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Full text of "Les Clouet : biographie critique"

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?:]'  Aîjphons^  OERMAÎN 


LES    GRANDS    ARTISTES 


Les   Clouet 


LES   GRANDS   ARTISTES 

COLLECTION     D  '  E  N  S  E  i  G  N  E  M  E  N  T     ET     DE     V  L"  L  G  A  P  1  S  AT  I  O  N 

Placée  sous  le  Haut  Patronage 

DE 

L'ADMINISTRATION    DES   BEAUX-ARTS 


Volumes  parus 


Boucher,  par  Gustave  Kahn. 
Canaletto  ,  Les  deux),  par  Octave  Uzannk. 
Carpaccio,  par  Léon  Rosenthal. 
Carpe  aux,  par  Léon  Riotor. 
Chardin,  par  Gasiom  Schéfer. 
Clouet  (Les),  par  Alphonse  Germain, 
Louis  David,  par  Charles  Saunier. 
Eugène  Delacroix,  par  M.\urice    Tolr- 

Niax. 
Donatello,  par  Arsène  Alexandre. 
Douris  et  les  peintres  de  vases  grec,   par 

E.  POTTIER. 

Albert  Diirer,  par  Auguste  Marguillieu. 
Fragonard.  par  Camille  Mauclair. 
(Jainsborough,  par  Gabriel  Mourev. 
Gros,  par  Henry  Lemonnier. 
Hogarth,  pa.  François  Benoit. 
Ingres,  par  Jules  Mo.mméja. 
Jordaëns,  par  Fierens-Gevaert. 


La  Tour,  par  Maurice  Tournfu.x. 
Léonard  de  Vinci,  par  Gabkikl  Séailles 
Claude  Lorrain,  par  R.wmond  Bouyer. 
Luini.  i)ar  Pierre  Gauthifz. 
Lysippe,  par  Maxime  Collignon. 
iSIichel-Ange,  par  Marcel  Reymond. 
J.-F.  Millet,  par  Henry  Marcel. 
Percier  et  Fontaine,  par  M.\urice  Foiché. 
Poussin,  par  Paul  Desjardins. 
Praxitèle,  par  Georges  Perrot. 
Puget,  par  Philippe  Auquier. 
Raphaël,  par  Eugène  Muntz. 
Rembrandt,  par  Emile  Veriheren. 
Rubens,  par  Gust.we  Geffrov. 
Ruysdaël,  par  Georges  Ri.\t. 
Titien,  par  Maurice  Hamel. 
Van  Dyck.  par  Fierens-Gevaert. 
Velazquez,  par  Elie  Faure. 
Watteau,  par  G.\briel  Séailles. 


\'<ilu}iies  à  paraître 


Fra  Angelico,  par  André  Pératé. 
.lean  Goujon,  par  Paul  Vitry. 
Meissonicr,  par  Léonce  Bénédite. 


Paul  Potter,  par  Emile  Michel. 

Puvis  de  Chavannes.  par  P.<tl  Dfsjar- 


85-4-06. —  Corbeil.  Imprimerif  Kl).  ("rÉTÉ. 


LES  GRANDS   ARTISTES 


LEUR   VIE  --  LEUR  ŒUVRE 


Les   Clouet 


PAR 


ALPHONSE    GERMAIN 


BIOGRAPHIE    CRITIQUE 


ILLUSTREE     DE      VINGT-QUATRE      REPRODUCTIONS     HORS    TEXTE 


^rôjrVi/à-^ 


^^^  ^^^  ^^m^ 


PARIS 

LIBRAIRIE     RENOUARD 

HENRI     LAURKNS,    KDITKUU 

6,      KIE      DE      TOI' R  NON      (Vl'=) 
Tous  clioils  ik-  iraduclioii  tl  ilc  riproductiiin  rcservOs  pour  lous  pajs. 


LES  GLOUET 


Le  t('!ii|is  est  loin  où  \  ollairc  l'aisiiil  roniiiiencer  notre 
pcinlun'  à  IV'|»o(|U('  de  Nicolas  Poussin.  Gi'àcc  aux  travaux 
(le  salaces  érudils,  ou  counaîl  inainleuaul.  au  uioius  dans 
ses  lijL>iies  essentielles,  lliisloire  de  notre  ai't  deiiuis  ses 
oi-ig^ines  et,  gTàce  sui'tout  à  linilialixe  de  L('ou  de  Lalioi'de. 
on  ne  se  inéprend  ])lus  sur  l'origine  des  bons  portiails  de 
notre  \vi'  siè(de.  Jean  (Uoui't  et  son  fils  l-'raneois,  les 
((  Janet  »  connue  les  appidaient  leiu's  coulenij)orains.  oui 
<'l('  remis  eu  linuière.  S'il  rest(^  heaucoup  à  apprendre  sur 
ces  maîtres,  si  nombre  de  leurs  li-aMur\  sont  à  l'elrouxcr. 
on  |)ossè(b'  cependant  (lassez  nndtij)les  d('tails  p(uu"  vyo- 
(juer  leui-s  pbysionomies  et  moulrei'  la  \aleui'  de  leurs 
(«nivres. 

Les  Cdouel  axaient  ('(•lips('  par  ieui'  renoui  la  plujiart  des 
peintres  (pu  g  ra\  liaient  autour  dCiix  .(  Mi  lin  il  par  les  reiiar- 
dei"  coiiliiie  les  seuls  grands  poil  rail  isles  de  leur  e[iO(pie. 
Un  deiiii-si('M'le  ne  s"('lail  pas  (''coub'  de|Uiis  la  iikm'I  «le 
Fi'aïKMds  (pie  ib'jà  I  <ni  attribuait  à  ce  iiiaitre  une  multitude 
(Tiinigies  peintes  dans  les  aniK-es  l.'ilM)  et  au  diduil  des 
aiUK'cs  KiOO.  ()ii  en  \ml  hicnliil  à  coiiloiidre  Jean  el 
l"'ran(;ois.  I"]|    la  coul'usion   s'i-tablit  d  aulaiil    plus  ais(''Uieul 


6  LES  CLOUKÏ. 

(jiif  le  lils  aviii;  t'h'  ci'lèljrc  sous  le  iik'iiic  prciioiii  iliiiiiiiii- 
lil'  (|ii<'  son  \H'Vii  (1). 

Au  \\n'  sii'clc.  l-"<''lil)i«'ii.  i|.ii  jiourlaiil  naxail  pas  épargne' 
les  rcclicrclics.  n»' incnlionnc  (|u  ini  CJoiicl  sous  le  noui  de 
Janel,  dans  ses  E/itt^etiens  sin-  hi  rie  tlfs  pei?it7^es.  Lu 
colleclionncur  de  la  même  «■ji(m|U('.  l"al)l)('  de  Marolles. 
au(]u<d  ou  doil  iiu  data/ix/in'  de  Ihrres,  d'estampes  et  de 
fujures  en  tai/li-  douce,  pensail  ('izalenienl  (|u  uu  seul 
Clouel  a\ail  exish'.  lillusli'e  Fraueois.  Au  sirde  sui\aul. 
ini  aulre  auialeur,  Marietle.  dans  s(ju  Aljccvdurio  jtilto- 
rico,  ne  trouvait  à  ajouter  (jue  le  nom  de  Glouet  aux 
renseiiznemenls  de  I*'('li]iien.  Plus  jn-ès  de  nous.  Alexandic 
Lenoir  s  en  tenait  toujours  à  l'unique  Janel.  auejuri  ou 
l'apporlail  i^énéraleuieiil  loules  les  bonnes  j»cinlures.  el 
même  (ju(d(jues  aulres,  du  xvi'  sièele.  Mais  depuis  ou  a 
fouillé  l'îs  ai'cluxes.  seruU'  divei's  t'ci'ilN.  el  I  on  es(  arri\<'  \\ 
dissijier  la  IVudieusc  Ix'nih'.  Les  couiptes  surloul  oui  rnidu 
d  nisiiines  sei'Niccs.  (le  soûl  des  i('iuoius  peu  diseris  mais 
paiTailemnil  sùi-s:c(dui  (|ui  sail  1rs  iulei-roiicr  pai-\icul  à 
i"econ>liluer  bien  des  choses,  à  en  cou  ij)rcndrc  bien  d  aulres. 
Non  seulement  on  a  reconnu  el  |)rouvé  (ju  il  v  a\ait  eu 
deux  Clouel.  le  père  el  b'  lils.  mais  encore  on  en  a  di'cou- 
\crl   un  Iroisiruir.  Irés  pr(diablcuicnl  Irri-f  i\u  yvi'www. 

(1)  L'usage  <lo  désigner  par  un  ilimiiiiilil'  l'I.iil  alors  hi''>  rc'|iaiiilii. 
cl  il  aiTJvait  assez  souvent  que  Ton  penlait  le  sens  de  ee  soliriqwil. 
Ccilains  déformèrent  celui  de  Clouel  en  .Irhaniet,  Jainet  ou  Jannl.  On 
relève  ces  erreurs  dans  les  comptes  adininistratifs. 


LES   CLOUET. 


I 


JKAX    Cr.OlKT.    SA    SITUATION    A    LA    CdlTS. 

ci;  uiK   l'on  sait  DK  LLI. 

On  ignore  où  na(|iiit  Jean  Clouet,  mais  assun'iin'ul  ce  ne 
tut  pas  on  Franco.  piiis(}u"apros  sa  mort  tous  s«'s  liions 
ocliuront.  par  droit  daubaino,  à  la  Couronne.  Le  roi.  lo- 
connaissanl  c«)mmr  il  convenait  envers  un  de  ses  meilleurs 
peintres,  s'empressa  d'abandonner  cet  Iieritaire  au  (ils  du 
défunt,  François,  ol  les  ternies  mêmes  de  sa  donalioii  ('la 
blissent  ({ue  Jean  n'«''tail  pas  originaire  d[i  royaume  el 
n'avait  pas  élt'  ualuralis*'  (  1  i.  Peul-etre  devai(-il  le  jour  à  ce 
Jean  Cloot  (jui  Iraxaillail  U  Bruxelles,  dans  le  troisième 
({uart  du  \v''  siècle,  pour  le  duc  de  Bourgogne,  et  ([ui  è'iail 
élève  de  van  Orlev.  Peut-ètr<'  aussi  u"y  axait-il  eiilre  les 
doux  peintres  (luuue  siuiilitude  lorliiile  de  noms  (2). 
Aucun  témoignage  u"a  eucore  «■claiit'  ce  point. 

On  ne  sait  daxaidage  (|uaud  notre  (lloiirl  passa  clie/, 
nous,  m  (|uelles  causes  I  \(l(''lernniièrenl .  Les  k  l'.lals  ^  de  la 
maison   du    l'oi    iu)us    r('\èlenl    seulemenl    (pi  à   la    inori    de 


(1)  Los  IcIU'Cs  l'dViili's  conli'iiiinl  (otlo  (lonalioii  stmt  aiiv  Aicliiscs 
naliiiiiali's.  Trésor  des  Chai'les.  .1.  ,1.  :2.'il;  elles  datent  de  1541. 

(2)  (lu  iii'  posstide  i|(ie  tics  |icii  dr  ii'iisoijjiH'iiii'nts  sur  Clin'l.  Lfnn  di- 
Laboi'de  a  dû-couvert  une  iniitt.irice  datée  du  4  sciili-iulire  r»T.">(|iii  |>iiiii\>' 
([ue,  cette  aiiiKH'-là,  ledit  |)ciiitir  |ii'ii,'iiit.  à  Hruxelles,  sous  le  coulrùlo  d<; 
son  eonl'ivii'  .|(>an  de  llaïunkarl.  dilVérentes  ligures  de  saints  sur  les 
pai'ois  d'un  |i;i\  dlmi. 


8  LES  CLOU  ET. 

Louis  XII  il  ('liiil  |M'iîili'('  en  I  il  rc  (  Ko  (lice  de  ce  Mioiiai'(|iic  (  I  ). 
Son  nom  liii'ti l'ail  le  dcciiicr  sui'  la  liste  des  pciiilrrs  ion  aux, 
à  la  suilc  (If  Nicolas  Belin,  de  Modèiic  et  de  BarlJK'Iciiiy 
Giiérv.  dil  (linol.  Les  tètes  de  liste,  les  chefs  d"<'mj>l(»i. 
«'taiciil  les  ci'dèbres  Perrt'al  et  Boui'diclion  (2).  A  ceux-ci 
((  deux  cens  (|uacanle  li\i'es  tourudis  »  t-laienl  all<)ii<''es 
(duujue  aiiiK'e,  iu)us  apprennent  les  comptes  des  dépenses 
royales;  Jean  devait  se  contenter  <le  cent  soixante  livi-es. 

François  1'''  n'ayant  pas  modili»'  le  i^r-oupe  de  ])einlr<'s 
formé  par  son  beau-père,  notre  artiste  reste  dans  sa  situa- 
tion modeste  jusqu'en  1522.  11  succède  alors  à  Boui'di<di()n 
défunt  et  devient  ainsi  valet  de  garde-i'obe  extraordinaire. 
Six  ans  plus  lai'd.  après  le  décès  de  Perréal,  la  première 
place  lui   (>st  donnée  avec   le    dire  de  peintre  et   valet    de 


(1)  Sa  prniiiriu  (luiUance  conniR'  est  du  i':2  (i(!'(X'iiibrc  J.")].s.  Le  Kdiix  ilc 
Liney  l'a  publiée  dans  \e  Moniteur  du  17  avril  IMiil,  p.  1130. 

(2)  Ci'.ÉIats  (le  lu  maison  du  l\<ii{\'.Ai\),  (-(Utirs  pour  Rosi'i'  du  Gaij^niùi'os, 
riibli(>tlié(iuc  nationale,  ins.  lianrais  21  iiiJ.  Jean  IVrréal,  dil  île  l'acis, 
;«iiiuit  vers  IKiO.  on  ne  sait  où,  et  mourut  vers  lo28.  Il  ne  subsiste 
aucune  ipunic  autlientique  de  lui.  Jean  liourdiclion  na(piil  à  Tours 
en  14.57  el  mourut  vers  la  lin  de  l.i2l).  On  lui  doit  les  meilleures  miniatures 
des  Heures  d'Anne  de  Bretagne  et  (|ualrc  miniatures  :  Vilomme  sauvof/e. 
11!  Pauvre,  l'Artisan,  Vilomme  ric/ie,  à  M.  J.  Masson.  d'Amii  iis.  .M.  l'.milr 
.Mâle  lui  attribue  les  miniatures  des  Heures  de  Ferdinand,  loi  ib'  Xapies. 
des  Heures  de  Cbai'les  VI 11  el  ipielqui's-iines  de  relies  ipii  déeorent  un 
missel  provrn.iiil  dune  église  toui'angelle.  On  ne  sait  rirn  sur  les  autres 
peintres  royau.x  et  pres([ue  rien  sur  un  autre  artiste  i|ui  travaill.i.  bii 
aussi,  pour  la  cour  et  que  certains  proelann'rent  le  rival  de  Fouipiel  :  le 
Tourangeaii  Jean  Poyet.  On  n'est  pas  mieux  renseigné  sur  |{a\m<ind 
Boteric,  dont  il  reste  une  médiocre  Trinité  entourée  d'anges  peinte  en  !.")()'.». 
ni  sur  Jean  Colombe  de  Bourges  qui  décora  les  Hru)-rs  de  Jacques  (lu  ur. 
l'^t,  sans  des  a(;tcs  d'arcliives,  nous  ne  eouiiaili  iuiis  mi'iiie  p,is  les  nnins  île 
i'ierie  Didier,  de  Claude  des  Bruyères  el  ije  |''i  aii.dis  jien.ird.  >•  pi  yiihe 
de  la  Ueync  en  151;i  ». 


.1 1:  v  N    ('i.ouET.  —   riiv>(;(>is   I"'    Pciiil  iircj. 
(\j)u\ve.) 


LES   CLOUET.  11 

rliambrt'.  Très  lionoi»'  et  chargé  de  travaux,  il  remplira  ses 
fonctions  jusqu'à  sa  mort,  en  1540. 

Le  titre  rie  valel  de  chambre  était,  à  cette  époque,  pai- 
faîtement  lionorahle,  car  il  n'impliquait  aucune  fonction 
et  il  conféi'ait  le  droit  d'approcher  le  roi  ainsi  (jue  de  le 
suivre.  Aussi  avait-il  t'té  réservé  tout  d"al)ord  aux  gentils- 
honunes.  Puis  l'étiquette  de  Ja  cour  avait  en  ([uehjue 
sorte  obligé  les  princes  à  l'octroyer  à  leurs  artistes  favoi'is. 
En  effet,  cette  étiquette,  reposant  sur  les  traditions  et  les 
slaluts  des  corporations,  assimilait  les  poètes  et  les  pein- 
tres aux  gens  de  métiei'.  lesquels  occupaient  la  deiniérr 
place  hiérarchique.  Le  seul  moyen  de  uieitre  les  aiiisles 
au-dessus  des  divei's  ofliciers  d()mesti(}ues.  de  leur  assurer 
un  rang  au  moins  coinenable,  c  i'iail  d fii  faire  des  \alels 
de  cliambie. 

Pourquoi  Louis  \I1  s"('lait-il  attaché'  .lean  Cdouel?  Nul 
ne  saurait  le  dire.  A\ait-il  accjuis  (juelque  rtqtutation  a\anl 
dèli'e  adnus  au  nombre  des  artistes  royaux,  ou  de\ail-il 
son  heureuse  foiliiuc  au  sens  esthétique  île  (|uel(|U('  cnii- 
seiller  du  monai'<jue?  Aucun  docunieni  ne  nous  ('claire  sui- 
tes (h'buls  du  maîirc.  sin'  srs  premiers  lra^■au\  à  la  cour  de 
Fi-anc('.  Plus  lard,  il  semble  bien  (|U  il  eu!  ralfeclion  de 
son  roi,  mais  lul-il  son  porlrail  isie  pn'IV'ré' ?  A  ce  sujel 
encoi'e,  on   se   voit    r(''dinl   aux  eon jeclures. 

Ces!  Tom's.  ceiilre  d  une  \ieille  ('cole  Ibirissanle.  (|Ue 
Jean  (ilouel  a\ail  é'bi  pdur  sa  i-esidenee  ordinanc.  S'il  alla 
(luebiuelnis  besogner  à  Paris,  (juand  le  roi  s  y  Irouxail 
entre  deux  (b'placemenis.   il  aeeonqdil    en    pr()\ince.  croit- 


12  LKS   CLOUKT. 

(Ml.    la    iiiaicdrr    parlic    de  son   (ruxir.    (In    lie    |M)il  rail  u  rail 
pas   alors  coiiiinc    ;i    |)r(''sciil:    les  jkmsoiiiics   (h'siraiil    Icni' 
image  ne  |)()sai('iil  pas  dans  la^'licr  de  I  arlisic.  cCsl  (•(dui-ci 
(jui    se    rciidail    dans    Icnr  dcnicnrc    II    les    dessinai!    liés 
soigneuseiiienl  sur   j)aj)ier.    indi(juail   les   Idnalilés  de  leur 
cîirnalion  pai'  (|n(d(|ues  Iraint-es  de  pasltd  dur  el  noiail  par 
écril  les  leinles  de  leui' coslunie  :  jtuis,  d'après  celle  ('ludc. 
d  p('i<:iiail  le  lahlisiu.   Ce  svslènie  n  a  l'ien   (|ui  doixc   sur- 
prendre ;    entre   les    mains    d'un    peintre,    maîlrt;   de  son 
mt'lier.   il  ne  peut  iiuère  donnei-  de  iuau\ais   résultais  (  Ij. 
Lorsque  Jean  rapportai!  de  ses  soi'ties,  de  ses  voyages, 
inic   douzaine  d  études,  il  avai!  du  travail  pour  plusieurs 
uKiis  à  son  loyer.  Des  courriers  emportaient  les  ou\iai;es 
aclie\(''s   au    fur    e!    ;i    mesure    des    besoins.     In    com|)le 
nous  allesle  (ju'au  mois  de  mars  \l'}2\)  un  certain  Loys  du 
^^olllln  lil.  «    en  dillin'ence  el    sur  (dievaulx   de  posie  ».  le 
voyage  de  lilois  h  Paris  pour  apj)Orler  U  François  1"  des 
porirails  el   des  ((   elïigies    au  \il"  »  dont  Cloue!    axai!    ('■!(' 
cliarg»'.  Et  nous  saxons.  |)ar  une  pièce  adressi'-e  au  pr(''\(H 
de  Paris,    qu  une   fois    au    moins,    vers    [.'i.']".   Jeanne,    la 
femme  du  maiire,  rempli!  ce!  ollice  de  courrier  (2j. 

(1)  Ceci  iloil  .s'ciili'iiilii'  (lus  poil  laits  |)('iiits  d'iiprès  les  crayons  iii("'iiirs 
ilii  jjoiti'uilish',  l'I  iiicnic  ;i  conilitioii  dr  l'aire  iiir'tloiiiini'i' la  slnuliii  !■  ilu 
(lussln  sur  la  |irinluir.  |ji  |ici;L;iiaiil  (ra|Fi('s  \v  dessin  d'un  aulre.  li'  )fIu> 
liahile  des  niaili-('s  |-is(|iii'rail  l'iiil  di'  ne  r(''alisrr  i|ii'iini'  irn\re  de 
vii'Luqsité  l'rivole.  On  peul  s'en  convaincre;  en  exaininanl  le  l'ranrois  /" 
du  Louvre  exOculé  par  Titien,  d"aprés  des  documents,  en  1535,  aiVlsahcllr 
'/'7i\/f  du  Musi'm!  de  Vienne  |ieinle  i»ai'  le  ni(''tne,  un  an  plus  lui.  de  la 
nièiiie  manière. 

(2)  ICn  ell'el,  (die  a  donne''  (piillance.  celle  annee-là.  an  ti(''>()iicr  de 
riùiai^;ne  d'une    soninnj   de    45   livres    Iniiiiiois   iiui    lui    a\ad    eh''    allouée 


Anne  ije  Montmoiiencv. 
depuis  connt'lnlili'.  ù  l'df/e   de  i*:^  ans. 


Robert  de  La  .Mauck, 

ilil    Fl.El  UAMiES. 


Gni.LAl'ME   GdUl'KlKll. 

ilit  IJoNMVET,  atiiir.il  (le  Frunci'. 


AuilH'H    (iiil  I  lIKIt. 


.1  r.\  \  (',  1. or  i:  I 


MiNiMiHKs    m.  \.  \  Cl  iif  ne  tj  u  1 1  iii  n  c 

|l!ililiiilli(''i|iii'    ii.iliiiliali'.) 


LES  GLOUET.  13 

Quelles  raisons  delerminèrent  Jean  à  se  fixer  à  Tours, 
on  l'ignore.  Peut-être  est-ce  tout  simplement  parce  qu'il 
s'allia,  par  son  mariage,  à  une  famille  de  cette  ville,  celle 
(le  l'orfèvre  Gatien  Boucault.  Ce  fut  au  moins  en  lol.')(ju'il 
se  maria,  car  nous  verrons  plus  loin  (ju'il  convient  de  pla- 
cer en  l.")l()  la  naissance  de  son  lils  François.  En  tout  cas, 
on  ne  saurait  beaucoup  reculer  la  date  de  cette  union 
puisqu'une  pièce  nous  apprend  (jue  les  deux  époux  achetè- 
rent à  Tours,  par-devant  notaii'e.  le  ^endredi  (I  juin  \l)'2'2, 
une  rente  en  grains  (\). 


11 


LE    GOUT    DES    PORTRAFFS    AU    XM      SIKCLK. 

Au  moment  où  la  fortune  commenrait  de  sourire  à  Jean, 
les  portraits  avaient  une  vogue  extraordinaire.  l)<''j;i.  au 
xiii'  siècle,  ils  jouaient  un  i('ile.  parfois  imporlanl.  dans  les 
n«'gociations  des  mariages  princiers  :  à  j)arlir  du  \i\'.  on  en 
usa  de  bien  d'aiilres  farons.  Kois  cl  grands  licnncnl  h  se 
faire  repr('seiiler  sur  les  noIcIs  des  (li|»l\(jn('s  cl  lripl\(|ii('s 
(ju'ils  olfreiil  aux  «'gbscs.  l]\\  oulre.  (|iiel(|nrs  liauls  per- 
sonnages se  niclleni  à  réunir  dans  leurs  demeures  ib-s 
séries    de   porirails.    Maliaul    dArlois    |)ossède.    axcc   une 

«    à    cause    du    voyage    qu'elk'    .ivail    fiiitl     ilc    Paris    à    Konlaiiiclili-au. 

pinu-  nppoi'lcf  (■(    inoriiiticr  au   lluy  aucuns  duvragcs »  ilc    sou   uiari. 

On    eu    |icul    (Iciluirc    que  .Icau   sciduruail    |)arlois  à  Paris,  où    pcul-t'lrc 
il  a\ait  une  dcuicure. 

(1)  Arr/iiri's  de  l'iirl  fninriiis.   1 ''    sciic,  I.  III.   p.  :::!•<)  (>l  s. 


16  LKS   GLOUET. 

siiilr  (le  jx'iiiliircs  coiisacft'cs  à  la  \i('  de  son  pri-c.  une 
f>"alri-i('  ilr  Idisics  rcproduisiiiil  nos  somcraiiis  cl  nos 
soincraincs.  Jean  de  Bcrrv  conserve,  dans  son  manoir  de 
Biceti"*'.  les  clliiiics  peintes  de  Cléinrnl  \11,  des  cardinaux, 
rois  cl  j)rinccs  de  France,  des  empereurs  d'Orient  et  dUc- 
cidcnt.  I^nlin  d  assez  nombreux  scio'ucurs  impriment  leur 
image  sur  les  J)àliments  publics  de  lein-  domaine. 

Nos  artistes  excellaient  à  figurer  les  donateurs  et  leurs 
entants;  l'interpn'tation  caractériste  des  tètes  étant  une  des 
(|ualilt''S  dominantes  de  noli'c  l'ace,  très  t('it  ils  proct-dèreni 
a\('c  une  siiKM'ritf'  et  une  conscience  dcdectables.  Le  Jean 
le  Bon  du  Louvre,  le  (lliarlesY  et  la  reine  Jeanne  <jui  se 
jii'olileiit  sur  le  Parement  de  Narbonnc  du  m(~'me  nnisi'c. 
les  miniatures  de  maintes  Heures  nous  en  fournissent  des 
preuves  aussi  di\eises  (jue  tvpi(]ues. 

