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socs
I.DS
CHEMINS DE FER
A FAIBLE TRAFIC
EN FRANCE
i
LES
CHEMINS DE FER
A FAIBLE TRAFIC
EN FRANGE
LIGNES SECONDAIRES DES GRANDS RÉSEAUX
CHEMINS DE FER DMNTÉRÊT LOCAL ET TRAMWAYS A VAPEUR
ÉTABLISSEMENT ET EXPLOITATION
PAR
A. aAMPITÉ
Ingénieur des Ponts et Chaussées
Sous-Chef de l'Exploitation des Chemins de fer de l'État
Avec un Atlas de 16 Planches in-4*
PARIS
LIBRAIRIE POLYTECHNIQUE, BAUDRY ET C", ÉDITEURS
15, RUE DES SAINTS-PÈRES, 15
MAISON A LIÈGE, RUE LAMBERT-LEBBGUE, 49
1888
à
INTRODUCTION
L'exploitation économique est une des questions de Theure
présente qui sollicitent le plus Tattention des compagnies de
chemins de fer.
% Cette question s'est peu posée pour les grandes compagnies
>: tant qu'elles n'ont eu à s'occuper que de leurs artères principales,
^ et môme des lignes dites du nouveau réseau, que les conven-
^ tions de 1859 ont mises à leur charge. Toutes ces lignes avaient
^ en effet un trafic important, qui permettait difficilement l'intro-
\ duction des petits moyens dans les procédés d'exploitation.
P* Il n'en est plus de même aujourd'hui. Les conventions du
% 20 novembre 1883 ont incorporé dans le réseau d'intérêt gé-
S néral une foule de lignes secondaires auxquelles les grandes
t) administrations de chemin de fer n'avaient pas accordé jusque-
^ là beaucoup d'attention, soit qu'elles fussent exploitées provi-
soirement par elles pour le compte de l'Etat, soit qu'elles eussent
appartenu à des compagnies locales en faillite. Les recettes de
ces lignes étaient le plus souvent insuffisantes à couvrir les
dépenses d'exploitation, et n'atteignaient que pour un bien
petit nombre d'entre elles un chiffre égal ou supérieur à
10000 francs par kilomètre.
Il faut bien le reconnaître, les grandes compagnies de che-
mins de fer étaient mal préparées pour exploiter avec économie
ces lignes secondaires. D'une part, l'exploitation provisoire
pour le compte de l'État était un précédent fâcheux, car on
s'était peu préoccupé de la question de dépense et il s'était créé
dans cette exploitation des habitudes avec lesquelles il était
33«965
II INTRODUCTION
difficile de rompre. D'autre part on hésitait à emprunter aux
compagnies locales, dont les lignes avaient été rachetées, leurs
procédés économiques, procédés que Ton connaissait mal, qui
devaient différer selon la nature et l'importance du trafic et
dont l'application nécessite d'ailleurs le plus souvent des ins-
tallations de gares différentes de celles en usage sur les grandes
lignes, i^TOcédés d'épicier, comme les a appelés Tun des hommes
qui ont le plus contribué au développement des lignes d'intért^t
local *.
Il convient du reste d'ajouter que beaucoup de compagnies
d'intérêt local elles-mêmes ne donnaient pas l'exemple de l'éco-
nomie, et s'attachaient plus à imiter Texploitation des grandes
lignes qu'à rechercher la simpHcité qui convenait à leurs
faibles ressources et à leur maigre trafic.
Mais la crise qui pèse si lourdement sur l'industrie des
transports a promptement amené toutes les compagnies, grandes
et petites, à s'ingénier pour réduire leurs dépenses. Toutes ont
mis cette question à l'ordre du jour.
A la compagnie du Nord revient l'honneur de Tavoir le
mieux comprise : cette compagnie a formé de toutes ses lignes
secondaires, c'est-à-dire de plus de 1500 kilomètres, une dou-
zaine de petits réseaux locaux de 80 à 250 kilomètres d'étendue,
indépendants de Tadministration des grandes lignes, et mettant
en usage, en les perfectionnant, les modes d'exploitation em-
ployés antérieurement sur les lignes rachetées ; le Nord revenait
ainsi, au moins en partie, à la situation préexistante aux con-
ventions de 1883, moins les embarras financiers des petites
compagnies et les détournements qu'elles faisaient à son pré-
judice. Grâce à l'économie obtenue par ces procédés, jointe aux
réductions de dépenses que justifiait sur les grandes Hgnes, la
réduction du trafic, et par suite celle du nombre des trains et
du personnel, la Compagnie du Nord a atteint ce remarquable
résultat, pour l'année 1885, de réduire ses dépenses d'exploi-
tation de 5407000 francs, alors que la diminution de recettes
n'atteignait que 5184000 francs.
* M. Emile Level.
INTUUDUCTION m
Sans aller peut-être aussi loin que la Compagnie du Nord,
les autres administrations de chemins de fer ont aussi obtenu
par leurs efforts de louables résultats. Néanmoins, la question
des économies est loin d'être résolue complètement, aussi bien
en ce qui concerne les grandes lignes que pour les petits che-
mins, et nous avons entendu d'excellents esprits émettre Topi-
nion qu'il n'était peut-être pas impossible de réaliser dans les
dépenses d'exploitation des chemins de fer d'intérêt général une
économie annuelle de nature à réduire considérablement les
sommes à payer pour la garantie d'intérêt.
Sans doute, pour obtenir un pareil résultat, les efforts des
compagnies de chemins de fer ne suffiraient pas seuls : il fau-
drait qu'elles fussent aidées dans cette voie par les pouvoirs
publics, et que ceux-ci consentissent, par exemple, à la suppres-
sion de trains notoirement inutiles. La question comme on voit
est aussi délicate qu'intéressante.
Des simplifications, et partant des économies importantes,
peuvent de même souvent être introduites sur les petites lignes
d'intérêt local.
Hàtons-nous de dire, au reste, que l'exploitation ne saurait
être envisagée, comme cela a lieu trop souvent, indépendam-
ment de l'établissement de la ligne.
Les dispositions que l'on donnera aux gares, l'assiette de la
voie de fer, le choix du matériel roulant et surtout des locomo-
tives, influeront d'une manière considérable sur les dépenses
de l'exploitation ; et selon que l'établissement aura été bien ou
mal conçu, l'exploitation sera économique ou irrémédiablement
onéreuse. Un chemin de fer à faible trafic doit être construit
comme tel, avec des dispositions toutes spéciales, et c'est une
grave erreur, malheureusement trop commune, que de lui ap-
pliquer les types qui conviennent aux grandes lignes.
Il importe de se garder de toute généralisation exclusive, et
de ne pas se renfermer dans des formules fixes en matière de
chemins de fer. S'il est un petit nombre de règles définies ap-
plicables à l'exploitation de tout chemin de fer de faible trafic,
la mise en pratique de bien des procédés des plus importants
est surtout une question d'espèces : tel convient à une ligne qui
IV INTRODUCTION
ne produirait sur une autre que de très-mauvais résultats ; ils
varient sous rinflucnce de bien des causes : le développement
de la ligne, le trafic, le pays, Tesprit du public. A l'exploitant
de rechercher ceux qui conviennent et de s'ingénier à en trouver
de nouveaux ; il ne doit pas oublier qu'il n'est autre chose
qu'un commerçant, et agir comme tel.
Du reste, le chemin de fer est un instrument de progrès ;
qui prétendrait enserrer le progrès dans une formule ? Ce qui
est progrès pour nous n'apparaîtra-t-il pas comme tout l'inverse
à nos successeurs ? On considérait il y a dix ans comme très
bas le coût de 120,000 francs par kilomètre de chemin de fer:
on construit aujourd'hui à raison de 40 à 50,000 francs le ki-
lomètre, y compris le matériel roulant. Sans doute, l'instrument
n'est pas tout à fait le même ; qu'importe, si le môme but est
atteint !
La présente étude a été entreprise en dehors de toute idée
théorique préconçue, elle a eu simplement pour but de recueillir
sur place tous les faits intéressants de construction et d'exploi-
tation des lignes à faible trafic.
En raison du temps considérable (jui eût été nécessaire pour
visiter tous les petits chemins d'intérêt local, on a dû se borner,
en général, à examiner des lignes ayant au moins 25 à 30 kilo-
mètres de développement ; celles d'un moindre parcours
sont en effet dans des conditions particulières : le service des
trains y est fait en navette, le nombre des stations y est res-
treint à une ou deux, chiffre trop faible pour qu'on puisse con-
clure à un système défini d'exploitation.
Cependant, on trouvera plus loin des exemples intéressants
de lignes de très-petits parcours.
On a divisé cette étude en 5 parties :
La première partie donne la relation des procédés spéciaux
adoptés dans l'exploitation des lignes d'intérêt général àlaible
trafic par quelques grandes administrations de chemin de fer.
1*" La compagnie du Nord.
2"* La compagnie de Paris-Lyon-Méditerranée (Dombes).
3* Les chemins de fer de l'Etat (Traction).
%
INTRODUCTION v
Dans la seconde partie, on a rendu compte de l'exploitation
des chemins de fer d'intérêt local à voie normale : deux de ces
chemins, le Médoc et Lvon-Croix-Rousse-Sathonav, dont la
concession est antérieure à la loi du 13 juillet 1865 sur les
chemins de fer d'intérêt local, sont, il est vrai, des lignes d'in-
térêt général ; mais elles n'ont de l'intérêt général que le nom ;
les lignes décrites sont les suivantes :
1* Chemin de fer d'intérêt local du Pas-de-Calais (Level).
2* Saint-Quentin à Guise.
3" Chemins de fer de l'Eure.
4* Chemins de fer de l'Orne.
5* Chemins de fer de Mamers à Saint-Calais.
6* Est de Lyon.
7* Compagnie du Rhône (Lyon à Sathonay et Trévoux).
8" Chemins des Bouches-du-Rhône.
9* Chemins de fer de THérault.
10* Compagnie du Médoc.
11° Ligne de Nizan à Sore et Luxey.
12* Chemins de fer des Landes de la Gironde.
Cette seconde partie est précédée d'une étude comparative
des deux lois relatives aux chemins de fer d'intérêt local, la loi
du 12 juillet 1865 et la loi du 11 juin 1880.
La troisième partie traite de chemins de fer à voie étroite :
r Hermès à Beaumont (Oise et Seine-et-Oise).
2** An vin à Calais.
3° Chemins de fer départementaux d'Indre-et-Loire.
4^ Valmondois à Epiais-Rhus (Seine-et-Oise).
La quatrième partie donne l'exemple de quelques che-
VI INTRODUCTION
iiiins (le fer sur routes, si intéressants par leur bon marché
(l'établissement et d'exploitation :
1*^ Chemins de la Meuse (Haironville à Triaucourt).
2° Tramways de la Sarthe.
3^ Chemins du Cambrésis.
¥ Tramways divers. — Valenciennes, Saint-Etienne,
Lille-Tourcoing, Rueil-Marly.
Un résumé de ces 22 exemples, complétés par la description
des procédés en usage à l'étranger pour Texploitation des
lignes secondaires, permet de mettre en lumière les conclu-
sions qui en découlent tout naturellement, et qui font Tobjet
de la cinquième partie.
Nous adressons tous nos remerciements aux Directeurs et
fonctionnaires supérieurs des Compagnies dont nous avons
visité les lignes, pour Tobligeance dont ils ont fait preuve à
notre égard.
i
PREMIÈRE PARTIE
LIGNES SECONDAIRES
DES GRANDS RÉSEAUX
^
CHAPITRE PREMIER
COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER DU NORD
Lignes secondaires. — Trains légers. — Trains-tramways.
Le réseau secondaire de la Compagnie du Nord a été constitué
partie par les lignes d'anciennes Compagnies locales tombées en
faillite, telles que les Compagnies de Picardie et Flandres, du
Nord-Est, duTréport à Abancourt, deFréventà Gamaches, etc.,
et partie par des lignes construites par TEtat et exploitées pro-
visoirement pour son compte jusqu'en 1883, date à laquelle celles-
ci et celles-là ont été incorporées à la Compagnie du Nord par la
convention-loi du 20 novembre.
Le réseau secondaire, accru depuis 1883 par les lignes nou-
velles dont ladite convention a mis l'exécution à la charge de la
Compagnie du Nord, atteint aujourd'hui un développement d'en-
viron 1,400 kilomètres, qui sera porté à 1,000 kilomètres environ
par les ouvertures ultérieures.
Dès l'abord, la Compagnie se montra hésitante à prendre en
mains l'exploitation de ces lignes à faible trafic;
i LIGNES SECONDAIRES
Mais après mûre réflexion, la Compagnie prit le parti de recou-
rir à ses propres moyens, tout en se gardant d'appliquer à ce ré-
seau les procédés d'exploitation en vigueur sur ses grandes artères.
On divisa le réseau secondaire en une douzaine do groupes
auxquels on donna un développement variant de 80 à 250 kilo-
mètres, selon l'importance des lignes, leur situation géographique,
et la similitude de leur trafic. Ces groupes furent constitués indé-
pendants les uns des autres, et avec une certaine autonomie par
rapport aux divisions administratives du réseau principal.
Sans doute cette indépendance et cette autonomie étaient suffi-
samment limitées pour qu'on n'eût pas à redouter les inconvé-
nients d'un particularisme exagéré, qui sont fréquents dans les
petites Compagnies de chemins de fer et qu'il n'est pas rare de
rencontrer dans les grandes, tels que détournements do trafic au
prix de parcours plus longs sur des profils moins bons, accapare-
ment de matériel au détriment du voisin, etc.
Mais on donnait aux chefs de groupe une autorité directe sur
leur personnel, des pouvoirs suffisants pour régler promptemcnt
les indemnités à payer au public; on leur affectait un matériel
de traction spécial. On leur laissait une grande liberté d'action,
partant une grande responsabilité; et une sorte de concours était
ouvert entre tous les groupes, dont les résultats d'exploitation,
dépenses et recettes, faisaient l'objet de comptes distincts per-
mettant d'établir des comparaisons et d'en tirer des conclu-
sions.
On en revenait, en résumé, au système dos Compagnies locales,
avec les embarras financiers et la mésintelligence en moins, avec
l'unité de vues et l'émulation en plus ; eût-il été possible de
pousser plus loin encore Tassimilation avec les petites Compa-
gnies, en concentrant entre les mains des chefs de groupe les
trois divisions du service : entretien de la voie, traction et exploi-
tation commerciale? On ne s'est pas arrêté à cette solution
radicale, au moins jusqu'à présent, et les services de voie et de
tractio.n, tout en étant spécialisés autant que possible sur les
groupes, restent indépendants du service du mouvement.
Quoi qu'il en soit, les résultats obtenus ont été considé-
rables.
DES GRANDS RÉSEAUX 5
La Compagnie du Nord n'a d'ailleurs pas borné là ses investi-
gations dans la voie dos économies. On relatera seulement celles
qui ont été réalisées sur les lignes à faible trafic. Sur un grand
nombre de ces lignes, les exigences des populations avaient
entraîné la création de 4 à 5 trains par jour dont plusieurs étaient
très accélérés par suite de la tension des correspondances aux
points de bifurcation ; la Compagnie demanda et obtint du mi-
nistre Tautorisation de supprimer dans ces trains la voiture ou
fourgon de choc, par suite, de faire l'économie d'un garde-frein,
sous la réserve que la composition do ces trains ne dépasserait
pas 6 véhicules au maximum et qu'ils seraient munis du frein
continu; le conducteur devait être placé dans le fourgon do
queue. Ces trains étaient dénommés trai?is légers ou écono-
miques.
On a même été plus loin dans cet ordre d'idées : sur certaines
lignes à trës-faible mouvement de voyageurs, la composition des
trains légers a été réduite à une seule voiture à 73 places, avec com-
partiment à bagages, et la Compagnie a été autorisée dans ce cas,
à supprimer le chauffeur; le personnel du train est par suito
réduit au mécanicien et au conducteur; une communication
existe entre la machine et la voiture, afin que le conducteur puisse
arrêter la machine au cas où le mécanicien serait hors d'état de
continuer son service.
• Ces trams-tramways f avant d'être appliqués aux petites lignes,
ont été expérimentés entre Lille et Tourcoing, où ils rendent de
très-grands services.
Les trains légers et les trains-tramways^ ont des arrêts facultatifs
prévus à certains ponts ou passages à niveau ; le conducteur
effectue les perceptions.
Des exemples feront bien voir les excellents résultats de ces
divers procédés économiques.
On a pris comme type le groupe n® 2 (planche I) qui embrasse
250 kilomètres de lignes, et qui représente assez bien la moyenne
* La mise en circulation des trains li^pers sur la ligne de Bonlog:ne à Saint-Omer,
et de trains tramways sur la ligne de Lille à Tourcoing, a élé autorisée par Arrêté
du Ministre des Travaux Publics en date du 15 Juin 1885. Chaqu^. application nouvelle
donne lieu à autorisation spéciale.
6 LIGNES SECONDAIRES
des lignes secondaires au point de vue des recettes et des dépenses
kilométriques.
La petite ligne de Perrière à Gonsolre donnera l'application
des trains-tramways * .
GROUPE N» 2
Conditions d'établissement et outillage. — Les lignes qui cons-
tituent le 2* groupe sont les suivantes :
Le Tréport à Saint-Pol par Abbeville, longueur 100 kilomètres ;
cette ligne a été construite par la Compagnie du Nord.
Frévent à Gamaches, 92 kilomètres ; cette ligne, parallèle à la
précédente, a été construite par une Compagnie portant le même
nom, et qui Ta exploitée de 1872-74 à 1881, date à laquelle elle a
été déclarée en faillite.
Doullens à Arras, 34 kilomètres, et Canaples à Amiens, 24 ki-
lomètres, concédées d'abord à des Compagnies locales, puis
rétrocédées à la Compagnie du Nord qui les a exécutées.
Ces lignes ont été établies sans plan nettement défini et deux
d'entre elles, Frévent à Gamaches et Frévent au Tréport, font
double emploi.
Les déclivités sont limitées à 15 "/™ par mètre sur Frévent-Ga-
maches, elles atteignent 17 "/" sur le Tréport-Saint-Pol.
Les rayons des courbes descendent souvent à 325 mètres; à
rapproche des courbes de moins de 400 mètres de rayon, des
signaux indiquent le ralentissement.
La voie ne présente aucune particularité, et les vitesses des
trains peuvent atteindre 50 kilomètres à Theure.
Le plan joint de la station d'Oisemont (planche II, fig. 1) peut
être considéré comme représentant le type des stations de la ligne
de Frévent à Gamaches; ce type est très-défectueux; on ne peut
• Dans une Note sur les Trains-Tramways, M. Cossmann, Ingénieur de l'Exploita-
lion (le la C»« du Nord, fait connaître que, à la date du 1««" Mars 1887, les trains-
tramways fonctionnent sur 131 kil., et les trains légers sur 300 kil. La longueur totale
des lignes de la C»« du Nord, sur lesquelles doivent circuler des trains-tramways ou
des trains légers sera prochainement portée à 860 kilomètres, ce qui rçprésente
le quart de son réseau.
DES GRAiNDS RÉSEAUX 7
accéder au quai et à la halle qu'au moyen do plaques tour-
nantes, ce qui nécessite des manœuvres longues et pénibles.
Le type des stations construites par la Compagnie du Nord sur
les autres lignes du 2* groupe est meilleur et permet aux ma-
chines de trains de passage de prendre et de laisser des wagons
sur les voies de marchandises, quel que soit le sens de la marche
des trains.
Les plans de la plupart de ces stations seront ultérieurement
revisés et ramenés, autant que faire se peut, aux dispositions des
gares des lignes secondaires, dispositions décrites dans le numéro
de novembre 1884 de ]sl Bévue générale des Chemins de fer y et qui
sont reproduites dans la figure 2. (PI. IL)
Un simple coup d'œil suffit pour reconnaître Texcellenco de ces
dispositions; toutes les manœuvres peuvent se faire rapidement à
la machine, quel que soit le sens de la marche du train, d'où éco-
nomie de personnel dans la station ; il n*y a pas de plaques tour-
nantes ; en même temps, do sages précautions ont été prises en
vue d'assurer les extensions que Tavenir peut nécessiter.
Le matériel à voyageurs de l'ancienne Compagnie de Frévent à
Gamaches et du Tréport à Abancourt n'est plus employé que dans
les trains de marchandises-voyageurs ; ce matériel est à couloir
extérieur avec compartiments distincts, il est difficile de le munir
du frein continu, condition sine quâ non des trains économiques ;
il est trop léger, et en outre le couloir prend une proportion im-
portante des places.
Le matériel à marchandises est, au contraire, resté en service
continu, et les trains sont remorqués par les locomotives-tenders
des anciennes Compagnies de Frévent à Gamaches et du Tréport
à Abancourt; ces locomotives ont six roues accouplées de 1 m. 40
de diamètre ; elles pèsent 34 tonnes en charge et peuvent atteindre
une vitesse de marche de 50 kilomètres. Ces machines, en raison
de leur faible empattement, tournent sur les plaques ordinaires,
ce qui permet de faire très-rapidement le service aux points de
bifurcation; trois ou quatre hommes, mécanicien et chauffeur
compris, effectuent le tournage en cinq minutes. Elles se prêtent
très-bien aux manœuvres en cours de route dans les stations.
8 LIGNES SECONDAIRES
Elles ont rinconvénient de posséder do Irfes-pelîts foyers, ce
qui ne permet pas d'employer d'autre combusliblo que les bri-
quettes, combustible peu économique.
Entretien de la voie. — L'organisation du service de la voie
sur les groupes ne présente aucune particularité; le service
n'y est pas autre que sur les grandes lignes, toute propor-
tion gardée quant à Timportance de la circulation. Il y a cepen-
dant une tendance à spécialiser les chefs de section et le personnel.
Il convient d*ajouter que les lignes des anciennes Compagnies
locales sont en général d'un entretien assez dispendieux, en raison
des vices de construction de ces lignes, traverses de second choix,
balast mauvais ou absent, etc.
Les dépenses d'entretien de la voie, ainsi que les frais généraux
sont localisées par groupe.
Traction. — Le service de traction sur le groupe no 2 relève de
deux ingénieurs d'arrondissement, celui d'Amiens pour la ligne de
Tréport à Saint-Pol, celui d'Arras pour le reste du groupe; mais les
machines et le personnel sont exclusivement affectés au groupe,
de même que le matériel à voyageurs. Cette spécialisation a une
grande importance au point de vue de la marche du service ; les
mécaniciens sont, en effet, habitués aux procédés particuliers
d^exploitation en usage sur des lignes dont ils font tous les jours
le service; exemple, àFrévent, station de bifurcation importante
au point de vue des échanges, une machine a un stationnement
d'une heure et demie au milieu du jour; pendant que le mécanicien
déjeune, soit pendant 3/4 d'heure, le chauffeur conduit les ma-
nœuvres, aidé par un homme d'équipe exercé ; le mécanicien
revient ensuite diriger les manœuvres pendant que le chauffeur
déjeune. La machine est donc complètement utilisée pour le ser-
vice spécial du groupe.
C'est grâce à cette spécialisation et à la parfaite connaissance
des stations que possèdent les mécaniciens, que les manœuvres
de passage pour prendre ou laisser un wagon sont extrêmement
rapides; dès Tarrivée du train, la coupure est faite et la manœuvre
DES GRANDS RÉSEAUX 9
a lieu sans quo lo chef de station perde de temps à fournir des
explications.
Un pareil service ne peut du reste être fait que grâce à une
entente parfaite entre les agents du service de la traction et ceux
du service de Texploitation ; on parviendrait sans doute à réaliser
mieux encore cette entente en mettant les deux services dans la
main du chef de groupe.
En dehors du deuxième groupe, sur un certain nombre de
lignes secondaires qui ne sont pas desservies par des trains
mixtes, circule un et quelquefois deux trains de marchandises.
Pour éviter des trains facultatifs, ces trains sont remorqués par
des machines très-puissantes; on y diminue, d'autre pari, le
nombre dos agents de trains en faisant desservir deux freins par
un seul garde-frein.
Le deuxiènne groupe dispose de 14 machines dont 5 appar-
tiennent au dépôt du Tréport et 9 au dépôt d'Arras; le roulement
en exige seulement 9; les autres machines assurent le service des
trains facultatifs, ou sont en excédent: le secours est assuré, en
cas de besoin, par les machines de réserve d'Arras ou d'Amiens,
du Tréport et d'Abbeville. Le groupe ne dispose pas d'ateliers
spéciaux pour les réparations de son matériel.
Mouvement et trafic. — Le service de l'exploitation propre-
ment dite est celui qui présente le plus d'intérêt dans les groupes:
c'est, en effet, celui qui jouit de la plus grande autonomie.
Le chef de groupe est un inspecteur indépendant, qui remplit à
peu près les fonctions d'un chef d'arrondissement ou inspecteur
principal. Il adresse directement au Service central de l'exploita-
tion ses propositions pour la marche de ses trains; il a seul auto-
rité sur son personnel, dont il propose le renvoi ouïe changement
sans passer par l'inspection principale à laquelle est nominalement
rattaché son groupe; il établit les feuilles de solde do ses agents;
il dispose du matériel roulant affecté au groupe, mais il avise
l'Inspecteur principal de ses disponibles ou manquants, afin que
celui-ci puisse assurer une bonne répartition d'ensemble; il règle
directement les indemnités à allouer pour avaries ou pertes de
marchandises et retards, etc., jusqu'à concurrence de 300 francs.
%
10 LIGNES SECOiNDAIBES
L'Inspcclciir principal ninlervient guère que dans les questions
techniques; par exemple, les projets de modifications ou exten-
sions de gares doivent lui être soumis avant d'être proposés au
Service central de l'exploitation.
Lorsque le groupe embrasse un développement de lignes étendu,
un inspecteur en sous-ordre est adjoint au chef de groupe, qui
dispose en outre d'un certain nombre d'agents intérimaires pour
les remplacements occasionnés par les congés ou maladies. Il en
est ainsi pour le deuxième groupe.
Service des stations. — En raison du faible trafic des lignes
qui. constituent ce groupe, les gares et stations ont en général un
personnel très-restreint : un chef de station avec un facteur ou
homme d'équipe au plus, le plus souvent un chef de station, parfois
aidé de sa femme. Sur nn total de 38 haltes et stations, 6 stations
sont gérées exclusivement par des femmes de cantonniers de
même que les 7 haltes.
Les stations gérées par des femmes offrent un intérêt tout parti-
culier sur lequel il y a lieu d'insister.
Ces femmes connaissent le maniement du télégraphe, et peuvent
faire une demande de secours ou aviser la gare voisine d'une cou-
pure de voie, etc., mais comme, eu principe, on ne fait pas de
croisements de trains dans les stations gérées par des femmes, le
télégraphe y est sur communication directe.
Elles ne concourent pas aux manœuvres des trains de passage,
qui sont faites par les agents des trains; les femmes remettent à
cet effet la clef des cadenas des aiguilles au garde-frein, qui
remplit momentanément les fonctions de chef de manœuvres;
mais elles doivent faire et vérifier les aiguilles après et avant le
passage des trains.
Lorsqu'il y a un wagon à pousser sous halle dans l'intervalle
des trains, la femme fait faire cette manœuvre à titre gratuit par
le public qui ne réclame jamais; les marchandises de détail
sont chargées ou déchargées au passage par les agents des
trains.
En général, les femmes font seules toutes leurs écritures et leur
comptabilité; elles effectuent leurs versements par dizaine seule-
DES GRANDS RÉSEAUX il
ment, lorsque la recelto est inférieure à 500 francs par dizaine,
tous les deux jours dans le cas contraire. La complabilito est arrê-
tée par mois.
La comptabilité mensuelle et les versements par décades ont
été adoptés récemment par la compagnie du Nord pour les petites
stations, en remplacement de la comptabilité décadaire et des ver-
sements quotidiens. Il en résulte une diminution d'imprimés et
de travail qui n*est pas sans importance pour les gares aussi bien
que pour le service de contrôle des recettes.
Lorsque les femmes chefs de halte no sont pas suffisamment
exercées pour tenir seules leur comptabilité, elles sont instruites,
non par un intérimaire ou chef de station, mais par une autre
femme très au courant du service, qui vient dans Tintervalle dos
trains.
Les femmes chefs de halte reçoivent 15 francs par mois comme
salaire de début; elles peuvent atteindre un traitement de 500 à
600 francs par an; de plus, elles ont droit aux primes de régu-
larité, soit 0 fr. 02 par train partant régulièrement à Theure, ce qui
représente 5 à 6 francs par mois.
Service des trains. — Trains légers. — Les lignes du deuxième
groupe sont desservies par i trains de chaque sens, deux accé-
lérés le matin et le soir, et deux de moindre vitesse dans le cours
de la journée.
Jusqu'en 1886, tous ces trains étaient mixtes, les trains accélé-
rés servant au transport des wagons complets, soit de bout en bout,
soit d'un terminus à une gare de bifurcation; ils servaient aussi
au transport des denrées, des bestiaux, etc.. Le service du détail,
de la répartition des wagons vides, ainsi que Tenlèvement des
marchandises peu pressées étaient faits par les trains de marchan-
dises-voyageurs. L'ensemble de ces trains assurait un bon service,
économique et très-régulier, bien que les correspondances aux
divers points de jonction fussent très-serrées.
Il n'arrivait que fort rarement qu'on dût recourir à la mise on
marche de trains facultatifs, qui entraînent toujours une dépense im-
portante supérieure à celle des trains réguliers ; car ils nécessitent
des déplacements de personnel et des parcours de machines
i2 LIGiNES SECOiNDAIRES
haut'le-piedj c'est-à-dire sans utilisation dans l'un des sens du
parcours.
Au service d'été de 1886, on a été amené à tendre la marche
des trains des grandes lignes ; les correspondances des trains du
deuxième groupe sont dès lors devenues plus difficiles aux points
de jonction et il a fallu renoncer à utiliser comme trains mixtes
les trains du matin et du soir, afin de leur donner plus de vitesse
en les déchargeant, et de diminuer leurs stationnements en ne leur
permettant plus les manœuvres.
Dans ces conditions, on devait forcément être amené à mettre
plus fréquemment en marche des trains facultatifs, d'où une
dépense en plus.
On est parvenu à compenser cette dépense nouvelle en transfor-
mant les anciens trains mixtes accélérés en trains légers ou
économiques, et par suite en supprimant un agent à chacun de
ces trains, ce qui, en tenant compte du salaire et des frais de dépla-
cement, donne une économie moyenne de i francs par jour par
agent supprimé.
Ce n'est pas par système que la Compagnie du Nord a adopté
les trains légers, mais chaque cas particulier a fait l'objet d'une
étude approfondie.
Les trains légers ne doivent être substitués aux trains mixtes
que si la tension des correspondances ne permet plus l'emploi de
ceux-ci, ou bien si le trafic P. V. de la section est assez faible pour
qu'un ou deux trains de marchandises-voyageurs puissent suffire
à en assurer le service.
Sur une même ligne un train léger peut être justifié à une sai-
son où le trafic est réduit et doit être remplacé par un Irain mixte
aux époques où le trafic est assez important pour nécessiter, à
défaut de celui-ci, la mise en marche de trains facultatifs.
Et même, tel train peut être normalement léger qui doit être
transformé en train mixte à certains jours. Les ordres de service
relatifs à Temploi de ces trains prévoient en effet ce cas : si les
nécessités du trafic obligent à dépasser la composition limite de
6 véhicules, la gare qui force la composition doit ajouter au per-
sonnel du train soit un garde-frein, soit un homme au courant des
règlements de conducteur.
DES GRANDS RÉSEAUX 13
Ea résumé, Temploi des trains légers est une question d'espèces,
dépendante des nécessités des correspondances, des satisfactions
à donner au public, du trafic, de la saison et même du jour;
mais on doit se garder do les mettre en marche pour n'obtenir
d'autre résultat que d'augmenter le nombre des trains, ou bien
d'accroître la vitesse au lieu de remorquer des charges utiles.
Les trains légers occasionnent au passage dans les stations un
surcroit de travail pour celles-ci ; le chef de station ou la gardienne
du passage à niveau à desservir doit en effet ouvrir et fermer les
portières, appeler le nom de la gare, station ou halte, aux lieu et
place du garde-frein, pendant que le conducteur charge et décharge
les colis. Il y a eu, dans le principe, quelque résistance de la part
du chef de station.
TRAINS-TRAMWAYS*
Sur certaines lignes, à très-faible mouvement do voyageurs
et de marchandises, les trains légers ont été remplacés par des
trains-tramways.: ceux-ci ont, du reste, un lien avec ceux-là, et le
train-tramway peut être transformé en train léger par Tadjonction
d'un chauffeur et de voitures, de même que le train léger peut être
transformé en train mixte par l'adjonction d'un garde-frein et de
wagons.
L'exemple le plus intéressant de ce service est celui de la petite
ligne de Maubeuge à Consolre, d'une quinzaine de kilomètres de
longueur : cinq trains-tramw^ays dans chaque sens desservent cette
ligne [Groupe n^ 11).
Le service des marchandises y est exclusivement fait par la ma-
chine d'un train de marchandises de grande ligne, stationnant
dans la gare de Maubeuge assez longtemps pour que la machine
ait le temps d'aller prendre ou conduire sur la petite ligne les
marchandises de détail ou les wagons complets.
Ainsi qu'il a été dit plus haut, les trains- tramways ont été
d'abord essayés dans un tout autre but que celui d'assurer le' ser-
vice des lignes à très-faible trafic.
* La Compa^ic de TEst, imitant la compagnie daNord, a appliqué récemment
les trains-tramways à un certain nombre de ses lignes.
La Compagnie de l'Ouest, l'Etat se préparent également ù entrer dans cette voie.
14 LIGNES SECONDAIRES
On les a mis en service en 1885, entre Lille et Tourcoing, par-
cours sur lequel la population est extrêmement dense.
En multipliant les trains-tramways qui étaient portés au
nombre de 7 dans chaque sens, aux heures où les déplacements
sont le plus nombreux, en leur donnant une grande accélération,
50 kilomètres àTheure, et fixant de nombreux points d'arrêts, un
par kilomètre, on espérait obtenir d'excellents résultats et concur-
rencer très-efficacement le tramway à vapeur de Lille à Roubaii.
C'est en effet ce qui est arrivé, et ces trains ont atteint, l'été,
des recettes de 250 francs par jour, avec des dépenses qui restaient
inférieures à 50 francs^ .
Le matériel du train-tramway est composé d'une seule voiture à
couloir central, ou plutôt de deux voitures jumellées de manière
à n'en faire qu'une seule : la voiture contient 73 places, y compris
un compartiment de secondes et un de premières; elle renferme
en outre, un compartiment pour les bagages. De nouvelles voitures
sont en construction et pourront contenir jusqu'à 110 places.
Les machines sont d'anciennes locomotives de vitesse du Nord,
du type Stéphenson, à 50 unités, que l'on avait songé à vendre
comme ferraille, et qui, moyennant '3 à 4,000 francs de réparations
ont été luises en état d'assurer le service. On a supprimé le tender
de ces locomotives et on les a transformées en machines-ten-
der ; une ouverture a été pratiquée dans le garde-corps d'arrière
pour permettre au Conducteur de venir au besoin prendre la place
du mécanicien.
La charge remorquée étant très-faible, les démarrages sont
très-rapides, de même que les arrêts : une minute et demie
suffit pour Tarrêt, le stationnement et la mise en vitesse du
train. La vitesse commerciale des trains-tramways reste ainsi
très-satisfaisante malgré les nombreux arrêts auxquels ils sont
assujettis.
Les machines qui remorquent les trains-tramways brûlaient^
avant d'être affectées à ce service, des briquettes et du tout- venant ;
* On a constaté un accroissement notable du nombre des voyageurs sur toutes les
lignes ou s'arrêtent des trains légers ou des trains-tramways. Cet accroissement a
a atteint 9 p. 100 sur la ligne de Lille à Tourcoing, 15 p. 100 sur celle d'Aulnoye à
Erquelines, etc.*
i
DES GRANDS RÉSEAUX 15
les trains-tramways exigeaient une moindre dépense de vapeur,
en raison de leur légèreté ; il est devenu inutile de forcer le tirage
et la production de la vapeur, et les grilles ont été suffisantes pour
brûler du charbon menu, des fines, dont le prix sur le carreau de
la mine est de 6 francs la tonne au lieu de 11 à 12 francs, prix du
charbon lout-venant.
La consommation kilométrique de charbon n'a du reste pas
sensiblement diminué. Pour obtenir ce résultat, il eût fallu
construire des machines spéciales, de faible poids, à diamètres
de cylindres réduits ; on a préféré se servir des machines dont on
disposait, plutôt que d'en construire de nouvelles dont Téco-
nomie de consommation n'eût pas suffi à payer Tintérêt et l'amor-
tissement du capital de premier établissement.
Telle quelle, la dépense kilométrique des trains- tramways ne
dépasse pas 0 fr. 29, en y comprenant les dépenses do personnel,
combustible et graissage; elle s'élèverait à 0 fr. 40 environ si on
tenait compte des frais généraux, de l'entretien et des grosses ré-
parations.
Les trains-tramways ont donné lieu à une expérience de
traction toute nouvelle en France et qui offre un intérêt consi-
dérable«
On sait qu'en Amérique, les Compagnies de chemins de fer
font assurer le service de chaque machine par une ou plusieurs
équipes de mécaniciens et chauffeurs; tandis que le système qui
prévaut en Europe est celui du roulement^ qui marie la machine
avec le mécanicien.
Les Américains obtiennent incontestablement un meilleur ren-
dement du capital de premier établissement'; les ingénieurs euro-
péens, de leur côté, contrôlent par le roulement la dépense d'en-
tretien et de conduite d'une machine par toutes les machines qui
entrent dans le roulement.
L'essai du système américain a été fait par la Compagnie du
Nord à l'occasion des tramways de Lille à Tourcoing, dont les
* Les Chemins de fer en Aménque, (Lavoinne et Pontzen.)
Revue générale des Chemins de fer. (Mai 1885. Bandérali.)
Id. (Avril 1887, de Fonbonne et Sauvage.)
i6 LIGNES SECOiNDAIRES
deux machines sont desservies indifféremment par un mécanicien
ou par Tautre.
Un essai du même genre a été fait récemment sur la ligne
belge d'Anor à Hastière par Chimay et Mariembourg* . En desser-
vant deux machines par trois équipes de mécaniciens et chauffeurs»
on est parvenu à augmenter notablement les parcours journaliers
des machines.
Ces deux essais ont parfaitement réussi, et seront, sans nul
doute, étendus à bref délai. Il importe du reste, pour obtenir de
bons résultats, de choisir d'excellents mécaniciens, vivant en par-
faite intelligence.
Par la suppression du roulement, on évite souvent les déplace-
ments des mécaniciens, et, par suite, les mauvaises habitudes
qu'ils contractent quand ils sont éloignés de leurs familles.
Pour les arrêts des trains-tramways de Lille à Tourcoing, on a
choisi des points déjà gardés, tels que passages à niveau, postes sé-
maphoriquesdeblock-system; on s'est contenté de construire en ces
points un trottoir en terre. Pour éviter les réclamations du public,
qui ne trouve pas d'abri à ces arrêts, on s'est astreint à marcher
avec une extrême régularité.
Le conducteur délivre des billets à souche aux voyageurs pris
aux points d'arrêt; il les retire à l'arrivée. Un contrôleur passe de
temps à autre dans les trains-tramways pour vérifier au moyen
des souches des billets délivrés s'il n'y a pas eu entente entre le
voyageur et le conducteur.
Les billets recueillis sont versés chaque soir par le conducteur à
la gare terminus en même temps que la recette.
Sur la petite ligne do Maubeuge à Gonsolre, ainsi que celle de
Maubeuge à Hautmont, où circulent des trains-tramways, de
même que sur les lignes où des passages à niveau en pleine voie
sont desservis par des trains économiques, les conducteurs ne déli-
vrent pas de billets spéciaux, mais ils effectuent la perception en
échange d'un bulletin à souche.
* Exploitée par la Compagnie du Nord.
DES GRANDS RÉSEAUX 17
Résultats de Texploitation des lignes secondaires.
Les dépenses en 1886 du groupe secondaire que nous avons
pris pour exemple ont été les suivantes :
1*> Voie et bâtiments i.GO.'i fr. par kilomètre.
2*^ Matériel et traction 1.862 —
3« Mouvement et traGc 937 —
Total. . . . 4.404 fr.
Cette dépense ne comprend pas les frais des gares communes
avec le réseau principal ni les frais d'administration centrale;
mais elle comprend une part proportionnelle des frais des services
centraux de voie^ traction et exploitation.
Lès dépenses de Tensemble des groupes du réseau secondaire
diffèrent peu du résultat indiqué pour le groupe dont nous avons
parlé et le coefficient d'exploitation, pour une recette kilomé-
trique de plus de 8,000 francs, s'écarte pou de 60 p. 100.
Depuis l'incorporation des lignes secondaires dans son réseau,
et le sectionnement de ces lignes en groupes, les dépenses kilomé-
triques totales ont été réduites d'environ 1,500 francs, soit plus de
deux millions par an.
C'est la meilleure preuve que l'on puisse donner à l'appui d'un
système qui revient en somme à l'application intelligente de cette
idée simple : proportionner l'outil au travail à produire.
CHAPITRE II
GOMPAQNIE DE PARIS-LTON-MÉDITERRANÉE
Lignes des Dombes
La Compagnie de Paris à Lyon et à la Méditerranée a conclu,
le 28 juillet 1881, avec la Compagnie des Dombes et du Sud-Est
deux traités : Tun pour la prise à bail du réseau des Dombes et
Sud-Est, l'autre pour l'achat de ce réseau.
Ces deux traités ont été approuvés par l'article 3 de la conven-
tion-loi du 20 novembre 1883.
Le réseau des Dombes et Sud-Est comprenait :
1** Ligne de Sathonay à Bourg 52 kil.
2^* — de Bourg à Bellegarde 65
3° — de Lyon à Montbrison 80
4® Embranchement de Sathonay à Lyon-St-Clair
(à construire) 7
5* — de Mâcon à Paray-le-Monial 78
6° — de Châlons-sur-Saône à Lons-le-Saulnier. . . 66
V — de Bourg à Saint-Germain-du-Plain 62
8** — d'Ambérieu à Montalieu 18
Total 428 kil.
Ces lignes étaient cédées à la Compagnie P.-L.-M. avec le maté-
riel roulant, le mobilier des stations, l'outillage des ateliers et des
gares.
En outre, la Compagnie P.-L.-M. était substituée, par le traité
d'achat, à la Compagnie des Dombes et Sud-Est dans les droits que
celle-ci avait acquis sur la Compagnie des chemins de fer du
k
GRANDS RÉSEAUX i9
Rhône (Lyon - Croix - Rousse à Trévoux) par traité en date
du 24 juin 1879.
Les conditions du rachatétaient que laCompagnicP.-L. -M. devait:
1° Prendre à sa charge le service de 80,000 obligations de la
Compagnie des Dombes, exigeant annuellement pour intérêts,
primes et amortissement une somme de 1,280,000 francs.
2°Remettre à la Compagnie des Dombes le nombre d'obligations
du type fusion nouvelles nécessaire pour lui assurer, à raison de
15 fr. par obligation, un revenu annuel égal à 2,400,000 fr., sauf
déduction d'nne somme de 730,000 fr. représentant l'écart entre
les charges des 80,000 obligations précitées et l'annuité de
5,502,266 fr. payés par l'État à titre de subventfon pour le chemin
de Lyon à Montbrison.
Le but de cette opération de rachat était de faire cesser une con-
currence qui gênait la Compagnie de Lyon ; le rachat a du reste été
effectué à des conditions très-onéreuses pour celle-ci, conditions
que la baisse constante du trafic depuis cette époque fait paraître
aujourd'hui fort lourdes, d'autant plus que la plupart des loco-
motives des Dombes ont dû être depuis mises à la réforme par suite
d'usure et que la Compagnie de Lyon s'est vue dans l'obligation
de remplacer immédiatement la presque totalité des traverses.
Quoi qu'il en soit, la Compagnie de Lyon a maintenu sur plu-
sieurs de ces lignes le système d'exploitation économique de la
Compagnie des Dombes; elle y a de plus introduit le mode spécial
d'exploitation qui était à l'étude, au moment de la reprise des
Dombes, sur quelques lignes maigres (Bonson à Saint-Bonnet), et
qu'elle applique aujourd'hui à toutes ses lignes à faible trafic. A
ce double point de vue, les lignes des Dombes offrent un intérêt
tout particulier.
En général, le tracé des lignes des Dombes est bien fait ; en
dehors delà ligne de Bourg à Bellegarde par Nantua, les déclivités
ne dépassent pas 15 millimètres par mètre; encore n'atteint-on ce
chiffre que sur des petits parcours.
Les courbes sont à grands rayons.
Les passages à niveau sont tous gardés, et les lignes sont par-
tout clôturées.
Les services de voie et de traction sont assurés suivant le mode
20 LIGNES SECOND.VIRKS
habituel de la Compagnie P.-L.-M., el à ce titre ils n'offrent en
leur examen aucun intérêt au point de vue do la présente étude.
Mouvement et Trafic
Dispositions des stations, — Contrairement a ce que Ton a vu
pour l'exploitation économique du Nord, l'inspecteur chargé d'une
ligne des Dombes possède en même temps des lignes ou tronçons
de lignes à trafic plus important. Il y a là une certaine incom-
patibilité.
Le croquis de la station de Saint-Etienne en Bresse (fig. 3,
pi. II) représente le type de la station des Dombes.
Une voie directe, affectée à la circulation des trains, longe le
bâtiment des voyageurs ; une voie de halle reliée par les deux
bouts à la précédente sert exclusivement aux marchandises.
Il y a en effet lieu de remarquer que, sur ces lignes, tout point
dénommé station no doit obligatoirement pas servir au croisement
des trains ^
Dans les stations à très-faible trafic, le cul-de-sac figuré sur le
croquis est supprimé.
Les bâtiments sont larges et bien construits, les chefs do stations
bien logés.
La station est couverte à 800 mètres environ de distance par
des signaux en bois, fixés, peints en vert, éclairés le soir, indi-
quant aux trains l'approche de la station et les obligeant à ralentir.
Ces disques verts d'avertissement ne sont d'ailleurs que provi-
soires ; ils seront remplacés par des signaux ordinaires du type
P.-L.-M., qui existent déjà dans les gares de bifurcation.
Service des trains. — Sur les lignes très-peu importantes,
comme celle de Châlons-sur-Saône àLons-le-Saulnier, tous les trains
sont mixtes : trois trains dans chaque sens, dont un au milieu du
jour, plus particulièrement affecté au service des marchandises,
avec des stationnements de 5, 8 et même 12 minutes pour les
manœuvres.
La composition minima d'un train en voitures à voyageurs est de :
* C'est là un procédé spécial h la Compagnie P.-L.-M. et employé par elle en
général sur scb li^iicb a laible Iralic.
DES GRANDS RÉSEAUX 21
Une voiture mixte à compartiments, comportant 2 compar-
timents de seconde, un de première et un coupé;
Une voiture de troisième classe à couloir central et à frein avis.
Les gares de croisement sont très-distantes : par exemple*,
29 kilomètres séparent Lons-le-Saulnier et Louhans ;
Service des stations. — La Compagnie des Bombes avait adopté
le système de la demande télégraphique de la voie, préalablement
à l'expédition de tout train.
La Compagnie P. -L. -M. en appliquant ses règlements a supprimé
ce système que rien ne justifie pour les trains réguliers.
En outre, comme les points dénommés stations n'ont pas de
voies d'évitement, et que, par suite, aucun croisement ne peut s'y
effectuer, on a jugé à propos de ne pas leur laisser Tusage du télé-
graphe, afin qu'elles ne puissent jamais intervenir dans la circu-
lation des trains.
On a même été jusqu'à enlever dans toutes les stations les appa-
reils télégraphiques installés par la Compagnie des Dombes.
Ainsi, de Lons-le-Saulnier à Louhans, 29 kilomètres, il n'existe
pas de poste télégraphique intermédiaire, d'où résulte qu'en cas
de détresse survenant au milieu du parcours (cas qui s'est produit)
l'agent chargé de demander le secours peut avoir à parcourir
14 kilomètres et demi à pied.
Il résulte encore de cette suppression que les gares de croisement
ne peuvent être avisées des retards qui se produisent aux stations
intermédiaires.
La Compagnie P.-L.-M. a maintenu cette suppression du télé-
graphe, malgré les réclamations du service du contrôle.
En fait, les détresses sont rares : d'autre part, il n'arrive
presque jamais sur de semblables lignes qu'on ait à faire des trains
spéciaux ou facultatifs. L'absence de télégraphe n'est pas non plus
une cause de gène dans le cas où circulent des trains de matériaux,
en raison des intervalles de cinq à six heures qui séparent les trains.
Néanmoins, l'économie réalisée par la suppression des appareils
télégraphiques est si minime, qu'elle ne saurait être admise.
On n'eût pas augmenté la consommation de matières en laissant
les appareils à chaque station et y maintenant les fils sur commu-
nication directe. Tandis que s'il survenait un accident grave, on
22 LIGNES SECONDAIRES
courrait le risque de voir les secours retardés de plusieurs heures,
par suite de Tabsence de télégraphe à portée.
Les stations sont gérées par des femmes lorsque les expéditions
et arrivages n\ dépassent pas le chiffre de 2 ou 3 par jour, que la
manutention n^excède pas une tonne et que le nombre des voya-
geurs reste inférieur à 10^ Le traitement journalier de la femme
varie de 1 franc à 1 fr. 50.
Dans ces stations, la manutention et les manœuvres sont faites
par les agents des trains qui ont à décadenasser et recadenasser les
aiguilles, abaisser les taquets, etc.
Lorsque le trafic excède les chiffres qui précèdent, la station est
gérée par un homme qui est toujours aidé par sa femme, moyen-
nant une rétribution quotidienne de 0 fr. 50.
Les colis de faible dimension sont déchargés au passage sur le
trottoir et emportés ensuite par la femme sous la halle.
S'il s'agit de colis lourds, on amène le fourgon ou le wagon
devant le quai couvert ou découvert, et les agents du train effectuent
le chargement ou le déchargement.
Lorsqu'il y a à manutentionner des wagons complets, avant ou
après le passage des trains^ la femme chef de station doit demander
au brigadier-poseur, sur réquisition écrite, un ou plusieurs agents
de la voie pour effectuer ce travail. Un imprimé existe à cet effet,
et le brigadier établit le décompte du temps employé au service de
la station, ou perdu pour se* rendre du chantier à la station ou
vice versa, La somme correspondante est facturée au service de
l'exploitation par celui de la voie.
Cette manière de faire n'est du reste pas particulière aux lignes
des Dombes. Elle est en usage sur tout le réseau P.-L.-M., dans les
stations de peu d'importance.
Les tarifs sont ceux de la Compagnie P.-L.-M., qui les a appliqués
dès la reprise ; ils sont sensiblement plus élevés que ceux de la
Compagnie des Dombes ^ D'autre part, la Compagnie locale avait
des habitudes beaucoup plus commerciales que la grande Compa-
gnie: ses agents étaient constamment à la recherche de nouveaux
* Il s'agit lii d'une indication exacte dans la pratique, mais non d'une rèplc absolue.
* La Compagnie «les Dombes ne se renfermait pas toujours strictement dans les
tarifs homologuc^s, et faisait souvent des prix de gré à pré.
DES GRANDS RÉSEAUX
23
transports, en relation étroite avec la population de la région et
attiraient ainsi le trafic sur les rails des Dpmbes. Il résulte de ces
deux causes jointes à la dépression générale des transports, que le
trafic des lignes des Dombes a très-notablement baissé, ce qui fait
ressortir plus encore l'élévation du prix de rachat.
Service des haltes. — Le service des haltes ouvertes aux
voyageurs, bagages et chiens, présente une intéressante par-
ticularité : suppression complète de la comptabilité. De plus, elles
ne font pas de perception, le paiement du billet étant effectué à
destination. D'où il résulte que ces haltes peuvent être confiées à
des femmes d'une instruction et d'une intelligence très-peu déve-
loppées, avec un traitement infime. Toutes les femmes des can-
tonniers, à la condition do savoir lire et écrire, sont aptes à tenir
ces haltes, qui , n'entraînant aucun frais ni de premier établis-
sement ni d'exploitation, peuvent être ainsi très-multipliées.
Voici comment on opère :
Chaque halte est munie de deux carnets de bulletins d'ori-
gine, l'un pour les trains pairs, l'autre pour les trains impairs ;
ce sont les gares de destination ou les gares de bifurcation qui
sont chargées de faire les encaissements.
Les bulletins comprennent à droite le coupon B (voir le spé-
cimen ci-contre), à gauche le coupon A sur
lequel sont portés le n® d'ordre, le nom de
la halte de départ et la classe du billet.
Entre les deux coupons sont indiqués les
noms des gares qui se trouvent entre la
halte de départ et la gare terminus du train
ou la gare de bifurcation la plus rappro-
chée.
On délivre au voyageur le coupon B du
bulletin que Ton découpe de manière à
y laisser joints les noms des gares jusques
et y compris celle désignée par le voyageur
comme destination.
Le numéro do la classe du billet est
porté à la main sur les deux coupons A et B.
?»►
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24 LIGNKS SECONDAIRES
La gare d'arrivée ou do bifurcation, on consul tant le coupon B
remis au voyageur, détermine la perception à effectuer.
Les coupons A sont envoyés en lin do journée à l'Inspection
principale qui reçoit d'autre part, sur le rapport journalier des
gares ayant effectué des perceptions sur bulletin d'origine, men-
tion de ces perceptions. Le rapprochement des souches et des
rapports permet de s'assurer si toutes les perceptions ont bien
été effectuées. C'est un travail insignifiant, attendu que les bul-
letins d'origine sont toujours peu nombreux, vu le faible trafic
des haltes.
Lorsque des voyageurs, au départ d'une halte, ont des ba-
gages ou dos chiens, la garde-halte porte au dos du bulletin la
mention de la nature et du nombre des colis. Cette indication suffit
à renseigner la gare destinataire qui fait le nécessaire pour effec-
tuer la perception, ou la gare de bifurcation, qui procède à Tenrc-
gistrement, si les bagages et les chiens doivent continuer au delà.
Comptabilité des stations, — Les stations gérées par des fem-
mes n'ont pas de comptabilité ou plutôt les femmes ne tiennent
que les écritures indispensables pour renseigner au point de vue
comptable, la gare importante la plus voisine, dénommée gare-
centre, qui est chargée de la comptabilité complète des stations.
La gare-centre peut être comptable de deux stations, mais
.rarement de trois. Elle tient des registres distincts pour chacune
et fournit au contrôle toutes les pièces comptables prescrites, aux
lieu et place des stations elles-mêmes.
Les stations effectuent d'ailleurs les perception^, tant en grande
qu'en petite vitesse, et font chaque jour leur versement, à la
gare-centre, à découvert, sur bordereau général G.V. etP.V.
Les relations des stations gérées par dos femmes sont limitées
aux gares et stations du réseau P.L.M.
En ce qui concerne les voyageurs, les renseignements à en-
voyer à la gare-centre sont inscrits sur un bordereau des billets
délivrés qui n'est que la copie du décompte des billets établi en
fin de journée sur le registre ad hoc,
A ce bordereau sont jointes les souches des billets passe-
parlout émis par les stations.
I
DES GRANDS RÉSEAUX 2r>
Pour les bagages, elles envoient le bordereau d'enregistré-
ment des bagages et les souches des fouilles de route, etc..
Pour les marchandises grande ou petite vitesse, à l'expédition,
attachement est pris sur un registre d'expéditions , avec tous
les renseignements habituels, non compris la taxe ; le récépissé
timbré et les autres écritures sont établies par la station, et les
opérations journalières sont détaillées sur un bordereau d'expé-
ditions envoyé à la gare-centre ; les déclarations d'expéditions
sont jointes à ce bordereau. La gare-centre établit et inscrit la
taxe sur les pièces.
A l'arrivée, les stations reçoivent les écritures qu'elles inscri-
vent sur un registre d'arrivages ; elles tiennent un livre de sortie,
effectuent les perceptions ep port payé, comme elles effectuent
les perceptions en port dû à l'expédition, et envoient à la gare-
centre un bordereau d'arrivages joint aux feuilles d'expéditions
•reçues.
C'est grâce à la simplification procurée par cette comptabilité
rudimentaire que la Compagnie de Lyon a pu confier le service
de stations peu importantes à des femmes ayant assez peu d'ins-
truction.
Les receltes kilométriques des Bombes varient, suivant, les
lignes, do 5,000 à 11,000 francs. Les dépenses sont généralement
supérieures aux recettes, et, à une ou deux exceptions près, le
coefficient d'exploitation oscille entre 100 et 140 p. 100.
CHAPITRE III
CHEMINS DE FER DE L'ÉTAT
Locoxnotives-Tenders-Fourgons
On a vu plus haut que la Compagnie du Nord avait créé des trains
économiques dans le but de réduire son personnel do conduc-
teurs ; le service de ces trains est en efTot assuré par un seul agent.
La Compagnie du Nord a pris soin de faire remorquer ces trains
par des machines légères de ses anciens types, ayant une consom-
mation réduite, et devenues trop faibles pour traîner les trains
express actuels dont la charge s'accroît chaque année en même
temps que la vitesse.
On a vu enfin que cette Compagnie, allant plus loin encore dans
la voie de la réduction du personnel dos trains, mettait en marche
des trains-tramways composés seulement d'une machine légère
et d'une voiture ou plutôt de deux voitures jumellées, avec un mé-
canicien seulement sur la machine, et pour le train un conduc-
teur-receveur qui peut en cas de besoin prendre la place du méca-
nicien. La Compagnie du Nord s'est du reste attachée à ne pas
augmenter le nombre des trains mis en marche sur les sections
ainsi desservies par des trains de voyageurs à îFaiblcs charges :
à cet effet elle assure le service do l'un des trains de chaque sens le
train de marchandises-voyageurs, par des machines très-puissantes.
Des essais analogues sont à l'étude sur les lignes à faible
trafic de plusieurs autres grandes Compagnies françaises*. En
• * LOuPst, l'Est, rKtat.
^
GRANDS RÉSEAUX 27
général, on emploi pour les trains de ces lignes des locomotives
de tjrpes anciens et à faibles poids. Il serait en olTet absurde de
traîner des trains dont la charge descend parfois à 25 ou 30 tonnes,
c'est-à-dire à 3 ou 4 véhicules, avec les locomotives actuelles à
voyageurs, qui pèsent 50 tonnes avec leur tender.
Il est vrai, cependant que les machines de types démodés
dépensent souvent plus de charbon que les excellentes machines
de vitesse que l'on construit aujourd'hui, et qu'on ne conserve en
service les vieilles locomotives que parce que l'intérêt et l'amortis-
sement do locomotives neuves seraient supérieurs à l'économie
de combustible qu'elles permettraient de réaliser.
On en vient alors à se demander si c'est un intérêt bien compris
que de prolonger pendant vingt-cinq, trente ou même quarante
années l'existence des locomotives. Ne vaudrait-il pas mieux les
user en douze ou quinze années en augmentant dans de très-no-
tables proportions leurs parcours annuels? C'est là une bien grave
question, résolue en Amérique d'une manière tout autre qu'en
Europe, ainsi qu'il a été dit déjà à propos des trains-tramways
de la Compagnie du Nord.
Quoi qu'il en soit delà solution à donner à cet intéressant pro-
blème, l'Administration des chemins de fer de l'Etat s'est trouvée
chargée d'exploiter un réseau étendu avec un matériel presque en-
tièrement neuf ; elle n'avait pas par suite à se préoccuper de l'em-
ploi de vieilles machines sur ses lignes à très-faible trafic, et
pouvait recourir à un matériel spécial.
On a tout d'abord songé à utiliser sur ces lignes la voiture à va-
peur de M. Belpaire, ingénieur en chef de la traction des chemins
de fer de l'Etat belge. Cette machine, mise en service sur la ligne
de Saint-Mariens àBlaye*, nécessitait des réparations constantes,
elle était d'un roulement très désagréable aux voyageurs, et la
fumée aveuglait ceux-ci, qui étaient trop rapprochés de la ma-
chine. Sur les plaintes incessantes du public, on a dû la retirer
du service après cinq années d'expérience, pour faire une nouvelle
étude. La locomotive-lender-fourgon, qui est le type adopté à la
* Vn décret du Président de la llépiibliqiie (20 mai 1880) a autorisé la réduction
à un mécanicien et à un conducteur parde-frcin du personnel de la voilure à
vapeur, par dérogation à rarlicle 18 do l'ordonnance du ib novembre 18iG.
28 LIGNES SECONDAIRES
suite do celte étude, a été mise à l'essai en 1885, et est complète-
ment expérimentée aujourd'hui ; elle a donné toute satisfaction * .
En proposant ce type à l'Administration des chemins de fer de
l'Etat, M. Ricour, ingénieur en chef du matériel et de la traction,
poursuivait un double but : réduction de consommation pour la
machine et réduction de personnel pour le train.
La machine-lender possède à l'arrière un compartiment-fourgon
pouvant porter une charge de 1,000 kilos, et communiquant avec
la plate-forme du mécanicien, de telle sorte que le conducteur
puisse, en cas de besoin, aider le mécanicien soit au chargement
du feu, soit à l'alimentation ou au frein, ou même arrêter la ma-
chine au cas où le mécanicien viendrait à tomber ou se trouverait
hors d'état d'assurer la conduite de la machine.
La machine^ représentée fig. 4, pi. III, est portée par trois
essieux dont deux accouplés seulement. Ses conditions d'établis-
sement sont les suivantes :
Dianlètre des cylindres 0,250
Course des pistons 0,400
Surface de chauffe du foyer 4 mq., 050
Surface de chauffe des tubes 25 m. q. 515
Timbre de la chaudière . . . . / 12 kilos.
Diamètre des roues motrices au contact 1 m. 320
Longueur entre plaques tubulaires 2 m. 250
Longueur totale de la chaudière 4 m. 045
Diamètre moyen de la chaudière 0 m. 246
Volume d'eau avec 100 °/™ au-dessus du ciel ... 1 m. q. 220
Volume de vapeur 0 m. 675
Eau et combustible dans les soutes 3,250 kilos
Ecartement des essieux accouplés 2 m. 100
Ecartement des essieux extrêmes 3 m. 750
Poids total de machine à vide 20,310 kilos
Poids total de la machine en service 24,800 kilos
L'empattement de la machine n'est donc pas supérieur à l'em-
pattement du matériel voitures et wagons, qui varie de 2 m. 70 à
* La locomotive-fourgon est employée depuis plusieurs années en Allemagne et en
Autriche, notamment sur certaines lignes de la Sùdbahn et de la Nordwestbahn.
^
DES GBANDS RÉSEAUX 20
3 nr. 75. Par suite, elle peut tourner sur les plaques tournantes or-
dinaires, ce qui permet de faire réconomie d'un pont tournant
pour les petites lignes où ces machines sont en usage.
Les deux essieux extrêmes sont chargés à 7,900 kilos, Tessieu
intermédiaire à 9,000 kilos; le poids adhérent est par suite de
16,900 kilos, ce qui donne avec le coefficient de 7? une adhérence
de 2,410 kilos, supérieure à Teffort maximum théorique de traction
de 2,272 kilos que peuvent développer les cylindres.
Le diamètre des cylindres est légèrement trop faible. En le por-
tant à 0 m. 26, on eût accéléré le démarrage, qui est un peu lent
lorsque le train est chargé ; d'où perte de temps sensible dans les
manœuvres.
On pourrait croire à première vue que le porte-à-faux du four-
gon, qui atteint 2 m. 535, doit déséquilibrer la machine. Il n'en est
rien. Le fourgon est au contraire d'un poids trop faible s'il n'est
pas chargé de près de 1,000 kilos de colis, charge que l'on atteint
fort rarement. Aussi en service normal, où il est à peu près vide, il
n'est pas suffisamment équilibré, et le conducteur y est assez mal
à Taise en raison des vibrations.
Telles quelles, ces machines atteignent facilement, sans fatigue
pour les organes, la vitesse maxima de 70 kilomètres à l'heure, en
traînant une charge de 70 à 80 tonnes en profil facile.
Elles ont été construites à Belfort par la Société alsacienne.
Les locomotives-fourgons sont spécialement afiectées au service
des lignes de :
Port-Boulet, Port-de-Piles et Ligré-Richelieu, d'une part ;
Blois à Pont-de-Braye, d'autre part.
Sept machines sont afiTectées au service des premières lignes et
trois à celui des secondes.
La consommation moyenne de ces machines est de 5 kilos 400
par kilomètre de train, alors que la consommation des machines
qu'elles ont remplacées atteignait 7 kilos 400.
Ces consommations comprennent les allumages, et il faut remar-
quer aussi que la mise en pression exige beaucoup moins de com-
bustible avecla machine-fourgon, eu égard aux dimensions réduites
de la chaudière. De même la consommation est moindre pendant
les stationnements.
i
30 LIGNES SKCONDAIRES
Le traitement annuel d'un chauffeur, qui est de 120 francs par
mois, est tout entier ^économisé.
Quant à sa prime mensuelle, qui s'élève à 15 ou 20 francs, elle
est affectée au conducteur à titre d'indemnité.
Il y a lieu de faire encore ressortir l'économie d'entretien que
présentent les locomotives-fourgons; le graissage en est également
moins onéreux que le graissage des machines ordinaires.
Ces diverses économies s'élèvent en résumé à un chiffre impor-
tant. Prenons pour exemple le groupe Port-Boule t-Port-de-Piles-
Richelieu.
Le parcours moyen journalier par machine est de 100 kilo-
mètres : 4 machines sont en service, 3 en dépôt ou réserve. L'é-
conomie journalière de combustible est par suite de :
4 machines x 100 kilomètres x 2 kilos i-800 kilos ; soit *par an
292 tonnes, soit à 20 fr. la tonne, 5,840 francs.
Il faut ajouter l'économie annuelle de chauffeurs, soit 4
équipes x 120 fr. x 12 ou 5,760 francs, et l'économie réalisée
dans le graissage, l'entretien, les manœuvres, la suppression d'un
fourgon, etc., etc., soit environ 2,400 francs.
Au total 14,000 fr. pour 7 machines, ou en fin de compte 2,000 fr.
par machine et par an.
On voit que l'acquisition de machines légères pour chemins à
très-faible trafic est largement justifiée.
La suppression du chauffeur est plus discutable.
En effet, si dans les manœuvres et pendant le remplissage du
tender aux prises d'eau, le concours du conducteur est effectif, il
n'en est plus de même en pleine marche. Le mécanicien doit alors,
outre ses occupations ordinaires, alimenter la chaudière et charger
le feu ; cette dernière opération demande un certain temps et
aveugle encore l'agent pondant quelques secondes après qu'elle est
terminée. Les conducteurs-chefs de train, qui peuvent communiquer
avec le mécanicien par la porte existant entre le fourgon et la
plate-forme de la locomotive, ont ;^bien été mis au courant des
moyens à employer pour arrêter les machines s'ils aperçoivent
soit un signal fermé, soit un obstacle, pendant que le mécanicien
s'occupe du feu ou amorce son injecteur.
Mais il faut observer que le conducteur doit normalement rester
DES GRANDS RÉSEAUX 31
dans le fourgon pour assurer le service du frein : il doit, d'autre
part, remplir les feuilles de marche, de mouvement, de matériel et
classer ses écritures. Son attention est forcément distraite de la
surveillance constante de la voie.
D'où il suit que l'emploi de la locomotive-tender-fourgon serait
sans inconvénient sur des lignes bien gardées et clôturées, ce qui
n'est précisément pas le cas des lignes ordinaires à trës-faible
trafic.
Aussi les mécaniciens de ces machines, ne pouvant compter
sur l'aide efficace du conducteur-chef de train, sont-ils unanimes à
demander l'adjonction d'un chauffeur.
D'autre part, la suppression du chauffeur nécessite obligatoire-
ment deux conducteurs au train, un chef de train sur la machine-
fourgon et un garde-frein dans le fourgon de queue; mais le frein
de la machine et celui du fourgon de tête, distincts par l'emploi
d'une machine ordinaire, sont confondus sur la locomotive-
fourgon ; d'où il résulte qu'on est obligé de prendre un garde-
frein supplémentaire toutes les fois que la composition du train
dépasse de 10 à 6 véhicules, selon la vitesse et les déclivités.
Mais cet avantage de la réduction d'un agent sur Tensomble du
personnel du train, et cette obligation de ramener ce personnel au
nombre habituel en cas de forcement de la charge du train ne
sont pas inhérents à la locomotive-fourgon.
On trouverait exactement le même avantage et le même incon-
vénient si on laissait un chauffeur sur la machine, et si on repor-
tait le conducteur à l'arrière du train, en supprimant le garde-
frein .
De cette manière, plus d'amoindrissement de la sécurité en
pleine marche ; on rentre dans le cas ordinaire et on réalise éga-
lement l'économie d'un agent, à peu près au même traitement
qu'un chauffeur.
Mais de même que le conducteur prête son concours à l'agent
de traction dans le système de l'exploitation par machine-fourgon,
de même, si on réduit le personnel d'agents de train à un seul, il
importe que le chauffeur et au besoin le mécanicien pnissentprêter
leur concoui*s pour les manœuvres ou manutentions au passage
dans les stations.
32 LIGNES SECONDAIRES DES GRANDS RÉSEAUX
On 110 peut obtenir un résultat tout à fait satisfaisant qu'on
réunissant les agents do traction et de mouvement sous Tautorité
d'un même chef. ,
On a vu que le fourgon de la locomotive-fourgon est plutôt nui-
sible qu'utile à la stabilité de la machine : ce fourgon, dont la
présence réduit la largeur de la plate-forme de la locomotive offre
aussi des inconvénients pour les lavages et l'entretien dans les
dépôts.
Doit-on conclure de la disposition de la machine- fourgon qu'elle
permet de réaliser la suppression d'un véhicule, le fourgon, qui
doit normalement être placé immédiatement derrière la machine?
Mais il faut observer qu'on tend aujourd'hui à renoncer à cette
sujétion, longtemps considérée comme indispensable à la sécu-
rité.
On verra plus loin, à l'occasion des chemins de fer d'intérêt
local du Pas-de-Calais et de diverses autres lignes d'intérêt local
à trafic réduit, que des Compagnies ont été autorisées, dans plu-
sieurs cas, par arrêtés préfectoraux, à supprimer le fourgon ou la
voiture de choc, qui, aux termes de l'article 20 de l'ordonnance
du 15 novembre 1846, doit être interposé entre la machine et les
voitures à voyageurs.
Cette suppression, qui ne présente aucun inconvénient, a été au-
torisée en principe par décret présidentiel du 20 mai 1880, et peut
être normalement étendue aux trains de faible composition des
lignes à trafic restreint, sous réserve de certaines précautions.
En résumé, ce qu'il y a lieu de retenir de l'essai de l'Adminis-
tration des chemins de fer de l'Etat, c'est remploi^ sur les lignes
peu importantes, de machines légères suffisantes pour les faibles
charges à remorquer et qui, par leurs dépenses réduites de char-
bon, graissage, etc., etc., permettent de réaliser des économies
moyennes annuelles d'un millier de francs par machine.
La circulation des locomotives-fourgons sur les lignes des che-
mins de fer de l'Etat a été autorisée par arrêté ministériel du
16 juillet 1886, en exécution du décret présidentiel précité.
DEUXIÈME PARTIE
CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
A VOIE NORMALE
i
à
CHAPITRE IV
ÉTUDE COMPARATIVE
DES LOIS DU 12 JUILLET 1866 ET DU 11 JUIN 1880
SUR LES CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Loi du 12 JniUet 1866
Les conventions de 1859, qui ont complété les grandes artères
du réseau français et créé les transversales constituant le nouveau
réseau, avaient laissé de côté un certain nombre de lignes ne pré-
sentant pas un caractère d'intérêt général, mais dont Texécution,
vivement désirée par les départements et les communes, sollicitée
par des concessionnaires, ne pouvait être assurée par les seules
ressources que pouvaient réunir les uns et les autres ; il fallait
encore le concours de l'Etat.
Aussi, dès 1861, se produisit-il un mouvement en faveur de la
construction de lignes secondaires; ce mouvement s'accentua, et en
1864, les Conseils généraux s'en firent les échos.
Un projet de loi sur les chemins de fer d'intérêt local et indus-
triel fut déposé par le gouvernement sur le bureau du Corps légis-
latif le 18 mai 1865, et la loi fut promulguéele 12 juillet suivant.
Les chemins d'intérêt local pouvaient être établis :
1® Par les départements ou les communes, avec ou sans le con-
cours des propriétaires intéressés ;
2'' Par des concessionnaires, avec le concours des départements
ou des communes (article l'').
Le Conseil général arrêtait, sur la proposition du préfet, la direc-
^
36 CHKMINS DK FER D'LNTÉRÊT LOCAL
tion du chemin, le modo et les condilions de construction, ainsi
que les traités et dispositions relatives à Texploitation.
Un décret délibéré en conseil d'Etat, sur le rapport des ministres
de rintérieur et des travaux publics, déclarait Futilité publique
et autorisait Texécution.
Le préfet approuvait ensuite les projets définitifs, homologuait
les tarifs et contrôlait Texploitation (art. 2).
Les ressources créées en vertu de la loi du 21 mai 1836 pouvaient
être affectées en partie par les départements et les communes
à la dépense des chemins de fer d'intérêt local, Tarticle 13 de
ladite loi étant applicables aux centimes extraordinaires imposés
en vue de Texécutiondeces chemins (art. 3).
La loi du 15 juillet 1845 sur la police des chemins de fer était
applicable aux chemins do fer d'intérêt local, sauf en ce qui con-
cerne les clôtures, qui pouvaient être supprimées, et les barrières,
que Ton pouvait se dispenser d'établir au croisement des chemins
peu fréquentés (art. 4).
Pour la construction de ces chemins, des subventions pouvaient
être accordées sur les fonds du Trésor, sous réserve que la somme
totale affectée chaque année par l'Etat à ces subventions ne dépas-
serait pas 6 millions ; la subvention de l'Etat pouvait être de 1/3 de
la dépense totale de construction prévue au traité d'exploitation et
même s*élever à moitié pour les départements dans lesquels le
produit du centime additionnel au principal des 4 contributions
directes était supérieur à 20000 fr.; en revanche, pour les dépar-
tements dans lesquels ce produit était supérieur à 40000 fr., la
subvention de l'Etat était réduite au quart (art. 5 et 6).
Les chemins de fer d'intérêt local, recevant une subvention du
Trésor, pouvaient seuls être assujettis envers TEtat à un service
gratuit ou à une réduction du prix des places (art. 7).
On verra, par les exemples qui suivent, que les chemins de fer
concédés sous Tempire de la loi du 12 juillet 1865 ont en général
une situation financière fort peu prospère. Un grand nombre de
ces chemins qui ne sont pas décrits ici, ont été repris par les
grandes Compagnies à la suite de faillite.
Dans son ouvrage sur les Chemins de fer français ^ M. Alfred
Picard juge sévèrement la loi de 1865. Bien que ses conclusions
LOIS DE 1865 ET DE 4880 37
ne soient pas applicables à tous les cas, il parait intéressant de les
reproduire :
« L'expérience n'est pas venue confirmer les espérances premières. Les
« causes principales de cet échec sont les suivantes:
:< Au lieu de rester dans leur rôle, dans leur sphère d^action ; au lieu de se
«< pénétrer de la nécessité d*une stricte économie ; au lieu d'éviter soigneuse-
« ment toute prodigalité dans la construction, comme dans l'exploitation ; au
« lieu de se considérer comme les alliés, les auxiliaires des grandes Compa-
w gnies ; au lieu de comprendre qu'ils couraient inévitablement à leur perte,
« en voulant faire concurrence aux lignes d'intérêt général, les concession-
« naires des chemins de fer dlntérêt local avaient trop souvent établi et
«( exploité ces lignes avec un luxe de dépenses tout à fait excessif, et oublié
« qu'en toute chose il fallait proportionner Toutil au service qui lui était
«< demandé. Trop souvent aussi on les avait vus s'efforcer de souder entre elles
<c les concessions obtenues sur le territoire de divers départements, chercher
u à créer ainsi de véritables lignes de transit et même des réseaux entremêlant
« leurs mailles ku milieu de celles des grands réseaux d'intérêt général, enga-
« ger une lutte qui ne pouvait que leur être fatale et les conduire à des catas-
« trophes.
u A côté de ce vice, exclusivement imputable à la manière dont la loi avait
u été appliquée, il en était un autre inhérent à la loi elle-même. Le législateur
« de 4865 avait commis une faute lourde, en instituant un système de subven-
« tions en capital ; il avait, ainsi, involontairement encouragé la spéculation^
« en lui procurant une première mise de fonds et en lui donnant un aliment
a qui lui permettait de se soutenir pendant la période de construction et de
« faire illusion au public, sans attribuer aux capitaux engagés aucune garantie
M de rémunération, sans fournir aux départements intéressés aucune garantie
0 d'exploitation. Plus d'une fois, les concessionnaires des chemins secondaires
a s'étaient empressés de réaliser d'énormes bénéfices, au moyen de l'émission
« des titres et au moyen de marchés de construction consentis avec des majo-
« rations scandaleuses, puis d'abandonner les entreprises dont ils avaient pris
« l'initiative, laissant ainsi les départements en face de difficultés et d'em-
9 barras inextricables ^ Cette situation avait encore été aggravée par la loi
« du 24 juillet 1867, qui, en émancipant les sociétés anonymes, avait porté
« atteinte aux mesures tutélaires édictées par la loi du 4 5 juillet 4845, pour
« mettre un frein à l'agiotage, pour sauvegarder les droits des intéressés,
«< pour maintenir une sage proportion entre le capital-actions et le capital-
« obligations, pour assurer le bon emploi des fonds souscrits par le public ou
« fournis par l'Etat et par les départements. Le Conseil d'Etat s'était à la vérité,
« appliqué, depuis 4872 notamment, à couper court aux abus, en insérant
(^ dans les actes de concession des dispositions particulières à chaque espèce ;
* Parmi les exemples d'abus les plus frappants, on peut citer celui d'un conces-
sionnaire qui, après avoir obtenu une subvention de 900.000 fr. du département,
avait constitué une société dont la charte lui réservait la totalité de cette subvention,
à titre de part de fondateur.
38 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
o mais il importait évidemment de faire davantage et de prendre des
« mesures d'ensemble consacrées par le Parlement. »
(Picard, Les Chemins de fer français, t. V, p. 169.)
Loi du 11 Juin 1880
Dès le 29 avril 1878, M. de Froycinet déposa sur le bureau du
Sénat deux projets de loi. qui avaient été longuement élaborés au
sein du Conseil d'Etat et qui étaient relatifs, Tun aux chemins de
fer d'intérêt local et Fautre aux voies ferrées établies sur les voies
publiques, c'est-à-dire aux tramways, qui prenaient de plus en plus
d'importance, et dont le régime n'avait encore été réglé par aucune
législation.
La discussion aux Chambres fut assez longue, et la loi ne put
être promulguée que le 11 juin 1880.
Les caractères fondamentaux de cette loi résident dans les
articles 2, 13, 14 et 18.
Aux termes de l'article 2 et contrairement aux dispositions de la
loi du 12 juillet 1865, il ne suffit plus, pour autoriser l'exécution
d'une ligne, d'un décret délibéré en conseil d'Etat ; mais si le Con-
seil général du département ou la commune (lorsque le chemin
ne sort pas du territoire de celle-ci), ont le droit d'arrêter la direc-
tion des chemins de fer d'intérêt local, le mode et les conditions
de la construction, ainsi que les traités d'exploitation, seule une
loi peut autoriser l'exécution après examen du Conseil général des
ponts et chaussées et du Conseil d'Etat.
L'article 13 règle la subvention de l'Etat. Cette subvention est
formée: l"" d'une somme fixe de 500 fr. par kilomètre exploité;
2* du quart de la somme nécessaire pour élever la recette brute
annuelle (impôts déduits) au chiffre de 10000 fr. par kilomètre de
ligne à voie normale, au chiffre de 8000 fr. par kilomètre de ligne
à voie étroite. Cette subvention ne peut du reste, en aucun cas,
élever la recette brute kilométrique au-dessus de 10500 pour la
voie normale et 8500 pour la voie étroite, ni attribuer au capital
de r' établissement plus de 5 p. 100 par an.
Enfin, elle n'est exigible qu'autant que partie au moins équiva-
lente sera payée par le département ou la commune, avec ou sans
le concours des intéressés.
I.OIS DE 1865 ET DE 1880 36
Ainsi la subvention, au lieu d'être composée d'une somme
fixe, comme sous le régime de la loi de 4865, est désormais
annuelle.
L'article 14 fixe à 400000 fr. le maximum de la charge
annuelle à imposer au Trésor, par département.
D'après l'article 18, il ne peut être émis d'obligations pour une
somme supérieure au montant du capital-actions, qui sera fixé à la
moitié au moins de la dépense jugée nécessaire pour le complet
établissement et la mise en exploitation de la voie ferrée; et
aucune émission d'obligations ne peut être autorisée avant que
les 4/5 du capital-actions ait été versés en argent et employés en
achats de terrains et approvisionnements sur place, ou en dépôt
de cautionnement.
Toutefois, exception peut être faite aux dispositions prévues
par l'article 1 8 pour une Compagnie déjà concessionnaire d'autres
chemins en exploitation, si le ministre des Travaux Publics recon-
naît que les revenus nets de ces chemins sont suffisants pour
assurer l'acquittement des charges résultant des obligations à
émettre.
Cette exception a reçu dans la pratique une extension qui réduit
singulièrement les garanties que l'article 18 avait données aux
obligataires.
La Société des chemins de fer économiques et la Compagnie des
chemins de fer départementaux ont construit des lignes dont elles
étaient concessionnaires à l'aide d^un capital-actions restreint;
elles ont été autorisées à émettre des obligations, les lignes ou
parties de lignes une fois terminées, pour rendre disponible le
capital-actions, qui sert ainsi de fonds de roulement en vue de
construire d'autres chemins; ces émissions ne peuvent, bien entendu,
être autorisées que jusqu'à concurrence du chiffre forfaitaire
déterminé dans Tacte de concession pour les dépenses de premier
établissement, et les charges des titres ne doivent pas dépasser
l'annuité garantie.
« Cette combinaison, poursuit M. Picard, réduit incontestablement les
« garanties des obligataires.
« La dérogation au principe est d'autant plus grave, qu'aux termes de ses
« statuts, la Compagnie peut engager son capital dans des opérations qui,
40 CHEMINS DE FER DINTÉRÊT LOCAL
« sans être étrangères à Tindustrie des chemins de fer, le seraient du moins
c aux concessions de lignes d'intérêt local. 11 serait prudent d'exiger l'immo-
« bilisation dans les travaux d^une quote-part au moins du capital-actions, de
« manière à' ménager entre le revenu assuré à la -Compagnie d'après les
« barèmes contractuels et les charges des obligations un écart sufGsant pour
« faire face à Téventualité des mécomptes d'exploitation. >'
(Les Chemins de fer français ^ t. V, p. Î07.)
Postérieurement à ces observations de M. Picard, il a été posé en
principe, qu'à Tavenir 1/5 du capital-actions serait immobilisé sur
les nouvelles lignes concédées à chacune des Sociétés précitées.
En dehors des articles 2, 13, 14 et 18, qui renferment les
principes fondamentaux de la loi, il convient encore de citer à
titre secondaire :
L'article 5 aux termes duquel le préfet homologue les tarifs
lorsque la ligne ne sort pas du département et que ces tarifs ne
dépassent pas les maxima fixés par le cahier des charges type,
qui ne diffère pas, sous ce rapport, du cahier des charges des
grandes Compagnies.
Si la ligne s*étend sur plusieurs départements, Thomologation
est demandée au ministre.
L'élévation des tarifs au-dessus des maxima ne peut avoir lieu
qu'en vertu d'un décret rendu en conseil d'Etat (art. 10).
L'article 12 applique en partie à la dépense des voies ferrées
les ressources créées en vertu de la loi du 21 mai 1836, pour les
communes qui ont assuré l'exécution de leur réseau subventionné
et l'entretien de tous les chemins classés.
L'article 15 partage entre l'Etat, les départements ou les com-
munes là moitié du surplus delà recette d'une ligne subventionnée,
quand cette recette couvre les dépenses d'exploitation et 6 p. 100
par an du capital de premier établissement.
L'article 19 oblige la Compagnie à fournir tous les trois mois,
sur un modèle arrêté par le ministre des Travaux Publics, le
compte rendu détaillé de l'exploitation, comprenant les dépenses
d'exploitation et d'établissement et les recettes brutes.
Les articles 20, 21 et 24 reproduisent les dispositions des
articles 4 et? de laloi du 12 juillet 1865 concernant l'application,
avec réserves, de la loi de police de 1845 et l'obligation, pour les
LOIS DE 1865 ET DE 1880 41
chemins subventionnés, à un service gratuit envers TElat ou à une
réduction du prix des places.
Le chapitre ii de la loi du 11 juin 1880 a trait aux tramways,
et leur applique à peu près les dispositions relatives aux chemins
de fer d'intérêt local.
La subvention de TEtat est portée par Tarticle 36 à une somme
fixe de 500 fr. par kilomètre exploité, augmentée du quart de la '
somme nécessaire, pour élever la recette brute au chifTre de 6000 fr.
par kilomètre, cette subvention no pouvant en aucun cas élever la
recette au-dessus de 6500 fr., ni attribuer au capital de premier
établissement plus de 5 p. 100 par an.
La loi du 11 juillet 1880 a été complétée :
1** Par un décret du 18 mai 1881 portant règlement d'admi-
nistration publique sur la forme des enquêtes en matière de che-
mins de fer d'intérêt local et de tramways ;
2"* Par un décret du 6 août 1881, portant règlement d'admi-
nistration publique pour rétablissement et l'exploitation des voies
ferrées sur le sol des voies publiques (art. 38 de la loi) ;
3"" Par un décret du 20 mars 1882 déterminant, conformément à
Tarticle 16 de la loi :
V Les justifications à fournir par les concessionnaires pour éta-
blir les recettes et les dépenses annuelles;
2'' Les conditions fixant le chiffre de la subvention due par TEtat,
le département et les communes, et lorsqu'il y a lieu, la part reve-
nant à l'Etat, le département et les communes ou les intéressés, à
litre de remboursement de leurs avances sur le produit net de
l'exploitation.
Enfin deux cahiers des charges types, l'un pour la concession
des chemins de fer d'intérêt local, Tautre pour la concession des
tramways, ont été approuvés par décret du 6 août 1881 délibéré
en Conseil d'État.
Sans doute, la loi du 11 juin 1880 n est pas parfaite; mais elle a
néanmoins produit des résultats considérables, et c'est à elle qu'on
doitcette expansion remarquable des chemins de fer à voie étroite
et des chemins de fer sur routes, dont le coût de premier établisse-
ment descend à 60000 et même 40000 fr. le kilomètre, y compris
le matériel roulant et qui sont exploités avec une extrême économie.
42 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
On a vivement reproché à la loi de 1880 d*avoir donné naissance,
dans Tapplication, à des formules qui n'intéressent l'exploitant
qu'à réduire le plus possible ses dépenses et non à chercher à
augmenter ses recettes brutes. Ce reproche n'est pas fondé et tout
dépend du choix de la formule elle-même.
Qu'on suppose par exemple, qu'un département fixe les dépenses
kilométriques d'exploitation d'une ligne d'intérêt local d'après la
formule suivante fréquemment suivie :
2500 + ^
R représentant la recelte brute kilométrique. En général, les
tarifs applicables aux lignes d'intérêt local sont à base élevée, et le
trafic y est des plus réduits.
Dès lors, le terme 4- ^^^ assez insignifiant pour que l'exploi-
tant n'ait pas d'intérêt à chercher à augmenter R au prix d'un
abaissement de tarifs, s'il en résulte pour lui une légère augmen-
tation de dépenses; d*où réclamations du public.
La faute en est à la formule et non à la loi.
Le système de la garantie, que consacre l'article 13 de la loi, a
aussi prêté à la critique. On on fera l'objet d'une étude appro-
fondie dans les conclusions de cet ouvrage.
CHAPITRE V
LIGNES DINTÉRÊT LOCAL DU PAS-DE-CALAIS ET DE
L'AISNE
Boisleux à Marquion. — Aohiet à Bapanme et à Marooing.
— Vélu-Bertincoiirt à Saint-Quentin. — Crôoy-Mortiers à
La .Fère.
I. - ÉTABLISSEXE.^T DE» CHEMINS
Les lignes d'intérêt local dites du Pas-de-Calais et de TÂisne
appartiennent à quatre Compagnies entièrement distinctes, bien
que leur exploitation soit confiée à la même Société, dirigée par
M. Emile Level.
Ces lignes ont respectivement les longueurs suivantes :
Boisleux à Marquion. 26kilom. livrées à Texploitalion en 1877-1878.
Achietà Marcoing . 32 — — 1871-1877-1878.
VéluàSaint-Quentin. 52 — — 1878-1879-1880.
Crécy à la Fère. . . 21 — — 1877 1879.
Total. . 131 kilomètres
44
CHEMINS DE FER D'IiNTÉRÊT LOCAL
La première partie de la ligne d'Âchiet à Marcoing a été cons-
truite sous le nom de ligne d'Âchiet à Bapaume, dans le but de
desservir l'agglomération de Bapaume, centre agricole et indus-
triel, qui représente une population d'environ 12000 habitants.
La ligne d'Achiet à Bapaume, longue de 7 kilomètres, a été ou-
verte en 1871.
En dehors de cette petite section, toutes les autres lignes ont été
construites essentiellement dans le but de desservir des fabriques
de sucre ou des distilleries.
Aussi ont-elles reçu des subventions très-importantes de la
part des fabricants. A ces subventions sont venues s'ajouter celles
de TEtat, des départements, des communes, et des dons indivi-
duels.
Les ressources financières des diverses Compagnies, pour réta-
blissement de leurs lignes, se résument ainsi :
Boisleux-Marquion .
SDBTlXTIOIiS
de
l'«tat
AUIHIB
SUBVENTIONS
CAPITAL
ACTIUNS
par
obligations
AVANCES
de la
COKPAORIKDCITORD
75.000
393.401 50
1.200.000
»
2.015.137 18
Achiet-Marcoing . . .
125.000
376.253 28
1.000.000
76.800
1.352.181 96
Vélu-Sainl-Quenlin •
200.000
606.000 -
2.400.000
>
4.622.755 17
Crécy- Mortier- UfèM.
65.000
439.300 .
1.000.000
500.175
400.000 .
%
Un des principaux actionnaires des trois premières Compagnies
n'est autre que la Compagnie du Nord, dont les avances à titre
d*obligations sont remboursables par annuités.
La Compagnie de Crécy-Morlier à La Fère a eu, dès le début
de sa mise en exploitation, des embarras financiers tels qu'elle a
dû emprunter à la Compagnie du Nord une somme de 400000 fr.
Cette dernière Compagnie a d'ailleurs mis fin à un système d'ex-
ploitation défectueux eu rattachant la petite ligne à la société
d'exploitation E. Level.
La Compagnie du Nord, on le voit, traite avec beaucoup de
A VOIE NORMALE 45
bienveillance ces petites lignes qu'elle considère comme ses af-
fluents; d'un autre côté, en devenant le principal actionnaire
de ces entreprises, elle les met hors d'état de lui faire jamais con-
currence et de renouveler, par leur entente, la tentative de Phi-
lippart.
Toutes ces lignes ont été concédées sous Tempire de la loi
de 1865.
Le cahier des charges est par suite du même typ^, et ne pré-
sente aucune particularité.
Description des lignes. — Les régions traversées sont agricoles
et sucrières ; les stations desservent pour la plupart des usines à
sucre ; il est assez surprenant qu'aucune de ces usines ne soit
desservie par un embranchement particulier qui permettrait
d'éviter tout transbordement de wagon à charrette ou inversement.
Du reste, les stations sont très-rapprochées des usines ou des
localités.
Les lignes sont construites économiquement. Il parait certain
cependant que si elles avaient été construites à l'heure présente,
on eût eu recours àla voie étroite et on eût emprunté, sur plusieurs
points, les accotements des routes.
Le court tronçon d'Achiet à Bapaume seul devait nécessaire-
ment être construit à voie normale : Bapaume représente en effet
un mouvement de 70 à 80 wagons par jour, dont la majeure par-
tie est en provenance ou destination des au-delà d'Achiet sur le
réseau du Nord.
Les courbes ne descendent pas au-dessous de 300 mètres de
rayon et les déclivités n'atteignent qu'exceptionnellement 13 mil-
limètres par mètre.
Le rail est en acier à 25 kilos par mètre ; son profil est figuré
(pi. IV, fig. 5). Il a 9 mètres de longueur. La voie est posée à
joints alternés, sur traverses distantes de 1 mètre d'axe en axe ; le
joint est soutenu et la traverse de joint est à 75 centimètres de
distance axiale des deux traverses voisines (pi. IV, fig. 6). Il y
a donc 10 traverses par rail.
46 CaEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
En raison du faible poids du rail /les \itesses des trains sont
limitées à 45 kilomètres à Theure.
Le type des gares est représenté par la station de Fins (fig. 7) ;
la voie d'évitement et la voie directe, entre lesquelles est placé le
trottoir (en terre], ont 330 mètres de pointe en pointe d'aiguille,
soit la longueur nécessaire à un train composé de trente véhicules,
qui représente la limite de charge correspondante au trafic et à
la puissance des machines. Le b&timent des voyageurs est accolé
à la halle des* marchandises et au quai découvert, lequel est
muni d'une rampe d'accès et d'une cage à tampons. Une voie
spéciale de débord est reliée, par plaques, quand l'importance du
trafic le justifie, avec la voie de marchandises qui passe devant
le bàtimeat des voyageurs.
Ce type de station est de tous points excellent.
Le b&timent est spacieux et commode.
La station est couverte par des disques avancés que la vitesse
limitée des trains a permis de ne placer qu'à 350 mètres de l'axe
du b&timent des voyageurs, qu'il y ait ou non pente ou rampe.
Ces disques, lorsqu'ils sont fermés, sont franchissables par ra-
lentissement.
D'après l'avis des exploitants, ces signaux pourraient fort bien
être supprimés à la condition que les aiguilles d'entrée fussent
muoies de signaux indicateurs d'aiguille ; ceux-ci donneraient
en effet une sécurité plus grande en cas de croisement, en indi-
quant au mécanicien si la voie est bien faite et la vitesse des
trains n'est pas assez grande pour qu'il y ait intérêt à couvrir
les stations à distance; la couverture par le signal d'aiguilles suf-
firait.
L'alimentation se fait exclusivement au moyen du. pulsomètre
de Hall. Les dépôts seuls possèdent des réservoirs qui sont, du
reste, alimentés à l'aide de cet appareil ; mais dans les gares or-
dinaires de prise d'eau, la prise est faite directement au puits. Les
locomotives portent à cet effet une tubulure sur laquelle le mécani-
cien visse le tuyau d'amenée de vapeur dans le pulsomètre; dès
que le robinet de vapeur est ouvert, l'eau est refoulée dans la
grue.
Du reste, au point de vue du temps dépensé pour le remplissage
k
A VOIE NORMALE 47
des caisses à eau, il n'y a pas de différence sensible entre le ré-
servoir avec grue hydraulique et le pulsomëtre sans réservoir ;
car le délai nécessaire pour visser et dévisser le tuyau de con-
duite de vapeur sur la locomotive est insignifiant, et le débit du
pulsomëtre est tout à fait comparable à celui des grues hydrau-
liques ordinaires, à la condition qne la nappe d'eau du puits ne
descende pas au-dessous de 15 à 20 mètres.
Le pulsomëtre est d'un très-mauvais rendement, car la vapeur,
en se condensant au contact de l'eau dans l'appareil, cède inu-
tilement à celle-ci un grand nombre de calories.
Une expérience intéressante a été faite à cet égard en Alle-
magne. Il s'agissait de remplacer une vieille machine à vapeur
élevant l'eau d'un puits dans un réservoir par une excellente ma-
chine Compound à condensation, et qui ne pouvait être mise en
place qu'après qu'on eût enlevé la première. Pendant l'interrup-
tion de marche de la machine élévatoire, c'est-à-dire pendant
quatorze jours, on a fait usage d'un pulsomëtre. Les trois en-
gins ont donc eu à faire le même travail et la vapeur était, dans
les trois cas, fournie par la même chaudière, marchant à six
atmosphères de pression.
On a trouvé que les dépenses de vapeur du pulsomëtre, de la
machine ordinaire et de la machine Compound, étaient dans le
rapport de vingt, dix et quatre.
Quoi qu'il en soit, le pulsomëtre représente une dépense insi-
gnifiante de premier établissement, 2,500 francs en moyenne
avec le puits, et ce n'est qu'à la condition d'avoir une consom-
mation d'eau continue et importante (ce qui n'a jamais lieu sur
des lignes d'intérêt local), que la dépense supplémentaire due
au mauvais rendement du pulsomëtre peut être mise en parallèle
avec rintérèt et l'amortissement d'une machine fixe avec réser-
voir, et les faux-frais qui en résultent.
Matériel roulant. — Voitures et Wagons. — Le matériel à voya-
geurs et marchandises a été construit par la Société générale des
ateliers de Saint-Denis. Il ne diffère pas sensiblement du maté-
riel habituel, et il suffira de donner les renseignements etprixsui-
48
CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
vants, qui se rapportent au chemin de Velu à Saint-Quentin et ne
présentent, pour les autres lignes, que des différences insignifiantes.
DÉSIGNATION DU MATÉRIEL
-s
m
9i
o
ie,
5
6
4
0
40
10
20
POIDS
MOIT
CHARGE
CTILS
Ecarte-
rocitt
des
B88IBUX
PRIX
de
L'oiflTÉ
lAPMIT
klloiétriq.
NATURE
des
PISIKTi
Voitures mixtes, 1* et 2* cl.
Voitures, 3* cl. à frein . .
Voitures, 3* cl. sans frein.
Fourgons à bagages. . .
Wagons couverts
Wagons tombereaux. . .
Plates-formes
6,350
6,200
6,800
6,800
5,300
4,900
4,500
u
H
5,000
10,000
10,000
10,000
3,00
3,00
3,00
2,70
•2,70
2,70
2,70
7,125
5,240
4,550
4,225
3,000
2,500
2,250
0,096
0,115
0,077
0,096
0,769
0,192
0,385
Stilmant
Id.
Freii à itii
Id.
îd.
Armature par kilomètre matériel G. V. . . 0,384.
— matériel P. V. . . 1,346.
Sur les lignes d'Achiet à Marcoing et de Boisleux à Marquion
les proportions sont les suivantes :
Matériel G. V. par kilomètre
Matériel P. V. par kilomètre
ACHIET
A UABCOING
BOISLEUX
A MARQUION
0,393
1,393
0,333
1,185
Il convient de dire d'ailleurs que Ton ne peut arriver à une
proportion kilométrique si faible en matériel P.V. que parce que la
Compagnie du Nord expédie sur ces lignes un grand nombre de
wagons qui lui sont réexpédiés chargés. L'outillage en matériel
G.Y. est largement suffisant.
Machines. — Les locomotives sont des machinos-tenders, à
six roues accouplées : les cylindres et le mécanisme de distribution
sont placés à l'extérieur.
Les machines des lignes d'Achiet à Marcoing et de Boisleux à
A VOIE NORMALE
49
Marquion ont été fournies par la Société de construction des Ba-
tig^oUes (anciennement Ernest Gouin etC^""), au prix de 30000 fr.
Tune. — Celles de Velu à Saint-Quentin ont été fournies par
la maison Cail et G^** au prix de 1 fr. 60 le kilog., soit environ
à 40000 francs Tune.
Les données principales sont les suivantes :
Longueur de la grille
Largeur de la grille
Surface de chauffe des foyers ....
Surface de chauffe des tubes ....
Surface de chauffe totale
Diamètre moyen du corps cylindrique .
Timbre de la chaudière (effectif) . . .
Diamètre des cylindres
Course des pistons
Diamètre des roues au contact . . .
Écartement des essieux extrêmes . .
Poids sur rails, machine vide . . . .
Approvisionnement complet d'eau. . .
Approvisionnement complet de charbon.
Poids de la machine à charge complète.
BATIGN'OLLES
1150 mm.
930 mm.
5 m. q. 120
67 m. q.
72 m. X\. 120
1100 mm.
8 k. 1/2
400 mm.
560 mm.
1200 mm.
2 m. 760
23 t. 1/2 à 24 t.
3 t. 600.
1 t. 400
31 t. à 31 t. 1/2.
CAIL
1150 mm.
1000 mm.
6m.q. 20
74 m.q. 20
80 m. q. 40
1 m. 150 •
8 k. 1/2
400 mm.
500 mm.
1 m. 150
2 m. 600
25 t. 1/2
3 t. 500
1 t. 000
32 t.
Les nombres de machines en service sont les suivants :
r
1
Boisleux à Marquion
Achiet à Marcoing
Velu à Saint-Quentin .....
Crécy à La Fère
LONGUEURS
«
NOMBRE
de machines
RAPPORT
kilométrique
27 kil.
33
52
22
3
5
6
2
0,115
0,156
0,116
0,090
Ateliers de réparation. — Les ateliers de Bapâume desservent
les lignes de Marquion, de Marcoing et de Vélu-Saint-Quentin ;
4
50
CHEMINS DE FER D'JNTÉRÊT LOCAL
ils sont assez puissamment outillés pour faire le levage et les
grosses réparations des machines ; cependant le remplacement
des foyers et la grosse chaudronnerie ont été faits jusqu'ici soit
aux usines de Denain, soit à celles de la Compagnie de Fives-
Lille, mais seront bientôt exécutés à Bapaume même.
Les ateliers de Bapaume sont armés pour un personnel de
douze à quinze ouvriers.
Les réparations du matériel de la ligne de Grécy-Mortiers à la
Fëre sont faites par la Compagnie du Nord, aux frais de la ligne
d'intérêt local : .
Dépenses de premier établissement au 3i décembre 1884
Construction des chemins.
Matériel et mobilier. . . .
Approvisionnements. . . .
Intérêts pendant la cons-
truction
Totaux
BOISLEUX-
MARQUION
ACHIET-
UARCOINQ
VÉLU-
SAINT-QUENTIN
CRÉCY-
LA FÈBE
2.822.558 85
278.273 35
m »
375.296 49
2.574.403 28
440.749 .
16 094 91
179.446 42
6.217 397 37
585.192 12
j» m
667.291 99
2.019 045 69
29 i 358 97
m m
133.785 10
3.476 128 69
3.210.693 61
100.334 75
7.469.883 40
143.632 36
2.447.187 76
116.532 80
Prix de revient kilométriq*
133.697 27
U.— EXPLOITATIOIV
Administration et Direction
Chacune des lignes d'intérêt local est administrée par un Conseil
d'administration distinct. Ces lignes n*ont entre elles aucun lien
au point de vue financier.
Le directeur qui les réunit, au point de vue de l'exploitation,
réside à Paris; les services d'exploitation sont à Arras et en rap-
port cfonstant avec le directeur.
A VOIK NORMALE 51
Voie et Bâtiments
Le service de la voie et des bâtiments est dirigé par un ingé-
nieur résidant à Arras, qui est en même temps chargé du service
de la traction ; un chef de bureau lui est spécialement attaché. ■
L'ingénieur est chargé des lignes de Marquion, de Marcoing et
de Velu; ses attributions s'étendent en outre, sur la ligne à voie
étroite d'Anvinà Calais, dont il sera parlé plus loin; mais le ser-
vice de la ligne de Crécy-Mortiers à La Fère est dirigé de Paris
par un ingénieur attaché au service central de la Société et qui
est en outre chargé de la petite ligne d'Enghien à Montmorency.
— Sur chacune des lignes de Marquion, Marcoing et Vélu-Saint-
Quentin est placé un piqueur comme chef du service actif de la
voie et des bâtiments, sous les ordres de l'ingénieur.
Cet agent est exclusivement un agent actif. Il n*a pas d'écri-
tures, pas de bureau; toute la comptabilité se fait au service cen-
tral, à Arras ; à cet effet, les éléments de dépenses sont envoyés
tous les deux jours à ce service, inscrits sur le rapport du chef
cantonnier.
Chaque chef-cantonnier est garde-magasin sur son parcours ; il
y a un magasin dans chaque gare.
Les brigades sont uniformément composées d'un chef-canton-
nier et trois hommes pour 8 kilomètres, ce qui correspond en
moyenne à une gare.
Tous les chefs-cantonniers sont logés, et au traitement mensuel
de 85 à 90 francs; les cantonniers ne sont pas logés et en général
n'ont pas un traitement supérieur à 70 francs ; ceux qui sont-
logés payent 7 fr. 50 par mois, ce qui représente à peu près Tin
térèt à 3 1/2 p. 100 de 2,700 francs, prix de revient d'une maison
de garde.
Le matériel de voie étant en acier ne donne pas lieu à renou-
vellement; l'entretien se fait en recherche et porte surtout sur
les traverses. Le ballast composé de calcaire crayeux sur Vélu-
Saint-Quentin, de schistes houillers sur les autres lignes, est en
général de médiocre qualité.
Les passages à niveau de première catégorie, c'est-à-dire les
passages des routes nationales et des chemins de grande commu-
52
CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
nication fréquentés, ainsi que ceux des rues des villes, bourgs et
villages, sont seuls gardés.
Les passages à niveau sont munis de contre-rails; ils sont em-
pierrés, mais rarement pavés; on trouve à cela Tavantage suivant :
tandis que les pavés sont coûteux de premier établissement et
nécessitent des ouvriers spéciaux, la pierre cassée peut être em-
ployée par tout cantonnier et est d un prix de revient bien infé-
rieur.
Les dépenses ne sont que rarement spécialisées par ligue; ce
n'est qu'en fin d'année qu'on établit une ventilation par à peu près
entre les diverses lignes, d'après la longueur kilométrique.
Les dépenses de la voie et des bâtiments se résument comme
suit, par ligne, pour 1884 :
•
Boisleux-Marauioii
DÉPENSES
totales
DÉPENSES
par kilomètre
26.990.23
32.233.37
50.379.13
17.005.65
1.038.05
1.007.29
968.82
809.79
Achiet-Marcoins'
Vélu-Saint-Quentin
Crécv-La Fère.
Traction
Ainsi qu^il a été dit déjà, le service du matériel et de la traction
est placé sous la direction de Tingénieur de la voie. Celui-ci est
secondé par un inspecteur de la traction, qui a autorité sur les
trois lignes de Marquion, Marcoing et Vélu-Saint-Quentin. L'ins-
pecteur est chargé de la comptabilité en même temps que de la
direction active du service.
Sur chacune des lignes, le service est placé sous la surveillance
d'un chef-mécanicien ou d'un chef d'atelier, qui a autorité aussi
bien sur le personnel actif, mécaniciens et chauffeurs, que sur le
personnel des ateliers (s'il y a lieu).
Le traitement fixe des mécaniciens varie de 1,200 à 1 ,800 francs
par an, celui des chauffeurs de 1,000 à 1,200 francs.
A VOIE NORMALE 53
Il y a au moins un dépôt sur chacune des lignes : Marquion,
Bapaume constituent les dépôts des deux premières lignes ; Ro-
côurt et Epéhy ceux de la ligne de Velu à Saint-Quentin. Les
roulements sont faits de telle sorte que les mécaniciens n'ont
jamais à coucher hors de leur dépôt.
«
Combustible y allocations, — On a brûlé tout d'abord des briquettes
mêlées au charbon sur les diverses lignes ; on y a renoncé en rai-
son de l'avantage de prix que procure réemploi du charbon tout
venant, qui doit être fourni avec 45 p. 100 de gaillette.
Les charbons du Pas-de-Calais coûtent 11 fr. 50 la tonne sur
wagons, à la gare d'embranchement de la mine (Lens, mines de
Courrières).
Transportée aux dépôts, la tonne de charbon revient, tout
compris, à 17 ou 19 francs.
Disons, à titre de renseignement, que le poussier de charbon
reviendrait à 6 francs la tonne, pris sur le carreau de la mine de
Liévin, mais les grilles des machines de la Société Level ne per-
mettent pas de brûler de poussier. On voit combien il importe de
disposer de foyers pouvant brûler toute espèce de charbons.
Dans le principe, les allocations de combustible, par kilomètre
parcouru, étaient variables avec le nombre de véhicules entrant
dans la composition du train.
On a jugé plus simple de donner une allocation fixe, qui com-
prend les stationnements de jour et de nuit et les manœuvres de
gare.
On accorde par kilomètre parcouru, et sans avoir 'égard au
nombre de véhicules : Tété 7 kilos 300; l'hiver 8 kilos 200.
Pour chaque allumage, les machines prêtes à partir on alloue
200 kilos, été comme hiver, ce qui correspond à 25 kilomètres
de parcours.
Si la formule prête à la critique au point de vue de l'exactitude,
elle a du moins l'avantage d'être très-simple.
La prime allouée par mille kilogrammes économisés est de
3 francs pour les mécaniciens, 1 fr. 50 pour les chauffeurs.
Toute consommation de charbon excédant les allocations ci-
dessus donne au contraire lieu à une retenue de 1 fr. 50 par tonne
à
54 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
pour les mécaniciens, et 75 centimes pour les chauffeurs. Pour
le graissage des machines, il est alloué 28 grammes par kilomètre
de parcours avec une prime d'économie de 20 centimes et une
retenue de 10 centimes par kilogramme pour le mécanicien, les
sommes afférentes au chauffeur étant moitié moindres.
Enfin, toutes les fois qu'une machine dépasse 15,000 kilomètres
de parcours sans exiger d'autres réparations que les réparations
courantes de dépôt, il est alloué une prime d'entretien qui est,
par 1,000 kilomètres de parcours en sus des 15,000 :
Pour le chef d'atelier 1 fr. 50
Pour le mécanicien 3 fr. »
Pour le chauffeur 1 fr. 50
Le chef d'atelier est magasinier; il délivre le combustible et les
matières de graissage aux mécaniciens, mentionne à son rapport
journalier les livraisons faites, et joint à l'appui les bons signés
par les mécaniciens. Ils ne peut participer aux économies réali-
sées; mais une gratification peut lui être allouée en raison de la
bonne marche du service.
Il est fait, sans avis préalable, des inventaires de matières res-
tant en magasin; on établit une balance entre les entrées et les
sorties pour contrôler l'exactitude des livraisons faites aux méca-
niciens.
