Skip to main content

Full text of "Les obseruations de plusieurs singularitez et choses memorables, trouuees en Grece, Asie, Iudée, Egypte, Arabie, & autres pays estranges"

See other formats


This  is  a  digital  copy  of  a  book  that  was  preserved  for  générations  on  library  shelves  before  it  was  carefully  scanned  by  Google  as  part  of  a  project 
to  make  the  world's  books  discoverable  online. 

It  has  survived  long  enough  for  the  copyright  to  expire  and  the  book  to  enter  the  public  domain.  A  public  domain  book  is  one  that  was  never  subject 
to  copyright  or  whose  légal  copyright  term  has  expired.  Whether  a  book  is  in  the  public  domain  may  vary  country  to  country.  Public  domain  books 
are  our  gateways  to  the  past,  representing  a  wealth  of  history,  culture  and  knowledge  that 's  often  difficult  to  discover. 

Marks,  notations  and  other  marginalia  présent  in  the  original  volume  will  appear  in  this  file  -  a  reminder  of  this  book' s  long  journey  from  the 
publisher  to  a  library  and  finally  to  y  ou. 

Usage  guidelines 

Google  is  proud  to  partner  with  libraries  to  digitize  public  domain  materials  and  make  them  widely  accessible.  Public  domain  books  belong  to  the 
public  and  we  are  merely  their  custodians.  Nevertheless,  this  work  is  expensive,  so  in  order  to  keep  providing  this  resource,  we  hâve  taken  steps  to 
prevent  abuse  by  commercial  parties,  including  placing  technical  restrictions  on  automated  querying. 

We  also  ask  that  y  ou: 

+  Make  non-commercial  use  of  the  files  We  designed  Google  Book  Search  for  use  by  individuals,  and  we  request  that  you  use  thèse  files  for 
Personal,  non-commercial  purposes. 

+  Refrain  from  automated  querying  Do  not  send  automated  queries  of  any  sort  to  Google's  System:  If  you  are  conducting  research  on  machine 
translation,  optical  character  récognition  or  other  areas  where  access  to  a  large  amount  of  text  is  helpful,  please  contact  us.  We  encourage  the 
use  of  public  domain  materials  for  thèse  purposes  and  may  be  able  to  help. 

+  Maintain  attribution  The  Google  "watermark"  you  see  on  each  file  is  essential  for  informing  people  about  this  project  and  helping  them  find 
additional  materials  through  Google  Book  Search.  Please  do  not  remove  it. 

+  Keep  it  légal  Whatever  your  use,  remember  that  you  are  responsible  for  ensuring  that  what  you  are  doing  is  légal.  Do  not  assume  that  just 
because  we  believe  a  book  is  in  the  public  domain  for  users  in  the  United  States,  that  the  work  is  also  in  the  public  domain  for  users  in  other 
countries.  Whether  a  book  is  still  in  copyright  varies  from  country  to  country,  and  we  can't  offer  guidance  on  whether  any  spécifie  use  of 
any  spécifie  book  is  allowed.  Please  do  not  assume  that  a  book's  appearance  in  Google  Book  Search  means  it  can  be  used  in  any  manner 
any  where  in  the  world.  Copyright  infringement  liability  can  be  quite  severe. 

About  Google  Book  Search 

Google's  mission  is  to  organize  the  world's  information  and  to  make  it  universally  accessible  and  useful.  Google  Book  Search  helps  readers 
discover  the  world's  books  while  helping  authors  and  publishers  reach  new  audiences.  You  can  search  through  the  full  text  of  this  book  on  the  web 


atjhttp  :  //books  .  qooqle  .  corn/ 


A  propos  de  ce  livre 

Ceci  est  une  copie  numérique  d'un  ouvrage  conservé  depuis  des  générations  dans  les  rayonnages  d'une  bibliothèque  avant  d'être  numérisé  avec 
précaution  par  Google  dans  le  cadre  d'un  projet  visant  à  permettre  aux  internautes  de  découvrir  l'ensemble  du  patrimoine  littéraire  mondial  en 
ligne. 

Ce  livre  étant  relativement  ancien,  il  n'est  plus  protégé  par  la  loi  sur  les  droits  d'auteur  et  appartient  à  présent  au  domaine  public.  L'expression 
"appartenir  au  domaine  public"  signifie  que  le  livre  en  question  n'a  jamais  été  soumis  aux  droits  d'auteur  ou  que  ses  droits  légaux  sont  arrivés  à 
expiration.  Les  conditions  requises  pour  qu'un  livre  tombe  dans  le  domaine  public  peuvent  varier  d'un  pays  à  l'autre.  Les  livres  libres  de  droit  sont 
autant  de  liens  avec  le  passé.  Ils  sont  les  témoins  de  la  richesse  de  notre  histoire,  de  notre  patrimoine  culturel  et  de  la  connaissance  humaine  et  sont 
trop  souvent  difficilement  accessibles  au  public. 

Les  notes  de  bas  de  page  et  autres  annotations  en  marge  du  texte  présentes  dans  le  volume  original  sont  reprises  dans  ce  fichier,  comme  un  souvenir 
du  long  chemin  parcouru  par  l'ouvrage  depuis  la  maison  d'édition  en  passant  par  la  bibliothèque  pour  finalement  se  retrouver  entre  vos  mains. 

Consignes  d'utilisation 

Google  est  fier  de  travailler  en  partenariat  avec  des  bibliothèques  à  la  numérisation  des  ouvrages  appartenant  au  domaine  public  et  de  les  rendre 
ainsi  accessibles  à  tous.  Ces  livres  sont  en  effet  la  propriété  de  tous  et  de  toutes  et  nous  sommes  tout  simplement  les  gardiens  de  ce  patrimoine. 
Il  s'agit  toutefois  d'un  projet  coûteux.  Par  conséquent  et  en  vue  de  poursuivre  la  diffusion  de  ces  ressources  inépuisables,  nous  avons  pris  les 
dispositions  nécessaires  afin  de  prévenir  les  éventuels  abus  auxquels  pourraient  se  livrer  des  sites  marchands  tiers,  notamment  en  instaurant  des 
contraintes  techniques  relatives  aux  requêtes  automatisées. 

Nous  vous  demandons  également  de: 

+  Ne  pas  utiliser  les  fichiers  à  des  fins  commerciales  Nous  avons  conçu  le  programme  Google  Recherche  de  Livres  à  l'usage  des  particuliers. 
Nous  vous  demandons  donc  d'utiliser  uniquement  ces  fichiers  à  des  fins  personnelles.  Ils  ne  sauraient  en  effet  être  employés  dans  un 
quelconque  but  commercial. 

+  Ne  pas  procéder  à  des  requêtes  automatisées  N'envoyez  aucune  requête  automatisée  quelle  qu'elle  soit  au  système  Google.  Si  vous  effectuez 
des  recherches  concernant  les  logiciels  de  traduction,  la  reconnaissance  optique  de  caractères  ou  tout  autre  domaine  nécessitant  de  disposer 
d'importantes  quantités  de  texte,  n'hésitez  pas  à  nous  contacter.  Nous  encourageons  pour  la  réalisation  de  ce  type  de  travaux  l'utilisation  des 
ouvrages  et  documents  appartenant  au  domaine  public  et  serions  heureux  de  vous  être  utile. 

+  Ne  pas  supprimer  V attribution  Le  filigrane  Google  contenu  dans  chaque  fichier  est  indispensable  pour  informer  les  internautes  de  notre  projet 
et  leur  permettre  d'accéder  à  davantage  de  documents  par  l'intermédiaire  du  Programme  Google  Recherche  de  Livres.  Ne  le  supprimez  en 
aucun  cas. 

+  Rester  dans  la  légalité  Quelle  que  soit  l'utilisation  que  vous  comptez  faire  des  fichiers,  n'oubliez  pas  qu'il  est  de  votre  responsabilité  de 
veiller  à  respecter  la  loi.  Si  un  ouvrage  appartient  au  domaine  public  américain,  n'en  déduisez  pas  pour  autant  qu'il  en  va  de  même  dans 
les  autres  pays.  La  durée  légale  des  droits  d'auteur  d'un  livre  varie  d'un  pays  à  l'autre.  Nous  ne  sommes  donc  pas  en  mesure  de  répertorier 
les  ouvrages  dont  l'utilisation  est  autorisée  et  ceux  dont  elle  ne  l'est  pas.  Ne  croyez  pas  que  le  simple  fait  d'afficher  un  livre  sur  Google 
Recherche  de  Livres  signifie  que  celui-ci  peut  être  utilisé  de  quelque  façon  que  ce  soit  dans  le  monde  entier.  La  condamnation  à  laquelle  vous 
vous  exposeriez  en  cas  de  violation  des  droits  d'auteur  peut  être  sévère. 

