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Full text of "Les eaux souterraines à l'époque actuelle; leur régime, leur température, leur composition au point de vue du rôle qui leur revient dans l'économie de l'écorce terrestre"

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GEOLOGICAL  SCIENCES 
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LES 


EAUX  SOUTERRAINES 

A  L'ÉPOQUE  ACTUELLE 


IMPRIMERIE   A.    LAHURE 

9,    RUE    DE    FLEURUS,  9 


LES 

EAUX  SOUTERRAINES 

A  LtPOQUE  ACTUELLE 

LEUR  RÉGI»,  LECR  TIIFÉRATURB,  LIDR  GOIPOSITION 

AU   POINT  DE  VUE  DU  RÔLE  QUI  LEUR  REVIENT  DANS  l'ÉGONOHIE 
DE  l'ÉGORGE  terrestre 


PAR 

A.  JAUBRÉE 

MBMBRl  Dl  l'iHSTITUT 

IHfNCTBUE  céaéBAL  DBS  MIKB8  BK  RBTRAITB,  DIRECTBUR  HOM ORAIRB  DB  L'^COU  NAnOllALB  DBS  MIHBS 

PR0FBS8BDR  DB  GEOLOGIE  AU  MUSÂUM  D*HISTOIRB  NATURBUB 


TOME  PREMIER 


PARIS 
V  CH.  DUNOD,  ÉDITEUR 

lAraiM  d«s  Oorps  d«i  PonU  ml  GhAUiéM,  d«s  MIbm  •%  d«s  TéMfraptoi 

49  y   QUAI  DES  AUGUSTINS,  49 

1887 
Tous  droits  réserrés 


GB 

IOD3 


AVANT-PROPOS 


La  circulation  souterraine  des  eaux  à  travers  les  pores 
et  les  fissures  des  roches,  bien  qu'obéissant  à  des  prin- 
cipes très  simples,  présente  une  grande  diversité,  sui- 
vant la  nature  et  le  mode  d'agencement  des  roches. 
Aussi,  pour  en  donner  une  idée  précise,  convient-il  d'en 
signaler  divers  exemples  empruntés  à  des  structures 
variées. 

Cela  expliquera  comment  je  me  suis  laissé  entraîner  à 
des  développements  beaucoup  plus  étendus  que  je  ne 
l'avais  présumé  d'abord.  D'ailleurs,  il  n'était  pas  sans 
intérêt  de  prendre  les  types  dans  des  contrées  distantes 
les  unes  des  autres,  sauf  à  y  reconnaître  des  particula- 
rités identiques. 

Dans  cet  ordre  de  recherches,  on  ne  peut  toujours 
arriver,  quelque  soin  qu'on  y  mette,  à  des  notions 
exactes,  quant  à  la  manière  d^être  des  eaux  souter- 
raines et  aux  mouvements  auxquels  elles  sont  soumises 
dans  leurs  trajets,  soit  à  la  descente,  soit  vers  la  remonte. 
Lors  même  qu'on  connaît  la  disposition  des  massifs  de 
roches,  on  ne  saisit  pas  en  général,  dans  tous  leurs 
détails,  la  disposition  des  fissures  et  autres  canaux  de 


II  AVANT-PROPOS. 

parcours  qui  restent  cachés,  à  raison  de  leur  plus  ou 
moins  grande  profondeur.  Trop  souvent  on  est  réduit  à 
des  données  vagues  ou  conjecturales,  à  moins  que 
quelque  circonstance  fortuite,  comme  un  percement 
artificiel,  n'éclaire  la  question. 

C'est  une  difficulté  dont  il  convient  de  tenir  compte, 
en  présence  du  travail  ingrat  dont  le  résultat  est  offert 
aujourd'hui  au  public;  elle  expliquera  certaines  la- 
cunes et  incertitudes  de  cet  ouvrage  et  engagera,  peut- 
être,  à  combler  et  à  éclairer  quelques-unes  d'entre 
elles. 

La  réunion  et  la  coordination  des  faits  qui  sont 
exposés  plus  loin  ont  exigé  d'assez  longues  recherches  ; 
car,  jusqu'à  présent,  l'histoire  des  eaux  souterraines 
avait  été  rarement  traitée  dans  son  ensemble,  autrement 
que  d'une  manière  très  sommaire*.  Ces  notions  n'étaient 
que  peu  développées  dans  les  traités  de  géologie,  bien 
qu'elles  constituent  une  branche  importante  de  cette 
science,  non  seulement  pour  les  applications,  mais  aussi 
au  point  de  vue  de  la  théorie.  On  ne  saurait,  en  effet, 
méconnaître  son  intérêt  dans  l'étude  de  bien  des  phé- 
nomènes actuels,  tels  que  les  éruptions  volcaniques. 
L'importance  des  eaux  souterraines  se  révèle  surtout, 
quand  on  remonte  dans  l'histoire  du  globe,  et  qu'on 
recherche  les  vestiges  qu'elles  ont  laissés  de  toutes  parts 
dans  l'écorce  terrestre,  par  la  formation  fréquente 
d'espèces  minérales. 

*  Il  est  juste  de  mentionner  l'ouvrage  du  docteur  Lei*scli  :  yatûrliche  Wauer,  publié 
en  1864. 


AVANT-PROFOS.  in 

C'est  ce  que  j'ai  fait  ressortir  dans  un  deuxième 
ouvrage,  qui  est  le  complément  de  celui-ci. 

Beaucoup  de  savants  de  France  et  de  l'étranger  ont 
répondu  aux  demandes  de  renseignements  que  je  leur 
avais  adressées,  avec  une  obligeance  pour  laquelle  je 
leur  offre  ici  mes  vifs  remerciements.  Je  signalerai 
particulièrement  en  France  :  MM.  Pouyanne,  Genreau, 
Tardy,  Paul  Gautier,  Lory,  Raulin,  Leymerie,  Bouvier, 
Sainjon,  Laur,  Dru,  Jus,  Angiboust,  Pérou,  Duporcq, 
Delafond,  Fouqué,  Schloesing,  Pelîgot,  Lefort,  Ledru, 
Bonnefoy,  Nivoit,  Huet,  Mathieu  et  Rolland;  en  Alle- 
magne, MM.  von  Dechen,  Gûmbel,  le  docteur  Gurlt, 
Credner  et  Koch  ;  en  Autriche-Hongrie,  MM.  Ed.  Suess 
et  Szabo;  en  Italie,  MM.  Giordano,  Silvestri,  Ch.  Durval 
et  Jervis;  en  Suisse,  MM.  Albert  Heim,  le  docteur  Jac- 
card,  Renevier  et  Stapff;  en  Belgique,  MM.  Dewalque, 
Verstraeten  et  van  Ertborn;  dans  le  grand-duché  de 
Luxembourg,  M.  Siegen;  en  Espagne,  MM.  de  Botella 
et  de  Madrid  d'Avila;  en  Portugal,  M.  Delgado;  dans  la 
Grande-Bretagne,  MM.  Geikie,  Prestwich  et  Ed.  Hull; 
en  Russie,  M.  Trautschold;  en  Suède,  M.  Tomebohm; 
dans  TAmérique  du  Nord,  MM.  Persefor  Fraser  et  Hay- 
den;  au  Chili,  M.  Domeyko;  dans  Tlnde,  M.  Medlicott; 
en  Abyssinie,  M.  Aubry;  en  Australie,  M.  Liverdsige. 

Dans  ce  long  travail,  j'ai  trouvé  surtout  le  secours 
d'une  collaboration  active  et  dévouée  de  la  part  de  mon 
aide-naturaliste  du  Muséum,  M.  Stanislas  Meunier,  que 
je  prie  d'accepter  ici  l'expression  de  toute  ma  gratitude. 


LES 

EA[]X  SOUTERRAINES 

A   UÉPOQUE    ACTUELLE 


LIVRE  PREMIER 

RÉGIME  DES  EAUX  SOUTERRAINES 


CHAPITRE    PREMIER 

GÉNÉRALITÉS 


Aperfa  htotoriqne.  —  Sans  essayer  de  faire  un  historique 
de  la  question,  rappelons  que  Bernard  Palissy,  dans  son 
Traité  des  eatix  et  fontaines,  avait  déjà  reconnu  que  les 
sources  proviennent  de  l'infiltration  des  pluies,  lesquelles 
tendent  à  descendre  dans  l'intérieur  de  la  terre  jusqu'à  ce 
qu'elles  rencontrent  un  fond  de  roc,  ou  d'argile  imper- 
méable, qui  les  contraigne  de  ne  pas  descendre  davantage  et 
de  se  faire  jour  à  la  partie  la  plus  déclive  du  terrain  qu'elles 
ont  traversé. 

C'est  cependant  l'opinion  inverse  qu'avait  adoptée  Pierre 
Perrault'  :  «  Mon  opinion  est  donc  que  les  eaux  des  pluies 
et  des  neiges  qui  tombent  sur  la  terre,  sont  la  cause  et 

*■  ùe  VOrigine  des  Fontaines,  1084. 


2  GÉNÉRALITÉS. 

l'origine  des  fonlaincs.  Ce  sentiment  est  le  plus  ordinaire 
et  le  plus  suivi  :  néanmoins  de  la  façon  dont  je  conçois  la 
chose,  il  y  a  une  différence  extrême  entre  ma  pensée  et  celle 
de  ceux  qui  suivent  ce  sentiment  ordinaire,  car  ils  croyent 
que  les  eaux  des  pluies  et  des  neiges  fondues  tombant  sur 
la  terre,  la  pénètrent  jusqu'à  ce  qu'elles  aient  rencontré  de 
la  terre  grasse  ou  autre  chose  qui  les  arrête;  sur  quoi  elles 
coulent  vers  quelque  ouverture  sur  le  penchant  d'une  mon- 
tagne; et  moi  je  crois  que  la  pluie  ne  pénètre  point  la  terre, 
ni  ne  descend  point  jusque  sur  cette  terre  grasse.  » 

La  lumière  n'était  donc  pas  faite  pour  tout  le  monde 
et  nous  n'en  voulons  pour  preuve  que  les  réfutations  que, 
cent  ans  plus  tard,  dans  son  traité  du  Mouvement  des  eaux\ 
Mariolte  Se  croit  obligé  d'opposer  à  des  opinions  différentes. 
Après  avoir  exposé  sa  doctrine,  d'ailleurs  conforme  à  celle 
de  Bernard  Palissy,  il  ajoute  : 

«  Il  y  a  des  carrières  en  plusieurs  endroits  dont  le  haut 
est  en  forme  de  voûte,  et  il  n'y  a  que  vingt  ou  trente  pieds 
de  terre  au-dessus,  où  l'on  peut  remarquer  que  les  petits 
égouts  d'eau  qui  s'y  font  passent  par  de  petites  fentes  entre 
les  lits  de  pierre  et  qu'ils  procèdent  des  pluies,  parce  qu'ils 
ne  paraissent  qu'après  de  grandes  pluies,  et  qu'ils  ne  durent 
que  quinze  jours  ou  trois  semaines  après  qu'il  a  cessé  de 
pleuvoir;  et  on  peut  facilement  juger  que  les  autres  écoule- 
ments des  fontaines  se  font  de  la  même  sorte.  » 

lk»nnée«  fournies  par  les  travaux  de  mines.    —     OutrC      IcS 

données  innombrables  que  fournit  l'observation  pure,  une 
foule  de  documents  importants  sont  procurés  par  de  véri- 
tables expériences.  Je  fais  allusion,  d'une  part,  aux  faits 
recueillis  dans  la  recherche  et  le  captage  des  eaux  souter- 

*  Traité  du  mouvement  des  eaux,  par  M.  Mariofte.  Édit.  1700. 


GÊxNÉRAUTÉS.  5 

raines,  ordinaires,  minérales  ou  thermales,  d'autre  part 
et  surtout,  à  ceux  qui  résultent  chaque  jour  de  l'exploitation 
des  mines  et  de  l'obligation  où  se  trouve  sans  cesse  le  mi- 
neur d'assécher  ses  travaux. 

Quand  on  pratique  une  excavation  plus  ou  moins  pro- 
fonde, on  fait  naître  des  parties  de  moindre  résistance  et, 
par  suite,  des  infiltrations  d'eau  qui  se  précipitent  avec  une 
pression  quelquefois  très  forte.  C'est  une  sorte  de  drainage 
obligé,  jusqu'à  des  profondeurs  dépassant  800  mètres.  Aussi, 
dans  bien  des  cas,  la  lutte  contre  les  eaux  souterraines  né- 
cessite-t-elle  l'une  des  principales  dépenses  de  Texploilation 
des  mines. 

Comme  exemple  des  travaux  auxquels  conduit  fréquem- 
ment la  présence  de  l'eau  dans  les  mines,  nous  citerons 
les  grandes  galeries  d'écoulement  exécutées  pour  dessé- 
cher divers  districts  de  mines,  métalliques  et  autres.  La 
galerie  de  Freyberg  est  longue  de  47  kil.  504;  la  ga- 
lerie Joseph  II,  a  Schemnitz,  dont  le  i)ercement  a  duré 
107  ans,  a  environ  18  kilomètres  avec  les  annexes.  La 
galerie  Ernest-Auguste,  au  Hartz,  a  une  longueur  de 
23  kil.  658  ;  elle  a  été  percée  à  une  profondeur  de 
408  mètres,  au-dessous  de  quatre  autres  galeries  situées 
aux  profondeurs  de  78,  120,  146  et  298  mètres  et  ayant 
respectivement  8  kiL  864,  9  kil.  168,  9  kil.  260  et  19  ki- 
lomètres. 

Aux  riches  mines  d'argent  de  Comstock  dans  le  Nevada, 
la  compagnie  Sutro  a  exécuté  un  tunnel  rectiligne  de 
6  kil.  147  qui  recoupe  le  filon  principal,  auquel  il  est 
perpendiculaire,  à  600  mètres  de  profondeur;  puis  il  se 
développe,  dans  le  filon  môme,  d'une  quantité  à  peu  près 
égale,  de  manière  à  assécher,  moyennant  un  abonne- 
ment, les  mines  des  diverses  sociétés  qui  exploitent  les 
bonanzas  du  filon.   En  France,  il  est  question   d'exécuter 


4  GÉNÊRALITËS. 

une  galerie  de  14  kilomètres,  pour  verser  dans  la  Méditer- 
ranée les  eaux  du  bassin  de  lignite  de  Fuveau. 

Lors  du  creusement  des  puits  de  mines,  pour  lutter 
contre  les  fnvasions  d'eau,  on  est  souvent  obligé  d'établir, 
avec  beaucoup  de  peine  et  à  grands  frais,  des  cuvelages 
étanches,  heureusement  remplacés  dans  certains  cas  par  le 
système  Kind  et  Chaudron.  Pour  le  même  but,  on  a  recours  à 
l'ingénieux  et  hardi  fonçage  dans  l'air  comprimé,  dont  nous 
devons  le  premier  emploi  à  Texcellent  géologue  M.  Triger. 

C'est  ainsi  que  les  travaux  de  ce  genre  fournissent,  au 
point  de  vue  de  la  circulation  souterraine  des  eaux,  des 
données  instructives,  que  Ton  ne  pourrait  déduire  des  seuls 
épanchements  naturels. 


§  1.  Eau  de  carrière  ou  d'imprégnation. 


Toutes  les  roches,  même  celles  qui  sont  le  plus  compactes, 
sont  imprégnées  d'une  certaine  quantité  d'eau. 

Les  ouvriers  des  carrières  savent  que  les  caractères  phy- 
siques des  pierres  les  plus  diverses  se  modifient  par  l'expo- 
sition à  l'air.  Ce  changement  qui  se  constate  clairement  sur 
les  roches  argileuses,  calcaires  et  gréseuses,  est  aussi  très 
appréciable  pour  les  roches  les  plus  compactes,  telles  que  le 
granité.  Il  paraît  s'expliquer  par  la  perte  d'une  certaine 
quantité  d'eau,  logée  d'abord  dans  les  pores  de  la  roche  et 
qui  a  disparu.  On  donne  à  cette  eau  le  nom  à^eau  de  car- 
rière ou  d'imprégnation. 

D'autre  part,  on  remarque  que  des  galeries  pratiquées 
dans  des  roches  très  compactes,  telles  que  le  basalte  et  le 
trachyte,  sont  habituellement  humides,  sans  qu'il  y  ait  inter- 
vention du  phénomène  de  la  rosée. 


EAUX  DE  CARRIÈRE  OU  D'IMPRÉGNATION.  5 

Le  délilement  à  la  suite  de  la  gelée,  des  pierres  de  con- 
structions appelées  gélives^  est  le  résultat  de  Teau  qui  y  était 
interposée. 

Déjà  Dolomieu  avait  signalé  des  faits  de  ce  genre  dans  son 
mémoire  sur  VArt  de  tailler  les  pierres  à  fusils 

c  Le  silex  pyromaque,  dit-il,  est  quelquefois  trop  humide 
au  sortir  de  la  carrière;  alors  on  le  fait  sécher;  mais  si,  par 
une  trop  longue  exposition  à  Tair  et  au  vent,  il  avait  perdu 
une  certaine  humidité  souvent  très  visible  lorsqu'on  le  tire, 
alors  il  ne  peut  plus  être  taillé  en  pierre  à  fusil  ;  il  casse 
mal.  » 

Et  plus  loin,  page  338  : 

€  Lorsque  les  cailloux  (silex)  sortent  de  terre,  ils  con- 
tiennent quelquefois  trop  d'humidité,  que  l'on  aperçoit  en 
les  fendant  et  qui  se  rassemble  en  gouttelettes.  On  ne  peut 
alors  les  tailler  comme  il  faut;  les  caillouteurs  les  font  alors 
sécher  quelques  heures,  l'été  au  soleil,  l'hiver  au  feu  ;  mais 
lorsqu'ils  ont  été  trop  longtemps  exposés  au  soleil  ou  au 
grand  air,  tels  que  ceux  que  l'on  trouve  sur  la  terre,  ils  ne 
peuvent  plus  être  taillés. 

c  Les  ardoisiers  des  Ardennes  disent  que  les  blocs  de 
schistes  séchés  ne  se  travaillent  plus  aussi  facilement;  que 
leur  fissilité  est  moindre  et  le  déchet  de  fabrication  plus 
grand.  Il  est  possible  de  remédier  à  cet  inconvénient,  et  les 
ouvriers  ne  manquent  pas  de  le  faire,  en  mouillant  légère- 
ment le  schiste  sur  la  tranche.  L'eau  doit  pénétrer  dans 
la  pierre,  car  une  goutte  isolée  s'élargit  très  vite  et  disparaît 
rapidement.  » 

Des  expériences  ont  été  faites  par  d'assez  nombreux  obser- 
vateurs pour  mesurer  la  quantité  d'eau  de  carrière  corres- 
pondant à  diverses  roches. 

*  Dictionnaire  de  chimie  de  Y  Encyclopédie  méthodique  ^  t.  Y,  p.  531  et  suiyantes. 


G  GÉNÉRALITÉS. 

En  étudiant  la  nature  des  pavés  et  grès  de  Paris,  Coriolis* 
avait  trouvé  que  la  quantité  d'eau  qu'ils  absorbent  paraît 
être  en  rapport  avec  leur  dureté  et  que  les  diverses  variétés 
de  grès  employées  dans  la  capitale  absorbent,  en  vingt- 
quatre  heures,  4  à  à  de  leur  volume. 

Le  tableau  ci-après  présente  quelques-uns  des  chiffres 
obtenus  par  M.  Delesse'. 


LAU   DE    CARRIKHË    DE   DIVERSES    KOCIILS 

Poids  de  l'eau  pour  100  de  la  substance  humide 

Craie  blanche ,,^'^g 

Calcaire  grossier  à  milliolites 25,55 

!25  20 

Argile  enveloppant  les  meulières  de  Meudon.   .    .  24,48 

Calcaire  grossier  dur 5,02 

Gypse i,50 

Granité  à  gros  grains  (le  SiMuur 0,57 

Quarlz  blanc  en  (ilon  dans  le  granité  de  Seniur  .  0,08 

Silex  de  la  craie  de  Meudon 0,12 

Silex  meulière 1,12 

Eurite  noirâtre  de  Cln;vigné 0,07 

Gneiss  1res  micacé  et  friable 5,00 

D'après  M.  Thoulet  100  grammes  de  basalte  de  Guéry 
(Puy-de-Dome),  parfaitement  desséché  à  100  degrés,  peuvent 
absorber  0  gr.  350  d'eau.  Dans  les  mêmes  conditions  ce 
chiffre  est  de  1,981  pour  le  calcaire  jurassique  compact  de 
Verdun. 

Ainsi,  une  quantité  très  notable  dVau  se  dissimule  dans 


*  Durée  des  pavés  cl  des  grès.  Annales  des  Ponts  et  Chaussées,  t.  V,  1854,  p.  259. 

*  Bulletin  de  la  Société  géologique  de  Ftumce,  2'  série,  t.  XIX,  p.  04.  Voir  aiis.<îi  :  Du- 
rochcr,  même  recueil.  2"  série,  t.  X,  p.  451.  Bischof,  Lehrbuch  der  physikalischen 
Géologie,  t.  I,  p.  204. 


nOCHES  IMPERMÉABLES  ET  ROCHES  PERMÉABLES.         7 

les  pores  les  plus  fins  des  roches.  Mais  à  raison  de  la  force 
avec  laquelle  elle  est  retenue  par  capillarité,  il  est  difficile 
de  l'expulser  complètement  et,  par  suite,  d'arriver  à  une  éva- 
luation exacte. 

Si  Ton  tient  compte  de  la  nature  des  roches  les  plus 
abondantes,  on  doit  reconnaître  que  la  quantité  totale  d'eau, 
ainsi  incorporée  dans  Técorce  solide,  représente  une  quan- 
tité très  importante,  sans  doute  comparable  au  volume  que 
l'eau  occupe  à  la  surface  même  du  globe,  quelque  vaste  que 
soit  le  bassin  de  l'Océan*. 


^^    "2.    KOCIIES  IMPERMÉABLES  ET  IIOGIIËS  PERMÉABLES. 


Au  point  de  vue  de  Thydrognosie,  tant  souterraine  que 
superficielle,  il  y  a  une  distinction  essentielle  à  faire  dans  la 
nature  des  roches  les  plus  répandues. 

Les  roches  sont,  les  unes  imperméables,  c'est-à-dire  ne  se 
laissent  pas  traverser  par  l'eau,  du  moins  en  quantité  no- 
table; les  autres,  capables  d'absorber  l'eau  avec  facilité  et 
perméables. 

Roches  imperméables. 

Tjres  de  roehes  imperiiiéiibies.  —  Comuie  rochcs  imper- 
méables se  présentent,  avant  tout,  les  silicates  d'alumine 
hydratés  connus  sous  le  nom  d'argile.  A  l'état  de  pureté, 
l'argile  n'est  pas  commune  ;, mais  elle  est  très  répandue  à 
Télat  de  mélange  avec  la  chaux  carbonatée  et  donne  alors 
les  marnes. 

■  H.  Deiesse,  dans  le  méiuoirc  précilé,  p.  83,  l'évalue  à  5  pour  100. 


8  GËNÉRALITÉS. 

L'imperméabilité  de  Targile  se  maintient,  même  quand 
elle  est  mélangée  d'une  certaine  quantité  de  sable,  de  telle 
sorte  que  l'élément  argileux  forme  un  ciment  reliant  les 
grains  de  sable;  mais  alors  la  masse  n'a  plus  la  souplesse  de 
l'argile  plastique  et  elle  peut  céder  à  des  actions  mécaniques*. 

Les  roches  granitiques  et  diverses  roches  cristallines  sont 
à  peu  près  imperméables,  quand  les  fissures  qui  les  traversent 
sont  assez  fines  pour  ne  pas  donner  issue  à  l'eau  ;  il  en  est 
de  même  des  schistes  argileux  ou  phyllades. 

On  a  constaté,  par  exemple,  que  les  galeries  préparatoires 
du  tunnel  sous  la  Manche,  établies  dans  les  couches  de  la 
craie  marneuse,  restaient  à  peu  près  étanches,  sur  plusieurs 
kilomètres,  lors  même  que  le  massif  qui  les  séparait  de  la 
mer  n'avait  que  quelques  mètres. 

Tandis  que  l'invasion  incessante  des  eaux  constitue  très 
souvent,  comme  on  l'a  vu,  l'une  des  plus  grandes  difficultés 
contre  lesquelles  le  mineur  ait  à  lutter,  il  est  cependant  des 
cas  où  les  travaux  sont  ouverts  dans  des  couches  tellement 
imperméables  qu'il  faut,  lors  du  fonçage  de  puits,  y  des- 
cendre de  l'eau,  pour  l'exécution  des  trous  de  mine.  C'est  à 
peu  près  ce  qui  est  arrivé  dans  les  mines  les  plus  profondes 
de  Kongsberg  {Gôttes  Hulfe  et  Armen)  en  Norvège  et  les  tun- 
nels de  ce  pays  restent  souvent  secs,  quoique  non  murailles. 
D'après  M.  Kjerulf,  l'imperméabilité  des  mêmes  roches  n'est 
pas  moins  remarquable  dans  les  régions  les  plus  septen- 
trionales de  la  Norvège. 

Les  travaux  percés  dans  le  gneiss  de  Suède  pour  des  ex- 
ploitations métalliques  ne  donnent  non  plus  que  de  très 
faibles  quantités  d'eau. 

Dans  la  mine  de  Bottalack  près  du  Lands'end,  en  Gor- 
nouailles,  on  a  une  preuve  particulièrement  éloquente  de 

^  Yerstraeten.  Eatiz  alimentaires  de  la  Belgique. 


ROCHES  IMPERMÉABLES  ET  ROCHES  PERMÉABLES.         9 

rimperméabilité  de  certaines  roches  métamorphiques, 
puisque  les  galeries  sont  établies  sous  la  mer  et  qu'un  toit 
de  quelques  mètres,  au  travers  duquel  le  roulement  des 
galets  poussés  par  la  grosse  mer  se  fait  nettement  entendre, 
suffit  pour  empêcher  toute  infiltration. 

De  même,  en  France,  sur  le  littoral  opposé,  aux  mines  de 
fer  de  Dielette,  des  puits  foncés  sous  la  mer  dans  les  roches 
granitiques  sont  étanches. 

Ajoutons,  qu'en  dépit  des  appréhensions  de  quelques 
personnes,  la  percée  du  mont  Cenis  n'a  rencontré  aucun 
amas  d'eau  important.  Le  débit  total  des  suintements 
qui  sortent  des  roches  schisteuses  ne  dépassait  pas  1  litre 
par  seconde.  Cependant  le  tunnel,  sur  une  longueur 
de  12  kil,  200,  a  coupé  des  couches  carbonifères  et 
triasiques,  inclinées  habituellement  de  50°  sur  l'horizon, 
et  consistant  en  calcaires  schisteux  ou  calcschistes,  sur 
9  kil.  592;  grès  talqueux,  sur  2  kil.  96;  quartzites 
(388  mètres)  et,  en  outre,  des  anhydrites,  des  dolomies 
et  des  calcaires  compacts*.  Au  lieu  de  gêner  les  travaux, 
Teau  a  tellement  fait  défaut  qu'on  était  obligé  d'aller  la 
chercher  au  dehors  pour  les  besoins  des  travailleurs. 
Les  gypses,  loin  de  livrer  passage  à  des  trombes  d'eau, 
comme  on  Tavait  craint ,  laissèrent  à  peine  suinter  une 
petite  source. 

Si,  dans  quelques  parties,  le  percement  du  Saint-Gothard 
(fig.  1),  a  donné  passage  à  des  irruptions  d'eau  et  de  boue 
par  des  lithoclases,  dont  les  principales  ont  été  tracées  sur 
la  figure,  il  est  au  contraire,  sur  la  plus  grande  longueur, 
remarquablement  étanche. 

L'influence  de  l'imperméabilité  des  terrains  sur  le  régime 
des  cours  d'eau  de  la  surface  a  été  mal  appréciée  jusqu'au 

*  Les  masses  superposées  au  tunnel  atteignent  1610  mètres. 


10 


GÉNÉRALITÉS. 


(Kgy)  9jp£  ap  ,^F 


eeo^  (auwj  ^t 


moment  où  Bclgraud,  à 
la  suite  des  études  sur  le 
bassin  de  la  Seine,  en  a 
signalé  rimporlance  aux 
ingénieurs. 

Exentples  du  rôle  des 
roches  imperméables  dam 
le  bassin  de  la  Seine.  — 
Dans  le  bassin  de  la 
Seine,  au-dessus  des  cou- 
ches imperméables  du 
terrain  crétacé  inférieur 
et  au  pied  des  coteaux  de 
la  craie  blanche,  se  trou- 
vent des  sourcestrès  nom- 
breuses et  en  général 
assez  faibles.  Dans  le  dé- 
parlement de  TAube,  en- 
tre TArmançon  et  la 
Seine,  elles  alimentent 
cinq  ou  six  affluenls  de 
TArmance  et  laMogne,  le 
principal  affluent  de  TIlo- 
zain.  Les  villages  se  sont 
accumulés  sur  cette  li- 
gne, attirés  par  la  pureté 
des  eaux  et  la  fertilité 
des  terres.  Dans  les  com- 
munes de  Coursan,  Mont- 
fey,  Saint-Thil,  Villeneu- 
ve-au- Chemin ,  Auxon , 
Chamoy,  Montigny,  As- 
senay  ,       Crésantigne^ , 


ROCHES  IMPERMËABLES  ET  ROCHES  PEUUÉÂDLES.  11 

Faves,  Saint-Jean-de-Bonneval,Lirev,  Machv,  Brunav,  Villv- 
le-Maréchal,  Longeviile,  Moussey,  Saint-Pouangc,  Roncenay, 
Yillemercuil,  on  ne  compte  pas  moins  de  50  à  60  sources 
pérennes  dont  plusieurs,  notamment  celles  de  Chamoy  et 
d'Auxon,  sont  fort  belles.  Entre  la  Seine  et  l'Aube,  ces 
sources  ne  sont  pas  moins  nombreuses;  on  en  compte  plus 
de  10  dans  les  communes  de  Doches,  Piney  et  Villehardoin. 
Des  faits  analogues  se  remarquent  sur  les  autres  terrains 
imperméables  du  même  bassin;  ainsi  les  sources  sont  très 
nombreuses  et  très  petites  dans  les  sablons  limoneux  du 
greemand,  et  rares  dans  les  argiles  ncocomienncs. 


iViaS  MAISONS 


Kîlomt-lrcs. 


5      4      :i      rî      7      K      î»     10  l,) 

I       I       I       I       î       I       I       I       1       '       I       I       I 


Fîg.  i.  —  Carie  monlrant  la  disposition  des  principales  sources  du  liassin  du  Pclil  Morin, 
entre  Vontmirail  el  Veidelot.  Kchelle  i-^^d  ou  O^.UOl?  par  Itilomèlrc. 


Dans  les  vallées  de  la  Bri(î,  le  terrain  tertiaire  et  spé- 
cialement les  marnes  supérieures  se  comportent  de  môme. 

Le  Petit  Morin  (lîg.  2),  entre  Montmirailel  Villcneuve-sur- 
Bellot,  reçoit  H5  sources  réparties  en  65  groupes.  Celles 
qui  sont  situées  le  long  de  son  cours  appartiennent,  soit  à 
Tétage  de  l'argile  plastique,  soit  aux  terrains  perméables 
compris  entre  les  marnes  vertes  el  l'argile  plastique; 
celles  qui  s'éloignent  de  son  cours,  et  qui  généralement 
sont  groupées  au  fond  des  vallées  secondaires,  appar- 
tiennent au  niveau  d'eau  des  marnes  vertes.  Les  rm  des 
plateaux,  qui  restent  à  sec  pendant  la  plus  grande  partie  de 


12  GÉNËRÂLITÉS. 

Tannée,  s'étendent  au-dessus  de  la  plus  élevée  des  sources 
de  chaque  groupe. 

La  figure  3  représente  les  50  sources  disséminées  le  long 
du  Clignon,  principal  affluent  de  TOurcq.  La  disposition  est 
identiquement  la  même  que  sur  la  figure  2  :  les  sources 


Kilomètrps. 


4     5     6      7      8      9      10 

'     I     I     I     1     I ! 


Fig^.  3.  —  Carie  montrant  la  disposition  des  principales  sources  le  long  du  Clignon 
Même  échelle  que  pour  la  figure  précédente. 

qui  sont  disposées  le  long  du  cours  d'eau  principal,  appar- 
tiennent aux  terrains  perméables,  compris  entre  le  gypse  et 
l'argile  plastique  ;  celles  qui  s'écartent  du  ruisseau  princi- 
pal, et  se  groupent  au  fond  des  vallées  secondaires,  appar- 
tiennent au  niveau  d'eau  des  marnes  vertes.  Ces  disposi- 
tions s'appliquent  à  toutes  les  vallées  de  la  Brie. 


Types  de  roehes  perméables.  —  Parmi  les  rochcs  perméables 
se  place  en  première  ligne  le  gravier*.  On  constate  chaque 
jour  sa  perméabilité,  dans  les  plaines  et  les  innombrables 
fonds  de  vallées  dont  il  constitue  le  sol.  Il  suffit,  pour 


^  Le  nom  de  roche  s'étend,  en  Géologie,  &  toutes  les  masses  considérables  par  leur 
volume,  lors  même  qu'elles  sont  tout  i  fait  incohérentes,  comme  le  gravier  et  le  sable. 


ROCHES  IMPERMÉABLES  ET  ROCHES  PERMÉABLES. 


13 


cela,  d'examiner  l'un  des  puits  qui  y  sont  entaillés  pour 
les  usages  domestiques,  et  d'observer  la  facilité  avec 
laquelle  Teau  afflue  à  travers  les  interstices  des  cailloux  et 
du  sable,  lorsqu'on  cherche  à  l'épuiser  en  l'aspirant.  C'est 
ce  que  montre  la  figure  4,  où  l'on  voit,  pour  un  moment 
donné,  la  distance  qui  sépare  le  niveau  de  l'eau  dans  la 
couche  entièrement  imbibée  du  niveau  de  l'eau  dans  le 
puits,  immédiatement  après  qu'on  en  a  extrait  une  certaine 
quantité.  A  la  suite  de  cet  état  artificiel,  le  niveau  général 
ne  tarde  pas  à  se  rétablir  conformément  à  la  figure  3.  On  re- 


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Fig.  4.  —  Puits  creusé  dans  un  gravier  aqui- 
féreGet  superposé  à  la  couche  argileuse  A. 
État  normal.  MN,  niveau  d'eau. 


Fig.  5.  —  Puits  creusé  dans  un  gravier  aqui- 
fére  G,  où  l'on  voit  comment  le  niveau  pri- 
mi  tir  MN  a  été  modifié  immédiatement 
après  qu'on  en  a  extrait  une  certaine  quan- 
tité d'eau.  A,  couche  imperméable. 


connaît  également  la  perméabilité  du  gravier,  par  l'avidité 
avec  laquelle,  à  l'état  sec,  il  absorbe  l'eau  qu'il  reçoit. 

Le  sable  qui  se  trouve,  plus  fréquemment  que  le  gravier, 
dans  les  terrains  de  tous  les  âges,  n'est  pas  moins  perméable, 
pourvu  qu'il  ne  soit  pas  mélangé  d'argile,  comme  il  arrive 
très  fréquemment.  C'est  de  la  couche  de  sables  verts  infé- 
rieurs à  la  craie  blanche  que  jaillissent  si  abondamment, 
à  Paris,  les  eaux  des  puits  artésiens  de  Grenelle  et  de 
Passy. 

L'aqueduc  de  la  Vanne  traverse  les  sables  de  Fontaine- 
bleau, entre  les  vallées  du  Loing  et  de  la  petite  rivière 
d'Ecolle,  sur  une  longueur  de  31  kilomètres,  et  ce  terrain 


14  GÉNÉRALITÉS. 

est  tellement  perméable,  que  le  tracé  n'a  rencontré  aucun 
ruisseau.  Il  franchit  cependant  plusieurs  dépressions,  celles 
des  Sablons,  de  la  Croix-du-Grand-Maître,  du  Vert-Galant, 
ou  même  des  vallées  assez  profondes,  telles  que  celles  de  la 
route  d'Orléans,  des  Rochers  de  la  Goulotte,  d'Arbonne,  de 
NoisY-sur-Ecolle,  de  Monlrouget.  Cette  rareté  des  cours  d'eau 
est  une  des  propriétés  les  plus  caractéristiques  des  terrains 
perméables. 

Les  terrains  perméables  du  bassin  de  la  Seine  absorbent 
sur  place  Teau  des  plus  grandes  averses. 

Toutes  les  formations  sablonneuses  ne  sont  d'ailleurs  pas 
perméables.  Tandis  que  les  sables  de  Fontainebleau  et  de 
Beauchamp  sont  très  franchement  perméables,  les  sables 
du  terrain  crétacé  inférieur  sont  assez  imperméables,  en 
raison  des  matières  argileuses  qu'ils  renferment,  pour  qu'on 
puisse  y  créer  partout  d'excellentes  prairies.  Il  en  est  souvent 
de  même,  dans  les  terrains  d'alluvion,  surtout  lorsque  le 
sable  est  lîn. 

«  La  plupart  de  ceux,  dit  Belgrand,  qui  ont  écrit  sur 
ragri€ulture  ont  négligé  cette  importante  propriété  du  sol. 
Ainsi,  presque  tous  admettent  qu'avec  un  litre  d'eau  par 
seconde,  coulant  d'une  manière  continue,  pendant  la  sai- 
son des  irrigations,  on  arrose  convenablement  un  hectare 
de  prairie.  Avec  un  litre  d'eau  par  seconde,  on  n'arro- 
serait pas  plus  de  50  mètres  carrés  des  sablons  de  la  forêt 
de  Fontainebleau.  D'excellenles  prairies,  les  herbages  du 
pays  de  Bray  et  de  la  vallée  d'Auge,  dans  les  sables  argi- 
leux du  terrain  crétacé  inférieur,  n'exigent  aucune  irriga- 
tion. » 

Le  grès,  roche  qui  n'est  que  du  sable  plus  ou  moins  ci- 
menté, est  souvent  très  accessible  à  l'eau,  à  part  celle  qui 
s'infiltre  dans  ses  fissures. 

Le  calcaire  friable  et  poreux,  connu  sous  le  nom  de  craie 


ROCHKS  IMPERMÉABLES  ET  ROCHES  PERMÉABLES.        15 

blanche,  nous  présente  une  autre  roche  perméable.  C'est  à 
cause  de  ses  pores  que  celte  variété  de  calcaire  happe  forte- 
ment à  la  langue. 

Toutefois  la  perméabilité  de  la  craie  n'est  pas  comparable 
à  celle  du  gravier  et  du  sable.  Sa  réputation  de  roche  très 
perméable  est  due  aux  innombrables  lithoclases  qui  débitent 
ordinairement  ses  couches  en  menus  fragments.  D'après 
M.  Beardroore,  l'eau  de  pluie  traverserait  si  lentement  une 
colline  crayeuse,  qui  serait  exempte  de  fissures,  qu'elle 
exigerait  de  quatre  à  six  mois  pour  parvenir  de  la  surface 
à  la  profondeur  de  60  à  90  mètres;  de  sorte  qu'une  forte 
pluie  d'hiver  ne  serait  pas  parvenue  au  niveau  des  sources 
avant  l'été  suivant  et  que  l'effet  maximum  d'une  pluie 
chaude  d'été  et  d'automne  ne  serait  pas  sensible  avant  seize 
mois*. 

Dans  les  roches  perméables  il  faut  comprendre  aussi  les 
roches  volcaniques  boursouflées,  laves,  basaltes  et  trachytes, 
ainsi  que  les  scories  incohérentes,  ponces,  tufs  et  conglo- 
mérats qui  sont  souvent  poreux. 

Quoique  la  tourbe  ne  soit  pas  à  proprement  parler  une 
substance  minérale,  on  doit  la  mentionner  ici.  Les  dépôts 
tourbeux  sont,  non  seulement  perméables,  mais  encore  doués 
d'un  grand  pouvoir  absorbant.  Ainsi  en  Irlande,  après  un 
été  sec,  il  faut  des  semaines  entières  de  pluies  fortes  et  con- 
tinuelles pour  saturer  les  dépôts  tourbeux  des  bassins  du 
Shannon  qui  donne  naissance  à  la  rivière  Killaloo.  Cela 
explique  le  rôle  de  la  tourbe  dans  l'histoire  des  sources  et 
inversement.  Sur  le  plateau  central  de  la  France,  par 
exemple  dans  les  départements  de  la  Haute-Vienne  et  de  la 
Creuse,  il  y  a  habituellement  de  la  tourbe  à  l'origine  des 
sources,  dont  le  régime  est  peu  considérable  et  très  régulier. 

•  Preslwich.  Affdreaa  of  the  Geoiogiral  Society.  Qiiarteriy  jotnna!,  1872,  p.  38. 


16  GÉNËRALITfiS. 

Observations  sur  la  monvemeiit  de  Teaii  dans  les  roehee  per* 

méabiee.  —  Ainsi  quc  le  remarque  M.  Yerslraelen*,  Toau 
qui  s'infiltre  dans  un  terrain  est  soumise  à  deux  influences  : 
la  gravité  et  rattraction  par  les  grains  solides.  Si  les  inter- 
stices ont  de  l'ampleur,  il  y  a  beaucoup  d'eau  pour  peu  de 
surface  attractive,  la  gravité  l'emporte  et  le  liquide  descend. 
Si,  au  contraire,  les  vides  sont  de  dimension  capillaire,  Tat- 
traction  moléculaire  l'emporte,  elle  retient  l'eau  ou  même 
la  fait  remonter,  comme  on  l'observe  dans  l'éponge  qui  aspire 
en  quelque  sorte  Teau  qu'elle  touche. 

La  capillarité  contribue  donc  à  élever  plus  ou  moins  l'eau 
dans  un  sol  au-dessus  de  son  nivean  hydrostatique  ;  d'où  il 
résulte  souvent  une  humidité  superficielle  qui  intéresse  les 
cultivateurs.  La  hauteur  d'eau  soulevée  par  la  capillarité,  qui 
est  presque  nulle  dans  les  graviers,  est  de  0",30  et  plus 
dans  les  sables  rugueux  moyens  ;  les  draineurs  l'estiment 
à  0",60  environ  pour  les  terres  sablo-argileuses;  on  lui  a 
assigné  l'",50  et  au-delà  dans  les  argiles  et  les  marnes 
compactes,  et  plus  encore  dans  les  terres  grasses  et  tour- 
beuses, à  cause  de  la  ténuité  des  tissus  végétaux  tassés  dans 
ces  couches*. 

PerméablUlé  en  grand.  —  BcaUCOUp  de  rOChcS  doivCUt  ICUr 

perméabilité,  non  pas  à  la  porosité  même  de  la  roche,  mais 
aux  diaclases  et  aux  fissures  de  retrait  qui  les  traversent. 

C'est  ainsi  que  beaucoup  de  calcaires  très  compacts, 
comme  le  calcaire  lithographique,  et  appartenant  aux  étages 
les  plus  différents,  peuvent  donner  issue  aux  eaux  avec  une 
grande  facilité. 


^  Eaux  alimentaire»  de  la  Belgique^  1885,  p.  50  et  51. 

*  L'eau  pure  s'élève  de  3  ceniiniëtres  dans  un  tube  de  verre  de  1  millimètre  de 
diamètre;  elle  atteindrait  une  trentaine  de  centimètres  dans  un  tube  de  ,^  de  milli- 
mètre. 


ROCHES  IMPERMÉABLES  ET  ROCHES  PERMÉABLES.  17 

Les  diaclases  présentent  souvent  une  notable  largeur, 
particulièrement  dans  les  roches  calcaires  de  tous  les  âges; 
elles  passent,  par  des  intermédiaires  de  toutes  sortes,  à  de 
véritables  crevasses.  Aussi,  au  fond  de  beaucoup  de  car- 
rières, l'eau  des  pluies,  quelque  abondante  qu'elle  soit, 
disparaît  instantanément,  comme  si  elle  s'écoulait  par  un 
conduit  artificiellement  disposé.  Quelquefois  ce  sont  des 
ruisseaux  ou  des  rivières  qui  s'engouffrent  partiellement  ou 
en  totalité  pour  reparaître  plus  loin.  Ces  faits  qui  nous  oc- 
cuperont doivent  être  pris  en  considération  par  les  ingé- 
nieurs, qui  s'exposeraient  à  de  graves  mécomptes  en  prati- 
quant dans  des  roches  ainsi  crevassées  des  canaux,  dont  on 
ne  parviendrait  pas  à  rendre  les  parois  étanches. 

Les  grès,  par  suite  des  cassures  qui  les  traversent,  se  com- 
portent de  même. 

Cette  perméctbilité  en  grand  joue  dans  le  régime  des  eaux 
souterraines  un  rôle  dont  on  appréciera  l'importance  plus 
loin*. 


*  La  capacité  d'absorption  des  principales  roches  triasiques  et  oolithiques  a  été  ré- 
cemment Tobjet  d'évaluations,  de  la  part  du  comité  chargé  par  la  BritUh  Asêociation 
d'étudier  la  circulation  de  l'eau  souterraine  en  Angleterre.  Année  1881,  p.  309. 


CHAPITRE  II 


RÉGIME    DES  EAUX    DANS    LES  TERRAINS    PERMÉABLES 


Quoique  le  régime  des  eaux  souterraines  présente  des  ca- 
ractères analogues  dans  les  terrains  perméables,  quelle 
qu'en  soit  leur  nature,  nous  avons  cru  devoir  distinguer  et 
signaler  d'abord  les  terrains  de  transport,  quaternaires  et 
récents,  non  seulement  à  cause  des  étendues  considérables 
qu'ils  occupent  à  la  surface  des  continents»  mais  aussi  en 
raison  de  la  facilité  particulière  d'étudier  les  nappes  d'eau 
qui  les  imbibent.  Dans  d'autres  terrains  perméables,  tels  que 
les  terrains  stratifiés,  les  roches  cristallines  désagrégées,  les 
déjections  volcaniques  poreuses,  on  retrouve  des  circon- 
stances semblables. 

Les  sources  sont  alimentées  par  des  courants  souterrains 
qui  circulent  dans  les  fissures  et  dans  les  interstices  des 
roches  et  qui  reçoivent  généralement  le  nom  deimppes  sou- 
terraims. 

Les  noms  de  nappe  d'eau  et  de  niveau  d^eau  ont  donné 
souvent  lieu  à  des  erreurs.  Il  ne  s'agit  pas  d'une  véritable 
nappe  d'eau,  qui  serait  interposée  entre  des  roches  solides, 
mais  d'eau  logée  dans  les  interstices  de  roches  solides,  dont 


RÉGIME  DES  EAUX  DANS  LES  TERRAUfS  PERMÉABLES       19 

elle  ne  représente  qu'une  faible  fraction  du  volume  totah 

Dans  le  cas  où  une  telle  nappe  d'eau  imprègne  des  roches 
poreuses,  telles  que  les  sables  ou  les  graviers,  elle  est  en 
général  continue.  Il  n'en  est  pas  de  même  quand  l'eau 
n'occupe  que  des  fissures  ou  des  cavités  plus  ou  moins 
espacées. 

La  nappe  d'eau  la  plus  rapprochée  de  la  surface  du  sol  est 
celle  qui  alimente  la  plupart  des  puits.  Dans  les  cas  les  plus 
fréquents,  où  cette  nappe  n'est  pas  recouverte  par  des  forma- 
tions imperméables,  elle  a  été  désignée  sous  des  noms  très 
divers  :  en  français,  on  l'appelle  nappe  iTeau  des  puiU 
(Belgrand),  nappe  d'infiltration  (Delesse),  couche  aquifère 
libre,  nappe  liquide  (Verstraeten)  ;  en  allemand,  le  nom  de 
Grundwasser  est  très  employé,  de  même  que  celui  de  ground- 
waler  en  Angleterre  ;  elles  ont  été  aussi  appelées  en  anglais 
ioater  level  (Geikie),  ground  spring  (Prestwich)  et  waterplain 
(Dana)  ;  en  hollandais,  Welwater;  en  Italie,  notamment  en 
Sicile,  acqv>a  di  livello  (eau  de  niveau),  et  vulgairement  acqua 
di  centroj  etc. 

Ces  noms,  que  les  populations  et  les  géologues  ont  partout 
donnés  à  des  nappes  d'eau  aussi  étendues  et  aussi  impor- 
tantes, sont  généralement  mal  appropriés  à  leur  régime  et 
peu  caractéristiques* 

Il  convient  que  leur  dénomination  soit  cosmopolite  comme 
Test  celle  de  phréatiques^  qui  exprime  qu'elles  alimentent 
les  puits  ordinaires j  ne  traversant  pas  de  couches  imper- 
méables, et  tels  que  l'entendaient  les  Grecs. 

La  profondeur  en  est  très  variable,  depuis  quelques  décimè- 
tres jusqu'à  100  mètres  et  au  delà.  Le  cas  le  plus  fréquent 
est  représenté  parla  figure  6  où  l'on  voit  un  puits  établi  dans 
des  graviers  d'alluvion.  Les  figures  7  et  8  représentent  des 


?pi«;,  xroçi  puits. 


20  RÉGIME  DES  EAUX  DÂI4S  LES  TERRAINS  PERMÉABLES. 

puits  tirant  leur  eau  des  fissures  de  la  craie  et  de  celles  du 


i.>.  -^^'^ 


*^-  *^; 


Fig.  6.—  Coupe  transversale  d*un  puits  foncé  dans  un  dép6t  de  transport. 
Échelle  de  0-,01  par  mètre. 

grès  bigarré.  Dans  ce  dernier  cas,  les  puits  sont  souvent  très 

t. 

G 

% 


Fig.  7.  —  Pnits  dans  la  craie  montrant  Tin- 
fluence  des  lithoclases  sur  la  circulation 
des  eaux  phréatiques. 


Fig.  8.  —  Pnits  dans  le  grès  bigarré  montrant 
rinfliience  sur  le  régime  des  eaux  phréa- 
tiques des  lithoclases  et  dei  diastromes 
(interstices  des  couches). 


profonds  ;  par  exemple  :  pour  la  craie,  au  camp  de  Châlons, 
(fig.  7)  et  pour  le  grès  keupérien,  à  Leicester  (fig.  8). 


EAUX  PURÉATiQUES  DES  TERRAIS  DE  TRAI9SP0RT.  SI 

Les  eaux  phréatiques  sont  aiises  à  profit  sous  une  forme 
très  simple,  par  les  puits  dits  imtarUanés\ 

Nous  accorderons  d'autant  plus  d'attention  aux  eaux  sou- 
terraines de  cette  catégorie  que,  outre  leur  utilité  de  chaque 
jour  pour  l'alimentation  de  millions  d^hommes,  leur  étude 
doit  éclairer  vivement  la  connaissance  du  régime  des  eaux 
souterraines  en  général. 


§  L  Eaux  phréatiques  des  terrau^s  de  transport. 

Une  partie  considérable  des  continents  est  recouverte  par 
des  traînées,  parfois  très  épaisses,  de  débris  de  roches  variées, 
qui  ont  été  transportés  de  distances  plus  ou  moins  considé- 
rables. Le  transport  de  ces  matériaux  est  dû,  tantôt  à  d'an- 
ciens cours  d'eau,  tantôt  à  des  glaciers  maintenant  disparus. 

Ces  dépôts,  qui  appartiennent  généralement  à  l'époque 
quaternaire,  sont  ordinairement  appelés  dépôts  glaciaires^ 
dUuviuniy  alluviom  a^iciennes  et  peuvent  être  désignés  sous 
le  nom  général  de  terrain  de  transport. 

Au  point  de  vue  où  nous  nous  plaçons,  ils  comprennent 
des  matériaux  de  perméabilité  très  différente,  depuis  les 
limons  compacts  jusqu'à  des  graviers  très  grossiers,  en 
passant  par  des  sables  plus  ou  moins  fins*. 

Les  traînées  de  graviers  et  de  sables  très  perméables,  au 
milieu  desquelles  coulent  un  grand  nombre  de  rivières  et 
de  fleuves,  sont  en  général  imbibées  d'eau.  C'est  avec  cette 

^  Revue  de  géologie ,  t.  XI,  p.  20. 

*  ReiaiiTemeiit  au  régime  des  nappes  souterraines  des  terrains  perméables,  on  peut 
consulter: 
Daubrée.  Description  géologique  du  Bot-AAtn,  1852,  p.  541  à  355. 
Delesse.  Carte  hydrologique  de  Paris.  Comptes  rendus  y  1856,  t,  XLII,  p,  1207, 
Le  même.  Légende  de  la  carte  hydrologique  de  Seines l-Oise,  1874. 


2S      RÉGIME  DES  EÂDX  DANS  LES  TERRAINS  PERMÉABLES. 

eau  que  s'alimentent  de  nombreuses  populations»  agglo- 
mérées en  villages  et  en  villes,  qui  vivent  sur  les  plaines 
alluviennes  :  l'eau  potable  s'y  obtient  par  le  foncement  de 
puits  ;  car  les  sources  proprement  dites  manquent  ordinai^ 
rement  dans  ces  plaines. 

Les  eaux  météoriques  qui  tombent  sur  des  roches  aussi 
perméables  que  le  gravier  ou  le  sable,  s'y  infiltrent  rapide- 
ment, à  moins  que  ces  dépôts  ne  soient  recouverts  de  limon 
argileux,  comme  il  arrive  quelquefois.  En  outre,  la  rivière 
qui  a  creusé  son  lit  dans  le  gravier  contribue  aussi,  pour  sa 
part,  à  alimenter  la  même  nappe  d'eau,  par  des  infiltrations 
latérales,  particulièrement  au  moment  des  crues. 

Ces  nappes  souterraines  se  prolongent  sous  toute  la  super- 
ficie du  dépôt  de  gravier  ^  Dans  le  sens  de  la  profondeur,  la 
nappe  d'eau  s'arrête  en  général  aux  roches  qui  supportent 
le  gravier,  à  moins  que  celles-ci  ne  soient  elles-mêmes  per- 
méables. 

En  fonçant  un  puits,  on  rencontre  quelquefois  au  milieu 
du  gravier  des  lits  argileux  peu  perméables,  auxquels  la 
nappe  d'eau  paraît  s'arrêter  (voir  ci-dessus  la  figure  6)  ;  mais 
ces  lits,  de  forme  lenticulaire,  peuvent  n'avoir  qu'une  dimen- 
sion très  restreinte  et  le  gravier  aquifère  reparaît  plus  bas. 


Ememple  foaml  par  la  plalae  do  Bhia  |  latei«a«es 
l'eaa  eircide)  nature  des  ■MMiTeneats  de  la  aappe  §  floareee  i|al  ea 

dériveat.  —  Commc  cxcmplcs  de  faits  qui  se  reproduisent, 
de  toutes  parts,  avec  les  mêmes  caractères,  nous  choisirons 
d'abord  la  nappe  d'eau  qui  borde  le  Rhin  à  la  hauteur  de 
Strasbourg  (fig.  9).  Sur  la  rive  gauche  seulement,  elle  a 
une  largeur  de  plus  de  20  kilomètres.  La  profondeur  en  est 
inconnue,  mais  elle  est  certainement  supérieure  à  10  mètres. 

*  Quand  le  grayier  est  recouvert  par  du  limon,  tel  que  le  loess  dans  la  plaine  d'Alsace, 
la  nappe  d*eau  se  poursuit  au-dessous  de  cette  couche  imperméable. 


îig.  9.  —  Pltn  représentant  la  nappe  d'eau  adjacente  au  Rhin  et  i  ses  affluenti,  sur  la  rive 
gaache  du  fleuve,  entre  Bâle  et  wissemboure.  Celle  du  gravier  du  Rbiu  est  représentée  en 
teinte  pâle:  celles  des  alluvions  provenant  des  Yosees  ^sont  désignées  par  une  teinte  plus 
foncée.  -  Échelle  de  0,000001.  -»     .  o         i— 


24      RÉGIME  DES  EAUX  DANS  LES  TERRAINS  PERMÉARLES. 

La  section  transversale  du  gravier  aquifère  est  donc  au 
moins  de  200  000  mètres  carrés.  Cette  section  est  320  fois 
plus  grande  que  celles  du  Rhin  et  de  TUl  réunis  qui  cou- 
lent à  sa  surface,  lors  des  eaux  moyennes*. 

Pour  évaluer  la  quantité  d'eau  souterraine  qui  imbibe  le 
gravier,  il  a  suffi  de  mesurer  les  interstices  que  laissent 
entre  eux  les  cailloux  et  les  grains  de  sable  dans  leur  état 
ordinaire  :  c'est  ce  que  j'ai  fait  d'une  manière  très  simple, 
pour  le  gravier  de  la  plaine  du  Rhin.  Le  gravier  est  tassé 
dans  un  vase  imperméable,  de  manière  à  occuper  le  moindre 
volume  possible.  En  déterminant  les  poids  j)'  du  gravier 

sec  et  f  celui  du  gravier  imbibé  d'eau,  ^- — 7-^  exprime  la 

dimension  relative  des  interstices.  Le  volume  des  interstices 
varie  suivant  la  variété  de  gravier  ;  pour  le  gros  gravier, 
passé  sur  un  crible  dont  les  mailles  étaient  distantes  de 
2  centimètres,  les  interstices  ont  été  trouvés  de  0,32  à  0,36, 
tandis  que  pour  le  mélange  de  menu  gravier  et  de  sable  qui 
a  passé  à  travers  le  crible,  il  ne  formait  que  0,15  à  0,16  du 
volume  total.  Dans  le  gravier  des  alluvions  modernes  ou 
anciennes  pris  m  place^  les  interstices  ne  peuvent  pas  être 
beaucoup  moindres  que  dans  le  gravier  tassé  artificielle- 
ment, comme  on  vient  de  le  voir.  Il  est  même  probable  que 
les  interstices  y  sont  en  général  encore  plus  volumineux  que 
dans  ce  dernier,  à  en  juger  par  le  déchet  que  Ton  remarque 
ordinairement  dans  les  travaux  où  l'on  emploie  le  gravier 
naturel*.  D'après  les  chiffres  trouvés  plus  haut,  on  reste 
donc  au-dessous  de  la  réalité  en  admettant,  pour  le  volume 
d'eau  qui  imbibe  le  gravier,  la  fraction  0,20  ou  un  cin- 
quième. La  nappe  adjacente  au  Rhin  renferme,  par  consé- 
quent, à  la  hauteur  de  Strasbourg  et  sur  un  kilomètre  de 

'  Description  géologique  du  fias-Rhin,  p.  542. 
s  On  a  quelquefois  observé  un  déchet  de  0,25. 


EADX  PURÉATJQUËS  DES  TERRAINS  DE  TRANSPORT.       25 

longueur,  une  quantité  d'eau  égale  à  celle  qui  passe  au 
pont  deKehl  en  H  heures  1/2,  lors  du  niveau  moyen. 

La  vitesse  avec  laquelle  afflue  l'eau  des  puits  foncés 
dans  le  gravier  donne  une  idée  des  conditions  suivant 
lesquelles  elle  se  meut  à  travers  les  interstices  qu'elle  oc- 
cupe*. Quelques  parties  de  gravier  naturellement  dépourvues 
de  sables  sont  d'une  perméabilité  bien  supérieure  à  la 
moyenne. 

A  la  suite  des  crues  et  des  basses  eaux  des  rivières,  le 
niveau  des  puits  s'élève  et  s'abaisse  V  La  correspondance 
n'est  pas  instantanée;  abstraction  faite  de  l'influence  di* 
recte  de  la  pluie,  la  hauteur  de  la  nappe  souterraine  présente 
un  retard  de  plusieurs  heures  ou  de  plusieurs  jours  sur  l'état, 
maximum  ou  minimum,  dé  la  rivière,  en  raison  de  la  résis- 
tance que  l'eau  éprouve  dans  son  mouvement  souterrain. 
x\ussi  le  long  des  cours  d'eau  sujets  à  des  variations  fré- 
quentes et  rapides,  l'eau  des  puits,  au  lieu  d'être  de  niveau 
avec  la  rivière,  est  ordinairement  en  contre-haut  ou  plus 
rarement  en  contre-bas  (fig.  10).  L'amplitude  des  oscillations 
souterraines  est  en  général  moindre  que  celle  des  cours 
d'eau. 

Souvent  le  volume  du  Rhiû  augmente  beaucoup,  sans  qu'il 
soit  tombé  d'eau  sur  la  partie  moyenne  du  fleuve,  parce 
qu'il  y  a  eu  des  fontes  de  neige  ou  des  chutes  de  pluie  dans 
la  partie  alpestre  de  son  bassin.  Dans  cette  région  moyenne, 
le  niveau  de  la  nappe  d'eau  souterraine  s'élève  néanmoins, 
d'abord  près  de  la  rivière,  puis  l'élévation  de  niveau  gagne 
de  proche  en  proche  ;  ce  qui  doit  résulter  de  ce  que  le 
fleuve,  en  s'élevant,  s'infiltre  latéralement  dans  le  gravier 


*  Quelques  chiffres  sur  ce  sujet  sont  consignés  dans  la  Description  géologique  du 
Bas-Rhin,  p.  543  et  344. 

s  On  peut  d'ailleurs  observer,  en  petit,  le  m£me  fuit  au  bord  de  la  mer,  à  l'aide  d'un 
simple  trou  creusé  dans  le  sable  fin  que  découvre  la  marée  basse. 


26       RÉGIME  DES  EAUX  DANS  LES  TERRAINS  PERMÉABLES. 

voisin.  Le  mouvement  transversal  dont  il  est  question  se 
fait  avec  lenteur;  cependant  si  la  crue  du  fleuve  dure 
quelque  temps,  toute  la  plaine  voisine  se  trouve  imbibée 
au-dessus  du  niveau  moyen.  La  baisse  du  fleuve  détermine 
un  écoulement  en  sens  inverse,  c'est-à-dire  de  l'intérieur 
du  sol  vers  le  cours  d'eau  superficieL  Ces  oscillations  dé- 
croissent d'amplitude  en  s'éloignant  de  la  rivière. 

Le  long  promontoire  qui  sépare  le  Rhin  de  l'IU,  à  la  hau- 
teur de  Strasbourg  (voir  plus  haut  la  figure  9),  présente 
quelquefois  un  mouvement  plus  complexe;  car,  les  bassins 
des  deux  cours  d'eau  étant  dans  des  conditions  météorolo- 
giques différentes,  leurs  crues  peuvent  être  indépendantes 


^P^^^^^^y,^^.:  .  .  ..^^^p^ 


Fit(.  10.  —  Nappe  d'eau  adjacente  au  Uliin  et  à  l'ill  ;  coufie  prise  A  la  hauteur  de  Stras- 
bourg montrant  les  changements  de  niveau  du  fleuve,  N,  N  et  n,  n,  qui  amènent  des  chan- 
gements dans  le  niveau  de  l'eau  d'imprégnation  du  gravier. 

l'une  de  l'autre.  Ainsi  le  Rhin  a  sa  crue  d'été  lorsque  l'IU 
est  ordinairement  très  basse.  Si  les  eaux  de  l'IU  viennent 
à  croître  subitement,  celles  du  Rhin  ne  variant  pas,  ses 
eaux  d'infiltration  s'élèvent  de  proche  en  proche,  à  partir 
de  la  première  rivière,  et  bientôt  une  partie  de  la  rivière 
d'Ill  se  déverse  dans  le  Rhin  par  cette  voie  souterraine.  Un 
mouvement  en  sens  contraire  se  fait  quand  c'est  le  Rhin 
qui  est  en  crue. 

Contrairement  à  ce  que  l'on  observe  en  général,  la  nappe 
aquifère  dont  il  vient  d'être  question  donne  lieu,  en  quelques 
points,  au  jaillissement  de  sources  nombreuses  et  abondantes. 
Plusieurs  de  ces  sources  sont  assez  volumineuses  pour  que 
les  ruisseaux  qui  en  naissent  servent  dès  l'origine  de  moteur 


EAUX  PHRÉATIQUES  DES  TERRAINS  DE  TRANSPORT.       27 

à  des  usines,  comme  à  Obenheim  et  à  Gerstheim.  D*autres 
forment  immédiatement  de  véritables  rivières,  ainsi  qu'on 
en  peut  citer  plusieurs  dans  la  plaine  du  Rhin;  telles  sont 
la  source  située  près  d'Offendorf,  celle  de  la  Loutter,  près  de 
Huttenheim,  celle  de  la  Blind,  près  de  Colmar  et  plusieurs 
des  cours  d'eau  situés  aux  environs  de  Schlestadt^  Tous  ces 
ruisseaux  et  petites  rivières,  qui  jaillissent  dans  des  rigoles 
peu  profondes,  à  0°*,50  ou  1  mètre  en  contre-bas  de  la  sur- 
face du  sol,  doivent  leur  origine  à  des  épanchements  de  la 
nappe  d'eau  d'infiltration  *.  L'alluvion  est  loin  d'être  homo- 
gène. Tandis  que  sur  certains  points  elle  consiste  en  un 
gravier  extrêmement  perméable,  ailleurs  elle  est  mélangée 
de  limon,  de  manière  à  former  des  digues,  à  peu  près  imper- 
méables. Il  parait  exister,  à  peu  de  profondeur,  des  espèces 
de  galeries,  essentiellement  perméables,  dans  lesquelles  il 
s'opère  des  dérivations  du  Rhin  et  d'autres  cours  d'eau.  Ces 
dérivations,  après  quelques  kilomètres  de  trajet  souterrain 
de  l'amont  vers  Taval,  donnent  naissance,  par  suite  d'une 
différence  de  niveau,  à  de  petites  rivières  qui  jaillissent  avec 
impétuosité  du  sol.  Ce  n'est  d'ailleurs  qu'une  variété  du 
mécanisme  ordinaire  des  sources.  L'élévation  de  l'orifice 
des  sources  qui  nous  occupent  au-dessous  du  niveau  moyen 
du  fleuve  considéré  dans  une  même  section  transversale  de 
la  vallée,  leur  extrême  limpidité,  les  faibles  variations  de 
température  qu'elles  présentent,  sont  autant  de  faits  qui 
apprennent  que  les  orifices  de  ces  sources  sont  en  général 
assez  éloignés  de  la  prise  d'eau. 

J'ai  encore  eu  l'occasion  d'observer  deux  faits  instructifs 
sur  la  marche  des  eaux  souterraines. 

L'eau  fournie,  à  Strasbourg,  par  les  puits  de  plusieurs 


'  IkêcripHon  géologique  du  Bas-Rhin,  p.  11  et  347. 

*  Ed  Alsace,  on  a  donné  ;le  nom  de  Graben  à  un  certain  nombre  d'entre  eux  (Rieth- 
graben,  îhrtgnbmi),  bien  que  leur  origine  ne  soit  pas  artificielle. 


38      RÉGIME  DES  EAUX  DANS  LES  TERRAINS  PERMËABLES. 

maisons  du  Faubourg  de  Pierre  devint  impure  à  peu  près 
simultanément,  en  1848.  Au  moment  où  cette  eau  sortait 
des  pompes,  elle  répandit  une  odeur  semblable  à  celle  du 
bitume  obtenu  par  la  fabrication  du  gaz;  abandonnée  à  elle- 
même,  elle  se  recouvrait  bientôt  d'une  pellicule,  due  à  la 
présence  du  goudron.  Les  puits  infectés  formaient  une 
bande  étroite  et  allongée,  qui  s'étendait  à  partir  de  Tusine 
à  gaz  jusqu'à  300  mètres  environ  de  distance.  Or,  la  direc- 
tion de  celte  zone  est  placée,  comme  une  résultante,  for* 
mant  diagonale  entre  les  directions  de  deux  courants  qui 
tendent  à  s'opérer,  l'un  dans  le  sens  du  canal  des  Faux- 
Remparts,  l'autre  de  ce  dernier  canal  dans  les  fossés  des 
fortifications  ^  On  a  bientôt  remédié  à  l'inconvénient  dont  il 
vient  d'être  question,  en  rendant  imperméable  le  réservoir 
à  bitume  de  l'usine  à  gaz. 

A  Haguenau  l'existence  d'un  courant  souterrain  dans  une 
direction  déterminée  a  été  révélée  par  une  infiltration  d'eau 
chaude,  à  partir  d'un  puits  où  la  déversait  une  machine  à 
vapeur  qui  en  portait  la  température  à  29  degrés.  Certains 
puits  du  voisinage  n'étaient  pas  sensiblement  influencés  ; 
mais  un  puits  situé  à  35  mètres  de  distance,  vers  E.  S.  £• 
donnait  au  thermomètre  18%4,  c'est-à-dire  un  échauffement 
d'environ  6  degrés.  Un  second  puits  situé  à  70  mètres  de 
dislance,  dans  la  même  direction,  était  échauffé  de  1  degrés 
Ce  fait  montre  que  l'eau  se  mouvait  alors  dans  le  gra- 
vier, du  puits  vers  la  Moder,  suivant  une  ligne  oblique  diri- 
gée E.  S.  E. 

On  doit  s'étonner  de  l'incurie  avec  laquelle,  même  dans 
de  grandes  villes,  on  a  laissé,  pendant  des  siècles,  les  nappes 
phréatiques  se  vicier  par  des  infiltrations    pernicieuses. 

^  Ajoutons  que  la  première  eau  aspirée  des  pompes  était  toujours  moins  chargée  de 
bitume,  ce  qui  résuluit  sans  doute  de  ce  que  l'eau  souterraine,  abandon^ée  au  repos, 
se  dépouillait  du  bitume  qu'elle  avait  entraînée. 


EAUX  PHRÉATIQUES  DES  TERRAINS  DE  TRANSPORT.       29 

C'est  pourquoi  nous  croyons  utile  de  donner  encore  avec 
détails,   des  exemples  choisis  dans  des  localités  variées. 

Enviroiui  de  Bonn  el  de  Dnaneldorf.    —  Le  dépôt  de   gravier 

qui,  aux  environs  de  Bonn,  couronne  le  plateau  jusqu'à  la 
hauteur  du  Roderberg,  à  140  mètres  au-dessus  du  Rhin , 
est  formé  de  gros  cailloux  sur  une  épaisseur  moyenne  de 
6  mètres  et  qui  dépasse  20  mètres.  A  leur  pied  s'étend  le 
gravier  d'alluvion.  Les  deux  dépôts  sont  également  impor- 
tants pour  les  eaux  souterraines  des  environs  de  Bonn*  qui 
ont  leurs  analogues  dans  la  nappe  d'eau  alimentant  les  puits 
de  Dusseldorf. 

Le  canal  exécuté  pour  assécher  la  partie  sud-ouest  de  la 
ville  de  Bonn  a  donné  lieu  à  des  observations  de  la  part  de 
M.  Heymann  sur  les  variations  de  niveau  des  eaux  phréa- 
tiques dans  8  stations  éloignées  du  Rhin  de  263  à  534  mè- 
tres, distance  à  laquelle  les  changements  de  niveau  du  fleuve 
se  font  encore  sentir;  Teau  souterraine  s'élève  peu  à  peu, 
mais  sans  atteindre  le  niveau  des  hautes  eaux  du  fleuve. 

EsTironsdc  BraxeUee.  —  En  1851,  lorsqu'il  s'agit  de  doter 
la  ville  de  Bruxelles  d'une  distribution  d'eau  complète,  cette 
capitale,  pour  ses  14  700  maisons  et  134  000  habitants,  possé- 
dait, outre  les  citernes,  8194  puits  et  29  fontaines  publiques. 
Lespuits  d'une  profondeur  atteignant  35  mètres  sont  alimen- 
tés par  une  nappe  que  soutient  l'argile  compacte  éocène  (ypré- 
sienne).  D'après  les  études  de  M.  Verstraeten,  cette  couche 
aquifère  existe  sans  interruption;  on  la  voit  affleurer  au  fond 
des  vallées,  sous  forme  de  suintements  et  de  sources  qui  don- 
nent naissance  à  des  ruisseaux,  des  étangs  et  des  rivières. 

Lorsqu'on  passe  d'une  vallée  à  une  vallée  voisine,  par 

*  Blnhme.  Yerhandlungen  êtes  naturhiêtoriichen  Veretnes  des  preustitchen  Westpha- 
Un,  t.  XXVni,  1871. 


30 


RÉGIME  DES  EAUX  DANS  LES  TERRAINS  PERHËABLES. 


exemple  lorsqu'on  traverse  Bruxelles,  de  la  Senne  au 
Maelbeek,  on  reconnaît,  d'après  les  niveaux  de  Teau  des 
puits,  que  la  surface  supérieure  de  la  couche  aquifère  s'é- 
lève constamment  dans  le  sous-sol,  jusque  sous  le  plateau, 
pour  descendre  ensuite  vers  le  Maelbeek  (fig.  H).  Cette  sur- 


N  O 


SE 


EdwJiâ     des  longuevrs 
1 3*"" 


Echelle    deb  hmitcurs 


tôt'  niê(i-»4 
— < 


Fig.  11.  —  Coupe  au  travers  de  Bruxelles  montrant  la  disposition  de  la  nappe  phréatique 
dont  le  niveau  sobit  les  inflexions  indignées  par  la  ligne  N,  N,  N.  Elle  imprègne  des  sables 
fins  du  terrain  tertiaire  Ts  très  perméables  et  Ts'  qui  le  sont  beaucoup  moins.  Cr  couches  argi- 
leuses et  argilo-sableuscs  imperméables  dans  leur  ensemble.  Qt  limon  quaternaire.  ~  D'après 
M.  Yerstracten. 


face  supérieure  est  convexe  et  sa  forme  détermine  le  partage 
des  eaux  de  sources  alimentant  les  deux  vallées.  On  remarque 
que  cette  proéminence  liquide  ne  coïncide  pas  avec  la  ligne  la 
plus  élevée  du  sol,  et  que  le  versant  liquide  du  côlé  de  la  Senne 
est  beaucoup  plus  étendu  que  celui  du  côté  du  Maelbeek. 

Dans  la  vallée  de  la  Senne,  la  nappe  d'eau  est  découverte 
à  la  cote  14  ;  dans  le  Parc,  elle  atteint  la  cote  49  ;  à  proximité 
de  la  place  de  la  Société  civile  elle  s'élève  à  la  cote  51  ;  elle 
revient  à  jour  au  Maelbeek  à  la  cote  46,  pour  former  l'étang 
du  Jardin  zoologique. 

Plus  on  se  dirige  vers  le  sud,  plus  la  nappe  d'eau  atteint 
un  niveau  élevé. 

Il  résulte  de  nombreuses  mesures  qu'elle  a,  comme  le  sol^ 


ËAUt  PHRÉATIQUES  DES  TERRAINS  DE  TRANSPORT.  51 

une  inclinaison  générale  vers  le  nord-ouest,  et  que,  si  on 
pouvait  la  voir  par  transparence,  elle  présenterait  des  inéga- 
lités comparables  à  celles  de  la  surface,  mais  adoucies. 

Ville  de  Liège.  —  Le  ccutrc  de  la  ville  de  Liège,  au  fond  de 
la  vallée  de  la  Meuse,  repose  sur  des  dépôts  de  gravier  et  des 
alluvions  ou  sur  des  remblais  amenés  à  difTérentes  époques, 
soit  pour  rehausser  le  sol,  soit  pour  combler  et  rétrécir 
divers  bras  du  fleuve.  Les  habitations  établies  sur  les  co- 
teaux des  deux  rives  sont  assises  sur  le  terrain  houiller, 
sauf  les  plus  élevées  de  la  rive  gauche  qui  ont  pour  sol  le 
terrain  crétacé  et  le  limon  quaternaire  (hesbayen). 

Dans  l'opinion  de  M.  Gustave  Dumont*,  Teau  que  contient 
ce  gravier  et  qui  alimente  un  très  grand  nombre  de  puits  ne 
doit  pas  être  considérée  comme  provenant  du  fleuve  :  elle 
tient  en  effet  en  dissolution  des  matières  étrangères  au  gra- 
vier. Des  eaux  descendant  des  collines  voisines  alimentent 
les  puits  qui  se  trouvent  sur  leur  passage,  avant  d'arriver 
dans  le  fond  de  la  vallée  *. 

Des  travaux  exécutés  dans  le  lit  de  la  Meuse  ont  montré 
que  le  gravier  situé  au-dessous  du  fleuve  présente  une  suc- 
cession de  dépôts^  les  uns  très  perméables,  composés  unique- 
ment de  cailloux,  les  autres  presque  imperméables  sous  de 
faibles  pressions,  parce  que  les  cailloux  sont  en  quelque 
sorte  cimentés  par  du  limon. 

Paye-iiM.  —  Daus  toutc  Tétendue  des  Pays-Bas,  on  trouve 
à  une  faible  profondeur  de  Teau  (Welwater). 
Suivant  les  renseignements  que  je  dois  à  Tobligeance  de 


*  Rapport  sur  les  eaux  alimentaires  de  la  ville  de  Liège^  1856,  p.  5. 

*  En  1856,  la  ville  renfermait,  sur  1000  maisons,  5422  puits  et  2213  citernes.  On  se 
proposait  alors  d'amener  par  jour  6000  mètres  cubes,  soit  70  litres  par  habitant  et  par 
jour. 


52  RÉGIME  DES  EAUX  DANS  LES  TERRAINS  PERMÉABLES. 

M.  Van  Baumhauer,  dans  les  alluvions  marines  et  les  tour- 
bières basses,  terrains  saturés  d'eau,  la  surface  de  la  nappe 
se  trouve  au  niveau  à  peu  près  des  eaux  superlicielles  voi- 
sines, et  elle  s'élève  ou  s'abaisse  avec  celles-ci. 

Dans  les  alluvions  fluviatiles,  dans  les  sables  diluviens  et 
dans  le  terrain  erratique,  là  où  il  est  déposé  horizontale- 
ment, on  rencontre  la  nappe  souterraine  à  1  ou  2  mètres 
au-dessous  de  la  surface  du  sol,  c'est-à-dire  à  peu  près  pa- 
rallèlement à  celle-ci.  C'est  ainsi,  par  exemple,  que  près  de 
Zutphen  la  surface  du  sol  est  à  8  mètres  au-dessus  du  zéro 
de  l'échelle  d'Amsterdam  et  la  nappe  à  environ  6  mètres 
au-dessus  du  même  point,  tandis  qu'à  Winterswijk  la  sur- 
face du  sol  s'élève  à  50  mètres,  la  nappe  à  environ  28  mètres 
au-dessus  de  ce  même  niveau. 

Là,  au  contraire,  où  le  gravier  diluvien  constitue  des 
collines,  la  nappe  souterraine  se  trouve  à  la  même  hauteur 
que  les  eaux  extérieures  situées  à  leur  pied.  Le  puits  profond 
du  Bois  de  Soeren  a  atteint  la  nappe  à  la  profondeur  d'envi- 
ron 90  mètres;  et  telle  est  aussi  l'altitude,  au-dessus  du 
Zuiderzée,  de  la  colline  dans  laquelle  le  puits  est  creusé.  Sur 
les  hauteurs  près  d'Arnhem,  la  profondeur  des  puits  ali- 
mentés par  la  nappe  est  égale  à  la  hauteur  de  la  surface  du 
sol  au-dessus  du  niveau  du  Rhin. 

Les  fleuves  de  la  Hollande  contribuent  très  peu  à  l'eau 
souterraine  par  leur  infiltration  latérale,  et  seulement  en 
ce  qui  concerne  la  viouille  (en  hollandais  kwel)  qu'on  re- 
marque à  une  faible  distance  de  leurs  rives. 

Lors  des  crues,  elle  vient  au  jour  en  dedans  des  digues, 
dans  les  fossés,  pour  inonder  souvent  des  contrées  entières*. 

Dans  les  provinces  maritimes  de  la  Hollande,  le  sous-sol 
est  entièrement  pénétré  d'eau  de  mer.  On  ne  saurait  encore 

*  Presque  toujours  on  peut  arrêter  la  mouille  au  moyen  d'un  batardeau  d'argile 
établi  au  pied  de  la  digue  jusqu'à  une  profondeur  qui  ne  dépasse  pas  trois  mètres. 


EAUX  PERfiÂTIQUES  DES  TERRAINS  DE  TRANSPORT. 


35 


dire  avec  précision  jusqu'à  quelle  distance  des  côtes  et  à 
quelle  profondeur  s'étend  cette  infiltration  marine  dans  les 
différentes  localités.  ADelft,  à  22  mètres  de  profondeur,  Teau 
possède  à  peu  près  le  degré  de  salure  de  l'eau  de  mer.  A 
50  mètres  de  profondeur,  elle  est  seulement  un  peu  sau- 
mâtre  à  Zoetermeer;  tandis  qu'à  Vinkeveen  on  a  pu  creuser 
jusqu'à  la  profondeur  de  60  mètres  sans  rencontrer  d'eau 
saumâtre. 


—  La  ville  de  Munich  est  en  grande  partie  ali- 


TOKE 


MUNICH 


sso 


Fig.  12.  —  Profil  montrant  la  disposition  des  eaux  phréatiques,  dans  une  partie  du  sol  de 
Munich,  an  milieu  d'août  1873.  A,  argile  tertiaire  imperméable;  G  G,  gravier  quaternaire  qui 
lui  est  superposé;  IV N,  niveau  de  l'eau  phréatique;  PPP,  puits  creusés  dans  diverses  rues 
de  la  ville;  f  f  f,  forages.  —  Échelle  ^jt^qq. 

mentée  par  des  eaux  phréatiques,  conjointement  avec  les 
sources  de  Grosshessel  '. 

D'après  M.  Gûmbel,  le  sol  du  plateau  élevé  sur  lequel  est 
construite  cette  capitale  et  qui  s'étend  jusqu'aux  Alpes  con- 
siste en  sable  et  en  cailloux  qui  reposent  sur  une  couche 
marneuse  tertiaire  nommée  flinZy  et  qui  arrête  les  eaux  four- 
nies par  la  surface.  Les  couches  de  gravier  sont  extraordi-* 
nairement  perméables,  ainsi  que  le  témoigne  l'absence  d'eau 
à  la  surface  du  sol,  dans  la  région  située  au  sud  de  Munich. 
C'est  seulement  à  proximité  des  moraines  et  des  dépôts  de 


*  Salbacb.  Wasserêorgung  der  Siadt  Mûnchen,  1876  et  i877. 


U  RÉGIME  DES  EiUî  DANS  LES  TERRAINS  PERMÉABLES. 

loess  que  se  trouvent  des  cours  d'eau  superficiels  qui  ne 
tardent  pas  à  s'infiltrer  dans  le  sous-sol. 

MUNICH  ^ 


Fjg.  13.  —  Profil  montrant  les  divcnes  hauteurs  des  eaux  pliréaliques  dans  une  autre  partie 
do  sol  de  Munich  au  milieu  d'août  1873.  A,  aiple  tertiaire  imperméable  ;  G,  gravier  quater- 
naire ;  NN, niveau  de  l'eau  phréatique;  PP,  puits;  f  f  f,  forages.—  Échelle  557500. 

La  configuration  supérieure  du   flinz  est  très  inégale  et 


Fig.  H.  —  l'roUl  longitudinal  de  la  Uinlcmiùblo  près  AscliUeini  à  travers  la  vallée  de 
Hackingerbach  jusqu'à  OfTerflng.  A,  argile  tertiaire  imperméable  dite  F/in^;  G,  gravier  qua- 
ternaire imbibé  d'eau  jusqu'à  la  surface  désignée  par  N  N;  S  S,  sources  qui  résultent  de 
répanchcmcnt  de  cette  eau  souterraine. 


ses  inflexions  sont  indépendantes  de  celles  de  la  surface.  Il 
en  résulte  souterrainement  des  bassins  et  des  rigoles  qui 


EAUX  PHRÉATIQUES  DES  TERRAINS  DE  TRANSPORT. 


35 


recueillent  et  font  écouler  les  eaux  phréatiques  (fig.  12,  13 
et  14). 

Les  vallées  de  l'Isar  et  du  Mangfall  sont  des  érosions  de  ce 
plateau  qui  coupent  la  couche  de  gravier  sur  toute  sa  hau- 


Fi^.  15.  —  Plan  de  Mtuiich  avec  les  courbes  horizontales  des  eaux  phréatiques  lors  de  leur  état 
le  plus  baat  (29  avril  1876)  et  de  leur  état  le  plus  bas  (29  décembre  1876),  d'après  M.  le 
docteur  C.  W.  Gûmbel.  Les  courbes  pleines  sont  relatives  à  la  première  date  et  les  courbes 
pomtUlées  â  la  seconde.  Les  chiffres  de  chaque  courbe  expriment  en  métrés  leur  cote  au- 
dessus  de  la  mer.  L'échelle  qui  est  indiquée  en  kilomètres  est  de  tqitvôïï* 

leur  et  qui,  en  quelques  points,  ont  été  creusées  jusqu'au 
flinz.  Le  niveau  de  Teau  du  grand  réservoir  souterrain 
s'abaisse  assez  rapidement  vers  ces  vallées  et  laisse  Teau 
s'extravaser  avec  une  grande  vitesse  (voir  fig.  14). 


3rx  RË6IME  DES  EâUX  DANS  LË8  TERRâLNS  PERMÉABLES. 

Gomme  )e  lit  de  l'Isar,  la  nappe  a  cependant  une  inclinai^ 
son  générale  du  Sud  vers  le  Nord.  Toutefois  sa  pente  est 
moins  forte  que  celle  de  la  couche  de  gravier,  dont  l'épais- 
seur et  par  conséquent  h  hauteur  au-dessus  de  l'eau  souter- 
raine sont  plus  grandes  au  Sud,  à  proximité  des  montagnes, 
que  vers  le  Nord.  Cette  hauteur  décroît  de  22  mètres  à  Fur- 
stenreid,  jusqu'à  6  mètres  dans  certains  quartiers  de  Munich, 
et  à  1",50  à  Mousach.  Enfin  à  Feldmochen,  au-dessous  de 
Munich,  il  jaillit  de  nombreuses  et  abondantes  sources  alimen- 
tées par  la  même  nappe  de  gravier  (voir  plus  haut,  fig.  15). 

La  direction  et  la  vitesse  des  eaux  phréatiques  dépendent 
des  inégalités  de  la  couche  de  flinz  et  de  la  plus  ou  moins 
grande  perméabilité  du  gravier.  En  général  son  mouvement 
est  à  peu  près  parallèle  à  celui  de  Tlsar,  qui  coule  entre 
des  terrasses  de  gravier  souvent  consolidé  par  un  ciment 
calcaire.  Le  régime  de  cette  nappe  souterraine  est  indiqué 
par  des  courbes  de  niveau  reconnues  dans  la  ville  de  Munich 
(fig.  15). 

11  est  des  points  où  la  surface  du  sol  s'abaisse  vers  le 
fleuve,  de  manière  à  provoquer  Tapparition  de  nombreuses 
sources  sur  le  flanc  de  ces  vallées,  comme  à  Thalkirchen,  où 
des  galeries  ont  été  exécutées  perpendiculairement  à  l'Isar 
pour  les  utiliser.  Les  sources  de  Grosshessel  sont  également 
dues  à  un  écoulement  latéral  des  eaux  phréatiques.  (Voir plus 
loin,  au  chapitre  relatif  aux  sources.)  Par  suite  du  rôle  ré- 
gulateur de  la  nappe  souterraine,  les  sources  du  groupe  du 
Muhlthal  et  de  Gotlzing  ont  beaucoup  de  régularité. 

Outre  l'inclinaison  du  Sud  vers  le  Nord,  la  couche  de  flinz 
parait  avoir  aussi  une  pente  assez  faible  de  l'Ouest  à  l'Est; 
car  lesépanchements  latéraux  de  la  nappe  sortent  souvent 
par  la  rive  gauche  du  cours  d'eau. 

Dans  le  Gleisenthal,  où  des  études  ont  été  faites  pour  Tali- 
inentation  de  Munich,  sur  13  kilomètres,  la  pente  supérieure 


.  EAUX  PHRÉATIQUES  DES  TERRAINS  DE  TRANSPORT.       57 

des  eaux  phréatiques  est  de  50  mètres,  tandis  que  celle  de 
risar,  sur  cette  même  distance,  n'est  que  de  30  mètres. 

Narembcrir.  —  Aux  cnvirous  de  Nuremberg  *  il  y  a  des  pla- 
teaux étendus,  renfermant,  comme  ceux  des  environs  de 
Munich,  des  eaux  phréatiques  qui  se  rencontrent  en  outre 
dans  les  fonds  de  vallées.  La  vallée  de  laPegnitz,  au-des- 
sus de  Nuremberg,  a  été  étudiée  au  point  de  vue  des  eaux 
d'alimentation  de  cette  ville.  Dans  cette  question,  on  a  pris 
en  égale  attention  :  l""  la  hauteur  de  chute  de  la  nappe  phréa- 
tique qui,  dans  ce  cas  particulier,  était  de  13  mètres; 
2**  l'épaisseur  de  celte  nappe  ;  3*  le  degré  de  perméabilité  du 
sol  au  travers  duquel  elle  se  meut,  et  qui,  de  nature  sableuse, 
renferme  30  à  40  pour  100  d'interstices. 


r.  — D'après  M.  H.  CrednerS  les  cailloux  et  sables  de 
la  plaine  dite  EUter  Plmie  renferment,  aux  environs  de 
[>eipzig,  qu'elle  sert  à  alimenter,  une  nappe  d'eau  considé- 


Fif(.  16.  —  Disposition  de  l'oau  phréatique  à  Leipiig  et  dans  les  environs.  1,  silurien  iiirèrictir; 
R,  grè«  ronge  inférieur  ;  A,  argile  appartenant  à  l'oligocène;  S,  sable  aigileux,  appartenant 
au  même  groupe;  A',  argile  et  S',  sable  argileux,  appartenant  tous  deuv  au  iné^mc  terrain î 
Q.  sable  et  gravier  quaternaire  de  Tancien  lit  de  la  Pleissc;  Q',  limon  cslcarift-re  avec  {?ros 
galets  ;  G,  gravier  grossier  ;  L,  limon  presque  imperméable  (aulehm).  —  D'après  U.  Crednei*. 

rabie.  Elle  coule  (fig.  16)  à  la  surface  du  Rothliegendc  et 
des  dépôts  argileux  de  Toligocène  :  elle  est  en  partie  recou- 
verte par  un  limon  presque  imperméable. 

*  A.  Rhiem,  der  Woêterwerk  der  Stadi  Sùrnberg,  1879. 

*  Géologie  de»  K.K.  Fram-Joscphs  lîochqueUen  Wataerleilung,  ALlianUl.  der  K.  K- 
Geologischen  ReichawsUU.  1X77.  IX,  pi.  Vnr,  IX  et  XI. 


38       RÉGIME  DES  EAUX  DANS  LES  TERRAINS  PERMÉABLES. 

■nviroBs  4e  iTieue.  — Lcs  eaux  phrédUques  qui  imprègnent 
le  gravier  diluvien  aux  environs  de  Vienne  présentent  des 
caractères  de  gisement  semblables  aux  précédents 

Les  variations  de  leur  niveau  ont  été  représentées  par 
M.  Karrer*  sur  l'atlas  de  la  commission  des  eaux  de  Vienne. 
L'infiltralion  directe  de  Teau  du  Danube  est  arrêtée  dans  son 
cours  souterrain  à  l'intérieur  de  la  ville  par  une  faible 
protubérance  de  l'argile  du  tegel,  qui  se  relève  graduelle- 
ment, de  manière  à  former  une  selle.  Elles  reçoivent  un 
contingent,  affluant  directement  des  montagnes. 

Quoique  la  disposition  de  cette  nappe  soit  très  ordinaire, 
on  a  cru  devoir  donner  ici  la  coupe  (fig.  17)  qui  montre  en 
même  temps  un  second  puits  alimenté  par  les  couches  subor- 
données au  tegel. 

Béfloii  eomprUe  entre  Buda-Pestli  etlteoliiok.  —  La  rivC  gau- 

cheduDanube,  près  de  Buda-Pesth,*  est  formée  par  une  plaine 


Fig.  17.— Exemple  de  puits  de  Vienne  (Extrémité  de  la  rue  de  Garinthie)  lUmentés,  l'un  ptr 
l'eau  N  N  du  gravier  diluvien  que  recouvre  un  remblai  superficiel,  et  l'autre  par  celle  du 
sable  S,  subordonné  à  l'argile  du  tegel  A.  —  D'après  M.  Sueas. 

sablonneuse  et  à  surface  inégale.  C'est,  entre  le  Danube  et  la 
Theiss,  une  suite  du  plateau  quaternaire*  qui  a  des  pentes 
très  douces  vers  les  deux  fleuves.  La  couche  sur  laquelle  la 
ville  est  bâtie  est  formée  de  sable  mélangé  de  gravier,  ren- 
fermant des  cailloux  trachytiques  plus  ou  moins  décompo- 
sés. Ce  dépôt,  dont  l'épaisseur  est  de  3  à  12  mètres,  est  très 


ËiUI  PHRÉATIQUES  DES  TERRAINS  DE  TRANSPORT. 


59 


perméable  à  Feau  qui  y  forme  une  nappe  continue.  Je  dois 
à  l'obligeance  de  M.  Szabo  les  renseignements  qui  suivent. 

Voici,  d'après  les  mesures  prises  un  même  jour  (18  dé- 
cembre 1864)  dans  les  85  puits  des  stations  du  chemin  de 
fer  de  Buda-Pesth  à  Szolnok,  sur  une  longueur  de  225  kilo- 
mètres, les  résultats  obtenus. 

Le  point  de  comparaison  est  le  zéro  du  Danube,  à  l'altitude 
de  96"',20  au-dessus  de  la  mer.  Le  jour  des  mesures,  la  hau- 
teur du  Danube  était  96", 59  au-dessus  du  niveau  de  la  mer. 


STATIONS 


Budapesth 
Kôbanya  . 
Lôrinczi.  . 
Vecsès  .  . 
Ullô.  .  .  . 
Monor.  .  . 
Pilîs.  .  .  . 
Alberti-Irsa. 
Czegled.  . 
Abony.  .  . 
Sxolnok.  . 


NIVEAU  DE  L'EAU 

0AK8  LIS  V01TS 

au-dessus  de  Ja  mer. 


98- 
105 
113 
128 
115 
120 
132 
157 
124 
96 
86 


;28 
,84 
,40 
,52 

,29 
,96 
,50 
,97 
,74 
,59 
,94 


On  voit  que  le  niveau  de  Teau  des  puits,  à  partir  de  Buda- 
Pesth,  s'élève  progressivement  jusqu'à  Pilis,  point  où  l'élé- 
vation du  terrain  atteint  son  maximum  et  où  passe  la  ligne 
de  partage  des  bassins  du  Danube  et  de  la  Theiss. 

L'eau  du  Danube  étant  impropre  à  l'alimentation  de  la 
ville  de  Buda-Pesth,  il  a  été  décidé,  sur  la  proposition  de 
M.  Szabo,  d'intercepter  celte  nappe  dans  le  thalweg  d'une 
des  vallées  principales,  dont  la  configuration  a  été  reconnue 
par  des  sondages.  On  a  donc  placé  à  5  mètres  au-dessous  du 


4a  RÉGIME  DES  EAUX  DANS  LES  TERRAINS  PERMÉABLES. 

zéro  du  Danube,  c'est-à-dire  dans  le  gravier  qui  forme  la 
base  de  la  couche  perméable,  des  tuyaux,  de  fonte  perforés 
à  Tembouchure  de  la  plus  grande  vallée,  sur  remplacement 
d'Âquineum,  les  sondages  ont  accusé  une  couche  perméable 
d'une  épaisseur  suffisante  et  renfermant  en  abondance  de 
Feau  de  la  meilleure  qualité. 

Au  Sud  de  Buda-Pesth,  la  couche  imperméable  à  laquelle 
sont  dues,  comme  on  le  verra,  de  nombreuses  sources  situées 
9u  Nord  de  la  capitale,  se  perd  au-dessous  de  la  surface  du 
sol  et  forme  une  série  d'inégalités  souterraines  que  remplis- 
sent des  matériaux  perméables  et  une  abondante  nappe 
d'eau.  lien  résulte  pour  la  nappe  un  réservoir,  dont  l'eau 
est  amenée  par  les  vallées  souterraines  latérales  à  la  vallée 
principale,  de  manière  à  former  un  fleuve  caché  qui  s'écoule 
vers  le  Danube. 

EiiTirolM  de  HoMom.  —  Le  platcau  qui  domine  Moscou  est 
recouvert  d'une  argile  glaciaire  de  2  à  8  mètres  d'épaisseur, 
tandis  que  Talluvion  occupe  le  fond  des  vallées*.  Une  nappe 
d'eau  est  alimentée  par  les  eaux  atmosphériques  qui  pénè- 
trent enter  l'argile  glaciaire  et  les  couches  de  grès  à  Ammo- 
7iites  fulgens.  Elle  est  arrêtée  par  des  couches  imperméables 
d'argile  jurassique,  oxfordienne  et  kellovienne,  qui  sont  à 
peu  près  horizontales. 

La  carte  ci-jointe  (fig.  48)  montre  l'étendue  du  bassin  con- 
tenant, dans  les  sables,  de  9  à  50  mètres  d'épaisseur,  que 
M.  Trautschold  a  nommés  éluvion,  à  la  surface  de  l'argile 
jurassique,  de  Teau  de  bonne  qualité.  Les  chiffres  indiquent, 
en  mètres,  la  hauteur  de  l'argile  jurassique  au-dessus  de  la 
rivière  Moskwa.  C'est  à  Mytichtche  qu'on  trouve  principale- 


*■  Alimentation  en  eau  de  Moscou,  1883.  L'eau  est  élevée  par  des  machines  à  vapeur 
installées  &  Alexsciewkoie* 


UHX  FHRÉÀTIQUKS  DES  TERRAINS  DE  TRANSPORT. 


41 


ment  Teau  que  Timpératrice  Catherine  a  fait  conduire  a 
Moscou  par  un  aqueduc. 


Fi;.  18.  — •  Carte  des  enTiroiis  de  Moscou  donuant  la  disposilion  de  la  napiie  d'oau  libre.  Des 
petits  cercles  représentant  les  sondages  exécutés  pour  reconnaître  la  nappe  phréatique  qui 
a  été  reconnue  dans  tout  l'intérieur  de  la  courbe  ponctuée. 

••rau  —  Dans  les  graviers  aurifères  de  TOural,  où  la  pré- 


Fig.  19.  —  Mode  de  dessèchement  des  alluvions  aurifères  de  l'Oural.  Coupe  en  travers  :  C  C, 
bancs  redressés  du  calcaire  silurien;  S,  serpentine  et  autres  roches  éruplives;  a,  gravier 
aurifère,  dans  lequel  une  large  excaration  indiquée  par  la  ligne  pouctuée»  a  été  pratiquée; 
N,  lit  du  ruisseau,  avant  que  l'on  commençât  les  travaux;  N',  lit  abaissé  de  ce  même 
ruisseau. 


sencede  Teau  (iig.  19)  entraverait  l'exploitation ,  on  en  abaisse 


4S       RÉGIME  DES  EAUX  DANS  LES  TERRAINS  PERMÉABLES. 

le  niveau  par  le  creusement  d'une  rigole  dont  la  pente  est 


Fig.  20.  —  Mode  de  dessèchement  des  alluvioos  aurifères  de  rOural;  coupe  en  long.  NN,  ni- 
veau primitif  de  la  nappe  d'eau  ;  N'  N\  fond  de  la  ti-anchée  d'assèchement  qui  aboutit  aux 
gradini  d'exploitation. 

moindre  que  celle  de  la  vallée  (fig.  20)  ;  le  gravier  se  trouve 
ainsi  asséché  vers  l'amont,  sur  plusieurs  mètres  d'épaisseur. 


Ea^trans  de   lioadrcs    et    antres    parties  de  TAnfleterre  ^,     — 

La  situation  d'un  grand  nombre  de  villes  et  de  villages  a  été 
déterminée  par  des  conditions  géologiques.  Quelquefois  c'est 

OXFORD 


Isi»   Wv 


CherweU.  RW 


Fig.  SI.  —  Coupes  du  sol  de  la  ville  d'Oxford,  montrant  la  disposition  de  la  nappe  phréatique 
N  N,  dans  le  gravier  que  supporte  l'argile  A,  dite  d'Oxford. 


une  roche  escarpée,  qui  a  été  choisie  dans  un  but  de 
défense  ;  ailleurs  la  présence  de  houille  ou  de  métaux  a 
attiré  des  exploitants;  mais  le  plus  ordinairement^  dans  les 
temps  anciens,  c'était  la  nécessité  d'un  réservoir  d'eau  faci* 
lement  accessible. 

Des  populations   nombreuses  trouvaient  des  conditions 
favorables  sur  des  bancs  de  gravier  étendus  et  recouvrant 


*  Joseph  Prestwich.  On  ihe  Geological  conditions  affeeting  the  water  supply  io 
housesand  lownê,iSlQ  . 


EAUX  PflKÊATlUUES  DES  TERRAINS  DE  TRANSPORT.  43 

quelque  grande  formation  argileuse,  comme  il  arrive  à  Lon- 
dres sur  le  London-clay,  à  Oxford  sur  TOxford-clay  (fig.  21), 
à  Glocester  sur  le  lias.  Dans  tous  ces  cas,  le  gravier 
a  généralement  4  à  8  mètres  d'épaisseur  et  chaque  maison 
atteint  facilement  Teau  par  un  puits  qui  lui  appartient  et 
qui  est  indépendant  des  voisins. 

Ce  fait,  dans  les  temps  anciens,  avant  qu'on  intro- 
duisit  des  moyens  publics  d'alimentation,  étaitd'une  impor- 
tance essentielle,  de  sorte  que  l'accroissement  des  villes  se 
faisait  toujours  dans  le  sens  suivant  lequel  s'étendait  le 
gravier. 

C'est  ainsi  que,  selon  les  observations  très  intéressantes 
de  M.  Prestwich^,  Londres  est  établi  sur  un  lit  de  gravier 
dont  l'épaisseur  varie  de  3  à  6  mètres  et  qui  repose  sur  des 
couches  d'argile  dites  de  Londres  {London  clay)  de  50  à 
60  mètres  d'épaisseur.  Le  gravier  étant  très  perméable, 
l'eau  de  pluie  est  arrêtée  par  l'argile  imperméable  et  forme 
un  réservoir  intarissable  pour  les  innombrables  puits  qui 
y  entêté  creusés  depuis  un  temps  immémorial  et  qui,  pen- 
dant des  siècles,  ont  constitué  l'unique  alimentation  en  eau 
de  cette  capitale. 

Une  carte  de  Londres  datée  de  1817  montre  combien  cette 
cause  physique  avait  nettement  déterminé  l'extension  des 
populations.  Çà  et  là  seulement,  au  delà  du  corps  principal 
de  gravier,  celui-ci  constituait  quelques  lambeaux,  tels  que 
ceux  de  Islington  et  de  Highbury,  sur  lesquels  s'établirent 
aussi  des  habitations. 

C'est  pour  le  même  motif  qu'au  sud  de  la  Tamise,  des  vil- 
lages et  des  bâtiments  s'étendirent  graducUejneiitsur  le  gra- 
vier des  vallées  jusqu'à  Peckham,  Camberwell,  Brixton  et 
Clapham»  tandis  que  plus  loin,  les  maisons  et  les  villages  s'éle- 

*  Prestwidi.  Addreu  to  the  Geological  Society  of  London,  1872. 


44      RÉGIME  DES  EAUX  DANS  LES  TERRAINS  PERMÉABLES. 

vaient  sur  des  collines  couronnées  de  gravier  à  Streatham, 
Denmark  Hill  et  Norwood. 

Ce  fut  seulement  lorsque,  par  suite  de  la  rapide  extension 
des  travaux  des  grandes  compagnies  d'eau,  on  eut  des  faci- 
lités pour  se  procurer  une  alimentation  indépendante,  qu'il 
devint  possible  d'établir  une  population  urbaine  sur  les 
districts  argileux  d'HoUoway,  de  Cambden  Town,  de  Re- 
gent's  Park,  de  St.  John's  Wood,  de  Westbourne  et  de  Nott- 
ting  Hill. 

Aux  environs  de  Londres,  des  kilomètres  de  villages  se 
développèrent  sur  les  grands  bancs  de  gravier  qui  suppor- 
tent Barking,  Ilford  et  Romford,  au  Nord-Ouest  de  la  vallée 
de  la  Lea  jusqu'à  Hammersmilh,  Ealing,  Hounslow,  Slough,  et 
au  delà,  tandis  que,  sauf  l'exception  de  Kilburn,  on  pou- 
vait à  peine,  il  y  a  peu  d'années  encore,  rencontrer  une  mai- 
son entre  Paddington  et  Edgeware  ou  entre  Marylebone  et 
Hendon,  et  pas  beaucoup  plus,  du  côté  de  Highgate  et  de 
Hampstead. 

Gomme  cas  caractérisé  des  eflets  exclusifs  d'une  grande 
étendue  de  couche  imperméable  dans  le  voisinage  d'une 
grande  ville,  M.  Prestwich  mentionne  le  district  de  London- 
clay  dénudé,  s'étendant  de  1  kil.  5  au  nord  d'Acton,  de 
Ealing  et  de  Hanwell  à  Stanmore,  à  Pinner  et  à  Ickenham, 
près  Uxbridge  :  à  l'exception  de  Harrow,  qui  repose  sur  un 
lambeau  de  Baghhot  $andj  Perivale  et  Greenford,  sur  des 
lambeaux  de  gravier,  il  n'existe  que  les  petits  villages  de 
Northall  et  de  Greenford  Green.  Dans  la  première  édition  des 
cartes  de  VOrdnance^  sur  une  étendue  de  16  kilomètres 
carrés  au  Nord  et  à  l'Ouest  de  Harrow,  on  voyait  seulement 
quatre  maisons.  Cependant  le  sol  est  partout  cultivé  et  pro- 
ductif. Mais  immédiatement  à  l'Est  de  cette  région  et  le  long 
de  la  vallée  de  la  Lea,  le  sol  s'élève  et  beaucoup  des  col- 
lines du  London-clay  sont  couronnées  par  du  gravier  plus 


EhXJl  PHRÉATIQUES  DBS  TERRAINS  DE  TRANSPORT.  45 

ancien  que  celui  de  la  vallée  de  Londres  et  appartenant  à 
Tâge  du  boulder  clay;  c'est  là  que  se  présentent  les  anciens 
établissements  de  Hendon,  de  Stanmore,  de  Finchley,  de 
Barnet,  de  Totteridge,  de  Whetstone,  de  Soulhgate  et  autres. 

Partout,  sur  les  bords  de  la  Tamise  et  de  ses  tributaires» 
il  y  a,  en  outre,  un  lit  inférieur  de  gravier  de  vallées.  Ce 
banc  est  alimenté  par  la  pluie  qui  tombe  sur  lui,  par  les 
sources  et  autres  eaux  qui  descendent  des  collines  adja- 
centes, et  par  place,  par  rinfiltration  de  la  rivière  quand» 
pour  une  cause  quelconque,  la  ligne  de  niveau  du  gravier 
descend  au-dessous  de  celle  de  la  rivière.  Une  grande  partie 
de  Londres  au  Sud  de  la  Tamise  :  Westminster,  fiattersea  et 
nombre  de  villes  sur  la  Tamise,  comme  Hammersmith, 
Brentford,  Eton,  Maidenhead,  ainsi  que  Newbury  et  plusieurs 
villages  sur  la  Kennet  et  les  villes  de  Warc  et  de  Hertford 
sur  la  Lea,  sont  alimentés  également  par  des  puits  peu 
profonds. 

Beaucoup  de  villes  et  de  très  nombreux  villages  le  long 
de  la  plupart  des  vallées  de  rivières  de  l'Angleterre,  quel  que 
soit  le  terrain  sur  lequel  elles  sont  situées,  dépendent  de 
cette  nappe  superficielle  d'alimenlation,  qui  est  plus  con- 
stante que  celle  des  autres  puits.  Ce  n'est  que  dans  le  cas  de 
saisons  exclusivement  sèches  ou  d'une  aspiration  excessive 
qu'il  faut  recourir,  comme  supplément,  à  l'eau  des  rivières 
elles-mêmes. 

La  nappe  d'eau  la  plus  élevée  qui  est  dans  le  gravier  dilu- 
vien s'étend  presque  partout  sous  les  rues  et  les  maisons  de 
Londres  à  des  profondeurs  de  4  à  8  mètres,  formant  ce 
que  Ton  nomme  ground  sprin-gs. 


CkMe  de  Ciéne»,    notMnmeHt  aux  enviroHs  de  l»oaao.    —  NoUS 

prendrons  comme  exemple  d'eaux  phréatiques  sur  la  côte  de 
Gênes,  la  nappe  souterraine  des  environs  de  Loano. 


46 


RÉGIME  DES  EAUX  DANS  LES  TERRAINS  PERMÉABLES. 


Cette  nappe  coule  à  une  profondeur  variable,  sous  une 
plaine  d'alluvion  formée  par  des  couches  de  cailloux,  d'ar- 
gile et  de  sable  et  alimente  de  nombreux  puits  qui  servent 


LOANO 


niveau  d«  la  mer 


Echelle    des  Longueurs 
i i__ 


Fig.  28.  —  Nappe  d'eau  des  alluvions  quaternaires  aux  environs  de  Lojno  ;  M  >',  nivrau  supé- 
rieur de  cette  nappe  qui  se  déverse  dans  la  mer.  La  figure  représente  la  position  des 
sources  importantes  S  ^ui  jaillissent  à  la  base  des  calcaires  dolomitiquesC  à  leur  jonction 
avec  les  schistes  cristallins  Sch.  (D'après  M.  Giordano.) 

iinhAii*  i  ^^>  distances  horiionlale» 0.000016 

Bcneiie  j  ^^  hauteurs 0.00052 

à  l'arrosage  des  riches  vignobles  et  des  jardins,  dans  la  loca- 
lité nommée  I  Gazzi. 


irveav.  -'»•  1.»  nier 


LOANO 


EchelJc  des  Longueurs 


Echelle  des  hauteurs 

0     10*  IM   )M  VM  MO" 


— I 


Fig.  23.  —  Nappe  d'eau  des  alluvions  quaternaires  aux  environs  do  Loano.  NN,  niveiu  supé- 
rieur de  cette  nappe  qui  se  déverse  dans  la  mer.  La  figure  représente  en  outre  la  posi- 
tion de  sources  im|)ortanles  S  qui  jaillissent  A  la  base  des  calcaires  dolomitiquos  G.  i 
leur  jonction  avec  les  schistes  cristaUins  Sch.  (D'après  M.  Giordano.) 

tfi*ki»ii<i  S  des  distances  horisontales 0.000013 

ccnetie  j  ^^  hauteurs O.000OS6 

L^eau  dont  il  s'ngit  provient  principalement  d'une  forma* 
tion  de  calcaire  magnésien  trîasique  C  (fig.  22),  très  étendue 
vers  le  Nord  et  le  Nord-Ouest  et  toute  remplie  de  fissures  et 
de  cavernes.  Le  calcaire  a  une  stratification  obscure  et 
irrégulière  ;  les  couches  plongent  en  général  vers  le  Nord. 


EiUI  PHRÉATIQUES  DES  TERRAINS  DE  TRANSPORT.       47 

A  la  base  du  calcaire,  au  contact  des  schistes  talqueux  et 
gneiss  sous-jacents  Sch,  jaillissent  de  belles  sources  S,  par 
exemple  à  Boissano. 

Le  torrent  Nimbaldo,  qui  passe  par  Yerzi  (fig.  23)  et  a  son 
embouchure  à  l'Est  de  Loano,  traverse  le  calcaire,  le  schiste 
et  Talluvion;  mais  en  passant  sur  celle  dernière,  il  devient 
presque  sec. 

Dans  les  environs  de  Gênes,  à  Sampierdarena,  à  Vol  tri,  à 
Âbbenga,  il  y  a  d'autres  exemples  semblables  de  nappes 
d'eau  soulerraines  passant  dans  le  quaternaire. 


B.  —Le littoral  du  détroit  de  Messine,  tant  en  Sicile 
que  sur  la  côte  calabraise  de  Reggio,  esl  couvert  par  les  plus 
florissantes  plantations  de  citronniers  et  d'orangers,  qui  don- 
nent lieu  à  une  grande  exporlalion  et  à  des  industries  locales 
de  distillation.  Or  ces  plantations,  qui  donnent  souvent  plus 
de  2000  à  3000  francs  de  revenu  net  par  hectare,  couvrent 


Echelle    des  Lonqueurs 

? 1 i : i î» 

Echelle  des  Hauteurs 

0  IM    tff  tO«   4««    B0«^ 

1  I        »         I         I         I 

Fîg.  21.  —  Coupes  montrant  les  régions  de  la  nappe  phréatique  N  N  des  environs  de  Uessliie 
que  contiennent  les  sables  d'alluvion  g  ;  S,  sables  et  graviera  quaternaires;  M,  argiles, 
grés  et  conglomérat  du  nilocêno  supérieur. 

les  dépôts  caillouteux  des  alluvions  modernes,  formant  des 
plans  inclinés  (fig.  24)  qui  vont  du  pied  des  montagnes  à  la 
mer,  avec  des  étendues  variables  de  600  mèlres  à  4  kilo* 
mètres  et  au  delà,  et  des  pentes  de  1  1/2  à  3  0/0.  Au-dessous 
de  la  surface,  ces  dépots  très  perméables  renferment  tou- 
jours une  nappe  d'eau,  utilisée  au  moyen  de  nombreuses 
norias  pour  l'arrosage  des  plantations  qui  lui  doivent  leur 


4K  RËGIME  DES  EAUX  DANS  LES  TERRAINS  PERMEABLES. 

prospérité  :  la  profondeur  constante  de  la  napi)e  d*eau  est 
d'environ  5  mètres  et  sa  surface  est  à  peu  près  parallèle  à 
celle  du  dépôt  caillouteux. 

BdiYiroM  «le  NewTork.  —  On  a  proposé  d'utiliser  pour  ralî- 
mentation  de  New-York  une  nappe  d'eau  imprégnant  le  sable 
avec  gravier  du  littoral  de  Long-Island.  Ce  sable  s'élève,  à 
partir  du  littoral  Sud,  sur  une  largeur  de  10  kilomètres,  avec 
une  pente  de  0",003  par  mètre,  tandis  que  la  nappe  d'eau 
partant  du  niveau  de  la  mer  à  marée  basse  a  une  inclinaison 
de0",002  par  mètre*. 


Exemples  IboniU   par  1*  plaine  4e    la   IjomhmrAîe  ^  Fontanili\ 

—  Parmi  les  innombrables  exemples  du  même  genre,  nous 
citerons  la  plaine  de  la  Lombardie,  qui  est  formée  principa- 
lement de  graviers  et  de  sables  appartenant  aux  alluvions 
anciennes  et  modernes.  Dans  la  plus  grande  partie  de  son 
étendue,  elle  possède  une  nappe  d'eau  qui,  en  général,  rentre 
dans  la  catégorie  de  celles  qui  nous  occupent.  Elle  est  très 
abondante,  notamment  dans  une  zone  qui  s'étend  de  la  Sesia 
à  rOglio,  passant  par  Novare,  Milan,  Meizo,  Garavaggio  et 
Calcio.  La  profondeur  des  eaux  souterraines  devientde  plus  en 
plus  considérable  à  mesure  que  Ton  remonte  vers  le  Nord,  où 
il  existe  plusieurs  puits  déplus  de  100  mètres  de  profondeur. 
L'abondance,  pendant  l'été,  de  ces  eaux  souterraines  est 
proportionnée  à  l'abondance  des  pluies  et  surtout  des  neiges 
tombées  dans  la  saison  précédente.  Ces  eaux  pénètrent  alors 
latéralement  dans  les  rivières;  ce  qui  fait  que  celles-ci, 
après  avoir  été  desséchées  par  les  prises  d'eau  des  canaux 
d'irrigation,  retrouvent  de  l'eau  vers  leur  partie  inférieure. 
Le  Tessîn  à  Tornavento,  TAdda  à  Cassano,  l'Oglio  à  Torre  Pal- 

*  Dans  Geology,  3*  édition,  p.  661. 

*  D'après  une  communication  très  obligeante  de  M.  Giordano. 


EAUX  PHRÉATIQUES  DES  TERRAINS  DE  TRANSPORT. 


49 


lavicina»  sont  en  certaines  saisons  complètement  absorbés 
par  les  canaux;  et  cependant,  sans  qu'ils  reçoivent  de 
subsides  apparents,  ils  renaissent  peu  à  peu  par  le  suinte- 
ment continu  de  leurs  berges,  jusqu'au  point  de  redevenir 
navigables.  C'est  ainsi  que  les  nappes  d'eau  sont  de  plus  en 
plus  profondes  et  de  moins  en  moins  abondantes  à  mesure 
que  Ton  approche  du  lit  du  fleuve  *. 
Ces  nappes  d'eau  subordonnées  aux  dépôts  quaternaires 


♦  FlïrrcîYcc: 


Echelle, 
so  mo 


Fig.  25.  —  Sitaation  des  principales  nappes  d'eau  utilisées  pour  rétablissement  des  fontanilù 

de  la  Lombardie  reçoivent  une  application  agricole  très  re- 
marquable et  peut-êlre  unique  jusqu'à  présent,  dans  la  vallée 
du  Pô,  surtout  dans  les  plaines  de  Lombardie  et  dans  une 
partie  delà  Yénétie  et  du  Modénais  (fig.  25). 

La  constitution  géologique  spéciale  du  sous-sol  de  ces 
plaines  permet  d'en  tirer  de  grands  volumes  d'eau  propres 
à  l'irrigation.  Cette  eau,  qui  sort  à  une  température  presque 
constante  et  de  beaucoup  supérieure,  en  hiver,  àl'air  ambiant, 
permet,  sur  les  terres  où  elle  est  déversée,  la  culture  de 

*  ÂtmaUê  de  rirutitul  national  agronomique,  5*  année. 


50  RÉ6IIIE  DES  EiUX  DANS  LES  TERRAINS  PERMÉABLES. 

prairies  artiGcielles  dites  mamte  (mouillées),  même  pendant 
les  plus  fortes  rigueurs  de  l'hiver.  Le  climat  de  la  vallée  du 
Pô  est  aussi  froid  en  hiver  que  celui  du  nord  de  la  France 
et  la  végétation  y  est  complètement  arrêtée  ;  mais  ici,  grâce 
à  ce  système  d'irrigation  continue,  le  sol  réchauffé  par  Teau 
des  fontanili  fait  pousser  Therbe  même  en  janvier,  et  permet 
d'en  faire  les  coupes,  comme  en  été.  Cette  herbe  coupée 
fraîche  toute  Tannée  est  employée  dans  les  grandes  fermes 
pour  nourir  les  belles  vaches  dont  le  lait  sert  à  faire  le  fro- 
mage dit  parmesan^  et  qu'en  Lombardie  l'on  appelle  plutôt 
lodisan^  parce  qu'aujourd'hui  sa  grande  production  est  dans 
les  plaines  de  Lodi.  Le  total  des  coupes  de  foin  dans  l'année 
atteint  quelquefois  une  longueur  de  2,50  à  5  mètres  d'un 
produit  moyen  de  30  000  kilogrammes  par  hectare. 


Fig.  26.  —  Dispontion  en  forma  de  toits  suivant  laquelle  on  aménage  le  sol 
pour  l'établissement  des  fontanili;  r,  rigoles  qui  déversent  l'eau  sur  les  deux  versants. 

Pour  arriver  à  ce  résultat,  le  terrain  d'une  prairie  de  ce 
genre,  à  arrosement  continu,  doit  être  aménagé  à  l'avance 
en  parcelles  ayant  chacune  la  forme  d*un  toit  (fig.  26),  dont 
le  faite  est  occupé  par  une  rigole  qui  déverse  l'eau  aux  deux 
versants,  de  manière  qu'une  mince  nappe  d'eau  courante 
couvre  toujours  le  sol  et  le  réchauffe  en  l'arrosant,  tandis 
qu'en  bas  des  deux  versants,  une  rigole  en  reçoit  les  écoule- 
ments, qui  à  leur  tour  sont  utilisés  de  la  même  manière 
pour  une  zone  de  terrain  sous-jacentc,  et  ainsi  de  suite. 
Suivant  l'utilisation  plus  ou  moins  répétée  que  l'on  peut 
obtenir  de  l'eau  ayant  déjà  servi  {colature)^  on  arrive  à  irri- 
guer des  étendues  fort  différentes  avec  le  même  volume 
d'eau,  et  ce  volume  varie  souvent  de  20  litres  et  plus  jusqu'à 
6  litres  seulement  par  seconde  et  par  hectare  de  marcxta. 