Le décompte des primes est établi à la fin de chaque mois à
Taidede la consommation et des parcours kilométriques.
La somme payée* mensuellement à chaque mécanicien pour
l'ensemble des primes, s'élève en moyenne à 30 ou 40 francs.
La comptabilité de la traction est dirigée par l'inspecteur de la
traction assisté de deux comptables.
L'ensemble du personnel du service central voie et traction se
compose, outre les agents précédents, d'un chef de bureau, un
caissier, deux expéditionnaires, deux dessinateurs et un commis
d'ordre.
Il est à noter que ce personnel est en outre utilisé pour la ligne
en exploitation d'Anvin à Calais (voie étroite) et pour la prépara-
tion des projets de 300 kilomètres de lignes à voie étroite dans
la Somme.
A VOIE NORMALE
55
Les dépenses de traction ressortent à 50 centimes en 1884, par
kilomètre de train. Elles se résument ainsi, par lignes :
BoisJeux-Marquion
Achiel-Marcoing .
Vé]u-SainUQuentin
Crécy-la Fère . .
DEPENSES
TOTALES
27.741,92
66.258,48
57.861,98
18.226,99
KILOMÉTRIQUES
1.067 fr.
2.133
1.112
868
Mouvement et Trafic
Le service de l'exploitation a son siège à Ârras : il est dirigé
par un ingénieur de l'exploitation auquel est adjoint un chef de
service central, qui supplée le premier aussi bien dans le service
actif que dans le service de bureau.
La ligne de Grécy-Mortiers à la Fère, qui ne relève pas, comme
on l'a vu, du service central d' Arras, sous le rapport de la voie
et de la traction, est rattachée à ce service au point de vue de
l'exploitation. La ligne à voie étroite d'Anvin à Calais est égale-
ment exploitée par ce service.
L'exploitation d'une part, la voie et la traction d'autre part,
constituent deux services parallèles et indépendants, placés sous
l'autorité du directeur, qui réside à Paris, et confère chaque
mois avec ses chefs de service.
Le bureau de l'exploitation est des plus restreints, comme
nombre de personnel : un agent capable de faire l'intérim d'ins-
pecteur, assure le service du mouvement et des réclamations; un
employé assisté d'un surnuméraire est chargé du service général :
correspondance, ordres de service, feuilles de solde, caisse de
régie, parcours des wagons, petit matériel, etc., etc. Enfin le con-
trôle des recettes est constitué par un chef de section et trois
employés. Au total neuf agents, en y comprenant l'ingénieur de
l'exploitation.
Le service de la ligne de Boisleux à Marquion est assuré direc-
56 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
tement par le personnel des bureaux d'Arras ; le chef du contrôle
effectue les vérifications de comptabilité.
Un inspecteur est chargé du mouvement et de la comptabilité
d'Achiet à Bapaume et prolongements. Cet inspecteur assure éga-
lement les intérims avec un conducteur en réserve à Bapaume.
Enfin, le service complet de la ligne de Crécy-Mortiers à La Fera
est fait, moyennant redevance, par un inspecteur de la Compagnie
du Nord.
Au point de vue de lexploitation comme au point de vue de la
voie et de la traction, les diverses compagnies de ]\farquion,
Achiet, Yélu et La Fère ont des comptes séparés, aussi bien entre
elles que vis-à-vis de la Compagnie du Nord.
Mouvement. — On a dit que le mouvement était placé sous la
surveillance d'un apprenti-inspecteur. En fait, ce service est suivi
de très-près par Tingénieur de Texploitation et son adjoint.
Service des traiiis. — Toutes les questions importantes concer-
nant le mouvement sont soumises au directeur qui les traite avec
les préfets. Ces derniers approuvent sur le rapport des ingénieurs
du contrôle.
D'une manière générale, les marches de trains sont fort diffi-
ciles à établir sur de petites lignes transversales raccordées aux
deux extrémités avec une ligne d'intérêt général. Les correspon-
dances avec les trains des grandes lignes sont le plus souvent fort
pénibles à assurer, et si Ton ne veut pas multiplier le nombre des
trains, on court le risque de mécontenter le public par le défaut
des correspondances, et, par suite, de ne pas avoir de voyageurs.
Il n'est possible d'arriver à un résultat satisfaisant qu'à la
condition d'être parfaitement d'accord avec la grande Compagnie,
qui peut avancer ou retarder ses heures de passage aux bifurca-
tions et accorder des délais d'attente aux trains affluents de la
ligne locale.
C'est du reste de cette manière que la Compagnie du Nord traite
les lignes que nous examinons, et à la prospérité desquelles elle
est intéressée, comme on l'a vu.
Le Nord accorde aux points de jonction 5 ou 10 minutes de
A VOIE NORMALE 57
délai d'attente, et d'ailleurs Tingénieur de l'exploitation des petites
lignes punit d^une manière très-sévère les agents responsables des
correspondances manquées. Aussi le service est-il extrêmement
régulier, ce qui est une condition sine quâ non de bonne exploi-
tation.
Tous les trains sont mixtes. On en prévoit les marches de
telle manière que chaque station puisse disposer d'au moins 5 mi-
nutes de stationnement pour un train de chaque sens dans la
journée.
Il n'y a de service de nuit sur aucune des lignes. La durée du
service de certaines gares atteint 14 heures. Chacune d'elles est
desservie par 4 trains dans chaque sens, sauf la ligne de Crécy-
Mortiers à La Fère sur laquelle ne circulent que 3 trains. La
vitesse commerciale de ces trains varie de 20 à 25 kilomètres à
l'heure.
Deux des trains d'Achiet à Marcoing sont prolongés sur
Cambrai, et vice versâ^ en tronc commun sur l'ancienne ligne de
Picardie et Flandres, qui appartient aujourd'hui à la Compagnie
du Nord.
Exceptionnellement, on met en marche des trains facultatifs de
marchandises entre Achiet et Bapaume, où le mouvement atteint
parfois 120 wagons dans une journée.
Mais en général pas de trains de marchandises.
Un arrêté préfectoral en date du 15 novembre 1885 a autorisé
la réduction à un seul agent du personnel de conduite des trains,
toutes les fois que la composition de ces trains n'excède pas
12 véhicules.
La machine peut être attelée directement en tête des voitures
à voyageurs, sans interposition de fourgon, quand la composition
du train n'excède pas 5 véhicules.
L'^arrêté préfectoral n'exige pas que le matériel soit muni du
frein continu ; il est comme on voit très-libéral. Il est reproduit
en annexe.
La composition normale des trains eH matériel à voyageurs est
de deux voitures, une mixte première et seconde et une troisième,
plus un fourgon.
En outre^ les machines peuvent remorquer une charge variable
k
8é . CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
avec le profil de la ligne et le type de la machine, et qui est, géné-
ralement, pour les plus fortes machines, de 10 wagons chargés
à 10 tonnes sur les rampes ne dépassant pas 10/1000; le wagon
tarant 5 tonnes, la charge variable peut atteindre 150 tonnes.
Une voiture en charge ou un fourgon est considéré comme repré-
sentant un demi-wagon chargé à 10 tonnes, soit 7 tonnes et demie.
La limite de charge totale est donc 180 tonnes sur les rampes
de 10/1000. Elle descend à 120 tonnes sur les rampes de 15/iOOO
comprises entre Marcoing et Cambrai.
Dans le cas où les circonstances atmosphériques sont très-défa-
vorables, le chargement maximum doit être réduit. Par contre,
par suite d'une prescription singulière, les mécaniciens ne sont
jamais autorisés à prendre de surcharge, même en cas de beau
temps.
Les voitures à voyageurs ne sont chauffées Thiver que dans les
compartiments de premières et secondes. Le mode de chauffage
est très-économique, mais très-malsain. Il consiste en une chauffe-
rette à briquettes Stocker, constituées par du charbon extrait des
cornues à gaz et comprimé.
Les briquettes brûlent lentement et durent environ 7 heures ;
elles dégagent une quantité de chaleur telle qu il n'est pas pos-
sible de tenir les pieds sur les chaufferettes, et, ce qui est plus
grave, Tacide carbonique, que produit en abondance la combus-
tion, incommode les voyageurs au point qu*ils sont forcés de
laisser les fenêtres ouvertes, ce qui revient à très -peu près à
Tabsence de chatiffage.
Cet inconvénient est trop grave pour faire admettre l'avantage
de la suppression de tout le matériel et du personnel qu occa-
sionne le chauffage par bouillottes.
L'éclairage des voitures est fait par des lampes à bec plat.
Il est suffisant. Il n*y a pas plus de service spécial d'éclairage
que de service de chauffage. De même que les conducteurs de
trains placent dans les chaufferettes les briquettes allumées avant
le départ, de même ils entretiennent, garnissent et allument
les lampes des voitures. Les conducteurs et graisseurs ont leurs
bidons, chiffons et mèches enfermés dans le coffre de leurs four-
gons, et préparent les lampes à la gare extrême entre deux trains.
A VOIE NORMALE
%i
Les conducteurs entretiennent encore les voitures, nettoient les
banquettes, les cuivres, etc., etc. Le service des agents de trains
est peu chargé en général, c'est ce qui leur permet de faire ces
travaux accessoires, d'où résulte une grande économie d'exploi-
tation. Ce service fonctionne très-bien, mais il a été très-difficile
à organiser.
Les parcours des trains ont été.les suivants pour Tannée 1884 :
Boisleux à Marquion
Achiet à Marcoing
Velu à Saint-Quentin
Crccj à la Fère
PAICOmS JOUI!fALIEIS
movens
PAICOUIS AinOTELS
156 kilom.
326 —
416 —
132
62.348 kilom.
126.306
i:i2.612
48.180
1 Total '
389.446 kiiom.
1 _ -
1
1
Service des gares. — Toutes les stations sont outillées pour
effectuer un croisement de trains, c'est-à-dire pourvues d'une voie^
d'évitement; mais les changements de croisement sont très-rares.
Le chef de la voie unique est Tinspecteur ou le chef de la gare
la plus importante, celle où se trouve la machine de réserve.
En cas de détresse, ce qui est exceptionnel, le chef de la voie
unique fait le secours.
Toutes les stations sont pourvues du télégraphe Bréguet, mais
on ne fait usage du télégraphe, au point de vue du mouvement,
que pour les trains facultatifs ou de matériaux, et en cas de chan-
gement de croisement. Ou ne demande pas la voie pour les trains
réguliers.
Chaque matin on doit demander par le fil omnibus Theure à la
gare de réserve, et chaque soir lui adresser l'heure de clôture du
service.
Les règlements se rapprochent des règlements de la Compagnie
du Nord, mais sont très-simplifiés. La répartition du matériel est
assurée sur chaque ligne par Tagent spécial de la voie unique.
60 CHEMINS DE FER b'fNTÉRÊT LOCAL
auquel chaque chef de station adresse en fin de journée un état
relatant le restant en gare, les disponibles et besoins; tous les
trains peuvent concourir à la répartition. Lorsque le matériel fait
défaut, Tagent. spécial demande du matériel Nord à la gare de
transit ; c'est d'ailleurs là un cas fort rare, attendu que les lignes
locales, recevant du Nord plus qu'elles ne lui réexpédient, ont tou-^
jours du matériel Nord à disposition.
Le personnel des stations est très-réduit, et comporte rarement
plus d'un homme d'équipe adjoint au chef de station. Plusieurs
stations ou haltes sont gérées exclusivement par des femmes, qui
font un excellent service ; elles délivrent les billets, font le service
du télégraphe, des bagages, mais sont dispensées des écritures
comptables. Elle reçoivent 5, 10, 15 ou 20 fr. par mois pour ces
travaux. On reviendra plus loin sur l'organisation particulière-
ment intéressante du service des haltes sur ces petites lignes.
Les femmes sont encore employées dans les stations de croi-
sement. La femme du chef de station fait le télégraphe et distri-
bue les billets pendant que son mari est occupé au service des
trains. Elle a un traitement de lOfr. par mois.
Pour Tadjonction ou le retrait des wagons au passage des
trains, aussi bien que pour la formation au départ et la déforma-
tion à l'arrivée, le personnel des stations, toujours extrêmement
restreint, ne prête son concours qu'en ce qui concerne la direction
à donner aux manœuvres, ou pour faire les aiguilles. Les agents
du train : conducteur, graisseur, mécanicien, et le chauffeur
assurent les manœuvres, qui sont d'ailleurs facilitées par l'excel-
lente disposition des gares.
Dans les stations gérées par des femmes, ou les haltes à voie de
garage, les aiguilles sont maintenues dans la position normale
par une goupille cadenassée ; la clef du cadenas reste entre les
mains de la garde qui doit visiter ses aiguilles avant et après le
passage des trains. Quand un train doit manœuvrer, la clef du
cadenas est remise au conducteur, qui remplit les fonctions de chef
de station pendant les manœuvres. Il est responsable de la ma-
nœuvre des aiguilles, des disques, des taquets d'arrêt, de la fer-
meture des portes, etc.
Le trafic de ces lignes industrielles et agricoles est surtout un
A VOIE NORMALE 61
trafic de grosses marchandises, par wagons complets : houille^
betteraves, sucres, mélasses, acides, noir animal, grains, paille,
lin en tiges, huiles, phosphates et engrais, matériaux de cons-
truction, briques, sable, pierre cassée, etc., etc.
La proportion des marchandises par wagons complets repré-
sente 80 à 85 p. 100.
Tous les trains transportent des marchandises, mais ils ne ma-
nœuvrent pas dans toutes les stations où il y aurait à prendre ou
à laisser, en raison de la nécessité des correspondances aux points
de jonction ; mais on fait en sorte, en traçant les marches, que
chaque station dispose par jour d'un arrêt de cinq minutes au
moins. Cela ne permettrait généralement pas au même train de
prendre un wagon à une gare intermédiaire pour le laisser à une
autre gare intermédiaire située plus loin ; mais on n'a guère à s'oc-
cuper de ce cas, car il faut remarquer que les wagons complets
sont presque exclusivement en provenance ou en destination du
réseau du Nord.
Le service des marchandises de détail est fait d'une manière
toute différente : ces marchandises sont transportées sans le
moindre retard; la marchandise remise le matin par Texpéditeur
est enlevée le matin. Les petits colis de détail sont pris ou laissés
au passage du train.
On procède autrement pour les marchandises encombrantes
ou d'un poids assez important pour que la manutention au passage
nécessite un délai supérieur au stationnement réglementaire. Un
wagon de détail est aftecté à ces marchandises; il est mis au
premier train du matin qui le laisse à la première station expédi-
trice ou destinataire de fûts ou autres marchandises lourdes; le
train suivant reprend le wagon chargé ou déchargé, qui est laissé
à la station suivante et ainsi de suite.
La disposition excellente de la halle et du quai à marchandises
accolés au bâtiment des voyageurs permet d'effectuer très-rapi-
dement le chargement ou le déchargement au passage. Elle
présente, sous ce rapport, un grand bénéfice de temps sur la
disposition habituelle d'un bâtiment distinct pour le service des
marchandises.
Là n'est pas le seul avantage : outre l'économie réalisée dans
Ô2 CHEMINS DE FER D'JNTÉRÈT LOCAL
le premier établissement, ce type de station permet d'éviter les
allées et venues et détours du public^ pour se rendre du bureau
de la gare à la halle aux marchandises ; le chef de la station ou
ses agents ne perdent pas de temps à aller du bâtiment des
voyageurs au quai de chargement; manœuvres de wagons réduites,
vols de colis rendus impossibles; tels sont les nombreux avan-
tages de ces dispositions qui sont excellemment appropriées aux
stations courantes des lignes secondaires.
Lorsque les chefs de station ont à faire des manœuvres de
wagons dans l'intervalle des trains, ils font le plus souvent appel
au concours gratuit du public, paysans ou charretiers venus à la
gare pour des expéditions ou livraisons, et qui ne marchandent
que bien rarement leur concours.
Service en gare de jonction, — Ce service diffère suivant qu'il
s'agit du point de jonction entre deux lignes exploitées par la
Société Level ou de la bifurcation d'une de ces lignes sur la Com-
pagnie du Nord.
Les gares de bifurcation sur le Nord appartiennent à cette Com-
pagnie; le service de composition et de décomposition des trains
de manutention et transbordement est assuré par le personnel
d'équipe de la Compagnie du Nord.
A Vélu-Bertincourt, au contraire, gare de bifurcation des lignes
d'Achiet à Marcoing et de Velu à Saint-Quentin, ce service est fait
par les agents des trains, pendant les stationnements. Un ordre
de service prévoit même l'emploi des chauffeurs et mécaniciens
soit aux manutentions sur quai, soit aux transbordements ; d'où il
résulte que les gares de bifurcation n'ont pas plus de personnel
que les stations courantes, contrairement à la pratique habituelle.
Les agents qui dirigent l'exploitation font très-judicieusement
observer ]que si les agents des trains n'étaient pas ainsi utilisés
pendant les stationnements prolongés aux gares terminus, soit au
nettoyage des voitures et des lampes, soit aux manutentions et
transbordements,, ou bien ils se croiseraient les bras, ou bien ils
iraient au cabaret.
A la bifurcation de Velu, passent sans transbordement d'une
ligne sur Tautre tous les wagons complets et les wagons de détail
A VOIE NORMALE 63
chargés à 1,500 kilogrammes et au-dessus; le reste donne lieu à
transbordement.
Ne passent sur le Nord, sans transbordement, que les wagons
complets.
Pour assurer dans ses gares de bifurcation le service des Corn*
pagnies dlntérèt local, la compagnie du Nord demande à ces Com-
pagnies des rétributions établies sans règle fixe : c'est ainsi que
pour les gares de Boisleux, Achiet, Marcoing, Grécy-Mortiers, la
compagnie du Nord ne réclame aucun loyer et répartit les dépenses
d'exploitation entre elle et les Compagnies locales au prorata du
nombre de trains de chaque administration qui passent dans
chaque gare, qui y sont reçus ou qui en sont expédiés. Pour Ver-
signy-la-Fëre, la part annuelle de la Compagnie locale est un for-
fait de 1,200 francs, duquel il y a lieu de déduire les dépenses de
manœuvres qui auront pu être faites dans Tannée par les machines
delà Compagnie locale.
Pour Saint-Quentin, forfait de 15,000 francs, sans déduction
des manœuvres.
Pour Epéby et Roisel, pas de participation au premier établisse-
ment; frais d'exploitation répartis au prorata du nombre de voya-
geurs et de tonnes manutentionnées.
En somme, les rapports avec la Compagnie du Nord sont
excellents.
»
Service commercial. — Le service commercial est dirigé
comme celui du mouvement par l'ingénieur de l'exploitation et le
chef du service central qui surveillent l'exécution de ce service
dans ses moindres détails.
Les principaux éléments du trafic se rattachent, comme il a
été dit, à la production agricole et sucriëre ; cette dernière a un
intérêt tout particulier : on compte en effet qu'un sac de sucre
fabriqué a produit cinq fois son prix de transport; cette formule
est loin d'être exagérée, car avant de transporter le sac de sucre,
il a fallu amener à l'usine la houille, les betteraves, les acides et
le noir animal ; de plus, l'agriculteur qui produit les betteraves a
eu besoin d'engrais, et enfin après la fabrication, il reste encore à
exploiter les mélasses.
64 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
La période active du trafic correspond à la période de fabrica-
tion du sucre, c'est-à-dire de Septembre à Mars.
Les voyageurs sont, comme partout, un peu plus nombreux
aux vacances ; leur mouvement fléchit en Juin et Juillet, pendant
les travaux des champs. Le reste du temps, les recettes-voyageurs
sont à peu près uniformes. Les marchés donnent lieu, dans le
nord de la France, à un mouvement de voyageurs plus accentué
que dans les autres régions.
Les tarifs ne présentent aucun caractère particulier. Comme
sur toutes les lignes de faible parcours, ils sont à base élevée.
Aussi les tarifs généraux donnent-ils lieu à la plus large part des
recettes, contrairement à ce qui a lieu sur les grands réseaux. Les
tarifs spéciaux sont très-peu nombreux. Les réductions des billets
d'aller et retour sont les mêmes que sur le réseau du Nord, c'est-
à-dire, 25 p. 100 pour les première et seconde classes, 15 p. 100
pour la troisième.
Le trafic est partagé avec la Compagnie du Nord suivant la règle
de la plus courte distance, sans réserve afférente à la transmission
ou aux déclivités.
La plupart des tarifs spéciaux créés par les Compagnies d'inté-
rêt local ont pour but de rendre à leurs lignes les transports qui
leur sont dus en vertu de la règle de la plus courte distance, et
que les tarifs réduits du Nord auraient pour effet de leur enlever.
Les relations avec le public sont partout très-bonnes. Cela tient
au bon service fait par la Société d'exploitation, à la libé-
ralité et à la rapidité avec lesquelles elle tranche toutes les
réclamations, pour lesquelles toute latitude est laissée au service
d'Arras, qui règle tout différend dans les vingt-quatre heures,
suivant la méthode américaine dont le directeur aime à s'inspirer;
d'autre part, les actionnaires sont répartis dans la région, ils sont
intéressés à la bonne marche du service et facilitent par leur
autorité la solution des difficultés qui peuvent naître.
Service des haltes. — Les Compagnies locales ont été amenées
à ouvrir au service un assez grand nombre de haltes qui sont
exploitées d'une manière très-économique.
Plusieurs de ces haltes sont constituées par un simple abri en
A VOIK NORMALK 6H
bois où se rond, à Theure des trains, la femme chargée du ser-
vice : ces haltes ne sont ouvertes qu aux voyageurs sans hagages.
Mais la plupart des haltes sont ouvertes aux voyageurs avec
bagages et au service des messageries en port dû. Quelques-
unes d'entre elles même, pourvues de garages, sont ouvertes au
service des marchandises par wagons complets.
Les haltes de ces deux dernières catégories disposent, pour le
service du public, de la pièce de devant d'une maison de chef
cantonnier.
Les femmes font le service moyennant une rétribution men-
suelle variant entre 5 francs pour les haltes à voyageurs et
20 francs pour les autres.
Le point le plus intéressant dans l'organisation du service de
toutes ces haltes, c'est que les femmes n'ont pas à s'occuper delà
comptabilité, et que cette comptabilité est établie dans une gare
voisine de la façon suivante :
Voyageurs. — Les haltes délivrent des billets dits à jarretière
munis d'une souche et d'un petit talon ; le nom de la halte qui
délivre le billet est imprimé en tête du billet et de la souche, ces
deux pièces portent successivement les noms de toutes les stations
et haltes de la ligne ; la préposée à la halte barre sur la souche et
le billet à l'aide d'un crayon lithographique la destination deman-
dée par le voyageur.
Le billet et sa souche sont numérotés, de même que le talon, et
sont frappés, lors de la délivrance, du composteur à date.
Tous les jours, la garde-halte envoie à la station chargée de sa
comptabilité, son versement qu'elle détaille sur un livre de caisse
qui accompagne la caisse renfermant les espèces; le livre est ren-
voyé avec la caisse après émargement du chef de gare. Tous les
huit jours au moins, le chef de gare se rend à la halte, contrôle
les versements avec les souches des billets et met son visa au dos
delà souche du dernier billet délivré après l'avoir frappé du com-
posteur à date.
Le chef de gare verse chaque jour les produits de la halte avec
ceux de sa gare en les distinguant sous la rubrique : a Produits de
la halte de... »
66 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
La comptabilité des stations se faisant par mois et non par
dizaine\ un bordereau spécial mensuel est établi pour la halte et le
chef de gare y joint toutes les souches qui sont rapprochées par le
contrôle, des billets délivrés.
Le relevé distinct des bagages est établi de même, et le chef
de gare tient également un relevé statistique pour la halte : les
rectifications sont à la charge de ce chef de gare.
Les billets recueillis à l'arrivée dans les haltes sont envoyés
chaque jour à la station chargée de la comptabilité qui établit un
état des billets recueillis pour elle et pour la halte, état qui est
contrôlé trës-sérieuscment. Du reste, si les halles délivrent des
billets à jarretière pour tous les points de la ligne, les stations
délivrent pour toutes les haltes des billots Edmundson, de façon
à réduire au strict minimum la délivrance des billets à souche.
Messageries. — Les haltes n'acceptent les messageries qu en
port dû et ne reçoivent pas de marchandises grevées de rembour-
sements.
Lorsque les femmes garde-haltes sont instruites, les écritures
sont entièrement faites par elles ; elles tiennent le livre d'expédi-
tion, dont le chef de la gare comptable fait le relevé. Il faut
remarquer, du reste, que les haltes ouvertes aux messageries ont
rarement à assurer plus de quatre à cinq expéditions par semaine.
Dans les haltes dont les femmes sont peu exercées, Texpédition
est faite par la station comptable à laquelle la garde-halte envoie la
note de remise de l'expéditeur et le colis. A l'arrivée, le conduc-
teur ne remet à la halte que la Icltre de voiture et le colis; la
feuille de route est remise à la station qui l'inscrit sur son livre
d'arrivages. La halte encaisse le transport et envoie l'argent avec
les recettes des voyageurs. En cas de réclamation, le nécessaire
est fait par la station. Il y a, bien entendu, un registre de sortie
à la halte.
Les haltes font le service de colis postaux (intérieur de la
France), la station tient les livres.
Dans les haltes qui sont ouvertes aux wagons complets, leser-
* La comptabilité mensuelle permet de réaliser une notable économie de temps et
d'imprimés.
A VOIE NORMALE
67
vice se fait exactement comme pour la messagerie; la garde-halte y
peut suffire, car les manœuvres sont faites par les agents des trains.
Le contrôle des recettes est fait à Arras. Quant à la statistique,
au lieu de la confier à un agent spécial, on la fait faire par un
chef de station peu occupé et à qui on donne à cet effet une in-
demnité de 300 frsuics par an.
Les recettes sont versées chaque jour à la Compagnie du Nord;
une feuille de route accompagne la caisse à finances. Le Nord est le
banquier des compagnies locales, et tient pour elles un compte
courant. Pour les payements à faire au personnel, aux fournis-
seurs, etc., etc., c'est au caissier général du Nord qu'on adresse
le bon signé du directeur des compagnies locales ; les sommes
sont apportées à Arras par un payeur.
Dépenses. — Les dépenses de l'exploitation sont pour 1884 :
DEPENSES TOTALES
Boisleux-Marquion
Achiet-Marcoing .
Vélu-Saint-Quentin
Crécy-La Fère. . .
33.506 50
o4.019 18
58.939 81
32.264 81
KILOMETRIQUES
1.288
1.707
1.133
1.536
Ces dépenses correspondent à un prix de revient moyen de
47 centimes par kilomètre de train.
Service médical
Les médecins ne sont généralement pas payés : la carte de
circulation sur le réseau est considérée comme un payement.
Leurs sections sont faibles.
Tout agent malade jouit de sa solde entière pendant quinze
jours; il est à demi-solde après cette période. Par exception, les
très-bons agents peuvent être payés sans retenue pendant toute
la durée de leur maladie.
Tout agent blessé en service a droit à la solde entière pendant
toute la durée du traitement.
68
CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Les médicaments sont gratuits sur toutes les lignes, sauf celle
de Yélu à Saint-Quentin.
Il n'existe malheureusement pas de caisse de retraite ; tnais
les Compagnies accordent parfois des secours.
Des gratifications ou augmentations de traitement peuvent être
données en fin d'année par les conseils d'administration sur la
proposition du directeur.
Résultats comparatifs des recettes et dépenses
Pour les cinq années 1881, 1882, 1883, 1884, 1885.
U
'r.
<
1881
1882
1883
188i
1885
1881
1882
1883
1884
1885
1881
1882
1883
188i
1885
LONGUEUR
moyenne
exploitée
RÉSULTATS TOTAUX
Recettes
totales
Dépenses
Produit
net
total
RÉSULTATS PAR KILOM.
bépeates
de
l'exploi
tatioD
Predoit
let
Boisleuz-Marquion
26 k.
26
26
26
26
32 k.
32
32
32
32
118.065 44
137.747 .
148.982 22
139. 8i7 71
118.028 96
109.218 02
99.062 12
107.716 36
104 590 85
9i.l58 62
8.817 42
38.684 88
41.265 86
35.256 86
23.870 34
4. 541
5.033
5 606
4.762
4 180
4.010
3 657
3.978
4.023
3.621
Achiet-Bapaume et Marcoing
284.902 99
285. 3n 10
311.542 93
289.767 69
267.961 44
180.899 95
181.095 55
193.037 41
181.607 72
163.115 23
104 003 04
104.218 55
118.505 52
108.159 97
104.846 21
8.886
8.037
8.620
8.845
8.108
4.686
5.067
5.313
5.675
5.097
531
1.376
1.628
739
559
4.200
2 970
3.307
3 170
3.011
1881
52 k.
292.996 39
1882
52
298.479 62
1883
52
322.050 95
1884
52
324.938 94
1885
52
254.252 90
Vélu-Bertincoort à Saint-Quentin
256.182 061
267 693 32
249.256 42
234.701 36
214 474 52
Grécy-Mortiers à La Fère
36.814 33
5.568
4.472
1.096
30.786 30
5.789
4 420
1.369
72 794 53
5.803
4.156
1.647
90.237 58
5.736
4.513
1 223
39.778 38
4.696
4.205
491
21 k.
21
21
21
21
118.477 85
123.917 .
147.655 28
148.674 85
167.959 27
101.647 41
89.358 60
85.898 16
84.103 68
89.069 39
16.830 44
34.558 40
61.757 12
64.571 17
78.089 88
5.572
5.797
7.031
7.080
7.998
4.448
3.727
3.513
4.004
4 241
1 . 124
2.070
3.518
3.076
3.757
RAPPORT
p. 100,
des
dépenses
aux
recettes
88
73
71
84
86
50
63
62
64
62
80
76
72
79
89
80
64
50
56
53
A VOIE NORMALE 69
La colonne « Recettes totales d comprend à la fois les recettes
de l'exploitation et les bénéfices provenant de fonds disponibles,
comptes courants, etc. Les recettes kilométriques tiennent seule-
ment compte des recettes de l'exploitation.
CHAPITRE VI
^
SAINT-QUENTIN A GUISE (AISNE)
I. — établisseme:vt dl* rHEai:v
La ligne de Saint-Quentin à Guise relie la ville de Saint-
Quentin et la vallée de la Somme où se trouve cette ville indus-
trieuse et commerçante, avec la vallée de TOise supérieure, où
Ton rencontre, en dehors de la ville de Guise, beaucoup de gros
villages et d'usines dont les relations avec Saint-Quentin sont
extrêmement suivies.
Guise possède, avec 5,000 habitants, des filatures, deux usines à
sucre et de plus une grande fabrique de poêles en fonte moulée
'.Godin) dont les expéditions s'élèvent à 20 ou 25 tonnes par jour.
— Origny a aussi des filatures, une fabrique d'huile et une fa-
brique de sucre produisant annuellement 5,000 tonnes de sucre
avec une population de près de 4,000 habitants. — Ribemont-
Lucy (3,000 habitants), fabrique de sucre, filatures et usine de
produits chimiques etc., etc. Le pays est, en outre, d^une richesse
agricole toute particulière.
De telles conditions assuraient à l'avance le succès de la ligne :
aussi les études furent-elles entreprises dèsTannée 1868 ; la conces-
sion date de 1869 et l'ouverture à l'exploitation a eu lieu en 1874.
Les actionnaires sont des industriels, propriétaires et capita-
listes de la région; il en est de même des obligataires.
A VOIE NORMALE 71
Les capitaux engagés au 31 décembre 1884 se répartissent en :
Subvention de TEtat, du département,
des communes. • 1.903.000 fr.
Capital-actions 1.700.000
Capital-obligations 2.337.000
Ensemble 5.930.000 Ir.
Description delà ligne. — Au sortir de Saint-Quentin, le Iracé
franchit le faite dltancourt, qui sépare la vallée de l'Oise et la
vallée de la Somme : ce faite est à 50 mètres d'altitude au-dessus
de la vallée de l'Oise, 40 mètres au-dessus de Saint-Quentin. On
le gravit par des rampes do 15/1000, tandis que l'ensemble de la
ligne, dans la vallée de l'Oise, ne présente que de très-courtes dé-
clivités supérieures à 5/1000.
La ligne de Guise se trouve, par la présence des rampes d'Itan-
court, dans des conditions d'exploitation défectueuses au point de
vue de l'utilisation des charges. Cet inconvénient ne se fait sentir
gravement qu'aux moments d'activité du trafic ; en temps normal,
le nombre des trains réguliers est plus que suffisant pour permettre
d'enlever les wagons de petite vitesse.
La ligne traverse trois fois l'Oise et une fois le canal; elle suit
sur la plus grande partie de son parcours la rive gauche de l'Oise,
sur laquelle se trouvent Ribemont, Origny et Guise. La ligne est
constamment au pied du coteau. Elle a un développement total de
40 kilomètres.
Les stations sont très-rapprochées des localités.
Les courbes sont très-multipliées : elles ont au minimum
300 mètres de rayon.
Il n'y a pas de clôtures pour défendre la ligne, sauf aux abords
des passages à niveau et jusqu'à 23 mètres de chaque côté, et
autour des stations.
Les talus en remblai sont plantés d'osiers, dont la coupe est
faite chaque année par des vanniers du Nord, moyennant une re-
devance de 2,500 francs.
Ne sont gardés que les passages à niveau situés sur les grandes
72 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
voies, soit une douzaine sur un total de cinquante. Les gardes-
barrières sont logées et ont un salaire de 30 francs par mois, ce
qui parait excessif.
Le rail était primitivement en fer, de 33 kilos le mètre cou-
rant ; on renouvelle annuellement un kilomètre en raîls de 30 kilos
en acier, les rails de fer sortis de la voie servent à Tentrelien des
voies non renouvelées. Le rail est à patin; il a sept mètres de lon-
gueur et repose sur huit traverses. C'est le même plan de pose
que pour les lignes d'intérêt local du Pas-de-Calais, précédemment
décrites ; c'est, du reste, le plan de pose du Nord.
Le type des stations, représenté (pi. IV, fig. 8) par la station
de Mézières-sur-Oise, est très-défectueux.
Toutes les stations disposent d'une voie d'évitement, ce qui
est nécessaire sur une ligne où circulent cinq trains par jour dans
chaque sens; la voie d^évitement permet de recevoir des trains de
20 véhicules. Mais les voies des marchandises sont en cul-de-sac,
d'où résulte que si les trains qui entrent en gare en prenant
l'aiguille des marchandises par la pointe ont à laisser des wagons
à la gare, ces wagons doivent être abandonnés par le train sur la
voie principale ou la voie d'évitement; ils sont ensuite repris par
la machine du train suivant de sens inverse, qui les conduit sous
halle ou sur la voie de débord. La même complication se présente
lorsqu'il s'agit d'un wagon à prendre.
Dans les stations de croisement ou qui ont un trafic suffisam-
ment actif pour qu'il ne soit pas possible de recourir à ce procédé
peu expéditif, il faut ou avoir des hommes pour pousser àTépaule,
ou disposer d'un cheval.
Le bâtiment des voyageurs est beaucoup trop vaste, en général;
néanmoins dans le principe, aucun chef de station n'était logé. On
a dû dans la suite construire des annexes pour leur logement.
La gare de Saint-Quentin est commune avec la Compagnie du
Nord.
Les stations sont très-rapprochées : il n'y en a pas moins de
onze, en dehors des deux gares extrêmes, pour un parcours total
inférieur à 40 kilomètres, ce qui donne un arrêt par trois kilo-
mètres.
A VOIE iNORMALE 73
Elles sont couvertes de chaque côté par un signal à distance
placé à 500 mètres.
L'alimentation en eau se fait à Saint-Quentin où Teau est four-
nie par la compagnie du Nord, à Origny et à Guise. Sur ces deux
derniers points on a installé dès le principe des pompes d'alimen-
tation avec réservoirs ; la pompe de Guise fonctionnant mal, on
a dû y suppléer par un pulsomètre qui est actionné par la locomo-
tive.
Matériel roulant. — Voitures et wagons. — Le matériel à
voyageurs se compose de quinze voitures, dont six mixtes à deux
étages, une mixte ordinaire et huit troisièmes. Ces troisièmes ont
0 m. 45 de largeur de plus que les caisses ordinaires; aussi en
a-t-on profité pour mettre six voyageurs par banquette, ce qui
donne soixante voyageurs par voiture.
Ce matériel est défectueux et incommode : dans les troisièmes
les voyageurs sont trop serrés; les voitures à étage, admissibles
dans la banlieue des grandes villes^ pour des parcours de quelques
kilomètres, sont généralement peu en faveur, eu égard au peu
de hauteur des compartiments et à l'obligation de monter; ces
voitures ont de plus des roues de faible diamètre et un poids mort
qui en rend la traction pénible, et elles supportent mal des vi-
tesses supérieures à 40 kilomètres à Theure* ; au point de vue de la
charge, les mécaniciens préfèrent généralement avoir dans un
train deux voitures ordinaires plutôt qu'une seule à étage : le ren-
dement est, du reste, bien meilleur.
Le prix de revient moyen du matériel à voyageurs s'est élevé à
8,000 fr., chiffre très-considérable: les troisièmes n'ont coûté que
4,500 francs la pièce.
Les fourgons sont de deux systèmes ; il existait au début trois
fourgons comprenant un compartiment pour voyageurs ou pour
le service de la poste. Plus tard on a été forcé, par suite de l'in-
suffisance de ce matériel, de munir du frein à vis et de transformer
en fourgons quatre wagons couverts.
* Les voitures à étage présentent, en outre, une grande résistance à l'air, ce qui se
traduit par une dépense supplémentaire de charbon d'autant plus grande que la vitesse
du train est elle-même plus considérable
/
74 CHKMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Le matériel de petite vitesse est composé de :
Wagons couverts 27
Wagons-tombereaux en bois 50
d« . en tôle 10
Plates-formes 30
Bergeries 2
Total 119
On a jugé inutile de munir le matériel de petite vitesse de freins
à vis, attendu que ce matériel entre toujours dans la composition
des trains de voyageurs, peu chargés sur les rampes dltancourt,
et que par suite, les freins du tender et des fourgons peuvent tou*
jours suffire ; mais le frein abattu existe sur tous les wagons, ce
qui est une excellente précaution sur un chemin de fer où presque
toutes les manœuvres sont faites au lancé, à la machine.
Le matériel de grande et de petite vitesse sort des 'ateliers
Bonnefond à Texception de dix vieux wagons-tombereaux, achetés
à la Compagnie allemande de Berg et Marche au prix de 1,200 fr.
la pièce.
L'armature par kilomètre en matériel G. V. est de 0.55.
— — P. V. est de 3.
La Compagnie n'emprunte au Nord que peu de matériel, bien
que son trafic P. V. soit assez actif. Son matériel est donc suffi-
sant.
Locomotives. — Les six locomotives de la ligne appartiennent
à deux types différents :
3 sont à 6 roues couplées et sont en réalité des machines à
marchandises.
3 sont des machines de vitesse et ont 4 roues couplées.
Les 6 machines sont d'ailleurs des machines-tenders. Elles ont
été construites par Tusine de Graffenstaden au prix moyen de
50,000 fr. la pièce.
■
Elles servent indifféremment à tous les trains, aussi bien à ceux
qui font plus spécialement les marchandises qu'aux trains de voya-
A VOIE NORMALE
75
geurs;cequi a pour résultat de détraquer très-rapidement les ma-
chines à 3 essieux couplés, qui sont impropres à un service de vitesse.
Les conditions des locomotives des deux types sont les sui-
vantes :
DEUX ESSIEUX
TROIS ESSIEUX •
Surface de la grille . •.
COUPLÉS
COUPLÉS
1 m. 200
i m. lo64
Surface de chauffe totale
87 m. 040
77 m. 132
Timbre de U chaudière
0 kil.
0 kil.
Diamètre des cylindres
0 m. 420
0 m. 400
Course dés pistons
0 m. 600
0 m. 500
Diamètre des roues motrices au con-
tact
1 m. 500
1 m. 200
Poids de la machine à vide ....
26.000 kil.
23.500 kil.
Approvisionnement d'eau dans les
lenders
3.000 lil.
3.000 lit.
Approvisionnement d'eau dans la
chaudière jusqu'à iOcts. sur le foyer
3.000 lil.
2.400 lit.
Approvisionnement de combustible.
1.200 kil.
1.200 kil.
Poids de la machine à charge com-
plète
33.200 kil.
30.100 kil.
Charge sous les roues couplées. . .
23.000 kil.
30.100 kil.
Longueur totale de la machine
entre tampons
8 m. 73
8 m . 30
Empattement total
3 ni. 30
3 m.
On voit d'après l'empattement que, les plaques tournantes or-
dinaires ayant 3 m. 80 de diamètre, il n'est pas nécessaire d'avoir
de plaques spéciales pour les locomotives^ que Ton tourne comme
un véhicule ordinaire.
Ateliers de réparation. — Les ateliers de réparation sont placés
à Saint-Quentin. On y dispose d'une raboteuse, une perceuse, un
tour, trois forges, une scie circulaire et une scie à ruban ; le tout
est actionné par une machine à vapeur de la force de quatre che-
vaux; on peut par suite faire les réparations courantes; on a
même remplacé une plaque tubulaire d'avant. Mais en général, les
grosses réparations, le tournage des roues et le remplacement des
76 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
bandages sont confiés à la Compagnie du Nord qui les exécute
dans ses ateliers de Tergnier.
Le personnel des ateliers s'élève à treize agents ; ils font non
seulement les réparations du matériel roulant, mais aussi celles
du matériel des voies, et même Tentretien des bâtiments des gares.
Dépenses de premier établissement au 31 décembre 1884
Construction du chemin 4.659.605 61
Matériel et mobilier 036.379 80
Intérêts pendant la construction 376.256 74
Totaux 5.972.131 15
Prix de revient kilométrique 149.300
Le prix de revient kilométrique a été majoré d'environ 10,000 fr.
par le prix élevé des fers et du matériel au moment de la cons-
truction du chemin.
11.- expl01tati0:\
Admi.mstration et Service central
Le conseil d'administration de la Compagnie se compose do onze
membres, qui se réunissent une fois par mois à Saint-Quen-
tin, et arrêtent le service des trains, approuvent les tarifs nou-
veaux, les marchés et conventions particulières.
Le service courant est dirigé par un comité de direction com-
posé de trois membres. L'un d'eux est en permanence au service
central et fait fonctions de directeur.
Le service actif est .placé sous la surveillance d'un inspecteur
qui dirige à la fois les services de la voie, de la traction et de
l'exploitation.
Voie et Bâtiments
Un chef de travaux est adjoint à Tinspecteur pour le service
de la voie et pour la traction; un piqueur, onze équipes de can-
tonniers, dont huit à trois agents et trois à quatre agents pour
I
A VOIE NORMALE 77
les parties de voie plus instables, tel est le personnel de la voie,
personnel assez nombreux et réparti sans raison plausible, en can-
tons qui paraissent trop courts (moins de 4 kilomètres). Cinq chefs
cantonniers sont logés, leurs femmes sont garde-barrières : les
chefs cantonniers logés n'ont que 70 francs par mois au lieu de
90 francs que touchent les autres. Les cantonniers ont de 80 à
85 francs et le piqueur 150 francs par mois.
Les gros travaux en dehors de Tentretien courant consistent,
ainsi qu'il a été dit plus haut, dans le remplacement annuel d'un
kilomètre de rails de fer par des rails d'acier.
L'entretien des ouvrages et des bâtiments est fait, en ce qui
concerne les maçonneries, par un cantonnier-maçon qui exécute
ces travaux pendant Tété ; pour la charpente, menuiserie, pein-
ture, etc., on a recours aux ateliers.
Les dépenses annuelles de la voie, entretien et réfection se
répartissent ainsi :
Personnel des cantonniers poseurs 26.315 40
— gardes-barrières 4.595 50
Travaux à rheure et à la tâche 2.493 55
Objets et fournitures diverses i4.557 85
Total 47.960 30
Soit par kilomètre i.l99
Traction
Ce service est dirigé, sous les ordres de Tinspecteur et de son
adjoint, par un chef de dépôt qui est en même temps chef d'atelier.
Le personnel de conduite se compose de trois mécaniciens à
135 francs par mois et trois chauffeurs à 90 et 100 francs. Deux
des chauffeurs sont capables de conduire une machine et font les
remplacements pendant les repos des mécaniciens, qui disposent
de deux jours par mois.
Le personnel de la traction, non compris celui des ateliers, est
complété par un garde*magasin qui tient la comptabilité du
dépôt, personnel et magasin, et fait la distribution des matières,
combustible, etc.
78 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Combustible^ allocations. — Le combustible se compose pour
1/3 de briquettes de Charleroi, à 12 fr. 50 à Tusine, 19 fr. 94 rendu
à Saint-Quentin, pour 2/3 de tout-venant de Béthume, payé
11 fr. 50 sur kt carreau de la mine et 18 fr. 07 à Saint-Quentin.
Les briquettes servent surtout à Tallumage; on s'en sert aussi
pour les mélanger avec le tout-venant quand il devient trop fin ;
on accepte pour le tout-venant 35 p. 100 de gros et 65 p. 100 de
«
menu ; les foyers ne sont pas disposés pour brûler du pienu
seul.
Les briquettes ne doivent pas donner plus de 5 1/2 p. 100 de
cendres.
Les allocations sont uniformément de 9 kilos par kilomètre,
quelle que soit la machine, ce qui laisse un avantage injustifié
aux mécaniciens qui conduisent les machines à deux essieux
couplés.
De plus, on alloue 200 kilos de charbon pour Tallumage lorsque
le parcours de la journée n'excède pas 120 kilomètres; si le par-
cours est supérieur à 120 kilomètres, pas d'allocation d'allumage,
On donne 8 kilogrammes par heure de réserve.
L'allocation pour graissage est de 3 kilog. 500 d'huile par
10 myriamètres; l'huile revient à 1 fr. 10 le kilogramme.
La prime accordée par tonne de charbon économisé est de
i francs. Le charbon est distribué à chaque mécanicien par
10 tonnes à la fois. Chacun d^eux dispose sur une estacadc, d'un
parc pouvant contenir 30 tonnes, ce qui représente à peu près
l'allocation d'un mois. Un inventaire est fait à la fin de chaque
mois par l'ingénieur lui-même, à l'effet de régler le compte du
garde-magasin et la prime des mécaniciens, d'après le nombre
de kilomètres faits par eux.
La prime mensuelle s^élève en moyenne à 65 francs pour les
mécaniciens, 35 francs pour les chauffeurs.
Le dépôt est à Saint-Quentin; la gare de Guise possède un abri
pour deux machines.
Le roulement se compose de 3 machines qui font absolument
le même service, c'est-à-dire en tout 400 kilomètres par jour : trois
trains le premier jour du roulement, quatre le deuxième et trois
le troisième.
A VOIE NORMALE 79
Comme les eaux sont excellentes, le lavage n'a lieu que tous les
quinze jours; il correspond aux jours de repos des mécaniciens.
Les dépenses de traction et des ateliers se répartissent ainsi qu il
suit :
Personnel du dépôt 34.755 30
Entretien du matériel roulant 33.346 24
Objets de consommation, déchets, cordes, plombs, elc . . i .041 25
Combustibles pour machines 32.621 50
Huiles et graisses pour machines 5.616 50
Redevance de matériel 478 52
Total .... 107.859 31
Le parcours kilométrique s'élevantpour Tannée 1884 à 177,056 ki-
lomètres, le prix de revient de la traction par kilomètre de train
atteint 60 centimes. Il est de 2,696 fr. 48 par kilomètre de ligne.
Le parcours moyen des machines a été de 34,766 kilomètres. La
machine u? 12 a parcouru 47,128 kilomètres.
Mouvement et Trafic
Le personnel du service central de Texploitation se compose,
outre rinspecteur, de :
Deux expéditionnaires ;
Deux employés au contrôle, dont un chef du contrôle et un
agent capable de faire les fonctions d'intérimaire et d'assurer le
remplacement des chefs de station, de conducteurs et de contrô-
leurs des trains.
Un caissier;
Un employé aux titres.
Au total sept agents.
Mouvement. — Service des trains, — Le service est assuré par
cinq trains dans chaque sens, avec des vitesses de marche de
45 kilomètres à rheure; les stationnements de ces trains ne dépas-
sent pas deux minutes, sauf pour un train de chaque sens où ils
sont de 5 minutes, afin de pouvoir assurer le service des mar-
chandises. A l'exception de ces deux trains, tous les trains
80 CHEMINS DE FER D INTÉRÊT LOCAL
ne peuvent transporter de wagons qu'à distance entière, de
Saint-Quentin à Guise ou vice versa, toute manœuvre dans les
gares intermédiaires leur étant interdite.
Pendant trois années, du 15 avril 1882 au 1*' juin 1885, il y a
eu un service de nuit, qui, croyait-on, devait développer le trafic.
Ce service coûtait environ 30.000 francs; la poste donnait une
subvention de 7,000 francs. Les gares de Saint-Quentin, Origny,
Ribemont et Guise étaient seules ouvertes au service de nuiL
Le conducteur du train délivrait les billets. Ce service n'ayant
absolument rien produit, on l'a supprimé dès que le traité avec le
ministre des postes fut expiré, ce qui a permis de congédier onze
agents.
Dans le service actuel, le personnel se compose de trois con-
ducteurs et de trois garde-freins de queue graisseurs. De plus un
agent du contrôle et un agent du dépôt, tous deux en résidence à
Guise, font, en venant à Saint-Quentin le matin, et en partant le
soir le service d'un train dans chaque sens, l'un comme conducteur,
l'autre comme garde-frein.
On se propose de supprimer le serre-frein graisseur en faisant
manœuvrer le frein du fourgon de tête par le chaufTeur. A cet
effet, on installerait sur ce fourgon un frein à contre-poids et à
déclanchement que le mécanicien ou le chauffeur pourrait abattre
en tirant une corde. Pour que ce dernier puisse relever le frein
sans être obligé de descendre de la machine, une ouverture serait
percée dans la balustrade, à l'arrière de la machine-tender, et
une porte de communication dans le fond de la caisse du fourgon.
Le conducteur se tiendrait dès lors en queue du train.
Outre les conducteurs et garde-freins, le personnel des trains
comprend encore deux contrôleurs de route, qui sont toujours
dans les trains et qui rapportent le double de ce qu'ils coûtent.
Il y a beaucoup de voyageurs sur la ligne et le conducteur n'aurait
pas le temps de faire le contrôle.
Au moment de la récolte des betteraves on a souvent à faire un
train facultatif, parfois même deux dans la journée.
La composition normale des trains est ainsi réglée : marchan-
dises en tête, un fourgon, une voiture de troisième, une mixte
à étage et en queue un fourgon.
A VOIE NORMALE 84
Là charge des trains pourrait facilement atteindre par beau temjSs
soixante unités Nord, soit seize véhicules chargés à dix tonnes
ou deux cent quarante tonnes. Mais on ne dépasse pas dans la
pratique quarante unités, soit dix wagons chargés à dix tonnes,
soit encore cent cinquante tonnes.
L'éclairage des trains ne présente aucune particularité.
Pour le chauffage, deux systèmes sont employés :
1^ Les bouillottes pour la voiture de troisième et pour les
compartiments 'inférieurs de la voiture mixte. Une bouillotterie
existe à cet effet à Saint-Quentin, une autre à Guise;
2** Pour les compartiments supérieurs de la voiture à étage, on
faitusage des chaufferettes à briquettes Stocker, dont il a été parlé
à propos des lignes du Pas-de-Calais, auxquelles du reste ce sys-
tème a été emprunté par la Compagnie de Saint-Quentin à Guise.
Il n'y a pas à revenir sur les défauts de ce chauffage. Les chauf-
ferettes sont fixées au plancher, afin que les voyageurs ne puissent
les ouvrir ou les renverser. Avant le départ du train on transporte
les briquettes rouges dans un panier de fer et on ferme à clef les
chaufferettes garnies.
Le parcours des trains a été en 1884 de 177,036 kilomètres, résul-
tant de 4,439 trains mixtes et 18 trains facultatifs de marchandises.
Le parcours moyen des voitures a été, pour la même année, de
34,782 kilomètres, celui des fourgons de 50,575 kilomètres.
Service des gares, — Toutes les stations sont armées d'une voie
d*évitement; les changements de croisement ne se présentent
toutefois que dans des cas tout à fait exceptionnels.
L'inspecteur est agent de la voie unique.
Aucune station n'est ouverte à la télégraphie privée.
Les règlements appliqués sont les anciens règlements de la
Compagnie du Nord.
La répartition du matériel est faite, par la gare de Saint-
Quentin.
Le personnel des stations est réduit à un agent pour quatre
stations; il est de trois à six agents pour les autres et de dix-sept
agents pour la gare de Guise.
Ainsi qu'il a été dit, le plan des gares est mauvais et donne lieu
6
82 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
à des dépenses de manœuvres qu'on eut pu éviter par une meil-
leure disposition. On est souvent forcé de louer à raison de i franc
rheure, un cheval aux cultivateurs voisins de la station ; les ma-
nœuvres se font le matin, à midi ou au soir, pendant l'interrup-
tion des travaux des champs. **
Le service des messageries est assez important : par exemple,
Origny expédie chaque soir sur Paris des tissus dont les matières
premières sont envoyées de Paris par des industriels qui font
fabriquer dans cette localité.
En dehors des charbons, qui voyagent toujours par chargement
de 10,000 kilos, le chargement moyen des wagons est de
3,000 kilos. C'est le chargement des poèleries Godin, en fonte
moulée très-légère; on ne pourrait du reste dépasser cette charge
sans risquer des bris. Ces marchandises ne sont jamais transbor-
dées lors de la remise à Saint-Quentin à la Compagnie du Nord,
bien que toutes les autres marchandises chargées dans des wa-
gons de la Compagnie de Saint-Quentin à Guise doivent, en prin-
cipe subir le transbordement.
Dans le sens Nord sur Guise, les wagons de charbon passent
sans transbordement.
D'après le traité de communauté relatif à la gare de Saint-Quen-
tin, les deux Compagnies doivent s'attacher à équilibrer les rede-
vances réciproques de matériel.
Dans le principe les dépenses delà gare commune étaient répar-
ties au prorata du nombre des trains ; le traité de 1880 a substitué
à cette règle un forfait de 7 1/2 p. 100 à la charge de la Compagnie
locale, forfait légèrement supérieur à la redevance antérieure. Ce
forfait s'applique aussi bien à l'intérêt et amortissement du capital
de premier établissement de la gare de Saint-Quentin, calculé à
5 fr. 45 p. 100, qu'aux dépenses d'exploitation comprenant : per-
sonnel, petit matériel, service télégraphique, éclairage, chauffage,
manœuvres de gare calculées à 6 fr. l'heure, transbordement, im-
primés, entrelien des bâtiments, assurance, impôts, etc.. Les rede-
vances pour gare commune sont réglées'par trimestre. Les autres
redevances pour échange de matériel, avaries, indemnités, etc...,
sont réglées par décompte de dizaine et payées en argent à la gare
de Saint-Quentin.
A VOIE NORMALE 83
Servioe commeroial. — L'inspecteur se réserve tout spéciale-
ment la direction de ce service.
Le trafic se répartit par moitié, à peu près, entre la grande et la
petite vitesse, dont le produit est cependant un peu supérieur à
celui de la grande vitesse.
Les voyageurs donnent un mouvement moyen de 300 par
jour.
Le trafic de petite vitesse se compose de charbon, betteraves,
poéleries Godin (8 wagons à 3,000 kilos par joiir), huiles d'Origny,
pommes, sucres, produits chimiques et agricoles.
La plus large part du trafic est en provenance ou à destination
des au-delà de Saint-Quentin sur le Nord. Le trafic intérieur de
la ligne, de station à station, est très-faible en dehors des bette-
raves.
Les marchandises par wagons complets à 10,000 ou 5,000 kilos,
constituent les 3/4 du trafic de petite vitesse.
La Compagnie de Saint-Quentin à Guise n'a pas devant elle la
perspective d'un avenir aussi brillant que Ta été le passé. Déjà, en
1885, l'ouverture de là ligne de Busigny à Hirson lui a enlevé
une part notable du trafic de la région située au nord d'Origny et
Guise. La ligne, actuellement en construction, du Gâteau à Laon
par Guise, menace de lui enlever la plus large part du trafic de
Guise, qui représente le 1/6 des recettes de la Compagnie.
Il n'y a aucune particularité à signaler dans les tarifs. Les tarifs
abaissés ont généralement pour but de concurrencer le canal de la
Sambre qui se réunit près de La Fère au canal de Saint-Quentin.
On devra créer de nouveaux prix spéciaux pour lutter contre la
ligne du Gâteau à Laon.
Le trafic direct n'existe avec la Compagnie du Nord que pour les
voyageurs et pour un petit nombre de relations : .toutes les gares de
la ligne de Saint-Quentin à Guise avec Paris et les gares inter-
médiaires depuis Tergnier jusqu'à Busigny, ces deux dernières
comprises.
La Compagnie locale a adopté sans la moindre modification le
système de comptabilité du Nord, avec les mêmes imprimés.
La ligne n'ayant que 40 kilomètres est soumise au point de vue
de l'impôt sur la grande vitesse, à la loi du 11 juillet 1879, c'est-à-
84 CHEMINS DE FER U'LNTÉRÊT LOCAL
dire que Timpôt est perçu par place et par voiture, à raison de
10 fr. par place et jusqu'à 50 places inclus, et de 5 fr. par place en
sus, lorsque la voiture comprend plus de 50 places. La redevance
totale est ainsi de 11,000 fr. environ au lieu de 40,000 fr. qu'elle
serait si on avait appliquer la loi du 11 septembre 1871, c'est-à-
dire le dixième plus double-décime et un dixième en sus^
Le contrôle des recettes a un fonctionnement calqué sur celui de
la Compagnie du Nord. De même pour la statistique.
Un caissier centralise les recettes à Saint-Quentin et les verse
en banque. Le caissier et l'employé aux titres sont, en outre, char-
gés de la comptabilité centrale.
Les feuilles de solde et factures sont arrêtées par Tinspecteur de
l'exploitation et visées par un administrateur délégué.
Les dépenses d'exploitation proprement dite se résument ainsi
qu'il suit:
Personnel des pares et stations -62.779 75
Menues dépenses des gares, etc 2.676 95
Billets et imprimés 4-486 66
Chauffage des gares et bureaux 2.451 70
Eclairage des gares et bureaux 6.319 35
Personnel des trains 11.592 50
Indemnités pour avaries, pertes de colis 1.788 35
Communauté de la gare de Saint-Quentin avec la Compagnie
du Nord 39.216 23
Subventions aux messagers et correspondants 6.334 90
Total ...... 137.646 39
Ce qui fait ressortir la dépense d'exploitation :
Par kilomètre de ligne à 3,441 fr. 15
Par kilomètre de train à 0 77
Services divers, — Le service médical comprend deux méde-
cins, l'un à Saint-Quentin, l'autre à Guise, tous deux au trai-
tement de 200 fr. par an.
La Compagnie paye les médicaments aux malades ; on accorde
le traitement intégral aux agents blessés en service, et la demi-
* Il en est de môme pour les lig^ies d'intérêt local du Pas-de-Calais et de TAisne,
qui font l'objet du chapitre précédent.
A VOIE NORMALE
80
solde aux bons agents malades ; on laisse sans solde les agents
médiocres lorsqu'ils sont malades.
Des secoiu*s peuvent être accordés aux agents méritants.
En fin d'année, on distribue au personnel des gratifications
d'importance variable, suivant le mérite, et qui n'excèdent pas une
moyenne de 30 fr. par agent.
Il n'existe pas de caisse de retraite ni de Société de secours
mutuels.
Les agents sont habillés à leurs frais, suivant les conditions
fixées par le règlement. Cependant, la Compagnie donne les
insignes.
Résultats comparatifs des Recettes et Dépenses
POUR LES CINQ ANNÉES 1881-1882-1883-1884-1885
»#\
i"
KÉSULTATS TOTAUX |
RiSDLTiTS llLOliTliaUBS
•il
£.5.2
en
<
S *"
eu M
"kîT
miTÏU TOTALES
( IMPÔT DBODIT )
DÉPENSES
PRODUITS
NKTfl
RECETTES
dCpekses
PRODUITS
NBTfl
1881
40
698.399 31
376 109 78
322.289 53
17.460
9 049
8.411
52
1882
40
724.702 43
409.317 41
315.385 02
17 151
9.834
7.317
57
1883
40
661.589 06
390.340 27
285.913 59
16.540
9 450
7.090
57
1884
40
624.505 96
356.628 50
267.877 46
15.672
8.916
6.697
57
1885
40
596.651 90
363.486 90
251.240 40
14.316
9.087
5.229
63
Le produit net accuse une décroissance continue : la crise des
transports d'une part, la ligne nouvelle de Busigny à Hirson
d'autre part, sont les causes de cette décroissance. Les capitaux
engagés par la Compagnie n'excédant pas 100.000 francs par
kilomètre, on voit que malgré sa réduction, le produit net est
encore très-rémunérateur.
CHAPITRE VII
CHEMINS DE FER DE L'EURE
Ligne de Glos-Montiort à Pont-Audemer. ... 16 kil.
— Dreux à Elbeuf 90 —
— Gisors à Pont-de-r Arche 53 —
— Gisors à Pacy-sur-Eure 67 —
— Évreux à Acquigny 21 ~
Longueur exploitée 237 kil.
I. — ÉTABLISSEMEIVT
Historique. — Les diverses lignes qui constituent les chemins
de fer d'intérêt local de TEure ont été concédées à quatre Com-
pagnies différentes :
1*^ Glos-Montfort à Pont-Audemer (16 kilomètres), concédée
au sieur Girard, par décret du 9 juin 1866, avec une subvention
comprenant les terrains, plus 500,000 francs, a été ouverte en
août 1867.
2*^ Gisors à Pont-de-r Arche (53 kilomètres), décret du 9 juin
1866, concessionnaires Teuré, Férot et Chéron, subvention : ter-
rains, plus 1,500,000 francs; ouverture en août 1869.
3*^ Gisors à Vernonnet (35 kilomètres), concédée le 31 juillet
A VOIE NORMALE 87
1867 aux sieurs Teuré, Férot et Chéron, ouverture le 1" Jan-
vier 1870.
4** Vemon à Vernonnet (2 kilomètres), avec traversée de la
Seine, concédée en avril 1858 ; ouverture en mai 1873.
5*^ Evreux à Elbeuf (43 kilomètres) décret du 1" mai 1869, con-
cessionnaire Girard, subvention terrains : plus 1,609,500 francs;
ouverture de 1872 à 1875.
6** Dreux à Acquigny (57 kilomètres) et Pacy à Vernon (19 ki-
lomètres), concessionnaire Desroches, décret du 1" mai 1869,
subvention 4,125,000 francs, ouverture de 1872 à 1875.
Les concessions d'Evreux à Elbeuf, et de Dreux à Acquigny
s'arrêtent à la limite du département de TEure, c'est-à-dire à
3 kil. 300 d'Elbeuf d'une part, et à 7 kil. 897 de Dreux, d'autre
part, ces deux tronçons situés le premier dans la Seine-Inférieure,
le second dans l'Eure-et-Loir, concédés ultérieurement à la
Compagnie d'Orléans à Rouen (Philippart), qui les a construits.
Le réseau de l'Eure proprement dit a donc un développement
de 225 kilomètres.
La Compagnie d'Orléans à Chàlons a repris les diverses lignes
de ce réseau le 1""' juillet 1870, à la suite de traités avec les
concessionnaires primitifs, et les a exploitées jusqu'au V^ juillet
1872, date à laquelle cette Compagnie en a confié l'exploitation
à la Compagnie d'Orléans à Rouen.
Celle-ci fut déclarée en faillite en décembre 1876, et les lignes
qu'elle possédait en propre furent reprises par l'Administration des
chemins de fer de l'Etat ; les chemins de TEure restèrent quelque
temps sous séquestre et la Compagnie d'Orléans à Chàlons rentra
en possession le T' juin 1877. Cette Compagnie se mit elle-même
eii liquidation le 1" juillet 1884 et fut déclarée en faillite en oc-
tobre 1884. La Compagnie de l'Ouest avait repris à la suite des
conventions de 1883 les lignes d'Elbeuf à Rouen et de Dreux
à Chartres. Les lignes de TEure sont actuellement gérées par un
syndic.
Description. — La ligne de Glos à Pont-Audemer relie cette
dernière ville à la ligne de Serquigny à Oissel, c'est-à-dire à
RouQn d'une part, à la ligne de Paris à Cherbourg d'autre part ;
88 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
les déclivités de cette ligne ne dépassent pas 11 millimètres par
mètre.
Gisors à Pont-de-l' Arche rattache à la ligne de Paris à Rouen
rimportante vallée de TAndelle, qui renferme de nombreuses
filatures et des villages très-rapprochés : limite des déclivités
1 1 millimètres par mètre.
La ligne de Dreux à Elbeuf suit la vallée agricole de TEure sur
la plus grande partie de son parcours ; les déclivités y sont limi-
tées à 10 millimètres de Dreux à Louviers, mais elles atteignent
15 et 16 millimètres entre Louviers et Elbeuf.
La ligne de Pacy à Gisors est la plus pauvre ; elle est très-mal
construite entre Pacy et Vernon, où elle présente des déclivités
de 16 à 17 millimètres qu'on pouvait très -facilement éviter sans
allongement de parcours.
Louviers à Evreux n'offre aucune particularité ; les rampes n'y
dépassent pas 10 millimètres.
Les courbes de pleine voie de ces diverses lignes ne descendent
pas au-dessous de 300 mètres de rayon; mais elles sont très-
multipliées.
Dans certaines gares, comme Vernon par exemple, les rayons des-
cendent à 200 mètres et même à 130 mètres dans les changements,
souvent placés en pleine courbe de 200 à 300 mètres de rayon.
Ces courbes causent une usure très-rapide des bandages des
roues avant des machines.
Sur un total de 456 passages à niveau, 127 seuls sont gardés,
dont 49 avec maison de garde et 23 avec guérite. Pour 55 d'entre
eux , le service est assuré par les gares ou haltes à proximité
desquelles ils se trouvent.
Les gares sont clôturées, ainsi que les abords des passages à
niveau. On met, en outre, des clôtures partout où le préfet y
oblige, près des habitations par exemple.
Le rail, en fer, pèse 35 kilos par mètre; il est à patin et fixé
par des crampons.
Sur la ligne de Dreux à Elbeuf, parcourue par les express
d'Orléans à Rouen, on remplace sur trois ou quatre kilomètres
par an, le rail de fer par un rail d'acier de 30 kilos, également à
patin, et fixé par des tire-fonds.
A VOIE NORMALE 89
Le rail de fer a 6 m. 60 de longueur, le rail d'acier 8 m. 50;
celui-ci est posé à joints alternés et repose sur 10 traverses ; le
rail de fer est posé à joints correspondants, sur sept traverses.
Celles-ci sont en chêne du pays, non injecté : le ballast a
50 centimètres d'épaisseur.
Les voies, qui avaient été laissées dans un état déplorable par
la Compagnie d'Orléans à Rouen, sont aujourd'hui excellentes.
Les stations sont trës-multipliées: le réseau comprend 70 sta-
tions et haltes, soit une par 3 kil. 4. Ce grand nombre de stations
grève lourdement l'exploitation comme le premier établissement :
on eût eu le même trafic et bien moins de dépenses en supprimant
une gare sur deux .
Le type adopté pour les stations est généralement bon : la gare
d'Ivry-la-Ba taille (pl.V, fig. 9) représente ce type. Pourtant on ren-
contre aussi fréquemment les dispositions défectueuses de Pont-
Saint-Pierre (fig. 10), qui obligent les trains venant de la droite à
abandonner les voitures de voyageurs au milieu des voies pour
faire leurs manœuvres de wagons avant d'arriver au bâtiment de
la station.
La jonction avec les lignes de la Compagnie de l'Ouest se fait
en gares communes à Dreux, Bueil, Louviers et Elbeuf. Toutes
les autres gares de jonction avec cette Compagnie sont des gares
accolées, reliées par une voie d'échange ; cette solution regret-
table a dû être adoptée par suite des résistances opposées par la
grande Compagnie à la mise en communauté et à l'établissement
d'aiguilles sur ses grandes lignes. C'est à cause de ces résistances
qu'on a dû, en particulier, desservir Vernon par un rebrous-
sement.
La gare de Gisors est commune avec la Compagnie du Nord
pour la ligne de Gisors à Beauvais.
Toutes les stations sont couvertes par des signaux avancés, pla-
cés à 600 ou 800 mètres de distance de l'aiguille, selon le profil.
Les bifurcations sont, en outre, couvertes par des signaux carrés
fixes, avant lesquels les trains doivent s'arrêter quand ils ont
trouvé le signal avancé fermé.
Les réservoirs d'alimentation sont remplis, les uns par des
machines fixes, comme à Pacy, Evreux, Gisors-Ville et Pont-
90 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Audemer, les autres par des pompes à main, manœuvrées pendant
deux à trois heures par jour.
Matériel roulant. — Voitures et Wagojis :
Les voitures et wagpns ne diffèrent pas du matériel ordinaire :
Tarmature du réseau se compose de :
1*. — Grande vitesse
9 voitures de 1" classe,
15 voitures mixtes, 1" et 2* classes,
16 secondes,
56 troisièmes,
8 voitures à étages, pour trains de marchandises
voyageurs,
Soit 104 véhicules à voyageurs ou 0,4 par kilomètre.
En plus : 28 fourgons,
6 écuries ou voitures à lait,
6 voitures de service et wagons de secours.
2°. — Petite vitesse
500 wagons, soit 2,1 par kilomètre.
Cette armature est largement suffisante, car elle permet do
louer à la Compagnie de rOuest pour 40,000 francs environ de
matériel, le service intérieur du réseau de l'Eure assuré.
Locomotives. — Toutes les machines sont des locomotives-
tender à trois essieux accouplés. Elles se rattachent à trois types:
3 machines Gouin, 23 tonnes en charges (Glos-Pont-Audemer);
10 machines Creuzot, 35 tonnes en charges, affectées au dép6t
de Gisors, font plus spécialement le service des trains lourds;
14 machines Fives-Lille etCail, 33 tonnes en charge, affectées
au dépôt do Pacy.
 VOIE NORMALE
91
Les conditions des deux derniers types sont les suivantes :
Diamètre des cylindres
Course des pistons
Diamètre des roues motrices au contact.
Timbre de la chaudière
Surface de grille
Surface de chauffe totale
Poids à vide
Poids maximum en service
Empattement total
Puissance de traction
CREUZOT
CAILKTFIVES-
LILLE
0,40
0,40
0,60
0,60
1,31
1,40
8 k.5
8 k. o
1 m. 730
1 m. 10
86,70
91
27 t.
26 t.
35 t.
33 t.
3,30
3,10
3.570 k.
3.340 k.
L'armature en machines, bien que s'élevant à la proportion im-
portante de une machine par moins de neuf kilomètres, est à
peine suffisante, en raison des difficultés du roulement.
Ateliers de réparation. — En dehors du petit entretien et du
lavage des machines, qui se font aux dépôts de Pont-Àudemer ,
Pacy et Gisors, les réparations de toute nature, y compris tour-
nage des roues, remplacement de plaques tubulaires, etc., sont
exécutées dans les ateliers de Gisors, qui sont très-suffisamment
outillés à cet effet. Une machine fixe à condensation, de 25 che-
vaux, met en œuvre :
1 toiu* à roues de wagons et voitures,
1 tour à roues de machines,
4 tours parallèles,
4 perceuses,
2 taraudeuses,
2 raboteuses,
1 ventilateur.
Les ateliers, ajustage, montage^ forge, menuiserie, peinture,
garniture, etc., comprennent un outillage d'environ 150,000 fr.,
et nécessitent 72 ouvriers d'atelier.
92
CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Dépenses de premier établissement au 31 Décembre 1885
Ligne de Glos-Montforl à I*onl-Audenier .
DÉPENSE
TOTAL!
DÉPENSE
à la charge
Di Là comrkonn
DÉPENSE
KILOUTRIQUI
tout compris
5 589.924
4.798.247
350.000
— de Gisors à Pont-de-rArche. . . .
12. 181.. 700
9.879.311
242.000
— de Gisors à Vernon
8.418.934
5.839.246
334.000
— d'Evreux-EIbeuf, Saint-Georges à
Acquigny et Pacy-Vernon. . . .
32 702.781
25.596.692
270.000
Ces prix, très élevés, ne sont pas suffisamment justifiés^ les
lignes étant en général très-simplement établies.
11.-- EXPL01T.1TI0:\
Administration kt Direction
L'administration est représentée par le syndic de la faillite,
qui passe les marchés, approuve et ordonnance les dépenses, etc..
Le directeur réside à Paris : il est assisté d'un ingénieur adjoint;
l'ensemble du personnel du service central, y compris celui du
contrôle des recettes, s'élève à ti agents.
Les dépenses d'administration centrale et de direction, y com-
pris assurances et loyers, charges d'administration publique, per-
sonnel de dfrection et de contrôle des receltes, s'élève pour Tan-
née 1885 à 120,685 fr. 98, soit par kilomètre exploité à 509 fr. 22.
Voie et Bâtiments
L'ingénieur chargé du service de la voie réside à Pacy-sur-
Eure, de même que l'inspecteur principal placé à la tète du mou-
vement.
Le réseau est divisé, au point de vue de la voie, en trois sec-
tions; chaque chef de section est assisté do trois piqueurs et d'un
expéditionnaire.
Le bureau central de l'ingénieur comprend six agents, dessina-
teurs et expéditionnaires.
A VOIE NORMALE 93
Les cantons de la voie embrassent en moyenne 5 kilomètres,
soit au total 39 cantons; chaque équipe est normalement compo-
sée de quatre hommes y compris le chef d'équipe; dans les can-
tons à fortes rampes et courbes roides, et dans ceux qui contiennent
une gare importante. Téquipe s'élève à cinq hommes.
Pendant trois ou quatre mois d'hiver, chaque équipe est ren-
forcée d*un auxiliaire.
Il semble qu'on pourrait, sans grand inconvénient, étendre à
8 kilomètres la longueur des cantons, sans augmenter le person-
nel des équipes.
L'entretien des bâtiments est assuré par une équipe volante
composée de 8 hommes, qui font les maçonneries, la menuise-
rie, etc.... et assurent encore la réparation des outils des agents
de la voie.
L'entretien de la voie a été assez pénible pendant les i ou
5 années qui ont suivi la reprise des lignes de la Compagnie
d'Orléans à Rouen. On a dû remplacer environ 65 p. 100 des tra-
verses et apporter du ballast sur un grand nombre de points où il
était ou absent ou de qualité médiocre.
La voie est arrivée aujourd'hui à une période d'entretien normal.
Outre l'entretien, on fait annuellement, en adjoignant des auxi-
liaires aux cantonniers, 3 à 4 kilomètres de renouvellement en
rails d'acier et traverses neuves sur la ligne de Dreux à Elbeuf,
les matériaux retirés des voies servant à l'entretien des autres
sections. Ces travaux sont compris dans les dépenses d'exploita-
tion: le kilomètre renouvelé revient en moyenne à 7,000 ou
9,000 francs, selon le prix des fers, défalcation faite des maté-
riaux à réemployer.
Les chefs-cantonniers ont d^s salaires variant entre 1,080 francs
et 1,200 francs par an, les cantonniers entre 900 francs et
1,020 francs.
Parmi les gardes-barrières, celles qui sont logées ont de 6 à
8 francs par mois, celles qui ne le sont pas, 25 francs.
Les dépenses de voie et bâtiments, pour 1885, s'élèvent à
402,095 fr. 51 pour 225 kilomètres, soit par kilomètre à 1,800 fr.,
chiffre dans lequel les renouvellements et réfections entrent pour
310 francs environ.
■\
94 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Traction
Le chef du service de la traction qui réside à Gisors, dirige
en même temps les ateliers sans autres intermédiaires que des
contre-maîtres.
Pour le service de traction proprement dit, il a sous ses ordres
un inspecteur de traction à Pacy, un chef de dépôt à Gisors et un
chef de réserve à Pont-Audemer.
19 machines sont en roulement journalier, 7 autres en réserve
ou réparation.
Le personnel do traction comprend 20 mécaniciens, 5 chauf-
feurs autorisés et 30 chauffeurs, dont 2 mécaniciens et 2 chauf-
feurs pour le service en navette de Glos-Montfort à Pont-Au-
demer.
t machine de réserve à Louviers n'est pas comprise dans le rou-
lement, ce qui porte le nombre des machines en feu à 20 par
jour.
La réserve est, en outre, assurée par deux machines, Tune à
Gisors, Tautre à Pacy, et qui sont comprises dans le roulement.
Les roulements sont les suivants :
1 navette sur Pont-Audemer, Téquipe du dépôt travaillant aux
réparations de dépôt, au lavage, etc..
9 machines rattachées au dépôt de Gisors avec un roulement de
8 jours, dont un jour de réserve et lavage.
9 machines rattachées au dépôt de Pacy avec un roulement
de 9 jours, dont un jour de réserve et lavage.
Dans le cours du roulement, les mécaniciens couchent une ou
deux nuits chez eux.
Le combustible se compose de moitié tout-venant de Béthune,
payé à 11 fr. 50 à la mine et moitié briquettes à 18 francs. On fait
principalement usage de celles-ci pour l'allumage, et dans les
fortes rampes.
Le mélange revient en moyenne à 19 fr. 70 la tonne, y compris
les frais de transport.
Les allocations de combustible sont variables suivant le type de
machine, la nature du train et sa charge.
A VOIE NORMALE 95
Pour les trains de voyageurs ou mixtes, on alloue jusqu'à
40 tonnes de charge remorquée :
Pour les machines Creuzot 8 kilog.
Pour les machines Fives-Lille et Cail. . 7 —
Pour les trains de marchandises ou de marchandises-voyageurs,
jusqu*à 40 tonnes de charge remorquée :
Machines Creuzot 9*^^500
Machines Fives-Lille et Cail .... 8, 250
En outre, quel que soit le train ou la machine, il est alloué un
supplément de 40 graipmes par tonne remorquée au delà de
40 tonnes.
Ces allocations comprennent l'allumage, ainsi que les station-
nementSy quand ceux-ci n'excèdent pas 3 heures de durée consé-
cutive.
La dépense effective par kilomètre est de 7 kilos et demi à
8 kilos.
Le graissage se fait moitié à l'huile végétale, moitié à l'oléo-
naphte; l'allocation kilométrique est de 35 grammes pour les
machines du Creuzot, 25 grammes pour les machines Fives-Lille
et Cail.
Les allocations sont les mêmes l'hiver et l'été ; en tenant
compte des primes pour minutes gagnées, soit 0 fr. 03 par
minute, les primes mensuelles des mécaniciens atteignent 55
et 60 francs en été ; les chautfeurs ont droit au tiers.
Les machines font un service extrêmement pénible et pour lequel
elles ne sont pas construites : en raison de la difficulté d'assurer
les correspondances aux nombreux points de jonction, elles
doivent marcher à 55 et même 60 kilomètres dans les pentes,
lorsqu'elles ont à gagner du temps, alors que 50 kilomètres consti-
tuent une vitesse exceptionnelle pour des machines à 3 essieux
accouplées. 11 faut encore ajouter à cette cause de destruction le
déplorable entretien dans lequel les a tenues la Compagnie d'Orléans
à Rouen, qui les a laissées à la Compagnie d'Orléans à Châlons
entartrées sur plusieurs centimètres d'épaisseur.
Aussi ces machines sont-elles sans cesse en réparatiou, pour
96 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
bielles cassées, plaques tubulaires brûlées, bandages usés et tiges
de tiroir rompues dans les courbes trop raides.
Depuis rétablissement des lignes, les locomotives ont nécessité
en moyenne phis de 15,000 francs de réparations, soit la moitié
de leur prix d'achat. Il eût été préférable de les user complè-
tement et d'en acquérir d'autres mieux appropriées au service à
faire.
Les constructeurs de ces lignes ne se sont nullement souciés
des nécessités de Texploitation, et les machines eussent pu être
choisies d'après de tout autres types, si on s'était préoccupé de
celles-ci; ce qui confirme ce principe si évident et pourtant si rare-
ment appliqué : la co^istruction et F armement d'une ligne doivent
être, sinon arrêtés, du moifis rigoureusement contrôlés par celui
qui aura charge de l'exploitation.
Les parcours journaliers des locomotives sont très-réduits. On
s'est vainement efforcé de modifier les roulements pour diminuer
le nombre des machines en service quotidien; la multiplicité des
correspondances, le sectionnement des lignes en courts tronçons
n'ont pas permis d'y arriver; la réduction même du nombre des
trains ne produirait pas de résultat satisfaisant sous ce rapport.
Les dépenses de traction et matériel sont majorées par les grosses
réparations.
Elles s'élèvent, pour 1885, à 302,935 fr. 37 pour la conduite, le
combustible, l'alimentation et le petit entretien, et à 158,572 fr. 62
pour l'entretien et les réparations aux ateliers, soit par kilomètre :
(237 kilomètres) à 1,276 francs pour la traction ;
— 669 — pour les réparations.
Total . . . 1,945 francs par kilomètre de ligne, et
par kilomètre de train à 0 fr. 56.
Mouvement et Trafic
Mouvement. — L'inspecteur principal qui dirige ce service
réside à Pacy. Il est assisté de deux inspecteurs pour tout le
service du mouvement et la vérification de la comptabilité des gares.
A VOIE NORMALE 97
Un chef de bureau, un comptable et 5 agents, y compris un
chef de magasin pour les imprimés, constituent le personnel de
bureau de ce service, qui n a pas, comme on Ta vu, à s'occuper
du contrôle des recettes.
Service des trains. — Le service des trains est en général assez
chargé :
Glos à Pont-Audenier . 4 trains mixtes dans chaque sens, dont 1 de
marchandises-voyageurs ;
GisorsàPont-de-rArche. 4 trains mixtes dans chaque sens, dont 1 de
marchandises-voyageurs;
Gisors à Vernon 3 Irains mixtes dans chaque sens, dont 1 de
marchandises-voyageurs ;
Pacy à Vernon 4 trains tous mixtes;
Dreux à Louviers. ... 5 trains dont, 1 train direct, 1 de marchandises
et 3 mixtes ne manœuvrant qu'aux gares
importantes;
Louviers à Elbeuf. . . 6 trains^ dont 1 direct, 1 de marchandises-
voyageurs et 4 mixtes.
Acquigny à Ëvreux. . . 4. trains, dont 1 de voyageurs allant jusqu'à
Louviers, et 3 mixtes d'Acquigny à Ëvreux
dont 1 de marchandises-voyageurs.
Il n'y a de service de nuit sur aucune ligne.
Les vitesses inscrites aux livrets sont de 50 kilomètres pour le
train direct de la grande ligne, de 40 kilomètres pour les trains
mixtes et 25 kilomètres pour les trains de marchandises-voyageurs ;
mais ces vitesses sont beaucoup dépassées. Elles sont encore exa-
gérées quand les trains de la Compagnie de TOuest sont en retard,
les trains de la Compagnie locale pouvant attendre ceux-ci pen-
dant 15 à 20 minutes ; en somme, le service des trains^ de celle-ci
est très-régulier.
On a cherché à réduire le grand nombre des trains, qui ne sont
pas tous absolument justifiés, maison a soulevé les réclamations
des conseillers généraux et des communes. Le réseau de TEure
étant un réseau départemental est, par là même, obligé de tenir
largement compte des réclamations qui se produisent. On a dû
rétablir les trains qui avaient été supprimés, bien que les dépenses
qui en résultent soient très-supérieures aux économies que leur
suppression eût permis de réaliser.
7
I
98 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Un des Iraîns qui offrent le moins d'intérêt est assurément le
direct de Dreux à Elbeuf, ou d'Orléans à Rouen, qui ne transporte
à travers le département de l'Eure qu'un nombre de voyageurs
tout à fait insignifiant.
Une autre cause de la multiplicité des trains réside dans le
grand nombre de correspondances à assurer aux huit points de
transit.
En résumé, on fait annuellement 815,000 kilomètres de trains,
alors que 600,000 kilomètres devraient largement suffire.
Le personnel de chaque train est composé d'un conducteur
et d'un garde-frein.
Les trains de marchandises peuvent atteindre une composition
de 30 à 35 véhicules dans les périodes de fort trafic, et descendre
à 5 ou 6 wagons. Ils ont lieu chaque jour, même quand le trafic
est très-faible, ce qui est le cas général, parce que les trains mixtes
ont des stationnements trop courts pour assurer le service des
marchandises dans les stations.
Les trains de marchandises ont toujours trois conducteurs, pour
assurer la rapidité des manœuvres.
Il n*y a pour ainsi dire jamais de facultatifs.
L'utilisation moyenne des trains en 1885 est de 19 voyageurs et
de 11 tonnes, 61 de marchandises.
Le train moyen, composé à 48 tonnes de poids mort, et
13 tonnes de poids net, utilise 43 p. 100 de la force des machines.
Tous les compartiments sont chauffés Thiver avec des bouil-
lottes : des bouillotteries sont à cet effet installées aux tètes de
ligne; la vapeur de la machine peut néanmoins être employée à
réchauffer les bouillottes pour les petits parcours ; c'est ce qui a
lieu à Vernon, pour le premier train du matin.
Service des stations, — Le service des stations courantes est
normalement assuré par un chef de station à 1,400 ou 1,500 fr.,
et par un homme d'équipe à 1 ,000 fr.
Les femmes sont dans la plupart des cas receveuses et reçoivent
300 fr.; les haltes sont gérées par des femmes de cantonniers.
On a cherché à supprimer l'homme d'équipe dans un certain
nombre de stations de peu d'importance; mais ces stations se
A VOIE NORMALE 99
trouvant sur la grande ligne, où le service est à 5 trains par jour,
dont 1 direct, on y a renoncé, par crainte de compromettre la
sécurité; de plus, il y a presque toujours à manœuvrer les bar-
rières d'un ou deux passages à niveau situés à proximité de la
station, ce qui deviendrait difficile par la réduction du personnel
delà station à un seul agent.
Toutes les gares sont outillées pour assurer au besoin les chan-
gements de croisement.
Le télégraphe employé est le Bréguet; on ne fait pas de télé-
graphie privée. Les règlements appliqués sont ceux de la Compagnie
de l'Ouest simplifiés.
Le service de détail est assez important dans chaque station.
Pendant que le chef de station procède à la reconnaissance des
écritures, l'homme d'équipe ou le facteur aide le conducteur au
service des bagages, ou à la manutention des wagons et colis, ou
bien il fait les aiguilles et commande les manœuvres.
Les conducteurs de réserve jouent, dans les gares d'attache, le
rôle d'employés aux écritures ou d'hommes de la manutention.
Pour les manœuvres ou manutentions à faire dans l'intervalle
des trains, les gares peuvent recourir aux agents de la voie,
moyennant remboursement à ce service du nombre des heures
employées. On évite du reste autant que possible ce moyen, en
raison du mécontentement qu'il provoque généralement de la part
des chefs d'équipe et de leurs supérieurs.
Gares communes et gares de jonction, — Dans toutes les gares de
jonction, les agents de la Compagnie locale vont prendre dans la
gare de la Compagnie de l'Ouest et avec leurs machines, les mar-
chandises qui sont à destination de la première, ou amener à
l'Ouest celles qui doivent lui être passées. La Compagnie de
rOuest, qui fait usage, pour ses propres manœuvres, des machines
des trains d'échange, rembourse les dépenses de manœuvres, cal-
culées à raison de 5 fr. l'heure.
Les transbordements sont effectués sous le couvert des règles à
suivre : ils sont, du reste, plus fréquents aujourd'hui, où chaque
Compagnie a pléthore de matériel, qu'ils ne l'étaient il y a quelques
-■ . - - -
iOO CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
années : TOuost évite ainsi des redevances pour location de maté-
riel, qui étaient assez élevées antérieurement.
Dans les gares de jonction, la Compagnie locale rembourse à la
Compagnie de TOuest les frais d'aiguillage.
Dans les quatre gares communes, les dépenses sont fixées à
forfait, tant pour rétablissement que pour l'exploitation sur les
bases suivantes :
Dreux. . */» ^^^ dépenses à la charge de l'Eure.
Bueil. . . V3 — —
Louviers '/a — —
Ces dépenses grèvent considérablement la Compagnie locale,
dont le trafic n'est nullement en rapport avec les chiffres qui pré-
cèdent.
Pour Elbeuf, prorata des unités de trafic.
Pour Gisors, gare commune avec la Compagnie du Nord,
celle-ci paye à la Compagnie de l'Eure les dépenses d'exploitation
au prorata du nombre des trains, et le loyer à forfait.
Service commercial. — Les tarifs ne présentent guère de par-
ticularités : ce sont ceux du cahier des charges, avec quelques
tarifs spéciaux de couverture contre les détournements de la
Compagnie do l'Ouest.
Une part importante du trafic de la grande ligne est le trafic
de transit voyageant sous le couvert d'un tarif commun réduit,
établi entre les chemins de fer de l'Etat et la Compagnie de
l'Eure et maintenu comme tarif commun Ouest-Eure.
Le trafic de grande vitesse constitue à peu près la moitié du
trafic total: le parcours moyen d'un voyageur est de 20 kilo-
mètres et son produit 1 fr.
Le trafic de petite vitesse consiste en produits agricoles, en
charbons du Nord, en transit de Gisors à Dreux ; en cotons,
cuivres, bois et zinc (usine de la Vieille-Montagne à Bray-Ecos) sur
Gisors à Pont-de-l'Arche; en bestiaux et grains sur Pacy; et en
écorces à tan et peaux sur Glos-Pont-Audemer. Le parcours moyen
d'une tonne de marchandises est de 33 kilomètres et son produit
de 2 fr. 93.
y
:r
A VOIE NORMALE lOi
La comptabilité des halles est centralisée par la gare voisine,
qui en est responsable et doit introduire le décompte des billets
dans son livre de liquidation.
La comptabilité est décadaire.
En raison de la diversité des concessions, qui ont donné lieu
à des émissions d'obligations différentes, la statistique des recettes
doit être tenue par groupe de lignes correspondant à chaque
concession, les obligataires prétendant, à juste titre, que chacun a
droit sur sa ligne. C'est un travail très-compliqué, qui est fait
par le contrôle des recettes à Paris.
Les dépenses du mouvement et du service commercial s'élèvent,
pour 1885, au total de 507,322 fr. 02, soit par kilomètre de ligne
à 2,140 fr.
Services divers, — La Compagnie délivre gratuitement les médi-
caments à ses agents malades, à qui est payée la demi-solde ; la
solde entière est allouée aux agents blessés eu service.
Le magasin-matières et matériel est sous les ordres du chef de
traction : un chef de magasin et deux employés sont spécialement
préposés à ce service.
Les combustibles constituent un compte d'approvisionnement
spécial.
Les imprimés sont placés sous le contrôle de l'inspecteur prin-
cipal de l'exploitation.
Il n'existe pas de caisse de secours: on distribue en fin d'année
quelques gratifications aux agents les plus méritants.
Résultats généraux pour 1885
Les dépenses d'exploitation sont au total les suivantes :
Administration et direction 120.685 98
Voie et bâti naenU 402.095 51
Traction et matériel 530.303 82
Mouvement et trafic 507.322 02
Dépenses diverses, péages et loyer des gares communes. H3.533 44
Total 1.073.940 77
Soit par kilomètre de ligne 7.0G3 »
Par kilomètre de train 2 04
102
CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
En résumé, le réseau de l'Eure est exploité aussi économi-
quement que le comporte le service de grand réseau qui lui a été
appliqué.
Si les gares étaient moins rapprochées, les trains moins mul-
tipliés et si les redevances de gares communes grevaient moins
lourdement son budget, les dépenses kilométriques d'exploitation
pourraient être très-notablement réduites.
La proportion kilométrique du personnel est de 3 agents, 3.
Les produits pour Tannée 1885, impôt déduit, sont les suivantes :
Grande vitesse 902.407 75
Petite vitesse , 830.433 85
Recettes diverses (location de matériel, gare commune). . 56.043 44
Total 1.788.885 04
Recette par kilomètre de ligne 7.548 03
Recette par kilomètre de train 2 18
Résultats comparatifs pour les années 1881-1882-1883-1884-1885
en
U3
Sri
r.
T.
<
1881
1882
1883
188i
1885
kil
237
237
237
237
237
KÉSULTATS TOTAUX (impôt déduit)
RECETTES
1.767.933 08
1 960.900 88
1.831.783 75
1.850.086 34
1.788.885 01
DÉPENSES
1.385.405 29
1.588.6i3 83
1.663.273 06
1.690.960 16
1.673.940 77
PRODUIT
IVBT
431.527 79
372.257 05
168.510 69
159.126 18
114.944 27
liSULTiTS ULOliTIIQOIS
RECETTES
7 460
8 274
7,729
7.806
7.548
ftfPEKSlS
5.816
6.703
7.018
7 135
7.023
PROKIT
MT
1.614
1.571
711
671
435
8.
"As
■4-3 «
78
81
91
91
94
CHAPITRE VIII
CHEMINS DE FER DE L'ORNE
Ligne d'Alençon à Gondé
1. — ÉTABLISSEMENT
La ligne d'Alençon à Condé a été concédée en février 1869 par
le département de TOrne à une société qui s'est constituée avec
le nom de Compagnie des chemins de fer de l'Orne, sous le pa-
tronage de la Société de dépôts et comptes courants et de la Société
financière de Paris; un décret du 12 mars 1870 a sanctionné cette
concession :
Le département fournissait une subvention de. . 2300000 fr.
Les communes 500000
L'Etat UOOOOO
Total ^200000
Soit environ par kilomètre 63600 fr.
Le fonds social de la Compagnie a été lixé à 2500000 fr. di-
visés en 5,000 actions de 500 fr.
La Compagnie traita avec la Compagnie de Fives-Lille pour
l'exécution de la ligne et son armature fixe et roulante à un prix
104 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
forfaitaire de 9700000 fr., soit environ 115000 fr. par kilo-
mètre.
La ligne fut ouverte à l'exploitation le 6 mai 1873 ; la cons-
truction avait été parfaitement exécutée, et le matériel était
suffisant pour assurer un bon fonctionnement.
Mais les recettes, suffisantes pour couvrir les dépenses d'ex-
ploitation au moins pendant les premières années, n'ont jamais
permis de faire face aux charges financières de la société qui
s'élevaient à 20,000 obligations représentant un emprunt de
5,000,000 fr.
Dans l'espoir d'améliorer sa situation, au moins par le partage
de ses frais d'administration, la Compagnie de l'Orne se chargea
à ses risques et périls, dans le cours de 1877, de l'exploitation
de lignes locales situées dans le voisinage de la sienne, Mamers à
Saint-Calais etBriouze à laFerté-Macé.
Cette combinaison ne donna que de médiocres résultats qui
n^ont pu faire sortir la société des embarras dans lesquels elle se
trouvait.
L'ouverture de lignes nouvelles construites par l'Etat dans la
région, Mamers à Mortagne, Mortagno à Laigle et Sainte-Gau-
burge, aggrava encore la situation en enlevant à la ligne d'Alençon
à Condé une part importante de son trafic, et les recottes devinrent
inférieures aux dépenses d'exploitation.
La Compagnie s'adressa alors à l'État en demandant le rachat
de sa ligne.
Le groupe financier qui avait créé la Compagnie et qui l'admi-
nistrait créa, sous la dénomination de Syndicat professionnel des
chemins de fer régionaux une société, au capital de 10 millions,
destinée à réunir diverses lignes et à les offrir à l'Etat.
Le Syndicat qui comprenait parmi ses administrateurs des
sénateurs et des députés, s'est dissous le 31 décembre 1883,
avant de parvenir à ses fins.
Cependant, à la date du 1" août 1883, une convention provi-
soire avait été passée avec le ministre des travaux publics pour
le rachat sur la base de 3,582,835 fr., dépréciation comprise et
déduction faite des subventions; le matériel roulant, le mobilier
et les approvisionnements devaient être repris à dire d'experts.
A VOIE NORMALE 105
Cette convention ne put être sanctionnée par les Chambres, et
le ministre des travaux publics, eu égard aux difficultés budgé-
taires, ne proposa plus en 1885 que le payement de ce qui pou-
vait appartenir à la Compagnie dans les gares d'Alençon, Mortagne
et Condé et le prix du matériel à dire d'experts, les 67 kilomètres
de voies et les gares intermédiaires devant être abandonnés gratui-
tement.
En présence de cette situation, les actionnaires votèrent la
dislocation de la société; mais celle-ci fut déclarée en faillite le
30 juillet 1885. L'exploitation est actuellement poursuivie par le
syndic de la faillite.
.Description. — La ligne d'Alençon à Condé part d'Alençon, en
gare commune avec la Compagnie de l'Ouest, pour remonter la
vallée de la Sarthe jusqu^aux collines du Perche qu'elle franchit
avec des rampes de 15""/" près de la ville de Mortagne.
Elle redescend ensuite dans une vallée secondaire de l'Huisne,
et longe cette rivière pour aboutir à Condé-sur-Huisne en gare
également commune avec la Compagnie de l'Ouest.
La ligne, établie en pays facile d'ailleurs, a été très-bien
construite, avec des courbes de 500 mètres de rayon au minimum,
et des rampes de 1 5 ""/"».
Le rail, en fer et à patin, pèse 35 kilos le mètre courant, ce
qui est un poids exagéré. Les barres ont 6 mètres de longueur et
reposent sur 6 traverses à 1 m. 10 d'écartement d'axe en axe, le
joint étant distant de 60 centimètres de Taxe de la dernière
traverse.
Les traverses sont pour la plupart en chêne du pays : cependant
15 kilomètres ont été armés en hêtre lors^de la construction.
Le ballast est en sable et cailloux sur le versant de l'Huisne,
en calcaire argileux de médiocre qualité sur le versant de la
Sarthe.
La vitesse maxima des trains est limitée à 45 kilomètres, ce qui
donne 30 à 35 kilomètres de vitesse moyenne.
Pas de clôtures, sauf le long des pâturages : la Compagnie a
charge de leur entretien.
Peu de passages à niveau gardés.
i06 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Les stations, au nombre de 12, sont distantes de 5 kilomètres et
demi ; 5 d'entre elles, indépendamment des terminus, sont dénom-
mées gares^ et peuvent seules assurer les croisements ou change-
ments de croisements : à ce titre elles possèdent une voie d'évi-
tement et le télégraphe.
Les stations proprement dites disposent seulement d'une voie
de halle, et non du télégraphe.
Sous cette réserve, les dispositions des stations se rattachent
à celles des gares : le plan de la gare du Meslc-sur-Sarthe (pi. V,
fig. 11) représente le type des gares ; en enlevant deux voies, on
aurait le type des stations.
Les manœuvres doivent se faire exclusivement à la machine,
ce qui, de l'avis des exploitants, est excellent quand on a plu-
sieurs wagons à prendre ou laisser, mais est moins justifié quand
il ne s^agit que d'une seule manœuvre ; on préférerait beaucoup
avoir les dispositions adoptées sur la ligne de Mamers à Saint-
Calais, qu'on verra ci-après :
Les gares de croisement sont seules protégées par des signaux
placés à 800 ou 1000 mètres.
Outre les gares d'Alençon et de Condé-sur-Huisne, communes
à la Compagnie locale et à la Compagnie de l'Ouest, et qui appar-
tiennent à cette dernière, la gare de Mortagne, dont le chemin de
fer départemental est propriétaire , est également commune :
Texécution d'extensions considérables, projetées diins cette gare et
insuffisamment justifiées, est provisoirement suspendue.
Deux machines fixes d'alimentation existent sur le parcours
intermédiaire, au Mesle et à Mauves ; aux terminus, l'eau est
fournie par les alimentations de la Compagnie de l'Ouest.
Matériel roulant. — Voitures et wagom, — Aucune particu-
larité dans le matériel roulant, construit par la maison Chevalier.
7 voitures mixtes, première et seconde, 10 troisièmes, 6 four-
gons à bagages et 2 wagons écuries composent le matériel de
grande vitesse; ce matériel pèse en moyenne 6 tonnes.
30 wagons couverts à 5 t. 700 de tare, 24 tombereaux et
36 plates-formes à 4 tonnes, soit 90 véhicules, constituent l'arme-
A VOIE NORMALE 107
ment en matériel de petite vitesse, ce qui donne une proportion
kilométrique de 1 m. 34.
Ce matériel est suffisant, eu égard au faible trafic.
Locomotives, — Les locomotives, au nombre de cinq, sont dos
machines-tender à trois essieux couplés. Construites par la Com-
pagnie de Fives-Lille, elles sont absolument du même type que
celles décrites précédemment dans le chapitre relatif aux lignes
de TEure.
Ces machines remorquent sur les rampes de 15 millimètres,
14 véhicules donnant une charge totale de 150 tonnes à la vitesse
de 25 kilomètres à Theure.
Ateliers de réparation. — La compagnie possède à Alençon
des ateliers outillés pour assurer toutes les réparations de son
matériel.
L'outillage est aussi simple que bien compris :
Une machine demi-fixe de 6 chevaux actionne :
1 tour à roues de machines el wagons.
2 lours parallèles.
i perceuse.
i raboteuse.
i machine à tarauder.
4 scie circulaire.
Une forge à deux feux avec son outillage, un atelier de menui-
serie et de peinture complètent les ateliers dont le service est as-
suré, sous les ordres du chef de traction, par un contre-maître,
un tourneur, deux ajusteurs, un forgeron, un menuisier, un fer-
blantier, un charron, un peintre, un sellier et un nettoyeur.
II. — EXPLOITATIOrV
.^DMIiMSTHATlON KT DIRECTION
L'administration est actuellement représentée par le syndic de
la faillite, auquel sont soumises toutes les questions importantes,
et particulièrement celles qui engagent des dépenses, marchés,
traitements, du personnel, etc.
108 CHEMINS DE FER D'IiNTÉRÊT LOCAL
Le directeur de Texploitation réside à AleDçoD.
Le personnel du service central se compose d'un chef du con-
trôle et de lacomptabilité avec 12 agents pour ces deux branches
du service.
Tout ce personnel, y compris le directeur, assure en outre le
service central de la ligne de Mamers à Saint-Galais.
Le service d'Alençon est représenté, à Paris, par un sous-
directeur assisté d'un agent, qui sert d'intermédiaire auprès du
syndic de la faillite.
Les dépenses de l'administration centrale : personnel, service
du contrôle, de la comptabilité et du magasin central, assurances,
loyers, charges diverses, s'élèvent, pour 1885, au chiffre rela-
tivement important de 54.614 fr. 86, soit par kilomètre 815 francs.
Voie et Bâtiments
Un ingénieur est spécialement attaché au service de la voie et
des bâtiments; il n'a pour son bureau aucun personnel.
Deux piqueurs le secondent dans le service actif, Tun pour la
section d'Alençon au Mesle, l'autre pour celle du Mesle à Condé.
Les brigades sont normalement composées à trois hommes pour
cinq kilomètres, y compris le chef d'équipe, ce qui donne
13 cantons. Une seule éqiiipe est à quatre hommes, en raison de
la qualité argileuse des terrains que traverse son canton.
Les chefs d'équipe seuls sont commissionnés à 90 ou 100 fr. par
mois ; les poseurs sont payés uniformément à l'heure, à raison de
0 fr. 25, et travaillent, par période de trois mois, pendant 9, 10,
11 et 12 heures par jour selon la saison.
Le chef d'équipe est chargé de la surveillance et fait une tour-
née chaque matin avant le passage du premier train.
Les rails sont d'excellente qualité et très-lourds ; aussi n'y a-t-il
pas lieu à leur renouvellement. Mais les traverses de hêtre sont
entièrement à remplacer, de même qu*un certain nombre de tra-
verses de chêne. Le renouvellement porte annuellement sur sept
à huit kilomètres, et la moitié des traverses de hêtre a fait place
au chêne.
En raison du poids du rail, de la légèreté du matériel roulant et
A VOIE NORMALE 109
des faibles vitesses des trains d'une part; en raison d'autre pari du
soin tout particulier qu'on apporte aux courbes, dans lesquelles
on s'attache à avoir toujours une traverse d'excellente qualité aux
joints et une au milieu de la barre, la voie peut être considérée
comme très-suffisante en général.
D'ailleurs, chaque équipe doit visiter et dégager toutes les tra-
verses de son canton dans le cours de Tannée.
Les maçonneries et menuiseries des bâtiments sont entretenues
par une équipe volante affectée à chaque dictrict et comprenant
un maçon, im menuisier et un charpentier.
Sur 150 passages à niveau, 15 seulement sont gardés avec
maison de cantonnier. Aux abords de chaque gare existent un ou
deux passages à niveau, dont le gardiennage est confié au personnel
de la gare, sans maison spéciale.
Les gardiennes de passages à niveau reçoivent 100 fr. par an.
Les dépenses de voie et bâtiments, pour l'année 1885, s'élèvent
à 84,133 fr. 24, soit par kilomètre 1,255 fr.
Traction
Un chef de traction est chargé du dépôt et des ateliers ; il est
assisté 4'un chef mécanicien qui conduit une machine et a autorité
sur les mécaniciens.
Deux machines sont en service journalier et couchent alterna-
tivement à Alençon et à Condé ; elles ont six jours de service et
trois jours de dépôt pour lavage et entretien courant.
Le personnel actif de la traction se compose de trois méca-
niciens, dont un chef, et de trois chauffeurs, dont deux autorisés
à conduire une machine en cas de besoin.
Chaque équipe passe trois jours au dépôt d'Alençon avec sa
machine.
Deux chauffeurs de nuit, l'un à Alençon, l'autre à Condé, ont
pour fonction de mettre les machines en pression avant le premier
départ, qui a lieu le matin vers cinq heures et demie.
Enfin, un chauffeur est affecté aux alimentations. Les méca-
niciens ont des traitements variables de 200 à 250 fr. par mois,
les chauffeurs de 125 à 175 fr.
110 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
L^allocation 'de combustible est composée d'une part fixe de
cinq kilogrammes par kilomètre pour la machine et cinq véhicules,
et d'une part variable de 400 grammes par wagon ou voiture en
sus.
Ces chiffres comprennent l'allumage.
La dépense réelle est d'environ cinq kilogrammes.
Le combustible est exclusivement composé de briquettes anglaises
prises àCaen à raison de 20 à 21 fr.la tonne, non compris les frais
de transport qui atteignent 5 fr. 55 par tonne.
Le graissage se fait à l'aide de l'huile de colza et d'oléonaphte
mélangés par moitié: on alloue 25 grammes du mélange par kilo-
mètre.
Ces allocations permettent au mécanicien d'obtenir la primo
moyenne de 100 fr. par mois, ce qui est un chiffre élevé ; le chauf-
feur à droit au 1/4 de la prime du mécanicien.
Le parcours journalier de chaque machine est toujours le
même, soit 201 kilomètres par jour ou la moitié du parcours jour-
nalier total.
Les cinq machines sont suffisantes et nécessaires : deux sont en
roulement, une au lavage et à l'entretien, une aux ateliers et
une autre disponible pour les facultatifs, doubles tractions, etc..
La réserve n'est pas en feu.
Ces machines sont très-bien utilisées, sinon par le trafic qui est
très-faible, au moins comme parcours.
Le chef de traction est aussi chargé de la tenue du magasin
général, matériel et matières; il est assisté pour ce service d'un
garde-magasin et d'un aide magasinier.
Le magasin des imprimés est au service central d'Alençon.
Les dépenses de traction et entretien du matériel pour
Tannée 1885, sont les suivantes :
Traction : personnel, combustible et dépôts. 36.733,78 par kilom. 548 fr.
Entretien et réparation aux ateliers 20.647,68 — 308
Totaux. . 37.381 46 856
A VOIE iNORMALE 111
Mouvement et Trafic
Mouvement. — Un inspecteur est chargé de la surveillance du
service des gares et des trains et des vérifications de comptabilité.
Un contrôleur lui est adjoint pour remplacer les chefs de station
absents, et pour Tintérim des autres agents; mais cet agent n'a
aucune autorité sur Tensemble du service des trains ou des
gares.
Les chefs des gares^ c'est-à-dire des stations de croisement, ont
un traitement variant de 1,500 à 1,800 fr.; ils sont aidés de leurs
femmes comme receveuses à 250 fr. par an, et d'un facteur à 1,000
ou 1,500 fr.
Les chefs de stations gèrent la station sans autre personnel : le
chef de station est dans plusieurs cas la femme d'un cantonnier,
elle assure tout le service, y compris la comptabilité, moyennant
un salaire de 25 à 30 fr. par mois.
Le chef de la gare de Mortagne est agent spécial de la voie
unique.
Un vieil agent est chargé du service de la répartition ; ce ser-
vice, fort peu important, pourrait être facilement assuré
par un chef de gare, moyennant une faible rétribution supplé-
mentaire.
Le service des trains est assuré par trois trains dans chaque
sens. Les correspondances avec les trains de la Compagnie de
rOuest sont difficiles et peu favorisées par cette Compagnie. Aussi
le mouvement des voyageurs n'est-il pas si important qu'il pour-
rait être en raison de ce que la voie « Alençon-Condé » est un peu
plus courte pour la direction de Paris que la voie Ouest, via Sur-
don.
Tous les trains sont mixtes et indifféremment affectés au service
de détail de route ou de wagons complets. Ce n'est que dans le
cas où les correspondances seraient compromises par un retard
qu'un train ne fait pas de manœuvres.
Les stationnements sont, en moyenne, de deux minutes et la
vitesse commerciale est de 25 à 30 kilomètres à l'heure.
Chaque train est conduit par un chef de train et un garde-frein.
Deux équipes constituent tout le personnel des trains ; chaque agent
112 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
a deux jours de congé par mois, et rintérim est assuré par ]e con-
trôleur.
Les conducteurs supplémentaires nécessités soit par le nombre
des véhicules des trains, soit par la mise en marche de trains
extraordinaires, sont empruntés soit aux gares, soit au personnel
d'ouvriers de la traction.
Le service des trains est du reste d'une régularité par-
faite.
Tous les croisements ont lieu régulièrement à Mortagne ; en cas
de retard, ils sont reportés à Tune des gares.
La composition des trains est normalement de deux fourgons,
Tun en tète, Tautrc en queue, d'une mixte à 28 places et de deux
troisièmes à 50 places chacune.
La limite de charge est de 14 véhicules d'Alençon à Mortagne
[rampe) et de 24 dans le sens inverse [pente); elle est de 24 véhi-
cules de Mortagne à Condé [petite) et de 18 dans le sens inverse
[rampe).
