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LES
EAUX SOUTERRAINES
A L'ÉPOQUE ACTUELLE
IMPRIMERIE A. LAHURE
9, RUE DE FLEURUS, 9
LES
EAUX SOUTERRAINES
A LtPOQUE ACTUELLE
LEUR RÉGI», LECR TIIFÉRATURB, LIDR GOIPOSITION
AU POINT DE VUE DU RÔLE QUI LEUR REVIENT DANS l'ÉGONOHIE
DE l'ÉGORGE terrestre
PAR
A. JAUBRÉE
MBMBRl Dl l'iHSTITUT
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PR0FBS8BDR DB GEOLOGIE AU MUSÂUM D*HISTOIRB NATURBUB
TOME PREMIER
PARIS
V CH. DUNOD, ÉDITEUR
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49 y QUAI DES AUGUSTINS, 49
1887
Tous droits réserrés
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IOD3
AVANT-PROPOS
La circulation souterraine des eaux à travers les pores
et les fissures des roches, bien qu'obéissant à des prin-
cipes très simples, présente une grande diversité, sui-
vant la nature et le mode d'agencement des roches.
Aussi, pour en donner une idée précise, convient-il d'en
signaler divers exemples empruntés à des structures
variées.
Cela expliquera comment je me suis laissé entraîner à
des développements beaucoup plus étendus que je ne
l'avais présumé d'abord. D'ailleurs, il n'était pas sans
intérêt de prendre les types dans des contrées distantes
les unes des autres, sauf à y reconnaître des particula-
rités identiques.
Dans cet ordre de recherches, on ne peut toujours
arriver, quelque soin qu'on y mette, à des notions
exactes, quant à la manière d^être des eaux souter-
raines et aux mouvements auxquels elles sont soumises
dans leurs trajets, soit à la descente, soit vers la remonte.
Lors même qu'on connaît la disposition des massifs de
roches, on ne saisit pas en général, dans tous leurs
détails, la disposition des fissures et autres canaux de
II AVANT-PROPOS.
parcours qui restent cachés, à raison de leur plus ou
moins grande profondeur. Trop souvent on est réduit à
des données vagues ou conjecturales, à moins que
quelque circonstance fortuite, comme un percement
artificiel, n'éclaire la question.
C'est une difficulté dont il convient de tenir compte,
en présence du travail ingrat dont le résultat est offert
aujourd'hui au public; elle expliquera certaines la-
cunes et incertitudes de cet ouvrage et engagera, peut-
être, à combler et à éclairer quelques-unes d'entre
elles.
La réunion et la coordination des faits qui sont
exposés plus loin ont exigé d'assez longues recherches ;
car, jusqu'à présent, l'histoire des eaux souterraines
avait été rarement traitée dans son ensemble, autrement
que d'une manière très sommaire*. Ces notions n'étaient
que peu développées dans les traités de géologie, bien
qu'elles constituent une branche importante de cette
science, non seulement pour les applications, mais aussi
au point de vue de la théorie. On ne saurait, en effet,
méconnaître son intérêt dans l'étude de bien des phé-
nomènes actuels, tels que les éruptions volcaniques.
L'importance des eaux souterraines se révèle surtout,
quand on remonte dans l'histoire du globe, et qu'on
recherche les vestiges qu'elles ont laissés de toutes parts
dans l'écorce terrestre, par la formation fréquente
d'espèces minérales.
* Il est juste de mentionner l'ouvrage du docteur Lei*scli : yatûrliche Wauer, publié
en 1864.
AVANT-PROFOS. in
C'est ce que j'ai fait ressortir dans un deuxième
ouvrage, qui est le complément de celui-ci.
Beaucoup de savants de France et de l'étranger ont
répondu aux demandes de renseignements que je leur
avais adressées, avec une obligeance pour laquelle je
leur offre ici mes vifs remerciements. Je signalerai
particulièrement en France : MM. Pouyanne, Genreau,
Tardy, Paul Gautier, Lory, Raulin, Leymerie, Bouvier,
Sainjon, Laur, Dru, Jus, Angiboust, Pérou, Duporcq,
Delafond, Fouqué, Schloesing, Pelîgot, Lefort, Ledru,
Bonnefoy, Nivoit, Huet, Mathieu et Rolland; en Alle-
magne, MM. von Dechen, Gûmbel, le docteur Gurlt,
Credner et Koch ; en Autriche-Hongrie, MM. Ed. Suess
et Szabo; en Italie, MM. Giordano, Silvestri, Ch. Durval
et Jervis; en Suisse, MM. Albert Heim, le docteur Jac-
card, Renevier et Stapff; en Belgique, MM. Dewalque,
Verstraeten et van Ertborn; dans le grand-duché de
Luxembourg, M. Siegen; en Espagne, MM. de Botella
et de Madrid d'Avila; en Portugal, M. Delgado; dans la
Grande-Bretagne, MM. Geikie, Prestwich et Ed. Hull;
en Russie, M. Trautschold; en Suède, M. Tomebohm;
dans TAmérique du Nord, MM. Persefor Fraser et Hay-
den; au Chili, M. Domeyko; dans Tlnde, M. Medlicott;
en Abyssinie, M. Aubry; en Australie, M. Liverdsige.
Dans ce long travail, j'ai trouvé surtout le secours
d'une collaboration active et dévouée de la part de mon
aide-naturaliste du Muséum, M. Stanislas Meunier, que
je prie d'accepter ici l'expression de toute ma gratitude.
LES
EA[]X SOUTERRAINES
A UÉPOQUE ACTUELLE
LIVRE PREMIER
RÉGIME DES EAUX SOUTERRAINES
CHAPITRE PREMIER
GÉNÉRALITÉS
Aperfa htotoriqne. — Sans essayer de faire un historique
de la question, rappelons que Bernard Palissy, dans son
Traité des eatix et fontaines, avait déjà reconnu que les
sources proviennent de l'infiltration des pluies, lesquelles
tendent à descendre dans l'intérieur de la terre jusqu'à ce
qu'elles rencontrent un fond de roc, ou d'argile imper-
méable, qui les contraigne de ne pas descendre davantage et
de se faire jour à la partie la plus déclive du terrain qu'elles
ont traversé.
C'est cependant l'opinion inverse qu'avait adoptée Pierre
Perrault' : « Mon opinion est donc que les eaux des pluies
et des neiges qui tombent sur la terre, sont la cause et
*■ ùe VOrigine des Fontaines, 1084.
2 GÉNÉRALITÉS.
l'origine des fonlaincs. Ce sentiment est le plus ordinaire
et le plus suivi : néanmoins de la façon dont je conçois la
chose, il y a une différence extrême entre ma pensée et celle
de ceux qui suivent ce sentiment ordinaire, car ils croyent
que les eaux des pluies et des neiges fondues tombant sur
la terre, la pénètrent jusqu'à ce qu'elles aient rencontré de
la terre grasse ou autre chose qui les arrête; sur quoi elles
coulent vers quelque ouverture sur le penchant d'une mon-
tagne; et moi je crois que la pluie ne pénètre point la terre,
ni ne descend point jusque sur cette terre grasse. »
La lumière n'était donc pas faite pour tout le monde
et nous n'en voulons pour preuve que les réfutations que,
cent ans plus tard, dans son traité du Mouvement des eaux\
Mariolte Se croit obligé d'opposer à des opinions différentes.
Après avoir exposé sa doctrine, d'ailleurs conforme à celle
de Bernard Palissy, il ajoute :
« Il y a des carrières en plusieurs endroits dont le haut
est en forme de voûte, et il n'y a que vingt ou trente pieds
de terre au-dessus, où l'on peut remarquer que les petits
égouts d'eau qui s'y font passent par de petites fentes entre
les lits de pierre et qu'ils procèdent des pluies, parce qu'ils
ne paraissent qu'après de grandes pluies, et qu'ils ne durent
que quinze jours ou trois semaines après qu'il a cessé de
pleuvoir; et on peut facilement juger que les autres écoule-
ments des fontaines se font de la même sorte. »
lk»nnée« fournies par les travaux de mines. — OutrC IcS
données innombrables que fournit l'observation pure, une
foule de documents importants sont procurés par de véri-
tables expériences. Je fais allusion, d'une part, aux faits
recueillis dans la recherche et le captage des eaux souter-
* Traité du mouvement des eaux, par M. Mariofte. Édit. 1700.
GÊxNÉRAUTÉS. 5
raines, ordinaires, minérales ou thermales, d'autre part
et surtout, à ceux qui résultent chaque jour de l'exploitation
des mines et de l'obligation où se trouve sans cesse le mi-
neur d'assécher ses travaux.
Quand on pratique une excavation plus ou moins pro-
fonde, on fait naître des parties de moindre résistance et,
par suite, des infiltrations d'eau qui se précipitent avec une
pression quelquefois très forte. C'est une sorte de drainage
obligé, jusqu'à des profondeurs dépassant 800 mètres. Aussi,
dans bien des cas, la lutte contre les eaux souterraines né-
cessite-t-elle l'une des principales dépenses de Texploilation
des mines.
Comme exemple des travaux auxquels conduit fréquem-
ment la présence de l'eau dans les mines, nous citerons
les grandes galeries d'écoulement exécutées pour dessé-
cher divers districts de mines, métalliques et autres. La
galerie de Freyberg est longue de 47 kil. 504; la ga-
lerie Joseph II, a Schemnitz, dont le i)ercement a duré
107 ans, a environ 18 kilomètres avec les annexes. La
galerie Ernest-Auguste, au Hartz, a une longueur de
23 kil. 658 ; elle a été percée à une profondeur de
408 mètres, au-dessous de quatre autres galeries situées
aux profondeurs de 78, 120, 146 et 298 mètres et ayant
respectivement 8 kiL 864, 9 kil. 168, 9 kil. 260 et 19 ki-
lomètres.
Aux riches mines d'argent de Comstock dans le Nevada,
la compagnie Sutro a exécuté un tunnel rectiligne de
6 kil. 147 qui recoupe le filon principal, auquel il est
perpendiculaire, à 600 mètres de profondeur; puis il se
développe, dans le filon môme, d'une quantité à peu près
égale, de manière à assécher, moyennant un abonne-
ment, les mines des diverses sociétés qui exploitent les
bonanzas du filon. En France, il est question d'exécuter
4 GÉNÊRALITËS.
une galerie de 14 kilomètres, pour verser dans la Méditer-
ranée les eaux du bassin de lignite de Fuveau.
Lors du creusement des puits de mines, pour lutter
contre les fnvasions d'eau, on est souvent obligé d'établir,
avec beaucoup de peine et à grands frais, des cuvelages
étanches, heureusement remplacés dans certains cas par le
système Kind et Chaudron. Pour le même but, on a recours à
l'ingénieux et hardi fonçage dans l'air comprimé, dont nous
devons le premier emploi à Texcellent géologue M. Triger.
C'est ainsi que les travaux de ce genre fournissent, au
point de vue de la circulation souterraine des eaux, des
données instructives, que Ton ne pourrait déduire des seuls
épanchements naturels.
§ 1. Eau de carrière ou d'imprégnation.
Toutes les roches, même celles qui sont le plus compactes,
sont imprégnées d'une certaine quantité d'eau.
Les ouvriers des carrières savent que les caractères phy-
siques des pierres les plus diverses se modifient par l'expo-
sition à l'air. Ce changement qui se constate clairement sur
les roches argileuses, calcaires et gréseuses, est aussi très
appréciable pour les roches les plus compactes, telles que le
granité. Il paraît s'expliquer par la perte d'une certaine
quantité d'eau, logée d'abord dans les pores de la roche et
qui a disparu. On donne à cette eau le nom à^eau de car-
rière ou d'imprégnation.
D'autre part, on remarque que des galeries pratiquées
dans des roches très compactes, telles que le basalte et le
trachyte, sont habituellement humides, sans qu'il y ait inter-
vention du phénomène de la rosée.
EAUX DE CARRIÈRE OU D'IMPRÉGNATION. 5
Le délilement à la suite de la gelée, des pierres de con-
structions appelées gélives^ est le résultat de Teau qui y était
interposée.
Déjà Dolomieu avait signalé des faits de ce genre dans son
mémoire sur VArt de tailler les pierres à fusils
c Le silex pyromaque, dit-il, est quelquefois trop humide
au sortir de la carrière; alors on le fait sécher; mais si, par
une trop longue exposition à Tair et au vent, il avait perdu
une certaine humidité souvent très visible lorsqu'on le tire,
alors il ne peut plus être taillé en pierre à fusil ; il casse
mal. »
Et plus loin, page 338 :
€ Lorsque les cailloux (silex) sortent de terre, ils con-
tiennent quelquefois trop d'humidité, que l'on aperçoit en
les fendant et qui se rassemble en gouttelettes. On ne peut
alors les tailler comme il faut; les caillouteurs les font alors
sécher quelques heures, l'été au soleil, l'hiver au feu ; mais
lorsqu'ils ont été trop longtemps exposés au soleil ou au
grand air, tels que ceux que l'on trouve sur la terre, ils ne
peuvent plus être taillés.
c Les ardoisiers des Ardennes disent que les blocs de
schistes séchés ne se travaillent plus aussi facilement; que
leur fissilité est moindre et le déchet de fabrication plus
grand. Il est possible de remédier à cet inconvénient, et les
ouvriers ne manquent pas de le faire, en mouillant légère-
ment le schiste sur la tranche. L'eau doit pénétrer dans
la pierre, car une goutte isolée s'élargit très vite et disparaît
rapidement. »
Des expériences ont été faites par d'assez nombreux obser-
vateurs pour mesurer la quantité d'eau de carrière corres-
pondant à diverses roches.
* Dictionnaire de chimie de Y Encyclopédie méthodique ^ t. Y, p. 531 et suiyantes.
G GÉNÉRALITÉS.
En étudiant la nature des pavés et grès de Paris, Coriolis*
avait trouvé que la quantité d'eau qu'ils absorbent paraît
être en rapport avec leur dureté et que les diverses variétés
de grès employées dans la capitale absorbent, en vingt-
quatre heures, 4 à à de leur volume.
Le tableau ci-après présente quelques-uns des chiffres
obtenus par M. Delesse'.
LAU DE CARRIKHË DE DIVERSES KOCIILS
Poids de l'eau pour 100 de la substance humide
Craie blanche ,,^'^g
Calcaire grossier à milliolites 25,55
!25 20
Argile enveloppant les meulières de Meudon. . . 24,48
Calcaire grossier dur 5,02
Gypse i,50
Granité à gros grains (le SiMuur 0,57
Quarlz blanc en (ilon dans le granité de Seniur . 0,08
Silex de la craie de Meudon 0,12
Silex meulière 1,12
Eurite noirâtre de Cln;vigné 0,07
Gneiss 1res micacé et friable 5,00
D'après M. Thoulet 100 grammes de basalte de Guéry
(Puy-de-Dome), parfaitement desséché à 100 degrés, peuvent
absorber 0 gr. 350 d'eau. Dans les mêmes conditions ce
chiffre est de 1,981 pour le calcaire jurassique compact de
Verdun.
Ainsi, une quantité très notable dVau se dissimule dans
* Durée des pavés cl des grès. Annales des Ponts et Chaussées, t. V, 1854, p. 259.
* Bulletin de la Société géologique de Ftumce, 2' série, t. XIX, p. 04. Voir aiis.<îi : Du-
rochcr, même recueil. 2" série, t. X, p. 451. Bischof, Lehrbuch der physikalischen
Géologie, t. I, p. 204.
nOCHES IMPERMÉABLES ET ROCHES PERMÉABLES. 7
les pores les plus fins des roches. Mais à raison de la force
avec laquelle elle est retenue par capillarité, il est difficile
de l'expulser complètement et, par suite, d'arriver à une éva-
luation exacte.
Si Ton tient compte de la nature des roches les plus
abondantes, on doit reconnaître que la quantité totale d'eau,
ainsi incorporée dans Técorce solide, représente une quan-
tité très importante, sans doute comparable au volume que
l'eau occupe à la surface même du globe, quelque vaste que
soit le bassin de l'Océan*.
^^ "2. KOCIIES IMPERMÉABLES ET IIOGIIËS PERMÉABLES.
Au point de vue de Thydrognosie, tant souterraine que
superficielle, il y a une distinction essentielle à faire dans la
nature des roches les plus répandues.
Les roches sont, les unes imperméables, c'est-à-dire ne se
laissent pas traverser par l'eau, du moins en quantité no-
table; les autres, capables d'absorber l'eau avec facilité et
perméables.
Roches imperméables.
Tjres de roehes imperiiiéiibies. — Comuie rochcs imper-
méables se présentent, avant tout, les silicates d'alumine
hydratés connus sous le nom d'argile. A l'état de pureté,
l'argile n'est pas commune ;, mais elle est très répandue à
Télat de mélange avec la chaux carbonatée et donne alors
les marnes.
■ H. Deiesse, dans le méiuoirc précilé, p. 83, l'évalue à 5 pour 100.
8 GËNÉRALITÉS.
L'imperméabilité de Targile se maintient, même quand
elle est mélangée d'une certaine quantité de sable, de telle
sorte que l'élément argileux forme un ciment reliant les
grains de sable; mais alors la masse n'a plus la souplesse de
l'argile plastique et elle peut céder à des actions mécaniques*.
Les roches granitiques et diverses roches cristallines sont
à peu près imperméables, quand les fissures qui les traversent
sont assez fines pour ne pas donner issue à l'eau ; il en est
de même des schistes argileux ou phyllades.
On a constaté, par exemple, que les galeries préparatoires
du tunnel sous la Manche, établies dans les couches de la
craie marneuse, restaient à peu près étanches, sur plusieurs
kilomètres, lors même que le massif qui les séparait de la
mer n'avait que quelques mètres.
Tandis que l'invasion incessante des eaux constitue très
souvent, comme on l'a vu, l'une des plus grandes difficultés
contre lesquelles le mineur ait à lutter, il est cependant des
cas où les travaux sont ouverts dans des couches tellement
imperméables qu'il faut, lors du fonçage de puits, y des-
cendre de l'eau, pour l'exécution des trous de mine. C'est à
peu près ce qui est arrivé dans les mines les plus profondes
de Kongsberg {Gôttes Hulfe et Armen) en Norvège et les tun-
nels de ce pays restent souvent secs, quoique non murailles.
D'après M. Kjerulf, l'imperméabilité des mêmes roches n'est
pas moins remarquable dans les régions les plus septen-
trionales de la Norvège.
Les travaux percés dans le gneiss de Suède pour des ex-
ploitations métalliques ne donnent non plus que de très
faibles quantités d'eau.
Dans la mine de Bottalack près du Lands'end, en Gor-
nouailles, on a une preuve particulièrement éloquente de
^ Yerstraeten. Eatiz alimentaires de la Belgique.
ROCHES IMPERMÉABLES ET ROCHES PERMÉABLES. 9
rimperméabilité de certaines roches métamorphiques,
puisque les galeries sont établies sous la mer et qu'un toit
de quelques mètres, au travers duquel le roulement des
galets poussés par la grosse mer se fait nettement entendre,
suffit pour empêcher toute infiltration.
De même, en France, sur le littoral opposé, aux mines de
fer de Dielette, des puits foncés sous la mer dans les roches
granitiques sont étanches.
Ajoutons, qu'en dépit des appréhensions de quelques
personnes, la percée du mont Cenis n'a rencontré aucun
amas d'eau important. Le débit total des suintements
qui sortent des roches schisteuses ne dépassait pas 1 litre
par seconde. Cependant le tunnel, sur une longueur
de 12 kil, 200, a coupé des couches carbonifères et
triasiques, inclinées habituellement de 50° sur l'horizon,
et consistant en calcaires schisteux ou calcschistes, sur
9 kil. 592; grès talqueux, sur 2 kil. 96; quartzites
(388 mètres) et, en outre, des anhydrites, des dolomies
et des calcaires compacts*. Au lieu de gêner les travaux,
Teau a tellement fait défaut qu'on était obligé d'aller la
chercher au dehors pour les besoins des travailleurs.
Les gypses, loin de livrer passage à des trombes d'eau,
comme on Tavait craint , laissèrent à peine suinter une
petite source.
Si, dans quelques parties, le percement du Saint-Gothard
(fig. 1), a donné passage à des irruptions d'eau et de boue
par des lithoclases, dont les principales ont été tracées sur
la figure, il est au contraire, sur la plus grande longueur,
remarquablement étanche.
L'influence de l'imperméabilité des terrains sur le régime
des cours d'eau de la surface a été mal appréciée jusqu'au
* Les masses superposées au tunnel atteignent 1610 mètres.
10
GÉNÉRALITÉS.
(Kgy) 9jp£ ap ,^F
eeo^ (auwj ^t
moment où Bclgraud, à
la suite des études sur le
bassin de la Seine, en a
signalé rimporlance aux
ingénieurs.
Exentples du rôle des
roches imperméables dam
le bassin de la Seine. —
Dans le bassin de la
Seine, au-dessus des cou-
ches imperméables du
terrain crétacé inférieur
et au pied des coteaux de
la craie blanche, se trou-
vent des sourcestrès nom-
breuses et en général
assez faibles. Dans le dé-
parlement de TAube, en-
tre TArmançon et la
Seine, elles alimentent
cinq ou six affluenls de
TArmance et laMogne, le
principal affluent de TIlo-
zain. Les villages se sont
accumulés sur cette li-
gne, attirés par la pureté
des eaux et la fertilité
des terres. Dans les com-
munes de Coursan, Mont-
fey, Saint-Thil, Villeneu-
ve-au- Chemin , Auxon ,
Chamoy, Montigny, As-
senay , Crésantigne^ ,
ROCHES IMPERMËABLES ET ROCHES PEUUÉÂDLES. 11
Faves, Saint-Jean-de-Bonneval,Lirev, Machv, Brunav, Villv-
le-Maréchal, Longeviile, Moussey, Saint-Pouangc, Roncenay,
Yillemercuil, on ne compte pas moins de 50 à 60 sources
pérennes dont plusieurs, notamment celles de Chamoy et
d'Auxon, sont fort belles. Entre la Seine et l'Aube, ces
sources ne sont pas moins nombreuses; on en compte plus
de 10 dans les communes de Doches, Piney et Villehardoin.
Des faits analogues se remarquent sur les autres terrains
imperméables du même bassin; ainsi les sources sont très
nombreuses et très petites dans les sablons limoneux du
greemand, et rares dans les argiles ncocomienncs.
iViaS MAISONS
Kîlomt-lrcs.
5 4 :i rî 7 K î» 10 l,)
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Fîg. i. — Carie monlrant la disposition des principales sources du liassin du Pclil Morin,
entre Vontmirail el Veidelot. Kchelle i-^^d ou O^.UOl? par Itilomèlrc.
Dans les vallées de la Bri(î, le terrain tertiaire et spé-
cialement les marnes supérieures se comportent de môme.
Le Petit Morin (lîg. 2), entre Montmirailel Villcneuve-sur-
Bellot, reçoit H5 sources réparties en 65 groupes. Celles
qui sont situées le long de son cours appartiennent, soit à
Tétage de l'argile plastique, soit aux terrains perméables
compris entre les marnes vertes el l'argile plastique;
celles qui s'éloignent de son cours, et qui généralement
sont groupées au fond des vallées secondaires, appar-
tiennent au niveau d'eau des marnes vertes. Les rm des
plateaux, qui restent à sec pendant la plus grande partie de
12 GÉNËRÂLITÉS.
Tannée, s'étendent au-dessus de la plus élevée des sources
de chaque groupe.
La figure 3 représente les 50 sources disséminées le long
du Clignon, principal affluent de TOurcq. La disposition est
identiquement la même que sur la figure 2 : les sources
Kilomètrps.
4 5 6 7 8 9 10
' I I I 1 I !
Fig^. 3. — Carie montrant la disposition des principales sources le long du Clignon
Même échelle que pour la figure précédente.
qui sont disposées le long du cours d'eau principal, appar-
tiennent aux terrains perméables, compris entre le gypse et
l'argile plastique ; celles qui s'écartent du ruisseau princi-
pal, et se groupent au fond des vallées secondaires, appar-
tiennent au niveau d'eau des marnes vertes. Ces disposi-
tions s'appliquent à toutes les vallées de la Brie.
Types de roehes perméables. — Parmi les rochcs perméables
se place en première ligne le gravier*. On constate chaque
jour sa perméabilité, dans les plaines et les innombrables
fonds de vallées dont il constitue le sol. Il suffit, pour
^ Le nom de roche s'étend, en Géologie, & toutes les masses considérables par leur
volume, lors même qu'elles sont tout i fait incohérentes, comme le gravier et le sable.
ROCHES IMPERMÉABLES ET ROCHES PERMÉABLES.
13
cela, d'examiner l'un des puits qui y sont entaillés pour
les usages domestiques, et d'observer la facilité avec
laquelle Teau afflue à travers les interstices des cailloux et
du sable, lorsqu'on cherche à l'épuiser en l'aspirant. C'est
ce que montre la figure 4, où l'on voit, pour un moment
donné, la distance qui sépare le niveau de l'eau dans la
couche entièrement imbibée du niveau de l'eau dans le
puits, immédiatement après qu'on en a extrait une certaine
quantité. A la suite de cet état artificiel, le niveau général
ne tarde pas à se rétablir conformément à la figure 3. On re-
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Fig. 4. — Puits creusé dans un gravier aqui-
féreGet superposé à la couche argileuse A.
État normal. MN, niveau d'eau.
Fig. 5. — Puits creusé dans un gravier aqui-
fére G, où l'on voit comment le niveau pri-
mi tir MN a été modifié immédiatement
après qu'on en a extrait une certaine quan-
tité d'eau. A, couche imperméable.
connaît également la perméabilité du gravier, par l'avidité
avec laquelle, à l'état sec, il absorbe l'eau qu'il reçoit.
Le sable qui se trouve, plus fréquemment que le gravier,
dans les terrains de tous les âges, n'est pas moins perméable,
pourvu qu'il ne soit pas mélangé d'argile, comme il arrive
très fréquemment. C'est de la couche de sables verts infé-
rieurs à la craie blanche que jaillissent si abondamment,
à Paris, les eaux des puits artésiens de Grenelle et de
Passy.
L'aqueduc de la Vanne traverse les sables de Fontaine-
bleau, entre les vallées du Loing et de la petite rivière
d'Ecolle, sur une longueur de 31 kilomètres, et ce terrain
14 GÉNÉRALITÉS.
est tellement perméable, que le tracé n'a rencontré aucun
ruisseau. Il franchit cependant plusieurs dépressions, celles
des Sablons, de la Croix-du-Grand-Maître, du Vert-Galant,
ou même des vallées assez profondes, telles que celles de la
route d'Orléans, des Rochers de la Goulotte, d'Arbonne, de
NoisY-sur-Ecolle, de Monlrouget. Cette rareté des cours d'eau
est une des propriétés les plus caractéristiques des terrains
perméables.
Les terrains perméables du bassin de la Seine absorbent
sur place Teau des plus grandes averses.
Toutes les formations sablonneuses ne sont d'ailleurs pas
perméables. Tandis que les sables de Fontainebleau et de
Beauchamp sont très franchement perméables, les sables
du terrain crétacé inférieur sont assez imperméables, en
raison des matières argileuses qu'ils renferment, pour qu'on
puisse y créer partout d'excellentes prairies. Il en est souvent
de même, dans les terrains d'alluvion, surtout lorsque le
sable est lîn.
« La plupart de ceux, dit Belgrand, qui ont écrit sur
ragri€ulture ont négligé cette importante propriété du sol.
Ainsi, presque tous admettent qu'avec un litre d'eau par
seconde, coulant d'une manière continue, pendant la sai-
son des irrigations, on arrose convenablement un hectare
de prairie. Avec un litre d'eau par seconde, on n'arro-
serait pas plus de 50 mètres carrés des sablons de la forêt
de Fontainebleau. D'excellenles prairies, les herbages du
pays de Bray et de la vallée d'Auge, dans les sables argi-
leux du terrain crétacé inférieur, n'exigent aucune irriga-
tion. »
Le grès, roche qui n'est que du sable plus ou moins ci-
menté, est souvent très accessible à l'eau, à part celle qui
s'infiltre dans ses fissures.
Le calcaire friable et poreux, connu sous le nom de craie
ROCHKS IMPERMÉABLES ET ROCHES PERMÉABLES. 15
blanche, nous présente une autre roche perméable. C'est à
cause de ses pores que celte variété de calcaire happe forte-
ment à la langue.
Toutefois la perméabilité de la craie n'est pas comparable
à celle du gravier et du sable. Sa réputation de roche très
perméable est due aux innombrables lithoclases qui débitent
ordinairement ses couches en menus fragments. D'après
M. Beardroore, l'eau de pluie traverserait si lentement une
colline crayeuse, qui serait exempte de fissures, qu'elle
exigerait de quatre à six mois pour parvenir de la surface
à la profondeur de 60 à 90 mètres; de sorte qu'une forte
pluie d'hiver ne serait pas parvenue au niveau des sources
avant l'été suivant et que l'effet maximum d'une pluie
chaude d'été et d'automne ne serait pas sensible avant seize
mois*.
Dans les roches perméables il faut comprendre aussi les
roches volcaniques boursouflées, laves, basaltes et trachytes,
ainsi que les scories incohérentes, ponces, tufs et conglo-
mérats qui sont souvent poreux.
Quoique la tourbe ne soit pas à proprement parler une
substance minérale, on doit la mentionner ici. Les dépôts
tourbeux sont, non seulement perméables, mais encore doués
d'un grand pouvoir absorbant. Ainsi en Irlande, après un
été sec, il faut des semaines entières de pluies fortes et con-
tinuelles pour saturer les dépôts tourbeux des bassins du
Shannon qui donne naissance à la rivière Killaloo. Cela
explique le rôle de la tourbe dans l'histoire des sources et
inversement. Sur le plateau central de la France, par
exemple dans les départements de la Haute-Vienne et de la
Creuse, il y a habituellement de la tourbe à l'origine des
sources, dont le régime est peu considérable et très régulier.
• Preslwich. Affdreaa of the Geoiogiral Society. Qiiarteriy jotnna!, 1872, p. 38.
16 GÉNËRALITfiS.
Observations sur la monvemeiit de Teaii dans les roehee per*
méabiee. — Ainsi quc le remarque M. Yerslraelen*, Toau
qui s'infiltre dans un terrain est soumise à deux influences :
la gravité et rattraction par les grains solides. Si les inter-
stices ont de l'ampleur, il y a beaucoup d'eau pour peu de
surface attractive, la gravité l'emporte et le liquide descend.
Si, au contraire, les vides sont de dimension capillaire, Tat-
traction moléculaire l'emporte, elle retient l'eau ou même
la fait remonter, comme on l'observe dans l'éponge qui aspire
en quelque sorte Teau qu'elle touche.
La capillarité contribue donc à élever plus ou moins l'eau
dans un sol au-dessus de son nivean hydrostatique ; d'où il
résulte souvent une humidité superficielle qui intéresse les
cultivateurs. La hauteur d'eau soulevée par la capillarité, qui
est presque nulle dans les graviers, est de 0",30 et plus
dans les sables rugueux moyens ; les draineurs l'estiment
à 0",60 environ pour les terres sablo-argileuses; on lui a
assigné l'",50 et au-delà dans les argiles et les marnes
compactes, et plus encore dans les terres grasses et tour-
beuses, à cause de la ténuité des tissus végétaux tassés dans
ces couches*.
PerméablUlé en grand. — BcaUCOUp de rOChcS doivCUt ICUr
perméabilité, non pas à la porosité même de la roche, mais
aux diaclases et aux fissures de retrait qui les traversent.
C'est ainsi que beaucoup de calcaires très compacts,
comme le calcaire lithographique, et appartenant aux étages
les plus différents, peuvent donner issue aux eaux avec une
grande facilité.
^ Eaux alimentaire» de la Belgique^ 1885, p. 50 et 51.
* L'eau pure s'élève de 3 ceniiniëtres dans un tube de verre de 1 millimètre de
diamètre; elle atteindrait une trentaine de centimètres dans un tube de ,^ de milli-
mètre.
ROCHES IMPERMÉABLES ET ROCHES PERMÉABLES. 17
Les diaclases présentent souvent une notable largeur,
particulièrement dans les roches calcaires de tous les âges;
elles passent, par des intermédiaires de toutes sortes, à de
véritables crevasses. Aussi, au fond de beaucoup de car-
rières, l'eau des pluies, quelque abondante qu'elle soit,
disparaît instantanément, comme si elle s'écoulait par un
conduit artificiellement disposé. Quelquefois ce sont des
ruisseaux ou des rivières qui s'engouffrent partiellement ou
en totalité pour reparaître plus loin. Ces faits qui nous oc-
cuperont doivent être pris en considération par les ingé-
nieurs, qui s'exposeraient à de graves mécomptes en prati-
quant dans des roches ainsi crevassées des canaux, dont on
ne parviendrait pas à rendre les parois étanches.
Les grès, par suite des cassures qui les traversent, se com-
portent de même.
Cette perméctbilité en grand joue dans le régime des eaux
souterraines un rôle dont on appréciera l'importance plus
loin*.
* La capacité d'absorption des principales roches triasiques et oolithiques a été ré-
cemment Tobjet d'évaluations, de la part du comité chargé par la BritUh Asêociation
d'étudier la circulation de l'eau souterraine en Angleterre. Année 1881, p. 309.
CHAPITRE II
RÉGIME DES EAUX DANS LES TERRAINS PERMÉABLES
Quoique le régime des eaux souterraines présente des ca-
ractères analogues dans les terrains perméables, quelle
qu'en soit leur nature, nous avons cru devoir distinguer et
signaler d'abord les terrains de transport, quaternaires et
récents, non seulement à cause des étendues considérables
qu'ils occupent à la surface des continents» mais aussi en
raison de la facilité particulière d'étudier les nappes d'eau
qui les imbibent. Dans d'autres terrains perméables, tels que
les terrains stratifiés, les roches cristallines désagrégées, les
déjections volcaniques poreuses, on retrouve des circon-
stances semblables.
Les sources sont alimentées par des courants souterrains
qui circulent dans les fissures et dans les interstices des
roches et qui reçoivent généralement le nom deimppes sou-
terraims.
Les noms de nappe d'eau et de niveau d^eau ont donné
souvent lieu à des erreurs. Il ne s'agit pas d'une véritable
nappe d'eau, qui serait interposée entre des roches solides,
mais d'eau logée dans les interstices de roches solides, dont
RÉGIME DES EAUX DANS LES TERRAUfS PERMÉABLES 19
elle ne représente qu'une faible fraction du volume totah
Dans le cas où une telle nappe d'eau imprègne des roches
poreuses, telles que les sables ou les graviers, elle est en
général continue. Il n'en est pas de même quand l'eau
n'occupe que des fissures ou des cavités plus ou moins
espacées.
La nappe d'eau la plus rapprochée de la surface du sol est
celle qui alimente la plupart des puits. Dans les cas les plus
fréquents, où cette nappe n'est pas recouverte par des forma-
tions imperméables, elle a été désignée sous des noms très
divers : en français, on l'appelle nappe iTeau des puiU
(Belgrand), nappe d'infiltration (Delesse), couche aquifère
libre, nappe liquide (Verstraeten) ; en allemand, le nom de
Grundwasser est très employé, de même que celui de ground-
waler en Angleterre ; elles ont été aussi appelées en anglais
ioater level (Geikie), ground spring (Prestwich) et waterplain
(Dana) ; en hollandais, Welwater; en Italie, notamment en
Sicile, acqv>a di livello (eau de niveau), et vulgairement acqua
di centroj etc.
Ces noms, que les populations et les géologues ont partout
donnés à des nappes d'eau aussi étendues et aussi impor-
tantes, sont généralement mal appropriés à leur régime et
peu caractéristiques*
Il convient que leur dénomination soit cosmopolite comme
Test celle de phréatiques^ qui exprime qu'elles alimentent
les puits ordinaires j ne traversant pas de couches imper-
méables, et tels que l'entendaient les Grecs.
La profondeur en est très variable, depuis quelques décimè-
tres jusqu'à 100 mètres et au delà. Le cas le plus fréquent
est représenté parla figure 6 où l'on voit un puits établi dans
des graviers d'alluvion. Les figures 7 et 8 représentent des
?pi«;, xroçi puits.
20 RÉGIME DES EAUX DÂI4S LES TERRAINS PERMÉABLES.
puits tirant leur eau des fissures de la craie et de celles du
i.>. -^^'^
*^- *^;
Fig. 6.— Coupe transversale d*un puits foncé dans un dép6t de transport.
Échelle de 0-,01 par mètre.
grès bigarré. Dans ce dernier cas, les puits sont souvent très
t.
G
%
Fig. 7. — Pnits dans la craie montrant Tin-
fluence des lithoclases sur la circulation
des eaux phréatiques.
Fig. 8. — Pnits dans le grès bigarré montrant
rinfliience sur le régime des eaux phréa-
tiques des lithoclases et dei diastromes
(interstices des couches).
profonds ; par exemple : pour la craie, au camp de Châlons,
(fig. 7) et pour le grès keupérien, à Leicester (fig. 8).
EAUX PURÉATiQUES DES TERRAIS DE TRAI9SP0RT. SI
Les eaux phréatiques sont aiises à profit sous une forme
très simple, par les puits dits imtarUanés\
Nous accorderons d'autant plus d'attention aux eaux sou-
terraines de cette catégorie que, outre leur utilité de chaque
jour pour l'alimentation de millions d^hommes, leur étude
doit éclairer vivement la connaissance du régime des eaux
souterraines en général.
§ L Eaux phréatiques des terrau^s de transport.
Une partie considérable des continents est recouverte par
des traînées, parfois très épaisses, de débris de roches variées,
qui ont été transportés de distances plus ou moins considé-
rables. Le transport de ces matériaux est dû, tantôt à d'an-
ciens cours d'eau, tantôt à des glaciers maintenant disparus.
Ces dépôts, qui appartiennent généralement à l'époque
quaternaire, sont ordinairement appelés dépôts glaciaires^
dUuviuniy alluviom a^iciennes et peuvent être désignés sous
le nom général de terrain de transport.
Au point de vue où nous nous plaçons, ils comprennent
des matériaux de perméabilité très différente, depuis les
limons compacts jusqu'à des graviers très grossiers, en
passant par des sables plus ou moins fins*.
Les traînées de graviers et de sables très perméables, au
milieu desquelles coulent un grand nombre de rivières et
de fleuves, sont en général imbibées d'eau. C'est avec cette
^ Revue de géologie , t. XI, p. 20.
* ReiaiiTemeiit au régime des nappes souterraines des terrains perméables, on peut
consulter:
Daubrée. Description géologique du Bot-AAtn, 1852, p. 541 à 355.
Delesse. Carte hydrologique de Paris. Comptes rendus y 1856, t, XLII, p, 1207,
Le même. Légende de la carte hydrologique de Seines l-Oise, 1874.
2S RÉGIME DES EÂDX DANS LES TERRAINS PERMÉABLES.
eau que s'alimentent de nombreuses populations» agglo-
mérées en villages et en villes, qui vivent sur les plaines
alluviennes : l'eau potable s'y obtient par le foncement de
puits ; car les sources proprement dites manquent ordinai^
rement dans ces plaines.
Les eaux météoriques qui tombent sur des roches aussi
perméables que le gravier ou le sable, s'y infiltrent rapide-
ment, à moins que ces dépôts ne soient recouverts de limon
argileux, comme il arrive quelquefois. En outre, la rivière
qui a creusé son lit dans le gravier contribue aussi, pour sa
part, à alimenter la même nappe d'eau, par des infiltrations
latérales, particulièrement au moment des crues.
Ces nappes souterraines se prolongent sous toute la super-
ficie du dépôt de gravier ^ Dans le sens de la profondeur, la
nappe d'eau s'arrête en général aux roches qui supportent
le gravier, à moins que celles-ci ne soient elles-mêmes per-
méables.
En fonçant un puits, on rencontre quelquefois au milieu
du gravier des lits argileux peu perméables, auxquels la
nappe d'eau paraît s'arrêter (voir ci-dessus la figure 6) ; mais
ces lits, de forme lenticulaire, peuvent n'avoir qu'une dimen-
sion très restreinte et le gravier aquifère reparaît plus bas.
Ememple foaml par la plalae do Bhia | latei«a«es
l'eaa eircide) nature des ■MMiTeneats de la aappe § floareee i|al ea
dériveat. — Commc cxcmplcs de faits qui se reproduisent,
de toutes parts, avec les mêmes caractères, nous choisirons
d'abord la nappe d'eau qui borde le Rhin à la hauteur de
Strasbourg (fig. 9). Sur la rive gauche seulement, elle a
une largeur de plus de 20 kilomètres. La profondeur en est
inconnue, mais elle est certainement supérieure à 10 mètres.
* Quand le grayier est recouvert par du limon, tel que le loess dans la plaine d'Alsace,
la nappe d*eau se poursuit au-dessous de cette couche imperméable.
îig. 9. — Pltn représentant la nappe d'eau adjacente au Rhin et i ses affluenti, sur la rive
gaache du fleuve, entre Bâle et wissemboure. Celle du gravier du Rbiu est représentée en
teinte pâle: celles des alluvions provenant des Yosees ^sont désignées par une teinte plus
foncée. - Échelle de 0,000001. -» . o i—
24 RÉGIME DES EAUX DANS LES TERRAINS PERMÉARLES.
La section transversale du gravier aquifère est donc au
moins de 200 000 mètres carrés. Cette section est 320 fois
plus grande que celles du Rhin et de TUl réunis qui cou-
lent à sa surface, lors des eaux moyennes*.
Pour évaluer la quantité d'eau souterraine qui imbibe le
gravier, il a suffi de mesurer les interstices que laissent
entre eux les cailloux et les grains de sable dans leur état
ordinaire : c'est ce que j'ai fait d'une manière très simple,
pour le gravier de la plaine du Rhin. Le gravier est tassé
dans un vase imperméable, de manière à occuper le moindre
volume possible. En déterminant les poids j)' du gravier
sec et f celui du gravier imbibé d'eau, ^- — 7-^ exprime la
dimension relative des interstices. Le volume des interstices
varie suivant la variété de gravier ; pour le gros gravier,
passé sur un crible dont les mailles étaient distantes de
2 centimètres, les interstices ont été trouvés de 0,32 à 0,36,
tandis que pour le mélange de menu gravier et de sable qui
a passé à travers le crible, il ne formait que 0,15 à 0,16 du
volume total. Dans le gravier des alluvions modernes ou
anciennes pris m place^ les interstices ne peuvent pas être
beaucoup moindres que dans le gravier tassé artificielle-
ment, comme on vient de le voir. Il est même probable que
les interstices y sont en général encore plus volumineux que
dans ce dernier, à en juger par le déchet que Ton remarque
ordinairement dans les travaux où l'on emploie le gravier
naturel*. D'après les chiffres trouvés plus haut, on reste
donc au-dessous de la réalité en admettant, pour le volume
d'eau qui imbibe le gravier, la fraction 0,20 ou un cin-
quième. La nappe adjacente au Rhin renferme, par consé-
quent, à la hauteur de Strasbourg et sur un kilomètre de
' Description géologique du fias-Rhin, p. 542.
s On a quelquefois observé un déchet de 0,25.
EADX PURÉATJQUËS DES TERRAINS DE TRANSPORT. 25
longueur, une quantité d'eau égale à celle qui passe au
pont deKehl en H heures 1/2, lors du niveau moyen.
La vitesse avec laquelle afflue l'eau des puits foncés
dans le gravier donne une idée des conditions suivant
lesquelles elle se meut à travers les interstices qu'elle oc-
cupe*. Quelques parties de gravier naturellement dépourvues
de sables sont d'une perméabilité bien supérieure à la
moyenne.
A la suite des crues et des basses eaux des rivières, le
niveau des puits s'élève et s'abaisse V La correspondance
n'est pas instantanée; abstraction faite de l'influence di*
recte de la pluie, la hauteur de la nappe souterraine présente
un retard de plusieurs heures ou de plusieurs jours sur l'état,
maximum ou minimum, dé la rivière, en raison de la résis-
tance que l'eau éprouve dans son mouvement souterrain.
x\ussi le long des cours d'eau sujets à des variations fré-
quentes et rapides, l'eau des puits, au lieu d'être de niveau
avec la rivière, est ordinairement en contre-haut ou plus
rarement en contre-bas (fig. 10). L'amplitude des oscillations
souterraines est en général moindre que celle des cours
d'eau.
Souvent le volume du Rhiû augmente beaucoup, sans qu'il
soit tombé d'eau sur la partie moyenne du fleuve, parce
qu'il y a eu des fontes de neige ou des chutes de pluie dans
la partie alpestre de son bassin. Dans cette région moyenne,
le niveau de la nappe d'eau souterraine s'élève néanmoins,
d'abord près de la rivière, puis l'élévation de niveau gagne
de proche en proche ; ce qui doit résulter de ce que le
fleuve, en s'élevant, s'infiltre latéralement dans le gravier
* Quelques chiffres sur ce sujet sont consignés dans la Description géologique du
Bas-Rhin, p. 543 et 344.
s On peut d'ailleurs observer, en petit, le m£me fuit au bord de la mer, à l'aide d'un
simple trou creusé dans le sable fin que découvre la marée basse.
26 RÉGIME DES EAUX DANS LES TERRAINS PERMÉABLES.
voisin. Le mouvement transversal dont il est question se
fait avec lenteur; cependant si la crue du fleuve dure
quelque temps, toute la plaine voisine se trouve imbibée
au-dessus du niveau moyen. La baisse du fleuve détermine
un écoulement en sens inverse, c'est-à-dire de l'intérieur
du sol vers le cours d'eau superficieL Ces oscillations dé-
croissent d'amplitude en s'éloignant de la rivière.
Le long promontoire qui sépare le Rhin de l'IU, à la hau-
teur de Strasbourg (voir plus haut la figure 9), présente
quelquefois un mouvement plus complexe; car, les bassins
des deux cours d'eau étant dans des conditions météorolo-
giques différentes, leurs crues peuvent être indépendantes
^P^^^^^^y,^^.: . . ..^^^p^
Fit(. 10. — Nappe d'eau adjacente au Uliin et à l'ill ; coufie prise A la hauteur de Stras-
bourg montrant les changements de niveau du fleuve, N, N et n, n, qui amènent des chan-
gements dans le niveau de l'eau d'imprégnation du gravier.
l'une de l'autre. Ainsi le Rhin a sa crue d'été lorsque l'IU
est ordinairement très basse. Si les eaux de l'IU viennent
à croître subitement, celles du Rhin ne variant pas, ses
eaux d'infiltration s'élèvent de proche en proche, à partir
de la première rivière, et bientôt une partie de la rivière
d'Ill se déverse dans le Rhin par cette voie souterraine. Un
mouvement en sens contraire se fait quand c'est le Rhin
qui est en crue.
Contrairement à ce que l'on observe en général, la nappe
aquifère dont il vient d'être question donne lieu, en quelques
points, au jaillissement de sources nombreuses et abondantes.
Plusieurs de ces sources sont assez volumineuses pour que
les ruisseaux qui en naissent servent dès l'origine de moteur
EAUX PHRÉATIQUES DES TERRAINS DE TRANSPORT. 27
à des usines, comme à Obenheim et à Gerstheim. D*autres
forment immédiatement de véritables rivières, ainsi qu'on
en peut citer plusieurs dans la plaine du Rhin; telles sont
la source située près d'Offendorf, celle de la Loutter, près de
Huttenheim, celle de la Blind, près de Colmar et plusieurs
des cours d'eau situés aux environs de Schlestadt^ Tous ces
ruisseaux et petites rivières, qui jaillissent dans des rigoles
peu profondes, à 0°*,50 ou 1 mètre en contre-bas de la sur-
face du sol, doivent leur origine à des épanchements de la
nappe d'eau d'infiltration *. L'alluvion est loin d'être homo-
gène. Tandis que sur certains points elle consiste en un
gravier extrêmement perméable, ailleurs elle est mélangée
de limon, de manière à former des digues, à peu près imper-
méables. Il parait exister, à peu de profondeur, des espèces
de galeries, essentiellement perméables, dans lesquelles il
s'opère des dérivations du Rhin et d'autres cours d'eau. Ces
dérivations, après quelques kilomètres de trajet souterrain
de l'amont vers Taval, donnent naissance, par suite d'une
différence de niveau, à de petites rivières qui jaillissent avec
impétuosité du sol. Ce n'est d'ailleurs qu'une variété du
mécanisme ordinaire des sources. L'élévation de l'orifice
des sources qui nous occupent au-dessous du niveau moyen
du fleuve considéré dans une même section transversale de
la vallée, leur extrême limpidité, les faibles variations de
température qu'elles présentent, sont autant de faits qui
apprennent que les orifices de ces sources sont en général
assez éloignés de la prise d'eau.
J'ai encore eu l'occasion d'observer deux faits instructifs
sur la marche des eaux souterraines.
L'eau fournie, à Strasbourg, par les puits de plusieurs
' IkêcripHon géologique du Bas-Rhin, p. 11 et 347.
* Ed Alsace, on a donné ;le nom de Graben à un certain nombre d'entre eux (Rieth-
graben, îhrtgnbmi), bien que leur origine ne soit pas artificielle.
38 RÉGIME DES EAUX DANS LES TERRAINS PERMËABLES.
maisons du Faubourg de Pierre devint impure à peu près
simultanément, en 1848. Au moment où cette eau sortait
des pompes, elle répandit une odeur semblable à celle du
bitume obtenu par la fabrication du gaz; abandonnée à elle-
même, elle se recouvrait bientôt d'une pellicule, due à la
présence du goudron. Les puits infectés formaient une
bande étroite et allongée, qui s'étendait à partir de Tusine
à gaz jusqu'à 300 mètres environ de distance. Or, la direc-
tion de celte zone est placée, comme une résultante, for*
mant diagonale entre les directions de deux courants qui
tendent à s'opérer, l'un dans le sens du canal des Faux-
Remparts, l'autre de ce dernier canal dans les fossés des
fortifications ^ On a bientôt remédié à l'inconvénient dont il
vient d'être question, en rendant imperméable le réservoir
à bitume de l'usine à gaz.
A Haguenau l'existence d'un courant souterrain dans une
direction déterminée a été révélée par une infiltration d'eau
chaude, à partir d'un puits où la déversait une machine à
vapeur qui en portait la température à 29 degrés. Certains
puits du voisinage n'étaient pas sensiblement influencés ;
mais un puits situé à 35 mètres de distance, vers E. S. £•
donnait au thermomètre 18%4, c'est-à-dire un échauffement
d'environ 6 degrés. Un second puits situé à 70 mètres de
dislance, dans la même direction, était échauffé de 1 degrés
Ce fait montre que l'eau se mouvait alors dans le gra-
vier, du puits vers la Moder, suivant une ligne oblique diri-
gée E. S. E.
On doit s'étonner de l'incurie avec laquelle, même dans
de grandes villes, on a laissé, pendant des siècles, les nappes
phréatiques se vicier par des infiltrations pernicieuses.
^ Ajoutons que la première eau aspirée des pompes était toujours moins chargée de
bitume, ce qui résuluit sans doute de ce que l'eau souterraine, abandon^ée au repos,
se dépouillait du bitume qu'elle avait entraînée.
EAUX PHRÉATIQUES DES TERRAINS DE TRANSPORT. 29
C'est pourquoi nous croyons utile de donner encore avec
détails, des exemples choisis dans des localités variées.
Enviroiui de Bonn el de Dnaneldorf. — Le dépôt de gravier
qui, aux environs de Bonn, couronne le plateau jusqu'à la
hauteur du Roderberg, à 140 mètres au-dessus du Rhin ,
est formé de gros cailloux sur une épaisseur moyenne de
6 mètres et qui dépasse 20 mètres. A leur pied s'étend le
gravier d'alluvion. Les deux dépôts sont également impor-
tants pour les eaux souterraines des environs de Bonn* qui
ont leurs analogues dans la nappe d'eau alimentant les puits
de Dusseldorf.
Le canal exécuté pour assécher la partie sud-ouest de la
ville de Bonn a donné lieu à des observations de la part de
M. Heymann sur les variations de niveau des eaux phréa-
tiques dans 8 stations éloignées du Rhin de 263 à 534 mè-
tres, distance à laquelle les changements de niveau du fleuve
se font encore sentir; Teau souterraine s'élève peu à peu,
mais sans atteindre le niveau des hautes eaux du fleuve.
EsTironsdc BraxeUee. — En 1851, lorsqu'il s'agit de doter
la ville de Bruxelles d'une distribution d'eau complète, cette
capitale, pour ses 14 700 maisons et 134 000 habitants, possé-
dait, outre les citernes, 8194 puits et 29 fontaines publiques.
Lespuits d'une profondeur atteignant 35 mètres sont alimen-
tés par une nappe que soutient l'argile compacte éocène (ypré-
sienne). D'après les études de M. Verstraeten, cette couche
aquifère existe sans interruption; on la voit affleurer au fond
des vallées, sous forme de suintements et de sources qui don-
nent naissance à des ruisseaux, des étangs et des rivières.
Lorsqu'on passe d'une vallée à une vallée voisine, par
* Blnhme. Yerhandlungen êtes naturhiêtoriichen Veretnes des preustitchen Westpha-
Un, t. XXVni, 1871.
30
RÉGIME DES EAUX DANS LES TERRAINS PERHËABLES.
exemple lorsqu'on traverse Bruxelles, de la Senne au
Maelbeek, on reconnaît, d'après les niveaux de Teau des
puits, que la surface supérieure de la couche aquifère s'é-
lève constamment dans le sous-sol, jusque sous le plateau,
pour descendre ensuite vers le Maelbeek (fig. H). Cette sur-
N O
SE
EdwJiâ des longuevrs
1 3*""
Echelle deb hmitcurs
tôt' niê(i-»4
— <
Fig. 11. — Coupe au travers de Bruxelles montrant la disposition de la nappe phréatique
dont le niveau sobit les inflexions indignées par la ligne N, N, N. Elle imprègne des sables
fins du terrain tertiaire Ts très perméables et Ts' qui le sont beaucoup moins. Cr couches argi-
leuses et argilo-sableuscs imperméables dans leur ensemble. Qt limon quaternaire. ~ D'après
M. Yerstracten.
face supérieure est convexe et sa forme détermine le partage
des eaux de sources alimentant les deux vallées. On remarque
que cette proéminence liquide ne coïncide pas avec la ligne la
plus élevée du sol, et que le versant liquide du côlé de la Senne
est beaucoup plus étendu que celui du côté du Maelbeek.
Dans la vallée de la Senne, la nappe d'eau est découverte
à la cote 14 ; dans le Parc, elle atteint la cote 49 ; à proximité
de la place de la Société civile elle s'élève à la cote 51 ; elle
revient à jour au Maelbeek à la cote 46, pour former l'étang
du Jardin zoologique.
Plus on se dirige vers le sud, plus la nappe d'eau atteint
un niveau élevé.
Il résulte de nombreuses mesures qu'elle a, comme le sol^
ËAUt PHRÉATIQUES DES TERRAINS DE TRANSPORT. 51
une inclinaison générale vers le nord-ouest, et que, si on
pouvait la voir par transparence, elle présenterait des inéga-
lités comparables à celles de la surface, mais adoucies.
Ville de Liège. — Le ccutrc de la ville de Liège, au fond de
la vallée de la Meuse, repose sur des dépôts de gravier et des
alluvions ou sur des remblais amenés à difTérentes époques,
soit pour rehausser le sol, soit pour combler et rétrécir
divers bras du fleuve. Les habitations établies sur les co-
teaux des deux rives sont assises sur le terrain houiller,
sauf les plus élevées de la rive gauche qui ont pour sol le
terrain crétacé et le limon quaternaire (hesbayen).
Dans l'opinion de M. Gustave Dumont*, Teau que contient
ce gravier et qui alimente un très grand nombre de puits ne
doit pas être considérée comme provenant du fleuve : elle
tient en effet en dissolution des matières étrangères au gra-
vier. Des eaux descendant des collines voisines alimentent
les puits qui se trouvent sur leur passage, avant d'arriver
dans le fond de la vallée *.
Des travaux exécutés dans le lit de la Meuse ont montré
que le gravier situé au-dessous du fleuve présente une suc-
cession de dépôts^ les uns très perméables, composés unique-
ment de cailloux, les autres presque imperméables sous de
faibles pressions, parce que les cailloux sont en quelque
sorte cimentés par du limon.
Paye-iiM. — Daus toutc Tétendue des Pays-Bas, on trouve
à une faible profondeur de Teau (Welwater).
Suivant les renseignements que je dois à Tobligeance de
* Rapport sur les eaux alimentaires de la ville de Liège^ 1856, p. 5.
* En 1856, la ville renfermait, sur 1000 maisons, 5422 puits et 2213 citernes. On se
proposait alors d'amener par jour 6000 mètres cubes, soit 70 litres par habitant et par
jour.
52 RÉGIME DES EAUX DANS LES TERRAINS PERMÉABLES.
M. Van Baumhauer, dans les alluvions marines et les tour-
bières basses, terrains saturés d'eau, la surface de la nappe
se trouve au niveau à peu près des eaux superlicielles voi-
sines, et elle s'élève ou s'abaisse avec celles-ci.
Dans les alluvions fluviatiles, dans les sables diluviens et
dans le terrain erratique, là où il est déposé horizontale-
ment, on rencontre la nappe souterraine à 1 ou 2 mètres
au-dessous de la surface du sol, c'est-à-dire à peu près pa-
rallèlement à celle-ci. C'est ainsi, par exemple, que près de
Zutphen la surface du sol est à 8 mètres au-dessus du zéro
de l'échelle d'Amsterdam et la nappe à environ 6 mètres
au-dessus du même point, tandis qu'à Winterswijk la sur-
face du sol s'élève à 50 mètres, la nappe à environ 28 mètres
au-dessus de ce même niveau.
Là, au contraire, où le gravier diluvien constitue des
collines, la nappe souterraine se trouve à la même hauteur
que les eaux extérieures situées à leur pied. Le puits profond
du Bois de Soeren a atteint la nappe à la profondeur d'envi-
ron 90 mètres; et telle est aussi l'altitude, au-dessus du
Zuiderzée, de la colline dans laquelle le puits est creusé. Sur
les hauteurs près d'Arnhem, la profondeur des puits ali-
mentés par la nappe est égale à la hauteur de la surface du
sol au-dessus du niveau du Rhin.
Les fleuves de la Hollande contribuent très peu à l'eau
souterraine par leur infiltration latérale, et seulement en
ce qui concerne la viouille (en hollandais kwel) qu'on re-
marque à une faible distance de leurs rives.
Lors des crues, elle vient au jour en dedans des digues,
dans les fossés, pour inonder souvent des contrées entières*.
Dans les provinces maritimes de la Hollande, le sous-sol
est entièrement pénétré d'eau de mer. On ne saurait encore
* Presque toujours on peut arrêter la mouille au moyen d'un batardeau d'argile
établi au pied de la digue jusqu'à une profondeur qui ne dépasse pas trois mètres.
EAUX PERfiÂTIQUES DES TERRAINS DE TRANSPORT.
35
dire avec précision jusqu'à quelle distance des côtes et à
quelle profondeur s'étend cette infiltration marine dans les
différentes localités. ADelft, à 22 mètres de profondeur, Teau
possède à peu près le degré de salure de l'eau de mer. A
50 mètres de profondeur, elle est seulement un peu sau-
mâtre à Zoetermeer; tandis qu'à Vinkeveen on a pu creuser
jusqu'à la profondeur de 60 mètres sans rencontrer d'eau
saumâtre.
— La ville de Munich est en grande partie ali-
TOKE
MUNICH
sso
Fig. 12. — Profil montrant la disposition des eaux phréatiques, dans une partie du sol de
Munich, an milieu d'août 1873. A, argile tertiaire imperméable; G G, gravier quaternaire qui
lui est superposé; IV N, niveau de l'eau phréatique; PPP, puits creusés dans diverses rues
de la ville; f f f, forages. — Échelle ^jt^qq.
mentée par des eaux phréatiques, conjointement avec les
sources de Grosshessel '.
D'après M. Gûmbel, le sol du plateau élevé sur lequel est
construite cette capitale et qui s'étend jusqu'aux Alpes con-
siste en sable et en cailloux qui reposent sur une couche
marneuse tertiaire nommée flinZy et qui arrête les eaux four-
nies par la surface. Les couches de gravier sont extraordi-*
nairement perméables, ainsi que le témoigne l'absence d'eau
à la surface du sol, dans la région située au sud de Munich.
C'est seulement à proximité des moraines et des dépôts de
* Salbacb. Wasserêorgung der Siadt Mûnchen, 1876 et i877.
U RÉGIME DES EiUî DANS LES TERRAINS PERMÉABLES.
loess que se trouvent des cours d'eau superficiels qui ne
tardent pas à s'infiltrer dans le sous-sol.
MUNICH ^
Fjg. 13. — Profil montrant les divcnes hauteurs des eaux pliréaliques dans une autre partie
do sol de Munich au milieu d'août 1873. A, aiple tertiaire imperméable ; G, gravier quater-
naire ; NN, niveau de l'eau phréatique; PP, puits; f f f, forages.— Échelle 557500.
La configuration supérieure du flinz est très inégale et
Fig. H. — l'roUl longitudinal de la Uinlcmiùblo près AscliUeini à travers la vallée de
Hackingerbach jusqu'à OfTerflng. A, argile tertiaire imperméable dite F/in^; G, gravier qua-
ternaire imbibé d'eau jusqu'à la surface désignée par N N; S S, sources qui résultent de
répanchcmcnt de cette eau souterraine.
ses inflexions sont indépendantes de celles de la surface. Il
en résulte souterrainement des bassins et des rigoles qui
EAUX PHRÉATIQUES DES TERRAINS DE TRANSPORT.
35
recueillent et font écouler les eaux phréatiques (fig. 12, 13
et 14).
Les vallées de l'Isar et du Mangfall sont des érosions de ce
plateau qui coupent la couche de gravier sur toute sa hau-
Fi^. 15. — Plan de Mtuiich avec les courbes horizontales des eaux phréatiques lors de leur état
le plus baat (29 avril 1876) et de leur état le plus bas (29 décembre 1876), d'après M. le
docteur C. W. Gûmbel. Les courbes pleines sont relatives à la première date et les courbes
pomtUlées â la seconde. Les chiffres de chaque courbe expriment en métrés leur cote au-
dessus de la mer. L'échelle qui est indiquée en kilomètres est de tqitvôïï*
leur et qui, en quelques points, ont été creusées jusqu'au
flinz. Le niveau de Teau du grand réservoir souterrain
s'abaisse assez rapidement vers ces vallées et laisse Teau
s'extravaser avec une grande vitesse (voir fig. 14).
3rx RË6IME DES EâUX DANS LË8 TERRâLNS PERMÉABLES.
Gomme )e lit de l'Isar, la nappe a cependant une inclinai^
son générale du Sud vers le Nord. Toutefois sa pente est
moins forte que celle de la couche de gravier, dont l'épais-
seur et par conséquent h hauteur au-dessus de l'eau souter-
raine sont plus grandes au Sud, à proximité des montagnes,
que vers le Nord. Cette hauteur décroît de 22 mètres à Fur-
stenreid, jusqu'à 6 mètres dans certains quartiers de Munich,
et à 1",50 à Mousach. Enfin à Feldmochen, au-dessous de
Munich, il jaillit de nombreuses et abondantes sources alimen-
tées par la même nappe de gravier (voir plus haut, fig. 15).
La direction et la vitesse des eaux phréatiques dépendent
des inégalités de la couche de flinz et de la plus ou moins
grande perméabilité du gravier. En général son mouvement
est à peu près parallèle à celui de Tlsar, qui coule entre
des terrasses de gravier souvent consolidé par un ciment
calcaire. Le régime de cette nappe souterraine est indiqué
par des courbes de niveau reconnues dans la ville de Munich
(fig. 15).
11 est des points où la surface du sol s'abaisse vers le
fleuve, de manière à provoquer Tapparition de nombreuses
sources sur le flanc de ces vallées, comme à Thalkirchen, où
des galeries ont été exécutées perpendiculairement à l'Isar
pour les utiliser. Les sources de Grosshessel sont également
dues à un écoulement latéral des eaux phréatiques. (Voir plus
loin, au chapitre relatif aux sources.) Par suite du rôle ré-
gulateur de la nappe souterraine, les sources du groupe du
Muhlthal et de Gotlzing ont beaucoup de régularité.
Outre l'inclinaison du Sud vers le Nord, la couche de flinz
parait avoir aussi une pente assez faible de l'Ouest à l'Est;
car lesépanchements latéraux de la nappe sortent souvent
par la rive gauche du cours d'eau.
Dans le Gleisenthal, où des études ont été faites pour Tali-
inentation de Munich, sur 13 kilomètres, la pente supérieure
. EAUX PHRÉATIQUES DES TERRAINS DE TRANSPORT. 57
des eaux phréatiques est de 50 mètres, tandis que celle de
risar, sur cette même distance, n'est que de 30 mètres.
Narembcrir. — Aux cnvirous de Nuremberg * il y a des pla-
teaux étendus, renfermant, comme ceux des environs de
Munich, des eaux phréatiques qui se rencontrent en outre
dans les fonds de vallées. La vallée de laPegnitz, au-des-
sus de Nuremberg, a été étudiée au point de vue des eaux
d'alimentation de cette ville. Dans cette question, on a pris
en égale attention : l"" la hauteur de chute de la nappe phréa-
tique qui, dans ce cas particulier, était de 13 mètres;
2** l'épaisseur de celte nappe ; 3* le degré de perméabilité du
sol au travers duquel elle se meut, et qui, de nature sableuse,
renferme 30 à 40 pour 100 d'interstices.
r. — D'après M. H. CrednerS les cailloux et sables de
la plaine dite EUter Plmie renferment, aux environs de
[>eipzig, qu'elle sert à alimenter, une nappe d'eau considé-
Fif(. 16. — Disposition de l'oau phréatique à Leipiig et dans les environs. 1, silurien iiirèrictir;
R, grè« ronge inférieur ; A, argile appartenant à l'oligocène; S, sable aigileux, appartenant
au même groupe; A', argile et S', sable argileux, appartenant tous deuv au iné^mc terrain î
Q. sable et gravier quaternaire de Tancien lit de la Pleissc; Q', limon cslcarift-re avec {?ros
galets ; G, gravier grossier ; L, limon presque imperméable (aulehm). — D'après U. Crednei*.
rabie. Elle coule (fig. 16) à la surface du Rothliegendc et
des dépôts argileux de Toligocène : elle est en partie recou-
verte par un limon presque imperméable.
* A. Rhiem, der Woêterwerk der Stadi Sùrnberg, 1879.
* Géologie de» K.K. Fram-Joscphs lîochqueUen Wataerleilung, ALlianUl. der K. K-
Geologischen ReichawsUU. 1X77. IX, pi. Vnr, IX et XI.
38 RÉGIME DES EAUX DANS LES TERRAINS PERMÉABLES.
■nviroBs 4e iTieue. — Lcs eaux phrédUques qui imprègnent
le gravier diluvien aux environs de Vienne présentent des
caractères de gisement semblables aux précédents
Les variations de leur niveau ont été représentées par
M. Karrer* sur l'atlas de la commission des eaux de Vienne.
L'infiltralion directe de Teau du Danube est arrêtée dans son
cours souterrain à l'intérieur de la ville par une faible
protubérance de l'argile du tegel, qui se relève graduelle-
ment, de manière à former une selle. Elles reçoivent un
contingent, affluant directement des montagnes.
Quoique la disposition de cette nappe soit très ordinaire,
on a cru devoir donner ici la coupe (fig. 17) qui montre en
même temps un second puits alimenté par les couches subor-
données au tegel.
Béfloii eomprUe entre Buda-Pestli etlteoliiok. — La rivC gau-
cheduDanube, près de Buda-Pesth,* est formée par une plaine
Fig. 17.— Exemple de puits de Vienne (Extrémité de la rue de Garinthie) lUmentés, l'un ptr
l'eau N N du gravier diluvien que recouvre un remblai superficiel, et l'autre par celle du
sable S, subordonné à l'argile du tegel A. — D'après M. Sueas.
sablonneuse et à surface inégale. C'est, entre le Danube et la
Theiss, une suite du plateau quaternaire* qui a des pentes
très douces vers les deux fleuves. La couche sur laquelle la
ville est bâtie est formée de sable mélangé de gravier, ren-
fermant des cailloux trachytiques plus ou moins décompo-
sés. Ce dépôt, dont l'épaisseur est de 3 à 12 mètres, est très
ËiUI PHRÉATIQUES DES TERRAINS DE TRANSPORT.
59
perméable à Feau qui y forme une nappe continue. Je dois
à l'obligeance de M. Szabo les renseignements qui suivent.
Voici, d'après les mesures prises un même jour (18 dé-
cembre 1864) dans les 85 puits des stations du chemin de
fer de Buda-Pesth à Szolnok, sur une longueur de 225 kilo-
mètres, les résultats obtenus.
Le point de comparaison est le zéro du Danube, à l'altitude
de 96"',20 au-dessus de la mer. Le jour des mesures, la hau-
teur du Danube était 96", 59 au-dessus du niveau de la mer.
STATIONS
Budapesth
Kôbanya .
Lôrinczi. .
Vecsès . .
Ullô. . . .
Monor. . .
Pilîs. . . .
Alberti-Irsa.
Czegled. .
Abony. . .
Sxolnok. .
NIVEAU DE L'EAU
0AK8 LIS V01TS
au-dessus de Ja mer.
98-
105
113
128
115
120
132
157
124
96
86
;28
,84
,40
,52
,29
,96
,50
,97
,74
,59
,94
On voit que le niveau de Teau des puits, à partir de Buda-
Pesth, s'élève progressivement jusqu'à Pilis, point où l'élé-
vation du terrain atteint son maximum et où passe la ligne
de partage des bassins du Danube et de la Theiss.
L'eau du Danube étant impropre à l'alimentation de la
ville de Buda-Pesth, il a été décidé, sur la proposition de
M. Szabo, d'intercepter celte nappe dans le thalweg d'une
des vallées principales, dont la configuration a été reconnue
par des sondages. On a donc placé à 5 mètres au-dessous du
4a RÉGIME DES EAUX DANS LES TERRAINS PERMÉABLES.
zéro du Danube, c'est-à-dire dans le gravier qui forme la
base de la couche perméable, des tuyaux, de fonte perforés
à Tembouchure de la plus grande vallée, sur remplacement
d'Âquineum, les sondages ont accusé une couche perméable
d'une épaisseur suffisante et renfermant en abondance de
Feau de la meilleure qualité.
Au Sud de Buda-Pesth, la couche imperméable à laquelle
sont dues, comme on le verra, de nombreuses sources situées
9u Nord de la capitale, se perd au-dessous de la surface du
sol et forme une série d'inégalités souterraines que remplis-
sent des matériaux perméables et une abondante nappe
d'eau. lien résulte pour la nappe un réservoir, dont l'eau
est amenée par les vallées souterraines latérales à la vallée
principale, de manière à former un fleuve caché qui s'écoule
vers le Danube.
EiiTirolM de HoMom. — Le platcau qui domine Moscou est
recouvert d'une argile glaciaire de 2 à 8 mètres d'épaisseur,
tandis que Talluvion occupe le fond des vallées*. Une nappe
d'eau est alimentée par les eaux atmosphériques qui pénè-
trent enter l'argile glaciaire et les couches de grès à Ammo-
7iites fulgens. Elle est arrêtée par des couches imperméables
d'argile jurassique, oxfordienne et kellovienne, qui sont à
peu près horizontales.
La carte ci-jointe (fig. 48) montre l'étendue du bassin con-
tenant, dans les sables, de 9 à 50 mètres d'épaisseur, que
M. Trautschold a nommés éluvion, à la surface de l'argile
jurassique, de Teau de bonne qualité. Les chiffres indiquent,
en mètres, la hauteur de l'argile jurassique au-dessus de la
rivière Moskwa. C'est à Mytichtche qu'on trouve principale-
*■ Alimentation en eau de Moscou, 1883. L'eau est élevée par des machines à vapeur
installées & Alexsciewkoie*
UHX FHRÉÀTIQUKS DES TERRAINS DE TRANSPORT.
41
ment Teau que Timpératrice Catherine a fait conduire a
Moscou par un aqueduc.
Fi;. 18. — • Carte des enTiroiis de Moscou donuant la disposilion de la napiie d'oau libre. Des
petits cercles représentant les sondages exécutés pour reconnaître la nappe phréatique qui
a été reconnue dans tout l'intérieur de la courbe ponctuée.
••rau — Dans les graviers aurifères de TOural, où la pré-
Fig. 19. — Mode de dessèchement des alluvions aurifères de l'Oural. Coupe en travers : C C,
bancs redressés du calcaire silurien; S, serpentine et autres roches éruplives; a, gravier
aurifère, dans lequel une large excaration indiquée par la ligne pouctuée» a été pratiquée;
N, lit du ruisseau, avant que l'on commençât les travaux; N', lit abaissé de ce même
ruisseau.
sencede Teau (iig. 19) entraverait l'exploitation , on en abaisse
4S RÉGIME DES EAUX DANS LES TERRAINS PERMÉABLES.
le niveau par le creusement d'une rigole dont la pente est
Fig. 20. — Mode de dessèchement des alluvioos aurifères de rOural; coupe en long. NN, ni-
veau primitif de la nappe d'eau ; N' N\ fond de la ti-anchée d'assèchement qui aboutit aux
gradini d'exploitation.
moindre que celle de la vallée (fig. 20) ; le gravier se trouve
ainsi asséché vers l'amont, sur plusieurs mètres d'épaisseur.
Ea^trans de lioadrcs et antres parties de TAnfleterre ^, —
La situation d'un grand nombre de villes et de villages a été
déterminée par des conditions géologiques. Quelquefois c'est
OXFORD
Isi» Wv
CherweU. RW
Fig. SI. — Coupes du sol de la ville d'Oxford, montrant la disposition de la nappe phréatique
N N, dans le gravier que supporte l'argile A, dite d'Oxford.
une roche escarpée, qui a été choisie dans un but de
défense ; ailleurs la présence de houille ou de métaux a
attiré des exploitants; mais le plus ordinairement^ dans les
temps anciens, c'était la nécessité d'un réservoir d'eau faci*
lement accessible.
Des populations nombreuses trouvaient des conditions
favorables sur des bancs de gravier étendus et recouvrant
* Joseph Prestwich. On ihe Geological conditions affeeting the water supply io
housesand lownê,iSlQ .
EAUX PflKÊATlUUES DES TERRAINS DE TRANSPORT. 43
quelque grande formation argileuse, comme il arrive à Lon-
dres sur le London-clay, à Oxford sur TOxford-clay (fig. 21),
à Glocester sur le lias. Dans tous ces cas, le gravier
a généralement 4 à 8 mètres d'épaisseur et chaque maison
atteint facilement Teau par un puits qui lui appartient et
qui est indépendant des voisins.
Ce fait, dans les temps anciens, avant qu'on intro-
duisit des moyens publics d'alimentation, étaitd'une impor-
tance essentielle, de sorte que l'accroissement des villes se
faisait toujours dans le sens suivant lequel s'étendait le
gravier.
C'est ainsi que, selon les observations très intéressantes
de M. Prestwich^, Londres est établi sur un lit de gravier
dont l'épaisseur varie de 3 à 6 mètres et qui repose sur des
couches d'argile dites de Londres {London clay) de 50 à
60 mètres d'épaisseur. Le gravier étant très perméable,
l'eau de pluie est arrêtée par l'argile imperméable et forme
un réservoir intarissable pour les innombrables puits qui
y entêté creusés depuis un temps immémorial et qui, pen-
dant des siècles, ont constitué l'unique alimentation en eau
de cette capitale.
Une carte de Londres datée de 1817 montre combien cette
cause physique avait nettement déterminé l'extension des
populations. Çà et là seulement, au delà du corps principal
de gravier, celui-ci constituait quelques lambeaux, tels que
ceux de Islington et de Highbury, sur lesquels s'établirent
aussi des habitations.
C'est pour le même motif qu'au sud de la Tamise, des vil-
lages et des bâtiments s'étendirent graducUejneiitsur le gra-
vier des vallées jusqu'à Peckham, Camberwell, Brixton et
Clapham» tandis que plus loin, les maisons et les villages s'éle-
* Prestwidi. Addreu to the Geological Society of London, 1872.
44 RÉGIME DES EAUX DANS LES TERRAINS PERMÉABLES.
vaient sur des collines couronnées de gravier à Streatham,
Denmark Hill et Norwood.
Ce fut seulement lorsque, par suite de la rapide extension
des travaux des grandes compagnies d'eau, on eut des faci-
lités pour se procurer une alimentation indépendante, qu'il
devint possible d'établir une population urbaine sur les
districts argileux d'HoUoway, de Cambden Town, de Re-
gent's Park, de St. John's Wood, de Westbourne et de Nott-
ting Hill.
Aux environs de Londres, des kilomètres de villages se
développèrent sur les grands bancs de gravier qui suppor-
tent Barking, Ilford et Romford, au Nord-Ouest de la vallée
de la Lea jusqu'à Hammersmilh, Ealing, Hounslow, Slough, et
au delà, tandis que, sauf l'exception de Kilburn, on pou-
vait à peine, il y a peu d'années encore, rencontrer une mai-
son entre Paddington et Edgeware ou entre Marylebone et
Hendon, et pas beaucoup plus, du côté de Highgate et de
Hampstead.
Gomme cas caractérisé des eflets exclusifs d'une grande
étendue de couche imperméable dans le voisinage d'une
grande ville, M. Prestwich mentionne le district de London-
clay dénudé, s'étendant de 1 kil. 5 au nord d'Acton, de
Ealing et de Hanwell à Stanmore, à Pinner et à Ickenham,
près Uxbridge : à l'exception de Harrow, qui repose sur un
lambeau de Baghhot $andj Perivale et Greenford, sur des
lambeaux de gravier, il n'existe que les petits villages de
Northall et de Greenford Green. Dans la première édition des
cartes de VOrdnance^ sur une étendue de 16 kilomètres
carrés au Nord et à l'Ouest de Harrow, on voyait seulement
quatre maisons. Cependant le sol est partout cultivé et pro-
ductif. Mais immédiatement à l'Est de cette région et le long
de la vallée de la Lea, le sol s'élève et beaucoup des col-
lines du London-clay sont couronnées par du gravier plus
EhXJl PHRÉATIQUES DBS TERRAINS DE TRANSPORT. 45
ancien que celui de la vallée de Londres et appartenant à
Tâge du boulder clay; c'est là que se présentent les anciens
établissements de Hendon, de Stanmore, de Finchley, de
Barnet, de Totteridge, de Whetstone, de Soulhgate et autres.
Partout, sur les bords de la Tamise et de ses tributaires»
il y a, en outre, un lit inférieur de gravier de vallées. Ce
banc est alimenté par la pluie qui tombe sur lui, par les
sources et autres eaux qui descendent des collines adja-
centes, et par place, par rinfiltration de la rivière quand»
pour une cause quelconque, la ligne de niveau du gravier
descend au-dessous de celle de la rivière. Une grande partie
de Londres au Sud de la Tamise : Westminster, fiattersea et
nombre de villes sur la Tamise, comme Hammersmith,
Brentford, Eton, Maidenhead, ainsi que Newbury et plusieurs
villages sur la Kennet et les villes de Warc et de Hertford
sur la Lea, sont alimentés également par des puits peu
profonds.
Beaucoup de villes et de très nombreux villages le long
de la plupart des vallées de rivières de l'Angleterre, quel que
soit le terrain sur lequel elles sont situées, dépendent de
cette nappe superficielle d'alimenlation, qui est plus con-
stante que celle des autres puits. Ce n'est que dans le cas de
saisons exclusivement sèches ou d'une aspiration excessive
qu'il faut recourir, comme supplément, à l'eau des rivières
elles-mêmes.
La nappe d'eau la plus élevée qui est dans le gravier dilu-
vien s'étend presque partout sous les rues et les maisons de
Londres à des profondeurs de 4 à 8 mètres, formant ce
que Ton nomme ground sprin-gs.
CkMe de Ciéne», notMnmeHt aux enviroHs de l»oaao. — NoUS
prendrons comme exemple d'eaux phréatiques sur la côte de
Gênes, la nappe souterraine des environs de Loano.
46
RÉGIME DES EAUX DANS LES TERRAINS PERMÉABLES.
Cette nappe coule à une profondeur variable, sous une
plaine d'alluvion formée par des couches de cailloux, d'ar-
gile et de sable et alimente de nombreux puits qui servent
LOANO
niveau d« la mer
Echelle des Longueurs
i i__
Fig. 28. — Nappe d'eau des alluvions quaternaires aux environs de Lojno ; M >', nivrau supé-
rieur de cette nappe qui se déverse dans la mer. La figure représente la position des
sources importantes S ^ui jaillissent à la base des calcaires dolomitiquesC à leur jonction
avec les schistes cristallins Sch. (D'après M. Giordano.)
iinhAii* i ^^> distances horiionlale» 0.000016
Bcneiie j ^^ hauteurs 0.00052
à l'arrosage des riches vignobles et des jardins, dans la loca-
lité nommée I Gazzi.
irveav. -'»• 1.» nier
LOANO
EchelJc des Longueurs
Echelle des hauteurs
0 10* IM )M VM MO"
— I
Fig. 23. — Nappe d'eau des alluvions quaternaires aux environs do Loano. NN, niveiu supé-
rieur de cette nappe qui se déverse dans la mer. La figure représente en outre la posi-
tion de sources im|)ortanles S qui jaillissent A la base des calcaires dolomitiquos G. i
leur jonction avec les schistes cristaUins Sch. (D'après M. Giordano.)
tfi*ki»ii<i S des distances horisontales 0.000013
ccnetie j ^^ hauteurs O.000OS6
L^eau dont il s'ngit provient principalement d'une forma*
tion de calcaire magnésien trîasique C (fig. 22), très étendue
vers le Nord et le Nord-Ouest et toute remplie de fissures et
de cavernes. Le calcaire a une stratification obscure et
irrégulière ; les couches plongent en général vers le Nord.
EiUI PHRÉATIQUES DES TERRAINS DE TRANSPORT. 47
A la base du calcaire, au contact des schistes talqueux et
gneiss sous-jacents Sch, jaillissent de belles sources S, par
exemple à Boissano.
Le torrent Nimbaldo, qui passe par Yerzi (fig. 23) et a son
embouchure à l'Est de Loano, traverse le calcaire, le schiste
et Talluvion; mais en passant sur celle dernière, il devient
presque sec.
Dans les environs de Gênes, à Sampierdarena, à Vol tri, à
Âbbenga, il y a d'autres exemples semblables de nappes
d'eau soulerraines passant dans le quaternaire.
B. —Le littoral du détroit de Messine, tant en Sicile
que sur la côte calabraise de Reggio, esl couvert par les plus
florissantes plantations de citronniers et d'orangers, qui don-
nent lieu à une grande exporlalion et à des industries locales
de distillation. Or ces plantations, qui donnent souvent plus
de 2000 à 3000 francs de revenu net par hectare, couvrent
Echelle des Lonqueurs
? 1 i : i î»
Echelle des Hauteurs
0 IM tff tO« 4«« B0«^
1 I » I I I
Fîg. 21. — Coupes montrant les régions de la nappe phréatique N N des environs de Uessliie
que contiennent les sables d'alluvion g ; S, sables et graviera quaternaires; M, argiles,
grés et conglomérat du nilocêno supérieur.
les dépôts caillouteux des alluvions modernes, formant des
plans inclinés (fig. 24) qui vont du pied des montagnes à la
mer, avec des étendues variables de 600 mèlres à 4 kilo*
mètres et au delà, et des pentes de 1 1/2 à 3 0/0. Au-dessous
de la surface, ces dépots très perméables renferment tou-
jours une nappe d'eau, utilisée au moyen de nombreuses
norias pour l'arrosage des plantations qui lui doivent leur
4K RËGIME DES EAUX DANS LES TERRAINS PERMEABLES.
prospérité : la profondeur constante de la napi)e d*eau est
d'environ 5 mètres et sa surface est à peu près parallèle à
celle du dépôt caillouteux.
BdiYiroM «le NewTork. — On a proposé d'utiliser pour ralî-
mentation de New-York une nappe d'eau imprégnant le sable
avec gravier du littoral de Long-Island. Ce sable s'élève, à
partir du littoral Sud, sur une largeur de 10 kilomètres, avec
une pente de 0",003 par mètre, tandis que la nappe d'eau
partant du niveau de la mer à marée basse a une inclinaison
de0",002 par mètre*.
Exemples IboniU par 1* plaine 4e la IjomhmrAîe ^ Fontanili\
— Parmi les innombrables exemples du même genre, nous
citerons la plaine de la Lombardie, qui est formée principa-
lement de graviers et de sables appartenant aux alluvions
anciennes et modernes. Dans la plus grande partie de son
étendue, elle possède une nappe d'eau qui, en général, rentre
dans la catégorie de celles qui nous occupent. Elle est très
abondante, notamment dans une zone qui s'étend de la Sesia
à rOglio, passant par Novare, Milan, Meizo, Garavaggio et
Calcio. La profondeur des eaux souterraines devientde plus en
plus considérable à mesure que Ton remonte vers le Nord, où
il existe plusieurs puits déplus de 100 mètres de profondeur.
L'abondance, pendant l'été, de ces eaux souterraines est
proportionnée à l'abondance des pluies et surtout des neiges
tombées dans la saison précédente. Ces eaux pénètrent alors
latéralement dans les rivières; ce qui fait que celles-ci,
après avoir été desséchées par les prises d'eau des canaux
d'irrigation, retrouvent de l'eau vers leur partie inférieure.
Le Tessîn à Tornavento, TAdda à Cassano, l'Oglio à Torre Pal-
* Dans Geology, 3* édition, p. 661.
* D'après une communication très obligeante de M. Giordano.
EAUX PHRÉATIQUES DES TERRAINS DE TRANSPORT.
49
lavicina» sont en certaines saisons complètement absorbés
par les canaux; et cependant, sans qu'ils reçoivent de
subsides apparents, ils renaissent peu à peu par le suinte-
ment continu de leurs berges, jusqu'au point de redevenir
navigables. C'est ainsi que les nappes d'eau sont de plus en
plus profondes et de moins en moins abondantes à mesure
que Ton approche du lit du fleuve *.
Ces nappes d'eau subordonnées aux dépôts quaternaires
♦ FlïrrcîYcc:
Echelle,
so mo
Fig. 25. — Sitaation des principales nappes d'eau utilisées pour rétablissement des fontanilù
de la Lombardie reçoivent une application agricole très re-
marquable et peut-êlre unique jusqu'à présent, dans la vallée
du Pô, surtout dans les plaines de Lombardie et dans une
partie delà Yénétie et du Modénais (fig. 25).
La constitution géologique spéciale du sous-sol de ces
plaines permet d'en tirer de grands volumes d'eau propres
à l'irrigation. Cette eau, qui sort à une température presque
constante et de beaucoup supérieure, en hiver, àl'air ambiant,
permet, sur les terres où elle est déversée, la culture de
* ÂtmaUê de rirutitul national agronomique, 5* année.
50 RÉ6IIIE DES EiUX DANS LES TERRAINS PERMÉABLES.
prairies artiGcielles dites mamte (mouillées), même pendant
les plus fortes rigueurs de l'hiver. Le climat de la vallée du
Pô est aussi froid en hiver que celui du nord de la France
et la végétation y est complètement arrêtée ; mais ici, grâce
à ce système d'irrigation continue, le sol réchauffé par Teau
des fontanili fait pousser Therbe même en janvier, et permet
d'en faire les coupes, comme en été. Cette herbe coupée
fraîche toute Tannée est employée dans les grandes fermes
pour nourir les belles vaches dont le lait sert à faire le fro-
mage dit parmesan^ et qu'en Lombardie l'on appelle plutôt
lodisan^ parce qu'aujourd'hui sa grande production est dans
les plaines de Lodi. Le total des coupes de foin dans l'année
atteint quelquefois une longueur de 2,50 à 5 mètres d'un
produit moyen de 30 000 kilogrammes par hectare.
Fig. 26. — Dispontion en forma de toits suivant laquelle on aménage le sol
pour l'établissement des fontanili; r, rigoles qui déversent l'eau sur les deux versants.
Pour arriver à ce résultat, le terrain d'une prairie de ce
genre, à arrosement continu, doit être aménagé à l'avance
en parcelles ayant chacune la forme d*un toit (fig. 26), dont
le faite est occupé par une rigole qui déverse l'eau aux deux
versants, de manière qu'une mince nappe d'eau courante
couvre toujours le sol et le réchauffe en l'arrosant, tandis
qu'en bas des deux versants, une rigole en reçoit les écoule-
ments, qui à leur tour sont utilisés de la même manière
pour une zone de terrain sous-jacentc, et ainsi de suite.
Suivant l'utilisation plus ou moins répétée que l'on peut
obtenir de l'eau ayant déjà servi {colature)^ on arrive à irri-
guer des étendues fort différentes avec le même volume
d'eau, et ce volume varie souvent de 20 litres et plus jusqu'à
6 litres seulement par seconde et par hectare de marcxta.
EAUX PHRÉATIQUES DES TERRAmS DE TRANSPORT. 51
Quant aux fontanili ou puits au moyen desquels on se
procure Teau souterraine pour cette irrigation d'une nature
spéciale, les endroits où Ton peut les creuser se trouvent
sur une longue zone de la plaine sur la gauche du Pô» lon-
geant de loin le pied des Alpes depuis la Sésia jusqu'à TAdige,
et puis aussi, au pied des Alpes vénitiennes et dans le bas
Fig. 27. — Détail d'un fontanile, montrant commant un tonneau t est établi pour Uévenor
à la surface l'eau de la nappe NN.