EAUX  PHRÉATIQUES  DES  TERRAmS  DE  TRANSPORT.       51 

Quant  aux  fontanili  ou  puits  au  moyen  desquels  on  se 
procure  Teau  souterraine  pour  cette  irrigation  d'une  nature 
spéciale,  les  endroits  où  Ton  peut  les  creuser  se  trouvent 
sur  une  longue  zone  de  la  plaine  sur  la  gauche  du  Pô»  lon- 
geant de  loin  le  pied  des  Alpes  depuis  la  Sésia  jusqu'à  TAdige, 
et  puis  aussi,  au  pied  des  Alpes  vénitiennes  et  dans  le  bas 


Fig.  27.  —  Détail  d'un  fontanile,  montrant  commant  un  tonneau  t  est  établi  pour  Uévenor 
à  la  surface  l'eau  de  la  nappe  NN. 

Véronais.  Le  procédé  consiste  à  enfoncer  dans  le  sol,  dans 
des  endroits  convenables,  des  tonneaux  sans  fond,  de  1  mètre 
environ  de  diamètre,  et  de  2  à  3  mètres  de  hauteur,  en  péné- 
trant jusqu'à  la  couche  aquifère  que  Ton  trouve  ordinaire- 
ment à  2  ou  5  mètres  de  profondeur  (fig.  27).  Le  tonneau  est 


Cig.  S8.  —  DispositlOa  de  Irois  fontanili  F  F  réunissant  leurs  eaux 
dans  un  mémo  canal  d'irrigation. 

légèrement  conique,  évasé  par  le  bas.  —  Une  fois  la  nappe 
aquifère  atteinte,  l'eau  surgit  du  fond  du  tonneau  et  se  dé- 
verse par  son  bord  supérieur,  qu'on  a  légèrement  échancré, 
dans  le  canal  creusé  pour  la  recevoir.  On  creuse  ordinaire- 
ment plusieurs  de  ces  fontanili  les  uns  près  des  autres  dans 
les  zones  les  plus  riches  en  eau  souterraine,  et  on  en  réunit 
le  produit  pour  alimenter  un  canal  d'irrigation  de  quelque 
importance  (fig.  28).  Le  débit  d'un  fonlanile  varie  beaucoup, 
suivant  les  localités;  par  exemple  de  50  jusqu'à  plus  de 


52  RÉGIME  DES  EAUX  DANS  LES  TERRAINS  PERMÉABLES. 

100  litres  par  seconde,  même  jusqu'à  200  litres;  l'eau  de  ces 
fontanili  a  des  températures  souvent  de  12  à  14  degrés  cen- 
tigrades ;  parfois,  dans  la  saison  froide,  de  9  à  8  degrés  cen- 
tigrades seulement;  mais  c'est  toujours  une  température 
assez  douce  en  hiver,  lorsque  tout  est  gelé  dans  la  plaine, 
et  elle  suffit  à  entretenir  la  végétation. 

On  vient  de  voir  que  Teau  souterraine  qui  alimente  les 
fontanili  se  trouve  généralement  à  une  petite  profondeur, 


Zone     dee  Fontanili 


Fig.  29.  —  Nappes  distinctes  et  peu  profondes,  superposées  l'iuie  à  l'autre  et  déterminées  par 
les  alternances  de  gravier  et  d'argile  de  Talluvion.  Exemple  pris  aux  environs  de  Milan  : 
ttttf  fontanili  établis  sur  Tune  de  ces  nappes. 


sur  une  zone  spéciale  de  Talluvion  qui  s'étend  du  pied  des 
Alpes  jusqu'à  la  rivière  du  Pô.  —  L'alluvion  contient  sou- 
vent des  couches  alternantes  de  gravier  et  d'argile  (fig.  29), 
ce  qui  donne  lieu  à  l'existence  de  plusieurs  nappes  alimen- 
tées par  les  eaux  des  Alpes.  —  En  Lombardie,  près  de  Milan, 
il  existe  trois  nappes  superposées,  assez  distinctes  et  à  peu 
de  profondeur.  C'est  dans  la  nappe  supérieure  que  sont 
creusés  les  fontanili.  Plus  près  des  Alpes,  l'alluvion  est  moins 
argileuse  et  plus  perméable  ;  mais  les  nappes  d'eau  s'y  trou- 
vent à  de  plus  grandes  profondeurs,  ce  qui  rendrait  les  /bn- 
tanili  plus  difficiles  et  plus  chers. 

Ces  fontaines  artificielles  d'eau  toujours  tiède  occupent 
une  zone  de  quelques  kilomètres  de  largeur,  à  la  hauteur  de 
Milan,  et  de  200  kilomètres  de  longueur,  depuis  le  Tessin 
jusqu'à  Vérone;  puis  au  delà  elle  longe  à  une  certaine  dis- 
tance le  pied  des  Préalpes.  Le  niveau  de  la  nappe  aquifère 
qui  se  trouve  dans  la  Lombardie  à  130  ou  120  mètres  au- 


EAUX  PHRÉATIQUES  DES  TERRAINS  DE  TRANSPORT.       53 

dessus  de  la  mer  va  naturellement  en  s'abaissant  vers  Test, 
de  manière  à  ne  plus  être  que  de  25  à  20  mètres  dans  la 
Vénétie  et  moins  encore  dans  le  bas  Yéronais. 

En  Lombardie^  on  a  plus  d'un  millier  de  ces  fontanili, 
qui,  pour  un  débit  moyen  de  120  litres  par  seconde,  don- 
nent un  total  de  120  mètres  cubes  par  seconde. 


EAUX  PHRÉATIQUES  DES  DUNES. 

Les  nappes  d*eau  que  renferment  les  sables  des  dunes 
présentent  des  dispositions  qui  s'expliquent,  d'après  ce  qui 
précède,  avec  cette  circonstance  qu'elles  subissent  l'in- 
fluence des  marées. 

«••MgM^  —  En  Gascogne,  les  eaux  pluviales  qui  tombent 
à  la  surface  des  dunes  pénètrent  immédiatement  dans  le  sol 


Léd9 


Echelle     des  longueurs. 


Echelle  des  hauteurs. 


je îï y»- «~. 


Fig.  sa  —  Coupe  de  la  chaîne  des  dunes,  4  la  hauteur  de  l'étang  de  Cazau,  au  sud  d'Arcachon, 
passant  par  le  point  culminant  qui  atteint  89  métrés.  Elle  montre  approximativement  la  dis- 
position ondulée  de  la  nappe  phréatique,  disposition  qui  est  d'ailleurs  Yariablc  suivant  les 
saisons.  —  L'échelle  des  hauteurs  est  six  fois  celle  des  bases. 

sans  ruisseler  à  la  surface.  Elles  s'infiltrent  dans  le  sable  et 
vont  former  une  nappe,  dont  la  surface  supérieure  est  ondulée 
comme  celle  des  dunes,  mais  avec  des  ondulations  beaucoup 
moins  prononcées  (fig.  30)  et  dont  les  formes  varient  d'ail- 

*  Diaprés  ime  obligeante  communication  de  M.  RauHn. 


54 


RÉGIME  DES  EAUX  DANS  LES  TERRAINS  PËRMÉARLES/ 


leurs  à  la  suite  des  pluies  et  des  sécheresses.  Considérée  en 
grand,  celte  surface  n'est  pas  horizontale;  car  au  niveau  des 
hautes  mers,  dans  le  voisinage  immédiat  de  l'Océan,  elle 
s'élève  dans  l'intérieur  de  la  chaîne  des  dunes  à  15  ou  20  mè^ 
très  d'altitude. 

Cette  nappe  est  alimentée,  soit  exclusivement  parles  eaux 
pluviales,  soit  en  partie  par  les  eaux  des  étangs.  Ses  eaux  sont 
douces  par  suite  de  la  poussée  constante,  tant  des  eaux  plu- 
viales supérieures  que  des  eaux  des  étangs  et  des  marécages 
échelonnées  jusqu'à  la  côte. 

Les  puits  situés  à  la  pointe  de  Grave,  et  vers  la  limite  de 
la  chaîne,  à  la  hauteur  de  Porge,  ne  fournissent  que  de  l'eau 
douce,  même  lorsque,  par  suite  de  leur  profondeur,  ils  des- 
cendent jusqu'au  niveau  moyen  de  la  mer,  et  que  par  suite 
de  leur  faible  éloignement,  leur  niveau  éprouve  des  fluctua- 
tions en  rapport  avec  celles  des  fortes  marées.  A  Arcachon 
les  puits  ne  donnent  que  des  eaux  douces,  même  ceux  qui 
sont  assez  rapprochés  de  la  plage. 

Hoiumde.  —  Il  cu  est  dc  même  dans  les  dunes  littorales 
de  la  Hollande,  où  la  nappe  souterraine  (fig.  51)  est  encore 


i8li(ltàl!Si!iii^iëiisSSIiiMilg»$i8^ 


8-. 


■S 

T 
S 


Fig.  31.  —  Nappe;7d'eau  des  dunes  de  la  Hollande,  d'après  M.  Van  Ertborn.  A,  argile  super- 
posée  à  la  tourbe  T  et  aux  sables  tertiaires  et  supportant  le  sable  des  dunes  D,  où  l'eau 
phréatique  affecte  une  surface  ondulée  NN. 

limitée  par  une  surface  courbe  qui  d*ordinaire  suit  plus  ou 
moins  régulièrement  les  ondulations  de  la  surface  du  sol. 
Ce  fait  a  été  mis  en  évidence  par  les  sondages  exécutés  dans 
les  dunes  de  Wassenaar,  lors  9es  études  qui  ont  eu  lieu 


EAUX  PHRÉATIQUES  DES  TERRAINS  DE  TRANSPORT. 


55 


pour  amener  Teau  des  dunes  dans  les  villes  de  la  Hollande 
méridionale. 

Cette  même  conclusion  ressort  également  de  ce  que  la 
nappe  souterraine  qui  fournit  Teau  à  la  ville  d'Amsterdam 
est  à  environ  2  mètres  au-dessus  du  niveau  des  canaux  du 
Rynland.  La  nappe  se  trouve  donc  dans  les  dunes  générale- 
ment plus  haut  que  la  surface  des  eaux  libres  dans  les  allu- 
vions  marines  ou  dans  les  tourbières  basses  du  voisinage 
immédiat,  et  beaucoup  plus  près  de  la  surface  du  sol  que 
dans  les  collines  de  gravier  diluvien. 

£■«  4'OirteB4e<.  —  Lcs  duucs  qui  reposent  sur  les  alluvions 
maritimes,  aux  environs  d'Ostende,  recèlent  une  couche 


PlaiJe 


.  _D;i_ae§ 


Polders 


kchôile    dc^s  jcuighfurs 


Echelle    dtà    /iniifeurs 


H>     U>      fQ 


Tig  3.  —  Coupe  monlnnt,  d'après  M.  Ventraeten,  comment  l'eau  d'inflllration  des  dunet 
subit  l'influence  des  marges  aux  environs  d'Ostende.  A,  alluvion  des  polders;  E„  sable  saturé 
d'eau  de  mer;  E^,  sable  saturt  d'eau  douce;  U..  sable  des  dunes.  NN.  niveau  convexe  de  la 
nappe  phréatique. 

aquifèrede  ce  genre  (fig.  32),  dont  M.  Verstraeten  a  étudié 
les  relations  avec  l'eau  marine  :  les  oscillations  de  celle-ci 
sont  de  4  à  5  mètres. 


*  Verstraeten.  Eaux  alimentaires  de  Belgique,  2«  partie,  p.  54. 


56  RÉGIME  DES  EAUX  DANS  LES  TERRAINS  PERMÉABLES. 


EAUX  PHRÉATIQUES   DES   DÉPdTS  GLAaAIRES. 
Hoot-rar-LaoMuiiie  et  bords  de  TAreMe. —  LeS  dépôts  glaCÎaireS, 

qui  contiennent  des  associations  irrégulières  de  blocs  de 
toutes  dimensions  avec  des  dépôts  argileux,  c'est-à-dire  à  la 
fois  des  matériaux  perméables  et  des  matériaux  imperméa- 
bles, donnent  lieu,  pour  les  eaux  souterraines,  à  un  méca- 
nisme très  simple,  dont  les  exemples  précédents  donnent 
une  idée  suffisante;  aussi  n'en  citerons-nous  qu*un  petit 
nombre  de  cas. 
Au  Mont-sur-Lausanne,  une  source  assez  puissante  pour 


Fig.  33.  —  Coupe  montrant  comment  l'eau  d'une  moraine  a  été  mise  A  profit  pour  l'alimenta- 
tion de  Lausanne,  d'après  M.  Chavanues  ;  T,  grés  moUeste  ;  A,  argile  qui  supporte  le  réser- 
voir de  la  morgue  dont  le  niveau  supérieur  est  NN. 


contribuer  à  Talimentation  de  la  ville  a  été  créée,  en  perçant 
à  travers  la  molasse  et  Targile  quaternaire,  une  galerie  abou- 
tissant au  milieu  des  blocs  d'une  moraine  très  aquifère 
(fig.  33). 

D'autres  exemples  sont  fournis  par  les  environs  de  Villard- 
sur-OUon  (canton  de  Vaud),  de  Chamonix,  etc.,  etc. 

Dans  le  vallon  du  Champ-du-Moulin  (canton  deNeuchâtel), 
des  argiles  plastiques  tout  à  fait  imperméables,  à  la  base 
d'un  dépôt  glaciaire,  donnent  naissance,  sur  les  bords  de 
l'Areuse,  à  de  nombreuses  sources. 


EAUX  PHRÉATIQUES  DES  TERRAINS  DE  TRANSPORT.       57 


EAUX  PHRiATlQUeS  DES   aSS  MADRÉPORIQUES. 


On  peut  citer,  d'après  Dana,  ce  qui  se  passe  dans  les  lies 
de  coraux.  Une  île  de  ce  genre,  formée  jusqu'au  niveau  de 
la  mer  de  roches  madréporiques  que  recouvrent  des  sables, 
fournit  de  Teau  à  ses  habitants  par  les  puits  qu'ils  y  creu- 
sent. Cette  eau  provient  de  la  pluie  ;  la  nappe  qu'elle  consti- 
tue suffit  pour  repousser  par  sa  pression  les  infiltrations 
marines. 


INTÉRÊT  DES   EAUX   PHRÉATIQUES   AU  POIKT  DE  VUE 
DE   l'agriculture    ET   DE    l'hYGIÈNE. 


Quand  les  nappes  d'eau  adjacentes  aux  rivières  s'appro- 
chent beaucoup  de  la  surface  du  sol,  ce  qui  est  un  cas  assez 
fréquent,  leur  existence  est  de  nature  à  intéresser  la  végé- 
tation, comme  l'a  montré  M.  Barrai  pour  le  sol  sablonneux 
des  environs  d'Aigues-Mortes,  où  l'on  a  depuis  quelque  temps 
planté  de  la  vigne  avec  succès.  Après  plus  de  trois  mois  sans 
pluie,  les  sondages  ont  indiqué  partout  moins  de  1  pour  100 
d'eau  à  0",20,  de  6  à  12  pour  100  à  1  mètre,  18  à  21  pour  100 
entre  2  mètres  et  2",25  de  profondeur. 

Dans  le  même  cas,  la  nappe  d'eau  souterraine  peut  égale- 
ment, par  capillarité,  avoir  une  action  sur  le  degré  d'humi- 
dité de  l'atmosphère.  Lors  des  grands  travaux  de  rectification 
du  Rhin,  qui  ont  été  entrepris  de  concert  entre  les  gouver- 
nements français  et  badois,  on  a  forcé  le  fleuve,  dont  la  vi- 
tesse devenait  plus  grande,  à  creuser  davantage  son  lit  et 


58 


BÉGIMR  DES  EAUX  DANS  LES  TERRAINS  PERMÉABLES. 


par  suite,  on  a  un  peu  abaissé  le  niveau  de  la  nappe  d'eau 
adjacente.  C'est  à  cette  circonstance  que  l'on  a  attribué 
l'assainissement  constaté  dans  l'état  des  villages  de  la  plaine, 
notamment  au  point  de  vue  du  goitre. 


OBSERVATIONS  THÉORIQUES. 

En  résumé,  quelque  perméable  que  soit  une  roche,  et  par 
suite  de  la  résistance  qu'elle  oppose  à  l'écoulement,  la  sur- 
face supérieure  de  la  couche  saturée  ou  nappe  d'eau  forme 


1^- 
N'y     w 

^     Le  Bois  de  Ban. 


Fig.  33.  —  Plan  montrant  comment  la  source  thermale  S  de  Lavey  s'épanchait  dans  des 
éboulis  où  elle  se  mélangeait  aux  eaux  phréatiques,  jusqu'à  ce  qu'elle  fut  captée  au  moyen 
d'un  puits  (d'après  M.  le  professeur  Renevier)  ;  y,  roches  cristallines  métamorphiques  (carbo- 
nifères) ;  /,  roches  du  trias  (arkose,  cargneule  et  calcaire  gris}. 


une  courbe  inclinée  vers  le  débouché  qui  en  est  la  partie  la 
plus  basse.  Les  divers  exemples  qui  précèdent  montrent 
quelle  est  la  complexité  des  mouvements  des  nappes  sou- 


EAUX  PflRÉATIQUES  DES  TERRAINS  DE  TRANSPORT.  59 

terraines,  sollicitées  à  descendre  suivant  certaines  pentes  et 
suivant  l'abondance  variable  des  eaux  qui  les  alimentent. 

Aux  eaux  provenant  directement  de  l'atmosphère  ou  des 
rivières,  s'ajoute  très  fréquemment  une  contribution  latente 
de  sources  invisibles  provenant  de  diverses  profondeurs. 
Parmi  les  innombrables  exemples  que  Ton  pourrait  citer,  je 
mentionnerai  seulement  la  source  du  Creux  du  Vent,  canton 
de  Neuchâtel,  dont  la  figure  sera  donnée  plus  loin. 

OUEST  EST 


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Echtiiit- 

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---w  J?:-  -Tl  .Aq. 

YS%.  35.  —  Coupe  montrant  comment  la  source  thermale  S  de  Lavey  s'épanchait  dans  les  éboulis, 
où  oUc  se  mélangeait  aax  eaux  phréatiques  jusqu'à  ce  qu'elle  ftit  captée  au  moyen  d'un 
puits  (d*apr6s  M.  le  professeur  Renevier)  ;  y,  roches  cristallines  métamorphiques  (carboni- 
fèrcs)  ;  t,  roches  du  trias  (arkose,  cargueule  et  calcaire  gris). 

Le  fait  a  été  particulièrement  étudié  dans  les  localités  où 
il  détermine  la  dilution,  par  les  eaux  phréatiques,  d'une  eau 
thermale  ou  minérale,  qui  vient  jaillir  au  milieu  d'elles, 
comme  à  Plombières,  à  Schinznach,  à  Lavey  (fig.  34  et  55). 
Le  but  à  atteindre  étant  d'obtenir  ces  sources  sans  mélange, 
on  est  amené  à  les  isoler  par  des  travaux  de  captage. 

Si  Ton  suppose  la  roche  imperméable  sous-jacente  parfai- 
tement plane  et  la  roche  perméable  parfaitement  homogène, 
le  calcul  démontre,  d'après  Dupuit,  que  la  courbe  de  la 


60  RÉGOŒ  DES  KAUX  DAItS  LES  TERRAINS  PERMÉABLES. 

partie  supérieure  de  la  nappe,  à  partir  du  point  le  plus  haut, 
a  pour  profil  un  arc  de  parabole. 

D'après  les  savantes  études  de  M.  Boussinesq  relatives  à  la 
théorie  des  eaux  courantes,  une  relation  entre  les  pentes, 
les  vitesses  moyennes,  la  forme  et  Taire  des  sections  régit 
les  mouvements  lents  des  eaux  d'infiltration  du  sol,  à  travers 
les  canaux  irréguliers  que  forment  les  interstices  des  grains 
de  sable  composant  les  terrains  perméables;  la  vitesse 
moyenne  est  simplement  proportionnelle  à  la  pente  motrice, 
comme  Dupuit  l'avait  admis  pour  le  régime  permanent.  Il 
en  est  de  même  pour  le  régime  non  permanent.  Les  crues 
ou  gonflements  des  eaux  souterraines  se  propagent,  en 
général,  avec  une  faible  vitesse,  sensiblement  constante,  et 
proportionnelle  à  la  pente  du  sous-sol;  plusieurs  gonfle- 
ments produits  à  la  fois,  en  divers  points,  se  fondent  peu 
à  peu  en  un  seul. 

Le  cours  d'eau  pénétrant,  lors  des  crues,  dans  la  couche 
caillouteuse  et  leur  soutirant,  au  contraire,  du  liquide  lors 
des  sécheresses,  la  nappe  adjacente  se  comporte  à  la  ma- 
nière d'un  régulateur.  En  effet,  cette  sorte  de  flux  et  de 
reflux,  qui  s'opère  sur  de  très  grandes  surfaces,  amoindrit 
les  oscillations  extrêmes  du  volume  de  la  rivière.  Le  phéno- 
mène a  quelque  analogie  avec  le  mouvement  ascendant  et 
descendant  de  la  chaleur  solaire  dans  l'intérieur  de  la  croûte 
terrestre,  suivant  les  saisons. 

Par  suite  du  va-et-vient  dont  il  s'agit,  on  a  supposé  que 
la  boue  infiltrée  dans  le  sable,  avec  les  eaux  troubles  de  la 
rivière,  à  proximité  du  lit,  en  serait  expulsée  lors  du  mouve- 
ment rétrograde  de  l'eau.  Ce  serait  par  suite  de  ce  double 
mouvement  que  le  gravier  ne  serait  pas  depuis  longtemps 
imprégné  de  vase,  même  à  peu  de  distance  de  la  rivière'. 

*■  Cet  effet  naturel  repose  sur  le  même  principe  qu'un  système  de  filtration  artifi- 


TERRAINS  AUTRES  QUE  LES  TERRAINS  DE  TRANSPORT.      61 

Des  expérimentateurs  se  sont  préoccupés  de  déterminer 
directement  la  perméabilité  des  différentes  roches,  et  ils 
sont  arrivés  à  des  résultats  discordants,  ce  qui  tient  sans 
doute  à  la  difficulté  de  se  placer  dans  des  conditions  compa- 
rables. 

Après  Darcy  et  M.  Hagen,  M.  Seelheim  *  a  cherché  à  obtenir 
des  conclusions  générales,  de  nature  à  éclairer  la  construc- 
tion, jusqu'ici  empirique,  des  digues,  autour  des  polders  et 
des  canaux  de  la  Hollande. 

Antérieurement  au  travail  de  M.  Seelheim,  Texpérience 
m'avait  paru  pouvoir  éclairer  le  sujet.  En  versant  de  Teau 
dans  le  premier  compartiment  d'une  caisse  contenant  plu- 
sieurs cloisons  verticales  et  parallèles,  formées  de  craie,  on 
constate  que  le  liquide  filtre  peu  à  peu  dans  les  autres  com- 
partiments, mais  que,  pendant  des  mois  entiers,  une  déni- 
vellation persiste  de  chacune  des  chambres  à  la  chambre 
suivante,  de  telle  sorte  que  la  surface  moyenne  du  liquide 
représente  un  plan  incliné  sur  l'horizon. 


§   II.    EAUX   PHRÉATIQUES   DES   TERRAINS    AUTRES   QUE   DES   TERRAINS 

DE   TRANSPORT. 


Les  nappes  d'infiltration  phréatiques  ne  sont  pas  res- 
treintes aux  terrains  de  transport  que  nous  avons  pris  pour 
exemple,  à  cause  de  leur  fréquence. 

Par  suite  des  fissures  qui  les  traversent  en  tous  sens,  ou  à 
raison  de  leur  nature  arénacée,  certains  groupes  de  couches 


cielle,  fort  ingénieuxi  établi  à  Greenock  par  Tingénieur  Thom,  en  1828,  dans  lequel  le 
neltoiement  du  filtra  se  fait  de  lui-même,  parce  que  Teau  peut  y  pénétrer,  soit  par  le 
haut,  soit  par  le  bas. 
'  Les  lois  de  la  perméabilité  du  sol.  Archives  néerlandaùe$,  t.  XIV,  p.  393.  1870. 


62 


RÉGINE  DES  EAUX  DANS  LES  TERRAINS  PERÏÉABLBS. 


des  terrains  slralifiés  se  comportent,  vîs-à-vis  des  eaux  sou- 
terraines, comme  les  terrains  de  transport.  Gomme  ceux-ci, 
ils  contiennent  des  eaux  phréatiques  qui  toutefois  s'y 
meuvent  en  général  avec  moins  de  facilité  et  de  régularité. 

Terrains  torllairci»  dcn  dépariementa  de  la  Seine  et  de  Seine- 

ec-Harne.  —  Daus  SCS  cartes  hydrologiques  de  la  Seine  et  de 


fig.  54;.  _  Cui-lc  mouU'aul  lu  Uisposiliun  de  l'eau  i)l.:-éallquc  i  Paris  cl  aux  cuvirous. 

Echelle  ibo  uds* 


Seine-et-Marne,  M.  Delesse  a  signalé  ces  résultats  avec  beau- 
coup de  précision. 

Toutes  les  maisons  de  Paris  devaient  être  autrefois  pour- 
vues d'un  puits.  Il  en  a  été  compté  50  000,  lorsqu'on  les  a 
recensés  au  moment  du  siège;  la  plupart  se  trouvent  dans 
les  vieux  quartiers.  L'usage  des  puits  est  tombé  en  désuétude, 


TERRAINS  AUTRES  QUE  LES  TERRAINS  DE  TRANSPORT.      6S 

depuis  le  développement  de  la  distribution  d'eau  de  la  ville. 

En  dehors  des  dépôts  d'alluvions,  les  couches  tertiaires 
renferment  une  nappe,  où  s*alimentent  de  nombreux  puits 
et  qui  se  relie  à  la  nappe  d'alluvion  (fig.  36).  Ainsi,  cette 
dernière  reçoit  sur  les  deux  rives  du  fleuve,  à  Auteuil  et  à 
Hontrouge»  un  déversement  de  la  nappe  qui  est  supportée 
par  l'argile  plastique. 

La  traversée  des  eaux  phréatiques  opposa  une  grande  dif- 
ficulté, lors  des  fouilles  qui  furent  ouvertes  le  1^'  septembre 
1861,  pour  les  fondations  de  l'Opéra.  Alimentée  par  des 
courants  souterrains  qui  descendent  abondamment  des  pla- 
teaux Toisins,  la  nappe  est  à  5  mètres  au-dessous  du  sol.  Or, 
pour  pouvoir  donner  aux  dessous  de  la  scène  une  dimension 
convenable,  il  fallait  asseoir  ses  fondations  à  une  profondeur 
de  14  mètres.  Les  8000  mètres  cubes  au  moins  qu'il  s'agissait 
d'épuiser  furent  extraits  à  l'aide  de  pompes  qui  travaillèrent 
plus  de  7 mois,  avant  qu'on  pût  établir  une  nappe  de  béton; 
les  effets  de  ces  machines  se  firent  sentir  à  plusieurs  kilo- 
mètres de  distance  ^ 

Partout  les  nappes  de  ces  divers  terrains  perméables 
se  relèvent,  quand  on  s'éloigne  des  thalwegs. 

A  Paris,  la  pente  de  la  nappe  d'eau  des  puits  a  été  trouvée 
supérieure  à  1  millimètre  par  mètre  et  elle  atteint  1  centi- 
mètre près  de  la  Seine,  qui  joue  le  rôle  d'un  canal  d'assè- 
chement. Sur  la  rive  droite,  en  temps  de  basses  eaux,  la 
pente  atteint  7  mètres  par  kilomètre,  soit  7  millimètres  par 
mètre  dans  l'axe  du  boulevard  de  Sébastopol.  Ces  fortes 
pontes  sont  variables  suivant  le  degré  de  perméabilité  du  sol 
et  le  volume  de  Teau  de  la  nappe. 

D'après  Belgrand,  la  nappe  d'eau  qui  alimente  les  puits  de 
la  rive  droite  est  à  un  niveau  peu  profond  au-dessous  du 


1.  Charles  Garnier,  Le  nouvel  Opéra  à  Paris;,  t.  II,  p.  217.  —  Oppermann,  Nouveliee 
urehitfe»  de  eonetruclion.  Janvier  1863. 


64       RÉGIME  DES  EAUX  DANS  LES  TERRAINS  PERMÉABLES 

sol,  tant  qu'elle  se  trouve  dans  des  terrains  de  transport 
du  fond  de  la  vallée.  Ces  terrains  se  composent  de  graTÎer, 
de  sable  et  de  limon  ;  leur  limite  suit  à  très  peu  près  le  pied 
des  coteaux.  Sur  toute  cette  rive,  si  l'on  ne  sort  pas  des  an- 
ciennes enceintes  de  Paris,  ou  même  des  faubourgs  qui  s'y 
rattachaient,  la  profondeur  des  puits  ne  dépasse  que  rare- 
ment 10  mètres;  souvent  elle  est  comprise  entre  4  et  5  mè- 
tres. 

Sur  la  rive  gauche,  la  profondeur  des  puits  est  plus  grande; 
dans  toute  la  partie  basse  occupée  par  l'ancienne  ville,  elle 
pouvait  varier  entre  6  et  10  mètres;  mais  si  l'on  considère 
les  parties  hautes  de  la  rue  Saint-Jacques  et  le  plateau 
occupé  autrefois  par  l'Université,  qui  s'étend  à  droite  et  à 
gauche  de  cette  rue,  on  trouve  que  la  nappe  d'eau  souter- 
raine est  à  28  et  30  mètres  au-dessous  du  sol.  Les  puits  les 
moins  profonds  sont  ceux  des  rues  qui  longent  la  Seine  et 
la  Bièvre.  C'est  le  contraire  sur  la  rive  droite  :  les  puits  les 
moins  profonds  sont  peu  éloignés  de  la  rue  Saint-Lazare.  La 
nappe  d'eau  remonte  plus  rapidement  que  le  sol,  à  mesure 
qu'on  s'éloigne  de  la  Seine. 

Dans  le  département  de  Seine-et-Marne,  les  nappes  phréa- 
tiques sont  très  développées,  non-seulement  dans  le  terrain 
de  transport,  mais  encore  dans  la  craie  blanche.  Il  en  existe 
aussi  dans  les  divers  terrains  perméables  qui  sont  traversés 
par  des  rivières,  notamment  dans  les  calcaires  lacustres  de 
la  Beau  ce,  de  la  Brie  et  du  Multien,  dans  les  sables  supé- 
rieurs dits  de  Fontainebleau,  dans  les  sables  moyens  qui  sont 
si  développés  dans  les  vallées  de  l'Ourq  et  de  la  Marne,  enfin 
dans  le  calcaire  grossier  et  les  caillasses  qui  recouvrent  ce 
dernier. 

Terrains  crétacés  ci  Jurassiques.    —  DanS  IC  terrain  Crétacé 

supérieur,  les  eaux  phréatiques  acquièrent  une  importance 


66      RËGIME  DES  EAUX  DANS  LES  TERRAINS  PERMÉABLES. 

beaucoup  plus  grande,  ainsi  qu'on  le  constate  dans  les  pla- 
teaux de  la  Champagne  (fig.  57). 

La  profondeur  des  puits  des  deux  plateaux  jurassiques  qui 
resserrent  la  vallée  du  Clain,  dans  les  localités  des  environs 
de  Poitiers  placées  à  une  distance  de  plusieurs  kilomètres  de 
cette  rivière,  est  moyennement  de  50  mètres  ;  mais  ceux  de 
la  berge  gauche  du  Clain  atteignent  45  mètres.  Dans  la  ville 
même  de  Poitiers,  sur  les  points  les  plus  élevés,  les  anciens 
puits,  dont  on  ne  fait  guère  usage,  tant  ils  sont  profonds, 
mesurent  40  mètres,  par  la  raison  que  la  croupe  calcaire 
qui  porte  la  ville  est  drainée  par  les  deux  vallées  du  Clain 
et  de  la  Boivre,  ainsi  que  par  une  multitude  d'excavations. 
Contrairement  à  une  opinion  assez  répandue,  on  atteint 
Teau  dans  les  puits  avant  d'être  arrivé  au  niveau  des  eaux 
courantes  des  vallées,  ce  qui  prouve,  une  fois  de  plus,  que 
les  eaux  des  puits  proviennent  des  suintements  des  eaux 
pluviales  à  travers  les  roches  calcaires  et  les  argiles  rouges 
du  sous-sol,  et  non  des  infiltrations  latérales  des  eaux  des 
rivières. 

Il  en  est  de  même  pour  les  couches  gréseuses  et  sableuses 
de  différents  âges. 

Comme  autre  exemple,  je  signalerai  la  nappe  d'eau  des 
environs  du  Mans*.  Elle  s'infiltre  dans  les  sables  cénoma- 
niens,  jusqu'à  la  rencontre  des  argiles  oxfordiennes,  c'est- 
à-dire  à  59  mètres  au-dessous  du  niveau  du  confluent  de 
THuisne  et  de  la  Sarthe.  Elle  sature  donc  toute  la  partie  in- 
férieure de  la  masse  sableuse  et  forme  ainsi  une  nappe  puis- 
sante, dont  la  partie  supérieure  s'écoule  par  les  deux  ri* 
vières  faisant  appel. 

Terrains  irlaalqaM  et  permleiui.  —  Nullc  part  OU  n'a  micUX 

^  D*après  M.  tiuillier. 


EAUX  PHRÉATIQUES  DES  TERRAINS  DE  TRANSPORT.       67 

constaté  l'importance  des  terrains  triasique  et  permien, 
comme  réservoir  inépuisable  d'eau  pour  les  puits,  qu*en 
Angleterre,  où  des  centres  industriels,  tels  que  Liverpool, 
Manchester,  Birmingham,  Noltingham,  en  consomment 
chaque  jour  d'énormes  quantités.  Le  grès  bigarré  {new  red 
mnàtone)  parait  même  être  la  formation  la  plus  riche  en 
eaux  phréatiques  de  l'Angleterre;  elle  rivalise  avec  la  craie, 
le  lower  green  $and,  et  le  grès  permien. 


4e  reporter  1  eiuunen  des  faits  «Malogves  avx  pré* 
cMeats    mm  chapitre   relatif    a«   rôle   des   Uthoelases.  —  ToutC- 

fois,  même  dans  les  roches  perméables  en  grand,  le  rôle 
qu'y  jouent  les  cassures  de  divers  ordres,  quant  au  mouve- 
ment des  eaux  souterraines,  est  très  considérable  :  aussi, 
pour  éviter  des  délimitations  artificielles  entre  des  cas  ana- 
logues, qui,  étant  inaccessibles,  échappent  souvent  à  une 
obsei-vation  précise,  nous  croyons  préférable  de  reporter 
l'examen  de  ce  sujet  au  chapitre  relatif  aux  lithoclases.  La 
liaison  fréquente  des  nappes  phréatiques  avec  de  nombreuses 
et  puissantes  sources  est  un  motif  de  plus  pour  adopter  ce 
mode  de  groupement. 

Des  nappes  souterraines  du  genre  de  celles  qui  viennent 
de  nous  occuper  ne  sont  pas  dans  la  dépendance  nécessaire 
de  grands  cours  d*eau  ;  elles  peuvent  en  être  plus  ou  moins 
distantes. 


CHAPITRE    III 


ROLE  DU  CONTACT  MUTUEL  DES  ROCHES  PERMÉABLES 
ET  DES  ROCHES  IMPERMÉABLES 


g  1.  —    CONTACT  PRODUIT   PAR   LE   FAIT   SEUL  DE   LA   STRATIFICATION 


fiénérautés.  —  Dans  toutc  la  série  des  terrains  stratifiés,  il 
existe  de  nombreuses  alternances  de  sable  ou  d'autres  roches 
perméables,  avec  des  argiles  ou  des  marnes.  Ces  empilements, 
souvent  répétés,  offrent  des  conditions  éminement  favorables 
à  la  formation  de  couches  aquifëres. 

En  se  déversant  naturellement  au  dehors,  ces  nappes 
produisent  des  sources. 

Si  le  terrain  imperméable  sur  lequel  les  eaux  pluviales 
s'arrêtent  est  plus  élevé  que  le  fond  des  vallées  principales, 
sa  ligne  d'affleurement  détermine  sur  le  flanc  des  coteaux 
un  cordon  ou  lieu  de  sources,  dont  la  plus  considérable  se 
trouve  habituellement  à  l'intersection  AA'  de  la  ligne  de 
thalweg  de  la  vallée  et  de  la  surface  du  terrain  qui  soutient 
l'eau.  Le  diagramme  (fig.  38)  fait  voir  qu'il  doit  en  être 
ainsi  habituellement,  puisque  le  bassin  d'alimentation  de 


COiNTACT  PRODUIT  PAR  LE  FAIT  SEUL  DE  LA  STRATIFICATION.        69 

ces  sources  Ak\  d'après  la  disposition  de  la  figure,  est  de 
beaucoup  plus  étendu  que  celui  de  deux  autres  sources  quel- 
conques BB'. 

Cette  disposition  des  nappes  souterraines  correspond  donc 
à  ce  que  nous  avons  déjà  appelé  un  niveau  d'eau. 

Dans  le  cas  où  la  couche  imperméable  qui  contient  leau 
passe  au-dessous  du  niveau  de  la  vallée,  les  eaux  pluviales 
absorbées  par  les  terrains  perméables  forment  une  accu- 
mulation d'eaux  souterraines,  dont  le  niveau  se  relève  entre 
deux  thalwegs  humides,  jusque  dans  le  voisinage  des  faites 


SoQToepniiciMlr 


-^Somee  pmctpalfi. 


Fig.  38.  —  Diagramme  représentant,  d'après  Belgrand,  la  disposition  des  sources  principales  AA' 
et  secondaires  BD',  par  rapport  A  la  ligne  de  thalweg  des  vallées. 


de  partage.  Par  un  mécanisme  analogue  à  celui  qui  a  été 
décrit  à  l'occasion  des  terrains  perméables,  l'action  de  drai- 
nage exercée  par  les  vallées  profondes  y  produit  ou  des 
sources  souvent  considérables,  ou  même  des  marais.  Ces 
sources  sont  d'autant  moins  pérennes  qu'elles  sont  plus  rap- 
prochées des  faîtes  de  partage*. 

n  est  des  cas  très  fréquents  où  le  mécanisme  habituel  qui 
donne  lieu  à  l'émergence  des  sources  se  complique:  la 
nappe  aquifère  peut  être  recouverte  par   un  placage  de 

*  fielgraad.  La  Seine,  t.  I,  p.  95. 


70    CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  DES  ROCHES  IMPERMÉABLES. 

matériaux  imperméables,  de  telle  sorte  que  les  eaux  se  font 
jour  au  niveau  le  plus  haut  des  affleurements  de  ces  der- 
niers. Ces  affleurements  forment  donc  comme  le  déversoir 
d*un  vase  rempli  d'eau,  ainsi  qu*on  en  verra  des  exemples 
pour  rOs  d'Upsal  et  pour  les  sources  de  Longi  et  d'Alcara, 
province  de  Messine. 

Dans  rénumération  des  exemples  que  nous  allons  signaler, 
Tordre  à  suivre  nous  a  paru  devoir  correspondre  à  Tordre 
stratigraphique. 


Terrains  quaternaires 


cm  Usarr,   «wk  enWrmw  de  ■•c«e«aa,  daas 
les  waUées  de  la  Hoder  et  du  Whim.  —  En  AlsaCC,  danS  la  forêl 

de  Haguenau,  Targile  tertiaire  arrête  à  une  très  faible  pro- 
fondeur les  eaux  qui  s'infiltrent  dans  le  gravier  quaternaire 


Fig.  89.  —  Disposition  des  sources  S  qui  sortent  des  sibles  quaternaires  G  superposés  aux  argiles 
tertiaires  A  dans  la  vallée  do  la  Noder,  près  Haguenau. 

superposé,  comme  on  le  voit  dans  la  vallée  de  la  Moder 
(fig.  39). 

De  la  longue  terrasse  diluvienne  formée  de  sable  et  de 
marne  qui,  vers  la  limite  de  cette  forêt,  s'étend  le  long  de 
la  plaine  du  Rhin,  jaillissent  aussi  de  nombreuses  sources 
très  limpides.  Elles  sont  situées,  soit  au  pied  du  même  talus, 


CONTACT  PRODUIT  PAR  LE  FAIT  SEUL  DE  LA  STRATIPiaTION. 


71 


soit  entre  2  et  4  mètres  au-dessus  de  la  plaine,  et  elles 
donnent  naissance  à  des  ruisseaux.  C'est  dans  les  deux  anses 
de  la  terrasse  comprise  entre  OberhofTen  et  Schirrhein  que 
sortent  les  principales  de  ces  sources.  Au  contraire,  les  pro- 
montoires formés  par  les  mêmes  terrains  sont  généralement 
secs.  Cette  observation  qui  se  lie  au  développement  des  ter- 
rains tourbeux  dans  les  anses,  est  applicable  en  général  à 
la  recherche  des  eaux  souterraines.  Toutes  ces  sources  parais- 
sent résulter  d*infiltrations  superficielles.  Des  sources  sem- 
blables se  rencontrent  entre  Kaltenhausen  et  Bischwiller  et 
dans  la  banlieue  de  Soufflenheim. 

RBTiraM  ém  Mets.  —  Telle  cst  aussi  Toriginc  des  sources 
du  Sablon,  près  Metz  ;  elles  forment  une  ceinture  à  la  base 
du  lambeau  de  gravier  qui,  dans  cette  localité,  est  superposé 
au  lias. 


Emwhnmm  de  Hmidh.  —  Âux  cuvirous  de  Muuich,  d*après 


MUNICH 


X 


X 


SXilom 


Pi^T-  iO.  —  Profil  de  Munich  (partie  inférieure  de  la  yille)  et  de  la  vallée  de  l'Isar  passant  par 
flaar.  A.  Argile  tertiaire  imperméable  (Flinx).  G.  Gravier  diluvien  qui  lui  est  superposé  et  qui 
contient  une  nappe  d'eau  douce,  le  profil  est  indiqué  par  la  ligne  NN  qui  alimente  la 
source  S,  ainsi  que  de  nombreux  puits  ;  plusieurs  forages  ff  en  ont  fait  reconnaître  les 
allures/  I^es  hauteurs  sont  A. une  échelle  10D  fois  plus  grande  que  les  distances  horizontales. 

M.  Çumbel,  quapd  les  érosions  du  plateau  de  gravier  at- 
teignent Targile  sQus-jacente  nommée  flinz^  comme  il  arrive 


72  CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  DES  ROCHES  IMPERIfÉABLES. 

dans  les  vallées  de  Tlsar  et  du  Mangfall,  il  se  produit  une 
source  (fig.  40). 
La  figure  41  montré  comment  cette  disposition  se  repro- 


1     ÎKm 


Fig.  41.  — >  Disposition  de  trois  groupes  de  sources  aux  environs  de  Munich,  appartenant  à  la 
vallée  de  l'Isar  et  au  Gleisenlhal,  d'après  M.  Gumbel. 


duitdans  trois  groupes  de  sources  appartenant  à  la  vallée 
de  risar  et  au  Gleisenthal,  qui  ont  été  spécialement  étudiés, 
au  point  de  vue  de  l'alimentation  de  Munich. 


D.  —  Â  part  la  nappe  phréatique  du  terrain  dilu- 
vien, on  rencontre  çà  et  là,  dans  les  collines  de  gravier 
diluvien  de  la  Hollande,  des  sources  à  des  niveaux  très  dif- 
férents.   Elles   paraissent  être  toujours   en  relation  avec 


œNTACT  PRODUIT  PAR  LE  FAIT  SEUL  DE  LA  STRATIFICATION.        75 

des  couches  argileuses,  qui  arrêtent  l'eau  de  pluie,  et  à 
la  surface  desquelles  cette  eau  s'écoule,  pour  apparaître 
au  jour  sur  le  flanc  des  collines.  Beaucoup  de  sources  taris- 
sent dans  les  étés  secs;  elles  disparaissent  parfois  à  la  suite 
de  déboisements  et  on  les  a  souvent  compromises,  en  per- 
çant la  couche  d'argile  qui  les  soutient. 


—  Non  seulement  le  gravier  consti- 
tue aux  environs  de  Londres  un  réservoir  souterrain  facile- 
ment accessible,  mais  au  nord  de  la  Tamise,  plusieurs  petites 
vallées  qui  coupent  le  gravier  pénètrent  dans  l'argile  de 
Londres,  de  telle  sorte  qu'une  partie  de  l'eau  de  ce  réservoir 
s'échappe  à  la  jonction  des  deux  terrains  et  donne  naissance 
à  plusieurs  sources,  dont  plusieurs  étaient  autrefois  très 
réputées,  telles  que  celle  de  Bagnigge  Well,  Notywell,  Cler- 
l^enwell,  etc. 

oxsorû.  —  A  Oxfords  dont  nous  avons  déjà  cité  la  nappe 
phréatique,  page  42,  un  grand  banc  de  gravier  supporté 
par  l'argile  dite  d'Oxford,  ayant  de  1°,50  à  6  mètres  d'épais- 

OXFORO 


Fig.  41  —  Coupe  montrant  la  situation  du  dépôt  quaternaire,  au<iuei  est  subordonnée  la  nappe 
d'eau  phréatique  d'Oxford.  A,  argile  dite  d'Oxford  ;  MN,  niveau  de  la  nappe  phréatique. 


seur,  est  très  perméable;  on  suppose  que  sur  0",68  d'eau  de 
pluie  annuelle  il  en  passe  au  moins  0",30  pour  une  surface 
d'environ  3  kilomètres  carrés  (fig.  42). 

'  D'après  M.  Prestwich. 


74  CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  DES  ROCHES  IMPERMÉABLES. 

irbiBde^  — Les  dépôts  superficiels,  principalement  de  (fW/^, 
sont  si  étendus  en  Iriande  qu'en  raison  de  leur  perméabilité, 
ils  constituent  un  réservoir  d*eau  important.  Tel  est  le  cas 
dans  quelques  portions  des  comtés  de  Kilkenny,  Carlow,  Kil- 
dare,  Wicklow  et  Dublin,  où  ils  recouvrent  des  roches  grani- 
tiques. Quand  on  fait  un  puits  sur  une  colline  de  drifl,  on 
peut  prévoir  la  profondeur  à  laquelle  ce  puits  atteindra 
l'eau,  d'après  le  niveau  des  sources  qui  se  montrent  sur  les 
flancs  de  la  colline. 

r^enae'.  — La  plaine  de  Palerme  est  d'une  étonnante 
fertilité,  par  les  produits  d'horticulture  nombreux  et 
variés  qui  s'y  récoltent  successivement,  jusqu'à  dix  à  douze 
fois  dans  une  même  année  et  sur  un  même  sol.  Le  bassin 
palermitain  qui,  à  cause  de  cette  heureuse  circonstance,  est 


PALERME 


0  Echelle     des    Icoitfiieure  TcheJle    de«  luiUetire 

L 1 2__i j  t    I    I    »    «    I 1  _ 

Cl  c  i^  0  600  vm* 

Fig.  a.  —  Coupe  montrant  la  disposition  de  la  nappe  aquifère  dans  la  plaide  de  Païenne. 
A,  argiles  écaillemcs  bigarrées  (éocène  moyen).  A',  argiles  quaternaires.  C,  calcaire  quater- 
naire (panchina).  NN,  niveau  de  l'eau  phréatique.  L'échelle  des  hauteurs  est  double  de  celle 
des  longueurs. 

appelé  la  concha  d'oro,  est  formé  par  un  dépôt  de  calcaire 
quaternaire  {panchina)  qui  repose  sur  des  argiles  du  même 
âge.  Celle-ci  supporte  un  niveau  aquifère  dont  la  profondeur 
varie  de  10  à  20  mètres,  et  c'est  à  ce  niveau  que  sont  foncés 
des  puits  munis  de  norias  (fig.  45). 


«  D'après  M.  Hull. 
>  D'après  M.  Giordano. 


CONTACT  PRODUIT  PAR  LE  FAIT  SEUL  DE  LA  STRATIFICATION.         75 

upwa*.  —  Les  Osar  constituent  en  Suède  la  formation 
aquifère  par  excellence.  Ces  anciens  dépôts  glaciaires  se 
présentent  souvent  sous  la  forme  de  collines  allongées, 
presque  exclusivement  constituées  par  des  sables  et  des 

0  K 


V 

Château  d'UPSAL. 

• 

S 

V 

<    A     V    V 

■       Anuriona 

1 

1^ 

A 

■^^r~-:=9E^ 

;~^^ 

Eig.  Ai.  —  Disposition  de  la  source  jaillissant  au-dessus  du  chAteau  d'Upsal.  Gr,  ip^nite; 
M,  ancienne  moraine  de  fond  ;  g,  grayier  (Os)  ;  a,  argile  glaciaire  ;  g',  sable;  a',  argile  post- 
glaciaire;  S,  source.  Échelle  yrj^ 

graviers  stratifiés.  Au  pied  de  ces  Osar  se  trouvent  des  sources 
excellentes,  dont  l'origine  ressort  clairement  de  la  figure  44, 
relative  à  la  source  renommée  qui  jaillit  au-dessous  du  châ- 
teau d'Upsal. 

OlMcrTatlon   relative  A  des  tafs   ▼oleantqaei»    atratlflés.    —   11  y 

aurait  lieu  de  signaler  ici  des  sources  qui  jaillissent  de 
tufs  volcaniques  stratifiés,  par  exemple  aux  environs  de 
Rome.  Mais,  à  cause  de  leur  liaison  avec  les  déjections  vol- 
caniques non  stratifiées,  il  a  paru  préférable  de  les  réunira 
celles-ci,  au  paragraphe  2  du  présent  chapitre. 


Terrains  stratifiés 

%mm.  —  Une  partie  de  la  région  de  la  Haute-Alsace 
située  au  sud  d'Allkirch,  connue  sous  le  nom  de  Sundgau, 
est  formée  de  collines  de  graviers  (fig.  45). 

*  D'après  M.  Tornebohm. 


76  CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  DES  ROCHES  IMPERMÉABLES. 

Quel  que  soit  son  âge,  pliocène  ou  quaternaire,  ce  dépôt 
de  cailloux  absorbe  les  nombreux  cours  d'eau  descendant 
vers  l'est*.  Comme  il  est  superposé  à  des  couches  tertiaires 
imperméables  de  Tâge  delà  molasse,  il  en  résulte  des  sources 
très  nombreuses  et  très  abondantes,  qui  jaillissent  dans 
presque  toutes  les  échancrures  du  terrain.  Aucune  région 
de  l'Alsace  n'est  plus  riche  en  sources.  Ainsi,  dans  la  vallée 
de  la  Largue,  creusée  dans  le  gravier,  elles  sont  très  fré- 
quentes depuis  Manspach  jusqu'à  Seppois-le-Haut;  il  en  est 

HUN3»B4C«  S.S.O. 


Fi(ç.  45.  —  Gisement  habtluel  des  sources  du  Slundgau  (Alsace).  A,  aii^iles  et  grès  tertiaires; 
A',  limon  et  sables  argileux  jaunes  mélangés  de  quelques  lits  de  cailloux;  G,  grandes 
assises  de  cailloux  mélangôs  de  sable;  Q,  loess  qui  constitue  le  plateau. 


de  même  dans  celle  de  l'IU.  Telles  sont  celles  de  Tagsdorf, 
Schwoben,  Hausgauen^  Hundspach,  Knoernigen,  Michel- 
bach-le-Bas,  Bourchwiller,  Folgensbourg,  Steinsultz,  Ober- 
manspach  et  Niedermanspach,  Waltighotten,  etc.  Sur  la  li- 
sière Est  du  Sundgau,  les  belles  sources  de  Blotzheim  sortent 
par  une  trentaine  d'orifices  et  seraient  assez  volumineuses 
pour  faire  marcher  des  moulins.  Dès  que  les  ruisseaux  for- 
més par  ces  sources  arrivent  dans  la  plaine,  ils  disparaissent 
en  s'infiltrant  dans  le  gravier  diluvien. 


—  Dans  les  Dombes  (Ain),  des  sables  et  des  gra- 
viers attribués  au  pliocène  supérieur  sont  superposés  à  des 
marnes;  il  en  résulte  de  nombreuses  sources,  très  abon- 
dantes et  à  des  altitudes  qui  varient  de  170  à  330  mètres  '. 
Divers  puits  profonds  vont  chercher  l'eau  potable  dans 

*  Daubrée.  Bulletin  de  la  Société  géologique  de  France^  2*  série,  t.  Y,  p.  165. 

*  D'après  une  obligeante  communication  de  M.  Tardj. 


CONTACT  PRODUIT  PAR  LE  FAIT  SEUL  DE  LA  STRATIFICATION.        77 

des  sables  fins,  à  travers  une  puissante  superposition  de 
marnes  et  d'argiles  bleues  et  noires.  Ces  argiles  et  marnes, 
causes  de  la  formation  des  innombrables  étangs  de  cette 
région,  ont  une  telle  épaisseur  qu'aucune  source  ne  peut 
proYenir  d'une  argile  qui  lui  serait  inférieure. 

Au-dessous  de  cette  première  nappe,  il  y  en  a  deux  autres, 
dans  le  pliocène  moyen  et  le  pliocène  inférieur. 


wrém  de  Bouwiuer.  —  Uu  exemple  dcs  plus  simples 
de  la  formation  des  sources  est  offert  par  celle  qui  jaillit  à 
la  base  de  la  colline  isolée  du  Bastberg,  près  de  Bouxwiller 
(Alsace). 

Cette  colline  est  terminée  par  un  cône  de  gros  cailloux 
de  calcaire  jurassique,  qui  sont  supportés  par  le  terrain  ter- 
tiaire palustre,  comme  l'indique  la  figure  46. 

Dans  cette  localité,  le  calcaire  d'eau  douce  est  très  fissuré, 
de  telle  sorte  que  l'eau  y  pénètre  avec  facilité  et  s'y  meut 
dans  les  cavités  de  la  roche;  mais  elle  est  arrêtée  parles 
couches  argileuses  qui  supportent  le  calcaire  et  recouvrent 
le  lignite.  Les  sources  auxquelles  donne  lieu  cette  nappe 
jaillissent  de  la  base  du  calcaire  d'eau  douce,  près  de  l'en- 
trée de  la  galerie  d'écoulement  de  la  mine.  Le  fond  du  bas- 
sin formé  par  le  plongement  des  couches  s'incline  vers  le 
nord-est  ;  c'est  précisément  à  l'extrémité  de  la  rigole  que 
forme  le  fond  ou  le  thalweg  de  ce  bassin  aquifère  et  au 
point  le  plus  bas  du  calcaire,  en  «,  que  s'opère  le  déver- 
sement de  la  nappe  souterraine. 

La  galerie  principale,  ouverte  pour  l'exploitation  du  lignite; 
rencontrait  la  couche  calcaire  à  60  mètres  du  jour,  mais  à 
un  niveau  supérieur  de  ô",90  à  celui  qu'occupe  ordinai- 
rement la  nappe  souterraine.  Aussi  l'eau  ne  sortait  par  celte 
galerie  qu'à  la  suite  des  grandes  pluies  et  des  fontes  de 
neige,  lorsque  les  orifices  des  sources  ne  pouvaient  plus 


78  CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  DES  ROCHES  IMPERMËA6LES. 

suffire  à  débiter  toute  Teau  qui  arrive  dans  le  réservoir. 
Lorsqu'au  printemps  le  dégorgeoir  de  la  galerie  fournissait 
beaucoup  d'eau,  on  regardait  comme  probable  que  les  sour- 
ces seraient  abondantes  pendant  Tété. 
C'est  aussi  du  terrain  tertiaire  que  dérivent  les  eaux  qui, 

Conpe   saiyênt    jnn. 
BASTBEM  Bmixwîuen 

S 


¥ig.  i6.  —  Di&posilion,  en  plan  et  en  coupe,  des  sources  des  environs  de  Bouxwiller.  1,  fabrique 
d'alun  ;  ï,  église  catholique  ;  3,  tuilerie  ;  i,  puits  dit  Machinen-Schacht  ;  5,  puits  d'aérag^e 
de  la  machine  A  vapeur  ;  6  et  7,  puits  d'aérage.  La  longue  ligne  noire  courbe  et  bifurquée 
partant  de  la  fabrique  d'alun,  représente  les  galeries  principales  d'exploitation  du  lignite  ; 
S,  source  sortant  du  calcaire  d'eau  douce  à  son  contact  avec  l'argile  à  lignite;  S',  source 
plus  faible;  S",  source  volumineuse,  sortant  du  calcaire  oolithique. 


à  partir  de  4844,  ont  fait  invasion  dans  Tintérieur  delà 
mine  de  Bouxwiller.  Jusqu'au  6  février  1844,  les  travaux 
inférieurs  à  la  galerie  principale  avaient  toujours  été  secs, 
lorsqu'un  petit  suintement  se  manifesta,  non  loin  du  pied 
du  plan  incliné,  au  toit  d'une  galerie  déboisée  et  déjà  en 
partie  affaissée.  Bientôt  l'abondance  de  l'eau  s^accrut,  au 
point  que  quarante-huit  heures  après  le  commencement  de 
Tirruption,  il  en  était  déjà  arrivé  2500  mètres  cubes.  L'eau 


COOTACT  PRODUIT  PAR  LE  FAIT  SEUL  DE  LA  STRATIFICATION.         79 

ne  tarda  pas  à  gagner  la  galerie  d'écoulement  et  cessa  par 
conséquent  de  s'élever;  le  27  février,  Faffluence  n'était  plus 
que  d'environ  170  mètres  cubes  par  24  heures.  Ce  n'est  que 
le  7  novembre  1847,  c'est-à-dire  trois  ans  et  demi  après 
l'inondation,  que  l'on  est  parvenu,  grâce  à  une  machine  à 
vapeur  de  6  chevaux,  à  dessécher  complètement  et  à  restau- 
rer les  travaux  inférieurs  ;  mais  depuis  lors  on  n'a  pu  les 
empêcher  d'être  noyés  de  nouveau  qu'à  la  condition  de 
faire  mouvoir  journellement  les  pompes. 

Comme  l'indique  la  figure  46,  les  orifices  souterrains 
qui  versent  l'eau  dans  la  mine  sont  verticalement  pla- 
cés au-dessous  du  cône  de  cailloux  du  Bastberg.  Cette 
eau  paraît  donc  principalement  provenir  des  infiltrations 
qui  se  font,  à  partir  de  la  surface,  dans  les  cailloux  et 
dans  le  calcaire  d'eau  douce.  A  la  suite  d*éboulements 
produits  par  l'exploitation,  le  toit  argileux  du  lignite, 
qui  était  imperméable,  tant  qu'il  était  massif,  a  proba- 
blement été  rompu,  et  l'eau  s'est  frayé  une  voie  à  travers 
les  fissures. 

Le  débit  quotidien  des  pompes  a  varié,  en  1851,  entre  204 
et  1410  mètres  cubes;  c'est  du  l*"^  au  9  avril,  à  la  suite  de 
pluies  continues,  que  se  trouve  le  maximum.  L'eau  affluait 
presque  en  totalité  sur  un  espace  très  restreint.  Pour  en  saisir 
d'un  seul  coup  d'œil  le  régime,  j'en  ai  représenté  les  varia- 
tions depuis  1846  jusqu'à  1852,  dans  une  figure  où  les 
temps  sont  comptés  comme  abscisses,  et  les  volumes  comme 
ordonnées*. 

A  moins  d'invasion  d^eau  par  de  nouveaux  orifices,  comme 
celles  qui  ont  eu  lieu  en  juillet  et  en  novembre  1851,  c'est 
en  général  à  la  fin  de  l'hiver  que  Teau  arrivait  avec  la  plus 
grande  abondance.  Le  régime  des  eaux  douteri*aines  suit  de 

*  0e8€ri|>tion  ^éoldgique  dii  Bas-^Rhln,  1855: 


80  CONTACT  DES  ROGEBS  PERMÉABLES  ET  DES  ROCHES  IMPERXÉiBLES. 

près  celui  des  eaux  météoriques  ;  trente  ou  quarante-huit 
heures  après  une  forte  pluie  torrentielle,  on  voyait  augmenter 
le  volume  d'eau  dans  la  mine.  Quand  le  terrain  était  déjà 
imprégné  d'eau,  il  suffisait  même  pour  cela  de  quinze  à  dix- 
huit  heures,  ainsi  qu'on  l'a  constaté  en  décembre  1849, 
pour  une  fonte  subite  de  neige.  Ces  derniers  chiffres  expri- 
ment donc  le  temps  nécessaire  pour  que  les  filets  d'eau 
arrivent  de  la  surface  à  une  profondeur  de  30  mètres. 
L'eau  qui  affluait  d'abord  était  chargée  de  limon  ;  elle  ne  se 
clarifiait  que  plus  tard.  Le  volume  annuel  des  eaux  de  la 
mine  n'avait  pas  diminué  avec  les  années  ;  les  canaux,  par 
lesquels  l'eau  se  déversait  dans  les  travaux  ne  paraissaient 
donc  pas  s'obstruer. 

L'isolement  du  Bastberg  permet  de  calculer  une  limite 
supérieure  de  la  quantité  d'eau  météorique  qui  peut  pé- 
nétrer dans  les  réservoirs  souterrains  auxquels  la  mine 
devait  son  eau  ;  on  arrive  ainsi,  en  la  répartissant  unifor- 
mément sur  tous  les  jours  de  l'année,  à  un  volume  maxi- 
mum de  753  mètres  cubes.  Or,  la  quantité  d'eau  réelle- 
ment enlevée  par  les  pompes  était  moyennement  égale, 
à  peu  près,  à  la  moitié  de  ce  chiffre.  Le  reste  de  l'eau  de 
pluie  et  de  neige  que  reçoit  le  sol,  ruisselait  à  la  surface 
du  Bastberg,  ou  s'évaporait,  ou  enfin  alimentait  les  sources 
extérieures. 

Ces  dernières  sources  ont  ordinairement  leur  plus  fort 
volume  en  novembre  et  en  janvier  ;  leur  plus  faible  écoule- 
ment a  lieu  de  juillet  à  septembre.  Le  minimum  annuel  est 
d'autant  plus  petit  que  l'hiver  a  été  plus  sec,  et  surtout  qu'il 
est  tombé  moins  de  neige,  remarque  qui  est  applicable  à  un 
grand  nombre  de  sources. 

Depuis  le  mois  d'octobre  1850  jusqu'au  23  mars  1851, 
deux  des  trois  sources  de  Bouxwiller  ont  complètement  tari, 
fait  qui  n'avait  pas  été  observé  de  mémoire  d'homme.  11  est 


CONTACT  PAR  LE  FAIT  DE  LA  STRATIFICATION.  81 

probable  que  cet  arrêt  n'aurait  pas  eu  lieu,  si  la  mine  n'avait 
pas  soustrait  une  forte  quantité  d'eau  au  réservoir  commun. 
Pour  obvier  autant  que  possible  à  une  telle  pénurie,  on  a 
Toncé,  à  côté  des  fontaines,  des  puits  qui  s'alimentent  dans 
la  nappe  du  calcaire  oolithique,  laquelle  est  inTérieure  de 
25  mètres  à  celle  du  calcaire  tertiaire  *. 

BMaia  de  Paris\  —  Grâcc  à  la  perméabilité  des  calcaires 
de  Beauce  et  des  sables  de  Fontainebleau,  les  sources  quMls 
alimentent  sont  toutes  situées  au  fond  des  vallées  les  plus 
profondes,  à  peu  de  hauteur  au-dessus  de  la  ligne  des 
thalwegs  ;  les  vallées  et  les  autres  coteaux  sont  complètement 
secs  et  arides.  Elles  sont  quelquefois  très  importantes  et  ali- 
mentent, à  l'exclusion  de  toutes  les  autres  eaux,  le  pays 
d'Hurepoix  et  la  partie  de  la  Beauce  dont  les  deux  versants 
sont  dirigés  vers  la  Seine  au-dessus  de  Paris. 

Les  marnes  vertes  qui  recouvrent  le  gjpse  ou  celles  qui 
sont  intercalées  dans  les  terrains  gypsifères  arrêtent  la 
plus  grande  partie  des  eaux  pluviales  absorbées  par  les  sables 
de  Fontainebleau,  sur  la  rive  gauche  de  la  Seine,  et  sur  la 
rive  droite,  par  les  meulières  et  les  calcaires  de  Brie.  De  là 
les  sources  innombrables  qui  donnent  aux  coteaux  dès  val- 
lées de  la  Brie  et  de  la  banlieue  de  Paris  et  de  Versailles 
leur  caractère  de  fraîcheur  et  leur  aspect  pittoresque.  Tout 
près  de  Paris,  le  contact  des  marnes  vertes  et  des  meu- 
lières, dites  de  Brie,  détermine  sur  les  flancs  de  toutes  les 
vallées  de  la  Brie,  de  la  forêt  de  Fontainebleau  et  des  envi- 
rons de  Versailles  un  niveau  d'eau  visible  de  loin  à  la  végé- 
tation caractéristique  qu'elle  nourrit  (Villc-d'Avray,  Meudon, 
Bellevue,  Louveciennes,  Brunoy). 


*  Detcripiwn  géologique  du  Bas-Wiin. 

*  D'après  fielgrand 


8S   ROLE  DU  CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  IMPERMÉABLES. 

Les  terrains  perméables,  compris  entre  les  marnes  vertes 
et  Targile  plastique,  ne  donnent  que  des  niveaux  d'eau  d'im- 
portance secondaire;  tels  sont  les  faibles  suintements  four- 
nis par  l'affleurement  des  sables  moyens,  sur  les  coteaux  de 
la  Marne. 

Des  niveaux  d*eau  beaucoup  plus  importants  se  rencontrent 
dans  le  groupe  de  Targile  plastique,  surtout  dans  les  régions, 
comme  le  Soissonnais  et  une  partie  de  la  vallée  de  la  Marne, 
où  cette  formation  est  épaisse  et  comprend  des  couches 
sableuses. 

Une  partie  des  sources  qui  servent,  depuis  les  travaux  de 
BelgrandS  à  l'alimentation  de  Paris,  et  particulièrement  les 
sources  de  la  Brie,  donnent  des  exemples  de  plusieurs  de  ces 
nappes  subordonnées  aux  terrains  tertiaires. 

Telles  sont,  sur  la  rive  gauche  de  la  Seine,  les  belles 
sources  de  la  Juine  et  de  l'Ecolle,  qui  donnent  de  l'eau 
excellente  à  la  base  des  calcaires  de  Beauce;  celles  des  deux 
petites  rivières,  le  Durtein  et  la  Voulzie,  qui  traversent  la 
ville  de  Provins,  et  les  grandes  sources  de  la  vallée  de  l'Yè- 
res,  telles  que  celles  de  Briant.  Dans  la  vallée  de  la  Marne, 
on  trouve  de  grandes  et  bonnes  sources.  Le  Sourdon,  affluent 
du  Cubry,  est  alimenté  par  la  très  belle  fontaine  du  Sour- 
don qui  jaillit  sur  le  territoire  de  Saint-Martin  d'Ablois  et 
débite  en  vingt-quatre  heures  environ  8000  mètres  cubes 
d'excellente  eau.  Entre  le  Cubry  et  le  Surmelin  se  mon- 
trent de  belles  sources,  notamment  à  Dormans.  C'est  dans 
le  bassin  du  Surmelin,  sur  le  territoire  de  Pargny,  can- 
ton de  Condé,  que  se  trouvent  les  célèbres  sources  de  la 
Dhuis,  qui  a  donné  son  nom  à  l'aqueduc  de  dérivation  de 
Paris;  elles  jaillissent  au  lieu  dit  le  Moulin  de  la  Source 
(fig.  47).  La  vallée  du  Petit-Morin  renferme  un  très  grand 

*  La  eattx  nouvelleê,  t.  IV,  p.  100. 


CONTACT  PAR  LE  FAIT  DE  LA  STRATIFICATION. 


83 


nombre  de  petites  sources  situées  en  amont  et  en  aval  de 
Montmirail.  Le  bassin  du  Grand-Morin  en  contient  de  très 
fortes,  notamment  celle  du  Moulin-au-Comte  ou  le  Comle, 
située  au  fond  de  la  vallée,  entre  Esternay  et  la  Ferté-Gaii- 
cher:  celle  de  la  Meilleraye,  à  quelques  kilomètres  en  aval 
du  Moulin-au-Comte,  jaillit  dans  l'intérieur  même  d'un 
moulin.  Entre  La  Ferté-Gaucher  etCoulommiers,  sur  la  com- 
mune de  Saint-Remy,  se  montre  une  des  plus  grandes  sources 


Fiç.  47.  —  Moulin  de  la  Source,  l'une  des  sources  de  la  Dhuis,  \iic  prise  à  Pargiiy,  canton  de 
Condc-en-Brie  (Aisne).  Vue  du  bras  droit  et  amorce  da  bras  gauche. 


du  bassin  de  la  Seine,  la  fontaine  de  Chailly;  elle  est  située 
au  fond  de  la  vallée,  à  gauche  du  Grand-Morin,  qui  d'après 
Belgrand  débitait  en  octobre  1857  environ  45  000  mètres 
cubes  d'eau  en  vingt-quatre  heures.  Un  groupe  de  très  belles 
sources  jaillit  dans  le  parc  de  Mauperthuis,  au  bord  de 
TAubetin,  affluent  du  Grand-Morin. 

Malgré  l'importance  des  sources  de  la  vallée  du  Grand- 
Morin,  Belgrand  n'a  pas  songé  à  les  conduire  à  Paris,  parce 


84      ROLE  DU  œNTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  IMPERMÉABLES. 

que  les  plus  importantes,  celles  de  Chailly  et  deMauperthuis, 
sont  à  une  trop  faible  altitude. 

G*est  ainsi  qu'on  a  été  conduit  à  choisir  Teau  de  la  Dhuis 
et  des  autres  sources  du  bassin  du  Surmelin  pour  alimenter 
Taqueduc  des  services  haut  et  moyen  de  Paris. 


—  Aux  environs  de  Laon,  la  couche  d'ar- 
gile plastique  placée  sous  la  glauconie  grossière  qui  constitue 
la  base  du  calcaire  grossier,  a  de  O^'yiO  à  1  mètre  d'épaisseur. 
Elle  s'abaisse  plus  ou  moins,  tantôt  dans  une  direction,  tan- 
tôt dans  une  autre,  en  formant  des  espèces  de  bassins  iiTé- 
guliers,  vers  la  partie  inférieure  desquels  se  rendent  les 
eaux  pluviales,  après  avoir  filtré  au  milieu  de  la  masse 
perméable  superposée,  pour  s'échapper  ensuite  au  dehors. 
Cette  couche  aquifère  alimente  les  puits  de  la  ville,  ainsi  que 
29  sources  réparties  sur  le  pourtour  de  la  colline,  d'un  pro- 
duit estimé  à  185  mètres  cubes  d'eau  par  vingt-quatre  heu- 
res. C'est  donc  à  la  présence  de  cette  couche  mince  d'argile 
que  la  ville  de  Laon  doit  d'exister*. 

vaUée  de  la  «aroaM*.  —  Lcs  tcrraius  diluvicus  de  la  vallée 
de  la  Garonne,  aux  environs  de  Toulouse,  forment  deux  pla- 
teaux, le  premier  d'une  altitude  de  13  mètres,  le  deuxième 
de  28  mètres  au-dessus  du  fond  de  la  vallée  proprement  dite. 
Ces  deux  plateaux  se  composent  essentiellement  de  cailloux 
roulés,  et  ils  recouvrent  le  terrain  tertiaire  qui,  étant  argi- 
leux et  imperméable,  arrête  les  eaux  d'infiltration. 

C'est  dans  ces  conditions  que  se  trouvent  des  sources  abon- 
dantes que  l'on  voit  jaillir  au  bord  du  plateau  de  Lardenne 
et  de  Saint-Simon,  sources  qu'on  avait  eu  l'idée  de  capter 
pour  les  conduire  à  Toulouse. 

*  D'Ârchiac.  Mémotret  de  la  Société  géologique  de  France,  !'«  sérient.  V,  p.  266-267, 1842. 
■  L<7inerie.  Géologie  de  la  Haute-Garonne. 


CONTACT  PAR  LE  FAIT  DE  U  STRATIFICATION.  85 

BaviruM  de  BwmKéOmm^  —  Dans  Ics  couchcs  tertiaires  des 
environs  de  Bruxelles,  il  existe  une  alternance,  au  moins 
deux  fois  répétée,  de  roches  perméables  et  de  roches  im- 
perméables, disposition  très  favorable  à  la  formation  de 
nappes  d'eau  :  d'abord  une  série  imperméable,  celle  des 
argiles  de  Landen  et  d'Ypres  ;  puis,  une  série  perméable, 
constituée  par  des  sables  variés  qui  se  montrent  au  Mont 
Panisel,  à  Bruxelles,  à  Laeken,  à  Tongres,  au  Rupel  ;  puis 
une  couche  imperméable,  l'argile  rupelienne;  enfin  une 
nouvelle  série  perméable  formée  des  sables  du  Bolderberg, 
de  Diest  et  de  l'Escaut;  de  nombreux  détails  sur  ce  sujet  ont 
été  récemment  publiés  par  M.  Rutol'.  (Voir  plus  loin,  dans 
le  chapitre  iv,  une  figure  à  ce  sujet.) 


de  lAiidre»'.  —  Un  petit  nombrc  de  collines  peu 
élevées  du  London-Clay,  au  voisinage  de  Londres,  sont  re- 
couvertes par  des  lambeaux  de  sable  de  Bagshot,  comme, 
par  exemple,  Harrov^,  Hampstead  et  Highgate,  tous  sièges 
d'ancienne  habitation.  Les  sables  qui,  dans  ces  localités, 
atteignent  une  épaisseur  de  10  à  24  mètres,  sont  très  per- 
méables et  apportent  une  ressource  en  eau,  au  moyen  de 
puits  suffisants  pour  une  population  limitée. 

I^s  vingt  à  trente  mètres  de  sable  et  de  gravier  apparte- 
nant aux  couches  tertiaires  inférieures  qui  supportent  le 
London-Clay  et  qui  recouvrent  la  craie,  sont  aussi  très  per- 
méables; comme  ils  sont  associés  à  quelques  lits  d'argile 
imperméable,  ils  déterminent  un  ou  deux  niveaux  d'eau. 

FmrmumÊtu^  mjrU\  —  Sur  le  Tcvcrs  Oriental  des  Alpes 


*  D'après  M.  VeratraeCen. 

t  Explication  de  la  carte  géologique  de  Bruxelles. 

s  Prestwich.  Address  of  the  Geologieal  Society,  1851. 

^  Star.  Gisementê  de$  cottche$  aquifères  de  Furstenfeld, 


86      ROLE  DU  CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  IMPERMÉABLES. 

centrales  s*étend  un  pays  de  collines,  formé  de  couches 
tertiaires  qui  sont  aquifères  dans  plusieurs  de  leurs  parties, 
notamment  dans  les  couches  à  corithes  et  dans  les  couches 
à  congéries  ou  legel  qui  leur  sont  superposées;  celles-ci 
renferment  des  sables  aquifères  subordonnés  à  de  l'ar- 
gile. 

Telle  est  la  disposition  dans  la  ville  de  Furstenfeld,  où 
les  habitants  ont  des  puits  de  25  à  35  mètres  de  profondeur 
installés  sur  les  couches  sableuses  du  tegel. 

La  figure  48  indique  par  des  chiffres  romains  la  superpo- 


pvRtnHrriD 


Fig.  AS.  —  Disposition  des  couches  aquifères  prés  de  la  ville  de  Furstenfeld  (Styrie). 

sition  de  six  niveaux  aquifères;  la  profondeur  de  quatre 
d'entre  eux,  au-dessous  du  niveau  de  la  rivière,  est  marquée 
par  des  chiffres  arabes.  Plusieurs  puits  ont  fait  jaillir  l'eau 
très  abondamment  jusqu'à  5  mètres  de  hauteur,  mais  ils 
se  sont  progressivement  amoindris. 

Les  sables  subordonnés  aux  terrains  stratifiés  de  tous  les 
âges  donnent  fréquemment  lieu  à  des  nappes  d'eau,  aussi 
bien  que  les  terrains  tertiaires.  Nous  nous  bornerons  à  citer 
trois  exemples  appartenant  aux  terrains  crétacés. 

La  Pnisaye  (Yonne)*.  Lcs sablcs  vcrts OU  fcrrugincux,  dits de 


Raulin.  Géologie  de  V Yonne. 


CONTACT  PAR  LE  FAIT  DE  LA  STRATIFICATION.  87 

la  Puisaye,  qui  supportent  des  couches  argileuses,  four- 
nissent plusieurs  nappes  d'eau.  Il  y  en  a  une  principale  à 
leur  base,  immédiatement  sur  les  argiles  à  grandes  exo- 
gjres,  à  l'est  de  l'Yonne.  Mais  à  l'ouest,  dans  la  Puisaye,  la 
puissante  assise  des  sables  de  ce  nom  renferme,  à  diverses 
hauteurs,  des  couches  interrompues  d'argiles,  qui  donnent 
des  niveaux  d'eau  partiels  fort  utiles  pour  l'approvision- 
nement d'eau  du  pays;  les  puits  y  sont  en  général  peu 
profonds.  Les  sources  sont  réparties  dans  une  zone  assez 
large,  qui  passe  par  la  forêt  de  Pontigny,  Appoigny,  Toucy, 
Saint-Sauveur-en-Puisaye;  il  y  a  aussi  de  petites  sources 
ferrugineuses  sur  quelques  points.  C'est  cet  ensemble  de 
nappes  qui,  se  prolongeant  sous  la  craie,  alimente  les 
puits  artésiens  de  Paris,  dont  la  profondeur  dépasse 
500  mètres. 


B.  —  Les  sables  verts  inférieurs  superposés  au 
gault,  renferment  une  nappe  d'eau  importante  dans  le  bas- 
sin de  Paris,  notamment  dans  la  Haute- Marne.  C'est  ainsi 
que  les  nombreuses  sources  qu'ils  fournissent  alimentent 
l'Aisne  et  la  Chée. 

TorreHt  4*aiibIm.  —  L'exploitatiou  de  la  houille  dans  le 
nord  de  la  France  a  fait  reconnaître  dans  le  terrain  crétacé 
une  espèce  de  lac  souterrain,  d'un  caractère  tout  parti- 
culier, dont  l'épuisement,  d'ailleurs  incomplet,  a  bien  fait 
reconnaître  le  régime. 

Sur  les  points  où  le  poudingue  crétacé  connu  sous  le  nom 
de  tourtia  ne  repose  pas  directement  sur  le  terrain  houiller, 
on  rencontre  à  la  base  des  morts-terraimj  des  dépôts  aré- 
nacés  très  aquifères;  tels  sont  les  sables  inférieurs  qui  don- 
nent naissance  au  torrent  d'Ànzin  et  la  couche  épaisse  de 
sables  fluides  traversée  au  puits  Saint-Alexandre  de.Strepy- 


88   ROLE  DU  CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  IMPERMÉABLES. 

Bracquegnies  et  à  la  fosse  Bonne-Espérance  de  la  société 
de  Saint-Waast,  centre  du  Hainaut  *. 

Celte  couche  n'est  connue  au-dessus  du  terrain  houil- 
ler  que  sur  un  espace  très  limité.  Elle  forme,  d'après  M.  Dor- 
moy,  une  courbe  ovale  ayant  son  grand  axe  dirigé  de  l'est 
15  degrés  nord  à  l'ouest  15  degrés  sud,  de  Saint-Waast  à 


4AUB11V 

Flkii 


^'^'"--^>.^.]^' 'Ç^AJjuû^n  *  raouvY 

Echelle  '    ^, 

' 1 t f t î^ 

Fisr-  tô'  —  Plan  du  lac  souterrain  subordonné  aux  sables  supérieurs  du  terrain  houiller  et 
connu  sous  le  nom  de  torrent  tTAnsin.  La  ligne  pleine  indique  le  contour  du  lac  avant  les 
travaux  d'épuisement,  c'est-à-dire  vers  1840;  la  lig^ne  ponctuée  représente  le  contour  actuel 
(d*aprés  M.  l'ingénieur  des  mines  Olry). 

Denain,  sur  une  longueur  de  7750  mètres  et  son  petit  axe 
dirigé  du  nord  au  sud,  d'Oisy  à  Prouvy  sur  4375  mètres  de 
longueur.  C'est  ce  que  montre  la  figure  49,  que  je  dois  à 
l'obligeance  de  M.  Olry,  ingénieur  des  Mines,  ainsi  que  les 
détails  suivants,  relatifs  au  torrent  d'Ànzin. 

La  superficie  occupée  par  cette  couche  est  de  26  500  kilo- 
mètres carrés.  Son  épaisseur  varie  de  2  à  3  mètres  jusqu'à 

*  Evrard.  Traité  pratique  de  V exploitation  de9  mines,  1. 1,  p.  232, 


CONTACT  PAR  LE  FAIT  DE  LA  STRATIFICATION.  89 

14  mètres;  elle  est,  en  moyenne,  de  9  mètres.  Celte  couche 
renferme  beaucoup  d'eau  *  et  forme  un  véritable  lac  souter- 
rain, tout  à  fait  distinct,  de  la  nappe  des  assises  calcaires 
qui  lui  est  superposée  et  dont  il  est  séparé  par  la  masse 
énorme  des  dièves.  Il  est  aussi  beaucoup  plus  gênant  que 
lui;  car  le  torrent  se  trouvant  au-dessous  des  couches  argi- 
leuses, on  ne  peut  empêcher  ses  eaux  de  pénétrer  dans  les 
exploitations.  Des  puits  spéciaux  et  de  puissantes  machines 
à  vapeur  sont  consacrés  à  Tépuisement,  auquel  on  tra- 
vaille depuis  vingt  ans  à  Denain,  et  depuis  quarante  à  Saint- 
Waast. 

Comme  la  couche  ne  doit  recevoir  que  peu  d'infiltrations, 
il  est  possible  qu'on  arrive  un  jour  à  son  assèchement  com- 
plet, si,  en  raison  même  de  l'absence  de  communication 
avec  la  surface  qui  le  prive  d'alimentation,  ce  réservoir  ne 
cesse  de  s'appauvrir. 

ivant  le  début  de  l'exploitation,  les  sables  aquifères  de 
cette  couche  occupaient  une  étendue  superficielle  d'envi- 
ron 24*-''-,574;  en  1867,  la  zone  mouillée  était  réduite  ù 
18''-^-,335;  elle  n'était  plus  au  !•'  décembre  1880  que  de 

Sur  la  figure,  on  a  représenté  le  périmètre  correspon- 
dant aux  sables  du  torrent,  et  celui  qui  comprend  aujour- 
d'hui la  partie  occupée  par  les  eaux. 

Trois  fosses  d'exhaure  ont  servi  spécialement  à  prendre 
les  eaux  directement  sur  la  nappe  du  torrent.  Ce  sont  les 
fosses  Bon-Air,  Vedette  et  Chabaud-Latour.  Elles  ont  été  suc- 
cessivement mises  en  chômage,  la  première  en  1845,  la  se- 
conde en  1847,  et  la  troisième  en  août  1868  (cette  dernière 
avait  commencé  à  épuiser  les  eaux  en  1845)'.  En  outre,  les 


^  Environ  40  pour  iOO  de  son  Tolume,  d'après  diverses  expériences. 

*  Dorrooy.  Topographie  touterraine  du  bassin  houiller  de  Valenciennes^  p.  117. 


90      ROLE  DU  COiNTAGT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  IMPERMÉABLES. 

fosses  d'Herin,  Ernestine,  Joseph  Périer  et  l'Enclos  ont  con- 
tribué à  assécher  le  torrent,  dont  les  eaux  pénétraient  dans 
les  travaux,  malgré  les  massifs  de  garantie  conservés  dans 
les  couches  de  houille.  Les  fosses  Lomprez  et  Du  temple  ont 
aussi  tiré  un  peu  d'eau,  mais  beaucoup  moins  que  les  pré- 
cédentes. 

On  peut  évaluer  ainsi  les  quantités  d'eau  dont  la  nappe 
se  serait  successivement  appauvrie  : 

Années  1856 745.000  mètres  cubes 

1857  655.000  — 

1858  702.000  — 

1859  791.000  — 

1860 992.000  — 

1861  1.800.000  — 

1862 928.000  — 

1863 714.000  — 

1864 1.032.000  — 

1865 877.000  — 

1866 800.000  — 

1867  635.000  — 

1868 572.000  — 

Arrêt  de  la  fosse  Chabaud-Latour. 

Total  en  13  ans.   .   .     10.229.000  mètres  cubes. 

Actuellement  on  tire  par  an  environ  206  000  mètres  cubes 
produits  accessoirement  par  les  fosses  Joseph  Périer,  l'En- 
clos et  Hérin.  Ce  chiffre  se  répartit  de  la  manière  suivante: 
Joseph  Périer,  109  000;  l'Enclos,  75  000;  Hérin,  24  000 
mètres  cubes. 

Lors  des  premiers  travaux ,  on  était  moins  bien  outillé 
qu'aujourd'hui  pour  creuser  les  puits  ;  le  mode  de  fonçage 
à  niveau  plein  n'était  pas  connu,  et  la  nappe  d'eau  consti- 
tuait un  obstacle  des  plus  sérieux  à  la  traversée  des  morts- 
terrains  entre  Saint- Waast  et  Denain.  D'autre  part,  on  devait 
réserver  dans  les  veines  de  charbon,  contre  le  torrent,  des 


CONTACT  PAR  DES  ÂCQDENTS  POSTÉRIEURS.  9i 

massifs  de  réserve  assez  épais.  D'ailleurs,  l'épuisement  de 
toutes  les  fosses  en  exploitation  contribue  indirectement  au 
même  résultat,  puisque  la  nappe,  comme  on  vient  de  le 
voir,  n'est  pas  séparée  du  terrain  houiller  par  des  couches 
imperméables  et  y  pénètre  par  des  fissures. 

Les  massifs  de  garantie  réservés  contre  le  torrent  corres* 
pondent  à  une  hauteur  verticale  de  40  mètres. 

Le  bord  de  la  nappe  passait  par  Bon-Air  en  1843  et  par 
Vedette,  en  1847,  époques  auxquelles  ces  deux  fosses  ont  été 
successivement  mises  en  chômage. 

En  résumé,  il  est  incontestable  que  le  lac  souterrain,  dé- 
signé sous  le  nom  de  torrent  d'Ànzin,  a  considérablement 
diminué  d'importance,  comme  s'il  n'avait  pas  d'alimentation. 
Ses  bords  se  sont  retirés,  au  point  de  laisser  à  sec  la  plus 
grande  partie  de  la  région  de  terrain  houiller,  actuellement 
occupé  par  les  travaux.  Cet  assèchement  a  surtout  été  pro- 
duit avant  1867,  mais  depuis  lors  il  a  été  continué,  quoique 
plus  lentement,  et  il  se  poursuit  môme  aujourd'hui. 


g    2.     CONTACT    PRODUIT    PAR     DES     ACaDENTS     POSTÉRIEURS 
A   LA   STRATIFICATION   OU   A   LA   FORMATION   DES   ROCHES. 


Roches  ImpennéableB  dàsagrégées  sur  place. 

Le  granité  et  le  gneiss,  ainsi  que  les  roches  cristallines 
qui  leur  sont  associées,  sont  en  général  imperméables,  au 
moins  lorsqu'ils  ne  sont  pas  traversés  par  des  fissures  assez 
peu  serrées  pour  donner  passage  aux  eaux.  Le  percement  du 
Saint-Gothard  a  été  mentionné  plus  haut  comme  une  preuve 
de  cette  assertion  (fig.  1,  p.  10). 

Toutefois  ces  roches  massives  sont  souvent  désagrégées  et 


n      ROLE  DU  œNTACT  DES  ROCHES  PERMfiABLES  ET  IMPERMÉABLES. 

réduites  en  une  sorte  de  masse  incohérente,  qu'on  appelle 
arène.  Cette  désagrégation,  à  laquelle  les  agents  atmosphé- 
riques ont  souvent  pris  une  part  active,  est  surtout  fréquente 
dans  le  voisinage  de  la  surface,  et  les  matériaux  qui  en  ré- 
sultent se  sont  accumulés  de  préférence  dans  certains  plis 
du  sol.  Gomme  ces  derniers  sont  fréquemment  de  nature  per- 
méable, ils  s'imprègnent  d'eau,  et  donnent  ainsi  naissance, 
dans  les  dépressions  de  la  roche  vive,  à  des  réservoirs  quel- 
quefois peu  étendus  et,  par  suite,  à  des  sources. 

Le  plateau  granitique  de  la  France  centrale  et  les  régions 
qui  s'y  rattachent  oiïrent  de  nombreux  faits  de  ce  genre. 

Ainsi,  comme  Belgrand  Ta  montré,  le  sol  du  Morvan  pré- 
sente un  nombre  extrêmement  considérable  de  petites  sour- 
ces dans  les  dépressions  ou  plis  qui  se  montrent  partout, 
aussi  bien  sur  les  flancs  des  coteaux  que  dans  le  fond  des 
vallées.  Hais,  en  général,  il  n'y  en  a  pas  de  considérable. 
Ces  petites  sources  sont  susceptibles  de  tarir  à  la  suite  des 
sécheresses. 

Dans  plusieurs  de  ces  régions,  le  point  d'émergence  de  la 
source  est  presque  invariablement  marqué  par  un  dépôt 
tourbeux  plus  ou  moins  important,  où  les  habitants  vont 
capter  la  source  pour  l'amener  au  hameau. 

irtMéo.  —  Cette  influence  des  arènes  superficielles  est 
habituelle  aux  pays  granitiques.  Nous  mentionnerons  l'Ir- 
lande, où  sur  des  étendues  considérables,  et  jusqu'à  de 
grandes  profondeurs,  le  granité  est  à  l'état  d'arène  ou  de 
growan^  suivant  ce  mot  populaire  d'origine  celtique.  De  là, 
d'après  M.  HuU,  des  réserves  d'eau  comparables  a  celles  que 
contiennent  si  souvent  les  alluvions  superposées  à  la  même 
roche. 

flehiatM  ««  diTers  é^cm.  —  Malgré  la  différence  de  nature 


CONTACT  PAR  DKS  ACCrDENTS  POSTÉRIEURS. 


93 


qui  les  sépare  du  granité,  les  roches  schisteuses  de  tout  âge 
présentent  des  circonstances  analogues. 


•bMrTatlMi  mur  l'éparpUleaMat  ûem  popwlatloMi.  —  De  la  mul- 
tiplicité et  de  réparpillement  des  sources  dans  les  pays  gra- 
nitiques et  schisteux  résultent  la  multiplicité  et  réparpille- 
ment des  habitations,  comme  Cuvier  l'avait  déjà  remarqué. 


Éboulis. 


Quel  que  soit  le  terrain  en  présence  duquel  on  se  trouve, 
des  éboulis  se  rencontrent  si  fréquemment  sur  les  flancs  des 


Fig.  50.  —  Situation  de  la  source  du  Creux-du-Vcnt  dont  l'arrivée  au  jour  est  déplacée  par 
un  grand  éboulement,  d'après  M.  Desor.  Ca,  calcaire  de  la  grande  oolithe  ;  A«,  marnes  oxfor- 
diennes;  C,  oolithe  astartienne;  A^  marne  a^lartienne;  G>,  calcaire  A  astartes;  %  calcaire 
kimméridgien;  C«.  calcaire  virgulien;  E,  éboulis. 


coteaux  ou  vers  leurs  bases,  qu'ils  sont  à  prendre  en  consi- 
dération sur  le  régime  des  eaux. 

Des  sources  que  Ton  rencontre  dans  les  terrains  imper- 
méables, tels  que  le  granité  et  le  phyllade,  sortent  quelque- 
fois des  éboulis  perméables,  dont  les  actions  désagrégeantes 
de  la  surface  les  recouvrent  peu  à  peu. 

C'est  ainsi  que  la  source  du  Creux-du-Vent  (fig.  50) 
dans  les  montagnes  du  Jura  neuchâtelois,  qui  est  alimentée 
par  les  calcaires  oxfordiens,  jaillit  à  la  base  des  iparnes 


9A      ROLE  DU  CONTACT  DES  ROCHES  PERMËABLES  ET  IHPERMÉABLES. 

oxfordiennes  par  suite  d'un  grand  éboulement  d'environ 
500  mètres. 

D'autre  part,  la  figure  51  représente  une  disposition  fré- 
quente le  loDgdes  collines,  formées  d'une  alternance  de  cal- 
caire ou  de  grès  et  d^argile,  comme  on  le  voit  dans  les  étages 
jurassiques. 

De  tels  glissements  déplacent  fréquemment  le  niveau  nor- 
mal des  sources,  qui,  suivant  la  nature  perméable  ou  imper- 
méable des  éboulis,  peuvent  baisser  ou  élever  leur  appari- 
tion au  jour. 

Par  suite  de  circonstances  de  ce  genre,  le  fond  des  vallons 


Fi^'.  51.  —  MaUSriaiix  calcaires  éboulés  C,  qui  se  sont  enfouis  dans  les  argiles  sous-jacetites  A. 
de  manière  à  former  un  bourrelet  B,  qui  constitue  comme  la  digue  d'un  réservoir  d'eau. 
|)0uvant  donner  lieu  à  la  source  S.  Exemple  pris  dans  Meurthe-et-Moselle,  par  M.  Braconnier. 


est  souvent  recouvert,  môme  dans  les  points  où  il  n'existe 
pas  de  traces  d'alluvions,  de  débris  anguleux  et  peu  cohé- 
rents. C'est  ainsi  qu'à  une  faible  profondeur,  il  circule  sou- 
vent, dans  cette  couche  meuble,  des  eaux  invisibles  à  la  sur- 
face du  sol.  Des  travaux  peu  dispendieux,  ne  s'étendant  qu'à 
5  ou  6  mètres  de  profondeur,  peuvent  y  ramener  ces  eaux 
latentes. 

Quand  l'eau  de  pluie  tombe,  des  surfaces  convexes  font 
diverger  les  filets  liquides  qui  se  rassemblent  dans  les  sur- 
faces concaves,  et  ces  dernières  deviennent  de  véritables 
bassins  de  réception. 


CONTACT  PAR  DES  ACUDENTS  POSTÉRIEURS.  95 

C'est  généralement  vers  le  haut  des  plis  concaves  du  ter- 
rain, c'est-à-dire  à  la  naissance  des  thalwegs,  que  Ton  peut 
rencontrer  l'eau  latente  des  terrains  meubles.  Un  court  exa- 
men du  modelé  du  sol  suffît  en  général  pour  déterminer 
la  position  de  Tentaille  à  faire.  Perpendiculairement  à  la 
ligne  du  thalweg  des  vallées,  on  pratique  une  rigole  trans- 
versale que  Ton  approfondit  jusqu'à  ce  que  les  eaux  y  dé- 
coulent. 

Des  caractères  de  ce  genre  ont  été  mis  à  profit  de  toute 
antiquité  et  dans  bien  des  pays,  et  c*est  à  la  suite  de  leur 
élude  approfondie  que  l'abbé  Paramelle*  a  formulé  des 
règles  qui  Tout  souvent  conduit  au  succès. 

Boues  glaciaires. 

Les  boues  glaciaires,  en  se  plaquant  sur  les  roches,  déter- 
minent, de  même  que  des  éboulements,  des  dérivations  de 
sources.  Un  cas  de  ce  genre  a  été  signalé  dans  l'Âlbisbrunn, 
pour  des  eaux  qui  sortent  de  la  molasse. 


Boories,  coulées  de  lare  et  autres  déjections  volcanicpies  incohérentes, 
Vaouolalres  ou  fissurées. 


€«■€•  d«  seorfes;  mL«aipl«s  mm  laeCluuHboa,  mi  lac  dm  Bottehet, 
à  Tewme,  *   Wmyml  et  *  San  Mlfiicl.  -^  En    divCrS   licUX,    IcS 

déjections  volcaniques  incohérentes  et  essentiellement  po- 
reuses donnent  lieu  à  des  filtrations  du  môme  genre  que 
celles  des  terrains  de  transport  et  des  éboulis. 

Le  lac  Chambon  (Puy-de-Dôme),  en  s*infiltrant  à  travers  les 
Mories  du  Tartaret,  près  Murols,  produit  de  nombreuses 
sources» 

*  L'art  de  décou^ir  leê  sùurceê,  î*  édit<»  p.  i4i,  i82  et  i904 


96      ROLE  DU  CONTACT  DES  ROCHES  PERHfiABLES  ET  IMPERMÉABLES. 

Le  lac  du  Bourget  (Haute-Loire),  qui  est  creusé  dans  un 
cône  volcanique,  n'a  aucune  issue  apparente.  Sa  forme  est 
à  peu  près  celle  d'une  ellipse,  dont  le  grand  axe  est  de 
825  mètres  et  le  petit  de  700  mètres.  Sa  plus  grande  pro- 
fondeur, qui  correspond  au  milieu  du  lac,  a  été  trouvée  de 
28  mètres.  D'après  Henri  I^coq,  ce  lac  présente  cette  par- 
ticularité qu'on  n'y  voit  pénétrer  aucun  filet  d'eau,  et  que 
nuHe  part  on  n'en  voit  sortir  la  moindre  trace.  Il  faut 
admettre  des  sources  intérieures  et  abondantes  au-dessous 
de  la  surface  de  l'eau,  tandis  que  le  trop  plein  s'échappe  à 
travers  les  bords  scoriacés  du  cratère.  Telle  serait  l'origine 
des  sources  abondantes  qui  jaillissent  au  pied  du  cône  vol- 
canique. Une  source  dont  l'eau  a  été  conduite  à  la  ville  du 
Puy  a  sa  naissance  auprès  du  village  de  Vourzac  et  dans  un 
petit  vallon  parcouru  par  le  ruisseau  qui  en  porte  le  nom, 
à  un  peu  moins  de  7  kilomètres  de  la  ville,  à  l'altitude  de 
850  mètres.  Elle  apparaît  dans  le  terrain  basaltique  au  pied 
d'une  butte  de  scories  de  forme  allongée  *. 

D'après  M.  Fouqué,  à  Fayal,  au  fond  du  cratère,  est  un 
réservoir  d'eau  fermé,  de  80  mètres  environ  de  diamètre, 
dans  lequel  on  peut  descendre  par  un  canal  vertical  de 
15  mètres  de  profondeur.  J^e  réservoir  d'environ  80  mètres 
de  diamètre  et  de  30  mètres  de  hauteur  est  sans  issue  ;  mais 
il  parait  alimenter  une  source  qui  forme  un  ruisseau 
descendant  sur  Horla. 

Le  lac  situé  dans  l'intérieur  du  cratère  Sete  Gidades,  à  San 
Miguel,  se  déverse  par  infiltration  à  travers  ses  parois  et 
donne  lieu  à  plusieurs  sources,  dont  la  principale  coule 
vers  le  sud.  Dans  la  même  lie,  la  digue  qui  termine  le  lac 
de  Fumas  alimente  une  source  et  un  ruisseau,  sur  le  pas- 
sage des  sources  chaudes. 

A  D'après  M.  Tournaire. 


CONTACT  PAR  DES  ACCIDENTS  POSTÉRIEURS. 


97 


4'^^ 


Bo7atccFMtaMu(Pn7Hie-iiùaM).  —  Les  oaux  pluviales  qui 


98      ROLE  DU  CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  IMPERMÉABLES. 

pénètrent  à  travers  les  coulées  volcaniques  modernes,  ainsi 
qu'à  travers  les  pouzzolanes  et  leurs  scories,  se  réunissent 
sous  les  matériaux  poreux,  en  suivant  les  mêmes  vallées, 
sous  la  protection  des  courants  et  s'échappent  abondantes 
à  leur  extrémité.  De  belles  sources  de  cette  catégorie  se 
rencontrent  dans  le  département  du  Puy-de-Dôme*. 

Aux  environs  de  Glermont  (fig.  52),  les  sources  de  Royat 
et  de  Fontanat  sortent  d'une  coulée  qui  s'est  épanchée  vers 
l'est  du  Puy  de  Dôme.  EJles  reçoivent  et  abritent  une  partie 
de  l'eau  qui  est  absorbée  par  la  masse  imposante  du  Puy 
de  Dôme  et  la  laissent  échapper  sur  plusieurs  points  de  leur 
trajet.  Parmi  toutes  ces  sources,  on  peut  mentionner  l'é- 
norme quantité  d'eau  qui  jaillit  à  Fontanat,  où  l'on  voit 
partout  sortir  de  la  lave  des  filets  d'eau  vive.  Au-dessus  de 
Royat,  il  y  a  également  une  source  très  abondante  et  à  Royat 
même  (fig.  53),  dans  une  grotte  charmante,  sous  une  lave 
prismée,  jaillissant  de  lapillis  et  de  scories  par  sept  ouver- 
tures, les  eaux  ont  entraîné  une  partie  du  terrain  meuble 
sur  lequel  reposait  la  lave.  Un  peu  plus  bas,  à  l'extrémité 
de  la  vallée,  s'ouvre  une  dernière  grotte  qui  fournit  le  plus 
d'eau,  et  alimente  la  ville  de  Glermont.  L'ouverture  de  cette 
grotte  a  été  également  creusée  par  les  eaux  sous  le  courant 
de  lave. 

La  quantité  d'eau  qui  sort  de  la  lave,  depuis  Font-de-l'Ar- 
bre  au-dessous  de  Fontanat,  jusqu'à  l'extrémité  de  la  coulée, 
est  énorme.  Lecoq  évalue  en  moyenne  à  1560  litres  par 
seconde,  soit  134000  mètres  cubes  par  24  heures,  le  volume 
d'eau  qui  sort  de  cette  longue  coulée. 

Le  Puy  de  Dôme  par  sa  grande  surface,  par  la  nature  po- 
reuse de  sa  roche  constituante,  et  surtout  par  son  action 
réfrigérante,  est  la  cause  principale  de  cette  alimentation. 

*  D'après  Ueuri  Lecoq,  Eaux  du  plateau  cenlraL 


CONTACT  PAR  DES  Aa:iDENTS  POSTÉRIEURS.  99 

C'est  à  la  coulée  de  lave  qui  part  de  sa  base,  et  non  à  celle 


Fig.  53.  —  Grotte  sous  une  coulée  de  lave  i  structure  prismatique  d'où  sort  la  source  de  Roya 

D'après  M.  Gautier 


de  Gravenoire,  qui  descend  aussi  jusqu'à  Royat,  qu'il  faut 
attribuer  Ténorme  volume  d'eau  de  ces  sources. 

AllA^Mit,  Ceyasat  ci  WLmmmje  (Pay-^e-Dômc).  «-  Du  CÔté  Occi- 
dental du  Puy-de-Dôme,  d'autres  coulées  partant  du  Puy  de 
Côme  et  peut-être  aussi  du  petit  Puy  de  Dôme,  ainsi  que 
celles  de  Barme  et  de  Monchié,  fournissent  aussi  des  sources 
qui  présentent  une  sorte  de  symétrie  avec  celles  de  Royat  et 
de  Fontanat  (fig.  54). 

La  masse  et  l'étendue  de  la  lave  du  Puy  de  Côme  permet- 
tent aux  eaux  pluviales  de  s'y  infiltrer  abondamment.  Elles 


100  ROLE  DU  CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  IMPERMÉABLES . 


5! 


.<  <^ 


ss 


sortent  très  volumineuses  à  Pontgi- 
baud,  au  point  de  refroidir  les  eaux 
de  la  Sioule. 

De  toutes  ces  sources,  d'après 
M.  Paul  Gautier,  préparateur  à  la  Fa- 
culté des  sciences  de  Glermont,  la 
plus  puissante  est  peut-être  celle  d'Al- 
lagnat  (fig.  55)  ;  elle  sort  d'un  cirque 
dont  les  parois,  formées  de  schistes 
anciens,  supportent  d'épaisses  cou- 
lées de  basalte,  recouvertes  de  lave 
moderne.  Tout  près  de  cette  première 
source  s'en  trouve  une  autre,  un  peu 
moins  abondante,  celle  du  Grand- 
Pré,  dont  les  eaux  se  réunissent  plus 
bas  à  celles  d'Âllagnat  et  de  Geyssal. 
La  source  de  Ceyssat  est  moins  forte 
que  les  deux  premières.  Elle  s'é- 
chappe au-dessous  de  l'église  du  vil- 
lage, au  milieu  d'éboulis  de  la  coulée 
de  Côme  et  de  blocs  de  roches  an- 
ciennes. 

L'étang  de  Fung  a  été  desséché  il 
y  a  une  vingtaine  d'années  et  trans- 
formé en  prairies.  Seules  les  sources 
subsistent  et  sont  captées  en  partie 
par  une  levée  de  terre  gazonnée,  de 
forme  circulaire  (fig.  56).  L'eau  ar- 
rive du  fond  de  cette  vasque  par  trois 
crevasses  très  profondes,  que  les  ha- 
bitants appellent  des  puits,  et  leur 
débit  varie  suivant  les  années.  A  côté 
de  la  pièce  d'eau  se  trouvent  d'autres 


CONTACT  PAR  DES  ACCIDENTS  POSTÉRIEURS.  101 

fissures  moins  importantes,  qui  sont  également  des  points 
d'émergence  de  sources. 

"  Le  groupe  de  Mazaye  (fig.  57)  est  constitué  par  trois 
sources.  Deux  sont  de  force  moyenne  et  sourdent,  Tune  sous 
l'église  et  l'autre  entre  Mazaye-Haute,  qui  est  bâtie  sur  la 


Echelle. 


Fig.  55.  —  Carte  da  bassin  d'alimentation  des  sources  de  Mazaye,  de  Fung,  de  Ceyssat 
et  d'Alagnat.  —  D'après  M.  P.  Gautier. 


coulée,  et  Mazaye-Basse,  qui  est  située  au  pied  de  cette  même 
coulée.  Ces  deux  sources  diminuent  beaucoup,  et  disparais- 
sent même  en  temps  de  sécheresse.  La  troisième,  qui  est  la 
plus  puissante,  alimentait  autrefois  un  petit  étang,  aujour- 
d'hui desséché,  et  sert  de  force  motrice  à  deux  roues  à  augets, 


iOi  ROLE  DU  CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  IMPERMÉABLES. 

actionnant  ensemble  quatre  paires  de  meules.  Cette  source 
est  intarissable  et  varie  peu.  Elle  se  trouve  placée  sur  une 
inflexion  qu'a  dû  subir  la  coulée,  à  son  extrémité  iufé- 
rieure,  pour  suivre  le  thalweg  de  l'ancienne  vallée.  La  lave 
offre  au-dessus  de  la  source  un  éperon  qui  semble  s'être  so- 
lidifié subitement  en  ce  point  ;  la  portion  de  coulée  qui  con- 
tinue dans  la  vallée  est  mince  et  peu  importante. 


Fig.  56.  —  Vue  de  Fung  :  Y,  granité;  «,  basalte;  C,  G,  coulée  volcanique  d'où  sort  la  source 
Cr.  crevasses  du  soi.  —  D'après  M.  Gautier. 


Attires  localités  un  départemeaC  dn  Fay-de-BôOM  t  Cîraveaolrc^ 
rari€Mi,  La  Na^ére,  HontelneTre,  le  Tartaret*. Le  Puy  dc  Grave- 

noire,  à  3  kilomètres  de  Clermont,  avec  son  cône  de  scories, 
émet  des  sources  limpides  sur  le  trajet  de  ses  laves,  notam- 
ment celle  qui  alimente  le  village  deBeaumont,  et  la  grande 
source  de  TOradou  qui  sort  aussi  de  la  lave. 

L*un  des  principaux  cônes  de  scories  de  la  chaîne  des 
Puys,  le  Puy  de  Pariou,  produit  aussi  plusieurs  sources  qui 
descendent  jusque  dans  la  plaine,  assez  près  de  Clermont. 


*  Uae  grande  partie  de  cet  article  est  emprunté  aux  publications  de  Lecoq. 


CONTACT  PAR  DES  ACCIDENTS  POSTÉRIEURS. 


i03 


Déjà,  près  de  la  montagne,  sort  la  fontaine  du  Berger,  la 
source  la  plus  élevée  et  la  plus  froide;  puis  une  autre,  au 
hameau  de  Chez-Vasson.  La  coulée  se  divise  en  deux  bran- 
ches; Tune  d'elles  descend  à  Villars  et  Ton  en  voit  jaillir  une 
belle  source,  au-dessous  du  village,  dans  une  prairie;  un 
peu  plus  bas,  une  autre  dans  le  bois  ;  enfin  à  Fontmort  sort 


Fig.  57.  —  Voo  de  Maxaye  :  C,  coulée  volcanique;  C,  retour  de  la  même  coulée  d'où  sort  la 
source  S.  —  D'après  M.  P.  Gautier. 


une  source  considérable  à  l'extrémilé  de  la  coulée.  I/autre 
branche  passe  au  Gressigny  et  abandonne,  après  plus  de 
12  kilomètres  de  longueur,  à  Nohanent,  un  véritable  ruis- 
seau où  cette  source  a  fixé  le  séjour  des  blanchisseuses. 

Entouré  de  plusieurs  cônes  de  scories  qui,  probablement, 
conduisent  leurs  eaux  sous  ses  laves,  le  Puy  de  la  Nugère 


iU    ROLE  DU  CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  IMPERHËABLES. 

représente,  suivant  l'expression  de  Lecoq,  le  plus  bel  appareil 
volcanique  de  l'Auvergne,  Des  sources  très  pures  et  très 
abondantes  s'échappent  sur  plusieurs  points;  la  plus  élevée 
est  celle  de  Volvic. 

La  coulée  de  lave  de  Montsineyre  descend  rapidement  à 
Compains,  et,  en  passant  à  Ghaméane,  elle  émet  une  très 
belle  source  qui  se  précipite  avec  la  lave  au  fond  de  la  vallée. 
Cette  eau  est  dirigée  sur  les  pentes  irrégulières  que  les  flots 
de  laves  ont  formées  en  descendant  à  Compains. 

Le  volcan  du  Tartaret  a  donné  naissance  à  une  coulée  de 
lave  très  étendue  qui  passe  à  Murols,  à  Sachapt  près  de  Sainl- 
Nectaire,  à  Champeix  et  ne  s'arrête  qu'à  Neschers.  Des  sour- 
ces très  belles  sortent  sur  plusieurs  points  de  cette  coulée  et 
ont  été  sans  doute  la  cause  déterminante  de  la  position  de 
plusieurs  villages.  Les  plus  belles  sortent  de  la  lave  à  Sachapt 
et  arrosent  de  larges  touffes  de  callitriches,  Cxées  sur  des 
scories  qui  couvrent  le  fond  des  ruisseaux  et  dont  la  tempé- 
rature reste  la  même  en  hiver  et  en  été. 

Batraiffaes  (Ardéehe).  —  Daus  des  couditious  Semblables 
une  source  jaillit  devant  Enlraigues  (Ârdèche),  sur  la  rive 
droite  de  la  Yolane,  vers  la  base  de  la  coulée  et  dans  une 
sorte  de  grotte. 

Etna,  Ter«elra  et  Sastorln^  —  DcS  SOUrCCS  trèS  fortCS  jaillis- 
sent des  matériaux  scoriacés  vers  la  base  de  l'Etna.  Tel  est  le 
Fiume-Freddo,  près  Giarra,  dont  la  température  très  basse 
fait  supposer  que  son  alimentation  se  fait  à  un  niveau  fort 
élevée 

À  Terceira,  c'est  une  disposition  analogue  :  l'eau  entre  dans 
un  boyau  formé  au  pied  d'une  coulée. 

*  D'après  H.  Fouqué. 


CONTACT  PAR  DES  ACCIDENTS  POSTÉRIEURS.        iOS 

Santorin  ne  possède  aucune  source  ;  l'île  étant  recouverte 
d'une  couche  de  ponces  épaisse  en  moyenne  de  20  mètres, 
les  eaux  de  pluie  y  disparaissent  et  s'écoulent  vers  la  mer, 
sans  laisser  de  traces  à  la  surface.  S'il  était  nécessaire,  on 
pourrait  sans  doute  les  capter  vers  le  bas  par  une  tranchée. 


et  emw%w4mm\  —  H  nous  parait  préférable  de  ne  pas 
scinder  ce  qui  se  rapporte  aux  eaux  de  Rome,  sauf  à  y  com- 
prendre des  nappes  d'eau  et  des  sources  qui  n'appartiennent 
pas,  en  totalité,  aux  déjections  volcaniques  incohérentes. 

Rome  est  située  au  milieu  d'un  plateau  élevé  de  40  à 
60  mètres,  au-dessus  la  mer,  et  sillonné  par  des  ravins  plus 


fsHil^i^^^^ 


Fig.  SB.  —  Constitution  géologique  de  la  campagne  romaine,  montrant  la  disposition  des  sources 
principales  de  la  contrée.  T,  tufs  divers;  P,  pounolanes;  Ti.  tuf  incohérent;  Ti.  tuf  solide  li- 
tholde;  Tg,  tuf  volcanique  granulaire;  NN,  niveau  de  la  nappe.  —  D'après  M.  Giordano. 


ou  moins  escarpés,  dans  lesquels  coulent  le  Tibre  et  ses  af- 
fluents. Les  collines  de  la  campagne  romaine  n'en  sont  que 
des  restes  ou  lambeaux.  Or  ce  plateau  est  constitué  par  des 
tufs  volcaniques,  en  assises  presque  horizontales  et  plus  ou 
moins  épaisses.  Ces  tufs,  dont  les  éléments  ont  été  projetés 
de  volcans  sous-marins  ou  sur  les  bords  d'un  ancien  estuaire, 
ont  une  texture  et  une  solidité  assez  différentes  dans  les 
difTérentes  couches.  Une  assise  de  tuf  solide  employé  comme 
pierre  de  taille  {tufo  litoide),  de  10  à  15  mètres  de  puissance, 
alterne  avec  du  tuf  moins  solide  et  avec  des  assises  tout  à 
fait  incohérentes  de  pouzzolane.  Celte  dernière  (fig.  58)  est 

*  Diaprés  une  obligeante  communication  de  N.  Giordano. 


i06  ROLE  DU  CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  IMPERMÉABLES. 

naturellement  fort  perméable  et  donne  lieu  à  une  nappe 
d*eau  souterraine  qui  alimente  plusieurs  sources  et  des  puits 
à  un  niveau  assez  constant,  inférieur  à  25  mètres  d'altitude. 

A  quelque  distance  de  la  ville,  s'élèvent  des  cônes  vol- 
caniques plus  récents,  recouvrant  les  tufs.  Ils  sont  formés 
par  des  assises  inclinées  de  cendres  (lapilli)  associées  à  des 
laves.  Le  plus  grandiose  de  ces  cônes  est  celui  dit  Ulial  ou 
d'Âlbano,  à  Test  de  Rome,  couvert  de  villas  et  de  villages. 
tels  qu'Albano,  Âricia,  Nemi,  Marino,  Frascati,  Rocca  di 
Papa,  etc.  —  Un  tel  cône  est  très  perméable,  et  les  eaux 
pluviales  en  sortent  à  l'état  de  sources  plus  ou  moins  abon 
dantes  et  généralement  assez  pures. 

Au  nord  de  la  ville,  à  2  kilomètres  environ  hors  de  la 
porte  du  Peuple,  la  source  gazeuse  renommée  dite  oc^tia 
dcetom  S  sort  au  pied  des  Monts  Parioli,  formés  de  tufs 
volcaniques  et  de  travertins,  avec  un  volume  d'environ 
60  mètres  cubes  par  24  heures.  A  3  kilomètres  et  demi  au 
sud  de  la  ville,  près  de  la  voie  Appienne,  dans  le  petit  val- 
lon de  la  Gaffarella,  Yacqua  nanta  est  également  gazeuse 
froide;  un  peu  plus  bas,  les  restes  d'une  ancienne  njm- 
phée  romaine  s'élèvent  près  d'une  autre  petite  source  où, 
d'après  la  tradition,  Numa  venait  consulter  la  nymphe 
Égérie  et  qui  ont  inspiré  Byron. 

Les  Trois  Fontaines  {acqux  mlvix)y  près  de  l'abbaye  de  ce 
nom ,  dans  un  petit  vallon  au  sud  de  Rome,  ont  été  captées 
et  conduites  sous  trois  autels  dans  l'intérieur  de  l'église  de 
l'abbaye:  c'est  ce  qui  a  fait  croire  à  trois  fontaines  diffé- 
rentes, qu'on  a  même  dît  avoir  des  températures  différentes 
et  auxquelles  une  tradition  religieuse  a  donné  jadis  une 
certaine  célébrité. 

Sur  les  flancs   du  Janicule   jaillissent  la   plupart  des 

*  Le  pape  Alexandre  YII  7  flt  bâtir  iin  temple  par  Bemini. 


CONTACT  PAR  DES  ACCIDENTS  POSTÉRIEURS.  iOl 

sables  superposés  aux  argiles  pliocènes,  les  sources  dites 
Lanmiana^  Pia,  Innocenziana;  au  pied  du  mont  Vatican,  la 
source  délie  Api;  à  la  base  du  Quirinal,  les  sources  dites  de 
Saint-Félix  del  Grillo,  etc. 

Le  sous-sol  de  la  ville  basse,  formé  par  des  décombres, 
est  traversé  par  des  eaux  assez  abondantes  s'écoulant  libre- 
ment au  Tibre,  qui  n'est  pas  encore  endigué.  Une  partie 
de  ces  eaux  est  due  à  la  perte  des  aqueducs  distribuant 
l'eau  à  la  ville.  Ledit  écoulement  souterrain  donne  souvent 
lieu  à  des  mouvements  dans  les  fondations  des  maisons,  dont 
les  murs  se  crevassent  assez  facilement. 

L'eau  Vergine  dite  de  Trecij  du  nom  de  la  fontaine  mo- 


Fig.  59.  —  Source  de  VAcgua  Vergine, 

numentale  qui  est  formée  par  cette  eau  dans  la  ville,  est 
l'ancienne  Virgo,  si  estimée  pour  sa  pureté  (fig.  59).  Elle 
surgit  du  petit  vallon  de  Nona,  qui  débouche  sur  la  gauche 
de  l'Aniene,  à  10  kilomètres  de  Rome  et  à  22  mètres  d'al- 
titude. C'est  une  couche  de  pouzzolane,  surmontée  par  les 
assises  de  tuf  lithoïde  fendillé,  qui  la  fournit.  Cette  eau 
peut  être  considérée  comme  le  drainage  d'une  partie  du 
cône  Latial,  ainsi  que  le  fait  comprendre  la  figure.  La  source 
est  captée  et  conduite  à  Rome  par  un  aqueduc  de  16  kilo- 
mètres, en  grande  partie  souterrain;  le  volume  qui  arrive 
aujourd'hui  n'est  évalué  qu'à  65  mètres  cubes  par  24  heu- 
res, tandis  qu'originairement  il  devait  être  au  moins 
double. 


108  ROLE  DU  CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  IMPERMÉABLES. 

L'eau  Felice^  à  peu  près  l'ancienne  Àlexandrina,  provient 
du  captage  de  plusieurs  sources,  aussi  à  l*est  de  Rome,  aux 
environs  de  Colonna,  au  pied  nord  du  grand  volcan  I^tial 
et  dans  les  mêmes  terrains  volcaniques,  consistant  en  une 
alternance  de  tufs  et  de  laves. 