Au  w'  siècle,  nos  peintres  les  nneux  douc's  IraxaillenI  en 
gènc'ral  comme  des  portraits  les  personnages  de  lem's  d(''- 
corations  ou  di'  ieui's  motifs  religieux.  Voy<'z  le  St-Au- 
giisliii  et  le  Sl-A)n/)f()tsr  de  Saint-Sauxeui'  à  (laen.  la 
l*r()C('ssi(tii  (lu  jxtjx'  (jré(jOirc  dans  la  callit'di'ale  d  Aiilim. 
les  peinlui'es  nmrales  A\\  li'ansepl  el  du  bas  v^\\v  ninil  de 
Nolie-Dame  de  Dijon,  la  Plela  (pii.  de  \'illeneu\e-lès- 
Avignon.  est  passi'c  au  Louxie.  et.  dans  ce  nuMue  nnist'e. 
la  Stc-Mddc/riiif  (pu  prè'senli'  une  \ieille  dame. 

Le  (■('■lèbre  dipl\(piede  l''()U(piel.  naguère  à  Melmi.  ne 
s  nu|)ose  à  ladmiralion  (pie  par  les  images  de  (.liexaliei' 
et  du  moine  (pu  ligure  Sl-I']|  iciiiie.  Le  ('.(il  rui  ri',  jadis  au 
IVdais  de  .liishce  de  Paris,  se  reconimaiide  siirhiiil   |iar  ses 


lÉcoLE   DE    Jean   (Iloif.i.    —   I'ouikai,!     m:    iemmi;  ^l'oiuUirc) 
'(Ancioniic  colloclion  Laurent  Riclmrd.) 


LES  GLOUET.  19 

saillis  aux  physionomies  si  uellcnient  iiidividiicllfs.  L"iii- 
trrùt  (lu  triptyque  au  Buisson  ardent  de  Nicolas  Froment 
(catlu-drale  dAix-en-Provence),  du  tripty(jue  de  la  cathé- 
drale de  Moulins  et  de  la  Nativité  de  révèché  d"Auluii  est 
loul  entier  dans  les  figures  des  donateurs  si  vivantes,  si 
délicieusement  expressives. 

De  ttdles  œuvres  durent  contrihuei-  ('iKtniKMiicul  à  rt'- 
pandre  l'usage  des  portraits  isolés.  Les  panneaux  ne  suffi- 
sant pas,  on  portraitura  sur  les  tapisseries,  sur  les  manu- 
scrits, les  livres  impriuK's  (1),  voire  sur  Ifs  cheminées 
monumentales  — que  l'on  adornait  de  médaillons  ou  de 
motifs  à  plusieurs  figures  —  e(  même  à  l'exItMifur  des  mai- 
sons. Jac(jues  Cœur  et  son  épouse  illustrèrciil  de  leurs 
images  sculptées  la  façade  de  le  m-  palais. 

L'honnne  a  toujours  chéri  la  représentation  de  ses  traits, 
e(  heaucouj).  même,  dans  le  piihh'c.  ne  conçoivent  pas 
l'art  plasti(jue  en  dcdiors  de  la  lidèle  reproduction  des 
tètes.  Quand  la  photographie  fut  iuvenli'e.  rimmanih' 
recul  iiii  des  plus  mer\('ilh;ux  hochets  (|u Vile  pi~il  dt'sirer. 
Aussi  (|uelle  allégresse;  !  Que  de  soins  apporlivs  au  jx-rfec- 


(1)  Il  y  .1  lie  savouifiiv  |>()rlniils  siii-  les  plus  diverses  tapisseries.  On  en 
roiiianim:  dans  la  Vie  de  saint  Pierre  de  la  eatlu'dialc  de  IJeauvais 
comme  dan.^  la  Condamnation  de  Souper  et  de  Ban<iupt  du  musée  di" 
Nancy,  dans  la  Scène  d'amour  du  Louvre  comnje  ilans  le  Priam  et  sa  cour 
du  Palais  de  .liislici'  d'Issoiir. 

Enfrt'  tous  les  [lortiails  des  livri's,  il  faut  iclenii' ceux  de  Cliailcs  VIII  cl 
d  Anne  di-  Ui-elaj;no  cxccuti's  en  luinialiirf  sur  Irs  Ajiotitr/urs  et  lùihtes 
d'Esope  (tradiiclinn  Iran.  Mise  dr  G.  Tanlil'i  cl  sur  la  Léijende  dorée 
(tnidnction  de  .1.  du  Vi^'uaii,  in-l'olin  >tii-  vcliii  nublics  à  Paris  par 
.Vnt.  Vérard,  l'un  en  •14'J0,  l'aulie  m  ll'j;>. 


^10  LES   GLOUKT. 

lioiiiiciiiciit  (le  J  iii\  fiilioii  !  J{t  (jiicl  siiccrs  ciiN  aliissfur  1 
Cliacuii  iiiaiiih'iiaiil  voudrait  opi'ici- soi-mèiiie. 

Au  lt'uij)s  (le  Cluu'k'S  \111,  il  devint  de  bon  Ion.  dans  la 
nol)lt'sse,  de  se  taire  portraitui-cr.  Et  ce  genre  alla  se  dt'-- 
vidoppant.  Les  princes  du  sang  se  piquèrent  d'aNoir  leurs 
peintres  comme  le  roi.  Les  riches  bourgeois  tinrent  <à 
honneur  de  procéder  (à  l'instar  des  seig"neurs.  A  partir  (hi 
règ'ne  de  Louis  XII,  tout  favorisé  de  la  fortune  recourut  au 
talent  d'un  portraitiste;  ceux  qui  ne  pouvaient  s'olfrir  une 
peinture  sur  panneau  ou  une  miniature  sur  vélin  se  con- 
tenlèi-ent  dini  crayon  sur  papier. 

Dès  lors,  il  fallut  bien  placer  les  porti'ails  sur  les  muis; 
ainsi  connnenca-t-on,  dans  maintes  familles,  des  galeries 
analogues  aux  collections  d'effigies  des  palais  royaux  et  de 
certaines  maisons  princières.  Un  n'en  forma  pas  seule- 
ment de  peiidures  sur  bois,  mais  aussi  démaux,  surtout 
(piand  Léonard  Limosin  eut  provoqué  des  enthousiasmes. 
Et  les  ensendjles  de  portraits  en  ('mail  ne  fureid  pas  les 
moins  goùlt'S,  car  par  leurs  teintes  sobres  el  lumineuses, 
ils  constituaient  des  effets  dt'corat ifs  assuri-menl  agréables. 

D'aucuns  continuèrent  h  |»lacer  leurs  busies  sui'  (|uel(|iie 
mur  de  leur  demetn-e,  t(ds  les  Dumonlat  en  leur  IkMcI  de 
lliom,  les  Dordel  de  Montai  au  château  de  ce  nom.  dans 
le  Lot  (1).  D'autres  \()ulureiil  leur  image  en  liaule  lisse, 
comme  Pierre  de  Kohan  et  Marguei'iie  d'Ainiagnac  lenaiil 
l'orgue  sur  la  tapisseiie  de  la  eallu'drale  d'Angers,  c(Mmne 

(1)  Lolligio  <lf  DuiduL  uslpa.sséu  uu  Loin  ru.  I^cs  porlrails  un  liaiil  ruliul 
de  DumontaL  el  de  son  épouse  sont  encore  dans  la  cour  de  son  liolel. 


(.'.lichi'  Alin.'iii. 


l'It  A  NCOIS     (',  l.Ul'KT.     —      l'itWCUIS      1'       l'i'illllllt'. 

(.Musée  (les  Oriiccs,    l-'liirciu-i'.  1 


lp:s  glouet.  23 

la  (lame  revêtue  de  drap  dor  qui  se  tient  à  genoux  dans  la 
Descente  de  Croix  du  musée  Çrozatier,  au  Puy,  comme 
les  anonymes  assemblés  au  Concert  du  nmsée  des  Gobe- 
lins.  D'autres  encore  se  mirent  à  collectionner  des  minia- 
tures ou  des  dessins.  On  se  plut  à  recueillir  les  portraits 
des  célébrités  du  temps,  des  ligures  qu'un  événement 
transformait  en  actualités .  L'arrivée  de  Maiie  Stuart  à  la 
cour  dans  son  costume  national  «  à  la  barbaresque  mode 
des  sauvages  de  son  pavs  »  ayant  lait  sensation,  nous  ap- 
prend Brantôme  («  eUe  paroissoit  une  vi-aye  déesse  )>), 
l)eau('Oup  désirèrent  son  effigie  «  est.uil  ainsi  babilb'e  ». 
Beaucoup  aussi  se  disputèrent  les  copies  dr  \\\  pcinliirc  (|iii 
représentait  Marguerite  de  Fiance,  sous  b;  costume  de 
velours  incarnat  d'Espagne  quelb;  portait  au  feslin  (b's 
andjassadeurs  polonais  ;  costume  dont  l'etlet  axait  t'tt' pro- 
digieux sur  tous  les  assistants,  notanuiienl  sui-  don  Juan 
d'Autricbe. 

Un  alJMini  (b'  la  l)il)li()lliè(|ue  Ab'janes  d'Aix-cn 
Pi'ovence  et  un  recueil  aiialoguc  de  la  bihliolbècjiir 
d  Ai'ras  nous  oll'rent  deux  curieux  spi'cimi'iis  îles  collec- 
tions de  [)orlrails  cra\()iin('s.  coinnic  on  les  comprcnaii 
dans  le  prcnncr  ([uarl  du  wT  siè(dt'.  Au  second  (|uart, 
les  crayons  suscilèrenl  tni  hd  engournienl  (|ii  il  y  eiil 
i(ierd(~)l  du  lra\ail  jtour  les  plus  nu'diocres  dessinateurs  ; 
et  JorccMnenl  ceu.v-ci,  b'conds  aiilani  (pi  insullisauts. 
(b'terniin'''renl  la  d('(di(''ance  de  ce  mode  de  jiuuralion. 
Ils  axaient  pour  en\  Ions  les  gcnsdennes  degoiil.  iesipuds 
sont    toujoui's    h'gion   :    n(''ainnoins    en    (|n(dqiies    ann(''es. 


24  LES   CLOU  ET. 

ils  comniircnl  do  toiles  ([iianlih's  do  tètes  banales  (|tra|)rès 
le  règne  i\('  Henri  [\  on  cessa  do  s'intéresser  aux  [lor- 
Iraits  crayonnés.  Ingres,  par  d'incontestables  inei\cilles, 
l'olèvora  plus  tard  ce  genre  sans  le  remettre  en  bonneur. 
Jean  Clouet  crayonna  certainement  plus  de  porliails  (ju  il 
n'en  peignit,  et  peut-être  en  lit-il  davantage  sur  vélin  que 
sur  panneau  de  bois  (1).  D'après  ce  que  nous  venons  Ar 
\(>ii',  cela  semble  bien  pro])ablo.  Enlin,  selon  l'usage  du 
temps,  il  décorail  aussi  dos  meubles,  exécutai!  dos  ai'moi- 
rios  et,  à  l'occasion,  modelait.  Même  s'il  peignit  pou  do 
portraits,  son  u^u\i"e  lui  donc  considt'rablo.  François  T'' 
l'atioctionnail  ou  reslimait  trop  })0ur  le  laisser  (  li("imei- 
longtemps;  à  [)artir  do  l.j2.').  il  dut  morne  l'accabler  de 
travaux  puis(|u  il  no  lui  donna  ipiun  auxiliaire,  ce  l*etit- 
Jean    Gbampion    dont    on    no  sait    rien. 


m 


L  (KrVME    1)K    .IKAN. 

On  no  peul  allribuer  à  Jean  CJouoI  (|uo  Irois  ou  (|ualre 
peinlures.  six  ou  sept  ilessins  el  les  uK'dadlons  d  un  nia- 
nuscril.  l'jicore  nCsI-ce  (|uo  par  une  s('ru'  do  conjoclures. 
Li'  seul  de  ses  lableaux  (jui  nous  soit  signali'  pai'  (ni  texio 
a  (■!(■  perdu  :  c  est  le  poihail  d  (  Mduce  h  iik'.  le  uiallieuia- 
licien  daupinnois.   Son    projtro   (ils    ci'itilie    (|(i  \\    lui     [icnil 

(1)    «    Il    I  f.i  \  ailldil    l'^'ali'iiiriil    liii'ii    en    liiiik'    r|    en    iiilniiiliii  I'    •>.     imld 
FiJlibii'ii.  I.  III.  |).  1  iS  (if  l'éditinii  ml.'. 


Cli,-lu'  ll.inM:ii-iii:l. 

Franchis    C.idir.r.      -    (liivmis    |\     Pi'inlmcj. 

(Muséo   ilr    N'iriiiU'.) 


LES  CLOU  ET.  27 

par  le  maître  ( prohaljlcmcnl    vei\s    lo)^(l).    Une  gi-avure  le 
re]»iT)iluil  dans  les  «  Hommes  illnstres  »  de  Tliev(4,  mais, 
(l'ès  vulgairement  établie,   elle   n'en    donne   (luiiiie  piètre 
idée,  et   ne  permet  même  pas  de  reconnailre   un  (Uouet. 
Les  peintui'es  conservées  (jue  lOu  supjtose,  avec  quel(|ue 
raison,  œuvrées par  noire  Jeau  soûl  :  le  graud /'/v/z/ro/.s' /''' 
du   Louvre    et   deux   efïigies   de   Montmorencv,   lune  au 
môme  musée,  l'autre  au  Palais  des  Beaux-Arts  de   Lyon. 
La  première,  tort  comuu',  dale  des  années   l.j20,   <î    eu 
juger  par  l'âge    du    porli-ailui'»'.  Vêtu  dun    poui'|)oint   de 
satin    gi'isovanl    ciiainan'é'    dOi'.   le    roi    se   |»rolile  sin'  un 
fond  rougeàti'e  dans  uiu'.  poslui'e  iialur(dle.    inie   main  sur 
la  garde  de  sou  ('pi'e.  La  télé   relienl  par  son  dessin    |>i't''- 
cis,  afïiruialir.  la  structure  giMu'rale  par  sa  \  ie  ;  les  di-lails 
du    eoslume    IralussenI    une    soliieilude    de    niimalui'iste. 
L'exécution   pictur.de,  [n-es(jiH'  loiile  en   glacis  el  en  Ions 
plais  très  lissc's,  est    uniforme,    monotone,    sauf  dans   les 
maneiies   el    le    fond,  d  oii.   par    malheur,     les    ornenienis 
(Muergenl  lro[t;  il  sendde  (|ue  l'auleur  ail  eu  les  liésilalions 
d  un  piMiili'e  (|ui  sori  de  son   lormal   ordinaire.   Les   mains 
sont   l(''(di(''es   d'mie    l'aeon    \ulgaire   el.    par-ci.    par-là.    !('•- 
jti'euses.    mais   il    iaiil  sCii   prendieau  reslauiMlenr  (|in  les 
suUsIilua  aux  originales. 

(iC  porirail  avail  v\r  place'-  au  palais  de  {•"oniainiddeaii 
dans  le  caltinel  t\i\  roi:  el  au  wii'  siècle,  il  se  Iroiivail 
loujoui's  à  sa  même  |)lace  au-dessus  d  une  iiorie.  Les  ama- 
leurs  (''rudils  sa\aienl  encore  (pi  M  elail  de  Lionel  ;  loiile- 
lois  ils  crovaienl.  eux  aussi,  (piil  n  \  a\ail  eu  (piini  arlisie 


28  LES   CLOUET. 

(lo  rc  noin.  l'ji  HitO.  le  P.  Dan  sipnalo  ce  portrait  et  celui 
<le  Fiaii(;ois  11  «  qui  sont  fie  Jand.  jH'iulrc  fort  renoninié 
par  la  muse  du  prince  de  nos  poètes  (1)  ».  Mais  le  dire  de 
ce  religieux  lut  bien  vite  oublie.  Quand,  en  1731,rabbé 
Guilbert  cila  de  nouveau  celte  (îffigie  royale  comme  un  ou- 
vrage de  .laiiel  (2),  Bailly  l'avait  inscrite,  dans  son 
inventaire,  depuis  vingt-ipois  ans.  sous  la  mention  d'ou- 
\  rase  d'inconnu.  Celle  insci'iplion .  Louis-Jac(jues  du 
Kaiiieau  la  reproduira,  en  1784,  dans  V Inventaire  des 
liihhum.r  du  cabinet  du  )-oi. 

il  est  légitime  de  donner  à  Jean  Clouet  les  deux  poi- 
trails de  Guillaume  de  Montmorency.  L'âge  accusé  par  le 
vieux  seigneur,  père  d'Anne  le  Connétable,  dans  ces  pein- 
tures, les  place  vers  le  milieu  ou  la  liii  des  années  l.')20.  au 
j)lus  tai'd  eu  \^VM)  (3).  A  celle  (-j^xpie.  il  n'\'  avait  guère 
(jue  le  niaîlre  (jui  tVil  en  ('lai  de  r('alisér  des  œuvres  aussi 
puissantes.  Sans  doute  la  pâle  n'est  pas  tout  ;i  l'ail  élab'c 
dans  ces  deux  ligures  connue  dans  celle  de  Franeois  F'% 
elle  y  modèle  les  plans  avec  autrement  plus  d  aisance  cl, 
en  ([uebpies  endroits,  elle  paraît  moins  lisse:  mais  Jean  a 
lorl  bien  pu  niodiliersa  facture  à  un  certain  moment  de  sa 
carrière,  comme  lanl  d'artistes,  et  il  serait  pliih')!  i-lonnant 
•  |ii  il  ne  IVil  pas  parvenu,  dans  ses  dernii'res  années,  à 
mano'UN  rer  les   bi'osses  avec    cràneia'e. 


(Il  l'.l  piiiir  (■•viti'i-  liiiilc  (•(inriHinii,  II'  iiuiii  ili'  (T  |iiiiici'.  liim<,U(l.  rst 
in.si'ril    en   ni.ir;,'!'. 

{2)Descrtp/ion  lii.tft)ri(iiiei/('sc/tf!leaiij/iiiii;/  cl  fores  I  il  c  l'ini  I  a'ntehle<i  u  A~'''>\ . 

(:{)  (  inill.i  iiinc  ilr  .Mdiil  iiH  iicin'v  ,  rlii'\  alirr  iriKuiiiiMir  ilr  Lmiisr  ilc 
Savoie,   iniiunit   en    \'.)\\\ . 


Fn A  >coi  s    (11. U  U  ET. 


Ki.is.vitETii   11  '  A  i  1  lu  i.iii,    l'fiiiluiv'i. 
(Louvre.) 


LES  CLOUET.  31 

Sans  doute  encore  1  exécution  des  Monlniorencv  lail 
songer  à  l'archevêque  d'Holbein,  mais  n'oublions  pas  que, 
entre  les  maîtres  à  même  psychologie,  à  semhlabh'  osthe'- 
tique,  il  y  a  forcémoril  un  air  de  famille.  Jean  Clouef 
concevait  Finterpi-i'tation  des  caractères  comme  Hans 
Holhein  :  il  s'ordonnait,  lui  aussi,  de  serrer  hi  forme  el  de 
peindre  en  amoureux  du  dessin,  c'est-à-dire  en  sacrilianl 
tout  effet  pictural  à  la  scrupuleuse  indication  des  plans. 
D'ailleurs,  doi(-on  vraiment  au  maître  de  Bàlerar(  he\('Mjue 
de  Canlorhery?  Plusieurs  ('ruchts  en  douleiil.  .Maintes 
peintures  que,  sur  la  foi  des  catalogues,  le  public  continue 
de  saluer  comme  des  créations  d'Holbein  seront  ])eul-tMi"e 
restituées  demain  à  Jean  Clouet. 

Le    Guillaume    de    Montmorency     offre    un    admirable 
exemple  d'interprétation  caractériste.  Les  moindres  traits 
du  visage,  les  doigts,   aux   dc'formations   implacablement 
traduites,  tout  accuse  son  individualiti'.   On   discei-ne    sur 
cette  tète  une   ti'naciti'  formidable,  une  aust('rité  pi-es(|ue 
féroce  et  certainement  m(tr<tse.  (let  homme  parait    ignorer 
le  soui'ire  et  peut-être  la    bien\ cillance.    Il    cause    une    im- 
pi'ession  lugid)re  (|ue    renl'orccnl   le  Ion  de  sa  cliair  jainni' 
ninie  un  vieux   parchemin  el  le  noir  de  son  coslinne.  (le 
serait  effrayant  si  ce  dernier  n  ê'tail  liunianis»'  par  (piehpu's 
accents  de  ci'aniorsi  en  haut,  à  IV'(diancrnre   du    costunu'. 
el  sur  les  (bdtoïdes.  amsi  (pie  p;n'  la  ta(die  Innnneirsc  de  la 
chaîne  d'or.  Profondi'Uient  «^xpi'essii's   et    très  liarnioimiix 
en  leur  gamme  s('\ère,  ces  deux  porliaits  coniplen!  jKirnu 
les  chcds-d'œuvre. 


32  LES   GLOUET. 

Les  dessins  doiil  on  jicuU  sans  crainlf,  l'aii-c  lioniiciir  an 
viiiilanl  arlisic  sr  IronNcnt  à  Cdianlillv,  au  nius('('  (Idiidi'. 
Cr  son!  les  cifiuics  du'^iand  niaiti'c  Arthur  Goullicr. 
dAnnc  (II-  Monlinorency  à  vinyt-deux  ans,  de  Guillaume 
Gouffier.  dil  lîonnivet,  amiral  de  France,  du  sieui'  de 
Tournon,  de  Cliabannes  la  Palice,  de  Robert  de  la  ,Mar(d<  dit 
Fleurang-os.  d'Odet  de  Foix,  sieur  de  Lautrec  (1).  (les  leles 
valent  tonles  par  leur  dessin  signilicatif  et  animt'.  surtout 
(•(dles  d'Amie  de  .Montmorency  el  de  Guillaume  Gonllier, 
si  lariiemenl  construites.  Elles  ont  une  saveui"  de  ci-0(|uis 
el  une  robustesse  d  étude  consciencieusement  cherchée. 

Quant  aux  miniatui'es  attribuables  à  Jean,  elles  ornent 
uu  manuscril.  A/  (tuerre  (jaUiqut'^  aujourd  hui  à  la  Bibho- 
tliè(jue  nalionjde  (fonds  français,  n°  1342!))  ;  ce  sont  h's 
lejiroihu'lions,  ri'duites  au  diamètre  d  une  pièce  (h-  .'i  IV.. 
des  dessins  prc'cilés.  A  M.  Ileni-i  Bouchot,  le  mérite  d'avoir 
découvert  la  parfaite  ressemblance  de  ces  minuscules  eidu- 
minures  avec  les  cravons  de  (ihanlillv.  et  (h-  h's  a\(iir  res- 
tituées à  ('Jouet  le  [)èi'e.  Restitution  des  plus  plausibles, 
on  \\\  le  \(iir  (2). 

Jmi  eli'et,  ;i  r('po(|ue  oii  fui  ex(''cul('e  A/  (iitcrri'  (/(if/if/iic 
jionr  l'"ranc(»is  1'''.  en   Kjll),  notre  Jean  ('lail  en  |deine  |ios- 

(I)  Cus  di'.s.siii.s  l'aisaluiil  partie  de  la  ((illccliuii  de  Slall'oril  IIùuso, 
(|u'.\lbert  Lenoir  avait  composée  et  iiuc  le  duc  d'Aunialo  acliota,  on  1889. 
ci  hird  Cari  i  si  e. 

[i]  Il  y  a  d'autres  iidniatnics  dans  hi  Guerre  r/fillir/iie  :  des  scènes  cl 
des  l'cprésenlalions  d'en;,niis  de  j^ueiic  (le  sont  do  léfj;èros  prisaillos. 
presipie  des  SÔpiaS,  liMll  à  l'ail,  iialialos  ediiniH'  .1  riM  li^riMcid  el  riiiMlMi' 
exo'Ciiliun.  inconloslablomenl.  leur  auteur,  (judelrciy  le  lliillandai>,  lia  pu 
tracer  les  oxijuis  portraits  de  soiyui'urs. 


'u\\(:(i[s     ('.i.uiET.   —    llr.Niu    II     Miiiialiiifi. 
(Cabine!     des    Ksliimpcs.) 


LES  GLOUET.  35 

session  de  sou  métier,  el  il  n'avait  g"uère  au-dessus  île  lui 
que  Perréal  et  Boui-(licli()ii.  Or  la  t'aeture  des  médaillons 
en  (|uestion  dill'ère  sensiblenieni  de  (-(die  de  Hourdielion, 
plutôt  lourde  et  cliarg-ée  en  coiilcur:  d<'  pins,  (die  déeèle 
une  l'ermeli''  de  main,  une  \"irilil('',  (|ue  ne  devait  pas  a\oii", 
en  sa  vieillesse,  le  miniaturiste  des  ïfnn-fs  d'Anne  de 
liretag'ne.  On  ne  saurail  daMintage  soutenii-  (pic  celle  ma- 
nière soit  celle  de  Perréal,  et  parce  que  nous  ne  possé-dons 
aucune  œuvre  auliientiipie  de  ce  brasseur  de  lra\;iu.\.  et 
parce  que,  si  Ion  a  loul  lieu  de  croire  (pi'il  l'ul  nci-s»'  en 
divers  genres,  on  ne  lit  nulle  part  (|u'il  se  soit  atlirmi'  bon 
portraitiste  (1).  Au  contraire,  Jean  devint  c('lèbre  en  inlei- 
prétant  des  pbysionomies  :  onpeul  d'auiani  mieux  b'  re^ai'- 
der  connue  lauleur  des  dessins  d  On  l'urenl  liri'cs  les  mi- 
m'atm'es  de  (((  Guerre  (/a//ir/ii(\  (pi'enlre  ces  ci-avons  el 
ceux  de  son  (ils  François  on  i'(dè\('  ({'('Iroiles  .inim'h's.  |']| 
il  est  «''\  ideni  (|ue  les  mininlures  sont  de  l;i  ini^me  nmin 
(pie  ces  dessins,  les  mènu's  (pialih's  s  \   recomiaissanl . 

Sans  doute  rien  n Cmjtéidie  d'admelli'e  (pie  liiii  des 
Iteiiilres  iUiX(jU(ds  l''ran(;()is  P'  iidress;iil  xoloiiliei's  des 
commaiides  ail  v\v  capable  de  r('aliser  les  im'daillons  de 
/((  (liicrrc  (j<i//i(/U(\  mais  jtouripioi  le  idi  eTil-il  lail  app(d 
à  cet  ai'lisie  alors  (piuii  de  ses  peinli'cs  en  lilre  se  dislin- 
giiail  jusiemeni  par  les  plus  rares  dons  de  poilrail  isle  ".' 
N'élail-il  pas  iialiir(d.  au  coniraire.  (piil  conjii'il  à  son  IVmI. 


(I)  'l'oiili'lois  (III    III'    pi'iil    iliiulri'  iiii'il    ail    |iiirl  l'aihin'-.   l'iir    Irtiir    ilr   lui 

nous   a]5iin'iiil  ciu'i!    III    aiiv   ciayuiis  ilr  cnulciir   l'iiiiaj;i'  de  la   IVmiiic  ilii 

sccriMairi'     ilc  Mai^ncriti'     iJAulriclu'.    I.cltir    </r    l'rrriuil    ii    lluriiiii/it'r. 