On ajoute un garde-frein au delà de 12 véhicules, jusqu'à 18, et
un autre au delà de 18.
Il convient du reste de remarquer que la ligne d'Alençon à
Condé est une ligne qui exporte beaucoup plus qu'elle n'importe ;
son principal trafic, généralement composé de chevaux et bestiaux
du Perche, est du trafic descendant à partir de Mortagne soit vers
Alençon, soit vers Condé.
Au passage des trains dans les stations gérées par des femmes,
les aiguilles sont faites par le garde-frein, les manœuvres et manu-
tentions assurées par le personnel des trains.
En dehors des trains, les manœuvres sont faites avec l'aide d'un
homme de la voie requis à cet effet; mais les femmes ne sont pas
dispensées de pousser les wagons, ce qu'elles font, du reste, sans
réclamation.
Le parcours kilométrique des trains, pour l'année 1885, s*est
élevé à 148,000 kilomètres.
Gares communes, — La Compagnie de l'Ouest assure tout le ser-
vice, sauf en ce qui concerne la traction, dans les gares communes
d'Alençon et de Condé.
A VOIE NORMALE 4i3
La redevance pour loyer et dépenses d'exploitation s'élève à 1/6
pour Alençon et à 1/3 pour Condé.
Ces redevances constituent pour la Compagnie locale une charge
assez lourde.
Pour la gare de Mortagne, qui appartient à la Compagnie locale,
et dont le service est fait par elle, la part de chacune est réglée
au prorata du nombre des trains expédiés ou reçus, qu'ils soient de
passage ou non.
Service oommeroial. — Toutes les questions commerciales sont
traitées par l'inspecteur.
Les tarifs sont les tarifs ordinaires du cahier des charges; mais
la Compagnie locale a établi des prix fermes à base réduite pour le
transport des chevaux d'une part, des bestiaux d'autre part, entre
le Mesle et Alençon etBoissy-Maugis et Condé.
La région desservie est surtout productive en bestiaux ; aussi
ces transports constituent-ils une large part du trafic de la ligne
d' Alençon à Condé. Les autres produits sont fournis par les voya-
geurs, les denrées en grande vitesse pour Paris d'une part, l'Angle-
terre ri4 Honfleur d'autre part, les pommes à cidre, etc., etc.
La ligne a été ouverte au service des colis postaux le
1" octobre 1886, la Compagnie de l'Ouest abandonnant 1/3 de sa
part à la Compagnie locale.
Pendant les premières années, les recettes ont été suffisantes
pour couvrir, sinon les charges du chemin, du moins les dépenses
d exploitation.
Il n'en a plus été de même à partir de 1882, à la suite de
l'ouverture par l'Etat des lignes de Mortagne à Mamers, àLaigle et
à Sainte-Gauburge, lignes rétrocédées à la Compagnie de l'Ouest
parla convention-loi du 20 novembre 188 3; les recettes sont aujour-
d'hui notablement inférieures aux dépenses.
Le contrôle des recettes est assuré a Alençon par douze agents
et un chef du contrôle, chargés du même service pour la ligne de
Mamers à Saint-Calais, ainsi que de la comptabilité des deux
lignes. On ne fait pas de statistique en raison du pou de personnel
dont on dispose.
Les recettes sont centralisées à Alençon.
8
114 CHEMINS DE FER D INTÉRÊT LOCAL
La liquidation des recettes est arrêtée chaque jour dans los
gares.
Les dépenses des services du mouvement et du trafic pour Tan-
née 1885 (contrôle des recettes et comptabilité non compris),
s'élèvent à 100,271 fr. 90, soit par kilomètre à 1,500 fr.
Le service médical est gratuit, y compris les médicaments.
Les agents malades reçoivent leur traitement intégral.
L'ensemble du personnel est satisfaisant.
La proportion kilométrique du personnel, tout compris, est de
1 agent 73.
Résultats généraux poar 1885
Les dépenses totales d'exploitation sont, en résumé, les suivantes
pour Tannée 1885 :
Administration, direction, contrôle des recettes 54.614 86
Voie et bâtiments 84.133 24
Traction et entretien du matériel roulant H7.381 46
Mouvement et trafic 100.271 90
Total. ... * 1496.40 62
Soit par kilomètre de ligne 4.420 »
Soit par kilomètre de train 2 »
Les recettes pour la même année se divisent, impôt déduit, en
io Grande vitesse 162.237 41
2« Petite vitesse 110.331 22
3o Recettes diverses 683 23
Total. . . . 271.888 40
Recettes par kilomètre 4.058 »
Insuffisance de produit total 24.613 06
•
A VOIK NORMALE
115
Résultats comparatifs pour les années 1881-1883-1883-1884-1885
itSDLTATS ULOIÉTUQUES
u
y.
<
1881
1882
1883
1884
188Ô
—' 5
kil.
67
67
67
67
67
HKSULTATS TOTAUX
RECETTES
370.050 35
322.286 66
32i.901 84
313. 73Ô 06
305.383 07
DEPENSES
298 911 40
334.364 28
310.106 05
319.194 20
329.896 13
PRODUIT
RKT
+71.138 95
— 12.077 62
+14 785 79
— 7.459 14
-24 513 06
Dl L BXPLOITATlOIf
RECETTES
5.607
4.883
4.923
4.682
4.058
dCpehses
4.529
5 066
4.699
4 76i
4.420
PRODUIT
nrr
1.078
—183
+224
— 82
—362
"•Il
• * a
81
104
95
102
108
Les résultats totaux comprennent des recettes et dépenses
d'ordre qui ne figurent pas dans les recettes kilométriques, celles-ci
ne renfermant que les recettes et dépenses de l'exploitation propre-
ment dite.
Il y aurait, en somme, peu à faire pour équilibrer les receltes et
les dépenses.
CHAPITRE IX
LIGNE DE MAMERS A SAINT-GALAIS (Sarthe)
I. — ÉTABLIS8EHEIWT DV CHEXIIV
Le chemin de fer d'intérêt local de Mamers à Saint-Galais a été
concédé en 1867, pour une durée de cinquante ans, par le dépar-
tement de la Sarthe, à une Société formée par MM. Haentjens, de
la Rochefaucauld-Bisaccia^ marquis de Talhouët et prince de
Beauvau.
Les concessionnaires recevaient les terrains jusqu'à concur-
rence de 125 hectares; ils devaient bénéficier de la différence
entre le prix réel d'acquisition et l'évaluation de 20.000 francs
par kilomètre. Une subvention kilométrique do 100.000 francs
leur était accordée. Ils devaient exploiter la ligne au moyen de
trois trains par jour.
Les tarifs étaient ceux de TOuest, mais avec une réduction de
50 p. 100 sur les taxes des voyageurs se rendant aux marchés voi-
sins.
Un décret du 16 août 1867 autorisa l'exécution du chemin et
alloua au département une subvention de 2.690.000 francs.
L'ouverture à Texploitation eut lieu en 1872-1873.
Les avantages offerts par le département étaient considérables ;
les concessionnaires réalisèrent des bénéfices sur la construction,
qui, du reste, a été très-satisfaisante.
Malheureusement le chemin de fer de Mamors à Saint-Calais
A VOIE NORMALE 447
n'avait pas à desservir de sérieux intérêts; il eût pu réussir s'il
eût été directement rattaché au Mans, chef-lieu du département.
Excentrique comme il Tétait, il ne devait donner qu'un médiocre
produit.
Aussi, dès l'achèvement de la construction, les concessionnaires
chargèrent-ils de l'exploitation la Compagnie d'Orléans à Châlons
qui se substituait à eux pour tous les droits et obligations, pen-
dant toute la durée de la concession.
La Compagnie d'Orléans à Chàlons a été déclarée en faillite en
octobre 1884.
La ligne de Mamers à Saint-Calais est actuellement gérée par
le syndic de la faillite.
Desoription de la ligne. — La ligne de Mamers à Saint-Calais
relie deux chefs-lieux d'arrondissement du département de la
Sarthe, ainsi que plusieurs chefs-lieux de canton importants, Bon-
nétable, Connerré, Thorigué.
Elle est construite avec des déclivités limitées à 15 millimètres
et des courbes dont les rayons ne descendent au-dessous de
450 mètres qu'à l'entrée de la station de Moncé.
Le département a imposé au constructeur la clôture du chemin
sur toute sa longueur, bien qu'il n'y ait que fort pou de passages
à niveau gardés et pas une seule maison de garde.
Le terrain est en général très-facile ; aussi rencontre-t-on fort
peu de terrassements. La ligne a 77 kilomètres de longueur.
Le rail à patin est en fer et pèse 30 kilos. Le renouvellement se
fait en rail d'acier de même poids et profil, ce qui paraît être une
erreur, le rail d'acier de 25 kilos étant préférable, au point de vue
de la résistance, au rail de fer de 30 kilos ; si donc ce dernier est
suffisant, le rail de 25 kilos acier l'est à fortiori.
Le rail de fer a 6 mètres de longueur de barre et repose sur
7 traverses, écartées de 90 centimètres d'axe en axe, les traverses
extrêmes étant à 60 centimètres du joint, qui est éclissé en porte
à faux.
La traverse est en chêne, le ballast en sable de Bonnétable.
Les stations sont au nombre de dix-sept, ce qui leur donne un
écartemenl moyen de 4 kil. 5.
118 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Le type des stations est représenté parla station de Moncé (pi. VI,
fig. 12). Ce t}rpe est très-satisfaisant; voies courtes, bâtiment des
voyageurs et halle à marchandises accolés, même dans les gares
de Mamers et de Saint-Calais.
Les voies sont coupées par une traversée de plaques qui per-
mettent de faire les manœuvres avec une très-grande célérité,
quand il n'y a qu'un wagon à ajouter au train, ou à en retirer.
Dans le cas où il y a plusieurs wagons, les manœuvres se font par
un coup de machine.
Les croisements des trains se faisant normalement à Connerré,
la plupart des stations n'ont pas la voie d'évitement figurée au
plan de Moncé.
Les bâtiments des stations sont simples et suffisants.
Chaque station est couverte par deux signaux carrés, fixes,
rouges, éclairés le soir ou lo matin, quand il y a lieu, par deux feux,
Tun par réflexion. Ces signaux sont placés à 100 mètres des
pointes d'aiguilles et indiquent le ralentissement pour entrer en
gare.
Les alimentations sont assurées :
A Mamers par Teau de la ville ;
A Connerré par la pompe des ateliers;
A Saint-Calais par un bélier hydraulique;
A Saint-Aignan par une pompe à main, manœuvrée par un
homme de la voie. Cette dernière alimentation ne sert du reste
que par extraordinaire.
Matériel roulant. — Voitures et wagons. — Les voitures sont
au nombre de douze, dont six à étage, qui donnent lieu aux récla-
mations qu'occasionne ce genre de véhicules sur tous les chemins
de fer d'intérêt local.
Quatre fourgons munis d'un compartiment pour le service de
la poste complètent l'armature du matériel de grande vitesse.
Le matériel de petite vitesse se compose de 24 wagons cou-
verts et de 25 plates-formes, soit 49 wagons ou 0,6 par kilomètre,
armature suffisante en raison du très-faible trafic.
Locomotives. — Les machines, au nombre de cinq, du même type,
A VOIE NORMALE H9
machines-tender à trois essieux accouplés, ont été construites
dans les ateliers de Fives-Lille.
Elles Sont de tous points semblables, sauf les dimensions, à
celles du chemin de fer de TEure, construites par la même maison.
Timbrées à 8 kilos 25, avec des roues de 1 m. 19 de diamètre
au contact, et un empattement de 2 m. 85, ces machines pèsent
25 tonnes en charge.
Elles remorquent 125 tonnes en rampe de 15 mill., soit 14 vé-
hicules chargés, à la vitesse de 25 kilomètres à Theure.
Le faible poids de ces machines montre que le rail de 25 kilos
acier aurait largement suffi.
Ateliers de réparatioii. — Les ateliers sont installés à Connerré.
Us permettent de faire toutes réparations.
Une machine de quatre chevaux actionne :
Un tour à roues ;
Un tour parallèle ;
Une perceuse ;
Un étau limeur.
Une forge et un atelier de menuiserie complètent l'outillage.
Le personnel est composé de huit agents, sous les ordres du
chef de dépôt, soit deux ajusteurs, un forgeron, un apprenti, un
menuisier, deux charpentiers et un peintre.
Dépenses de premier établissement au 31 décembre 1885
i^'CoDstruction du chemin 6.748.9o9 04
2» Matériel et mobilier 692.669 66
3* Intérêts et amortissement pendant la construclion et
résultats de l'exploitation au compte d'établissement. . 214.567 8o
Total cénéral. *. . . 7.723.912 94
Soit par kilomètre 100.300 »
II. - EXPLOITATIO:\
Administration kt Direction
L'administration du chemin de Mamers à Saint-Calais est toute
concentrée dans les mains du syndic de la faillite de la Compagnie
120 CHEMINS DE FER D'LNTÉRÊT LOCAL
d'Orléans à Ghàlons, auquel sont soumises toutes les questions de
principe et Tordonnancement des dépenses, etc.
Le directeur n'est autre que celui du chemin de fer d'Alençon
à Condé ; le personnel de direction et de contrôle des recettes
seul est commun aux deux lignes.
Les dépenses d'administration centrale, de direction et contrôle
des recettes s'élèvent pour 1885 à 48,053 fr. 43, soit par kilo-
mètre à 624fr. Elles sont relativement élevées.
Voie et Bâtiments
Un ingénieur résidant à Connerré est chargé à la fois des ser-
vices de la voie et de la traction.
Il est assisté, pour la voie proprement dite, de deux piqueurs,
l'un pour la section de Mamers à Connerré, l'autre pour celle de
Connerré à Saint-Calais.
Le personnel est divisé en 15 équipes de trois hommes, chaque
équipe embrassant cinq kilomètres.
Les chefs d'équipe seuls sont commissionnés et reçoivent 90 à
100 fr. par mois; les hommes sont payés à l'heure à raison de
0 fr. 25.
Il n'y a pas une seule maison de garde ; à chacun des neuf pas-
sages gardés est placée une guérite; la garde-barrière reçoit
200 fr. par an.
La voie est très-bonne; les charges sont faibles, le rail est lourd
et le balast d'excellente qualité.
On renouvelle par an environ un kilomètre en rails d'acier, de
côté et d'autre, et 3,000 traverses. Toutes les traverses sont visi-
tées dans le cours de l'année.
Un ouvrier, qui est à la fois maçon, couvreur, vitrier et peintre,
suffit à l'entretien des bâtiments.
Les dépenses de voie et bâtiments pour l'année 1885 s'élèvent
à 87,924 fr. 66, soit par kilomètre à l,142fr.
Th ACTION
Un chef de dépôt, chargé en même temps de la conduite des
ateliers^ est adjointe l'ingénieur pour le service de la traction.
A VOIE NORMALE- 421
Le personnel de bureau est composé d'un magasinier ci d'un
comptable.
Le roulement est. assuré par deux machines, dont chacune
couche un jour à Saint-Calais, le lendemain à Mamers ; il néces-
site, par suite, deux mécaniciens et deux chaufTeurs ; le roulement
de chaque équipe porte sur quatre jours, après lesquels deux jours
sont consacrés aux réparations de dépôt et au lavage,
Le personnel de traction est au total de trois mécaniciens et trois
chauffeurs.
Les allocations de combustible sont fixées d'après la règle adop-
tée sur la ligne d'Alençon à Condé, c'est-à-dire six kilos pur kilo-
mètre pour la machine et cinq wagons chargés, et 400 grammes
par wagon au delà de cinq wagons.
Les primes d'économie des mécaniciens atteignent au total
80 fr. par mois en moyenne; celles des chauffeurs le 1/4 de cette
somme.
Les parcours journaliers de chaque machine en service
sont de 231 kilomètres, ce qui constitue une excellente utilisation.
L'ingénieur de la traction est chargé du magasin matières et
matériel pour les trois services de voie, traction et mouvement ;
uu magasinierest préposé à la comptabilité et satisfait aux demandes
des services.
Les dépenses de traction et matériel pour 1885 sont les sui-
vantes:
Conduite, combustible et alimentation 58.718 43
Entretien et réparation aux ateliers 29.155 53
Total 90.373 96
Soit par kilomètre de ligne 1.174 »
Soit par kilomètre de train 0 53
Mouvement et Trafic
Mouvement. — Le service du mouvement et du trafic est assuré
par un inspecteur de Texploitation, en résidence à Mamers*; un
contrôleur lui est adjoint pour les intérims de chef do station.
Les gares^ c'est-à-dire les stations munies d'une voie d'évitement
122 CHEMINS DE FER DLNTÉRÊT LOCAL
et du télégraphe, sont au nombre de 7. Elles sont gérées par un
chef de gare à 1,600 fr. et un homme d*équipe à 900 fr.
Les stations n'ont ni voie d'évitement ni télégraphe ; elles sont
gérées, soit par un homme seul, soit par une femme.
Le service des trains comporte trois trains dans chaque sens,-
faisant indistinctement là grande et la petite vitesse et manœuvrant
au besoin dans chaque station, où ils ont en moyenne deux minutes
d'arrêt.
Les vitesses sont de 35 kilomètres à l'heure; les machines
peuvent aller à 45 kilomètres, au maximum. Chaque train est des-
servi par deux agents, un conducteur et un garde-frein : deux
équipes suffisent pour tout le service. Ces agents assurent les
manœuvres des wagons au passage des trains dans les stations. S'il
y a des manœuvres ou manutentions à faire dans l'intervalle des
trains, les hommes de la voie sont au besoin réquisitionnés.
La composition normale des trains en matériel à voyageurs est
d'un fourgon et une voiture mixte à étage et une troisième à
frein.
Les compartiments, sauf ceux de troisième classe, sont chauffés
l'hiver avec des bouillottes réchauffées aux extrémités du parcours
par la vapeur de la locomotive.
Le maximum de charge est de quatorze véhicules sur tout le
parcoure, la puissance des machines étant limitée à 125 tonnes
sur les rampes de 15 millimètres.
Les règlements de sécurité sont les mêmes que ceux appliqués
sur le chemin de l'Orne. Les gares sont ouvertes à la télégraphie
privée. Le chef de gare de Mamers est agent spécial de la voie
unique, celui de MaroUes assure la répartition.
Tous les croisements de trains se font à Connerré. Les corres-
pondances sont faciles à assurer à Mamers et à Connerré ; elles
n'existent pas à Saint-Calais.
Les trois gares de jonction avec les réseaux voisins sont en com-
munauté : Mamers et Saint-Calais, qui appartiennent à la Compa-
gnie locale, sont gérées par elle; le loyer et les dépenses
d'exploitation sont répartis au prorata du nombre des trains.
Pour la gare de Connerré, qui appartient à la Compagnie de
A VOIE NORMALE 123
rOuest, la Compagnie locale paye 1/3 du loyer et des dépenses
d^ exploitation.
Les échanges de matériel avec la Compagnie deTOuest et TAd-
ministration des chemins de fer de TEtat se soldent généralement
au débit de cette dernière, et au crédit de la première; et ensemble
par Téquilibre.
Serrice commercial. — Ce service offre bien peu d'intérêt.
Les tarifs, comme on Ta dit au début, sont ceux de la Compa-
gnie de rOuest avec réduction de 50 p. 100 pour les voyageurs se
rendant aux marchés.
Le trafic est purement agricole : pas d'autre industrie desservie
qu'une verrerie à Coudrecieux, donnant un mouvement de trois à
quatre wagons par jour; peu de bestiaux, quelques denrées à des-
tination de Paris ; pas de trafic de transit.
La ligne a été ouverte au service des colis postaux à partir du
1" octobre, la Compagnie de TOuest accordant 1/3 de sa part à la
Compagnie locale.
Les liquidations sont arrêtées chaque jour; les femmes tiennent
elles-mêmes leur comptabilité.
Les recettes sont centralisées à Mamers et reversées au service
central à Âlençon.
Le nombre limité du personnel ne permet pas défaire de statis-
tique.
Les dépenses du mouvement et du service commercial se sont
élevées en 1885 à 70,183 fr. 60, soit par kilomètre à 910 fr.; elles
ne comprennent pas les dépenses du service du contrôle.
Service médical, — Ce service est gratuit, y compris les médi-
caments que la Compagnie prend à sa charge.
Les agents malades sont à solde entière jusqu'à cinq jours
d'absence, en demi-solde au delà de cinq jours.
124
CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Résultats généraux pour 1885
M
Les dépenses sont en somme ainsi totalisées :
Administration direction et contrôle 48.053 4
Voie et bâtiments 87.924 6
Traction et matériel 90.373 9
Mouvement et trafic 70.183 6
ToTAi 296.540 6
Soit par kilomètre de ligne 3.851 i»
Les recettes pour la même année se décomposent comme suit
1» Grande vitesse, impôt déduit 146.743 0
20 Petite vitesse 121.613 0
3* Recettes diverses : gares communes, location du maté-
riel, magasinage 5.046 9
Total. . . . 290.713 8
3./ /O p
5.826 8
; . . . . 76 »
Soit par kilomètre de ligne . .
D'où une insuffisance totale de
Etpar Kilomètre de ligne de. .
Résultats comparatifs pour les années 1881, 1882^ 1883,
1884 et 1885
on
là
<
1881
1882
1883
1884
1885
BOJHie
exploitée
77
77
77
77
77
RÉSULTATS TOTAUX (Impôt déduit)
Recettes
316.069 49
312.046 18
312.359 91
298.058 05
290.713 80
Dépenses
297 685 23
304.349 77
344.916 11
297.571 10
296.540 65
Produit
net
18.38r36
7.696 41
—32.556 20
+ 486 95
— 5.826 85
RÉSULTATS KILOUÉTRIQUES 1
Reçut les
Dépenses
Produit
net
i.IOo
3.866
239
4.053
3.953
100
4.056
4.479
— 423
3.870
3.865
+ 5
3.775
3.851
— 76
S s
9i
98
110
100
102
En résumé, la ligne de Mamers à Saint-Calais est bien con
truite et exploitée économiquement, avec un personnel qui i
dépasse pas 2,5 par kilomètre.
Son trafic est malheureusement trës-restreint.
CHAPITRE X
CHEMINS DE FER DE L'EST DE LYON
Lignes de Lyon à Ssdnt-Geniz-d'Aoste. ... 72 kil.
• — de Sablonnières à Montalieu 18 —
— de Montalieu à Amblagnieu 3 —
L — ÉTABLISSEMENT DES CHEHI.^S
La ligne de Lyon à Saint-Genix-d'Aoste a été concédée par dé-
cret du 14 août 1877 à M. Bachelier quia vendu ses titres à la
Société belge des chemins de fer. Cette dernière, après l'exécution
des travaux, a créé la Société anonyme actuelle, dont elle est restée
maîtresse, sans émettre ni actions, ni obligations. Les titres non
émis sont restés en portefeuille dans les mains des banquiers de la
Société belge. Le capital-actions est nominalement do 6,000,000 fr.
d'ailleurs réalisés.
La Compagnie de TEst de Lyon a obtenu, en janvier 1879, la con-
cession de Tembranchement de Sablonnières à Montalieu- Vercieu
et postérieurement en août 1883, celui do Montalieu aux carrières
d'Amblagnieu-Pourcieu, ce dernier devant être exclusivement
aCTecté au service des marchandises.
Les subventions accordées aux ligues de Lyon àSaint-Genix et
de Sablonnières à Montalieu se sont élevées respectivement à
126 CHEMINS DE FER D1NTÉRÊT LOCAL
500,000 francs et à 150,000 francs. L'embranchemeDi d*Âmbla-
gnieu a été construit sans subvention!
La ligne de Saint-Genix a été ouverte en 1881, Fembranche-
ment de Sablonnières à Montalieu eu 1882.
Ces deux lignes sont sous le régime do la loi de 1865.
La ligne d'Âmblagnieu récemment ouverte est, au contraire,
placée sous le régime de la loi de 1880.
L'ensemble de ces lignes avait pour but de desservir des car-
rières, fours à chaux et à ciment, en même temps que la banlieue
de Lyon, et Villeurbanne. La région traversée est du reste fort
pauvre en produits agricoles.
La ligne part de l'extrémité du quartier des Brotteaux où elle
est reliée à la gare P.-L.-M. de ce nom.
Elle traverse Villeurbanne, commune de la banlieue de Lyon;
jusqu'à Crémieu (32 kilomètres), le tracé reste en pays plat et fa-
cile; au delà le profil est plus ondulé. Les déclivités sont généra-
lement limitées à lOmill., sauf sur deux points où elles attei-
gnent 16 mill. ; encore sont-elles dans le sens favorable au
trafic.
L'embranchement de Montalieu ne présente qu'exceptionnelle-
ment et sur de très-petits parcours la déclivité de 10 mill.; celui
d'Amblagnieu au contraire est en rampe de 20 mill., ce qui n'offre
aucun inconvénient, le sens du trafic étant suivant la pente. La
gare de Montalieu est reliée avec la gare de la Compagnie
P.-L.-M.
Les rayons des courbes ne descendent pas au-dessous de
400 mètres ; encore cette limite ne se rencontre-t-elle qu'aux abords
des stations.
Le rail pèse 30 kilos le mètre courant, il est en acier et à patin.
Les traverses sont en chêne non injecté, à raison de neuf traverses
par rail de 8 mètres.
La ligne a été construite avec soin et se prête facilement à des
vitesses pouvant atteindre 70 kilomètres à l'heure.
Les stations sont très-rapprochéos des localités desservies. Le
plan de la station courante de Saint-Hilaire est représenté fig. 13,
pi. VL Les stations courantes ne sont généralement pas munies de
quai, ni de halle, suivant le mode belge.
A VOIK NORMALK 127
La disposition des voies rend difficile la manœuvre des trains
mixtes; en effet, lorsqu'on dispose d'une voie d'évitement devant
le bâtiment des voyageurs, on peut laisser stationner les voitures à
voyageurs devant ce bâtiment pendant que la machiac va prendre
ou laisser des wagons sur les voies de marchandises; ici au con-
traire, comme le montre le plan de Saînt-Hilaire, on est forcé de
laisser sur la demi-lune les voyageurs placés en queue du train,
de faire les manœuvres, puis do venir les rechercher pour les
amener devant le bâtiment de la station, où ils descendent du
train. Il en résulte une gêne pour le public et une perte de temps
dans les manœuvres.
La proscription systématique de plaques tournantes n'est pas
non plus pour faciliter les manœuvres dans les gares où le mou-
vement est important.
En somme, la disposition des stations, admissible sur une ligne
où ne circulent pas de trains mixtes, n'est pas à recommander
pour une ligne à faible traftc.
Les bâtiments sont soignés et confortables.
Les stations sont couvertes par des signaux carrés d'arrêt absolu
manœuvres à distance et dont la cocarde est placée très-bas, ce qui
offre le double inconvénient de permettre de les confondre avec
les signaux des trains et de diminuer leur champ de visibilité.
Pour l'alimentation, il y a des machines fixes d'alimentation à
Villeurbanne, Crémieu, Sablonniëres et Saint-Genix ; en outre, il
existe trois alimentations avec pompes à main.
Matériel roulant. — Voitures et wagons. — L'outillage de la
ligne en matériel roulant est plus que suffisant pour les besoins du
service: il comprend 46 voitures du type ordinaire dont 31 cons-
truites par la Société Bonnefond et C* de Paris, 15 par les ateliers
de Malines. Ce matériel se divise en :
30 voitures de troisième classe ;
8 mixtes première, seconde et troisième;
8 mixtes première et seconde ;
17 fourgons à compartiment pour la poste complètent l'outillage
de grande vitesse.
428 CHEMINS DE FER DMNTÉRÊT LOCAL
Les wagons ont été construits en Belgique pour une très-grande
part. Il y a :
•
40 wagons couverts tous munis du frein à vis;
126 wagons tombereaux à bords de 0 m. 80 de hauteur, 63
ont le frein à levier.
80 demi-tombereaux à bords de 0 m. 40 de hauteur, 5 ont
lô frein à vis ;
5 wagons plats.
Soit au total 251 wagons^ ce qui constitue un outillage large.
L'armature en wagons ressort à 2,7 par kilomètre, et en voi-
tures et fourgons à 0,5 par kilomètre.
Locomotives, — Les locomotives présentent un intérêt tout
spécial, en ce sens qu'elles ont été construites en vue de brûler
des charbons menus ; on leur a donné à cet effet une très-grande
surface de grille.
Elles sont à foyer Belpaire et sortent des ateliers de Gouillet
(Belgique), dont la Société belge des [chemins de fer est pro-
priétaire.
Les machines au nombre de dix sont toutes du même type :
locomotive-tender à trois essieux accouplés et à roues de 1 m. 42
de diamètre. Le mouvement est extérieur; le faible diamètre des
roues ne permet pas de dépasser des vitesses absolues de 50 à
53 kilomètres à Theure.
On projette de construire quatre nouvelles machines à deux es-
sieux couplés et à roues de 1 m. 80 de diamètre pour atteindre de
plus grandes vitesses.
Les dimensions principales des machines en service sont les
suivantes :
Diamètre des cylindres 0 m. 430
Course des pistous 0 m. 600
Diamètre des roues au roulement 1 m. 420
Timbre de la chaudière 9 atmosph.
Longueur de la grille 1 m. 980
Largeur de la grille 1 m. 050
k
A VOIE NORMALE 129
Surface de la grille 2 mq. 080
Hauteur du ciel du foyer au-dessus du mi-
lieu de la grille 1 mètre.
Nombre des tubes 216
Surface de chauffe par les tubes 93 mq.
Surface de chauffe par le foyer 7 mq.
Surface de chauffe totale 100 mq.
Capacité des soutes à eau 4.500 litres
Capacité des soutes à charbon 1.100 kilos
Longueur totale de la locomotive 7 m. 085
Largeur 2 m. 90
Ecartement extrême des essieux 3 m. 800
Poids de la locomotive à vide 30.000 kilos
Poids de la locomotive en ordre démarche. 37.S00 kilos
Poids sur chaque paire de roues a vide: Av. 10.800. Mil. 10.800.
Ar. 8.400.
Poids sur chaque paire de roues en charge: Av. 13.000. Mil. 13.000
Ar. 11.500.
La puissance de ces machines est de 300 chevaux,
Les barreaux de grille sont disposés par paquets de 10; ils ont
0 m. 63 de longueur, 70 mill. de hauteur et sont écartés de 5 mill.,
ce qui est à la fois suffisant et nécessaire ; un ecartement trop
faible gênerait la circulation de Tair; un ecartement plus con-
sidérable laisserait passer le poussier. Avec cette dimension,
le poussier ne passe pas à travers les barreaux, car la
houille mouillée colle et lorsqu'elle est au rouge, elle s'agglo-
mère en laissant des vides suffisants pour le passage de Tair, à
la condition toutefois que Ton charge à très-peu d'épaisseur,
0 m. 15 au plus, et par conséquent très-fréquemment.
Il est impossible de brûler du poussier sur des grilles de faible
surface, parce que ce poussier serait entraîné dans la boîte à
fumée par le tirage. Dans les très-grands foyers comme celui
des machines de TEst de Lyon, au contraire, les énergiques
appels d'air produits par Téchappcment dans la cheminée sont
atténués et régularisés par la grande capacité du foyer qui cons-
titue en quelque sorte volant et ne détermine à travers la couche
9
130 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
do poussier qu^un tirage modéré et très-régulier; il s'ensuit sans
doute une combustion moins active, mais la grande surface de
grille vient compenser Tinsuffisance d'élévation de tempé-
rature.
Lorsque Ton veut brûler du poussier dans des machines à très-
grande vitesse, il devient plus difficile d'éviter Tentraînement;
car, d'une part, on ne peut augmenter indéfiniment la surface de
la grille; d'autre part, le nombre des coups de piston par seconde
devenant plus considérable, le tirage devient plus énergique.
Dans les dernières machines qu'il a construites, M. Belpaire a di-
minué très-notablement la hauteur du foyer, afin de porter le
ciel du foyer à une température élevée, et par suite, d'augmenter
la production de vapeur. Mais comme la capacité du foyer était
insuffisante pour faire office de régulateur de tirage, il a dû
charger de cette fonction la boîte à fumée dont il a accru consi-
dérablement la capacité; à cet effet, il lui a ajouté le volume obtenu
en menant du sommet de la cheminée deux plans tangents au
corps cylindrique.
Grâce à cette disposition, M. Belpaire brûle exclusivement des
poussiers à 6 et 7 francs la tonne au lieu de charbons à 13 francs.
La consommation resterait plutôt inférieure, avec du poussier, à ce
qu'elle est avec des tout-venants ou des briquettes, car le charbon
en poussier se trouvant dans un grand état de division, la com-
bustion en est immédiate et il n'y a pas de chaleur perdue à ré-
chauffement progressif d'une masse importante de briquettes ou
de gaillette
« Je suis même convaincu, nous disait M. Belpaire, qu'il y au-
« rait avantage, le jour où on manquerait de poussier, à réduire
« préalablement le tout- venant en poussière plutôt que de le brûler
(( tel quel. »
Quoi qu'il en soit de cette digression, les machines de la Com-
pagnie de l'Est de Lyon font un excellent service, et le charbon
qu'elles brûlent, composé exclusivement de fines de Saint-Etienne,
revient à 10 fr. 25 la tonne sur wagons à la mine, et à 14 fr. 80
en gare de Lyon-Est, alors que la briquette reviendrait à 26 fr.
la tonne et le tout- venant à 17 fr. 50 (13 francs a la mine), soit des
A VOIE NORMALE
ISi
différences de 11 fr. 20 par rapport aux briquettes et de 2 fr. 70 par
rapport au tout- venant.
On peut mesurer par là quelle importance il y a à disposer de
très-grands foyers dans les locomotives. Un autre avantage des
grandes grilles, c'est qu'elles permettent de brûler des charbons
mêmes médiocres, et par suite moins coûteux.
Ateliers de réparatioti. — Les ateliers de réparation sont installés
à Villeurbanne. Leur outillage comprend :
1 forge double ;
2 tours, dont un tour à roues;
1 presse à caler les roues;
1 étau limeur ;
1 perceuse;
1 petite raboteuse;
Et, en outre, des installations suffisantes pour la pein-
ture et la menuiserie.
L'outillage est suffisant pour toutes les réparations courantes.
Le remplacement des bandages est fait aux usines de Saint-Cha-
mond (Forges et Aciéries de la marine).
Le personnel des ateliers comprend douze ouvriers et une dizaine
de laveurs, manœuvres, chauffeurs de nuit, etc. Il est placé sous
les ordres du chef de dépôt et d'un chef-mécanicien.
Dépenses de rétablissement des trois lignes au 31 décembre 1884
!• Construction
2" Matériel et Mobilier
3» Approvisionnements
Total
Totaux par kilomètre. . .
LYON
A SAINT-GEMX
SABLONNIÈKE
A MONTALIEi;
MONTALIEU
A AMULAGNIEU
9. OU. 870 .
l.i2ô.2K0 -
20.000 -
2.483 800 -
3Ô0.200 •
ô.OOO -
26i.250 •
35.750 »
10.460.150 .
liô.418 -
2.745.000 -
152.500 .
335.000 -
111.900 .
132 CHEMINS DE FER D1NTÉRÊT LOCAL
L'ensemble des lignes a donné Heu à une dépense totale de
13,540,150, dont 12,720,150 à la charge de la Compagnie.
Le prix de revient moyen du kilomètre ressort au chiffre modéré
de 145,500 fr.
II.— EXPLOITATION
Administration
L'administration est concentrée dans les mains du directeur
auquel toute latitude est laissée, sauf pour les questions graves et
de principe, qui doivent être soumises au Conseil d*adminis-
tration.
Le directeur est du reste effectivement le chef des trois services
de voie, traction et exploitation; son siège est à Lyon.
Le service central de la Compagnie se compose, outre le direc-
teur, de :
1 chef de comptabilité ;
3 agents au contrôle des recettes ;
1 caissier payeur ;
t secrétaire pouvant faire des remplacements ;
1 expéditionnaire.
Toutes les dépenses sont liquidées sur la signature du direc-
teur, sans rintervention du Conseil d'administration.
Voie et Bâtiments
Le service actif de la voie est assuré par un chef de section
auquel sont adjoints trois piqueurs et un dessinateur.
Les équipes de la voie sont au nombre de 13; elles ont en
moyenne quatre hommes et un brigadier.
Les lignes sont exemples de clôtures ; beaucoup de passages à
niveau sont gardés, ce qui a permis de loger tous les agents de
la voie.
Les femmes gardes-barrières ont 15 fr. par mois
Les poseurs 75 fr. —
Les brigadiers 100 fr. —
I-es piqueurs 150 fr. —
A VOIE NORMALE 133
Les travaux de voie consistent principalement en renouvelle-
ment de traverses. Les traverses sont restées longtemps exposées
aux intempéries pendant la construction, qui a été fort lente ; elles
se sont échauiTées, et malgré le peu de temps que la ligne est en
exploitation, on est déjà forcé de faire un renouvellement très-
étendu. C'est ainsi qu'en 1884 le renouvellement a absorbé une
somme de 14,002 fr. 21.
L'entretien des bâtiments est insignitiant ; il est assuré par les
équipes.
Les dépenses de la voie et des bâtiments, pour l'anncc 1884,
s'élèvent à 123,436 fr. 12 c. ; soit par kilomètre de voie,
1,327 fr. 27 c.
Traction
Un chef de dépôt assure le service de la traction sous les ordres
du directeur.
Le nombre des machines en service est de six à la fois ; une
est au lavage, et quatre sont en réserve; le personnel de traction
se compose de sept mécaniciens et de sept chauffeurs. — La na-
ture des eaux, bonnes à Lyon, mauvaises sur la ligne, nécessite
le lavage des machines tous les sept jours. Le lavage correspond
au jour de repos du mécanicien et de son chauffeur.
Outre ce personnel, il y a encore un chauffeur autorisé pouvant
assurer le remplacement d'un mécanicien, et un chauffeur d'ali-
mentation pour les alimentations do Crémieu et de Sublonnières.
Le service de la machine d'alimentation de Villeurbanne est
assuré par le chauffeur de la machine des ateliers.
L'allocation de combustible est de :
6 kilos par kilomètre pour les trains de 40 tonnes de charge
et au-dessous (machine non comprise) ;
9 kilos en été, 10 kilos en hiver pour les trains mixtes ou de
marchandises ayant comme charge moyenne 100 à 150 tonnes.
On alloue 100 kilos pour l'allumage, qui se fait avec du charbon
grenu à 16 francs la tonne.
L'heure de stationnement est comptée pour 6 kilomètres.
L'heure de manœuvre est comptée pour 10 kilomètres.
134 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Le graissage se fait à l'huile minérale, même dans les cylin-
dres, sans aucune disposition spéciale. L'allocation d'huile est de
35 grammes par kilomètre.
Les primes d'économie, tant pour le combustible que pour le
graissage et l'entretien, atteignent mensuellement une moyenne
de 50 francs pour les mécaniciens, 25 francs pour les chauffeurs.
La consommation moyenne de charbon ne dépasse pas 6 kil., 5
par kilomètre de train.
Bien que les mécaniciens soient autorisés à accepter des sur-
charges jusqu'à concurrence de 20 p. 100 de la charge inscrite sur
les marches de train, on ne leur accorde pour cela aucune
allocation supplémentaire; le contraire serait cependant rationnel.
Le parcours moyen des machines est de 35,000 kilomètres
par an.
Les dépenses de traction pour l'année 1884 montent à
154,649 fr. 07 c.
Ce qui fait ressortir le prix de revient du kilomètre de train à
0 fr. 615, et du kilomètre de ligne à 1,680 francs.
Mouvement et Trafic
Mouvement. — Le service du mouvement est assuré par un chef
du mouvement qui a autorité sur les trains et les gares; il est
aussi chargé de l'instruction des litiges ; un employé lui est spé-
cialement attaché.
Le directeur se réserve exclusivement le service commercial.
Les lignes comprennent 22 gares et stations, plus un bureau
de ville à Lyon,
Service des trains. — La ligne de Lyon à Saint-Genix a un
mouvement de deux trains de voyageurs et de deux trains mixtes
de bout en bout dans chaque sens : entre Lyon et Crémieu, il y a
quatre trains de voyageurs.
En outre, pendant Tété, saison de construction, le transport
des pierres et de la chaux nécessite deux trains de marchandises;
un seul l'hiver.
A VOIE NORMALE 435
L'embranchemeDt de Sablonnières à Montalieu n'est desservi
que par des trains mixtes.
La vitesse des trains do voyageurs varie, suivant le profil, de 42
à 48 kilomètres à Theure ; celle des trains de marchandises de
18 à 30 kilomètres.
Il n'y a pas de service de nuit. Toutes les gares ne sont pas
outillées pour assurer les croisements ; huit seulement les per-
mettent, les gares extrêmes non comprises.
La composition des trains en matériel grande vitesse est de :
i fourgon de tête ;
3 ou 4 voitures, dont une troisième à frein à vis on queue;
1 wagon soieries.
Les trains de marchandises peuvent être composés à 25 véhi-
cules ; on ne peut dépasser ce chifFre en raison du grand poids des
marchandises transportées (pierre, chaux, ciment). — Aussi les
voies de garage ne sont-elles pas disposées pour recevoir plus
de 25 véhicules.
La répartition du matériel est assurée par le chef du mouve-
ment.
Le chauffage est fait à l'acétate de soude et donne d'excellents
résultats. Les bouillottes séjournent pendant une heure dans un
bain d'eau, qui est bouillante quand on les y plonge et que Ton
maintient à 80\
Les trois classes sont chauffées.
L'éclairage ne présente aucune particularité.
Le parcours des trains de toute nature a été de 248,446 kilo-
mètres en 1884.
Service des gares et stations. — Toute station comporte au mi-
nimum un chef de station et une receveuse, femme du chef de
station. La receveuse assure le service du télégraphe et le chef
de station concourt à la manutention et aux manœuvres il fait
les aiguilles.
Le chef de station reçoit 75 francs par mois, et la receveuse 25;
en outre, le ménage est logé, chauffé et éclairé.
136 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Dans toute station comportant croisement, il y a au moins un
homme d'équipe, quelquefois deux, dont un est élève facteur.
Le chef de station reçoit dans ce cas de 110 à 125 francs par
mois.
Le télégraphe Morse existe dans toutes les stations, deux haltes
exceptées. Le maniement de cet appareil est difficile à apprendre
aux femmes; les télégraphistes sont tenues de traduire les signes
du Morse en langage ordinaire sur les procès-verbaux télégra-
phiques.
On ne se sert du reste pas du télégraphe pour les trains régu-
liers.
Les grosses manutentions sont généralement faites par le pu-
blic, qui y est assujetti par les tarifs spéciaux. Lorsque la manu-
tention reste à la charge de la Compagnie, le chef de station
demande au brigadier de la voie les poseurs nécessaires pour y
subvenir.
Le service d'échange avec la Compagnie P.-L.-M. est assuré par
les soins de cette dernière, tant aux Brotteaux qu à Montalieu; les
manœuvres restent à sa charge.
Les raccordements avec les gares des Brotteaux et de Montalieu
ont été construits aux frais de la Compagnie de TEst de Lyon.
La gare de Saint-Génix sera également raccordée prochaine-
ment avec la ligne P.-L.-M. de Saint-André-de-Gaz à Virieu-le-
Grand.
Les grosses marchandises ne subissent pas de transbordement
en passant d'une Compagnie sur Tautre. Pour les parcours infé-
rieurs à 100 kilomètres sur les rails du P.-L.-M., la Compagnie
locale peut charger sur son propre matériel; pour les parcours
supérieurs à 100 kilomètres, elle est tenue de demander du matériel
à la grande Compagnie.
Le matériel échangé est loué à raison de 3 fr. par jour, suivant
les conditions habituelles.
Les marchandises de détail sont transbordées par la Compagnie
sur laquelle la marchandise est réexpédiée et aux frais de cette
Compagnie. Cette réciprocité est équitable. On ne peut que regretter
de ne pas la voir plus fréquemment appliquée ailleurs.
A VOIE NORMALE i37
Service oommercial. — Les marchandises P. Y. transportées
au tarif général sont divisées en quatre séries, dont les prix d'ap-
plication sont respectivement de 0 fr. 16, 0 fr. 14, 0 fr. 10 et
0 fr. 08 par kilomètre, sans réduction proportionnelle <\ la distance.
Il existe un certain nombre de tarifs spéciaux, applicables par
wagoos complets de 3, 5, 8 ou 10,000 kilos, selon la nature des
marchandises, et visant spécialement les pierres, les chaux et
ciments, bois de charpente, vins et alcools, farines et céréales,
métaux, foins et pailles, et animaux vivants.
Tous ces tarifs spéciaux comprennent les frais de gare. Ils pré-
sentent cette particularité non encore rencontrée jusqu'ici, sur les
chemins de fer d'intérêt local, que les barèmes d'application ont
des bases décroissantes avec la distance, suivant le système belge.
Les conditions d'application sont d'ailleurs les mêmes que sur la
Compagnie de la Méditerranée.
Les écritures sont tenues comme à la Compagnie P.-L.-M.,avec
cette différence, que la feuille d'expédition est distincte de la décla-
ration d'expédition.
La comptabilité est mensuelle, ce qui présente ici un inconvénient
sérieux ; en effet, les agents comptables ne sont pas assujettis au
cautionnement; dès lors, il ne reste à la Compagnie aucune sanc-
tion contre les détournements, que rend plus faciles la comptabilité
mensuelle.
Le remède consisterait à augmenter le nombre des contrôleurs
et par suite celui des vérifications comptables qui ont lieu actuel-
lement toutes les six semaines et sont faites par le chef de comp-
tabilité.
Le contrôle des recettes est assuré par le chef de la comptabilité,
assisté de trois agents.
Les recettes sont centralisées par le caissier-payeur.
Les dépenses du service de Texploitation pour Tannée 1884 sont
les suivantes, administration centrale non comprise.
Service central 8.840 38
Gares 42 080 08
Trains 07.431 >»
Total . . . 12:i.ol7 08
Soit par kilomèlre de ligne 1.350 »
138 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Les dépenses d* exploitation, rapportées au kilomètre de train,
ressortent à 0,85.
Dans ces dépenses ne figurent pas les dépenses du service du
contrôle des recettes, ni les indemnités et avaries; celles-ci
rentrent dans les dépenses de direction.
Services divers. — Le service matières, petit matériel et impri-
més, est tenu par un magasinier.
Le service médical et pharmaceutique est gratuit.
Les agents malades sont à demi-solde ; ils ont droit à la solde
entière quand ils ont été blessés en service.
Une caisse de retraite a été organisée à partir du 1*' jan-
vier 1886. Elle est alimentée partie par les versements de la Com-
pagnie, partie par une retenue de i p. 100 sur le salaire des
■
agents et de 25 p. 100 sur Taugmentation des traitements pendant
la première année qui suit cette augmentation.
La retraite peut être de 40 p. 100 du salaire après dix ans de
service et est limitée à 80 p. 100. Les femmes veuves ont droit à
la moitié de la retraite du mari et chaque enfant à 10 p. 100.
La Compagnie a fait preuve d'une très-grande libéralité ; car ce
système se traduira pour elle par une charge assez lourde.
Les agents sont habillés sur retenue.
Les dépenses de direction, services divers, etc., se résument
comme suit pour l'année 1884.
Résultats généraux pour rannée 1884
En résumé, les dépenses sont les suivantes pour Tannée 1884 :
Service central (direction, contrôle, frais fiénéraux, etc.' . 04.980 08
Service de la voie et des bâtiment? 123.436 12
— du matériel et de la traction 154.647 07
— du mouvement 12;>.;il7 08
Total des dépenses d'exploitation. . 468..'>80 35
Soit par kilomètre de ligne 5.038 49
Soit par kilomètre de train 1 88
%
A VOIE NORMALE 439
Les recettes, pour la même année, sont :
!• Grande vitesse (impôt déduit) 397.524 50
5« Petite vitesse 376.977 51
a« Recettes diverses 5,338 »
Total. . . . 779.442 01
Recettes par kilomètre de ligne 8.385 37
— kilomètre de train 3 14
Résultats comparatifs des Recettes et Dépenses
POUR LES CINQ ANNEES 1881-1882-1883-1884-1885
te
<
1881
1882
1883
1884
1885
1^
S M
£?
kil.
14
82
91
91
92
RESULTATS TOTAUX
RECmiS TOTALES
(f Ans L'iar^r)
78 960 10
582.624 90
752.648 46
779.840 01
678.485 08
DEPENSES
90.598 93
483.776 71
466.830 14
468.580 35
493.383 05
PRODUIT
1»BT
-11.638 83
98 848 19
285.818 32
311.259 66
185.102 03
BKSOLTiTS E1L0IETRIQDI8
RECETTES
5.040
7.101
8.267
8.i58
7.317
bî?mu
6.223
5.900
5.118
5 038
5.305
PROBEIT
nKT
—583
1 201
3 149
3 120
2.012
110
83
62
60
71
L'exploitation des lignes de la Compagnie de TEst, à Lyon, est
à classer parmi celles qui offrent le plus d'intérêt.
La proportion kilométrique du personnel s'y élève à 3,1.
CHAPITRE XI
COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER DU RHONE
Ligne de Lyon (Croiz-Ronsse) à Trévoux. 26 kil.
I. — ÉTABLISSEMEIXT DL' CHEMIi^
Historique. — L'histoire de la ligne de Lyon à Trévoux est
remplie de péripéties, qui sont loin d'être terminées.
La population qui se trouve sur le plateau de la Croix-Rousse
et de Caluiro s'élève à plus de 50,000 habitants; elle se compose
de tisseurs, de cultivateurs et de maraîchers. Avant 1859,
cette population laborieuse et active était privée de tout chemin
do fer.
C'est de cette année que date la construction du plan incliné
de Lyon à la Croix-Rousse, appelé communément le chemin de la
Ficelle.
La création d'un chemin de fer plus étendu et prolongeant en
quelque sorte le plan incliné était justifiée par l'importance de la
population du plateau et par la nombreuse garnison que conte^
nait alors le camp de Sathonay, situé à 7 kilomètres de la Croix-
Rousse.
VOIE NORMALE 141
MM. le comte du Hamel et consorts sollicitèrent et obtinrent
en 1861, en faisant valoir Tintérèt stratégique, la concession du
chemin de fer de la Croix-Rousse au camp do Sathonay, qui était
classé d'intérêt général par le décret de concession.
La ligne fut ouverte en 1863.
La construction avait été onéreuse : les terrains de la Croix-
Rousse étaient fort chers, et, de plus, la Compagnie dut faire,
sous le fort de Montessuy, des travaux de terrassement pour
glacis et délardement de terrains qui absorbèrent plus do
1,500,000 fr. Les dépenses totales s'étaient élevéesà 5.600.000 fr.
pour 7 kilomètres de longueur totale.
Aussi, dès Tannée 1864, la Compagnie du chemin de fer de la
Croix-Rousse au camp de Sathonay, se trouvant aux prises avec
de grands embarras financiers, sollicita la mise sous séquestre du
chemin, demande qui fut accueillie par décret du 26 octobre 1864.
La Compagnie fut déclarée en faillite en 1865, avec un
passif de 3,300,000 fr., et le chemin de fer resta sous séquestre
jusqu'en 1872.
Cependant, en 1863, une Société formée sous le nom de Com-
pagnie des Dombes avait obtenu, avec une forte subvention, la
concession d'une ligne de Sathonay à Bourg, ligne qui fut
ouverte. en 1866; les trains de cette ligne étaient prolongés jusqu'à
la Croix-Rousse moyennant péage, et apportaient ainsi
un élément important de recettes au chemin de la Croix-Rousso à
Sathonay.
La Compagnie des Dombes offrait d'acheter la ligne de Sathonay
au prix de 800,000 fr. Les créanciers, ne voulant pas accepter de
semblables conditions, se formèrent en syndicat et réussirent,
en 1872, à vendre la ligne au prix do 3,000,000 fr. aune Société
dont Philippart était Tâme, et qui se proposait de prolonger la
ligne "vers Paris, par Belleville et Beaujeu.
Un décret du 12 juillet 1872 autorisa la substitution, à l'ancienne
Société, de la nouvelle Compagnie dite Société anonyme des che-
mins de fer du Rhône,
Après la chute de Philippart en 1875, son principal créancier, le
Crédit Mobilier, reprit la ligne qu'il exploite encore aujourd'hui.
En 1879, la Compagnie des chemins de fer du Rhône obtint la
142 CHEMINS DE FER DLNTÉRÈT LOCAL
concession d'un chemin d'intérêt local de Sathonay à Trévoux,
chemin qui prolongeait la ligne de la Croix-Rousse à Sathonay,
sur la rive gauche de la Saône, et qui fut ouvert en 1882: la nou-
velle ligne avait des pentes de 20 millimètres à la descente du pla-
teau. Chacun des départements du Rhône et de TAin avait versé
une subvention de 300,000 fr. On ne comprend pas très-nettement
ridée qui a poussé la Compagnie à solliciter cette concession,
dont le résultat ne pouvait être de la tirer de ses embarras finan-
ciers.
Dans la même année 1879, à la date du 24 juin, la Compagnie
du Rhône passa avec la Compagnie des Dombes un traité qui
fut approuvé par décret du Président de la République, le 22 dé-
cembre 1879.
D'après ce traité, la Compagnie du Rhône vendait à celle des
Dombes tout son réseau, pour être livré dans quinze ans et moyen-
nant un prix à fixer d'après le revenu, en capitalisant à 5 fr. 75
p. 100 le produit net moyen des trois dernières années.
De plus, ce traité faisait cesser une rivalité devenue intolérable,
par suite du défaut d'entente sur les prix de péage que les Dombes
devaient payer à la Compagnie du Rhône, pour la circulation de
ses trains entre la Croix-Rousse et Sathonay; les prix de péage
étaient abaissés. Enfin, la Compagnie des Dombes garantissait à la
Compagnie du Rhône un trafic annuel minimum et net de
172,500 fr., somme que cette dernière se proposait d'affecter à la
garantie et au paiement des obligations qu'elle voulait émettre
pour construire la ligne de Sathonay à Trévoux.
Dans la pensée commune des deux parties, le traité constituait
en outre leur union contre la Compagnie de la Méditerranée. La
lutte devait être rendue plus efficace par la construction du raccor-
dement de Sathonay à Lyon-Saint-Clair, sur la ligne de Genève,
raccordement concédé à la Compagnie des Dombes, et qui devait
relier son réseau avec les lignes situées à Test et au sud de Lyon.
Mais en 1881, la Compagnie des Dombes passa elle-même avec
la Compagnie P.-L.-M., un traité aux termes duquel celle-ci rache-
tait toute la concession des Dombes et se substituait à cette der-
nière pour l'exécution du traité du 24 juin 1879, relatif à l'achat
de la ligne de la Croix-Rousse à Trévoux.
A VOIH: normale 143
Ce traité fut sanctionné par la loi du 20 novembre 1883, qui a
approuvé la convention passée le 26 mai 1883 entre le Ministre
des Travaux Publics et la Compagnie P.-L.-M.
La Compagnie des chemins de fer du Rhône vit une grave
atteinte à ses droits dans Texécution du traité de rachat des
Dombes ; la Compagnie des Dombes faisait, en effet, à celle de la
Méditerranée, grâce à l'abaissement de ses tarifs, un détournement
important qui venait alimenter les recettes que la Compagnie du
Rhône tirait du péage sur le tronçon de Sathonay à la Croix-
Rousse; le détournement allait cesser et diminuer d'autant ces
recettes.
La Compagnie du Rhône déclara que les Dombes ne pouvaient
conclure sans elle un traité dont Texécution portait, selon elle,
une si grave atteinte au traité d'union du 24 juin 1879. Elle pro-
testa successivement auprès du Ministre des Travaux Publics et de
la Compagnie de la Méditerranée, à qui elle demandait, pour le
préjudice causé, une somme de dix millions à retenir sur le prix
à payer aux Dombes.
En fin de compte, la Compagnie a intenté, devant le tribunal de
commerce de Lyon, une action contre la liquidation des Dombes
et la Compagnie de la Méditerranée. Elle a été déboutée de sa
demande que le tribunal de commerce a trouvée prématurée, la
Compagnie du Rhône pouvant faire valoir ses droits le jour où le
rachat s'effectuera.
La Compagnie a fait appel de ce jugement. Elle ne semble pas
douter que l'issue ne lui soit favorable ; car elle a sollicité en 1885,
du Conseil général du Rhône, la concession du prolongement de
la ligne de Trévoux jusqu'à Villefranche, de manière à relier les
deux rives de la Saône. La Compagnie demandait à cet effet une
avance de 1,500,000 fr. et se proposait même de prolonger ulté-
rieurement la ligne jusqu'à Mâcon.
Le prolongement jusqu'à Villefranche a été accordé en principe,
en 1886, par le département de l'Ain, qui s'est engagé à fournir
une subvention de 20,000 fr. par kilomètre; mais les ingénieurs
du contrôle ont demandé l'étude d'une variante.
Description de la ligne. — La ligne de la Croix-Rousse à Tré-
144 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
voux est à proprement parler une ligne de banlieue. Jusqu'à Satho-
nay, elle reste en profil facile et a été établie en double voie.
Au delà de Sathonay, la ligne quitte le plateau pour descendre sur
la rive gauche de la Saône par des pentes de 1 8 à 20 millimètres
par mètre sur un parcours très -tourmenté de près de 4 kilomètres,
où Ton a dû construire de coûteux ouvrages d'art; on n'y ren-
contre pas moins de six viaducs de 20 à 25 mètres de hauteur en
courbes de 300 à 350 mètres de rayon : deux d'entre eux sont en
métal et ont 200 mètres de longueur. Dans la vallée de la Saône,
on trouve des rampes de 12 et 15 millimètres.
Le rayon minimum des courbes est de 300 mètres.
Entre Sathonay et Trévoux, le rail Vignole est en acier, du
poids de 30 kilos le mètre courant; il a 8 mètres de longueur. De
Sathonay à la Croix-Rousse, le rail est en fer et du poids de
35 kilos ; on*le remplace au fur et à mesure par le rail de 30 kilos
acier.
Les vitesses sont limitées à 45 kilomètres à Theure entre Lyon
et Sathonay et à 35 kilomètres au delà. La descente ou la montée
du plateau s'effectue à la vitesse de 20 kilomètres.
Les stations sont très-multipliées : il n'existe pas moins de
15 points d'arrêt pour un parcours de 26 kilomètres, en comprenant
les gares extrêmes et une halte facultative.
Si Taspcct des stations de Sathonay à Trévoux est très-satis-
faisant, et les bâtiments soignés, il n'en est pas de même entre
la Croix-Rousse et Sathonay, où les bâtiments très-vastes, cons-
truits provisoirement eu 1863, sont en bois, et sont loin d'avoir
le caractère qui convient à des stations voisines d'une grande
ville.
Si on laisse cette considération de côté, on doit reconnaître que
la gare de la Croix-Rousse est disposée d'une manière très-ration-
nelle, eu égard aux difficultés du terrain. Le plan de cette gare
est représenté fig. 14, pi. VL Dans le principe, la gare de voya-
geurs était à l'emplacement qu'occupe actuellement la gare des
marchandises.
Lors de l'ouverture de la ligne des Dombes en 1866, la gare
construite par la Compagnie de la Croix-Rousse à Sathonay devo-
A VOIE NORMALE 14;>
nait insufG santé pour assurer le service des marchandises, et, sur
les instances de la Compagnie des Dombes, on résolut de traverser
à niveau le boulevard de la Croix-Rousse et de transférer au delà
la gare des voyageurs, en la juxtaposant à la gare haute du che-
min de fer de la Ficelle, sur un terrain appartenant à celui-ci et
qui est loué moyennant une redevance annuelle de 6,000 fr. ; les
voyageurs n'avaient ainsi qu'à traverser à couvert un trottoir pour
passer d'un chemin sur l'autre.
Il est vrai que là aussi on était limité par le terrain : les voies
ne peuvent contenir plus de 10 véhicules en sus de la machine
et des fourgons. Lorsque la composition du train est plus forte, on
laisse jusqu'au moment du départ les véhicules complémentaires
à la gare des marchandises, avec la machine, et on les refoule à la
dernière limite.
La traversée fréquente du boulevard de la Croix-Rousse par les
trains et machines offre bien des inconvénients ; mais cette tra-
versée se fait au pas et les inconvénients sont largement compensés
par l'avantage de la correspondance immédiate du chemin de fer
de la Ficelle avec la ligne de Sathonay, qui, dans le patois
lyonnais, est désigné sous le nom de chemin de fer de la Ga-
loche.
Le type des stations de la ligne de Sathonay à Trévoux est repré-
senté (fig. 1 5, pl.VII) par la station de Reyrieux ; on peut y faire des
croisements ; la voie des marchandises est reliée parles extrémités,
mais le trafic de marchandises est si peu important que le quai à
marchandises n'est pas construit en général.
Les stations de la Croix-Rousse à Sathonay sont couvertes ar
des signaux rouges, à plaque ronde, placés à 300 mètres et qui
commandent l'arrêt absolu.
De Sathonay à Trévoux, on s'est contenté de signaux fixes,
verts, éclairés par un feu vert pendant la nuit, placés également à
300 mètres, et qui n'ont d'autre but que d'annoncer la station et
d'obliger le mécanicien à ralentir.
Les alimentations sont assurées, à la Croix-Rousse par l'eau de
la ville ; à Sathonay, par la machine qui alimente le camp; à Tré-
voux, par une pompe à main que manœuvrent les hommes de la
gare.
iO
446 CHEMINS DE FER D INTÉRÊT LOCAL
Matériel roulant. — Voitures et wagons. — Toutes les voitures
sont à étage. Il eu existe 20^ dout 10 coustruites daus les chan-
tiers de la Buire et 10 par la Société Dyle et Bacalan.
Les voitures de la Buire ue pëseut que 8 tounes ; 7 d'entre
elles sont exclusivement alfectées à la troisième classe et com-
portent 78 places, 40 en bas et 38 en haut; 3 sont mixtes et ont les
trois classes.
Les voitures Dyle et Bacalan sont toutes mixtes : quatre sont à
85 places, et 6 à 73 places seulement, parce que les bancs de
l'impériale sont longitudinaux. Ces voitures pèsent de 10 à 1 1 tonnes
et ont été achetées lors de l'ouverture de la ligne de Trévoux.
Toutes les voitures sont munies de la conduite du frein Wes-
tinghouse: 10 seulement ont le frein lui-même, en même temps
du reste que le frein à main. Dans la pratique, on ne fait pas
usage du frein Westinghouse, en raison des fortes déclivités; car
il disloque les bandages.
Les fourgons sont au nombre de quatre : deux d'entre eux ont un
compartiment de 28 places pour chasseurs et fumeurs. Les four-
gons ont à la fois le frein à main et le frein Westinghouse.
Le matériel P. Y. se compose seulement de deux plates-formes à
frein abattu.
Locomotives. — Les locomotives sont au nombre de six ; quatre
d'entre elles proviennent de la Compagnie de Sathonay ; cons-
truites en vue d'une ligne facile, elles n'ont que deux essieux cou-
plés. Le constructeur est Gouin.
Deux autres machines, à six roues accouplées, ont été acquises
à l'ouverture de la ligne de Trévoux.
Les premières font difficilement le service sur la rampe de
20 millimètres; elles y remorquent à grand peine huit véhicules.
Aussi, la section de Sathonay à Trévoux est-elle desservie par les
machines à trois essieux couplés.
Ces diverses machines n'offrent d'ailleurs aucune particularité
intéressante.
Ateliers de réparations. — Presque toutes les réparations sont exé-
cutées à Lyon, par Tindustrie privée, bien que la Compagnie primi-
tive ait installé à la Croix-ilousse des ateliers, où, il est vrai, les
A VOIE NORMALE
441
outils achetés par elle n'ont jamais été montés. On n'y fait que les
petites réparations n'exigeant pas d'autre outillage que la forge,
Fétau et la lime: un chef monteur et deux hommes suffisent pour
les machines, les voitures et même les bâtiments. Encore le chef
monteur assure- t-il les remplacements des mécaniciens.
Tant qu'a duré la Compagnie des Dombes, on faisait faire les
réparations à ses ateliers de Bourg. Après la reprise par la Compa-
gnie de P.-L.-M., ces ateliers ont été supprimés.
Dépenses de premier établissement au 31 décembre 1884
{** Construction des chemins
2» Matériel , mobilier et approvisionne-
ments
3^ Intérêts pendant la construction. . . .
Totaux
Prix de revient par kilomètre.
LYON
(Croix-Rousse)
A SATHONAY
4.405.149 66
o67 867 54
210.475 15
SATHONAY
A TRÉVOUX
5.253.967 50
750.566 80
3.782.015 58
373.500 »
80.000 »
4.315.51^ 58
227.132 30
Ainsi qu'on Ta dit, la ligne de Sathonay à Trévoux a bénéficié
d*une subvention de 600,000 fr.
II. — EXPLOITATIO:^
Administration
Le conseil d'administration a son siège à Paris.
Un comité de direction, composé de deux administrateurs se
réunissant à Lyon une fois par mois, examine et règle les affaires
courantes, marche des trains, travaux importants, etc., etc. La
situation financière est adressée chaque mois, à Paris, au prési-
dent du conseil d'administration.
Le service actif est dirigé par un directeur, chef d'exploita-
tion, qui a pleine autorité sur la marche du service, règle les
dépenses, etc. Le directeur est effectivement le chef de chacune
148
CHEMINS DE FER D INTÉRÊT LOCAL
branches, voie, traction et exploitation, en même temps qu'il cen-
tralise la marche de ces service^.
Un chef de bureau assure la comptabilité de tous les services. Il
est assisté au service central par quatre employés aptes à remplir
toutes les fonctions dans les gares et les trains, et qui font les rem-
placements.
Voie et Bâtiments
Un piqueur dirige le service de la voie sous les ordres immé-
diats du directeur.
Un chef poseur a autorité sur tout le personnel des cantonniers.
L'entretien des 7 kilomètres de double voie est confié à une bri-
gade de huit cantonniers ; mais, au delà de Sathonay, les brigades
sont limitées à six agents et n'embrassent pas plus de 6 kilomètres.
Les agents de la voie concourent aux chargements des grosses
marchandises dans les gares. En outre, les dimanches et fêtes,
jours d'affluence, Téquipe de chaque station est renforcée par un
cantonnier.
Enfin, les agents de la voie remplacent encore les hommes
d'équipe malades ou en congé.
La plupart des cantonniers (20 sur 24) sont logés dans des mai-
sons de garde où leurs femmes sont gardes-barrières.
Le magasin est au service central, aussi bien pour les imprimés,
rhuile, etc., que pour le matériel.
Les dépenses du service de la voie, pour Tannée 1884, sont les
suivantes.
Personnel
Entrelien de la voie
Entretien des bâtiments, etc., et ouvrages
d'art
Divers
Totaux . . .
Soit par kilomètre
LYON
(Croix-Rousse)
A SATHONAY
15.064 20
lo.aao 44
1.691 92
339 55
28.031 U
4 ..004 44
SATHONAY
A TRÉVOUX
22.013 35
10.572 66
448 70
2.179 42
35.214 13
1.853 37
A VOIE NORMALE 149
II convient de remarquer au sujet de la ligne de Lyon-Croix- .
Rousse à Sathonay, que cette ligne est à double voie, en rails de
fer, et qu'elle est en renouvellement.
Traction
Le chef-monteur qui dirige Tatelicr a autorité sur les mécani-
ciens.
■
Le personnel actif de la traction se compose de quatre mécani-
ciens et de quatre chauffeurs, dont les traitements mensuels sont
respectivement de 175 et 100 fr.
Il y a trois machines en roulement à la fois. Les eaux étant
excellentes, le lavage n'a lieu qu après trois semaines de ser-
vice ; chaque machine avec ses servants passe une semaine au
dépôt pour repos, lavage, et réparations diverses ; ces travaux
sont faits par le mécanicien, le chauffeur et les ouvriers de
l'atelier.
La machine qui est au lavage assure au besoin le service de
réserve ; on ne Tallumc qu'en cas de besoin.
Le combustible se compose exclusivement de briquettes payées
26 fr. 50 la tonne sur quai de la Croix-Rousse.
Les mécaniciens ne rei^oivent pas d'allocation fixe, ni pour le
combustible, ni pour l'huile.
On fait un relevé de la consommation tous les trimestres, et on
accorde une gratification de 15 à 20 fr. par mois au mécanicien qui
a fait le plus d'économies, en tenant compte de l'entretien de la
machine, de la conduite privée, etc..
Ce système est défectueux.
La dépense de charbon par kilomètre varie de 8 kilog. 500 à
9 kil. 300 suivant l'état de la machine et le tonnage remarqué.
Cette forte consommation s'explique par trois raisons : absence
d'allocations fixes, fortes rampes et arrêts très-fréquents.
Le parcours annuel de chaque machine uitleint en moyenne
43,000 kilomètres.
i50
CHKMINS DE FER DINTÉRÊT LOCAL
Les dépenses de traction pour Tannée 1884, sont :
LYON
(Croix-Rouase)
SATHONAY
Personnel
Combustible
Graissage
Primes d*économie
Alimentalion
Entrelien du matériel roulant ....
Dépenses diverses
TuT.\UX
Par kilomètre
13.808 27
lo.390 75
1.982 25
842 10
162 42
9.594 19
3.917 93
45.697 91
6.528 26
SATHONAY
A TRÉVOUX
10.025 60
30.476 82
3.097 21
780 70
162 42
8.283 69
4 089 27
56.615 71
2.927 14
Ce qui fait revenir le prix du kik)mëtro de train au prix moyen
de 0 fr. 52.
Mouvement et Trafic
Moavement. — Le service du mouvement, est dirigé par un
inspecteur assisté d'un sous-inspecteur, qui est en même temps
caissier. Tous deux font les vérifications de comptabilité en même
temps qu'ils assurent le service du mouvement.
^
Service des trains, — Sur un total de 15 trains par jour
dans chaque sens (service d'été), huit trains ne circulent que dans
la banlieue proprement dite, c'est-à-dire entre la Croix-Rousse et
Sathonay. Ces trains sont remorqués par les machines à deux roues
couplées. Les sept autres trains ont lieu de bout en bout, et sont faits
sans changement de machine par les locomotives à trois essieux
couplés.
Tous les croisements ont lieu à Sathonay, de telle sorte qu'il
ne circule jamais qu'un seul train à la fois sur la section de voie
unique de Sathonay à Trévoux.
Il n'y a pour ainsi dire pas de marchandises. Le tonnage de
A VOIE NORMALE 151
petite vitesse ne s'est élevé en totalité, en 1884, qu'à 3,875 tonnes,
dont la majeure partie consistait en sable et gravier destiné à des
entrepreneurs de travaux de la ville, qui ont un dépôt à la gare de
la Croix-Rousse. Ces matériaux sont amenés par des trains spé-
ciaux de sable, qui sont en réalité des trains de balast.
Il résulte de là que le service des marchandises joue un rôle à
peu près nul dans les trains, et bien qu'ils soient tous nominale-
ment mixtes, les stationnements sont extrêmement courts : les
trains étant peu chargés, les démarrages sont très-rapides et les
arrêts ne dépassent pas une minute dans chaque station. A Satho-
nay, on a donné un stationnement compensateur de cinq mi-
nutes.
Les trains de la Méditerranée (anciennement Dombes), qui cir-
culent en tronc commun entre la Croix-Rousse et Sathonay, ne
desservent pas les stations intermédiaires et n'y ont pas d'arrêt:
ils reçoivent, pour le compte de la Compagnie du Rhône, les voya-
geurs de la Croix-Rousse à Sathonay ou vice versa. En dehors de
ces trains, tous les autres s'arrêtent à toutes les stations.
Il n'y a pas de service de nuit, le dernier train arrivant do Lyon
à 10 heures 23 minutes du soir.
Les trains ont un fourgon en tête et un en queue. La Compagnie
est autorisée à n'avoir qu'un seul frein desservi pour tous les trains
qui circulent entre Lyon-Croix-Rousse et Sathonay : ces trains
n'ont donc qu'un seul conducteur.
Entre Sathonay et Trévoux, on est obligé de mettre deux agents
au train, jusqu'à dix véhicules par train, trois au delà, ce qui
n'arrive jamais. Le conducteur supplémentaire fait par suite la
navette entre Sathonay et Trévoux.
L'hiver, les voitures étaient primitivement chauffées avec des
briquettes. On a fait ressortir, à propos du chemin de Saint-Quen-
tin à Guise, les inconvénients que présente ce mode de chauffage
au point de vue de l'hygiène. Il s'en présentait en outre ici un
autre qui a promptement obligé à renoncer à ces briquettes : les
voyageurs ouvraient les chaufferettes et répandaient les briquettes
sur le plancher, exposant le train à l'incendie.
On chauffe aujourd'hui avec des bouillottes à eau. L'éclairage se
fait avec des lampes à huile à bec plat.
152 CHEMINS DE FER D1NTÉRÊT LOCAL
Le parcours total des trains a été, en 1884, de 72,534 kilomètres
sur la ligne de Sathonay, et de 116,527 kilomètres sur la ligne de
Sathonay à Trévoux.
Service des gares. — En général, chaque station est gérée par
la femme d'un employé de bureau ou d'un chef poseur.
A Lyon et' à Sathonay, le personnel est composé d'un chef de
gare et de quatre hommes d'équipe; à Trévoux, un €hef de gare,
sa femme receveuse, et deux hommes d'équipe dont un pour la
pompe d'alimentation.
Les femmes chefs de station ont un traitement annuel de 300 à
500 fr. Les chefs de gare reçoivent 100 fr. par mois.
Les règlements adoptés sont les anciens règlements des Dombes,
moins la demande de voie pour les trains réguliers. Le télégraphe
Bréguet existe dans toutes les stations, et les femmes sont aptes à
le manipuler, de même que les chefs de train, pour les cas de
détresse ; mais dans les stations gérées par des femnnes, l'appareil
est normalement sur communication directe.
Le trafic do marchandises est, on Ta dit, extrêmement peu
important: pour les chargements, qui se font le plus souvent
directement dans le fourgon au passage du train, la femme ou le
chef de station, s'ils n'y peuvent suffire avec les agents du train,
se font aider par les poseurs de la voie, ou même par les expédi-
teurs, si ces derniers doivent faire le chargement, aux termes des
tarifs appliqués.
Le trafic de petite vitesse étant pour ainsi dire nul, la Compa-
gnie des chemins de fer du Rhône avait abandonné à la Compagnie
des Dombes, dès l'ouverture des lignes de cette dernière, le soin
de gérer à ses frais, les gares n*** 2 et 3 de la Croix-Rousse, gares
spécialement affectées aux marchandises. La Compagnie de la
Méditerranée a repris ce fonctionnement. Aucune location n'est
payée de ce chef à la Compagnie des chemins du Rhône et la Com-
pagnie P.-L.-M. conser\'e exclusivement tous les frais accessoires,
qui n*entrent pas en compte dans le péage.
Le péage est réglé d'après le produit brut voyageurs et mar-
chandises par la Compagnie de la Méditerranée, et au prorata
kilométrique; par exemple, pour un voyageur allant de Lypn à
A VOIE NORMALE lîi3
Bourg (59 kilom.), ou vice versa, la part de la Compagnie du
Rhône est de ^ et celle de la Compagnie de Lyon de ^|-.
En échange de la gratuité accordée par la Compagnie du Rhône
pour Tusage des gares de marchandises de la Croix-Rousse, cette
Compagnie a le droit d'user de tous les trains P.-L.-M. pour les
voyageurs de Lyon (Croix-Rousse) à Sathonay, ou vice versa; la
recettes de ces voyageurs est entièrement acquise à la Compa-
gnie du Rhône moyennant un prix forfaitaire de traction fixé à
2 francs par train, ce qui revient par kilomètre à -j- soit environ
0 fr. 285.
Le service de la Compagnie P.-L.-M. à la gare do Croix-Rousse
■
voyageurs est fait exclusivement aux frais de cette Compagnie,
ses messageries sont reçues dans un bureau de ville placé au bas
du chemin de la Ficelle; les colis montent ou descendent par cette
voie.
•
Enfin, à Sathonay, le service commun est assuré entièrement par
les soins et aux frais de la Compagnie du Rhône.
Ces diverses conditions sont loin d'être à l'avantage de cette
dernière.
Service commercial. — Le seul trafic intéressant est
celui des voyageurs, pour lesquels les tarifs sont respectivement
de :
0 fr. 10 pour la 1'* classe ]
0 075 — 2* classe [ impôt compris.
0 0;) — 3* classe 1
Les voyageurs bénéficient de billets d'aller et retour à 25 p. 100
de réduction, délivrés de toute gare à toute gare.
La comptabilité est faite par jour; les femmes n'en sont pas
dispensées.
Le service du contrôle est assuré par le chef de bureau et ses
quatre employés.
iH4
CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
\
Les dépenses du service du mouvement et du trafic sont les
suivantes, pour Tannée 1884 :
Personnel
Entretien et réparation du mobilier
Frais divers (de bureau, éclairage, chauf-
fage, etc.)
Totaux. . .
Soit par kilomètre de li^'ue
LYON
A SATHONAY
24.314 20
581 17
4.r>88 51
2y..*)8:? 88
4.226 27
SATHONAY
A TREVOUX
29.091 53
697 10
6.435 91
36.224 54
1.906 55
Services divers. — Les versements des recettes sont faits
chaque jour à la Société lyonnaise. Les coupons des obligations
sont payés par cette société. Pour les besoins du service, le
directeur de la Compagnie tire un chèque sur la Société lyonnaise.
Le service médical et les médicaments sont gratuits. Les agents
malades sont à demi-solde.
La casquette constitue le seul insigne des agents de la Compa-
gnie, elle est acquise à leurs frais.
Pas de caisse de retraites ni de secours.
Résultats généraux pour Tannée 1884
Enrésumé,Iesdépensesderannécl884serépartissentcommesuit:
Voie et travaux
Matériel et traction
Mouvement et trafic
Administration centrale de Lyon et de Paris.
Dépenses diverses, loyerdes gares communes,
timbre des actions et obligations, etc. . . .
ToTAlX. . . .
LYON
A SATHONAY
28.031 11
43.097 91
29.583 88
10.329 94
9.095 46
SATDONAY
A TRÉVOUX
35 214 13
56.615 71
36.224 54
11.304 69
0.436 80
120.738 30
17.234 04
Soit par kilomètre de ligne
Soit par kilomètre de train pour l'ensemble des deux lignes : 1 95
148.795 87
7.831 36
A VOIE NORMALE
155
Les recettes se décomposent comme suit S sans impôl :
r
Voyageurs
Péages et redevances
Bagages et chiens
Messageries
Marchandises de petite vitesse
Produits du domaine, des bâtiments et des
marchandises
ToTAr'x. . .
Par kilomètre de ligne
Par kilomètre de train
LYON
A SATHONAY
198.880 50
78.180 12
3.060 20
572 85
3.227 06
21.707 88
305.628 61
43.597 10
4 21
SATHONAY
A TREVOCX
160.287 55
» »
3.569 85
2.675 63
3 622 20
» »
2.220 22
172.375 45
9.072 40
1.48
Le total des recettes pour Tensomblo des deux lignes s'élfeve à
477,555 fr. 20, donnant un bénéfice net de 208,121 fr. 03, soit de
26,363 fr. 06 par kilomètre sur Lyon-Sathonay, et de 1241 fr. 04
sur Sathonay-Trévoux.
Les coefficients d'exploitation sont :
Pour la première ligne, de.
Pour la seconde ligne, de. .
40 p
86 p.
100
100
Celte dernière ligne est exploitée chèrement : cela tient aux
fortes rampes qui majorent les dépenses de traction, et surtout à
rinsignifiance du trafic de marchandises, ce qui ne permet pas
d'utiliser les trains.
Les 3,815 tonnes de marchandises de petite vitesse ont produit
6,849 fr. 26.
Il y a eu en 1884, par rapport à 1 883, une diminution de recet-
tes importante, en partie compensée par une diminution de
dépenses.
* La ligne ayant moins de 40 kilomètres de longueur, Timpôt est perçu par place et
par Yoiture, par application de la loi du 11 juillet 1879. — Il a été, en 1884, de
4,582 fr. 42 pour Tensemble des deux lignes, au lieu de 50,000 fVancs qu*eùt donnés
Tapplication de la loi de 1871.
456
CHEMINS DK FER D'INTÉRÊT LOCAL
La diminution de receitesa été causée par une décroissance dans
les péages et redevances relatifs à la ligne de Bourg, décroissance
qui a atteint 15,384 35 à la suite de la reprise par la Compa-
gnie P.-L.-M., et de la cessation des détournements qui en est
résultée.
En fin de compte, on voit que^ si du bénéfice net d'un exercice
on retranche la charge do plus de 12,000 obligations à 15 francs
Tune, il ne reste que bien peu de chose pour Tactionnaire, c'est-à-
dire pour le Crédit Mobilier.
On comprend moins encore, en présence de ces résultats, les
raisons qui ont conduit la Compagnie du Rhône à construire la
ligne de Sathonay à Trévoux, laquelle représente presque la
moitié de ses charges, el seulement le tiers de ses produits.
Résultats comparatifs des Recettes et Dépenses des lignes du Rhône
Pour les cinq années 1881, 1882, 1883, 18^4, 1885.
u
'r.
"T.
<
exploitée
RESULTATS TOTAUX
Recettes
totales
( impôt
déduit)
Dépenses
Produit
net
total
i
RÉSULTATS KILOMÉTRIQUES
Recettes
Dépenses
Produit
net
10 _ Lyon-Groix-Rou88e
à Sathonay
1881
240. 5 i3 80
157.670 68
82.873.12
34.367
21.749
13.618
1882
280.448 57
150.979 49
129.469 08
40 06i
20.775
19.289
1883
331 390 72
127.621 01
203.769 71
47 3il
17.564
29.777
1884
305.179 75
120.638 30
184. 5il 45
43.597
17.234
26.363
1885
300.103 01
106.780 80
193 322 21
42.872
15.254
27.618
2"
— Sathonay à Trévoux
1881
■
M M
1» »
n «
. »
«
1882
10
79.150 09
75.089 68
4.060 il
7.915
7 428
487
1883
19
174.674 .
152 639 98
22.034 02
9.193
7.914
1.279
1884
19
172 375 45
148.795 87
23 579 58
9.072
7.831
1.241
1885
19
177.378 55
145.286 75
32 091 80
9.335
7.647
1.688
RAPPORT
p. 100
des
dépenses
aux
recettes
63
51
37
39
35
93
86
86
82
Dans les recettes totales et kilométriques de la ligne de Lyon-
Croix-Rousse à Sathonay figure le péage payé par la Compagnie
des Dombes et, après elle, par la Compagnie de la Méditerranée,
pour la circulation de leurs trains.
\
A VOIE NORMALE 157
Ce péage a été successivement de :
Eq 1881 807,594.7
1882 95,632,65
1883 94,471,53
1884 79,087,18
1885 76,888,06
C*est en partie sur ces décroissances que la Compagnie du
Rhône fonde ses réclamations contre le rachat de ses lignes par la
Compagnie de la Méditerranée.
CHAPITRE XII
CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
DES BOUGHES-DU-RHONE
LOircnui
Lignes de Pas-de-Lanciers à Martigues 19 kil.
Tarascon à Saint-Rémy 15
— Arles aux Carrières de Fontvieille*. . . 9
— Miramas à Port-de-Bouc . 26
Historicnie. — Les deux premières lignes ont été concédées par
décret du 19 février 1870, à la société Henri Michel et compagnie,
qui obtint également la concession de la troisième par décret du
2 mai 1873. Les concessions étaient faites pour 46 ans.
La ligne de Pas-des-Lanciers à Martigues a été ouverte
en 1872, Tarascon à Saint-Rémy en 1874 et Arles à Fontvieille
en 1875.
Le chemin de Miramas à Port-de-rBouc a été concédé le
12 avril 1875 à MM. Dolamarre et Digeon pour une durée de qua-
tre-vingt-six ans et ouvert à Texploitation de 1879 à 1881.
Tandis que le chemin de Miramas à Port-de-Bouc a été construit
sans subvention, les lignes de M. Henri Michel ont regu de l'Etat,
* Le prolon^^emcnt de Fontvieille à Salon (27 kilomètres) a été ouvert à rexploitatioD
le 5 mai 1887.
VOIE NORMALE 159
du département, des communes, des industriels intéressés, de très-
importantes subventions qui se chiffrent conune suit :
Pas-des-Lanciers à Martigues 1,349,500 fr.
Tarascon à Saint-Rémy 1,538,500
Arles à Fontvieille 1,158,500
Total 4,247,500 fr.
Malgré ses faibles charges de construction, la société Henri
Michel fit faillite. Les lignes furent placées sous séquestre
d*août 1878 à mai 1880, date à laquelle elles furent remises à
M. Casimir Delamarre, qui en avait été décl6U*é adjudicataire au
prix de 550,000 francs, non compris le matériel roulant évalué à
dire d'experts à la somme de 293,870 francs, et non compris l'ou-
tillage et les approvisionnements estimés à 41,130 francs. La vente
a donc produit 885,050 francs.
M. Delamarre forma après le rachat, sous le nom de Société
Nouvelle des chemins de fer d'intérêt local des Bouches-du-Rhône,
une société qui est aujourd'hui propriétaire des trois- chemins.
Cette société est au capital social de 1,000,000. Les actions ont été
souscrites sans émission publique.
D'un autre côté, un décret du 30 août 1884 a donné à la Compa-
gnie des chemins de fer régionaux des Bouches-du-Rhône, formée
spécialement à cet effet, la concession des quatre lignes suivantes
dont deux sont les prolongements des chemins construits par
Henri Michel.
Fontvieille à Salon 37 kil.
Saint-Rémy à Orgon 20
Barbentanne à Plan-d'Orgon 23
La Ciotat-gare à La Ciotat- ville 5
Fontvieille à Salon a été ouvert à l'exploitation en mai 1887.
La construction des autres chemins est à l'étude ^
Mais la Société Nouvelle des chemins de fer des Bouches-du-
* Une loi du 27 juillet 1886 a concédé à la môme compagnie la ligne d*Eyguières à
Peyroiles, à oonstroire sur la rive gauche de la Durance.
N
160 CHKMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Rhône a passé, les 6 et 27 juillôt 1885, avec la Compagnie des
chemins de fer régionaux des Bouches-du-Rhôue, un traité aux
termes duquel cette dernière Compagnie se chargeait d'effectuer
par ses soins l'exploitation des trois lignes appartenant à la pre-
mière :
Pas-des-Lanciers — Martigues.
Tarascon — Sainl-Rémy.
Arles ^— Fontvieille.
Ce traité a été sanctionné par une loi.
Ëniin M. Delamarre, déjà concessionnaire de la ligne de Mira-
mas à Port-de-Bouc, a constitué pour cette ligne une société dite
Compagnie des chemins de fer méridionaux français, au capital
nominal de 2,100,000 francs.
Bien que cette société soit distincte, l'exploitation en est assu-
rée par le même service que pour les lignes delà Société Nouvelle.
I. — ÉTABLISSEMENT
Description des lignes. — Toutes ces lignes sont à voie normale.
Le chemin de fer du Pas-des-Lanciers à Martigues dessert une
région essentiellement agricole. La gare de Pas-des-Lanciers est
commune avec la Compagnie P.-L.-M.
Pour la ligne de Miramas à Port-de-Bouc, qui traverse aussi
une région agricole, la tète de ligne est en gare distincte de la
gare P.-L.-M.
Le chemin de Tarascon à Saint-Rémy a pour principal trafic, en
dehors des voyageurs, les fruits, légumes, primeurs en destination
de Paris. Il a son origine dans le bas de la station P.-L.-M. de
Tarascon, entre le chemin de fer de Marseille à Cette et la caserne
de cavalerie. Un escalier construit sur le talus du chemin de fer
de la Méditerranée sert de liaison entre les deux gares pour les
voyageurs, bagages et messageries passant de Tune à Tautre. Une
voie spéciale de raccordement avec la ligne de Marseille à Cette,
dont Taiguille se trouve à 800 mètres do la gare de Tarascon
P.-L.-M., sert au passage des wagons transitant de la grande
ligne sur la ligne d'intérêt local, ou vice versa.
La ligne d'Arles à Fontvieille a été spécialement construite en
A VOIE NORMALE 161
vue de Texploitatioa des magaifiques carrières de Fontvieille (le
Castellet), d'où Ton extrait la pierre dite d'Arles. L'origine de la
ligne à Arles se trouve placée exactement dans les mêmes condi-
tions que celle de la ligne de Saint-Rémy à Tarascon. La station
de la ligne locale située près de la gare d'Arles P.-L.-M. est en
relation avec cette dernière pour les voyageurs et messageries par
un chemin d'accès établi sur le talus de la ligne de la Méditer-
ranée, et une voie de raccordement relie les deux chemins de fer.
Ces diverses lignes ont les déclivités suivantes :
Pas-des-Lanciers à Martigues, rampe maxima 14 "" 5
Tarascon à Saint-Rémy. ... — 15"™
Arles à Fontvieille — 17 """ 6
Miramas à Port-de-Bouc. ... — 15""
Le rayon des courbes ne descend pas au-dessous de 300 mètres.
Les terrassements sont peu importants ; mais les petits ouvrages
d'art sont assez nombreux, en raison des canaux d'irrigation
que Ton traverse.
La voie est partout en rail Vignole. Le rail est de 35 kilos fer
sur les trois lignes de la Société Nouvelle. Sur Miramas-Port-de-
Bouc, le rail est en acier et pèse 30 kilos par mètre. Ces poids sont
élevés pour des lignes d'aussi faible trafic. Les traverses sont
en chêne ; elles ont 2 m. 30 de longueur, 0 m. 20 de largeur et
0 m. 12 d'épaisseur. En raison du poids du rail, onn'a qu une tra-
verse par mètre courant de voie.
Stations. — La ligne de Martigues comprend, en dehors des
gares extrêmes, deux stations et deux haltes. L'une des haltes
est un simple arrêt avec guérite en bois servant de salle d'attente.
La ligne de Saint-Rémy a, outre les gares terminus, une station
et trois haltes intermédiaires, dont deux sans bâtiment ni guérite,
avec simple trottoir.
La ligne de Fontvieille ne possède qu'une halte intermédiaire,
sans bâtiment ni guérite.
Enfin, la ligne de Miramas comprend les deux gares extrêmes,
quatre stations et deux gares intermédiaires. La station deParadou,
dont le plan est représenté figure 16 (pi. VII), donne le type adopté
11
162 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
pour, les stations, pour tous les chemins secondaires des Bouches-
du-Rhône, y compris les lignes de la Compagnie des chemins de
fer régionaux. Ce type est simple et suffisant pour un service qui
se fait exclusivement en navette.
Les bâtiments sont très-confortables ; le rez-de-chaussée com-
prend un bureau, une salle d'attente, une cuisine et un dégage-
ment; Fétage, dei^ chambres à coucher indépendantes et une
chambre d'enfant.
Les stations sont couvertes par des signaux fixes, à cocarde
rouge, placés suivant les déclivités, à 500 ou 800 mètres de la sta-
tion. Ces signaux n'obligent pas à Tarrêt : ils ont pour signification
de commander au mécanicien de siffler pour avertir la station de
l'arrivée du train.
L'alimentation est assurée à Tarascon et Arles par des réser-
voirs remplis -par la conduite de la ville; à Pas-des-Lanciers, l'eau
estfournieparla Compagnie P.-L.-M. Aux autres gares extrêmes,
y compris Miramas, sont installés des réservoirs alimentés, à l'aide
d'une pompe à main, par les hommes d'équipe dans l'intervalle des
trains. A Martigues, où il n'y a pas d'eau sur place, on est obligé
d'amener un wagon-citerne.
Matériel roulant. — l*' Voitures et wagons. — En dehors de la
ligne de Miramas à Port-de-Bouc, desservie par des voitures ordi-
naires mixtes, les lignes d'intérêt local des Bouches-du-Rhône ne
possèdent, comme matériel à voyageurs, que des voitures mixtes
à étage, matériel qui, ainsi qu'on a déjà eu occasion de le faire
ressortir, est reconnu détestable partout. Dans ce pays balayé par
le mistral, il y a encore, eu égard à la résistance du vent, une
aggravation qui se traduit par une très-notable dépense supplé-
mentaire de charbon.
De plus, ces voitures ayant, en raison de leur longueur, des
essieux relativement écartés, les courbes de faible rayon occa-
sionnent une usure rapide des boudins.
La composition normale de chaque train en matériel à voya-
geurs est, sur les trois premières lignes, d'une seule voiture mixte,
soit de 72 places, 10 de première, 10 de seconde, 52 de troisième.
Sur Miramas, où les voitures sont du type ordinaire, le nombre
%
A VOIE NORMALE 163
des places oiïertes est de 4 premières, 10 secondes et 30 troisièmes.
Une seule voiture suffit généralement, avec un poids mort bien plus
faible que celui des voitures à étage.
La ligne de Miramas possède seule des fourgons proprement
dits, chaque fourgon contient un compartiment pour voyageurs.
Sur les autres lignes, les wagons couverts à frein tiennent lieu de
fourgons, avec Taddition d'une armoire à billets; car le chef de
train distribue les billets aux haltes sans bâtiment.
Le matériel à marchandises est des plus réduits: 11 wagons
plats, 6 wagons à pierres à trois essieux pouvant circuler sur
les rails P.-L.-M, 6 wagons tombereaux employés au trans-
port des moellons destinés aux endiguements du Rhône et
20 wagons à ballast, constituent tout le matériel P. Y. des chemins
des Bouches-du-Rhône, la ligne de Miramas exclue. L'armature
du matériel P. V. ressort pour l'ensemble de ces chemins, à
0 w. 92 par kilomètre, chifTre d^autant plus faible que, les lignes
étant séparées, l'utilisation du matériel est beaucoup plus défec-
tueux que sur un réseau continu. Ce matériel serait du reste,
insuffisant à l'exploitation des lignes des Bouches-du-Rhône; la
Compagnie régionale utilise largement les wagons P.-L.-M. loués
à raison de 2 fr. par wagon, sous la condition qu'il ne séjourne
pas plus de douze heures sur les lignes locales (heures de nuit, de
six heures soir à six heures matin, non comprises). Les wagons
livrés par P.-L.-M. et rendus chargés le lendemain de k remise,
sont exonérés de redevance. Les locations mensuelles payées à la
Compagnie P.-L.-M. varient au total de 1,000 à 1,500 fr.
C'est pour réduire la location que la Compagnie régionale a fait
construiresixwagons destinés au transport des pierres deFontvieille,
transport généralement à longue distance. Ces wagons, à trois es-
sieux, ont coûté 3,500 fr. la pièce, et sont loués à P.-L.-M. pour le
parcours sur ses rails, dans les conditions ordinaires, soit deux
centimes par kilomètre avec une indemnité de 3.fr. par jour de re-
tarda la restitution, le parcours journalier étant de 120 kilomètres.
Locomotives. — On a vu que les rails étaient trop lourds pour
lignes à faible trafic. Les locomotives ne sont nullement en rapport
avec les poids de ces rails : elles sont à faible poids.
i64
CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Toutes sont des locomotives-tendors ; Tarmature est la suivante:
3 sur Pas-des-Lanciers à Martigues, 4 sur Tarascon à Saint-
Rémy. 6 de ces machines sont du même type : construites de 1872 à
1874, parla maison Gorpet de Paris, 6 roues couplées et IG tonnes
à vide. Puissance de 75 tonnes sur rampes de 15 ™" à 15 kilo-
mètres à Theure. •
3 sur Arles à Fontvieille, dont 2 ont été construites en 1875,
par la société de Saint-Léonard à Liège (Belgique), 2 essieuii:
couplés, foyer Belpaire, charge à vide 18 tonnes; remorquent
90 tonnes dans les mêmes conditions que ci-dessus.
Deux machines ont été achetées, en 1880, d'occasion à Lyon.
Elles sont on réserve. Ces machines ont quatre roues couplées et
sont d'un type analogue au type Corpct avec la puissance des
machines belges; elles ont été construites par Anjubault, prédé-
cesseur de Gorpet. Les autres machines ayant suffi jusqu^ici à assu-
rer le service, on n'a pas eu occasion de faire usage de ces deux
machines, qui pèsent 17 tonnes avide.
Enfin, la ligne de Miramas à Port-de-Bouc possède un outillage
plus fort : 2 machines à 6 roues couplées, d^un poids de 26 tonnes
à vide, remorquant 140 tonnes sur rampes de 15 "*" à la vitesse
de 30 kilomètres. Société de construction de Passy-Paris.
Les principales données de ces diverses machines sont :
Diamètre des cylindres
Course des pistons
Diamètre des roues
Timbre de la chaudière
Surface de la grille
N'ombre des tubes
Approvisionnement d'eau . . . .
— de combustible.
Poids de la machine à vide. . . .
— en charge . • .
Effort de traction à la circonférence
des roues
Adhérence de la machine en charge.
BELGES
0,330
0,500
1,0Ô0
9almosp.
0,945
130
2.500 lit.
900 lit.
18 tonn.
23 t. 500
3.375 kil.
3.357 kil.
AHJDBAELT
0,340
0,500
1,100
7 atm. 5
0,730
146
3.500 lit.
1.200 lit.
19 tonn.
24 t. 400
2.760 kil.
3.480 kil.
CORPET
0,300
0,450 ^
1,000 *
7 atm. 5
0.640
84
3.000 lit.
1.000 lit.
16 tonn.
21 t. 300
2.126 kil.
3.040 kil.
PASSY
0,420
0,500
1.200
Satm.SOO'
1,25
lU
5.000 lit.
1.000 lit.
26 tonn.
33 tonn.
4.700 kil.
5.300 kil.
A VOIE NORMALE 165
La ligne de Miramas à Port-de-Bouc est, comme on peut s'en
rendre compte, beaucoup mieux construite et outillée que les
lignes Henri Michel.
Ateliers de réparation. — A chaque tête de ligne est un atelier
de petit entretien, où on ne fait que de très-petites réparations,
L'atelier est dirigé par un chef mécanicien qui travaille lui-même.
Toutes les grosses réparations se font à Textérieur, y compris le
tournage des bandages.
L'armature, qui est la même pour les divers ateliers, comprend :
1 forge à 1 feu avec son outillage;
2 étaux avec l'outillage de deux ajusteurs; un marbre et
une meule ;
i cisailleuse poinçonneuse;
1 machine à percer.
Dépenses de premier établissement au 31 décembre 1884
LIGNES Henri Michel
10 Construction des chemins 4.285.676 30
2» Matériel 485.708 80
Total 4.775.385 40
Soit par kilomètre 111.055 50
LIGNE DE MiRAlIAS A PORT-DE-BoUC
!• Construction du chemin 3.299.031 30
2* Matériel, mobilier et approvisionnements 364.300 »
Total 3.663.331 30
Soit par kilomètre 146.535 26
Il n'a pas été possible d'obtenir pour les lignes construites par
Henri Michel, et appartenant aujourd'hui à la Société nouvelle,
des renseignements détaillés par ligne.
Il convient d'ailleurs de dire que les prix de revient kilomé-
trique de 1*' établissement no sont pas exagérés.
166 CHEMINS DK FER D'INTÉRÊT LOCAL
II. — EXPLOITATIO:^
Administration
Le Conseil d'Administration a son siège à Marseille. Il n'a
pas de réunions fixes. Le Conseil délibère lorsque les affaires se
présentent.
L'ensemble de l'exploitation est dirigée par un ingénieur chef
de l'exploitation, qui centralise tous les services et est en même
temps chargé de la construction des lignes nouvelles et des tra-
vaux d'agrandissement. Le chef de l'exploitation a des pouvoirs
très-étendus, que lui confère le Conseil d'Administration. Il nomme
et révoque les agents, règle les factures, etc., sans avoir besoin
d'en référer à l'Administration.
Un agent principal est spécialement chargé de la traction, de la
voie et du matériel fixe et roulant.
Un seul agent suffit à la comptabilité générale. La comptabilité
des magasins est tenue par un comptable, et la vérification des
écritures des gares est faite par deux contrôleurs. Enfin, il y a
un caissier.
Le personnel du service central et de direction comprend donc
au total sept agents.
Voie et Bâtiments
Le personnel d'entretien do chaque ligne se compose de quatre
hommes et d'un brigadier, sur les trois lignes de la Société nouvelle.
Sur la ligne de Miramas, il y a trois équipes.
Le service de la surveillance est assuré deux fois par semaine
par un poseur désigné à cet effet par le brigadier et qui parcourt
toute la ligne.
Le renouvellement s'est borné, jusqu'à ce jour, aux traverses,
que l'on remplace à raison de 30 à 100 fr. par kilomètre et
par an.
A VOIE NORMALE 167
En cas de travaux pressés on prend des auxiliaires ; on y a par-
ticulièrement recours en été pour renlèvement des herbes sur les
lignes, afin d'éviter des incendies.
Les réparations de l'outillage des agents et du matériel de la
voie se font aux ateliers de la Compagnie.
Le personnel delà voie fait aussi les déchargements de combus-
tible et autres manutentions du même genre pour le semce de la
traction et du magasin général. Il concourt également à la manu-
tention des marchandises* quand les gares sont encombrées.
Les passages à niveau sont gardés sur les routes nationales et
départementales et les chemins do grande communication. Les
chefs cantonniers ou les poseurs y sont logés, et leurs femmes
assurent le service des barrières moyennant une rétribution men-
suelle de 5 à 10 francs.
Sur les trois lignes de la Société nouvelle, il y a au total 10 pas-
sages gardés et 109 non gardés.
Les clôtures n'existent qu'autour des stations et jusqu'à
six mètres de chaque côté des passages pourvus de barrières.
Les dépenses, pour le service do la voie, des bâtiments et du
matériel fixe, s'élèvent, pour les diverses lignes en 1883, aux
chiffres suivants, par kilomètre :
Pas-des-Lanciers à Martigues. . . 749 fr. 32
Tarascon à Saint-Rémy 728 41
Arles à Fontvieille 1,138 52
Miramas à Port-de-Bouc 959 93
Ce sont des chiffres très-réduits.
Traction
Tous les trains sont faits en navette par une seule machine.
Une seconde machine assure la réserve, et la troisième est do
dépôt pour les lavages et les réparations courantes du petit
entretien. Deux machines eussent suffi à la rigueur sur chaque
ligne.
168 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
La machine en circulation fait le service pendant une semaine
avec les mêmes mécanicien et chauffeur, puis elle rentre au
dépôt.
Les mécaniciens ont un traitement qui varie de 1 ,560 à 1 ,680 fr.,
les chauffeurs do i,200à i,440 fr.
Il n'y a que deux mécaniciens et deux chauffeurs sur chaque
ligne,. en dehors du chef de dépôt.
Pendant la semaine de dépôt, le mécanicien et le chauffeur font
le lavage de leur machine, et assurent, sous les ordres du chef du
dépôt et avec Taide d'un auxiliaire, les travaux du petit entretien.
De plus, ils concourent aux manutentions des marchandises lourdes
dans la gare.
Le combustible employé se compose exclusivement d'agglo-
mérés de la Société de Rochebclle (Gard), qui sont livrés au prix
de 22 fr. la tonne sur wagon en gare de Tamaris. Le transport
revient en moyenne à 6 fr., ce qui fait ressortir le combustible au
prix élevé de 28 fr. la tonne. On no brûle que des briquettes, même
dans les machines à foyer Belpaire, malgré leur grande surface
de grille. La teneur en cendres des briquettes no doit pas dépasser
iOp. iOO.
Le graissage se fait avec de Thuile d'olive mélangée et avec de
l'huile minérale : celle-ci n'est cependant pas employée dans les
cylindres ou tiroirs.
Les mécaniciens n'ont pas d'allocations de combustible ou
d'huile. La raison que l'on donne pour cela est que les parcours sont
trop faibles et les stationnements prolongés trop fréquents. Les
mécaniciens et chauffeurs n'ont par suite aucun intérêt à réaliser
des économies dans la traction.
Pour éviter les abus, on contrôle sévèrement les états de con-
sommation.
Ce moyen est évidemment insuffisant. C'est une des raisons
pour lesquelles les prix de traction sont relativement assez élevés,
pour des machines de si faibles poids. Une autre cause réside
dans la séparation des lignes, qui ne permet pas l'établissement
d'un atelier assez complètement outillé pour faire face à toutes les
réparations.
A VOIE NORMALE
169
Les dépenses de traction par kilomètre (frais généraux non com-
pris) ressortent, pour Tannée 1883, aux chiffres suivants :
Combustibles
Frais de conduite
Graissage machines et wagons. .
Entretien et réparation du maté-
riel roulant
Alimentation d'eau
Chefs de dépôt et frais divers . .
DÉPENSES TOTALES. . . .
MARTIGUES
TARASCON
FONVIEILLE
MIRAMAS
0,1684
0,I93Ô
0,2371
0,1878
0,U03
0,1934
0,2345
0,1316
0,028 i
0,0221
0,0278
0,0353
0,0169
0,0092
0,0287
0,0389
0,0107
0,0219
0,0277
0,0350
0,0649
0,0759
0,1183
0,1188
0,4306
0,5140
0,6741
0,547 i
Les consommations des combustibles ont été les suivantes :
Par kilomètre de train
Par tonne kilométrique remorquée.
MAHTIGURS
5kil.650
0 213
TARASCON
7kiI.165
0 193
FONVIEILLE
8kil.783
0 117
MIRAMAS
6kil. 709
0 346
Mouvement et Trafic
Monvexnent. — Il n'y a pas de personnel spécial affecté à la
direction du mouvement.
Service des traifis. — Le service des trains est assuré par un seul
agent, le chef de train, qui est généralement au traitement de
1,350 francs.
Lorsqu'il y a plus'de 16 véhicules au train, ce qui arrive parfois
sur la ligne de Miramas, où les machines sont plus puissantes, on
est obligé d'ajouter un frein en queue. Ce frein est desservi par
un homme d'équipe, pris à la gare extrême.
Sur toutes les lignes circulent trois trains mixtes dans chaque
sens. Cependant, l'été, les dimanches et fêtes, un quatrième train
170 CHEMINS DE FER DINTÉRÊT LOCAL
aller et retour a lieu sur la ligne de Martigues, pour les voya-
geurs de Marseille.
Les traius qui assurent le transport des moellons destinés aux
endiguements du Rhône entre les carrières du Gastellet (Font-
vieille) et Arles, sont considérés comme des trains de matériaux et
circulent comme tels.
Sur la ligne de Tarascon à Saint-Hémy, on fait quelques trains
facultatifs à Tépoque des foires et fêtes d'Arles.
La vitesse moyenne des trains, arrêts déduits, est de 30 kilo-
mètres à rheure; cette vitesse peut être portée à 40 kilomètres en
cas de retard, en vue d'assurer la correspondance des trains de la
ligne principale.
Les trains ne contiennent généralement qu'une seule voiture à
voyageurs, un fourgon à bagages, et s'il y a lieu, des wagons de
marchandises jusqu'à concurrence des charges limites de 75,90 ou
140 tonnes, selon qu'il s'agit d'une machine Gorpet, Saint-Léo-
nard ouAnjubault et Passy.
L'ordre de composition est le suivant : machine, fourgon, voi-
ture, wagons en queue. Il y a une plaque ordinaire à chaque extré-
mité, afin de tourner la machine, dont l'empattement ne dépasse
pas celui des wagons.
Service des gares. — Le personnel des stations se compose
généralement d'un chef de station et d'un facteur.
Dans chacune des gares extrêmes, il y a, en outre, 1 homme
d'équipe.
Quelques stations de peu d*importance n'ont pas de facteur. Les
chefs de station ont constamment réclamé cette adjonction, jus-
qu'au jour où on a donné 25 francs par mois à leur femme
pour les aider. Le service y fonctionne maintenant sans récla-
mation.
Sur la ligne de Martigues, les deux stations intermédiaires sont
gérées exclusivement par des femmes, dont les maris sont poseurs
de la voie et qui assurent tout le service, y compris la comptabi-
lité.
Les haltes ne sont ouvertes qu'au service des voyageurs, les
A VOIE NORMALE 171
billets y sont distribués par le chef de traia ; on a vu que le four-
gon est muni, à cet effet, d'un casier à billets.
Les chefs de station ont un traitement de 1,500 francs, ils sont
logés, éclairés et chauffés. Les facteurs reçoivent de 80 à 90 francs
par mois.
Le personnel des gares et stations est comme on le voit, exces-
sivement réduit. Lorsque, par suite de circonstances imprévues, ce
personnel ne peut suffire à assurer la manutention des marchan-
dises, le brigadier de la voie met à la disposition du chef de gare
le nombre de poseurs nécessaire, afin d'éviter de recourir à des
supplémentaires .
Dans les gares où sont placés les ateliers, les agents au dépôt
concourent aussi aux manutentions, s'il y a lieu.
Le télégraphe n'est installé que dans les stations tenues par des
hommes. Le service des trains se faisant en navette, on n'a recours
au télégraphe que pour demander le secours ou pour réclamer
des wagons.
Tous les trains mixtes assurent indifféremment le service du
détail ou des wagons complets.
La plupart des chargements, au moins pour les wagons complets
sont faits par les expéditeurs moyennant l'abandon des frais acces-
soires.
Chaque gare tète de ligne classe et répartit le matériel.
Le chef de cette gare est garde-magasin pour la ligne, et tient
un magasin de charbon, huiles, etc., etc., à l'exclusion des impri-
més qui doivent être demandés directement au service central à
Marseille.
La comptabilité des magasins est tenue par un agent de service
central.
Les relations avec la Compagnie P.-L.-M., aux points de jonc-
tion sont excellentes.
La Compagnie locale paye à celle-ci pour surveillance et entretien
des raccordements à Arles, et Tarascon, les redevances annuelles
suivantes :
Tarascon 2.400 francs.
Arles 1.S70
i78 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
La gare de Pas-des-Lanciers, qui est commune, donne lieu à
une redevance fixe de 7.000 francs par "an. En outre, les trans-
bordements sont faits par la grande Compagnie, moyennant une
somme de 40 centimes par tonne transbordée dans un sens ou
dans Tautre (traité du 10 décembre 1882).
Antérieurement à cette date, le partage des dépenses avait lieu
au prorata du nombre des branches, ce qui était fort lourd pour
la Compagnie locale. La grande Compagnie a cédé aux réclama-
tions de cette dernière.
Pour Miramas, où la ligne de la Compagnie locale est reliée par
rails avec celle de la Compagnie P.-L.-M., il est payé à celle-ci
une redevance fixe de 2.280 francs pour les aiguilles. Le régime
des échanges est ici très-difl'érent de ce qu'il est dans les autres
gares de jonction; la Compagnie locale est considérée comme un
camionneur et doit payer les taxes de transport quand les marchan-
dises lui sont passées.