Véronais. Le procédé consiste à enfoncer dans le sol, dans
des endroits convenables, des tonneaux sans fond, de 1 mètre
environ de diamètre, et de 2 à 3 mètres de hauteur, en péné-
trant jusqu'à la couche aquifère que Ton trouve ordinaire-
ment à 2 ou 5 mètres de profondeur (fig. 27). Le tonneau est
Cig. S8. — DispositlOa de Irois fontanili F F réunissant leurs eaux
dans un mémo canal d'irrigation.
légèrement conique, évasé par le bas. — Une fois la nappe
aquifère atteinte, l'eau surgit du fond du tonneau et se dé-
verse par son bord supérieur, qu'on a légèrement échancré,
dans le canal creusé pour la recevoir. On creuse ordinaire-
ment plusieurs de ces fontanili les uns près des autres dans
les zones les plus riches en eau souterraine, et on en réunit
le produit pour alimenter un canal d'irrigation de quelque
importance (fig. 28). Le débit d'un fonlanile varie beaucoup,
suivant les localités; par exemple de 50 jusqu'à plus de
52 RÉGIME DES EAUX DANS LES TERRAINS PERMÉABLES.
100 litres par seconde, même jusqu'à 200 litres; l'eau de ces
fontanili a des températures souvent de 12 à 14 degrés cen-
tigrades ; parfois, dans la saison froide, de 9 à 8 degrés cen-
tigrades seulement; mais c'est toujours une température
assez douce en hiver, lorsque tout est gelé dans la plaine,
et elle suffit à entretenir la végétation.
On vient de voir que Teau souterraine qui alimente les
fontanili se trouve généralement à une petite profondeur,
Zone dee Fontanili
Fig. 29. — Nappes distinctes et peu profondes, superposées l'iuie à l'autre et déterminées par
les alternances de gravier et d'argile de Talluvion. Exemple pris aux environs de Milan :
ttttf fontanili établis sur Tune de ces nappes.
sur une zone spéciale de Talluvion qui s'étend du pied des
Alpes jusqu'à la rivière du Pô. — L'alluvion contient sou-
vent des couches alternantes de gravier et d'argile (fig. 29),
ce qui donne lieu à l'existence de plusieurs nappes alimen-
tées par les eaux des Alpes. — En Lombardie, près de Milan,
il existe trois nappes superposées, assez distinctes et à peu
de profondeur. C'est dans la nappe supérieure que sont
creusés les fontanili. Plus près des Alpes, l'alluvion est moins
argileuse et plus perméable ; mais les nappes d'eau s'y trou-
vent à de plus grandes profondeurs, ce qui rendrait les /bn-
tanili plus difficiles et plus chers.
Ces fontaines artificielles d'eau toujours tiède occupent
une zone de quelques kilomètres de largeur, à la hauteur de
Milan, et de 200 kilomètres de longueur, depuis le Tessin
jusqu'à Vérone; puis au delà elle longe à une certaine dis-
tance le pied des Préalpes. Le niveau de la nappe aquifère
qui se trouve dans la Lombardie à 130 ou 120 mètres au-
EAUX PHRÉATIQUES DES TERRAINS DE TRANSPORT. 53
dessus de la mer va naturellement en s'abaissant vers Test,
de manière à ne plus être que de 25 à 20 mètres dans la
Vénétie et moins encore dans le bas Yéronais.
En Lombardie^ on a plus d'un millier de ces fontanili,
qui, pour un débit moyen de 120 litres par seconde, don-
nent un total de 120 mètres cubes par seconde.
EAUX PHRÉATIQUES DES DUNES.
Les nappes d*eau que renferment les sables des dunes
présentent des dispositions qui s'expliquent, d'après ce qui
précède, avec cette circonstance qu'elles subissent l'in-
fluence des marées.
«••MgM^ — En Gascogne, les eaux pluviales qui tombent
à la surface des dunes pénètrent immédiatement dans le sol
Léd9
Echelle des longueurs.
Echelle des hauteurs.
je îï y»- «~.
Fig. sa — Coupe de la chaîne des dunes, 4 la hauteur de l'étang de Cazau, au sud d'Arcachon,
passant par le point culminant qui atteint 89 métrés. Elle montre approximativement la dis-
position ondulée de la nappe phréatique, disposition qui est d'ailleurs Yariablc suivant les
saisons. — L'échelle des hauteurs est six fois celle des bases.
sans ruisseler à la surface. Elles s'infiltrent dans le sable et
vont former une nappe, dont la surface supérieure est ondulée
comme celle des dunes, mais avec des ondulations beaucoup
moins prononcées (fig. 30) et dont les formes varient d'ail-
* Diaprés ime obligeante communication de M. RauHn.
54
RÉGIME DES EAUX DANS LES TERRAINS PËRMÉARLES/
leurs à la suite des pluies et des sécheresses. Considérée en
grand, celte surface n'est pas horizontale; car au niveau des
hautes mers, dans le voisinage immédiat de l'Océan, elle
s'élève dans l'intérieur de la chaîne des dunes à 15 ou 20 mè^
très d'altitude.
Cette nappe est alimentée, soit exclusivement parles eaux
pluviales, soit en partie par les eaux des étangs. Ses eaux sont
douces par suite de la poussée constante, tant des eaux plu-
viales supérieures que des eaux des étangs et des marécages
échelonnées jusqu'à la côte.
Les puits situés à la pointe de Grave, et vers la limite de
la chaîne, à la hauteur de Porge, ne fournissent que de l'eau
douce, même lorsque, par suite de leur profondeur, ils des-
cendent jusqu'au niveau moyen de la mer, et que par suite
de leur faible éloignement, leur niveau éprouve des fluctua-
tions en rapport avec celles des fortes marées. A Arcachon
les puits ne donnent que des eaux douces, même ceux qui
sont assez rapprochés de la plage.
Hoiumde. — Il cu est dc même dans les dunes littorales
de la Hollande, où la nappe souterraine (fig. 51) est encore
i8li(ltàl!Si!iii^iëiisSSIiiMilg»$i8^
8-.
■S
T
S
Fig. 31. — Nappe;7d'eau des dunes de la Hollande, d'après M. Van Ertborn. A, argile super-
posée à la tourbe T et aux sables tertiaires et supportant le sable des dunes D, où l'eau
phréatique affecte une surface ondulée NN.
limitée par une surface courbe qui d*ordinaire suit plus ou
moins régulièrement les ondulations de la surface du sol.
Ce fait a été mis en évidence par les sondages exécutés dans
les dunes de Wassenaar, lors 9es études qui ont eu lieu
EAUX PHRÉATIQUES DES TERRAINS DE TRANSPORT.
55
pour amener Teau des dunes dans les villes de la Hollande
méridionale.
Cette même conclusion ressort également de ce que la
nappe souterraine qui fournit Teau à la ville d'Amsterdam
est à environ 2 mètres au-dessus du niveau des canaux du
Rynland. La nappe se trouve donc dans les dunes générale-
ment plus haut que la surface des eaux libres dans les allu-
vions marines ou dans les tourbières basses du voisinage
immédiat, et beaucoup plus près de la surface du sol que
dans les collines de gravier diluvien.
£■« 4'OirteB4e<. — Lcs duucs qui reposent sur les alluvions
maritimes, aux environs d'Ostende, recèlent une couche
PlaiJe
. _D;i_ae§
Polders
kchôile dc^s jcuighfurs
Echelle dtà /iniifeurs
H> U> fQ
Tig 3. — Coupe monlnnt, d'après M. Ventraeten, comment l'eau d'inflllration des dunet
subit l'influence des marges aux environs d'Ostende. A, alluvion des polders; E„ sable saturé
d'eau de mer; E^, sable saturt d'eau douce; U.. sable des dunes. NN. niveau convexe de la
nappe phréatique.
aquifèrede ce genre (fig. 32), dont M. Verstraeten a étudié
les relations avec l'eau marine : les oscillations de celle-ci
sont de 4 à 5 mètres.
* Verstraeten. Eaux alimentaires de Belgique, 2« partie, p. 54.
56 RÉGIME DES EAUX DANS LES TERRAINS PERMÉABLES.
EAUX PHRÉATIQUES DES DÉPdTS GLAaAIRES.
Hoot-rar-LaoMuiiie et bords de TAreMe. — LeS dépôts glaCÎaireS,
qui contiennent des associations irrégulières de blocs de
toutes dimensions avec des dépôts argileux, c'est-à-dire à la
fois des matériaux perméables et des matériaux imperméa-
bles, donnent lieu, pour les eaux souterraines, à un méca-
nisme très simple, dont les exemples précédents donnent
une idée suffisante; aussi n'en citerons-nous qu*un petit
nombre de cas.
Au Mont-sur-Lausanne, une source assez puissante pour
Fig. 33. — Coupe montrant comment l'eau d'une moraine a été mise A profit pour l'alimenta-
tion de Lausanne, d'après M. Chavanues ; T, grés moUeste ; A, argile qui supporte le réser-
voir de la morgue dont le niveau supérieur est NN.
contribuer à Talimentation de la ville a été créée, en perçant
à travers la molasse et Targile quaternaire, une galerie abou-
tissant au milieu des blocs d'une moraine très aquifère
(fig. 33).
D'autres exemples sont fournis par les environs de Villard-
sur-OUon (canton de Vaud), de Chamonix, etc., etc.
Dans le vallon du Champ-du-Moulin (canton deNeuchâtel),
des argiles plastiques tout à fait imperméables, à la base
d'un dépôt glaciaire, donnent naissance, sur les bords de
l'Areuse, à de nombreuses sources.
EAUX PHRÉATIQUES DES TERRAINS DE TRANSPORT. 57
EAUX PHRiATlQUeS DES aSS MADRÉPORIQUES.
On peut citer, d'après Dana, ce qui se passe dans les lies
de coraux. Une île de ce genre, formée jusqu'au niveau de
la mer de roches madréporiques que recouvrent des sables,
fournit de Teau à ses habitants par les puits qu'ils y creu-
sent. Cette eau provient de la pluie ; la nappe qu'elle consti-
tue suffit pour repousser par sa pression les infiltrations
marines.
INTÉRÊT DES EAUX PHRÉATIQUES AU POIKT DE VUE
DE l'agriculture ET DE l'hYGIÈNE.
Quand les nappes d'eau adjacentes aux rivières s'appro-
chent beaucoup de la surface du sol, ce qui est un cas assez
fréquent, leur existence est de nature à intéresser la végé-
tation, comme l'a montré M. Barrai pour le sol sablonneux
des environs d'Aigues-Mortes, où l'on a depuis quelque temps
planté de la vigne avec succès. Après plus de trois mois sans
pluie, les sondages ont indiqué partout moins de 1 pour 100
d'eau à 0",20, de 6 à 12 pour 100 à 1 mètre, 18 à 21 pour 100
entre 2 mètres et 2",25 de profondeur.
Dans le même cas, la nappe d'eau souterraine peut égale-
ment, par capillarité, avoir une action sur le degré d'humi-
dité de l'atmosphère. Lors des grands travaux de rectification
du Rhin, qui ont été entrepris de concert entre les gouver-
nements français et badois, on a forcé le fleuve, dont la vi-
tesse devenait plus grande, à creuser davantage son lit et
58
BÉGIMR DES EAUX DANS LES TERRAINS PERMÉABLES.
par suite, on a un peu abaissé le niveau de la nappe d'eau
adjacente. C'est à cette circonstance que l'on a attribué
l'assainissement constaté dans l'état des villages de la plaine,
notamment au point de vue du goitre.
OBSERVATIONS THÉORIQUES.
En résumé, quelque perméable que soit une roche, et par
suite de la résistance qu'elle oppose à l'écoulement, la sur-
face supérieure de la couche saturée ou nappe d'eau forme
1^-
N'y w
^ Le Bois de Ban.
Fig. 33. — Plan montrant comment la source thermale S de Lavey s'épanchait dans des
éboulis où elle se mélangeait aux eaux phréatiques, jusqu'à ce qu'elle fut captée au moyen
d'un puits (d'après M. le professeur Renevier) ; y, roches cristallines métamorphiques (carbo-
nifères) ; /, roches du trias (arkose, cargneule et calcaire gris}.
une courbe inclinée vers le débouché qui en est la partie la
plus basse. Les divers exemples qui précèdent montrent
quelle est la complexité des mouvements des nappes sou-
EAUX PflRÉATIQUES DES TERRAINS DE TRANSPORT. 59
terraines, sollicitées à descendre suivant certaines pentes et
suivant l'abondance variable des eaux qui les alimentent.
Aux eaux provenant directement de l'atmosphère ou des
rivières, s'ajoute très fréquemment une contribution latente
de sources invisibles provenant de diverses profondeurs.
Parmi les innombrables exemples que Ton pourrait citer, je
mentionnerai seulement la source du Creux du Vent, canton
de Neuchâtel, dont la figure sera donnée plus loin.
OUEST EST
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YS%. 35. — Coupe montrant comment la source thermale S de Lavey s'épanchait dans les éboulis,
où oUc se mélangeait aax eaux phréatiques jusqu'à ce qu'elle ftit captée au moyen d'un
puits (d*apr6s M. le professeur Renevier) ; y, roches cristallines métamorphiques (carboni-
fèrcs) ; t, roches du trias (arkose, cargueule et calcaire gris).
Le fait a été particulièrement étudié dans les localités où
il détermine la dilution, par les eaux phréatiques, d'une eau
thermale ou minérale, qui vient jaillir au milieu d'elles,
comme à Plombières, à Schinznach, à Lavey (fig. 34 et 55).
Le but à atteindre étant d'obtenir ces sources sans mélange,
on est amené à les isoler par des travaux de captage.
Si Ton suppose la roche imperméable sous-jacente parfai-
tement plane et la roche perméable parfaitement homogène,
le calcul démontre, d'après Dupuit, que la courbe de la
60 RÉGOŒ DES KAUX DAItS LES TERRAINS PERMÉABLES.
partie supérieure de la nappe, à partir du point le plus haut,
a pour profil un arc de parabole.
D'après les savantes études de M. Boussinesq relatives à la
théorie des eaux courantes, une relation entre les pentes,
les vitesses moyennes, la forme et Taire des sections régit
les mouvements lents des eaux d'infiltration du sol, à travers
les canaux irréguliers que forment les interstices des grains
de sable composant les terrains perméables; la vitesse
moyenne est simplement proportionnelle à la pente motrice,
comme Dupuit l'avait admis pour le régime permanent. Il
en est de même pour le régime non permanent. Les crues
ou gonflements des eaux souterraines se propagent, en
général, avec une faible vitesse, sensiblement constante, et
proportionnelle à la pente du sous-sol; plusieurs gonfle-
ments produits à la fois, en divers points, se fondent peu
à peu en un seul.
Le cours d'eau pénétrant, lors des crues, dans la couche
caillouteuse et leur soutirant, au contraire, du liquide lors
des sécheresses, la nappe adjacente se comporte à la ma-
nière d'un régulateur. En effet, cette sorte de flux et de
reflux, qui s'opère sur de très grandes surfaces, amoindrit
les oscillations extrêmes du volume de la rivière. Le phéno-
mène a quelque analogie avec le mouvement ascendant et
descendant de la chaleur solaire dans l'intérieur de la croûte
terrestre, suivant les saisons.
Par suite du va-et-vient dont il s'agit, on a supposé que
la boue infiltrée dans le sable, avec les eaux troubles de la
rivière, à proximité du lit, en serait expulsée lors du mouve-
ment rétrograde de l'eau. Ce serait par suite de ce double
mouvement que le gravier ne serait pas depuis longtemps
imprégné de vase, même à peu de distance de la rivière'.
*■ Cet effet naturel repose sur le même principe qu'un système de filtration artifi-
TERRAINS AUTRES QUE LES TERRAINS DE TRANSPORT. 61
Des expérimentateurs se sont préoccupés de déterminer
directement la perméabilité des différentes roches, et ils
sont arrivés à des résultats discordants, ce qui tient sans
doute à la difficulté de se placer dans des conditions compa-
rables.
Après Darcy et M. Hagen, M. Seelheim * a cherché à obtenir
des conclusions générales, de nature à éclairer la construc-
tion, jusqu'ici empirique, des digues, autour des polders et
des canaux de la Hollande.
Antérieurement au travail de M. Seelheim, Texpérience
m'avait paru pouvoir éclairer le sujet. En versant de Teau
dans le premier compartiment d'une caisse contenant plu-
sieurs cloisons verticales et parallèles, formées de craie, on
constate que le liquide filtre peu à peu dans les autres com-
partiments, mais que, pendant des mois entiers, une déni-
vellation persiste de chacune des chambres à la chambre
suivante, de telle sorte que la surface moyenne du liquide
représente un plan incliné sur l'horizon.
§ II. EAUX PHRÉATIQUES DES TERRAINS AUTRES QUE DES TERRAINS
DE TRANSPORT.
Les nappes d'infiltration phréatiques ne sont pas res-
treintes aux terrains de transport que nous avons pris pour
exemple, à cause de leur fréquence.
Par suite des fissures qui les traversent en tous sens, ou à
raison de leur nature arénacée, certains groupes de couches
cielle, fort ingénieuxi établi à Greenock par Tingénieur Thom, en 1828, dans lequel le
neltoiement du filtra se fait de lui-même, parce que Teau peut y pénétrer, soit par le
haut, soit par le bas.
' Les lois de la perméabilité du sol. Archives néerlandaùe$, t. XIV, p. 393. 1870.
62
RÉGINE DES EAUX DANS LES TERRAINS PERÏÉABLBS.
des terrains slralifiés se comportent, vîs-à-vis des eaux sou-
terraines, comme les terrains de transport. Gomme ceux-ci,
ils contiennent des eaux phréatiques qui toutefois s'y
meuvent en général avec moins de facilité et de régularité.
Terrains torllairci» dcn dépariementa de la Seine et de Seine-
ec-Harne. — Daus SCS cartes hydrologiques de la Seine et de
fig. 54;. _ Cui-lc mouU'aul lu Uisposiliun de l'eau i)l.:-éallquc i Paris cl aux cuvirous.
Echelle ibo uds*
Seine-et-Marne, M. Delesse a signalé ces résultats avec beau-
coup de précision.
Toutes les maisons de Paris devaient être autrefois pour-
vues d'un puits. Il en a été compté 50 000, lorsqu'on les a
recensés au moment du siège; la plupart se trouvent dans
les vieux quartiers. L'usage des puits est tombé en désuétude,
TERRAINS AUTRES QUE LES TERRAINS DE TRANSPORT. 6S
depuis le développement de la distribution d'eau de la ville.
En dehors des dépôts d'alluvions, les couches tertiaires
renferment une nappe, où s*alimentent de nombreux puits
et qui se relie à la nappe d'alluvion (fig. 36). Ainsi, cette
dernière reçoit sur les deux rives du fleuve, à Auteuil et à
Hontrouge» un déversement de la nappe qui est supportée
par l'argile plastique.
La traversée des eaux phréatiques opposa une grande dif-
ficulté, lors des fouilles qui furent ouvertes le 1^' septembre
1861, pour les fondations de l'Opéra. Alimentée par des
courants souterrains qui descendent abondamment des pla-
teaux Toisins, la nappe est à 5 mètres au-dessous du sol. Or,
pour pouvoir donner aux dessous de la scène une dimension
convenable, il fallait asseoir ses fondations à une profondeur
de 14 mètres. Les 8000 mètres cubes au moins qu'il s'agissait
d'épuiser furent extraits à l'aide de pompes qui travaillèrent
plus de 7 mois, avant qu'on pût établir une nappe de béton;
les effets de ces machines se firent sentir à plusieurs kilo-
mètres de distance ^
Partout les nappes de ces divers terrains perméables
se relèvent, quand on s'éloigne des thalwegs.
A Paris, la pente de la nappe d'eau des puits a été trouvée
supérieure à 1 millimètre par mètre et elle atteint 1 centi-
mètre près de la Seine, qui joue le rôle d'un canal d'assè-
chement. Sur la rive droite, en temps de basses eaux, la
pente atteint 7 mètres par kilomètre, soit 7 millimètres par
mètre dans l'axe du boulevard de Sébastopol. Ces fortes
pontes sont variables suivant le degré de perméabilité du sol
et le volume de Teau de la nappe.
D'après Belgrand, la nappe d'eau qui alimente les puits de
la rive droite est à un niveau peu profond au-dessous du
1. Charles Garnier, Le nouvel Opéra à Paris;, t. II, p. 217. — Oppermann, Nouveliee
urehitfe» de eonetruclion. Janvier 1863.
64 RÉGIME DES EAUX DANS LES TERRAINS PERMÉABLES
sol, tant qu'elle se trouve dans des terrains de transport
du fond de la vallée. Ces terrains se composent de graTÎer,
de sable et de limon ; leur limite suit à très peu près le pied
des coteaux. Sur toute cette rive, si l'on ne sort pas des an-
ciennes enceintes de Paris, ou même des faubourgs qui s'y
rattachaient, la profondeur des puits ne dépasse que rare-
ment 10 mètres; souvent elle est comprise entre 4 et 5 mè-
tres.
Sur la rive gauche, la profondeur des puits est plus grande;
dans toute la partie basse occupée par l'ancienne ville, elle
pouvait varier entre 6 et 10 mètres; mais si l'on considère
les parties hautes de la rue Saint-Jacques et le plateau
occupé autrefois par l'Université, qui s'étend à droite et à
gauche de cette rue, on trouve que la nappe d'eau souter-
raine est à 28 et 30 mètres au-dessous du sol. Les puits les
moins profonds sont ceux des rues qui longent la Seine et
la Bièvre. C'est le contraire sur la rive droite : les puits les
moins profonds sont peu éloignés de la rue Saint-Lazare. La
nappe d'eau remonte plus rapidement que le sol, à mesure
qu'on s'éloigne de la Seine.
Dans le département de Seine-et-Marne, les nappes phréa-
tiques sont très développées, non-seulement dans le terrain
de transport, mais encore dans la craie blanche. Il en existe
aussi dans les divers terrains perméables qui sont traversés
par des rivières, notamment dans les calcaires lacustres de
la Beau ce, de la Brie et du Multien, dans les sables supé-
rieurs dits de Fontainebleau, dans les sables moyens qui sont
si développés dans les vallées de l'Ourq et de la Marne, enfin
dans le calcaire grossier et les caillasses qui recouvrent ce
dernier.
Terrains crétacés ci Jurassiques. — DanS IC terrain Crétacé
supérieur, les eaux phréatiques acquièrent une importance
66 RËGIME DES EAUX DANS LES TERRAINS PERMÉABLES.
beaucoup plus grande, ainsi qu'on le constate dans les pla-
teaux de la Champagne (fig. 57).
La profondeur des puits des deux plateaux jurassiques qui
resserrent la vallée du Clain, dans les localités des environs
de Poitiers placées à une distance de plusieurs kilomètres de
cette rivière, est moyennement de 50 mètres ; mais ceux de
la berge gauche du Clain atteignent 45 mètres. Dans la ville
même de Poitiers, sur les points les plus élevés, les anciens
puits, dont on ne fait guère usage, tant ils sont profonds,
mesurent 40 mètres, par la raison que la croupe calcaire
qui porte la ville est drainée par les deux vallées du Clain
et de la Boivre, ainsi que par une multitude d'excavations.
Contrairement à une opinion assez répandue, on atteint
Teau dans les puits avant d'être arrivé au niveau des eaux
courantes des vallées, ce qui prouve, une fois de plus, que
les eaux des puits proviennent des suintements des eaux
pluviales à travers les roches calcaires et les argiles rouges
du sous-sol, et non des infiltrations latérales des eaux des
rivières.
Il en est de même pour les couches gréseuses et sableuses
de différents âges.
Comme autre exemple, je signalerai la nappe d'eau des
environs du Mans*. Elle s'infiltre dans les sables cénoma-
niens, jusqu'à la rencontre des argiles oxfordiennes, c'est-
à-dire à 59 mètres au-dessous du niveau du confluent de
THuisne et de la Sarthe. Elle sature donc toute la partie in-
férieure de la masse sableuse et forme ainsi une nappe puis-
sante, dont la partie supérieure s'écoule par les deux ri*
vières faisant appel.
Terrains irlaalqaM et permleiui. — Nullc part OU n'a micUX
^ D*après M. tiuillier.
EAUX PHRÉATIQUES DES TERRAINS DE TRANSPORT. 67
constaté l'importance des terrains triasique et permien,
comme réservoir inépuisable d'eau pour les puits, qu*en
Angleterre, où des centres industriels, tels que Liverpool,
Manchester, Birmingham, Noltingham, en consomment
chaque jour d'énormes quantités. Le grès bigarré {new red
mnàtone) parait même être la formation la plus riche en
eaux phréatiques de l'Angleterre; elle rivalise avec la craie,
le lower green $and, et le grès permien.
4e reporter 1 eiuunen des faits «Malogves avx pré*
cMeats mm chapitre relatif a« rôle des Uthoelases. — ToutC-
fois, même dans les roches perméables en grand, le rôle
qu'y jouent les cassures de divers ordres, quant au mouve-
ment des eaux souterraines, est très considérable : aussi,
pour éviter des délimitations artificielles entre des cas ana-
logues, qui, étant inaccessibles, échappent souvent à une
obsei-vation précise, nous croyons préférable de reporter
l'examen de ce sujet au chapitre relatif aux lithoclases. La
liaison fréquente des nappes phréatiques avec de nombreuses
et puissantes sources est un motif de plus pour adopter ce
mode de groupement.
Des nappes souterraines du genre de celles qui viennent
de nous occuper ne sont pas dans la dépendance nécessaire
de grands cours d*eau ; elles peuvent en être plus ou moins
distantes.
CHAPITRE III
ROLE DU CONTACT MUTUEL DES ROCHES PERMÉABLES
ET DES ROCHES IMPERMÉABLES
g 1. — CONTACT PRODUIT PAR LE FAIT SEUL DE LA STRATIFICATION
fiénérautés. — Dans toutc la série des terrains stratifiés, il
existe de nombreuses alternances de sable ou d'autres roches
perméables, avec des argiles ou des marnes. Ces empilements,
souvent répétés, offrent des conditions éminement favorables
à la formation de couches aquifëres.
En se déversant naturellement au dehors, ces nappes
produisent des sources.
Si le terrain imperméable sur lequel les eaux pluviales
s'arrêtent est plus élevé que le fond des vallées principales,
sa ligne d'affleurement détermine sur le flanc des coteaux
un cordon ou lieu de sources, dont la plus considérable se
trouve habituellement à l'intersection AA' de la ligne de
thalweg de la vallée et de la surface du terrain qui soutient
l'eau. Le diagramme (fig. 38) fait voir qu'il doit en être
ainsi habituellement, puisque le bassin d'alimentation de
COiNTACT PRODUIT PAR LE FAIT SEUL DE LA STRATIFICATION. 69
ces sources Ak\ d'après la disposition de la figure, est de
beaucoup plus étendu que celui de deux autres sources quel-
conques BB'.
Cette disposition des nappes souterraines correspond donc
à ce que nous avons déjà appelé un niveau d'eau.
Dans le cas où la couche imperméable qui contient leau
passe au-dessous du niveau de la vallée, les eaux pluviales
absorbées par les terrains perméables forment une accu-
mulation d'eaux souterraines, dont le niveau se relève entre
deux thalwegs humides, jusque dans le voisinage des faites
SoQToepniiciMlr
-^Somee pmctpalfi.
Fig. 38. — Diagramme représentant, d'après Belgrand, la disposition des sources principales AA'
et secondaires BD', par rapport A la ligne de thalweg des vallées.
de partage. Par un mécanisme analogue à celui qui a été
décrit à l'occasion des terrains perméables, l'action de drai-
nage exercée par les vallées profondes y produit ou des
sources souvent considérables, ou même des marais. Ces
sources sont d'autant moins pérennes qu'elles sont plus rap-
prochées des faîtes de partage*.
n est des cas très fréquents où le mécanisme habituel qui
donne lieu à l'émergence des sources se complique: la
nappe aquifère peut être recouverte par un placage de
* fielgraad. La Seine, t. I, p. 95.
70 CONTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET DES ROCHES IMPERMÉABLES.
matériaux imperméables, de telle sorte que les eaux se font
jour au niveau le plus haut des affleurements de ces der-
niers. Ces affleurements forment donc comme le déversoir
d*un vase rempli d'eau, ainsi qu*on en verra des exemples
pour rOs d'Upsal et pour les sources de Longi et d'Alcara,
province de Messine.
Dans rénumération des exemples que nous allons signaler,
Tordre à suivre nous a paru devoir correspondre à Tordre
stratigraphique.
Terrains quaternaires
cm Usarr, «wk enWrmw de ■•c«e«aa, daas
les waUées de la Hoder et du Whim. — En AlsaCC, danS la forêl
de Haguenau, Targile tertiaire arrête à une très faible pro-
fondeur les eaux qui s'infiltrent dans le gravier quaternaire
Fig. 89. — Disposition des sources S qui sortent des sibles quaternaires G superposés aux argiles
tertiaires A dans la vallée do la Noder, près Haguenau.
superposé, comme on le voit dans la vallée de la Moder
(fig. 39).
De la longue terrasse diluvienne formée de sable et de
marne qui, vers la limite de cette forêt, s'étend le long de
la plaine du Rhin, jaillissent aussi de nombreuses sources
très limpides. Elles sont situées, soit au pied du même talus,
CONTACT PRODUIT PAR LE FAIT SEUL DE LA STRATIPiaTION.
71
soit entre 2 et 4 mètres au-dessus de la plaine, et elles
donnent naissance à des ruisseaux. C'est dans les deux anses
de la terrasse comprise entre OberhofTen et Schirrhein que
sortent les principales de ces sources. Au contraire, les pro-
montoires formés par les mêmes terrains sont généralement
secs. Cette observation qui se lie au développement des ter-
rains tourbeux dans les anses, est applicable en général à
la recherche des eaux souterraines. Toutes ces sources parais-
sent résulter d*infiltrations superficielles. Des sources sem-
blables se rencontrent entre Kaltenhausen et Bischwiller et
dans la banlieue de Soufflenheim.
RBTiraM ém Mets. — Telle cst aussi Toriginc des sources
du Sablon, près Metz ; elles forment une ceinture à la base
du lambeau de gravier qui, dans cette localité, est superposé
au lias.
Emwhnmm de Hmidh. — Âux cuvirous de Muuich, d*après
MUNICH
X
X
SXilom
Pi^T- iO. — Profil de Munich (partie inférieure de la yille) et de la vallée de l'Isar passant par
flaar. A. Argile tertiaire imperméable (Flinx). G. Gravier diluvien qui lui est superposé et qui
contient une nappe d'eau douce, le profil est indiqué par la ligne NN qui alimente la
source S, ainsi que de nombreux puits ; plusieurs forages ff en ont fait reconnaître les
allures/ I^es hauteurs sont A. une échelle 10D fois plus grande que les distances horizontales.
M. Çumbel, quapd les érosions du plateau de gravier at-
teignent Targile sQus-jacente nommée flinz^ comme il arrive
72 CONTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET DES ROCHES IMPERIfÉABLES.
dans les vallées de Tlsar et du Mangfall, il se produit une
source (fig. 40).
La figure 41 montré comment cette disposition se repro-
1 ÎKm
Fig. 41. — > Disposition de trois groupes de sources aux environs de Munich, appartenant à la
vallée de l'Isar et au Gleisenlhal, d'après M. Gumbel.
duitdans trois groupes de sources appartenant à la vallée
de risar et au Gleisenthal, qui ont été spécialement étudiés,
au point de vue de l'alimentation de Munich.
D. — Â part la nappe phréatique du terrain dilu-
vien, on rencontre çà et là, dans les collines de gravier
diluvien de la Hollande, des sources à des niveaux très dif-
férents. Elles paraissent être toujours en relation avec
œNTACT PRODUIT PAR LE FAIT SEUL DE LA STRATIFICATION. 75
des couches argileuses, qui arrêtent l'eau de pluie, et à
la surface desquelles cette eau s'écoule, pour apparaître
au jour sur le flanc des collines. Beaucoup de sources taris-
sent dans les étés secs; elles disparaissent parfois à la suite
de déboisements et on les a souvent compromises, en per-
çant la couche d'argile qui les soutient.
— Non seulement le gravier consti-
tue aux environs de Londres un réservoir souterrain facile-
ment accessible, mais au nord de la Tamise, plusieurs petites
vallées qui coupent le gravier pénètrent dans l'argile de
Londres, de telle sorte qu'une partie de l'eau de ce réservoir
s'échappe à la jonction des deux terrains et donne naissance
à plusieurs sources, dont plusieurs étaient autrefois très
réputées, telles que celle de Bagnigge Well, Notywell, Cler-
l^enwell, etc.
oxsorû. — A Oxfords dont nous avons déjà cité la nappe
phréatique, page 42, un grand banc de gravier supporté
par l'argile dite d'Oxford, ayant de 1°,50 à 6 mètres d'épais-
OXFORO
Fig. 41 — Coupe montrant la situation du dépôt quaternaire, au<iuei est subordonnée la nappe
d'eau phréatique d'Oxford. A, argile dite d'Oxford ; MN, niveau de la nappe phréatique.
seur, est très perméable; on suppose que sur 0",68 d'eau de
pluie annuelle il en passe au moins 0",30 pour une surface
d'environ 3 kilomètres carrés (fig. 42).
' D'après M. Prestwich.
74 CONTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET DES ROCHES IMPERMÉABLES.
irbiBde^ — Les dépôts superficiels, principalement de (fW/^,
sont si étendus en Iriande qu'en raison de leur perméabilité,
ils constituent un réservoir d*eau important. Tel est le cas
dans quelques portions des comtés de Kilkenny, Carlow, Kil-
dare, Wicklow et Dublin, où ils recouvrent des roches grani-
tiques. Quand on fait un puits sur une colline de drifl, on
peut prévoir la profondeur à laquelle ce puits atteindra
l'eau, d'après le niveau des sources qui se montrent sur les
flancs de la colline.
r^enae'. — La plaine de Palerme est d'une étonnante
fertilité, par les produits d'horticulture nombreux et
variés qui s'y récoltent successivement, jusqu'à dix à douze
fois dans une même année et sur un même sol. Le bassin
palermitain qui, à cause de cette heureuse circonstance, est
PALERME
0 Echelle des Icoitfiieure TcheJle de« luiUetire
L 1 2__i j t I I » « I 1 _
Cl c i^ 0 600 vm*
Fig. a. — Coupe montrant la disposition de la nappe aquifère dans la plaide de Païenne.
A, argiles écaillemcs bigarrées (éocène moyen). A', argiles quaternaires. C, calcaire quater-
naire (panchina). NN, niveau de l'eau phréatique. L'échelle des hauteurs est double de celle
des longueurs.
appelé la concha d'oro, est formé par un dépôt de calcaire
quaternaire {panchina) qui repose sur des argiles du même
âge. Celle-ci supporte un niveau aquifère dont la profondeur
varie de 10 à 20 mètres, et c'est à ce niveau que sont foncés
des puits munis de norias (fig. 45).
« D'après M. Hull.
> D'après M. Giordano.
CONTACT PRODUIT PAR LE FAIT SEUL DE LA STRATIFICATION. 75
upwa*. — Les Osar constituent en Suède la formation
aquifère par excellence. Ces anciens dépôts glaciaires se
présentent souvent sous la forme de collines allongées,
presque exclusivement constituées par des sables et des
0 K
V
Château d'UPSAL.
•
S
V
< A V V
■ Anuriona
1
1^
A
■^^r~-:=9E^
;~^^
Eig. Ai. — Disposition de la source jaillissant au-dessus du chAteau d'Upsal. Gr, ip^nite;
M, ancienne moraine de fond ; g, grayier (Os) ; a, argile glaciaire ; g', sable; a', argile post-
glaciaire; S, source. Échelle yrj^
graviers stratifiés. Au pied de ces Osar se trouvent des sources
excellentes, dont l'origine ressort clairement de la figure 44,
relative à la source renommée qui jaillit au-dessous du châ-
teau d'Upsal.
OlMcrTatlon relative A des tafs ▼oleantqaei» atratlflés. — 11 y
aurait lieu de signaler ici des sources qui jaillissent de
tufs volcaniques stratifiés, par exemple aux environs de
Rome. Mais, à cause de leur liaison avec les déjections vol-
caniques non stratifiées, il a paru préférable de les réunira
celles-ci, au paragraphe 2 du présent chapitre.
Terrains stratifiés
%mm. — Une partie de la région de la Haute-Alsace
située au sud d'Allkirch, connue sous le nom de Sundgau,
est formée de collines de graviers (fig. 45).
* D'après M. Tornebohm.
76 CONTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET DES ROCHES IMPERMÉABLES.
Quel que soit son âge, pliocène ou quaternaire, ce dépôt
de cailloux absorbe les nombreux cours d'eau descendant
vers l'est*. Comme il est superposé à des couches tertiaires
imperméables de Tâge delà molasse, il en résulte des sources
très nombreuses et très abondantes, qui jaillissent dans
presque toutes les échancrures du terrain. Aucune région
de l'Alsace n'est plus riche en sources. Ainsi, dans la vallée
de la Largue, creusée dans le gravier, elles sont très fré-
quentes depuis Manspach jusqu'à Seppois-le-Haut; il en est
HUN3»B4C« S.S.O.
Fi(ç. 45. — Gisement habtluel des sources du Slundgau (Alsace). A, aii^iles et grès tertiaires;
A', limon et sables argileux jaunes mélangés de quelques lits de cailloux; G, grandes
assises de cailloux mélangôs de sable; Q, loess qui constitue le plateau.
de même dans celle de l'IU. Telles sont celles de Tagsdorf,
Schwoben, Hausgauen^ Hundspach, Knoernigen, Michel-
bach-le-Bas, Bourchwiller, Folgensbourg, Steinsultz, Ober-
manspach et Niedermanspach, Waltighotten, etc. Sur la li-
sière Est du Sundgau, les belles sources de Blotzheim sortent
par une trentaine d'orifices et seraient assez volumineuses
pour faire marcher des moulins. Dès que les ruisseaux for-
més par ces sources arrivent dans la plaine, ils disparaissent
en s'infiltrant dans le gravier diluvien.
— Dans les Dombes (Ain), des sables et des gra-
viers attribués au pliocène supérieur sont superposés à des
marnes; il en résulte de nombreuses sources, très abon-
dantes et à des altitudes qui varient de 170 à 330 mètres '.
Divers puits profonds vont chercher l'eau potable dans
* Daubrée. Bulletin de la Société géologique de France^ 2* série, t. Y, p. 165.
* D'après une obligeante communication de M. Tardj.
CONTACT PRODUIT PAR LE FAIT SEUL DE LA STRATIFICATION. 77
des sables fins, à travers une puissante superposition de
marnes et d'argiles bleues et noires. Ces argiles et marnes,
causes de la formation des innombrables étangs de cette
région, ont une telle épaisseur qu'aucune source ne peut
proYenir d'une argile qui lui serait inférieure.
Au-dessous de cette première nappe, il y en a deux autres,
dans le pliocène moyen et le pliocène inférieur.
wrém de Bouwiuer. — Uu exemple dcs plus simples
de la formation des sources est offert par celle qui jaillit à
la base de la colline isolée du Bastberg, près de Bouxwiller
(Alsace).
Cette colline est terminée par un cône de gros cailloux
de calcaire jurassique, qui sont supportés par le terrain ter-
tiaire palustre, comme l'indique la figure 46.
Dans cette localité, le calcaire d'eau douce est très fissuré,
de telle sorte que l'eau y pénètre avec facilité et s'y meut
dans les cavités de la roche; mais elle est arrêtée parles
couches argileuses qui supportent le calcaire et recouvrent
le lignite. Les sources auxquelles donne lieu cette nappe
jaillissent de la base du calcaire d'eau douce, près de l'en-
trée de la galerie d'écoulement de la mine. Le fond du bas-
sin formé par le plongement des couches s'incline vers le
nord-est ; c'est précisément à l'extrémité de la rigole que
forme le fond ou le thalweg de ce bassin aquifère et au
point le plus bas du calcaire, en «, que s'opère le déver-
sement de la nappe souterraine.
La galerie principale, ouverte pour l'exploitation du lignite;
rencontrait la couche calcaire à 60 mètres du jour, mais à
un niveau supérieur de ô",90 à celui qu'occupe ordinai-
rement la nappe souterraine. Aussi l'eau ne sortait par celte
galerie qu'à la suite des grandes pluies et des fontes de
neige, lorsque les orifices des sources ne pouvaient plus
78 CONTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET DES ROCHES IMPERMËA6LES.
suffire à débiter toute Teau qui arrive dans le réservoir.
Lorsqu'au printemps le dégorgeoir de la galerie fournissait
beaucoup d'eau, on regardait comme probable que les sour-
ces seraient abondantes pendant Tété.
C'est aussi du terrain tertiaire que dérivent les eaux qui,
Conpe saiyênt jnn.
BASTBEM Bmixwîuen
S
¥ig. i6. — Di&posilion, en plan et en coupe, des sources des environs de Bouxwiller. 1, fabrique
d'alun ; ï, église catholique ; 3, tuilerie ; i, puits dit Machinen-Schacht ; 5, puits d'aérag^e
de la machine A vapeur ; 6 et 7, puits d'aérage. La longue ligne noire courbe et bifurquée
partant de la fabrique d'alun, représente les galeries principales d'exploitation du lignite ;
S, source sortant du calcaire d'eau douce à son contact avec l'argile à lignite; S', source
plus faible; S", source volumineuse, sortant du calcaire oolithique.
à partir de 4844, ont fait invasion dans Tintérieur delà
mine de Bouxwiller. Jusqu'au 6 février 1844, les travaux
inférieurs à la galerie principale avaient toujours été secs,
lorsqu'un petit suintement se manifesta, non loin du pied
du plan incliné, au toit d'une galerie déboisée et déjà en
partie affaissée. Bientôt l'abondance de l'eau s^accrut, au
point que quarante-huit heures après le commencement de
Tirruption, il en était déjà arrivé 2500 mètres cubes. L'eau
COOTACT PRODUIT PAR LE FAIT SEUL DE LA STRATIFICATION. 79
ne tarda pas à gagner la galerie d'écoulement et cessa par
conséquent de s'élever; le 27 février, Faffluence n'était plus
que d'environ 170 mètres cubes par 24 heures. Ce n'est que
le 7 novembre 1847, c'est-à-dire trois ans et demi après
l'inondation, que l'on est parvenu, grâce à une machine à
vapeur de 6 chevaux, à dessécher complètement et à restau-
rer les travaux inférieurs ; mais depuis lors on n'a pu les
empêcher d'être noyés de nouveau qu'à la condition de
faire mouvoir journellement les pompes.
Comme l'indique la figure 46, les orifices souterrains
qui versent l'eau dans la mine sont verticalement pla-
cés au-dessous du cône de cailloux du Bastberg. Cette
eau paraît donc principalement provenir des infiltrations
qui se font, à partir de la surface, dans les cailloux et
dans le calcaire d'eau douce. A la suite d*éboulements
produits par l'exploitation, le toit argileux du lignite,
qui était imperméable, tant qu'il était massif, a proba-
blement été rompu, et l'eau s'est frayé une voie à travers
les fissures.
Le débit quotidien des pompes a varié, en 1851, entre 204
et 1410 mètres cubes; c'est du l*"^ au 9 avril, à la suite de
pluies continues, que se trouve le maximum. L'eau affluait
presque en totalité sur un espace très restreint. Pour en saisir
d'un seul coup d'œil le régime, j'en ai représenté les varia-
tions depuis 1846 jusqu'à 1852, dans une figure où les
temps sont comptés comme abscisses, et les volumes comme
ordonnées*.
A moins d'invasion d^eau par de nouveaux orifices, comme
celles qui ont eu lieu en juillet et en novembre 1851, c'est
en général à la fin de l'hiver que Teau arrivait avec la plus
grande abondance. Le régime des eaux douteri*aines suit de
* 0e8€ri|>tion ^éoldgique dii Bas-^Rhln, 1855:
80 CONTACT DES ROGEBS PERMÉABLES ET DES ROCHES IMPERXÉiBLES.
près celui des eaux météoriques ; trente ou quarante-huit
heures après une forte pluie torrentielle, on voyait augmenter
le volume d'eau dans la mine. Quand le terrain était déjà
imprégné d'eau, il suffisait même pour cela de quinze à dix-
huit heures, ainsi qu'on l'a constaté en décembre 1849,
pour une fonte subite de neige. Ces derniers chiffres expri-
ment donc le temps nécessaire pour que les filets d'eau
arrivent de la surface à une profondeur de 30 mètres.
L'eau qui affluait d'abord était chargée de limon ; elle ne se
clarifiait que plus tard. Le volume annuel des eaux de la
mine n'avait pas diminué avec les années ; les canaux, par
lesquels l'eau se déversait dans les travaux ne paraissaient
donc pas s'obstruer.
L'isolement du Bastberg permet de calculer une limite
supérieure de la quantité d'eau météorique qui peut pé-
nétrer dans les réservoirs souterrains auxquels la mine
devait son eau ; on arrive ainsi, en la répartissant unifor-
mément sur tous les jours de l'année, à un volume maxi-
mum de 753 mètres cubes. Or, la quantité d'eau réelle-
ment enlevée par les pompes était moyennement égale,
à peu près, à la moitié de ce chiffre. Le reste de l'eau de
pluie et de neige que reçoit le sol, ruisselait à la surface
du Bastberg, ou s'évaporait, ou enfin alimentait les sources
extérieures.
Ces dernières sources ont ordinairement leur plus fort
volume en novembre et en janvier ; leur plus faible écoule-
ment a lieu de juillet à septembre. Le minimum annuel est
d'autant plus petit que l'hiver a été plus sec, et surtout qu'il
est tombé moins de neige, remarque qui est applicable à un
grand nombre de sources.
Depuis le mois d'octobre 1850 jusqu'au 23 mars 1851,
deux des trois sources de Bouxwiller ont complètement tari,
fait qui n'avait pas été observé de mémoire d'homme. 11 est
CONTACT PAR LE FAIT DE LA STRATIFICATION. 81
probable que cet arrêt n'aurait pas eu lieu, si la mine n'avait
pas soustrait une forte quantité d'eau au réservoir commun.
Pour obvier autant que possible à une telle pénurie, on a
Toncé, à côté des fontaines, des puits qui s'alimentent dans
la nappe du calcaire oolithique, laquelle est inTérieure de
25 mètres à celle du calcaire tertiaire *.
BMaia de Paris\ — Grâcc à la perméabilité des calcaires
de Beauce et des sables de Fontainebleau, les sources quMls
alimentent sont toutes situées au fond des vallées les plus
profondes, à peu de hauteur au-dessus de la ligne des
thalwegs ; les vallées et les autres coteaux sont complètement
secs et arides. Elles sont quelquefois très importantes et ali-
mentent, à l'exclusion de toutes les autres eaux, le pays
d'Hurepoix et la partie de la Beauce dont les deux versants
sont dirigés vers la Seine au-dessus de Paris.
Les marnes vertes qui recouvrent le gjpse ou celles qui
sont intercalées dans les terrains gypsifères arrêtent la
plus grande partie des eaux pluviales absorbées par les sables
de Fontainebleau, sur la rive gauche de la Seine, et sur la
rive droite, par les meulières et les calcaires de Brie. De là
les sources innombrables qui donnent aux coteaux dès val-
lées de la Brie et de la banlieue de Paris et de Versailles
leur caractère de fraîcheur et leur aspect pittoresque. Tout
près de Paris, le contact des marnes vertes et des meu-
lières, dites de Brie, détermine sur les flancs de toutes les
vallées de la Brie, de la forêt de Fontainebleau et des envi-
rons de Versailles un niveau d'eau visible de loin à la végé-
tation caractéristique qu'elle nourrit (Villc-d'Avray, Meudon,
Bellevue, Louveciennes, Brunoy).
* Detcripiwn géologique du Bas-Wiin.
* D'après fielgrand
8S ROLE DU CONTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET IMPERMÉABLES.
Les terrains perméables, compris entre les marnes vertes
et Targile plastique, ne donnent que des niveaux d'eau d'im-
portance secondaire; tels sont les faibles suintements four-
nis par l'affleurement des sables moyens, sur les coteaux de
la Marne.
Des niveaux d*eau beaucoup plus importants se rencontrent
dans le groupe de Targile plastique, surtout dans les régions,
comme le Soissonnais et une partie de la vallée de la Marne,
où cette formation est épaisse et comprend des couches
sableuses.
Une partie des sources qui servent, depuis les travaux de
BelgrandS à l'alimentation de Paris, et particulièrement les
sources de la Brie, donnent des exemples de plusieurs de ces
nappes subordonnées aux terrains tertiaires.
Telles sont, sur la rive gauche de la Seine, les belles
sources de la Juine et de l'Ecolle, qui donnent de l'eau
excellente à la base des calcaires de Beauce; celles des deux
petites rivières, le Durtein et la Voulzie, qui traversent la
ville de Provins, et les grandes sources de la vallée de l'Yè-
res, telles que celles de Briant. Dans la vallée de la Marne,
on trouve de grandes et bonnes sources. Le Sourdon, affluent
du Cubry, est alimenté par la très belle fontaine du Sour-
don qui jaillit sur le territoire de Saint-Martin d'Ablois et
débite en vingt-quatre heures environ 8000 mètres cubes
d'excellente eau. Entre le Cubry et le Surmelin se mon-
trent de belles sources, notamment à Dormans. C'est dans
le bassin du Surmelin, sur le territoire de Pargny, can-
ton de Condé, que se trouvent les célèbres sources de la
Dhuis, qui a donné son nom à l'aqueduc de dérivation de
Paris; elles jaillissent au lieu dit le Moulin de la Source
(fig. 47). La vallée du Petit-Morin renferme un très grand
* La eattx nouvelleê, t. IV, p. 100.
CONTACT PAR LE FAIT DE LA STRATIFICATION.
83
nombre de petites sources situées en amont et en aval de
Montmirail. Le bassin du Grand-Morin en contient de très
fortes, notamment celle du Moulin-au-Comte ou le Comle,
située au fond de la vallée, entre Esternay et la Ferté-Gaii-
cher: celle de la Meilleraye, à quelques kilomètres en aval
du Moulin-au-Comte, jaillit dans l'intérieur même d'un
moulin. Entre La Ferté-Gaucher etCoulommiers, sur la com-
mune de Saint-Remy, se montre une des plus grandes sources
Fiç. 47. — Moulin de la Source, l'une des sources de la Dhuis, \iic prise à Pargiiy, canton de
Condc-en-Brie (Aisne). Vue du bras droit et amorce da bras gauche.
du bassin de la Seine, la fontaine de Chailly; elle est située
au fond de la vallée, à gauche du Grand-Morin, qui d'après
Belgrand débitait en octobre 1857 environ 45 000 mètres
cubes d'eau en vingt-quatre heures. Un groupe de très belles
sources jaillit dans le parc de Mauperthuis, au bord de
TAubetin, affluent du Grand-Morin.
Malgré l'importance des sources de la vallée du Grand-
Morin, Belgrand n'a pas songé à les conduire à Paris, parce
84 ROLE DU œNTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET IMPERMÉABLES.
que les plus importantes, celles de Chailly et deMauperthuis,
sont à une trop faible altitude.
G*est ainsi qu'on a été conduit à choisir Teau de la Dhuis
et des autres sources du bassin du Surmelin pour alimenter
Taqueduc des services haut et moyen de Paris.
— Aux environs de Laon, la couche d'ar-
gile plastique placée sous la glauconie grossière qui constitue
la base du calcaire grossier, a de O^'yiO à 1 mètre d'épaisseur.
Elle s'abaisse plus ou moins, tantôt dans une direction, tan-
tôt dans une autre, en formant des espèces de bassins iiTé-
guliers, vers la partie inférieure desquels se rendent les
eaux pluviales, après avoir filtré au milieu de la masse
perméable superposée, pour s'échapper ensuite au dehors.
Cette couche aquifère alimente les puits de la ville, ainsi que
29 sources réparties sur le pourtour de la colline, d'un pro-
duit estimé à 185 mètres cubes d'eau par vingt-quatre heu-
res. C'est donc à la présence de cette couche mince d'argile
que la ville de Laon doit d'exister*.
vaUée de la «aroaM*. — Lcs tcrraius diluvicus de la vallée
de la Garonne, aux environs de Toulouse, forment deux pla-
teaux, le premier d'une altitude de 13 mètres, le deuxième
de 28 mètres au-dessus du fond de la vallée proprement dite.
Ces deux plateaux se composent essentiellement de cailloux
roulés, et ils recouvrent le terrain tertiaire qui, étant argi-
leux et imperméable, arrête les eaux d'infiltration.
C'est dans ces conditions que se trouvent des sources abon-
dantes que l'on voit jaillir au bord du plateau de Lardenne
et de Saint-Simon, sources qu'on avait eu l'idée de capter
pour les conduire à Toulouse.
* D'Ârchiac. Mémotret de la Société géologique de France, !'« sérient. V, p. 266-267, 1842.
■ L<7inerie. Géologie de la Haute-Garonne.
CONTACT PAR LE FAIT DE U STRATIFICATION. 85
BaviruM de BwmKéOmm^ — Dans Ics couchcs tertiaires des
environs de Bruxelles, il existe une alternance, au moins
deux fois répétée, de roches perméables et de roches im-
perméables, disposition très favorable à la formation de
nappes d'eau : d'abord une série imperméable, celle des
argiles de Landen et d'Ypres ; puis, une série perméable,
constituée par des sables variés qui se montrent au Mont
Panisel, à Bruxelles, à Laeken, à Tongres, au Rupel ; puis
une couche imperméable, l'argile rupelienne; enfin une
nouvelle série perméable formée des sables du Bolderberg,
de Diest et de l'Escaut; de nombreux détails sur ce sujet ont
été récemment publiés par M. Rutol'. (Voir plus loin, dans
le chapitre iv, une figure à ce sujet.)
de lAiidre»'. — Un petit nombrc de collines peu
élevées du London-Clay, au voisinage de Londres, sont re-
couvertes par des lambeaux de sable de Bagshot, comme,
par exemple, Harrov^, Hampstead et Highgate, tous sièges
d'ancienne habitation. Les sables qui, dans ces localités,
atteignent une épaisseur de 10 à 24 mètres, sont très per-
méables et apportent une ressource en eau, au moyen de
puits suffisants pour une population limitée.
I^s vingt à trente mètres de sable et de gravier apparte-
nant aux couches tertiaires inférieures qui supportent le
London-Clay et qui recouvrent la craie, sont aussi très per-
méables; comme ils sont associés à quelques lits d'argile
imperméable, ils déterminent un ou deux niveaux d'eau.
FmrmumÊtu^ mjrU\ — Sur le Tcvcrs Oriental des Alpes
* D'après M. VeratraeCen.
t Explication de la carte géologique de Bruxelles.
s Prestwich. Address of the Geologieal Society, 1851.
^ Star. Gisementê de$ cottche$ aquifères de Furstenfeld,
86 ROLE DU CONTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET IMPERMÉABLES.
centrales s*étend un pays de collines, formé de couches
tertiaires qui sont aquifères dans plusieurs de leurs parties,
notamment dans les couches à corithes et dans les couches
à congéries ou legel qui leur sont superposées; celles-ci
renferment des sables aquifères subordonnés à de l'ar-
gile.
Telle est la disposition dans la ville de Furstenfeld, où
les habitants ont des puits de 25 à 35 mètres de profondeur
installés sur les couches sableuses du tegel.
La figure 48 indique par des chiffres romains la superpo-
pvRtnHrriD
Fig. AS. — Disposition des couches aquifères prés de la ville de Furstenfeld (Styrie).
sition de six niveaux aquifères; la profondeur de quatre
d'entre eux, au-dessous du niveau de la rivière, est marquée
par des chiffres arabes. Plusieurs puits ont fait jaillir l'eau
très abondamment jusqu'à 5 mètres de hauteur, mais ils
se sont progressivement amoindris.
Les sables subordonnés aux terrains stratifiés de tous les
âges donnent fréquemment lieu à des nappes d'eau, aussi
bien que les terrains tertiaires. Nous nous bornerons à citer
trois exemples appartenant aux terrains crétacés.
La Pnisaye (Yonne)*. Lcs sablcs vcrts OU fcrrugincux, dits de
Raulin. Géologie de V Yonne.
CONTACT PAR LE FAIT DE LA STRATIFICATION. 87
la Puisaye, qui supportent des couches argileuses, four-
nissent plusieurs nappes d'eau. Il y en a une principale à
leur base, immédiatement sur les argiles à grandes exo-
gjres, à l'est de l'Yonne. Mais à l'ouest, dans la Puisaye, la
puissante assise des sables de ce nom renferme, à diverses
hauteurs, des couches interrompues d'argiles, qui donnent
des niveaux d'eau partiels fort utiles pour l'approvision-
nement d'eau du pays; les puits y sont en général peu
profonds. Les sources sont réparties dans une zone assez
large, qui passe par la forêt de Pontigny, Appoigny, Toucy,
Saint-Sauveur-en-Puisaye; il y a aussi de petites sources
ferrugineuses sur quelques points. C'est cet ensemble de
nappes qui, se prolongeant sous la craie, alimente les
puits artésiens de Paris, dont la profondeur dépasse
500 mètres.
B. — Les sables verts inférieurs superposés au
gault, renferment une nappe d'eau importante dans le bas-
sin de Paris, notamment dans la Haute- Marne. C'est ainsi
que les nombreuses sources qu'ils fournissent alimentent
l'Aisne et la Chée.
TorreHt 4*aiibIm. — L'exploitatiou de la houille dans le
nord de la France a fait reconnaître dans le terrain crétacé
une espèce de lac souterrain, d'un caractère tout parti-
culier, dont l'épuisement, d'ailleurs incomplet, a bien fait
reconnaître le régime.
Sur les points où le poudingue crétacé connu sous le nom
de tourtia ne repose pas directement sur le terrain houiller,
on rencontre à la base des morts-terraimj des dépôts aré-
nacés très aquifères; tels sont les sables inférieurs qui don-
nent naissance au torrent d'Ànzin et la couche épaisse de
sables fluides traversée au puits Saint-Alexandre de.Strepy-
88 ROLE DU CONTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET IMPERMÉABLES.
Bracquegnies et à la fosse Bonne-Espérance de la société
de Saint-Waast, centre du Hainaut *.
Celte couche n'est connue au-dessus du terrain houil-
ler que sur un espace très limité. Elle forme, d'après M. Dor-
moy, une courbe ovale ayant son grand axe dirigé de l'est
15 degrés nord à l'ouest 15 degrés sud, de Saint-Waast à
4AUB11V
Flkii
^'^'"--^>.^.]^' 'Ç^AJjuû^n * raouvY
Echelle ' ^,
' 1 t f t î^
Fisr- tô' — Plan du lac souterrain subordonné aux sables supérieurs du terrain houiller et
connu sous le nom de torrent tTAnsin. La ligne pleine indique le contour du lac avant les
travaux d'épuisement, c'est-à-dire vers 1840; la lig^ne ponctuée représente le contour actuel
(d*aprés M. l'ingénieur des mines Olry).
Denain, sur une longueur de 7750 mètres et son petit axe
dirigé du nord au sud, d'Oisy à Prouvy sur 4375 mètres de
longueur. C'est ce que montre la figure 49, que je dois à
l'obligeance de M. Olry, ingénieur des Mines, ainsi que les
détails suivants, relatifs au torrent d'Ànzin.
La superficie occupée par cette couche est de 26 500 kilo-
mètres carrés. Son épaisseur varie de 2 à 3 mètres jusqu'à
* Evrard. Traité pratique de V exploitation de9 mines, 1. 1, p. 232,
CONTACT PAR LE FAIT DE LA STRATIFICATION. 89
14 mètres; elle est, en moyenne, de 9 mètres. Celte couche
renferme beaucoup d'eau * et forme un véritable lac souter-
rain, tout à fait distinct, de la nappe des assises calcaires
qui lui est superposée et dont il est séparé par la masse
énorme des dièves. Il est aussi beaucoup plus gênant que
lui; car le torrent se trouvant au-dessous des couches argi-
leuses, on ne peut empêcher ses eaux de pénétrer dans les
exploitations. Des puits spéciaux et de puissantes machines
à vapeur sont consacrés à Tépuisement, auquel on tra-
vaille depuis vingt ans à Denain, et depuis quarante à Saint-
Waast.
Comme la couche ne doit recevoir que peu d'infiltrations,
il est possible qu'on arrive un jour à son assèchement com-
plet, si, en raison même de l'absence de communication
avec la surface qui le prive d'alimentation, ce réservoir ne
cesse de s'appauvrir.
ivant le début de l'exploitation, les sables aquifères de
cette couche occupaient une étendue superficielle d'envi-
ron 24*-''-,574; en 1867, la zone mouillée était réduite ù
18''-^-,335; elle n'était plus au !•' décembre 1880 que de
Sur la figure, on a représenté le périmètre correspon-
dant aux sables du torrent, et celui qui comprend aujour-
d'hui la partie occupée par les eaux.
Trois fosses d'exhaure ont servi spécialement à prendre
les eaux directement sur la nappe du torrent. Ce sont les
fosses Bon-Air, Vedette et Chabaud-Latour. Elles ont été suc-
cessivement mises en chômage, la première en 1845, la se-
conde en 1847, et la troisième en août 1868 (cette dernière
avait commencé à épuiser les eaux en 1845)'. En outre, les
^ Environ 40 pour iOO de son Tolume, d'après diverses expériences.
* Dorrooy. Topographie touterraine du bassin houiller de Valenciennes^ p. 117.
90 ROLE DU COiNTAGT DES ROCHES PERMÉABLES ET IMPERMÉABLES.
fosses d'Herin, Ernestine, Joseph Périer et l'Enclos ont con-
tribué à assécher le torrent, dont les eaux pénétraient dans
les travaux, malgré les massifs de garantie conservés dans
les couches de houille. Les fosses Lomprez et Du temple ont
aussi tiré un peu d'eau, mais beaucoup moins que les pré-
cédentes.
On peut évaluer ainsi les quantités d'eau dont la nappe
se serait successivement appauvrie :
Années 1856 745.000 mètres cubes
1857 655.000 —
1858 702.000 —
1859 791.000 —
1860 992.000 —
1861 1.800.000 —
1862 928.000 —
1863 714.000 —
1864 1.032.000 —
1865 877.000 —
1866 800.000 —
1867 635.000 —
1868 572.000 —
Arrêt de la fosse Chabaud-Latour.
Total en 13 ans. . . 10.229.000 mètres cubes.
Actuellement on tire par an environ 206 000 mètres cubes
produits accessoirement par les fosses Joseph Périer, l'En-
clos et Hérin. Ce chiffre se répartit de la manière suivante:
Joseph Périer, 109 000; l'Enclos, 75 000; Hérin, 24 000
mètres cubes.
Lors des premiers travaux , on était moins bien outillé
qu'aujourd'hui pour creuser les puits ; le mode de fonçage
à niveau plein n'était pas connu, et la nappe d'eau consti-
tuait un obstacle des plus sérieux à la traversée des morts-
terrains entre Saint- Waast et Denain. D'autre part, on devait
réserver dans les veines de charbon, contre le torrent, des
CONTACT PAR DES ÂCQDENTS POSTÉRIEURS. 9i
massifs de réserve assez épais. D'ailleurs, l'épuisement de
toutes les fosses en exploitation contribue indirectement au
même résultat, puisque la nappe, comme on vient de le
voir, n'est pas séparée du terrain houiller par des couches
imperméables et y pénètre par des fissures.
Les massifs de garantie réservés contre le torrent corres*
pondent à une hauteur verticale de 40 mètres.
Le bord de la nappe passait par Bon-Air en 1843 et par
Vedette, en 1847, époques auxquelles ces deux fosses ont été
successivement mises en chômage.
En résumé, il est incontestable que le lac souterrain, dé-
signé sous le nom de torrent d'Ànzin, a considérablement
diminué d'importance, comme s'il n'avait pas d'alimentation.
Ses bords se sont retirés, au point de laisser à sec la plus
grande partie de la région de terrain houiller, actuellement
occupé par les travaux. Cet assèchement a surtout été pro-
duit avant 1867, mais depuis lors il a été continué, quoique
plus lentement, et il se poursuit môme aujourd'hui.
g 2. CONTACT PRODUIT PAR DES ACaDENTS POSTÉRIEURS
A LA STRATIFICATION OU A LA FORMATION DES ROCHES.
Roches ImpennéableB dàsagrégées sur place.
Le granité et le gneiss, ainsi que les roches cristallines
qui leur sont associées, sont en général imperméables, au
moins lorsqu'ils ne sont pas traversés par des fissures assez
peu serrées pour donner passage aux eaux. Le percement du
Saint-Gothard a été mentionné plus haut comme une preuve
de cette assertion (fig. 1, p. 10).
Toutefois ces roches massives sont souvent désagrégées et
n ROLE DU œNTACT DES ROCHES PERMfiABLES ET IMPERMÉABLES.
réduites en une sorte de masse incohérente, qu'on appelle
arène. Cette désagrégation, à laquelle les agents atmosphé-
riques ont souvent pris une part active, est surtout fréquente
dans le voisinage de la surface, et les matériaux qui en ré-
sultent se sont accumulés de préférence dans certains plis
du sol. Gomme ces derniers sont fréquemment de nature per-
méable, ils s'imprègnent d'eau, et donnent ainsi naissance,
dans les dépressions de la roche vive, à des réservoirs quel-
quefois peu étendus et, par suite, à des sources.
Le plateau granitique de la France centrale et les régions
qui s'y rattachent oiïrent de nombreux faits de ce genre.
Ainsi, comme Belgrand Ta montré, le sol du Morvan pré-
sente un nombre extrêmement considérable de petites sour-
ces dans les dépressions ou plis qui se montrent partout,
aussi bien sur les flancs des coteaux que dans le fond des
vallées. Hais, en général, il n'y en a pas de considérable.
Ces petites sources sont susceptibles de tarir à la suite des
sécheresses.
Dans plusieurs de ces régions, le point d'émergence de la
source est presque invariablement marqué par un dépôt
tourbeux plus ou moins important, où les habitants vont
capter la source pour l'amener au hameau.
irtMéo. — Cette influence des arènes superficielles est
habituelle aux pays granitiques. Nous mentionnerons l'Ir-
lande, où sur des étendues considérables, et jusqu'à de
grandes profondeurs, le granité est à l'état d'arène ou de
growan^ suivant ce mot populaire d'origine celtique. De là,
d'après M. HuU, des réserves d'eau comparables a celles que
contiennent si souvent les alluvions superposées à la même
roche.
flehiatM «« diTers é^cm. — Malgré la différence de nature
CONTACT PAR DKS ACCrDENTS POSTÉRIEURS.
93
qui les sépare du granité, les roches schisteuses de tout âge
présentent des circonstances analogues.
•bMrTatlMi mur l'éparpUleaMat ûem popwlatloMi. — De la mul-
tiplicité et de réparpillement des sources dans les pays gra-
nitiques et schisteux résultent la multiplicité et réparpille-
ment des habitations, comme Cuvier l'avait déjà remarqué.
Éboulis.
Quel que soit le terrain en présence duquel on se trouve,
des éboulis se rencontrent si fréquemment sur les flancs des
Fig. 50. — Situation de la source du Creux-du-Vcnt dont l'arrivée au jour est déplacée par
un grand éboulement, d'après M. Desor. Ca, calcaire de la grande oolithe ; A«, marnes oxfor-
diennes; C, oolithe astartienne; A^ marne a^lartienne; G>, calcaire A astartes; % calcaire
kimméridgien; C«. calcaire virgulien; E, éboulis.
coteaux ou vers leurs bases, qu'ils sont à prendre en consi-
dération sur le régime des eaux.
Des sources que Ton rencontre dans les terrains imper-
méables, tels que le granité et le phyllade, sortent quelque-
fois des éboulis perméables, dont les actions désagrégeantes
de la surface les recouvrent peu à peu.
C'est ainsi que la source du Creux-du-Vent (fig. 50)
dans les montagnes du Jura neuchâtelois, qui est alimentée
par les calcaires oxfordiens, jaillit à la base des iparnes
9A ROLE DU CONTACT DES ROCHES PERMËABLES ET IHPERMÉABLES.
oxfordiennes par suite d'un grand éboulement d'environ
500 mètres.
D'autre part, la figure 51 représente une disposition fré-
quente le loDgdes collines, formées d'une alternance de cal-
caire ou de grès et d^argile, comme on le voit dans les étages
jurassiques.
De tels glissements déplacent fréquemment le niveau nor-
mal des sources, qui, suivant la nature perméable ou imper-
méable des éboulis, peuvent baisser ou élever leur appari-
tion au jour.
Par suite de circonstances de ce genre, le fond des vallons
Fi^'. 51. — MaUSriaiix calcaires éboulés C, qui se sont enfouis dans les argiles sous-jacetites A.
de manière à former un bourrelet B, qui constitue comme la digue d'un réservoir d'eau.
|)0uvant donner lieu à la source S. Exemple pris dans Meurthe-et-Moselle, par M. Braconnier.
est souvent recouvert, môme dans les points où il n'existe
pas de traces d'alluvions, de débris anguleux et peu cohé-
rents. C'est ainsi qu'à une faible profondeur, il circule sou-
vent, dans cette couche meuble, des eaux invisibles à la sur-
face du sol. Des travaux peu dispendieux, ne s'étendant qu'à
5 ou 6 mètres de profondeur, peuvent y ramener ces eaux
latentes.
Quand l'eau de pluie tombe, des surfaces convexes font
diverger les filets liquides qui se rassemblent dans les sur-
faces concaves, et ces dernières deviennent de véritables
bassins de réception.
CONTACT PAR DES ACUDENTS POSTÉRIEURS. 95
C'est généralement vers le haut des plis concaves du ter-
rain, c'est-à-dire à la naissance des thalwegs, que Ton peut
rencontrer l'eau latente des terrains meubles. Un court exa-
men du modelé du sol suffît en général pour déterminer
la position de Tentaille à faire. Perpendiculairement à la
ligne du thalweg des vallées, on pratique une rigole trans-
versale que Ton approfondit jusqu'à ce que les eaux y dé-
coulent.
Des caractères de ce genre ont été mis à profit de toute
antiquité et dans bien des pays, et c*est à la suite de leur
élude approfondie que l'abbé Paramelle* a formulé des
règles qui Tout souvent conduit au succès.
Boues glaciaires.
Les boues glaciaires, en se plaquant sur les roches, déter-
minent, de même que des éboulements, des dérivations de
sources. Un cas de ce genre a été signalé dans l'Âlbisbrunn,
pour des eaux qui sortent de la molasse.
Boories, coulées de lare et autres déjections volcanicpies incohérentes,
Vaouolalres ou fissurées.
€«■€• d« seorfes; mL«aipl«s mm laeCluuHboa, mi lac dm Bottehet,
à Tewme, * Wmyml et * San Mlfiicl. -^ En divCrS licUX, IcS
déjections volcaniques incohérentes et essentiellement po-
reuses donnent lieu à des filtrations du môme genre que
celles des terrains de transport et des éboulis.
Le lac Chambon (Puy-de-Dôme), en s*infiltrant à travers les
Mories du Tartaret, près Murols, produit de nombreuses
sources»
* L'art de décou^ir leê sùurceê, î* édit<» p. i4i, i82 et i904
96 ROLE DU CONTACT DES ROCHES PERHfiABLES ET IMPERMÉABLES.
Le lac du Bourget (Haute-Loire), qui est creusé dans un
cône volcanique, n'a aucune issue apparente. Sa forme est
à peu près celle d'une ellipse, dont le grand axe est de
825 mètres et le petit de 700 mètres. Sa plus grande pro-
fondeur, qui correspond au milieu du lac, a été trouvée de
28 mètres. D'après Henri I^coq, ce lac présente cette par-
ticularité qu'on n'y voit pénétrer aucun filet d'eau, et que
nuHe part on n'en voit sortir la moindre trace. Il faut
admettre des sources intérieures et abondantes au-dessous
de la surface de l'eau, tandis que le trop plein s'échappe à
travers les bords scoriacés du cratère. Telle serait l'origine
des sources abondantes qui jaillissent au pied du cône vol-
canique. Une source dont l'eau a été conduite à la ville du
Puy a sa naissance auprès du village de Vourzac et dans un
petit vallon parcouru par le ruisseau qui en porte le nom,
à un peu moins de 7 kilomètres de la ville, à l'altitude de
850 mètres. Elle apparaît dans le terrain basaltique au pied
d'une butte de scories de forme allongée *.
D'après M. Fouqué, à Fayal, au fond du cratère, est un
réservoir d'eau fermé, de 80 mètres environ de diamètre,
dans lequel on peut descendre par un canal vertical de
15 mètres de profondeur. J^e réservoir d'environ 80 mètres
de diamètre et de 30 mètres de hauteur est sans issue ; mais
il parait alimenter une source qui forme un ruisseau
descendant sur Horla.
Le lac situé dans l'intérieur du cratère Sete Gidades, à San
Miguel, se déverse par infiltration à travers ses parois et
donne lieu à plusieurs sources, dont la principale coule
vers le sud. Dans la même lie, la digue qui termine le lac
de Fumas alimente une source et un ruisseau, sur le pas-
sage des sources chaudes.
A D'après M. Tournaire.
CONTACT PAR DES ACCIDENTS POSTÉRIEURS.
97
4'^^
Bo7atccFMtaMu(Pn7Hie-iiùaM). — Les oaux pluviales qui
98 ROLE DU CONTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET IMPERMÉABLES.
pénètrent à travers les coulées volcaniques modernes, ainsi
qu'à travers les pouzzolanes et leurs scories, se réunissent
sous les matériaux poreux, en suivant les mêmes vallées,
sous la protection des courants et s'échappent abondantes
à leur extrémité. De belles sources de cette catégorie se
rencontrent dans le département du Puy-de-Dôme*.
Aux environs de Glermont (fig. 52), les sources de Royat
et de Fontanat sortent d'une coulée qui s'est épanchée vers
l'est du Puy de Dôme. EJles reçoivent et abritent une partie
de l'eau qui est absorbée par la masse imposante du Puy
de Dôme et la laissent échapper sur plusieurs points de leur
trajet. Parmi toutes ces sources, on peut mentionner l'é-
norme quantité d'eau qui jaillit à Fontanat, où l'on voit
partout sortir de la lave des filets d'eau vive. Au-dessus de
Royat, il y a également une source très abondante et à Royat
même (fig. 53), dans une grotte charmante, sous une lave
prismée, jaillissant de lapillis et de scories par sept ouver-
tures, les eaux ont entraîné une partie du terrain meuble
sur lequel reposait la lave. Un peu plus bas, à l'extrémité
de la vallée, s'ouvre une dernière grotte qui fournit le plus
d'eau, et alimente la ville de Glermont. L'ouverture de cette
grotte a été également creusée par les eaux sous le courant
de lave.
La quantité d'eau qui sort de la lave, depuis Font-de-l'Ar-
bre au-dessous de Fontanat, jusqu'à l'extrémité de la coulée,
est énorme. Lecoq évalue en moyenne à 1560 litres par
seconde, soit 134000 mètres cubes par 24 heures, le volume
d'eau qui sort de cette longue coulée.
Le Puy de Dôme par sa grande surface, par la nature po-
reuse de sa roche constituante, et surtout par son action
réfrigérante, est la cause principale de cette alimentation.
* D'après Ueuri Lecoq, Eaux du plateau cenlraL
CONTACT PAR DES Aa:iDENTS POSTÉRIEURS. 99
C'est à la coulée de lave qui part de sa base, et non à celle
Fig. 53. — Grotte sous une coulée de lave i structure prismatique d'où sort la source de Roya
D'après M. Gautier
de Gravenoire, qui descend aussi jusqu'à Royat, qu'il faut
attribuer Ténorme volume d'eau de ces sources.
AllA^Mit, Ceyasat ci WLmmmje (Pay-^e-Dômc). «- Du CÔté Occi-
dental du Puy-de-Dôme, d'autres coulées partant du Puy de
Côme et peut-être aussi du petit Puy de Dôme, ainsi que
celles de Barme et de Monchié, fournissent aussi des sources
qui présentent une sorte de symétrie avec celles de Royat et
de Fontanat (fig. 54).
La masse et l'étendue de la lave du Puy de Côme permet-
tent aux eaux pluviales de s'y infiltrer abondamment. Elles
100 ROLE DU CONTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET IMPERMÉABLES .
5!
.< <^
ss
sortent très volumineuses à Pontgi-
baud, au point de refroidir les eaux
de la Sioule.
De toutes ces sources, d'après
M. Paul Gautier, préparateur à la Fa-
culté des sciences de Glermont, la
plus puissante est peut-être celle d'Al-
lagnat (fig. 55) ; elle sort d'un cirque
dont les parois, formées de schistes
anciens, supportent d'épaisses cou-
lées de basalte, recouvertes de lave
moderne. Tout près de cette première
source s'en trouve une autre, un peu
moins abondante, celle du Grand-
Pré, dont les eaux se réunissent plus
bas à celles d'Âllagnat et de Geyssal.
La source de Ceyssat est moins forte
que les deux premières. Elle s'é-
chappe au-dessous de l'église du vil-
lage, au milieu d'éboulis de la coulée
de Côme et de blocs de roches an-
ciennes.
L'étang de Fung a été desséché il
y a une vingtaine d'années et trans-
formé en prairies. Seules les sources
subsistent et sont captées en partie
par une levée de terre gazonnée, de
forme circulaire (fig. 56). L'eau ar-
rive du fond de cette vasque par trois
crevasses très profondes, que les ha-
bitants appellent des puits, et leur
débit varie suivant les années. A côté
de la pièce d'eau se trouvent d'autres
CONTACT PAR DES ACCIDENTS POSTÉRIEURS. 101
fissures moins importantes, qui sont également des points
d'émergence de sources.
" Le groupe de Mazaye (fig. 57) est constitué par trois
sources. Deux sont de force moyenne et sourdent, Tune sous
l'église et l'autre entre Mazaye-Haute, qui est bâtie sur la
Echelle.
Fig. 55. — Carte da bassin d'alimentation des sources de Mazaye, de Fung, de Ceyssat
et d'Alagnat. — D'après M. P. Gautier.
coulée, et Mazaye-Basse, qui est située au pied de cette même
coulée. Ces deux sources diminuent beaucoup, et disparais-
sent même en temps de sécheresse. La troisième, qui est la
plus puissante, alimentait autrefois un petit étang, aujour-
d'hui desséché, et sert de force motrice à deux roues à augets,
iOi ROLE DU CONTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET IMPERMÉABLES.
actionnant ensemble quatre paires de meules. Cette source
est intarissable et varie peu. Elle se trouve placée sur une
inflexion qu'a dû subir la coulée, à son extrémité iufé-
rieure, pour suivre le thalweg de l'ancienne vallée. La lave
offre au-dessus de la source un éperon qui semble s'être so-
lidifié subitement en ce point ; la portion de coulée qui con-
tinue dans la vallée est mince et peu importante.
Fig. 56. — Vue de Fung : Y, granité; «, basalte; C, G, coulée volcanique d'où sort la source
Cr. crevasses du soi. — D'après M. Gautier.
Attires localités un départemeaC dn Fay-de-BôOM t Cîraveaolrc^
rari€Mi, La Na^ére, HontelneTre, le Tartaret*. Le Puy dc Grave-
noire, à 3 kilomètres de Clermont, avec son cône de scories,
émet des sources limpides sur le trajet de ses laves, notam-
ment celle qui alimente le village deBeaumont, et la grande
source de TOradou qui sort aussi de la lave.
L*un des principaux cônes de scories de la chaîne des
Puys, le Puy de Pariou, produit aussi plusieurs sources qui
descendent jusque dans la plaine, assez près de Clermont.
* Uae grande partie de cet article est emprunté aux publications de Lecoq.
CONTACT PAR DES ACCIDENTS POSTÉRIEURS.
i03
Déjà, près de la montagne, sort la fontaine du Berger, la
source la plus élevée et la plus froide; puis une autre, au
hameau de Chez-Vasson. La coulée se divise en deux bran-
ches; Tune d'elles descend à Villars et Ton en voit jaillir une
belle source, au-dessous du village, dans une prairie; un
peu plus bas, une autre dans le bois ; enfin à Fontmort sort
Fig. 57. — Voo de Maxaye : C, coulée volcanique; C, retour de la même coulée d'où sort la
source S. — D'après M. P. Gautier.
une source considérable à l'extrémilé de la coulée. I/autre
branche passe au Gressigny et abandonne, après plus de
12 kilomètres de longueur, à Nohanent, un véritable ruis-
seau où cette source a fixé le séjour des blanchisseuses.
Entouré de plusieurs cônes de scories qui, probablement,
conduisent leurs eaux sous ses laves, le Puy de la Nugère
iU ROLE DU CONTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET IMPERHËABLES.
représente, suivant l'expression de Lecoq, le plus bel appareil
volcanique de l'Auvergne, Des sources très pures et très
abondantes s'échappent sur plusieurs points; la plus élevée
est celle de Volvic.
La coulée de lave de Montsineyre descend rapidement à
Compains, et, en passant à Ghaméane, elle émet une très
belle source qui se précipite avec la lave au fond de la vallée.
Cette eau est dirigée sur les pentes irrégulières que les flots
de laves ont formées en descendant à Compains.
Le volcan du Tartaret a donné naissance à une coulée de
lave très étendue qui passe à Murols, à Sachapt près de Sainl-
Nectaire, à Champeix et ne s'arrête qu'à Neschers. Des sour-
ces très belles sortent sur plusieurs points de cette coulée et
ont été sans doute la cause déterminante de la position de
plusieurs villages. Les plus belles sortent de la lave à Sachapt
et arrosent de larges touffes de callitriches, Cxées sur des
scories qui couvrent le fond des ruisseaux et dont la tempé-
rature reste la même en hiver et en été.
Batraiffaes (Ardéehe). — Daus des couditious Semblables
une source jaillit devant Enlraigues (Ârdèche), sur la rive
droite de la Yolane, vers la base de la coulée et dans une
sorte de grotte.
Etna, Ter«elra et Sastorln^ — DcS SOUrCCS trèS fortCS jaillis-
sent des matériaux scoriacés vers la base de l'Etna. Tel est le
Fiume-Freddo, près Giarra, dont la température très basse
fait supposer que son alimentation se fait à un niveau fort
élevée
À Terceira, c'est une disposition analogue : l'eau entre dans
un boyau formé au pied d'une coulée.
* D'après H. Fouqué.
CONTACT PAR DES ACCIDENTS POSTÉRIEURS. iOS
Santorin ne possède aucune source ; l'île étant recouverte
d'une couche de ponces épaisse en moyenne de 20 mètres,
les eaux de pluie y disparaissent et s'écoulent vers la mer,
sans laisser de traces à la surface. S'il était nécessaire, on
pourrait sans doute les capter vers le bas par une tranchée.
et emw%w4mm\ — H nous parait préférable de ne pas
scinder ce qui se rapporte aux eaux de Rome, sauf à y com-
prendre des nappes d'eau et des sources qui n'appartiennent
pas, en totalité, aux déjections volcaniques incohérentes.
Rome est située au milieu d'un plateau élevé de 40 à
60 mètres, au-dessus la mer, et sillonné par des ravins plus
fsHil^i^^^^
Fig. SB. — Constitution géologique de la campagne romaine, montrant la disposition des sources
principales de la contrée. T, tufs divers; P, pounolanes; Ti. tuf incohérent; Ti. tuf solide li-
tholde; Tg, tuf volcanique granulaire; NN, niveau de la nappe. — D'après M. Giordano.
ou moins escarpés, dans lesquels coulent le Tibre et ses af-
fluents. Les collines de la campagne romaine n'en sont que
des restes ou lambeaux. Or ce plateau est constitué par des
tufs volcaniques, en assises presque horizontales et plus ou
moins épaisses. Ces tufs, dont les éléments ont été projetés
de volcans sous-marins ou sur les bords d'un ancien estuaire,
ont une texture et une solidité assez différentes dans les
difTérentes couches. Une assise de tuf solide employé comme
pierre de taille {tufo litoide), de 10 à 15 mètres de puissance,
alterne avec du tuf moins solide et avec des assises tout à
fait incohérentes de pouzzolane. Celte dernière (fig. 58) est
* Diaprés une obligeante communication de N. Giordano.
i06 ROLE DU CONTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET IMPERMÉABLES.
naturellement fort perméable et donne lieu à une nappe
d*eau souterraine qui alimente plusieurs sources et des puits
à un niveau assez constant, inférieur à 25 mètres d'altitude.
A quelque distance de la ville, s'élèvent des cônes vol-
caniques plus récents, recouvrant les tufs. Ils sont formés
par des assises inclinées de cendres (lapilli) associées à des
laves. Le plus grandiose de ces cônes est celui dit Ulial ou
d'Âlbano, à Test de Rome, couvert de villas et de villages.
tels qu'Albano, Âricia, Nemi, Marino, Frascati, Rocca di
Papa, etc. — Un tel cône est très perméable, et les eaux
pluviales en sortent à l'état de sources plus ou moins abon
dantes et généralement assez pures.
Au nord de la ville, à 2 kilomètres environ hors de la
porte du Peuple, la source gazeuse renommée dite oc^tia
dcetom S sort au pied des Monts Parioli, formés de tufs
volcaniques et de travertins, avec un volume d'environ
60 mètres cubes par 24 heures. A 3 kilomètres et demi au
sud de la ville, près de la voie Appienne, dans le petit val-
lon de la Gaffarella, Yacqua nanta est également gazeuse
froide; un peu plus bas, les restes d'une ancienne njm-
phée romaine s'élèvent près d'une autre petite source où,
d'après la tradition, Numa venait consulter la nymphe
Égérie et qui ont inspiré Byron.
Les Trois Fontaines {acqux mlvix)y près de l'abbaye de ce
nom , dans un petit vallon au sud de Rome, ont été captées
et conduites sous trois autels dans l'intérieur de l'église de
l'abbaye: c'est ce qui a fait croire à trois fontaines diffé-
rentes, qu'on a même dît avoir des températures différentes
et auxquelles une tradition religieuse a donné jadis une
certaine célébrité.
Sur les flancs du Janicule jaillissent la plupart des
* Le pape Alexandre YII 7 flt bâtir iin temple par Bemini.
CONTACT PAR DES ACCIDENTS POSTÉRIEURS. iOl
sables superposés aux argiles pliocènes, les sources dites
Lanmiana^ Pia, Innocenziana; au pied du mont Vatican, la
source délie Api; à la base du Quirinal, les sources dites de
Saint-Félix del Grillo, etc.
Le sous-sol de la ville basse, formé par des décombres,
est traversé par des eaux assez abondantes s'écoulant libre-
ment au Tibre, qui n'est pas encore endigué. Une partie
de ces eaux est due à la perte des aqueducs distribuant
l'eau à la ville. Ledit écoulement souterrain donne souvent
lieu à des mouvements dans les fondations des maisons, dont
les murs se crevassent assez facilement.
L'eau Vergine dite de Trecij du nom de la fontaine mo-
Fig. 59. — Source de VAcgua Vergine,
numentale qui est formée par cette eau dans la ville, est
l'ancienne Virgo, si estimée pour sa pureté (fig. 59). Elle
surgit du petit vallon de Nona, qui débouche sur la gauche
de l'Aniene, à 10 kilomètres de Rome et à 22 mètres d'al-
titude. C'est une couche de pouzzolane, surmontée par les
assises de tuf lithoïde fendillé, qui la fournit. Cette eau
peut être considérée comme le drainage d'une partie du
cône Latial, ainsi que le fait comprendre la figure. La source
est captée et conduite à Rome par un aqueduc de 16 kilo-
mètres, en grande partie souterrain; le volume qui arrive
aujourd'hui n'est évalué qu'à 65 mètres cubes par 24 heu-
res, tandis qu'originairement il devait être au moins
double.
108 ROLE DU CONTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET IMPERMÉABLES.
L'eau Felice^ à peu près l'ancienne Àlexandrina, provient
du captage de plusieurs sources, aussi à l*est de Rome, aux
environs de Colonna, au pied nord du grand volcan I^tial
et dans les mêmes terrains volcaniques, consistant en une
alternance de tufs et de laves.
Le niveau moyen de ces sources atteint 100 mètres d'alti-
tude; aussi l'eau arrive à la ville au niveau de 60 mètres en
entrant par la Porta Maggiore, où elle utilise plusieurs arcs
d'un ancien aqueduc *. Le volume d'eau n'est pas considé-
rable, environ 21 mètres cubes par 24 heures. Elle alimente
à Rome d'abord la fontaine du Mosi, la belle fontaine du
Quirinal, celle du Triton et passe enfin au Transtevere.
Les sources Vergine ou de Trevi et Felice contribuent à
l'alimentation des aqueducs modernes de Rome.
n en est de même de Teau Paola, qui provient du lac
Bracciano, c'est-à-dire aussi de roches volcaniques.
Quant à l'eau Marcia^ qui est conduite par quatre aque-
ducs •, elle est fournie par des roches calcaires de TApennin
et elle nous occupera plus loin.
Plus loin de Rome, le lac de Yico (Romagne) mérite aussi
d'être mentionné. Ce lac % bien qu'ayant un émissaire appelé
Rio Vicano, qui fait la richesse de la vallée le Ronciglione,
alimente un grand nombre de sources venant sourdre sur les
flancs des monts Gimino. Toutes celles de l'est vont, comme
celles du même côté du massif de Bolsena, se jeter dans le
Tibre à diverses hauteurs, tandis que celles des autres points
des deux massifs convergent, en forme de raquette, vers la
Marta, qui court à l'ouest se jeter dans la mer Tyrrhénienne,
entre Monte Alto et Corneto.
* L*aqueduc moderne de 33 kilomètres de longueur est l'œuvre du pape Fdice
Peretti, dit Sixte V, dont il porte le nom.