8  octobre  IM  1.  Itililiulh.  iiatidiialr.  iiis.,  iiiiu\cliis  a(i|iii>ilii>iis,  ii"  I  1 1:2. 


:}6  LES   CLOU  ET. 

k  ce  iiiailrr  (|iii  connaissait  si  hicn  la  cour.  le  soin  de  lii:ii- 
rer  ses  cliers  seigneurs,  ses  preux  de  Mariguan  ?  En  loul 
cas,  ces  efrigies  soni  dun  bel  artiste.  Très  sinipleincnl  ]iro- 
(ilées  sur  un  fond  outremei-.  dont  le  (on  met  en  valeui-  les 
linesses  des  chairs,  elles  produisent  un  excellent  elle!  pai' 
leur  structure  intelligente  et  leur  intense  vie.  Linteipr-' 
tation  ])icturale  en  est  large,  nette,  IVanclie  :  Tensendile 
très  sobre,  car  on  n'entrevoit  qu'une  faible  partie  des  cos- 
tumes, tous  à  dominante  sombre.  Ijinlérèt  se  concentre 
d'autant  mieux  sur  les  visages,  et  Ton  doit  s'en  réjouii'. 


lY 


S(»N   Aivr. 

11  se  peut  que.  |>armi  les  crayons  de  Clianlilly.  il  y  ail 
d'autres  tiMes  de  (llouet  (|iie  cidles  des  compagnons  de 
l''rancois  l"''.  Certains  portraits  d  aiiteui's  inconiuis  sont 
assez  artistemeid  tracés  pcuii-  (pi  on  les  suppose  du  niaiti-e. 
Toutefois  il  faudi'ait  (b's  arguments  jdus  indiscutai)les 
pour  ('lablir  des  conjectures  en  sa  laveur.  puis(pril  eut. 
autour  de  lui.  maints  confrères  caj)al)les  de  bien  ('crire 
une  pliN  sionomie.  Muant  au  rici/fard  (\y\  Lou\  re.  bnig- 
|(MUps  (dass('',  sans  motil  solide,  au  nombi'e  de  ses 
(cuvres,  c'est  un  crayon  très  oi'dniaire  oi'i  rien  iriiiili(pie 
le  poi'traitiste  de  prennCr  |dan. 

11  se  pourrait  aussi  (pie  Jean  lut  I  aiileiii'  du  p(»rlrai( 
|»r('siimt'  de  (Jaude  d  rrr(''.  aujoiird  liiii  au  roi  i'jlouard  \  II. 


LES  CLOU  ET.  37 

dr  Vllenri  d'AIhret  (vers  1535),  à  M.  G.  de  Montbrison, 
(If  la  Catherine  de  Médicis  (1540)  du  musée  de  Versailles, 
de  la  Charlotte  de  France  enfant,  acquise  par  MM.  Ag-new, 
de  Londres,  et  île  ce  petit  Daupiiin  du  musée  d'Anvers  dont 
on  a  longtemps  honoré  Corneille  de  Lyon.  Mais  il  paraît 
douteux  qu'il  ait  fait  le  François  1'''  en  Saint  Jean-Bapfisfc 
de  M.  P.  fïordoii  Smitl». 

L'iiypotliéti({ut'  yWrfé  se  rapproche  fort,  par  la  facture, 
des  deux  Montniorenrij  auxquels  il  serait  postérieur:  au 
contraire,  le  grand-père  de  Hciiii  IN'  et  surtout  l'épouse 
(le  fleuri  11  s'en  édoignent,  ce  (jui  s'explicjiK'  beaucoup  par 
la  différence  d'âge  et  de  complexion  des  portraiturés.  Une 
jeune  femme  déjà  gi-asse  comme  r('lait  Catherine,  en  154(1. 
ne  pouvait  être  interprétt'c  de  la  nuMue  maiiit'ic  (jii  un 
vieillard  desséché  (l).Pourles  deux  «'niants  (2).  ilesl  lorl  dif- 
licile  <i  ('tal)lir  wnr  conjectur-e,  siiiloul  pour  le  Diuipliin  dont 
nous  ne  connaissons  menu?  [)as  sùremeni  ridenlili'.  Nous 
prt'senle-l-il  les  Irailsde  François  II  qui  natjuil  en  l."')ii  ou 
ceux  de  h'rançois.  [)reniier  lils  de  François  l"  el  de  Claude 


(1)  [.(■  ]inrli;iit  ci';!  \  nriiii'  d'iiin-rs  li'i|U('l  a  l'It'  l'ail  Ir  lalilcim  ilc  N'crsaillos 
li;;illi'  ail  iiiiisi'r  t'iiii(l(''  siius  le  liiiiii  ili>  .Miiii>  il  .\llil\r;  Ir  dessin  iMl  est 
toul  juste  sullisaMl,  mais  il  livre  liieii  les  signes  earaeirTi>li(iiies  de 
Catlieriiie.  I.e  piirtrail  peint  est  inleiieiii'  à  celui  d'Henri  d  Alliiel. 

(2)  Le  porliail  |)eiMl  de  la  lillelle  e>t  expressif,  l'il  des--ili  du  niliséo  Condl' 
ijui  la  i-eprôsonle  au  niènio  à;j;e  ni>  ])ariul  |ias  ('die  de  Jean  C.loiiet,  ni- 
serait-ce  cjiie  i)ai'cc  i\u('  la  lèvre  supérieure  évoque  par  trop  une  laini!  de 
couteau.  On  ne  peut  adiiielire  ijue  l'artiste  capai)le.  en  l.'ilil.  de  li'acer  les 
iii('daill(iii>  de  la  (liicrfc  '/(i/li(iiii'  ail  si  pau\  iciik'II  I  dessiin''  une  tête 
\ers  15154,  date  ap|ii(i\iniati\e  de  ce  ciayiui  de  la  piesunn-e  Jeanne. 
I"ll  si  c'e.sL  une  copie  d'un  dessin  du  niaiire,  elle  laisse  cerlaiiienieni 
iieaucniiii  à  di'sirer. 


^8  LES  CLOU  ET. 

(le  France,  (jui,  nv  on  151  S.  (l('C('(la  on  153G  '?  Si  ce  poil  rail 
(lo  garçonnet  représento  Fran^-ois  11,  il  n"osl  ('vidoiiiimiil 
pas  de  Jean,  mort  avani  la  naissance  de  ce  princo.  Pour 
surcroît  de  difïicultos,  ces  images  d'enfants  ne  sont  pas  de 
oclles  à  (|ai  l'exécution  tient  lieu  do  signaturo  (  I  ). 

Plusieurs  arlislos  do  la  proniièro  moitié  do  noti-o  \m'  siècle 
('■laient  en  état  de  l'i'alisor  di'  tfdlos  peintures,  et  aussi  los 
autres  portraits  exliilx's,  on  [\)()i,  commo  atti'il)ual)l<>s  au 
maître,  à  l'exposition  dos  Primitifs franoais.  l'orco  pointi'os 
du  temps  do  Jean  usaioiil  d'un  miUior  analogue  au  sien, 
ol  leur  personnalité  no  se  manifestait  poiid  ])ar  des  signes 
li'î'S  sensibles;  à  pi'i'senl,  ils  nous  tVaj>penl  surtout  parleur 
ail'  de  famille.  (•(»iiime  leurs  porlraiturt's  jiar  leur 
type  d  op()(|ue.  f^os  points  de  comparaison  nous  iiian(|uoiil 
pour  discerner  les  nuances  (|ui  les  dislinguaioiil  ol  ris(|uoi' 
des  attrihulions  on  nous  basant  sur'  la  seule  lecbni(|ue  de 
leurs  oeuvres.  (Test  aux  scrutateurs  daicliix-os.  aux  ('lu- 
dils  de  rbisloii'o  de  l'art,  (|U  il  appai'lioni  d  aiillioiili(|iier 
los  peintures  dos  inconnus. 

Parmi  celles-ci,  plusieurs  sont  [loul-ètro  bien  du  ïvvyr  de 
Jean,  col  artiste  doni  on  sait  seulemeni  (pi  il  lut  aux  g^ag'os 
de  Marguerite  d  Angoulèmo.  so-ur  de  hraïK-ois  I'.  el  (|uo, 
pour  celle  raison,  on  noiiimo  (Jouel  de  .Na\arre.  .Mais 
coninieiil  \  (■rilior  sa  fa  cl  lire  (  pu.  I  rès  probablemeiil .  eiil  lorce 
analogies  iwvc  celle  de  son  illustre  frère,  ;i  (piels  signes  vv- 


(1)  LiMili  lie  |„i  lidi'ili'  priisilil  i{lli'  .1.  (llullcl  ,l\;iil  |Mirl  |-,iilllli'  le  |irlil 
ilaui)liiii  murl  rn  |.'i:!l)  ri  (|iic  son  lil>  l''raiicins  ;i\;iit  Ciil,  |Miiir  j-'iaïu'ui^  l''\ 
lllir   ic]|ii('   lie   ceUe  (l'iivrr. 


LES   CLOU  ET.  39 

connaître  ses  travaux?  C'ost  sans  motif  peromptoire  (|u"on 
lui  altribuc  le  Saint  Gelais  du  Louvre,  bon  portrait  aux 
tonalités  un  peu  plus  chargées  en  rouge  que  celles  de  Jean 
et  de  François,  à  la  barbe  lécliëe  méticuleusement,  aux 
détails  très  poussas.  Le  billet  qui  l'exhume  ilc  lOui)!!  ne 
nous  apprend  rien  sur  son  ait,  rien  sur  sa  psychologie. 
ses  sentiments  d'artiste.  Le  voici  : 

A  monsieur  le  chancelier  d'Alenron, 

Monsieur  le  clianeelier,  le  Roy  de  Navarre  et  inoy  avons  délibéré 
prendre  le  peintre,  frère  de  Jeannet,  peintre  du  Roy,  à  notre  service  (1); 
et  luy  baille  le  dirt  seigneur  eent  livres  sur  son  estât  et  luoy  cent.  Et 
pour  ce  que  nous  avons  nécessairement  à  faire  de  luy,  pour  quidipic 
chose  que  nous  voulons  faire,  je  vous  prie  incontinent  le  nous  envoyer 
et  qu'il  soit  icy  lundy,  pour  le  plus  tard,  et  vous  prie  luy  faire  délivrer 
quelijue  argent  pour  idiiiniciiccr,  jiour  luy  donner  couraige  di'  bien 
besongner. 

Priant  Dieu,  monsieur  le  clianeelier.  vous  avoir  en  sa  sainte  gardr 
à  Fontainebleau  le  XX''  jour  de  juillet. 

Votre  bonne  maîtresse, 
MAnocEiirrE  (2). 

C'est  beaucoup  cl  c'est  peu.  Attendons  j)aliemuienl  la 
d('Couverte  d  un  nouveau  documcni.  L<'S  archives  nOiil 
pas  li\'rt'  lous  h'iirs  sccn-ls,  b's  lettres  réserNcnt  iiiaiiilcs 
surprises.  Mais  tant  (|Lie  nous  n'aui'oiis  pas  une  agnsdilc 
aubaine,  abslcnoiis-uons  de  iv'b'rcr  au  uivsh-rirux  iicmlrc 
d(!  iVargu<Til('  de  .Na\arre  ce  (|ui  pourrait  ajipaili'nir  à 
(|uel(pi('  autre.    A  (|U(>i   bon  Nouloir  loujom's  a|ipli(pn'r  un 

|l)  A  r('lMii|lU'  ni'i  cr  lidli'l  lui  iM-rit.  t-'esl  hiru  Je;Ul,  rapprliUls-le.  qui 
élail  |iiiuln'  du  roi.   I''r.i  urois  avilit   huit  au  plus  IrtMZO  ans. 

{'2)  Uelti'  Icllri'  ol  dater  de  l.'iiVI  :  clic  sr  Irouvr  dans  le  uiauil><ii| 
di'  l!(''tliuni'.  Mil.  ;iucii'U  S.'ilCi,  loi.  ;î. 


^0  LES   CLOUKT. 

iKnn  sous  iiii livre?  1-ji  (lr\  icul-illr  iiiiill('ui-c  ?  Ouf  les 

t'spiils  aflinés  cessent  donc  i\r  h  i>(  r  -^ur  les  noms  des  au- 
li'Uis  leur  adinii'alion  pour  les  reuvrcs:  iir  jias  aimer  ces 
dfi'iiirics  jiour  leurs  tjualih'-s  nn-iiies-  c'est  nv  f)as  eom- 
pri'ndii'  I  ai't. 

Jean  (.Iducl.  iKius  ui'ii  saurioiiv  .Imilcr.  t'-lail  trèscstiuit- 
de  ses  c-oiilriiiporaiii>.  ;i  rau.sf  de  la  hclK'  siucérilé  de  sa  jiein- 
lure  cl  de  sa  pi'nétranliMnt('i-pr('fatioii  des  cai'acti'-rrs  indivi- 
duels. Les  eloii'es  dunt  (Hi  I  eii\ cloppa  pendant  sa  \  h'  et  après 
sa  moil  ne  provenaient  pasd  un  eniiouement passager,  mais 
de  laililection  (jue  lepublic  a  toujours  ressentie  pour  les  jjor- 
trails  ressemblants.  A  la  \  ille  connue  à  la  cour,  on  le  salua 
niaili'e  pai'ce  (jue  les  t \  pes  écrits  de  sa  main  •'•taieni  aduu- 
ralileinenl  recdiniaissaldes.  Les  rares  œuvres  (|ue  Ton  a 
l'uil  dniil  de  i-eiiarder  t'ounne  siennes  sullisent  ]miui- pitiu- 
\cr  sa  maîtrise  et  justilier  sa  l'eiKiiiiint'e.  Leur  >tiufture 
prorlanie  que,  s  il  s  arrêtait  volontiers  aux  minuties,  il 
savait  à  lOccasion  rnnfiiiui'f'r  les  formes  avec  ampleur: 
leurs  tonalilt's  t«'moii;niiil  ([iie.  s  il  axait  la  vision  sobre  et 
le  goût  des  neutres,  c  était  un  harmoniste  didicat  et  un 
l'jiris  de  cbairs  lumineuses.  Si  la  carnation  des  Montmo- 
reiKN  |ir('-seiite  un  aspect  saur»-,  c  est  moins  parce  (jue  c'est 
celle  d  un  \ieillaril  au  teint  terreux  ipie  jiarce  (jue  ses 
jaunes  et  ses  bruns  ont  souH'erl  de  laclion  des  âges.  .Mais. 
dans  les  i;ammes  on  dominent  les  oramrés  cbaiiiels.  dans 
le  h  iii  ii<;i)is  I  \  comme  dans  les  médaillons  de  la  (iurrrr 
(jiilhqui'.  les  \isag«'s  sont  l'estes  (daiis.  Ceux  des  seigneurs, 
à  peine  altiMi-s.  (diaiMueiit  |iai-  leur  e\ipiise  IVai(  lieiir.   leur 


UXNCllIS     (".l.olKT.      —       MuiVMl.      I>l      \    Il    lIlliiN       |)l'>>ill 

(Caliiiift  lies    l!slaiii|"'s.) 


LES   CLOU  ET.  43 

Iransparence;  fait  pni  commun  dans  les  miniatures,  ils 
causent  une  impression  d'atiuarelle.  El  ces  chairs  nuan- 
cées avec  une  suhtilitt'  donl.  seul,  Fouquct  avait  donné 
des  exemples  (1),  s'orchestrent  à  merveille  avec  les  gris 
et  les  noirs  linement  comhinés  dans  les  costumes.  Celui 
(|ui  a  construit  et  \  ivilit'  cesefhgics,  et  les  dessins  de  Chan- 
tilly et  les  Montmoi'encv.  celui-l<à  mérite  sans  conteste  le 
liti'e  d  artiste  sup('i"i('ui'. 

Jean  Clouet  appai'ail  dCspril  llamand  par  sa  Iciidaiice  à 
relever  scrupuleusement  les  minuties.. 'i  respccltr  les  sifines 
particuliers  :  mais,  par  sa  manière  à  la  l'ois  lai'ge  et  dili- 
g'ente  d'accuser  les  formes  quand  il  dessiiiail  sur  j)apier  ou 
de  bâtir  les  plans  d'une  face  (juand  il  jx'ignait,  il  se  rat- 
tache à  notre  race.  Je  ne  serais  pas  étonné  si  Ion  décou- 
vrait un  jour  (|u  il  iiil  de  ces  artisles  ('tranj^ers  dont  la 
formation  s'acheva  chez  nous  (2). 

11  V  a  toujours  eu  maintes  alliiiih'S  eiilre  les  lils  de  la 
France  septenti'ioiiale  et  les  nordiijues  des  l-'lamlres.  de  la 
Wallonnie  el  des  pays  rlnMians.  Un  peintre  on  un  sculp- 
leur  venant  de  ces  ri-uions.  sous  Charles  \'lll  ou  Louis  XII. 
n'était  pas  dépaysé  à  Paris;  en  i:('ii('ral.  il  s"\  allinaiL  el.  s  il 
e.xercail  ensuile  une  inlltience  elle/,  nous,  c  ('lail  pour  noire 
plus  grand  bien.  Les  nord  icpies.  a\'e<'  leur  |U(''occu  pal  ion  con- 
slanle  de  xi-rih',  leur  esj)iil  d'ohserN  aliiui  louj(uns  en  é'\eil. 

(I)    Diiiis    i|ii('li|iii's    |)aysa^n's    t\r>    llciufs    il  l'.liriiiii'    Clnxalici'   imiixi' 

('.(Il  H  II'). 

[•2]  De  liés  iioniii'  liciiri',  force  iii)i(lii|iii's  \inrenl  eompli'tei- leiii's  l'-Unles 
irailistc  aii|)i(''s  île  nos  iiiailres;  tels,  au  xn""  siècle,  Jaciiues  (loene  «le 
Uriii^i's,  llainci'lin  ilc  Mai:ih'iiau,  l'ul  ijr  l.iiiiliniii^  cl   ses  IVt'res. 


44  LES   CLOU  ET. 

maintenaient  nos  artistes  dans  la  saine  inlt'ijirt'latioii  des 
êtres  et  des  choses.  Nos  sculpteurs  du  w"  sirclc  duii'iil 
beaucoup  à  Clans  Sluter  (|iii.  kii-inème,  dt'\ail  liés  pro- 
bablement quel(|ue  ciiose  à  nos  imagiers  du  \i\' :  nos 
peintres  des  aimées  13(10  furent  sans  doute  aussi  rede\a- 
])les  —  les  ouvraii'es  manqueul.  liidas  !  ](0ui'  s  en  i-ciidre 
compte  —  à  Beauneveu  et  à  Jehan  Bandolf.  Icscjucds  n'au- 
raient peut-être  pas  développé  si  bien  leurs  dons  sans  nos 
«  paingneurs  »  de  l'ère  des  g"randcs  catbédrales.  Fou({uet 
ne  pei'dit  rien  de  si's  (|ualit('s  etbni(jues  pour  avoii'  eu 
un  maître  llauiaud,  Jean  Clouet  n'aurait  pu  que  gag'nei- 
aux  conseils  d^un  continuateui-  di'  notre  illustre  Touran- 
g<^au.  Il  convient  (jue.  deteni|»s  en  temps,  une  race  reçoive 
d'une  autre  race  sœur,  un  afflux  de  sève,  les  élénu'nts  d  un 
renoLiNeau  artisinpie.  Le  rôle  des  ajjp(jrts  adventices  est 
aussi  nécessaire  à  r<'\olution  iluii  art  (juà  sa  formation. 
Unt;  grande  loi  d  imiverselle  fraternitc'  se  manifeste  par 
ces  «'chanires  enli'e  peujdes.  en  ih'qjit  des  bari'ières  g('oi2'ra- 
phi(|ues  ou  p()nii(|nes.  et  il  faut  s'en  f('liciler.  Li's  apports 
(pi  mie  i-ace  accepte  du  dejioi's  ne  hn  de\  lenneni  funestes 
(pie  si  ses  teiilali\t's  pour  se  les  assimiler  sont  illogi(jue- 
iiieiil  dirigées. 


FllA.NÇOIS    Cl.orKl'.     SA     VIK. 

l'^raniMiis  Chiuel   naipiil  à  Tours  :  et .  si  l'on  iu  nore  encoi-e 
la   date  e\acle  de    sa    naissance,    au    iiKiins    iieul-on    I  iiidi- 


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Koberf  ^»../4Miurck,  Dut  fà^oin'/i, 


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n-    .»//Jtr»v/.//  <t'i  jFrotifc ■  <•  Il  iS-,>r    ',i\\ 


F  K.\  N  CO  I  s    (1  1.0  U  KT. 


15  OH  LUI     m:  I. A    .Mviu.K,    l)i  (     m:   lloi  u.i.on 
(Dessin^. 

(daliiiii'l   (1rs    l'Isl.iiiiiK'sJ 


LES   CLOU  ET.  47 

quer  approxiniativeinent  d'après  cellf  de  sa  mort,  dont  on 
est  sûr.  Ayant  trépasse  le  22  septembre  lo72.  il  a  dû  venir 
au  monde  vers  l.'iKi:  car,  en  l'iiU.  un  uiaïuiscrit  le 
prouve  (1),  il  remplaça  son  père  dans  sa  charge  de  peintre 
du  roi.  aux  mêmes  liages  et  prérogalix es  :  or.  (|uoique  fils 
d  ini  maiire  bien  en  cour  «'I  lui-même  s\  nipatlii(jue  au 
monar(jue,  eùl-il  éh'  iuNcsli  de  celle  sorle  duiu'  telle  l'onc- 
tion, s'il  n'avait  eu  plus  de  vingt  ans? 

Formé  par  son  j)ère  doni  il  possédail  toules  les  (|iialilt's, 
François  s'aflii-ma  ti'ès  vile  caractériste  insigne;  et  lOu 
reporta  sur  lui  toute  l'estime  dont  on  avait  env(do|)pë  Jean. 
La  cour  lui  prodigua  ses  i'axcurs:  les  poètes,  Koiisaid  i  ii 
tète,  l'auréolèrent  de  louanges.  Le  roi  Irouxail  (|iir  Ir 
jeune  artiste  marchait  déjà  très  bien  sur  les  (races  de  son 
regretté  Janet  et  caressait  l'espoir  (piil  le  dépasserait:  il  le 
(b'clara  nellenieni  dans  son  acte  de  donation  signalé'  [)lus 
haut  et  lui  octroya  des  letties  de  naturalisation.  De  l'iiO 
à  l.")4(l,  François  resta  le  seul  peintre  du  roi:  il  eut  ensuite 
à  ses  côtés  un  artiste  fort  inti'ressant.  (jiie  ses  portraits 
en  émail  classent  painii  les  bons  interprètes  de  phvsiono- 
mies  :  Léonard  l^imosin. 

Ou.iud  mourut  François  I".  en  l.'iiT.  ce  l'ut  noire  Clouet 
(jui  prit,  h  Rand)ouillel,  rempreinle  de  la  l'.ice  du  feu  roi. 
Api'ès  en  avoir  l'ail  aussi  mi  estampage  et  ime  ('tude  dessi- 
iK'e,  il  alla  coid'ect  lonner  le  moulage  à  l*aris.  et.  connue  le 
temps  j)ressail,  il  passa  plusieuis  nuits  a\ec  ses  auxiliaires 

(I)  l!ilili{iMii'i|Mr  n.iliniialc.  iiis.  l'iaiirais.  l'IioO.  Dès  l."»'»ll.  Fi'anrcii.s  Clourl 

rcriil  :il(i  livres  cniiimi'  ^'ai;i's  aiiiiui'ls. 


iH  LES   CLOU  ET. 

pour  iiiciicr  il  bien  celle  l)es()i;iie  assez  delicale.  Il  saisissait 
(le  donner  lilliision  du  cadavre  royal  au  moyen  dini  inan- 
niMjuin  coslunx'  el  d  un  Imste  en  ciic  colorit'e.  aïKjuel  on 
a|i[di(juail.  en  se  servaid  de  mastic,  une  cheNclure  et  une 
barlje  postiches,  (l'est  ce  que  Ton  a])[)elait  une  repr«'sen- 
talion  funéraire.  Notre  artiste  ('dalilit  le  l)uste  en  londe 
Ijosse  a\('C  de  la  (erre  à  potier,  d'après  son  propre  mou- 
lage, puis  il  en  surveilla  l'exécution  en  ciie.  11  moula  el 
modela  de  même  les  mains  dans  deux  poses  diverses,  les 
unes  jointes  pour  ser\  ii-  pendant  l'exposition  de  l'effigie, 
les  autres  «  clozes  »  de  manière  à  tenir  le  scej)lre  el  la 
main  de  justice  au  cours  des  cérémonies  i'unèbi'es.  Quant 
à  la  carcasse  d'osier  que  l'on  devait  recouvrir  du  costume 
royal  et  qu'il  fallait,  par  consé(|uenl,  jn-opoilionner  comme 
le  gisani,  un  ou\rier  l'apjjréta  sous  la  direction  du  jeune 
maître,  (iclui-ci  fut  aussi  chargé'  de  peindre  les  molifs  d('- 
coralils  des  ohsèijues  ainsi  (|ue  les  llc'Ui's  de  lis  des  ban- 
nières et  des  enseignes  destinées  aux  genlilsbonnnes,  aux 
ar(diers  de  la  gai'de  ef  aux  Suisses.  Ces  traxaux  reniraieni 
dans  les  altribulions  des  peintres  de  nos  l'ois  (  I  ). 

Henri  II  n'eut  garde  de  se  pri\cr  des  services  d'un  ai't  iste 
tel  «pie  François  Clouet,  il  le  maintint  dans  ses  préroga- 
tives et  lui  adjoig'nille  peintre  (luillaume  Jîoulelou.  liienh'it 


(1)  Ces  peintres,  coiiinir  Imis  iimix  (|ui  i';ii>;iiriil  ii.nlic  de  l,i  iiiaisun 
royale,  portaient  le  deuil  des  nionan|ues  déi'uiils.  On  Irm  ildiuLiil  ICldlle 
nécessaire.  A  la  mort  de  François  I'"",  notre  Clouet  rcriit  six  auiie>  et  liciuie 
de  drap  nuira  4  livres  l'aune.  Ms.  Cluirumbaull.  ll'lf).  fol.  fiO.  Diiix  ans 
anii.ir.i  \  .iiil .  il  a\ait  l'Ii'  cliarj^c  di'  la  |miiii|m>  t'inirlirc  du  |Mdil  due 
d'(  iili'ans. 


..Sp^A 


ri^6 


l'KANcnm    (',i,((t'r.i.    —    l'K  \  m;o  1  Si:    IIauiii     m     \.\    lîm  kka  i  si  i  iir 

Il  \  M  i:    I»' 1"^  s  I  ni.ES   (Dessin). 