À  propos  du  service  Google  Recherche  de  Livres 

En  favorisant  la  recherche  et  l'accès  à  un  nombre  croissant  de  livres  disponibles  dans  de  nombreuses  langues,  dont  le  français,  Google  souhaite 
contribuer  à  promouvoir  la  diversité  culturelle  grâce  à  Google  Recherche  de  Livres.  En  effet,  le  Programme  Google  Recherche  de  Livres  permet 
aux  internautes  de  découvrir  le  patrimoine  littéraire  mondial,  tout  en  aidant  les  auteurs  et  les  éditeurs  à  élargir  leur  public.  Vous  pouvez  effectuer 


des  recherches  en  ligne  dans  le  texte  intégral  de  cet  ouvrage  à  l'adresse|http  :  //books  .qooqle  .  corn 


fl  .Z&J0J4 


LES 


OBSERVATIONS 

DE  PLVSIEVRS 

SINGVLARITEZ    ET    CHOSES 

MEMORABLES,      TROVVEES 

en  Grece^fieJudéeJBgypte^Arabie,  ôc 

aucres  pays  eftranges  ,  rédigées  en 

trois  liureSjPar  Pierre  Beion 

du  Mans. 

'Meueu^de  nouveau  £r  augmentezjte  ligures* 

Le  Catalogue  contenant  les  p!us  notables  çhofes  yç{z 
en  la  pagefuyuante* 


?5^i 


m 


A    PARIS, 

Chez  Hierofmc  âe  Marner,  &:  îa  vcufàc  Guillaume  Caueîîat^. 
au  mont  S.Hilairc5à  lenfeigne  du  Pélican. 

M.     D.     LXXXVIII. 

«4VS.C    PRIVILEGE    J>V  &OB 


f  - 

ê    - 

m-  . 


L£   CATALGGVE    CONTENANT 

les  plus  notables  chofès  de  ce 

prefent  liure. 

Les  appellations  antiques  des  arbres  &  autres  plantes  ydes/èrpents,  despoif 

fons^des  oi féaux  ^  &  autres  befles  terreflresy  conférées  auec  les  noms  Fra- 

cois  modernes  :  &plufieurs  vrais  portraiBs  iiceux ntire^du  naturel^ 

non  encores  veu^parcy  deuant. 
Les  mœurs  &  façons  de  viure  de  diuerjès  nations  en  Grece>&  Turquie:  & 

les  veflemens  d'i  ceux* 
Les antiquite^g?  ruines  deplujieurs  villes illuflres  en *Afie  &  Grèce. 
La  defcnptiondu  Caire  lemfdem^p  amas  ^ntioche ,  Burfe  y  .Alexandrie^ 

&  plu fieurs  autres  villes  du  Leuant^auec  leurs  noms  modernes. 
La  defcriptim  de  plufeurs  monts  celebre%j>ar  les  anciens  Prêtes  &  Hifto- 

riens* 
glufîeursdifcoursfur  les  chemins  en  diuers  voyages  par  Egypte  ,  .Arabie, 

tAfie^gp  Grèce  ^-contenons  diuerfes  chofes  des  antiques  conférées  auec 

lesmodemes. 
+Ample difeours  fur la vraye  origine  du  fin  or  ^  fur  les  principales  mines 

d'or  &  d argent  dugrand  Turc* 


A    TRESILLVSTRE    ET    REVEREN- 

DISSIME    SEIGNEVR    FRANÇOIS     CARDINAL 

de-Tournoi  5  fingHlie*  &  libéral  Mecenas  des  hommes. 
Jtudieux  de  'vertu  >  Pierre  Belon  fin  treshumble 
domefiique  firuiteur  falut  &  en." 
Uere  groffceritL 

Onseignevr,  c  eiï a  bon  droiét  que 
(  les  gens  doâes  vous  ont  en  admiration,  & 
k  &  que  le  peuple  eftranger  affeâé  ànoftre 
-  république  y  comme  anfE  le  François  ,  a 
grandement  loué  Se  eftimé  l'excellence  de  voftre bon 
iugement,  &  magnifié  voftre  prudence  &  vertu;  cas 
entre  tous  autres  illuftres  prélats  ,  voas  auczfinguiic^ 
rement  aimé  Se  honoré  les  lettres  ,  aduancé  les  let- 
trez,  &  par  voâre  fpeciaie  faueur  enflammé  &  pro- 
meu  leurs  eftudes  >  faifant  cEoifir  plusieurs  enfans  Se 
autres  plus  aagez  de  bon  efprit  ,  que  vous  entrete- 
nez &  faites  inftruire  Se  endoâriner  en  tous  arts  pas 
les  vniuerfîtez  Se  en  voz  collèges  de  T  o vm  o n,  Se 
autres  qu'auez  édifiez  Se  bien  munis  de  gens  experts 
Se  fçauans.  Les  feienees  Se  difeiplines  qui  fopt  main- 
tenant familières  Se  communes  à  noftre  nation,  ont 
raifon  de  vous  aduouer  pour  leur  patron  ,  d'autans 
qu  enfouftenant  le  pelant  faiz  de  noftre  république^ 
vous  auez  prins  pîaifïr  de  leur  donner  commet 
cernent ,  Se  efleuer  les  gentils- efprits  y  Se.  les  aduan*- 
eer  fèloa  leurs  qualkez,&  aufli  les  employer  en  cei. 
qraoy.  ont  e&é  trouuez  enclins  Se  fuffifans  po^t.femisà 


EPHTRE. 

"iVtilité  commune.  Delleft  enfuiuyquejeseiprits  des 
hommes ,  quiauparauant  eftoyét  comme  endormis  & 
détenus  aflbpiz  en  vn  profond  fommeil  d'ancienne  i- 
gnorance,ontcomencé  à  sefueiller,  Se  forcir  des  tene- 
bres,ou  fi  long  ceps  cftoyent  demeurez  enfeueliz:  &  en 
forçant ,  ont  ic£té  hors  Se  tiré  en  euidëce  toutes  efpeces 
de  bonnes  difeiplincs  :  lefquelles  à  leur  tant  heureufe  Se 
defirable  renaiffitnce,tout  ainfi  que  les  nouuelles  plates 
après  Fafpre  laifon  de  Fhy  uer  reprennent  leu r  vigueur  à 
la  chaleur  du  Soleil,  &font  confotées  delà  douceur  du 
printéps  :  femblabiement  ayans  trouué  vn  incoparable 
Mecenas,  Se  fauorabie  reftaurateur  fi  propice  n  arrefte- 
rent  gueres  à  pulluler  Se  à  produire  leurs  bourge6s;pui$ 
cfmaillâs  leurs  draios,&  couurâs  leurs tiges  de  nouuelle 
verdure,&paruenuesenleur  faifon  d'efté  gracie  ux5cha- 
cun  s'eft  trelbien  ornée  de  moult  belles  fleurettes:  dont 
ayans  puis  engendré  le  fruid  dele&able  Se  à  meftima- 
ble  bonté,  n'y  a  eu  celle  qui  n'en  ait  fait  prefent  pour  le 
payemêtdesprimices  du  reuenu  àfon  fouuerain  orna- 
teur,&  gracieux  foleihduquel  le  bening  afped  les  auoit 
toutes  remifes  en  vigueur.Ceftoit  le  Roy  magnanime, 
treflage,trefpuiirant,&  prudent,François  premier  de  ce 
îiormauqueLeomme  libéral  Mecenas  des  hommes  ftu- 
dieux  de  vertu ,  il  ny  auoit  celuy  qui  ne  s'employait  de 
toutfon  pouuoir  faire  prefent  de  quelque  chofe  hone- 
ftc  :  mais  fur  tout  des  fruiâs  cueilliz  au  deledlable  iar- 
din ,  entez  de  greffes  exquifes  furlesplantes  de  Miner- 
ue^u'il  aimoit  dvne  finguliere  afFedion.  Auffi  eftoit  il 
de  ftbenigne  Se  libérale  nature ,  qu'il  ny  eut  onc  hom- 
îue,'eftranger,oudefanation,  luy  preientant aucune 
ciiofe ,  tant  feuft  elle  petite,  qu'il  m  Fait  humainement 