* 11 ne subsiste plus que quatre des dix aqueducs de la Rome antique.
* D'Armand. Eaux minérales de Vilerbe^ 1852» p. 9.
CONTACT Par des ACCIDENTS POSTÉRIEURS. 109
— Les sources sont fréquentes sur les confins des
massifs de roches éruptives, ainsi que dans ces roches
elles-mêmes, lorsque des masses de tuf y sont interstrati-
fiées. Ainsi Pallas Hill, comté de Limerick*, qui est composé
de mélaphyre carbonifère, avec quelques lits de tuf, est cé-
lèbre pour ses nombreuses sources, qui cependant ne sont
pas seulement dues aux lits de tuf subordonnés, mais dont
quelques-unes sont dues à des paraclases qui disloquent
et rejettent ces roches.
i^étérA^ie V — Quoique le Haut-Vogelsberg soit pauvre en
sources fortes et pérennes et qu'il y en ait un peu davantage
vers la partie basse, son sol est presque toujours humide. La
division du basalte en plaques ou en colonnes et sa nature
poreuse, ainsi que l'existence d'un sous-sol argileux résul-
tant de la décomposition des roches volcaniques, permet
aux eaux atmosphériques de s'étendre assez uniformément.
Plusieurs districts de sources sont décrits dans différentes
régions *.
Syrie) Sources dM Petit Jowdaln. — A BauiaS, l'uue dcS
grandes coulées basaltiques qui couvrent tout le Jaulan et
qui descend dans la vallée, contourne le pied du Jebel-es-
Scheikh et s'étale dans la plaine d'Arb-el-Huleh, en laissant
échapper des masses d'eau souterraines qui, après s'être
frayé un chemin sous cette coulée, vont sortir à Banias et à
Tell-el-Kadei : elles y sont connues sous le nom de sources
du Jourdain *. La source de Dan est souvent mentionnée
dans la Bible et dans Josèphe.
> D'après M. HuU.
* Tascbe. Géologie de Schotten, 1869.
* Page 16 de Touvrage précité.
* Lartet. ExplorcUion géologique de la mer Morte, p. 191, avec une llgtirc de cette
110 ROLE DU CONTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET IMPERilÊABLES.
Rejets accompagnant les failles
Par le rejet qu'elles ont produit, les paraclases ou failles
ont juxtaposé parfois des couches inperméables» qui établis-
sent alors un barrage; de là» un arrêt brusque de la nappe,
dont l'eau est contrainte de se déverser, avec un débit sou-
vent très fort.
Celte disposition doit être fréquente dans la nature ; mais
on ne peut le constater avec certitude que grâce à des cir-
constances assez exceptionnelles, par exemple, lors de l'exé-
cution de travaux souterrains.
Pour éviter des répétitions, nous placerons ici. parmi les
roches perméables, celles qui doivent cette qualité aux nom-
breuses fissures dont elles sont traversées et dont il sera
spécialement question plus loin.
EaTiroBs de Londeui '. — La faille qui passc au nord de
Loudun (Vienne), avec une direction Nord-Ouest à Sud-Est
(fig. 60), rompt subitement la continuité des couches
crayeuses, à la hauteur de Veniers, Claunay, Maulay et Nueil.
En interrompant le plan incliné régulier des étages super-
posés, à la manière d'un mur infranchissable, cette faille a,
entre autres résultats, celui de faire remonter leurs eaux sur
quelques points. C'est à cette circonstance que l'on peut at-
tribuer le volume qui est considérable de la fontaine de Son,
comparativement aux eaux fournies par le sol crayeux supé-
rieur ; car cette source émane très probablement des grès
source, pi. IIL — Danville prétend que les objets jetés dans le lac Phiala, situé att
milieu des coulées du Jaulan et qui parait être un ancien cratère, reparaissent à
Banias, aux sources apparentes du Jourdain.
* De Longuemar. Arrondissement de Loudun^ 1860.
CONTACT PAR DES ACCIDENTS POSTÉRIEURS.
111
verts abaissés et interrompus par les étages jurassiques, qui
les forcent à rejeter au dehors les eaux infiltrées dans leur
épaisseur, avec assez d'abondance pour faire tourner des
moulins, à peu de distance de leur origine ^
La même figure peut représenter la disposition du sous-
sol de Trois-Moustiers, vers lequel se dirige la même
faille. Toutefois c'est surtout l'oxford clay inférieur à Àm-
monites anceps qui constitue le sous-sol de la plaine entre
Ne
ECHELLE DES LONQEURS
S 9 A
0 KILOIETR»
ECHELLE DES HAUTEURS
-h-
f«H) ■tmis
— I
¥ïç. 60. — Coupe géologique du Loudunois, de la Dive i Loudun, montrant comment la nappe
d'eau du terrain crétacé est barrée par l'oxford clay, par suite d'une paraclase. B, calcaire
grossier de l'étage bathonien; K, calcaire marneux de l'étage kcUovien; 0, marne de l'oxt'ord
clay ; G, sable gris ferrugineux et marnes du terrain cénomanien ; C, craie grise et tuffeau.
— D'après M. Le Touxé de Longuemar.
Trois-Moustiers et la Dive, l'oxford clay supérieur faisant
défaut sur la rive gauche de la Maine *.
; Heta. — Pour bien préciser le rôle des failles,
nous allons décrire avec détail les conditions dans lesquelles
jaillissent, en Lorraine, les abondantes sources de Gorze.
* D'apr^ une communicalion personnelle de H. de Longuemar.
113 ROLE DU CONTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET IMPERMÉABLES.
Au sud-ouest de Metz *, le plateau oolithique est sillonné
par une faille qui, partant des environs d'Ars-sur-Moselle,
traverse la plaine de Geai, descend à Parfondval par un
vallon situé entre le bois de la Croix-Saint-Marc et celui
Eciltelle
Fig. 61. — Carte des environs de Gorze (Lorraine), montrant comment les belles sources SS de
celte localité jaillissenl de la grande paraclase PP dilo de Saint-Julien, qui traverse le pay^
— D'après M. le colonel Goulier.
des Chevaux, coupe le revers septentrional de la côte Mousa,
passe derrière Gorze (fig. 61) et se dirige de là, vers Saiiil-
Julien et Charey, par une dépression du sol que le relief de
la carte du Dépôt de la guerre met bien en évidence. C'est à
Gorze que l'accident parait avoir le plus d'amplitude.
* Jacquot. Descriptioti géologique du déparlemenl de la Mo9elUy 1868, p. 275.
CONTACT PAR DES ACCIDENTS POSTÉRIEURS. Ii5
Ce bourg est situé à la limite du lias avec Toolithe; à la
base de la côte Mousa qui le domine, et sur le revers opposé
delà vallée, on observe les calcaires gréseux qui constituent
les premières couches du groupe oolithique inférieur, tan-
dis que de l'autre côté de la côte, on voit des exploitations
dans le calcaire oolithique jaune, et qu*à peine engagé dans
le chemin de Mars-la-Tour, on constate la présence de Tas-
sise argilo-marneuse avec Ostrxa acuminatay 0. costata, Cly-
pem patellay placée à la base du second groupe de l'étage
supérieur.
La faille {fig. 62) a donc eu pour effet de rapprocher, à
Echelle des lon^urô
H * 1 • »
EcheHe des hauteure.
Fi^. 68. — Coupe montrant le rejet produit par la paraclasc qui, en abaissant dVnviron
60 mètres la paroi NO par rapport à la paroi SE, a fait buter le calcaire oolithique G^ contre
l'aii^ile liasique Ai (d'après M. le colonel Goulier). — L'échelle des hautews est 8 fois plus
grande que celle des bases.
Gorze, des bancs qui, dans leur situation normale, sont sé-
parés par toute l'épaisseur de l'étage inférieur de l'oolithe,
soit par 50 ou 60 mètres au moins.
L'accident est d'ailleurs très accusé dans le relief de la
contrée. Le revers septentrional de la côte Mousa, qui se
trouve sur la trace de la faille, est un véritable précipice.
L'écrasement du sol a, de plus, déterminé la formation, au
pied de cette côte, d'un certain nombre de vallons secs qui,
remontant dans des directions diverses, jusqu'au plateau,
8
114 ROLE DU CONTACT 1«S ROCHES PERMÉABLES ET IMPERMÉABLES.
figurent assez exactement une rupture étoilée. (Voir plus
hautfig. 61.)
L*hydrographie souterraine de la contrée est également en
rapport avec la faille de Gorze ; car c'est à cet accident qu'il
faut attribuer le jaillissement des magnifiques sources des
Bouillons et de Parfondval qui alimentent depuis environ
vingt-cinq ans la ville de Metz* où les Romains les avaient
déjà amenées par un aqueduc dont il reste d'imposants ves-
tiges. Le nouvel aqueduc est construit pour fournir à Metz
10 000 mètres cubes d'eau en vingt-quatre heures, volume
supérieur au débit des sources après les périodes de séche-
resse, mais inférieur de beaucoup à ce débit à la suite des
périodes pluvieuses. La constitution orographique et miné-
ralogique de leur bassin d'alimentation explique l'empla-
cement et le débit des sources.
Voici, d'après M. le colonel du génie Goulier, les condi-
tions qui ont déterminé leur jaillissement : Gorze est bâti
sur les deux côtés d'un ruisseau, auquel ces sources ont
donné naissance et qui, se dirigeant successivement vers
l'est, le sud-est, le sud et Test, conflue avec la Moselle en
face de Novéant, après un parcours de 6 kilomètres. La vallée
de Gorze, dans laquelle coule ce ruisseau, et trois autres
vallées qui se réunissent à elle près de son origine, sont en-
taillées dans un plateau, dont l'altitude moyenne est de
530 mètres, tandis que celle de la vallée de la Moselle, en face
de Novéant, est seulement 178 mètres.
De ces trois vallées tributaires de celle de Gorze, deux
viennent du Nord, presque parallèlement, séparées par une
arête qui, près de Gorze, se termine par le promontoire de
la côte Mousa. La vallée, située à Test, est appelée de Par-
fondval; on peut la suivre sur 11 kilomètres jusqu'à son
origine vers Vernéville. Celle de l'ouest est plus courte; son
origine est à 7 kilomètres de Gorze, vers Villers-aux-Bois.
(mikCl PAR DES ACCIDENTS POSTSRIEDRS. 115
Mais avec elle conflue, à un demi-kilomètre en avant de
Gorze, la troisième vallée qui vient de l'ouest et dont une
origine est près de Tronville, à 6 ou 7 kilomètres de son
confluent.
Ces trois vallées, la dernière surtout, ont avec évidence
les caîractères de vallées de fracture. Elles sont entaillées
dans des roches calcaires très fendillées et, par conséquent,
très perméables aux eaux pluviales. Aussi ont-elles des fonds
plats^ $ans eau. Et comme ce sont les voies d'émission natu-
relles de bassins perméables très étendus, il faut nécessai-
rement que les eaux d'infiltration y coulent souterrainement,
soit dans des canaux naturels, soit au milieu des gros débris
qui probablement remplissent lés crevasses origines de ces
Tallées.
Mais pourquoi ces eaux sourdent-elles près de Gorze pour
former le ruisseau qui les mène à ciel ouvert vers la Moselle,
au lieu de continuer leur marche souterraine en aval de
Gorze? En voici la cause : A quelques centaines de mètres au
nord de Gorze, passe la grande faille dite de Saint-Julien,
dont il vient d'être question, qui traverse tout l'ancien dépar-
tement de la Moselle dans la direction de l'E.-N.-E. a
rO.-S.-O. Toutes les couches de terrain ont subi, au nord-
ouest de cette faille, un abaissement considérable au-dessous
des positions qu'elles occupent au sud-est du même accident,
c'est-à-dire dans Gorze et dans la région traversée par sa
vallée. Près de Gorze même, la dénivellation est manifeste;
car on constate, à 1 kilomètre en amont de son débouché
dans la tallée de Gorze, que les pieds des berges de la vallée
de Parfondval sont entaillés dans des roches identiques à
celles qui couronnent la côte Mousa, à une centaine de mè-
tres au-dessus de la position qu'elles occupent dans le fond
de la vallée. Par suite de cette dénivellation, au nord-ouest
de la faille, les vallées sans eau sont découpées dans des
116 ROLE DU CONTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET DfPERNËABLES.
couches calcaires superposées à des couches marneuses pro-
fondément enfouies, tandis que les pieds des berges de la
vallée de Gorze sont entaillées dans ces couches marneuses
plus élevées, couches que Ton trouve encore à la base de la
côte Mousa et aux pieds des berges de la partie de la vallée
de Parfondval, située au sud-est de la faille. Ce sont ces mar-
nes qui , formant barrage pour les eaux souterraines des
couches calcaires déprimées, forcent ces eaux à sourdre à la
surface du sol près de ce barrage, pour s'épancher à travers
les échancrures formées par les vallées dans les couches mar-
neuses. Aussi les sources sont-elles toutes situées près de la
limite commune aux deux terrains, d'abord en amont de
Gorze où elles bouillonnaient dan3 un bassin appelé les
Bouillons, puis dans la vallée de Parfondval à 1 kilomètre en
amont de son confluent.
Quant au volume d'eau, fourni par ces sources, on s'en
rend aussi compte facilement, si l'on admet, comme cela est
probable, que les lignes de partage des eaux souterraines,
entre les diverses vallées, diffèrent peu de celles des eaux
superficielles. Dans ce cas, on peut prendre, pour la super-
ficie du bassin d'alimentation des sources, celle de la partie
du bassin de réception du ruisseau de Gorze qui est en
amont de ces sources, ou au moins celle qui est au
nord-ouest de la faille. Or celte dernière partie a une su-
perficie de 60 kilomètres carrés, divisée en deux portions
presque égales pour les Bouillons et les sources de Par-
fondval.
Pour avoir l'épaisseur de la couche de pluie capable d'ali-
menter annuellement les sources, il suffira de diviser leur
débit annuel par cette superficie. Si l'on admet le débit
moyen journalier de 10000 mètres cubes, pour lequel
l'aqueduc a été construit, le débit annuel sera 5 650 000
mètres cubes, et le quotient par 60 000 000 mètres carrés,
œNTAGT PAR DES ACCIDENTS POSTÉRIEURS. 117
donnera une hauteur d'eau de 6 centimètres : c'est environ
le dixième de la hauteur d*eau qui, année moyenne, tombe
à la surface du sol. On conçoit que cette fraction, un dixième,
puisse facilement s'infiltrer dans un sol fendillé, surtout à
la faveur de la couche spongieuse de débris végétaux existant
dans les bois, qui occupent une partie très notable du bassin.
Et Ton conçoit en même temps les grandes variations que
peut éprouver le débit des sources, à la suite de périodes im-
portantes de temps secs ou pluvieux.
i fireaebie. — Les sourccs ïioTi moius conuues
de Sassenage, aux environs immédiats de Grenoble, nous
Fontaine.
Hg. 63. — Disposition, en plan, de la faille de Sassenage qui donne lieu à la source, eu faisan
buter la craie blanche à beleroni telles Ce conti-e les couches argileuses de l'ui^gonicn Cu. —
Q amas glaciaire. — D'après M. Lory.
montrent un autre exemple des rôles des failles dans le ré-
gime des eaux souterraines.
Comme l'a bien montré M. Lory S la craie à silex bule
contre les marnes à spatangues du terrain néocomien et il
est évident que c'est de cette fracture intérieure que jaillis-
sent les sources (fig. 63 et 64).
' Excursion géologique à Sauenage^ Grenoble, 1858.
il 8 ROLE DU CONTACT DES ROCHES PEkMÉARLES ET IMPERMÉARLES.
Les variations de volume de ces sources, les époques et
les durées de leurs crues sont complètement indépendantes
de celles de la rivière du Furon, à laquelle elles viennent se
joindre. On ne saurait donc considérer ces sources, ainsi
qu'on Ta fait quelquefois, comme provenant d'une dérivation
souterraine d'une partie des eaux du Furon, en quelque
point des gorges d'Engins. Mais si l'on suit avec attention la
trace de la faille, dont il vient d'être question, on voit que
cette fracture du sol se continue vers le sud-ouest, puis du
sud-sud-ouest. Elle passe ainsi à mi-côte sur le versant occi-
dental de la montagne, dans une direction à peu près parai-
NNO. BSE.
Giirgcsd*En^ns. PktoaudeSfWticr. ^
faine locale ^ ■ ^
dea Sroites de$9êêmiége.
Echelle,
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Fig. 6i. — Coupe verticale perpendiculaire é la faille de Sassena^e qui donne lieu à la source S
en rnisanl buter la craie blanche à belcmnitcllest, Ca contre les couches marneuses de l'ur-
gonicn U (d'après M. Lory).
lèle à celle du Furon- L'existence de la faille se manifeste
ici par son caractère géologique, par la discontinuité et
le défaut de correspondance des couches du sol, des deux
côtés de cette ligne; elle tend du reste à devenir de moins
en moins marquée et paraît cesser complètement à environ
2 kilomètres de Sassenage.
Malgré sa faible longueur, cette fracture est évidemment
la tranchée naturelle où se rassemblent les eaux qui forment
les sources. En effet, la montagne de Sassenage se termine
supérieurement par un large plateau qui s'étend vers le sud
jusqu'au village de Saint-Nizier ; le sol de ce plateau, couvert
d'une grande quantité de blocs erratiques des grandes Alpes,
CONTiCT PAR DES ACCIDENTS POSTÉRIEURS. i19
est formé, soit par les couches fendillées de la craie à silex,
soit par un dépôt de molasse et de poudingues tertiaires
qui les recouvre à Saint-Nizier. Ce sol, éminemment per-
méable, boit les eaux pluviales; et l'inflexion des couches,
qui forment, sous Saint-Nizier, une gouttière concave dans
la direction même de la faille supposée prolongée, concentre
naturellement ses eaux à l'origine de cette fracture. Elles
s'y engouffrent, la suivent, descendent à mesure qu'elle
s'approfondit et arrivent ainsi au niveau des grottes. A ce
niveau, le calcaire néocomien supérieur, qui forme le bord
oriental de la faille, repose sur les marnes à spatangues,
première assise de l'étage néocomien inférieur, couches peu
consistantes qui ont dû s'ébouler dans la faille et y former
un fond marneux impénétrable. Dès lors les eaux arrêtées
dans leur chute se sont frayé des passages à travers les
roches fendillées de la craie, formant l'autre bord de la
faille : de là l'ouverture des grottes, sorte de robinet latéral,
par lequel jaillissent les eaux amassées dans la faille et rete-
nues inférieurement au niveau des marnes néocomiennes.
imfirabca, AMtrtche. — La belle sourcc de Rohr-
bach im Graben, près Vienne (fig. 65), est un exemple re-
Fig. &. — > Jaxtaposition da calcaire C aux schistes de Verfcn (triasiques) et è d'autres couche
imperméables, d'où résulte le jaillissement de la source S du Rohrbach im Graben. (D'apr6s
M. Karrer).
marquable de ce type. Une faille dirigée à peu près de
l'ouest à Test et connue sur une longueur de 11 kilomètres
120 ROLE DU CONTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET IMPERMËABLES.
au moins, fait buter en ce point les couches imperméables
des schistes de Verfen (triasiques) contre le calcaire, d*où il
jaillit de nombreuses sources, entre autres celle du Rohrbach.
— Dans le Lancashire, lorsqu'une faille a
juxtaposé des couches imperméables, comme les marnes du
kcuper ou du terrain houiller, au grès bigarré, la quantité
d'eau accumulée sur l'une des parois de cette faille peut
être très considérable et donner naissance à une source.
Le puits de Flaybrick-Hill, près Birkenhead, fait également
ressortir cette disposition ; un tunnel poussé du fond de ce
puits, à la profondeur d'environ 50 mètres, a coupé à la
distance de 10 mètres une faille, d'où l'eau coulait avec une
telle impétuosité que le débit de 1820 mètres cubes par jour
fut immédiatement doublé.
Derbyahire. — De uonibrcuses faiUcs dirigées est-ouest et
remarquables par leur parallélisme coupent le calcaire car-
bonifère du Derbyshire et leur direction commune coïncide
avec le plongement moyen des couches.
D'après M. Hopkins, toutes les fortes sources de cette ré-
gion sont en rapport avec les grandes failles; l'auteur ne
connaît pas une seule exception a cette règle et, partout ou
il observait une source puissante, il acquérait la certitude
d'une grande faille. L'eau généralement partait de la surface
supérieure du toadstone qu'elle ne peut traverser et l'étude
attentive des conditions dans lesquelles jaillissent ces sour-
ces confirme bien l'interstratification des couches de toad-
stone au milieu des couches calcaires.
La Bourboiile (Pay-de-Ddme). — LcS SOUrCCS thcrmalcS si
* Hull. Géologie des cnviron$ de Prescol,
CONTACT PAR DES ACCIDENTS POSTÉRIEURS.
121
connues de la Bourboule (Puy-de-Dôme) jaillissent d'une
grande faille qui traverse le granité et plonge de 60 à
70 degrés vers le sud-est et forme les rochers contre lesquels
est adossé le village de la Bourboule (fig. 66). Elle parait
plus ancienne que les tufs trachj tiques ou rhyolithiques du
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Fi^. 66. — Coupe montrant la situation des eaux thermales de la Bourboule aux abords de la
faille qui fait buler contre le granité massif G le tuf trachytique dur Ti. le tuf lamelleux très
dur Tf, le luf plastique Tp et le granité fragmentaire, appelé tuf granitique par les maîtres
sondeurs. — Echelle de ^^. — D'après M. Bonnefoy.
voisinage, qui sont venus recouvrir le granité au pied de
son affleurement.
Une série de sondages a fait reconnaître que Teau ther-
male, venant de la profondeur par la faille, se ramifie, bien
avant d'arriver à Taffleurement de cette faille, dans un sys-
tème des nombreuses cassures du granité bréchiforme qui
122 ROLE DU CONTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET IMPERMÉABLES
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COIITÂCT PAR DES ACCIDENTS POSTÉRIEURS. 123
existe au toit de la faille. Les maîtres sondeurs ont désigné
sous le nom de grés ou de tuf granitique cette brèche,
dans laquelle les eaux coulent en abondance et se répan-
dent jusqu'à une assez grande distance de la faille. En
cheminant à travers cette partie extrêmement fissurée de
la roche granitique l'eau atteint la base d'une couche argi-
leuse imperméable dite tuf plastique. Au-dessus du tuf
plastique se présentent d'autres tufs plus ou moins per-
méables, dans lesquels les eaux minérales pénètrent, soit
en montant par la faille, soit en traversant, par quelques
fentes, les bancs imperméables. I)e là, quelques nappes dites
secondaires ou superficielles, d'ailleurs très discontinues.
Autrefois, l'eau thermale s'élevait jusqu'au jour entre le
granité et le tuf granitique, en alimentant plusieurs sources
situées près de l'affleurement de la faille. Mais ces sources
ont disparu, lorsque, par le forage de puits, on a réussi à
produire un appel sur les nappes souterraines, dont aucune
n'est jaillissante. La carte (fig. 67), a été exécutée par l'in-
génieur des mines Bonnefoy, dont le dévouement au devoir
a amené la fin prématurée.
Stelle t Sdafani, Païenne, Mjongj et Aleara \ — La SOUrCC
thermale sulfureuse des bains de Sclafani en Sicile, au nord-
ouest du groupe des Madonies, dont la surface est de 2 kilo-
mètres carrés, sort au pied septentrional de la montagne
de Sclafani (fig. 68). Celle-ci est constituée par des dolomies
triasiques, avec des calcaires du lias et de l'éocène, roches
assez perméables; mais elle est enveloppée à la base méri-
dionale par les argiles écailleuses bigarrées de Féocène
moyen, et au nord, par les argiles du cénomanien tout aussi
imperméables. De ce côté nord^ il y a de plus une faille qui
^ D*après une obligeante communication de M. Giordano.
134 ROLE DU CONTACT DES ROCHES PERMÉABLES ET IMPERMÉABLES.
livre passage à la source, dont le point d'émission est ce-
N SCLKfANI (auTte) S
Echelle
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•M •» tB»!
■ ^
1 — ^J 1 1 1
Fig. 68. — Coupe montrant comment la source thermale de Sclafani jaillit d'une faille, (disant
buter des roches perméables contre des roches imperméables. T*, dolomiedu trias; L, cal-
caire du lias ; G«. argiles écailleuses de l'étage cénomanien ; Ce, calcaire de l'étage créUcc
moyen ; E, calcaire nummulitique (éocëne inférieur) ; E., argiles bigarrées écailleuses (éocènc
moyen); I, terrain imperméable; NN, niveau de la nappe; S, source. D'après une communi-
cation manuscrite de M. Giordano.
pendant déterminé par le niveau de la bande d'argiles im-
perméables entourant la montagne.
La Sicile présente plusieurs autres exemples de formations
0. e;
M^Cucci oViflwJ
Bocca ài Falco
Echelle des Lanceurs
kkil.
A.
Echelle des Hauteurs
>■ ajpo loooM
r— »— I — ■ ■ I ' I I I I t
Fig. 69. — Coupe montrant le gisement des sources qui alimentent Palerrae. I. terrain imper-
méable; Ta. dolomie du trias; L, calcaire du lias; A«, argile écailleuse juxtaposée à celle
dolomic, par suite d'une faille; S, source alimentée par la nappe d*eau NN. —D'après
une communication manuscrite de M. Giordano.
perméables entourées d'une bande imperméable, qui don-
nent aussi naissance à des sources.
CONTACT PAR DES ACCIDENTS POSTÉRIEURS.
125
La source Gabriele, à Bocca-di-Falco, qui contribue pour
25 litres par seconde» ou 2160 mètres cubes par 24 heures,
à ralimentalion de la ville et de la plaine de Palerme, qui
tire d'une vingtaine de sources un débit total d'environ
550 litres par seconde.
L'eau sort de la formation des dolomies spongieuses
(fig. 69) constituant le mont Cuccio, formation entourée jus-
qu'à un certain niveau par une bande d'argiles écailleuses
eocènes qui sont imperméables. La surface totale de dolomie
enfermée dans ladite bande est d'environ 150 kilomètres
carrés.
11 est un autre exemple près des villes de Longiei d'i/cara
au nord-est de la Sicile, près de Patte. Le vaste plateau qui
^^ÏLM°P^^^
M*' CTrasLo
Echelle
4-
X
J
kil.
Fig. 70. — Coupe des montagncK calcaires (Je lu piuviiice uc Mv.!>^i..c, iiiuu|uj..i la u.j»|'U$ilioii
des loorces de LoDgi et d'Alcara. I, phyllade silurien inférieur ; Ta, dolomie du trias; L, cal-
caire du lias; A*, argiles écailleuses (éocéne inférieur); NN, niveau aquifére donnant nais-
sance au sources S d'Alcara et S' de Longi. — D'après une communication manuscrite de
M. Giordano.
sépare les deux villes est formé par un grand noyau de phyl-
lades en schistes anciens, entouré et recouvert de dolomie
triasique et de calcaire liasique perméable.
Ce dernier massif est recouvert ou entouré d'argiles
éocènes imperméables, du côté est (Longi) jusqu'à 800 mètres
d'altitude, et du côté ouest (Alcara) jusqu'à 400 mètres seule-
ment.
Deux groupes de sources paraissent en ces deux points;
iS5 MU DU (MITACT UE8 ROCHES PCRtfABUS R inmiIÉA^
les sources plus élevées de Test débitant seulement 40 litres
environ par seconde, tandis que celles de Fouest, plus basses,
débitent 100 litres.
Les intercalations de filons métallifères et de roches énip-
tives ou cristallines, pourvu qu'elles soient imperméables,
peuvent produire des barrages, du même genre que les
rejets déterminés par des failles et qui viennent de nous
occuper.
On sait que le quartz et d*autres rocbes s'élèvent souvent
aux travers de terrains variés, sous la forme de puissants
filons. Au point de vue de rbydrognosie souterraine, ce sont
des barrages naturels qui retiennent les eaux d'infiltration.
Leurs salbandes du toit, souvent argileuses, peuvent donner
lieu à des nappes aquifères verticales, de même que les
failles.
Le même phénomène se produit encore, lorsque la roche
intercalée, au lieu de constituer un mur à faces parallèles, se
présente en pointements irréguliers.
Aipe 4« wwtendKsrff. — Les platcaux de TAlpe du Wur-
temberg en présentent des exemples, dans les parties où les
couches jurassiques sont traversées par des pointements de
basalte.
D'après M. le comte de Mandelslohe *, ces masses se pré-
sentent, soit comme des cônes isolés sur le versant nord-
ouest de la chaîne, soit comme des filons qui se montrent
au jour dans les vallées transversales, ou qui ont percé le
> Mémoire de la Société (thiHoire naturelle de Strasbourg, U II, p. 36 et 37,
1835.
CONTACT PAR DES ACCIDENTS POSTÉRIEURS. i37
plateau même et s'y étendent sous forme de bandes étroites.
Les cônes basaltiques montrent ordinairement à leur pied
l'oolithe inférieure et le lias» en couches horizontales et nul-
lement dérangées ; la partie supérieure de la montagne est
seule composée de basalte et de tuf. Les conglomérats basal-
tiques sont beaucoup plus répandus que le basalte lui-même,
lequel y forme quelquefois des filons.
Le plateau de TAlpe est généralement privé d'eau. Il est
cependant des villages qui font exception à cette r^le et qui
sont pourvus d'eaux abondantes. Presque tous doivent cet
avantage aux roches basaltiques, qui provoquent le jaillisse-
ment de sources. Sur l'un des points les plus élevés del'Alpe,
au Sternenberg, on admet que les filons de conglomérat
basaltique qui traversent les masses poreuses du coral-rag,
s'opposent à l'écoulement des eaux atmosphériques et les
forcent ainsi à reparaître au jour, ou du moins de se ras-
sembler dans des puits qui ne tarissent jamais. <c Ce phéno-
mène se reproduit d'une manière si constante sur toute
rétendue de l'Alpe que bien des fois, dit M. de Mandelslohe,
lorsqu'on me citait une source qui ne tarissait jamais, j'en
concluais, sans avoir été sur les lieux, l'existence du terrain
basaltique, et je ne me suis trompé que rarement. » Le n^.m
de Wa$$er8tein que les habitants lui ont donné est caracté-
ristique.
La raison de ce fait paraît être que les roches voisines
de la surface sont fissurées et absorbent Teau, qui est rete-
nue par les masses inférieures. Cela est particulièrement
vrai quand ces roches sont montées de la profondeur. Lors-
que ces lieux sont dans des dépressions comme à Zainingen,
Wurlingen, Wittlingen, Sternenbrunnen, il en résulte des
sources qui ne tarissent jamais. Il faut ajouter que dans
rintérieur de l'Alpe, les couches calcaires renferment une
grande quantité de cavités en communication les unes avec
128 ROLE DU CONTACT DES ROCHES PERMÉiBLES ET INPERIIÉÀBLES.
les autres qui servent de réservoir. Elles se remplissent dans
les années humides, lorsque l'orifice d'écoulement inférieur
est trop étroit pour permettre l'écoulement total'.
iriwi4e. — Les calcaires carbonifères de l'Irlande sont
plus ou moins perméables, et particulièrement le Feneslella
limestone que l'eau traverse rapidement, sans revenir à la
surface, excepté près des affleurements des nappes basalti-
ques. De même quelques couches de schiste qui traversent
la masse arrêtent invariablement l'eau et la ramènent à la
surface*.
et Terds (LuidcNi), Ho«tpcsat (Ardéelie), €4Me d'BMcy
(Hcwtiieet-HoMne). — Quaud OU arrive à Dax, département
des Landes, après avoir traversé des plaines formées par des
couches tertiaires horizontales et à peine accidentées, il y a
lieu d'être surpris de se trouver en présence d'une sorte de
rivière d'eau chaude, jaillissant du milieu de la ville, qui
lui doit sans doute son origine. Cette belle source, aujour-
d'hui utilisée de nouveau, parait avoir été largement mise à
profit par les Romains. L'explication de sa présence se trouve
dans la petite colline dite Pouy-d'Euse qui avoisine la ville
et qui est formée de diorite (ophite). Peut-être est-ce un
mécanisme du même genre qui donne naissance à la source
thermale de Tercis (Landes) située près de l'ophite, aux
deux sources très volumineuses sortant du basalte à Monl-
pezat (Ardèche), et à la belle source située au sommet ba-
saltique de la côte d'Essey (Meurthe).
* Quenstedt. Explication de la carte géologique tTUrach^ 1869.
* D*aprës H. HuU.
CHAPITRE IV
ROLE DES LITHOCLASES DE DIVERS ORDRES
GÉNÉRALITÉS
Quand on examine attentivement les dispositions indéfi-
niment variées par lesquelles les lithoclases déterminent et
dirigent la circulation des eaux souterraines, on est obligé
de reconnaître qu'une classification rationnelle de ces méca-
nismes est très difficile, sinon impossible, surtout si Ton
tient compte de l'impuissance où se trouve l'observateur de
suivre ces dispositions jusqu'à une grande profondeur. Aussi
s'est-on borné à grouper les faits caractéristiques signalés
dans ce chapitre, suivant les terrains et étages géologiques
auxquels ils appartiennent. Il ne faut donc pas s'étonner de
trouver ensemble des exemples de nature assez différente,
qu'au premier abord on serait tenté de disjoindre. Ainsi, à
côté de réseaux de cassures qui coupent certains étages des
terrains stratifiés et y établissent des couches aquifères plus
ou moins continues, comme on le voit dans la craie, les cal-
caires jurassiques et le grès bigarré, il en est qui donnent
naissance à des sources isolées et apportées souvent de pro-
fondeurs considérables : c'est ce qu'indique leur thermalilé;
9
idO ROLE DES LITHOCLiSES DE DIVERS ORDRES.
par exemple, à Plombières, Bourbonne-les-Bains, Wilbad,
Garlsbad. Quelquefois, comme à Ems et Âix-la-Ghapelle, les
cassures ont été ouvertes sur des plis très prononcés.
Les considérations générales placées à la suite de ce tra-
vail feront mieux ressortir les différences auxquelles est sou-
mis le régime des eaux souterraines.
Lilhoclase$ et particulièrement diacla$e$.
Uans le plus grand nombre des cas, la circulation souter-
raine des eaux se lie à la disposition des cassures de divers
ordres qui leur servent de canaux à travers les roches. 11
convient donc avant tout de se faire une idée nette de ces
dernières, ce qui oblige à entrer dans certains détails.
Considérées dans leur ensemble les innombrables cassures
ou lithoclases qui traversent l'écorce terrestre, dans toutes
ses parties, peuvent se grouper en trois grandes classes,
auxquelles conviennent les noms de leptoclasesy de diaclam
et de paracla$es.
V i^cvioéiMM. — Sous le nom de leptoclases', on coin-'
prend toutes les cassures qui sont de dimensions faibles,
dans les deux sens ou au moins dans un. Elles débitent
l'écorce terrestre en menus fragments.
Synclase$. — Parfois elles rappellent une régularité géo-
métrique et donnent lieu, par exemple, aux prismes des ba-
saltes, des trachytes, des porphyres, etc., ainsi qu'à ceux de
certains gypses et aux polyèdres des argiles et des limons
desséchés. Quelle que soit la hauteur des colonnades basal-
tiques et autres, le nom de leptoclase peut leur être appli-
* De >c:trof, menu» ténu; el xJixu, briser, diviser.
GÉNÉRALITÉS. 131
que, parce que leur grande dimension ne s*élend que dans
un seul sens. Parfois elles sont irrégulières.
Dans ces diverses circonstances, les cassures sont dues à
des actions intérieures ou moléculaires, généralement à un
retrait, qui a pour cause, tantôt le refroidissement, tantôt la
dessiccation.
Le nom de synclase* rappelle bien cette origine par retrait
ou contraction.
Piàoclases. — Le plus souvent les leptoclases sont sans
aucune régularité apparente. •
Elles deviennent particulièrement fréquentes à proximité
de la surface du sol et s'entre-croisent en tous sens, comme
on le voit dans le som-sol qui est immédiatement recouvert
par la terre végétale et cela, dans des roches de toutes
sortes, calcaire, grès, quartzite, schiste, granité, gneiss, ba-
salte, etc.
Très fréquemment, elles partagent la roche en fragments
si menus qu'il est fort difficile d'y obtenir une cassure
fraîche-
Cette sorte de pulvérisation ou de concassement naturel
des roches, qui a si puissamment favorisé les érosions n'est
pas exclusive aux régions superficielles.
Les alternatives de gelée et de dégel, en faisant éclater
les pierres, ne font souvent que rendre manifestes des lep-
toclases qui y existaient déjà à l'état latent.
D'innombrables leptoclases ressortent non moins claire-
ment dans les réseaux de petites veines, planes ou courbes,
concrétées à l'intérieur des roches ; par exemple sous forme
de calcite dans les marbres veinés, dans les ophicalcs; de
' De 9V9 qui ne veut pas seulement dire avec, mais qui désigne aussi une action
complexe et simultanée, teUe que la contraction, de même qu'eu latin la proposition
cum danr contrahere.
idâ ROLE DES LITHOGLiSES DE DIVERS ORDRES.
quartz, dans les quartziles ou les phyllades; de minerais
métalliques» au voisinage de nombreux gites métallifères.
Dans des roches de nature variée, les leptoclases s'accu-
sent encore par des surfaces polies et striées {Slicken$ide$,
Quet$chflaeche)j parfois accompagnés d'une structure fibreuse
comparable à celle du bois. La craie en fournit beaucoup
d'exemples. Ues surfaces polies et striées toutes semblables
sont aussi bien connues dans la houille, le lignite, les cal-
caires, les grès, les argiles (particulièrement les argile sca-
gliosede l'Italie), les schistes, les minerais de fer, la serpen-
tine, le silicate hydraté de nickel et de magnésie, désigné
sous le nom de noumeïte; dans les météorites sporadosidères
du type de Chantonnay et les syssidères du type d'Atacama.
Ces surfaces frottées sont des effets de glissements internes,
que l'expérience imite complètement.
Le craquelé du marbre ruiniforme de Florence accuse
aussi des glissements, ainsi que le craquelé cuboïde de la mé-
téorite holosidère de Sainte-Catherine.
Les leptoclases, lors des frottements et des rejets dont il
vient d'être question, et dans bien d'autres cas beaucoup
plus ordinaires où ces effets ne se manifestent pas, résultent,
comme les deux autres grandes catégories de lithoclases,
non plus d'actions intérieures comme les synclases, mais
d'efforts mécaniques extérieurs, tassements ou autres, qui
ont produit des pressions; d'où le nom de pié$ocla9e^ peut
leur être appliqué.
La division en parallélipipédes alignés parallèlement, au
milieu de divisions irrégulières, est l'un des caractères
auxquels on pourra distinguer les piésoclases des synclases.
■. — Parmi les cassures qui traversent en tous
' De icicÇci), presser ou comprimer (au futur nitaw), et xXaw, briser.
GÉNÉRALITÉS.
135
sens l'écorce terrestre, la catégorie la plus nombreuse, dési-
gnée sous le nom de diaclases, est la moins connue dans ses
caractères généraux. Dans les traités de géologie, si elles ne
sont pas passées sous silence, elles sont considérées seule-
ment dans quelques cas tout à fait particuliers et complète-
ment méconnues dans leur origine. Cependant elles traver-
sent les terrains et les roches les plus diverses.
C'est surtout dans les terrains stratifiés que leurs carac-
tères ressortent clairement, à cause des couches diverses à
travers lesquelles elles se sont propagées.
Leurs caractères, souvent d'une régularité géométrique, se
décèlent, lorsqu'au lieu d'en considérer quelques-unes, on les
suit dans leur ensemble et sur des étendues suffisantes. Mais
Fig. 69. — Plan du front de taille d'une carrière du calcaire grossier à Arcueil.
cette régularité n'existe pas toujours et fait souvent place à une
irrégularité apparente, dont on verra plus loin l'explication.
Parmi les géologues auxquels on est redevable de notions
exactes sur les cassures que nous groupons sous le nom de
diaclases, on doit citer tout particulièrement : Sedgwick
(1821 et 1835), de la Bêche (1858), John Phillips (1857 à
1839), Thurmann (1857), Ilarkness (1858), Haughton (1858),
Jukes(1862), William King (1876).
L'allure des diaclases a été étudiée dans les terrains ter-
154
ROLE DES LITHOGLASES DE DIVERS ORDRES.
tiaires, aux environs de Paris (fig. 69 et 70) et de Fontaine-
bleau, dans la mollasse suisse; dans le terrain crétacé, sur
les falaises de la Normandie, aux environs du Tréport, de
Fig. 70. — Vue du front de taille d'une carrière de calcaire grossier à Arcueil.
Dieppe et d'Etretat (fig. 71), dans le département de TAisnc,
le quadersandstein de la Saxe et de la Bohême et celui de la
Fig. 71. — Vue des falaises d'Etretat montrant les diar.lases qui les coupent sur toute leur
hauteur et qui sont souvent rectangulaires entre elles.
Westphalie, qui se rapporte à l'étage du gault et du néoco-
mien (fig. 72 et 73), — dans le terrain jurassique, dans la
chaîne du Jura et de toutes parts (fig. 74) — dans le trias et
GÉNÉRALITÉS.
135
surtout dans le grès des Vosges, où elles donnent lieu à des
rochers, souvent très accidentés et très pittoresques, comme
dans le pays de Daun (Palatinat), — dans le terrain houiller
pour lequel la régularité des diaclases est particulièrement
frappante, dans le pays de Galles, — dans le calcaire carbo-
nifère, pour des localités d'Irlande que M. Harkness a ren-
dues classiques, — dans les terrains dévonien et silurien, où
Fig. 72. — Vue d'une partie des l'ocbcs dites Exiemêleine près Horn, montrant la disposition
des diaclases à pou près rectangulaires entre elles qui y coupent des courbes de grès crétacé.
les exploitants d'ardoises les ont déterminées avec la plus
grande exactitude*, — dans le gneiss-granite des Alpes, par
exemple au pied du Bietschhorn, — en dehors des terrains
stratifiés dans le granité, en Cornwall (Carglaze, Mont Saint-
Michel), aux environs de Carlsbad (Scharcher Klippe), etc.
Dans tous les terrains, les diaclases, par leurs intersec-
* Géologie expérimentale, p. 534 et 335.
io6
ROLE DES LITHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
lions mutuelles, délimitent des polyèdres, tantôt réguliers,
tantôt irréguliers.
Très souvent les diaclases ont reçu des incrustations mi-
nérales, pierreuses ou métalliques, qui par leur contraste
avec la roche elle-même, les font parfaitement ressortir.
Comme exemple d'incrustations métalliques on peut citer
les diaclases métallifères du Laurium et surtout celle du
Fig. 73. — Vue d'une partie des roches dites Extertuteine près Horn, montrant la disposition
des diaclases à peu près rectangulaires entre elles, qui y coupent des couches de grès crétacé
Wisconsin (États-Unis), si bien décrites par M. Whitney et
où on exploite le plomb; elles constituent deux systèmes rec-
tangulaires entre eux.
Diverses études ont appris que les diaclases s'étendent,
avec des formes que l'on peut considérer comme planes,
très souvent sur plus de 100 mètres dans le sens horizontal.
En outre elles peuvent conserver la même orientation
moyenne sur des distances de plusieurs dizaines de kilo-
mètres et au delà.
GÉNÉRALITÉS.
157
Cette persislance se maintient au travers de roches de
nature et d'origine différentes; de La Bêche a par exemple
reconnu que les diaclases, qui coupent sur de grandes éten-
dues le granité du Cornouailles, ne subissent pas de dévia-
tion notable en passant dans la serpentine.
D'après John Phillips dans tous les bassins houillers du
sud de l'Angleterre, la direction du t cleat » ou « face » est
Fig. 7-i. — Vue d'un escarpement avoisinant Solutré (Saône-et-Loire), montrant une disposition
très fréquente des diaclases dans les couches calcaires.
environ N.O.-S.E., quels que soient la direction et le pion-
gement des couches.
Dans le sens vertical, les diaclases, par milliers, coupent
perpendiculairement des séries de couches très épaisses.
C'est ainsi qu'on les voit traverser les couches crétacées des
falaises de Normandie, sur plus de cent mètres et, sur plu-
sieurs centaines de mètres, les roches de maintes localités
des Alpes, par exemple dans la vallée de Zermatt, notam-
ment près de Stalden. Des diaclases rectangulaires entre
elles tranchent le grès crétacé des Pyrénées espagnoles,
i38
ROLE DE8 LITHOGLASES DE DIVERS ORDRES. .
dans le massif calcaire da Mont-Perdu, sur plus de 450 mè-
tres de hauteur, comme l'a reconnu H. Schrader sur une
longueur de 1200 mètres, dans le cirque imposant du Cota-
tuero, contre-partie de celui de Gavarnie (fig. 75). De même
dans le Colorado, d'épaisses couches de grès sont découpées
de la même manière, par de grandes diaclases que représen-
tent très clairement les belles photographies de M. Whealer.
GÉNÉRALITÉS. 139
Elles ont une tendance à se grouper parallèlement entre
elles, en systèmes, au nombre de deux ou de plusieurs, el
parfois rectangulaires entre eux, comme le montrent plu-
sieurs des figures précédentes. L'un des systèmes est souvent
tout à fait prédominant.
Les accidents des parois ne sont pas les mêmes dans les
deux systèmes, ainsi que Thurmann Ta remarqué dans le
fura. . . '
Quant à ia distance mutuelle des diverses diaclases d'un
même système*, elle est variable. Aux environs de Paris, elle
est ordinalreraeiit comprise entre 1 à 5 mètres, et rarement
elle excède 40 à 45 mètres. Ainsi les couches horizontales
sont découpées en tranchés verticales qui, par leur épais-
seur et leur régularité, sont parfois comparables aux couches
elles-mêmes, aii point de pouvoir être confondues avec elles.
Souvent la roche paraît ainsi comme laminée.
Ceci explique les passages fréquents de la structure dé-
terminée par de' telles diaclaseà avec le feuilleté propre-
ment dit. Toutefois il y à cette différence que. dans la struc-
ture feuilletée, le clivage se manifeste à des distances à
peine sensibles, tandis que les joints restent écartés les uns
des autres.
Quant a l'oi^igine des diaclases, elle a été généralement
assimilée à celle des formes prismatiques des basaltes, et
par conséquent, attribuée à un retrait.
D'un autre côté, leur tégularîté presque géométrique, si
fréquente dans les calcaires, les phyllades^ le granité, etc., a
conduit à supposer qu'eUe résulte d'une force cristalline, et
on a cherché à rapprocher les angles des fragments naturels
de ceux des cristaux de calcite et de feldspath ^
Ces analogies ne sont pas motivées, quoique la nature des
> llarkness. 1850,
i40 ROLE DES LITUOCLASES DE DIVERS ORDRES.
roches influe sur le nombre et la nature des diaclases qui
les traversent.
Lorsqu'une observation plus atteutivc eut fait reconnaître
que les diaclases se poursuivent sur de grandes étendues,
avec une direction à peu près constante, et cela, même au
travers de roches tout à fait différentes les unes des autres,
on chercha à les rattacher à des actions physiques se pro-
duisant dans Técorce terrestre. Pour de La Bêche, c'était une
action polaire, telle que celle dont on faisait alors dériver le
feuilleté. Pour Thurmann, qui en fit une étude des plus ap-
profondies, « elles ne peuvent être attribuées qu'au retrait
par l'action de la température interne^ t Pour M. William
King% c'est une action polaire résultant du magnétisme ter-
restre.
Cependant, l'intervention des actions mécaniques avait
été entrevue par John Phillips; à la suite de ses études clas-
siques sur le Yorkshire.
Cette conclusion ne peut plus faire de doute, surtout de-
puis qu'elle s'appuie sur des résultats d'expériences.
Ainsi qu'on vient de le voir, leurs formes et leurs allures,
tout aussi bien que celles des failles, expriment des rup*
tures dues à des actions externes.
Il n'est pas douteux que tous ces réseaux de diaclases, à
mailles si multiples et si serrées, ne résultent d'actions mé-
caniques qui ont agi sur les couches depuis leur consolida-
tion complète. Elles sont bien de la famille des cassures de
grande dimension, désignées sous le nom de failles ou de
paraclases, dont il va être question.
C'est ce qui a conduit à essayer de les reproduire par
^ Essai d'orographie jurassique. Mémoire de rinstitut national génevoiê, t. IV, p. 63.
i857.
* Superindoced divisional structure of rocks caUed jointing and its relations to slaly
cleavage. Transaetiont of the royal iriah Academy, t. XXV. 1873.
GÉNÉRiLlTÊS.
141
des actions mécaniques très simples de pression ou de
torsion telles qu*il a dû s'en produire fréquemment dans la
nature :
La ressemblance des réseaux de cassures naturelles avec
les réseaux de cassures que Texpérimentation produit est
Fig. 76. — Disposition d'une lame de glace destinée à subir la rupture par torsion. — GG, plaque
déglace; EE, étau qui maintient l'extrémité fixe; TT, tourne à gauche dans lequel est
maintenue l'autre extrémité de la glace. — Échelle de 7. — On aperçoit le double système
6
de fissures dont la glace est comme hachée.
manifeste. Sans revenir sur des détails qui figurent ailleurs*,
je rappellerai seulement deux résultats, Tun obtenu par
torsion, l'autre par pression.
Une très faible torsion exercée sur une lame de glace y
détermine un double système de fissures, présentant nette-
ment le caractère de parallélisme, caractéristique des cassures
^ Géologie expérimentale, p. 289 et suivantes.
us
ROLE DES LITHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
naturelles, et de plus, le groupement suivant deux directions
à peu près orthogonales, système de fissures comparable à
ceux qui traversent beaucoup de roches (fig. 76).
D'un autre côté, la pression exercée, à l'aide de la presse
Fig. 77. -~ Prisme de cire à mouler» soumis à raclion de la presse hydrauUquCf suivant le seiu
Tertical. BB, plaques de pression en fer, de même section que le prisme ; FF, Tentes princi-
pales avec rejet ; ff, fentes conjuguées avec la précédente; RR, réseau de Assures fines à peu
près rectangulaires entre elles, développées sur les portions bombées des quatre Cices du
prisme. — Échelle de r*
6
hydraulique, sur des prismes de mastic, à la fois cassants et
flexibles, y a fait naître aussi, outre des fentes principales,
une très nombreuse série de fissures rectilignes et parallèles
qui se groupent suivant deux directions parallèles aux fentes
GËNËRAUTÉS. 145
principales et à peu près rectangulaires entre elles (fig. 77).
Dans les expériences» la régularité géométrique ne peut
être obtenue qu*au moyen de précautions particulières*.
 plus forte raison dans des masses hétérogènes» comme
celles de la nature, la tendance à la régularité a-t-ellepu
être contrariée, surtout lorsque ces masses étaient soumises
à des efforts aussi irréguliers que ceux qui ont ployé les cou-
ches. Tout exceptionnelle qu'elle soit dans l'écorce terrestre,
la régularité mathématique n'y a pas moins la signification
très claire que nous venons de lui assigner.
S"" pwrMkMM. — Les paraclases* ou failles {faulu^ en
anglais; tprungCy en allemand; etc.), dont les formes se
rapprochent beaucoup de celles des diaclases» mais sont
plus souvent courbes ou infléchies» s'en distinguent par
des dimensions horizontales généralement beaucoup plus
grandes, dépassant souvent mille mètres» et surtout» par
la grandeur du rejet» indéfini en profondeur» qui les ac-
compagne.
Les failles ont fixé tout naturellement l'attention des
mineurs depuis que Werner» à la fin du siècle dernier» a
démontré que les filons métalliques doivent naissance à leur
remplissage. Dans de nombreux districts de filons» elles ont
été étudiées dans leurs moindres détails» et elles ont été
figurées d'une manière très instructive, tant dans leur pro-
jection horizontale qu'en coupes verticales. En outre, dans
les mines de houille, elles arrêtent à chaque instant le champ
* Le soi de Venise est sajet à des tassements et, par suite, à des ondulations, A des
courbures de petit rayon que l'on reconnaît de toutes parts dans le pavé de la basilique
de Saint-Marc, ainsi que dans celui de la basilique de Murano. Par suite de ces mou-
vements, les plaques de marbre ont subi des cassures nombreuses, mais irréguliëres et
ne ressemblant pas aux réseaux parallèles qu'une torsion proprement dite fait naître.
* La proposition iccpa qui exprime ordinairement obliquité, latéralité, irrégularité,
s'applique bien à une Assure accompagnée de l'abaissement de l'une des deux surfaces,
comme celui qui résulterait d'un glissement mutuel.
144 ROLE DES LITHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
d'exploitation, à cause du déplacement relatif des couches,
qui s'est produit le long de leurs parois; aussi, dans un
grand nombre de bassins houillers, leurs caractères ont-ils
été étudiés géoméiriquement de la manière la plus précise,
et il n'en est guère qui n'ait fourni à cet égard des rensei-
gnements caractéristiques. Ici, comme dans d'autres cas, la
pratique a fourni des données précieuses à la théorie.
En dehors des exploitations de mines, les failles ont été
aussi fort étudiées; car elles jouent un rôle de premier ordre
dans l'écorce terrestre, qu'elles divisent en innombrables
compartiments, en sortes de voussoirs; elles forment comme
des linéaments, auxquels se coordonnent les traits du relief
terrestre.
Dans leurs traces horizontales, considérées à des niveaux
différents, de même qu'à leurs affleurements, les failles
présentent des configurations semblables à celles qui résul-
tent des expériences précitées.
Gomme exemples, je rappellerai le massif de la Côte-d'Or,
dans lequel les failles ont été relevées avec beaucoup de soin,
tant en plan qu'en coupes verticales; celles de la Haute-
Marne; celles qui sont figurées sur diverses feuilles de la
carte géologique d'Angleterre, etc.
Observations.
A chaque pas, l'exploitation montre au mineur comment
les filons métallifères se ramifient en veinules, quelquefois
très petites et comparables au chevelu d'une racine. On voit
ainsi comment les plus petites cassures ou leptoclases peu-
vent se rattacher, comme des diminutifs, aux plus grandes :
aux paraclases aussi bien qu'aux diaclases.
Par conséquent beaucoup de piésoclases ont la même
origine que les diaclases et les paraclases et se sont souvent
GËNËRALITÊS. 145
produites en même temps que ces dernières. C'est ce qiie
témoignent pour beaucoup de piésoclases des surfaces polies
el striées, ainsi que des rejets plus ou moins sensibles.
De même, de vrais rejets sont notés à chaque pas le long
des diaclases, sur les parois desquelles on observe également
dessurfaces frottées : exemple le souterrain du canal d*Arsch-
willer*.
Néanmoins, de même que dans beaucoup d'autres cas, où
il eiiste des passages, il est nécessaire d'établir une démar-
cation. Elle est fondée ici sur des différences de caractères
géométriques et de dimensions.
Il importe toutefois de remarquer, en présence de cette
liaison entre des cassures si différentes par leur dimension,
que les synclases constituent un ensemble nettement déli-
mité, et il convient d'autant plus de le faire qu'à première
vue, à cause de certaine ressemblance dans les caractères
géométriques, on a généralement rapproché les systèmes de
cassures qui déterminent des prismes de celles qui détermi-
nent des parallélipipèdes ou des rhomboïdes.
Exemple du râle des lithoclases relativement au régims
des eaux souterraines.
Les lithoclases de divers ordres ont une part évidente
dans la circulation des eaux souterraines. On l'a déjà vu à
propos de la perméabilité en grand.
Par exemple, d'après les études de Belgrand, la vallée de la
Vanne est creusée' tout entière dans la craie fissurée; les
sources qui alimentent cette rivière et qui jaillissent au-des-
sous du village de Fontvannesoùest la source de la Vanne, ont
* Géologie expérimeniale,^. 532.
* Lu Eaux nouvelles, p. 140 et suivanles.
10
146 ROLE DES LITHOGUSES DE DIVERS ORDRES.
cela de particulier qu'elles ne sont pas soutenues, à leur
point d'émergence, par un terrain imperméable. Les eaux
pluviales descendent donc bien au-dessous du thalweg delà
vallée, dans les fissures de la craie, soit jusqu'aux argiles
sableuses imperméables du terrain crétacé inférieur, soit
jusqu'à une masse de craie blanche compacte dépourvue de
fissures, ou dont les fissures sont trop étroites pour conte-
nir une grande quantité d'eau. Si le sol était horizontal,
comme l'indique la figure 78, les eaux pluviales, après avoir
saturé la roche, remonteraient nécessairement jusqu'à la
surface du sol, qui deviendrait marécageuse; tels sont les
Fig. 78. — Disposition de la nappe d'eau NN dans des couches horixontales de craie fissurée CG
supportées par une assise argileuse AA (d'après Belgrand).
marais de Saint-Gond, qui occupent une vaste plaine de 5 à
4000 hectares dans la craie blanche du Petit-Morin.
Quand, au contraire, la surface du sol est découpée par
de nombreuses vallées, comme c'est le cas dans le bassin de
la Yaïine et de la plupart des petites rivières de la Cham-
pagne, la nappe d'eau, produite par l'absorption des eaux
pluviales, ne peut remonter sur les plateaux jusqu'à la sur-
face du sol, son trop-plein se dirigeant à travers la masse
de la craie, et avec une très forte pente, vers la vallée la
plus profonde qui forme appel, absolument comme un tuyau
de drainage (fig. 79). Il en est de même dans les calcaires
oolithiques de la Bourgogne, non moins fissurés.
Le fond de la vallée recevant l'eau par les fissures peut
être submergé d'une manière permanente et transformé
GÉNÉRALITËS.
147
en marais tourbeux qui sont assez fréquents et assez étendus
(2173 hectares) pour avoir contribué aux difficultés de la
dérivation de la Yanne.
La nappe d'eau souterraine se relève donc dans le sol per-
méable de chaque côté du fond de la vallée principale. Si
Fig. 79. — Disposition de la nappe d'eau NN, renfermée dans la craie fissurée GC, au voisinage
de vallées dans lesquelles elle se déverse sous forme de sources SS. AA, couche imperméable
qui soutient la nappe (d'après Belgrand).
Taffleurement de la couche imperméable qui la supporte se
fait au-dessus du fond d'une vallée, il y produit une source
(fig. 80).
Les sources qui portent en Champagne le nom de Btme
Fig. SO. — Disposition de la nappe d'eau NN, renfermée dans la craie fissurée CC, dans le cas
où la couche imperméable AA qui la soutient arOcure à flanc de coteau. S, source (d'après
Belgrand).
abîme), font bien connaître les allures des eaux phréatiques
de la craie; ainsi le Bimé, qui formé l'origine du ruisseau de
Cérilly (fig. 81), source considérable aujourd'hui dérivée à
Paris, est à 4500 mètres à vol d'oiseau du thalweg de la val-
lée de la Vanne à Armentières, et à 26 mètres au-dessus
148
ROLE DES LITHOGLASES DE DIVERS ORDRES.
de ce thalweg. II faut donc une pente de 5", 78 par kilomètre
pour que la nappe d'eau qui alimente le Bîme s'écoule jus-
qu'à la Yanne par les fissures de la craie; or dans un aque-
duc de section convenable, cet écoulement se ferait avec iiue
pente de 0',10 par kilomètre. La belle source formant la
tête de la partie pérenne du quatrième affluent de la Vanne
jaillit, comme l'indique son nom, au fond d'un abîme ou
GËNÉRALITËS. 140
gouffre. Autrefois elle remplissait tout le gouffre qui for-
mait le bief du moulin de Cérilly, et, pour la couvrir plus
facilement d'une voûte, Belgrand a fait abaisser le plan
d'eau, de sorte qu'il ne reste plus qu'un mètre d'eau envi-
ron, tandis qu'avant les travaux de captation, la profondeur
était de 5^,06. L'eau était si limpide qu'on aurait vu une
épingle au fond du gouffre; cependant, les gens du pays
prétendaient qu'on n'avait jamais pu en trouver le fond.
Ces pentes font comprendre aussi l'existence des sources
abondantes de Saiht-Mards en Othe, du château de Villemoi-
ron, et de Vareilles, dans les vallées secondaires de la Nosle
et de Yar^illes.
Quoique ces sources soient à une hauteur notable au-
dessus du thalweg de la vallée de la Vanne et qu'elles soient
séparées de ce thalweg par des massifs de craie très per-
méable, elles restent très fortes dans les étés les plus secs.
Ce qui précède explique le petit nombre des rivières et de
leurs ramifications, dans les terrains perméables.
A 600 mètres des sources de Saint-Philibert et de Saiut-
Harcouf jaillissent deux belles sources dont l'une, qui sort
du fond d'une grande pièce d'eau admirablement limpide,
est qualifiée de miroir (fig. 82).
Ces sources sont, après celles d'Armentières, les plus
abondantes de celles qui sont conduites à Paris; toutefois
elles fléchissent beaucoup en temps de sécheresse.
Lés travaux de captation, entrepris à partir de 1868, ont
augmenté le débit de toutes les sources en abaissant leur
niveau.
En outre, comme l'a fait ressortir Belgrand, l'altitude
exerce une influence sur leur régime. Ainsi en considérant
seulement les grandes sources, Armentières, Saint-Philibert,
le Miroir de Theil et Noé, la première, située à 23 mètres
environ au-dessus des autres, a varié du printemps à Tau-
150
ROLE DES LITHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
tomne, pendant les années humides 1866 et 1867, dans les
^ ^ 666 ^ ^ 907 ^ ^^
rapports de g^^ = ^ et ^ = 2,77,
Les rapports des débits de la plus variable des trois autres
sources, le Miroir de Theil, sont notablement plus petits; ils
GÉNÉRAUTÊS.
151
sont, pour ces mêmes années, j^ = 1,40 et jjt = 1,46.
Le débit des sources de la Vanne est observé chaque jour,
à cause de l'intérêt qu'il présente pour ralimenlation de
Paris, 6ù elles sont amenées après un parcours de 62 kilo-
mètres.
Cest ainsi qu'on a constaté son accroissement régulier de
novembre 1880 à mars 1881, avec un maximum de 1783
litres survenu en mars; elksontdécru ensuite, avec la saison
chaude, de façon à donner 1117 litres en novembre 1881,
chiffre supérieur au minimum des dix années antérieures.
Elles ont continué à décroître en décembre, à cause de
la sécheresse anormale de cette période et n'ont gagné
presque rien jusqu'à la fin de l'hiver. Elles se sont relevées
un peu au début de 1881-1882, mais se sont mises à bais-
ser à partir du mois de juillet pour atteindre en août leur
débit minimum, 945 litres, inférieur à celui des années
précédentes*.
Pour la source de Cerilly en particulier, M. Lemoine a
comparé son débit de 1882 à ceux des années antérieures de
sécheresse; voici le résultat de cette comparaison :
Mars . . .
IMO
175
1*11-
9
503
in*
m*
m*
256
!•?•
IMO
IMl
MM
126
173
311
240
269
155
Mai. . . .
426
188
301
114
127
300
281
209
271
145
Juillet . .
129
193
259
105
105
213
259
182
213
149
Octobre. .
101
93
155
72
97
132
237
140
143
95
Les diaclases dont les dimensions dépassent 500 mètres,
* Ponts et chaussées, service hydrographique du bassin de la Seine organisé par Bol-
grand : Késumides obtervaiions petidant Cannée 1881.
153 ROLE DES LITHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
servent très souvent de canaux de descente et de remonte.
À plus forte raison cela est-il vrai pour les paraclases, qui
non seulement par leurs rejets peuvent juxtaposer des ter-
rains de perméabilité différente, comme il a été dit dans
le chapitre précédent, mais aussi ouvrir aux eaux un pas-
sage plus ou moins facile. Quand, par exemple, des cours
d*eau souterrains, cheminant à travers des cavernes, vien-
nent buter contre une issue facile, ils sont dérivés et peu-
vent parvenir ainsi au jour, sous la forme de sources très
volumineuses.
Les lithoclases peuvent aussi déterminer un passage d*un
niveau aquifère à un niveau sous-jacent. Par exemple, dans
le Jura, l'horizon constitué par les marnes liasiques est ali-
menté, non seulement par le massif calcaire qui les sur-
monte, mais aussi par les nappes aquifères supérieures ^
Percements artificiels des roches : forages artésiens.
À défaut de cassures naturelles, la main de l'homme peut,
à l'aide de forages, ouvrir une issue aux nappes souter-
raines et les faire monter jusqu'à la surface et souvent
même jaillir au-dessus du niveau du sol.
L'idée de tels travaux remonte à une antiquité reculée :
les Égyptiens y ont eu recours, il y.a plus de quarante siècles,
et en France, dès 1126, on les pratiquait à Aire en Artois,
d'où le nom d'artésien qui leur est habituellement donné-
Dans certains cas, le même procédé est mis en usage pour
augmenter le volume des sources, particulièrement lorsqu'il
s'agit d'eaux rendues précieuses par leur composition ou par
leur température.
* Yezian. Étude$ géologique* dan* le Jura, t. II, p. 54.
GËfiÉRALlTËS.
153
À part leur utilité pratique, les puits forés apportent
des notions précises et en quelque sorte expérimentales »
sur le régime des nappes d'eau souterraines.
On avait été conduit à assimiler le phénomène qui nous
occupe au mécanisme des vases communicants. Il est plus
exact de le rapprocher des conditions réalisées dans la
figure ci-jointe ^
Représentons, dans un premier aperçu, la nappe souter-
raine par le tuyau droit A'O (fig. 83), à travers lequel s'é-
coule uniformément Teau d'un réservoir. Si nous comparons
Fig. 83. — Appareil servant i rendre compte des hauteurs diverses auxquelles parvient l'eau
d'usé nappe artésienne, d'après les dislances respectives au niveau du réservoir d'alimenta*
lion et de Forifice d'écoulement.
les pressions qui ont lieu aux points A',B',C' à l'intérieur du
tuyau, nous reconnaîtrons qu'elles varient proportionnelle-
ment aux distances A'B',B'C' comprises entre ces points. Ima-
ginons pour cela des sections transversales faites dans le li-
quide par les points A',B',C'. Les tranches liquides A'B',B'C'
ont des poids proportionnels à leurs longueurs; les compo-
santes de ces poids, dans le sens de l'axe du tuyau, sont aussi
proportionnelles à leurs longueurs, puisque le tuyau est
* Ddannay. Court élémentaire de mécanique, p. 436, 1851.
L'eiplicalion des poits jaillissants a été domiée, en 1691, par Bernardin! Ramazxini.
i54 ROLE DES LITHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
droit, et qu'en conséquence son inclinaison est partout la
même. D'un autre côté, les résistances qu'éprouvent ses di-
verses tranches dans leur mouvement sont également pro-
portionnelles aux longueurs des portions des tuyaux contre
lesquelles elles frottent. Donc, d'après la condition de l'équi-
libre entre les forces qui agissent sur chacune de ces tran-
ches, les différences des pressions qui agissent à leurs extré-
mités doivent être proportionnelles aux longueurs des
tranches; les différences des pressions eu A' et en B', en B*
et en G', doivent donc être dans le même rapport que les
distances A'B',B'C'. Si les distances sont égales entre elles,
la pression variera autant de k' en B' que de B' en C.
Pour mesurer les pressions qui ont lieu aux divers points
A',B',C', on peut y implanter des tubes de verre qui s'élèvent
verticalement, comme le montre la figure. L'excès de la
pression en un quelconque de ces points, sur la pression
atmosphérique, sera mesuré par la hauteur à laquelle l'eau
s'élèvera dans le tube de verre correspondant. Il est aisé de
conclure de ce qui précède que les extrémités A,B,G des
colonnes d'eau que l'on obtiendra ainsi seront situées sur
une ligne droite. De plus cette ligne droite, prolongée suf-
fisamment, devra passer par l'extrémité du tuyau 0, et par
le point N, situé sur la surface libre de l'eau du réservoir,
verticalement au-dessus de l'origine du tuyau.
C'est ce que l'expérience confirme complètement.
Si l'on suppose maintenant que l'ensemble des couches ait
la disposition, très fréquemment observée, d'une sorte de
bassin ou de fond de bateau (fig. 84) S les affleurements des
diverses couches viendront se relever et dessiner à la surface
du sol une série de courbes concentriques. Les couches per-
méables auront laissé s'infiltrer les eaux coulant à la surface
* Nous ne pouvons mieui faire que d'emprunter textuellement les détails qui suivent
i Texcellent Court dexploitalion des minet, de N. Gallon, 1. 1, p. 93.
GÉNÉRALITÉS.
155
du sol, d'autant plus facilement qu'en raison même de leur
perméabilité, elles ont été souvent les plus faciles à désagré-
ger, et que, par suite, leurs affleurements sont accusés par
des dépressions où les eaux du jour tendent à se rassem-*
bler. Ces couches seront donc entièrement saturées d*eau.
Si maintenant, ce qui est le cas général, les divers points
d'afOeurement ne sont pas au même niveau, l'eau s'infiltre
par les points les plus élevés, tels que A, et elle sort par les
points les plus bas, tels que B, sous la forme de sources jail-
lissant au jour, ou sous le lit des fleuves ou sous celui de la
mer. Les eaux dont est imprégnée la couche aquifère ne
sont donc pas stagnantes; elles forment, au contraire.
Fig. 84. — Coupo d'un groupe de couches disposées en forme de bassins parmi lesquelles il en
est une ÂB perméable comprise entre deux couches argileuses. UN, niveau auquel l'eau
s'élève dans deux frages, exécutés à des altitudes différentes (d'après M. Callon).
des courants souterrains, dont la direction et la vitesse en
chaque point dépendent de sa position, en plan et en élé«
ration, par rapport aux affleurements, ainsi que de la per*
ffléabilité plus ou moins grande de la couche aux environs
du point considéré.
Si l'on isolait par la pensée une petite masse d'eau depuis
son entrée dans la nappe aquifère jusqu'à sa sortie, l'enve*
loppe de ses positions successives serait assimilable à un
tuyau de conduite, dans lequel on devrait regarder la sec-
tion comme irréguliére et brusquement variable d'un point
à un autre, et le périmètre de la section comme très grand
relativement à cette section; à un tuyau de conduite, en un
moty dans lequel, pour une vitesse donnée de l'eau, il ce
156 ROLE DES LITUOCLÂSES DE DIVERS ORDRES.
ferait des pertes de charge par mètre courant beaucoup plus
grandes que dans un tuyau ordinaire. Mais cela n'empêche-
rait pas Técoulement de s'y faire suivant des lois semblables,
qui ne différeraient que par la valeur des coefficients nu-
mériques*. Supposons donc qu'en un point donné de ce
courant souterrain on eut percé un trou et qu'on y implan-
tât» comme dans le cas de la figure 85, un tuyau suffisamment
prolongé vers le haut, on aurait une sorte de piézomètre,
dans lequel l'eau se tiendrait en dessous du point d'infiltra-
tion, à une distance verticale qui servirait de mesure à la
hauteur totale employée pour donner à l'eau sa vitesse au
point considéré, et, en outre, pour surmonter toutes les ré-
sistances et compenser toutes les pertes de force vive éprou-
I vées depuis le point d'infiltration.
En d'autres termes, le niveau de l'eau dans le tube serait
un point de la ligne de charge *, et le lieu géométrique de ces
niveaux, considérés pour l'ensemble de la nappe souterraine,
serait une surface plus ou moins sinueuse qu'on pourrait
désigner sous le nom de surface piézométrique ou surface de
charge.
Ceci posé, un puits artésien aboutissant à un point de la
nappe aquifère donnerait, ou non, des eaux jaillissantes selon
que la sur/ace piézométrique en ce point serait au-dessus
comme en Mou au-dessous comme en N du point correspon-
dant de la surface du sol.
On partage ainsi la contrée eu deux sortes de zones, que
l'on pourrait figurer par deux couleurs différentes. M. Haton
de la Goupillière ' appelle positives celles dans lesquelles la
surface piézométrique s'élève au-dessus du terrain, et néga-
tives celles pour lesquelles elle plonge au-dessous du sol. La
' Delaunay. Coun de machinée, vp 136.
* Qui était une ligne droite dans les conditions théoriques de la figure 83.
' Cour9 d exploitation des minet, 1. 1, p. 145.
GÉI^ËRALITÉS. i57
courbe d'intersection qui les limite devient ainsi la %ne de
partage hydrologique de la région, au point de vue qui nous
occupe.
Cet énoncé constitue comme une sorte de théorème,
définissant la condition géométrique à laquelle serait subor-
donné le succès d'un sondage, qu'on entreprendrait en un
point donné, pour créer un puits artésien donnant de Teau
jaillissante.
Cette théorie doit être regardée comme parfaitement
établie, et d'accord avec tous les faits observés, faits qu'elle
explique et peut même faire prévoir. On en citera ici quelques-
uns:
1** Le niveau piézométrique en un point donné, c'est-à-
dire le niveau auquel l'eau s'arrête au-dessous du sol dans le
cas d'un boit-tout, ou s'élève avrdessus dans un puits arté-
sien, prolongé par un tuyau d'une longueur suffisante pour
que l'écoulement n'ait pas lieu, ce niveau est indépendant
du diamètre, et il est généralement plus élevé lorsque le
trou est tube que lorsqu'il ne l'est pas.
2" Le volume d'eau que fournit un puits artésien augmente
avec le diamètre du puits, mais non pas proportionnelle-
ment à sa section. Le rapport des débits est moindre que
celui des sections, et d'autant moindre que, pour un rap^
port donné, ces sections sont plus grandes en valeur absolue.
3° Ce même volume augmente à mesure que l'on prend
Teau plus près de la surface du sol, ou à une plus grande
distance en dessous du niveau piézométrique.
4^ n augmente encore, lorsque, après avoir foré un puits,
on vient à le tuber. Cela résulte de ce qui a été dit plus
haut, sur les variations du niveau piézométrique. L'écou-
lement par un puits non tube équivaut en effet à l'écoule-
ment par un tuyau qui présenterait des fuites sur divers
points de sa longueur.
458 ROLE DES LITHOCUSES DE DIVERS ORDRES.
5"" Deux puits suflisamment voisins s'influencent de telle
sorte que chacun d*eux diminue le produit que donnerait
Tautre, s'il était seul ; la somme de leurs débits tend, à
mesure qu'ils sont plus rapprochés, à se réduire à ce que
donnerait un puits unique ayant une section égale à la
somme de leurs sections.
La théorie qui vient d'être donnée explique facilemenl
ce fait bien connu, à proximité des côtes de l'Océan, que
l'état de la marée influe sur le débit des puits artésiens.
Ainsi on remarque que le niveau de la fontaine jaillissante de
Noyelle-sur-Mer (Somme) monte et baisse avec la marée. Le
puits de l'hôpital militaire de Lille suit, à huit heures de dis-
tance, les oscillations de la marée. A Fulham, près de l'em-
bouchure de la Tamise, un puits foré à 97 mètres de pro-
fondeur donne 563 litres par minute au moment du reflux
et 273 lors du flux'. D'autres puits voisins de la mer sont
jaillissants à marée haute et cessent de l'être à marée basse.
La marée haute augmente la charge sur les orifices de sor-
tie qui sont sous l'Océan, en ralentit l'écoulement, relève la
surface piézométrique de toute la nappe souterraine et pour
certains points peu éloignés de la mer et placés à un ni-
veau assez bas, peut les faire passer du dessous au dessus de
la surface du sol.
Certaines irrégularités de quelques puits artésiens se rat-
tachent à des tremblements de terre. Par exemple, en
juin 1863, le forage d'El-Annatt, dans le Hodna, a subi un
arrêt momentané coïncidant, non seulement avec un violent
ouragan, mais aussi avec des oscillations du sol dans le
voisinage.
^ Comme confirmation de l'existence et du mode d'alimen-
tation superficiel de cours d'eau souterrains, d'où provien-
* Comptée rendui, t. LYlI, p. 114, 1863.
6ËNËRÂLITÉS. 459
nentles eaux artésiennes, le fait suivant est particulièrement
éloquent.
À la fin de janvier 1830 on reconnut^ que dans le puits
foré de 110 mètres de profondeur exécuté à Tours en 1829,
dans la craie inférieure, Teau s'étant élevée durant plusieurs
heures avec une grande vitesse, avait amené beaucoup de
sable fin et de petits fragments d'épines, des graines de
plantes, la plupart marécageuses {Galiumuliginomm), ainsi
que des coquilles d'eau douce et terrestres non altérées
{Planorbis marginatm, Belixrotwida elstriata).
De leur état de conservation et de la maturité des graines,
Dujardin pensa pouvoir conclure que ces eaux et les corps
étrangers qu'elles avaient entraînés n'avaient pas mis
plus de trois ou quatre mois à descendre de quelque vallon
humide.
De même, l'eau d'un puits foré à Riemke, près de Bochum,
en Westphalie, a amené de 45 mètres jusqu'à son orifice de
petits poissons de 8 à 10 centimètres, et sans doute em-
pruntés aux cours d'eau superficiels, dont les plus voisins
sont à 10 et 20 kilomètres.
Pour quelques graines, coquilles, poissons, sables ou gra-
viers qui, de ces profondeurs, pamennent à la surface,
combien s'arrêtent en route dans les sinuosités des canaux
que ces objets finissent par obstruer!
Des faits analogues ont été fréquemment signalés dans les
puits artésiens du Sahara.
Certains puits jaillissants de la région d'Ourlana dans
rOued Rhir rejettent des animaux, et nulle part ce fait ne
parait mieux caractérisé, puisqu'il s'agit ici d'animaux vi-
vants, poissons, crabes et mollusques qui sont loin d'être
une rareté.
* DQjardin. Mémoire wc. géoL, 1» série, t. U, p. 248, 1837.
160 ROLE DES LITUOCLASES DE DIVERS ORDUËS.
M. G. Rolland cite, comme authentiques, les deux exemples
suivants* :
Mazer. Sondage n* 3; 8 février 1876. Profondeur, 80»,35.
Hauteur de rorifice du tube au-dessus du sol, 0°,80; diamètre
final, O'^jlô. Débit total primitif, 5800 litres par minute, à
la température de 25%5; au bout de deux ans, le débit s'est
élevé à 4600 litres. Le sondage avait été entrepris à 1 kilo-
mètre de l'ancienne oasis, au milieu d'un terrain nu et
inculte, sans rigole ou fossé, ni source ou étang. Or, quelques
jours après l'aménagement du puits, le directeur de l'atelier
vit sortir du tube un crabe vivant de la grosseur du pouce.
Après lui, M. le général Carteret et M. Jus vérifièrent devim
que la gerbe jaillissante rejetait des crabes, poissons et mol-
lusques vivants, en même temps que des sables; coiffant d'un
filet l'orifice du tube, ils prirent beaucoup de crabes de
petite et moyenne grosseur.
Sidi-Amran. Sondage n" 2; 31 janvier 1879. Profon-
deur 81*^,09. Diamètre final 0",12. Débit, 4000 litres à 24^
L'emplacement était situé à une extrémité de l'oasis et n'of-
frait pas trace d'eau. Dès que la colonne de 0'",12 fut parve-
nue à 61", 73 sur le poudingue calcaire qui recouvre la
nappe artésienne dans cette région, le jaillissement eut lieu
avec force ; du 23 au 28 janvier, tandis qu'on s'enfonçait
dans les sables aquifères, l'eau charria au jour une grande
quantité de ces sables, ainsi que des cailloux et noyaux cal-
caires pesant jusqu'à 1200 grammes, soit, en tout, non
moins de 400 mètres de matières solides. Or, le 29 janvier,
M. Jus recueillit, au milieu des sables qui venaient d'être
rejetés et encombraient les abords du tube, beaucoup de
petits poissons et mollusques vivants.
Les mollusques sont très communs, tant à Ouargla et dans
i Complet rendus, t. XCIII, p. 1000, 1881.
GÉNÉRALITÉS. 161
rOued Rhir qu'au Zab. Dans 59 localités de l'Oued Rhir, les
puits artésiens ont ainsi rejeté des poissons, crustacés et
mollusques vivants, qui ont été déterminés par M. Sauvage
et M. Bourguignat. Les mollusques vivants recueillis, d'après
M. Jus, appartiennent aux espèces suivantes : Melanopsis Ma-
roccanaj Morlet; Àmnicola Pycnocheiliaf Bourguignat; Amni-
cola Jusi^ A. Milonij id.; A. Saharica, id.; A. Cossonh id.;
Melania tuberculata, id.; Palydestrina^ Jusi, id. ; P. arena-
ria, id. ; P. Peraudierij id. ; P. mbacerom, id. ; Hydrobia
Brondeli, id. ; Cardium edule, Planorbis cornevs, id. ; Car-
dium Saharicurriy id.; Hélix Uthicensisj id. ; H. pyramidata,
Draparnaud; H. Sitifiensisj Bourguignat; H. specialis, id. ;
H. Critonidis, Jus, id.; ff. micromphatus, Letourneur; H. Kol-
censis^ Bourguignat; Lemochroca candidmima^ Beeck; Buli-
mw decollatmy Bruguière; fi. Ju$iy Bourguignat.
Les crabes ne sont connus qu'en trois points de l'Oued
Rhir, savoir, dans les rigoles alimentées par les puits n" 5 de
Mazet, n" 2 d'Ourlana, et n" 1 de Tamerna Dyedida. Dans le
Zab occidental, ils sont plus fréquents. Les divers individus
appartiennent à une même espèce, la Telphusa fluviatilis
(Rondelet).
Les poissons sont Cyprinodon calaritanuSy Bonelli ; Hemi-
chromis mhara^ Sauvage ; Hemichromis Rollandiy Chromis Zil-
lei, Gervais; Chromis DesfontaineijLRcépède.
On s'expliquera l'origine de ces nombreux végétaux et ani-
maux provenant de la surface, après avoir vu plus loin le
régime des nappes souterraines du Sahara.
Boit-tout^. Si le niveau d'équilibre d'un puits artésien
se trouve au-dessous de la surface du sol, ce puits peut
fournir de l'eau, comme les puits ordinaires, à la condi-
tion qn'on emploie des moyens particuliers pour l'élever jus-
Detannay. Cours élémetilaire de mécanique^ p. 44o, 1851.
11
i62 ROLE DES LITHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
qu'à la surface du sol. Mais si, au lieu d'y puiser de l'eau, on
y en introduit, au contraire, ce qui tend à y faire monter le
niveau, l'équilibre sera rompu. La colonne d'eau contenue
dans le puits deviendra trop haute pour être soutenue par
la pression qui s'exerce à sa partie inférieure ; et en consé-
quence elle descendra, de manière à rétablir le niveau où
il était précédemment. On pourra donc faire arriver conti-
nuellement de l'eau dans un pareil puits sans qu'il s'em-
plisse; cette eau s'écoulera dans la nappe souterraine à
laquelle il communique; on aura ce que l'on nomme un
puits absorbant^ ou boit-tout.
On se sert très souvent de puits absorbants, tels que ceux
dont nous venons de parler, soit pour dessécher des terrains
marécageux, soit pour faire disparaître l'humidité du sol
dans le voisinage de constructions importantes auxquelles
elle pourrait porter préjudice, soit encore pour faire dispa-
raître des eaux malsaines provenant d'un établissement in-
dustriel, ou enfin, pour créer de petits fours hydrauliques,
comme avec le procédé Haurian *. 11 existe un exemple re-
marquable de puits absorbant à Saint-Denis, près Paris. En
perçant un puits artésien on rencontra d'abord une couche
absorbante; puis plus bas une nappe d'eau jaillissante; et
plus bas encore une seconde nappe jaillissante, dont l'eau
était de meilleure qualité que celle de la précédente. On dis-
posa dans ce puits trois tuyaux concentriques, s'élevant
tous trois jusqu'à la surface du sol, mais descendant à des
profondeurs différentes. Le tuyau intérieur, fut établi jus-
qu'à la seconde nappe jaillissante. Le second tuyau, enve-
loppant le premier, de manière à laisser un espace libre
entre eux, descendit jusqu'à la première nappe jaillissante.
Enfin le troisième tuyau, enveloppant le second de la même
' Haton de la Goupillière» Traita d*expl<ntaUon des mines, t. I, p. 140i
ROLE DES LITHOCLASES SIMPLES. 16o
manière ne descendit que jusqu'à la couche absorbante. Par
cette disposition, les eaux de la nappe jaillissante inférieure
montent par le tuyau central; celles de la nappe jaillissante
supérieure montent par l'espace annulaire compris entre le
premier tuyau et le second; et l'excédent de ces eaux, qui
n'est pas employé pour l'usage de la ville, s'écoule dans la
couche absorbante, par l'espace annulaire compris entre le
second et le troisième tuyau.
§ 1". ROLE DES LITHOCLASES SIMPLES
Terrains tertiaires.
!• Farta. — La Variété des terrains tertiaires pari-
siens ne permet pas d'indiquer d'une manière générale les
nombreuses nappes d'eau que l'on y rencontre très fréquem-
ment. Nous nous bornerons à rappeler que les couches ter-
tiaires présentent plusieurs niveaux de sources. Un premier
niveau aquifère se trouve dans les marnes et calcaires la-
custres supérieurs et un second dans les sables et grès su-
périeurs, dits de Fontainebleau, qui sont soutenus par les
marnes vertes supérieures au gypse. Ces eaux sont rarement
ascendantes, parce qu'elles n'ont pas de bassin hydrogra-
phique d'une étendue suffisante; utilisées souvent au moyen
de puits, elles sortent des flancs des collines, sous forme de
sources. Un troisième niveau d'eau, se divisant souvent,
existe dans le terrain lacustre inférieur. L'étage des marnes,
des calcaires et des meulières, supérieur à ce groupe, l'é-
tage gj'pseux, l'étage calcaire inférieur, renferment égale-
ment des eaux souvent ascendantes, quelquefois jaillissantes
à plusieurs mètres au-dessus du niveau de la Marne ou de
164 ROLE DES LITHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
la Seine, notamment dans le département de Seine-et-Marne.
Le calcaire grossier contient aussi des couches aquifères qui
constituent un quatrième niveau d'eau. Enfin, les sables
inférieurs ou le groupe de l'argile plastique, à cause des
sables qui lui sont subordonnés, en contiennent un cin-
quième, le plus important, en ce que les jets qu'il produit
sont les plus fréquents et en même temps les plus élevés.
Les couches de ce groupe constituent des réservoirs plus
étendus que ne le sont ceux des couches précédentes *.
La présence souterraine des eaux est due à la disposition
des couches, qui est telle qu'elles occupent la partie infé-
rieure du bassin tertiaire de Paris, tandis qu'en se redres-
sant elles forment une partie de son pourtour élevé.
On a vu plus haut quelle est leur disposition dans les
vallées de la Brie. La figure 47 donnée page 85, représente
l'une des sources de la Dhuis.
Considéré dans son ensemble géologique, le bassin de
Paris est éminemment propre à la création des puits artésiens.
Les couches y sont disposées enferme de cuvettes de grandeur
décroissante, placées les unes dans les autres, et dont Paris
occupe à peu près la partie centrale. Ces terrains alternati-
vement perméables et imperméables sont très faiblement
accidentés; plusieurs niveaux fournissent des centaines de
puits artésiens dont la profondeur varie habituellement de
10 à 30 mètres. M. Ch. Laurenta publié des coupes d'ensem-
ble des puits qu'il a forés dans les vallées delà Seine et de la
Marne et qui font connaître les ondulations du terrain, ainsi
que les différences remarquables qui existent entre les ni-
veaux d'ascension de leurs eaux *.
Pyrénées-Orientale*. — De mêmcque Icbassiu de Paris, bien
* Degousée. Traité de sondage, 2* édition, t. U, p. 475.
' Degousée et Laurent. Guide du êondeur, 2« édition, t. I, p. 323, planches 42 et 43.
ROLE DES LITHOaASES SIMPLES. 1G5
des terrains tertiaires présentent une disposition favorable à
la réussite des puits artésiens.
D'après M. L. Ville* les eaux du pliocène supérieur jaillis-
sent seulement dans une étendue fort limitée du bassin
hydrographique du Roussillon ; en sorte que généralement
les puits artésiens vont s'alimenter dans le pliocène infé-
rieur qui est d'origine marine. Quant à la profondeur à
laquelle ils sont forés, elle doit naturellement être d'autant
plus grande qu'on s'éloigne davantage des montagnes qui
limitent le bassin.
L'auteur rapporte les couches aquifères du Roussillon à
deux étages géologiques, le pliocène inférieur, et le pliocène
supérieur. Ce dernier serait, du reste, contemporain du ter-
rain de Sahara, dont il a, sous certains rapports, les carac-
tères minéralogiques.
1 de MAméwem. — A Loudrcs il existc des puits de ce
genre qui se présentent dans des sables subordonnés à l'ar-
gile plastique.
Dans le bassin de la Tamise une succession de villes et de
villages marque la jonction des couches tertiaires et de la
craie, sur laquelle, le niveau des eaux souterraines appro-
chant de la surface, les sources sont nombreuses, comme a
Croydon, à Carshalton et dans toute cette ligne de villages
qui s'étend jusqu'à Guildford et en outre de l'autre côté de
Londres, à Ware, Hertford, Hatfield, Watford et d'autres.
Us sables tertiaires inférieurs ont, dans ces dernières
années, contribué à l'alimentation, au moyen de puits arté-
siens, de Londres, aussi bien que des districts adjacents,
dont le sol est formé d'argile imperméable et où l'oau
est rare*.
' Revue géologique de Delesse.
' hejtwich. ^r///rw.1851.
166 ROLE DES LITHOaASES DE DIVERS ORDRES.
En effet ces sables passent sous le London clay, de telle
sorte qu'ils sont alimentés d'eau tout le long de leur affleu-
rement dans le Surrey et le comté de Hertford.
Leur niveau à l'affleurement est à peu près à 30 mètres
au-dessus du niveau de la Tamise, tandis qu'à Londres ils
sont à environ 60 mètres au-dessous. De sorte qu'ils for-
ment une cuvette de 100 mètres de profondeur, dont le
centre est rempli d'argile imperméable.