En résumé, les dépenses totales d'exploitation des trois gares de
ïarascon, Arles et Miramas sont beaucoup plus élevées qu'elles
ne le seraient par la communauté avec les gares de la Compagnie
P.-L.-M. On a commis dans le principe une erreur coûteuse qui a
pour autre conséquence un mauvais service.
Service commerciaL — Ce service est exclusivement concen-
tré dans les mains du chef de Texploitation. Il n'offre d'ailleurs
pas de particularités.
On a vu précédemment quel est le trafic spécial à chacune des
lignes.
Les tarifs sont ceux du cahier des charges, avec sa classification.
Les frais pour les marchandises et autres transports ne différent
pas des frais accessoires en vigueur sur les grands réseaux.
Deux tarifs spéciaux ont été créés sur la ligne de Miramas à
Port-de-Bouc, Tun pour wagons complets de 4.000 kilos et pour
certaines catégories de marchandises, l'autre pour les bestiaux.
Il n'existe pas de tarifs spéciaux sur les lignes de la Société
Nouvelle, à l'exception de la ligne d'Arles à Fontvieille pour
laquelle a été établi un prix ferme de 1 fr. 70 par tonne (frais de
manutention compris), applicable par wagons complets deS.OOOkil.
A VOIE NORMALK
473
au moins, pour les produits des carrières de Fontvieille. On
déduit 30 centimes par tonne lorsque le chargement est fait par
Fexpéditeur.
Les écritures sont tenues suivant le même mode et sur les mêmes
imprimés qu'à la Compagnie P.-L.-M. — La comptabilité est dé-
cadaire.
Les versements des gares sont effectués d'une manière différente
selon les lignes.
Sur la ligne de Saînt-Rémy et sur celle de Fontvieille, les ver-
sements sont faits entre les mains de banquiers, Tun à Saint-Rémy,
Tautre à Arles. Ces banquiers sont en compte courant avec une
maison de Marseille près de laquelle la Compagnie d'exploitation
a un compte ouvert.
Les versements des stations de. lignes do Martigues et de Mi-
ramas sont envoyés au service central à Marseille.
Résultats Généraux
Les dépenses et recettes du service de l'exploitation sont ligurées
dans les résultats ci-après, relatifs à Tannée en 1883, par ligne
et par kilomètre.
® DÉPENSES PAR KILOMÈTRE
Direction. — Frais généraux. .
Mouvement, trafic service des
gares
Matériel el traction
Voie, matériel fixe
Dépenses par kilomètre de lig[nc.
— — de train.
martigi:es
TARASCON
FONTVIEILLE
MIRAMAS
418 67
91Ô 33
1.390 48
749 32
370 90
918 44
1.8G3 24
728 It
39:. 09
1 . 4G8 42
3.264 39
1.138 .Vi
754 95
1.568 06
1 . 3()9 07
959 93
3.474 110
1 Cm
•
3.780 7 4
i 74
6.267 02
2 62
4.642 31
2 09
174
CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
2° RECETTES DE l'exploitation (Impôls et détaxes déduits).
Voyageurs • . .
Bagages, messageries, produits
G. V
Marchandises P. V., bestiaux, etc.
Recettes en dehors du trafîc :
domaine de la compagnie. .
Totaux des recettes. . .
Recettes par kilomètre de ligne.
— de train.
Dépenses par kilomètre de ligne.
Produit net
Rapports p. 100 des dépenses aux
recettes
MARTIGI'ES
FONTVIKILLE
61.112 05
6.294 »
14.514 17
450 .
82.370 02
4.335 29
1 93
3.474 60
860 69
80 p. 100
26.068 69
3.098 30
37.702 10
335 3»
61.704 09
4.581 26
2 08
3.780 74
799 52
82 p. 100
TARASCON
13.470 33
365 45
103.513 90
189 50
UIRAM4S
117.739 24
10.703 55
4 51
6.267 02
4.436 53
59 p. 100
26.88i 75
4.185 05
IOi.688 05
135.757 85
5.221 45
2 37
4.642 31
579 14
89 p. 100
Ces lignes sont incontestablement exploitées d'une manière très
économique.
Le tableau ci-après donne le mouvement des dépenses et des
recettes pendant les cinq années 1881, 1882, 1883, 1884 et 1885
d'une part pour l'ensemble des trois lignes delà Société Nouvelle;
d'autre part pour la ligne de Miramas à Port-de-Bouc :
g3
•r,
<
•M
>^
«kl
s •
m S
if
10^
RÉSULTATS TOTAUX
RÉSULTATS KILOMÉTRIQUES
si
II
Uere ttes
Dépenses
Produit
net
1 Recettes
Dépenses
1
Produit
net
1 1 1
1«^-
- Soci
.été nouvelle (Pas-des-Lanciers à Marti gués, Tarascon à 1
Saint-Rémy et Arles à Fontvieille) |
1881
44 k.
253.849 30
179.027 99
74.821 31
5.769
4 069
1.700
71
1882
44
255.923 23
198.893 90
57.030 88
5 816
4.178
1.638
72
1883
44
267.839 45
189.526 27
78.313 18
6.087
4.307
1.780
72
1884
44
254.400 43
192.432 43
61.908 .
5.782
4.373
1.409
1885
44
256.642 79
196.702 92
59.939 85
5 810
4 470
1.340
76
2«) — Miramas à Portde-Bouc |
1881
21k.
146.294 50
100.027 57
40.206 93
6.966
5.049
1.917
73
1882
25
127.833 30
108.010 .
19.823 30
5.113
4.320
793
85
1883
25
137.300 25
110.950 55
26.355 70
5.492
4.438
1.054
80
1884
25
117.241 25
112.351 32
4.889 93
4 650
4. 494
156
96
1885
25
109.614 75
107.468 40
2.146 35
4.384
4 298
86 95 1
CHAPITRE XIII
CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL DE L'HÉRAULT
Ligne de Montpellier à Palavas 12 kil.
— Montpellier à Gessenon (y compris 18 kilomètres
de troDc commun avec la compagnie du Midi entre
Montpellier (Arènes) et Montbazin) 104 kil.
I* — ÉTABLISSEHEIWT DES CHEHINS
Le département do THérault so trouvant insuffisamment doté
en chemins de fer, à l'époque de sa plus grande prospérité vini-
Gole, demanda et obtint par décret du d4 août 18G7, la concession
de cinq lignes d'intérêt local, savoir :
Saint-Chinian à Montbazin, par Béziers, Pézonas
et Mèze 94 kil.
Agde à Mèze 49
Montpellier à Rabieux 47
Montpellier à Palavas 42
Roquessels à Pézenas 14
Total 186
La durée de la concession était de quatre-vingt-dix-neuf ans.
Les tarifs étaient ceux du Midi, avec un rabais de 0 fr. 02 sur cha-
176 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
que classe, sous la réserve qu'il n'y aurait que deux classes de
voyageurs, taxées àO fr. 08 et 0 fr. 05 sans l'impôt
Le département de TUérault, qui recevait du Trésor une subven-
tion de 3,410,000 francs, demanda aux Compagnies du Midi et de
la Méditerranée, de se charger de la construction et de l'exploita-
tion des chemins qui lui avaient été concédés.
En présence du refus de ces Compagnies, le département recher-
cha un concessionnaire : M. Joret accepta les conditions du cahier
dos charges.
Par décret du 4 août 1869, la subvention fut modifiée et fixée
à 75,000 francs par kilomètre, non compris les terrains pour l'as-
siette des lignes, gares et dépendances qui ont été livrés gratuite-
ment au concessionnaire par le département.
La section relativement facile de Montpellier à Palavas a été
ouverte en 1872.
Pézenas à Mèze, tracé difficile, a été ouvert en janvier 1873;
Pézenas à Bassan en octobre de la même année; Bassan à Béziers,
où l'on rencontre des ouvrages d'art considérables, en juin 1874;
Mèze à Montbazin, en juillet 1876; Béziers à Cazoules, en novem-
bre 1876; et Cazoules à Cessenon en décembre 1877.
Les demandes des populations étaient tellement pressantes, par
suite do l'abondance des produits, qu'on était forcé d'ouvrir à l'ex-
ploitation par petits tronçons.
98 kilomètres seulement ont été construits, bien que, diaprés
le cahier des charges, les travaux du réseau complet dussent être
exécutés en 8 années, c'est-à-dire en 1876.
Les raisons de ce retard résident en premier lieu dans les diffi-
cultés exceptionnelles rencontrées dans la construction. En effet,
soit dans le but de se rapprocher de villes qu'il eût été préférable
de laisser de côté, comme c'est le cas pour Montagnac, entre
Mèze et Pézenas; soit qu'on ait adopté des tracés défectueux, ainsi
qu'on l'a fait de Pézenas à Béziers et de Béziers à Cessenon, on
s'est trouvé en présence de difficultés telles qu'il a fallu recourir à
des rampes de 30 ™™ et des courbes de 200 mètres de rayon qui
n'ont pas toujours permis d'éviter la construction d'ouvrages d'art
importants.
En second lieu, dans les premières années de l'exploitation, la
A VOIE NORMALE 477
production vinicole du département de THérauIt atteignait jusqu'à
iS millions d'hectolitres par an. En 1875, les attaques du phyl-
loxéra l'avaient réduite à iO millions, et, en 1883, elle descendait
à 4 millions.
Il devenait dès lors très-difficile au département de payer la sub-
vention qu'il avait souscrite; d'autre pari, les recettes kilométri-
ques décroissant progressivement, les ressources du concession-
naire s'épuisaient. De là des tiraillements et des procès.
Bien que le Conseil d'État, par arrêt au contentieux en date du
21 décembre 1883, ait donné en partie raison aux réclamations de
la Compagnie, en rendant le département de l'Hérault responsable
d'une partie des pertes subies par celle-ci, la Compagnie a été
mise en faillite le 9 août 1884.
Desoription de la ligne. — Les tracés sont sur bien des points
défectueux; il semble qu'on n'ait pas assez tenu compte, en les
adoptant, des difficultés d'exploitation sur des rampes de 30 """
et des courbes de 200 mètres souvent concomitantes.
La petite ligne de Montpellier à Palavas elle-même, tracée en
pays de plaine, n'est pas exempte de fortes rampes, ni même d'ou-
vrages d'art importants. Dans le but de placer la tête de cette
ligne à l'Esplanade, c'est-à-dire aussi près que possible du centre
de la ville de Montpellier, on a établi le premier kilomètre en
pente de 25 "" et en partie sur viaduc.
Sur le parcours de Montbazin à Mèze, plaine facile, on n'a pas
craint de recourir à des rampes de 20 à 25 ""° ; de Mèze à Monta-
gnac, la traversée du faite de la Madone s'effectue par de longues
rampes de 30 "■ et des courbes de 200 mètres de rayon. Enfin,
dans les plaines de Pézenas à Béziers et de Béziers à Cessenon,
onaeu recours à des rampes de 20, 25 et 30"", qui ne sont pas tou-
jours suffisamment justifiées ; la gare de Béziers a été placée dans
la partie haute de la ville, ce qui ne permet pas le raccordement
avec la gare du Midi, qui se trouve en contrebas, et ce quidoune,
eaoutre^ lieu à de sérieuses difficultés de camionnage.
La gare de Montbazin est commune avec la Compagnie du Midi ;
le parcours de Montbazin à Montpellier est également commun
12
178 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
avec le Midi jusqu'à Arènes, bifurcation des lignes de Rodez et de
Cette à Montpellier; le tronc de Montbazin à Arènes est de
18 kilomètres; Arènes, à 2 kilomètres de Montpellier, est une
gare d'échange de marchandises commune au Midi, au P.-L.-M.
et aux chemins de fer de FHérault.
La ligne de Montpellier à Rabieux est en construction; Texpé-
rience des lignes précédentes semble avoir porté ses fruits; car
suf cette ligne, on a réduit les rampes et on n'a pas admis de
rayons inférieurs à 400 mètres. Mais on a jugé à propos de cons-
truire à Montpellier, à l'occasion de cette ligne, une nouvelle gare
dite gare centrale de l'Hérault; cette gare est actuellement la tète
de ligne des trains de la ligne de Montbazin-Pézenas-Béziers; elle
est raccordée avec la ligne de Palavas.
Ces dispositions coûteuses et compliquées sont injustifiables. D
eût été bien préférable, et pour le public et pour la Compagnie
exploitante, de concentrer le service de la ligne de Palavas aussi
bien que celui des lignes de Rabieux et de Pézenas-Béziers dans
une gare unique, celle de la Compagnie de la Méditerranée.
Dans le principe, on avait armé la ligne en rail Yignole, en fer.
Ce rail a été progressivement remplacé par un rail Vignole, acier
du poids de 25 kilos le mètre courant, il ne reste plus que 10 kilo-
mètres de voie en rail de fer. Le rail a 6 mètres de longueur.
LastationdeTourbes(fig.l7,pl.VlI) représente le type des petites
stations. Le plan en est commode et simple ; le bâtiment des mar-
chandises est accolé à celui des voyageurs*. Dans les stations des
lignes nouvelles, on a supprimé la plaque tournante et le cul-de-
sac auquel elle donne accès, comme rendant peu de services.
Les stations sont couvertes par des signaux à distance placés à
1,000 mètres, et qui commandent l'arrêt absolu quand ils sont
tourués au rouge.
Les prises d'eau sont assurées à l'aide de machines d^alimenta-
tion et de réservoirs.
Matériel roulant. — Voitures et wagons. — Les voitures, four-
gons et wagons ont été construits par la maison Chevalier, de Paris.
Toutes les voitures sont à couloir central et à frein à vis, manœu-
vré par les agents des trains placés sur la plate-forme. Ce matériel
A VOm NORMALE 179
.comporte que deux classes, suivant le cahier ^les charges ; il y
lependant des compartiments de luxe dits coupés. Le nombre
(voitures est de 55.
is 6 fourgons comportent tous un compartiment de seconde
; dans le fourgon proprement dit est installé un casier à bil
ï et un guichet donnant sur la plate-forme, afin de permettre la
'tribution des billets en pleine voie, aux passages à niveau les
plus importants; c'est là une excellente disposition.
Tout le matériel de petite vitesse est muni du frein à vis, ce qui
est une exagération ; ce matériel se compose de :
10 wagons couverts, à bestiaux;
64 wagons plates-formes ;
10 wagons à houille.
Ce qui constitue un armement faible de 0 w. 7 par kilomè-
tre. On pare aux insuffisances de matériel en louant des wagons
à la Compagnie du Midi ou à celle de la Méditerranée.
Locomotives. — Le choix des locomotives n'a pas été plus heu-
reux que le choix des tracés.
Toutes les machines sont des machines-tenders. — Il en existe
16 de 6 modèles différents :
4 machines à 2 essieux accouplés du poids de 23 tonnes en
charge (Graffenstaden) ;
2 machines à voyageurs, 3 essieux couplés, pesant 28 tonnes
(Cail);
4 machines à 4 essieux accouplés, pesant 34 tonnes (Gail);
2 machines à 3 essieux accouplés, pesant 32 tonnes (Gouin);
2 machines à — 24 tonnes (Corpet);
2 machines à 2 trains articulés de trois essieux chacun, pesant
54 tonnes (Cail).
Ces dernières machines sont très-assujettissantes : d'entretien
difficile et de réparation délicate; pour des travaux qui retiennent
2 jours aux ateliers les machines ordinaires, celles-ci exigent
8 jours.
80 CHEMINS UE FER DINTÉBÈT LOCAL
Les coodilioas d'établissemoal de ces diverses machines sont
as BuivaDtes :
Diamètredescylindres.. . ,
Course du piston
DiamÈlre des roues motrices.
Surface de r.hauITe du foyer.
— des mbes.
Poiiisilelarnachineâvlde..
il
1
î
i
1
4
i i
1
1
" S
0.3(M)
O.i60
1.300
3"90
il- 50
17.300k
23.200
0.350
0.650
1.310
4-65
53-26
21.600 k.
Ï7.80O
O.iOO
0.460
1.060
5-23
65- 27
21.700 k
32.600
0.400
0.560
1.2D0
5-M2
61- 25
23.600 k
31.800
0.310
0 500
I.OTO
i"63
45-37
le.OOOk
25.000
0.350
0.550
1.200
8-95
112-39
13.100 k.
55.000
Ateliers. — Les ateliers soht installés k MoDtpellier dans la gare
centrale des chemins de fer de l'Hérault. Us sont beaucoup trop
importants et pourraient suffire à uue exploitation de 500 kilomé-
trés.
Une machine de 25 chevaux actionne :
3 tours à roues, 6 tours ordinaires ;
4 perceuses ;
2 raboteuses, 2 étaux limeurs;
1 marteau pilon ;
1 cisaille;
i presse hydraulique.
On dispose, en outre, d'un outillage important pour la forge et
l'atelier do menuiserie.
Ces installations permettent de faire toutes réparations et même
la construction.
Il va de soi que le personnel employé est fort nombreux.
Dépenses de premier établiBeement au 31 dioembre 1884
Il n'a pas été possible d'obtenir des renseignements détaillés par
ligue sur les dépenses de premier établissement.
A VOIE NORMALE 181
Les chiffres donnés ci-après so rapportent donc à Tensemble des
lignes de Montpellier à Palavas 12kii.
et de Montbazin àCessenon 86
Total 98 kil.
i« Gonslraction du chemin 17.413.510 »
29 Matériel, mobilier et approvisionnements 2.205.766 »
3® Intérêts et amortissement pendant la construction. 6.578.126 »
Total GÉNÉRAL. . 26.197.402 »
Soit par kilomètre 267.330 »
Ce qui est une dépense très-élovée.
Les subventions reçues pour cette construction ont atteint le
chiffre de 8,358,379 francs.
ii. —exploitation
Administration
Avant la mise en faillite, le conseil d'administration, qui sié-
geait à Paris, se composait de sept membres et se réunissait chaque
semaine. Un administrateur délégué à Paris, un autre à Mont-
pellier étaient chargés de la solution des questions urgentes.
C'est le syndic de la faillite qui représente aujourd'hui toute
rAdminis tration .
Un directeur, chef d'exploitation, centralise tous les services,
et s'occupe tout spécialement du mouvement et de la partie com-
merciale.
Sous ses ordres, un ingénieur est chargé de la voie, un autre
de la traction.
La comptabilité de tous les services est tenue dans les bureaux
du service central de l'exploitation.
Les feuilles de solde et factures sont certifiées par les chefs des
services et approuvées par le directeur.
Voie et Bâtiments
L'ingénieur qui dirige ce service est assisté d'un piqueur.
182 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Lesbrigades delà voie sont généralement composées à 5 agents;
elles ont à assurer le service de 4 à 6 kilomètres de voie; cepen-
dant, dans les fortes rampes à courbes raides, la longueur affectée
à la brigade descend à 3 kilomètres.
La ligne facile de Palavas, qui n'a que 12 kilomètres, ne com-
porte qu'une seule brigade.
Les passages à niveau des routes importantes sont gardés par
les femmes des chefs-cantonniers ou des cantonniers. Les gardes-
barrières ne sont pas toujours logées ; celles qui le sont reçoivent
15 francs par mois, et les autres 20 francs.
n n'y a pas de clôtures, sauf autour des gares, et aux abords
immédiats des passages à niveau gardés.
Dépenses du service de la voie en 1885 :
•
Personnel 80.659 55
Matériel de la ,voie 88.215 47
Balast 455 »
Entretien des plaques tournantes, chariots, etc 2.726 55
Entretien des ouvrages d'art 2.063 56
Entretien des bâtiments. 3,750 93
Dépenses diverses 4.633 19
Total. . . . 152.524 25
Soit par kilomètre de ligne (les 18 kilomètres de tronc
commun avec le Midi défalqués) 1.556 37
Traction
Le chef du service de la traction a sous ses ordres un chef de
dépôt à Montpellier et un chef-mécanicien à Béziers.
Les machines sont conduites par 8 mécaniciens et autant de
chaufTeurs ; les mécaniciens peuvent être suppléés par 3 chauffeurs
autorisés. Les mécaniciens sont payés à raison de 150 à 165 francs
par mois, les chauffeurs 110 à 123 francs.
Le chef de dépôt dirige les ateliers, qui comprennent un per-
sonnel de 34 ouvriers ; il a en outre 4 employés de bureau.
Les allocations de combustible sont variables suivant le type de
machine ; elles atteignent 10 kil. par kilomètre pour les grosses
machines, avec 200 kil. pour allumage; pour ces mêmes ma-
A VOIE NORMALE 183
chines, Tallocalion pour graissage est de 34 grammes d*huile par
kilomètre.
Les primes d'économies et d'entretien s'élèvent à 50 ou 60 francs
par trimestre pour les mécaniciens des petites machines, 80 francs
pour ceux des grosses machines.
Les chauffeurs reçoivent une prime moitié moindre.
Le service de la ligne de Montpellier à Cessenon comporte un
roulement à trois jours, d'où résultent des déplacements pour les
mécaniciens et chauffeurs. Le roulement complet ne présente pas
d'intérêt lorsqu'on a des machines de types si différents ; le roule-
ment a pour but de comparer les services des mécaniciens entre
eux. Or, comment établir une comparaison lorsqu'on ne dispose
que d'éléments différents ? Il eût mieux valu couper le roulement
à Pézenas et éviter ainsi tous déplacements.
Les parcours de machines varient de 100 à 160 kilomètres par
jour.
Le combustible employé se compose exclusivement de bri-
quettes, en provenance d'Alais et de Graissessac et qui reviennent
à 26 fr. 50 à Montpellier.
Les eaux sont généralement calcaires et exigent un lavage delà
machine chaque semaine.
Dépenses du service delà traction en 1885 :
Personnel de la traction 51.924 10
Personnel des ateliers 44.220 40
Déplacements et gratiGcations, primes, de 16.071 70
Combustibles 58.255 96
Alimentation 6.342 46
Entretien et réparation des machines 32.030 72
Entretien et réparation du matériel 15.514 95
Total. . . . 224.360 29
Soit par kilomètre de train 0 80
Mouvement et Trafic
MouTemeiit. — Le directeur est lui-même chef du service du
mouvement ; un secrétaire de l'exploitation est, sous ses ordres,
spécialement chargé du personnel. Un agent tient à la fois la sta-
tistique commerciale et celle du mouvement.
18i CHKMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Tel est le personnel du service central du mouvement, pour un
total de 25 gares et stations.
Service des trains. — La ligne de Palavas comporte l'hiver un
service à 4 trains dans chaque sens, Tété un service à 7 trains.
La ligne de Montpellier à Gessenon est desservie par deux trains
de voyageurs et un train mixte dans chaque sens ; il n'y a pas de
trains réguliers de marchandises, mais seulement des trains fa-
cultatifs.
Pas de service de jiuit en temps normal.
Quelque réduite que soit la composition des trains, chacun d'eux
comporte deux agents, un conducteur et un garde-frein.
Quand les trains sont chargés, on ajoute à ce personnel un
homme d'équipe.
La composition normale des trains de la ligne de Palavas est de
12 voitures en été. Il n'est pas possible de dépasser cette compo-
sition en raison de la rampe de 25°"/°^ qu'on rencontre dans le sens
pair, à l'arrivée à Montpellier.
Sur les autres lignes, les voies d'évitement ont été établies pour
assurer le croisement des trains de 24 véhicules, maiâ les grosses
machines seules peuvent remorquer de semblables charges ; avec
les machines ordinaires, on est obligé de recourir à la double trac-
tion, machine en tète et machine en queue, dès qu'on dépasse 45
à 18 véhicules. Ce sont là des conditions d'exploitation aussi
incommodes que peu économiques.'La composition en voitures des
trains de la ligne de Montpellier à Gessenon, est normalement
d'une mixte et d'une seconde ; un fourgon est en tète, il n'y a pas
de fourgon en queue. Tous les 10 à 15 kilomètres, une ou deux
voitures sont en réserve dans les stations pour les cas d*affluence
de voyageurs.
Il y a peu de marchandises Tété sur la ligne de Gessenon ; mais
l'hiver un train facultatif y circule à peu près chaque jour.
La vitesse maxima des trains est 50 kilomètres à l'heure sur la
ligne de Palavas ; 45 kilomètres en plaine sur la grande ligne ; les
trains mixtes sont limités à 30 kilomètres de vitesse.
Jusqu'en 1885, les voitures ont été chauffées l'hiver avec des
briquettes Stocker, auxquelles on a renoncé depuis pour recourir
A VOIE NORMALE 185
aux bouillottes à eau, réchaufTées par la vapeur prise à la loco-
motive.
Le nettoyage et le balayage des voitures est assuré par les
hommes d'équipe des gares terminus.
Service des gares et stations. — i3 stations sur 25 sont gérées
par un seul agent, assisté de sa femme pour le service des billets
et du télégraphe, service dont elle s'acquitte généralement fort
bien ; la femme reçoit 15 francs par mois.
Un petit nombre de stations ont deux agents.
Les gares ont un personnel en rapport avec leur importance ; à
Béziers, par exemple, il y a 2i agents.
Les stations sont rapprochées ; toutes sont munies d'une voie
d'évitement, les haltes exceptées.
Toutes les stations sont pourvues du télégraphe.
Les règlements sont identiquement ceux de la Compagnie du
Midi.*
Dans les gares à un seul agent, les manœuvres sont exé-
cutées par le personnel du train, le garde-frein faisant les
aiguilles.
Les trains qui ont à prendre ou à laisser des marchandises de
détail suivent la voie de halle. Les autres trains suivent soit la voie
directe, soit, en cas de croisement, la voie directe et la voie d'évi-
tement.
Pour les manutentions ou manœuvres des wagons dans l'inter-
valle des trains, on n'a pas ici recours aux agents de la voie pour
compenser l'insuffisance de personnel des stations, mais on envoie
en cas de besoin un ou deux hommes d'équipe de la gare impor-
tante la plus voisine.
Le service ainsi organisé fonctionne à Tentiëre satisfaction du
public et de la Compagnie.
La répartition du matériel est faite par le chef de gare de
Béziers pour la ligne de Montpellier à Cessenon, par celui de la
gare de l'Esplanade pour la ligne de Palavas.
Chaque chef de gare répartiteur reçoit journellement des sta-
tions et gares un état du l'estant en gare, des demandes et des
wagons disponibles.
186 GHEMhNS DE FER D^ INTÉRÊT LOCAL
Les deux répartiteurs sont en même temps agents de la voie
unique.
Le service de transit dans la gare d'Arènes est assuré par la
Compagnie P.-L.-M., soit pour ses propres échanges avec la
Compagnie du Midi, soit pour les échanges de la Compagnie de
l'Hérault avec le P.-L.-M. ou le Midi. Les dépenses d'exploitation
étaient primitivement réparties au prorata du nombre des branches,
ce qui mettait un quart à la charge de la Compagnie locale. Aujour-
d'hui chacun paye suivant le prorata des tonnes manutentionnées.
La gare de Montbazin est commune avec la Compagnie du Midi
pour tous les services ; la dépense d'exploitation est répartie
d'après le nombre des branches, ce qui met un tiers à la charge de
la Compagnie locale.
Les dépenses de premier établissement de ces deux gares com-
munes sont réparties sur la base d'un intérêt annuel de 5,75 p. 100,
et suivant la formule adoptée pour chacune d'elles pour le partage
des dépenses d'exploitation.
On a projeté de raccorder les gares de Béziers et de Pézenas
avec celles de la Compagnie du Midi; mais on a jusqu'ici reculé
devant les difficultés et la dépense.
Les trains de la Compagnie de l'Hérault circulant entre Mont-
pellier et Montbazin sont assujettis au péage de 6/10 des recettes
brutes.
Les parcours kilométriques des trains se sont élevés en 1885 à
279,981 kilomètres, y compris 14,121 kilomètres de trains de
ballast et de service, ce qui donne pour les parcours des trains de
l'exploitation 265,860 kilomètres.
Service oommeroial. — Le directeur s'est, comme on Ta vu,
exclusivement réservé le service commercial.
Ce service offre du reste pou de particularités.
Le trafic de la ligne de Palavas est à peu près exclusivement
composé de voyageurs qui se rendent aux bains de mer ou en
reviennent.
Sur la ligne de Cessenon, le principal élément du trafic en
dehors des voyageurs est le vin, et tout ce qui peut servir à sa
production, ou à la défense contre le phylloxéra.
A VOIE NORMALE 187
Les régions où les vignes sont anéanties produisent des grains,
des fourrages, etc.... Mais la reconstitution des vignes a suivi de
grands progrès dans l'Hérault, où Ton ne désespère pas de retrou-
ver, dans un petit nombre d'années la prospérité d'autrefois.
Aux teimes du cahier des charges, les tarifs de voyageurs ne
comportent que deux classes, pour lesquelles les perceptions kilo-
métriques sont réduites :
Pour la première à 0,0896.
Pour la seconde à 0,0560.
Les billets d'aller et de retour comportent une réduction de
30 p. 100 sur le double des billets simples qui sont délivrés de toute
gare à toute gare.
Pour les marchandises, ou a adopté à peu près la classification
et les conditions d'application de la Compagnie du Midi, seule-
ment les prix d'application des 4 classes sont des prix respective-
ment réduits à 14, 12, 8 et 6 centimes par kilomètre.
Sur le parcours de Montpellier àMontbazin, les marchandises
sont taxées 0,02 en plus par classe pour les 18 kilomètres appar-
tenant au Midi.
Les prix très-réduits adoptés pour les chemins de fer de l'Hé-
rault ont, il est vrai, pour effet d'éviter des détournements de la
part de la Compagnie du Midi ou même d'effectuer des détourne-
ments au détriment de celle-ci; mais cette réduction est contraire à
ce principe très-rationnel et généralement admis que sur les lignes
de faible parcours et à faible trafic, les tarifs doivent être élevés.
Uue compagnie de chemins de fer n'est autre chose qu'un com-
merçant ; si ses affaires sont très-développées, les bases de ses
tarifs pour les grosses parties ou les longs parcours peuvent être
très-abaissées.Si^ au contraire, son trafic estfaible, qu'elle n'aitpas
à espérer de grosses expéditions, et que ses parcours soient
réduits, il est de toute évidence qu'elle a besoin pour vivre d'ap-
pliquer des tarifs élevés. A fortiori est-on dans Terreur lorsque, et
c'est le cas pour l'Hérault, les prix appliqués à de petits parcours
et un faible trafic sont des prix inférieurs aux tarifs habituels.
Les marchandises à destination des gares de la ligne de Mont-
pellier à Cessenon et en provenance du réseau P.-L.-M. ou d'au
delà, transitent à Montbazin. Les marchandises à destination du
188 CHEMINS DE FER D INTÉRÊT LOCAL
réseau P.-L.-M., et en provenance de cette ligne, transitent à
Montpellier- Arènes.
Les gares de la ligne de Gessenon sont ouvertes au trafic direct
avec le Midi pour toutes directions en ce qui concerne la petite
vitesse, pour certains points importants seulement en ce qui con-
cerne la grande vitesse.
Les écritures sont les mêmes que celles de la Compagnie du
Midi, et la comptabilité s'établit de même par dizaine.
Le service du contrôle est dirigé par un comptable principal,
chef du contrôle ; il est assisté par 4 agents qui font en même
temps les vérifications de comptabilité dans les gares.
Les recettes sont centralisées par un caissier.
Les dépenses du service de l'exploitation ont été les suivantes
en 1885 :
Personnel (service centra] compris) 139.063 65
Fournitures de bureau 16.012 10
Eclairage et chaufiage 4.968 03
Entretien et réfection du petit matériel des gares 3.577 36
Dépenses diverses 1.244 90
Total pour les dépenses d'exploitation proprement dites. 164.866 04
Soit par kilomètre de train 0 62
— de ligne 1.397 •
Services divers. — Le matériel et les matières de la voie et de la
traction sont distribués par un garde-magasin qui en a charge.
De même un commis d'économat est préposé au service des
imprimés et fournitures diverses.
Une retenue de 1 p. iOO est faite à tous les agents pour assurer
le service médical et pharmaceutique.
La Compagnie de THérault est moins libérale en cela que la
plupart des Compagnies de chemins de fer d'intérêt local.
Pas de caisse de retraite ni de secours.
Résultats généraux.
Les dépenses données plus haut par service sont incomplètes
en ce sens qu'elles ne comprennent pas la participation dans les
A VOIE NORMALE 189
frais d'exploitation des gares communes et du tronc commun
d'Arènes à Montbazin, frais qui n'ont pas été répartis par service
dans les comptes de la Compagnie.
Ces frais s'élèvent à 63,487 10
Il faut encore y ajouter :
l^^Les frais de location du matériel étranger, soit . 17,380 »
2* Les dépenses d'administration centrale, du ma-
gasin central, et les charges d'administration pu-
blique, de contribution, etc 34^516 52
Les dépenses résumées pour l'exercice 1883 sont, par suite les
suivantes :
Voie et bâtiments 152.524 25
Traction 224.360 29
Exploitation 164.866 04
Gares communes, tronc commun et loyer du malériel
étranger 80.867 10
Administration centrale et charges diverses. : 34.516 52
Totaux. . . 657.134 20
Soit par kilomètre de ligne (y compris le tronc commun). 5.664 95
Par kilomètre de train 2 34
*
Les recettes ont été pour le même exercice, impôt compris :
{o Grande vitesse 468.020 20
20 Petite vitesse 319.036 85
3« Recettes diverses 14.220 85
Total des recettes brutes. . . 801.277 90
Impôt 75.903 70
Recettes nettes 725.374 20
Recette nette kilométrique. . 6.253 22
Recette par kilomètre de train de Texploitation. . 3 01
En résumé, de très-grosses erreurs ont été commises dans la
construction des chemins de fer d'intérêt local de THérault. On
n'a pas été plus heureux dans le choix des locomotives et Tou-^
tiUage des ateliers. Ces chemins sont à classer parmi les plus
190
CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
défectueux qu'il y ait en France sous le rapport de l'établisse-
ment.
L'exploitation rendue très-ardue par les erreurs de premier
établissement est assez bien conduite, mais nécessairement oné-
reuse sous le rapport de Tentretien et de la traction. D'une part,
les charges qui pèsent sur l'exploitation par suite de ces erreurs;
d'autre part, la faiblesse injustifiée des tarifs ne permettent pas
d'espérer de longtemps une situation prospère pour les chemins
de l'Hérault qui, mieux construits et outillés simplement, eussent
pu être en mesure, avec les tarifs habituels, de donner une rému-
nération suffisante des capitaux engagés, même au milieu de la
crise phylloxérique.
RÉSULTATS DE L'EXPLOITATION DES CHEMINS DE FER DE L'HÉRAULT
Pendant les années 1881, 1882, 1883, 1884, 1885
as
•<
M* *
a s-
es **
S
RÉSULTATS TOTAUX
RÉSULTATS PAR Kl
[LOMÈTRE
Produit
net
-fi
il
il
73
Recettes
(impôt déduit)
Dépenses
Produit
net
Recettes
Dépenses
1881
116
1.285.247
940.201
345.046
11.079
8.105
2.974
1882
lie
912.610
837.727
74.883
7.867
6.352
1.515
81
1883
116
773.811
796 868
— 23.057
6.671
6.869
-198
103
188i
116
797.132
800.188
— 3.056
6.872
6.898
- 26
101
1885
116
725.37 i
657.134
68.240
6.253
5.065
588
90
CHAPITRE XIV
CHEMINS DE FER DU MÉDOG (Gironde).
LOROOIVft
Ijignes de Bordeaux au Verdon 101 kil.
— Màrgaux à Gastelnau 10 id.
Total. 111 kU.
I. — ÉTABLISSEXE.HT DES CHEHI.HS
Concédée antérieurement à la loi de 1865, la ligne de Bordeaux
au Verdon est une ligne d'intérêt général, bien qu'ayant essentiel-
lement le caractère d'une ligne d'intérêt local.
La ligne de Margaux à Gastelnau est au contraire placée sous le
régime de la loi de 1865.
Le 17 octobre 1857, le gouvernement concéda à une Compagnie
spéciale, un chemin de Bordeaux au Verdon, appelé à desservir les
vignobles les plus renommés du Bordelais. La dépense de cons-
truction était évaluée à 15 millions et le produit net à 700,000 fr.
Mais les souscripteurs anglais, qui devaient contribuer à fournir
la plus large part du capital, se refusèrent, en 1858, à tenir leurs
engagements, et la Compagnie demanda le remboursement de son
cautionnement.
Un décret du 21 juin 1861, prononça la résiliation de la con-
cession.
La ligne fut mise en adjudication, sur un cahier des charges
192 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
•
conforme à celui des Charentes. MM. Poujardhieu et consorts
furent déclarés adjudicataires par décret du 2 juin i863.
L'ouverture à Texploitation eut lieu par sections, de 1868 à
i875. (Picard. Les Chemins de fer français, t. II.)
Le département de la Gironde avait donné une subvention de
1,600,000 francs, et l'Etat une subvention de 4,500,000 francs.
La petite ligne de Margaux à Gaslelnau a été concédée par
décret du 22 avril 1880 et ouverte en mars 1884. Le département
accordait comme subvention l'exécution à ses frais de la totalité
des travaux, sauf remboursement partiel en 15 annuités de
10,000 francs. L'acte de concession portait la faculté de ne faire
qu'un train de voyageurs et de marchandises par jour, dans
chaque sens, et l'immunité, au profit de la Compagnie des Landes
de la Gironde, pour l'usage commun de plusieurs sections du
chemin du Médoc.
Antérieurement à l'établissement de la ligne du Médoc, une
voie avait été construite entre le Verdon et la pointe de Grave par
le service des Ponts et Chaussées, en vue de travaux de défense
contre les érosions de la mer. Cette voie, longue de 3 kilomètres,
a 1 mètre d'écartement. L^Etat a autorisé la Compagnie du Médoc
à faire circuler sur cette voie, sans redevance, des trains remorqués
par des chevaux, et qui établissent une correspondance, à la pointe
de Grave, entre les trains du Verdon et le bateau de la Grave àRoyan.
Le capital social se compose de :
20,000 actions à 500 francs . . . 10,000,000 fr.
Environ 30,000 obligations à 250 francs . . 7,500,000
Les actions sont en majorité entre les mains des entrepreneurs
qui ont construit la ligne, et qui ont été payés partie en argent|
partie en actions.
La ligne de Bordeaux au Verdon a été construite chèrement.
Les terrains ont été très-coûteux; leur acquisition constitue une
charge de plus de 20,000 francs par kilomètre. Les frais généraux
ont absorbé, avec les intérêts pendant la construction, le tiers de
la dépense totale de premier établissement.
La Compagnie se dispose à construire, à la charge du départe-^
ment de la Gironde, un embranchement de 500 mètres de Ion-
A VOIR NORMALE 193
gueur reliant la gare de Pauillac au port des Pilotes; cette voie est
destinée à supprimer le camionnage de la gare au port et à donner
ainsi de grandes facilités à certains articles de trafic, tels que les
traverses, planches et poteaux de mine qui ont besoin de moyens
de transport économiques et que tient éloignés le prix trop élevé
du camionnage. Cet embranchement a été concédé par une loi du
27 juillet 1886, en exécution de la loi do principe du 11 juin 1880.
D'un autre côté, l'Etat construit un embranchement de o kilo-
mètres de la gare de Moulis au port de Lamarque, dont Texploita-
tion doit être confiée à la Compagnie du Médoc. Cet embranche-
ment est destiné à mettre en relations la région du Médoc avec
celle du Blayais par l'intermédiaire d'un service de correspon-
dance sur la Gironde, entre Lamarque et Blaye.
Enfin, des pourparlers sont engagés avec la Compagnie du Midi
d'une part, le ministre des Travaux Publics d'autre part, pour
relier la gare du Médoc, à Bordeaux, avec les quais et les docks, et
par suite, pour permettre, par la voie des quais, l'échange des mar-
chandises avec les grandes lignes du Midi, de l'Etat et de l'Orléans.
Un premier projet étudié dans ce but, empruntant le Cours du
Médoc, a été abandonné et remplacé par un autre comprenant un
raccordement direct avec les docks et les quais par les prairies;
ce projet a donné lieu à une convention passée entre le départe-
ment et la Compagnie du Midi, convention sanctionnée par le
Conseil général dans sa session d'août 1886.
D'autre part, la gare Saint-Louis ou du Médoc doit être ulté-
rieurement reliée avec la gare Saint-Jean ou du Midi par le
chemin de fer de ceinture de Bordeaux, dont Tavant-projet a été
soumis à l'enquête d'utilité publique.
Dispositions des lignes. — Les déclivités sont on général limitées
à 8*" par mètre, sauf une rampe exceptionnelle de 10"". Les
rayons des courbes ne sont pas inférieurs à 800 mètres.
Les rails ont pour les 2/3, 6m. 20 de longueur, et pour l'autre
tiers 6 mètres. Ils sont en fer et pèsent 36 kilogrammes.
Les stations sont plus vastes qu'il n'est nécessaire en raison du
peu d'importance du trafic de petite vitesse ; toutes possèdent une
13
194 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
voie d'évitoment de 400 mètres de longueur; la voie directe est
toujours celle qui longe le bâtiment des voyageurs. La voie qui
dessert le quai à marchandises est reliée de chaque côté aux voies
principales. Les types des stations sont figurés (PI. VIII, fig. 48
et 19) par les stations de Blanquefort et de Ludon. Des types
plus réduits auraient suffi.
Les signaux couvrent les gares à une distance variable de 800
à 1,200 mètres; quand ils sont fermés, ils commandent l'arrêt, le
mécanicien doit ensuite s'avancer doucement et s'arrêter avant la
pointe de Taiguille d'entrée pour recevoir les instructions de la gare.
Toutes les prises d'eau sont assurées au moyen de Véjecieur à
culotte, qui fonctionne d'après le même principe que l'injecteur
Giffard. La vapeur est empruntée à la locomotive, avec laquelle
l'éjecteur est mis en relations par un tube. Cet appareil plus simple
que le pulsomètre, est installé dans les mêmes conditions, et
dépense comme lui beaucoup de vapeur; il en a les avantages et
les inconvénients, précédemment décrits à l'occasion des chemins
de fer d'intérêt local du Pas-de-Calais. La figure 20 en reproduit
les dispositions. L'éjecteur permet de remplir le tender en 5 mi-
nutes. Il n'a jamais besoin de réparations.
Matériel roulant. — Voitures et wagons, — La plupart des
voitures sont à étage, et contiennent en moyenne 75 places; ces
voitures sont ou mixtes, ou affectées exclusivement à une seule
classe. Elles ont été construites par la maison Bonnefond, pèsent
do 7 à 8 tonnes et ont coûté en moyenne 10,393 francs la pièce.
On a dit déjà que les voitures à étage sont absolument impropres
à un service de vitesse et de grand parcours; la Compagnie du
Médoc n'en est que trop convaincue aujourd'hui.
En outre des 20 voitures à étage, la Compagnie dispose encore
de 12 troisièmes ordinaires à 50 places et de 3 mixtes premières et
secondes ordinaires à 36 places.
Ce matériel de 33 voitures, soit 0,3 par kilomètre, est souvent
insuffisant, pendant l'été; on ne pare à cette insuffisance qu'avec
de grandes difficultés.
Les freins employés sont des freins Stilmant, dont sont aussi
munis les 11 fourgons.
i
A. VOIE NORMALE 19S
Le matériel de petite vitesse se compose de 152 wagons, ce qui
constitue une proporlion de 1,5 par kilomètre.
En outre, le petit chemia du Verdon à la pointa de Grave est
desservi par 9 wagonnets qui sont aménagés l'été pour les voya-
geurs, l'hiver pour te transportdesmatérîaus. Ces wagonnets con-
Uennent 18 ou 24 places.
Locomotives. — Les machines sont au nombre de 10, apparte-
nant à K types différents, ce qu'on ne saurait trop bUmer.
4 sont des machines- tenders à 3 essieux accouplés; elles se
rattachent à deux types et ont été construites par les ateliers de
Fives-Lille en 1870 et 1883.
Les 6 autres sont des machines de vitesse à 2 essieux couplés
et à tender séparé; ces dernières se répartissent deux à deux en
trois types différents :
2ontétéconstruîteseul8Siparlesateliersdu chemin deferdel'E^t, '
2 — en 1864 par les ateliers de Graffenstaden.
2 — en 1868 par les ateliers André Kœchlin et C.
Les conditions d'établissement de ces diverses machines sont
ainsi résumées :
Diamètre des cylindres
Course des pistons .
Diamètre des ro
Timbre de la chaudière.
Surface de la grille . .
Surface de chauFTe du foyi
Id. des tul}cs.
Id. totale
Eurtement dcE essieux entrËmcs.
Poids des loeomoli
Id.
Poids adhérent .
S2 RfMt
3 300
22'iOO
i-oïi
e soo
70 i63
196 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Ateliers de réparations, — Les ateliers sont installés à la gare
Saint-Louis, à Bordeaux : une locomobile de 10 chevaux actionne
un tour ordinaire, une raboteuse, une perceuse, etc..
Les grosses réparations sont faites en ville, et le tournage des
roues aux ateliers de la Compagnie du Midi.
Dépenses de premier établissement au 31 décembre 1884
BORDEAUX AU MARGAUX A
V EU DON CASTELNAU
1« Coiistruction i9.038.164 17 418.150
2° Matériel, mobilier et divers 1.407. 169 17 850
3^ Intérêts et amortissement pendant la cons-
truction 3.344.717 60
Totalgénéraldesdépensesd'établissemcnl. . 24.780.051 03 419.000
(H y a lieu de s'étonner en ce qui concerne la ligne de Bordeaux au Verdon
de la somme énorme affectée aux frais généraux compris dans le paragraphe
construction du chemin, et qui s'élèrvcnt à 4.832.920 fr. 13, ce qui donne le
tiers de la dépense totale du 1er établissement de celte ligne, si Ton y ajoute
rintérôt et l'amortissement pendant la construction.)
Lo kilomètre do la ligne de Bordeaux au Verdon ressort comme
établissement à 243,345 francs, ce qui est inadmissible pour une
semblable ligne.
La ligne de Margaux à Castelnau n'a coûté que 41,900 par
kilomètre.
11. — EXPLOITATION!
Administration
Le conseil d'administration a son siège à Paris. Il est composé
de 9 membres, et se réunit chaque mois.
Les pièces de dépenses, établies à Bordeaux, sont adressées à
Paris et soumises à l'approbation d'un administrateiu* délégué.
D'ailleurs beaucoup de latitude est laissée à ringénieur de la
Compagnie qui dirige tous les services à Bordeaux.
A VOIE iNORMALE 197
Le bureau du service central à Bordeaux comporte 9 agents,
dont les fonctions sont les suivantes :
1 chef de comptabilité chargé en même temps du contrôle des
recettes;
2 agents pour la comptabilité et les écritures de la voie et de la
traction. Pas de dessinateurs;
2 vérificateurs de taxes;
1 caissier qui vérifie les bordereaux récapitulatifs des opérations
de la dizaine, et établit les rectifications ;
1 agent pour la vérification des billets recueillis;
2 agents à la statistique.
Les dépenses d'administration et du service central sont les sui*
vantes pour 1884:
i^ Administration de paris
Conseil d'administration. . . . • 12.000 »
Secrétariat général et complahilité centrale 17.249 30
Dépenses diverses (publicité, etc.) 2.572 80
:H. 822.10
2° Frais généraux
Impôts 22.465 63
Loyers, liépiacemcnts, ctc 4.348 95 26.814 48
3® Service central de bordeaux
Personnel du service central. • . . 39.122 »
Dépenses diverses 31.395 6.1
Indemnités pour avaries ou pcrle< . 2.036 98
Service de correspondance 6.078 15
Service de la Pointe de Grave. . . . 35.903 50
Service médical 5.622 72 120.158 96
Total pour l'administration et le service central. . . 178,795 64
Dans ce total la ligne de Margauxà Castelnau figure pour. 5.643 84
Voie et Bâtiments
L'ingénieur de la Compagnie est assisté, pour la direction de ce
service, par un surveillant-chef et trois surveillants. — Le pcr-
198 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
sonnel des cantonniers forme 15 équipes à 4 agents chacune, et
dont le canton varie de 3 à 8 kilomètres.
En raison du très-grand nombre de passages à niveau gardés,
les agents de la voie sont à peu près tous logés : le Médoc est très-
peuplé, et dans sa traversée, il y a environ un passage à niveau
par kilomètre.
Les travaux de la voie n'ont consisté jusqu'ici qu'en renouvel-
lements partiels de traverses et de rails ; environ 12000 traverses par
an et depuis l'origine 850 rails.
Les cantonniers sont payés ainsi qu*il suit:
Chefs d'équipe : 85 à 90 francs ;
Poseurs: 70 à 72 fr. 50.
Les dépenses du service de la voie et de bâtiments pour 1884
ressortent à :
-, . . IX • 1 « (* Personnel et entretien 77.454 12
Voie et matériel fixe { _ ^^ ^^^ ^«
( Traverses 55.056 58
Terrassements et ouvrages d'art 2.639 »
BâtimenU 15.285 71
Total.. . . 153.654 26
Dans ce total sont comprises les dépenses de la ligne de Margaux
à Gastelnau, ouverte en mars 1884. Si on ne tient pas compte de
cette ligne qui figure pour une dépense de 3,442 fr. 45 au chapitre
de la voie, la dépense kilométrique d'entretien est de 1,502 fr. 11.
Traction
Un chef de dépôt, en même temps chef d'atelier, a autorité sur
tout le personnel de la traction.
5 machines sont en service, une en réserve, ce qui fait un rou-
lement de 6 mécaniciens et 6 chauffeurs.
L'été, il y a en plus 2 machines, et par suite 4 agents en
service.
Les mécaniciens sont payés à raison de 1,500 fr. à 2,400 francs
par an.
Les chauffeurs sont payés à raison de 1300 francs à 1500 fr.
A VOIE NORMALE 199
L'allocation en charbon est composée d'une part fi xe de 3 kilos
700 ou 4 kilos 700 par kilomètre, selon le type de machine, part à
laquelle on ajoute 0 kil. 350 par wagon ou voiture, le wagon vide
comptant pour une demi-unité.
Ces allocations sont d'autant plus fortes que le charbon est du
tout-venant anglais, en provenance de Cardiff, c'est-à-dire qu'il
est de première qualité. Le prix de revient à Bordeaux, gare Saint-
Louis, est de 25 francs la tonne.
La prime d'économie de chaque mécanicien atteint par mois le
chiffre élevé de 80 francs.
Le roulement des machines oblige les mécaniciens et chauffeurs
à découcher à tour de rôle ; il ne leur est rien alloué pour ces
déplacements. •
Le parcours moyen des machines atteirtt 39,000 kilomètres par
an : deux machines ont parcouru 60,000 kilomètres en 1884, 4 ont
dépassé 53,000 kilomètres.
Les machines sont donc très-bien utilisées; du reste leur nom-
bre est loin d'être exagéré.
Les dépenses de traction pour 1884 sont:
f
Machines (personnel, cçmbustible, entretien, etc.). . . . 147.431 64
Voitures et wagons (entretien, etc.) 35.903 67
Total. . 183.335 31
Soit par kilomètre de train 0 60
— de ligne 1.800 »
Mouvement et Trafic
Mouvement. — Un inspecteur chargé en même temps du con-
tentieux assiste l'ingénieur de l'exploitation dans la direction du
service du mouvement.
Service des trains. — Le service de chaque train est assuré par
un conducteur et au moins un garde-frein *.
* La circulation de trains légers, à un seul apcnt, a été autorisée en juin 1887,
pour la ligne de Marsaux h Castelnau.
200 CHEBflNS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
L'hiver, la ligne de Bordeaux au Verdon, est desservie par trois
trains de voyageurs dans chaque sens; un train de marchandises
circule entre Bordeaux et Lesparre.
L'été le nombre des trains de voyageurs dans chaque sens est
porté sur la ligne du Verdon à 5 trains réguliers, par Taddition de
deux express Tun le matin, l'autre le soir. En outre, plusieurs
trains facultatifs à marche rapide sont prévus pour les jours d'af-
fluence, et des trains de plaisir ont lieu les dimanches et fêtes.
— Entre Lesparre et le Verdon existe un sixième train pendant
l'été.
La ligne de Margaux à Castelnau est desservie par trois trains
en toute saison : les dimanches et fêtes d'été, on met en marche
un quatrième train.
La vitesse des trains ordinaires de voyageurs est limitée à 45 ki-
lomètres à l'heure, celle des trains express atteint 55 kilomètres :
les trains de marchandises n'ont pas de vitesse supérieure à
25 kilomètres à l'heure.
Le service des marchandises de détail, ainsi que des wagons
complets de station à station, est assuré par les trains de mar-
chandises réguliers entre Bordeaux et Lesparre. Entre Lesparre
et le Verdon, ce service est fait par deux trains mixtes, un dans
chaque sens; ces trains ne sont autorisés à prendre ou laisser des
marchandises dans les stations de cette section que tous les deux
jours. Ils peuvent de plus servir au transport des wagons complets
entre Bordeaux et Lesparre ou ses au-delà, mais ils ne font aucune
manœuvre entre Bordeaux et Lesparre.
Les wagons de marchandises sont placés en tête des trains
mixtes, entre la machine et les- voitures à voyageurs.
Pendant l'hiver, la composition des trains do voyageurs dépasse
rarement 7 à 8 voitures: on ne met au train qu'un seul fourgon
en tête ; une voiture à frein est placée à la queue. Les deux véhi-
cules extrêmes sont retournés à l'extrémité du parcours.
L'été, la composition des trains de voyageurs peut atteindra
15 voitures sans le fourgon.
Les trains de marchandises sont limités théoriquement à 50 vé-
hicules, pratiquement à la charge que peuvent remorquer les
machines, soit de 22 à 27 véhicules, selon la machine.
A VOIE NORMALE 20«
Les compartiments des voilures de première classe sont seuls
chauffés rhi ver : on emploie des bouillottes à eau, que l'on réchauffe
à Bordeaux, avec la vapeur prise à la locomobile de Talelier, au
Verdon, avec la vapeur prise directement à la locomotive ; deux
minutes suffisent pour réchauffer à la fois deux bouillottes.
L'éclairage ne présente aucune particularité : un lampiste pré-
pare les lampes et les allume à Bordeaux.
Le lavage et le balayage des voitures .est fait à Bordeaux par les
hommes d'équipe.
Le parcours kilométrique des trains en 1884, non compris
2,348 kilomètres parcourus par les trains de travaux, s'est élevé à
305,020 kilomètres.
Service des gares et stations, — Dans toute station, il y a au moins
un agent, dont la femme est receveuse^ et reçoit un salaire de
15 francs par mois.
Il n'y a d'hommes d'équipe que dans les stations ou gares im-
portantes ; aussi les agents des trains doivent-ils concourir aux
manœuvres et à la manutention avec le chef de station.
Dans les haltes, les gardes-barrières font tout le service,
y compris leiir comptabilité; elles reçoivent 15 francs par mois
en plus des 15 francs qui leur sont alloués pour le service des
barrières.
Le télégraphe existe dans toutes les stations. Les règlements
adoptés sont ceux de la Compagnie du midi.
Lorsque les chefs de station ont à faire des manœuvres ou des
manutentions dans l'intervalle des trains, ils doivent autant que pos-
sible recourir aux bons offices du public, et si celui-ci fait défaut, ils
réquisitionnent un ouplûsieurs agents de lavoiede l'équipe voisine,
le nombre d'heures employées étant inscrites contradictoirement
sur le bulletin de réquisition, et servant à établir le décompte de
reprise du service de la voie sur celui de l'exploitation.
L'inspecteur de l'exploitation assure la répartition du matériel.
L'ingénieur de la Compagnie est agent de la voie unique.
Pendant l'été, les facteurs des gares de Moulis et Lesparre sont
envoyés chaque jour en renfort, pendant plusieurs heures, à Sou-
lac-1 es-Bains.
202 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Dans les gares de croisement, les chefs d'équipe de la voie sont
chargés de faire les aiguilles, lorsqu'il n'y a pas d'aiguilleur on
titre.
Aux termes de Tacte de concession de la ligne de Margaux à
Castelnau, la Compagnie du Médoc a dû recevoir les trains do la
Compagnie des Landes de la Gironde dans ses gares de Lesparre
et de Bordeaux. La Compagnie du Médoc prétend que cette der-
nière Compagnie a été exonérée des dépenses de premier éta-
blissement, mais non des dépenses d'exploitation. — D'après
elle, les dépenses d'exploitation et d'entretien des gares com-
munes, ainsi que les dépenses du tronc commun de Bruges à
Bordeaux doivent être partagées entre les deux Compagnies au
prorata du nombre de leurs trains. La Compagnie des chemins de
fer économiques prétend au contraire qu'elle est dispensée de toute
participation, aussi bien dans les dépenses d'exploitation quedans
celles d'établissement. L'affaire est en litige.
Service commercial. — Ce service est exclusivement dirigé par
l'ingénieur de la Compagnie.
Les voyageurs constituent le principal élément du trafic : les
recettes de la grande vitesse sont plus que triples des recettes de la
petite vitesse.
En outre des voyageurs locaux, qui ont des relations suivies
avec Bordeaux, la ligne du Médoc a Tété, un mouvement très-im-
portant de voyageurs de bains de mer, allant au Verdon, Soulac-
les-Bains et Royan.
Enfin, un nombre important de voyageurs d'outre-mer emprunte
le Médoc entre le Pauillac et Bordeaux pour éviter la navigation
fluviale et gagner du temps.
Les transports de petite vitesse ont subi une dépression par
suite de la destruction des magnifiques vignobles du Médoc; ces
transports ont du reste toujours été assez faibles, en raison de la
concurrence fluviale.
Les conditions d'application des tarifs sont celles de la Com-
pagnie d'Orléans.
Les tarifs généraux ne présentent aucune particularité : les mar-
A VOIE NORMALE 203
chandises sont classées en six séries à 16, 14, 12, 10^ 9 et 8 cen-
times, plus une série spéciale à 6 centimes.
Il est délivré tous les jours des billets d'aller et retour de toute
gare à Bordeaux ou vice versa, et de toute gare à Soulac et au
Verdon. — Ces billets comportent une réduction de 40 p. 100; ils
sont valables jusqu'au lendemain soir.
En outre, Tété, il est délivré des billets d* excursions à prix très-
réduits, pour Soulac, le Verdon et Royan.
Les tarifs spéciaux sont de même très-réduits ; les vins, bes-
tiaux, bois et matériaux sont les principaux produits appelés à
bénéficier de ces tarifs.
La comptabilité est tenue par dizaine.
On a vu, à propos de Torganisation du service central, quel est
le fonctionnement du contrôle. •
Les dépenses de l'exploitation, en 1884, sont :
Trains (personnel) 28.430 65
Gares (personnel) . . . • 95.136 85
Dépenses diverses de.* Iràins 6.354 70
Dépenses diverses des gares 21.831 »
Télégraphie 1.781 50
Total. . . . 153.534 70
La ligne de Margaux à Castelnau entre dans ce total pour
5,839 fr. 45. En défalquant cette somme, le kilomètre de ligne
revient pour le service de l'exploitation à 1,462 fr. 33 ; le kilo-
mètre de train à 0,50.
Services divers. — Le magasin des matières nécessite un per-
sonnel de deux agents.
Quant aux imprimés^ c'est le fournisseur lui-même qui en est
le magasinier. Il ne peut, bien entendu, livrer aucune fourniture
sans un bon émanant du service central.
Le service médical et pharmaceutique est gratuit. Après trois
jours de maladie, les agents sont mis en demi-solde. Le service
médical donne une charge annuelle de 5,000 à 6,000 francs.
Le personnel est habillé sur retenues.
Il n'y a pas de caisses de retraites ni de secours.
204 CHEMINS DE FER DINTÉRÊT LOCAL
Résultats statisticpies et financiers
Les dépenses de Tannée 1884 se récapitulent comme suit pour
la ligne du Yerdon seule :
Administration de Pari^ 29.411 25
Frais généraux 26.427 72
Services centraux de Bordeaux 417.312 73
Entretien et surveillance de la ligne 150.211 81
Matériel et traction 173.167 21
Mouvement et traflc 147.695 25
Total. . 644.226 07
Ce qui donne par kilomètre de ligne 6.378 47
— par kilomètre de train 2 11
Les dépenses totales de la ligne de Margaux à Castelnau se
sont élevées à 25,093 fr. 84.
Les recettes de l'exploitation pour la ligne du Verdon seule
sont les suivantes :
Jo Transports à grande vitesse (impôt déduit) 864.968 72
20 Transports à petite vitesse 287.014 80
30 Recettes diverses 45.557 83
Total des recettes. . . 1.197.541 35
Soit par kilomètre de ligne 10.856 84
— par kilomètre dé train 3 78
Les recettes de la ligne de Castelnau se sont élevées à 20,i 83 fr. 22
donnant une insuffisance de 4,910 fr. 62 sur les dépenses.
Le produit net de l'ensemble des deux lignes a été par suite de
553,315 fr. 28.
Dans les recettes totales, Bordeaux figure pour 344,975 fr. 70,
soit bien près de la moitié.
Les charges de l'exercice 1884 ont été les suivantes :
Intérêt et amortissement des emprunts 507.400 »
Intérêts sur créances diverses 38.710 »
Total. 546.110 n
Ce qui laisse une somme de 7,205 fr. 28 pour solde à nouveau.
Iln'a^été payé aux actionnaires ni intérêt, ni dividende.
A VOIE NORMALE
205
En somme, la situation médiocre où se trouve la Compagnie du
Hédoc est en partie imputable à cette Compagnie. Les frais géné-
raux et intérêts pendant la construction ont été en eiïet tellement
élevés qu'ils représentent le 1/3 de la dépense totale de premier
établissement.
RÉSULTATS COMPARATIFS DES RECETTES ET DÉPENSES DE LA LIGNE
DE BORDEAUX AU VERDON
Pour les cinq années 1881, 1882, 1883, 188i et 1885
S
Sri •
X
T.
<
1881
ES
a* ^
>^ M
—a
100
RÉS
ULTATS TOT.
Dépenses
\i:x
RÉSULTATS KILOMÉTRIQUES
•S s
s ^
. M
si
54
Recettes totales
(impôt déduit)
Produit
net
Recettes
Dépenses
Produit
net
1.122.936 92
613.692 47
509. 2 i4 45
11.229
6.043
5 186
1882
100
1.177.840 55
615.739 83
562 100 72
11.778
6.064
5.714
52
1883
100
1.182.431 10
628.477 05
553.954 05
11.729
6.192
5 537
53
188 i
100
1.197.5il 35
6U.226 07
553.315 28
11.857
6.378
5.479
53
1885
100
1.168.825 05
662.109 75
506.715 30
11.573
6 556
5.017
56
CHAPITRE XV
CHEMIN DE FER DINTÉRËT LOCAL
DE NIZAN A SAINT-STBiPHORIEN, SORE ET LUXEY
(Gironde et Landes)
Nizan à Sore 31 kil.
Sore à Luxey 9
1. — ÉTABLlSSEXErVT DU CHEXIHV
Historique. — Le chemin de fer de Nizan à Saint-Symphorien
(longueur 17 kilomètres) a été projeté en vue de l'exploitation
des bois : la région à desservir était d'autre part assez peuplée.
Ce chemin a été concédé en 1870 à MM. Faugère et Bernard,
entrepreneurs de travaux publics, et ouvert en 1873. Ces conces-
sionnaires ont obtenu au commencement de 1876 de prolonger la
ligne jusqu'à Sore. Ce tronçon, de 13 kilomètres de longueur, a été
ouvert dans la même année. Enfin, le prolongement de Sore à
Luxey (9 kilomètres) concédé en 1883, et qui a fait l'objet d'un
décret de concession spécial, a été ouvert en septembre 1886.
La concession de Nizan à Sore est placée sous le régime de la
A VOIK NORMALE
20:
loi du 12 juillet 1865; celle de Sore à Luxey, sous la région de la
loi du 11 juin 1880.
Los concessionnaires ont eu, il y a quel^ques années, le dessein de
prolonger la ligne jusqu aLabouheyre, station de la ligne de Bor-
deaux à Bayonne; la demande en concession n'a pas abouti, mais
l'extension prochaine jusqu'aux lignes d'intérêt local du départe-
ment des Landes, qui se construisent de ce côté, ne fait aucun
doute.
Ou verra plus loin, au sujet des chemins de fer d'intérêt local
des Landes et de la Gironde, que la Société Générale des chemins
de fer économiques a pris l'engagement, aux termes de son acte de
concession, do racheter à ses frais, et sans garantie d'intérêt, la
ligne de Nizan à Sore et prolongements; ce rachat n'a pu encore
s'otfectuer par suite de défaut d'entente avec les concessionnaires,
mais il aura lieu nécessairement à bref délai.
L'Etat, le département et les communes ont fourni des subven-
tions dont le montant total est assez élevé.
Part de l'Etat
Part du département . . . . •
Part des communes
Tut AL.
Soit par kiloinèlre,
A NIZAN
SAINT-SYMPHORIEN
300.000 »
847.000 P GirMde
o3.000 »
1.200.000 .)
CO.GGG »
SAINT-SYMPUORIEN
A SORE
126.000 >
120.000 » Gîreade
37.200 >* Uidet
57.800 »
346.000 »
26.61:) »
Les subventions totales pour la ligne de Nizan à Sore se sont
élevées à i,olG,000 francs, c'est-à-dire aux 3/5 de la dépense
totale du premier établissement.
Il n'y a pas eu d'émission d'actions ni de charges d'obligations,
MM. Faugère et Bernard ayant réiXlisé par leur propre crédit les
sommes nécessaires à la construction.
208 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Tracé de construction. — Entre Nizan et Villandraut, le tracé
descend dans la vallée du Ciron par des pentes de 15™"* par mètre ;
au delà de Villandraut, il est très-peu accidenté. Les courbes ont
500 mètres de rayon, au minimum. Très peu de terrassements;
pas d'ouvrages d'art à l'exception d'un pont de 20 mètres d'ou-
verture sur la rivière flottable du Ciron.
La station de Villandraut est reliée par embranchement avec le
port de Villandraut, sur le Ciron. A Saint-Symphorien existe un
autre embranchement desservant une scierie importante.
Le rail en fer pèse 30 kilos le mètre; le balast est en sable du
pays.
Les stations distantes en moyenne de 4 kilomètres sont d'une
très-grande simplicité. Presque toutes comportent une voie de
garage, une voie de cour et souvent deux, raccordées à chaque
extrémité de la station et traversant le chemin d'accès à celle-ci.
Le bâtiment des marchandises est accol:é au bâtiment des voya-
geurs.
Le plan (fig. 21, pi. IX) représente la disposition de la station de
Sore.
Les stations sont couvertes à 300 mètres de distance par un
signal d'arrêt absolu, éclairé le soir.
La principale prise d'eau est à Saint-Symphorien : le réservoir
est alimenté par une pompe mise en action par la machine à vapeur
de l'atelier. En outre, les locomotives peuvent s'alimenter à Nizan
et à Saint-Symphorien.
*
Matériel roulant. — Voitures, — Les voitures sont mixtes, à
3 classes, avec accès aux extrémités ; elles contiennent 50 places.
Les fourgons comportent un compartiment de 12 places pour
les voyageurs.
3 voitures et 2 fourgons, tous munis du frein à vis, constituent
l'armement de la ligne de Nizan à Sore, en matériel de grande
vitesse; depuis l'ouverture de Sore à Luxey on n'a pas augmenté
le matériel, le même train faisant le service en navette sur la
ligne prolongée.
Le matériel de petite vitesse se compose de 2 wagons couverts
à frein à vis et de 24 plates-formes. Il y a en outre 30 wagons à
A VOIE NORMALE 209
ballast qui servent plutôt aux entreprises de MM. Faugère et Ber-
nard qu'à l'entretien de la ligne en exploitation proprement dite.
Les deux fourgons servent concurremment avec les wagons
couverts au transport du peu de marchandises qui ne peuvent
voyager qu'abritées.
On se sert du reste beaucoup, pour les expéditions de bois, du
matériel de la Compagnie du Midi, ces transports étant toujours à
destination des au-delà de Nizan. Sans cette ressource, l'armature
en matériel P.-V., réduite à 0'',90 par kilomètre, serait tout à
fait insuffisante.
Locomotives. — Leslocomotives-tenders, construites à Graffens-
taden et du poids de 30 tonnes en charge, sont au nombre de 4,
ce qui est largement suffisant. Elles ont 3 essieux accouplés.
. Les données de ces locomotives sont les suivantes :
Diamètre des cylindres 0 m. 40
Course des pistons 0 m. 50
Timbre de la chaudière 9 kil.
Surface de la grille 1 m. 16
Surface de chauffe du foyer 5 m. 73
Surface de chauffe totale 77 m. 13
Diamètre des roues au contact 1 m. 20
Empattement total 3 m. 00
Poids de la machine à vide 23,000 kil.
— en charge. . . . 30,000 kil.
Effort de traction 4,600 kil.
Atelier de réparation. — L'atelier de Saint-Symphorien permet
de faire les réparations courantes.
Dépenses d'établissement au 31 décembre 1884
(Nizan à Sore)
1° Construction du chemin 1.938.072 94
2o Mobilier et matériel roulant 389.200-34
3® Int«?r6Ls pendant la construction, amortissement,
déficit de l'exploitation 369.674 62
Total 389.200 34
Soit par kilomètre 86.998 32
La construction a été remarquablement économique.
14
«fl^^rritSl
210 CHEMINS DE FEU DlNTEUhT LOCAL
11. — EXPLOITATIOIK
Administration
L'administration et la direction effective sont concentrées dans
les mains des concessionnaires.
Les résultats donnés ci-après concernent exclusivement la ligne
de Nizan à Sore.
Le personnel de Tadministration centrale se compose d'un
secrétaire et de 2 agents de bureau.
Les dépenses de ce service en 1885 se divisent ainsi :
Salaires^ frais de bureau, chauffage, publicité, etc. . • . 6.207 27
Assurances, loyers et charges diverses, contributions,
indemnités, etc 3.207 72
Service médical, secours, etc 300 »
Total 1(^.209 17
Soit par kilomètre 329 33
Voie et Bâtiments
Ce service est dirigé par un surveillant qui a sous ses ordres
4 équipes composées en moyenne à 3 cantonniers; le canton
embrasse normalement 8 kilomètres.
L'emploi de quelques auxiliaires a porté à 17, y compris le sur-
veillant, le personnel d'entretien de la ligne en 1885.
Les chefs-cantonniers reçoivent de 80 à 85 francs par mois, les
cantonniers de 55 à 60 francs .
Les travaux d'entretien consistent principalement en remplace-
ment de traverses ; 4 à 5000 traverses sont changées annuellement;
ce remplacement se fait en recherche.
Tous les passages à niveau sont libres, même à la traversée des
routes départementales, ce qui ne paraît présenter aucun inconvé-
nient sérieux.
Les dépenses de voie et bâtiments pour l'année 1885 sont les sui^
vantes :
Personnel 13.813 42
Entretien de la voie 4.809 82
Entretien des bâtiments 251 54
Dépenses diverses 3.418 65
Total. . . 22.293 43
Soit par kilomètre 719 44
A VOIE NORMALE 211
Ce chiffre est extrêmement réduit, ce qui se justifie par le petit
nombre de trains quotidiens circulant sur la ligne et par la nature
particulièrement perméable du sol des Landes, qui assure une
bonne et solide assiette à la voie.
Traction
Le personnel de ce service est réduit à un chef-mécanicien qui
dirige à la fois la traction proprement dite et Tatelier, et à deux
mécaniciens et deux chauffeurs; au total 5 agents.
Le service des trains se faisant en navette et étant réduit à deux
trains de chaque sens, un mécanicien et un chauffeur sont tou-
jours à Tatelier, où ils travaillent non seulement aux réparations
du matériel de la ligne, mais encore aux wagons et machines de
travaux qui constituent Toutillage de MM. Faugère et Bernard
pour leurs diverses entreprises.
Les allocations de combustible sont de 6 kilos par kilomètre
de machine; on alloue en outre Ok. 300 par wagon vide et Ok. 100
par tonne kilométrique. Ces allocations comprennent implicite-
ment l'allumage .
Le combustible est exclusivement de la briquette anglaise, qui
revient à 28 fr. 20 la tonne.
Le dépôt des machines est à Saint-Symphorien ; 3 machines au
lieu de 4 pourraient à la rigueur suffire à l'armement de la ligne.
Une machine assure le roulement journalier; elle couche à
Luxey.
La machine do réserve n'est pas maintenue en feu.
Les dépenses de traction pour 1885 sont :
•
Personnel de conduite et primes d'économie 7.278 50
Combustible. 10.500 »
Graissage * 1.^36 90
Alimentation . ♦ 4r08 »
Entretien des machines et véhicules 2.029 35
Dépenses diverses 283 75
Total 22.436 50
Soit par kilomètre de ligne 723 76
Et par kilomètre de train 0 48
212 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Chiffres très-réduits qui s'expliquent parle faible lonnage trans-
porté, par l'entretien un peu sommaire du matériel roulant et par
Texcellente qualité des machines.
Mouvement et Trafic
Mouvement. — Le mouvement est dirigé par un inspecteur; en
outre, un chef du trafic assure le contrôle et la comptabilité géné-
rale des stations, avec un vérificateur de taxes.
Le personnel des stations se compose de 4 chefs de station et
de 4 receveuses dont deux assurent seules le service des haltes
de La Barthe et de Magenta.
La gare de Saint-Symphorien seule possède un homme d'équipe,
depuis la mise en communauté avec la Société des chemins de fer
économiques.
Le personnel des trains est réduit normalement à un seul agent.
Pour les vitesses inférieures à 30 kilomètres, on doit avoir un
garde-frein par 9 véhicules, pour les vitesses de 30 à 40 kilo-
mètres, un garde-frein par 8 véhicules, pour les vitesses de 40 à
50 kilomètres, un garde-frein par 7 véhicules, pour les vitesses
au delà de 50 kilomètres, un garde-frein par 6 véhicules.
Les garde-freins supplémentaires sont pris dans le personnel
de la voie et de la traction. Le télégraphe existe dans toutes les
stations. Les chefs de station ont des traitements mensuels de 85
à 100 francs, les receveuses de 10 à 15 francs et les chefs do train
100 francs.
•
Service des trains. — Les trains sont en correspondance à Nizan
et Saint-Symphorien, respectivement avec les trains de la Com-
pagnie du Midi et ceux de la Société des chemins de fer écono-
miques.
11 n'y a que deux trains réguliers dans chaque sens entre Nizan
et Saint-Symphorien, un le matin avant 10 heures, un le soir
après 5 heures; entre Saint-Symphorien à Sore, il n'y a qu'un
train régulier de chaque sens, prolongeant l'un des trains de Nizan
à Saint-Symphorien.
A VOIE NORMALE 213
Ces divers trains sont faits en navette, avec un fourgon et une
voiture comme composition normale de matériel à grande vitesse.
Les jeudis, jours de marché à Yillandraut, et les samedis,
jours de marché à Bazas, un train facultatif est mis en marche
dans chaque sens et de plus, les trains de section de Nizan à
Saint-Symphorien sont prolongés jusqu'à Sore.
La vitesse de marche de ces divers trains est de 30 à 40 kilo-
mètres.
Trains de gravité, — On a vu plus haut que de Nizan à Villan-
draut, le tracé suit une pente continue de 15 ™™ par mètre. On
utilise cette disposition les jours de foire ou d'affluence excep-
tionnelle à Yillandraut pour faire au départ de Nizan des trains
dits de gravité^ circulant sans machine.
Une voiture mixte avec un agent au frein, est poussée au
départ de la gare de Nizan soit par une machine, soit par des
hommes jusquà ce qu'elle ait atteint la pente de 15"" qu'elle
descend ensuite seule, et maintenue par le frein.
On constitue ainsi des trains supplémentaires très-écono-
miques.Les trains de gravité ne sont utilisés que pour les voya-
geurs.
Us ont été autorisés par arrêté préfectoral.
La charge des trains mixtes peut atteindre, outre la voiture à
voyageurs et le fourgon, 18 à 20 wagons chargés de bois, soit
200 tonnes environ.
Le nombre total dos kilomètres de train pendant Tannée 1885^
a atteint le chiffre de 16,427.
Service des marchandises. — Le service des marchandises dans
les gares présente encore une particularité fort intéressante.
En raison de nombreux dépôts de bois qu'elles doivent per-
mettre, les stations ont généralement des superficies très-consi-
dérables : Saint-Symphorien occupe 5 hectares et demi, Sore
4 hectares et demi, etc..
Les terrains pour dépôts sont loués à l'année aux marchands
de bois, qui font eux-mêmes leurs chargements, condition obliga-
toire d'après les tarifs.
214 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Dans chaque station, un de ces marchands est choisi cq^ime
magasinier; il accepte pour la Compagnie les marchandises de
détail dont il effectue le chargement dans les wagons qu'il doit
amener à quai; et réciproquement, il décharge sous halle après
les y avoir conduits par ses propres moyens, les wagons de mar-
chandises que lui remet la Compagnie. Celle-ci n'intervient donc
pas dans la manutention des marchandises.
La somme allouée au magasinier, par tonne de marchandises
chargée ou déchargée, manœuvres comprises, est de 0 fr. 30.
Pour les arrivages, le magasinier n*a pas d'autre charge que de
mettre la marchandise sous halle ; la livraison est faite par le chef
de station.
Gares communes. — La gare de Nizan est commune avec la
Compagnie du Midi ; les dépenses en sont partagées au prorata du
nombre des branches, soit pour 1885, à la charge de la Com-
pagnie locale, un total de 8,478 55
Se subdivisant en :
Loyer de la gare 3,600 50
Frais d'exploitation 4,678 05
La gare de Saint-Symphorien, commune avec la Compagnie
des chemins de fer économiques, est gérée par la Société de Nizan
à Sore.
La redevance de l'embranché a été fixée à forfait à 3,600 francs
par an, et comprend le loyer et les dépenses d'exploitation de la
gare commune. Il convient de dire que la Société des chemins de
fer économiques a construit à ses frais les installations complé-
mentaires nécessaires pour recevoir ses trains.
Service oommeroial. — Le service commercial est peu com^
pliqué; les concessionnaires suivent eux-mêmes toutes les ques-
tions de tarifs ; le contrôle est fait au bureau de Bordeaux par deux
agents.
Tari/s. — Les tarifs des voyageurs sont les tarifs habituels, et
les conditions d'application sont celles de la Compagnie du Midi.
A VOIE NORMALE 215
Les marchandises de petite vitesse sont divisées on 5 classes
pour lesquelles les prix kilométriques sont respectivement de
O-fr. 24, 0 fr. 18, 0 fr. 14, G fr. 10 et 0 fr. 05.
Des tarifs spéciaux tempèrent l'élévation de ces prix, et des
tarifs communs avec la Compagnie du Midi ont été établis sur des
bases réduites pour le transport des bois.
■
Trafic. — La ligi^e de Nizan à Sore a été construite en vue de
l'exploitation des forets.
Son trafic consiste principalement en expéditions de bois ; cette
nature de marchandises représente exactement les 3/4 du tonnage
annuel transporté et environ la moitié des recettes totales de la
ligne.
Les chiffres ci-après donnent le mouvement du trafic pour
Tannée 1885 :
i» Grande vitesse 32.047 44
2» Petite vitesse 84.272 85
3* Receltes diverses (^arcs communes, produits divers). . 29.365 40
Total des recettes 436.685 39
Soit par kilomètre de lig:ne 4.409 20
Id. de train 2 94
Les dépenses du service de l'exploitation commerciale {mouve-
ment et trafic) pour Tannée 1883 sont :
Service central, éclairage, chauffage, etc 8.246 55
Service des pares, éclairage, chauffage et mobilier. . • . i0.403 57
Service des trains i.300 99
Indemnités, rectifications, timbres de lettres de voiture, etc. 5.565 45
Dépenses diverses 3.943 39
Total 29.459 94
Soit par kilomètre de ligne 950 30
Id. de train 0 64
Il convient de remarquer que dans ces sommes figurent les
dépenses do service central afférentes aussi bien aux services de
la voie et de traction qu'au service de l'exploitation commerciale,
telles que frais du personnel comptable, loyer, etc...
216
CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Résultats comparatifs des dépenses et des recettes
4« Année 1885
Les dépenses totales d'exploitation sont les suivantes :
Administration 84.209 27
Voie et bâtiments 22.293 43
Traction 22.436 60
Mouvement et trafic 29.459 94
Total 84.399 14
Soit par kilomètre de ligne 2.754 81
Id. de train 1 82
2» Années 1881, 1882, 1883, 1884, 1885
«0
1881
1882
1883
1884
1885
si
SS M
31
31
31
31
31
RÉSULTATS TOTAUX
RECETTES
148.813 21
160.405 33
177.869 61
152.586 52
136.685 39
DÉPENSES
91.926 54
91.392 81
87.841 32
82.406 48
84.399 14
PRODUIT
IflT
56.886 67
69.012 52
90.028 29
70.180 04
52.286 25
RÉSULTATS PAR KILOHÈT.
RECETTES
4.801
5.17i
5.738
4.922
4.409
IEPEHSES
2.966
2.948
2.834
2.658
2.755
PIODCIT
WtT
1.835
2.226
2.004
2.364
1.654
8
0. B -
9
i **
02
57
49
54
62
II y a bien peu d'exemples en France d'une exploitation aussi
remarquablement économique, et de petites lignes aussi prospères.
CHAPITRE XVI
SOCIÉTÉ GÉNÉRALE DES CHEMINS DE FER ÉCONOMIQUES
LIGNES DU BLAYAIS ET DES LANDES DE LA GIRONDE
Lesparre à Saint-Sjrmphorien 139 kil.
Lacanau à Bordeaux 44
Hostens à Beautiran 34
St-André-de-Cubzac à St-Giers-la-Lande. 50 (en construction.)
I. — ÉTABLISSEMEi^T DU CHEMIIM
Le conseil général de la Gironde a eu l'idée, il y a environ dix
ans, de construire un chemin de fer de grande ceinture autour du
département, en reliant ce chemin à Bordeaux par des lignes
transversales ou rayons. Le but principal qu'on poursuivait était
la mise en exploitation des immenses forêts de pins des Landes et
de la Gironde.
Le département traita avec MM. Bernard et Faugère, entre-
preneurs des travaux publics, déjà concessionnaires de la petite ligne
de Nizan à Sore.
Cette concession fut abandonnée par les titulaires qui cédèrent
leurs droits à la Société Générale des chemins de fer économiques\
* Directeur M. Emile Level.
218 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Cette dernière entra do nouveau en pourparlers avec le dépar-
tement : on ajouta à la concession première la ligne du Blayais
(Saint-André-de-Cubzacà Saint-Ciers-la-Lande), qui traversait une
région riche en vins, aujourd'hui dévastée par le phylloxéra, et on
renonça à établir à Bordeaux une gare spéciale reliée avec le futur
chemin de fer de ceinture de cette ville.
La concession eut lieu en exécution de la loi du 11 juin 1880 et
fut prononcée par une loi du 22 août 1881.
M. Picard expose de la manière suivante les conditions de cette
importante concession :
« Aux termes de la convention, le département fournissait les terrains
« moyennant un versement de 4,000 francs à forfait par kilomètre; toutefois,
« en cas d'insuffisance de ce versement, il devait ôtre fait état des terrains
» cédés gratuitement par ks communes ou les particuliers, pour une somme
« de 200,000 francs que la Compagnie était tenue de rembourser au môme
« titre que les avances pour garantie d'intérêt.
« Le département garantissait les dépenses d'exploitation etr> p. 100 du ca-
€ pital de premier établissement, sauf participation de TEtat, dans Jes limi-
« tes des maxima fixés par Ja loi du 11 juin 1880. Il encaissait d'ailleurs la
« subvention de 300,000 francs de l'administration forestière.
a Les frais d'établissement étaient fixés à forfait à 117,500 fr< par kilo-
€ mètre pour la ligne du Blayais et à 62,000 fr. pour les trois autres. Ces
« chiffres étaient établis en prévision d'une circulation de deux trains par jour
« dans chaque sens, sur les lignes des Landes ; si les besoins du service
« nécessitaient un plus grand nombre de trains, la dépense ailérente à ces
« lignes pouvait ôtre portée à 63,330 francs.
« Les frais d'exploitation étaient également arrêtés à forfait par
•< kilomètre :
« 1® A 3,786 fr. pour deux trains circulant par jour dans chaque sens,
« quand la recette brute serait inférieure à ;>,500 fr. par kiIom6tre, le dépar-
« tement ayant la faculté d'exiger des trains supplémentaires payés à raison
« de 0 fr. 70 par kilomètre.
« 20 A 2,300 fr., plus le tiers des recettes brutes, impôts déduits, avec
« minimum de 4,300 fr., à partir du jour 'où ces recettes atteindraient
« 5,500 fr. par kilomètre, limite au delà de laquelle la Compagnie s'engage-
<i rait à faire le nombre de trains nécessaires pour une bonne exploitation.
« Les avance? de l'Etal, du département ou des intéressés, devaient ôtre
« remboursées au moven de la moitié des excédents de recettes sur le revenu
« garanti.
« Le département souscrivait à l'incorporation, dans le réseau, do la ligne
« de Nizan vers Sore, mais sans subvention ni garantie d'intérôt.
« Le projet de loi, par application du dernier paragraphe de l'article 18 de
u la loi du 11 juin 1880, autorisait la Compagnie à faire face aux dépenses
A VOIE NORMALE 219
« de premier établissement, au moyen d'émissions d'obligations réalisées
« après la mise en exploitation des lignes ou sections de lignes, sans que ces
« émissions pussent être supérieures aux dépenses correspondant auxdites
« lignes ou sections, et sous la condition expresse que les charges des titres
« ne dépasseraient pas l'intérêt garanti sur ces dépenses et que le ministre
« aurait procédé aux constatations préalables prescrites parl'article 18 précité
f de la loi. La combinaison financière proposée par la Compagnie et admise
« par les pouvoirs publics consistait, on le voit, à exécuter progressivement
u les travaux, au moyen d'un capital social restreint, remplacé par des obli-
« gâtions au fur et à mesure de la mise en exploitation pour être reporté
« sur d'autres points.
a Le ministre des finances, tout en adhérant à cette combinaison, avait fait
u observer que, au cas où la Compagnie obtiendrait ultérieurement d'antres
<( concessions, il y aurait lieu d'examiner si le capital social ne devrait pas
c être augmenté ou d'assigner une limite aux émissions d'obligations; ils
« s'était, d'ailleurs, refusé à laisser reporter sur les exercices suivants l'excé-
« dent de la charge de la garantie de l'Etat, au cas où elle devrait être mise
<c en jeu pour une somme de plus de 400,000 francs *.
« Le maximum du capital de premier établissement était fixé à forfait à
<c 21 millions.
a Le cahier des charges était conforme au type.
« La voie avait 1"44 de largeur. »
La ligne du Blayaîs doit être prolongée ultérieurement dans le
département de la Charente-Inférieure, jusqu'à Pons d'une part,
jusqu'à Royan d'autre part. Des pourparlers sont activement pour-
suivis dans ce but.
Le premier tronçon, Ares à Facture, a été ouvert à l'exploitation
le 7 janvier 1883, Facture à Saint-Symphorien le 16 mars de la
même année, Ares à Lesparre le 20 octobre 1884.-
Le rayon nord (Lacanau-Bordeaux) a été ouvert le 21 décembre
1883, et le rayon sud le 21 février 1886.
Deux prolongements sont d'ores et déjà réclamés par divers
intéressés, Tun d'Ares au cap Ferret, à l'entrée du bassin d'Ar-
cachon, oh on voudrait créer une station balnéaire ; un autre de
Lacanau à l'Océan, tant pour un but analogue que pour l'exploi-
tation des pins.
* On a vu plus haut (p. 40) que ces obs*^rvations du ministre des finances ont été
prises en consid«'Tation, puisque le cinquième du capital-actions doit être maintenant
immobilisé sur les nouvelles lignes concédées.
220 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Ainsi qu'il a été dit déjà au sujet de la ligne de Sore à Saint-
Symphorien, cette dernière ligne n'a pas été incorporée dans le
réseau des chemins de fer économiques de la Gironde par suite des
difficultés d'entente sur le prix du rachat.
Description des lignes. — De Saint-Symphorien à Facture, on
rencontre quelques accidents de terrain, des collines de sable^ et
on a dû recourir à des rampes de IC"" par mètre ; les localités sont
sur ce parcours assez rapprochées.
De Facture à Ares, la ligne longe le bassin d'Arcachon, et Ton
espère développer sur ce parcours des stations de bains de mer
qui possèdent déjà quelques baigneurs : l'élevage des huîtres et
l'industrie du bois constituent actuellement les principaux élé-
ments de transport.
D'Ares à Lesparre on traverse un pays plat, de marais et de
bois.
Entre Facture et Lesparre, les déclivités ne dépassent pas 5 à
6 millimètres par mètre.
Les transversales ou rayons de Lacanau à Bordeaux et de
Beautiran à Hostens se rapprochent, comme tracé, de la section
de Saint-Symphorien à Facture.
Enfin la ligne de Saint-André-dc-Cubzac à Saint-Ciers-la-Lande
traverse une région assez mouvementée, où il est nécessaire
de recourir à des rampes supérieures à 15°". La dépense kilomé-
trique d'établissement de cette ligne est du reste prévue au double
environ de la dépense des autres lignes.
Sur les lignes situées au sud de la Garonne, les rayons des
courbes ne descendent pas au-dessous de 500 mètres : pour le
Blayais, on a adopté 300 mètres comme minimum.
L'écartement normal des rails était ici tout indiqué, au moins
pour les lignes placées au sud de la Garonne. En effet les terras-
sements y sont pour ainsi dire nuls, les terrains étaient ou gratuits
ou à très-bon marché et il n'y avait aucune raison de tracé qui
nécessitât des courbes de faible rayon. De plus les traverses
prises sur place sont à un prix des plus avantageux et le balast
est constitué par le terrain naturel lui-même, c'est-à-dire par le
sable.
A VOIE NORMALE 221
Toutes ces raisons jointes aux facilités d'échange que devait
procurer l'adoption de la voie large dans les relations nombreuses
avec la ligne du Médoc, celle de Nizan à Sore, et surtout avec le
Midi, ne permettaient pas d'hésitations sur le choix de Técartc-
ment des rails pour les lignes au sud de la Garonne.
L'adoption de la voie normale est moins justifiée pour la ligne
du Blayais. Là au contraire on se trouve en présence de sérieuses
difficultés de tracé; mais cette raison n'a pas suffi à fixer le choix
du département sur la voie étroite. On a pensé qu'avec la voie
normale, les trains pourraient être prolongés d'une part jusqu'à
Bordeaux, en empruntant les rails de l'Etat; d'autre part, si ulté-
rieurement le département de la Charente-Inférieure concédait le
prolongement de la ligne du Blayais soit sur Gozes, soit surRoyan,
on arriverait à concurrencer pour le trafic entre Bordeaux et cette
station balnéaire importante, les lignes de PËtatet du Médoc, ainsi
que le service fluvial. On retomberait ainsi dans la lutte du che-
min de fer d'intérêt local contre les grandes lignes, lutte à
laquelle la loi de 1880 avait pour but de mettre fin.
On a examiné avant la construction, l'intéressante question de
l'établissement des chemins des Landes de la Gironde sur Tac-
cottement des routes.
Cette solution, impossible pour la région accidentée du Blayais,
ne Tétait pas davantage pour les rayons ni pour la section mou-
vementée de Saint-Symphorien à Facture.
De Facture à Lesparre au contraire, le tracé longe constamment
les routes ; mais ces routes sont étroites d'une part; d'autre part,
le bon marché des terrassements a fait hésiter le concessionnaire;
le voisinage immédiat d'une route lui a paru une source d'incon-
vénients nombreux, et de plus une voie noyée dans une chaussée
a semblé onéreuse d^entretien comme d'établissement.
Le ballast a 0 m. 50 d'épaisseur, le rail, à patin, est en acier et
pèse 25 kilos le mètre : il a 8 mètres de longueur et repose sur
8 traverses.
La vitesse légalement autorisée est de 50 kilomètres et on pour-
rait sans le moindre inconvénient atteindre cette vitesse; mais,
dans la pratique, les marches ont jusqu'ici été limitées à la vitesse
de 30 kilomètres à l'heure.
222 CHEMINS DE FER DTOTÉRÊT LOCAL
Il a été construit des maisons de garde près des passages à
niveau les plus importants, tous les 8 ou 10 kilomètres environ,
de telle manière que chaque chef-cantonnier est généralement
logé dans une maison de garde.
Les clôtures n'existent qu'autour des stations et jusqu'à 25 mètres
de chaque côté des passages à niveau.
La figure 22 (pi. IX) représente le type d'une station com-
plète dite de première classe. Toutes les stations se rattachent à
ce type.
La voie n* 1 est affectée aux trains de passage; la voie n*" 2,
qui sert au croisement des trains, existe tous les 10 à 12 kilomètres,
mais son emplacement est prévu dans toute station.
La voie n° 3 est établie dans toutes les stations, quelle que soit
leur classe ; elle sert pour le chargement et le déchargement des
marchandises ordinaires qui doivent emprunter la surface décou-
verte du quai ou la surface couverte de la halle. Cette voie peut
être également affectée au chargement du bois.
La voie n^ 4 ou voie de cour est posée dans les stations voisines
des centres forestiers où l'on peut compter sur un trafic de bois
assez important. Cette voie n'est généralement reliée à la voie
n"" 3 que du côté où les bois doivent être expédiés. Du reste, la
traversée de la cour des voyageurs par cette voie ne présente aucun
inconvénient pratique.
La voie n"" 5 existe dans les stations qui sont les points de départ
et d'arrivée des trains.
Dans les haltes, qui sont surtout destinées au service des mar-
chandises sur le réseau des Landes de la Gironde, on a toujours
une voie en cul-de-sac posée soit sur l'emplacement de la voie n"» 3
lorsque la surface des emprises de la halte est peu développée,
soit sur remplacement de la voie n^ 4 lorsque les terrains de la
halte sont plus vastes.
Ce tjrpe unique dans lequel rentre toutes les stations, est un type
très-satisfaisant et très-rationnel ; toutes les voies sont reliées par
les deux extrémités, ou peuvent l'être, et la station est symétrique
par rapport à l'axe du b&timent des voyageurs et concentrée sur
350 mètres.
On retrouve dans les bâtiments, remarquablement construits, et
A VOIE NORMALE 223
d'aspect très-satisfaisant, la mémo logique qui a présidé aux dis-
positions des voies : ils sont bâtis d'après un type unique, dans
lequel toutes les constructions peuvent rentrer. .
Dans la station de première classe A et B sont affectés au ser-
vice des voyageurs : A comprend au rez-de-chaussée, un vestibule
avec guichets et banc à bagages, et un bureau pour le chef de sta-
tion ; au premier étage un logement pour celui-ci.
B comprend une salle d'attente au rez-de-chaussée et une cham-
bre au premier.
C est une halle à marchandises, à deux travées^ communiquant
de plein pied avec le quai découvert.
Dans la station de deuxième classe, le bâtiment A n'a qu'une
travée, le bâtiment B sert à la fois de salle d'attente et de vestibule,
et la halle C n'a également qu'une travée. Mais le tout est exécuté
de manière à permettre la transformation facile en bâtiments de
première classe.
De même, dans les haltes, les bâtiments B et G sont supprimés,
et le bâtiment A est réduit aux dispositions de la station de
deuxième classe, mais avec facilités de transformation en station
de deuxième classe.
Enfin la maison de garde est le bâtiment de la halte avec sup-
pression du premier étage, de telle sorte qu'elle peut être trans-
formée en halte à l'occasion. .
Les trottoirs sont en gravier pilonné et suivant la forme de dos
d'âne ; ils ont cinq mètres de largeur.
Le prix moyen d'établissement d'une station de deuxième
classe est de 25,000 francs dont:
Terrains et terrassements. 3 à 4,000 fr*
Bâtiments ..... 10 à 12,000
Quais 1,500
Empierrement .... 1,500
Voies et appareils . . . 6 à 8,000
Les stations sont couvertes, à 100 mètres de- la pointe de chaque
aiguille d'entrée, pat un signal' de ralentissement, fixe et peint en
vert. Aux bifurcations on a installé un signal à distance, à la
224 NS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
pointe d'aiguille; ce signal est permissif et commande Tarrêt
avant de franchir l'aiguille.
Avant de prendre Taiguille de dédoublement de toute station où
a lieu un croisement^ les trains doivent s'arrêter et le mécanicien
vérifier si Taiguille est bien faite.
Il n'est fait usage que de pulsomètres pour alimenter le tender
des locomotives et les réservoirs d'eau: le diamètre intérieur d'as-
piration d'eau a 90™", celui de refoulement 80°" et celui do va-
peur 17"™. Le prix de cet appareil est de 1,200 francs; on l'ins-
talle d'une manière très-simple et très-économique à l'orifice ou à
l'intérieur du puits d'alimentation en le faisant reposer sur des
madriers en bois ou sur des coupons de rails encastrés dans les
parois du puits.
La hauteur d'aspiration ne dépasse généralement pas 2 m. 50;
celle du refoulement ne dépassant pas 6 à 8 mètres, le débit par
minute peut atteindre 500 litres avec une pression de 5 kilos dans
la chaudière. L'installation du pulsomètre coûte 200 francs et le
puisard environ 300 francs pour de faibles profondeurs, soit au
total de 1,800 à 2,000 francs.
Matériel roulant. — Voitures et wagons. — Le matériel a été
construit par la maison Désouches,* David et G'^, de Pantin. Ce ma-
tériel est excellent et supérieur au matériel des lignes secondaires
de la plupart des grandes Compagnies.
L'armature en voitures se compose pour toutes les ligues, y
compris celle du Blayais, de :
12 mixtes première, seconde et troisième;
10 troisièmes sans frein ;
12 troisièmes à frein à vis.
Les fourgons sont au nombre de 12, tous munis de frein à vis,
et comprenant un compartiment de troisième classe affecté au
service, c'est-à-dire aux agents de la Compagnie.
Les wagons ont tous le frein abattu, excellente précaution
A VOIE NOBMALE 225
pour les manœuvres. Leur nombre est de 210, se décomposant
en :
60 plates-formes ordinaires.
30 plates-formes à traverse mobile pour bois de longueur.
40 wagons couverts dont 10 à vis.
80 wagons tombereaux dont 20 à frein à vis.
Tous ces wagons peuvent porter 10 tonnes,- et sont du nouveau
type de la Compagnie du Midi, afin de pouvoir circuler sans dif-
ficultés sur les lignes du Midi, ou les lignes des autres réseaux.
L'armature kilométrique du matériel de petite vitesse ressort à
0 w. 80, ce qui sera insuffisant après l'ouverture du Blayais.
Machines, — Les machines ont été étudiées par M. Bandérali,
ingénieur du service central du matériel et de la traction de la
Compagnie du Nord, à qui est également dû tout le reste du
matériel.
16 machines sont du même type, sans tendcr, à trois essieux cou-
plés. Elles ont été construites par la Société Alsacienne.
Ces machines sont excellentes, mais seraient un peu faibles pour
un trafic plus développé.
On a acheté récemment une machine de la ligne de Nizan à Sore,
qui était à vendre, et qui est plus forte que les machines Bandérali.
Les conditions principales de celles-ci sont les suivantes:
Diamètre des cylindres 0.35
Course des pistons 0.S6
Surface de la grille 1,0S
Surface de chauffe du foyer 5.200
— des tubes .... 50.670
— totale 55.870
Timbre de la chaudière 9 atm.
Diamètre des roues , . 1",260
Empattement des roues 3
Poids à vide 21 tonnes.
Poids en charge 26 t. 5
Chaque dépôt possède une plaque pour tourner les machines.
15
226 CHKMINS Ï)E FEH DINTÉRKT LOCAL
Ateliers de réparation. — Les grosses réparations ainsi que
le tournage des roues se font actuellement aux ateliers de la
Compagnie du Midi à Bordeaux.
La gare de Lacanau dispose d'un atelier pour petites répara-
tions. Le matériel neuf n'a pas encore nécessité do grosses répa-
rations; mais on projette de construire à Lacanau un grand
atelier suffisamment outillé pour tous les besoins du réseau.
L'atelier que possède actuellement à Saint-Symphorien la
Compagnie .du chemin de fer de Nizan à Sorc doit d'autre part
être conservé après l'incorporation de ce chemin au réseau de la
Gironde.
Il n'a pas été possible d'obtenir des renseignements détaillés
en ce qui cencerne les dépenses de premier établissement. Il y a
donc lieu de s'en tenir aux chiiïres forfaitaires très-modérés d'ail-
leurs de 117,500 francs par kilomètre pour le Blayais, 62,000 francs
pour le réseau des Landes de Gironde.
Il convient d'ajouter que les concessionnaires ont réalisé sur
ce dernier chiffre un bénéfice raisonnable, tout en établissant le
chemin et le matériel dans des conditions de solidité et de luxe
tout particuliers.
La construction du Blayais est en cours.
H. — EXPLOITATIOIW
Administration et Direction
L'administration des chemins de fer économiques a son siège
à Paris. On a vu dans Texposé quelles facilités considérables ont
été accordées à cette Société au point de vue financier.
Toutes les affaires importantes telles que marchés, traités, sont
soumises à l'approbation du conseil.
Le directeur réside également à Paris. Il est assisté d'un Ingé-
nieur, d'un chef de comptabilité, d'un caissier et d'un comptable.
Tout ce personnel est du reste, affecté à la construction comme à
l'exploitation des multiples entreprises de la Société des chemins
de fer économiques.
A VOIE NORMALE 227
Un chef dexploitation avec des pouvoirs étendus, dirige à Bor-
deaux Tensemble des services de Texploitation.
Son bureau se compose d'un chef de comptabilité avec deux
expéditionnaires pour la comptabilité, la voie, la traction et Texploi-
tation commerciale ; un agent suit spécialement le service de la
voie et de la traction, et trois agents assurent le contrôle des
recettes, au total sept agents au service central.
Les feuilles de soldes et factures sont envoyées à Paris, d*où
elles sont renvoyées revêtues de la signature du directeur.
Le chef d'exploitation possède d^ailleurs, une grande liberté
d'action.
Voie et Bâtiments
Le chef d'exploitation a sous ses ordres, pour diriger le service
de la voie et des bâtiments, deux conducteurs ; Tun à Hostens,
avec deux surveillants ou piqueurs, l'autre à Lacanau, avec trois
surveillants.
Ces divers agents ont activement concouru à la construction.
Les équipes sont à trois ou quatre agents, et leur canton s'é-
tend généralement sur 10 kilomètres, ce qui, du reste, ne peut
pas être considéré comme une situation normale, les voies étant
toutes neuves.
On s'attache à réduire uniformément le personnel des équipes
à 3 trois hommes, en réduisant aussi la longueur du canton à
8 kilomètres. Depuis l'uoverturc des rayons, presque toutes les
équipes ont été ramenées à trois hommes.
Les chefs-cantonniers sont tous logés ; il reçoivent 80 francs
par mois, les femmes gardes-barrières d2 francs ; les poseurs ont
65 francs.
Le service de la voie n'offre guère de particularités, en raison
de l'âge récent des lignes.
Pour cette même raison, il n'est pas possible de fournir des
chiffres de dépense d'entretien; il n'y a en effet ni renouvellement
ni gros- travaux d'entretien sur une ligne neuve et bien cons-
truite, et ce n'est qu'au bout de quatre ou cinq années que les dé-
penses kilométriques peuvent être considérées comme assises et
normales, ou à peu près.
228 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAÎ.
Les chitrres qui pourraient être actuellement donnés n'auraient
aucun sens. Il en est de même pour la traction, le matériel étant
neuf et l'entretien, par le fait^ nul ; et pour Texploitation, le trafic
étant à peine développé.
Il convient d'ajouter cependant que les dépenses d'entretien de
la voie sont extrêmement réduites.
Traction
Ce service est dirigé en sous-ordre par un chef de traction ;
en outre, il y a un chef de dépôt à Lacanau, chargé en même
temps de -la conduite de Tatelier.
Trois dépôts : Lacanau, Ares et Belin sont répartis sur la ligne.
L'ensemble des trains est desservi par 6 machines en service
journalier, non compris une réserve en feu à Lacanau, qui fait
des manœuvres dans cette gare importante de bifurcation, et une
seconde machine de réserve à Hostens.
La machine do Lacanau remplace au besoin les machines de
Lesparre, Bordeaux et Ares, celle d'Hostens les machines de
Belin et do Saint-Symphorien.
Le personnel se compose de dix mécaniciens et dix chauffeurs;
une brigade est constamment occupée en remplacement des ma-
lades et une autre est au lavage et aux ateliers.
Le traitement des mécaniciens est de 125 francs par mois.
— des chauffeurs — 90 —
Les chefs-mécaniciens reçoivent 3.000 francs par an.
Le combustible est composé pour les 2/3 de briquettes anglaises
en provenance de Cardiff, et pouri/3 de charbon tout- venant de
même provenance.
Le prix de revient des briquettes est de 24 fr. 20 la tonne en
gare du Médoc ou de Beautiran.
Les allocations kilométriques sont de o kilos pour une charge
inférieure ou égale à 5 véhicules vides ou chargés.
6 kilos de 5 à 10 véhicules.
7 kilos de 10 à 15 véhicules.
Le décompte des allocations par machine^ d*après le nombre
A VOIE NORMALE 229
des véhicules, est établi au moyen de feuilles de trains par un
chef de gare (Belin).
En outre de ces allocations de parcours, il est accordé 200 kilos
pour allumage, 10 kilos par heure de stationnement et 30 kilos par
heure de manœuvre.
L'huile de graissage est un mélange par parties égales d^huiles
de colza et d'huile de résine; Tallocation est de 30 grammes par
kilomètre.
Les primes d'économie et d'entretien rapportent 30 à 40 francs
par mois aux mécaniciens, moitié aux chauffeurs.
On a pour principe que les mécaniciens doivent rentrer chez
eux tous les soirs ; on évite ainsi les déplacements, c'est-à-dire des
frais supplémentaires, et les ménages en partie double, résultat
général des roulements à long terme. Les points d'attache, où
couchent les mécaniciens et les machines, sont les suivants : 1 ma*
chine à Lesparre, 1 à Bordeaux, 1 à Lacanau (réserve), 2 à Ares,
i à Belin, 1 à Saint-Symphorien, 1 à Hostons (réserve).
De même que le décompte des allocations do charbon est établi
par un chef de gare moyennant une légère augmentation de trai-
tement, de même un autre chef de gare est chargé de la statis-
tique des parcours des machines et véhicules ; ces états sont véri-
fiés à l'aide de ceux du chef de dépôt.
Les parcours des machines varient de 86 à 188 kilomètres par
machine et par jour avec une moyenne journalière de 135 kilo-
mètres par machine.
Certaines machines atteignent des parcours annuels de 50,000 kilo-
mètres.
Le prix de traction du kilomètre ne dépasse pas 40 centimes;
mais comme on Ta déjà dit, il n'y a pas lieu de s'arrêter à ce
chiffre, où n'entre en ligne de compte aucune dépense d'entretien.
Mouvement et Trafic
Mouvement. — Le chef de l'exploitation a sous ses ordres, pour
la direction du mouvement, un inspecteur à Lacanau et deux sous-
inspecteurs, en résidence Tun à Belin, l'autre à Saint-Sym-
phoFien.
230 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Service des stations. — 4 stations seulement, Ares, Lacanau,
Belin etHostcns ont un personnel composé d'un chef de station,
un facteur et un homme d'équipe.
Dans toutes les autres stations, le chef de station est seul, à Tex-
ception d*Andernos qui, en raison de ses importantes expéditions
d'huîtres, possède un élève facteur.
Lanton est la seule station gérée par une femme, qui assure
tout le service y compris la comptabilité. Il est assez difficile,
dans les Landes, d'étendre l'emploi des femmes comme chefs de
station en raison de leur peu d'instruction en général.
Les sept haltes sont toutes pourvues d'une voie en cul-de-sac
pour l'expédition des bois par wagons complets ; les haltes ont
plutôt pour but d'assurer ces transports que le service des voya-
geurs dont le mouvement y est à peu près nul. Toutes les haltes
sont gérées par des femmes.
Les règlements adoptés sont ceux de l'ancienne Compagnie des
Dombes.
Avant l'expédition d'un train, les gares sont tenues de deman-
der la voie par télégraphe à la station suivante. Ce mode d'emploi
du télégraphe est presque universellement abandonné par les
Compagnies; c'est une complication sans garantie, difficilement
justifiable sur des lignes à mouvement chargé, et qui ne saurait
être admise sur des lignes à deux ou trois trains par jour, comme
c'est ici le cas.
Dans toute station gérée par un seul agent, les manœuvres sont
faites par le personnel des trains; le chef de station donne à cet
effet la clef des cadenas d'aiguilles au garde-frein.
Il y a très-peu de marchandises de .détail; aussi tous les trains
peuvent-ils en assurer le service ; ces marchandises sont chargées
au passage par les agents du train aidés par le chef de station.
L'excellente disposition des gares facilite ce travail de même
qu'elle permet d'accélérer les manœuvres de wagons.
Le service de la répartition du matériel est fait par le chef de
station d'Ares, auquel les gares adressent chaque jour la situa-
tion du matériel, avec les disponibles et les demandes.
L'état d'échange du matériel avec les Compagnies étrangères
A VOIE NORMALE 23i
est tenu par le chef de la station de Belin, qui reçoit h cet effet
les feuilles des conducteurs des trains.
Un chef do station (Lacanau) est chargé du magasin des huiles.
Un autre chef de station (Ares) du magasin des imprimés. Moyen-
nant une redevance mensuelle de 10 à 20 francs par chef de gare,
on fait ainsi l'économie de un ou plusieurs agents.
On retrouve ici les procédés économiques déjà remarqués sur
d'autres lignes dont M. Emile Level a la direction, sur les lignes du
Pas-de-Calais par exemple.
Le travail d'écritures est divisé le plus possible et confié aux
chefs de station, en vue d'économie d'agents.
Quant aux chefs de station oux-mômes, on s'attache à les rap-
procher le plus possible de la localité dont ils sont originaires. Bien
logés et à proximité de leur famille, ils font plus d'économies avec
100 francs par mois qu'avec ioO quand ils sont éloignés.
L'inspecteur de l'exploitation est agent spécial de la voie unique.