E  P  I  S  T  fc  & 

îcceue  ,  &  fore  bien  rémunéré  celuy  qui  la  prefen- 
coit,de  don  Royal, &  honorable  guerdo.ParquQy  tous 
en  gênerai  fuyuoy  ent  i'exéple  de  ce  tant  vertueux  &  in- 
comparable prince ,  père  des  Ccicnccs  :  tellement  que  fit 
court  fembloit  quelque  belle  A  cademie^u  ancien  e  ef- 
cole  de  Philoiophie,cn  laquelle  cftoit  mofttee  laTheo- 
rique,&:  pra&ique  de  toute  vertu.DonCjtnonfeigneur, 
poureeque  les  Mules  vous  ont  cognu  fingulierement 
entre  tous  autres  ennemy  capitaine  l'ignorance,  eft  ans 
aileurees-de  pîufieurs  fciéces  qui  font  infufesea  voftre 
diuiriefprit  toutes  d'vncomun  confenteméteognoif- 
fans  bien  voftre  noble  cœur,  vous  prefenterent  la  pal- 
me^ deflors  vous  ayans  eleu  pour  leur  chef,voulurent 
vouscollkuerfouuerainPhebus  fur  l'armonie  de  leurs 
inftrumens  des  refonantes  Mufiques  bien  accordées:  à 
fin  qu'en-  celle  excellente  Mufique  fon  beau  Théâtre 
Royal,feuft  décoré  par  voftre  affiilance  :  fçacbans  auffi 
que  les  lettres  Greques  &  Latines  vous  font  fi  familie- 
res,que  tout  ce  que  lifez  des  bons  autheurs,en  Théolo- 
gie, Phiiofophie,  Aftrologie,  Cofmographie ,  ou  Hi- 
ftoires,vous  le  lifez  au  melme  lâgage  de  leurs  autheurs: 
efquelles  feiences  &  lettres  Greques ,  vous  elles  d  autât 
plus  excellenr,que  des  voftre  ieune  aage  vous  auez  grâ~ 
dément  trauaillé  à  les  apprendre,  &  y  auez  fort  bien  elle 
ihftruiâ:  :  &  auffi  que  pour  l'heure  prefente  le  pi  us  grâd 
piaille  que  puiffiez  prendre,ell  d'employer  le  téps  con- 
uenablc  à  lire  les  plus  excelles  autheurs  anciens.  Et  fuy- 
uât  celle  naturelle  excellence  de  voftre  diuin  efprit,  qui 
s'ell  toufiours  dele&é  en  la  contemplation  des  choies 
naturelles,  defquellesvous  elles  fouucrain  admirateur: 
après  qu'eultes  cogneu  le  defir  que  i  auoy c  de  paruenir 

a  iij 


EPÎSTRE. 

alintelfigencc  des  chofes  concernantes  la  matière  des^ 
mediçamens  Se  des  places  {.laquelle  le  ne  pouuoye  bon- 
nement acquérir  finon  parvne  loingtaine  peregrina- 
tion)il  vous  pleut  me  comander  les  aller  voir  es  régions 
loingtaines -,  Se  les  chercher  iufques  aux  lieux  de  leurs 
milTaoce,  chofe  que  ie  n'euffe  peu  ny  ofé  entreprendre 
fans  voftre  aide ,  fçachant  que  la  difficulté  euft  efté  es 
frais  Se  defpês,qu'il  m'y  a  conuenu  faire.  Parquoy  ayâr, 
auec  Payck  de  Dieu ,  Se  par  le  moyen  de  voftre  liberali- 
té,acheué  le  voyage,qui  ne  m'a  efté  moins  vtiie  Se  déle- 
ctable, que  difficile  Se  laborieux,  ôc  nç-.voulant  perdre 
ce  repos  &  loifîr  duquel  ie  fuis  à-prefenc  par  voftre  bé- 
nignité iouiflant  ,  iay  cy  réduit  par  eicrit  en  noftre-lan- 
gueles  chofes  mémorables  ôc  fïngularitcz,  félon  que 
les  y  ay  obferuees  &  choifies  ça  ôc  là,  ainfî  quelles  mot 
fembié  dignes  de  récit:  afin  .de  vous  faire  apparoiike 
que  ie  n  ay  du  toutfruftxé  voftre  in  tëtion.  D  autre  parc 
à  fin  que  noftre  nation ,  qui  fçaic  quelle  affection  vous 
portez  àJTvtilité  publique,  fe  fenre  aucunemée  du  fruiâ: 
de  cefte  miéne  pérégrination,  dont  vous  eftes  autheur: 
Se  qu  vn  bien  eft  d'autant  pIusiouable,qu'il  eft  plus  co- 
mun:  i'ay.traidté  cefte  mienne  obferuation  en  noftre 
vulgaire  François,  &  rédigé  en  trois  Iiures,ie  plus  fidè- 
lement qu'il  ma  efté  poiTiblern'vfant  d'autre  artifice  ou 
élégance d'oraifon,  finon  d'vne  forme  iîmple.,  narrant; 
les  chofes  au  vray  ainfi  que  les  ay  trouuees  es  pays-eftrâ- 
ges  :  rendant  à  chacun  ion  appellation  Franco:! e  ou  il 
m'a  efté  poifible  deluy  trouuer  vn  nom  vulgaire.  Des- 
quelles chofes,  poSblequclacognoifiance  n'en  fera, 
moins  vtile&plaifànre,  que  l'abus  ancien  prouenâtde 
ligaorance  de  pluileixrs,d6 1  i'ay  cogneu  la  vexûé^elloit. 


EPISTRÏ. 

dommageable  &  pernicieux.  Et  en  prenant  liberté  dV 
ûendre  mes  difeours  plus îoing,  ie  tfay  voulu  omettre 
quelques  topographies  5r  particulières  <Jefcriptions 
des  lieux  qui  m'ont  femblé  mémorables  > les  reprefen- 
cantàmon  poflible,&  mettant  quafi  deuant  les  yeux 
•des  Le&eurs^ainfî  que  moymefme  les  ay  veues.  le  tou- 
cheray  des  mœurs  ôc  façons  de  viure  de  maintenant  tac 
des  Turcs ,  des  IuifsJ,  que  des  Grecs.  Lequel  mien  petit 
labeur  d'aage  encor  iuuenil,  i'ay  bié  ofé  vous  prefenter, 
Monfcigneur ,  ne  prétendant  que  par  fi  peu  de  chofe  ie 
mepuifliacquiterde  mon  deuoir  enuers  vous  ,  mais 
fouz  efpcrance  qu  auec  l'aide  denoftre  Seigneur,  &  ce 
qu  il  a  pieu  à  noftretrefmagnanimejtresheureux^cle- 
ment  Roy  me  maintenir  au  nombre  de  fes  efcoliers,&  à 
la  bénignité  &  libéralité  de  monfeigneur  le  Chancelier 
François  Oliuier,  me  donner  moyen  pour  entretenir 
mes  eftudes.  Vous  voyreez,  en  bref  autre  mien  ceu-urc 
en  la  traduction  de  Diofcoride  en  noftre  langue,  &  co- 
mmîmes en  iceluypourfatisfaireàvofke  treflouable 
defir ,  fur  la  cognoiiTance  tant  des  plantes  étrangères 
dlrurope^Afie,  Se  partie  d'Afrique,  que  des  oifeaux^ 
ferpens,  poiiTons,  &  autres  animaux  terreftres  5  que  i  ay 
obfeué par  terre  &  met,  &  par  les  portséspaysduLe- 
uantme  propofant  en  tout  ce  que  ï en  eïcrijtnettre  cho- 
fe que  ie  naye  premièrement  veuërà  fin  quefuiuant 
voftre  commandement  l'ayant  mife  au  vray,  félon  que 
nature  la  produide 5  vn  chacun  ièpuiffe  pcrfhader  de 
affeurer  de  la  lire  à  la  vérité. 

Monfeigneur  y  ie  fupplie  ireshumblemem  le  Créateur 
vous  donner  en  fa  grâce  entière  projperité. 