■ei^qoe. — Les tcrraius tertiaires jouent un rôle impor-
tant dans le gisement des eaux souterraines de la Belgique,
Echelle des Hauteurs
0 10 « 30 41 M M 10 N »0 UO ZM^i*
-J
rlii^mtJt VlvACI
Fig. 83- — Coupe des couches aquifères de la Belgique, dirigée du nord au}5ud. I, roches dévo-
nieones quartzeuses et schisteuses; C, couches crayeuses et marneuses, eu partie aquifères;
C,, couches crétacées argileuses et argilo-sableuses imperméables dans leur ensemble;
., couches sableuses et sa bio-argileuses perméables; Qa, argile quaternaire; Q., sable qua-
ternaire. — D'après M. Yei-slraeten.
ainsi que l'expriment les deux coupes (fig. 86 et 87) emprun-
tés à M. Verstraeten *.
Aux environs de Bruxelles les groupes éocènes yprésien
et landénien renferment des argiles sableuses, auxquelles
correspondent plusieurs niveaux d'eau de régime différent
et souvent ascendants.
Les sondages exécutés dans la vallée de la Dives à Louvain
* Verstraeten. Examen hydrologique de* environs de Bruxelles.
ROLE DES UTHOCLASES SIMPLES.
167
et aux environs ont également rencontré des nappes d'eau
jaillissantes ^
»iTiurpeviLLf
'-^fUBlrCVllXC
Echelle des Longueurs.
0 10 20 30 w so""
i ■ ' ' <
Fig. 86. — ^Coupe des. couches aquifères de la Belgique dirigée de l'ouest à l'est. I,, roches
quartzeases et schisteuses des Ardennes; I,, roches calcaires et quartzo-schisteuses du Con*
droi (déronien) ; H, terrain houiller ; C,, roches crayeuses et marneuses imperméables ;
C^ couches crétacées, argileuses et argilo-sabieuses imperméables dans leur ensemble ; T*.
roQches tertiaires sableuses et sablo-argileuses perméables; Qa, argile quaternaire; Qt, sable
quaternaire. — D'après M. Verstraeten.
Tienoe, AvfHehe. — Plus de Cent puits dont plusieurs
sont séculaires ont déjà été ouverts à Vienne et dans ses
environs. Leur profondeur est en général comprise entre
60 et d 00 mètres.
TeidM. — La situation exceptionnelle de Venise semblait
devoir la priver de toute eau douce provenant de son propre
sol. A défaut de sources et de puits ordinaires, des puits
forés y ont apporté en abondance de Teau douce ; la
figure 88 montre la disposition de la nappe qui les ali-
mente.
DépartcHiaii d'Aller i Basse Hitidjai sources Jalllissaiiies na-
* Bihel. PuîU artétien de Louvain, 1870.
108
ROLE DES UTHOCUSES BE DIVERS ORDRES.
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ROLE DES LITHOGLASES SIMPLES. iCO
inrrues et paite forés'. — La Basse Mitidja renferme des nap-
pes d'eau souterraines qui se manifestent soit par des
sources naturelles, soit en s'élevant dans de nombreux fora-
ges; elles sont instructives, particulièrement au point de
vue des nappes analogues du Sahara (fig. 89).
Les eaux de THarrach supérieuretde son principal affluent,
rOued Djemâa, sont détournées à leur sortie du terrain cré-
tacé, et utilisées presque entièrement en irrigations sur les
territoires de l'Arbaet de Rovigo.
Une partie de ces eaux se perd néanmoins dans les cail-
loux du lit, et on pourrait penser qu'elles circulent souter-
rainement sous ces cailloux depuis Rovigo ou l'Arba jusqu'au
deuxième kilomètre en aval du confluent de l'Oued Djemâa,
point où l'eau reparaît dans le lit d'abord par un faible
débit qui s'accroît assez rapidement en descendant le coure
de la rivière. On avait même basé sur cette idée un projet
d'aménagement d'eaux pour la ville d'Alger. Il n'en est pour-
tant point ainsi en réalité. En 1874 plusieurs sondages que
M. l'ingénieur en chef des mines Pouyanne a fait exécuter
dansle lit de l'Uarrach, un peu en aval du confluent de
rOued Djemâa, ont démontré que s'il coule réellement un
peu d'eau en ce point sous les cailloux du lit de l'Harrach,
c'est une quantité insignifiante, ne pouvant nullement
expliquer les débits qui passent en toute saison à ciel ouvert
dans l'Harrach inférieur. En suivant ce lit pas à pas, en 1874,
M. Ville et M. Pouyanne ont pu s'assurer, par de nom-
breuses mesures thermométriques, par des jaugeages
répétés de distance en distance et par la vue directe, que
tout le débit de l'Harrach inférieur, en étiage, provient de
sources artésiennes naturelles, sourdant pour la plus grande
partie dans le lit, mais pour une certaine fraction, auxenvi-
* D'après une communication de 11. TinRéoieur en chef des mines Pouyanne.
« Degousée. Bull, de la Sociéié géologique, 2« série, t. V, p. 30 et t. VU, p. 481.
170
ROLE DES UTHOaASES DE DIVERS ORDRES.
rons et dans le lit des affluenls inférieurs. A Tétiage le débit
total ainsi produit dépasse un mètre cube par seconde. La
presque totalité de ces sources artésiennes sort de terre avec
Fig. 88. — Carte de la Basie Mitic^a. r, terrain crétacé; m, terrain tertiaire ; 9, terrain quater-
naire. Les sondages à nappes jaillissantes sont représentés par de petits ronds noirs, et ceux
é nappes simplement ascendants, par de petits can*és. — D'après M. Pouyanne.
une température de 18 à 19% à peine supérieure à la tempé-
rature moyenne des lieux qui atteint 17** ou 17*,5. Un très
petit nombre de sources seulement, fournissant ensemble
un faible débit, sourdent à la température de 21 à 22*.
ROLE DES LITHOCLASES SIMPLES. 171
Les faits ainsi observés prouvent à eux seuls que dans la
partie tout à fait inférieure du bassin de THarrach, il existe
au moins deux nappes artésiennes, Tune à profondeur assez
grande, fournissant peu de sources, l'autre à profondeur
moindre, fournissant la plupart d'entre elles. Celles de ces
dernières qui se font jour au dehors du lit des oueds faisaient
autrefois un vaste marais de toute cette partie de la plaine
(le la Mitidja ; les fossés d'assainissement en ont fait dispa-
raître un grand nombre, ou plutôt leur ont donné un
emploi utile tout en supprimant les marécages. Ces phéno-
mènes ne sont pas particuliers au bassin inférieur de l'Har-
rach, mais on les retrouve aussi dans le bassin inférieur du
Mazafran.
L'existence des nappes en question est démontrée, d'autre
part, par les nombreux sondages de la basse Mitidja.
La figure montre que la Mitidja est formée par une bande
quaternaire s'appuyant au nord sur les collines tertiaires
du Sahel, au sud sur le terrain crétacé du petit Atlas et un
certain nombre d'affleurements tertiaires qui en bordent le
pied. La profondeur de cette bande quaternaire n'est pas
bien connue; mais elle dépasse 120 mètres en plusieurs
points, comme il résulte de plusieurs sondages. Elle semble,
si Ton peut s'exprimer ainsi, n'être au moins dans sa partie
supérieure que l'intégrale des cônes de déjection des nom-
breux torrents venant du petit Atlas. Cela explique pourquoi
ce terrain n'est point régulièrement stratifié, au point que
deux sondages, même fort voisins, présentent toujours des
coupes dissemblables. Le terrain consiste en lentilles plus ou
moins étendues composées les unes de cailloux roulés, les
autres de sable, d'autres d'argiles sableuses ou caillouteuses,
d'autres d'argile à peu près pure, enchevêtrées les unes dans
les autres. Les eaux du petit Atlas s'infiltrent dans la partie
sud de ce terrain, y descendent à des profondeurs diverses.
172 ROLE DES LITHOaASES DE DIVERS ORDRES.
cheminent par les lentilles perméables, tantôt s'élevant,
tantôt s'abaissant, tantôt se partageant en plusieurs nappes,
suivant la composition du terrain, et viennent buter contre
le pied du Sahel, formé par les puissantes assises du terrain
sahélien (miocène supérieur). SMnfiltrant aux altitudes de
120 à 150 mètres, elles arrivent au pied du Sahel sous un sol
dont l'altitude maximum est de 50 mètres vers les Quatre-
Chemins et s'abaisse de plus en plus vers Maison-Carrée d'une
part, vers le Mazafran de l'autre. Leur pression hydrosta-
tique est suffisante pour les faire remonter partiellement au
jour par une foule de crevasses naturelles. On a pensé qu'elles
devaient avoir sous la mer un exutoire direct et cette opi-
nion n'a rien d'invraisemblable.
Beaucoup de sondages ayant fourni des résultats utiles
sont compris dans une bande de 36 kilomètres de longueur
et 7 à 8 kilomètres de largeur. Tous n'ont pas donné de
l'eau jaillissante, et beaucoup ne fournissent que de l'eau
arrivant à 5 ou 6 mètres sous le sol. Mais avec des engins
élévatoires (norias ou pompes) ils donnent des débits consi-
dérables, et beaucoup de particuliers s'accommodent parfai-
tement de ce résultat.
Presque tous empruntent l'eau de la nappe supérieure
qui se rencontre ordinairement entre 25 et 45 mètres de
profondeur.
D'autres parties du département d'Alger, ainsi que du
département d'Oran, sont riches en sondages.
Hodna et Sahara du dégMirteineiit de Constantlne. -— DanS de
vastes régions du globe où il ne pleut pas, il peut exister
néanmoins à proximité de la surface, des nappes d'eau qui
y pénètrent latéralement de régions éloignées.
Ainsi, les puits artésiens du Sahara, qui jaillissent géné-
ralement de couches quaternaires sont alimentés, du moins
ROLE DES UTUÛOLASES SIMPLES. 175
en partie, comme Ta déjà reconnu M. DubocqS par des
nappes subordonnées au terrain crétacé, lis représentent une
Téritable imitation artificielle des sources jaillissantes du
même pays.
La vaste région qui s'étend du 2' au 5* degré de
longitude orientale, du 55* au 32* degré de latitude, n'est
point stérile sur toute son étendue. On y constate des
alternances de hauteurs et de dépressions qui viennent
fréquemment borner un horizon que l'on croyait sans
limites, ainsi que, des dunes de sables et de vastes maré-
cages. Les lacs salés ou chotts et les dunes de sables,
à la surface incessamment agitée et remaniée par le
vent, sont seuls absolument stériles. Des arbrisseaux
rabougris et noueux, retenant le sable ou la terre autour de
leur pied, de manière à former une série de buttes natu-
relles; quelques graminées, des plantes littorales, qui ne
prospèrent que dans les terrains contenant une certaine
proportion de sel marin, couvrent le sol du désert, et sont
incessamment rongées par les moutons et les chameaux
des nomades, auxquels leurs feuilles servent de pâtures
pendant les mois de l'hiver.
On rencontre de plus aux abors des cours d'eau qui des-
cendent de l'Aurès, tels que l'Oued Biskra, l'Oued-el-Abiod,
rOued-el-Arab, d'assez vastes espaces cultivés en céréales,
pour lesquelles on utilise les eaux que les torrents four-
nissent en abondance en hiver et au printemps, jusqu'à la
fonte des neiges qui couvrent les cimes de l'Aurès. A ce mo-
ment les blés et les orges atteignent leur maturité; on les
coupe et le terrain reçoit, au retour de la saison d'hiver, de
nouvelles semences. Les cultures les plus variées prospèrent :
des arbres à fruits, tels que le figuier, l'olivier, le grenadier;
* Annales des Mines, 5» scrie, t. H, p. 248, 1852.
174 ROLE M8 USHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
des légumes, fèves, oignons» pastèques, le piment indispen-
sable à la cuisine arabe, le henné et le tabac. On plante
de plus dans les clairières, de Torge qui se consomme le
plus souvent en vert (djedria) et donne deux eoupes suc-
cessives au printemps, ainsi que quelques blés hâtife« Leur
irrigation exige, d'après des relevés pris aux environs de
Touggourt, environ 70 litres par jour; si Ton ajoute une
quantité égale pour les cultures maraîchères du jardin,
on arrive à 140 litres par vingt-quatre heures, soit a un
décilitre par minute et par dattier, en rapportant tout
le volume d'eau à cet arbre, qui sert habituellement de
terme de comparaison pour apprécier l'importance des
cultures des oasis. L'abondance des eaux forme ainsi la
seule limite du développement que peuvent recevoir les
plantations de dattiers, car les débouchés en sont faciles et
assurés.
Dans les plateaux, les eaux qui descendent des montagnes
et les nombreuses sources qui prennent naissance au voisi-
nage des couches relevées des montagnes et des assises hori-
zontales du terrain pliocène du Sahara, pourvoient en
quantité suffisante aux besoins des trente-six oasis du Ziban.
Dans le désert de sables ou Souf, qui ne compte que huit
villages ou oasis, les palmiers sont plantés au fond de trous
coniques de 6 à 12 mètres de profondeur, et trouvent dans
le sol, à une faible distance, une nappe d'eau qui leur assure
une végétation puissante.
D'après M. Ville, dans le Hodna, c'est un terrain tertiaire
marin qui donne les eaux jaillissantes. Il y a plusieurs
cuvettes souterraines, nettement accusées par la stratification
des couches, et dans chacune desquelles le thalweg repré-
sente un maximum d'eaux jaillissantes; ce thalweg souter-
rain renferme lui-même un point de débit maximum. Les
principaux cours d'eau superficiels correspondent en général
ROLE DES LITHOCLASES SIMPLES. 175
aux thalwegs souterrains. Dans chaque cuvette, il y a un
régime spécial de nappes souterraines et par suite, d'eaux
jaillissantes; plusieurs nappes sont superposées, à cause de
Talternance fréquente des couches de grès sableux et de
marnes. Les eaux de pluie qui tombent directement sur les
affleurements des couches absorbantes et les cours d'eau
abondants qui descendent des montagnes secondaires ou
miocènes limitant au sud et au nord le bassin du Hodna^ et
qui passent sur les affleurements des couches tertiaires,
servent à l'alimentation des nappes souterraines.
Mmh t Sources JaOttflMUites mitarcllcii. — De tcllcS SOUrCCS
émergent fréquemment dans le Zab occidental du dépôt
quaternaire saharien*. Elles ne peuvent être fournies par les
eaux de pluie qui tombent dans l'espace très restreint com-
pris entre les bouillons de ces sources et le pied des mon-
tagnes crétacées limitant au nord, le bassin du Sahara;
la quantité d'eau de pluie qui tombe annuellement est en
en effet très faible, et le bassin hydrographique qui la reçoit
est tout à fait insignifiant. La température élevée de certaines
sources sortant du terrain saharien montre qu'elles viennent
d'une assez grande profondeur; leur alimentation est assu-
rée par les belles sources des divers étages du terrain cré-
tacé, sources dont les unes arrivent directement jusqu'au
jour et dont les autres passent souterrainement du terrain
crétacé dans le terrain saharien.
Dans le Zab occidental on voit de magnifiques sources
jaillissantes émerger soit du terrain saharien, soit du terrain
crétacé inférieur, soit du terrain nummulitique à la limite
du contact du terrain saharien. Ainsi l'Aïn Oumach surgit
par plusieurs bouillons ; quelques-uns sortent du terrain
^ Ville. BulleiiH de la Sociélé géologique, 2* série, t. XXH, p. 115.
176 ROLE DES LITIIOGLASES DE DIVERS ORDRES.
crétacé à la température de 27%33 et débitent ensemble
d24 litres par seconde.
Tout près de là, à quelques mètres de distance, il y a plu-
sieurs gouffres, dans le terrain saharien, d*où émergent des
sources jaillissantes; la profondeur a été trouvée de plus de
40 mètres pour l'un d'entre eux. Un de ces gouffres débite
10 litres d'eau par seconde à la température de 26**,35. Cn
deuxième gouffre débite 50 litres d'eau par «econde à la
température de 26*, 53. D'autres sources émergent sur les
deux rives du ravin d'Oumach, qui produit en somme un
cours d'eau dont le débit est de 217 litres à la seconde.
1 BUr I Soarees BatareHes et rora«e•^ — LcS SOUrCCS arté-
siennes naturelles de l'Oued Rhir qui sont surtout
nombreuses près d'Ourlana se divisent en deux groupes : les
behour (mers), au singulier behar ou bahr et les chrïaU.
Les behours sont de grandes nappes d'eau circulaires
d'un diamètre variable, ordinairement 10 à 40 mètres, qui
sont en communication avec des nappes situées à diverses
profondeurs. Ces behours ont une profondeur considérable,
si l'on en juge par la couleur vert foncé de leurs eaux. Ils
renferment les mêmes petits poissons qu'on trouve dans les
puits jaillissants, ainsi que des paludines des mélanies et
des mélanopsides. Le behar de Touggourt est le plus consi-
dérable de tous; sa surface est irrégulière; elle a 2000 mètres
environ de longueur sur une largeur variable de 200
à 300 mètres; sa profondeur au centre est de plus de
40 mètres. Ordinairement les behours sont dans des terrains
tout à fait plats; cependant quelques-uns se trouvent au
milieu de terrains légèrement bombés; leurs bords sont cou-
pés nettement et à pans abrupts. 11 est impossible d'admettre,
« D*apré8 V. L. Ville.
ROLE DES UTHOOASES SIMPLES. 177
comme on l'a supposé, qu'ils résultent de réboulement
d'anciens puits creusés par les indigènes; les puits taris
ou puits morts, bien qu'ayant reçu le nom de behours
comme les appellent les Rouara, ne produisent que des
mares infectes, le plus souvent sans aucun écoulement au
dehors. Les chrïats sont des sources existant au sommet
de petits mamelons coniques, de 3 à 4 mètres de hauteur
au-dessus de la plaine saharienne. Au sommet de ces ma-
melons, il y a une petite dépression, rappelant un cratère,
dans laquelle la source forme une nappe d'eau vive. Une
tranchée pratiquée sur le bord de cette cuvette donne écou-
lement à l'eau qui sert toujours à l'irrigation de quelques
palmiers.
Les nappes souterraines ont donc, pour ainsi dire, des
évents à la surface, non seulement par la voie directe des
puits dont il va être question, mais aussi par le réseau com-
plexe des conduits naturels qui aboutissent aux behours et
aux chrïats.
En général il existe une nappe principale, parfois unique,
renfermée dans des sables quartzeux et associée à des mar-
nes compactes, marnes sableuses, sables argileux, le tout
alternant avec des allures lenticulaires et variables. Sa
pression hydrostatique est maxima dans la région d'Ourlana,
où les puits ont atteint la nappe vers 70 mètres. L'eau jaillit
dès que la sonde à percé la couverture. En maint endroit,
Teau s'est elle-même frayé passage jusqu'à la surface : d'où
les sources naturelles.
Dans la zone privilégiée du Sahara qui comprend une qua-
rantaine d'oasis groupées sous le nom d'Oued-Rhir, et dont
Touggourt est la capitale, les jardins sont alimentés par
quelques sources naturelles et par de nombreux puits arté-
siens (fig. 90).
La ligne d'eau de l'Oued-Rhir peut être considérée comme
178
ROLE DES LITUOCLiSES DE DIVERS ORDRES.
BATNA
TEL
0-
Ouargla'^,!^^ ^^""'^^ ^'^^'^ Bet<fha^
Echelle
tf « 30 9UUS0 ti»7OM9O10O
I L__J , . , L_J L__. i_
okil.
Fïg. 90. — Carte des fora^^es artésiens de la province de ConsUintine (sabdivision de Batna). Us
petits carrés noirs indiquent les puits forés jaillissants; les triangles, les puits forés donnant
des eaux ascendantes; les ronds, les puits abandonnés par les Arabes et terminés par les ate-
liers de sondages. Les chiffres placés à côté de ces différents signes indiquent le nombre de
puits en chaque point. — D'après M. Jus.
ROLE DES LITHOCLASES SIMPLES. , 179
reconnue depuis l'oasis d'Ourir, au sud-ouest du chott Mel-
Rhir, jusqu'au récent sondage de Schmourra, près de Toug-
gourt, soit sur 120 kilomètres*. Elle offre tout son dévelop-
pement aux environs d'Ourlana, où les puits artésiens fran-
çais ont des débits de 3000 à 3500 litres par minute. Sur
toute cette longueur, des recherches suffisamment profondes
semblent appelées à fournir des eaux jaillissantes. Elles de-
vraient être faites, non aux oasis actuelles, dont certaines
sont mal situées, et où des puits trop multipliés peuvent se
nuire, mais en des points convenablement choisis, où se
créeraient de nouveaux centres.
Plus au sud, vers Toued Mya et l'oued Igharghar, il y a éga-
lement des eaux artésiennes, dans des conditions de moins
en moins favorables, à cause du relèvement des couches.
A Ouargla, où Ton trouve de nombreux puits artésiens in-
digènes, les sondages sont assurés du succès.
Les premiers puits artésiens de l'Oued-Rhir sont très an-
ciens. Ebn-Khaldoun, écrivain arabe du quatorzième siècle,
en fait mention, et on peut admettre que des puits jaillis-
sants y existaient bien antérieurement; car ce pays était déjà
peuplé de Berbères, lorsque Sidi Okba entreprit la conquête
de l'Afrique, et il est ainsi assez difficile de supposer que
l'emploi des puits artésiens ait été introduit par les Arabes,
à la suite de leur conquête. Ces puits ont une section qua-
drangulaire, d'environ 0",80 de côté; leur profondeur, qui
estvariable suivant les localités, peut être estimée en moyenne
entre 50 et 60 mètres. Pour les creuser les indigènes em-
ploient une sorte de houe a manche très court et très incliné
sur le plan de l'outil qui leur sert également pour le travail
des jardins*
En 1854, la corporation de ces hommes habiles, surnom-
* Rollandi Aiêociation françaue pout* tavancement de$ sciences. Reims, 1880, p. 547.
180 ROLE DES LITHOGLÂSES DE DIVERS ORDRES.
mes les Meallem (savants) et R'tassin (plongeurs), qui avaient
créé et vivifié ces belles oasis du Sud, n'existait plus que
de nom. Des perles considérables l'avaient cruellement
éprouvée de 1845 à 1854, et, malgré le prestige dont elle
était entourée, on montrait peu]d'émulation pour apprendre
un métier aussi périlleux, et dont la conséquence était la
phthisie ou une mort prématurée.
Dès Tannée 1844, M. l'ingénieur en chef des mines Fournel
avait pressenti le rôle important que la sonde artésienne
était appelée à jouer dans la province de Gonstantine, pour
doter d'eau potables les régions sahariennes qui en sont
dépourvues sur d'immenses étendues. Il ne put, à celle
époque, qu'entrevoir pour ainsi dire, ces vastes plaines que
nos colonnes n'avaient pas encore sillonnées dans tous les
sens. Aussi, le premier essai de sondage fut^i-il entrepris,
sur la proposition de M. Fournel, auprès de Biskra, c'est-à-
dire à la porte même des régions sahariennes. Par suite des
difficultés survenues dans l'exécution des travaux, le son-
dage dut être abandonné, avant d'atteindre la nappe arté-
sienne qui existe probablement à l'aplomb du point choisi.
Ce premier insuccès fit susprendre, pendant plusieurs
années, les travaux de sondage dans la province de Gonstan-
tine.
M. l'ingénieur des mines Dubocq fil, en 1848, un voyage
à Touggourt. 11 visita les principales oasis échelonnées entre
ce point et Biskra, étudia les terrains au double point de vue
de la géologie et de l'hydrologie et, dans un mémoire qui fut
publié en 1853*, il fit connaître les nombreux puits jaillis-
sants creusés par les indigènes avec les moyens primitifs
dont nous venons de parler. 11 démontra sans peine le suc-
* Annales des mines, 5« série, t. II, p. 249, 1853.
ROLE DES LITHOGLASËS SIMPLES. 181
ces que la sonde française remporterait dans les terrains des
oasis. M. le général Desvaux* embrassa avec enthousiasme
J'idée de créer des gîtes d'étapes sur la route militaire de
Biskra à Toughourt, de multiplier les oasis dans les solitudes
du Sahara, et de rendre une vie nouvelle à des oasis déjà
existantes, mais qui dépérissaient par suite de la diminution
des débits de leurs puits jaillissants. Les projets du général
Desvaux furent mis immédiatement à exécution. Les son-
dages de rOued-Rhir furent d'abord confiés à M. Jus, ingé-
nieur de la maison Degousée et Charles Laurent qui fournit
tout le matériel nécessaire.
En 1858, on entreprit, dans le bassin du Hodna, des puits
artésiens qui auraient ouvert un vaste champ à la colonisa-
tion européenne, s'il eût été possible d'irriguer ses plaines
incultes.
Plus tard, quelques sondages furent exécutés dans la par-
tie septentrionale du Tell de la province, à la suite des
éludes géologiques de M. l'ingénieur des mines Tissot.
Dans un ouvrage intitulé : Voyage d'exploration dam les
bûisins du Hodna et du Sahara j publié en 1868, M. Ville a fait
Tétude géologique des bassins artésiens de la province de
Constantine et a décrit tous les puits artésiens creusés
jusqu'en 1864, en indiquant les conséquences générales à
déduire de l'ensemble de tous les travaux.
Plusieurs bassins artésiens ont été reconnus dans la pro-
vince de Constantine; ce sont les suivants en allant du sud
au nord.
1** La grande cuvette du Sahara. Le chott Melrhir qui en
occupe la partie la plus basse se trouve à 25 mètres environ
au-dessous du niveau de la mer, à son extrémité occidentale ;
2* Le bassin d'El-Outaïa ;
* Même recueil, 5- série, t. XIV, p. 421, 1858.
182
ROLE DES LITHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
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ROLE DES UTHOGLASES SIMPLES.
183
5" La cuvette du Hodna ;
4* La région des petits lacs salés, formant une large bande
dirigée de TO. N. 0. à TE. S. E. au milieu du Tell.
5* La zone septentrionale du Tell ^
Ces différents bassins correspondant à des ondulations
dans le terrain quaternaire du Sahara, constituent autant
de cuvettes artésiennes distinctes.
La figure 91 indique, d'après M. Charles Laurent*, la
disposition des puits forés entre Tamelath près Temacin et
Biskra.
Il n'est pas inutile de comparer ce qu'était TOued-Rhir,
d'une part en 1856, deux années seulement après la prise
de Touggourt et alors que la paix et la confiance venaient de
renaître dans le Sahara, et d'autre part en 1880, c'est-à-dire
23 années après l'introduction de la sonde artésienne dans
le Sahara.
Nombre d'habitants. . . .
— d'oasis et annexes .
— de palmiers. . . .
— d'arbres fruitiers. .
— de puits artésiens
• arabes
— de behour ....
— de puits artésiens
français
— de litres à la minute.
Disse.
■111880.
■Il nos ■!! 1880.
6.67â
31
359.300
40.000
282
21
52.767
12.827
37
517.565
90.000
434
16
59
124.916
6.055
6
158.263
50.000
152
59
72.149
D'après M. Jus qui a pris une grande part à ces travaux, les
^ On peut Toir pour plus de détails le rapport de H. Dubocq sur le Sahara oriental de
U province de Constantine. Rapport du jury de VExposition universelle de i9Ql, p. 32.
* BulUtin de la Société géologique, 2* série, t. XIY, 1856.
i8i ROLE DES LITHOCLASES DE DITERS ORDRES.
sondages exécutés dans le Sahara et le Hodna du départe-
ment de Gonstantine, de 1856 à 1882, se sont élevés au
nombre de 199 représentant une profondeur totale forée
de 16 kilomètres 325 mètres et ayant fourni 270 nappes
d*eau ascendantes et 552 nappes jaillissantes, débitant
ensemble 209759 litres à la minute, desquels on a capté
194105 litres à la minute, soit 252594 mètres cubes par
24 heures.
Les recherches d'eau potable exécutées pendant la même
période représentent une profondeur totale forée de 6 kilo-
mètres 457 mètres et ayant fourni 258 nappes ascendantes
potables et saumâtres.
Au 1* juillet 1882, la profondeur totale forée dans le dé-
partement de Constantine était donc de 22 kilomètres 780
mètres.
La dépense totale occasionnée par tous ces travaux s'élève
à 3 897 524 francs.
■uuMn-BiMi-Ha4j«r 9 Mmee tfMnMlle^ — Parmi Ics nom-
breuses sources thermales de l'Algérie, il en est qui sortent
de cassures du terrain tertiaire. Telles sont les sources ther-
males d'Hamman-Bou-Hadjar (bains Père des pierres) situées
à 50 kilomètres environ au S. 0. d'Oran, près de l'extrémité
occidentale du Sebka d'Oran. Elles se font jour à travers
quatre longues fentes, à peu près dirigées N. S., qui ont
coupé les couches du terrain tertiaire et que l'on peut con-
sidérer comme de véritables fllons d'eau.
Ain NonlMy, près Hoateffuiem. — C'cst d'uUC faille qUC SOft,
d'après M. Pouyanne, la source thermale d'Aïn Nouissy près
Mostaganem, comme l'indiquent les figures 92 et 93.
« L. Ville. Provinces d'Alger et (FOran, 1851, p. 258.
*i7P««
ROLE DES LITHOGIASES SIMPLES. 185
En Egypte, comme en Algérie, les anciens ont
Fig. 91 — Plan montrant U position de la source S d'Aîn Nouissy prés Hostaganem qui sort
d'une faille dirigée ouest-est; m, terrain miocène; p, terrain pliocène. — D'après M. Pouyanne
laissé des témoignages de leurs connaissances relativement
./.. ■ V . : .'
Fig. 95. — Coupe dirigée suivant la ligne AB du plan précédent montrant la position de la
source S d'Ain Nouissy, sur une faille séparant le terrain miocène m du terrain pliocène p,
— Diaprés M. Pouyanne.
à la « mer sous terre, » courant souterrain qu'on a supposé
provenir du Darfour.
C'estainsi que la grande oasis de Thèbes, de 100 kilomètres
de long sur 8 à 16 kilomètres de large, ne peut avoir dû sa
fertilité qu'aux puits forés dont son sol est criblé.
186 ROLE DES LITHOCLASES DE DIYERS ORDRES.
D'après M. Schweinfurth, les cultures de cette oasis dé-
pendent actuellement de l'existence de 75 sources d'arro-
sage, fournies par des puits forés. Elles sont toutes thermales
et d'une température variant de 25 à 30*. Ces puits creusés
par un procédé inconnu datent, sans exception, de temps an-
ciens ; la profondeur des forages qui varie de 48 à 80 mètres
est en général de 60 mètres. Les sources ensablées, dites
aveuglesy se comptent par centaines. Quatre temples dont la
construction remonte au moins au cinquième siècle avant
J.-C, et sept grands châteaux du temps de l'empire Romain,
rappellent l'antique prospérité de ce pays et l'importance
qu'il devait avoir aux premiers siècles de notre ère. Des
ruines nombreuses de maisons construites en voûtes, des
couvents, des métropoles du temps chrétien bâties en
briques crues, des colombiers {borg) innombrables, tous
plus ou moins bien conservés, se trouvent disséminés sur
tout le pays*.
— Il est remarquable qu'en Auvergne un
grand nombre de villages soient construits sur les argiles
sableuses et très rapprochés de plateaux basaltiques. Cette
préférence n'est pas due au hasard; les argiles sont imper-
méables et l'eau qui s'écoule sous les plateaux de basalte est
arrêtée par les argiles et forme des sources. C'est la nais-
sance de ces sources, à la jonction des deux roches, qui dé-
termine la situation des villages.
Toutefois, ces sources qui coulent de la tranche des pla-
teaux basaltiques sont moins abondantes que celles qui
naissent à l'extrémité des coulées modernes, dont il a été
question plus haut. Les basaltes, en effet, maintenant ré-
* Bulletin de la Société de géographie, 0« série, t. VU, p. 628.
Leooq. Eattx minéraleê de V Auvergne.
ROLE DES LITHOGLÀSES SIMPLES. 187
duits à de simples lambeaux, permettent à Teau de s'échap-
per par de nombreuses issues, tandis que les coulées mo-
dernes recueillent et filtrent l'eau de longues et profondes
vallées.
Il existe plusieurs sources de cette catégorie aux environs
de Clermont.
Telle est celle qui, à Gergovia, sort sous le basalte, du côté
de Clermont et qui probablement fournissait l'eau aux
Gaulois, pendant qu'ils soutenaient si vaillamment leur po-
sition devant César.
Telles sont encore, parmi beaucoup d'autres, celles qui
alimentent les fontaines de Besse; celles de Bergonne près
d'Issoire, une très belle source près du lac Chauvet, et plu-
sieurs autres dans le massif du Cézalier.
Dans le Cantal, le basalte fissuré verticalement laisse des-
cendre les eaux qui tombent sur le plateau jusqu'aux lapillis
basaltiques décomposés et transformés en une sorte d'argile
imperméable. C'est le cas, d'après M. Fouqué, pour la source
du ruisseau de Faillitoux, l'un des affluents de la rive droite
de la Cère, et pour les sources froides du village de Chau-
desaigues.
HMiie-iioire. — D'autres sources importantes sortent dans
les mêmes conditions. Le terrain volcanique du plateau du
Velay présente, outre les nappes de basalte pierreux qui sont
remplies de fentes, et les scories et cendres à l'état fragmen-
taire (clappiers), des assises de basalte transformé en terre
noirâtre assez compacte, ainsi que des cendres et scories
agglutinées, qui arrêtent les eaux.
C'est par la même raison que plusieurs anciens cratères
contiennent des lacs, dont le niveau est supérieur à celui
de la plus grande partie des terrains environnants; comme
le lac de la Godivelle, dans la montagne de Cézalier.
188 ROLE DES UTUOGUSES DE DIViiiRS ORDRES.
iriMide) eoatrée d'Aatrim. — Un dernier exemple nous sera
fourni par les grandes nappes de basalte et de dolérites mio-
cènes du comté d'Antrim en Irlande. Imperméables par
elles-mêmes, elles permettent à l'eau, à cause de leurs
nombreuses fissures, de s'infiltrer dans leur masse et de
descendre jusqu'aux lits argileux qui sont leurs subordonnés,
de manière à produire plusieurs zones de sources.
En outre, le dépôt de minerai de fer, qui constitue un ho-
rizon à 200 mètres plus b^s, contient une argile imper-
méable avec bauxite, qui provoque aussi un niveau d'eau,
et manifeste son affleurement par un grand nombre de
sources.
Terrains crétacés.
Dans le nord de la France et dans diverses autres cen-
trées, la base de la craie blanche, vers son contact avec les
roches argileuses sous-jacentes, présente un niveau d'eau
important, pour les puits qui y trouvent leur alimentation,
ainsi que pour les sources qui en jaillissent, lorsque le sol
naturel est assez profondément entaillé pour leur donner
issue.
Les lithoclases de la craie sont souvent très étendues, ainsi
qu'on le voit sur les falaises de la Normandie, où l'œil les
suit du haut en bas des escarpements verticaux de 100 mè-
tres. Voir plus haut la figure 71, page 134.
Ces nombreuses lithoclases expliquent comment, jusqu'à
une certaine hauteur, variable avec les saisons, au-dessus de
la couche imperméable, la craie est comme une éponge
saturée; aussi il n'est pas nécessaire de creuser jusqu'à cette
couche pour trouver l'eau.
ROLK DES UTfiOaÂSES SIMPLES. iK9
Si les terrains tertiaires donnent, comme on vient de le
voir, fréquemment des eaux jaillissantes, les terrains
crétacés, en raison de la plus grande étendue de leurs bas-
sins, les surpassent bien souvent par l'abondance de leur
débit. Toutefois, et comme on devait s'y attendre, le résultat
u est ordinairement obtenu qu'après des forages plus pro-
fonds.
de ChAloM-Mr-MarM. — LcS puitS pcrcés daUS IcS
plateaux crétacés des environs de Châlons-sur-Marne donnent
des notions, quant au régime de l'eau phréatique, comme
l'indique page 62, la figure 56. On y voit comment des
Fi^. 94. — Ondulation de l'eau phréatique dans le plateau du camp de Châlons ; NN, furface
sDpérieure de la nappe d'eau A son miDimum (septembre) ; S, S, S, S, sources permanentes ou
sommes. CC, craie fissurée; AÂ, couche de craie marneuse qui arrête les eaux d'infiltration
de U craie.
puits qui sont souvent très profonds, rencontrent la nappe
à des niveaux très différents, même sur des points voisins;
le maximum et le minimum dans chacun de ces puits
s'écarte aussi du niveau des eaux courantes : la rivière Soude
à Chenier; la Marne au Moulin Saint-Michel, à Yérigneul et
à Pogny; le ruisseau de Man au Moulin Picot.
Dans le plateau du camp de Châlons (fig. 94), le niveau
général moyen de l'eau phréatique présente des ondulations
assez prononcées, en rapport avec celles de la surface du
sol; elle s'élève jusqu'à 20 mètres au-dessus du niveau d'é-
tiage, loin des ruisseaux où elle peut se déverser sous forme
de sources permanentes, telles que celles de Mourmelon-le-
190 ROLE DES LITHOCLASES DE DIYERS ORDRES.
Grand, de Clairfond, de Cuperly et de Puits Gheneu; cette
dernière consiste en eaux dites bâtardes qui tarissent fré-
quemment.
DépariMiettt de la Marae et réfioM voMiMft*. — Si leS SOUrCCS
sont rares sur le plateau crayeux, il n'en est pas de même le
long de la falaise que Ton appelle les monts de Ghampagne.
La séparation entre la craie et les marnes crayeuses est mar-
quée par des sources nombreuses et assez abondantes. Aussi
toutes les communes qui se trouvent au pied des monts de
Ghampagne, Saulces^hampenoise, Yaux-Ghampagne, Cou-
lommes, Tourcelles, Gontreuves, Mont-Saint-Martin, Lin,
Manre, sont-elles bien pourvues d'eau.
Gomme il arrive dans les terrains perméables, les sources
de la craie sortent toutes à peu de hauteur au-dessus des
thalwegs des vallées les plus profondes; jamais on ne les
trouve à flanc de coteau. Ge sont des sources plus ou moins
considérables qui habituellement portent dans la Ghampagne
sèche le nom générique de Somme.
Ainsi, dans le département de la Marne, la source de la
Suippe s'appelle Sommcsuippe; celle de la Vesles, Somme-
vesles; celle de la Tourbe, Sommetourbe; celle de laBionne,
Sommebionne; celle de l'Yèvre, Sommeyèvre; celle du Pj',
Sommepy; celle de la Soude, Sommesoude; dans le déparle*
ment de l'Aube, la source du Puits s'appelle Sompuis; celle
de rOrvin, Sommefontaine» et une autre, Somsous,
« Les eaux pluviales, dit Belgrand à cette occasion, ne
ruisselant jamais à la surface du sol, les sources sont bien
en effet l'origine, le sommet de chaque ruisseau. » Ce nom ^
des sources initiales s'est étendu jusqu'en Ghampagne hu-
mide, où il n*a plus la même signification ; car le terrain
* Belgrand. Eaut nouvelles.
ROLE DES LITBOaiSES SIMPLES. 191
étant imperméable, le cours d'eau remonte, en temps de
pluie, plus haut que la source désignée sous le nom de
Somme. Telles sont : la source de l'Aisne (Meuse) Sommaine ;
la source de la Voire (Haute-Marne) Sommevoire ; la source
d'un affluent de l'Ornel (Meuse) Sommelonne*.
On doit encore considérer comme dérivant du même mot
les noms suivants : source de l'Ain, Champagne sèche (Marne),
Sùuain; source de la Laines, Champagne humide (Haute-
Marne), Soulaines.
Il y a toujours près de ces sources un village ou un hameau
qui porte le même nom.
Dans les terrains crayeux, ainsi que dans les terrains ooli-
thiques, les noms Abîme, Bîms s'appliquent aux sources qui
jaillissent d'un gouffre; telles sont : à Balnot-la-Grange
(Aube), le Bime, source de la Marve; le Bime, à Cérilly
(Yonne) (voir plus haut, p. 148, fig. 81), une des plus belles
sources que la ville de Paris possède dans le bassin de la
Vanne; l'Abîme près Pilliers, vallée de l'Orvanne (Seine-et-
Marne). Dans la vallée de la Vanne, ce nom désigne un grand
nombre de sources qui jaillissent dans les marais.
Les niots CrOf Gouffre, Fosse, ont la même signification.
Ainsi on trouve les Gros, à Charmont (Aube), vallée de la Bar-
buisse, le Gouffre de la Prairie, près de Nemours (Seine-et-
Marne), vallée du Loing; la Fosse d'Yonne, à Tonnerre, vallée
de l'Armançon ; la Pevie-Fosse (la Laide-Fosse), vers les sources
de la Biaise. Ces sources jaillissent toutes d'une excavation
profonde.
On trouve encore dans la même région et sur les bords de
la Brie, des sources dont le nom dérive du mot sourdre :
* En Algérie, et principalement dans les hauts plateaux du Saliara, d*après une re-
niarque de M. Pérou, un grand nombre de petites localités ou de campements arabes
situés autour des rares sources de cette région portent le nom de Râs ; Ràs-el-Oued,
Ràs-el-Ain, Râs-el-Ma, Râs-el-Ayouiit etc.; ce qui se traduit littéralement par le mot
tommet ou tétc de la rivière;
103 ROLE DBS LITHOGLASES DE DIVERS ORDRES.
Source de la Soude, affluent de la Sommesoude, Soude
Notre-Dame^ et un peu plus bas sur le même ruisseau, Sour
dron. Source de Cubrj-, bord de la Brie, près d'Épernay
(Marne) Sourdon*.
On a encore conservé dans le bassin de la Seine quelques
noms gallo-romains qui s'appliquent à certaines grandes
sources; en Basse Bourgogne, c'est le nom de Douix, Douille,
Duée, Duis, qu'on trouve le plus souvent. Nous citerons no-
tamment les sources suivantes, auxquelles ce nom a été
donné : source initiale de laSeine, àSaint-Germain-la-Feuille
(Côte-d'Or), Douix; la belle source de Châtillon-sur-Seine,
Douix; grande source de l'hôpital de Bar-sur-Aube, Dkuu;
source près de Montbard (Côte-d'Or), Douille; source près
de Monthérie, vallée de la Renne, affluent de l'Aujon, te
DuiU.
Ce nom se trouve aussi en Champagne et en Brie : source
dérivée à Bouilly (Aube), Cro {cretix, gouffre) de Dhuie;
grande source de Soulaines (Aube), Dhuis; source à Aix-en-
Othe, vallée de la Vanne (Aube), Duée; source de Pargnj
(voir plus haut p. 83, fig. 47) dérivée à Paris, bassin de la
Marne (Brie) Dhuis. Ces noms, ajoute Belgrand, sont évidem-
ment dérivés du mot latin ductus (aqueduc), dont nous avons
tiré aussi le mot conduite. Il y a une faute d'orthographe
dans le mot dhuisj Vh devrait être supprimé.
On fait aussi usage, en Basse Bourgogne et en Champagne,
des noms suivants, qui s'appliquent à la source initiale
d'un cours d'eau : source de l'Arce (Aube), Fontarce; source
de la Vanne (Aube), Fonlvannes; grande source des Trannes,
vallée d'Aube, les Fonts.
Il est évident que la première syllabe de ces noms est déri-
* Dans le Soissonnais, tes lieux dit* du cadastre qui correspondent aux sources de
l'argile plastique portent, presque partout, les noms de Soudray, Soudroy.
ROLE DES LITHOCUSES SIMPLES. 193
vée du mot latin foM. Ordinairement le village bâti près de
la source porte le même nom.
Dans le bassin de la Seine, le terrain néocomien donne
naissance à des sources qui, à cause de la force qui les fait
surgir, ont été nommées artésiennes*. Les eaux absorbées par
les terrains oolithiques sont si abondantes que, lorsque ces
calcaires s'enfoncent sous les terrains néocomiens, une partie
de l'eau emprisonnée se fait jour çà et là par des puits ou
cheminées, au travers des couches argileuses qui les recou-
vrent. Telles sont les sources de la Barse à Yendœuvres, de la
Laines à Soulaine, de la Voire à Somme-Voire, de Somme-
lonue, de Brousseval. Suivant M. Tombeck, plusieurs de ces
sources jaillissent de puits profonds qui descendent évidem-
ment jusqu'au terrain jurassique.
•ementHosaie. — Lcs observatious intéressantes
que M. Pérou a faites en Champagne septentrionale méritent
d'être rapportées*. Tout autour du plateau de la Champagne
septentrionale, dite Pouilleuse, dont l'altitude dépasse rare-
ment 200 mètres, de nombreuses rivières aux eaux abon-
dantes viennent prendre naissance. Telles sont, pour ne
citer que les principales, le Fion, la Vière, l'Auve, l'Yèvre,
la Moivre, la Yesle, la Noblette, la Tourbe, la Bionne, la
Suippe (figure 96).
Dans ces rivières, pas de ramifications du cours supérieur,
aucun affluent, une source unique, habituellement puissante,
parfois presque vauclusîenne, et toujours assez abondante
pour faire marcher des moulins, à quelques centaines de
mètres de sa sortie de terre.
Autour de ces sources, seuls points habitables de cette
* Belgrand. Ouvrage précité, p. 111.
' Péron. Association française, session de lieimst 1880, p. 534.
13
iU
ROLE DES LITHOCLiSES DE WVERS ORDRES.
région presque déserte, se sont groupés des villages qui ont
pour la plupart emprunté leur nom aux sources auxquelles
ils doivent la vie, en rappelant, comme on Ta vu plus haut,
en même temps Torigine des rivières qui en sont formées.
EdidJe
âcpbl
Fig. 96. — Carte montrant la disposition de quelques-unes des principales sources jaillis»nl
des plateaux crétacés dans le N.-E. de la France, ainsi que celles de la Dhuis qui sounieai
du terrain tertiaire.
L'explication du phénomène paraît se trouver en grande
partie dans la nature et la disposition des divers strates géo-
logiques qui constituent le sol et le sous-sol de cette partie
de la Champagne (fig. 97).
ROLE DES LITHOGLASES SIMPLES.
195
La zone de gaize argileuse forme, le long du ifersant occi-
dental de TArgonne, le sol de la région déprimée qui s'étend
au pied des collines, depuis Sainte-Menehould jusqu'au sud
de Givry-en-Argonne. Cette roche imperméable retient toutes
les eaux à la surface en empêchant leur infiltration dans
le sol, et elle donne naissance à un pays particulièrement
marécageux. Son affleurement est marqué par une ligne
presque ininterrompue d'étangs et de marais qui s'échelon-
nent parallèlement à la crête del'Argonne, c'est-à-dire paral-
lèlement à la direction des couches géologiques. Parmi les
principaux, il faut citer l'étang Le Roi, à l'ouest de Sainte-
Fig. 97. — Disposition des concbes appartenant au terrain crétacé dans une partie de la Cham-
pagne. — g, gaize de l'Argonne; Ci, argile de la gaize supérieure; Gr. sable vert à Pecten
atler; Ca, marne de la craie chlorilée ; âi craie tuffeau ; C, craie blanche à Micraster,
Menehould, les étangs d'Argers, de Trienval, d'Élize, de
Roussi-Pré, des Fosses, d'Oie, de La Lieue, de Noirlieu, de
Haronchêne, etc.
Au-dessus d'une assise sableuse superposée à la gaize, les
couches de craie forment un sol très ingrat, éminemment
perméable, qui absorbe avec la plus grande facilité les eaux
pluviales. Une très petite partie de ces eaux peut être arrêtée
par les marnes turoniennes et donner lieu, par places, à un
petit niveau aquifère secondaire ; mais la grande masse des
eaux descend et s'arrête dans les sables verts, où elle se réu-
nit aux eaux absorbées directement par les sables eux-mêmes,
le long de leurs affleurements.
196 ROLE DES UTHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
Ainsi il existe, au-dessous du plateau d'Auve, une puis-
sante nappe aquifère dont les eaux emprisonnées ont une
tendance à remonter, par toutes les issues, jusqu'à la hauteur
de leur niveau supérieur. Toutes les fractures qui sont si
nombreuses dans la craie donnent passage à ces eaux ascen-
dantes, et c'est là, en presque totalité, l'origine des sources
£i nombreuses et si abondantes que l'on voit tout autour du
plateau qui nous occupe.
Il suffît de rapprocher l'altitude de toutes ces sources de
celle de l'affleurement extérieur des sables verts et aussi
du niveau des étangs qui forment la bordure orientale du
plateau pour être frappé de la corrélation qui existe entre
ces diverses altitudes. Tandis que celle des étangs est en
moyenne de 160 mètres, les sources de l'Yèvre sont à 158 mè-
tres, celles de la Moivre à 150, celles du Fion à 154, celles
de la Vesle à 155, celles de la Suippe à 150, celles de la
Tourbe à 152, celles de la Bionne à 157, celles de l'Auve à
160, etc.
C'est donc ainsi, à une altitude de 50 mètres environ au-
dessous des sommets du plateau que se trouvent toutes les
sources. Aucune autre ne parait se montrer au-dessus de ce
niveau général, et cette circonstance s'explique facilement,
la force ascensionnelle des eaux étant déterminée et limitée
par leur niveau supérieur, lequel ne dépasse guère la cote
moyenne de 150 mètres.
Ces sources sont donc subartésiennes, et l'ascension des
eaux s'y fait, grâce à l'existence de cassures dans la masse
calcaire et marneuse qui surmonte la nappe aquifère.
L'existence de ces cassures, à la vérité, n'est pas facile à
constater, en raison de l'uniformité des assises crayeuses
qui ne permet pas de préciser, par la comparaison des
couches juxtaposées, la discontinuité de ces couches et leur
dénivellement relatif. Mais tout porte à croire cependant
ROLE DES LITHOGUSES SIMPLES. 107
qu'elles existent, et on a pu en constater des traces, notam-
ment près du village de Sommc-Bionne. On a prétendu en
outre que la plupart des sources sont alignées suivant des
directions sensiblement rectilignes, ce qui semble indiquer
que divers groupes pourraient devoir leur existence à la pré-
sence d'une même fracture.
Un autre caractère de ces rivières, c'est l'uniformité de
leur débit et l'absence totale de grandes variations dans leur
niveau. Elles ne connaissent ni ces crues subites que dé-
terminent si fréquemment les pluies abondantes dans les
rivières à réseau d'affluents très ramifiés, ni la sécheresse
habituellement provoquée dans ces mêmes rivières par les
chaleurs estivales.
MptfptemcBt de l'Aime. — D'Ârchiac a très bien étudié cette
disposition dans le département de l'Aisne*, où les glaises
bleues supérieures placées entre la craie à silex et le grès
vert sont importantes au point de vue hydrognostique.
Outre qu'elles donnent naissance aux sources de la Somme
et de l'Escaut (près du Catelet), elles retiennent la nappe qui
alimente la plupart des puits percés dans la craie.
Bien que cette nappe aquifère soit fort étendue, son
niveau est loin d'être constant; elle n'est pas continue et sa
pente n'est pas régulière. Il existe très probablement des
bassins en partie circonscrits ayant entre eux des relations
plus ou moins directes; il paraît y avoir, à ces profondeurs,
des circonstances comparables à celles qui sont connues
pour les nappes aquifères du terrain tertiaire*.
A Saint-Quentin, les glaises forment le lit de la Somme
et la nappe d'eau qui alimente les puits de la ville descend
au même niveau.
* Mémoireê de la Société géologique de France, %• série, 1. 1, p. 328, 1880.
' Cette manière de Toir est confirmée par le creusement des puits, qui, quoique très
198 ROLE DES UTHOCUSES DE DIVERS ORDRES.
Awë^wmm : mrrmmâimtmtmt ém Egiliel*. — Dans TarrondisSC-
ment de Rethel, les habitants des villages de la craie se pro-
curent souvent Teau au moyen de puits. Quand un puits
vient d'être creusé, il a d*abord un faible débit; ce n'est
qu'au bout d'un certain temps que l'eau arrive plus abon-
dam ment par paroiless.
Ces puits atteignent parfois une grande profondeur.
Âinsiy dans les villages élevés comme à Hannogne et Ban-
nogne, ils ont 60 mètres et plus; ils sont alors intaris-
sables. Il est d'ailleurs facile de rendre leur débit plus
considérable en les approfondissant ou mieux, en creusant
des galeries horizontales qui augmentent la surface de
suintement.
Comme on Ta déjà vu, les niveaux auxquels se rencontre
Teau dans les différents puits d'une même contrée, ne se
trouvent pas sur un plan horizontal, mais sur un plan in-
cliné vers les vallées. L'inclinaison de ce plan diminue dans
les sécheresses et augmente dans les hautes eaux ; en sorte
que les puits les plus éloignés des vallées sont ceux où le
débit commence à baisser. Il en est de même pour les
sources ; les plus élevées tarissent les premières.
La craie se colmate facilement. Ses pores sont bouchés
par les petites particules crayeuses amenées par les eaux, et
elle devient alors imperméable. C'est ce que prouve la pré-
sence de certaines mares dans les villages champenois; il
suffit de curer ces mares et d'enlever la boue crayeuse qui
en tapisse le fond pour que l'eau disparaisse. Pour le même
voisins, atteignent Teau & des profondeors souvent fort diflérentes, de même qu'anx
environs de diàlons. Dana les temps de grande sécheresse, un certain nombre de puits
creusés dans la craie tarissent complètement, tandis qu'à une très petite distance,
d'autres ne sont jamais privés d'eau. On a creusé, à Tune des fermes de Ferriëres, on
puits de 90 mètres sans trouver d'eau, et on a été obligé de l'abandonner, i cause d'an
grand dégagement de gaz qui asphyxiait les ouvriers, tandis que dans une ferme conti-
gue à la précédente, un puits qui n'a que 35 à 40 mètres ne tarit pas.
*' Meugy et Nivoit. Carte géologique de Reihel, 1878.
ROLE DES LITHOGLASES SIMPLES. 199
motif, il faut au contraire curer les puits de temps en temps
pour rendre les suintements plus abondants.
Anbe eC partlevUèrenieiit ImmsIb de Ui Vanne. — Le départe-
ment de TAube présente des faits semblables; d'après
LeymerieS les infiltrations qui pénètrent dans la craie s'ar-
rêtent aux couches marneuses de la partie inférieure et s'y
rassemblent en un grand nombre de points avec un volume
souvent considérable. C'est ainsi que la base de la falaise
crayeuse* l'un des traits principaux du relief du pays, se
trouve marquée depuis Racines jusqu'à Chavanges, par une
ligne de sources, remarquables surtout du côté de l'ouest par
leur abondance, leur constance et leur limpidité. Telles
sont les belles fontaines de Blenne et de Forest, près d'Auxon,
celle qui est située au milieu de ce village lui-même ; celles
de Montigny et de Chamoy, qui à leur sortie font tourner
plusieurs moulins; la source de la Vanne sous le village de
Fonlvannes, qui vient contribuer à l'alimentation de Paris;
la source de la Vienne près Torvilliers. Du côté oriental, les
sources ont un volume moins considérable, mais elles sont
également très nombreuses. On en compte plusieurs dans
les environs de chaque village. Elles alimentent pour la
plupart des ruisseaux qui contribuent pour beaucoup à la
richesse des belles prairies qui couvrent l'argile téguline.
Les puits creusés sur le plateau sont en général profonds,
ainsi qu'on devait s'y attendre d'après les considérations
précédentes; car ils doivent être poussés assez bas pour
atteindre les marnes crayeuses. Aussi, tandis que beaucoup
n'ont que de 33 à 35 mètres, peut-on en citer dont la
profondeur va jusqu'à 100 mètres, comme au moulin de
Macey.
* Deicription géologique de P Aube, p. 248.
300 ROLE DES UTHOGIASES DE DIVERS ORDRES.
TMUi•^ — De même que dans les régions voisines, les
marnes de la craie inférieure donnent lieu, dans le départe-
ment de TYonne, à un niveau d*eau d'une très grande con-
stance, qui alimente un grand nombre de sources, parfois
fort abondantes, situées généralement au pied de la grande
terrasse crayeuse du Senonais et du Câlinais. Les principales
sont celles de Neuvy-Sautour, Venisy, Saint-Florentin, Mi-
gennes, Lasson, Mont-Saint-Sulpice, Cheny, Chichery, Lin-
dry, Pourrain, Saint-Aubin-Château-Neuf, Fontaines etSaint-
Fargeau. Elles alimentent TArmençon, TYonne, le Loing
et quelques-uns de ses affluents. Cette nappe, en outre,
fournit d'eau les puits peu nombreux qui s'enfoncent dans
la craie, au voisinage de la terrasse; leur profondeur,
ordinairement assez grande, apporte des données sur
l'épaisseur de la craie moyenne. Les sources précitées
paraissent dues à un dégorgement des eaux pluviales
qui filtrent au travers de la craie et qui y descendent jus-
qu'au niveau du fond des vallées au-dessous duquel la
craie est imbibée, comme on l'a vu pour le camp de Chà-
lons.
L'aqueduc romain de Sens, dont on a reconnu l'existence
dans les travaux récemment faits pour l'alimentation de
Paris, dérivait au moins trois sources, Saint-Philberl, I^e
Miroir, Noé, et probablement quatre.
Ces sources proviennent de nappes profondes et arrivent
au jour par de véritables cheminées forées dans la craie
compacte. Ces cheminées sont remplies de cailloux à Saint-
Philbert, à Theil et à Noé, et de limon à Vareilles. Elles ont
la plus grande analogie avec ce qu'on nomme en Cham-
pagne btme^ en basse Bourgogne abtme, en Gâtinais abtme ou
gouffre; seulement, pour qu'on lui applique son nom, un
* Rtulin. Statittique géologique de l'Yonne, p. 128.
ROLE DES LITUOCLÂSES SIUPLES. SOI
Mme doit être béant, comme celui de Cérilly, et non rempli
de cailloux.
Ces sources sont donc sans relation avec la nappe d'eau
superficielle des puits. On peut pratiquer des tranchées à
une très petite distance de leur point d'émission sans les
déplacer, et les relever d'une certaine quantité sans trop
craindre de les perdre : c'est ce qu'ont fait les Romains à
Noé et à Saint-Philbert. L'eau sortait du pied du mur par
six barbacanes ou griffons, dont cinq sont encore visibles.
Le dessus de ce mur est d'origine moderne et soutient le
chemin de Noé à Theil ; mais le bas, appareillé en petits
moellons, est au contraire une véritable maçonnerie romaine.
Iie■a▼r«^ — Lcs sourccs du Havre, qui proviennent du
terrain crétacé inférieur (gaize ou gault), ont un régime
très simple. La couche imperméable qui les soutient, ayant
sa pente vers le nord-est et son bord sud très sensible-
ment en relief par rapport à la plaine, ne peut être ali-
mentée d'eau que par les pluies locales tombant sur le pla-
teau.
Le sol, qui leur sert de filtre, est considéré comme per-
méable, bien que formé d'une argile rouge sableuse, généra-
lement imperméable et empâtant d'abondants rognons de
silex. La perméabilité n'est donc pas continue; elle n'existe
que sur les parties fendillées et là où les pointements très
perméables de la craie affleurent. Dans ces conditions,
l'eau de la pluie ne réussit à pénétrer qu'après avoir fait,
comme eau sauvage, de longs trajets et subi par évaporation
des pertes importantes, d'où il résulte que le débit est faible,
en égard à la hauteur des pluies annuelles.
L'écoulement de l'eau fournie aux sources du Havre par
* leurdra. Association française ^ 1877.
S02 ROLE DES LITUOGLASES DE DIVERS ORDRES
les pluies des hivers les plus humides et les plus efficaces
dure au moins trente mois.
Le bassin souterrain des sources comprend nécessairement
des plans inclinés, des paliers, des ondulations, des cuvettes,
des poches, des couloirs, etc. Supposons tout d'abord ce
bassin complètement à sec. Les premières eaux d'infiltration
commencent par imbiber toute la masse filtrante, puis elles
s'épanchent peu à peu dans le bassin souterrain; une pre-
mière cavité les arrête ; elles en surmontent bientôt le seuil
pour aller remplir la suivante. Après celle-ci une troisième,
et ainsi de proche en proche, elles cheminent vers rorifice.
Tant que les eaux affluentes sont tranquilles et peu abon-
dantes, le débit reste faible et régulier. Aussitôt qu'une
crue survient, le débit augmente.
Les sources qui sortent du plateau du Havre (sources
naturelles de Sainte -Adresse, de Fontaines de Rouelles et
de la Bouteillerie ; sources artificielles de Bellefontaine et
autres comprises entre Graville et Sainte-Adresse) provien-
nent du niveau imperméable de la gaize. Au delà de la ligne
qui passerait par Gournay et Cauville, les sources appartien-
nent au niveau de la craie marneuse.
Dans l'espace compris entre la faille de Bolbec et Fécamp
et le Havre, la stratification de la craie marneuse étant par-
faitement concordante avec celle de la gaize, l'eau qui les ali-
mente provient donc exclusivement des pluies locales.
Les sources de Bruneval, de Notre-Dame-du-Bec, de Saint-
Laurent sortent de la craie marneuse. Ces dernières, situées
à 10 kilomètres du Havre, en tête de la rivière de Gournay,
le long du chemin de fer de Rouen, entrent pour les trois
quarts dans la distribution de la ville du Havre. Depuis près
de trente ans qu'elles sont exploitées, elles ont fourni un
débit moyen d'environ 20 000 mètres cubes d'eau par jour,
représentant près de moitié dans le débit totalisé des sources
ROLE DES UTBOGLASES SIMPLES.
305
de la vallée deGournay, qui eslenmoyenne de 45 600 mètres
cubes par jour.
Toutes les sources, grandes et petites, qui alimentent le
Havre ont le même régime. Plus une source a un débit im-
portant, plus son bassin a d'étendue et plus le temps qui
s'écoule entre l'origine et la fin d'une crue doit l'emporter
sur la durée de la pluie efficace qui l'a occasionnée.
cahradosetEnre. — Daus l'oucst de la Frauce, on observe
Fig. «8. - Source de la Folletière prés Orbec (Calvados), jaillissant de la craie glauconieuse.
des faits analogues. Les niveaux d'eau les plus importants se
rencontrent, surtout vers la base de la craie glauconieuse, à
son contact avec l'argileglauconieuse verte, à nodules phos-
phatés, qui représente une partie de la gaize dans cette
204 ROLE DES LITHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
région et dont la couche très argileuse est généralement
fort peu perméable*.
On en voit un exemple remarquable, dans la belle source
de la Folletière, située dans la vallée d'Orbec, qui sort avec
une abondance extraordinaire (fig. 98) de ces couches cré-
tacées et sur raftteurement d'une argile se rapportant à la
craie glauconieuse.
Des sources de même disposition existent dans le départe-
ment de l'Eure près Gormel et près Pont-l'Évêque (source
de la Galonné).
chM«Bi«'. — La formation crétacée présente dans la Cha-
rente deux niveaux d'eau.
Le plus considérable, qui se trahit toujours par la beauté
des prairies qu'elle arrose, est soutenu par des bancs d'ar-
gile bleuâtres très propres à la fabrication des briques, con-
tenant en abondance les Ostrea biauriculata et flabellata
qu'on observe surtout dans les arrondissements d'Angou-
lême et de Cognac. Comme elles sont surmontées par trois
étages de composition calcaire, les eaux qui filtrent avec
facilité à travers des bancs crevassés sont retenues dans leur
marche par les argiles tégulines, d'où elles s'échappent à la
surface.
Le deuxième niveau se montre à la base de l'étage santo-
nien, souvent marneux, qui arrête les eaux d'infiltration des
coteaux supérieurs. Nous citerons principalement les belles
sources de La Palue et de Gensac près de Cognac, et la source
de Roncenac, connue sous le nom de Grand'Fontaine.
■oachM-da-Bh^ne i BamIii de Fnvcaa '. — Le bassiu de Fu-
« Guyerdet. Texte de la feuille de Bemay,
* Coquand. Géologie de la Charente,
3 YiUot. Annales det minet, 8* série, t. IV, p. 5, 1883.
ROLE DES LITHOGLASES SIMPLES. 205
veau se compose d*un ensemble de couches qui, après avoir
été supposées tertiaires, ont été reconnues par M. Matheron
appartenir à la partie supérieure du terrain crétacé.
Le groupe auquel est subordonné le lignite exploité est
principalement calcaire et il contient les calcaires argileux
fournissant le ciment dit de la Valentine. L'épaisseur de ce
groupe dépasse 200 mètres. Il repose sur des couches attri-
buées au senonien supérieur.
Les travaux d'exploitation, dans lesquels on doit lutter à
grands frais contre les venues d'eau, en ont fait ressortir le
régime. Le calcaire est coupé, non seulement par de nom-
breuses diaclases (partem), mais aussi par des paraclases
qui remplissent tantôt l'office de barrage, tantôt celui d'une
conduite d'eau. Ces dernières sont situées dans la partie sud
du bassin. En revanche, le nord jusqu'à Trels constitue la
région des diaclases.
Les eaux pluviales arrivent dans les travaux verticalement
et, par suite, d'une manière soudaine. On peut avoir une
idée des variations très considérables de la nappe souter-
raine par une figure* qui donne, depuis 1868,1a hauteur
d'eau dans le puisard. En rapportant la quantité d'eau
à la quantité de charbon extraite, on a pompé, de 1868
à 1882 inclus, de 6 à 30 mètres cubes et en moyenne 15,5
pour une tonne de charbon sortie, et cela, sans tenir
compte des masses bien plus considérables qui sortent des
galeries. On s'explique ainsi que les frais d'épuisement aient
pu dépasser en certaines années 1 fr. 30 par tonne, 16
pour 100 des dépenses totales, et encore ces chiffres sont-ils
au-dessous de la réalité.
La surface de l'eau souterraine est inclinée vers la mer,
de façon à se raccorder avec elle. Autour de cette espèce
^ Mémoire précité, pi. UL
206 ROLE DES LITUOCLASES DE DITERS ORDRES.
de charnière, elle monte ou descend suivant les saisons,
comme le prouvent les variations de hauteur, d'autant plus
grandes que Ton considère une section de la nappe plus
éloignée de Tembouchure : plus on s*avance vers l'est, plus
une pluie produit des ascensions d'eau subites et de grande
amplitude.
Gomme d'ordinaire, des sources jaillissent à la rencontre
de cette surface d'eau avec le relief du sol.
Ces eaux doivent avoir un écoulement vers la mer; car,
non seulement la quantité d'eau absorbée par le sol est bien
supérieure au débit total des sources, mais encore le long
du rivage, entre Marseille et Bandol, jaillissent de nombreuses
sources d'eau douce.
¥ar et Aipes-Bteriuines ^ -— Daus le Yar et daus les Alpes-
Maritimes, les puissantes couches marneuses de la craie à
Inoceramus labiatus arrêtent les eaux circulant dans les cal-
caires superposés ; l'une des trois sources venant au jour dans
la vallée de Dardennes et qui alimentent Toulon, le Foux, qui
produit le Béai, sort de ce niveau.
Dans le voisinage de la source de la Foux existe, au milieu
des calcaires blancs cristallins appartenant à l'étage ncoco-
mien, un réservoir naturel appelé ragas. Ce réservoir ren-
ferme toujours de l'eau, et presque tous les ans, à l'époque de
la saison des pluies, il déborde en versant dans la vallée des
masses d'eau considérables. On a pensé de tout temps, à
Toulon, que cette cavité était le regard naturel d'un grand
courant d'eau souterrain, et que pour obtenir de l'eau en
abondance, il suffirait de pratiquer une galerie allant s'ouvrir
au fond du réservoir et aboutissant dans la vallée en un
point convenablement choisi.
' Dieulafait. Sur la zone à Avtcula contorta^ 1867.
ROLE DES LITIIOGLASËS SIMPLES. 207
j\ — Les sources thermales du département du Gers
sont remarquables par les conditions dans lesquelles elles
jaillissent.
Les sources salines et moyennement thermales de Barbo-
tan, commune de Cazaubon, et celles du groupe de Castera-
Verduzan, du Masca et du Lavardens sont disposées le long
de l'axe d'une grande ride crétacée, dirigée E. 21*» S. à 0.
21" N., qui traverse une partie du département. Les eaux qui
circulent dans la craie rencontrant des fissures dans les ter-
rains supérieurs en profitent pour remonter à la surface, à
la manière de fontaines artésiennes.
de Psru. — En 1833, l'Administration municipale
ayant eu connaissance des puits artésiens exécutés à Épinay
et à Saint-Denis près Paris, résolut d'en faire exécuter elle-
même pour l'alimentation de la capitale. Une somme de
18 000 francs fut alors votée pour l'exécution de deux puits,
devant atteindre la formation de l'argile plastique d'où
provenaient les eaux jaillissantes de Saint-Denis.
Mais l'examen de cette question fit bientôt reconnaître à
M. Emmery, alors directeur du service municipal, que, par
suite de l'affleurement de la formation aquifère dans le lit
de la Seine, entre Auteuil et le Point-du-Jour, le niveau de
la nappe devait se trouver considérablement abaissé et que,
par suite, les chances de succès étaient notablement dimi-
nuées. Un puits fut néanmoins exécuté au carrefour Reuilly;
la formation aquifère fut rencontrée, mais l'eau resta en
contre-bas du sol. Les études géologiques faites sur le bassin
parisien, quoique peu avancées à cette époque, firent des
lors pressentir qu'il fallait traverser non seulement les
terrains tertiaires, mais aussi la craie, pour avoir une eau
' Jacquot. Comptes rendus^ t. LX, p. 067, 1865.
208 ROIE DES LITHOGLASES DE DIVERS ORDRES.
jaillissante en atteignant les grès verts inférieurs. Peu de
temps après, 40 000 francs furent votés par le conseil muni-
cipal pour exécuter un sondage de 400 mètres ; le travail fut
mis en adjudication et confié à M. Mulot, le seul des entre-
preneurs de sondage existant à cette époque qui se présentai.
Il devait être primitivement exécuté sur la place de la
Madeleine, mais la crainte d'encombrements sur un point
aussi fréquenté fit adopter définitivement la cour de l'abat-
toir de Grenelle.
Le travail fut commencé au mois de décembre 1853.
A 400 mètres, limite fixée pour la profondeur définitive du
puits, on était encore en pleine craie. De nouveaux crédits
furent alloués successivement, non sans beaucoup d'hésita-
tion, pour descendre jusqu'à 500, 550 et 600 mètres. Enfin,
le 26 février 1841, à 2 heures du soir, après un travail de
7 années, des accidents et des péripéties de toutes sortes, on
rencontra la formation des grès verts, à la profondeur
de 547 mètres, et avec elle, l'eau jaillissante si longtemps et
si impatiemment attendue.
Après le succès obtenu à Grenelle, l'Administration projeta
le forage de plusieurs puits semblables. L'un d'eux devait
être percé à l'abattoir Montmartre et un autre au Jardin
des Plantes, pour être spécialement affecté au chauffage des
serres et à la création de bains et de lavoirs publics dans le
quartier Saint-Marceau. Les événements de 1848 firent ajour-
ner l'exécution de ces travaux.
Plus tard, lors des travaux d'embellissement du Bois de
Boulogne, la grande quantité d'eau nécessaire au service de
cette promenade (8000 mètres cubes par 24 heures) fil
penser à demander un nouveau tribut à la nappe des grès
verts. La création à Passy d'un puits semblable à celui du
puis de Grenelle fut résolue, et l'entreprise confiée àM. Kind,
habile ingénieur saxon.
ROLE DES LlTHOCLiSES SIMPLES. 209
Le résultat dépassa les espérances. Aussi résolut-on de
faire construire deux puits nouveaux, Tun sur TEstrapade,
près du Panthéon, l'autre à la barrière du Trône. Une com-
mission fut nommée par le Préfet de la Seine, et sur ses
observations, les positions des puits furent modifiées : celui
du Panthéon fut reporté à la Butte-aux-Cailles, près de la
barrière Fontainebleau, et celui de la barrière du Trône à La
Chapelle-Saint-Denis, de manière à former avec celui de
Passy les trois sommets d'un triangle à peu près équila-
téral. Le puits de La Chapelle fut confié à Mii. Laurent et
Degousée, celui de la Butte-aux-Cailles à M. Saint-Just Dru,
le successeur de M. Mulot. Ces deux puits devaient non seu-
lement atteindre la nappe rencontrée à Passy, mais descendre
dans la formation des sables verts pour recueillir les diffé-
rentes nappes que l'on suppose y exister, et atteindre même,
s'il était possible, les terrains jurassiques.
On sait que Paris occupe le centre d'un vaste bassin gros-
sièrement circulaire, dont le rayon pris dans la direction
de la Champagne vers Troyes mesure 160 kilomètres. Les
sables verts qui occupent une large zone s'étendant sur le
pourtour de ce bassin présentent une pente souterraine
égale, en moyenne, à 0",003 par mètre.
La force considérable d'ascension des eaux des grès verts
provient de l'altitude à laquelle ils affleurent autour du
terrain crétacé.
La coupe détaillée du sondage de Grenelle, dont les
échantillons sont déposés au Muséum, a été relevée avec le
plus grand soin (fig. 99).
Le puits de Grenelle, revêtu d'un tubage en tôle de 0",17
à la base et de 0",235 à l'orifice, donnait 2200 litres par
minute, soit environ 3000 mètres cubes par 24 heures.
En 1852, soûs la pression des argiles inférieures, une portion
du tube ayant été aplatie, on descendit dans le premier tube
14
210 ROLE DES UTHOaÂSES DE DIVERS ORDRES.
une seconde colonne de 0",iO de diamètre seulement. U
11
f^^^
là
Â^mmi
p'^^^rn .
nil Pr<AL.lU
«THE tifi II WàM(t
Fig. 99. ~~ Coupe du fondage de Grenelle, d'après M. Mulot.
débit n'en lut point altéré, ce qui prouve qu'il n'est pas pro-
portionnel au diamètre.
ROLE DES LITHOGUSES SIMPLES. âlf
Le rendement en 1862 était en moyenne de 472 litres
par minute ou de 680 mètres cubes par 24 heures; en 1885,
il était constant et seulement de 240 litres par minute^ soit
346 mètres cubes par 24 heures.
A Passy, par suite d'accident, le travail a été fort long,
très dispendieux; il a duré onze ans et a coûté 1 064 000 fr.
Deux nappes jaillissantes y ont été rencontrées, l'une vers
577 mètres, l'autre vers 586 mètres. On a supposé que la
première est la nappe de Grenelle; elle n'a pas monté au
niveau du sol, mais s'est élevée jusqu'à 7 mètres en contre-
bas, pour descendre ensuite à 18 mètres.
En septembre 1861, 22 heures après le jaillissement de la
deuxième nappe de Passy, le puits de Grenelle a éprouvé une
perturi>ation dans son débit; ce qui tend à prouver que
celte seconde nappe est bien réellement en communication
avec celle de Grenelle, quoique coulant à cet endroit dans
des sables plus gros et plus perméables. C'est à cet écoule-
ment dans des sables plus gros qu'est dû surtout l'énorme
débit du puits de Passy.
A Passy, on a établi ua cuvelage en bois, dont les divers
tronçons, qui ontO",80 de diamètre intérieur, sont compo-
sés de douves jointives, et la pression augmentant avec la
profondeur, les douves ont eu à supporter une pression tou-
jours croissante, jusqu'à 550 mètres, base du tubage en bois;
à cette profondeur la pression n'est pas moindre que 55 at-
mosphères. Leg douves ont dû être disjointes, et alors ua
plan de fuite s^est manifesté entre elles; l'eau a pu dès
lors passer extérieurement, monter le long du tube et venir
s'absorber dans les couches supérieures du terrain tertiaire*.
Aussi le débit du puits, qui à l'origine était de 17000 mètres
' Oppermann. Portefeuille économique des machines, t. IX, p. 186; notice de II. Cas-
sagne. ......
919 ROLE DES UTHOGUSES DE DITERS ORDRES,
cubes par 24 heures, était-il réduit, en 1864, à 1500 mètres
environ. Du l*' novembre 1881 au 30 octobre 1883, le débit
a oscillé entre 6540 et 6588 mètres cubes. Quant aux deux
puits de la Butte-aux-Gailles et de La Chapelle, qui avaient
à traverser, non seulement tout le crétacé, mais aussi les
couches jurassiques qui le supportent, ils n'ont pas eu le
même succès que les précédents. On a dû les abandonner
tous deux, le premier à 532 mètres, après une dépense de
plus de 200000 francs, le second à 677 mètres, lorsqu'on y
avait consacré plus de 1 600 000 francs.
Le puits de Tusine Constant Say, boulevard de la Gare, qui
a une profondeur de 580 mètres, débitait en mars 1885
4500 mètres cubes.
BBviffoBs 4e T«ws. — Lcs puits artésicns des environs de
Tours alimentés par les mêmes nappes, méritent d'être
mentionnés, à cause de leur antériorité sur les autres forages
de la même région.
North Dowas d« Méat et dn Sorrey. — Le régime dcS CaUI
souterraines dans la craie des North Downs du Kent et du
ALBURY
Echelle des Longuturs
2 k»
Flg. 100. — Disposilion (la niveau d'eau de la craie, non loin de Gailford (Sarre] •
D'après M. Lucas.
Surrey, entre le Darent et le Môle, a été Tobjet d'études ap-
profondies de la part de M. J. Lucas'.
^ Proceedingt ofthe Imitiulion of civil engineers^ t. XLVH, p. 1, 1877.
ROLE DES LITHOCLASëS SUIPLES. 315
Les traits généraux de la région sont analogues à ceux des
autres régions crétacées. La figure 100 montre comment la
nappe d'eau de la craie qui alimente divers puits donne
naissance à des sources.
Il en est de même de la figure 101, qui montre en outre
comment prennent naissance les épanchements d*eau connufs
généralement sous le nom de boumes. D'après M. Topley, dans
le Kent, on les nomme aussi nailbournesy dans le Sussex,
livants, dans le Dorset, winterbournes, dans le Yorkshire,
(jypsies.
Ils jaillissent subitement et seulement après une saison
exceptionnellement humide ; ils suivent les grandes chutes
6006T0Ne . eÉDOlNOTOM
.—- . — - - - — ..•••■ -«- .- — — .--^^^-y^-^^-
Echelle des Longueurs:
; ]' î î t r*
fig. 101. — Disposition du niveau d'eau de la craie, non loin de Banstead (Surrey), montrant
comment prennent naissance des sources connues [sous lo nom de bourneê, — D'après
M Lacas.
de pluie, après un intervalle de quelques mois, c'est-à-dire
après que la pluie a eu le temps de se réunir souterrainc-
ment et de s'élever suffisamment. En général ils apparais-
sent à la partie supérieure des vallées, et s'écoulent dans un
lit entièrement sec.
U jonction de la craie inférieure et du gault donne nais-
sance, au pied des North Downs, à une affluence d'eau consi-
dérable qui se manifeste aussi par les sources de Wrotham,
Godstone, Merstham et beaucoup d'autres. On peut citer
celle qui sort du gault, près de Cuxham.
— Dans le but de suppléer à l'insuffisance de
l'alimentation par les sables tertiaires inférieurs, la plupart
2U ROLE DES UTHOCUSES DE DIVERS ORDRES.
des puits artésietis forés à Londres dans ces derniers temps
pénètrent dans la craie inférieure, qui s'étend au-dessous
de Londres à des profondeurs de 50 à 65 mètres.
A cause de sa grande étendue superficielle et de son épais-
seur qui varie de 150 à 300 mètres, elle constitue la prin-
cipale ressource en eau souterraine de Londres. Plus de
31 780 mètres cubes sont journellement lires de la craie au
S--E. de Londres.
YorkuMro^ — Daus le Yorkshirc et spécialement aux envi-
rons de Holderness, des argiles du diluvium et des dépôts
Fi>. 102. — Section montrant la circulation de Teau dans la craie du Yorksliire. À, argile im-
perméable des étages kimméridgien et néocomien; C, craie qui lui est superposée et à tnvei^
laquelle se meut l'eau souterraine, dont la surface €st très fortement ondulée, ainsi que
l'indique la ligne N.N. T, argile tertiaire imperméable. — D'après N. Robert -Mortimer.
superficiels couvrent la craie en s'élevant à une altitude de
20™ au-dessus de la mer. L'épaisseur de la craie atteint
250 mètres. Elle repose sur les argiles imperméables des
étages néocomien et kimméridien (fig. 102), qui s'élèvent
jusqu'à Taltilude de 300 mètres avec une épaisseur dépas-
sant 150 mètres et viennent affleurer au nord et à Touest.
Les cours d'eau superficiels et souterrains de celte région
aboutissent d'un côté à la mer et de l'autre côté sont inter-
rompus par les argiles des étages précités.
La surface de la nappe d'eau intérieure n'est pas horizon-
* J. Robert Mortimer. Proceedhigs of civil enginrers of Yorkthire, t LV, p. 151 18t>4.
ROLE DES LITHOCLASES SIMPLES. 215
laie, mais elle s'abaisse vers le sud et vers Test, de manière
à se rapprocher de la surface de la craie qui la contient.
i\ — De même dans le Hertsfordshire, la sur-
face qui limite la nappe d*eau dans la craie est très variable
suivant les saisons et la quantité d'eau que lui fournit Tat-
mosphère ; son niveau varie dans les collines crayeuses, de
10 à 12 mètres, en présentant des inflexions, comme on
Ta vu pour les exemples cités en France.
Cette nappe fournit aussi de fortes sources, telles que
celles de Chadwell, Hoddesdon, Olter, Carlshalton, Leather-
head et Ospringe. En outre il y a d'innombrables petites
sources, comme celles qui sont le long de la Tamise, de
Greenhithe à Paversham.
OxibrdaUre et wiutoiiire. — Lcs colliues de craic de rOxford-
shire et du Whitshire présentent aussi de très belles sources
(Prestwich).
La quantité de pluie moyenne qui tombe sur les Chalk
Wolds est environ 0°,68, dont trois quarts environ pénè-
trent dans le sol. L'écoulement de ce réservoir souterrain
vers la région sud-est du bassin se produit quelquefois avec
une force considérable, tant dans la mer que dans la rivière
Humber. En quelques points il en résulte des bouillonne-
ments le long du rivage, qu'on a souvent observés près du
port de Bridlington et ailleurs, sur le côté oriental, particu-
lièrement dans le lit de la Humber, entre Hull et Hessle.
Dans cette dernière localité les bouillonnements sont connus
sous le nom de Hesshwhelps.
Quelque considérables que soient ces décharges superfi-
cielles et souterraines dans la mer et dans la Humber, elles
* D'après H. CluUerbuck.
il 6 ^ ROLE DES LITHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
sont compensées par la grande masse d'eau qui provient
d'une direction opposée. liC long de la limite de la craie,
elle produit des sources permanentes et intermittentes de
toutes dimensions, depuis un très petit filet jusqu'à un
courant assez puissant; plusieurs moulins ont été construits
à proximité des sources de cetle sorte.
A proximité de la mer, notamment àlIuU et à Sunk Island,
l'eau des puits percés à travers la craie est habituellement
saumâtre, par suite de la pression de l'eau salée de l'Océan.
L'eau la moins salée rencontrée à Hull provient d'un puits
de 31 mètres de profondeur, et un autre puits situé à
20 mètres du précédent, avec une profondeur de 100 mètres,
contient 20 pour 100 en plus de sel ; les deux sont dans la
craie qui, dans cette région, est atteinte de 15 à 20 mètres de
la surface.
Nord de la Wrmmee. Belf l^sc et Westphalle i eavlroMs de IJéiC.
— Dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais,
aux environs de Mons, de même qu'en Westphalie, dans le
bassin de la Ruhr, les terrains qui recouvrent le système
houiller, connu des mineurs sous le nom de inorts4erram,
appartiennent à la période crétacée. Ils sont formés de
couches alternatives d'argile, de marne, de craie et de
sable. C'est là qu'on rencontre les plus grandes diflicultés
pour le fonçage des puits à travers des bancs perméables,
fissurés en tous sens et qui renferment de vastes réservoirs
où s'accumulent les eaux pluviales.
Les diève$ ou bancs argileux forment, à la partie infé-
rieure, une base plastique et imperméable, au-dessus de
laquelle les eaux sont retenues. Lorsque, par une excavation
pratiquée à la surface, on pénètre dans ces bancs aquifères,
l'eau s'y précipite et tend à reprendre son niveau hydrosta-
tique.
ROLE DES LlTHOGLAbES SIMPLES. 217
A pari les sources abondantes qui se rencontrent ordi-
nairement au milieu des bancs de craie à silex pyromaque,
les bancs fissurés de marne grise, alternant avec des ar-
giles, renferment aussi des niveaux importants.
La quantité d'eau à épuiser dans la traversée des couches
crétacées qui recouvrent le terrain houiller est essentielle-
ment variable, non seulement d*un point à un autre du
même bassin, mais encore d'un point à un autre de la même
concession.
La fosse n* 3 de Ferfay est située à une distance de HOO mè-
tres environ de la fosse n** 2; la première n'a rencontré que
<les sources insignifiantes, tandis que la seconde avait fourni
beaucoup d'eau. La fosse Saint-Pierre, près de Thivencelles,
a débité par minute 150 hectolitres. A la fosse de Courrières,
la quantité maximum à extraire s'est élevée à 219 hectoli-
tres. A l'Escarpelle, près de Douai, elle a atteint jusqu'à
600 hectolitres. A Havre (Belgique), on a installé sur trois
puits foncés simultanément, quatorze chaudières et un en-
semble de machines représentant une force de 1350 chevaux,
en vue de traverser les nappes aquifères*.
A Lens (Pas-de-Calais)*, le puits n^ 5, d'un diamètre de
o^^SO, a été commencé sur le bord de la rive droite de la
Souchez (fig. 103j, à la fin de 1872. Le creusement était ar-
rivé, en septembre 1873, à la profondeur de 13'",50, à la-
quelle l'eau a commencé à affluer, à raison de 6000 à 7000
mètres cubes par jour. On était alors à 28^,50 au-dessus du
niveau de la mer, et à 3 mètres au-dessous du niveau des
eaux du marais de la vallée. La venue d'eau a augmenté ra
pidcment avec le creusement. A 28 mètres de profondeur,
elle atteignait 40000 mètres cubes par jour, chiffre qu'elle
* Evrard. Exploitation des mines ^ p. '233-234.
^ D'après une obligeante communicalion de M. Pingénieur en chef des mines Duporcq.
318
ROLE DES UTHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
a conservé jusqu'à la profondeur de 58 mètres. C'est seule-
ment alors qu'elle a commencé à diminuer, et à 48 mètres
qu'on a pu se rendre maître de l'épuisement, après dix
mois d'un travail entouré de difficultés énormes. Six pom-
pes à vapeur avaient été montées sur la fosse pour parve-
nir à remonter ces 40000 mètres cubes par jour, d'une pro-
V Ville .de Lens .
Echelle :
Fig. 103. — Disposition de la Tosse n** 5 de Lcns. par rapport à la Soaclici cl â la Glissoire.
D'après M. Dnporcq.
fondeur de 28 à 58 mètres. A la profondeur de 72 mètres,
dans le terrain bleu, les eaux ont absolument cessé, et à
92 mètres on a installé la base du cuvelage.
La fosse était tombée sur une large cassure ouverte dans
la craie blanche et dirigée E. S. E. a 0. N. 0. Au nord de la
cassure la craie était excessivement fissurée et perméable à
l'eau; au sud, au contraire, les bancs étaient compacts et
ROLE DES UTHOCUSES SIMPLES. 219
fermes. La position et Tinclinaison de la cassure par rapport
à la vallée et la nature extrêmement fendillée de la craie
conduisent M. Duporcq, ingénieur en chef des mines, à pré-
sumer que les eaux venaient principalement de la vallée,
sinon de la Souchez et de la Glissoire même, qui coulent sur
un terrain plus ou moins tourbeux et assez imperméable,
(lu moins d'eaux imbibant les alluvions sableuses perméa-
bles et plus profondes de cette vallée. On remarque d'ail-
leurs que Tapparition des eaux dans le puits, à 3 mètres en
dessous des eaux de la Glissoire, coïncide bien avec la situa-
lion de ces alluvions.
D'après M. Yan Ertborn, la craie blanche de la Belgique
renferme de nombreuses fissures aquifères qui rendent aléa-
toire le résuliat des forages.
A Léau (Brabant), cote 30, on a atteint la craie à 43 mètres
sous le sol. Après 10 mètres dans la craie, la sonde s'enfonça
dans une fissure de 0",40; une source d*un pouvoir ascen-
sionnel considérable jaillit à la surface du sol, avec un débit
de 5360 litres par minute.
La craie a fourni à Yelvords, à 29", 86, et à Bruxelles, à
5",20, des sources d'un débit considérable.
11 en a été de même dans le nord de la France, à Neuville-
cn-Terrain et à Tourcoing, où des sondages ont également
rencontré des fissures aquifères dans la craie blanche. L'eau
se maintient en contre-bas du sol, à cause de l'altitude des
lieux; mais à l'aide de pompes, on en puise des quantités
considérables.
Aux environs de Liège* la craie présente deux horizons
aquifères distincts.
L'un est dans le calcaire à peu près pur et perméable à
l'eau dont l'épaisseur est d'environ 30 mètres. Outre les joints
* Gustave Dumont. Eaux alimentaires de Liège, 185G.
Hîù ROLE DES LITHOaASES DE DIVERS ORDRES.
de stratification, il y existe des fissures verticales et des
ochancrures, parfois 1res profondes, comblées par des dépôts
plus récents.
I/horizon inférieur est supporté par une marne connue
sous le nom de dielle, qui par son imperméabilité empêche
les eaux des couches supérieures de parvenir dans le terrain
houiller.