Service des trains. — Les trains sont au nombre de deux dans
chaque sens, un le matin, un le soir, sauf entre Ares et Facture,
où la population ostréicole et les baigneurs donnent un mouvement
assez important et où le nombre des trains est porté à trois.
Tous ces trains correspondent soit avec les trains du Midi ou
ceux de la ligne de Nizanà Sore.
Tous les trains sont mixtes ; leur vitesse de marche est calculée
à 30 kilomètres à l'heure, et pourrait sans le moindre inconvé-
nient être portée à 45 ou 50 kilomètres, s'il était nécessaire.
Les stationnements sont très-réduits : \ minute dans les petites
stations, 2 minutes dans les stations de moyenne importance. Ils
sont suffisants pour assurer le service des marchandises de détail,
très-peu développé.
Le personnel de chaque train est composé d'un conducteur à
iOO francs par mois, et d'un garde-frein à 80 francs : 6 équipes
de conducteurs constituent tout le personnel; ces agents ont la
charge d'entretenir les voitures du train, ce qui leur est facile en
raison des stationnements prolongés dont ils disposent.
Chaque train est composé comme matériel à grande vitesse d'un
fôur;b^on. d'une voiture mixte contenant un compartiment de pre-
232 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
mière classe, 2 de seconde et 1 de troisième pour la poste, et d'une
voiture de troisième classe à frein. Cette composition est placée en
queue du train ; en avant sont attelés les wagons à marchandises.
La composition du train atteint aumaximun i5 véhicules; d'où il
suit que la longueur du train est au plus de 120 mètres. Il résulte
de là que les gares sont un peu plus longues qu'il n'est nécessaire
et que les manœuvres donnent lieu à des pertes de temps, incon-
vénient de peu d'importance du reste.
Le conducteur relève sur une même feuille les incidents de
marche du train, la composition de ce train et le mouvement du
matériel.
Le mécanicien est chargé de la tenue de la feuille de traction.
Les compartiments de première classe sont seuls chauffés l'hiver;
encore le sont-ils avec des chaufferettes à briquettes, chauffage mal-
sain et même dangereux comme on Ta déjà vu à plusieurs reprises.
L'éclairage est fait à l'huile de colza; les lampes sont entrete-
nues par les hommes d'équipe des gares de formation.
Les parcours en 1885 se sont élevés pour 152,5 kilomètres de
ligne, à 212,300 kilomètres dont 3, 183 kilomètres de trains debalast.
Service des gares communes. — Le trafic de détail étant très-
faible, il en résulte peu de transbordements dans les gares de
jonction avec les réseaux étrangers.
Les dépenses à la charge de la Société des chemins de fer
économiques pour les gares communes avec la Compagnie du
Midi, qui assure par ses propres moyens tout le service de l'em-
branché (excepté pour ce qui concerne la traction, l'alimenta-
tion, etc.), sont fixées à forfait, loyer compris, à 10,000 pour Fac-
ture, 7,000 pour Beautiran, tant que le trafic de l'embranché restera
inférieur à 4,500 francs par kilomètre. Au delà, les dépenses
seront partagées au prorata des unités de trafic local.
Tandis que dans les gares communes avec la Compagnie du
Midi d'importants travaux d'appropriation ont été exécutés par
cette Compagnie, à ses frais, les agrandissements nécessaires dans
la gare de Saint-Symphorien, commune avec la Compagnie de
Nizan à Sore ont été faits par la Compagnie départementale et à sa
charge. La Compagnie de Nizan à Sore assure l'exploitation com-
A VOIE NORMALE* 233
munc et perçoit de ce chef de Tcmbranché une redevance annuelle
de 3,600 francs (loyer compris).
Enfin pour les gares de Lesparre et de Bordeaux-Saint-Louis,
communes avec la Compagnie du Médoc, ainsi que pour le tronc
commun de Bruges à Bordeaux, la Compagnie départementale
comme on Ta vu à propos du chemin du Médoc, se prétend exo-
nérée de toute participation aux dépenses de la communauté, soit
en ce qui concerne l'exploitation, soit en ce qui concerne la cons-
truction.
Le Médoc est d'accord sur ce dernier point mais non sur le pre-
mier.
L'affaire est en instance.
Service commercial. — Tarifs, — Les tarifs généraux sont
à base élevée au moins pour la petite vitesse, ce qui donne lieu à
des réclamations assez vives.
Les tarifs des voyageurs sont les tarifs habituels des grandes
Compagnies.
Des billets d'aller et retour comportant une réduction d'envi-
ron 25 p. 100 sur le double des billets simples sont applicables
pour un certain nombre de relations, les dimanches, jours de mar«
ché, de foire et de fête, entre Bordeaux et les stations du littora
du Bassin d'Arcachon ; ces billets d'aller et retour sont délivrés tout
les jours.
D'autre part on a établi des tarifs réduits pour le transport des
huîtres en grande vitesse.
Les conditions d'application pour la grande comme pour la
petite vitesse sont celles de la Compagnie du Midi. Les marchan-
dises sont divisées en 5 classes dont les 4 premières correspon-
dent à peu près aux séries du Midi, et dont les prix d'application
par kilomètre sont respectivement de 24, 18, 14, 10 et 5 centimes.
La 5' classe ne comprend que des matériaux d'empierrement.
Des tarifs spéciaux applicables par wagons complets de
5,000 kilogrammes, corrigent un peu ce que les tarifs généraux ont
d'excessif, pour les grosses marchandises, tout en restant beaucoup
plus élevés que les tarifs similaires en vigueur sur les grandes
lignes.
234 CHEMINS DE FER D'LNTÉRftT LOCA!.
Après les bois qui constituent le principal élément de trafic, le
tonnage le plus important est fourni par les matériaux de cons-
truction : cette région en est complètement dépourvue (les bois
exceptés).
La comptabilité est tenue par dizaine; l'inspecteur et les sous-
inspecteurs assurent les vérifications dans les gares.
Le contrôle des recettes est assuré, dans les bureaux du service
central à Bordeaux, par trois employés dont Tun est chef do station
intérimaire.
On avait pensé à suivre pour le contrôle des recettes le procédé
employé pour la répartition et l'échange du matériel, ainsi que
pour les magasins, c'est-à-dire en charger plusieurs chefs de sta-
tion; mais on a reconnu qu'il y aurait de graves inconvénients à
charger un agent de se contrôler lui-même.
La statistique commerciale est tenue par le chef de station
d'Hourtin.
Services divers. — Le service médical est gratuit, les médecins
ne reçoivent pas de traitement.
. Les médicaments donnent lieu à une retenue de 10 p. i 00 de
leur valeur; on a pensé par là éviter les abus.
On a mis à l'étude la question de l'instruction d'une caisse de
retraite pour les employés de l'ensemble des lignes de la Compa-
gnie des chemins de fer économiques.
Résultats du trafic pour Tannée 1885
(Longueur moyenne des kilomètres exploités : 142,5)
On n'a pu obtenir les dépenses kilométriques totales d'exploita-
tion; on ne pourrait du reste tirer aucune conclusion de chiffres
dans lesquels ne figurent, en raison de l'âge récent des lignes, ni
le renouvellement des rails et traverses, ni les grosses réparations
du matériel roulant et des machines, ni les frais d'une exploitation
arrivée à son complet développement quant au trafic.
Il suffira de dire que présentement, le chiffre de 3786 francs par
A VOIE NORMALE 235
kilomètre est très-rémunérateur pour l'exploitant; il le sera cer-
tainement moins au bout de 4 ou 5 années d^exploitatiou.
Bien que le tableau des produits ne soit pas non plus l'expres-
sion d'un trafic normal, il peut être intéressant de le reproduire :
1° Grande vitesse 108.. *m2 77
20 Petite vitesse 213.383 02
3« Recettes diverses 2.007 7;i
215. 3m) 77
Soit par kilomètre 1.510 »
On voit que la construction du réseau départemental n'a pas été
une brillante affaire pour le département de la Gironde. Il n'en est
pas de même pour la Compagnie concessionnaire. Il en résulte
des tiraillements entre le département et la Compagnie.
Quoi qu'il en soit, il convient de dire que celle-ci exploite aussi
bien qu'elle a construit.
TROISIÈME PARTIE
CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
A VOIE ETROITE
CHAPITRE XVll
I
ï
GHEBON DE FER DE HERMES A BEAUMONT
(Oise et Seine-et-Oise.)
Longueur 32 kilomètres
La ligne de Hermès à Beaumont est le premier chemin de fer
à voie étroite construit en France; il existait bien avant lui des
lignes industrielles à largeur de voie réduite, mais ce n'est que
le jour de Touverture de la ligne de Hermès à Beaumont au ser-
vice des voyageurs et marchandises qu'est véritablement né le
chemin de fer à voie étroite, en tant que chemin approprié au
service des intérêts locaux.
C'est Texpérience de la ligne de Hermès à Beaumont jointe à
celle du chemin de fer d'Anvin à Calais, construit vers la même
époque et d'après les mêmes principes, qui a fait sortir le chemin
de fer d'intérêt local de l'état de déliance où l'avaient placé les
malheureuses tentatives issues de la loi du 12 juillet 1865; cette
double expérience a certainement accéléré le mouvement d'où est
sortie la loi du il juin 1880, de laquelle date le merveilleux déve-
240 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
loppement actuel des petits chemins de fer, si remarquables de
bon marché dans leur exploitation comme dans leur construction.
Le chemin de fer de Hermès à Beaumont (voir Revue générale
des Chemins de fer^ mai et septembre i881) dessert par 9 stations,
une population d'environ 10,000 habitants, dont 6,000 appartien-
nent aux localités de Hermès et Beaumont déjà desservies par les
lignes de la Compagnie du Nord.
La région est à la fois industrielle et agricole ; en dehors de la
fabrication du sucre qui donne lieu aux plus gros transports, il y a
dans tout le jpays une très-importante production de brosserie fine,
éventails, tabletterie, etc.. Ainsi, Noailles occupe 500 ouvriers à
la brosserie; une très-grande part des éventails espagnols sont
fabriqués à Sainte-Geneviève, etc.. Enfin Ercuis possède une
fabrique de couverts en métal alfénide, une autre de fils de coton.
Ces éléments de trafic pouvaient permettre de vivre à une Com-
pagnie de chemin de fer, à la condition que la dépense de premier
établissement et les charges financières fussent peu élevées.
C'est pour cette raison qu'on a fait choix de la voie étroite.
D'autre part, on s'est efforcé de limiter les emprunts en donnant
plus d'importance au capital-actions et en s'attachant à recueillir
les souscriptions parmi les habitants du pays, afin d'éviter des
frais d'émission par la voie de banquiers.
La Société a été constituée au capital de 1,300, 000 francs, dont
200,000 souscrits par la Compagnie du Nord qui, toujours libérale
avec les Compagnies affluentes, offrait en outre une subvention
de 0 fr. 10 par tête de voyageur de ou pour le réseau du Nord.
Le capital-obligations ne dépasse pas 730,000 francs dont
612,500 seulement réalisés.
Les subventions fixes accordées ont été les suivantes :
Eut 100.000 »
Départements 130.000 »
Communes 146.500 »
Total 376.500
»
La ligne a été concédée par décret du 14 juillet 1877 et a été
ouverte par parties en 1879 et 1880; elle est placée sous le régime
de la loi de 1865.
A VOIE ÉTROITE 24*
1. — ÉTABLISSEMENT DU CHEMIN
Description. — La ligne aboutit à ses extrémités aux gares de
la Compagnie du Nord avec lesquelles elle est reliée par voies et
quais de transbordement.
Le profil et le plan sont assez accidentés par suite de la tra-
versée du coteau de Bray : les déclivités de 15 à 20** par mètre
existent sur 17 kilomètres, c'est-à-dire sur plus de la moitié du
parcours total; les côtes extrêmes franchies ont une différence
d'altitude de 123 mètres; 2 kilomètres seulement de la ligne sont
en Seine-et-Oise, le reste est dans TOise.
En pleine voie, le rayon minimum est toujours de 300 mètres
et les courbes de rayon inférieur n'ont été adoptées qu'aux abords
des gares d'un accès difficile. On a pris soin de réduire les rampes
dans les courbes de manière à ne jamais dépasser la déclivité
nette de 20"°.
On a examiné au moment de la construction la question de
savoir si l'on devait ou non emprunter les accotements des routes,
ce qui était possible sur environ 1/3 du parcours. On ne s'est pas
arrêté à cette solution qui eût trop limité la vitesse des trains.
La voie a un mètre d'écartement entre les bords intérieurs des
rails.
Le rail Vignole, en fer, pèse 20 kilos le mètre courant; il a
0 m. 095 de hauteur avec 0 m. 080 de largeur de patin et 0 m. 046
de largeur de champignon; il a 8 m. de longueur. Ce rail s'est
trouvé, à l'usage, résister assez mal aux efforts latéraux. Aussi le
remplace-t-on annuellement par un rail en acier de même poids
et profil, que l'on substitue par voie d'entretien.
Les traverses, partie en chêne, partie en pin des Landes injecté
au sulfate de cuivre, ont 1 m. 70 de longueur, 0 m. 15 de largeur
et Om. 12 d'épaisseur; elles sont écartées de Om. 88 d'axe en
axe en aligement et multipliées dans les courbes.
Le ballast, d'excellente qualité, en sable de rivière et cailloux
roulés, a 0 m. 40 d'épaisseur avec 2 m. 30 de largeur au niveau
16
242 CHE3UNS DE FER D'LNTÊRÊT LOCAL
des rails et 3 m. 10 sur la plate-forme, ce qui constitue un cube
de 1 m. 080 par mètre courant.
Avec ces éléments on peut obtenir des vitesses pratiques de
45 kilomètres à rheure.
Deux embranchements relient à la lig^e une fabrique de sucre
(Mesnil, Saint-Denis) et une usine à gaz (Xeuilly-en-ThelIe).
La distance moyenne entre les stations est de 3 kilomètres.
La figure 23 (PI. X), station de Fresnoy-Morangles, représente le
type des stations. C'est le type plusieurs fois rencontré avec quai
et halle à marchandises accolés au bâtiment des voyageurs; il est
commode et suffit dans Tespèce. Aucune station ne dispose de
plaques tournantes, le matériel de grande et de petite >îtesse
n'étant jamais tourné. Les bâtiments sont très-bien construits;
les chefs de station sont logés largement.
Les dispositions spéciales prises dans les gares extrêmes de
Beaumont et de Hermès pour assurer le transbordement des
wagons de la ligne à voie étroite dans les wagons de la grande
ligne, ou vice versa^ ne présentent pas grand intérêt; les voies de
transbordement sont parallèles et de même niveau, à l'exception
d*une voie surélevée sur laquelle sont amenés les wagons de
charbon de la Compagnie du Nord, afin de permettre le décharge-
ment rapide et par la gravité de la houille dans les wagons de la
Compagnie locale.
Les stations sont couvertes par des signaux à distance type Nord,
munis de sonneries électriques. On les avait tout d'abord placés
à 800 m. de la station. Cet éloignement ayant été reconnu inutile,
on a rapproché les signaux à 300 m. de la pointe de Taiguille
lorsque la voie est en pente dirigée vers la station, et à ioO m.
lorsqu'elle est en palier ou en rampe vers la station.
Les exploitants seraient d'avis de supprimer tout signal.
Les passages à niveau ne sont pas gardés; sur 78 passages à
niveau, 3 qui se trouvent à la sortie des gares sont munis de
barrières manœuvrées de la gare.
Les stations sont clôturées ; il en est de même des passages à
niveau jusqu'à 10 mètres de distance de chaque côté du chemin.
L'alimentation d'eau est assurée :
A Beaumont par le réservoir de la Compagnie du Nord ;
A VOIE ÉTROITE 243
A Neuilly-en-ThelIe, par la distribution de la ville;
A Hermès, par une pompe dite universelle, système Daulton.
{Revue générale des chemins de fer, novembre 1884.) Cette pompe,
actionnée par la vapeur de la locomotive, alimente un réservoir.
Ce dernier système n'est pas à Tabri de toute critique ; le pulso-
mètre ou Téjecteur sont préférables.
Matériel roulant. — Le matériel roulant a été étudié par
M. Bandérali, ingénieur du service central du matériel et de la
traction à la Compagnie du Nord, qui en a donné une des-
cription détaillée dans la Revue générale des chemins de fer
(septembre 1881).
Le matériel à voyageurs et à marchandises a été construit par
la Société Dyle et Bacalan ; les locomotives par la Société alsa-
cienne.
Tout le matériel est à tamponnement central.
Voitures. — Les voitures à voyageurs sont de 4 types :
Voitures de troisième classe à 34 places, poids : 5,000 kilos;
— mixtes à 8 places de seconde, 26 places de troisième,
poids : 5,000 kilos j
— mixtes à 6 places de première, 26 places de troisième,
poids : 5,200 kilos;
— mixtes à 6 premières, 8 secondes, 18 troisièmes, poids :
5,225 kilos.
Les compartiments sont séparés; la largeur intérieure de 2 m. 05
est faible en raison du nombre de places ; les places de première
elles-mêmes sont insuffisamment confortables.
Toutes les voilures sont pourvues du frein à vide. Il en est de
même des fourgons qui ont en plus le frein à vis Slilmant.
Les wagons, qui pèsent de 3 à 4,000 kilos, peuvent porter
10 tonnes; ils portent des raccords qui permettent de les intercaler
dans les trains munis du frein à vide et sont tous pourvus du frein
à main.
244 CHEMLNS DE FER DINTÉRÉT LOCAL
L'effectif ejg. matériel est le suivant :
8 voitures à voyageurs, 2 de chaque type ;
2 fourgons avec compartiment pour la poste ;
2 wagons à lait;
20 plates-formes ;
25 tombereaux ;
13 wagons couverts.
L'armature en matériel P. Y. ressort à 2 wagons par kilomètre.
Le matériel, trop considérable en temps normal, fait défaut
dans les périodes de trafic. C'est un des principaux inconvénients
des chemins à voie étroite.
Dans le cas de grande affluence de voyageurs, on aménage, à
Faide de bancs, les wagons couverts qui peuvent contenir 30 voya-
geurs chacun.
Locomotives. — Les locomotives-tenders sont à trois essieux
accouplés et à arrière-traiu monté sur truc indépendant du sys-
tème Bissel, pour la facile inscription dans les courbes ; elles sont
pourvues du frein à vide et du frein à vis.
L'empattement rigide de la machine n'est que de 2 m. 07; aussi
son inscription dans les courbes n'exige-t-elle que très-peu de jeu
longitudinal dans les boîtes; les bielles d'accouplement sont à arti-
culation sphérique.
La Compagnie possède 4 locomotives, dont 2 en service nor-
mal; toutes sont du même type; ce sont d'excellentes machines.
Les conditions principales de la locomotive sont les suivantes :
Diamètre des cylindres 0m.350
Course des pistons 0 m. 460
Surface de la grille 1 m.
Surface de chauffe du foyer 4 "'
— des tubes 50 m. 22
— totale 54 m. 22
Timbre de la chaudière 8 k. 5
Diamètre des roues couplées 0 m. 900
A VOIE ÉTROITE 246
Empattement total des roues couplées 2 m. 070
— de la machine 3 m. 970
Longueur totale de la machine 7 m. 690
Poids de la machine à vide 17 t. 650
— en service 23 t. 700
Charge maxima sur les roues accouplées. ... 20 t.
— sur le Bissel ....... 3 t. 700
Effort de traction. = 0,65 ^ = 0,65 x 626 x 8''5 = 3,458 kil.
Charge remorquée sur une rampe de 20'"" en ali-
gnement droit à la vitesse de 22 kil. à Theure. 94 t.
Le dépôt est à Neuilly-en-Thelle, mais les gares de Hermès et
de Beaumont possèdent chacune une remise pour une locomotive
qui y couche chaque nuit.
Deux plaques tournantes de 4 m. 80 ont été placées aux extré-
mités de la ligne pour les locomotives.
Atelier de réparation. — L'atelier de réparation a été installé à
Neuilly-en-TheJle, station la plus importante de la ligne et rési-
dence de ringénieur-directeur.
Une machine à vapeur demi-fixe de la force de 5 chevaux
actionne un tour, une machine à percer et un ventilateur : une
forge à 2 feux, un étau de forge et 3 étaux d'ajusteur complètent
un outillage très-suffisant pour toutes réparations, sauf le tour-
nage des roues qui est fait au dehors.
Le personnel de Tatelier est composé d'un ajusteur, un forge-
ron, deux-hommes de peine et un apprenti.
Résumé des Dépenses de premier Établissement
au 31 décembre 1884
i^ Construction du chemin. • . •
2^ Matériel et mobilier
3<^ Intérêt pendant la construction.
Total.
Soit par kilomètre
i.QH.306 23
379.220 20
9i.451 87
2.414.978 30
76.000 n
Il convient de remarquer que les rails de fer ont été payés très
bon marché, et qu'il en a été de même des travaux.
246 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Quoi qu'il en soit le prix de revient par kilomètre est peu élevé,
si Ton tient compte des difQcultés de la construction : les terras-
sements et Tacquisition des terrains entrent dans le prix de revient
kilométrique pour la somme élevée de 25.000 francs environ.
II. — EXPLOITATIOIW
Administration
Le siège social de la Compagnie est à Neuilly-en-Thelle. Le
conseil d'administration composé de neuf membres, dont un délé-
gué de la Compagnie du Nord se réunit environ quatre fois par
an. Les fonctions d'administrateur sont gratuites, les membres
du conseil ayant fait abandon des jetons de présence qui leur avaient
été alloués par l'assemblée générale des actionnaires.
Ne sont soumises au conseil d'administration* que les questions
suivantes : service des trains, marchés, propositions d'avance-
ment et gratifications de fin d'année, compte d'administration.
L'ingénieur-directeur est chargé de tous les services, et a des
pouvoirs étendus concernant le personnel, qu*il nomme et révoque,
il assure seul le mouvement des fonds, etc., etc. Il a comme agent
de bureau, un expéditionnaire et un comptable.
Les frais d'administration, assurances, loyers, charges d*admi-
nistration publique, indemnités, secours, etc., s'élèvent pour 1885
au total de 24.233 fr. 56. Soit par kilomètre de ligne 757 fr. 30.
Voie et Bâtiments
Le service de la voie est dirigé par un inspecteur. Les brigades
de cantonniers sont au nombre de trois : chacune comprend quatre
agents et embrasse une dizaine de kilomètres.
Les chefs-cantonniers ont 100 francs par mois et les cantonniers
90 francs. Aucun passage à niveau n'étant gardé, il n'y a pas de
cantonniers logés.
Le principal travail des brigades consiste dans le renouvelle-
ment partiel en rails d^acier.
là'
A VOIE ÉTROITE 247
Les cantonniers assurent à la fois Tentretien des voies et celui
des bâtiments; ils sont chargés d'entretenir et renouveler les
peintures, remettre les carreaux, etc.
Les dépenses du service de la voie et des bâtiments pour Tannée
1885 se résument ainsi qu'il suit :
Personnel 41.220 44
Entretien de la voie 1.593 25
Entretien des bâtiments 345 10
Divers 493 93
Total 13.78275
Soit par kilomètre 430 71
Traction
Un chef de dépôt, qui est en même temps chef d'atelier, dirige
le service.
Deux mécaniciens et deux chauffeurs constituent le personnel
de conduite, qui est suppléé en cas de congé ou de train supplé-
mentaire par deux ouvriers de Tatelier, dont un peut conduire une
machine, l'autre faire fonctions de chauffeur.
Ce service est peu chargé, chaque machine faisant journelle-
ment deux trains dans les deux sens, soit environ 8 heures de
travail coupées par des stationnements prolongés aux extrémités
du parcours. Aussi n'est-il pas accordé de repos aux mécaniciens.
Pendant le lavage qui a lieu tous les dix jours au dépôt deNeuilly-
en-Thelle par les soins des ouvriers de Tatelier, le mécanicien
et le chauffeur font le service avec la machine de réserve, qui
n'est allumée que dans ces circonstances et en cas de détresse.
D'autre part, les agents de traction obtiennent des congés, sans
réduction de traitement, quand ils en ont besoin.
Les salaires mensuels sont respectivement de 125, 150 et
175 francs suivant la classe.
Il n'y a pas d'allocation fixe de combustible.
Le roulement ne permet pas de comparaison entre les deux mé-
caniciens, qui font toujours le même service, l'un au départ de
Hermès pour y revenir coucher, l'autre au départ de Beaumont.
Or, dans le sens de la plus grande montée, c'est-à-dire de
248 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Beaumont à Hermès, a lieu un train de marchandises-voyageurs
toujours très-chargé, tandis que le train de détail de Hermès à
Beaumont Test beaucoup moins, ce qui rend la comparaison
impossible.
Cette raison ne justifie peut-être pas suffisamment le rejet du
système des allocations pour le combustible et le graissage.
On se borne à comparer la consommation de chaque mécanicien
d*un jour à Tautre. Lorsqu'elle ne dépasse pas la quantité nor-
male, on alloue une prime fixe de 25 francs par mois ; dans le cas
contraire, la prime est retirée à moins de justification valable.
Le mécanicien est chargé du graissage des wagons et des voitu-
res aussi bien que du graissage de la machine.
En raison de Texiguïté des foyers, on ne peut brûler que des
briquettes d'Anzin d'excellente qualité, dont le prix est de 16 fr. 50
à Anzin et de 25 fr. à Neuiliy. Le charbon tout-venant lui-même
ne pourrait être employé pour la cause précitée.
Les parcours sont uniformément de 128 kilomètres pour chaque
machine.
L'intelligent directeur de cette petite ligne a soigneusement
étudié la possibilité de supprimer le chauiTeur, ce qui permettrait
de réaliser une notable économie de traction ; il a bien vite reconnu
qu'il n*y fallait pas songer en raison du grand nombre de passages
à niveau non gardés que comporte la ligne.
Le mécanicien doit être, en effet, constamment à son régulateur
pour arrêter son train, en cas d'obstacles pouvant se rencontrer
dans les courbes, ou de voitures traversant un passage à niveau.
Son attention serait par trop distraite s'il avait à s'occuper de
Talimentation de la chaudière, du chargement du foyer et surtout
de casser les briquettes dont on fait ici exclusivement usage, ce
qui constitue une opération relativement longue.
La suppression du chauffeur est possible sur une grande ligne,
bien gardée et clôturée, comme on l'a vu à propos des trains-
tramways de la compagnie du Nord, plutôt que sur une petite
ligne sans clôtures et à passages à niveau non gardés.
Enfin, et ce point est plus grave encore, y a-t-il intérêt à ré-
duire à l'extrême limite le nombre des agents d'un train mixte,
alors que ceux-ci, et c'est le cas sur la ligne de Hermès à Beau-
•
A VOIE ÉTROITE 249
mont, concourent tous aux manœuvres et aux manutentions qui
se font en cours de route dans des stations gérées par une femme
seule, ou tout au plus par un homme seul ?
Réduire d'un agent le personnel d'un train peut souvent avoir
pour résultat d'augmenter d*un agent le personnel de plusieurs
stations. La question est donc très-complexe ; c'est une question
d'espèces, qui ne peut être résolue qu'en faisant soigneusement
entrer en ligne de compte tous les éléments.
Au bout de six mois de parcours, soit environ 22.500 kilomètres,
les bandages de chaque machine, usés dans les courbes, doivent
être repassés.
Les dépenses de traction et d'entretien pour 1885 se décompo-
sent ainsi :
Personnel i6.135 61
Combustible 14.003 40
Graissage et petit entretien des machines et véhicules . 1.248 05
Alimentation 407 16
Entretien et réparation aux ateliers 2.890 85
Total 34.685 07
Soit par kilomètre de train 0 34
Mouvement et Trafic
Mouvement. — Le mouvement est dirigé, sous les ordres de*
l'ingénieur-directeur, par le chef de bureau qui est en même
temps inspecteur d'exploitation.
Un intérimaire attaché au bureau assure l'intérim des chefs de
station et des conducteurs de train.
Service des gares. — Dans 4 stations sur 9 le service est fait
exclusivement par des femmes de cantonniers ; dans ces 4 stations,
le télégraphe est sur communication directe, mais les femmes
chefs de station connaissent assez bien le maniement du télégra-
phe pour demander le secours en cas de nécessité.
Ces femmes tiennent toutes les écritures de la station, à l'excep-
tion du livre de compte courant qui est rempli par Tintérimaire.
Deux stations seulement, Neuilly et Noaiiles, ont un chef de
station et un homme d*équipe; enfin, dans les trois autres stations.
250 CHEMINS DE FER DINTÉRÊT LOCAL
on a adjoint au chef de station sa femme pour distribuer et retirer
les billets et même pour la manœuvre du télégraphe : ces femmes
font un excellent service et reçoivent un traitement de 200 francs
par an.
Les règlements adoptés sont ceux de la Compagnie du Nord ou
à peu près.
Les exploitants, reconnaissant que les procès-verbaux télégraphi-
ques qui sont tenus avec le télégraphe Bréguet n'offrent aucune
garantie, préféreraient Tinstallation de téléphones qui ne présen-
tent ni plus ni moins de garantie au point de vue des procès-
verbaux, mais qui offrent Tincontestable avantage de la rapidité
et de la simplicité.
Les marchandises par wagons complets sont, aux termes de
l'application des tarifs, manutentionnées par le public.
Les marchandises de détail sont chargées dans les trains ou ren-
trées sous halle par les chefs de station ou Thomme d'équipe aidés
par des agents du train, c'est-à-dire du conducteur en général, et
même quand le poids et le volume sont trop considérables^ par le
chauffeur et le mécanicien.
Dans les stations où il n'y a qu'une femme, la manutention est
faite au passage des trains par le conducteur aidé au besoin par le
personnel ^e la machine. Pour faciliter cette opération, lorsque de
gros ou nombreux colis doivent être déchargés dans une gare, le
conducteur en prévient le mécanicien et, à l'approche de la station,
celui-ci demande, à Taide du sifflet do la machine que la voie de
la halle lui soit donnée. Il arrête son train do manière à placer le
fourgon au droit du quai, et les colis sont déchargés directement
sous halle.
De son côté, la station qui a de lourds colis à charger donne au
train la voie delà halle en ayant soin de faire le signal de ralentis-
sèment à l'aiguille décadenassée et prise en pointe.
Dans les stations gérées par des femmes, le public fait généra-
lement, à titre gratuit, les manœuvres des wagons, s'il y a lieu,
dans l'intervalle des trains. Les femmes se bornent à vérifier les
poids sur la bascule. Il n'en résulte aucune récrimination.
Les relations entre la Compagnie et le public sont, comme on le
voit, tout particulièrement cordiales. La Compagnie fait du reste
A VOIE ÉTROITE 251
tout lo possible pour éviter des réclamatioas ; elle consent mème^
quand besoin est, à laisser, dans Tintervalle des trains, des wagons
en pleine voie pour y être chargés de betteraves, bois et autres
grosses parties.
La répartition du matériel est chose facile en temps normal,
mais dans la période de transport de betteraves, il n'en est plus
de même, et l'inspecteur de l'exploitation doit être constamment
sur la ligne pour presser les chargements et déchargements et faire
prendre patience aux expéditeurs non satisfaits.
Service des trains. — Le service est fait à 4 trains dans chaque
sens.
La composition normale des trains, en matériel de grande
vitesse, est d*un fourgon à compartiment, de 2 voitures mixtes et^
en queue du train, d'un wagon couvert muni du frein à vis, qui
sert de wagon de choc dans l'autre sens du parcours.
Les jours de marché, jeudi et samedi, ainsi que le dimanche, le
nombre des voitures est doublé.
La composition maximum du train peut atteindre 15 véhicules.
Tous les trains sont mixtes; mais un train de chaque sens est
plus généralement affecté au service des marchandises.
Le trafic des betteraves donne souvent lieu à la mise en marche
de trains facultatifs.
Le service du train est fait par un seul agent placé en queue.
Cet agent fait le contrôle de route, assure le service des bagages et
des messageries avec l'aide du personnel des stations et de la
machine, s'il y a lieu; il suffit à la surveillance des 15 véhicules
dont peut se composer le train au maximun. Le conducteur est
porteur d'une clef ouvrant tous les cadenas des aiguilles de la voie
et remplit les fonctions d'aiguilleur, ainsi que de chef de manœu-
vre dans toute station où la promptitude des manœuvres l'exige;
le chaulfeur décroche et accroche les wagons. Enfin, le conduc-
teur est encore chargé du nettoyage des voitures de son train.
Le service des trains est extrêmement régulier; jamais de cor-
respondances manquées.
Les 1" et 2* classes sont chauffées l'hiver : à Beaumont, la Com-
pagnie du Nord assure le service des bouillottes; à Hermès, où
252 CHEBflNS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
il n'existe pas de chaufTeretterie, les bouillottes sont réchauffées
par la vapeur de la locomotive à Taide d'un tube que Ton visse
sur le Giffard. Chaque bouillotte nécessite une minute, soit 6 mi-
nutes pour les 6 bouillottes.
Les parcours des trains s'élèvent pour l'année 1885 à 99,917 kilo-
mètres.
Gares de jonction, — Les gares de la petite Compagnie à Her-
mès et à Beaumont sont accolées à celles de la Compagnie du Nord
qui assure tout le service ; les billets des voyageurs sont délivrés
aux guichets de la gare de la grande ligne.
On a dit plus haut que les transbordements se font de wagon à
wagon; un pont volant réunit le wagon de la grande ligne à celui
de la petite ligne. Ces wagons sont placés sur des voies parallèles
et de même niveau; il en résulte, il est vrai, une différence de
0 m. 20 entre les planchers des deux wagons : le pont volant est par
suite en pente, mais cela ne présente aucun inconvénient pratique.
Un quai de transbordement qui avait été construit dans le prin-
cipe n'est jamais utilisé.
La houille est transbordée à Beaumont d'une façon spéciale; les
wagons Nord sont amenés sur une voie surélevée; on faisait tout
d'abord usage de goulottes en tôle pour conduire le charbon du wagon
Nord dans le wagon de la petite Compagnie placé en contre-bas. On
n'utilise plus ces goulottes, car on a trouvé plus simple de transbor-
der simplement à la pelle. Les wagons de la ligne locale contenant
10 tonnes comme ceux de la grande ligne, il n'y a pas de temps
perdu, et 10 tonnes sont transbordées par un seul homme en
deux heures et demie au plus, ce qui, à raison de 0,35 c. l'heure,
donne un prix de revient de 0,10 c. par tonne.
Les redevances payées par la Compagnie locale et la Compagnie
du Nord pour le service de transbordement qu'assure celle-ci, sont :
1® pour Hermès, de 0 fr. 25 par tonne pour tout service et tou-
tes marchandises ;
2® Pour Beaumont, de 0 fr. 25 par tonne de betteraves; pour le
transbordement des marchandises de détail, et pour le service des
trains, qui est fait par la Compagnie du Nord, la Compagnie locale
fournit la valeur de 2,400 francs en journées d'hommes.
A VOIE ÉTROITE 253
Le Nord ne perçoit aucune autre taxe et fait gratuitement le
service des bouillottes, ladistribution des billets, etc., sauf Téclai-
rage des trains qui reste à la charge de Tafiluent.
D'un autre côté, la Compagnie du Nord subventionne celui-ci
à raison de :
i** 0 fr. 23 c. par tête de voyageurs en provenance ou à desti-
nation de ses propres lignes pour les 5,000 premiers voyageurs
arrivés ou partis à chacune des stations extrêmes;
2^ 0 fr. 20 c. pour les 10,000 suivants;
3® 0 fr. 10 c. pour les autres.
Il n'est perçu du public, pour les transbordements, aucune taxe
spéciale autre que les frais accessoires.
Service commercial. — Le service commercial est plus spécia-
lement suivi par Tingénieur-directeur de la ligne.
Les tarifs sont à base élevée ; ils sont pour lés voyageurs :
0.1344 par kilomètre pour la 1'* classe
0.112 — 2« —
0.0784 — 3« —
Les tarifs des bagages, messageries et denrées sont majorés
dans les mêmes portions, par rapport aux tarifs habituels.
Les marchandises de petite vitesse, pour lesquelles on a adopté
la classiPicalion en vigueur sur la Compagnie du Nord, compor-
tent les bases suivantes :
i« série 0.24 par kilomètre
2» id 0.21 —
3« id 0.15 —
4«, 5« et 6« séries. 0.12 —
Les conditions d'application sont également les mêmes que sur
la Compagnie du Nord, sauf en ce qui concerne les frais de
manutention qui sont de 2 francs par tonne pour les marchandi-
254
CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
ses de grande vitesse, et qui, pour la petite vitesse, se décomposent
comme suit :
4* Frais de chargement au départ. . .
2« Frais de déchargement à Tarrivée. .
3** Frais de gare au départ
4® Frais de gare à l'arrivée
MARCHANDISES
transportées
SANS CONDITION
de tonnage
f. c.
0.50
0.50
0.40
0.40
Total
lfr.80
par
tonne
MARCHANDISES
transportées
par
WAGON COMPLET
de 4,000 kilos
et au-dessus
Quand l'expéditeur effectue lui-même le chargement et le des-
tinataire le déchargement de marchandises transportées par
wagons complets pour lesquels cette faculté est accordée, ils sont
exonérés des frais de manutention.
La Compagnie du chemin de fer de Hermès à Beaumont n'est
considérée, en raison de la voie étroite, que comme un corres-
pondant par terre; aussi fait-elle payer pour deux opérations dis-
tinctes le transbordement de ses wagons complets sur ceux de la
Compagnie du Nord, ou vice versa, à Hermès ou à Beaumont,
soit :
Déchargement des wagons Nord ou rechargement dans ces
wagons (tarif général de la Compagnie du Nord). ... 0 fr. 30
Déchargement des wagons H.-B. ou rechargement
dans ces wagons (tarif indiqué plus haut) 0 fr. 40
On a déjà eu occasion de dire dans le cours de cette étude que
des taxes élevées sont parfaitement justifiées quand il s'agit d'une
voie de transport courte et à trafic peu développé. On a donc eu
raison d'adopter sur la petite ligne de Hermès à Beaumont des
tarifs supérieurs aux tarifs habituels des grandes Compagnies.
Toutefois, ils eussent été excessifs pour les marchandises trans-
portées par grosses parties. Aussi a-t-on adopté, pour un certain
nombre de marchandises courantes transportées par wagons
A VOIE ÉTROITE 25d
/
complets de 5,000 kilos, des tarifs réduits à la base d'environ
0,10 c. par kilomètre.
Tels quels, ces tarifs paraissent donner au public toute satisfac-
tion, puisqu'ils ne soulèvent aucune réclamation. Il convient de
dire d'ailleurs que la diffusion des actions de la Compagnie dans
la région est très-importante au point de vue du règlement des
difficultés.
On ne reviendra pas sur les éléments du trafic qui ont été indi-
qués au commencement de cette note. Les marchandises par
wagons complets forment 90 p. 100 du tonnage total.
La ligne ayant moins de 40 kilomètres de développement, l'im-
pôt sur la grande vitesse y est perçu par abonnement, à la place et
à la voiture, conformément à la loi du 11 juillet 1879.
Les écritures sont celles de la Compagnie du Nord. Depuis
1883, la comptabilité est tenue par mois, ainsi que cela a lieu sur
les lignes du Pas-de-Calais; les avantages principaux procurés
ici par cette modification ont été :
1^ de diminuer la consommation des imprimés et, par suite, de
simplifier les opérations du contrôle des recettes ;
2** De donner lieu à moins de déplacements de la part de Tintéri-
maire, qui tient la comptabilité des stations gérées par des femmes.
Le service central de la Compagnie ne possède pas de personnel
affecté au contrôle des recettes. Toutes les pièces sont vérifiées par
le service du contrôle de la Compagnie du Nord, qui ne demande
aucune rémunération pour ce travail.
Les recettes sont centralisées par un caissier comptable qui fait
en même temps le service des titres et paye les coupons.
Les dépenses du service du mouvement et du trafic pour Tan-
née 1885 se résument comme suit :
Personnel 48.180 6o
Gares et stations {Frais de bureau, éclair. elcbauff.,elc. . 852 99
Divers 430 77
Service des trains, éclairage, chauffage, etc 3.406 65
Total 22.571 06
Soit par kilomètre de ligne 705 38
— de train 0 23
Chiffres extrêmement réduits.
256 CHEMINS DE FER 01NTÉKÊT LOCAL
Le service médical est gratuit pour les agents, sauf en ce qui
concerne les médicaments, qui sont à leurs frais.
Il n'y a pas de règle déterminée pour le traitement des agents
malades. On est dans Tusage de leur accorder leur salaire intégral
quand leur service habituel donne toute satisfaction, ce qui est le
cas général.
Des gratifications variant entre un mois et deux mois de traite-
ment peuvent être accordées en fin d'année.
Le personnel est, en somme, excellent et ne change pas.
Résultats généraux pendant Tannée 1885
Les dépenses totales de l'exploitation se récapitulent ainsi qu'il
suit :
Administration et direction 24.233 56
Voie et bâtiments 13.782 75
Traction et ateliers 34.685 07
Mouvement et trafic 22.571 06
Total 95.272 44
A ajouter : dépenses d'ordre et annexes, intérêts des
comptes courants, dépenses d'exercices clos .... 2.152 55
Dépenses totales 97.424 99
Les dépenses d'exploitation proprement dites sont par
kilomètre de ligne de 3.044 53
— de train de 0 97
Les recettes pour la même année sont :
1» Grande vitesse ... 96.297 11
2» Petite vitesse 49.003 45
30 Recettes diverses et subventions du Nord. . . 10.149 83
Total général des recettes 151.526 67
Ce qui fournit par kilomètre 4.735 21
Les recettes de la grande vitesse comprennent Timpôt, qui ne
saurait en être dégagé puisque celui-ci est perçu d'après le nombre
de voitures en circulation.
A VOIE ÉTROITE
Le produit net de 54.101 fr. 68 a été consacré :
1° pour une part de 38.515 28 au service des emprunts.
257
20
3»
4«
10.400 » à un dividende de 4 fr. par action.
1.000 9 à i'amorlisseraent.
4.186 40 au fonds de réserve qui atteint actuelle-
ment une somme de 52.858 83.
Total . . 54,101 68
On voit que la petite Compagnie du chemin de fer de Hermès à
Beaumont, bien qu'assez fortement éprouvée par la crise actuelle
et en particulier par la diminution considérable de la production
sucrière, fait honneur à ses engagements. Si les actionnaires,
presque tous petits cultivateurs, propriétaires, industriels ou
même paysans de la région, touchent un dividende de moins de
1 p. 100, ils s'en consolent par les multiples bénéfices indirects
qu'ils retirent de la présence du chemin de fer qu'ils ont créé.
RÉSULTATS COMPARATIFS DES RECETTES ET DES DÉPENSES PENDANT
les années 1881, 1882, 1883, 1884, 1885
M
• -<
M*
Sa
«0 ■
s
32
RÉS
RECETTES
TOTALM
ULTATS TOT
DÉPENSES
AUX
PRODUIT
HIT
RÉSULTA
KBCITTIl
da
rezpleiUUon
TS KILO!
ifmsis
HÉTRIQ.
PtONIT
KIT
§53
67
1
1881
140.218 37
94.353 78
45.864 59
4.385
2.931
1.454
1882
32
157.586 53
105.532 82
52.053 71
4.924
3.328
1.596
67
1883
32
179.640 76
118.837 37
60.803 39
5.613
3.752
1.861
67
1884
32
155.851 61
102.175 31
53.676 30
4.873
3.296
1.577
68
1885
1
32
151 .526 67
95.272 44
54.101 68
4.735
3.073
1.662
65
Dans les recettes totales et kilométriques sont comprises les
subventions de la Compagnie du Nord, pour voyageurs transitant
à Hermès et à fieaumont, soit une dizaine de mille francs par an.
17
CHAPITRE XVIII
LIGNE D'AN VIN A CALAIS (Pas-de-Calais)
Longueur 94 kilomètres
I. — ÉTABLISSEMENT DU CHEMIIV
Le chemin de fer à voie étroite d*Anvin à Calais a été con-
cédé en 1876 à M. Emile Level, avec une subvention totale de
1.188.600 francs, dont 250.000 francs à la charge de TÉtat.
' Ce chemin a été ouvert à l'exploitation en 1882.
La Compagnie d'Anvin à Calais a été patronnée parla Compagnie
du Nord, qui, sur un capital de 5,000 actions de 500 francs, a sous-
crit 3,900 actions, les 1,100 autres étant placées dans la région. La
Compagnie du Nord possède en outre toutes les obligations, soit
3.600.000 francs.
Le tracé de la ligne part de la gare d'Anvin, sur le chemin de
fer d'Arras à Étaples ; cette gare a été aménagée de manière à
permettre le transbordement facile des marchandises transitant du
chemin de fer du Nord sur le chemin à voie étroite ; les disposi-
tions adoptées ne diffèrent pas sensiblement de celles déjà rencon-
trées à Hermès et à Beaumont.
Le tracé passe avec des déclivités atteignant 15 millimètres par
mètre do la vallée de la Canche, où se trouve Anvin, dans celle
de la Lys où il rencontre l'important bourg de Fruges, puis de la
VOIE ÉTROITE .259
vallée de la Lys dans celle de TAa, rivière qu'il longe pendant
20 kilomètres, et sur laquelle se trouvent les villes de Fauquem-
bergue et de Lumbres. La gare de Lumbres est commune avec
la Compagnie du Nord (ligne de Boulogne à Saint-Omer); des
installations spéciales y ont été exécutées pour assurer les trans-
bordements.
En s'éloignant de Lumbres, le tracé franchit les collines de TAr-
tois avec des déclivités de 15 millimètres qui régnent sur une
dizaine de kilomètres de part et d'autre de la ligne de faite ; dans
cette partie du parcours, les rayons des courbes, qui sont très
nombreuses, descendent fréquemment à 150 et même à 130 mètres.
A partir de Tournehem, qui est au pied des collines de TArtois
du côté du Nord, le tracé est beaucoup moins accidenté. La ligne
dessert la région populeuse comprise entre Ardres, Guines et Saint-
Pierre-lès-Galais, où elle a un terminus provisoire, accolé à la
gare de la Compagnie du Nord, terminus qui doit être reporté ulté-
rieurement dans une gare commune avec cette Compagnie et
projetée entre Calais et Saint-Pierre-lès-Calais.
En raison, du très-faible trafic à attendre de la ligne, on aurait
pu porter les déclivités à 20 millimètres, comme on Ta fait sans
hésitation sur la ligne de Hermès à fieaumont ou même à 25 milli
mètres; on aurait pu de cette manière desservir beaucoup de
villages qu'on a dû laisser de côté, et on serait parvenu à réduire
très-sensiblement la longueur de la ligne.
Le rail pèse 20 kil. au mètre courant. Ce rail est à patin et en
fer ; il est de qualité médiocre. On le remplace par un rail de
20 kilos acier entre Saint-Pierre et Ardres, c'est-à-dire sur les
17 kilomètres qui constituent la banlieue de Calais, et où la circu-
lation est très-active ; au delà d'Ardres et jusqu'à Anvin, on a le
dessein de remplacer le rail de fer par un rail de 15 kilos acier,
poids qui parait faible. L'écartement des traverses est de O^'SS,
avec 10 traverses par rail de 8 mètres de longueur.
Le ballast n'a que 0°'35 d*épaisseur dont 0''15 seulement sous
la traverse, qui a 1°60 de longueur et 0"12 d'épaisseur.
La station de Fauquembergue (figure 24, pl.X) représente un type
auquel se ramènent toutes les stations. La station courante possède
en moins la voie de garage extérieure, la voie de cour et la trans-
260 CHEMINS DE FER D INTÉRÊT LOCAL
versale des plaques ; on éviterait aujourd'hui d'installer des plaques
et on s'arrangeraitde manière àfaire toutes manœuvres à la machine.
La halle et le quai à marchandises sont accolés au bâtiment des
voyageurs.
Les bâtiments sont très-bien construits et le logement du chef
de station est largement suffisant ; le système de portes de la halle
aux marchandises est à noter : au lieu do portes à charnières et
vantaux, on a installé des fermetures en tôle ondulée analogues à
celles employées pour les devantures des magasins de Paris.
Les stations ont été couvertes à la distance de 300 mètres par
un signal dont on eût pu aisément faire l'économie.
Les alimentation^ se font exclusivement au moyen du pulso-
mètre, dont les avantages et les inconvénients ont été précédem-
ment décrits.
Matériel roulant. — Voitures et wagom. — Le matériel roulant
se rapproche beaucoup du matériel de la ligne de Hermès à
fieaumont.
Les voitures â voyageurs qui sont les mêmes que sur cette ligne
sont par suite d'un type peu satisfaisant.
Mais on a fait ici un essai qui présente un grand intérêt.
Entre Saint-Pierre-lès-Calais et Guise, la circulation des voya-
geurs est très-importante, et on a dii porter sur ce parcours le
nombre des trains à 8 par jour dans chaque sens ; la composition
des trains en matériel devait en outre y être forcée.
On a dès lors été amené à construire de nouvelles voitures et on
a choisi le type de matériel américain : la voiture, de grande' lon^
gueur, montée sur deux trucks ou bogies, contient 55 places et
pèse 8 tonnes; elle est à couloir central, avec 2 places de chaque
côté du couloir, et dispose de deux larges plates-formes à l'avant
et â l'arrière. Ces voitures ont une très^grande stabilité, passent
facilement dans les courbes raides et le roulement en est très-
doux ; aussi le public a-t-il une préférence marquée pour les trois
bogies de 3* classe qui circulent dans les trains de banlieue ; ces
voitures sont envahies instantanément, et le public n'entre d^ns les
compartiments ordinaires que lorsque les voitures à bogies sont
remplies.
A VOIE ÉTROITE 261
L'essai a été tellement satisfaisant que la Société des Chemins
do fer économiques, que dirige M. Emile Level, a décidé d'armer
exclusivement en matériel américain, avec compartiments de
première et deuxième les 300 kilomètres de ligne à voie étroite
dont elle a obtenu la concession dans la Somme, à raison de
64,000 francs le kilomètre, ainsi que les autres lignes dont elle a
la concession.
Les voitures à bogies sont munies du frein à vis système Stil-
mant, de même que les voitures ordinaires et les fourgons.
Le matériel de petite vitesse est un peu plus faible que celui de
Hermès à Beaumont ; il porte seulement 8 tonnes ; la roideur des
courbes présente ici un inconvénient qui ne se rencontre pas sur
Hermès à Beaumont; les wagons couverts manquent de stabilité,
en raison de la largeur qu'on a dû leur donner pour pouvoir y
embarquer des bestiaux en travers.
Les vagons ne possèdent pas d'autre frein que le frein à main.
Les locomotives sont exactement celles de Hermès à Beaumont ;
elles ont coûté 32,000 francs l'une.
L'armature en matériel roulant est de :
7 voitures mixtes à frein (!'• et 2') :
5 voitures mixtes sans frein (1", 2* et 3') ;
20 voitures de 3* classe;
3 voitures à bogies;
Soit 35 voitures constituant une armature kilométrique
de 0.372.
10 wagons à bagages.
L'armature en wagons est de :
58 wagons couverts ;
50 wagons-tombereaux ;
32 plates-formes ;
10 wagons à bois :
Soit 150 wagons ou 1,6 par kilomètre, proportion largement
suffisante en raison du très-faible trafic.
Enfin, il y a encore 30 wagons à ballast et 9 locomotives; l'ar-
mature en locomotives ressort ainsi à un peu moins de 0,1 par
kilomètre.
262
CHEMINS DE FER D INTÉRÊT LOCAL
Ateliers. — Lumbres possède des ateliers de réparations suffi-
sants pour l'entretien courant du matériel.
Les éléments constitutifs de la ligne d'Anvin à Calais sont
résumés dans les tableaux ci-après :
1» éTABLlSSEMENT DE LA PLATE-FORME
Largeur de la voie entre les rails. 1 mètre
Rayon minimum des courbes 130 mètres
Maximum des déclivités 0,016
Surface moyenne des terrains par kilomètre 1 hectare 25
Longueur de la plate-forme de terrassement < ,.'.'' ^ «^
^ ^ (remblai. . 3™70
Nombre moyen de mètres cubes de terrassement par
mètre courant 7™ 350
2» ÉLÉMENTS DE LA VOOS
I Longueur du rail 8"^
Poids par mètre courant 20^
Prix de la tonne à l'usine .... 160 francs
/Longueur i"70
Traverses en sapin pour lesl Margeur 0,170
alignements ^Épaisseur 0,120
en chêne pour les courbes Jp^.^ ^^^^^ ^.^^^ ^^^^^^^^ 2 fr. 15
Prix d'un changement de voie 1.000 00
Prix d'une plaque tournante 1*150 00
— pont à bascule 1.580 00
— pont tournant pour locomotives 5.000 00
— poteau kilométrique 10 00
— barrière économique y *^ ^
— disque à distance 500 00
— grue de 5,000 k" 2.850 00
— alimentation au pulsomètre 3.500 00
— d'un pulsomètre 1.400 00
3» BATIMENTS
Prix d'une maison de halte 4.300 00
Prix des bâtiments d'une station de village, avec halle
à marchandises 9.090 00
Prix des bâtiments d'une station de chef-lieu de canton 14.890 00
^ des ateliers et dépôt de Lumbres. . 50.000 00
A VOIE ÉTROITE
^ MATKRTEL ROULANT
8 locomotives de 18 t. 1/2 à vide l'une
3 voitures à bogies (56 places)
7 voitures mixtes l'* et 2» classes (22 places) Tune. . .
5 id. 1", 2* et 3« classes (19 places) Tune •
20 voitures de Z^ classe (24 places)
8 fourgons à bagages portant 8,000 kilos
60 wagons couverts —
50 wagons-tombereaux —
32 wagons-plates-formes —
10 wagons à bois —
30 wagons à ballast —
Machines et outillage des ateliers de Lumbres
5^ DÉPENSES DE PREMIER ÉTABUSSEMENT
263
32.375 00
8.000 00
5.725 00
5.000 00
3.650 00
3.650 00
2.350 00
2.000 00
1.575 00
1.700 00
1.123 00
60.000 00
POUR LA LIGNE
PAR
Frais généraux (constitution de la Société,
ENTIÈRE
KILOMETRE
études, personnel, intérêt des capitaux) . •
1.158.235
»
12.321^8
Acquisition des terrains
1.815.980
»
19.318 93
Terrassements et ouvrages d'art. Plantations
1.170.046
»
12.447 29
Bâtiments des stations, haltes et ateliers. .
373.250
»
3.970 74
Matériel de voie et matériel fixe. Pose de
voie. Balastage. Télégraphe
1.830.424
)>
19.472 59
Matériel remorqueur et roulant
806.040
»
8.574 89
Mobilier •
44.625
»
474 73
Totaux
7.198.600
9
76.580 85
6» RESSOURCES
Capital social : 5,000 actions de 500 francs ^ 2.500.000 00
Emprunt 3.600 000 00
Subvention de lÉtat 250.000 00 J
— du département 800.000 00? 1.188.600 00
— des communes 138.800 00 )
Total 7.288.600 00
IL— EXPLOITATION
Administration et Direction
L'administration de la ligne d'Anvin à Calais est dirigée par
264 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
M. Emile Level, qui en à confié Texploitation au personnel déjà
chargé des lignes d'intérêt local à voie normale du Pai-de-Galais
et de TAisne, précédemment décrites.
Gomme pour ces lignes, le service de la voie et celui delà trac-
tion sont assurés sous les ordres d'un ingénieur résidant à Arras ;
le mouvement et le trafic sont de même sous la direction de Tin-
génieur, chef de Texploitation des lignes à voie normale.
Le même personnel de bureaux sert à la ligne d'Anvin à Calais
comme aux autres lignes.
Voie et Bâtiments
Un conducteur est à la tète de ce service ; il est assisté de deux
piqueurs.
Les brigades sont réduites à 3 hommes dont un chef cantonnier,
pour des cantons variant de 6 à 9 kilomètres de parcours.
Tous les cantonniers sont logés, et leurs femmes assurent le
service des barrières.
Le traitement des cantonniers varie de 85 à 95 fr. par mois.
Celui des cantonniers de 60 à 70 —
Celui des gardes-barrières ... de 15 à 20 —
La construction du chemin d'Anvin à Calais a été mal faite:
aussi y est-on déjà en grands travaux d'entretien ; on remplace
* les traverses, ainsi que les rails de fer, par des rails d'acier : la
substitution a déjà porté sur 10 kilomètres ; elle se fait du reste au
fur et à mesure, en imputant la dépense au compte du premier
établissement.
Les dépenses de voie et bâtiments pour Tannée 1885 s'élèvent
à 53,696 fr. 52 pour l'entretien proprement dit, renouvellement
non compris, ce qui fournit par kilomètre un chiffre de 571 fr. 24.
Traction
Le service de la traction relève d'un inspecteur de traction,
placé sous les ordres d'un ingénieur de la voie et de la traction, et
qui a, de même que celui-ci, la charge des lignes d'intérêt local à
voie normale du Pas-de-Calais et de l'Aisne ; de plus, un chef d'à-
A VOIE ÉTROITE 265
telier, dirigeant Tatelier de Lumbres, a autorité sur les méca-
niciens.
Les machines sont rattachées aux dépôts de Guines, Tournehem
et Frugcs: le service exige 5 machines en roulement, 12 méca-
niciens et chauffeurs, dont 2 pour les remplacements, pour un par-
cours journalier de 686 kilomètres.
Le combustible se compose d'un mélange de tout-venant à 16 fr.
la tonne et de briquettes anglaises à 22 fr.
Les règles applicables aux primes et retenues sont les mêmes
sur la ligne d'Anvin à Calais que sur les lignes à voie normale du
Pas-de-Calais et de l'Aisne.
Cependant les allocations de combustible sont, par kilomètre et
sans tenir compte du nombre de véhicules, de :
7 kilos 400 l'été;
8 kilos 200 l'hiver.
Ces consommations, très-élevées, se justifient par la longueur
des rampes.
Les charges remorquées varient suivant le profil de 28 unités
Nord à 48 unités, une voiture à voyageurs, un fourgon ou un wagon
vide représentant 2 unités, une voiture à bogie ou un wagon
chargé à moins de 5,000 kilos, 3 unités et un wagon chargé à plus
de 5,000 kilos, 4 unités.
Les dépenses de traction pour Tannée 1885 s'élèvent en totalité
à 69,651 fr. 76, soit, par kilomètre, à 740 fr. 98, et par kilomètre
de train à 0 fr. 27. — Ce chiffre réduit est justifié par l'âge récent
du matériel qui n'a pas encore donné lieu à grosses réparations;
la dépense de charbon est au contraire importante.
Mouvement et Trafic
Le chef de l'exploitation a, comme il a été dit, ses bureaux à Arras.
Un inspecteur résidant à Guines est chargé du service actif; il
est aidé pour le travail de bureau par un conducteur intérimaire.
Le service des gares et stations ne présente pas de différence avec
ce qui a été dit déjà à propos des lignes à voie normale du Pas-
de-Calais et de l'Aisne.
266 CHEMmS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Il y a lieu' cependant de noter Temploi du téléphone entre Guines
et Saint-Pierre-lès-Calais, c'est-à-dire sur 10 kilomètres, avec cou-
pure à la halte intermédiaire de Fontinettes, qui peut, soit être
sur fil omnibus, soit donner communication directe aux deux
postes extrêmes.
On a eu occasion de dire déjà que le télégraphe Bréguet ne peut
donner aucune garantie de plus que le téléphone, et qu'il présen-
tait en outre sur ce dernier un grand désavantage sous le rapport
de la rapidité, de la simplicité et de l'économie.
L'essai fait entre Saint-Pierre et Fruges a décidé la Société des
chemins de fer économiques à supprimer le télégraphe sur la ligne
de Yalmondois à Epiais-Rhus, sur le réseau départemental de la
Somme, etc., etc..
Les haltes sont gérées par des femmes ; elles sont formées d'une
simple guérite, et les billets qui y sont délivrés sont des billets à
jarretière.
Service des trains. — Le personnel des trains est composé de
5 brigades de conducteurs, chaque brigade comprenant un chef de
train et un garde-frein graisseur.
Le service des trains comporte :
8 trains dans chaque sens entre St-Pierre-lès-Galais et Guines.
5 — Guines et Ardres.
4 — Ardres et Tournehem.
2 — Tournehem et Lumbres.
3 — Lumbres et Anvin.
On a eu jusqu'à l'T trains dans chaque sens entre Guines et
Saint-Pierre, les jours do fêtes de Guines.
La vitesse de marche des trains varie de 22 à 35 kilomètres à
l'heure ; la vitesse commerciale du train le plus rapide n'excède
pas 19 kilomètres, ce qui est assez peu satisfaisant.
La composition des trains de Calais à Guines, en voitures à
voyageurs est normalement d'un fourgon, de deux voitures mixtes et
de deux bogies, l'un des bogies se trouvant en arrière avec frein
desservi.
Un bogie continue ordinairement dans les trains de Guines
A VOIE ÉTROITE 267
à Tournehem. De Touruehem à Anvin la composition est réduite
à une voiture mixte et une troisième.
Le trafic marchandises est extrêmement réduit ; aussi les trains
ne sont-ils qu'exceptionnellement à charge complète. Il n'y avait
aucune raison pour se limiter à des rampes de 15 ou 16™"*.
Le parcours des trains de toute nature s'est élevé pour 1885 au
total de 250,204.
La répartition du matériel est assurée par l'inspecteur qui est
en même temps agent spécial de la voie unique.
Gares de jonction. — Les gares de jonction d' Anvin et de Lum*
bres sont communes, le service y est fait par la Compagnie du
Nord, sauf en ce qui concerne les ateliers de Lumbres, qui appar-
tiennent à la Compagnie locale.
Les installations prévues pour assurer les transbordements à
Anvin et à Lumbres sont assez compliquées et servent peu : une
voie de 1 mètre de largeur surhaussée permet d'effectuer les trans-
bordements des wagons de la Compagnie locale dans ceux de la
grande Compagnie placés sur une voie en contrebas ; de même une
voie normale surhaussée commandant une voie étroite surbaissée
permet le transbordement des grosses marchandises de la grande
Compagnie sur la petite ; une batterie de plaques tournantes a été
armée de manière à assurer le tournage des wagons de la grande
comme de la petite ligne. Il y a de plus un quai découvert de trans-
bordement.
Toutes ces installations fonctionnent assez mal et sont peu uti-
lisées.
Les dépenses de communauté sont rép&rties entre les deux
Compagnies au prorata du nombre des trains de chacune.
Service commercial. — Ce service est presque exclusivement
dirigé des bureaux centraux d'Arras.
Les tarifs de grande vitesse présentent peu de particularités :
Pour les ouvriers, il existe un tarif de billets de troisième classe
réduit à 0 fr. 25 entre Guines et Calais.
Des billets d'aller et retour, comportant 25 p. 100 de réduction
sur le double des billets simples sont délivrés de toute gare à toute
268 CHEBIINS DE FEft D'INTÉRÊT LOCAL
gare ; pour un parcours excédant 25 kilomètres, la durée de vali-
dité est de 18 heures.
Les tarifs de petite vitesse sont à base élevée ; les marchandises
sont divisées en 4 classes dont les prix d'application sont respec-
tivement de 25., 20, 16 et 12 centimes par kilomètre.
Des tarifs spéciaux applicables aux céréales, betteraves et ma-
tériaux de construction, ont des bases plus réduites.
Enfin des tarifs communs existent avec le Nord pour le transport
delà houille et des papiers d'emballage.
Les frais accessoires sont exactement les mêmes que sur la ligne
de Hernes à fieaumont, et les conditions d'application sont celles
de la Compagnie du Nord, hormis en ce qui concerne les frais
accessoires.
Trafic. — Entre Calais etGuines, le trafic est important, et forme
plus de la moitié des recettes totales de la ligne : il dépasse
15,000 francs par kilomètre, bien que Guines soit en outre reliée
à Calais par un tramway qui avait été concédé antérieurement à la
ligne d'Anvin à Calais, et qui n'eût pas été construit si le cahier
des charges n'y eût forcé le concessionnaire.
En outre du mouvement des voyageurs, très-actif en raison du
grand nombre d'ouvriers qui y habitent, la banlieue de Calais
donne lieu à un mouvement important de marchandises de faible
poids, mais de très-grande valeur, comme les tulles par exemple,
dont la plus grande partie est fabriquée à la campagne.
Les autres transports importants de la ligne d'Anvin à Calais
consistent en :
1® Phosphates naturels de Fauquembergue, destinés à l'agri-
culture et qui représentent un mouvement de 5 à 7 wagons par
jour;
2"* Briques et ciments ;
3"* Pailles pour pâte à papier.
Une grande partie des phosphates et des pailles sont dirigés sur
TAngle terre par la voie de Lumbres et Boulogne, n'accomplissant
sur les rails de la ligne à voie étroite qu'un parcours réduit.
L'exécution de la gare centrale commune de Calais-Saiut-Pierre,
A VOIE ÉTROITE 269
permettra à la Compagnie locale de conserver ces transports jus-
qu'à Calais, qui deviendra le port d'embarquement.
La comptabilité des recettes est mensuelle.
Les dépenses du mouvement et du service commercial pour
Tannée 1885 se résument ainsi :
Service central. 4.159 20
Service des gares 64.860 96
Service des trains 13.277 44
Total 82.297 60
Soit par kiiomèlre 832 95
Résultats généraux
Les dépenses d'exploitation se résument en définitive pour Tan-
née 1885, aux chiffres suivants:
Administration 40.033 14
Voie etbâtimenls . 53.696 52
Traction 69.651 76
Mouvement et traQc 82.297 60
Total 247.162 02
Soit par kilomètre de ligne 2.629 38
Et par kilomètre de train 0 92
Il convient de rappeler que ces chiffres très-réduits ont besoin
d'un correctif : le renouvellement des traverses et le remplacement
des rails de fer par des rails d'acier est en effet porté au compte
des travaux neufs ; en outre, le matériel est encore trop récent
pour qu'il y ait lieu à grosses réparations. Quoi qu'il en soit,
Texploitation de la ligne d'Anvin à Calais est incontestablement
très-économique.
Les receltes en 1885 sont les suivantes 1
10 Grande vitesse (impôt déduit) 172.257 06
2» Petite vitesse 62.815 25
30 Recettes diverses * 12.710 3.')
Total 247.782 66
Soit par kiiomètrei ...«.*««..« 2.635 98
270
CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Résultats comparatifs des recettes et dépenses pour les années
1882, 1883, 1884 et 1886
S —
m
« M
e <B a
l-s-
114
103
100
w
1882
1883
1884
1885
il
S
M
11
94
94
94
RÉSULTATS TOTAUX
RECETTES
238.879 80
258.684 94
247.782.66
DÉPENSES
273.819 15
267.820 60
247.162 02
PRODUIT
ITBT
—34.939 35
— 9.135 66
H- 620 64
RÉSULTATS KILOMÉTRIQ.
RECETTES
2.541
2.752
2.636
ifpnsEs
2.886
2.849
2.629
rioiciT
HIT
—345
— 97
+ 7
I
CHAPITRE XIX
COMPAGNIE DES GHEIONS DE FER DÉPARTEMENTAUX
RÉSEAU DINDRE-ET-LOIRE
Ligne de Port-Boulet à Ghftteaurenault . . . 1031dl.
— Grand-PressignyàEsvresparLigueil 51 ) „
- LigueUàMontrôsor parlioohes. . . 41 jcoMCTmocnoîi
Total. . . . 195 kil.
I. » ÉTABLISSEMENT DU CMEMIIV
Le réseau départemental d'Indre-et-Loire est une conception
désastreuse; il a beaucoup d'analogie avec celui de la Gironde.
Dans le but de doter d'un chemin de fer plusieurs cantons qui
en étaient dépourvus, le Conseil général a eu l'idée d'établir une
première ligne concentrique, de Port-Boulet à Châteaurenault, dé-
crivant 1/3 de cercle le long de la limite nord et ouest du dépar-
tement qui a été concédé pour 75 ans par une loi du 26 septembre
272 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
1862. Le capital du premier établissement était fixé à forfait à
50,000 francs par kilomètre, y compris le matériel roulant ; en cas
d'insuffisance du produit brut pour couvrir les dépenses d'exploi
tation et les charges à 5 p. 100 du capital du premier établissement,
le département s'engageait à subvenir aux 9/10 de Tinsuffisance,
avec le concours de TEtat dans les limites déterminées par la loi
du 11 juin 1880. Les frais d'exploitation étaient fixés à forfait à
2,000 francs par kilomètre, plus 3/10 de la recette brute, impôts
déduits. La subvention annuelle de l'Etat était limitée à un maxi-
mum de 131,000 francs. Les tarifs étaient fixés aux chiffres trop
bas de 10,7 et 5 cent. 5 pour les voyageurs, et de 16, 14, 10 et
8. centimes pour les marchandises avec tarif de 6 centimes par
wagon complet.
Le cahier des charges limitait les déclivités à 15 ""par mètre.
Cette concession fut suivie en 1885 par celle :
V D'une ligne du Grand-Pressigny à Esvres, également concen-
trique et suivant la limite sud-est du département ;
2"" D'un rayon de Ligueil à Esvres, reliant la précédente au
chef-lieu du département par la ligne de Tours à Montluçon.
La dépense de construction était fixée :
Pour Ligueil à Montrésor à 65,215 francs par kilomètre.
Pour le Grand-Pressigny à Esvres à 59,300 francs par kilo-
mètre*
La durée de concession était portée à 99 ans et la formule
d'exploitation à 2000 + -y-, formule qui, ainsi qu'on a déjà eu
Toccasion de le dire, offre l'inconvénient d'intéresser peu le
concessionnaire à développer son trafic; le département devait
rembourser, sans déduction, les insuffisances entre les charges
d'établissement et d'exploitation et le produit brut.
Les déclivités limites de ces deux lignes étaient portées à 25 ""
par le cahier des charges; sage disposition, car^ en raison de
l'extrême faiblesse du trafic à attendre en général des lignes dépar-
tementales, les machines ont presque toujours plus de puissance
que ce trafic n'en nécessite, même sur de très-fortes rampes.
A VOIE ÉTROITE 273
Le réseau Sud qui est en construction, n'a aucun lien avec le
réseau Nord du département, même à Tétat de projet.
Au lieu de créer des lignes de ceinture, qui ne sont appelées à
desservir aucun intérêt sérieux, le département d'Indre-et-Loire
eût mieux fait de suivre l'exemple de son voisin, le département
de la Sarthe, qui, après avoir fait avec la ligne de Mamers à
Saint-Galais la fâcheuse expérience d'une ligne du même genre,
s'est décidé en 1880 à ne plus construire que des rayons conver-
gents vers le cheMieu du département, où sont concentrés les
intérêts véritables.
Le coût réel de premier établissement de la ligne de Port-
Boulet à Gbâteaureuault, bien que non encore complètement arrêté
dépassera certainement 60,000 francs par kilomètre, soit de 10,000
francs le chiffre prévu par l'acte de concession ; c'est donc une
perle d*au moins un million pour le concessionnaire.
La section de Port-Boulet àNeuillé a été ouverte à l'exploitation
le 10 mars 1885; (^elle de Neuillé à Ghàteaurenault le T' juillet
1883.
Les recettes brutes ne dépassent pas depuis l'ouverture 1,200 fr.
par kilomètre.
On voit que l'affaire n'a pas été meilleure pour le département
que pour la Compagnie concessionnaire.
La Compagnie des chemins de fer départementaux, qui s'était
présentée à l'adjudication concurremment avec la Société Générale
des chemins de fer économiques, n'a pris cette concession à aussi
bas prix qu'à titre d'affaire de début et pour se faire connaître.
Une certaine jalousie régnait alors entre ces deux Sociétés, ap-
puyées la première par une Société financière belge et la
seconde par le Comptoir d'escompte. Elles ont cessé de se
faire la guerre, en reconnaissant qu'il y avait en prévision
pour chacune d'elles plus de concessions qu'elle n'en pouvait
prendre.
Aussi, le réseau Sud du département d'Indre-et-Loire a-t-il
été concédé à des conditions plus avantageuses pour le cons-
tructeur.
18
27i
CHEMINS DE FER DINTËRËT LOCAL
Les diverses concessions qu'à obtenues depuis sa constilution
la Compagaie des chemins de fer départementaux sont les sui-
vanles:
i
iii
-,-+
S 5 i
sis
* 1
||-|
A VOIE ÉTROITE 275
De plus, un décret du 17 mars 1887 a approuvé un trailé passé
entre la Compagnie Franco- Algérienne et la Compagnie des che-
mins de fer départementaux, en vue d'assurer le concours de cette
dernière pour la construction de la ligne de Mostaganem à Tiaret.
Il convient de rappeler que la Compagnie des chemins de fer
départementaux a obtenu les mêmes fapilités financières que la
Société des chemins de fer économiques, c'est-à-dire qu'elle a été
autorisée àn'aiïecter son capital-actions à chacune des lignes que
pendant la période de construction, ce capital pouvant être
remplacé par un capital-obligations correspondant dès la mise en
exploitation, et reporté sur de nouvelles lignes.
Description delà ligne de Port-Boulet à Ghâteaorenault. — On
ne s'occupera dans tout ce qui va suivre que du réseau Nord, la
construction du réseau Sud étant en cours.
La ligne ne suit aucune direction naturelle, c'est-à-dire ne
dessert aucune vallée. Le département s'est imposé pour règle de
desservir le plus de villages possibles ; mais la solution qu*il a
adoptée dans bien des cas va à rencontre de son but : un chemin
appelé à desservir des intérêts secondaires, comme l'est un chemin
de fer départemental, doit aller solliciter ces intérêts au point
même où ils se trouvent, c'est-à-dire dans l'intérieur des localités
elles-mêmes; mais si cette solution eût été adoptée en principe, on
eût été amené obligatoirement à laisser do côté d'autres villages ;
pour éviter des réclamations qu'eût le plus souvent provoquées
une jalousie de clocher plutôt que des intérêts réels, on a préféré
établir les stations à mi-distance entre deux localités, d'où résulte
qu'aucune d'elles n'est desservie; il n'y a rien de changé à la situa,
tion antérieure à la création du chemin de fer ; les paysans en font
peu ou point usage, d'autant mieux que leurs intérêts les appellent
au centre du département et non à la périphérie.
Les déclivités ont été limitées à 15 i]^illim., ainsi qu'il a été dit ;
c'est là une condition malheureuse qui a obligé le constructeur à
ouvrir des tranchées importantes, dont l'une de 1.200 mètres de
longueur, dans des terrains argileux qui ont nécessité des travaux
de revêtement très importants (Château-la- Vallière).
La rampe de 20 à 23 millim. eût permis d'éviter des terrasse-
s
276 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
ments, qui sont relativement considérables, et par suite d'obtenir
une voie stable et saine, ce qui n'est pas; les courbes en pleine
voie ne sont généralement pas inférieures à 450 mètres de rayon,
et ne descendent qu'exceptionnellement à 100 mètres.
L'expérience du réseau Nord a servi pour le réseau Sud, où les
rampes ont été portées à 20 et 2S mill., et où les stations sont en
général établies à proximité immédiate des localités à desservir.
Les rayons des courbes en pleine voie ont été fixés au minimum
de 200 mètres.
Le rail, à patin et en acier, pèse 15 kilog. le mètre courant. Ce
rail est trop faible, principalement dans les changements. La
Compagnie des chemins de fer départementaux l'a reconnu et a
adopté pour ses concessions ultérieures, le rail d'acier de 18 kilog.
qui est le type véritable de ces chemins à très-faible trafic.
Le rail a 8 mètres de longueur et porte sur 10 traverses,
écartées de 0 m. 89 d'axe en axe, les traverses extrêmes étant à
0 m. 80 des joints. Les traverses sont en pin créosote dans les
alignements droits où le sous-sol est bon; mais les traverses sont
en chêne aux joints et dans les courbes.
La traverse de pin a coûté 2 fr. 75 ;
La traverse de chêne a coûté 3 fr. 25 ;
Les dimensions sont de : ~q-^-^^f^^
Le balast a 0 m. 35 d'épaisseur ; le rail ayant 0 m. 08 de hau-
teur, il reste normalement 0 m. 18 d'épaisseur de balast sous la
traverse ; cette dernière épaisseur a été portée à 0 m. 40 ou 0 m. 50
par des encoffrements dans les tranchées argileuses.
Le prix de revient de la voie proprement dite, y compris pose
et ballastage, peut être évalué dans ces conditions à 20,000 fr. par
kilomètre en raison du bas prix actuels des fers.
Les passages à niveau sont garnis de contre-rails : 6 seulement
sont gardés, dont 3 avec maison de garde, les autres avec guérite.
Les stations, au nombre 'de 21, sont distantes de 5 kilomètres ;
le type adopté pour les voies est représenté (fig. 25, pi. X) par le
plan de la station de Channay-Courcelles ; ce type est suffisant, il
permet le croisement des trains dans toutes les stations ; le bâti-
ment des voyageurs et les quai et halle à marchandises sont accolés.
A VOIE ÉTROITE 277
Le bâtiment est médiocrement satisfaisant, il est trop réduit et
peu habitable; on a résolu d'adopter des dimensions plus impor-
tantes pour les bâtiments du réseau sud.
En raison du trës-faible trafic do détail, les halles accolées au
bâtiment des voyageurs servent généralement d'annexé au loge-
ment du chef de station, qui s'en sert comme de cuisine et
débarras.
Les gares de jonction de Port-Boulet, Neuillé et Ghâteaure-
nault avec la Compagie d'Orléans, celle de Château-la- Valli ère
avec les chemins de fer de l'Etat, sont des gares séparées et reliées
par des voies et quais de transbordement. Il eût été préférable
pour le public et plus économique pour la Compagnie départe-
mentale d'avoir la communauté pour le service des voyageurs,
ainsi que cela a lieu aux points de jonction des lignes de Hermès à
Beaumont et d'Anvin à Calais avec la Compagnie du Nord; mais
la Compagnie d'Orléans s'est montrée si peu favorable à la Com-
pagnie départementale que force a été à cette dernière de recourir
à ses propres moyens ; quant à la gare de Château-la-Vallière,
(grande ligne), elle n'a été ouverte au service des chemins de fer
de l'Etat que près de 18 mois après la mise en exploitation de la
ligne de Port-Boulet à Neuillé, et la Compagnie locale ne pouvait
attendre cette ouverture.
La mauvaise solution adoptée pour les gares de jonction n'est
donc pas imputable à la Compagnie départementale.
Les stations courantes sont signalées à 100 mètres de distance
de la pointe d* aiguille par des signaux fixes de ralentissement
peints en vert. Ces signaux n'ont aucune utilité.
Les alimentations sont assurées :
1° A Neuillé par la pompe de la machine fixe qui fait le service
des ateliers de réparation ;
2° A Port-Boulet, Savigné, Souvigné, Marray, Le Sentier et
Chàteaurenault, par une pompe à main, avec réservoir de 12 mètres
cubes ; les réservoirs sont remplis par les chefs de station moyen-
nant une faible rétribution que leur alloue le service de la trac-
tion.
Matériel roulant. — Voitures et wagons, — Les voitures et
b
278 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
wagons ont été construits par les ateliers de Marly ( Valenciennes).
Les voitures sont à compartiments.
Les compartiments de !'• classe sont à 3 places par banquette,
ceux de 2* et 3* à 4 places ; on y est bien assis, ce qui n'a pas lieu
au moins pour la 1'*" et la seconde classes dans les voitures des
lignes de Hermès à Beaumont ou d*Anvin à Calais.
Les six voitures mixtes 1" et 2* contiennent 3 compartiments,
soit 22 places et pèsent 4,380 kilog.; les 3", 4 compartiments, soit
32 places et pèsent 3,700 kilog.
L'écartement des essieux est de 2ra. 10 pour tout le matériel de
grande ou de petite vitesse.
Le matériel de grande vitesse est complété par une voiture à
bogie analogue à celles de la ligne d'Anvin à Calais, qui sert en
cas d'affluence et dont le public se montre très-satisfait.
Le matériel G. V., dont la proportion est de 0,2 par kilomètre,
est insuffisant dans les cas de mouvement important de voyageurs;
on y supplée à Taide des wagons couverts, où le public doit se
tenir debout, ce qui suscite à bon droit ses réclamations.
Le département a commis une erreur en imposant au conces-
sionnaire le choix du matériel à compartiments pour le réseau
nord ; la Compagnie avait déjà commandé du matériel à couloir
et a dû retirer sa commande en présence de Tinsistance du dépar-
tement ; le matériel à couloir, et en particulier les voitures bogies,
suspendues sur deux trains articulés, constituent le matériel le
mieux approprié à de faibles trajets, et à des voies parfois mal
assises et à courbes prononcées pour lesquelles un empattement
même réduit à 2 mètres ou 1 m. 80 est encore trop important, et
occasionne Tusure rapide des bandages et par suite des réactions
désagréables pour les voyageurs, et dangereuses pour la stabilité
de la voie.
Le département d'Indre-et-Loire a reconnu son erreur, et le
réseau sud sera doté de matériel à couloir longitudinal.
La ligne de Port-Boulet à Châteaurenault possède 6 fourgons
pesant 3,700 kilog. et munis de freins à vis dont aucune voiture
ne dispose.
Le matériel de petite vitesse se compose de :
A VOIE ÉTROITE 279
35 wagons-tombereaux du poids de 2,900 kilog.;
66 plates-formes de 1,800 kilog. de tare, dont 20 à frein et
à traverse mobile pour le transport des bois de lon-
gueur.
13 wagons couverts pesant 3,230 kilogr.
Total: 114 ou 1 w,l par kilomètre, ce qui suffit largement en
raison du très-faible trafic.
Ce matériel porte uniformément une charge de 8 tonnes.
Locomotives, — Les 8 machines-tenders sont du même type à
3 essieux couplés et pesant 12 t. o à vide, et 15 tonnes en charge ;
5 d'entre elles ont été construites par les ateliers de Gouillet, et
3 par ceux de Saint-Léonard (Belgique).
La Compagnie des chemins de fer départementaux commande
aujourd'hui tout son matériel en France, mais ne pouvait le faire
il y a quelques années, où on construisait dans ce pays fort peu de
locomotives pour voies de 1 mètre et à des prix très-élevés.
Le diamètre des roues de ces machines est de 0 m. 80, ce qui
est trop faible; leur empattement est de 2 m. 40. On a commis
Terreur de prévoir pour le matériel roulant des plaques tournantes
qui ont un diamètre tout juste suffisant pour Tempattement de
2 m. 10 de ce matériel; d'où résulte qu'on ne peut les employer
pour le tournage des machines ; et comme on n'a pas construit de
plaques spéciales pour les machines, celles-ci ne sont jamais tour-
nées, et doivent marcher tender en avant sur la moitié de leur
parcours.
Ces machines présentent un double inconvénient assez grave :
le faible diamètre des roues et l'ensemble des organes ne permet
pas de dépasser la vitesse limite de 30 kilomètres à l'heure, ce qui
est insuffisant; d'autre part, le mécanisme, très-bas, n'est pas
protégé contre le sable tenu qui constitue le ballast sur une grande
partie du parcours ; aussi l'usure est-elle très-rapide.
On s'est décidé à choisir pour le réseau sud un type de machine
plus puissant.
Les conditions de la locomotive de 12 t. 5 sont les suivantes :
280 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Diamètre des cylindres 270 mm.
Course des pistons 360
Timbre de la chaudière 10 kilog.
Surface de chauffe totale 36 mètres.
Diamètre des roues motrices au contact. 0,80
Charge par essieu (machine en charge). Ti tonnes.
Ces locomotives, de même que la plupart des locomotives cons-
truites en Belgique, ont des grilles suffisantes pour pouvoir
brûler du charbon tout-venant très-menu.
Elles remorquent en moyenne de 6 <à 8 wagons chargés, soit
70 tonnes au maximum ; le cahier des charges limite la longueur
des trains à 60 mètres, machine comprise.
Ateliers de réparations. — Les ateliers de Neuillé-Pont-Pierre
sont outillés de manière à assurer les réparations courantes, mais
non les grosses réparations, ou le tournage des roues, qui ont lieu
à Tours ou au Mans.
L'outillage se compose d'un tour parallèle et d'une perceuse,
actionnés par une machine de* deux chevaux qui sert également à
Talimentation d'un réservoir de 30 mètres cubes ; une forge et
4 étaux complètent cette installation simple ; 2 ajusteurs, 1 forge-
ron et 1 aide forment le personnel de l'atelier.
En résumé, la ligne de Port-Boulet à Chàteaurenault constitue
au point de vue du premier établissement, pour la Compagnie des
chemins de fer départementaux une entreprise désastreuse, dans
laquelle le prix forfaitaire est loin de couvrir la dépense réelle.
Indépendamment de la conception du chemin lui-même,
quelques erreurs ont été commises dans l'établissement et Texpé-
rience paraît avoir profité aussi bien au département qu'au conces-
sionnaire.
En raison des travaux importants qu'a nécessités la construction,
on ne peut que trouver très réduit le chiffre réel de l'établissement
du chemin.
k
A VOIE ÉTROITE 281
II. ~ EXPLOITATIO.li
Administration et Direction
L'administration de ]a Compagnie des chemins de fer départe-
mentaux a son siège à Paris.
Elle s'occupe d'affaires multiples, ainsi qu'on Ta vu plus haut,
et n'a pas de personnel supérieur tout spécialement, affecté à l'ex-
ploitation du chemin de Port-Boulet à Ghàteaurenault.
M. Zens, directeur de la Compagnie, assisté d'un ingénieur en
chef, règle la marche du service de cette ligne, en même temps
qu'il poursuit et la concession et la construction de lignes nou-
velles.
Le contrôle des recettes ainsi que la comptabilité sont centra-
lisés à Paris, auprès du directeur.
En raison du peu de temps pendant lequel la ligne a été exploitée,
il n'a pas été possible de réunir des chiffres précis relativement aux
dépenses d'exploitation; d'autre part, il est assez difficile do fixer
le prorata des frais généraux d'une ligne qui ne constitue qu'une
part minime des affaires suivies par le conseil d'administration et
par le service central.
Aussi se bornera-t-on, comme on l'a fait déjà pour les lignes de
la Gironde {Société générale des chemins de fer économiques), à
relater les faits intéressants de l'exploitation sans fournir des
chiffres qui ne pourraient être considérés comme éléments d'ap-
préciation, eu égard à la jeunesse des lignes.
Voie et Bâtiments
Ce service est dirigé par un ingénieur, résidant à Tours, qui a
construit la ligue, et qui est encore chargé de la construction du
réseau sud du déparlement d'Indre-et-Loire, ainsi que la ligne
d'Angoulême à Rouillac.
Deux chefs do district lui sont adjoints, l'un pour la section de
Sonzay à Chàteaurenault, l'autre pour la section de Sonzay à Port-
Boulet.
Le personnel compte 17 équipes de 3 hommes, le canton portant
282 GHEMLNS DE FER DINTÉRÉT LOCAL
sur 6 kilomètres en moyenne. Le traitement de ces agents varie de
75 à 110 francs.
Les travaux d'entretien ont consisté exclusivement jusqu'ici en
relevages de voie par suite des tassements ou gonflements du sous-
sol argileux, et dans Texécution d'encoffrements de sable sous la
voie. Les travaux complémentaires tels que revêtement de tran-
chées et autres sont classés au compte de premier établissement.
Ces divers travaux ont été très-importants au début de l'exploita-
tion ; on a dû à diverses reprises enlever de nuit les argiles
fluentes qui obstruaient la voie dans les tranchées afin de livrer
passage aux trains du lendemain matin.
L*entretien des bâtiments est assuré par des ouvriers spéciaux
du pays quand il s'agit de maçonneries, peintures, etc.
Les hommes de la voie peuvent être réquisitionnés parles chefs
de stations pour les manœuvres ou manutentions à faire en dehors
du passage des trains.
Les femmes chargées du gardiennage des 6 passages à niveau
sont des femmes de cantonniers : 3 d'entre elles qui ne sont pas
logées, reçoivent mensuellement 20 à 30 francs.
8 stations sont exclusivement gérées par des femmes de can-
tonniers.
Traction et Matériel
Ce service est dirigé par un chef de traction; un chef-mécanicien
assiste le chef de traction pour la direction du service actif aussi
bien que des ateliers; cet agent assure d'ailleurs, en cas de besoin,
le remplacement des mécaniciens.
Le personnel de conduite se compose de S mécaniciens à
150 francs par mois et de 5 chauffeurs à 100 francs.
Les machines en service journalier sont au nombre de 5; il n'y
a pas à proprement parler de roulement, chaque machine faisant
toujours le même service et couchant toujours au même point :
1 à Gizcux.
1 à Château-la-Vallière ]
2 à Neuillé-Pont-Pierre''^^"^P^^^^' terminus et d'origine de
1 à Châteaurenault ) ^^^^^^'
• • A VOIE ÉTROITE 283
En outre une machine de réserve est maintenue en feu à
Neuillé, et deux sont au dépôt pour lavage, ou aux ateliers.
Les jours de repos, le service du mécanicien et du chauffeur est
assuré par deux ouvriers de Tatelier.
Enfin, un chauffeur de nuit chargé du nettoyage, de Tallumage
et de la mise en pression est placé à chacun des points d'origine
des trains.
Le combustible se compose exclusivement de tout-venant fin du
Nord; on ne fait usage de briquettes que pour l'allumage.
L'allocation de combustible par kilomètre est fixée à 4 kilos
pendant Tété, à 4 kilos 3 pendant Thiver, allumage compris, et
quelle que soit la charge, qui est toujours très-faible, de même que
les vitesses.
Le graissage se fait avec de Thuile de pied-de-bœuf; c'est un
graissage peu économique.
Les primes des mécaniciens atteignent mensuellement 15 à
20 francs, celle des chauffeurs 1/3 de cette somme.
Les machines sont assez bien utilisées ; elles font 130 kilomètres
de parcours journalier moyen.
Les réparations si petites qu'elles soient, se font aux ateliers de
Neuillé.
En raison de Tinstabilité des marches de trains, que le Conseil
général du département a déjà obligé la Compagnie à modifier
trois fois, il n'a pas été possible de pourvoir de remises à
machines toutes les gares où couchent les machines. Port-Boulet,
Neuillé et Chàteaurenault seules en possèdent.
Le service de la traction est chargé de la tenue du magasin
matériel et matières pour l'ensemble des services : un magasinier
y est préposé.
Mouvement et Trafic
Mouvement. — Ce service est assuré par un inspecteur auquel
est adjoint un intérimaire pour les remplacements.
8 stations, y compris une halte, sont gérées par des femmes de
chefs-cantonniers; ces femmes assurent tout le service sans excep-
tion, y compris le télégraphe et la comptabilité.
284 CHEMEVS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
En principe, les stations où ont lieu des croisements réguliers
de trains sont dirigées par des hommes, mais les femmes peuvent
assurer les changements de croisements.
Au chef de station est adjoint un homme d'équipe àBourgueil
et à 3 des gares de jonction avec les réseaux voisins; la gare
de Port-Boulet dispose de deux hommes d'équipe.
Toutes les stations, sauf une seule, sont pourvues du télégraphe
Bréguet. Les chefs de station sont astreints à demander la voie
par le télégraphe avant l'expédition des trains réguliers, ce qui
est d'autant moins justifié qu'on a pu constater ici, comme par-
tout où ce système est en vigueur, que la demande est le plus
souvent inscrite sur le procès-verbal télégraphique sans qu'elle ait
été eiïectivement passée à la gare suivante.
Le recours à la demande de voie pour les trains réguliers est
condamnable; il n'est jamais pratiqué effectivement; carie chef
de station devrait assurer le servrce du télégraphe au moment où il
attend un train, ou bien au moment où il le reçoit, c'est-à-dire
quand il a le plus besoin de surveiller ses voies et le service exté-
rieur. Par suite, ce mode d'emploi donne une fausse sécurité.
Service des trains, — La marche des trains est très-pénible à
assurer; les intérêts de la région de Port-Boulet à Gizeux sont
appelés vers Chinon et Tours via Port-Boulet ; de Gizeux à Neuillé,
ils sont sollicités vers Tours, via Neuillé, ou vers Paris, via
Château-la-Vallière. Enfin, la section de Neuillé à Châteaurenault
a des correspondances obligatoires avec les trains de la Compagnie
d'Orléans qui passent en ces deux points.
D'un autre côté, les sections ont peu de rapports entre elles, la
ligne étant excentrique.
Aussi les marches et les correspondances des trains sont-elles
difficiles à établir; d'autre part, certaines localités, appuyées par le
Conseil général, demandent qu'aux points de jonction avec les
grands réseaux voisins, le train de la grande ligne soit relevé par
deux trains de la Compagnie locale, Tun descendant pour amener
les voyageurs à destination de la grande ligne, l'autre remonUint
pour amener les voyageurs en provenance de cette ligne ; soit pour
un train de grande ligne, deux trains locaux.
A VOIE ETIIOITE 283
Lo vœu des populations est légitime; mais, d'autre part, les
recettes brutes de la ligne, qui atteignent à peine 1,200 francs par
kilomètre, ne justifient pas l'augmentation du nombre des trains,
qui sont déjà beaucoup trop multipliés pour le trafic qu'ils assu-
rent :
De Port-Boulet à Bourgueil. . . o trains dans chaque sens.
De Bourgueil à Gizeux 3 — —
De Gizeux à Château-la-Vallière 4 — —
De Château-la-Vallière à Neuillé 3 — —
De Neuillé à Châteaurenault. . . 3 — —
Les vitesses commerciales ne dépassent pas 20 kilomètres à
l'heure ; il y a lieu de remarquer d'ailleurs que les marches de
trains ne sont pas, en général, tendues par les correspondances,
mais qu'au contraire, les trains doivent perdre beaucoup de temps
à certains points intermédiaires importants tels que Ghâteau-la-
Vallière et Bourgueil par suite du long délai qui s'écoule entre le
passage des trains de grande ligne à deux points de jonction
consécutifs.
Les stationnements dans les gares intermédiaires sont en général
de 2 à 3 minutes.
Tous les trains sont mixtes et peuvent assurer le service de
détail comme celui des wagons complets. Ce service est assuré
parles deux agents qui conduisent chaque train, l'un comme chef
de train, l'autre comme garde-frein.
Il est à noter que bien que les règlements de la Compagnie ne
l'obligent pas à avoir deux agents dans chaque train, celle-ci a cru
devoir les y maintenir dans tous les cas, même lorsque la charge
du train ne le nécessiterait pas. Le garde-frein est, en effet, consi-
déré non comme agent de train proprement dit, mais comme
homme d'équipe volant, chargé d'aider le chef de train ou de sta-
tion pour les manœuvres et les manutentions, opérations aux-
quelles la Compagnie n'a pas cru devoir faire concourir le chauf-
feur.
Les agents de trains assurent encore, dans les intervalles du ser-
vice, le nettoyage des voitures, Tentretien des poignées, le ser-
vice de l'éclairage, etc..
286 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Cinq équipes de deux agents oomposent le personne des trains.
En cas de train extraordinaire, un garde-frein est détaché
comme chef de ce train, qui est dirigé par un seul agent, de même
que le train régulier dont le garde-frein a été distrait.
La composition des trains est normalement de deux fourgons,
l'un en tète, l'autre en queue, et de deux voitures, Tune mixte et
l'autre de 3"' classe.
Dans toute station de croisement, les deux trains doivent
s'arrêter à la pointe de l'aiguille d'entrée, et le chef de station,
homme ou femme, va successivement de l'un à l'autre avec un
drapeau rouge ; chaque train ne peut entrer que lorsque le dra-
peau a été abaissé.
L'Inspecteur est agent spécial de la voie unique et le chef de
station de Neuillé est chargé de la répartition du matériel.
Les trains ne sont pas chauffés l'hiver; le climat de la Touraine
est d'ailleurs fort doux.
Service en gare de jonctioîi. — La Compagnie d'Orléans s'est
montrée peu bienveillante envers la Compagnie départementale ;
après avoir fait toutes difficultés pour laisser passer les voyageurs
allant de sa ligne à la ligne locale ou vice versd, elle a imposé aux
trains de cette dernière des conditions fort dures pour la traversée
à niveau de la ligne de Tours ou Mans par la ligne de Port-Boulet
à Neuillé ; tout train de la Compagnie locale doit franchir le passage
un quart d'heure au moins avant l'arrivée d'un train de la grande
ligne; en cas de retard du premier train, le passage est fermé
même si le train de grande ligne avait lui-même du retard; enfin
il est formellement interdit de franchir la traversée à niveau la
nuit, même pour un train de matériaux, ou un envoi ou retour de
machine de secours. Aussi la Compagnie départementale a-t-elle
décidé de supprimer toute traversée à niveau sur les lignes du
réseau sud, même au prix de travaux considérables.
La Compagnie d'Orléans ne s'est pas montrée plus libérale pour
réchange des marchandises passant d'un réseau sur l'autre ; elle a
exigé de la Compagnie départementale une redevance de 0,80 par
tonne pour le transbordement des marchandises de détail, et de
0,60 par tonne pour le transbordement des wagons complets.
A VOIE ÉTROITE 287
sommes dont la Compagnie locale a dû nécessairement majorer
les transports transitant de son réseau sur celui de la Compagnie
d'Orléans, ou vice versa.
Moyennant ces taxes, auxquelles doivent être ajoutées des rede-
vances pour entretien des voies d'échange, la Compagnie d'Orléans
assure tout le service de transbordement.
L'Administration des chemins de fer de l'Etat effectue égale-
ment dans la gare de Château-la- Yallière le transbordement des
marchandises en provenance ou à destination de la ligne de la
Compagnie départementale, et perçoit de celle-ci une taxe de
transbordement de 0,50 par tonne.
Les autres frais accessoires, frais de gare, de chargement et de
déchargement, ne diffèrent pas des taxes habituelles.
Il serait, en somme, préférable délaisser à la Compagnie locale
le soin d'effectuer à ses frais les transbordements; au lieu d'y
employer un personnel spécial, comme sont obligées de le faire les
Administrations voisines, elle se servirait à cet effet de ses agents
de trains, qui disposent d'une temps suffisant dans l'intervalle de
leur service; les frais de transbordement seraient par suite très
réduits et on éviterait les incessantes réclamations du public, qui
proteste à bon droit contre des taxes qui sont souvent plus élevées,
pour les petits parcours, que celles résultant- de l'application des
tarifs eux-mêmes.
Service commercial. — Les tarifs adoptés sont beaucoup trop
faibles en raison du peu de trafic et de la petite distance que les
voyageurs ou marchandises ont à parcourir sur le réseau. Le peu
d'élévation des tarifs de marchandises en particulier, qui sont à
peu près ceux du cahier des charges général, avec addition d'un
tarif spécial à la base de 6 centimes par wagon complet de toute
marchandise, fait encore ressortir ce que les taxes de transborde-
ment ont d'exagéré.
Le trafic est insignifiant, autant en raison du peu d'éléments
qu'on trouve dans la région que de la faible longueur que ces élé-
ments parcourent sur la ligne départementale, qu'ils quittent à
chaque point de transit.
On eût pu cependant espérer voir dans quelques années les
288 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
recettes do la secLîou de Port-Boulet à Chàteau-la-Valliëre c
vrir les dépenses d'exploitatioa de cette section, sur laquelle
trouve un certaÎD Iraiic de voyageurs, do bestiaux, de vins, et t
tout de denrées en provenance du groupe important de Bourg]
(6,000 habitants) et à destination de Paris, et qui sont remises i
trains de l'Etat à Chftteau-la-Vallifere après avoir parcouru p
de 40 kilomèlres sur les rails de la Compagnie locale.
Le trafic de cette station est très en progrès depuis l'ouvert
de la ligne nouvelle de l'Etat vers Paris.
Mais la section de Neuillé à Cb&teaurenault ne donne pas
produit supérieur à 500 francs par kilomètre.
La comptabilité est décadaire, les versements sont faits tous
dfux jours à la gare de Neuillé-Orléans, la Compagnie d'Orlé
ayant un compte courant avec la Compagnie des chemins de
départementaux pour la ligne de Port-Boulel à Chàteaurenault.
Le contrôle desrecelles est, ainsi qu'on l'a dit plus haut, elTec
au service central à Paris, de même que la comptabilité centri
Le service médical est assuré moyennant une retenue
1 p. 100 exercée sur le traitement des agents.
Les agents malades ont droit àl'inlégralité de leur traitem<
Quelques gratifications sont accordéesen fin d'année aux âge
dont le service a donné particulièrement satisfaction.
Résultats généraux
Il est, comme on l'a dit, fort difficile de donner des chill
précis: ceux-ci, du reste, ne représenteraient rien en raison
l'âge récent des Hgnes.
Quoi qu'il en soit, on peut évaluer à peu près à- 700 francs
dépense annuelle d'entretien des voies, dans leur état actuel,
pense qui sera portée à 800 ou i ,000 francs lorsqu'on sera arriv
la période des remplacements do traverses.
1,200 francs pourraient donner la part de la traction et de 1'
tretien du matériel roulant.
900 à 1,000 francs celle de l'exploitation.
Soit eaviroa 3,000 francs par kilomètre.
A VOIE ÉTROITE 289
Il paraît bien difficile de descendre sensiblement au-dessous de
ces chiffres, avec 3 à 4 trains par jour dans chaque sens, et si
faible que soit le trafic.
Quant aux recettes, elles atteignent actuellement en moyenne
1200 francs par kilomètre^ soit à peu près 2000 francs sur la sec-
tion de Port-Boulet à Château-la- Vallière, 1000 francs de Château-
la- Vallière à Neuillé, et 500 francs de Neuillé à Châteaurenault.
En résumé, la ligne de Port-Boulet à Châteaurenault est une
entreprise désastreuse pour le département comme pour le
concessionnaire.
Aucune nécessité de trafic ne pouvait justifier Texécution de ce
chemin parallèle à la ligne d'intérêt général de Saumur à Château-
du-Loir, longeant la limite du département au lieu de converger
vers le centre, et réunissant des localités sans relations possibles
dans le présent ou Tavenir.
Le seul centre utilement desservi est Bourgueil, situé à 4 kilo-
mètres de Port-Boulet; mais si l'on envisage le point de vue
général, on reconnaît que cette localité, dont tous les intérêts sont
tournés vers Tours ou Paris eût été satisfaite par l'exécution d'un
chemin à voie normale de 4 kilom., et que le trafic qu'elle donne
à la ligne départementale étant à destination de Paris, par le transit
de Château-la- Vallière, il n'y a eu, par suite de l'exécution de la
ligne de Port-Boulet à Châteaurenault, qu'un déplacement de trafic
au détriment de la Compagnie d'Orléans, sans que Bourgueil y
ait beaucoup gagné ni comme rapidité, ni comme différence de
prix.
19
CHAPITRE XX
VALMONDOIS A ËPIAIS-RHUS (Seine -et- Oise)
Longueur 14 kilomètres
(Société générale des Chemins de fer économiques)
I.— ÉTABLISSEMENT
Bien que la petite ligno do Yalmondois à Epiais-Rhus n'ait été
livrée à rexploitation qu'ea juillet 1886, elle est intéressante en
raison de ce qu'elle présente le type d'exploitation auquel parait
s'être définitivement arrêtée la Société générale des Chemins de
fer économiques pour les nombreuses lignes à voie étroite dont
elle a obtenu la concession dans ces dernières années.
La ligne de Yalmondois à Epiais-Rhus a été projetée sous l'in-
fluence de M. Léon Say. Elle a été déclarée d'utilité publique par
une loi du 2 août 1883.
La durée de la concession est de 99 ans.
Lesdépensesd'établissement,ycomprislematérielroulantévaluéà
25,600 francs par kilomètre, ont été fixées à forfait à 96,492 francs
par kilomètre, soit 1,269,830 francs pour la ligne totale qui
mesure 13,160 mètres; la formule adoptée pour les dépenses
kilométriques était 2,000 +-^) ^^^^ <iuc Tapplication de cette
formule put faire descendre les charges kilométriques, tant de pre-
VOIE ÉTROITE . 291
micr établissement que d'exploitation, au-dessous de la somme do
7,300 francs.
La ligne remonte la vallée du Sausseron, ruisseau qui se jette
dans l'Oise à Valmondois, et forme une extension de la ligne à
voie normale de Paris à Valmondois par Ermont.
Elle doit être prolongée d'une dizaine de kilomètres jusqu'à
Ws-Marines; mais on n'a pas le dessein, au moins jusqu'à présent,
de la raccorder en ce point avec la ligne de Paris à Dieppe.
Les déclivités sont limitées au maximum de 15 millimètres par
mètre ; encore ne règnent-elles que sur des longueurs qui n'excè-
dent en aucun point 500 mètres consécutifs.
Les rayons des courbes ne descendent pas, en pleine voie, au-
dessous de 200 mètres ; ils sont le plus généralement do 250 à
300 mètres.
Ces bonnes conditions d'établissement permettent d'atteindre des
vitesses de marche de 35 à 40 kilomètres à Theurc, mais elles ont
nécessité des terrassements importants à la sortie de la gare de
Valmondois et aux abords d'Epiais.
Le rail, en acier, et à patin, pèse 20 kilos le mètre courant ; les
barres ont 9 mètres de longueur et reposent sur li traverses de
chêne.
Le balast est en excellent gravier de l'Oise, d'épaisseur variant
entre 30 et 45 centimètres, selon la nature du sous-sol et selon
qu'on est en déblai ou remblai.
Les stations sont au nombre de 6, c'est-à-dire qu'elles sont dis-
tantes en* moyenne de 2 kil. 1.
Malgré ce faible écartement, la Compagnie a décidé d'accéder à
des demandes qui lui ont été adressées en arrêtant les trains à deux
passages à niveau avoisinant des localités.
D'ailleurs, les stations elles-mêmes sont placées à la porte des
villages, à l'exception de celle d'Epiais, qui se trouve éloignée des
agglomérations d'Epiais et do Rhus.
Les voies des stations ont la disposition qui a été précédemment
décrite à propos du réseau départemental d'Indre-et-Loire, si ce
n'est que le cul-de-sac a été ici supprimé : les trains circulant en
navette, il n'y avait en effet pas de croisements à prévoir. Mais les
voies de gare ont sur la ligne de Valmondois à Epiais-Rhus une
292 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
longueur injustifiée par Timportauce du trafic, qui est des plus
restreints.
A Tin verse des types dlndre-et-Loire, les bâtiments sont ici spa-
cieux et extrêmement satisfaisants, plutôt luxueux, suivant le
mode adopté par la même Compagnie pour les chemins des Landes
de la Gironde ; la halle et le quai aux marchandises sont accolés
au bâtiment des voyageurs.
On a commis Terreur de construire un bâtiment de station à
Yalmondois, où le service est assuré, en gare commune, par le
chef de la gare de la Compagnie du Nord.
Le télégraphe a été supprimé. Toutes les communications de
gare à gare se font par le 'téléphone.
Les stations sont couvertes par des signaux fixes, verts, indiquant
le ralentissement, et qui sont parfaitement inutiles.
Une seule prise d'eau, placée à Epiais, suffit à Talimentation.
Le réservoir est rempli à Taide d'un pulsomëtreque fait fonction-
ner la vapeur d'une locomotive.
Matériel roulant. — La matériel de grande vitesse est composé
de trois voitures à couloir et plates-formes extrêmes ; ces voitures
sont montées chacune sur deux trains à bogies.
Il n'existe que deux classes.
L'une des voitures est de deuxième classe et contient S6 places.
Les deux autres (PI. XI, fig. 26 et 26 6/5) sont mixtes et à32places,
dont 12 de première classe et 20 de seconde. Elles contiennent en
outre, unfourgon pour les bagages et un compartiment pour laposte.
Le compartiment-fourgon est séparé du compartiment première
classe par une plate-forme. Un couloir règne de bout en bout du
véhicule; mais la porte du fourgon, ainsi que la porte de sépara^
tion entre la première classe et la deuxième classe, ne peut être
ouverte que par le conducteur, qui possède à cet effet une cleL
Ce matériel est muni du frein à vis et on projette de lui appli*
quer le frein continu, à vide, en installant la conduite seule sur le
matériel de petite vitesse.
Le matériel de grande vitesse a été projeté par M. Bandérali et
construit par les ateliers de Saint-Denis (Maze et Voisine).
Le matériel de petite vitesse se compose de wagons couverts, de
wagons tombereaux et de plates-formes à traverses fixes destinées
A VOIE ÉTROITE 293
au transport des pierres de dimension qu'on espère tirer d^Epiais
et de Vallangoujard.
On ne sait pas encore exactement quelle sera Tarmaturo en ma-
tériel de petite vitesse de la ligne de Valmondois à Ëpiais-Rhus ;
car une partie de ce matériel va être transportée sur les nouvelles
lignes de TAUier que construit la Société des chemins de fer éco-
nomiques.
Les locomotives sont de deux types :
Le type Anvin-Calais ou Hermes-Beaumont, c'est-à-dire à 3 es-
sieux couplés et 1 Bissel à l'arrière, pesant 21 t. 700 à vide,
28 t. 500 en charge avec un poids adhérent de 24 tonnes, et ayant
un empattement total de 4 m. 170.
Ces machines à roues de 1 mètre de diamètre sont beaucoup
plus puissantes que ne le comporte le trafic de la ligne ; elles ont Fa-
vantage de pouvoir marcher à 35 et 40 kilomètres de vitesse
limite. Elles doivent être transportées sur les lignes de l'Allier,
qui présentent des rampes de 20 à 25 millimètres, auxquelles elles
sont parfaitement appropriées.
L'autre type est une locomotive de 15 tonnes en charge qui a
beaucoup d'analogie avec les machines du réseau départemental
d'Indre-et-Loire.
Elles pèsent comme elles 15 tonnes en charge, ont des roues de
80 centimètres de diamètre, et présentent les mêmes inconvénients
au point de vue de la vitesse.
Les réparations sont faites aux ateliers de Neuilly-en-ThoUe
(Hermes-Beaumont).
II. — EXPLOITATIOi\^
L'exploitation de la ligne de Valmondois à Epiais-Rhus a été
confiée au personnel chargé de l'exploitation du chemin do fer do
Hermès à Beaumont ; ces deux lignes sont en effet, très- voisines,
et cette solution était plus économique que d'affecter à la nouvelle
ligne un personnel spécial.
L'administration relève, bien entendu, du conseil d'administra-
tion de la Société générale des chemins de fer économiques, au-
quel sont soumises toutes les affaires importantes. La direction
générale est de même assurée par le directeur de cette Société.
294 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Voie et Bâtiments
L'inspecteur do la voie du chemin de fer de Hermès à Beau-
ment dirige les travaux et le personnel, qui est composé de 5 can-
tonniers et d'un chef-cantonnier, réunis en une seule équipe ; le
chef-cantonnier est spécialement chargé de la surveillance de la
voie, et fait, à cet effet une tournée générale tous les deux jours.