®evoJîrematfon  en  l'abbaye  de  JknB Germain 
iespre^lespam.    1553* 


PREFACE. 


<T.^=5a^"??l  ^^^^fe^y  O  v  t  ainfi  que  les  hommes  font  compofizje  corps 
if'ffêff^  r%^^v  &  d'âme  ,  femblablemtnt  leurs  œuures  &  entre-  . 
^^fer/l  C  ^vSST  prinfes  fuynent  lesvnes  la  nature  du  corps  3  &les 
^■f"  ÏÂ  Î^K^Ér'^  Autres  ce'te  de  l  esprit  :  &Ji  les  œuures  du  corps  & 
CfS  Jfea3  ^tSSîL  ^e  ^e^}Ylt  fmt  excellentes  >  tout  amfi  font  de  me~ 
^$&$\  moire  perdurable.  Car  comme  les  hommes  [ont  »rf- 
saK^^  turellement  enclins  à  conuoitet  bruit  &  reno  ^pour- 
leur  gloire  ££r*  louangeiaufii  sefludlent  ils  de  ï acquérir  en- diuer fis  manières». 
Les  vnsparla  pmjjknce  du  corps  3  les  autres  parla  vivacité  de  leffirlt.  Les 
forces  d *  Hercules  j 'ont  célébrées  en  toutes  hiftoires  :  Alexandre  &  Pompée 
ont  obtenu  lefitmom  'de  o-radeur^gp  Ce  far  de  vaiUantife  &hardiejfe.  Mais- 
Blato>*s4rijlote:>&  autres  Philofophes  contemplatifs  ïont  acquis  par  lafuh' 
iihtédeleur  entendement  5  &-  profonde  érudition.  Les  autres  par  mefme 
moyen  ayansjuiuy  quelque  honefleeîfierance^  riay  ans  fait  difficulté  de  s' ex- 
pofer  itdiuers  périls  ^fentans  efîre  beaucoup  plus  raijonnable  de  pou-rchafi 
fer  leur  gloire  parles  facuke^de-lentendementy  en  ont  femblabiement  gai-* 
<mé renommée  immortelle.  "Dont  T>emocnte  en  porte  bontefinoignave  3/e«- 
quel  pour  le  grand  de Çtr  qu'il  auoit  £  acquérir  U  praçllque  des  fiiencess 
c'efi  k  dire  Inexpérience  aufii  bien  que  la  Théorique  ,&  principalement  d'*A- 
fironomie  ^7*  G eometrie  ^vendit fin patrimoine  a  Ces  frères }  afinèeploief 
l'argent  delà  vents  en  lointaines  pérégrinations  par des  pays  d' Egpptejn- 
die^&  Chaldeegour paruenir  aux  Gymnofophifles^ puis  après  retourner- 
en  ^Athènes  auec grande  reput aîion^  &y  efire  honoré  par  finfiçauoir.Plu" 
fieurs  autres  Je  font  grandement  illufirez^  pur  moult  petite  occafion%  mais 
non  fans  avoir  beaucoup  profité  k  ïvtilité  publique. Me  finement grand  n  fi- 
bre de  Roy  s  ay  ans  feulement  laijje  leurs  noms  à  quelques  plantes,  &  autres 
chofes^defquelles ils  furent  inventeurs  >en  ont  rendu  leur  renommée  tmmor- 
telîe.MitbridatesRoydePonty&de  tant  d'autres  prouinces  ,  encorquil 
mjî  obtenu  plufiems  viBbiresen  diuer  fis  batailles*  &  eu  fi  Ivfitge  &fcie~ 
€e de xxij.  langues y  ejquelles  il  oyoit  0*  refpondoit  à  toutes  nations  qui  luy. 
efioyem.fMeBes  ;  nés  'efi.  il  pas  rend®  glus  renommé  0plus  tUufire  pour 
■  ■  ,  ;  imfeuï. 


PREFACE 

<vn feuî médicament  qu'il  compofa ,  auquel  il  laiffa  fon  nom  2  que  pour  l'o- 
pulence &  grandeur  de  fon  Royaume}  Tandis  que  la  terre  produira  la  Cen~ 
toirejle  nom  de  Chiron  Centaurus ,  qui  fut  maijïre  dEfculaptus ,  demeurera 
imprimé  en  la  mémoire  des  hommes,  La  Gentiane  n'a  elle  pas  rendu  Gen- 
dus  Royd'Eficlauonie  plus  renommé ,  que  n'ont  fait  toutes  fis  richcffesïïLy- 
Çimachus  Roy  de  Macédoine  5  &  Eupator  qui  domina  en  Thrace^  n'ont  ?/%, 
pas  perpétué  leurs  noms  parles  plantes  ?  lubaRoy  de  Mauritanie  >  ^Achil- 
les  Grec,  TeucerJeRoy  Clymenon^  &  plusieurs  autres  grands  pe-r formages 
âyans  donné  leurs  noms  a  certaines  plantes  >  ne  s  en  font  ilx^pas  refirué 
éternelle  renommée  1  Grand  nombre  d 'autres  sefforcans  de  vaincre  toutes 
difficultés  3  ont  par  fimUable  defir  fuyui  loingtaines  pérégrinations-,  aufi 
quelles  frai eur  s  des  naufrages  en  la  perilleufi  me?  5o»  la  tourmente  des 
vents  impétueux  bat  tans  les  nauirest  &  brifians  entre  les  vndes  agitées  par- 
les orao-es^ula  crainte  de  perdre  leur  liberté  es  mains  des  Pyrates  mhumainsy 
ne  les  dangereux paff âges  parles  affres  rochers^  ne  ïintemperature  du  chaud 
excejiif  ou  de  l'extrême  froidure  fie  le$nuit~ls  obficurcies  des  nuées  pluuieu- 
Jês  fouldroiantes  de  [horrible  tonnerre  ^  ne  le  danger  de  paffer  les  deferts  in- 
habite^pour  la  crainte  des  beftes  fàuuages  3  n'ont  eu  pouuoir  de  reprimer 
ï ardeur  deleur  noble  courage  ia  enflammée  en  leur  cœur  généreux ,  qui /^ 
Payent  mis  fin  a  leur  délibération.  Vlyffis  en  a  ejléejhmé  &  mgé  de  tout  le 
monde  le  plus  fige  &  prudent  d'entre  les  autres  princes  illufires  5  tant  pour 
auoir  obfeméla  diuerfité  des  mœurs  de  plufieurs  hommes  >  que  pour  auoir 
veu  ht  diuerfité  des  villes  &  des- pays  effranges .  Uevo  dotefbwdore^  Stra- 
ho3^rrianus<>& plufieurs  autres  anciens  5  nous  ont  laijjéieurs  loingtains 
voyages  parefint  5  defiquel'xj-es  hommes  ont  receu  bénéfice  inefirmabie ^at- 
tendu que  tous  leurs  trauaux  tombent  au  foulagemsnt  0-  repos  de  la  posté- 
rité. Car  nous  efians  ànojire  ai  fi  en  lieu  de  fèureté^  nayans  crainte  des  pé- 
rils 0*  dangers,  li fions  Ihifioire  qui  nous  donne  cognoijjance  dinfimes  cho- 
fisacquifies  par  innumerables  trauaux  5  &  incredihles miftyss  d'autruy.  Or~ 
pourcequeles  chofies  finguheres  prinfis-des  plantes  3  animaux  5  g?  miné- 
raux pour  la plm  grande  partie  nous  font  enuoyees  parle  bénéfice  des  pe- 
re  <rr mations  3fiam  lefquelles.il  nous  efi  difficile.  &  dutout  bnpojîible  auom 
part  es  dons&  richefjes  des  terres  efiranges^  nous  dehberafines  les  aller  voir 
fur  les  lieux  de  leur  naijfiance.  Et  À  aufi  que  la  cognoi [fiance  iicelhs  nous- 
eufl  eflé  d'autant  plus  malaifie  yvoulufines  auparavant  tirer  la  perfpecliue-. 
de  leurs  effigies  des  Hures  de  nos  ancefires  5  pour  T imprimer  ennofîre  ideei- 
&  alors  ofafmes  entreprendre  les  aller  chercher  au  loing  par  les  pays  ejlra- 
gesfîefyeunsjMtrexeccmpsnfe  pom  nos  peines  que  de  les  voh  en  vigueur* 