Le  niveau  moyen  de  ces  sources  atteint  100  mètres  d'alti- 
tude; aussi  l'eau  arrive  à  la  ville  au  niveau  de  60  mètres  en 
entrant  par  la  Porta  Maggiore,  où  elle  utilise  plusieurs  arcs 
d'un  ancien  aqueduc  *.  Le  volume  d'eau  n'est  pas  considé- 
rable, environ  21  mètres  cubes  par  24  heures.  Elle  alimente 
à  Rome  d'abord  la  fontaine  du  Mosi,  la  belle  fontaine  du 
Quirinal,  celle  du  Triton  et  passe  enfin  au  Transtevere. 

Les  sources  Vergine  ou  de  Trevi  et  Felice  contribuent  à 
l'alimentation  des  aqueducs  modernes  de  Rome. 

n  en  est  de  même  de  Teau  Paola,  qui  provient  du  lac 
Bracciano,  c'est-à-dire  aussi  de  roches  volcaniques. 

Quant  à  l'eau  Marcia^  qui  est  conduite  par  quatre  aque- 
ducs •,  elle  est  fournie  par  des  roches  calcaires  de  TApennin 
et  elle  nous  occupera  plus  loin. 

Plus  loin  de  Rome,  le  lac  de  Yico  (Romagne)  mérite  aussi 
d'être  mentionné.  Ce  lac  %  bien  qu'ayant  un  émissaire  appelé 
Rio  Vicano,  qui  fait  la  richesse  de  la  vallée  le  Ronciglione, 
alimente  un  grand  nombre  de  sources  venant  sourdre  sur  les 
flancs  des  monts  Gimino.  Toutes  celles  de  l'est  vont,  comme 
celles  du  même  côté  du  massif  de  Bolsena,  se  jeter  dans  le 
Tibre  à  diverses  hauteurs,  tandis  que  celles  des  autres  points 
des  deux  massifs  convergent,  en  forme  de  raquette,  vers  la 
Marta,  qui  court  à  l'ouest  se  jeter  dans  la  mer  Tyrrhénienne, 
entre  Monte  Alto  et  Corneto. 


*  L*aqueduc  moderne  de  33  kilomètres  de  longueur  est  l'œuvre  du  pape  Fdice 
Peretti,  dit  Sixte  V,  dont  il  porte  le  nom. 

*  11  ne  subsiste  plus  que  quatre  des  dix  aqueducs  de  la  Rome  antique. 

*  D'Armand.  Eaux  minérales  de  Vilerbe^  1852»  p.  9. 


CONTACT  Par  des  ACCIDENTS  POSTÉRIEURS.  109 

—  Les  sources  sont  fréquentes  sur  les  confins  des 
massifs  de  roches  éruptives,  ainsi  que  dans  ces  roches 
elles-mêmes,  lorsque  des  masses  de  tuf  y  sont  interstrati- 
fiées. Ainsi  Pallas  Hill,  comté  de  Limerick*,  qui  est  composé 
de  mélaphyre  carbonifère,  avec  quelques  lits  de  tuf,  est  cé- 
lèbre pour  ses  nombreuses  sources,  qui  cependant  ne  sont 
pas  seulement  dues  aux  lits  de  tuf  subordonnés,  mais  dont 
quelques-unes  sont  dues  à  des  paraclases  qui  disloquent 
et  rejettent  ces  roches. 

i^étérA^ie  V  —  Quoique  le  Haut-Vogelsberg  soit  pauvre  en 
sources  fortes  et  pérennes  et  qu'il  y  en  ait  un  peu  davantage 
vers  la  partie  basse,  son  sol  est  presque  toujours  humide.  La 
division  du  basalte  en  plaques  ou  en  colonnes  et  sa  nature 
poreuse,  ainsi  que  l'existence  d'un  sous-sol  argileux  résul- 
tant de  la  décomposition  des  roches  volcaniques,  permet 
aux  eaux  atmosphériques  de  s'étendre  assez  uniformément. 
Plusieurs  districts  de  sources  sont  décrits  dans  différentes 
régions  *. 


Syrie)  Sources  dM  Petit  Jowdaln.  —    A     BauiaS,    l'uue     dcS 

grandes  coulées  basaltiques  qui  couvrent  tout  le  Jaulan  et 
qui  descend  dans  la  vallée,  contourne  le  pied  du  Jebel-es- 
Scheikh  et  s'étale  dans  la  plaine  d'Arb-el-Huleh,  en  laissant 
échapper  des  masses  d'eau  souterraines  qui,  après  s'être 
frayé  un  chemin  sous  cette  coulée,  vont  sortir  à  Banias  et  à 
Tell-el-Kadei  :  elles  y  sont  connues  sous  le  nom  de  sources 
du  Jourdain  *.  La  source  de  Dan  est  souvent  mentionnée 
dans  la  Bible  et  dans  Josèphe. 


>  D'après  M.  HuU. 

*  Tascbe.  Géologie  de  Schotten,  1869. 

*  Page  16  de  Touvrage  précité. 

*  Lartet.  ExplorcUion  géologique  de  la  mer  Morte,  p.  191,  avec  une  llgtirc  de  cette 


110    ROLE  DU  CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  IMPERilÊABLES. 


Rejets  accompagnant  les  failles 

Par  le  rejet  qu'elles  ont  produit,  les  paraclases  ou  failles 
ont  juxtaposé  parfois  des  couches  inperméables»  qui  établis- 
sent alors  un  barrage;  de  là»  un  arrêt  brusque  de  la  nappe, 
dont  l'eau  est  contrainte  de  se  déverser,  avec  un  débit  sou- 
vent très  fort. 

Celte  disposition  doit  être  fréquente  dans  la  nature  ;  mais 
on  ne  peut  le  constater  avec  certitude  que  grâce  à  des  cir- 
constances assez  exceptionnelles,  par  exemple,  lors  de  l'exé- 
cution de  travaux  souterrains. 

Pour  éviter  des  répétitions,  nous  placerons  ici.  parmi  les 
roches  perméables,  celles  qui  doivent  cette  qualité  aux  nom- 
breuses fissures  dont  elles  sont  traversées  et  dont  il  sera 
spécialement  question  plus  loin. 


EaTiroBs  de  Londeui  '.  —  La  faille  qui  passc  au  nord  de 
Loudun  (Vienne),  avec  une  direction  Nord-Ouest  à  Sud-Est 
(fig.  60),  rompt  subitement  la  continuité  des  couches 
crayeuses,  à  la  hauteur  de  Veniers,  Claunay,  Maulay  et  Nueil. 
En  interrompant  le  plan  incliné  régulier  des  étages  super- 
posés, à  la  manière  d'un  mur  infranchissable,  cette  faille  a, 
entre  autres  résultats,  celui  de  faire  remonter  leurs  eaux  sur 
quelques  points.  C'est  à  cette  circonstance  que  l'on  peut  at- 
tribuer le  volume  qui  est  considérable  de  la  fontaine  de  Son, 
comparativement  aux  eaux  fournies  par  le  sol  crayeux  supé- 
rieur ;  car  cette  source  émane  très  probablement  des  grès 

source,  pi.  IIL  —  Danville  prétend  que  les  objets  jetés  dans  le  lac  Phiala,  situé  att 
milieu  des  coulées  du  Jaulan  et  qui  parait  être  un  ancien  cratère,  reparaissent  à 
Banias,  aux  sources  apparentes  du  Jourdain. 
*  De  Longuemar.  Arrondissement  de  Loudun^  1860. 


CONTACT  PAR  DES  ACCIDENTS  POSTÉRIEURS. 


111 


verts  abaissés  et  interrompus  par  les  étages  jurassiques,  qui 
les  forcent  à  rejeter  au  dehors  les  eaux  infiltrées  dans  leur 
épaisseur,  avec  assez  d'abondance  pour  faire  tourner  des 
moulins,  à  peu  de  distance  de  leur  origine  ^ 

La  même  figure  peut  représenter  la  disposition  du  sous- 
sol  de  Trois-Moustiers,  vers  lequel  se  dirige  la  même 
faille.  Toutefois  c'est  surtout  l'oxford  clay  inférieur  à  Àm- 
monites  anceps  qui  constitue  le  sous-sol  de  la  plaine  entre 


Ne 


ECHELLE     DES     LONQEURS 

S  9  A 


0  KILOIETR» 


ECHELLE     DES   HAUTEURS 


-h- 


f«H)  ■tmis 
— I 


¥ïç.  60.  —  Coupe  géologique  du  Loudunois,  de  la  Dive  i  Loudun,  montrant  comment  la  nappe 
d'eau  du  terrain  crétacé  est  barrée  par  l'oxford  clay,  par  suite  d'une  paraclase.  B,  calcaire 
grossier  de  l'étage  bathonien;  K,  calcaire  marneux  de  l'étage  kcUovien;  0,  marne  de  l'oxt'ord 
clay  ;  G,  sable  gris  ferrugineux  et  marnes  du  terrain  cénomanien  ;  C,  craie  grise  et  tuffeau. 
—  D'après  M.  Le  Touxé  de  Longuemar. 


Trois-Moustiers  et  la  Dive,   l'oxford  clay  supérieur  faisant 
défaut  sur  la  rive  gauche  de  la  Maine  *. 


;  Heta.  —  Pour  bien  préciser  le  rôle  des  failles, 
nous  allons  décrire  avec  détail  les  conditions  dans  lesquelles 
jaillissent,  en  Lorraine,  les  abondantes  sources  de  Gorze. 


*  D'apr^  une  communicalion  personnelle  de  H.  de  Longuemar. 


113  ROLE  DU  CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  IMPERMÉABLES. 

Au  sud-ouest  de  Metz  *,  le  plateau  oolithique  est  sillonné 
par  une  faille  qui,  partant  des  environs  d'Ars-sur-Moselle, 
traverse  la  plaine  de  Geai,  descend  à  Parfondval  par  un 
vallon  situé  entre  le  bois  de  la  Croix-Saint-Marc  et  celui 


Eciltelle 


Fig.  61.  —  Carte  des  environs  de  Gorze  (Lorraine),  montrant  comment  les  belles  sources  SS  de 
celte  localité  jaillissenl  de  la  grande  paraclase  PP  dilo  de  Saint-Julien,  qui  traverse  le  pay^ 
—  D'après  M.  le  colonel  Goulier. 

des  Chevaux,  coupe  le  revers  septentrional  de  la  côte  Mousa, 
passe  derrière  Gorze  (fig.  61)  et  se  dirige  de  là,  vers  Saiiil- 
Julien  et  Charey,  par  une  dépression  du  sol  que  le  relief  de 
la  carte  du  Dépôt  de  la  guerre  met  bien  en  évidence.  C'est  à 
Gorze  que  l'accident  parait  avoir  le  plus  d'amplitude. 


*  Jacquot.  Descriptioti  géologique  du  déparlemenl  de  la  Mo9elUy  1868,  p.  275. 


CONTACT  PAR  DES  ACCIDENTS  POSTÉRIEURS.  Ii5 

Ce  bourg  est  situé  à  la  limite  du  lias  avec  Toolithe;  à  la 
base  de  la  côte  Mousa  qui  le  domine,  et  sur  le  revers  opposé 
delà  vallée,  on  observe  les  calcaires  gréseux  qui  constituent 
les  premières  couches  du  groupe  oolithique  inférieur,  tan- 
dis que  de  l'autre  côté  de  la  côte,  on  voit  des  exploitations 
dans  le  calcaire  oolithique  jaune,  et  qu*à  peine  engagé  dans 
le  chemin  de  Mars-la-Tour,  on  constate  la  présence  de  Tas- 
sise  argilo-marneuse  avec  Ostrxa  acuminatay  0.  costata,  Cly- 
pem  patellay  placée  à  la  base  du  second  groupe  de  l'étage 
supérieur. 

La  faille  {fig.  62)  a  donc  eu  pour  effet  de  rapprocher,  à 


Echelle  des  lon^urô 
H * 1 • » 

EcheHe  des  hauteure. 


Fi^.  68.  —  Coupe  montrant  le  rejet  produit  par  la  paraclasc  qui,  en  abaissant  dVnviron 
60  mètres  la  paroi  NO  par  rapport  à  la  paroi  SE,  a  fait  buter  le  calcaire  oolithique  G^  contre 
l'aii^ile  liasique  Ai  (d'après  M.  le  colonel  Goulier).  —  L'échelle  des  hautews  est  8  fois  plus 
grande  que  celle  des  bases. 


Gorze,  des  bancs  qui,  dans  leur  situation  normale,  sont  sé- 
parés par  toute  l'épaisseur  de  l'étage  inférieur  de  l'oolithe, 
soit  par  50  ou  60  mètres  au  moins. 

L'accident  est  d'ailleurs  très  accusé  dans  le  relief  de  la 
contrée.  Le  revers  septentrional  de  la  côte  Mousa,  qui  se 
trouve  sur  la  trace  de  la  faille,  est  un  véritable  précipice. 
L'écrasement  du  sol  a,  de  plus,  déterminé  la  formation,  au 
pied  de  cette  côte,  d'un  certain  nombre  de  vallons  secs  qui, 
remontant  dans  des  directions  diverses,  jusqu'au  plateau, 

8 


114  ROLE  DU  CONTACT  1«S  ROCHES  PERMÉABLES  ET  IMPERMÉABLES. 

figurent  assez  exactement  une  rupture  étoilée.  (Voir  plus 
hautfig.  61.) 

L*hydrographie  souterraine  de  la  contrée  est  également  en 
rapport  avec  la  faille  de  Gorze  ;  car  c'est  à  cet  accident  qu'il 
faut  attribuer  le  jaillissement  des  magnifiques  sources  des 
Bouillons  et  de  Parfondval  qui  alimentent  depuis  environ 
vingt-cinq  ans  la  ville  de  Metz*  où  les  Romains  les  avaient 
déjà  amenées  par  un  aqueduc  dont  il  reste  d'imposants  ves- 
tiges. Le  nouvel  aqueduc  est  construit  pour  fournir  à  Metz 
10  000  mètres  cubes  d'eau  en  vingt-quatre  heures,  volume 
supérieur  au  débit  des  sources  après  les  périodes  de  séche- 
resse, mais  inférieur  de  beaucoup  à  ce  débit  à  la  suite  des 
périodes  pluvieuses.  La  constitution  orographique  et  miné- 
ralogique  de  leur  bassin  d'alimentation  explique  l'empla- 
cement et  le  débit  des  sources. 

Voici,  d'après  M.  le  colonel  du  génie  Goulier,  les  condi- 
tions qui  ont  déterminé  leur  jaillissement  :  Gorze  est  bâti 
sur  les  deux  côtés  d'un  ruisseau,  auquel  ces  sources  ont 
donné  naissance  et  qui,  se  dirigeant  successivement  vers 
l'est,  le  sud-est,  le  sud  et  Test,  conflue  avec  la  Moselle  en 
face  de  Novéant,  après  un  parcours  de  6  kilomètres.  La  vallée 
de  Gorze,  dans  laquelle  coule  ce  ruisseau,  et  trois  autres 
vallées  qui  se  réunissent  à  elle  près  de  son  origine,  sont  en- 
taillées dans  un  plateau,  dont  l'altitude  moyenne  est  de 
530  mètres,  tandis  que  celle  de  la  vallée  de  la  Moselle,  en  face 
de  Novéant,  est  seulement  178  mètres. 

De  ces  trois  vallées  tributaires  de  celle  de  Gorze,  deux 
viennent  du  Nord,  presque  parallèlement,  séparées  par  une 
arête  qui,  près  de  Gorze,  se  termine  par  le  promontoire  de 
la  côte  Mousa.  La  vallée,  située  à  Test,  est  appelée  de  Par- 
fondval; on  peut  la  suivre  sur  11  kilomètres  jusqu'à  son 
origine  vers  Vernéville.  Celle  de  l'ouest  est  plus  courte;  son 
origine  est  à  7  kilomètres  de  Gorze,  vers  Villers-aux-Bois. 


(mikCl  PAR  DES  ACCIDENTS  POSTSRIEDRS.  115 

Mais  avec  elle  conflue,  à  un  demi-kilomètre  en  avant  de 
Gorze,  la  troisième  vallée  qui  vient  de  l'ouest  et  dont  une 
origine  est  près  de  Tronville,  à  6  ou  7  kilomètres  de  son 
confluent. 

Ces  trois  vallées,  la  dernière  surtout,  ont  avec  évidence 
les  caîractères  de  vallées  de  fracture.  Elles  sont  entaillées 
dans  des  roches  calcaires  très  fendillées  et,  par  conséquent, 
très  perméables  aux  eaux  pluviales.  Aussi  ont-elles  des  fonds 
plats^  $ans  eau.  Et  comme  ce  sont  les  voies  d'émission  natu- 
relles de  bassins  perméables  très  étendus,  il  faut  nécessai- 
rement que  les  eaux  d'infiltration  y  coulent  souterrainement, 
soit  dans  des  canaux  naturels,  soit  au  milieu  des  gros  débris 
qui  probablement  remplissent  lés  crevasses  origines  de  ces 
Tallées. 

Mais  pourquoi  ces  eaux  sourdent-elles  près  de  Gorze  pour 
former  le  ruisseau  qui  les  mène  à  ciel  ouvert  vers  la  Moselle, 
au  lieu  de  continuer  leur  marche  souterraine  en  aval  de 
Gorze?  En  voici  la  cause  :  A  quelques  centaines  de  mètres  au 
nord  de  Gorze,  passe  la  grande  faille  dite  de  Saint-Julien, 
dont  il  vient  d'être  question,  qui  traverse  tout  l'ancien  dépar- 
tement de  la  Moselle  dans  la  direction  de  l'E.-N.-E.  a 
rO.-S.-O.  Toutes  les  couches  de  terrain  ont  subi,  au  nord- 
ouest  de  cette  faille,  un  abaissement  considérable  au-dessous 
des  positions  qu'elles  occupent  au  sud-est  du  même  accident, 
c'est-à-dire  dans  Gorze  et  dans  la  région  traversée  par  sa 
vallée.  Près  de  Gorze  même,  la  dénivellation  est  manifeste; 
car  on  constate,  à  1  kilomètre  en  amont  de  son  débouché 
dans  la  tallée  de  Gorze,  que  les  pieds  des  berges  de  la  vallée 
de  Parfondval  sont  entaillés  dans  des  roches  identiques  à 
celles  qui  couronnent  la  côte  Mousa,  à  une  centaine  de  mè- 
tres au-dessus  de  la  position  qu'elles  occupent  dans  le  fond 
de  la  vallée.  Par  suite  de  cette  dénivellation,  au  nord-ouest 
de  la  faille,  les  vallées  sans  eau  sont  découpées  dans  des 


116     ROLE  DU  CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  DfPERNËABLES. 

couches  calcaires  superposées  à  des  couches  marneuses  pro- 
fondément enfouies,  tandis  que  les  pieds  des  berges  de  la 
vallée  de  Gorze  sont  entaillées  dans  ces  couches  marneuses 
plus  élevées,  couches  que  Ton  trouve  encore  à  la  base  de  la 
côte  Mousa  et  aux  pieds  des  berges  de  la  partie  de  la  vallée 
de  Parfondval,  située  au  sud-est  de  la  faille.  Ce  sont  ces  mar- 
nes qui ,  formant  barrage  pour  les  eaux  souterraines  des 
couches  calcaires  déprimées,  forcent  ces  eaux  à  sourdre  à  la 
surface  du  sol  près  de  ce  barrage,  pour  s'épancher  à  travers 
les  échancrures  formées  par  les  vallées  dans  les  couches  mar- 
neuses. Aussi  les  sources  sont-elles  toutes  situées  près  de  la 
limite  commune  aux  deux  terrains,  d'abord  en  amont  de 
Gorze  où  elles  bouillonnaient  dan3  un  bassin  appelé  les 
Bouillons,  puis  dans  la  vallée  de  Parfondval  à  1  kilomètre  en 
amont  de  son  confluent. 

Quant  au  volume  d'eau,  fourni  par  ces  sources,  on  s'en 
rend  aussi  compte  facilement,  si  l'on  admet,  comme  cela  est 
probable,  que  les  lignes  de  partage  des  eaux  souterraines, 
entre  les  diverses  vallées,  diffèrent  peu  de  celles  des  eaux 
superficielles.  Dans  ce  cas,  on  peut  prendre,  pour  la  super- 
ficie du  bassin  d'alimentation  des  sources,  celle  de  la  partie 
du  bassin  de  réception  du  ruisseau  de  Gorze  qui  est  en 
amont  de  ces  sources,  ou  au  moins  celle  qui  est  au 
nord-ouest  de  la  faille.  Or  celte  dernière  partie  a  une  su- 
perficie de  60  kilomètres  carrés,  divisée  en  deux  portions 
presque  égales  pour  les  Bouillons  et  les  sources  de  Par- 
fondval. 

Pour  avoir  l'épaisseur  de  la  couche  de  pluie  capable  d'ali- 
menter annuellement  les  sources,  il  suffira  de  diviser  leur 
débit  annuel  par  cette  superficie.  Si  l'on  admet  le  débit 
moyen  journalier  de  10000  mètres  cubes,  pour  lequel 
l'aqueduc  a  été  construit,  le  débit  annuel  sera  5  650  000 
mètres  cubes,  et  le  quotient  par  60  000  000  mètres  carrés, 


œNTAGT  PAR  DES  ACCIDENTS  POSTÉRIEURS.  117 

donnera  une  hauteur  d'eau  de  6  centimètres  :  c'est  environ 
le  dixième  de  la  hauteur  d*eau  qui,  année  moyenne,  tombe 
à  la  surface  du  sol.  On  conçoit  que  cette  fraction,  un  dixième, 
puisse  facilement  s'infiltrer  dans  un  sol  fendillé,  surtout  à 
la  faveur  de  la  couche  spongieuse  de  débris  végétaux  existant 
dans  les  bois,  qui  occupent  une  partie  très  notable  du  bassin. 
Et  Ton  conçoit  en  même  temps  les  grandes  variations  que 
peut  éprouver  le  débit  des  sources,  à  la  suite  de  périodes  im- 
portantes de  temps  secs  ou  pluvieux. 


i  fireaebie.  —  Les  sourccs  ïioTi  moius  conuues 
de  Sassenage,  aux  environs  immédiats  de  Grenoble,  nous 


Fontaine. 


Hg.  63.  —  Disposition,  en  plan,  de  la  faille  de  Sassenage  qui  donne  lieu  à  la  source,  eu  faisan 
buter  la  craie  blanche  à  beleroni telles  Ce  conti-e  les  couches  argileuses  de  l'ui^gonicn  Cu.  — 
Q  amas  glaciaire.  —  D'après  M.  Lory. 

montrent  un  autre  exemple  des  rôles  des  failles  dans  le  ré- 
gime des  eaux  souterraines. 

Comme  l'a  bien  montré  M.  Lory  S  la  craie  à  silex  bule 
contre  les  marnes  à  spatangues  du  terrain  néocomien  et  il 
est  évident  que  c'est  de  cette  fracture  intérieure  que  jaillis- 
sent les  sources  (fig.  63  et  64). 

'  Excursion  géologique  à  Sauenage^  Grenoble,  1858. 


il 8  ROLE  DU  CONTACT  DES  ROCHES  PEkMÉARLES  ET  IMPERMÉARLES. 

Les  variations  de  volume  de  ces  sources,  les  époques  et 
les  durées  de  leurs  crues  sont  complètement  indépendantes 
de  celles  de  la  rivière  du  Furon,  à  laquelle  elles  viennent  se 
joindre.  On  ne  saurait  donc  considérer  ces  sources,  ainsi 
qu'on  Ta  fait  quelquefois,  comme  provenant  d'une  dérivation 
souterraine  d'une  partie  des  eaux  du  Furon,  en  quelque 
point  des  gorges  d'Engins.  Mais  si  l'on  suit  avec  attention  la 
trace  de  la  faille,  dont  il  vient  d'être  question,  on  voit  que 
cette  fracture  du  sol  se  continue  vers  le  sud-ouest,  puis  du 
sud-sud-ouest.  Elle  passe  ainsi  à  mi-côte  sur  le  versant  occi- 
dental de  la  montagne,  dans  une  direction  à  peu  près  parai- 

NNO.  BSE. 

Giirgcsd*En^ns.  PktoaudeSfWticr.  ^ 


faine  locale       ^  ■  ^ 
dea  Sroites  de$9êêmiége. 

Echelle, 
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Fig.  6i.  —  Coupe  verticale  perpendiculaire  é  la  faille  de  Sassena^e  qui  donne  lieu  à  la  source  S 
en  rnisanl  buter  la  craie  blanche  à  belcmnitcllest,  Ca  contre  les  couches  marneuses  de  l'ur- 
gonicn  U  (d'après  M.  Lory). 

lèle  à  celle  du  Furon-  L'existence  de  la  faille  se  manifeste 
ici  par  son  caractère  géologique,  par  la  discontinuité  et 
le  défaut  de  correspondance  des  couches  du  sol,  des  deux 
côtés  de  cette  ligne;  elle  tend  du  reste  à  devenir  de  moins 
en  moins  marquée  et  paraît  cesser  complètement  à  environ 
2  kilomètres  de  Sassenage. 

Malgré  sa  faible  longueur,  cette  fracture  est  évidemment 
la  tranchée  naturelle  où  se  rassemblent  les  eaux  qui  forment 
les  sources.  En  effet,  la  montagne  de  Sassenage  se  termine 
supérieurement  par  un  large  plateau  qui  s'étend  vers  le  sud 
jusqu'au  village  de  Saint-Nizier  ;  le  sol  de  ce  plateau,  couvert 
d'une  grande  quantité  de  blocs  erratiques  des  grandes  Alpes, 


CONTiCT  PAR  DES  ACCIDENTS  POSTÉRIEURS.  i19 

est  formé,  soit  par  les  couches  fendillées  de  la  craie  à  silex, 
soit  par  un  dépôt  de  molasse  et  de  poudingues  tertiaires 
qui  les  recouvre  à  Saint-Nizier.  Ce  sol,  éminemment  per- 
méable, boit  les  eaux  pluviales;  et  l'inflexion  des  couches, 
qui  forment,  sous  Saint-Nizier,  une  gouttière  concave  dans 
la  direction  même  de  la  faille  supposée  prolongée,  concentre 
naturellement  ses  eaux  à  l'origine  de  cette  fracture.  Elles 
s'y  engouffrent,  la  suivent,  descendent  à  mesure  qu'elle 
s'approfondit  et  arrivent  ainsi  au  niveau  des  grottes.  A  ce 
niveau,  le  calcaire  néocomien  supérieur,  qui  forme  le  bord 
oriental  de  la  faille,  repose  sur  les  marnes  à  spatangues, 
première  assise  de  l'étage  néocomien  inférieur,  couches  peu 
consistantes  qui  ont  dû  s'ébouler  dans  la  faille  et  y  former 
un  fond  marneux  impénétrable.  Dès  lors  les  eaux  arrêtées 
dans  leur  chute  se  sont  frayé  des  passages  à  travers  les 
roches  fendillées  de  la  craie,  formant  l'autre  bord  de  la 
faille  :  de  là  l'ouverture  des  grottes,  sorte  de  robinet  latéral, 
par  lequel  jaillissent  les  eaux  amassées  dans  la  faille  et  rete- 
nues inférieurement  au  niveau  des  marnes  néocomiennes. 


imfirabca,  AMtrtche.  —  La  belle  sourcc  de  Rohr- 
bach  im  Graben,  près  Vienne  (fig.  65),  est  un  exemple  re- 


Fig.  &.  — >  Jaxtaposition  da  calcaire  C  aux  schistes  de  Verfcn  (triasiques)  et  è  d'autres  couche 
imperméables,  d'où  résulte  le  jaillissement  de  la  source  S  du  Rohrbach  im  Graben.  (D'apr6s 
M.  Karrer). 

marquable  de  ce  type.  Une  faille  dirigée  à  peu  près  de 
l'ouest  à  Test  et  connue  sur  une  longueur  de  11  kilomètres 


120     ROLE  DU  CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  IMPERMËABLES. 

au  moins,  fait  buter  en  ce  point  les  couches  imperméables 
des  schistes  de  Verfen  (triasiques)  contre  le  calcaire,  d*où  il 
jaillit  de  nombreuses  sources,  entre  autres  celle  du  Rohrbach. 


—  Dans  le  Lancashire,  lorsqu'une  faille  a 
juxtaposé  des  couches  imperméables,  comme  les  marnes  du 
kcuper  ou  du  terrain  houiller,  au  grès  bigarré,  la  quantité 
d'eau  accumulée  sur  l'une  des  parois  de  cette  faille  peut 
être  très  considérable  et  donner  naissance  à  une  source. 
Le  puits  de  Flaybrick-Hill,  près  Birkenhead,  fait  également 
ressortir  cette  disposition  ;  un  tunnel  poussé  du  fond  de  ce 
puits,  à  la  profondeur  d'environ  50  mètres,  a  coupé  à  la 
distance  de  10  mètres  une  faille,  d'où  l'eau  coulait  avec  une 
telle  impétuosité  que  le  débit  de  1820  mètres  cubes  par  jour 
fut  immédiatement  doublé. 

Derbyahire.  —  De  uonibrcuses  faiUcs  dirigées  est-ouest  et 
remarquables  par  leur  parallélisme  coupent  le  calcaire  car- 
bonifère du  Derbyshire  et  leur  direction  commune  coïncide 
avec  le  plongement  moyen  des  couches. 

D'après  M.  Hopkins,  toutes  les  fortes  sources  de  cette  ré- 
gion sont  en  rapport  avec  les  grandes  failles;  l'auteur  ne 
connaît  pas  une  seule  exception  a  cette  règle  et,  partout  ou 
il  observait  une  source  puissante,  il  acquérait  la  certitude 
d'une  grande  faille.  L'eau  généralement  partait  de  la  surface 
supérieure  du  toadstone  qu'elle  ne  peut  traverser  et  l'étude 
attentive  des  conditions  dans  lesquelles  jaillissent  ces  sour- 
ces confirme  bien  l'interstratification  des  couches  de  toad- 
stone au  milieu  des  couches  calcaires. 

La  Bourboiile  (Pay-de-Ddme).    —    LcS    SOUrCCS    thcrmalcS  si 

*  Hull.  Géologie  des  cnviron$  de  Prescol, 


CONTACT  PAR  DES  ACCIDENTS  POSTÉRIEURS. 


121 


connues  de  la  Bourboule  (Puy-de-Dôme)  jaillissent  d'une 
grande  faille  qui  traverse  le  granité  et  plonge  de  60  à 
70  degrés  vers  le  sud-est  et  forme  les  rochers  contre  lesquels 
est  adossé  le  village  de  la  Bourboule  (fig.  66).  Elle  parait 
plus  ancienne  que  les  tufs  trachj  tiques  ou  rhyolithiques  du 


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Fi^.  66.  —  Coupe  montrant  la  situation  des  eaux  thermales  de  la  Bourboule  aux  abords  de  la 
faille  qui  fait  buler  contre  le  granité  massif  G  le  tuf  trachytique  dur  Ti.  le  tuf  lamelleux  très 
dur  Tf,  le  luf  plastique  Tp  et  le  granité  fragmentaire,  appelé  tuf  granitique  par  les  maîtres 
sondeurs.  —  Echelle  de  ^^.  —  D'après  M.  Bonnefoy. 

voisinage,  qui  sont  venus  recouvrir  le  granité  au  pied  de 
son  affleurement. 

Une  série  de  sondages  a  fait  reconnaître  que  Teau  ther- 
male, venant  de  la  profondeur  par  la  faille,  se  ramifie,  bien 
avant  d'arriver  à  Taffleurement  de  cette  faille,  dans  un  sys- 
tème des  nombreuses  cassures  du  granité  bréchiforme  qui 


122     ROLE  DU  CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  IMPERMÉABLES 


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COIITÂCT  PAR  DES  ACCIDENTS  POSTÉRIEURS.  123 

existe  au  toit  de  la  faille.  Les  maîtres  sondeurs  ont  désigné 
sous  le  nom  de  grés  ou  de  tuf  granitique  cette  brèche, 
dans  laquelle  les  eaux  coulent  en  abondance  et  se  répan- 
dent jusqu'à  une  assez  grande  distance  de  la  faille.  En 
cheminant  à  travers  cette  partie  extrêmement  fissurée  de 
la  roche  granitique  l'eau  atteint  la  base  d'une  couche  argi- 
leuse imperméable  dite  tuf  plastique.  Au-dessus  du  tuf 
plastique  se  présentent  d'autres  tufs  plus  ou  moins  per- 
méables, dans  lesquels  les  eaux  minérales  pénètrent,  soit 
en  montant  par  la  faille,  soit  en  traversant,  par  quelques 
fentes,  les  bancs  imperméables.  I)e  là,  quelques  nappes  dites 
secondaires  ou  superficielles,  d'ailleurs  très  discontinues. 

Autrefois,  l'eau  thermale  s'élevait  jusqu'au  jour  entre  le 
granité  et  le  tuf  granitique,  en  alimentant  plusieurs  sources 
situées  près  de  l'affleurement  de  la  faille.  Mais  ces  sources 
ont  disparu,  lorsque,  par  le  forage  de  puits,  on  a  réussi  à 
produire  un  appel  sur  les  nappes  souterraines,  dont  aucune 
n'est  jaillissante.  La  carte  (fig.  67),  a  été  exécutée  par  l'in- 
génieur des  mines  Bonnefoy,  dont  le  dévouement  au  devoir 
a  amené  la  fin  prématurée. 

Stelle  t   Sdafani,  Païenne,  Mjongj  et  Aleara  \    —    La   SOUrCC 

thermale  sulfureuse  des  bains  de  Sclafani  en  Sicile,  au  nord- 
ouest  du  groupe  des  Madonies,  dont  la  surface  est  de  2  kilo- 
mètres carrés,  sort  au  pied  septentrional  de  la  montagne 
de  Sclafani  (fig.  68).  Celle-ci  est  constituée  par  des  dolomies 
triasiques,  avec  des  calcaires  du  lias  et  de  l'éocène,  roches 
assez  perméables;  mais  elle  est  enveloppée  à  la  base  méri- 
dionale par  les  argiles  écailleuses  bigarrées  de  Féocène 
moyen,  et  au  nord,  par  les  argiles  du  cénomanien  tout  aussi 
imperméables.  De  ce  côté  nord^  il  y  a  de  plus  une  faille  qui 

^  D*après  une  obligeante  communication  de  M.  Giordano. 


134  ROLE  DU  CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉABLES  ET  IMPERMÉABLES. 

livre  passage  à  la  source,  dont  le  point  d'émission  est  ce- 

N  SCLKfANI  (auTte)  S 


Echelle 


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1 — ^J 1 1 1 

Fig.  68.  —  Coupe  montrant  comment  la  source  thermale  de  Sclafani  jaillit  d'une  faille,  (disant 
buter  des  roches  perméables  contre  des  roches  imperméables.  T*,  dolomiedu  trias;  L,  cal- 
caire du  lias  ;  G«.  argiles  écailleuses  de  l'étage  cénomanien  ;  Ce,  calcaire  de  l'étage  créUcc 
moyen  ;  E,  calcaire  nummulitique  (éocëne  inférieur)  ;  E.,  argiles  bigarrées  écailleuses  (éocènc 
moyen);  I,  terrain  imperméable;  NN,  niveau  de  la  nappe;  S,  source.  D'après  une  communi- 
cation manuscrite  de  M.  Giordano. 

pendant  déterminé  par  le  niveau  de  la  bande  d'argiles  im- 
perméables entourant  la  montagne. 
La  Sicile  présente  plusieurs  autres  exemples  de  formations 
0.  e; 

M^Cucci  oViflwJ 


Bocca  ài  Falco 


Echelle  des  Lanceurs 


kkil. 


A. 


Echelle  des  Hauteurs 

>■  ajpo  loooM 

r— »— I — ■     ■  I  '    I     I    I     I    t 


Fig.  69.  —  Coupe  montrant  le  gisement  des  sources  qui  alimentent  Palerrae.  I.  terrain  imper- 
méable; Ta.  dolomie  du  trias;  L,  calcaire  du  lias;  A«,  argile  écailleuse  juxtaposée  à  celle 
dolomic,  par  suite  d'une  faille;  S,  source  alimentée  par  la  nappe  d*eau  NN.  —D'après 
une  communication  manuscrite  de  M.  Giordano. 


perméables  entourées  d'une  bande  imperméable,  qui  don- 
nent aussi  naissance  à  des  sources. 


CONTACT  PAR  DES  ACCIDENTS  POSTÉRIEURS. 


125 


La  source  Gabriele,  à  Bocca-di-Falco,  qui  contribue  pour 
25  litres  par  seconde»  ou  2160  mètres  cubes  par  24  heures, 
à  ralimentalion  de  la  ville  et  de  la  plaine  de  Palerme,  qui 
tire  d'une  vingtaine  de  sources  un  débit  total  d'environ 
550  litres  par  seconde. 

L'eau  sort  de  la  formation  des  dolomies  spongieuses 
(fig.  69)  constituant  le  mont  Cuccio,  formation  entourée  jus- 
qu'à un  certain  niveau  par  une  bande  d'argiles  écailleuses 
eocènes  qui  sont  imperméables.  La  surface  totale  de  dolomie 
enfermée  dans  ladite  bande  est  d'environ  150  kilomètres 
carrés. 

11  est  un  autre  exemple  près  des  villes  de  Longiei  d'i/cara 
au  nord-est  de  la  Sicile,  près  de  Patte.  Le  vaste  plateau  qui 


^^ÏLM°P^^^ 


M*'  CTrasLo 


Echelle 


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kil. 


Fig.  70.  —  Coupe  des  montagncK  calcaires  (Je  lu  piuviiice  uc  Mv.!>^i..c,  iiiuu|uj..i  la  u.j»|'U$ilioii 
des  loorces  de  LoDgi  et  d'Alcara.  I,  phyllade  silurien  inférieur  ;  Ta,  dolomie  du  trias;  L,  cal- 
caire du  lias;  A*,  argiles  écailleuses  (éocéne  inférieur);  NN,  niveau  aquifére  donnant  nais- 
sance au  sources  S  d'Alcara  et  S'  de  Longi.  —  D'après  une  communication  manuscrite  de 
M.  Giordano. 


sépare  les  deux  villes  est  formé  par  un  grand  noyau  de  phyl- 
lades  en  schistes  anciens,  entouré  et  recouvert  de  dolomie 
triasique  et  de  calcaire  liasique  perméable. 

Ce  dernier  massif  est  recouvert  ou  entouré  d'argiles 
éocènes  imperméables,  du  côté  est  (Longi)  jusqu'à  800  mètres 
d'altitude,  et  du  côté  ouest  (Alcara)  jusqu'à  400  mètres  seule- 
ment. 

Deux  groupes  de  sources  paraissent  en  ces  deux  points; 


iS5    MU  DU  (MITACT  UE8  ROCHES  PCRtfABUS  R  inmiIÉA^ 

les  sources  plus  élevées  de  Test  débitant  seulement  40  litres 
environ  par  seconde,  tandis  que  celles  de  Fouest,  plus  basses, 
débitent  100  litres. 


Les  intercalations  de  filons  métallifères  et  de  roches  énip- 
tives  ou  cristallines,  pourvu  qu'elles  soient  imperméables, 
peuvent  produire  des  barrages,  du  même  genre  que  les 
rejets  déterminés  par  des  failles  et  qui  viennent  de  nous 
occuper. 

On  sait  que  le  quartz  et  d*autres  rocbes  s'élèvent  souvent 
aux  travers  de  terrains  variés,  sous  la  forme  de  puissants 
filons.  Au  point  de  vue  de  rbydrognosie  souterraine,  ce  sont 
des  barrages  naturels  qui  retiennent  les  eaux  d'infiltration. 
Leurs  salbandes  du  toit,  souvent  argileuses,  peuvent  donner 
lieu  à  des  nappes  aquifères  verticales,  de  même  que  les 
failles. 

Le  même  phénomène  se  produit  encore,  lorsque  la  roche 
intercalée,  au  lieu  de  constituer  un  mur  à  faces  parallèles,  se 
présente  en  pointements  irréguliers. 


Aipe  4«  wwtendKsrff.  —  Les  platcaux  de  TAlpe  du  Wur- 
temberg en  présentent  des  exemples,  dans  les  parties  où  les 
couches  jurassiques  sont  traversées  par  des  pointements  de 
basalte. 

D'après  M.  le  comte  de  Mandelslohe  *,  ces  masses  se  pré- 
sentent, soit  comme  des  cônes  isolés  sur  le  versant  nord- 
ouest  de  la  chaîne,  soit  comme  des  filons  qui  se  montrent 
au  jour  dans  les  vallées  transversales,  ou  qui  ont  percé  le 


>  Mémoire  de  la  Société  (thiHoire  naturelle  de  Strasbourg,  U  II,  p.  36  et  37, 
1835. 


CONTACT  PAR  DES  ACCIDENTS  POSTÉRIEURS.        i37 

plateau  même  et  s'y  étendent  sous  forme  de  bandes  étroites. 
Les  cônes  basaltiques  montrent  ordinairement  à  leur  pied 
l'oolithe  inférieure  et  le  lias»  en  couches  horizontales  et  nul- 
lement dérangées  ;  la  partie  supérieure  de  la  montagne  est 
seule  composée  de  basalte  et  de  tuf.  Les  conglomérats  basal- 
tiques sont  beaucoup  plus  répandus  que  le  basalte  lui-même, 
lequel  y  forme  quelquefois  des  filons. 

Le  plateau  de  TAlpe  est  généralement  privé  d'eau.  Il  est 
cependant  des  villages  qui  font  exception  à  cette  r^le  et  qui 
sont  pourvus  d'eaux  abondantes.  Presque  tous  doivent  cet 
avantage  aux  roches  basaltiques,  qui  provoquent  le  jaillisse- 
ment de  sources.  Sur  l'un  des  points  les  plus  élevés  del'Alpe, 
au  Sternenberg,  on  admet  que  les  filons  de  conglomérat 
basaltique  qui  traversent  les  masses  poreuses  du  coral-rag, 
s'opposent  à  l'écoulement  des  eaux  atmosphériques  et  les 
forcent  ainsi  à  reparaître  au  jour,  ou  du  moins  de  se  ras- 
sembler dans  des  puits  qui  ne  tarissent  jamais.  <c  Ce  phéno- 
mène se  reproduit  d'une  manière  si  constante  sur  toute 
rétendue  de  l'Alpe  que  bien  des  fois,  dit  M.  de  Mandelslohe, 
lorsqu'on  me  citait  une  source  qui  ne  tarissait  jamais,  j'en 
concluais,  sans  avoir  été  sur  les  lieux,  l'existence  du  terrain 
basaltique,  et  je  ne  me  suis  trompé  que  rarement.  »  Le  n^.m 
de  Wa$$er8tein  que  les  habitants  lui  ont  donné  est  caracté- 
ristique. 

La  raison  de  ce  fait  paraît  être  que  les  roches  voisines 
de  la  surface  sont  fissurées  et  absorbent  Teau,  qui  est  rete- 
nue par  les  masses  inférieures.  Cela  est  particulièrement 
vrai  quand  ces  roches  sont  montées  de  la  profondeur.  Lors- 
que ces  lieux  sont  dans  des  dépressions  comme  à  Zainingen, 
Wurlingen,  Wittlingen,  Sternenbrunnen,  il  en  résulte  des 
sources  qui  ne  tarissent  jamais.  Il  faut  ajouter  que  dans 
rintérieur  de  l'Alpe,  les  couches  calcaires  renferment  une 
grande  quantité  de  cavités  en  communication  les  unes  avec 


128    ROLE  DU  CONTACT  DES  ROCHES  PERMÉiBLES  ET  INPERIIÉÀBLES. 

les  autres  qui  servent  de  réservoir.  Elles  se  remplissent  dans 
les  années  humides,  lorsque  l'orifice  d'écoulement  inférieur 
est  trop  étroit  pour  permettre  l'écoulement  total'. 

iriwi4e.  —  Les  calcaires  carbonifères  de  l'Irlande  sont 
plus  ou  moins  perméables,  et  particulièrement  le  Feneslella 
limestone  que  l'eau  traverse  rapidement,  sans  revenir  à  la 
surface,  excepté  près  des  affleurements  des  nappes  basalti- 
ques. De  même  quelques  couches  de  schiste  qui  traversent 
la  masse  arrêtent  invariablement  l'eau  et  la  ramènent  à  la 
surface*. 


et   Terds    (LuidcNi),    Ho«tpcsat    (Ardéelie),    €4Me    d'BMcy 

(Hcwtiieet-HoMne).  —  Quaud  OU  arrive  à  Dax,  département 
des  Landes,  après  avoir  traversé  des  plaines  formées  par  des 
couches  tertiaires  horizontales  et  à  peine  accidentées,  il  y  a 
lieu  d'être  surpris  de  se  trouver  en  présence  d'une  sorte  de 
rivière  d'eau  chaude,  jaillissant  du  milieu  de  la  ville,  qui 
lui  doit  sans  doute  son  origine.  Cette  belle  source,  aujour- 
d'hui utilisée  de  nouveau,  parait  avoir  été  largement  mise  à 
profit  par  les  Romains.  L'explication  de  sa  présence  se  trouve 
dans  la  petite  colline  dite  Pouy-d'Euse  qui  avoisine  la  ville 
et  qui  est  formée  de  diorite  (ophite).  Peut-être  est-ce  un 
mécanisme  du  même  genre  qui  donne  naissance  à  la  source 
thermale  de  Tercis  (Landes)  située  près  de  l'ophite,  aux 
deux  sources  très  volumineuses  sortant  du  basalte  à  Monl- 
pezat  (Ardèche),  et  à  la  belle  source  située  au  sommet  ba- 
saltique de  la  côte  d'Essey  (Meurthe). 


*  Quenstedt.  Explication  de  la  carte  géologique  tTUrach^  1869. 

*  D*aprës  H.  HuU. 


CHAPITRE  IV 


ROLE    DES    LITHOCLASES    DE    DIVERS   ORDRES 


GÉNÉRALITÉS 

Quand  on  examine  attentivement  les  dispositions  indéfi- 
niment variées  par  lesquelles  les  lithoclases  déterminent  et 
dirigent  la  circulation  des  eaux  souterraines,  on  est  obligé 
de  reconnaître  qu'une  classification  rationnelle  de  ces  méca- 
nismes est  très  difficile,  sinon  impossible,  surtout  si  Ton 
tient  compte  de  l'impuissance  où  se  trouve  l'observateur  de 
suivre  ces  dispositions  jusqu'à  une  grande  profondeur.  Aussi 
s'est-on  borné  à  grouper  les  faits  caractéristiques  signalés 
dans  ce  chapitre,  suivant  les  terrains  et  étages  géologiques 
auxquels  ils  appartiennent.  Il  ne  faut  donc  pas  s'étonner  de 
trouver  ensemble  des  exemples  de  nature  assez  différente, 
qu'au  premier  abord  on  serait  tenté  de  disjoindre.  Ainsi,  à 
côté  de  réseaux  de  cassures  qui  coupent  certains  étages  des 
terrains  stratifiés  et  y  établissent  des  couches  aquifères  plus 
ou  moins  continues,  comme  on  le  voit  dans  la  craie,  les  cal- 
caires jurassiques  et  le  grès  bigarré,  il  en  est  qui  donnent 
naissance  à  des  sources  isolées  et  apportées  souvent  de  pro- 
fondeurs considérables  :  c'est  ce  qu'indique  leur  thermalilé; 

9 


idO  ROLE  DES  LITHOCLiSES  DE  DIVERS  ORDRES. 

par  exemple,  à  Plombières,  Bourbonne-les-Bains,  Wilbad, 
Garlsbad.  Quelquefois,  comme  à  Ems  et  Âix-la-Ghapelle,  les 
cassures  ont  été  ouvertes  sur  des  plis  très  prononcés. 

Les  considérations  générales  placées  à  la  suite  de  ce  tra- 
vail feront  mieux  ressortir  les  différences  auxquelles  est  sou- 
mis le  régime  des  eaux  souterraines. 


Lilhoclase$  et  particulièrement  diacla$e$. 

Uans  le  plus  grand  nombre  des  cas,  la  circulation  souter- 
raine des  eaux  se  lie  à  la  disposition  des  cassures  de  divers 
ordres  qui  leur  servent  de  canaux  à  travers  les  roches.  11 
convient  donc  avant  tout  de  se  faire  une  idée  nette  de  ces 
dernières,  ce  qui  oblige  à  entrer  dans  certains  détails. 

Considérées  dans  leur  ensemble  les  innombrables  cassures 
ou  lithoclases  qui  traversent  l'écorce  terrestre,  dans  toutes 
ses  parties,  peuvent  se  grouper  en  trois  grandes  classes, 
auxquelles  conviennent  les  noms  de  leptoclasesy  de  diaclam 
et  de  paracla$es. 

V  i^cvioéiMM.  —  Sous  le  nom  de  leptoclases',  on  coin-' 
prend  toutes  les  cassures  qui  sont  de  dimensions  faibles, 
dans  les  deux  sens  ou  au  moins  dans  un.  Elles  débitent 
l'écorce  terrestre  en  menus  fragments. 

Synclase$.  —  Parfois  elles  rappellent  une  régularité  géo- 
métrique et  donnent  lieu,  par  exemple,  aux  prismes  des  ba- 
saltes, des  trachytes,  des  porphyres,  etc.,  ainsi  qu'à  ceux  de 
certains  gypses  et  aux  polyèdres  des  argiles  et  des  limons 
desséchés.  Quelle  que  soit  la  hauteur  des  colonnades  basal- 
tiques et  autres,  le  nom  de  leptoclase  peut  leur  être  appli- 

*  De  >c:trof,  menu»  ténu;  el  xJixu,  briser,  diviser. 


GÉNÉRALITÉS.  131 

que,  parce  que  leur  grande  dimension  ne  s*élend  que  dans 
un  seul  sens.  Parfois  elles  sont  irrégulières. 

Dans  ces  diverses  circonstances,  les  cassures  sont  dues  à 
des  actions  intérieures  ou  moléculaires,  généralement  à  un 
retrait,  qui  a  pour  cause,  tantôt  le  refroidissement,  tantôt  la 
dessiccation. 

Le  nom  de  synclase*  rappelle  bien  cette  origine  par  retrait 
ou  contraction. 

Piàoclases.  —  Le  plus  souvent  les  leptoclases  sont  sans 
aucune  régularité  apparente.  • 

Elles  deviennent  particulièrement  fréquentes  à  proximité 
de  la  surface  du  sol  et  s'entre-croisent  en  tous  sens,  comme 
on  le  voit  dans  le  som-sol  qui  est  immédiatement  recouvert 
par  la  terre  végétale  et  cela,  dans  des  roches  de  toutes 
sortes,  calcaire,  grès,  quartzite,  schiste,  granité,  gneiss,  ba- 
salte, etc. 

Très  fréquemment,  elles  partagent  la  roche  en  fragments 
si  menus  qu'il  est  fort  difficile  d'y  obtenir  une  cassure 
fraîche- 
Cette  sorte  de  pulvérisation  ou  de  concassement  naturel 
des  roches,  qui  a  si  puissamment  favorisé  les  érosions  n'est 
pas  exclusive  aux  régions  superficielles. 

Les  alternatives  de  gelée  et  de  dégel,  en  faisant  éclater 
les  pierres,  ne  font  souvent  que  rendre  manifestes  des  lep- 
toclases qui  y  existaient  déjà  à  l'état  latent. 

D'innombrables  leptoclases  ressortent  non  moins  claire- 
ment dans  les  réseaux  de  petites  veines,  planes  ou  courbes, 
concrétées  à  l'intérieur  des  roches  ;  par  exemple  sous  forme 
de  calcite  dans  les  marbres  veinés,  dans  les  ophicalcs;  de 


'  De  9V9  qui  ne  veut  pas  seulement  dire  avec,  mais  qui  désigne  aussi  une  action 
complexe  et  simultanée,  teUe  que  la  contraction,  de  même  qu'eu  latin  la  proposition 
cum  danr  contrahere. 


idâ  ROLE  DES  LITHOGLiSES  DE  DIVERS  ORDRES. 

quartz,  dans  les  quartziles  ou  les  phyllades;  de  minerais 
métalliques»  au  voisinage  de  nombreux  gites  métallifères. 

Dans  des  roches  de  nature  variée,  les  leptoclases  s'accu- 
sent encore  par  des  surfaces  polies  et  striées  {Slicken$ide$, 
Quet$chflaeche)j  parfois  accompagnés  d'une  structure  fibreuse 
comparable  à  celle  du  bois.  La  craie  en  fournit  beaucoup 
d'exemples.  Ues  surfaces  polies  et  striées  toutes  semblables 
sont  aussi  bien  connues  dans  la  houille,  le  lignite,  les  cal- 
caires, les  grès,  les  argiles  (particulièrement  les  argile  sca- 
gliosede  l'Italie),  les  schistes,  les  minerais  de  fer,  la  serpen- 
tine, le  silicate  hydraté  de  nickel  et  de  magnésie,  désigné 
sous  le  nom  de  noumeïte;  dans  les  météorites  sporadosidères 
du  type  de  Chantonnay  et  les  syssidères  du  type  d'Atacama. 
Ces  surfaces  frottées  sont  des  effets  de  glissements  internes, 
que  l'expérience  imite  complètement. 

Le  craquelé  du  marbre  ruiniforme  de  Florence  accuse 
aussi  des  glissements,  ainsi  que  le  craquelé  cuboïde  de  la  mé- 
téorite holosidère  de  Sainte-Catherine. 

Les  leptoclases,  lors  des  frottements  et  des  rejets  dont  il 
vient  d'être  question,  et  dans  bien  d'autres  cas  beaucoup 
plus  ordinaires  où  ces  effets  ne  se  manifestent  pas,  résultent, 
comme  les  deux  autres  grandes  catégories  de  lithoclases, 
non  plus  d'actions  intérieures  comme  les  synclases,  mais 
d'efforts  mécaniques  extérieurs,  tassements  ou  autres,  qui 
ont  produit  des  pressions;  d'où  le  nom  de  pié$ocla9e^  peut 
leur  être  appliqué. 

La  division  en  parallélipipédes  alignés  parallèlement,  au 
milieu  de  divisions  irrégulières,  est  l'un  des  caractères 
auxquels  on  pourra  distinguer  les  piésoclases  des  synclases. 


■.  —  Parmi  les  cassures  qui  traversent  en  tous 

'  De  icicÇci),  presser  ou  comprimer  (au  futur  nitaw),  et  xXaw,  briser. 


GÉNÉRALITÉS. 


135 


sens  l'écorce  terrestre,  la  catégorie  la  plus  nombreuse,  dési- 
gnée sous  le  nom  de  diaclases,  est  la  moins  connue  dans  ses 
caractères  généraux.  Dans  les  traités  de  géologie,  si  elles  ne 
sont  pas  passées  sous  silence,  elles  sont  considérées  seule- 
ment dans  quelques  cas  tout  à  fait  particuliers  et  complète- 
ment méconnues  dans  leur  origine.  Cependant  elles  traver- 
sent les  terrains  et  les  roches  les  plus  diverses. 

C'est  surtout  dans  les  terrains  stratifiés  que  leurs  carac- 
tères ressortent  clairement,  à  cause  des  couches  diverses  à 
travers  lesquelles  elles  se  sont  propagées. 

Leurs  caractères,  souvent  d'une  régularité  géométrique,  se 
décèlent,  lorsqu'au  lieu  d'en  considérer  quelques-unes,  on  les 
suit  dans  leur  ensemble  et  sur  des  étendues  suffisantes.  Mais 


Fig.  69.  —  Plan  du  front  de  taille  d'une  carrière  du  calcaire  grossier  à  Arcueil. 


cette  régularité  n'existe  pas  toujours  et  fait  souvent  place  à  une 
irrégularité  apparente,  dont  on  verra  plus  loin  l'explication. 

Parmi  les  géologues  auxquels  on  est  redevable  de  notions 
exactes  sur  les  cassures  que  nous  groupons  sous  le  nom  de 
diaclases,  on  doit  citer  tout  particulièrement  :  Sedgwick 
(1821  et  1835),  de  la  Bêche  (1858),  John  Phillips  (1857  à 
1839),  Thurmann  (1857),  Ilarkness  (1858),  Haughton  (1858), 
Jukes(1862),  William  King  (1876). 

L'allure  des  diaclases  a  été  étudiée  dans  les  terrains  ter- 


154 


ROLE  DES  LITHOGLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 


tiaires,  aux  environs  de  Paris  (fig.  69  et  70)  et  de  Fontaine- 
bleau, dans  la  mollasse  suisse;  dans  le  terrain  crétacé,  sur 
les  falaises  de  la  Normandie,  aux  environs  du  Tréport,  de 


Fig.  70.  —  Vue  du  front  de  taille  d'une  carrière  de  calcaire  grossier  à  Arcueil. 

Dieppe  et  d'Etretat  (fig.  71),  dans  le  département  de  TAisnc, 
le  quadersandstein  de  la  Saxe  et  de  la  Bohême  et  celui  de  la 


Fig.  71.  —  Vue  des  falaises  d'Etretat  montrant  les  diar.lases  qui  les  coupent  sur  toute  leur 
hauteur  et  qui  sont  souvent  rectangulaires  entre  elles. 

Westphalie,  qui  se  rapporte  à  l'étage  du  gault  et  du  néoco- 
mien  (fig.  72  et  73),  —  dans  le  terrain  jurassique,  dans  la 
chaîne  du  Jura  et  de  toutes  parts  (fig.  74)  —  dans  le  trias  et 


GÉNÉRALITÉS. 


135 


surtout  dans  le  grès  des  Vosges,  où  elles  donnent  lieu  à  des 
rochers,  souvent  très  accidentés  et  très  pittoresques,  comme 
dans  le  pays  de  Daun  (Palatinat),  —  dans  le  terrain  houiller 
pour  lequel  la  régularité  des  diaclases  est  particulièrement 
frappante,  dans  le  pays  de  Galles,  — dans  le  calcaire  carbo- 
nifère, pour  des  localités  d'Irlande  que  M.  Harkness  a  ren- 
dues classiques,  —  dans  les  terrains  dévonien  et  silurien,  où 


Fig.  72.  —  Vue  d'une  partie  des  l'ocbcs  dites  Exiemêleine  près  Horn,  montrant  la  disposition 
des  diaclases  à  pou  près  rectangulaires  entre  elles  qui  y  coupent  des  courbes  de  grès  crétacé. 

les  exploitants  d'ardoises  les  ont  déterminées  avec  la  plus 
grande  exactitude*,  —  dans  le  gneiss-granite  des  Alpes,  par 
exemple  au  pied  du  Bietschhorn,  —  en  dehors  des  terrains 
stratifiés  dans  le  granité,  en  Cornwall  (Carglaze,  Mont  Saint- 
Michel),  aux  environs  de  Carlsbad  (Scharcher  Klippe),  etc. 
Dans  tous  les  terrains,  les  diaclases,  par  leurs  intersec- 


*  Géologie  expérimentale,  p.  534  et  335. 


io6 


ROLE  DES  LITHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 


lions  mutuelles,  délimitent  des  polyèdres,  tantôt  réguliers, 
tantôt  irréguliers. 

Très  souvent  les  diaclases  ont  reçu  des  incrustations  mi- 
nérales, pierreuses  ou  métalliques,  qui  par  leur  contraste 
avec  la  roche  elle-même,  les  font  parfaitement  ressortir. 
Comme  exemple  d'incrustations  métalliques  on  peut  citer 
les  diaclases  métallifères  du  Laurium  et  surtout  celle  du 


Fig.  73.  —  Vue  d'une  partie  des  roches  dites  Extertuteine  près  Horn,  montrant  la  disposition 
des  diaclases  à  peu  près  rectangulaires  entre  elles,  qui  y  coupent  des  couches  de  grès  crétacé 

Wisconsin  (États-Unis),  si  bien  décrites  par  M.  Whitney  et 
où  on  exploite  le  plomb;  elles  constituent  deux  systèmes  rec- 
tangulaires entre  eux. 

Diverses  études  ont  appris  que  les  diaclases  s'étendent, 
avec  des  formes  que  l'on  peut  considérer  comme  planes, 
très  souvent  sur  plus  de  100  mètres  dans  le  sens  horizontal. 

En  outre  elles  peuvent  conserver  la  même  orientation 
moyenne  sur  des  distances  de  plusieurs  dizaines  de  kilo- 
mètres et  au  delà. 


GÉNÉRALITÉS. 


157 


Cette  persislance  se  maintient  au  travers  de  roches  de 
nature  et  d'origine  différentes;  de  La  Bêche  a  par  exemple 
reconnu  que  les  diaclases,  qui  coupent  sur  de  grandes  éten- 
dues le  granité  du  Cornouailles,  ne  subissent  pas  de  dévia- 
tion notable  en  passant  dans  la  serpentine. 

D'après  John  Phillips  dans  tous  les  bassins  houillers  du 
sud  de  l'Angleterre,  la  direction  du  t  cleat  »  ou  «  face  »  est 


Fig.  7-i.  —  Vue  d'un  escarpement  avoisinant  Solutré  (Saône-et-Loire),  montrant  une  disposition 
très  fréquente  des  diaclases  dans  les  couches  calcaires. 

environ  N.O.-S.E.,  quels  que  soient  la  direction  et  le  pion- 
gement  des  couches. 

Dans  le  sens  vertical,  les  diaclases,  par  milliers,  coupent 
perpendiculairement  des  séries  de  couches  très  épaisses. 
C'est  ainsi  qu'on  les  voit  traverser  les  couches  crétacées  des 
falaises  de  Normandie,  sur  plus  de  cent  mètres  et,  sur  plu- 
sieurs centaines  de  mètres,  les  roches  de  maintes  localités 
des  Alpes,  par  exemple  dans  la  vallée  de  Zermatt,  notam- 
ment près  de  Stalden.  Des  diaclases  rectangulaires  entre 
elles  tranchent  le  grès  crétacé   des  Pyrénées  espagnoles, 


i38 


ROLE  DE8  LITHOGLASES  DE  DIVERS  ORDRES.  . 


dans  le  massif  calcaire  da  Mont-Perdu,  sur  plus  de  450  mè- 
tres de  hauteur,  comme  l'a  reconnu  H.  Schrader  sur  une 
longueur  de  1200  mètres,  dans  le  cirque  imposant  du  Cota- 


tuero,  contre-partie  de  celui  de  Gavarnie  (fig.  75).  De  même 
dans  le  Colorado,  d'épaisses  couches  de  grès  sont  découpées 
de  la  même  manière,  par  de  grandes  diaclases  que  représen- 
tent très  clairement  les  belles  photographies  de  M.  Whealer. 


GÉNÉRALITÉS.  139 

Elles  ont  une  tendance  à  se  grouper  parallèlement  entre 
elles,  en  systèmes,  au  nombre  de  deux  ou  de  plusieurs,  el 
parfois  rectangulaires  entre  eux,  comme  le  montrent  plu- 
sieurs des  figures  précédentes.  L'un  des  systèmes  est  souvent 
tout  à  fait  prédominant. 

Les  accidents  des  parois  ne  sont  pas  les  mêmes  dans  les 
deux  systèmes,  ainsi  que  Thurmann  Ta  remarqué  dans  le 
fura.         . .    ' 

Quant  à  ia  distance  mutuelle  des  diverses  diaclases  d'un 
même  système*,  elle  est  variable.  Aux  environs  de  Paris,  elle 
est  ordinalreraeiit  comprise  entre  1  à  5  mètres,  et  rarement 
elle  excède  40  à  45  mètres.  Ainsi  les  couches  horizontales 
sont  découpées  en  tranchés  verticales  qui,  par  leur  épais- 
seur et  leur  régularité,  sont  parfois  comparables  aux  couches 
elles-mêmes,  aii  point  de  pouvoir  être  confondues  avec  elles. 
Souvent  la  roche  paraît  ainsi  comme  laminée. 

Ceci  explique  les  passages  fréquents  de  la  structure  dé- 
terminée par  de' telles  diaclaseà  avec  le  feuilleté  propre- 
ment dit.  Toutefois  il  y  à  cette  différence  que.  dans  la  struc- 
ture feuilletée,  le  clivage  se  manifeste  à  des  distances  à 
peine  sensibles,  tandis  que  les  joints  restent  écartés  les  uns 
des  autres. 

Quant  a  l'oi^igine  des  diaclases,  elle  a  été  généralement 
assimilée  à  celle  des  formes  prismatiques  des  basaltes,  et 
par  conséquent,  attribuée  à  un  retrait. 

D'un  autre  côté,  leur  tégularîté  presque  géométrique,  si 
fréquente  dans  les  calcaires,  les  phyllades^  le  granité,  etc.,  a 
conduit  à  supposer  qu'eUe  résulte  d'une  force  cristalline,  et 
on  a  cherché  à  rapprocher  les  angles  des  fragments  naturels 
de  ceux  des  cristaux  de  calcite  et  de  feldspath  ^ 

Ces  analogies  ne  sont  pas  motivées,  quoique  la  nature  des 

>  llarkness.  1850, 


i40  ROLE  DES  LITUOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

roches  influe  sur  le  nombre  et  la  nature  des  diaclases  qui 
les  traversent. 

Lorsqu'une  observation  plus  atteutivc  eut  fait  reconnaître 
que  les  diaclases  se  poursuivent  sur  de  grandes  étendues, 
avec  une  direction  à  peu  près  constante,  et  cela,  même  au 
travers  de  roches  tout  à  fait  différentes  les  unes  des  autres, 
on  chercha  à  les  rattacher  à  des  actions  physiques  se  pro- 
duisant dans  Técorce  terrestre.  Pour  de  La  Bêche,  c'était  une 
action  polaire,  telle  que  celle  dont  on  faisait  alors  dériver  le 
feuilleté.  Pour  Thurmann,  qui  en  fit  une  étude  des  plus  ap- 
profondies, «  elles  ne  peuvent  être  attribuées  qu'au  retrait 
par  l'action  de  la  température  interne^  t  Pour  M.  William 
King%  c'est  une  action  polaire  résultant  du  magnétisme  ter- 
restre. 

Cependant,  l'intervention  des  actions  mécaniques  avait 
été  entrevue  par  John  Phillips;  à  la  suite  de  ses  études  clas- 
siques sur  le  Yorkshire. 

Cette  conclusion  ne  peut  plus  faire  de  doute,  surtout  de- 
puis qu'elle  s'appuie  sur  des  résultats  d'expériences. 

Ainsi  qu'on  vient  de  le  voir,  leurs  formes  et  leurs  allures, 
tout  aussi  bien  que  celles  des  failles,  expriment  des  rup* 
tures  dues  à  des  actions  externes. 

Il  n'est  pas  douteux  que  tous  ces  réseaux  de  diaclases,  à 
mailles  si  multiples  et  si  serrées,  ne  résultent  d'actions  mé- 
caniques qui  ont  agi  sur  les  couches  depuis  leur  consolida- 
tion complète.  Elles  sont  bien  de  la  famille  des  cassures  de 
grande  dimension,  désignées  sous  le  nom  de  failles  ou  de 
paraclases,  dont  il  va  être  question. 

C'est  ce  qui  a  conduit  à  essayer  de  les  reproduire  par 


^  Essai  d'orographie  jurassique.  Mémoire  de  rinstitut  national  génevoiê,  t.  IV,  p.  63. 
i857. 

*  Superindoced  divisional  structure  of  rocks  caUed  jointing  and  its  relations  to  slaly 
cleavage.  Transaetiont  of  the  royal  iriah  Academy,  t.  XXV.  1873. 


GÉNÉRiLlTÊS. 


141 


des  actions  mécaniques  très    simples  de  pression  ou  de 
torsion  telles  qu*il  a  dû  s'en  produire  fréquemment  dans  la 


nature  : 


La  ressemblance  des  réseaux  de  cassures  naturelles  avec 
les  réseaux  de  cassures  que  Texpérimentation  produit  est 


Fig.  76.  —  Disposition  d'une  lame  de  glace  destinée  à  subir  la  rupture  par  torsion.  —  GG,  plaque 
déglace;  EE,  étau  qui  maintient  l'extrémité  fixe;  TT,  tourne  à  gauche  dans  lequel  est 

maintenue  l'autre  extrémité  de  la  glace.  —  Échelle  de  7.  —  On  aperçoit  le  double  système 

6 

de  fissures  dont  la  glace  est  comme  hachée. 

manifeste.  Sans  revenir  sur  des  détails  qui  figurent  ailleurs*, 
je  rappellerai  seulement  deux  résultats,  Tun  obtenu  par 
torsion,  l'autre  par  pression. 

Une  très  faible  torsion  exercée  sur  une  lame  de  glace  y 
détermine  un  double  système  de  fissures,  présentant  nette- 
ment le  caractère  de  parallélisme,  caractéristique  des  cassures 


^  Géologie  expérimentale,  p.  289  et  suivantes. 


us 


ROLE  DES  LITHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 


naturelles,  et  de  plus,  le  groupement  suivant  deux  directions 
à  peu  près  orthogonales,  système  de  fissures  comparable  à 
ceux  qui  traversent  beaucoup  de  roches  (fig.  76). 
D'un  autre  côté,  la  pression  exercée,  à  l'aide  de  la  presse 


Fig.  77.  -~  Prisme  de  cire  à  mouler»  soumis  à  raclion  de  la  presse  hydrauUquCf  suivant  le  seiu 
Tertical.  BB,  plaques  de  pression  en  fer,  de  même  section  que  le  prisme  ;  FF,  Tentes  princi- 
pales avec  rejet  ;  ff,  fentes  conjuguées  avec  la  précédente;  RR,  réseau  de  Assures  fines  à  peu 
près  rectangulaires  entre  elles,  développées  sur  les  portions  bombées  des  quatre  Cices  du 

prisme.  —  Échelle  de  r* 

6 

hydraulique,  sur  des  prismes  de  mastic,  à  la  fois  cassants  et 
flexibles,  y  a  fait  naître  aussi,  outre  des  fentes  principales, 
une  très  nombreuse  série  de  fissures  rectilignes  et  parallèles 
qui  se  groupent  suivant  deux  directions  parallèles  aux  fentes 


GËNËRAUTÉS.  145 

principales  et  à  peu  près  rectangulaires  entre  elles  (fig.  77). 
Dans  les  expériences»  la  régularité  géométrique  ne  peut 
être  obtenue  qu*au  moyen  de  précautions  particulières*. 
  plus  forte  raison  dans  des  masses  hétérogènes»  comme 
celles  de  la  nature,  la  tendance  à  la  régularité  a-t-ellepu 
être  contrariée,  surtout  lorsque  ces  masses  étaient  soumises 
à  des  efforts  aussi  irréguliers  que  ceux  qui  ont  ployé  les  cou- 
ches. Tout  exceptionnelle  qu'elle  soit  dans  l'écorce  terrestre, 
la  régularité  mathématique  n'y  a  pas  moins  la  signification 
très  claire  que  nous  venons  de  lui  assigner. 

S""  pwrMkMM.  —  Les  paraclases*  ou  failles  {faulu^  en 
anglais;  tprungCy  en  allemand;  etc.),  dont  les  formes  se 
rapprochent  beaucoup  de  celles  des  diaclases»  mais  sont 
plus  souvent  courbes  ou  infléchies»  s'en  distinguent  par 
des  dimensions  horizontales  généralement  beaucoup  plus 
grandes,  dépassant  souvent  mille  mètres»  et  surtout»  par 
la  grandeur  du  rejet»  indéfini  en  profondeur»  qui  les  ac- 
compagne. 

Les  failles  ont  fixé  tout  naturellement  l'attention  des 
mineurs  depuis  que  Werner»  à  la  fin  du  siècle  dernier»  a 
démontré  que  les  filons  métalliques  doivent  naissance  à  leur 
remplissage.  Dans  de  nombreux  districts  de  filons»  elles  ont 
été  étudiées  dans  leurs  moindres  détails»  et  elles  ont  été 
figurées  d'une  manière  très  instructive,  tant  dans  leur  pro- 
jection horizontale  qu'en  coupes  verticales.  En  outre,  dans 
les  mines  de  houille,  elles  arrêtent  à  chaque  instant  le  champ 

*  Le  soi  de  Venise  est  sajet  à  des  tassements  et,  par  suite,  à  des  ondulations,  A  des 
courbures  de  petit  rayon  que  l'on  reconnaît  de  toutes  parts  dans  le  pavé  de  la  basilique 
de  Saint-Marc,  ainsi  que  dans  celui  de  la  basilique  de  Murano.  Par  suite  de  ces  mou- 
vements, les  plaques  de  marbre  ont  subi  des  cassures  nombreuses,  mais  irréguliëres  et 
ne  ressemblant  pas  aux  réseaux  parallèles  qu'une  torsion  proprement  dite  fait  naître. 

*  La  proposition  iccpa  qui  exprime  ordinairement  obliquité,  latéralité,  irrégularité, 
s'applique  bien  à  une  Assure  accompagnée  de  l'abaissement  de  l'une  des  deux  surfaces, 
comme  celui  qui  résulterait  d'un  glissement  mutuel. 


144  ROLE  DES  LITHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

d'exploitation,  à  cause  du  déplacement  relatif  des  couches, 
qui  s'est  produit  le  long  de  leurs  parois;  aussi,  dans  un 
grand  nombre  de  bassins  houillers,  leurs  caractères  ont-ils 
été  étudiés  géoméiriquement  de  la  manière  la  plus  précise, 
et  il  n'en  est  guère  qui  n'ait  fourni  à  cet  égard  des  rensei- 
gnements caractéristiques.  Ici,  comme  dans  d'autres  cas,  la 
pratique  a  fourni  des  données  précieuses  à  la  théorie. 

En  dehors  des  exploitations  de  mines,  les  failles  ont  été 
aussi  fort  étudiées;  car  elles  jouent  un  rôle  de  premier  ordre 
dans  l'écorce  terrestre,  qu'elles  divisent  en  innombrables 
compartiments,  en  sortes  de  voussoirs;  elles  forment  comme 
des  linéaments,  auxquels  se  coordonnent  les  traits  du  relief 
terrestre. 

Dans  leurs  traces  horizontales,  considérées  à  des  niveaux 
différents,  de  même  qu'à  leurs  affleurements,  les  failles 
présentent  des  configurations  semblables  à  celles  qui  résul- 
tent des  expériences  précitées. 

Gomme  exemples,  je  rappellerai  le  massif  de  la  Côte-d'Or, 
dans  lequel  les  failles  ont  été  relevées  avec  beaucoup  de  soin, 
tant  en  plan  qu'en  coupes  verticales;  celles  de  la  Haute- 
Marne;  celles  qui  sont  figurées  sur  diverses  feuilles  de  la 
carte  géologique  d'Angleterre,  etc. 

Observations. 

A  chaque  pas,  l'exploitation  montre  au  mineur  comment 
les  filons  métallifères  se  ramifient  en  veinules,  quelquefois 
très  petites  et  comparables  au  chevelu  d'une  racine.  On  voit 
ainsi  comment  les  plus  petites  cassures  ou  leptoclases  peu- 
vent se  rattacher,  comme  des  diminutifs,  aux  plus  grandes  : 
aux  paraclases  aussi  bien  qu'aux  diaclases. 

Par  conséquent  beaucoup  de  piésoclases  ont  la  même 
origine  que  les  diaclases  et  les  paraclases  et  se  sont  souvent 


GËNËRALITÊS.  145 

produites  en  même  temps  que  ces  dernières.  C'est  ce  qiie 
témoignent  pour  beaucoup  de  piésoclases  des  surfaces  polies 
el  striées,  ainsi  que  des  rejets  plus  ou  moins  sensibles. 

De  même,  de  vrais  rejets  sont  notés  à  chaque  pas  le  long 
des  diaclases,  sur  les  parois  desquelles  on  observe  également 
dessurfaces  frottées  :  exemple  le  souterrain  du  canal  d*Arsch- 
willer*. 

Néanmoins,  de  même  que  dans  beaucoup  d'autres  cas,  où 
il  eiiste  des  passages,  il  est  nécessaire  d'établir  une  démar- 
cation. Elle  est  fondée  ici  sur  des  différences  de  caractères 
géométriques  et  de  dimensions. 

Il  importe  toutefois  de  remarquer,  en  présence  de  cette 
liaison  entre  des  cassures  si  différentes  par  leur  dimension, 
que  les  synclases  constituent  un  ensemble  nettement  déli- 
mité, et  il  convient  d'autant  plus  de  le  faire  qu'à  première 
vue,  à  cause  de  certaine  ressemblance  dans  les  caractères 
géométriques,  on  a  généralement  rapproché  les  systèmes  de 
cassures  qui  déterminent  des  prismes  de  celles  qui  détermi- 
nent des  parallélipipèdes  ou  des  rhomboïdes. 

Exemple  du  râle  des  lithoclases  relativement  au  régims 
des  eaux  souterraines. 

Les  lithoclases  de  divers  ordres  ont  une  part  évidente 
dans  la  circulation  des  eaux  souterraines.  On  l'a  déjà  vu  à 
propos  de  la  perméabilité  en  grand. 

Par  exemple,  d'après  les  études  de  Belgrand,  la  vallée  de  la 
Vanne  est  creusée'  tout  entière  dans  la  craie  fissurée;  les 
sources  qui  alimentent  cette  rivière  et  qui  jaillissent  au-des- 
sous du  village  de  Fontvannesoùest  la  source  de  la  Vanne,  ont 


*  Géologie  expérimeniale,^.  532. 

*  Lu  Eaux  nouvelles,  p.  140  et  suivanles. 

10 


146  ROLE  DES  LITHOGUSES  DE  DIVERS  ORDRES. 

cela  de  particulier  qu'elles  ne  sont  pas  soutenues,  à  leur 
point  d'émergence,  par  un  terrain  imperméable.  Les  eaux 
pluviales  descendent  donc  bien  au-dessous  du  thalweg  delà 
vallée,  dans  les  fissures  de  la  craie,  soit  jusqu'aux  argiles 
sableuses  imperméables  du  terrain  crétacé  inférieur,  soit 
jusqu'à  une  masse  de  craie  blanche  compacte  dépourvue  de 
fissures,  ou  dont  les  fissures  sont  trop  étroites  pour  conte- 
nir une  grande  quantité  d'eau.  Si  le  sol  était  horizontal, 
comme  l'indique  la  figure  78,  les  eaux  pluviales,  après  avoir 
saturé  la  roche,  remonteraient  nécessairement  jusqu'à  la 
surface  du  sol,  qui  deviendrait  marécageuse;  tels  sont  les 


Fig.  78.  —  Disposition  de  la  nappe  d'eau  NN  dans  des  couches  horixontales  de  craie  fissurée  CG 
supportées  par  une  assise  argileuse  AA  (d'après  Belgrand). 

marais  de  Saint-Gond,  qui  occupent  une  vaste  plaine  de  5  à 
4000  hectares  dans  la  craie  blanche  du  Petit-Morin. 

Quand,  au  contraire,  la  surface  du  sol  est  découpée  par 
de  nombreuses  vallées,  comme  c'est  le  cas  dans  le  bassin  de 
la  Yaïine  et  de  la  plupart  des  petites  rivières  de  la  Cham- 
pagne, la  nappe  d'eau,  produite  par  l'absorption  des  eaux 
pluviales,  ne  peut  remonter  sur  les  plateaux  jusqu'à  la  sur- 
face du  sol,  son  trop-plein  se  dirigeant  à  travers  la  masse 
de  la  craie,  et  avec  une  très  forte  pente,  vers  la  vallée  la 
plus  profonde  qui  forme  appel,  absolument  comme  un  tuyau 
de  drainage  (fig.  79).  Il  en  est  de  même  dans  les  calcaires 
oolithiques  de  la  Bourgogne,  non  moins  fissurés. 

Le  fond  de  la  vallée  recevant  l'eau  par  les  fissures  peut 
être  submergé  d'une  manière  permanente  et  transformé 


GÉNÉRALITËS. 


147 


en  marais  tourbeux  qui  sont  assez  fréquents  et  assez  étendus 
(2173  hectares)  pour  avoir  contribué  aux  difficultés  de  la 
dérivation  de  la  Yanne. 

La  nappe  d'eau  souterraine  se  relève  donc  dans  le  sol  per- 
méable de  chaque  côté  du  fond  de  la  vallée  principale.  Si 


Fig.  79.  —  Disposition  de  la  nappe  d'eau  NN,  renfermée  dans  la  craie  fissurée  GC,  au  voisinage 
de  vallées  dans  lesquelles  elle  se  déverse  sous  forme  de  sources  SS.  AA,  couche  imperméable 
qui  soutient  la  nappe  (d'après  Belgrand). 

Taffleurement  de  la  couche  imperméable  qui  la  supporte  se 
fait  au-dessus  du  fond  d'une  vallée,  il  y  produit  une  source 
(fig.  80). 
Les  sources  qui  portent  en  Champagne  le  nom  de  Btme 


Fig.  SO.  —  Disposition  de  la  nappe  d'eau  NN,  renfermée  dans  la  craie  fissurée  CC,  dans  le  cas 
où  la  couche  imperméable  AA  qui  la  soutient  arOcure  à  flanc  de  coteau.  S,  source  (d'après 
Belgrand). 


abîme),  font  bien  connaître  les  allures  des  eaux  phréatiques 
de  la  craie;  ainsi  le  Bimé,  qui  formé  l'origine  du  ruisseau  de 
Cérilly  (fig.  81),  source  considérable  aujourd'hui  dérivée  à 
Paris,  est  à  4500  mètres  à  vol  d'oiseau  du  thalweg  de  la  val- 
lée de  la  Vanne  à  Armentières,  et  à  26  mètres  au-dessus 


148 


ROLE  DES  LITHOGLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 


de  ce  thalweg.  II  faut  donc  une  pente  de  5", 78  par  kilomètre 
pour  que  la  nappe  d'eau  qui  alimente  le  Bîme  s'écoule  jus- 
qu'à la  Yanne  par  les  fissures  de  la  craie;  or  dans  un  aque- 


duc de  section  convenable,  cet  écoulement  se  ferait  avec  iiue 
pente  de  0',10  par  kilomètre.  La  belle  source  formant  la 
tête  de  la  partie  pérenne  du  quatrième  affluent  de  la  Vanne 
jaillit,  comme  l'indique  son  nom,  au  fond  d'un  abîme  ou 


GËNÉRALITËS.  140 

gouffre.  Autrefois  elle  remplissait  tout  le  gouffre  qui  for- 
mait le  bief  du  moulin  de  Cérilly,  et,  pour  la  couvrir  plus 
facilement  d'une  voûte,  Belgrand  a  fait  abaisser  le  plan 
d'eau,  de  sorte  qu'il  ne  reste  plus  qu'un  mètre  d'eau  envi- 
ron, tandis  qu'avant  les  travaux  de  captation,  la  profondeur 
était  de  5^,06.  L'eau  était  si  limpide  qu'on  aurait  vu  une 
épingle  au  fond  du  gouffre;  cependant,  les  gens  du  pays 
prétendaient  qu'on  n'avait  jamais  pu  en  trouver  le  fond. 

Ces  pentes  font  comprendre  aussi  l'existence  des  sources 
abondantes  de  Saiht-Mards  en  Othe,  du  château  de  Villemoi- 
ron,  et  de  Vareilles,  dans  les  vallées  secondaires  de  la  Nosle 
et  de  Yar^illes. 

Quoique  ces  sources  soient  à  une  hauteur  notable  au- 
dessus  du  thalweg  de  la  vallée  de  la  Vanne  et  qu'elles  soient 
séparées  de  ce  thalweg  par  des  massifs  de  craie  très  per- 
méable, elles  restent  très  fortes  dans  les  étés  les  plus  secs. 

Ce  qui  précède  explique  le  petit  nombre  des  rivières  et  de 
leurs  ramifications,  dans  les  terrains  perméables. 

A  600  mètres  des  sources  de  Saint-Philibert  et  de  Saiut- 
Harcouf  jaillissent  deux  belles  sources  dont  l'une,  qui  sort 
du  fond  d'une  grande  pièce  d'eau  admirablement  limpide, 
est  qualifiée  de  miroir  (fig.  82). 

Ces  sources  sont,  après  celles  d'Armentières,  les  plus 
abondantes  de  celles  qui  sont  conduites  à  Paris;  toutefois 
elles  fléchissent  beaucoup  en  temps  de  sécheresse. 

Lés  travaux  de  captation,  entrepris  à  partir  de  1868,  ont 
augmenté  le  débit  de  toutes  les  sources  en  abaissant  leur 
niveau. 

En  outre,  comme  l'a  fait  ressortir  Belgrand,  l'altitude 
exerce  une  influence  sur  leur  régime.  Ainsi  en  considérant 
seulement  les  grandes  sources,  Armentières, Saint-Philibert, 
le  Miroir  de  Theil  et  Noé,  la  première,  située  à  23  mètres 
environ  au-dessus  des  autres,  a  varié  du  printemps  à  Tau- 


150 


ROLE  DES  LITHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 


tomne,  pendant  les  années  humides  1866  et  1867,  dans  les 

^   ^   666      ^    ^  907      ^  ^^ 
rapports  de  g^^  =  ^  et  ^  =  2,77, 


Les  rapports  des  débits  de  la  plus  variable  des  trois  autres 
sources,  le  Miroir  de  Theil,  sont  notablement  plus  petits;  ils 


GÉNÉRAUTÊS. 


151 


sont,  pour  ces  mêmes  années,  j^  =  1,40  et  jjt  =  1,46. 

Le  débit  des  sources  de  la  Vanne  est  observé  chaque  jour, 
à  cause  de  l'intérêt  qu'il  présente  pour  ralimenlation  de 
Paris,  6ù  elles  sont  amenées  après  un  parcours  de  62  kilo- 
mètres. 

Cest  ainsi  qu'on  a  constaté  son  accroissement  régulier  de 
novembre  1880  à  mars  1881,  avec  un  maximum  de  1783 
litres  survenu  en  mars;  elksontdécru  ensuite,  avec  la  saison 
chaude,  de  façon  à  donner  1117  litres  en  novembre  1881, 
chiffre  supérieur  au  minimum  des  dix  années  antérieures. 

Elles  ont  continué  à  décroître  en  décembre,  à  cause  de 
la  sécheresse  anormale  de  cette  période  et  n'ont  gagné 
presque  rien  jusqu'à  la  fin  de  l'hiver.  Elles  se  sont  relevées 
un  peu  au  début  de  1881-1882,  mais  se  sont  mises  à  bais- 
ser à  partir  du  mois  de  juillet  pour  atteindre  en  août  leur 
débit  minimum,  945  litres,  inférieur  à  celui  des  années 
précédentes*. 

Pour  la  source  de  Cerilly  en  particulier,  M.  Lemoine  a 
comparé  son  débit  de  1882  à  ceux  des  années  antérieures  de 
sécheresse;  voici  le  résultat  de  cette  comparaison  : 


Mars  .  .  . 

IMO 

175 

1*11- 

9 

503 

in* 

m* 

m* 
256 

!•?• 

IMO 

IMl 

MM 

126 

173 

311 

240 

269 

155 

Mai.  .  .  . 

426 

188 

301 

114 

127 

300 

281 

209 

271 

145 

Juillet  .  . 

129 

193 

259 

105 

105 

213 

259 

182 

213 

149 

Octobre.  . 

101 

93 

155 

72 

97 

132 

237 

140 

143 

95 

Les  diaclases  dont  les  dimensions  dépassent  500  mètres, 


*  Ponts  et  chaussées,  service  hydrographique  du  bassin  de  la  Seine  organisé  par  Bol- 
grand  :  Késumides  obtervaiions  petidant  Cannée  1881. 


153  ROLE  DES  LITHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

servent  très  souvent  de  canaux  de  descente  et  de  remonte. 
À  plus  forte  raison  cela  est-il  vrai  pour  les  paraclases,  qui 
non  seulement  par  leurs  rejets  peuvent  juxtaposer  des  ter- 
rains de  perméabilité  différente,  comme  il  a  été  dit  dans 
le  chapitre  précédent,  mais  aussi  ouvrir  aux  eaux  un  pas- 
sage plus  ou  moins  facile.  Quand,  par  exemple,  des  cours 
d*eau  souterrains,  cheminant  à  travers  des  cavernes,  vien- 
nent buter  contre  une  issue  facile,  ils  sont  dérivés  et  peu- 
vent parvenir  ainsi  au  jour,  sous  la  forme  de  sources  très 
volumineuses. 

Les  lithoclases  peuvent  aussi  déterminer  un  passage  d*un 
niveau  aquifère  à  un  niveau  sous-jacent.  Par  exemple,  dans 
le  Jura,  l'horizon  constitué  par  les  marnes  liasiques  est  ali- 
menté, non  seulement  par  le  massif  calcaire  qui  les  sur- 
monte, mais  aussi  par  les  nappes  aquifères  supérieures ^ 


Percements  artificiels  des  roches  :  forages  artésiens. 

À  défaut  de  cassures  naturelles,  la  main  de  l'homme  peut, 
à  l'aide  de  forages,  ouvrir  une  issue  aux  nappes  souter- 
raines et  les  faire  monter  jusqu'à  la  surface  et  souvent 
même  jaillir  au-dessus  du  niveau  du  sol. 

L'idée  de  tels  travaux  remonte  à  une  antiquité  reculée  : 
les  Égyptiens  y  ont  eu  recours,  il  y.a  plus  de  quarante  siècles, 
et  en  France,  dès  1126,  on  les  pratiquait  à  Aire  en  Artois, 
d'où  le  nom  d'artésien  qui  leur  est  habituellement  donné- 
Dans  certains  cas,  le  même  procédé  est  mis  en  usage  pour 
augmenter  le  volume  des  sources,  particulièrement  lorsqu'il 
s'agit  d'eaux  rendues  précieuses  par  leur  composition  ou  par 
leur  température. 

*  Yezian.  Étude$  géologique*  dan*  le  Jura,  t.  II,  p.  54. 


GËfiÉRALlTËS. 


153 


À  part  leur  utilité  pratique,  les  puits  forés  apportent 
des  notions  précises  et  en  quelque  sorte  expérimentales  » 
sur  le  régime  des  nappes  d'eau  souterraines. 

On  avait  été  conduit  à  assimiler  le  phénomène  qui  nous 
occupe  au  mécanisme  des  vases  communicants.  Il  est  plus 
exact  de  le  rapprocher  des  conditions  réalisées  dans  la 
figure  ci-jointe  ^ 

Représentons,  dans  un  premier  aperçu,  la  nappe  souter- 
raine par  le  tuyau  droit  A'O  (fig.  83),  à  travers  lequel  s'é- 
coule  uniformément  Teau  d'un  réservoir.  Si  nous  comparons 


Fig.  83.  —  Appareil  servant  i  rendre  compte  des  hauteurs  diverses  auxquelles  parvient  l'eau 
d'usé  nappe  artésienne,  d'après  les  dislances  respectives  au  niveau  du  réservoir  d'alimenta* 
lion  et  de  Forifice  d'écoulement. 


les  pressions  qui  ont  lieu  aux  points  A',B',C'  à  l'intérieur  du 
tuyau,  nous  reconnaîtrons  qu'elles  varient  proportionnelle- 
ment aux  distances  A'B',B'C'  comprises  entre  ces  points.  Ima- 
ginons pour  cela  des  sections  transversales  faites  dans  le  li- 
quide par  les  points  A',B',C'.  Les  tranches  liquides  A'B',B'C' 
ont  des  poids  proportionnels  à  leurs  longueurs;  les  compo- 
santes de  ces  poids,  dans  le  sens  de  l'axe  du  tuyau,  sont  aussi 
proportionnelles  à  leurs  longueurs,  puisque  le  tuyau  est 


*  Ddannay.  Court  élémentaire  de  mécanique,  p.  436,  1851. 

L'eiplicalion  des  poits  jaillissants  a  été  domiée,  en  1691,  par  Bernardin!  Ramazxini. 


i54  ROLE  DES  LITHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

droit,  et  qu'en  conséquence  son  inclinaison  est  partout  la 
même.  D'un  autre  côté,  les  résistances  qu'éprouvent  ses  di- 
verses tranches  dans  leur  mouvement  sont  également  pro- 
portionnelles aux  longueurs  des  portions  des  tuyaux  contre 
lesquelles  elles  frottent.  Donc,  d'après  la  condition  de  l'équi- 
libre entre  les  forces  qui  agissent  sur  chacune  de  ces  tran- 
ches, les  différences  des  pressions  qui  agissent  à  leurs  extré- 
mités doivent  être  proportionnelles  aux  longueurs  des 
tranches;  les  différences  des  pressions  eu  A'  et  en  B',  en  B* 
et  en  G',  doivent  donc  être  dans  le  même  rapport  que  les 
distances  A'B',B'C'.  Si  les  distances  sont  égales  entre  elles, 
la  pression  variera  autant  de  k'  en  B'  que  de  B'  en  C. 

Pour  mesurer  les  pressions  qui  ont  lieu  aux  divers  points 
A',B',C',  on  peut  y  implanter  des  tubes  de  verre  qui  s'élèvent 
verticalement,  comme  le  montre  la  figure.  L'excès  de  la 
pression  en  un  quelconque  de  ces  points,  sur  la  pression 
atmosphérique,  sera  mesuré  par  la  hauteur  à  laquelle  l'eau 
s'élèvera  dans  le  tube  de  verre  correspondant.  Il  est  aisé  de 
conclure  de  ce  qui  précède  que  les  extrémités  A,B,G  des 
colonnes  d'eau  que  l'on  obtiendra  ainsi  seront  situées  sur 
une  ligne  droite.  De  plus  cette  ligne  droite,  prolongée  suf- 
fisamment, devra  passer  par  l'extrémité  du  tuyau  0,  et  par 
le  point  N,  situé  sur  la  surface  libre  de  l'eau  du  réservoir, 
verticalement  au-dessus  de  l'origine  du  tuyau. 

C'est  ce  que  l'expérience  confirme  complètement. 

Si  l'on  suppose  maintenant  que  l'ensemble  des  couches  ait 
la  disposition,  très  fréquemment  observée,  d'une  sorte  de 
bassin  ou  de  fond  de  bateau  (fig.  84)  S  les  affleurements  des 
diverses  couches  viendront  se  relever  et  dessiner  à  la  surface 
du  sol  une  série  de  courbes  concentriques.  Les  couches  per- 
méables auront  laissé  s'infiltrer  les  eaux  coulant  à  la  surface 

*  Nous  ne  pouvons  mieui  faire  que  d'emprunter  textuellement  les  détails  qui  suivent 
i  Texcellent  Court  dexploitalion  des  minet,  de  N.  Gallon,  1. 1,  p.  93. 


GÉNÉRALITÉS. 


155 


du  sol,  d'autant  plus  facilement  qu'en  raison  même  de  leur 
perméabilité,  elles  ont  été  souvent  les  plus  faciles  à  désagré- 
ger,  et  que,  par  suite,  leurs  affleurements  sont  accusés  par 
des  dépressions  où  les  eaux  du  jour  tendent  à  se  rassem-* 
bler.  Ces  couches  seront  donc  entièrement  saturées  d*eau. 
Si  maintenant,  ce  qui  est  le  cas  général,  les  divers  points 
d'afOeurement  ne  sont  pas  au  même  niveau,  l'eau  s'infiltre 
par  les  points  les  plus  élevés,  tels  que  A,  et  elle  sort  par  les 
points  les  plus  bas,  tels  que  B,  sous  la  forme  de  sources  jail- 
lissant au  jour,  ou  sous  le  lit  des  fleuves  ou  sous  celui  de  la 
mer.  Les  eaux  dont  est  imprégnée  la  couche  aquifère  ne 
sont  donc  pas  stagnantes;   elles  forment,  au  contraire. 


Fig.  84.  —  Coupo  d'un  groupe  de  couches  disposées  en  forme  de  bassins  parmi  lesquelles  il  en 
est  une  ÂB  perméable  comprise  entre  deux  couches  argileuses.  UN,  niveau  auquel  l'eau 
s'élève  dans  deux  frages,  exécutés  à  des  altitudes  différentes  (d'après  M.  Callon). 


des  courants  souterrains,  dont  la  direction  et  la  vitesse  en 
chaque  point  dépendent  de  sa  position,  en  plan  et  en  élé« 
ration,  par  rapport  aux  affleurements,  ainsi  que  de  la  per* 
ffléabilité  plus  ou  moins  grande  de  la  couche  aux  environs 
du  point  considéré. 

Si  l'on  isolait  par  la  pensée  une  petite  masse  d'eau  depuis 
son  entrée  dans  la  nappe  aquifère  jusqu'à  sa  sortie,  l'enve* 
loppe  de  ses  positions  successives  serait  assimilable  à  un 
tuyau  de  conduite,  dans  lequel  on  devrait  regarder  la  sec- 
tion comme  irréguliére  et  brusquement  variable  d'un  point 
à  un  autre,  et  le  périmètre  de  la  section  comme  très  grand 
relativement  à  cette  section;  à  un  tuyau  de  conduite,  en  un 
moty  dans  lequel,  pour  une  vitesse  donnée  de  l'eau,  il  ce 


156  ROLE  DES  LITUOCLÂSES  DE  DIVERS  ORDRES. 

ferait  des  pertes  de  charge  par  mètre  courant  beaucoup  plus 
grandes  que  dans  un  tuyau  ordinaire.  Mais  cela  n'empêche- 
rait pas  Técoulement  de  s'y  faire  suivant  des  lois  semblables, 
qui  ne  différeraient  que  par  la  valeur  des  coefficients  nu- 
mériques*. Supposons  donc  qu'en  un  point  donné  de  ce 
courant  souterrain  on  eut  percé  un  trou  et  qu'on  y  implan- 
tât» comme  dans  le  cas  de  la  figure  85,  un  tuyau  suffisamment 
prolongé  vers  le  haut,  on  aurait  une  sorte  de  piézomètre, 
dans  lequel  l'eau  se  tiendrait  en  dessous  du  point  d'infiltra- 
tion, à  une  distance  verticale  qui  servirait  de  mesure  à  la 
hauteur  totale  employée  pour  donner  à  l'eau  sa  vitesse  au 
point  considéré,  et,  en  outre,  pour  surmonter  toutes  les  ré- 
sistances et  compenser  toutes  les  pertes  de  force  vive  éprou- 


I  vées  depuis  le  point  d'infiltration. 


En  d'autres  termes,  le  niveau  de  l'eau  dans  le  tube  serait 
un  point  de  la  ligne  de  charge  *,  et  le  lieu  géométrique  de  ces 
niveaux,  considérés  pour  l'ensemble  de  la  nappe  souterraine, 
serait  une  surface  plus  ou  moins  sinueuse  qu'on  pourrait 
désigner  sous  le  nom  de  surface  piézométrique  ou  surface  de 
charge. 

Ceci  posé,  un  puits  artésien  aboutissant  à  un  point  de  la 
nappe  aquifère  donnerait,  ou  non,  des  eaux  jaillissantes  selon 
que  la  sur/ace  piézométrique  en  ce  point  serait  au-dessus 
comme  en  Mou  au-dessous  comme  en  N  du  point  correspon- 
dant de  la  surface  du  sol. 

On  partage  ainsi  la  contrée  eu  deux  sortes  de  zones,  que 
l'on  pourrait  figurer  par  deux  couleurs  différentes.  M.  Haton 
de  la  Goupillière  '  appelle  positives  celles  dans  lesquelles  la 
surface  piézométrique  s'élève  au-dessus  du  terrain,  et  néga- 
tives celles  pour  lesquelles  elle  plonge  au-dessous  du  sol.  La 

'  Delaunay.  Coun  de  machinée,  vp  136. 

*  Qui  était  une  ligne  droite  dans  les  conditions  théoriques  de  la  figure  83. 

'  Cour9  d exploitation  des  minet,  1. 1,  p.  145. 


GÉI^ËRALITÉS.  i57 

courbe  d'intersection  qui  les  limite  devient  ainsi  la  %ne  de 
partage  hydrologique  de  la  région,  au  point  de  vue  qui  nous 
occupe. 

Cet  énoncé  constitue  comme  une  sorte  de  théorème, 
définissant  la  condition  géométrique  à  laquelle  serait  subor- 
donné le  succès  d'un  sondage,  qu'on  entreprendrait  en  un 
point  donné,  pour  créer  un  puits  artésien  donnant  de  Teau 
jaillissante. 

Cette  théorie  doit  être  regardée  comme  parfaitement 
établie,  et  d'accord  avec  tous  les  faits  observés,  faits  qu'elle 
explique  et  peut  même  faire  prévoir.  On  en  citera  ici  quelques- 
uns: 

1**  Le  niveau  piézométrique  en  un  point  donné,  c'est-à- 
dire  le  niveau  auquel  l'eau  s'arrête  au-dessous  du  sol  dans  le 
cas  d'un  boit-tout,  ou  s'élève  avrdessus  dans  un  puits  arté- 
sien, prolongé  par  un  tuyau  d'une  longueur  suffisante  pour 
que  l'écoulement  n'ait  pas  lieu,  ce  niveau  est  indépendant 
du  diamètre,  et  il  est  généralement  plus  élevé  lorsque  le 
trou  est  tube  que  lorsqu'il  ne  l'est  pas. 

2"  Le  volume  d'eau  que  fournit  un  puits  artésien  augmente 
avec  le  diamètre  du  puits,  mais  non  pas  proportionnelle- 
ment à  sa  section.  Le  rapport  des  débits  est  moindre  que 
celui  des  sections,  et  d'autant  moindre  que,  pour  un  rap^ 
port  donné,  ces  sections  sont  plus  grandes  en  valeur  absolue. 

3°  Ce  même  volume  augmente  à  mesure  que  l'on  prend 
Teau  plus  près  de  la  surface  du  sol,  ou  à  une  plus  grande 
distance  en  dessous  du  niveau  piézométrique. 

4^  n  augmente  encore,  lorsque,  après  avoir  foré  un  puits, 
on  vient  à  le  tuber.  Cela  résulte  de  ce  qui  a  été  dit  plus 
haut,  sur  les  variations  du  niveau  piézométrique.  L'écou- 
lement par  un  puits  non  tube  équivaut  en  effet  à  l'écoule- 
ment par  un  tuyau  qui  présenterait  des  fuites  sur  divers 
points  de  sa  longueur. 


458  ROLE  DES  LITHOCUSES  DE  DIVERS  ORDRES. 

5""  Deux  puits  suflisamment  voisins  s'influencent  de  telle 
sorte  que  chacun  d*eux  diminue  le  produit  que  donnerait 
Tautre,  s'il  était  seul  ;  la  somme  de  leurs  débits  tend,  à 
mesure  qu'ils  sont  plus  rapprochés,  à  se  réduire  à  ce  que 
donnerait  un  puits  unique  ayant  une  section  égale  à  la 
somme  de  leurs  sections. 

La  théorie  qui  vient  d'être  donnée  explique  facilemenl 
ce  fait  bien  connu,  à  proximité  des  côtes  de  l'Océan,  que 
l'état  de  la  marée  influe  sur  le  débit  des  puits  artésiens. 
Ainsi  on  remarque  que  le  niveau  de  la  fontaine  jaillissante  de 
Noyelle-sur-Mer  (Somme)  monte  et  baisse  avec  la  marée.  Le 
puits  de  l'hôpital  militaire  de  Lille  suit,  à  huit  heures  de  dis- 
tance, les  oscillations  de  la  marée.  A  Fulham,  près  de  l'em- 
bouchure de  la  Tamise,  un  puits  foré  à  97  mètres  de  pro- 
fondeur donne  563  litres  par  minute  au  moment  du  reflux 
et  273  lors  du  flux'.  D'autres  puits  voisins  de  la  mer  sont 
jaillissants  à  marée  haute  et  cessent  de  l'être  à  marée  basse. 

La  marée  haute  augmente  la  charge  sur  les  orifices  de  sor- 
tie qui  sont  sous  l'Océan,  en  ralentit  l'écoulement,  relève  la 
surface  piézométrique  de  toute  la  nappe  souterraine  et  pour 
certains  points  peu  éloignés  de  la  mer  et  placés  à  un  ni- 
veau assez  bas,  peut  les  faire  passer  du  dessous  au  dessus  de 
la  surface  du  sol. 

Certaines  irrégularités  de  quelques  puits  artésiens  se  rat- 
tachent à  des  tremblements  de  terre.  Par  exemple,  en 
juin  1863,  le  forage  d'El-Annatt,  dans  le  Hodna,  a  subi  un 
arrêt  momentané  coïncidant,  non  seulement  avec  un  violent 
ouragan,  mais  aussi  avec  des  oscillations  du  sol  dans  le 
voisinage. 

^  Comme  confirmation  de  l'existence  et  du  mode  d'alimen- 
tation superficiel  de  cours  d'eau  souterrains,  d'où  provien- 

*  Comptée  rendui,  t.  LYlI,  p.  114,  1863. 


6ËNËRÂLITÉS.  459 

nentles  eaux  artésiennes,  le  fait  suivant  est  particulièrement 
éloquent. 

À  la  fin  de  janvier  1830  on  reconnut^  que  dans  le  puits 
foré  de  110  mètres  de  profondeur  exécuté  à  Tours  en  1829, 
dans  la  craie  inférieure,  Teau  s'étant  élevée  durant  plusieurs 
heures  avec  une  grande  vitesse,  avait  amené  beaucoup  de 
sable  fin  et  de  petits  fragments  d'épines,  des  graines  de 
plantes,  la  plupart  marécageuses  {Galiumuliginomm),  ainsi 
que  des  coquilles  d'eau  douce  et  terrestres  non  altérées 
{Planorbis  marginatm,  Belixrotwida  elstriata). 

De  leur  état  de  conservation  et  de  la  maturité  des  graines, 
Dujardin  pensa  pouvoir  conclure  que  ces  eaux  et  les  corps 
étrangers  qu'elles  avaient  entraînés  n'avaient  pas  mis 
plus  de  trois  ou  quatre  mois  à  descendre  de  quelque  vallon 
humide. 

De  même,  l'eau  d'un  puits  foré  à  Riemke,  près  de  Bochum, 
en  Westphalie,  a  amené  de  45  mètres  jusqu'à  son  orifice  de 
petits  poissons  de  8  à  10  centimètres,  et  sans  doute  em- 
pruntés aux  cours  d'eau  superficiels,  dont  les  plus  voisins 
sont  à  10  et  20  kilomètres. 

Pour  quelques  graines,  coquilles,  poissons,  sables  ou  gra- 
viers qui,  de  ces  profondeurs,  pamennent  à  la  surface, 
combien  s'arrêtent  en  route  dans  les  sinuosités  des  canaux 
que  ces  objets  finissent  par  obstruer! 

Des  faits  analogues  ont  été  fréquemment  signalés  dans  les 
puits  artésiens  du  Sahara. 

Certains  puits  jaillissants  de  la  région  d'Ourlana  dans 
rOued  Rhir  rejettent  des  animaux,  et  nulle  part  ce  fait  ne 
parait  mieux  caractérisé,  puisqu'il  s'agit  ici  d'animaux  vi- 
vants, poissons,  crabes  et  mollusques  qui  sont  loin  d'être 
une  rareté. 

*  DQjardin.  Mémoire  wc.  géoL,  1»  série,  t.  U,  p.  248, 1837. 


160  ROLE  DES  LITUOCLASES  DE  DIVERS  ORDUËS. 

M.  G.  Rolland  cite,  comme  authentiques,  les  deux  exemples 
suivants*  : 

Mazer.  Sondage  n*  3;  8  février  1876.  Profondeur,  80»,35. 
Hauteur  de  rorifice  du  tube  au-dessus  du  sol,  0°,80;  diamètre 
final,  O'^jlô.  Débit  total  primitif,  5800  litres  par  minute,  à 
la  température  de  25%5;  au  bout  de  deux  ans,  le  débit  s'est 
élevé  à  4600  litres.  Le  sondage  avait  été  entrepris  à  1  kilo- 
mètre de  l'ancienne  oasis,  au  milieu  d'un  terrain  nu  et 
inculte,  sans  rigole  ou  fossé,  ni  source  ou  étang.  Or,  quelques 
jours  après  l'aménagement  du  puits,  le  directeur  de  l'atelier 
vit  sortir  du  tube  un  crabe  vivant  de  la  grosseur  du  pouce. 
Après  lui,  M.  le  général  Carteret  et  M.  Jus  vérifièrent  devim 
que  la  gerbe  jaillissante  rejetait  des  crabes,  poissons  et  mol- 
lusques vivants,  en  même  temps  que  des  sables;  coiffant  d'un 
filet  l'orifice  du  tube,  ils  prirent  beaucoup  de  crabes  de 
petite  et  moyenne  grosseur. 

Sidi-Amran.  Sondage  n"  2;  31  janvier  1879.  Profon- 
deur 81*^,09.  Diamètre  final  0",12.  Débit,  4000  litres  à  24^ 
L'emplacement  était  situé  à  une  extrémité  de  l'oasis  et  n'of- 
frait pas  trace  d'eau.  Dès  que  la  colonne  de  0'",12  fut  parve- 
nue à  61", 73  sur  le  poudingue  calcaire  qui  recouvre  la 
nappe  artésienne  dans  cette  région,  le  jaillissement  eut  lieu 
avec  force  ;  du  23  au  28  janvier,  tandis  qu'on  s'enfonçait 
dans  les  sables  aquifères,  l'eau  charria  au  jour  une  grande 
quantité  de  ces  sables,  ainsi  que  des  cailloux  et  noyaux  cal- 
caires pesant  jusqu'à  1200  grammes,  soit,  en  tout,  non 
moins  de  400  mètres  de  matières  solides.  Or,  le  29  janvier, 
M.  Jus  recueillit,  au  milieu  des  sables  qui  venaient  d'être 
rejetés  et  encombraient  les  abords  du  tube,  beaucoup  de 
petits  poissons  et  mollusques  vivants. 

Les  mollusques  sont  très  communs,  tant  à  Ouargla  et  dans 

i  Complet  rendus,  t.  XCIII,  p.  1000, 1881. 


GÉNÉRALITÉS.  161 

rOued  Rhir  qu'au  Zab.  Dans  59  localités  de  l'Oued  Rhir,  les 
puits  artésiens  ont  ainsi  rejeté  des  poissons,  crustacés  et 
mollusques  vivants,  qui  ont  été  déterminés  par  M.  Sauvage 
et  M.  Bourguignat.  Les  mollusques  vivants  recueillis,  d'après 
M.  Jus,  appartiennent  aux  espèces  suivantes  :  Melanopsis  Ma- 
roccanaj  Morlet;  Àmnicola  Pycnocheiliaf  Bourguignat;  Amni- 
cola  Jusi^  A.  Milonij  id.;  A.  Saharica,  id.;  A.  Cossonh  id.; 
Melania  tuberculata,  id.;  Palydestrina^  Jusi,  id.  ;  P.  arena- 
ria,  id.  ;  P.  Peraudierij  id.  ;  P.  mbacerom,  id.  ;  Hydrobia 
Brondeli,  id.  ;  Cardium  edule,  Planorbis  cornevs,  id.  ;  Car- 
dium  Saharicurriy  id.;  Hélix  Uthicensisj  id.  ;  H.  pyramidata, 
Draparnaud;  H.  Sitifiensisj  Bourguignat;  H.  specialis,  id. ; 
H.  Critonidis,  Jus,  id.;  ff.  micromphatus,  Letourneur;  H.  Kol- 
censis^  Bourguignat;  Lemochroca  candidmima^  Beeck;  Buli- 
mw  decollatmy  Bruguière;  fi.  Ju$iy  Bourguignat. 

Les  crabes  ne  sont  connus  qu'en  trois  points  de  l'Oued 
Rhir,  savoir,  dans  les  rigoles  alimentées  par  les  puits  n"  5  de 
Mazet,  n"  2  d'Ourlana,  et  n"  1  de  Tamerna  Dyedida.  Dans  le 
Zab  occidental,  ils  sont  plus  fréquents.  Les  divers  individus 
appartiennent  à  une  même  espèce,  la  Telphusa  fluviatilis 
(Rondelet). 

Les  poissons  sont  Cyprinodon  calaritanuSy  Bonelli  ;  Hemi- 
chromis  mhara^  Sauvage  ;  Hemichromis  Rollandiy  Chromis  Zil- 
lei,  Gervais;  Chromis  DesfontaineijLRcépède. 

On  s'expliquera  l'origine  de  ces  nombreux  végétaux  et  ani- 
maux provenant  de  la  surface,  après  avoir  vu  plus  loin  le 
régime  des  nappes  souterraines  du  Sahara. 

Boit-tout^.  Si  le  niveau  d'équilibre  d'un  puits  artésien 
se  trouve  au-dessous  de  la  surface  du  sol,  ce  puits  peut 
fournir  de  l'eau,  comme  les  puits  ordinaires,  à  la  condi- 
tion qn'on  emploie  des  moyens  particuliers  pour  l'élever  jus- 

Detannay.  Cours  élémetilaire  de  mécanique^  p.  44o,  1851. 

11 


i62  ROLE  DES  LITHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

qu'à  la  surface  du  sol.  Mais  si,  au  lieu  d'y  puiser  de  l'eau,  on 
y  en  introduit,  au  contraire,  ce  qui  tend  à  y  faire  monter  le 
niveau,  l'équilibre  sera  rompu.  La  colonne  d'eau  contenue 
dans  le  puits  deviendra  trop  haute  pour  être  soutenue  par 
la  pression  qui  s'exerce  à  sa  partie  inférieure  ;  et  en  consé- 
quence elle  descendra,  de  manière  à  rétablir  le  niveau  où 
il  était  précédemment.  On  pourra  donc  faire  arriver  conti- 
nuellement de  l'eau  dans  un  pareil  puits  sans  qu'il  s'em- 
plisse; cette  eau  s'écoulera  dans  la  nappe  souterraine  à 
laquelle  il  communique;  on  aura  ce  que  l'on  nomme  un 
puits  absorbant^  ou  boit-tout. 

On  se  sert  très  souvent  de  puits  absorbants,  tels  que  ceux 
dont  nous  venons  de  parler,  soit  pour  dessécher  des  terrains 
marécageux,  soit  pour  faire  disparaître  l'humidité  du  sol 
dans  le  voisinage  de  constructions  importantes  auxquelles 
elle  pourrait  porter  préjudice,  soit  encore  pour  faire  dispa- 
raître des  eaux  malsaines  provenant  d'un  établissement  in- 
dustriel, ou  enfin,  pour  créer  de  petits  fours  hydrauliques, 
comme  avec  le  procédé  Haurian  *.  11  existe  un  exemple  re- 
marquable de  puits  absorbant  à  Saint-Denis,  près  Paris.  En 
perçant  un  puits  artésien  on  rencontra  d'abord  une  couche 
absorbante;  puis  plus  bas  une  nappe  d'eau  jaillissante;  et 
plus  bas  encore  une  seconde  nappe  jaillissante,  dont  l'eau 
était  de  meilleure  qualité  que  celle  de  la  précédente.  On  dis- 
posa dans  ce  puits  trois  tuyaux  concentriques,  s'élevant 
tous  trois  jusqu'à  la  surface  du  sol,  mais  descendant  à  des 
profondeurs  différentes.  Le  tuyau  intérieur,  fut  établi  jus- 
qu'à la  seconde  nappe  jaillissante.  Le  second  tuyau,  enve- 
loppant le  premier,  de  manière  à  laisser  un  espace  libre 
entre  eux,  descendit  jusqu'à  la  première  nappe  jaillissante. 
Enfin  le  troisième  tuyau,  enveloppant  le  second  de  la  même 

'  Haton  de  la  Goupillière»  Traita  d*expl<ntaUon  des  mines,  t.  I,  p.  140i 


ROLE  DES  LITHOCLASES  SIMPLES.  16o 

manière  ne  descendit  que  jusqu'à  la  couche  absorbante.  Par 
cette  disposition,  les  eaux  de  la  nappe  jaillissante  inférieure 
montent  par  le  tuyau  central;  celles  de  la  nappe  jaillissante 
supérieure  montent  par  l'espace  annulaire  compris  entre  le 
premier  tuyau  et  le  second;  et  l'excédent  de  ces  eaux,  qui 
n'est  pas  employé  pour  l'usage  de  la  ville,  s'écoule  dans  la 
couche  absorbante,  par  l'espace  annulaire  compris  entre  le 
second  et  le  troisième  tuyau. 


§    1".    ROLE   DES   LITHOCLASES   SIMPLES 

Terrains  tertiaires. 

!•  Farta.  —  La  Variété  des  terrains  tertiaires  pari- 
siens ne  permet  pas  d'indiquer  d'une  manière  générale  les 
nombreuses  nappes  d'eau  que  l'on  y  rencontre  très  fréquem- 
ment. Nous  nous  bornerons  à  rappeler  que  les  couches  ter- 
tiaires présentent  plusieurs  niveaux  de  sources.  Un  premier 
niveau  aquifère  se  trouve  dans  les  marnes  et  calcaires  la- 
custres supérieurs  et  un  second  dans  les  sables  et  grès  su- 
périeurs, dits  de  Fontainebleau,  qui  sont  soutenus  par  les 
marnes  vertes  supérieures  au  gypse.  Ces  eaux  sont  rarement 
ascendantes,  parce  qu'elles  n'ont  pas  de  bassin  hydrogra- 
phique d'une  étendue  suffisante;  utilisées  souvent  au  moyen 
de  puits,  elles  sortent  des  flancs  des  collines,  sous  forme  de 
sources.  Un   troisième  niveau  d'eau,  se  divisant  souvent, 
existe  dans  le  terrain  lacustre  inférieur.  L'étage  des  marnes, 
des  calcaires  et  des  meulières,  supérieur  à  ce  groupe,  l'é- 
tage gj'pseux,  l'étage  calcaire  inférieur,  renferment  égale- 
ment des  eaux  souvent  ascendantes,  quelquefois  jaillissantes 
à  plusieurs  mètres  au-dessus  du  niveau  de  la  Marne  ou  de 


164  ROLE  DES  LITHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

la  Seine,  notamment  dans  le  département  de  Seine-et-Marne. 
Le  calcaire  grossier  contient  aussi  des  couches  aquifères  qui 
constituent  un  quatrième  niveau  d'eau.  Enfin,  les  sables 
inférieurs  ou  le  groupe  de  l'argile  plastique,  à  cause  des 
sables  qui  lui  sont  subordonnés,  en  contiennent  un  cin- 
quième, le  plus  important,  en  ce  que  les  jets  qu'il  produit 
sont  les  plus  fréquents  et  en  même  temps  les  plus  élevés. 
Les  couches  de  ce  groupe  constituent  des  réservoirs  plus 
étendus  que  ne  le  sont  ceux  des  couches  précédentes  *. 

La  présence  souterraine  des  eaux  est  due  à  la  disposition 
des  couches,  qui  est  telle  qu'elles  occupent  la  partie  infé- 
rieure du  bassin  tertiaire  de  Paris,  tandis  qu'en  se  redres- 
sant elles  forment  une  partie  de  son  pourtour  élevé. 

On  a  vu  plus  haut  quelle  est  leur  disposition  dans  les 
vallées  de  la  Brie.  La  figure  47  donnée  page  85,  représente 
l'une  des  sources  de  la  Dhuis. 

Considéré  dans  son  ensemble  géologique,  le  bassin  de 
Paris  est  éminemment  propre  à  la  création  des  puits  artésiens. 
Les  couches  y  sont  disposées  enferme  de  cuvettes  de  grandeur 
décroissante,  placées  les  unes  dans  les  autres,  et  dont  Paris 
occupe  à  peu  près  la  partie  centrale.  Ces  terrains  alternati- 
vement perméables  et  imperméables  sont  très  faiblement 
accidentés;  plusieurs  niveaux  fournissent  des  centaines  de 
puits  artésiens  dont  la  profondeur  varie  habituellement  de 
10  à  30  mètres.  M.  Ch.  Laurenta  publié  des  coupes  d'ensem- 
ble des  puits  qu'il  a  forés  dans  les  vallées  delà  Seine  et  de  la 
Marne  et  qui  font  connaître  les  ondulations  du  terrain,  ainsi 
que  les  différences  remarquables  qui  existent  entre  les  ni- 
veaux d'ascension  de  leurs  eaux  *. 

Pyrénées-Orientale*.  — De  mêmcque  Icbassiu  de  Paris,  bien 

*  Degousée.  Traité  de  sondage,  2*  édition,  t.  U,  p.  475. 

'  Degousée  et  Laurent.  Guide  du  êondeur,  2«  édition,  t.  I,  p.  323,  planches  42  et  43. 