L'entretien consiste en relevages de la voie ; les cantonniers
éloignés se rendent à leur travail par le premier train du matin.
Plusieurs cantonniers peuvent aussi être employés aux trans-
bordements des wagons complets à Yalmondois, particulièrement
dans la saison des betteraves, pendant laquelle 5 à 6 wagons sont
transbordés par jour avec Taide de deux cantonniers .
6 passages à niveau sont gardés ; deux munis de barrières à bas-
cule manœuvrées des stations, et 4 gardés au passage des trains
par des femmes habitant les villages voisins, et auxquelles il est
alloué 15 francs par mois.
Traotion. — Le personnel, placé sous la surveillance de l'ins-
pecteur de l'exploitation de la ligne de Hermès à Beaumont, se
compose d'un mécanicien et d'un chauiïeur.
Une seule machine assure le service : elle couche à Epiais;
chaque soir le chaufTeur charge de charbon la grille de la machine
et il reste assez de feu le matin pour que la mise en pression soit
rapidement obtenue. La machine consomme '400 kilogrammes de
briquettes par jour, soit 5 kilogrammes par kilomètre.
La machine en service habituel est une machine à 4 essieux,
dont 1 Bissel.
Une autre machine, de 15 tonnes, tient lieu de réserve; elle
est mise en service lorsque la première reste au dépôt pour lavage
ou réparations, opérations qui sont effectuées par un ouvrier do
l'atelier de Neuilly-en-Thelle, venant à Epiais à cet effet.
Toutes les règles appliquées au service de la traction sont celles
en vigueur sur le chemin de fer de Hermès à Beaumont.
Du reste, les machines sont fort mal entretenues; il n'en saurait
être autrement avec une seule équipe d'agents. Le service de la
ligne de Yalmondois à Epiais-Rhus n'est pas encore organisé
d'une façon définitive.
A VOIE ÉTROITE 295
Mouvement et Service commercial
A Texception de la station de Nesle, qui possède une voie de ga-
rage spéciale, et qui est le point de concentration de tout le maté-
riel roulant, toutes les stations sont gérées par des femmes, deux
par des femmes de cantonniers, une (Epiais) par la femme du
chauffeur et la halte de la Naze par la femme du conducteur.
Ces femmes font tout le service y compris la comptabilité,
et reçoivent 300 francs par an.
Le mouvement est de trois trains dans chaque sens : un conduc-
teur assure seul le service de tous ces trains, qui ont lieu en na-
vette; un homme de la voie le remplace quand il est en congé. Le
conducteur ne distribue les billets qu'aux deux passages à niveau
où les trains s'arrêtent ; dans les stations, ils sont distribués par
les chefs de station.
La vitesse commerciale des trains est de 20 kilomètres à l'heure.
Une seule voiture mixte première, seconde et fourgon constitue
la composition habituelle des Irains, au point de vue de la grande
vitesse : Tété, où le mouvement des voyageurs est assez actif en
raison de la proximité de Paris, les trois voitures entrent souvent
simultanément dans la composition des trains.
Outre la voiture, les machines à 4 essieux remorquent aisé-
ment 10 wagons chargés.
Le téléphone remplace le télégraphe : on a déjà eu l'occasion
de dire que le télégraphe n'est nullement à sa place sur les chemins
d'intérêt local. L'emploi du téléphone dans les stations estune très-
heureuse innovation de la Société générale des chemins de fer
économiques, quisepropose d'en munir toutes ses lignes nouvelles.
Les manœuvres et manutentions dans les stations sont faites par
le conducteur, aidé au besoin du chauffeur.
Les tarifs sont à base élevée, comme il convient à un chemin
d'aussi faible développement.
Les taxes applicables aux voyageurs sont 0,1344 pour la pre-
mière classe et 0,084. pour la deuxième classe.
Le minimum de distance d'application a été réduit de 6 à 3 kilo-
mètres.
296 CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL
Les taxes kilométriques de marchandises sont, suivant la classe,
de 24, 18, 44 et 10 centimes; la classification correspond à celle
de la Compagnie du Nord, ainsi modifiée :
La 1" classe correspond auxl" et 2* séries nord ;
La 2" classe correspond aux 3' et 4' séries nord ;
La 3' classe correspond à. la 5^ série nord ;
La 4^ classe correspoiid à la 6" série nord.
Les frais accessoires ne diffèreat pas des frais ordinairement
appliqués, sous cette réserve que pour les marchandises transbor-
dées, le chemin de Yalmondois à Epiais-Rhus est considéré
comme un correspondant parterre, et que par suite, les marchan-
dises arrivant à Yalmondois doivent en principe y acquitter les
frais de gare à Tarrivée et la taxe de déchargement, les frais de
gare au départ et la taxe de rechargement.
La taxe de déchargement et celle de rechargement, dont l'en-
semble constitue les frais de transbordement, sont toutefois ré-
glées chacune à 20 centimes par tonne pour les marchandises de
détail, et à 15 centimes par tonne pour les marchandises par wagons
complets.
Tous les transbordements, sauf pour les betteraves, sont effec-
tués par les soins de la Compagnie du Nord, et moyennant rever-
sement de ces taxes.
Le contrôle des recettes est assuré, comme pour la Compagnie
de Hermès à Beaumont, par la Compagnie du Nord, à qui sont
versées les recettes.
Le trafic de la ligne de Yalmondois à Epiais-Rhus est loin
d'avoir acquis tout sont développement : il se compose principale-
ment, en été, de voyageurs, et en hiver, de betteraves. Tel quel, il
serait actuellement d'environ 2,500 francs par kilomètre. On ne peut
encore savoir au juste quelles seront les dépenses kilométriques.
Le personnel kilométrique est, tout compris, d'environ 1 agent, S.
Mais il n'est pas douteux que, si faibles que soient les produits
de la jolie vallée du Sausseron, la proximité de Paris n'élève ra-
pidement les recettes brutes à un chiffre notablement supérieur.
Toutefois, l'entreprise restera vraisemblablement longtemps
encore peu fructueuse pour le concessionnaire, qui ne se fait à cet
égard aucune illusion.
A VOIE ETROITE »7
CUaprès le résumé des entreprises actuelles de la Société des
chemins de fer économiques :
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298 CHEMINS DE FER DMNTÉRÊT LOCAL
Soit au total 972 kilomètres de lignes et 76 millions engagés.
La durée de concession de ces diverses lignes est de 99 ans,
sauf pour celle de Gudmont à Rimaucourt, 75 ans, et celle de
Bourges à Dun, dont la concession expire en même temps que
celle de la Compagnie d'Orléans...
En outre, un décret du 47 mars 1887 a approuvé un traité passé
entre la Compagnie de TOuest et la Société des chemins de fer
économiques, en vue de l'exploitation par cette dernière, du réseau
à voie étroite construit en Bretagne par la Compagnie de TOuest.
QUATRIÈME PARTIE
CHEMINS DE FER SUR ROUTES
CHAPITRE XXI
CHEMIN DE FER DE HAIRONVILLE A TRIAUGOURT (Meuse)
Longueur : . . 61 kilomètres
I.— HISTORIQUE ET ÉTABLiSSEMErVT DU CHE
Le chemin do for à voie étroite de Haironville à Triaucourt est
lo premier chemin de fer sur routes construit en France.
Peu de temps après la promulgation de la loi du 12 juillet iSGo,
le département de la Meuse fut sollicité à établir une voie ferrée
dans la vallée delà Saulx, pour relier cette industrieuse vallée au
chemin do fer de TEst à Sermaize ou Révigny, et en même temps
au canal de la Marne au Rhin, voie que suivent les charbons et
marchandises lourdes
Les habitants de la vallée réclamaient une voie normale.
Mais un concessionnaire se présenta, le sieur Soulié, qui dési*
rait faire un essai de chemin de fer sur route, à voie étroite, et
qui proposait de prolonger le chemin au nord de la ligne de Stras-
bourg vers TArgonne, c'est-à-^dire jusqu'à Triaucourt. Le trafic à
attendre de la région de Révigny à Triaucourt ne justifiait nulle-
ment ce dernier projet, qui du reste n'était soumis au Conseil géné-
ral que dans le but de gagner à la cause du chemin sur route les
conseillers de cette partie du département et par suite d'assurer le
succès de la demande en concession.
302 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
Cette concession, signée en octobre 1876, fut régularisée par
décret du 6 février 1877.
Le département livrait gratuitement les terrains et accordait
une subvention de 10,000 francs par kilomètre ; la subvention de
TEtat était portée à 5,000 francs.
Le Conseil général s'engageait en outre à accorder à la Com*^
pagnie pendant trois années, délai qui a été porté ultérieurement
à six années, la préférence, à conditions égales/pour la concession
de tout nouveau chemin de fer d'intérêt local à construire dans le
département.
La ligne a été partiellement ouverte à l'exploitation de 1878
à 1881.
Elle n'était pas viable, au moins dans la section de Révigny à
Triaucourt; elle était plus justifiée danç la vallée de la Saulx, en
raison des importantes usines que possède cette vallée. Mais on
n'avait à compter ni pour le tronçon nord, ni pour le tronçon sud,
sur le transport des voyageurs ou des marchandises de détail ; car
la ligne était excentrique et contournait le chef-lieu à une distance
moyenne de 10 à 12 kilomètres. Or, comme on a déjà eu plusieurs
fois l'occasion de le dire, une ligne d'intérêt local doit être essen-
tiellement radiale, et non périphérique.
Cependant les recettes des premières années couvraient à peu
près les dépenses d'exploitation. Mais en 1882 eut lieu l'ouverture
de la ligne à voie normale de Révigny à Vouziers, parallèle à la
section de Révigny à Triaucourt, très-rapprochée de celle-ci et dont
la concession, datant de 1875 et étant par suite antérieure à celle de
la ligne d'intérêt local elle-même, eût dû faire reculer le départe-
ment et le concessionnaire devant une entreprise condamnée
d'avance à l'insuccès.
D'autre part, une nouvelle ligne, également à voie normale, de
Révigny à Saint-Dizier, concédée ultérieurement, et ouverte
en 1885 allait également concurrencer la section de Révigny à
Haironville, dont elle se tenait immédiatement rapprochée, et
donner a posteriori raison aux populations de la vallée de la Saulx,
qui avaient instamment réclamé une ligne à écartement ordinaire.
Le concessionnaire avait évalué le trafic de la ligne de Hairon-
ville à Triaucourt à 6,000 fraucs le kilomètre. Or, même avant
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 303
Touverture de la ligne de Révigny à Saint-Dizier, le chemin de fer
d'intérêt local ne dépassait pas une moyenne de recette annuelle.de
2,500 francs par kilomètre.
La Compagnie, endettée, s'adressa en 1883, à une Société d'ex-
ploitation de chemins de fer, qui lui avança 300,000 francs et
qui se chargea de continuer l'exploitation, après avoir obte-
nu des créanciers la priorité pour le remboursement de son
avance.
L'affaire n'a pas mieux prospéré sous cette nouvelle gestion, et
en 1886 la Société d'exploitation adressait au préfet de la Meuse
une lettre par laquelle elle se déclarait à bout de ressources et se
proposait de suspendre l'exploitation à dater du 15 juillet.
Le chemin de fer fut immédiatement mis sous séquestre.
Dès 1885, la Société avait adressé au département un mémoire
dans lequel elle réclamait une indemnité à raison de la concur-
rence que lui faisaient les nouvelles lignes construites par l'Etat,
et du préjudice qu'allait lui causer la concession à une autre Com-
pagnie de nouveaux chemins de fer à voie étroite dans le dépar-
tement.
La première raison no concernait pas le département, et pour ce
qui était de la seconde, il était dégagé entièrement par l'expiration
de la période sexennale du privilège de la Compagnie de Hairon-
villo à Triaucourt.
11 est à présumer que la Compagnie abandonnera son entre-
prise et que le déparlement ne trouvera aucun concessionnaire nou-
veau, au moins sans subvention.
Celui-ci a dès lors jugé de son intérêt de conserver le matériel
roulant et l'outillage.
Une estimation a été faite, et le préfet a proposé au Conseil
général d* acquérir ce matériel au moyen d'une annuité à laquelle
on affecterait le produit d'un centime additionnel, soit 25,000 francs
jusqu'à concurrence d'une somme totale de 435,000 francs. Le
Conseil général a été d'avis de réduire la somme à 300,000 francs,
soit à 12 annuités de 25,000 francs, en raison du mauvais état du
matériel. La Société d'exploitation réclame le payement en capi-
tal de la première estimation.
304 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
La question en est là. Il est vraisemblable que le département,
qui s'est arrêté un instant à la pensée d'abandonner purement et
simplement un chemin qui fait double emploi sur presque tout son
parcours, excepté dans la haute vallée de la Saulx, confiera l'ex-
ploitation de la ligne de Haironville à Triaucourt à la Société
Yarinot, concessionnaire en i884 des nouveaux chemins départe-
mentaux de la Meuse.
Pour ces nouveaux chemins, le département a changé radicale-
ment de système.
La ligne principale, longue de 50 kilomètres, est un rayon par-
tant de Bar-le-Duc pour aboutir à Glermont en Argonne sur la ligne
de Paris à Metz.
On a profité en outre de cette ligne pour transformer en ligne
également radiale la partie la plus intéressante de la section de
Révigny à Triaucourt, soit celle qui joint les deux cantons de
Yaubecourt et Triaucourt, par un embranchement des Merchines
à Rambercourt.
D'un autre côté, les populations des communes traversées par
la ligne de Haironville à Triaucourt se sont montrées extrêmement
peu satisfaites du système adopté pour ce chemin, et ont formulé
des plaintes continuelles contre le peu de vitesse des trains et
contre le danger qu'ils présentent : en pleine voie par suite de
l'effroi qu'ils inspirent aux chevaux et aux bestiaux ; dans la tra-
versée des villages, soit pour la même raison, soit à cause de la
présence des enfants. Enfin, les routes de la Meuse sont construites
avec des matériaux argilo-calcaires ; bien que Ton pratique de
fréquentes saignées dans le ballast, l'écoulement des eaux est
imparfaitement assuré ; par suite l'entretien des routes est rendu
très-difficile par la présence du chemin de fer, et leur viabilité est
détestable.
Tenant grand compte de ces diverses raisons, le Conseil général
se décida à construire les nouvelles lignes en dehors des routes et
chemins.
Au lieu de courbes de 50 à 100 mètres de rayon, et de rampes
de 25 à 30 millim. par mètre, on adopta des rayons de 200 mètres
et des rampes de 0 m. 015.
La réaction était beaucoup trop forte ; des courbes de 150 mètres
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 305
de rayon et des rampes de 20 à 25 millimètres eussent permis de
réduire le parcours et d'éviter les tranchées considérables qu'on a
dû exécuter pour gravir le plateau qui limite au nord la vallée de
rOrnain, où est situé Bar-le-Duc, et pour descendre dans la vallée
de l'Aire, que le tracé suit sur une grande partie de son parcours
avant d'arriver à Clermont.
Par ces courbes et ces rampes, on aurait d'autre part pu se
rapprocher beaucoup plus qu'on ne Ta fait de quelques villages,
et il n'est que trop certain qu'elles n'eussent pas constitué la
moindre 'gène pour le trafic, qui sera^ comme dans la plupart des
chemins départementaux, inférieur à la puissance des machines.
Le rail adopté sur ces lignes est du même type que celui de
Haironville à Triaucourt, soit 15 kilog. acier, poids un peu faible
pour des machines de 20 tonnes en charge ; le rail, de 8 mètres
de longueur est, il est vrai, soutenu par 11 traverses.
Les voitures sont à compartiments, ce qui est encore une
erreur.
Enfin le type des stations est figuré (PI. XI, fig. 28) de même que
celles du chemin de Haironville à Triaucourt (PI. XII, fig. 27).
Bien que les lignes concédées à M. Varinot viennent seulement
d'être livrées à l'exploitation (juin 1887), il a paru intéressant de
relater les conditions de leur établissement, qui découlent de l'ex-
périence faite dans la Meuse, d'un chemin sur route.
Description de la ligne de HaironTille à Triauoonrt. — Le che-
min de fer de Haironville à Triaucourt décrit autour de Bar-le-
Duc, sur la majeure partie de son parcours, un cercle d'une
douzaine de kilomètres de rayon.
De H£|,ironville à Révigny, le tracé suit la vallée de la Saulx, où
se rencontrent d'importantes usines : deux papeteries, une forge,
une fonderie et deux fabriques de bleu d'outre-mer. Toutes ces
usines sont reliées par embranchement au chemin de fer, qui les
relie lui-même aux lignes de la Compagnie de l'Est à Révigny et
au port de Contrisson sur le canal de la Marne au Rhin, où une
gare maritime importante a été construite aux frais des industriels
de la vallée de la Saulx réunis en syndicat.
La jonction avec la gare de Révigny se fait par double rcbrous-
20
306 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
sèment; des voies de transbordement sont installées dans la gare
des marchandises.
Entre Révigny et Triaucourt, le tracé n'est commandé par
aucune considération naturelle ; on s'est attaché à réunir les loca-
lités les plus importantes, Lahaycourt, Vaubecourt et Triaucourt.
Sur le tronçon Nord comme sur le tronçon Sud, la ligne est
pour la plus grande partie assise sur les accotements des routes,
dont la largeur ne dépasse pas de 8 à 10 mètres. Elle aban-
donne les routes toutes les fois que la largeur de celles-ci devient
inférieure à 8 mètres, ce qui a lieu dans la traversée de la plupart
des villages, ou bien lorsque leurs déclivités dépassent 30 mil-
limètres par mètre; 1/3 du parcours environ se trouve hors
route.
Dans les parties sur accotements des routes, la voie et le balast
ne sont pas protégés par une bordure en saillie, précaution qui a
été ultérieurement prise par l'article 7 du cahier des charges (tram-
ways) dressé en exécution de la loi du 11 juin 1880.
Mais lorsque la voie est établie sur route, elle est munie de
contre-rails et est noyée dans la chaussée.
Les déclivités courantes sont de 10,15, 20 ou même 25 milli-
mètres; elles montent exceptionnellement à 30 millimètres, mais
sont toujours fort courtes, 200 à 400 mètres au plus.
Les rayons des courbes sont de 100 mètres, 80 mètres, 75 mètres
et descendent assez souvent à 60 mètres et même à 50 mètres en
pleine voie.
Aussi la vitesse de marche des trains ne dépasse-t-elle que rare-
ment 20 kilomètres à Theure, limite d'ailleurs imposée par le
cahier des charges sur les sections où la ligne suit les accotements
des routes, la vitesse ne devant pas excéder 10 kilomètres à la
traversée des villages.
La vitesse commerciale n'excède pas 12 à 13 kilomètres à l'heure,
c'est-à-dire celle d'une voiture de poste, bien que la distance
moyenne entre stations ne descende pas au-dessous de 4 kil. 4.
Aussi les voyageurs préfèrent-ils se rendre à Bar-le-Duc directe-
ment plutôt que d'emprunter le chemin de fer; on comprendrait
difficilement qu'il en fût autrement.
A l'exception d'un pout en fer de 24 mètres d'ouverture qui a
CHEMINS DE FEU SUR ROUTES 307
été jeté sur la Saulx dans une partie où la ligue est éloignée de
la route, et d'un passage au-dessus du chemin de fer de Révigny
à Saint-Dizier exécuté aux frais de celui-ci, tous les ouvrages d'art
qui se trouvent sur le parcours de la ligne de Haironville à Triau-
court sont les ouvrages des routes elles-mêmes.
Le rail est du poids de 15 kilos en acier; il est à patin. Le
balast n'a que 25 centimètres d'épaisseur, ce qui est insuffisant.
Les trains ne s'arrêtent pas à la demande des voyageurs, mais
dans des stations qui sont toujours placées à l'extrémité même
des localités, c'est-à-dire dans les meilleures conditions possibles.
Ces stations ont consisté jusqu'à ce jour en une voie de garage
sans quai ni bâtiment, la Compagnie ayant dans chaque localité un
représentant, cultivateur, marchand de vin ou tout autre, désigné
sous le titre de chef de gare, et chargé de l'encaissement des ports
dûs, et de l'établissement des taxes sur les feuilles d'expédition.
Cependant la Compagnie reconnaissant les inconvénients mul-
tiples de ce système, tant au point de vue des voyageurs que des
marchandises, avait dressé un projet de bâtiment comprenant salle
d'attente et magasin pour abriter les colis de détail qui ne peuvent
sans inconvénient être exposés au dehors.; le projet comportait
en outre rétablissement d'un petit quai en terre pour l'embarque-
ment'des bestiaux.
Ce projet a été mis en exécution depuis que le chemin .d© fer
est placé sous séquestre ; le département a affecté à cette construc-
tion un reliquat de 26,000 francs que l'Etat devait encore à la Com-
pagnie locale pour compléter le versement de sa subvention.
Ce type est représenté (fig. 27, PI. XII).
Le bâtiment ne comporte pas de logement pour le chef de sta-
tion, ce qui est regrettable.
Bien entendu, les stations ne sont pas couvertes par des signaux
et il n'existe pas do télégraphe.
Il n'y a pas d'alimentation fixe, soit à l'aide do pulsomètrc ou
tout autre appareil.
Des puits sont installés dans presque toutes les stations, avec
une profondeur de 3 à 5 mètres.
Chaque machine porte un tuyau en caoutchouc de 8 mètres de
longueur qui est plongé dans le puits, ou mémo au besoin dans le
308 CHEMINS DE FEU SUR KOLTES
lit de la Saulx, et un injecteur à vapeur permet le remplissage du
tender : 12 minutes pour 2 mètres cubes.
Ces tuyaux repliés sur la chaudière à Tavant des locomotives
donnent à celles-ci un aspect quelque peu fantastique.
Matériel reniant. — Voitures et wagons. — Le matériel à voya-
geurs est composé de 8 voitures mixtes à 4 places de i" classe et
18 de 2'' classe; il n'y a que deux classes de voyageurs.
8 fourgons à freins servent de wagons couverts pour les mar-
chandises de détail.
30 plates-formes, 50 tomberaux dont 30 à bords tombants pour
pierres et bois, et 12 wagons à coke pour les usines, constituent le
matériel de petite vitesse, qui ressort ainsi ai w. S par kilomètre.
La force de ce matériel est en général de 5 tonnes, à Texccp-
tion de 10 tombereaux et de 10 plates-formes à bords tombants
qui peuvent porter 8 tonnes.
Locomotives. — 5 machines toutes du même type constituent un
armement de 1 machine par 12 kilomètres.
Ces machines, construites dans les ateliers de Passy (Paris),
pèsent 12 tonnes à vide, 15 tonnes en charge.
Elles ont le foyer trop élevé, le premier rang des tubes est
noyé dans le charbon ; il s'ensuit que la plaque tubulaire exposée
aux coups de feu est fréquemment détraquée, et que les tubes
doivent être souvent remis en place.
D'autre part, le mouvement est placé trop bas, la bielle motrice
descend à 4 centimètres du rail, c'est-à-dire du sol, la machine
étant neuve ; mais Tusure des bandages et l'afTaiblissement des
ressorts tendent à diminuer encore cette faible distance ; de là des
chocs contre le sol et des ruptures de bielles assez fréquentes.
La machine est timbrée à 10 kilos, les roues ont seulement
75 centimètres de diamètre, donnant un empattement total de
1 m. 80 pour les essieux extrêmes, ce qui est plus que sufGsant
pour rinscription dans les courbes de 50 mètres de rayon, sans
addition de boites radiales à la machine.
Des plaques sont disposées à chaque extrémité du parcours
ainsi qu'à Révigny pour le tournage des wagons et des machines.
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 309
Ateliers. — Les ateliers de Révigay comportent un outillage suf-
lisant pour assurer toutes les réparations courantes, soit :
i tour à roues ;
2 tours parallèles;
1 perceuse;
1 étau limeur;
1 cisaille poinçonneuse.
Le moteur est une machine de 12 chevaux qui serait suffisante
pour actionner un outillage triple ou quadruple. 2 ajusteurs, i for-
geron, 3 apprentis, 1 visiteur, 1 chauffeur et 1 charpentier consti-
tuent le personnel des ateliers.
II.— EXPLOITATIOr\'
Administration
L'Administration est présentement réduite au séquestre, effecti-
vement confié aux ingénieurs du département, qui passent les
marchés, contrôlent et ordonnancent les dépenses, et ont toute
autorité sur le personnel d'exploitation.
Un chef d'exploitation résidant à Révigny dirigeait tous les
services avant la mise sous séquestre, et a conservé ses fonctions
depuis cette époque. Deux employés placés sous ses ordres directs
sont occupés à la tenue de la comptabilité.
Les frais d'Administration se sont élevés en 1885, c'est-à-dire
sous la gestion de la Société d'exploitation, à 16,915 fr. 23 tout
compris, soit au chiffre réduit de 277 fr. par kilomètre.
Voie et Bâtiments
Ce service est dirigé par un chef de section et deux piqueurs,
l'un pour le tronçon au sud de Révigny, l'autre pour le tronçon
Nord.
i) équipes de 3 hommes constituent l'ensemble du' personnel
310 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
d^entretien, les cantons embrassent par suite i2 kilomètres en
moyenne. Ces agents sont payés à l'heure, à raison deO fr. 35 pour
le chef d'équipe et de 0 fr. 25 pour les hommes.
Outre ce personnel spécialement affecté aux travaux, H can-
tonniers sont employés à la surveillance de la voie, que chacun
doit parcourir sur toute la longueur de son canton de 5 à 6 kil.,
avant et après le passage des trains. Ces agents doivent inscrire
sur leur rapport journalier l'heure exacte du passage de chaque
train au point où ils l'ont rencontré ; le rapprochement du rapport
journalier et de la feuille de marche du train sert de contrôle au
service central, qui punit les cantonniers en cas d'indications
inexactes.
Les cantonniers doivent se joindre aux équipes pour travailler
à la vbie.
Cette organisation bien singulière a été empruntée à une grande
Compagnie qui vient de l'abandonner, après en avoir reconnu les
vices.
Les piqueurs sont de leur côté chargés de contrôler chaque
jour les billets dans deux trains.
L'entretien consiste en travaux de relevage d'une part, de Vautre
en remplacement de traverses. On renouvelle environ 2,000 tra-
verses par an, en ayant soin de porter à 12 le nombre des traverses
dans les courbes de 100 mèires de rayon et au-dessous, taudis que
dans les alignements, le rail (8 mètres de longueur) repose sur
11 traverses.
L'assiette do la voie est assez mauvaise sur le tronçon Nord, où
l'on rencontre des argiles et des sables verts.
Les dépenses d'entretien de la voie en 1885 s'élèvent au total
de 33,770 fr. 46, ce qui représente un prix de revient kilométrique
de 550 francs.
Traction et entretien du matériel
Un chef de dépôt dirige le service actif et les ateliers.
Deux machines sont en roulement journalier ; chacune couche
à tour de rôle, un jour à Haironville, et le lendemain à Triaucourt.
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 3il
Une machine de réserve, en feu, sert aux manœuvres pour la
gare de Révigny et le port de Contrisson.
Trois mécaniciens et 3 chauffeurs assurent le service: le roule-
ment comporte 2 ournées et demie de marche et une journée et
demie de réserve ; après avoir accompli deux fois ce roulement de
trois jours, soit après 6 jours, la machine passe un jour au lavage
et au dépôt.
Un chauffeur de nuit est placé à chaque extrémité du parcours
pour le nettoyage et la mise en pression des machines.
Le dépôt de Révigny possède en outre un visiteur.
Le combustible consommé se compose exclusivement de bri-
quettes.
L'allocation kilométrique est de 6 kilos pour une charge remor-
quée égale ou inférieure à 50 tonnes. Au delà de 50 tonnes on
ajoute 50 grammes par tonne.
Malgré ces allocations énormes pour des machines de si faible
poids, les mécaniciens ne parviennent pas à réaliser d'économies.
La recherche de la véritable cause de cette consommation exa-
gérée ne parait pas avoir attiré Tattention des exploitants.
L'allocation d'huile s'élève à 50 grammes par kilomètre, chiffre
qui convient plus à de grandes machines qu'à des locomotives de
15 tonnes.
Les dépenses de l'année 1885 s'élèvent :
Pour la traction proprement dite 35.781 30
Pour l'entretien et les réparations du matériel .... 20.234 49
Dépenses diverses 3.571 14
Total 59.586 93
Soit par kilomètre. ... 98000
Mouvement et Trafic
Mouvement. — Le service du mouvement et du trafic est dirigé,
sous les ordres du chef d'exploitation, par un inspecteur aidé d'un
employé spécial chargé du contrôle des recettes et du service de
la gare maritime de Contrisson.
La gare de Révigny seule est gérée par un chef de gare rési-
312 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
dant sur place et chargé en même temps du magasin matières et
matériel pour tous les services; il est aidé d'un employé surnu-
méraire pour les écritures et l'établissement des bordereaux de
remise des marchandises à la Compagnie de TEst.
Dans toutes les autres localités il existe bien un chef de gare,
mais n'ayant de la fonction que le titre. Cet agent ne s'occupe pas
du tout du service des voyageurs, les billets étant délivrés par le
conducteur du train. Il est spécialement affecté au service des
marchandises. Il remplit les écritures, c'est-à-dire la feuille de
route, le récépissé, les relevés de dizaine et tient le livre de comp-
tabilité. Il reçoit les colis et les marchandises de détail, les
transporte aux trains ou vice versa j et fait émarger le livre d'ar-
rivages.
Le chef de gare, qui est souvent un marchand de vin de la
localité, résidant rarement à proximité immédiate de la station ,
est tenu d'être présent aux trains spécialement affectés au service
des marchandises de détail, c'est-à-dire au train qui a lieu dans
chaque sens le matin.
Le traitement de ce représentant, 12 fr. 50 à 15 fr. par mois,
démontre que ses fonctions, dont Ténumération est assez longue,
sont pratiquement réduites à fort peu de chose, en raison de l'ex-
trême faiblesse du trafic.
Les wagons complets, qui constituent la presque totalité du
trafic de petite vitesse, sont dans la plupart des cas en provenance
ou à destination des usines, qui disposent d'embranchements par-
ticuliers ou de la gare maritime de Contrisson.
Lorsqu'il s'en trouve à l'expédition ou à l'arrivage dans les sta-
tions, l'expéditeur ou le destinataire en a toutes charges, y com-
pris le bàchage en cas de pluie avec les bâches de la Compagnie.
Si l'on ajoute que la gare des marchandises n'est ordinairement
autre que la route elle-même, on reconnaîtra que ce système est
bien primitif et peu satisfaisant.
Les billets sont délivrés par le conducteur du train, qui dispose
à cet effet d'un carnet à souche ne comportant pas le nom des
stations, mais seulement les prix appliqués ; le nom dos stations
est inscrit à la main sur la souche et le talon.
Le personnel du train se compose d'un seul conducteur. Deux
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 3i3
I
sont en roulement journalier; un autre, à disposition, surveille les
remises et transbordements des marchandises en transit sur la
Compagnie de TEst ou inversement, il donne ou prend des
réserves. Enfin, un quatrième agent de train, également à dispo-
sition, e3t occupé à divers travaux.
Le conducteur tient la comptabilité voyageurs, il établit le
bulletin de ses recettes par journée ; le chef de gare de Révigny
centralise les recettes de grande vitesse.
Au passage dans les stations, les manœuvres ou manutentions
sont assurées par le conducteur et le chauffeur, et au besoin par le
mécanicien.
Deux trains seulement circulent dans chaque sens, Tun le matin,
l'autre le soir; leur service est fait en navette sur chacun des deux
tronçons.
En cas de détresse, on a recours au télégraphe de la localité la
plus proche qui en possède : Révigny, poste de dépôt, a un bureau
télégraphique à titre de chef-lieu de canton*.
Une voiture suffit normalement dans les trains; elle est séparée
de la machine par un fourgon.
Un seul agent suffit pour la conduite du train et la tenue du frein,
tant que la composition du train ne dépasse pas 8 véhicules; cela
n'arrive jamais.
L'hiver, les compartiments de seconde sont chauffés, aussi bien
que ceux do V classe, avec des bouillottes réchauffées par la
locomotive.
Les manœuvres à faire pour conduire des wagons sur les
5 embranchements particuliers ou pour les en tirer sont toujours
faites au passage des trains.
Plusieurs do ces embranchements sont reliés à une station, et
dans ce cas la manœuvre est toute simple; mais deux embranche-
ments ont leur aiguille de jonction en pleine voie. Lorsqu'un train
devant aborder Taiguille par la pointe, a un ou plusieurs wagons
à conduire sur l'embranchement, il fait dans la gare qui précède
une manœuvre ayant pour effet de placer devant la machine le ou
les wagons destinés à cet embranchement. Puis le train ainsi
composé s'arrête avant l'aiguille de jonction, la machine est
coupée de la queue du train, qui est abandonnée en pleine voie,
3i4 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
Taiguille est décadenassée par le conducteur et faite pour rem-
branchement, et la machine pousse les wagons à Tusine toujours
située à faible distance du chemin de fer.
On procède de façon analogue pour les wagons à prendre.
Service en gare d'échange. — Le service commun à Révigny,
gare de transbordement se fait par les soins de la Compagnie de
TEst qui se contente d'une taxe de transbordement de 20 centimes
par tonne en sus de ses frais accessoires. Les échanges se font
entre les wagons placés sur deux voies parallèles et voisines, la
voie normale étant surbaissée de 0",30 environ afin que les plan-
chers des wagons soient de niveau.
Il existe également un quai de transbordement; mais on n'en
fait jamais usage.
On a dit que le chemin de fer de Haironville à Triaucourt a à
Révigny un double rebroussement.
Chacun d'eux sert de tête de ligne, Tun pour les trains de
Haironville, l'autre pour les trains de Triaucourt. Les trains des
deux sections sont, en effet, indépendants, et sans correspondance
entre eux, en raison de l'absence de tout trafic de voyageurs ou
de marchandises passant de l'une sur l'autre.
Cependant chaque machine couche alternativement à Haironville
et à Triaucourt, ce qui ne parait pas offrir d'autre résultat effectif
que des dépenses supplémentaires à payer pour déplacements au
chauffeur et au mécanicien.
Service oommercial. — Les tarifs de voyageurs sont de 0 fr. 15
pour la première classe et 0 fr. 12 pour la seconde, impôt
compris avec réduction de 25 p. 100 pour les billets d'aller et
retour. Ces tarifs sont trop élevés.
Pour les marchandises, les taxes kilométriques sont de Ofr. 20
pour les marchandises de détail, 0 fr. J 5 pour les marchandises
par wagons complets.
Des tarifs spéciaux à la base de 9 et 10 centimes sont applicables
aux phosphates de Triaucourt et Lahaycourt, aux bois de l'Ar-
gonne à destination du port de Contrisson, et à la houille.
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 315
Toutes ces taxes comprennent les frais accessoires ou de trans-
bordement.
Le trafic du tronçon nord consiste principalement en bois et
phosphates ; sur le tronçon sud arrivent de vieux fers, des fontes,
des kaolins, des chiffons, de la houille, du coke, etc.. Les expédi-
tions consistent eu fers en barres, fontes ouvrées, papier, bleu
d'outre-mer, etc.
Pour l'exploitation de la gare maritime de Contrisson, cons-
truite aux frais des industriels de la. Saulx et qui a coûté
60,000 francs, la Compagnie partage par moitié ses bénéfices avec
le syndicat des industriels qui profitent en outre de taxes réduites
pour le transbordement de bateaux h wagons ou vice versa.
Le contrôle des recettes et la statistique sont faits par l'inspec-
teur et son aide.
Les recettes sont versées entre les mains de l'ingénieur chargé
du séquestre.
Les dépenses du mouvement et du service commercial pour
1885, s'élèvent à 29,752 fr. 44, soit par kilomètre à 490 francs,
chiffre extrêmement réduit.
Une caisse de secours, alimentée par une retenue de 2 p. 100
sur les salaires, paye les frais de médecin et les médicaments.
La Compagnie ne fait pas de retenue aux agents malades, pour
ne pas grever la caisse de secours.
Le personnel ressort au total à 1 agent, 4 par kilomètre.
Résultats généraux pour 1885
Les dépenses se récapitulent comme suit :
Administration 16.915 23
Voie et bâtiments. 33.770 46
Traction et entretien du matériel roulant 59.586 93
Mouvement et trafic 29.752 44
Divers 249 75
Total 140.274 87
Soit par kilomètre. . . . 2.300 00
316 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
Les recettes pour la même année se décomposent, impôt
déduit, en :
!•> Grande vitesse 20.827 27
Par kilomètre 340 00
20 Petite vitesse 119.731 85
Par kilomètre 1.960 00
Total. . . . 140.559 12
Soit par kilomètre 2.370 00
En comprenant les dépenses d^ordre, supérieures aux recettes
d'ordre, le produit net devient négatif et offre une insuffisance de
677fr. 51.
On voit combien peu d'importance a le produit des voyageurs
et de la grande vitesse.
RÉSULTATS COMPARATIFS POUR LES ANNÉES 1881, 1882, 1883, 1884 et 1885
OS S
RÉSULTATS TOTAUX* (impôt déduit)
RÉSULTATS K1L0MÉTKIQ. |
= 1
2 o
Ml
^ -^^^^-i^
> ^^^
'A.
•<
S-
55
RECETTES
DÉPENSES
PRODUIT
NIT
RECETTES
DlPEXSES
PROD[IT
WBT
lis
76
1881
142.367 52
108.842 53
33.524 99
2.589
1.966
623
1882
61
153.742 05
159.807 70
— 6.065 65
2.520
2.608
— 88
104
1883
61
157.166 52
183.467 63
—26.301 11
2.577
3.008
431
117
188 i
61
157.069 22
162.017 51
— 4.948 29
2.575
2.656
— 81
103
1883
61
1U.749 70
145.427 21
— 677 51
2.372
2.384
— 12
100
* Y compris recettes et dépenses non classées.
CHAPITRE XXII
TRAMWAYS DE LA SARTHE
Le Mans au Grand-Lucé 31 kil.
Le Grand-Lucé à la Ghartre 17 —
Total 48 kU.
L - ÉTABLISSEMEIVT
Historique. — L'idée de construire des chemins de fer sur
routes dans le département de la Sarthe est due à l'ingénieur qui
en est devenu concessionnaire, M. Faliès, dont l'énergie et Tintel-
lîgence sont parvenues, non sans grande peine, à faire triompher
ce type de voie ferrée non seulement dans la Sarthe, mais encore
dans doux départements voisins, Loir-et-Cher et Maine-et-Loire,
ainsi que dans le département de la Loire.
Dès 1872, M. Faliès qui avait pour lui l'expérience de la cons-
truction de divers chemins de fer d'intérêt local, et qui venait de
visiter en Europe un grand nombre de lignes de ce genre, proposa
au Conseil général de la Sarthe de doter le département de che-
mins do fer sur routes, dont le service d'exploitation serait fait
3^8 CHEMINS DE FEH SUK ROUTES
exclusivement parles agents des trains, et dont le prix d'établisse-
ment, y compris le matériel roulant, devait osciller autour du
chiffre séduisant de 40,000 francs par kilomètre.
Une commission fut nommée qui examina les chemins de fer
de ce genre existant en Angleterre et en Allemagne ; elle conclut
au rejet des propositions de M. Faliès.
Ce dernier pressa vivement le département de faire au moins
un essai de son système. Le Conseil général finit par s'y résoudre
et choisit à dessein, pour champ d'expériences, la région la plus
pauvre de tout le département, région qui ne pouvait espérer êlre
jamais dotée d'un chemin de fer à voie normale.
Si Fessai réussissait, on pourrait constituer sur les mêmes bases,
dans les parties riches du département, le réseau local très-étendu
que Ton projetait d'établir ; si au contraire, il échouait, rien ne
serait compromis.
La convention acceptée par le département le 26 décembre 4878
fut ratifiée par décret du 6 mars 1880, qui déclarait d'utilité
publique un chemin de fer sur routes entre le Mans et le chef-lieu
de canton le Grand-Lucé. Le département avait ajouté à cette
concession un petit chemin de fer industriel de 8 kilomètres, pour
relier Ballon à la Forge d'Antoigné et dont il ne sera pas fait
d'autre mention dans le cours de cette étude, dans le cadre do
laquelle il ne rentre pas.
Le département de la Sarthe établissait directement l'assiette
de la plate-forme et le concessionnaire devait exécuter la super-
structure et armer le chemin de fer en matériel roulant pour le
prix forfaitaire de 29,300 francs par kilomètre, qui a laissé au
concessionnaire un bénéfice raisonnable de 4,000 francs.
Aucune garantie n'était accordée au concessionnaire pour les
dépenses d'exploitation ; mais il devait remettre au département
23 p. 100 des recettes brutes lorsque celles-ci dépasseraient
3,500 francs par kilomètre et que les insuffisances des années pré-
cédentes auraient été couvertes jusqu'à concurrence de cette
somme, intérêts compris ; une part du bénéfice ainsi acquis au
département devait êlre partagée avec l'Etat proportionnellement
au montant de la subvention de celui-ci, subvention qui s'élevait
au total de 394,083 francs.
^
CHEMINS DE FEK SUK ROUTES 310
Enfin lo droit de préférence était réservé au concessionnaire
pendant trois années pour les autres chemins à voie étroite à établir
dans le département. Le nombre des trains était fixé à trois dans
chaque sens.
Le prix de revient kilométrique de l'infrastructure s'étant élevé
à une quinzaine de mille francs, le chemin du Mans au Grand-Lucé
est revenu tout compris à 44,000 francs environ.
Il a été livré à l'exploitation en 1882.
Dans la même année, M. Faliës obtenait le prolongement de la
ligne jusqu'à la Ghartre, autre chef-lieu de canton du département.
Les conditions de la concession de cette nouvelle ligne étaient à
peu près analogues à celles de la ligne du Mans au Graud-Lucé
qui avait été concédée sous le régime de la loi de 1863, tandis que
la loi de i880 était applicable au prolongement, qui fut ouvert à
l'exploitation en 4884.
L'expérience avait pleinement réussi. En dépit de la pauvreté
de la région traversée, les tramways de la Sarthe convergeant au
chef-lieu du département, ville de 60,000 habitants, pénétrant
jusqu'au centre des localités quand cela était possible, ou se tenant
dans le cas contraire, à leur proximité immédiate, arrivaient, dès
le principe, contrairement aux prévisions du concessionnaire lui-
même, à fournir un produit brut de 3,000 francs par kilomètre,
c'est-à-dire largement suffisant pour couvrir les dépenses d'exploi-
tation.
Aussi le département résolut-il de poursuivre l'application du
système, en le modifiant toutefois malgré l'opinion contraire de
M. Faliës.
Désireux de pouvoir obtenir au besoin, soit dans le présent, soit
dans l'avenir, une vitesse supérieure à celle de 20 kilomètres à
l'heure à laquelle sont limités les chemins de fer sur routes, le
Conseil décidait d'abandonner généralement les routes en pleine
voie, et de n'emprunter leurs accotements que dans des cas for-
tement motivés, par exemple aux abords des localités, à la tra-
versée des cours d'eau, ou dans le but d'éviter des expropriations
coûteuses.
C'est dans ces conditions qu'est exécutée la ligne nouvelle du
Mans à Saint-Denis-d'Orques^ dans la direction de Laval, ligne
320 CHEMINS DE FEU SUR ROUTES
d'un tracé plus accidenté que la ligne du Mans à la Chartre et qui
a été concédée à M. Faliës en 1885.
C'est encore dans ces conditions qu'est présentement étudié
l'achëvement du réseau de la Sarthe par les lignes du Mans à
Bonnétable, du Mans à la Flèche, du Mans à Thorigné, etc.
Ces lignes toutes rayonnantes autour du Mans, seront exécutées
suivant la méthode employée pour le chemin du Grand-Lucé,
c'est-à-dire que le département fera directement l'infrastructure
en laissant au concessionnaire la superstructure et Tarmement en
matériel roulant suivant un prix forfaitaire.
Mais le prix de revient kilométrique de l'infrastructure sera
nécessairement augmenté et même doublé, et on atteindra ainsi
le chiffre de 60,000 francs au lieu do 40 à 45,000 francs le kilo-
mètre.
Voici à l'égard de cette question de principe, l'opinion de
M. Faliès lui-même :
c Le choix pouvait être douteux alors que la traction par locomotives sur
« routes donnait lieu à des craintes et à des hésitations de toute nature. Mais
« aujourd'hui l'expérience est faite.
« Elle est concluante.
« La traction par locomotives sur routes est entrée dans le domaine de la
« pratique, et la statistique des accidents prouve que la circulation des trains
« de voyageurs et de marchandises sur les routes ne présente pas plus de
« dangers qu'un chemin de fer à travers champs.
« Indépendamment de la question d'économie^ il y a encore celle de la
« rapidité d'exécution qui doit faire donner la préférence à l'emploi des
« routes.
« N'ayant ni longues études, ni expropriations considérables, ni travaux
a importants, le chemin de fer sur routes demande un an au plus pour être
a livré à la circulation, tandis que trois ans au moins sont nécessaires à
« l'exécution d'une ligne à plate-forme indépendante.
« D'ailleurs si Ton considère les services rendus par les deux systèmes, on
« peut afOrmer qu'ils sont identiques, car il est incontestable qu'un chemin
« sur routes peut desservir le môme^trafic que celui à travers champs, et en-
« core il le fera dans de meilleures conditions pour le public, puisqu'il pénè-
« tre généralement au centre ou plus près des localités, et suit les courants
« déjà établis.
o II est vrai que l'établissement sur routes oblige à réduire la vitesse
« à 20 kilomètres à l'heure. Mais cette prescription du cahier des charges n'a
« rien d'absolu. Elle a été sans doute dictée par les craintes qu'inspirait à
« l'origine la traction par locomotive sur routes, alors qu'elle était encore
(c ù l'état d'essai. Après la consécration de la pratique, nous pensons que, si
CHEMINS DE FEK SUR ROUTES 321
« besoin était, cette vitesse pourrait être portée saos danger à 25 et môme
« à 30 kilomètres à l'heure.
« Mais pour un service purement local, cette augmentation de vitesse n'est
« pas généralement nécessaire. La limitation à 20 kilomètres est suffisante et
« elle procure par surcroît l'avantage d'assurer la bonne conservation de la
« voie et du matériel roulant, et, en cas d'accident, obvie aux conséquences
€ dangereuses qui'résultent d'une grande vitesse.
« En somme, d'après l'expérience des résultats acquis, se priver volontai-
« rement de 1-emprunt des routes, partout où cela est possible, c'est gaspiller
« en pure perte la dépense relative à l'infrastructure correspondante. »
Il y a lieu encore de remarquer le système financier qui a pré-
valu dans la Sarthe. Il est excellent.
Au lieu de charger le concessionnaire de faire l'avance des frais
de premier établissement et de lui rembourser cette avance par
une annuité comprenant l'intérêt et l'amortissement, c'est le
département lui-même qui a supporté directement la dépense de
l'infrastructure ; il a remboursé au fur et à mesure et sans intérêt
les dépenses de la superstructure et du matériel roulant faites à
forfait par le concessionnaire.
Celui-ci n'est donc tenu à disposer que d'un capital restreint,
sans obligations ; soit nominalement 1,000,000 pour le cas de la
Sarthe. Cette combinaison oiTre un avantage considérable. En
effet, bien souvent le crédit du concessionnaire ne lui permet pas
d'avoir de l'argent à un taux inférieur à 6 ou 7 p. 100, tandis que le
Crédit foncier prête aux départements à un taux* bien moindre ; d'où
il suit que le concessionnaire, pour ne pas être en perte, est forcé
d'enfler le prix de premier établissement du kilomètre de chemin
de fer, et qu'en fin de compte le département et FEtat sont lésés.
Le système adopté dans la Sarthe est infiniment préférable et
plus économique.
D'autre part, mieux vaut entreprendre la construction de che-
mins de fer successivement, en y introduisant au fur et à mesure
les perfectionnements que l'exploitation antérieure aura fait recon-
naître, plutôt que de créer d'emblée et sans réflexion, ainsi que
cela a été entrepris dans plusieurs départements, un réseau
complet, dont la conception, le type et l'outillage apparaissent
vicieux dès les premiers temps de l'exploitation, c'est-à-dire
alors qu'il n'est plus possible d'y porter remède.
21
322 CHEMINS DE FEU SUU ROUTES
La formule d'exploitation des chemins de fer de la Sarthe
ne paraît pas moins recommandablc que le mode de cons-
truction.
Pas de garantie de la part du département ; exploitation tout
entière aux risques et périls du concessionnaire ; de cette ma-
nière, celui-ci n'est plus incité à se désintéresser presque complè-
tement du résultat de Texploitation, ainsi que cela pourrait avoir
lieu dans la plupart des cas, si les concessionnaires se renfermaient
strictement dans la formule de garantie qui forme la base habi-
tuelle des concessions.
Avec le système de la Sarthe, il doit au contraire s'ingénier, se
mettre activement à la recherche du trafic, le faire naître. L'in-
térêt du concessionnaire dans la construction n'est plus que de
peu d'importance et vise principalement l'exploitation qui doit être
le principal et non l'accessoire de l'entreprise.
En d'autres termes, le système généralement adopté à la suite
de la loi de 1880 est quelquefois la continuation des erreurs nées
de la loi de 1865 : le plus souvent, une concession de chemins de
fer est une entreprise de construction. Au département do la
Sarthe et à M. Faliès revient l'honneur d'avoir envisagé le chemin
de fer d'intérêt local sous son véritable aspect, qui est de desservir
utilement les intérêts des populations et non de constituer une
entreprise * .
■
Description de la ligne du Mans à la Ghartre. — La tête de
ligne est placée dans Tintérieur de la ville du Mans, à proximité
de la gare de la Compagnie de l'Ouest ; la gare des voyageurs et
* Les concessions nouvelles du Mans à Saint-Denis-d'Orqucs (Sarlhe) et de Blois à
Ouzouer, Blois à la Motte-Beuvron (Loir-et-Cher) portent à près de 200 kilomètres les
chemins de fer sur routes concédés à M. Faliès.
Les 100 kilomètres de lignes du Loir-et-Cher sont concédés au prix forfaitaire
d'établissement de 40.000 francs par kilomètre, payables par le département, au fur
et à mesure de l'exécution des travaux. L'exploitation est aux risques et périls du
concessionnaire tant que la recelte brute ne dépasse pas 3,500 francs par kilomètre.
Au delà, partage avec le département. (Décret du 25 décembre 1880.)
Une concession a été faite sur des bases analogues dans la Dordogne. (Décret du
22 décembre 1886.) Eiiviron 100 kilomètres de chemins de fer sur roules ont été
concédés à M. Empain au prix de 45,000 francs par kilomètre, payable au fur et à
mesure de l'exécution des travaux, et avec exploitation à la charge du concessionnaire
tant que la recette brute (impôt déduit) reste inférieure à 2,820 francs par kilomètre,
partage du surplus des recettes au delà.
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 323
des marchandises, le dépôt, les bureaux do gare et le service d'ex-
ploitation sont réunis sur un même emplacement et seraient
insuffisants pour assurer le service de tout le réseau départemental
projeté. Aussi le départiement a-t-il résolu, en principe, à l'occasion *
de la ligne du Mans à Saint-Denis-d'Orques de faire abandon de
la gare actuelle et de créer une gare plus importante tout à fait
au centre de la ville du Mans, à l'emplacement de l'hôpital insuf-
fisant et ruiné qui doit être démoli et reconstruit extra-muros.
Le réseau départemental sera ainsi desservi au Mans d'une
manière tout à fait rationnelle et avantageuse.
Au sortir de la gare actuelle, la ligne de la Chartre emprunte
le milieu de la chaussée des rues et chemins jusqu'à Pontlieue^
faubourg du Mans, situé à 2 kilomètres de la tête de ligne ; il eût
été possible de se tenir sur les accotements de la route sur les
3/4 au moins de ce parcours, et on a le dessein de faire prochai-
nement cette modification à laquelle on ne s'est pas arrêté tout d'a-
bord en raison de l'incertitude et des tâtonnements bien excusables
pour un début.
De Pontlieue à Parigné, 12 kilomètres, le tracé suit généralement
l'accotement de la route départementale du Mans à Tours qui a
15 mètres de largeur, dont 8 mètres de chaussée, et ne s'en écarte
que lorsque les déclivités y sont supérieures à 30 millimètres par
mètre, limite fixée par le cahier des charges.
De Parigné au Grand-Lucé, 17 kilomètres, le chemin est à peu
près constamment à travers champs, sauf l'emprunt d'un chemin
vicinal de grande communication qui n'a que 8 mètres de largeur
entre fossés. Enfin du Grand-Lucé à la Chartre, il est presque
exclusivement établi sur l'accotement d'une route qui n'a pas plus
de 12 mètres de largeur dont 6 mètres de chaussée.
Dans laplupart des localités à par tir de Parigné, celle-ci comprise,
les stations sont en général établies tout près des villages, à leur
sortie même ; mais le chemin de fer ne pénètre pas au centre de ces
localités, soit en raison des difficultés du terrain, soit en raison du
peu de largeur des rues, soit encore parce qu'il eût été impossible
de trouver dans Tintérieurde la localité un emplacement suffisant
pour pouvoir y installer une station.
Avant d'arriver à la Chartre, le chemin franchit à niveau la
324 CHEMINS DE FEU SUIi ROUTES
ligne de TEtat de Paris à Niort, et bien que le passage soit livré au
premier train qui se présente sans distinction, soitqu'il appartienne
au grand réseau, soit à la Compagnie d'intérêt local, celle-ci a
trouvé cette traversée à niveau assez incommode et les dépenses
de gardiennage assez élevées pour demander au département de
supprimer cette sujétion sur les nouvelles lignes en exécution ou
projetées ; le département a accédé à cette requête, bien qu'elle en-
traînât pour lui la charge de rétablissement de passages supérieurs.
Conformément au cahier des charges, la ligne a tout d'abord été
établie avec contre-rails sur les sections où elle emprunte la chaus-
sée des routes ; le vide entre contre-rails était fixé à 0,029 en ali-
gnement. Mais ce faible écartement était insuffisant pour assurer
librement le jeu des boîtes et, d'autre part, il était encore assez
important pour que les roues des véhicules légers s'y engageassent
avec coincement.
Divers accidents ont amené le public à demander la modification
de cet état de chose. Le concessionnaire n'a pas trouvé de meil-
leure solution que la suppression du contre-rail; lorsque les or-
nières creusées dans l'empierrement le long des rails par le bou-
din des véhicules deviennent trop accusées, soit par suite du jeu
dans les boîtes, soit par suite du passage des voitures privées, on
se borne à y entasser fortement des cailloux, de telle sorte que le
rail se trouve comme encastré dans une maçonnerie; on enlève à
la main les cailloux qui touchent le rail et le boudin se fraye lui-
même un passage. Il n'en est jamais résulté de déraillement, mais
il convient de dire que les vitesses sont réduites à 10 kilomètres
sur ce parcours. La suppression des contre-rails eût été moins
facile si la voie publique eût été construite en pavés; on eût dû,
pour y arriver, remplacer les pavés d'entre-rails par du macadam.
Le concessionnaire a fait régulariser par arrêté préfectoral la
suppression des contre-rails qui a eu lieu à la satisfaction de tout
le monde.
On a de même supprimé les contre-rails aux passages à niveau,
ainsi qu'on le fait en Allemagne. Le choc que peuvent occasionner
les roues des véhicules franchissant perpendiculairement le rail,
n'est en eiïet pas plus important si la chaussée est bien entretenue
que le choc que n'évite pas la présence du contre-rail.
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 323
*
La voie établie sur accotements entre le Mans et le Grand-
Lucé n'a pas été protégée contre les véhicules par une bordure en
saillie; le cahier des charges ne comportait pas cette précaution qui
a été postérieurement introduite dans le cahier des charges annexé
à la loi de 1880.
Mais lorsque la ligne du Grand-Lucé à la Chartre a été cons-
truite, en exécution de la loi de 1880, on a jugé, d'après l'exemple
précédent, que la bordure de trottoir était trop onéreuse et que la
saillie du balast constituait une protection suffisante. Aussi n'a-t-on
pas cru devoir appliquer à la lettre l'article 7 du cahier des charges
type.
Dans un assez grand nombre de cas, où les déclivités delà route
dépassaient 30 millimètres, on a évité une déviation en écrètant
l'accotement sur une profondeur dépassant quelquefois 1 mètre,
la route étant protégée du côté de la tranchée par une banquette en
terre.
Le profil de la ligne du Mans à la Chartre est assez mou-
vementé : les déclivités supérieures à 25 millimètres s'y ren-
contrent très-fréquemment, même dans les déviations, et sans
qu'elles soient toujours pleinement justifiées.
De même on a souvent eu recours en pleine voie aux courbes
roides concomitantes avec les fortes déclivités; le rayon de
100 mètres est fréquemment adopté et, dans plusieurs cas des
rayons moindres de 80 et même 60 mètres. Sous ce rapport cepen-
dant, la ligne du Mans à la Chartre est mieux construite que celle
de Haironville à Triaucourt.
Dans la traversée du Mans où la vitesse est limitée à 10 kilo-
mètres à l'heure, on a eu recours sans le moindre inconvénient au
rayon de 50 mètres.
Le rail est en acier, à patin et du poids de 15 kilogrammes au
mètre. Les barres ont 8 mètres de longueur etle cahier des charges
fixe à 9 le nombre de traverses par rail, nombre que le conces-
sionnaire a spontanément et fort judicieusement porté à 12 dans
les courbes de faible rayon.
Ces traverses sont en chêne du pays et ont un écartement axial
en alignement, de 95 centimètres, et de Om. 60 au joint. Les joints
sont d'équerre et en porte-à-faux.
326 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
Le balast a 30 centimètres d^épaisseur lorsque le sous-sol est
bon, 35 à 40 centimètres quand le sous-sol est humide ou argi-
leux. Le balast est d'ailleurs de bonne qualité, quoique un peu
trop fin, tout au moins sur la section du Mans au Grand-Lucé où
on a dû le recouvrir avec de Texcellent gravier du Loir pris à la
Chartre.
Avec ces éléments, la voie supporte parfaitement les vitesses de
30 à 35 kilomètres que peuvent au maximum atteindre les ma-
chines.
La figure 29 (PI. XII) représente le type des stations, construites
de telle sorte que toutes manœuvres ou manutations doivent être
faites par les agents des trains au passage.
Ce type convient parfaitement au but qu'on s'est proposé.^
Les stations sont abandonnées sans surveillance en dehors des
heures de trains; il n'y a n'y télégraphe, ni bâtiment.
Cependant on y a installé une guérite en briques et fer qui sert
au rangement des outils, des papiers du correspondant et du con-
ducteur, et au besoin de petits colis.
Cette installation trop primitive ne satisfait que médiocrement
le public, obligé d'attendre les trains en restant exposé aux intem-
péries, s'if ne veut pas faire usage delà maison du correspondant;
celui-ci est généralement un marchand de vins très-voisin de la
station qui met gratuitement une salle à la disposition des voya-
geurs, avec l'espoir, le plus souvent réalisé, que ceux-ci l'indem-
niseront largement de ce bon office par les consommations qu'ils
prendront.
Diverses localités, trouvant cette gratuité ou trop onéreuse ou
incommode, ont réclamé l'établissement dans la station de petits
abris pour les voyageurs; le concessionnaire y a consenti à la con-
dition que le département et la commune prissent chacun à leur
charge un tiers delà dépense d'établissement, qui est de 1,000 fr.
en moyenne.
Le chemin de fer du Mans à la Chartre n'est pas relié par des
voies d'échange aux grandes lignes voisines, ni à la gare du Mans
ni à celle de la Chartre.
La liaison avec la gare du Mans deviendra toutefois inévitable
après l'ouverture de la ligne du Mans à Saint-Denis-d'Orques ; car
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 327
les frais de camionnage et de transbordement, qui représentent de
1 fr. 50 à 2 francs par tonne, sont une trop lourde charge pour le
concessionnaire, qui les supporte intégralement sans les réclamer
au public.
L'alimentation en eau est assurée, au Mans par la distribution
de la ville, et dans trois stations du parcours, par une grue-réser-
voir avec pompe à main manœuvrée, à la Cbartre, par le chauffeur
de nuit, au Grand-Lucé et à Parigné par le correspondant auquel
on donne une rétribution spéciale de 25 centimes pour 1 mètre
cube, qui suffit par jour en chacun de ces points, où Ton prend peu
d'eau à dessein.
Matériel roulant. — Voitures et wagons. — Le concessionnaire
s'est attaché à obtenir un matériel léger, afin que les manœuvres
dans les stations pussent être faites avec une grande célérité, et
qu'en cas de déraillement, le personnel du train pût suffire au be-
soin à remettre sur rails voitures et wagons.
L'écartcment des ossieuxafait l'objet de nombreuses expériences;
le matériel primitif a été construit à l'écartement de 1 m. 50; on
a reconnu ensuite que le matériel à écartement de 2 mètres pas-
sait sans difficulté dans les courbes ; mais on s'est arrêté par pru-
dence à l'écartement de 1 m. 80.
Toutes les voitures sont à couloir et frein à vis ; elles sortent
des ateliers de Nivelles (Belgique). Elles ne comportent que deux
classes (fig. 30, PI. XII).
Lés voitures primitives contiennent 14 places à l'intérieur; les
nouvelles 16 places. Les deux plates-formes extérieures ont
80 centimètres de longueur et la largeur de la voiture.
Le poids de ces véhicules varie de 3,200 à 3,500 kilos.
Le nombre des voitures est de 15, dont 2 mixtes ; cet armement
étant insuffisant les jours de fête, on y adjoint les fourgons dans
lesquels on place des bancs.
Les fourgons sont au nombre de 5, tous munis de freins : deux
d'entre eux, dont chacun entre toujours dans la composition des
trains, renferment Tun un compartiment de 1" classe, l'autre un
compartiment de 2'' classe; il» sont attelés derrière la machine sans
interposition d'autre fourgon ou wagon de choc.
328 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
Tous les véhicules, fourgons et voitures, sont disposés de ma-
nière à permettre la circulation de bout en bout du train soit au
conducteur, soit même aux voyageurs, qui se montrent très-satis-
faits de ce matériel.
En raison des fortes rampes, on est obligé d'ajouter un garde-
frein au personnel normal do 2 agents, lorsque la composition du
train dépasse 6 véhicules. Bien que, pour éviter ce supplément de
personnel, on fasse déjà usage du frein à déclanchement Eberlein,
que le mécanicien peut mettre en action à Taide d'une corde, on
a cependant le projet de munir tout le matériel de grande vitesse
du frein à vide, la conduite seule, et non le frein, devant être ins-
tallée sur les wagons de petite vitesse.
Le matériel à marchandises se compose de :
3 wagons couverts pour bestiaux;
12 wagons plats, dont 2 à traverse mobile et flèche d'ac-
couplement pour transport de pièces de plus de
6 mètres de longueur;
5 tombereaux.
Total. 20 wagons, soit 0 w., 4 par kilomètre.
Locomotives. — 4 machines, pesant 10 tonnes à vide, 13 tonnes
en charge, sortent des ateliers de Tubize (Belgique).
1 machine de 12 tonnes avide, 15 tonnes en charge, a étécons-
truite par Dubois etC** à Anzin.
L'armement en machines ressort à 1 par 10 kilomètres, pour
un service journalier de trois trains.
Le mouvement extérieur est hermétiquement enveloppé; on
évite ainsi l'usure rapide par la poussière et le sable lorsque les
organes sont trop bas, et en même temps, on ne court pas le risque
d'accrocher les objets reposant sur le sol et de fausser ou casser
les bielles, ce qui est fréquent sur la ligne de Haironville à Triau-
court.
Les machines sont munies d'une forte cloche dont le mécani-
cien doit faire usage dès qu'il aperçoit une voiture ou des voya-
geurs sur les routes, ou pour annoncer son arrivée aux stations.
L'usage du sifflet, <jui effrayerait les chevaux, est proscrit.
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 329
Les conditions de la locomotive belge, la plus employée, sont
les suivantes (fig. 31) :
Diamètre des cylindres .... 0°23
Course des pistons 0 36
Diamètre des roues 0 83
Timbre de la chaudière .... 12 kilos.
Surface de la grille 0*^764
Surface de chauffe du foyer. . . 3 704
— des tubes . . 15 56
Poids à vide 11 tonnes.
Poids en charge 13 —
Empattement 1"80
Largeur toutes saillies comprises. 2 »
Les machines de Turbize remorquent sur la ligne 35 tonnes
brutes en tempâ normal, soit 7 véhicules.
Les machines Dubois, 45 tonnes, soit 9 véhicules.
Présentement il n'y a pas d'ateliers de réparations ; on fait au
dépôt les réparations courantes ; mais on a le dessein de cons-
truire un atelier dans la gare nouvelle. Les grosses réparations
sont faites en ville.
U. — EXPLOITATION
Administration et Direction
M. Faliès est l'administrateur délégué chargé de la direction
du chemin ; le conseil d'administration se réunit chaque mois, et
règle le service des trains, approuve les marchés, les tarifs, etc..
Tous les services sont conduits au Mans par un directeur de
l'exploitation, chargé en même temps de la superstructure des
lignes neuves.
Le service central comprend 4 employés à la comptabilité et
3 agents au contrôle des recettes placés sous les ordres d'un chef
du service central.
Tous les chiffres qui seront donnés dans la suite, dépenses ou
330 CHEMINS DE FEU SUR ROUTES
receltes, sont afférents à la section du Mans au Grand-Lucé, le
prolongement du Grand-Lucé à la Chartre ayant été ouvert à
Fexploitation depuis trop peu de temps pour que Ton puisse con-
sidérer comme définitifs les chiffres qui s'y rapportent.
Les dépenses de l'administration centrale en 1885 s'élèvent pour
la 1" section à 7,678 fr. 54, soit à la somme kilométrique très
modeste de 250 francs.
Les dépenses du service central du Mans sont comprises dans
celles de chacun des trois services, voie, traction, mouvement
et trafic.
Voie et Bâtiments
Un chef-poseur surveille l'ensemble de ce service sous les ordres
du directeur de l'exploitation.
Le personnel d'entretien est limité pour toute la ligne du Mans
à la Chartre, à 4 équipes de 3 agents^ spit une équipe par 12 ki-
lomètres. Un cantonnier est spécialement affecté à la traversée du
Mans jusqu'à Pontlieue.
Grâce à la perfection de la pose au moment delà construction,
à l'excellence du balast et des traverses et à la précaution prise
de forcer le nombre de celles-ci dans les courbes de petits rayons
et grâce aussi au faible poids du matériel, ce personnel restreint
suffit pour entretenir la voie dans un excellent état, et trouve
encore le temps de faire des travaux neufs, rectification de
courbes, amélioration du profil, etc.
Il est vrai que l'on n'en est pas encore arrivé à la période des
remplacements et que l'entretien de la voie consiste seulement en
relevages.
On a parlé plus haut de l'absence de contre-rails aux passages
à niveau et dans la traversée du Mans à Pontlieue. Pour réduire
les ornières provoquées par le passage du boudin de la roue, et
accrues par le jeu latéral, on a réduit sur ce parcours l'écartement
de la voie à 0,985 dans les alignements et proportionnellement
dans les courbes. Cette disposition a produit un très-bon résultat,
grâce, il ne faut pas l'oublier, à la vitesse réduite à 6 kilomètres
à l'heure.
CHEMINS DE FER SUR ROUTES :<3<
Les dépenses de voie pour la ligne du Mans 4iu Grand-Imcé se
sont élevées en i88o à 8,902 fr. 92, soit, par kilomètre, au chiffre
presque invraisemblable de 290 francs.
Traction
, Un chef de dépôt est chargé de la conduite de ce service, dont
4 mécaniciens et 4 chauffeurs forment le personnel actif ; 3 équi-
pes sont en service, une est au dépôt pour réparations ou lavage.
Le roulement comporte un jour de dépôt après 4 jours de marche
et un déplacement : une nuit est en effet passée à la Chartre.
Le personnel d'entretien du dépôt se compose d'un ajusteur,
qui est au besoin mécanicien suppléant, d'un chaudronnier et d'un
élève mécanicien.
Un coketier aide le garde-magasin, nettoie le dépôt et le bureau,
tient le journal d'entrée des matières au dépôt et assure la distri-
bution du combustible.
Enfin 2 chauffeurs de nuit, un au Mans, un à la Chartre, com-
plètent le personnel du service de la traction, qui comprend par
conséquent 15 agents pour toute la ligne du Mans à la Chartre.
L'allocation de combustible est uniformément de 5 kilos par
kilomètre, quelle que soit la charge, et allumage compris : les
machines ne consomment guère plus de 3 kilos et demi à 4 kilos,
ce qui laisse au mécanicien une prime mensuelle de 60 francs en-
viron. Le chauffeur a droit au tiers.
Le graissage se fait avec un mélange par moitié d'huile de pied
de bœuf et d'huile d'olive ; le mécanicien est tenu d'assurer lui-
même le graissage.
Le parcours journalier des machines est en moyenne de 96 kilo-
mètres.
Les dépenses de traction pour 1885 s'élèvent à la somme de
33,455 fr. 56, soit 1,080 fr. par kilomètre, chiffre qui paraît rela-
tivement élevé si Ton tient compte de la faible consommation des
machines, de l'absence d'ateliers, et de l'&ge récent du matériel
qui n'a pas encore eu à supporter de grosses réparations.
332 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
Mouvement et Trahc
Un agent principal d^exploitation, agent essentiellement actif,
assure le service des gares et des trains que le directeur surveille
d'ailleurs constamment comme toutes les branches du service.
La gare du Mans comporte seule un personnel sédentaire,
composé d'un chef do gare, d'un sous-chef de gare et d'un facteur
de grande vitesse.
Dans les villes et villages, la Compagnie a un correspondant qui
doit être présent à tous les trains ; c'est autant que possible un
aubergiste voisin,^ qui est tenu de recevoir et d'abriter les voya-
geurs sans leur demander de rétribution. Dans plusieurs cas, on
a ÛTié l'emplacement de la station en tenant compte de la proximité
d'un débit de vins ; le plus souvent le correspondant choisi a lui-
même trouvé avantage à construire une maison immédiatement à
côté de la station.
L'aubergiste correspondant est tenu d'installer à ses frais une
bonne horloge dans la salle commune.
Il ne distribue pas de billets.
A l'arrivage, il reçoit les colis de grande et de petite vitesse et
la feuille d'expédition, et les transporte ou camionne au besoin à
domicile, moyennant une taxe de camionnage arrêtée par la Com-
pagnie ; il perçoit les ports dûs et les verse au conducteur avec la
feuille d'expédition émargée par le destinataire.
La Compagnie ne délivre de récépissé timbré au public qu'en
cas de réclamation, ce qui n'a jamais lieu, celui-ci préférant
économiser 70 centimes.
A l'expédition, le correspondant reçoit des expéditeurs les colis
de grande et de petite vitesse, avec la déclaration d'expédition.
En cas de transport en port payé, ce qui est rare, il demande à
l'expéditeur une provision, car il ne connaît les tarifs que par à
peu près et n'est pas chargé de la tenue des écritures qui est dévo-
lue spécialement au conducteur de train.
Le correspondant a un salaire fixe de 15 francs, le produit de
son factage est ordinairement très-faible. Mais son véritable trai-
tement consiste dans les bénéfices qu'il réalise sur les consomma-
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 333
lions livrées aux voyageurs. Aussi co poste de correspondant
est-il assez recherché en général.
Le service de chaque train est assuré par un conducteur et un
garde-frein.
Chaque conducteur est chargé de délivrer les billets au guichet
de la gare du Mans avant le départ de son train.
En cours de route, les billets sont distribués aux voyageurs au
fur et à mesure qu'ils montent dans les voitures ; un contrôle est
efTectué pendant la marche.
Chaque conducteur dispose d'un casier à billets portatif, conte-
nant des carnets à souche de billets de toute gare à toute gare ; le
billet doit être détaché de la souche sous les yeux du voyageur
qui est ainsi chargé de contrôler le conducteur, concurremment
avec Tagent principal do l'exploitation.
Le conducteur retire lui-même les billets aux voyageurs qui
descendent. Lorsque son train parti du Mans y revient, il établit
à l'aide des souches et du talon un bordereau de recettes voyageurs
relatif au train.
On procède d'une manière analogue pour les bagages et messa-
geries ou la petite vitesse. La feuille d'expédition est détachée
d'un carnet à souche et remplie par le conducteur qui est ainsi en
même temps taxateur ; il remet la feuille d'expédition avec le colis
au correspondant, lui fait émarger la souche qu'il conserve pour
la joindre à son bordereau de grande ou de petite vitesse ; à l'aide
de ces divers bordereaux, le conducteur établit un état résumé des
recettes du train.
En fin do journée, chaque conducteur, à tour de rôle, dresse un
résumé général des recettes de la journée.
La comptabilité est ainsi journalière et accompagne les verse-
ments. Le chef de station du Mans centralise toutes les écritures et
les recettes sont versées tous les jours à la caisse du service central.
On a dit que les stations ne disposaient pas de télégraphe; en
cas de détresse, on a recours au télégraphe privé de Parigné, du
Grand- Lucé ou do la Chartre.
Le nombre des trains est de trois par jour dans chaque sens ; de
plus, il y a deux trains supplémentaires le dimanche, un jusqu'à
la Chartre, un jusqu'à Parigné qui compte 3,000 habitants. Enfio^
334 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
le vendredi, jour de marché au Mans, un train est mis en marche
de bout en bout.
A chaque station de croisement, le premier arrivé entre en gare ;
le conducteur prend dans la guérite une plaque de manœuvre ; lo
second train doit marquer Tarrèt à la pointe de Taiguille et
ne peut entrer en gare qu^autant que la plaque de manœuvre est
présentée au mécanicien qui doit s'assurer qu'elle porte en grosses
lettres lo nom de la station. De même au départ, le premier train
ne peut quitter la station qu'autant que le conducteur du second
lui présente la plaque de manœuvres.
En cas de retards, le train qui vient du Mans a droit de pré-
séance: si après un délai d'attente de 15 à 30 minutes, variable
suivant la station, le train allant au Mans n'est pas arrivé, l'autre
train reprend sa marche ; il est formellement interdit au second
train de se mettre en marche s'il ne peut arriver à la station de
croisement dans le délai ci-dessus indiqué. On trouve dans ce règle-
ment, qui est loin d'être à l'abri de la critique, l'avantage de porter
ainsi secours au train en retard, s'il a été arrêté par une détresse.
Il convient d'ailleurs d'ajouter que la marche des trains est
très-régulière.
La vitesse commerciale des trains est de 46 kilomètres à l'heure.
A Tarrivée en gare, c'est le personnel de la machine qui est
responsable de l'aiguillage. Qu'il y ait ou non croisement, chaque
train doit s'arrêter avant la pointe d'aiguille, et le chauffeur doit
vérifier et maintenir l'aiguille pendant le passage du train.
Dans quelques stations où il -n'y a pas habituellement de croise-
ment, Taiguille est Cadenassée, mais le chauffeur n'est pas dispensé
de descendre de la machine, précaution excellente pour des
gares abandonnées.
La composition des trains est limitée par le cahier des charges à
une longueur totale de 60 mètres, ce qui correspond à 10 véhicules,
machine comprise. En fait, comme il a été dit à propos des loco-
motives, celles-ci ne remorquent guère plus de 7 à 8 véhicules.
Les voies d'évitement pour croisemeats sont prévues à une
distance moyenne de 6 kilomètres; elles ont strictement la lon-
gueur libre de 60 mètres.
Les manœuvres de wagons dans les stations sont eflectuées à la
CHEMINS DE FEK SUH ROUTES 335
plaque quand il n'y a qu'un wagon à prendre ou laisser, à la ma-
chine quand il s'agit d'une rame. Les manœuvres ou manutentions
sont assurées normalement par le conducteur et le garde-frein
assistés par le correspondant, ou un agent de la voie quand il s'en
rencontre dans la station au passage du train.
Le transbordement dans les gares de transit, le Mans ou la
Chartre, est, comme il a été dit déjà, entièrement à la charge de
la Compagnie, sans participation du public; d'où il appert que la
taxe totale perçue du public par la Compagnie est fréquemment
inférieure aux dépenses de camionnage qu'elle a à supporter et
qui sont:
Au Mans, de. . . . 1 fr. 50 par tonne,
A la Chartre, de. . 2 fr. —
Tarifs et Trafic — Les tarifs fixés par le cahier des charges sont :
Pour les voyageurs (impôt non compris), 0 fr. 10 pour la
1" classe et 0 fr. 075 pour la 2' classe ;
Pour les marchandises, de 16, 14, 10 et 8 centimes, suivant la
classe.
En fait les tarifs réellement appliqués ont été réduits de près de
50 p. 100 sur ceux du cahier des charges par la Compagnie qui
attribue à cette réduction le trafic important de voyageurs qu'elle
est parvenue à obtenir et qui représente environ 80 p. 100 de son.
trafic total.
La ligne du Mans à la Chartre a effectivement 48 kilomètres
de longueur, mais moins de 40 kilomètres à vol d'oiseau ; aussi
les transports de grande vitesse bénéficient-ils des dispositions de
la loi du 11 juillet 1879, c'est-à-dire que l'impôt est perçu par
abonnement à la place et à la voiture.
Vis-à-vis de la Compagnie de l'Ouest et de l'Administration des
chemin de fer de TEtat^ c'est-à-dire au Mans et à la Chartre, la
Compagnie est considérée non comme un correspondant, mais
comme un expéditeur ou destinataire ordinaire, c'est-à-dire qu'elle
règle à présentation les débours, avances ou ports dus, etc..
Les dépenses du mouvement et du trafic pour 1885, contrôle des
recettes compris, s'élèvent, pour la ligne du Mans au Grand-^Lucé ^
à 28,352 fr. 21, soit à 914 fr. par kilomètre.
336 CHEMINS DE FEH SUH ilOUTES
Dispositions diverses. — Les visites du médecin sont à demi-
tarif, et les consultations à la gare du Mans, gratuites. Les médi-
caments sont fournis par le pharmacien de la Société de secours
mutuels au tarif de cette Société.
Une caisse de secours sera organisée quand le réseau sera
complété.
Des gratifications proportionnelles aux recettes sont accordées
en fin d'année, jusqu'à concurrence d'environ 5 à 6,000 fr.
La proportion du personnel est de 1 agent, 5 par kilomètre.
Résultats généraux pour Tannée 1885.
En résumé, les dépenses se récapitulent comme suit :
•
Administration 7.678 54
Voie et bâtimenU 8.902 92
Traction 33.435 56
Mouvement et trafic 28.325 2i
Dépenses diverses 2.735 70
Total 80.924 93
Soit par kilomètre 2.610 »
Ces dépenses ne tiennent pas compte de 2,734 fr. 01 pour
dépenses d'ordre.
Les recettes pour le même exercice sont :
\^ GRANDE VITESSE (impôt déduit)
Voyageurs • 81,672 80
Accessoires 9.154 05
Total 90.826 85
20 petite vitesse
Marchandises et accessoires 24.307 65
3^ RECETTES DIVERSES
Factage, etc 206 40
Total 115.340 90
Soil par kilomètre 3.720 »
CHEMINS DE FEIt SUR ROUTES
337
L'exploitation de la ligne du Mans au Grand-Lucé a donc fourni
en 1885 un produit net de 34,395 fr. 97.
Soit par kilomètre de 4,110 fr. dépenses d'ordre non comprises.
Par contre la ligne du Grand-Lucé à la Chartre, ligne neuve,
a produit une insuffisance de recettes de 8,786 fr. 86, ce qui a
réduit à 25,609 fr. 11 le produit net total dont il y aurait encore
lieu de déduire une réserve pour renouvellement de voie et de
matériel, ainsi que pour les risques d'accidents et d'incendie qui
ne peuvent être couverts qu'en partie par les assurances.
RÉSULTATS COMPARATIFS POUR LES ANNÉES 1883, 1884 et 1885
en
^3
RÉSULTATS TOTAUX
RÉSULTATS KILONÉTRIQllS
-Il
<
*=> Ai
i
31
RECETTES
DÉPENSES
PHODLIT
IflT
RECETTES
DfPESSCS
PRODUIT
IfBT
90
1883
95.256 -
86.204 35
9.051 65
3.073
2.764
309
1884
31
106.205 35
80.453 58
25.751 77
3.426
2.595
831
75
i885
31 115.340 90
80.924 93
3i.415 97
3.720
2.610
1.110
70
22
CHAPITRE XXIII
CHEMINS DE FER DU GAMBRËSIS
De Cambrai au Gateau-Cambrésis. . . 26 kil.
Du Gâteau au Gatillon 10 —
Total 36 kil.
1. — ÉTABLlSSEME.lîT
La ligne de Cambrai au Catillon, qui est établie sur raccotement
de la route nationale n® 39, de Montreuil-sur-MeràMézières,aété
déclarée d'utilité publique par décret en date du 17 août 1880,
sous le nom de « tramway à traction de locomotives » destiné au
service des voyageurs et des marchandises.
Les concessionnaires, MM. Chevalier, ingénieur-constructeur
de matériel de chemin de fer, et Lambert et i\ey, ingénieurs,
recevaient une subvention totale d'environ 14,000 fr. par kilo-
mètre.
La section de Cambrai au Caleau a été livrée à l'exploitation en
1881, celle du Cateau au Catillon en 1885. Le cahier des charges
provisoire qui avait été annexé à l'acte de concession, a été rem-
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 330
placé par le cahier des charges type qui résulte de la loi du
41 juiu 1880.
L'établissement du chemin sur accotements de route n'avait pas
donné toute satisfaction aux concessionnaires, qui avaient dû,
d'une part, faire des dépenses importantes pour le séparer de la
route par une bordure de trottoir, et d'autre part suivre un profil
accidenté, à déclivités atteignant souvent 30 et même 33"" par
mètre, ce qui était un inconvénient assez grave, en raison de l'im-
portance relative du trafic; de plus, les accidents n'étaient pas
rares, d'où plaintes du public, procès, et avaries au matériel, et
enfin, la longueur des trains est limitée à 60 mètres par l'article 15
du cahier des charges, ce qui est une grave sujétion quand le
trafic est important. Aussi la Société du Cambrésis se décida- t-elle
à ne pas emprunter les routes, d'ailleurs trop étroites, dans les
-entreprises dont elle sollicitait la concession, et qui ont été
déclarées d'utilité publique sous le régime de la loi de 1880, à
titre de chemins de fer d'intérêt local. Les lignes nouvelles, dont
la première seule est eu construction, sont les suivantes :
Denain au Catelet* 50 kil.
Le Catelet à Saint-Quentin 28 —
Le Catelet à Cambrai, par la vallée de l'Escaut. 26 —
Soit un ensemble de 140 kilomètres, y compris la ligne de
Cambrai au Catillon.
Pour toutes ces lignes, la subvention kilométrique s'élevait à
peu près au même chiffre que pour le tramway, et la dépense
d'établissement était limitée à un maximum d'environ 83,000 fr
par kilomètre, y compris les frais de constitution de capital.
Les déclivités limites adoptées par la Compagnie étaient de 0,015
par mètre, ce qui est justifié par le trafic relativement considé-
rable que Ton attend de ces lignes, traversant un pays très-riche,
actuellement mal desservi, et dont l'une, la transversale de Denain
à Saint-Quentin par le Catelet, est appelée à avoir un important
trafic de bout en bout en charbons, et doit, dans la pensée des
< Un tronçon de la li^^ne de Denain au Catelet, Caudry à Walincourt 10 kil., a été
ouvert à rdxploitation au commencement de 1887.
340 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
constructeurs, atteindre dès les premières années d'exploitation
un trafic kilométrique supérieur à 10,000 fr.
Les rayons des courbes sont fixés au minimum de 150°* en
pleine voie, et le rail sera du poids de 18 kilos acier.
Malgré des conditions de tracé bien moins favorables, et des
expropriations beaucoup plus importantes, la Société duCambrésis
espère établir ses lignes d'intérêt local à un prix de revient kilo-
métrique inférieur à celui de la ligne sur route.
Enfin le réseau du Cambrésis doit être relié à Denain avec celui
de la Société des Chemins de fer Economiques du Nord, ou
autrement dit, aux Tramways de Valenciennes. Les chemins du
Cambrésis seront composés, en fin de compte, de deux lignes
radiales autour de Cambrai, ville de 23,000 habitants, à laquelle
elles rattachent une population riche, dense, et se déplaçant aisé,
ment, et d'une ligne à trafic assuré et à grand parcours (Denain à
Saint-Quentin) raccordée à Caudry et au Catelet avec les deux
précédentes, et jouant entre le Catelet et Saint-Quentin (46,000 hab.)
le rôle de rayon par rapport à cette dernière localité fort impor-
tante, de même qu'entre Denain (15,000 hab.), Lourches (4,000 hab.)
etDouchy (1,500 hab.)
Un autre rayon partant de Cambrai pour aboutir à Arras, en
empruntant l'accotement de la route nationale de Montreuil à
Mézières, a également fait l'objet d'une demande on concession;
cette ligne prolongerait en ligne droite, vers l'Ouest, celle de
Cambrai au Catillon, et compléterait un réseau qui, établi dans
une des régions les plus riches et les plus populeuses de la France,
est, on doit le reconnaître, conçu avec toutes chances de succès,
en dépit de la faible subvention qui lui a été accordée.
Description de la ligne de Cambrai au Catillon^ . — La ligne
suit presque constamment la route nationale n® 32, entre Cambrai
et le Cateau; elle n'abandonne cette route qui a 20 mètres de lar-
geur que pour se rapprocher de l'importante agglomération do
Caudry (5,000 hab.) située en dehors de la route, pour contourner
le village d'Inchy et pénétrer dans la ville du Cateau (9,600 hab.).
* Les conditions techniques d'établissement de ce chemin ont été décrites récem-
ment dans la Revue générale des Chemins de fer (janvier et lévrier 1887;.
CHEMINS DE FER SUR ROUJES 341
Du Cateau au Catillon (2,500 hab.) le tracé est plus fréquemment
hors route, en raison des fortes rampes de celle-ci.
II est d'ailleurs certain que si, dans ce cas particulier assez rare,
Ton ne s'était pas astreint à emprunter la route nationale sur
la plus grande partie de son parcours, les localités, qui en sont en
général relativement éloignées, eussent été mieux desservies.
La tète de ligne est placée à la porte de la ville de Cambrai, sur
les glacis des fortifications; on avait pensé dans le principe à la
reporter au centre de la ville ; on y a renoncé en raison de l'ac-
tivité de la circulation dans la rue qui sert d'accès aux deux gares
de la Compagnie du Nord et de l'ancien chemin de Picardie et
Flandres, et aussi en raison de ce que cette rue présente des
déclivités de 40 millim. par mètre.
Le Catillon, terminus de la ligne, est situé sur le canal de la
Sambre, par lequel arrivant des grains et surtout des charbons;
aussi le trafic de petite vitesse a-t-il très-notablement augmenté
depuis l'ouverture de la section du Cateau au Catillon.
Dans son ensemble, le tramway est parallèle à la ligne de Cam-
brai à Busigny, et dessert les mêmes localités, au moins jusqu'au
Cateau; mais il offre sur la grande ligne l'avantage d*ètre plus
rapproché d'elles et de pénétrer dans l'intérieur même du Cateau
et aux portes de Cambrai, dont la gare de la Compagnie du Nord
est distante de 1,300 mètres; aussi a-t-il enlevé à cette Compagnie
la presque totalité des voyageurs de la région.
La distance du rail à la bordure de trottoir est limitée à 1™,15
au minimum, et la largeur du matériel à 2°',50, d^où une protec-
tion de 0",40 entre le train et la bordure de trottoir, protection
que le cahier des charges définitif réduit à 0°',30.
On a exigé du concessionnaire qu'il maintînt à la hauteur du
rail, la plate-forme de Taccotement emprunté pour faciliter la cir-
culation des piétons ; par suite, le balast, qui a 0 m. 30 d'épaisseur
et 2 mètres do largeur en tête, est noyé dans la terre, l'assèche-
ment de la voie est rendu très-difficile, et les traverses pourrissent
rapidement.
La route est pavée jusqu'au Cateau ; le mètre courant de bordure
exigée pour protéger le chemin contre les voitures a coûté sur
cette section 2 francs environ. Mais du Cateau au Catillon, la route
342 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
est empierrée, et les matériaux d'empierromeiit y forment une
maçonnerie extrêmement dure dans laquelle on a dû creuser une
tranchée de Om. 30 de largeur pour asseoir la bordure dulrottoir,
dont la pose est ainsi revenue à 5 ou 6 francs le mètre. Si, sur
cette section, on avait emprunté la route dans les rampes supé-
rieures à 30 millimètres, on eût dû, aux termes de l'article 7 du
cahier des charges, défendre la bordure par un caniveau de Om.30
de largeur, et le tout eût coûté plus de 10 francs le mètre courant.
Ces conditions onéreuses que prévoit le cahier des charges annexe
à la loi de 1880, rendent très-justifié l'abandon des routes, qui
a été fait pour les lignes nouvelles.
Les déclivités atteignent très-souvent la limite de 33 millimètres,
et le profil est très mouvementé (fig. 32, PI. XIII). Ces rampes limi-
tent à 30 tonnes la charge des trains, c'est-à-dire à 6 véhicules en
charge, ce qui nécessite assez souvent la mise en marche de
trains extraordinaires pour l'enlèvement des marchandises, parti-
culièrement l'hiver, période de transport des betteraves et du
charbon.
Bien que les rayons autorisés par le cahier des charges puissent
descendre à 40 mètres, on n'a pas cru devoir admettre moins de
100 mètres.
Le rail pèse 18 kilog.; il est en fer; on se propose de le rem-
placer par un rail de même poids en acier quand on arrivera à la
période du renouvellement. Ce dernier type a du reste été adopté
pour les nouvelles concessions.
Les barres ont 8 mètres de longueur et sont soutenues par
9 traverses. Les traverses sont en sapin créosote ; on les remplace
en entretien par des traverses de chêne.
On s'est attaché à rapprocher le plus possible les stations des
localités desservies, même au prix de l'abandon de la route, ce qui
est le cas pour Caudry, Inchy, le Cateau et Bazuel, et sans reculer
devant des acquisitions de ter/ain, qui ont atteint 13,000 francs
l'hectare sur certains points.
L'écartement moyen des stations et haltes est de 3 kilomètres.
Les stations sont généralement situées à proximité de la route :
on leur a donné une emprise beaucoup trop vaste. La station de
Beauvois (fig. 33) représente le type adopté, mais partiellement
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 343
exécuté; car on n'a nulle part établi de quai, ni halle aux mar-
chandises, ni de voie dévitement, le service se faisant en navette.
Chaque gare dispose donc seulement d'une voie de marchandises
reliée à la voie principale et prolongée par un cul-de-sac ; le trafic
des marchandises est à peu près exclusivement un trafic de wagons
complets, charbons, betteraves, grains, etc., et ne nécessitera pas
de longtemps la construction d'une halle à marchandises.
Quoi qu'il en soit, le type adopté dans cette prévision est peu
recommandable. La halle accolée au bâtiment des voyageurs [eût
été mieux à sa place.
Le bâtiment des voyageurs, quand il en existe un, se compose
seulement d'une salle d'attente avec bureau de distribution des
billets, le logement du chef do gare, qui devait être attenant
d'après le projet définitif, ayant été supprimé ou reporté plus
loin.
Dans la moitié des stations, et principalement dans celles
dénommées haltes, qui n'ont pas de voie de marchandises, la salle
d'attente n'est autre que la salle commune de Vestaminet le plus
voisin, où se fait la distribution des billets.
Dans plusieurs gares, Caudry, le Cateau, etc., on a adopté pour
loger le chef de gare une disposition économique qui a sa justifi-
cation dans les habitudes particulières de la population de la
région.
La Compagnie a traité avec un brasseur, qui construit, à ses
frais, dans la gare, sur le terrain appartenant à la Compagnie, un
estaminet, et un logement attenant pour le chef de gare ; la Com-
pagnie obtient ainsi un logement sinon absolument gratuit, car
elle doit rembourser en 18 ans la dépense des matériaux du loge-
ment et de l'estaminet, du moins très-économique.
On a le dessein d'appliquer le même système à toutes les gares
desservant à la fois voyageurs et marchandises.
Dans aucune partie de la France en effet, Vestaminet n'est une
annexe aussi indispensable à toute entreprise que dans le dépar-
tement du Nord. Tout établissement, agricole, industriel ou autre,
est doublé d'un estaminet, ce qui justifie le dicton du pays : « Le
nombre des kilomètres se compte par celui des chopes, w
Aussi l'emprunt par une Compagnie de tramways de l'estaminet
344 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
comme salle d'attente et lieu de distribution de billets est-il extrê-
mement recherché.
La gare du Cateau est une gare en cul-de-sac, ce qui ne présente
du reste aucun inconvénient, le service se faisant en navette entre
le Cateau et le Catillon, de même qu*entre Cambrai et le Cateau.
La gare du Cateau doit être ultérieurement reliée à la gare du
Nord, située à 1 kilomètre et demi, en vue d'assurer les échanges
d'un réseau à l'autre.
A Cambrai deux voies de transbordement parallèles ont été
installées, dès le début, à l'extrémité de la gare de la Compagnie
du Nord; la ligne locale n'est pas reliée avec la gare de Picardie
et Flandres, dont elle est très- voisine, mais à laquelle elle est
presque superposée.
Enfin, outre la gare tête de ligne, située comme il a été dit aux
portes de Cambrai, la Compagnie locale a installé à une distance
d'environ un kilomètre, près de ses ateliers, une gare de marchan-
dises pour ne pas obliger les agriculteurs ou industriels voisins à
venir apporter leurs produits ou chercher leurs arrivages à la gare
haute.
Il n'y a pas de signaux dans les gares, et on a exploité jusqu'en
1885 sans appareils télégraphiques; mais des appareils télépho-
niques ont été installés l'hiver dernier et fonctionnent à la grande
satisfaction des exploitants.
Les alimentations sont assurées, à Cambrai et au Cateau par les
distributions locales, à Beauvois par la concession gratuite d'un
industriel, au Catillon par une pompe.
Matériel roulant. — Voitures et wagons. — Ce matériel a été
construit par M. Chevalier, un des fondateurs du chemin.
Il a été payé fort cher : en 1881, les usines françaises avaient
grand'peine à fournir tout le matériel qui leur était demandé, et
les prix étaient élevés.
Le matériel voyageurs est à compartiments, à trois classes, ce
qui est une double erreur; le nombre des voitures s'élève à 15, en
y comprenant 4 voitures-fourgons.
En raison du très-graud nombre de voyageurs, cet armement
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 343
est parfois insuffisant, spécialement au moment des foires et fêtes;
on y ajoute des wagons couverts que l'on a munis de bancs.
On a construit, à titre d'essai, une voiture bogie canalogue à la
voiture de 3® classe adoptée sur le chemin d'Anvin à Calais, et on
se propose d'étendre Temploi de ce matériel nouveau aux chemins
en construction.
Tout ce matériel est muni du frein à vide; les voitures-four-
gons ont, en outre, le frein ordinaire à vis; ces dernières voitures
sont à trois compartiments, les deux extrêmes pour voyageurs, le
compartiment du milieu pour les bagages et le conducteur.
Les wagons sont au nombre de 52, soit :
iO wagons couverts portant 8 tonnes;
22 wagons plats portant 8 tonnes ;
20 wagons à houille à ridelles, 8 tonnes.
Soit environ 1 wagon, 2 par kilomètre. Les wagons ont la con-
duite du frein continu; quelques-uns portent le frein lui-même.
Locomotives, — L'armement en machines spécial au chemin de
Cambrai au Catillon comprend 4 locomotives construites par la
Compagnie de Fives-Lille, à mouvement extérieur, qui font un
excellent service : elles atteignent sans danger pour le mécanisme,
la vitesse de 30 kilomètres à l'heure.
Les conditions d'établissement sont les suivantes :
Diamètre des cylindres. . 0°27
Course des pistons. . . 0 38
Timbre de la chaudière . 8kg5
Diamètre des roues. . . 0"'*'80
Surface de chauffe. . . 30 80
Surface de grille. ... 0 66
Empattement des roues . I^IS
Poids à vide 12 tonnes.
Poids en service. ... 15 tonnes.
Dans le principe, les machines étaient exclusivement munies du
sifflet à vapeur; en raison de Teffroi qu'il causait aux chevaux,
346 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
Tusage du siffletaété proscrit; on se sert aujourd'hui d'unclrompo
d'appel analogue à celle des tramways parisiens et qui, appliquée
à un train, présente le grave inconvénient de ne pouvoir être enten-
due à distance, le bruit du train couvrant le son de la trompe.
On étudie en ce moment un sifflet à vapeur à note grave, ana-
logue à celui qui est en usage sur les bateaux à vapeur. Une forte
cloche vaudrait mieux.
Ateliers de réparation, — Ils sont provisoirement installés à
Cambrai, près de la gare du Nord ; oii a le dessein d'établir ulté-
rieurement un atelier central soit à Caudry, soit au Catelet.
L'atelier de Cambrai, comprenant un tour parallèle et une ma-
chine à percer, permet de faire toutes réparations courantes. Les
grosses réparations et le tournage des roues se font en ville.
Les dépenses de premier établissement au 31 décembre 1883, se
résumaient ainsi, pour la ligne de Cambrai au Cateau :
Dépenses de premier établissement
Infra et superstructure 1.736.329 »
Matériel 372.300 »
Total 2.098.629 i»
Soit par kilomètre 83.945 »
Ce qui est un chiffre très-élevé pour un chemin de ce genre.
II.— EXPLOITATION
Administration
En dehors du Conseil d'administration, qui se réunit soit à Cam-
brai, soit à Paris, et auquel sont soumises toutes les questions de
principe, la direction effective est confiée à un ingénieur qui est
en même temps administrateur délégué, et chargé à la fois de la
construction des lignes nouvelles et de Texploitation des lignes
ouvertes.
Il dispose, en outre, du personnel affecté à la construction, de
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 347
trois agents, dont un caissier-comptable pour le service de la
comptabilité et du contrôle des recettes du tramway.
On ne s'est pas jusqu'à présent préoccupé de dégager exactement
par service les dépenses annuelles, dont on vient seulement do se
décider à faire la ventilation. Aussi ne peut-on fournir, pour les
dépenses d'exploitation, que le chiffre annuel, en bloc. On ne
donnera, du reste, que les résultats relatifs à la ligne de Cambrai
au Gâteau, celle du Gâteau au Gatillon ayant à peine une année
d'exploitation.
Voie et Bâtiments
»
Un piqueur dirige le service.
Le personnel d'entretien est composé pour la ligne de Gambrai
au Gâteau, de 5 équipes comprenant chacune 1 chef d'équipe et
2 hommes, soit 3 hommes par 5 kilomètres.
Une équipe d'agents de la voie est souvent employée aux trans-
bordements à Gambrai, principalement l'automne, période active
du trafic.
Il n'y a pas d'autre passage gardé que la traversée à niveau de
la ligne de Gambrai à Busigny, à la sortie de la gare de Gambrai-
Nord.
Le gardiennage est assuré par la Compagnie du Nord, aux
frais de la Compagnie locale.
L'entretien de la voie ressort à peu près à 16,996 francs pour
1885, soit par kilomètre à 650 francs. On a dû commencer déjà le
remplacement des traverses en sapin, en raison du défaut d'assai-
nissement de la voie, que le service du contrôle a forcé d'encastrer
dans la terre jusqu'à hauteur de l'accotement : 1,000 traverses
ont été remplacées en 1886.
Traction
Un chef de dépôt a autorité sur tout le service.
Une seule machine assure la traction des 4 trains de chaque
sens qui ont Hou entre Cambrai et le Gâteau, soit 208 kilomètres
348 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
par jour; une autre machine fait le service du Cateau au Catillon;
mais chaque machine a un double personnel : la moitié des trains
est faite par une équipe d'un mécanicien et d'un chauffeur, Tautre
moitié par une autre équipe.
Ce système, très-révolutionnaire en Europe et si usité en Amé-
rique, fonctionne depuis 1881 à l'absolue satisfaction delà Compa-
gnie dont les machines n*ont jamais eu ni détresse, ni avarie ; le
Cateau est le point d'attache de la machine et des agents.
Chaque équipe assure du reste journellement deux trains de
chaque sens de Cambrai au Cateau, et un ou deux trains du
Cateau au Catillon.
Deux cantonniers sont dressés aux fonctions de chauffeur^ en
vue du cas de mise en marche de trains extraordinaires pouf le
transport de marchandises que les trains réguliers sont parfois
impuissants à enlever.
Les deux ajusteurs de l'atelier peuvent faire fonctions de méca-
niciens, pendant le repos des mécaniciens et chauffeurs eu titre.
Outre ces ajusteurs, le personnel de l'atelier comprend encore
1 forgeron et 1 menuisier-charron.
Le combustible est exclusivement composé de briquettes; le
tirage violent qui a lieu dans les rampes ne permettrait pas, avec
les petits foyers de ces machines, de faire usage de tout-venant
menu, qui serait on grande partie entraîné dans la boîte à fumée.
La consommation kilométrique du combustible est de 4 kilg., 4;
ce chiffre comprend l'allumage.
L'allocation en huile végétale est de 3 kilos à3 k. 500 par jour,
selon la saison, ce qui correspond à 15 ou 17 grammes par
kilomètres.
Les primes des mécaniciens atteignent 10 à 13 francs par mois
avec ces allocations.
Le traitement mensuel des mécaniciens est de 150 à 200 fr.
— des chauffeurs est de i50 fr.
Les dépenses kilométriques de traction s'élèvent annuellement à
1,200 à 1,300 fr.
Mouvement et Trafic
Mouvement. — Un inspecteur est chargé -à la fois du service du
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 349
•
mouvement et de la vérification de comptabilité des gares. Il est
aidé d*un intérimaire, qui est en même temps employé au bureau
de la comptabilité.
Dans chacune des gares, extrêmes, y compris celle du Cateau, le
service est fait par un chef de station et un homme d'équipe-facteur.
Les autres gares ouvertes au service des marchandises sont
gérées par un chef de station seul.
Enfin le service des haltes, Awoingt, Estourmel, Inchyet Trois-
villes, est assuré par la femme du cabaretier voisin, moyennant
un salaire de 15 fr., qui, comme on Ta dit, ne représente qu'une
très faible part des profits dévolus à cette fonction.
Les chefs de gare, dans les stations, les cabaretiëres dans les
haltes, délivrent les billets, à l'exclusion du conducteur des trains;
elles ont à cet effet un casier à billets simples ou d'aller et retour
pour toute destination. Elles remettent, chaque matin, les recettes
de la veille au premier train vers Cambrai.
Dans le principe, la Compagnie avait commencé l'exploitation
de la ligne sans autres bâtiments que ceux des points extrêmes.
On s'est décidé à construire des bâtiments dans les gares et à con-
fier, dans les haltes, le service de la distribution des billets aux
cabaretiëres, pour mettre fin aux nombreux détournements que
faisaient les conducteurs, insuffisamment contrôlés. Le tramway
du Cambrésis a donc, au point de vue du service des voyageurs,
beaucoup plus d'analogie avec un chemin de fer ordinaire, qu'avec
les deux tramways précédemment décrits.
Service des trains. — Un conducteur assure seul le service des
8 trains de la journée : on lui accorde chaque semaine un ou deux
jours de congé, pendant lesquels le service des trains est fait par
l'intérimaire.
Les trains du Calillon au Cateau sont en correspondance avec
ceux du Cateau à Cambrai ou vice versa.
La vitesse des trains a été limitée à 20 kilomètres à l'heure par
le cahier des charges; mais, sur la réclamation des populations
appuyées par le conseil général, le ministre des travaux publics a
• autorisé, à partir d'octobre 1885, l'essai de la vitesse limite de
25 kilomètres.
350 GHEBUNS DE FER SUR ROUTES
Grâce à cette vitesse, et à la durée très-réduite des stationne-
ments, les trains parviennent actuellement à atteindre une vitesse
commerciale de 18 kilomètres, à laquelle la Compagnie locale doit
d'avoir enlevé à la Compagnie du Nord presque tous les voyageurs
de la région.
Dans la traversée des localités, on a abandonné la vitesse trop fai-
ble de 6 kilomètres à l'heure pour aller jusqu'à celle de 10 kilomètres.
L'adoption définitive de ces vitesses a été soumise à l'enquête,
qui lui a été favorable, et il est à présumer que la vitesse de
25 kilomètres sera dorénavant sanctionnée par les cahiers des
charges, au moins sur les routes larges comme celle dont il s'agit.
En fait, la vitesse de 30 kilomètres est fréquemment dépassée
dans les pentes, et cela sans inconvénient pour la circulation sur
la route, les chevaux s'habituant rapidement au passage des trains.
Tous les trains transportent des marchandises.
La composition est normalement de 3 voitures à voyageurs et
d'un fourgon, soit environ 100 places. Le dimanche et le lundi,
la composition monte à 5 ou 6 voitures; les voitures sont directe-
ment attelées derrière la machine sans interposition de fourgon
ou wagon. On ajoute ordinairement 2 ou 3 wagons en semaine, de
manière à compléter la charge maxima de 30 tonnes que peuvent
remorquer les machines sur les rampes de 33"". Les wagons sont
généralement placés en queue des trains; la longueur maxima
fixée à 60 mètres ne peut jamais être atteinte, en raison des
faibles charges que la machine peut remorquer.
On a déjà dit que le trafic de petite vitesse était suffisamment inu
portant pour qu'on fût assez souvent, surtout à l'automne, dans
l'obligation de mettre en marche des trains spéciaux pour l'en-
lèvement des charbons ou betteraves; c'est là la plus grave objec-
tion qu'on puisse élever contre l'emploi de Taccotement de la route
par le chemin de fer du Cambrésis ; car les déclivités de celle-ci y
sont trop accusées et trop fréquentes, ainsi qu'on peut s'en rendre
compte par le profil (fig. 32). On eût du reste pu obtenir un
meilleur profil en recourant plus souvent aux déviations.
C'est aussi en raison de la limitation de charge occasionnée par
les fortes rampes que, en cas d'affluence et de fêtes, on est dans
l'obligation de multiplier les trains de voyageurs, et de créer des
CHEMINS DE FEU SUR ROUTES 351
marches spéciales. On a fait jusqu'à 24 trains à certains jours de
fête, en effectuant des croisements jtux gares pourvues de voies
de garage : Carnières, Beauvais, Caudry, Inchy.
Lorsque les manœuvres ont lieu au passage des trains, tout le
personnel y concourt, conducteur, chauffeur et chef de station.
Les aiguilles sont partout boulonnées et cadenassées.
Peu de manutentions au passage, le transport des marchandises
ayant lieu presque exclusivement par wagons complets.
Service des échanges avec la Compagnie du Nord. — La Compa-
gnie du Nord a installé les voies d'échange aux frais de la Com-
pagnie locale, dont elle perçoit une location de terrain de 1 fr.
par mètre carré et une taxe de Ofr. 12 par tonne en provenance ou
à destination du tramway.
La Compagnie locale effectue elle-même le transbordement des
marchandises; elle y emploie, quand c'est nécessaire, une équipe
de cantonniers, et se borne à percevoir du public une taxe de
transbordement de 0 fr. 20 par tonne.
Service commercial. — Les tarifs du cahier des charges sont
de 10, 7, 5 et 5, 5 pour les voyageurs (iippôt non compris), et de
20, 18 et 13 cent, pour les marchandises, suivant la classe; avec
tarif spécial de 13 cent, par wagon complet pour les marchandises
des 2 classes, indistinctement.
Ce tarif est réduit à 10 cent, pour les charbons et graines.
En outre, les voyageurs bénélicient de billets d'aller et retour
comportant 23 p. 100 de réduction.
Le trafic des voyageurs constitue 80 p. 100 du trafic total; les
trains transportent journellement 500 voyageurs en semaine,
1,000 le dimanche.
Bien que le chemin passe devant un assez grand nombre
d'usines, spécialement de fabriques de sucre, aucune d'elles n'est
reliée par rails en raison des conditions exagérées qui ont été ins-
crites à l'article 61 du cahier des charges, soit un droit d'embranche-
ment de Ofr. 23 par tonne et un droit de fourniture et envoi de maté-
riel de 0 fr. 15 par tonne, ou au total Ofr. 40 par tonne.
Aucun industriel n'a pu se décider à prendre à sa charge, outre
352
CHEMINS DE FER SUR ROUTES
la construction de l'embranchement, des conditions aussi oné-
reuses, et chacun a continué à se servir dos moyens de transport
plus économiques dont il disposait, c'est-à-dire de ses charrettes.
Il y a là une erreur commerciale regrettable.
La comptabilité et les écritures ne présentent aucune particu-
larité. Le contrôle est assuré au service central.
Résultats généraux pour Tannée 1885
Les dépenses sont les suivantes :
Entretien de la voie i6.996 »
Droits de régie 3.333 »
Autres dépenses (admiiiisl., traction et mouvement, etc.). 75.072 »
Total 95.401 T
Soit par kilomètre 3.816 •
Les recettes brutes, impôt déduit, s'élèvent à 129.370 »
Soit par kilomètre 5.175 »
D'où un produit net total de 33.969 •
— kilométrique 1,359 »
1
RÉSU
LTATS COMPARATIFS POUR LES ANNÉES 1882,
1883, 1884, 1885
en
^ S
RÉSULTATS TOTAUX
RÉSULTATS KILOMÉTRIQ.
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RECETTES
DÉPENSES
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1882
134.911
»
»
5.866
»
»
1883
26
142.503
87.933
54.570
6.196
3.823
3.373
62
1884
26
136.612
81.081
55.531
5.464
3.243
2.221
59
1885
26
129.370
95.401
33.969
5.175
3.816
1.359
73
CHAPITRE XXIV
TRAMWAYS DIVERS A TRACTION MÉCANIQUE
I. — TRAX^AYS DE VALENC I E !%':!« ES
Établissement
Les tramways qui rayonaent autour de Valenciennes ont un
développement total de 50 kilomètres. Ils sont formés des lignes
suivantes :
Valenciennes à Saint-Amand 13 kil.
La Croix-d'Anzin à Condé et Vieux-Condé 14 —
Valenciennes à Quiévrain (frontière) 10 —
La Croix-d'Anzin à Denain ii ^
Chemin de ceinture des Alliés 2 —
Total 50 kil.