PREFACE. 
Tuis  donc  quede propos  délibéré  nofire  defir  nous  droit  la, pour  les  troutw 
ou  par  monts ,  ou  par  vaux  ,  plaines  campagnes ^&  ombrageufi forefis  en* 
diuer fis  parties  du  monde ,  nofire  intention  napas  eflédu  toutfrujlree. 
Car  en  les  cherchant  &  recognoijfant ,  plufieurs  autres  chofes  d % abondant 
fie  font  offertes 4  nous  tant  en  ^éfie  qu'en  Grèce ,  dignes  d'efire  ccmmuni  - 
quees  a  noflrenation  :  lejqueîles  nous  a  fimblé  bon  obferuer  &  rédiger  par 
efcrit  ainft  fuccin&emenu  Car  fi  eufiions  défera  entièrement  toutes  les  cho- 
fis  que  nommerons ,  nous  eufiions  eu  crainte  d'ennuyer  le  leBeur  de  prohxi" 
te.LefqueUes  obforuations  auons  propofé  deferire  en  trois  lwres\  defquel-%lc 
premier  comprendra  quelques  fingularite\du  mont  ^ithos^deïisle  de  Lcm~ 
nos  &  plu fieurs  autres  chofis  de  Grèce*  Le  ficond  contiendra  la  defeription 
des  ruines  de  Trqye^  &Je  plufieurs  autres  villes  lUufires  en  ^éfie  :  &y  ad- 
ioufierons  la  defiription  d'vn  voyage  par -mer  3  de  Conflantinople  en  Ale- 
xandrie^ de  la  au  Caire  mfques  au  mont  Sinai&  delà  en  Ieruftlem^  & 
confequemment  a  ConfiantinopieXe  tiers  fera  entendre  la  manière  moder- 
ne de  viure  des  Turcs ycommeT auons  defiriteefiamrefidens  defiiourau  mi- 
lieu de  Turquie*  Et  afin  de  nelaiffer  le  leEieuren  doute  du  temps  auquel  auos 
efcrit  cefle  oh feruationjious  a  fimblé bon  faire  entendre  que  nofire  départ 
fui  du  Viuant  du  Roy  François  fan  mil  cinq  cens  quarante fix^gr  le  retour^ 
•l'an  mil  cinq  cens  quarante  neuf:  par  ce  moyen  tout  le  voyage  n'a  duré  trois 
ans  complets.  *Au  furplus  après  auoir  confideréque  les  hommes  croiffenten 
fçauoirde  plus  en  plus  les  vns  par  deffusles  autres  3  &  que  tout  ce  que  nous 
mettons  en  euidence  noyant  authorité  que  de  nous  mefmes  3  rieftgrandemet 
frifé^  il  nous  a  fimblé '  conuenable  amener  quelquesfois  les  pajfages  des  bons 
mtheursrfow  donner  authorité 'aux  chofes  que  dirons  par  cy  après. 


LÀ    TABLE    DES    CHAPITRES 

du  premier  Hure  des  fingularitez^bfèruees 
par  Pierre  Bclon  du  Mans- 

,  Ve  nature  coduifant  im  chacun  en  ce  monde  par  dî- 
ner [es  vqyes  If  ait  que  le  but  de  tous  tendâjtuerjes> 
fins,  chapitre  premier. par. i. 

'  Quon  ne  Je  doit  trop  fier  aux  appellations  des  cho*- 
[es  ^encor  quelles  foyent  vulgairement  nommées  y 
fi  elles  ne  font  bien  correspondantes  aux  defcrip*- 
tions  des  anciens ,  &  conuenantes  lia  chafeqjéon 
defcnpZr  chap.it. pag.  3. 

JLe  portrait!  du  Platane  Pa^* 

Brief  difcours  des  fengularkezi  de  Crète  r  &  particulière  ohferuation  des 
_  moeurs  des  Grées.  chapaiipag.  5^ 

Que  les  Grecs  efians  tributaires  fous  leioug  des  feignems  efirangevs-^cùm- 
*  portent  félon  hcoufiume  de viure  de  leurs  faperieurs.  cha.  tiii.pag.il ^ 
Ohferuation  des  principaux  lieux  de  ïisle  de  Crète.  chap.v.pag.i^. 

Du  faux  labyrinthe  de  Crète:  s&  des  ruines  de  quelques  villes  deïide+. 

chaprvL  ■■■—'  B^1?* 

Comment  les  Crêtes  font  le  Ladanon.  »  chap.vir.pag.1%  *. 

Wvn  poiffon  nommé  S  carus  ^moult  fréquent  au  riuagede  Crète  ^toutes,- 
fois  rare  es  autres  contrées.  chap.vi11.pag.19*. 

Les  noms  François  de  plu fieurs-e >fpecesiïoifeaux.ûhferu£%jn  Grèce ^  &  cïL- 
fere^auec  leurs  appeÏÏatiûns  antiques^  •  cbapjx.pag.zu 

Le  portrait!  du  Merops.  pag.  2.3. 

Les  noms  Grecs  de  plufieurs  autres  01 féaux ^confere^uec  leurs  appeUams- 
Françoifes.  chap.x.pag.z^. 

Les  noms  antiques  &  modernes  tant  François  que  Grecs  %de  plufieurs  au- 
.  très  oi féaux. chap. xi.  pag.zj^ 

"Befcription  dvn  petit  animal  commun  en  Crète  ^  nommé  phalangion^ 
chap.  xiu  p*g.  $<à» 

Wune  efpece  de Roue  fauuage  frtquent m  Creterque  les  François  nomment 
vnBoucefiain^  cèap.xiiLpag^. 

Le  partraiEiduBoucefiain^.  _£•*£•  3>* 

2> 'vn  Mouton  de  Crète  nomméStrepficherQSiauecvn  difeoursquim feigne 
que  cefi  que  Licorne.    "  '  *  ■  cbap.xiiii.pag.%. 

MrmiBde  Strepficherou  pag.56^ 


LA      T  À  B  L  E 

Tfvne  pierre  de  Crète  dont  Solin  a  fait  mention,  nommée  Da&ylus  idem. 

chapitre.xv.  Pag& 

Defcriptiondu  plus  haut  mont  de  Crète  3  que 'tes  Grecs  nomet  vulgairemet 

Vfûoritl.anciennement  IÀa\&  les  plantes  quiy  croiffent.ch.xvi.pag.yj>. 

Les  nomsdesarbres  &  herbes' exquifes  qui  naijfent  fauuages  autour  dumot 

Jck:0^hmanier€dci^UirU^£r4»e^/€arlatte:  chap.xvij.  pag.59. 

Brief  récit  de  plusieurs  autres  plates  fauuages  de  lafufdiSle  ifle.cxviiLp.  42-. 

Ve  laMaluaifie  de  Candie  nommée  Pr -omnium  vmum&  quelle  n'eftfai- 

te  ailleurs.  ckap.yux.pag.4j. 

Del*  ancienne. manière  de  danfermec  les  armes  ^nommée,  Pyrrhtcajaitatio. 

chapitres*  .  '•'■',■■■    Hb'48*' 

Quetout  homme  ayant  vn  commandement  ou  paffeportd'vnBacha^oudu 

Turc3efiant  habillé  À  la  mode  des  Turcs ^menant \% me. guide  auec  foy^pom 
fermr  £  interprète  ou  truchement  ypeut  cheminer  feurement  par  tout  le 

pays  des  Turcs.  ~  ,,chap.xxi.pag.49* 

Que  les  Turcs  efcnuentiwe  mefme  Atâton  w*vocabk 'de leurs  lettres  en 

plus  de  vingt  fortes.  .,.       chap.x%it^ag^ï. 

Defcriptiondes  différentes  espèces  des  terres  fellees  3  &  des  féaux  qu'on  a 

imprimezdeffus.  .  chap.xx1iLPOg.5z. 