(daliiiii'l   (li's  l'",st;im|M's.) 


LES   CLOU  ET.  SI 

apr<''s  il  manifesta  combion  il  pi'isait  l'cMiiinont  protraitu- 
reur;  en  l.j:il.  il  le  gralilia  (runc  charge  de  coininissaire 
au  Chàtelet  (1). 

Le  iiiaiire  ii  en  continuait  pas  moins,  selon  la  tradition, 
d'exécuter  des  travaux  doi'dre  dficoratif.  Une  quittance 
nous  apprend  (ju  au  di'hut  de  l'année  15o0  il  avait  peint 
les  devises  et  les  croissants  laces  du  l'ol  sur  le  coffre  d'un 
chariot  htvinslant  t"abri(|ué  par  Francis(jue  de  Garpy,  me- 
nuisier italien  établi  à  Pai'is.  Les  comptes  nous  informent 
(ju'en  juillet  1559  il  organisa  les  obsècjues  et  les  pompes 
funèbres  de  Henri  11,  répétant  pour  ce  roi  ce  qu'il  avait 
fait  pour  son  prédt-cesseur.  A  partir  du  règne  de  Fran- 
çois 11,  sa  situation  devint  magnilique;  on  ne  se  lassait 
|)oinf  (b'  sa  manière  (|ui,  d'ailleurs,  n-pondail  à  merveille 
au  gont  français  el  mil  rival  ne  lui  portait  ombrage.  C'est 
envelopjK' d "homu'ur  et  de  gloire  (|u"il  rendit  l'âme  (2). 

La  veiHe  de  sa  mort,  le  21  se|(l<MMbre  l."i72,  il  avait  l'ail 
son  leslamenl  en  ]»i'('seiice  du  rwvr  Av  Saint-Mei'ry,  sa  pa- 
roisse: il  b'guait  I2n0li\i-es  ;i  ses  deux  (illes  naturelles, 
Diane  <•!  Lucrèce,  el  une  renie  de  (iOO  li\res  surl'lK'tlel  de 
\ille  à  sa  Sd'ur   t'allierme.   ('pousc  d  Abel    l''()id(iii.  ('<(dle-ci 

(Il  l!ii)Ii(i(lir(|ti('  niiliiiii.ili',  luiids  français,  ;>1:28,  ji.  .•)'.).  (les  cliai'irps  venais 
élaicnl  octroviMss  coiniiir  iccompi'uscs  et  se  i'ev<'ii(laienl  ;  Fiani;ois  céda 
la  sienne  à  nii  certain  J.  l'auimiei'. 

(2)  A  une  ('pociue  encore  inconnue  il  avait  élc  ai)|i(li'  au  conlrùlo 
j;(''iH'Mal  (les  clligies  de  la  Monnaie.  S'il  iiCul  jias  la  cliaif^e  uiènie  de 
conliùli'ur.  il  est  ceilain  ([u'il  en  reiii|iliL  les  fonctions,  car  on  sait  iju'il 
lui  iiiaiide.  le  il  dceeiidiic  l."l(i'.l,  il  la  V.imv  des  Monnaies,  inmi'  éruettro  son 
avis  sur  la  valeur  d'un  nou\eau  iinimiin  à  relli;,'ie  de  (lliarles  l\,  que 
vi'uail  de  i,'i'a\er  Claude  île  lléfv. 


52  LES  CLOU  ET. 

revendiqua  la  succession  de  son  frèic  et  ohliiil  les  autres 
biens  :  une  maison  de  i  apjMiil.  rue  Saint-Avoye,  celle 
HK'nie  diuis  laquidlc  il  mourut,  et  quelques  arpents  boisés 
dans  la  loi-rl  d'Urlrans  (  1  ). 

Le  dernier  compte  relatif  à  Fj-ançois  date  de  I.jTO;  il 
nous  fait  savoir  (|ue.  raiiiK'e  même  on  il  ])ortraitura  si 
splendidement  Fnmyois  de  Coli^ny  el  si  précieusement  le 
C/mrh'y.  /X  destiné  à  l;i  cour  de  Vienne,  le  maître  peiiinil 
aussi  des  bannières. 

VI 

SES    POUTRArrS    TKINTS    El'    SES    MIMATLHES. 

Force  portrails.  peints  et  dessinés. ont  éli' naguère  ail ri- 
bués  à  Fran(;ois  Clouet  simplemeni  jtarce  (ju  ils  reprt'sen- 
laient  avec  beaucoup  de  soin  des  ])ersonnaiies  du  wi'  siè- 
cle. En  l'éalih'.  il  v  a  liieii  une  soixanlaine  de  dessins,  au 
Cabinet  des  Eslamj)es,  au  Louxre  el  au  imisée  Coudé,  donl 
loni  pei-niel  de  le  direlauleur;  maison  ne  peut  consid('rer 
comme  si<'nnes  (pie  1res  peu  de  peinhires.  Ce  son!  les  por- 
I  rails  (■(|ile^ll•es  de  François  l'''  (IJffizi.  j-'lorence)  cl  de 
lleiiii  II  (clie/  MM.  Law ne.  I^ondres).  les  pdrliails  sur 
|)amieaii\  de   l'"rancois  de   (luise    (L()u^•re).  de    Charles    l\ 


(1)  La  maison  do  François,  dilc  ilii  rli,i]iili'an.  piiyait  un  cons,  on  raison 
(lo  sa  silualion,  à  la  coniniandriir  du  '!'i'ni|)lr.  l'n  ai-lr  consorxi''  aux 
.Vroliivos  nati(jnaii'S  (S.  50Co)  inuis  a|i|iiL'nil  i|u  il  la  iinsMilail  au  nniiii^ 
(lo|)uis  loTI. 


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V  u  AN  (-.(Il  S   (".  i.or  i:  I. 


.    Cl  V    i.r  Kaik,    sii:i  11    lu:  I'ihuac  ^Dossin) 

^C;ibiurl    lies  EsUiinpos.) 


LES  GLOUET.  55 

(iniisec  (le  Vienne  ci  Louvre),  d'Elisabetli  dAiili-ielie 
(Louvre):  1rs  })orlrails  en  niinialine  de  Henri  11  (Cabiiiel 
des  Estampes),  de  Caliieriue  df»  Médieis  et  de  Charles  IX 
(Trésor  impérial  de  Vienne i  et  de  Marie  Stuai-t  (eolleclion 
de  Windsor). 

Tous  ces  portraits  de  François  valent  par  leur  structure 
comme  par  ieni-  r('alisation  picturale,  et  chacun  d'eux  lixe 
avec  rectitude  des  caractères  moraux,  une  individualité. 

François  1",  sui-  son  portrait  é([uestre,  paraît  trente 
ans  enviion  ;  en  vérité,  il  a  <'lé  exécuté  aux  dernières  an- 
nées du  roi,  entre  l'iil  et  l'ji.'j.  C'est  une  liuuration  stvli- 
sée  el,  pour  la  face,  idéalisée  en  un  âge  dt,'  pleine  robus- 
tesse. Les  galbes  en  sont  d'un  dessin  quelque  peu  sec,  et 
leui- facture  précieuse  ne  les  dt'r;ii(lit  guère,  mais  ellea  grand 
air  et  sa  silhouette  engendre  un  heureux  etfet  décoratif. 
L'harmonie  des  teintes  enestfine,  les  rouges  carminés  s'('- 
panouissent  agréablement  sur  la  tunicjue  du  cavalier  el  h' 
ca|)araçon  du  destrier.  A  une  épO(jue  inconnue,  cette  œuvre 
passa  dans  la  galerie  de  Mesmes,  où  Gaignières  la  lil  copieL'. 
coiiNaincii,  comme  son  possesseur,  (pu*  François  l'axai! 
|ieinle  (  I  ).  Or,  (laignièi'es  a  laissé  le  renom  d  un  collec- 
lionneur  très  avei-ti.  circonspect  non  moins  (pie  rairnu-. 
h>l-ce  TdMivre  ac(piise  pai'  de  AFesmes  (pii  se  trouve  main- 
lenanl  aux  Uilizi  ?  On  en  [leul  (h)uier.  car  c  (-lail  là  une 
l-ep|-('senlalion  oflicielle  el  Ton  en  demanda  plusieurs  r(''pli- 
(pies    au     niallre.    Les    l'"lorenlins    ne    possèdeiil    peiil-t'lre 

(1)  (li'llc  copir  se  tiiiusc  aiijnunriHii  .m  Ciiliiiirl  dos   i']stain|ics,  (),i  |(i, 
fui.  li  (lU'c'ucil  GaigiiiéiTs). 


56  LES  rj;OUKT. 

(|ii  une  r(''|»(''lili()ri,  mais  l'ieu  iiCiiiprclic  de  la  cioiic  de 
François,  j)uis(|ue  1rs  ai'lisics  les  plus  gi-aixls  cllcctiiaiciil 
de  tels  doubles.  11  leur  fallait  Iréquernnient  re[»roduir('  cer- 
taines effigies,  les  hauts  personnages  ayant,  en  mainte 
circonstance,  besoin  de  plusieurs  exemplaires  de  leur 
image.  Le  Louvre  conserve  encore  une  autre  réj)li(jur.  — 
en  miniature  C(dle-là,  —  du  poi'trait  equesti'e  de  Fi-an- 
çois  L'';  elle  se  recommande  par  assez  de  grâce  et  de  soli- 
dité pour  (|ue  1  on  se  sente  entraîn*'  à  l'accorder  au  mailic. 
Assurément,  elle  dérive  dun  gentil  miniaturiste. 

Le  portrait  équestre  de  Henri  H  semble  avoir  l'I»'  rid(|U('' 
sur  le  François  l""  dont  il  vient  d'èlic  (juestion:  il  en  a 
tout  le  caractère,  les  mêmes  qualités  et  les  mêmes  d('l'auls. 
(iOnstruit  d'après  des  docunuMils  et  brosse'"  non  sans  crà- 
nerie,  vers  1559,  c'est  une  grande  image  sècbe  el  jjuIs- 
sante.  Jodelle  signale  un  Henri  H  représentt'  à  cbeAal.  en 
triomphateur,  par  notre  Clouet,  sous  une  sorte  de  |)(ir- 
tique  (1).  On  ne  saurai!  dii'e  si  le  porlraii  pai-Ncnii 
jusqu  à  nous  i-t'jjèle  cette  peint  ui'e.  aujoui'd  hui  pei'due. 
ou  l)ien  un  auti'e  original.  Ia\  joui  cas,  il  porte  nette- 
ment la  inai(|ue  de  François  [2]. 

Ce  genre  de  [toriraiture,  (lù  la  ri'-alil»'  se  niide  à  la  con- 
venliou.  ra|»pelle  ces  anti(|ues  images  de  m(»nar(|ues  t'gvp- 
lieus  el  assyi'iens   <|ue  Ton  construisail  d  après  un  canon. 

(Il  .Indclli'.  HeciU'il  (/('.s-  iitscfijiliolis,  fii/iirrs  cl  indsqiKtriidvs  ordoniircs 
en,  r/iiilcl  de  ville  de  l'iiris,  le  jeudi  11  de  jrrv'u-v  l'i'i,s\  l'aris.  Wci'krl, 
1:jo8,  in-4",  fol.  [V.i. 

(2)  On  n'en  jimil  dire  aulantdc  l,i  n'iilhiin'  en  iniiii^iliii  c  ilr  ir  llriiii  II 
(juo  conscrvu  1<;  imiséu  Coiiili'. 


./■" 


u,ï^^.  -•^'' 


Ixrxa.t 


•^ynirut^ 


(C,ii,in,.(,  dos   Ks(, 


iiii|i|.> 


'      "'•     •'^"NV.         lUss 


111 


LES  CLOUET.  59 

('/<'st  le  iiK^'iiic  syslriiie  porfcclioniK'.  CJir/  nous  coimne 
en  UrieiiL  on  visait  à  rendre  le  portrait  plus  royal,  à  l'em- 
preindre d'une  majesté  propre  à  frapper  h'  vuliiaire. 

Le  petit  portrait  de  François  de  Guise  (l.'KiO?)  appartint 
à  Gaig-nières,  qui  le  tenait  pour  unClouet;  fions-nous  d'au- 
tant mieux  au  sentiment  de  cet  amateur  compétent  (jue  re 
panneau  attire  l'attention  par  un  caraetérisme  expressif  et 
une  factuie  assez  vi\(;  en  certaines  parties.  Toutefois,  dans 
l'œuvre  d'un  maître  comme  François,  une  telle  peint ui'e 
compte   pou,    elle    n';i   izurre   (|ui"    la   valeui'  d'une   ('lude. 

Sur- le  tableau  de  N'iennc,  Gliarles  IX  se  di'esse  sous  sa 
stature  naturelle,  et  ce  format  a  sans  doute  gènt!  l'auteui'. 
Si  le  visage  du  prince  parle,  les  autres  formes  sentent  un 
tantinet  le  mannequin:  n<''amnoins  l'ensemble  est  roval. 
Les  détails  (\[\  costume  sont,  connue  dans  toutes  les  pein- 
tures de  Fi'ançois.  traduits  à  souliait.  surtout  le  bandeau 
de  j)ierreries,  bon  spi'cimen  de  notre  orl'è\  rerie.  l'orne- 
mentation de  la  ceintiu'e.  les  bi'oderies  du  juslaucor|)s  et 
des  rbingra\'es  bouHanles.  Pendant  loimlemj)s.  on  a  dati' 
ce  tablejiii  de  I.')b3,  son  inscription  a\ant  soulferl(l):  en 
\éril(''.  il  ;i  (■!(■  f;iil  \'ers  la  lin  de  |.")(»!).  —  I  àg'c  (lu'accuse  le 
l'oi,  nt'  en  lo.'id,  iicliè\  <•  de  le  d('monli-er  —  lors(|ue  sc'dabo- 
rait  le  mariage  de  CJiarles  l\  ;i\ec  l^lisabetb  d'Autriclie. 

Le  |»elil  j)anne;iu  du  Loti\  re  on  [Mêle  ce  piince  d.ins  inie 
attil  ude  imalogue  lui  peint  \  raisemblablenieni  à  la  nii-nie 
épocjue  cl  par  le    maiire.  car  ItH-i'itiire  un  est   artiste.  Je  le 

(I)  Cf.    Aiiatdir  (iriiyn-,  ('/iiir!rs   l\  ri  rniiirois  t'/ouci  [lieviic  i/,:s  Ih'it.r 
Mondes,  I.  lAXII.  p.  iiSb). 


r.O  I.KS   CLOU  ET. 

consi(l(''rei"ais  |tliis  \ oloiilicrs  coiihim'  uiir  (''IikIc  tirs  poiis- 
S('e,avaiil  servi  à  rexécution  du  iiiaiid  lahlcau.  (|iic  coiiiiiic 
uiu'  rt'j»li(juf.  La  iiiaiiirrr  de  li'aNaillci'  de  (lloucl  autoi'ise 
celle  coujeclure. 

Envoyés  à  Vienne  poui'  ré\('ler  à  la  lillc  de  Alaxiiiii- 
lien  11  les  Irails  de  son  l'iilui-  ('j)on\  (  I  ).  «'es  deux  porliaits 
re\  ini-eiit  h  l'aris.  avec  lanl  d  aulres  OHivres,  à  la  simIc  de 
la  cainj)ai:;ii»'  de  Napob'on  1'''  en  Aulri(die.  J']|  l()rs(ju"eii 
181ÎJ,  les  Alli(''S  repi'iicul  leur  bien,  les  Auliifdnens  se  con- 
tenlèiful.  heureusement  poui'  nous,  du  grand  jtortrait.  Le 
petit.  (juoi(ju«'  caressi'  avec  ini  ])eu  de  préciositi".  laisse 
inie  bien  meilleure  impression.  Tout  y  Iraliit  un  i^oTit  par- 
lait. J^a  jihvsionomie  du  roi.  jj;('nlimenl  ui(>d(dée.  inspii'i; 
delà  sym[)atlii(' ;  ses  mains  cliarmeni  par  leur  structure. 
Les  noii's  \(d()ut('s  du  justaucorps,  les  blancs  jaunàlres 
soyeux  des  mau(dies  et  des  rbini;'rav('s  c(Mistilurnt .  avec 
1rs  di\('rs  oi  Trois,  une  harmonie  sobic  et   ri(di('. 

Lf  portrait  dElisabelli  d'Autriche,  si  justeuieut  c('lèbre, 
lui  (eu\r«''  suixanl  loule  apparence  en  1571,  ajtrès  larriNi'e 
(1(^  la  jcuuc  rt'iuc  ;i  Paris.  Le  dessin  en  est  si'ricux.  1  atti- 
tude lieiH'euse  en  sa  siuiplicib'.  Le  visai^e.  dont  t(Mis  les 
traits  respirent  la  sér('iiil('',  se  coui'onne  duue  coillure  en 
arr(dels  (|ui  le   lad  didicieusenienl  \aloii'.   Les  mains,  rt'U- 


(1)  Ccsl  .suiiIi;mioiiI    li'  -~    iiuNciiilir.'    l.'iTO,   tii'iilf  ilrii\  jdur.s   aju-ùs   smi 
mariage   par   procuration,    à    Spire,    i|u  lllisain'lli    se    rciicoiilra,  pour    la 

|pit'iiiiore  fois,  avec  son  iny.il  i'ikhix.  i.ciilirx ni  lien  à  Mé/iùrcs,  dans 

les  .Ardenncs.  Lp  coniral  <{ui  1  arcordail  a  Cliarlis  1\  avait  été  signé 
ipieiijiii'S  mois  aiii)ara\ant.  le  1  1  jatuicr.  (^ourniun'i'  à  Urims,  le  2(>  mars 
l-'iTI,  la  jciini'  ri'ini'  lil  snn  cnlu'i'  solrnnrlli'  a  l'aii>  lrni>  jnurs   plu^  l,ii(l. 


LES  CLOUET.  61 

nies  avec  un  abandon  qui  corrobore  les  indices  de  carac- 
tère livres  par  la  physionomie,  ('(juilibrenL  l'orl  bien  Ten- 
senible.  Les  yeux,  intelligents  et  bons,  un  peu  voiles 
d'apathie  et  de  mélancolie,  le  front  pensif  et  épris  d'idi'al 
élevé  disent  la  \ie  inl('iieur<'  de  cette  princesse  belle  de 
solides  vertus  (1). 

Les  chairs,  aux  modelés  suaves,  sont  lumineuses  et 
dune  rare  unitt';  même  du  cùlt'  de  Tombi-e,  les  gris  neu- 
tres conservent  une  transparence.  Celte  peinture  suffirait 
pour  pi'ouver  que  son  auteur  avait  un  sens  très  alfin('  des 
valeurs:  les  lonalitt'S  des  lèvres  ont  été  post'es  sans  liaison 
apparente  av«'C  les  tons  voisins,  et  cependant  la  bouche 
ne  présente  aucune  dureté.  Le  corsage  bouillonné  et  la 
parure,  les  elfets  de  la  soie,  de  l'or  el  de  largent  sont 
merveilleusement  interprétt'S.  La  collerette  goderonnée, 
vrai  motif  ornemeiihil  cl  douce  symphonie  en  blanc,  a  é'té 
peinte  avec  amoui',  cfda  se  dcxine,  et  connue  par  des 
mains  de  fée.  Les  perles,  h\s  pend(do(iues  et  les  cai'cans 
dorfèvrei'ie  jouent  un  ri'ile  d('C(ual  if  dans  la  conlexture 
des  lignes  el  lienneul  inie  partie  dans  rorchesl  rai  ion  des 
lonalilt's.  Ijc  maître  n Cxcellail  pas  senlcnienl  à  caresseï" 
la  inalière.  il  sa\ail  aniinei'  les  étoiles,  les  bijonv  et  jus- 
(inaux  moindres  riens.  Tontes   ses  ressources    de    minia- 


(I)  Cf.  sur  KlisahcLli  :  iSraiilnini',  I.  IX  cl  llatloii.  Mrinoires.  CiMiiiiii-  flic 
n'iMail  pas  vi'tiic  à  iioti'c  (icrnii'ic  iihhIc,  ('(11111110  elle  ('-tail  ilc  ix^litc  lailli' 
et  Ile  |iiii'lail  pas  (II'  paliii>,  la  ji'iiin'  |inii('('ssc  paru!  i  niiucctiti'  o(  sans 
lj(;aii(o  à  |)i('S([iH!  tous  les  sci^iicms  cl  d  inics  ilc  la  ((lur-.  Ils  ii'i'ii 
poinaiciil  (•(iiiii)i'('nilri'  la  ^'l'àce  simple:  k'iir  cspril  élail  Inip  (JcpraM'.  leur 
j^di'il    Irop  ;;r(is>icl' 


62  LES  CLOU  ET. 

lurislf.  L'I  elles  ('■hiieiil  peu  (•(»iiiiiiiiiies.  il  les  a  (l(''|tl()\  ('es 
dans  ee  porliail  (IKIisabelli.  Sulioidoiiiies  à  1  ell'el  d  en 
seiiiMe.  les  divers  di'lails  el  les  dilliTeiils  tons  y  concon- 
reiil  à  formel'  une  liarnionie  lendre  el  juraN'e.  1res  en  rap- 
poi't  avec  Tespril  de  la  pi'incesse.  Ce  pur  eind'-d  (eux  re 
doit  être  regardé  connue  lun  des  jovaux  de  1  ('cole  liau- 
çaise    (1). 

Dans  les  miniatures  de  Fi'aïKjois.  nous  reIrouN ous.  hien 
afîirmtM'S.  ses  (|ualit(''S  de  cousl  ludeur  de  formes,  d  in- 
lerpi"('[e  de  plivsiononiies  el  d  harmoniste  de  tons.  Le 
portrait  sur  |»ai(diemin  de  Henri  IL  tri's  travailli'  —  on 
pourrait  m("''me  dire  troj).  tant  les  ])lans  de  la  tète  sont 
mt'ticuleusemenl  mod(d(''s  —  a  la  solidil('  d  une  peinture 
à  riiuile.  Quoi(|ue  linenieiil  gouacli(''.  il  cause  une  impres- 
sion de  lourdeur,  (le  buste,  aujoui'd'hui  aux  Estainjtes, 
illustrait  ini  li\re  dlieures  de  Catherine  de  Médicis;  au 
wu"  si(''cle.  on  \\m  détacdia  et  (laii:ni('-res  en  lil  I  ac- 
(|uisition.  le  sau\anl  ainsi  de  loule  uiau\aise  aNcnt  ui'c  (2  ). 
Le  roi.  dont  le  xisaizc  d(''C('de  de  la  lalimu'  ou  de  I  ennui, 
parait  (Mre  eidre  ti-ente-cin(|  à  (piaraule  an>;.  Sans  doule 
ful-il  peint  peu  a\aid  sa  mort  il<»  juillet  l."»."»!h  ou  plus 
lard  (I  apr('s  les  proju'es  ('Indes  du  maiire.  Il  ne  semble 
|»as  (pie  notre  artiste  ait  exécut('  d  autres  mimai  ures  pou  r 
ces     Meures,    car.     sauf    les    elli^ies    de     l'^rancois     L'.     de 


(1)  1{.  ilr    (j.iif^iiirri'S    |)Osséila   ce    poclr.iil.    ijni    iiinvii-iil    de    l'aiirii'iiiic 
collection  ilii  I^(juvre. 

(2)  Ce  livi-(^  (j'iii'uces  f.iit,  partie  aujoiinllmi  ilr-  collecliDiis   .lu  Lndvi-c. 
.\  In  pl.ici'  lie  lli-mi  II,  (in  a  mis  rellisicdu  vii-'uiiilc  de  Maiti^'ues. 


LES  CLOU  ET.  03 

Louise  <le  Savoie  et  de  Catherine  dr  Mt'dicis  en  lo72  (1). 
la  j)luparl  oui  luie  eonliguralion  bien  anodine  el  plusieurs, 
comme  le  Hcni'i  III  en  l.'i^l.  e(  les  Callierine  en  L'iHO 
el  [."JH.'j,  sont  puslt'rieurcs  ;i  la  niurl  de  Cloiiel.  Si  cr 
dernier  avait  été  charge  de  peindre  quelques-unes  de  ces 
tètes,  dont  celles  de  Charles  IX  ti  (rÉlisaheth  d'Auti-iche. 
(|ui  rappellent  mal  ses  fameux  portraits,  vraiment  il  aurait 
accompli  sa  besogne  comme  un  pensum  ennuyeux,  avec 
d'incroyables  nég-ligcnces. 

La  Catherine  de  Vienne  a  été  laite  selon  toute  vraisem- 
blance en  1571;  car  un  registre  des  comptes  de  l'Epargne 
de  l'année  suivante  nous  appi-end  (jue  Clouet  reçut  le  paie- 
ment de  celle  effigie  au  mois  de  mai  ('2).  La  boîte  d"or  oii 
elle  repose  exhibe  sur  lune  de  ses  faces  extérieures  le 
cliill're  de  Cliarles  1\  —  deux  (-  eidaci's  (|ue  sui'monte  une 
couronne  royale  fei'niée  el  (|u Cnloure  une  couronne  de 
fleurs  et  (le  fi'iiits  —  et  sur  l'autre  sa  de\  ise  :  deux  co- 
lonnes a\ec  la  Pi«'l('  et  la.luslice.  lùdiii  il  coiilieiil  un 
portrait  du  uK'ine  pi'ince:  el,  connue  celle  miniature  re- 
produit à  la  perfection  I  inie  des  Udes  (|ue  dessina  fian- 
eois.  il  ne  faut  pas  rranidre  de  la  cron'e  de  ses  manis. 
(|uoi(iue  le  document  prt'Cih'  m-  la  meiiliouue  pas.  {Jud 
penilre   am'ail    jiu    \i\ilier    une    pli\  sionomie.    d  après  une 


(1)  LnMis(!  (le  Savoie  a  (•citaiiieiiienl  éfi''  laite  d'api'ès  lios  (lociiinoiils.  car 
il  la  iiKirt  (le  cette  pi'iiieesse  Ftaneois  avait  tout  au  plus  i[uiii/e  ans.  l'.atliei'irie 
a  le  tyiii'  ilune  eoninierçante  enricliie  el  opanouie. 

\-2\  l{il)li(»tliè(iue  nationale,  nis.  Clairanihaull,  n»  l'iK!,  p.2".l'J2.  C'est  M.  Maze- 
roile  (pii  lit  cette  inipni'tante  déeduverle,  (11'.  Hcrue  de  l'arl  c/irrih'ii.  ISS'.i. 
t.  VII.  p.  41G41'J. 


64  LES   CLOUET. 

rluilc  (le  Clouel,  mieux  que  Clouet  lui-niènie  ?  P()un|uoi 
se  serail-oii  avisé  de  lui  enlever  une  mission  qui  lui  reve- 
nait tout  naturellement  ? 