ROLE  DES  LITHOaASES  SIMPLES.  1G5 

des  terrains  tertiaires  présentent  une  disposition  favorable  à 
la  réussite  des  puits  artésiens. 

D'après  M.  L.  Ville*  les  eaux  du  pliocène  supérieur  jaillis- 
sent seulement  dans  une  étendue  fort  limitée  du  bassin 
hydrographique  du  Roussillon  ;  en  sorte  que  généralement 
les  puits  artésiens  vont  s'alimenter  dans  le  pliocène  infé- 
rieur qui  est  d'origine  marine.  Quant  à  la  profondeur  à 
laquelle  ils  sont  forés,  elle  doit  naturellement  être  d'autant 
plus  grande  qu'on  s'éloigne  davantage  des  montagnes  qui 
limitent  le  bassin. 

L'auteur  rapporte  les  couches  aquifères  du  Roussillon  à 
deux  étages  géologiques,  le  pliocène  inférieur,  et  le  pliocène 
supérieur.  Ce  dernier  serait,  du  reste,  contemporain  du  ter- 
rain de  Sahara,  dont  il  a,  sous  certains  rapports,  les  carac- 
tères minéralogiques. 


1  de  MAméwem.  —  A  Loudrcs  il  existc  des  puits  de  ce 
genre  qui  se  présentent  dans  des  sables  subordonnés  à  l'ar- 
gile plastique. 

Dans  le  bassin  de  la  Tamise  une  succession  de  villes  et  de 
villages  marque  la  jonction  des  couches  tertiaires  et  de  la 
craie,  sur  laquelle,  le  niveau  des  eaux  souterraines  appro- 
chant de  la  surface,  les  sources  sont  nombreuses,  comme  a 
Croydon,  à  Carshalton  et  dans  toute  cette  ligne  de  villages 
qui  s'étend  jusqu'à  Guildford  et  en  outre  de  l'autre  côté  de 
Londres,  à  Ware,  Hertford,  Hatfield,  Watford  et  d'autres. 

Us  sables  tertiaires  inférieurs  ont,  dans  ces  dernières 
années,  contribué  à  l'alimentation,  au  moyen  de  puits  arté- 
siens, de  Londres,  aussi  bien  que  des  districts  adjacents, 
dont  le  sol  est  formé  d'argile  imperméable  et  où  l'oau 
est  rare*. 

'  Revue  géologique  de  Delesse. 
'  hejtwich.  ^r///rw.1851. 


166  ROLE  DES  LITHOaASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

En  effet  ces  sables  passent  sous  le  London  clay,  de  telle 
sorte  qu'ils  sont  alimentés  d'eau  tout  le  long  de  leur  affleu- 
rement dans  le  Surrey  et  le  comté  de  Hertford. 

Leur  niveau  à  l'affleurement  est  à  peu  près  à  30  mètres 
au-dessus  du  niveau  de  la  Tamise,  tandis  qu'à  Londres  ils 
sont  à  environ  60  mètres  au-dessous.  De  sorte  qu'ils  for- 
ment une  cuvette  de  100  mètres  de  profondeur,  dont  le 
centre  est  rempli  d'argile  imperméable. 

■ei^qoe.  —  Les  tcrraius  tertiaires  jouent  un  rôle  impor- 
tant dans  le  gisement  des  eaux  souterraines  de  la  Belgique, 

Echelle   des  Hauteurs 

0    10    «   30  41  M   M    10   N   »0  UO  ZM^i* 


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rlii^mtJt       VlvACI 


Fig.  83-  —  Coupe  des  couches  aquifères  de  la  Belgique,  dirigée  du  nord  au}5ud.  I,  roches  dévo- 
nieones  quartzeuses  et  schisteuses;  C,  couches  crayeuses  et  marneuses,  eu  partie  aquifères; 
C,,  couches  crétacées  argileuses  et  argilo-sableuses  imperméables  dans  leur  ensemble; 
.,  couches  sableuses  et  sa  bio-argileuses  perméables;  Qa,  argile  quaternaire;  Q.,  sable  qua- 
ternaire. —  D'après  M.  Yei-slraeten. 


ainsi  que  l'expriment  les  deux  coupes  (fig.  86  et  87)  emprun- 
tés à  M.  Verstraeten  *. 

Aux  environs  de  Bruxelles  les  groupes  éocènes  yprésien 
et  landénien  renferment  des  argiles  sableuses,  auxquelles 
correspondent  plusieurs  niveaux  d'eau  de  régime  différent 
et  souvent  ascendants. 

Les  sondages  exécutés  dans  la  vallée  de  la  Dives  à  Louvain 

*  Verstraeten.  Examen  hydrologique  de*  environs  de  Bruxelles. 


ROLE  DES  UTHOCLASES  SIMPLES. 


167 


et  aux  environs  ont  également  rencontré  des  nappes  d'eau 

jaillissantes  ^ 


»iTiurpeviLLf 


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Echelle    des    Longueurs. 
0           10          20         30         w         so"" 
i  ■  '  '  < 

Fig.  86.  — ^Coupe  des.  couches  aquifères  de  la  Belgique  dirigée  de  l'ouest  à  l'est.  I,,  roches 
quartzeases  et  schisteuses  des  Ardennes;  I,,  roches  calcaires  et  quartzo-schisteuses  du  Con* 
droi  (déronien)  ;  H,  terrain  houiller  ;  C,,  roches  crayeuses  et  marneuses  imperméables  ; 
C^  couches  crétacées,  argileuses  et  argilo-sabieuses  imperméables  dans  leur  ensemble  ;  T*. 
roQches  tertiaires  sableuses  et  sablo-argileuses  perméables;  Qa,  argile  quaternaire;  Qt,  sable 
quaternaire.  —  D'après  M.  Verstraeten. 

Tienoe,  AvfHehe.  —  Plus  de  Cent  puits  dont  plusieurs 
sont  séculaires  ont  déjà  été  ouverts  à  Vienne  et  dans  ses 
environs.  Leur  profondeur  est  en  général  comprise  entre 
60  et  d  00  mètres. 

TeidM.  —  La  situation  exceptionnelle  de  Venise  semblait 
devoir  la  priver  de  toute  eau  douce  provenant  de  son  propre 
sol.  A  défaut  de  sources  et  de  puits  ordinaires,  des  puits 
forés  y  ont  apporté  en  abondance  de  Teau  douce  ;  la 
figure  88  montre  la  disposition  de  la  nappe  qui  les  ali- 
mente. 


DépartcHiaii  d'Aller  i  Basse   Hitidjai   sources  Jalllissaiiies  na- 


*  Bihel.  PuîU  artétien  de  Louvain,  1870. 


108 


ROLE  DES  UTHOCUSES  BE  DIVERS  ORDRES. 


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ROLE  DES  LITHOGLASES  SIMPLES.  iCO 

inrrues  et  paite  forés'.  —  La  Basse  Mitidja  renferme  des  nap- 
pes d'eau  souterraines  qui  se  manifestent  soit  par  des 
sources  naturelles,  soit  en  s'élevant  dans  de  nombreux  fora- 
ges; elles  sont  instructives,  particulièrement  au  point  de 
vue  des  nappes  analogues  du  Sahara  (fig.  89). 

Les  eaux  de  THarrach  supérieuretde  son  principal  affluent, 
rOued  Djemâa,  sont  détournées  à  leur  sortie  du  terrain  cré- 
tacé, et  utilisées  presque  entièrement  en  irrigations  sur  les 
territoires  de  l'Arbaet  de  Rovigo. 

Une  partie  de  ces  eaux  se  perd  néanmoins  dans  les  cail- 
loux du  lit,  et  on  pourrait  penser  qu'elles  circulent  souter- 
rainement  sous  ces  cailloux  depuis  Rovigo  ou  l'Arba  jusqu'au 
deuxième  kilomètre  en  aval  du  confluent  de  l'Oued  Djemâa, 
point  où  l'eau  reparaît  dans  le  lit  d'abord  par  un  faible 
débit  qui  s'accroît  assez  rapidement  en  descendant  le  coure 
de  la  rivière.  On  avait  même  basé  sur  cette  idée  un  projet 
d'aménagement  d'eaux  pour  la  ville  d'Alger.  Il  n'en  est  pour- 
tant point  ainsi  en  réalité.  En  1874  plusieurs  sondages  que 
M.  l'ingénieur  en  chef  des  mines  Pouyanne  a  fait  exécuter 
dansle  lit  de  l'Uarrach,  un  peu  en  aval  du  confluent  de 
rOued  Djemâa,  ont  démontré  que  s'il  coule  réellement  un 
peu  d'eau  en  ce  point  sous  les  cailloux  du  lit  de  l'Harrach, 
c'est  une  quantité  insignifiante,  ne  pouvant  nullement 
expliquer  les  débits  qui  passent  en  toute  saison  à  ciel  ouvert 
dans  l'Harrach  inférieur.  En  suivant  ce  lit  pas  à  pas,  en  1874, 
M.  Ville  et  M.  Pouyanne  ont  pu  s'assurer,  par  de  nom- 
breuses mesures  thermométriques,  par  des  jaugeages 
répétés  de  distance  en  distance  et  par  la  vue  directe,  que 
tout  le  débit  de  l'Harrach  inférieur,  en  étiage,  provient  de 
sources  artésiennes  naturelles,  sourdant  pour  la  plus  grande 
partie  dans  le  lit,  mais  pour  une  certaine  fraction,  auxenvi- 

*  D'après  une  communication  de  11.  TinRéoieur  en  chef  des  mines  Pouyanne. 
«  Degousée.  Bull,  de  la  Sociéié  géologique,  2«  série,  t.  V,  p.  30  et  t.  VU,  p.  481. 


170 


ROLE  DES  UTHOaASES  DE  DIVERS  ORDRES. 


rons  et  dans  le  lit  des  affluenls  inférieurs.  A  Tétiage  le  débit 
total  ainsi  produit  dépasse  un  mètre  cube  par  seconde.  La 
presque  totalité  de  ces  sources  artésiennes  sort  de  terre  avec 


Fig.  88.  —  Carte  de  la  Basie  Mitic^a.  r,  terrain  crétacé;  m,  terrain  tertiaire  ;  9,  terrain  quater- 
naire. Les  sondages  à  nappes  jaillissantes  sont  représentés  par  de  petits  ronds  noirs,  et  ceux 
é  nappes  simplement  ascendants,  par  de  petits  can*és.  —  D'après  M.  Pouyanne. 


une  température  de  18  à  19%  à  peine  supérieure  à  la  tempé- 
rature moyenne  des  lieux  qui  atteint  17**  ou  17*,5.  Un  très 
petit  nombre  de  sources  seulement,  fournissant  ensemble 
un  faible  débit,  sourdent  à  la  température  de  21  à  22*. 


ROLE  DES  LITHOCLASES  SIMPLES.  171 

Les  faits  ainsi  observés  prouvent  à  eux  seuls  que  dans  la 
partie  tout  à  fait  inférieure  du  bassin  de  THarrach,  il  existe 
au  moins  deux  nappes  artésiennes,  Tune  à  profondeur  assez 
grande,  fournissant  peu  de  sources,  l'autre  à  profondeur 
moindre,  fournissant  la  plupart  d'entre  elles.  Celles  de  ces 
dernières  qui  se  font  jour  au  dehors  du  lit  des  oueds  faisaient 
autrefois  un  vaste  marais  de  toute  cette  partie  de  la  plaine 
(le  la  Mitidja  ;  les  fossés  d'assainissement  en  ont  fait  dispa- 
raître un  grand  nombre,  ou  plutôt  leur  ont  donné  un 
emploi  utile  tout  en  supprimant  les  marécages.  Ces  phéno- 
mènes ne  sont  pas  particuliers  au  bassin  inférieur  de  l'Har- 
rach,  mais  on  les  retrouve  aussi  dans  le  bassin  inférieur  du 
Mazafran. 

L'existence  des  nappes  en  question  est  démontrée,  d'autre 
part,  par  les  nombreux  sondages  de  la  basse  Mitidja. 

La  figure  montre  que  la  Mitidja  est  formée  par  une  bande 
quaternaire  s'appuyant  au  nord  sur  les  collines  tertiaires 
du  Sahel,  au  sud  sur  le  terrain  crétacé  du  petit  Atlas  et  un 
certain  nombre  d'affleurements  tertiaires  qui  en  bordent  le 
pied.  La  profondeur  de  cette  bande  quaternaire  n'est  pas 
bien  connue;  mais  elle  dépasse  120  mètres  en  plusieurs 
points,  comme  il  résulte  de  plusieurs  sondages.  Elle  semble, 
si  Ton  peut  s'exprimer  ainsi,  n'être  au  moins  dans  sa  partie 
supérieure  que  l'intégrale  des  cônes  de  déjection  des  nom- 
breux torrents  venant  du  petit  Atlas.  Cela  explique  pourquoi 
ce  terrain  n'est  point  régulièrement  stratifié,  au  point  que 
deux  sondages,  même  fort  voisins,  présentent  toujours  des 
coupes  dissemblables.  Le  terrain  consiste  en  lentilles  plus  ou 
moins  étendues  composées  les  unes  de  cailloux  roulés,  les 
autres  de  sable,  d'autres  d'argiles  sableuses  ou  caillouteuses, 
d'autres  d'argile  à  peu  près  pure,  enchevêtrées  les  unes  dans 
les  autres.  Les  eaux  du  petit  Atlas  s'infiltrent  dans  la  partie 
sud  de  ce  terrain,  y  descendent  à  des  profondeurs  diverses. 


172  ROLE  DES  LITHOaASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

cheminent  par  les  lentilles  perméables,  tantôt  s'élevant, 
tantôt  s'abaissant,  tantôt  se  partageant  en  plusieurs  nappes, 
suivant  la  composition  du  terrain,  et  viennent  buter  contre 
le  pied  du  Sahel,  formé  par  les  puissantes  assises  du  terrain 
sahélien  (miocène  supérieur).  SMnfiltrant  aux  altitudes  de 
120  à  150  mètres,  elles  arrivent  au  pied  du  Sahel  sous  un  sol 
dont  l'altitude  maximum  est  de  50  mètres  vers  les  Quatre- 
Chemins  et  s'abaisse  de  plus  en  plus  vers  Maison-Carrée  d'une 
part,  vers  le  Mazafran  de  l'autre.  Leur  pression  hydrosta- 
tique est  suffisante  pour  les  faire  remonter  partiellement  au 
jour  par  une  foule  de  crevasses  naturelles.  On  a  pensé  qu'elles 
devaient  avoir  sous  la  mer  un  exutoire  direct  et  cette  opi- 
nion n'a  rien  d'invraisemblable. 

Beaucoup  de  sondages  ayant  fourni  des  résultats  utiles 
sont  compris  dans  une  bande  de  36  kilomètres  de  longueur 
et  7  à  8  kilomètres  de  largeur.  Tous  n'ont  pas  donné  de 
l'eau  jaillissante,  et  beaucoup  ne  fournissent  que  de  l'eau 
arrivant  à  5  ou  6  mètres  sous  le  sol.  Mais  avec  des  engins 
élévatoires  (norias  ou  pompes)  ils  donnent  des  débits  consi- 
dérables, et  beaucoup  de  particuliers  s'accommodent  parfai- 
tement de  ce  résultat. 

Presque  tous  empruntent  l'eau  de  la  nappe  supérieure 
qui  se  rencontre  ordinairement  entre  25  et  45  mètres  de 
profondeur. 

D'autres  parties  du  département  d'Alger,  ainsi  que  du 
département  d'Oran,  sont  riches  en  sondages. 

Hodna   et  Sahara  du  dégMirteineiit  de  Constantlne.  -—  DanS  de 

vastes  régions  du  globe  où  il  ne  pleut  pas,  il  peut  exister 
néanmoins  à  proximité  de  la  surface,  des  nappes  d'eau  qui 
y  pénètrent  latéralement  de  régions  éloignées. 

Ainsi,  les  puits  artésiens  du  Sahara,  qui  jaillissent  géné- 
ralement de  couches  quaternaires  sont  alimentés,  du  moins 


ROLE  DES  UTUÛOLASES  SIMPLES.  175 

en  partie,  comme  Ta  déjà  reconnu  M.  DubocqS  par  des 
nappes  subordonnées  au  terrain  crétacé,  lis  représentent  une 
Téritable  imitation  artificielle  des  sources  jaillissantes  du 
même  pays. 

La  vaste  région  qui  s'étend  du  2'  au  5*  degré  de 
longitude  orientale,  du  55*  au  32*  degré  de  latitude,  n'est 
point  stérile  sur  toute  son  étendue.  On  y  constate  des 
alternances  de  hauteurs  et  de  dépressions  qui  viennent 
fréquemment  borner  un  horizon  que  l'on  croyait  sans 
limites,  ainsi  que,  des  dunes  de  sables  et  de  vastes  maré- 
cages. Les  lacs  salés  ou  chotts  et  les  dunes  de  sables, 
à  la  surface  incessamment  agitée  et  remaniée  par  le 
vent,  sont  seuls  absolument  stériles.  Des  arbrisseaux 
rabougris  et  noueux,  retenant  le  sable  ou  la  terre  autour  de 
leur  pied,  de  manière  à  former  une  série  de  buttes  natu- 
relles; quelques  graminées,  des  plantes  littorales,  qui  ne 
prospèrent  que  dans  les  terrains  contenant  une  certaine 
proportion  de  sel  marin,  couvrent  le  sol  du  désert,  et  sont 
incessamment  rongées  par  les  moutons  et  les  chameaux 
des  nomades,  auxquels  leurs  feuilles  servent  de  pâtures 
pendant  les  mois  de  l'hiver. 

On  rencontre  de  plus  aux  abors  des  cours  d'eau  qui  des- 
cendent de  l'Aurès,  tels  que  l'Oued  Biskra,  l'Oued-el-Abiod, 
rOued-el-Arab,  d'assez  vastes  espaces  cultivés  en  céréales, 
pour  lesquelles  on  utilise  les  eaux  que  les  torrents  four- 
nissent en  abondance  en  hiver  et  au  printemps,  jusqu'à  la 
fonte  des  neiges  qui  couvrent  les  cimes  de  l'Aurès.  A  ce  mo- 
ment les  blés  et  les  orges  atteignent  leur  maturité;  on  les 
coupe  et  le  terrain  reçoit,  au  retour  de  la  saison  d'hiver,  de 
nouvelles  semences.  Les  cultures  les  plus  variées  prospèrent  : 
des  arbres  à  fruits,  tels  que  le  figuier,  l'olivier,  le  grenadier; 

*  Annales  des  Mines,  5»  scrie,  t.  H,  p.  248, 1852. 


174  ROLE  M8  USHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

des  légumes,  fèves,  oignons»  pastèques,  le  piment  indispen- 
sable à  la  cuisine  arabe,  le  henné  et  le  tabac.  On  plante 
de  plus  dans  les  clairières,  de  Torge  qui  se  consomme  le 
plus  souvent  en  vert  (djedria)  et  donne  deux  eoupes  suc- 
cessives au  printemps,  ainsi  que  quelques  blés  hâtife«  Leur 
irrigation  exige,  d'après  des  relevés  pris  aux  environs  de 
Touggourt,  environ  70  litres  par  jour;  si  Ton  ajoute  une 
quantité  égale  pour  les  cultures  maraîchères  du  jardin, 
on  arrive  à  140  litres  par  vingt-quatre  heures,  soit  a  un 
décilitre  par  minute  et  par  dattier,  en  rapportant  tout 
le  volume  d'eau  à  cet  arbre,  qui  sert  habituellement  de 
terme  de  comparaison  pour  apprécier  l'importance  des 
cultures  des  oasis.  L'abondance  des  eaux  forme  ainsi  la 
seule  limite  du  développement  que  peuvent  recevoir  les 
plantations  de  dattiers,  car  les  débouchés  en  sont  faciles  et 
assurés. 

Dans  les  plateaux,  les  eaux  qui  descendent  des  montagnes 
et  les  nombreuses  sources  qui  prennent  naissance  au  voisi- 
nage des  couches  relevées  des  montagnes  et  des  assises  hori- 
zontales du  terrain  pliocène  du  Sahara,  pourvoient  en 
quantité  suffisante  aux  besoins  des  trente-six  oasis  du  Ziban. 

Dans  le  désert  de  sables  ou  Souf,  qui  ne  compte  que  huit 
villages  ou  oasis,  les  palmiers  sont  plantés  au  fond  de  trous 
coniques  de  6  à  12  mètres  de  profondeur,  et  trouvent  dans 
le  sol,  à  une  faible  distance,  une  nappe  d'eau  qui  leur  assure 
une  végétation  puissante. 

D'après  M.  Ville,  dans  le  Hodna,  c'est  un  terrain  tertiaire 
marin  qui  donne  les  eaux  jaillissantes.  Il  y  a  plusieurs 
cuvettes  souterraines,  nettement  accusées  par  la  stratification 
des  couches,  et  dans  chacune  desquelles  le  thalweg  repré- 
sente un  maximum  d'eaux  jaillissantes;  ce  thalweg  souter- 
rain renferme  lui-même  un  point  de  débit  maximum.  Les 
principaux  cours  d'eau  superficiels  correspondent  en  général 


ROLE  DES  LITHOCLASES  SIMPLES.  175 

aux  thalwegs  souterrains.  Dans  chaque  cuvette,  il  y  a  un 
régime  spécial  de  nappes  souterraines  et  par  suite,  d'eaux 
jaillissantes;  plusieurs  nappes  sont  superposées,  à  cause  de 
Talternance  fréquente  des  couches  de  grès  sableux  et  de 
marnes.  Les  eaux  de  pluie  qui  tombent  directement  sur  les 
affleurements  des  couches  absorbantes  et  les  cours  d'eau 
abondants  qui  descendent  des  montagnes  secondaires  ou 
miocènes  limitant  au  sud  et  au  nord  le  bassin  du  Hodna^  et 
qui  passent  sur  les  affleurements  des  couches  tertiaires, 
servent  à  l'alimentation  des  nappes  souterraines. 

Mmh  t  Sources   JaOttflMUites    mitarcllcii.    —  De    tcllcS  SOUrCCS 

émergent  fréquemment  dans  le  Zab  occidental  du  dépôt 
quaternaire  saharien*.  Elles  ne  peuvent  être  fournies  par  les 
eaux  de  pluie  qui  tombent  dans  l'espace  très  restreint  com- 
pris entre  les  bouillons  de  ces  sources  et  le  pied  des  mon- 
tagnes crétacées  limitant  au  nord,  le  bassin  du  Sahara; 
la  quantité  d'eau  de  pluie  qui  tombe  annuellement  est  en 
en  effet  très  faible,  et  le  bassin  hydrographique  qui  la  reçoit 
est  tout  à  fait  insignifiant.  La  température  élevée  de  certaines 
sources  sortant  du  terrain  saharien  montre  qu'elles  viennent 
d'une  assez  grande  profondeur;  leur  alimentation  est  assu- 
rée par  les  belles  sources  des  divers  étages  du  terrain  cré- 
tacé, sources  dont  les  unes  arrivent  directement  jusqu'au 
jour  et  dont  les  autres  passent  souterrainement  du  terrain 
crétacé  dans  le  terrain  saharien. 

Dans  le  Zab  occidental  on  voit  de  magnifiques  sources 
jaillissantes  émerger  soit  du  terrain  saharien,  soit  du  terrain 
crétacé  inférieur,  soit  du  terrain  nummulitique  à  la  limite 
du  contact  du  terrain  saharien.  Ainsi  l'Aïn  Oumach  surgit 
par  plusieurs  bouillons  ;  quelques-uns  sortent  du  terrain 

^  Ville.  BulleiiH  de  la  Sociélé  géologique,  2*  série,  t.  XXH,  p.  115. 


176  ROLE  DES  LITIIOGLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

crétacé  à  la  température  de  27%33  et  débitent  ensemble 
d24  litres  par  seconde. 

Tout  près  de  là,  à  quelques  mètres  de  distance,  il  y  a  plu- 
sieurs gouffres,  dans  le  terrain  saharien,  d*où  émergent  des 
sources  jaillissantes;  la  profondeur  a  été  trouvée  de  plus  de 
40  mètres  pour  l'un  d'entre  eux.  Un  de  ces  gouffres  débite 
10  litres  d'eau  par  seconde  à  la  température  de  26**,35.  Cn 
deuxième  gouffre  débite  50  litres  d'eau  par  «econde  à  la 
température  de  26*, 53.  D'autres  sources  émergent  sur  les 
deux  rives  du  ravin  d'Oumach,  qui  produit  en  somme  un 
cours  d'eau  dont  le  débit  est  de  217  litres  à  la  seconde. 


1  BUr  I  Soarees  BatareHes  et  rora«e•^  —  LcS  SOUrCCS  arté- 
siennes naturelles  de  l'Oued  Rhir  qui  sont  surtout 
nombreuses  près  d'Ourlana  se  divisent  en  deux  groupes  :  les 
behour  (mers),  au  singulier  behar  ou  bahr  et  les  chrïaU. 

Les  behours  sont  de  grandes  nappes  d'eau  circulaires 
d'un  diamètre  variable,  ordinairement  10  à  40  mètres,  qui 
sont  en  communication  avec  des  nappes  situées  à  diverses 
profondeurs.  Ces  behours  ont  une  profondeur  considérable, 
si  l'on  en  juge  par  la  couleur  vert  foncé  de  leurs  eaux.  Ils 
renferment  les  mêmes  petits  poissons  qu'on  trouve  dans  les 
puits  jaillissants,  ainsi  que  des  paludines  des  mélanies  et 
des  mélanopsides.  Le  behar  de  Touggourt  est  le  plus  consi- 
dérable de  tous;  sa  surface  est  irrégulière;  elle  a  2000  mètres 
environ  de  longueur  sur  une  largeur  variable  de  200 
à  300  mètres;  sa  profondeur  au  centre  est  de  plus  de 
40  mètres.  Ordinairement  les  behours  sont  dans  des  terrains 
tout  à  fait  plats;  cependant  quelques-uns  se  trouvent  au 
milieu  de  terrains  légèrement  bombés;  leurs  bords  sont  cou- 
pés nettement  et  à  pans  abrupts.  11  est  impossible  d'admettre, 

«  D*apré8  V.  L.  Ville. 


ROLE  DES  UTHOOASES  SIMPLES.  177 

comme  on  l'a  supposé,  qu'ils  résultent  de  réboulement 
d'anciens  puits  creusés  par  les  indigènes;  les  puits  taris 
ou  puits  morts,  bien  qu'ayant  reçu  le  nom  de  behours 
comme  les  appellent  les  Rouara,  ne  produisent  que  des 
mares  infectes,  le  plus  souvent  sans  aucun  écoulement  au 
dehors.  Les  chrïats  sont  des  sources  existant  au  sommet 
de  petits  mamelons  coniques,  de  3  à  4  mètres  de  hauteur 
au-dessus  de  la  plaine  saharienne.  Au  sommet  de  ces  ma- 
melons, il  y  a  une  petite  dépression,  rappelant  un  cratère, 
dans  laquelle  la  source  forme  une  nappe  d'eau  vive.  Une 
tranchée  pratiquée  sur  le  bord  de  cette  cuvette  donne  écou- 
lement à  l'eau  qui  sert  toujours  à  l'irrigation  de  quelques 
palmiers. 

Les  nappes  souterraines  ont  donc,  pour  ainsi  dire,  des 
évents  à  la  surface,  non  seulement  par  la  voie  directe  des 
puits  dont  il  va  être  question,  mais  aussi  par  le  réseau  com- 
plexe des  conduits  naturels  qui  aboutissent  aux  behours  et 
aux  chrïats. 

En  général  il  existe  une  nappe  principale,  parfois  unique, 
renfermée  dans  des  sables  quartzeux  et  associée  à  des  mar- 
nes compactes,  marnes  sableuses,  sables  argileux,  le  tout 
alternant  avec  des  allures  lenticulaires  et  variables.  Sa 
pression  hydrostatique  est  maxima  dans  la  région  d'Ourlana, 
où  les  puits  ont  atteint  la  nappe  vers  70  mètres.  L'eau  jaillit 
dès  que  la  sonde  à  percé  la  couverture.  En  maint  endroit, 
Teau  s'est  elle-même  frayé  passage  jusqu'à  la  surface  :  d'où 
les  sources  naturelles. 

Dans  la  zone  privilégiée  du  Sahara  qui  comprend  une  qua- 
rantaine d'oasis  groupées  sous  le  nom  d'Oued-Rhir,  et  dont 
Touggourt  est  la  capitale,  les  jardins  sont  alimentés  par 
quelques  sources  naturelles  et  par  de  nombreux  puits  arté- 
siens (fig.  90). 

La  ligne  d'eau  de  l'Oued-Rhir  peut  être  considérée  comme 


178 


ROLE  DES  LITUOCLiSES  DE  DIVERS  ORDRES. 


BATNA 


TEL 
0- 


Ouargla'^,!^^  ^^""'^^  ^'^^'^  Bet<fha^ 


Echelle 


tf    «    30  9UUS0    ti»7OM9O10O 

I L__J , . , L_J L__. i_ 


okil. 


Fïg.  90.  —  Carte  des  fora^^es  artésiens  de  la  province  de  ConsUintine  (sabdivision  de  Batna).  Us 
petits  carrés  noirs  indiquent  les  puits  forés  jaillissants;  les  triangles,  les  puits  forés  donnant 
des  eaux  ascendantes;  les  ronds,  les  puits  abandonnés  par  les  Arabes  et  terminés  par  les  ate- 
liers de  sondages.  Les  chiffres  placés  à  côté  de  ces  différents  signes  indiquent  le  nombre  de 
puits  en  chaque  point.  —  D'après  M.  Jus. 


ROLE  DES  LITHOCLASES  SIMPLES.      ,       179 

reconnue  depuis  l'oasis  d'Ourir,  au  sud-ouest  du  chott  Mel- 
Rhir,  jusqu'au  récent  sondage  de  Schmourra,  près  de  Toug- 
gourt,  soit  sur  120  kilomètres*.  Elle  offre  tout  son  dévelop- 
pement aux  environs  d'Ourlana,  où  les  puits  artésiens  fran- 
çais ont  des  débits  de  3000  à  3500  litres  par  minute.  Sur 
toute  cette  longueur,  des  recherches  suffisamment  profondes 
semblent  appelées  à  fournir  des  eaux  jaillissantes.  Elles  de- 
vraient être  faites,  non  aux  oasis  actuelles,  dont  certaines 
sont  mal  situées,  et  où  des  puits  trop  multipliés  peuvent  se 
nuire,  mais  en  des  points  convenablement  choisis,  où  se 
créeraient  de  nouveaux  centres. 

Plus  au  sud,  vers  Toued  Mya  et  l'oued  Igharghar,  il  y  a  éga- 
lement des  eaux  artésiennes,  dans  des  conditions  de  moins 
en  moins  favorables,  à  cause  du  relèvement  des  couches. 
A  Ouargla,  où  Ton  trouve  de  nombreux  puits  artésiens  in- 
digènes, les  sondages  sont  assurés  du  succès. 

Les  premiers  puits  artésiens  de  l'Oued-Rhir  sont  très  an- 
ciens. Ebn-Khaldoun,  écrivain  arabe  du  quatorzième  siècle, 
en  fait  mention,  et  on  peut  admettre  que  des  puits  jaillis- 
sants y  existaient  bien  antérieurement;  car  ce  pays  était  déjà 
peuplé  de  Berbères,  lorsque  Sidi  Okba  entreprit  la  conquête 
de  l'Afrique,  et  il  est  ainsi  assez  difficile  de  supposer  que 
l'emploi  des  puits  artésiens  ait  été  introduit  par  les  Arabes, 
à  la  suite  de  leur  conquête.  Ces  puits  ont  une  section  qua- 
drangulaire,  d'environ  0",80  de  côté;  leur  profondeur,  qui 
estvariable  suivant  les  localités,  peut  être  estimée  en  moyenne 
entre  50  et  60  mètres.  Pour  les  creuser  les  indigènes  em- 
ploient une  sorte  de  houe  a  manche  très  court  et  très  incliné 
sur  le  plan  de  l'outil  qui  leur  sert  également  pour  le  travail 
des  jardins* 

En  1854,  la  corporation  de  ces  hommes  habiles,  surnom- 

*  Rollandi  Aiêociation  françaue  pout*  tavancement  de$  sciences.  Reims,  1880,  p.  547. 


180  ROLE  DES  LITHOGLÂSES  DE  DIVERS  ORDRES. 

mes  les  Meallem  (savants)  et  R'tassin  (plongeurs),  qui  avaient 
créé  et  vivifié  ces  belles  oasis  du  Sud,  n'existait  plus  que 
de  nom.  Des  perles  considérables  l'avaient  cruellement 
éprouvée  de  1845  à  1854,  et,  malgré  le  prestige  dont  elle 
était  entourée,  on  montrait  peu]d'émulation  pour  apprendre 
un  métier  aussi  périlleux,  et  dont  la  conséquence  était  la 
phthisie  ou  une  mort  prématurée. 

Dès  Tannée  1844,  M.  l'ingénieur  en  chef  des  mines  Fournel 
avait  pressenti  le  rôle  important  que  la  sonde  artésienne 
était  appelée  à  jouer  dans  la  province  de  Gonstantine,  pour 
doter  d'eau  potables  les  régions  sahariennes  qui  en  sont 
dépourvues  sur  d'immenses  étendues.  Il  ne  put,  à  celle 
époque,  qu'entrevoir  pour  ainsi  dire,  ces  vastes  plaines  que 
nos  colonnes  n'avaient  pas  encore  sillonnées  dans  tous  les 
sens.  Aussi,  le  premier  essai  de  sondage  fut^i-il  entrepris, 
sur  la  proposition  de  M.  Fournel,  auprès  de  Biskra,  c'est-à- 
dire  à  la  porte  même  des  régions  sahariennes.  Par  suite  des 
difficultés  survenues  dans  l'exécution  des  travaux,  le  son- 
dage dut  être  abandonné,  avant  d'atteindre  la  nappe  arté- 
sienne qui  existe  probablement  à  l'aplomb  du  point  choisi. 

Ce  premier  insuccès  fit  susprendre,  pendant  plusieurs 
années,  les  travaux  de  sondage  dans  la  province  de  Gonstan- 
tine. 

M.  l'ingénieur  des  mines  Dubocq  fil,  en  1848,  un  voyage 
à  Touggourt.  11  visita  les  principales  oasis  échelonnées  entre 
ce  point  et  Biskra,  étudia  les  terrains  au  double  point  de  vue 
de  la  géologie  et  de  l'hydrologie  et,  dans  un  mémoire  qui  fut 
publié  en  1853*,  il  fit  connaître  les  nombreux  puits  jaillis- 
sants creusés  par  les  indigènes  avec  les  moyens  primitifs 
dont  nous  venons  de  parler.  11  démontra  sans  peine  le  suc- 

*  Annales  des  mines,  5«  série,  t.  II,  p.  249, 1853. 


ROLE  DES  LITHOGLASËS  SIMPLES.  181 

ces  que  la  sonde  française  remporterait  dans  les  terrains  des 
oasis.  M.  le  général  Desvaux*  embrassa  avec  enthousiasme 
J'idée  de  créer  des  gîtes  d'étapes  sur  la  route  militaire  de 
Biskra  à  Toughourt,  de  multiplier  les  oasis  dans  les  solitudes 
du  Sahara,  et  de  rendre  une  vie  nouvelle  à  des  oasis  déjà 
existantes,  mais  qui  dépérissaient  par  suite  de  la  diminution 
des  débits  de  leurs  puits  jaillissants.  Les  projets  du  général 
Desvaux  furent  mis  immédiatement  à  exécution.  Les  son- 
dages de  rOued-Rhir  furent  d'abord  confiés  à  M.  Jus,  ingé- 
nieur de  la  maison  Degousée  et  Charles  Laurent  qui  fournit 
tout  le  matériel  nécessaire. 

En  1858,  on  entreprit,  dans  le  bassin  du  Hodna,  des  puits 
artésiens  qui  auraient  ouvert  un  vaste  champ  à  la  colonisa- 
tion européenne,  s'il  eût  été  possible  d'irriguer  ses  plaines 
incultes. 

Plus  tard,  quelques  sondages  furent  exécutés  dans  la  par- 
tie septentrionale  du  Tell  de  la  province,  à  la  suite  des 
éludes  géologiques  de  M.  l'ingénieur  des  mines  Tissot. 

Dans  un  ouvrage  intitulé  :  Voyage  d'exploration  dam  les 
bûisins  du  Hodna  et  du  Sahara j  publié  en  1868,  M.  Ville  a  fait 
Tétude  géologique  des  bassins  artésiens  de  la  province  de 
Constantine  et  a  décrit  tous  les  puits  artésiens  creusés 
jusqu'en  1864,  en  indiquant  les  conséquences  générales  à 
déduire  de  l'ensemble  de  tous  les  travaux. 

Plusieurs  bassins  artésiens  ont  été  reconnus  dans  la  pro- 
vince de  Constantine;  ce  sont  les  suivants  en  allant  du  sud 
au  nord. 

1**  La  grande  cuvette  du  Sahara.  Le  chott  Melrhir  qui  en 
occupe  la  partie  la  plus  basse  se  trouve  à  25  mètres  environ 
au-dessous  du  niveau  de  la  mer,  à  son  extrémité  occidentale  ; 

2*  Le  bassin  d'El-Outaïa  ; 

*  Même  recueil,  5-  série,  t.  XIV,  p.  421, 1858. 


182 


ROLE  DES  LITHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 


 
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ROLE  DES  UTHOGLASES  SIMPLES. 


183 


5"  La  cuvette  du  Hodna  ; 

4*  La  région  des  petits  lacs  salés,  formant  une  large  bande 
dirigée  de  TO.  N.  0.  à  TE.  S.  E.  au  milieu  du  Tell. 

5*  La  zone  septentrionale  du  Tell  ^ 

Ces  différents  bassins  correspondant  à  des  ondulations 
dans  le  terrain  quaternaire  du  Sahara,  constituent  autant 
de  cuvettes  artésiennes  distinctes. 

La  figure  91  indique,  d'après  M.  Charles  Laurent*,  la 
disposition  des  puits  forés  entre  Tamelath  près  Temacin  et 
Biskra. 

Il  n'est  pas  inutile  de  comparer  ce  qu'était  TOued-Rhir, 
d'une  part  en  1856,  deux  années  seulement  après  la  prise 
de  Touggourt  et  alors  que  la  paix  et  la  confiance  venaient  de 
renaître  dans  le  Sahara,  et  d'autre  part  en  1880,  c'est-à-dire 
23  années  après  l'introduction  de  la  sonde  artésienne  dans 
le  Sahara. 


Nombre  d'habitants.  .   .   . 

—  d'oasis  et  annexes  . 

—  de  palmiers.   .   .   . 

—  d'arbres  fruitiers.  . 

—  de  puits  artésiens 

•  arabes 

—  de  behour  .... 

—  de   puits   artésiens 

français 

—  de  litres  à  la  minute. 

Disse. 

■111880. 

■Il  nos  ■!!  1880. 

6.67â 

31 

359.300 

40.000 

282 
21 

52.767 

12.827 

37 

517.565 

90.000 

434 
16 

59 
124.916 

6.055 

6 

158.263 

50.000 

152 

59 
72.149 

D'après  M.  Jus  qui  a  pris  une  grande  part  à  ces  travaux,  les 


^  On  peut  Toir  pour  plus  de  détails  le  rapport  de  H.  Dubocq  sur  le  Sahara  oriental  de 
U  province  de  Constantine.  Rapport  du  jury  de  VExposition  universelle  de  i9Ql,  p.  32. 
*  BulUtin  de  la  Société  géologique,  2*  série,  t.  XIY,  1856. 


i8i  ROLE  DES  LITHOCLASES  DE  DITERS  ORDRES. 

sondages  exécutés  dans  le  Sahara  et  le  Hodna  du  départe- 
ment de  Gonstantine,  de  1856  à  1882,  se  sont  élevés  au 
nombre  de  199  représentant  une  profondeur  totale  forée 
de  16  kilomètres  325  mètres  et  ayant  fourni  270  nappes 
d*eau  ascendantes  et  552  nappes  jaillissantes,  débitant 
ensemble  209759  litres  à  la  minute,  desquels  on  a  capté 
194105  litres  à  la  minute,  soit  252594  mètres  cubes  par 
24  heures. 

Les  recherches  d'eau  potable  exécutées  pendant  la  même 
période  représentent  une  profondeur  totale  forée  de  6  kilo- 
mètres 457  mètres  et  ayant  fourni  258  nappes  ascendantes 
potables  et  saumâtres. 

Au  1*  juillet  1882,  la  profondeur  totale  forée  dans  le  dé- 
partement de  Constantine  était  donc  de  22  kilomètres  780 
mètres. 

La  dépense  totale  occasionnée  par  tous  ces  travaux  s'élève 
à  3  897  524  francs. 

■uuMn-BiMi-Ha4j«r  9  Mmee  tfMnMlle^  —  Parmi  Ics  nom- 
breuses sources  thermales  de  l'Algérie,  il  en  est  qui  sortent 
de  cassures  du  terrain  tertiaire.  Telles  sont  les  sources  ther- 
males d'Hamman-Bou-Hadjar  (bains  Père  des  pierres)  situées 
à  50  kilomètres  environ  au  S.  0.  d'Oran,  près  de  l'extrémité 
occidentale  du  Sebka  d'Oran.  Elles  se  font  jour  à  travers 
quatre  longues  fentes,  à  peu  près  dirigées  N.  S.,  qui  ont 
coupé  les  couches  du  terrain  tertiaire  et  que  l'on  peut  con- 
sidérer comme  de  véritables  fllons  d'eau. 

Ain  NonlMy,  près  Hoateffuiem.  —  C'cst  d'uUC  faille  qUC  SOft, 

d'après  M.  Pouyanne,  la  source  thermale  d'Aïn  Nouissy  près 
Mostaganem,  comme  l'indiquent  les  figures  92  et  93. 

«  L.  Ville.  Provinces  d'Alger  et  (FOran,  1851,  p.  258. 


*i7P««    


ROLE  DES  LITHOGIASES  SIMPLES.  185 

En  Egypte,  comme  en  Algérie,  les  anciens  ont 


Fig.  91  —  Plan  montrant  U  position  de  la  source  S  d'Aîn  Nouissy  prés  Hostaganem  qui  sort 
d'une  faille  dirigée  ouest-est;  m,  terrain  miocène;  p,  terrain  pliocène.  —  D'après  M.  Pouyanne 


laissé  des  témoignages  de  leurs  connaissances  relativement 


./..  ■  V  .  : .' 


Fig.  95.  —  Coupe  dirigée  suivant  la  ligne  AB  du  plan  précédent  montrant  la  position  de  la 
source  S  d'Ain  Nouissy,  sur  une  faille  séparant  le  terrain  miocène  m  du  terrain  pliocène  p, 
—  Diaprés  M.  Pouyanne. 


à  la  «  mer  sous  terre,  »  courant  souterrain  qu'on  a  supposé 
provenir  du  Darfour. 

C'estainsi  que  la  grande  oasis  de  Thèbes,  de  100  kilomètres 
de  long  sur  8  à  16  kilomètres  de  large,  ne  peut  avoir  dû  sa 
fertilité  qu'aux  puits  forés  dont  son  sol  est  criblé. 


186  ROLE  DES  LITHOCLASES  DE  DIYERS  ORDRES. 

D'après  M.  Schweinfurth,  les  cultures  de  cette  oasis  dé- 
pendent actuellement  de  l'existence  de  75  sources  d'arro- 
sage, fournies  par  des  puits  forés.  Elles  sont  toutes  thermales 
et  d'une  température  variant  de  25  à  30*.  Ces  puits  creusés 
par  un  procédé  inconnu  datent,  sans  exception,  de  temps  an- 
ciens ;  la  profondeur  des  forages  qui  varie  de  48  à  80  mètres 
est  en  général  de  60  mètres.  Les  sources  ensablées,  dites 
aveuglesy  se  comptent  par  centaines.  Quatre  temples  dont  la 
construction  remonte  au  moins  au  cinquième  siècle  avant 
J.-C,  et  sept  grands  châteaux  du  temps  de  l'empire  Romain, 
rappellent  l'antique  prospérité  de  ce  pays  et  l'importance 
qu'il  devait  avoir  aux  premiers  siècles  de  notre  ère.  Des 
ruines  nombreuses  de  maisons  construites  en  voûtes,  des 
couvents,  des  métropoles  du  temps  chrétien  bâties  en 
briques  crues,  des  colombiers  {borg)  innombrables,  tous 
plus  ou  moins  bien  conservés,  se  trouvent  disséminés  sur 
tout  le  pays*. 


—  Il  est  remarquable  qu'en  Auvergne  un 
grand  nombre  de  villages  soient  construits  sur  les  argiles 
sableuses  et  très  rapprochés  de  plateaux  basaltiques.  Cette 
préférence  n'est  pas  due  au  hasard;  les  argiles  sont  imper- 
méables et  l'eau  qui  s'écoule  sous  les  plateaux  de  basalte  est 
arrêtée  par  les  argiles  et  forme  des  sources.  C'est  la  nais- 
sance de  ces  sources,  à  la  jonction  des  deux  roches,  qui  dé- 
termine la  situation  des  villages. 

Toutefois,  ces  sources  qui  coulent  de  la  tranche  des  pla- 
teaux basaltiques  sont  moins  abondantes  que  celles  qui 
naissent  à  l'extrémité  des  coulées  modernes,  dont  il  a  été 
question  plus  haut.  Les  basaltes,  en  effet,  maintenant  ré- 


*  Bulletin  de  la  Société  de  géographie,  0«  série,  t.  VU,  p.  628. 
Leooq.  Eattx  minéraleê  de  V Auvergne. 


ROLE  DES  LITHOGLÀSES  SIMPLES.  187 

duits  à  de  simples  lambeaux,  permettent  à  Teau  de  s'échap- 
per par  de  nombreuses  issues,  tandis  que  les  coulées  mo- 
dernes recueillent  et  filtrent  l'eau  de  longues  et  profondes 
vallées. 

Il  existe  plusieurs  sources  de  cette  catégorie  aux  environs 
de  Clermont. 

Telle  est  celle  qui,  à  Gergovia,  sort  sous  le  basalte,  du  côté 
de  Clermont  et  qui  probablement  fournissait  l'eau  aux 
Gaulois,  pendant  qu'ils  soutenaient  si  vaillamment  leur  po- 
sition devant  César. 

Telles  sont  encore,  parmi  beaucoup  d'autres,  celles  qui 
alimentent  les  fontaines  de  Besse;  celles  de  Bergonne  près 
d'Issoire,  une  très  belle  source  près  du  lac  Chauvet,  et  plu- 
sieurs autres  dans  le  massif  du  Cézalier. 

Dans  le  Cantal,  le  basalte  fissuré  verticalement  laisse  des- 
cendre les  eaux  qui  tombent  sur  le  plateau  jusqu'aux  lapillis 
basaltiques  décomposés  et  transformés  en  une  sorte  d'argile 
imperméable.  C'est  le  cas,  d'après  M.  Fouqué,  pour  la  source 
du  ruisseau  de  Faillitoux,  l'un  des  affluents  de  la  rive  droite 
de  la  Cère,  et  pour  les  sources  froides  du  village  de  Chau- 
desaigues. 

HMiie-iioire.  —  D'autres  sources  importantes  sortent  dans 
les  mêmes  conditions.  Le  terrain  volcanique  du  plateau  du 
Velay  présente,  outre  les  nappes  de  basalte  pierreux  qui  sont 
remplies  de  fentes,  et  les  scories  et  cendres  à  l'état  fragmen- 
taire (clappiers),  des  assises  de  basalte  transformé  en  terre 
noirâtre  assez  compacte,  ainsi  que  des  cendres  et  scories 
agglutinées,  qui  arrêtent  les  eaux. 

C'est  par  la  même  raison  que  plusieurs  anciens  cratères 
contiennent  des  lacs,  dont  le  niveau  est  supérieur  à  celui 
de  la  plus  grande  partie  des  terrains  environnants;  comme 
le  lac  de  la  Godivelle,  dans  la  montagne  de  Cézalier. 


188  ROLE  DES  UTUOGUSES  DE  DIViiiRS  ORDRES. 

iriMide)  eoatrée  d'Aatrim.  —  Un  dernier  exemple  nous  sera 
fourni  par  les  grandes  nappes  de  basalte  et  de  dolérites  mio- 
cènes du  comté  d'Antrim  en  Irlande.  Imperméables  par 
elles-mêmes,  elles  permettent  à  l'eau,  à  cause  de  leurs 
nombreuses  fissures,  de  s'infiltrer  dans  leur  masse  et  de 
descendre  jusqu'aux  lits  argileux  qui  sont  leurs  subordonnés, 
de  manière  à  produire  plusieurs  zones  de  sources. 

En  outre,  le  dépôt  de  minerai  de  fer,  qui  constitue  un  ho- 
rizon à  200  mètres  plus  b^s,  contient  une  argile  imper- 
méable avec  bauxite,  qui  provoque  aussi  un  niveau  d'eau, 
et  manifeste  son  affleurement  par  un  grand  nombre  de 
sources. 


Terrains  crétacés. 

Dans  le  nord  de  la  France  et  dans  diverses  autres  cen- 
trées, la  base  de  la  craie  blanche,  vers  son  contact  avec  les 
roches  argileuses  sous-jacentes,  présente  un  niveau  d'eau 
important,  pour  les  puits  qui  y  trouvent  leur  alimentation, 
ainsi  que  pour  les  sources  qui  en  jaillissent,  lorsque  le  sol 
naturel  est  assez  profondément  entaillé  pour  leur  donner 
issue. 

Les  lithoclases  de  la  craie  sont  souvent  très  étendues,  ainsi 
qu'on  le  voit  sur  les  falaises  de  la  Normandie,  où  l'œil  les 
suit  du  haut  en  bas  des  escarpements  verticaux  de  100  mè- 
tres. Voir  plus  haut  la  figure  71,  page  134. 

Ces  nombreuses  lithoclases  expliquent  comment,  jusqu'à 
une  certaine  hauteur,  variable  avec  les  saisons,  au-dessus  de 
la  couche  imperméable,  la  craie  est  comme  une  éponge 
saturée;  aussi  il  n'est  pas  nécessaire  de  creuser  jusqu'à  cette 
couche  pour  trouver  l'eau. 


ROLK  DES  UTfiOaÂSES  SIMPLES.  iK9 

Si  les  terrains  tertiaires  donnent,  comme  on  vient  de  le 
voir,  fréquemment  des  eaux  jaillissantes,  les  terrains 
crétacés,  en  raison  de  la  plus  grande  étendue  de  leurs  bas- 
sins, les  surpassent  bien  souvent  par  l'abondance  de  leur 
débit.  Toutefois,  et  comme  on  devait  s'y  attendre,  le  résultat 
u  est  ordinairement  obtenu  qu'après  des  forages  plus  pro- 
fonds. 


de  ChAloM-Mr-MarM.  —  LcS  puitS   pcrcés  daUS  IcS 

plateaux  crétacés  des  environs  de  Châlons-sur-Marne  donnent 
des  notions,  quant  au  régime  de  l'eau  phréatique,  comme 
l'indique  page  62,  la  figure  56.   On  y  voit  comment  des 


Fi^.  94.  —  Ondulation  de  l'eau  phréatique  dans  le  plateau  du  camp  de  Châlons  ;  NN,  furface 
sDpérieure  de  la  nappe  d'eau  A  son  miDimum  (septembre)  ;  S,  S,  S,  S,  sources  permanentes  ou 
sommes.  CC,  craie  fissurée;  AÂ,  couche  de  craie  marneuse  qui  arrête  les  eaux  d'infiltration 
de  U  craie. 


puits  qui  sont  souvent  très  profonds,  rencontrent  la  nappe 
à  des  niveaux  très  différents,  même  sur  des  points  voisins; 
le  maximum  et  le  minimum  dans  chacun  de  ces  puits 
s'écarte  aussi  du  niveau  des  eaux  courantes  :  la  rivière  Soude 
à  Chenier;  la  Marne  au  Moulin  Saint-Michel,  à  Yérigneul  et 
à  Pogny;  le  ruisseau  de  Man  au  Moulin  Picot. 

Dans  le  plateau  du  camp  de  Châlons  (fig.  94),  le  niveau 
général  moyen  de  l'eau  phréatique  présente  des  ondulations 
assez  prononcées,  en  rapport  avec  celles  de  la  surface  du 
sol;  elle  s'élève  jusqu'à  20  mètres  au-dessus  du  niveau  d'é- 
tiage,  loin  des  ruisseaux  où  elle  peut  se  déverser  sous  forme 
de  sources  permanentes,  telles  que  celles  de  Mourmelon-le- 


190  ROLE  DES  LITHOCLASES  DE  DIYERS  ORDRES. 

Grand,  de  Clairfond,  de  Cuperly  et  de  Puits  Gheneu;  cette 
dernière  consiste  en  eaux  dites  bâtardes  qui  tarissent  fré- 
quemment. 

DépariMiettt  de  la  Marae  et  réfioM  voMiMft*.  — Si  leS  SOUrCCS 

sont  rares  sur  le  plateau  crayeux,  il  n'en  est  pas  de  même  le 
long  de  la  falaise  que  Ton  appelle  les  monts  de  Ghampagne. 
La  séparation  entre  la  craie  et  les  marnes  crayeuses  est  mar- 
quée par  des  sources  nombreuses  et  assez  abondantes.  Aussi 
toutes  les  communes  qui  se  trouvent  au  pied  des  monts  de 
Ghampagne,  Saulces^hampenoise,  Yaux-Ghampagne,  Cou- 
lommes,  Tourcelles,  Gontreuves,  Mont-Saint-Martin,  Lin, 
Manre,  sont-elles  bien  pourvues  d'eau. 

Gomme  il  arrive  dans  les  terrains  perméables,  les  sources 
de  la  craie  sortent  toutes  à  peu  de  hauteur  au-dessus  des 
thalwegs  des  vallées  les  plus  profondes;  jamais  on  ne  les 
trouve  à  flanc  de  coteau.  Ge  sont  des  sources  plus  ou  moins 
considérables  qui  habituellement  portent  dans  la  Ghampagne 
sèche  le  nom  générique  de  Somme. 

Ainsi,  dans  le  département  de  la  Marne,  la  source  de  la 
Suippe  s'appelle  Sommcsuippe;  celle  de  la  Vesles,  Somme- 
vesles;  celle  de  la  Tourbe,  Sommetourbe;  celle  de  laBionne, 
Sommebionne;  celle  de  l'Yèvre,  Sommeyèvre;  celle  du  Pj', 
Sommepy;  celle  de  la  Soude,  Sommesoude;  dans  le  déparle* 
ment  de  l'Aube,  la  source  du  Puits  s'appelle  Sompuis;  celle 
de  rOrvin,  Sommefontaine»  et  une  autre,  Somsous, 

«  Les  eaux  pluviales,  dit  Belgrand  à  cette  occasion,  ne 
ruisselant  jamais  à  la  surface  du  sol,  les  sources  sont  bien 
en  effet  l'origine,  le  sommet  de  chaque  ruisseau.  »  Ce  nom  ^ 
des  sources  initiales  s'est  étendu  jusqu'en  Ghampagne  hu- 
mide, où  il  n*a  plus  la  même  signification  ;  car  le  terrain 

*  Belgrand.  Eaut  nouvelles. 


ROLE  DES  LITBOaiSES  SIMPLES.  191 

étant  imperméable,  le  cours  d'eau  remonte,  en  temps  de 
pluie,  plus  haut  que  la  source  désignée  sous  le  nom  de 
Somme.  Telles  sont  :  la  source  de  l'Aisne  (Meuse)  Sommaine  ; 
la  source  de  la  Voire  (Haute-Marne)  Sommevoire  ;  la  source 
d'un  affluent  de  l'Ornel  (Meuse)  Sommelonne*. 

On  doit  encore  considérer  comme  dérivant  du  même  mot 
les  noms  suivants  :  source  de  l'Ain,  Champagne  sèche  (Marne), 
Sùuain;  source  de  la  Laines,  Champagne  humide  (Haute- 
Marne),  Soulaines. 

Il  y  a  toujours  près  de  ces  sources  un  village  ou  un  hameau 
qui  porte  le  même  nom. 

Dans  les  terrains  crayeux,  ainsi  que  dans  les  terrains  ooli- 
thiques,  les  noms  Abîme,  Bîms  s'appliquent  aux  sources  qui 
jaillissent  d'un  gouffre;  telles  sont  :  à  Balnot-la-Grange 
(Aube),  le  Bime,  source  de  la  Marve;  le  Bime,  à  Cérilly 
(Yonne)  (voir  plus  haut,  p.  148,  fig.  81),  une  des  plus  belles 
sources  que  la  ville  de  Paris  possède  dans  le  bassin  de  la 
Vanne;  l'Abîme  près  Pilliers,  vallée  de  l'Orvanne  (Seine-et- 
Marne).  Dans  la  vallée  de  la  Vanne,  ce  nom  désigne  un  grand 
nombre  de  sources  qui  jaillissent  dans  les  marais. 

Les  niots  CrOf  Gouffre,  Fosse,  ont  la  même  signification. 
Ainsi  on  trouve  les  Gros,  à  Charmont  (Aube),  vallée  de  la  Bar- 
buisse,  le  Gouffre  de  la  Prairie,  près  de  Nemours  (Seine-et- 
Marne),  vallée  du  Loing;  la  Fosse  d'Yonne,  à  Tonnerre,  vallée 
de  l'Armançon  ;  la  Pevie-Fosse  (la  Laide-Fosse),  vers  les  sources 
de  la  Biaise.  Ces  sources  jaillissent  toutes  d'une  excavation 
profonde. 

On  trouve  encore  dans  la  même  région  et  sur  les  bords  de 
la  Brie,  des  sources  dont  le  nom  dérive  du  mot  sourdre  : 

*  En  Algérie,  et  principalement  dans  les  hauts  plateaux  du  Saliara,  d*après  une  re- 
niarque  de  M.  Pérou,  un  grand  nombre  de  petites  localités  ou  de  campements  arabes 
situés  autour  des  rares  sources  de  cette  région  portent  le  nom  de  Râs  ;  Ràs-el-Oued, 
Ràs-el-Ain,  Râs-el-Ma,  Râs-el-Ayouiit  etc.;  ce  qui  se  traduit  littéralement  par  le  mot 
tommet  ou  tétc  de  la  rivière; 


103  ROLE  DBS  LITHOGLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

Source  de  la  Soude,  affluent  de  la  Sommesoude,  Soude 
Notre-Dame^  et  un  peu  plus  bas  sur  le  même  ruisseau,  Sour 
dron.  Source  de  Cubrj-,  bord  de  la  Brie,  près  d'Épernay 
(Marne)  Sourdon*. 

On  a  encore  conservé  dans  le  bassin  de  la  Seine  quelques 
noms  gallo-romains  qui  s'appliquent  à  certaines  grandes 
sources;  en  Basse  Bourgogne,  c'est  le  nom  de  Douix,  Douille, 
Duée,  Duis,  qu'on  trouve  le  plus  souvent.  Nous  citerons  no- 
tamment les  sources  suivantes,  auxquelles  ce  nom  a  été 
donné  :  source  initiale  de  laSeine,  àSaint-Germain-la-Feuille 
(Côte-d'Or),  Douix;  la  belle  source  de  Châtillon-sur-Seine, 
Douix;  grande  source  de  l'hôpital  de  Bar-sur-Aube,  Dkuu; 
source  près  de  Montbard  (Côte-d'Or),  Douille;  source  près 
de  Monthérie,  vallée  de  la  Renne,  affluent  de  l'Aujon,  te 
DuiU. 

Ce  nom  se  trouve  aussi  en  Champagne  et  en  Brie  :  source 
dérivée  à  Bouilly  (Aube),  Cro  {cretix,  gouffre)  de  Dhuie; 
grande  source  de  Soulaines  (Aube),  Dhuis;  source  à  Aix-en- 
Othe,  vallée  de  la  Vanne  (Aube),  Duée;  source  de  Pargnj 
(voir  plus  haut  p.  83,  fig.  47)  dérivée  à  Paris,  bassin  de  la 
Marne  (Brie)  Dhuis.  Ces  noms,  ajoute  Belgrand,  sont  évidem- 
ment dérivés  du  mot  latin  ductus  (aqueduc),  dont  nous  avons 
tiré  aussi  le  mot  conduite.  Il  y  a  une  faute  d'orthographe 
dans  le  mot  dhuisj  Vh  devrait  être  supprimé. 

On  fait  aussi  usage,  en  Basse  Bourgogne  et  en  Champagne, 
des  noms  suivants,  qui  s'appliquent  à  la  source  initiale 
d'un  cours  d'eau  :  source  de  l'Arce  (Aube),  Fontarce;  source 
de  la  Vanne  (Aube),  Fonlvannes;  grande  source  des  Trannes, 
vallée  d'Aube,  les  Fonts. 

Il  est  évident  que  la  première  syllabe  de  ces  noms  est  déri- 


*  Dans  le  Soissonnais,  tes  lieux  dit*  du  cadastre  qui  correspondent  aux  sources  de 
l'argile  plastique  portent,  presque  partout,  les  noms  de  Soudray,  Soudroy. 


ROLE  DES  LITHOCUSES  SIMPLES.  193 

vée  du  mot  latin  foM.  Ordinairement  le  village  bâti  près  de 
la  source  porte  le  même  nom. 

Dans  le  bassin  de  la  Seine,  le  terrain  néocomien  donne 
naissance  à  des  sources  qui,  à  cause  de  la  force  qui  les  fait 
surgir,  ont  été  nommées  artésiennes*.  Les  eaux  absorbées  par 
les  terrains  oolithiques  sont  si  abondantes  que,  lorsque  ces 
calcaires  s'enfoncent  sous  les  terrains  néocomiens,  une  partie 
de  l'eau  emprisonnée  se  fait  jour  çà  et  là  par  des  puits  ou 
cheminées,  au  travers  des  couches  argileuses  qui  les  recou- 
vrent. Telles  sont  les  sources  de  la  Barse  à  Yendœuvres,  de  la 
Laines  à  Soulaine,  de  la  Voire  à  Somme-Voire,  de  Somme- 
lonue,  de  Brousseval.  Suivant  M.  Tombeck,  plusieurs  de  ces 
sources  jaillissent  de  puits  profonds  qui  descendent  évidem- 
ment jusqu'au  terrain  jurassique. 


•ementHosaie.  — Lcs  observatious  intéressantes 
que  M.  Pérou  a  faites  en  Champagne  septentrionale  méritent 
d'être  rapportées*.  Tout  autour  du  plateau  de  la  Champagne 
septentrionale,  dite  Pouilleuse,  dont  l'altitude  dépasse  rare- 
ment 200  mètres,  de  nombreuses  rivières  aux  eaux  abon- 
dantes viennent  prendre  naissance.  Telles  sont,  pour  ne 
citer  que  les  principales,  le  Fion,  la  Vière,  l'Auve,  l'Yèvre, 
la  Moivre,  la  Yesle,  la  Noblette,  la  Tourbe,  la  Bionne,  la 
Suippe  (figure  96). 

Dans  ces  rivières,  pas  de  ramifications  du  cours  supérieur, 
aucun  affluent,  une  source  unique,  habituellement  puissante, 
parfois  presque  vauclusîenne,  et  toujours  assez  abondante 
pour  faire  marcher  des  moulins,  à  quelques  centaines  de 
mètres  de  sa  sortie  de  terre. 

Autour  de  ces  sources,  seuls  points  habitables  de  cette 


*  Belgrand.  Ouvrage  précité,  p.  111. 

'  Péron.  Association  française,  session  de  lieimst  1880,  p.  534. 

13 


iU 


ROLE  DES  LITHOCLiSES  DE  WVERS  ORDRES. 


région  presque  déserte,  se  sont  groupés  des  villages  qui  ont 
pour  la  plupart  emprunté  leur  nom  aux  sources  auxquelles 
ils  doivent  la  vie,  en  rappelant,  comme  on  Ta  vu  plus  haut, 
en  même  temps  Torigine  des  rivières  qui  en  sont  formées. 


EdidJe 


âcpbl 


Fig.  96.  —  Carte  montrant  la  disposition  de  quelques-unes  des  principales  sources  jaillis»nl 
des  plateaux  crétacés  dans  le  N.-E.  de  la  France,  ainsi  que  celles  de  la  Dhuis  qui  sounieai 
du  terrain  tertiaire. 


L'explication  du  phénomène  paraît  se  trouver  en  grande 
partie  dans  la  nature  et  la  disposition  des  divers  strates  géo- 
logiques qui  constituent  le  sol  et  le  sous-sol  de  cette  partie 
de  la  Champagne  (fig.  97). 


ROLE  DES  LITHOGLASES  SIMPLES. 


195 


La  zone  de  gaize  argileuse  forme,  le  long  du  ifersant  occi- 
dental de  TArgonne,  le  sol  de  la  région  déprimée  qui  s'étend 
au  pied  des  collines,  depuis  Sainte-Menehould  jusqu'au  sud 
de  Givry-en-Argonne.  Cette  roche  imperméable  retient  toutes 
les  eaux  à  la  surface  en  empêchant  leur  infiltration  dans 
le  sol,  et  elle  donne  naissance  à  un  pays  particulièrement 
marécageux.  Son  affleurement  est  marqué  par  une  ligne 
presque  ininterrompue  d'étangs  et  de  marais  qui  s'échelon- 
nent parallèlement  à  la  crête  del'Argonne,  c'est-à-dire  paral- 
lèlement à  la  direction  des  couches  géologiques.  Parmi  les 
principaux,  il  faut  citer  l'étang  Le  Roi,  à  l'ouest  de  Sainte- 


Fig.  97.  —  Disposition  des  concbes  appartenant  au  terrain  crétacé  dans  une  partie  de  la  Cham- 
pagne. —  g,  gaize  de  l'Argonne;  Ci,  argile  de  la  gaize  supérieure;  Gr.  sable  vert  à  Pecten 
atler;  Ca,  marne  de  la  craie  chlorilée  ;  âi  craie  tuffeau  ;  C,  craie  blanche  à  Micraster, 

Menehould,  les  étangs  d'Argers,  de  Trienval,  d'Élize,  de 
Roussi-Pré,  des  Fosses,  d'Oie,  de  La  Lieue,  de  Noirlieu,  de 
Haronchêne,  etc. 

Au-dessus  d'une  assise  sableuse  superposée  à  la  gaize,  les 
couches  de  craie  forment  un  sol  très  ingrat,  éminemment 
perméable,  qui  absorbe  avec  la  plus  grande  facilité  les  eaux 
pluviales.  Une  très  petite  partie  de  ces  eaux  peut  être  arrêtée 
par  les  marnes  turoniennes  et  donner  lieu,  par  places,  à  un 
petit  niveau  aquifère  secondaire  ;  mais  la  grande  masse  des 
eaux  descend  et  s'arrête  dans  les  sables  verts,  où  elle  se  réu- 
nit aux  eaux  absorbées  directement  par  les  sables  eux-mêmes, 
le  long  de  leurs  affleurements. 


196  ROLE  DES  UTHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

Ainsi  il  existe,  au-dessous  du  plateau  d'Auve,  une  puis- 
sante nappe  aquifère  dont  les  eaux  emprisonnées  ont  une 
tendance  à  remonter,  par  toutes  les  issues,  jusqu'à  la  hauteur 
de  leur  niveau  supérieur.  Toutes  les  fractures  qui  sont  si 
nombreuses  dans  la  craie  donnent  passage  à  ces  eaux  ascen- 
dantes, et  c'est  là,  en  presque  totalité,  l'origine  des  sources 
£i  nombreuses  et  si  abondantes  que  l'on  voit  tout  autour  du 
plateau  qui  nous  occupe. 

Il  suffît  de  rapprocher  l'altitude  de  toutes  ces  sources  de 
celle  de  l'affleurement  extérieur  des  sables  verts  et  aussi 
du  niveau  des  étangs  qui  forment  la  bordure  orientale  du 
plateau  pour  être  frappé  de  la  corrélation  qui  existe  entre 
ces  diverses  altitudes.  Tandis  que  celle  des  étangs  est  en 
moyenne  de  160  mètres,  les  sources  de  l'Yèvre  sont  à  158  mè- 
tres, celles  de  la  Moivre  à  150,  celles  du  Fion  à  154,  celles 
de  la  Vesle  à  155,  celles  de  la  Suippe  à  150,  celles  de  la 
Tourbe  à  152,  celles  de  la  Bionne  à  157,  celles  de  l'Auve  à 
160,  etc. 

C'est  donc  ainsi,  à  une  altitude  de  50  mètres  environ  au- 
dessous  des  sommets  du  plateau  que  se  trouvent  toutes  les 
sources.  Aucune  autre  ne  parait  se  montrer  au-dessus  de  ce 
niveau  général,  et  cette  circonstance  s'explique  facilement, 
la  force  ascensionnelle  des  eaux  étant  déterminée  et  limitée 
par  leur  niveau  supérieur,  lequel  ne  dépasse  guère  la  cote 
moyenne  de  150  mètres. 

Ces  sources  sont  donc  subartésiennes,  et  l'ascension  des 
eaux  s'y  fait,  grâce  à  l'existence  de  cassures  dans  la  masse 
calcaire  et  marneuse  qui  surmonte  la  nappe  aquifère. 
L'existence  de  ces  cassures,  à  la  vérité,  n'est  pas  facile  à 
constater,  en  raison  de  l'uniformité  des  assises  crayeuses 
qui  ne  permet  pas  de  préciser,  par  la  comparaison  des 
couches  juxtaposées,  la  discontinuité  de  ces  couches  et  leur 
dénivellement  relatif.  Mais  tout  porte  à  croire  cependant 


ROLE  DES  LITHOGUSES  SIMPLES.  107 

qu'elles  existent,  et  on  a  pu  en  constater  des  traces,  notam- 
ment près  du  village  de  Sommc-Bionne.  On  a  prétendu  en 
outre  que  la  plupart  des  sources  sont  alignées  suivant  des 
directions  sensiblement  rectilignes,  ce  qui  semble  indiquer 
que  divers  groupes  pourraient  devoir  leur  existence  à  la  pré- 
sence d'une  même  fracture. 

Un  autre  caractère  de  ces  rivières,  c'est  l'uniformité  de 
leur  débit  et  l'absence  totale  de  grandes  variations  dans  leur 
niveau.  Elles  ne  connaissent  ni  ces  crues  subites  que  dé- 
terminent si  fréquemment  les  pluies  abondantes  dans  les 
rivières  à  réseau  d'affluents  très  ramifiés,  ni  la  sécheresse 
habituellement  provoquée  dans  ces  mêmes  rivières  par  les 
chaleurs  estivales. 

MptfptemcBt  de  l'Aime.  —  D'Ârchiac  a  très  bien  étudié  cette 
disposition  dans  le  département  de  l'Aisne*,  où  les  glaises 
bleues  supérieures  placées  entre  la  craie  à  silex  et  le  grès 
vert  sont  importantes  au  point  de  vue  hydrognostique. 
Outre  qu'elles  donnent  naissance  aux  sources  de  la  Somme 
et  de  l'Escaut  (près  du  Catelet),  elles  retiennent  la  nappe  qui 
alimente  la  plupart  des  puits  percés  dans  la  craie. 

Bien  que  cette  nappe  aquifère  soit  fort  étendue,  son 
niveau  est  loin  d'être  constant;  elle  n'est  pas  continue  et  sa 
pente  n'est  pas  régulière.  Il  existe  très  probablement  des 
bassins  en  partie  circonscrits  ayant  entre  eux  des  relations 
plus  ou  moins  directes;  il  paraît  y  avoir,  à  ces  profondeurs, 
des  circonstances  comparables  à  celles  qui  sont  connues 
pour  les  nappes  aquifères  du  terrain  tertiaire*. 

A  Saint-Quentin,  les  glaises  forment  le  lit  de  la  Somme 
et  la  nappe  d'eau  qui  alimente  les  puits  de  la  ville  descend 
au  même  niveau. 

*  Mémoireê  de  la  Société  géologique  de  France,  %•  série,  1. 1,  p.  328, 1880. 

'  Cette  manière  de  Toir  est  confirmée  par  le  creusement  des  puits,  qui,  quoique  très 


198  ROLE  DES  UTHOCUSES  DE  DIVERS  ORDRES. 

Awë^wmm  :  mrrmmâimtmtmt  ém  Egiliel*.    —   Dans    TarrondisSC- 

ment  de  Rethel,  les  habitants  des  villages  de  la  craie  se  pro- 
curent souvent  Teau  au  moyen  de  puits.  Quand  un  puits 
vient  d'être  creusé,  il  a  d*abord  un  faible  débit;  ce  n'est 
qu'au  bout  d'un  certain  temps  que  l'eau  arrive  plus  abon- 
dam  ment  par  paroiless. 

Ces  puits  atteignent  parfois  une  grande  profondeur. 
Âinsiy  dans  les  villages  élevés  comme  à  Hannogne  et  Ban- 
nogne,  ils  ont  60  mètres  et  plus;  ils  sont  alors  intaris- 
sables. Il  est  d'ailleurs  facile  de  rendre  leur  débit  plus 
considérable  en  les  approfondissant  ou  mieux,  en  creusant 
des  galeries  horizontales  qui  augmentent  la  surface  de 
suintement. 

Comme  on  Ta  déjà  vu,  les  niveaux  auxquels  se  rencontre 
Teau  dans  les  différents  puits  d'une  même  contrée,  ne  se 
trouvent  pas  sur  un  plan  horizontal,  mais  sur  un  plan  in- 
cliné vers  les  vallées.  L'inclinaison  de  ce  plan  diminue  dans 
les  sécheresses  et  augmente  dans  les  hautes  eaux  ;  en  sorte 
que  les  puits  les  plus  éloignés  des  vallées  sont  ceux  où  le 
débit  commence  à  baisser.  Il  en  est  de  même  pour  les 
sources  ;  les  plus  élevées  tarissent  les  premières. 

La  craie  se  colmate  facilement.  Ses  pores  sont  bouchés 
par  les  petites  particules  crayeuses  amenées  par  les  eaux,  et 
elle  devient  alors  imperméable.  C'est  ce  que  prouve  la  pré- 
sence de  certaines  mares  dans  les  villages  champenois;  il 
suffit  de  curer  ces  mares  et  d'enlever  la  boue  crayeuse  qui 
en  tapisse  le  fond  pour  que  l'eau  disparaisse.  Pour  le  même 

voisins,  atteignent  Teau  &  des  profondeors  souvent  fort  diflérentes,  de  même  qu'anx 
environs  de  diàlons.  Dana  les  temps  de  grande  sécheresse,  un  certain  nombre  de  puits 
creusés  dans  la  craie  tarissent  complètement,  tandis  qu'à  une  très  petite  distance, 
d'autres  ne  sont  jamais  privés  d'eau.  On  a  creusé,  à  Tune  des  fermes  de  Ferriëres,  on 
puits  de  90  mètres  sans  trouver  d'eau,  et  on  a  été  obligé  de  l'abandonner,  i  cause  d'an 
grand  dégagement  de  gaz  qui  asphyxiait  les  ouvriers,  tandis  que  dans  une  ferme  conti- 
gue  à  la  précédente,  un  puits  qui  n'a  que  35  à  40  mètres  ne  tarit  pas. 
*'  Meugy  et  Nivoit.  Carte  géologique  de  Reihel,  1878. 


ROLE  DES  LITHOGLASES  SIMPLES.  199 

motif,  il  faut  au  contraire  curer  les  puits  de  temps  en  temps 
pour  rendre  les  suintements  plus  abondants. 


Anbe  eC  partlevUèrenieiit  ImmsIb  de  Ui  Vanne.  —  Le  départe- 
ment de  TAube  présente  des  faits  semblables;  d'après 
LeymerieS  les  infiltrations  qui  pénètrent  dans  la  craie  s'ar- 
rêtent aux  couches  marneuses  de  la  partie  inférieure  et  s'y 
rassemblent  en  un  grand  nombre  de  points  avec  un  volume 
souvent  considérable.  C'est  ainsi  que  la  base  de  la  falaise 
crayeuse*  l'un  des  traits  principaux  du  relief  du  pays,  se 
trouve  marquée  depuis  Racines  jusqu'à  Chavanges,  par  une 
ligne  de  sources,  remarquables  surtout  du  côté  de  l'ouest  par 
leur  abondance,  leur  constance  et  leur  limpidité.  Telles 
sont  les  belles  fontaines  de  Blenne  et  de  Forest,  près  d'Auxon, 
celle  qui  est  située  au  milieu  de  ce  village  lui-même  ;  celles 
de  Montigny  et  de  Chamoy,  qui  à  leur  sortie  font  tourner 
plusieurs  moulins;  la  source  de  la  Vanne  sous  le  village  de 
Fonlvannes,  qui  vient  contribuer  à  l'alimentation  de  Paris; 
la  source  de  la  Vienne  près  Torvilliers.  Du  côté  oriental,  les 
sources  ont  un  volume  moins  considérable,  mais  elles  sont 
également  très  nombreuses.  On  en  compte  plusieurs  dans 
les  environs  de  chaque  village.  Elles  alimentent  pour  la 
plupart  des  ruisseaux  qui  contribuent  pour  beaucoup  à  la 
richesse  des  belles  prairies  qui  couvrent  l'argile  téguline. 

Les  puits  creusés  sur  le  plateau  sont  en  général  profonds, 
ainsi  qu'on  devait  s'y  attendre  d'après  les  considérations 
précédentes;  car  ils  doivent  être  poussés  assez  bas  pour 
atteindre  les  marnes  crayeuses.  Aussi,  tandis  que  beaucoup 
n'ont  que  de  33  à  35  mètres,  peut-on  en  citer  dont  la 
profondeur  va  jusqu'à  100  mètres,  comme  au  moulin  de 
Macey. 

*  Deicription  géologique  de  P Aube,  p.  248. 


300  ROLE  DES  UTHOGIASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

TMUi•^  —  De  même  que  dans  les  régions  voisines,  les 
marnes  de  la  craie  inférieure  donnent  lieu,  dans  le  départe- 
ment de  TYonne,  à  un  niveau  d*eau  d'une  très  grande  con- 
stance, qui  alimente  un  grand  nombre  de  sources,  parfois 
fort  abondantes,  situées  généralement  au  pied  de  la  grande 
terrasse  crayeuse  du  Senonais  et  du  Câlinais.  Les  principales 
sont  celles  de  Neuvy-Sautour,  Venisy,  Saint-Florentin,  Mi- 
gennes,  Lasson,  Mont-Saint-Sulpice,  Cheny,  Chichery,  Lin- 
dry,  Pourrain,  Saint-Aubin-Château-Neuf,  Fontaines  etSaint- 
Fargeau.  Elles  alimentent  TArmençon,  TYonne,  le  Loing 
et  quelques-uns  de  ses  affluents.  Cette  nappe,  en  outre, 
fournit  d'eau  les  puits  peu  nombreux  qui  s'enfoncent  dans 
la  craie,  au  voisinage  de  la  terrasse;  leur  profondeur, 
ordinairement  assez  grande,  apporte  des  données  sur 
l'épaisseur  de  la  craie  moyenne.  Les  sources  précitées 
paraissent  dues  à  un  dégorgement  des  eaux  pluviales 
qui  filtrent  au  travers  de  la  craie  et  qui  y  descendent  jus- 
qu'au niveau  du  fond  des  vallées  au-dessous  duquel  la 
craie  est  imbibée,  comme  on  l'a  vu  pour  le  camp  de  Chà- 
lons. 

L'aqueduc  romain  de  Sens,  dont  on  a  reconnu  l'existence 
dans  les  travaux  récemment  faits  pour  l'alimentation  de 
Paris,  dérivait  au  moins  trois  sources,  Saint-Philberl,  I^e 
Miroir,  Noé,  et  probablement  quatre. 

Ces  sources  proviennent  de  nappes  profondes  et  arrivent 
au  jour  par  de  véritables  cheminées  forées  dans  la  craie 
compacte.  Ces  cheminées  sont  remplies  de  cailloux  à  Saint- 
Philbert,  à  Theil  et  à  Noé,  et  de  limon  à  Vareilles.  Elles  ont 
la  plus  grande  analogie  avec  ce  qu'on  nomme  en  Cham- 
pagne btme^  en  basse  Bourgogne  abtme,  en  Gâtinais  abtme  ou 
gouffre;  seulement,  pour  qu'on  lui  applique  son  nom,  un 

*  Rtulin.  Statittique  géologique  de  l'Yonne,  p.  128. 


ROLE  DES  LITUOCLÂSES  SIUPLES.  SOI 

Mme  doit  être  béant,  comme  celui  de  Cérilly,  et  non  rempli 
de  cailloux. 

Ces  sources  sont  donc  sans  relation  avec  la  nappe  d'eau 
superficielle  des  puits.  On  peut  pratiquer  des  tranchées  à 
une  très  petite  distance  de  leur  point  d'émission  sans  les 
déplacer,  et  les  relever  d'une  certaine  quantité  sans  trop 
craindre  de  les  perdre  :  c'est  ce  qu'ont  fait  les  Romains  à 
Noé  et  à  Saint-Philbert.  L'eau  sortait  du  pied  du  mur  par 
six  barbacanes  ou  griffons,  dont  cinq  sont  encore  visibles. 
Le  dessus  de  ce  mur  est  d'origine  moderne  et  soutient  le 
chemin  de  Noé  à  Theil  ;  mais  le  bas,  appareillé  en  petits 
moellons,  est  au  contraire  une  véritable  maçonnerie  romaine. 

Iie■a▼r«^  —  Lcs  sourccs  du  Havre,  qui  proviennent  du 
terrain  crétacé  inférieur  (gaize  ou  gault),  ont  un  régime 
très  simple.  La  couche  imperméable  qui  les  soutient,  ayant 
sa  pente  vers  le  nord-est  et  son  bord  sud  très  sensible- 
ment en  relief  par  rapport  à  la  plaine,  ne  peut  être  ali- 
mentée d'eau  que  par  les  pluies  locales  tombant  sur  le  pla- 
teau. 

Le  sol,  qui  leur  sert  de  filtre,  est  considéré  comme  per- 
méable, bien  que  formé  d'une  argile  rouge  sableuse,  généra- 
lement imperméable  et  empâtant  d'abondants  rognons  de 
silex.  La  perméabilité  n'est  donc  pas  continue;  elle  n'existe 
que  sur  les  parties  fendillées  et  là  où  les  pointements  très 
perméables  de  la  craie  affleurent.  Dans  ces  conditions, 
l'eau  de  la  pluie  ne  réussit  à  pénétrer  qu'après  avoir  fait, 
comme  eau  sauvage,  de  longs  trajets  et  subi  par  évaporation 
des  pertes  importantes,  d'où  il  résulte  que  le  débit  est  faible, 
en  égard  à  la  hauteur  des  pluies  annuelles. 

L'écoulement  de  l'eau  fournie  aux  sources  du  Havre  par 

*  leurdra.  Association  française ^  1877. 


S02        ROLE  DES  LITUOGLASES  DE  DIVERS  ORDRES 

les  pluies  des  hivers  les  plus  humides  et  les  plus  efficaces 
dure  au  moins  trente  mois. 

Le  bassin  souterrain  des  sources  comprend  nécessairement 
des  plans  inclinés,  des  paliers,  des  ondulations,  des  cuvettes, 
des  poches,  des  couloirs,  etc.  Supposons  tout  d'abord  ce 
bassin  complètement  à  sec.  Les  premières  eaux  d'infiltration 
commencent  par  imbiber  toute  la  masse  filtrante,  puis  elles 
s'épanchent  peu  à  peu  dans  le  bassin  souterrain;  une  pre- 
mière cavité  les  arrête  ;  elles  en  surmontent  bientôt  le  seuil 
pour  aller  remplir  la  suivante.  Après  celle-ci  une  troisième, 
et  ainsi  de  proche  en  proche,  elles  cheminent  vers  rorifice. 
Tant  que  les  eaux  affluentes  sont  tranquilles  et  peu  abon- 
dantes, le  débit  reste  faible  et  régulier.  Aussitôt  qu'une 
crue  survient,  le  débit  augmente. 

Les  sources  qui  sortent  du  plateau  du  Havre  (sources 
naturelles  de  Sainte -Adresse,  de  Fontaines  de  Rouelles  et 
de  la  Bouteillerie  ;  sources  artificielles  de  Bellefontaine  et 
autres  comprises  entre  Graville  et  Sainte-Adresse)  provien- 
nent du  niveau  imperméable  de  la  gaize.  Au  delà  de  la  ligne 
qui  passerait  par  Gournay  et  Cauville,  les  sources  appartien- 
nent au  niveau  de  la  craie  marneuse. 

Dans  l'espace  compris  entre  la  faille  de  Bolbec  et  Fécamp 
et  le  Havre,  la  stratification  de  la  craie  marneuse  étant  par- 
faitement concordante  avec  celle  de  la  gaize,  l'eau  qui  les  ali- 
mente provient  donc  exclusivement  des  pluies  locales. 

Les  sources  de  Bruneval,  de  Notre-Dame-du-Bec,  de  Saint- 
Laurent  sortent  de  la  craie  marneuse.  Ces  dernières,  situées 
à  10  kilomètres  du  Havre,  en  tête  de  la  rivière  de  Gournay, 
le  long  du  chemin  de  fer  de  Rouen,  entrent  pour  les  trois 
quarts  dans  la  distribution  de  la  ville  du  Havre.  Depuis  près 
de  trente  ans  qu'elles  sont  exploitées,  elles  ont  fourni  un 
débit  moyen  d'environ  20  000  mètres  cubes  d'eau  par  jour, 
représentant  près  de  moitié  dans  le  débit  totalisé  des  sources 


ROLE  DES  UTBOGLASES  SIMPLES. 


305 


de  la  vallée  deGournay,  qui  eslenmoyenne  de  45  600  mètres 
cubes  par  jour. 

Toutes  les  sources,  grandes  et  petites,  qui  alimentent  le 
Havre  ont  le  même  régime.  Plus  une  source  a  un  débit  im- 
portant, plus  son  bassin  a  d'étendue  et  plus  le  temps  qui 
s'écoule  entre  l'origine  et  la  fin  d'une  crue  doit  l'emporter 
sur  la  durée  de  la  pluie  efficace  qui  l'a  occasionnée. 

cahradosetEnre.  —  Daus  l'oucst  de  la  Frauce,  on  observe 


Fig.  «8.  -  Source  de  la  Folletière  prés  Orbec  (Calvados),  jaillissant  de  la  craie  glauconieuse. 

des  faits  analogues.  Les  niveaux  d'eau  les  plus  importants  se 
rencontrent,  surtout  vers  la  base  de  la  craie  glauconieuse,  à 
son  contact  avec  l'argileglauconieuse  verte,  à  nodules  phos- 
phatés, qui  représente  une  partie  de  la  gaize  dans  cette 


204  ROLE  DES  LITHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

région  et  dont  la  couche  très  argileuse  est  généralement 
fort  peu  perméable*. 

On  en  voit  un  exemple  remarquable,  dans  la  belle  source 
de  la  Folletière,  située  dans  la  vallée  d'Orbec,  qui  sort  avec 
une  abondance  extraordinaire  (fig.  98)  de  ces  couches  cré- 
tacées et  sur  raftteurement  d'une  argile  se  rapportant  à  la 
craie  glauconieuse. 

Des  sources  de  même  disposition  existent  dans  le  départe- 
ment de  l'Eure  près  Gormel  et  près  Pont-l'Évêque  (source 
de  la  Galonné). 

chM«Bi«'.  —  La  formation  crétacée  présente  dans  la  Cha- 
rente deux  niveaux  d'eau. 

Le  plus  considérable,  qui  se  trahit  toujours  par  la  beauté 
des  prairies  qu'elle  arrose,  est  soutenu  par  des  bancs  d'ar- 
gile bleuâtres  très  propres  à  la  fabrication  des  briques,  con- 
tenant en  abondance  les  Ostrea  biauriculata  et  flabellata 
qu'on  observe  surtout  dans  les  arrondissements  d'Angou- 
lême  et  de  Cognac.  Comme  elles  sont  surmontées  par  trois 
étages  de  composition  calcaire,  les  eaux  qui  filtrent  avec 
facilité  à  travers  des  bancs  crevassés  sont  retenues  dans  leur 
marche  par  les  argiles  tégulines,  d'où  elles  s'échappent  à  la 
surface. 

Le  deuxième  niveau  se  montre  à  la  base  de  l'étage  santo- 
nien,  souvent  marneux,  qui  arrête  les  eaux  d'infiltration  des 
coteaux  supérieurs.  Nous  citerons  principalement  les  belles 
sources  de  La  Palue  et  de  Gensac  près  de  Cognac,  et  la  source 
de  Roncenac,  connue  sous  le  nom  de  Grand'Fontaine. 

■oachM-da-Bh^ne  i  BamIii  de  Fnvcaa  '.  —  Le  bassiu  de   Fu- 


«  Guyerdet.  Texte  de  la  feuille  de  Bemay, 

*  Coquand.  Géologie  de  la  Charente, 

3  YiUot.  Annales  det  minet,  8*  série,  t.  IV,  p.  5, 1883. 


ROLE  DES  LITHOGLASES  SIMPLES.  205 

veau  se  compose  d*un  ensemble  de  couches  qui,  après  avoir 
été  supposées  tertiaires,  ont  été  reconnues  par  M.  Matheron 
appartenir  à  la  partie  supérieure  du  terrain  crétacé. 

Le  groupe  auquel  est  subordonné  le  lignite  exploité  est 
principalement  calcaire  et  il  contient  les  calcaires  argileux 
fournissant  le  ciment  dit  de  la  Valentine.  L'épaisseur  de  ce 
groupe  dépasse  200  mètres.  Il  repose  sur  des  couches  attri- 
buées au  senonien  supérieur. 

Les  travaux  d'exploitation,  dans  lesquels  on  doit  lutter  à 
grands  frais  contre  les  venues  d'eau,  en  ont  fait  ressortir  le 
régime.  Le  calcaire  est  coupé,  non  seulement  par  de  nom- 
breuses diaclases  (partem),  mais  aussi  par  des  paraclases 
qui  remplissent  tantôt  l'office  de  barrage,  tantôt  celui  d'une 
conduite  d'eau.  Ces  dernières  sont  situées  dans  la  partie  sud 
du  bassin.  En  revanche,  le  nord  jusqu'à  Trels  constitue  la 
région  des  diaclases. 

Les  eaux  pluviales  arrivent  dans  les  travaux  verticalement 
et,  par  suite,  d'une  manière  soudaine.  On  peut  avoir  une 
idée  des  variations  très  considérables  de  la  nappe  souter- 
raine par  une  figure* qui  donne,  depuis  1868,1a  hauteur 
d'eau  dans  le  puisard.  En  rapportant  la  quantité  d'eau 
à  la  quantité  de  charbon  extraite,  on  a  pompé,  de  1868 
à  1882  inclus,  de  6  à  30  mètres  cubes  et  en  moyenne  15,5 
pour  une  tonne  de  charbon  sortie,  et  cela,  sans  tenir 
compte  des  masses  bien  plus  considérables  qui  sortent  des 
galeries.  On  s'explique  ainsi  que  les  frais  d'épuisement  aient 
pu  dépasser  en  certaines  années  1  fr.  30  par  tonne,  16 
pour  100  des  dépenses  totales,  et  encore  ces  chiffres  sont-ils 
au-dessous  de  la  réalité. 

La  surface  de  l'eau  souterraine  est  inclinée  vers  la  mer, 
de  façon  à  se  raccorder  avec  elle.  Autour  de  cette  espèce 

^  Mémoire  précité,  pi.  UL 


206  ROLE  DES  LITUOCLASES  DE  DITERS  ORDRES. 

de  charnière,  elle  monte  ou  descend  suivant  les  saisons, 
comme  le  prouvent  les  variations  de  hauteur,  d'autant  plus 
grandes  que  Ton  considère  une  section  de  la  nappe  plus 
éloignée  de  Tembouchure  :  plus  on  s*avance  vers  l'est,  plus 
une  pluie  produit  des  ascensions  d'eau  subites  et  de  grande 
amplitude. 

Gomme  d'ordinaire,  des  sources  jaillissent  à  la  rencontre 
de  cette  surface  d'eau  avec  le  relief  du  sol. 

Ces  eaux  doivent  avoir  un  écoulement  vers  la  mer;  car, 
non  seulement  la  quantité  d'eau  absorbée  par  le  sol  est  bien 
supérieure  au  débit  total  des  sources,  mais  encore  le  long 
du  rivage,  entre  Marseille  et  Bandol,  jaillissent  de  nombreuses 
sources  d'eau  douce. 

¥ar  et  Aipes-Bteriuines  ^  -—  Daus  le  Yar  et  daus  les  Alpes- 
Maritimes,  les  puissantes  couches  marneuses  de  la  craie  à 
Inoceramus  labiatus  arrêtent  les  eaux  circulant  dans  les  cal- 
caires superposés  ;  l'une  des  trois  sources  venant  au  jour  dans 
la  vallée  de  Dardennes  et  qui  alimentent  Toulon,  le  Foux,  qui 
produit  le  Béai,  sort  de  ce  niveau. 

Dans  le  voisinage  de  la  source  de  la  Foux  existe,  au  milieu 
des  calcaires  blancs  cristallins  appartenant  à  l'étage  ncoco- 
mien,  un  réservoir  naturel  appelé  ragas.  Ce  réservoir  ren- 
ferme toujours  de  l'eau,  et  presque  tous  les  ans,  à  l'époque  de 
la  saison  des  pluies,  il  déborde  en  versant  dans  la  vallée  des 
masses  d'eau  considérables.  On  a  pensé  de  tout  temps,  à 
Toulon,  que  cette  cavité  était  le  regard  naturel  d'un  grand 
courant  d'eau  souterrain,  et  que  pour  obtenir  de  l'eau  en 
abondance,  il  suffirait  de  pratiquer  une  galerie  allant  s'ouvrir 
au  fond  du  réservoir  et  aboutissant  dans  la  vallée  en  un 
point  convenablement  choisi. 

'  Dieulafait.  Sur  la  zone  à  Avtcula  contorta^  1867. 


ROLE  DES  LITIIOGLASËS  SIMPLES.  207 

j\  —  Les  sources  thermales  du  département  du  Gers 
sont  remarquables  par  les  conditions  dans  lesquelles  elles 
jaillissent. 

Les  sources  salines  et  moyennement  thermales  de  Barbo- 
tan,  commune  de  Cazaubon,  et  celles  du  groupe  de  Castera- 
Verduzan,  du  Masca  et  du  Lavardens  sont  disposées  le  long 
de  l'axe  d'une  grande  ride  crétacée,  dirigée  E.  21*»  S.  à  0. 
21" N.,  qui  traverse  une  partie  du  département.  Les  eaux  qui 
circulent  dans  la  craie  rencontrant  des  fissures  dans  les  ter- 
rains supérieurs  en  profitent  pour  remonter  à  la  surface,  à 
la  manière  de  fontaines  artésiennes. 


de  Psru.  —  En  1833,  l'Administration  municipale 
ayant  eu  connaissance  des  puits  artésiens  exécutés  à  Épinay 
et  à  Saint-Denis  près  Paris,  résolut  d'en  faire  exécuter  elle- 
même  pour  l'alimentation  de  la  capitale.  Une  somme  de 
18  000  francs  fut  alors  votée  pour  l'exécution  de  deux  puits, 
devant  atteindre  la  formation  de  l'argile  plastique  d'où 
provenaient  les  eaux  jaillissantes  de  Saint-Denis. 

Mais  l'examen  de  cette  question  fit  bientôt  reconnaître  à 
M.  Emmery,  alors  directeur  du  service  municipal,  que,  par 
suite  de  l'affleurement  de  la  formation  aquifère  dans  le  lit 
de  la  Seine,  entre  Auteuil  et  le  Point-du-Jour,  le  niveau  de 
la  nappe  devait  se  trouver  considérablement  abaissé  et  que, 
par  suite,  les  chances  de  succès  étaient  notablement  dimi- 
nuées. Un  puits  fut  néanmoins  exécuté  au  carrefour  Reuilly; 
la  formation  aquifère  fut  rencontrée,  mais  l'eau  resta  en 
contre-bas  du  sol.  Les  études  géologiques  faites  sur  le  bassin 
parisien,  quoique  peu  avancées  à  cette  époque,  firent  des 
lors  pressentir  qu'il  fallait  traverser  non  seulement  les 
terrains  tertiaires,  mais  aussi  la  craie,  pour  avoir  une  eau 

'  Jacquot.  Comptes  rendus^  t.  LX,  p.  067, 1865. 


208  ROIE  DES  LITHOGLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

jaillissante  en  atteignant  les  grès  verts  inférieurs.  Peu  de 
temps  après,  40  000  francs  furent  votés  par  le  conseil  muni- 
cipal pour  exécuter  un  sondage  de  400  mètres  ;  le  travail  fut 
mis  en  adjudication  et  confié  à  M.  Mulot,  le  seul  des  entre- 
preneurs de  sondage  existant  à  cette  époque  qui  se  présentai. 
Il  devait  être  primitivement  exécuté  sur  la  place  de  la 
Madeleine,  mais  la  crainte  d'encombrements  sur  un  point 
aussi  fréquenté  fit  adopter  définitivement  la  cour  de  l'abat- 
toir de  Grenelle. 

Le  travail  fut  commencé  au  mois  de  décembre  1853. 
A  400  mètres,  limite  fixée  pour  la  profondeur  définitive  du 
puits,  on  était  encore  en  pleine  craie.  De  nouveaux  crédits 
furent  alloués  successivement,  non  sans  beaucoup  d'hésita- 
tion, pour  descendre  jusqu'à  500,  550  et  600  mètres.  Enfin, 
le  26  février  1841,  à  2  heures  du  soir,  après  un  travail  de 
7  années,  des  accidents  et  des  péripéties  de  toutes  sortes,  on 
rencontra  la  formation  des  grès  verts,  à  la  profondeur 
de  547  mètres,  et  avec  elle,  l'eau  jaillissante  si  longtemps  et 
si  impatiemment  attendue. 

Après  le  succès  obtenu  à  Grenelle,  l'Administration  projeta 
le  forage  de  plusieurs  puits  semblables.  L'un  d'eux  devait 
être  percé  à  l'abattoir  Montmartre  et  un  autre  au  Jardin 
des  Plantes,  pour  être  spécialement  affecté  au  chauffage  des 
serres  et  à  la  création  de  bains  et  de  lavoirs  publics  dans  le 
quartier  Saint-Marceau.  Les  événements  de  1848  firent  ajour- 
ner l'exécution  de  ces  travaux. 

Plus  tard,  lors  des  travaux  d'embellissement  du  Bois  de 
Boulogne,  la  grande  quantité  d'eau  nécessaire  au  service  de 
cette  promenade  (8000  mètres  cubes  par  24  heures)  fil 
penser  à  demander  un  nouveau  tribut  à  la  nappe  des  grès 
verts.  La  création  à  Passy  d'un  puits  semblable  à  celui  du 
puis  de  Grenelle  fut  résolue,  et  l'entreprise  confiée  àM.  Kind, 
habile  ingénieur  saxon. 


ROLE  DES  LlTHOCLiSES  SIMPLES.  209 

Le  résultat  dépassa  les  espérances.  Aussi  résolut-on  de 
faire  construire  deux  puits  nouveaux,  Tun  sur  TEstrapade, 
près  du  Panthéon,  l'autre  à  la  barrière  du  Trône.  Une  com- 
mission fut  nommée  par  le  Préfet  de  la  Seine,  et  sur  ses 
observations,  les  positions  des  puits  furent  modifiées  :  celui 
du  Panthéon  fut  reporté  à  la  Butte-aux-Cailles,  près  de  la 
barrière  Fontainebleau,  et  celui  de  la  barrière  du  Trône  à  La 
Chapelle-Saint-Denis,  de  manière  à  former  avec  celui  de 
Passy  les  trois  sommets  d'un  triangle  à  peu  près  équila- 
téral.  Le  puits  de  La  Chapelle  fut  confié  à  Mii.  Laurent  et 
Degousée,  celui  de  la  Butte-aux-Cailles  à  M.  Saint-Just  Dru, 
le  successeur  de  M.  Mulot.  Ces  deux  puits  devaient  non  seu- 
lement atteindre  la  nappe  rencontrée  à  Passy,  mais  descendre 
dans  la  formation  des  sables  verts  pour  recueillir  les  diffé- 
rentes nappes  que  l'on  suppose  y  exister,  et  atteindre  même, 
s'il  était  possible,  les  terrains  jurassiques. 

On  sait  que  Paris  occupe  le  centre  d'un  vaste  bassin  gros- 
sièrement circulaire,  dont  le  rayon  pris  dans  la  direction 
de  la  Champagne  vers  Troyes  mesure  160  kilomètres.  Les 
sables  verts  qui  occupent  une  large  zone  s'étendant  sur  le 
pourtour  de  ce  bassin  présentent  une  pente  souterraine 
égale,  en  moyenne,  à  0",003  par  mètre. 

La  force  considérable  d'ascension  des  eaux  des  grès  verts 
provient  de  l'altitude  à  laquelle  ils  affleurent  autour  du 
terrain  crétacé. 

La  coupe  détaillée  du  sondage  de  Grenelle,  dont  les 
échantillons  sont  déposés  au  Muséum,  a  été  relevée  avec  le 
plus  grand  soin  (fig.  99). 

Le  puits  de  Grenelle,  revêtu  d'un  tubage  en  tôle  de  0",17 
à  la  base  et  de  0",235  à  l'orifice,  donnait  2200  litres  par 
minute,  soit  environ  3000  mètres  cubes  par  24  heures. 
En  1852,  soûs  la  pression  des  argiles  inférieures,  une  portion 
du  tube  ayant  été  aplatie,  on  descendit  dans  le  premier  tube 

14 


210  ROLE  DES  UTHOaÂSES  DE  DIVERS  ORDRES. 

une  seconde  colonne  de  0",iO  de  diamètre  seulement.  U 


11 


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«THE  tifi  II  WàM(t 

Fig.  99.  ~~  Coupe  du  fondage  de  Grenelle,  d'après  M.  Mulot. 

débit  n'en  lut  point  altéré,  ce  qui  prouve  qu'il  n'est  pas  pro- 
portionnel au  diamètre. 


ROLE  DES  LITHOGUSES  SIMPLES.  âlf 

Le  rendement  en  1862  était  en  moyenne  de  472  litres 
par  minute  ou  de  680  mètres  cubes  par  24  heures;  en  1885, 
il  était  constant  et  seulement  de  240  litres  par  minute^  soit 
346  mètres  cubes  par  24  heures. 

A  Passy,  par  suite  d'accident,  le  travail  a  été  fort  long, 
très  dispendieux;  il  a  duré  onze  ans  et  a  coûté  1  064 000 fr. 
Deux  nappes  jaillissantes  y  ont  été  rencontrées,  l'une  vers 
577  mètres,  l'autre  vers  586  mètres.  On  a  supposé  que  la 
première  est  la  nappe  de  Grenelle;  elle  n'a  pas  monté  au 
niveau  du  sol,  mais  s'est  élevée  jusqu'à  7  mètres  en  contre- 
bas, pour  descendre  ensuite  à  18  mètres. 

En  septembre  1861,  22  heures  après  le  jaillissement  de  la 
deuxième  nappe  de  Passy,  le  puits  de  Grenelle  a  éprouvé  une 
perturi>ation  dans  son  débit;  ce  qui  tend  à  prouver  que 
celte  seconde  nappe  est  bien  réellement  en  communication 
avec  celle  de  Grenelle,  quoique  coulant  à  cet  endroit  dans 
des  sables  plus  gros  et  plus  perméables.  C'est  à  cet  écoule- 
ment dans  des  sables  plus  gros  qu'est  dû  surtout  l'énorme 
débit  du  puits  de  Passy. 

A  Passy,  on  a  établi  ua  cuvelage  en  bois,  dont  les  divers 
tronçons,  qui  ontO",80  de  diamètre  intérieur,  sont  compo- 
sés de  douves  jointives,  et  la  pression  augmentant  avec  la 
profondeur,  les  douves  ont  eu  à  supporter  une  pression  tou- 
jours croissante,  jusqu'à  550  mètres,  base  du  tubage  en  bois; 
à  cette  profondeur  la  pression  n'est  pas  moindre  que  55  at- 
mosphères. Leg  douves  ont  dû  être  disjointes,  et  alors  ua 
plan  de  fuite  s^est  manifesté  entre  elles;  l'eau  a  pu  dès 
lors  passer  extérieurement,  monter  le  long  du  tube  et  venir 
s'absorber  dans  les  couches  supérieures  du  terrain  tertiaire*. 
Aussi  le  débit  du  puits,  qui  à  l'origine  était  de  17000  mètres 


'  Oppermann.  Portefeuille  économique  des  machines,  t.  IX,  p.  186;  notice  de  II.  Cas- 

sagne.  ...... 


919  ROLE  DES  UTHOGUSES  DE  DITERS  ORDRES, 

cubes  par  24  heures,  était-il  réduit,  en  1864,  à  1500  mètres 
environ.  Du  l*'  novembre  1881  au  30  octobre  1883,  le  débit 
a  oscillé  entre  6540  et  6588  mètres  cubes.  Quant  aux  deux 
puits  de  la  Butte-aux-Gailles  et  de  La  Chapelle,  qui  avaient 
à  traverser,  non  seulement  tout  le  crétacé,  mais  aussi  les 
couches  jurassiques  qui  le  supportent,  ils  n'ont  pas  eu  le 
même  succès  que  les  précédents.  On  a  dû  les  abandonner 
tous  deux,  le  premier  à  532  mètres,  après  une  dépense  de 
plus  de  200000  francs,  le  second  à  677  mètres,  lorsqu'on  y 
avait  consacré  plus  de  1  600  000  francs. 

Le  puits  de  Tusine  Constant  Say,  boulevard  de  la  Gare,  qui 
a  une  profondeur  de  580  mètres,  débitait  en  mars  1885 
4500  mètres  cubes. 

BBviffoBs  4e  T«ws.  —  Lcs  puits  artésicns  des  environs  de 
Tours  alimentés  par  les  mêmes  nappes,  méritent  d'être 
mentionnés,  à  cause  de  leur  antériorité  sur  les  autres  forages 
de  la  même  région. 

North  Dowas  d«  Méat  et  dn  Sorrey.    —    Le   régime    dcS    CaUI 

souterraines  dans  la  craie  des  North  Downs  du  Kent  et  du 


ALBURY 


Echelle  des  Longuturs 


2  k» 


Flg.  100.  —  Disposilion  (la  niveau  d'eau  de  la  craie,  non  loin  de  Gailford  (Sarre]  • 
D'après  M.  Lucas. 

Surrey,  entre  le  Darent  et  le  Môle,  a  été  Tobjet  d'études  ap- 
profondies de  la  part  de  M.  J.  Lucas'. 

^  Proceedingt  ofthe  Imitiulion  of  civil  engineers^  t.  XLVH,  p.  1,  1877. 


ROLE  DES  LITHOCLASëS  SUIPLES.  315 

Les  traits  généraux  de  la  région  sont  analogues  à  ceux  des 
autres  régions  crétacées.  La  figure  100  montre  comment  la 
nappe  d'eau  de  la  craie  qui  alimente  divers  puits  donne 
naissance  à  des  sources. 

Il  en  est  de  même  de  la  figure  101,  qui  montre  en  outre 
comment  prennent  naissance  les  épanchements  d*eau  connufs 
généralement  sous  le  nom  de  boumes.  D'après  M.  Topley,  dans 
le  Kent,  on  les  nomme  aussi  nailbournesy  dans  le  Sussex, 
livants,  dans  le  Dorset,  winterbournes,  dans  le  Yorkshire, 
(jypsies. 

Ils  jaillissent  subitement  et  seulement  après  une  saison 
exceptionnellement  humide  ;  ils  suivent  les  grandes  chutes 


6006T0Ne  .  eÉDOlNOTOM 

.—- .   — -      -      -    —         ..•••■        -«- .-   — — .--^^^-y^-^^- 
Echelle  des  Longueurs: 

;      ]' î î t      r* 

fig.  101.  —  Disposition  du  niveau  d'eau  de  la  craie,  non  loin  de  Banstead  (Surrey),  montrant 
comment  prennent  naissance  des  sources  connues  [sous  lo  nom  de  bourneê,  —  D'après 
M  Lacas. 


de  pluie,  après  un  intervalle  de  quelques  mois,  c'est-à-dire 
après  que  la  pluie  a  eu  le  temps  de  se  réunir  souterrainc- 
ment  et  de  s'élever  suffisamment.  En  général  ils  apparais- 
sent à  la  partie  supérieure  des  vallées,  et  s'écoulent  dans  un 
lit  entièrement  sec. 

U  jonction  de  la  craie  inférieure  et  du  gault  donne  nais- 
sance, au  pied  des  North  Downs,  à  une  affluence  d'eau  consi- 
dérable qui  se  manifeste  aussi  par  les  sources  de  Wrotham, 
Godstone,  Merstham  et  beaucoup  d'autres.  On  peut  citer 
celle  qui  sort  du  gault,  près  de  Cuxham. 


—  Dans  le  but  de  suppléer  à  l'insuffisance  de 
l'alimentation  par  les  sables  tertiaires  inférieurs,  la  plupart 


2U  ROLE  DES  UTHOCUSES  DE  DIVERS  ORDRES. 

des  puits  artésietis  forés  à  Londres  dans  ces  derniers  temps 
pénètrent  dans  la  craie  inférieure,  qui  s'étend  au-dessous 
de  Londres  à  des  profondeurs  de  50  à  65  mètres. 

A  cause  de  sa  grande  étendue  superficielle  et  de  son  épais- 
seur qui  varie  de  150  à  300  mètres,  elle  constitue  la  prin- 
cipale ressource  en  eau  souterraine  de  Londres.  Plus  de 
31  780  mètres  cubes  sont  journellement  lires  de  la  craie  au 
S--E.  de  Londres. 

YorkuMro^  —  Daus  le  Yorkshirc  et  spécialement  aux  envi- 
rons  de  Holderness,  des  argiles  du  diluvium  et  des  dépôts 


Fi>.  102.  —  Section  montrant  la  circulation  de  Teau  dans  la  craie  du  Yorksliire.  À,  argile  im- 
perméable des  étages  kimméridgien  et  néocomien;  C,  craie  qui  lui  est  superposée  et  à  tnvei^ 
laquelle  se  meut  l'eau  souterraine,  dont  la  surface  €st  très  fortement  ondulée,  ainsi  que 
l'indique  la  ligne  N.N.  T,  argile  tertiaire  imperméable.  —  D'après  N.  Robert -Mortimer. 


superficiels  couvrent  la  craie  en  s'élevant  à  une  altitude  de 
20™  au-dessus  de  la  mer.  L'épaisseur  de  la  craie  atteint 
250  mètres.  Elle  repose  sur  les  argiles  imperméables  des 
étages  néocomien  et  kimméridien  (fig.  102),  qui  s'élèvent 
jusqu'à  Taltilude  de  300  mètres  avec  une  épaisseur  dépas- 
sant 150  mètres  et  viennent  affleurer  au  nord  et  à  Touest. 
Les  cours  d'eau  superficiels  et  souterrains  de  celte  région 
aboutissent  d'un  côté  à  la  mer  et  de  l'autre  côté  sont  inter- 
rompus par  les  argiles  des  étages  précités. 
La  surface  de  la  nappe  d'eau  intérieure  n'est  pas  horizon- 

*  J.  Robert  Mortimer.  Proceedhigs  of  civil  enginrers  of  Yorkthire,  t  LV,  p.  151 18t>4. 


ROLE  DES  LITHOCLASES  SIMPLES.  215 

laie,  mais  elle  s'abaisse  vers  le  sud  et  vers  Test,  de  manière 
à  se  rapprocher  de  la  surface  de  la  craie  qui  la  contient. 


i\  —  De  même  dans  le  Hertsfordshire,  la  sur- 
face qui  limite  la  nappe  d*eau  dans  la  craie  est  très  variable 
suivant  les  saisons  et  la  quantité  d'eau  que  lui  fournit  Tat- 
mosphère  ;  son  niveau  varie  dans  les  collines  crayeuses,  de 
10  à  12  mètres,  en  présentant  des  inflexions,  comme  on 
Ta  vu  pour  les  exemples  cités  en  France. 

Cette  nappe  fournit  aussi  de  fortes  sources,  telles  que 
celles  de  Chadwell,  Hoddesdon,  Olter,  Carlshalton,  Leather- 
head  et  Ospringe.  En  outre  il  y  a  d'innombrables  petites 
sources,  comme  celles  qui  sont  le  long  de  la  Tamise,  de 
Greenhithe  à  Paversham. 

OxibrdaUre  et  wiutoiiire.  —  Lcs  colliues  de  craic  de  rOxford- 
shire  et  du  Whitshire  présentent  aussi  de  très  belles  sources 
(Prestwich). 

La  quantité  de  pluie  moyenne  qui  tombe  sur  les  Chalk 
Wolds  est  environ  0°,68,  dont  trois  quarts  environ  pénè- 
trent dans  le  sol.  L'écoulement  de  ce  réservoir  souterrain 
vers  la  région  sud-est  du  bassin  se  produit  quelquefois  avec 
une  force  considérable,  tant  dans  la  mer  que  dans  la  rivière 
Humber.  En  quelques  points  il  en  résulte  des  bouillonne- 
ments le  long  du  rivage,  qu'on  a  souvent  observés  près  du 
port  de  Bridlington  et  ailleurs,  sur  le  côté  oriental,  particu- 
lièrement dans  le  lit  de  la  Humber,  entre  Hull  et  Hessle. 
Dans  cette  dernière  localité  les  bouillonnements  sont  connus 
sous  le  nom  de  Hesshwhelps. 

Quelque  considérables  que  soient  ces  décharges  superfi- 
cielles et  souterraines  dans  la  mer  et  dans  la  Humber,  elles 

*  D'après  H.  CluUerbuck. 


il 6  ^         ROLE  DES  LITHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

sont  compensées  par  la  grande  masse  d'eau  qui  provient 
d'une  direction  opposée.  liC  long  de  la  limite  de  la  craie, 
elle  produit  des  sources  permanentes  et  intermittentes  de 
toutes  dimensions,  depuis  un  très  petit  filet  jusqu'à  un 
courant  assez  puissant;  plusieurs  moulins  ont  été  construits 
à  proximité  des  sources  de  cetle  sorte. 

A  proximité  de  la  mer,  notamment  àlIuU  et  à  Sunk  Island, 
l'eau  des  puits  percés  à  travers  la  craie  est  habituellement 
saumâtre,  par  suite  de  la  pression  de  l'eau  salée  de  l'Océan. 
L'eau  la  moins  salée  rencontrée  à  Hull  provient  d'un  puits 
de  31  mètres  de  profondeur,  et  un  autre  puits  situé  à 
20  mètres  du  précédent,  avec  une  profondeur  de  100  mètres, 
contient  20  pour  100  en  plus  de  sel  ;  les  deux  sont  dans  la 
craie  qui,  dans  cette  région,  est  atteinte  de  15  à  20  mètres  de 
la  surface. 


Nord  de  la  Wrmmee.  Belf  l^sc  et  Westphalle  i  eavlroMs  de  IJéiC. 

—  Dans  les  départements  du  Nord  et  du  Pas-de-Calais, 
aux  environs  de  Mons,  de  même  qu'en  Westphalie,  dans  le 
bassin  de  la  Ruhr,  les  terrains  qui  recouvrent  le  système 
houiller,  connu  des  mineurs  sous  le  nom  de  inorts4erram, 
appartiennent  à  la  période  crétacée.  Ils  sont  formés  de 
couches  alternatives  d'argile,  de  marne,  de  craie  et  de 
sable.  C'est  là  qu'on  rencontre  les  plus  grandes  diflicultés 
pour  le  fonçage  des  puits  à  travers  des  bancs  perméables, 
fissurés  en  tous  sens  et  qui  renferment  de  vastes  réservoirs 
où  s'accumulent  les  eaux  pluviales. 

Les  diève$  ou  bancs  argileux  forment,  à  la  partie  infé- 
rieure, une  base  plastique  et  imperméable,  au-dessus  de 
laquelle  les  eaux  sont  retenues.  Lorsque,  par  une  excavation 
pratiquée  à  la  surface,  on  pénètre  dans  ces  bancs  aquifères, 
l'eau  s'y  précipite  et  tend  à  reprendre  son  niveau  hydrosta- 
tique. 


ROLE  DES  LlTHOGLAbES  SIMPLES.  217 

A  pari  les  sources  abondantes  qui  se  rencontrent  ordi- 
nairement au  milieu  des  bancs  de  craie  à  silex  pyromaque, 
les  bancs  fissurés  de  marne  grise,  alternant  avec  des  ar- 
giles, renferment  aussi  des  niveaux  importants. 

La  quantité  d'eau  à  épuiser  dans  la  traversée  des  couches 
crétacées  qui  recouvrent  le  terrain  houiller  est  essentielle- 
ment variable,  non  seulement  d*un  point  à  un  autre  du 
même  bassin,  mais  encore  d'un  point  à  un  autre  de  la  même 
concession. 

La  fosse  n*  3  de  Ferfay  est  située  à  une  distance  de  HOO  mè- 
tres environ  de  la  fosse  n**  2;  la  première  n'a  rencontré  que 
<les  sources  insignifiantes,  tandis  que  la  seconde  avait  fourni 
beaucoup  d'eau.  La  fosse  Saint-Pierre,  près  de  Thivencelles, 
a  débité  par  minute  150  hectolitres.  A  la  fosse  de  Courrières, 
la  quantité  maximum  à  extraire  s'est  élevée  à  219  hectoli- 
tres. A  l'Escarpelle,  près  de  Douai,  elle  a  atteint  jusqu'à 
600  hectolitres.  A  Havre  (Belgique),  on  a  installé  sur  trois 
puits  foncés  simultanément,  quatorze  chaudières  et  un  en- 
semble de  machines  représentant  une  force  de  1350  chevaux, 
en  vue  de  traverser  les  nappes  aquifères*. 

A  Lens  (Pas-de-Calais)*,  le  puits  n^  5,  d'un  diamètre  de 
o^^SO,  a  été  commencé  sur  le  bord  de  la  rive  droite  de  la 
Souchez  (fig.  103j,  à  la  fin  de  1872.  Le  creusement  était  ar- 
rivé, en  septembre  1873,  à  la  profondeur  de  13'",50,  à  la- 
quelle l'eau  a  commencé  à  affluer,  à  raison  de  6000  à  7000 
mètres  cubes  par  jour.  On  était  alors  à  28^,50  au-dessus  du 
niveau  de  la  mer,  et  à  3  mètres  au-dessous  du  niveau  des 
eaux  du  marais  de  la  vallée.  La  venue  d'eau  a  augmenté  ra 
pidcment  avec  le  creusement.  A  28  mètres  de  profondeur, 
elle  atteignait  40000  mètres  cubes  par  jour,  chiffre  qu'elle 


*  Evrard.  Exploitation  des  mines ^  p.  '233-234. 

^  D'après  une  obligeante  communicalion  de  M.  Pingénieur  en  chef  des  mines  Duporcq. 


318 


ROLE  DES  UTHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 


a  conservé  jusqu'à  la  profondeur  de  58  mètres.  C'est  seule- 
ment alors  qu'elle  a  commencé  à  diminuer,  et  à  48  mètres 
qu'on  a  pu  se  rendre  maître  de  l'épuisement,  après  dix 
mois  d'un  travail  entouré  de  difficultés  énormes.  Six  pom- 
pes à  vapeur  avaient  été  montées  sur  la  fosse  pour  parve- 
nir à  remonter  ces  40000  mètres  cubes  par  jour,  d'une  pro- 


V  Ville  .de  Lens . 


Echelle  : 


Fig.  103.  —  Disposition  de  la  Tosse  n**  5  de  Lcns.  par  rapport  à  la  Soaclici  cl  â  la  Glissoire. 

D'après  M.  Dnporcq. 

fondeur  de  28  à  58  mètres.  A  la  profondeur  de  72  mètres, 
dans  le  terrain  bleu,  les  eaux  ont  absolument  cessé,  et  à 
92  mètres  on  a  installé  la  base  du  cuvelage. 