Les eaux pluviales pénètrent dans les fissures de la craie,
après avoir filtré à travers le limon et le sable quartzeux et
sont arrêtées par la couche imperméable. Vers les bords
méridional et oriental du plateau, ces eaux se répandent,
sous forme de sources, dans les vallons qui aboutissent à la
Meuse ; mais la majeure partie s'écoule vers le sud-ouest, à
peu près suivant la ligne de plus grande pente des couches
qui forment le terrain crétacé.
L'inclinaison de la surface de l'eau varie suivant les
circonstances. Elle est d'autant plus forte que la roche est
moins fissurée, ou, en d'autres termes, qu'elle présente
plus de résistance au passage de l'eau. Pour des roches dif-
férentes, l'inclinaison doit donc varier. Il en est ainsi pour
une môme roche, suivant la quantité d'eau qui y afflue et
suivant la direction que prend le courant souterrain.
Dans toute la partie de la Ilesbaye qui s'étend au nord-
est de Liège, la profondeur à laquelle se trouve l'eau a été
mesurée à différentes époques. 11 résulte de l'ensemble de
ces observations que la nappe d'eau y est inclinée : partant
des bords du bassin et s'avançant vers le Geer, elle donne
lieu aux sources qui alimentent cette rivière.
Vers Test le courant change de direction, parce qu'il s'é-
coule en partie sous forme de sources dans les vallées de
* L'auleur a publié une carie où est représentée, par des li^es borizontaleit. rinter-
section de la surCace de Teau avec des plans horizontaux, établis à différentes hauteurs
au-dessus de la Meuse. Des flèches mai*quent la direction du courant.
ROLE DES LITUOaASES SIMPLES. 221
Vollem et de flermée, où vient affleurer la couche imper-
méable. La nappe d'eau s'incline donc rapidement dans cette
direction.
Vers le sud, les vallées qui aboutissent à la Meuse, mettant
à nu la couche perméable au-dessous du niveau que la nappe
aquifère atteindrait pour que son écoulement fût possible
vers le Geer, les eaux qui la forment s'échappent en sens
contraire en donnant naissance aux sources d'Ans, de IIol-
logne, etc.*.
L'inclinaison de la surface de la nappe vers le nord varie
de0",005 à 0",009 par mètre; mais de l'est à l'ouest, elle
dépasse généralement 0'",01, probablement parce que les
fentes de la craie sont principalement dirigées nord-sud.
Depuis longtemps des galeries creusées dans la craie,
ainsi que dans le terrain houiller fournissent des eaux à la
ville de Liège. En 1856, ces galeries étaient au nombre de
six. Celles qui ont été percées autrefois dans le terrain
houiller pour l'exploitation de la houille et qui sont au-
dessus de la Meuse*, après avoir satisfait au but pour le-
quel on les avait exécutées, sont utilisées, sous le nom
à' arènes^ pour les usages domestiques, à cause des eaux qui
en proviennent. Leur utilité est telle que quatre d'entre elles
furent mises en garde de loi.
Tant que la galerie reste dans les couches imperméables,
c'est-à-dire dans le terrain houiller et les argiles, les eaux
circulent au-dessus d'elle comme si elle n'existait pas. A son
entrée dans la craie, les eaux y affluent de toutes parts et la
zone asséchée forme au-dessus d'elle une sorte de cône ren-
versé dont l'angle au sommet est d'autant moins ouvert que
la roche est moins concassée et que la quantité d'eau est plus
abondante.
La craie fissurée sert de réceptacle à une nappe profonde,
où sont forés, à Bruxelles et aux environs, particulièrement
223
ROLB DES UTHÛCLASES DE DIVERS ORDRES.
dans les parties basses de la vallée de la Senne ^ des puits
artésiens dont M. Rutot a étudié les conditions générales do
gisement (fig. 104).
On peut aussi signaler une étude de M. Bihet sur les puits
HcheJJe des lanceurs
t.wi
EcheJh Hts haut nin
Fig. 104. ■— Diagramme transversal entre Cureghem et Ixelles, montrant les conditions géolo-
giques dans lesquelles divers puits trouvent de l'eau, soit dans les couches tertiaires, soit
dans le terrain silurien. I, terrain silurien ; Cr. terrain crétacé. Les coucbcs superposées
appartiennent à difTérents étages de Téocène, comme il est indiqué ci-aprés; Ai, assise ia-
férieure du terrain landénien; Ni. étage landénien supérieur qui est aquifére; A,, yprésieo;
Ny, nappe d'eau dans le sable perméable fin, donnant des sources et alimentant les puits do-
mestiques; B, sable très perméable appartenant à l'étage bruxellien ; B', étage laekeaien et
wemelien; Q, limon quaternaire (Hesbayen); Q', alluvion ancienne; a, alluvion moderne. —
Diaprés M. Rutot.
artésiens de Louvain, dont plusieurs pénètrent dans la craie
et atteignent 136 mètres au-dessous du niveau de la mer'.
Tersaiat nord J« Teatobniv^rwald et veraftat nord de Im
Faderbora. — La dernière zone de collines du Teutoburger*
wald (fjg. 105) se compose de calcaires marneux très fissurés
appartenant au terrain crétacé (étages turonien et cénoma-
iiien) qui sont superposés à du quadersandstein également
très fissuré (gault et néocomien).
Les couches de la craie marneuse plongent vers la plaine
' Description géologique deêenvironê de Bruxelleét p. 129, 1884.
* Bibet. Puitt artétien de Louvain^ 1876.
ROLE DES LITHOGLASES SIMPLES. â^5
<le Westphalie, sous un angle moyen de 10* et, a mesure
({u'elles se rapprochent, deviennent de moins en moins in*
clinées.
De grandes fentes verticales, qui sont distantes Tune de
Tautre d'environ 0",40, coupent d'autres fentes qui sont pa-
rallèles au plongement des masses crétacées, de sorte que
toutes les couches sont divisées en rhomboèdres. Les fissures
verticales du calcaire marneux se poursuivent dans le qua-
dersandstein sous-jacent. La direction de ces systèmes de
Fig. 105. ~ Coupe idéale de Paderborn par Schwanei é Dribourg, montrant comment les cou-
ches des divers étages crétacés concourent à la formation des belles sources qui jaillissent au
pied des collines, t,, dévouien supérieur; H,, culm; H,, grés houiller inrérieur, sans couche
dehoaille; F*, zechstein (permien); T, grès bigarré, grés des Vosges; T«, muschelkalk; T,,
keaper; L, hills néocomien; G«, gault, étage auquel se rapporte le quadersandstein du texte;
C"'a, tourtia (couche imperméable) ; C"e, cénomanien ; C"., zone à Inoceramus liibiatux qui
est imperméable; Ce, marne à Terebratula gracUis; C'a. zoue à Inoceramut Geinilzii;
C, craie à Micrtuter cortestudinarum ; Cm, marne de l'Emscher. Les deux lignes horizontales
sont le niveau de la mer et le niveau des sources qui jaillissent au pied de la cathédrale de
Paderborn*. ~ D'après X. le professeur Schlûter.
cassures parallèles peut êlre suivie sur des dizaines de kilo-
mètres, et on remarque ça et là, à la surface, des cavités
où les eaux météoriques s'engouffrent, et où mugit souvent
iin cours d'eau souterrain.
La division rhomboédrique se poursuit dans les calcaires
marneux, de manière à former de très petits rhomboèdres.
' G. Bischof. Neueê Jahrbuek der Chemie und Pkytih ton Schtoeigger-Seidel, t. VUI,
p. 449,1853.
* La partie an -dessus de ces lignes donne la position des couches; mais la partie
au^denoua est assex hypothétique pour les détails,
Sâ4 ROLE DES UTHOaASES DE DIYERS ORDRES.
n'ayant que quelques centimètres de côté, à travers lesquels
circulent les eaux qui sont arrêtées plus bas.
Près de Ilorn, dans le Lippe Delmold, les roches dites
Externstein ou Eggersterstein (voir pages 125 et 156 les fig. ?2
et 73), au nombre de cinq et atteignant 40 mètres de hauteur,
sont coupées par des diaclases; les unes grandes, régulières,
verticales, se poursuivant sur toute la hauteur; les autres
moins régulières et inclinées. Quand les Externstein for-
maient encore le noyau d'une grande masse de quadersaiid-
stein, les eaux s'y mouvaient, ainsi que l'attestent les for-
mes arrondies des parois et leurs érosions de formes di-
verses.
Ni le calcaire marneux crétacé, ni le quadersandstein ne
renferment une couche continue imperméable. Des couches
argileuses qui arrêtent l'eau, tant qu'elles ne sont pas bri-
sées ou déplacées par des soulèvements, se rencontrent,
comme l'indique la coupe, à la base du turonien (zone à
Inoceramus lahiatm) et à celle du cénomanien (tourtia).
Les couches crétacées dites Emscherj entre le turonien, et
le senonien, distinguées par ÏAmm. Margx et que M. le pro-
fesseur Schlûter a reconnues depuis Duisbourg sur le Rhin
jusqu'à Paderborn, sont argileuses et imperméables; leur
épaisseur atteint 600 mètres. Ces couches sont la cause que
les sources prennent naissance en des points où elles recou-
vrent les couches qui sont remplies d'eau et forment un bas-
sin souterrain. Six forts ruisseaux, de petites rivières, la
Becke, le EUerbach, l'Aa, la Sauer, l'Altona, l'Afle et
l'Aime montrent le phénomène. Une ligne droite tirée de
Neuenbecken par Dahle sur Grunsteinsheim forme à peu
près la limite du cours des quatre premiers de ces cours
d'eau.
L'Afte, qui sort du quadersandstein et du grès houiller,
se perd en partie; l'Aime, le plus important des ruisseaux
ROLE DES LITUOGLASES SIMPLES.
225
qui sort du calcaire carbonifère, perd dans le terrain cré-
tacé, jusque près de son embouchure dans la Lippe, une
grande partie de son eau et, dans les années sèches, dispa-
raît entièrement.
Fi?. 1(£». ~ Disposition des sources de la Pader, dans la ville de Paderborn. A Spuhl Pader, à
80" au nord de la cathédrale^ sont 2i sources, dont 10 très fortes (a) et U autres (b) ; entre
a et d sur les deux bords de la Spuhl Pader, 14 sources, dont 3 très fortes; c, Rolhborn Pader,
iO" à l'ouest de la Spuhl Pader, prés de la Mulilengasse, 19 sources, dont 3 très fortes ;
d. Borne Pader, prés de la rue Paderberg, à 218' de la face occidentale de la cathédrale,
41 sources dont 25 très fortes; e, Damme Pader é 90* de d, vers le nord-ouest, 12 sources,
dont 3 très fortes, é 230- de la face occidenUle de la cathédrale ; ^, Wasch Pader, é 40* de <f,
15 sources généralement nommées Warme Pader, é cause de leur température. Vers le nord
sont les sources: I, à 230- N. N. B. de la cathédrale; H et III, qui sont plus au nord; IV, à
càli de la promenade, au nord de la ville, à 490* de la cathédrale ; V, à côté de la prome-
nade, à 170* de IV vers l'ouest. ~ Diaprés l'obligeante communication de M. Von Dechen.
La ligne de séparation de toutes ces eaux qui se perdent
dans les calcaires marneux, court du pied des montagnes du
Teutoburgerwald et de la Haar» depuis Lippspringe jusqu'à
Paderborn; Elsen, Saltzkatten, Geseeke, Erwith, etc.
A Lippspringe jaillissent les sept puissantes sources du
15
S26 ROLB DES LITHOGLASES DE DIVERS ORDRES.
Jordanes (Jourdain), principalement celle de la Lippe. Cette
dernière sort, avec une grande vitesse et un fort volume, de
ROLE DES LITHOaÂSES SIMPLES. 227
trois fentes voisines qui traversent le calcaire marneux, et
d'une dépression en forme d'entonnoir : la moitié suffit
immédiatement 'à. faire mouvoir un moulin à trois paires
de meules.
A Paderborn (fig. 105), dans la partie basse de la ville, jail-
lissent plus de 140 sources, dont plusieurs ne sont distantes
les unes des autres que de 1 à 2 mètres. L'une d'elles est
représentée par la figure 106. Elles forment un ruisseau qui,
à sa rencontre avec la Pader, constitue déjà une rivière con-
sidérable, faisant mouvoir non moins de quatorze roues de
moulin. Le rendement de toutes ces sources ensemble, au
point où la Pader quitte la ville, est de 5, 6 mètres cubes par
seconde et va jusqu'à 7 mètres cubes. A part les sources
notées sur le plan, il en est quelques-unes qui se trouvent
sous les maisons.
I>ans trois villages dits secSy Dornhagen, Eggeringhaulen,
Busche> situés sur le turonien, au sud-ouest de Paderborn,
les eaux s'engoti'ffrent pour reparaître aux sources de la
Pader, à des distances respectives de 7, 5 et de H kilo-
mètres.
Quand une chaîne est formée de roches aussi fissurées
que le calcaire marneux crétacé et le quadersandstein, on
ne doit pas s'étonner qu'on n'y rencontre pas de sources.
Cette absence est frappante quand on traverse les régions qui
s'étendent de Paderborn vers Hesse-Cassel. A part quelques
suintements, qui probablement proviennent de couches im-
perméables subordonnées aux calcaires marneux, on ne
peut citer que des puits, qui, malgré leur profondeur de
30 mètres, tarissent pendant les sécheresses.
Maikto. — Le terrain crétacé, superposé aux couches tria-
siques et liasiques, est à son tour surmonté par de grandes
nappes de basalte très aquifères, comme le montrent les
338
ROLE DES UTHOCLASES DE DITERS ORDRES.
nombreuses sources qui jaillissent à leur base, tout le long
des flancs du plateau d'Antrim.
Depuis les environs de Belfast jusqu'à la chaussée des
y
Echelle
20
Fig. 107. — Carte géolo(?ique des environs de Piali^forsk. C„ terrain créUcé inférieur; C^ lorrain
crétacé supérieur; Q, terrains éocéneset dépôts quaternaires; m, roches éruptivei : andésite
microgranulite et porphyre pétrosiliceux. -> D'après M. Âbich.
Géants, le nombre très considérable de sources pérennes
s'explique parce que les roches perméables de la craie sont
supportées par les argiles plastiques du lias et du keuper.
Dans beaucoup de lieux, cette affluence continuelle d'eau
ROLE DES LITUOGUSES SIMPLES.
220
est la cause des paysages si remarquables du voisinage de
Carnlough et de la ville de Limavady.
Kisiovodftk et piAticonk. — Âux euvirous de Kislo-
vodsk, d'Essentouky et de Piatigorsk se montrent des cou-
ches crétacées appartenant à l'étage du gault et a celui de la
craie supérieure (fig. 107).
Près de Kislovodsk, les couches néocomiennes présentent
des calcaires dolomitiques jaunâtres, très durs (lig. 108), avec
de nombreuses nérinées. Ils sont traversés par de larges fis-
WAUXHALL.
£.
Echelle des Longueurs
— '— ' ' ' ' ' ' ' 1
Echelle dos Hauteurs
ipB ay 400 w t
fig. 106. — Coupe prise aux environs de Kislovodsk, passant par la rivière Olkovka et la butte du
Wauxhall, montrant la situation de la source thermale du Narzan, et celle de la source du
Moulin. C„ crétacé inférieur (néocomien) ; Qt, travertin ; a, alluvions. — D'après M. Dru.
sures qui livrent passage à de véritables sources vauclu-
siennes, comme celle du Moulin de la Berezovaïa. Quelques
bancs composés d'un calcaire oolithique jaunâtre ou gris,
avec de nombreux fossiles, sont en quelque sorte perforés.
La station de Kislovodsk, la plus fréquentée du Caucase, ne
possède qu'une seule source minérale, le Narzan (géant), qui
est caractérisée par l'abondance de l'acide carbonique. Elle
se trouve dans une vallée pittoresque, au pied des premiers
contreforts de la chaîne caucasique, à 800 mètres seulement
de la source du Moulin qui vient d'être signalée. Quoique la
* On connaît les importantes recherches de M. Abich sur la géologie et l'hydrologie
des proTinces caucasiennes; ce qui suit est emprunté aux Geclogische Beobachtungen auf
lieiien im Kaukasut, Moscou, 4875. de ce savant éminent.
S30
ROLE DES UTHOCUSES D£ DIVERS ORDRES.
^^
i
J
.2 2
■A 2
roche émissaire du Narzan ne soit pas
visible, il est certain qu elle appartient
à ces calcaires dolomitiques que ron
retrouve près de son émergence, dans
les berges de la rivière Olkovka.
A Piatigorsk (fig. 109 et HO) les
mouvements qui ont poussé au jour les
^{ assises crétacées de la Machouka et re-
îb jeté sur ses pentes les couches ter-
i ^ tiaires, ont en même temps produit des
;| fractures, l'une, principale, E. 55' N.,
si dont profitent les eaux thermales. Les
l e pentes du mont Machouka sont formées
If de couches peu épaisses d'un calcaire
il" bleuâtre, à texture cristalline, recou-
pées quelquefois dans leur masse par
de petits filons de carbonate de chaux,
^.| et séparées par des lits minces de marne
1^' feuilletée. L'inclinaison moyenne des
il bancs varie de 10% vers la cote 640
I 8 mètres, à 55% vers 746 mètres.
^1 En orientant la direction générale
I g de ces affleurements, que l'on peut
|| suivre sur toutes les pentes de la Ma-
« • chouka, on est conduit à un des ac-
|l cidents géologiques les plus remar-
I s quables de la contrée, le Grand-Proval
I ^ (Gg. 111), sorte de gouffre cratériforme,
I mis en communication avec un chemin
"] d'accès par une galerie de 80 mètres de
longueur. Du fond de cet entonnoir
émerge une source thermale puis-
sante, à l'altitude de 770 mètres. Ce
ROLE DES LITHOCUSES SIMPLES.
251
gigantesque griflbn, qui sort du terrain crétacé, est traversé
par une fente E. 27^ N., à peu près suivant la direction
générale des affleurements. Près de cet alignement, une
SE
M.MachouAa
Riv.ft(}koumoci?*^*î
NO.
M^ BechUou
Mont-Verbloud
(885T)
Echelle des hn^fturs
-.idl
Ech. de6 haut ''^
kil
Fig. 110. — Coupe géologique passant par les monts Machouka, Bechlaou et Verbloud (mont Cha-
meau), y, schistes crisUllins ;j\, terrain jurassique inférieur; y„ terrain jurassique supérieur ;
C, terrain crétacé; B, terrain éocéne; Q, travertin. «, roches éruptiTet : andésite, microgra-
nulitc et porphyre pétrosiliceux. — D'après M. Dru.
deuxième fissure bien moins importante, appelée Petit Pro-
val, existe entre la galerie Elisabeth et le Grand Proval; elle
S.O. N.E.
Grand -Proval
Fjv PudWmok
Fig. 111. — Coupe prise aux environs de Piaîigorsic du Grand-Proval A l'extrémité orientale de la
Goriatcha!a-€ora. C, craie supérieure (senonicn) ; Em, marne éocéne; Qe. conglomérats;
Qt, travertin ; a, allurions. — D'après M. Dm.
est au sud de celui-ci, et se continue, en descendant au sud-
ouest, par des séries interrompues de fentes et d'ouvertures
en partie comblées.
Terrain jura$$ique.
Les terrains jurassiques, avec leurs couches calcaires sou-
vent très fissurées, alternant avec des couches marneuses
ou argileuses, donnent lieu à d'assez nombreux niveaux
d'eau qui ont été étudiés avec soin dans beaucoup de lieux.
232 ROLE DES LITHOCUSES DE DIVERS ORDRES.
T€Ml■•^ — Les marnes supérieures du lias à bélemnites
déterminent dans TYonne un grand nombre de sources,
souvent fort abondantes, alimentées par les eaux qui s'in-
filtrent dans le calcaire à entroques. Dans les coteaux qui
forment le bord de la première terrasse de la Bourgogne,
et que, d'Avallon, on voit border l'horizon, la nappe d'eau
vient affleurer à une grande hauteur pour s'abaisser dans
les flancs des vallées et des vallons. Les principales sources
sont à Anstrude, Santigny, Marmeaux, Talcy, l'Isle, Civry,
Dissangis, Lucy-le-Bois, Aunay-la-Côte, GiroUes-les-Forges,
Givry, Domecy-sur-le-Vault, Asquins et Fontenay-près-Véze-
lay. Un grand nombre de ruisseaux s'en échappent et vont
grossir TArmançon, le Serain et la Cure, au-dessus d'Aisy,
de Civry et de Fontenay. En outre, cette nappe alimente,
sur le plateau de calcaire à entroques, des puits dont la pro-
fondeur est variable, par suite de l'inclinaison des assises.
Un second niveau repose sur les marnes et calcaires à pho-
ladomyes. Les eaux qui traversent la grande oolithe sont ar-
rêtées par cette assise marneuse et donnent lieu seulement
à un petit nombre de sources peu considérables, placées
sur une zone un peu plus éloignée d'Avallon que la précé-
dente. Quelques-unes, comme celles de Voutenay et du ruis-
seau d'Asnières, ont cependant de l'importance. Les puits
peu nombreux et plus ou moins profonds des plateaux de la
grande oolithe sont alimentés par cette nappe.
De plus, dans le fond des grandes vallées, il y a quelques
sources considérables à la partie supérieure de la grande
oolithe, sous les argiles oxfordiennes inférieures. Les princi-
pales sont les fontaines de Lichères, dans la vallée de
l'Yonne, de Saint-Moré dans celle de la Cure, d'Arlot à Grj,
de Fulvy à la Grande-Fontaine près d'Argenteuil, dans la
* Raulin. Description de VYonne^ p. 125.
ROLE DES LITBOGIASES SIMPLES. 255
vallée de TArmançon. Cette dernière, dit Élie de Beaumont,
est un nouvel exemple de ces cours d'eau*souterrains formés
dans l'intérieur du massif calcaire du plateau de la Côte-
d'Or, par Tinfiltration des eaux pluviales et même de cer-
tains ruisseaux. Resserré entre le niveau des eaux de l'Ar*
mançon et les couches marneuses et imperméables de l'étage
oxfordien, ce cours d'eau souterrain n'a d'autre issue que la
vallée même de TArmançon, dans laquelle il se fait jour.
A un étage plus élevé encore, le calcaire marneux de l'as-
sise oxfordien ne supérieure donne naissance à des sources
parfois assez abondantes. Toutes les eaux qui se perdent
dans le calcaire corallien viennent s'y réunir; les principales
sources sont celles de Baon, deSoulangy, près de Tonnerre,
Chemilly-sur-Serain, Val-de-Mercy et Courson. Elles donnent
lieu à quelques ruisseaux peu considérables qui, en géné-
ral, se perdent dans le sol avant d'atteindre les rivières.
Cette nappe alimente les puits, ordinairement très profonds,
creusés dans le calcaire corallien. Dans la partie sud-ouest
du département, au delà de Courson, elle existe à peine,
rassise oxfordienne supérieure étant presque exclusivement
formée par des calcaires compacts.
Dans le fond des grandes vallées, quelques fortes sources
sont alimentées par des bancs supérieurs du calcaire coral-
lien, au-dessus du calcaire marneux à astartés. Les princi-
pales sont la Fosse Dionne, à Tonnerre, et les sources de
Bellombre, près d'Escolives, dans la vallée de l'Yonne.
11 est un quatrième niveau d'eau dont la constance n'est
dépassée que par celle de la nappe superposée aux marnes
à bélemnites. Toutefois, comme la séparation du calcaire
compact portlandien et des marnes kimmeridgiennes n'est
pas tranchée, et que d'ailleurs les calcaires alternent avec
les marnes, il y a une succession de faibles nappes situées à
diverses hauteurs. Le plus grand nombre d'entre elles et
S34 ROLE DES UTUOCLÂSES DE DIVERS ORDRES.
les plus abondantes sont situées sur la pente rapide de la
deuxième terrasse *de la Bourgogne ou dans les vallons qui y
sont renfermés. Ce sont celles de Melisey, Serrigny, Fyé,
Fontenay-près-Chablis, Beine, Quenne, Gy-l'Évêque, Vallan
(dont une partie des eaux a été détournée pour le service
de la ville d'Auxerre), Migé, Mouffy, Ouanne, Loing, près de
Sainte-Colombe, Treigny. Plusieurs ruisseaux s'en échap-
pent et viennent grossir l'Àrmançon, le Serain et T Yonne.
Cette nappe alimente, en outre, sur le plateau de calcaire
portlandien, les puits peu nombreux, mais profonds, qui y
sont creusés,
A part les sources précédentes, il en est d'énormes à di-
vers niveaux du terrain jurassique*. Telles sont, dans la
Côte-d'Or, celles de l'Arlot (vallée de TArmançon), de Lai-
gnes (vallée de Laignes), de Courcelles-les-Rangs (vallée de
la Seine), de Brion et de Thoires (vallée deTOurce); dans
TAube, celle de Montigny (vallée de l'Aube); dans la Haute-
Marne, celle de Château-Yillain (vallée d'Aujon), de Condes
(vallée de la Marne), etc.
Kiévre. — D'après M. Lefort*, on connaît, dans la Nièvre,
plusieurs localités où l'eau minérale a été reconnue, et donl
le sol est formé de couches comprises entre le trias supé-
rieur et l'étage oxfordien. Elles sont :
1^ A Fougues, en quatre points groupés autour de la gare
du chemin de fer;
2" A Fourchambault, en trois points, entre le passage à
niveau de la route de Gorchisy et la Loire ;
3" A Tazières, en trois points à peu près en ligne droite.
De nombreuses cassures ont disloqué la région de Fou-
gues. Des assises diverses se heurtent avec des inclinaisons
* Belgrand. Eaux nouvelles, t. IV, p. 116.
* D'après une obligeante communication manuscrite.
ROLE DES LITHOCUSES SIMPLES. 255
différentes, par suite de failles qui donnent un cachet par-
ticulier au pays.
Les sources minérales de Fourchambault ont été rencon-
ti'ées dans des forages, à 20 mètres environ de profondeur.
L'eau gazeuse a jailli du puits du Château de l'usine des
Forges, à la profondeur de 13 mètres, soit 7 mètres en con-
Ire-bas de la nappe aquifère d'eau douce. Non loin de la
gare, on a trouvé une source d'eau douce extrêmement abon-
dante à 8 mètres de profondeur.
Au château du Chasnay, le puits ayant été creusé au-des-
sous de la nappe aquifère, qui s'étend sous les calcaires à
enlroques, l'eau gazeuse a paru et l'on a dû boucher le fond
du puits pour ne conserver que l'eau douce. L'eau minérale
monte dans tous les puits, assez près de la surface, mais ne
jaillit nulle part.
Dans tout le pays l'eau minérale a été trouvée au-dessous
de l'abondante nappe d'eau douce qui alimente les puits de
la contrée, et qui provient de la partie moyenne de l'étage
toarcien, laquelle est très argileuse, compacte, imperméable
et très pyriteuse. L'eau minérale affleure aux altitudes sui-
vantes : Fougues, 190 mètres; Fourchambault, 180 mètres;
Tazières, 198 mètres.
Ces sources constituent plusieurs alignements en rapport
avec des failles.
Dans le sud du département, plusieurs autres sources bi-
carbonatées gazeuses se montrent naturellement à Saint-
Parizé-le-Chàtel et dans le bois des Vertus. Elles sont situées,
la première à 28 kilomètres, et la seconde à 38 kilomètres
de Fougues. Elles se trouvent aux altitudes suivantes : Saint-
Parizé-le-Châtel, 205 mètres; Bois-des-Vertus, 240 mètres.
Elles jaillissent de failles bien nettement accusées à tra-
vers les calcaires infraliasiquesde la zone dite hettangienne
et orientées N. 52" E., comme à Fougues et à Fourchambault.
SS6 BOLE DES LITHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
ne«Hiie-«t-noMUe \ — Dcs dispositions semblables à celles
qui viennent d'être signalées dans l'Yonne se renconlrent
dans le département de Meurthe-et-Moselle.
La couche marneuse située à la base de Toolithe infé-
rieure alimente les puits des communes situées sur un
grand nombre de lieux des plateaux de Tarrondissemenl de
Briey. Grâce à elle, on voit des communes, telles que Liver-
dun, bâties au-dessus des escarpements de l'oolithe infé-
rieure, à plus de 60 mètres au-dessus du fond des vallées,
posséder des fontaines abondantes.
Dans les arrondissements de Nancy et de Toul, des cou-
ches marneuses subordonnées à l'oolithe inférieure fonc-
tionnent comme banc imperméable et déterminent une
nappe d'où sortent les plus fortes sources, telles que celles
qui avoisinent l'embouchure du Terrouin, en face d'Inge-
ray, et celle de Frasne sous Villey-Saint-Étienne. Toutefois,
entre les grandes lignes de cassure, les calcaires marneux
présentent souvent assez d'imperméabilité pour assurer l'ali-
mentation des puits creusés dans les calcaires supérieurs.
Pour les coteaux dont la partie supérieure est formée par
le calcaire à nérinées et à astartés, une petite couche Ao.
marne imperméable détermine en nappe.
lctMaat«-l■arne^ — Une uappc forméc par les eaux
contenues dans les calcaires caverneux et fissurés du port-
landien repose sur les argiles du kimmeridgien (sources de
l'Aisne et de la Chée).
En outre, aux environs de Vassy, le calcaire portlandien
est percé de nombreux puits naturels absorbants, dus à des
failles.
' D*aprës U. Braconnier.
* Fuchs. Feuillet géologiques de Bar-le-Duc et de Ya$iy,
ROLE DES LITHOCUSES SIMPLES. S37
Lorraim aiienuuide \ — L'étage oolitlùque inférieur, avec
ses alternances de couches calcaires iissurées et de marnes
argileuses étanches, oflre de même, en Lorraine, une dispo-
sition éminemment propre à la production des sources. On
rencontre dans ce terrain trois nappes principales, qui sont
placées ainsi dans Tordre ascendant : 1^ à la base de la for-
mation où la puissante assise de calcaires repose sur les
marnes liasiques associées au gîte de limonite oolithique;
2^ au contact des marnes argileuses et sableuses à Ostrea
acuminata et de Toolithe de Jaumont; 5** aux points, où les
calcaires gris à grosses oolithesse superposent aux argiles de
Gravelotte. On trouve également quelques suintements dans
les couches calcaires intercalées au milieu de ces argiles,
mais ils sont peu volumineux et très sujets à tarir pendant
Tété.
La première nappe est de beaucoup la plus importante.
Correspondant à une puissante assise de calcaires fissurés,
et recueillant même une partie des eaux des couches supé-
rieures, elle donne lieu à épanchements très considérables.
La plupart des sources qui existent dans les vallées à l'ouest
de la Moselle tirent leurs eaux de cette nappe; ce sont, en
particulier, les Bouillons de Gorze, dont il a été question
plus haut, à propos de la faille qui contribue à renforcer
leur volume ; les sources de Mance et de Montvaux, celles de
Scy, de Lessy, de Saulny, de Marange, de Pierrevillers, de
Rombas, la belle fontaine de Glouange dans la vallée de
rOrne, dont les figures seront données dans la seconde
partie, les sources de la Fensch*, de l'Alzette, et des ruis-
* Jacquot. Deêcription géologique de la Moselle.
* Les marnes superposées à la couche de minerai de fer oolithique ont une épaisseur
de 5 à 40 mètres. Dans les parties où elles sont minces et où elles se brisent à la suite
de l'exploitation, elles laissent pénétrer les eaux dans les galeries, particulièrement de
novembre eo avril : c'est ainsi qu'elles affluent très abondamment dans les mines de
Uerserange.
S38 ROLE DES LITHOGUSES DE DIVERS ORDRES.
seaux de la Côte-Rouge et du Coulmy. I^ Ghiers a également
sa source à ce niveau, sur le territoire de Dîfferdange, àunc
petite distance de la frontière.
Le niveau d'eau qui correspond aux marnes à (htrea
acuminataj s^épanche à la surface en sources assez rappro-
chées, mais peu volumineuses. La plupart des petites fon-
taines qui prennent naissance sur le plateau, à peu de
distance de ses bords, appartiennent à ce niveau ; telles sont
celles d'Auboué, de Briey, de Beuvillers, de Boulange, de
Cosnes, de Lexy, de Tellancourt et de Bromont.
La troisième nappe donne lieu à des sources qui ne man-
quent pas d'importance et notamment à celles de Saint-
Julien-lès-Gorze, Chambley, Tronville, Yionville, Puxieux,
et à celles des deux Failly et du Petit Xivry dans le canton de
lx)nguyon. La région de la plaine de Briey, la moins bien
pourvue d'eau, est, comme on le voit, celle qui s'étend sur
les argiles placées à la base du troisième groupe de Toolithe :
on n'y rencontre que quelques suintements peu volumineux,
circonstance qu'il faut attribuer à la compacité de cette
assise et au peu d'étendue des couches perméables qui y
sont intercalées. Aussi les eaux météoriques s'écoulent-elles
à la surface de cette région et se rendent-elles aux cours
d'eau, sans pénétrer dans le sol. L'extrême perméabilité
des calcaires de l'étage inférieur donne lieu, au contraire,
à des phénomènes inverses. Il n'est pas rare de voir un
ruisseau, après avoir coulé pendant quelque temps à la sur-
face du plateau, disparaître tout à coup dans ces calcaires.
Ces pertes d'eau sont assez communes dans l'arrondissement
de Briey; les plus connues sont celles de Havange et du
Grand-Bichet, commune de Mercy-le-Bas. Selon toute vrai-
semblance, les eaux qui disparaissent ainsi, contribuent à
alimenter les sources qui prennent naissance dans les vallées
voisines à un niveau géologique inférieur.
ROLE DES LITHOGLASES SIMPLES.
239
Pour préciser, nous citerons, d'après Tobligeaule commu-
nication de M. Simon, comptable aux usines de Hayange,
l'exemple des volumineuses sources de la Fensch, dont le
débit varie, au cours d'une année normale, de 8000 à
60000 litres par minute, et a été exceptionnellement jusqu'à
200000 litres. Ces sources sortent par sept ouvertures dis-
^Cnisnes^--^''
\. Rodmnviller/
«-Auinetz
Ludelanjp q
/
/
N -
/S ny ♦Anqcvillere
vBassomiiicrrc ' / \
.-'^♦Dassoniïiicrrc
^Atrfun-Ie- Roman
0*A /
/ \.y ♦MaJavillere/ ♦Saiacj.le-Bafi /
IN'
/
/Loàn
Echellô
4< « •
«loi.
Fi;. 111 — Carte de la région de la Lorraine, située entre Aumetzet Hayange, montrant la dispo-
sition des failles principales indiquées par des lignes brisées, et celle des sources de la
Feosch à Fontoj, avec les pertes d*eau A,B,C,D,E,F,G, auxquelles elles paraissent devoir leur
origine, ainsi que les sources S,S,S du Gontroy, de U Grusne et de Sainte-Neige. — D*aprés
M. Simon.
lincles, sous l'ancien château de Fontoy (fig. 112 et 113).
Elles correspondent à une faille dirigée E. 46'' N., qui met
les argiles de Gravelotte en contact avec le calcaire à poly-
piers. A 250" de leur émergence, ces sources font marcher
toute l'année un moulin de quatre paires de meules, et plus
bas, sur un cours de 15 kilomètres, jusqu'à son confluent
avec la Moselle, elle est utilisée dans dix-huit chutes pour
240
ROLE DES UTUOCUSES DE DIVERS ORDRES.
faire mouvoir des roues hydrauliques et des turbines, dont
certaines sont très fortes, particulièrement dans les cinq
usines de Hayangc.
Or sur le plateau d'environ 73 kilomètres carrés qui
s'étend à Touest de Fontoy, se trouvent beaucoup d'enton-
noirs dans lesquels se perdent les eaux. Les plus importants
sont marqués sur la figure par les lettres A, B,C, D, E,F,G.
Ces trois derniers sont les plus considérables.
L'entonnoir G, situé entre Ludlange et Hayange, reçoit
les eaux de la région qui s'étend d'Aumetz à Tressange,
s«o
F
NNE
Rochonvilfers.
^ — ^>^ m^ ftf-iiy^
ï^
F
F
Nireau
^^ 7a ___!'?'!-
E chel le des Longueurs .
0 1 2 a*^ ♦ feva
. Echelle des Hatiteurs
0 » 90 30 «0 5C-*
Fig. 113. — Coape suivant la ligne ab â\i plan précédent, montrant comment les sources 5.
dites de la Fensch à Fontoy, jaillissent d'une grande faille pasnnt dans cette localité;
fff, couche de minerai de Ter oolilhique rejeté par les failles et qui supporte une napfw^
d'eau, également rejetée et formant ainsi la source de la Fensch. — D'après M. Simon.
Rochonvillers et Havange; autrefois ces eaux formaient un
ruisseau appelé le Kellebri, qui se jetait dans le ruisseau de
Boulange et qui a disparu depuis vingt-cinq ans environ,
époque de la formation de cet entonnoir. En y jetant de la
sciure de bois, les paysans ont constaté que les eaux de cet
entonnoir forment les deux sources nord de la Fensch, qui
restent toujours limpides.
Il y a environ 60 ans, les entonnoirs C, D, E, F n'existaient
pas; les eaux du ruisseau de Boulange se déversaient dans
le Conroy, au détriment duquel la Fensch en profite aujour-
ROLE DES LITHOCLASES SIMPLES. 241
d'hui. La source actuelle du Conroy débite environ 50 litres
par minute.
Les cinq sources du côté sud correspondent aux entonnoirs
C, D, E, F, et probablement aussi à A et B. Chaque fois
qu'un orage est localisé sur les hauteurs d'Audun, Sancy et
Boulange, sans atteindre Fontoy, l'eau de ces cinq sources
se trouble, tandis que les deux autres restent claires.
Ainsi, les eaux des entonnoirs, sans doute par l'intermé-
diaire des failles et de leurs ramifications, descendent d'une
hauteur de plus de 120 mètres pour former les sources de la
Fensch. La source de la Crusnes, environ 15 fois moindre
que celle de la Fensch, ne provient pas comme ces der-
nières d'entonnoirs, mais de la dénivellation du sol occa-
sioimée par la grande faille d'Audun-le-Tiche, qui, par suite
deTalfaissement du côté oriental, fait aboutir la nappe d'eau
à la surface du sol, où elle vient émerger.
Enfin les sources de Sainte-Neige, commune de Neufchef,
près de Hayange, proviennent de la grande faille dite de
Hayange, par suite de cassures secondaires, dont deux sont à
angle droit. Elles produisent environ 120 litres par minute,
et, à 50 mètres environ de leur émergence, elles disparaissent
«n s'engouffrant dans la grande faille de Hayange, pour en
ressortir plus bas, peut-être entre Hayange et Knutange, où
il y a plusieurs petites sources.
C'est principalement dans l'oolithe que Ton peut remar-
quer les rapports qui existent, d'une manière presque cons-
tante, entre la position des habitations et la distribution
des eaux souterraines et des sources. Une première ligne de
villages est placée à mi-côte sur la falaise qui termine le
plateau ; elle est habituellement alimentée par les sources
du premier niveau. Noveant, Dornot, Vaux, Jussy, Lessy, Scy,
Plappeville, Saulny, Marange, Pierrevillers, Rombas et une
foule d'aulres localités, sont situées dans cette position. Sur
16
242 ROLE DES LITHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
le plateau, les villages sont groupés au contact des marnes à
Oslrea acuminata et de Toolithe de Jaumont, où il existe de
petites sources; mais on en voit aussi beaucoup sur celle
dernière assise; ceux-là se procurent l'eau qui leur est né-
cessaire, en creusant des puits qui descendent généralemeDl
jusqu'aux premières couches du système marneux placé à la
base de Tétage supérieur. Il n'y a jamais de groupes d'ha-
bitations, au contraire, sur le calcaire à polypiers, parce
qu'il faudrait descendre à une trop grande profondeur pour
y rechercher l'eau. On ne connaît, dans l'ancien déparle-
ment de la Moselle, que Longwy qui fasse exception à celte
règle; lespuils qui alimentent cette ville traversent toute
l'oolithe inférieure ; l'eau s'y tient à 60 mètres au-dessous
du sol. Mais il faut remarquer que Longwy est une place de
guerre, dont remplacement a été déterminé bien plutôt par
des considérations stratégiques que par la nature. Les vil-
lages de la partie occidentale de la plaine de Briey sont, en
général, alimentés par la troisième nappe; aussi la pliiparl
d'entre eux sont-ils placés sur la ligne de contact de l'argile
marneuse à Ostrea costata et des calcaires oolithiques gris
qui la surmontent.
«ralld-DacllédeLaxeBlbollrff^ — La valléc de la Syrc prend
son origine à Syren, à 12 kilomètres de Luxembourg, dans un
sol très accidenté. Une sorte d'entonnoir (fig. 114) dans les
couches du calcaire infraliasique, que recouvrent les couches
très perméables de grès du Luxembourg, donnent naissance
à la source la plus volumineuse du pays : elle forme immé-
diatement un ruisseau qui, à 100 mètres de là, fait marcher
plusieurs moulins.
Le ruisseau du Muhlbach, à 2 kilomètres au N. 0. de Luxem-
* D*après H. Siegen, auteur de la carte géologique du Grand-Duché.
ROLE DES LITHOGLASES SIMPLES.
243
bourg, présente une disposition identique à celle de la Syre.
Sept sources assez considérables jaillissent sur une super-
080
Ulft
'.-Éèçllc des Hautorrà. •'
Fig. lli. — Plan et coupe montrant la soorce de la Syre, à Syrcn. Ak, marnes irisées du Keuper;
Li, maroes infraliasiques; Li, grés infraliasiques ; G, calcaire A gryphées ; Lo, marnes à
oToIdM; S» source. — D'après M. Siegen.
fîcie de moins d'un are et donnent naissance au ruisseau
qui sert de moteur à une importante fayencerie.
C'est le même grès qui alimente les puits de Luxem-
bourg.
;\ — Le plateau de l'Mpe du Wurtemberg
formé du Jura blanc (séquanien) est tout à fait sec, si ce
n'est dans les lieux où il est recouvert de quelques lambeaux
de terrains tertiaires ou de tuf basaltique. Cette aridité
résulte de ce que les couches sont très fissurées, de sorte
* Fraas. Die Nutzbare mhieralien Wurtembergs, 1860.
944
ROLE DES LITUOGLASES DE DIVERS ORDRES.
que les eaux de pluie s'infiltrent jusqu'à ce qu'elles rencon-
trent des couches argileuses ordinairement profondes. Toutes
les couches ayant un plongement général vers le S.-E., le
versant méridional de TAlpe donne issue à des sources remar-
quables par leur fort volume. On les voit quelquefois se
troubler par suite de pluies tombées à quelque distance sur
le plateau qui les alimentent, et sans qu'il soit tombé d'eau
dans les environs. Il est arrivé aussi qu'un effondrement les
a rendues limoneuses; à la suite d'un accident de ce genre
qui eut lieu à Ennabeuren, la source Smihe près Springen,
({ui en est distante de plus de 10 kilomètres, resta trouble
pendant quelque temps. Quelquefois aussi, les cours d'eau
Fig. 115. — Coupe montrant les conditions géologiques qui donnent naissance au pied de
l'Alpe du Wurtemberg à la source de BUuberen. — D'après M. 0. Fraas.
souterrains alimentant les sources paraissent se déplacer,
comme cela est arrivé pour la source de Sondernach, de-
puis 1849. Dans cette même année, les sources Smihe devin-
rent si fortes que la vallée se trouva submergée et, depuis
lors, le volume des eaux est resté plus élevé qu'autrefois.
La figure 116 représente la source importante qui sorl
dans la vallée de le Blau, près de Blaubeuren. Ses eaux, après
avoir pénétré à travers les couches « du Jura blanc, sont
arrêtées par les bancs imperméables du corallien et elles
s'écoulent vers le S.-E. jusqu'à ce qu'elles trouvent une
issue par la cassure de Blaubeuren. Entre Tutlingen et
Neresheim, il y a des centaines de sources correspondant
aux couches argileuses de la partie moyenne du Jura blanc.
ROLE DES LITIIOGLÂSES SIMPLES. ^5
Il en existe aussi dans les vallées profondes qui descendent
vers le N., particulièrement entre Mûnsigen et Weissen-
stein.
var et Alpe•-»hlrl«lllle•^ — En y Comprenant les assises cré-
tacées et jurassiques, les couches calcaires constituent, dans
les départements du Var et des Alpes maritimes une épais-
seur totale de plus de 2000 mètres.
A la partie inférieure des terrains jurassiques, il faut
citer surtout, comme principale couche imperméable, les
dépôts argileux et finement feuilletés de la zone à Àvicula
œntoridj qui occupe une grande étendue.
On peut en effet suivre cette zone depuis Ollioules jusqu'à
la vallée de Dardennes, d'où la ville de Toulon tire ses eaux.
Mais dans cet intervalle, les couches plongeant assez forte-
ment vers le nord, il n'existe pas de sources sur le versant
méridional, seul accessible à l'observation. Dans la vallée de
Dardennes, la zone revenant au jour sur une assez grande
étendue, les sources reparaissent, et, en même temps, la
source de la Baume.
Partout aux environs de Tourves, de Saint-Maximin, de
Barjols, de Besse, deFlassans, etc., la zone k Avicula contorta
joue le rôle découche imperméable, et produit à peu près la
totalité des sources nombreuses et abondantes qui existent
dans cette partie du département.
La couche imperméable caractérisée par V Ameuta con-
torfa vient au jour sur de grands espaces; mais en général
elle plonge sous l'horizon à partir de sa ligne d'émergence.
11 résulte de cette disposition que l'eau s'éloigne du bord
visible de la zone. C'est seulement par exception que la dispo-
sition contraire se présente. Mais alors ce ne sont plus des
* Dieulafait. Zone à Avicula contorta, p. H , 1807.
246 ROLE DES LITHOCUSES DE DIVERS ORDRES.
sources ordinaires qui sortent de cette zone : ce sont de véri-
tables torrents. C'estce qu'il est facile de vérifier en plusieurs
points de Tarrondissement de Brignoles, à Bargemont, à
Seillans, à la Foux de Draguignan, etc.
wmdÊL'WemÊh : féruces. — Les forages qui ont fait jaillir
dans ces dernières années à Buda-Pesth des eaux magné-
siennes si remarquables et dont l'un dépasse 970 mètres, les
ont rencontrées dans des couches de dolomie et de calcaire
attribuées à l'étage rhétien et très perméables, à cause des
nombreuses fissures et cavités qui les traversent.
Aafleterre : CSloccsterahIre, Uncolaslilre, LelceatenlrfK, ïVér-
<hMirtMshire (BatiaNd). — En Angleterre, Toolithe inférieure
et la grande oolithe sont également le siège de sources
très volumineuses.
Tel est le cas dans le Glocestershire. D'après M. Prestwich*
entre Cirencester et Cheltenham sont, dans Toolithe infé-
rieure : les sources célèbres dites Seven Wells, origine de
la Churm et débitant environ par jour 9000 mètres
cubes. A Syreford, près Cheltenham, une forte source jaillit
a la base de Toolithe inférieure, d'un volume journalier de
18 000 mètres cubes; elle forme la source principale de la
Colne.
Dans la grande oolithe, les sources sont en général encore
plus puissantes et moins variables dans leur débit. Elles
sortent pour la plupart sur le banc du fuUer's earth, qui
sépare la grande oolithe de Toolithe inférieure. Celle de
Ampney Cinas, près Cirencester, donne par jour de 22300
à 90000 mètres cubes.
Douze sources sortant du massif oolithique près d'Oxford
* Sources deê environs dVxfordt p. 24.
ROLE DES LITflOGLASES SIMPLES.
247
fournissent un volume moyen de 252 000 mètres cubes par
jour.
Des alternances fréquentes de calcaire et de sable avec des
argiles donnent lieu à de nombreuses sources bien connues
dans le comté de Northampton. Leur sortie à la base des
proéminences pierreuses et la verdure qu'elles provoquent
à leur sortie les font reconnaître de loin.
Comme il est bien souvent arrivé, la présence de sources
a déterminé la situation de villes, villages et mémo d'habita-
tions isolées. Tel est particulièrement le cas pour des séries
de villages en rapport, d'une part, avec la limite de Toolithe
inférieure et du lias supérieur, de l'autre, avec celle du
marUtone^rock et des argiles du lias moyen. Tandis que des
villages ont pris naissance sur de nombreux affleurements
de cette sorte, de grandes étendues intermédiaires en sont
dépourvues et présentent à peine quelques habitations isolées.
D'après M. Judd, les Northampton sands qui sont à la base de
Toolithe inférieure, reposent dans le Rutland et le South-
Lincoln sur une surface érodéede l'argile supérieure du lias.
Tig. 116. — Coupe prise dans le Ratland (Lincoinshirc) de Somerby à Exton, montrant les deux
niveaux d'eau soutenus par les argilea marneuses et supérieures du lias, sur une longueur de
16 kilomètres ; G, boulder clay ; Oi. oolithe inférieure ; U. argile du lias supérieur ; I^. marUtone
rock bed; Lm. sables et argiles du marUlone; U, argile du lias inférieur. — D'après M. Judd.
L'escarpement hardi et abrupt formé de roches oolithiques
« cliff > qui s'étend sur 145 kilomètres à travers le Lincohi-
shire jusqu'au lorkshire fournit à sa base, vers sa jonction
avec le lias, de copieuses sources, parmi lesquelles la belle
source Éléonor Cross, à Geddington et celle de Easton.
La figure M 6 donne un exemple fréquent dans le Rutland.
248 ROLE DES UTHOaiSES DE DIVERS ORDRES.
Trias et terrain permien.
5*. — Le grès bigarré, quoique fournis-
sant des sources, ne présente pas à proprement parler de ni-
veaux d'eau.
Il en existe au contraire un très abondant au-dessus des
glaises bigarrées avec gypse qui forment la base du muschel-
kalk. Ce niveau donne lieu à un très grand nombre de belles
sources et, en particulier, à celles qui alimentent le hameau de
Rustroff près Sierk, ainsi qu'un certain nombre de villages
placés à mi-côte, dans Tamphithéàlre de collines qui entoure
la plaine de Creutzwald, tels que : Berweilcr, Remering, Bisten
im Loch, Œtingen, Spicheren, Alsting, Hesseling et Zinging.
Beaucoup de sources, dans le canton deRohrbach, prennent
également naissance à la jonction des marnes et des glaises
du muschelkalk. Un autre niveau se montre, avec une cons-
tance remarquable, au contact des couches dolomi tiques qui
constituent le troisième étage du muschelkalk et des marnes
verdâtressur lesquelles elles reposent. Il s'épanche à la base
des plateaux que ces assises recouvrent, aux points où elles
commencent à disparaître sous les marnes irisées. Ce niveau
est notamment bien accusé dans la région comprise entre
les deux Nieds, où le système supérieur du muschelkalk
acquiert un développement exceptionnel. Il y a déterminé
remplacement des villages de Courcelles-Chaussy, Chevillon,
Maizeroy, Bazoncourt, Villers-Stoncourt et Servigny-les-
Raville qui sont tous alimentés par de belles sources. Les
mêmes considérations hydrographiques ont amené la fonda-
tion de centres de population plus importants, qui occupent
dans le département une situation identique et se trouvent
* Jacquot. Géologie de la Moselle.
ROLE DES UTHOaASES SIMPLES. 249
dans des conditions analogues, tels que Sarreguemines^
Faulquemont, Boulay et Bouzonville.
La contrée occupée par les marnes irisées est raal pourvue
d'eau. Les assises marneuses qui prédominent dans ce ter-
rain étant imperméables, les eaux qu'on y rencontre no
peuvent prendre naissance que dans les couches dolomiliques
ou gréseuses qui s'y trouvent intercalées; elles sont peu
volumineuses et très sujettes à tarir pendant l'été. Par l'effet
de ces conditions hydrographiques, tous les villages apparte-
nant à la région keupérienne sont placés sur la dolomie qui
couronne l'élage inférieur, ou un peu en contre-bas de celle
assise, et, quand elle ne fournit point d'eau courante, ce qui
est le cas le plus général, ils s'approvisionnent dans le grès,
au moyen de puits plus ou moins profonds.
Quant au grès des Vosges, il est presque toujours fissuré
et n'a aucune assise qui puisse arrêter les eaux ; aussi n'y
rencontre-t-on pas de sources sur les flancs des montagnes;
elles sourdent toutes dans le fond des vallées. Elles sont
abondantes, fraîches et d'une grande purelé. Dans le pays de
Bilche tous les villages sont, comme les sources, groupés
dans les profonds replis du sol, et le reste de la contrée est
inhabité.
De même que les couches de houille du nord de la France,
celles que la sonde a fait découvrir en Lorraine, sur le pro-
longement du bassin de Sarrebrûck, sont recouvertes de
couches d'un autre terrain. Ces couches, dont l'épaisseur
dépasse 150 mètres, appartiennent au grès des Vosges, qui
non seulement est poreux, mais traversé par des fissures
nombreuses et quelquefois assez larges. A l'abondance très
considérable d'eau, conséquence de cette disposition, se
joint la circonstance que la nappe d'eau, au lieu d'être res-
treinte à un niveau déterminé, comme dans le nord de la
France, s'étend depuis la surface jusqu'au terrain houiller.
250 ROLE DES LITUOCLASES DE DIVERS ORDRES.
de sorte qu'elle fonctionne comme une colonne d'eau de
100 mètres de hauteur, c'est-à-dire avec une pression de
10 atmosphères. En 1858, vingt et un millions de francs
avaient déjà été dépensés à l'exécution de puits à traversées
couches perméables, lorsqu'on se mit à forer dans cette ré-
gion, comme on l'avait fait ailleurs avec succès, des puits à
niveau plein avec cuvelage en fonte, suivant les procédés
Kind et Chaudron \
■Matai de lA iterrc*. — Sur la rivc gauchc de la Sarre, entre
Forbach et Merten, la limite du terrain houiller et du grès
des Vosges est marquée par un niveau d'eau extrêmement
abondant et qui donne lieu à un très grand nombre de
sources ; l'une d'elles est à une distance de 300 mètres envi-
ron du hameau de Schoenecken, qu'elle alimente.
de Luxembonrff : Hoadorf. — Parmi les caux jaillis-
santes, on peut mentionner celle qu'a atteinte à Mondorl
(Grand-duché de Luxembourg) à 202 mètres de profondeur,
un forage exécuté à travers le trias, dans le but d'y recher-
cher le sel gemme.
Henrthe-et-HoaeUe. — Au poiut de vue dcs eaux, le grès des
Vosges présente les mômes caractères dans Meurthe-et-Mo-
selle " que dans la Lorraine allemande.
AlMeei Soultji-les-Babis e« Nlederbromi. — La SOUrCC minérale
de Soultz-les-Bains jaillit des couches inférieures du grès bi-
garré qui se lient au grès des Vosges, dans un vallon, à i ki-
lomètres au N.-N.-E. de Mutzig et à 6 kilomètres au S.-S.E.
^ Annalei de$ Minet, 6* série, t. XI.
* D*8près H. Jacquot.
' Braconnier. Ouvrage précité, p. 108.
ROLE DES LITHOCLASES SIMPLES. 25i
du Kronthal, localités dans chacune desquelles le grès des
Vosges a été poussé au milieu des couches plus élevées du
trias. Le grès bigarré de Soultz-les-Bains est lui-même à un
niveau bien supérieur au keuper qui est situé à moins de
2 kilomètres de la source vers l'ouest, ce qui décèle aussi
un soulèvement, dont Soultz-les-Bains occupe le centre, et
qui présente de l'analogie avec ceux de Mutzig et du Kron-
thal. Enfin des failles traversent les couches du trias, et les
couches jurassiques sont fortement inclinées dans le voisi-
nage.
La source minérale de Niederbronn sort également d'un
pointement anormal de grès bigarré au milieu du muschel-
kalk.
Maote-Haraei Bo«rboue-lc»-Babis\ — LcS SOUrCCS thermales
de Bourbonne, telles qu'elles étaient connues il y a cent ans,
émergeaient sur la rive droite du ruisseau de Borne, au fond
de son vallon, au milieu de terres rapportées et de débris
d'anciennes constructions. Les moindres excavations dans le
sol donnaient lieu à des venues d'eaux plus ou moins chau-
des, plus ou moins salées, que les habitants considéraient
comme autant de sources thermales indépendantes.
Les travaux de 1783 et 1784 ont montré que l'origine des
sources connues jusque là n'était pas aussi naturelle qu'on
le supposait : la source dite le Puisard Romain, était enve-
loppée par un puits en maçonnerie jusqu'à 6 mètres au
moins au-dessous du sol où elle émergeait, et les sources mi-
litaires appelées Étuve et Bains Patrice provenaient de tuyaux
verticaux en plomb profondément enfoncés dans la terre.
Les sources anciennes et modernes ne sont pas indépen-
dantes les unes des autres ; car les nouveaux forages ont tou -
* Rigaud. Annale» des Mines, t. XVII, 7« série, 1880, p. 360.
252
ROLE mS LITHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
jours fait baisser le volume d'eau fourni auparavant par les
sources romaines.
Des obsei^vations établissent l'existence d'une assise per-
méable placée à la base des argiles bariolées. La nappe d'eau
minérale chaude circulant à la surface du grès a percé en
plusieurs points la masse superposée des argiles barioléeSt
Echelle des hn^ueurs
Echelle des hauteurs
-H
MM
■H
Fig. 117. — Coupe transversale de la vallée de Bourboiine, avec les sondages exécutés i la
recherche de l'eau minérale, qui accusent l'existence de failles. T| grés bigarré préseoUnt
des alternances d'argiles et de grés; T,, rauschelkalk ; q. alluvions et remblais artificiel.
— D'après M. Drouot.
probablement en les délayant peu à peu. Elle a formé ainsi
des puits à peu près verticaux, dont le plus important esl
sans doute celui qui a pour issue le puisard romain. Ces che-
minées se sont remplies de matières perméables, sur une éten-
due suffisante pour permettre le passage des eaux affluenles.
Il est constant qu'une faille passe très près des établisse-
ments thermaux. M. Drouol l'a constaté avec précision*. Cette
* Annales des Mines, !• série, t. III, 1863.
ROLE DES LITHOGLASES SIMPLES.
955
254 ROLE DES LlTHOaASES DE DIVERS ORDRES.
faille n*est pas isolée : elle se trouve en relation à Test, avec
un réseau d'autres fissures assez compliqué et sans grands re-
jets-Les parties de ces failles qui se dirigent au nord-ouest iie
semblent pouvoir jouer aucun rôle dans la formation des
sources thermales.
D'après M. Higaud, les eaux paraissent entrer dans le sol
par une faille et en ressortir par une autre faille très voisine
de la région des sources. Quant à b première, elle serait
dans le lit de l'Apance, entre Fresne et ChàliUon-sur-Saône,
aux environs d'un centre d'éloilement. Revenant ensuite par
d'autres cassures à la surface des grès bigarrés, dans le voi*
sinage du Puisard romain, l'eau minérale s'épancherait en
nappe dans les zones perméables situées au contact des grès
et des argiles bariolées. Retenue par l'imperméabilité de ces
dernières, l'eau ne parviendrait à la surface du sol que par
des sondages et par une ou plusieurs cheminées qu'elle a
percées dans les argiles. En continuant son ascension par
les cheminées naturelles, une partie des eaux s'élèverait jus-
qu'aux bancs perméables placés à la base des alluvions mo-
dernes, sous le béton romain, pour traverser les orifices ré-
servés dans cette maçonnerie et recevoir des infiltrations
d'eau douce et froide alimentant ainsi les sources ro-
maines.
H n'est pas inutile de remarquer que les importantes
carrières de grès bigarré, voisines du pont de Chàtillon,
montrent de grandes fissures orientées N 18* E, et perpendi-
culairement E 18" S. Les blocs de pierres de taille ne peuvent
être tirées de la carrière, sans déchet, qu'au moyen de
recoupes menées suivant ces alignements.
Dans les autres carrières de grès et dans les exploitations
de moellons du muschelkalk, il existe des fissures régulières,
ayant pour direction N 74* E, et la perpendiculaire à cette
ligne.
ROLE DES LITHOGIASES SIMPLES. 255
— Les nombreuses exploitations du département du
Gard ont montré combien certaines couches calcaires du
trias sont aquifères. Beaucoup de venues d'eau qui tendent
à envahir le terrain houiller sont fournies par ce terrain où
s'infiltrent les cours d'eau de la surface, comme à Malbos et
à Saint-Germain d'Âlais. Les mineurs reconnaissent de
toutes parts que les failles, qui parfois leur servent de pré-
servatif contre les eaux, souvent ausi amènent celles-ci dans
leurs travaux.
i; paite artésiM*. — L*eau jaillissante que le puits
artésien de l'hôpital militaire de Rochefort, l'un des plus pro-
fonds qu'on ait exécutés jusqu'à présent, amène au jour,
provient de profondeurs de 816 mètres et de 854 mètres et
de couches appartenant au trias.
ri thermes de Wlldl»«d| forages de Berg et de
t'. — Dans la Forêt Noire, le grès bigarré inférieur
ou grès des Vosges se comporte comme en Lorraine. Ainsi
tandis que les plateaux entre l'Enz et le Nagold manquent
d'eau dans les années sèches, un grand nombre de sources
jaillissent du fond de leurs vallées. Il en est de môme dans
la contrée de Wildbad ; les plateaux manquent d'eau. Dobel,
Neusatz, Rothensol, Bernbach, doivent parfois recourir à
des citernes pendant les années sèches, tandis que des
sources abondantes sortent au fond des vallées voisines.
Le keuper présente un niveau d'eau important dans la
région du grès grossier dit stubemandstein. Il y a un autre
niveau d'une grande constance, qui correspond aux bancs
dolomitiques supérieurs à la Lettenkohle\
*■ Czyszkowâki. Note sur le$ eaux du triai dans le Gard^ 1874.
' Roux. Comptes rendus, t. LXIIU, p. 910, 1871.
' PanlQS. Explication des feuUtes de LUbemell et de Wildbad, 1866 et 1862.
* Fraas, ouvrage précité, p. 188.
^56 ROLE DES LITHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
Quant au muschelkalk, les proéminences qu'il forme aux
environs de Stuttgart, par exemple, sont aussi pauvres en
sources que les hauteurs de TAlpe. Mais les vallées fournis-
sent beaucoup de sources; telles sont celles de Strudelbach.
au-dessus et au-dessous de Rieth, remarquables par leur
limpidité^
Les sondages qui dans la vallée de Stuttgart, à Berg et à
Cannstadt, apportent des eaux chlorurées accompagnées de
beaucoup d'acide carbonique pénètrent aussi dans le trias.
CSraad-Daehé de Bmdlef Motheareto. — Uu forage exécUté
en 1839 à Rothenfels, par M. le professeur Walchner, dans la
vallée de la Murg, à travers le conglomérat du grès rouge,
au voisinage d'un pointement de granité, arrivé à 94 mètres
de profondeur, a livré passage à une source d'eau thermale,
se rapprochant de celle de Bade qui en est distante de 7 kilo-
mètres. Or cette eau jaillit tout à coup, en grande abondance,
d'une fissure du conglomérat.
FrmnconieV — En Fraucouie, le groupe de l'anhydrite con-
tient une grande abondance d'eau retenue par des schistes
marneux dans la dolomie (oberzeller^dolomit) qui s'en trouve
imbibée, à la manière d'une éponge.
Cette dolomie caverneuse constitue la plus puissante ac*
cumulation d'eau souterraine du muschelkalk; elle fournit
les énormes «sources de la ville de Vurtzbourg et alimenle
abondamment les puits profonds de toute la contrée'.
Autriche 9 Stlxenstcin et Antre* soirées allmentaiit Vleancf
«ronpe de fimsIiaii. — Cc quc uous avous sigualé dans les cal-
* Fraas. Carte géologique de Stuttgart,
* D'après H. F. Sandberger.
> D'après M. Gûmbel, 1872.
ROLE DES LITHOGUSES SIMPLES.
257
caires jurassiques se reproduitdans les calcaires triasiques,
et entre autres, pour les fortes sources si bien étudiées par
M. Karrer* pour alimenter la ville de Vienne.
Deux types fréquents peuvent être représentés par les
Fig. 119. — Type de source résultant du déversement de l'eau imprégnant le calcaire et arrê-
tée par des schistes de Werfen. Exemple pris aux environs de Vienne. — D'après M. Sucss.
figures 119, 120 et 121 empruntées à M. Suess. Cette dernière
Fig. 120. — Exemple de la source de la vallée de Brichberg, non loin de Vienne, dont le
réservoir, situé dans le calcaire, est arrêté à la surface du schiste de Werfen. — D'apr.'s
M. Suess.
s'applique particulièrement aux sources de Stixenstein.
Hg. 121. — Coupe montrant les conditions dans lesquelles los sources de Stixenstein jaillissent
aa foDd d'une vallée entaillée dani le calcaire alpin. C, calcaire alpin; W, schistes de Wer-
fen. — D'après M. Suess.
Ces dernières, dont la situation est représentée par la
figure 122, s'échappent en écumant dans la vallée étroite de
Sirning, d'un calcaire jaune rougeâtre, qu'on rapporte au
* Géologie des Kauer* Fran^^Jouft'Eochquellen Wasterlettung, 1877.
17
S58
ROLE DES LITDOaiSES DE DIYERS ORDRES.
trias supérieur. On n'aperçoit pas, d'après M. Suess, de roches
imperméables dans le voisinage. Le volume de la source
principale et des sources voisines est au minimum, par jour,
««AStAID
•TIxaiSTON
Fig. 122. — SUzenstein. Versant gaoche de la vallée. Sources principales situées près da chàUau
de Stizenstein. au pied du ruisseau Sirning et captées pour l'alimenUUon de la ville it
Vienne (Autriche). — D'après M. Karrer.
de 38 800 mètres cubes et au maximum de 43000 mètres
cubes.
Le mécanisme de la formation de ces sources tient ici,
«RUllHti
Fig. 123. — Carte montrant les conditions dans lesquelles sort la source S de Kaiserbruonen, et
les galeries gg qui ont été pratiquées pour en augmenter le rendement. C, calcaire que Ion
attribue au trias supérieur. — D'après M. Karrer.
comme dans beaucoup d'autres roches calcaires, à la pré-
sence d'innombrables lithoclases de tout ordre, qui forment
un réseau gigantesque où les eaux circulent avec facilité»
ROLE DES LITHOCLASES SIMPLES. 359
qu'elles proviennent de la précipitation atmosphérique ou
de la fonte des neiges. Elles y descendent jusqu'à ce qu'elles
rencontrent les schistes de Werfen, sur lesquels elles s'accu-
mulent, de façon à déborder çà et là sous forme de sources,
comme à Stixenstein et à Kaiserbrunnen.
Le Kaiserbrunnen (Gg. 123 et 124) est la plus élevée des
sources mises à contribution pour l'approvisionnement de
Vienne, par la galerie dite François-Joseph. Le ruisseau de
Tig. 12i. — Coupe montnnt la situation du niveau des eaux phréatiques qui alimentent la
source de Kaiserbrunnen par rapport au niveau de la Schwana. C, calcaire que l'on attribue
au trias supérieur; E, niveau des eaux phréatiques pendant l'été; H, leur hauteur variable
pendant Thiver ; N, niveau du fond de la Schwarza. — Diaprés M. Karrer.
laSchwarza reçoit dans le haut de son cours un fort contin-
gent par l'influence des eaux phréatiques ; il tire son origine
du calcaire de la région du Schneeberg.
Le rôle des paraclases dans cette même région n'est pas
moins manifeste. De nombreuses sources, les unes thermales,
les autres froides, sont en rapport avec la faille terminale
des Alpes, au sud-ouest de Vienne (fig. 125). Telles sont
Môdling, Baden, Wôslau, Fischau et Brunn-am-Steinfeld.
La ûgure 126 représente, en particulier, la situation de
Fischau sur la faille, à la limite de la plaine quaternaire de
Vienne. Des sources thermales et des sources froides en sor-
tent, de même qu'à Brunn. Une partie de ces dernières sert
à l'alimentation de la ville de Vienne.
260
ROLE DES LITUOaASES DE DIVERS ORDRES.
Enfin la vue ci-jointe (fig. 127) représente, le long de
celte même faille terminale des Alpes, la situation rela-
Fig. 125. — Groupe de sources thermales en rapport avec la faille terminale
des Alpes, au sud-ouest de Vienne (Autiiche). — D'après M. Suess.
tive de deux groupes de sources ordinaires et de sources
OKO, ESE.
F1SCKAU
Fig. 126. — Profil montrant la situation de Fischau et de la faille qui donne nai>-
sance â des sources thermales et i des sources froides de même qu'A Brunn. —
D'après M. Suess.
thermales, entre Wirflach et Fischau, sur une longueur
d'environ H kilomètres.
ROLE DES LITUOCLASES SIMPLES.
A■sleterre^ — Le new red sandstone ren-
fermant les étages du bunter et du keuper
inférieur, rivalise par sa perméabilité avec
la craie et le lower greensand; aussi pré-
sente-t-il à ce point de vue une grande im-
portance.
C'est à sa structure à peu près homogène
dans ses sous-étages et à l'absence de lits
d'argile ou de marne imperméable que ce
terrain doit sa richesse en eau.
Buckland a remarqué que la plupart des
grandes villes manufacturières des comtés
du centre et du nord de l'Angleterre sont
établies sur le new red sandstone. Ce fait,
qui pourrait paraître accidentel, tient à des
causes naturelles. A part la circonstance
que les villes ainsi situées sont générale-
ment à proximité du terrain houiller et de
la houille, et de plus, qu'elles trouvent de
très bonnes pierres de taille, comme on le
voit dans leurs monuments et leurs an-
ciennes églises, elles jouissent de l'avan-
tage de se procurer facilement de l'eau.
Toutes les villes bâties sur ces terrains re-
posent sur des réservoirs naturels d'eaux,
filtrées dans des roches éminemmejit po-
reuses. C'est ainsi que les emplacements
occupés par les villes de Manchester, Liver-
pool, Stockport, ^facclesfleld, Leek, Nol-
tingham , Derby , Wolverhampton , Bir-
â61
I h
%, ^
a \
* Hull. New red sandstone and permian sources water supply.
Mémoire of ihe litterai'y and philo9ophical Society of Man-
chester, 1861-1862. Le môme, 18o9-1876.
263 ROLE DES UTHOGLASES DE DIVERS ORDRES.
mingham, Kidderminster, Stourbridge, ont a la fois les
avantages d'un accès facile au charbon, à Teau et à la pierre
de construction.
Le volume d'eau que Ton peut extraire des puits est
étonnemment abondant.
A Liverpool, la. quantité d'eau aspirée de tous les puits,
tant publics que privés, peut être estimée à 22 500 mètres,
provenant d'une superficie d'environ 51 kilomètres carrés.
A Manchester et à Salford, M. Hull a estimé, en 1865, que
soixante et dix puits profonds fournissaient environ 27000
mètres cubes d'eau par jour. Cette eau, claire et parfaite-
ment adaptée aux usages industriels, correspond à une sur-
face d'environ 17 kilomètres carrés. Les rivières Irwell, Irk
et Medlock y contribuent sans doute pour une part par leurs
infiltrations.
A Birmingham, sur les 31 000 mètres cubes employés par
jour, il y en avant 9000 qui, en 1865, étaient fournis parle
new red sandstone.
La présence de l'eau dans celui-ci est non seulement due à
la présence de lithoclases et des plans de stratification qui le
traversent, comme le savent très bien les puisatiers, mais
aussi à sa perméabilité propre, laquelle varie d'un district
à l'autre.
On augmente le débit des puits en les approfondissant et
en poussant des galeries à partir de leur fond.
Dans le Lancashire, la surface de la nappe dans le grès
est faiblement ondulée, et plus haute dans l'intérieur que
sur les côtes de la mer.
Au sud des Mendips Hills, les conglomérats sont imbibés
d'eau, comme les grès dont il vient d'être question.
Des sources abondantes jaillissent souvent de cette roche,
à sa jonction avec les roches paléozoïques imperméables qui
lessupportent. L'un des plus remarquables exemples est fourni
ROLE DES LITHOaiSES SIMPLES. S65
par les sources de Wall-Grange, près Leek, en StafTordshire,
qui produisent par jour environ 13 500 mètres cubes.
Irlande ^ ^- Le ucw rcd sandstonc, qui se trouve exclusive-
ment dans le nord-est de l'Irlande, repose sur divers étages
de la série paléozoîque et supporte le terrain crétacé et les
roches volcaniques miocènes du comté d'Ântrim. Comme en
Angleterre, les roches de cet étage sont fortement aquifères.
Toutefois de nombreux dykes basaltiques apportent un
obstacle à la circulation des eaux souterraines (fig. 128).
Tig. 128. — Coupe montrant la disposition des eaux souterraines à Belfast et environs. 1, silu-
rien inférieur oA l'eau est fournie par des puits ; T^, grès bigarré (new red sandstone) dont
Teau alimente aussi de nombreux puits; T,, marnes Irisées (keuper); Cf, grés Tert supérieur
(npper green sand); G,, craie; «, basalte en nappes et nombreux dykes et pointements;
G, graviers quaternaires. — D'aprÀ une très obligeante communication de M. Edward fluli.
C'est sur ces grès que la grande ville manufacturière de Bel-
fast est construite, et quelques-unes de ses fabriques en tirent
une partie ou la totalité de leurs eaux, notamment par le
puits artésien de Gromac.
BaviroM de Loaao, prés fiéaes. — Une formation de calcaires
magnésiens triasiques très étendue vers le nord et le nord-
ouest de Loano et toute remplie de fissures et de cavernes,
donne naissance à de belles sources qui jaillissent à sa base
(voir plus haut, page 46, les figures 22 et 23), au contact des
schistes talqueux et des gneiss sous-jacents. On peut citer,
par exemple, celle de Boissano et celle de Verzi.
^ HuU. Géologie de» environs de Preecoty p. 36. — D'après une obligeante communica-
tion de M. Edward Hull.
2G4 ROLE DES UTHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
Terrains paléozmques.
Artois. -- C'est du carbonifère que sortent les eaux jaillis-
santes par les forages qui ont, depuis longtemps, rendu
Massique'.
l'Artois classique*.
4e hoiUlle : 1m dMipeUe-Mas-Bn («Adae-et-LoIre). — LeS
exploitations de houille n'apprennent que trop comment
l'eau peut jaillir par les lithoclases qui coupent le grès
houiller. Nous nous bornerons ici à citer l'exemple des tra-
vaux des mines de La Chapelle-sous-Dun\ où, en 1857, les
eaux arrivaient abondamment par les failles, recoupées dans
la partie nord des ouvrages des puits Marc et Félicité, ainsi
que par la couche de grès qui se trouve au-dessous de la
couche de houille, dite de Conchalon, et qui a été traversée,
par le dernier de ces puits, au niveau de 235 mètres.
— Dans le sud-ouest de la Sardaigne, les plus
belles sources paraissent au contact du calcaire dit fnéld-
lifère avec les formations imperméables, schistes siluriens et
cambriens. Ce calcaire, privé de fossiles, atteint souvent une
grande épaisseur. Les exploitations de gîtes métallifères
qu'il renferme ne sont jamais gênées par les eaux, tant
qu'elles restent au-dessus du niveau des vallées.
Parmi les sources de ce genre, nous citerons celles du
Gutturu-Pala, de Su-Mannau (fig. 129) et de [Doumsnovas,
dont l'altitude est d'environ 180 mètres. Leurs débits moyens
par minute sont respectivement de 280, 70, 200 litres. La
source de Quoquadraxiu (fig. 130j, dans la même région, est
* Garnier. Traité du sondeur,
• Droiiot. Notice sur les gites de houille de Saùne-et-Loire, p. 311.
ROLE DES LITHOCUSES SIMPLES.
365
le drainage d'une couche calcaire repliée et enchâssée entre
des schistes peut-être cambriens.
Les études que Ton a faites, sur la faculté d'absorption des
Echelle des longueurs.
0 12 3 kfl-
> 1 1 1 .
Bdielle ddsh&uleurB^
Fig. 120. — Ccupe mnnliant la situation de la source S de Su-Maiinau (Sardaigne). Ce. schistes
I et grès cambriens; Is. schiste silurien; le, calcaire silurien. — D'après une communication
I; raanuscrïte de M. Giordanc.
eaux pluviales par les calcaires de ces régions, en comparant
Wvtaià
de la Mer •
Echelle dea Longueurs.
J..
- kil
Echelle des //auteurs
^
S(00
joooMét
Fig. 130. — Coupe montrant la position de la source S de Quoquadraxiu en Sardaigne.
Ce. schistes et grès cambriens, auxquels sont subordonnées des couches calcaires. — D'après
M. Giordano.
le volume d'eau de pluie tombée, avec celui des sources, a
déjà fourni des données intéressantes et utiles. Le rapport
S66 ROLE DES UTUOGUSES DE DIVERS ORDRES.
entre ces deux quantités varie de 0,56 jusqu'à près de 0,50.
On perce en ce moment une longue galerie d'écoulement
devant servir à la mine de plomb de Monteponi, que le gou-
vernement a vendue récemment. Cette galerie, de plus de 6 ki-
lomètres, desservira en même temps quelques autres mines
latérales, en vertu de la filtration naturelle des calcaires, et
au moyen des études susdites, on a pu calculer, assez approxi-
mativement, le débit probable de la galerie et par conséquent
ses dimensions.
— Grâce aux failles et aux diaclases de toutes
sortes qui les traversent, les roches paléozoîques de l'Irlande,
cambriennes et siluriennes, donnent souvent lieu à des
sources. C'est ce qui arrive, par exemple, pour les schistes
cambriens et cambro-siluriens. Dans les comtés de Mayo,
de Galway et de Kerry, les roches siluriennes inférieures ne
sont pas aussi fracturées.
On peut citer', comme donnant lieu à de belles sources, le
qtuirtz rock ou quarlzite cambrien à Howth, comté de Dublin,
dans les montagnes de Forth, comté de Vexford, dans les
montagnes de Bennabeola, comté de Galway, et ailleurs.
Alz-to-Cliapelle et Boreetie (B■riMhel4)^ — Aix-la-Chapclle et
Berce tte sont situées sur des couches devoniennes qui pré-
sentent une série de plis aigus (fig. 131) semblables à ceux
que Ton connaît en Belgique. Au contact des calcaires et des
couches schisteuses, jaillissent de volumineuses sources
chaudes qui manquent, au contraire, dans le^ schistes et
grès, auxquels le calcaire est associé, ainsi que dans le terrain
houiller. L'ensemble des sources présente deux alignements
* D*aprës M. Kinnahan.
' D'après M. I. Beissel. Congre* des ingénieuv allemande à AiX'la^Chapelle, 1876.
ROLE DES LITHOCLiSES SIMPLES. S67
évidents (fig. 132), qui coïncident avec ceux du calcaire.
Fig. 131. — Plan montrant les affleurements des couches devonieiincs et carbonifères, qui sup-
portent Aix-la-Chapelle et Burtscheid. le, calcaire devonien ; It, schiste devonien supérieur;
I fle, calcaire carbonifère; Hh. groupe houiller; les sources thermales sont représentées par
I des points noirs disposés suivant deux alignements parallèles, qui passent par Aix-la-Chapelle
' et Bartscheid; la lignt de coupe AB coïncide avec la direction nord-sud. — L'aprés M. 1.
Beiasel.
tM fP9l
Fjg. 132. — Coupe suivant la ligne AB, du plan précédent. Ii, schiste devonien liiférieur; le. cal-
caire devonien; U, schiste devonien supérieur; Hc, calcaire carbonifère; Hh, groupe houil-
ler ;C^ sable dit d'Aix-la-Chapelle; Ce-, sables verts; Ct". couches marneuses crétacées. —
D'après M. I. Beissel.
K««*. — Les sources thermales d'Ems sortent de fissures
* Gûmbel. SiUmgêberichte der K. bayer Akad. der Wissentchaflen sûMunchen, 1882.
2G8 ROLE DES LITHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
ouvertes, avec une disposition radiale, dans une voûte de
quartzite fortement courbée, dont le rayon n'est que de 50 à
60 mètres (lig. 155). Pour reconnaître s'il y avait une relation
entre les liions métallifères et les sources, il fallut faire un
relevé exact des allures des couches devoniennes inférieures.
UOPnEM
hiis. 133. — DisiMisiUoii gciiéralo des sources thermales d'Ems. Q, seUc principale de quarliiie
et cassures d'où sortent les eaux thermales S, et à l'ouest de laquelle sont d'ancienn'*»
exploitations de plomb et d'argenL Q, selle latérale également de quartzite. — D'apré»
M. Gùmbcl.
ainsi que des nombreuses diaclases qui les traversent. C'est
ce que représente la coupe théorique ci-jointe, due à M. Koch
(fig. 134).
On voit que le quartzite forme deux cuvettes dirigées du
N.-O. au S.-E. comme la plupart des rides du système rhénan:
la cuvette des filons métalliques et la cuvette des sources
thermales. Ces cuvettes sont séparées l'une de l'autre par la
selle des quartzites d'Ems. A son affleurement, la cuvetle
des filons a 5 kilomètres environ de diamètre et celle des
sources l''",8. Cette dernière se relève vers le N.-E.
Des roches éruptives sont connues dans le voisinage. A
deux kilomètres au N.-E. des bains, au village de Kemmenau,
paraît un petit pointement de basalte. D'autres pointements
basaltiques sont connus dans la contrée. En outre, le trachyte
forme deux cônes aigus à Arzbach, au nord de la raine de
plomb et de mercure et de plus, il est assez répandu dans
le Westerwald.
ROLE DES UTHOCLÂSES SIMPLES.
2G9
Comme le montre la figure, Teau peut suivre la séparation
S70 ROLE DES LlTHOaASES DE DIVERS ORDRES.
du quartzite et du schiste ( Wisperschiefer) avant de s'épancher
au travers des quartzites. Toute la contrée est d'ailleurs tra-
versée par de nombreuses paraclases et diaclases, dont la
coupe représente un certain nombre.
Aucun danger ne parait i craindre pour les thermes,
tant que la selle de quartzite qui les sépare des travaux de
mines n'est pas attaquée.
Il est très possible que plus bas, elle longe le basalte, con-
formément à la coupe ci-jointe; mais le fait n'est pas assez
certain pour qu'on ait cru devoir rattacher le gisement de
ces sources à des pointemenls de roches éruptives.
WImomUb t SoMrcM aAlarellcs et pwdim mwtéaiomm. Parmi leS
nappes reconnues à divers niveaux du terrain silurien dans
l'État du Wisconsin, par M. Chamberlin*, le plus remarquable
est situé à la partie supérieure des schistes argileux de Cin-
cinnati, qui retiennent l'eau, après son passage à travers le
calcaire du Niagara, très fissuré et caverneux. Sur la côte
orientale de Green-Bay et de la vallée de Rock-River, celte
jonction affleure, à de fréquents intervalles, sur 240 kilo-
mètres, de sorte que des centaines, si ce n'est des milliers
de sources, grandes et petites, marquent cet horizon. Quel-
ques-unes de ces sources sont très fortes; elles peuvent être
regardées comme des dérivations de ruisseaux, plutôt que
comme des sources ordinaires. En beaucoup de lieux elles
font tourner des moulins.
De nombreux puits artésiens ont atteint Teau dans les
couches siluriennes du même Ëtat, au moins à 6 niveaux
différents (fig. 155). Le plus important et le plus utile, quoi-
que le plus profond de ces niveaux est celui du grès de Saint-
Pierre (S-Peters), dans la partie orientale de l'État. Ce
* lïydrology of TKûcofwm, 1877.
ROLE DES LITHOaiSES SIMPLES.
271
grès est non seulement poreux, mais traversé par de nom-
breuses cassures, qui permettent à l'eau de le traverser
rapidement.
 Sparta, il y a 12 puits artésiens, situés à 5 kilomètres de
la ville. Ils tirent leur eau d'une même couche, à 100 mètres
de profondeur, et jaillissent à 2 mètres au-dessus de la sup»
face*. D'autres puits artésiens ont été creusés, par exemple,
Fig. 135. — ProÛl donnant, à Pond du Lac, un exemple des puits artésiens du Wisconsin, d'après
X. G. Chamberlin; section de Taychedah à Ripon. Échelle horizontale = — - — ; échelle
155.000
Terticalerrjigg.
dans la Prairie du Chien, où l'eau jaillissante provient de
plus de 300 mètres de profondeur.
De belles sources sont communes dans la formation de
Postdam.
Terraim cristallins.
— Lorsqu'on creuse un puits dans le gra-
nité ou dans les roches cristallines qui lui sont associées, on
ne trouve pas l'eau avec régularité; il faut tomber sur quel-
que fissure, il n'y a pas de nappes d'eau à proprement parler.
Toutefois, lorsque ces roches sont traversées par des fissures
* Ouvrage précité, t. IV, p. 57.
'2n ROLE DES LITHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
profondes, il peut en résulter des sources qui se distinguent
par un débit plus volumineux et plus constant de celles que
fournit l'arène granitique.
Telles sont, dans le département du Puy-de-Dôme : arron-
dissement de Clermont, d'après Lecoq : celles du Petit Ba-
reix, près Laqueille (micaschiste); celles de Ghàteauneuf,
sous le château même, de Genestine; — arrondissement
de Riom : la magnifique source de Giat; celle de Servolles;
— arrondissement de Thiers : celle de Bourdier ; — arron-
dissement d'Ambert : celle de la Bourlhomme, au-dessus de
Pierre-sur-Haute; celle de Montgeol, canton de Saint-Amand;
celle de Roche-Savine ; celle de la Viade, commune de Sainte-
Catherine.
Le même auteur en signale d'analogues dans les départe-
ments du Cantal, du Gard, de la Haute-Loire et de la Lozère.
Les sources qui sortent du trachyte sont nombreuses, lim-
pides, mais en général d'un faible débit, comme celles qui
s'échappent des terrains primitifs et pour la même raison.
Cependant il en est d'abondantes qui résultent non seule-
ment de roches poreuses qui leur sont subordonnées, mais
aussi de cassures. Telle est, dans le cirque de Lioran, où
affluent les infiltrations, la source de TAlagnon, la Font-de-
Cère, au pied du Plomb du Cantal, et une autre, au pied du
Puy-Mary.
. — Quelque peu importantes, au point de vue
du mouvement des eaux, que soient les lithoclases des roches
cristallines aux abords de la surface du sol, elles leur sont
encore moins accessibles dans la profondeur, qu'elles s'y
trouvent moins nombreuses ou que leurs parois soient plus
serrées, plus rapprochées.
C'est ce que montre, en particulier, le percement du mas-
sif du Saint-Gothard, d'après les observations exactes dont
ROLE DES UTHOGLASES SIMPLES. i73
on est redevable à M. Stapff' (voir plus haut fig. 1, p. 10).
Dans ce percement, long de plus de 14 kilomètres, des
infiltrations notables (0,4 à 0,8 litre par seconde) ne se sont
produites, dans la partie nord du tunnel, qu'entre 1450 et
1500 mètres de Torifice, position qui correspond à la pre-
mière traversée de la Reuss \
La totalité des venues d*eau de cette partie septentrionale
peut être évaluée de 3,5 à 13,5 litres au plus, par seconde.
Dans la partie sud, les venues d'eau ont été plus impor-
tantes*. Entre le profil 3178 et le profil 7093, qui est à peu
près au faite du tunnel, le débit a été d'à peu près 37 litres
par seconde. Ces venues d'eau étaient très inégalement ré-
parties. Du profil 6400 vers l'intérieur, elles sont devenues
tout à fait insignifiantes, et le profil géologique en indique
la raison. La gi*ande faille principale qui descend du glacier
de Sainte-Anne et coupe le tunnel vers le profil 5908, col-
lecte en effet les eaux provenant des couches aquifères voi-
sines de la surface du massif (voisines des deux côtés du
Kastelhorngrat) de sorte qu'elles ne peuvent plus déboucher
dans le tunnel qu'à travers la zone fissurée comprise entre
le profil 5908 et la faille du profil 6530.
Abstraction faite de l'intervention de pareils systèmes de
fentes dérivatrices, tous les bassins sourciers connus à ciel
ouvert se retrouvent à l'intérieur du souterrain. Nous ne
citerons que les venues d'eau les plus importantes. Elles se
sont produites aux profils 3921; 4088; 4125 (petit lac de
Sella); 4208, environ 1 litre par seconde (grand lac de Sella) ;
4599; 4456 à 4566, sur le toit des lithoclases du Greno di
Prosa, environ 14 litres; infiltrations de peu d'importance à
l'intérieur de ces lithoclases jusqu'au profil 4700; puis, plus
* Slapff. Profil géologique du Saini-Gothard dam taxe du grand tunnel^ p. 23.
* Mémoire précité^ p. 46.
18
274 ROLE DES LITHOCLASES DE DIVERS ORDRES.
fortes à partir de là, jusqu'au profil 4776; 5455; 5446; 557 i
(dépression la plus méridionale du Guspisthal); 5871 à 5980,
environ 9 litres, amenés par la grande faille principale,
depuis les autres bassins sourciers du Guspisthal; 6105;
6214 à 6229, environ 5 litres ; 6305 à 6400. Les débits isolés,
que nous venons d'indiquer pour quelques sources, don-
nent un total de 27 litres; toutes les autres infiltrations réu-
nies doivent par conséquent fournir encore 10 litres.