Pour  la  même  raison,  considérons  comme  son  œuvre  la 
J/«7'/e-/S'^*/rtr^  de  Windsor.  Celle-ci  ne  reflète  pas  trait  pour 
trait,  elle  évoque  avec  une  analogie  d'écriture  très  sen- 
siljle,  un  dessin  de  François.  Entre  ce  dessin,  qui  date 
de  1.538,  et  la  susdite  miniature,  il  y  a  une  indiscutable 
parenté.  La  tulure  reine  d  Ecosse,  vêtue  d  un  rose  réjouis- 
sant, qui  s'accorde  assez  bien  avec  le  fond  outremer,  est 
d'une  exquise  faclui'e:  Charles  IX  et  sa  mère  sont  splendi- 
ilciucnl  fouillés,  ce  qui  ne  rend  pas  la  terrible  et  grasse 
royiti'  plus  sympatlii(pie.  au  contraire  (  1 1. 


VII 


SES    DESSINS   I)K    1,  ANCIEN    ALBUM    FOI  I.ON. 

Maigri'  leur  xalcur,  les  peintures  et  les  miniatures  de 
Fi*an(;ois  ne  nous  niaiiifestenl  jtas.  dans  sa  pli'nitude,  sa 
puissance  réalisatrice.  Bien  aulremml  \  igdurcux.  iinpres- 

(1)  Ces  i)Oih<iils  cl  leur  éciin  iïu-enl  cxôculés  poiii-  la  reine  irE.spafj:no 
Anne-Marie  il'Autriciie.  La  iiioilc  exigeait  ces  sortes  de  caileaiix  entre 
princes.  Les  fréquentes  relations  qu'enlrelenaient,  les  ilcux  hranches  de 
la  maison  de  llabshonrg  exi)]ii|uenl  ([lie  ce  liijuusoit  niainlenanl  à  Vienne. 
Klant  donnée  la  date  de  son  exécution,  il  aurait  dû  contenir  l'clligie 
d'iilisaljeth,  épouse  de  Charles  I.X,  plutôt  ([ue  celle  de  Galhorine:  mais 
celle-ci  se  considérait  comme  un  \rai  iiiiiii-lic  des  all'aires  étrangères, 
lieut-clri'  comme  la  vraie  rciiie,  et  elle  cnlcihliil  (|uc  sa  hru  restât  (lan> 
une  ilisei'éte  pénombre. 


•"éf^? 


% 


^\Lc/ui   '^  6(/i/  ,     cJhhkÔMxi\  uicjJ« 


(l'.nl.iiiil   Av<  Iv-tampi's.) 


LES  CLOUET.  67 

sionnants  cl  artistes  apparaissent  ses  portraits  crayonnés. 
Ce  sont  d'admiraljles  interprétations,  à  la  fois  liardies  et 
sévères.  Aussi  sûrement  construits  que  les  tètes  peintes, 
ils  expriment  plus  encore  ;  ils  ont  cette  souplesse  et  cette 
acuité,  ce  quelque  chose  d'intime  que  Ion  chercherait  en 
vain  dans  la  meilh^ure  peinture.  Travaillés  sur  le  vit",  ils 
nous  mettent  en  contact  direct  avec  des  personnalités,  ils 
nous  livrent  des  physionomies  au  dernier  point  parlantes. 

Les  plus  remanjuahles  enrichissent  le  Gahinet  des  Es- 
tampes. Ils  proviennent  d'un  album  que  possédait  le 
neveu  du  maître,  peintre  comme  lui.  Benjamin  Foulon, 
et  qui  (init  par  tomber  entre  les  mains  d'un  c<'rtain  Lecu- 
rieux,  lequel,  en  182o,  vendit  à  la  Bibliothècjue  natioiuile 
ce  trésor  inestimable  (ju'il  n'était  pas  en  état  d'estimer. 
C'est  M.  Bouchot,  le  savant  conservateur  des  Estampes, 
(jui  reconnut  —  tous  les  épi'is  d'art  lui  en  seront  recon- 
naissants —  (ju  une  bonne  partie  de  ces  dessins  pouvait 
être  très  raisonnablement  attribuée  à  François  Clouel  (I). 

Les  ol  dessins  de  cet  album  ont  au  moins  (Jcnx  au- 
teurs très  dislincls.  on  le  constate  d'un  simple  coup  d"(eil. 
Vinci-deux  poitrails  de  conleniporains  de  Heiuà  IV  suin- 
tent la  banalitt'  el  l,i  plupart  floi\('nl  t'Ire  iniputt's  à  l-'ou- 
lon,  car  leur  faclin'e  se  rattache  à  celle  de  l'un  d'eux  (|u  il 
a   sigillé'  de  son  nom.    Trois  au  |tlus  lonl   exception  (2|. 

fjcs  effipies  al  I  riliiiables  à    h'raneois    sont    celles  île  |>ei" 

(I)  llcmi  |{uiiili((l.  Les  por/i'fii/s  aux  cidi/iins,  |i.   IS-fii!. 
{•2\  Si   ci's   ili'ssiiis  III'  SDiil    pas   lios   copies,   il    taul    les  rri^Midci-  cnniiiK- 
l'(iu\  i;iiii>  il  un  iiii   lie  ili'iix  iiiiiiiiiiii--.  i|iii   li'>  auraii'iil  cxr'culi's  \oi's   t.">;iO. 


68  LES  CLOUET. 

snnnag'cs  poi'trailiin's  ciilrc  l.'i.'iSct  l'iTI.  ("Jiosc  nolahle, 
il  csl  impossible  (juc  1  iiiif  d  elles  soil  post/'iieiire  ;i  l.')72. 
c  est  à-(Iire  à  la  inorl  du  maiire.  Pour  contester  (|tiClles 
soient  son  œuvre,  il  faudrait  supposer  (juelles  reproilui- 
sent  des  originaux;  or.  sauf  deux,  toutes  ont  celte  frai- 
(dieur  d'exécution,  ce  charme  particuliei-  (|ui  caractt'iisenl 
les  dessins  d'après  nature.  Comment  Benjamin  aurai!  il  eu. 
si  ce  n'est  jiar  son  oncle,  ces  portraits  de  |)ers(iinies  (juil 
iiaNail  pu  connaître?  M.  lioucliot  présume  donc  (|ue 
François,  n'ayant  pas  d'enfant  ai'tisie,  lit  don  à  son  ne\eu 
de  ses  albums  d'r/t/rhs.  C'était  bien  naturel.  Benjamin 
embrassant  la  même  carrièi'e  (jue  lui:  on  ne  voit  pas 
quelle  meilleure   hypothèse  pouirait   être   ('cbafaudée. 

Les  dessins  de  François  ont  été  travailb'S,  comme  l'Eli- 
sabeth du  Louvre,  avec  un  soin  très  intidlii^-ent.  un  rare 
souci  de  noter  les  valeurs  et  les  di'gradations  des  modelés 
—  voire,  dans  «juebjues-uns,  les  minuties  des  costumes  el 
des  pai'ures  —  parlant  en  \  ue  de  sCn  sei'\  ir  pour  |teindre 
sur  pamieau.  Le  maître  a  si  bien  trace''  ces  ('Indes  jjour 
ses  propres  besoins  (pTil  n'a  mis  sur  aucune  des  b'uilles 
les  noms  des  pori  rail  urt's  il).  (Jr  ses  coulrèi'es  u  oniel- 
laienl  j;iuiais  ce  di'iiiil  lors(|u"ils  (b'sira  ieni  \t'udre  des 
efligies  craNonni'es.  ce  (pii  s('\|(li(|ue  du  resie  puis(|ue  les 
amaleiH's  aciiehiieiil  surloul  des  noms.  Doue  les  conjec- 
tures   les  j)lus    j)lausibles    indulsenl    à     regarder    les    nii'd- 


(I  )  G  usi  Benjamin  l''(iiiliiii  liii-ini'iur  ipii  ;i  irril  les  Mniii~  cl  le>  iiumiMums 
(|iie  l'<iii  ieiiiar(|Ui'  sur  l.i  |ilii|i;iil  d'inlir  ellev.  I  )ti  ;i  rciiiimu  son 
éeiiUire. 


lp:s  clou?:t.  69 

leurs   dessins  de   raihum    Foulon  comme  des  œuvres  de 
FraïKjois  Clouet. 

Ces    dessins    sonl    au   iioudjre   de    trente-eincj;  les  voici 
dans  1  ordre  qu  ils  uccupaieiil  jadis  : 

Jounc  hoiume  anonyiiio  (1365?).  —  Mme  de  Villeroy  (.Magdclcinc  de 
l'Aiihespine,  femme  de  Nicolas  de  Neuville,  seigneur  do  Villeroy  et 
secrétaire  d'Etat).  —  Philippe  Sfrozzi,  sieur  d'Épernay  (1.567.  date  postérieure 
au  dessin  d'après  .M.  linmlioti.  —  Madeleine  Leclerc  liu  Ti'e'iMbiay,  épouse 
de  Sébastien  Zamct,  baron  de  Murât,  surintendant  de  la  maison  de 
la  reine.  — ■  Claude  II  de  l'Aubespine,  baron  de  Cbàteauneuf.  —  (llaudf 
Catherine  de  Clermont,  duchesse  de  Retz  (loTO).  —  Henri-Robert  de  la 
Marck  Bouillon.  —  Léonore  Breton,  dame  du  Goguier  {vers  1.509).  — 
Robert  IV  de  la  Marck.  duc  de  Bouillon  (1369).  —  Jeanne  Cliasteignier  de 
a  Rocheporay,  dame  d'^  Sehomberg.  — Albert  de  Gondi,  duc  de  Retz  (qui 
l'ut  chargé,  avec  Neuville-Villeroy,  par  Charles  IX,  d'aller  recevoir  à  Spire 
la  rrine  Elisabeth).  —  Françoise  Babou  de  la  Bourdaisiére,  dame  d'Kstiées. 

—  Guy  du  Faur,  sieur  de  Pybrac,  président  au  Parlement  de  Toulouse.  — 
Françoise  d'Orléans-Rothelin,  princesse  de  Condé.  —  Louis  Dubois, 
sieur  dis  Arpentis,  maître  de  la  garde-robe  du  roi.  —  Denise  de 
Neuville-Villeroy,  dame  Glausse  de  Fleury  depuis  1308.  —  François  île 
Valois,  duc  d'Alençon  (1339  ou  1360).  —  Hélène  ou  Henriette  de  Tournon, 
comtesse  de  la  Baume-Montrevel.  —  Guy-Chabot,  baron  de  Jarnac.  — 
Jeanne  de  Laval-Loné,  dame  de  Scneterre,  dame  d'iinninur  de  la 
comtesse    de   Soissons.  —  François    de    Coligny,    sieur  d'Andelot  (1369). 

—  Jeune  femme  vers  1303  (Kcnée  de  Rieux,  d'après  M.  Bouchid).  — 
.M.  de  Morvilliers.  —  Mme  Liébaud.  —  Louis  de  Bérenger,  sieur  du 
Gast  (157l)i.  —  Marguerite  de  Valois  (portrait  présumé  de  la  lille  dr 
Catherine  de  Médicis).  —  Jean  de  la  Burte  ou  de  Barta.  sieur  d'.\iijac, 
ehancelirr  (h'  Navarre.  — Marcjuise  de  Lononcourt  (Marguerite  de  Broyés. 
|iuis  (l.iiiic  de  Rnhan,  princesse  de  Giiéménée),  femmr  il'iiii  i;riililliiiiiimc 
de  la  eliambri'  sous  ilcnii  II.  — Jean  de  Léaumnnt,  sieur  (h-  Puigaillard. 

—  Philippe  de  Montesprdon  (plus  tard  [iiineesse  de  la  Roehe-siir-Vnui. — 
Ji'annc  d'.VIbret.  —  Vincent  de  Goiizaguc  dui-  de  Maubme.  —  Mlle  du  V.d 
le  Grand  (personne  inconnue  qui  pourrait  être  une  certaine  Flisabelh 
Diival.  peintre  portraitiste).  —  Odel  île  Coligny,  dit  le  cardinal  de 
Chàtillon  (1370).  —  Isabeau  de  Hauteviile  (même  année),  femme  du 
pn''ci'd('iil   (1). 

(1)  Mémi'   si    l'un  n'avait  rricuinu   l'i»  lilure   de    Fnulon.  mi    ne   puuiiail 
atliibucr  à  François  h's  insiiiptions  de  ces  dessins,  à  cause  du  lilndlr  ilr 


70  LES   CLOUET. 

Os  dessins  ont  rlr  disjoints:  afin  de  les  cnnscrvci' dans 
de  meilleures  conditions,  on  les  a  collés  sur  des  carions 
et  onles  serre  dans  des  boîtes.  Connue  ils  on!  v\r  lra\aill«'s 
à  la  sanguine  ou  aux  crayons  de  couleui-,  cette  précaution 
s'imposait  (I  ).  Six  seulement  ont  (|U(dques  défectuosités, 
tous  les  autres  sont  expressifs  et  révèlent  des  àines. 
(Juel(iues-uns  frappcnl  dadmiration  pai'  leur  coidexlure 
supérieure  et  leur  belle  vie.  Tels  ceux  (|ui  rt'prt'senient  les 
deux  Coligny,  Isabelle  de  lJaule\  ille.  les  deux  la  Marclie. 
Jarnac,  du  Gast,  des  Arpentis.  Gonzague,  la  inar(|uise  de 
Lenoncourt.  Puicaillard.  Pibrac  et  Gondi. 

La  tête  de  François  de  Coligfiy,  réalisée  avec  une  magis- 
trale simplicih'  de  moyens,  est  une  interprétation  très  syn- 
tliétique  oi^i  ne  mancjue  rien  d'essentiel.  Les  modeb's  en 
sont  à  la  fois  précis  et  enveloppeurs;  les  yeux,  en  impec- 
cable perspective,  reflètent  une  flamme  intérieure.  OuanI 
aux  jeux  de  cravon.  ils  donnent  bien  limpression  de  la 
chair  et.  sur  les  lèvres,  ('lalenl  de  Unes  dégradations  <le 
teintes.  Odet  de  (îolignv  et  son  ('pouse  Isabeau  ollicnl  des 
faces  non  moins  parlantes,  non  moins  largement  traitées, 

queliiucs-uncs.  Cclli'  ([ui  se  truuM'  |iii's  de  la  li'tc  ilr  ilu  (!a>t  imus 
apprend  que  Ci;  iiersonnaf,'f  lut  tué  par  Ir  liaioii  de  Viteaux  :  cille 
qui  concerne  .leanne  dWlhrct  signale  cette  piiieesse  comnie  niéir  ili' 
('  Henri  l''».  Or  François,  ayant  trépassé  en  157i',  n'a  pu  uictlrc  de  telles 
indications,  il  n'a  ]iu  davantaf^e  écrire  que  Mme  de  N'illeroy  unuirut 
en  lij'JG,  i'liilip|ie  de  Montesjiedon  en  l.'iTS,  Mine  de  Senetei-re  en  tiilii; 
que  Gonzague  l'imusn,  en  l.").S4.  Eléonur  de  Midicis,  sniir  de  la  reine 
et  Jeanne  Ghasteignior  Gaspard  de  Schoiuberg  en  li)73. 

(1)  Ainsi  braveront-ils  mieux  les  siècles.  Toutefois  il  convienilrait  (|ue 
ceux  qui  se  les  font  coniinuni(iuer  les  traitassent  avec  le  l'espect  du  aux 
belles  (euvros.  On  \nil  par  les  souillures  des  carions  qui  emadrenl 
quel(|ues-uns  de  ces  dessins  que  maints  barbares  les  nnt  \ilipeiides. 


LES  CLOU  ET.  71 

et'leur  costume  est  traduit  en  quelques  traits  typiques  à  la 
Holbein. 

Robert  IV  de  lu  Murck  a  des  formes  souples  et  fermes 
agréablement  modelées  au  crayon  marron-orangé  (l). 
Des  Arp<'ntis  et  Pibrac.  au  regard  inoubliable,  rayonnent 
une  abondante  vie  intime.  Gonzague,  par  l'esprit  et  la 
sûreté  de  son  dessin,  annonce  Domini(jue  Ingres.  Les 
plans  de  son  visage,  les  mèches  de  sa  chevelure  sont  éta- 
blis avec  autant  de  naturel  que  de  savoir.  Ses  yeux  gris 
clair  à  peine  bleuis  attirent  par  leur  transparence  et  re- 
tiennent par  leur  éloquence.  La  physionomie  intelligente 
et  grave  de  la  marquise  de  Lenoncourt  est  travaillée  avec 
un  tact  exquis. 

Plusieurs  de  ces  tètes  sont  si  merveilleusement  teiiilt'es. 
avec  un  sentiment  si  juste  des  valeurs,  qu'elles  sembleîil 
des  peintures  à  Ihuile  ;  ainsi  celles  de  Jarnac,  de  du  (lnsl. 
de  Gondi,  aux  tonalités  vigoureuses,  celle  de  Piiigaillard. 
aux  harmonies  savantes,  celle  de  Pibrac,  dont  les  nmltiples 
nuances  causent  lilliision  d'une  chair  palpable.  D'autres, 
celles  de  Gonzague  et  de  Mme  de  Lenoncourt,  pr(''senteiil 
des  ellets  de  pastel:  en  outre,  la  seconde  eiicliaiile  par  sa 
gamme  un  tantinet  l'aïK-e.  La  bai'be  de  l''ranr()is  de  Coligiiy 
s'avive  dune  leinle  pr('cieuse  de  sépia  oi'angt'e;  celle 
d'Odet  grisomie  au  moyen  d'un  ing('nieux  assemblage  de 
[Utils   et     de    roux.    |)armi    les(juels  opèicnl    les  blancs  du 

(1)  M.  Houchot  iiiclino  à  voii-  tiaiis  ce  poitrail  uiio  cupii'  l'aile  par 
Frani:ois  d'aiin's  im  de  sos  proincs  liossius  ;  s'il  rii  l'st  ainsi,  c'est  imo 
cxcellcnti'  copie. 


"72  LES   GL0U?:T. 

suhjcdilc  :  celle  de  Jarnac,  dont  la  l'acliire  i'aj)|ielle  les 
Pritiiitils.  el  celle  de  du  (last  soiil  diiii  (diàlaiii  (dair  1res 
juste. 

()ii  j)eut  ranger  aussili')!  a{)rès  ces  ceuvres.  pour  leurs 
qiialif(''s  artistes,  les  jiori rails  du  jeune  anonvnie.  de  Kenee 
de  Rieux.  de  Jeanne  d'Albret,  de  la  présumée  Marguerite 
de  Valois,  de  François  dAlencon,  de  Strozzi,  de  3Inie  de 
la  Hourdaisière,  de  Mme  de  Retz.  Les  quatre  premiers  sont 
très  délicatement  modelés.  Sur  le  visag^e  de  linconnu.  le 
maître  a  traduit  les  demi-teintes  ])ar  des  frottis  de  crayon 
noir  et  les  clairs  par  de  légères  ti-aînées  de  sang-uine  entre 
les(|uelles  le  papier  exécute  au  mieux  sa  partie.  Ainsi 
s"«'fFectue  un  mélange  opti(jue  (jui  procure  une  sensation 
de  chair  suavement  dégradée.  Renée  séduit  par  ses  teintes 
hunineuses  (1).  Jeanne  par  sa  physionomie  vraiment  nolde. 
que  poétisent  des  tonalités  fondues  sous  faction  du  temps. 
Marguerite  se  recommande  par  un  nez  et  une  houi  lie  dé- 
leclaMemenl  ('ci'its.  des  (die\ eux  fi'isotés  dun  rare  intt-rèt 
ornemental:  et  tdle  produit  un  curieux  eti'et  axcc  son 
visage  à  peine  teint»'  où  ses  lè\  res.  (juoiipie  rougies  sans 
excès,  mettent  um-  note  intense.  La  galante  Rourdaisière. 
à  la  face  é'galemeni  pâle,  se  distuigiie  par  sa  houclie  aunn- 
cie  et  ses  iris  per\eu(dies.  Strozzi  et  Mme  de  l{el/.  nionireni 
deux  cas  (h;  physionomie  nulle  l'cndue  |tres(|ue  attaidianle 
|iar  la  [niissance  I  ransforniat  nce  dun  ai'lisle.  A\('c  ses 
gros  veux  azur  hidiiilh'.   la  seconde  qui.  parail  il.   ne  iiian- 

|l)    |).:in>  ir    jKii'ti.iil ,    sur   la   |iliiiii('   ilc   la    lij([ur,    li'    niaitrc  a    iiulf   des 
indications  de  couleurs. 


/' 


/■•■ 


fruiu  o/.! 


UAXiois  Ci.orKT.  —  I' Il  \  N  (Il  I  >;  m:  C.n  i  n.  n  v,  sir.c  n  n  A  n  i>ri  i»  c  (Dessin - 

(Cahiiicl  ilrs  i;>tam|)es.) 


LES  CLOUET.  75 

quail  pas  (rcspiil,  a  un  air  vag-ueinont  bovin,  mais  coinme 
on  l'oublie  à  ne  regarder  que  les  jeux  du  rrayoïi  :  nuances 
légères  du  visag-e,.  modelés  presque  vaporeux,  détails  du 
costume  et  du  collier  (Ij! 

L'imag-e  du  petit  François  d'Alenron  exprime  bien  les 
caractères  de  Tenfance,  par  la  pose  des  mains  comme  parla 
délinéation  des  formes;  et  les  yeux  parlent  à  ravir. 

C'est  encore  avec  un  art  peu  commun  (jue  le  maîtr»'  a 
ligure  M.  de  la  Burte,  la  princesse  de  Condé,  anmsante 
sous  sa  toque  à  plume,  la  comtesse  de  Montrevel,  au  très 
seyant  béguin  de  veuve,  Mmes  de  Schomberg,  de  Villeroy 
et  de  Fleury,  aux  tètes  diversement  banales,  même  Pliilippe 
de  Montespedon,  au  masque  mafïlu  de  duègne  du  vieux  ré- 
pertoire, et  Mlle  Duval,  au  type  liouîmasse,  au  sourire 
éginétique. 

Ml! 

SKS    Al  l'UKS    DESSINS. 

Ijcs  aiilres    dessins  ait  nbiiabb'S  ii   Fraïujois   C.loiiel   pro 
vieinieut    (le    la    l»il»li(»lliè(|iie   Sainle-(iene\  iè\ c.    ils    repi'i'-- 
seiilenl  : 

Un  anonyini'  liomme  (1555 ?K  —  Un  anonyiiio  fciiiiiir  en  clKiiuToii  cl 
colliTiMlc  l'ii  fraise  (itl.).  —  Marie  Stuart  (l"t:iS  nu  Vy.iiK  seul  jiorirail 
aullieiiliqiic  de  celle  princesse).  —  Marguerite  de   Valois  (vers    \lti\:i\.  — 

(1)  (yi'tail.  avec  Margueiite  dr  Valois,  une  ciHnicItt'  irrésistildc  iiin- 
Circé,  a»  ilire  de  son  i'nl<iiira^;c.  i'.llc  a\.iil  i'ihuim'  en  si'Cuiidi's  noces 
l'avenlurier  Alberl  de  Gondi. 


■'G  LES   CLOUET. 

La  iiii'iiii'  (lb(J0-l.")(i7).  — Cliarli's  l.\  (l.'iG.'Il.  —  Jucquelim-  uu  .JactiULttc  di' 
l-(iii^r\w-Givry,  comtesse  de  Bar-sur-Scinr,  duchesse  de  Montpensier  (vers 
l.'ili'.i).  —  L'amiral  Gaspanl  de  Coli^Miy  (loTO).  —  François  de  Valois,  duc 
d'Alençon  (liiTO).  —  Hélène  de  Tournon,  dame  de  Vassalicu,  depuis  darne 
de  la  Baume,  comtesse  de  Montrevel  (vers  lo70).  —  Ctiarlcs  IX  (l.">70  ou 
1571).  —  Elisabelh  d'Autriche  i1.p71.  papier  très  abîmé).  —  Françoise  de 
Brezé,  depuis  coiidesse  de  Mauleviier,  dame  de  Flourange  rt  dui  hesse  de 
Bouillon  (V).  —  Marie   de  Cléves,  princesse  de  Condé. 

Ces  |(()rl  i;iils  se  rtMM)iiiiiiaii(l('iit  pur  1rs  mciiics  (juulités 
(le  striK'Iui'o.  d'oxpréssion  et  de  \  ic  (jiic  leurs  cniifitMièrcs 
<li'  I  ;mcit'ii  ;illiuiii  Foulon.  Les  plus  iii,iL;islr:ii]\  son!  ct'ytx 
(le  Mar^LU'i'iic.  lillcIU-,  du  Cliaflcs  JX  jeiiiic  lioimiic  vide 
Gaspard  de  Coligny. 

T^a  fiiliire  i-cine  Margot  est  une  (l«'licicus('  inlci-|)rrtaiion 
(If  l)a(di('l('lt('.  aux  modelés  obtenus  avec  une  adnnrahle 
siniplicil*'.  à  la  cliair  transformée  en  fleur  diaphane  par  un 
Irollis  caressanl.  C.liarles  IX  captive  lallenlion  par  son 
nuisque  psycholog^iciueuieiil  liuiiné,  aux  denii-leinles  ('la- 
hlies  avec  UIU'  heureuse  \ii:iieur  en  noil"  et  sieiuie  hnih'e. 
Li'S  yeux.  niei'Ncille  de  r(''alisation,  soni  in(|ui(''(anls  connue 
crux  de  certains  n(''vr()j)allies.  la  hoindie  a  (pi»d(|ue  chose 
de  niauxais.  le  nez  j^rossier  accuse  de  raiiluialih'.  (Tesl 
d'aj)rès  ce  dessin,  dune  saisissanle  hunianih'.  (|u  a  ('-té-  l'aile 
la  nuniaiui'e  du  Tri'sor  de  \  ienne.  Posh-rieui'  de  (piin/.e  ou 
vingt  mois  aux  (  Iharles  j)einls  pai'  (  'lonel  en  I  ."di'.l.  d  nelnpie 
.pnd  pr(dond  (diauMcmen!  s  ('lail  opeic  en  ce  prince  peiidani 
cel    inler\alle  (  1  i. 

Gaspard,     exc(dlennnenl     couslruil.    connue    ses    deux 

(I)   Ce  porhait  l'st  cului    ipii  sr  huuNr  <lans  un  l'Hcadrcrurid    de    hrislol 
bleu. 


■i'^'à.JA 


^^ 


n^ 


■►s." 


•  llCiltCltt 


•<,,.     Afif^  JJi  Mty  M- 


Fk.vn(:ois  (li.ouET.  -      Mvuniisi:   m.    L  i;  n  o  mo  i  ii  i     Doniii) 

(Uahiiicl  (l(.'s  Mslaiiiiirs.) 