La  fosse  était  tombée  sur  une  large  cassure  ouverte  dans 
la  craie  blanche  et  dirigée  E.  S.  E.  a  0.  N.  0.  Au  nord  de  la 
cassure  la  craie  était  excessivement  fissurée  et  perméable  à 
l'eau;  au  sud,  au  contraire,  les  bancs  étaient  compacts  et 


ROLE  DES  UTHOCUSES  SIMPLES.  219 

fermes.  La  position  et  Tinclinaison  de  la  cassure  par  rapport 
à  la  vallée  et  la  nature  extrêmement  fendillée  de  la  craie 
conduisent  M.  Duporcq,  ingénieur  en  chef  des  mines,  à  pré- 
sumer que  les  eaux  venaient  principalement  de  la  vallée, 
sinon  de  la  Souchez  et  de  la  Glissoire  même,  qui  coulent  sur 
un  terrain  plus  ou  moins  tourbeux  et  assez  imperméable, 
(lu  moins  d'eaux  imbibant  les  alluvions  sableuses  perméa- 
bles et  plus  profondes  de  cette  vallée.  On  remarque  d'ail- 
leurs que  Tapparition  des  eaux  dans  le  puits,  à  3  mètres  en 
dessous  des  eaux  de  la  Glissoire,  coïncide  bien  avec  la  situa- 
lion  de  ces  alluvions. 

D'après  M.  Yan  Ertborn,  la  craie  blanche  de  la  Belgique 
renferme  de  nombreuses  fissures  aquifères  qui  rendent  aléa- 
toire le  résuliat  des  forages. 

A  Léau  (Brabant),  cote  30,  on  a  atteint  la  craie  à  43  mètres 
sous  le  sol.  Après  10  mètres  dans  la  craie,  la  sonde  s'enfonça 
dans  une  fissure  de  0",40;  une  source  d*un  pouvoir  ascen- 
sionnel considérable  jaillit  à  la  surface  du  sol,  avec  un  débit 
de  5360  litres  par  minute. 

La  craie  a  fourni  à  Yelvords,  à  29", 86,  et  à  Bruxelles,  à 
5",20,  des  sources  d'un  débit  considérable. 

11  en  a  été  de  même  dans  le  nord  de  la  France,  à  Neuville- 
cn-Terrain  et  à  Tourcoing,  où  des  sondages  ont  également 
rencontré  des  fissures  aquifères  dans  la  craie  blanche.  L'eau 
se  maintient  en  contre-bas  du  sol,  à  cause  de  l'altitude  des 
lieux;  mais  à  l'aide  de  pompes,  on  en  puise  des  quantités 
considérables. 

Aux  environs  de  Liège*  la  craie  présente  deux  horizons 
aquifères  distincts. 

L'un  est  dans  le  calcaire  à  peu  près  pur  et  perméable  à 
l'eau  dont  l'épaisseur  est  d'environ  30  mètres.  Outre  les  joints 

*  Gustave  Dumont.  Eaux  alimentaires  de  Liège,  185G. 


Hîù  ROLE  DES  LITHOaASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

de  stratification,  il  y  existe  des  fissures  verticales  et  des 
ochancrures,  parfois  1res  profondes,  comblées  par  des  dépôts 
plus  récents. 

I/horizon  inférieur  est  supporté  par  une  marne  connue 
sous  le  nom  de  dielle,  qui  par  son  imperméabilité  empêche 
les  eaux  des  couches  supérieures  de  parvenir  dans  le  terrain 
houiller. 

Les  eaux  pluviales  pénètrent  dans  les  fissures  de  la  craie, 
après  avoir  filtré  à  travers  le  limon  et  le  sable  quartzeux  et 
sont  arrêtées  par  la  couche  imperméable.  Vers  les  bords 
méridional  et  oriental  du  plateau,  ces  eaux  se  répandent, 
sous  forme  de  sources,  dans  les  vallons  qui  aboutissent  à  la 
Meuse  ;  mais  la  majeure  partie  s'écoule  vers  le  sud-ouest,  à 
peu  près  suivant  la  ligne  de  plus  grande  pente  des  couches 
qui  forment  le  terrain  crétacé. 

L'inclinaison  de  la  surface  de  l'eau  varie  suivant  les 
circonstances.  Elle  est  d'autant  plus  forte  que  la  roche  est 
moins  fissurée,  ou,  en  d'autres  termes,  qu'elle  présente 
plus  de  résistance  au  passage  de  l'eau.  Pour  des  roches  dif- 
férentes, l'inclinaison  doit  donc  varier.  Il  en  est  ainsi  pour 
une  môme  roche,  suivant  la  quantité  d'eau  qui  y  afflue  et 
suivant  la  direction  que  prend  le  courant  souterrain. 

Dans  toute  la  partie  de  la  Ilesbaye  qui  s'étend  au  nord- 
est  de  Liège,  la  profondeur  à  laquelle  se  trouve  l'eau  a  été 
mesurée  à  différentes  époques.  11  résulte  de  l'ensemble  de 
ces  observations  que  la  nappe  d'eau  y  est  inclinée  :  partant 
des  bords  du  bassin  et  s'avançant  vers  le  Geer,  elle  donne 
lieu  aux  sources  qui  alimentent  cette  rivière. 

Vers  Test  le  courant  change  de  direction,  parce  qu'il  s'é- 
coule en  partie  sous  forme  de  sources  dans  les  vallées  de 


*  L'auleur  a  publié  une  carie  où  est  représentée,  par  des  li^es  borizontaleit.  rinter- 
section  de  la  surCace  de  Teau  avec  des  plans  horizontaux,  établis  à  différentes  hauteurs 
au-dessus  de  la  Meuse.  Des  flèches  mai*quent  la  direction  du  courant. 


ROLE  DES  LITUOaASES  SIMPLES.  221 

Vollem  et  de  flermée,  où  vient  affleurer  la  couche  imper- 
méable. La  nappe  d'eau  s'incline  donc  rapidement  dans  cette 
direction. 

Vers  le  sud,  les  vallées  qui  aboutissent  à  la  Meuse,  mettant 
à  nu  la  couche  perméable  au-dessous  du  niveau  que  la  nappe 
aquifère  atteindrait  pour  que  son  écoulement  fût  possible 
vers  le  Geer,  les  eaux  qui  la  forment  s'échappent  en  sens 
contraire  en  donnant  naissance  aux  sources  d'Ans,  de  IIol- 
logne,  etc.*. 

L'inclinaison  de  la  surface  de  la  nappe  vers  le  nord  varie 
de0",005  à  0",009  par  mètre;  mais  de  l'est  à  l'ouest,  elle 
dépasse  généralement  0'",01,  probablement  parce  que  les 
fentes  de  la  craie  sont  principalement  dirigées  nord-sud. 

Depuis  longtemps  des  galeries  creusées  dans  la  craie, 
ainsi  que  dans  le  terrain  houiller  fournissent  des  eaux  à  la 
ville  de  Liège.  En  1856,  ces  galeries  étaient  au  nombre  de 
six.  Celles  qui  ont  été  percées  autrefois  dans  le  terrain 
houiller  pour  l'exploitation  de  la  houille  et  qui  sont  au- 
dessus  de  la  Meuse*,  après  avoir  satisfait  au  but  pour  le- 
quel on  les  avait  exécutées,  sont  utilisées,  sous  le  nom 
à' arènes^  pour  les  usages  domestiques,  à  cause  des  eaux  qui 
en  proviennent.  Leur  utilité  est  telle  que  quatre  d'entre  elles 
furent  mises  en  garde  de  loi. 

Tant  que  la  galerie  reste  dans  les  couches  imperméables, 
c'est-à-dire  dans  le  terrain  houiller  et  les  argiles,  les  eaux 
circulent  au-dessus  d'elle  comme  si  elle  n'existait  pas.  A  son 
entrée  dans  la  craie,  les  eaux  y  affluent  de  toutes  parts  et  la 
zone  asséchée  forme  au-dessus  d'elle  une  sorte  de  cône  ren- 
versé dont  l'angle  au  sommet  est  d'autant  moins  ouvert  que 
la  roche  est  moins  concassée  et  que  la  quantité  d'eau  est  plus 
abondante. 

La  craie  fissurée  sert  de  réceptacle  à  une  nappe  profonde, 
où  sont  forés,  à  Bruxelles  et  aux  environs,  particulièrement 


223 


ROLB  DES  UTHÛCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 


dans  les  parties  basses  de  la  vallée  de  la  Senne ^  des  puits 
artésiens  dont  M.  Rutot  a  étudié  les  conditions  générales  do 
gisement  (fig.  104). 
On  peut  aussi  signaler  une  étude  de  M.  Bihet  sur  les  puits 


HcheJJe    des  lanceurs 


t.wi 


EcheJh  Hts  haut  nin 


Fig.  104.  ■—  Diagramme  transversal  entre  Cureghem  et  Ixelles,  montrant  les  conditions  géolo- 
giques dans  lesquelles  divers  puits  trouvent  de  l'eau,  soit  dans  les  couches  tertiaires,  soit 
dans  le  terrain  silurien.  I,  terrain  silurien  ;  Cr.  terrain  crétacé.  Les  coucbcs  superposées 
appartiennent  à  difTérents  étages  de  Téocène,  comme  il  est  indiqué  ci-aprés;  Ai,  assise  ia- 
férieure  du  terrain  landénien;  Ni.  étage  landénien  supérieur  qui  est  aquifére;  A,,  yprésieo; 
Ny,  nappe  d'eau  dans  le  sable  perméable  fin,  donnant  des  sources  et  alimentant  les  puits  do- 
mestiques; B,  sable  très  perméable  appartenant  à  l'étage  bruxellien  ;  B',  étage  laekeaien  et 
wemelien;  Q,  limon  quaternaire  (Hesbayen);  Q',  alluvion  ancienne;  a,  alluvion  moderne.  — 
Diaprés  M.  Rutot. 


artésiens  de  Louvain,  dont  plusieurs  pénètrent  dans  la  craie 
et  atteignent  136  mètres  au-dessous  du  niveau  de  la  mer'. 


Tersaiat  nord   J«   Teatobniv^rwald  et  veraftat  nord  de  Im 

Faderbora.  —  La  dernière  zone  de  collines  du  Teutoburger* 
wald  (fjg.  105)  se  compose  de  calcaires  marneux  très  fissurés 
appartenant  au  terrain  crétacé  (étages  turonien  et  cénoma- 
iiien)  qui  sont  superposés  à  du  quadersandstein  également 
très  fissuré  (gault  et  néocomien). 
Les  couches  de  la  craie  marneuse  plongent  vers  la  plaine 


'  Description  géologique  deêenvironê  de  Bruxelleét  p.  129,  1884. 
*  Bibet.  Puitt  artétien  de  Louvain^  1876. 


ROLE  DES  LITHOGLASES  SIMPLES.  â^5 

<le  Westphalie,  sous  un  angle  moyen  de  10*  et,  a  mesure 
({u'elles  se  rapprochent,  deviennent  de  moins  en  moins  in* 
clinées. 

De  grandes  fentes  verticales,  qui  sont  distantes  Tune  de 
Tautre  d'environ  0",40,  coupent  d'autres  fentes  qui  sont  pa- 
rallèles au  plongement  des  masses  crétacées,  de  sorte  que 
toutes  les  couches  sont  divisées  en  rhomboèdres.  Les  fissures 
verticales  du  calcaire  marneux  se  poursuivent  dans  le  qua- 
dersandstein  sous-jacent.  La  direction  de  ces  systèmes  de 


Fig.  105.  ~  Coupe  idéale  de  Paderborn  par  Schwanei  é  Dribourg,  montrant  comment  les  cou- 
ches des  divers  étages  crétacés  concourent  à  la  formation  des  belles  sources  qui  jaillissent  au 
pied  des  collines,  t,,  dévouien  supérieur;  H,,  culm;  H,,  grés  houiller  inrérieur,  sans  couche 
dehoaille;  F*,  zechstein  (permien);  T,  grès  bigarré,  grés  des  Vosges;  T«,  muschelkalk;  T,, 
keaper;  L,  hills  néocomien;  G«,  gault,  étage  auquel  se  rapporte  le  quadersandstein  du  texte; 
C"'a,  tourtia  (couche  imperméable)  ;  C"e,  cénomanien  ;  C".,  zone  à  Inoceramus  liibiatux  qui 
est  imperméable;  Ce,  marne  à  Terebratula  gracUis;  C'a.  zoue  à  Inoceramut  Geinilzii; 
C,  craie  à  Micrtuter  cortestudinarum ;  Cm,  marne  de  l'Emscher.  Les  deux  lignes  horizontales 
sont  le  niveau  de  la  mer  et  le  niveau  des  sources  qui  jaillissent  au  pied  de  la  cathédrale  de 
Paderborn*.  ~  D'après  X.  le  professeur  Schlûter. 

cassures  parallèles  peut  êlre  suivie  sur  des  dizaines  de  kilo- 
mètres, et  on  remarque  ça  et  là,  à  la  surface,  des  cavités 
où  les  eaux  météoriques  s'engouffrent,  et  où  mugit  souvent 
iin  cours  d'eau  souterrain. 

La  division  rhomboédrique  se  poursuit  dans  les  calcaires 
marneux,  de  manière  à  former  de  très  petits  rhomboèdres. 


'  G.  Bischof.  Neueê  Jahrbuek  der  Chemie  und  Pkytih  ton  Schtoeigger-Seidel,  t.  VUI, 
p.  449,1853. 

*  La  partie  an -dessus  de  ces  lignes  donne  la  position  des  couches;  mais  la  partie 
au^denoua  est  assex  hypothétique  pour  les  détails, 


Sâ4  ROLE  DES  UTHOaASES  DE  DIYERS  ORDRES. 

n'ayant  que  quelques  centimètres  de  côté,  à  travers  lesquels 
circulent  les  eaux  qui  sont  arrêtées  plus  bas. 

Près  de  Ilorn,  dans  le  Lippe  Delmold,  les  roches  dites 
Externstein  ou  Eggersterstein  (voir  pages  125  et  156  les  fig.  ?2 
et  73),  au  nombre  de  cinq  et  atteignant  40  mètres  de  hauteur, 
sont  coupées  par  des  diaclases;  les  unes  grandes,  régulières, 
verticales,  se  poursuivant  sur  toute  la  hauteur;  les  autres 
moins  régulières  et  inclinées.  Quand  les  Externstein  for- 
maient encore  le  noyau  d'une  grande  masse  de  quadersaiid- 
stein,  les  eaux  s'y  mouvaient,  ainsi  que  l'attestent  les  for- 
mes arrondies  des  parois  et  leurs  érosions  de  formes  di- 
verses. 

Ni  le  calcaire  marneux  crétacé,  ni  le  quadersandstein  ne 
renferment  une  couche  continue  imperméable.  Des  couches 
argileuses  qui  arrêtent  l'eau,  tant  qu'elles  ne  sont  pas  bri- 
sées ou  déplacées  par  des  soulèvements,  se  rencontrent, 
comme  l'indique  la  coupe,  à  la  base  du  turonien  (zone  à 
Inoceramus  lahiatm)  et  à  celle  du  cénomanien  (tourtia). 

Les  couches  crétacées  dites  Emscherj  entre  le  turonien,  et 
le  senonien,  distinguées  par  ÏAmm.  Margx  et  que  M.  le  pro- 
fesseur Schlûter  a  reconnues  depuis  Duisbourg  sur  le  Rhin 
jusqu'à  Paderborn,  sont  argileuses  et  imperméables;  leur 
épaisseur  atteint  600  mètres.  Ces  couches  sont  la  cause  que 
les  sources  prennent  naissance  en  des  points  où  elles  recou- 
vrent les  couches  qui  sont  remplies  d'eau  et  forment  un  bas- 
sin souterrain.  Six  forts  ruisseaux,  de  petites  rivières,  la 
Becke,  le  EUerbach,  l'Aa,  la  Sauer,  l'Altona,  l'Afle  et 
l'Aime  montrent  le  phénomène.  Une  ligne  droite  tirée  de 
Neuenbecken  par  Dahle  sur  Grunsteinsheim  forme  à  peu 
près  la  limite  du  cours  des  quatre  premiers  de  ces  cours 
d'eau. 

L'Afte,  qui  sort  du  quadersandstein  et  du  grès  houiller, 
se  perd  en  partie;  l'Aime,  le  plus  important  des  ruisseaux 


ROLE  DES  LITUOGLASES  SIMPLES. 


225 


qui  sort  du  calcaire  carbonifère,  perd  dans  le  terrain  cré- 
tacé, jusque  près  de  son  embouchure  dans  la  Lippe,  une 
grande  partie  de  son  eau  et,  dans  les  années  sèches,  dispa- 
raît entièrement. 


Fi?.  1(£».  ~  Disposition  des  sources  de  la  Pader,  dans  la  ville  de  Paderborn.  A  Spuhl  Pader,  à 
80"  au  nord  de  la  cathédrale^  sont  2i  sources,  dont  10  très  fortes  (a)  et  U  autres  (b)  ;  entre 
a  et  d  sur  les  deux  bords  de  la  Spuhl  Pader,  14  sources,  dont  3  très  fortes;  c,  Rolhborn  Pader, 
iO"  à  l'ouest  de  la  Spuhl  Pader,  prés  de  la  Mulilengasse,  19  sources,  dont  3  très  fortes  ; 
d.  Borne  Pader,  prés  de  la  rue  Paderberg,  à  218'  de  la  face  occidentale  de  la  cathédrale, 
41  sources  dont  25  très  fortes;  e,  Damme  Pader  é  90*  de  d,  vers  le  nord-ouest,  12  sources, 
dont  3  très  fortes,  é  230-  de  la  face  occidenUle  de  la  cathédrale  ;  ^,  Wasch  Pader,  é  40*  de  <f, 
15  sources  généralement  nommées  Warme  Pader,  é  cause  de  leur  température.  Vers  le  nord 
sont  les  sources:  I,  à 230-  N.  N.  B.  de  la  cathédrale;  H  et  III,  qui  sont  plus  au  nord;  IV,  à 
càli  de  la  promenade,  au  nord  de  la  ville,  à  490*  de  la  cathédrale  ;  V,  à  côté  de  la  prome- 
nade, à  170*  de  IV  vers  l'ouest.  ~  Diaprés  l'obligeante  communication  de  M.  Von  Dechen. 


La  ligne  de  séparation  de  toutes  ces  eaux  qui  se  perdent 
dans  les  calcaires  marneux,  court  du  pied  des  montagnes  du 
Teutoburgerwald  et  de  la  Haar»  depuis  Lippspringe  jusqu'à 
Paderborn;  Elsen,  Saltzkatten,  Geseeke,  Erwith,  etc. 

A  Lippspringe  jaillissent  les  sept  puissantes  sources  du 

15 


S26  ROLB  DES  LITHOGLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

Jordanes  (Jourdain),  principalement  celle  de  la  Lippe.  Cette 


dernière  sort,  avec  une  grande  vitesse  et  un  fort  volume,  de 


ROLE  DES  LITHOaÂSES  SIMPLES.  227 

trois  fentes  voisines  qui  traversent  le  calcaire  marneux,  et 
d'une  dépression  en  forme  d'entonnoir  :  la  moitié  suffit 
immédiatement 'à.  faire  mouvoir  un  moulin  à  trois  paires 
de  meules. 

A  Paderborn  (fig.  105),  dans  la  partie  basse  de  la  ville,  jail- 
lissent plus  de  140  sources,  dont  plusieurs  ne  sont  distantes 
les  unes  des  autres  que  de  1  à  2  mètres.  L'une  d'elles  est 
représentée  par  la  figure  106.  Elles  forment  un  ruisseau  qui, 
à  sa  rencontre  avec  la  Pader,  constitue  déjà  une  rivière  con- 
sidérable, faisant  mouvoir  non  moins  de  quatorze  roues  de 
moulin.  Le  rendement  de  toutes  ces  sources  ensemble,  au 
point  où  la  Pader  quitte  la  ville,  est  de  5,  6  mètres  cubes  par 
seconde  et  va  jusqu'à  7  mètres  cubes.  A  part  les  sources 
notées  sur  le  plan,  il  en  est  quelques-unes  qui  se  trouvent 
sous  les  maisons. 

I>ans  trois  villages  dits  secSy  Dornhagen,  Eggeringhaulen, 
Busche>  situés  sur  le  turonien,  au  sud-ouest  de  Paderborn, 
les  eaux  s'engoti'ffrent  pour  reparaître  aux  sources  de  la 
Pader,  à  des  distances  respectives  de  7,  5  et  de  H  kilo- 
mètres. 

Quand  une  chaîne  est  formée  de  roches  aussi  fissurées 
que  le  calcaire  marneux  crétacé  et  le  quadersandstein,  on 
ne  doit  pas  s'étonner  qu'on  n'y  rencontre  pas  de  sources. 
Cette  absence  est  frappante  quand  on  traverse  les  régions  qui 
s'étendent  de  Paderborn  vers  Hesse-Cassel.  A  part  quelques 
suintements,  qui  probablement  proviennent  de  couches  im- 
perméables subordonnées  aux  calcaires  marneux,  on  ne 
peut  citer  que  des  puits,  qui,  malgré  leur  profondeur  de 
30  mètres,  tarissent  pendant  les  sécheresses. 

Maikto.  —  Le  terrain  crétacé,  superposé  aux  couches  tria- 
siques  et  liasiques,  est  à  son  tour  surmonté  par  de  grandes 
nappes  de  basalte  très  aquifères,  comme  le  montrent  les 


338 


ROLE  DES  UTHOCLASES  DE  DITERS  ORDRES. 


nombreuses  sources  qui  jaillissent  à  leur  base,  tout  le  long 
des  flancs  du  plateau  d'Antrim. 
Depuis  les  environs  de  Belfast  jusqu'à  la  chaussée  des 


y 


Echelle 

20 


Fig.  107.  —  Carte  géolo(?ique  des  environs  de  Piali^forsk.  C„  terrain  créUcé  inférieur;  C^  lorrain 
crétacé  supérieur;  Q,  terrains  éocéneset  dépôts  quaternaires;  m,  roches  éruptivei  :  andésite 
microgranulite  et  porphyre  pétrosiliceux.  ->  D'après  M.  Âbich. 

Géants,  le  nombre  très  considérable  de  sources  pérennes 

s'explique  parce  que  les  roches  perméables  de  la  craie  sont 

supportées  par  les  argiles  plastiques  du  lias  et  du  keuper. 

Dans  beaucoup  de  lieux,  cette  affluence  continuelle  d'eau 


ROLE  DES  LITUOGUSES  SIMPLES. 


220 


est  la  cause  des  paysages  si  remarquables  du  voisinage  de 
Carnlough  et  de  la  ville  de  Limavady. 


Kisiovodftk  et  piAticonk.  —  Âux  euvirous  de  Kislo- 
vodsk,  d'Essentouky  et  de  Piatigorsk  se  montrent  des  cou- 
ches crétacées  appartenant  à  l'étage  du  gault  et  a  celui  de  la 
craie  supérieure  (fig.  107). 

Près  de  Kislovodsk,  les  couches  néocomiennes  présentent 
des  calcaires  dolomitiques  jaunâtres,  très  durs  (lig.  108),  avec 
de  nombreuses  nérinées.  Ils  sont  traversés  par  de  larges  fis- 


WAUXHALL. 


£. 


Echelle    des  Longueurs 

— '— ' ' ' ' ' ' ' 1 


Echelle  dos  Hauteurs 

ipB      ay      400     w      t 


fig.  106.  —  Coupe  prise  aux  environs  de  Kislovodsk,  passant  par  la  rivière  Olkovka  et  la  butte  du 
Wauxhall,  montrant  la  situation  de  la  source  thermale  du  Narzan,  et  celle  de  la  source  du 
Moulin.  C„  crétacé  inférieur  (néocomien)  ;  Qt,  travertin  ;  a,  alluvions.  —  D'après  M.  Dru. 

sures  qui  livrent  passage  à  de  véritables  sources  vauclu- 
siennes,  comme  celle  du  Moulin  de  la  Berezovaïa.  Quelques 
bancs  composés  d'un  calcaire  oolithique  jaunâtre  ou  gris, 
avec  de  nombreux  fossiles,  sont  en  quelque  sorte  perforés. 
La  station  de  Kislovodsk,  la  plus  fréquentée  du  Caucase,  ne 
possède  qu'une  seule  source  minérale,  le  Narzan  (géant),  qui 
est  caractérisée  par  l'abondance  de  l'acide  carbonique.  Elle 
se  trouve  dans  une  vallée  pittoresque,  au  pied  des  premiers 
contreforts  de  la  chaîne  caucasique,  à  800  mètres  seulement 
de  la  source  du  Moulin  qui  vient  d'être  signalée.  Quoique  la 

*  On  connaît  les  importantes  recherches  de  M.  Abich  sur  la  géologie  et  l'hydrologie 
des proTinces caucasiennes;  ce  qui  suit  est  emprunté  aux  Geclogische  Beobachtungen  auf 
lieiien  im  Kaukasut,  Moscou,  4875.  de  ce  savant  éminent. 


S30 


ROLE  DES  UTHOCUSES  D£  DIVERS  ORDRES. 


^^ 


i 


J 


.2  2 


■A       2 


roche  émissaire  du  Narzan  ne  soit  pas 
visible,  il  est  certain  qu  elle  appartient 
à  ces  calcaires  dolomitiques  que  ron 
retrouve  près  de  son  émergence,  dans 
les  berges  de  la  rivière  Olkovka. 

A  Piatigorsk  (fig.  109  et  HO)  les 
mouvements  qui  ont  poussé  au  jour  les 
^{  assises  crétacées  de  la  Machouka  et  re- 
îb  jeté  sur  ses  pentes  les  couches  ter- 
i  ^  tiaires,  ont  en  même  temps  produit  des 
;|  fractures,  l'une,  principale,  E.  55' N., 
si  dont  profitent  les  eaux  thermales.  Les 
l  e  pentes  du  mont  Machouka  sont  formées 
If  de  couches  peu  épaisses  d'un  calcaire 
il"  bleuâtre,  à  texture  cristalline,  recou- 
pées  quelquefois  dans  leur  masse  par 
de  petits  filons  de  carbonate  de  chaux, 
^.|  et  séparées  par  des  lits  minces  de  marne 
1^'  feuilletée.  L'inclinaison  moyenne  des 
il  bancs  varie  de  10%  vers  la  cote  640 
I  8  mètres,  à  55%  vers  746  mètres. 
^1  En  orientant  la  direction  générale 
I  g  de  ces  affleurements,  que  l'on  peut 
||  suivre  sur  toutes  les  pentes  de  la  Ma- 
«  •  chouka,  on  est  conduit  à  un  des  ac- 
|l  cidents  géologiques  les  plus  remar- 
I  s  quables  de  la  contrée,  le  Grand-Proval 
I  ^  (Gg.  111),  sorte  de  gouffre  cratériforme, 
I  mis  en  communication  avec  un  chemin 
"]  d'accès  par  une  galerie  de  80  mètres  de 
longueur.  Du  fond  de  cet  entonnoir 
émerge  une  source  thermale  puis- 
sante, à  l'altitude  de  770  mètres.  Ce 


ROLE  DES  LITHOCUSES  SIMPLES. 


251 


gigantesque  griflbn,  qui  sort  du  terrain  crétacé,  est  traversé 
par  une  fente  E.  27^  N.,  à  peu  près  suivant  la  direction 
générale  des  affleurements.   Près  de  cet  alignement,  une 

SE 

M.MachouAa 
Riv.ft(}koumoci?*^*î 


NO. 


M^  BechUou 


Mont-Verbloud 
(885T) 


Echelle   des  hn^fturs 


-.idl 


Ech.  de6  haut  ''^ 


kil 


Fig.  110.  —  Coupe  géologique  passant  par  les  monts  Machouka,  Bechlaou  et  Verbloud  (mont  Cha- 
meau), y,  schistes  crisUllins  ;j\,  terrain  jurassique  inférieur;  y„  terrain  jurassique  supérieur  ; 
C,  terrain  crétacé;  B,  terrain  éocéne;  Q,  travertin.  «,  roches éruptiTet  :  andésite,  microgra- 
nulitc  et  porphyre  pétrosiliceux.  —  D'après  M.  Dru. 

deuxième  fissure  bien  moins  importante,  appelée  Petit  Pro- 
val,  existe  entre  la  galerie  Elisabeth  et  le  Grand  Proval;  elle 

S.O.  N.E. 

Grand -Proval 


Fjv  PudWmok 


Fig.  111.  —  Coupe  prise  aux  environs  de  Piaîigorsic  du  Grand-Proval  A  l'extrémité  orientale  de  la 
Goriatcha!a-€ora.  C,  craie  supérieure  (senonicn)  ;  Em,  marne  éocéne;  Qe.  conglomérats; 
Qt,  travertin  ;  a,  allurions.  —  D'après  M.  Dm. 

est  au  sud  de  celui-ci,  et  se  continue,  en  descendant  au  sud- 
ouest,  par  des  séries  interrompues  de  fentes  et  d'ouvertures 
en  partie  comblées. 


Terrain  jura$$ique. 

Les  terrains  jurassiques,  avec  leurs  couches  calcaires  sou- 
vent très  fissurées,  alternant  avec  des  couches  marneuses 
ou  argileuses,  donnent  lieu  à  d'assez  nombreux  niveaux 
d'eau  qui  ont  été  étudiés  avec  soin  dans  beaucoup  de  lieux. 


232  ROLE  DES  LITHOCUSES  DE  DIVERS  ORDRES. 


T€Ml■•^  —  Les  marnes  supérieures  du  lias  à  bélemnites 
déterminent  dans  TYonne  un  grand  nombre  de  sources, 
souvent  fort  abondantes,  alimentées  par  les  eaux  qui  s'in- 
filtrent dans  le  calcaire  à  entroques.  Dans  les  coteaux  qui 
forment  le  bord  de  la  première  terrasse  de  la  Bourgogne, 
et  que,  d'Avallon,  on  voit  border  l'horizon,  la  nappe  d'eau 
vient  affleurer  à  une  grande  hauteur  pour  s'abaisser  dans 
les  flancs  des  vallées  et  des  vallons.  Les  principales  sources 
sont  à  Anstrude,  Santigny,  Marmeaux,  Talcy,  l'Isle,  Civry, 
Dissangis,  Lucy-le-Bois,  Aunay-la-Côte,  GiroUes-les-Forges, 
Givry,  Domecy-sur-le-Vault,  Asquins  et  Fontenay-près-Véze- 
lay.  Un  grand  nombre  de  ruisseaux  s'en  échappent  et  vont 
grossir  TArmançon,  le  Serain  et  la  Cure,  au-dessus  d'Aisy, 
de  Civry  et  de  Fontenay.  En  outre,  cette  nappe  alimente, 
sur  le  plateau  de  calcaire  à  entroques,  des  puits  dont  la  pro- 
fondeur est  variable,  par  suite  de  l'inclinaison  des  assises. 

Un  second  niveau  repose  sur  les  marnes  et  calcaires  à  pho- 
ladomyes.  Les  eaux  qui  traversent  la  grande  oolithe  sont  ar- 
rêtées par  cette  assise  marneuse  et  donnent  lieu  seulement 
à  un  petit  nombre  de  sources  peu  considérables,  placées 
sur  une  zone  un  peu  plus  éloignée  d'Avallon  que  la  précé- 
dente. Quelques-unes,  comme  celles  de  Voutenay  et  du  ruis- 
seau d'Asnières,  ont  cependant  de  l'importance.  Les  puits 
peu  nombreux  et  plus  ou  moins  profonds  des  plateaux  de  la 
grande  oolithe  sont  alimentés  par  cette  nappe. 

De  plus,  dans  le  fond  des  grandes  vallées,  il  y  a  quelques 
sources  considérables  à  la  partie  supérieure  de  la  grande 
oolithe,  sous  les  argiles  oxfordiennes  inférieures.  Les  princi- 
pales sont  les  fontaines  de  Lichères,  dans  la  vallée  de 
l'Yonne,  de  Saint-Moré  dans  celle  de  la  Cure,  d'Arlot  à  Grj, 
de  Fulvy  à  la  Grande-Fontaine  près  d'Argenteuil,  dans  la 

*  Raulin.  Description  de  VYonne^  p.  125. 


ROLE  DES  LITBOGIASES  SIMPLES.  255 

vallée  de  TArmançon.  Cette  dernière,  dit  Élie  de  Beaumont, 
est  un  nouvel  exemple  de  ces  cours  d'eau*souterrains  formés 
dans  l'intérieur  du  massif  calcaire  du  plateau  de  la  Côte- 
d'Or,  par  Tinfiltration  des  eaux  pluviales  et  même  de  cer- 
tains ruisseaux.  Resserré  entre  le  niveau  des  eaux  de  l'Ar* 
mançon  et  les  couches  marneuses  et  imperméables  de  l'étage 
oxfordien,  ce  cours  d'eau  souterrain  n'a  d'autre  issue  que  la 
vallée  même  de  TArmançon,  dans  laquelle  il  se  fait  jour. 

A  un  étage  plus  élevé  encore,  le  calcaire  marneux  de  l'as- 
sise oxfordien  ne  supérieure  donne  naissance  à  des  sources 
parfois  assez  abondantes.  Toutes  les  eaux  qui  se  perdent 
dans  le  calcaire  corallien  viennent  s'y  réunir;  les  principales 
sources  sont  celles  de  Baon,  deSoulangy,  près  de  Tonnerre, 
Chemilly-sur-Serain,  Val-de-Mercy  et  Courson.  Elles  donnent 
lieu  à  quelques  ruisseaux  peu  considérables  qui,  en  géné- 
ral, se  perdent  dans  le  sol  avant  d'atteindre  les  rivières. 
Cette  nappe  alimente  les  puits,  ordinairement  très  profonds, 
creusés  dans  le  calcaire  corallien.  Dans  la  partie  sud-ouest 
du  département,  au  delà  de  Courson,  elle  existe  à  peine, 
rassise  oxfordienne  supérieure  étant  presque  exclusivement 
formée  par  des  calcaires  compacts. 

Dans  le  fond  des  grandes  vallées,  quelques  fortes  sources 
sont  alimentées  par  des  bancs  supérieurs  du  calcaire  coral- 
lien, au-dessus  du  calcaire  marneux  à  astartés.  Les  princi- 
pales sont  la  Fosse  Dionne,  à  Tonnerre,  et  les  sources  de 
Bellombre,  près  d'Escolives,  dans  la  vallée  de  l'Yonne. 

11  est  un  quatrième  niveau  d'eau  dont  la  constance  n'est 
dépassée  que  par  celle  de  la  nappe  superposée  aux  marnes 
à  bélemnites.  Toutefois,  comme  la  séparation  du  calcaire 
compact  portlandien  et  des  marnes  kimmeridgiennes  n'est 
pas  tranchée,  et  que  d'ailleurs  les  calcaires  alternent  avec 
les  marnes,  il  y  a  une  succession  de  faibles  nappes  situées  à 
diverses  hauteurs.  Le  plus  grand  nombre  d'entre  elles  et 


S34  ROLE  DES  UTUOCLÂSES  DE  DIVERS  ORDRES. 

les  plus  abondantes  sont  situées  sur  la  pente  rapide  de  la 
deuxième  terrasse  *de  la  Bourgogne  ou  dans  les  vallons  qui  y 
sont  renfermés.  Ce  sont  celles  de  Melisey,  Serrigny,  Fyé, 
Fontenay-près-Chablis,  Beine,  Quenne,  Gy-l'Évêque,  Vallan 
(dont  une  partie  des  eaux  a  été  détournée  pour  le  service 
de  la  ville  d'Auxerre),  Migé,  Mouffy,  Ouanne,  Loing,  près  de 
Sainte-Colombe,  Treigny.  Plusieurs  ruisseaux  s'en  échap- 
pent et  viennent  grossir  l'Àrmançon,  le  Serain  et  T Yonne. 
Cette  nappe  alimente,  en  outre,  sur  le  plateau  de  calcaire 
portlandien,  les  puits  peu  nombreux,  mais  profonds,  qui  y 
sont  creusés, 

A  part  les  sources  précédentes,  il  en  est  d'énormes  à  di- 
vers niveaux  du  terrain  jurassique*.  Telles  sont,  dans  la 
Côte-d'Or,  celles  de  l'Arlot  (vallée  de  TArmançon),  de  Lai- 
gnes  (vallée  de  Laignes),  de  Courcelles-les-Rangs  (vallée  de 
la  Seine),  de  Brion  et  de  Thoires  (vallée  deTOurce);  dans 
TAube,  celle  de  Montigny  (vallée  de  l'Aube);  dans  la  Haute- 
Marne,  celle  de  Château-Yillain  (vallée  d'Aujon),  de  Condes 
(vallée  de  la  Marne),  etc. 

Kiévre.  —  D'après  M.  Lefort*,  on  connaît,  dans  la  Nièvre, 
plusieurs  localités  où  l'eau  minérale  a  été  reconnue,  et  donl 
le  sol  est  formé  de  couches  comprises  entre  le  trias  supé- 
rieur et  l'étage  oxfordien.  Elles  sont  : 

1^  A  Fougues,  en  quatre  points  groupés  autour  de  la  gare 
du  chemin  de  fer; 

2"  A  Fourchambault,  en  trois  points,  entre  le  passage  à 
niveau  de  la  route  de  Gorchisy  et  la  Loire  ; 

3"  A  Tazières,  en  trois  points  à  peu  près  en  ligne  droite. 

De  nombreuses  cassures  ont  disloqué  la  région  de  Fou- 
gues. Des  assises  diverses  se  heurtent  avec  des  inclinaisons 

*  Belgrand.  Eaux  nouvelles,  t.  IV,  p.  116. 

*  D'après  une  obligeante  communication  manuscrite. 


ROLE  DES  LITHOCUSES  SIMPLES.  255 

différentes,  par  suite  de  failles  qui  donnent  un  cachet  par- 
ticulier au  pays. 

Les  sources  minérales  de  Fourchambault  ont  été  rencon- 
ti'ées  dans  des  forages,  à  20  mètres  environ  de  profondeur. 
L'eau  gazeuse  a  jailli  du  puits  du  Château  de  l'usine  des 
Forges,  à  la  profondeur  de  13  mètres,  soit  7  mètres  en  con- 
Ire-bas  de  la  nappe  aquifère  d'eau  douce.  Non  loin  de  la 
gare,  on  a  trouvé  une  source  d'eau  douce  extrêmement  abon- 
dante à  8  mètres  de  profondeur. 

Au  château  du  Chasnay,  le  puits  ayant  été  creusé  au-des- 
sous de  la  nappe  aquifère,  qui  s'étend  sous  les  calcaires  à 
enlroques,  l'eau  gazeuse  a  paru  et  l'on  a  dû  boucher  le  fond 
du  puits  pour  ne  conserver  que  l'eau  douce.  L'eau  minérale 
monte  dans  tous  les  puits,  assez  près  de  la  surface,  mais  ne 
jaillit  nulle  part. 

Dans  tout  le  pays  l'eau  minérale  a  été  trouvée  au-dessous 
de  l'abondante  nappe  d'eau  douce  qui  alimente  les  puits  de 
la  contrée,  et  qui  provient  de  la  partie  moyenne  de  l'étage 
toarcien,  laquelle  est  très  argileuse,  compacte,  imperméable 
et  très  pyriteuse.  L'eau  minérale  affleure  aux  altitudes  sui- 
vantes :  Fougues,  190  mètres;  Fourchambault,  180  mètres; 
Tazières,  198  mètres. 

Ces  sources  constituent  plusieurs  alignements  en  rapport 
avec  des  failles. 

Dans  le  sud  du  département,  plusieurs  autres  sources  bi- 
carbonatées gazeuses  se  montrent  naturellement  à  Saint- 
Parizé-le-Chàtel  et  dans  le  bois  des  Vertus.  Elles  sont  situées, 
la  première  à  28  kilomètres,  et  la  seconde  à  38  kilomètres 
de  Fougues.  Elles  se  trouvent  aux  altitudes  suivantes  :  Saint- 
Parizé-le-Châtel,  205  mètres;  Bois-des-Vertus,  240  mètres. 

Elles  jaillissent  de  failles  bien  nettement  accusées  à  tra- 
vers les  calcaires  infraliasiquesde  la  zone  dite  hettangienne 
et  orientées  N.  52"  E.,  comme  à  Fougues  et  à  Fourchambault. 


SS6  BOLE  DES  LITHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

ne«Hiie-«t-noMUe  \  —  Dcs  dispositions  semblables  à  celles 
qui  viennent  d'être  signalées  dans  l'Yonne  se  renconlrent 
dans  le  département  de  Meurthe-et-Moselle. 

La  couche  marneuse  située  à  la  base  de  Toolithe  infé- 
rieure alimente  les  puits  des  communes  situées  sur  un 
grand  nombre  de  lieux  des  plateaux  de  Tarrondissemenl  de 
Briey.  Grâce  à  elle,  on  voit  des  communes,  telles  que  Liver- 
dun,  bâties  au-dessus  des  escarpements  de  l'oolithe  infé- 
rieure, à  plus  de  60  mètres  au-dessus  du  fond  des  vallées, 
posséder  des  fontaines  abondantes. 

Dans  les  arrondissements  de  Nancy  et  de  Toul,  des  cou- 
ches marneuses  subordonnées  à  l'oolithe  inférieure  fonc- 
tionnent comme  banc  imperméable  et  déterminent  une 
nappe  d'où  sortent  les  plus  fortes  sources,  telles  que  celles 
qui  avoisinent  l'embouchure  du  Terrouin,  en  face  d'Inge- 
ray,  et  celle  de  Frasne  sous  Villey-Saint-Étienne.  Toutefois, 
entre  les  grandes  lignes  de  cassure,  les  calcaires  marneux 
présentent  souvent  assez  d'imperméabilité  pour  assurer  l'ali- 
mentation des  puits  creusés  dans  les  calcaires  supérieurs. 
Pour  les  coteaux  dont  la  partie  supérieure  est  formée  par 
le  calcaire  à  nérinées  et  à  astartés,  une  petite  couche  Ao. 
marne  imperméable  détermine  en  nappe. 


lctMaat«-l■arne^  —  Une  uappc  forméc  par  les  eaux 
contenues  dans  les  calcaires  caverneux  et  fissurés  du  port- 
landien  repose  sur  les  argiles  du  kimmeridgien  (sources  de 
l'Aisne  et  de  la  Chée). 

En  outre,  aux  environs  de  Vassy,  le  calcaire  portlandien 
est  percé  de  nombreux  puits  naturels  absorbants,  dus  à  des 
failles. 


'  D*aprës  U.  Braconnier. 

*  Fuchs.  Feuillet  géologiques  de  Bar-le-Duc  et  de  Ya$iy, 


ROLE  DES  LITHOCUSES  SIMPLES.  S37 


Lorraim  aiienuuide  \  —  L'étage  oolitlùque  inférieur,  avec 
ses  alternances  de  couches  calcaires  iissurées  et  de  marnes 
argileuses  étanches,  oflre  de  même,  en  Lorraine,  une  dispo- 
sition éminemment  propre  à  la  production  des  sources.  On 
rencontre  dans  ce  terrain  trois  nappes  principales,  qui  sont 
placées  ainsi  dans  Tordre  ascendant  :  1^  à  la  base  de  la  for- 
mation où  la  puissante  assise  de  calcaires  repose  sur  les 
marnes  liasiques  associées  au  gîte  de  limonite  oolithique; 
2^  au  contact  des  marnes  argileuses  et  sableuses  à  Ostrea 
acuminata  et  de  Toolithe  de  Jaumont;  5**  aux  points,  où  les 
calcaires  gris  à  grosses  oolithesse  superposent  aux  argiles  de 
Gravelotte.  On  trouve  également  quelques  suintements  dans 
les  couches  calcaires  intercalées  au  milieu  de  ces  argiles, 
mais  ils  sont  peu  volumineux  et  très  sujets  à  tarir  pendant 
Tété. 

La  première  nappe  est  de  beaucoup  la  plus  importante. 
Correspondant  à  une  puissante  assise  de  calcaires  fissurés, 
et  recueillant  même  une  partie  des  eaux  des  couches  supé- 
rieures, elle  donne  lieu  à  épanchements  très  considérables. 
La  plupart  des  sources  qui  existent  dans  les  vallées  à  l'ouest 
de  la  Moselle  tirent  leurs  eaux  de  cette  nappe;  ce  sont,  en 
particulier,  les  Bouillons  de  Gorze,  dont  il  a  été  question 
plus  haut,  à  propos  de  la  faille  qui  contribue  à  renforcer 
leur  volume  ;  les  sources  de  Mance  et  de  Montvaux,  celles  de 
Scy,  de  Lessy,  de  Saulny,  de  Marange,  de  Pierrevillers,  de 
Rombas,  la  belle  fontaine  de  Glouange  dans  la  vallée  de 
rOrne,  dont  les  figures  seront  données  dans  la  seconde 
partie,  les  sources  de  la  Fensch*,  de  l'Alzette,  et  des  ruis- 


*  Jacquot.  Deêcription  géologique  de  la  Moselle. 

*  Les  marnes  superposées  à  la  couche  de  minerai  de  fer  oolithique  ont  une  épaisseur 
de  5  à  40  mètres.  Dans  les  parties  où  elles  sont  minces  et  où  elles  se  brisent  à  la  suite 
de  l'exploitation,  elles  laissent  pénétrer  les  eaux  dans  les  galeries,  particulièrement  de 
novembre  eo  avril  :  c'est  ainsi  qu'elles  affluent  très  abondamment  dans  les  mines  de 
Uerserange. 


S38  ROLE  DES  LITHOGUSES  DE  DIVERS  ORDRES. 

seaux  de  la  Côte-Rouge  et  du  Coulmy.  I^  Ghiers  a  également 
sa  source  à  ce  niveau,  sur  le  territoire  de  Dîfferdange,  àunc 
petite  distance  de  la  frontière. 

Le  niveau  d'eau  qui  correspond  aux  marnes  à  (htrea 
acuminataj  s^épanche  à  la  surface  en  sources  assez  rappro- 
chées, mais  peu  volumineuses.  La  plupart  des  petites  fon- 
taines qui  prennent  naissance  sur  le  plateau,  à  peu  de 
distance  de  ses  bords,  appartiennent  à  ce  niveau  ;  telles  sont 
celles  d'Auboué,  de  Briey,  de  Beuvillers,  de  Boulange,  de 
Cosnes,  de  Lexy,  de  Tellancourt  et  de  Bromont. 

La  troisième  nappe  donne  lieu  à  des  sources  qui  ne  man- 
quent pas  d'importance  et  notamment  à  celles  de  Saint- 
Julien-lès-Gorze,  Chambley,  Tronville,  Yionville,  Puxieux, 
et  à  celles  des  deux  Failly  et  du  Petit  Xivry  dans  le  canton  de 
lx)nguyon.  La  région  de  la  plaine  de  Briey,  la  moins  bien 
pourvue  d'eau,  est,  comme  on  le  voit,  celle  qui  s'étend  sur 
les  argiles  placées  à  la  base  du  troisième  groupe  de  Toolithe  : 
on  n'y  rencontre  que  quelques  suintements  peu  volumineux, 
circonstance  qu'il  faut  attribuer  à  la  compacité  de  cette 
assise  et  au  peu  d'étendue  des  couches  perméables  qui  y 
sont  intercalées.  Aussi  les  eaux  météoriques  s'écoulent-elles 
à  la  surface  de  cette  région  et  se  rendent-elles  aux  cours 
d'eau,  sans  pénétrer  dans  le  sol.  L'extrême  perméabilité 
des  calcaires  de  l'étage  inférieur  donne  lieu,  au  contraire, 
à  des  phénomènes  inverses.  Il  n'est  pas  rare  de  voir  un 
ruisseau,  après  avoir  coulé  pendant  quelque  temps  à  la  sur- 
face du  plateau,  disparaître  tout  à  coup  dans  ces  calcaires. 
Ces  pertes  d'eau  sont  assez  communes  dans  l'arrondissement 
de  Briey;  les  plus  connues  sont  celles  de  Havange  et  du 
Grand-Bichet,  commune  de  Mercy-le-Bas.  Selon  toute  vrai- 
semblance, les  eaux  qui  disparaissent  ainsi,  contribuent  à 
alimenter  les  sources  qui  prennent  naissance  dans  les  vallées 
voisines  à  un  niveau  géologique  inférieur. 


ROLE  DES  LITHOGLASES  SIMPLES. 


239 


Pour  préciser,  nous  citerons,  d'après  Tobligeaule  commu- 
nication de  M.  Simon,  comptable  aux  usines  de  Hayange, 
l'exemple  des  volumineuses  sources  de  la  Fensch,  dont  le 
débit  varie,  au  cours  d'une  année  normale,  de  8000  à 
60000  litres  par  minute,  et  a  été  exceptionnellement  jusqu'à 
200000  litres.  Ces  sources  sortent  par  sept  ouvertures  dis- 


^Cnisnes^--^'' 


\.  Rodmnviller/ 


«-Auinetz 

Ludelanjp  q 


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N  - 

/S  ny  ♦Anqcvillere 

vBassomiiicrrc    '  /       \ 


.-'^♦Dassoniïiicrrc 

^Atrfun-Ie- Roman 
0*A  / 


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IN' 


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/Loàn 


Echellô 

4<         «         • 


«loi. 


Fi;.  111  —  Carte  de  la  région  de  la  Lorraine,  située  entre  Aumetzet  Hayange,  montrant  la  dispo- 
sition des  failles  principales  indiquées  par  des  lignes  brisées,  et  celle  des  sources  de  la 
Feosch  à  Fontoj,  avec  les  pertes  d*eau  A,B,C,D,E,F,G,  auxquelles  elles  paraissent  devoir  leur 
origine,  ainsi  que  les  sources  S,S,S  du  Gontroy,  de  U  Grusne  et  de  Sainte-Neige.  —  D*aprés 
M.  Simon. 


lincles,  sous  l'ancien  château  de  Fontoy  (fig.  112  et  113). 
Elles  correspondent  à  une  faille  dirigée  E.  46'' N.,  qui  met 
les  argiles  de  Gravelotte  en  contact  avec  le  calcaire  à  poly- 
piers. A  250"  de  leur  émergence,  ces  sources  font  marcher 
toute  l'année  un  moulin  de  quatre  paires  de  meules,  et  plus 
bas,  sur  un  cours  de  15  kilomètres,  jusqu'à  son  confluent 
avec  la  Moselle,  elle  est  utilisée  dans  dix-huit  chutes  pour 


240 


ROLE  DES  UTUOCUSES  DE  DIVERS  ORDRES. 


faire  mouvoir  des  roues  hydrauliques  et  des  turbines,  dont 
certaines  sont  très  fortes,  particulièrement  dans  les  cinq 
usines  de  Hayangc. 

Or  sur  le  plateau  d'environ  73  kilomètres  carrés  qui 
s'étend  à  Touest  de  Fontoy,  se  trouvent  beaucoup  d'enton- 
noirs dans  lesquels  se  perdent  les  eaux.  Les  plus  importants 
sont  marqués  sur  la  figure  par  les  lettres  A,  B,C,  D,  E,F,G. 
Ces  trois  derniers  sont  les  plus  considérables. 

L'entonnoir  G,  situé  entre  Ludlange  et  Hayange,  reçoit 
les  eaux  de  la  région  qui  s'étend  d'Aumetz  à  Tressange, 


s«o 

F 

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Rochonvilfers. 

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Nireau 

^^     7a  ___!'?'!- 

E  chel le  des  Longueurs . 
0         1         2         a*^      ♦         feva 

.     Echelle  des  Hatiteurs 

0              »           90           30           «0          5C-* 

Fig.  113.  —  Coape  suivant  la  ligne  ab  â\i  plan  précédent,  montrant  comment  les  sources  5. 
dites  de  la  Fensch  à  Fontoy,  jaillissent  d'une  grande  faille  pasnnt  dans  cette  localité; 
fff,  couche  de  minerai  de  Ter  oolilhique  rejeté  par  les  failles  et  qui  supporte  une  napfw^ 
d'eau,  également  rejetée  et  formant  ainsi  la  source  de  la  Fensch.  —  D'après  M.  Simon. 


Rochonvillers  et  Havange;  autrefois  ces  eaux  formaient  un 
ruisseau  appelé  le  Kellebri,  qui  se  jetait  dans  le  ruisseau  de 
Boulange  et  qui  a  disparu  depuis  vingt-cinq  ans  environ, 
époque  de  la  formation  de  cet  entonnoir.  En  y  jetant  de  la 
sciure  de  bois,  les  paysans  ont  constaté  que  les  eaux  de  cet 
entonnoir  forment  les  deux  sources  nord  de  la  Fensch,  qui 
restent  toujours  limpides. 

Il  y  a  environ  60  ans,  les  entonnoirs  C,  D,  E,  F  n'existaient 
pas;  les  eaux  du  ruisseau  de  Boulange  se  déversaient  dans 
le  Conroy,  au  détriment  duquel  la  Fensch  en  profite  aujour- 


ROLE  DES  LITHOCLASES  SIMPLES.  241 

d'hui.  La  source  actuelle  du  Conroy  débite  environ  50  litres 
par  minute. 

Les  cinq  sources  du  côté  sud  correspondent  aux  entonnoirs 
C,  D,  E,  F,  et  probablement  aussi  à  A  et  B.  Chaque  fois 
qu'un  orage  est  localisé  sur  les  hauteurs  d'Audun,  Sancy  et 
Boulange,  sans  atteindre  Fontoy,  l'eau  de  ces  cinq  sources 
se  trouble,  tandis  que  les  deux  autres  restent  claires. 

Ainsi,  les  eaux  des  entonnoirs,  sans  doute  par  l'intermé- 
diaire des  failles  et  de  leurs  ramifications,  descendent  d'une 
hauteur  de  plus  de  120  mètres  pour  former  les  sources  de  la 
Fensch.  La  source  de  la  Crusnes,  environ  15  fois  moindre 
que  celle  de  la  Fensch,  ne  provient  pas  comme  ces  der- 
nières d'entonnoirs,  mais  de  la  dénivellation  du  sol  occa- 
sioimée  par  la  grande  faille  d'Audun-le-Tiche,  qui,  par  suite 
deTalfaissement  du  côté  oriental,  fait  aboutir  la  nappe  d'eau 
à  la  surface  du  sol,  où  elle  vient  émerger. 

Enfin  les  sources  de  Sainte-Neige,  commune  de  Neufchef, 
près  de  Hayange,  proviennent  de  la  grande  faille  dite  de 
Hayange,  par  suite  de  cassures  secondaires,  dont  deux  sont  à 
angle  droit.  Elles  produisent  environ  120  litres  par  minute, 
et,  à  50  mètres  environ  de  leur  émergence,  elles  disparaissent 
«n  s'engouffrant  dans  la  grande  faille  de  Hayange,  pour  en 
ressortir  plus  bas,  peut-être  entre  Hayange  et  Knutange,  où 
il  y  a  plusieurs  petites  sources. 

C'est  principalement  dans  l'oolithe  que  Ton  peut  remar- 
quer les  rapports  qui  existent,  d'une  manière  presque  cons- 
tante, entre  la  position  des  habitations  et  la  distribution 
des  eaux  souterraines  et  des  sources.  Une  première  ligne  de 
villages  est  placée  à  mi-côte  sur  la  falaise  qui  termine  le 
plateau  ;  elle  est  habituellement  alimentée  par  les  sources 
du  premier  niveau.  Noveant,  Dornot,  Vaux,  Jussy,  Lessy,  Scy, 
Plappeville,  Saulny,  Marange,  Pierrevillers,  Rombas  et  une 
foule  d'aulres  localités,  sont  situées  dans  cette  position.  Sur 

16 


242  ROLE  DES  LITHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

le  plateau,  les  villages  sont  groupés  au  contact  des  marnes  à 
Oslrea  acuminata  et  de  Toolithe  de  Jaumont,  où  il  existe  de 
petites  sources;  mais  on  en  voit  aussi  beaucoup  sur  celle 
dernière  assise;  ceux-là  se  procurent  l'eau  qui  leur  est  né- 
cessaire, en  creusant  des  puits  qui  descendent  généralemeDl 
jusqu'aux  premières  couches  du  système  marneux  placé  à  la 
base  de  Tétage  supérieur.  Il  n'y  a  jamais  de  groupes  d'ha- 
bitations, au  contraire,  sur  le  calcaire  à  polypiers,  parce 
qu'il  faudrait  descendre  à  une  trop  grande  profondeur  pour 
y  rechercher  l'eau.  On  ne  connaît,  dans  l'ancien  déparle- 
ment de  la  Moselle,  que  Longwy  qui  fasse  exception  à  celte 
règle;  lespuils  qui  alimentent  cette  ville  traversent  toute 
l'oolithe  inférieure  ;  l'eau  s'y  tient  à  60  mètres  au-dessous 
du  sol.  Mais  il  faut  remarquer  que  Longwy  est  une  place  de 
guerre,  dont  remplacement  a  été  déterminé  bien  plutôt  par 
des  considérations  stratégiques  que  par  la  nature.  Les  vil- 
lages de  la  partie  occidentale  de  la  plaine  de  Briey  sont,  en 
général,  alimentés  par  la  troisième  nappe;  aussi  la  pliiparl 
d'entre  eux  sont-ils  placés  sur  la  ligne  de  contact  de  l'argile 
marneuse  à  Ostrea  costata  et  des  calcaires  oolithiques  gris 
qui  la  surmontent. 


«ralld-DacllédeLaxeBlbollrff^  —  La  valléc  de  la  Syrc  prend 
son  origine  à  Syren,  à  12  kilomètres  de  Luxembourg,  dans  un 
sol  très  accidenté.  Une  sorte  d'entonnoir  (fig.  114)  dans  les 
couches  du  calcaire  infraliasique,  que  recouvrent  les  couches 
très  perméables  de  grès  du  Luxembourg,  donnent  naissance 
à  la  source  la  plus  volumineuse  du  pays  :  elle  forme  immé- 
diatement un  ruisseau  qui,  à  100  mètres  de  là,  fait  marcher 
plusieurs  moulins. 

Le  ruisseau  du  Muhlbach,  à  2  kilomètres  au  N.  0.  de  Luxem- 

*  D*après  H.  Siegen,  auteur  de  la  carte  géologique  du  Grand-Duché. 


ROLE  DES  LITHOGLASES  SIMPLES. 


243 


bourg,  présente  une  disposition  identique  à  celle  de  la  Syre. 
Sept  sources  assez  considérables  jaillissent  sur  une  super- 


080 


Ulft 


'.-Éèçllc  des  Hautorrà.  •' 


Fig.  lli.  —  Plan  et  coupe  montrant  la  soorce  de  la  Syre,  à  Syrcn.  Ak,  marnes  irisées  du  Keuper; 
Li,  maroes  infraliasiques;  Li,  grés  infraliasiques  ;  G,  calcaire  A  gryphées  ;  Lo,  marnes  à 
oToIdM;  S»  source.  —  D'après  M.  Siegen. 


fîcie  de  moins  d'un  are  et  donnent  naissance  au  ruisseau 
qui  sert  de  moteur  à  une  importante  fayencerie. 

C'est  le  même  grès  qui  alimente  les   puits  de  Luxem- 
bourg. 


;\  —  Le  plateau  de  l'Mpe  du  Wurtemberg 
formé  du  Jura  blanc  (séquanien)  est  tout  à  fait  sec,  si  ce 
n'est  dans  les  lieux  où  il  est  recouvert  de  quelques  lambeaux 
de  terrains  tertiaires  ou  de  tuf  basaltique.  Cette  aridité 
résulte  de  ce  que  les  couches  sont  très  fissurées,  de  sorte 


*  Fraas.  Die  Nutzbare  mhieralien  Wurtembergs,  1860. 


944 


ROLE  DES  LITUOGLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 


que  les  eaux  de  pluie  s'infiltrent  jusqu'à  ce  qu'elles  rencon- 
trent des  couches  argileuses  ordinairement  profondes.  Toutes 
les  couches  ayant  un  plongement  général  vers  le  S.-E.,  le 
versant  méridional  de  TAlpe  donne  issue  à  des  sources  remar- 
quables par  leur  fort  volume.  On  les  voit  quelquefois  se 
troubler  par  suite  de  pluies  tombées  à  quelque  distance  sur 
le  plateau  qui  les  alimentent,  et  sans  qu'il  soit  tombé  d'eau 
dans  les  environs.  Il  est  arrivé  aussi  qu'un  effondrement  les 
a  rendues  limoneuses;  à  la  suite  d'un  accident  de  ce  genre 
qui  eut  lieu  à  Ennabeuren,  la  source  Smihe  près  Springen, 
({ui  en  est  distante  de  plus  de  10  kilomètres,  resta  trouble 
pendant  quelque  temps.  Quelquefois  aussi,  les  cours  d'eau 


Fig.  115.  —  Coupe  montrant  les  conditions  géologiques  qui  donnent  naissance  au  pied  de 
l'Alpe  du  Wurtemberg  à  la  source  de  BUuberen.  —  D'après  M.  0.  Fraas. 


souterrains  alimentant  les  sources  paraissent  se  déplacer, 
comme  cela  est  arrivé  pour  la  source  de  Sondernach,  de- 
puis 1849.  Dans  cette  même  année,  les  sources  Smihe  devin- 
rent si  fortes  que  la  vallée  se  trouva  submergée  et,  depuis 
lors,  le  volume  des  eaux  est  resté  plus  élevé  qu'autrefois. 

La  figure  116  représente  la  source  importante  qui  sorl 
dans  la  vallée  de  le  Blau,  près  de  Blaubeuren.  Ses  eaux,  après 
avoir  pénétré  à  travers  les  couches  «  du  Jura  blanc,  sont 
arrêtées  par  les  bancs  imperméables  du  corallien  et  elles 
s'écoulent  vers  le  S.-E.  jusqu'à  ce  qu'elles  trouvent  une 
issue  par  la  cassure  de  Blaubeuren.  Entre  Tutlingen  et 
Neresheim,  il  y  a  des  centaines  de  sources  correspondant 
aux  couches  argileuses  de  la  partie  moyenne  du  Jura  blanc. 


ROLE  DES  LITIIOGLÂSES  SIMPLES.  ^5 

Il  en  existe  aussi  dans  les  vallées  profondes  qui  descendent 
vers  le  N.,  particulièrement  entre  Mûnsigen  et  Weissen- 

stein. 

var  et  Alpe•-»hlrl«lllle•^  —  En  y  Comprenant  les  assises  cré- 
tacées et  jurassiques,  les  couches  calcaires  constituent,  dans 
les  départements  du  Var  et  des  Alpes  maritimes  une  épais- 
seur totale  de  plus  de  2000  mètres. 

A  la  partie  inférieure  des  terrains  jurassiques,  il  faut 
citer  surtout,  comme  principale  couche  imperméable,  les 
dépôts  argileux  et  finement  feuilletés  de  la  zone  à  Àvicula 
œntoridj  qui  occupe  une  grande  étendue. 

On  peut  en  effet  suivre  cette  zone  depuis  Ollioules  jusqu'à 
la  vallée  de  Dardennes,  d'où  la  ville  de  Toulon  tire  ses  eaux. 
Mais  dans  cet  intervalle,  les  couches  plongeant  assez  forte- 
ment vers  le  nord,  il  n'existe  pas  de  sources  sur  le  versant 
méridional,  seul  accessible  à  l'observation.  Dans  la  vallée  de 
Dardennes,  la  zone  revenant  au  jour  sur  une  assez  grande 
étendue,  les  sources  reparaissent,  et,  en  même  temps,  la 
source  de  la  Baume. 

Partout  aux  environs  de  Tourves,  de  Saint-Maximin,  de 
Barjols,  de  Besse,  deFlassans,  etc.,  la  zone k  Avicula  contorta 
joue  le  rôle  découche  imperméable,  et  produit  à  peu  près  la 
totalité  des  sources  nombreuses  et  abondantes  qui  existent 
dans  cette  partie  du  département. 

La  couche  imperméable  caractérisée  par  V Ameuta  con- 
torfa  vient  au  jour  sur  de  grands  espaces;  mais  en  général 
elle  plonge  sous  l'horizon  à  partir  de  sa  ligne  d'émergence. 
11  résulte  de  cette  disposition  que  l'eau  s'éloigne  du  bord 
visible  de  la  zone.  C'est  seulement  par  exception  que  la  dispo- 
sition contraire  se  présente.  Mais  alors  ce  ne  sont  plus  des 

*  Dieulafait.  Zone  à  Avicula  contorta,  p.  H  ,  1807. 


246  ROLE  DES  LITHOCUSES  DE  DIVERS  ORDRES. 

sources  ordinaires  qui  sortent  de  cette  zone  :  ce  sont  de  véri- 
tables torrents.  C'estce  qu'il  est  facile  de  vérifier  en  plusieurs 
points  de  Tarrondissement  de  Brignoles,  à  Bargemont,  à 
Seillans,  à  la  Foux  de  Draguignan,  etc. 

wmdÊL'WemÊh  :  féruces.  —  Les  forages  qui  ont  fait  jaillir 
dans  ces  dernières  années  à  Buda-Pesth  des  eaux  magné- 
siennes si  remarquables  et  dont  l'un  dépasse  970  mètres,  les 
ont  rencontrées  dans  des  couches  de  dolomie  et  de  calcaire 
attribuées  à  l'étage  rhétien  et  très  perméables,  à  cause  des 
nombreuses  fissures  et  cavités  qui  les  traversent. 

Aafleterre    :   CSloccsterahIre,  Uncolaslilre,    LelceatenlrfK,  ïVér- 

<hMirtMshire  (BatiaNd).  —  En  Angleterre,  Toolithe  inférieure 
et  la  grande  oolithe  sont  également  le  siège  de  sources 
très  volumineuses. 

Tel  est  le  cas  dans  le  Glocestershire.  D'après  M.  Prestwich* 
entre  Cirencester  et  Cheltenham  sont,  dans  Toolithe  infé- 
rieure :  les  sources  célèbres  dites  Seven  Wells,  origine  de 
la  Churm  et  débitant  environ  par  jour  9000  mètres 
cubes.  A  Syreford,  près  Cheltenham,  une  forte  source  jaillit 
a  la  base  de  Toolithe  inférieure,  d'un  volume  journalier  de 
18  000  mètres  cubes;  elle  forme  la  source  principale  de  la 
Colne. 

Dans  la  grande  oolithe,  les  sources  sont  en  général  encore 
plus  puissantes  et  moins  variables  dans  leur  débit.  Elles 
sortent  pour  la  plupart  sur  le  banc  du  fuUer's  earth,  qui 
sépare  la  grande  oolithe  de  Toolithe  inférieure.  Celle  de 
Ampney  Cinas,  près  Cirencester,  donne  par  jour  de  22300 
à  90000  mètres  cubes. 

Douze  sources  sortant  du  massif  oolithique  près  d'Oxford 

*  Sources  deê  environs  dVxfordt  p.  24. 


ROLE  DES  LITflOGLASES  SIMPLES. 


247 


fournissent  un  volume  moyen  de  252  000  mètres  cubes  par 
jour. 

Des  alternances  fréquentes  de  calcaire  et  de  sable  avec  des 
argiles  donnent  lieu  à  de  nombreuses  sources  bien  connues 
dans  le  comté  de  Northampton.  Leur  sortie  à  la  base  des 
proéminences  pierreuses  et  la  verdure  qu'elles  provoquent 
à  leur  sortie  les  font  reconnaître  de  loin. 

Comme  il  est  bien  souvent  arrivé,  la  présence  de  sources 
a  déterminé  la  situation  de  villes,  villages  et  mémo  d'habita- 
tions isolées.  Tel  est  particulièrement  le  cas  pour  des  séries 
de  villages  en  rapport,  d'une  part,  avec  la  limite  de  Toolithe 
inférieure  et  du  lias  supérieur,  de  l'autre,  avec  celle  du 
marUtone^rock  et  des  argiles  du  lias  moyen.  Tandis  que  des 
villages  ont  pris  naissance  sur  de  nombreux  affleurements 
de  cette  sorte,  de  grandes  étendues  intermédiaires  en  sont 
dépourvues  et  présentent  à  peine  quelques  habitations  isolées. 

D'après  M.  Judd,  les  Northampton  sands  qui  sont  à  la  base  de 
Toolithe  inférieure,  reposent  dans  le  Rutland  et  le  South- 
Lincoln  sur  une  surface  érodéede  l'argile  supérieure  du  lias. 


Tig.  116.  —  Coupe  prise  dans  le  Ratland  (Lincoinshirc)  de  Somerby  à  Exton,  montrant  les  deux 
niveaux  d'eau  soutenus  par  les  argilea  marneuses  et  supérieures  du  lias,  sur  une  longueur  de 
16  kilomètres  ;  G,  boulder  clay  ;  Oi.  oolithe  inférieure  ;  U.  argile  du  lias  supérieur  ;  I^.  marUtone 
rock  bed;  Lm.  sables  et  argiles  du  marUlone;  U,  argile  du  lias  inférieur.  —  D'après  M.  Judd. 


L'escarpement  hardi  et  abrupt  formé  de  roches  oolithiques 
«  cliff  >  qui  s'étend  sur  145  kilomètres  à  travers  le  Lincohi- 
shire  jusqu'au  lorkshire  fournit  à  sa  base,  vers  sa  jonction 
avec  le  lias,  de  copieuses  sources,  parmi  lesquelles  la  belle 
source  Éléonor  Cross,  à  Geddington  et  celle  de  Easton. 
La  figure  M  6  donne  un  exemple  fréquent  dans  le  Rutland. 


248  ROLE  DES  UTHOaiSES  DE  DIVERS  ORDRES. 


Trias  et  terrain  permien. 


5*.  —  Le  grès  bigarré,  quoique  fournis- 
sant des  sources,  ne  présente  pas  à  proprement  parler  de  ni- 
veaux d'eau. 

Il  en  existe  au  contraire  un  très  abondant  au-dessus  des 
glaises  bigarrées  avec  gypse  qui  forment  la  base  du  muschel- 
kalk.  Ce  niveau  donne  lieu  à  un  très  grand  nombre  de  belles 
sources  et,  en  particulier,  à  celles  qui  alimentent  le  hameau  de 
Rustroff  près  Sierk,  ainsi  qu'un  certain  nombre  de  villages 
placés  à  mi-côte,  dans  Tamphithéàlre  de  collines  qui  entoure 
la  plaine  de  Creutzwald,  tels  que  :  Berweilcr,  Remering,  Bisten 
im  Loch,  Œtingen,  Spicheren,  Alsting,  Hesseling  et  Zinging. 
Beaucoup  de  sources,  dans  le  canton  deRohrbach,  prennent 
également  naissance  à  la  jonction  des  marnes  et  des  glaises 
du  muschelkalk.  Un  autre  niveau  se  montre,  avec  une  cons- 
tance remarquable,  au  contact  des  couches  dolomi tiques  qui 
constituent  le  troisième  étage  du  muschelkalk  et  des  marnes 
verdâtressur  lesquelles  elles  reposent.  Il  s'épanche  à  la  base 
des  plateaux  que  ces  assises  recouvrent,  aux  points  où  elles 
commencent  à  disparaître  sous  les  marnes  irisées.  Ce  niveau 
est  notamment  bien  accusé  dans  la  région  comprise  entre 
les  deux  Nieds,  où  le  système  supérieur  du  muschelkalk 
acquiert  un  développement  exceptionnel.  Il  y  a  déterminé 
remplacement  des  villages  de  Courcelles-Chaussy,  Chevillon, 
Maizeroy,  Bazoncourt,  Villers-Stoncourt  et  Servigny-les- 
Raville  qui  sont  tous  alimentés  par  de  belles  sources.  Les 
mêmes  considérations  hydrographiques  ont  amené  la  fonda- 
tion de  centres  de  population  plus  importants,  qui  occupent 
dans  le  département  une  situation  identique  et  se  trouvent 

*  Jacquot.  Géologie  de  la  Moselle. 


ROLE  DES  UTHOaASES  SIMPLES.  249 

dans  des  conditions  analogues,  tels  que  Sarreguemines^ 
Faulquemont,  Boulay  et  Bouzonville. 

La  contrée  occupée  par  les  marnes  irisées  est  raal  pourvue 
d'eau.  Les  assises  marneuses  qui  prédominent  dans  ce  ter- 
rain étant  imperméables,  les  eaux  qu'on  y  rencontre  no 
peuvent  prendre  naissance  que  dans  les  couches  dolomiliques 
ou  gréseuses  qui  s'y  trouvent  intercalées;  elles  sont  peu 
volumineuses  et  très  sujettes  à  tarir  pendant  l'été.  Par  l'effet 
de  ces  conditions  hydrographiques,  tous  les  villages  apparte- 
nant à  la  région  keupérienne  sont  placés  sur  la  dolomie  qui 
couronne  l'élage  inférieur,  ou  un  peu  en  contre-bas  de  celle 
assise,  et,  quand  elle  ne  fournit  point  d'eau  courante,  ce  qui 
est  le  cas  le  plus  général,  ils  s'approvisionnent  dans  le  grès, 
au  moyen  de  puits  plus  ou  moins  profonds. 

Quant  au  grès  des  Vosges,  il  est  presque  toujours  fissuré 
et  n'a  aucune  assise  qui  puisse  arrêter  les  eaux  ;  aussi  n'y 
rencontre-t-on  pas  de  sources  sur  les  flancs  des  montagnes; 
elles  sourdent  toutes  dans  le  fond  des  vallées.  Elles  sont 
abondantes,  fraîches  et  d'une  grande  purelé.  Dans  le  pays  de 
Bilche  tous  les  villages  sont,  comme  les  sources,  groupés 
dans  les  profonds  replis  du  sol,  et  le  reste  de  la  contrée  est 
inhabité. 

De  même  que  les  couches  de  houille  du  nord  de  la  France, 
celles  que  la  sonde  a  fait  découvrir  en  Lorraine,  sur  le  pro- 
longement du  bassin  de  Sarrebrûck,  sont  recouvertes  de 
couches  d'un  autre  terrain.  Ces  couches,  dont  l'épaisseur 
dépasse  150  mètres,  appartiennent  au  grès  des  Vosges,  qui 
non  seulement  est  poreux,  mais  traversé  par  des  fissures 
nombreuses  et  quelquefois  assez  larges.  A  l'abondance  très 
considérable  d'eau,  conséquence  de  cette  disposition,  se 
joint  la  circonstance  que  la  nappe  d'eau,  au  lieu  d'être  res- 
treinte à  un  niveau  déterminé,  comme  dans  le  nord  de  la 
France,  s'étend  depuis  la  surface  jusqu'au  terrain  houiller. 


250  ROLE  DES  LITUOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

de  sorte  qu'elle  fonctionne  comme  une  colonne  d'eau  de 
100  mètres  de  hauteur,  c'est-à-dire  avec  une  pression  de 
10  atmosphères.  En  1858,  vingt  et  un  millions  de  francs 
avaient  déjà  été  dépensés  à  l'exécution  de  puits  à  traversées 
couches  perméables,  lorsqu'on  se  mit  à  forer  dans  cette  ré- 
gion, comme  on  l'avait  fait  ailleurs  avec  succès,  des  puits  à 
niveau  plein  avec  cuvelage  en  fonte,  suivant  les  procédés 
Kind  et  Chaudron  \ 

■Matai  de  lA  iterrc*.  —  Sur  la  rivc  gauchc  de  la  Sarre,  entre 
Forbach  et  Merten,  la  limite  du  terrain  houiller  et  du  grès 
des  Vosges  est  marquée  par  un  niveau  d'eau  extrêmement 
abondant  et  qui  donne  lieu  à  un  très  grand  nombre  de 
sources  ;  l'une  d'elles  est  à  une  distance  de  300  mètres  envi- 
ron du  hameau  de  Schoenecken,  qu'elle  alimente. 


de  Luxembonrff  :  Hoadorf.  —  Parmi  les  caux  jaillis- 
santes,  on  peut  mentionner  celle  qu'a  atteinte  à  Mondorl 
(Grand-duché  de  Luxembourg)  à  202  mètres  de  profondeur, 
un  forage  exécuté  à  travers  le  trias,  dans  le  but  d'y  recher- 
cher le  sel  gemme. 

Henrthe-et-HoaeUe.  —  Au  poiut  de  vue  dcs  eaux,  le  grès  des 
Vosges  présente  les  mômes  caractères  dans  Meurthe-et-Mo- 
selle "  que  dans  la  Lorraine  allemande. 

AlMeei  Soultji-les-Babis  e«  Nlederbromi.  —  La  SOUrCC  minérale 

de  Soultz-les-Bains  jaillit  des  couches  inférieures  du  grès  bi- 
garré qui  se  lient  au  grès  des  Vosges,  dans  un  vallon,  à  i  ki- 
lomètres au  N.-N.-E.  de  Mutzig  et  à  6  kilomètres  au  S.-S.E. 

^  Annalei  de$  Minet,  6*  série,  t.  XI. 

*  D*8près  H.  Jacquot. 

'  Braconnier.  Ouvrage  précité,  p.  108. 


ROLE  DES  LITHOCLASES  SIMPLES.  25i 

du  Kronthal,  localités  dans  chacune  desquelles  le  grès  des 
Vosges  a  été  poussé  au  milieu  des  couches  plus  élevées  du 
trias.  Le  grès  bigarré  de  Soultz-les-Bains  est  lui-même  à  un 
niveau  bien  supérieur  au  keuper  qui  est  situé  à  moins  de 
2  kilomètres  de  la  source  vers  l'ouest,  ce  qui  décèle  aussi 
un  soulèvement,  dont  Soultz-les-Bains  occupe  le  centre,  et 
qui  présente  de  l'analogie  avec  ceux  de  Mutzig  et  du  Kron- 
thal.  Enfin  des  failles  traversent  les  couches  du  trias,  et  les 
couches  jurassiques  sont  fortement  inclinées  dans  le  voisi- 
nage. 

La  source  minérale  de  Niederbronn  sort  également  d'un 
pointement  anormal  de  grès  bigarré  au  milieu  du  muschel- 
kalk. 

Maote-Haraei  Bo«rboue-lc»-Babis\  —  LcS  SOUrCCS  thermales 

de  Bourbonne,  telles  qu'elles  étaient  connues  il  y  a  cent  ans, 
émergeaient  sur  la  rive  droite  du  ruisseau  de  Borne,  au  fond 
de  son  vallon,  au  milieu  de  terres  rapportées  et  de  débris 
d'anciennes  constructions.  Les  moindres  excavations  dans  le 
sol  donnaient  lieu  à  des  venues  d'eaux  plus  ou  moins  chau- 
des, plus  ou  moins  salées,  que  les  habitants  considéraient 
comme  autant  de  sources  thermales  indépendantes. 

Les  travaux  de  1783  et  1784  ont  montré  que  l'origine  des 
sources  connues  jusque  là  n'était  pas  aussi  naturelle  qu'on 
le  supposait  :  la  source  dite  le  Puisard  Romain,  était  enve- 
loppée par  un  puits  en  maçonnerie  jusqu'à  6  mètres  au 
moins  au-dessous  du  sol  où  elle  émergeait,  et  les  sources  mi- 
litaires appelées  Étuve  et  Bains  Patrice  provenaient  de  tuyaux 
verticaux  en  plomb  profondément  enfoncés  dans  la  terre. 

Les  sources  anciennes  et  modernes  ne  sont  pas  indépen- 
dantes les  unes  des  autres  ;  car  les  nouveaux  forages  ont  tou  - 

*  Rigaud.  Annale»  des  Mines,  t.  XVII,  7«  série,  1880,  p.  360. 


252 


ROLE  mS  LITHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 


jours  fait  baisser  le  volume  d'eau  fourni  auparavant  par  les 
sources  romaines. 

Des  obsei^vations  établissent  l'existence  d'une  assise  per- 
méable placée  à  la  base  des  argiles  bariolées.  La  nappe  d'eau 
minérale  chaude  circulant  à  la  surface  du  grès  a  percé  en 
plusieurs  points  la  masse  superposée  des  argiles  barioléeSt 


Echelle  des  hn^ueurs 


Echelle    des  hauteurs 


-H 


MM 

■H 


Fig.  117.  —  Coupe  transversale  de  la  vallée  de  Bourboiine,  avec  les  sondages  exécutés  i  la 
recherche  de  l'eau  minérale,  qui  accusent  l'existence  de  failles.  T|  grés  bigarré  préseoUnt 
des  alternances  d'argiles  et  de  grés;  T,,  rauschelkalk  ;  q.  alluvions  et  remblais  artificiel. 
—  D'après  M.  Drouot. 

probablement  en  les  délayant  peu  à  peu.  Elle  a  formé  ainsi 
des  puits  à  peu  près  verticaux,  dont  le  plus  important  esl 
sans  doute  celui  qui  a  pour  issue  le  puisard  romain.  Ces  che- 
minées se  sont  remplies  de  matières  perméables,  sur  une  éten- 
due suffisante  pour  permettre  le  passage  des  eaux  affluenles. 
Il  est  constant  qu'une  faille  passe  très  près  des  établisse- 
ments thermaux.  M.  Drouol  l'a  constaté  avec  précision*.  Cette 


*  Annales  des  Mines,  !•  série,  t.  III,  1863. 


ROLE  DES  LITHOGLASES  SIMPLES. 


955 


254  ROLE  DES  LlTHOaASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

faille  n*est  pas  isolée  :  elle  se  trouve  en  relation  à  Test,  avec 
un  réseau  d'autres  fissures  assez  compliqué  et  sans  grands  re- 
jets-Les  parties  de  ces  failles  qui  se  dirigent  au  nord-ouest  iie 
semblent  pouvoir  jouer  aucun  rôle  dans  la  formation  des 
sources  thermales. 

D'après  M.  Higaud,  les  eaux  paraissent  entrer  dans  le  sol 
par  une  faille  et  en  ressortir  par  une  autre  faille  très  voisine 
de  la  région  des  sources.  Quant  à  b  première,  elle  serait 
dans  le  lit  de  l'Apance,  entre  Fresne  et  ChàliUon-sur-Saône, 
aux  environs  d'un  centre  d'éloilement.  Revenant  ensuite  par 
d'autres  cassures  à  la  surface  des  grès  bigarrés,  dans  le  voi* 
sinage  du  Puisard  romain,  l'eau  minérale  s'épancherait  en 
nappe  dans  les  zones  perméables  situées  au  contact  des  grès 
et  des  argiles  bariolées.  Retenue  par  l'imperméabilité  de  ces 
dernières,  l'eau  ne  parviendrait  à  la  surface  du  sol  que  par 
des  sondages  et  par  une  ou  plusieurs  cheminées  qu'elle  a 
percées  dans  les  argiles.  En  continuant  son  ascension  par 
les  cheminées  naturelles,  une  partie  des  eaux  s'élèverait  jus- 
qu'aux bancs  perméables  placés  à  la  base  des  alluvions  mo- 
dernes, sous  le  béton  romain,  pour  traverser  les  orifices  ré- 
servés dans  cette  maçonnerie  et  recevoir  des  infiltrations 
d'eau  douce  et  froide  alimentant  ainsi  les  sources  ro- 
maines. 

H  n'est  pas  inutile  de  remarquer  que  les  importantes 
carrières  de  grès  bigarré,  voisines  du  pont  de  Chàtillon, 
montrent  de  grandes  fissures  orientées  N  18*  E,  et  perpendi- 
culairement E  18"  S.  Les  blocs  de  pierres  de  taille  ne  peuvent 
être  tirées  de  la  carrière,  sans  déchet,  qu'au  moyen  de 
recoupes  menées  suivant  ces  alignements. 

Dans  les  autres  carrières  de  grès  et  dans  les  exploitations 
de  moellons  du  muschelkalk,  il  existe  des  fissures  régulières, 
ayant  pour  direction  N  74*  E,  et  la  perpendiculaire  à  cette 
ligne. 


ROLE  DES  LITHOGIASES  SIMPLES.  255 

—  Les  nombreuses  exploitations  du  département  du 
Gard  ont  montré  combien  certaines  couches  calcaires  du 
trias  sont  aquifères.  Beaucoup  de  venues  d'eau  qui  tendent 
à  envahir  le  terrain  houiller  sont  fournies  par  ce  terrain  où 
s'infiltrent  les  cours  d'eau  de  la  surface,  comme  à  Malbos  et 
à  Saint-Germain  d'Âlais.  Les  mineurs  reconnaissent  de 
toutes  parts  que  les  failles,  qui  parfois  leur  servent  de  pré- 
servatif contre  les  eaux,  souvent  ausi  amènent  celles-ci  dans 
leurs  travaux. 


i;  paite  artésiM*.  —  L*eau  jaillissante  que  le  puits 
artésien  de  l'hôpital  militaire  de  Rochefort,  l'un  des  plus  pro- 
fonds qu'on  ait  exécutés  jusqu'à  présent,  amène  au  jour, 
provient  de  profondeurs  de  816  mètres  et  de  854  mètres  et 
de  couches  appartenant  au  trias. 


ri   thermes     de    Wlldl»«d|    forages    de    Berg   et    de 

t'.  —  Dans  la  Forêt  Noire,  le  grès  bigarré  inférieur 
ou  grès  des  Vosges  se  comporte  comme  en  Lorraine.  Ainsi 
tandis  que  les  plateaux  entre  l'Enz  et  le  Nagold  manquent 
d'eau  dans  les  années  sèches,  un  grand  nombre  de  sources 
jaillissent  du  fond  de  leurs  vallées.  Il  en  est  de  môme  dans 
la  contrée  de  Wildbad  ;  les  plateaux  manquent  d'eau.  Dobel, 
Neusatz,  Rothensol,  Bernbach,  doivent  parfois  recourir  à 
des  citernes  pendant  les  années  sèches,  tandis  que  des 
sources  abondantes  sortent  au  fond  des  vallées  voisines. 

Le  keuper  présente  un  niveau  d'eau  important  dans  la 
région  du  grès  grossier  dit  stubemandstein.  Il  y  a  un  autre 
niveau  d'une  grande  constance,  qui  correspond  aux  bancs 
dolomitiques  supérieurs  à  la  Lettenkohle\ 

*■  Czyszkowâki.  Note  sur  le$  eaux  du  triai  dans  le  Gard^  1874. 

'  Roux.  Comptes  rendus,  t.  LXIIU,  p.  910,  1871. 

'  PanlQS.  Explication  des  feuUtes  de  LUbemell  et  de  Wildbad,  1866  et  1862. 

*  Fraas,  ouvrage  précité,  p.  188. 


^56  ROLE  DES  LITHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

Quant  au  muschelkalk,  les  proéminences  qu'il  forme  aux 
environs  de  Stuttgart,  par  exemple,  sont  aussi  pauvres  en 
sources  que  les  hauteurs  de  TAlpe.  Mais  les  vallées  fournis- 
sent beaucoup  de  sources;  telles  sont  celles  de  Strudelbach. 
au-dessus  et  au-dessous  de  Rieth,  remarquables  par  leur 
limpidité^ 

Les  sondages  qui  dans  la  vallée  de  Stuttgart,  à  Berg  et  à 
Cannstadt,  apportent  des  eaux  chlorurées  accompagnées  de 
beaucoup  d'acide  carbonique  pénètrent  aussi  dans  le  trias. 

CSraad-Daehé    de  Bmdlef    Motheareto.   —    Uu     forage     exécUté 

en  1839  à  Rothenfels,  par  M.  le  professeur  Walchner,  dans  la 
vallée  de  la  Murg,  à  travers  le  conglomérat  du  grès  rouge, 
au  voisinage  d'un  pointement  de  granité,  arrivé  à  94  mètres 
de  profondeur,  a  livré  passage  à  une  source  d'eau  thermale, 
se  rapprochant  de  celle  de  Bade  qui  en  est  distante  de  7  kilo- 
mètres. Or  cette  eau  jaillit  tout  à  coup,  en  grande  abondance, 
d'une  fissure  du  conglomérat. 

FrmnconieV  —  En  Fraucouie,  le  groupe  de  l'anhydrite  con- 
tient une  grande  abondance  d'eau  retenue  par  des  schistes 
marneux  dans  la  dolomie  (oberzeller^dolomit)  qui  s'en  trouve 
imbibée,  à  la  manière  d'une  éponge. 

Cette  dolomie  caverneuse  constitue  la  plus  puissante  ac* 
cumulation  d'eau  souterraine  du  muschelkalk;  elle  fournit 
les  énormes  «sources  de  la  ville  de  Vurtzbourg  et  alimenle 
abondamment  les  puits  profonds  de  toute  la  contrée'. 

Autriche  9    Stlxenstcin   et     Antre*    soirées    allmentaiit   Vleancf 

«ronpe  de  fimsIiaii.  —  Cc  quc  uous  avous  sigualé  dans  les  cal- 

*  Fraas.  Carte  géologique  de  Stuttgart, 

*  D'après  H.  F.  Sandberger. 
>  D'après  M.  Gûmbel,  1872. 


ROLE  DES  LITHOGUSES  SIMPLES. 


257 


caires  jurassiques  se  reproduitdans  les  calcaires  triasiques, 
et  entre  autres,  pour  les  fortes  sources  si  bien  étudiées  par 
M.  Karrer*  pour  alimenter  la  ville  de  Vienne. 
Deux  types  fréquents  peuvent  être  représentés  par  les 


Fig.  119.  —  Type  de  source  résultant  du  déversement  de  l'eau  imprégnant  le  calcaire  et  arrê- 
tée par  des  schistes  de  Werfen.  Exemple  pris  aux  environs  de  Vienne.  —  D'après  M.  Sucss. 

figures  119, 120  et  121  empruntées  à  M.  Suess.  Cette  dernière 


Fig.  120.  —  Exemple  de  la  source  de  la  vallée  de  Brichberg,  non  loin  de  Vienne,  dont  le 
réservoir,  situé  dans  le  calcaire,  est  arrêté  à  la  surface  du  schiste  de  Werfen.  —  D'apr.'s 
M.  Suess. 

s'applique   particulièrement  aux  sources   de  Stixenstein. 


Hg.  121.  —  Coupe  montrant  les  conditions  dans  lesquelles  los  sources  de  Stixenstein  jaillissent 
aa  foDd  d'une  vallée  entaillée  dani  le  calcaire  alpin.  C,  calcaire  alpin;  W,  schistes  de  Wer- 
fen. —  D'après  M.  Suess. 

Ces  dernières,  dont  la  situation  est  représentée  par  la 
figure  122,  s'échappent  en  écumant  dans  la  vallée  étroite  de 
Sirning,  d'un  calcaire  jaune  rougeâtre,  qu'on  rapporte  au 


*  Géologie  des  Kauer*  Fran^^Jouft'Eochquellen  Wasterlettung,  1877. 


17 


S58 


ROLE  DES  LITDOaiSES  DE  DIYERS  ORDRES. 


trias  supérieur.  On  n'aperçoit  pas,  d'après  M.  Suess,  de  roches 
imperméables  dans  le  voisinage.  Le  volume  de  la  source 
principale  et  des  sources  voisines  est  au  minimum,  par  jour, 


««AStAID 


•TIxaiSTON 


Fig.  122.  —  SUzenstein.  Versant  gaoche  de  la  vallée.  Sources  principales  situées  près  da  chàUau 
de  Stizenstein.  au  pied  du  ruisseau  Sirning  et  captées  pour  l'alimenUUon  de  la  ville  it 
Vienne  (Autriche).  —  D'après  M.  Karrer. 

de  38  800  mètres  cubes  et  au  maximum  de  43000  mètres 
cubes. 
Le  mécanisme  de  la  formation  de  ces  sources  tient  ici, 


«RUllHti 


Fig.  123.  —  Carte  montrant  les  conditions  dans  lesquelles  sort  la  source  S  de  Kaiserbruonen,  et 
les  galeries  gg  qui  ont  été  pratiquées  pour  en  augmenter  le  rendement.  C,  calcaire  que  Ion 
attribue  au  trias  supérieur.  —  D'après  M.  Karrer. 

comme  dans  beaucoup  d'autres  roches  calcaires,  à  la  pré- 
sence d'innombrables  lithoclases  de  tout  ordre,  qui  forment 
un  réseau  gigantesque  où  les  eaux  circulent  avec  facilité» 


ROLE  DES  LITHOCLASES  SIMPLES.  359 

qu'elles  proviennent  de  la  précipitation  atmosphérique  ou 
de  la  fonte  des  neiges.  Elles  y  descendent  jusqu'à  ce  qu'elles 
rencontrent  les  schistes  de  Werfen,  sur  lesquels  elles  s'accu- 
mulent, de  façon  à  déborder  çà  et  là  sous  forme  de  sources, 
comme  à  Stixenstein  et  à  Kaiserbrunnen. 

Le  Kaiserbrunnen  (Gg.  123  et  124)  est  la  plus  élevée  des 
sources  mises  à  contribution  pour  l'approvisionnement  de 
Vienne,  par  la  galerie  dite  François-Joseph.  Le  ruisseau  de 


Tig.  12i.  —  Coupe  montnnt  la  situation  du  niveau  des  eaux  phréatiques  qui  alimentent  la 
source  de  Kaiserbrunnen  par  rapport  au  niveau  de  la  Schwana.  C,  calcaire  que  l'on  attribue 
au  trias  supérieur;  E,  niveau  des  eaux  phréatiques  pendant  l'été;  H,  leur  hauteur  variable 
pendant  Thiver  ;  N,  niveau  du  fond  de  la  Schwarza.  —  Diaprés  M.  Karrer. 


laSchwarza  reçoit  dans  le  haut  de  son  cours  un  fort  contin- 
gent par  l'influence  des  eaux  phréatiques  ;  il  tire  son  origine 
du  calcaire  de  la  région  du  Schneeberg. 

Le  rôle  des  paraclases  dans  cette  même  région  n'est  pas 
moins  manifeste.  De  nombreuses  sources,  les  unes  thermales, 
les  autres  froides,  sont  en  rapport  avec  la  faille  terminale 
des  Alpes,  au  sud-ouest  de  Vienne  (fig.  125).  Telles  sont 
Môdling,  Baden,  Wôslau,  Fischau  et  Brunn-am-Steinfeld. 

La  ûgure  126  représente,  en  particulier,  la  situation  de 
Fischau  sur  la  faille,  à  la  limite  de  la  plaine  quaternaire  de 
Vienne.  Des  sources  thermales  et  des  sources  froides  en  sor- 
tent, de  même  qu'à  Brunn.  Une  partie  de  ces  dernières  sert 
à  l'alimentation  de  la  ville  de  Vienne. 


260 


ROLE  DES  LITUOaASES  DE  DIVERS  ORDRES. 


Enfin  la  vue  ci-jointe  (fig.  127)  représente,  le  long  de 
celte  même  faille  terminale  des  Alpes,  la  situation  rela- 


Fig.  125.  —  Groupe  de  sources  thermales  en  rapport  avec  la  faille  terminale 
des  Alpes,  au  sud-ouest  de  Vienne  (Autiiche).  —  D'après  M.  Suess. 

tive  de  deux  groupes  de  sources  ordinaires  et  de  sources 
OKO,  ESE. 


F1SCKAU 


Fig.  126.  —  Profil  montrant  la  situation  de  Fischau  et  de  la  faille  qui  donne  nai>- 
sance  â  des  sources  thermales  et  i  des  sources  froides  de  même  qu'A  Brunn.  — 
D'après  M.  Suess. 

thermales,  entre  Wirflach  et  Fischau,  sur  une  longueur 
d'environ  H  kilomètres. 


ROLE  DES  LITUOCLASES  SIMPLES. 

A■sleterre^  —  Le  new  red  sandstone  ren- 
fermant les  étages  du  bunter  et  du  keuper 
inférieur,  rivalise  par  sa  perméabilité  avec 
la  craie  et  le  lower  greensand;  aussi  pré- 
sente-t-il  à  ce  point  de  vue  une  grande  im- 
portance. 

C'est  à  sa  structure  à  peu  près  homogène 
dans  ses  sous-étages  et  à  l'absence  de  lits 
d'argile  ou  de  marne  imperméable  que  ce 
terrain  doit  sa  richesse  en  eau. 

Buckland  a  remarqué  que  la  plupart  des 
grandes  villes  manufacturières  des  comtés 
du  centre  et  du  nord  de  l'Angleterre  sont 
établies  sur  le  new  red  sandstone.  Ce  fait, 
qui  pourrait  paraître  accidentel,  tient  à  des 
causes  naturelles.  A  part  la  circonstance 
que  les  villes  ainsi  situées  sont  générale- 
ment à  proximité  du  terrain  houiller  et  de 
la  houille,  et  de  plus,  qu'elles  trouvent  de 
très  bonnes  pierres  de  taille,  comme  on  le 
voit  dans  leurs  monuments  et  leurs  an- 
ciennes églises,  elles  jouissent  de  l'avan- 
tage de  se  procurer  facilement  de  l'eau. 
Toutes  les  villes  bâties  sur  ces  terrains  re- 
posent sur  des  réservoirs  naturels  d'eaux, 
filtrées  dans  des  roches  éminemmejit  po- 
reuses. C'est  ainsi  que  les  emplacements 
occupés  par  les  villes  de  Manchester,  Liver- 
pool,  Stockport,  ^facclesfleld,  Leek,  Nol- 
tingham ,    Derby ,    Wolverhampton ,    Bir- 


â61 


I  h 


%,  ^ 


a    \ 


*  Hull.  New  red  sandstone  and  permian  sources  water  supply. 
Mémoire  of  ihe  litterai'y  and  philo9ophical  Society  of  Man- 
chester, 1861-1862.  Le  môme,  18o9-1876. 


263  ROLE  DES  UTHOGLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

mingham,  Kidderminster,  Stourbridge,  ont  a  la  fois  les 
avantages  d'un  accès  facile  au  charbon,  à  Teau  et  à  la  pierre 
de  construction. 

Le  volume  d'eau  que  Ton  peut  extraire  des  puits  est 
étonnemment  abondant. 

A  Liverpool,  la.  quantité  d'eau  aspirée  de  tous  les  puits, 
tant  publics  que  privés,  peut  être  estimée  à  22  500  mètres, 
provenant  d'une  superficie  d'environ  51  kilomètres  carrés. 

A  Manchester  et  à  Salford,  M.  Hull  a  estimé,  en  1865,  que 
soixante  et  dix  puits  profonds  fournissaient  environ  27000 
mètres  cubes  d'eau  par  jour.  Cette  eau,  claire  et  parfaite- 
ment adaptée  aux  usages  industriels,  correspond  à  une  sur- 
face d'environ  17  kilomètres  carrés.  Les  rivières  Irwell,  Irk 
et  Medlock  y  contribuent  sans  doute  pour  une  part  par  leurs 
infiltrations. 

A  Birmingham,  sur  les  31 000  mètres  cubes  employés  par 
jour,  il  y  en  avant  9000  qui,  en  1865,  étaient  fournis  parle 
new  red  sandstone. 

La  présence  de  l'eau  dans  celui-ci  est  non  seulement  due  à 
la  présence  de  lithoclases  et  des  plans  de  stratification  qui  le 
traversent,  comme  le  savent  très  bien  les  puisatiers,  mais 
aussi  à  sa  perméabilité  propre,  laquelle  varie  d'un  district 
à  l'autre. 

On  augmente  le  débit  des  puits  en  les  approfondissant  et 
en  poussant  des  galeries  à  partir  de  leur  fond. 

Dans  le  Lancashire,  la  surface  de  la  nappe  dans  le  grès 
est  faiblement  ondulée,  et  plus  haute  dans  l'intérieur  que 
sur  les  côtes  de  la  mer. 

Au  sud  des  Mendips  Hills,  les  conglomérats  sont  imbibés 
d'eau,  comme  les  grès  dont  il  vient  d'être  question. 

Des  sources  abondantes  jaillissent  souvent  de  cette  roche, 
à  sa  jonction  avec  les  roches  paléozoïques  imperméables  qui 
lessupportent.  L'un  des  plus  remarquables  exemples  est  fourni 


ROLE  DES  LITHOaiSES  SIMPLES.  S65 

par  les  sources  de  Wall-Grange,  près  Leek,  en  StafTordshire, 
qui  produisent  par  jour  environ  13  500  mètres  cubes. 

Irlande  ^  ^-  Le  ucw  rcd  sandstonc,  qui  se  trouve  exclusive- 
ment dans  le  nord-est  de  l'Irlande,  repose  sur  divers  étages 
de  la  série  paléozoîque  et  supporte  le  terrain  crétacé  et  les 
roches  volcaniques  miocènes  du  comté  d'Ântrim.  Comme  en 
Angleterre,  les  roches  de  cet  étage  sont  fortement  aquifères. 
Toutefois  de  nombreux  dykes  basaltiques  apportent  un 
obstacle  à  la  circulation  des  eaux  souterraines  (fig.  128). 


Tig.  128.  —  Coupe  montrant  la  disposition  des  eaux  souterraines  à  Belfast  et  environs.  1,  silu- 
rien inférieur  oA  l'eau  est  fournie  par  des  puits  ;  T^,  grès  bigarré  (new  red  sandstone)  dont 
Teau  alimente  aussi  de  nombreux  puits;  T,,  marnes  Irisées  (keuper);  Cf,  grés  Tert  supérieur 
(npper  green  sand);  G,,  craie;  «,  basalte  en  nappes  et  nombreux  dykes  et  pointements; 
G,  graviers  quaternaires.  —  D'aprÀ  une  très  obligeante  communication  de  M.  Edward  fluli. 

C'est  sur  ces  grès  que  la  grande  ville  manufacturière  de  Bel- 
fast est  construite,  et  quelques-unes  de  ses  fabriques  en  tirent 
une  partie  ou  la  totalité  de  leurs  eaux,  notamment  par  le 
puits  artésien  de  Gromac. 


BaviroM  de  Loaao,  prés  fiéaes.  —  Une  formation  de  calcaires 
magnésiens  triasiques  très  étendue  vers  le  nord  et  le  nord- 
ouest  de  Loano  et  toute  remplie  de  fissures  et  de  cavernes, 
donne  naissance  à  de  belles  sources  qui  jaillissent  à  sa  base 
(voir  plus  haut,  page  46,  les  figures  22  et  23),  au  contact  des 
schistes  talqueux  et  des  gneiss  sous-jacents.  On  peut  citer, 
par  exemple,  celle  de  Boissano  et  celle  de  Verzi. 


^  HuU.  Géologie  de»  environs  de  Preecoty  p.  36.  —  D'après  une  obligeante  communica- 
tion de  M.  Edward  Hull. 


2G4  ROLE  DES  UTHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 


Terrains  paléozmques. 


Artois.  --  C'est  du  carbonifère  que  sortent  les  eaux  jaillis- 
santes par  les  forages  qui  ont,  depuis  longtemps,  rendu 
Massique'. 


l'Artois  classique*. 


4e  hoiUlle  :  1m  dMipeUe-Mas-Bn  («Adae-et-LoIre).  —  LeS 

exploitations  de  houille  n'apprennent  que  trop  comment 
l'eau  peut  jaillir  par  les  lithoclases  qui  coupent  le  grès 
houiller.  Nous  nous  bornerons  ici  à  citer  l'exemple  des  tra- 
vaux des  mines  de  La  Chapelle-sous-Dun\  où,  en  1857,  les 
eaux  arrivaient  abondamment  par  les  failles,  recoupées  dans 
la  partie  nord  des  ouvrages  des  puits  Marc  et  Félicité,  ainsi 
que  par  la  couche  de  grès  qui  se  trouve  au-dessous  de  la 
couche  de  houille,  dite  de  Conchalon,  et  qui  a  été  traversée, 
par  le  dernier  de  ces  puits,  au  niveau  de  235  mètres. 


—  Dans  le  sud-ouest  de  la  Sardaigne,  les  plus 
belles  sources  paraissent  au  contact  du  calcaire  dit  fnéld- 
lifère  avec  les  formations  imperméables,  schistes  siluriens  et 
cambriens.  Ce  calcaire,  privé  de  fossiles,  atteint  souvent  une 
grande  épaisseur.  Les  exploitations  de  gîtes  métallifères 
qu'il  renferme  ne  sont  jamais  gênées  par  les  eaux,  tant 
qu'elles  restent  au-dessus  du  niveau  des  vallées. 

Parmi  les  sources  de  ce  genre,  nous  citerons  celles  du 
Gutturu-Pala,  de  Su-Mannau  (fig.  129)  et  de  [Doumsnovas, 
dont  l'altitude  est  d'environ  180  mètres.  Leurs  débits  moyens 
par  minute  sont  respectivement  de  280,  70,  200  litres.  La 
source  de  Quoquadraxiu  (fig.  130j,  dans  la  même  région,  est 


*  Garnier.  Traité  du  sondeur, 

•  Droiiot.  Notice  sur  les  gites  de  houille  de  Saùne-et-Loire,  p.  311. 


ROLE  DES  LITHOCUSES  SIMPLES. 


365 


le  drainage  d'une  couche  calcaire  repliée  et  enchâssée  entre 
des  schistes  peut-être  cambriens. 
Les  études  que  Ton  a  faites,  sur  la  faculté  d'absorption  des 


Echelle    des  longueurs. 

0                             12                            3  kfl- 
> 1 1 1      . 


Bdielle   ddsh&uleurB^ 


Fig.  120.  —  Ccupe  mnnliant  la  situation  de  la  source  S  de  Su-Maiinau  (Sardaigne).  Ce.  schistes 
I  et  grès  cambriens;  Is.  schiste  silurien;  le,  calcaire  silurien.  —  D'après  une  communication 
I;  raanuscrïte  de  M.  Giordanc. 

eaux  pluviales  par  les  calcaires  de  ces  régions,  en  comparant 


Wvtaià 


de     la      Mer  • 


Echelle    dea  Longueurs. 


J.. 


-  kil 


Echelle     des  //auteurs 


^ 


S(00 


joooMét 


Fig.  130.  —  Coupe  montrant  la  position  de  la  source  S  de  Quoquadraxiu  en  Sardaigne. 
Ce.  schistes  et  grès  cambriens,  auxquels  sont  subordonnées  des  couches  calcaires.  —  D'après 
M.  Giordano. 

le  volume  d'eau  de  pluie  tombée,  avec  celui  des  sources,  a 
déjà  fourni  des  données  intéressantes  et  utiles.  Le  rapport 


S66  ROLE  DES  UTUOGUSES  DE  DIVERS  ORDRES. 

entre  ces  deux  quantités  varie  de  0,56  jusqu'à  près  de  0,50. 
On  perce  en  ce  moment  une  longue  galerie  d'écoulement 
devant  servir  à  la  mine  de  plomb  de  Monteponi,  que  le  gou- 
vernement a  vendue  récemment.  Cette  galerie,  de  plus  de 6  ki- 
lomètres, desservira  en  même  temps  quelques  autres  mines 
latérales,  en  vertu  de  la  filtration  naturelle  des  calcaires,  et 
au  moyen  des  études  susdites,  on  a  pu  calculer,  assez  approxi- 
mativement, le  débit  probable  de  la  galerie  et  par  conséquent 
ses  dimensions. 


—  Grâce  aux  failles  et  aux  diaclases  de  toutes 
sortes  qui  les  traversent,  les  roches  paléozoîques  de  l'Irlande, 
cambriennes  et  siluriennes,  donnent  souvent  lieu  à  des 
sources.  C'est  ce  qui  arrive,  par  exemple,  pour  les  schistes 
cambriens  et  cambro-siluriens.  Dans  les  comtés  de  Mayo, 
de  Galway  et  de  Kerry,  les  roches  siluriennes  inférieures  ne 
sont  pas  aussi  fracturées. 

On  peut  citer',  comme  donnant  lieu  à  de  belles  sources,  le 
qtuirtz  rock  ou  quarlzite  cambrien  à  Howth,  comté  de  Dublin, 
dans  les  montagnes  de  Forth,  comté  de  Vexford,  dans  les 
montagnes  de  Bennabeola,  comté  de  Galway,  et  ailleurs. 


Alz-to-Cliapelle  et  Boreetie  (B■riMhel4)^  —  Aix-la-Chapclle  et 

Berce tte  sont  situées  sur  des  couches  devoniennes  qui  pré- 
sentent une  série  de  plis  aigus  (fig.  131)  semblables  à  ceux 
que  Ton  connaît  en  Belgique.  Au  contact  des  calcaires  et  des 
couches  schisteuses,  jaillissent  de  volumineuses  sources 
chaudes  qui  manquent,  au  contraire,  dans  le^  schistes  et 
grès,  auxquels  le  calcaire  est  associé,  ainsi  que  dans  le  terrain 
houiller.  L'ensemble  des  sources  présente  deux  alignements 


*  D*aprës  M.  Kinnahan. 

'  D'après  M.  I.  Beissel.  Congre*  des  ingénieuv  allemande  à  AiX'la^Chapelle,  1876. 


ROLE  DES  LITHOCLiSES  SIMPLES.  S67 

évidents  (fig.  132),  qui  coïncident  avec  ceux  du  calcaire. 


Fig.  131.  — Plan  montrant  les  affleurements  des  couches  devonieiincs  et  carbonifères,  qui  sup- 
portent Aix-la-Chapelle  et  Burtscheid.  le,  calcaire  devonien ;  It,  schiste  devonien  supérieur; 
I  fle,  calcaire  carbonifère;  Hh.  groupe  houiller;  les  sources  thermales  sont  représentées  par 
I  des  points  noirs  disposés  suivant  deux  alignements  parallèles,  qui  passent  par  Aix-la-Chapelle 
'  et  Bartscheid;  la  lignt  de  coupe  AB  coïncide  avec  la  direction  nord-sud.  —  L'aprés  M.  1. 
Beiasel. 


tM  fP9l 


Fjg.  132.  —  Coupe  suivant  la  ligne  AB,  du  plan  précédent.  Ii,  schiste  devonien  liiférieur;  le.  cal- 
caire devonien;  U,  schiste  devonien  supérieur;  Hc,  calcaire  carbonifère;  Hh,  groupe  houil- 
ler ;C^  sable  dit  d'Aix-la-Chapelle;  Ce-,  sables  verts;  Ct".  couches  marneuses  crétacées.  — 
D'après  M.  I.  Beissel. 

K««*.  —  Les  sources  thermales  d'Ems  sortent  de  fissures 


*  Gûmbel.  SiUmgêberichte  der  K.  bayer  Akad.  der  Wissentchaflen  sûMunchen,  1882. 


2G8  ROLE  DES  LITHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

ouvertes,  avec  une  disposition  radiale,  dans  une  voûte  de 
quartzite  fortement  courbée,  dont  le  rayon  n'est  que  de  50  à 
60  mètres  (lig.  155).  Pour  reconnaître  s'il  y  avait  une  relation 
entre  les  liions  métallifères  et  les  sources,  il  fallut  faire  un 
relevé  exact  des  allures  des  couches  devoniennes  inférieures. 


UOPnEM 


hiis.  133.  —  DisiMisiUoii  gciiéralo  des  sources  thermales  d'Ems.  Q,  seUc  principale  de  quarliiie 
et  cassures  d'où  sortent  les  eaux  thermales  S,  et  à  l'ouest  de  laquelle  sont  d'ancienn'*» 
exploitations  de  plomb  et  d'argenL  Q,  selle  latérale  également  de  quartzite.  —  D'apré» 
M.  Gùmbcl. 

ainsi  que  des  nombreuses  diaclases  qui  les  traversent.  C'est 
ce  que  représente  la  coupe  théorique  ci-jointe,  due  à  M.  Koch 
(fig.  134). 

On  voit  que  le  quartzite  forme  deux  cuvettes  dirigées  du 
N.-O.  au  S.-E.  comme  la  plupart  des  rides  du  système  rhénan: 
la  cuvette  des  filons  métalliques  et  la  cuvette  des  sources 
thermales.  Ces  cuvettes  sont  séparées  l'une  de  l'autre  par  la 
selle  des  quartzites  d'Ems.  A  son  affleurement,  la  cuvetle 
des  filons  a  5  kilomètres  environ  de  diamètre  et  celle  des 
sources  l''",8.  Cette  dernière  se  relève  vers  le  N.-E. 

Des  roches  éruptives  sont  connues  dans  le  voisinage.  A 
deux  kilomètres  au  N.-E.  des  bains,  au  village  de  Kemmenau, 
paraît  un  petit  pointement  de  basalte.  D'autres  pointements 
basaltiques  sont  connus  dans  la  contrée.  En  outre,  le  trachyte 
forme  deux  cônes  aigus  à  Arzbach,  au  nord  de  la  raine  de 
plomb  et  de  mercure  et  de  plus,  il  est  assez  répandu  dans 
le  Westerwald. 


ROLE  DES  UTHOCLÂSES  SIMPLES. 


2G9 


Comme  le  montre  la  figure,  Teau  peut  suivre  la  séparation 


S70  ROLE  DES  LlTHOaASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

du  quartzite  et  du  schiste  ( Wisperschiefer)  avant  de  s'épancher 
au  travers  des  quartzites.  Toute  la  contrée  est  d'ailleurs  tra- 
versée par  de  nombreuses  paraclases  et  diaclases,  dont  la 
coupe  représente  un  certain  nombre. 

Aucun  danger  ne  parait  i  craindre  pour  les  thermes, 
tant  que  la  selle  de  quartzite  qui  les  sépare  des  travaux  de 
mines  n'est  pas  attaquée. 

Il  est  très  possible  que  plus  bas,  elle  longe  le  basalte,  con- 
formément à  la  coupe  ci-jointe;  mais  le  fait  n'est  pas  assez 
certain  pour  qu'on  ait  cru  devoir  rattacher  le  gisement  de 
ces  sources  à  des  pointemenls  de  roches  éruptives. 

WImomUb  t  SoMrcM  aAlarellcs  et  pwdim  mwtéaiomm.  Parmi  leS 

nappes  reconnues  à  divers  niveaux  du  terrain  silurien  dans 
l'État  du  Wisconsin,  par  M.  Chamberlin*,  le  plus  remarquable 
est  situé  à  la  partie  supérieure  des  schistes  argileux  de  Cin- 
cinnati, qui  retiennent  l'eau,  après  son  passage  à  travers  le 
calcaire  du  Niagara,  très  fissuré  et  caverneux.  Sur  la  côte 
orientale  de  Green-Bay  et  de  la  vallée  de  Rock-River,  celte 
jonction  affleure,  à  de  fréquents  intervalles,  sur  240  kilo- 
mètres, de  sorte  que  des  centaines,  si  ce  n'est  des  milliers 
de  sources,  grandes  et  petites,  marquent  cet  horizon.  Quel- 
ques-unes de  ces  sources  sont  très  fortes;  elles  peuvent  être 
regardées  comme  des  dérivations  de  ruisseaux,  plutôt  que 
comme  des  sources  ordinaires.  En  beaucoup  de  lieux  elles 
font  tourner  des  moulins. 

De  nombreux  puits  artésiens  ont  atteint  Teau  dans  les 
couches  siluriennes  du  même  Ëtat,  au  moins  à  6  niveaux 
différents  (fig.  155).  Le  plus  important  et  le  plus  utile,  quoi- 
que le  plus  profond  de  ces  niveaux  est  celui  du  grès  de  Saint- 
Pierre  (S-Peters),  dans  la  partie  orientale  de  l'État.  Ce 

*  lïydrology  of  TKûcofwm,  1877. 


ROLE  DES  LITHOaiSES  SIMPLES. 


271 


grès  est  non  seulement  poreux,  mais  traversé  par  de  nom- 
breuses cassures,  qui  permettent  à  l'eau  de  le  traverser 
rapidement. 

  Sparta,  il  y  a  12  puits  artésiens,  situés  à  5  kilomètres  de 
la  ville.  Ils  tirent  leur  eau  d'une  même  couche,  à  100  mètres 
de  profondeur,  et  jaillissent  à  2  mètres  au-dessus  de  la  sup» 
face*.  D'autres  puits  artésiens  ont  été  creusés,  par  exemple, 


Fig.  135.  —  ProÛl  donnant,  à  Pond  du  Lac,  un  exemple  des  puits  artésiens  du  Wisconsin,  d'après 

X.  G.  Chamberlin;  section  de  Taychedah  à  Ripon.  Échelle  horizontale  =  — - —  ;   échelle 

155.000 

Terticalerrjigg. 

dans  la  Prairie  du  Chien,  où  l'eau  jaillissante  provient  de 
plus  de  300  mètres  de  profondeur. 

De  belles  sources  sont  communes  dans  la  formation  de 
Postdam. 

Terraim  cristallins. 


—  Lorsqu'on  creuse  un  puits  dans  le  gra- 
nité ou  dans  les  roches  cristallines  qui  lui  sont  associées,  on 
ne  trouve  pas  l'eau  avec  régularité;  il  faut  tomber  sur  quel- 
que fissure,  il  n'y  a  pas  de  nappes  d'eau  à  proprement  parler. 
Toutefois,  lorsque  ces  roches  sont  traversées  par  des  fissures 


*  Ouvrage  précité,  t.  IV,  p.  57. 


'2n  ROLE  DES  LITHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

profondes,  il  peut  en  résulter  des  sources  qui  se  distinguent 
par  un  débit  plus  volumineux  et  plus  constant  de  celles  que 
fournit  l'arène  granitique. 

Telles  sont,  dans  le  département  du  Puy-de-Dôme  :  arron- 
dissement de  Clermont,  d'après  Lecoq  :  celles  du  Petit  Ba- 
reix,  près  Laqueille  (micaschiste);  celles  de  Ghàteauneuf, 
sous  le  château  même,  de  Genestine;  —  arrondissement 
de  Riom  :  la  magnifique  source  de  Giat;  celle  de  Servolles; 
—  arrondissement  de  Thiers  :  celle  de  Bourdier  ;  —  arron- 
dissement d'Ambert  :  celle  de  la  Bourlhomme,  au-dessus  de 
Pierre-sur-Haute;  celle  de  Montgeol,  canton  de  Saint-Amand; 
celle  de  Roche-Savine  ;  celle  de  la  Viade,  commune  de  Sainte- 
Catherine. 

Le  même  auteur  en  signale  d'analogues  dans  les  départe- 
ments du  Cantal,  du  Gard,  de  la  Haute-Loire  et  de  la  Lozère. 

Les  sources  qui  sortent  du  trachyte  sont  nombreuses,  lim- 
pides, mais  en  général  d'un  faible  débit,  comme  celles  qui 
s'échappent  des  terrains  primitifs  et  pour  la  même  raison. 

Cependant  il  en  est  d'abondantes  qui  résultent  non  seule- 
ment de  roches  poreuses  qui  leur  sont  subordonnées,  mais 
aussi  de  cassures.  Telle  est,  dans  le  cirque  de  Lioran,  où 
affluent  les  infiltrations,  la  source  de  TAlagnon,  la  Font-de- 
Cère,  au  pied  du  Plomb  du  Cantal,  et  une  autre,  au  pied  du 
Puy-Mary. 


.  —  Quelque  peu  importantes,  au  point  de  vue 
du  mouvement  des  eaux,  que  soient  les  lithoclases  des  roches 
cristallines  aux  abords  de  la  surface  du  sol,  elles  leur  sont 
encore  moins  accessibles  dans  la  profondeur,  qu'elles  s'y 
trouvent  moins  nombreuses  ou  que  leurs  parois  soient  plus 
serrées,  plus  rapprochées. 

C'est  ce  que  montre,  en  particulier,  le  percement  du  mas- 
sif du  Saint-Gothard,  d'après  les  observations  exactes  dont 


ROLE  DES  UTHOGLASES  SIMPLES.  i73 

on  est  redevable  à  M.  Stapff'  (voir  plus  haut  fig.  1,  p.  10). 

Dans  ce  percement,  long  de  plus  de  14  kilomètres,  des 
infiltrations  notables  (0,4  à  0,8  litre  par  seconde)  ne  se  sont 
produites,  dans  la  partie  nord  du  tunnel,  qu'entre  1450  et 
1500  mètres  de  Torifice,  position  qui  correspond  à  la  pre- 
mière traversée  de  la  Reuss  \ 

La  totalité  des  venues  d*eau  de  cette  partie  septentrionale 
peut  être  évaluée  de  3,5  à  13,5  litres  au  plus,  par  seconde. 