Voyage  de  Confiatinople  à  Lemnosjfie  en  la  mer  Bgee^  nommée  en  vulgai  - 

reltalienStalimene.  chap:x%i'm.pag.^, 

Defcriptiondes  villes  &  mines  de  Lemnos.  cbap.xxv.pag.ff* 

Les  noms  des  plantes  communes  naiffantes  en  XrsU  de  Lenos.ch.xxvi.p.59. 
Queles  grands  fiigneurs  de Turquie viuans  aleur  mode,  fe  nourri ffent  me- 
caniquement \p 'ay ans  aucunes  délices.         .  .  .-.    thap.xxvn.pag.6z. 
Ladefcriptïodu  lieu  en  Lenos  ou  lopredla  ttrrepGiirfeeUer.c.xxviu.p.64. 

vqy  les  chapitres.zz.z$.i 4.2,5. &  16. touchant  le  pays  deLemnos. 
■Que  les  chofes  viles  &  de  petite  eftime  font  rendues  precieufes  par  ceremo  - 

nies:  &que  les  chofes  de  petite  valeur  prennent  autkorité,eftans  anoblies 

dehfuperftitton.  ^  jhap.xy.ix.pag.  6$. 

Zes  nomsdes  poiffons  freques  au  riuage  de  ïisle  de  Lenos.ch.xxx  ,pag.  6%. 
De  la  o-umme  de  Codnlle^  autres  chofes  fmgulieres^auec  les  noms  des  fer- 

pensqu  on  cognoiflviure  en  lisle  deLemnos.  chap.xxxi.pag.-jo. 

Le  portraiBduferpentCenchris.  P^'7°* 

De  toifire  qu'on pefçhe  communément  au  riuage  de  ïisle  de  Lemnos. 

chap.xxxii.  Pjg'72- 

D'vne  fiurcedes  baings  chauds  en  Lemnos&  des  monajî  ères  des  religieux 

Grecs.  :chap:xxziii.pag.'7$« 


DES    tHAMTRESi 

Voyage  delemnoscntijledeTaJfos.    '.-...-  cb^plxxxiiifpag.j^ 

la  defcription  du  mont  ^ithos  :  &  éscbofis  mémorables  qrtmy  trouué, 

ehap.xxxv.  .  PaS*7^ 

QtCjlyapourkiourcthuy  de  cinq  a  famille  Caloieres  Grecs  yviuas  aumot 

^tbosyéff>arsç*er  laparlesmonafleres.  cbap.xxxvLpdg.79>  ' 

:Que  tomlesmonafleres  du  mont  ^étbosfont forts  pour  refifter  aux  putes* 
>&quclesPyrates  ne  leur  font  pas  grandes  'violences.  çbjcxxvif.pag.'J,9% 
Que  leniont  \Athos  efl  eftimé  en  telle  réputation  aux  Grecs  ,  comme  Rome 
aux  Latins.  cha.xxxviijpag.So. 

lesnoms  de  tous  les  monafleresfcs  nombrant  par  orkefommençant  a  ter- 
^referme,  ,:        .  .:  V       '  .  —  :;%.  :  /-         cha.xxxix+pagr&<u 
Jtaifbnpouvquoy  plufieurs  Hures  ont  efléruîne^&perdM-enGr£ce:&de 
la  fondation  des  monafleresdumont^ithos.  cba.xl.pag.2p 

Be  quelques  cerimonies  en l'Eglifedes  Grecs.  &  de  tignorance  qui  efl  entre 
■;  lesgemiEgltfeenGrece.     -         .  ^  cbajdt.pag&$. 

&e&plantesfengulieresdu  mont  ^hos,pitouemmmmrdlememfansefire 
y  cultiuees.  -       -'■■..■  ééjdij.pâg^ 

portraiB  de  l'herbe  nommée  ^ipios.  p*g$>  S. 

les  noms  des  arbres  toufiours  verds venants  famages  par les  vdlees-dumot 
*Athos.         .        :  xhap.xliij,pag:8& 

les  noms en  gênerai  des<trbres  (^arbriffeaux^  quauons  obfcruczjn  àuers 
pays  efiretovfwurs  verds.  ^  xba.xI1iy.pag.S9» 

PortratâdelaSwffe.  P*g-9°* 

Obferuatiûn  désireux  circomoifins  qù on  peut  regardereftantfirlefatftt 
.  du  mont  ^étbos.  cha.xlv.pag.9 1-. 

les  Cdoieres  ou  moines  du  mont  ^ithos  font  bs  arts  mécaniques,  -ebapt- 
trexlvï.  f*g~9A? 

®es  Cancres  £*au  douce jpuife  tiennent  é  raijfeduxparkstnontagnes^éf- 
.  ferentslno^efcreuijfes.  .chajavu.pag.96-. 

VeFeflrangcmaniere  de  viure  des  religieux  Grecs  :  &  hleur aufieï-efaco, 
fuperflition&  cérémonies  touchât  le  boire  &  manger.chajclviij.fr.  96. 
Voyage  dumont  *4tbos  a  Salonify:  &  des poiffons rares  quonypefche. 
chap^xlix.  .  ./*g;  9& 

PortraiB  de  la  Lamoufle.en  François  Sauterelle.  pag.99. 

Des  mines  d'or  &4iargentdugrandfiigneuri  ^  ample  difeatm  detorï* 
.  ginedufincr.      '     '  cha.Lpag.ioQ* 

^utredifcours  détordu  Veru^&  des Indes^&aupU manière  comment 
ksmetalkires  affinent  for  dont  lesducats  dugrandTurcfontforge^  & 

e    ty 


£  A      T  ABlî 

quHlny  a  que  ivne forte  d'or  de  ducat  en  toute  Turquie»  chaJi.pag.lo^ù 
Doteft  venu  toccafio  des  fables  qd an  a  rjicotees  delà  toi  fan  dor.c.lij.p.lo  S 
Defcription  de  plusieurs autres jwgulariîezjrouuees es fufdites  mines  3  ^* 

automnes  montagnes  dudit  pays,.  chajiij.p.  1 1 4. 

La  figure  du  Cotiledon,  pag.  118. 

£es  noms  de  pîufeurs  bejhesfkwages*.  cha.  liii)  .pag.  119* 

PortraiB.  du  Chamois  pag.  i  2  o  • 

PortraiSïdu  Trageî'apbus^ou  houe  ceruier.  pag.i22+ 

VqyagedeSiderocapfiaBucepbalay  &dela  rimer  e  Strimone^  &  despoif 

fônsqucnypefcbe.  cha.lvfag.123. 

Defcriptiondeplufieurs  anùquiîezj&  ruines  des  villes  en  Macedome^^ 
.   dePhilippi&Vbihppopoû^  cha.lvi.pag.126* 

T>efcription  de  la  ville  de  Bucephala^  qui  sappeïïoitauparauant  Chalafirea, 

maintenant  la  CauaUe.    .  cha.lvii.pag.129* 

Que  les  murailles  qui  durent  encor  de préjentfur  le  mont  Hemws.mwjhrent 

la  feparati  an  des  forces  de  Macédoine  &  de  Thrace..  th.lviii.pag.  1  fLÏ 
Quil  n'y  dit  aucunes  hojîeleries  en  Turame^ak  qu'on  trùuue  des  hofyltaux 

a  fe  loger.  ckaJix+pag.i$2\ 

J^ugranichemmdela'ÇauaUekConfiantinople^  cba.lx,pag+ï3$+ 

D'vinMresnancienne place.enThrace^iûmmee  CypfeUa;  avec  lamanterede 

fmeléun%       »-:\  ■    '        -        .      ;   ..  ~(à&Jbci.%agiyi\ 

"Btfgrand  chemin  pafftnt  quonfaifoit  anciennement ^  venatiè  KomeÀ-Co- 

ftantinople.  chajxii.pag.ï^ 

T}eUrm§n,rwnnueli4£r'fy  &  des  pillcries  des 

Turcs*:  chaJxiiLpag.iqi. 

Que  plu fems  nattons  ien  vont  hors  de  leur  pays  en  certain  teps  de*  tannée^ 

0*puis  s*en  retournent  en  autre  faifbn.  chamhiiii;pagrî^s . 

Que  les  arbres  nvmme%Terebintbes  portent  vne  efpece  de galles \qui font  en 
.  grand vjage  en  Turquie.  cbaJxv.pagjL^^ 

Que  lesTurcsaUanspar  pay s font  petite  déîfenfe.  cha.lxvLpag.ltf» 

Qve  les  Turcs  font-gens  quifeauent  mieux  charger  &  dejeharger  bagage  en 
..  allant  par  pay  s.  cha  IxviLpag.i^.6* 

De  la  Ville  qui  efloit  and ennement  nommée  Perinth^maintenat  RoAofte, 
&deHeradec.  choix viiJ.pag.ï^ 

De  la  trejgrandefileçe  &modefùe  des  Turc&aUansparpaysxh.lxix.pmi^j\. 
J>e  la  ville  de  P  ère  &  de  Confiantinople.  }  chdxx.pag.l$o. 