— Près de Chamonix, on voit plusieurs belles
sources sortir des diaclases. Par exemple, au-dessous du
bourg, aux Gallians, il en est deux qui jaillissent à 12 mètres
Tune de Tautre, au fond de la vallée, au pied de deux
diaclases que Ton voit couper un escarpement vertical
de protogîne, sur 50 mètres de hauteur. A 1500 mètres
plus bas, auprès de Mont-Quart, se présente un fait ana-
logue.
w«rtenibers9 wnAad. — Àu milicu dcs masses de grès bi-
garré dont l'épaisseur atteint 1000 mètres, le granité appa-
raît d'une manière inattendue, au point où est situé Wildbad.
et il s'élève, en cette localité, jusqu'à une hauteur de 12 mè-
tres au-dessus du fond de la vallée, recouvert de nombreux
blocs anguleux de grès bigarré.
Les sources thermales jaillissent par des diaclases traver-
sant le pointement de granité qui, autant qu^on en peut
juger, sont parallèles entre elles et se dirigent à peu près de
Test à l'ouest, c'est-à-dire perpendiculairement à la direction
de la vallée, et parallèlement à de petits filons de quartz et
barytine coupant aussi le granité. Ces diaclases sont obli-
ques, de telle sorte que le forage vertical offre aux eaux le
plus court chemin. Dans le but d'augmenter le débit des
sources naturelles, on a exécuté, à partir de 1838, des fo-
ROLE DES UTHOGLASES SIMPLES. 375
rages qui, en 1849, étaient au nombre de 28 et atteignaient
une profondeur de 31 mètres.
iriaodc. — Les basaltes et dolérites miocènes qui, en Ir-
lande, couvrent de grandes étendues sont par eux-mêmes
imperméables; mais leurs cassures permettent à Teau de s'y
infiltrer.
■«M de l'Eisa. caiMie. — Aux cnvirous de GataneS trois
coulées de lave, dont l'une est antérieure à l'arrivée des co-
lonies grecques, une autre du troisième siècle, puis celle de
1669, ont détourné et recouvert le cours de la rivière Ame-
nano qui n'a plus, à Tair libre, que son embouchure au fond
du port.
Un autre cours moindre, le Cifali, a eu le même sort.
Par suite, les eaux phréatiques {acqua di livelloj acqua di
$colo) s'étendent sur une large zone, à Test et au sud de la
ville. Elles sont de première importance pour Catane : outre
qu'elles satisfont aux usages domestiques, elles ont trans-
formé les laves stériles en fertiles cultures. Partout où Ton
creuse un puits, on les rencontre avec un niveau qui varie
suivant la hauteur de la mer. Elles circulent dans le sol, à
travers les innombrables fissures de la lave.
A proximité de la mer, sur une longueur de 6 kilomètres
et une largeur de 50 à 500 mètres, elles sont saumâtres.
Des faits analogues se montrent, d'après une obligeante
communication de M. 0. Silvestri, à Paterne, à Aci Reale, et
a Piedimonte.
cmucmmm. «uoDOTodflk. — Lcs étudcs approfondtcs qu'a
faites au Caucase M. Abich, sur le gisement des sources
* Carmelo Santo Patli. Garta idograflca di Gatania. Accademia die Scienze in Catania^
série lU, t. XI, 1877.
276
ROLE DES UTUOCLASES DE DIVERS ORDRES.
thermales ont fait reconnaître que c'est un porphyre pélro-
siliceux, d'ailleurs masqué par des marnes, qui est réelle-
ment la roche émissaire des uombreuses sources minérales
rio
Ifontigne dofiDr
Echelle des Lon
1 îe_
)n(nieurs
Echelle des Hauteurs
Fig. 136. —Coupe prise éGilemoTodtk, montrant comment la source Emmanuel jaillit de roches
cristallinei au pied de la Montagne de fer. «•, porphyre pétrosiliceux ; £■. marne éocrne.
Qi. travertin quaternaire. — D'après M. Dru *.
de Gileznovodsk (fig. 156). Ce porphyre est analogue aux mi-
crogranulites des dykes qui entourent le mont Bechtaou et
qui ont soulevé les masses minérales, crétacées et tertiaires
Fig. 137. — Coupe montrant les roches traversées par la galerie de captage de Gileznovosd'i
(source de l'Ouest). •*, porphyre pétrosiliceux ; Em, marne éocène ; Ar, cboulcments argileux :
Qt. travertin. — D'après M. Dru.
des monts Youtza et Machouca. La Gileznaïa-Gora (Montagne
de fer), entièrement formée de cette roche éruptive, n'est sé-
* Dru. Eaux minérale$ du Caucase, 1884.
LITHOCUSES ASSOCIÉES A DES POINTEMENTS DE ROCHES ÉRUPTIVES. 377
parée du massif du Bechtaou que par une dépression étroite.
I^ faible épaisseur de ces dépôts récents a permis d'atteindre
les eaux minérales au moyen de galeries et de sondages peu
profonds (fig. 137).
En outre, des fissures des microgranulites du versant nord
du Bechtaou, auxquelles se rattachent les porphyres précé-
dents, livrent passage à des sources froides» dont cinq
donnent ensemble 570 mètres cubes par 24 heures.
§ 2. — LH'HOCI.ASES ASSOCIÉES A DES POlMTEMENTâ DE ROCHES ÉRUPTIVES
Les cassures, qui sont nombreuses dans Técorce terrestre,
ne le sont pas moins à proximité des roches éruptives.
Il n'est pas aussi naturel qu'il peut le paraître tout d'abord
de faire une catégorie spéciale pour les sources qui jaillissent
à proximité de ces pointements de roches, comme par
exemple la source salée de Salies (Haute-Garonne) située au
pied d'un typhon d'ophite (fig. 138).
Cependant nous citerons un exemple bien connu de ce
genre de gisement.
«Md. — Les liions de fraidronite et les dykes quartzeux
jouent dans le terrain granitique du Gard le rôle de drains
naturels. Les eaux superficielles s'infiltrent dans les fentes
de Tune des salbandes, quelquefois dans toutes deux. Par
une galerie a travers banc qu'on perce sur le filon, on donne
une issue aux eaux. C'est là une pratique courante dans les
arrondissements de Lasalle et de Saint-Jean du Gard. Aussi,
dans les Cévennes* les habitants, connaissant fort bien ce
^ Emilien Dumas. Géologie du Gard^ t. UI, p. 58.
278
ROLE DES LITHOCUSES DE DIVERS ORDRES.
phénomène, désignent ces filons sous le nom de carab ou
conducteurs d'eau.
C'est surtout aux environs de Saint-Jean du Gard, où ils
sont nombreux, qu'on a su utiliser les filons aquifères.
Lorsque, d'un point élevé, on jette un coup d'œil sur les
pentes des montagnes qui entourent cette commune, on est
Viii. 138. — Vue de Salies (Haute-Garonne), montrant l'ophitc avec la source salée qui jalllilsur
In colline de Sainl-Narlory. 1, ville de Salies. S, ancienne église. 5. ancien château. 4, ruin<:!»
de Saint-Pierre. 5, fontaine salée. 6, carrière de moellons sénonieus. — D'après M. Leymehc.
frappé de voir çà et là, répandus avec une espèce de régula-
rité, de petits jardins échelonnés sur les hauteurs; c'est qu'à
chacun de ces jardins correspond une petite source naturelle
s'échappant d'un même filon.
Cette observation a été mise à profit et a donné Vidée ingé-
nieuse de percer dans le granité des galeries horizontales,
dirigées perpendiculairement à la direction de ces filons,
qui remplissent l'office de barrages souterrains; ce sont
LITUOCLASES ASSOCIÉES A DES POINTEMENTS DE ROCHES ÉRUPTIVES. 279
comme des puits artésiens horizontaux. Ces travaux ne sont
pas coûteux, parce qu'en général, ils sont pratiqués dans un
granité friable et décomposé, mais assez solide pour que la
voûte se soutienne sans le secours d'aucun boisement.
En 1840, un percement de ce genre entrepris dans la
commune de Saint-Jean du Gard, au domaine de la Fa-
brique, rencontra un grand nombre de filons dont chacun
fournit son contingent d'eau. Cette galerie, l'une des plus
longues qu'on ait pratiquées dans la contrée, a 150 mètres
environ et elle fournit un volume d'eau qui surpasse celui
(les plus belles sources granitiques de ce canton. Aussi de
semblables travaux ont été depuis lors exécutés dans la
même commune, sur un grand nombre de points. Au ha-
meau de Saillan, après avoir percé un filon, on a obtenu une
belle source, assez abondante pour arroser une propriété dix
fois plus considérable que celle pour laquelle on avait entre-
\ms ces recherches. Dans le domaine des Pommarèdes, une
forte source a été également rencontrée par le même pro-
cédé.
Ces conditions se retrouvent dans un grand nombre de
localités granitiques des Cévennes.
Dans la même commune de Saint-Jean du Gard, domaine
de Vitrac, il existe une source thermale, sortant d'une ma-
nière bien évidente, d'un filon de quartz, et à côté, à une
distance de deux ou trois mètres à peine, on voit avec éton-
nement surgir du même filon une source d'eau froide. On
expliquerait ce contraste en admettant qu(; les eaux de la
première source, après être descendues à une profondeur
assez grande pour y acquérir leur température, remontent,
en suivant une nouvelle fissure placée entre le dyke et le
terrain granitique, tandis que la source d'eau froide est
simplement le résultat d'infiltrations superficielles.
280
ROLE DES LlTflOaASES DE DIVERS ORDRES.
§ 3. — RÔLE DES L1TH0CLA8B8 ASSOCIÉES ▲ DES FILONS MÉTALLIFÈRES
¥o«se»9 pioMbtércs. — A Plombîères, le grès bigarré est
séparé du granité par un poudingue quarlzeux très grossier,
qui parait le représentant du grès des Vosges. Le fond delà
vallée est entaillé dans un granité porphyroïde, quelquefois
r>y<>.TVrrrrtTi-.TnrTlTt-rT-ri.T^
Echelle
Fig. 159. — Groupe de filons et de veines de fluorine, d'où jaillit la source Simon S i Plom-
bières; y, granité; IT, liions ou veines de spath fluor; ff filons ou veines de quartz.
parsemé d'amphibole, qui forme une partie de la chaîne des
Vosges.
De nombreux filons coupent le flanc gauche de la vallée
de Plombières, dans la région d'où jaillissent les principales
sources tièdes ou savonneuses. Le percement de la galerie
des sources tièdes, et une tranchée qui a été faite pour la
rectification de la route nationale de Metz à Besançon, ont
fait reconnaître, vers 1856, la disposition de ces filons.
Les filons dirigés à peu près N. 0. à S. E se composent prin-
cipalement de quartz et de spath fluor. Certains filons sont
presque exclusivement formés de fluorine; dans d'autres le
quartz prédomine. C'est précisément de ces filons que jaillis-
].lTflOaASES ASSOCIÉES A DES FILONS MÉTALLIFÈRES.
281
saient alors les principales sources tièdes de la rive gauche.
La source tiède la plus remarquable, qui est connue sous le
nom de source de Simon, jaillit au milieu d'un réseau de
filons de fluorine, comme le représente la figure 139. Le
filon principal, qui a 0",20 à O^jSO d'épaisseur se dirige
K. 30" S. à 0. 30^ N. et plonge de 25^ vers iN. 30* E. La fluo-
rine a en outre pénétré dans d'innombrables fissures du
granité, de sorte que les fragments détachés de cette roche
sont souvent enduits de fluorine sur toutes leurs faces; c'est
comme une espèce de stockwerk de fluorine. Ses princi-
fi?. 140. — ili^sociation des sources thermales 888 aux liions raétaliifferes à Plombières (côte de
la Gendarmerie) ; y, granité; ff, filons ou veines de fluorine; ff, filons ou veines de quartz;
S', source 8imon ; S", source de Luxeuil ; S'" et S'% sources du Jardin, aujourd'hui taries.
pales veines se dirigent parallèlement au filon principal ;
beaucoup d'autres ont la même direction, mais plongent de
63 degrés. Les grands cristaux de feldspath, qui rendent le
granité porphyroïde, sont souvent si nettement coupés par
ces veines de fluorine que les deux parties du môme cristal,
situées de chaque côté de la veine, peuvent se raccorder
exactement.
La source savonneuse, dite de Luxeuil, située à 55 mètres
au nord-est de la source Simon, sort de veines de môme na-
ture, mais moins développées.
Un troisième filon, situé à 20 mètres au sud-ouest du filon
de la source Simon, donnait issue à deux sources situées
dans le jardin de la Préfecture. Ces sources ont tari parce
28^ ROLE DES LITUOCLASES DE DIVERS ORDRES.
qu'une galerie a été percée à un niveau plus bas; mais
les cinq sources que cette galerie a rencontrées jaillissent
également d'un groupe de petits filons de quartz et de fluo-
rine et le long de plusieurs d'entre eux. La figure 140 repré-
sente cette association remarquable, telle qu'on pouvait
l'observer dans la tranchée de la route, c'est-à-dire à un ni-
veau supérieur d'environ 10 mètres à celui de la galerie. Sur
moins de 40 mètres, il y a six filons; deux d'entre eux sont
juxtaposés. Les filons sont plus nombreux encore dans la ga-
lerie. Ce rapprochement établit comme une filiation immé-
diate entre les sources thermales actuelles et les filons mé-
tallifères*.
Loire I saii-sou-çouaa. — Parmi Ics cxcmpIcs du même
genre que présente le plateau central, on peut citer, d'après
Gruner, la source de Sail-sous-Couzan *, qui jaillit d'un
filon plombo-barytique. L'eau minérale sort des fissures et
cavités du filon, ainsi que l'ont montré les travaux de cap-
tage exécutés sur la source Fontfort.
Héranic t La Haioa. — De uombreux filous métallifères for-
més de quartz et de barytine, autrefois exploités pour cuivre
et plomb, se montrent aux environs de la Malou-le-Haut et
de la Malou-le-Bas, commune de Villecelle. Ces filons sont
nombreux et en rapport avec un gros filon quartzeux dirigé
à peu près nord-sud. Plusieurs sources minérales en sortent,
ainsi que l'ont appris des galeries et des puits exécutés dans
deux buts distincts : le captage des sources et l'exploitation
des minerais métalliques.
En faisant, il y a vingt-cinq ans, les travaux de captage
' Les sources du thalweg, dont le point d'émergence n'est pas masqué par TalluTion,
sortent des fissures du granité.
* Deêcription de la Loire, p. 723 à 728.
LITHOaiSES ASSOCIÉES A DES FILONS MÉTALLIFÈRES. 28S
de la Malou-le-Bas, on a rencontré successivement trois
filons aquifères. De plus, il s'y trouvait des fragments de
quartz et de baryline, cimentée par de la barytine de for-
mation plus récente, et qui, selon toute probabilité, a été
précipitée par les sources de l'époque actuelle.
A la Malou-le-Haut, quand on a foré le puits dit des
Anglais, il en sortait en abondance de l'eau minérale ayant
la composition de celle de l'établissement et que les bu-
veurs utilisèrent. Sur ce poiut, le puits avait rencontré
un filon quartzo-barytique du type de la Malou-le-Bas. Les
travaux d'exploitation ont dû être arrêtés pour ne pas com-
promettre l'exploitation de l'établissement voisin.
Haate-l4>ire : Rrionde \ — AuX CUVirOUS dc Brioudc il
existe une très grande quantité de sources acidulés froides*
Celles du Breuil, près de Lamolhe; de Cléraensat, près d'Au-
zon; de Barèges, près d'Ardes; d'Aurouse, etc., jaillissent à
travers des fractures N. 50* 0.; souvent elles sourdent des
filons métallifères eux-mêmes.
Ardèche t ¥als, Desaignes, SlaTres. — LcS SOUrCCS dc Yals,
sortent aux bords de la Volane, du lit de laquelle on voit
s'échapper de nombreuses bulles de gaz.
Elles jaillissent, sur la limite du gneiss avec pegmatile et
des terrains secondaires, d'un filon étendu et puissant
orienté à peu près N. E. à S. 0. et dont on retrouve, à 1500 mè-
tres au sud, des affleurements escarpés.
Ce filon, principalement formé de quartz avec pyrite, s'est
lui-même formé sur une grande faille, de même orientation,
qui s'étend jusqu'à la Voulte et qu'il ne remplit que sur une
petite partie de sa longueur.
^ Dorlhac. Filonê de BrUmde, p. 23.
S84 ROLE DES UTDOCLASES DE DIVERS ORDRES.
À Desaigues, arrondissement de Tournon, une source ga-
zeuse sort également d'un filon avec pyrite un peu arseni-
fère, fluorine et bar} tine.
Dans le même département, la source de Mayres s*écoule
aussi d'un filon pyriteux'.
Antre» iMaUlés d« plateaa central. — DeS relations de
même genre entre des filons métallifères et des sources ther-
males ou gazeuses se montrent à Néris et à Bourbon-Uncy
(Allier), à Sylvanès (Aveyron), à Trebas (Tarn), à Balarur
(Hérault) et à Chaudesalgues (Cantal).
«rani-BncM dto Bii4e : BiproMMia et Badenvetter. — (eS
sources acidulés de Rippoldsau sont en rapport avec dos
filons métallifères', auxquels on a attribué une partie des
sulfates qu'elles tiennent en dissolution. Tel est le cas pour
la source Léopold.
Des sources jaillissent aussi des ramifications latérales du
filon Prosper. La source Joseph, qui avait tari pendant qu'on
travaillait sur ce filon, a reparu quand on en a abandonné
l'exploitation. Lorsqu'en 1787 on voulut reprendre les tra-
vaux, l'eau minérale y pénétra, ainsi qu'une énorme quantiU'
d'acide carbonique, et l'irruption fut si subite qu'un homme
y périt et que ses compagnons ne durent leur salut qu'à la
fuite. Dej)uis lors, tout travail a cessé dans le voisinage des
sources.
A Badenweiler, une source minérale sort à quelques
mètres d'un filon de quartz et de galène.
Prasse rhénane : Mine de Kantenbaeh, près de Trarbach, «or
' Pan*an. Annales det minest 3* série, t. X, p. 25.
« F. Sandberger. lienchbâder, 1863, p. 39 et 40. Une carie annexée i ce tranii
montre bien la connexion dont il 8*agit.
LITHOCUSES ASSOaÉES A DES FILONS MÉTALLIFÈRES. 285
la HcMelle^ — Près de Trarbach (Prusse rhénane) dans le filon
de plomb et de cuivre de Kautenbach, d'une épaisseur de
1",25 à 1",75, qui se dirige N. 130. E. avec un plongement
d'environ 57* vers Touest, on avait trouvé, il y a un siècle
environ, dans un puits, à la profondeur d'environ 50 mètres,
une source thermale de 40** qui était employée à une pape-
terie. Plus tard, en 1824, une galerie atteignit, dans un quartz
sl6rile,une autre source de 35** que les mineurset les étrangers
utilisèrent cubains. La mine ayant été abandonnée en 1860,
cette source devint inaccessible; cependant, malgré son
mélange avec de l'eau froide, la source continua à arriver
avec une température de 27%50 à 28%75, et en 1864 on
établit un bain à l'orifice de la galerie.
saase t Wrejherg. — Eu pcrçaut uuc galcric daus le filon d'ar-
gent de Churprinz près Freyberg, en 1821, on a découvert, à
160 mètres de profondeur, une source thermale volumi-
neuse dont la température excède 26 degrés.
BohéOM t Ciurlshiidl et HaHenbad. QuclqUCS-UneS deS litho-
clases qui coupent régulièrement le granité de Carlsbad
sont remplies de -quartz corné (hornstein). Plusieurs des
sources de Carlsbad sortent de ces filons quartzeux, comme
Cotta l'avait déjà reconnu'. D'après M. von Warnsdorff, un
de ces filons, d'environ 1"*, 30 d'épaisseur, qui traverse le gra-
nité décomposé (fig. 141), donne naissance par ses fissures à
une source thermale de 29 degrés.
Les lithoclases de ce granité porphyroïde (fig. 142) affec-
tent deux directions, l'une N. E.-S. 0., l'autre N. O.-S. E.
Ce double système de cassures n'est pas moins caracté-
ristique dans la direction des nombreux filons de quartz et
* D'après une communication personnelle de M. Groppe, employé des mines & Trêves*
- Leonhardê Jahrbuch, 1835, p. 55.
â8d
ROLE DES LITUOaASES DE DIVERS ORDRES.
de hornstein et dans la position des sources chaudes que
dans la formation des vallées de Garlsbad (Teppellhal Pia-
gergasse, Tgal et Petit-Versailles).
Le centre d'éruption des sources chaudes de la région des
Fig. 141. — Croquis géologique des roches mises à nu, en 1878, au marché de CarblwJ pr '•
démolition de la maison « xum weissen Adier ». y granité; c,c, calcaire déposé par les viurcf-
(sprudelstein) de diverses variétés; ff, filons de quartx (hornstein) par lesquels les eaui ther-
males S (1, 11, IIl, lY) surgissent en plusieurs points; b,b, brèche de hornstein. — D'après 1. vi>u
flochstetter.
sprudels se trouve au croisement des deux systèmes. Toutes
les autres sources paraissent devoir leur existence à des
communications plus ou moins indirectes avec la cassure
principale des sprudels (fig. 145.)
UTHOCLâSES associées a des filons métallifères. 287
L'ensemble des sources de Carlsbad constitue deux ali-
gnements parallèles que M.von Hochtetter a désignés sous les
noms de Sprudel-Hauptzug et de Muhlbrunnen-Nebenzug,
en montrant que ces deux groupes correspondent à deux
/"-^ '
Fi^'. 142. — Carte des environs immédiats de Carlsbad. y, granité à gros grains; y", granité à
grains fins; Q, diluvium; Tr, calcaire déposé par les sources (sprudelstein) ; a, spnidel;
b, source d'Uygie; c, source dans le lit du Topel; d, Marktbrunnen ; e, Schlossbrunnen ;
fy source de la « Russischen-Krone > ; g, Muhlbninnen ; h, Neubrunnen ; i, Theresienbnio-
nen; k, Bemardsbnmnen ; 1, Hospitalbrunnen ; m, Hospital Sauerling; n, source au < rolhen
»tem >; o, source gazeuse; p, Stepbans-Quelle. — D'après M. von Warnsdorf.
systèmes de fentes que Ton peut reconnaître à la surface
du sol.
Cet alignement est en rapport avec les deux systèmes de
diaclases qui coupent le granité dit de Carlsbad.
On voit donc que, comme à Plombières, les sources de
* Mémoireêde V Académie de Vienne, t. XXXIV, 1878.
Î88
ROLE DES LITflOCLASES DE DIVERS ORDRES.
Garlsbadt sortent les unes, de simples diaclases, les autres
de diaclases parallèles incrustées de matériaux filoniens.
Il en est de même à Marienbad ' où lessources gazeuses sortent
de lithoclases orientées suivant plusieurs directions et dont
Fig. Ii3. — Coupe de CarlstMid. AA, fente principale du sprudel ; r«, dépôts du sprudel ; «, sprin-
ter; by source d'Hygie ; d^ Schlossbrunn : e. source « sur russischen Krone » ; BB, fente latênk
du Mutilbrunn; ^ Nuhlbrunn; A, Theresienbrunn. — D'après M. von Bochstetter.
quelques-unes, par suite de remplissages antérieurs, consti-
tuent aujourd'hui des filons de quartz. Ainsi le Kreutzbrunnen
est à peu près au croisement de deux systèmes de cassures
et les sources Caroline, Âmbroise et Marie sont alignées
comme le gros filon quarlzeux de Schneedrang.
Ilalle : Pereta et l§lel¥ea«9 Tolfo. — En ToSCaUC, il SC dégage
encore des filons d'antimoine de Pereta et de Selvena des
exhalaisons d'hydrogène sulfuré, qui déposent journellement
du soufre et formentdu gjpse, comme M. Coquand l'a signalé* :
* Yon Warnsdorf . Leonhards Jahrlmch, p. 385, 1846.
* Bulletin de la Société géologique de France, 2* série, t. YL p. 91.
ROLE DES FILONS UÉTAIXIFÈRES. S89
Ues sources thermales jaillissent à côté des filons de galène
et des gîtes d'alunite de la Tolfa.
Aii^érie. — Parmi les exemples d'association du même
genre que Ton connaît en Algérie, je mentionnerai seule-
ment à Hammam-Rhira près Milianah, province d'Alger, une
source thermale qui sort d'un filon de cuivre pyrileux, lui-
même d'un âge très récent, puisque, comme d'autres de la
même contrée, il traverse le terrain tertiaire moyen*.
' Ville, yolice sur les provinces d*Oran et d'Alger, p. 193,
19
CHAPITRE V
ROLE DES CAVERNE
INTRODUGTIOK
Dans la circulation souterraine des eaux, les cavernes se
comportent à la manière des cassures, mais avec une acti-
vité plus grande. Le développement considérable qu'elles
prennent, dans beaucoup de contrées calcaires, en leur pro-
curant un rôle hydrognostique de premier ordre, a nécessité
pour elles un chapitre spécial.
Les noms de cavernes ou de grottes désignent des cavités de
formes très irrégulières, tantôt des chambres plus ou moins
spacieuses, tantôt des boyaux étroits en communication
entre eux et formant des couloirs qui peuvent s'étendre sur
des centaines et des milliers de mètres*.
Les fissures des roches ou diaclases sont parfois très
larges, tantôt parce qu'une action mécanique a écarté leui-s
parois, tantôt parce que celles-ci ont été attaquées par les
eaux souterraines, le plus souvent parce que les deux actions
*■ M. I>esnoyers a publié, en 1845, dans le Dietiontiaire universel (T histoire naturelle
de dOrbigny^ des recherches géologiques et historiques sur les cavernes, qui oonstiUieot
un excellent tableau des faits connus alors sur ce sujet.
INTRODUCTION.
291
se sont superposées. C'est ainsi qu'elles peuvent passer par
degrés à de véritables cavernes, qui d'ailleurs peuvent résul-
ter également de cassures fort irrégulières, ainsi que du
décollement de couches contournées.
Fig. 131. — Grotte de Jupiter à Naxie.
La figure 131 représente le dernier cas pour la grotte de
Jupiter à Naxie.
D'autres cavités de formes variées, telles que les puits natu-
rels j gouffres, abîmes j ragagés (Provence), rfo//mes(Frioul), en-
tonnoirSy bétoireSy puisards; schasmata chez les anciens Grecs ;
katavothra chez les modernes; schlotten en Thuringe ; swallow
holes dans le nord de l'Angleterre, ponor chez les Slaves, se
rattachent aux cavernes par toutes sortes d'intermédiaires
et jouent un rôle important dans Téconomie des eaux sou-
terraines.
S99 ROLE DES CÂYER.NES.
Parmi les cntonnoii's, nous nous bornerons a citer ceux
qu'a reconnus récemment M. l'ingénieur Roche, dans le
Echelle
soc M
Fig. 132. — Plan de deux entonnoirs situés à Aln-Talba, au milieu des dunes, dont nn .vu)
contient de l'eau. GG, affleui'ement de grès. — D'après V. l'ingénieur des mines Rocbe.
Sahara, lors de la seconde mission Flatters*, de si tragique
mémoire.
Les entonnoirs d*Aln-Mokhanza et Aïn-Taïba (voir les
fig. 132 et 133) sont situés au milieu des dunes ou des
« Motion, p. Si5, 1884.
CARACTÈRES GÉNÉRAUX.
293
gassis: Ils ne sont cerlainement pas excavés par la main de
l'homme ; mais i)s sont l'effet d'effondrements dus proba-
Echelle
Fig. 133. — Coupe montrant la disposition de l'entonnoir aquirèredu plan précédent. GG, couche
de grés à einient calcaire ayant, au-dessus et au-dessous de lui, d'autres couches de grès. —
D'après ]|. l'ingénieur des mines Roche.
blementà la dissolution de certaines masses dégj^pse par les
eaux souterraines. C'est surtout dans les calcaires de tous
les âges que se trouvent les cavernes.
Pour donner une idée de ces accidents, de leur groupe-
ment et de leur fréquence, il n'est pas inutile d'entrer dans
quelques détails pour plusieurs exemples
g 1. CARACTÈRES GÉNÉRAUX DES CAVERNES ET DES CAVWÉS ANALOGinSS
Tonoe : Arcy-flor-carc ^ — La grottc d'Arcy-sur-Curc, la
Fig. i54. — Pian des grottes d'Arcy-sur-Cure.
plus remarquable des nombreuses cavernes connues dans le
calcaire jurassique du département de l'Yonne, se compose,
* Raulin. Géologie de P Yonne, p. 721.
29i
ROLE DES CAVERNES.
sur plus de 800 mètres, d'une série rectiligne de salles,
parfois très grandes, réunies par des parois étranglées
(fig. 134).
Il est probable que les roches qui constituent le promon-
AlCYo
Fig. 135. — Plan da promontoire travené par les grottes d'are j-sur-Cure,
toire, traversé par les grottes d'Arcy, sont interrompues par
des fissures GG', g^j à peu près verticales (fig. 135) que
les eaux auront suivies et agrandies.
Tleuie I IbersM 4« Clate * Poltlen'. — Il SUfOt d^avoir gra?i,
à Poitiers, la voie pittoresque du Porteau, sur la rive gauche
du Clain, pour avoir été frappé d'une série d'excavations
Fig. 136. — Série de puits naturels P et Q le loug des falaises calcaires C du Porteau, situés
sur la rive gauche du Clain, près Poitiers. — D'après M. de Longuemar*
cylindriques et verticales, pratiquées dans la paroi du rocher
principal (fig. 136), et rangées en file. Une ancienne exploi-
' De LoDguemar. Géologie de la Vienne, t. L p. 396, 397.
GARiCTÊRES GÉNËRÀ6X. S95
tation les a rendues visibles, en enlevant la partie anté-
rieure des bancs. Cette première file de cylindres naturels^
dont les diamètres varient de {"'«SO à 3 mètres, est doublée,
en arrière et en avant, par d'autres excavations semblables ;
les unes masquées par les talus et la partie supérieure de
l'escarpement; les autres visibles, mais tronquées par les
carriers sur la terrasse inrérieure qui précède la grande
muraille. Ces cavités présentent des renflements et des
étranglements alternatifs résultant de l'action des remous
d'eaux animées d'une grande vitesse et s'attaquant à des
roches, dont les diverses parties, calcaires ou siliceuses,
oflTraient une résistance inégale à leurs efforts. C'est évi-
demmeut ainsi que, le long des berges, on constate souvent
la communication directe des puits naturels avec les grottes.
Les uns et les autres sont, en outre, en relation directe
avec les sillons creusés horizontalement le long des berges
calcaires, et dont les parois, polies par le frottement, ne sau-
raient être confondues avec les sillons produits sur certains
lits de roches tendres et gélives, par suite des délitements
d'origine atmosphérique. Il est à remarquer, en effet, que
Torifice supérieur des puits, qui sont intacts, s'évase nota-
blement, et, qu'à ce niveau, viennent aboutir quelques-uns
des sillons échelonnés le long de ces berges ^ comme pour
marquer la décroissance successive des eaux qui creusèrent
progressivement les vallées.
Les cavités dont il s'agit se retrouvent également dans la
partie supérieure de la craie jaune (près de Mondion et au-
tour de Saint-Remy notamment), et jusque dans les couches
résistantes du gisement falunier de Mirebalais.
Avc/rim^ — Le calcairc oolithique qui, à l'altitude
' Boisse. EsquUie géologiqtte de rAveyron, p. 207, 208.
S9tf ROLE DES CAVERNES.
moyenne de 650 à 800 mètres, forme le sol des grands pla-
teaux de l'Aveyron connus sous le nom de causses, tels que
celui de Larzac, présente à sa surface, qui est tantôt plane,
tantôt ondulée, de nombreux accidents.
Ce sont :
1* Des affaissements coniques, vulgairement connus sous
le nom de bétoires ou entonnoirs; dépressions naturelles, le
plus souvent elliptiques ou circulaires, sur le pourtour des-
quelles on voit les affleurements des couches éboulées
former une série de gradins, qui rappellent les ruines des
arènes antiques. Ces dépressions abondent, surtout dans la
partie nord-ouest du causse de Coucourès, aux environs de
Solsac.
2' Des abîmes ou puits naturels, à parois verticales ou
même en surplomb, dont la profondeur atteint parfois plus
de 50 mètres; comme l'abîme dit le Tindoul de la Vayssière
(canton de Marsillac), le Tindoul ou Abenc deCourinos, près
de Compeyre.
3" Des crevasses ou fissures verticalesy tantôt vides, tantôt
remplies d'une terre rougeâtre, mélangée de minerai de fer
en grains, et de fragments de roches agglutinés par des con-
crétions calcaires.
4^ Un grand nombre de cavernes, dont quelques-unes très
étendues, et parmi lesquelles on cite les grottes de Bouche-
rolland, de Salles-la-Source, de TEstang, près de Sainl-
Saturnin, de la Poujade, du Monna, de Sorgues, etc. Toutes
ces grottes présentent des circonstances de gisement à peu
près semblables; elles ont leur ouverture au pied des escar-
pements qui entourent les plateaux, dans les couches infé-
rieures, souvent magnésiennes, et s'étendent à peu près ho-
rizontalement, tantôt se développant en salles immenses,
tantôt formant des galeries étroites et basses, où un homme
peut à peine se glisser en rampant.
CARACTÈRES GÉNÉRAUX. 297
card*. —De même que l'oolithe de rAvëyron, lé néoco-
îîiien du Gard est souvent percé de grottes, parfois très spa-
cieuses et de nombreuses cavités, en forme de gouffres ou
d'abîmes, désignés dans le pays sous le nom d'aven ou de
calavën^.
Des cavités très remarquables^ existent dans Tarrondisse-
ment d'Âlais et dans le massif néocomien de Bouquet. La
grotte de Tharaux, située sur la rive droite de la (lèze, est
Tune des plus intéressantes du département du Gard, par
sa grandeur et la beautéde ses stalactites; on cite encore
la grotte de Bellegorge, près Navacelle ; celle dite la Grande
fiamne, dans la commune de Brouzet, et une autre dans le
voisinage, d'une profondeur de 50 mètres, servant aux
bergers à remiser leurs troupeaux pendant les fortes
chaleurs; la grotte de Seynes, qui domine le village du
même nom et dont on voit, sur un rocher à pie, les deux
ouvertures communiquant ensemble par un couloir de 20 à
25 mètres; celles situées au nord d'Ëuzet, au quartier dit
les Arenas, qui servirent de retraite aux camisards pendant
les guerres de religion.
L'étage néocomien supérieur est également percé de plu-
sieurs grottes dans l'arrondissement d'Uzès : telle est la
Baume de Magdeleine, dans la commune de Baron. Dans la
commune de Lussan, au quartier des Concluses, on en
trouve trois assez vastes, dites las Très Pouses, le Maigre et
la combe Saint-Martin ; et près de Saint-André de Roque-
pertuis, la grotte de Soulié, sur la rive gauche de la Cèze.
Telles sont encore, près de Roquemaure, dans la commune
de Saint-Geniès de Comelas, sur la petite chaîne dite la
* Ëmilien Dumas, t. IH, p. 340.
* Ce mot parait provenir du celtique avain, ruisseau, de môme qu*avin en écossais et
en irlandais, et aicen en bas-breton. Dans la angue celtique caraw, creux, et avcn^
liYiëre, sont, d'après M. Ë. Dumas, l'origine du mot languedocien calawetu
208 ROLE DES CiYERNES.
Roque, la Grande Baume ; près du pont du Gard, la grotte de
la Sartanette. Dans la commune de Dions, où Tétage supé-
rieur néocomien est très développé, plusieurs ouTertures
profondes dans les parois verticales de la roche, au pied de
laquelle passe le Gardon.
La plupart des grottes qui viennent d'être citées contien-
nent, sous une croûte de stalagmite ou dans le limon qui
couvre le sol, des restes de l'industrie des anciens âges.
Près du village de Dions, on visite beaucoup une grande
dépression en forme d'entonnoir, au fond de laquelle se
trouve une grotte assez profonde. Sa dénomination latine
s^est consei*vée presque pure dans le pays, où on la désigne
sous le nom d*Espeluca*.
Un peu en amont des sources dites les Fonts de Collias,
on observe dans cette commune l'entrée de la Baume de
Pasque, dont le plein cintre surbaissé a environ 7 à 8 mè-
tres de hauteur sur une base d'une quinzaine de mètres. Au-
dessus et en face du moulin de la Baume existe une grotte,
dont on a fait une chapelle : elle a deux ouvertures séparées
par un intervalle de 450 mètres. C'est à peu près à 400 mè-
tres en amont de ce point que surgissent les sources abon-
dantes du moulin de la Baume. Dans le même groupe néoco-
mien, sur la montagne du Bois-des-Lens, des grottes assez
vastes sont désignées sous le nom de grottes deMacassargues»
et près de là, vers le nord-est, un avën ou abime, d un
mètre d'ouverture, mais très profond, si l'on en juge par
le bruit prolongé que rendent les pierres qu'on y préci-
pite.
Ardéche : Pont d*jM. — Le pont d'Arc, daus l'Ardèche, e^t
à rapprocher des accidents précédents.
' Spelunca^ grotte.
CARACTÈRES GÉNÉRAUX. 999
B^ — Dans le petit massif jurassique du nord de
risère, la célèbre grotte de la Balme, près Crémieu, est ou-
verte dans un escarpement de calcaire bathonien, qui forme
la lèvre supérieure d*une grande faille limitant à l'ouest ce
massif*
Ohervationi théoriques.
Bien que les eaux aient agi d*une manière évidente dans la
formation des cavernes des massifs calcaires et dolomiti-
ques, dont il vient d'être question, il importe de remarquer
que le premier rôle revient aux cassures souterraines.
Lors des mouvements qui ont brisé les couches, à toutes
les époques, aux diaclases se sont souvent associés d'autres
modes de cassures et, par suite, des cavités de formes diver-
ses. Gela explique pourquoi les cavernes et autres cavités
s'alignent souvent avec les dislocations du sol.
A la manière de ce que présentent les excavations artifi-
cielles, les cavités, grandes ou petites, ont exercé un vérita-
ble appel sur les eaux de la surface; de là, sont résultés des
ruisseaux et des torrents souterrains, que l'approfondisse-
ment graduel des vallées a successivement déplacés. L'action
de ces eaux a été et est encore à la fois mécanique et chi-
mique.
La présence de matériaux de transport, galets, sables et
limons, celle de cavités taraudées, analogues aux marmites
des géants (grotte d'Arcy) sont une preuve d'une usure mé-
canique.
Quant aux actions chimiques, elles se trahissent par cer-
taines formes qu'elles seules ont pu produire : par la nature
« Lory : Bull. Soc. géoL, 1851.
500 . ROLE DES CAVERNES.
corrodée et comme pourrie des parois et surtout, par les
stalactites et stalagmites qui y abondent.
Ces actions des eaux, avec ou sans le concours de Tacide
carbonique, se sont manifestées souvent, même dans des
cavernes aujourd'hui complètement à sec. On reconnaît que
leur dessèchement est relativement récent et résulte sans
doute de la formation ou de l'approfondissement de vallées
voisines, qui ont joué le rôle de drains.
C'est par centaines que Ton pourrait cataloguer les caver-
nes connues dans certaines régions de la France, quoiqu'une
faible minorité seulement se décèle par leur afneurement
accidentel : la plupart restent inaperçues.
Aux cavernes se rattachent des effondrements, qui sont in-
nombrables, dans les régions montagneuses de la Carniolis
de rillyrie, de la Croatie et de la Dalmatie.
Orlsine des caTeracs produites par l^enCralnemcat des ■Millèrrt
«rénaeées. — A part les cavcmes produites par les amoncel-
lements de blocs, telles qu'on en voit de si nombreuses
dans la forêt de Fontainebleau, il en est qui résultent de
rentraînemcnt, par les eaux d'infiltration, des parties sa-
bleuses de couches partiellement agglutinées en grès.
Orlirlns des eavemes produites par l^éroston dn vTpae et da tel
femme. — Une simple érosion souterraine de roches solubles
dans l'eau, comme le gypse et surtout le sel gemme, a
produit des cavernes et, par suite, des effondrements de la
surface. Les environs de Pesey, en Savoie, et différentes lo-
calités de la Thuringe, du Harz et du Lûnebourg en pré-
sentent des exemples.
Pour le sel gemme, la nature ébouleuse des couches argi-
leuses encaissantes provoque le remblai de ces cavités, au
fur et à mesure de leur production. On en a vu tout récem-
CARACTÈRES GÉNÉRAUX. 331
ment encore une démonstration évidente dans les effondre-
ments qu'a provoqués, dans la vallée de la Meurthe, l'exploi-
tation du sel par dissolution artificielle, notamment à
Arth-sur-Meurthe, le 9 novembre 4876. La crainte du retour
de pareils accidents a motivé une décision ministérielle
du 15 mars 1877, et on règle le minimum de. distance
du chemin de fer et du canal, auquel les puits de disso-
lution doivent être établis.
Orlf^e des cavernes dnes A des gllssemeiils snperflelels. — Cl-
tons les cavernes qui résultent de l'accumulation de grands
blocs, à la suite de glissements superficiels. Il y en a un exemple
Cambalou
Echelle
I 1 i 1
Fi». 157. — Coupe de la montagne de Combalou, versant de Roquefort (Aveyron) montrai!
comment la démolition et le glissement des couches calcaires ont déterminé ia formation de
cavernes (caves de Roquefort). J|,oolithe; J,, oxfordien; N,N, niveau d'eau; S, source a,
orifice d'entrée du courant d'air qui ressort par les points p et y; U,V, talus argileux. —
D'après M. Parran.
particulièrement connu dans les caves de Roquefort (fig. 157) *.
A cette catégorie de cavernes se rattachent même des
^ Parran, Annales det Mines, t. X» p. 110.
503 ROLE DES GÂTERNES.
accumulations de petits blocs, qu'on ne mentionnerait pas,
s'ils n'avaient été le théâtre de découvertes intéressantes,
au point de vue de la faune quaternaire, comme M. Des-
noyers Ta montré pour les blocs de g)pse des collines de
Montmorency et pour les blocs de grès de la colline
d'Auvers.
Origine émm cAvevaes excAvées par la Mer <
Partout où le littoral de la mer est constitué par des escar-
pements de roches plus ou moins cohérentes, on y rencontre
des cavernes et autres excavations dues à l'action méca-
nique des galets ou d'autres fragments rocheux, poussés
par les vagues. Nous nous bornerons à rappeler la figure 71,
p, 134, pour Étretat, ainsi que les exemples connus aux
environs de Dieppe, du Tréport; dans les granités de Bre-
tagne (Piriac) et de Jersey; dans le basalte de Sliffa (grottes
de Fingal) ; à Sorrente, etc.
Orlgiae éLem eaveraen é»m «oalées voleaal^aefi. — II n'y a paS
lieu de revenir sur les cavernes que présentent souvent les
coulées volcaniques, comme on l'a vu page 99, pour Royal,
par exemple et comme il en existe à Lancerotte, à Ténériffe
et en Islande.
Le docteur Eugène Robert a signalé dans ce dernier pays'
des sources abondantes qui sortent, comme en Auvergne,
des extrémités de courants de laves. Quelquefois c'est une
petite rivière qui s'échappe, après avoir parcouru des canaux
tortueux.
Oriffliie éimm eaTernea parai— aat résider daas les flûtes des
YoieaaiqaM. — Parmi les coulées boueuses aux-
* Voyage en Islande, 1" partie, page 225.
CARACTÈRES GÉNÉRAUX.
503
quelles donnent lieu les éruptions volcaniques, toutes ne
proviennent pas de la mise en mouvement des eaux de la
surface et de pluies torrentielles ou d'une fonte partielle de
neiges, comme il est arrivé trop souvent, lors des éruptions
du Gotopaxi. Il est des volcans dont les coulées boueuses pa-
raissent provenir du déversement d*eaux souterraines, ren-
fermées dans la montagne, et dénoter ainsi Texislence pro-
Fig. 138. — État du Cai-guairazo depuis son écroulement; contraste de sa forme vec celle
du Chimborazo. — D'après Uumboldt.
bable de vastes cavités inférieures, qui sont à rapprocher
des cavernes.
Tel est le cas pour diverses coulées de boue, acidifiées par
l'acide sulfurique (biuih) que Ton a vu sortir des volcans de
Java. Ainsi Téruption du Galong-Gong, le 8 octobre 1822,
produisit des eaux chaudes et sulfureuses, dont l'éruption
dura deux heures. Le 12 octobre, les mêmes faits recom-
mencèrent.
504 ROLE DES CAVERNES.
Tel est le cas aussi pour certains courants boueux [nioyas)
des volcans de la Colombie. Plusieurs éruptions du volcan
de Ruiz ont donné des coulées de boue, avec sulfate de fer
et acide sulfurique, par exemple, le 12 mars 1595 et le
19 février 1845*.
Ce qui confirme Texistence de vastes cavités intérieures
el, par suite de lacs souterrains, c'est récroulement du
Carguairazo (fig. 138) qui a eu lieu le 20 juin 1698, et la
forme de cône tronqué qu'il a prise alors, en abandonnant
également beaucoup de boue, dans laquelle se trouvaient
de petits poissons {Pymelodes cydopum).
§ 2. INFLUENCE DES CAVERNES SLR LE nÉGlME DES EAUX.
J«ra : Déi^rtemcnte eu Do«Im et Am Jota*. Le premier
plateau du Jura, formé presque exclusivement par le pre-
mier étage des terrains oolithiques compacts (jurassique
inférieur), constitue, par sa nature perméable et par ses
vides intérieurs, un réservoir d'une énorme épaisseur qui
alimente les cours d'eau du Vignoble et de la Bresse. Les
seules marnes que ce massif renferme sont les marnes à
foulon, précieuses pour l'agriculture, mais d'une étendue
minime, par rapport à celle du plateau et, pour cette raison,
d'une faible importance hydrologique.
A part les sources qui sortent au-dessus des assises mar-
neuses, beaucoup d'autres jaillissent de cavités et de fissures
souvent très vastes du jurassique inférieur.
> Comptes rendue de V Académie des eciences, 27 aTril 1847. — BulL Sœ. grol^
2* série, t YllI, p. 489.
* Lamairesse. Éludée hydroloçiguee eur les Monte Jura, — Veiian. Éludée sur U
Jura .
INFLUENCE SUR LE RÉGIME DES EAUX. 305
Un grand nombre de très longues lignes d'enfoncements
anciens ou de formation actuelle, existent le long des lignes
de failles. Ainsi s'oriente une série de grandes escavations,
en forme de puits, qui passe à l'ouest de Mournans, puis se
dirige sur Onglières, Plenîsette et Plenise.
Dans une partie des monts Jura, des ouvertures coniques
et béantes, désignées sous divers noms, sont dues à des tasse-
ments du sol et à des effondrements, qui sont la conséquence
d'érosions souterraines.
Foumet a cité les environs de Lons-le-Saulnier, comme
une des localités les plus remarquables sous ce rapport.
Cette ville est établie sur un calcaire jurassique, supporté
par des marnes argileuses et une formation salifère. Un
premier effondrement eut lieu dans cette ville, en 1703;
d'autres s*y sont produits en 1712, 1738, 1792, 1814, 1830.
Pendant l'affaissement de 1792, des eaux souterraines,
interceptées dans leur cours parla descente du sol, s'exhaus-
sèrent en même temps dans un puits, d'où Ton extrayait
l'eau salée.
Dans la commune de Châtelaine et dans les forêts d'Ar-
bois, on connaît treize entonnoirs de toutes formes, éche-
lonnés dans une direction générale du nord-est au sud-
ouest.
Les grottes de Baume, ouvertes dans le terrain jurassique
inférieur, où elles font suite à l'échancrure la plus haute,
la plus profonde, la plus étroite et la mieux dessinée du
Jura, donnent issue à la source principale de la Seille. Elle
correspond à une série d'entonnoirs et d'enfoncements,
dans le prolongement des cavernes où naît la rivière. Les
sources pérennes qu'elle produit ont pour complément, en
grandes eaux, une source temporaire qui sort par déver-
sement.
Le Lison du département du Jura reçoit, en amont du
20
306 ROLK DES CAYERNES.
Moulin Croton, deux affluents; Tun, le Bief des Joncs, perd
dans un entonnoir une des deux branches dans lesquelles
il se divise, un peu avant son confluent. Les eaux du Moulin
Groton, dérivées du Lison, se perdent également dans un
entonnoir, de sorte que le ruisseau est le plus souvent à sec,
à l'aval de la prise d'eau de cette usine. Toutefois son cours
se continue et aboutit, à 4000 mètres à l'aval du Moulin,
dans un puits placé en tête du bief des Laizines : on désigne
ainsi une longue fente très large, à bords abrupts, d'une
profondeur de 4 mètres environ à l'origine, dans laquelle il
n'existe de cours d'eau que lors des grandes crues. A une
distance de 3 kilomètres de l'origine de cette dépression, il
sort du sol un cours d'eau, prolongement du Lison, qui a
coulé souterrainement sous les laizine$. Ce cours d'eau,
après un parcours de 860 mètres, tombe dans le lit d'un
bief venant de Villeneuve.
La source du Lison du Doubs, à un kilomètre au-dessous
de Nans-sous-Sainte-Anne, s'échappe d'une belle grotte
dans le roc vif et forme une cascade de 10 mètres au fond
d'un cirque. Elle fait mouvoir immédiatement un moulin.
Ses eaux sont attribuées au puits Billard, situé à 400 mètres,
et au marais de Villeneuve. Elles sont très boueuses,
parce qu'elles se sont engouffrées dans des entonnoirs et
des laizines.
Parmi les sources qui sortent du rocher sans descendre
jusqu'aux marnes, une des plus renuirquables est celle du
Doubs (département du Doubs). Son orifice est situé dans la
paroi presque verticale d'un rocher. Elle jaillit, en toute sai-
son, avec une direction horizontale, comme la veine fluide
d'un vase percé latéralement. En sécheresse., on peut péné-
trer dans cet orifice sur plus de 10 mètres de profondeur;
on voit les eaux sortir de fissures et l'on entend un bruit de
chutes lointaines. Située à la base du mont Bison, cette
INFLUENCE SUR LE RËGiHE DES EàUX. 307
source parait être la décharge de yastes plateaux portlan-
diens dépourvus de cours d*eau.
Au-dessus de Saint-Claude, est un abime sans fond, d'où
le ruisseau de ce nom sort par le haut.
La Loue, commune d'Ouhans, jaillit d'un rocher qui a
600 mètres de haut, à 20 mètres en contre-haut. On le con-
sidère comme le débouché des eaux qu'absorbent les gouf-
fres des plateaux de Gouy (gouffres de la Crète de René,
de Sept-Fontaines, de Levier).
Le lac de Joux, alimenté par TOrbe, a une décharge sou-
terraine et communique aussi avec le Yalorbe.
Quelques sources temporaires sont alimentées par l'infil-
tration d'eaux pluviales, tombées sur des surfaces fort éloi-
gnées, en sorte qu'elles grossissent ou diminuent sans cause
apparente, à la grande stupéfaction des habitants de la
localité, qui les désignent sous le nom de calamiteu$e$. Cer-
tains bancs qui affleurent par le haut sur la chaîne de
l'Euthe et par le bas, au pied du premier plateau, à une
distance de près d'un myriamètre, donnent lieu à des
sources de cette espèce. D'autres sources qui déversent à
l'extérieur, par siphonement, les eaux de certaines cavités
intérieures sont dites affameuset.
■MrtiM et H^Mtte ^ — Dcs cours d'cau souterrains assez
importants circulent dans les fissures del'oolithe inférieure;
on peut citer celui qui forme la belle source du Château de
Dieulouard, et ceux que produisent le ruisseau de Thuillcy
et l'une des branches du ruisseau de Gemonville.
VMfM*. — Sur les plateaux calcaires du département des
Vosges, il y a des enfoncements coniques, à ouvertures cir-
* Braconnier, Meurihe-et-Moêelie, p. 35S.
* D'api^lÉ. Howard.
308 ROLE DES CAVERNES.
culaires, de 10 à 30 mètres de diamètre, peu profonds, dési-
gnés sous le nom de mares ou de mortes; dans quelques-uns
il y a toujours de Teau, même en été. Le muschelkalk, dans
la forêt de Padoux, en présente des centaines. Il y en a
d'autres dans le bas. Il en est encore qui servent de récep-
tacles aux eaux de pluie ou de ruisseaux, et qui ont les noms
de puisarts, de puits, de pertes ; d'autres paraissent obstrués ;
d'autres, enfin, au lieu d'absorber, sei*vent à dégorger le
trop plein des eaux souterraines. Il en est près d'Autreville,
dans le fond delà vallée, connus sous le nom de fossesj qui
sont bordés de buttes coniques, formées de détritus rejetés
par les eaux. La plus grande a 40 mètres à sa base et 4 mè-
tres de hauteur.
— Dans le département de TAube, les plaines du
calcaire àspatangues présentent, aux environs de Vendeu-
vre, de Vauchonvilliers, Trannes, Levigny, Fresnay, Ville-
sur-Terre, etc., des trous souvent très larges et très profonds,
auxquels les habitants ont donné les nonis de gouffres ou de
fosses. Leur forme ordinaire est celle d'un conoîde ou d'une
pyramide quadrangulaire renversée, ayant quelquefois à la
surface plus de 80 mètres de périphérie, et 10 à 12 mètres
de profondeur. Quelques-uns de ces gouffres absorbent les
eaux pluviales^ qui disparaissent ensuite par des canaux sou-
terrains, et vont contribuer à alimenter des fontaines abon-
dantes. D'autres se comblent en partie et deviennent le
refuge d'une végétation vigoureuse. Enfin, il en est où se
conservent les eaux qui s'y rendent, et souvent les remplis-
sent dans les temps de pluie, de manière à se déverser dans
les ravins environnants. Ces trous sont dus à des effondre-
ments.
' Leymerie. Aul>e, p. 204-205.
INFLUENCE SUR LE RÉGIlfE DES EAUX. 309
€éte-4'<lr^ — Aux environs de Montbard, le gouffre de Vau-
gimois est un ensemble de bétoires où disparait la rivière
de Yilaines-en-Duemois. Non loin de là, plusieurs ruisseaux se
perdent de même dans les sillons du grand plateau calcaire,
qui forme la pente septentrionale de la Côte-d'Or.
mmmUrSmàme : «btItom 4c TeMwl'. — LcS plateaUX de l'oO-
lithe inférieure, au sud de Yesoul, sont absolument dépour-
vus de sources; l'écoulement des eaux s'y fait par des con-
duits souterrains, communiquant parfois avec le jour par
des puits naturels, qui servent de déversoirs après les grandes
pluies (Fontaine de Gourboux, trou de Fondremand). Ces
canaux, à leur arrivée au jour, peuvent former des cours
d'eau importants (Source de la Romaine).
Ain ;r«rte4«BMBe A BeUeffar 4e. — D'aprës M. Tardy, le
sol, au point précis oùse perd le Rhône, à Bellegarde (fig. 139)
présente trois couches successives de calcaire urgonien,
étudiées par M. Renevier*. C'est sous le banc inférieur n* 3
que le Rhône disparaît dans les basses eaux, c'est-à-dire de
février à juin; autrefois, le banc supérieur n* 1 recouvrait
le lit du fleuve, comme un pont naturel, qu*ona fait sauter,
vers 1830, pour faciliter le flottage des bois.
CAiTadM\ — Dans le Calvados, l'Aure et la Dromme se per-
dent insensiblement à Fosse-Souci, au pied de la butte d'Es-
cures, dans la vallée de Maisons, à 6 kilomètres au nord de
Bayeux, entre les strates du calcaire marneux du niveau de
l'argile de Port-en-Bessin, presqu'au point de contact de
■ Explication de la Carie géologique de France, t. II, p. 387.
• Carte géologique détaillée; feuille de Gray.
» Bull. Soc. géol,, t. III, ^ Bérie, p, 706.
^ De Gaumont. Euai sur la topographie géognoêtique du Calvadoe^ p. 226.
510
ROLE DBS CAVERNES.
Fig. 139. — Vue do la perte du Rhône à Bellegarde, prise du milieu du pont de Lucet. On toit,
sur la rive droite du fleuve et Ters le haut, un barrage qui a été établi pour la prise d'eaa
des turbines.
LNFLUENGE SUR LE RÉGIME DES EAUX. 311
cette roche avec l*oolithe inférieure. Après s*être réunies,
les rivières se divisent en deux courants : en été, on voit
disparaître l*un d'eux dans l'espace de 40 mètres environ ;
en hiver, quand les eaux sont plus abondantes, ils se perdent
sur une longueur de plus de 80 mètres. Partout où les eaux
sont absorbées, on entend un bruit sourd, et on les voit res-
sortir à marée basse, au pied des falaises, entre Port-en-
Bessin, Gommes et Marigny, à 4 kilomètres de distance : les
•couches d'où elles surgissent sur la côte sont identiques
avec celles qui les reçoivent à Maisons.
ClMWMiie : Tardovérc, le Bandlat, la To■vre^ *— Le terrain
Jurassique présente, dans diverses parties du département
de la Charente, de nombreuses dislocations qui ne se tradui-
sent pas seulement par de simples ruptures de couches ou
par des failles, mais souvent aussi par des effondrements,
des gouffres plus ou moins profonds, dont les bouches sont
béantes à la surface du sol, et qui jouent un rôle important
dans la circulation des eaux souterraines.
Lia Tardouère ou Tardoirc, depuis Montbron, perd ses
eau-x dans des cavités, de sorte que dans son état ordinaire
elle est réduite à la moitié de son volume à la Rochefou-
cauld. Elle ne parvient au pont d'Agris qu'après des pluies
abondantes, et il faut des crues extraordinaires pour que
•cette rivière coule jusqu'à la Bonnieure. Les gouffres dans
lesquels elle se perd sont quelquefois vides et apparents;
d'autres fois, ils sont recouverts par des matériaux incohé-
rents ou par des couches de sable à travers lesquels les
eaux s'infiltrent. Le sol d'ailleurs, dans les cantons de Mont-
bron, de la Rochefoucauld et de Mansle, porte les traces de
fortes dislocations, et beaucoup de bancs approchent de la
verticale.
* Goquand. Géologie du la CharenU 1863, p. 264 et suivantes ; p. 292.
5i3 ROLE DES GàVERNES.
La commune de Pransac présente, sur la rive gauche du
Bandiat» dont le cours est sensiblement parallèle à celui de
la Tardouère^ un gouffre dans lequel pénètrent les eaux de
la rivière. Ce gouffre, entr*ouvert dans une faille, est situé
au pied de roches coralliennes très fissurées. En aval,
comme en amont de Pransac, le Bandiat se perd dans une
multitude d'entonnoirs. A part les grottes de Bancogne, le
gouffre le plus apparent est celui que Ton rencontre à 2 kilo-
mètres du pont de la Bécasse, près du village de Ghez-Roby.
C'est une crevasse béante, dont le fond présente un amas de
rochers écroulés et entassés sans ordre les uns au-dessus des
autres. Elle engloutirait toute la rivière, si celle-ci n'était
retenue par une forte digue. Pendant l'été elle ne dépasse
pas le gouffre de la Caillère, dans lequel on la voit se préci-
piter avec fracas. La coupe qui a été faite dans le coteau du
village de la Chabanne, pour la traversée de la route, au
sortir de la plaine de la Rochefoucauld, montre des rochers
inclinés en différents sens, laissant entre eux des cavités
plus ou moins considérables. C'est ainsi que sous le village
de Lacoux, il existe, au bas d'une saillie de rochers, un
gouffre recouvert par des quartiers de pierres énormes.
La forêt de la Braconne contient aussi plusieurs de ces
gouffres, qui pénètrent jusqu'à une profondeur considé-
rable. Ainsi on rencontre dans la commune d'Agris une de
ces excavations, désignée sous le nom de Dufaix, qui s'ouvre,
sous forme de galerie tortueuse, dans les bancs du corallien
supérieur, dont les couches s'inclinent vers le gouffre. On
peut citer, dans la même localité, la Fosse Mobile, qui com-
mence par une cavité sinueuse, s'engage ensuite à travers
une voûte, et débouche sur un puits presque vertical, la
Fosse Limousine, dont la cavité inférieure se continue
dans l'intérieur de la montagne, au moyen de grottes; les
bords supérieurs du précipice sont formés par le calcaire à
INFLUENCE SUR LE RÉGIME DES EAUX. 313
astartes. Le gouffre le plus grand et le plus tourmenté est la
Grande-Fosse, au milieu de la forêt de la Braconne, et qui
est entièrement ouverte dans le calcaire à astartes. G est une
vaste caverne circulaire, de 3 à 400 mètres de diamètre, à
parois verticales, et présentant des couches brisées; un cône,
qui s'élève à peu près au milieu de la dépression, a une
hauteur de 30 mètres environ.
On comprend comment, dans une région aussi fracturée,
les eaux se perdent successivement dans les gouffres béants
qu'elles trouvent sur leur passage.
À Tinverse de la Tardouère et duBandiat, qui disparaissent
dans des gouffres, la Touvre sort en bouillonnant, avec le
volume d'une rivière et une largeur de 80 mètres, de cou-
ches appartenant au sous-étage virgulien.
Ces magnifiques sources de la Touvre, comme la fontaine
de Vaucluse, les rivières de la Loue et du Lison, jaillissent
d'un gouffre dominé par des rochers taillés à pic. Elles pren-
nent naissance dans deux bassins principaux : le Dormant
et le Bouillant, dont les deux noms rappellent l'aspect. Le
premier a 24 mètres et le second 12 mètres de profondeur.
On doit considérer aussi comme une des sources de la
Touvre la fontaine bouillonnante de la Laiche, que l'on ren-
contre à 1000 mètres au sud du gouffre, et qui forme une
nappe d'eau, ayant plus d'un hectare d'étendue.
La Touvre doit incontestablement son origine aux deux
rivières de la Tardouère et du Bandiat, qui, comme on vient
de le voir, se perdent en entier à la hauteur de la Rochefou-
cauld, dans des crevasses ouvertes au milieu de leur lit, et
dont les eaux se dirigent vers, le sud-ouest, suivant le plon-
gement des couches. Leur communication souterraine est
attestée d'abord par une observation que l'on a souvent
occasion de faire. 11 n'est pas rare de voir les eaux de la
Touvre devenir troubles et limoneuses dans la plus belle
314 ROLE DES CAVERNES.
saison de Tannée, sans que l'on se soit aperçu de la moindre
pluie. Ce phénomène n'a d'autre cause que les orages locaui,
qui salissent les eaux du Bandiat et les transmettent en plus
grande quantité dans les goufTres destinés à les recevoir.
Les dénivellements que Ton remarque dans les bancs à
Oslrea virgula^ depuis les gouffres jusqu'au-dessus de la
Laiche, démontrent que les escarpements, au pied desquels
jaillissent les sources, ont été produits par une faille qui,
formant un barrage intérieur, limite vers l'est les cavernes
souterraines, et force le Crop-plein à s'écouler par cette
vanne naturelle.
■ér•«lt^ — Dans le département de l'Hérault, les calcaires
offrent le caractère de présenter quelquefois à la surface,
indépendamment de leui*s pores toujours béants, de vastes
ouvertures résultant le plus souvent d'effondrements (la
croix de Miège), plus fréquemment des trous plus ou moins
spacieux, appelés évenU ou boit-tout, ou bien encore des
fissures plus ou moins étroites, qui se prolongent bien
avant dans leur intérieur et aboutissent à de larges cavités
susceptibles de fournir aux eaux des bassins de réception.
Ces bassins communiquent avec l'extérieur par des canaux
plus ou moins sinueux, et donnent un écoulement d'eau
d'un volume exceptionnel (source du Lez).
La source de la Vis, située au moulin de la Fou, près du
hameau de Novacelle, est un énorme bouillon, d'un volume
de deux mètres par seconde, qui change immédiatement le
torrent en une belle rivière aux eaux limpides. Il parait pro-
venir d'infiltrations dans le plateau de calcaire oolithique
du Larzac \
' D'après M. de Roaville.
* Lequeulre. Annuaire du Club Alpin françai$, 1883. p. 331.
INFLUENCE SDR LE RËGIME DES EAUX. 315
li«re e«Dr6aie\ — Les calcaires à caprotines qui forment
toutes les crêtes principales et presque tous les grands pla-
teaux rocheux des massifs de la Chartreuse , de Lans, de
Royans et du Vercors (Isère et Drôme) sont très compacts
et ne se dégradent que très lentement par les agents atmo-
sphériques.
Mais ils sont toujours plus ou moins crevassés, de
telle sorte que les eaux ne séjournent point à leur surface
et s'infiltrent rapidement à travers toute l'épaisseur de ces
calcaires, jusqu'à ce qu'elles rencontrent une assise mar-
neuse qui les arrête : ce sont des marnes néocomiennes à
spatangues ; puis elles ressortent souvent par des grottes, en
sources volumineuses et souvent intarissables, dont les posi-
tions sont déterminées par les inflexions des couches néoco-
miennes.
Telles sont, dans les montagnes de la Chartreuse, les sour-
ces du Guiers-Vif et du Guiers-Mort, alimentées par les pluies
et les neiges de la chaîne du Hautdu-Seuil. Presque toutes
les grottes qui ont une certaine célébrité dans la région
sont situées dans les calcaires à caprotines : telles sont le
Trou du Glaz, sur la montagne du Petit Som, les glacières de
Proveysieux, de Corençon, celle de Fondeurle- en -Ver-
cors, etc.
Dans les parties basses des grands plateaux du Vercors
(I.ente, Vassieux, etc.) on voit souvent les crevasses des cal-
caires néocomiens converger vers des entonnoirs ou fontis,
désignés sous le nom de scialets, où les eaux s'engloutissent.
Pendant les grandes pluies, il arrive quelquefois qu'un scia-
let est insuffisant pour absorber l'eau qui se rassemble dans
une partie basse du plateau : il se forme un lac temporaire,
dont le niveau s'exhausse jusqu'à la rencontre d'un scialet
• Lory. Dauphiné, p. 316-317.
316 ROLE DES aVERNES.
placé plus haut. Ces faits ont été étudies dans le Vercors,
par Fournet et Duval-Jouve *.
Dans la Drôme, en particulier* la falaise dite du Robinet,
près Viviers, entre Donzère et Ghâteauneuf, est perforée de
nombreuses cavernes. La grotte de Dieu-le-Fit, qui porte le
nom particulier de Tom-Jones, est remarquable par son
étendue et par la présence d'énormes cailloux roulés qui
n'ont pu y être amenés que par des courants rapides; celle
de MoUans est située sur la limite de cette commune vers
Malaucène.
¥•» ec AipM-Baritimei\ — Dcsgrottesse trouvent à chaque
pas sur les flancs élevés des escarpements calcaires du dé-
partement du Var, auprès de Grasse; sous le plateau de
Saint-Vallier, près de Toulon, sous l'escarpement du plateau
d'Orves. La célèbre grotte de la Sainte-Baume est ouverte
dans les flancs de la montagne de ce nom, qui fournit des
eaux pures et abondantes , parmi lesquelles la source de
Saint-Pons : celle-ci, qui jaillit en bouillonnant du rocher,
pourrait, dès sa sortie, porter des bateaux. Les grottes de
Barfols, sous le plateau calcaire du Gaud, sur la rive droite
de la Siagne d'EscragnolIes, sont également bien connues.
Les ragagés^ les gouffres et les crevasses sont des cavités
verticales, ouvertes aussi dans les calcaires secondaires
des plateaux , qui présentent des analogies ^vec les
grottes.
Il existe plusieurs gouffres qui déversent dans la mer les
eaux qu'ils ont prises à la superficie. Ainsi le gouffre de
Cuges qui reçoit toutes les eaux de ce bassin ne paraît les
restituer que dans les flots. Ainsi les calcaires poreux et
« Bulletin de la Société géologique 2« série, t. XI, p. 731. Fournet. Sur Ut effon-
dremente. Académie de Lyon 1852.
■ De Villeneuve. Géologie de la Provence, p. 306.
LNFLUENCK ^UR LE RÉGIME DES EAUX. 317
siliceux du plateau de Roquefort, à Biot, ne peuvent se dé-
charger de leurs eaux que dans le golfe d*Antibes.
Une grande source sous-marine se manifeste dans le petit
golfe de Cannes, vis-à-vis la partie du rivage formée de mus-
chelkalk ; cette source se trahit pendant les temps calmes,
par un bouillonnement. Elle est située vers le point du cap
Croisette, où le rapprochement de la ligne sans fond indique
un rivage abrupt, dont la pente moyenne est de 27 pour 100.
Plusieurs sources analogues existent très probablement
dans le golfe Jouan, près Ântibes, et dans le golfe de l'em-
bouchure du Var.
Lorsqu'on examine la composition du littoral, de Nice à
Gênes, on retrouve toutes les circonstances caractéristiques
des sources sous-marines, terrains perméables arrivant jus-
qu'au contact des flots et rapide dépression du fond de la
mer vers le littoral. Aucun cours d'eau important n'établit
d'ailleurs un grand centre de réunion aux eaux absorbées.
On trouve, en effet, au sud de Menton, des sources tellement
abondantes qu'elles adoucissent l'eau marine.
Dans la partie occidentale du département du Yar, les
sources sous-marines ne se montrent plus qu'au contact des
masses calcaires avec la mer, vers Saint-Nazaire et Baudol
et près du golfe de Lèques. Sur un point, l'affluencede l'eau
douce est tellement connue qu'il y a auprès de la plage de
Portissol, à l'ouest de Saint-Nazaire, un avancement nommé
pointe de la Source. Au nord de Bandol, les eaux intérieures
sont si abondantes, qu'un trou de sonde percé, en 1828, à
la Cadière, dans un puits de recherche de mine, amena une
affluence d'eau qui nécessita l'abandon du puits inondé.
Plus à l'ouest, les eaux de sources sous-marines se présentent
en plusieurs points. Aux Capucins, près la Ciotat, elles rédui-
sent de trois quarts la salure de l'eau. A Cassis apparaît la
grande source sous-marine de Port-Miou, qui émerge du roc
518 ROLE DKS CAVERNES.
par une ouverture de 2 mètres carrés au moins. J^ force d'im-
pulsion de cette eau se manifeste par un courant, entraînant
des corps flottants jusqu'à plus de 2 kilomètres du rivage.
Une sonde tenue en suspension dans un puits creusé près
de l'émergence de cette source sous-marine, ne peut pas
demeurer verticale sous la charge de 16 kilogrammes; il faut
armer la sonde de 38 kilogrammes pour qu'elle résiste à
l'entraînement.
Ajoutons, d'après M, de Villeneuve, que cette grande source
sous-marine de Cassis s'aligne, d'une part, avec la source
sous-marine de Cannes, parallèlement au système de la
Sainte-Baume, et de l'autre, avec la grande source de Vau-
cluse, suivant N. 22 0., parallèlement au système du Vise,
qui est équivalent à celui de la Sainte-Baume.
BMehe•-d■-Bbtee^ — Âuprès de Marseille, toutes les eaux
des terres basses de Gémenos, après avoir été retenues parles
argiles tertiaires, viennent s'engouffrer dans les puits absor-
bants offerts par les calcaires à chama, qui bordent au sud
le petit bassin de Gémenos à Âubagne. Ges puits absorbants
sont connus en Provence sous le nom i'embucs. Ils suivent
les alignements des sources : c'est ainsi qu'un môme aligne-
ment, parallèle aux eaux thermales de Gréouls, à Digne,
couvre les sources de Sorps, de Barjols, deSeillons, de Sainfe-
Zacharie, de Gémenos, et la source sous-marine de Cassis.
Comme les embues de Gémenos, les puits absorbants déver-
sent les eaux des petits bassins imperméables, sans écoule-
ments apparents. Ainsi s'échappent, vers la mer, les eaui
du bassin de Cuges; ainsi les eaux du bassin tertiaire d'Ar-
tignosc, celles du bassin de Saint-Julien le Montagnier, une
grande partie des eaux des petites vallées tertiaires de Rians
* De VilleneuTC. Géologie de la Provence, p. 464.
INFLUENCE SUR LE RÉGIME DES EAUX. 519
à Esparron et Ginasservis, viennent grossir le volume
des eaux filtrées à travers les calcaires secondaires qui les
encaissent.
Dans la chaîne de Sainte-Victoire, on remarque la belle
source du Tholonet, que les Romains avaient recueillie dans
un aqueduc. Jonques, situé dans un vallon comme celui de
Saint-Pons, possède aussi plusieurs belles sources, et entre
autres, celle de la Traconade, que les Romains ont conduite
jusqu'à Aix, en perçant plusieurs chaînes montagneuses.
Toute la partie de la Trevaresse qui tourne vers la Durance
est arrosée par des sources abondantes. La chaîne de l'Étoile
fournit aussi de belles eaux.
Cette même chaîne verse dans le bassin de Marseille les
sources des Eygalades et de Plombières, sans compter plu-
sieurs autres moins considérables.
Excepté quelques villages situés sur les hauteurs, comme
le Vernègue, Aurons, Miramas, Eguilles, la plupart des
communes du département ont des sources qui alimen-
tent leurs fontaines, et les villes de Marseille, Aix, Arles,
Tarascon, Saint-Remi, Aubagne n'ont rien à désirer sous ce
rapport.
M FoBtaiM ém ¥aiici«M ^ La foutainc de Yaucluse
sort au pied d'un rocher taillé à pic (fig. 140) dont la hau-
teur est de 200 mètres et qui ferme brusquement un vallon
étroit ^ Elle jaillit d'un vaste bassin presque circulaire et en
forme d'entonnoir, qui aboutit à une caverne profonde, ou-
verte en arcade.
L'aspect de la source varie beaucoup suivant Tabondance
des eaux. Lorsqu'elles sont à leur maximum, ce qui a lieu
* Gras. Deêeripiion géologique du département de Vaucluêe, p. 28.
* L'élymologis de Yaucluse est probablemeot vallie clama, yaliée close.
9S0 ROLE DES CAVKRNES.
au printemps, époque de la fonta des neig^, ia voûte de la
¥ig. lii). — Vue de l'e^caiiii'TDeDL cakaiie au pii:d duquel sorL la Fou Ut me de Vauclu^
caverne est cachée» et une nappe d'eau tranquille remplit
I
b
à
ESFLUENGE SUR LE RËOlHfi DES EAUX. 3Si
le bassin jusqu'à son orifice. Au mois d'octobre, ati contraire,
lorsque les eaux sont à leur minimum de hauteur, la voûle
de l'antre apparaît tout entière et laisse voir un lac dont
rétendue se perd dans une profonde obscurité. On peut des-
cendre, en prenant des précautions, le long de l'entonnoir
et arriver jusqu'à la surface de cette nappe d'eau limpide, qui
remplit un abime dont on n'a pu jusqu'à présent mesurer là
profondeur. La source en sortant n'est pas bouillonnante,
comme on pourrait le croire ; rien n'altère le calme parfait
ni la transparence cristalline de sa surface. Son trop-plein,
lorsqu'il ne surmonte pas les bords du bassin, s'échappe
par les nombreuses fissures du roc calcaire. Il en résulte, à
quelques mètres de là, vingt ruisseaux bruyants qui tombent
en cascade (fig. 141) et produisent des flots d'écume en se
brisant sur les rochers. Une autre source remarquable, celle
du Grozeau, analogue à la Fontaine de Vaucluse, sort éga-
lement du pied du massif calcaire.
Suivant l'intéressante étude qu'en a faite M. Bouvier S pour
arriver à la fontaine, on pénètre par une ouverture unique,
dans le cirque où elle prend naissance et que dominent, dQ
tous les autres côtés, de hautes falaises calcaires. Cette masse
liquide dont la fraîcheur, l'abondance et la limpidité cont
trastent avecTaridité et la sauvagerie du paysage, atteint un.
volume de 120 mètres cubes par seconde : elle gagne bientôt
le seuil de rocher§qui lui sert de déversoir et en tombe sous
;forme de cascade (fig. 142),
Le cours de la Sorgue commence au pied de cette cascade.
£lle se divise aloi^s en une multitude de bras, jusqu'à ceque^
après avoir mis en mouvement plus de 200 usines et avoir
irrigué plus de 2000 hectares, elle vienne se mêler au cours
du Rhône, aux environs de Sorgucs et d'Avignon*
* Antociation françaiie pour Vavancement des sciences^ Uontpellier, 1879*
SI
322 ROLE DES CAVERNES.
Lorsque les pluies ont été rares dans la région, le débit
diminue successivement, et dès qu'il descend au-dessous de
INFLUENCE SUR LE RÉGINE DES EAUX.
325
22 mètres, le niveau de la source cesse d'atteindre le seuil
de son déversoir; la cascade cesse en même temps d'être ali-
mentée, et les eaux, abandonnant bientôt la cavité extérieure,
se retirent dans une grotte qui lui fait suite. et qui est creusée
dans la falaise. Si la sécheresse persiste, la baisse continue
et on arrive enfin à n*avoir plus devant les yeux qu'une petite
nappe liquide, contenue tout entière dans une espèce d'en-
Fig. 142. — Plan correspondant à une section placée près du sommet de la grotte de la Fontaine
de Vaucluse. Échelle approximative de 0,0003 par mètre. — D'après M. Bouvier.
tonnoir, dont le diamètre supérieur et la profondeur ne
dépassent guère 10 à 12 mètres.
Lorsqu'il en est ainsi, la limpidité de l'eau permet- de dis-
tinguer nettement tous les contours de cet entonnoir et d'a-
percevoir dans le fond, à l'est de la paroi, une sombre ouver-
ture qui forme l'issue de la galerie d'amenée des eaux. Cette
situation extrême ne se produit qu'assez rarement, et à k
suite de grande» sécheresses.
Le zéro de l'échelle de la Sorgue correspond àl'abaissement
considérable, signalé le 17 novembre 1869.
5S4 ROLE DES CAVERNES.
En dehors de ces faits exceptionnels, le niveau de la fon-
taine subit régulièrement, chaque année, une dépression
assez sensible ; la cascade est à sec et les sources qui surgis-
sent à son pied alimentent seules la Sorgue. Le débit est
cependant encore considérable dans les cas extrêmes, comme
en 1869; il ne descend pas au-dessous de 5°^, 500 par seconde,
et il n*est pas inférieur, en étiage ordinaire, à 8 mètres
cubes.
D'ailleurs par la limpidité à peu près constante de ses
eaux, par Tuniformité et la fraîcheur de leur température,
qui se maintient toujours entre 12* et 14% la fontaine est
naturellement très poissonneuse, et les espèces les plus esti-
mées, la truite, l'anguille, s'y développent à plaisir avec Té-
crevisse, en acquérant une chair exquise. Aussi paraît-il
que, dès les temps les plus reculés, la Fontaine de Yaucluse,
a été considérée, suivant la coutume païenne, comme une
divinité bienfaisante.
Pendant longtemps, la question de Torigine de ces eaux
est restée irrésolue. On l'a attribuée d'abord à l'échappement
d'un lac lointain. L'idée d'une dérivation souterraine de la
Durance pouvait paraître plus plausible.
L'explication du phénomène a été donnée en 1855 par un
ancien ingénieur en chef de Yaucluse, M. Bouvier, parent
et l'un des prédécesseurs de l'auteur que nous venons de
citer.
c Le terrain néocomien qui circonscrit le mont Ventoux,
dit-il, se continue au sud et à l'est de cette montagne et occupe
un espace très considérable, qui s'étend de la Fontaine de
Yaucluse à Sisteron, c'est-à^lire règne sur 70 kilomètres de
longueur et dont la largeur varie entre 26 et 5 kilomètres.
C'est là, à mon avis, le bassin de la Fontaine de Yaucluse et
j'ai été conduite l'admettre en reconnaissant qu'on ne trouve,
ni sources, ni puits, sur toute cette étendue ; que, comme
INFLUENCE SUR LE RÉGIME DES FAUX.
525
pour le Yentoux, les ravins y sont constamment à sec, si ce
n*est dans des cas tout à fait exceptionnels; que les eaux de
pluies, alors même qu'elles tombent sur des cônes renversée,
sont immédiateniçnt absorbées, et que les quelques villages
r,2G ROLE DES CAVERNES.
qui sont bâtis sur cette espèce de désert ue sont alimentés
que par des eaux de citernes. Gela admis, le bassin de la
Fontaine se trouve naturellement circonscrit par les limites
du terrain néocomien, et par le ravin très profond de la
Nesque, qui le sépare du mont Ventoux (fig. 145). J'ai me-
suré très exactement cette surface sur la carte géologique,
et j'ai trouvé qu'elle est de 96 500 hectares. C'est un plateau
élevé où les eaux doivent être plus abondantes que dans la
plaine : je prendrai 0",85 pour le chiffre de la hauteur
d'eau qui y tombe annuellement. Le volume total est donc
de 850 250 000 mètres cubes; en divisant ce chiffre par
31531000, nombre de secondes dans l'année, je trouve
pour le débit moyen des sources alimentées par le bassin
26 mètres cubes, volume qui satisfait évidemment, soit au
débit de la Fontaine de Vaucluse, soit aux pertes qui peuvent
résulter de l'évaporation ou des écoulements, dont il est
impossible de tenir compte. >
Les observations de la Commission météorologique de Vau-
cluse ont pleinement confirmé cette explication *. Elle a
installé, en effet, sur le plateau dont il s'agit, plusieui-s
stations pluviométriques, placées à des altitudes différentes
et à des distances de plus en plus grandes de la Fontaine. Les
indications qui y ont été recueillies, de 1874 à 1885, gra-
phiquement représentées au-dessus des hauteui*s correspon-
dantes de la courbe des débits de la source, ont permis de
voir avec quelle régularité et avec quelle rapidité les varia-
tions de la pluie, à chacune de ces stations, se transmettent
à la courbe des débits de la source (fig. 144 et 145)'. Un
' Voir les Comptes rendus annuels de cette commission.
» Ces ligures permettent encore de constater qu'avec les eaux basses, des
pluies d'une certaine importance ont pu se produire dans le bassin de réception,
sans déterminer de surélévation dans a courbe des débits et sans même arrêter sa
décroissance; c'est ce qui a eu lieu notamment en 1878, entre les 5 et 10 janvier;
mFLUENGE SUR LE RÉGIME DES EAUX.
327
intervalle de 24 heures ou de 48 heures au plus, suivant
réloigncment, suffit à cette transmission qui, sauf un léger
fléC(«a)j<WOnO PJV. MâB6 AVRIL mai JUJN JUILLET AOÛT SEPT. OCT. NOV
NAUmUS
xiECt»7)jfti«v(iai} rev mars avril mai ,'U1N juillet août sept, oct
Fig. 144. — Tableau graphique des obserralions sur le régime de la Fontaine de Vaucluse com-
paré au régime des pluies en des points de la surraco du sol où elle s'alimente, pendant
Tannée 1877-78. L'échelle des débits par seconde de la Sorgue est de ^ millimètre par mètre
cube; les hauteurs da pluie sont représentées au^ de grandeur.
ralentissement dû aux difficultés de la circulation souter-
raine, s'opère avec la même ponctualité que s'il s'agissait
1" et 5 août et le 15 août. Il parait difficile d'en trouver Texplication autrement que
dans rbypothëse de vastes réservoirs souterrains, où les eaux de pluies trouvent facile-
ment h s'emmagasiner, lorsque le niveau est bas, sans que les écoulements en soient
influencés d'une manière immédiate et apparente. L'existence de ces mêmes réser-
voirs semble également pouvoir seule expliquer comment il se fait qu'après une
absence absolue de pluie, pendant tout le mois de septembre et les premiers jours
d'octobre, la fontaine n'ait cessé d'écouler un volume de 7 mètres cubes par seconde,
qui est resté constant jusqu'à ce que des pluies abondantes soient survenues et Taient
fait rapidement augmenter.
398 ROLE DiDS CAVKHNKS.
d'un bassin ordinaire et d'un cours d'eau à ciel ouvert. Il
n'est donc pas douteux que ce plateau, où les eaux de pluies
s'infiltrent presque instantanément, ne forme le bassin ali-
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UARt AVRIL HAI. 4UIN JUUlT A061. tlP. OCT.
Fig. 145. — Tableau graphique des observations sous le régime de la Fontaine de Vaucl»»'.
comparé au régime des pluies en des points de la surface du sol où elle s'alimente, pendant
l'année 1880-^1. L'échelle des débits par seconde de la Sorgue est de { millimètre par mMre
cube ; les hauteurs de pluie sont représentées au ^ de grandeur.
mentaire de la Fontaine, et la seule difficulté est d'en déter-
miner les limites précises.
On sait que le calcaire néocomien est formé de couches
puissantes, traversées par des fissures, des crevasses, des
conduites en forme de tuyaux irréguliers et des cavernes qui
communiquent les unes avec les autres et dont l'allure est
INFLUENGK SUR LE IIÉGDIË DES EAUX. 3'i!l
indépendante de la stratification, comme il arrive dans
beaucoup de départements du sud de la France.
Le terrain néocomien s'étend en masses puissantes depuis
Sisteron, à l'est, jusqu'à la plaine du Comtat. Il repose au nord
sur les assises compactes du calcaire oxfordien,; il est déli-
mité de ce côté par la vallée profonde du Thoulourenc, sur
le versant gauche de laquelle, à une grande hauteur, appa-
raissent les assises marneuses qui forment la couche infé-
rieure du néocomien et dont l'imperméabilité s'oppose à
l'écoulement des eaux souterraines. Au sud, la rive droite de
la Durance, où apparaissent successivement les assises com-
pactes de l'oxfordien, les couches marneuses du néocomien
et les dépôts tertiaires, lui sert de limite. Enfin, à l'ouest,
il est recouvert à son pied par des dépôts tertiaires qui vont
rejoindre la plaine du Comtat. Il forme donc un vaste
triangle, ayant son sommet à Sisieron, ses côtés sur les ver-
sants rive gauche et rive droite du Thoulourenc et de la
Durance, sa base sur la ligne supérieure des dépôts tertiaires
de la plaine.
Entre ces limites est concentrée une puissante masse
néocomienne, fissurée et crevassée dans tous les sens, et
toute disposée pour recevoir, dans de vastes cavités souter-
raines, les eaux de pluies qui tombent à sa surface. Elle
repose sur un fond d'assises marneuses imperméables, et elle
est bordée de toutes parts de terrains également imper-
méables. Il est évident dès lors que les eaux de pluies
doivent s'y réfugier et s'y emmagasiner jusqu'à ce qu'elles
puissent trouver une issue par le point le plus bas de la cein-
ture qui les renferme. Ce point bas, c'est la Fontaine de Vau-
cluse et on conçoit que, dans de pareilles conditions, cette
fontaine, tout en étant soumise aux variations de la pluie
sur la surface du bassin alimentaire, reste toujours large-
ment alimentée et qu'elle conserve sa limpidité.
530 ROLE DES CAVERNES.
Qu'on imagine une vaste éponge, pourvue de larges et
nombreuses cellules, posée sur un fond imperméable et en-
tourée d'un mastic également imperméable, qui s'élève tout
autour d'elle à une grande hauteur, et dont l'arête ne s'abaisse
que sur un seul point; qu'on suppose ensuite qu'on verse de
l'eau d'une manière discontinue sur cette éponge, et on aura
la représentation de ce qui se passe dans le bassin de la Fon-
taine. L'éponge commence par s'humecter; puis le fond du
bassin se remplit jusqu'au niveau du point bas; ensuite un
écoulement constant s'effectue par ce point; il variera sans
doute avec la quantité d'eau versée, mais il subsistera pendant
longtemps, quoique le versement de l'eau ait cessé, et l'in-
troduction d'eaux troubles pourra ne pas altérer sa limpidité.
Ce bassin occupe une surface totale de 165000 hectares.
Comparée à la hauteur moyenne des pluies constatées aux
stations météorologiques, laquelle a été de 0",55, de 1874
à 1878, et au débit moyen delà Fontaine de Yaucluse, lequel
a été de 17 mètres cubes pendant la même période, elle fait
ressortir un volume d'inliltrations souterraines qui repré-
sente 60 pour 100 de la hauteur d'eau tombée.
La surface du calcaire néocomien est criblée de puits na-
turels, abîmes souvent insondables, qu'on désigne tantôt
sous le nom de « tindouls > tantôt sous celui « d'avens >.
C'est cette dernière dénomination qui a prévalu dans le Yau-
cluse, et les avens, dont beaucoup ont des noms connus,
jouent un rôle important dans les histoires et les légendes
locales.
Parmi les plus remarquables, est celui de la Cruis (fig. 143)
situé près du village de ce nom, arrondissement de Forcal-
quier, dont le diamètre à la surface atteint 33 mètres.
D'après M. Vial, l'aven du Toumple, qui est situé à 1 kilo-
mètre et demi au nord-ouest du château de Javon, et dont
l'ouverture est rectangulaire, mesure 1 mètre sur 4 mètres :
INFLUENCE SUR LE RÉGIME DES EAUX. 354
sa profondeur dépasse 95 mètres. L'aven du Grand-Gérin,
qui est situé dans le voisinage de la Devandoure, dans un
ravin aboutissant à la combe Malavard, présente la particu-
larité de deux ouvertures jumelles, séparées d'abord par un
rocher sur JO mètres de profondeur, et n'en formant qu'une
ensuite ; la sonde a pu y descendre aussi jusqu'à 95 mètres.
Enfin, pour l'aven de Jean-Nouveau, qui est situé à 2 kilo-
mètres au sud-ouest de Sault, la sonde v est descendue à
180 mètres; son orifice a la forme d'un entonnoir, dont le
diamètre d'abord de 10 mètres, n'est plus que de 2", 50 à
5 mètres de profondeur.
Le nombre des avens qui apparaissent à la surface est
considérable; mais il en existe encore beaucoup qui sont
invisibles, soil qu'ils aient été fermés naturellement, ^sous
l'action des apports charriés par les eaux de pluies, soit
qu'ils aient été bouchés par les habitants.