Dans  la  partie  sud,  les  venues  d'eau  ont  été  plus  impor- 
tantes*. Entre  le  profil  3178  et  le  profil  7093,  qui  est  à  peu 
près  au  faite  du  tunnel,  le  débit  a  été  d'à  peu  près  37  litres 
par  seconde.  Ces  venues  d'eau  étaient  très  inégalement  ré- 
parties. Du  profil  6400  vers  l'intérieur,  elles  sont  devenues 
tout  à  fait  insignifiantes,  et  le  profil  géologique  en  indique 
la  raison.  La  gi*ande  faille  principale  qui  descend  du  glacier 
de  Sainte-Anne  et  coupe  le  tunnel  vers  le  profil  5908,  col- 
lecte en  effet  les  eaux  provenant  des  couches  aquifères  voi- 
sines de  la  surface  du  massif  (voisines  des  deux  côtés  du 
Kastelhorngrat)  de  sorte  qu'elles  ne  peuvent  plus  déboucher 
dans  le  tunnel  qu'à  travers  la  zone  fissurée  comprise  entre 
le  profil  5908  et  la  faille  du  profil  6530. 

Abstraction  faite  de  l'intervention  de  pareils  systèmes  de 
fentes  dérivatrices,  tous  les  bassins  sourciers  connus  à  ciel 
ouvert  se  retrouvent  à  l'intérieur  du  souterrain.  Nous  ne 
citerons  que  les  venues  d'eau  les  plus  importantes.  Elles  se 
sont  produites  aux  profils  3921;  4088;  4125  (petit  lac  de 
Sella);  4208,  environ  1  litre  par  seconde  (grand  lac  de  Sella)  ; 
4599;  4456  à  4566,  sur  le  toit  des  lithoclases  du  Greno  di 
Prosa,  environ  14  litres;  infiltrations  de  peu  d'importance  à 
l'intérieur  de  ces  lithoclases  jusqu'au  profil  4700;  puis,  plus 


*  Slapff.  Profil  géologique  du  Saini-Gothard  dam  taxe  du  grand  tunnel^  p.  23. 

*  Mémoire  précité^  p.  46. 

18 


274  ROLE  DES  LITHOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

fortes  à  partir  de  là,  jusqu'au  profil  4776;  5455;  5446;  557 i 
(dépression  la  plus  méridionale  du  Guspisthal);  5871  à  5980, 
environ  9  litres,  amenés  par  la  grande  faille  principale, 
depuis  les  autres  bassins  sourciers  du  Guspisthal;  6105; 
6214  à  6229,  environ  5  litres  ;  6305  à  6400.  Les  débits  isolés, 
que  nous  venons  d'indiquer  pour  quelques  sources,  don- 
nent un  total  de  27  litres;  toutes  les  autres  infiltrations  réu- 
nies doivent  par  conséquent  fournir  encore  10  litres. 


—  Près  de  Chamonix,  on  voit  plusieurs  belles 
sources  sortir  des  diaclases.  Par  exemple,  au-dessous  du 
bourg,  aux  Gallians,  il  en  est  deux  qui  jaillissent  à  12  mètres 
Tune  de  Tautre,  au  fond  de  la  vallée,  au  pied  de  deux 
diaclases  que  Ton  voit  couper  un  escarpement  vertical 
de  protogîne,  sur  50  mètres  de  hauteur.  A  1500  mètres 
plus  bas,  auprès  de  Mont-Quart,  se  présente  un  fait  ana- 
logue. 

w«rtenibers9  wnAad.  — Àu  milicu  dcs  masses  de  grès  bi- 
garré dont  l'épaisseur  atteint  1000  mètres,  le  granité  appa- 
raît d'une  manière  inattendue,  au  point  où  est  situé  Wildbad. 
et  il  s'élève,  en  cette  localité,  jusqu'à  une  hauteur  de  12  mè- 
tres au-dessus  du  fond  de  la  vallée,  recouvert  de  nombreux 
blocs  anguleux  de  grès  bigarré. 

Les  sources  thermales  jaillissent  par  des  diaclases  traver- 
sant le  pointement  de  granité  qui,  autant  qu^on  en  peut 
juger,  sont  parallèles  entre  elles  et  se  dirigent  à  peu  près  de 
Test  à  l'ouest,  c'est-à-dire  perpendiculairement  à  la  direction 
de  la  vallée,  et  parallèlement  à  de  petits  filons  de  quartz  et 
barytine  coupant  aussi  le  granité.  Ces  diaclases  sont  obli- 
ques, de  telle  sorte  que  le  forage  vertical  offre  aux  eaux  le 
plus  court  chemin.  Dans  le  but  d'augmenter  le  débit  des 
sources  naturelles,  on  a  exécuté,  à  partir  de  1838,  des  fo- 


ROLE  DES  UTHOGLASES  SIMPLES.  375 

rages  qui,  en  1849,  étaient  au  nombre  de  28  et  atteignaient 
une  profondeur  de  31  mètres. 

iriaodc.  —  Les  basaltes  et  dolérites  miocènes  qui,  en  Ir- 
lande, couvrent  de  grandes  étendues  sont  par  eux-mêmes 
imperméables;  mais  leurs  cassures  permettent  à  Teau  de  s'y 
infiltrer. 

■«M  de  l'Eisa.  caiMie.  —  Aux  cnvirous  de  GataneS  trois 
coulées  de  lave,  dont  l'une  est  antérieure  à  l'arrivée  des  co- 
lonies grecques,  une  autre  du  troisième  siècle,  puis  celle  de 
1669,  ont  détourné  et  recouvert  le  cours  de  la  rivière  Ame- 
nano  qui  n'a  plus,  à  Tair  libre,  que  son  embouchure  au  fond 
du  port. 

Un  autre  cours  moindre,  le  Cifali,  a  eu  le  même  sort. 

Par  suite,  les  eaux  phréatiques  {acqua  di  livelloj  acqua  di 
$colo)  s'étendent  sur  une  large  zone,  à  Test  et  au  sud  de  la 
ville.  Elles  sont  de  première  importance  pour  Catane  :  outre 
qu'elles  satisfont  aux  usages  domestiques,  elles  ont  trans- 
formé les  laves  stériles  en  fertiles  cultures.  Partout  où  Ton 
creuse  un  puits,  on  les  rencontre  avec  un  niveau  qui  varie 
suivant  la  hauteur  de  la  mer.  Elles  circulent  dans  le  sol,  à 
travers  les  innombrables  fissures  de  la  lave. 

A  proximité  de  la  mer,  sur  une  longueur  de  6  kilomètres 
et  une  largeur  de  50  à  500  mètres,  elles  sont  saumâtres. 

Des  faits  analogues  se  montrent,  d'après  une  obligeante 
communication  de  M.  0.  Silvestri,  à  Paterne,  à  Aci  Reale,  et 
a  Piedimonte. 

cmucmmm.  «uoDOTodflk.  —  Lcs  étudcs  approfondtcs  qu'a 
faites  au  Caucase  M.  Abich,   sur  le  gisement  des  sources 

*  Carmelo  Santo  Patli.  Garta  idograflca  di  Gatania.  Accademia  die  Scienze  in  Catania^ 
série  lU,  t.  XI,  1877. 


276 


ROLE  DES  UTUOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 


thermales  ont  fait  reconnaître  que  c'est  un  porphyre  pélro- 
siliceux,  d'ailleurs  masqué  par  des  marnes,  qui  est  réelle- 
ment la  roche  émissaire  des  uombreuses  sources  minérales 


rio 


Ifontigne  dofiDr 


Echelle  des  Lon 

1 îe_ 


)n(nieurs 


Echelle  des  Hauteurs 


Fig.  136.  —Coupe  prise  éGilemoTodtk,  montrant  comment  la  source  Emmanuel  jaillit  de  roches 
cristallinei  au  pied  de  la  Montagne  de  fer.  «•,  porphyre  pétrosiliceux  ;  £■.  marne  éocrne. 
Qi.  travertin  quaternaire.  —  D'après  M.  Dru  *. 

de  Gileznovodsk  (fig.  156).  Ce  porphyre  est  analogue  aux  mi- 
crogranulites  des  dykes  qui  entourent  le  mont  Bechtaou  et 
qui  ont  soulevé  les  masses  minérales,  crétacées  et  tertiaires 


Fig.  137.  —  Coupe  montrant  les  roches  traversées  par  la  galerie  de  captage  de  Gileznovosd'i 
(source  de  l'Ouest).  •*,  porphyre  pétrosiliceux  ;  Em,  marne  éocène  ;  Ar,  cboulcments  argileux  : 
Qt.  travertin.  —  D'après  M.  Dru. 

des  monts  Youtza  et  Machouca.  La  Gileznaïa-Gora  (Montagne 
de  fer),  entièrement  formée  de  cette  roche  éruptive,  n'est  sé- 


*  Dru.  Eaux  minérale$  du  Caucase,  1884. 


LITHOCUSES  ASSOCIÉES  A  DES  POINTEMENTS  DE  ROCHES  ÉRUPTIVES.  377 

parée  du  massif  du  Bechtaou  que  par  une  dépression  étroite. 
I^  faible  épaisseur  de  ces  dépôts  récents  a  permis  d'atteindre 
les  eaux  minérales  au  moyen  de  galeries  et  de  sondages  peu 
profonds  (fig.  137). 

En  outre,  des  fissures  des  microgranulites  du  versant  nord 
du  Bechtaou,  auxquelles  se  rattachent  les  porphyres  précé- 
dents, livrent  passage  à  des  sources  froides»  dont  cinq 
donnent  ensemble  570  mètres  cubes  par  24  heures. 


§  2.  —  LH'HOCI.ASES  ASSOCIÉES  A  DES  POlMTEMENTâ  DE  ROCHES  ÉRUPTIVES 

Les  cassures,  qui  sont  nombreuses  dans  Técorce  terrestre, 
ne  le  sont  pas  moins  à  proximité  des  roches  éruptives. 

Il  n'est  pas  aussi  naturel  qu'il  peut  le  paraître  tout  d'abord 
de  faire  une  catégorie  spéciale  pour  les  sources  qui  jaillissent 
à  proximité  de  ces  pointements  de  roches,  comme  par 
exemple  la  source  salée  de  Salies  (Haute-Garonne)  située  au 
pied  d'un  typhon  d'ophite  (fig.  138). 

Cependant  nous  citerons  un  exemple  bien  connu  de  ce 
genre  de  gisement. 

«Md.  —  Les  liions  de  fraidronite  et  les  dykes  quartzeux 
jouent  dans  le  terrain  granitique  du  Gard  le  rôle  de  drains 
naturels.  Les  eaux  superficielles  s'infiltrent  dans  les  fentes 
de  Tune  des  salbandes,  quelquefois  dans  toutes  deux.  Par 
une  galerie  a  travers  banc  qu'on  perce  sur  le  filon,  on  donne 
une  issue  aux  eaux.  C'est  là  une  pratique  courante  dans  les 
arrondissements  de  Lasalle  et  de  Saint-Jean  du  Gard.  Aussi, 
dans  les  Cévennes*  les  habitants,  connaissant  fort  bien  ce 

^  Emilien  Dumas.  Géologie  du  Gard^  t.  UI,  p.  58. 


278 


ROLE  DES  LITHOCUSES  DE  DIVERS  ORDRES. 


phénomène,  désignent  ces  filons  sous  le  nom  de  carab  ou 
conducteurs  d'eau. 

C'est  surtout  aux  environs  de  Saint-Jean  du  Gard,  où  ils 
sont  nombreux,  qu'on  a  su  utiliser  les  filons  aquifères. 
Lorsque,  d'un  point  élevé,  on  jette  un  coup  d'œil  sur  les 
pentes  des  montagnes  qui  entourent  cette  commune,  on  est 


Viii.  138.  —  Vue  de  Salies  (Haute-Garonne),  montrant  l'ophitc  avec  la  source  salée  qui  jalllilsur 
In  colline  de  Sainl-Narlory.  1,  ville  de  Salies.  S,  ancienne  église.  5.  ancien  château.  4,  ruin<:!» 
de  Saint-Pierre.  5,  fontaine  salée.  6,  carrière  de  moellons  sénonieus.  —  D'après  M.  Leymehc. 


frappé  de  voir  çà  et  là,  répandus  avec  une  espèce  de  régula- 
rité, de  petits  jardins  échelonnés  sur  les  hauteurs;  c'est  qu'à 
chacun  de  ces  jardins  correspond  une  petite  source  naturelle 
s'échappant  d'un  même  filon. 

Cette  observation  a  été  mise  à  profit  et  a  donné  Vidée  ingé- 
nieuse de  percer  dans  le  granité  des  galeries  horizontales, 
dirigées  perpendiculairement  à  la  direction  de  ces  filons, 
qui    remplissent  l'office  de  barrages  souterrains;  ce  sont 


LITUOCLASES  ASSOCIÉES  A  DES  POINTEMENTS  DE  ROCHES  ÉRUPTIVES.  279 

comme  des  puits  artésiens  horizontaux.  Ces  travaux  ne  sont 
pas  coûteux,  parce  qu'en  général,  ils  sont  pratiqués  dans  un 
granité  friable  et  décomposé,  mais  assez  solide  pour  que  la 
voûte  se  soutienne  sans  le  secours  d'aucun  boisement. 

En  1840,  un  percement  de  ce  genre  entrepris  dans  la 
commune  de  Saint-Jean  du  Gard,  au  domaine  de  la  Fa- 
brique, rencontra  un  grand  nombre  de  filons  dont  chacun 
fournit  son  contingent  d'eau.  Cette  galerie,  l'une  des  plus 
longues  qu'on  ait  pratiquées  dans  la  contrée,  a  150  mètres 
environ  et  elle  fournit  un  volume  d'eau  qui  surpasse  celui 
(les  plus  belles  sources  granitiques  de  ce  canton.  Aussi  de 
semblables  travaux  ont  été  depuis  lors  exécutés  dans  la 
même  commune,  sur  un  grand  nombre  de  points.  Au  ha- 
meau de  Saillan,  après  avoir  percé  un  filon,  on  a  obtenu  une 
belle  source,  assez  abondante  pour  arroser  une  propriété  dix 
fois  plus  considérable  que  celle  pour  laquelle  on  avait  entre- 
\ms  ces  recherches.  Dans  le  domaine  des  Pommarèdes,  une 
forte  source  a  été  également  rencontrée  par  le  même  pro- 
cédé. 

Ces  conditions  se  retrouvent  dans  un  grand  nombre  de 
localités  granitiques  des  Cévennes. 

Dans  la  même  commune  de  Saint-Jean  du  Gard,  domaine 
de  Vitrac,  il  existe  une  source  thermale,  sortant  d'une  ma- 
nière bien  évidente,  d'un  filon  de  quartz,  et  à  côté,  à  une 
distance  de  deux  ou  trois  mètres  à  peine,  on  voit  avec  éton- 
nement  surgir  du  même  filon  une  source  d'eau  froide.  On 
expliquerait  ce  contraste  en  admettant  qu(;  les  eaux  de  la 
première  source,  après  être  descendues  à  une  profondeur 
assez  grande  pour  y  acquérir  leur  température,  remontent, 
en  suivant  une  nouvelle  fissure  placée  entre  le  dyke  et  le 
terrain  granitique,  tandis  que  la  source  d'eau  froide  est 
simplement  le  résultat  d'infiltrations  superficielles. 


280 


ROLE  DES  LlTflOaASES  DE  DIVERS  ORDRES. 


§   3.  —    RÔLE  DES  L1TH0CLA8B8  ASSOCIÉES  ▲   DES  FILONS   MÉTALLIFÈRES 

¥o«se»9  pioMbtércs.  —  A  Plombîères,  le  grès  bigarré  est 
séparé  du  granité  par  un  poudingue  quarlzeux  très  grossier, 
qui  parait  le  représentant  du  grès  des  Vosges.  Le  fond  delà 
vallée  est  entaillé  dans  un  granité  porphyroïde,  quelquefois 


r>y<>.TVrrrrtTi-.TnrTlTt-rT-ri.T^ 


Echelle 

Fig.  159.  —  Groupe  de  filons  et  de  veines  de  fluorine,  d'où  jaillit  la  source  Simon  S  i  Plom- 
bières; y,  granité;  IT,  liions  ou  veines  de  spath  fluor;  ff  filons  ou  veines  de  quartz. 


parsemé  d'amphibole,  qui  forme  une  partie  de  la  chaîne  des 
Vosges. 

De  nombreux  filons  coupent  le  flanc  gauche  de  la  vallée 
de  Plombières,  dans  la  région  d'où  jaillissent  les  principales 
sources  tièdes  ou  savonneuses.  Le  percement  de  la  galerie 
des  sources  tièdes,  et  une  tranchée  qui  a  été  faite  pour  la 
rectification  de  la  route  nationale  de  Metz  à  Besançon,  ont 
fait  reconnaître,  vers  1856,  la  disposition  de  ces  filons. 

Les  filons  dirigés  à  peu  près  N.  0.  à  S.  E  se  composent  prin- 
cipalement de  quartz  et  de  spath  fluor.  Certains  filons  sont 
presque  exclusivement  formés  de  fluorine;  dans  d'autres  le 
quartz  prédomine.  C'est  précisément  de  ces  filons  que  jaillis- 


].lTflOaASES  ASSOCIÉES  A  DES  FILONS  MÉTALLIFÈRES. 


281 


saient  alors  les  principales  sources  tièdes  de  la  rive  gauche. 
La  source  tiède  la  plus  remarquable,  qui  est  connue  sous  le 
nom  de  source  de  Simon,  jaillit  au  milieu  d'un  réseau  de 
filons  de  fluorine,  comme  le  représente  la  figure  139.  Le 
filon  principal,  qui  a  0",20  à  O^jSO  d'épaisseur  se  dirige 
K.  30"  S.  à  0.  30^  N.  et  plonge  de  25^  vers  iN.  30*  E.  La  fluo- 
rine a  en  outre  pénétré  dans  d'innombrables  fissures  du 
granité,  de  sorte  que  les  fragments  détachés  de  cette  roche 
sont  souvent  enduits  de  fluorine  sur  toutes  leurs  faces;  c'est 
comme  une  espèce  de  stockwerk  de  fluorine.  Ses  princi- 


fi?.  140.  —  ili^sociation  des  sources  thermales  888  aux  liions  raétaliifferes  à  Plombières  (côte  de 
la  Gendarmerie) ;  y,  granité;  ff,  filons  ou  veines  de  fluorine;  ff,  filons  ou  veines  de  quartz; 
S',  source  8imon  ;  S",  source  de  Luxeuil  ;  S'"  et  S'%  sources  du  Jardin,  aujourd'hui  taries. 


pales  veines  se  dirigent  parallèlement  au  filon  principal  ; 
beaucoup  d'autres  ont  la  même  direction,  mais  plongent  de 
63  degrés.  Les  grands  cristaux  de  feldspath,  qui  rendent  le 
granité  porphyroïde,  sont  souvent  si  nettement  coupés  par 
ces  veines  de  fluorine  que  les  deux  parties  du  môme  cristal, 
situées  de  chaque  côté  de  la  veine,  peuvent  se  raccorder 
exactement. 

La  source  savonneuse,  dite  de  Luxeuil,  située  à  55  mètres 
au  nord-est  de  la  source  Simon,  sort  de  veines  de  môme  na- 
ture, mais  moins  développées. 

Un  troisième  filon,  situé  à  20  mètres  au  sud-ouest  du  filon 
de  la  source  Simon,  donnait  issue  à  deux  sources  situées 
dans  le  jardin  de  la  Préfecture.  Ces  sources  ont  tari  parce 


28^  ROLE  DES  LITUOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

qu'une  galerie  a  été  percée  à  un  niveau  plus  bas;  mais 
les  cinq  sources  que  cette  galerie  a  rencontrées  jaillissent 
également  d'un  groupe  de  petits  filons  de  quartz  et  de  fluo- 
rine et  le  long  de  plusieurs  d'entre  eux.  La  figure  140  repré- 
sente cette  association  remarquable,  telle  qu'on  pouvait 
l'observer  dans  la  tranchée  de  la  route,  c'est-à-dire  à  un  ni- 
veau supérieur  d'environ  10  mètres  à  celui  de  la  galerie.  Sur 
moins  de  40  mètres,  il  y  a  six  filons;  deux  d'entre  eux  sont 
juxtaposés.  Les  filons  sont  plus  nombreux  encore  dans  la  ga- 
lerie. Ce  rapprochement  établit  comme  une  filiation  immé- 
diate entre  les  sources  thermales  actuelles  et  les  filons  mé- 
tallifères*. 

Loire  I  saii-sou-çouaa.  —  Parmi  Ics  cxcmpIcs  du  même 
genre  que  présente  le  plateau  central,  on  peut  citer,  d'après 
Gruner,  la  source  de  Sail-sous-Couzan  *,  qui  jaillit  d'un 
filon  plombo-barytique.  L'eau  minérale  sort  des  fissures  et 
cavités  du  filon,  ainsi  que  l'ont  montré  les  travaux  de  cap- 
tage  exécutés  sur  la  source  Fontfort. 

Héranic  t  La  Haioa.  —  De  uombreux  filous  métallifères  for- 
més de  quartz  et  de  barytine,  autrefois  exploités  pour  cuivre 
et  plomb,  se  montrent  aux  environs  de  la  Malou-le-Haut  et 
de  la  Malou-le-Bas,  commune  de  Villecelle.  Ces  filons  sont 
nombreux  et  en  rapport  avec  un  gros  filon  quartzeux  dirigé 
à  peu  près  nord-sud.  Plusieurs  sources  minérales  en  sortent, 
ainsi  que  l'ont  appris  des  galeries  et  des  puits  exécutés  dans 
deux  buts  distincts  :  le  captage  des  sources  et  l'exploitation 
des  minerais  métalliques. 

En  faisant,  il  y  a  vingt-cinq  ans,  les  travaux  de  captage 

'  Les  sources  du  thalweg,  dont  le  point  d'émergence  n'est  pas  masqué  par  TalluTion, 
sortent  des  fissures  du  granité. 
*  Deêcription  de  la  Loire,  p.  723  à  728. 


LITHOaiSES  ASSOCIÉES  A  DES  FILONS  MÉTALLIFÈRES.  28S 

de  la  Malou-le-Bas,  on  a  rencontré  successivement  trois 
filons  aquifères.  De  plus,  il  s'y  trouvait  des  fragments  de 
quartz  et  de  baryline,  cimentée  par  de  la  barytine  de  for- 
mation plus  récente,  et  qui,  selon  toute  probabilité,  a  été 
précipitée  par  les  sources  de  l'époque  actuelle. 

A  la  Malou-le-Haut,  quand  on  a  foré  le  puits  dit  des 
Anglais,  il  en  sortait  en  abondance  de  l'eau  minérale  ayant 
la  composition  de  celle  de  l'établissement  et  que  les  bu- 
veurs utilisèrent.  Sur  ce  poiut,  le  puits  avait  rencontré 
un  filon  quartzo-barytique  du  type  de  la  Malou-le-Bas.  Les 
travaux  d'exploitation  ont  dû  être  arrêtés  pour  ne  pas  com- 
promettre l'exploitation  de  l'établissement  voisin. 


Haate-l4>ire   :   Rrionde  \    —    AuX    CUVirOUS    dc    Brioudc     il 

existe  une  très  grande  quantité  de  sources  acidulés  froides* 
Celles  du  Breuil,  près  de  Lamolhe;  de  Cléraensat,  près  d'Au- 
zon;  de  Barèges,  près  d'Ardes;  d'Aurouse,  etc.,  jaillissent  à 
travers  des  fractures  N.  50*  0.;  souvent  elles  sourdent  des 
filons  métallifères  eux-mêmes. 

Ardèche  t  ¥als,    Desaignes,  SlaTres.  —  LcS  SOUrCCS   dc   Yals, 

sortent  aux  bords  de  la  Volane,  du  lit  de  laquelle  on  voit 
s'échapper  de  nombreuses  bulles  de  gaz. 

Elles  jaillissent,  sur  la  limite  du  gneiss  avec  pegmatile  et 
des  terrains  secondaires,  d'un  filon  étendu  et  puissant 
orienté  à  peu  près  N.  E.  à  S.  0.  et  dont  on  retrouve,  à  1500  mè- 
tres au  sud,  des  affleurements  escarpés. 

Ce  filon,  principalement  formé  de  quartz  avec  pyrite,  s'est 
lui-même  formé  sur  une  grande  faille,  de  même  orientation, 
qui  s'étend  jusqu'à  la  Voulte  et  qu'il  ne  remplit  que  sur  une 
petite  partie  de  sa  longueur. 

^  Dorlhac.  Filonê  de  BrUmde,  p.  23. 


S84  ROLE  DES  UTDOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 

À  Desaigues,  arrondissement  de  Tournon,  une  source  ga- 
zeuse sort  également  d'un  filon  avec  pyrite  un  peu  arseni- 
fère,  fluorine  et  bar}  tine. 

Dans  le  même  département,  la  source  de  Mayres  s*écoule 
aussi  d'un  filon  pyriteux'. 

Antre»    iMaUlés    d«   plateaa    central.    —    DeS    relations   de 

même  genre  entre  des  filons  métallifères  et  des  sources  ther- 
males ou  gazeuses  se  montrent  à  Néris  et  à  Bourbon-Uncy 
(Allier),  à  Sylvanès  (Aveyron),  à  Trebas  (Tarn),  à  Balarur 
(Hérault)  et  à  Chaudesalgues  (Cantal). 


«rani-BncM    dto   Bii4e   :   BiproMMia   et  Badenvetter.   —  (eS 

sources  acidulés  de  Rippoldsau  sont  en  rapport  avec  dos 
filons  métallifères',  auxquels  on  a  attribué  une  partie  des 
sulfates  qu'elles  tiennent  en  dissolution.  Tel  est  le  cas  pour 
la  source  Léopold. 

Des  sources  jaillissent  aussi  des  ramifications  latérales  du 
filon  Prosper.  La  source  Joseph,  qui  avait  tari  pendant  qu'on 
travaillait  sur  ce  filon,  a  reparu  quand  on  en  a  abandonné 
l'exploitation.  Lorsqu'en  1787  on  voulut  reprendre  les  tra- 
vaux, l'eau  minérale  y  pénétra,  ainsi  qu'une  énorme  quantiU' 
d'acide  carbonique,  et  l'irruption  fut  si  subite  qu'un  homme 
y  périt  et  que  ses  compagnons  ne  durent  leur  salut  qu'à  la 
fuite.  Dej)uis  lors,  tout  travail  a  cessé  dans  le  voisinage  des 
sources. 

A  Badenweiler,  une  source  minérale  sort  à  quelques 
mètres  d'un  filon  de  quartz  et  de  galène. 

Prasse  rhénane  :   Mine  de  Kantenbaeh,  près  de  Trarbach,  «or 


'  Pan*an.  Annales  det  minest  3*  série,  t.  X,  p.  25. 

«  F.  Sandberger.  lienchbâder,  1863,  p.  39  et  40.  Une  carie  annexée  i  ce  tranii 
montre  bien  la  connexion  dont  il  8*agit. 


LITHOCUSES  ASSOaÉES  A  DES  FILONS  MÉTALLIFÈRES.  285 

la  HcMelle^  —  Près  de  Trarbach  (Prusse  rhénane)  dans  le  filon 
de  plomb  et  de  cuivre  de  Kautenbach,  d'une  épaisseur  de 
1",25  à  1",75,  qui  se  dirige  N.  130.  E.  avec  un  plongement 
d'environ  57*  vers  Touest,  on  avait  trouvé,  il  y  a  un  siècle 
environ,  dans  un  puits,  à  la  profondeur  d'environ  50  mètres, 
une  source  thermale  de  40**  qui  était  employée  à  une  pape- 
terie. Plus  tard,  en  1824,  une  galerie  atteignit,  dans  un  quartz 
sl6rile,une  autre  source  de  35**  que  les  mineurset  les  étrangers 
utilisèrent  cubains.  La  mine  ayant  été  abandonnée  en  1860, 
cette  source  devint  inaccessible;  cependant,  malgré  son 
mélange  avec  de  l'eau  froide,  la  source  continua  à  arriver 
avec  une  température  de  27%50  à  28%75,  et  en  1864  on 
établit  un  bain  à  l'orifice  de  la  galerie. 

saase  t  Wrejherg.  —  Eu  pcrçaut  uuc  galcric  daus  le  filon  d'ar- 
gent de  Churprinz  près  Freyberg,  en  1821,  on  a  découvert,  à 
160  mètres  de  profondeur,  une  source  thermale  volumi- 
neuse dont  la  température  excède  26  degrés. 

BohéOM  t  Ciurlshiidl  et  HaHenbad.  QuclqUCS-UneS  deS  litho- 

clases  qui  coupent  régulièrement  le  granité  de  Carlsbad 
sont  remplies  de  -quartz  corné  (hornstein).  Plusieurs  des 
sources  de  Carlsbad  sortent  de  ces  filons  quartzeux,  comme 
Cotta  l'avait  déjà  reconnu'.  D'après  M.  von  Warnsdorff,  un 
de  ces  filons,  d'environ  1"*, 30  d'épaisseur,  qui  traverse  le  gra- 
nité décomposé  (fig.  141),  donne  naissance  par  ses  fissures  à 
une  source  thermale  de  29  degrés. 

Les  lithoclases  de  ce  granité  porphyroïde  (fig.  142)  affec- 
tent deux  directions,  l'une  N.  E.-S.  0.,  l'autre  N.  O.-S.  E. 

Ce  double  système  de  cassures  n'est  pas  moins  caracté- 
ristique dans  la  direction  des  nombreux  filons  de  quartz  et 

*  D'après  une  communication  personnelle  de  M.  Groppe,  employé  des  mines  &  Trêves* 
-  Leonhardê  Jahrbuch,  1835,  p.  55. 


â8d 


ROLE  DES  LITUOaASES  DE  DIVERS  ORDRES. 


de  hornstein  et  dans  la  position  des  sources  chaudes  que 
dans  la  formation  des  vallées  de  Garlsbad  (Teppellhal  Pia- 
gergasse,  Tgal  et  Petit-Versailles). 
Le  centre  d'éruption  des  sources  chaudes  de  la  région  des 


Fig.  141.  —  Croquis  géologique  des  roches  mises  à  nu,  en  1878,  au  marché  de  CarblwJ  pr  '• 
démolition  de  la  maison  «  xum  weissen  Adier  ».  y  granité;  c,c,  calcaire  déposé  par  les  viurcf- 
(sprudelstein)  de  diverses  variétés;  ff,  filons  de  quartx  (hornstein)  par  lesquels  les  eaui  ther- 
males S  (1,  11,  IIl,  lY)  surgissent  en  plusieurs  points;  b,b,  brèche  de  hornstein.  —  D'après  1.  vi>u 
flochstetter. 


sprudels  se  trouve  au  croisement  des  deux  systèmes.  Toutes 
les  autres  sources  paraissent  devoir  leur  existence  à  des 
communications  plus  ou  moins  indirectes  avec  la  cassure 
principale  des  sprudels  (fig.  145.) 


UTHOCLâSES  associées  a  des  filons  métallifères.  287 

L'ensemble  des  sources  de  Carlsbad  constitue  deux  ali- 
gnements parallèles  que  M.von  Hochtetter  a  désignés  sous  les 
noms  de  Sprudel-Hauptzug  et  de  Muhlbrunnen-Nebenzug, 
en  montrant  que  ces  deux  groupes  correspondent  à  deux 


/"-^    ' 

Fi^'.  142.  —  Carte  des  environs  immédiats  de  Carlsbad.  y,  granité  à  gros  grains;  y",  granité  à 
grains  fins;  Q,  diluvium;  Tr,  calcaire  déposé  par  les  sources  (sprudelstein) ;  a,  spnidel; 
b,  source  d'Uygie;  c,  source  dans  le  lit  du  Topel;  d,  Marktbrunnen  ;  e,  Schlossbrunnen  ; 
fy  source  de  la  «  Russischen-Krone  >  ;  g,  Muhlbninnen  ;  h,  Neubrunnen  ;  i,  Theresienbnio- 
nen;  k,  Bemardsbnmnen  ;  1,  Hospitalbrunnen  ;  m,  Hospital  Sauerling;  n,  source  au  <  rolhen 
»tem  >;  o,  source  gazeuse;  p,  Stepbans-Quelle.  —  D'après  M.  von  Warnsdorf. 

systèmes  de  fentes  que  Ton  peut  reconnaître  à  la  surface 
du  sol. 

Cet  alignement  est  en  rapport  avec  les  deux  systèmes  de 
diaclases  qui  coupent  le  granité  dit  de  Carlsbad. 

On  voit  donc  que,  comme  à  Plombières,  les  sources  de 


*  Mémoireêde  V Académie  de  Vienne,  t.  XXXIV,  1878. 


Î88 


ROLE  DES  LITflOCLASES  DE  DIVERS  ORDRES. 


Garlsbadt  sortent  les  unes,  de  simples  diaclases,  les  autres 

de  diaclases  parallèles  incrustées  de  matériaux  filoniens. 

Il  en  est  de  même  à  Marienbad  '  où  lessources  gazeuses  sortent 

de  lithoclases  orientées  suivant  plusieurs  directions  et  dont 


Fig.  Ii3.  —  Coupe  de  CarlstMid.  AA,  fente  principale  du  sprudel  ;  r«,  dépôts  du  sprudel  ;  «,  sprin- 
ter; by  source  d'Hygie  ;  d^  Schlossbrunn  :  e.  source  «  sur  russischen  Krone  »  ;  BB,  fente  latênk 
du  Mutilbrunn;  ^  Nuhlbrunn;  A,  Theresienbrunn.  —  D'après  M.  von  Bochstetter. 

quelques-unes,  par  suite  de  remplissages  antérieurs,  consti- 
tuent aujourd'hui  des  filons  de  quartz.  Ainsi  le  Kreutzbrunnen 
est  à  peu  près  au  croisement  de  deux  systèmes  de  cassures 
et  les  sources  Caroline,  Âmbroise  et  Marie  sont  alignées 
comme  le  gros  filon  quarlzeux  de  Schneedrang. 


Ilalle  :  Pereta  et  l§lel¥ea«9  Tolfo.  —  En  ToSCaUC,  il  SC  dégage 

encore  des  filons  d'antimoine  de  Pereta  et  de  Selvena  des 
exhalaisons  d'hydrogène  sulfuré,  qui  déposent  journellement 
du  soufre  et  formentdu  gjpse,  comme  M.  Coquand  l'a  signalé*  : 


*  Yon  Warnsdorf .  Leonhards  Jahrlmch,  p.  385,  1846. 

*  Bulletin  de  la  Société  géologique  de  France,  2*  série,  t.  YL  p.  91. 


ROLE  DES  FILONS  UÉTAIXIFÈRES.  S89 

Ues  sources  thermales  jaillissent  à  côté  des  filons  de  galène 
et  des  gîtes  d'alunite  de  la  Tolfa. 

Aii^érie.  —  Parmi  les  exemples  d'association  du  même 
genre  que  Ton  connaît  en  Algérie,  je  mentionnerai  seule- 
ment à  Hammam-Rhira  près  Milianah,  province  d'Alger,  une 
source  thermale  qui  sort  d'un  filon  de  cuivre  pyrileux,  lui- 
même  d'un  âge  très  récent,  puisque,  comme  d'autres  de  la 
même  contrée,  il  traverse  le  terrain  tertiaire  moyen*. 

'  Ville,  yolice  sur  les  provinces  d*Oran  et  d'Alger,  p.  193, 


19 


CHAPITRE  V 


ROLE    DES    CAVERNE 


INTRODUGTIOK 


Dans  la  circulation  souterraine  des  eaux,  les  cavernes  se 
comportent  à  la  manière  des  cassures,  mais  avec  une  acti- 
vité plus  grande.  Le  développement  considérable  qu'elles 
prennent,  dans  beaucoup  de  contrées  calcaires,  en  leur  pro- 
curant un  rôle  hydrognostique  de  premier  ordre,  a  nécessité 
pour  elles  un  chapitre  spécial. 

Les  noms  de  cavernes  ou  de  grottes  désignent  des  cavités  de 
formes  très  irrégulières,  tantôt  des  chambres  plus  ou  moins 
spacieuses,  tantôt  des  boyaux  étroits  en  communication 
entre  eux  et  formant  des  couloirs  qui  peuvent  s'étendre  sur 
des  centaines  et  des  milliers  de  mètres*. 

Les  fissures  des  roches  ou  diaclases  sont  parfois  très 
larges,  tantôt  parce  qu'une  action  mécanique  a  écarté  leui-s 
parois,  tantôt  parce  que  celles-ci  ont  été  attaquées  par  les 
eaux  souterraines,  le  plus  souvent  parce  que  les  deux  actions 


*■  M.  I>esnoyers  a  publié,  en  1845,  dans  le  Dietiontiaire  universel  (T histoire  naturelle 
de  dOrbigny^  des  recherches  géologiques  et  historiques  sur  les  cavernes,  qui  oonstiUieot 
un  excellent  tableau  des  faits  connus  alors  sur  ce  sujet. 


INTRODUCTION. 


291 


se  sont  superposées.  C'est  ainsi  qu'elles  peuvent  passer  par 
degrés  à  de  véritables  cavernes,  qui  d'ailleurs  peuvent  résul- 
ter également  de  cassures  fort  irrégulières,  ainsi  que  du 
décollement  de  couches  contournées. 


Fig.  131.  —  Grotte  de  Jupiter  à  Naxie. 


La  figure  131  représente  le  dernier  cas  pour  la  grotte  de 
Jupiter  à  Naxie. 

D'autres  cavités  de  formes  variées,  telles  que  les  puits  natu- 
rels j  gouffres,  abîmes j  ragagés  (Provence),  rfo//mes(Frioul),  en- 
tonnoirSy  bétoireSy  puisards;  schasmata  chez  les  anciens  Grecs  ; 
katavothra  chez  les  modernes;  schlotten  en  Thuringe  ;  swallow 
holes  dans  le  nord  de  l'Angleterre,  ponor  chez  les  Slaves,  se 
rattachent  aux  cavernes  par  toutes  sortes  d'intermédiaires 
et  jouent  un  rôle  important  dans  Téconomie  des  eaux  sou- 
terraines. 


S99  ROLE  DES  CÂYER.NES. 

Parmi  les  cntonnoii's,  nous  nous  bornerons  a  citer  ceux 
qu'a  reconnus  récemment  M.  l'ingénieur  Roche,   dans  le 


Echelle 


soc  M 


Fig.  132.  —  Plan  de  deux  entonnoirs  situés  à  Aln-Talba,  au  milieu  des  dunes,  dont  nn  .vu) 
contient  de  l'eau.  GG,  affleui'ement  de  grès.  —  D'après  V.  l'ingénieur  des  mines  Rocbe. 


Sahara,  lors  de  la  seconde  mission  Flatters*,  de  si  tragique 
mémoire. 

Les  entonnoirs  d*Aln-Mokhanza  et  Aïn-Taïba  (voir  les 
fig.  132  et  133)   sont  situés  au  milieu  des  dunes  ou  des 

«  Motion,  p.  Si5,  1884. 


CARACTÈRES  GÉNÉRAUX. 


293 


gassis:  Ils  ne  sont  cerlainement  pas  excavés  par  la  main  de 
l'homme  ;  mais  i)s  sont  l'effet  d'effondrements  dus  proba- 


Echelle 


Fig.  133.  — Coupe  montrant  la  disposition  de  l'entonnoir  aquirèredu  plan  précédent.  GG,  couche 
de  grés  à  einient  calcaire  ayant,  au-dessus  et  au-dessous  de  lui,  d'autres  couches  de  grès.  — 
D'après  ]|.  l'ingénieur  des  mines  Roche. 

blementà  la  dissolution  de  certaines  masses  dégj^pse  par  les 
eaux  souterraines.  C'est  surtout  dans  les  calcaires  de  tous 
les  âges  que  se  trouvent  les  cavernes. 

Pour  donner  une  idée  de  ces  accidents,  de  leur  groupe- 
ment et  de  leur  fréquence,  il  n'est  pas  inutile  d'entrer  dans 
quelques  détails  pour  plusieurs  exemples 


g    1.    CARACTÈRES   GÉNÉRAUX   DES    CAVERNES    ET   DES    CAVWÉS   ANALOGinSS 

Tonoe  :  Arcy-flor-carc  ^  —  La  grottc  d'Arcy-sur-Curc,  la 


Fig.  i54.  —  Pian  des  grottes  d'Arcy-sur-Cure. 


plus  remarquable  des  nombreuses  cavernes  connues  dans  le 
calcaire  jurassique  du  département  de  l'Yonne,  se  compose, 


*  Raulin.  Géologie  de  P  Yonne,  p.  721. 


29i 


ROLE  DES  CAVERNES. 


sur  plus  de  800  mètres,  d'une  série  rectiligne  de  salles, 
parfois  très  grandes,  réunies  par  des  parois    étranglées 
(fig.  134). 
Il  est  probable  que  les  roches  qui  constituent  le  promon- 


AlCYo 


Fig.  135.  —  Plan  da  promontoire  travené  par  les  grottes  d'are j-sur-Cure, 

toire,  traversé  par  les  grottes  d'Arcy,  sont  interrompues  par 
des  fissures  GG',  g^j  à  peu  près  verticales  (fig.  135)  que 
les  eaux  auront  suivies  et  agrandies. 


Tleuie I IbersM  4«  Clate * Poltlen'.  —  Il  SUfOt  d^avoir  gra?i, 

à  Poitiers,  la  voie  pittoresque  du  Porteau,  sur  la  rive  gauche 
du  Clain,  pour  avoir  été  frappé  d'une  série  d'excavations 


Fig.  136.  —  Série  de  puits  naturels  P  et  Q  le  loug  des  falaises  calcaires  C  du  Porteau,  situés 
sur  la  rive  gauche  du  Clain,  près  Poitiers.  —  D'après  M.  de  Longuemar* 

cylindriques  et  verticales,  pratiquées  dans  la  paroi  du  rocher 
principal  (fig.  136),  et  rangées  en  file.  Une  ancienne  exploi- 

'  De  LoDguemar.  Géologie  de  la  Vienne,  t.  L  p.  396,  397. 


GARiCTÊRES  GÉNËRÀ6X.  S95 

tation  les  a  rendues  visibles,  en  enlevant  la  partie  anté- 
rieure des  bancs.  Cette  première  file  de  cylindres  naturels^ 
dont  les  diamètres  varient  de  {"'«SO  à  3  mètres,  est  doublée, 
en  arrière  et  en  avant,  par  d'autres  excavations  semblables  ; 
les  unes  masquées  par  les  talus  et  la  partie  supérieure  de 
l'escarpement;  les  autres  visibles,  mais  tronquées  par  les 
carriers  sur  la  terrasse  inrérieure  qui  précède  la  grande 
muraille.  Ces  cavités  présentent  des  renflements  et  des 
étranglements  alternatifs  résultant  de  l'action  des  remous 
d'eaux  animées  d'une  grande  vitesse  et  s'attaquant  à  des 
roches,  dont  les  diverses  parties,  calcaires  ou  siliceuses, 
oflTraient  une  résistance  inégale  à  leurs  efforts.  C'est  évi- 
demmeut  ainsi  que,  le  long  des  berges,  on  constate  souvent 
la  communication  directe  des  puits  naturels  avec  les  grottes. 
Les  uns  et  les  autres  sont,  en  outre,  en  relation  directe 
avec  les  sillons  creusés  horizontalement  le  long  des  berges 
calcaires,  et  dont  les  parois,  polies  par  le  frottement,  ne  sau- 
raient être  confondues  avec  les  sillons  produits  sur  certains 
lits  de  roches  tendres  et  gélives,  par  suite  des  délitements 
d'origine  atmosphérique.  Il  est  à  remarquer,  en  effet,  que 
Torifice  supérieur  des  puits,  qui  sont  intacts,  s'évase  nota- 
blement, et,  qu'à  ce  niveau,  viennent  aboutir  quelques-uns 
des  sillons  échelonnés  le  long  de  ces  berges  ^  comme  pour 
marquer  la  décroissance  successive  des  eaux  qui  creusèrent 
progressivement  les  vallées. 

Les  cavités  dont  il  s'agit  se  retrouvent  également  dans  la 
partie  supérieure  de  la  craie  jaune  (près  de  Mondion  et  au- 
tour de  Saint-Remy  notamment),  et  jusque  dans  les  couches 
résistantes  du  gisement  falunier  de  Mirebalais. 

Avc/rim^  —  Le   calcairc    oolithique    qui,    à    l'altitude 

'  Boisse.  EsquUie  géologiqtte  de  rAveyron,  p.  207,  208. 


S9tf  ROLE  DES  CAVERNES. 

moyenne  de  650  à  800  mètres,  forme  le  sol  des  grands  pla- 
teaux de  l'Aveyron  connus  sous  le  nom  de  causses,  tels  que 
celui  de  Larzac,  présente  à  sa  surface,  qui  est  tantôt  plane, 
tantôt  ondulée,  de  nombreux  accidents. 

Ce  sont  : 

1*  Des  affaissements  coniques,  vulgairement  connus  sous 
le  nom  de  bétoires  ou  entonnoirs;  dépressions  naturelles,  le 
plus  souvent  elliptiques  ou  circulaires,  sur  le  pourtour  des- 
quelles on  voit  les  affleurements  des  couches  éboulées 
former  une  série  de  gradins,  qui  rappellent  les  ruines  des 
arènes  antiques.  Ces  dépressions  abondent,  surtout  dans  la 
partie  nord-ouest  du  causse  de  Coucourès,  aux  environs  de 
Solsac. 

2'  Des  abîmes  ou  puits  naturels,  à  parois  verticales  ou 
même  en  surplomb,  dont  la  profondeur  atteint  parfois  plus 
de  50  mètres;  comme  l'abîme  dit  le  Tindoul  de  la  Vayssière 
(canton  de  Marsillac),  le  Tindoul  ou  Abenc  deCourinos,  près 
de  Compeyre. 

3"  Des  crevasses  ou  fissures  verticalesy  tantôt  vides,  tantôt 
remplies  d'une  terre  rougeâtre,  mélangée  de  minerai  de  fer 
en  grains,  et  de  fragments  de  roches  agglutinés  par  des  con- 
crétions calcaires. 

4^  Un  grand  nombre  de  cavernes,  dont  quelques-unes  très 
étendues,  et  parmi  lesquelles  on  cite  les  grottes  de  Bouche- 
rolland,  de  Salles-la-Source,  de  TEstang,  près  de  Sainl- 
Saturnin,  de  la  Poujade,  du  Monna,  de  Sorgues,  etc.  Toutes 
ces  grottes  présentent  des  circonstances  de  gisement  à  peu 
près  semblables;  elles  ont  leur  ouverture  au  pied  des  escar- 
pements qui  entourent  les  plateaux,  dans  les  couches  infé- 
rieures, souvent  magnésiennes,  et  s'étendent  à  peu  près  ho- 
rizontalement, tantôt  se  développant  en  salles  immenses, 
tantôt  formant  des  galeries  étroites  et  basses,  où  un  homme 
peut  à  peine  se  glisser  en  rampant. 


CARACTÈRES  GÉNÉRAUX.  297 

card*.  —De  même  que  l'oolithe  de  rAvëyron,  lé  néoco- 
îîiien  du  Gard  est  souvent  percé  de  grottes,  parfois  très  spa- 
cieuses et  de  nombreuses  cavités,  en  forme  de  gouffres  ou 
d'abîmes,  désignés  dans  le  pays  sous  le  nom  d'aven  ou  de 
calavën^. 

Des  cavités  très  remarquables^  existent  dans  Tarrondisse- 
ment  d'Âlais  et  dans  le  massif  néocomien  de  Bouquet.  La 
grotte  de  Tharaux,  située  sur  la  rive  droite  de  la  (lèze,  est 
Tune  des  plus  intéressantes  du  département  du  Gard,  par 
sa  grandeur  et  la  beautéde  ses  stalactites;  on  cite  encore 
la  grotte  de  Bellegorge,  près  Navacelle  ;  celle  dite  la  Grande 
fiamne,  dans  la  commune  de  Brouzet,  et  une  autre  dans  le 
voisinage,  d'une  profondeur  de  50  mètres,  servant  aux 
bergers  à  remiser  leurs  troupeaux  pendant  les  fortes 
chaleurs;  la  grotte  de  Seynes,  qui  domine  le  village  du 
même  nom  et  dont  on  voit,  sur  un  rocher  à  pie,  les  deux 
ouvertures  communiquant  ensemble  par  un  couloir  de  20  à 
25  mètres;  celles  situées  au  nord  d'Ëuzet,  au  quartier  dit 
les  Arenas,  qui  servirent  de  retraite  aux  camisards  pendant 
les  guerres  de  religion. 

L'étage  néocomien  supérieur  est  également  percé  de  plu- 
sieurs grottes  dans  l'arrondissement  d'Uzès  :  telle  est  la 
Baume  de  Magdeleine,  dans  la  commune  de  Baron.  Dans  la 
commune  de  Lussan,  au  quartier  des  Concluses,  on  en 
trouve  trois  assez  vastes,  dites  las  Très  Pouses,  le  Maigre  et 
la  combe  Saint-Martin  ;  et  près  de  Saint-André  de  Roque- 
pertuis,  la  grotte  de  Soulié,  sur  la  rive  gauche  de  la  Cèze. 
Telles  sont  encore,  près  de  Roquemaure,  dans  la  commune 
de  Saint-Geniès  de  Comelas,  sur  la  petite  chaîne  dite  la 


*  Ëmilien  Dumas,  t.  IH,  p.  340. 

*  Ce  mot  parait  provenir  du  celtique  avain,  ruisseau,  de  môme  qu*avin  en  écossais  et 
en  irlandais,  et  aicen  en  bas-breton.  Dans  la  angue  celtique  caraw,  creux,  et  avcn^ 
liYiëre,  sont,  d'après  M.  Ë.  Dumas,  l'origine  du  mot  languedocien  calawetu 


208  ROLE  DES  CiYERNES. 

Roque,  la  Grande  Baume  ;  près  du  pont  du  Gard,  la  grotte  de 
la  Sartanette.  Dans  la  commune  de  Dions,  où  Tétage  supé- 
rieur néocomien  est  très  développé,  plusieurs  ouTertures 
profondes  dans  les  parois  verticales  de  la  roche,  au  pied  de 
laquelle  passe  le  Gardon. 

La  plupart  des  grottes  qui  viennent  d'être  citées  contien- 
nent, sous  une  croûte  de  stalagmite  ou  dans  le  limon  qui 
couvre  le  sol,  des  restes  de  l'industrie  des  anciens  âges. 

Près  du  village  de  Dions,  on  visite  beaucoup  une  grande 
dépression  en  forme  d'entonnoir,  au  fond  de  laquelle  se 
trouve  une  grotte  assez  profonde.  Sa  dénomination  latine 
s^est  consei*vée  presque  pure  dans  le  pays,  où  on  la  désigne 
sous  le  nom  d*Espeluca*. 

Un  peu  en  amont  des  sources  dites  les  Fonts  de  Collias, 
on  observe  dans  cette  commune  l'entrée  de  la  Baume  de 
Pasque,  dont  le  plein  cintre  surbaissé  a  environ  7  à  8  mè- 
tres de  hauteur  sur  une  base  d'une  quinzaine  de  mètres.  Au- 
dessus  et  en  face  du  moulin  de  la  Baume  existe  une  grotte, 
dont  on  a  fait  une  chapelle  :  elle  a  deux  ouvertures  séparées 
par  un  intervalle  de  450  mètres.  C'est  à  peu  près  à  400  mè- 
tres en  amont  de  ce  point  que  surgissent  les  sources  abon- 
dantes du  moulin  de  la  Baume.  Dans  le  même  groupe  néoco- 
mien, sur  la  montagne  du  Bois-des-Lens,  des  grottes  assez 
vastes  sont  désignées  sous  le  nom  de  grottes  deMacassargues» 
et  près  de  là,  vers  le  nord-est,  un  avën  ou  abime,  d  un 
mètre  d'ouverture,  mais  très  profond,  si  l'on  en  juge  par 
le  bruit  prolongé  que  rendent  les  pierres  qu'on  y  préci- 
pite. 

Ardéche  :  Pont  d*jM.  —  Le  pont  d'Arc,  daus  l'Ardèche,  e^t 
à  rapprocher  des  accidents  précédents. 

'  Spelunca^  grotte. 


CARACTÈRES  GÉNÉRAUX.  999 

B^  —  Dans  le  petit  massif  jurassique  du  nord  de 
risère,  la  célèbre  grotte  de  la  Balme,  près  Crémieu,  est  ou- 
verte dans  un  escarpement  de  calcaire  bathonien,  qui  forme 
la  lèvre  supérieure  d*une  grande  faille  limitant  à  l'ouest  ce 
massif* 

Ohervationi  théoriques. 


Bien  que  les  eaux  aient  agi  d*une  manière  évidente  dans  la 
formation  des  cavernes  des  massifs  calcaires  et  dolomiti- 
ques,  dont  il  vient  d'être  question,  il  importe  de  remarquer 
que  le  premier  rôle  revient  aux  cassures  souterraines. 

Lors  des  mouvements  qui  ont  brisé  les  couches,  à  toutes 
les  époques,  aux  diaclases  se  sont  souvent  associés  d'autres 
modes  de  cassures  et,  par  suite,  des  cavités  de  formes  diver- 
ses. Gela  explique  pourquoi  les  cavernes  et  autres  cavités 
s'alignent  souvent  avec  les  dislocations  du  sol. 

A  la  manière  de  ce  que  présentent  les  excavations  artifi- 
cielles, les  cavités,  grandes  ou  petites,  ont  exercé  un  vérita- 
ble appel  sur  les  eaux  de  la  surface;  de  là,  sont  résultés  des 
ruisseaux  et  des  torrents  souterrains,  que  l'approfondisse- 
ment graduel  des  vallées  a  successivement  déplacés.  L'action 
de  ces  eaux  a  été  et  est  encore  à  la  fois  mécanique  et  chi- 
mique. 

La  présence  de  matériaux  de  transport,  galets,  sables  et 
limons,  celle  de  cavités  taraudées,  analogues  aux  marmites 
des  géants  (grotte  d'Arcy)  sont  une  preuve  d'une  usure  mé- 
canique. 

Quant  aux  actions  chimiques,  elles  se  trahissent  par  cer- 
taines formes  qu'elles  seules  ont  pu  produire  :  par  la  nature 

«  Lory  :  Bull.  Soc.  géoL,  1851. 


500  .  ROLE  DES  CAVERNES. 

corrodée  et  comme  pourrie  des  parois  et  surtout,  par  les 
stalactites  et  stalagmites  qui  y  abondent. 

Ces  actions  des  eaux,  avec  ou  sans  le  concours  de  Tacide 
carbonique,  se  sont  manifestées  souvent,  même  dans  des 
cavernes  aujourd'hui  complètement  à  sec.  On  reconnaît  que 
leur  dessèchement  est  relativement  récent  et  résulte  sans 
doute  de  la  formation  ou  de  l'approfondissement  de  vallées 
voisines,  qui  ont  joué  le  rôle  de  drains. 

C'est  par  centaines  que  Ton  pourrait  cataloguer  les  caver- 
nes connues  dans  certaines  régions  de  la  France,  quoiqu'une 
faible  minorité  seulement  se  décèle  par  leur  afneurement 
accidentel  :  la  plupart  restent  inaperçues. 

Aux  cavernes  se  rattachent  des  effondrements,  qui  sont  in- 
nombrables, dans  les  régions  montagneuses  de  la  Carniolis 
de  rillyrie,  de  la  Croatie  et  de  la  Dalmatie. 

Orlsine  des  caTeracs  produites  par  l^enCralnemcat  des  ■Millèrrt 

«rénaeées.  —  A  part  les  cavcmes  produites  par  les  amoncel- 
lements de  blocs,  telles  qu'on  en  voit  de  si  nombreuses 
dans  la  forêt  de  Fontainebleau,  il  en  est  qui  résultent  de 
rentraînemcnt,  par  les  eaux  d'infiltration,  des  parties  sa- 
bleuses de  couches  partiellement  agglutinées  en  grès. 

Orlirlns  des  eavemes  produites  par  l^éroston  dn  vTpae  et  da  tel 

femme.  —  Une  simple  érosion  souterraine  de  roches  solubles 
dans  l'eau,  comme  le  gypse  et  surtout  le  sel  gemme,  a 
produit  des  cavernes  et,  par  suite,  des  effondrements  de  la 
surface.  Les  environs  de  Pesey,  en  Savoie,  et  différentes  lo- 
calités de  la  Thuringe,  du  Harz  et  du  Lûnebourg  en  pré- 
sentent des  exemples. 

Pour  le  sel  gemme,  la  nature  ébouleuse  des  couches  argi- 
leuses encaissantes  provoque  le  remblai  de  ces  cavités,  au 
fur  et  à  mesure  de  leur  production.  On  en  a  vu  tout  récem- 


CARACTÈRES  GÉNÉRAUX.  331 

ment  encore  une  démonstration  évidente  dans  les  effondre- 
ments qu'a  provoqués,  dans  la  vallée  de  la  Meurthe,  l'exploi- 
tation du  sel  par  dissolution  artificielle,  notamment  à 
Arth-sur-Meurthe,  le  9  novembre  4876.  La  crainte  du  retour 
de  pareils  accidents  a  motivé  une  décision  ministérielle 
du  15  mars  1877,  et  on  règle  le  minimum  de. distance 
du  chemin  de  fer  et  du  canal,  auquel  les  puits  de  disso- 
lution doivent  être  établis. 

Orlf^e  des  cavernes  dnes  A  des  gllssemeiils  snperflelels.  —  Cl- 

tons  les  cavernes  qui  résultent  de  l'accumulation  de  grands 
blocs,  à  la  suite  de  glissements  superficiels.  Il  y  en  a  un  exemple 


Cambalou 


Echelle 

I 1 i 1 

Fi».  157.  —  Coupe  de  la  montagne  de  Combalou,  versant  de  Roquefort  (Aveyron)  montrai! 
comment  la  démolition  et  le  glissement  des  couches  calcaires  ont  déterminé  ia  formation  de 
cavernes  (caves  de  Roquefort).  J|,oolithe;  J,,  oxfordien;  N,N,  niveau  d'eau;  S,  source  a, 
orifice  d'entrée  du  courant  d'air  qui  ressort  par  les  points  p  et  y;  U,V,  talus  argileux.  — 
D'après  M.  Parran. 

particulièrement  connu  dans  les  caves  de  Roquefort  (fig.  157)  *. 
A  cette  catégorie  de  cavernes  se  rattachent  même  des 


^  Parran,  Annales  det  Mines,  t.  X»  p.  110. 


503  ROLE  DES  GÂTERNES. 

accumulations  de  petits  blocs,  qu'on  ne  mentionnerait  pas, 
s'ils  n'avaient  été  le  théâtre  de  découvertes  intéressantes, 
au  point  de  vue  de  la  faune  quaternaire,  comme  M.  Des- 
noyers Ta  montré  pour  les  blocs  de  g)pse  des  collines  de 
Montmorency  et  pour  les  blocs  de  grès  de  la  colline 
d'Auvers. 


Origine  émm  cAvevaes  excAvées  par  la  Mer  < 

Partout  où  le  littoral  de  la  mer  est  constitué  par  des  escar- 
pements de  roches  plus  ou  moins  cohérentes,  on  y  rencontre 
des  cavernes  et  autres  excavations  dues  à  l'action  méca- 
nique des  galets  ou  d'autres  fragments  rocheux,  poussés 
par  les  vagues.  Nous  nous  bornerons  à  rappeler  la  figure  71, 
p,  134,  pour  Étretat,  ainsi  que  les  exemples  connus  aux 
environs  de  Dieppe,  du  Tréport;  dans  les  granités  de  Bre- 
tagne (Piriac)  et  de  Jersey;  dans  le  basalte  de  Sliffa  (grottes 
de  Fingal)  ;  à  Sorrente,  etc. 

Orlgiae  éLem  eaveraen  é»m  «oalées  voleaal^aefi.  —  II    n'y  a   paS 

lieu  de  revenir  sur  les  cavernes  que  présentent  souvent  les 
coulées  volcaniques,  comme  on  l'a  vu  page  99,  pour  Royal, 
par  exemple  et  comme  il  en  existe  à  Lancerotte,  à  Ténériffe 
et  en  Islande. 

Le  docteur  Eugène  Robert  a  signalé  dans  ce  dernier  pays' 
des  sources  abondantes  qui  sortent,  comme  en  Auvergne, 
des  extrémités  de  courants  de  laves.  Quelquefois  c'est  une 
petite  rivière  qui  s'échappe,  après  avoir  parcouru  des  canaux 
tortueux. 


Oriffliie   éimm  eaTernea   parai— aat   résider   daas  les    flûtes   des 

YoieaaiqaM.  —  Parmi  les  coulées  boueuses  aux- 


*  Voyage  en  Islande,  1"  partie,  page  225. 


CARACTÈRES  GÉNÉRAUX. 


503 


quelles  donnent  lieu  les  éruptions  volcaniques,  toutes  ne 
proviennent  pas  de  la  mise  en  mouvement  des  eaux  de  la 
surface  et  de  pluies  torrentielles  ou  d'une  fonte  partielle  de 
neiges,  comme  il  est  arrivé  trop  souvent,  lors  des  éruptions 
du  Gotopaxi.  Il  est  des  volcans  dont  les  coulées  boueuses  pa- 
raissent provenir  du  déversement  d*eaux  souterraines,  ren- 
fermées dans  la  montagne,  et  dénoter  ainsi  Texislence  pro- 


Fig.  138.  —  État  du  Cai-guairazo  depuis  son  écroulement;  contraste  de  sa  forme    vec  celle 
du  Chimborazo.  —  D'après  Uumboldt. 


bable  de  vastes  cavités  inférieures,  qui  sont  à  rapprocher 
des  cavernes. 

Tel  est  le  cas  pour  diverses  coulées  de  boue,  acidifiées  par 
l'acide  sulfurique  (biuih)  que  Ton  a  vu  sortir  des  volcans  de 
Java.  Ainsi  Téruption  du  Galong-Gong,  le  8  octobre  1822, 
produisit  des  eaux  chaudes  et  sulfureuses,  dont  l'éruption 
dura  deux  heures.  Le  12  octobre,  les  mêmes  faits  recom- 
mencèrent. 


504  ROLE  DES  CAVERNES. 

Tel  est  le  cas  aussi  pour  certains  courants  boueux  [nioyas) 
des  volcans  de  la  Colombie.  Plusieurs  éruptions  du  volcan 
de  Ruiz  ont  donné  des  coulées  de  boue,  avec  sulfate  de  fer 
et  acide  sulfurique,  par  exemple,  le  12  mars  1595  et  le 
19  février  1845*. 

Ce  qui  confirme  Texistence  de  vastes  cavités  intérieures 
el,  par  suite  de  lacs  souterrains,  c'est  récroulement  du 
Carguairazo  (fig.  138)  qui  a  eu  lieu  le  20  juin  1698,  et  la 
forme  de  cône  tronqué  qu'il  a  prise  alors,  en  abandonnant 
également  beaucoup  de  boue,  dans  laquelle  se  trouvaient 
de  petits  poissons  {Pymelodes  cydopum). 


§    2.    INFLUENCE   DES   CAVERNES    SLR   LE   nÉGlME   DES   EAUX. 
J«ra  :  Déi^rtemcnte   eu  Do«Im  et  Am  Jota*.   Le   premier 

plateau  du  Jura,  formé  presque  exclusivement  par  le  pre- 
mier étage  des  terrains  oolithiques  compacts  (jurassique 
inférieur),  constitue,  par  sa  nature  perméable  et  par  ses 
vides  intérieurs,  un  réservoir  d'une  énorme  épaisseur  qui 
alimente  les  cours  d'eau  du  Vignoble  et  de  la  Bresse.  Les 
seules  marnes  que  ce  massif  renferme  sont  les  marnes  à 
foulon,  précieuses  pour  l'agriculture,  mais  d'une  étendue 
minime,  par  rapport  à  celle  du  plateau  et,  pour  cette  raison, 
d'une  faible  importance  hydrologique. 

A  part  les  sources  qui  sortent  au-dessus  des  assises  mar- 
neuses, beaucoup  d'autres  jaillissent  de  cavités  et  de  fissures 
souvent  très  vastes  du  jurassique  inférieur. 


>  Comptes  rendue  de  V Académie  des  eciences,  27  aTril  1847.  —  BulL  Sœ.  grol^ 
2*  série,  t  YllI,  p.  489. 

*  Lamairesse.  Éludée  hydroloçiguee  eur  les  Monte  Jura,  —  Veiian.  Éludée  sur  U 
Jura . 


INFLUENCE  SUR  LE  RÉGIME  DES  EAUX.  305 

Un  grand  nombre  de  très  longues  lignes  d'enfoncements 
anciens  ou  de  formation  actuelle,  existent  le  long  des  lignes 
de  failles.  Ainsi  s'oriente  une  série  de  grandes  escavations, 
en  forme  de  puits,  qui  passe  à  l'ouest  de  Mournans,  puis  se 
dirige  sur  Onglières,  Plenîsette  et  Plenise. 

Dans  une  partie  des  monts  Jura,  des  ouvertures  coniques 
et  béantes,  désignées  sous  divers  noms,  sont  dues  à  des  tasse- 
ments du  sol  et  à  des  effondrements,  qui  sont  la  conséquence 
d'érosions  souterraines. 

Foumet  a  cité  les  environs  de  Lons-le-Saulnier,  comme 
une  des  localités  les  plus  remarquables  sous  ce  rapport. 
Cette  ville  est  établie  sur  un  calcaire  jurassique,  supporté 
par  des  marnes  argileuses  et  une  formation  salifère.  Un 
premier  effondrement  eut  lieu  dans  cette  ville,  en  1703; 
d'autres  s*y  sont  produits  en  1712,  1738,  1792, 1814, 1830. 
Pendant  l'affaissement  de  1792,  des  eaux  souterraines, 
interceptées  dans  leur  cours  parla  descente  du  sol,  s'exhaus- 
sèrent en  même  temps  dans  un  puits,  d'où  Ton  extrayait 
l'eau  salée. 

Dans  la  commune  de  Châtelaine  et  dans  les  forêts  d'Ar- 
bois,  on  connaît  treize  entonnoirs  de  toutes  formes,  éche- 
lonnés dans  une  direction  générale  du  nord-est  au  sud- 
ouest. 

Les  grottes  de  Baume,  ouvertes  dans  le  terrain  jurassique 
inférieur,  où  elles  font  suite  à  l'échancrure  la  plus  haute, 
la  plus  profonde,  la  plus  étroite  et  la  mieux  dessinée  du 
Jura,  donnent  issue  à  la  source  principale  de  la  Seille.  Elle 
correspond  à  une  série  d'entonnoirs  et  d'enfoncements, 
dans  le  prolongement  des  cavernes  où  naît  la  rivière.  Les 
sources  pérennes  qu'elle  produit  ont  pour  complément,  en 
grandes  eaux,  une  source  temporaire  qui  sort  par  déver- 
sement. 

Le  Lison  du  département  du  Jura  reçoit,  en  amont  du 

20 


306  ROLK  DES  CAYERNES. 

Moulin  Croton,  deux  affluents;  Tun,  le  Bief  des  Joncs,  perd 
dans  un  entonnoir  une  des  deux  branches  dans  lesquelles 
il  se  divise,  un  peu  avant  son  confluent.  Les  eaux  du  Moulin 
Groton,  dérivées  du  Lison,  se  perdent  également  dans  un 
entonnoir,  de  sorte  que  le  ruisseau  est  le  plus  souvent  à  sec, 
à  l'aval  de  la  prise  d'eau  de  cette  usine.  Toutefois  son  cours 
se  continue  et  aboutit,  à  4000  mètres  à  l'aval  du  Moulin, 
dans  un  puits  placé  en  tête  du  bief  des  Laizines  :  on  désigne 
ainsi  une  longue  fente  très  large,  à  bords  abrupts,  d'une 
profondeur  de  4  mètres  environ  à  l'origine,  dans  laquelle  il 
n'existe  de  cours  d'eau  que  lors  des  grandes  crues.  A  une 
distance  de  3  kilomètres  de  l'origine  de  cette  dépression,  il 
sort  du  sol  un  cours  d'eau,  prolongement  du  Lison,  qui  a 
coulé  souterrainement  sous  les  laizine$.  Ce  cours  d'eau, 
après  un  parcours  de  860  mètres,  tombe  dans  le  lit  d'un 
bief  venant  de  Villeneuve. 

La  source  du  Lison  du  Doubs,  à  un  kilomètre  au-dessous 
de  Nans-sous-Sainte-Anne,  s'échappe  d'une  belle  grotte 
dans  le  roc  vif  et  forme  une  cascade  de  10  mètres  au  fond 
d'un  cirque.  Elle  fait  mouvoir  immédiatement  un  moulin. 
Ses  eaux  sont  attribuées  au  puits  Billard,  situé  à  400  mètres, 
et  au  marais  de  Villeneuve.  Elles  sont  très  boueuses, 
parce  qu'elles  se  sont  engouffrées  dans  des  entonnoirs  et 
des  laizines. 

Parmi  les  sources  qui  sortent  du  rocher  sans  descendre 
jusqu'aux  marnes,  une  des  plus  renuirquables  est  celle  du 
Doubs  (département  du  Doubs).  Son  orifice  est  situé  dans  la 
paroi  presque  verticale  d'un  rocher.  Elle  jaillit,  en  toute  sai- 
son, avec  une  direction  horizontale,  comme  la  veine  fluide 
d'un  vase  percé  latéralement.  En  sécheresse.,  on  peut  péné- 
trer dans  cet  orifice  sur  plus  de  10  mètres  de  profondeur; 
on  voit  les  eaux  sortir  de  fissures  et  l'on  entend  un  bruit  de 
chutes  lointaines.  Située  à  la  base  du  mont  Bison,  cette 


INFLUENCE  SUR  LE  RËGiHE  DES  EàUX.  307 

source  parait  être  la  décharge  de  yastes  plateaux  portlan- 
diens  dépourvus  de  cours  d*eau. 

Au-dessus  de  Saint-Claude,  est  un  abime  sans  fond,  d'où 
le  ruisseau  de  ce  nom  sort  par  le  haut. 

La  Loue,  commune  d'Ouhans,  jaillit  d'un  rocher  qui  a 
600  mètres  de  haut,  à  20  mètres  en  contre-haut.  On  le  con- 
sidère comme  le  débouché  des  eaux  qu'absorbent  les  gouf- 
fres des  plateaux  de  Gouy  (gouffres  de  la  Crète  de  René, 
de  Sept-Fontaines,  de  Levier). 

Le  lac  de  Joux,  alimenté  par  TOrbe,  a  une  décharge  sou- 
terraine et  communique  aussi  avec  le  Yalorbe. 

Quelques  sources  temporaires  sont  alimentées  par  l'infil- 
tration d'eaux  pluviales,  tombées  sur  des  surfaces  fort  éloi- 
gnées, en  sorte  qu'elles  grossissent  ou  diminuent  sans  cause 
apparente,  à  la  grande  stupéfaction  des  habitants  de  la 
localité,  qui  les  désignent  sous  le  nom  de  calamiteu$e$.  Cer- 
tains bancs  qui  affleurent  par  le  haut  sur  la  chaîne  de 
l'Euthe  et  par  le  bas,  au  pied  du  premier  plateau,  à  une 
distance  de  près  d'un  myriamètre,  donnent  lieu  à  des 
sources  de  cette  espèce.  D'autres  sources  qui  déversent  à 
l'extérieur,  par  siphonement,  les  eaux  de  certaines  cavités 
intérieures  sont  dites  affameuset. 

■MrtiM  et  H^Mtte  ^  —  Dcs  cours  d'cau  souterrains  assez 
importants  circulent  dans  les  fissures  del'oolithe  inférieure; 
on  peut  citer  celui  qui  forme  la  belle  source  du  Château  de 
Dieulouard,  et  ceux  que  produisent  le  ruisseau  de  Thuillcy 
et  l'une  des  branches  du  ruisseau  de  Gemonville. 

VMfM*.  —  Sur  les  plateaux  calcaires  du  département  des 
Vosges,  il  y  a  des  enfoncements  coniques,  à  ouvertures  cir- 

*  Braconnier,  Meurihe-et-Moêelie,  p.  35S. 

*  D'api^lÉ.  Howard. 


308  ROLE  DES  CAVERNES. 

culaires,  de  10  à  30  mètres  de  diamètre,  peu  profonds,  dési- 
gnés sous  le  nom  de  mares  ou  de  mortes;  dans  quelques-uns 
il  y  a  toujours  de  Teau,  même  en  été.  Le  muschelkalk,  dans 
la  forêt  de  Padoux,  en  présente  des  centaines.  Il  y  en  a 
d'autres  dans  le  bas.  Il  en  est  encore  qui  servent  de  récep- 
tacles aux  eaux  de  pluie  ou  de  ruisseaux,  et  qui  ont  les  noms 
de  puisarts,  de  puits,  de  pertes  ;  d'autres  paraissent  obstrués  ; 
d'autres,  enfin,  au  lieu  d'absorber,  sei*vent  à  dégorger  le 
trop  plein  des  eaux  souterraines.  Il  en  est  près  d'Autreville, 
dans  le  fond  delà  vallée,  connus  sous  le  nom  de  fossesj  qui 
sont  bordés  de  buttes  coniques,  formées  de  détritus  rejetés 
par  les  eaux.  La  plus  grande  a  40  mètres  à  sa  base  et  4  mè- 
tres de  hauteur. 


—  Dans  le  département  de  TAube,  les  plaines  du 
calcaire  àspatangues  présentent,  aux  environs  de  Vendeu- 
vre,  de  Vauchonvilliers,  Trannes,  Levigny,  Fresnay,  Ville- 
sur-Terre,  etc.,  des  trous  souvent  très  larges  et  très  profonds, 
auxquels  les  habitants  ont  donné  les  nonis  de  gouffres  ou  de 
fosses.  Leur  forme  ordinaire  est  celle  d'un  conoîde  ou  d'une 
pyramide  quadrangulaire  renversée,  ayant  quelquefois  à  la 
surface  plus  de  80  mètres  de  périphérie,  et   10  à  12  mètres 
de  profondeur.  Quelques-uns  de  ces  gouffres  absorbent  les 
eaux  pluviales^  qui  disparaissent  ensuite  par  des  canaux  sou- 
terrains, et  vont  contribuer  à  alimenter  des  fontaines  abon- 
dantes. D'autres  se  comblent  en  partie  et  deviennent  le 
refuge  d'une  végétation  vigoureuse.  Enfin,  il  en  est  où  se 
conservent  les  eaux  qui  s'y  rendent,  et  souvent  les  remplis- 
sent dans  les  temps  de  pluie,  de  manière  à  se  déverser  dans 
les  ravins  environnants.  Ces  trous  sont  dus  à  des  effondre- 
ments. 

'  Leymerie.  Aul>e,  p.  204-205. 


INFLUENCE  SUR  LE  RÉGIlfE  DES  EAUX.  309 

€éte-4'<lr^  —  Aux  environs  de  Montbard,  le  gouffre  de  Vau- 
gimois  est  un  ensemble  de  bétoires  où  disparait  la  rivière 
de  Yilaines-en-Duemois.  Non  loin  de  là,  plusieurs  ruisseaux  se 
perdent  de  même  dans  les  sillons  du  grand  plateau  calcaire, 
qui  forme  la  pente  septentrionale  de  la  Côte-d'Or. 


mmmUrSmàme  :  «btItom  4c  TeMwl'.  —  LcS  plateaUX  de  l'oO- 

lithe  inférieure,  au  sud  de  Yesoul,  sont  absolument  dépour- 
vus de  sources;  l'écoulement  des  eaux  s'y  fait  par  des  con- 
duits souterrains,  communiquant  parfois  avec  le  jour  par 
des  puits  naturels,  qui  servent  de  déversoirs  après  les  grandes 
pluies  (Fontaine  de  Gourboux,  trou  de  Fondremand).  Ces 
canaux,  à  leur  arrivée  au  jour,  peuvent  former  des  cours 
d'eau  importants  (Source  de  la  Romaine). 

Ain  ;r«rte4«BMBe  A  BeUeffar 4e.  —  D'aprës  M.  Tardy,  le 
sol,  au  point  précis  oùse  perd  le  Rhône,  à  Bellegarde  (fig.  139) 
présente  trois  couches  successives  de  calcaire  urgonien, 
étudiées  par  M.  Renevier*.  C'est  sous  le  banc  inférieur  n*  3 
que  le  Rhône  disparaît  dans  les  basses  eaux,  c'est-à-dire  de 
février  à  juin;  autrefois,  le  banc  supérieur  n*  1  recouvrait 
le  lit  du  fleuve,  comme  un  pont  naturel,  qu*ona  fait  sauter, 
vers  1830,  pour  faciliter  le  flottage  des  bois. 

CAiTadM\  —  Dans  le  Calvados,  l'Aure  et  la  Dromme  se  per- 
dent insensiblement  à  Fosse-Souci,  au  pied  de  la  butte  d'Es- 
cures,  dans  la  vallée  de  Maisons,  à  6  kilomètres  au  nord  de 
Bayeux,  entre  les  strates  du  calcaire  marneux  du  niveau  de 
l'argile  de  Port-en-Bessin,  presqu'au  point  de  contact  de 


■  Explication  de  la  Carie  géologique  de  France,  t.  II,  p.  387. 

•  Carte  géologique  détaillée;  feuille  de  Gray. 

»  Bull.  Soc.  géol,,  t.  III,  ^  Bérie,  p,  706. 

^  De  Gaumont.  Euai  sur  la  topographie  géognoêtique  du  Calvadoe^  p.  226. 


510 


ROLE  DBS  CAVERNES. 


Fig.  139.  —  Vue  do  la  perte  du  Rhône  à  Bellegarde,  prise  du  milieu  du  pont  de  Lucet.  On  toit, 
sur  la  rive  droite  du  fleuve  et  Ters  le  haut,  un  barrage  qui  a  été  établi  pour  la  prise  d'eaa 
des  turbines. 


LNFLUENGE  SUR  LE  RÉGIME  DES  EAUX.  311 

cette  roche  avec  l*oolithe  inférieure.  Après  s*être  réunies, 
les  rivières  se  divisent  en  deux  courants  :  en  été,  on  voit 
disparaître  l*un  d'eux  dans  l'espace  de  40  mètres  environ  ; 
en  hiver,  quand  les  eaux  sont  plus  abondantes,  ils  se  perdent 
sur  une  longueur  de  plus  de  80  mètres.  Partout  où  les  eaux 
sont  absorbées,  on  entend  un  bruit  sourd,  et  on  les  voit  res- 
sortir à  marée  basse,  au  pied  des  falaises,  entre  Port-en- 
Bessin,  Gommes  et  Marigny,  à  4  kilomètres  de  distance  :  les 
•couches  d'où  elles  surgissent  sur  la  côte  sont  identiques 
avec  celles  qui  les  reçoivent  à  Maisons. 

ClMWMiie  :  Tardovérc,    le  Bandlat,  la  To■vre^    *—  Le   terrain 

Jurassique  présente,  dans  diverses  parties  du  département 
de  la  Charente,  de  nombreuses  dislocations  qui  ne  se  tradui- 
sent pas  seulement  par  de  simples  ruptures  de  couches  ou 
par  des  failles,  mais  souvent  aussi  par  des  effondrements, 
des  gouffres  plus  ou  moins  profonds,  dont  les  bouches  sont 
béantes  à  la  surface  du  sol,  et  qui  jouent  un  rôle  important 
dans  la  circulation  des  eaux  souterraines. 

Lia  Tardouère  ou  Tardoirc,  depuis  Montbron,  perd  ses 
eau-x  dans  des  cavités,  de  sorte  que  dans  son  état  ordinaire 
elle  est  réduite  à  la  moitié  de  son  volume  à  la  Rochefou- 
cauld. Elle  ne  parvient  au  pont  d'Agris  qu'après  des  pluies 
abondantes,  et  il  faut  des  crues  extraordinaires  pour  que 
•cette  rivière  coule  jusqu'à  la  Bonnieure.  Les  gouffres  dans 
lesquels  elle  se  perd  sont  quelquefois  vides  et  apparents; 
d'autres  fois,  ils  sont  recouverts  par  des  matériaux  incohé- 
rents ou  par  des  couches  de  sable  à  travers  lesquels  les 
eaux  s'infiltrent.  Le  sol  d'ailleurs,  dans  les  cantons  de  Mont- 
bron, de  la  Rochefoucauld  et  de  Mansle,  porte  les  traces  de 
fortes  dislocations,  et  beaucoup  de  bancs  approchent  de  la 
verticale. 

*  Goquand.  Géologie  du  la  CharenU  1863,  p.  264  et  suivantes  ;  p.  292. 


5i3  ROLE  DES  GàVERNES. 

La  commune  de  Pransac  présente,  sur  la  rive  gauche  du 
Bandiat»  dont  le  cours  est  sensiblement  parallèle  à  celui  de 
la  Tardouère^  un  gouffre  dans  lequel  pénètrent  les  eaux  de 
la  rivière.  Ce  gouffre,  entr*ouvert  dans  une  faille,  est  situé 
au  pied  de  roches   coralliennes  très  fissurées.   En  aval, 
comme  en  amont  de  Pransac,  le  Bandiat  se  perd  dans  une 
multitude  d'entonnoirs.  A  part  les  grottes  de  Bancogne,  le 
gouffre  le  plus  apparent  est  celui  que  Ton  rencontre  à  2  kilo- 
mètres du  pont  de  la  Bécasse,  près  du  village  de  Ghez-Roby. 
C'est  une  crevasse  béante,  dont  le  fond  présente  un  amas  de 
rochers  écroulés  et  entassés  sans  ordre  les  uns  au-dessus  des 
autres.  Elle  engloutirait  toute  la  rivière,  si  celle-ci  n'était 
retenue  par  une  forte  digue.  Pendant  l'été  elle  ne  dépasse 
pas  le  gouffre  de  la  Caillère,  dans  lequel  on  la  voit  se  préci- 
piter avec  fracas.  La  coupe  qui  a  été  faite  dans  le  coteau  du 
village  de  la  Chabanne,   pour  la  traversée  de  la  route,  au 
sortir  de  la  plaine  de  la  Rochefoucauld,  montre  des  rochers 
inclinés  en  différents  sens,  laissant  entre  eux  des  cavités 
plus  ou  moins  considérables.  C'est  ainsi  que  sous  le  village 
de  Lacoux,  il  existe,  au  bas  d'une  saillie  de  rochers,  un 
gouffre  recouvert  par  des  quartiers  de  pierres  énormes. 

La  forêt  de  la  Braconne  contient  aussi  plusieurs  de  ces 
gouffres,  qui  pénètrent  jusqu'à  une  profondeur  considé- 
rable. Ainsi  on  rencontre  dans  la  commune  d'Agris  une  de 
ces  excavations,  désignée  sous  le  nom  de  Dufaix,  qui  s'ouvre, 
sous  forme  de  galerie  tortueuse,  dans  les  bancs  du  corallien 
supérieur,  dont  les  couches  s'inclinent  vers  le  gouffre.  On 
peut  citer,  dans  la  même  localité,  la  Fosse  Mobile,  qui  com- 
mence par  une  cavité  sinueuse,  s'engage  ensuite  à  travers 
une  voûte,  et  débouche  sur  un  puits  presque  vertical,  la 
Fosse  Limousine,  dont  la  cavité  inférieure  se  continue 
dans  l'intérieur  de  la  montagne,  au  moyen  de  grottes;  les 
bords  supérieurs  du  précipice  sont  formés  par  le  calcaire  à 


INFLUENCE  SUR  LE  RÉGIME  DES  EAUX.  313 

astartes.  Le  gouffre  le  plus  grand  et  le  plus  tourmenté  est  la 
Grande-Fosse,  au  milieu  de  la  forêt  de  la  Braconne,  et  qui 
est  entièrement  ouverte  dans  le  calcaire  à  astartes.  G  est  une 
vaste  caverne  circulaire,  de  3  à  400  mètres  de  diamètre,  à 
parois  verticales,  et  présentant  des  couches  brisées;  un  cône, 
qui  s'élève  à  peu  près  au  milieu  de  la  dépression,  a  une 
hauteur  de  30  mètres  environ. 

On  comprend  comment,  dans  une  région  aussi  fracturée, 
les  eaux  se  perdent  successivement  dans  les  gouffres  béants 
qu'elles  trouvent  sur  leur  passage. 

À  Tinverse  de  la  Tardouère  et  duBandiat,  qui  disparaissent 
dans  des  gouffres,  la  Touvre  sort  en  bouillonnant,  avec  le 
volume  d'une  rivière  et  une  largeur  de  80  mètres,  de  cou- 
ches appartenant  au  sous-étage  virgulien. 

Ces  magnifiques  sources  de  la  Touvre,  comme  la  fontaine 
de  Vaucluse,  les  rivières  de  la  Loue  et  du  Lison,  jaillissent 
d'un  gouffre  dominé  par  des  rochers  taillés  à  pic.  Elles  pren- 
nent naissance  dans  deux  bassins  principaux  :  le  Dormant 
et  le  Bouillant,  dont  les  deux  noms  rappellent  l'aspect.  Le 
premier  a  24  mètres  et  le  second  12  mètres  de  profondeur. 

On  doit  considérer  aussi  comme  une  des  sources  de  la 
Touvre  la  fontaine  bouillonnante  de  la  Laiche,  que  l'on  ren- 
contre à  1000  mètres  au  sud  du  gouffre,  et  qui  forme  une 
nappe  d'eau,  ayant  plus  d'un  hectare  d'étendue. 

La  Touvre  doit  incontestablement  son  origine  aux  deux 
rivières  de  la  Tardouère  et  du  Bandiat,  qui,  comme  on  vient 
de  le  voir,  se  perdent  en  entier  à  la  hauteur  de  la  Rochefou- 
cauld, dans  des  crevasses  ouvertes  au  milieu  de  leur  lit,  et 
dont  les  eaux  se  dirigent  vers,  le  sud-ouest,  suivant  le  plon- 
gement  des  couches.  Leur  communication  souterraine  est 
attestée  d'abord  par  une  observation  que  l'on  a  souvent 
occasion  de  faire.  11  n'est  pas  rare  de  voir  les  eaux  de  la 
Touvre  devenir  troubles  et   limoneuses  dans  la  plus  belle 


314  ROLE  DES  CAVERNES. 

saison  de  Tannée,  sans  que  l'on  se  soit  aperçu  de  la  moindre 
pluie.  Ce  phénomène  n'a  d'autre  cause  que  les  orages  locaui, 
qui  salissent  les  eaux  du  Bandiat  et  les  transmettent  en  plus 
grande  quantité  dans  les  goufTres  destinés  à  les  recevoir. 

Les  dénivellements  que  Ton  remarque  dans  les  bancs  à 
Oslrea  virgula^  depuis  les  gouffres  jusqu'au-dessus  de  la 
Laiche,  démontrent  que  les  escarpements,  au  pied  desquels 
jaillissent  les  sources,  ont  été  produits  par  une  faille  qui, 
formant  un  barrage  intérieur,  limite  vers  l'est  les  cavernes 
souterraines,  et  force  le  Crop-plein  à  s'écouler  par  cette 
vanne  naturelle. 

■ér•«lt^  — Dans  le  département  de  l'Hérault,  les  calcaires 
offrent  le  caractère  de  présenter  quelquefois  à  la  surface, 
indépendamment  de  leui*s  pores  toujours  béants,  de  vastes 
ouvertures  résultant  le  plus  souvent  d'effondrements  (la 
croix  de  Miège),  plus  fréquemment  des  trous  plus  ou  moins 
spacieux,  appelés  évenU  ou  boit-tout,  ou  bien  encore  des 
fissures  plus  ou  moins  étroites,  qui  se  prolongent  bien 
avant  dans  leur  intérieur  et  aboutissent  à  de  larges  cavités 
susceptibles  de  fournir  aux  eaux  des  bassins  de  réception. 
Ces  bassins  communiquent  avec  l'extérieur  par  des  canaux 
plus  ou  moins  sinueux,  et  donnent  un  écoulement  d'eau 
d'un  volume  exceptionnel  (source  du  Lez). 

La  source  de  la  Vis,  située  au  moulin  de  la  Fou,  près  du 
hameau  de  Novacelle,  est  un  énorme  bouillon,  d'un  volume 
de  deux  mètres  par  seconde,  qui  change  immédiatement  le 
torrent  en  une  belle  rivière  aux  eaux  limpides.  Il  parait  pro- 
venir d'infiltrations  dans  le  plateau  de  calcaire  oolithique 
du  Larzac  \ 


'  D'après  M.  de  Roaville. 

*  Lequeulre.  Annuaire  du  Club  Alpin  françai$,  1883.  p.  331. 


INFLUENCE  SDR  LE  RËGIME  DES  EAUX.  315 

li«re  e«Dr6aie\  —  Les  calcaires  à  caprotines  qui  forment 
toutes  les  crêtes  principales  et  presque  tous  les  grands  pla- 
teaux rocheux  des  massifs  de  la  Chartreuse ,  de  Lans,  de 
Royans  et  du  Vercors  (Isère  et  Drôme)  sont  très  compacts 
et  ne  se  dégradent  que  très  lentement  par  les  agents  atmo- 
sphériques. 

Mais  ils  sont  toujours  plus  ou  moins  crevassés,  de 
telle  sorte  que  les  eaux  ne  séjournent  point  à  leur  surface 
et  s'infiltrent  rapidement  à  travers  toute  l'épaisseur  de  ces 
calcaires,  jusqu'à  ce  qu'elles  rencontrent  une  assise  mar- 
neuse qui  les  arrête  :  ce  sont  des  marnes  néocomiennes  à 
spatangues  ;  puis  elles  ressortent  souvent  par  des  grottes,  en 
sources  volumineuses  et  souvent  intarissables,  dont  les  posi- 
tions sont  déterminées  par  les  inflexions  des  couches  néoco- 
miennes. 

Telles  sont,  dans  les  montagnes  de  la  Chartreuse,  les  sour- 
ces du  Guiers-Vif  et  du  Guiers-Mort,  alimentées  par  les  pluies 
et  les  neiges  de  la  chaîne  du  Hautdu-Seuil.  Presque  toutes 
les  grottes  qui  ont  une  certaine  célébrité  dans  la  région 
sont  situées  dans  les  calcaires  à  caprotines  :  telles  sont  le 
Trou  du  Glaz,  sur  la  montagne  du  Petit  Som,  les  glacières  de 
Proveysieux,  de  Corençon,  celle  de  Fondeurle- en -Ver- 
cors,  etc. 

Dans  les  parties  basses  des  grands  plateaux  du  Vercors 
(I.ente,  Vassieux,  etc.)  on  voit  souvent  les  crevasses  des  cal- 
caires néocomiens  converger  vers  des  entonnoirs  ou  fontis, 
désignés  sous  le  nom  de  scialets,  où  les  eaux  s'engloutissent. 
Pendant  les  grandes  pluies,  il  arrive  quelquefois  qu'un  scia- 
let  est  insuffisant  pour  absorber  l'eau  qui  se  rassemble  dans 
une  partie  basse  du  plateau  :  il  se  forme  un  lac  temporaire, 
dont  le  niveau  s'exhausse  jusqu'à  la  rencontre  d'un  scialet 

•  Lory.  Dauphiné,  p.  316-317. 


316  ROLE  DES  aVERNES. 

placé  plus  haut.  Ces  faits  ont  été  étudies  dans  le  Vercors, 
par  Fournet  et  Duval-Jouve  *. 

Dans  la  Drôme,  en  particulier*  la  falaise  dite  du  Robinet, 
près  Viviers,  entre  Donzère  et  Ghâteauneuf,  est  perforée  de 
nombreuses  cavernes.  La  grotte  de  Dieu-le-Fit,  qui  porte  le 
nom  particulier  de  Tom-Jones,  est  remarquable  par  son 
étendue  et  par  la  présence  d'énormes  cailloux  roulés  qui 
n'ont  pu  y  être  amenés  que  par  des  courants  rapides;  celle 
de  MoUans  est  située  sur  la  limite  de  cette  commune  vers 
Malaucène. 


¥•»  ec  AipM-Baritimei\ — Dcsgrottesse  trouvent  à  chaque 
pas  sur  les  flancs  élevés  des  escarpements  calcaires  du  dé- 
partement du  Var,  auprès  de  Grasse;  sous  le  plateau  de 
Saint-Vallier,  près  de  Toulon,  sous  l'escarpement  du  plateau 
d'Orves.  La  célèbre  grotte  de  la  Sainte-Baume  est  ouverte 
dans  les  flancs  de  la  montagne  de  ce  nom,  qui  fournit  des 
eaux  pures  et  abondantes ,  parmi  lesquelles  la  source  de 
Saint-Pons  :  celle-ci,  qui  jaillit  en  bouillonnant  du  rocher, 
pourrait,  dès  sa  sortie,  porter  des  bateaux.  Les  grottes  de 
Barfols,  sous  le  plateau  calcaire  du  Gaud,  sur  la  rive  droite 
de  la  Siagne  d'EscragnolIes,  sont  également  bien  connues. 

Les  ragagés^  les  gouffres  et  les  crevasses  sont  des  cavités 
verticales,  ouvertes  aussi  dans  les  calcaires  secondaires 
des  plateaux ,  qui  présentent  des  analogies  ^vec  les 
grottes. 

Il  existe  plusieurs  gouffres  qui  déversent  dans  la  mer  les 
eaux  qu'ils  ont  prises  à  la  superficie.  Ainsi  le  gouffre  de 
Cuges  qui  reçoit  toutes  les  eaux  de  ce  bassin  ne  paraît  les 
restituer  que  dans  les  flots.  Ainsi  les  calcaires  poreux  et 

«  Bulletin  de  la  Société  géologique  2«  série,  t.  XI,  p.  731.  Fournet.  Sur  Ut  effon- 
dremente.  Académie  de  Lyon  1852. 
■  De  Villeneuve.  Géologie  de  la  Provence,  p.  306. 


LNFLUENCK  ^UR  LE  RÉGIME  DES  EAUX.  317 

siliceux  du  plateau  de  Roquefort,  à  Biot,  ne  peuvent  se  dé- 
charger de  leurs  eaux  que  dans  le  golfe  d*Antibes. 

Une  grande  source  sous-marine  se  manifeste  dans  le  petit 
golfe  de  Cannes,  vis-à-vis  la  partie  du  rivage  formée  de  mus- 
chelkalk  ;  cette  source  se  trahit  pendant  les  temps  calmes, 
par  un  bouillonnement.  Elle  est  située  vers  le  point  du  cap 
Croisette,  où  le  rapprochement  de  la  ligne  sans  fond  indique 
un  rivage  abrupt,  dont  la  pente  moyenne  est  de  27  pour  100. 

Plusieurs  sources  analogues  existent  très  probablement 
dans  le  golfe  Jouan,  près  Ântibes,  et  dans  le  golfe  de  l'em- 
bouchure du  Var. 

Lorsqu'on  examine  la  composition  du  littoral,  de  Nice  à 
Gênes,  on  retrouve  toutes  les  circonstances  caractéristiques 
des  sources  sous-marines,  terrains  perméables  arrivant  jus- 
qu'au contact  des  flots  et  rapide  dépression  du  fond  de  la 
mer  vers  le  littoral.  Aucun  cours  d'eau  important  n'établit 
d'ailleurs  un  grand  centre  de  réunion  aux  eaux  absorbées. 
On  trouve,  en  effet,  au  sud  de  Menton,  des  sources  tellement 
abondantes  qu'elles  adoucissent  l'eau  marine. 

Dans  la  partie  occidentale  du  département  du  Yar,  les 
sources  sous-marines  ne  se  montrent  plus  qu'au  contact  des 
masses  calcaires  avec  la  mer,  vers  Saint-Nazaire  et  Baudol 
et  près  du  golfe  de  Lèques.  Sur  un  point,  l'affluencede  l'eau 
douce  est  tellement  connue  qu'il  y  a  auprès  de  la  plage  de 
Portissol,  à  l'ouest  de  Saint-Nazaire,  un  avancement  nommé 
pointe  de  la  Source.  Au  nord  de  Bandol,  les  eaux  intérieures 
sont  si  abondantes,  qu'un  trou  de  sonde  percé,  en  1828,  à 
la  Cadière,  dans  un  puits  de  recherche  de  mine,  amena  une 
affluence  d'eau  qui  nécessita  l'abandon  du  puits  inondé. 
Plus  à  l'ouest,  les  eaux  de  sources  sous-marines  se  présentent 
en  plusieurs  points.  Aux  Capucins,  près  la  Ciotat,  elles  rédui- 
sent de  trois  quarts  la  salure  de  l'eau.  A  Cassis  apparaît  la 
grande  source  sous-marine  de  Port-Miou,  qui  émerge  du  roc 


518  ROLE  DKS  CAVERNES. 

par  une  ouverture  de  2  mètres  carrés  au  moins.  J^  force  d'im- 
pulsion de  cette  eau  se  manifeste  par  un  courant,  entraînant 
des  corps  flottants  jusqu'à  plus  de  2  kilomètres  du  rivage. 
Une  sonde  tenue  en  suspension  dans  un  puits  creusé  près 
de  l'émergence  de  cette  source  sous-marine,  ne  peut  pas 
demeurer  verticale  sous  la  charge  de  16  kilogrammes;  il  faut 
armer  la  sonde  de  38  kilogrammes  pour  qu'elle  résiste  à 
l'entraînement. 

Ajoutons,  d'après  M,  de  Villeneuve,  que  cette  grande  source 
sous-marine  de  Cassis  s'aligne,  d'une  part,  avec  la  source 
sous-marine  de  Cannes,  parallèlement  au  système  de  la 
Sainte-Baume,  et  de  l'autre,  avec  la  grande  source  de  Vau- 
cluse,  suivant  N.  22  0.,  parallèlement  au  système  du  Vise, 
qui  est  équivalent  à  celui  de  la  Sainte-Baume. 

BMehe•-d■-Bbtee^  —  Âuprès  de  Marseille,  toutes  les  eaux 
des  terres  basses  de  Gémenos,  après  avoir  été  retenues  parles 
argiles  tertiaires,  viennent  s'engouffrer  dans  les  puits  absor- 
bants offerts  par  les  calcaires  à  chama,  qui  bordent  au  sud 
le  petit  bassin  de  Gémenos  à  Âubagne.  Ges  puits  absorbants 
sont  connus  en  Provence  sous  le  nom  i'embucs.  Ils  suivent 
les  alignements  des  sources  :  c'est  ainsi  qu'un  môme  aligne- 
ment, parallèle  aux  eaux  thermales  de  Gréouls,  à  Digne, 
couvre  les  sources  de  Sorps,  de  Barjols,  deSeillons,  de  Sainfe- 
Zacharie,  de  Gémenos,  et  la  source  sous-marine  de  Cassis. 
Comme  les  embues  de  Gémenos,  les  puits  absorbants  déver- 
sent les  eaux  des  petits  bassins  imperméables,  sans  écoule- 
ments apparents.  Ainsi  s'échappent,  vers  la  mer,  les  eaui 
du  bassin  de  Cuges;  ainsi  les  eaux  du  bassin  tertiaire  d'Ar- 
tignosc,  celles  du  bassin  de  Saint-Julien  le  Montagnier,  une 
grande  partie  des  eaux  des  petites  vallées  tertiaires  de  Rians 

*  De  VilleneuTC.  Géologie  de  la  Provence,  p.  464. 


INFLUENCE  SUR  LE  RÉGIME  DES  EAUX.  519 

à  Esparron  et  Ginasservis,  viennent  grossir  le  volume 
des  eaux  filtrées  à  travers  les  calcaires  secondaires  qui  les 
encaissent. 

Dans  la  chaîne  de  Sainte-Victoire,  on  remarque  la  belle 
source  du  Tholonet,  que  les  Romains  avaient  recueillie  dans 
un  aqueduc.  Jonques,  situé  dans  un  vallon  comme  celui  de 
Saint-Pons,  possède  aussi  plusieurs  belles  sources,  et  entre 
autres,  celle  de  la  Traconade,  que  les  Romains  ont  conduite 
jusqu'à  Aix,  en  perçant  plusieurs  chaînes  montagneuses. 
Toute  la  partie  de  la  Trevaresse  qui  tourne  vers  la  Durance 
est  arrosée  par  des  sources  abondantes.  La  chaîne  de  l'Étoile 
fournit  aussi  de  belles  eaux. 

Cette  même  chaîne  verse  dans  le  bassin  de  Marseille  les 
sources  des  Eygalades  et  de  Plombières,  sans  compter  plu- 
sieurs autres  moins  considérables. 

Excepté  quelques  villages  situés  sur  les  hauteurs,  comme 
le  Vernègue,  Aurons,  Miramas,  Eguilles,  la  plupart  des 
communes  du  département  ont  des  sources  qui  alimen- 
tent leurs  fontaines,  et  les  villes  de  Marseille,  Aix,  Arles, 
Tarascon,  Saint-Remi,  Aubagne  n'ont  rien  à  désirer  sous  ce 
rapport. 


M  FoBtaiM  ém  ¥aiici«M  ^  La  foutainc  de  Yaucluse 
sort  au  pied  d'un  rocher  taillé  à  pic  (fig.  140)  dont  la  hau- 
teur est  de  200  mètres  et  qui  ferme  brusquement  un  vallon 
étroit  ^  Elle  jaillit  d'un  vaste  bassin  presque  circulaire  et  en 
forme  d'entonnoir,  qui  aboutit  à  une  caverne  profonde,  ou- 
verte en  arcade. 

L'aspect  de  la  source  varie  beaucoup  suivant  Tabondance 
des  eaux.  Lorsqu'elles  sont  à  leur  maximum,  ce  qui  a  lieu 


*  Gras.  Deêeripiion  géologique  du  département  de  Vaucluêe,  p.  28. 

*  L'élymologis  de  Yaucluse  est  probablemeot  vallie  clama,  yaliée  close. 


9S0  ROLE  DES  CAVKRNES. 

au  printemps,  époque  de  la  fonta  des  neig^,  ia  voûte  de  la 


¥ig.  lii).  —  Vue  de  l'e^caiiii'TDeDL  cakaiie  au  pii:d  duquel  sorL  la  Fou  Ut  me  de  Vauclu^ 

caverne  est  cachée»  et  une  nappe  d'eau  tranquille  remplit 


I 


b 


à 


ESFLUENGE  SUR  LE  RËOlHfi  DES  EAUX.  3Si 

le  bassin  jusqu'à  son  orifice.  Au  mois  d'octobre,  ati  contraire, 
lorsque  les  eaux  sont  à  leur  minimum  de  hauteur,  la  voûle 
de  l'antre  apparaît  tout  entière  et  laisse  voir  un  lac  dont 
rétendue  se  perd  dans  une  profonde  obscurité.  On  peut  des- 
cendre, en  prenant  des  précautions,  le  long  de  l'entonnoir 
et  arriver  jusqu'à  la  surface  de  cette  nappe  d'eau  limpide,  qui 
remplit  un  abime  dont  on  n'a  pu  jusqu'à  présent  mesurer  là 
profondeur.  La  source  en  sortant  n'est  pas  bouillonnante, 
comme  on  pourrait  le  croire  ;  rien  n'altère  le  calme  parfait 
ni  la  transparence  cristalline  de  sa  surface.  Son  trop-plein, 
lorsqu'il  ne  surmonte  pas  les  bords  du  bassin,  s'échappe 
par  les  nombreuses  fissures  du  roc  calcaire.  Il  en  résulte,  à 
quelques  mètres  de  là,  vingt  ruisseaux  bruyants  qui  tombent 
en  cascade  (fig.  141)  et  produisent  des  flots  d'écume  en  se 
brisant  sur  les  rochers.  Une  autre  source  remarquable,  celle 
du  Grozeau,  analogue  à  la  Fontaine  de  Vaucluse,  sort  éga- 
lement du  pied  du  massif  calcaire. 

Suivant  l'intéressante  étude  qu'en  a  faite  M.  Bouvier  S  pour 
arriver  à  la  fontaine,  on  pénètre  par  une  ouverture  unique, 
dans  le  cirque  où  elle  prend  naissance  et  que  dominent,  dQ 
tous  les  autres  côtés,  de  hautes  falaises  calcaires.  Cette  masse 
liquide  dont  la  fraîcheur,  l'abondance  et  la  limpidité  cont 
trastent  avecTaridité  et  la  sauvagerie  du  paysage,  atteint  un. 
volume  de  120  mètres  cubes  par  seconde  :  elle  gagne  bientôt 
le  seuil  de  rocher§qui  lui  sert  de  déversoir  et  en  tombe  sous 
;forme  de  cascade  (fig.  142), 

Le  cours  de  la  Sorgue  commence  au  pied  de  cette  cascade. 
£lle  se  divise  aloi^s  en  une  multitude  de  bras,  jusqu'à  ceque^ 
après  avoir  mis  en  mouvement  plus  de  200  usines  et  avoir 
irrigué  plus  de  2000  hectares,  elle  vienne  se  mêler  au  cours 
du  Rhône,  aux  environs  de  Sorgucs  et  d'Avignon* 

*  Antociation  françaiie  pour  Vavancement  des  sciences^  Uontpellier,  1879* 

SI 


322  ROLE  DES  CAVERNES. 

Lorsque  les  pluies  ont  été  rares  dans  la  région,  le  débit 


diminue  successivement,  et  dès  qu'il  descend  au-dessous  de 


INFLUENCE  SUR  LE  RÉGINE  DES  EAUX. 


325 


22  mètres,  le  niveau  de  la  source  cesse  d'atteindre  le  seuil 
de  son  déversoir;  la  cascade  cesse  en  même  temps  d'être  ali- 
mentée, et  les  eaux,  abandonnant  bientôt  la  cavité  extérieure, 
se  retirent  dans  une  grotte  qui  lui  fait  suite. et  qui  est  creusée 
dans  la  falaise.  Si  la  sécheresse  persiste,  la  baisse  continue 
et  on  arrive  enfin  à  n*avoir  plus  devant  les  yeux  qu'une  petite 
nappe  liquide,  contenue  tout  entière  dans  une  espèce  d'en- 


Fig.  142.  —  Plan  correspondant  à  une  section  placée  près  du  sommet  de  la  grotte  de  la  Fontaine 
de  Vaucluse.  Échelle  approximative  de  0,0003  par  mètre.  —  D'après  M.  Bouvier. 

tonnoir,  dont  le  diamètre  supérieur  et  la  profondeur  ne 
dépassent  guère  10  à  12  mètres. 

Lorsqu'il  en  est  ainsi,  la  limpidité  de  l'eau  permet-  de  dis- 
tinguer nettement  tous  les  contours  de  cet  entonnoir  et  d'a- 
percevoir dans  le  fond,  à  l'est  de  la  paroi,  une  sombre  ouver- 
ture qui  forme  l'issue  de  la  galerie  d'amenée  des  eaux.  Cette 
situation  extrême  ne  se  produit  qu'assez  rarement,  et  à  k 
suite  de  grande»  sécheresses. 

Le  zéro  de  l'échelle  de  la  Sorgue  correspond  àl'abaissement 
considérable,  signalé  le  17  novembre  1869. 


5S4  ROLE  DES  CAVERNES. 

En  dehors  de  ces  faits  exceptionnels,  le  niveau  de  la  fon- 
taine subit  régulièrement,  chaque  année,  une  dépression 
assez  sensible  ;  la  cascade  est  à  sec  et  les  sources  qui  surgis- 
sent à  son  pied  alimentent  seules  la  Sorgue.  Le  débit  est 
cependant  encore  considérable  dans  les  cas  extrêmes,  comme 
en  1869;  il  ne  descend  pas  au-dessous  de  5°^,  500  par  seconde, 
et  il  n*est  pas  inférieur,  en  étiage  ordinaire,  à  8  mètres 
cubes. 

D'ailleurs  par  la  limpidité  à  peu  près  constante  de  ses 
eaux,  par  Tuniformité  et  la  fraîcheur  de  leur  température, 
qui  se  maintient  toujours  entre  12*  et  14%  la  fontaine  est 
naturellement  très  poissonneuse,  et  les  espèces  les  plus  esti- 
mées, la  truite,  l'anguille,  s'y  développent  à  plaisir  avec  Té- 
crevisse,  en  acquérant  une  chair  exquise.  Aussi  paraît-il 
que,  dès  les  temps  les  plus  reculés,  la  Fontaine  de  Yaucluse, 
a  été  considérée,  suivant  la  coutume  païenne,  comme  une 
divinité  bienfaisante. 

Pendant  longtemps,  la  question  de  Torigine  de  ces  eaux 
est  restée  irrésolue.  On  l'a  attribuée  d'abord  à  l'échappement 
d'un  lac  lointain.  L'idée  d'une  dérivation  souterraine  de  la 
Durance  pouvait  paraître  plus  plausible. 

L'explication  du  phénomène  a  été  donnée  en  1855  par  un 
ancien  ingénieur  en  chef  de  Yaucluse,  M.  Bouvier,  parent 
et  l'un  des  prédécesseurs  de  l'auteur  que  nous  venons  de 
citer. 

c  Le  terrain  néocomien  qui  circonscrit  le  mont  Ventoux, 
dit-il,  se  continue  au  sud  et  à  l'est  de  cette  montagne  et  occupe 
un  espace  très  considérable,  qui  s'étend  de  la  Fontaine  de 
Yaucluse  à  Sisteron,  c'est-à^lire  règne  sur  70  kilomètres  de 
longueur  et  dont  la  largeur  varie  entre  26  et  5  kilomètres. 
C'est  là,  à  mon  avis,  le  bassin  de  la  Fontaine  de  Yaucluse  et 
j'ai  été  conduite  l'admettre  en  reconnaissant  qu'on  ne  trouve, 
ni  sources,  ni  puits,  sur  toute  cette  étendue  ;  que,  comme 


INFLUENCE  SUR  LE  RÉGIME  DES  FAUX. 


525 


pour  le  Yentoux,  les  ravins  y  sont  constamment  à  sec,  si  ce 
n*est  dans  des  cas  tout  à  fait  exceptionnels;  que  les  eaux  de 


pluies,  alors  même  qu'elles  tombent  sur  des  cônes  renversée, 
sont  immédiateniçnt  absorbées,  et  que  les  quelques  villages 


r,2G  ROLE  DES  CAVERNES. 

qui  sont  bâtis  sur  cette  espèce  de  désert  ue  sont  alimentés 
que  par  des  eaux  de  citernes.  Gela  admis,  le  bassin  de  la 
Fontaine  se  trouve  naturellement  circonscrit  par  les  limites 
du  terrain  néocomien,  et  par  le  ravin  très  profond  de  la 
Nesque,  qui  le  sépare  du  mont  Ventoux  (fig.  145).  J'ai  me- 
suré très  exactement  cette  surface  sur  la  carte  géologique, 
et  j'ai  trouvé  qu'elle  est  de  96  500  hectares.  C'est  un  plateau 
élevé  où  les  eaux  doivent  être  plus  abondantes  que  dans  la 
plaine  :  je  prendrai  0",85  pour  le  chiffre  de  la  hauteur 
d'eau  qui  y  tombe  annuellement.  Le  volume  total  est  donc 
de  850  250  000  mètres  cubes;  en  divisant  ce  chiffre  par 
31531000,  nombre  de  secondes  dans  l'année,  je  trouve 
pour  le  débit  moyen  des  sources  alimentées  par  le  bassin 
26  mètres  cubes,  volume  qui  satisfait  évidemment,  soit  au 
débit  de  la  Fontaine  de  Vaucluse,  soit  aux  pertes  qui  peuvent 
résulter  de  l'évaporation  ou  des  écoulements,  dont  il  est 
impossible  de  tenir  compte.  > 

Les  observations  de  la  Commission  météorologique  de  Vau- 
cluse ont  pleinement  confirmé  cette  explication  *.  Elle  a 
installé,  en  effet,  sur  le  plateau  dont  il  s'agit,  plusieui-s 
stations  pluviométriques,  placées  à  des  altitudes  différentes 
et  à  des  distances  de  plus  en  plus  grandes  de  la  Fontaine.  Les 
indications  qui  y  ont  été  recueillies,  de  1874  à  1885,  gra- 
phiquement représentées  au-dessus  des  hauteui*s  correspon- 
dantes de  la  courbe  des  débits  de  la  source,  ont  permis  de 
voir  avec  quelle  régularité  et  avec  quelle  rapidité  les  varia- 
tions de  la  pluie,  à  chacune  de  ces  stations,  se  transmettent 
à  la  courbe  des  débits  de  la  source  (fig.  144  et  145)'.  Un 


'  Voir  les  Comptes  rendus  annuels  de  cette  commission. 

»  Ces  ligures  permettent  encore  de  constater  qu'avec  les  eaux  basses,  des 
pluies  d'une  certaine  importance  ont  pu  se  produire  dans  le  bassin  de  réception, 
sans  déterminer  de  surélévation  dans  a  courbe  des  débits  et  sans  même  arrêter  sa 
décroissance;  c'est  ce  qui  a  eu  lieu  notamment  en  1878,  entre  les  5  et  10  janvier; 


mFLUENGE  SUR  LE  RÉGIME  DES  EAUX. 


327 


intervalle  de  24  heures  ou  de  48  heures  au  plus,  suivant 
réloigncment,  suffit  à  cette  transmission  qui,  sauf  un  léger 


fléC(«a)j<WOnO     PJV.       MâB6      AVRIL       mai  JUJN      JUILLET  AOÛT       SEPT.      OCT.        NOV 


NAUmUS 


xiECt»7)jfti«v(iai}  rev      mars    avril     mai      ,'U1N     juillet   août      sept,     oct 


Fig.  144.  —  Tableau  graphique  des  obserralions  sur  le  régime  de  la  Fontaine  de  Vaucluse  com- 
paré au  régime  des  pluies  en  des  points  de  la  surraco  du  sol  où  elle  s'alimente,  pendant 
Tannée  1877-78.  L'échelle  des  débits  par  seconde  de  la  Sorgue  est  de  ^  millimètre  par  mètre 
cube;  les  hauteurs  da  pluie  sont  représentées  au^  de  grandeur. 

ralentissement  dû  aux  difficultés  de  la  circulation  souter- 
raine, s'opère  avec  la  même  ponctualité  que  s'il  s'agissait 


1"  et  5  août  et  le  15  août.  Il  parait  difficile  d'en  trouver  Texplication  autrement  que 
dans  rbypothëse  de  vastes  réservoirs  souterrains,  où  les  eaux  de  pluies  trouvent  facile- 
ment h  s'emmagasiner,  lorsque  le  niveau  est  bas,  sans  que  les  écoulements  en  soient 
influencés  d'une  manière  immédiate  et  apparente.  L'existence  de  ces  mêmes  réser- 
voirs semble  également  pouvoir  seule  expliquer  comment  il  se  fait  qu'après  une 
absence  absolue  de  pluie,  pendant  tout  le  mois  de  septembre  et  les  premiers  jours 
d'octobre,  la  fontaine  n'ait  cessé  d'écouler  un  volume  de  7  mètres  cubes  par  seconde, 
qui  est  resté  constant  jusqu'à  ce  que  des  pluies  abondantes  soient  survenues  et  Taient 
fait  rapidement  augmenter. 


398  ROLE  DiDS  CAVKHNKS. 

d'un  bassin  ordinaire  et  d'un  cours  d'eau  à  ciel  ouvert.  Il 
n'est  donc  pas  douteux  que  ce  plateau,  où  les  eaux  de  pluies 
s'infiltrent  presque  instantanément,  ne  forme  le  bassin  ali- 


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UARt       AVRIL  HAI.         4UIN  JUUlT  A061.        tlP.  OCT. 


Fig.  145.  —  Tableau  graphique  des  observations  sous  le  régime  de  la  Fontaine  de  Vaucl»»'. 
comparé  au  régime  des  pluies  en  des  points  de  la  surface  du  sol  où  elle  s'alimente,  pendant 
l'année  1880-^1.  L'échelle  des  débits  par  seconde  de  la  Sorgue  est  de  {  millimètre  par  mMre 
cube  ;  les  hauteurs  de  pluie  sont  représentées  au  ^  de  grandeur. 


mentaire  de  la  Fontaine,  et  la  seule  difficulté  est  d'en  déter- 
miner les  limites  précises. 

On  sait  que  le  calcaire  néocomien  est  formé  de  couches 
puissantes,  traversées  par  des  fissures,  des  crevasses,  des 
conduites  en  forme  de  tuyaux  irréguliers  et  des  cavernes  qui 
communiquent  les  unes  avec  les  autres  et  dont  l'allure  est 


INFLUENGK  SUR  LE  IIÉGDIË  DES  EAUX.  3'i!l 

indépendante  de  la  stratification,  comme  il  arrive  dans 
beaucoup  de  départements  du  sud  de  la  France. 

Le  terrain  néocomien  s'étend  en  masses  puissantes  depuis 
Sisteron,  à  l'est,  jusqu'à  la  plaine  du  Comtat.  Il  repose  au  nord 
sur  les  assises  compactes  du  calcaire  oxfordien,;  il  est  déli- 
mité de  ce  côté  par  la  vallée  profonde  du  Thoulourenc,  sur 
le  versant  gauche  de  laquelle,  à  une  grande  hauteur,  appa- 
raissent les  assises  marneuses  qui  forment  la  couche  infé- 
rieure du  néocomien  et  dont  l'imperméabilité  s'oppose  à 
l'écoulement  des  eaux  souterraines.  Au  sud,  la  rive  droite  de 
la  Durance,  où  apparaissent  successivement  les  assises  com- 
pactes de  l'oxfordien,  les  couches  marneuses  du  néocomien 
et  les  dépôts  tertiaires,  lui  sert  de  limite.  Enfin,  à  l'ouest, 
il  est  recouvert  à  son  pied  par  des  dépôts  tertiaires  qui  vont 
rejoindre  la  plaine  du  Comtat.  Il  forme  donc  un  vaste 
triangle,  ayant  son  sommet  à  Sisieron,  ses  côtés  sur  les  ver- 
sants rive  gauche  et  rive  droite  du  Thoulourenc  et  de  la 
Durance,  sa  base  sur  la  ligne  supérieure  des  dépôts  tertiaires 
de  la  plaine. 

Entre  ces  limites  est  concentrée  une  puissante  masse 
néocomienne,  fissurée  et  crevassée  dans  tous  les  sens,  et 
toute  disposée  pour  recevoir,  dans  de  vastes  cavités  souter- 
raines, les  eaux  de  pluies  qui  tombent  à  sa  surface.  Elle 
repose  sur  un  fond  d'assises  marneuses  imperméables,  et  elle 
est  bordée  de  toutes  parts  de  terrains  également  imper- 
méables. Il  est  évident  dès  lors  que  les  eaux  de  pluies 
doivent  s'y  réfugier  et  s'y  emmagasiner  jusqu'à  ce  qu'elles 
puissent  trouver  une  issue  par  le  point  le  plus  bas  de  la  cein- 
ture qui  les  renferme.  Ce  point  bas,  c'est  la  Fontaine  de  Vau- 
cluse  et  on  conçoit  que,  dans  de  pareilles  conditions,  cette 
fontaine,  tout  en  étant  soumise  aux  variations  de  la  pluie 
sur  la  surface  du  bassin  alimentaire,  reste  toujours  large- 
ment alimentée  et  qu'elle  conserve  sa  limpidité. 


530  ROLE  DES  CAVERNES. 

Qu'on  imagine  une  vaste  éponge,  pourvue  de  larges  et 
nombreuses  cellules,  posée  sur  un  fond  imperméable  et  en- 
tourée d'un  mastic  également  imperméable,  qui  s'élève  tout 
autour  d'elle  à  une  grande  hauteur,  et  dont  l'arête  ne  s'abaisse 
que  sur  un  seul  point;  qu'on  suppose  ensuite  qu'on  verse  de 
l'eau  d'une  manière  discontinue  sur  cette  éponge,  et  on  aura 
la  représentation  de  ce  qui  se  passe  dans  le  bassin  de  la  Fon- 
taine. L'éponge  commence  par  s'humecter;  puis  le  fond  du 
bassin  se  remplit  jusqu'au  niveau  du  point  bas;  ensuite  un 
écoulement  constant  s'effectue  par  ce  point;  il  variera  sans 
doute  avec  la  quantité  d'eau  versée,  mais  il  subsistera  pendant 
longtemps,  quoique  le  versement  de  l'eau  ait  cessé,  et  l'in- 
troduction d'eaux  troubles  pourra  ne  pas  altérer  sa  limpidité. 