J/efcri-ption.des  rames  de  Nicomedie^  de  ce  qui  y  eft  maintenant*  chapir 

Vtelxxi^  pag.L$2,, 


t>  £  S     CH  A- M  T  %lf. 
Que  les  nations  du  levant  aiment  mieux  manger  du '  poijfon  que  de  U  chair \ 
cbap.lxxij.-  P*g-ip- 

Que  la  manière  de  pefcher  au  Propontideefldemoult grand  profit,  chapitre. 

txxiif.  t  Pa&l*± 

De  plusieurs  autres  manières  depefchér  au  Propont idem      chapitre  Ixxuij. 

pag.l$6. 

De  lamanieredepefcherla  nui&aufeu  auec  le  Tridents&  deplufieurs  au- 
tres du  Propontiâe.  chap.lxxv.pag.1%9. 

Des  antiquttc^&plufiturs4Utresfingularite%jlc  Confiantinople.  chapitre 
Ixxvi.  pag.162. 

ZeportraiBdelaGenette.  $a&lH* 

Fin  de  la" table  des  chapitres  du  premier  Tiurc. 

LA    TABLE    CONTENANT    LES 

chapitres  du  fécond  liure» 

i  Ve  les  voyages  faits  par  mer  font  de  temps  incertain  :  &  le 
voyage  de  Confiantinople  en  Alexandrie,  chapitre 

premier.pag.l6  9. 

^$Des  villes  antiques fituees  a  la  riue  du  Propantidedu  cofiéde 

ThraceJ?  de  lavilledeGallipoli.  chap.ij  .pag.ij  a. 

Defcription  du  Bofyhore  de  Thrace  y  0*  des  thafteaux  nomme^Sejlus  & 
,  *sébydœ^&  des  ruines  de Scamandria.  *  chap.iij.pag.lj  2. 

PortraiSidclamerHeïïefponte&deTroyc*  pag.ij^ 

VortraiSîdetarhrepignefauuage.  P*g'l75- 

Vartkuliere  deferiptio  du  chajieau  d\^ihydm^ui  eftl'vne  des  clefs  de  Tur* 
quie.  chap.iiii.pag.ij6. 

Quonpeut  voir  les  mines  de  Troye  clairement  de  la  mer.     cba.v*pag.  1 7  8. 
Defcription  des  ruines  de  Troye*  ch0.vi.pag.ij9. 

Delisle  de MeteUn,&  du  Promontoire.  cha.vii.pag.l'è$+ 

SuccinBc  defcription  de  ceqtfauonsobferuéen  l'islc  &  ville  de  Chto  :  & 
qtfonnetromeleMaflichquelL  cè^.viy.pag.iBy. 

Delisle  de S^mos.  '  cha.1x.pag.1SS. 

Difcourspour  diffinir  que  cefi  que  Courfaire.  cha.x.pag.iS8. 

VjelisledePathmos.  cha.xi.pdg.19  3, 

Del'kledeCo^ays  d'Hyppocrates.  cha.xijfag.194. 

Singularite^objèruces  en  Rhodes.  cba.xiîj.pag<i$^ 


< 


nu 


Ii  A      T  A  IL  E 
Màdefîtedesfilùts  Turcs  :  0*  d'vnferpent  nommé  îaculm:  <&  de  toifeau*. 

nommé Onocrotalus^  ch4.xiiij.pcig.19ji 

LeportraiBduferpentlaculus.  pag.içS*. 

Voyage  de  Rhodes  en  Alexandrie.  cha.xv.pag.  19  9. 

Que  les  mariniers  nauigeoient  anciennement  fans  F  aiguille  &  quadrants* 

fans  auotr  vfage  de  la  pierre  d'aimant.  chap.xvi.pag.  1  o  1. 

Quil  n'y  a  que  deux  grandes  bouches  âuNilnamgables^  ou  les  grands  vaif- 

feaux  ronds  puiffent  entrer.  cha.xvii.pag.  2  o  2» 

Sommaire  du  chemin  de  Conflantinçple  en  Alexadrie.  ch.xviij.  pag.  203. 
P«  deuxwiUes  d Alexandrie  june  en  Egypte  3  0*  l'autre  qui  ejloit  Colonie 

des  Romains  en  Phrigie.  chap.xix.pag.2 o 4, 

J>ortrai£l  de  la  ville  d Alexandrie^  PaZ'1Q  &•■ 

P e  la  befle  anciennement  nùmmee  Hyena^<&  maintenant  Ciuette.cha.xx» 

PortraiçtdelaCiuette*  pag.  20$. 

Difcours  de  diuerfeschofes  d'Alexandrie:  &  des  obelifques^&  gros  colojfe^ 

des  Egyptiens»    ■  chap.xxi. pag.  20& 

Que  Jchneumon  efi-encor pour  le iourdhuy garde prmé en  plufieurs  maifons 
-  (t Egypte^ le combativn  autre qui 'efijujit  nommé 'Jchneumon Vefya 

auec  lePhalangion^,  cba.xxij.pag.iu*. 

Portraiêi  du  Rat  de  Pharaon,        "  pag.212.. 

D es moeurs  des  Alexandrins:  &  des  dejèrts  de  fain&Macano  :&  de  plu- 
fieurs autres  chofesd  Alexandrie.  cha.xxiij.pag.ziq.. 
Voyage  delà  ville  d'Alexandrie  au  grand  Caire.       chap.  xxnïypag.  2x6. 
Des  chofesfinwlierestrouuees  entre  la  ville,  dï Alexandrie  &  laviUe  de 

Rofette.  chap.xxv.  pag.  21 7. . 

De  la  ville  de  mofette  ^àla  bouche  du  Nil  nommée  Qftium  Canopicum* 

chap.xxvi.  pag.2iç*„ 

DespefcheuYsduNiL  -  chap.XXviLpag.220^ 

Voyage  par  eau  &e  Rofette.au  Caire  :  &■  de  plufieurs  chofes  qui  font  fur  le 

■NiL  chap.xxviihpag.22U. 

Des grandes  villes  &  villages  et  Eoypte,fituees  far  le  Nil  le  long  des  riua- 

ges^cherchansk  commodité  de  l'eau.  chap.xxix.  pag.  2.23. 

Que  le  Nil  mis  en  comparai foy  eji  quafi  femblable  à  la  riuiere  du  Pau.: 

chap.xxx.  pag.220,. 

Quelques particuhrite^Je l 'Egypte &  des  Egyptiens;  ch.xxxi.pag.  227. 
Defcripiion  de  plufieurs  oi féaux  Çg  autres  animaux  oh  femelle' long  du* . 

Nd*._  "    '  .■-..■-•    çfr^xxxii.  pag.22%. 


D  E  SC  H  APIT  R  E  S. 

PortraiM du  Crocodile :■  pag.z$o. 

De  la  différence  des  bateaux  qui  nauigent  fut  le  Nil:  &  des  arbres  plus  com- 
muns qui  font  ésiaràins  du  Caire.  chap. xxxiii. pag. z$î. 
Que  plufieurs  ayentmd  penfé  que  les  Chameleons  vefquiffent  du  feul  vent 
.  fans  rien  manger.  ^  chap.xxxiii.p4g.z12 
De  nofire  arriuee  au  Caire  ?  &dccc  que  nous  y  auons  veu.  chapitre. xxxv. 

...  ^-z35. 
PortraiB  des  femmes  &  hommes  du  Caire  &  d Egypte.  pag.  ztf.z$6. 
Des  maifons  du  Caire ,  des  iardinages  3&dela  tour  qui  enfeigne  la  creue  du 

Nil  pour  fçauoir  la  fertilité  de  l'année.  chap.  xxxvi.pag.  239. 

Tortrai&duCaJïiev.  pag.z^o. 