Le 22 mars 1878, à la suite d'une sécheresse a peu près
absolue, qui avait régné depuis le commencement de dé-
cembre, le niveau de la fontaine était descendu à la cote
0",56 du sorguomètre; dans un sol aussi facile à traverser,
toutes les infiltrations avaient certainement disparu, et
l'alimentation ne se faisait plus qu'au moyen des réserves
souterraines. Cependant, jusqu'au 28 mars, c'est-à-dire
pendant sept jours consécutifs, le débit s'est uniformément
maintenu à 6'"%10 par seconde, tandis que le niveau ne
s'est abaissé que de 0",1I; l'écoulement total a donc été de
5689280 mètres cubes pour un abaissement de 0°,11
dans les nappes alimentaires, d'où Ton est amené à conclure
que la surface de ces nappes était au moins égale, à ce
,5689280 ^,.^^ ^ , .
moment, a — rppj — = o3o0 hectares. Tout porte a croire,
et l'expérience au scaphandre, dont il va être parlé, le dé-
montre, que ces nappes ont de grandes profondeurs; on
55a ROLK DKS CAVERNES.
peut juger par ]k de Fimportance des vofumes d'eau qui
restent enfouis dans le sol sans être utilisés.
Ces nappes sont probablement accumulées dans le voisi-
nage de la source ; mais il en existe aussi à des étages plus
élevés, et on en trouve la preuve en visitant un travail inté-
ressant, récemment exécuté dans le voisinage de Ferras-
sières, au pied de la montagne de Lure, à une altitude d'en-
viron 1000 mètres. Là, sur un sol aride, comme le sont tous
Fig. U6. — Coupe de la Grotte de Vaucluse suivant la ligne A.B.C.D. du plan (tlg. i«), d'apri's
H. Bouvier. Elle montre aussi la position du plongeur qui l'a explon^e, en 1878, pendant les
basses eaux. La corde de si^relé avait SO mètres de longueur. — Échelle approximative
0,0025 par mètre.
ceux du bassin alimentaire de la Fontaine, un propriétaire
a eu l'ingénieuse idée de chercher à utiliser les eaux d'une
couche aquifère, dont l'existence lui paraissait attestée par
la présence constante de l'eau au fond d'un aven situé dans
son domaine. Après de laborieux efforts, il est parvenu
jusqu'à cette couche par une galerie souterraine, et il a mis
au jour une source précieuse, dont le débit, en étiage, n'est
pas moins de 2000 litres par minute.
INFLUENCE SUR L£ RÉGINE DES ËADX. 55S
Pour étudier le régime souterrain de la fontaine de Yau*
cluse, M. Bouvier profita des basses eaux de 1878. L'eau
était très claire, et on distinguait très nettement dans le
fond, creusée dans la paroi orientale, l'ouverture de la
galerie d'amenée des eaux (fig. 146), on partie masquée par
un énorme bloc légèrement incliné qui ne laissait libre,
de chaque côté, qu'une ouverture en forme de segment cir-
culaire. Un plongeur intrépide pénétra plusieurs fois dans
le conduit souterrain et fournit ainsi les indications néces-
saires pour dresser le profil approximatif de la galerie.
vmê. — Les faits relatifs aux sources ont été particulière-
ment bien observés dans le département du Lot, par l'abbé
Paramelle*. De toutes parts le calcaire renferme des bétoires.
C'est ainsi que tous les ruisseaux du canton de la Capclle-
Marival, qui se forment dans les terrains granitiques et
schisteux, arrivés au bourg de Thémines, Théminette et
Issendolus, où commence la formation calcaire, se préci-
pitent dans trois cavernes, se réunissent sous terre, reçoi-
vent un très grand nombre de ruisseaux cachés et vont,
après un trajet de 25 kilomètres, former, près de Souillac,
la source de Louysse.
— Dans le département de la Dordogne les
sources de Salibourne, de Bourdeilles, du Toulgou, et surtout
celle de Sourzac, sont de véritables ruisseaux sortant de
plusieurs des nombreuses cavernes creusées dans le calcaire*
Quelques autres sont intermittentes.
! Pertes de l'Iton^ — L'Ilon prcnd SU souFCC dans un
* VÂrl de découvrir les sources , 2" édition, j). 24ti.
« Ferray. Leê Pertes de Vlton, Évfeui 1883.
534
ROLE DES CAVERNES.
endroit voisin de celle de FAvre, à Rouxou (Orne) à une alti-
tude de 280 mètres, entre dans le département de TEure à
Chaise-Dieu du Theil, arrive à Villalet, où il se perd dans
les périodes sèches, passe à Evreux, et va se jeter dans
l'Eure à Acquigny, après un parcours de 88 kilomètres,
dans le seul département de l'Eure.
Sur la rive droite se rencontre l'étage cénomanien et
sur la rive opposée l'étage sénonien; d'un côté craie blanche,
KILO M C TRCa
Fig. Ii7. — Courbe du débit de l'Ilon à partir de son entrée dans le département de TEwre,
montrant les pertes qu'il y subit, d'après M. Ferra y. — Échelle des disUnces horison-
lales nroi-ôOT.
de l'autre craie chloritée. Ainsi que Guettard l'avait déjà
signalé, en 1758, Tlton, à Villalet, cesse de couler pendant
Tété, et toute la portion de son lit, depuis ce point jusqu'à
Gaudreville et quelquefois au delà, reste complètement à
sec, d'où le nom de Sec-Iton donné à cette partie de la
rivière.
La figure 147 donne clairement, sans qu'il y ait besoin
d'explications supplémentaires, la courbe de débit de l'Iton,
à partir de son entrée dans le département de l'Eure jusqu'à
INFLUENCE SUR LE RÉGIME DES EAUX. 535
son confluent. On y voit avec quel soin son régime a été
étudié.
Guettard avait aussi remarqué dans le lit de la rivière des
entonnoirs ou bétoires, dans lesquels Teau s'engouffre. En
outre, il en existe une série non interrompue dans la forêt
d'Évreux. Les uns et les autres paraissent former une ligne
presque droite, partant du moulin de Verrières à Coulonges
pour aboutir à la source de la Fosse-aux-Dames. L'un des
bétoires les plus considérables mesure 80 mètres de diamètre
et 16 mètres de profondeur. Cet effondrement du toit du
canal souterrain de Tlton indique que la capacité de la
caverne sous-jacente n'est pas moindre que celle de ce
vaste entonnoir, soit de 25 à 30000 mètres cubes.
Sur le territoire des Boscherons, des ouvriers, occupés à
ouvrir une carrière pour l'exploitation de la marne, ont mis
à jour, en 1860, à une profondeur de 18"',70, un canal
large de 2", 90, profond de 1™,75, creusé dans la craie,
et dans lequel passe un cours d'eau dont la vitesse est
de 6 mètres à la minute, et le débit de 507 litres par
seconde. Le plan d'eau de ce canal est à 5", 16 en contre-bas
de l'eau ordinaire de la rivière d'Iton sur ce point. Il est à
noter que la marnière des Boscherons se trouve exactement
sur la ligne de bétoires citée plus haut, comme allant de
Coulanges à la Fosse. Déjà, en 1857, M. Lapeyruque, con-
ducteur des ponts et chaussées, signalait, à 500 mètres en
amont du point précédent, un autre cours d'eau souterrain,
à plus de 8 mètres en contre-bas du plafond du lit.
Le mode de formation des bétoires ressort, par exemple,
de l'effondrement observé, en mars 1880, sur le même par-
cours qui, sur le bord d'un chemin à flanc de coteau, pro-
duisit instantanément un puits profond de 20 mètres, à
parois cylindriques et bien verticales, de 6 mètres de dia-
mètre.
556 HOLE DES GAYeRNËS.
Tout d'abord le ciel de la caverne s'effondre ; la mince
couche crétacée qui le surmonte diminue peu à peu par les
infiltrations, et n'a plus la force de soutenir la masse de
sable avec silex qui le surmonte. La cavité, d^nbord cylin-
drique, devient, avec le temps, conique.
Immédiatement dans le voisinage du puits, si subitement
ouvert, sept ou huit entonnoirs, dans la direction nord,
c'est à dire en aval, se succèdent sans interruption, sur une
distance de 200 à 300 mètres environ.
D'après Itf. Ferray, tout le plateau de 24 kilomètres qui
sépare la vallée de l'Eure de celle de Tlton, doit renfermer
de vastes cavernes, qui sontdes réservoirs d'eau où s'alimen-
tent les sources voisines, ainsi que la rivière souterraine qui
suit la vallée, et où puisent les pompes de l'établissement des
eaux de la ville d'Evreux. On aura une idée de son débit par
les 500 à 600 litres à la minute que fournit une seule galerie
de 60 mètres de longueur.
Ces faits ont été constatés a l'aide de la fluorescine versée
au Reybrac.
La Rille disparaît dans le canton de Beaumont-le-Rogcr
(Eure), et, après un certain parcours, reparaît dans la même
vallée. L'Iton, qui s'engouffre à Yillalet (Eure), va ressortir à
Bonneville.
Loiret lirai A^OriéM». — Le Val d'Orléaus, situé sur la rive
gauche de la Loire, fournit un exemple remarquable de cavi-
tés souterraines traversées par des cours d'eau : il a été
récemment fort bien étudié par M. Sainjon, ingénieur des
ponts et chaussées ^
A la suite d'un éboulement qui eut lieu subitement en
juillet 1841, sur le chemin de fer d'Orléans à Vierzon, près-
^ Comptes rêndut de l* Académie des tcienres. T. XCI, p. !2tJ2. 1880
IiNFLUHiNCË SUR LE KËGIMii: DES EAUX. 537
que au sortir de la première de cette ville, un déblai d'envi-
ron 1500 mètres cubes s'effondra et disparut. Des travaux
d'exploration exécutés à cette occasion, sur 2 kilomètres de
longueur, amenèrent la découverte de nombreuses cavités,
dont deux avaient 6 mètres de hauteur.
C'est par une cavité de ce genre que sort le Loiret.
On sait que le val d'Orléans est sillonné par des courants
souterrains, auxquels sont directement empruntées les eaux
qui alimentent la ville d'Orléans depuis l'année 1864. C'est
également à ces courants qu'est liée l'existence des sources
fort connues du Loiret (fig. 148).
Les eaux souterraines dont il s'agit proviennent de la Loire
elle-même, mais elles y rentrent toutes, après un trajet rela-
tivement peu considérable.
Le point où commencent les premières pertes souterraines
de la Loire est situé près du hameau de Bouteille (commune
de Guilly), à 41 kilomètres en amont d'Orléans. Il ne
peut y avoir de doute à cet égard; car des jaugeages com-
paratifs faits avec le moulinet de Woltmann ont accusé
une diminution sensible à peu de distance en aval de ce
point.
On peut également indiquer et même préciser le point où
la rentrée en Loire des eaux perdues s'est intégralement effec-
tuée ; ce point coïncide avec l'embouchure du JiOiret (9 kilo-
mètres en aval d'Orléans) ; immédiatement en aval de cette
embouchure, on retrouve les mêmes débits qu'en amont de
Bouteille, ainsi qu'il résulte de nombreux jaugeages.
La restitution à la Loire des eaux qu'elle a perdues n'a pas
uniquement lieu à ciel ouvert par le Loiret; elle a lieu, en
outre, par des rentrées de fond, dans le lit même de la
Loire; mais ces rentrées ne commencent qu'auprès d'Or-
léans, de sorte que c'est là que le fleuve est réduit à son
minimum de débit, ou, en d'autres termes, c'est au droit
22
5Ô8
UOLK DtS CAVEILNES.
LNFLUIlNCË sur le RÉGIUË DES EAUX. 339
d'Orléans que la somme de;> courants souterrains du Val
atteint son débit maximum.
La Loire a donc, entre Bouteille et le confluent du Loiret,
deux cours, l'un à ciel ouvert, le long des escarpements qui
régnent presque sans interruption sur la rive droite, l'autre
à travers le Val d'Orléans, et celui-ci est souterrain, ou du
moins, en grande partie souterrain, puisqu'une fraction seu-
lement des eaux dérivées devient visible au Loiret.
Quant au Val d'Orléans, il se présente sous la forme d'une
grande dépression, d'une superficie de 14400 hectares,
dont le niveau moyen est seulement de 4 à 5 mètres
au-dessus des plus basses eaux de la Loire, et il est limité
sur la gauche par des coteaux. C'est au pied de ces coteaux
que coulent d'abord le petit ruisseau du Dhuy, puis le
Loiret, qui n'est que la continuation du Dhuy, mais du Dhuy
brusquement transformé par les sources abondantes prove-
nant de la Loire.
Cette configuration topographique est la conséquence de
la dislocation qui accompagne la faille dans laquelle s'est
établi le cours de la liOire; la Loire coule dans la branche
droite, le Loiret dans la région la plus accentuée de la bran-
che gauche, et l'ilot compris entre ces deux branches s'est
affaissé pour former le Val d'Orléans.
Vers Bouteille, les dépôts lacustres de l'étage miocène
inférieur, dont fait partie le calcaire de Beauce, succèdent
brusquement à l'argile plastique. Ces dépôts lacustres,
marnes et calcaires, deviennent apparents à partir de Tigy,
sur le versant des coteaux de la rive gauche, et, à partir de
Ghâteauneuf, sur la tranche des escarpements de la rive
droite. Dès Châteauneuf, ils se montrent aussi dans la Loire
et à une profondeur peu considérable, sous les sables et les
graviers ; ils émergent dans lelitmême du fleuve, depuis Com*
bleux (6 kilomètres en amont d'Orléans) jusqu*au confluent
340 HOLE DES CAVERNES.
du Loirotet au delà. Eiifiuon retrouve également des affleure-
ments de ce calcaire lacustre dans presque toute rétendue
du lit du Loiret. La présence de ces mêmes couches a été,
comme on doit s'y attendre, constatée dans le Val d'Orléans.
Les sondages ont appris de plus qu'il y existe de nom-
breuses fissures et mômes des cavernes.
Voici quelques détails sur la manière dont s'effectuent les
pertes et les rentrées d'eau.
La où les couches fissurées affleurent, au fond même du
lit, les choses s'expliquent d'elles-mêmes. Rien de plus
simple aussi partout où les fissures sont directement en
contact avec les sables et graviers. Mais le plus souvent, les
sables et les graviers sont séparés des couches fissurées par
desdépôts argileux ou argilo-sablonneux, et la communication
n'est alors possible que sur les points accidentels où ce toit
imperméable a disparu.
II est probable d'ailleurs que ces cheminées de communi-
cation correspondent plutôt à des cavités ou cavernes qu'à
de simples fissures; car il ne se passe guère d'année où Ton
n'ait à signaler dans le lit de la Loire des effondrements par-
tiels, qui donnent lieu soit à des pertes, soit à des rentrées
d'eau, suivant la région dans laquelle ils se produisent, et ils
se présentent presque toujours sous la forme d'entonnoirs
circulaires ou cônes renversés, à talus réguliers, par le fond
desquels le terrain meuble de la surface disparaît presque
instantanément; or la rapidité de cette disparition serait
incompréhensible s'il n'existait pas dans le calcaire sous-
jacent des cavités dans lesquelles tout le déblai d'éboule-
ment s'est facilement logé. Les gouffres qui s'ouvrent ainsi
en Loire restent béants pendant quelques jours; mais les
sables roulés par le fleuve finissent par les combler et eu
effacer la trace..
11 faut sans doute attribuer ces effondrements, moins à
INFLUENCE SUR LE RÉGIME DES EAUX. 5il
Taction du courant de la ïiOire qu'à celle des courants sou-
terrains, minant à la longue la couche imperméable qui les
isolait de l'extérieur. En effet, des faits du même genre se
sont produits et se produisent encore dans le Val d'Orléans,
et par conséquent en dehors de la Loire, par exemple
en 4846, lors de la construction du chemin de fer de Vier-
zon. Les entonnoirs d'ancienne date, aujourd'hui plus ou
moins comblés, qui sont si multipliés sur le territoire des
communes de Saint-Denis en Val et de Saint-Jean le Blanc,
n'ont pas une autre origine.
C'est à cette catégorie de sources qu'appartient la rentrée
d'eau connue sous le nom de source du Loiret, mais qui
n'est en réalité que la première en amont des sources de ce
cours d'eau. Cette source bouillonne d'une façon très mar-
quée lorsque les eaux sont basses, circonstance qui lui a
valu depuis longtemps une grande notoriété (fig. 149).
C'est également à cette catégorie qu'appartient le petit
gouffre (S^jSO de diamètre seulement) de rentrée d'eau
qui s'est ouvert dans la Loire, pendant les gelées du mois de
décembre 1871, à mi-distance entre les deux ponts d'Orléans
et tout près de la rive gauche (fig. 150). Il avait 12 mètres de
profondeur, et dans les premiers jours le fleuve était assez
bas pour que la rentrée d'eau se fît avec un bouillonnement
sensible; la transparence de la source permettait d'aperce-
voir très distinctement les roches calcaires du fond, ainsi
que des couches d'argile verte, à 8 mètres de profondeur.
Ce gouffre, qui a subsisté pendant toute la durée de la gelée,
a été comblé par la première petite crue qui est survenue ; il
n'est donc plus visible. Il en existe certainement à peu de
distance d'autres, qui sont également masqués par les
sables; car lors des froids exceptionnels du mois de dé-
cembre 1880, non seulement cette région de la rive gauche
de la Loire est restée constamment libre de glaces, mais de
549 ROLE DES CAVKRNES.
plus elle était couverte d'abondantes vapeurs, indice évident
de la température relativement élevée et par conséquent, de
la provenance souterraine de ses eaux.
INFLUENCE SUR LE RÉGIME DES EAUX. 543
Ardeancst siffay-i* Abbaye ^ — A Signy-rAbbaye une mani-
gnifique source, le Gibergeon, fournit au moins 400 litres
d'eau par seconde (autant que les sources de la Vanne) et
fait mouvoir toute une grande filature. Cette source sort du
calcaire oolithique, à proximité de gouffres qui traversent
->i'ii^^i:>.^''^^"
Fî}r. 150. — Coa|ic d*un petit gouffre observé en Loire, ^ Orléans, en décembre 1871,
à travers des couches de calcaire siliceux, de sable et d'argile. Echelle ^. D'après M. Sainjon.
la même roche et qui absorbent les eaux pluviales. Le cal-
caire oollthique qui affleure dans le bas-fonds de Signy,
est recouvert sur les plateaux environnants par l'argile
oxfordienne. On rencontre souvent sur ces plateaux des
entonnoirs d'un plus ou moins grand diamètre.
Belglqoe t ea virons de DiBAiiti Blcybcre-és-lllonteen. — AuX CU-
virons de Dinant', à Bleyberg-ès-Montzen, il arrive, comme
il est fréquent dans toutes les régions calcaires, que le sol
s'enfonce sur de petits espaces, et qu'il s'y forme des puits
ou entonnoirs naturels qui portent dans le pays le nom
A'aiguigeoù.
* Weugy, Géologie des Ardennes, Association française, 1880.
* Voir pour plus de détails X Explication de la carte de Binant de M. Dupont,
Druielles 1883.
r,4i ROLE DES CAVERNES.
Ces accidents sont dus a rexistence de longues cavernes,
dans lesquelles circulent des coui-s d'eau souterrains, tels
entre autres que la Lesse, qui s'engouffre dans la grotle de
Han et y suit un cours souterrain de plus de 1100 mètres.
I/exploilatiori du filon de plomb de Bleyberg-ès-Montzen,
près Moresnct, met en évidence de très fortes infiltrations
d'eau, exceptionnellement considérables, contre lesquelles
la lutte est très dispendieuse. La venue d'eau dans les mines
s'est élevée, d'après un rapport de 1878*, à 53 mètres cubes
par minute, et elle a atteint parfois le chiffre de 45 mètres
cubes, après de grandes pluies et des fontes de neiges.
La quantité annuelle d'eau épuisée d'une profondeur de
182 mètres représente 18 millions de mètres cubes. La dé-
pense d'épuisement obtenu avec une machine de 500 che-
vaux s'est élevée, en 1878, à 500000 francs*. En 1879
elles s'accrurent au point de ne pouvoir être combattues,
et noyèrent une partie de la mine. L'exploitation, qui était
arrivée à la profondeur de 180 mètres, dût être aban-
donnée, mais elle a pu être reprise.
Les calcaires et les dolomies sont traversés par la rivière
la Gueule, dont le cours moyen est parallèle à une frac-
ture, et par des aliïuents qui suivent les lignes de jonction
des terrains ou des dépressions provenant d'arrachements
latéraux à la déchirure principale. Les eaux de pluie, ainsi
que celles des rivières, passant sur des roches brisées et
des terrains perméables, se perdaient en partie ou en
totalité et augmentaient considérablement les quantités à
épuiser.
On a dû rendre imperméable le lit de tous ces cours d'eau.
La rivière la Gueule à été canalisée, sur une longueur de
* Industrie minérale belge, page 263.
* Devaiix. Annales des Mines de Belgique^ t. XXI.
LNFLUENCE SUR LE RÉGIME DES EAUX. 545
4000 mètres, avec une section transversale de 25 mètres
carrés. Des affluents ont été l'objet du même travail, sur
une longueur totale de plus de 12 000 mètres. On a rendu
imperméables les lits de ces cours d'eau, par des revêtements
en argile protégés par des perrés en pierres calcaires.
Le détournement provisoire de la rivière fit découvrir,
dans le calcaire de l'ancien lit, de véritables agolina$y
c'est-à-dire d'énormes crevasses autrefois remplies de
sables et d'argiles bigarrées, se dirigeant normalement au
cours de l'eau et dont quelques-unes présentaient des dimen-
sions assez fortes pour permettre aux hommes d'y pénétrer
jusqu'à une dizaine de mètres de profondeur.
HmhÊmm s Cantoa de NeachAteli environs de Kandersteif. — La
fréquence des cavernes dans les couches calcaires du massif
du Jura, sur une épaisseur de plus de 500 mètres, contribue
pour beaucoup au caractère vauclusien que présentent
beaucoup de sources de cette région : telles que celles de
l'Areuse, de l'Orbe, de la Loue, de la Serrières.
Gomme exemple, nous choisirons le canton de Neuchàtel,
qui a été l'objet de travaux approfondis de la part de M. le
docteur Jaccard, à l'obligeance duquel nous sommes rede-
vables de communications manuscrites.
Deux grandes sources, celle de l'Areuse (ou la Reuse) à
Saint-Sulpice (altitude 780 mètres) et celle de la Noiraigue
fournissent à elles seules la plus grande partie de l'eau qui
s'écoule par le Champ du Moulin et les Gorges vers le lac de
Neuchàtel (fig. 151). En outre, un grand nombre de sources,
dont beaucoup sont considérables, jaillissent dans la vallée.
L'Areuse coule sur la nappe phréatique du Val-de-Travers,
dont elle éprouve plus ou moins les fluctuations. Les quatre
cinquièmes du bassin, sont constitués par le calcaire juras-
sique, essentiellement caverneux, dans lequel l'eau pénètre
m
nOLE DKS CAVEliNES.
iNFLUEiNGE SUR LE RÉGIME DES EAUX. 547
avec une grande rapidité. Elle y circule et en ressort non
moins rapidement, puisqu'on a vu le débit de TAreuse qui
était à Tétiage, de 1 mètre cube par seconde, s'élever, dans
l'espace de trente-six heures, à 100 mètres cubes, à la suite
de pluies abondantes dans les vallées supérieures.
Toutefois, un certain nombre de sources échappent à ces
fluctuations et sont même remarquables pour l'invariabilité
de leur débit.
I/Areuse reçoit du bassin des Granges de Sainte-Croix un
contingent tout aussi capricieux dans son débit; car on l'a
vu s'élever, à son passage à Buttes, à 10 mètres cubes par
seconde, tandis qu'en certaines saisons, l'eau disparaît
dans les graviers et se mêle à la nappe phréatique du
Val-de-Travers, De même à Motiers et à Couvet s'ouvrent des
gorges profondes par lesquelles débouchent, de temps en
temps, des torrents furieux, dont le lit est à sec pendant
la plus grande partie de Tannée.
La vallée des Ponts*, situé à environ 1000 mètres d'altitu-
de, est un vrai type de haute vallée jurassique à fond tour-
beux, mais sans rivière qui s'en échappe. Bien différente
des vallées plus basses, du Val-de-Travers où serpente l'A-
reuse, du Val-de-Ruz où coule leSeyon, elle ressemble aux
vallées plus élevées de la Brévine et de la Chaux-de-Fonds.
Les eaux, ne pouvant s'échapper de ces dépressions sans
issues, se rassemblent sur les couches calcaires horizon-
tales qui forment le fond de la cuvette ; une couche d'ar-
gile, par son imperméabilité, détermine un vaste marais
qui envahit la vallée tout entière et la transforme en
tourbière : la tourbe atteint en général une épaisseur de
6 mètres.
Mais l'écoulement des eaux, impossible au fond de la
* P^sor. Leê Emposieux de la vç^llée de* Ponts, p. 58,
548
ROLE DKS CAVERNES.
vallée, est possible sur les bords. Là des couches calcaires
se sont brisées, de telle sorte que les eaux, en atteignant ce
niveau, trouvent des issues. Ces issues sont les emponeux
(fig. 152), vastes entonnoirs où les eaux pluviales se préci-
Fig. 15i. — Coupe hypollictique inontranl coniincut les empasieux de U Vaille des Pouls pa-
raissent donner naissance au ruisseau de la Noiraigue (ranton de Neuchâlel] ; Ka, calcaire
astartien; Kp, calcaire ptérocerien; Ky, calcaire Tiri^lien; l\ purbcckien; C, néocomien;
t, tourbières. D'après Desor.
pitent et où se perdent quelques petits cours d'eau alimentés
par les faibles sources des pentes voisines. Les emposieux
sont rarement isolés; ils forment des groupes, fréquemment
alignés suivant les failles qui traversent le pays. Leur gran-
deur est inégale : quelques-uns n'ont que 20 mètres de dia-
mètre; d'autres, non loin du village des Ponts, ont jusqu'à
INFLUENCE SDR LE RÉGIME DES EAUX. 349
100 mètres à leur ouverture supérieure. La forme est celle
d'un entonnoir ou d'un cône renversé des plus réguliers.
Au fond, on distingue, au milieu des hautes herbes et des
plantes aquatiques, dont l'ombre et l'humidité favorisent la
végétation, l'orifice par lequel l'eau peut s'écouler. Le groupe
de Combe-Varin, à l'extrémité orientale de la vallée des
Ponts, en fournit un exemple remarquable.
Voici les principales sources du bassin de l'Areuse re-
connues jusqu'à ce jour : Rive gauche : source de l'Areuse
(la Doux); Saint-Sulpice; la Sourde; Couvet; Grand-Fon-
taine; laNoiraigue; Brot; Rochefort. — Rive droite : sources
du Pont-de-l'Areuse; des Rayes; la Raisse de Fleurier; sour-
ces du Pré-Marceau ; de Motiers ; du Champ-du-Moulin ; de
Combe Garot ; de Frément.
Le Doubs, dont la source est près de Mouthe, à la cote de
937 mètres, est grossi à 200 mètres plus bas et se transforme
en un lac profond et tranquille : le lac de Chaillexon.
Pendant les basses eaux de 1870, M. Jaccard a vu le fond
de ce lac donner issue à une rivière distincte, allant mêler
ses eaux à celles du courant principal, à une trentaine de
mètres de la source.
Le fond de la vallée est plus plat. Les emposieux corres-
pondent par conséquent au point où les couches cessent
d'être horizontales pour s'incliner ; en d'autres termes, où
les roches calcaires du sous-sol se sont brisées. Les eaux ar-
rivent ainsi au travers des calcaires portlandiens, sur la pre-
mière couche imperméable qui vient affleurer dans la
combe de Noiraigue, au pied de l'escarpement des Blanches-
Roches, de 300 mètres de hauteur. « Il existe donc, dit
M. Desor, une liaison intime entre les marais et les grandes
et belles sources de notre Jura. Sans les marais de nos
hautes vallées, nos rivières seraient à sec en été et devien-
draient des torrents dévastateurs dans la saison des pluies.»
550 UOLE DES CAVEILNES.
L'eau qui s'engouffre dans les emposieux de la vallée des
Ponts va reparaître dans la vallée de l'Areuse, à une alli-
lude moindre de 274 mètres, pour former la source de la
Noiraigue, près du village auquel elle a donné son nom. Le
trajet qu'elle parcourt n'étant pas très long, elle n'a pas le
temps de s'épurer complètement; elle conserve encore en
partie sa nuance primitive en reparaissant au pied des
rochers de la Clusette t c'est pourquoi elle s'appelle noire
aiguë ou noire eau.
Déjà Saussure a appelé l'attention sur rOrbCi qui, au sortir
du petit lac de Joux, se perd dans des rochers calcaires^ au
pied d'un escarpement de même nature.
Non loin de KanderslegS le lac de Daube, à plus de
2000 mètres au-dessus de la mer, n'a pas d'écoulement
visible, quoiqu'il sait alimenté par le torrent du glacÎCTdu
Laemmeren.Maisà400 mètres plus bas et à environ 5 kilo-
mètres sur la Spitalmatt, entre Kandensteg et la Gemmi, il
existe plus de cinquante sources qui très probablement
résultent d'une infiltration du lac à travers les calcaires
très fendillés de la Gemmi.
lEMl^ — Dans la Baltique, le calcaire et les dolomiesen
couches horizontales qui constituent l'ile d'Œsel contien-
nent beaucoup de cavités, à travers lesquelles les ruisseaux
prennent un cours souterrain, qui pour l'un d'eux est de
4 kilomètres.
Ansicterfe. — Prcsquc toutcs Ics cavcmes de l'Angleterre,
à part quelques-unes du Devonshire et du Somersetshire,
sont dans le calcaire carbonifère, et donnent lieu souvent à
* Isclier. Feuille géoloaiquc^ n« XIII.
* Ëichwald. Société imj)ériale de Moscou, T. 27, p. 78.
LNFLUENCE SUtt LK RÉGIME DES EAUX. 5jI
des pertes et à des apparitions subites de ruisseaux et de
cours d'eau. Celles de Inglcborough et de Castleton, dans les
environs de Bristol, s'ouvrent dans des gorges étroites où
sont engloutis beaucoup de ruisseaux {swallow hole$). C'est
ainsi que dans le sud du pays de Galles, le ruisseau le
Lwchwr jaillit tout à coup.
Irlande ^ — Eu Irlande, le calcaire carbonifère aune épais-
seur de 800 à 1 000 mètres ; sa portion moyenne contient généra-
lement des lits d'argile schisteuse et n'est pas très aquifère ;
mais les portions supérieure et inférieure, qui consistent
en calcaire pur avec des lits accidentels de silex, sont for-
lemenf pénétrées par les eaux. Des cavernes et des canaux
souterrains, a travers lesquels elles circulent, se sont pro-
duits dans diverses parties du pays, particulièrement dans
les comtés de Clare, de Limerick, de Gallway, de Sligo, de
Fermanagh et de Donegal.
L'une des plus remarquables peut-être de ces rivières
souterraines est celle qui transporte les eaux de Lougli-
Mask à Lough-Corrib, dans le comté de Gallway. Lough-Mask
est un lac considérable, ayant 16 kilomètres de longueur du
nord au sud, qui reçoit de nombreux cours d'eau, tant du
district montagneux de l'ouest que du pays plat qui le borde
à Test. Toutes les eaux ainsi réunies passent par un canal
souterrain sinueux, d'environ 4 kilomètres de longueur, et
aboutissent à la tète de Lough-Corrib, où elles jaillissent en
une série de magnifiques sources, à la base des escarpements
de calcaire et au village de Cong.
Dans les comtés de Sligo et de Fermanagh, où le calcaire
carbonifère occupe des plateaux élevés, il y a beaucoup
d'exemples intéressants de rivières souterraines, dont quel-
< D'après une communication ro&nuscHte de H. Ed. llull.
353 ROLE DKS aVERNIilS.
ques-unes cependant ne donnent de Teau qu'après de fortes
pluies.
Comme exemple de ces rivières souterraines, celle qui
jaillit au Marble-Arch, près Florence-Court, est d'un intérêt
spécial (fig. 153). L'étage du calcaire supérieur forme une
terrasse, limitée par un escarpement à pic regardant l'est,
dont la base est constituée par les lits schisteux du groupe
moyen. Au-dessus de ce plateau s'élève une colline formée
de millstone^rit et des couches de Yoredale atteignant, à
Cuilcagh, une altitude de 650 mètres. Les cours d'eau qui
s 0. c-«cAO» ^^•
L9*J8i msnuM
Fi{(. 1o3. —Section parCuelcagh, comté de Férmana|i^li« montrant la disposition d'un courant
souterrain à travers le calcaire carbonifère supérieur, qui alimenlCf entre autres sources
considérables, celle qui jaillit en S, au pied de l'escarpement du Marble Arcb. C,, calcaire
carbonifère moyen; C,, calcaire carbonifère supérieur; G|, grès et argile de Yoredale; .i„
schist de YoreUale; G,, raillsloncsf;rilt; 0, orifice supérieur du conduit souterrain. <— D'après
la très obligeante communication de M. Edward UuU.
descendent les pentes de celte petite chaîne de collines cou-
lent jusqu'au plateau de calcaire, où ils disparaissent dans
des cavités étroites. Alors elles courent souterrainement,
jusqu'à ce qu'elles jaillissent à la base du calcaire supérieur,
comme on le voit, par exemple, au Marble Arch. Après une
pluie violente, quand tous ces canaux souterrains sont pleins
d'eau, la ligne de sources se précipitant le long de l'escar-
pement au-dessus de la rive méridionale du Lough-Ernc,
présente un spectacle remarquable.
D'après M. Kinahan \ les cavernes du calcaire carboni-
fère supérieur, outre les rivières souterraines qui les traver-
sent, sont en rapport, à la surface du sol, avec beaucoup de
* Geology of Ireland, p. 325.
INFLUENCE SUR LE RÉGIME DES EAUX. 353
petits lacs sans issue apparente, appelés blirMl lakes ou du
nom celtique turloughSf qui sont pleins d'eau en hiver et
secs en été.
Les tlugga$^ non moins caractéristiques, sont associés aux
turloughs et aux rivières souterraines, et ils résultent de
Teffondrement de portions de rochers, dans les cavités sous-
jacentes où coulent ces rivières. Ou peut ainsi quelquefois
en suivre le cours. Les sluggas sont dispersés irrégulièrement
sur une étendue considérable, de manière à faire supposer
que le sous-sol est traversé par de nombreux cours d'eau
souterrains. Quelques-uns sont des trous abrupts très pro-
fonds; d'autres sont de faibles dépressions, et quand l'eau,
durant les averses, coule dans ces dernières, elle déborde
dans les terres voisines formant des turloughs, qui devien-
nent des pâturages pendant Télé. Un slugga est ordinaire-
ment circulaire et a des parois verticales.
Dans la vaste région calcaire située entre l'embouchure
du Shannon et la baie de Killala, les rivières et les cours
d'eau sont plus ou moins souterrains, et les meilleurs
exemples se voient aux environs de Gort. La rivière Beagh
sort du Loch-Coster. Après avoir eu, sur 3 kilomètres, un
cours à découvert, elle s'engouffre dans le calcaire sous un
bourrelet de cailloux ; mais sa course peut être reconnue,
grâce à ses sluggas, qui ont reçu différents noms, entre au-
tres ceux de Devil's punch bowl, Black weir, etc., jusqu'à la
caverne de Polduagh, d'où il revient de nouveau à la surface.
C'est alors, sur environ 4 kilomètres et demi, une rivière à
ciel ouvert; puis il s'engouffre de nouveau au sud-est de
Killarten, reparaît au jour à l'ouest du village, pour se
perdre et apparaître plusieurs fois, jusqu'à ce qu'enfin il
trouve une voie dans le Coole-Lough, qui s'écoule à la mer
par un canal souterrain. Il serait facile de citer, dans la
même région, d'autres faits du même genre.
25
S54 AOLI:; DES aVEANtS.
BspacM^ — Dans la région de la Sierra de Gazorla (pro-
vence de Jaen) où prennent naissance le Guadalquivir el
la Segura, on observe au pied d'un escarpement de calcaire
caverneux, une très volumineuse source jaillissante. Elle
s'élèverait, d'après une mesure prise le 15 août 1881, à
10 mètres de hauteur verticale, et Ton assure qu'à la
suite d'hivers pluvieux, ses dimensions sont encore plus
considérables. L'origine de celte source parait se rattacher
aux puits absorbants qui, sur plusieurs kilomètres, s'éche-
lonnent le long de la route par laquelle on pénètre dans la
vallée de la Segura.
Le cours souterrain du Guadiana, dans la province de la
Manche, est classique.
Italie'. — Les Apennins, de même que la plupart des pays
calcaires, absorbent facilement les eaux et, par suite, don-
nent lieu à des sources très volumineuses qui sortent çà et
là au fond des vallées et forment l'origine de cours d'eau.
Dans l'intérieur de ces grands massifs, il s'établit des cou-
rants souterrains en sens divers, dont la direction corres-
pond souvent à celle des eaux coulant à la surface.
L'eau Marcia', conduite la première fois à Rome par le
préteur Quintus Marcius, en l'an 608 avant Jésus-Christ, est
encore de la première importance pour la Rome moderne.
Ses sources dites Serene se trouvent sur la gauche de
l'Aniene supérieur, à 20 kilomètres au-dessus de Tivoli et à
un niveau de 320 mètres au-dessus du niveau de la mer;
« D'après une communication manuscrite de H. de Hadrid d'Avila.
* D'après une communicalion manuscrite que je dois à Tobligeance de M. Giordano.
' Une société, un peu avant i870» avait entrepris de ramener ces eaux i Rome.
L'aqueduc en maçonnerie jusque auprès de Tivoli peut débiter 100,000 mètres cubes
par vingt-quatre heures. De Tivolij à 186 mètres au-dessus de la mer, on siphon de
26 kilomètres et demi apporte l'eau à Rome, sur la place de la station, à b cote de
60 mètres, mais avec une force ascensionnelle de 80 mètres. De là elle est distribuée,
sans pression, aux différentes parties de la villei
INFLUENCE SUR LE RÉGIME DES EAUX. 35o
jaillissant en abondance des flancs calcaires de la vallée,
elles peuvent être considérées comme le drainage d'une
partie de la chaîne de TÀpennin.
Les montagnes calcaires de la Sabine, généralement de
calcaire jurassique et crétacé, sont également remarquables
^^r leur perméabilité, et les grandes sources plus ou moins
constantes qu'elles produisent dans les vallées alimentent
les rivières du Velino et de la Neva, principaux affluents du
Tibre. Aussi ce fleuve, quoique peu considérable en lui-
même, jouit d'un caractère de fixité dans son débit, dont
le minimum en été n'est guère au-dessous de 170 mètres
cubes par seconde. Le Velino est formé lui-même par les
grandes sources sortant des flancs calcaires des montagnes
d'Antvodoco et autres de la Sabine et atteignant quelque-
fois un débit total de 50 mètres cubes par seconde. Cette
masse d'eau tombe tout à coup dans la Neva, un peu au-
dessus de Terni, et forme la cascade dite délie Marmore, à
cause des nombreuses incrustations qu'elle forme (fig. 154).
Cette cascade magnifique, de 160 mètres de hauteur totale,
se fait d'abord à pic, puis en un vaste éventail; elle repré-
sente une force motrice de 50,000 chevaux. De plus, la Neva,
très rapide sur plusieurs kilomètres, en pourrait donner
encore au moins autant.
Les montagnes de Tivoli, également calcaires, produisent
par leur drainage TAniene (Anis) ou Teverone, confluent du
Tibre à l'entrée même de Rome. Son débit est souvent de
40 à 50 mètres cubes, et au minimum de 15 mètres cubes
par seconde. En débouchant des montagnes de Tivoli vers la
plaine, cette rivière tombe du niveau de Tivoli même, qui
est à 200 mètres, jusqu'à celui de la plaine sous-jacente qui
est de 60 au plus, en formant les fameuses carcaterelles et les
cascatelles (fig. 155),
On peut' encore mentionner» aux environs de Rome, les
ROLE DES CAVERNES.
Fig. 154. — Chute du Vclino au-dessus de Terni, dite ducmde dellg Marmore, donnint ubc idée
du Toluine considérable des sources qui rtlimentenU
grandes sources qui sortent du pied occidental de la chaîne
INFLUENCE SUR LE RÉGIME DES EAUX. ^7
calcaire des monts Lepîni, sources débitant plusieurs mètres
eubes par seconde et qui, débouchant dans les marais Pontins,
358
ROLK DKS CAVERNES.
alimentent les grands canaux d'eau claire qui rendent celto
basse région si caractéristique par son régime hydraulique.
Le Sarno, à 40 kilomètres à l'est de Naples, mérite aussi
d*ètre cité, comme source rentrant dans la même catégorie.
Dans le massif du mont Alburno (province de Salerne),
qui est formé de calcaire compact crétacé, la conformation
du plateau explique Ténorme volume d'eau qui s'y engouffre.
Parmi les sources qui en jaillissent, la plus importante est
Fig. 153. — Grotte de Monsumano, Toscane. Conpe longitudinale. C, calcaire grisâtre Vapporté
au lias inférieur. — D'apr6s M. Giordano.
celle de la grotte de l'Aviso, à 1500 mètres d'Ollati; elle
fait mouvoir plusieurs moulins et se jette dans la rivière de
la Fasanelle.
A Monsumano, dans le val de Nievole, en Toscane, existe
une source d'eau chaude saline etcalcarifère, assez semblable
à celle des thermes de Montecatini, qui se trouvent à peu de
distance au S. 0. Un petit établissement construit près de
cette source est avoisiné par une grotte naturelle, qui sert
de tepidarium humide pour les malades, et a une tempéra-
ture d'environ 36 degrés. Découverte en 1849 seulement,
xîette grotte (fig. 156 et 157) est ouverte dans une crevasse
U^IFLUENCE SUR LE RËGUIE DES EAUX. 559
OU faille des couches calcaires liasiques. Son fond est infé^
rieur de 5 à 6 mèlres à la vallée et on y entre par un esca-
lier. Elle n'est praticable qu'en été, à cause des eaux qui
l'envahissenl l'hiver. La longueur de la partie accessible
est de 200 mètres environ, sur une largeur variable de quel-
ques mètres. Toutes les parois, ainsi que les aspérités du
Fig. 15". — Grotte de Monsumano, Toscane. Coupe transversale. Mêmes lettres que pour
la fl^re précédente. — D'après M. Giordano.
fond, sont tapissées de cristaux de calcite, ce qui lui donne
un aspect fort agréable.
Il y a lieu de mentionner encore la Polla de Cadimare,
source sous-marine au fond du golfe de la Spezia, tout près
des constructions du grand arsenal. Une forte colonne d'eau
douce y surgit au milieu de l'eau salée, d'une profondeur
d'environ 18 mètres, et vient former à la surface un cham-
pignon qui repousse les petits bateaux. Il y a encore d'autres
sources analogues, mais moins remarquables, qui sont
alignées dans la direction N. 0. à S. E. du promonloire
560
ROLE DES CAVERNES.
limitant le golfe (fig. 158 et 159). On avait fait jadis le
projet de l'utiliser pour les besoins de l'arsenal, en la cap-
tant et en l'amenant au-dessus du niveau de la mer, par
un gros tuyau implanté dans le fond.
L'origine de ces sources sous-marines se trouve à 4 kilo-
Fif . 158. — Situation de la source souterraine de Cadiroare (Polla) dans le golfe de la Speiia.
FF, faille sur laquelle sont ali^niées plusieurs sources et les inûltrations qui les alimeoteot,
notamment à San Benedetto. — D'après une communication manuscrite de M. Giordano.
mètres 1/2 environ, dans l'intérieur des terres, près de San Be-
nedetto. Des entonnoirs absorbent les eaux pluviales, qui se
trouvent sur l'alignement d'une grande faille ayant la même
direction N. 0. à S/E. du golfe, et faisanlbuter l'éocène contre
U^FLUENGE SDR LE RÉGIME DES EAUX. 361
les calcaires caverneux du trias et de Tinfralias. Les sources
sont sur le prolongement sous-marin de cette faille; et,
comme les entonnoirs absorbants sont à un niveau très élevé,
environ 200 mèlres au-dessus de la mer, on s'explique faci-
lement la vigueur du jaillissement.
La grotte de Doums-Novas près du chemin de Cagliari à
nu
? L
Echelle .
J S ! î L.
jo Wl.
Fig. 199. — Coupe suivant AB de la figure précédente, passant par Spragola, à proximité des
infiltrations d'eau qui alimentent la Polla et les autres sources sous-marines du golfe de la
Spesia. T, trias; R, infra has (rhétien); L, lias; E, éocène; FF, faille. —D'après une commu-
nication manuscrite de M. Giordano. *
Iglesias, dans le sud-ouest de la Sardaigne (fig. 160), est fort
remarquable par sa longueur, ainsi que par sa beauté, à
cause des stalagmites qui forment des séries de bassins éçhe-^
lonnés. Les sources sortant des calcaires sur les schistes silu-
riens, dans la vallée de Barrascuitta, avec un délit qui varie
de 80 à 400 litres par seconde, forment un fort ruisseau qui
traverse ladite grotte, à côté d'un chemin pratiqué par les
voitures, comme dans un tunnel, et qui sort au débouché de
la grotte.
MorsTie. — Le calcairc dévonien des environs d*Adamsthal
et de Blansko, en Moravie, non loin du massif de syénile, con-
302
POLE DES CAVERNES.
slitue un plateau qui a environ 40 kilomètres de long sur
4 à 6 kilomètres. Los eaux y descendent dans de nombreux
gouffres et se perdent dans des cavernes, pour suivre un
cours souterrain à travers ce calcaire. Ce cours souterrain
des eaux est accusé à la surface par une série de dépressions,
EchsUû
t J
ueurs
sui
t f i^
Fif. IflO. — Coupe moatraiU la stlualion de la source cl de la frrotle de Doum»-?loTas, dam
le S. 0. de In Sardaijcne. y. granité; Is, schistes siluriens; le, calcaire silurien. ~ D'apr«s une
comraunicalioo manuscrite de M. Giordano.
en forme d*entonnoirs, et dont le célèbre Mazocha, non loin
de Blansko, a 55 mètres de profondeur.
On peut citer* au-dessous d'Ostrow, a une altitude supé-
rieure à 400 mètres, un lac de plusieurs kilomètres de lon-
gueur qui, par son écoulement, alimente une rivière.
■lo et Croatie. — D*après M. V. Mojsisovics' ces carac-
tères se retrouvent dans la Bosnie occidentale et la Croatie
turque. Là aussi de vastes cavités en forme d'auge {poljé
dans la Turquie slave) déterminent dans les roches des cours
d'eau souterrains.
11 en est de même en Albanie et en Dalmatie.
Créée'. — Au point de vue qui nous occupe, la Grèce offre
des exemples classiques. Les calcaires y constituent des
* Uartin Krii. Geologiêche Reichêanstait 1883, p. 253.
* ïojsisoTics. Géologie du Katsi, 188U.
* Boblaye et Virlet. Géologie de la Morée, p. 3:;0.
INFLUKNCE SUR LE RÉGIME DES EAUX. 563
bassins fermés, dont les eaux, au lieu de s'écouler librement,
comme dans les vallées ordinaires, sont retenues par des
barrages naturels. Chacun de ces bassins fermés possède un
ou plusieurs gouffres, par lesquels se dégorgent les lacs et
se perdent les eaux des torrents; on les désigne aujourd'hui
dans toute la Grèce sous le nom de kalavolhra; les anciens
les nommaient zerelhra et chasma. Ils sont situés en général
au pied des montagnes qui forment Tenceinte des bassins,
et on reconnaît toujours, dans les rochers qui les surmon-
tent, des fentes ouvertes, des fractures, et souvent beaucoup
de désordre dans la stratification. Lorsque l'ouverture se
présente au milieu de la plaine, comme à Kavaros (Pyrrhicus)
dans la presqu'île du Tenare, et à Tripolitsa, on ne la recon-
naît en été qu'à un dépôt rougcatre tout crevassé. Mais lors-
qu'elle est située dans les rochers, au pied des montagnes,
elle est souvent assez spacieuse pour qu'on puisse y pénétrer :
tels sont les gouffres du lac Stymphale, du lac Copaïs dont
l'assèchement a été l'objet d'études*, et celui de Tsipiana
près Mantinée, dans l'intérieur duquel est construit un
moulin, pour profiter de la chute d'eau. On y reconnaît
des chambres à parois lisses, des couloirs étroits et des lacs
qui sont une ressource pour les bergers, sur ces plateaux
arides.
De ces pertes d'eau résultent de fortes sources nommées
kephaloiorysij caractérisées par leur intermittence; le fleuve
sous-marin de l'Anavolo, mentionné par Pausanias, sous le
nom de Dine, présente un intérêt spécial. A 500 ou 400 mètres
du rivage, on voit, dans un temps calme, quoique la mer ait
de 8 à 10 mètres de profondeur, les flots dessiner de grands
arcs concentriques autour d'une partie très bombée, et les
sables dti fond bouillonner sur une étendue considérable.
* Sauvage. Bull. Soc. géologique, 2* série. T. TI, p. 27.
564
ROLE DES CàVERNES.
Le rivage présente des indices d'un efTondrement de cayernes,
correspondant au cours souterrain du fleuve. La plaine
d*Ârgos est entourée de ces kephalovrjsi, dont les eaux pro-
duisent les marais pestilentiels que la fable a personnifiés
dans THydre de Lerne.
cHaié«. — La relation des sources avec les cavernes des
calcaires jurassique et crétacé, a été également signalée en
Crimée*.
iu«ért«*. — Â 2 kilomètres de TÂîn Djerob, aux environs
de Zerguin, se trouve une source thermale dite Âin-el-
Hammam. Elle n'a pas d'écoulement visible du dehors. Son
bouillon est situé a 17 mètres environ au-dessus de la surface
Echelle
4-
T\%, 161. — Sources de Ain el Hammann. C, calcaire tertiaire; Q, dépôt quaternaire.
D'après M. Ville.
du soIetTeau s'écoule souterrainement, à travers les fissures
de la roche crétacée. On y pénètre par une première exca-
vation à ciel ouvert, de 10 mètres de profondeur sur 10 mètres
de diamètre.
L'entonnoir (fig. 161) communique avec une première
* Dubois de Uontperreux.
' Ville. Exploration géologique du Dent Mzab et du Sahara^ p. 207.
INFLUENCE SUE LE RÉGIME DES EàUX. 365
grotte souterraine, en forme de couloir incliné de 10 mètres
de long, 5 mètres de hauteur yerticale et 3 mètres de large.
A la suite vient une deuxième grotte de 7 mètres de long,
2 mètres de haut et 1",50 de large* Au fond se trouve un
petit bassin de 0",30 de profondeur, l^.SO de long et 1 mètre
de large, rempli par Teau thermale* C'est là que se baignent
les femmes. Ce bassin communique par une ouverture,
qui a 1 mètre de haut sur 0",80 de large, avec une troisième
grotte souterraine dans laquelle se prolonge le réservoir
d'eau thermale et où se baignent les hommes. L'air de
la grotte intérieure a une température de 30* et l'eau
thermale de 42*.
La roche dans laquelle sont contenues ces grottes est
tantôt un calcaire gris, compact, se divisant en petits
fragments irrëguliers, reliés par une gangue argileuse grise;
tantôt c'est une dolomie de couleurs variées et très géodique.
sjrie 9 Nahr-ci-Kcb'. — Parmi Ics sourccs remarquables
sortant de calcaires à cavernes, on peut citer celle de Nahr-
el-Keb (rivière du chien), l'ancien Lycus, qui aboutit à la mer
près Beyrouth.
Un très fort volume d'eau sort d'une grotte pittoresque
(fig. 162) rappelant tout à fait, d'après M. le duc deLuynes, la
fontaine de Yaucluse, et dans laquelle on entend mugir des
eaux, d'où vient peut être son nom. La source s'élance avec
impétuosité et grand bruit au pied d'un rocher, d'une hauteur
de 10 à 15 mètres, où abondent des natices et autres fossiles
crétacés.
: C'est en ce point que M. Louis Lartet a découvert d'abord
des couteaux de silex.
Beaucoup d'autres sources très fortes sont signalées comme
* Duc de Luynes. Voyage à la mer Morte,
ù6G ' ROLE DES CAVERNES.
sortant de grottes; telles sont celles, au nombre de six,
Fig. 16i. — Nahr-el-Keb (rivière du chien), l'ancien Lycus. ^ D'après M. le duc de Luyo>>.
du Wady Mousa, celle du Nahr-el-Asi et celle du Wadv
Hasbany*.
ÉiatM-UnU i ttentncky et tBdlaBa^ — Les Cduî soutcrraines
des cavernes du Kentucky et de Tlndiana, ont leurs cascades,
comme les rivières ordinaires, et on peut y naviguer sur de
grandes distances. D'après M. Dana, on a reconnu plus de
100,000 kilomètres de chambres souterraines dans le calcaire
subcarbonifère du Kentucky (shales), plusieurs milliersdans
celui de Tlndiana, et d'autres, mais moins étendus, dans les
calcaires siluriens. Des rivières se perdent dans ces cavernes,
* Duc de Luynes. Ouvrapc préoilé, p. 155 el 720, et Planche LIX.
« Dana. Manuel ofGeology, p, 663-1880.
INFLUENCE SUR LE RÉGIME DES EAUX. 567
tandis que d'autres orifices débitent tout à coup de grands
cours d'eau, tel que le Lost-River, dans le comté d'Orange
(Indiana). De nombreux entonnoirs {sink^-holes) près Saint-
Louis, dans Télat de Missouri, doivent provenir d'effondre-
ments du toit des cavernes, de même que les dolines et
d'autres cavités, dont il a été précédemment question.
CHAPITRE VI
EAUX POUSSÉES PAR DES GAZ COMPRIMÉS
Au lieu (l*ètre amenées au jour par Taction de la graTiic,
comme dans les exemples qui nous ont occupés précédem-
ment, les eaux souterraines sont parfois poussées par la ten-
sion de gaz.
Ce rôle est ordinairement dévolu à l'acide carbonique, si
abondant dans les régions profondes; parfois aussi, dans les
terrains pétrolifères, c'est l'hydrogène protocarboné, pou-
vant être accompagné d'autres carbures d'hydrogène, qui
sert de moteur. Celui-ci est plus rarement l'azote.
§ 1. EAUX POUSSÉES PAR l' ACIDE CARBONIQUE.
. 4e HoMNiMd, Loin. — Uu forage exécuté à Mont-
rond, canton de Saint-Galmier, pour la recherche du ter-
rain houiller, a présenté des phénomènes intéressants,
au point de vue des eaux souterraines, et surtout des mou-
EâUX poissées par L^iClDE CARBONIQUE.
569
aZ5 61
vements que peuvent leur faire subir les gaz qui y sont
associés.
Après les sables tertiaires supérieurs du Forez, la sonde a
traversé, sur 40 ou 50 mètres, des marnes blanches ou
vertes de l'étage miocène inférieur; puis,
des argiles verdâtrcs alternant avec des
bancs arénacés, qui ont été assimilés au
terrain permien, mais que M. Gruner
considère comme analogues aux schistes
ardoisiers anciens des environs de Saint-
Galmier.
Ce sondage, d'après les nombreux do-
cuments que je dois à l'obligeance de
M. F. Laur, a rencontré trois nappes
principales : 1** à 25 mètres une eau
douce jaillissante; 2* à 180 mètres dans
des sables verts, une eau thermale mi-
néralisée avec un peu d'acide carboni-
que; 3** à 502 mètres une eau thermale
également minéralisée et très chargée
d'acide carbonique, dont la proportion
augmente avec la profondeur. Des tubages
ont été introduits successivement les uns
dans les autres, pour maintenir les parois
(fig. 165); leur diamètre, et leur profon-
deur sont indiqués par les chiffres sui-
vants : 1* de 0",410 prenant pied à 23 mè-
tres; 2Me 0"*,360, id. à 100 mètres ; 3" de
0",310 id. à 225 mètres; 4" de 0",260 id. à 419 mètres;
S** de 0",210 id. à 473 mètres. Ce dernier aboutit à une
dernière nappe, très chargée d'acide carbonique, qu'amène
au jour un tube central d'un diamètre de 0",125.
Cette abondance d'acide carbonique rappelle les eaux
t>4
*18"20
; 5oa ■ 00
Bchfille
100 Hikrta .
Fig. 165. — Coupe da sondage
de Montrond. — D'après
.M. P. Laur.
370 £AUI POUSSÉES PAR LES GAZ COMPRIMÉS.
bicarbonatées sodiques de Saint-Galmier et de Monlbrison,
qui sont en rapport avec des masses basai tiques^
1/ écoulement normal a toujours eu lieadaas V^MK
annulaire laissé par le tubage de plus grand diamëtre^^liil
plus bas niveau. Ainsi avant que la source de 2S 1B||||I
fût bétonnée, Teau coulait entre la colonne de OT^IIpiH
celle de 0",360. Dans la colonne centrale de O^iSJli^
niveau d'eau était toujours un peu plus bas que ^IHlJM
espaces annulaires. I/eau se rapprochait toujours de^.yglffe)
et sortait par le point le plus bas. * '^, •
Normalement les sources réunies de 180 et de hO2mèll0gi
et dans les conditions d'émergence qu on leur a ^t^jfk
débitaient 576 mètres cubes d'eau par vingt-quatre kM|îh
Le 25 septembre 1881, on était arrivé à la profondeuf Ûfi
475 mètres, quand il se produisit une premijère érup^M
qui fut suivie d'autres, dans les circonstances suivMl^
(fig.164).
L'espace annulaire de la colonne de O'^idôO donira dm
un débit inusité, qui projeta à 2 mètres de hauteur ;de^
gerbes d'une eau écumeuse. Cette éruption annulaire^ 1sftù^
avait passé par un maximum, diminua et cessa presque
totalement. L'eau s'abaissa; les espaces annulaires et la
colonne centrale de 0"',210 fortement agitée faisaient ea-i
tendre un grand bruit, occasionné par un très fort d^age->
ment gazeux. Peu d'instants après, le liquide s'éleva. dans
cette colonne centrale, avec une vitesse de 0",05 par seconde
environ, déborda assez tranquillement au-dessous de cq
tuyau central; puis, après iO ou 12 secondes» s'élança en
deux ou trois saccades ou pulsations, sous forme d'une gerbe
qui atteignait 35 mètres de hauteur. Le jaillissement restait
a cette hauteur pendant 5 minutes, puis commençait
à décroître : au bout de 20 minutes environ t éruption
centrale était terminée et il régnait un calme apparent; le
EAUX POUSSÉES PAR L'ACIDE CAHfiœilQlE.
571
Fig. 164. ^ Sondage de Monlrond. Fin du Jaillissement annulaire et début du Jaillls«enient
central. C colonne centrale ayant 0*,21 do diamètre ; j jaillissement annulaire à sa fin ;
j jaillissement central à son début La photographie a inscrit losUifTérentes saccades S. S. S. S
du jet et enfln le jet b, qui commence à devenir rectiligue. *^ D'après M. F. Laur.
572 EAUX IH)USSÉES PàR LES GAZ GOMPRMÉS.
débit (les sources, presque annulé, ne commençait à rede-
venir notable qu'au bout de cinq minutes.
Ce phénomène s*est reproduit plusieurs fois; puis il a
cessé, pour reprendre à la profondeur de 497 mètres, dans
une autre couche de sable quarlzeux, toujours avec la
même durée de 20 minutes pour Téruption centrale.
Ainsi, on voyait se succéder : l^une éruption annulaire;
â** après cessation de ce débit annulaire, une éruption cen-
trale pendant 20 minutes; 3* après un repos extérieur de
5 à 10 minutes, reprise du débit annulaire normal.
La photographie a été prise à la fin du jaillissement
annulaire et au début du jaillissement central.
La figure 165, prise en février 1883, représente le jaillis-
sement depuis le captage, qui a lieu non plus par le tube
de 0™,210, mais parle tube de 0'",125 allant jusqu'au fond.
11 n'y a donc plus de jaillissement annulaire, les autres
nappes ayant été obturées. La cheminée en bois par laquelle
il s'échappe en 0, avait un mètre carré. On voit par les ruis-
sellements d'eau c, e, quel volume était débité, et par la ver-
ticalité, quelle puissance avait le jet. De gros morceaux de
planche étaient lancées bien plus haut que l'eau, jusqu'à
50 ou 60 mètres de hauteur.
Lors des grandes éruptions, deux jets se succédaient à
10 minutes d'intervalle : le premier durait 15 minutes et le
second 20 minutes. C'étaient deux éruptions jumelles. Dans
ce cas, beaucoup de sable vert était rejeté sur le sol.
Le mécanisme des éruptions et des intermittences de
Montrond a pu être produit et dirigé expérimentalement
par divers procédés, dont les résultats ont été notés par
M. Laur; mais leur exposition nous entraînerait trop loin.
Les baisses barométriques paraissent avoir une influence
sur ces jaillissements*.
« Cotupte^ rendtu, t. XGYI, p. 1420, 1883.
EAlîX POUSSÉES PAR L^ACIDE CARBONIQUE. 375
L'acide carbonique en se séparant, lorsque la colonne
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approche de la surface, sous forme de bulles, du liquide
574 EAOX POUSSÉES PAR LES GAZ COMPRIMÉS.
dans lequel il était dissous, le rend plus léger : dès lors la
0 E
Fïg. 166. — Ck)upe transversale à travers les sprudels sales de Naulieim. G, grés à spirirer;
Sch. schiste à orthocères ; P. conglomérat traversé par l'eau sali^^re ; G, calaire i stringo-
cepbales.Tf terrain tertiaire déposé irré^^ulièremcnt sur les inégalités des couches dévonicn-
nes. Les traits forts expriment les eaux salées jaillissantes, soit les plans de contact des
schistes et des calcaires; soit en ramincalions dans les dépôts tertiaires superposés; soit
enfin suivant les forages. Le jailIi^'sement le plus élevé au-dessus du sol est la source Frie-
drichwilhelra. D'après M. Ludwig.
pression exercée sur la colonne inférieure devenant moin-
dre, celle-ci abandonne elle-même son acide carbonique.
EAUX POUSSÉES PAR L'ACIDE CARBONIQUE. 375
Quant aux intermittences et à la succession de l'éruption
centrale à l'éruption annulaire, elle peut se concevoir par
l'existence de vides intérieurs formant réservoir.
lVa«lieiai, ¥étéravie (ancien dncbé de ■cMe-Cnaeel^). — LcS
eaux gazeuses et salées de Nauheim jaillissent abondamment
de couches dévoniennes redressées à 72* sur l'horizon
(fig. 166), entre les schistes à orthocères et le calcaire à
stringocéphales qui lui est superposé. Des dépôts tertiaires
recouvrent, sur 20 mètres et davantage, ces couches an-
ciennes.
Divers vestiges annoncent que ces eaux salées ont été ex-
ploitées à une antiquité très reculée, bien avant les Romains
et les Germains. Plus tard, le désir d'avoir des eaux plus
salées a fait entreprendre des puits dont la profondeur
varie de 5 à 20 mètres, et qui tous ont donné beaucoup
d'acide carbonique.
A partir de 1816, on a exécuté une série de sondages, dont
plusieurs, les n"" 5, 7 et 8 ont donné des eaux jaillissantes,
de véritables sprudels. L'un, partant de la profondeur de
159 mètres, a jailli violemment dans la nuit du 21 au 22 dé-
cembre 1846 (fig. 167). Celui de la source Friedrich Wilhem
s'élève à 12 ou 14 mètres.
L'ascension de l'eau salée est déterminée par le dégage-
ment de l'acide carbonique que, sous la simple pression
atmosphérique, elle renferme à peu près à égal volume. Le
mécanisme de l'ascension si rapide de l'eau paraît être con-
forme à celui qui vient d'être mentionné pour Montrond et
rend compte également de l'influente de la pression baro-
métrique sur le dégagement.
Ajoutons qu'il s'exhale du Taunus et de la Véteravie une
* Ludwig. Section Friedherg^ geologish hearbeitet^ 1855.
576 EAUX POUSSËES PAR LES GAZ œMPRIMÉS.
quantité énorme d*acide carbonique, non seulement dans les
nombreuses eaux gazeuses qu'on y connaît, mais aussi à sec,
dans le voisinage des sources.
EAUX POUSSÉES PAR L'ACIDE CARBONIQUE. 377
NeaoMhr S PrwM rhéaMio. — Les riches exhalaisons (le gaz
de la vallée de TAhr, au pied de la montagne basaltique
dite Neuenahr, ont engagé, depuis 1855, à y faire des fo-
rages. On était, pour Tun d'eux, à la profondeur de 90 mè-
tres, lorsque, le 5 octobre 1860, à 9 heures du matin, il y eut
une violente éruption d'eau qui projeta hors du puits, du
sable, ainsi que des morceaux de grauwacke et de quartz
de la grosseur d'une noisette. Le phénomène dura une
heure, puis cessa subitement. Ail heures, il y eut une nou-
velle éruption semblable, et depuis lors, elles se sont re-
produites avec une durée de 1 heure et demie à 2 heures et
des intervalles de repos de 2 a 5 heures. On a adapté un ro-
binet au tubage, afin d'utiliser l'acide carbonique.
1, Bavière\ — Dcmêmeque daus bcaucoup d'autres
localités, la présence de sources salées naturelles a conduit
à faire des sondages à Kissingen pour la recherche du sel
gemme. Le trias, c'est-à-dire le grès bigarré, le muschelkalk
et le keuper, constituent cette partie de la Basse-Franconie,
et vers le nord de Kissingen surgissent les puissantes érup-
tions basaltiques du Rhôngebirge. Le sondage le plus profond,
après avoir atteint le zechstein {Platten dolomit) à 495 mètres
et le sel gemme à 507 mètres, a pénétré jusqu'à 584",22 dans
l'anhydrite. A 490 mètres, c'est-à-dire à 5 mètres au-dessus
de la plattendolomit, jaillit en abondance l'acide carbonique,
accompagnant l'eau salée. Ce puits dit Schônbornsprudel
fournit environ par minute 2000 à 6000 litres de gaz associé
à 300 ou 600 litres d'eau salée''.
, sfenc. — Bien que la plupart des volcans de boue
* Nœggerath. Jahrbuch fur Minéralogie, 1862.
« Saodberger, Jahrbuch fur Minéralogie, 1870, t. XXXVHI, p. 642.
3 D' BayerleÎD. Bad Kiuingen, 1884.
378 EAUX POUSSÉES PAR LES GAZ COMPRllTËS.
OU salses soient caractérisés, comme on le verra au para-
graphe suivant, par un dégagement d'hydrogène carboné,
il en est quelques-uns dans lesquels c'est l'acide carbonique
qui prédomine. Tel est le volcan de boue, situé au pied
de l'Etna, près de Paterno et nommée Salinelia. Le gaz qui
s'ea dégage en grande abondance a été reconnu par Ch.
Sainte-Claire Deville, à deux dates diflerentes, 26 juin et
23 juillet 1856, renfermer 93 à 96 pour 100 d'acide carbo-
nique, avec 1 à 4 pour 100 d'azote. La salse est entrée en
éruption le 22 janvier 1866, à la suite d'un tremblement de
terre qui se fit sentir dans les environs '. Des colonnes de boue
à 46 degrés centigrades, ayant 40 à 50 centimètres de dia-
mètre, jaillissaient les deux premiers jours jusqu'à hauteur
d'homme, accompagnées de beaucoup de gaz; l'éruption se
faisait principalement par six cratères circulaires de l'^ySO
à 2 mètres de diamètre ; mais il y en avait, sur divers
points du sol, qui apparaissaient, tandis que d'autres dispa-
raissaient. La figure 168 représente une éruption de boue
salée pétrolifère, poussée parle gaz, qui est survenue le 3 dé-
cembre 1878, d'après une obligeante communication de
M. le professeur Silvestri.
Selon ce savant, la salse de Paterno a présenté de nouveau ^
lors des éruptions de l'Etna, de. 1879 et de janvier 1883, des
caractères d'activité, d'où il a conclu qu'elle est en relation
avec l'éruption ignée du grand volcan son voisin*.
De l'autre côté du fleuve Simeto et tout à fait symétrique-
ment, près de Palagonia, se trouve le lac de Palici des anciens
ou lago di nafiia; il s'y produit des dégagements de gaz {hu-
licami) composés principalement d'acide carbonique, avec
i à 5 pour 100 d'azote ou d'oxj-gène et un peu de naphte.
* D'après le professeur 0. Silvestri, Comptes rendue de l'Académie deê êciencet^
t. LXIM866, p. 646.
* Sulta esplosione dell Etna^ 1884, p. 51.
EAUX POUSSÉES PAR L'ACIPE CARBOMQUE.
-.79
d'après l'examen qu'en a fait Ch. Sainte-Claire Deville, le
22 octobre 1855.
580 EAUX lH)rSSÉES PAR LES GAZ COMPRIMÉS,
Ces dégagements d'acide carbonique sont sans doute en
rapport avec les anciennes éruptions du val di Noto, ainsi
qu'avec la source acidulé dite Acqua rossa, situéeà 600 mètres
de la salinelle de Paterno.
g I . KAUX P0USS^:ES PRINCIPALEMEKT PAU DES ,m'1>nOGÈ^ES CARBONÉS;.
VOI^CAKS DE BOUE, SALSES.
Italie I Apeaaias et Mciie. — Reaucoup de jcts d'hydrogèucs
carbonés sont connus depuis un temps immémorial dans la
baute Italie, sous les noms de Urraim ardents, de fonlahm
ardentes, de volcam boueux, de saUes, de salinellesj suivant
les conditions particulières de leurs gisements.
Peu de contrées en Europe présentent une aussi grande
abondance de dégagements de ce gaz que la région des
Apennins qui traverse le Bolonais, le Parmesan et le Modenais,
et que MM. Fouqué et Gorceix ont étudiés sur beaucoup de
points*.
Aux environs de San-Yenanzio, non loin de Barigazzo, il
existe une salse composée d'un cône boueux de 25 mètres de
circonférence et de 3 à 4 mètres de hauteur, autour duquel
étaient groupés onze cônes plus petits, lors de la visite qu'en
ont faite ces savants. Tous laissaient échapper par leur
sommet de nombreuses bulles de gaz inflammable. L'argile
qui les formait était imprégnée de pétrole et le gaz brûlait.
La salse de Sassuolo, avait déjà attiré l'attention du temps
de Pline. En 1789, Spallanzani, qui la visita, la décrivit
ainsi :
« A un mille au sud de Sassuolo existe, sur un monticule,
une salse environnée d'un cordon de terre et de pierres. Elle
* Annales des sciences géologiques.
EAUX POUSSÉES PAR LES HYDROGÈNES CARBOiNÉS. 381
se présente sous la forme d'un cône terreux, haut de deux
pieds, terminé par un entonnoir d'un pied de diamètre,
d'où sortent par intervalles des bulles de quatre ou cinq
pouces de diamètre, qui, à peine formées, éclatent et dispa-
raissent. Ces bulles soulèvent une terre argileuse grisâtre
imprégnée d'eau et semi-fluide, qui déborde au-dessus de
l'entonnoir et descend le long des parois extérieures. A cette
époque, les éruptions de la salse paraissaient très faibles, en
comparaison de celles qui étaient survenues dans les temps
passés : ces dernières avaient fourni vers l'ouest des coulées
de boue, qui s'étaient étendues jusqu'à la plaine où passe
la grande route, et elles occupaient une aire d'environ trois
quarts de mille de tour. *
Spallanzani retourna à Sassuolo le 12 juillet 1790. Quel-
ques semaines auparavant, la salse venait d'avoir une nou-
velle éruption. En 1795, dans un troisième voyage, ce savant
trouva la salse principale peu active et réduite à un petit
cône.
Jusqu'en 1855, la salse de Sassuolo resta dans le repos;
au mois de juin de cette année, elle fut le siège d'une nou-
velle éruption, qui s'est manifestée avec une forte odeur de
pétrole. Le 4 juin, à 5 heures du matin, par un ciel pur et
serein et une température modérée, une forte odeur de
pétrole se répandit dans l'air. Quelques minutes après, une
secousse violente, accompagnée d'une détonation semblable
à un coup de canon, agita le sol. La secousse se fit sentir
surtout à l'est et à l'ouest, jusqu'à Saint-Michel, au delà du
torrent de la Lecchia. La détonation fut entendue à Sas-
suolo, où toutes les vitres des fenêtres tremblèrent. Les
eaux du canal furent agitées par un flot qui heurta violem-
ment les barques des bateliers. Une colonne d'épaisse fumée,
traversée par des lueurs jaune rouge, s'échappa de la
salse au milieu des détonations. Des pierres et de la boue
383 EADI POUSSCES PAR LES GAZ GOMFIUNÉS.
furent lancées a une grande distance, et une épaisse bouillie
d'argile s'échappa des ouvertures. Les pierres rejetées avec
l'argile étaient formées de calcaire marneux, de calcaire
cristallin, de macigno, de marne argileuse verte, de ser-
pentine, etc. Ces matières se recouvrirent bientôt de croûtes
de sel marin.
A 9 heures et demie, une nouvelle détonation, plus faible
que la première, se fit entendre, â 6 heures du soir, il s'en
produisit une encore plus faible. Elles furent suivies, pendant
douze jours, de détonations analogues à des coups de pis-
tolet. La salse continua pendant ce temps à bouillonner, et
en appliquant l'oreille contre le sol, on entendait un bruil
semblable à celui de l'eau qui coule. La terre, sur le bord
de l'ouverture de la salse, présentait à quelque profondeur
une température notablement élevée. Le gaz qui s'échappait
s'enflammait à l'approche d'une allumette; son odeur loin
d'être sulfurée était aromatique. Il ne se produisit pas de
cône et l'ouverture était cylindrique. La matière rejetée se
répandit sur un espace presque rectangulaire de 276 mèti*es
de long et de 106 de large. La masse en est évaluée à
10460000 mètres cubes.
Pendant l'éruption le sol se fendit, et dans les fentes, la
température était plus élevée qu'à l'air libre. A quelque dis-
tance au sud-ouest, deux sources se montrèrent, l'une d*eau
salée, l'autre laissant échapper de nombreuses bulles de gaz
inflammable. A cette période d'agitation a succédé une longue
période de repos.
Le gaz de la salse de Sassuolo est composé principalement
de gaz des marais, 98 pour 100, avec un peu d'azote (1,38)
et d*acide carbonique (0,56).
Le volcan boueux situé à 1 1 kilomètres au nord de Girgenti
a déjà été cité par Platon et décrit par Strabon» Le nom
arabe de Macaluba, qui lui a été appliqué, a souvent été
EAUX POUSSÉES PAR LES UYDROGÈNËS CARfiOf^ÉS. 385
étendu aux autres volcans d'air et de boue. Voici dans quels
termes en a parlé Dolomieu : < Dans une plaine d'argile qui
a 150 pas de long sur 50 de large, on trouve une trentaine
de cônes de boue, ayant entre 0",60 et 1 mètre. Chacun porte
vers son sommet un petit enfoncement de quelques centi-
mètres, qui est rempli avec de l'eau salée; constamment la
surface de ces petites flaques d'eau est agitée par le déga-
gement de bulles de gaz. Il en résulte sur les flancs du cône
de petits courants d'argile délayée par l'eau salée, qui res-
semblent pour la forme à de petits courants de lave. Ces
éruptions ont donc l'allure de celles de Paterno.
Tandis que, d'après Ch. Sainte-Claire Deville, les salses de
Macaluba fournissaient principalement, en octobre 1865, de
l'acide carbonique et de l'hydrogène carboné, c'était de
l'hydrogène carboné avec de l'azote et un peu d'acide carbo-
nique qui s'en exhalait les 17, 18 et 19 juillet 1866.
En outre, au centre de la Sicile, près de Caltanisetta, les
macalube de Terra Pilata fournissaient également, à la même
époque, de l'eau salée mélangée d'argile et d'hydrogène car-
boné pur ou mélangé d'un peu d'azote. Ils sont situés sur
un petit plateau d'argile crétacée, ayant 250 mètres de lar-
geur, et sont influencés par les tremblements de terre qui
agitent la Sicile. Ils sont à proximité des soufrières les plus
considérables de l'Europe et non loin de sources de pétrole.
Caaeaae t mer Noire et mer Ca^lenne. — Dcs VOlcaUS pluS
remarquables se trouvent aux deux extrémités du Caucase,
d'une part, sur la mer d'Âzof et la mer Noire, d'autre part
sur la mer Caspienne,
Dans la partie orientale de la Crimée, près de Kertsch, et
dans la presqu'île de Taman, le sol est formé de couches
tertiaires renfermant du bitume, et spécialement de calcaire
avec coquilles marines. Sur une bande de 100 kilomètres de
58 i
EAIX POISSÉES PAR L£S GAZ COMl'RLMÉS.
longueur, dirigé à peu près de l'est à Touest, s'élève une
série de cônes, dont quelques-uns alleignent 80 mètres de
hauteur.
Lors des éruptions qui sont accompagnées de bruits sou-
terrains et de tremblements de terre locaux, il se dégage
Y'm. IG9. — CarU* (If la |)rt>>qirile d'A|>stliéron. Do {grands points étoiles i-o|»rés<>iileul ({«"s xol-
(■ans de bouc; des |>oinU> moindres, les sourcet» de gaz hvdrogëne proto-carbone. — b'apiè»
M. Abich.
des jets d*eau salée et boueuse accompagnée de bitume*. Le
gaz consiste principalement en hydrogènes bicarboné et
protocarboné.
En 1855, lors de la visite de M. de Verneuil, après trois
* b*aprè8 M. de Verneuil. BuUelindc la Société géologique de France, i'* ^i£
t. VII, p. 515 et t. VIII, p. 188.
EAUX POUSSÉES PAR LES HYDROGÈNES CARBONÉS.
385
jours de bruits souterrains, il y eut
une éruption qui projeta Teau boueu-
se à 10 mètres de hauteur. Une érup-
tion, dontPallas fut témoin en 1794,
donna 20,000 mètres cubes de boue
bitumineuse. Des tremblements de
terre furent ressentis à plus de 250
kilomètres.
A l'extrémité orientale du Cau-
case , la presqu'île d'Apscheron
(fig. 169) présente des phénomènes
du même genre. Le sol (fig. 170) est
formé de couches tertiaires, surtout
de grès calcarifère, d'argile schis-
teuse et de marnes, en partie bigar-
rées et salifères. Elles sont recou-
vertes par le dépôt aralo-caspien ,
principalement formé de calcaire po-
reux, de sables et de marnes riches
en débris de mollusques.
Cette région, connue par sa richesse
en pétrole et par ses jets d'hydro-
gène carboné {feux éterneh), présente
des volcans de boue en divers points.
M. Abich en a fait une intéressante
étude, à propos d'une île nommée
Kumani, qui a apparu à proximité,
sur les côtes de la mer Caspienne,
en mai 1861'.
Éteta-vato. — Dcs puits forés, sou-
T s*
M
i.
D,«
h U
' Uénioiret de V Académie desicienceê de Saint'Pélersbourg.yW" série, t. Vf. n«5, U'05.
25
586 EAUX POUSSÉES PAR LES GAZ COMPROlfS.
vent jaillissants, existent en très grand nombre dans la ré-
gion pétrolifère de rAmérique du Nord. Les réservoirs où
ils aboutissent renferment à la fois du pétrole, du gaz hy-
drogène carboné et de l'eau salée. L'ascension du liquide est
provoquée, dans certains cas, non par la simple pression
hydrostatique, mais par la force élastique du gaz empri-
sonné, qui explique leur sortie impétueuse et spontanée par
l'orifice des puits récemment ouverts'.
Dans la région à huile de la Pennsylvanie occidentale, à
6 kilomètres de Kane, dans la vallée de Wilson, il existe un
jet d'eau et de gaz, nommé Kane Geyser (fig. 171). Un puils
d'une profondeur de 600 mètres projette une colonne d'eau
et de gaz à une hauteur de 50 à 50 mètres. Elle jaillit pério-
diquement, à des intervalles qui étaient d'environ 13 minutes
pendant l'été de 1879. Le gaz est souvent allumé la nuit, de
sorte qu'on y voit associés les éléments antagonistes, le feu
et l'eau.
Observation théorique.
La démarcation qui vient d'être établie entre les jets d'acide
carbonique et ceux d'hydrogène carboné n'est pas toujours
bien nette. D'une part, ces deux gaz se trouvent quelquefois
associés l'un à l'autre, comme à Paterno, d'après l'analyse
de M. Silvestri, et aux environs de Poretta, à Bovi et à Parle,
d'après M. Fouqué. D'autre part, l'un ou l'autre gaz peut pré-
dominer suivant l'époque, ainsi qu'on vient de le voir. Les
volcans de boue de Turbaco, près de Carthagène, présentent
un exemple de ces variations, puisqu'au lieu de l'azote que
' Daubrëe. Substances minérales, p. 90.
■ Dana, Geologyt 3- édition, p. 752, i880.
EAUX POUSSÉES PAR LES HYDROGÈNES CARBONES.
587
Humboldt y avait signalé, on n'y a trouvé plus tard que de
l'hydrogène carboné*.
Suivant les remarques de M. Fouqué, Jes cônes de déjec-
tions ne doivent pas être regardés comme un caractère
essentiel des dégagements gazeux, auxquels on donne le nom
Fig. 171. — Vue du Kane-Geyser. — D'après M. Dana.
de salses. Plusieurs conditions sont nécessaires pour qu'il y
ait formation de cônes. Il faut d'abord que le terrain où se
fait le dégagement de gaz soit argileux; car, s'il est pierreux,
< Ces cônes, au nombre de '20, ont élé visités, en 18ô5, par M. Vauvert de Néan.
Comptes rendue, XXXVIII, p. 765.
M8 KAUX P0DSS8ËE PAR LES GAZ COMPRIVÉS.
comme à Barigazzo ou à Pietra-Mala, le gaz sort des inter-
stices des roches, sans entraîner avec lui aucune matière
boueuse. Dans le cas où le terrain [est composé d'ai^ile
dans ses parties superticielles, il faut encore que cette ar-
gile contienne de Teau. Très souvent le dégagement ga-
zeux est accompagné de naphte et de pétrole et Teau est
salée.
Bien que la température des déjections soit en général
voisine de la température ordinaire et qu'elle ne s^élève que
momentanément, par exemple pendant l'éruption, ces volcans
sont en relation avec les cassures profondes du sol, ainsi que
le témoigne leur situation aux deux extrémités du Caucase.
Plusieurs auteurs, MM. Charles Sainte-Claire Deville, Abich,
Fouqué, ont même cherché à les rattacher aux volcans pro-
prements dits. Il est certain qu'ils présentent des périodes
d'activité et des éruptions^ ayant quelque analogie, sur une
petite échelle, avec celles des volcans, et que parfois il en
sort de l'eau chaude, comme lors de l'éruption de Paterno
du 22 février 1866.
Quoiqu'il en soit, le nom de volcans* (JVulcane), qui leur a
été donné à cause de leurs éruptions, ne parait pas devoir
leur être maintenu. Ce nom volcan, qui dérive du nom de
Vulcain, dieu du feu, ne peut s'appliquer qu'à un appareil,
dont les produits sont doués d'une haute température et
dont le siège est dans des régions chaudes et profondes.
Pour les éruptions boueuses qui se font à peu près à froid,
le nom de volcan doit être évité, comme ayant alors une
application opposée à son étymologie et pouvant donner lieu,
par conséquent, à une confusion regrettable. On aurait tout
avantage, à ce point de vue, à changer cette dénomination
* Et en allemand, Schlammwulkane ; II. GAinbel a employé le nom de SchUunm'
SprudeL
Ek\}l POUSSÉES PAR LES HYDROGÈNES CàRBONfiS. 389
SOUS le nom cosmopolite de pélozème^ ou bouillonnements
de boue ou pélocones (cônes de boue), noms qui rappelle-
raient simplement leur trait caractéristique et indépen-
damment de toute hypothèse.
* De Kcloff, boue et Çim, boaillonner.
CHAPITRE VII
EAUX POUSSÉES PAR LA FORCE EXPANSIVE
DE LEUR VAPEUR
§ 1 . — GEYSERS.
Il est des sources d'eau liquide, dans le régime desquelles
Teau en vapeur, par sa force élastique, joue un rôle inter-
mittent, mais caractéristique. Tels sont les Getpen, dont le
nom est emprunté à un mot islandais qui veut dire jaillir.
teiaad«. — Les plus beaux geysers de l'Islande sont situés
dans la vallée de Haukadalr, dans le sud*ouest de Tile. En
1881 on en comptait 130 en activité. Leur nombre varie;
tandis que les uns s'éteignent, il en naît de nouveaux.
Le bassin du grand Geyser a la forme d'une coupe d'en-
viron 16 mètres de diamètre. Le conduit central, ouvert
dans un dépôt siliceux, a 3 mètres de diamètre à son orifice
et l'on a pu le sonder jusqu'à 24 mètres de profondeur. La
température de l'eau dans ce puits dépasse beaucoup le point
d'ébullition. Ses éruptions sont toujours précédées de plu-
sieurs autres plus petites, qu'annonce un bruit de tonnerre
souterrain, accompagné d'ébranlements du sol. L'eau déborde
GEYSERS. 391
du bassin, de grosses bulles viennent crever à la surface,
d'abord très régulièrement toutes les deux heures, puis plus
fréquemment. Enfin une puissante colonne d'eau de 3 mètres
de diamètre, entourée de nuages de vapeur, s'élance verti-
calement jusqu'à 20 et quelquefois même 40 à 50 mètres de
hauteur. Au bout de dix minutes, tout est fini ; la colonne
d'eau, après avoir subi des oscillations, el être retombée, puis
repartie deux ou trois fois, finit par disparaître. M. des Cloi-
zeaux a estimé à 160 mètres cubes la quantité d'eau rejetée
par chaque éruption du geyser; mais, à cause des colonnes de
vapeur qui s'échappent en même temps, et qui se mêlent à
Teau, il est probable, d'après les plus récentes observations,
que cette quantité ne doit pas s'élever au delà d'une cen-
taine de mètres cubes. Vers le milieu du siècle, le Grand-
Geyser jaillissait tous les jours*; cent ans plus tard, les érup-
tions étaient plus fréquentes et plus régulières ; en 1770, il y
avait souvent trois à quatre éruptions dans l'espace de vingt
quatre heures et lesjets dépassaient 80 mètres. En 1804, il jail-
lissait de 6 heures en 6 heures. Déjà en 1866, il fallait quel-
quefois attendre 6 jours. Les dernières éruptions de l'Eskja
en 1873 et de l'Hécla, ainsi que de violents tremblements
de terre, ont exercé une influence sur le phénomène, et les
éruptions n'ont plus guère lieu que tous les 17 jours.
Le petit Geyser, nommé Blesi par les Islandais, situé à
50 mètres du précédent, a deux bassins, dont le plus grand a
12 mètres; il avait autrefois de fréquentes éruptions, mais
il a cessé de jaillir depuis un violent tremblement de terre,
en 1789.
En même temps que la commotion dérangeait le canal,
elle ouvrit, à 60 mètres de là, le nouveau geyser connu sous
le nom de Strokr. Le Strokr, ou nouveau geyser, est très irri-
* Gérard, Voyage en Islande.
59S EAUX POUSSÉES PAR LA VAPEUR.
table. A la différence du Grand-Geyser, qui ne jaillit que
momentanément, le Strokr fait explosion, selon le bon
plaisir des visiteurs. Il a o mètres de diamètre et 13 mètres
de profondeur; ses eaux bouillonnent à 4 mètres de pro-
fondeur avec véhémence ; elles donnent par intervalle d'a-
bondantes émissions de vapeur.
D'après un récit de 1885, 25 minutes après qu'on eut pré-
cipité une douzaines de mottes de gazon dans sa bouche, les
eaux montèrent tout à coup jusqu'au bord; puis une forte
colonne d'eau jaillit dans les airs, avec des sifflements in-
tenses, rejetant violemment la boue et le gazon; les jets se
succédèrent avec rapidité et la colonne ascendante se frayait
une cheminée à travers la colonne descendante; cette
fureur dura 10 minutes. Le phénomène se reproduisit régu-
lièrement d'heure en heure toute la journée et les jaillisse-
ments ne cessèrent que lorsque toutes les mottes de gazon
furent expulsées; les plus hauts jets s'élevaient jusqu'à 50
et 35 mètres.
La ligne sur laquelle se rangent ces sources jaillissantes
suit une direction générale sensiblement parallèle à la ligne
d'activité volcanique qui traverse l'île, du sud-ouest au nord-
est.
Il existe aussi des eaux chaudes toujours bouillantes,
nommées Hoerjar et d'autres tranquilles, nommées Laugar
(en islandais citerne).
Ètate-llBto s pare aatlomil de Yellowstoaei CaUfornle. — DanS
la partie occidentale des États-Unis, vers les confins des
territoires de Wyoming, de Montana et de IdahoS les geysers
sont extrêmement nombreux et associés à beaucoup de
sources chaudes.
^ Entre ie 110« et ie lll* degré de longitude et entre le 44" et le 45* degré de latitude.
GEYSERS. • 395
Le nombre des uns et des autres est de plus de 2000 ;
mais la région, qui n'a été pour ainsi dire aperçue qu'en
1854, est loin d'être complètement explorée.
En raison du haut intérêt que présentent les phénomènes,
une loi de 1872 a établi le Parc national de Yellowstone*,
qui comprend le plus grand nombre d'entre eux et qui a la
forme d'un rectangle de 88 kilomètres sur 104. Son alti-
tude est d'environ 2500 mètres et il est avoisiné par des mon-
tagnes, qui atteignent 3800 mètres. Le sol de la contrée
présente des couches carbonifères, jurassiques et tertiaires ;
les roches volcaniques, basaltes et trachytes, le couvrent
dans sa plus grande étendue.