Ce  bassin  occupe  une  surface  totale  de  165000  hectares. 
Comparée  à  la  hauteur  moyenne  des  pluies  constatées  aux 
stations  météorologiques,  laquelle  a  été  de  0",55,  de  1874 
à  1878,  et  au  débit  moyen  delà  Fontaine  de  Yaucluse,  lequel 
a  été  de  17  mètres  cubes  pendant  la  même  période,  elle  fait 
ressortir  un  volume  d'inliltrations  souterraines  qui  repré- 
sente 60  pour  100  de  la  hauteur  d'eau  tombée. 

La  surface  du  calcaire  néocomien  est  criblée  de  puits  na- 
turels, abîmes  souvent  insondables,  qu'on  désigne  tantôt 
sous  le  nom  de  «  tindouls  >  tantôt  sous  celui  «  d'avens  >. 
C'est  cette  dernière  dénomination  qui  a  prévalu  dans  le  Yau- 
cluse, et  les  avens,  dont  beaucoup  ont  des  noms  connus, 
jouent  un  rôle  important  dans  les  histoires  et  les  légendes 
locales. 

Parmi  les  plus  remarquables,  est  celui  de  la  Cruis  (fig.  143) 
situé  près  du  village  de  ce  nom,  arrondissement  de  Forcal- 
quier,  dont  le  diamètre  à  la  surface  atteint  33  mètres. 
D'après  M.  Vial,  l'aven  du  Toumple,  qui  est  situé  à  1  kilo- 
mètre et  demi  au  nord-ouest  du  château  de  Javon,  et  dont 
l'ouverture  est  rectangulaire,  mesure  1  mètre  sur  4  mètres  : 


INFLUENCE  SUR  LE  RÉGIME  DES  EAUX.  354 

sa  profondeur  dépasse  95  mètres.  L'aven  du  Grand-Gérin, 
qui  est  situé  dans  le  voisinage  de  la  Devandoure,  dans  un 
ravin  aboutissant  à  la  combe  Malavard,  présente  la  particu- 
larité de  deux  ouvertures  jumelles,  séparées  d'abord  par  un 
rocher  sur  JO  mètres  de  profondeur,  et  n'en  formant  qu'une 
ensuite  ;  la  sonde  a  pu  y  descendre  aussi  jusqu'à  95  mètres. 
Enfin,  pour  l'aven  de  Jean-Nouveau,  qui  est  situé  à  2  kilo- 
mètres au  sud-ouest  de  Sault,  la  sonde  v  est  descendue  à 
180  mètres;  son  orifice  a  la  forme  d'un  entonnoir,  dont  le 
diamètre  d'abord  de  10  mètres,  n'est  plus  que  de  2", 50  à 
5  mètres  de  profondeur. 

Le  nombre  des  avens  qui  apparaissent  à  la  surface  est 
considérable;  mais  il  en  existe  encore  beaucoup  qui  sont 
invisibles,  soil  qu'ils  aient  été  fermés  naturellement, ^sous 
l'action  des  apports  charriés  par  les  eaux  de  pluies,  soit 
qu'ils  aient  été  bouchés  par  les  habitants. 

Le  22  mars  1878,  à  la  suite  d'une  sécheresse  a  peu  près 
absolue,  qui  avait  régné  depuis  le  commencement  de  dé- 
cembre, le  niveau  de  la  fontaine  était  descendu  à  la  cote 
0",56  du  sorguomètre;  dans  un  sol  aussi  facile  à  traverser, 
toutes  les  infiltrations  avaient  certainement  disparu,  et 
l'alimentation  ne  se  faisait  plus  qu'au  moyen  des  réserves 
souterraines.  Cependant,  jusqu'au  28  mars,  c'est-à-dire 
pendant  sept  jours  consécutifs,  le  débit  s'est  uniformément 
maintenu  à  6'"%10  par  seconde,  tandis  que  le  niveau  ne 
s'est  abaissé  que  de  0",1I;  l'écoulement  total  a  donc  été  de 
5689280  mètres  cubes  pour  un  abaissement  de  0°,11 
dans  les  nappes  alimentaires,  d'où  Ton  est  amené  à  conclure 
que  la  surface  de  ces  nappes  était  au  moins  égale,  à  ce 

,5689280       ^,.^^  ^  ,       . 

moment,  a — rppj —  =  o3o0  hectares.  Tout  porte  a  croire, 

et  l'expérience  au  scaphandre,  dont  il  va  être  parlé,  le  dé- 
montre, que  ces  nappes  ont  de  grandes  profondeurs;  on 


55a  ROLK  DKS  CAVERNES. 

peut  juger  par  ]k  de  Fimportance  des  vofumes  d'eau  qui 
restent  enfouis  dans  le  sol  sans  être  utilisés. 

Ces  nappes  sont  probablement  accumulées  dans  le  voisi- 
nage de  la  source  ;  mais  il  en  existe  aussi  à  des  étages  plus 
élevés,  et  on  en  trouve  la  preuve  en  visitant  un  travail  inté- 
ressant, récemment  exécuté  dans  le  voisinage  de  Ferras- 
sières,  au  pied  de  la  montagne  de  Lure,  à  une  altitude  d'en- 
viron 1000  mètres.  Là,  sur  un  sol  aride,  comme  le  sont  tous 


Fig.  U6.  —  Coupe  de  la  Grotte  de  Vaucluse  suivant  la  ligne  A.B.C.D.  du  plan  (tlg.  i«),  d'apri's 
H.  Bouvier.  Elle  montre  aussi  la  position  du  plongeur  qui  l'a  explon^e,  en  1878,  pendant  les 
basses  eaux.  La  corde  de  si^relé  avait  SO  mètres  de  longueur.  —  Échelle  approximative 
0,0025  par  mètre. 

ceux  du  bassin  alimentaire  de  la  Fontaine,  un  propriétaire 
a  eu  l'ingénieuse  idée  de  chercher  à  utiliser  les  eaux  d'une 
couche  aquifère,  dont  l'existence  lui  paraissait  attestée  par 
la  présence  constante  de  l'eau  au  fond  d'un  aven  situé  dans 
son  domaine.  Après  de  laborieux  efforts,  il  est  parvenu 
jusqu'à  cette  couche  par  une  galerie  souterraine,  et  il  a  mis 
au  jour  une  source  précieuse,  dont  le  débit,  en  étiage,  n'est 
pas  moins  de  2000  litres  par  minute. 


INFLUENCE  SUR  L£  RÉGINE  DES  ËADX.  55S 

Pour  étudier  le  régime  souterrain  de  la  fontaine  de  Yau* 
cluse,  M.  Bouvier  profita  des  basses  eaux  de  1878.  L'eau 
était  très  claire,  et  on  distinguait  très  nettement  dans  le 
fond,  creusée  dans  la  paroi  orientale,  l'ouverture  de  la 
galerie  d'amenée  des  eaux  (fig.  146),  on  partie  masquée  par 
un  énorme  bloc  légèrement  incliné  qui  ne  laissait  libre, 
de  chaque  côté,  qu'une  ouverture  en  forme  de  segment  cir- 
culaire. Un  plongeur  intrépide  pénétra  plusieurs  fois  dans 
le  conduit  souterrain  et  fournit  ainsi  les  indications  néces- 
saires pour  dresser  le  profil  approximatif  de  la  galerie. 

vmê.  —  Les  faits  relatifs  aux  sources  ont  été  particulière- 
ment bien  observés  dans  le  département  du  Lot,  par  l'abbé 
Paramelle*.  De  toutes  parts  le  calcaire  renferme  des  bétoires. 
C'est  ainsi  que  tous  les  ruisseaux  du  canton  de  la  Capclle- 
Marival,  qui  se  forment  dans  les  terrains  granitiques  et 
schisteux,  arrivés  au  bourg  de  Thémines,  Théminette  et 
Issendolus,  où  commence  la  formation  calcaire,  se  préci- 
pitent dans  trois  cavernes,  se  réunissent  sous  terre,  reçoi- 
vent un  très  grand  nombre  de  ruisseaux  cachés  et  vont, 
après  un  trajet  de  25  kilomètres,  former,  près  de  Souillac, 
la  source  de  Louysse. 


—  Dans  le  département  de  la  Dordogne  les 
sources  de  Salibourne,  de  Bourdeilles,  du  Toulgou,  et  surtout 
celle  de  Sourzac,  sont  de  véritables  ruisseaux  sortant  de 
plusieurs  des  nombreuses  cavernes  creusées  dans  le  calcaire* 
Quelques  autres  sont  intermittentes. 

!  Pertes  de  l'Iton^  —  L'Ilon  prcnd  SU  souFCC  dans  un 


*  VÂrl  de  découvrir  les  sources ,  2"  édition,  j).  24ti. 
«  Ferray.  Leê  Pertes  de  Vlton,  Évfeui  1883. 


534 


ROLE  DES  CAVERNES. 


endroit  voisin  de  celle  de  FAvre,  à  Rouxou  (Orne)  à  une  alti- 
tude de  280  mètres,  entre  dans  le  département  de  TEure  à 
Chaise-Dieu  du  Theil,  arrive  à  Villalet,  où  il  se  perd  dans 
les  périodes  sèches,  passe  à  Evreux,  et  va  se  jeter  dans 
l'Eure  à  Acquigny,  après  un  parcours  de  88  kilomètres, 
dans  le  seul  département  de  l'Eure. 

Sur   la  rive  droite  se   rencontre  l'étage  cénomanien  et 
sur  la  rive  opposée  l'étage  sénonien;  d'un  côté  craie  blanche, 


KILO  M  C  TRCa 


Fig.  Ii7.  —  Courbe  du  débit  de  l'Ilon  à  partir  de  son  entrée  dans  le  département  de  TEwre, 
montrant  les  pertes  qu'il  y  subit,  d'après  M.  Ferra  y.  —  Échelle  des  disUnces  horison- 
lales  nroi-ôOT. 


de  l'autre  craie  chloritée.  Ainsi  que  Guettard  l'avait  déjà 
signalé,  en  1758,  Tlton,  à  Villalet,  cesse  de  couler  pendant 
Tété,  et  toute  la  portion  de  son  lit,  depuis  ce  point  jusqu'à 
Gaudreville  et  quelquefois  au  delà,  reste  complètement  à 
sec,  d'où  le  nom  de  Sec-Iton  donné  à  cette  partie  de  la 
rivière. 

La  figure  147  donne  clairement,  sans  qu'il  y  ait  besoin 
d'explications  supplémentaires,  la  courbe  de  débit  de  l'Iton, 
à  partir  de  son  entrée  dans  le  département  de  l'Eure  jusqu'à 


INFLUENCE  SUR  LE  RÉGIME  DES  EAUX.  535 

son  confluent.  On  y  voit  avec  quel  soin  son  régime  a  été 
étudié. 

Guettard  avait  aussi  remarqué  dans  le  lit  de  la  rivière  des 
entonnoirs  ou  bétoires,  dans  lesquels  Teau  s'engouffre.  En 
outre,  il  en  existe  une  série  non  interrompue  dans  la  forêt 
d'Évreux.  Les  uns  et  les  autres  paraissent  former  une  ligne 
presque  droite,  partant  du  moulin  de  Verrières  à  Coulonges 
pour  aboutir  à  la  source  de  la  Fosse-aux-Dames.  L'un  des 
bétoires  les  plus  considérables  mesure  80  mètres  de  diamètre 
et  16  mètres  de  profondeur.  Cet  effondrement  du  toit  du 
canal  souterrain  de  Tlton  indique  que  la  capacité  de  la 
caverne  sous-jacente  n'est  pas  moindre  que  celle  de  ce 
vaste  entonnoir,  soit  de  25  à  30000  mètres  cubes. 

Sur  le  territoire  des  Boscherons,  des  ouvriers,  occupés  à 
ouvrir  une  carrière  pour  l'exploitation  de  la  marne,  ont  mis 
à  jour,  en  1860,  à  une  profondeur  de  18"',70,  un  canal 
large  de  2", 90,  profond  de  1™,75,  creusé  dans  la  craie, 
et  dans  lequel  passe  un  cours  d'eau  dont  la  vitesse  est 
de  6  mètres  à  la  minute,  et  le  débit  de  507  litres  par 
seconde.  Le  plan  d'eau  de  ce  canal  est  à  5",  16  en  contre-bas 
de  l'eau  ordinaire  de  la  rivière  d'Iton  sur  ce  point.  Il  est  à 
noter  que  la  marnière  des  Boscherons  se  trouve  exactement 
sur  la  ligne  de  bétoires  citée  plus  haut,  comme  allant  de 
Coulanges  à  la  Fosse.  Déjà,  en  1857,  M.  Lapeyruque,  con- 
ducteur des  ponts  et  chaussées,  signalait,  à  500  mètres  en 
amont  du  point  précédent,  un  autre  cours  d'eau  souterrain, 
à  plus  de  8  mètres  en  contre-bas  du  plafond  du  lit. 

Le  mode  de  formation  des  bétoires  ressort,  par  exemple, 
de  l'effondrement  observé,  en  mars  1880,  sur  le  même  par- 
cours qui,  sur  le  bord  d'un  chemin  à  flanc  de  coteau,  pro- 
duisit instantanément  un  puits  profond  de  20  mètres,  à 
parois  cylindriques  et  bien  verticales,  de  6  mètres  de  dia- 
mètre. 


556  HOLE  DES  GAYeRNËS. 

Tout  d'abord  le  ciel  de  la  caverne  s'effondre  ;  la  mince 
couche  crétacée  qui  le  surmonte  diminue  peu  à  peu  par  les 
infiltrations,  et  n'a  plus  la  force  de  soutenir  la  masse  de 
sable  avec  silex  qui  le  surmonte.  La  cavité,  d^nbord  cylin- 
drique, devient,  avec  le  temps,  conique. 

Immédiatement  dans  le  voisinage  du  puits,  si  subitement 
ouvert,  sept  ou  huit  entonnoirs,  dans  la  direction  nord, 
c'est  à  dire  en  aval,  se  succèdent  sans  interruption,  sur  une 
distance  de  200  à  300  mètres  environ. 

D'après  Itf.  Ferray,  tout  le  plateau  de  24  kilomètres  qui 
sépare  la  vallée  de  l'Eure  de  celle  de  Tlton,  doit  renfermer 
de  vastes  cavernes,  qui  sontdes  réservoirs  d'eau  où  s'alimen- 
tent les  sources  voisines,  ainsi  que  la  rivière  souterraine  qui 
suit  la  vallée,  et  où  puisent  les  pompes  de  l'établissement  des 
eaux  de  la  ville  d'Evreux.  On  aura  une  idée  de  son  débit  par 
les  500  à  600  litres  à  la  minute  que  fournit  une  seule  galerie 
de  60  mètres  de  longueur. 

Ces  faits  ont  été  constatés  a  l'aide  de  la  fluorescine  versée 
au  Reybrac. 

La  Rille  disparaît  dans  le  canton  de  Beaumont-le-Rogcr 
(Eure),  et,  après  un  certain  parcours,  reparaît  dans  la  même 
vallée.  L'Iton,  qui  s'engouffre  à  Yillalet  (Eure),  va  ressortir  à 
Bonneville. 

Loiret  lirai  A^OriéM».  —  Le  Val  d'Orléaus,  situé  sur  la  rive 
gauche  de  la  Loire,  fournit  un  exemple  remarquable  de  cavi- 
tés souterraines  traversées  par  des  cours  d'eau  :  il  a  été 
récemment  fort  bien  étudié  par  M.  Sainjon,  ingénieur  des 
ponts  et  chaussées  ^ 

A  la  suite  d'un  éboulement  qui  eut  lieu  subitement  en 
juillet  1841,  sur  le  chemin  de  fer  d'Orléans  à  Vierzon,  près- 

^  Comptes  rêndut  de  l* Académie  des  tcienres.  T.  XCI,  p.  !2tJ2.  1880 


IiNFLUHiNCË  SUR  LE  KËGIMii:  DES  EAUX.  537 

que  au  sortir  de  la  première  de  cette  ville,  un  déblai  d'envi- 
ron 1500  mètres  cubes  s'effondra  et  disparut.  Des  travaux 
d'exploration  exécutés  à  cette  occasion,  sur  2  kilomètres  de 
longueur,  amenèrent  la  découverte  de  nombreuses  cavités, 
dont  deux  avaient  6  mètres  de  hauteur. 

C'est  par  une  cavité  de  ce  genre  que  sort  le  Loiret. 

On  sait  que  le  val  d'Orléans  est  sillonné  par  des  courants 
souterrains,  auxquels  sont  directement  empruntées  les  eaux 
qui  alimentent  la  ville  d'Orléans  depuis  l'année  1864.  C'est 
également  à  ces  courants  qu'est  liée  l'existence  des  sources 
fort  connues  du  Loiret  (fig.  148). 

Les  eaux  souterraines  dont  il  s'agit  proviennent  de  la  Loire 
elle-même,  mais  elles  y  rentrent  toutes,  après  un  trajet  rela- 
tivement peu  considérable. 

Le  point  où  commencent  les  premières  pertes  souterraines 
de  la  Loire  est  situé  près  du  hameau  de  Bouteille  (commune 
de  Guilly),  à  41  kilomètres  en  amont  d'Orléans.  Il  ne 
peut  y  avoir  de  doute  à  cet  égard;  car  des  jaugeages  com- 
paratifs faits  avec  le  moulinet  de  Woltmann  ont  accusé 
une  diminution  sensible  à  peu  de  distance  en  aval  de  ce 
point. 

On  peut  également  indiquer  et  même  préciser  le  point  où 
la  rentrée  en  Loire  des  eaux  perdues  s'est  intégralement  effec- 
tuée ;  ce  point  coïncide  avec  l'embouchure  du  JiOiret  (9  kilo- 
mètres en  aval  d'Orléans)  ;  immédiatement  en  aval  de  cette 
embouchure,  on  retrouve  les  mêmes  débits  qu'en  amont  de 
Bouteille,  ainsi  qu'il  résulte  de  nombreux  jaugeages. 

La  restitution  à  la  Loire  des  eaux  qu'elle  a  perdues  n'a  pas 
uniquement  lieu  à  ciel  ouvert  par  le  Loiret;  elle  a  lieu,  en 
outre,  par  des  rentrées  de  fond,  dans  le  lit  même  de  la 
Loire;  mais  ces  rentrées  ne  commencent  qu'auprès  d'Or- 
léans, de  sorte  que  c'est  là  que  le  fleuve  est  réduit  à  son 
minimum  de  débit,  ou,  en  d'autres  termes,  c'est  au  droit 

22 


5Ô8 


UOLK  DtS  CAVEILNES. 


LNFLUIlNCË  sur  le  RÉGIUË  DES  EAUX.  339 

d'Orléans  que  la  somme  de;>  courants  souterrains  du  Val 
atteint  son  débit  maximum. 

La  Loire  a  donc,  entre  Bouteille  et  le  confluent  du  Loiret, 
deux  cours,  l'un  à  ciel  ouvert,  le  long  des  escarpements  qui 
régnent  presque  sans  interruption  sur  la  rive  droite,  l'autre 
à  travers  le  Val  d'Orléans,  et  celui-ci  est  souterrain,  ou  du 
moins,  en  grande  partie  souterrain,  puisqu'une  fraction  seu- 
lement  des  eaux  dérivées  devient  visible  au  Loiret. 

Quant  au  Val  d'Orléans,  il  se  présente  sous  la  forme  d'une 
grande  dépression,  d'une  superficie  de  14400  hectares, 
dont  le  niveau  moyen  est  seulement  de  4  à  5  mètres 
au-dessus  des  plus  basses  eaux  de  la  Loire,  et  il  est  limité 
sur  la  gauche  par  des  coteaux.  C'est  au  pied  de  ces  coteaux 
que  coulent  d'abord  le  petit  ruisseau  du  Dhuy,  puis  le 
Loiret,  qui  n'est  que  la  continuation  du  Dhuy,  mais  du  Dhuy 
brusquement  transformé  par  les  sources  abondantes  prove- 
nant de  la  Loire. 

Cette  configuration  topographique  est  la  conséquence  de 
la  dislocation  qui  accompagne  la  faille  dans  laquelle  s'est 
établi  le  cours  de  la  liOire;  la  Loire  coule  dans  la  branche 
droite,  le  Loiret  dans  la  région  la  plus  accentuée  de  la  bran- 
che gauche,  et  l'ilot  compris  entre  ces  deux  branches  s'est 
affaissé  pour  former  le  Val  d'Orléans. 

Vers  Bouteille,  les  dépôts  lacustres  de  l'étage  miocène 
inférieur,  dont  fait  partie  le  calcaire  de  Beauce,  succèdent 
brusquement  à  l'argile  plastique.  Ces  dépôts  lacustres, 
marnes  et  calcaires,  deviennent  apparents  à  partir  de  Tigy, 
sur  le  versant  des  coteaux  de  la  rive  gauche,  et,  à  partir  de 
Ghâteauneuf,  sur  la  tranche  des  escarpements  de  la  rive 
droite.  Dès  Châteauneuf,  ils  se  montrent  aussi  dans  la  Loire 
et  à  une  profondeur  peu  considérable,  sous  les  sables  et  les 
graviers  ;  ils  émergent  dans  lelitmême  du  fleuve,  depuis  Com* 
bleux  (6  kilomètres  en  amont  d'Orléans)  jusqu*au  confluent 


340  HOLE  DES  CAVERNES. 

du  Loirotet  au  delà.  Eiifiuon  retrouve  également  des  affleure- 
ments de  ce  calcaire  lacustre  dans  presque  toute  rétendue 
du  lit  du  Loiret.  La  présence  de  ces  mêmes  couches  a  été, 
comme  on  doit  s'y  attendre,  constatée  dans  le  Val  d'Orléans. 
Les  sondages  ont  appris  de  plus  qu'il  y  existe  de  nom- 
breuses fissures  et  mômes  des  cavernes. 

Voici  quelques  détails  sur  la  manière  dont  s'effectuent  les 
pertes  et  les  rentrées  d'eau. 

La  où  les  couches  fissurées  affleurent,  au  fond  même  du 
lit,  les  choses  s'expliquent  d'elles-mêmes.  Rien  de  plus 
simple  aussi  partout  où  les  fissures  sont  directement  en 
contact  avec  les  sables  et  graviers.  Mais  le  plus  souvent,  les 
sables  et  les  graviers  sont  séparés  des  couches  fissurées  par 
desdépôts  argileux  ou  argilo-sablonneux,  et  la  communication 
n'est  alors  possible  que  sur  les  points  accidentels  où  ce  toit 
imperméable  a  disparu. 

II  est  probable  d'ailleurs  que  ces  cheminées  de  communi- 
cation correspondent  plutôt  à  des  cavités  ou  cavernes  qu'à 
de  simples  fissures;  car  il  ne  se  passe  guère  d'année  où  Ton 
n'ait  à  signaler  dans  le  lit  de  la  Loire  des  effondrements  par- 
tiels, qui  donnent  lieu  soit  à  des  pertes,  soit  à  des  rentrées 
d'eau,  suivant  la  région  dans  laquelle  ils  se  produisent,  et  ils 
se  présentent  presque  toujours  sous  la  forme  d'entonnoirs 
circulaires  ou  cônes  renversés,  à  talus  réguliers,  par  le  fond 
desquels  le  terrain  meuble  de  la  surface  disparaît  presque 
instantanément;  or  la  rapidité  de  cette  disparition  serait 
incompréhensible  s'il  n'existait  pas  dans  le  calcaire  sous- 
jacent  des  cavités  dans  lesquelles  tout  le  déblai  d'éboule- 
ment  s'est  facilement  logé.  Les  gouffres  qui  s'ouvrent  ainsi 
en  Loire  restent  béants  pendant  quelques  jours;  mais  les 
sables  roulés  par  le  fleuve  finissent  par  les  combler  et  eu 
effacer  la  trace.. 

11  faut  sans  doute  attribuer  ces  effondrements,  moins  à 


INFLUENCE  SUR  LE  RÉGIME  DES  EAUX.  5il 

Taction  du  courant  de  la  ïiOire  qu'à  celle  des  courants  sou- 
terrains, minant  à  la  longue  la  couche  imperméable  qui  les 
isolait  de  l'extérieur.  En  effet,  des  faits  du  même  genre  se 
sont  produits  et  se  produisent  encore  dans  le  Val  d'Orléans, 
et  par  conséquent  en  dehors  de  la  Loire,  par  exemple 
en  4846,  lors  de  la  construction  du  chemin  de  fer  de  Vier- 
zon.  Les  entonnoirs  d'ancienne  date,  aujourd'hui  plus  ou 
moins  comblés,  qui  sont  si  multipliés  sur  le  territoire  des 
communes  de  Saint-Denis  en  Val  et  de  Saint-Jean  le  Blanc, 
n'ont  pas  une  autre  origine. 

C'est  à  cette  catégorie  de  sources  qu'appartient  la  rentrée 
d'eau  connue  sous  le  nom  de  source  du  Loiret,  mais  qui 
n'est  en  réalité  que  la  première  en  amont  des  sources  de  ce 
cours  d'eau.  Cette  source  bouillonne  d'une  façon  très  mar- 
quée lorsque  les  eaux  sont  basses,  circonstance  qui  lui  a 
valu  depuis  longtemps  une  grande  notoriété  (fig.  149). 

C'est  également  à  cette  catégorie  qu'appartient  le  petit 
gouffre  (S^jSO  de  diamètre  seulement)  de  rentrée  d'eau 
qui  s'est  ouvert  dans  la  Loire,  pendant  les  gelées  du  mois  de 
décembre  1871,  à  mi-distance  entre  les  deux  ponts  d'Orléans 
et  tout  près  de  la  rive  gauche  (fig.  150).  Il  avait  12  mètres  de 
profondeur,  et  dans  les  premiers  jours  le  fleuve  était  assez 
bas  pour  que  la  rentrée  d'eau  se  fît  avec  un  bouillonnement 
sensible;  la  transparence  de  la  source  permettait  d'aperce- 
voir très  distinctement  les  roches  calcaires  du  fond,  ainsi 
que  des  couches  d'argile  verte,  à  8  mètres  de  profondeur. 

Ce  gouffre,  qui  a  subsisté  pendant  toute  la  durée  de  la  gelée, 
a  été  comblé  par  la  première  petite  crue  qui  est  survenue  ;  il 
n'est  donc  plus  visible.  Il  en  existe  certainement  à  peu  de 
distance  d'autres,  qui  sont  également  masqués  par  les 
sables;  car  lors  des  froids  exceptionnels  du  mois  de  dé- 
cembre 1880,  non  seulement  cette  région  de  la  rive  gauche 
de  la  Loire  est  restée  constamment  libre  de  glaces,  mais  de 


549  ROLE  DES  CAVKRNES. 

plus  elle  était  couverte  d'abondantes  vapeurs,  indice  évident 


de  la  température  relativement  élevée  et  par  conséquent,  de 
la  provenance  souterraine  de  ses  eaux. 


INFLUENCE  SUR  LE  RÉGIME  DES  EAUX.  543 

Ardeancst  siffay-i* Abbaye  ^  — A  Signy-rAbbaye  une  mani- 
gnifique  source,  le  Gibergeon,  fournit  au  moins  400  litres 
d'eau  par  seconde  (autant  que  les  sources  de  la  Vanne)  et 
fait  mouvoir  toute  une  grande  filature.  Cette  source  sort  du 
calcaire  oolithique,  à  proximité  de  gouffres  qui  traversent 


->i'ii^^i:>.^''^^" 


Fî}r.  150.  —  Coa|ic  d*un  petit  gouffre  observé  en  Loire,  ^  Orléans,  en  décembre  1871, 
à  travers  des  couches  de  calcaire  siliceux,  de  sable  et  d'argile.  Echelle  ^.  D'après  M.  Sainjon. 

la  même  roche  et  qui  absorbent  les  eaux  pluviales.  Le  cal- 
caire oollthique  qui  affleure  dans  le  bas-fonds  de  Signy, 
est  recouvert  sur  les  plateaux  environnants  par  l'argile 
oxfordienne.  On  rencontre  souvent  sur  ces  plateaux  des 
entonnoirs  d'un  plus  ou  moins  grand  diamètre. 

Belglqoe  t  ea virons  de  DiBAiiti  Blcybcre-és-lllonteen.  —  AuX  CU- 

virons  de  Dinant',  à  Bleyberg-ès-Montzen,  il  arrive,  comme 
il  est  fréquent  dans  toutes  les  régions  calcaires,  que  le  sol 
s'enfonce  sur  de  petits  espaces,  et  qu'il  s'y  forme  des  puits 
ou  entonnoirs  naturels  qui  portent  dans  le  pays  le  nom 
A'aiguigeoù. 


*  Weugy,  Géologie  des  Ardennes,  Association  française,  1880. 

*  Voir  pour  plus  de  détails  X Explication  de  la  carte  de  Binant  de   M.   Dupont, 
Druielles  1883. 


r,4i  ROLE  DES  CAVERNES. 

Ces  accidents  sont  dus  a  rexistence  de  longues  cavernes, 
dans  lesquelles  circulent  des  coui-s  d'eau  souterrains,  tels 
entre  autres  que  la  Lesse,  qui  s'engouffre  dans  la  grotle  de 
Han  et  y  suit  un  cours  souterrain  de  plus  de  1100  mètres. 

I/exploilatiori  du  filon  de  plomb  de  Bleyberg-ès-Montzen, 
près  Moresnct,  met  en  évidence  de  très  fortes  infiltrations 
d'eau,  exceptionnellement  considérables,  contre  lesquelles 
la  lutte  est  très  dispendieuse.  La  venue  d'eau  dans  les  mines 
s'est  élevée,  d'après  un  rapport  de  1878*,  à  53  mètres  cubes 
par  minute,  et  elle  a  atteint  parfois  le  chiffre  de  45  mètres 
cubes,  après  de  grandes  pluies  et  des  fontes  de  neiges. 
La  quantité  annuelle  d'eau  épuisée  d'une  profondeur  de 
182  mètres  représente  18  millions  de  mètres  cubes.  La  dé- 
pense d'épuisement  obtenu  avec  une  machine  de  500  che- 
vaux s'est  élevée,  en  1878,  à  500000  francs*.  En  1879 
elles  s'accrurent  au  point  de  ne  pouvoir  être  combattues, 
et  noyèrent  une  partie  de  la  mine.  L'exploitation,  qui  était 
arrivée  à  la  profondeur  de  180  mètres,  dût  être  aban- 
donnée, mais  elle  a  pu  être  reprise. 

Les  calcaires  et  les  dolomies  sont  traversés  par  la  rivière 
la  Gueule,  dont  le  cours  moyen  est  parallèle  à  une  frac- 
ture, et  par  des  aliïuents  qui  suivent  les  lignes  de  jonction 
des  terrains  ou  des  dépressions  provenant  d'arrachements 
latéraux  à  la  déchirure  principale.  Les  eaux  de  pluie,  ainsi 
que  celles  des  rivières,  passant  sur  des  roches  brisées  et 
des  terrains  perméables,  se  perdaient  en  partie  ou  en 
totalité  et  augmentaient  considérablement  les  quantités  à 
épuiser. 

On  a  dû  rendre  imperméable  le  lit  de  tous  ces  cours  d'eau. 
La  rivière  la  Gueule  à  été  canalisée,  sur  une  longueur  de 


*  Industrie  minérale  belge,  page  263. 

*  Devaiix.  Annales  des  Mines  de  Belgique^  t.  XXI. 


LNFLUENCE  SUR  LE  RÉGIME  DES  EAUX.  545 

4000  mètres,  avec  une  section  transversale  de  25  mètres 
carrés.  Des  affluents  ont  été  l'objet  du  même  travail,  sur 
une  longueur  totale  de  plus  de  12  000  mètres.  On  a  rendu 
imperméables  les  lits  de  ces  cours  d'eau,  par  des  revêtements 
en  argile  protégés  par  des  perrés  en  pierres  calcaires. 

Le  détournement  provisoire  de  la  rivière  fit  découvrir, 
dans  le  calcaire  de  l'ancien  lit,  de  véritables  agolina$y 
c'est-à-dire  d'énormes  crevasses  autrefois  remplies  de 
sables  et  d'argiles  bigarrées,  se  dirigeant  normalement  au 
cours  de  l'eau  et  dont  quelques-unes  présentaient  des  dimen- 
sions assez  fortes  pour  permettre  aux  hommes  d'y  pénétrer 
jusqu'à  une  dizaine  de  mètres  de  profondeur. 

HmhÊmm  s  Cantoa  de  NeachAteli  environs  de    Kandersteif.   —   La 

fréquence  des  cavernes  dans  les  couches  calcaires  du  massif 
du  Jura,  sur  une  épaisseur  de  plus  de  500  mètres,  contribue 
pour  beaucoup  au  caractère  vauclusien  que  présentent 
beaucoup  de  sources  de  cette  région  :  telles  que  celles  de 
l'Areuse,  de  l'Orbe,  de  la  Loue,  de  la  Serrières. 

Gomme  exemple,  nous  choisirons  le  canton  de  Neuchàtel, 
qui  a  été  l'objet  de  travaux  approfondis  de  la  part  de  M.  le 
docteur  Jaccard,  à  l'obligeance  duquel  nous  sommes  rede- 
vables de  communications  manuscrites. 

Deux  grandes  sources,  celle  de  l'Areuse  (ou  la  Reuse)  à 
Saint-Sulpice  (altitude  780  mètres)  et  celle  de  la  Noiraigue 
fournissent  à  elles  seules  la  plus  grande  partie  de  l'eau  qui 
s'écoule  par  le  Champ  du  Moulin  et  les  Gorges  vers  le  lac  de 
Neuchàtel  (fig.  151).  En  outre,  un  grand  nombre  de  sources, 
dont  beaucoup  sont  considérables,  jaillissent  dans  la  vallée. 
L'Areuse  coule  sur  la  nappe  phréatique  du  Val-de-Travers, 
dont  elle  éprouve  plus  ou  moins  les  fluctuations.  Les  quatre 
cinquièmes  du  bassin,  sont  constitués  par  le  calcaire  juras- 
sique, essentiellement  caverneux,  dans  lequel  l'eau  pénètre 


m 


nOLE  DKS  CAVEliNES. 


iNFLUEiNGE  SUR  LE  RÉGIME  DES  EAUX.  547 

avec  une  grande  rapidité.  Elle  y  circule  et  en  ressort  non 
moins  rapidement,  puisqu'on  a  vu  le  débit  de  TAreuse  qui 
était  à  Tétiage,  de  1  mètre  cube  par  seconde,  s'élever,  dans 
l'espace  de  trente-six  heures,  à  100  mètres  cubes,  à  la  suite 
de  pluies  abondantes  dans  les  vallées  supérieures. 

Toutefois,  un  certain  nombre  de  sources  échappent  à  ces 
fluctuations  et  sont  même  remarquables  pour  l'invariabilité 
de  leur  débit. 

I/Areuse  reçoit  du  bassin  des  Granges  de  Sainte-Croix  un 
contingent  tout  aussi  capricieux  dans  son  débit;  car  on  l'a 
vu  s'élever,  à  son  passage  à  Buttes,  à  10  mètres  cubes  par 
seconde,  tandis  qu'en  certaines  saisons,  l'eau  disparaît 
dans  les  graviers  et  se  mêle  à  la  nappe  phréatique  du 
Val-de-Travers,  De  même  à  Motiers  et  à  Couvet  s'ouvrent  des 
gorges  profondes  par  lesquelles  débouchent,  de  temps  en 
temps,  des  torrents  furieux,  dont  le  lit  est  à  sec  pendant 
la  plus  grande  partie  de  Tannée. 

La  vallée  des  Ponts*,  situé  à  environ  1000  mètres  d'altitu- 
de, est  un  vrai  type  de  haute  vallée  jurassique  à  fond  tour- 
beux, mais  sans  rivière  qui  s'en  échappe.  Bien  différente 
des  vallées  plus  basses,  du  Val-de-Travers  où  serpente  l'A- 
reuse,  du  Val-de-Ruz  où  coule  leSeyon,  elle  ressemble  aux 
vallées  plus  élevées  de  la  Brévine  et  de  la  Chaux-de-Fonds. 
Les  eaux,  ne  pouvant  s'échapper  de  ces  dépressions  sans 
issues,  se  rassemblent  sur  les  couches  calcaires  horizon- 
tales qui  forment  le  fond  de  la  cuvette  ;  une  couche  d'ar- 
gile, par  son  imperméabilité,  détermine  un  vaste  marais 
qui  envahit  la  vallée  tout  entière  et  la  transforme  en 
tourbière  :  la  tourbe  atteint  en  général  une  épaisseur  de 
6  mètres. 

Mais  l'écoulement  des  eaux,  impossible  au  fond  de  la 

*  P^sor.  Leê  Emposieux  de  la  vç^llée  de*  Ponts,  p.  58, 


548 


ROLE  DKS  CAVERNES. 


vallée,  est  possible  sur  les  bords.  Là  des  couches  calcaires 
se  sont  brisées,  de  telle  sorte  que  les  eaux,  en  atteignant  ce 
niveau,  trouvent  des  issues.  Ces  issues  sont  les  emponeux 
(fig.  152),  vastes  entonnoirs  où  les  eaux  pluviales  se  préci- 


Fig.  15i.  —  Coupe  hypollictique  inontranl  coniincut  les  empasieux  de  U  Vaille  des  Pouls  pa- 
raissent donner  naissance  au  ruisseau  de  la  Noiraigue  (ranton  de  Neuchâlel]  ;  Ka,  calcaire 
astartien;  Kp,  calcaire  ptérocerien;  Ky,  calcaire  Tiri^lien;  l\  purbcckien;  C,  néocomien; 
t,  tourbières.  D'après  Desor. 


pitent  et  où  se  perdent  quelques  petits  cours  d'eau  alimentés 
par  les  faibles  sources  des  pentes  voisines.  Les  emposieux 
sont  rarement  isolés;  ils  forment  des  groupes,  fréquemment 
alignés  suivant  les  failles  qui  traversent  le  pays.  Leur  gran- 
deur est  inégale  :  quelques-uns  n'ont  que  20  mètres  de  dia- 
mètre; d'autres,  non  loin  du  village  des  Ponts,  ont  jusqu'à 


INFLUENCE  SDR  LE  RÉGIME  DES  EAUX.  349 

100  mètres  à  leur  ouverture  supérieure.  La  forme  est  celle 
d'un  entonnoir  ou  d'un  cône  renversé  des  plus  réguliers. 
Au  fond,  on  distingue,  au  milieu  des  hautes  herbes  et  des 
plantes  aquatiques,  dont  l'ombre  et  l'humidité  favorisent  la 
végétation,  l'orifice  par  lequel  l'eau  peut  s'écouler.  Le  groupe 
de  Combe-Varin,  à  l'extrémité  orientale  de  la  vallée  des 
Ponts,  en  fournit  un  exemple  remarquable. 

Voici  les  principales  sources  du  bassin  de  l'Areuse  re- 
connues jusqu'à  ce  jour  :  Rive  gauche  :  source  de  l'Areuse 
(la  Doux);  Saint-Sulpice;  la  Sourde;  Couvet;  Grand-Fon- 
taine; laNoiraigue;  Brot;  Rochefort.  —  Rive  droite  :  sources 
du  Pont-de-l'Areuse;  des  Rayes;  la  Raisse  de  Fleurier;  sour- 
ces du  Pré-Marceau  ;  de  Motiers  ;  du  Champ-du-Moulin  ;  de 
Combe  Garot  ;  de  Frément. 

Le  Doubs,  dont  la  source  est  près  de  Mouthe,  à  la  cote  de 
937  mètres,  est  grossi  à  200  mètres  plus  bas  et  se  transforme 
en  un  lac  profond  et  tranquille  :  le  lac  de  Chaillexon. 
Pendant  les  basses  eaux  de  1870,  M.  Jaccard  a  vu  le  fond 
de  ce  lac  donner  issue  à  une  rivière  distincte,  allant  mêler 
ses  eaux  à  celles  du  courant  principal,  à  une  trentaine  de 
mètres  de  la  source. 

Le  fond  de  la  vallée  est  plus  plat.  Les  emposieux  corres- 
pondent par  conséquent  au  point  où  les  couches  cessent 
d'être  horizontales  pour  s'incliner  ;  en  d'autres  termes,  où 
les  roches  calcaires  du  sous-sol  se  sont  brisées.  Les  eaux  ar- 
rivent ainsi  au  travers  des  calcaires  portlandiens,  sur  la  pre- 
mière couche  imperméable  qui  vient  affleurer  dans  la 
combe  de  Noiraigue,  au  pied  de  l'escarpement  des  Blanches- 
Roches,  de  300  mètres  de  hauteur.  «  Il  existe  donc,  dit 
M.  Desor,  une  liaison  intime  entre  les  marais  et  les  grandes 
et  belles  sources  de  notre  Jura.  Sans  les  marais  de  nos 
hautes  vallées,  nos  rivières  seraient  à  sec  en  été  et  devien- 
draient des  torrents  dévastateurs  dans  la  saison  des  pluies.» 


550  UOLE  DES  CAVEILNES. 

L'eau  qui  s'engouffre  dans  les  emposieux  de  la  vallée  des 
Ponts  va  reparaître  dans  la  vallée  de  l'Areuse,  à  une  alli- 
lude  moindre  de  274  mètres,  pour  former  la  source  de  la 
Noiraigue,  près  du  village  auquel  elle  a  donné  son  nom.  Le 
trajet  qu'elle  parcourt  n'étant  pas  très  long,  elle  n'a  pas  le 
temps  de  s'épurer  complètement;  elle  conserve  encore  en 
partie  sa  nuance  primitive  en  reparaissant  au  pied  des 
rochers  de  la  Clusette  t  c'est  pourquoi  elle  s'appelle  noire 
aiguë  ou  noire  eau. 

Déjà  Saussure  a  appelé  l'attention  sur  rOrbCi  qui,  au  sortir 
du  petit  lac  de  Joux,  se  perd  dans  des  rochers  calcaires^  au 
pied  d'un  escarpement  de  même  nature. 

Non  loin  de  KanderslegS  le  lac  de  Daube,  à  plus  de 
2000  mètres  au-dessus  de  la  mer,  n'a  pas  d'écoulement 
visible,  quoiqu'il  sait  alimenté  par  le  torrent  du  glacÎCTdu 
Laemmeren.Maisà400  mètres  plus  bas  et  à  environ  5  kilo- 
mètres sur  la  Spitalmatt,  entre  Kandensteg  et  la  Gemmi,  il 
existe  plus  de  cinquante  sources  qui  très  probablement 
résultent  d'une  infiltration  du  lac  à  travers  les  calcaires 
très  fendillés  de  la  Gemmi. 

lEMl^  — Dans  la  Baltique,  le  calcaire  et  les  dolomiesen 
couches  horizontales  qui  constituent  l'ile  d'Œsel  contien- 
nent beaucoup  de  cavités,  à  travers  lesquelles  les  ruisseaux 
prennent  un  cours  souterrain,  qui  pour  l'un  d'eux  est  de 
4  kilomètres. 

Ansicterfe.  —  Prcsquc  toutcs  Ics  cavcmes  de  l'Angleterre, 
à  part  quelques-unes  du  Devonshire  et  du  Somersetshire, 
sont  dans  le  calcaire  carbonifère,  et  donnent  lieu  souvent  à 


*  Isclier.  Feuille  géoloaiquc^  n«  XIII. 

*  Ëichwald.  Société  imj)ériale  de  Moscou,  T.  27,  p.  78. 


LNFLUENCE  SUtt  LK  RÉGIME  DES  EAUX.  5jI 

des  pertes  et  à  des  apparitions  subites  de  ruisseaux  et  de 
cours  d'eau.  Celles  de  Inglcborough  et  de  Castleton,  dans  les 
environs  de  Bristol,  s'ouvrent  dans  des  gorges  étroites  où 
sont  engloutis  beaucoup  de  ruisseaux  {swallow  hole$).  C'est 
ainsi  que  dans  le  sud  du  pays  de  Galles,  le  ruisseau  le 
Lwchwr  jaillit  tout  à  coup. 

Irlande ^ — Eu  Irlande,  le  calcaire  carbonifère  aune  épais- 
seur de  800  à  1 000  mètres  ;  sa  portion  moyenne  contient  généra- 
lement des  lits  d'argile  schisteuse  et  n'est  pas  très  aquifère  ; 
mais  les  portions  supérieure  et  inférieure,  qui  consistent 
en  calcaire  pur  avec  des  lits  accidentels  de  silex,  sont  for- 
lemenf  pénétrées  par  les  eaux.  Des  cavernes  et  des  canaux 
souterrains,  a  travers  lesquels  elles  circulent,  se  sont  pro- 
duits dans  diverses  parties  du  pays,  particulièrement  dans 
les  comtés  de  Clare,  de  Limerick,  de  Gallway,  de  Sligo,  de 
Fermanagh  et  de  Donegal. 

L'une  des  plus  remarquables  peut-être  de  ces  rivières 
souterraines  est  celle  qui  transporte  les  eaux  de  Lougli- 
Mask  à  Lough-Corrib,  dans  le  comté  de  Gallway.  Lough-Mask 
est  un  lac  considérable,  ayant  16  kilomètres  de  longueur  du 
nord  au  sud,  qui  reçoit  de  nombreux  cours  d'eau,  tant  du 
district  montagneux  de  l'ouest  que  du  pays  plat  qui  le  borde 
à  Test.  Toutes  les  eaux  ainsi  réunies  passent  par  un  canal 
souterrain  sinueux,  d'environ  4  kilomètres  de  longueur,  et 
aboutissent  à  la  tète  de  Lough-Corrib,  où  elles  jaillissent  en 
une  série  de  magnifiques  sources,  à  la  base  des  escarpements 
de  calcaire  et  au  village  de  Cong. 

Dans  les  comtés  de  Sligo  et  de  Fermanagh,  où  le  calcaire 
carbonifère  occupe  des  plateaux  élevés,  il  y  a  beaucoup 
d'exemples  intéressants  de  rivières  souterraines,  dont  quel- 

<  D'après  une  communication  ro&nuscHte  de  H.  Ed.  llull. 


353  ROLE  DKS  aVERNIilS. 

ques-unes  cependant  ne  donnent  de  Teau  qu'après  de  fortes 
pluies. 

Comme  exemple  de  ces  rivières  souterraines,  celle  qui 
jaillit  au  Marble-Arch,  près  Florence-Court,  est  d'un  intérêt 
spécial  (fig.  153).  L'étage  du  calcaire  supérieur  forme  une 
terrasse,  limitée  par  un  escarpement  à  pic  regardant  l'est, 
dont  la  base  est  constituée  par  les  lits  schisteux  du  groupe 
moyen.  Au-dessus  de  ce  plateau  s'élève  une  colline  formée 
de  millstone^rit  et  des  couches  de  Yoredale  atteignant,  à 
Cuilcagh,  une  altitude  de  650  mètres.  Les  cours  d'eau  qui 


s  0.  c-«cAO»  ^^• 


L9*J8i  msnuM 


Fi{(.  1o3.  —Section  parCuelcagh,  comté  de  Férmana|i^li«  montrant  la  disposition  d'un  courant 
souterrain  à  travers  le  calcaire  carbonifère  supérieur,  qui  alimenlCf  entre  autres  sources 
considérables,  celle  qui  jaillit  en  S,  au  pied  de  l'escarpement  du  Marble  Arcb.  C,,  calcaire 
carbonifère  moyen;  C,,  calcaire  carbonifère  supérieur;  G|,  grès  et  argile  de  Yoredale;  .i„ 
schist  de  YoreUale;  G,,  raillsloncsf;rilt;  0,  orifice  supérieur  du  conduit  souterrain.  <—  D'après 
la  très  obligeante  communication  de  M.  Edward  UuU. 

descendent  les  pentes  de  celte  petite  chaîne  de  collines  cou- 
lent jusqu'au  plateau  de  calcaire,  où  ils  disparaissent  dans 
des  cavités  étroites.  Alors  elles  courent  souterrainement, 
jusqu'à  ce  qu'elles  jaillissent  à  la  base  du  calcaire  supérieur, 
comme  on  le  voit,  par  exemple,  au  Marble  Arch.  Après  une 
pluie  violente,  quand  tous  ces  canaux  souterrains  sont  pleins 
d'eau,  la  ligne  de  sources  se  précipitant  le  long  de  l'escar- 
pement au-dessus  de  la  rive  méridionale  du  Lough-Ernc, 
présente  un  spectacle  remarquable. 

D'après  M.  Kinahan  \  les  cavernes  du  calcaire  carboni- 
fère supérieur,  outre  les  rivières  souterraines  qui  les  traver- 
sent, sont  en  rapport,  à  la  surface  du  sol,  avec  beaucoup  de 

*  Geology  of  Ireland,  p.  325. 


INFLUENCE  SUR  LE  RÉGIME  DES  EAUX.  353 

petits  lacs  sans  issue  apparente,  appelés  blirMl  lakes  ou  du 
nom  celtique  turloughSf  qui  sont  pleins  d'eau  en  hiver  et 
secs  en  été. 

Les  tlugga$^  non  moins  caractéristiques,  sont  associés  aux 
turloughs  et  aux  rivières  souterraines,  et  ils  résultent  de 
Teffondrement  de  portions  de  rochers,  dans  les  cavités  sous- 
jacentes  où  coulent  ces  rivières.  Ou  peut  ainsi  quelquefois 
en  suivre  le  cours.  Les  sluggas  sont  dispersés  irrégulièrement 
sur  une  étendue  considérable,  de  manière  à  faire  supposer 
que  le  sous-sol  est  traversé  par  de  nombreux  cours  d'eau 
souterrains.  Quelques-uns  sont  des  trous  abrupts  très  pro- 
fonds; d'autres  sont  de  faibles  dépressions,  et  quand  l'eau, 
durant  les  averses,  coule  dans  ces  dernières,  elle  déborde 
dans  les  terres  voisines  formant  des  turloughs,  qui  devien- 
nent des  pâturages  pendant  Télé.  Un  slugga  est  ordinaire- 
ment circulaire  et  a  des  parois  verticales. 

Dans  la  vaste  région  calcaire  située  entre  l'embouchure 
du  Shannon  et  la  baie  de  Killala,  les  rivières  et  les  cours 
d'eau  sont  plus  ou  moins  souterrains,  et  les  meilleurs 
exemples  se  voient  aux  environs  de  Gort.  La  rivière  Beagh 
sort  du  Loch-Coster.  Après  avoir  eu,  sur  3  kilomètres,  un 
cours  à  découvert,  elle  s'engouffre  dans  le  calcaire  sous  un 
bourrelet  de  cailloux  ;  mais  sa  course  peut  être  reconnue, 
grâce  à  ses  sluggas,  qui  ont  reçu  différents  noms,  entre  au- 
tres ceux  de  Devil's  punch  bowl,  Black  weir,  etc.,  jusqu'à  la 
caverne  de  Polduagh,  d'où  il  revient  de  nouveau  à  la  surface. 
C'est  alors,  sur  environ  4  kilomètres  et  demi,  une  rivière  à 
ciel  ouvert;  puis  il  s'engouffre  de  nouveau  au  sud-est  de 
Killarten,  reparaît  au  jour  à  l'ouest  du  village,  pour  se 
perdre  et  apparaître  plusieurs  fois,  jusqu'à  ce  qu'enfin  il 
trouve  une  voie  dans  le  Coole-Lough,  qui  s'écoule  à  la  mer 
par  un  canal  souterrain.  Il  serait  facile  de  citer,  dans  la 
même  région,  d'autres  faits  du  même  genre. 

25 


S54  AOLI:;  DES  aVEANtS. 

BspacM^  —  Dans  la  région  de  la  Sierra  de  Gazorla  (pro- 
vence  de  Jaen)  où  prennent  naissance  le  Guadalquivir  el 
la  Segura,  on  observe  au  pied  d'un  escarpement  de  calcaire 
caverneux,  une  très  volumineuse  source  jaillissante.  Elle 
s'élèverait,  d'après  une  mesure  prise  le  15  août  1881,  à 
10  mètres  de  hauteur  verticale,  et  Ton  assure  qu'à  la 
suite  d'hivers  pluvieux,  ses  dimensions  sont  encore  plus 
considérables.  L'origine  de  celte  source  parait  se  rattacher 
aux  puits  absorbants  qui,  sur  plusieurs  kilomètres,  s'éche- 
lonnent le  long  de  la  route  par  laquelle  on  pénètre  dans  la 
vallée  de  la  Segura. 

Le  cours  souterrain  du  Guadiana,  dans  la  province  de  la 
Manche,  est  classique. 

Italie'.  —  Les  Apennins,  de  même  que  la  plupart  des  pays 
calcaires,  absorbent  facilement  les  eaux  et,  par  suite,  don- 
nent lieu  à  des  sources  très  volumineuses  qui  sortent  çà  et 
là  au  fond  des  vallées  et  forment  l'origine  de  cours  d'eau. 
Dans  l'intérieur  de  ces  grands  massifs,  il  s'établit  des  cou- 
rants souterrains  en  sens  divers,  dont  la  direction  corres- 
pond souvent  à  celle  des  eaux  coulant  à  la  surface. 

L'eau  Marcia',  conduite  la  première  fois  à  Rome  par  le 
préteur  Quintus  Marcius,  en  l'an  608  avant  Jésus-Christ,  est 
encore  de  la  première  importance  pour  la  Rome  moderne. 
Ses  sources  dites  Serene  se  trouvent  sur  la  gauche  de 
l'Aniene  supérieur,  à  20  kilomètres  au-dessus  de  Tivoli  et  à 
un  niveau  de  320  mètres  au-dessus  du  niveau  de  la  mer; 


«  D'après  une  communication  manuscrite  de  H.  de  Hadrid  d'Avila. 

*  D'après  une  communicalion  manuscrite  que  je  dois  à  Tobligeance  de  M.  Giordano. 

'  Une  société,  un  peu  avant  i870»  avait  entrepris  de  ramener  ces  eaux  i  Rome. 
L'aqueduc  en  maçonnerie  jusque  auprès  de  Tivoli  peut  débiter  100,000  mètres  cubes 
par  vingt-quatre  heures.  De  Tivolij  à  186  mètres  au-dessus  de  la  mer,  on  siphon  de 
26  kilomètres  et  demi  apporte  l'eau  à  Rome,  sur  la  place  de  la  station,  à  b  cote  de 
60  mètres,  mais  avec  une  force  ascensionnelle  de  80  mètres.  De  là  elle  est  distribuée, 
sans  pression,  aux  différentes  parties  de  la  villei 


INFLUENCE  SUR  LE  RÉGIME  DES  EAUX.  35o 

jaillissant  en  abondance  des  flancs  calcaires  de  la  vallée, 
elles  peuvent  être  considérées  comme  le  drainage  d'une 
partie  de  la  chaîne  de  TÀpennin. 

Les  montagnes  calcaires  de  la  Sabine,  généralement  de 
calcaire  jurassique  et  crétacé,  sont  également  remarquables 
^^r  leur  perméabilité,  et  les  grandes  sources  plus  ou  moins 
constantes  qu'elles  produisent  dans  les  vallées  alimentent 
les  rivières  du  Velino  et  de  la  Neva,  principaux  affluents  du 
Tibre.  Aussi  ce  fleuve,  quoique  peu  considérable  en  lui- 
même,  jouit  d'un  caractère  de  fixité  dans  son  débit,  dont 
le  minimum  en  été  n'est  guère  au-dessous  de  170  mètres 
cubes  par  seconde.  Le  Velino  est  formé  lui-même  par  les 
grandes  sources  sortant  des  flancs  calcaires  des  montagnes 
d'Antvodoco  et  autres  de  la  Sabine  et  atteignant  quelque- 
fois un  débit  total  de  50  mètres  cubes  par  seconde.  Cette 
masse  d'eau  tombe  tout  à  coup  dans  la  Neva,  un  peu  au- 
dessus  de  Terni,  et  forme  la  cascade  dite  délie  Marmore,  à 
cause  des  nombreuses  incrustations  qu'elle  forme  (fig.  154). 
Cette  cascade  magnifique,  de  160  mètres  de  hauteur  totale, 
se  fait  d'abord  à  pic,  puis  en  un  vaste  éventail;  elle  repré- 
sente une  force  motrice  de  50,000  chevaux.  De  plus,  la  Neva, 
très  rapide  sur  plusieurs  kilomètres,  en  pourrait  donner 
encore  au  moins  autant. 

Les  montagnes  de  Tivoli,  également  calcaires,  produisent 
par  leur  drainage  TAniene  (Anis)  ou  Teverone,  confluent  du 
Tibre  à  l'entrée  même  de  Rome.  Son  débit  est  souvent  de 
40  à  50  mètres  cubes,  et  au  minimum  de  15  mètres  cubes 
par  seconde.  En  débouchant  des  montagnes  de  Tivoli  vers  la 
plaine,  cette  rivière  tombe  du  niveau  de  Tivoli  même,  qui 
est  à  200  mètres,  jusqu'à  celui  de  la  plaine  sous-jacente  qui 
est  de  60  au  plus,  en  formant  les  fameuses  carcaterelles  et  les 
cascatelles  (fig.  155), 

On  peut' encore  mentionner»  aux  environs  de  Rome,  les 


ROLE  DES  CAVERNES. 


Fig.  154.  —  Chute  du  Vclino  au-dessus  de  Terni,  dite  ducmde  dellg  Marmore,  donnint  ubc  idée 
du  Toluine  considérable  des  sources  qui  rtlimentenU 


grandes  sources  qui  sortent  du  pied  occidental  de  la  chaîne 


INFLUENCE  SUR  LE  RÉGIME  DES  EAUX.  ^7 

calcaire  des  monts  Lepîni,  sources  débitant  plusieurs  mètres 


eubes  par  seconde  et  qui,  débouchant  dans  les  marais  Pontins, 


358 


ROLK  DKS  CAVERNES. 


alimentent  les  grands  canaux  d'eau  claire  qui  rendent  celto 
basse  région  si  caractéristique  par  son  régime  hydraulique. 

Le  Sarno,  à  40  kilomètres  à  l'est  de  Naples,  mérite  aussi 
d*ètre  cité,  comme  source  rentrant  dans  la  même  catégorie. 

Dans  le  massif  du  mont  Alburno  (province  de  Salerne), 
qui  est  formé  de  calcaire  compact  crétacé,  la  conformation 
du  plateau  explique  Ténorme  volume  d'eau  qui  s'y  engouffre. 
Parmi  les  sources  qui  en  jaillissent,  la  plus  importante  est 


Fig.  153.  —  Grotte  de  Monsumano,  Toscane.  Conpe  longitudinale.  C,  calcaire  grisâtre  Vapporté 
au  lias  inférieur.  —  D'apr6s  M.  Giordano. 


celle  de  la  grotte  de  l'Aviso,  à  1500  mètres  d'Ollati;  elle 
fait  mouvoir  plusieurs  moulins  et  se  jette  dans  la  rivière  de 
la  Fasanelle. 

A  Monsumano,  dans  le  val  de  Nievole,  en  Toscane,  existe 
une  source  d'eau  chaude  saline  etcalcarifère,  assez  semblable 
à  celle  des  thermes  de  Montecatini,  qui  se  trouvent  à  peu  de 
distance  au  S.  0.  Un  petit  établissement  construit  près  de 
cette  source  est  avoisiné  par  une  grotte  naturelle,  qui  sert 
de  tepidarium  humide  pour  les  malades,  et  a  une  tempéra- 
ture d'environ  36  degrés.  Découverte  en  1849  seulement, 
xîette  grotte  (fig.  156  et  157)  est  ouverte  dans  une  crevasse 


U^IFLUENCE  SUR  LE  RËGUIE  DES  EAUX.  559 

OU  faille  des  couches  calcaires  liasiques.  Son  fond  est  infé^ 
rieur  de  5  à  6  mèlres  à  la  vallée  et  on  y  entre  par  un  esca- 
lier. Elle  n'est  praticable  qu'en  été,  à  cause  des  eaux  qui 
l'envahissenl  l'hiver.  La  longueur  de  la  partie  accessible 
est  de  200  mètres  environ,  sur  une  largeur  variable  de  quel- 
ques mètres.  Toutes  les  parois,  ainsi  que  les  aspérités  du 


Fig.  15".  —  Grotte  de  Monsumano,  Toscane.  Coupe  transversale.  Mêmes  lettres  que  pour 
la  fl^re  précédente.  —  D'après  M.  Giordano. 

fond,  sont  tapissées  de  cristaux  de  calcite,  ce  qui  lui  donne 
un  aspect  fort  agréable. 

Il  y  a  lieu  de  mentionner  encore  la  Polla  de  Cadimare, 
source  sous-marine  au  fond  du  golfe  de  la  Spezia,  tout  près 
des  constructions  du  grand  arsenal.  Une  forte  colonne  d'eau 
douce  y  surgit  au  milieu  de  l'eau  salée,  d'une  profondeur 
d'environ  18  mètres,  et  vient  former  à  la  surface  un  cham- 
pignon qui  repousse  les  petits  bateaux.  Il  y  a  encore  d'autres 
sources  analogues,  mais  moins  remarquables,  qui  sont 
alignées  dans  la  direction  N.  0.  à  S.  E.  du  promonloire 


560 


ROLE  DES  CAVERNES. 


limitant  le  golfe  (fig.  158  et  159).  On  avait  fait  jadis  le 
projet  de  l'utiliser  pour  les  besoins  de  l'arsenal,  en  la  cap- 
tant et  en  l'amenant  au-dessus  du  niveau  de  la  mer,  par 
un  gros  tuyau  implanté  dans  le  fond. 
L'origine  de  ces  sources  sous-marines  se  trouve  à  4  kilo- 


Fif .  158.  —  Situation  de  la  source  souterraine  de  Cadiroare  (Polla)  dans  le  golfe  de  la  Speiia. 
FF,  faille  sur  laquelle  sont  ali^niées  plusieurs  sources  et  les  inûltrations  qui  les  alimeoteot, 
notamment  à  San  Benedetto.  —  D'après  une  communication  manuscrite  de  M.  Giordano. 


mètres  1/2  environ,  dans  l'intérieur  des  terres,  près  de  San  Be- 
nedetto. Des  entonnoirs  absorbent  les  eaux  pluviales,  qui  se 
trouvent  sur  l'alignement  d'une  grande  faille  ayant  la  même 
direction  N.  0.  à  S/E.  du  golfe,  et  faisanlbuter  l'éocène  contre 


U^FLUENGE  SDR  LE  RÉGIME  DES  EAUX.  361 

les  calcaires  caverneux  du  trias  et  de  Tinfralias.  Les  sources 
sont  sur  le  prolongement  sous-marin  de  cette  faille;  et, 
comme  les  entonnoirs  absorbants  sont  à  un  niveau  très  élevé, 
environ  200  mèlres  au-dessus  de  la  mer,  on  s'explique  faci- 
lement la  vigueur  du  jaillissement. 
La  grotte  de  Doums-Novas  près  du  chemin  de  Cagliari  à 


nu 


? L 


Echelle  . 
J S ! î L. 


jo  Wl. 


Fig.  199.  —  Coupe  suivant  AB  de  la  figure  précédente,  passant  par  Spragola,  à  proximité  des 
infiltrations  d'eau  qui  alimentent  la  Polla  et  les  autres  sources  sous-marines  du  golfe  de  la 
Spesia.  T,  trias;  R,  infra  has  (rhétien);  L,  lias;  E,  éocène;  FF,  faille.  —D'après  une  commu- 
nication manuscrite  de  M.  Giordano.  * 


Iglesias,  dans  le  sud-ouest  de  la  Sardaigne  (fig.  160),  est  fort 
remarquable  par  sa  longueur,  ainsi  que  par  sa  beauté,  à 
cause  des  stalagmites  qui  forment  des  séries  de  bassins  éçhe-^ 
lonnés.  Les  sources  sortant  des  calcaires  sur  les  schistes  silu- 
riens, dans  la  vallée  de  Barrascuitta,  avec  un  délit  qui  varie 
de  80  à  400  litres  par  seconde,  forment  un  fort  ruisseau  qui 
traverse  ladite  grotte,  à  côté  d'un  chemin  pratiqué  par  les 
voitures,  comme  dans  un  tunnel,  et  qui  sort  au  débouché  de 
la  grotte. 


MorsTie.  —  Le  calcairc  dévonien  des  environs  d*Adamsthal 
et  de  Blansko,  en  Moravie,  non  loin  du  massif  de  syénile,  con- 


302 


POLE  DES  CAVERNES. 


slitue  un  plateau  qui  a  environ  40  kilomètres  de  long  sur 
4  à  6  kilomètres.  Los  eaux  y  descendent  dans  de  nombreux 
gouffres  et  se  perdent  dans  des  cavernes,  pour  suivre  un 
cours  souterrain  à  travers  ce  calcaire.  Ce  cours  souterrain 
des  eaux  est  accusé  à  la  surface  par  une  série  de  dépressions, 


EchsUû 
t J 


ueurs 


sui 


t f i^ 

Fif.  IflO.  —  Coupe  moatraiU  la  stlualion  de  la  source  cl  de  la  frrotle  de  Doum»-?loTas,  dam 
le  S.  0.  de  In  Sardaijcne.  y.  granité;  Is,  schistes  siluriens;  le,  calcaire  silurien.  ~  D'apr«s  une 
comraunicalioo  manuscrite  de  M.  Giordano. 

en  forme  d*entonnoirs,  et  dont  le  célèbre  Mazocha,  non  loin 
de  Blansko,  a  55  mètres  de  profondeur. 

On  peut  citer*  au-dessous  d'Ostrow,  a  une  altitude  supé- 
rieure à  400  mètres,  un  lac  de  plusieurs  kilomètres  de  lon- 
gueur qui,  par  son  écoulement,  alimente  une  rivière. 


■lo  et  Croatie.  —  D*après  M.  V.  Mojsisovics'  ces  carac- 
tères se  retrouvent  dans  la  Bosnie  occidentale  et  la  Croatie 
turque.  Là  aussi  de  vastes  cavités  en  forme  d'auge  {poljé 
dans  la  Turquie  slave)  déterminent  dans  les  roches  des  cours 
d'eau  souterrains. 
11  en  est  de  même  en  Albanie  et  en  Dalmatie. 


Créée'.  —  Au  point  de  vue  qui  nous  occupe,  la  Grèce  offre 
des  exemples  classiques.  Les  calcaires  y  constituent  des 


*  Uartin  Krii.  Geologiêche  Reichêanstait  1883,  p.  253. 

*  ïojsisoTics.  Géologie  du  Katsi,  188U. 

*  Boblaye  et  Virlet.  Géologie  de  la  Morée,  p.  3:;0. 


INFLUKNCE  SUR  LE  RÉGIME  DES  EAUX.  563 

bassins  fermés,  dont  les  eaux,  au  lieu  de  s'écouler  librement, 
comme  dans  les  vallées  ordinaires,  sont  retenues  par  des 
barrages  naturels.  Chacun  de  ces  bassins  fermés  possède  un 
ou  plusieurs  gouffres,  par  lesquels  se  dégorgent  les  lacs  et 
se  perdent  les  eaux  des  torrents;  on  les  désigne  aujourd'hui 
dans  toute  la  Grèce  sous  le  nom  de  kalavolhra;  les  anciens 
les  nommaient  zerelhra  et  chasma.  Ils  sont  situés  en  général 
au  pied  des  montagnes  qui  forment  Tenceinte  des  bassins, 
et  on  reconnaît  toujours,  dans  les  rochers  qui  les  surmon- 
tent, des  fentes  ouvertes,  des  fractures,  et  souvent  beaucoup 
de  désordre  dans  la  stratification.  Lorsque  l'ouverture  se 
présente  au  milieu  de  la  plaine,  comme  à  Kavaros  (Pyrrhicus) 
dans  la  presqu'île  du  Tenare,  et  à  Tripolitsa,  on  ne  la  recon- 
naît en  été  qu'à  un  dépôt  rougcatre  tout  crevassé.  Mais  lors- 
qu'elle est  située  dans  les  rochers,  au  pied  des  montagnes, 
elle  est  souvent  assez  spacieuse  pour  qu'on  puisse  y  pénétrer  : 
tels  sont  les  gouffres  du  lac  Stymphale,  du  lac  Copaïs  dont 
l'assèchement  a  été  l'objet  d'études*,  et  celui  de  Tsipiana 
près  Mantinée,  dans  l'intérieur  duquel  est  construit  un 
moulin,  pour  profiter  de  la  chute  d'eau.  On  y  reconnaît 
des  chambres  à  parois  lisses,  des  couloirs  étroits  et  des  lacs 
qui  sont  une  ressource  pour  les  bergers,  sur  ces  plateaux 
arides. 

De  ces  pertes  d'eau  résultent  de  fortes  sources  nommées 
kephaloiorysij  caractérisées  par  leur  intermittence;  le  fleuve 
sous-marin  de  l'Anavolo,  mentionné  par  Pausanias,  sous  le 
nom  de  Dine,  présente  un  intérêt  spécial.  A  500  ou  400  mètres 
du  rivage,  on  voit,  dans  un  temps  calme,  quoique  la  mer  ait 
de  8  à  10  mètres  de  profondeur,  les  flots  dessiner  de  grands 
arcs  concentriques  autour  d'une  partie  très  bombée,  et  les 
sables  dti  fond  bouillonner  sur  une  étendue  considérable. 

*  Sauvage.  Bull.  Soc.  géologique,  2*  série.  T.  TI,  p.  27. 


564 


ROLE  DES  CàVERNES. 


Le  rivage  présente  des  indices  d'un  efTondrement  de  cayernes, 
correspondant  au  cours  souterrain  du  fleuve.  La  plaine 
d*Ârgos  est  entourée  de  ces  kephalovrjsi,  dont  les  eaux  pro- 
duisent les  marais  pestilentiels  que  la  fable  a  personnifiés 
dans  THydre  de  Lerne. 

cHaié«.  —  La  relation  des  sources  avec  les  cavernes  des 
calcaires  jurassique  et  crétacé,  a  été  également  signalée  en 
Crimée*. 

iu«ért«*.  —  Â  2  kilomètres  de  TÂîn  Djerob,  aux  environs 
de  Zerguin,  se  trouve  une  source  thermale  dite  Âin-el- 
Hammam.  Elle  n'a  pas  d'écoulement  visible  du  dehors.  Son 
bouillon  est  situé  a  17  mètres  environ  au-dessus  de  la  surface 


Echelle 
4- 


T\%,  161.  —  Sources  de  Ain  el  Hammann.  C,  calcaire  tertiaire;  Q,  dépôt  quaternaire. 
D'après  M.  Ville. 

du  soIetTeau  s'écoule  souterrainement,  à  travers  les  fissures 
de  la  roche  crétacée.  On  y  pénètre  par  une  première  exca- 
vation à  ciel  ouvert,  de  10  mètres  de  profondeur  sur  10  mètres 
de  diamètre. 
L'entonnoir  (fig.   161)  communique  avec  une  première 

*  Dubois  de  Uontperreux. 

'  Ville.  Exploration  géologique  du  Dent  Mzab  et  du  Sahara^  p.  207. 


INFLUENCE  SUE  LE  RÉGIME  DES  EàUX.  365 

grotte  souterraine,  en  forme  de  couloir  incliné  de  10  mètres 
de  long,  5  mètres  de  hauteur  yerticale  et  3  mètres  de  large. 
A  la  suite  vient  une  deuxième  grotte  de  7  mètres  de  long, 
2  mètres  de  haut  et  1",50  de  large*  Au  fond  se  trouve  un 
petit  bassin  de  0",30  de  profondeur,  l^.SO  de  long  et  1  mètre 
de  large,  rempli  par  Teau  thermale*  C'est  là  que  se  baignent 
les  femmes.  Ce  bassin  communique  par  une  ouverture, 
qui  a  1  mètre  de  haut  sur  0",80  de  large,  avec  une  troisième 
grotte  souterraine  dans  laquelle  se  prolonge  le  réservoir 
d'eau  thermale  et  où  se  baignent  les  hommes.  L'air  de 
la  grotte  intérieure  a  une  température  de  30*  et  l'eau 
thermale  de  42*. 

La  roche  dans  laquelle  sont  contenues  ces  grottes  est 
tantôt  un  calcaire  gris,  compact,  se  divisant  en  petits 
fragments  irrëguliers,  reliés  par  une  gangue  argileuse  grise; 
tantôt  c'est  une  dolomie  de  couleurs  variées  et  très  géodique. 

sjrie  9  Nahr-ci-Kcb'.  —  Parmi  Ics  sourccs  remarquables 
sortant  de  calcaires  à  cavernes,  on  peut  citer  celle  de  Nahr- 
el-Keb  (rivière  du  chien),  l'ancien  Lycus,  qui  aboutit  à  la  mer 
près  Beyrouth. 

Un  très  fort  volume  d'eau  sort  d'une  grotte  pittoresque 
(fig.  162)  rappelant  tout  à  fait,  d'après  M.  le  duc  deLuynes,  la 
fontaine  de  Yaucluse,  et  dans  laquelle  on  entend  mugir  des 
eaux,  d'où  vient  peut  être  son  nom.  La  source  s'élance  avec 
impétuosité  et  grand  bruit  au  pied  d'un  rocher,  d'une  hauteur 
de  10  à  15  mètres,  où  abondent  des  natices  et  autres  fossiles 
crétacés. 

:    C'est  en  ce  point  que  M.  Louis  Lartet  a  découvert  d'abord 
des  couteaux  de  silex. 

Beaucoup  d'autres  sources  très  fortes  sont  signalées  comme 

*  Duc  de  Luynes.  Voyage  à  la  mer  Morte, 


ù6G  '     ROLE  DES  CAVERNES. 

sortant  de  grottes;  telles  sont  celles,  au  nombre  de  six, 


Fig.  16i.  —  Nahr-el-Keb  (rivière  du  chien),  l'ancien  Lycus.  ^  D'après  M.  le  duc  de  Luyo>>. 

du  Wady  Mousa,  celle  du  Nahr-el-Asi  et   celle  du  Wadv 
Hasbany*. 

ÉiatM-UnU  i  ttentncky  et  tBdlaBa^  —  Les  Cduî  soutcrraines 
des  cavernes  du  Kentucky  et  de  Tlndiana,  ont  leurs  cascades, 
comme  les  rivières  ordinaires,  et  on  peut  y  naviguer  sur  de 
grandes  distances.  D'après  M.  Dana,  on  a  reconnu  plus  de 
100,000  kilomètres  de  chambres  souterraines  dans  le  calcaire 
subcarbonifère  du  Kentucky (shales),  plusieurs  milliersdans 
celui  de  Tlndiana,  et  d'autres,  mais  moins  étendus,  dans  les 
calcaires  siluriens.  Des  rivières  se  perdent  dans  ces  cavernes, 


*  Duc  de  Luynes.  Ouvrapc  préoilé,  p.  155  el  720,  et  Planche  LIX. 
«  Dana.  Manuel  ofGeology,  p,  663-1880. 


INFLUENCE  SUR  LE  RÉGIME  DES  EAUX.  567 

tandis  que  d'autres  orifices  débitent  tout  à  coup  de  grands 
cours  d'eau,  tel  que  le  Lost-River,  dans  le  comté  d'Orange 
(Indiana).  De  nombreux  entonnoirs  {sink^-holes)  près  Saint- 
Louis,  dans  Télat  de  Missouri,  doivent  provenir  d'effondre- 
ments du  toit  des  cavernes,  de  même  que  les  dolines  et 
d'autres  cavités,  dont  il  a  été  précédemment  question. 


CHAPITRE  VI 


EAUX  POUSSÉES  PAR  DES  GAZ  COMPRIMÉS 


Au  lieu  (l*ètre  amenées  au  jour  par  Taction  de  la  graTiic, 
comme  dans  les  exemples  qui  nous  ont  occupés  précédem- 
ment, les  eaux  souterraines  sont  parfois  poussées  par  la  ten- 
sion de  gaz. 

Ce  rôle  est  ordinairement  dévolu  à  l'acide  carbonique,  si 
abondant  dans  les  régions  profondes;  parfois  aussi,  dans  les 
terrains  pétrolifères,  c'est  l'hydrogène  protocarboné,  pou- 
vant être  accompagné  d'autres  carbures  d'hydrogène,  qui 
sert  de  moteur.  Celui-ci  est  plus  rarement  l'azote. 


§    1.    EAUX  POUSSÉES   PAR   l' ACIDE   CARBONIQUE. 


.  4e  HoMNiMd,  Loin.  —  Uu  forage  exécuté  à  Mont- 
rond,  canton  de  Saint-Galmier,  pour  la  recherche  du  ter- 
rain houiller,  a  présenté  des  phénomènes  intéressants, 
au  point  de  vue  des  eaux  souterraines,  et  surtout  des  mou- 


EâUX  poissées  par  L^iClDE  CARBONIQUE. 


569 


aZ5  61 


vements  que  peuvent  leur  faire  subir  les  gaz  qui  y  sont 
associés. 

Après  les  sables  tertiaires  supérieurs  du  Forez,  la  sonde  a 
traversé,  sur  40  ou  50  mètres,  des  marnes  blanches  ou 
vertes  de  l'étage  miocène  inférieur;  puis, 
des  argiles  verdâtrcs  alternant  avec  des 
bancs  arénacés,  qui  ont  été  assimilés  au 
terrain  permien,  mais  que  M.  Gruner 
considère  comme  analogues  aux  schistes 
ardoisiers  anciens  des  environs  de  Saint- 
Galmier. 

Ce  sondage,  d'après  les  nombreux  do- 
cuments que  je  dois  à  l'obligeance  de 
M.  F.   Laur,  a   rencontré  trois  nappes 
principales   :    1**  à  25  mètres  une  eau 
douce  jaillissante;  2*  à  180  mètres  dans 
des  sables  verts,  une  eau  thermale  mi- 
néralisée avec  un  peu  d'acide  carboni- 
que; 3**  à  502  mètres  une  eau  thermale 
également  minéralisée  et  très  chargée 
d'acide  carbonique,  dont  la  proportion 
augmente  avec  la  profondeur.  Des  tubages 
ont  été  introduits  successivement  les  uns 
dans  les  autres,  pour  maintenir  les  parois 
(fig.  165);  leur  diamètre,  et  leur  profon- 
deur sont  indiqués  par  les  chiffres  sui- 
vants :  1*  de  0",410  prenant  pied  à  23  mè- 
tres; 2Me  0"*,360,  id.  à  100  mètres  ;  3"  de 
0",310  id.  à  225  mètres;  4"  de  0",260  id.  à  419  mètres; 
S**  de  0",210  id.  à  473  mètres.  Ce  dernier  aboutit  à  une 
dernière  nappe,  très  chargée  d'acide  carbonique,  qu'amène 
au  jour  un  tube  central  d'un  diamètre  de  0",125. 

Cette  abondance  d'acide  carbonique  rappelle  les  eaux 

t>4 


*18"20 


;  5oa  ■  00 
Bchfille 


100  Hikrta . 


Fig.  165.  —  Coupe  da  sondage 
de  Montrond.  —  D'après 
.M.  P.  Laur. 


370         £AUI  POUSSÉES  PAR  LES  GAZ  COMPRIMÉS. 

bicarbonatées  sodiques  de  Saint-Galmier  et  de  Monlbrison, 
qui  sont  en  rapport  avec  des  masses  basai  tiques^ 

1/ écoulement  normal  a  toujours  eu  lieadaas  V^MK 
annulaire  laissé  par  le  tubage  de  plus  grand  diamëtre^^liil 
plus  bas  niveau.  Ainsi  avant  que  la  source  de  2S  1B||||I 
fût  bétonnée,  Teau  coulait  entre  la  colonne  de  OT^IIpiH 
celle  de  0",360.  Dans  la  colonne  centrale  de  O^iSJli^ 
niveau  d'eau  était  toujours  un  peu  plus  bas  que  ^IHlJM 
espaces  annulaires.  I/eau  se  rapprochait  toujours  de^.yglffe) 
et  sortait  par  le  point  le  plus  bas.  *  '^,  • 

Normalement  les  sources  réunies  de  180  et  de  hO2mèll0gi 
et  dans  les  conditions  d'émergence  qu  on  leur  a  ^t^jfk 
débitaient  576  mètres  cubes  d'eau  par  vingt-quatre  kM|îh 

Le  25  septembre  1881,  on  était  arrivé  à  la  profondeuf  Ûfi 
475  mètres,  quand  il  se  produisit  une  premijère  érup^M 
qui  fut  suivie  d'autres,  dans  les  circonstances  suivMl^ 
(fig.164). 

L'espace  annulaire  de  la  colonne  de  O'^idôO  donira  dm 
un  débit  inusité,  qui  projeta  à  2  mètres  de  hauteur ;de^ 
gerbes  d'une  eau  écumeuse.  Cette  éruption  annulaire^  1sftù^ 
avait  passé  par  un  maximum,  diminua  et  cessa  presque 
totalement.  L'eau  s'abaissa;  les  espaces  annulaires  et  la 
colonne  centrale  de  0"',210  fortement  agitée  faisaient  ea-i 
tendre  un  grand  bruit,  occasionné  par  un  très  fort  d^age-> 
ment  gazeux.  Peu  d'instants  après,  le  liquide  s'éleva. dans 
cette  colonne  centrale,  avec  une  vitesse  de  0",05  par  seconde 
environ,  déborda  assez  tranquillement  au-dessous  de  cq 
tuyau  central;  puis,  après  iO  ou  12  secondes»  s'élança  en 
deux  ou  trois  saccades  ou  pulsations,  sous  forme  d'une  gerbe 
qui  atteignait  35  mètres  de  hauteur.  Le  jaillissement  restait 
a  cette  hauteur  pendant  5  minutes,  puis  commençait 
à  décroître  :  au  bout  de  20  minutes  environ  t éruption 
centrale  était  terminée  et  il  régnait  un  calme  apparent;  le 


EAUX  POUSSÉES  PAR  L'ACIDE  CAHfiœilQlE. 


571 


Fig.  164.  ^  Sondage  de  Monlrond.  Fin  du  Jaillissement  annulaire  et  début  du  Jaillls«enient 
central.  C  colonne  centrale  ayant  0*,21  do  diamètre  ;  j  jaillissement  annulaire  à  sa  fin  ; 
j  jaillissement  central  à  son  début  La  photographie  a  inscrit  losUifTérentes  saccades  S.  S.  S.  S 
du  jet  et  enfln  le  jet  b,  qui  commence  à  devenir  rectiligue.  *^  D'après  M.  F.  Laur. 


572  EAUX  IH)USSÉES  PàR  LES  GAZ  GOMPRMÉS. 

débit  (les  sources,  presque  annulé,  ne  commençait  à  rede- 
venir notable  qu'au  bout  de  cinq  minutes. 

Ce  phénomène  s*est  reproduit  plusieurs  fois;  puis  il  a 
cessé,  pour  reprendre  à  la  profondeur  de  497  mètres,  dans 
une  autre  couche  de  sable  quarlzeux,  toujours  avec  la 
même  durée  de  20  minutes  pour  Téruption  centrale. 

Ainsi,  on  voyait  se  succéder  :  l^une  éruption  annulaire; 
â**  après  cessation  de  ce  débit  annulaire,  une  éruption  cen- 
trale pendant  20  minutes;  3*  après  un  repos  extérieur  de 
5  à  10  minutes,  reprise  du  débit  annulaire  normal. 

La  photographie  a  été  prise  à  la  fin  du  jaillissement 
annulaire  et  au  début  du  jaillissement  central. 

La  figure  165,  prise  en  février  1883,  représente  le  jaillis- 
sement depuis  le  captage,  qui  a  lieu  non  plus  par  le  tube 
de  0™,210,  mais  parle  tube  de  0'",125  allant  jusqu'au  fond. 
11  n'y  a  donc  plus  de  jaillissement  annulaire,  les  autres 
nappes  ayant  été  obturées.  La  cheminée  en  bois  par  laquelle 
il  s'échappe  en  0,  avait  un  mètre  carré.  On  voit  par  les  ruis- 
sellements d'eau  c,  e,  quel  volume  était  débité,  et  par  la  ver- 
ticalité, quelle  puissance  avait  le  jet.  De  gros  morceaux  de 
planche  étaient  lancées  bien  plus  haut  que  l'eau,  jusqu'à 
50  ou  60  mètres  de  hauteur. 

Lors  des  grandes  éruptions,  deux  jets  se  succédaient  à 
10  minutes  d'intervalle  :  le  premier  durait  15  minutes  et  le 
second  20  minutes.  C'étaient  deux  éruptions  jumelles.  Dans 
ce  cas,  beaucoup  de  sable  vert  était  rejeté  sur  le  sol. 

Le  mécanisme  des  éruptions  et  des  intermittences  de 
Montrond  a  pu  être  produit  et  dirigé  expérimentalement 
par  divers  procédés,  dont  les  résultats  ont  été  notés  par 
M.  Laur;  mais  leur  exposition  nous  entraînerait  trop  loin. 

Les  baisses  barométriques  paraissent  avoir  une  influence 
sur  ces  jaillissements*. 

«  Cotupte^  rendtu,  t.  XGYI,  p.  1420,  1883. 


EAlîX  POUSSÉES  PAR  L^ACIDE  CARBONIQUE.  375 

L'acide  carbonique  en  se  séparant,  lorsque  la  colonne 


^H          "-^ 

*'-     ^'^a^    * 

j^^^B^«^Hi'  lliV^^^^^H^ 

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approche  de  la  surface,  sous  forme  de  bulles,  du  liquide 


574         EAOX  POUSSÉES  PAR  LES  GAZ  COMPRIMÉS. 

dans  lequel  il  était  dissous,  le  rend  plus  léger  :  dès  lors  la 
0  E 


Fïg.  166.  —  Ck)upe  transversale  à  travers  les  sprudels  sales  de  Naulieim.  G,  grés  à  spirirer; 
Sch.  schiste  à  orthocères  ;  P.  conglomérat  traversé  par  l'eau  sali^^re  ;  G,  calaire  i  stringo- 
cepbales.Tf  terrain  tertiaire  déposé  irré^^ulièremcnt  sur  les  inégalités  des  couches  dévonicn- 
nes.  Les  traits  forts  expriment  les  eaux  salées  jaillissantes,  soit  les  plans  de  contact  des 
schistes  et  des  calcaires;  soit  en  ramincalions  dans  les  dépôts  tertiaires  superposés;  soit 
enfin  suivant  les  forages.  Le  jailIi^'sement  le  plus  élevé  au-dessus  du  sol  est  la  source  Frie- 
drichwilhelra.  D'après  M.  Ludwig. 

pression  exercée  sur  la  colonne  inférieure  devenant  moin- 
dre, celle-ci  abandonne  elle-même  son  acide  carbonique. 


EAUX  POUSSÉES  PAR  L'ACIDE  CARBONIQUE.  375 

Quant  aux  intermittences  et  à  la  succession  de  l'éruption 
centrale  à  l'éruption  annulaire,  elle  peut  se  concevoir  par 
l'existence  de  vides  intérieurs  formant  réservoir. 

lVa«lieiai,    ¥étéravie    (ancien   dncbé  de  ■cMe-Cnaeel^).   —  LcS 

eaux  gazeuses  et  salées  de  Nauheim  jaillissent  abondamment 
de  couches  dévoniennes  redressées  à  72*  sur  l'horizon 
(fig.  166),  entre  les  schistes  à  orthocères  et  le  calcaire  à 
stringocéphales  qui  lui  est  superposé.  Des  dépôts  tertiaires 
recouvrent,  sur  20  mètres  et  davantage,  ces  couches  an- 
ciennes. 

Divers  vestiges  annoncent  que  ces  eaux  salées  ont  été  ex- 
ploitées à  une  antiquité  très  reculée,  bien  avant  les  Romains 
et  les  Germains.  Plus  tard,  le  désir  d'avoir  des  eaux  plus 
salées  a  fait  entreprendre  des  puits  dont  la  profondeur 
varie  de  5  à  20  mètres,  et  qui  tous  ont  donné  beaucoup 
d'acide  carbonique. 

A  partir  de  1816,  on  a  exécuté  une  série  de  sondages,  dont 
plusieurs,  les  n""  5,  7  et  8  ont  donné  des  eaux  jaillissantes, 
de  véritables  sprudels.  L'un,  partant  de  la  profondeur  de 
159  mètres,  a  jailli  violemment  dans  la  nuit  du  21  au  22  dé- 
cembre 1846  (fig.  167).  Celui  de  la  source  Friedrich  Wilhem 
s'élève  à  12  ou  14  mètres. 

L'ascension  de  l'eau  salée  est  déterminée  par  le  dégage- 
ment de  l'acide  carbonique  que,  sous  la  simple  pression 
atmosphérique,  elle  renferme  à  peu  près  à  égal  volume.  Le 
mécanisme  de  l'ascension  si  rapide  de  l'eau  paraît  être  con- 
forme à  celui  qui  vient  d'être  mentionné  pour  Montrond  et 
rend  compte  également  de  l'influente  de  la  pression  baro- 
métrique sur  le  dégagement. 

Ajoutons  qu'il  s'exhale  du  Taunus  et  de  la  Véteravie  une 

*  Ludwig.  Section  Friedherg^  geologish  hearbeitet^  1855. 


576  EAUX  POUSSËES  PAR  LES  GAZ  œMPRIMÉS. 

quantité  énorme  d*acide  carbonique,  non  seulement  dans  les 


nombreuses  eaux  gazeuses  qu'on  y  connaît,  mais  aussi  à  sec, 
dans  le  voisinage  des  sources. 


EAUX  POUSSÉES  PAR  L'ACIDE  CARBONIQUE.  377 


NeaoMhr  S  PrwM  rhéaMio.  —  Les  riches  exhalaisons  (le  gaz 
de  la  vallée  de  TAhr,  au  pied  de  la  montagne  basaltique 
dite  Neuenahr,  ont  engagé,  depuis  1855,  à  y  faire  des  fo- 
rages. On  était,  pour  Tun  d'eux,  à  la  profondeur  de  90  mè- 
tres, lorsque,  le  5  octobre  1860,  à  9  heures  du  matin,  il  y  eut 
une  violente  éruption  d'eau  qui  projeta  hors  du  puits,  du 
sable,  ainsi  que  des  morceaux  de  grauwacke  et  de  quartz 
de  la  grosseur  d'une  noisette.  Le  phénomène  dura  une 
heure,  puis  cessa  subitement.  Ail  heures,  il  y  eut  une  nou- 
velle éruption  semblable,  et  depuis  lors,  elles  se  sont  re- 
produites avec  une  durée  de  1  heure  et  demie  à  2  heures  et 
des  intervalles  de  repos  de  2  a  5  heures.  On  a  adapté  un  ro- 
binet au  tubage,  afin  d'utiliser  l'acide  carbonique. 


1,  Bavière\ — Dcmêmeque  daus  bcaucoup  d'autres 
localités,  la  présence  de  sources  salées  naturelles  a  conduit 
à  faire  des  sondages  à  Kissingen  pour  la  recherche  du  sel 
gemme.  Le  trias,  c'est-à-dire  le  grès  bigarré,  le  muschelkalk 
et  le  keuper,  constituent  cette  partie  de  la  Basse-Franconie, 
et  vers  le  nord  de  Kissingen  surgissent  les  puissantes  érup- 
tions basaltiques  du  Rhôngebirge.  Le  sondage  le  plus  profond, 
après  avoir  atteint  le  zechstein  {Platten  dolomit)  à  495  mètres 
et  le  sel  gemme  à  507  mètres,  a  pénétré  jusqu'à  584",22  dans 
l'anhydrite.  A  490  mètres,  c'est-à-dire  à  5  mètres  au-dessus 
de  la  plattendolomit,  jaillit  en  abondance  l'acide  carbonique, 
accompagnant  l'eau  salée.  Ce  puits  dit  Schônbornsprudel 
fournit  environ  par  minute  2000  à  6000  litres  de  gaz  associé 
à  300  ou  600  litres  d'eau  salée''. 


,  sfenc.  —  Bien  que  la  plupart  des  volcans  de  boue 


*  Nœggerath.  Jahrbuch  fur  Minéralogie,  1862. 

«  Saodberger,  Jahrbuch  fur  Minéralogie,  1870,  t.  XXXVHI,  p.  642. 

3  D'  BayerleÎD.  Bad  Kiuingen,  1884. 


378         EAUX  POUSSÉES  PAR  LES  GAZ  COMPRllTËS. 

OU  salses  soient  caractérisés,  comme  on  le  verra  au  para- 
graphe suivant,  par  un  dégagement  d'hydrogène  carboné, 
il  en  est  quelques-uns  dans  lesquels  c'est  l'acide  carbonique 
qui  prédomine.  Tel  est  le  volcan  de  boue,  situé  au  pied 
de  l'Etna,  près  de  Paterno  et  nommée  Salinelia.  Le  gaz  qui 
s'ea  dégage  en  grande  abondance  a  été  reconnu  par  Ch. 
Sainte-Claire  Deville,  à  deux  dates  diflerentes,  26  juin  et 
23  juillet  1856,  renfermer  93  à  96  pour  100  d'acide  carbo- 
nique, avec  1  à  4  pour  100  d'azote.  La  salse  est  entrée  en 
éruption  le  22  janvier  1866,  à  la  suite  d'un  tremblement  de 
terre  qui  se  fit  sentir  dans  les  environs  '.  Des  colonnes  de  boue 
à  46  degrés  centigrades,  ayant  40  à  50  centimètres  de  dia- 
mètre, jaillissaient  les  deux  premiers  jours  jusqu'à  hauteur 
d'homme,  accompagnées  de  beaucoup  de  gaz;  l'éruption  se 
faisait  principalement  par  six  cratères  circulaires  de  l'^ySO 
à  2  mètres  de  diamètre  ;  mais  il  y  en  avait,  sur  divers 
points  du  sol,  qui  apparaissaient,  tandis  que  d'autres  dispa- 
raissaient. La  figure  168  représente  une  éruption  de  boue 
salée  pétrolifère,  poussée  parle  gaz,  qui  est  survenue  le  3  dé- 
cembre 1878,  d'après  une  obligeante  communication  de 
M.  le  professeur  Silvestri. 

Selon  ce  savant,  la  salse  de  Paterno  a  présenté  de  nouveau  ^ 
lors  des  éruptions  de  l'Etna,  de.  1879  et  de  janvier  1883,  des 
caractères  d'activité,  d'où  il  a  conclu  qu'elle  est  en  relation 
avec  l'éruption  ignée  du  grand  volcan  son  voisin*. 

De  l'autre  côté  du  fleuve  Simeto  et  tout  à  fait  symétrique- 
ment, près  de  Palagonia,  se  trouve  le  lac  de  Palici  des  anciens 
ou  lago  di  nafiia;  il  s'y  produit  des  dégagements  de  gaz  {hu- 
licami)  composés  principalement  d'acide  carbonique,  avec 
i  à  5  pour  100  d'azote  ou  d'oxj-gène  et  un  peu  de  naphte. 


*  D'après  le  professeur  0.  Silvestri,   Comptes  rendue  de  l'Académie  deê  êciencet^ 
t.  LXIM866,  p.  646. 

*  Sulta  esplosione  dell  Etna^  1884,  p.  51. 


EAUX  POUSSÉES  PAR  L'ACIPE  CARBOMQUE. 


-.79 


d'après  l'examen  qu'en  a  fait  Ch.  Sainte-Claire  Deville,  le 
22  octobre  1855. 


580  EAUX  lH)rSSÉES  PAR  LES  GAZ  COMPRIMÉS, 

Ces  dégagements  d'acide  carbonique  sont  sans  doute  en 
rapport  avec  les  anciennes  éruptions  du  val  di  Noto,  ainsi 
qu'avec  la  source  acidulé  dite  Acqua  rossa,  situéeà  600  mètres 
de  la  salinelle  de  Paterno. 


g    I .    KAUX   P0USS^:ES   PRINCIPALEMEKT   PAU    DES  ,m'1>nOGÈ^ES    CARBONÉS;. 
VOI^CAKS    DE    BOUE,    SALSES. 

Italie  I  Apeaaias  et  Mciie.  —  Reaucoup  de  jcts  d'hydrogèucs 
carbonés  sont  connus  depuis  un  temps  immémorial  dans  la 
baute  Italie,  sous  les  noms  de  Urraim  ardents,  de  fonlahm 
ardentes,  de  volcam  boueux,  de  saUes,  de  salinellesj  suivant 
les  conditions  particulières  de  leurs  gisements. 

Peu  de  contrées  en  Europe  présentent  une  aussi  grande 
abondance  de  dégagements  de  ce  gaz  que  la  région  des 
Apennins  qui  traverse  le  Bolonais,  le  Parmesan  et  le  Modenais, 
et  que  MM.  Fouqué  et  Gorceix  ont  étudiés  sur  beaucoup  de 
points*. 

Aux  environs  de  San-Yenanzio,  non  loin  de  Barigazzo,  il 
existe  une  salse  composée  d'un  cône  boueux  de  25  mètres  de 
circonférence  et  de  3  à  4  mètres  de  hauteur,  autour  duquel 
étaient  groupés  onze  cônes  plus  petits,  lors  de  la  visite  qu'en 
ont  faite  ces  savants.  Tous  laissaient  échapper  par  leur 
sommet  de  nombreuses  bulles  de  gaz  inflammable.  L'argile 
qui  les  formait  était  imprégnée  de  pétrole  et  le  gaz  brûlait. 

La  salse  de  Sassuolo,  avait  déjà  attiré  l'attention  du  temps 
de  Pline.  En  1789,  Spallanzani,  qui  la  visita,  la  décrivit 
ainsi  : 

«  A  un  mille  au  sud  de  Sassuolo  existe,  sur  un  monticule, 
une  salse  environnée  d'un  cordon  de  terre  et  de  pierres.  Elle 

*  Annales  des  sciences  géologiques. 


EAUX  POUSSÉES  PAR  LES  HYDROGÈNES  CARBOiNÉS.  381 

se  présente  sous  la  forme  d'un  cône  terreux,  haut  de  deux 
pieds,  terminé  par  un  entonnoir  d'un  pied  de  diamètre, 
d'où  sortent  par  intervalles  des  bulles  de  quatre  ou  cinq 
pouces  de  diamètre,  qui,  à  peine  formées,  éclatent  et  dispa- 
raissent. Ces  bulles  soulèvent  une  terre  argileuse  grisâtre 
imprégnée  d'eau  et  semi-fluide,  qui  déborde  au-dessus  de 
l'entonnoir  et  descend  le  long  des  parois  extérieures.  A  cette 
époque,  les  éruptions  de  la  salse  paraissaient  très  faibles,  en 
comparaison  de  celles  qui  étaient  survenues  dans  les  temps 
passés  :  ces  dernières  avaient  fourni  vers  l'ouest  des  coulées 
de  boue,  qui  s'étaient  étendues  jusqu'à  la  plaine  où  passe 
la  grande  route,  et  elles  occupaient  une  aire  d'environ  trois 
quarts  de  mille  de  tour.  * 

Spallanzani  retourna  à  Sassuolo  le  12  juillet  1790.  Quel- 
ques semaines  auparavant,  la  salse  venait  d'avoir  une  nou- 
velle éruption.  En  1795,  dans  un  troisième  voyage,  ce  savant 
trouva  la  salse  principale  peu  active  et  réduite  à  un  petit 
cône. 

Jusqu'en  1855,  la  salse  de  Sassuolo  resta  dans  le  repos; 
au  mois  de  juin  de  cette  année,  elle  fut  le  siège  d'une  nou- 
velle éruption,  qui  s'est  manifestée  avec  une  forte  odeur  de 
pétrole.  Le  4  juin,  à  5  heures  du  matin,  par  un  ciel  pur  et 
serein  et  une  température  modérée,  une  forte  odeur  de 
pétrole  se  répandit  dans  l'air.  Quelques  minutes  après,  une 
secousse  violente,  accompagnée  d'une  détonation  semblable 
à  un  coup  de  canon,  agita  le  sol.  La  secousse  se  fit  sentir 
surtout  à  l'est  et  à  l'ouest,  jusqu'à  Saint-Michel,  au  delà  du 
torrent  de  la  Lecchia.  La  détonation  fut  entendue  à  Sas- 
suolo, où   toutes   les  vitres  des  fenêtres  tremblèrent.  Les 
eaux  du  canal  furent  agitées  par  un  flot  qui  heurta  violem- 
ment les  barques  des  bateliers.  Une  colonne  d'épaisse  fumée, 
traversée  par  des   lueurs  jaune  rouge,   s'échappa  de    la 
salse  au  milieu  des  détonations.  Des  pierres  et  de  la  boue 


383  EADI  POUSSCES  PAR  LES  GAZ  GOMFIUNÉS. 

furent  lancées  a  une  grande  distance,  et  une  épaisse  bouillie 
d'argile  s'échappa  des  ouvertures.  Les  pierres  rejetées  avec 
l'argile  étaient  formées  de  calcaire  marneux,  de  calcaire 
cristallin,  de  macigno,  de  marne  argileuse  verte,  de  ser- 
pentine, etc.  Ces  matières  se  recouvrirent  bientôt  de  croûtes 
de  sel  marin. 

A  9  heures  et  demie,  une  nouvelle  détonation,  plus  faible 
que  la  première,  se  fit  entendre,  â  6  heures  du  soir,  il  s'en 
produisit  une  encore  plus  faible.  Elles  furent  suivies,  pendant 
douze  jours,  de  détonations  analogues  à  des  coups  de  pis- 
tolet. La  salse  continua  pendant  ce  temps  à  bouillonner,  et 
en  appliquant  l'oreille  contre  le  sol,  on  entendait  un  bruil 
semblable  à  celui  de  l'eau  qui  coule.  La  terre,  sur  le  bord 
de  l'ouverture  de  la  salse,  présentait  à  quelque  profondeur 
une  température  notablement  élevée.  Le  gaz  qui  s'échappait 
s'enflammait  à  l'approche  d'une  allumette;  son  odeur  loin 
d'être  sulfurée  était  aromatique.  Il  ne  se  produisit  pas  de 
cône  et  l'ouverture  était  cylindrique.  La  matière  rejetée  se 
répandit  sur  un  espace  presque  rectangulaire  de  276  mèti*es 
de  long  et  de  106  de  large.  La  masse  en  est  évaluée  à 
10460000  mètres  cubes. 

Pendant  l'éruption  le  sol  se  fendit,  et  dans  les  fentes,  la 
température  était  plus  élevée  qu'à  l'air  libre.  A  quelque  dis- 
tance au  sud-ouest,  deux  sources  se  montrèrent,  l'une  d*eau 
salée,  l'autre  laissant  échapper  de  nombreuses  bulles  de  gaz 
inflammable.  A  cette  période  d'agitation  a  succédé  une  longue 
période  de  repos. 

Le  gaz  de  la  salse  de  Sassuolo  est  composé  principalement 
de  gaz  des  marais,  98  pour  100,  avec  un  peu  d'azote  (1,38) 
et  d*acide  carbonique  (0,56). 

Le  volcan  boueux  situé  à  1 1  kilomètres  au  nord  de  Girgenti 
a  déjà  été  cité  par  Platon  et  décrit  par  Strabon»  Le  nom 
arabe  de  Macaluba,  qui  lui  a  été  appliqué,  a  souvent  été 


EAUX  POUSSÉES  PAR  LES  UYDROGÈNËS  CARfiOf^ÉS.  385 

étendu  aux  autres  volcans  d'air  et  de  boue.  Voici  dans  quels 
termes  en  a  parlé  Dolomieu  :  <  Dans  une  plaine  d'argile  qui 
a  150  pas  de  long  sur  50  de  large,  on  trouve  une  trentaine 
de  cônes  de  boue,  ayant  entre  0",60  et  1  mètre.  Chacun  porte 
vers  son  sommet  un  petit  enfoncement  de  quelques  centi- 
mètres, qui  est  rempli  avec  de  l'eau  salée;  constamment  la 
surface  de  ces  petites  flaques  d'eau  est  agitée  par  le  déga- 
gement de  bulles  de  gaz.  Il  en  résulte  sur  les  flancs  du  cône 
de  petits  courants  d'argile  délayée  par  l'eau  salée,  qui  res- 
semblent pour  la  forme  à  de  petits  courants  de  lave.  Ces 
éruptions  ont  donc  l'allure  de  celles  de  Paterno. 

Tandis  que,  d'après  Ch.  Sainte-Claire  Deville,  les  salses  de 
Macaluba  fournissaient  principalement,  en  octobre  1865,  de 
l'acide  carbonique  et  de  l'hydrogène  carboné,  c'était  de 
l'hydrogène  carboné  avec  de  l'azote  et  un  peu  d'acide  carbo- 
nique qui  s'en  exhalait  les  17, 18  et  19  juillet  1866. 

En  outre,  au  centre  de  la  Sicile,  près  de  Caltanisetta,  les 
macalube  de  Terra  Pilata  fournissaient  également,  à  la  même 
époque,  de  l'eau  salée  mélangée  d'argile  et  d'hydrogène  car- 
boné pur  ou  mélangé  d'un  peu  d'azote.  Ils  sont  situés  sur 
un  petit  plateau  d'argile  crétacée,  ayant  250  mètres  de  lar- 
geur, et  sont  influencés  par  les  tremblements  de  terre  qui 
agitent  la  Sicile.  Ils  sont  à  proximité  des  soufrières  les  plus 
considérables  de  l'Europe  et  non  loin  de  sources  de  pétrole. 

Caaeaae  t  mer  Noire  et  mer  Ca^lenne.   —  Dcs  VOlcaUS  pluS 

remarquables  se  trouvent  aux  deux  extrémités  du  Caucase, 
d'une  part,  sur  la  mer  d'Âzof  et  la  mer  Noire,  d'autre  part 
sur  la  mer  Caspienne, 

Dans  la  partie  orientale  de  la  Crimée,  près  de  Kertsch,  et 
dans  la  presqu'île  de  Taman,  le  sol  est  formé  de  couches 
tertiaires  renfermant  du  bitume,  et  spécialement  de  calcaire 
avec  coquilles  marines.  Sur  une  bande  de  100  kilomètres  de 


58  i 


EAIX  POISSÉES  PAR  L£S  GAZ  COMl'RLMÉS. 


longueur,  dirigé  à  peu  près  de  l'est  à  Touest,  s'élève  une 
série  de  cônes,  dont  quelques-uns  alleignent  80  mètres  de 
hauteur. 

Lors  des  éruptions  qui  sont  accompagnées  de  bruits  sou- 
terrains et  de  tremblements  de  terre  locaux,  il  se  dégage 


Y'm.  IG9.  —  CarU*  (If  la  |)rt>>qirile  d'A|>stliéron.  Do  {grands  points  étoiles  i-o|»rés<>iileul  ({«"s  xol- 
(■ans  de  bouc;  des  |>oinU>  moindres,  les  sourcet»  de  gaz  hvdrogëne  proto-carbone.  —  b'apiè» 
M.  Abich. 


des  jets  d*eau  salée  et  boueuse  accompagnée  de  bitume*.  Le 
gaz  consiste  principalement  en  hydrogènes  bicarboné  et 
protocarboné. 
En  1855,  lors  de  la  visite  de  M.  de  Verneuil,  après  trois 

*  b*aprè8  M.  de  Verneuil.   BuUelindc   la  Société  géologique  de  France,  i'*  ^i£ 
t.  VII,  p.  515  et  t.  VIII,  p.  188. 


EAUX  POUSSÉES  PAR  LES  HYDROGÈNES  CARBONÉS. 


385 


jours  de  bruits  souterrains,  il  y  eut 
une  éruption  qui  projeta  Teau  boueu- 
se à  10  mètres  de  hauteur.  Une  érup- 
tion, dontPallas  fut  témoin  en  1794, 
donna  20,000  mètres  cubes  de  boue 
bitumineuse.  Des  tremblements  de 
terre  furent  ressentis  à  plus  de  250 
kilomètres. 

A  l'extrémité  orientale  du  Cau- 
case ,  la  presqu'île  d'Apscheron 
(fig.  169)  présente  des  phénomènes 
du  même  genre.  Le  sol  (fig.  170)  est 
formé  de  couches  tertiaires,  surtout 
de  grès  calcarifère,  d'argile  schis- 
teuse et  de  marnes,  en  partie  bigar- 
rées et  salifères.  Elles  sont  recou- 
vertes par  le  dépôt  aralo-caspien , 
principalement  formé  de  calcaire  po- 
reux, de  sables  et  de  marnes  riches 
en  débris  de  mollusques. 

Cette  région,  connue  par  sa  richesse 
en  pétrole  et  par  ses  jets  d'hydro- 
gène carboné  {feux  éterneh),  présente 
des  volcans  de  boue  en  divers  points. 
M.  Abich  en  a  fait  une  intéressante 
étude,  à  propos  d'une  île  nommée 
Kumani,  qui  a  apparu  à  proximité, 
sur  les  côtes  de  la  mer  Caspienne, 
en  mai  1861'. 

Éteta-vato.  —  Dcs  puits  forés,  sou- 


T        s* 


M 


i. 


D,« 


h  U 


'  Uénioiret  de  V Académie  desicienceê  de  Saint'Pélersbourg.yW"  série,  t.  Vf.  n«5,  U'05. 

25 


586  EAUX  POUSSÉES  PAR  LES  GAZ  COMPROlfS. 

vent  jaillissants,  existent  en  très  grand  nombre  dans  la  ré- 
gion pétrolifère  de  rAmérique  du  Nord.  Les  réservoirs  où 
ils  aboutissent  renferment  à  la  fois  du  pétrole,  du  gaz  hy- 
drogène carboné  et  de  l'eau  salée.  L'ascension  du  liquide  est 
provoquée,  dans  certains  cas,  non  par  la  simple  pression 
hydrostatique,  mais  par  la  force  élastique  du  gaz  empri- 
sonné, qui  explique  leur  sortie  impétueuse  et  spontanée  par 
l'orifice  des  puits  récemment  ouverts'. 

Dans  la  région  à  huile  de  la  Pennsylvanie  occidentale,  à 
6  kilomètres  de  Kane,  dans  la  vallée  de  Wilson,  il  existe  un 
jet  d'eau  et  de  gaz,  nommé  Kane  Geyser  (fig.  171).  Un  puils 
d'une  profondeur  de  600  mètres  projette  une  colonne  d'eau 
et  de  gaz  à  une  hauteur  de  50  à  50  mètres.  Elle  jaillit  pério- 
diquement, à  des  intervalles  qui  étaient  d'environ  13  minutes 
pendant  l'été  de  1879.  Le  gaz  est  souvent  allumé  la  nuit,  de 
sorte  qu'on  y  voit  associés  les  éléments  antagonistes,  le  feu 
et  l'eau. 


Observation  théorique. 

La  démarcation  qui  vient  d'être  établie  entre  les  jets  d'acide 
carbonique  et  ceux  d'hydrogène  carboné  n'est  pas  toujours 
bien  nette.  D'une  part,  ces  deux  gaz  se  trouvent  quelquefois 
associés  l'un  à  l'autre,  comme  à  Paterno,  d'après  l'analyse 
de  M.  Silvestri,  et  aux  environs  de  Poretta,  à  Bovi  et  à  Parle, 
d'après  M.  Fouqué.  D'autre  part,  l'un  ou  l'autre  gaz  peut  pré- 
dominer suivant  l'époque,  ainsi  qu'on  vient  de  le  voir.  Les 
volcans  de  boue  de  Turbaco,  près  de  Carthagène,  présentent 
un  exemple  de  ces  variations,  puisqu'au  lieu  de  l'azote  que 


'  Daubrëe.  Substances  minérales,  p.  90. 
■  Dana,  Geologyt  3-  édition,  p.  752,  i880. 


EAUX  POUSSÉES  PAR  LES  HYDROGÈNES  CARBONES. 


587 


Humboldt  y  avait  signalé,  on  n'y  a  trouvé  plus  tard  que  de 
l'hydrogène  carboné*. 

Suivant  les  remarques  de  M.  Fouqué,  Jes  cônes  de  déjec- 
tions ne  doivent  pas  être  regardés  comme  un  caractère 
essentiel  des  dégagements  gazeux,  auxquels  on  donne  le  nom 


Fig.  171.  —  Vue  du  Kane-Geyser.  —  D'après  M.  Dana. 

de  salses.  Plusieurs  conditions  sont  nécessaires  pour  qu'il  y 
ait  formation  de  cônes.  Il  faut  d'abord  que  le  terrain  où  se 
fait  le  dégagement  de  gaz  soit  argileux;  car,  s'il  est  pierreux, 


<  Ces  cônes,  au  nombre  de  '20,  ont  élé  visités,  en  18ô5,  par  M.  Vauvert  de  Néan. 
Comptes  rendue,  XXXVIII,  p.  765. 


M8  KAUX  P0DSS8ËE  PAR  LES  GAZ  COMPRIVÉS. 

comme  à  Barigazzo  ou  à  Pietra-Mala,  le  gaz  sort  des  inter- 
stices des  roches,  sans  entraîner  avec  lui  aucune  matière 
boueuse.  Dans  le  cas  où  le  terrain  [est  composé  d'ai^ile 
dans  ses  parties  superticielles,  il  faut  encore  que  cette  ar- 
gile contienne  de  Teau.  Très  souvent  le  dégagement  ga- 
zeux est  accompagné  de  naphte  et  de  pétrole  et  Teau  est 
salée. 

Bien  que  la  température  des  déjections  soit  en  général 
voisine  de  la  température  ordinaire  et  qu'elle  ne  s^élève  que 
momentanément,  par  exemple  pendant  l'éruption,  ces  volcans 
sont  en  relation  avec  les  cassures  profondes  du  sol,  ainsi  que 
le  témoigne  leur  situation  aux  deux  extrémités  du  Caucase. 
Plusieurs  auteurs,  MM.  Charles  Sainte-Claire  Deville,  Abich, 
Fouqué,  ont  même  cherché  à  les  rattacher  aux  volcans  pro- 
prements  dits.  Il  est  certain  qu'ils  présentent  des  périodes 
d'activité  et  des  éruptions^  ayant  quelque  analogie,  sur  une 
petite  échelle,  avec  celles  des  volcans,  et  que  parfois  il  en 
sort  de  l'eau  chaude,  comme  lors  de  l'éruption  de  Paterno 
du  22  février  1866. 

Quoiqu'il  en  soit,  le  nom  de  volcans*  (JVulcane),  qui  leur  a 
été  donné  à  cause  de  leurs  éruptions,  ne  parait  pas  devoir 
leur  être  maintenu.  Ce  nom  volcan,  qui  dérive  du  nom  de 
Vulcain,  dieu  du  feu,  ne  peut  s'appliquer  qu'à  un  appareil, 
dont  les  produits  sont  doués  d'une  haute  température  et 
dont  le  siège  est  dans  des  régions  chaudes  et  profondes. 

Pour  les  éruptions  boueuses  qui  se  font  à  peu  près  à  froid, 
le  nom  de  volcan  doit  être  évité,  comme  ayant  alors  une 
application  opposée  à  son  étymologie  et  pouvant  donner  lieu, 
par  conséquent,  à  une  confusion  regrettable.  On  aurait  tout 
avantage,  à  ce  point  de  vue,  à  changer  cette  dénomination 


*  Et  en  allemand,  Schlammwulkane ;  II.  GAinbel  a  employé  le  nom  de  SchUunm' 
SprudeL 


Ek\}l  POUSSÉES  PAR  LES  HYDROGÈNES  CàRBONfiS.  389 

SOUS  le  nom  cosmopolite  de  pélozème^  ou  bouillonnements 
de  boue  ou  pélocones  (cônes  de  boue),  noms  qui  rappelle- 
raient simplement  leur  trait  caractéristique  et  indépen- 
damment de  toute  hypothèse. 


*  De  Kcloff,  boue  et  Çim,  boaillonner. 


CHAPITRE  VII 


EAUX  POUSSÉES  PAR   LA   FORCE   EXPANSIVE 
DE  LEUR  VAPEUR 


§  1 .  —  GEYSERS. 

Il  est  des  sources  d'eau  liquide,  dans  le  régime  desquelles 
Teau  en  vapeur,  par  sa  force  élastique,  joue  un  rôle  inter- 
mittent, mais  caractéristique.  Tels  sont  les  Getpen,  dont  le 
nom  est  emprunté  à  un  mot  islandais  qui  veut  dire  jaillir. 

teiaad«.  —  Les  plus  beaux  geysers  de  l'Islande  sont  situés 
dans  la  vallée  de  Haukadalr,  dans  le  sud*ouest  de  Tile.  En 
1881  on  en  comptait  130  en  activité.  Leur  nombre  varie; 
tandis  que  les  uns  s'éteignent,  il  en  naît  de  nouveaux. 

Le  bassin  du  grand  Geyser  a  la  forme  d'une  coupe  d'en- 
viron 16  mètres  de  diamètre.  Le  conduit  central,  ouvert 
dans  un  dépôt  siliceux,  a  3  mètres  de  diamètre  à  son  orifice 
et  l'on  a  pu  le  sonder  jusqu'à  24  mètres  de  profondeur.  La 
température  de  l'eau  dans  ce  puits  dépasse  beaucoup  le  point 
d'ébullition.  Ses  éruptions  sont  toujours  précédées  de  plu- 
sieurs autres  plus  petites,  qu'annonce  un  bruit  de  tonnerre 
souterrain,  accompagné  d'ébranlements  du  sol.  L'eau  déborde 


GEYSERS.  391 

du  bassin,  de  grosses  bulles  viennent  crever  à  la  surface, 
d'abord  très  régulièrement  toutes  les  deux  heures,  puis  plus 
fréquemment.  Enfin  une  puissante  colonne  d'eau  de  3  mètres 
de  diamètre,  entourée  de  nuages  de  vapeur,  s'élance  verti- 
calement jusqu'à  20  et  quelquefois  même  40  à  50  mètres  de 
hauteur.  Au  bout  de  dix  minutes,  tout  est  fini  ;  la  colonne 
d'eau,  après  avoir  subi  des  oscillations,  el  être  retombée,  puis 
repartie  deux  ou  trois  fois,  finit  par  disparaître.  M.  des  Cloi- 
zeaux  a  estimé  à  160  mètres  cubes  la  quantité  d'eau  rejetée 
par  chaque  éruption  du  geyser;  mais,  à  cause  des  colonnes  de 
vapeur  qui  s'échappent  en  même  temps,  et  qui  se  mêlent  à 
Teau,  il  est  probable,  d'après  les  plus  récentes  observations, 
que  cette  quantité  ne  doit  pas  s'élever  au  delà  d'une  cen- 
taine de  mètres  cubes.  Vers  le  milieu  du  siècle,  le  Grand- 
Geyser  jaillissait  tous  les  jours*;  cent  ans  plus  tard,  les  érup- 
tions étaient  plus  fréquentes  et  plus  régulières  ;  en  1770,  il  y 
avait  souvent  trois  à  quatre  éruptions  dans  l'espace  de  vingt 
quatre  heures  et  lesjets  dépassaient  80  mètres.  En  1804,  il  jail- 
lissait de  6  heures  en  6  heures.  Déjà  en  1866,  il  fallait  quel- 
quefois attendre  6  jours.  Les  dernières  éruptions  de  l'Eskja 
en  1873  et  de  l'Hécla,  ainsi  que  de  violents  tremblements 
de  terre,  ont  exercé  une  influence  sur  le  phénomène,  et  les 
éruptions  n'ont  plus  guère  lieu  que  tous  les  17  jours. 

Le  petit  Geyser,  nommé  Blesi  par  les  Islandais,  situé  à 
50  mètres  du  précédent,  a  deux  bassins,  dont  le  plus  grand  a 
12  mètres;  il  avait  autrefois  de  fréquentes  éruptions,  mais 
il  a  cessé  de  jaillir  depuis  un  violent  tremblement  de  terre, 
en  1789. 

En  même  temps  que  la  commotion  dérangeait  le  canal, 
elle  ouvrit,  à  60  mètres  de  là,  le  nouveau  geyser  connu  sous 
le  nom  de  Strokr.  Le  Strokr,  ou  nouveau  geyser,  est  très  irri- 

*  Gérard,  Voyage  en  Islande. 