LES  GLOUET.  ^^9 

frères,  est  non  moins  signilicalif.  Ses  yeux  gris  d'acier, 
d'une  extraordinaire  acuilr,  suffiraient  pour  le  classer 
parmi  les  fortes  œuvres.  De  savoureuses  tonalités  animent 
sa  chair.  Deux  autres  imasres  du  même  Gaspard,  fl  voisines 
de  la  préct'deiile,  pourraient  bien  èlre  sorties  des  mains  de 
notre  François.  La  première,  de  petit  format,  semble  un 
beau  travail  pi'('paratoire  de  miniaturiste;  on  y  remarque 
une  barbe  subtilement  fouillée  et  des  colorations  ingénieu- 
sement constituées  sur  les  joues  avec  de  la  sanguine.  Sur 
la  seconde,  la  face  seule  a  été  travaillée,  mais  de  la 
meilleure  manière. 

Charles  IX  en  I.060,  la  blanche  et  rose  Jacqueline  de 
Long'wv,  à  lair  plulùt  l»onnasse,  et  Hélène  de  Tournon 
retiennent  ensuite  par  le  dessin  de  leurs  jtbysionomies. 
Hélène  a  [)lus  dintelligence  et  de  dislin<-tiun  ilans  ce 
])or(i-ait  (|ue  daiis  c(dui  de  l'album  Foulon.  Marie  Stuart, 
avec  sa  fraîcheur  (elle  avait  alors  seize  ou  dix-sept  ans), 
ses  prumdles  dans  le  vag"ue,  sa  cbeNidure  dûment  cahi- 
mistrée,  évoque  assez  bien  une  agnelle.  Des  modelés 
vaj)oreux  en\(dt)ppenl  son  chiir  et  j>àle  minois  à  jxdne 
loii<di(''  |)ai'  le  craNon  Ion  de  (diaiiM  I  ).  l^lisabelb  n  a  pas  sa 
|dace  pai'mi  les  (duds-d'anu  re  du  maitic.  mais  ses  traits 
n  en  sont  pas  nionis  (do(pienls  et  ses  umdeb's  suaves.  Le 
nez  est  très  ('crit.  la  lè\  re  inb'rieure  a  de  bonnes  dt'gi'a- 
dalions.   ÎVIai'ie    de    (élèves    exhibe   des    i'oi-nies    molles;    un 

(1)  Sans  (louto  ost-ii'  \inuv  faii'o  valoir  sa  pàk'ur  nalurfllc,  pour  se 
prrsontcr  en  uni'  st-duisaulc  liai'uionic  d'aiialoitïut's,  (|Ut'.  coiilrairoiucnl 
;i  l'usaf^c  (Ir  tinUL'  cour,  elle  adiijita  If  lilaiic  poui' son  cosluino  ili^  niarit'i' ; 
la  pit'iiiirir  des  rrini'S  di'  KrauL'c,  elle  prit  cette  iidlialivc 


80  LES  CLOUET. 

gros  nez  achève  de  la  vulgariser,  <'l.  dans  sa  lace  blan- 
châtre, SCS  h''Vï'es  paraissent  saigner.  Tout,  dans  la  j»ré- 
sumee  dame  dr  Fleurange,  tlénole  une  vie  végétative. 

11  y  a  encore,  aux  Estampes,  trois  effigies  que  lein\s 
(jualih'S  e(  leur  sonune  darl  jiernicllciit  dallrihuer  à 
François  :  ceHe.  très  curieuse,  d'Antoine  de  Bourbon.  loi 
de  Navarre  (fo47),  prestement  enlevée  en  esquisse,  celle 
de  François  11  éphèbe,  bien  modelée,  bien  teintt'e,  bim 
vivante,  et  c<dle  dun  Fdiai'les  IX  garçonnet  silbouellé-e, 
d  un  tour  almabl<\  dans  un  entourage  ornemental. 

Six  dessins  de  l'ancien  album  Foulon  ont  des  inqjeitec- 
tions.  ai-je  dit  plus  haut.  I']n  elfef.  les  porti'aits  de  lim- 
pressif  lAubespine  et  de  linsigniliant  Morvilliers,  ne  sont 
pas  partout  d'une  délint'ation  très  solide:  les  contours  du 
second  mancjuent  même  beaucoup  de  fermeté'  du  (•(')!(■  lunii- 
iHMix.  Néanmoins  on  ne  saïu'ait.  j)our  celte  raison,  les 
refuser  à  François,  les  maîtres  ayant  leurs  moments  de 
lassitude,  de  faiblesse  et  aussi  de  ni'gligences.  L"el!igie  de 
Mme  de  Senelerre  nCst  j)as  non  plus  des  mieux  é'cnt«'S. 
elle  atout  I  aspect  dune  coine  làcliee:  toulelois  la  boui'be 
et  les  veux  —  ces  dei'uiers  bien  lu lia ii'es  —  sont  signilicatils. 
(Juan!  aux  trois  autres  dessins,  leur  inlerioiité'  ne  se  jieiit 
contester.  L;i  (hiiiie  du  Goguiei',  grasse,  bl.iiiclie  et  rose. 
expose  des  rondeurs  lelleiiieiil  eiillUX ciises  ipie  I  ou  se 
|»reiid  il  douter  (iiiVlle  soit  de  François.  Mais  celle  personne 
é'i.iil  si  I  ri\  ialeiiieiil  adipeuse,  ipie  nul  porirailisie  sincère 
Il  en  efil  lire  iiieilleiii'  |i,iiii.  La  daiiie  Zaïiiel.  blalaide  a\ec 
du  carmin  aux  pommelles  comme  une  lv{r  laiib'c.  clnupie 


^  p-. 


l 


Jcjrf     i<K    /•  t  .r//j/uyi/     J^^^.'ii.   Juyfai/^if'^ 


|-UAM,..IS     Cl.dlET.    —    .h.  \N     l>E     I.I.MMONI,    S  1  K  l    K     lU      IM    H,  A  1  I.  I    Ml  l. 

(Dessin). 
(Caliiiici  lies  Estampes.) 

6 


LES  CLOUET.  83 

par  ses  sourcils  filiformes,  sa  bouche  misérable,  son  oreille 
plutôt  indigente.  Le  maître  dut  être  mal  impressionné  par 
cette  tète  froide,  voire  glaciale,  aux  lèvres  égoïstes,  et  il  resta 
certainement  insensible  devant  l'inanité  de  Mme  Liébaud, 
car  celle-ci,  tout  le  crie^  a  été  bâclée  sans  pitié.  La  bouche 
n'existe  pas,  les  modelés  sont  poussés  au  noir  du  côté  de 
l'ombre  et  l'indication  du  costume  n'est  pas  précisément 
artiste. 

Les  costumes  de  quelques-uns  des  personnag'es  précités 
intc'ressent  par  l'intellig'ente  traduction  de  leurs  minuties, 
ttds  ceux  de  Renée  de  Rieux.  à  l'accorte  collerette,  et  de 
Jeanne  d  Albret,  ainsi  (juc  la  partir  supérieure  de  celui  de 
Marguerite.  Ceux  des  autres  sont  prestement  configurés, 
certains,  comme  ceux  d'Odet  et  de  sa  femme,  en  (jU(d(|ues 
traits  essentiels  et  définitifs.  Les  chevelures  de  Gonzague 
et  de  Mme  de  Seneterre,  la  barbe  d'Odet  présentent  de  bons 
exemples  d'interprétation  syntlu''ti(|ue:  les  ciieveux  et  la 
bai'be  de  Gondi,  de  Puigaillard  et  (h'  (Ui  Gast  des  spécimens 
de  représentation  \alant  par  le  naturel.  La  chevehnc  et  la 
coiM'tii'e  de  la  marcjuise  de  LenoncourI  constituent  une  nia- 
giiili(|iie  coiitexlnre  de  dt''lails. 

11  va  sans  dire  (|ue  les  cai'actères  indix  iihiels  des  di\ers 
portraiturés  dont  il  ;i  ('•l(''  ([uestion  sont  excellemnieiil  iiia- 
tiifeslés. 

On  reconnaît  en  Krancois  de  Golignv  un  morose  s'en- 
nuyaiil  a\cc  (ligiiit('',  en  Gas|»ard.  le  moins  sinisti'e  des  trois 
frères,  en  (h'pil  de  ses  Ncnx  daigle.  un  (''iu'rg"i(|ue  jns(|u'à 
la    dureti',    en    Odet    un    opiniàti'e   acariâtre,    un    fâcheux 


84  LES   CLOUET. 

solennel.  LN'pouse  de  ce  dei'iiiei-.  ;iii  eoiilraire,  n  1  air  so- 
eial)le.  Ses  prunelles,  où  seiuhlr  luire  un  crf'pLiseuIr  Meuis- 
sant,  son  nez  et  ses  lèvres  in(li(]ueul  une  cfrlaiiie  honh'. 
Les  yeux  châtains  de  Marguerile  laissent  voir  quelque  ten- 
dresse et  déjà  force  sensualité.  Robeil  de  la  Marck  respire 
la  fraiicliise  el  la  niarlialit»'.  La  vulgai'ih'  (riienri-Uoherl, 
au  nez  légèremcnl  de  lra\ers.  est  Iraduile  sans  euplié- 
niisnie:elle  est  nn^iie  [)lut(M  corroborée  pai'  son  clia|)eau 
endenii-cloclie.  DesArpentis  reflète  les  qualih's  d'un  brave 
homme.  L'épais  Sti'ozzi,  avec  son  l'ecai'd  ('leint  el  ses  (raits 
résolus,  décèle  un  bizarre  mélange  de  vigueur  physique  et 
dinhibilion  morale.  Les  yeux  dacier  de  Jarnac  n'inspirent 
ni  confiance,  ni  sympathie.  Les  yeux  félins  de  du  GasI  ont 
inie  lueur  qui  ne  dit  rien  (jui  vaille,  son  nez  un  lanliuel 
retroussé  dénote  une  propension  à  la  médisance,  au  men- 
songe, et  tout,  dans  son  masque,' accuse  un  espril  capri- 
cieux, insidieux,  malfaisant. 

La  mar(|uise  de  Tjeiioncourl  l'ayonne  une  inlelligenle 
gravitt'.  La  princesse  de  Condé',  au  nez  volui)lueu\'.  offre 
un  Ivpe  cui'it'irx  d"imaginali\'e  scej)li(jU('.  lMiilip|»e  de  .Mon- 
lespeddu.  dame  d  liounrur  de  (lai lierinr.  parait  excessive- 
mcnl  c()ii\  aiucuc  de  son  nu|»(irlaiice.  mais,  malgi'c' ses  pr('- 
Iciilioiis.  ne  diïpasse  pas  l'orgiK'il  des  pii'es  enrichis.  La 
peu  allracli\<'  ll('lèn('  de  Tournon  iiàlc  paidc  la  riiiidiU'  la 
pelile  somme  de  dislmclion  (|ii  clic  |)ossè(lc.  j^c  uoii'àlre 
Claude  de  rALd)es|tine  a  la  uime  d  un  ii'ascilile  peu 
connnode.  1)  l'Jisabel  li.  ('mane  une  1res  lirande  douceur. 
Les  lares  (!(;  d(''g('nér('' du  CJiailes  l\  de  1570.  I  an'  quel(|ne 


'UANTOIS     Cl.OUIOT.     —     M  VHI.lKUl  I  I-,     |.  |;     \    \lnls    ^•.',    J)fSsil|). 

(Cabine!  lir^^  Kslaiii|Ms.  i 


LES  GLOUET.  ^' 

l,ou  ingrat  .lu  d'Alenron  de  la  iiu'nic  .'po(iue  sonl  implaca- 
blement lix(-s.  Et  combien  lisibles  les  expressions  animales 
(lu  piètre  condottiere  Gondi,  de  Mme  de  Retz  et  autres 
pauvres  êtres  de  ce  genre!  Que  d'utiles  documents  humains 
dans  toutes  ces  œuvres  !  En  les  examinant  avec  soin  on 
arrive  à  découvrir  dans  la  plupart  d'entre  elles  jusqu^iux 
nuances  du  caractère.  11  y  a.  dans  les  meilleures  de  ces 
l.Mes.  des  éléments  de  psychologie  très  précieux  pour  les 

historiens. 

Souhaitons  (jue  celte  merveilleuse  .■ollection  d.'  dessins 
passe  au  Louvre,  où  notre  école  du  \m"  sièch'  est  encore 
hisuffisamment  représentée.  Les  raisons  (jui  motivèrent  Ir 
passage  aux  Estampes  de  la  collection  dr  Sainte-Geneviève 
„-élaienl  guèiv  (hscutables  :  le  sont-elles  davanta-e,  celles 
qui  Iniil  .[.'■siivr  la  translation  de  ce  trésor  inestimable  dans 
notre  grand  musée?  Là,  du  moins,  tous  les  amis  dr  I  art 
pourraient  le  contempler. 


IX 

(«•Avnr.s  or'oN  i.n  miiuiui:.   —  oi  vu.viiKs  i'KUDls. 

Au  MuséT  d.'   Chanlillv  l.'s  i)orti-ails   dcssint^s  atliibua 
1,1, -s  à  Traurois  sonl    à    p<  u    piès   une  di/aine.    Au-dessus 
.1,.    l.Mis.     il    eonvi.'Ml     dr    placer    .Tlui     dr    Marguerite    de 
Valois,     au     costume    a.iinirell.'.    C/cst     un uviv    d.'-li- 


n.'use  où  tout  exprim.'  la  j.M.nesse.   Il  seii  dégage  comme 
,,n  ravon   de    soleil  daMil.   Les  uueux    venus    des    autivs 


88  LES  GLOUET. 

reproduisent  Antoine  de  Bourbon,  roi  de  Navarre  (vers 
1348),  à  la  personnalih'  lariienienl  éci'ite.  la  niarfjuise  de 
Nesie  (?)  et  Henri  d'All>r<'l. 

x\u  Louvre,  il  uy  a  guère  (jue  (|Uiili'e  dessins  dignes 
d'aug'menter  cette  liste.  Ce  sont  des  portraits  de  Icmmes, 
dont  une  seule  jusqu'à  ee  jour  a  l'I)'  reconnue  :  Anne  de 
Beauvillier,  dame  Forgct  du  Fresne  (vers  i"J70).  Sa  l'ace 
disgracieuse  —  un  nez  insolent  5^  domine  une  bouche  exi- 
guë' —  est  celle  diine  assez  fine  mouche,  au  demeurant 
sans  intelligence.  L'une  des  jeunes  femmes,  que  dislingue 
un  escoffjon  à  voile,  rappelle  la  Renée  de  Rieux  de  l'an- 
cien album  Foulon  ;  mais  il  faut  se  (b'dier  de  ces  sortes  <le 
ressemblance,  qui,  souvent,  sur  les  sujets  au-dessous  de 
quarante  ans.  ne  liennent  qu'à  Yair  dune  ('iMMiiie.  Ces 
diverses    effigies,    sans    atteindre    à    la    perfection,    sont 


diligemment  cai-aclerisées. 


Beaucoup  de  j)orlrails  peints  sont  encore  alli'il)U<'s  à 
François  Clouet  sans  raisons  suffisantes,  tels  le  llrtiri  II 
en  pied  (\-ers  l.'.'H)  du  Lou\re.le  l'^raiirnis  II  {\vv<,  l.'ioO) 
du  Musée  de  Berlin,  le  pr('siiiiir  Dkc  ilWIcnvoii  (l.'i(iO)  à 
M.  Kro-mei"  (Paris),  la  pn-suiut'c  Mari/iicrilf  de  I  n/ais 
(vers  l.'Kio)  du  .Musée  Coudé'.  La  l'acliii-e  de  ces  011- 
vragfes  n'est  ])as  si  personiudle,  leui' soiiiiiic  dail  si  lorlc 
(ju  \\  Il  V  ail  hMiM'i'ilt'.  en  I  absi-ncr  de  docuinenls  ccrlanis. 
à  les  dire  du  niailrc  Le  Henri  //.aux  lourds  uiodtdt'S,  aux 
jaudx'S  uial  propoil  lonm'es.  scndde  loii  un  lia\ail  dcléxc 
ou  d  unilalciM'.  Le  l'iunirois  II  a  loul  I  aspccl  d  unr  coinr. 
Le    l)nc    il  Aicnrun .    exrellcule    lii^uic    jadis    au     cliriicau 


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l'iiANt.ois  Cl,..!  i-.T.  -      OhiT   1.1,  Col. n.NV  ^Dessin). 

iL'.aliinrl   (lr>  I'.sImiiiiu'S.) 


LES  CLOUET.  91 

(l'Azay-l('-Ri(loaii,  où  on  la  consi(l('rail  comme  d'Antonio 
Moro,  pourrait  bien  v\io  de  Pierre  Poui'bus.  On  sait,  en 
effet,  que  ce  caractériste  sincère  fit  une  remarquable  por- 
traiture de  ce  prince;  van  Mander  en  a  témoigné.  La 
Jlarr/iirrife,  qui  provient  de  cbez  Colnagbi  (Londres),  vaut 
par  sa  bonne  structure.  Mais  si  cette  image  met  effective- 
ment sous  nos  yeux  la  future  reine  Margot,  elle  est  idt'a- 
lisée  ou  plus  exactement  dépersonnalisée,  car  il  s'en  faul 
que  son  type  individuel  la  rapproche  des  Marguerite  des 
Estampes;  elle  en  diffère  môme  par  le  dessin  du  front, 
du  nez,  delà  bouche  et  des  arcades  sourcilières. 

D'autre  part,  les  Clouet  ayant  »'!('  1res  copiés,  on  ne 
saurait  davantage  rapporter  à  François  l'effigie  peinte  de 
Mme  de  Retz  qui  se  trouve  dans  la  galerie  Czartoryski. 
Quoi(|u'elle  y  porte  le  nom  de  Catherine  de  Médicis,  le 
doute  sur  sa  personnalité  n'est  pas  possible. car  rlb'  i-élb-- 
cliit  le  dessin  de  l'ancien  album  Foulon.  Et  cet  exemple, 
entre  beaucoup,  montre  avec  (|uelh'  légèreté'  on  [iroct'dait 
naguère  aux  attributions. 

Quelques  cravons  passent  poui'  des  copies  d'originaux 
du  maîti'e;  un  des  ]»lus  acceptables  est  le  l'rancois  de  la 
Rochefoucauld,  sieur  de  Ra\('l.  au  Louxie.  D'autres 
œuvres  ont  de  Icdies  (|ualit('s  de  coiitextuic  et  de  peinture 
(|ue  l'on  ne  doil  [tas  cranidre  de  les  classer  parnu  les  allii- 
buables  à  h'rancois.  ('/est  le  cas  du  uiiiniscule  portrait 
présumé  de  Jean  d  Albon.  seigneui'  de  Saint-André 
(Louvre)  el  du  buste  de  l'Vancois  de  Lorranie.  duc  de 
Guise  (  LouNi'e).   I^e  premier,  (|ui  date  de  la  lin  >\vs  annt'cs 


92  LES  CLOUET. 

1340,  si  nous  en  croyons  son  costume,  se  recommande 
par  une  physionomie  très  \  i\aiil('  cl  des  chairs  aux  gris 
(léhcats  :  le  second,  par  son  liarmonie  austère  ainsi  que 
par  sa  carnation  (jui  seml)le  laite  d'un  seul  ton  et  dont 
cependant  existent  tous  les  plans  ne'cessaires  (1). 

On  pouriail.  à  la  rigueur,  sans  manquer  de  resix'cl  ;i  la 
mémoire  du  maître,  reconnaître  sa  manière  dans  ([uaiie 
])0ilraits  peints  du  Musée  Conde  :  celui  d'Alhert  de 
Gondi  tentre  looH  et  1562),  ceux,  hien  secs,  de  Jeanne 
et  d'Henri  d"Alhi-el  et  celui  dun  g'entilhomme  de  la  cour  de 
Charles  IX.  On  a  vu  plus  haut  que  les  tètes  des  deux  pre- 
miers ont  été  crayonnées  par  François  (Estampes),  il  est 
donc  fort  prohahle  ([u'elles  furent  peintes.  Mais  il  ne 
s'ensuit  pas  (jue  les  panneaux  de  Chantilly  soii'ul  des 
originaux  de  notre  artiste,  et  parce  que  ses  œuvres  ont  ('h- 
heaucoup  reproduites,  et  parce  (jue  les  personnages  dont 
ils  divulguent  l'image  se  firent  certainement  porli-aire  par 
phis  d'un  peintre.  Quant  au  g'eniilhomnie.  il  jdait  par  son 
exécution  prime-sautière. 

Parmi  les  miniatures,  où  (|uel(jues   érudits  ont    ci'u   dis 
cerner  iCmpreitde  de  François,  il   en  est    une   tout  ii  l'ail 
dig-ne  dattention.   Elle  décoi'e    les  Heures    de  Henri    il  r\ 
rrpr(''seutc  ce   priiu'e  au    milieu  des    scrol'uleux   de  Saint- 
Denis  i^l). 

(1)  A  point:  11'  liiii  (If  chaii-  csl-il  irli;nissr>  di'  roux  aux  pdiiiiiicllos, 
et,  comme  le  Ion  dos  (Iciiii-loinlcs,  il  est  ingi'nieuscmcnt  ilof^radc 

(2)  Biblioliioquc  nationale,  fonds  latin,  n"  14:2!).  .\  on  ju-cf  jiar-  les 
costumes,  la  scène  des  écrouelles  a  ilù  l'Ire  exéculoe  vers  le  niilii-u 
(lu  siècle. 


LES  CLOUET.  93 

Composée   comme  par  un  caractériste  préoceupé  avant 
tout  d'expressions,  c'est-à-dire  sans  recherche  de  contex- 
lure  belk'ment  ('quilibrée,  cette  scène  constitue  néanmoins 
un  ensemble  satisfaisant.  Presque  au  milieu,  le  roi,  assez 
décoratif  en   son    costume    outremer  et  rouge    carminé, 
touche  un    iiommc   agenouillé   devant    lui;   à  g-auclie,  de 
pauvres  gens  sont  rangés.  L'architecture  est  indiquée  avec 
soin  et,   chose  plus  remarquable,  il  y  a  une   atmosphère 
dans  le  monument.  Les  tonalités,  oij  dominent  les  gris, 
forment  une   harmonie  sobre  et  tine.  Le   manteau  violet 
et  la  tunique    marron   jauni  du  pauvre  que  touche  Henri 
n'attristent  pas  le  regard:  la  robe  carminée  du  cardinal  de 
Guise,    qui  se  lient   à   droite,  le   vêtement    noir  d'un   sei- 
gneur, son  voisin,  ne  détonnent  point.  Les  nuances  légè- 
res delà  partie  supérieure  (b'  bi  basilitjue,  les  rellels  rosés 
du  surplis  du    prébd    témoignent   dune  sublib'   vision  de 
peinde.  Les  tètes  des  divers  personnages  vivent  normale- 
ment, mais  quelques  j)ieds  clio(|uent  par  leur  petitesse,  et 
le    susdit    seigneur  est    du  ne    longueur   démesurée.    J'ai 
peine  à  croire  (pie  h'rancois  ail  conunis  de  telles  dispropor- 
tions. (|uoi(|ue,  je   b'  lépèle.  un  maître  se  laisse  allei'  pai'- 
l'ois    à    (l"inconci'\  ailles    lu-gligences.    l'^ri   loul    ras.    on   ne 
|)eul.    en    se   basani    exclusivement   sur  l'étude    de     celte 
page,  l'allribuer  au  uiaitre.  Nous  n(>  comiaissons  ses  (pia- 
lités  fie  uiinialurisle  (|ue  yixv  des   |iorli-ails.  les   poiuls    de 
comparaison    iu)us     maïuiuenl    donc    pour    di-couxiir    sa 
main    dans    une   coiiqiosilioii.    liornons-nous    à    constater 
(jue    celle    scèue   des  écrouelles    l'emporte    sur  celles    (|ui 


94  LES   CLOUET. 

rontourciit,  non  si'ult'iiienl  j)ar  sa  l'aclui'e.  mais  aussi  par 
son  cncadreinent  ornemental  d'un  si  joli  lour  Uciuiis- 
sance. 

Peut-être  découvrira-t-on  demain,  en  cxploi-ant  des  ai'- 
ehives,  que  tel  ou  hd  portrait  dr  musée  esl  un  Franrois 
Clouet,  mais  on  ne  retrouvera  jamais  sans  doute  certaines 
j)eintures  (jue  Ion  sait  avoir  rlr  réalisc-es  par  le  maîtic 
et  qui,  depuis  longtemps,  ont  dispai'u  :  le  j)orlrai(  de 
Léonor  d'Orléans,  duc  de  Lonj^ueville.à  vingl-cincj  ans,  et 
une  série  de  tableaux  à  sujets  divers  ayant  tiait  à  l'histoire 
de  Henri  II  et  de  Catherine  de  Médicis.  Le  Léonor  (["Or- 
léans ('fait  regardé  par  Gaignières,  qui  le  posséda,  connue 
un  authcnti(|ue  François,  et  l'on  jM'ut  se  lier  à  cet  ama- 
teur soucieux  de  l'oi'igine  des  œuvres  qu'il  acqu(''rail. 
L'imag^e  du  jeune  duc  nous  est  à  moitié  n'vt'dée  par  une 
copie,  hélas  vulgaire,  du  dessin  original  dont  se  ser\  it  le 
maître  pour  exécuter  le  portrait;  on  la  conserve  aux 
Estampes  (1). 

Quant  à  la  Sf-rie  de  peinlm-cs.  nous  la  connaissons  par 
Y  Inventaire  (/rnêral  des  lablcau,v  du  liot/  (juc  lit.  en 
1709  et  1710,  le  sieui'  Bailly,  «  garde  desdits  tableaux  ». 

Ces  tableaux  mesuraient  IT)  pieds  de  haut  sur  7  \\  !•  de 
larg'e.  On  ignore  ce  (ju  ils  sont  deNcnus:  L.  de  Laborde 
supposait  (jue  Mar'ie  de  Mé'dicis  se  les  ('lail  a|)pr()pri('s  el 
les  avait  lait  placer  an  Lu\end)Ourg".  On  ne  saurai!  tro]» 
regretter   la    dispanlion    de    ees    (euvres:   bien    \('iuies    on 

(1)  lierueil  de  Uaii/iiièrr.s,  (l,i  17.  loi.  :i3. 


LES  GLOUET.  95 

nianquées,  elles  achèveraient  de  nous  renseigner  tort 
utilement  sur  les  dons  et  le  savoir  du  maître. 