M. A. C. Peale*, dans une monographie étendue qu'il en a
donnée en 1883, dit que ces diverses sources chaudes, dont
la température varie de 71 a 93 degrés', constituent 50 à 40
groupes distants de moins de 25 kilomètres les uns des
autres et dont 8 renferment des geysers. La carte ci-jointe
figure 172 donne leur situation sur le haut Madison.
Dans le bassin de la rivière Yellowstone se trouvent les
sources dites Mammooth ou White Mountains, du Garden Row.
A 5 kilomètres de l'embouchure se trouve un développe-
ment des plus remarquables du phénomène. Les sources de
la vallée Hayden, avec leurs volcans de boue; celles du lac
de Yellowstone, de Pélican Creek, appartiennent à ce même
groupe.
Au bassin de la ri vère Madison appartiennent les sources de
la rivière de Gibbon, au nombre de 290 à 300, et les bassins
supérieurs et inférieurs de la rivière Fire-Hole. Dans ce
dernier se trouve le Grotto Geyser, décrit en détail par
' H. llayJeii qui a dirigé la première exploration, (*n 1872, l'a Irès b'en fait con-
naître. UoUprings and geysers of Yellowstone^ ânkhicak Juuiu(àl. 1872, p. 105.
* Heport on the thermal spring of the Yellowstone National Park. 1883. Geological
Sdrtbt.
' Â cette altitude, la lempérature d'ébuUiUoa de l'eau est de 92*,22.
504
EAUX PODSSSES par Là YAmiR.
Fig. 172. — Carte du bassin des geysers sur le Haut-Madison, Montana. Les cercles blancs, i
centre noir, désignent les geysers ; les points noirs représentent les sources chaudes et les
sources boueuses, y compris celles qui sont désignées sous le nom de mud spring : les petits
cercles blancs désignent des points appelés cratères. T, dépôts modernes des sources. — D'après
Geological turvey.
GEYSERS. 395
M. Hayden, et plus loin, le Grand Geyser, le Old Faithful et
le 6ee flive.
Un troisième groupe, celui de la rivière Snake, comprend
le Shoshone et le Union Geyser.
Un grand nombre de geysers du Parc national atteignent
une hauteur de 30 mètres et quelquefois de 60 mètres, et
FExcelsior a jailli jusqu'à 100 mètres.
Dans la partie orientale du Parc, beaucoup de ces geysers
constituent un alignement nord-sud.
Lors de l'éruption, le jet est d'abord de l'eau, ensuite
beaucoup de vapeur avec de l'eau, et à la fin presque entière-
ment ou entièrement de la vapeur, l'eau ayant été entière-
ment projetée. Quand l'eau tombe en partie dans le bassin,
l'éruption est parfois renouvelée avant de s'arrêter tout à fait.
En Californie, des sources chaudes qui doivent être rap-
prochées des geysers, sont situées au nord de San Francisco,
dans un vallon latéral de la vallée Napa, appelé Pluton ou
Devils Canon (comté de Sonoma.) Ce canon, qui a environ
2 kil. 1/2 de longueur et 10 mètres de large, présente des
dépôts très étendus d'anciennes sources, parmi lesquels se
font jour de nombreux jets de vapeur et beaucoup de sources
chaudes. Plusieurs de ces dernières, telles que Witches-Cal-
dron, sont en complète ébuUition. D'autres sont intermit-
tentes, lançant l'eau jusqu'à des hauteurs de 5 à 6 mètres.
Le canal du Steamboat geyser, qui a 20 centimètres de dia-
mètre, émet sans cesse un jet de vapeur dont la hauteur
dépasse 30 mètres, avec un bruit comparable à celui d'une
chaudière à vapeur*.
La chaîne dite Coast Range, à laquelle appartiennent ces
sources, se compose, dans cette région, de couches crétacées
et tertiaires,. y compris le miocène, qui sont très fortement
A. C. Peale. Thermal springê of Yellowatone Park 1883 p. 321.
396 EAUX POUSSËES PAR LA VAPEUR.
ployées. De tous côtés se montrent des roches volcaniques,
dont le point culminant, au mont Saint-IIelena, atteint
1320 mètres*.
i«oBveiie-séiMM«9 proviace d*A«kuuui. — Parmi les faits re-
marquables que le très regretté de Hochstetter a rapportes
en 1858, de son expédition de la Novara, ceux qui concer-
nent la Nouvelle-Zélande ont une importance exceptionnelle".
Entre le volcan de Tongariro et Tile fumante Whakari,
dans la baie d'Abondance, sur une étendue de 220 kilomè-
tres, se trouvent une multitude de sources bouillantes, de
geysers et de solfatares. Elles sortent pour la plupart de
trachytes et d'autres roches volcaniques. Ces phénomènes
ont été particulièrement étudiés entre le lac Taupo et la
côte orientale. Comme les indigènes l'ont très bien remar-
qué, ces sources chaudes sont en relation avec des volcans
encore actifs, et, de même que les Islandais, ils les distin-
guent par trois noms : le mot Puia est particulièrement
employé pour les geysers intermittents et s'applique quel-
quefois aussi aux volcans actifs ou éteints {Hverjar en
Islande). Tels sont Tokanu, Oràkeikorako sur le Waikato et
Whakarewarewa sur le lac Rotorua (fig. 173). Les Ngawha
sont ordinairement des sources non intermittentes, telles
que les solfatares et les sources sulfureuses chaudes de
Rotomahana Rotorua et Rotoiti {Namur d'Islande). Enfin les
sources destinées au bain, dont la température n'atteint
pas celle de l'eau bouillante, sont appelées Watariki^ corres-
pondent aux Laugar d'Islande.
Aç«rc« 9 Ile SMi-m««ei. — Daus son étude approfondie des
*■ I« Conte. American journal 1876 t. XI, p. 287.
s New Zealand, 1807, ouvrage publié en allemand dès 1863.
GEYSERS.
397
sources thermales de l'île de San-Miguel, aux Açores,
M. Fouqué* a signalé au fond du cirque dit Val Furnas, trois
excavations naturelles qui ont reçu le nom deCaldeiraSy
à cause de leur ressemblance avec des chaudières remplies
d'eau en ébuUition. Le liquide y bouillonne avec force et
s'y élève en jets; Tune d'elles donne lieu à des projections
Fig. 173. — Le geyser de Waîkile sur le lac Roiorua, à la Nuuvellc-Zélandc. — D'après
M. de llochstetier.
d'eau intermittentes ou geysériennes, assez fréquentes pour
engendrer un petit courant d'eau chaude. Elle s'est ouverte
en 1840, après une forte explosion.
Thlbet^ — Des sources chaudes ont été découvertes en
1871, par le colonel Montgomerie, sur le plateau duThibet,
à une altitude de plus de 4700 mètres. Ces sources se trou-
vent en plusieurs points et en grand nombre, particulière-
ment à Naisum-Chuja. Beaucoup d'entre elles jaillissent à
» Comptes rendus, t. LXXVI, p. 1361.
* Journal of the Geological Society of London, t. XLV, p. 517.
398 EAUX POUSSÉES PAR LA VAPEUR.
des hauteurs de 12, 15 et 20 mètres, avec un fort bruit et
dégagement de torrents de vapeur qui obscurcissent l'at-
mosphère. Leur température est égale à celle du point d'ébul-
lltion qui, à cette altitude, est de 84 degrés. La vapeur parait
être la cause de les projections et lors même qu'elles ne
seraient pas intermittentes, elles doivent être comptées dans
la famille des geysers.
§ 2. SOFFIONIS.
En dehors du domaine des volcans proprement dits,
dont il va être question, il existe des jets de vapeur, doués
d'une température très élevée, qui s*élancent de certaines
fractures du sol.
ToMMie. — Les plus connus de ces jets sont ceux qui, en
Toscane, dans la province de Pise, aux environs de Yolterra,
apportent au jour l'acide borique. Us sont exploités dans
la partie élevée de la région septentrionale de la Haremme,
ainsi que dans le haut de la vallée de la Gecina, dans les
localités de Larderello ou Monte-Cerboli, Castel-Nuovo, Tra-
vale, Sasso, Monte-Rolondo, Serrazzano, Lago, Lustignano,
La figure 174 en représente une partie. Ces soffioniy ainsi
que d'autres trop pauvres, sont situés sur une zone d'en-
viron 60 kilomètres de longueur, du nord-nord-ouest au
sud-sud-est avec une largeur de 37 kilomètres. De nom-
breuses failles également dirigées N. 15* 0. à S. 15* E. tra-
versent cette région. La plupart des soflionis sont situés dans
le territoire de Pomarance entre le torrent Cecina, à l'est
et les sources de la Cornia, au sud.
Le terrain tertiaire environnant est constitué par les
schistes galestrini et les calcaires alberese de Téocéne, qui,
SOFFIONIS.
399
près de Pomarance, sont recouverts par des couches
miocènes et pliocènes. Il y a aussi, comme ailleurs en
Toscane, de grandes masses de serpentine, par exemple
tout près du Monte Gerboli.
L'exploitation de Monte-Cerboli ou Larderello, qui est
la plus importante et qui comprend l'établissement prin-
Scn^azavo
Echelle
%-
'sTrilom;
Fig. 174. — Carte des lagonis boracifères de la propriété do Larderol.
cipal, peut être prise comme exemple. Les jets de vapeur
(fumacchi ou volcani) de 10 à 15 mètres de hauteur, font
entendre un bruit strident, qui leur a valu leur nom de
soflBonis (fig. 175 et 176). Les roches de Téocène y sont ré-
duites en boue parles vapeurs chargées de gaz sulfhydrique,
qui transforment le calcaire en sulfate.
iOO
EAUX POUSSÉES PAR LA VAPEUR.
A ces jets naturels sont venus se joindre ceux qu'on a
obtenus au moyen de forages (fig. 177). A Larderello, ces
trous ne sont guère poussés à plus de 70 mètres, tandis qu'à
rétablissement Durval, à Monte-Rotondo, ils arrivent à
150 mètres. Lorsque la sonde atteint la nappe de vapeur,
une véritable éruption a lieu; Teau, la boue et les pierres
SOPFIONIS.
401
sont lancées avec violence, à une hauteur de plus de
20 mètres. Ces soffionis artificiels, comme ceux de la na-
ture, sont loin d'être également riches en acide borique.
En dehors du groupe dont il vient d'être question, les
soffionis de Travale sont situés sur la droite du fleuve de la
26
m
EADI POUSSfiES PAR LA VAPEUR.
Gecina, à 5 kilomètres du village Montieri, célèbre par ses
mines antiques de cuivre, de plomb et d'argent. D'après
M. Bechi, le terrain d'où ils sortent appartient à réocène»
associé au miocène; il est percé par la serpentine.
Les sondages exécutés à proximité des sofiionis naturels
SOFFIONIS.
403
atteignent la vapeur dès la profondeur de 8 mètres; cepen-
dant ils en ont rencontré de plus puissants à la profondeur
de 58 mètres. Le fer de la sonde tombant de plus d'un mètre,
le soffioni surgit avec beaucoup de bruit; d'où Ton peut con-
clure qu'il existe eu ce point des canaux ou réservoirs de
404 EAUX POUSSÉES PAR LA VAPEUR.
vapeur. Les ouvertures artificielles paraissent avoir diminué
le débit des sofTionis naturels du voisinage. La pression de
la vapeur, dont la température est de 98 à 100 degrés, a été
trouvée de 1.1/2 à 1.3/4 atmosphère. Un puits ayant été
foré dans la partie basse du périmètre de Travale, à 100 mè-
tres au-dessous des soffionis, la vapeur jaillit avec un bruit
formidable d'une profondeur de 59 mètres, entraînant
beaucoup d*eau liquide, dont la quantité fut évaluée à
environ 700 mètres cubes par vingt-quatre heures. Celte
eau ne contenait que peu d'acide borique.
Le lac de Monte Kotondo, dans lequel s'épanchaient des
soffîonis, a été rétréci, à partir de 1840, par M. Durval père,
à l'aide de fossés et, dans le terrain conquis depuis lors,
on a fait une série de sondages, dans le but d'obtenir des
vapeurs destinées à chauffer les appareils évapora toi res.
La figure 179 est en croquis géologique.
Les lagonis consistent dans une fosse remplie d'eau,
ordinairement de 4 à 20 mètres de diamètre, et profonde
de 1",50 à 2",50, habituellement très chaude (95* à 95*
centigrades). La vapeur y bouillonne (fig. 180), de façon à
donner à l'eau l'apparence d'une constante ébullition et
avec assez de force pour élever la surface liquide, comme
une colonne de 1 à 2 mètres et même davantage. Qui con-
naît les phénomènes des geysers s'attendrait, d'un instant à
l'autre, à une explosion projetant en Tair toute la masse
aqueuse, et laissant à sec le cratère; mais cela ne se produit
pas ici, et cet état se prolonge indéfiniment.
Les soffîonis et les lagonis, après un certain temps d'ac-
tion, ou s'affaiblissent peu à peu et finissent par disparaître,
ou cessent soudainement de se manifester. Il arrive alors
qu'un nouveau soffioni ou lagoni apparaît à une petite
i D'après une obligeante communication de M. Ch. Durval.
\
SOFFIONIS.
405
distance. Dans ce déplacement, il semble suivre une règle
constante ; du fond de la vallée et des bords stériles et brûlés
des torrents Possera et Pavone (fig, 174), les soffionis vont
remontant d'année en année vers le sommet de la colline ;
ceux de Monte Cerboli se portant à la direction de Castel-
Nuovo et réciproquement, ceux de Castel-Nuovo se dirigeant
en sens contraire ; de sorte que Ton dirait qu'ils tendent à
s'unir les uns aux autres pour conquérir le sommet delà
montagne, un foyer commun leur servant vraisemblable-
ment d'aliment*. Ce mouvement d'ailleurs s'effectue si len-
tement que, dans l'espace de cinquante ans, temps d'exis-
I
Fi^. 179. — Coupe du terrain des soffionis près du village de Monte-Rotondo, département de
Yoltcrra. — Tp, argile pliocène; Te, calcaire etschistes éocènes ; Cr, terrain crétacé ; L, lias;
0, serpentine. D'après M. Ch. Durval.
tence que compte l'industrie boracifère, on n'en peut
encore absolument rien conclure relativement à l'emplace-
ment futur des établissements.
L'apparition des soffionis et des lagon is est précédée de
phénomènes remarquables. Parfois des bruits souterrains se
font entendre; la terre s'échauffe progressivement jusqu'à
devenir brûlante, perd toute végétation et se colore diverse-
ment par l'arrivée d'efflorescences ; des crevasses s'ouvrent
en diverses directions, et alors, un choc accidentel, le
passage fortuit d'un homme ou d'un animal, suffisent à
faire jaillir la vapeur emprisonnée. Il peut être dangereux
de se promener sans précaution et sans guide dans les
406
EAUX POrSSÉtS PAR LA VAPEUR.
VOLCANS £T SOLFATARES. 407
environs, et le souvenir de tristes événements doit tenir
l'attention éveillée. D'ailleurs le craquement se produit
parfois spontanément, et dans ce cas, une partie plus ou
moins étendue du sol est lancée en l'air. Une fois l'entrée
ouverte, le jet de vapeur continue, ou seul ou accompagné
d'eau, qui alors s'accumule à Tcntour et forme un lac
(lagoni).
§ 3, — VOLCANS ET SOLFATARES.
Malgré l'idée qu'ils évoquent généralement de roches
fondues, dérivant essentiellement de la voie ignée, les vol-
cans représentent avant tout des sources d'eau.
Partout l'eau en vapeur est le produit principal de leur
activité.
Les canaux par lesquels cette eau parvient dans l'atmo-
sphère aboutissent en général à une montagne qui se distin-
gue par son isolement, au lieu de se rattacher à d'autres
pour constituer une chaîne avec elles. D'ordinaire, cette
montagne possède une forme conique plus ou moins régu-
lière dont le Cotopaxi, dans la Cordillère de la Colombie
(fig, 181), et le Mayon ou volcan d'Âlbay, dans l'île de Luçon
(fig. 182), peuvent donner une idée.
Un autre trait distinctif consiste dans l'excavation, en
forme de coupe ou cratère, qui les termine par en haut.
Les dimensions des cônes volcaniques sont très variables,
ainsi que le montrent les mesures suivantes :
* Repetti. Happort à V Académie des Georg., 1853.
408
EAUX POUSSEES PAR LA VAPEUR.
Vulcano (Lipari) 408 mètres.
Slromboli (id.) 925
Hekla (Islande) 1624
Etna (Sicile) 5313
Pic de Ténériffe 5716
Terror (glaces antarctiques) 5800
Hauna-Loa (Hawaî) 4155
Gunung-Dempor à Sumatra 4222
Grand Ararat 5157
Sangay (Quito) 5225
Popocatepelt (Mexique) 5410
; Klintschew-K^a (Kamtschatka) 5500
Cotopaii (Quito) 5940
Aconcagua (Chili) 6854
Gualatieri ou Sahama (Bolivie) 6990
Plusieurs de ces hauteurs sont sujettes à varier, à la suite
des éruptions, qui peuvent démolir ou exhausser le cône
terminal.
Fig. 181 — Cotopaxi, d'après HumboU*.
Les volcans actifs, dont le nombre dépasse 300, se ren-
contrent à des longitudes très diverses et sous les latitudes
* M. Th. Wolf en a récemment donné une vue intéressante (Jahrbuch fur Minéra-
logie, 1878).
VOLCANS ET SOLFATARES. 409
les plus différentes. Habituellement ils s'élèvent en îles
du fond de l'Océan ou à très peu de distance du litto-
ral.
Le plus souvent ils sont assez rapprochés les uns des
autres et constituent des séries linéaires. Une remarquable
rangée de volcans coupe les deux hémisphères. Commençant
à l'extrémité méridionale de l'Amérique, à la Terre-de-Feu,
elle longe toute la bordure occidentale du continent jus-
qu'au détroit de Behring; elle traverse l'océan Pacifique par
l'archipel des iles Aléoutiennes, puis se dirige vers le sud,
à travers le Kamtschatka, le Japon, le& Philippines et les
Moluques; là, elle se divise en deux branches, presque à
angle droit, l'une s'étendant dans les iles de la Sonde, Java
et Sumatra, jusqu'aux iles Andaman ; l'autre dans la terre
des Papous, les archipels de Salomon et des Nouvelles-Hébri-
des et jusqu'à la Nouvelle-Zélande.
Dans toutes les régions du globe, la vapeur d'eau con-
stitue le produit le plus abondant et le plus constant des
éruptions volcaniques. Elle est aussi le moteur de leurs
éruptions, grâce à l'énorme tension que les températures
souterraines lui ont fait acquérir*.
Dès le début de l'éruption, la vapeur d'eau sort par
torrents, entraînant des débris de toutes grosseurs, qu'elle a
arrachés dans son trajet souterrain. Sa sortie n'est pas con-
tinue, mais intermittente, et elle se fait par énormes bouf-
fées successives. Il en résulte bientôt une colonne nuageuse,
s'élevant verticalement et s'épanouissant dans les hautes
régions de l'atmosphère, sous forme d'un pin d'Italie, sui-
vant l'expression de Pline. Cette colonne est souvent noircie
fortement par les déjections solides, cendres et lapillis,
* C'est une assertion qu'a émise Poulett-Scrope, dés 1825, dans son ouvrage classi-
que sur les volcans.
410
EAUX POUSSEES PAR U VAPEUR.
dont elle est mélangée , surtout au commencement de
l'éruption.
La hauteur de celte colonne est souvent très considérable,
lorsqu'elle n'est pas emportée ou dissoute par les courants
aériens.
Lors de l'éruption de 1822, le panache du Vésuve formait,
Fig. 182. — Le Hayon ou volcan d'Albay, dans l'Ile de Lucon, d'après M. l'Ingénieur des mines
Henri Abella y Casariego. Son altidude est dei734 mètres*.
d'après Monticelli, un cylindre parfait d'environ trois mille
mètres de hauteur qui, à sa partie supérieure, se courbait
en parabole en se dirigeant du côté de Naples, suivant une
disposition imposante que l'on a souvent reproduite. M. Th.
Wolf estime à huit ou dix mille mètres la hauteur de la
colonne de vapeur du Cotopaxi, lors de la grande éruption
du 26 juin 1877. La figure 181 représente cette montagne à
son état habituel. La figure 182 montre le Mayon avec le
* Tramaclious of the seitmologicai Society of Japon ^ t. V, p. 23.
VOLCANS ET SOLFATARES.
411
panache de vapeur caractéristique. Plus récemment, le
5 juillet 1880, lors de son intrépide ascension du Chim-
borazo, M. Whymper aperçut un commencement d'éruption
du Cotopaxi. Une colonne de fumée noire comme de l'encre
s'élevait, avec une immense rapidité, jusqu'à plus de six
mille mètres au-dessus des lèvres du cratère. A cette hau-
Fig. 185. — Colopaxi, vu du Chimborazo le 3 juillet 18S0, lors d'un commencement d'éruption.
D'après M. Whymper.
teur elle était entraînée par un vent d'est, à angle droit de la
direction primitive (fig. 183).
Très souvent la lave vient se déverser au dehors, soit par
les flancs de la montagne, qui est ordinairement crevassée,
soit par son sommet. L'élévation à laquelle elle monte,
dans certains cas, sous l'impulsion de la vapeur, témoigne
de la forte tension de celle-ci. Par exemple, au sommet de
l'Etna, c'est-à-dire à 3000 mètres d'altitude, l'ascension de
la masse fondue correspond à une pression d'au moins
1000 atmosphères.
4iS E\UX POUSSÉES PAR LA VAPEUR.
Les exhalaisons ou fumerolles qui sortent de la lave,
jusqu'à solidification complète, c'est-à-dire pendant des
années entières, sont souvent riches en eau.
La prodigieuse abondance des menus matériaux qui sont
amenés par l'éruption est aussi une preuve dans le même
sens. Elle est telle que le ciel en est souvent tout à fait
obscurci. Lors de l'éruption du Krakatau ou Rakata, du
27 août 1885 (fig. 184), à 10 heures du matin, l'obscurité
était complète. D'après un des témoins : « le soleil, étant
au-dessus de notre tête, pas la plus petite lueur du ciel,
pas la plus petite trace lumineuse difTuse à l'horizon. Et
cette affreuse nuit a duré dix-huit heures. Le navire le
Loudon se trouvait condamné à rester sur place, devant le
péril qui l'attendait. »
Le 28 août, à 500 kilomètres à l'ouest du détroit de la
Sonde, le navire le Salazie reçut un orage violent, accompa-
gné d'éclairs et de coups de tonnerre effrayants : après
quelques minutes d'intervalle, l'eau fut remplacée par du
sable qui aveuglait les voyageurs et, bientôt après, par une
poussière blanche et impalpable, de telle sorte qu'au point
du jour, le navire semblait couvert de neige.
Après l'éruption, un énorme dépôt de ces matériaux inco-
hérents recouvrit le pays. Son épaisseur, sur 15 kilomètres
de rayon, était de 20 à 40 mètres et quelquefois de 80.
Deux lies, Stears-Eiland et Calmeyer-Eiland, formées par
ces déjections prirent naissance. En quelques heures, un
immense barrage flottant, formé par des pierres ponces,
fermait la baie ; sa longueur était d'environ 50 kilomètres
sur une largeur de plus de 1 kilomètre et une profondeur
de 4 à 5 mètres, soit 150 millions de mètres cubes de
projectiles.
M. Yeerbeck estime que le volume total de sable et de
cendre de ce formidable cataclysme s'éleva à 18 kilomètres
VOLCANS ET SOLFATARES.
415
cubes. Quelque énorme que soit ce volume, il est encore dé-
passé par celui que vomit le Timboro ou Tambora, en 1815,
volume qui était au moins de 150 kilomètres cubes.
Lors de l'éruption de TEtna, de 1865, d'après M. Fouqué,
l'un des six cratères actifs a détoné pendant cent jours,
à peu près toutes les quatre minutes, en donnant chaque
Fig. 184. — Vue du Krakataii, pendant l'éruption du il aoiU 1885. D'après le bureau
topographique de Batavia.
fois naissance à une épaisse colonne de vapeur d'eau, ayant
environ 4000 mètres carrés de section et 500 mètres de
hauteur et correspondant à un volume d'eau liquide de
10 mètres cubes. Les six cratères fournirent donc 22000.mè-
tres cubes d'eau par jour, soit environ 2 millions de mètres
cubes pendant la durée totale de l'éruption.
D'ailleurs les pluies torrentielles que provoquent souvent
414 ËALX FOUSSËES PAR LA VAPEIR.
les nuages engendrés par Téruplion, sont également une
preuve de la grande quantité d'eau qu'elle apporte.
Toutes caractéristiques qu'elles soient, les éruptions sont,
pour la plupart des volcans, un état exceptionnel, dont la
durée est incomparablement moindre que celle du repos.
On sait que lors de sa mémorable éruption de l'an 79,
le Vésuve était depuis bien des siècles à un repos si complet
que les habitants traitaient de légendes le souvenir des
anciennes éruptions. Depuis lors, il y en a eu un grand
nombre et de très récentes. Le volcan de File d'Ischia,
l'Epomeo, n'a pas donné d'éruption depuis 1502.
Comme exception à ces intermittences, on peut citer l'ac-
tivité permanente du Stromboli, qui, avec des intensités
variables, persiste depuis plus de deux mille ans, avec un
bain de lave en ébuUition permanente. Ce petit cône est
connu, depuis l'antiquité, des navigateurs qui considèrent
sa colonne comme un pronostic du temps, servant à la fois
de baromètre et d'hygromètre.
Lorsque les volcans ne sont pas dans le paroxysme de
l'éruption, ils ne sont pas complètement inactifs : le plus
souvent ils exhalent de la vapeur d'eau, reconnaissable au
panache qui les surmonte (fig. 181). Daprès M. Whymper,
rimpteant Cotopaxi, lorsqu'il tenta de l'escalader en fé-
vrier 1880, lançait constamment de l'eau, mais d'une ma-
nière très inégale; les 18 et 19 février, sans projeter de
pierres, la vapeur s'élevait en un jet d'une grande violence,
en bouillonnant du fond de l'abime.
Il est une sorte de demi-activité, dont la solfatare de
Pouzzoles peut servir de type, et qu'atteste une émanation
continue de vapeur d'eau, accompagnée d'hydrogène sulfuré
et de quelques autres substances. Le nom de cette petite
montagne est devenu générique et s'applique à d'autres
sources continues de vapeurs, jaillissant également de cra-
VOLCANS ET SOLFATARES. 4i5
tères ou dans leur voisinage, tels qu'on en voit à Yulcano, à
Milo, au Demavend, à la Guadeloupe, à la Réunion, à Java,
au Chili et ailleurs. Leur association aux montagnes volcani-
ques les distingue des sofGonis, dont il a été question plus
haut et qui sortent, non de cratères, mais de simples fissu-
res profondes.
A part les solfatares les plus répandues et qui ont ordi-
nairement leur siège dans des cratères, il en est d'une autre
catégorie, que M. Domeyko a très bien fait connaître au
Chili *. Ces dernières sont latérales^ c'est-à-dire placées sur
les flancs de grands cônes volcaniques.
Les faits remarquables qui se rapportent à l'origine des
solfatares de cette catégorie méritent d'être rapportés avec
quelques détails, à cause de la lumière nouvelle qu'ils jet-
tent sur les phénomènes qui nous occupent.
La solfatare de Gerro Azul, au Chili, dans le grand massif
trachytique des Descabczados, s'est ouverte tout récemment
dans une gorge profonde, entre deux montagnes volcaniques
et à la limite méridionale du massif des deux Descabczados.
Le 26 novembre 1847, à la suite de bruits extraordinaires
ressemblant à des détonations ou à des mugissements et qui
continuèrent le lendemain, la montagne de Cerro Azul, du
côté du nord, apparut en feu. Quinze jours après, deux gar-
diens de troupeaux trouvaient le passage qu'ils suivaient
d'habitude obstrué par d'énormes blocs, qui exhalaient des
fumées épaisses, au milieu desquelles on apercevait des
flammes. Le phénomène eut lieu à des altitudes comprises
entre 3000 et 1650 mètres, sur une longueur de 8 à 9 kilo-
mètres.
Dans toute son étendue, la solfatare se compose d'énor-
mes blocs trachytiques fracturés, à arêtes vives, soulevés et
^ Annaleê des Mines, V série, t. IX, p. 1G8, 1870.
416
KAUI POUSSËES PAR LA VAPEUR.
entassés les uns sur les autres, et formant des monceaux, qui
ont 80 à 100 mètres de hauteur au-dessus du sol. Du milieu
de ces monceaux on voyait sortir, sur toute la longueur de
la solfatare, d'innombrables fumerolles et, de temps eu
temps, des jets plus élevés de vapeur, accompagnés de
bruits et de projections de pierre. Mais on n'y a pas trouve
de matières fondues, ni de projections de lapilli, de ponce
ou de cendres volcaniques, que les volcans actifs du Chili
rejettent dans leurs éruptions. Tout annonce que la solfatare
Fig. 185. — Vue d'une des solfatures éteintes représentées sur U carte, fig. 187.
D'après M. Domeyko.
s'est ouverte d'un seul coup, sur une crevasse longitudinale,
formée dans la croûte trachytique du massif et produite par
le dégagement violent de la vapeur d'eau.
En 1877, il y avait quatre années qu'elle était complète-
ment éteinte; elle ne dégageait plus traces de fumées, ni de
vapeurs ; mais elle conservait à peu près la configuration et
la hauteur qu'elle possédait à l'époque de sa formation.
C'était, vu à une certaine distance, un solide de forme
assez régulière, que représentent les figures 185 et 186.
Si l'on jette maintenant un regard sur la carte (fig. 187)
VOLCANS KT SOLFATARES.
il7
on y voit indiquées, autour du grand massif triangulaire que
dominent deux énormes cônes volcaniques à cratères éteints,
outre celle dont il vient d'être question, quatre autres sol-
latares qui ont les mêmes caractères et sans doute la même
origine. Ces solfatares ne montrent plus que les traces d'au-
tant de soupiraux ou crevasses latérales {respiraderos ou
canaux de respiration), qui à diverses époques se sont ou-
vertes sur les flancs du massif, peut-être par suite de l'ob-
struction du volcan.
Il faut ajouter que des phénomènes, semblables à ceux qui
Fig. 186. — Coupe Iransversale d'une des solfalares éteintes représentées sur la carte fig. 187
et dont la vue est représentée par la figure précédente. — D'après M. Domcyko.
ont eu lieu à la naissance et pendant toute l'époque d'activité
de la solfatare de Cerro Azul \ se sont reproduits, bien qu'à
de grands intervalles de temps, sur d'autres points de la
chaîne méridionale des Andes. Ainsi il est connu qu'en 1845,
aux approches du volcan éteint de San José (lat. SSMC), d'une
altitude de 6098 mètres, on entendit, à plusieurs lieues de
distance, des bruits épouvantables qui venaient de cette
1. M. Donieyko n'a pas reculé devant les fatigues de trois voyages successifs pour
suivre les phases de cette soliataii;.
27
418
EAUX IH)USS£ES PAK LA YAPRIR.
cordilHèrc. 11 se forma une crevasse dans la direction du
volcan, vers la vallée de Jeso, où passe le chemin de Men-
doza ; d'énormes las de pierres et de rochers brises furent
rejelés et envahirent la vallée. Pendant longtemps ces dé-
combres exhalèrent des fumées et de la vapeur d'eau, sans
^^^mm^^"^
Echelle :
10 ts
-1—1 — 1__|
Fig. 187. — Carie représentant les cinq solfatares, qui se sont ouvertes dans le massif des deoi
Descabesados. Les solfatares aont représentées par des hachures. — D'après M. Domeyko.
qu'il y eut le moindre indice d'éruption et d'activité au cra-
tère du volcan.
Ces phénomènes indiquent l'origine et servent à expliquer
la formation des rangées de conglomérats trachytiques, qu'on
voit souvent former des crêtes allongées et saillantes, sur des
pentes, peu accidentées d'ailleurs, des montagnes volca-
niques.
La solfatare de Chillan, que Ton connaît aussi sous le
VOLCANS ET SOLFATARES. 41 U
nom de Cerro (ou Cerrito) de Azufre, peut être prise comme
type de solfatares latérales permanentes.
En face de la ville de Chillan, chef-lieu de la province
de Nubie (latitude 36^ 48'), et un peu à l'ouest de la ligne de
séparation des eaux, dans les Andes, s'élèvent, Tun à côté
de l'autre, deux cônes volcaniques nommés Volcan Nuevo
de Chillan et Nevado ou Volcan Viejo de Chillan. Une fi-
gure du massif sera donnée plus loin. Le sommet craléri-
forme du Nevado atteint la hauteur d'environ 3000 mètres
au-dessus du niveau de la mer. De ces deux volcans, le
Nevado parait être éteint depuis un temps immémorial,
tandis que son voisin, le Volcan Nuevo, a produit le 2 août
1861 des éruptions de laves, accompagnées de matières
incohérentes et de cendres, que le vent emportait a plus
de 50 kilomètres de distance. En général, ce groupe vol-
canique et les montagnes qui Tenvironnent se composent
de roches trachytiques, de même espèce que celles du massif
des deux Descabezados. A la base du cône du Volcan Viejo,
dit le courageux auteur de la carte géologique du Chili,
M. Aimé Pissis, Jaillissent de nombreuses bouffées de vapeur
connues sous le nom de Vulcancitos (petits volcans). Parmi
les bouffées intermittentes, qui rappellent sur une petite
échelle les geysers d'Islande, les plus notables se trouvent
près de l'établissement des bains et occupent le fond d'une
cavité coniqu(î qui paraît avoir été produite par une ex-
plosion. La vapeur qui s'en dégage presque continuelle-
ment s'arrête par moment : on entend alors un bruit sourd ;
puis survient une forte projection, qui élève à quelques
mètres de hauteur une colonne d'eau bouillante, avec des
sifllements. Bientôt arrive un nouveau temps de repos et le
même phénomène se répète par intervalle de quelques
minutes.
Une solfatare, tout a fait semblable a celle de Chillan,
420 EAUX 1H)USS£ES PAR LA VAPEUR.
existe à deux degrés de latitude plus au nord, près de la
base du volcan éteint Tinguiririca, dont le sommet s'élève
à 4478 mètres au-dessus de la mer; elle porte aussi le
nom de Cerro de Azufre. Ses vapeurs marquent OO* à Tori-
lice de sortie.
LIVRE II
TEMPÉRATURE DES EAUX SOUTERRAINES
CHAPITRE PREMIER
TEMPÉRATURE DES SOURCES ORDINAIRES
La température moyenne des sources est en général voisine
de la tempéralure moyenne du lieu \ ordinairement un peu
supérieure, quelquefois un peu moindre.
Dans beaucoup de cas cette température moyenne peut
être obtenue approximativement par un petit nombre de
mesures, les écarts étant en général peu considérables pour
des sources dont le réservoir n'est pas tout à fait superficiel.
Ainsi, en 1881, les sources hautes de la Vanne ont varié seule-
ment de 11" à 11%7'. Pour la Fontaine de Vaucluse, les plus
grandes variations entre les moyennes mensuelles ont été, en
1881, de 0%7 et en 1883, de 1". La température moyenne a
été, pour chacune de ces deux années, de 12%7 et inférieure
de 0%7 à la température moyenne de l'air en 1881.
En étudiant pendant plusieurs années la disposition des
eaux souterraines dans le bassin du Rhin', j'ai pris la tem-
* Cette température atteint 26 de^és à l'équateur et, par conséquent, excède beau-
coup celles des nombreuses sources thermales des pays tempérés.
* Ainsi qu'on pouvait le prévoir, à leur réservoir de Paris (Nontsouris), les écarts
ont été plus considérables.
s Annale* des Mineê, 4» série, t. XV. p. 459. 1848.
422 TRMPËRATURE DES SOURCES ORDINAIRES.
pératurc d*un grand nombre de sources qui sonl situées à
des altitudes différentes et dans des conditions géologiques
variées. Le but principal de ces observations était de chercher
u distinguer plusieurs des influences qui concourent à déter-
miner la température d'une source, telles que la profondeur
de son réservoir d'alimentation, la nature et la disposition
des roches avoisinantes, son élévation au-dessus de la mer.
Toutes ces températures, dont les valeurs les plus certaines
ont été consignées dans le tableau ci-après, ont été prises
avec un thermomètre centigrade fort exact, sur lequel on
pouvait apprécier les dixièmes de degré*.
* Ces mesures ont été; pour la plupart, prises en juin, juillet et aoât, dans les années
1846 et 1847.
TEMPÉRATURE DES SODRCES ORDINAIRES.
4S3
Températurei de sources situées à différentes altitudes dans la vallée
du Rhin et en Lorraine*.
DÉSIGNATION
DK LA flOUKGK*
Source du Rauscbendwasser.
prëa Niederbronn
Puite du faubourg de Lichleii-
thal à Bade (duché de Bade) .
Sources de Lichtentbal, pré^
Bade (duché de Bade)
Source de la forêt de Frobrei,
près de Niederbronn
Forte source dans la Tallée de
Dossenheim, pi*è8 du Xtllerhif .
Autre forte source, près de h
précédente
Source de Niederbronn à l'ex-
trémité orientale de la Ville.
Source de Yfimenau
Sources de Kintzbeini.
Sources des environs de Lem-
bach
Sources, de Bonnefontaine.
commune d'AltwiUer
Sources du bas de la ville de
Bouxwiller (Fischpfuhl). . .
Source de Weiterswiller. . . .
Sources d'Orschwiller
Source d'Avenheim
Source salée de Diemeringen
Source salée du même village
Source du hameau de GraufT-
tbaU prés d'Escbbourg. .
appro-
ximative.
luëlres.
180
180?
180?
185
100
105
105
200
200
210
215
220
224
225
250
230
230
240
TEXPÉRA-
TURK.
deiçrés C.
10,6
10,G
10,6
10,5
10,5
10,5
10,5
10,6
10,7
10,2
10,5
10,5
10,5
10,7
10,8
10,0
10,1
10,3
TERRAIN
d'où
sort la source.
Grés bigarré.
Grès rouge.
Idem.
Marnes irisées.
Grès des Vosges.
OBSERVATIONS.
Muschelkalk.
Grès des Vosges,
Jonction du
granité et du
muschelkak.
Muschelkalk.
Marnes irisées,
Calcaire ooli
Ihique inférieur
Grès des Vosges.
Granité.
Keuper.
MiuiMlilkiifériNr.
Idem.
Grès des Vosges.
Ces deux sour-
ces sont situées
au fond d'une
I vallée de hi chaî-
ne des Vosges
Cette source
sort aussi au
fond d'une val-
lée de la chaîne
des Vosges.
Ces sources
sont vulgaire-
ment qualifiées
d*eaux minera-
les.
A Gorxe, près
Uetx (Moselle),
la température
de deux fortes
sources situées
à une altitude
d'environ 230-
estde9-,«etl0*.
1. Od ne fait figurer dans ce tableau que les sources dont on a pu prendre la température au
point même où elles jaillissent.
2. Les localités dont la position n'est pas indiquée appartiennent à l'ancien département du
Bas-Rhin.
i-2i
TEMPÉRATURE DES SOURCES ORDINAIRES.
DÉSIGNATION
ALTITUDE
mrfaA-
TCMAIX
appro-
d'où
OKUTATIO!l«.
Dl LA lODRtB.
linalive.
TCie.
sort la souire.
moires.
degrés C.
Source du pied du Bastberg
(Bouiwiller)
260
iO S
fslmiPA H'pflii
Source de Wingen, près de
iw,*
douce.
Urnbach
SOO
10.2
Grès bigarré.
«70
10,3
IncMbi iBfmnr
Source de liurstcll
275
10,2
Muschdkalk.
l'ouest du Klingentha] ....
280
10,2
Grés des Vosges.
Source de Siewiller
280
10,1
Iliisi*hplkiilk
Source de lloegen
28J
Grès des Vosges.
Source de Maricnbronn, piùs
w,o
Cette source
Lobcann
300
10,4
Idem.
sort sur la faille
terminale du
grés des Vosges.
Source de Erlenhof, près Thaï .
200
9,0
Idem.
Source de Honcourt, préa Ville.
300
0,5
ScUsIiiitraBiliii.
Source de Neufbois
300
9.1
Grès rouge.
Source dite Teufelsbrunncn,
dans la forêt de Ville
320
0,7
Idem.
Source prés de Petersbacb.. .
330
9,4
Muschelkalk.
Source de Meissengotte
360
8.6
Timiiiitrtntiii.
Source de laModer, àModerCeld
375
8,(i
Grès des Vosges.
Soui*ce située au pied du Hoh-
kœnigsbourg (revers sep-
tentrional)
300
8,6
Terrain houiller
Calcaire
Source de la mi ne de Grandi on -
C'est une des
taine.prés Framont (Vosges)
475
8,0
de transition.
curées les plus
Source de la base du HohkcF-
''ortes du pays.
nigsbourg (autre que celle
désignée plus haut)
550
7,6
Grès des Vosges.
SourceduHuhwald.à la mon-
tée du Champ du Feu
600
7,5
Granité.
Autre source située non loin
620
7 2
Syénite.
Source abondante eorUnt dtr
'i*
la galerie de Terlingoulte
près Framont (Vosges) ....
630
ï,t
fiibdetniBtîiL
Source de la base du Climont.
700
7,1
UrèsdesVo.-gc>.
Autre source de la base du
Climont
750
0,4
Idem.
Source du Scliœflerlagcr au
Hohwald
780
1,î
Granité.
Source à 1 kilomètre au sud
de la maison forestière de
la Rothlach (Champ du Feu) .
820
6,1
Syénite.
Source de la Kitzmatt (Champ
du Feu)
850
8,5
6,6
Diorite.
Granité.
Sourcede la Magel (Ch. du Feu)
880
Source de la maison forestière
de U Rothlach (Ch. du Feu).
920
5,8
Idem.
TEMPÉRATURE DES SOURCES ORDINAIRES. 425
La plupart de ces sources qui arrivent au jour sans se mé-
langer à des eaux superficielles, subissent seulement dans
leur température, pendant le courant de l'année, de faibles
variations qui, en général, ne dépassent pas quelques dixiè-
mes de degré. Une seule observation peut donc déjà faire
connaître approximativement la température moyenne d'une
source placée dans ces conditions, surtout si son volume
est considérable.
Il n'en est pas ainsi de celles qui sortent des sables dilu-
viens ou tertiaires, dont les réservoirs sont peu profonds ;
plusieurs d'entre elles dérivent en effet d'infiltrations d'une
rivière ou d'un ruisseau peu éloigné. Tel est le cas pour une
ligne de sources qui sortent des terrains tertiaires supérieurs,
entre Bischwiller etSoufflenheim, et qui sont alimentées par
des infiltrations de la Moder; quoiqu'elles soient très abon-
dantes, la température de ces sources varie, selon les saisons,
de 8% 5 à 12%5, c'est-à-dire avec une amplitude de 4\
Voici quelques faits généraux qui ressortent des chiffres
consignés dans le tableau des observations :
IM^es sources situées, soit dans la plaine et les collines
basses de l'Alsace, soit dans les vallées des Vosges et de la
Forêt Noire, ne diffèrent en général, dans leur température
moyenne que de 0%8 au plus, lorsqu'elles sont à des altitudes
très rapprochées et à égale hauteur au-dessus du niveau de la
mer. Il est remarquable de trouver autant d'uniformité dans
la température d'eaux qui jaillissent de terrains les plus va-
riés dans leur nature, leur relief et leur exposition.
La température moyenne des sources situées dans la vallée
lu Rhin, entre 180 et 260 mètres de hauteur au-dessus de la
mer, et entre les latitudes de 48%20' et 49% est de 10%5, va-
leur qui correspond à une altitude moyenne de 212 mètres.
La grande nappe d'eau qui imbibe le gravier de la plaine
du Rhin possède à Strasbourg, d'après des observations
49G
TEMPÉRATURE DES SOURCES ORDINAIRES.
faites en 1846 et 1817, une température moyenne d'environ
10%2, qui est un peu inférieure à celle des sources propre-
ment dites.
2" On peut juger, par un simple coup d'œil, de la manière
suivant laquelle diminue la température des sources, à mesure
que Ton s'élève, en examinant la fig. 188. Dans la courbe
Mûre*
MO
MO
•M
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..
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Fig. 188. — Tableau firaphique de la températnre des soorces de la vallée du Rhin et de a
chatne des Vosges. La courbe repn^ente la ligne thermométrique des sources ordinaires;
les letlres a^b^c^ tf, e, f, correspondent aux températures de quelques sources qui sortent
de dislocations; a, Kûttobheim; fr, papeterie de Reichslioffen ; r, Châtenois; d, SoulU-les-
Bains ; «, Niederbronn ; f, Wasselonne.
les abscisses représentent les températures, et les ordonnées,
les altitudes au-dessus de la mer.
La ligne déterminée par Tensemble de ces points s'éloigne
notablement de la ligne droite, ce qui montre qu'ici le
décroissement dans la température des sources n'est pas tout
à fait uniforme à mesure que Ton s'élève. Dans la plaine, et
dans les collines de hauteur inférieure à 280 mètres, le
décroissement n'est à peu près que de 1* par 200 mètres ;
de 280 à 360 mètres d'altitude, la diminution est beaucoup
TEMPÉRATURE DES SOURCES ORDINAIRES, 427
plus rapide : elle est de 1"* par 120 mètres; à partir de
360 mètres, et jusqu'à 920 mètres, le décroissement redevient
le même que dans la plaine, c'est-à-dire P par 200 mètres.
C'est quand on quitte le sol à ondulations douces pour passer
aux pentes abruptes des montagnes que le décroissement
devient plus prononcé.
5* Dans la région de la vallée du Rhin sur laquelle s'éten-
dent les observations, et à toutes les hauteurs, il y a excès
de la température moyenne des sources sur celle de l'air. En
effet, si l'on rapproche les températures moyennes de Stras-
bourg, Carlsruhe, Bâleet FribourgS on trouve que la tempé-
rature moyenne de l'air dans cette partie delà vallée du Rhin,
et à l'altitude de 212 mètres, est très rapprochée de 9%9 ; à
cette hauteur, la température des sources, qui est de 10%5,
excéderait donc celle de l'air de 0%6.
Cet excès paraît croître avec la hauteur, de même qu'il
arrive avec Taugmentation de latitude; ainsi à Saint-Biaise,
dans la Forêt Noire, à 771 mètres de hauteur, la température
de l'air est de 5%20*; la température moyenne des sources
situées à la même altitude est de 6%8; elles surpassent par
conséquent de 1%6 la température de l'air. D'après de Hum-
boldt, un excès de température de même sens s'observe
dans les contrées centrales de l'Europe, où il tombe plus
d'eau en été qu'en hiver; l'inverse a au contraire lieu dans
les régions méridionales, qui reçoivent à peu près toute leur
* Voici de quelles données on peut partir :
Haotenr. Tempénture moyenne.
Strasbourg 144 9*>,8
Carlsruhe 118 10»,32
Bâle 260 0»,«2
Fribourg 280 9o,75
Moyenne 203 0o,89
Les valeurs relatives aux trois dernières localités sont empruntées à l'ouvrage de
Walchner : Handbuch der Ceognosie, 2* édition, p. 188.
* Walchner. Même ouvrage,
iSA TEMPÉRATURE DES SOURCES ORDINAIRES.
pluie pendant la saison d'hiver, ainsi que Humboldl l*a ob-
servé le premier '. I^opold de Buch pensait également que
ces différences sont en rapport avec les quantités relatives
de pluie qui tombent dans chaque saison \ Cette inégale
répartition de la pluie suivant les saisons, quoique ayant une
influence évidente, ne parait pas contribuer seule à élever
la température moyenne des sources au-dessus de celle de
Tair, dans les régions froides où la température de Taîr est
pendant plusieurs mois au-dessous de zéro. En effet, Feau
qui tombe pendant l'hiver à l'état de neige, et souvent à
quelques degrés au-dessous de zéro, ne s'introduit pas dans
le sol avec sa température primitive ; elle ne s'écoule vers
les réservoirs des sources qu'après s'être préalablement
échauffée, au moins jusqu'à zéro, aux dépens de l'atmo-
sphère, qu'elle refroidit en outre, en lui empruntant aussi
la quantité de chaleur nécessaire pour se fondre. De là une
seconde cause, qui s'ajoute à la première dans les latitudes
moyennes et élevées, pour élever la température des sources
comparativement à la température moyenne de l'air.
A mesure que l'on s'élève dans les régions montagneuses,
où il tombe annuellement une forte proportion de neige, la
température des sources parait donc diminuer moins rapi-
dement que celle de l'air.
On verra que la température des fontaines artésiennes est
supérieure à la température de la surface, et que l'augmen-
tation de température est en général en raison d'un degré
centigrade pour 20 ou 50 mètres de profondeur. En laissant
de côté les sources qui sortent de failles ou du terrain basal-
tique, il est remarquable de ne pas rencontrer dans les ter-
rains stratifiés de sources dont la température dépasse la
« Annales de Gilbert, t. XXIV, p. 46.
* Léopold de Buch. Description physique des îles Canaries. Traduction française
p. 81 et suivantes.
TEMPÉRATURE DES SOURCES ORDINAIRES. 429
température moyenne de l'air de plus de 1%6; pourla plupart,
la différence est même au-dessous de 1*". Cela parait résulter
de ce que les réservoirs des sources sont généralement peu
profonds.
¥ Au milieu de l'uniformité générale de la température
des sources, le massif du Kaiserstuhl, dans le duché de Bade,
présente une anomalie remarquable.
Ce petit groupe montagneux qui surgit de la plaine du Rhin
entre les Vosges et la Forêt Noire, jusqu'à une hauteur de
558 mètres au-dessus de la mer, ou de 380 mètres au-dessus
de la plaine, a, suivant la plus grande dimension, un dia-
mètre de 15 kilomètres. Il est très riche en sources : c'est,
avec les sables tertiaires supérieurs du Sundgau, la région de
la plaine du Rhin la plus riche en sources que je connaisse.
Ce fait rappelle celui observé par M. le comte de Mandelslohe
en Wurtemberg, où les nombreux pointements basaltiques
se distinguent par de belles sources.
Considéré dans son ensemble, le Kaiserstuhl se compose
d'une roche riche en pyroxène, que l'on désigne ordinaire-
ment sous le nom de dolérite et qui appartient à la famille
du basalte. Celte roche très fissurée en tous sens est en outre
perméable par elle-même sur différents points, par suite de
ses boursouflures ; elle permet donc aux eaux météoriques de
s'y infiltrer avec facilité. Aussi des sources, dont beaucoup
sont fort abondantes, jaillissent du fond des vallons et de
leurs principales ramifications ; elles sont particulièrement
nombreuses vers la limite du basalte et du loess, qui forme
vers le bas une sorte de batardeau; elles sortent, soit de l'un,
soit de l'autre terrain, entre 200 et 280 mètres d'altitude ; je
n'en ai point observé qui soit à un niveau de plus de
100 mètres au-dessus de la plaine. Leur volume varie en
général peu sensiblement de l'hiver a l'été, et, par suite,
leur température doitaussi avec les saisons faiblement varier.
450
TEMPÉRATURE DES SOURCES ORDINAIRES.
TompdratiiroB de quelques sources du massif basaltique du Kaisentuhl,
duché de Bade.
DÉSICNATION
DB LA tOl'RCB.
Source du Rleinthal, à 1 kil.
N.-O. dHhringen
Source dans la même vallée.
Trois MMirces du vallon situ^
au M. d'IhriDgen
Source du vallon situé au N.
d'lbringen(canton dit Ziegell
Une forte source située au N.
d'Ihringen
Source au canton dit Himmel-
burg« près d'une habita-
tion isolée
Source dite Sauerwasser, à
200 mètres à l'ouest de la
pi'écédente
Source à Zwarenbach, à 3 kil.
d'ibringcn ...
Source du Brunnthal..
Source du Muhltbal
Source de AVascnweiler . .
Source du bain, à Oberschaff-
hausen
Autre source prés du mémo
village
Trois sources au fond d'un val-
lon, près d'Oberschaffhau-
sen
Source du village de Vogstburg
Source du vallon de Vogstburg.
près du Badloch
TciipiaA-
TOftK.
degrés C.
13,2
12,5
14.5
11,6
13,1
13,1
12,3
12,7
11,6
12,0
13,1
12,7
12,7
10,8
10,4
18»!
TKftEAia
d'où
sort la source.
Look.
Basalte.
Id.
OHBRTJinO!l«.
Toutes tes sources
du Kaiserstuhl ont
une altitude com-
prise entre 200 et
i80 mètres.
Les sources sans
indication sortent
vers la limite du
basalte et du loess.
Basalte.
Limite
du basalte
et du calcaire
cristallin.
TEMPÉRATURE DES SOURCES ORDINAIRES. 451
Si l'on examine le tableau de la température de vingt de ces
principales sources que j'ai observées à leur orifice, on voit
que leurs températures sont comprises, entre 10%4 et 14% 5,
c'est-à-dire qu'elles varient d'un point ù l'autre, entre des
limites beaucoup plus distantes que ne le font ordinairement
les autres sources de la contrée; une d'entre elles s'élève
même jusqu'à 18%1 . En faisant la moyenne des sources pota-
lables, abstraction faite de cette dernière, qui est franche-
ment thermale, on trouve une valeur de 12%4. Or la tempé-
rature de Fribourg en Brisgau, qui est situé à 14 kilomètres
de distance du Kaiserstuhl, et à une hauteur de 280 mètres,
est de 9% 7. Il y a donc une différence d'à peu près 2% 6
en faveur de la température moyenne des sources du Kai-
serstuhl.
Le climat du Kaiserstuhl passe pour plus doux que celui
de la plaine voisine; cela est particulièrement sensible pour
les hivers, qui y sont beaucoup moins rudes qu'à Fribourg,
Karlsruhe et Mannheim. Mais la cause de la haute tempé-
rature des sources de cette contrée ne parait pas résulter
seulement des circonstances météorologiques ou de toute
autre influence extérieure, telle que la couleur sombre du
sol, sans quoi on ne verrait pas cette température varier
d'une source à l'autre, irrégulièrement.
En général et comme on vient de le voir pour la vallée du
Rhin, la température des sources décroît à mesure qu'on
s'élève.
M. Boisse, qui, dans l'Âveyron, a pris de nombreuses me-
sures entre 250 et 1200 mètres d'altitude, a trouvé un dé-
croissement de l'^par 155 mètres*.
Dans les Alpes, les importantes études d'Adolphe et Her-
mann Schlaginweit sur les lignes isothermes, ont montré
« Dclesse. Revue de Géologie, T. Y1II« p. 'ia7. 1868.
AÔ2 TEMPÉRATIRE bïS SOURCES ORDLN.URËS.
qu^à cel égard il y a d'assez grandes variations dues, entre
autres circonstances* à celle du relief du sol : à altitude égale,
les sources des vallées paraissent plus chaudes que celles
des montagnes.
Pour les Alpes bavaroises, M. Gûmbel a donné le taux de
!• par 272 mètres*.
Ce savant géologue a trouvé, pour le Fichtelgebirge, l"" par
222 mètres.
Aux lies Féroê, Durocher * avait observé, en 1845, une dé-
croissance de 1* par 144 ou 152 mètres.
Parmi les anomalies de température des sources ordi-
nair.es, on peut mentionner, diaprés M. Desor, celle que pré-
sente la source du Creux-du-Yent ou Fontaine-Froide, dont
la figure 50, page 95, représente le gisement et dont la tem-
pérature a été trouvée, à diverses époques, de 5" à 4*. Le
Creux-du-Yent est une cavité ouverte au sommet de la grande
voûte jurassique, dont fait partie la montagne de Boudry
(Solliat). Sa forme est celle d'un hémicycle, à parois verti-
cales, d'une hauteur de près de 200 mètres, dont la con-
vexité est tournée au midi. Par suite de son orientation et
de la hauteur de son parapet, le Creux-du-Yent est tout à
fait abrité contre les rayons du soleil. La neige n'y fond que
très tard. L'eau de fusion ne peut pas se réchauffer dans les
talus superficiels, avant d'arriver à la source. Celle-ci
étant intarissable, il existe probablement dans la hauteur
du talus, au-dessus de la marne oxfordiennc, un affluent
d'eau.
Comme exemple des variations citées plus haut, dans la
température des eaux peu profondes, nous citerons celle de
la vallée de Mangfall, dont le gisement a été décrit page 55.
« Dayern, T. I, p. 950.
« Annales dat Mines, 4« série, T. M, p. 445. 184ô.
TEMPÉRATURE DES SOURCES ORDINAIRES.
433
La figure 189 en indique les variations annuelles, dont on a
rapproché les changements de volume *.
StP.(»tg) OCT. NOV. DÉD.(W7E}J/LWV^H7<P fÊV. KARS, AVUIL. MAI. JUIN. JUIIL
8£PT. OCT. NOV. DeO(IS:EjJANV(ra7^ FCV. MAR8 AVRIL MM JUIN JUIL
Fig. 189. — Diagramme représentant les quantités (en mètres cubes) et les températures (en
degrés centigrades) de la source Kaltenbach, dans la vallée de Mangfall, aux environs de
Munich. — D'après M. A. Thiem.
Un examen plus détaillé de la température des sources
ordinaires nous entraînerait hors des limites assignées à
cet ouvrage*.
* U. Gumbel a distingué, sous le nom de hétérothermes, ces sources à température
très variable, et a donné le nom de homolkermeê à celles qui sont à peu près constantes.
* M. Renou a publié une étude étendue sur la température des sources des environs
de Vendôme. Bulletin de la Société météorologique de France, t. XIV, p. 209, 1866.
CHAPITRE II
TEMPÉRATURE DES SOURCES THERMALES
On rencontre çà et là des sources dont la température est
évidemment supérieure à la température moyenne du lieu
et, par conséquent, à celle des sources ordinaires du pays.
Ce sont des sources dites thermales.
Contrairement à ce que l'on suppose ordinairement, il
n'est pas nécessaire que des sources soient relativement
chatules, ou même tièdes, pour être comprises dans cette
catégorie. D'après ce que l'on connaît sur la relation de tem-
pérature des sources en général avec celle du sol, on doit
déjà considérer comme thermales celles dont, l'excès ther-
mométrique est de 2 degrés*.
Les sources que l'on doit qualifier de thermales ne se sépa-
rent pas toujours avec netteté des sources ordinaires : dans
bien des contrées il y a entre elles des intermédiaires. Tel
est le cas pour les sources du massif volcanique du Kaiser-
stuhl, comme on l'a vu au chapitre précédent.
* On peut faire une réserve pour les contrées polaires, sur lesquelles on n'a eneore
que peu de données.
TEMPÉRATURE DES SOURCES THERMALES. 435
Il en est de même pour de nombreuses sources de TAl-
gérie, dont Tintérêt particulier justifiera les détails qui
suivent.
M. Ville ^ a signalé le premier la grande abondance des
sources d'eau potable qui émergent du sein du bassin cré-
tacé, avec des températures plus ou moins élevées*^
Voici quelques déterminations de températures et de débits
pour les sources thermales des environs de Constantine et
quelques autres.
TEMPÉRATURE. D^.BIT PAR SECONDE.
degrés. litres.
Source de Sidi-Himoum 35 2 à 3
Source de Salah-Bey 28 45
Source de Sidi-Rached 28,3 4
Source de la rive gauche du Rhumel,
à 3 mètres au-dessus du lit . . . 28 18
Source d'Aïn-Rabah 30,5 50
Source du Hamma 33,1 700
Source d'Aîn-Bou-Merzoug 23,7 900
Les eaux du Hamma constituent une véritable rivière qui
fait mouvoir plusieurs moulins. Celles d'Aïn-Bou-Merzoug,
encore plus volumineuses, ont été amenées par les Romains
à Constantine, au moyen d'un conduit dont on voit encore
quelques restes.
Dans Toasis de Chetma', située à proximité de Biskra, vers
l'est, les sources principales émergent au fond d'entonnoirs
où l'eau fait bouillonner les sables.
Première source .
Deuxième source.
Troisième source.
Quatrième source.
« Bulletin de la Société géologique, 2* série, t. 22, 1864, p. 107.
' It importe de rapprocher des mesures qui suivent k température moyenne de loca-
lités appartenant à la région : Tebessa donne Wfi, Laghouat 220,7 et Biskra 22<>,9.
TEVPfauTDM.
tint TAU siconiK
degrés.
litres.
54
3 à 4
34,5
15
35,5
7 à 8
33
50
456
TEMPÉRATURE DES SOURCES THERMALES.
Les sources qui alimentent Biskra émergent à la tempéra-
ture de 29%o, avec un volume de 500 litres a la seconde.
Le Ilodna et le Zab occidental, dont on a mentionné plus
haut (voir p. 172 et 175) les belles sources jaillissantes, pré-
sentent des faits analogues. Quant à la plaine de la Metidja,
on a vu (p. 167) qu'a côté de sources dont la température est
de 18 à 19 degrés, c'est-à-dire à peine supérieure à la tem-
pérature moyenne du lieu, il y en a qui atteignent 21 à 22*.
Voici quelques chiffres obtenus par M. L. Ville.
Behar de Neciza
Behar de Bazed
Bchar de Tinala
Behar Tassegurt d*Ourlaua .
Behar Mamoussa, à Hazet .
Behar El Haoueli, à Mazet. .
Behar Malah, ù Zaouiat-Rhab
Chrîet Sidi-Hamadou. . . .
Chriet Oulet-Ben-Araeur . .
Btxn ru SCC0.1M;.
TKuriuTniE
litn».
degrés.
10,60
24,66
faible
25,00
faible
24.53
6,38
22.50
iO,00
22,00
28,00
21,00
8 à 10,00
25.50
faible
20,66
faible
22.00
Une thermalité, comparable à celle des sources naturelles
que nous venons de signaler, se retrouve pour les eaux jail-
lissantes de cette même région, dont la sortie est provoquée
par des sondages artificiels. C'est ce que montre le tableau
suivant, publié en 1864 par M. L. Ville.
Troisième pulls de Chegga
Oum-el-Thiour, deux puits
Sidi-Khélil
Ourlana
Djama
Sidi-Amrau . .
Tamerna Djedidu
DÉBIT
PAR »KCO.'«DE.
litres.
4.50
2,20
6,00
22,92
52,18
67.C0
4S,0y
rROPOMDErn.
mètres.
56.0
79,8
27,5
65,2
69,0
77,6
60.0
TMUTtMxntE.
degrés.
25,8
25,0
24,3
25,0
26.0
24.8
24,0
DitIT
Pllt SECONDE.
PMOrONDBUR.
nartoiTo
litres.
mètres.
dfgrés.
17,60
57,0
24.0
58,37
48,6
25.5
12,00
57,6
24,5
30,72
75,0
25,8
36,60
45,6
26,5
TEMPÉRATURE DES SOURCES THERMALES. 457
Sidi-Rached
Braam
Rhamra
Sidi-Sliman
El Ksour
Les puits artésiens, au nombre de ISS^quionl été creusés,
de 1865 à 1882, dans le Sahara et la province de Gonstan-
tine, ont fourni des chiffres que M. Jus a bien voulu me com-
muniquer. En voici quelques exemples : à Tamerna-Djedida
(sondage n*" 4), deux nappes jaillissent, l'une à 48 mètres,
l'autre à 53 mètres, ce dernier donnant 20 litres par seconde
avec la température de 24^ Au Candiat-Sidi-Iahia, un puits,
à la profondeur de 66 mètres, a donné une nappe à 24" et, à
la profondeur de 74 mètres, une autre de 464 litres par se-
conde, mesurant 56^
D'après les nombreuses observations que j'ai faites dans
les Vosges et dans la vallée du Rhin, un très faible excès de
température correspond souvent à des conditions particu-
lières de gisement.
Si parmi toutes les sources du bassin du Rhin observées^
on réunit celles qui dépassent de plus de 2^ h température
moyenne du lieu d'où elles sortent, on reconnaît qu'en de-
hors du Kaisersluhl, toutes sortent de failles ou de lignes
de dislocation. Telles sont, à part celles qui sont depuis
longtemps connues comme thermales, leis sources suivantes,
qui toutes sont situées dans l'ancien département du Bas-
Rhin (voir p. 426 la figure 188) :
AlUtude. Température.
La source de KQtlolsheira, 220" H^8
Celle de la papeterie de ReichsholT»'!! . . 200™ 13°,5
Celle de Chàtenois 180'" ^4^7
Celle de Soultz-les-Bains 172« ^6^2
UUtode.
Tanp&itiir6.
190-
17».2
210-
17»,5
45S TEMPÉRATURE DES SOURCES TBERNALES.
Celle de Niederbronn
Celle de la papeterie de Wasselonne. .
Cette dernière, malgré sa température élevée, sert comme eau po-
table.
La température des sources thermales présente d'ailleurs
tous les degrés jusqu'à celle de l'eau bouillante* qu'elle dé-
passe même.
Parmi les températures très diverses fournies par les
sources thermales, nous nous bornerons à un petit nombre
d'exemples.
ER FRANCE :
Degrés.
Plombières (Vosges) 7i
Luxeuil (Haute-Saône) 56
Bourbonne-les-Bains (Haute-Marne) 68
Aix-les-Bains (Savoie) 45
Saint-Gervais (Haute-Savoie) 4â
Gréoulx (Basses-Alpes) 38,7
Allevard (Isère) 24,7
Uriage (Isère) 27
Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône) 56,8
Pietrapola (Corse) 58
Lamalou (Hérault) 55
Balaruc (Hérault) 47.5
Sylvanès (Aveyron) 58
Bagnols (Lozère) 43
Chaudesaigues (Cantal) 88
Neyrac (Ardèche) 27
Montrond, sondage (Loire) 27
Saint-Allyre à Clermont (Puy-de-Dôme) 24
Chfttelguyon (Puy-de-Dôme) 35
Royal (Puy-de-Dôme) 55,5
Châleauneuf (Puy-de-Dôme) 57
Mont-Dore (Puy-de-Dôme) 45,5
TEMPÉRATURE DES SOURCES THERMALES. 459
Degrés.
La Bourboule (Puy-de-Ddme) 52
Évaux (Creuse) 55
Vichy (Allier) 43,6
Neris (Allier) 52
Saint-Honoré (iNièvre) 31
Bourbon-rArchambault (Saône-et-Loire) 52
Bourbon-Lancy (Saône-et-Loire) 56
Amélie-les-Bains (Pyrénées-Orientales) 61
Ussat (Ariège) 40,2
Ax(Ariège) 77
Bagnères-de-Luchon (Haute-Garonne) 66
Barèges (Hautes-Pyrénées) 44,2
Bagnères-de-Bigorre (Hautes-Pyrénées) 51
Cauterets (Hautes-Pyrénées) 60
Eaux-Bonnes (Basses-Pyrénées) 32
Eaux-Chaudes (Basses-Pyrénées) 36,4
Dax (Landes) 61
Bagnoles (Orne) 27
Saint-Amand (Nord) 19,5
DANS LES ILES BRITAMNIQDES :
Bristol 25
Bath 46
Buxton 20,9
Source rencontrée en Cornwall dans le filon de Huel
Selon, à 292 mètres de profondeur 33
Mallow (comté de Cork, Irlande) 22
EN SUISSE :
Baden (Argovie) 50
Schinznach (Argovie) 55
Loéche ou Louesch (Leuk) (Valais) 51
Pfeffers (Grisons) 38
EN BELGIQUE :
Chaudfontaine 34
440 TEMPÉRATURE DES SOURCES THERMALES.
RR PRU8SB :
Aix-la-Chapelle 55
Borcelte (Burtscheid) 78
Bertrich (Prusse rhénane) 52
Schlangenbad (Nassau) 32
Nauheim (Nassau) 39
Eins (Nassau) 47,5
Wiesbadcn (Nassau) 69
Warmbrunn (Silèsie) 32
DANS LE GEAKD-DUCRÉ DE BADE :
Bade 67
EN WURTEMBERG :
CannsUdl 21,2
Wildbad 57
EN SAXE :
Source rencontrée dans le filon de Churprinz, prés
Freyberg, à 167 métrés de profondeur 26
EN AUTRICHE-HONGRIE :
Teplitz-Schœnau (Bohême) 49
Carlsbad (Bohême) 74
Gastein (Salzbourg) 71,5
Tcplitz-Trentschin (Hongrie) 40
Mehadia (Hongrie) 55
Buda-Pesth (Ofen) (Hongrie). 61,5
EN PORTUGAL :
Caldas-de-Chaves (Traz-oz-Montes) 56,1
San Pedro do Sul (Beïra) 69
EN ESPAGNE :
Panticosa (Aragon) 51
Alhama (Grenade) 47
Villar-Muerto (Salamanque) 52
Caldas de Montbuy (Barcelone) 70
TEMPÉRATURE DES SOURCES THERMALES. 441
E2< ITALIB :
Degrés.
Abano (Monts Euganéens) 84,5
San Mariino (Yalteline) 48
Acqui (Piémont) 75
Porretta (Bologne) 39
Monte Catini (Toscane) 29,5
San Filippo (Toscane) 50
San Yignone (Toscane) 44
Lucques 54
Soffioni, près Monte Cerboli (Toscane) 100
Pise 44
Viterbe 65
San Yicarello (lac Bracciano) 48
Pisciarelli, près la Solfatare de Pouzzoles 84
Éluves de Néron, près Pouzzoles 86
Lacco Ameno (Ischia) 50
Gurgilello (Ischia) 90
Benatutli (île de Sardaigne) 40
Fordongiamis (ile de Sardaigne) 66
Termini à Palerme (Sicile) 47
Sciacca (Sicile) 56
San Calogero (Lipari) 61
Eluves (Lipari) 97 à 100
Source à Vulcano 56
Source à Pontellaria 73
EK GRÈCE :
Thermopyles 67,5
Methana (Morée) 28
Aedepse ou Dipso à Nègrepont (bouillante)
Protolhalassa (Milo) 46
Santorin 55
DANS LA RUSSIE MÉRIDIONALE :
Piatigorsk (Caucase) 47
Gileznovodsk (Caucase) 51,5
Vallée du Terek (source de Pierre) 89
Tcheleken (ile de naphte; Caspienne) 48,75
442 TCMPÉRATUnE DES SOURCES THERUALES.
E5 ASIE milECIlB :
Degrés.
Brousse (Anatolie) 84
Kizildja, près Angora (Anatolie), à Taltitude de
1025 mètres « 99
B!« PALESTI!fB :
Tibériade 68
Callirhoé 59
DA?IS L*I!fDB :
AnaYal (Khandish) 49
Tantipara 72
Jumnotri Gharwal (Himalaya) 22
A CBTLAN :
Cannea, près Trincomalie 41
AU JAPO!l :
Kusatsou 72,2
Jozankei 89
Nuburibets 99
KH CHINE :
YungMak, près Hakao. Kungtung (bouillante)
EN SIBÉRIE :
Souixe de Rachmanou, à Tallitude de 5900 mètres . 43
EN ALGÉRIE :
Ouled Sidi-Brahin, près Hostaganem (Oran) .... 66
Hammam Bou-Hadjar (Oran) 78
Hammam des Bibans (Gonstantine) 81
Arel-EI-Hammam, non loin de Bougie 85
Hammam Sciai, non loin de Bougie 87
Hammam Meskoutine, près Guelma (Gonstanline) 78 à 95
1 TcHiHATCHEFF, Asic Mineuve, t. I, p. 97.
TEMPÉRATURE DES SOURCES THERMALES. 443
EN ABYSSmiE :
Degrés.
Sources nombreuses^ en partie bouillantes, entre
Tatchoura et Choa 97
Sud du Mozambique (Afrique australe) 45
AUX ÉTATS-UKIS :
Hots Springs, Bath County (Virginie) 42
Washitaw (Arkansas) 65,5
Pagosa (Colorado) 60,6
Sulphur Springs (Colorado) 65,5
Diamond Creek, Socoro County (Nouveau-Mexique). . 66
Source à 20 kilomètres à Test de Minersville (Utah) . 85
Sleamsboats Spring, Bear River (Idaho) 87,7
Malheur River (Orégon) 75
Sou, vallée d*Osobb (Nevada) 85
Steamboat, Virginia Ranges (Nevada) 95
Thousand Springs Valley (vallée des mille sources)
(Nevada) (bouillante)
Butte, extrémité nord de la chaîne de Truckee
(Nevada) (bouillante)
Ile du lac Mono (Californie) (bouillante)
lie d'Unimak (Alaska) (bouillante)
AU MEXIQUE :
Sources de Chichi Mequilla 96,4
DANS LES AJ1TILLES :
Galion (Guadeloupe) 65,8
Matouba (Guadeloupe) 59,2
Pigeon, au niveau de la mer (Guadeloupe) 100
DA:IS LE VENEZUELA :
La Trincheras * 96,9
AU PÉROU :
Caliente (Moquigna) 86
* D'après M. Boussiogault, Tune des plus chaudes que l'on connaisse, en dehors des
régions volcaniques.
4il TEMPÉRATURE DES SOURCES THERMALES.
Degrés.
Carumas (Moquigna) . • 91
Omate (Moquigna) 7t
£5 COLOMBIE :
Coconuco, à Tallitude de 3500 mètres 75
Banaa, près Quito 52
AU CHILI :
Cauquenes 47
Toro (Coquimbo), altitude de 5258 mètres 63
Tinguirlrica, altitude de plus de 1200 mètres ... 96
EN OCÉARIE :
Igabo (Albay), ile de Luçon (Philippines) 56
Savu-Savu (iles Fidji) (source bouillante)
On voit que, comme les volcans, les sources thermales se
présentent aux latitudes les plus diverses; on en trouve en
Islande, au Kamtschatka, au Groenland où jaillissent vers le
nord-est, à Ounastot, d'après le capitaine Graah, des sources
atteignant 42\
Il en existe aussi à toutes les altitudes. Ainsi, au Thibet, à
4700 mètres, des sources bouillantes sont associées aux gey-
sers qui ont été mentionnés plus haut (p. 367) : leur
température est de 84% correspondant à TébuUition de l'eau
à cette hauteur. Au sud de Tanla, M. de Orzewalski a récem-
ment signalé, à l'altitude de 4877 mètres, des sources de
52° centigrades. De même dans les Cordillières on en ren-
contre au delà de 4000 mètres.
D'un autre côté, le bassin de la mer Morte en renferme qui
jaillissent bien au-dessous du niveau de l'océan.
Le bassin des mers, sous lequel est le siège de nombreux
volcans, doit lui-même servir de réceptacle à de nombreuses
sources thermales.
TEMPÉRATURE DES SOURCES TUERMALES.
445
Fig. 190. — Caverne dans le calcaire urgonien, d'où sort la source de Sassenage.
Voir les pages 117 à 119 de ce volume.
Quant a la vapeur qui se dégage, soit mélangée d'eau
446 TEVPËRATURE DES SOURCES THERMALES.
liquide, comme dans les geysers, soit seule comme dans les
solfatares et les volcans, nous n*en dirons ici que peu de
mots.
La force considérable de projection des geysers montre
que la vapeur d'eau acquiert une température notablement
supérieure à 100 degrés, dans les réservoirs où elle s'accu-
mule. On a, en effet, observé 127 degrés dans le canal d'as-
cension du Grand Gevser en Islande.
Dès que l'eau volcanique parvient dans les parties super-
ficielles du globe, c'est-à-dire la où nous pouvons la soumet-
tre à nos mesures, et par suite de la détente qu'elle a éprou-
vée, elle a déjà perdu la plus grande partie de sa chaleur.
Mais en voyant l'intimité de son mélange avec les matières
fondues, qui constituent les laves et d'où elle s'exhale len-
tement, durant leur refroidissement, on est contraint d'ad-
mettre que dans les profondeurs, elle a eu la même tempé-
rature que celles-ci. C'est même à son intervention, à plus
de 1000 degrés thermométriques, sous une énorme tension,
qu'il est légitime d'attribuer l'ascension des laves dans les
canaux volcaniques, ainsi que la force avec laquelle elle pro-
jette des blocs volumineux et d'autres matières solides.
A la suite de la description de la source de Sassenage
(p. 117 à 119), il parait utile de donner la vue, d'après une
photographie, de la caverne qui lui donne issue.
TABLE DES MATIÈRES
DU TOME PREMIER
LIVRE PREMIER
RÉGIME DES EAUX SOUTERRAINES
CHAPITRE PREMIER
GiNÉRAurés
Aperçu historique
Données fournies par les travaux de mines .
§ i . — Eau de caruèrb ou D*iMpiié6nATT0M . . . .
§2. — Roches mpBREéADLBs et roches perméables.
Rooliet impermèaUet
Types de roches imperméables
Exemples du rôle des roches imperméables dans le bassin de la Seine. iO
Rochet pcmèablet 12
Types de roches perméables 12
Observations sur le mouvement de Teau dans les roches perméables . i 6
Perméabilité en grand 16
CHAPITRE II
RÉGIME DES EAUX DANS LES TERRAINS PERMÉABLES
§ i . — Eaux phréatiques des terraois de transport 21
Exemple fourni par la plaine du Rliin, interstices dans lesquels
Teau circule ; nature des mouvements de la nappe : sources qui
en dérivent 22
« On trouvera h la lin du tome II une U*iple Uble alphabétique des matières, des
localités et des auteurs mentionnés dans l'ouvrage.
448 TABLE DES MATIÈRES.
Environs de Bonn et de Dusseldorf 29
Environs de Bruxelles 29
Ville de Liège 31
Pays-Bas 31
Munich 55
Nuremberg 57
Leipitg 37
Environs de Vieuue 58
Région comprise entre iSuaa-Pestii et iizoluok 38
Environs de Moscou 40
Oural 41
Environs de Londres et autres parties de F Angleterre 42
Côte de Gènes, notamment aux environs de Loano . 45
Messine 47
Environs de Wew-York 48
Exemples fournis par la plaine de Lombardie 48
Baux phréatîqoea &ma duBM 53
Gascogne 53
Hollande 54
Est d'Ostende 55
Baux phrtetîcpiM det dép6U gUMÙAires 56
Mont-sur-Lausanne et bords de TAreuse 56
Baux phréatiqnet des llet nMidréponquas .... 57
Intérêt daf amiz phréatiquat av point de tu» da Ta^îoiikiire et
de rhygîtee 57
ObtcnratMNM théoriques 58
§ 2. — Eaux pHaiATiQUBs des tbrbàins autres que les terrains de transport. G1
Terrains tertiaires des départements de la Seine et de Seine-et-
I Marne 62
I Terrains crétacés et juras!>ique5 64
Terrains triasiques et permiens 66
Convenance de reporter Texamen des laits analogues au chapitre
relatif au rôle des lithoclases 67
CHAPITRE III
ROLE DU CONTACT MUTUEL DES ROCHES PERMÉABLES
ET DES ROCHES IMPERMÉABLES
§ 1 . — Contact PRODUIT PAR LE FAIT SEUL DE LA stratification 68
Généralités 68
Terrains quaternaires 70
Exemples fournis en Alsace, aux environs de Haguenau, dans les
vallées de la Moder et du Rhin 70
Environs de Metz 71
TABLE DES MATIÈRES. 449
Environs de Munich 71
Hollande 72
Londres et ses environs 75
Oxford 73
Irlande 74
Palerme 74
Upsal 75
Observations relatives à des tufs volcaniques stratifiés 75
Tarraiiu •Ualifièt 75
Sundgau 75
Dombes 76
Bastbergy près Bouxwiller 77
Bassin de Paris 81
Environs de Laon 84
Vallée de la Garonne 84
Environs de Bruxelles 85
Environs de Londres 85
Furslenfeld, Styrie 85
La Puysaye (Yonne) 86
Haute-Marne . 87
Torrent d'Anzin 87
§ 2. — Co.NTACT PRODUIT PAR DES AGCIDINTS POSTÉRIEURS A LA STRATIFICATION OU A
LA FORMATION DES ROCHES {)[
Roches impeméablet dèMigrégéet tur plaoe Dl
Irlande yî
Schistes de divers âges y2
Observations sur réparpilleraent des popula lions 1)5
ÉboulM Uo
Boues glemaires. 115
Scories, coulées de lave et autres déjections volcaniques incohérentes
vacnolaires ou fissurées 95
Cônes de scories ; exemples au lac Chaïubon, au lac du Bouchot, à
Yourzac, à Fayal et à San Miguel 95
Royat et Fontanat (Puy-de-Dôme) 97
AUagnat, Ceyssat et Mazayc (Puy-de-Dôme) 99
Autres localités du département du Puy-de-Dôme : Gravenoire, Pa-
riou, la Nugère, Montsineyre, le Tartaret 102
Entraigues (Ardèche) 104
Etna, Terceira et Santorin 104
Rome et environs 105
Irlande 109
Vétéravie 109
29
4M) TiBLE DES MATIÈRES.
Syrie; sources du petit Jourdain 109
B4«U MODoipagam Im falUaf 110
Environs de Loudun 110
Gorze, près Metz 111
Sassenagc, près Grenoble 117
Rohrbach im Graben (Autriche) 119
Lancashire 1^
Derbyshire 120
LaBourboule (Puy-de-Dôme) 120
Sicile : Sclafani, Palerme, Longi et Alcara 1â5
iBtmtiooi âm rochee 126
Alpe du Wurtemberg 126
Irlande 128
Daz et Tercis (Landes), Mont|iezat (Ardèche), côte d'Essey (Neurthe-
el-MoseUe) ' 128
CHAPITRE IV
ROLE DES LITH0CLA8ES DE DIVERS ORDRES
GÉnÉBALiTés 129
litlMNUMt «1 pwtMuUènaMB» dÎMUset 130
1* Leptoclases 130
SyncUueê 130
Piéêocloies 131
2* Diaclases 132
5*Paracla$es 145
144
du rdle def IHhooIaset relaUvemeol mi règinie dma emxa.
145
•itîiMmk dea roohat : foraget «riètten* 132
§1"'. — RÔLBDESUTBOCLASBSSnFLKS 165
Temîna lerlîaÎMi 165
Bassin de Paris 165
Pyrénées-Orientales 164
. Bassin de Londres • 163
Belgique 166
Vienne (Autriche) 167
Venise 167
Département d'Alger : Basse Mitidya ; sources jaillissantes naturelles
et puits forés 169
TABLE DES MATIÈRES. 451
Hodna et Sahara du département de Gonstantine 472
Zab : sources jaillissantes naturelles i 75
Oued Rhir : sources naturelles et forages 176
Hammam-Bou-Hadjar ; source thermale 184
Aîn Nouissy, près Mostaganem 184
Egypte 185
Puy-de-Dôme 186
Haute-Loire 187
Irlande, contrée d'Anlrim 188
Tenramt orétaoét 188
Environs de Ghâlons-sur-Marne 189
Département de la Marne et régions voisines 190
Champagne septentrionale 193
Département de l'Aisne 197
Ardennes (arrondissement de Relliel) 198
Aube et particulièrement bassin de la Vanne 199
Yonne 200
Le Havre 201
Calvados et Eure 203
Charente 204
fiouches-du-Rhône, bassin de Fuveau 204
Var et Alpes-Maritimes 206
Gers 207
Bassin de Paris 207
Environs de Tours 212
North Downs du Kent et du Surrey 212
Londres 213
Yorkshire 214
Hertforlshire 215
Oxfordshire et Whilsliire 215
Nord de la France, Belgique et Weslplialic, environs de Liôge. . . 216
Versant nord duTeutoburgerwald et versant nord de la Uaar : Pader-
born 222
Irlande 227
Caucase, Kislovodsk et Piatigur^k 229
Terrain {uratitqaa 251
Yonne 232
Nièvre 234
Meurthe-et-Moselle 256
Meuse et Haute-Marne 236
Grand-Duché de Luxembourg 242
Wurtemberg; ' 245
Var et Alpes-Maritimes 245
Buda-Pesth ; forages 246
4:>3 TABLI:: DES MATIÈRES.
Angleterre : Glocestershire, Lincolnshire, Leicestershire, Northamp-
tonshire (RuUand) âi6
TriM «1 îMmSm MnwtB itô
Lorraine allemande 248
Bassin de la Sarre âoO
Duché de Luxembourg : Mondorf 2o0
Meurthe-et-MoseUe SIiO
Alsace : SoulU-les-Bains et Niederbronn ^
Haute-Marne : Bourbonne-les-Bains 351
Gard 255
Rochefort ; puits artésien 25ô
Wurtemberg ; Thermes de Widbad ; forages de Berg et de Cannstadt . 255
Grand-Duché de Bade : Rothenfels 256
Franconie 256
Autriche; Stixenstein et autres sources alimentant Vienne, groupe
de Fischau 256
Angleterre 261
Environs de Loano, prés Gènes 263
I pAléosoîqact 264
Artois 264
Mines de houille : la Chapelle-sous-Dun (Saône-et-IiOire) 264
Sardaigne 264
Irlande 266
Aix-la-Chapelle et Borcette (Burtscheid) 266
Ems 267
Wisconsin : sources naturelles et puits artésiens 270
TeirÛM orôUlliBt 271
France centrale 271
Saint-Gothard 272
Ghamonix 274
Wurtemberg : Wildbad 274
Irlande 275
Base de l'Etna : Catane 275
Caucase : GileznoTodsk 275
§ 2. — LiTHOCLASBS ÂSSOCléES k liU rOINTBMBNTS DE ROCHBS ÉRUPHTIS 277
Gard 277
§5. — ROLB DES UTHOCUISSS ASSOCIÉES A DES nLONS MéTàLLIFÈRES 280
Vosges : Plombières 280
Loire : Sail-sous-Couzan 282
Hérault : La Malou 282
Haute-Loire : Brioude 283
TABLE DES MATIÈRES. 455
Ardèche : Vais, Desaigues, ICayrès 285
Autres localités du Plateau central 284
Grand-Duché de Bade : Rippoldsau et Baden^eiler 284
Prusse Rhénane : Mine de Kautenbach, près de Trarbach, sur la
MoseUe 284
Saxe : Freyberg 285
Bohême : Garlsbad et Marienbad 285
Italie : Pereta et Selvena; Tolfa 288
Algérie 289
CHAPITRE V
ROLE DES CAVERNES
Introduction 290
1. — GaRACTÈRES GéN^RAUX DKS CAYBRNE8 ET DBS CATITÉS AHALOCDRS 295
Yonne : Arcy-sur-Gure 293
Vienne : berges du Glain à Poitiers 294
Aveyron 295
Gard 297
Ardèche ; Pont d'Arc 298
Isère 299
ObcervatiOBt théorîquet 299
Origine des cavernes des massifs calcaires et dolomitiques .... 299
Origine des cavernes produites par Tentrainement des matières
arénacées 500
Origine des cavernes produites par Térosioii du gypse et du sel
gemme 300
Origine des cavernes dues à des glissements superficiels 501
Origine des cavernes excavées par la mer dans les falaises .... 302
Origine des cavernes des coulées volcaniques 302
Origine des cavernes paraissant résider dans les flancs des mon-
tagnes volcaniques 302
§ 2. — Influence des cavernes sur le RécwB des baux 304
Jura : Départements du Doubs et du Jura 504
Meurthe-et-Moselle 307
Vosges 307
Aube 308
Gôte-d*Or 309
Haute-Saône : environs de Vesoul 309
Ain : Perte du Rhône à Bellegarde 309
4M TABLE DES MàTIÈRES.
Calvados 309
Charente : Tardouére, le Bandiat, la Touvre 511
Hérault 314
Isère et Drdme 315
Yar et Alpes-Maritiote:» 316
Bouches-du-Rhône 318
Yaucluse : Fontaine de Vaucluse 319
Lot 355
Dordogne 333
Eure : Pertes de Tllon 355
Loiret : Val d'Orléans 336
Ardennes : Signy-l* Abbaye . 545
Belgique : environs de Dinan, Bleyberg-ès-Montzea 345
Suisse: canton de NeuchAtel; environs de Kandersteg 345
Œsel 550
Angleterre 350
Irlande 331
Espagne 554
Italie 354
Moravie 561
Bosnie et Croatie 362
Grèce 562
Crimée 564
Algérie 364
Syrie : Nahr-el-Keb 365
£tats-Unis : Kentucky et liidiana 366
CHAPITRE VI
EAUX POUSSÉES PAR DES ÛkZ COMPRIMÉS
§1. — Eaux POUSSÉES PAR L*ACIDB CARiORIQUB 368
Sondage de Montrond (Loire) 568
Naubeim (Yétéravie, ancien duché de Hesse-Cassel) 575
Neuenahr (Prusse Rhénane) 577
Kissingen (Bavière) 377
Paterno (Sicile) 377
§ 2. — Eaux poussées principalement par des hydrogènes ciRBOEts; volcans db
BOUES, 8ALSES 380
Italie : Apennins et Sicile 380
Caucase : iner Noire et mer Caspienne 383
États-Unis 385
ObMnratîoBi théonquM 386
TABLE DES MATIÈilES. 455
CHAPITRE VII
EAUX P0U88ÉE8 PAR LA FORCE EXPANSIVE DE LEUR VAPEUR
|1.^GeT8BIi8 390
Islande 390
États-Unis : parc national de Yellowstone; Galirornie 392
Nouvelle-Zélande : province d'AukIand 396
Açores : Ile San Miguel 396
Thibet 397
jâ.— SOFFIOHIS 400
Toscane 400
^ 3. — VOLCAKS ET SOLFATARIS 407
LIVRE SECOND
TEMPÉRATURE DES EAUX SOUTERRAINES
CHAPITRE PREMIER
TEMPÉRATURE 0E8 80URCES 0R0INAIRE8
Température des sources ordinaires i'21
CHAPITRE II
TEMPÉRATURE DE8 SOURCES THERMALES
TlHPÉRATURK DES SOURCES THERMALES 434
8167. — Imprimerie A. Lahure, 9, rue de Fleuras, à Paris.
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