59S  EAUX  POUSSÉES  PAR  LA  VAPEUR. 

table.  A  la  différence  du  Grand-Geyser,  qui  ne  jaillit  que 
momentanément,  le  Strokr  fait  explosion,  selon  le  bon 
plaisir  des  visiteurs.  Il  a  o  mètres  de  diamètre  et  13  mètres 
de  profondeur;  ses  eaux  bouillonnent  à  4  mètres  de  pro- 
fondeur avec  véhémence  ;  elles  donnent  par  intervalle  d'a- 
bondantes émissions  de  vapeur. 

D'après  un  récit  de  1885,  25  minutes  après  qu'on  eut  pré- 
cipité une  douzaines  de  mottes  de  gazon  dans  sa  bouche,  les 
eaux  montèrent  tout  à  coup  jusqu'au  bord;  puis  une  forte 
colonne  d'eau  jaillit  dans  les  airs,  avec  des  sifflements  in- 
tenses, rejetant  violemment  la  boue  et  le  gazon;  les  jets  se 
succédèrent  avec  rapidité  et  la  colonne  ascendante  se  frayait 
une  cheminée  à  travers  la  colonne  descendante;  cette 
fureur  dura  10  minutes.  Le  phénomène  se  reproduisit  régu- 
lièrement d'heure  en  heure  toute  la  journée  et  les  jaillisse- 
ments ne  cessèrent  que  lorsque  toutes  les  mottes  de  gazon 
furent  expulsées;  les  plus  hauts  jets  s'élevaient  jusqu'à  50 
et  35  mètres. 

La  ligne  sur  laquelle  se  rangent  ces  sources  jaillissantes 
suit  une  direction  générale  sensiblement  parallèle  à  la  ligne 
d'activité  volcanique  qui  traverse  l'île,  du  sud-ouest  au  nord- 
est. 

Il  existe  aussi  des  eaux  chaudes  toujours  bouillantes, 
nommées  Hoerjar  et  d'autres  tranquilles,  nommées  Laugar 
(en  islandais  citerne). 

Ètate-llBto  s  pare  aatlomil  de  Yellowstoaei  CaUfornle.   —  DanS 

la  partie  occidentale  des  États-Unis,  vers  les  confins  des 
territoires  de  Wyoming,  de  Montana  et  de  IdahoS  les  geysers 
sont  extrêmement  nombreux  et  associés  à  beaucoup  de 
sources  chaudes. 

^  Entre  ie  110«  et  ie  lll*  degré  de  longitude  et  entre  le  44"  et  le  45*  degré  de  latitude. 


GEYSERS.  •  395 

Le  nombre  des  uns  et  des  autres  est  de  plus  de  2000  ; 
mais  la  région,  qui  n'a  été  pour  ainsi  dire  aperçue  qu'en 
1854,  est  loin  d'être  complètement  explorée. 

En  raison  du  haut  intérêt  que  présentent  les  phénomènes, 
une  loi  de  1872  a  établi  le  Parc  national  de  Yellowstone*, 
qui  comprend  le  plus  grand  nombre  d'entre  eux  et  qui  a  la 
forme  d'un  rectangle  de  88  kilomètres  sur  104.  Son  alti- 
tude est  d'environ  2500  mètres  et  il  est  avoisiné  par  des  mon- 
tagnes, qui  atteignent  3800  mètres.  Le  sol  de  la  contrée 
présente  des  couches  carbonifères,  jurassiques  et  tertiaires  ; 
les  roches  volcaniques,  basaltes  et  trachytes,  le  couvrent 
dans  sa  plus  grande  étendue. 

M.  A.  C.  Peale*,  dans  une  monographie  étendue  qu'il  en  a 
donnée  en  1883,  dit  que  ces  diverses  sources  chaudes,  dont 
la  température  varie  de  71  a  93  degrés',  constituent  50  à  40 
groupes  distants  de  moins  de  25  kilomètres  les  uns  des 
autres  et  dont  8  renferment  des  geysers.  La  carte  ci-jointe 
figure  172  donne  leur  situation  sur  le  haut  Madison. 

Dans  le  bassin  de  la  rivière  Yellowstone  se  trouvent  les 
sources  dites  Mammooth  ou  White  Mountains,  du  Garden  Row. 
A  5  kilomètres  de  l'embouchure  se  trouve  un  développe- 
ment des  plus  remarquables  du  phénomène.  Les  sources  de 
la  vallée  Hayden,  avec  leurs  volcans  de  boue;  celles  du  lac 
de  Yellowstone,  de  Pélican  Creek,  appartiennent  à  ce  même 
groupe. 

Au  bassin  de  la  ri vère  Madison  appartiennent  les  sources  de 
la  rivière  de  Gibbon,  au  nombre  de  290  à  300,  et  les  bassins 
supérieurs  et  inférieurs  de  la  rivière  Fire-Hole.  Dans  ce 
dernier  se  trouve  le  Grotto  Geyser,  décrit  en  détail  par 

'  H.  llayJeii  qui  a  dirigé  la  première  exploration,  (*n  1872,  l'a  Irès  b'en  fait  con- 
naître. UoUprings  and  geysers  of  Yellowstone^  ânkhicak  Juuiu(àl.  1872,  p.  105. 

*  Heport  on  the  thermal  spring  of  the  Yellowstone  National  Park.  1883.  Geological 
Sdrtbt. 

'  Â  cette  altitude,  la  lempérature  d'ébuUiUoa  de  l'eau  est  de  92*,22. 


504 


EAUX  PODSSSES  par  Là  YAmiR. 


Fig.  172.  —  Carte  du  bassin  des  geysers  sur  le  Haut-Madison,  Montana.  Les  cercles  blancs,  i 

centre  noir,  désignent  les  geysers  ;  les  points  noirs  représentent  les  sources  chaudes  et  les 

sources  boueuses,  y  compris  celles  qui  sont  désignées  sous  le  nom  de  mud  spring  :  les  petits 

cercles  blancs  désignent  des  points  appelés  cratères.  T,  dépôts  modernes  des  sources.  —  D'après 

Geological  turvey. 


GEYSERS.  395 

M.  Hayden,  et  plus  loin,  le  Grand  Geyser,  le  Old  Faithful  et 
le  6ee  flive. 

Un  troisième  groupe,  celui  de  la  rivière  Snake,  comprend 
le  Shoshone  et  le  Union  Geyser. 

Un  grand  nombre  de  geysers  du  Parc  national  atteignent 
une  hauteur  de  30  mètres  et  quelquefois  de  60  mètres,  et 
FExcelsior  a  jailli  jusqu'à  100  mètres. 

Dans  la  partie  orientale  du  Parc,  beaucoup  de  ces  geysers 
constituent  un  alignement  nord-sud. 

Lors  de  l'éruption,  le  jet  est  d'abord  de  l'eau,  ensuite 
beaucoup  de  vapeur  avec  de  l'eau,  et  à  la  fin  presque  entière- 
ment ou  entièrement  de  la  vapeur,  l'eau  ayant  été  entière- 
ment projetée.  Quand  l'eau  tombe  en  partie  dans  le  bassin, 
l'éruption  est  parfois  renouvelée  avant  de  s'arrêter  tout  à  fait. 

En  Californie,  des  sources  chaudes  qui  doivent  être  rap- 
prochées des  geysers,  sont  situées  au  nord  de  San  Francisco, 
dans  un  vallon  latéral  de  la  vallée  Napa,  appelé  Pluton  ou 
Devils  Canon  (comté  de  Sonoma.)  Ce  canon,  qui  a  environ 
2  kil.  1/2  de  longueur  et  10  mètres  de  large,  présente  des 
dépôts  très  étendus  d'anciennes  sources,  parmi  lesquels  se 
font  jour  de  nombreux  jets  de  vapeur  et  beaucoup  de  sources 
chaudes.  Plusieurs  de  ces  dernières,  telles  que  Witches-Cal- 
dron,  sont  en  complète  ébuUition.  D'autres  sont  intermit- 
tentes, lançant  l'eau  jusqu'à  des  hauteurs  de  5  à  6  mètres. 
Le  canal  du  Steamboat  geyser,  qui  a  20  centimètres  de  dia- 
mètre, émet  sans  cesse  un  jet  de  vapeur  dont  la  hauteur 
dépasse  30  mètres,  avec  un  bruit  comparable  à  celui  d'une 
chaudière  à  vapeur*. 

La  chaîne  dite  Coast  Range,  à  laquelle  appartiennent  ces 
sources,  se  compose,  dans  cette  région,  de  couches  crétacées 
et  tertiaires,. y  compris  le  miocène,  qui  sont  très  fortement 

A.  C.  Peale.  Thermal springê  of  Yellowatone  Park  1883  p.  321. 


396  EAUX  POUSSËES  PAR  LA  VAPEUR. 

ployées.  De  tous  côtés  se  montrent  des  roches  volcaniques, 
dont  le  point  culminant,  au  mont  Saint-IIelena,  atteint 
1320  mètres*. 

i«oBveiie-séiMM«9  proviace  d*A«kuuui.  —  Parmi  les  faits  re- 
marquables que  le  très  regretté  de  Hochstetter  a  rapportes 
en  1858,  de  son  expédition  de  la  Novara,  ceux  qui  concer- 
nent la  Nouvelle-Zélande  ont  une  importance  exceptionnelle". 

Entre  le  volcan  de  Tongariro  et  Tile  fumante  Whakari, 
dans  la  baie  d'Abondance,  sur  une  étendue  de  220  kilomè- 
tres, se  trouvent  une  multitude  de  sources  bouillantes,  de 
geysers  et  de  solfatares.  Elles  sortent  pour  la  plupart  de 
trachytes  et  d'autres  roches  volcaniques.  Ces  phénomènes 
ont  été  particulièrement  étudiés  entre  le  lac  Taupo  et  la 
côte  orientale.  Comme  les  indigènes  l'ont  très  bien  remar- 
qué, ces  sources  chaudes  sont  en  relation  avec  des  volcans 
encore  actifs,  et,  de  même  que  les  Islandais,  ils  les  distin- 
guent par  trois  noms  :  le  mot  Puia  est  particulièrement 
employé  pour  les  geysers  intermittents  et  s'applique  quel- 
quefois aussi  aux  volcans  actifs  ou  éteints  {Hverjar  en 
Islande).  Tels  sont  Tokanu,  Oràkeikorako  sur  le  Waikato  et 
Whakarewarewa  sur  le  lac  Rotorua  (fig.  173).  Les  Ngawha 
sont  ordinairement  des  sources  non  intermittentes,  telles 
que  les  solfatares  et  les  sources  sulfureuses  chaudes  de 
Rotomahana  Rotorua  et  Rotoiti  {Namur  d'Islande).  Enfin  les 
sources  destinées  au  bain,  dont  la  température  n'atteint 
pas  celle  de  l'eau  bouillante,  sont  appelées  Watariki^  corres- 
pondent aux  Laugar  d'Islande. 

Aç«rc«  9  Ile  SMi-m««ei.  —  Daus  son  étude  approfondie  des 


*■  I«  Conte.  American  journal  1876  t.  XI,  p.  287. 

s  New  Zealand,  1807,  ouvrage  publié  en  allemand  dès  1863. 


GEYSERS. 


397 


sources  thermales  de  l'île  de  San-Miguel,  aux  Açores, 
M.  Fouqué*  a  signalé  au  fond  du  cirque  dit  Val  Furnas,  trois 
excavations  naturelles  qui  ont  reçu  le  nom  deCaldeiraSy 
à  cause  de  leur  ressemblance  avec  des  chaudières  remplies 
d'eau  en  ébuUition.  Le  liquide  y  bouillonne  avec  force  et 
s'y  élève  en  jets;  Tune  d'elles  donne  lieu  à  des  projections 


Fig.  173.  —  Le  geyser  de  Waîkile  sur  le  lac  Roiorua,  à  la  Nuuvellc-Zélandc.  —  D'après 

M.  de  llochstetier. 

d'eau  intermittentes  ou  geysériennes,  assez  fréquentes  pour 
engendrer  un  petit  courant  d'eau  chaude.  Elle  s'est  ouverte 
en  1840,  après  une  forte  explosion. 

Thlbet^  —  Des  sources  chaudes  ont  été  découvertes  en 
1871,  par  le  colonel  Montgomerie,  sur  le  plateau  duThibet, 
à  une  altitude  de  plus  de  4700  mètres.  Ces  sources  se  trou- 
vent en  plusieurs  points  et  en  grand  nombre,  particulière- 
ment à  Naisum-Chuja.  Beaucoup  d'entre  elles  jaillissent  à 


»  Comptes  rendus,  t.  LXXVI,  p.  1361. 

*  Journal  of  the  Geological  Society  of  London,  t.  XLV,  p.  517. 


398  EAUX  POUSSÉES  PAR  LA  VAPEUR. 

des  hauteurs  de  12,  15  et  20  mètres,  avec  un  fort  bruit  et 
dégagement  de  torrents  de  vapeur  qui  obscurcissent  l'at- 
mosphère. Leur  température  est  égale  à  celle  du  point  d'ébul- 
lltion  qui,  à  cette  altitude,  est  de  84  degrés.  La  vapeur  parait 
être  la  cause  de  les  projections  et  lors  même  qu'elles  ne 
seraient  pas  intermittentes,  elles  doivent  être  comptées  dans 
la  famille  des  geysers. 


§  2.  SOFFIONIS. 

En  dehors  du  domaine  des  volcans  proprement  dits, 
dont  il  va  être  question,  il  existe  des  jets  de  vapeur,  doués 
d'une  température  très  élevée,  qui  s*élancent  de  certaines 
fractures  du  sol. 

ToMMie.  —  Les  plus  connus  de  ces  jets  sont  ceux  qui,  en 
Toscane,  dans  la  province  de  Pise,  aux  environs  de  Yolterra, 
apportent  au  jour  l'acide  borique.  Us  sont  exploités  dans 
la  partie  élevée  de  la  région  septentrionale  de  la  Haremme, 
ainsi  que  dans  le  haut  de  la  vallée  de  la  Gecina,  dans  les 
localités  de  Larderello  ou  Monte-Cerboli,  Castel-Nuovo,  Tra- 
vale,  Sasso,  Monte-Rolondo,  Serrazzano,  Lago,  Lustignano, 
La  figure  174  en  représente  une  partie.  Ces  soffioniy  ainsi 
que  d'autres  trop  pauvres,  sont  situés  sur  une  zone  d'en- 
viron 60  kilomètres  de  longueur,  du  nord-nord-ouest  au 
sud-sud-est  avec  une  largeur  de  37  kilomètres.  De  nom- 
breuses failles  également  dirigées  N.  15*  0.  à  S.  15*  E.  tra- 
versent cette  région.  La  plupart  des  soflionis  sont  situés  dans 
le  territoire  de  Pomarance  entre  le  torrent  Cecina,  à  l'est 
et  les  sources  de  la  Cornia,  au  sud. 

Le  terrain  tertiaire  environnant  est  constitué  par  les 
schistes  galestrini  et  les  calcaires  alberese  de  Téocéne,  qui, 


SOFFIONIS. 


399 


près  de  Pomarance,  sont  recouverts  par  des  couches 
miocènes  et  pliocènes.  Il  y  a  aussi,  comme  ailleurs  en 
Toscane,  de  grandes  masses  de  serpentine,  par  exemple 
tout  près  du  Monte  Gerboli. 

L'exploitation  de  Monte-Cerboli  ou  Larderello,  qui   est 
la  plus  importante  et  qui  comprend  l'établissement  prin- 


Scn^azavo 


Echelle 


%- 


'sTrilom; 


Fig.  174.  —  Carte  des  lagonis  boracifères  de  la  propriété  do  Larderol. 

cipal,  peut  être  prise  comme  exemple.  Les  jets  de  vapeur 
(fumacchi  ou  volcani)  de  10  à  15  mètres  de  hauteur,  font 
entendre  un  bruit  strident,  qui  leur  a  valu  leur  nom  de 
soflBonis  (fig.  175  et  176).  Les  roches  de  Téocène  y  sont  ré- 
duites en  boue  parles  vapeurs  chargées  de  gaz  sulfhydrique, 
qui  transforment  le  calcaire  en  sulfate. 


iOO 


EAUX  POUSSÉES  PAR  LA  VAPEUR. 


A  ces  jets  naturels  sont  venus  se  joindre  ceux  qu'on  a 
obtenus  au  moyen  de  forages  (fig.  177).  A  Larderello,  ces 
trous  ne  sont  guère  poussés  à  plus  de  70  mètres,  tandis  qu'à 


rétablissement  Durval,  à  Monte-Rotondo,  ils  arrivent  à 
150  mètres.  Lorsque  la  sonde  atteint  la  nappe  de  vapeur, 
une  véritable  éruption  a  lieu;  Teau,  la  boue  et  les  pierres 


SOPFIONIS. 


401 


sont  lancées  avec  violence,  à    une   hauteur  de   plus  de 
20  mètres.  Ces  soffionis  artificiels,  comme  ceux  de  la  na- 


ture, sont  loin  d'être  également  riches  en  acide  borique. 

En  dehors  du  groupe  dont  il  vient  d'être  question,  les 

soffionis  de  Travale  sont  situés  sur  la  droite  du  fleuve  de  la 

26 


m 


EADI  POUSSfiES  PAR  LA  VAPEUR. 


Gecina,  à  5  kilomètres  du  village  Montieri,  célèbre  par  ses 
mines  antiques  de  cuivre,  de  plomb  et  d'argent.  D'après 


M.  Bechi,  le  terrain  d'où  ils  sortent  appartient  à  réocène» 
associé  au  miocène;  il  est  percé  par  la  serpentine. 
Les  sondages  exécutés  à  proximité  des  sofiionis  naturels 


SOFFIONIS. 


403 


atteignent  la  vapeur  dès  la  profondeur  de  8  mètres;  cepen- 
dant ils  en  ont  rencontré  de  plus  puissants  à  la  profondeur 


de  58  mètres.  Le  fer  de  la  sonde  tombant  de  plus  d'un  mètre, 
le  soffioni  surgit  avec  beaucoup  de  bruit;  d'où  Ton  peut  con- 
clure qu'il  existe  eu  ce  point  des  canaux  ou  réservoirs  de 


404  EAUX  POUSSÉES  PAR  LA  VAPEUR. 

vapeur.  Les  ouvertures  artificielles  paraissent  avoir  diminué 
le  débit  des  sofTionis  naturels  du  voisinage.  La  pression  de 
la  vapeur,  dont  la  température  est  de  98  à  100  degrés,  a  été 
trouvée  de  1.1/2  à  1.3/4  atmosphère.  Un  puits  ayant  été 
foré  dans  la  partie  basse  du  périmètre  de  Travale,  à  100  mè- 
tres au-dessous  des  soffionis,  la  vapeur  jaillit  avec  un  bruit 
formidable  d'une  profondeur  de  59  mètres,  entraînant 
beaucoup  d*eau  liquide,  dont  la  quantité  fut  évaluée  à 
environ  700  mètres  cubes  par  vingt-quatre  heures.  Celte 
eau  ne  contenait  que  peu  d'acide  borique. 

Le  lac  de  Monte  Kotondo,  dans  lequel  s'épanchaient  des 
soffîonis,  a  été  rétréci,  à  partir  de  1840,  par  M.  Durval  père, 
à  l'aide  de  fossés  et,  dans  le  terrain  conquis  depuis  lors, 
on  a  fait  une  série  de  sondages,  dans  le  but  d'obtenir  des 
vapeurs  destinées  à  chauffer  les  appareils  évapora  toi  res. 
La  figure  179  est  en  croquis  géologique. 

Les  lagonis  consistent  dans  une  fosse  remplie  d'eau, 
ordinairement  de  4  à  20  mètres  de  diamètre,  et  profonde 
de  1",50  à  2",50,  habituellement  très  chaude  (95*  à  95* 
centigrades).  La  vapeur  y  bouillonne  (fig.  180),  de  façon  à 
donner  à  l'eau  l'apparence  d'une  constante  ébullition  et 
avec  assez  de  force  pour  élever  la  surface  liquide,  comme 
une  colonne  de  1  à  2  mètres  et  même  davantage.  Qui  con- 
naît les  phénomènes  des  geysers  s'attendrait,  d'un  instant  à 
l'autre,  à  une  explosion  projetant  en  Tair  toute  la  masse 
aqueuse,  et  laissant  à  sec  le  cratère;  mais  cela  ne  se  produit 
pas  ici,  et  cet  état  se  prolonge  indéfiniment. 

Les  soffîonis  et  les  lagonis,  après  un  certain  temps  d'ac- 
tion, ou  s'affaiblissent  peu  à  peu  et  finissent  par  disparaître, 
ou  cessent  soudainement  de  se  manifester.  Il  arrive  alors 
qu'un   nouveau  soffioni  ou   lagoni  apparaît  à  une  petite 

i  D'après  une  obligeante  communication  de  M.  Ch.  Durval. 


\ 


SOFFIONIS. 


405 


distance.  Dans  ce  déplacement,  il  semble  suivre  une  règle 
constante  ;  du  fond  de  la  vallée  et  des  bords  stériles  et  brûlés 
des  torrents  Possera  et  Pavone  (fig,  174),  les  soffionis  vont 
remontant  d'année  en  année  vers  le  sommet  de  la  colline  ; 
ceux  de  Monte  Cerboli  se  portant  à  la  direction  de  Castel- 
Nuovo  et  réciproquement,  ceux  de  Castel-Nuovo  se  dirigeant 
en  sens  contraire  ;  de  sorte  que  Ton  dirait  qu'ils  tendent  à 
s'unir  les  uns  aux  autres  pour  conquérir  le  sommet  delà 
montagne,  un  foyer  commun  leur  servant  vraisemblable- 
ment d'aliment*.  Ce  mouvement  d'ailleurs  s'effectue  si  len- 
tement que,  dans  l'espace  de  cinquante  ans,  temps  d'exis- 


I 


Fi^.  179.  —  Coupe  du  terrain  des  soffionis  près  du  village  de  Monte-Rotondo,  département  de 
Yoltcrra.  —  Tp,  argile  pliocène;  Te,  calcaire  etschistes  éocènes  ;  Cr,  terrain  crétacé  ;  L,  lias; 
0,  serpentine.  D'après  M.  Ch.  Durval. 


tence  que  compte  l'industrie  boracifère,  on  n'en  peut 
encore  absolument  rien  conclure  relativement  à  l'emplace- 
ment futur  des  établissements. 

L'apparition  des  soffionis  et  des  lagon is  est  précédée  de 
phénomènes  remarquables.  Parfois  des  bruits  souterrains  se 
font  entendre;  la  terre  s'échauffe  progressivement  jusqu'à 
devenir  brûlante,  perd  toute  végétation  et  se  colore  diverse- 
ment par  l'arrivée  d'efflorescences  ;  des  crevasses  s'ouvrent 
en  diverses  directions,  et  alors,  un  choc  accidentel,  le 
passage  fortuit  d'un  homme  ou  d'un  animal,  suffisent  à 
faire  jaillir  la  vapeur  emprisonnée.  Il  peut  être  dangereux 
de  se  promener  sans  précaution   et  sans  guide  dans  les 


406 


EAUX  POrSSÉtS  PAR  LA  VAPEUR. 


VOLCANS  £T  SOLFATARES.  407 

environs,  et  le  souvenir  de  tristes  événements  doit  tenir 
l'attention  éveillée.  D'ailleurs  le  craquement  se  produit 
parfois  spontanément,  et  dans  ce  cas,  une  partie  plus  ou 
moins  étendue  du  sol  est  lancée  en  l'air.  Une  fois  l'entrée 
ouverte,  le  jet  de  vapeur  continue,  ou  seul  ou  accompagné 
d'eau,  qui  alors  s'accumule  à  Tcntour  et  forme  un  lac 
(lagoni). 


§  3,  —  VOLCANS   ET   SOLFATARES. 

Malgré  l'idée  qu'ils  évoquent  généralement  de  roches 
fondues,  dérivant  essentiellement  de  la  voie  ignée,  les  vol- 
cans représentent  avant  tout  des  sources  d'eau. 

Partout  l'eau  en  vapeur  est  le  produit  principal  de  leur 
activité. 

Les  canaux  par  lesquels  cette  eau  parvient  dans  l'atmo- 
sphère aboutissent  en  général  à  une  montagne  qui  se  distin- 
gue par  son  isolement,  au  lieu  de  se  rattacher  à  d'autres 
pour  constituer  une  chaîne  avec  elles.  D'ordinaire,  cette 
montagne  possède  une  forme  conique  plus  ou  moins  régu- 
lière dont  le  Cotopaxi,  dans  la  Cordillère  de  la  Colombie 
(fig,  181),  et  le  Mayon  ou  volcan  d'Âlbay,  dans  l'île  de  Luçon 
(fig.  182),  peuvent  donner  une  idée. 

Un  autre  trait  distinctif  consiste  dans  l'excavation,  en 
forme  de  coupe  ou  cratère,  qui  les  termine  par  en  haut. 

Les  dimensions  des  cônes  volcaniques  sont  très  variables, 
ainsi  que  le  montrent  les  mesures  suivantes  : 

*  Repetti.  Happort  à  V Académie  des  Georg.,  1853. 


408 


EAUX  POUSSEES  PAR  LA  VAPEUR. 


Vulcano  (Lipari) 408  mètres. 

Slromboli  (id.) 925 

Hekla  (Islande) 1624 

Etna  (Sicile) 5313 

Pic  de  Ténériffe 5716 

Terror  (glaces  antarctiques) 5800 

Hauna-Loa  (Hawaî) 4155 

Gunung-Dempor  à  Sumatra 4222 

Grand  Ararat 5157 

Sangay  (Quito) 5225 

Popocatepelt  (Mexique) 5410 

;  Klintschew-K^a  (Kamtschatka) 5500 

Cotopaii  (Quito) 5940 

Aconcagua  (Chili) 6854 

Gualatieri  ou  Sahama  (Bolivie) 6990 

Plusieurs  de  ces  hauteurs  sont  sujettes  à  varier,  à  la  suite 
des  éruptions,  qui  peuvent  démolir  ou  exhausser  le  cône 
terminal. 


Fig.  181  —  Cotopaxi,  d'après  HumboU*. 


Les  volcans  actifs,  dont  le  nombre  dépasse  300,  se  ren- 
contrent à  des  longitudes  très  diverses  et  sous  les  latitudes 


*  M.  Th.  Wolf  en  a  récemment  donné  une  vue  intéressante  (Jahrbuch  fur  Minéra- 
logie, 1878). 


VOLCANS  ET  SOLFATARES.  409 

les  plus  différentes.  Habituellement  ils  s'élèvent  en  îles 
du  fond  de  l'Océan  ou  à  très  peu  de  distance  du  litto- 
ral. 

Le  plus  souvent  ils  sont  assez  rapprochés  les  uns  des 
autres  et  constituent  des  séries  linéaires.  Une  remarquable 
rangée  de  volcans  coupe  les  deux  hémisphères.  Commençant 
à  l'extrémité  méridionale  de  l'Amérique,  à  la  Terre-de-Feu, 
elle  longe  toute  la  bordure  occidentale  du  continent  jus- 
qu'au détroit  de  Behring;  elle  traverse  l'océan  Pacifique  par 
l'archipel  des  iles  Aléoutiennes,  puis  se  dirige  vers  le  sud, 
à  travers  le  Kamtschatka,  le  Japon,  le&  Philippines  et  les 
Moluques;  là,  elle  se  divise  en  deux  branches,  presque  à 
angle  droit,  l'une  s'étendant  dans  les  iles  de  la  Sonde,  Java 
et  Sumatra,  jusqu'aux  iles  Andaman  ;  l'autre  dans  la  terre 
des  Papous,  les  archipels  de  Salomon  et  des  Nouvelles-Hébri- 
des et  jusqu'à  la  Nouvelle-Zélande. 

Dans  toutes  les  régions  du  globe,  la  vapeur  d'eau  con- 
stitue le  produit  le  plus  abondant  et  le  plus  constant  des 
éruptions  volcaniques.  Elle  est  aussi  le  moteur  de  leurs 
éruptions,  grâce  à  l'énorme  tension  que  les  températures 
souterraines  lui  ont  fait  acquérir*. 

Dès  le  début  de  l'éruption,  la  vapeur  d'eau  sort  par 
torrents,  entraînant  des  débris  de  toutes  grosseurs,  qu'elle  a 
arrachés  dans  son  trajet  souterrain.  Sa  sortie  n'est  pas  con- 
tinue, mais  intermittente,  et  elle  se  fait  par  énormes  bouf- 
fées successives.  Il  en  résulte  bientôt  une  colonne  nuageuse, 
s'élevant  verticalement  et  s'épanouissant  dans  les  hautes 
régions  de  l'atmosphère,  sous  forme  d'un  pin  d'Italie,  sui- 
vant l'expression  de  Pline.  Cette  colonne  est  souvent  noircie 
fortement  par  les  déjections  solides,  cendres   et  lapillis, 


*  C'est  une  assertion  qu'a  émise  Poulett-Scrope,  dés  1825,  dans  son  ouvrage  classi- 
que sur  les  volcans. 


410 


EAUX  POUSSEES  PAR  U  VAPEUR. 


dont  elle  est  mélangée ,  surtout  au  commencement  de 
l'éruption. 

La  hauteur  de  celte  colonne  est  souvent  très  considérable, 
lorsqu'elle  n'est  pas  emportée  ou  dissoute  par  les  courants 
aériens. 

Lors  de  l'éruption  de  1822,  le  panache  du  Vésuve  formait, 


Fig.  182.  —  Le  Hayon  ou  volcan  d'Albay,  dans  l'Ile  de  Lucon,  d'après  M.  l'Ingénieur  des  mines 
Henri  Abella  y  Casariego.  Son  altidude  est  dei734  mètres*. 

d'après  Monticelli,  un  cylindre  parfait  d'environ  trois  mille 
mètres  de  hauteur  qui,  à  sa  partie  supérieure,  se  courbait 
en  parabole  en  se  dirigeant  du  côté  de  Naples,  suivant  une 
disposition  imposante  que  l'on  a  souvent  reproduite.  M.  Th. 
Wolf  estime  à  huit  ou  dix  mille  mètres  la  hauteur  de  la 
colonne  de  vapeur  du  Cotopaxi,  lors  de  la  grande  éruption 
du  26  juin  1877.  La  figure  181  représente  cette  montagne  à 
son  état  habituel.  La  figure  182  montre  le  Mayon  avec  le 


*  Tramaclious  of  the  seitmologicai  Society  of  Japon ^  t.  V,  p.  23. 


VOLCANS  ET  SOLFATARES. 


411 


panache  de  vapeur  caractéristique.  Plus  récemment,  le 
5  juillet  1880,  lors  de  son  intrépide  ascension  du  Chim- 
borazo,  M.  Whymper  aperçut  un  commencement  d'éruption 
du  Cotopaxi.  Une  colonne  de  fumée  noire  comme  de  l'encre 
s'élevait,  avec  une  immense  rapidité,  jusqu'à  plus  de  six 
mille  mètres  au-dessus  des  lèvres  du  cratère.  A  cette  hau- 


Fig.  185.  —  Colopaxi,  vu  du  Chimborazo  le  3  juillet  18S0,  lors  d'un  commencement  d'éruption. 

D'après  M.  Whymper. 


teur  elle  était  entraînée  par  un  vent  d'est,  à  angle  droit  de  la 
direction  primitive  (fig.  183). 

Très  souvent  la  lave  vient  se  déverser  au  dehors,  soit  par 
les  flancs  de  la  montagne,  qui  est  ordinairement  crevassée, 
soit  par  son  sommet.  L'élévation  à  laquelle  elle  monte, 
dans  certains  cas,  sous  l'impulsion  de  la  vapeur,  témoigne 
de  la  forte  tension  de  celle-ci.  Par  exemple,  au  sommet  de 
l'Etna,  c'est-à-dire  à  3000  mètres  d'altitude,  l'ascension  de 
la  masse  fondue  correspond  à  une  pression  d'au  moins 
1000  atmosphères. 


4iS  E\UX  POUSSÉES  PAR  LA  VAPEUR. 

Les  exhalaisons  ou  fumerolles  qui  sortent  de  la  lave, 
jusqu'à  solidification  complète,  c'est-à-dire  pendant  des 
années  entières,  sont  souvent  riches  en  eau. 

La  prodigieuse  abondance  des  menus  matériaux  qui  sont 
amenés  par  l'éruption  est  aussi  une  preuve  dans  le  même 
sens.  Elle  est  telle  que  le  ciel  en  est  souvent  tout  à  fait 
obscurci.  Lors  de  l'éruption  du  Krakatau  ou  Rakata,  du 
27  août  1885  (fig.  184),  à  10  heures  du  matin,  l'obscurité 
était  complète.  D'après  un  des  témoins  :  «  le  soleil,  étant 
au-dessus  de  notre  tête,  pas  la  plus  petite  lueur  du  ciel, 
pas  la  plus  petite  trace  lumineuse  difTuse  à  l'horizon.  Et 
cette  affreuse  nuit  a  duré  dix-huit  heures.  Le  navire  le 
Loudon  se  trouvait  condamné  à  rester  sur  place,  devant  le 
péril  qui  l'attendait.  » 

Le  28  août,  à  500  kilomètres  à  l'ouest  du  détroit  de  la 
Sonde,  le  navire  le  Salazie  reçut  un  orage  violent,  accompa- 
gné d'éclairs  et  de  coups  de  tonnerre  effrayants  :  après 
quelques  minutes  d'intervalle,  l'eau  fut  remplacée  par  du 
sable  qui  aveuglait  les  voyageurs  et,  bientôt  après,  par  une 
poussière  blanche  et  impalpable,  de  telle  sorte  qu'au  point 
du  jour,  le  navire  semblait  couvert  de  neige. 

Après  l'éruption,  un  énorme  dépôt  de  ces  matériaux  inco- 
hérents recouvrit  le  pays.  Son  épaisseur,  sur  15  kilomètres 
de  rayon,  était  de  20  à  40  mètres  et  quelquefois  de  80. 
Deux  lies,  Stears-Eiland  et  Calmeyer-Eiland,  formées  par 
ces  déjections  prirent  naissance.  En  quelques  heures,  un 
immense  barrage  flottant,  formé  par  des  pierres  ponces, 
fermait  la  baie  ;  sa  longueur  était  d'environ  50  kilomètres 
sur  une  largeur  de  plus  de  1  kilomètre  et  une  profondeur 
de  4  à  5  mètres,  soit  150  millions  de  mètres  cubes  de 
projectiles. 

M.  Yeerbeck  estime  que  le  volume  total  de  sable  et  de 
cendre  de  ce  formidable  cataclysme  s'éleva  à  18  kilomètres 


VOLCANS  ET  SOLFATARES. 


415 


cubes.  Quelque  énorme  que  soit  ce  volume,  il  est  encore  dé- 
passé par  celui  que  vomit  le  Timboro  ou  Tambora,  en  1815, 
volume  qui  était  au  moins  de  150  kilomètres  cubes. 

Lors  de  l'éruption  de  TEtna,  de  1865,  d'après  M.  Fouqué, 
l'un  des  six  cratères  actifs  a  détoné  pendant  cent  jours, 
à  peu  près  toutes  les  quatre  minutes,   en  donnant  chaque 


Fig.  184.  —  Vue  du  Krakataii,  pendant  l'éruption  du  il  aoiU  1885.  D'après  le  bureau 
topographique  de  Batavia. 

fois  naissance  à  une  épaisse  colonne  de  vapeur  d'eau,  ayant 
environ  4000  mètres  carrés  de  section  et  500  mètres  de 
hauteur  et  correspondant  à  un  volume  d'eau  liquide  de 
10  mètres  cubes.  Les  six  cratères  fournirent  donc  22000.mè- 
tres  cubes  d'eau  par  jour,  soit  environ  2  millions  de  mètres 
cubes  pendant  la  durée  totale  de  l'éruption. 
D'ailleurs  les  pluies  torrentielles  que  provoquent  souvent 


414  ËALX  FOUSSËES  PAR  LA  VAPEIR. 

les  nuages  engendrés  par  Téruplion,  sont  également  une 
preuve  de  la  grande  quantité  d'eau  qu'elle  apporte. 

Toutes  caractéristiques  qu'elles  soient,  les  éruptions  sont, 
pour  la  plupart  des  volcans,  un  état  exceptionnel,  dont  la 
durée  est  incomparablement  moindre  que  celle  du  repos. 

On  sait  que  lors  de  sa  mémorable  éruption  de  l'an  79, 
le  Vésuve  était  depuis  bien  des  siècles  à  un  repos  si  complet 
que  les  habitants  traitaient  de  légendes  le  souvenir  des 
anciennes  éruptions.  Depuis  lors,  il  y  en  a  eu  un  grand 
nombre  et  de  très  récentes.  Le  volcan  de  File  d'Ischia, 
l'Epomeo,  n'a  pas  donné  d'éruption  depuis  1502. 

Comme  exception  à  ces  intermittences,  on  peut  citer  l'ac- 
tivité permanente  du  Stromboli,  qui,  avec  des  intensités 
variables,  persiste  depuis  plus  de  deux  mille  ans,  avec  un 
bain  de  lave  en  ébuUition  permanente.  Ce  petit  cône  est 
connu,  depuis  l'antiquité,  des  navigateurs  qui  considèrent 
sa  colonne  comme  un  pronostic  du  temps,  servant  à  la  fois 
de  baromètre  et  d'hygromètre. 

Lorsque  les  volcans  ne  sont  pas  dans  le  paroxysme  de 
l'éruption,  ils  ne  sont  pas  complètement  inactifs  :  le  plus 
souvent  ils  exhalent  de  la  vapeur  d'eau,  reconnaissable  au 
panache  qui  les  surmonte  (fig.  181).  Daprès  M.  Whymper, 
rimpteant  Cotopaxi,  lorsqu'il  tenta  de  l'escalader  en  fé- 
vrier 1880,  lançait  constamment  de  l'eau,  mais  d'une  ma- 
nière très  inégale;  les  18  et  19  février,  sans  projeter  de 
pierres,  la  vapeur  s'élevait  en  un  jet  d'une  grande  violence, 
en  bouillonnant  du  fond  de  l'abime. 

Il  est  une  sorte  de  demi-activité,  dont  la  solfatare  de 
Pouzzoles  peut  servir  de  type,  et  qu'atteste  une  émanation 
continue  de  vapeur  d'eau,  accompagnée  d'hydrogène  sulfuré 
et  de  quelques  autres  substances.  Le  nom  de  cette  petite 
montagne  est  devenu  générique  et  s'applique  à  d'autres 
sources  continues  de  vapeurs,  jaillissant  également  de  cra- 


VOLCANS  ET  SOLFATARES.  4i5 

tères  ou  dans  leur  voisinage,  tels  qu'on  en  voit  à  Yulcano,  à 
Milo,  au  Demavend,  à  la  Guadeloupe,  à  la  Réunion,  à  Java, 
au  Chili  et  ailleurs.  Leur  association  aux  montagnes  volcani- 
ques les  distingue  des  sofGonis,  dont  il  a  été  question  plus 
haut  et  qui  sortent,  non  de  cratères,  mais  de  simples  fissu- 
res profondes. 

A  part  les  solfatares  les  plus  répandues  et  qui  ont  ordi- 
nairement leur  siège  dans  des  cratères,  il  en  est  d'une  autre 
catégorie,  que  M.  Domeyko  a  très  bien  fait  connaître  au 
Chili  *.  Ces  dernières  sont  latérales^  c'est-à-dire  placées  sur 
les  flancs  de  grands  cônes  volcaniques. 

Les  faits  remarquables  qui  se  rapportent  à  l'origine  des 
solfatares  de  cette  catégorie  méritent  d'être  rapportés  avec 
quelques  détails,  à  cause  de  la  lumière  nouvelle  qu'ils  jet- 
tent sur  les  phénomènes  qui  nous  occupent. 

La  solfatare  de  Gerro  Azul,  au  Chili,  dans  le  grand  massif 
trachytique  des  Descabczados,  s'est  ouverte  tout  récemment 
dans  une  gorge  profonde,  entre  deux  montagnes  volcaniques 
et  à  la  limite  méridionale  du  massif  des  deux  Descabczados. 
Le  26  novembre  1847,  à  la  suite  de  bruits  extraordinaires 
ressemblant  à  des  détonations  ou  à  des  mugissements  et  qui 
continuèrent  le  lendemain,  la  montagne  de  Cerro  Azul,  du 
côté  du  nord,  apparut  en  feu.  Quinze  jours  après,  deux  gar- 
diens de  troupeaux  trouvaient  le  passage  qu'ils  suivaient 
d'habitude  obstrué  par  d'énormes  blocs,  qui  exhalaient  des 
fumées  épaisses,  au  milieu  desquelles  on  apercevait  des 
flammes.  Le  phénomène  eut  lieu  à  des  altitudes  comprises 
entre  3000  et  1650  mètres,  sur  une  longueur  de  8  à  9  kilo- 
mètres. 

Dans  toute  son  étendue,  la  solfatare  se  compose  d'énor- 
mes blocs  trachytiques  fracturés,  à  arêtes  vives,  soulevés  et 

^  Annaleê  des  Mines,  V  série,  t.  IX,  p.  1G8,  1870. 


416 


KAUI  POUSSËES  PAR  LA  VAPEUR. 


entassés  les  uns  sur  les  autres,  et  formant  des  monceaux,  qui 
ont  80  à  100  mètres  de  hauteur  au-dessus  du  sol.  Du  milieu 
de  ces  monceaux  on  voyait  sortir,  sur  toute  la  longueur  de 
la  solfatare,  d'innombrables  fumerolles  et,  de  temps  eu 
temps,  des  jets  plus  élevés  de  vapeur,  accompagnés  de 
bruits  et  de  projections  de  pierre.  Mais  on  n'y  a  pas  trouve 
de  matières  fondues,  ni  de  projections  de  lapilli,  de  ponce 
ou  de  cendres  volcaniques,  que  les  volcans  actifs  du  Chili 
rejettent  dans  leurs  éruptions.  Tout  annonce  que  la  solfatare 


Fig.  185.  —  Vue  d'une  des  solfatures  éteintes  représentées  sur  U  carte,  fig.  187. 
D'après  M.  Domeyko. 


s'est  ouverte  d'un  seul  coup,  sur  une  crevasse  longitudinale, 
formée  dans  la  croûte  trachytique  du  massif  et  produite  par 
le  dégagement  violent  de  la  vapeur  d'eau. 

En  1877,  il  y  avait  quatre  années  qu'elle  était  complète- 
ment éteinte;  elle  ne  dégageait  plus  traces  de  fumées,  ni  de 
vapeurs  ;  mais  elle  conservait  à  peu  près  la  configuration  et 
la  hauteur  qu'elle  possédait  à  l'époque  de  sa  formation. 

C'était,  vu  à  une  certaine  distance,  un  solide  de  forme 
assez  régulière,  que  représentent  les  figures  185  et  186. 

Si  l'on  jette  maintenant  un  regard  sur  la  carte  (fig.  187) 


VOLCANS  KT  SOLFATARES. 


il7 


on  y  voit  indiquées,  autour  du  grand  massif  triangulaire  que 
dominent  deux  énormes  cônes  volcaniques  à  cratères  éteints, 
outre  celle  dont  il  vient  d'être  question,  quatre  autres  sol- 
latares  qui  ont  les  mêmes  caractères  et  sans  doute  la  même 
origine.  Ces  solfatares  ne  montrent  plus  que  les  traces  d'au- 
tant de  soupiraux  ou  crevasses  latérales  {respiraderos  ou 
canaux  de  respiration),  qui  à  diverses  époques  se  sont  ou- 
vertes sur  les  flancs  du  massif,  peut-être  par  suite  de  l'ob- 
struction du  volcan. 

Il  faut  ajouter  que  des  phénomènes,  semblables  à  ceux  qui 


Fig.  186.  —  Coupe  Iransversale  d'une  des  solfalares  éteintes  représentées  sur  la  carte  fig.  187 
et  dont  la  vue  est  représentée  par  la  figure  précédente.  —  D'après  M.  Domcyko. 

ont  eu  lieu  à  la  naissance  et  pendant  toute  l'époque  d'activité 
de  la  solfatare  de  Cerro  Azul  \  se  sont  reproduits,  bien  qu'à 
de  grands  intervalles  de  temps,  sur  d'autres  points  de  la 
chaîne  méridionale  des  Andes.  Ainsi  il  est  connu  qu'en  1845, 
aux  approches  du  volcan  éteint  de  San  José  (lat.  SSMC),  d'une 
altitude  de  6098  mètres,  on  entendit,  à  plusieurs  lieues  de 
distance,  des  bruits  épouvantables  qui  venaient  de  cette 


1.  M.  Donieyko  n'a  pas  reculé  devant  les  fatigues  de  trois  voyages  successifs  pour 
suivre  les  phases  de  cette  soliataii;. 

27 


418 


EAUX  IH)USS£ES  PAK  LA  YAPRIR. 


cordilHèrc.  11  se  forma  une  crevasse  dans  la  direction  du 
volcan,  vers  la  vallée  de  Jeso,  où  passe  le  chemin  de  Men- 
doza  ;  d'énormes  las  de  pierres  et  de  rochers  brises  furent 
rejelés  et  envahirent  la  vallée.  Pendant  longtemps  ces  dé- 
combres exhalèrent  des  fumées  et  de  la  vapeur  d'eau,  sans 


^^^mm^^"^ 


Echelle  : 


10  ts 


-1—1 — 1__| 


Fig.  187.  —  Carie  représentant  les  cinq  solfatares,  qui  se  sont  ouvertes  dans  le  massif  des  deoi 
Descabesados.  Les  solfatares  aont  représentées  par  des  hachures.  —  D'après  M.  Domeyko. 


qu'il  y  eut  le  moindre  indice  d'éruption  et  d'activité  au  cra- 
tère du  volcan. 

Ces  phénomènes  indiquent  l'origine  et  servent  à  expliquer 
la  formation  des  rangées  de  conglomérats  trachytiques,  qu'on 
voit  souvent  former  des  crêtes  allongées  et  saillantes,  sur  des 
pentes,  peu  accidentées  d'ailleurs,  des  montagnes  volca- 
niques. 

La  solfatare  de  Chillan,  que  Ton  connaît  aussi  sous  le 


VOLCANS  ET  SOLFATARES.  41 U 

nom  de  Cerro  (ou  Cerrito)  de  Azufre,  peut  être  prise  comme 
type  de  solfatares  latérales  permanentes. 

En  face  de  la  ville  de  Chillan,  chef-lieu  de  la  province 
de  Nubie  (latitude  36^  48'),  et  un  peu  à  l'ouest  de  la  ligne  de 
séparation  des  eaux,  dans  les  Andes,  s'élèvent,  Tun  à  côté 
de  l'autre,  deux  cônes  volcaniques  nommés  Volcan  Nuevo 
de  Chillan  et  Nevado  ou  Volcan  Viejo  de  Chillan.  Une  fi- 
gure du  massif  sera  donnée  plus  loin.  Le  sommet  craléri- 
forme  du  Nevado  atteint  la  hauteur  d'environ  3000  mètres 
au-dessus  du  niveau  de  la  mer.  De  ces  deux  volcans,  le 
Nevado  parait  être  éteint  depuis  un  temps  immémorial, 
tandis  que  son  voisin,  le  Volcan  Nuevo,  a  produit  le  2  août 
1861  des  éruptions  de  laves,  accompagnées  de  matières 
incohérentes  et  de  cendres,  que  le  vent  emportait  a  plus 
de  50  kilomètres  de  distance.  En  général,  ce  groupe  vol- 
canique et  les  montagnes  qui  Tenvironnent  se  composent 
de  roches  trachytiques,  de  même  espèce  que  celles  du  massif 
des  deux  Descabezados.  A  la  base  du  cône  du  Volcan  Viejo, 
dit  le  courageux  auteur  de  la  carte  géologique  du  Chili, 
M.  Aimé  Pissis,  Jaillissent  de  nombreuses  bouffées  de  vapeur 
connues  sous  le  nom  de  Vulcancitos  (petits  volcans).  Parmi 
les  bouffées  intermittentes,  qui  rappellent  sur  une  petite 
échelle  les  geysers  d'Islande,  les  plus  notables  se  trouvent 
près  de  l'établissement  des  bains  et  occupent  le  fond  d'une 
cavité  coniqu(î  qui  paraît  avoir  été  produite  par  une  ex- 
plosion. La  vapeur  qui  s'en  dégage  presque  continuelle- 
ment s'arrête  par  moment  :  on  entend  alors  un  bruit  sourd  ; 
puis  survient  une  forte  projection,  qui  élève  à  quelques 
mètres  de  hauteur  une  colonne  d'eau  bouillante,  avec  des 
sifllements.  Bientôt  arrive  un  nouveau  temps  de  repos  et  le 
même  phénomène  se  répète  par  intervalle  de  quelques 
minutes. 
Une  solfatare,  tout  a  fait  semblable  a  celle  de  Chillan, 


420  EAUX  1H)USS£ES  PAR  LA  VAPEUR. 

existe  à  deux  degrés  de  latitude  plus  au  nord,  près  de  la 
base  du  volcan  éteint  Tinguiririca,  dont  le  sommet  s'élève 
à  4478  mètres  au-dessus  de  la  mer;  elle  porte  aussi  le 
nom  de  Cerro  de  Azufre.  Ses  vapeurs  marquent  OO*  à  Tori- 
lice  de  sortie. 


LIVRE  II 

TEMPÉRATURE  DES   EAUX  SOUTERRAINES 


CHAPITRE    PREMIER 

TEMPÉRATURE    DES    SOURCES    ORDINAIRES 

La  température  moyenne  des  sources  est  en  général  voisine 
de  la  tempéralure  moyenne  du  lieu  \  ordinairement  un  peu 
supérieure,  quelquefois  un  peu  moindre. 

Dans  beaucoup  de  cas  cette  température  moyenne  peut 
être  obtenue  approximativement  par  un  petit  nombre  de 
mesures,  les  écarts  étant  en  général  peu  considérables  pour 
des  sources  dont  le  réservoir  n'est  pas  tout  à  fait  superficiel. 
Ainsi,  en  1881,  les  sources  hautes  de  la  Vanne  ont  varié  seule- 
ment de  11"  à  11%7'.  Pour  la  Fontaine  de  Vaucluse,  les  plus 
grandes  variations  entre  les  moyennes  mensuelles  ont  été,  en 
1881,  de  0%7  et  en  1883,  de  1".  La  température  moyenne  a 
été,  pour  chacune  de  ces  deux  années,  de  12%7  et  inférieure 
de  0%7  à  la  température  moyenne  de  l'air  en  1881. 

En  étudiant  pendant  plusieurs  années  la  disposition  des 
eaux  souterraines  dans  le  bassin  du  Rhin',  j'ai  pris  la  tem- 

*  Cette  température  atteint  26  de^és  à  l'équateur  et,  par  conséquent,  excède  beau- 
coup celles  des  nombreuses  sources  thermales  des  pays  tempérés. 

*  Ainsi  qu'on  pouvait  le  prévoir,  à  leur  réservoir  de  Paris  (Nontsouris),  les  écarts 
ont  été  plus  considérables. 

s  Annale*  des  Mineê,  4»  série,  t.  XV.  p.  459. 1848. 


422  TRMPËRATURE  DES  SOURCES  ORDINAIRES. 

pératurc  d*un  grand  nombre  de  sources  qui  sonl  situées  à 
des  altitudes  différentes  et  dans  des  conditions  géologiques 
variées.  Le  but  principal  de  ces  observations  était  de  chercher 
u  distinguer  plusieurs  des  influences  qui  concourent  à  déter- 
miner la  température  d'une  source,  telles  que  la  profondeur 
de  son  réservoir  d'alimentation,  la  nature  et  la  disposition 
des  roches  avoisinantes,  son  élévation  au-dessus  de  la  mer. 
Toutes  ces  températures,  dont  les  valeurs  les  plus  certaines 
ont  été  consignées  dans  le  tableau  ci-après,  ont  été  prises 
avec  un  thermomètre  centigrade  fort  exact,  sur  lequel  on 
pouvait  apprécier  les  dixièmes  de  degré*. 


*  Ces  mesures  ont  été;  pour  la  plupart,  prises  en  juin,  juillet  et  aoât,  dans  les  années 
1846  et  1847. 


TEMPÉRATURE  DES  SODRCES  ORDINAIRES. 


4S3 


Températurei  de  sources  situées  à  différentes  altitudes  dans  la  vallée 
du  Rhin  et  en  Lorraine*. 


DÉSIGNATION 

DK     LA     flOUKGK* 


Source  du  Rauscbendwasser. 

prëa  Niederbronn 

Puite  du  faubourg  de  Lichleii- 

thal  à  Bade  (duché  de  Bade) . 
Sources  de  Lichtentbal,  pré^ 

Bade  (duché  de  Bade) 

Source  de  la  forêt  de  Frobrei, 

près  de  Niederbronn 

Forte  source  dans  la  Tallée  de 

Dossenheim,  pi*è8  du  Xtllerhif . 
Autre  forte  source,  près  de  h 

précédente 

Source  de  Niederbronn  à  l'ex- 
trémité orientale  de  la  Ville. 
Source  de  Yfimenau 


Sources  de  Kintzbeini. 


Sources  des  environs  de  Lem- 
bach 

Sources,  de  Bonnefontaine. 
commune  d'AltwiUer 


Sources  du  bas  de  la  ville  de 
Bouxwiller  (Fischpfuhl). . . 

Source  de  Weiterswiller. . . . 

Sources  d'Orschwiller 

Source  d'Avenheim 

Source  salée  de  Diemeringen 
Source  salée  du  même  village 


Source  du  hameau  de  GraufT- 
tbaU  prés  d'Escbbourg. . 


appro- 
ximative. 


luëlres. 
180 
180? 
180? 
185 
100 
105 


105 
200 


200 

210 
215 

220 

224 
225 
250 
230 
230 


240 


TEXPÉRA- 
TURK. 


deiçrés  C. 

10,6 
10,G 
10,6 
10,5 
10,5 
10,5 


10,5 
10,6 


10,7 

10,2 
10,5 

10,5 

10,5 
10,7 
10,8 
10,0 
10,1 


10,3 


TERRAIN 

d'où 
sort  la  source. 


Grés  bigarré. 

Grès  rouge. 

Idem. 

Marnes  irisées. 

Grès  des  Vosges. 


OBSERVATIONS. 


Muschelkalk. 
Grès  des  Vosges, 


Jonction  du 
granité  et  du 
muschelkak. 

Muschelkalk. 

Marnes  irisées, 


Calcaire  ooli 
Ihique  inférieur 
Grès  des  Vosges. 
Granité. 
Keuper. 
MiuiMlilkiifériNr. 
Idem. 


Grès  des  Vosges. 


Ces deux sour- 
ces sont  situées 
au  fond  d'une 
I  vallée  de  hi  chaî- 
ne des  Vosges 


Cette  source 
sort  aussi  au 
fond  d'une  val- 
lée de  la  chaîne 
des  Vosges. 


Ces  sources 
sont  vulgaire- 
ment qualifiées 
d*eaux  minera- 
les. 


A  Gorxe,  près 
Uetx  (Moselle), 
la  température 
de  deux  fortes 
sources  situées 
à  une  altitude 
d'environ  230- 
estde9-,«etl0*. 


1.  Od  ne  fait  figurer  dans  ce  tableau  que  les  sources  dont  on  a  pu  prendre  la  température  au 
point  même  où  elles  jaillissent. 

2.  Les  localités  dont  la  position  n'est  pas  indiquée  appartiennent  à  l'ancien  département  du 
Bas-Rhin. 


i-2i 


TEMPÉRATURE  DES  SOURCES  ORDINAIRES. 


DÉSIGNATION 

ALTITUDE 

mrfaA- 

TCMAIX 

appro- 

d'où 

OKUTATIO!l«. 

Dl     LA     lODRtB. 

linalive. 

TCie. 

sort  la  souire. 

moires. 

degrés  C. 

Source  du  pied  du  Bastberg 

(Bouiwiller) 

260 

iO  S 

fslmiPA     H'pflii 

Source  de  Wingen,  près  de 

iw,* 

douce. 

Urnbach 

SOO 

10.2 

Grès  bigarré. 

«70 

10,3 

IncMbi  iBfmnr 

Source  de  liurstcll 

275 

10,2 

Muschdkalk. 

l'ouest  du  Klingentha] .... 

280 

10,2 

Grés  des  Vosges. 

Source  de  Siewiller 

280 

10,1 

Iliisi*hplkiilk 

Source  de  lloegen 

28J 

Grès  des  Vosges. 

Source  de  Maricnbronn,  piùs 

w,o 

Cette    source 

Lobcann 

300 

10,4 

Idem. 

sort  sur  la  faille 
terminale      du 
grés  des  Vosges. 

Source  de  Erlenhof,  près  Thaï . 

200 

9,0 

Idem. 

Source  de  Honcourt,  préa  Ville. 

300 

0,5 

ScUsIiiitraBiliii. 

Source  de  Neufbois 

300 

9.1 

Grès  rouge. 

Source  dite  Teufelsbrunncn, 

dans  la  forêt  de  Ville 

320 

0,7 

Idem. 

Source  prés  de  Petersbacb.. . 

330 

9,4 

Muschelkalk. 

Source  de  Meissengotte 

360 

8.6 

Timiiiitrtntiii. 

Source  de  laModer,  àModerCeld 

375 

8,(i 

Grès  des  Vosges. 

Soui*ce  située  au  pied  du  Hoh- 

kœnigsbourg  (revers  sep- 

tentrional)   

300 

8,6 

Terrain  houiller 
Calcaire 

Source  de  la  mi  ne  de  Grandi  on  - 

C'est  une  des 

taine.prés  Framont  (Vosges) 

475 

8,0 

de  transition. 

curées  les  plus 

Source  de  la  base  du  HohkcF- 

''ortes  du  pays. 

nigsbourg  (autre  que  celle 

désignée  plus  haut) 

550 

7,6 

Grès  des  Vosges. 

SourceduHuhwald.à  la  mon- 

tée du  Champ  du  Feu 

600 

7,5 

Granité. 

Autre  source  située  non  loin 

620 

7  2 

Syénite. 

Source  abondante  eorUnt  dtr 

'i* 

la  galerie  de  Terlingoulte 

près  Framont  (Vosges) .... 

630 

ï,t 

fiibdetniBtîiL 

Source  de  la  base  du  Climont. 

700 

7,1 

UrèsdesVo.-gc>. 

Autre   source  de  la  base  du 

Climont 

750 

0,4 

Idem. 

Source  du  Scliœflerlagcr  au 

Hohwald 

780 

1,î 

Granité. 

Source  à  1  kilomètre  au  sud 

de  la  maison  forestière  de 

la  Rothlach  (Champ  du  Feu) . 

820 

6,1 

Syénite. 

Source  de  la  Kitzmatt  (Champ 

du  Feu) 

850 

8,5 
6,6 

Diorite. 
Granité. 

Sourcede  la  Magel  (Ch.  du  Feu) 

880 

Source  de  la  maison  forestière 

de  U Rothlach  (Ch. du  Feu). 

920 

5,8 

Idem. 

TEMPÉRATURE  DES  SOURCES  ORDINAIRES.  425 

La  plupart  de  ces  sources  qui  arrivent  au  jour  sans  se  mé- 
langer à  des  eaux  superficielles,  subissent  seulement  dans 
leur  température,  pendant  le  courant  de  l'année,  de  faibles 
variations  qui,  en  général,  ne  dépassent  pas  quelques  dixiè- 
mes de  degré.  Une  seule  observation  peut  donc  déjà  faire 
connaître  approximativement  la  température  moyenne  d'une 
source  placée  dans  ces  conditions,  surtout  si  son  volume 
est  considérable. 

Il  n'en  est  pas  ainsi  de  celles  qui  sortent  des  sables  dilu- 
viens ou  tertiaires,  dont  les  réservoirs  sont  peu  profonds  ; 
plusieurs  d'entre  elles  dérivent  en  effet  d'infiltrations  d'une 
rivière  ou  d'un  ruisseau  peu  éloigné.  Tel  est  le  cas  pour  une 
ligne  de  sources  qui  sortent  des  terrains  tertiaires  supérieurs, 
entre  Bischwiller  etSoufflenheim,  et  qui  sont  alimentées  par 
des  infiltrations  de  la  Moder;  quoiqu'elles  soient  très  abon- 
dantes, la  température  de  ces  sources  varie,  selon  les  saisons, 
de  8% 5  à  12%5,  c'est-à-dire  avec  une  amplitude  de  4\ 

Voici  quelques  faits  généraux  qui  ressortent  des  chiffres 
consignés  dans  le  tableau  des  observations  : 

IM^es  sources  situées,  soit  dans  la  plaine  et  les  collines 
basses  de  l'Alsace,  soit  dans  les  vallées  des  Vosges  et  de  la 
Forêt  Noire,  ne  diffèrent  en  général,  dans  leur  température 
moyenne  que  de  0%8  au  plus,  lorsqu'elles  sont  à  des  altitudes 
très  rapprochées  et  à  égale  hauteur  au-dessus  du  niveau  de  la 
mer.  Il  est  remarquable  de  trouver  autant  d'uniformité  dans 
la  température  d'eaux  qui  jaillissent  de  terrains  les  plus  va- 
riés dans  leur  nature,  leur  relief  et  leur  exposition. 

La  température  moyenne  des  sources  situées  dans  la  vallée 
lu  Rhin,  entre  180  et  260  mètres  de  hauteur  au-dessus  de  la 
mer,  et  entre  les  latitudes  de  48%20'  et  49%  est  de  10%5,  va- 
leur qui  correspond  à  une  altitude  moyenne  de  212  mètres. 

La  grande  nappe  d'eau  qui  imbibe  le  gravier  de  la  plaine 
du  Rhin  possède  à  Strasbourg,  d'après    des  observations 


49G 


TEMPÉRATURE  DES  SOURCES  ORDINAIRES. 


faites  en  1846  et  1817,  une  température  moyenne  d'environ 
10%2,  qui  est  un  peu  inférieure  à  celle  des  sources  propre- 
ment dites. 

2"  On  peut  juger,  par  un  simple  coup  d'œil,  de  la  manière 
suivant  laquelle  diminue  la  température  des  sources,  à  mesure 
que  Ton  s'élève,  en  examinant  la  fig.  188.  Dans  la  courbe 


Mûre* 


MO 

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1      10     il 

Fig.  188.  —  Tableau  firaphique  de  la  températnre  des  soorces  de  la  vallée  du  Rhin  et  de  a 
chatne  des  Vosges.  La  courbe  repn^ente  la  ligne  thermométrique  des  sources  ordinaires; 
les  letlres  a^b^c^  tf,  e,  f,  correspondent  aux  températures  de  quelques  sources  qui  sortent 
de  dislocations;  a,  Kûttobheim;  fr,  papeterie  de  Reichslioffen ;  r,  Châtenois;  d,  SoulU-les- 
Bains  ;  «,  Niederbronn  ;  f,  Wasselonne. 


les  abscisses  représentent  les  températures,  et  les  ordonnées, 
les  altitudes  au-dessus  de  la  mer. 

La  ligne  déterminée  par  Tensemble  de  ces  points  s'éloigne 
notablement  de  la  ligne  droite,  ce  qui  montre  qu'ici  le 
décroissement  dans  la  température  des  sources  n'est  pas  tout 
à  fait  uniforme  à  mesure  que  Ton  s'élève.  Dans  la  plaine,  et 
dans  les  collines  de  hauteur  inférieure  à  280  mètres,  le 
décroissement  n'est  à  peu  près  que  de  1*  par  200  mètres  ; 
de  280  à  360  mètres  d'altitude,  la  diminution  est  beaucoup 


TEMPÉRATURE  DES  SOURCES  ORDINAIRES,  427 

plus  rapide  :  elle  est  de  1"*  par  120  mètres;  à  partir  de 
360  mètres,  et  jusqu'à  920  mètres,  le  décroissement  redevient 
le  même  que  dans  la  plaine,  c'est-à-dire  P  par  200  mètres. 
C'est  quand  on  quitte  le  sol  à  ondulations  douces  pour  passer 
aux  pentes  abruptes  des  montagnes  que  le  décroissement 
devient  plus  prononcé. 

5*  Dans  la  région  de  la  vallée  du  Rhin  sur  laquelle  s'éten- 
dent les  observations,  et  à  toutes  les  hauteurs,  il  y  a  excès 
de  la  température  moyenne  des  sources  sur  celle  de  l'air.  En 
effet,  si  l'on  rapproche  les  températures  moyennes  de  Stras- 
bourg, Carlsruhe,  Bâleet  FribourgS  on  trouve  que  la  tempé- 
rature moyenne  de  l'air  dans  cette  partie  delà  vallée  du  Rhin, 
et  à  l'altitude  de  212  mètres,  est  très  rapprochée  de  9%9  ;  à 
cette  hauteur,  la  température  des  sources,  qui  est  de  10%5, 
excéderait  donc  celle  de  l'air  de  0%6. 

Cet  excès  paraît  croître  avec  la  hauteur,  de  même  qu'il 
arrive  avec  Taugmentation  de  latitude;  ainsi  à  Saint-Biaise, 
dans  la  Forêt  Noire,  à  771  mètres  de  hauteur,  la  température 
de  l'air  est  de  5%20*;  la  température  moyenne  des  sources 
situées  à  la  même  altitude  est  de  6%8;  elles  surpassent  par 
conséquent  de  1%6  la  température  de  l'air.  D'après  de  Hum- 
boldt,  un  excès  de  température  de  même  sens  s'observe 
dans  les  contrées  centrales  de  l'Europe,  où  il  tombe  plus 
d'eau  en  été  qu'en  hiver;  l'inverse  a  au  contraire  lieu  dans 
les  régions  méridionales,  qui  reçoivent  à  peu  près  toute  leur 


*  Voici  de  quelles  données  on  peut  partir  : 

Haotenr.  Tempénture  moyenne. 

Strasbourg 144  9*>,8 

Carlsruhe 118  10»,32 

Bâle 260  0»,«2 

Fribourg 280  9o,75 

Moyenne 203  0o,89 

Les  valeurs  relatives  aux  trois  dernières  localités  sont  empruntées  à  l'ouvrage  de 
Walchner  :  Handbuch  der  Ceognosie,  2*  édition,  p.  188. 

*  Walchner.  Même  ouvrage, 


iSA  TEMPÉRATURE  DES  SOURCES  ORDINAIRES. 

pluie  pendant  la  saison  d'hiver,  ainsi  que  Humboldl  l*a  ob- 
servé le  premier  '.  I^opold  de  Buch  pensait  également  que 
ces  différences  sont  en  rapport  avec  les  quantités  relatives 
de  pluie  qui  tombent  dans  chaque  saison  \  Cette  inégale 
répartition  de  la  pluie  suivant  les  saisons,  quoique  ayant  une 
influence  évidente,  ne  parait  pas  contribuer  seule  à  élever 
la  température  moyenne  des  sources  au-dessus  de  celle  de 
Tair,  dans  les  régions  froides  où  la  température  de  Taîr  est 
pendant  plusieurs  mois  au-dessous  de  zéro.  En  effet,  Feau 
qui  tombe  pendant  l'hiver  à  l'état  de  neige,  et  souvent  à 
quelques  degrés  au-dessous  de  zéro,  ne  s'introduit  pas  dans 
le  sol  avec  sa  température  primitive  ;  elle  ne  s'écoule  vers 
les  réservoirs  des  sources  qu'après  s'être  préalablement 
échauffée,  au  moins  jusqu'à  zéro,  aux  dépens  de  l'atmo- 
sphère, qu'elle  refroidit  en  outre,  en  lui  empruntant  aussi 
la  quantité  de  chaleur  nécessaire  pour  se  fondre.  De  là  une 
seconde  cause,  qui  s'ajoute  à  la  première  dans  les  latitudes 
moyennes  et  élevées,  pour  élever  la  température  des  sources 
comparativement  à  la  température  moyenne  de  l'air. 

A  mesure  que  l'on  s'élève  dans  les  régions  montagneuses, 
où  il  tombe  annuellement  une  forte  proportion  de  neige,  la 
température  des  sources  parait  donc  diminuer  moins  rapi- 
dement que  celle  de  l'air. 

On  verra  que  la  température  des  fontaines  artésiennes  est 
supérieure  à  la  température  de  la  surface,  et  que  l'augmen- 
tation de  température  est  en  général  en  raison  d'un  degré 
centigrade  pour  20  ou  50  mètres  de  profondeur.  En  laissant 
de  côté  les  sources  qui  sortent  de  failles  ou  du  terrain  basal- 
tique, il  est  remarquable  de  ne  pas  rencontrer  dans  les  ter- 
rains stratifiés  de  sources  dont  la   température  dépasse  la 

«  Annales  de  Gilbert,  t.  XXIV,  p.  46. 

*  Léopold  de  Buch.  Description  physique  des  îles  Canaries.  Traduction  française 
p.  81  et  suivantes. 


TEMPÉRATURE  DES  SOURCES  ORDINAIRES.  429 

température  moyenne  de  l'air  de  plus  de  1%6;  pourla  plupart, 
la  différence  est  même  au-dessous  de  1*".  Cela  parait  résulter 
de  ce  que  les  réservoirs  des  sources  sont  généralement  peu 
profonds. 

¥  Au  milieu  de  l'uniformité  générale  de  la  température 
des  sources,  le  massif  du  Kaiserstuhl,  dans  le  duché  de  Bade, 
présente  une  anomalie  remarquable. 

Ce  petit  groupe  montagneux  qui  surgit  de  la  plaine  du  Rhin 
entre  les  Vosges  et  la  Forêt  Noire,  jusqu'à  une  hauteur  de 
558  mètres  au-dessus  de  la  mer,  ou  de  380  mètres  au-dessus 
de  la  plaine,  a,  suivant  la  plus  grande  dimension,  un  dia- 
mètre de  15  kilomètres.  Il  est  très  riche  en  sources  :  c'est, 
avec  les  sables  tertiaires  supérieurs  du  Sundgau,  la  région  de 
la  plaine  du  Rhin  la  plus  riche  en  sources  que  je  connaisse. 
Ce  fait  rappelle  celui  observé  par  M.  le  comte  de  Mandelslohe 
en  Wurtemberg,  où  les  nombreux  pointements  basaltiques 
se  distinguent  par  de  belles  sources. 

Considéré  dans  son  ensemble,  le  Kaiserstuhl  se  compose 
d'une  roche  riche  en  pyroxène,  que  l'on  désigne  ordinaire- 
ment sous  le  nom  de  dolérite  et  qui  appartient  à  la  famille 
du  basalte.  Celte  roche  très  fissurée  en  tous  sens  est  en  outre 
perméable  par  elle-même  sur  différents  points,  par  suite  de 
ses  boursouflures  ;  elle  permet  donc  aux  eaux  météoriques  de 
s'y  infiltrer  avec  facilité.  Aussi  des  sources,  dont  beaucoup 
sont  fort  abondantes,  jaillissent  du  fond  des  vallons  et  de 
leurs  principales  ramifications  ;  elles  sont  particulièrement 
nombreuses  vers  la  limite  du  basalte  et  du  loess,  qui  forme 
vers  le  bas  une  sorte  de  batardeau;  elles  sortent,  soit  de  l'un, 
soit  de  l'autre  terrain,  entre  200  et  280  mètres  d'altitude  ;  je 
n'en  ai  point  observé  qui  soit  à  un  niveau  de  plus  de 
100  mètres  au-dessus  de  la  plaine.  Leur  volume  varie  en 
général  peu  sensiblement  de  l'hiver  a  l'été,  et,  par  suite, 
leur  température  doitaussi  avec  les  saisons  faiblement  varier. 


450 


TEMPÉRATURE  DES  SOURCES  ORDINAIRES. 


TompdratiiroB  de  quelques  sources  du  massif  basaltique  du  Kaisentuhl, 

duché  de  Bade. 


DÉSICNATION 

DB     LA     tOl'RCB. 


Source  du  Rleinthal,  à  1  kil. 
N.-O.  dHhringen 

Source  dans  la  même  vallée. 

Trois  MMirces  du  vallon  situ^ 
au  M.  d'IhriDgen 

Source  du  vallon  situé  au  N. 
d'lbringen(canton  dit  Ziegell 

Une  forte  source  située  au  N. 
d'Ihringen 


Source  au  canton  dit  Himmel- 
burg«  près  d'une  habita- 
tion isolée 


Source  dite  Sauerwasser,  à 
200  mètres  à  l'ouest  de  la 
pi'écédente 


Source  à  Zwarenbach,  à  3  kil. 
d'ibringcn ... 


Source  du  Brunnthal.. 

Source  du  Muhltbal 

Source  de  AVascnweiler . . 


Source  du  bain,  à  Oberschaff- 
hausen 


Autre  source  prés  du  mémo 
village 


Trois  sources  au  fond  d'un  val- 
lon, près  d'Oberschaffhau- 
sen 


Source  du  village  de  Vogstburg 

Source  du  vallon  de  Vogstburg. 
près  du  Badloch 


TciipiaA- 

TOftK. 


degrés  C. 
13,2 
12,5 

14.5 

11,6 

13,1 

13,1 

12,3 

12,7 
11,6 
12,0 
13,1 

12,7 

12,7 

10,8 
10,4 

18»! 


TKftEAia 

d'où 
sort  la  source. 


Look. 


Basalte. 
Id. 


OHBRTJinO!l«. 


Toutes  tes  sources 
du  Kaiserstuhl  ont 
une  altitude  com- 
prise entre  200  et 
i80  mètres. 

Les  sources  sans 
indication  sortent 
vers  la  limite  du 
basalte  et  du  loess. 


Basalte. 

Limite 

du  basalte 

et   du  calcaire 

cristallin. 


TEMPÉRATURE  DES  SOURCES  ORDINAIRES.  451 

Si  l'on  examine  le  tableau  de  la  température  de  vingt  de  ces 
principales  sources  que  j'ai  observées  à  leur  orifice,  on  voit 
que  leurs  températures  sont  comprises,  entre  10%4  et  14% 5, 
c'est-à-dire  qu'elles  varient  d'un  point  ù  l'autre,  entre  des 
limites  beaucoup  plus  distantes  que  ne  le  font  ordinairement 
les  autres  sources  de  la  contrée;  une  d'entre  elles  s'élève 
même  jusqu'à  18%1 .  En  faisant  la  moyenne  des  sources  pota- 
lables,  abstraction  faite  de  cette  dernière,  qui  est  franche- 
ment thermale,  on  trouve  une  valeur  de  12%4.  Or  la  tempé- 
rature de  Fribourg  en  Brisgau,  qui  est  situé  à  14  kilomètres 
de  distance  du  Kaiserstuhl,  et  à  une  hauteur  de  280  mètres, 
est  de  9% 7.  Il  y  a  donc  une  différence  d'à  peu  près  2% 6 
en  faveur  de  la  température  moyenne  des  sources  du  Kai- 
serstuhl. 

Le  climat  du  Kaiserstuhl  passe  pour  plus  doux  que  celui 
de  la  plaine  voisine;  cela  est  particulièrement  sensible  pour 
les  hivers,  qui  y  sont  beaucoup  moins  rudes  qu'à  Fribourg, 
Karlsruhe  et  Mannheim.  Mais  la  cause  de  la  haute  tempé- 
rature des  sources  de  cette  contrée  ne  parait  pas  résulter 
seulement  des  circonstances  météorologiques  ou  de  toute 
autre  influence  extérieure,  telle  que  la  couleur  sombre  du 
sol,  sans  quoi  on  ne  verrait  pas  cette  température  varier 
d'une  source  à  l'autre,  irrégulièrement. 

En  général  et  comme  on  vient  de  le  voir  pour  la  vallée  du 
Rhin,  la  température  des  sources  décroît  à  mesure  qu'on 
s'élève. 

M.  Boisse,  qui,  dans  l'Âveyron,  a  pris  de  nombreuses  me- 
sures entre  250  et  1200  mètres  d'altitude,  a  trouvé  un  dé- 
croissement  de  l'^par  155  mètres*. 

Dans  les  Alpes,  les  importantes  études  d'Adolphe  et  Her- 
mann  Schlaginweit  sur  les  lignes  isothermes,  ont  montré 

«  Dclesse.  Revue  de  Géologie,  T.  Y1II«  p.  'ia7.  1868. 


AÔ2  TEMPÉRATIRE  bïS  SOURCES  ORDLN.URËS. 

qu^à  cel  égard  il  y  a  d'assez  grandes  variations  dues,  entre 
autres  circonstances*  à  celle  du  relief  du  sol  :  à  altitude  égale, 
les  sources  des  vallées  paraissent  plus  chaudes  que  celles 
des  montagnes. 

Pour  les  Alpes  bavaroises,  M.  Gûmbel  a  donné  le  taux  de 
!•  par  272  mètres*. 

Ce  savant  géologue  a  trouvé,  pour  le  Fichtelgebirge,  l""  par 
222  mètres. 

Aux  lies  Féroê,  Durocher  *  avait  observé,  en  1845,  une  dé- 
croissance de  1*  par  144  ou  152  mètres. 

Parmi  les  anomalies  de  température  des  sources  ordi- 
nair.es,  on  peut  mentionner,  diaprés  M.  Desor,  celle  que  pré- 
sente la  source  du  Creux-du-Yent  ou  Fontaine-Froide,  dont 
la  figure  50,  page  95,  représente  le  gisement  et  dont  la  tem- 
pérature a  été  trouvée,  à  diverses  époques,  de  5"  à  4*.  Le 
Creux-du-Yent  est  une  cavité  ouverte  au  sommet  de  la  grande 
voûte  jurassique,  dont  fait  partie  la  montagne  de  Boudry 
(Solliat).  Sa  forme  est  celle  d'un  hémicycle,  à  parois  verti- 
cales, d'une  hauteur  de  près  de  200  mètres,  dont  la  con- 
vexité est  tournée  au  midi.  Par  suite  de  son  orientation  et 
de  la  hauteur  de  son  parapet,  le  Creux-du-Yent  est  tout  à 
fait  abrité  contre  les  rayons  du  soleil.  La  neige  n'y  fond  que 
très  tard.  L'eau  de  fusion  ne  peut  pas  se  réchauffer  dans  les 
talus  superficiels,  avant  d'arriver  à  la  source.  Celle-ci 
étant  intarissable,  il  existe  probablement  dans  la  hauteur 
du  talus,  au-dessus  de  la  marne  oxfordiennc,  un  affluent 
d'eau. 

Comme  exemple  des  variations  citées  plus  haut,  dans  la 
température  des  eaux  peu  profondes,  nous  citerons  celle  de 
la  vallée  de  Mangfall,  dont  le  gisement  a  été  décrit  page  55. 


«  Dayern,  T.  I,  p.  950. 

«  Annales  dat  Mines,  4«  série,  T.  M,  p.  445.  184ô. 


TEMPÉRATURE  DES  SOURCES  ORDINAIRES. 


433 


La  figure  189  en  indique  les  variations  annuelles,  dont  on  a 
rapproché  les  changements  de  volume  *. 


StP.(»tg)     OCT.        NOV.    DÉD.(W7E}J/LWV^H7<P    fÊV.       KARS,     AVUIL.     MAI.     JUIN.      JUIIL 


8£PT.      OCT.        NOV.    DeO(IS:EjJANV(ra7^     FCV.      MAR8     AVRIL       MM      JUIN       JUIL 


Fig.  189.  —  Diagramme  représentant  les  quantités  (en  mètres  cubes)  et  les  températures  (en 
degrés  centigrades)  de  la  source  Kaltenbach,  dans  la  vallée  de  Mangfall,  aux  environs  de 
Munich.  —  D'après  M.  A.  Thiem. 


Un  examen  plus  détaillé  de  la  température  des  sources 
ordinaires  nous  entraînerait  hors  des  limites  assignées  à 
cet  ouvrage*. 


*  U.  Gumbel  a  distingué,  sous  le  nom  de  hétérothermes,  ces  sources  à  température 
très  variable,  et  a  donné  le  nom  de  homolkermeê  à  celles  qui  sont  à  peu  près  constantes. 

*  M.  Renou  a  publié  une  étude  étendue  sur  la  température  des  sources  des  environs 
de  Vendôme.  Bulletin  de  la  Société  météorologique  de  France,  t.  XIV,  p.  209,  1866. 


CHAPITRE  II 


TEMPÉRATURE  DES  SOURCES  THERMALES 


On  rencontre  çà  et  là  des  sources  dont  la  température  est 
évidemment  supérieure  à  la  température  moyenne  du  lieu 
et,  par  conséquent,  à  celle  des  sources  ordinaires  du  pays. 
Ce  sont  des  sources  dites  thermales. 

Contrairement  à  ce  que  l'on  suppose  ordinairement,  il 
n'est  pas  nécessaire  que  des  sources  soient  relativement 
chatules,  ou  même  tièdes,  pour  être  comprises  dans  cette 
catégorie.  D'après  ce  que  l'on  connaît  sur  la  relation  de  tem- 
pérature des  sources  en  général  avec  celle  du  sol,  on  doit 
déjà  considérer  comme  thermales  celles  dont,  l'excès  ther- 
mométrique est  de  2  degrés*. 

Les  sources  que  l'on  doit  qualifier  de  thermales  ne  se  sépa- 
rent pas  toujours  avec  netteté  des  sources  ordinaires  :  dans 
bien  des  contrées  il  y  a  entre  elles  des  intermédiaires.  Tel 
est  le  cas  pour  les  sources  du  massif  volcanique  du  Kaiser- 
stuhl,  comme  on  l'a  vu  au  chapitre  précédent. 


*  On  peut  faire  une  réserve  pour  les  contrées  polaires,  sur  lesquelles  on  n'a  eneore 
que  peu  de  données. 


TEMPÉRATURE  DES  SOURCES  THERMALES.  435 

Il  en  est  de  même  pour  de  nombreuses  sources  de  TAl- 
gérie,  dont  Tintérêt  particulier  justifiera  les  détails  qui 
suivent. 

M.  Ville  ^  a  signalé  le  premier  la  grande  abondance  des 
sources  d'eau  potable  qui  émergent  du  sein  du  bassin  cré- 
tacé, avec  des  températures  plus  ou  moins  élevées*^ 

Voici  quelques  déterminations  de  températures  et  de  débits 
pour  les  sources  thermales  des  environs  de  Constantine  et 
quelques  autres. 

TEMPÉRATURE.      D^.BIT  PAR  SECONDE. 

degrés.  litres. 

Source  de  Sidi-Himoum 35  2  à  3 

Source  de  Salah-Bey 28  45 

Source  de  Sidi-Rached 28,3  4 

Source  de  la  rive  gauche  du  Rhumel, 

à  3  mètres  au-dessus  du  lit  .    .    .  28  18 

Source  d'Aïn-Rabah 30,5  50 

Source  du  Hamma 33,1  700 

Source  d'Aîn-Bou-Merzoug 23,7  900 

Les  eaux  du  Hamma  constituent  une  véritable  rivière  qui 
fait  mouvoir  plusieurs  moulins.  Celles  d'Aïn-Bou-Merzoug, 
encore  plus  volumineuses,  ont  été  amenées  par  les  Romains 
à  Constantine,  au  moyen  d'un  conduit  dont  on  voit  encore 
quelques  restes. 

Dans  Toasis  de  Chetma',  située  à  proximité  de  Biskra,  vers 
l'est,  les  sources  principales  émergent  au  fond  d'entonnoirs 
où  l'eau  fait  bouillonner  les  sables. 


Première  source  . 
Deuxième  source. 
Troisième  source. 
Quatrième  source. 


«  Bulletin  de  la  Société  géologique,  2*  série,  t.  22,  1864,  p.  107. 
'  It  importe  de  rapprocher  des  mesures  qui  suivent  k  température  moyenne  de  loca- 
lités appartenant  à  la  région  :  Tebessa  donne  Wfi,  Laghouat  220,7  et  Biskra  22<>,9. 


TEVPfauTDM. 

tint  TAU  siconiK 

degrés. 

litres. 

54 

3  à  4 

34,5 

15 

35,5 

7  à  8 

33 

50 

456 


TEMPÉRATURE  DES  SOURCES  THERMALES. 


Les  sources  qui  alimentent  Biskra  émergent  à  la  tempéra- 
ture de  29%o,  avec  un  volume  de  500  litres  a  la  seconde. 

Le  Ilodna  et  le  Zab  occidental,  dont  on  a  mentionné  plus 
haut  (voir  p.  172  et  175)  les  belles  sources  jaillissantes,  pré- 
sentent des  faits  analogues.  Quant  à  la  plaine  de  la  Metidja, 
on  a  vu  (p.  167)  qu'a  côté  de  sources  dont  la  température  est 
de  18  à  19  degrés,  c'est-à-dire  à  peine  supérieure  à  la  tem- 
pérature moyenne  du  lieu,  il  y  en  a  qui  atteignent  21  à  22*. 

Voici  quelques  chiffres  obtenus  par  M.  L.  Ville. 


Behar  de  Neciza 

Behar  de  Bazed 

Bchar  de  Tinala 

Behar  Tassegurt  d*Ourlaua . 
Behar  Mamoussa,  à  Hazet  . 
Behar  El  Haoueli,  à  Mazet.  . 
Behar  Malah,  ù  Zaouiat-Rhab 
Chrîet  Sidi-Hamadou.  .  .  . 
Chriet  Oulet-Ben-Araeur .    . 


Btxn  ru  SCC0.1M;. 

TKuriuTniE 

litn». 

degrés. 

10,60 

24,66 

faible 

25,00 

faible 

24.53 

6,38 

22.50 

iO,00 

22,00 

28,00 

21,00 

8  à  10,00 

25.50 

faible 

20,66 

faible 

22.00 

Une  thermalité,  comparable  à  celle  des  sources  naturelles 
que  nous  venons  de  signaler,  se  retrouve  pour  les  eaux  jail- 
lissantes de  cette  même  région,  dont  la  sortie  est  provoquée 
par  des  sondages  artificiels.  C'est  ce  que  montre  le  tableau 
suivant,  publié  en  1864  par  M.  L.  Ville. 


Troisième  pulls  de  Chegga 
Oum-el-Thiour,  deux  puits 

Sidi-Khélil 

Ourlana 

Djama 

Sidi-Amrau  .   . 
Tamerna  Djedidu 


DÉBIT 
PAR  »KCO.'«DE. 

litres. 

4.50 
2,20 
6,00 

22,92 

52,18 

67.C0 

4S,0y 


rROPOMDErn. 
mètres. 

56.0 
79,8 
27,5 
65,2 
69,0 
77,6 
60.0 


TMUTtMxntE. 

degrés. 
25,8 

25,0 
24,3 
25,0 
26.0 
24.8 
24,0 


DitIT 

Pllt  SECONDE. 

PMOrONDBUR. 

nartoiTo 

litres. 

mètres. 

dfgrés. 

17,60 

57,0 

24.0 

58,37 

48,6 

25.5 

12,00 

57,6 

24,5 

30,72 

75,0 

25,8 

36,60 

45,6 

26,5 

TEMPÉRATURE  DES  SOURCES  THERMALES.  457 


Sidi-Rached 

Braam 

Rhamra 

Sidi-Sliman 

El  Ksour 

Les  puits  artésiens, au  nombre  de  ISS^quionl  été  creusés, 
de  1865  à  1882,  dans  le  Sahara  et  la  province  de  Gonstan- 
tine,  ont  fourni  des  chiffres  que  M.  Jus  a  bien  voulu  me  com- 
muniquer. En  voici  quelques  exemples  :  à  Tamerna-Djedida 
(sondage  n*"  4),  deux  nappes  jaillissent,  l'une  à  48  mètres, 
l'autre  à  53  mètres,  ce  dernier  donnant  20  litres  par  seconde 
avec  la  température  de  24^  Au  Candiat-Sidi-Iahia,  un  puits, 
à  la  profondeur  de  66  mètres,  a  donné  une  nappe  à  24"  et,  à 
la  profondeur  de  74  mètres,  une  autre  de  464  litres  par  se- 
conde, mesurant  56^ 

D'après  les  nombreuses  observations  que  j'ai  faites  dans 
les  Vosges  et  dans  la  vallée  du  Rhin,  un  très  faible  excès  de 
température  correspond  souvent  à  des  conditions  particu- 
lières de  gisement. 

Si  parmi  toutes  les  sources  du  bassin  du  Rhin  observées^ 
on  réunit  celles  qui  dépassent  de  plus  de  2^  h  température 
moyenne  du  lieu  d'où  elles  sortent,  on  reconnaît  qu'en  de- 
hors du  Kaisersluhl,  toutes  sortent  de  failles  ou  de  lignes 
de  dislocation.  Telles  sont,  à  part  celles  qui  sont  depuis 
longtemps  connues  comme  thermales,  leis  sources  suivantes, 
qui  toutes  sont  situées  dans  l'ancien  département  du  Bas- 
Rhin  (voir  p.  426  la  figure  188)  : 

AlUtude.        Température. 

La  source  de  KQtlolsheira, 220"  H^8 

Celle  de  la  papeterie  de  ReichsholT»'!!  .    .  200™  13°,5 

Celle  de  Chàtenois 180'"  ^4^7 

Celle  de  Soultz-les-Bains 172«  ^6^2 


UUtode. 

Tanp&itiir6. 

190- 

17».2 

210- 

17»,5 

45S  TEMPÉRATURE  DES  SOURCES  TBERNALES. 

Celle  de  Niederbronn 

Celle  de  la  papeterie  de  Wasselonne.   . 

Cette  dernière,  malgré  sa  température  élevée,  sert  comme  eau  po- 
table. 

La  température  des  sources  thermales  présente  d'ailleurs 
tous  les  degrés  jusqu'à  celle  de  l'eau  bouillante*  qu'elle  dé- 
passe même. 

Parmi  les  températures  très  diverses  fournies  par  les 
sources  thermales,  nous  nous  bornerons  à  un  petit  nombre 
d'exemples. 

ER    FRANCE    : 

Degrés. 

Plombières  (Vosges) 7i 

Luxeuil  (Haute-Saône) 56 

Bourbonne-les-Bains  (Haute-Marne) 68 

Aix-les-Bains  (Savoie) 45 

Saint-Gervais  (Haute-Savoie) 4â 

Gréoulx  (Basses-Alpes) 38,7 

Allevard  (Isère) 24,7 

Uriage  (Isère) 27 

Aix-en-Provence  (Bouches-du-Rhône) 56,8 

Pietrapola  (Corse) 58 

Lamalou  (Hérault) 55 

Balaruc  (Hérault) 47.5 

Sylvanès  (Aveyron) 58 

Bagnols  (Lozère) 43 

Chaudesaigues  (Cantal) 88 

Neyrac  (Ardèche) 27 

Montrond,  sondage  (Loire) 27 

Saint-Allyre  à  Clermont  (Puy-de-Dôme) 24 

Chfttelguyon  (Puy-de-Dôme) 35 

Royal  (Puy-de-Dôme) 55,5 

Châleauneuf  (Puy-de-Dôme) 57 

Mont-Dore  (Puy-de-Dôme) 45,5 


TEMPÉRATURE  DES  SOURCES  THERMALES.  459 

Degrés. 

La  Bourboule  (Puy-de-Ddme) 52 

Évaux  (Creuse) 55 

Vichy  (Allier) 43,6 

Neris  (Allier) 52 

Saint-Honoré  (iNièvre) 31 

Bourbon-rArchambault  (Saône-et-Loire) 52 

Bourbon-Lancy  (Saône-et-Loire) 56 

Amélie-les-Bains  (Pyrénées-Orientales) 61 

Ussat  (Ariège) 40,2 

Ax(Ariège) 77 

Bagnères-de-Luchon  (Haute-Garonne) 66 

Barèges  (Hautes-Pyrénées) 44,2 

Bagnères-de-Bigorre  (Hautes-Pyrénées) 51 

Cauterets  (Hautes-Pyrénées) 60 

Eaux-Bonnes  (Basses-Pyrénées) 32 

Eaux-Chaudes  (Basses-Pyrénées) 36,4 

Dax  (Landes) 61 

Bagnoles  (Orne) 27 

Saint-Amand  (Nord) 19,5 

DANS  LES   ILES  BRITAMNIQDES    : 

Bristol 25 

Bath 46 

Buxton 20,9 

Source  rencontrée  en  Cornwall  dans  le  filon  de  Huel 

Selon,  à  292  mètres  de  profondeur 33 

Mallow  (comté  de  Cork,  Irlande) 22 

EN   SUISSE    : 

Baden  (Argovie) 50 

Schinznach  (Argovie) 55 

Loéche  ou  Louesch  (Leuk)  (Valais) 51 

Pfeffers  (Grisons) 38 

EN   BELGIQUE    : 

Chaudfontaine 34 


440  TEMPÉRATURE  DES  SOURCES  THERMALES. 

RR    PRU8SB   : 

Aix-la-Chapelle 55 

Borcelte  (Burtscheid) 78 

Bertrich  (Prusse  rhénane) 52 

Schlangenbad  (Nassau) 32 

Nauheim  (Nassau) 39 

Eins  (Nassau) 47,5 

Wiesbadcn  (Nassau) 69 

Warmbrunn  (Silèsie) 32 

DANS   LE  GEAKD-DUCRÉ   DE   BADE    : 

Bade 67 

EN    WURTEMBERG    : 

CannsUdl 21,2 

Wildbad 57 

EN   SAXE    : 

Source  rencontrée  dans  le  filon  de  Churprinz,  prés 

Freyberg,  à  167  métrés  de  profondeur 26 

EN   AUTRICHE-HONGRIE    : 

Teplitz-Schœnau  (Bohême) 49 

Carlsbad  (Bohême) 74 

Gastein  (Salzbourg) 71,5 

Tcplitz-Trentschin  (Hongrie) 40 

Mehadia  (Hongrie) 55 

Buda-Pesth  (Ofen)  (Hongrie). 61,5 

EN    PORTUGAL    : 

Caldas-de-Chaves  (Traz-oz-Montes) 56,1 

San  Pedro  do  Sul  (Beïra) 69 

EN   ESPAGNE    : 

Panticosa  (Aragon) 51 

Alhama  (Grenade) 47 

Villar-Muerto  (Salamanque) 52 

Caldas  de  Montbuy  (Barcelone) 70 


TEMPÉRATURE  DES  SOURCES  THERMALES.  441 


E2<   ITALIB    : 

Degrés. 

Abano  (Monts  Euganéens) 84,5 

San  Mariino  (Yalteline) 48 

Acqui  (Piémont) 75 

Porretta  (Bologne) 39 

Monte  Catini  (Toscane) 29,5 

San  Filippo  (Toscane) 50 

San  Yignone  (Toscane) 44 

Lucques 54 

Soffioni,  près  Monte  Cerboli  (Toscane) 100 

Pise 44 

Viterbe 65 

San  Yicarello  (lac  Bracciano) 48 

Pisciarelli,  près  la  Solfatare  de  Pouzzoles 84 

Éluves  de  Néron,  près  Pouzzoles 86 

Lacco  Ameno  (Ischia) 50 

Gurgilello  (Ischia) 90 

Benatutli  (île  de  Sardaigne) 40 

Fordongiamis  (ile  de  Sardaigne) 66 

Termini  à  Palerme  (Sicile) 47 

Sciacca  (Sicile) 56 

San  Calogero  (Lipari) 61 

Eluves  (Lipari) 97  à  100 

Source  à  Vulcano 56 

Source  à  Pontellaria 73 

EK   GRÈCE    : 

Thermopyles 67,5 

Methana  (Morée) 28 

Aedepse  ou  Dipso  à  Nègrepont (bouillante) 

Protolhalassa  (Milo) 46 

Santorin 55 

DANS   LA   RUSSIE   MÉRIDIONALE    : 

Piatigorsk  (Caucase) 47 

Gileznovodsk  (Caucase) 51,5 

Vallée  du  Terek  (source  de  Pierre) 89 

Tcheleken  (ile  de  naphte;  Caspienne) 48,75 


442  TCMPÉRATUnE  DES  SOURCES  THERUALES. 

E5    ASIE   milECIlB   : 

Degrés. 

Brousse  (Anatolie) 84 

Kizildja,   près  Angora   (Anatolie),   à  Taltitude   de 
1025  mètres  « 99 

B!«    PALESTI!fB    : 

Tibériade 68 

Callirhoé 59 

DA?IS   L*I!fDB    : 

AnaYal  (Khandish) 49 

Tantipara 72 

Jumnotri  Gharwal  (Himalaya) 22 

A   CBTLAN    : 

Cannea,  près  Trincomalie 41 

AU  JAPO!l    : 

Kusatsou 72,2 

Jozankei 89 

Nuburibets 99 

KH    CHINE    : 

YungMak,  près  Hakao.  Kungtung (bouillante) 

EN   SIBÉRIE    : 

Souixe  de  Rachmanou,  à  Tallitude  de  5900  mètres  .       43 

EN    ALGÉRIE    : 

Ouled  Sidi-Brahin,  près  Hostaganem  (Oran)  ....      66 

Hammam  Bou-Hadjar  (Oran) 78 

Hammam  des  Bibans  (Gonstantine) 81 

Arel-EI-Hammam,  non  loin  de  Bougie 85 

Hammam  Sciai,  non  loin  de  Bougie 87 

Hammam  Meskoutine,  près  Guelma  (Gonstanline)    78  à  95 

1  TcHiHATCHEFF,  Asic  Mineuve,  t.  I,  p.  97. 


TEMPÉRATURE  DES  SOURCES  THERMALES.  443 

EN  ABYSSmiE    : 

Degrés. 

Sources  nombreuses^  en  partie  bouillantes,   entre 

Tatchoura  et  Choa 97 

Sud  du  Mozambique  (Afrique  australe) 45 

AUX  ÉTATS-UKIS    : 

Hots  Springs,  Bath  County  (Virginie) 42 

Washitaw  (Arkansas) 65,5 

Pagosa  (Colorado) 60,6 

Sulphur  Springs  (Colorado) 65,5 

Diamond  Creek,  Socoro  County  (Nouveau-Mexique).  .      66 
Source  à  20  kilomètres  à  Test  de  Minersville  (Utah)  .       85 

Sleamsboats  Spring,  Bear  River  (Idaho) 87,7 

Malheur  River  (Orégon) 75 

Sou,  vallée  d*Osobb  (Nevada) 85 

Steamboat,  Virginia  Ranges  (Nevada) 95 

Thousand  Springs  Valley  (vallée  des  mille  sources) 

(Nevada) (bouillante) 

Butte,  extrémité   nord   de  la   chaîne  de   Truckee 

(Nevada) (bouillante) 

Ile  du  lac  Mono  (Californie) (bouillante) 

lie  d'Unimak  (Alaska) (bouillante) 

AU   MEXIQUE  : 

Sources  de  Chichi  Mequilla 96,4 

DANS   LES   AJ1TILLES    : 

Galion  (Guadeloupe) 65,8 

Matouba  (Guadeloupe) 59,2 

Pigeon,  au  niveau  de  la  mer  (Guadeloupe) 100 

DA:IS  LE  VENEZUELA    : 

La  Trincheras  * 96,9 

AU  PÉROU    : 

Caliente  (Moquigna) 86 

*  D'après  M.  Boussiogault,  Tune  des  plus  chaudes  que  l'on  connaisse,  en  dehors  des 
régions  volcaniques. 


4il  TEMPÉRATURE  DES  SOURCES  THERMALES. 

Degrés. 

Carumas  (Moquigna)  .  • 91 

Omate  (Moquigna) 7t 

£5   COLOMBIE   : 

Coconuco,  à  Tallitude  de  3500  mètres 75 

Banaa,  près  Quito 52 

AU   CHILI    : 

Cauquenes 47 

Toro  (Coquimbo),  altitude  de  5258  mètres 63 

Tinguirlrica,  altitude  de  plus  de  1200  mètres  ...  96 

EN   OCÉARIE    : 

Igabo  (Albay),  ile  de  Luçon  (Philippines) 56 

Savu-Savu  (iles  Fidji) (source  bouillante) 


On  voit  que,  comme  les  volcans,  les  sources  thermales  se 
présentent  aux  latitudes  les  plus  diverses;  on  en  trouve  en 
Islande,  au  Kamtschatka,  au  Groenland  où  jaillissent  vers  le 
nord-est,  à  Ounastot,  d'après  le  capitaine  Graah,  des  sources 
atteignant  42\ 

Il  en  existe  aussi  à  toutes  les  altitudes.  Ainsi,  au  Thibet,  à 
4700  mètres,  des  sources  bouillantes  sont  associées  aux  gey- 
sers qui  ont  été  mentionnés  plus  haut  (p.  367)  :  leur 
température  est  de  84%  correspondant  à  TébuUition  de  l'eau 
à  cette  hauteur.  Au  sud  de  Tanla,  M.  de  Orzewalski  a  récem- 
ment signalé,  à  l'altitude  de  4877  mètres,  des  sources  de 
52°  centigrades.  De  même  dans  les  Cordillières  on  en  ren- 
contre au  delà  de  4000  mètres. 

D'un  autre  côté,  le  bassin  de  la  mer  Morte  en  renferme  qui 
jaillissent  bien  au-dessous  du  niveau  de  l'océan. 

Le  bassin  des  mers,  sous  lequel  est  le  siège  de  nombreux 
volcans,  doit  lui-même  servir  de  réceptacle  à  de  nombreuses 
sources  thermales. 


TEMPÉRATURE  DES  SOURCES  TUERMALES. 


445 


Fig.  190.  —  Caverne  dans  le  calcaire  urgonien,  d'où  sort  la  source  de  Sassenage. 
Voir  les  pages  117  à  119  de  ce  volume. 


Quant  a  la  vapeur  qui  se  dégage,  soit  mélangée  d'eau 


446  TEVPËRATURE  DES  SOURCES  THERMALES. 

liquide,  comme  dans  les  geysers,  soit  seule  comme  dans  les 
solfatares  et  les  volcans,  nous  n*en  dirons  ici  que  peu  de 
mots. 

La  force  considérable  de  projection  des  geysers  montre 
que  la  vapeur  d'eau  acquiert  une  température  notablement 
supérieure  à  100  degrés,  dans  les  réservoirs  où  elle  s'accu- 
mule. On  a,  en  effet,  observé  127  degrés  dans  le  canal  d'as- 
cension du  Grand  Gevser  en  Islande. 

Dès  que  l'eau  volcanique  parvient  dans  les  parties  super- 
ficielles du  globe,  c'est-à-dire  la  où  nous  pouvons  la  soumet- 
tre à  nos  mesures,  et  par  suite  de  la  détente  qu'elle  a  éprou- 
vée, elle  a  déjà  perdu  la  plus  grande  partie  de  sa  chaleur. 
Mais  en  voyant  l'intimité  de  son  mélange  avec  les  matières 
fondues,  qui  constituent  les  laves  et  d'où  elle  s'exhale  len- 
tement, durant  leur  refroidissement,  on  est  contraint  d'ad- 
mettre que  dans  les  profondeurs,  elle  a  eu  la  même  tempé- 
rature que  celles-ci.  C'est  même  à  son  intervention,  à  plus 
de  1000  degrés  thermométriques,  sous  une  énorme  tension, 
qu'il  est  légitime  d'attribuer  l'ascension  des  laves  dans  les 
canaux  volcaniques,  ainsi  que  la  force  avec  laquelle  elle  pro- 
jette des  blocs  volumineux  et  d'autres  matières  solides. 

A  la  suite  de  la  description  de  la  source  de  Sassenage 
(p.  117  à  119),  il  parait  utile  de  donner  la  vue,  d'après  une 
photographie,  de  la  caverne  qui  lui  donne  issue. 


TABLE  DES  MATIÈRES 

DU  TOME   PREMIER 


LIVRE  PREMIER 

RÉGIME   DES  EAUX   SOUTERRAINES 


CHAPITRE  PREMIER 
GiNÉRAurés 


Aperçu  historique 

Données  fournies  par  les  travaux  de  mines . 


§  i .  —  Eau  de  caruèrb  ou  D*iMpiié6nATT0M  .   .    .    . 
§2.  —  Roches  mpBREéADLBs  et  roches  perméables. 
Rooliet  impermèaUet 


Types  de  roches  imperméables 

Exemples  du  rôle  des  roches  imperméables  dans  le  bassin  de  la  Seine.      iO 

Rochet  pcmèablet 12 

Types  de  roches  perméables 12 

Observations  sur  le  mouvement  de  Teau  dans  les  roches  perméables .      i  6 
Perméabilité  en  grand 16 

CHAPITRE  II 

RÉGIME  DES  EAUX  DANS  LES  TERRAINS  PERMÉABLES 

§  i .  —  Eaux  phréatiques  des  terraois  de  transport 21 

Exemple  fourni  par  la  plaine  du  Rliin,  interstices  dans  lesquels 
Teau  circule  ;  nature  des  mouvements  de  la  nappe  :  sources  qui 
en  dérivent 22 

«  On  trouvera  h  la  lin  du  tome  II  une  U*iple  Uble  alphabétique  des  matières,  des 
localités  et  des  auteurs  mentionnés  dans  l'ouvrage. 


448  TABLE  DES  MATIÈRES. 

Environs  de  Bonn  et  de  Dusseldorf 29 

Environs  de  Bruxelles 29 

Ville  de  Liège 31 

Pays-Bas 31 

Munich 55 

Nuremberg 57 

Leipitg 37 

Environs  de  Vieuue 58 

Région  comprise  entre  iSuaa-Pestii  et  iizoluok 38 

Environs  de  Moscou 40 

Oural 41 

Environs  de  Londres  et  autres  parties  de  F  Angleterre 42 

Côte  de  Gènes,  notamment  aux  environs  de  Loano .  45 

Messine 47 

Environs  de  Wew-York 48 

Exemples  fournis  par  la  plaine  de  Lombardie 48 

Baux  phréatîqoea  &ma  duBM 53 

Gascogne 53 

Hollande 54 

Est  d'Ostende 55 

Baux  phrtetîcpiM  det  dép6U  gUMÙAires 56 

Mont-sur-Lausanne  et  bords  de  TAreuse 56 

Baux  phréatiqnet  des  llet  nMidréponquas ....  57 

Intérêt  daf  amiz  phréatiquat  av  point  de  tu»  da  Ta^îoiikiire  et 

de  rhygîtee 57 

ObtcnratMNM  théoriques 58 

§  2.  —  Eaux  pHaiATiQUBs  des  tbrbàins  autres  que  les  terrains  de  transport.  G1 

Terrains  tertiaires  des  départements  de  la  Seine  et  de  Seine-et- 

I                                                Marne 62 

I                                              Terrains  crétacés  et  juras!>ique5 64 

Terrains  triasiques  et  permiens 66 

Convenance  de  reporter  Texamen  des  laits  analogues  au  chapitre 

relatif  au  rôle  des  lithoclases 67 

CHAPITRE  III 

ROLE    DU    CONTACT    MUTUEL    DES    ROCHES    PERMÉABLES 
ET    DES    ROCHES    IMPERMÉABLES 

§  1 .  — Contact  PRODUIT  PAR  LE  FAIT  SEUL  DE  LA  stratification 68 

Généralités 68 

Terrains  quaternaires 70 

Exemples  fournis  en  Alsace,  aux  environs  de  Haguenau,  dans  les 

vallées  de  la  Moder  et  du  Rhin 70 

Environs  de  Metz 71 


TABLE  DES  MATIÈRES.  449 

Environs  de  Munich 71 

Hollande 72 

Londres  et  ses  environs 75 

Oxford 73 

Irlande 74 

Palerme 74 

Upsal 75 

Observations  relatives  à  des  tufs  volcaniques  stratifiés 75 

Tarraiiu  •Ualifièt 75 

Sundgau 75 

Dombes 76 

Bastbergy  près  Bouxwiller 77 

Bassin  de  Paris 81 

Environs  de  Laon 84 

Vallée  de  la  Garonne 84 

Environs  de  Bruxelles 85 

Environs  de  Londres 85 

Furslenfeld,  Styrie 85 

La  Puysaye  (Yonne) 86 

Haute-Marne .  87 

Torrent  d'Anzin 87 

§  2.  —  Co.NTACT  PRODUIT  PAR  DES  AGCIDINTS  POSTÉRIEURS  A  LA  STRATIFICATION  OU  A 

LA    FORMATION  DES   ROCHES {)[ 

Roches  impeméablet  dèMigrégéet  tur  plaoe Dl 

Irlande yî 

Schistes  de  divers  âges y2 

Observations  sur  réparpilleraent  des  popula  lions 1)5 

ÉboulM Uo 

Boues  glemaires. 115 

Scories,  coulées  de  lave  et  autres  déjections  volcaniques  incohérentes 

vacnolaires  ou  fissurées 95 

Cônes  de  scories  ;  exemples  au  lac  Chaïubon,  au  lac  du  Bouchot,  à 

Yourzac,  à  Fayal  et  à  San  Miguel 95 

Royat  et  Fontanat  (Puy-de-Dôme) 97 

AUagnat,  Ceyssat  et  Mazayc  (Puy-de-Dôme) 99 

Autres  localités  du  département  du  Puy-de-Dôme  :  Gravenoire,  Pa- 

riou,  la  Nugère,  Montsineyre,  le  Tartaret 102 

Entraigues  (Ardèche) 104 

Etna,  Terceira  et  Santorin 104 

Rome  et  environs 105 

Irlande 109 

Vétéravie 109 

29 


4M)  TiBLE  DES  MATIÈRES. 

Syrie;  sources  du  petit  Jourdain 109 

B4«U  MODoipagam  Im  falUaf 110 

Environs  de  Loudun 110 

Gorze,  près  Metz 111 

Sassenagc,  près  Grenoble 117 

Rohrbach  im  Graben  (Autriche) 119 

Lancashire 1^ 

Derbyshire 120 

LaBourboule  (Puy-de-Dôme) 120 

Sicile  :  Sclafani,  Palerme,  Longi  et  Alcara 1â5 

iBtmtiooi  âm  rochee 126 

Alpe  du  Wurtemberg 126 

Irlande 128 

Daz  et  Tercis  (Landes),  Mont|iezat  (Ardèche),  côte  d'Essey  (Neurthe- 

el-MoseUe) ' 128 

CHAPITRE  IV 

ROLE    DES    LITH0CLA8ES    DE    DIVERS   ORDRES 

GÉnÉBALiTés 129 

litlMNUMt  «1  pwtMuUènaMB»  dÎMUset 130 

1*  Leptoclases 130 

SyncUueê 130 

Piéêocloies 131 

2*  Diaclases 132 

5*Paracla$es 145 


144 

du  rdle  def   IHhooIaset  relaUvemeol  mi  règinie  dma  emxa. 

145 

•itîiMmk  dea  roohat   :  foraget  «riètten* 132 

§1"'.  — RÔLBDESUTBOCLASBSSnFLKS 165 

Temîna  lerlîaÎMi 165 

Bassin  de  Paris 165 

Pyrénées-Orientales 164 

.    Bassin  de  Londres • 163 

Belgique 166 

Vienne  (Autriche) 167 

Venise 167 

Département  d'Alger  :  Basse  Mitidya  ;  sources  jaillissantes  naturelles 

et  puits  forés 169 


TABLE  DES  MATIÈRES.  451 

Hodna  et  Sahara  du  département  de  Gonstantine 472 

Zab  :  sources  jaillissantes  naturelles i  75 

Oued  Rhir  :  sources  naturelles  et  forages 176 

Hammam-Bou-Hadjar  ;  source  thermale 184 

Aîn  Nouissy,  près  Mostaganem 184 

Egypte 185 

Puy-de-Dôme 186 

Haute-Loire 187 

Irlande,  contrée  d'Anlrim 188 

Tenramt  orétaoét 188 

Environs  de  Ghâlons-sur-Marne 189 

Département  de  la  Marne  et  régions  voisines 190 

Champagne  septentrionale 193 

Département  de  l'Aisne 197 

Ardennes  (arrondissement  de  Relliel) 198 

Aube  et  particulièrement  bassin  de  la  Vanne 199 

Yonne 200 

Le  Havre 201 

Calvados  et  Eure 203 

Charente 204 

fiouches-du-Rhône,  bassin  de  Fuveau 204 

Var  et  Alpes-Maritimes 206 

Gers 207 

Bassin  de  Paris 207 

Environs  de  Tours 212 

North  Downs  du  Kent  et  du  Surrey 212 

Londres 213 

Yorkshire 214 

Hertforlshire 215 

Oxfordshire  et  Whilsliire 215 

Nord  de  la  France,  Belgique  et  Weslplialic,  environs  de  Liôge.  .   .  216 
Versant  nord  duTeutoburgerwald  et  versant  nord  de  la  Uaar  :  Pader- 

born 222 

Irlande 227 

Caucase,  Kislovodsk  et  Piatigur^k 229 

Terrain  {uratitqaa 251 

Yonne 232 

Nièvre 234 

Meurthe-et-Moselle 256 

Meuse  et  Haute-Marne 236 

Grand-Duché  de  Luxembourg 242 

Wurtemberg; ' 245 

Var  et  Alpes-Maritimes 245 

Buda-Pesth  ;  forages 246 


4:>3  TABLI::  DES  MATIÈRES. 

Angleterre  :  Glocestershire,  Lincolnshire,  Leicestershire,  Northamp- 
tonshire  (RuUand) âi6 

TriM  «1  îMmSm  MnwtB itô 


Lorraine  allemande 248 

Bassin  de  la  Sarre âoO 

Duché  de  Luxembourg  :  Mondorf 2o0 

Meurthe-et-MoseUe SIiO 

Alsace  :  SoulU-les-Bains  et  Niederbronn ^ 

Haute-Marne  :  Bourbonne-les-Bains 351 

Gard 255 

Rochefort  ;  puits  artésien 25ô 

Wurtemberg  ;  Thermes  de  Widbad  ;  forages  de  Berg  et  de  Cannstadt .  255 

Grand-Duché  de  Bade  :  Rothenfels 256 

Franconie 256 

Autriche;  Stixenstein  et  autres  sources  alimentant  Vienne,  groupe 

de  Fischau 256 

Angleterre 261 

Environs  de  Loano,  prés  Gènes 263 


I  pAléosoîqact 264 

Artois 264 

Mines  de  houille  :  la  Chapelle-sous-Dun  (Saône-et-IiOire) 264 

Sardaigne 264 

Irlande 266 

Aix-la-Chapelle  et  Borcette  (Burtscheid) 266 

Ems 267 

Wisconsin  :  sources  naturelles  et  puits  artésiens 270 

TeirÛM  orôUlliBt 271 


France  centrale 271 

Saint-Gothard 272 

Ghamonix 274 

Wurtemberg  :  Wildbad 274 

Irlande 275 

Base  de  l'Etna  :  Catane 275 

Caucase  :  GileznoTodsk 275 

§  2.  —  LiTHOCLASBS  ÂSSOCléES  k  liU  rOINTBMBNTS  DE  ROCHBS  ÉRUPHTIS 277 

Gard 277 

§5.  —  ROLB  DES  UTHOCUISSS  ASSOCIÉES   A  DES  nLONS  MéTàLLIFÈRES 280 

Vosges  :  Plombières 280 

Loire  :  Sail-sous-Couzan 282 

Hérault  :  La  Malou 282 

Haute-Loire  :  Brioude 283 


TABLE  DES  MATIÈRES.  455 

Ardèche  :  Vais,  Desaigues,  ICayrès 285 

Autres  localités  du  Plateau  central 284 

Grand-Duché  de  Bade  :  Rippoldsau  et  Baden^eiler 284 

Prusse  Rhénane  :  Mine  de  Kautenbach,  près  de  Trarbach,  sur  la 

MoseUe 284 

Saxe  :  Freyberg 285 

Bohême  :  Garlsbad  et  Marienbad 285 

Italie  :  Pereta  et  Selvena;  Tolfa 288 

Algérie 289 


CHAPITRE  V 

ROLE    DES    CAVERNES 

Introduction 290 

1.  —  GaRACTÈRES  GéN^RAUX   DKS  CAYBRNE8  ET  DBS  CATITÉS  AHALOCDRS 295 

Yonne  :  Arcy-sur-Gure 293 

Vienne  :  berges  du  Glain  à  Poitiers 294 

Aveyron 295 

Gard 297 

Ardèche  ;  Pont  d'Arc 298 

Isère 299 

ObcervatiOBt  théorîquet 299 

Origine  des  cavernes  des  massifs  calcaires  et  dolomitiques ....  299 
Origine  des  cavernes  produites  par  Tentrainement  des  matières 

arénacées 500 

Origine  des  cavernes  produites  par  Térosioii  du  gypse  et  du  sel 

gemme 300 

Origine  des  cavernes  dues  à  des  glissements  superficiels 501 

Origine  des  cavernes  excavées  par  la  mer  dans  les  falaises ....  302 

Origine  des  cavernes  des  coulées  volcaniques 302 

Origine  des  cavernes  paraissant  résider  dans  les  flancs  des  mon- 
tagnes volcaniques 302 

§  2.  —  Influence  des  cavernes  sur  le  RécwB  des  baux 304 

Jura  :  Départements  du  Doubs  et  du  Jura 504 

Meurthe-et-Moselle 307 

Vosges 307 

Aube 308 

Gôte-d*Or 309 

Haute-Saône  :  environs  de  Vesoul 309 

Ain  :  Perte  du  Rhône  à  Bellegarde 309 


4M  TABLE  DES  MàTIÈRES. 

Calvados 309 

Charente  :  Tardouére,  le  Bandiat,  la  Touvre 511 

Hérault 314 

Isère  et  Drdme 315 

Yar  et  Alpes-Maritiote:» 316 

Bouches-du-Rhône 318 

Yaucluse  :  Fontaine  de  Vaucluse 319 

Lot 355 

Dordogne 333 

Eure  :  Pertes  de  Tllon 355 

Loiret  :  Val  d'Orléans 336 

Ardennes  :  Signy-l* Abbaye .  545 

Belgique  :  environs  de  Dinan,  Bleyberg-ès-Montzea 345 

Suisse:  canton  de NeuchAtel;  environs  de  Kandersteg 345 

Œsel 550 

Angleterre 350 

Irlande 331 

Espagne 554 

Italie 354 

Moravie 561 

Bosnie  et  Croatie 362 

Grèce 562 

Crimée 564 

Algérie 364 

Syrie  :  Nahr-el-Keb 365 

£tats-Unis  :  Kentucky  et  liidiana 366 


CHAPITRE  VI 

EAUX    POUSSÉES    PAR   DES   ÛkZ   COMPRIMÉS 

§1.  — Eaux  POUSSÉES  PAR  L*ACIDB  CARiORIQUB 368 

Sondage  de  Montrond  (Loire) 568 

Naubeim  (Yétéravie,  ancien  duché  de  Hesse-Cassel) 575 

Neuenahr  (Prusse  Rhénane) 577 

Kissingen  (Bavière) 377 

Paterno  (Sicile) 377 

§  2.  —  Eaux  poussées  principalement  par  des  hydrogènes  ciRBOEts;  volcans  db 

BOUES,  8ALSES 380 

Italie  :  Apennins  et  Sicile 380 

Caucase  :  iner  Noire  et  mer  Caspienne 383 

États-Unis 385 

ObMnratîoBi  théonquM 386 


TABLE  DES  MATIÈilES.  455 
CHAPITRE  VII 

EAUX    P0U88ÉE8    PAR    LA    FORCE    EXPANSIVE    DE    LEUR   VAPEUR 

|1.^GeT8BIi8 390 

Islande 390 

États-Unis  :  parc  national  de  Yellowstone;  Galirornie 392 

Nouvelle-Zélande  :  province  d'AukIand 396 

Açores  :  Ile  San  Miguel 396 

Thibet 397 

jâ.— SOFFIOHIS 400 

Toscane 400 

^  3.  —  VOLCAKS  ET  SOLFATARIS 407 


LIVRE  SECOND 

TEMPÉRATURE  DES  EAUX  SOUTERRAINES 


CHAPITRE  PREMIER 

TEMPÉRATURE    0E8    80URCES    0R0INAIRE8 

Température  des  sources  ordinaires i'21 

CHAPITRE  II 

TEMPÉRATURE    DE8   SOURCES   THERMALES 

TlHPÉRATURK  DES  SOURCES  THERMALES 434 


8167.  —  Imprimerie  A.  Lahure,  9,  rue  de  Fleuras,  à  Paris. 


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