D'après  L.  de  Laborde,  il  faudrait  aussi  reg^arder  eonune 
perdue  une  autre  peinture  de  notre  artiste  :  reffigie  du  petit 
duc  d'Orléans  décédé  en  lo4y.  Enfin  plusieurs  ont  attribué 
à  François  un  portrait  du  jurisconsulte  René  Choppin 
en  1570,  dont  une  gravure  de  J.-Cli.  Flipart  serait  la 
reproduction.  Cette  estampe  étant  d'un  métier  très  qutd- 
conque,  on  n'en  peut  faire  état. 

Quelques  miniatures  du  maître  ont  également  disparu, 
elles  portraituraient  Catherine,  Giiarles  IX,  le  duc  d'Alen- 
çon,  le  futur  Henri  III  et  Marguerite  de  Valois.  Oll'ertes 
en  cadeau,  vers  la  lin  des  années  looO,  à  Elisabeth,  reine 
d'Espagne  (1),  peut-être  ont-elles  échappé  à  la  destruc- 
tion. C'est  suî'tout  chez  nous  (jue  les  œuvres  des  Clouet 
tombèrent  entre  des  mains  barbares.  Nojnbre  de  leurs 
peintures  ont  dû  jx'rir  ou  échouer  chez  des  brocanteurs 
au  moment  de  la  tourmente  révolutionnaire. 


X 


I.KS    l'KlMUKS    1)1     \\f    SIKCLK 


Un  riipi<le  coup  (['(ril  siii'  les   peintres  cont('ni|i( iraiiis  de 

François    acIièNciM    de    mcltre    m    lumière  sa   \aleiii'  et   sa 

personnalil('.  Il   y   a    pt'iiuiie    de    renseigriemeiils  sur  nos 

artistes  du  wi'  siècle,  toutefois  les  documeiils  rtdatifs  aii\ 

[l]  Négocialions  sous  I^'i-ainois  II,  DocuiulmiIs  iiu'(li(.s.  p.  SliT. 


96  LES  CLOUET. 

mis  cl  les  ci'uvrt'S  (lu  (|U('l(jiics  aiilrcs  nous  jx-i'iiicllciil  dr 
coiislater  qu  ils  rtaieni  en  assez  grand  iioiiihre  et  (|ue  heau- 
(■oii|)  pnss('(laienl  du  laleiil. 

Guillaume  Jioultdou  (né  h  lilois  au  commencoinenl  du 
siè(de).  axaiil  dClre  iiounM('  peintre  du  roi,  avail  elt-, 
dès  l.'))^!),  celui  du  daupiiin  Franeois  d'Ang-oulème.  Son 
seul  dessin  connu,  le  jtorirail  du  fou  Thonyn  (Musée 
Condé),  quoi(jue  un  peu  fVèle.  ne  manque  pas  diiili'i'èl. 
11  date  de  l.'»(i(l:  vingt-trois  ans  plus  lard,  Boulidoii  \i\ail 
encore  et  lra\  aillait  pour  (lallicriiic  de  AL'dicis.  Il  a\ail. 
à  ses  débuts,  peint  quelques-uns  des  stucs  de  h'onlaine- 
i)]eau:  mais  s"('lant  sjx'cialisé  très  lot  dans  la  poi-lrailure, 
il   ne   ressenlil  point  linlluence  du  Primatice  (1). 

.Moins  heureux,  Jean  Cousin  (n('.  lui  aussi,  dans  les 
premières  anné'cs  loOO,  <à  Soucy,  près  de  Sens),  l»a\a  Iri- 
l)ul  il  ritalianisme.  du  moins  danS'Ses  compositions  ;  son 
J/fi/c//i>'/i/  (Icfiiicr  du  Louvre  et  ses  scènes  gravées  en 
fournissent  la  jiieuve.  Mais  deux  poriraits,  (|ue  loul 
autorise  à  croire  de  sa  main,  se  recommandent  |»ar  des 
qualih's  hieii  françaises  el  \alenL  le  prcniier  surloul.  par 
leur  jxiissance  expressive  ;  ils  repr(''seiileiil  sa  tille  Marie  el 
son  heau-frère  ,1.  Bouvyer  (collection  V.  Houvyi'i-).  Sans 
doiile  <inl-ils  ('lé'  i-('alis('s  vers  le  mdieu  du  siècle,  alors 
(pie  leuraiileiir  se  lrou\ail  dans  la  |(l(''nilude  de  ses  lorces. 

L(''oiiard  Li sin  (Limoges,  nci's    I  .■»().")- 1 ')77  )  n"(''lail  pas 

(1)  On  sait  enfin,  par  un  coniplc.  iiu'il  oxécuta.  en  l.'ioli,  divorsos 
puinlurcs  néccssaiios  à  la  IragéditJ  (]ue  l;i  reine  fil  jouer  à  lilois  celle  nn^nie 
anniîc. 


/  .. 


,-'.^-, 


;/ 


^bJ^" 


hoLil    H,„>hv,lk,  ^.>rm.n.^  L„r,iu>,.i  ■'•   Ôoiu/Zo^i ,   >'f/^,  ,„  vi-?/ 


u\M.(M>    (:i...ii;ï.    -IsMir.u-    i.  r.   Il  m  tk\  1 1  i  k     Dessin^. 

(Cahiiirl    (les  Kstiuii|ics.  | 


LES   CLOUEÏ.  99 

seulement  einailleur,  il  peignait  aussi  sur  panneau  et  gra- 
vait sur  cuivre.  On  a  vu  qu'il  fut  nommé  valet  de  chambre 
(lu  roi  en  1548  :  c'est  surtout  à  partir  de  ce  moment  (|ii"il 
exécuta,  croit-on,  ces  portraits  à  l'émail  aux(jiit'ls  il  doit 
sa  grande  rt-puLation.  Quelques-uns  —  tort  peu  —  ont  t'ti' 
réalisés  d'après  ses  propres  dessins;  de  ce  nombre,  le  su- 
perbe Montmorency  du  Louvre,  dont  le  crayon  trrs  artiste 
enrichit  le  musée  Dubouché  à  Limoges.  Quant  à  runi(|ue 
tableau  (jui  nous  le  révèle  comme  peintre,  /.' Incrédulité 
de  saint  Thomas  (  1551,  Limoges),  il  prouve  que  cr  maître 
es  arts  du  feu  n'était  pas  doué  pour  arranger  des  figures 
et  accorder  des  tons. 

Nicolas  Denisot  (1515-1559),  esprit  très  cultivé,  ne  se 
consacra  pas  entièrement  à  l'ai't  et  sans  doute  produisil-il 
en  x\ngleterre,  où  il  passa  de  longues  années,  autant  (ju  en 
France.  On  ne  connaît  de  lui  (|u'un  portrait,  encore  est-ce 
par  une  gravure  sur  bois  :  il  nous  fait  conteinpiei-  Mar- 
guerite de  Valois,  i-eine  de  Navarre,  en  son  dt''(din.  Le 
xvlograpiie  a  traduit  avec  une  heureuse  sollicitude  celle 
fine  interprétation,  (jui  [)are  ini  li\i'e  exécuté  par  liois 
élèves  du  peintre,  les  sœurs  Seymour  (1). 

Geolfrov  Dumonstier.  (|ue  I  italianisme  a\ail  alleinl. 
S('vil  il  h'onlainebleau  de  |.").'n  à  L'iiU  ['1\.  De  ses  li'ois  lils. 
égalemeiil    peintres,  1  aîné,    liitienne  (1 5:20-1  (iO.'iK  fut  \alel 

(l)  /.(■  Totnbean  i/r  Miif'/iifritc.  l'aris.  Miclirl  Fezandal  ri  HnltiMl 
Gaulon,  15."):).  iii-S.  IJiliJiolli.  iiat'",  imprimés  Y.  laiiG.  résurvo. 

("2)  Il  n'csl  (lue  le  sccdiid  de  la  dynastie  des  numonslier,  le  ciii'l'  en  (•>t 
Éliciiiie  h'",  dont  on  sait  ijeuleineiil  iiu'il  participa  auv  travaux  do  Gaillon 
en  1501. 


100  LES  CLOUET. 

lie  cliaiiildc  îles  (jiialif  (Imiicrs  N'alois  cl  ilc  llciiri  IV. 
cl  (-(tsiiic.  le  cadcl.  cul  une  cliarprc  ii|ciili(|uc  aiipics  de 
(ialiierine.  ('csl  de  lui  (jue  ua(|uil  Daniel,  en  l."»7i  :  de  la 
dvnasiic  des  Dunionsliei'.  il  dcxail  dcscnir  le  |ilu.s  ccIMji'c 
mais  non  le  |)lus  artiste,  ('.eux  de  ses  dessins  (|ui  nous 
sont    paiNcnus  ne  dt'pussciit  pas   1  lionnelc  traduction. 

Antdine  Caroii  (IJcauvais.  vers  l.)2  i- I  .'>'.lll  i  lui  île  ceux 
i|iii  s'italianiscicnl  couijilèlcnicnl,  aussi  l»(''n(''licia-l-il  des 
lionnes  gi'àcos  de  Callicrine.  Pendant  les  ainu-cs  l')")î)  cl 
l'ilîd.  il  proct'da  au  «  laliVcidiisscnienl  »  de  ((uel(|ues  pein- 
fures  à  Fontainebleau,  |)uis  coinniil.  sous  le  liiie  A //is- 
loirc  (lA  rl/i'-inisr.  une  suite  de  1  rcnlc-neulCoinpdsilions 
à  la  séj)ia.  tlit'àlralcs  cl  rénuniscenles,  en  I  liomieur  de 
lailile  reine  itlahiiiet  des  Estampes^.  Ku  outre,  il  a  c('d<'I)rt' 
des  Irioinplies  dans  une  autre  st-ric  de  dessins. 

Coi'iiélis  de  la  Haye,  coinniuiK'iuent  app(d('-  ('orncillc  r|c 
Lv'on,  s'était  t'talili  die/,  nous  d  assez  lionne  heure.  Les 
ar(dn\('s  Iviinnaiscs  nous  ont  apjiris  (juc  le  daupliin  lavait 
(diniiic  peintre  en  l'iiH  et  que.  onze  ans  plus  lard,  il  lut 
iKMunie  peintre  en  tille  de  Ijeliri  II.  Lcs  dons  (jii  il  tenait 
(le  sa  race  ne  i'is(|uaieiit  pas  de  s'allci'cr  dans  le  tcri'oir 
lui^iluiiieii  dû  I  intcrprelalioii  smccrc  cl  um'I  iculeu>c  des 
l'orines  a  toujours  ('■!(•  en  honneur:  mais  avant  ncj^ligc  le 
dessin  pour  la  |icinlure.  il  narrixa  |ias  ;i  une  hidlc  puis- 
sance d  ex|iressi(iii.  Ses  poi'trails  aut lient  i(|ucs,  ceux  du 
(laujihin  |- lançois  d  Aiii:tiuh~'UU',  vers  l.'iiiili  (uuisée  ("midé), 
de  MarilUerite.  dlliliesssc  de  SaXdic  liil.).  de  .lac(|U«diue. 
mar(|uise  de    Kdtlndin  iimuscc   de  \  ci'sailles  i.   de    Louis  de 


LES  CLOUET.  loi 

Montponsici'  (  i(l.  I.  d'un  jj-snido-diic  de  Aloiitpriisiri'.  (|iii 
dalc  de  la  lin  des  aniit'es  loiO  (iiiiisi'c  (".oml(''),  intéressent 
par  leur  vie  et  leurs  souplesjeux  de  pàfe  ;  tous  pèchent  par 
leur  structui-e  (  1  ).  De  in(Mne  les  nieilirurs  des  portraits  (|ui 
lui  sord  raisonnablement  alliiliiiés:  celui,  prt'sunit'.  de  la 
niai(|nise  de  I{ollielin.  Ncrs  lo48  [Il  M.  Avnard,  Lxoni. 
celui  de  la  duchesse  de  Savoie    (inusée  de  Versailles). 

Le  Jilésois  Jean  de  Court  axait  eu  jiour  premier  maître 
Léonard  Limosin.  Après  avoir  remplacé  son  père  Jacques, 
en  l.")72.  comme  [leiiilre  allacli(''  aux  t-cuiàes,  il  succt'da 
deux  ans  plus  tard,  à  noire  |-"ian(;ois  dans  sa  (diaru'e  de 
peintre  (lu  roi  (2).  En  I.jTI.  il  axail  [loilraituiM'  le  l'utui- 
Henri   III. 

Fi'an(;ois  Quesnel.  né  en  l'iii.  .à  Kdindiouri:.  dun  [)ère 
(pii  desceiidail  d  une  \  ieille  laniillc  écossaise,  lui  idext'  en 
hrance  el  s  \  li\a.  ()n  lieiil  poiii-  li'ès  plausible  (pi  \\  a  rt'-a- 
lis('  1  exjiressd  porirail  [lemi  d  inconnu  de  1  ancieime  col- 
lection Antonin  Proiisl  el  diverses  elii^ies  cravomu-es. 
doiil  plusieiu's  aii'n'ahleiiieiil  l'crites.  celles  de  l*'ran{;ois. 
duc  d  Aleiicoii.  Ncrs  I'mSI).  de  Keiiaud  de  IJeaune.  l'iNî*.  de 
Galuiidle  d'i^slrees  \ crs  l.'lîlO  (l'estampes)  et  de  (îeorges 
lialioii.  coiiile  de   Sai2'oinie   ([^ouNi'e)    {'.\].   (Vt'tail   un  (-lève. 


(I)  (lis  iKirliaits  liiLMil  |i;irlic'  <lr  i,i  coili'cliDU  t\r  Gaignioros.  où  ils 
(iiiuiaii'iil  ((iiiiiiu'  t\iis  iiMivies  aiinii'Mlii|iics  tic  CitriU'ille. 

[d)  VA  alors  son   liis  Charles  jwil  sa  place  aux  écuries. 

(3)  lin  outre,  on  lui  alliiliue  li-s  carions  dos  tapisseries  consacrées  aux 
Fètos  tic  liriii  i  III.  coniposilions  allrayanles,  plus  liarnionicuscs  ciuunie 
accoi-ils  lie  lini.ililes  —  beaucoup  soni  déleclaMes  —  que  comme  arraiifie- 
meiils  lie  lignes  (muséi>  (\(i:i  tapisseries  de  Florence). 


102  LES  CLOU  ET. 

un  (lisriplf  mrnuMle  François  (îloïK'l.  Do  sos  flonx  fivrcs. 
Nicolas,  adomu'  au  blason  on  même  l('m|)s  (ju'au  poilrail, 
et  Jacques,  spécialisé  dans  Tliistoire,  il  ne  reste  rien, 
croit-on.  Rien  non  plus  de  leur  père,  Piei-n-  Quf'snrI.  Au 
moins  sait-on  quil  avail  composé,  pour  It-glise  des  Grands 
Augustins  de  Paris,  un  carton  de  verrière  représentant 
une  Ascension  où,  près  des  personnages  traditioinicls. 
se  voyaient  Henri  II  et  son  ('pouse. 

Au  milieu  des  ann^'es  l.'idO,  on  trouve  encore  Etienne 
Martelange,  auquel  on  donne  la  Bianca  Capello  de  Ver- 
sailles; Jean  de  Gourmont,  banal  metteur  on  scène:  Sci- 
pion  Bruisbal,  témoin  au  testament  (b;  François  Clouol  ; 
b'  Lorrain  Pierre  Woériol.  (jui  séjourna  longtemps  en  Italie 
et  finit  pai'  s'installer  à  Lyon.  Puis  c'est,  dans  le  dernier 
quart  du  siècle  :  les  peintres  aux  gages  de  Catborine,  gens 
de  métier  plus  ou  moins  avariés  par  l'italianisme,  Jacques 
Patin,  dont  il  subsiste  dimbgontes  g-ravui'os  relatant  les 
phases  du  ballet  de  Circé  représenté,  en  Kj81,  aux  noces 
(TA.  de  Joyeuse  ;  Pierre  Gourdello,  gcnilro  de  Caron.  Keni'' 
Tiborg'eau,  Pvramus  Lucas,  Gontien  lîourdonnais.  Nico- 
las Leblond.  Los  italianisarits  (b''g('iu'it's,  Toussaint  Dii- 
bi'euil  (!')()  I  ?-l(i(l2)  sc(Miarisle  adliizcinl  :  Jacob  liunel 
(l.'i.'iH-lGli),  (|ui  s  ellorça  ilu  moins  d"(Mre  un  [lortiailisle 
sincère  ;  Martin  Fi-c-minot  (I;)(j7-101î)),  aux  groupenienis 
empliali(jues  :  Henri  Guigne  ou  Guigonis,  bien  nul  si 
tous  ses  ouvi'ag'os  rossenddaieni  aux  Adorai  ions  de 
.M.  <le  Lainollie  lAxignoni.  1^1  les  aull'es  decadeiils. 
Ueiijamin  F<julon.  (jui  ligui'a  dans  les  l'Ials  di-  la  maison  du 


L?:S  GLOUET.  103 

roi  (lès  lo77  cl  <I('viii(  en  1609  valet  de  cliambre  de 
Henri  IV,  Antoine  de  Recouvrance,  que  compromet  une 
médiocre  PrMication  de  saint  PauJ (h  M.  Scordel,  Cliau- 
mont),  Lagneau  ou  Lanneau,  dont  trop  de  crayons  ont 
écliappé  à  la  ruine  ! 

X  côté  de  ces  peintres  aux  noms  sauvtLs  de  1  oubli,  que 
d'autres  artistes  dont  on  m»  comiaît  (jue  certaines  œuvres! 
Assurément  on  peut  admettre  que  quelques-uns  des  por- 
traitistes précités  ont  fait  les  effigies  si  l)ien  caractérisées 
de  Claude  de  France,  duchesse  de  Lorraine,  aujourd'hui  à 
Munich,  (Ui  vieillard  que  conserve  M.  Thiéhault-Sisson,  <lu 
seigneur  anonyme  (jue  possède  M.  Aynard  ;  et  aussi  l'es- 
timable Henri  il  en  pied  des  LIfïizi,  les  ti'ès  bonnèles 
Charles  IX  éphèbe,  de  Windsor,  el  Cossf'-Biissac  (?)  de 
la  National  Gallery,  les  non  moins  bons  Heini  II.  Fran- 
çois il  et  Fran(;ois  lil  de  La  Rocbetoucanld  du  Kuiisl/iis- 
forisr/zt'  /fof'//nfs/'i////  Ac  Vienne,  les  lypitjues  archiducs 
Philippe  et  Marguerite  (rAutri(die  de  MM.  Agnew,  le  curieux 
Ronsard  du  Mus('e  de  lilois.  maints  poilinils  du  Lonxre. 
de  Versailles  et  de  Chantilly. 

Mais  Idul  |M)rle  à  xoir  d  antres  |)ei"Sonnalil('s  dans  les 
auteurs  de  /a  l  /n-t/c  l'iilrc  (/cit.r  (londlcu rs  iLonxrei  el 
de  lexcidlenl  M(inatj<>  nii/slitiiif  \\  M.  \(Mi  Kautniami 
(liei'liu)  altribuc'S  sans  raison  ;i  Perrt'al.  de  \  Aii</r  ittirhiiil 
(I  Alnuthitin  (\\  la  comlesse  Durrieui.  du  Cul rniri'  expi'es- 
sit"  mais  un  p(Mi  conN cnlioiUKd  (à  Mlle  .Nitdi.  delà  femme 
alh'gorisanl  la  l*ai\  (nuisc-e  d  "Amiens)  aux  Ions  de  |»(M-ce- 
laine.de  la  haine  à  sa  htilclh'.  aimable  nn  i  à  M.   Ilaxanli. 


loi  LES  CLOU  ET. 

(le  la  Diane  aux  Irois  suivantes  (iiius(M'  "le  Rouen), 
ilaliancrie  assez  hieii  arrangt'e.  de  la  Danse  du  mai/  el  de 
kl  (loupe  (à  M.  Tlu'venin),  où  1  un  (h'iuèle  une  cerlaiue 
recherche  de  sincei'itr. 

Et  si  (h'jà  h^s  arlisles  altondaient  à  Paris,  on  en  cornp- 
lail  (les  h'gions  encore  dans  maintes  villes  du  loyaunie. 
(juehjues  juovinces  conservaient  leui's  ('coies,  cl  (|ue  ih' 
lahleaux  en  sortirent! 

A  Lvon,  foyer  d'art  intense  depuis  au  uioius  Charles  YIU, 
les  interprètes  de  la  ligure  se  distinguai»'!)!  dans  Ions  les 
genres.  Malheureusement,  il  n'existe  plus  (jue  très  ])eu  de 
peintures  de  I  (''pixjue  des  deruiei's  \alois:  la  meilleui'e 
est  une  sigiulicalive  sainte  (lalJierine,  exécutée  en  Kj()7 
]iar  Claude  Tiuinel  et  travailh'c  counue  un  poi*li"ail  (uuisée 
de  Lyonj. 

Plus  nomhreux  soni  les  ouvrages  hourguiguons.  et 
jjresque  tous  se  recommandeni  par  la  \ie  rohusie  de 
leurs  ligures;  telles  la  Vicrt/e-nn'-n'  au  danaleur  de  .\.-l). 
de  Dijon  (has  eôh'  sud),  la  Messe  de  saini  drét/aire 
(vers  1520)  aux  t\pes  trac»\s  dureuieiil  mais  ex|ti'essi\  eiiieiil 
(au  due  de  liaull  reiiioul  I.  (elle  /a  Cj'ne  i  uu'Uie  ('pi^iue. 
Nolels  de  la  sacnslu'  de  .\ol  re-l)aiiie  de  lioiu'g  I.  où  se 
retnai'(|ueid  siii'Ioid  les  edigies  des  donaleiii-s  el  de  leurs 
e  I  d  a  1  d  s . 

Dans  Auuens.  (|U(d(jues  dt'eoraleurs  ('laienl  caiiahles  de 
liieii  liiiiirer.  on  le  eonslale  par  les  Si/ji/Z/es  de  la  cailie- 
dl'ale.  D  adiré  pari,  une  eoiilViTie  lil  h'-raire.  celle  de 
Nolre-Danir   du   l*ii\.  eneoii ragea 1 1    les   peinlres    locaux    en 


<\' ... 


.,#■ 


V 

'     \         ■ 

■  ^-5  0 

"^''^'""^    Ci.'M  ,  ,.    _    M,,,,|.;   SiiAui    (l).w.in 
(C.iliiiici  (ii-s  listamitcs.) 


LES  GLOUET.  101 

leur  (leniandant  d interpréter  les  thèmes  des  ballades 
auxquelles  elle  accordait  des  récompenses.  Aucune  des 
interprétations  parvenues  jusqu'à  nous  n'est  attachante: 
mais  il  n'en  faut  l'ien  inférer  de  péjoratif  ;  avec  des 
sujets  imposés  de  la  sorte,  on  nohtient  guère  que  (h- 
piètres  résultats.  Deux  volets  de  triptyques,  oii  se  profilent 
un  seigneur  et  une  dame  en  costume  de  1540  (à  M.  Heugel. 
Paris),  montrent  qu'il  y  eut  en  Picardie,  comme  ailleurs, 
d'excellents  portraitistes. 

Le  Ponthieu  avait  ses  peintres,  connue  on  le  voit  par  les 
deux  panneaux  datés  de  lool  qui  représentent,  d  une  faron 
vulgaire  mais  xigomvusa,  /a  Peste  «T^o/z/e  (Saint-Nicolas, 
Avesnes).  Le  Yelay  avait    les  siens,  on  peut  h'  supposer, 
d'après  les  figures  qui  symbolisent,  non  sans  bonheur.  b>s 
arts  libéraux,    dans  le  bâtiment  relié   à    la  cathédrale  thi 
Puy,  et  d'api-ès  le  tal)leau  votif  du  musée  Notre-Dame  où 
se    trouvent  rt'unis   r('vè({ue  de   Senecteiic   el    son    frèi-e 
François  avec  la  femme  et  l'enfant  (h'   cekii-ri   (l.jHi).  De 
même  le    Poitou,   (hinl   un   certain  Mèrevaclie  était   «  l'A- 
pelle  »,  dans  la  j»remièi-e  nioilit'   (ki  siècle,   selon  Sct-xole 
(le  Sainte-Marthe.  Lt,  dans  (iuel(|ues  terroirs,  l'école  locale 
s  augmenlail     de    professionnels     ncuus  d  ailleurs.     Lyon 
donnait   l'hospitalih'  au    lialave  Corneille,  au     Pii-nionlais 
(leorges    Reverdi,    à   d'autres    encoi-e  :    Avignon,    où    le 
Laoïmais  Charonloii  el  le  Limousin  Villate  s'élaieiil  li\('s;ui 
siècle  [ii-('cédenl,  avait  accueilli  Simon  de  (".hàlons. 

Les  iuùlaleurs.  les  iidlueno-s  leiiaient.  coiniiie  à  chaque 
épO(|ue,    une   place    ('•nonne.   La     \  isihiluui   et    la    /*rrsr/i- 


108  LES  GLOUET. 

talion  <1u  miis('r  de  Màcon  nous  apprcnnoiil  l'existence  de 
pasliclieui's  allanlés  des  qualtrocentisti.  Les  (jualre  sa^ ou- 
roux  iiiolif's  lirt's  de  la  h'gende  de  Sainte-Marguerile  (au 
roi  l'jloiiai'd  Nil),  nous  doinieni  lieu  de  croire  que  les  ar- 
chaïsants  ne  disparaissaient  pas  vite  (1).  Bourdiclion,  Cou- 
sin, les  Clouet  (surtout  François)  avaient  l'ail  ('cole;  Cor- 
neille était  d(''inar(]ii('.  El  ceux  qui  rt'pi'taieni  nos  artistes 
ou  tàchaienl  de  s Cn  inspirer  opposaient  peut-(Mre  une 
masse  égale  en  nombre  \\  l'armée  des  coi'y])li<'es  el  des 
suivants  du  Prinialice. 

Tant  dœuvres  disséminées  dans  les  musées  et  les  col- 
leclions  prouveni  (|ne  notre  wi"^  siècle  fui  une  ère  de  lions 
poi'traitistes.  Les  mieux  doués  des  peiiilres  daloi's  sonl 
des  interprètes  de  physionomies  ou  des  compositeurs  de 
scènes  désireux  de  liien  Iraduii'e  des  individualih's.  Aussi 
leui's  lra\aux  sonl  ils  liés  utiles  j)Out'  1  étude  des  c;nac- 
ières  de  noire  race;  |-eleuons-en  les  meillein's  el  nallen- 
dous  jias.  pour  piiNcr  un  Irihul  daduiiralion  \\  ceux  des 
inconnus,  de  saxoir  (|ui  les  ;i  consiruils.  Ou  iuip(ule  le 
nom  de  liuileur  si  louni'e  esl  helle  !  I  lahil  uons-nous 
donc  ;'i  Itaser  noire  l'esjx'cl  eslli('li(|ue  sio'  la  sonnue 
d  arl  des  (r-uxres.  non  sur  le  degrc'  de  (•('■l/'linh'  de  letn's 
auleurs. 