Ces divers rayons traversent une région à population très-dense,
et déjà antérieurement desservie par 7 lignes de chemins de fer.
La première concession, accordée en 1877 à la ville de Valen-
ciennes, était destinée à relier à ce centre les deux faubourgs de
Raismes et de Bruay, situés tous deux à 5 kilomètres environ de
la ville.
23
354 CHEMINS DE FEU SLR ROUTES
Après bien des vicissitudes, cette concession a été rétrocédée à
une Société belge qui a obtenu de prolonger les lignes primitives
jusqu'à Saint-Amand et Vieux-Condé et de construire celles de
Denain et do Quiévrain (vers Mons). Le capital social de la Société
est de 3,002,000 fr. auxquels il faut ajouter 1,438,000 fr. d'obli-
gations.
La tète de ligne de ces tramways est au centre de la ville do
Valenciennes; à la traversée de la ville (dont les rues sont étroites),
la voie est établie sur la chaussée, de manière à réserver un
minimum de 2 m. 60 entre Taplomb des voitures du tramway et
la bordure des trottoirs.
Hors ville, les tramways de Valenciennes sont établis sur l'acco-
tement des larges routes nationales de Cambrai, de Lille, de
Bruxelles et de Mons : le rail est à 0 m. 80 de la bordure du
trottoir.
La voie a 1 m. d'écartement, le rail pèse 18 kilos; il est en fer
sur les lignes de Valenciennes et de Bruay, en acier sur les
autres; les traverses en pin injecté, remplacées annuellement par
des traverses en chêne, ont Om. 80 d'espacement axial.
La voie est double depuis la sortie de Valencieunes jusqu'à la
Croix d'Anzin (1 kil.).
Les rampes atteignent assez fréquemment 30 "/" par mètre ; la
rampe de la Croix-d'Anzin est même de 34"/"".
Hors ville, les courbes ont en général 100 mètres de rayon,
quelques-unes descendent même à 50 mètres.
A la traversée de Condé et de Valenciennes, elles sont fréquem-
ment de 30 mètres et 25 mètres de rayon.
Le plus mauvais point est sur le passage de la route de Lille
par-dessus le chemin de fer du Nord, à la sortie de Valenciennes,
où une courbe de 30 mètres de rayon coïncide avec une rampe de
0 m. 030, ce qui correspond à une déclivité nette de plus
de 0 m. 06.
Dans le principe, on s'est beaucoup préoccupé d'assurer un
service de marchandises ; on a même fait construire dans ce but
25 wagons. Mais la plupart des industries de la région sont reliées
par embranchements aux grandes lignes do chemins de fer, qui
desservent aussi fort bien les centres agricoles; la Compagnie des
CHEMINS DE FER SUH ROUTES 355
tramways de Valenciennes a donc dû renoncer à la petite vitesse
et remiser ses wagons à ses ateliers de Raismes; son trafic se
borne aux voyageurs et aux messageries.
Dès lors, on n'avait pas d'installations particulières à assurer
dans les stations qui se composent uniquement d'une salle d'at-
tente.
Des salles d'attente spéciales n'ont été établies par la Com-
pagnie que sur un petit nombre de points, en particulier à la tète
de ligne de \alenciennes.
En général les salles d'attente sont fournies gratuitement par
un cabaretier, qui se charge, moyennant une taxe de factage de
0 fr. 10 par colis, des colis de messagerie à destination ou en
provenance du tramway; cette fonction de facteur de la Com-
pagnie est extrêmement recherchée par les cabaretiers, en raison
des avantages indirects procurés par la vente des boissons, si
importante dans la région du Nord, et en particulier dans les
districts miniers.
La plupart des 22 stations des tramways de Valenciennes corres-
pondent ainsi à des estaminets.
Les voies d'évitement, qui coïncident souvent avec les stations,
ont été établies à des distances telles que les croisements de trains
puissent être assurés sur la base d'un départ par demi-heure. En
fait les départs ont lieu d'heure en heure.
Pas de télégraphe ni de téléphone.
Du reste, les trains peuvent s'arrêter en dehors des stations, à
la demande des voyageurs.
Le matériel, voitures et wagons, est le même que celui précé-
demment décrit à propos des tramways de la Sarthe.
Le matériel roulant se compose de 20 machines, 1 pour 2 k. 5;
13 voitures de première classe;
4 — mixtes ;
20 — - de deuxième classe.
Soit. . 39 voitures et 2 fourgons.
Les ateliers de Raismes sont suffisamment outillés pour assurer
toutes réparations, et même au besoin la construction.
Le prix d'établissement des tramways de Valenciennes ressort,
356 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
tout compris, à près de 90,000 francs par kilomètre, chiffre élevé.
La conception de ce petit réseau est très-heureuse; les lignes,
courtes, rayonnantes, donnent une excellente utilisation du
matériel, tout en desservant parfaitement les localités.
Exploitation
L'entretien de chacune des lignes est assuré par une brigade
de 5 agents.
Un conducteur et un aide surveillent l'ensemble du service de
la voie.
Le service de traction exige 1 chef de dépôt et 14 mécaniciens
et chauffeurs dont 10 en route, 1 en réserve, 2 au lavage et 1 en
repos ou congé.
Chaque machine est conduite par deux agents : un mécanicien
et un chauffeur.
L'allocation de charbon est de 4 à 5 kilos, suivant le profil, non
compris 48 kilos pour allumage.
Le charbon est composé de fines, demi-grasses, do la Compagnie
d'Anzin, à 11 francs la tonne sur la carreau de la mine, et
12 francs rendu aux dépôts.
Les mécaniciens sont payés à l'heure, à 0 fr. 45.
Les parcours journaliers sont de 150 kilomètres en moyenne
par machine.
Les trains sont normalement composés de 2 voitures et d'un
fourgon; mais les machines sont assez puissantes pour remorquer,
en cas d'affluence, 6 voitures sur les diverses lignes.
La vitesse des trains est de 15 kilomètres à l'heure en cam-
pagne, de 10 kilomètres au passage des agglomérations et de
6 kilomètres à la traversée des villes; la durée de parcours des
diverses lignes varie de 54 minutes à 1 h. 15 pour des distances
de H à 13 kilomètres; on pourrait facilement accélérer ces
marches.
Les croisements de trains sont fixés d'une manière ferme par
les marches; ils no peuvent être modifiés que sur un ordre écrit
du chef de gare de Yalenciennes-, agent spécial de la voie unique,
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 357
OU bien sur un ordre verbal de Tun des trois contrôleurs chefs
du mouvement.
Les jours de fête, des ordres spéciaux règlent la marche des
trains facultatifs.
Chaque train est accompagné d'un conducteur qui délivre les
billets dans la gare de Yalenciennes avant le départ du train, et
dans les voitures en cours de route. Le même agent retire les
billets; c'est le procédé employé sur les tramways de la Sarthe.
Les conducteurs ont un traitement fixe de 100 francs par mois^
plus 4 p. 100 de la recette brute réalisée, système qui permet de
forcer la durée du service les jours de fête, sans avoir à redouter
de récriminations.
Le service des messageries est fait de la même manière que sur
les tramways do la Sarthe.
Un comptable et un commis suffisent au contrôle des recettes.
L'ensemble du personnel est placé sous les ordres d'un directeur
aidé d'un ingénieur, et auquel le conseil d'Administration laisse
les pouvoirs les plus étendus.
Les tarifs de voyageurs sont à la base de 0 fr. 08 par kilomètre
pour la première classe, 0 fr. 06 par kilomètre pour la deuxième
classe, avec minima de 0 fr. 20 et 0 fr. 15 quelle que soit la dis-
tance parcourue au-dessous de 2 kilomètres.
Les voyageurs ont droit à la gratuité pour leurs bagages, jusqu'à
30 kilos.
Les messageries et marchandises de toute classe payent 0 fr. 40
par tonne et par kilomètre.
Résultats. — Le nombre des voyageurs kilométriques varie par
année de 28,000 sur la ligne de Quiévrain à 45,000 sur celle de
Raismcs; moyenne 38,000.
Les recettes et dépenses par train-kilomètre ont été successive-
ment, en moyenne :
1882 Recette par train-kil. 0.98 Dépense par traiu-kil. 0.62
1883 — 1.10 — 0.61
1884 — 1.02 — 0.56
La dépense de traction du train-kilomètre ressort en moyenne à
358
CHEMINS DE FER SUR ROUTES
0 fr. 33, y compris l'entretien. Ce chiffre peu élevé correspond à
un matériel neuf et à des prix de personnel et de charbon excep-
tionnellement bas.
Les résultats comparatifs sont les suivants :
C/)
•a
1882
1883
1884
1885
3 ■
^ S
o S
o s
mi
22
29
38
50
RÉSULTATS TOTAUX (impôt déduit)
RECETTES
DÉPENSES
278.709
358.696
437 . 759
509.376
176.766
201.910
242.633
276.567
PRODUIT
RET
101. 9i3
156.786
195.122
232.809
RÉSULTATS KILOMÉTRIQ.
RECETTES
BfPISSlS
12. 5U
12.284
11.328
10.492
7.962
6.915
6.278
5.696
PROKIT
4.582
5.369
5.050
4.796
m
63
56
55
54
En somme, les tramways de Valenciennes constituent une
entreprise avantageuse pour la Compagnie *.
Pour ce qui est du public, nous ne saurions mieux exprimer
son opinion que ne l'a fait un ingénieur du contrôle :
f L'impression du public est excellente. Personne ne saurait plus mainle-
u nant se passer de ce moyen de communication essentiellement commode
« et intime, pénétrant dans les agglomérations, s'arrêtant à la demande du
(c voyageur^ n'ayant ni gares, ni distribution de billets, ni tout cet appareil
« propre aux grandes voies ferrées et intimidant, même aujourd'hui, dans
« une certaine mesure, Tagriculteur et le paysan. »
II. » TRAHl^l'AYS DE S AIIVT-ÉTIEIVIVE
Établissement
Les tramways de Saint-Etienne embrassent trois lignes à service
distinct :
1® Une ligne urbaine^ partant de la Terrasse, quartier bas, au
nord de la ville, où est située la manufacture d'armes, et remon-
tant dans toute sa longueur la grande rue axiale de Saint-Etienne
(rues Gambetta, d'Annonay) pour aboutir à la place Bellevue, située
* La Société des Chemins de fer économiques du Nord, qui exploite les tramways de
Valenciennes, vient d'obtenir la concession de 250 kilomètres de chemins de fer sur
routes dans le département du Nord.
\
m * •
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 359
dans la partie haute, àTextrémité sud; la ligne urbaine se poursuit
de Bellevue au faubourg de la Digonnière.
La longueur de la terrasse à Bellevue est de. . 5 kil. 300
— de Bellevue à la Digonnière est de. 0 kil. 700
Soit pour la ligne urbaine proprement dite. . 6 kil. »
Les déclivités de la ligne urbaine n'excèdent pas 35 millimètres
par mètre; la rue axiale étant une longue ligne droite, il n'y a pour
ainsi dire pas de courbes ; la ligne urbaine est tout entière éta-
blie sur la chaussée.
2** Une ligne de banlieue de la place Bellemie à Firminy^ longue
de 9 kil. 700, et qui traverse les grandes agglomérations de la
Ricamario, du Ghambon, etc. Les rampes de cette ligne atteignent
60 millimètres; elles sont longues, les courbes descendent à
25 mètres de rayon. En dehors des agglomérations, la voie est
assise sur Taccotement des routes; à leur traversée, elle est éta-
blie sur la chaussée.
3® Une ligne de Saint-Etienne à Saint-Chamond et Rive-de-Gier.
La tète de cette ligne est située dans un quartier voisin de la
gare de Saint-Etienne; elle est reliée à la ligne urbaine sur la
place de THôtel-de-Ville par une voie qui suit la rue de la Répu-
blique, rue perpendiculaire à Tartère principale (rue Gambetta);
mais cette ligne de raccordement n'est pas utilisée commerciale-
ment, en raison de la gêne qu'apporterait la circulation des tram-
ways au mouvement considérable qui se fait par cette rue étroite
entre la gare et la ville; la ligne de raccordement ne sert que la
nuit pour le passage des véhicules ou locomotives allant aux ate-
liers de réparation de la place Bellevue ou en revenant.
La ligne de Rive-de-Gier a 24 kilomètres de longueur, soit :
De Saint-Etienne à Saint-Ghamond 13 kilomètres.
De Saint-Ghamond à Rive-de-Gier il kilomètres.
Les agglomérations sont moins rapprochées sur cette ligne que
sur celle de Firminy ; les rampes y atteignent 70 millimètres par
mètre; les courbes descendent aussi à 25 mètres de rayon.
De même que sur la ligne de Firminy, la voie est sur accote-
ment en dehors des localités.
Les profils en long des lignes de tramways de Saint-Etienne sont
représentés figurés 35, 35 bis, 35 ter (PI. XIV).
360 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
La longueur de Tensemble des lignes est de 40 kilomètres
(39kil. 684).
Une double erreur a été commise dans l'établissement de la voie;
d'abord, le choix du rail; le rail do Demerbe, représenté fig. 36,
planche XIV, a donné de très- mauvais résultats. Bien que ce rail
soit en acier et pèse 30 kilos le mètre courant, il s'est fendu longi-
tudinalement au bout de peu d'années, suivant la gorge, et on a
dû le remplacer par le rail Marsillon (fig. 37), déjà employé sur
les voies de Lille, Nantes, Lyon, etc., et qui donne un excellent
roulement.
Une autre erreur, non moins coûteuse, a consisté à employer le
rail à gorge, non seulement sur la chaussée, à la traversée des
agglomérations, mais encore sur l'accotement des routes, où rien
ne le justifiait, et où le rail ordinaire, de 15 à 20 kilos, était tout
indiqué. Cette erreur a eu comme conséquence une dépense de
rails à peu près double de ce qu'elle aurait pu être.
La voie a un mètre d'écartement.
Exploitation
Les trains des tramways de Saint-Etienne ne s'arrêtent pas à la
demande des voyageurs, pas plus dans la section urbaine que hors
ville, mais seulement en des points déterminés, arrêts ou stations.
Les arrêts sont marqués par un écriteau ; les stations comportent
une voie d'évitement dont les aiguilles sont automatiquement
ramenées à leur position normale lorsqu'elles en ont été écartées
par une prise en talon.
Les rues de Saint-Etienne sont très-étroites, et on a dû, sur plu-
sieurs points, réduire la largeur dos trottoirs pour donner à la
chaussée les 7m. 20 de largeur nécessaires pour l'établissement des
voies d'évitement.
Il n'y a de salles d'attente qu'aux tètes de lignes ; la distribu-
tion des billets est toujours faite par le conducteur du train, sou-
mis du reste à un contrôle fréquent.
Les machines sont de deux types; les unes ont été construites
à Winterthur (Suisse), les autres en Belgique. Elles pèsent envi-
ron 13 tonnes en charge et remorquent leur poids sur la rampe do
CHEMINS DE FEU SIH UOUTES 361
70 millimètres. L'aspect extérieur de ces machines ne diffère pas
de celui des locomotives ordinaires.
Elles brûlent exclusivement du coke ne donnant pas plus de
o p. iOO de cendres, et que Von trouve à Saint-Etienne au prix de
23 francs la tonne.
Aux termes du cahier des charges, il est interdit au mécanicien
de charger le feu à la traversée des villes; dans le cas particulier
de Saint-Etienne, on procède ainsi : on charge complètement le
foyer à Bellevue, avant de s'engager sur la pente continue
qui va de Bellevue à la Terrasse, et sur laquelle on n'a pas
à faire usage de la vapeur; à l'arrivée du train à la Terrasse,
le coke est au rouge, et permet de fournir toute la vapeur pour
le trajet en rampe de la Terrasse à Bellevue.
La Compagnie des tramways se base avec quelque raison sur
rinterdiction de charger le feu dans le parcours urbain, pour
solliciter la suppression du chauffeur sur ce parcours. Le chauf-
feur est au contraire indispensable sur la ligne de Firminy et sur
celle de Saint-Chamond-Rive-de-Gier.
Le nombre total des machines en service sur les tramways de
Saint-Etienne s'élève à 34.
Le nombre des voitures est de 110; construites soit en Suisse,
soit en Belgique et d'un poids moyen de 2,300 kilos, sauf toutefois
7 grandes voitures à 30 places, pesant 3,300 kilos, et spécialement
destinées au service de Saint-Etienne.
Un certain nombre de voitures ouvertes latéralement, sont
mises en service pendant l'été et fort appréciées du public.
Il n'y a qu'une seule classe de voyageurs.
Jusqu'à présent, on n'a pas fait de transport de messageries ou
do marchandises entre Saint-Etienne et Firminy ou Rive-de-Gier;
mais on vient de construire 12 fourgons à l'effet d'assurer ce service.
Des ateliers de réparation sont installés à Bellevue, d'autres à
Saint-Chamond; mais ceux de Bellevue sont les plus importants,
et on y amène le matériel de la ligne de Rive-de-Gier aussi bien
que celui de la ligne de Firminy pour les réparations importantes.
Les trains sont composés de 2, 3 et même 4 véhicules, au moins
sur la ligne urbaine : on ne peut dépasser 3 véhicules sur les lignes
de banlieue, en raison de leurs fortes déclivités.
362 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
La vitesse des trains est de 10 kilomètres à travers ville, 20 kilo-
mètres hors ville ; les trains ont lieu toutes les dix minutes sur le
parcours urbain, toutes les demi-heures sur la ligne de Bellevue à
Firminy et d'heure en heure sur celle de Saint-Chamond-Rive-de-
Gier.
Comme les trains ne font qu'un service de voyageurs, les arrêts
sont très-courts et la vitesse commerciale très-satisfaisante, ce qui
a permis à la Compagnie des tramways d'enlever à la Compagnie
de la Méditerranée la presque totalité des voyageurs de la banlieue
de Saint-Etienne, bien que toutes les localités de cette banlieue
soient déjà desservies, d'une façon imparfaite il est vrai, par les
trains de cette dernière Compagnie.
Il y a dans la banlieue un arrêt environ par deux kilomètres ; en
ville, deux arrêts par kilomètre.
Malgré les déclivités exceptionnelles qu'on rencontre sur les
lignes des tramways de Saint-Etienne, malgré la vitesse des trains,
le peu de largeur des rues, et l'énorme circulation à pied ou en
voiture, le matériel du tramway n'est pas muni de freins continus,
ce qui est une faute.
Les accidents sont assez fréquents et pourraient incontestable-
ment être réduits par l'adoption du frein continu.
Le réseau urbain transporte une moyenne de 10,000 voyageurs
parjour,la ligne de Firminy 3,500, la ligne de Rive-de-Gier 2,000,
soit environ 7,000,000 voyageurs par an jpour l'ensemble du réseau.
Les tarifs sont exceptionnellement bas ; c'est ainsi que le par-
cours de Bellevue à la Terrasse (6 kil. 300) coûte 10 centimes. Ce
prix semble trop faible; une taxe de 13 centimes mettrait l'exploi-
tant dans une situation très-prospère.
Résultats. — Les recettes kilométriques sont en moyenne les
suivantes, pour les dernières années :
Terrasse-Bellevue v . 70.000 francs
Bellevue-Digonnière 7.000 —
Bellevue-Firminy 26.000 —
Saint-Etienne-Saint-Chamond 20.000 —
Sainl-Chamond-Rive-de-Gier 15.000 —
Soit en moyenne 27.000 —
La dépense kilornélriaue ressort à 21.000 —
Ce qui ressort à un coefficient d'cxploilalion de 80 p. 100.
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 363
La dépense kilométrique d'établissement s'est élevée à envi-
ron 130,000 francs par kilomètre, chiffre dans lequel rentrent
d'énormes frais de constitution de société.
La dépense kilométrique de traction ressort àOfr. 43, et le
parcours moyen journalier d'une locomotive à 120 kilomètres.
En somme, les tramways à vapeur de Saint-Etienne ont toute
la faveur de la population. Malgré le peu de largeur des rues, et
l'activité de la circulation, malgré les accidents qu'on a eus à
déplorer, l'usage du tramway à vapeur est entré dans les habi-
tudes tout autant que celui des omnibus et des tramways à trac-
tion de chevaux à Paris. Saint-Etienne a sans conteste l'avantage
de la rapidité et du confortable.
Le tramway à vapeur a de plus été une cause de moralisation
pour la population ouvrière, à laquelle ce moyen de transport
rapide et économique a permis d'aller prendre tous ses repas en
famille, alors qu'auparavant, elle se trouvait obligée de déjeuner
chez le marchand de vin le plus proche.
Les tramways de Saint-Etienne fournissent l'argument le plus
concluant en faveur de la traotion mécanique sur routes et à
travers les agglomérations; leur exemple seul suffirait à démontrer
l'inanité des objections élevées contre son usage.
in. — TRAMWAYS A TRACTI01!V DE . LOCOMOTIVES SAIVS FOYER.
Tram-ways de Rueil à Marly, de Lille à Roubaix et Tourcoing
et de Lyon à Vénissieux.
1. — Tramway de Rueil à Marly.
Le tramway de Rueil à Marly a été concédé par décret du
15 juillet 1854 à M. deMazenod.
Ce tramway devait relier au chemin de fer de Paris à Saint-Ger-
main les importantes localités deBougival, la Malmaison, et Marly.
364 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
Apres être passée dans plusieurs mains, la concession a élé
rétrocédée en 1874 à M. Edmond Tarbé, qui a construit le chcntiin
et Texploite.
La ligne a un développement total de 9 kilomètres. La tête
de ligne de Rueil est située en contre-bas de la gare de la Compa-
gnie de rOuest. En dehors de quelques centaines de mètres qui
séparent la tête de la ligne de la ville de Rueil, où il passe à tra-
vers champs, le tramway est établi sur l'accotement des routes.
On a jugé nécessaire d'imposer au concessionnaire le gardien-
nage à la traversée des routes importantes, qui sont fermées par
une chaîne au moment du passage des trains.
La voie est à écartement normal. Le rail à patin, de 20 kilos,
primivement en fer, a été remplacé en grande partie par un rail
acier de mêmes poids et profil.
Entre Rueil et Port-Marly (7 kil.) les déclivités n'excèdent pas
30"" par mètre ; de Port-Marly à Marly (2 kil.) elles varient de
40 à 60""" par mètre (pi. XIII, fig. 34). Les rayons des courbes des-
cendent à 30 mètres et même 23 mètres.
La ligne comprend 14 stations ou haltes; les trains ne s'arrêtent
pas à la demande du public, mais seulement aux haltes et stations.
Les stations sont pourvues d'une voie d'évitement et d'une salle
d'attente où le chef de station distribue les billets.
Les haltes n'ont ni salle d'attente, ni voie d'évitement; la distri-
bution des billets y est faite par le chef de train, qui procède du
reste partout au retrait des billets à l'arrivée (Rueil-gare excepté).
. Les voitures du tramway de Rueil à Marly devaient, d'après
l'acte de concession, être traînées par des chevaux; mais on eut
bientôt recours à la traction mécanique.
On commença par acquérir 4 machines à foyer dont deux à
chaudière verticale, construites en Belgique par la Société de
Saint-Léonard. Ces machines ne suffisant pas, le concessionnaire
accepta en 1878 les propositions de M. Léon Francq, qui avait
repris, en la perfectionnant notablement, la machine sans foyer
mise en service par le docteur Lamm sur les tramways de la
Nouvelle-Orléans (1873).
Moteur, — La machine sans foyer Lamm et Francq a été essayée,
CHEMINS DE FEU SUU ROUTES 365
tout d'abord, sur le tramway de la Madeleine à Courbevoio; elle a
été perfectionnée après ces essais ; la description en a été
faite par M. Lavoinne, dans les Annales des Ponts et Chaussées
(septembre 1878); nous n'en dirons que quelques mots :
Ces machines consistent essentiellement.
1° En un réservoir en grande partie rempli d'eau que Ton
échauffe progressivement par un courant de vapeur de manière à
la porter à 200"*, ce qui corresponde 15 atmosphères de pression;
pour les machines de Rueil-Marly, qui ont un réservoir de
1,800 litres, le remplissage dure 20 minutes.
Le réservoir est isolé par une première enveloppe emprison-
nant un matelas d'air, et par une seconde enveloppe de coton sili-
cate; l'amiante essayée primitivement a donné de moins bons
résultats. Le tout est recouvert d'une troisième enveloppe en
bois.
2** Un détendeur automatique dans lequel se rend la vapeur sor-
tant du dôme, et qui est disposé de telle sorte que la vapeur en
sorte toujours à la pression que l'on a réglée au départ au moyen
d'un balance (système Francq).
3** Des cylindres, et une distribution qui ne présente aucune par-
ticularité, mais qui permet de faire usage de la détente, ce qui
n'existait pas dans les machines primitives de Lamm.
4* Un condenseur dans lequel se rend la vapeur d'échappement;
le réfrigérant employé est l'air extérieur appelé du dehors par un
grand nombre de tubes verticaux et s'échappant dans la cheminée
avec ce qui reste de vapeur non condensée. Le but du condenseur
est de réduire à une quantité imperceptible le volume de vapeur
s'échappant dans la cheminée avec ce qui reste de vapeur s'échap-
pant à l'air libre. On sait, en effet, que c'est le bruit de l'échap-
pement de la vapeur plus que le panache de fumée, qui effraye
les chevaux.
Le condenseur n'a pas donné tout ce qu'en attendait M. Léon
Francq; la vitesse de l'air dans les tubes verticaux n'ont guère que
de l'^par seconde au lieu de 3'",00 que l'on avait espéré obtenir,
le refroidissement est incomplet et il s'échappe encore par la
cheminée environ 60 p. 100 de la vapeur. Toutefois, le but proposé
est en grande partie atteint, car le bruit de l'échappement est à
366 CHEMINS DE FEH SUR ROUTES
peine perceptible. M. Léon Francq étudie une nouvelle disposition
des tubes dans le but d'augmenter la condensation.
50 Enfin Técartement des essieux de 2", 10 n'aurait pas permis
le passage dans des courbes de 25™ de rayon en voie normale, si
le rectangle des essieu^t avait été indéformable. La disposition
adoptée par M. Francq laisse les essieux parallèles, mais permet
au châssis de prendre une position oblique par rapport aux essieux.
Grâce à ces dispositions, le roulement des machines est d'une dou-
ceur remarquable.
Les générateurs de vapeur, au nombre de trois, sont installés à
Port-Marly dans un hangar en bois; chacun d'eux est recouvert
d'une simple enveloppe en tôle; ces conditions ne suffisent pas
pour empêcher la déperdition de calorique, déperdition qui est
très-importante.
Les générateurs sont des chaudières tubulaires de 50 mètres
carrés de surface de chaufTe; en service normal, l'un est en fonc-
tionnement, un autre en réparation, le troisième est disponible; le
dimanche et les jours d'affluence, on met deux générateurs en
service.
Le combustible employé à Port-Marly est exclusivement de la
briquette.
Il serait cependant bien facile de modifier les foyers de manière
à pouvoir faire usage d'un combustible plus économique.
Les 6 machines Lamm et Francq en usage sur la ligne deRueil
à Marly ont été construites en vue de remorquer des charges de
15 tonnes; en fait elles en remorquent généralement près du
double, soit 4 à 5 voitures, entre Rueil et Port-Marly. Le poids de
ces machines est de 8 t. 500 en charge.
De Port-Marly à Marly, la rampe de 60"" ne permet pas de
remorquer plus de deux voitures (10 tonnes).
Les vitesses sont de 20 kilomètres à l'heure à travers champs et
10 kil. à la traversée des agglomérations. Ces vitesses ne subis-
sent pas de réduction à la montée de Marly, et c'est véritablement
un curieux spectacle que celui de la montée rapide de cette rampe
dé 6 centimètres.
Malgré les conditions défectueuses dans lesquelles, est employé
le moteur sans foyer de M. Francq, conditions qui ne sont nulle-
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 367
ment inhérentes au système, et contre lesquelles l'inventeur n'a
cesse de protester, ce moteur paraît généralement plus écono-
mique que les machines à feu.
En effet, la machine locomotive à foyer est d'un rendement
mécanique d'autant plus imparfait que ses dimensions sont plus
réduites; dans les petites locomotives, le charbon est mal utilisé,
la combustion ne pouvant s'y faire d'une manière rationnelle.
Leurs foyers de faibles dimensions nécessiteraient, plus encore
que les graûdes machines, des mécaniciens et chauffeurs expéri-
mentés ; c'est le contraire qui arrive dans la pratique, car on
cherche toujours, sur les petits chemins do fer, à économiser sur
le personnel; d'où coups de feux fréquents, réparations multi-
pliées, et inutilisation prolongée des machines.
Déplus, le poids du foyer et la charge des approvisionnements
d'eau et de charbon donnent une mauvaise assiette à la locomotive
qui fatigue et s'use rapidement.
Rien de semblable avec les locomotives sans foyer.
Ici la vapeur est produite en grande masse en un lieu unique,
dans des chaudières fixes qui permettent d'obtenir le meilleur
rendement possible du combustible; quant au combustible lui-
même, on peut le prendre aussi économique que possible, con-
trairement à ce qui a été fait jusqu'ici à Port-Marly, et contraire-
ment à ce qu'on est généralement forcé de faire sur les petites
locomotives à foyer.
Enfin, s'il n'est guère possible do songer à conduire une ma-
chine à foyer avec un seul agent, dont l'attention est forcément
distraite pendant qu'il chargerait le feu ou alimenterait la machine,
un mécanicien seul suffit sur la machine Francq ; encore peut-il
n'être pas très-expérimenté. Il faut, il est vrai, des chauffeurs et
des mécaniciens aux générateurs, mais en nombre moindre.
Economie d'entretien, économie de combustible, économie de
personnel, tel est le triple avantage des locomotives sans feu.
Sans doute, leur emploi est limité à un service de trains fré-
quents et réguliers et à de faibles parcours^ ce qui est le cas des
tramways qui desservent la banlieue des très-grandes villes; on
ne saurait songer à étendre leur application aux lignes à petit
nombre de trains, où l'on aurait trop de déperdition de calorique.
Vj.
368 CHEMINS Db) KEH SUH ROUTES
Sur le tramway de Rueil à. Marly, les dépenses de traclioa
comparatives sont relevées, pour les machines Francq et pour
les machines à foyer, qui continuent à faire le service les jours
d'affluence.
Le prix de revient de la traction pour les locomotives à foyer
est de 0 fr. 93 par kilomètre, et pour les locomotives sans foyer
de 0 fr. 43.
Le premier chilTre démontre que les machines à foyer en usage
sur Rueil-Marly sont particulièrement défectueuses. -
Le trafic du tramway de Rueîi-Marly est un trafic assez variable;
très-réduit en semaine, il est considérable le dimanche, surtout
l'été, où Bougival, la Malmaison et Marly, attirent un énorme
concours de promeneurs.
C'est en raison de cette affluence que l'on a été forcé de distri-
buer les billets et enregistrer les bagages dans les stations ; les
conducteurs des trains n'eussent jamais pu suflire à ce service ;
cependant un certain nombre de chefs de station sont supprimés
l'hiver.
Les résultats comparatifs de l'exploitation sont les suivants pour
les 6 dernières années :
i
Si
IIÉSILTAT
.roT..x,
11-61 .lililull,
,*,u.
TS KLLOMllTnLQI.ES
-i^
i
5 =
..„„.,
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Ql-ijl)
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^
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0 2o0
2ie.76e
148.708
70.8iB
23.7J8
16.098
7.660
G7
1S8J
9 2o0
2Ô2 97i
212. 80 i
i0.li4
27.318
33.012
1.336
SI
1881
9 i)0
206.972
217.170
-10,198
22 375
23.173
— 1.098
101
l»8o
9 2,0
I7li.90i
JS4.yU
+ 31.6«l
19 002
li.600
* 3.422
83
t886
0 1dC\
ni. 438
Ii9,970
+2:^ 162
18.066
16.213
2,7i3
»-o
Le tramway de Rueil à Marly n'est pas, comme on le voit, dans
une situation très-prospère. On pourrait sans difficulté réaliser de
sérieuses économies dans son exploitation; la baisse de recettes
que l'on constate k partir de 188i est due h l'ouverture de la
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 369
ligne de TEtang-la-Ville à Sainl-Cloud, qui dessert Marly; Taug-
mentation de dépenses qu'accusent les exercices 1883 et 1884
tient au renouvellement de la voie.
En somme le tramway de Rueil à Marly rend de très-grands
services à Ténorme population flottante des localités du par-
cours.
On se propose de le prolonger d'une part sur Saint-Germain,
d'autre part sur Paris (Porte-Maillot), à travers Asnières et Cour-
bevoie.
2° Tramways de Lille a Roubaix et Tourcoing
Les tramways de Lille comprennent un réseau urbain à traction
de chevaux, et un réseau suburbain à traction mécanique.
Les deux réseaux sont à la voie de 1 mètre 44.
Les lignes à traction mécanique nous intéressent seules.
L'une part du centre de la ville (place de l'Hôtel-de- Ville), passe
par-dessus le chemin de fer de Roubaix et arrive à Roubaix après
un parcours de 11 kilomètres, dont la moitié environ en double
voie.
La traction par locomotives sans foyer se fait sur cette ligne
depuis 1880, date à laquelle elle a remplacé la traction par loco-
motives ordinaires de construction belge.
La ligne de Lille à Tourcoing, longue de 13 kilomètres, part de
la porte de Gand et va jusqu'à Tourcoing en se tenant au nord
du chemin de fer de Lille à Roubaix, tandis que le tramway de
Roubaix est au sud de ce chemin. La tête de ligne de Tourcoing
est reliée à Lille par les voies urbaines que le matériel aurait à
emprunter pour se rendre aux ateliers tiu Pont du Lion d'Or
(ligne do Roubaix) ; mais, en fait, la ligne de Tourcoing, dont
l'ouverture est imminente, est destinée à rester absolument indé-
pendante de celle de Roubaix : elle a ses générateurs spéciaux
installés au pont de Marcq, vers le milieu du parcours, et les
trains ne pourront passer d'une ligne sur l'autre que le jour où
les deux lignes seront raccordées par une jonction à travers
Roubaix et Tourcoing, dont le projet est à l'étude.
La ligne de Tourcoing est d'un profil facile.
2i
370 CHEMINS DE FEU SUU ROUTES
La ligne de Raubaix a dos courbes descendant à 20 mètres de
rayon, en particulier dans la traversée de la ville de Lille, où elle
emprunte des rues trcs-étroites : 2 kil. 900 seulement sont établis
sur accotements; le reste est sur chaussée.
Les déclivités sont longues : elles sont généralement de 20 à
23 millimètres ; cependant une rampe de 53 millimètres existe
vers le milieu du parcours.
Le rail employé sur la ligne de Roubaix, comme sur celle
de Tourcoing, est le rail Marsillon ; mais la voie est en général
assez mauvaise, en raison du sous-sol argileux.
Les machines sont plus fortes que celles de Rueil-Marly ; elles
pèsent 9 t. 800 en charge et ont un récipient do 2,500 litres ; la
charge remorquée est de 15 tonnes, soit 3 à 4 véhicules.
Le nombre des machines en service est de 15 ; la vitesse
maxima est de 20 kil. à l'heure; le trajet de Lille à Roubaix se
fait en 50 minutes. Les trains se suivent de quart d'heure en
quart d'heure ; ils s'arrêtent à la demande des voyageurs.
Deux installations distinctes fournissent la vapeur aux machines
sans foyer : Tune située au pont du Lion d'Or, h 2 kilomètres de
Lille, où sont installés des générateurs Belleville ; une autre au
Brœucq, point situé à moitié du parcours, où on fait usage de
générateurs du même type que ceux de Port-Marly.
Cette double installation est une erreur : elle a été rendue né-
cessaire par l'insuffisance du récipient des machines : aussi ce
récipient est-il porté à 4 mètres cubes pour les machines desti-
nées au réseau suburbain de Lyon.
La ligne de Lille à Roubaix dessert un mouvement quotidien
de 4,500 voyageurs, qui va progressant chaque année, malgré la
concurrence que font depuis 1885 les trains-tramways de la
Compagnie du Nord.
Traction mécanique et traction animée. — Les comptes d'ad-
ministration de l'ensemble des tramways de Lille, dont les deux
réseaux, urbain et suburbain, appartiennent à la Compagnie des
Tramways du département du Nord, font apparaître les prix de
revient comparés de la traction animale et de la traction mécani-
que, par kilomètre de train.
CHEMINS DE FEH SUR ROUTES
371
Cette comparaison est particulièrement intéressante; elle ressort
aux chiffres suivants :
1883
188 i
188o
1886
DEPENSE
d'kxi»loitation kilométrique totale
LIGNES
A TRACTION ANIMÉE
(45 kilomètres)
0 53
0 49
0 46
0 43
LIGNES
A TRACTION MÉCANIQUE
(11 kilomëlres)
1 10
0 89
0 74
0 64
PRIX
DE REVIENT KILOMÉTRIQUE
de traction mécanique
proprement dite
0 5i
0 38
0 35
0 33
Ainsi, contrairement à Topinion de M. Léon Francq, qui attri-
bue à son mode de traction un énorme avantage d'économie sur
la traction par chevaux, cette dernière semblerait, à première vue,
plus économique que Tautre.
Mais il importe tout d'abord de remarquer que, dans l'espèce,
l'exploitation par chevaux no saurait remplacer l'exploitation avec
traction mécanique. En effet la ligne de Lille à Roubaix a une
recette kilométrique de 32,000 francs, alors que celle des tram-
ways urbains de Lille n'atteint pas 22,000 francs ; le succès de la
ligne suburbaine tient à la vitesse des trains, vitesse que ne
pourrait atteindre la traction animale, et qui est moins nécessaire
sur le parcours urbain que sur la ligne de banlieue ; si donc la
traction animale était substituée à la traction mécanique sur cette
dernière ligne, il paraît probable que les recettes kilométriques
seraient réduites dans des proportions considérables.
D'un autre côté, les chiffres qui précèdent ne sont pas tout à
fait comparables : en effet, le nombre de voyageurs par train-kilo-
mètre est de : 4,30 sur la ligue suburbaine ;
3,20 — urbaine.
Rapporté au même nombre de voyageurs par train-kilomètre,
le prix de revient kilométrique de l'exploitation sur la ligne de
372 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
Roubaix devrait être diminué de près de 23 p. 100, ce qui don-
nerait pour chaque année 1883 1884 188S 1886
au lieu des chiffres de. .. . 1,10 0,89 0,74 0,64
les chiffres de 0,82 0,67 0,33 0,48
les lignes à traction mécani-
que ayant donné 0,33 0,49 0,46 0,43
Enfin il y a lieu de tenir compte de ce triple fait que :
1° La voie de Lille à Roubaix est établie sur une plate-forme
argileuse, et que, malgré un entretien onéreux, la traction y est
difficile :
2® La proportion de double voie est plus forte sur la ligne
suburbaine que sur la ligne urbaine ;
3® Et qu'enfin, les voies des tramways à traction de chevaux
exigent un entretien bien moins soigné, et une pose beaucoup
moins parfaite que les lignes à traction mécanique ; c*est en
grande partie devant la nécessité de remanier au préalable toutes
les voies, qu'on a reculé jusqu'ici devant l'emploi de la traction
mécanique sur les lignes des tramways suburbains de Paris qui
restent, par suite, dans un regrettable état d'infériorité par rapport
à Saint-Etienne, Lille, Lyon, etc.. Car il résulte de toutes les
raisons qui précèdent que la traction mécanique par moteurs
Francq est en somme comparable, au point de vue de l'économie,
avec la traction animée, bien qu'elle ne semble pas réaliser par
rapport à celle-ci les énormes avantages que lui attribue cet
ingénieur.
La dépense kilométrique de la ligne de Lille à Roubaix est de
22,000 francs pour une recette de 32,000 francs, soit un coefficient
d'exploitation de 67 p. 100.
Moteur Mékarsky. — Puisque nous nous sommes laissé entraî-
ner dans cette digression, il parait utile de la compléter en disant
quelques mots des moteurs à air comprimé de l'ingénieur Mékarsky
qui soutient depuis dix ans une querelle retentissante avec
M. Léon Francq.
Dans le système Mékarsky, qui fonctionne depuis plusieurs
années sur les tramways de Nantes, et qui doit être appliqué pro-
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 373
chainement aux tramways de Nogent-sur-Marne, la voiture porte
elle-même son moteur et son approvisionnement d'air; pour éviter
la congélation des huiles qui résulterait de la détente de Tair com-
primé, celui-ci, avant de se rendre dans les cylindres, se réchauffe
dans un récipient ou bouillotte contenant de Teau chaude à
150 degrés.
L'air est comprimé à une pression de 30 kilog. dans une usine .
centrale où les voitures viennent se charger après chaque parcours
aller et retour.
Il n'est pas difficile de voir qu*au point de vue économique, le
moteur Mékarsky est très-inférieur au moteur Francq et comme
premier établissement et comme exploitation.
Au point de vue du premier établissement, Tusine centrale
nécessite, dans le système Mékarsky, de puissantes machines à
vapeur et des appareils de compression coûteux, tandis que le
système Francq exige seulement des générateurs; la dépense
d'établissement est de quatre à cinq fois plus élevée dans le pre-
mier système que dans le second.
Pour le matériel roulant, les dépenses sont comparables; dans
l'un des systèmes, toutes les voitures doivent être munies du
moteur et du réservoir, ce qui majore notablement le prix d'ac-
quisition, et le rapproche de la dépense des moteurs spéciaux et
des véhicules ordinaires employés dans l'autre système.
En exploitation, les locomotives à air comprimé ou à air chaud
ont le même rendement, soit 63 p. 100.
Sans doute, dans la locomotive Francq, Toau chaude subit un
refroidissement important qui donne une réduction notable du
nombre de calories extraites des générateurs ; mais cette perte ne
saurait être comparée à celle qui résulte, dans le système Mékarsky,
des transformations successives de Ténergie; en effet, la machine
fixe qui actionne les compresseurs ne peut rendre plus de 73 p. 100,
et les compresseurs d'air eux-mêmes plus de 70 p. '100 d'oîi
il résulte que le rendement do l'énergie disponible sous forme
de vapeur dans les générateurs n'est pas supérieure à
^lôô" ^ TôiT ^ "îôcr= ^* P- *^
dans le système Mékarsky, alors que le rendement du moteur
374 CHEMINS DE FER SUR ROUTES
Francq ne descend certainement pas au-dessous de 5«^ à 60 p. iOO,
eu évaluant largement les pertes dues au refroidissement.
A côté de cette infériorité, la voiture Mékarsky présente de
sérieux avantages; elle risque moins d*eiïrayer les chevaux, et de
plus la voiture, ayant un nombre restreint de places, doit avoir
des départs très-fréquents, ce qui est essentiellement conforme aux
nécessités d'un service urbain, et ce qui conviendrait peu au moteur
Francq, construit pour remorquer plusieurs voitures à la fois et
par suite pour des départs plus espacés.
Mais le système Mékarsky n'est guère extensible; il donne en
effet une traction plus onéreuse que la traction par chevaux, sans
avantage bien marqué, tandis que le système Francq convient
bien aux lignes de banlieue.
3® Tramway de Lyon a Vénissieux
M. Léon Francq a encore obtenu récemment d'appliquer son
système sur le parcours de Lyon (place Bellecour) à Saint-Fons et
à Vénissieux, ligne de 9 kilomètres avec rampes de 44 millim.
et courbes de 23 mètres de rayon.
Les générateurs installés à Saint-Fons, auront tous les perfec-
tionnements que les expériences de Rueil-Marly et de Lille-Roubaix
ont amené à reconnaître.
On a renoncé aux générateurs Belleville ; l'eau de condensation
des locomotives sera renvoyée dans les chaudières; on brûlera des
combustibles économiques, etc.
On a apporté un soin tout particulier au mode de remplissage.
Un des desiderata des moteurs à eau chaude réside dans ce fait
que malgré la précaution prise de faire barbotter la vapeur dans
toute la masse d'eau du récipient, celle-ci s'échauffe d'une manière
très-inégale ; les couches supérieures sont à la température de 200**
alors que les couches inférieures restent souvent au-dessous de
100®. La cause de ce mauvais chargement, d'où résulte nécessai-
rement une chute de pression rapide en marche, et une impuis-
sance do la machine, est la différence de pression entre la vapeur
des générateurs (io atmosphères) et le récipient de la locomotive
(1 atmosphère). La vapeur se précipite dans ce récipient avec une
CHEMINS DE FER SUR ROUTES 375
vitesse d'écoulement trop grande pour permettre réchauffement
de toutes les couches d'eau.
Les mécaniciens expérimentés atténuent en partie cet inconvé-
nient en ouvrant progressivement et lentement la valve d'admis-
sion de la vapeur du générateur, et consacrant environ 20 minutes
au chargement.
M. Léon Francq espère faire disparaître entièrement l'inconvé-
nient par remploi d'une valve livrant automatiquement à la va-
peur un passage d'autant plus grand que la pression du récipient
sera plus rapprochée de celle des générateurs.
De plus, la locomotive aura un récipient de 4 mètres cubes.
Enfin on étudie en ce moment une ligne de Lyon à Oullins,
dont les déclivités atteindront 65 millimètres.
Le moteur à eau chaude est encore employé pour le remorquage
des bateaux dans le souterrain de Mauvages (canal de TEst) et sur
les tramways suburbains de Batavia.
CINQUIÈME PARTIE
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
\
CHAPITRE XXVI
RÉSUMÉ
I. — CHEMINS DE FER A FAIRLE TRAFIC DES GRANDS
RÉSEAUX
En résumé, on a vu que les grandes Compagnies se sont effor-
cées d'introduire de notables économies dans l'exploitation de
leurs lignes à faible trafic, surtout à partir des conventions du
20 novembre 1883, qui ont mis défmitivement à leur charge une
foule de lignes improductives construites par TEtat ou rachetées
à la suite de la faillite de Compagnies locales.
Deux d'entre elles, la Compagnie de Paris-Lyon-Méditerranée
et surtout la Compagnie du Nord, ont appliqué à ces lignes un
mode d'exploitation tout différent de celui qu'elles ont adopté
pour les grandes lignes de leurs réseaux.
Compagnie da 3kord
La Compagnie du Nord, désireuse à juste titre de ne pas ren-
fermer son exploitation dans une formule unique, a détaché de
ses inspections principales 1,400 kilomètres de lignes secondaires
et les a divisés en une douzaine de groupes autonomes, non
enserrés dans les règles étroites qui peuvent convenir à l'exploita-
380 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
tion stricte et quasi militaire des grandes artères, mais qui sont
souvent inconciliables avec la recherche de multiples économies,
dont Tensemble a pu atteindre plus de 1,000 fr. par kilomètre sur
le réseau secondaire de la Compagnie du Nord. Les chefs de
groupe n*ont plus avec les inspections principales que des rela-
tions nominales. Ils ont autorité absolue sur leur personnel et
apportent à Texécution de leurs fonctions toute Tardeur et Tinté-
rèt que peuvent faire naître la responsabilité directe et Témula-
tion, et que des règles administratives trop étroites tendent au
contraire à étouffer.
Sans doute ce système nécessite des hommes intelligents et
actifs, mais il a justement pour effet de les mettre en lumière.
En même temps qu'elle divisait en groupes ses lignes secon-
daires, la Compagnie du Nord s'attachait à réduire le personnel
de ses stations et de ses trains. Elle remplaçait les trains mixtes
par des trains légers à marche accélérée, toutes les fois que le ou
les trains de marchandises existant sur la section pouvaient suf-
fire à assurer le service de la petite vitesse sans qu'il fût néces-
saire de recourir à la mise en marche de trains nouveaux. Les trams
lég€7*s ou économiques, essenlieWemeni munis du frein continu, et
limités à 6 véhicules, d'après les arrêtés ministériels^ n'ont qu'un
conducteur comme personnel de train proprement dit : ils peu-
vent du reste être transformés en trains mixtes, dès que le trafic
l'exige, par l'adjonction d'un homme d'équipe pris comme garde-
frein à la gare qui force la composition du train.
Enfin, la Compagnie du Nord, réduisant à une grande voiture à
couloir la composition du train léger, a été autorisée, dans cer-
tains cas, à réduire du même coup à un seul agent le personnel de
la machine. Le train-tramway ainsi constitué, dessert, de même
que le train léger, certains passages à niveau et fournit accrois-
sement de recettes en même temps que réduction de dépenses et
accélération de vitesse.
Telles sont les intéressantes améliorations introduites récem-
ment dans l'exploitation des lignes secondaires de la Compagnie
du Nord. Il convient du reste de faire ressortir qu'il n'y a pas là un
* Rendus en extension du décret présidentiel du 20 mai 1880.
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 381
système absolu, mais que chaque cas particulier fait Tobjet d'une
étude attentive, facilitée par la division en groupes indépendants,
entre lesquels est établi un concours d'économie et de bon service.
On ne peut que regretter que la Compagnie du Nord n'ait pas
cru devoir donner à ses groupes une autonomie et une spécialisa-
tion plus complète encore en réunissatit dans la même main, au
lieu do les tenir séparées, les trois divisions du service : voie,
traction et mouvement.
Compa§^e de Paiis-Lyon-lléditerranée
L'exemple de l'exploitation des Dombes par la Compagnie de
Paris-Lyon-Méditerranée, présente aussi un grand intérêt. Un
petit nombre de stations, dénommées gares^ peuvent intervenir
dans le mouvement des trains, et sont munies à cet effet de
voies de croisement et du télégraphe. Dès lors, le service des
autres stations peut être assuré par un personnel restreint le plus
généralement à une femme. Certains passages à niveau ont été
transformés en haltes sans qu'il en résulte aucun travail spécial
pour la garde-halte, d'une instruction souvent insuffisante, car
elle se borne à distribuer un bulletin d'origine, sans effectuer de
perception.
D'un autre côté, lorsque la station a des manœuvres ou manu-
tentions à faire dans l'intervalle des trains, elle peut requérir des
hommes de la voie, en remboursant à ce service les heures
employées.
On peut critiquer la suppression systématique du télégraphe
dans les stations gérées par les femmes, ce qui oblige les agents
de train à de trop longs parcours à pied en cas de détresse ; le
report à la gare centre des opérations comptables des femmes
chefs de station est en principe une idée excellente; mais en fait,
eu égard au travail que la Compagnie P. L. M. exige de ces
femmes, elle aurait bien peu à faire pour leur apprendre la tenue
complète de leur comptabilité.
État
L'Administration des chemins de fer de TElat a eu, dès le
382 HÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
principe, à exploiter de nombreuses lignes improductives. Bien
qu*elle se soit attachée en général à la réduction du personnel
de ces lignes, elle n'est pas entrée, comme la Compagnie du
Nord, dans la voie de la division en groupes soustraits aux règles
d'exploitation applicables aux lignes plus importantes. Elle n'a pas
non plus, comme la Compagnie Paris-Lyon-Méditerranée, dis-
tingué ses stations en gares de croisement, à personnel plus
important, et en stations gérées économiquement par des femmes
de cantonniers. Ses efforts ont plutôt porté sur l'allégement de la
machine et sur la réduction du personnel des trains. Après Tin-
succès de la voiture à vapeur Belpaire, elle a fait construire pour
ses lignes à très-faible trafic, à rampes de 15 ™/° et où les trains
ont des charges variant entre 30 et 100 tonnes, des locomotives-
tenders' fourgons, d'un poids limité à 25 tonnes en charge, et
inférieur à 10 tonnes par essieu, pouvant atteindre en palier des
vitesses maxima de 70 kilomètres à l'heure ; on a supprimé le
chauffeur, et le chef do train, placé dans le fourgon que porte la
machine, peut au besoin en tenir lieu.
Economie de près de 30 p. 100 de combustible ; même économie
dans le personnel de conduite de la machine ; tel est le résultat
sanctionné par l'expérience de 10 machines pendant deux
ans.
Les trois exemples qui précèdent donnent une solution diffé-
rente du problème de l'exploitation économique des lignes à
faible trafic.
Réduction du personnel des stations et du personnel des trains,
tel est le but poursuivi par la Compagnie du Nord.
Stations gérées par un seul agent, homme, ou le plus souvent
femme ; concours des hommes de la voie aux manœuvres des
wagons et manutentions des marchandises : c'est la solution Paris-
Lyou-Méditerranée.
Enfin , l'Administration des Chemins de l'Etat se préoccupe
surtout de la machine, adopte des locomotives légères et réduit
ainsi la consommation du combustible, et supprime le chauf-
feur.
Aucune particularité spéciale n'est à signaler pour le service
d entretien des voies ; il est rare qu'on descende au-dessous de la
HÉSI'MÉ ET CO.NCLISIONS 38;i
proportion d'un homme par deux kilomèlros ; encore celle pro-
portion n'est-elle pas fréquente.
Pour bien juger la valeur de ces diverses solutions du problème
de Téconomie sur les lignes secondaires, il convient de jeter les
yeux hors de France, et de rechercher ce qui se fait à l'étranger*,
par comparaison avec les procédés qu'on vient de rappeler.
LI(]i.^CS SECONDAIRES DES GR.13iDS RÉSEAL'X E:V ALLEMAGNE,
ALTRICHE-HONGRIE, IT.1LIE, HOLLANDE ET HELGIQUE
1" . — Allemagne
C'est en Allemagne que les chemins de fer secondaires ont été
le mieux étudiés : c'est aussi dans ce pays qu'ils ont regu le plus
d'extension.
Les chemins de fer secondaires (Secundârbahnen) sont régis par
une ordonnance très-libérale du Conseil fédéral (12 juin 1878).
Cotte ordonnance a un effet rétroactif et a été appliquée à un
grand nombre de lignes exploitées jusqu'alors comme grandes
lignes (Hauptbahnen) et déclassées à l'effet de bénéficier des faci-
lités nouvelles.
Les vitesses supérieures à 30 kilomètres à Theure sont interdites
sur les Secundârbahnen. — Sous cette condition, pas de clôtures
sur ces lignes, pas de surveillance ni de barrières aux passages à
niveau, pas de signaux fixes.
Les divers pays de TEmpire ont tiré un parti différent des
facilités de l'ordonnance du 12 juin 1878.
* Une partie des renseignements qui suivent ont été puisés dans une étude sur
V Exploitation économique des lignes secondaires des grands réseaux de Chemins de
fer dans les différents pays de l'Europe^ par de Busschere, de Jaer et Niels, ingé-
nieurs attachés aux Chemins de fer de TEtat belge, chargés d'une mission spéciale
par le Ministre des Chemins de fer, Postes et Télégraphes de Belgique.
384 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
Prusse. — KEtàt prussien possède environ 3,000 kilomètres
de lignes secondaires sur un total de 22,000 kilomètres.
Voie. — Les voies sont en général armées en rails de réemploi
provenant des grandes lignes ; la visite de la voie n'a lieu qu'une
fois par jour, le matin, lorsque les cantonniers se rendent au
travail.
Le personnel d'entretien est extrêmement réduit : il est d'un
homme par 3 à 4 kilomètres. Les dispositions des stations et des
bâtiments sont des types les plus simples.
Matériel roulant. — Les machines des Secundârbahnen sont
exclusivement des machines légères, dont le poids par essieu ne
dépasse pas 10 tonnes ; on fait usage, selon les cas, de deux types
de locomotives-tenders : l'une est à deux essieux pesant 20 tonnes,
l'autre à trois essieux pesant 30 tonnes. Ces locomotives sont à
grande surface de chauffe : un mètre carré par 300 kilogrammes
de poids en service, ce qui leur permet de développer une force
respective de 160 et 250 chevaux. Elles sont munies de cloches
que le machiniste fait sonner aux abords des passages à niveau
non gardés, ou lorsque la voie est longée par un chemin public.
Le diamètre des roues est de 1"",080. Ces machines coûtent res-
pectivement 18,000 marcks (22,500 francs) et 24,000 marcks
(30,000 francs).
Sur la plupart des ligues secondaires, la première classe de
voyageurs est supprimée, et on y fait surtout usage de voitures
mixtes 2* et 3* classes (16 places 2% 28 en 3'). La composition de
train la plus habituelle comprend la locomotive, un wagon mixte
pour poste et bagages, et une ou deux voitures mixtes 2* et
3* classes.
Ces voilures sont à compartiments, éclairées au gaz autant que
possible, et munies du frein continu : une décision du Ministère
des Chemins de fer de Prusse (1" mai 1886) permet en effet de
supprimer le serre-frein dans tous les trains munis du frein
continu.
Service des yares et des trains, — Dans les stations d'une cer-
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 38o
laine importance, le chef de slation est aidé soit d'un homme
d'équipe permanent, soit d'un poseur de la voie ou d'un supplé-
mentaire, aux heures les plus chargées de la journée. Les billets
sont toujours délivrés par le chef de station.
Dans les stations de moindre importance on a réduit le personnel,
et on emploie comme chefs de station des agents d'ordre inférieur.
Les horaires des trains sont calculés de manière que le service
des stations n'excède pas 15 heures par jour.
En général, on cherche à séparer autant que possible le service
des voyageurs de celui des marchandises, au moins sur les lignes
longues, où, en raison de la limitation de vitesse des trains, la
durée du trajet serait trop prolongée si les trains de voyageurs
devaient assurer le service des marchandises. Toutefois les wagons
transitant sur la ligne sont ajoutés en queue de ces trains.
Saxe. — Le réseau Saxon embrasse 2,200 kilomètres, dont
640 kilomètres de chemins de fer secondaires. Il semble qu'on
soit allé jusqu'à l'extrême limite de l'économie dans l'exploitation
de ces derniers.
Voie. — Sur les lignes déclassées, on a laissé tomber les clô-
tures faute d'entretien ; le gardiennage a été supprimé. On a loué
à des particuliers les locaux rendus disponibles par la suppression
du gardiennage ou le déclassement des stations; on a même
démoli toutes les maisons qui ne pouvaient servir au logement
des agents et qu'on ne trouvait pas h louer. On a pu réaliser, par
ces diverses mesures, 1,630 francs d'économie par kilomètre.
Les voies nouvelles sont en rails légers, à 23 kilos acier. Pas
de signaux: des poteaux d'avertissement indiquent seulement au
machiniste les endroits où il doit sonner, lorsque le chemin de fer
longe une route fréquentée.
Matériel roulant. — Rien de particulier au point de vue du
matériel roulant : l'adminislration use ses machines et ses voitures,
dont elle a un stock important, avant de construire des types plus
légers. Cependant, sur quelques lignes nouvelles, on emploie des
locomotives dont le poids est limite à 10 tonnes par essieu.
25
386 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
Pas de compartiments de V^ classe dans les trains, composés
comme en Prusse, aune ou deux voitures mixtes 2^ et3'.
Les voitures sont à intercommunication.
Service des trains et des gares, — Le nombre des trains est très-
limité.
Tous les trains sont mixtes sur les lignes courtes ; mais sur les
lignes longues, les trains assurant des correspondances impor-
tantes ne transportent que des voyageurs ; les autres sont
mixtes.
Ils ont généralement un conducteur et un serre-frein.
Dans les stations, le chauffeur coopère au chargement et au
déchargement des colis, ainsi qu'à l'accrochage et au décrochage
des wagons.
Les stations importantes seules so*nt munies d'appareils télégra-
phiques et gérées par un fonctionnaire de l'administration. Le
personnel de ces stations délivre des billets aux voyageurs pour
tout le réseau Saxon.
Les haltes sont au contraire dirigées par un particulier nommé
Gûteragenty ordinairement un cabaretier, qui doit habiter à proxi-
mité de la halte et fournir au public une salle d'attente, mais qui
ne lui délivre pas de billets. La distribution des billets est faite
parle conducteur, pendant l'arrêt du train: le fourgon comporte
à cet effet un casier à billets, tous du modèle Ëdmondson. Les
billets ne sont délivrés que pour les points d'arrêt du train. Pour
réduire le nombre des billets, on fait servir chacun d'eux entre
deux stations, quel que soit le sens du train ; à cet effet, il porte la
mention : De A en B on vice versa. Le conducteur accepte égale-
ment les bagages et les expéditions de messagerie, jusqu'àSO kilos;
il pèse à l'aide d'un peson suspendu au fourgon.
Le Gûteragent est présent au passage des trains ; il aide aux
manœuvres des aiguilles, des wagons, veille à la réception et à
l'expédition des colis.
Les marchandises en provenance d'une halte gérée par un
Gûteragent sont, autant que possible, expédiées en port dû, les
marchandises à destination de celte halte, en port payé.
 l'expédition, le Gûteragent marque avec son timbre la lettre
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 387
de voiture, qu'il envoie avec la marchandise à la station la plus
voisine, qui est chargée de rétablissement des écritures.
A l'arrivée, la marchandise est accompagnée d'un laisser-passer
portant, le cas échéant, mention de la somme à percevoir du des-
tinataire. La feuille de route est envoyée à la gare dont relève le
CMÛteragent,
Celui-ci ne reçoit aucune rémunération de l'administration ;
mais il est autorisé à percevoir des habitants de la localité une
taxe supplémentaire de 1 marck par wagon complet de 5,000 ki-
logs, et de 5 pfennigs par fraction indivisible de 100 kilos de
marchandises de détail.
Sur un total de 52 stations et haltes ouvertes aux voyageurs et
marchandises que comprennent les 8 lignes secondaires du réseau
Saxon, 34 haltes sont gérées de cette façon.
Organisation administrative. — Une autre particularité des
lignes secondaires do ce réseau réside dans leur organisation
administrative.
Chacune d'elles est dirigée par un régisseur [Bahnverwalter) ayant
dans ses attributions tous les services, et relevant directement;
pour tout ce qui concerne l'exécution' proprement dite, de la
direction générale.
Le Bahnverwalter est ordinairement le chef de la gare la plus
importante de la ligne.
Outre son service propre comme chef de station, dans lequel il
est assisté par des auxiliaires, il doit veiller à l'entretien de la voie
de toute la ligne, s'occuper de l'utilisation et de la consommation
des machines, du petit entretien des voitures, wagons et locomo-
tives, de l'alimentation, du mouvement des trains et des stations.
Il reçoit chaque jour les versements des conducteurs des trains,
contrôle leurs opérations dans ses tournées, centralise les recettes
de toute nature de la ligne et les envoie à la direction générale,
effectue les payements, etc.
Le Bahnverwalter a autorité sur tout le personnel y compris les
Gûteragent : il adresse à la direction générale toutes les proposi-
tions qu'il croit devoir faire dans l'intérêt de la ligne.
L'administration fait faire chaque année le compte séparé des
388 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
dépenses et des recettes de ses diverses lignes secondaires et en
publie les résultats, ce qui est à ses yeux un excellent moyen de
stimuler Tamour-propre des Bahnverivalter.
Grâce à ces divers procédés les dépenses des Secundarbahnen,
dont plusieurs ont de fréquentes et longues rampes atteignant
25 millimètres par mètre, restent au-dessous de 3,500 francs par
kilomètre.
Bavière. — L'organisation des chemins de fer secondaires de
Bavière a été calquée sur celle en vigueur en Saxe.
De même que dans ce dernier pays, « on a pensé en Bavière
« qu'on ne pouvait arriver à une exploitation économique pour
a Tadministralion, satisfaisante pour le public, que par une con-
« centration d'autorité qui permette de mettre en mouvement,
« pour les faire concourir à un but commun, tous les moyens,
« en hommes et en matériel, dont on dispose; on a pensé que
c( Tagent unique doit avoir l'indépendance et la liberté nécessaires
« pour approprier ces moyens aux besoins constamment variables
« du trafic, et qu'il doit en même temps posséder les aptitudes
« voulues pour pouvoir, dans les moments difficiles, faire oublier,
« par l'opportunité de ses mesures et la rapidité de leur exécution,
« la pauvreté des installations de la ligne et la parcimonie avec
« laquelle elle a été outillée et armée *. »
Le Bahnverwalter saxon s'appelle en Bavière Betriebsleiter (con-
ducteur de l'exploitation); mais il aies mêmes fonctions; il est
habituellement le chef de la station tête de la ligne secondaire.
Les lignes secondaires du réseau Bavarois sont pour la plupart
des lignes en impasse.
Voie. — Sur les lignes nouvelles on n'emploie que des machines
très-légères; le poids du rail est limité à 18 kilos par mètre. Le
personnel d'entretien delà voie y est très-restreint; sur certaines
lignes, la proportion atteint à peine un homme par 4 kil. 5. Les
brigades sont renforcées en hiver pour l'enlèvement delà neige.
* De Vexploitation économique des lignes secondaires des Grands réseaux de
Chemins de fer dans les différents pays de ^Europe, par de Busschèrc, de Jaer et
Niels (page 9Ô).
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 389
Matériel roulant, — Les machines ne doivent pas donner une
charge supérieure à 8,500 kilos par essieu ; elles sont à 2 ou 3 es-
sieux, selon les déclivités, et pèsent respectivement 17,000 et
25,300 kilogrammes ; les roues ont 0",97 de diamètre et les chau-
dières sont timbrées à 12 atmosphères.
Les voitures sont à couloir; il n'y a pas de première classe;
le train est ordinairement composé d'une troisième et d'une mixte
deuxième et troisième classes.
Service des trains et des gares. — Les trains sont généralement
mixtes; on attelle en queue les wagons qui doivent parcourir la
ligne entière et en tête les voitures à voyageurs et les wagons à
déposer en cours de route.
Le conducteur délivre des billets en cours de route.
En dehors de quelques gares gérées par des employés de l'ad-
ministration, les stations ou haltes sont dirigées par des particu-
liers qui portent ici le nom de Baltesteller, mais dont le service
est le même que celui des Gûteragent saxons, à part l'améliora-
tion suivante : si une expédition doit être faite d'une halte en port
payé, le Haltesteller demande à la gare dont il relève, par le télé-
phone, qu'il a à sa disposition, la taxe à appliquer : il la perçoit
et en fait mention sur son livre.
Les gares de croisement seules sont munies du télégraphe :
les stations et les halles intermédiaires disposent du téléphone,
comme il vient d'être dit.
La Bavière comme la Saxe est arrivée, par l'adoption do ces
mesures, à des résultats remarquables. Les dépenses de personnel,
qui fournissaient autrefois sur les lignes secondaires une part de
68 p. 100 de la dépense totale, sont aujourd'hui réduites à 35p. 100
et sur quelques lignes même à 30 p. 100.
Hanovre. — On n'a guère à signaler ici, en dehors de ce qui
a été dit pour la Prusse, que l'emploi sur les lignes secondaires
neuves, de locomotives Compound, construites par M. von Borries;
ces machines sont à deux essieux non couplés; elles pèsent
18 tonnes en ordre de marche avec une charge de 10 tonnes sur
l'essieu moteur.
390 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
Elles remorquent sur les lignes ordinaires, à profil facile, 4 à
5 voitures à la vitesse de 40 kilomètres à Theure, et leur consom-
mation ne dépasse pas 3 kilogrammes de charbon par kilomètre.
Le diamètre du petit cylindre est de 270 millimètres, celui de
grand cylindre 410 millimètres.
Alsace-Lorraine. — Peu de particularités autres que celles
relatées pour la Prusse.
Dans les gares, pas de signaux autres que ceux de position des
aiguilles.
Les voies sont solidement établies, et on ne doit pas dépasser
pour leur entretien, la proportion d'un cantonnierpar 3 kilomètres.
Deux types de locomotives, à trois essieux chargés à 8,700 ou
8,900 kilos au maximum; le premier type a deux essieux couplés,
l'autre les trois essieux.
Tous les trains ont des compartiments de première classe.
2* Autriche-Hongrie
Des lois à peu près identiques et portant les dates du 23 mai
1880 (Autriche) et 13 juin 1880 (Hongrie) ont délégué la conces-
sion des chemins de fer d'intérêt local des Chambres aux gouver-
ments respectifs d'Autriche et de Hongrie.
Par une ordonnance du 1" août 1883, rendue en exécution de la
loi de 1880, le gouvernement Autrichien a spécifié les facilités et
simplifications qui peuvent être accordées aux chemins de fer d'in-
térêt local à construire et étendues aux chemins précédemment
construits.
Pas de clôtures le long de la voie; pas de barrières aux pas-
sages à niveau, ni de gardiennage; pas de signaux ni de télégraphe;
suppression de la voiture de choc, sauf quand le train est trop
long ou le profil trop accidenté; réduction du personnel de con-
duite à un seul agent dans les trains de voyageurs, mixtes ou de
marchandises, toutes les fois que la composition du train ne ré-
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 394
clamo pas plus d'un frein desservi ; détermination de la vitesse
maxima laissée, pour chaque cas particulier, au ministre du com-
merce; le train doit pouvoir être arrêté sur une distance de
100 mètres à la rencontre des traversées à niveau non protégées
par des barrières ; suppression possible du chauffeur dans des
cas particuliers.
Tels sont les avantages accordés par la nouvelle réglementation,
avantages qui, aux termes de Tarticle 3 de la loi de 1880, sont
acquis à tous les chemins de fer existants exploités avec une vitesse
modérée et de la même manière que les chemins de fer d'intérêt
local.
Ces dispositions avantageuses viennent d'être complétées par
la loi du 17 juin 1887, applicable aux chemins de fer d'intérêt
local préexistants ou nouveaux, de même que la loi de 1880. La
loi de 1887 dispense les chemins de fer d'intérêt local des obliga-
tions relatives au service postal, des dépenses de police et de sur-
veillance, des droits de timbre relatifs à certains pactes et contrats,
de certains impôts, etc., etc.; elle atténue en faveur de ces
chemins, tant au point de vue de l'établissement que de Texploita-
tion, la part contributive dans les dépenses des gares communes
avec les lignes de l'Ëtat ou des Compagnies garanties par TËtat ;
enfin le Gouvernement donne des subventions aux Compagnies
de chemins de fer d'intérêt local à la condition que celles-ci aient
pu obtenir une contribution des provinces, des communes ou des
particuliers.
Voie. — Les rails adoptés pour les lignes neuves, secondaires
ou d'intérêt local, ont des poids réduits, descendant à 21 kil. 25
acier.
Matériel roulant. — Les locomotives qui y sont employées ne
doivent pas avoir, par essieu, un poids supérieur à 10 tonnes.
La Sùdbahn et la Nordweslbahn font usage sur certaines lignes
de locomotives- fourgons à trois essieux, pesant 7à 8 tonnes par
essieu, et ayant un poids adhérent de 13 tonnes environ.
Mais la Nordwestbahn seule profite des dispositions de ces ma-
chines pour supprimer le chauffeur; la Siidbahn a renoncé à cette
suppression, à la suite d'accidents, en raison de la difficulté que
392 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
préseuto le service pour un seul agents et de la diminution de sécu-
rité qui en résulte.
En ce qui concerne les voitures, toutes les administrations autri-
chiennes sont d'avrs que le type à couloir convient particulière-
ment pour Texploitatien des lignes à faible trafic; outre qu'il per-
met, mieux que le matériel à compartiments, de faire desservir
et surveiller le train par un seul conducteur, le matériel à couloir
donne, en général, une meilleure utilisation des places disponibles;
c'est ainsi qu'on estime en Autriche à 40 p. 100 l'occupation
moyenne du nombre des places avec ce matériel, tandis qu'elle
n'est que de 2S p. 100 avec le matériel à compartiments, soit un
rapport de 3 à 3.
Sur la majeure partie des lignes secondaires, les trains n'ont
pas de compartiments de première classe; par contre, sur quelques-
unes il y a des quatrièmes classes (debout).
Service des trains et des gares. — Le personnel des trains est
réduit à un seul agent toutes les fois que la charge du train le
permet; on s'attache à supprimer les trains mixtes sur les lignes
longues, lorsque le service des marchandises peut être intégrale-
ment assuré par un seul train.
En général, la distribution des billets se fait dans les stations
ou haltes ; les administrations autrichiennes trouvent dans ce
système plus de garantie que dans celui de la distribution des bil-
lets par le conducteur du train.
Les stations et haltes sont toujours gérées par des fonctionnaires
de la Compagnie, contrairement à ce qui se passe en Saxe et en
Bavière.
On rencontre en Autriche beaucoup de points d'arrêts intermé-
diaires facultatifs, c'est-à-dire où le train ne s'arrête que si un
voyageur est à prendre ou à laisser; le ou les voyageurs à laisser
avertissent le conducteur à l'avance; quand il y en a à prendre,
l'agent delà voie à qui est confié le service de Tarrêt plante sur
l'accotement troussé en forme de trottoir un disque rouge.
* On a vu que TEtat français fait aider le mécanicien par le chef du train^ moyennant
une légère indemnité à ce dernier.
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 393
Ces points d'arrêt ne distribuent de billets que pour les stations
ou les haltes de la ligne.
Les lignes secondaires autrichiennes sont en somme exploitées
avec beaucoup d^économie.
3"" Italie
L'Italie ne possède aucune législation spéciale aux chemins de
fer secondaires.
Une commission a bien été nommée en 1879 à TefTetde recher-
cher les économies qui pourraient être introduites dans la cons-
truction et l'exploitation des nombreux chemins de fer décrétés
par la loi du 29 juillet 1879; mais aucune sanction législative ou
administrative n'a été donnée au rapport très-bien fait de la com-
mission qui concluait à l'adoption d'un grand nombre des procé-
dés qui sont aujourd'hui employés en Allemagne, et à une large
utilisation des accotements des routes ordinaires.
La seule particularité qu'on rencontre en Italie est le grand
développement des tramways à vapeur.
Ceux-ci sont installés sur l'accotement des routes et font une
concurrrence très-grande aux chemins de fer ordinaires. Ils sont
en général à écartement normal et peuvent ainsi avoir un service
mixte avec les grandes lignes auxquelles ils sont reliés par rails.
La plus remarquable exploitation de tramways est celle de la
Société Yénéta qui, en dehors des 300 kilomètres de chemins de
fer ordinaires qu'elle possède, exploite un réseau de tramways à
vapeur qui a aujourd'hui 90 kilomètres et qui enaurabientôtSOO:
tramways et chemins de fer sont du reste exploités identiquement
de la même manière, sauf en ce qui concerne la vitesse et la lon-
gueur des trains, limités sur les tramways respectivement à 18 ki-
lomètres à Theure et 30 mètres, machine comprise.
Chaque ligne forme un groupe distinct, et son exploitation est
dirigée par un Ingegnere deW Esercizio, qui réunit dans sa main
les trois services de voie, traction, mouvement et trafic, et qui a
absolument les mêmes attributions que le Bahnverwalter saxon ou le
394 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
Betriebsleiter bavarois ; c'est le système qu'on appelle en Italie « sys-
tème de la concentration des services et de l'indépendance des lignes » .
Le matériel est spécialisé par lignes : sur les lignes à faible
trafic on fait usage de machines à trois essieux dont deux accouplés,
pesant 24 tonnes, pouvant remorquer, sur des rampes de 15 milli-
mètres, 30 tonnes en marchant à 50 kilomètres à l'heure, et
84 tonnes à 15 kilomètres.
Sur ces lignes le poids du rail descend à 23 kilos par mètre.
Les voitures sont tantôt à couloir, tantôt à compartiments ; l'a-
doption du frein continu permettra prochainement de supprimer
le serre-frein dans les trains.
Contrairement à ce qui se pratique sur les autres tramways à
vapeur du nord de Tltalie, la Compagnie Vénéta n'admet pas le
système de distribution des billets dans les trains.
La plus intéressante des lignes do la Société Yénéta est le
tramway de Padoue à Venise, qui, établi sur Taccotement de la
route reliant ces deux villes et pénétrant partout dans le centre
des villages, enlève tout le trafic local au chemin de fer, dont les
stations desservant ces mêmes villages sont souvent trop éloignées.
4® Hollande
La Hollande possède depuis le 9 août 1878, une loi sur les che-
mins de fer secondaires; cette loi a un e (Te t rétroactif.
Aux termes de cette loi, les chemins de fer sur lesquels aucun
essieu n'a une charge supérieure à 10 tonnes et où la vitesse de
marche des trains est limitée à 30 kilomètres au plus, sont affran-
chis des stipulations relatives aux clôtures, au gardiennage, etc.:
le personnel du train peut y être réduit à un mécanicien-chauffeur
et un conducteur, si le nombre des freins à desservir le permet.
Les Compagnies hollandaises n*ont guère profité de ces avan-
tages pour l'exploitation des lignes secondaires ; mais elles ont
créé autour des villes importantes des trains-légers, remorqués
par des machines de faible poids, à personnel restreint et desser-
vant les relations locales ; ces trains ne peuvent dépasser la vi-
tesse de 35 kilomètres à Thcure et s'arrêtent aux passages à niveau
les plus importants; on a profité de ce que leur dépense est faible
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 395
pour les multiplier; ils procurent une sensible augmentation de
trafic.
5° Belgique
Les Compagnies de chemins de fer belges, et en particulier
l'administration des chemins de fer de l'Etat, qui exploite plus de
3,000 kilomètres de lignes, se sont surtout occupés de Tallègement
des trains et de la multiplication des points d'arrêts ; la Belgique
a une population très-dense, voyageant beaucoup, et il importait
de mettre en circulation des trains fréquents, par suite légers et
à faible dépense, et de les arrêter le plus souvent possible, aux
passages h niveau avoisinant les localités, très-rapprochées et
toujours très-peuplées, pour ne pas obliger les habitants des
campagnes à faire 3, 4, 5 kilomètres et parfois plus pour se
rendre à une station.
L'Administration des chemins de fer de l'Etat belge a introduit
l'exploitation par trains légers sur 1,300 kilomètres de lignes.
Ces trains sont constitués ou bien avec moteur indépendant
(locomotive-fourgon ou locomotive légère) ou bien avec voiture
à vapeur Belpaire ; la charge par essieu, quel que soit le moteur,
reste au-dessous de 10 tonnes.
La locomotive-fourgon remorque 3 à 6 voitures sur des lignes
à rampes moyennes de 0"*,10, à la vitesse de 33 ou 40 kilomètres
à rheure.
La voiture à vapeur est de deux types :
Le premier type comprend trois classes de voyageurs,
43 places assises et un petit compartiment pour les bagages ; cette
voiture circule seule, et son moteur ne permet pas de lui adjoindre
d'autres véhicules.
La voiture à vapeur du deuxième type contient un moteur
plus puissant, un compartiment à bagages et un compartiment à
voyageurs de 3' classe, comprenant seulement 20 places. Ce
moteur peut remorquer deux ou trois voitures sur des rampes
deO^jlO, et est employé sur des lignes à trafic plus important.
La vitesse des voitures à vapeur est limitée à 33 kilomètres.
Leur personnel est réduit à un machiniste et un conducteur.
396 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
Les dépenses propres du service des trains, y compris person-
nel, entretien et réparations du matériel, et intérêt et amortisse-
ment du capital engagé dans ce matériel, descendent à G fr. 30
par train-kilomètre avec la voiture à vapeur du premier type;
0 fr. 33 avec la voiture à vapeur du deuxième type ; alors
qu'elles sont de :
0 fr. 40 pour les trains-tramways de la Compagnie du Nord
français ;
0 fr. 60 pour les trains légers de cette Compagnie ;
0 fr. 85 pour les trains de grandes lignes.
La dépense de premier établissement de ces divers trains varie
à peu près dans la même proportion.
« Avez-vous remarqué quelquefois, messieurs, » s'écriait récem-
ment (10 mars 1887), devant la Chambre des représentants de
Belgique, M. Vandenpeereboom, ministre des chemins de fer,
postes et télégraphes, «< l'organisation des trains circulant sur
« nos petites lignes secondaires, avant l'adoption des trains légers ?
« En tète, une locomotive de 40 à 50 tonnes, suivie de son ten-
« der, avec un machiniste et un chauffeur; puis vient un véhicule
« de choc, qui ne sert à rien, puisqu'il n'y a pas de bagages ;
a ensuite trois, quatre ou cinq voitures ; enfin un fourgon pour
« les bagages. Outre le machiniste et le chauffeur, il y a un chef-
« garde, un garde, un serre-frein ; total une dizaine de véhicules
« et cinq agents. Et tout cela, messieurs, pour transporter quel-
« ques personnes : j'ai vu de ces trains contenant trois, quatre,
u cinq, dix personnes au plus ! »
EXPLOITATIO.'V PAR TRALliS MIXTES OU HiDÉPEXDAl^XE DES
SERVICES VOYAGEURS ET MARCHil^ DISES SUR LES UG3ÎES
SECOIKDAIRES ?
L'indépendance des services de voyageurs et de marchandises
doit-elle être la règle pour les lignes à faible trafic comme pour
les grandes artères ?
On y tend en Allemagne et en Autriche-Hongrie, au moins sur
les lignes longues. En France l'extension des trains légers et des
trains-tramways est aussi un grand pas en avant dans cette voie.
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 397
Doit-on conclure de ces exemples à l'abandon prochain des
trains mixtes ?
C'est là, comme presque toujours en matière d'exploitation de
chemins de fer, une question d'espèces : tout dépend des condi-
tions particulières à la ligne. Un exemple, qu'on rencontre sou-
vent dans la pratique, le fera hien comprendre :
Soit une ligne suffisamment desservie par trois trains de chaque
sens ; les correspondances aux points de soudure avec les autres
lignes ne nécessitent pas de vitesses supérieures à 30 ou 40 kilo-
mètres à l'heure, et le service des trains est facilement assuré par
deux machines et par deux équipes de personnel, chaque équipe
et chaque machine fait trois des trains ; les deux machines,
remorquant successivement les mêmes trains, sont nécessaire-
ment du même type.
L'exploitation par trains mixtes est ici absolument ration-
nelle.
En effet, veut-on changer le mode d'exploitation et affecter
Tun des trains de chaque sens au service des marchandises-voya-
geurs, les deux autres transportant exclusivement des voyageurs?
D'une part on devra desservir le train de marchandises-voyageurs,
auquel on donnera la totalité des wagons, par une machine plus
puissante ; d'autre part, les trains de voyageurs devront, ration-
nellement, être remorqués par des machines légères ; mais alors
toutes les machines employées sur la ligne ne pourront plus ren-
trer dans le même roulement, et une seule machine légère ne suf-
fira pas à faire le service des quatre trains de voyageurs. D'un
côté on aura pu économiser un serre-frein et du combustible sur ^
les trains légers, mais de l'autre, il faudra une machine en plus,
avec son personnel, c'est-à-dire accroissement au lieu de réduc-
tion de dépenses.
Que l'on suppose au contraire que, sur la même ligne, les récla-
mations du public, le mouvement des voyageurs nécessitent la
création d'un quatrième train de chaque sens, ce qui entraine
comme conséquence : une machine en plus, avec son personnel,
et une équipe de personnel de conduite. Il y aura tout intérêt à
faire de ce train un train léger, avec locomotive légère et un seul
conducteur, et on trouvera généralement sans difficulté la possi-
398 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
bilité de faire de l'un des trains mixtes préexistants un train léger,
dont le matériel et le personnel rentreront dans le roulement du
train créé.
Les exemples pourraient varier à Tinfmi. Celui qui précède
suffit à montrer que si le train léger est souvent justifié, le train
mixte ne Test pas moins, et que, pour le choix de Tun ou de
l'autre, on doit soigneusement peser toutes les considérations :
longueur de la ligne, vitesse des trains, mouvement des voya-
geurs, importance des correspondances, nature et tonnage des
marchandises y utilisation du matériel et du personnel, etc., etc.
L'une des grosses objections que Ton fasse en Allemagne et en
Autriche contre le train mixte, c'est sa lenteur; d'autre part, on
limite dans ces pays à 30 kilomètres à l'heure la vitesse de tous
les trains des lignes secondaires, qu'ils soient affectés ou non au
service exclusif des voyageurs.
L'objection n'est pas valable ; il n'y a aucune raison pour
donner aux trains mixtes peu chargés de moindres vitesses qu'aux
trains de voyageurs.
Il y a en efl*et deux natures de trains mixtes : 1° le trciin qui
assure le service de détail, train de marchandises-voyageurs, qui
manœuvre dans les stations, et par suite y stationne longuement,
et dont la vitesse de marche doit être aussi réduite que la charge
à remorquer le nécessite ; et 2* le train qui transporte des wagons
complets ne faisant que transiter sur la ligne ; celui-là n'a pas à
stationner dans les gares du parcours plus qu'un train de voya-
geurs ordinaire, et peut avoir en marche la même vitesse que celui-
ci. La seule différence, c'est qu'il nécessite des machines plus
puissantes et par suite plus coûteuses. Est-ce une infériorité?
C'est là une question d'espèces, comme on vient de le mon-
trer.
Ajoutons que le train léger ^ tel qu'il est compris en France,
n'est pas une entité parfaitement rationnelle. Pourquoi ce chiffre
absolu de 6 véhicules au delà duquel il faut deux agents de con-
duite?
On a vu plus haut qu'en Prusse, tout train muni du frein con-
tinu peut être desservi par un seul conducteur, quel que soit le
nombre de véhicules.
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 399
Et d'autre part, tous les règlements en vigueur en France,
tout en obligeant les Administrations de chemins de fer à avoir
deux conducteurs par train (hormis les exceptions qui découlent
du décret du 20 mai 1880), reconnaissent explicitement qu'un
frein suffit pour 12, 10 ou 8 véhicules, selon que les déclivités sont
de 10, 12 ou io »/", et les vitesses de 36, 40 ou SO kilomètres à
rheuro*.
Si donc il est désirable que les trains munis du frein continu
puisscjit être desservis par un seul conducteur, sans limitation de
véhicules, comme cela se pratique en Prusse, il n'est pas moins
désirable que les trains mixtes puissent bénéficier de la suppres-
sion du serre-frein, toutes les fois que cet agent n'est pas néces-
sité par Tobligation du frénage. Serait alors train léger tout train
à un seul conducteur.
DE LA VITESSE DES TRAITS SLR LES LIGIVES SECO.\DAUlES
Les lois et règlements allemands, autrichiens, hollandais limi-
tent à 30 kilomètres la vitesse des trains des lignes secondaires.
En Belgique, les trains légers atteignent 35 et 40 kilomètres de
vitesse.
Rien de semblable en France, où des vitesses de 50, 55 et
60 kilomètres ont été autorisées, suivant les cas, pour les trains
légers et les trains- tramway s.
Sans doute la réduction des vitesses permet la réduction du
poids des machines, et ipso facto celle du rail ; elle permet la
suppression des clôtures, du gardiennage, des passages à niveau,
des signaux, etc., etc.
Mais tous ces résultats ne peuvent-ils être obtenus autre-
ment?
L'exemple de l'Administration des chemins de fer de l'Etat
(locomotive-fourgon) prouve qu'on peut construire des machines
légères, pesant moins de 10 tonnes par essieu et pouvant atteindre
une vitesse de marche de 70 kilomètres à Theiire.
* Le frein continu est, il est vrai, obligatoire pour tous les trains de voyageurs
(circulaire ministérielle du 29 mars 1886), mais cette prescription n'est pas applicable
aux trains mixtes.
400 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
Aux grandes vitesses, ces machines remorquent de faibles
charges, partant la masse du train est faible, et, si les véhicules
sont munis du frein continu, Tarrèt est possible sur une aussi
faible longueur que pour un train de même masse limité à 30 ou
40 kilomètres sans frein continu; dès lors, clôtures, gardiennage
et signaux ne sont pas plus justifiés dans un cas que dans Tautre.
Est-ce à dire que les trains des lignes secondaires doivent être à
grande vitesse?
Cela peut être utile dans certains cas particuliers, où les corres-
pondances à assurer sont importantes et serrées, où, en accélérant
les trains, on peut éviter la mise en roulement du matériel et du
personnel qui serait indispensable sans cela.
Si donc, en général, les trains des lignes à faible trafic doivent
être à faibles vitesses, soit 30 ou 40 kilomètres, il faut se réserver
la possibilité d'aller au delà, puisque! n'en résulte pas obligatoi-
rement dépense supplémentaire appréciable d'établissement, ni
amoindrissement de la sécurité.
Le système français, c'est-à-dire l'absence de limitation, parait,
sous ce rapport, le meilleur ; mais il implique, pour les grandes
vitesses, l'obligation du frein continu.
Revenons maintenant à Texamen séparé des diverses solutions
du problème de l'exploitation économique des lignes à faible trafic.
Kéduotion du personnel de station
Que Ton suppose une gare courte, bien aménagée, à voies de
service bien reliées aux voies principales. Est-il possible, sans in-
convénient, de n*avoir dans une semblable station qu'un personnel
réduit à un agent pour desservir 6 à 8 trains au total, et un trafic
n'excédant pas une cinquantaine de voyageurs par jour, une tonne
de bagages ou marchandises de détail et 4 ou o wagons tant à
l'arrivée qu'au départ. C'est le cas le plus général des stations des
lignes à faible trafic;- il peut encore représenter \d à 30,000 francs
de recettes.
Avant le passage d'un train de voyageurs, le travail d'un chef
do station consiste à vérifier la position de ses aiguilles, ouvrir le
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 401
signal, délivrer les billets, enregistrer les bagages. — Au passage
du train, il procède à la vérification des colis et écritures qui lui
sont laissés parle conducteur et remet à celui-ci les écritures qui
accompagnent les bagages, pendant que le garde-frein annonce la
station, ouvre et ferme les portières et aide au besoin au charge-
ment ou déchargement des colis ; le chef de station vise en outre
la feuille de marche du train, etc....
Le signal du départ donné, il retire les billets des voyageurs
descendus et délivre les bagages.
S'agit-il d'un train mixte ou de marchandises-voyageurs, il doit,
en dehors des occupations précédentes, procéder à la reconnais-
sance des colis, wagons ou écritures qui lui sont remis, diriger
les manœuvres, pousser les wagons avec l'aide du conducteur et
du garde-frein.
Tous ces travaux n'excèdent pas les forces d'un seul homme, si le
nombre des voyageurs est réduit, les manutentions restreintes et
les manœuvres de wagons peu fréquentes.
Une femme seule peut encore y suffire ; ce n'est pas seulement
l'exemple des Bombes et de certains groupes de la Compagnie du
Nord qui le démontre, c'est aussi celui d'un grand nombre de
chemins de fer d'intérêt local ; mais une femme seule ne peut
diriger une station qu'à la condition que les agents du train fassent
eux-mêmes manœuvres et manutentions. Et plus le trafic sera
réduit, plus Temploi de la femme sera justifié.
Selon le degré de son instruction, l'agent qui dirige seul la sla^
tion, homme ou femme, devra, ou bien tenir ses écritures, ou bien
en adresser les éléments à Tune des stations voisines : ce dernier
procédé est en usage sur les lignes secondaires de la Compagnie
P.-L.-M., non sans quelques complications dont on a su s'aff'ran-
chir sur les chemins de fer d'intérêt local du Pas-de-Calais, et sur
les Secimdarbahneii du réseau Saxon ou Bavarois.
Mais un agent seul^ homme ou femme, ne pourra plus que très
difficilement remplir les multiples fonctions qui lui incombent au
moment du passage d'un train, s'il a à assurer en outre le service
du télégraphe ou le croisement des trains.
Il faudrait, pour qu'il pût y parvenir, que le mouvement des
26
402 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
voyageurs fût infime et le trafic de petite vitesse à peu près nul,
ce que nous ne supposons pas.
Conséquemment, la demande de voie pour les trains réguliers,
qui présente d'ailleurs toute sorte d'inconvénients sans nul avan-
tage, n'est pas compatible avec la gestion d'une station par un seul
agent * ; de même on n'y peut guère effectuer de croisements ou
de changements de croisement de trains.
Si Ton veut conserver la possibilité de faire éventuellement des
croisements dans la station, il faut adjoindre un agent au chef de
station ; ce qui est le plus simple et le plus économique, est de
charger sa femme de la tenue du lélégraphe et de la distribution
des billets.
Mais il paraît infiniment préférable d'adopter le système P.-L.-M.,
c'est-à-dire d'interdire à toute une catégorie de stations d'interve-
nir dans le mouvement des trains ou d'effectuer des changements
de croisement, plutôt que de s'exposer à des catastrophes toujours
à redouter de la part d'agents nécessairement moins expérimentés
que ceux que l'on met à la tète des stations de croisements réguliers.
Sans doute, il faut que les trains aient une régularité absolue,
sans quoi le moindre retard risquerait d'entraîner la désorganisa-
tion complète du service. Il est peut-être plus facile d'obtenir
cette régularité sur les sections à faible trafic si elles sont décen-
tralisées que si elles rentrent dans l'organisation générale ; car
la surveillance est, dans le premier cas, plus étroite et le lien
entre les divers services plus resserré ; l'exemple des groupes du
Nord et des chemins de fer d'intérêt local le prouve; le service y
est toujours en effet d'une extrême régularité, à la condition
bien entendu que les trains de grandes lignes, que relèvent ceux
des petites, soient eux-mêmes réguliers, ce qui est le cas général.
D'autre part il est plus économique de payer une indemnité
aux réclamants en cas de retard exceptionnel, que de s'astreindre
à avoir dans une station un personnel exagéré, exposé à commet-
tre de lourdes fautes en effectuant des changements de croisement
auxquels il n'est pas habitué par la pratique journalière.
* La Compagnie de TEst vX quelques Compagnies d'intérêt local seules font usage
de la demande de voie. L'administration des chemins de fer de l'Etat qui Tavait
adoptée au début de son exploitation, vient d'en décider la suppression.
T .
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 403
Dans rinlervalle des trains, les manutentions et surtout les
manœuvres de wagons dans une station gérée par un seul agent
sont faites le plus souvent parle chef de station, aidé du destina-
taire ou de l'expéditeur à titre gratuit.
Si le trafic est faible, que le personnel supplémentaire no doive
être employé que pendant peu de temps, il faut recourir le moins
possible à des auxiliaires du dehors^ dont le chef de station est
toujours tenté de faire régulariser l'emploi à titre permanent. Il
vaut bien mieux suivre l'exemple de la Compagnie P.-L.-M. et,
moyennant paiement^ des heures employées, prendre des hommes
de la voie, qui ne peuvent être distraits de leur service normal
que pendant le temps strictement indispensable.
Il est vrai que le recours au personnel des. équipes do la voie
n'est possible qu'au moment où ces équipes ne sont pas elles-
mêmes surchargées de travail ; et que les chefs d'équipe sont tout
naturellement incités à ne pas laisser leur personnel hors de leur
surveillance immédiate ; d'où peu d'empressement à répondre aux
demandes de personnel qui leur sont adressées par les stations.
Mais bien que le juste point soit difficile à obtenir, il n'y a là
aucune impossibilité. Tout tiraillement disparaîtra si le chef de
groupe est à la fois chargé de t exploitation proprement dite et de
l'entretien de la voie: il reportera en effet dans les stations le per-
sonnel de la voie quand les travaux le permettront et même au
besoin, sur la*voio, les hommes d'équipe inutilisés dans les gares.
— On arrivera encore à un excellent résultat en intéressant le
chef d'équipe au bon service de la station, c'est-à-dire en plaçant
sa femme à la tête de celle-ci.
On a supposé que la station était bien aménagée. Il est désira-
ble que les voies y soient courtes, bien reliées par aiguilles aux
voies principales, de manière à permettre les manœuvres à la ma-
chine pour les trains circulant dans un sens ou dans un autre, que
le quai à marchandises et la halle soient très-rapprochés du bâti-
ment des voyageurs, ou mieux encore accolés, pour éviter toute
perte de temps et au public et au personnel de la station ou des
trains.
' Payement pour ordre, par simple jeu d'écriture*
404 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
Si les aiguilles sont au contraire éloignées, les voies difficile-
ment accessibles aux machines, le quai distant, les manœuvres ou
manutentions deviennent fatalement onéreuses et lentes.
On ne saurait trop insister sur ce point : un chemin de fer ne
peut être exécuté indépendamment de la considération des besoins
de l'exploitation, comme cela a lieu le plus fréquemment. On
pouvait autrefois ne pas trop se préoccuper des dispositions inté-
rieures des gares, car le personnel y était toujours nombreux.
Mais construire de petites stations sur des lignes à faible trafic
suivant les types adoptés pour les grandes lignes, comme cela se
fait bien souvent encore à l'heure présente, c'est pure ignorance
ou hérésie, et, ce qui est plus grave, c'est condamner presque irré-
médiablement l'exploitant à des dépenses injustifiées.
Ce n'est pas à dire que le type à choisir soit absolument défini.
On a pu voir dans les nombreux exemples qui précèdent qu'il y a
un assez grand nombre de dispositions différentes, dont chacune
est excellente ou défectueuse selon la nature du trafic ou du ser-
vice qu'elle doit assurer. C'est encore ici, comme presque toujours,
question d'espèces.
à
Réduction du personnel des trainii
Il est très-difficile de faire à la fois des économies dans le per-
sonnel des trains et dans celui des stations.
En effet, l'exemple des trains légers de la Compagnie du Nord
le prouve, on peut encore, sans avoir à lutter contre d'autres obs-
tacles que la mauvaise volonté initiale des agents, réduire à un
conducteur le personnel des trains affectés au service exclusif des
voyageurs, alors que la station est gérée par un homme ou une
femme seule. Le chef de station est alors dans l'obligation de
nommer à haute voix la station, d'ouvrir et fermer les portières.
Il lui faut déployer beaucoup d'activité ou de zèle pour ne pas
occasionner de retards aux trains.
Mais la question se complique si le train à un seul agent doit
prendre ou laisser au passage des colis nombreux ou pesants. La
réduction du personnel de train peut avoir dans ce cas pour con-
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 405
séquence raugmentation du personnel de la station, ce qui ferait
bien plus que compenser Téconomie réalisée.
Cette réduction peut encore présenter un autre danger, elle
revient en eiïet à supprimer, au moins en partie, les trains mixtes ;
il ne faut pas dès lors qu'il en résulte ni une diminution de vitesse
dans le transport des marchandises, ni un accroissement du nom-
bre des trains par la mise en marche de trains facultatifs destinés
à suppléer à Tinsuffisance des trains de marchandises réguliers.
Chaque cas particulier nécessite, comme on voit, une étude
approfondie.
Il est cependant possible de supprimer un garde-frein tout en
disposant de deux agents pour les manutentions ou manœuvres
dans les stations. C'est le résultat qui a été obtenu sur plusieurs
lignes d'intérêt local par l'obligation imposée au chauffeur, et au
besoin au mécanicien, de prêter la main au conducteur; mais cette
adjonction est bien difficile à obtenir si le personnel de traction ne
relève pas directement du chef de l'exploitation de la ligne.
On en revient donc, en fin de compte, à charger un seul chef de
l'ensemble des trois services de la ligne ou du groupe : voie, traction
et mouvement.
C'est le système du Bahnverwalter saxon, du Betriebsleiter bava-
rois, système qui a été si heureusement défini en Italie sous le
nom de système de la concentraiion des services et de l'indépendance
des lignes.
Dès lors, plus de tiraillements entre les agents des divers
services d'exploitation d'un chemin de fer, comme il arrive par-
fois à un tel degré qu'on en est à douter que tous ces agents aient
pour mission de servir les intérêts d'une même administration ; le
chef de groupe a au contraire toutes facilités pour faire concourir
au même but tout son personnel.
C'est parce qu'ils sont placés sous une direction unique et sans
intermédiaires à plusieurs degrés que les Secundàrbahnen saxon-
nes et bavaroises et les lignes secondaires de la Société italienne
Veneta à l'étranger, et les chemins de fer d'intérêt local en France,
sont pour la plupart exploités avec une économie qu'on cherche-
rait vainement sur les lignes similaires de nos grandes adminis-
trations.
406 RÉSUMÉ ET CONCLUSIOiNS
Emploi de machines légères et réduction du personnel
de la machine
En ce qui concerce le premier point, c'est-à-dire l'emploi des ma-
chines légères sur les lignes secondaires, il y a unanimité à l'étran-
ger sur la nécessité de cet emploi, qui entraîne comme conséquence,
outre l'économie dans l'acquisition, les consommations et l'entre-
tien de la machine, la réduction de poids du rail.
En France, on est généralement aussi de cet avis ; mais on
préfère user le stock important de locomotives que la baisse du
trafic laisse à la disposition des Compagnies plutôt que d'en cons-
truire do neuves ; par suite, on continue à armer en rails lourds
les lignes nouvelles ; c'est là un cercle vicieux et une économie
mal entendue.; et l'objection que ce système permet sur toutes les
lignes l'emploi indistinct de toutes les machines n'est pas valable,
puisque, pour une bonne exploitation, le matériel locomotives et
voitures doit être spécialisé sur les lignes secondaires, et qu'en
fait il l'est le plus souvent.
Du reste, on ne peut aller très-loin dans cette voie de l'allége-
ment des machines, c'est-à-dire descendre à des charges de 8 et
7 tonnes par essieu, que sous la condition de renoncer à la vitesse,
ce qui, ainsi qu'il a été dit plus haut, n'est pas toujours une sage
mesure.
On doit entendre par machines légères des machines dont la
charge par essieu reste limitée à 10 tonnes, ce qui permet l'emploi
de rails de 25 kilos acier, et do vitesses de 50 à 60 kilomètres à
l'heure si besoin est.
Pour ce qui est de la réduction du personnel de la machine,
elle a été réalisée par la Compagnie du Nord pour ses trains-
tramways, sur les chemins do fer de l'Etat par l'adoption des
locomotives-fourgons, et à Télranger, par les voitures à vapeur
de Belgique, et les trains secondaires de la Nordwestbahn autri-
chienne et des chemins hollandais.
Cette réduction n'est compatible qu'avec une consommation de
charbon restreinte, c'est-à-dire avec des machines de faible
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 407
poids. Elle no présente aucun inconvénient sur des lignes bien
gardées, où le mécanicien peut distraire son attention de la voie
pour casser le charbon, charger le feu et alimenter la chaudière.
Il n'en est plus de même sur des lignes non clôturées, incomplè-
tement gardées, où le mécanicien doit apporter plus d'attention à
la voie.
Sur les locomotives-fourgons, le conducteur peut, il est vrai,
prêter aide au mécanicien ; mais le frein de la machine et le frein
du fourgon sont confondus ; il y a donc un frein desservi en
moins, et par suite nécessité d'adjoindre un second garde-frein au
train dès que la composition dépasse G à 10 véhicules selon les
rampes.
D'où il suit que Téconomio résultant de la suppression complète
d'un chauffeur n'est réelle que pour les très-faibles charges, c'est-
à-dire qu'elle n'est admissible que pour des trains légers.
Aussi, pour ce qui concerne la France, ce qu'il faut surtout
retenir de l'essai do l'administration des chemins de fer de l'Etat,
c'est l'heureuse idée de desservir les lignes à très-faible trafic avec
des machines do poids réduit, et par suite de consommation res-
treinte ; mais il paraît préférable de maintenir un chauffeur en
titre sur la machine, en le faisant concourir au service du train
daus les stations.
Réduction du personnel d'entretien et de surveillance
de la voie.
La proportion kilométrique du personnel d'entretien est
fixée par le nombre et la vitesse des trains, la charge des
essieux, la nature du terrain et du ballast. Il est rare que Ton
descende au-dessous d'un homme par 2 kilomètres sur les lignes
secondaires de nos grands réseaux. A l'étranger, avec des rails
de faibles poids, des voies saines, des trains lents, légers et peu
nombreux, on a pu atteindre la proportion d'un homme par
4 kilomètres et même par 4 kil.,S.
La question de surveillance dépend essentiellement de la légis-
lation et on ne peut à cet égard que regretter que les lois fran-
408 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
çaises du H juin 1880 et du 27 décembre^ de la même année n'aient
pas d'effet rétroactif, contrairement à ce qui a lieu partout à
rétranger pour les lignes secondaires préexistantes aux lois
nouvelles.
En résumé, on peut réduire à un seul agent, homme ou femme,
le personnel des stations peu importantes sur les lignes à faible
trafic, à la condition de ne pas faire intervenir ces stations dans
le mouvement des trains, et de faire concomnr au besoin les
hommes de la voie aux manutentions et manœuvres peu fré-
quentes qui y ont lieu, en dehors du passage des tfains. En char-
geant de la tenue des écritures Tune des stations voisines plus
importante, on pourra confier la station de trës-faiblo trafic à un
agent peu instruit et par suite peu rétribué.
Il est bon que la femme chef de station soit femme d'un chef
cantonnier. Il est indispensable que les aménagements des stations
soient disposés de manière à permettre de faire rapidement tout
le service de voyageurs ou marchandises au passage des trains.
Dans les stations de faible trafic, où ont lieu des croisements de
trains, la femme doit être adjointe au chef de station pour le ser-
vice du télégraphe et des billets.
Les trains mixtes peuvent être allégés et on peut réduire à un
seul agent le personnel des trains de voyageurs à composition
restreinte, s'il ne résulte pas de là, création de trains nouveaux ou
mise en service de machines et d'équipes supplémentaires, mais
sous ces conditions seulement.
Les trains légers doivent être remorqués par une machine de
faible poids et par suite de faible consommation, mais à vitesse
pas trop limitée ; il est utile que les véhicules soient armés du
frein continu, au moins si les vitesses atteignent ou dépassent,
en pleine marche, une cinquantaine de kilomètres à Theure. Le
chauffeur doit aider au service du train et aux chargements et
déchargements des colis.
i La loi du 27 décembre 1880 autorise, dans certains cas, en ce qui concerne les
clôtures et les barrières des passages à niveau, une dérogation à Tarticle 4 de la loi
du 15 juillet 1845 pour Ico chemins de fer d'intérêt général à construire et pour les
chemins de fer d'intérêt local à incorporer dans le réseau d'intérêt général.
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 409
Le personnel d'entretien et de surveillance des voies peut être
réduit à un homme pour 3 ou 4 kilomètres pourvu que les lignes
soient armées en rails légers, non clôturées et non gardées.
Ces diverses économies pourront être recherchées avec la plus
grande chance de succès par la division des lignes à faible trafic
en groupes de peu d'étendue, embrassant des lignes de trafic ana-
logue, et où les trois services de voie, traction et mouvement,
seront concentrés dans la main d'un même chef de groupe jouis-
sant de toute l'autorité compatible avec la responsabilité qui lui
est imposée, et soustrait aux règles en vigueur sur les grandes
artères.
Ce système, qui procède du système en faveur en Amérique ou
en Allemagne, revient à appliquer aux lignes secondaires des
grands réseaux le mode d'exploitation des Compagnies de che-
mins de fer d'intérêt local.
Nous allons voir, en résumant rapidement les exemples qui
font l'objet de l'étude qui précède, jusqu'à quelles limites on
peut aller dans cet ordre d'idées.
II. — CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL A VOIE
NORMALE
Traeés. — Parmi les chemins de fer d'intérêt local qui ont été
décrits, un certain nombre sont justifiés soit par le caractère
industriel de la région qu'ils desservent, soit par la densité
de la population, soit encore par le trafic toujours assuré
à une ligne convergeant vers un centre important ou une grande
artère, lorsqu'elle reste dans le rayon d'attraction de ce centre ou
de cette artère.
D'autres chemins de fer d'intérêt local ont été exécutés sans
but bien défini : concédées sans étude suffisante des intérêts à
desservir, ou encore sans autre raison que celle de créer des che-
mins de fer, qui sont tracés à droite plutôt qu'à gauche selon que
les influences politiques de droite ou de gauche l'emportent, ces
conceptions étaient destinées à semer tôt ou tard la ruine ou
4i0 RÉSUMÉ ET CONCLUSIOiNS
tout au moins le mécontentement : c'est le cas général des che-
mins de fer excentriques ou supérieurs en longueur au rayon
d'attraction du centre ou de la grande ligne auxquels ils abou-
tissent.
Tels quels, ces chemins existent, comme les premiers. Résu-
mons ce que sont les uns et les autres.
Les chemins de fer d'intérêt local du Pas-de-Calais et de TAisne
sont des lignes industrielles, reliant à la Compagnie du Nord de
nombreuses fabriques de sucre.
Saint-Quentin à Guise, rayon de 40 kilomètres, reliant à une
ville de 40,000 habitants une vallée industrielle, riche et peuplée,
qui a des rapports nombreux avec Saint-Quentin.
L'Est de Lyon, rayon convergeant vers la ligne de Lyon, mais
qui, au delà de 50 kilomètres, a déjà un trafic réduit.
Les chemins du Rhône (Lyon à Sathonay), autre rayon de
26 kilomètres de longueur, qui a malheureusement coûté trop .
cher d'établissement.
Parmi les chemins des Bouches-du-Rhône un seul est nettement
justifié, c'est le court rayon industriel qui joint à Arles les carrières
de Fontvieille.
Montpellier à Palavas, courte ligne balnéaire, ayant malheu-
reusement un mauvais profil.
Le Médoc, autre ligne balnéaire, traversant, pour arriver à Bor-
deaux, une région riche et peuplée. Celte ligne était malheureu-
sement trop rapprochée de la Gironde pour qu'on pût espérer
autre chose qu'un faible trafic de marchandises, que le phylloxéra
a encore réduit.
Toutes les lignes qui précèdent sont plus ou moins prospères,
mais viables ; leurs recettes paient largement les dépenses d'ex-
ploitation.
De plus, elles sont toutes, sinon complètement indépendantes
des grands réseaux au point de vue de leur service de traiqs,
du moins assez autonomes quant aux vitesses à donner à ces
trains.
La ligne de Saint-Rémy aboutit à'Tarascon, ville peu impor-
tante.
Pas-des-Lanciers à Martigues, Miramas à Port-de-Bouc sont
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 411
bien aussi des rayons par rapport à Marseille, mais des rayons
éloignés et ne conduisant qu'indirectement à cette ville, au prix
de détours et do changements do train.
Nizan à Sore et Luxey est aussi un rayon^ mais doublement
indirect, et éloigné par rapport à Bordeaux.
Les recettes des quatre dernières lignes ne couvrent leurs
dépenses que grâce à une exploitation remarquablement écono-
mique.
Le réseau de l'Eure n'a aucune autonomie : le grand nombre
de ses points de jonction avec le réseau de TOuest écrase son
exploitation par la multiplicité de ses correspondances, c'est-à-
dire des trains, et par leurs vitesses. Réseau mal conçu : les lignes
reliant Louviers à Elbeuf et Evreux, Pont-Audemer à la ligne de
rOuest, sont des rayons d'une vitalité suffisante : Tembranche-
ment qui relie à Pont-de-l' Arche l'industrieuse vallée de TAn-
delle était non moins justifié ; le reste n'a servi qu'à rendre oné-
reuse l'exploitation de ces lignes, en les surchargeant de trains.
Alençon à Condé, ligne longue (67 kilomètres), ayant avec
la Compagnie de l'Ouest trois points de jonction, plus nuisibles
qu'utiles au trafic de la ligne.
Mamers à Saint-Galais, chemin excentrique traversant un pays
de peu de ressources.
Montpellier à Cessenon, ligne agricole, justifiée avant l'inva-
sion du phylloxéra.