(I)  l'lii''iiiiiiii''iii'  ruiiiiiiiui  à  luiis  1rs  pays.  Il  y  a  liiiiimif^  ilr>  .iili^lcs  m 
irlaiil  (l'un  (Iciiii-siccli'  ri  (|iii'|i|ii('s-ii:i>  n'en  son!  jias  iiinins  ili'iccla  Mes. 
<;uMli'iil()iis-nniis  lie  si;,'nalrr  (lcu\  rxcmpics  :  ni  dilà  des  Alpes,  Saiio  di 
Pictro  (pii,  en  jilrin  \v  .siècle.  salLaehe  à  cdniiiiiiii  llinrin.  sans  pnUsstM' 
pins  loin  s;i  liihniijne  ;  au  delà  des  Ardohnes,  .luacliun  l'ilciur  ■|iii.  an 
ti'ni|)S  de  Otienlin  Massij.s,  i)er.sisle  dans  les  eririmnl-  di>  \an  di  i  \\(  vdni 
l'I   de  'riiieiiN'  itiiiils. 


"/  _-    -. 


!? 


-mm^    'ti^i 


i 


J- 


H^»uV  w^6t/'<«wC  i*.f^tuuj. 


l'KWCdis    C.i.diKr.    —    M  V  m,  I  I  III  1  I.    i>  I      \\inis    J)i-s>iii 

(Cabinol  des   l'.-laiui)es.) 


LES  GLOUET.  111 

XI 

LART    DE    FRANÇOIS.    —    SON     INFLUENCE.    SES    ENSEIGNEMENTS. 

Enfin  concluons  que  si  François  Clouet  n'est  pas  le  seul 
^Tand  portraitiste  de  son  époque,  il  apparaît  du  moins 
comme  l'un  des  plus  grands.  Ses  peintures  certaines,  ses 
dessins  incontestables  sont  vite  comptés,  on  l'a  vu  :  c'est 
assez  cependant  pour  nous  permettre  de  reconnaître  en 
lui  des  dons  exceptionnels  et  une  force  peu  commune. 
Parmi  les  ouvrages  sauvés,  on  chercherait  inutilement 
une  tète  qui  l'emporte  sur  ses  effigies  culminantes.  Et 
malgré  que  l'on  puisse  supposer  l'existence  de  maîtres  in- 
connus, il  est  pres(jue  impossible  d'admettre  (|u"au 
nombre  des  travaux  détruits  il  y  ait  eu  des  portraits  supé-- 
rieurs  à  ceux  (ju'il  dessina,  (-ar  peu  de  maîtres,  au  coui's 
des  âges,  ont  bâti  et  vivifié  des  tètes  avec  plus  de  succès. 
lîoutelou,Denisot,  ,1.  deCourt,  F.  Quesnel.  d'autres  encore, 
ont  peut-être  acconqdi  d'inqji-essionnantes  choses;  il  serait 
sur|)renant,  s'il  leur  ai'i'iva  parfois  de  (  licf-ircrm  icr.  ipi  il 
nCii  resjj'il  pas  imMue  mi  soiiNcmr  dans  (|U('I(|U('  iexie. 

L  inlhieiicc  (h'  h'i'anrois  Cloiicl  lut  bienfaisant»',  cela  res- 
sort (h'  (h'ssins  cl  (h'  priiil  iirt-s  assez  notables  jutur  qudn 
ait  pu  les  croire,  pres(|ut'  tous,   ihi  maître  liii-mt-mc. 

Sans  (h)ule  maints  imitateurs  exagéi-èrciil  les  (jt-laiils  du 
maître  en  abusant  des  dcloK'alions  sè(  lies,  des  détails  ini- 
crosco})i(|ues,  des  tons  plats.  (h''la\(''s.  iiiiiloiiiics.  licscllrl^ 


112  LES  CLOUET. 

inoiiocordcs,  romino  fit  le  pciiiln-  ilr  lu  Chiidr  «le  Bcaunc 
(lu  Louvre;  sans  doute  d'autres  pcrdii'cii!  la  loiinc  f(tiiiiiic 
les  exécuteurs  de  la  prétendut»  Mariiucrilc  de  Navarre  d 
(rime  aldx'ssc  iiicdiiiiue  (Cahiiiet  des  l']staiu|)t's  ).  et  plus  d  iiii 
tondja  dans  la  disproportion  coinnic  le  niassacrcui-  du  Hour- 
dcillc.  l'rrrc  de  Brantôme,  (|ue  icnd  inoubliable  son  type 
de  d(dv(di(tct-j)liale  siniiesque.  Mais  de  Itds  excès  sont  iiu'- 
vitaldes  dans  les  écoles.  Soniiuf  toute  François  Clouet 
poussa  jtar  ses  exemples  une  nndiitude  de  peintres  vers  la 
lumière  tout  en  les  incitant  au  lespect  du  naturfd  et  des 
pi'incipes  sans  lesquels  aucune  structure  sérieuse  n  est 
possii)le.  Et  son  action  fut  d'aiilaiit  plus  salutaire  (|u"elle 
s'exerra  pendant  les  ravag'es  de  Titalianisuie.  En  pr()(da- 
nuint,  |)ar  dirridra^ables  dessins,  la  \aleur  de  nos  tradi- 
tions, alors  (pu'  Caron  ni /'niir/iissitit  les  peintures  de 
Fonlaintddeaii  :  en  diMUontraid,  pai'  son  porli'ait  d  l'disa- 
bclli.  l'aniH'e  luème  où  disparut  le  l*i-imatiee.  (pie  I  art  de 
notre  l'"rance  \i\ait  toujours,  el  belleuienl.  de  sa  \  ie  pro- 
piT.  il  rendit  dinnnenses  services.  Couibien  il  altistes  et  de 
iii()iid;iiiis  lui  durent  de  ne  pas  succoiiiber  au  sii(d)isiiie 
rt-g-nan!  !  ('jinibien  d'autres  osèreiil.  iicàci-  à  lui.  n'iu^ir 
coiilre    I  e\ol  isiiie  ! 

François  Cloiiel  lut.  conuiie  son  père,  un  ainoui'eux  de 
sincè-ritt'.  un  inlerpièle  |(t\;d.  un  \  i\  ilicaleiii':  mieux  ipie 
son  père,  d'un  trait  |iliis  niai^istral  et  plus  iiiliiiie.  il  d('- 
\(iila  les  .iiiies  en  lixaiil  la  iindiilitt-  des  |tli\  sionomies.  en 
leli.iiissaiil  le  sens  îles  c;iracl  ('res.  Coniine  peintre,  il  lia. 
pas  plus  ipie  Jean,  une  de  ces  orii:  inalilès  ipii  lraj)pent   les 


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l'iiANiuis    ("ii.DiKT.    —   ('.iiAin.K-^    l\      ht'-- in 
(daliiiiol  (It's  l'isliiiniifs.) 


LES  CLOUET.  113 

moins  avertis;  néanmoins  sa  persoimalité,  pour  s'affirmer 
discrèteniciit,  n  en  est  pas  moins  sensil)!»'.  An  Louvre, 
\ EllsahctJi  resplendit  dun  éclat  bien  particulier.  Les  por- 
traits (jui  1  entourent  ont  ét('  iu'osst'S  tous  avec  des  procédés 
analogues,  mais  combien  inférieure  leur  irradiation  !  Elle 
l'emporte  sur  eux  non  seulement  par  ses  (jualités  techni- 
ques, mais  par  sa   vie  intérieure  et  l'indicible  (ju'elle  Aï - 


o-n  o-fi 


Dans  le  dessin,  François  atteignit  aux  plus  hauts  som- 
mets. Son  sentiment  de  l'écriture  plastique  (-tait  merveil- 
leux :  il  l'eut  presque  au  degré  où  devaient  le  posséder 
Poussin  et  Ingres,  ses  chefs-d'œuvre  des  Estanqics  auto- 
risent cette  assertion,  (j'est  en  harmoniste  (ju'il  édifiait  ses 
formes,  en  expressif  (|u"il  li-arait  ses  délinf'ations.  m  tout 
respectueux  des  signes  (k'  la  \  ie  autant  (pie  (h's  htis  de 
l'équilibre.  Il  fut  si  foncièrement  dessinateur  (juc  ses  por- 
traits peints,  considérés  au  seul  point  de  nui-  im'ticr. 
apparaissent  comme  des  dessins  rehaussés  de  tons,  l'as  de 
jeux  (le  pjitc,  pas  d'habiletés  (h'  brosses,  nul  stratagème  : 
les  tonalités  sont  ('talées  candidement,  les  luodtdt's  traités 
à  peu  près  couuue  des  Irdtlis  de  craNou  et  n'-duils  au  slnet 
nécessaire.  (!es  tonalitivs  oll'rent,  il  est  \rai.  de  Hues  (h'gi'a- 
dations  :  mais  n'oulilinus  pas  (pTun  «eil  de  dessinateur 
[•(''elh'Uient  artiste  doit  perceNoir  aussi  liieii  (|iie  celui  d  un 
lieiiiireces  etl'elsde  la  lumière  sur  les  reliefs  et  les  plans 
(pie  lOu  ti'adiiil  eu  (h'gradaut  les  teintes.  l'IH'ectut'es  sans 
aucune  de  ces  recherches  au\(|uelles  se  délectent  les  ma- 
nieiirsde  piguieiils.  les  (h'-gradal  ions  de  r'raiii.'ois  sont  celles 


tl6  LES   CLOU  ET. 

d'uii  liannoiiisle  on  noir  cl  blanc.  De  là  celle  Ijelle  iiiiih'  el 
cette  sévéï'ih'  picturale  <les  h'Ies  du  iiiiiîli-e.  De  là  aussi  la 
clai'lé  (le  ses  cliaiis.  La  pleine  lumière  siinj)li(ie  (oui  :  |ilus 
elle  enveloppe  une  lornie,  ])lus  elle  en  syntlu'lise  les  tona- 
lités. Sans  doute  est-ce  pai'ce  (ju'il  a\ail  observé  loul  cela 
qu'il  s'appliquait  à  rnainlenir  dans  une  même  gamme  ses 
tons  de  cliair.  Et  comme,  pour  obtenir  ce  résullal.  il  lui 
fallait  respeclei'  scrupuleusemeid  les  \aleurs  de  ces  Ions. 
ses  carnalions  y  ont  gagné  une  lumière  (jue  les  âges  nonl 
point  lernie.  (lar  la  luminosilé  dune  peinture  ne  d('pend 
pas  du  degré  de  pliotogénie  de  ses  tons,  mais  de  la  bonne 
transcription  de  leui'S  valeurs. 

Mais,  demanderont  certains,  a-t-il  volontairement  ust- 
de  cette  métliode  de  peinture  simplifiée?  Ne  lui  a-l-elle  pas 
été  imposée  par  lobligation  où  il  se  trouvait  de  peindic 
exclusivement  d'après  ses  dessins  ?  Assin<''menl  nous 
['ignorons.  Aucini  texte  ne  nous  renseigne  sin-  sa  tournure 
d'espi'it  et  ses  j)i"('oecupalions  d'artiste.  Toulcdois.  ('tant 
domu'e  sa  manière  d'inlerpri'ter  au  crayon  les  tonalilt's,  on 
peut  sans  ci'ainte  pr('sumer  (piil  n'ei'it  pas  sensiblement 
mo(bli(''  son  taire  s  d  a\ail  pemi  st.'s  portraits  d'après  na- 
ture. I*eut-(~'ti('  en  cTit-il  \ai'i('  ou  allim'  daxantage  les  notes 
de  sa  gamme  de  cliair.  di'grade  plus  sensd)lenienl  ou  plus 
subidemeni  ses  pari  U's  chures  :  mais  tenons  pour  indiibi 
table  iju  d  n  eût  pas  compli(|U(''  ses  parlu'S  d  oudnc  |iuis- 
i\\[  [\  a\ail.  ses  ci'axons  pol\  (du'onu's  latleslenl.  celle 
\isioii  (pu  porte  à  niodcder  par  un  mimuniin  de  deuu- 
leniles.  A  (juoi  bon.  d  adieurs.  s  arré-ler  ;i  des  li\polbèses 


if  \ 


l*"ii\\(;ois    (',  i.oiiET.    —    Civsi'uiii    m;   ('.  mu.  w     l)('^>in 

M'.:i  liiiicl   Ai'<  l\slaiii|M's.) 


LES   GLOUET.  119 

quand  la  milite  nous  offre  de  si  multiples  sujets  d'étude! 
On  perdrait  sa  peine  à  cherclier  ce  que  François  aurait 
accompli,  sei-vi  [)ai-  d'autres  circonstances;  au  contraire, 
on  gagnera  tort  k  scruter  les  œuvres  qu'il  a  laissées.  En 
parvenant  à  rendre  ses  chairs  lumineuses  et  harmonieuses, 
avec  une  justesse  si  parfaite,  le  maître  a  constitué  une 
peinture  délectable  en  son  austérité.  Quelles  que  soient  les 
sensations  quelle  cause,  quoi  qu'on  en  pense,  en  toute 
justice  on  doit  confesser  qu'elle  a  de  soh'des  (pialités  y)ic- 
turales. 

Mais  la  supt-riorité  de  Fran(;ois  s'affirme  plus  encore, 
répétons-le,  dans  ses  crayons;  voire  sa  supériorilt'  de 
peintre.  Que  cela  n'étonne  pas.  On  obtient  des  dégrada 
lions  de  teintes  plus  multiples  et  plus  fines  avec  des  mines 
de  couleur  ou  des  pastels  tendres  sur  le  papier  (ju'avec 
des  pigments  ;i  riuille  sur  toile  ou  sur  bois.  Aussi  des  effets 
plus  variés  et  plus  impressifs.  La  matière  oh-a^ineuse, 
iniMue  ap|>li(jU('e  par  des  mains  fort  expei'tes.  ne  manifeste 
jamais  les  dt'licatcsses,  les  Iransparencivs,  1rs  poi-sies, 
connue  le  ]»en\('nl  i'aii'c  des  caresses  de  crayon  :  elle  a  des 
opacili's  (pie  rien  n;irn\e  à  \aincre.  elle  cuirasse  les 
reliefs,  elle  impose  au.x  c((iil(»iii's  une  piii'tnc  qui  souxcnl 
les  (M'rase. 

Le  cra\(»ii  nioiiire  a\<'C  n('tlrl(''  ce  que  les  brosses  niill- 
(|uenl  à  peine  ;  <-e  (pTel les  disent  loin'denienl .  d  le  C(Uile  ou 
l"('\()(pu'  a\'ec  une  grâce  niconqiarable.  Le  |U'olane  ne 
souiicomie  |>as  la  baule  uldilé"  de  cet  ould  idi'al.  pas  encor»! 
assez  esiiiiK'.   Le  ci'avon  !    mais   \\  a   d'uiappré'ciables  (|ua- 


120  LES   CLOU  HT. 

lih's.  oïl  scrail  Icnh'  de  «lue  des  vertus,  loutre  les  iii;iiiis 
(le  I  ;ii-list(',  il  est  beaucoiij)  j)lu.s  olK'issanl  (jiic  les  hrosscs; 
la  main  le  discipline  et  le  dirii^^e  à  souliail,  lanh')|  1  a|»|uivanl 
sur  le  papier  eoinnie  une  pointe  d'acier  sur  le  cuix  ic. 
lantôt  le  faisant  évoliiei"  dans  une  savante  stratégie  coniuie 
un  pinceau  leycr.  iJeuiandez-lui  des  traits  \  i^uoureux.  inci- 
sifs, ou  de  suaves  indications,  de  larges  modelés,  des  con- 
trastes j)uissants  ou  des  accords  d'analogues,  d'im})lacaldes 
perspectives  ou  de  vaporeuses  ('vocations:  employez-le  à 
retracer  des  drames  lugubres  ou  de  sei'eines  visions.  Ihu- 
manil('  ou  la  natui'e  sous  leurs  plus  divers  aspects,  il  n'est 
rien  ([u  il  ne  mène  à  bien  si  vous  savez  le  conduire.  Toutes 
les  souplesses,  toutes  les  fermetés,  tous  les  charmes,  il  les 
possède;  tous  les  modes  d'exprimer,  de  l'alerte  au  nsajes- 
tueuN,  il  les  pratique:  tous  les  effets,  tous  les  caractères,  il 
les  reproduit  a\cc  une  bonne  Nolonti'-.  un  loyalisme,  (jue 
rien  ne  rebute.  11  est  Prot(''e,  et  il  est  fée.  A  cei'tains  mo- 
ments, on  le  croirait  pai'tie  int('grante  de  la  main:  sous 
les  impidsions  de  Tesprit.  il  conlMUie  le  traxail  des  doigts. 
11  seud)le,  tant  persistent  son  zèle  et  sa  docilité.  (|u  il  xcuillc 
('ollaborer  ;i  l'onivi'e  de  son  maiti'e,  de  son  guide.  De  lait, 
il  en  ('pousc  li's  ardeurs  et  la  liè\  re  :  les  phalanges  (|Mi 
li'l  reigiicnl  le  sentent  maintes  fois  IVé'nur.  I  n  imaiiiiiatil 
pourrait  se  surprendr<'  à  lui  prt'tei'  de  I  intidligence.  La 
brosse  tient  de  la  truelle,  elle  permet  des  labeurs  solides 
mais  restreints,  le  plus  \n-lui)se  Ars  penilres  ne  rt'ussil  pas 
toujours  il  la  plier  <à  sa  x'oloiiti'':  et  iiK'ine  ipiand  il  la  maî- 
trise, il  ne  la  eliange  pas  en  calaiiie.   La  lii'osse  est  un  sei"- 


Aniii  li  iMii.i:   A  l'uANcois  Ci.di  i-.T.   -      I'"k\n<,i»is  m:  l.nivit\i\i 

I)  uc,   ;>r.   ('.  r  i  s  k  (Pciiiliiic.. 
(I. ouvre.) 


LES   GLOUET.  123 

viti'ur.  ellt>  no  sera  jamais  un  auxiliaire,  un  collaborateur. 
Le  crayon  a  des  secrets,  que  la  brosse  a  toujours  ignorés, 
pour  nous  initier  à  lintiniite  des  êtres  et  à  Ten-dedans  des 
cboses.  D'ailleurs,  en  recouvrant  de  pâte  une  figure,  on  se 
sent  entraîné  à  la  matérialiser,  même  lors(ju'on  se  garde 
de  la  traduclion  étroite:  n"use-l-on  que  de  mines,  on  est 
porté  naturellement,  à  moins  de  compter  parmi  les  incor- 
rigibles de  1  analyse  méticuleuse,  à  n't'crirc  que  l'essentitd 
des  formes.  On  exagère  les  mérites  de  la  peinture  parce 
que,  seule,  elle  pei-mef  les  vastes  décorations  nun-ales  et 
les  scènes  d'un  cadre  important.  A  la  vérité,  dans  les  for- 
mats ordinaii-es,  le  crayon  (le  noir.  le  sanguine  comme  les 
polycbromes),  s'il  est  manié  par  un  maître,  vaut  la  pein- 
ture et  parfois  l'emporte  sur  elle.  Le  crayon  se  prête  ;i 
merveille  à  l'interprétation  psycliologique,  cai-  sa  puissance 
évocatrice  égale  sa  force  expressive.  Aussi  les  dessins  des 
interprètes  supiémes  de  la  pbysionomie  sufTisenl-ils  pour 
confirmer  leur  (Muinence.  Ceux  de  Dîirer,  de  Lionardo.  de 
llans  llolbein.  de  l-'cancois  Cbtuel.  de  Ingres,  eu  fournis- 
sent <le  suj)erbes  exenq)les. 

François  se  relie  à  [jonardo  par  son  senliiiieiil  du  lan- 
gage des  lignes  et  <le  la  valeur  des  icgards  jiinsi  (|iie  pin- 
son intidligence  des  moyens  (r(''clairer  les  profondeurs  des 
âmes.  Pai' le  caraclère  de  son  ('•criliire.  son  besoin  dCxiger 
heaucoiij»  du  Irail.  sa  scienre  ilc  coiisl  riicleur  des  iornies. 
sa  l'igoureuse  proliih-  de  porirail  isle.  il  esl  l'iiiicelre  de 
Ingi'es.  (pii  la  conlinuc'  dans  ses  dessins  en  poussani  plus 
loin  encore  le  souci  de  svnlli(''liser. 


1-24  LKS   CL  OU  ET. 

IV'i"ils  ('oiniiic  par  un  liiiriiiislc.  les  dessins  de  l'r.incois 
soni  Ifiiih's  par  un  liariiMniisIc  Ivvh  s(tl)rc  iiiaisd  une  cxfinisc 
scnsihilllc.  Ses  di-j^radalioiis  sur  le  papier  sonI  uivsh'- 
licuscs  cl  aiiiint'cs  coinnic  la  ^  ic  luènie.  Ses  siruclui'cs 
nous  onseig'ncnl  (|uc  le  j)lus  i-(dii:i('u.\  souci  de  l'csicr  \rai 
se  ('(jncilie  fort  l)ien  axcc  le  vouloir  d  (''\  lier  1  elroilessc 
dans  l'exeeution.  Tous  les  principes  de  larl  de  dessinei-  se 
lisenl  dans  ces  lèles  si  sùrenieni  ('(juilihri'-es.  propoi'lion- 
ni'cs  cl  \ivili<'es.  El  iiondtre  (Tenlre  (dies  i-epn''senteiil  une 
phase  instruelixe  ;iulanl  (|u  allacluinte  de  la  marche  vei's  la 
Jiuuièi'c  conuneiKM'c  par  nos  jxdnli'es  du  su''(de  de  l'\)U(|uel. 
Soyons  Mers  de  ce  ('dou<'l.  «  hoinieur  de  nosire  i'^raiice  », 
connue  disait  Ronsard,  saluons  en  ce  digne  artiste  ini  pr(''- 
cin'seur  de  nos  portraitistes  les  plus  l'ohusles  el  les  j)lus 
subtils,  un  iiulialeui'  aux  l'ccdiei'clies  conlenipoi'aines  les 
plus  ni'cessaii'cs.  .N  lii'silons  pas  à  le  classer  dans  le  clueui- 
de  nos  maîtres  insignes.  (pioi(|iH'  ses  ceuvres  certaines  ne 
soieiil  pas  h'gioii.  De  hm'iiic  (|u  un  soniiel  iiii|)eccal)le  siillil 
|)()ur  ('lahlir  la  repiilalKUi  d  un  poêle  ;  de  iiK-iiie.  c  est  assez 
d'une  Icle  arlislemeiil  conslruile  el  amiiH'e  pour  immoria- 
liser  un  jteiiil  re. 


IN 


TABLE   DES  GRAVURES 


Jean  Clouet.  —  François !•='■.  Peinture  (Louvre) 9 

Jean  Clouet.  — ^Miniatures  delà  Guerre  (jallique   (Bibliothèque 

nationale) 13 

École  de  Jean  Clouet.  —  Portrait  de  femme.  Peinture  (Ancienne 

collectittn  Laurent  Richard) IT 

François  Clouet.  —  Fran(;ois  I'  ' .  Peinture  (Musée  des  Offices, 

Florence) 21 

iManrois  ("Jouet.  —  Charles  IX.  Peinture  (Musée  de  Vienne). . .  2") 
François  Clouet.  —Elisabeth  d'Autriche.  Peinture  (Louvre). . .  29 
François  (îlouct.  — Henri  IL  Minialure  (Cabinet  des  Estampes) .  33 
François  Clouet. — .Madame  de  \  illetoy.   Dessin   (Cabinet  des 

Estampes) ti. 

l-'rançois  ("Jouet.  —  l{obertdela  .Marck,  Duc  de  lîouillon.  Dessin 

((kibiiiel  (les  Estampes) ï\} 

François  Clouet.  —  l'rançoise  llaliou  de  la  lîourdaisière,  dame 

d'Eslrées.  Dessin  .Cabinet des  Estam[)es'i 49 

I  laiKois    Clouet.    —   ('■ny    du  Faur,  sieur    de   Pibrac.    Dessiu 

(Cabiiiel  des  Estampes) ■'•3 

i'raiiiwtis   Clouel.      -    Ciiv     Clialmt,    baron    de   Jarnac.     Dessin 

(Cabinet  de-  l'1-lampes) 'iT 


126  TABLE  DES  GRAVURES. 

François  Clouet.  —  Louis  de  lU'-rt'iiLier,  sieur  <lii    Cast.  Dessin. 

(Cabinet  des  Estampes) 6-'> 

François    Clouet.    —   François  de    Coligny,    sieur    d'Andelot. 

Dessin  (Cabinet  des  Estampes) "3 

François  Clouet.  —  Marquise  de  Lenoncourt.  Dessin  (Cabinet 

des  Estampes) ~  ' 

François  Clouet.  —  Jean  de  Léaumont,  sieur  de  Puigaillard 

Dessin  (Cabinet  des  Estampes) 81 

François  Clouet.  —  Marguerite  de  Valois  (?).  Dessin  (Cabinet  des 

Estampes) • 8à 

François    Clouet.    —   Odet  de    Coligny.   Dessin   (Cabinet  des 

Estampes) '•  •  •       89 

François  Clouet.  —  Isabeau  de  Ilauteville.  Dessin  (Cabinet  des 

Estampes) 97 

François  Clouet.  —  Marie  Stuart.  Dessin  (Cabinet  des  Estampes)  iOo 
François  Clouet.  —  Marguerite  de  Valois.  Dessin  (Cabinet  des 

Estampes '"■' 

François  Clouet.  —  Charles IX.  Dessin  (Cabinet  des  Estampes).  113 
François  Clouet.  —  (iaspard   de  Coligny.'  Dessin  (Cabinet  des 

Estampes) ■ 11" 

Attribuable  à  François  Clouet.  —  François  de  Lorraine,  dur  de 

Guise.  Peinture  (Louvre) 121 


TABLE   DES  MATIERES 


1.  —  Jean    (Uouet    —  Sa  situation   à  la  cow\    —  Ce  que 

l'on  sait  de  lui 7 

H.  —  Le  goût  des  portraits  au  xvi"  siècle l.'i 

III.  —  L'œuvre  de  Jean 24 

IV.  —  Son   art 30 

V.  —  Fran(;ois  Clouet.  —  Sa  vie 4'* 

VI.  —  Ses  portraits  peints  et  ses  miniatures ;)2 

VIL  —  Ses  dessins  de  l'ancien  album  Foulon 04 

VIII.  —  Ses  autres  dessins ''■'} 

IX.  —  Œuvres  qu'on  lui  attribue.  —  Ouvrages  perdus 87 

X.  —  Les  peintres  du  xvi''  siècle. 0." 

-XI.  —  L'art  de  François.  —  Son  iiiiluence.   —  Ses  enseigne- 
ments   III 


8lî7i-0ij.  —  Corbilii  .  Im|iiiiiifiie  ko.  C.Hiirit. 


L