Lignes des Landes de la Gironde, en grande partie périphé-
riques, tracées en pays de bois, très-peu habité.
Plusieurs de ces dernières lignes, et principalement celles des
Landes de la Gironde, constituent autant d'entreprises condam-
nées d'avance à l'insuccès.
Conditions et dépenses d'établissement. — Les déclivités de
la plupart de ces lignes n'atteignent que sur des parcours excep-
tionnels la limite de IS à 16 °/°*. Exception est faite pour Satho-
nay-Trévoux (20 -/•») et les chemins de l'Hérault (30 T)-
La limite de 13 à 16 "»/", peut-être un peu forte pour la ligne
à trafic important de Saint-Quentin à Guise, eût convenu, à cette
exception près, à toutes les lignes de la première catégorie. Pour
412 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
celles de la seconde, 20, 2S, 30"/" ou même davantage étaient
de mise, si c'eût été nécessaire.
Les rayons sont partout restés supérieurs à 300 mètres en pleine
voie, sauf sur THérault où on a admis 200 mètres.
Sur le réseau des Landes de la Giroiide, le poids du rail des-
cend à 25 kilos acier ; il en est de même pour les renouvellements
de THérault où ce poids est faible, en raison des courbes et du
profil.
A ces exceptions près, le rail pèse le plus souvent de 30 kilos
(fer ou acier) à 36 kilos (fer), ce qui est le plus souvent exagéré.
Les dispositions des stations sont généralement appropriées
au service qu'elles ont à assurer : cependant celles de Saint-
Quentin-Guise et de TEst de Lyon sont défectueuses, celles du
Médoc trop vastes : les plus satisfaisantes sont celles de Mamers-
Saint-Galais et des Landes de la Gironde.
Excepté sur le Médoc, où on fait usage d'éjecteurs à culotte,
actionnés par la vapeur de la locomotive, et sur les Landes de la
Gironde, où on a installé des pulsomètres, l'alimentation est assu-
rée par les moyens ordinaires, pompe à bras ou à vapeur.
Le matériel roulant est presque partout à compartiments, il n'est
à couloir que sur l'Hérault et Nizan à Sore. On n'a pas eu à se
louer du matériel à étage, partout où on en a fait usage : Saint-
Quentin-Guise, Bouches-du-Rhône, Médoc, etc.
Le poids des machines varie en général de 23 à 35 tonnes ; il
atteint 55 tonnes pour certaines machines de THérault (2 trucs à
trois essieux). Le Médoc seul possède un groupe de machines à
tender séparé.
On n'attache pas en général suffisamment d'importance à
l'avantage qu'il y a sur des lignes à faible trafic et à personnel
d'une instruction souvent incomplète, à ne posséder qu'un type
unique de matériel remorqueur, deux au plus : le Médoc a cinq
types différents, l'Hérault six.
L'outillage des ateliers est le plus souvent suffisant pour
assurer les réparations courantes ; il est exagéré sur l'Hérault.
Les dépenses d'établissement, par kilomètre, ne dépassent pas
62,000 francs pour les Landes de la Gironde, lignes exception-
nellement faciles ; elles sont de 87,000 francs pour Nizan à Sore ;
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 413
varient de 100,000 à 150,000 francs pour la plupart des lignes,
atteignent 245,000 francs pour le Médoc, 267,000 francs pour
THérault, 350,000 francs pour certaines lignes de TEure et
750,000 francs pour Lyon-Sathonay (intérêt général).
Organisation des services. — Sur la plupart des lignes, tous
les services sont concentrés dans la main d*un chef d'exploitation,
ingénieur ou directeur, qui fait concourir au même but tout l'en-
semble du personnel, en maintenant un lien étroit entre les
diverses branches, voie, traction et mouvement.
Plus grande est l'autorité du chef d'exploitation, et meilleurs
sont en général les résultats. Cet agent supérieur prend ordinai-
rement la direction effective de tous les services, et s'occupe des
moindres détails de chacun d'eux ; il est aidé dans chaque
branche par un inspecteur, piqueur ou chef de traction, le plus
souvent chargé à la fois de la surveillance quotidienne des ser-
vices et des remplacements qui des mécaniciens, qui des chefs de
station ou conducteurs de trains.
C'est ainsi que sont dirigées les lignes de Saint-Quentin à
Guise, Alençon à Gondé, de l'Est de Lyon, les chemins du Rhône
et des Bouches-du-Rhône, de l'Hérault, le Médoc, Nizan à Sore
et Luxey et les Landes de la Gironde.
Sur les lignes du Pas-de-Galais et de l'Aisne et de Mamers à
Saint-Galais, la voie et la traction sont réunies sous la même direc-
tion immédiate, le mouvement est distinct.
Indépendance absolue entre tous ces services sur le réseau de
TEure, réseau d'ailleurs assez développé et par suite plus difficile à
conduire. Le lien entre les diverses branches du service est repré-
senté, pour ces dernières lignes, par un directeur éloigné, et par
suite placé dans de moins bonnes conditions pour assurer une ges-
tion aussi économique que s*il pouvait procéder sur place à la sur-
veillance instante de toutes les parties du service.
Entretien de la voie. — La règle qui parait en général adop-
tée pour l'entretien de la voie, est la règle humoristique formulée
par un directeur de chemins de fer d'intérêt local : « Moins on
touche à la voie, meilleure elle est. » II est clair que cette règle a pour
414 RÉSUMÉ KT CONCLUSIONS
but de prévenir un excès de zèle, mais non d'interdire Tentretien
des voies.
Et d'abord, les chemins do fer d'intérêt local sont des-
servis par un petit nombre do trains, peu chargés et ayant de
faibles vitesses ; le matériel roulant est léger, le rail lourd, les
courbes à grands rayons (Hérault excepté). Toutes ces condi-
tions concourent à réduire l'entretien au strict minimum.
II y a d'ailleurs très-grand intérêt à établir solidement les voies;
la dépense de construction en est faiblement majorée et Técono-
mie de l'entretien rachète bien au delà cette majoration. Les voies
sont meilleures sur un sol sain, avec de médiocre ballast, que sur
une plate-forme argileuse ou humide avec d'excellent ballast.
Les traverses doivent être visitées aumoins une foisl'an, et toutes
irrégularités dans la voie évitées.
Telles sont les règles suivies à peu près sur toutes les lignes d'in-
térêt local qui ont été décrites; telles quelles les voies y sont bien
souyent meilleures que sur les lignes analogues des grands réseaux.
En outre, les cantonniers assurent en général l'entretien des
bAtiments; il y a le plus fréquemment parmi eux des hommes suf-
fisamment exercés pour exécuter les maçonneries, charpentes ou
menuiseries; dans d'autres cas, ce sont les ouvriers de l'atelier
qui font ces travaux.
Le personnel d'entretien est de i homme par 3 kilomètres sur
le réseau des Landes de la Gironde (lignes neuves) à 4 trains par
jour, les deux sens compris, et sur Nizan à Sore (4 trains).
Un homme pour 2 kilomètres sur les lignes du Pas-de-Calais et
de l'Aisne et de celles des Bouches-du-Rhône (6 trains).
Trois hommes pour S kilomètres, Alençon-Condé, Mamers,
Saint-Calais (6 trains) et Médoc (8 trains).
Deux hommes pour 3 kilomètres, Eure (6 à 10 trains).
Un homme par kilomètre, Saint-Quentin, Rhône et Hérault et sur
ce dernier jusqu'à 2 hommes par kilomètre dans les parties difficiles.
L'infériorité générale, sous le rapport de l'économie d'entretien
de nos chemins de fer d'intérêt local par rapport aux lignes secon-
daires d'Allemagne et d'Autriche-Hongrie, tient à l'exagération
du poids du rail et des locomotives et à la différence de vitesse
des trains.
RÉSUMÉ ET CONCI.rSlONS 4i:>
Quoi qu'il en soit, la dépense kilométrique annuelle descend à
700 à 800 francs pour certaines lignes du Pas-de-Calais et do
l'Aisne, des Bouches-du-Rhône, et pour Nizan à Sore et les Landes
de la Gironde.
Elle est, en général, comprise 900 et 1,200 francs, soit en
moyenne \ ,000 francs.
Elle monte à 1,300 francs pour le Médoc et l'Est de Lyon, et
s'élève à 1,600 et 1 ,€00 francs pour rHéraull, l'Eure et Sathonay-
Trévoux.
Traction. — La traction est la partie la plus technique d'une
exploitation de chemins de fer, partantla plus difficile. Aussi est-ce
en général le service le moins satisfaisant sur les lignes d'inté-
rêt local; les chefs de traction ou de dépôt connaissent à peu près
le matériel qu'ils ont sous la main et sont souvent aptes à en bien
assurer les réparations; mais il est rare qu'ils possèdent des con-
naissances suffisantes pour introduire des améliorations sérieuses
soit dans la traction, soit dans les consommations. La question
est encore fréquemment compliquée par l'erreur qu'ont commise
des constructeurs ignorants des nécessités de l'exploitation, en
armant la ligne avec divers types de machines, que les nécessités
du service forcent d'employer indistinctement aux mêmes trains,
d'où une usure rapide et en fin de compte des dépenses fort
lourdes.
Enfin les machines sont le plus souvent beaucoup plus pesantes
qu'il ne serait nécessaire. C'est ainsi qu'en général, les consom-
mations sont exagérées ; mais cette exagération de dépenses est
Tachetée par l'absence de roulement, c'est-à-dire de déplacements,
qui prévaut sur presque tous les chemins d'intérêt local, machines
et mécaniciens rentrant chaque soir à un point d'attache qui est
toujours le même pour chacun.
Exception est faite pour THérault et quelques autres chemins.
Dans plusieurs cas, Pas-de-Calais, Bouches-du-Rhône, etc., etc.,
les mécaniciens et chauffeurs concourent d'une façon affective aux
manutentions et manœuvres dans les stations gérées par un seul
agent, homme ou femme, et lorsque le personnel de conduite du
train est lui-même réduit à un seul conducteur.
416 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS-
L'Est do Lyon est le seul qui ait adopté des machines du système
Belpaire, à grands foyers, permettant de brûler des charbons
« fines » à 14 fr. 80 au lieu de tout-venant à 17 fr. 50 ou de bri-
quettes à 26 francs.
Les dépenses kilométriques de traction pour les lignes desser-
vies à 6 trains seulement par jour, varientdepuis 800 francs (Nizan
à Sore) et 900 à 1,200 francs (Orne, Pas-de-Calais, Mamers-Saint-
Galais) jusqu'à 1,400 francs (Bouches-du-Rhône). Elles sont do
1,700 à 2,000 francs pour les lignes à 8 trains.
Service des trains et des gares. — En général, le service des
trains est de trois dans chaque sens ; il est difficile de descendre
au-dessous de ce nombre. Mais il ne devrait jamais être dépassé
sur des chemins à faible trafic : un train accéléré le soir et le matin,
un train de machandises-voyagenrs au milieu du jour, telle devrait
être la règle absolue pour ces chemins.
Les lignes de Nizan à Sore et des Landes de la Gironde ont
seules deux trains dans chaque sens.
On atteint 4 trains sur le Médoc, entre Bordeaux et Lesparre^
sur TEst deLyon et certaines lignes de TEure, 5 trains sur d'autres
lignes de ce dernier réseau et sur Saint-Quentin-Guise.
Le Pas-de-Calais, Lyon à Sathonay, les Bouches-du-Rhône,
Margaux à Gastelnau et Nizan à Sore et Luxey sont les seules
lignes sur lesquelles le personnel des trains soit réduit à un seul
agent. Un arrêté préfectoral autorise pour le Pas-de-Calais cette ré-
duction lorsque la composition du train n'excède pas 12 véhicules.
Les vitesses commerciales des trains varient de 20 kilomètres à
rheure sur l'Hérault, à 30 ou même 35 kilomètres (Eure). Elles
sont le plus généralement de 22 à 25 kilomètres.
Les stations où ne se font pas de croisements de trains sont,
dans la plupart des cas, gérées par un seul agent, homme ou
femme, qui réquisitionne les hommes de la voie pour les manu-
tentions ou manœuvres à faire dans l'intervalle des trains. Il en
est ainsi pour un grand nombre de stations sur les lignes du
Pas-de-Calais et de l'Aisne, de Saint-Quentin à Guise, d'Alençon
à Condé, de Mamers à Saint-Calais, du Rhône, des Bouches-du-
Rhône, du Médoc, de Nizan à Sore et des Landes de la Gironde.
HÉSUMK ET CONCLUSIONS
41
Dans les stations où ont lieu des croisements, on se borne sou-
vent à adjoindre la femme du chef de station à son mari pour le
service du télégraphe et des billets.
Ces procédés économiques ne sont pas en usage sur TEure et
TEst de Lyon.
Les dépenses kilométriques du service des trains et des gares,
c'est-à-dire du mouvement et trafic, descendent au-dessous de
1,000 fr. sur Mamers-Saint-Calais, Pas-des-Lanciers àMartigues,
Tarascon à Saint-Rémy, Nizan à Sore et les Landes de la Gironde.
Elles sont en général de 1,200 à 1,500 fr., dépassent 2,000 fr.
sur TEure, et atteignent 3,400 fr. sur la ligne de Saint-Quentin
à Guise.
Résultats généraux par kilomètre
Les dépenses d'exploitation les plus réduites sont celles de
Nizan à Sore, donnant une somme de 2,800 fr. pour un service à
deux trains de chaque sens, et des recettes de 4,500 fr., soit un
coefficient d'exploitation de 62 p. 100.
Les lignes des Landes de la Gironde (2 trains), ont des dépenses
d'exploitation qui se rapprochent des précédentes; mais ces lignes
sont neuves, et leur trafic est extrêmement faible (1,500 fr.). On
n'en peut encore tirer de conclusion.
Pour les autres lignes, les résultats sont les suivants :
DÉPENSES
RECETTES
^ 2
•r, .2
S2 "5
U TU
M M
Lignes à 3 trains dans chaque sens
Pas-dcs-Lancicrs-Marligues .... 3.400 4.300
Tarascon-Sainl-Rémy 4.o00
Mamers-Saint-Calais ( 3.600 à 3.800 3.775
Boisleux-Marquion ] 4.000
Achiet-Marcoing \ 7.500
Vélu-Sainl-Quenlin / 5.000
Miramas.Porl-de-Bouc [ 4.000 à 4. 400
Orne
Crécy-La Fère . .
Arles-Fontvieille,
5.000
6.200
5.200
4,000
8.000
10.700
80
82
105
85
53
80
89
108
62
59
27
UÉSLMÈ ET CONCLUSIONS
Lignes de 4, 5 trains et plus
Esl de Lyon (4 trains) . .
Uêdoc (i trains)
Eure (3 à 4 trains) ....
Saint-Qjfintin-Guise (3 trai
Sathonay-Trévouï (6 train;
Lyoa-Salhonay [iti trains)
5.00O
8.200
11.51)0
9.300
43.000
En résumé, si Ton doit reconnaître que quelques Compagnies
de chemins de fer d'intérêt local exploitent avec une remar-
quable économie, on peut reprocher à plusieurs d'entre elles
d'avoir manqué d'initiative, et de s'être trop souvent hornées à
imiter servilement les procédés en usage sur les grands réseaux
voisins.
Aussi un grand nomhre d'économies qui ont été indiquées
comme applicables aux lignes secondaires des grands réseaux,
le sont-elles ipso facto h certains chemins de fer d'intérêt local.
III. — CHEMINS DE FER D'INTÉRÊT LOCAL A VOIE
ÉTROITE
Nous no reproduirons pas les considérations qui précèdent le
résumé des conditions d'établissement et d'exploitation des che-
mins de fer à voie normale.
Elles s'appliquent aux chemins do fer à voie étroite^
Parmi les quatre exemples de chemins do fer à voie étroite qui
ont été donnés ', il n'en est qu'un complètement justifié, c'est le
premier.
' Il faut ajouter il ces lignes celle» ouvertes fin 1886 : 1» dans l'Allier (Moulins à
Biiiière-les-Minea, 4ô kilomètres), pu la Société des Ctiemins de far économiques ;
2" dans le Bhûne (Lyon-Saint-Just à Vaugnoray et à Messimy, 21 kilon)èirea\ par
rOnp=i-I.vnnnais; 3" dans le Nord (Caudry à Walincourt, iO kilomètres) par le
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 419
La ligne de Hermès à Beaiimont (32 kilomètres), la première en
date, la mieux construite et Tune des mieux exploitées, dessert une
région à population dense et industrieuse, ayant de nombreuses
relations vers Paris, dont rattraction est très-sensible encore à
cette distance.
Anvin à Calais, ligne à peu près contemporaine de la précé-
dente (94 kilomètres), desservant la banlieue de Calais-Saint-
Pierre sur 20 à 25 kilomètres, mais absolument injustifiée au
delà; car la région est des plus pauvres.
Ces deux lignes sont exploitées sans garantie.
Réseau dlndre-et-Loire, dont une seule ligne en exploitation :
Port-Boulet à Châteaurenault (103 kilomètres). Ligne périphé-
rique, tracée à tort et à travers, conception déplorable, ruineuse
pour le département et le concessionnaire, qui s'est chargé de la
construction à trop bas prix. Garantie incomplète et s'élevant aux
9/10 seulement des insuffisances. Régime de la loi du 11 juin 1880.
Valmondois à Epiais-Rhus (14 kilomètres), tout récemment
ouverte, tracée dans une vallée sans trafic, ligne dont le voisinage
de Paris ne peut faire espérer de couvrir les charges. Garantie
incomplète des insuffisances. Régime de la loi du 11 juin 1880.
Conditions et dépenses d*établissement. Hermes-Beaumont.
Déclivités de 20 millimètres, grands rayons, 300 mètres en pleine
voie. Rail de fer 20 kilog. remplacé annuellement par rail acier
de même poids. Machines de 24 tonnes à arrière-train monté sur
truc indépendant, roues de 0 m. 90 de diamètre, 2 m. 07 d'em-
pattement rigide, trois essieux accouplés, charge maxima par
essieu 7 tonnes. Matériel à compartiments, à frein à vide. Dépense
d'établissement 76,000 fr. par kilomètre.
Anvin-Calais. Déclivités limitées sans raison à 15 et 16 milli-
mètres, d'où très-longues rampes, et courbes de 100 à ISO mètres
de rayon, allongement inutile et localités mal desservies. Même
rail et à peu près même matériel que sur Hermes-Beaumont, sans
frein avide. Mêmes-dispositions des stations. On a expérimenté pour
les voyageurs de grandes voitures montées sur deux bogies ou
trains articulés, qui sont très en faveur auprès du public. Dépense
d'établissement 76,000 fr. par k^ilomètrc.
420 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
Indre-et-Loire. — Déclivités limitées à 15 millimètres, d'où
terrassements importants, courbes de 100 mètres. Rails de
ISkilog. acier, faible. Machines de 15 tonnes, trois essieux accou-
plés. Prix forfaitaire d'établissement 50,000 francs par kilomètre,
dépassé en fait de plus de 10,000 fr.
Valmondois-Epiais-Rhus. — Déclivités de 15 millimètres,
courbes de 200 mètres. Rail de 20 kilog. acier. Machines de 15 et
28 tonnes (8 tonnes par essieu accouplé), ces dernières provisoires.
Voitures exclusivement à deux trains articulés ou bogies.
Stations reliées non par le télégraphe mais par le téléphone. Prix
forfaitaire d'établissement très-élevé : 96,500 fr. par kilomètre.
Cette ligne représente le type auquel paraît s'être arrêtée la
Société générale des chemins de fer économiques.
Organisation des services . — Le directeur a charge effective
de tous les services sur la ligne de Hermès à Beaumont. Ce même
directeur est également chargé de l'exploitation de la ligne de
Valmondois à Epiais-Rhus.
Le personnel supérieur de l'exploitation est pour Anvin-Calais
le même que pour les lignes du Pas-de-Calais.
Sur le réseau d'Indre-et-Loire, les trois branches du service
sont indépendantes.
Entretien de la voie. — Hermes-Beaumont : 2 agents pour
5 kilomètres (8 trains par jour), dépense kilométrique annuelle :
430 francs.
Anvin-Calais : 1 homme par 2 à 3 kilomètres (2 trains sur la
plus grande partie du parcours), dépense d'entretien : 570 francs
par kilomètre, courbes roides.
Indre-et-Loire : 1 homme par 2 kilomètres (3 à 4 trains), dé-
pense d'entretien : 650 francs par kilomètre, ligne neuve, courbes
roides.
Sur la ligne de Hermès à Beaumont et sur celle de Valmondois
à Epiais-Rhus, les cantonniers peuvent être employés aux manu-
tentions dans les gares, et en particulier aux transbordements aux
points de jonction.
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 421
Traction. — La traction n'offre pas de particularités bien sail-
lantes. Sur tous les chemins de fer à voie étroite on a renoncé au
roulement proprement dit, c'est-à-dire à l'idée de faire assurer
successivement tous les trains de chaque ligne par la même
machine et le même personnel.
Les machines d'Indre-et-Loire, machines belges, sont à grands
foyers et consomment du tout-venant, les autres locomotives des
briquettes.
Les alimentations ont lieu au pulsomëtre sur Anvin-Galais.
Les dépenses de traction, par kilomètre de ligne, varient depuis
740 fr. (2 trains sur le plus long parcours — Anvin-Calais) jusqu'à
1,100 fr.(4 trains — Ilermes-Beaumont) et 1,200 fr. (3 et 4 trains —
Indre-et-Loire), où les machines sont fort mal utilisées, en raison
des trains multipliés et à faible parcours.
Mouvement et Service commercial . — Le service de chaque
train est assuré par un seul agent sur la ligne de Valmondois à
Epiais-Rhus ; sur cette seule ligne on a pris le parti de desservir
certains passages à niveau en y arrêtant les trains.
Le nombre et la vitesse des trains sont :
4 trains sur Hermes-Beaumont, vitesses commerciales 25 kil.
2 ou 3 trains sur Anvin-Galais, selon les sections
vitesses commerciales 18 —
3 à 4 trains sur Port-Boulet-Châteaurenault 20 —
3 trains sur Valmondois-Epiais-Rhus 20 —
Toutes ces lignes sont plus ou moins dépendantes des grands
réseaux voisins sous le rapport des correspondances, ce qui leur
constitue un service tendu en cas de retards des trains de grandes
lignes :
Valmondois-Epiais-Rhus n'a qu'un seul point de jonction ;
Hermes-Beaumont en a deux ;
Anvin-Calais en a trois ;
Indre-et-Loire en a quatre ;
Sur cette dernière ligne, le personnel des trains est systémati-
4» RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
quement fixé k deux agents, dont un homme d'équipe volant pour
manœuvres et manutentions dans les sLations. Sur cette ligne seule,
les chefs de station demandent la voie préalablement à l'expédition
des trains, ce qui n'a aucune raison d'être.
Les dépenses de mouvement et trafic, gares et trains, ne s'élè-
vent pas au-dessus de 700 francs sur Hermes-Beaumont, à 800
ou 850 francs sur Anvin-Calais et lo réseau d'Indre-et-Loire.
Les résultats totaux sont les suivants :
s s
LIGNES
DÉPENSES
RECETTES
= 1
o "
Henr
es-Beaumoiit (4 Iraiu-J . . .
3.UO0â 3.500
t.700àS.01)0
iiS
Anvi
i-Culai= (2 il 3 Iraius) . . , .
a. 000
2.600
„
Indv
-el-Loire (3 à i truius) . . .
3.000
t. 800
IV. — CHEMINS DE FER SUR ROUTES
Les chemins de la Meuse, delà Sarthe et du Camhrésis, les seuls
qu'il ait paru intéressant de relater d'une manière complète, at-
tendu que ce sont les seuls qui aient à la fois un service de voya-
geurs et de marchandises, sont établis pour la plus grande partie
sur l'accotement des routes; ils n'abandonnent celles-ci que
lorsque les déclivités y deviennent trop fortes, c'est-à-dire dépas-
sent 30 à 33 mîllim. par mètre.
La largeur des routes varie de 8 mètres (fiaironvillc à Triau-
court et certains parcours de tramways de la Sarthe] à IS mètres
(Sarthe) et 20 mètres (Cambrésis).
La ligne de Haironville à Trlaucourt {til kil.) est en partie une
ligne industrielle; mais c'est une ligne excentrique, décrivant un
urc de cercle do 12 à lo kilomètres de rayon autour de Bar-le-
Duc; partant son trafic voyageur est à peu près nul.
Le Maus à la Ghartre (48 kil.) est une ligne rayonnante, trar
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 423
versant une région très-pauvre; grâce à rallraction de la ville du
Mans (60,U00 habitants), les recettes couvrent amplement les
dépenses, au moins jusqu'au Grand-Lucé (31 kilomètres).
Cambrai au Catillon (36 kil.) traverse au départ de Cambrai
(23,000 hab.) une région riche et peuplée, pour aboutir au canal
de la Sambre ; bien que le pays soit déjà sillonné de chemins de
fer, les recettes du Cambrésis sont satisfaisantes.
L'expérience de ces trois chemins de fer ne parait pas, à pre-
mière vue, favorable à l'extension des lignes sur routes.
En effet, le département de la Meuse y a renoncé pour ses lignes
nouvelles, rayonnantes au départ de Bar-le-Duc, à la suite du
fâcheux essai de Hairon ville à Triaucourt; mais il convient de
faire ressortir que la route empruntée par ce chemin est étroite,
les vitesses très-faibles, le service défectueux, le danger perma-
nent, et surtout que la ligne est excentrique; les populations de la
région ne pouvant se servir de ce chemin à vitesses comparables
à celle d'une chaise de poste, et qui n'aboutit à aucun centre, ont
conclu à la défectuosité de principe du système.
Le département de la Sarthe a conservé pour ses nouveaux
rayons le même mode d'exploitation, mais tant en raison de la
limitation de vitesse, que de la difficulté des tracés, il n'emprunte
plus les routes qu'exceptionnellement.
Enfin la Compagnie du Cambrésis a résolu de construire ses
nouvelles lignes à travers champs, soit à cause des dépenses cau-
sées par l'obligation de protéger la voie ferrée par des bordures
de trottoir, soit parce que les déclivités trop fortes limitent les
charges des trains, soit encore parce que les routes sont étroites.
Il était nécessaire de rechercher si le danger incontestable que
présentent les chemins de fer sur route pour les piétons d'une
part^ pour les chevaux d'autre part, pouvait être considéré comme
une objection de principe suffisamment valable pour faire rejeter
systématiquement les chemins de fer sur routes.
Les exemples des tramways à vapeur de Yalenciennes, de Lille
à Tourcoing, de Rueil à Marly et de Saint-Etienne à Firminy,
Saint-Chamond et Rive-de-Gier, dont la description sommaire a
été jointe aux exemples de la Meuse, do la Sarthe et du Cambrésis,
démontrent péremptoirement le contraire.
424 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
Tous les ingénieurs du contrôle consultés ont déclaré avec la
plus grande netteté leur préférence pour le chemin sur routes.
Nous citerons l'opinion de Tun d'eux qui résume celle de tous les
autres : « Un bon tramway à vapeur est bien préférable à un mau-
« vais chemin de fer, et cette vérité ne serait jamais mise en dis-
« cussion si le mot de tramway n'éveillait à tort chez beaucoup
a do gens Tidée d'un simple omnibus, plus ou moins perfec^
(( tionné. »
Conditions et dépenses d'établissement. — Rampes de 30 mil-
limètres et courbes de 100, 80, 60 et 50 mètres sur Haironville*
Triaucourt.
Rampes de 30 millimètres, courbes de 100 mètres de rayon
en pleine voie, et de 50 mètres à la traversée des agglomérations
sur les tramways de la Sarthe.
Rampes de 33 millimètres, courbes de 100 mètres de rayon sur
le Gambrésis.
Rampes do 30 à 34 mm., rayons descendant à 25 et 30 m. au
passage des agglomérations sur les tramways de Yalenciennes.
Rampes de 60 à 70 mm., rayons descendant à 25 et 30 m. sur
les tramways de Saint-Etienne.
Rail de 15 kilog. acier sur les deux premières lignes.
— 18 kilog. fer sur le Gambrésis.
— 30 kilog. acier, à gorge sur Saint-Etienne, aussi bien sur
les accotements (ce qui est une grave erreur) que sur les chaussées.
Les machines sont de 15 tonnes au maximum, et à 3 essieux
accouplés, au moins sur les chemins de fer proprement dits.
Les empattements du matériel sont partout de 1 m. 80 environ.
Les dépenses kilométriques d'éUiblissement sont :
Pour le Mans et la Ghartre 44.000 francs
— Haironville-Triaucourt 60.000 —
— Gambrésis 84.000 —
Ges dernières ont été majorées par de coûteuses expropriations
pour les gares et les déviations, et par Tobligation d'établir par-
tout des bordures de trottoirs.
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 42o
Organisation et fonotionnement des services. — Les diverses
branches du service de tous ces. chemins de fer sur routes, sans
exception, sont dirigées dans les moindres détails par le direc*
teur chef d'exploitation.
Le Gambrésis seul a des chefs de station proprement dits, pour
le service des marchandises comme pour celui des voyageurs.
Sur ces chemins, un estaminet placé en face de la station sert dans
la plupart des cas d'abri au public : la femme du cabaretier distri-
bue les billets. Le téléphone est installé entre les diverses stations.
Sur les tramways de la Sarthe, pas de chefs de station propre-
ment dits; les cabaretiers, dénommés correspondants^ remettent les
marchandises aux destinataires ou les reçoivent des expéditeurs;
mais leur fonction se borne généralement à abriter le public. Les
conducteurs de train délivrent les billets et établissent les taxes de
petite vitesse.
C'est aussi ce dernier système qui prévaut sur Haironville-
Triaucourt.
Sur tous ces chemins, ainsi que sur les tramways de Saint-
Etienne, les trains ne s'arrêtent qu'aux gares exclusivement.
Les tramways de Yalenciennes s'arrêtent aux stations et à la
demande des voyageurs.
Les manœuvres de wagons en cours de route sont affectuées
par les agents des trains, aidés au besoin du chauffeur et du
mécanicien.
Le matériel est muni du frein à vide sur le Gambrésis, il le sera
prochainement sur la Sarthe.
L'entretien de la voie comporte un homme par 3 ou 4 kilomè-
tres sur toutes les lignes.
Le roulement entraîne déplacement pour les mécaniciens et
conducteurs sur la Meuse et la Sarthe.
Sur le Gambrésis, les machines sont banales, une même
machine roule toute la journée, deux équipes de mécanicien et
chauffeur assurent chacune la moitié du service.
Un seul conducteur au train sur la Meuse et le Gambrésis,
deux agents sur la Sarthe.
4 trains sur le Gambrésis, 3 sur la Sarthe, 2 seulement sur la
Meuse.
42G
HÉSLMÈ ET CONCLUSIONS
Vilesaes commerciales, respectivement de 20,J6cHakiIomfetres.
Une expérieuco <le marche à 25 kil. en pleine voie a été faite
depuis un an sur le Cambrésis; elle n'a prouvé que des avantagea.
La limitation à. 20 kil. du cahier des charges ne peut, par suite,
pas être considérée commo une objection contre le chemin de fer
sur route.
Les résultats kilométriques sont respectivement les suivants :
ël
LIGNES
UÉPENSES
RECETTES
il
Cambrcsij (4 trains)
3.30O&3.8O0
S.iOOàS.WO
6<i
3.630
2.S7a
101
Citons encore les tramways de Valencienues, embrassant 4 lignes
en rayon de 12 à ii kilomètres, dont les recettes s'élèvent en
moyenne à 11,300 francs, les dépenses à 6,280 francs et le coef-
ficient d'exploitation à 55 p. 100.
Pour arriver à tirer des conclusions relativement aux chemins
de fer d'intérêt local, il importe de résoudre au préalable les deux
questions suivantes :
1° Du choix à faire entre la voie normale et la voie étroite.
2° Du choix à faire entre le chemin de fer sur routes et le che-
min de fera travers champs.
- DU CHOIX A FAIBE ENTRE LA VOIE KORXALE ET LA. VOIE
ÉTROITE
Les avantages couramment reconnus de la voie étroite sur la
voie normale sont les suivants :
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 427
Floxibilité plus grande, emprises plus réduites, poids moindre
de la voie et du matériel; d'où économie dans le premier établis-
sement.
Réduction de l'entretien de la voie et du matériel, manœuvres
do gares rendues plus faciles, d'où économie danjs l'exploitation.
Les inconvénients sont :
Nécessité d'avoir des installations et gares distinctes au point
de contact avec la grande ligne; impossibilité d'emprunter du
matériel au grand réseau voisin, c'est-à-dire : obligation d'être
armé en prévision du maximum du trafic; enfin, obligation du
transbordement.
La flexibilité de la voie normale est-elle réellement aussi limitée
qu'on le croit généralement?
Une étude récente ^ met en lumière, par des exemples multipliés,
que des rayons de 250 mètres en voie ordinaire permettent sans
difficulté une vitesse de 60 kilomètres à l'heure, des rayons de
200 mètres une vitesse de 45 kilomètres, et dos rayons de 150 mè-
tres une vitesse de 25 kilomètres.
Dans plusieurs exemples, ces courbes sont combinées avec des
déclivités de 25 à 30 milimètres par mètre.
On a vu dans le cours de cette étude qu'il est bon de ne pas
descendre, pour la voie de 1 m. 00, à des rayons inférieurs à
150 mètres; mais avec cette condition la voie étroite est excel-
lente, tandis que la voie normale doit être fortement soutenue
dans les courbes par de nombreuses traverses, très-solidement
construite avec rails lourds, fixés sur les traverses par des coussi-
nets; et telle quelle, elle use très-rapidement le matériel roulant
et exige des locomotives spéciales, à faible empattement, boites
radiales ou trains articulés.
Le rayon de 150 mètres en voie étroite correspond aux rayons
de 250 à 300 mètres en voie normale; mais si le tracé l'exige, la
voie étroite à 1 mètre d'écartement peut sans danger être cons-
truite avec des rayons de 100 m., 75 m. ou même 50 mètres do
rayon, ce qui correspond à 200 ou 180 mètres en voie normale.
* Note sur la réduclion des rayons des courbes ; Annales des Ponts et Chaussées,
août 1886. — M. Jules Martin.
428 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
Donc incontestablement la voie normale a une moindre flexibilité.
Elle nécessite une emprise un peu supérieure.
Le poids du rail de la voie normale peut se rapprocher assez
sensiblement de celui de la voie étroite, si la ligne est à faible tra-
fic, et le terrain facile, comme c'est le cas pour les chemins des
Landes de la Gironde, où le rail, en acier, pèse 25 kilos le mèlre
et est suffisant. Le véritable rail de la voie de 1 mètre est le rail
acier de 18 kilos le mètre courant.
La différence de poids est donc d'environ 15 à 20 tonnes par kilo-
mètre, gares comprises, soit au prix actuel dés rails d'acier, une
différence de dépense no dépassant pas 2,500 à 3,000 francs par
kilomètre; on irait à 5,000 francs en faisant entrer en ligne de
compte les traverses et attaches.
L'avantage du faible poids du matériel roulant de la voie étroite
peut être considéré comme amplement racheté par l'obligation
d'armer le chemin en vue de pouvoir satisfaire au maximum du
trafic, tandis que nous voyons les chemins de fer d'intérêt local à
voie normale se servir du matériel des grands réseaux pour tous
les transports en transit.
L'établissement de gares distinctes aux points de jonction avec
les grands réseaux ne se traduit pas par une dépense notablement
plus élevée avec la voie étroite qu'avec la voie normale. En effet,
le chemin de fer d'intérêt local a besoin de voies propres, qu'il ait
sa tête de ligne en gare commune ou en gare indépendante; elles
ne seront guère moins importantes dans un cas que dans un
autre. Et pour ce qui est des quais et bâtiments, ils peuvent tout
aussi bien être mis en communauté, que l'embranchement soit à
étroite ou à voie normale.
Ainsi, au point de vue du 1*' établissement, peu de différence
entre les deux genres de chemins de fer quant à l'armature en
matériel roulant; peu de différence également quant à la super-
structure s'il s'agit d'un pays facile; l'avantage de la voie étroite
s'accentue dès que le pays devient plus tourmenté, par suite de la
nécessité de renforcer la voie normale. Mais oh l'économie àfi la
voie étroite éclate surtout, c'est dans l'établissement de la plate-
forme; elle peut s'élever dans certains cas à la moitié de la
dépense d'un chemin à voie large, ou même davantage.
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 429
Voyons maintenant les différences des deux chemins en exploi-
tation.
L'entretien de la voie étroite est évidemment plus économique
que celui de la voie normale; en particulier la même courbe qui
est très-roide en voie normale est presque comparable à un aligne-
ment en voie étroite; il en est de même pour l'usure du matériel
roulant, que la courbure augmente si rapidement.
La consommation de combustible dépend de la charge des
trains, de la vitesse, du profil, etc. Toutes choses égales d'ailleurs
elle peut s'exprimer ^ros5o modo par la proportion de 1 kilogramme
par 5 tonnes de poids de machine : ainsi.
Une machine tender ayant un poids adhérent de 15 tonnes
consomme de 4 kilos à 5 kilos.
Une machine de 20 tonnes d'adhérence. 5 à 6 kilos.
— 25— — 6à7 —
— 30— — 7à8 —
— 35 — — 8 à 9 —
Le poids adhérent peut être le même, quel que soit l'écartement
de la voie; par suite la puissance et la consommation de combus-
tible peuvent être identiques si les machines sont bien cons-
truites.
Donc pour ce qui concerne le moteur, la voie étroite ne présente
pas d'avantage sur la voie normale, ni sous le rapport de la
dépense de 1'*^ établissement, ni sous le rapport de la consomma-
lion de combustible.
Le matériel roulant de la voie étroite, à puissance égale de
chargement, pèse moins que le matériel de la voie normale ; d'où
réduction de poids mort dans les trains ; de plus, ce moindre poids
permet des manœuvres beaucoup plus rapides dans les gares, un
personnel moins important. Ces deux avantages sont à ajouter au
précédent.
Ainsi qu'il a été dit précédemment, la spécialisation du matériel,
au moins pour les locomotives et le matériel à voyageurs, s'impose
sur toutes les lignes secondaires, qu'elles soient à voie normale
ou à voie étroite; il n'y a donc pas de ce chef un désavantage pour
celle-ci.
430 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
La question du transbordement, dont on ne parle plus beaucoup
aujourd'hui, a été longtemps une grave objection contre le
chemin à voie étroite. Il convient d'en montrer brièvement la
valeur.
Examinons d'abord le cas de la voie normale, dans l'intérieur
d'un même réseaif, ou dans les relations de grand réseau à grand
réseau.
Quand un voyageur passe d'un embranchement sur un autre
ou sur une grande ligne, il doit le plus souvent subir un trans-
bordement, qui est, par suite, le même dans tous les cas, que
l'embranchement soit à voie large ou à voie étroite.
Toute marchandise de détail en provenance ou à destination
d'un embranchement est généralement transbordée au point de
jonction.
Sur le même réseau, les marchandises par wagons complets
passent sans transbordement d'un embranchement sur un autre.
— Au transit d'un grand réseau sur un autre, la même règle est
applicable depuis le i**^ octobre 1886 seulement; antérieurement à
cette date, plusieurs catégories de marchandises par wagons
complets, devaient subir le transbordement.
S'il s'agît au contraire du passage d'un grand réseau sur les rails
d'un réseau d'intérêt local à voie normale, ou vice versay ce n'est
plus qu'un petit nombre de marchandises par wagons complets,
telles que charbons, pierres oubetteraves qui transitent sans trans-
bordement.
La différence d'écartement de voie ne nécessite donc de trans-
bordement supplémentaire que pour un petit nombre de marchan-
dises par wagons complets. D'un autre côté, la proportion des
marchandises en wagons complets, d'autant plus importante que le
trafic du réseau est lui-même plus important, varie de 50 à
80 p. 100 du trafic P.V. total. — Prenons une moyenne de
70 p. 100 et appliquons à l'un des cas les plus défavorables qui
précèdent :
Une des lignes précédemment décrites, longue de 53 kilomè-
tres, ayant une recette kilométrique d'environ 10,000 francs,
divisée également entre la grande et la petite vitesse, a au point de
transit un trafic d'échange de 15 à 20 wagons par jour, atteignant
RÉSL'MK ET CONCLUSIONS 431
annuellement 48,000 tonnes. Dans ce total 35,000 tonnes arrivent
en wagons complets et 20,000 tonnes seulement passent sans
transbordement.
Si la ligne eût été construite à voie étroite quelle charge sup-
plémentaire en fût-il résulté? Le transbordement des marchandises
par wagons complets peut être évalué à 0 fr. 40 par tonne. Encore
ce chiffre est-il souvent un maximum quand il s'agit de chemins
d'intérêt local, qui appliquent à ce travail soit leurs conducteurs ou
chauiïeurs dans l'intervalle des trains, les cantonniers, hommes
d'équipe, etc., etc., et non un personnel spécial. En admettant
Ofr. 40, on arrive à une dépense annuelle de 8,000 francs, soit do
150 fr. par kilomètre pour une ligne ayant un trafic de 10,000 fr.
par kilomètre.
Pour une ligne d'un trafic ordinaire de 3,000 à 4,000 fr., cette
dépense ne chargerait pas Texploitation. de plus de 50 fr. par
kilomètre.
Or, la différence d'écartement permet de réaliser sur l'entretien
de la voie et du matériel roulant, les manœuvres, etc., une éco-
nomie kilométrique certainement équivalente sinon supérieure à
150 francs.
D'où il suit que pour des lignes exploitées suivant les mêmes
principes d'économie, et armées comme il convient à leur trafic,
les dépenses d'exploitation sont à peu près indépendantes de l'é-
cartement de la voie.
Au point de vue du premier établissement, l'avantage de la voie
étroite peut être faible si Ton est en pays plat, et c'est avec raison
qu'on a adopté la voie normale dans les Landes de la Gironde.
Mais cet avantage peut être considérable en pays accidenté.
D'après une étude récente *, la comparaison portant sur 1,000 kilo-
mètres de chemins à voie étroite et 600 kilomètres de chemins
à voie normale construits en Norwège fait ressortir la dépense
du kilomètre de voie étroite aux 2/3 de celle du kilomètre de
voie large.
Encore faut-il ajouter qu'en Norwège, les chemins à voie étroite
' Les uoies de communicalion en Norwège^ par MM. Petsche et Delebecque [Annales
des Ponts et Chaussées, avril 1887).
432 RÉSUME ET CONCLUSIONS
sont construits en pays de montagnes et les autres en pays de
plaines.
En pays accidente, on peut généralement dire qu'un chemin
de fer à voie étroite coûtera moitié moins qu'un chemin à voie
normale.
Or tous les chemins de fer qui restent à construire ne sont-ils
pas précisément en pays de montagnes ? Et combien de lignes,
même d'intérêt général, pour lesquelles aucune considération stra-
tégique ne justifiait la voie normale, eussent pu être exécutées à
moitié prix par l'adoption delà voie étroite? Quelle considération
a pu fixer le choix de la voie normale en Algérie, par exemple ?
En résumé, au point de vue de l'exploitation, la voie normale
ne présente aucun avantage sur la voie étroite ; au point de vue
de l'établissement, elle est beaucoup plus coûteuse en général.
Donc, il en faut faire abandon pour les nouvelles lignes.
Que d'économies la France eût pu réaliser si cette vérité simple
n'avait pas été longtemps méconnue !
Quelle qu'en soit l'erreur, le chemin de fer secondaire à voie
normale existe. On a vu quels modes d'exploitation lui ont été
appliqués, quel parti ou a su en tirer.
11. — DL € HOIX A FAIRE E3kTRE LE CHEXL\ DE FER SLR ROUTES
ET LE CHE»i:\ DE FER A TRAVERS CHAXPS.
co:«DiTio:\s de tracé et d*étarlissexe:«t d'v\ chemlh de fer
SLR ROLTES.
De l'étude des 20 chemins de fer d'intérêt local ou tramways à
vapeur qui fait l'objet du présent ouvrage, ressort d'une façon
éclatante cette conclusion : une ligne ou un réseau de chemins de
fer ne peut réussir que s'il converge vers un centre important.
Une ligne qui assurerait la jonction d'une vallée industrieuse ou
peuplée avec un grand réseau est encore une ligne convergente.
Tout chemin de fer excentrique, comme les réseaux départe-
mentaux d'Indre-et-Loire ou de la Gironde, comme les lignes de
Mamcrs à Saint-Calais, de Haironville à Triaucourt, etc., est
voué à un double insuccès : d'une part, trafic de voyageurs nul,
d'autre part, dépendance étroite, au point de vue de la marche
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 433
■
des trains, des lignes qu'il rencontre, d'où charges anormales
résultant de la multiplicité des trains.
Il no suffit pas qu'un chemin de fer soit convergent vers un
centre important. Il faut encore qu'il ne sorte pas du cercle d'at-
traction de ce centre, et cela, comme on va le voir, pour une
double raison.
Et d'abord, remarquons que le réseau des grandes lignes de
chemins de fer dans notre pays est à mailles trës-serrées. Dès
lors, une ligne d'intérêt local, en s'éloignant du centre duquel
elle rayonne, arrivera soit à se rapprocher, soit à rencontrer ou
traverser une ligne d'intérêt général.
Or, quel est le rayon d'attraction d'un centre important pour les
populations à peu près exclusivement agricoles, difficiles à dépla-
cer, que le chemin de fer d'intérêt local est appelé à desservir?
On peut admettre, au moins pour ces voyageurs, qu'au delà d'une
centaine de kilomètres, l'influence de Paris se fait peu sentir.
Une cinquantaine de kilomètres pourront à la rigueur repré-
senter le rayon d'attraction pour Lyon, Marseille, Bordeaux,
Toulouse, Nantes, etc..
30 à 40 kilomètres pour des villes de 50 à 60,000 habitants,
comme Tours, le Mans, Dijon, Limoges.
20 à 30 kil. pour les chefs-lieux des départements ordinaires,
15 à 20 pour les chefs-lieux d'arrondissement importants.
Dépasse-t-il ces limites, le chemin d'intérêt local ne trouve plus
d'éléments voyageurs? Se rapproche-t-il d'une grande ligne ou la
traverse-t-il ? Il no peut plus lutter contre celle-ci, ni sous le rap-
port de la vitesse, ni sous le rapport des moindres tarifs de
miarchandises; il no sert plus que d'affluent à la grande ligne :
le point de jonction est un point de fuite de son trafic propre: il
est aussi une cause d'asservissement, en raison des correspon-
dances à assurer.
Rappelons un exemple: du Mans au Grand-Lucé, 31 kilomètres,
pays très-pauvre, les recettes kilométriques du tramway de la
Sarthe dépassent de 1,000 fr. ses dépenses ; du Grand-Lucé à la
Chartre, pays riche, faible attraction du Mans, la Chartre desservie
par une grande ligne (Paris à Niort), recettes kilométriques infé-
rieures de 300 francs aux dépenses.
28
434 RÉSUME ET CONCLUSIONS
Ainsi, d'une part, Tinfluenco du centre d'attraction décroit en
raison inverse de la distance ; d'autre part, toute grande ligne dont
on se rapproche donne lieu à un point de fuite.
Une autre cause sérieuse milite encore en faveur de la réduction
de longueur du chemin local; c'est la loi du 11 juillet 1879, qui
taxe par abonnement et à la voiture, au lieu et place de l'impôt
de septembre 1871, les chemins de fer qui n'ont pas un dévelop-
pement de 40 kilomètres à vol d'oiseau. — Beaucoup d'intéressés
voudraient voir cette mesure bienveillante étendue en principe à
tous les chemins de fer d'intérêt local, quelle que soit leur longueur.
Nous considérons au contraire la limite fixée par la loi du 17 juil-
let 1879 comme une très-sage précaution, dont l'effet doit être de
maintenir dans le rayon de 40 kilomètres les petits chemins de
fer d'intérêt local à créer.
Enfin le chemin de fer d'intérêt local doit encore satisfaire à
une troisième condition de principe : pour qu'il puisse desservir
utilement les localités, il faut qu'il en soit aussi rapproché que
possible, qu'il y pénètre même au besoin.
Sans doute, l'organisation administrative centralisée de notre
pays est bien en général concentrée au point où sont sollicités les
intérêts des populations agricoles, c'est-à-dire au chef-lieu de
département ou d'arrondissement.
C'est là que le paysan trouvera à lafois, dans la même journée,
un acheteur pour ses produits, un marchand pour les objets de
consommation ou de travail dont il a besoin, un tribunal, une
étude de notaire, une préfecture, etc. ; donc le paysan ira au
chef-lieu.
Mais il s'y rendra par ses propres moyens, avec sa charrette,
s'il doit faire un, deux ou trois kilomètres pour aller prendre le
chemin de fer * .
L'avantage du chemin de fer doit être pour lui deux fois évident
pour qu'il puisse se résoudre à en faire usage : il faut que ce
moyen de transport économique soit non seulement à sa proximité,
* Vn etemple bien topique à cet égard est celui du tramway à vapeur de Padoue
A Venise (Italie), qui enlève au chemin de fer reliant ces deux villes tout le trafic
local des villages intermédiaires, villages qu'il traverse alors que les stations du che-
min de fer en restent éloignées.
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 435
mais à sa porte. Il n'ira pas au chemin de fer si celui-ci ne va
pas à lui.
Tout calcul ayant pour objet de déterminer à l'avance le trafic
probable d'un chemin de fer d'intérêt local est vicieux s'il ne tient
pas compte de cet important élément; une même localité peut
donner un trafic à peu près nul ou très-important selon l'éloigne-
ment ou le rapprochement du chemin do fer qui a pour objet do
la desservir: la route traverse ou touche le village, et la voiture
publique vient chercher les voyageurs au village même; il n'en
saurait être autrement du chemin de for, et c'est se tromper
étrangement que s'imaginer que les populations doivent aller
trouver le chemin de fer, et que celui-ci n'a pas à faire pour elles
le moindre effort.
En résumé, trois conditions essentielles, de principe fonda-
mental, sont nécessaires pour assurer le succès d'un chemin de
fer d'intérêt local. Il doit:
1* Converger vers un centre important ;
2* Ne pas s'écarter du cercle d'attraction de ce centre, c'est-à-
dire être court ;
3^ Solliciter les populations en s'introduisant dans les localités
mêmes.
Ces trois conditions déterminent ipso facto le choix du tracé
dans la plupart des cas.
Il n'y a pas lieu en effet de s'ingénier à rechercher des courants
de trafic qui n'existent pas.
Les grandes lignes suivent les grandes vallées, ou les grandes
routes, autant du moins qu'elles le peuvent, en raison des grands
rayons et faibles déclivités qui leur sont imposés par les exigences
de leur trafic développé.
Un centre important est desservi par deux, trois, quatre ou cinq
grandes lignes, rayonnant dans des directions diverses, et laissant
généralement entre elles des secteurs plus ou moins égaux.
Des routes également rayonnantes existent dans ces secteurs :
routes nationales que n'ont pu longer les grandes voies ferrées,
soit à cause de leur profil trop accusé, soit pour contourner les
localités que les routes traversent ; routes départementales reliant
au chef-lieu villages et chefs-lieux de cantons; chemins d'intérêt
436 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
commun. Toutes ces routes ont des largeurs de 8, 10, 12, 15 et
20 mètres.
Ce sont ces courants de trafic déjà existants, que le chemin de
fer d'intérêt local doit desservir. En d'autres termes, il doit être,
autant que possible, construit sur routes ; et du même coup, il est
rayonnant, et en général pénétrant dans les localités à desservir.
Le danger qu il présente pour les piétons et les chevaux est-il
suffisant pour le faire rejeter? Non, car en ce qui concerne les pié-
tons, les accidents sont extrêmement rares, ainsi que le démon-
trent les exemples relatés dans cet ouvrage, et parmi lesquels les
plus probants, en raison de Factivité de la circulation et du grand
nombre des trains, sont les tramways à vapeur de Yalenciennes,
de Saint-Etienne, de Lille et de Rueil-Marly.
Et pour ce qui concerne les chevaux, Thabitude du chemin de
fer est bientôt prise; il suffit de marcher lentement et avec pru-
dence dans les premiers mois de l'exploitation.
Il est, du reste, au point de vue de la sécurité, une précaution
aussi simple qu'efficace que nous voudrions voir introduire dans
les cahiers des charges de tous les chemins de fer sur routes ; le
matériel devrait, sans exception, être muni du frein continu ; en
raison des faibles vitesses et de la légèreté des trains, moins de
50 mètres suffisent pour l'arrêt.
Pas de sifflet^ qui effraye les chevaux, mais une cloche.
La limitation de la vitesse à 20 kilomètres est-elle une objection
fondamentale ?
Elle pourrait être considérée comme telle dans certains cas si
elle était irrémissible.
Mais on a vu que l'expérience de marche à 25 kilomètres faite
pendant une année sur le Cambrésis n'a donné que pleine satisfac-
tion pour tout le monde.
Il nous a été donné de faire dans le cours de nos recherches,
sur deux chemins différents, des essais prolongés de vitesses de
35 kilomètres, sur routes, sans qu'il en soit résulté la moindre
frayeur de la part des chevaux rencontrés.
Il n'y a donc, et nous donnons ici l'avis de tous ceux qui ont
étudié la question, aucun inconvénient à atteindre sur les routes
des vitesses maxima do 25, 30, 35 kilomètres à l'heure.
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 437
Seulement, nous le répétons, il importe au plus haut point que
le matériel soit muni du frein continu.
Les mêmes vitesses peuvent donc être admises sur les chemins
do fer à voie étroite, qu'ils soient sur routes ou à travers champs.
Est-ce utile? Sans aucun doute.
Remarquons en effet qu'il est des points où la vitesse démarche
des trains sur routes est forcément réduite.
D'abord, par les conditions techniques de l'établissement ; les
routes ont en effet très-fréquemment de fortes rampes.
En second lieu, le ralentissement est nécessaire quand des pié-
tons ou des voitures circulent sur la route.
En troisième lieu, la vitesse doit être forcément limitée à 10 kilo-
mètres à rheure à la rencontre des agglomérations, et même à
6 kilomètres à travers ville.
D'où il résulterait, en ajoutant les pertes de temps dues aux
stationnements et aux manœuvres, que la vitesse commerciale
ne dépasserait guère 12 à 13 kilomètres, si on se limitait à la
vitesse absolue de 20 kilomètres.
Or, bien que l'une des conditions du chemin de fer d'intérêt
local soit le peu de longueur, on ne peut admettre que ce chemin
n'ait pas des vitesses sensiblement différentes de la voiture de
poste ou d'une charrette tratnée par un bon cheval.
Chaque année voit s'accroître la vitesse des trains des grandes
lignes ; on tend de plus en plus à supprimer les trains mixtes pour
les remplacer par des trains à service exclusif de voyageurs. Au
reste, il est intéressant d'indiquer les vitesses commerciales
actuelles des trains de grandes lignes :
Trains rapides 55 à 60 kil. à l'heure.
— express 45 à 50 — —
— directs 40 — —
— omnibus 30 à 35 — —
— mixtes 25 — —
Le chemin de fer d'intérêt local peut avoir une vitesse de 15 à
18 kilomètres; mais il faut qu'il ait la possibilité d'obtenir, si le
besoin se fait sentir, et cela arrivera toujours tôt ou tard, des
vitesses commerciales de 20 et même 25 kilomètres.
438 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
Donc ce chemin doit être construit et outillé en vue de vitesses
de 30 à 33 kilomfelres en pleine voie.
Une dernière considération est encore à envisager en vue de la
fixation des conditions techniques du chemin de fer d'intérêt local;
c'est la nature et l'importance du trafic.
Si la population est exceptionnellement dense, comme c'est le
cas pour la banlieue de Lille et de Saint-Etienne ou les environs
de Yalenciennes, et que Ton n'ait à espérer à peu près exclusi-
vement qu'un trafic de voyageurs, les trains seront multipliés,
peu chargés, la vitesse forcément réduite, et par suite, on peut
adopter des déclivités de 40, 50 et même 60 millimètres ou
70 millimètres comme sur les tramways de Saint-Etienne, et des
rayons de 30, 30 ou 23 mètres.
Mais c'est le chemin de fer à faible trafic, transportant mar-
chandises et voyageurs, et non le tramway proprement dit, qui
fait l'objet de la présente étude.
Sur ce chemin, les trains journaliers seront peu nombreux,
3 en général, 4 au plus, les jours de marchés ou dimanches. Ils
doivent pouvoir enlever normalement tout le trafic sans qu'il soit
nécessaire de mettre en marche des trains extraordinaires,
toujours onéreux.
Les déclivités seront donc essentiellement dépendantes du
trafic.
Pour un trafic égal ou inférieur à 3,000 fr., déclivités de 30 à
40 millimètres.
De 3,000 à 4,000 fr 23 à 30 millimètres.
De 4,000 à 3,000 fr 20 à 23 —
De 3,000 à 7,000 fr 13 à 20 —
De 7,000 à 8,000 fr 10 à 13 —
Au delà de 8,000 fr 10 —
Les déclivités ne limitent pas la vitesse moyenne, si les pentes
et rampes se compensent à peu près : 12 à 13 kilomètres de
vitesse en rampe, 33 en pente, donnent en effet une moyenne de
20 kilomètres.
Le choix des courbes ne dépend au contraire que des vitesses
et non du trafic; une courbe roide ne présente aucun inconvénicn
RÉSILMÉ ET CONCLUSIONS 439
lorsqu'elle est placée aux abords d'un point culminant, où la
vitesse des trains venant de l'un ou de l'autre sens est forcément
ralentie ; elle est encore sans inconvénient si elle se rencontre au
passage d'une agglomération ou d'une ville, ou lorsqu'elle se
présente à l'entrée d'une station. Il n'en est pas de même en
pleine voie, au cours d'une pente ou d'un profil facile.
Ainsi, le rayon de 40 ou 50 mètres peut être admis à la tra-
versée d'une localité, 60 à 80 mètres aux abords d'une station ou
d'un point culminant ; mais il est bon de ne pas descendre au-
dessous de 150 mètres en pleine voie.
Nous devons signaler à cet égard la répugnance de tous les
ingénieurs que nous avons rencontrés, à faire usage des rayons
de 100 à 150 mètres. Beaucoup prétendent que même pour la voie
étroite on ne devrait pas descendre au-dessous do 200 à 250 mè-
tres ; certains même n'admettent que le rayon do 300 mètres en
pleine voie. Ils s'appuient sur ce que même dans ces courbes do
grands rayons les machines grincent et les mentonnets des roues
d'avant s'usent rapidement.
Il y a là une erreur évidente et qui tient à ce que, dans la pose
de la voie étroite en courbes, on a exagéré le surécartement, qui
a été porté à 20, 30 ou même 40 millimètres, d'où augmentation
de l'angle de cisaillement*. Le surécartement est inutile, avec le
matériel ordinairement employé, quand les rayons restent supé-
rieurs à 100 mètres.
Il va de soi que la longueur des trains ne saurait être limitée
par d'autres considérations que la puissance des machines; la
limitation à 40 ou 60 mètres, fixée par les cahiers de charges n'a
pas d'inconvénients en raison des profils adoptés; elle en offrirait
de sérieux si les profils étaient réduits et le trafic important.
Pour déterminer le trafic probable d'une ligne en étude, les for-
mules habituelles, contrôlées par la comparaison des cas analo-
gues, offrent une approximation suffisante, à la condition que
les localités soit effectivement desservies ; mais il ne faut leur
demander que des approximations.
* Voir à ce sujet rintéressante note de M. Jules Michel, dans la Revue générale
des Chemins de fer^ septembre 1884 : n La circulation des locomotives et des wagons
dans les courbes, »
440 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
On vient de voir que le trafic définit les déclivités, et que les
vitesses déterminent les courbes. Mais les conditions d'établisse-
ment de la route n'ont pas été arrêtées suivant ces prévisions. D'où
il suit que plus le trafic prévu est important, plus le chemin de fer
aura souvent à s'écarter de la route, si un écrêtement de l'accote-
ment ne suffit pas. En général, pour un trafic de 6 à 8,000 fr., la
route ne serait plus empruntée que sur une faible partie du par-
cours, et pourrait même, dans certains cas, être une gêne sérieuse
pour le tracé si l'on s'astreignait à venir l'emprunter ; aussi vau-
dra-t-il mieux l'abandonner complètement. Mais quels sont les
chemins d'intérêt local dont on peut attendre un trafic de 6 à
8,000 fr. par kilomètre?
Cet exemple prouve en tout cas, qu'il ne faut pas considérer
comme absolu l'emprunt des accotements de routes.
Du reste, si les routes sont trop étroites ou trop accidentées, il
convient d'en faire abandon, tout en restant aussi rapproché que
possible de ce courant de trafic.
Il est encore un autre cas où on ne devra pas trop s'astreindre à
suivre les routes : c'est à la traversée des localités. Sans doute il
est intéressant de pénétrer jusqu'au milieu des villes importantes;
et surtout du centre principal d'attraction du chemin de fer. On
ne saurait trop louer, à cet égard, la décision prise par le dépar-
tement de la Sarthe, qui a pour effet d'établir, au cœur même de
la ville du Mans, la gare à laquelle viendront converger tous les
chemins de fer départementaux, au prix de dépenses importantes.
Cette décision est tout à fait rationnelle, puisque c'est le centre
même que les chemins de fer départementaux ont pour but
d'atteindre.
Mais à la traversée des villages, les routes ont souvent une lar-
geur réduite; de plus les villages sont fréquemment en terrain
accidenté, et une gare, si réduite qu'elle soit, nécessite une super-
ficie qui ne pourrait être obtenue sans grosse dépense au centre
du village; en outre, à la traversée d'une localité la vitesse des
trains est réduite à 6 et 8 kilomètres à l'heure, et enfin il y a là
danger; ces traversées diminueraient donc par trop les vitesses
commerciales.
Pour toutes ces raisons, il est souvent préférable de contourner
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 441
la localité plutôt que de la traverser; si la localité est allongée,
on peut établir une gare complète sur un point, et une halte sur
un autre point. Mais il ne faut pas multiplier les gares complètes,
c'est-à-dire les gares à service de voyageurs et de marchandises,
car outre la majoration de dépense d'établissement qu'elles occa-
sionnent, elles majorent notablement la dépense d'exploitation.
La halte sera ou non à proximité d'une auberge, d'un estaminet,
peu importe. Mais, en dépit de l'exemple des tramways du Gam-
brésis et de la Sarthe, et des Secundarbahnen saxonnes et bava-
roises, il est assez difficile d'admettre que la gare complète soit
abandonnée, et que la livraison ou la réception des marchandises
soit subordonnée aux loisirs d'un marchand de vin ou d'un maré-
chal ferrant, que la Compagnie soit représentée par un commer-
çant ayant des intérêts propres, des amitiés ou des rivalités dans
la localité, et qu'enfin la sécurité de la circulation soit nécessai-
rement amoindrie.
On eu est venu à reconnaître la nécessité d'avoir un représentant
à poste fixe (femme de cantonnier à très-faible traitement) sur les
lignes de Haironville à Triaucourt et du Cambrésis ; on y tend
dans la Sarthe.
' Donc la gare devra offrir aux voyageurs uu abri ; elle devra
disposer du téléphone la reliant à l'ensemble de la ligne, et le
public devra pouvoir y trouver un représentant à toute heure du
jour. Ce représentant pourra être la femme d'un chef-cantonnier,
ce qui donnera lieu à faible dépense, et il est désirable qu'elle soit
logée. C'est une dépense do 5 à 6,000 francs de plus par station,
soit de 1,000 fr. par kilomètre de ligne, devant laquelle il n'y a
pas à reculer, si faible que doive être le trafic.
La gare sera aussi courte et concentrée que possible, pour
permettre des manœuvres rapides : les dispositions de voies des
gares de la Sarthe paraissent très-satisfaisantes.
Pas d'arrêts en pleine voie à la demande des voyageurs.
Vole. — Rail Vignole, en acier, de 15 à 20 kilos au mètre
courant, plutôt 18 kilos.
Rail tramway, à gorge, de 32 à 35 kilos, lorsque la voie est
établie sur chaussée. Pas de contre-rails aux passages à niveau.
442 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
Tire-fonds et non crannpons.
Traverses en chêne, multipliées dans les courbes roides. Les
bordures de trottoir destinées à protéger la voie contre les voitu-
res sont une précaution aussi onéreuse qu'inutile ; la saillie du
ballast ou de Taccotement suffit (Sarthe).
Matériel roulant. — Machines à trois essieux tous accouplés ;
roues de O^jSS à0",9o de diamètre; empattement do 1°,80 à 2°,00
au maximum, mécanisme recouvert, soustrait à la poussière.
Grands foyers, permettant de brûler du charbon tout-venant,
au besoin des menus. Poids de 15 à 20 tonnes. Vitesses possibles:
35 ou même 40 kilomètres à Theure. Le personnel de conduite de
de la machine doit, ici surtout, comprendre deux agents.
Matériel à couloir à 1"*,80 ou 2°*,00 d'empattement, ou mieux
encore, matériel monté sur trucs articulés ou à bogies, qui a plus
de stabilité et est bien mieux approprié à des chemins dont l'en-
tretien est forcément inférieur à celui des grandes lignes, et dont
les voies sont d'ailleurs plus susceptibles de dérangement, direc-
tement exposées qu'elles sont au choc des voitures ou à la
malveillance.
Deux classes seulement de voyageurs ; moindre est le trafic,
moins sont fréquentées les places de luxe ; sur le Cambrésis, la
proportion des voyageurs de i" classe ne dépasse pas 9 p. 1,000 ;
ceux de seconde classe ne fournissent encore qu'un prorata de
40 p. 1,000. !
Wagons pouvant porter 5 à 8 tonnes.
Tout le matériel muni partie du frein continu, partie de la con-
duite de ce frein. — Le frein à adopter est le frein à vide : il est
plus robuste, plus économique, puisqu'il ne dépense rien, alors
que les freins à air comprimé dépensent 4 à 5 p. 100 de la vapeur
de la locomotive ; le défaut du frein à vide consiste en ce que son
action se fait peu sentir sur les véhicules des trains de longueur,
c'est-à-dire de 20 à 24 véhicules. On ne peut songer que difficile-
ment à atteindre ici la moitié de ces compositions.
Un conducteur suffira aux trains, il délivrera les billets seule-
ment aux haltes sans auberge ; il effectuera avec le mécanicien et
le chauffeur les manœuvres des véhicules en gare.
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 443
Gares de Jonction. — La jonction avec les grands réseaux est
une question aussi délicate qu'importante.
Et d'abord, bien que le trafic du petit chemin de fer soit pour
la plus large part un trafic destiné au centre d'attraction ou en
provenant, ce chemin ne peut pas laisser complètement de côté le
trafic d'au delà, à peine de grever la marchandise d'un droit de
camionnage supérieur à la taxe même qu'elle supporte, comme
ce serait souvent le cas en raison de la faible longueur du chemin
local ; celui-ci doit venir se souder à la gare de marchandises de
la grande ligne, pour que les transbordements s'effectuent le plus
économiquement possible : une courte voie étroite le long d'un
quai existant, une autre parallèle à une voie normale et rapprochée
d'elle, telles sont les installations qui peuvent suffire.
Les trains du chemin local doivent en outre concorder, au moins
approximativement, avec les trains arrivant au chef-lieu ou s'en
éloignant qui présentent le plus d'intérêt pour les voyageurs de
ce chemin: trains desservant une région ou un marché voisins,
BIC, 61C.««
Etabli dans les conditions qui viennent d'être décrites, c'est-à-
dire convergent, et par suite affluent du réseau de la grande Com-
pagnie et non son concurrent, le chemin local ne peut qu'attirer
la bienveillance de celle-ci, et nous ajouterons, il y a intérêt,
bonne politique pour les grands réseaux à aider les chemins
affluents, comme ceux-ci ont intérêt à être aidés.
C'est en les aidant, en ne les écrasant pas sous des charges in-
justifiées de gares communes, en suivant en d'autres termes
l'exemple de la Compagnie du Nord, que les grandes Compagnies
parviendront à empêcher les détournements qui, sans cela, ne
manqueront pas de se faire, et qui peuvent aujourd'hui avoir de
tout aussi graves conséquences que par le passé.
Qu'arrive-t-il en effet?
Sans doute la loi du 11 juin 1880 a eu pour but de mettre un
terme à la concurrence qu'avait produite la loi de 1865. Mais, qu'on
y prenne garde, on est envoie de retomber dans les mêmes erreurs
que celles qui ont produit les tentatives de Philippart et autres.
Nous assistons à une grande expansion de chemins à voie
étroite. Beaucoup d'entre eux ne sont encore que des entreprises
444 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
do construction, dont certaines supputent, on vue de leur exploi-
tation, les détournements qu'elles pourront faire à un trafic qui
appartient légitimement à la grande ligne préexistante.
D'autres sont exploités : ils sont souvent reçus avec hostilité aux
points de jonction par la grande Compagnie qui les écrase par des
taxes de transbordement ou des charges de service commun, ou
encore qui cherche à détourner le maigre trafic qui leur revient.
Et déjà ils cherchent à se souder au chemin de fer à voie étroite du
département voisin qui les aidera à éviter des transbordements et
à faire à leur tour des détournements de trafic.
Mais alors, c'est dans un avenir prochain, le renouvellement des
tentatives Philippart ou autres, avec cette seule différence que les
chemins seront à voie étroite.
Et il y aura ici cette aggravation que pour les chemins d'intérêt
local construits sous le régime de la loi de 1865, les départements
n'avaient plus d'intérêt dans l'exploitation de ces chemins, la sub-
vention une fois versée.
Tandis que les chemins construits en vertu de la loi nouvelle
appartiennent aux départements, qui doivent établir chaque année
leur budget en tenant compte des résultats de leur exploitation, et
qui naturellement prendront parti pour leurs chemins contre les
grandes Compagnies.
Devons-nous assister dans l'avenir à une lutte des départements
contre les grandes Compagnies?
Il est regrettable que le législateur, éclairé par les résultats pro-
duits par la loi de 1865, n'ait pas inscrit danâ la loi de 1880 une
clause relative au partage du trafic.
A défaut du législateur, l'Etat et le département, dans la prépa-
ration des concessions, les Compagnies dans les traités de corn*
munauté peuvent parer à ce danger.
Que les Compagnies reçoivent libéralement les petits affluents;
elles auront dès lors tous droits à inscrire dans les traités destinés
à régler le régime des échanges, des stipulations destinées à évi-
ter les détournements de part et d'autre, dût au besoin l'embran-
ché modifier une partie de son tracé. Celui-ci, qui a besoin de l'aide
de la grande Compagnie ne refusera pas cette juste satisfaction.
Il appartient à l'Etat, intéressé des delix côtés, d'imposer des
HÉSUMÉ LT CONCLUSIONS 445
règles à l'un et à l'autre. Mais on ne saurait admettre plus long-
temps que TEtat, qui garantit les recettes du grand réseau, garan-
tisse en même temps des lignes d'intérêt local dont le but avéré
est de concurrencer celui-ci.
On a supposé un seul point de jonction : il peut s'en rencontrer
deux; dans ce cas, le chemin local perd toute autonomie; on doit
l'éviter, non le rechercher.
Dépenses de premier établissement. — Dans les considérations
qui précèdent, nous n'avons pas fait intervenir à dessein la
dépense d'établissement comme une des justifications du chemin
de fer sur routes.
Les raisons données paraissent suffisamment concluantes ; mais
celle-ci est loin d'être négligeable.
On construit aujourd'hui, en Maine-et-Loire, des chemins de fer
sur routes à moins de 40,000 francs le kilomètre (36,000 francs
Angers à Beaugé).
Avec les conditions d'établissement que nous avons indiquées
plus haut, il faut considérer 40 à 45,000 francs comme un mini-
mum possible, matériel roulant compris.
Pour un chemin de fer établi entièrement à travers champs, on
ne saurait compter une majoration inférieure de 15 ou 20,000 fr.,
soit d'un tiers ou moitié en sus.
En somme, 50,000 francs par kilomètre semblent être une bonne
évaluation, permettant de donner au chemin sui: routes toute
la solidité et le confortable qui manquent souvent aux chemins de
fer d'intérêt local, et de l'armer en prévision d'une exploitation
entièrement satisfaisante.
Il n'est pas bon, croyons-nous, de chercher à descendre beau-
coup au-dessous de cette somme, car on ne peut que se placer
dans de moins bonnes conditions d'établissement et d'exploitation.
Tarifs. — La question des tarifs est sans contredit l'une des
plus délicates : il ne suffit pas de venir solliciter les populations
rurales jusqu'à leur porte; il ne faut pas oublier que ces popula-
tions sont généralement économes et préféreront faire un long
trajet à pied plutôt que de payer un prix élevé. Les tarifs des
446 UÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
voitures publiques, quaud il en est de préexistantes, sont le plus
souvent très-bas.
Or, les voyageurs représenteront toujours de 60 à 90 p. 100 du
trafic total.
Donc les tarifs de voyageurs doivent être bas ;"réductions impor-
tantes sur les billets d'aller et retour. C'est ainsi, du reste, que la
question a été comprise et dans la Sarlhe et dans le Cambrésis : on
peut affirmer que c'est à cette cause qu'est dû le succès de ces
petits chemins.
Pour ce qui est des tarifs de marchandises, il n'en est plus tout
à fait de même : et d'abord, il n'y a pas à espérer transporter
beaucoup de grosses marchandises, en dehors des produits agri-
coles. Et pour ceux-ci même, la dépense de traction par chevaux
apparaît beaucoup mieux aux yeux de l'agriculteur que réconomie
de temps qu'il peut lui-même faire comme voyageur en empruntant
le chemin de fer plutôt qu'en se rendant à la ville à pied ou en
voiture.
Et pour la marchandise de détail, des tarifs élevés, vu le faible
parcours, représentent toujours une somme peu importante.
Donc, en général, tarifs élevés pour les marchandises de détail;
pour les produits agricoles, voyageant par wagons complets, les
tarifs peuvent descendre à 10 ou 8 centimes, ce qui est encore un
prix très-rémunérateur.
Mais en tout état de cause, les tarifs doivent être peu nombreux
et d'application facile.
Pas de frais accessoires, de gare, de chargement ou décharge-
ment.
Et surtout, pas de camionnage ou de taxe élevée de transbor-
dement. Le mieux est de supprimer complètement ceux-ci en pre-
nant des dispositions pour eiïectuer les transbordements do la ma-
nière la plus économique au point de jonction; et c'estlà surtout
que peut se faire sentir le bon vouloir de la grande Compagnie.
C'est, du reste, ainsi que sont établis les tarifs des chemins de
fer sur routes existants.
Autre point très-important. Si le chemin local a la bonne for-
tune de rencontrer sur son parcours une ou plusieurs usines, il ne
faut pas commettre l'erreur que Ton a à déplorer sur le Cambrésis,
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 447
c'est-à-dire adopter des taxes prohibitives qu'aucun industriel ne
saurait accepter, et dont le résultat est tel que nul ne consent à
établir un embranchement, au détriment de Tindustricl comme à
celui du transporteur. — Redevances dites d'embranchement par-
ticulier réduites, ou mieux encore complètement supprimées ; et
si rindustriel recule devant la dépense d'établissement de l'embran-
chement, lui en faire au besoin l'avance, ou même l'abandon; on
évitera ainsi l'extension de la gare voisine, et des manœuvres ou
manutentions embarrassantes ou coûteuses.
Une modification dans ce sens libéral de l'article 34 du cahier
des charges ne saurait être refusée par l'autorité compétente,
pourvu que tous les industriels fussent traités de façon analogue.
Forme delà concession. — Enfin, il nous parait utile de reve-
nir encore une fois sur la forme de la concession, bien que ce
point ait été traité déjà dans le chapitre relatif aux tramways de
la Sarthe.
Deux systèmes sont en présence :
Ou le système de la garantie^ destinée, en cas d'insuffisance de
recettes, à couvrir non seulement les dépenses d'exploitation, mais
encore l'intérêt à 5 p. 100 du capital. C'est le régime général prévu
par l'article 13 de la loi du 11 juin 1880.
Ou le système de la construction directe ou de la subvention fixe^
qui consiste, pour le département, à réaliser le capital nécessaire,
au moyen d'un emprunt amortissable, et à exécuter les travaux
soit directement, soit par l'intermédiaire du concessionnaire, en
remboursant à celui-ci, au fur et à mesure, les dépenses faites. Le
concessionnaire prend à sa charge tous les risques de l'exploitation
et partage avec le département les produits de la ligne. C'est le
système de la Sarthe.
Dans le premier système, c'est le concessionnaire qui doit faire
l'avance intégrale du capital de premier établissement, le départe-
ment remboursant par annuités la différence entre la garantie et
les recettes d'exploitation.
Mais, à l'exception de la Société Générale des Chemins de fer
économiques et desChemins de fer départementaux, qui s'appuient
sur des Sociétés financières puissantes^ le crédit du concession-
448 RÉSUME ET COiNCLUSIOiNS
naire est en général bien moindre que celui du département; par-
tant, la garantie prévue par la loi n'étant que de 5 p. 100, le con-
cessionnaire, qui ne peut souvent trouver à emprunter qu'à 6, 7
ou 7 1/2 p. 100, amortissement compris, sera forcément amené à
majorer le capital garanti dans la proportion de 6 ou 7 1/2 à 5,
c'est-à-dire jusqu'à moitié en sus. En outre, pour diminuer les
charges de l'amortissement, la durée de la concession, c'est-à-dire
celle de la garantie devra être aussi longue que possible, soit de
quatre-vingt-dix-neuf ans.
Passons à l'exploitation : la totalité des recettes doit être
employée en diminution de la garantie; mais alors, l'exploitant
n'a aucun intérêt à développer le trafic. En effet, pourquoi faire
des trains supplémentaires, diminuer les tarifs, courir les chances
d'accidents, etc., etc., en un mot, faire une exploitation intensive
pour n'avoir toujours que ses frais d'exploitation et 5 p. 100 du
capital?
En ne se donnant aucun mal, en ne courant aucun risque, le
résultat sera le même.
Il reste, il est vrai, un stimulant puissant pour inciter le conces-
sionnaire à exploiter économiquement et à développer son trafic,
le désir de se créer de nouvelles entreprises en témoignant d*une
excellente exploitation dans celles qui sont en cours.
A titre d'exemple, on ne saurait trop louer les méthodes de
construction aussi bien que d'exploitation des deux Sociétés les
plus importantes, les chemins de fer économiques et les chemins
de fer départementaux.
Les 1,800 kilomètres de lignes actuellement concédées à ces
deux Sociétés sous le régime de la garantie pour quatre-vingt-dix.
neuf ans en général, donnent un prix forfaitaire moyen d'établis-
sement d'un peu plus de 80,000 francs par kilomètre, chiffre assez
élevé pour être rémunérateur.
Quoi qu'il en soit du régime de la garantie, qui, on le voit, n'est
pas irréprochable, ce régime est très en faveur et les capitaux sont
aujourd'hui presque introuvables pour une entreprise qui n'est
pas couverte parla garantie d'intérêts. C'est un fait contre lequel
• il est difficile de s'insurger.
Dans l'autre système, celui de la subvention fixe on de la
UÉSL'MK KT CONCLUSIONS 440
construction directe^ le département, par son crédit, peut emprun-
ter directement au taux moyen de S à 3,25 p. 100, amortissement
compris; le capital de premier établissement peut, par suite,
souvent être réduit dans une proportion égale ou inférieure au
tiers, de même l'annuité à payer.
Le concessionnaire, ne faisant pas les fonds, n'a pas besoin d*une
durée de concession de quatre-vingt-dix-neuf ans ; il peut se con-
tenter de cinquante ou même de trente ans, ce qui permet au
département de rentrer en possession de ses lignes à plus bref
délai, de les exploiter lui-même ou de les affermer avec une rede-
vance si elles sont productives.
Le concessionnaire, au lieu d'être un entrepreneur de coyistruc-
tion^ ce qui est souvent le cas dans le système de la garantie, est
ici incité au développement du trafic, il y est stimulé par son inté-
rêt, de même qu'il a tout intérêt à assurer une exploitixtion écono-
mique.
Un autre avantage de ce régime, c'est que les capitaux néces-
saires étant très-réduits, le nombre des concurrents peut être plus
considérable, partant plus d'émulation et de rabais.
Mais on a d'autre part plus de chances de tomber sur un adjudi-
cataire incapable de mener à bien Tentreprise, ce qui, il est vrai, no
présente d'autre risque que celui d'un retard.
Il est d'ailleurs bien entendu que la construction doit être faite
par le concessionnaire, car le rabais de l'adjudication du chemin de
fer peut ainsi porter à la fois et sur la construction et sur l'exploi-
tation, au lieu de porter seulement sur cette dernière, comme ce
serait le cas si le département se chargeait de la construction. Il y
a en outre tout intérêt à ce que l'établissement soit fait en vue
d'une bonne exploitation, et le concessionnaire est mieux placé à
cet effet que qui que ce soit.
En somme, le prix de revient kilométrique des chemins de fer
sur routes construits ou entrepris suivant le système de la construc-
tion directe dans la Sarthe, le Maine-et-Loire et le Loir-et-Cher
oscille autour de 40 à 45,000 francs.
Il est assez difficile do faire un choix entre le régime de la garan-
tie d'intérêt et celui de la construction directe : c'est souvent une
question d'espèces.
20
450 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
On pourrait encore recourir a un régime mixte : construction
directe par les soins du département ou de la commune et garan-
tie pour Texploitation.
Mais quel que soit le régime financier à adopter^ il faut soigneu-
sement éviter de construire des chemins de fera tort et à travers
au gré des intérêts électoraux, comme nous en voyons cons-
truire dans maint département : chemins voués à un insuccès
certain.
A cet égard, les concessions faites sous le régime des frais et
risques du concessionnaire au point de vue de l'exploitation
auront pour oITet de faire réfléchir concédants et concessionnaires,
et de n'amener à exécution que des lignes pouvant vivre, c'est-à-
dire pouvant payer leurs dépenses d'exploitation.
Or, il ne devrait pas y avoir de chemins d'une autre nature, en
dehors des lignes stratégiques. Tout chemin de fer dont les recettes
ne pourraient couvrir les dépenses d'exploitation est un chemin
de fer injustifié, il ne doit pas être construit.
On peut admettre que l'Etat et les départements concourent à
établir et armer des voies de fer en faisant en principe l'abandon
de la dépense de premier établissement. C'est une augmentation
du domaine national, et il y a au moins autant d'intérêt à entre-
prendre celte construction, lentement, sagement, en profitant
chaque année de l'expérience des années précédentes, qu'il peut y
en avoir à construire des routes, des chemins vicinaux, des canaux
et des écoles, toutes constructions faites à fonds perdus.
Mais ce qu'on ne peut admettre, c'est que ces chemins de fer
ne puissent vivre et viennent accroître chaque année, par leurs
insuffisances, les charges déjà si lourdes des budgets de l'Etat et
des départements.
Donc, à cet égard, l'absence de garantie est un frein contre les
prodigalités auxquelles, il faut bien le reconnaître, l'article 13 de
la loi du H juin 1880 ouvre un peu imprudemment la porte.
XXVL — CONCLUSIONS
L'examen comparatif des lignes secondaires de notre pays avec
les lignes similaires de l'étranger fait ressortir Tinfériorité des
premières au point de vue économique, tant en exploitation qu'en
établissement.
La législation est une des causes de cette infériorité; tous les
pays étrangers, sans exception, ont en effet donné aux lois relati-
ves à leurs lignes secondaires un caractère rétroactif qui a permis
le déclassement des lignes maigres préexistantes ; en France, au
contraire, les lignes anciennes ne peuvent bénéficier ni de la loi
du 11 juin 1880 sur les chemins de fer d'intérêt local, ni de la loi
du 27 décembre de la mèmç année relative à la suppression des
clôtures et du gardiennage des nouveaux chemins de fer d'intérêt
général.
La réglementation administrative est de même souvent plus
libérale à l'étranger que dans notre pays; c'est ainsi, pour ne
prendre que les trains pour exemple, qu'en Prusse, les trains à
frein continu sont dispensés du serre-frein, quel que soit le
nombre de leurs véhicules, et qu'en d'autres pays, le serre-frein
n'est obligatoire, dans les trains mixtes ou autres, que lorsqu'il
est nécessité par les considérations de déclivités, vitesse ou
composition.
Le décret présidentiel du 20 mai 1880 a été chez nous le point
de départ de progrès incontestables ; mais il reste bien des éla-
gages à faire dans l'ordonnance de 1846, qui est sans doute un
admirable monument administratif, surtout si l'on tient compte
de ce qu'il a été érigé presque à l'origine des chemins de fer, mais
qui, par malheur, date de plus de 40 ans, c'est-à-dire d'une épo-
que où le chemin de fer secondaire n'existait pas et où on ne
soupçonnait pas même qu'il pût jamais exister.
452 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
Du côté des grandes administrations françaises de chemins do
fer, nous trouvons de louables efforts dans la voie de rexploitation
économique de leurs lignes secondaires; malheureusement ces
efforts ne sont pas combinés : chez Tune, c'est le service do l'ex-
ploitation qui introduit d'heureuses innovations dans ses trains,
sépare ses lignes maigres en groupes à peu près indépendants de
ses grandes artères; chez une autre, ce même service s'attache à
la gestion économique des stations; chez une troisième, le ser-
vice de traction recherche l'allégement des machines, etc.... Mais,
dans aucune d'elles, les services de voie, traction et exploitation,
ne réunissent leurs efforts vers un but commun.
En comment en serait-il autrement alors qu'un quatrième ser-
vice, souvent indépendant de l'exploitant, livre à celui-ci des
lignes armées comme pour un grand trafic, avec rails lourds,
clôtures, signaux, maisons de garde, et des gares se prêtant mal
à une gestion économique?
Et comment pourrait faire le constructeur lui-même, alors que
l'exploitant, possédant en excédent des machines lourdes, demande
au premier des voies qui puissent les porter ?
Nul ne se rend parfaitement compte que le chemin de fer secon-
daire est un outil différent de la grande ligne, qu'il doit être
exploité séparément, et par suite armé et outillé d'une façon dis-
tincte.
Ce n'est qu'auprès de quelques Compagnies d'intérêt local que
nous voyons appliquer cette règle si simple. Aussi quelle diffé-
rence dans les résultats !
Il a paru intéressant de mettre en regard les chiffres que donne
la situation actuelle tant en établissement qu'en exploitation, et
ceux qu'on eût pu obtenir avec le mode d'établissement et d'ex-
ploitation qui conviennent aux lignes secondaires.
Dans la planche XV sont figurées les dépenses kilométriques de
premier établissement (au 31 décembre 1884) etdans laplancheXVI,
les résultats kilométriques d'exploitation (pour l'année 1883) de
tous les chemins de fer français dont la recette kilométrique
annuelle ne dépasse pas 1 0,000 /rûwc5 ;
RÉSUME ET COiNGLLSIONS 453
1" Chemins de fer d'intérêt général (grands réseaux) :
Nord 988 kil.
Est 1,089
Ouest 1,295
Orléans 1,338
Paris-Lyon-Méditerranée 2,292
Midi 412
Etat 1,004
Total 8,418
2o Chemins de fer d'intérêt local à voie normale. . 1,408
3° Chemins de fer d'intérêt local à voie étroite. . 230
4* Chemins de fer sur routes 148
Total GÉNÉRAL 10,204 kil.
c'est-à-dire le 1/3 du réseau français.
Sur les 8,418 kilomètres de chemins de fer d'intérêt général,
il y a lieu de défalquer environ 1,000 kilomètres de lignes straté-
giques, ou de courts embranchements ou raccordements qui ne
pouvaient manifestement être exécutés d'une manière différente
de celle adoptée pour les grandes lignes du réseau français.
Il y a lieu également d'en défalquer les 2,000 kilomètres pro-
venant de lignes construites par des Compagnies d'intérêt local
et incorporées ultérieurement dans le réseau d'intérêt général
à la suite de faillites ou de rachat.
Les 5,500 kilomètres restants ont donc été exclusivement
construits par l'État ou par les grandes Compagnies : ils repré-
sentent une dépense totale de 1,550 millions, soit en moyenne
280,000 francs par kilomètre.
Si à ces 5,500 kilomètres on ajoute les 7,200 de lignes con-
cédées aux Compagnies, soit à titre ferme, soit à titre éventuel,
par les conventions du 20 novembre 1883, et qu'on prenne comme
base d'évaluation le même chiffre de 280,000 francs par kilomètre,
chiffre au-dessous de la vérité, dans l'espèce, car la plupart de
ces nouvelles lignes sont en pays de montagnes, on arrive à une
dépense nouvelle de deux milliards pour des lignes qui, à de
bien rares exceptions près, auront un trafic kilométrique bien
inférieur à 10,000 francs.
454 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
L'ensemblo des lignes françaises d'intérêt général ayant au
plus 10,000 francs de recettes kilométriques donne donc, avec
des évaluations bien modestes, une dépense totale de 3 milliards
et demi.
Or les 4,300 kilomètres de chemins de fer d'intérêt local à
voie normale, soit anciens, soit incorporés dans le réseau d'inté-
rêt général, depuis les conventions du 20 novembre 1883, don-
nent, pour une dépense totale de 700 millions, un prix do revient
kilométrique moyen de 165,000 francs.
Les chemins de fer à voie étroite, tant les 300 kilomètres qui
sont en exploitation que les 1,500 kilomètres concédés soit à la
Société générale des chemins de fer économiques, soit aux che-
mins de fer départementaux ou à d'autres Compagnies, donnent
un prix de revient kilométrique moyen de 80,000 francs et une
dépense totale de 145 millions.
Enfin, les chemins de fer sur routes oscillent autour du prix de
revient de 40 à 50,000 francs le kilomètre.
11 n'est certes pas exagéré de dire que, parmi les 12,700 kilo-
mètres de chemins de fer d'intérêt général dont la recette kilomé-
trique est ou sera égale ou inférieure à 10,000 francs, et qui ne
comprennent pas les lignes stratégiques, ni les lignes provenant
d'anciennes Compagnies d'intérêt local, la voie normale pouvait
tout au plus se justifier pour la moitié d'entre eux, et que 50 p. 100
do l'autre moitié auraient dû être établis comme chemins de fer à
voie étroite sur accotements des routes.
En outre, si la législation l'eût permis, ce n'est pas au prix
réel do 280,000 francs qu'aurait dû revenir le kilomètre de voie
normale, mais tout au plus, au prix moyen des chemins do fer
d'intérêt local à voie normale (rails et matériel légers, dispense de
clôtures et de gardiennage, etc.), soit à 165,000 francs.
Ainsi, sur *-^^ (voie normale) ont eût pu
économiser 730 millions.
_ 11^ (voie étroite) 640 —
— 1?2^^. (chemins sur routes) 730 —
Total 2,100 millions.
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 453
On Irouverait de même qu'on eût pu, avec une construction
différente, réaliser en exploitation une économie annuelle de
40 millions, c'est-à-dire les deux tiers du chiffre qu'ont atteint
les garanties d'intérêts en 1886 (63 millions).
Malheureusement telles quelles, les lignes à faible trafic existent
et il n'est pas possible de les remanier. On ne peut que regretter
qu'elles n'aient pas été autrement conçues.
La planche XVI donne les résultats d'exploitation pour 1885;
ces résultats ont été traduits graphiquement par des lignes qui
représentent la moyenne des dépenses kilométriques par rapport
aux recettes ; ces moyennes ou lois sont les suivantes :
Lignes secondaires des grands réseaux : D = 4,500 + -^. R
Chemins d'intérêt local à voie normale : D = 2,300 + -^. R
Chemins à voie étroite et sur routes : D = 1,800 +^. R
Cette dernière loi n'est basée que sur un petit nombre d'exemples,
dont plusieurs n'ont pas la sanction d'une exploitation prolongée.
En somme, les 8,418 kil. do lignes (grands réseaux) à recettes
kilométriques limitées à 10,000 fr. donnent les résultats suivants :
Recettes totales : 51 millions. Recettes moyennes kilométri-
ques : 6,000 francs.
Dépenses totales : 61 millions. Dépenses moyennes kilométri-
ques : 7,200 francs.
Soit un coefficient d'exploitation moyen de 120 p. 100.
Les Seciindarbahnen allemandes et austro-hongroises qui ont
des recettes kilométriques à peu près équivalentes sont exploitées
avec des coefficients d'exploitation de 60 à 65 p. 100.
Les chemins do fer d'intérêt local à voie normale en France
fournissent :
Recettes totales : 8,150,000 fr. Receltes kilométriques : 5,700 fr.
Dépenses totales : 7,500,000 fr. Dépenses kilométriques: 5,300 fr.
Coefficient d'exploitulion moyen : 92 p. 100.
Si l'on pouvait arriver à exploiter les lignes secondaires des
grands réseaux avec le même coefficient, on réaliserait encore le
450 KÉSLMÉ ET CONCLUSIONS
beau bénéfice d'une vingtaine de millions sur les lignes actaelie-
ment en exploitation.
Est-ce là un résultat qu'il soit possible d'atteindre ? On a été
beaucoup plus loin à l'étranger, pourquoi n'y parviendrait-on pas
en France?
On y tendrait sans aucun doute s'il était donné satisfaction aux
desiderata suivants :
1. — LIGNES SECONDAIRES DES €iRA3iDS RÉ
A. — Législation et Réglementation
V Application, à titre rétroactif, aux lignes secondaires
préexistantes, des avantages conférés aux nouveaux chemins de
fer d'intérêt général ou local par les lois du H juin et du 27 dé-
cembre 1880.
Extension rétroactive aux lignes préexistantes (autant que faire
se peut), des sages précautions par lesquelles les articles 13 ou 14
(selon les compagnies) des conventions-lois du 20 novembre 1883
ont limité le nombre des trains sur les lignes nouvelles à un train
par 3,000 fr.de recettes brutes, sans service de nuit, avec minimum
de trois trains dans chaque sens.
2'' Extension du bénéfice de la suppression du serre-frein, et
sans limitation du nombre des véhicules, aux trains munis du frein
continu.
3*^ Application du même bénéfice aux trains de toute nature,
non munis du frein continu, en tant que la suppression du serre-
frein est compatible avec la composition du train, telle qu'elle
est fixée par les règlements selon les conditions de vitesse et de
profil.
4° Suppression de la 1" classe dans tout train où le nombre des
voyageurs de r* classe ne dépasse pas, en moyenne, deux ou
trois ; suppression dans la plupart des cas, des compartiments de
dames seules, fumeurs, etc.
KKSUMK ET COiNCLUSIONS 457
B. — Etablissement et Armement
5** Sur les lignes neuves :
Pas de clôtures, ni de signaux sur les lignes neuves à très-
faible trafic. Gardiennage maintenu aux seules routes trës-fré-
quentées. Au besoin, courts rayons (200 à 230 mètres), fortes
déclivités (25, 30 à 40 millimètres) ; cboix d'un rail léger (25 kilos
acier) ; stations courtes, à voies bien reliées, avec hangar à mar-
chandises accolé au bâtiment des voyageurs ; installations pour
croisement dans un petit nombre de gares, les plus importantes;
télégraphe dans celles-là seulement ; téléphone dans les autres.
6^ Sur les lignes neuves, et par remplacement en suite d'usure
sur les lignes anciennes :
Adoption de machines légères tournant sur les plaques ordi-
naires, ayant des charges limitées à 10 tonnes par essieu, et à
foyers de grande dimension, afin de pouvoir faire usage des com-
bustibles les plus économiques. Il peut être utile de ne pas trop
limiter la vitesse de ces locomotives.
Spécialisation du matériel sur les lignes secondaires, et emploi
du matériel h intercommunication, et surtout des grandes voitures
montées sur bogies, qui donnent un meilleur roulement, moins
d'usure, sont mieux appropriées aux lignes à courbes roides; le
matériel à intercommunication permet en outre une surveillance
plus facile.
G. — Exploitation
7^ Indépendance des lignes secondaires ; division de ces lignes
en groupes de 75, 100 ou 150 kilomètres régis par des chefs auto-
nomes [Bahnverwalter saxon, Betriebsleiter bavarois, bigegnere
deir Exercizio italien)^ chargés de la conduite de tous les ser-
vices : voie, traction, mouvement et trafic, et ayant toute autorité
pour faire concourir au même but l'ensemble du personnel placé
sous leurs ordres.
8*^ Possibilité, sous la condition que les trains (et machines) soient
légers, peu nombreux (3 à 4 dans chaque sens) et à vitesses limi-
458 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
lées, do réduction du personnel d'entretien, au-dessous de la
proportion d'un homme par doux kilomètres.
9"" Etablissement des roulements des mécaniciens et conduc-
teurs de telle sorte que chacun d'eux puisse coucher chaque soir
dans sa résidence.
Recherche d'une meilleure utilisation du capital de premier
établissement des machines en les faisant conduire par des équipes
différentes de mécaniciens et chauffeurs^ en vue d'atteindre des
parcours journaliers plus étendus.
Emploi des chauffeurs, et au besoin des mécaniciens, à la ma-
nutention des colis et à la manœuvre des wagons, soit au passage
dans les stations, soit aux tètes de ligne dans l'intervalle des trains.
10® Gestion économique des stations de très-faible trafic n'assu-
rant pas de croisements : report des opérations comptables aux
gares plus importantes, renseignant au besoin les premières par
le téléphone ou le télégraphe. Par suite, emploi d'un personnel
peu instruit, et dès lors peu rétribué, en particulier des femmes.
Exploitation par trains mixtes, en tant que cette exploitation est
compatible avec la longueur de la ligne, les correspondances à
assurer, et par suite la vitesse des trains, la charge de ceux-ci.
Exploitation par trains légers (mixtes ou non) avec machines
légères, toutes les fois que ce procédé n'entraîne pas création de
trains nouveaux, ou mise en marche d'un nombre de machines
ou d'équipes supérieur à celui que nécessite l'exploitation par
trains mixtes.
Arrêt facultatif des trains aux passages à niveau importants,
sans installations spéciales, les billets étant délivrés de préférence
parle conducteur. On évitera ainsi l'établissement souvent coûteux
d'une halte dans la plupart des cas.
Suppression de tout train notoirement injustifié et dont les
recettes ne parviennent pas à payer sa dépense, si réduites que
soient celles-ci par l'adoption de ces diverses mesures.
11*» Possibilité, par la mise en œuvre de ces divers procédés,
auxquels il faut ajouter les procédés spéciaux à chaque cas parti-
culier, d'arriver à exploiter des lignes à très-faible trafic, desservies
par 3 ou 4 trains par jour, dans chaque sens, moyennant des dé-
penses kilométriques de 3,000 à 3,000 francs, et des coefficients
É
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 4o9
d'exploitation de 60 à 80 pour 100, frais généraux d'administration
non compris.
D.
12'' Enfin, il est désirable que les fonctionnaires du Contrôle
administratif facilitent aux Compagnies de chemins de fer Tappli-
cation de ces diverses mesures, et qu'ils n'oublient pas que toute
économie réalisée sur une ligne, soit en établissement, soit en
exploitation, est, ipso factOj un allégement au budget de TËtat.
Nota. — On ne saurait nier la difficulté d'application de toutes
les mesures précitées, mais ce qui est non moins indéniable,
c'est l'importance du résultat.
II. — CHEMIIVS DE FER D'I.HTÉRÉT LOCAL
La plupart des conclusions précédentes sont applicables aux
lignes des chemins de fer d'intérêt local à voie normale aussi
bien qu'à voie étroite.
En outre :
Il est très-désirable en particulier que tous les chemins de fer
d'intérêt local puissent bénéficier, à titre rétroactif, des avantages
de la loi du 11 juin 1880.
11 est désirable que les administrations des grands réseaux se
montrent bienveillantes envers les petites compagnies d'intérêt
local, et traitent celles-ci libéralement aux points de jonction.
Il est également désirable que des règles précises pour le par-
tage du trafic mettent fin aux détournements que les petites com-
pagnies font aux grandes ou inversement : les services du
contrôle peuvent utilement intervenir*
Le choix de la voie normale pour les chemins de fer d'intérêt
local est une erreur, à moins que l'embranchement ne soit indus-
triel, très-court, et établi en pays exceptionnellement facile.
Les chemins de fer d'intérêt local ne doivent être construits à
travers champs que si l'emprunt des routes est impossible en
raison des conditions d'établissement de celles-ci.
460 RÉSUMÉ ET COiNGLUSIONS
III. — CHEMI.HS DE FER SUR ROUTES
• • •
Un chemin de fer départemental doit essentiellement converger
vers un centre important, chef-lieu du département ou chef-lieu
d'arrondissement. Il doit être court ; il doit pénétrer dans les
localités mêmes qu'il est appelé à desservir.
On a vu que, dans certaines régions, on a interprété dans
le sens rigoureux les prescriptions de l'article 7 du cahier des
charges, type relatif aux tramways sur accotements, prescriptions
qui concernent la défense de l'accotement contre la route par
une bordure d'une solidité suffisante. Cette interprétation revient
le plus souvent à l'exclusion de la solution du chemin de fer sur
accotements. Il est désirable que des tempéraments soient apportés
à cette interprétation, au moins pour les parties de routes à
déclivités inférieures à 0 m. 03 par mètre, et qu'une saillie en
terre ou balast, de 0 m. 25 à 0 m. 30 soit considérée comme une
protection suffisante.
Le service des chemins sur routes dans les localités peut être
assuré par un particulier, établi dans le voisinage du point
d'arrêt, et disposant d'une salle d'attente pour le public. Mais il
est peut-être préférable que les gares des chemins de fer sur routes
soient gérées par un agent placé à poste fixe dans la station
(femme de cantonnier), et que les stations soient reliées entre
elles par le téléphone.
Il est désirable que les vitesses de marche des trains sur routes,
en dehors des agglomérations, ne soient pas limitées à 20 ou
25 kilomètres à l'heure, mais puissent atteindre 30 ou 35 kilo-
mètres, de manière que les vitesses commerciales puissent être
au moins de 20 à 22 kilomètres à l'heure.
Tout le matériel des chemins de fer sur routes doit être muni du
frein continu.
En ce qui concerne le régime financier, si le système de la
garantie d'intérêts a souvent du bon, il faut bien se garder d'y
voir une panacée infaillible, et de se laisser entraîner, par les
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 401
facilités qu'il donne, à exécuter (hormis dos exceptions parfaite-
ment justifiées) des lignes incapables de payer leurs frais d'exploi-
tation.
Un chemin de fer sur routes desservi par 6 ou 8 trains par jour
peut être exploité, tout compris, à 2,500 ou 3,000 fr. de dé-
penses par kilomètre; la construction ne doit pas excéder
S0,000 francs par kilomètre.
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AiNNEXE • 463
CHEMINS DE FER RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
d'intérêt local
d
PRÉFECTURE DU PAS-DE-CALAIS
Modification du Règlement gêné-
rai pour les scrtices de l'Ex-
ploitation, de la Voie et de la
Traction. EXTRAIT DU REGISTRE AUX ARRÊTES DU PRÉFET
Arras, le iO novembre i88a.
Le Préfet du Pas-de-Calais, chevalier de la Légion d'honneur,
Vu la lettre du i7 octobre 1885 par laquelle M. le directeur du
chemin de fer demande Tautorisation :
i» De ne faire accompagner que par un seul agent actionnant
un frein à vis manœuvré à la main tout train dont la composition
ne dépassera pas 12 véhicules;
2® De supprimer le véhicule de choc et d'atteler la machine
directement à tout train ne contenant que des voitures à voya-
geurs au nombre de 6 au plus;
Vu les rapports des ingénieurs du contrôle, en date des 30 octo-
bre et 19 novembre 1885;
Vu Tordonnance du 15 novembre 1816, et la loi du 11 juin
1880,
Arrête :
Article premier. — Les articles 63 et 64 du règlement général
pour les services de l'exploitation, de la voie et de la traction du
chemin de fer, seront remplacés par les articles suivants :
Art. 63. — Le nombre minimum des freins pour chaque train
est fixé de la manière suivante:
Traiîis de voyageurs ou de marchandises composés rfe 12 voitures
et au-dessous.
Un frein gardé, lesté ou chargé sur la dernière voiture conte-
nant des voyageurs ou à l'arrière de cette dernière voiture, et,
dans tous les cas, placé dans le dernier tiers du train.
Trains de voyageurs composés de 13 d 15 voitures.
Deux freins gardés, dont un lesté ou chargé en tête du train et
le second sur la dernière voiture contenant des voyageurs ou à
l'arrière de cette dernière voiture dans l'un des cinq derniers
véhicules du train, etc..
(Le reste de l'article 63 sans modification.)
464 ANNEXE
AaT. 64. — Il devra toujours y avoir en tète de chaque train
entre le tender de la machine et la première voiture contenant
des voyageurs, autant de voitures ne contenant pas de voyageurs
qu*il y aura de locomotives en feu attelées au train.
(Cette prescription n'est pas applicable aux cas de secours.)
Sont exceptés de cette règle les trains ne contenant que des
voitures à voyageurs au nombre de 6 au plus dans lesquels la
machine pourra être attelée directement au train sans véhicules
de choc.
Art. 2. — Cette modification aux articles 63 et 64 précités ne
sera appliquée que provisoirement et à titre d*essai, et ne préjuge
en rien les nouvelles mesures administratives dont Texpérience
pourra ultérieurement révéler la nécessité.
Art. 3. — M. l'ingénieur en chef .des ponts et chaussées, direc-
teur du contrôle des chemins de fer d'inférét local du départe-
ment du Pas-de-Calais, est chargé de Texécution du présent arrêté
dont ampliation sera adressée à la Compagnie du chemin de fer.
ArraSy le 19 novembre 1885.
LE PREFET DU PAS-DE-CALAIS,
Signé : VEL DURAND.
TABLE DES MATIÈRES
PAGES
Introduction i
PREMIÈRE PARTIE
UGNES SECONDAIRES DES GRANDS RÉSEAUX
1® — Compagnie du Nord : Groupes du réseau secondaire 3
Trains économiques ou légers 11
Trains-tramways 13
2^ — Compagnie de Lyon-Méditerranée : Ligne des Bombes. ... 18
3<> — Chemins de fer de TEtat : Locomotives-fourgons 26
DEUXIÈME PARTIE
CHEMINS DE FER d'iNTÉRÂT LOCAL A VOIE NORMALE
4<> — Etude comparative des lois du 12 juillet ^865 et du 11 juin 1880
sur les Chemins de fer d'intérêt local 35
5** — Chemins de fer d'intérêt local du Pas-de-Calais et de l'Aisne. . 43
6<> — Saint-Quentin à Guise 70
7*> — Chemins de fer de l'Eure 86
80 — Chemins de fer de TOrne 103
90 — Mamers à Saint-Calais (Sarthe) 116
100 — Est de Lyon (Rhône) 125
11 o — Compagnie du Rhône (Lyon, Croix-Rousse à Sathonay et à
Trévoux 140
120 — Chemins des Bouches-du-Rhône 158
130 — Chemins de l'Hérault.. 175
140 — Médoc (Gironde) 191
150 — Nizan à Sore et Luxey (Gironde) 206
16" — Chemins de fer des Landes de la Gironde (Société générale
des Chemins de fer économiques) 217
30
466
TABLE DES MATIÈRES
17o
200
TROISIÈME PARTIE
CHEMINS DE FER d'lNTÉRÊT LOCAL A VOIE ÉTROITE
Hermès à Beaumont (Oise et Seine-et-Oise)
Anvin à Calais (Pas-de-Calais)
Chemins départementaux dIndre-et-Loire
Valmondois à Epiais-Rhus (Seine-et-Oise)
239
258
271
290
219
22«
230
240
QUATRIÈME PARTIE
CHEMINS DE FER SUR ROUTES
Chemins de la Meuse
Tramways de la Sarthe
Chemins du Cambrésis
Tramways divers à traction mécanique
Tramways de Valenciennes
Tramways de Saint-Etienne ......
Tramways à traction de locomotives sans foyer
Rueil-Marly
Lille, Roubaix et Tourcoing
Traction mécanique et traction animée.
Moteur Mékarski
Lyon à Vénissieux
301
317
338
353
353
358
363
363
369
370
372
374
I
CINQUIÈME PARTIE
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
25» — Résumé
I. — Chemins de fer à faible trafic des grands réseaux. . . •
Lignes secondaires des grands réseaux en
Allemagne, Autriche-Hongrie, Italie, Hol-
lande et Belgique
Exploitation par trains mixtes ou indépen-
dance des services voyageurs et marchan-
dises sur les lignes secondaires? ....
De la vitesse des trains sur les lignes secon-
daires
Réduction du personnel de station ....
— des trains , . • .
Emploi de machines légères et réduction du
personnel de la machine
Réduction du personnel d'entretien et de
surveillance de la voie
379
379
383
396
399
400
404
406
407
TABLE DES MATIERES 467
II. — Chemins de fer d'intérêt local à voie normale 409
nï. — Chemins de fer d'intérêt local à voie étroite 418
IV. — Chemins de fer sur routes 422
V. — Du choix à faire entre la voie normale et la voie étroite. 426
Du choix à faire entre le chemin de fer sur routes et le
chemin de fer à travers champs. Conditions de tracé
et d'établissement d'un chemin de fer sur routes . . 432
26® — Conclusions 451
I. — Lignes secondaires des grands réseaux 456
IL — Chemins de fer d'intérêt local 459
m. — Chemins de fer sur routes 460
Annexe 463
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— Plan.
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8
9
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12
13
fé et son raccordement avec le chemin de fer de
pe) au Camp de Sathonay (Lyon à Trévoux).
.(Rhône).
(Bouches-du-Rhône) .
[Hérault).
Drt (Médoc).
lédoc).
an à Sore et à Luxey).
les de la Gironde (Soc. des Ch.de fer économiques) .
RES
A VOIE ETROITE
6b»
B
longitudinal, avec trains articulés et compartiments pour les
bagages et la poste (Yalmondois à Ëpiais-Rhus).
Coupe horizontale de la caisse à couloir longitudinal avec trains arti-
culés et compartiments pour les bagages et la poste (Yalmondois à
Epiais-Rhus).
Type de station de croisement (Meuse).
OUTES
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5
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Stcr
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Profil en long du tramway de Rueil à Marly-le-Roi.
Tramway de S t-Étienne. — Profil en long de la Terrasse à Bellevue.
— — de St-Étienne à Rive-de-Gier.
— — de St-Étienne à Firminy.
— Rail Demerbe.
— — Marsillon.
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Graphiques comparatifs des résultats kilométriques d'exploitation
des chemins de fer français ayant moins de 10,000 francs de recette
brute (impôt déduit) par kilomètre.
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