Defcription  de  la  ville  du  Caire  &  de  fin  Chafleau.        chapitre.xxxvii. 

pag.  24Z. 
PortraiB  du  Sycomore,.  pag»z44* 

D'vn grand  conduiB  d'eau  qui  ejî  entre  les  ruines  de  Babylone:&  de  la  vil-' 

le  du  Caire  qui  porte  l'eau  du  Nil  la  haut  pour  abbreuuer  le  Chafieau. 

cbapitre.xxxviii.  Pa^z4S* 

Defcription  du  Baume.chap.xxxix.  ~  pag.z^6. 

If  vn  grand  obelifque  tout  droiB  auprès  du  Caire,  &  des  arbres  naiffans 
dedensleiardindelaMateree.  '  cbap.xl.pag.24s>. 

Que  telle  manière  de  gentramaffee  que  nommons  Egpptiens%font aujîibien 

trouuez^en  Egypte  que  es  autres  pays.  chap.xli.pag.z5i. 

Obferuations  des  Pyramides.  c0ap.xlii.pag.z5z. 

Obferuation  de  la  féconde  Pyramide.        '  .       chap.xliii.pag.z55. 

De  la  troifiefme  petite  Pyramide  iEppte.  chap.xlmupag.z56. 

De  plufieurs  autres  Pyramides  d  Egypte.  chap  .xlv.pag.2  57. 

Du  grand  Coloffe  nome  par  Hérodote \Andro$~fhinx&  par  Pline  Sphm- 

ge,  qui  efl  en  fculpture  deuant  les  Pyramides.  cbap.xlvi.pag.z5S. 

De  la  Mumie:&  de  l'ancienne  manière  de  confire  ou  embaumer  &  en/eue- 

lir  les  corps  en  Egypte.  chap.xlvii.pag.z6l. 

Des  violes  des  Egyptiens.  chap. xlv'ui. pag. z6z. 

De  la  Giraffeque  les  arabes  nomment  Zurnapay&  les  Grecs  &  Latins 
Chamelopardalis.  chap.xlix.pag.z6$. 

PortraiB  de  la  Giraffe/  ^  pag.z6$. 

Vvn  moult  beau  petit  boeuf  à  Afrique  3  que  les  anciens  Grecs  nommèrent 
Bubalus.  chapl.pag.z64. 

PortraiB  du  Bœuf  d* Afrique.  p*g.  166. 

&vne  autre  manière  de  Cerf  rejfemblant  à  vn  Vain ,  anciennement  nomé 


LA     TABLE 

\Axts ,  &  de  la  Gafclle  anciennement  nommée  Orix.   cha.U  .pag.zGj. 
Des  baflelleries  qu'on  fait  au  Caire  3  &  d'une  efyece  de  Guenon  nomme 

Callitnches.  chaJij.pag.26S. 

Detapprefl  que  font  ceux  qui  vont  en  voyage  du  Caire  a  la  Meque. 

cha.liij.  pag.zà}. 

La  defeription  de  noflre  voyage  du  Caire  au  mont  Sinai  auec  vne  recepte 

finguliere  pour  apprefeer  la  chair  à  gens  qui  vont  en  voyages  loingtains. 

cha.lnij.  pag.269. 

Figure  de  la  Vipère.  '  pag.zji* 

La  defeription  ivn  puis  trejprofonden  F  trahie  deferte. cha.lv. pag.zy  5. 
Des  plantes  qui  croijfent  parles  fablons  autour  du  Sues,  cha.lvi.pag.zj4. 
PortraiB de t acacia-  ..  pag.zjq. 

Z>e  douze  fontaines  ameres  de  Moyfedont  Pline  a  fait  mention. 

cha.lvij.  Pag-275* 

Vu  Canal  de  lamer  rouge.  cha*  hii/pag.ij  6. 

Tfvn  arbre  de  Rhamnus  qui  <roifl  aux  riuages  de  la  mer  Rouge. 

cha.lix.  pag.ijj. 

Deplufeeurs  arbres  d '^érable  3  &  de  ceux  qui  portent  la  laine:  &  des 

Chameleons.  cha.lx.pag.zjZ. 

PortraiB  du  Chamèleon-  pag. 278. 

Du  premier  village  que  trouuafmes  aîlans  au  mont  Sinai.  cb.Hi.pag.z%o. 
Du  mont  de  Sinai.  cha.hifpag.z2z. 

'Defeription  du  mont  Sinai&  du  mont  Oreb.  cha .hitj  .pag.2%3. 

PortraiB  du  mont  de  S  mai.  pag.  2  83 : . 

DW  autre  monaflere  fitué au  pied  du  mont  Orebs  &  du  rocher  dont  ijiit 

ïeau  aux  enfans  ilfrael.  cba.hitij.pag.2X4. 

Des  places  £7*  lieux  JainBs  en  la  montagne  de  Sinai.  cha.Hv.pag. 2%  6. 
Voyage  du  mont  de  SmatauT or.  cha.Uvi.pag.2Sj. 

Defeription  de  la  ville  &  chafleau  du  Tor  :  &  des  fmgularite^  du  nuage 
,  delà  mer  rouge.  cha.lxvij.pag.2%9. 

Desbateaux  &  barques  de  la  mer  rouge.  cha.hv1ijpag.29L 

Computation  du  chemin  pariournees^du  Tor  au  Caire,  cha.hix  .pag.  2  93 .  ' 
Du  port  du  Sues  au  nuage  delà  mer  rouge.  cha.hx.pag.294. 

PortraiB  du  ferpent  allé.  p*g  •  2 9  6 • 

D  es  vafes  de  Porcelaine  que  loved  au  Caire^<&  duNitre.  ch.hy.i  pa.29%. 
Que  timbre  iaunenefl  minerai  comme  plufieurs  onteftimé,  ams  eftgum- 

meiarbre.  cha.hxfpag.299. 

De noflre  départ  d*  Caire  pour  aller  en  Ierufalem.     cha.hxiifpag^oo. 


DES,    CHAFITRES. 

D'vn petit  arbre  d'Egypte  toufiours  verd ,  qui  teint  en  couleur  rouge. 
..     chapitre Jxxiiij.  pag.301. 

De  plu fieurs  bourgades  en  Empte>fkr  le  chemin  de  Iemfalem.  chapitre 
.   hxv.  .'■'•*■  ^.302. 

De  ïejlrange  &  difficile  chemin  qui  efi  entre  le  Caire  &  Iemfalem. 

chalxxvi.  '  pag.  304» 

Du  nitre  &  d'vn petit  Cancre  de  la  plus  merueilleufe  compkxion  quenul- 
.     le  autre  chofe  qui  foit  en  nature.  cha.  hxvij.  pag.  30  6. 

De  plufieurs arbres ,  oï féaux  ^*  autres  chofes  fmgulieres  produises  en  la 

terre  de  Palefiine.  cha.hxviij  pag.30%. 

De  la  ville  de  Ga%am.  cha.hxix.pag.  3 10» 

De  la  ville  de  Rama.  cka.lxxx.pag.iit. 

De  Iemfalem^ui  ejl  fituee  entremontagnes.  cha.lxxxi.pag.312. 

Briefue  computation  du  chemin  Centre  le  Caire  &  lerufalem.cha.lxxxij,. 

SuccinSîe  defcription  des  fainBs  lieux  de  Jerufalem.  ch.lxxxiij.pag.31 4. 
Du  fepulchrenojlre  Dame  en  la  vallée  de  lof aphat.cha.lxxxïiij.pag.316. 
Du  fepulchre  de  noflre  Seigneur:  &  des  ruines  de  Iemfalem.   cha  Ixxxv. 

pag.31^ 
Du  defert  ou  fut  tenté  nojlre  Seigneur  :  &  dufleuue  lordain. 
'...- cha.hxxvi.  pag.  319^ 

DeBetbleem&Ebron.  cha.lxxxviji.pag.322. 

Voyage  par  terre  ferme  de  Iemfalem  en  Conflantinople:  &  quels  awres  ef~ 
pineux  font  frequens  au  territoire  de  Ierufalem.  ch  a.hxxviif.  pag.3  2  J. 
Defcription  d'vn  homme  ^Arabe&  de  Nazareth  >  ou  fut  annoncé  a  nojlre 

Dame  quelle  conceuroit  nojlre  Seigneur.  cha.hxxh.pa.32j. 

Vortrjtic~i  d'vn  villageois  ^4vabe.  Pag'329' 

Du  lac  Gène  far eth  &  mer  Thiberiadis.  cha-.xc.pag.33  o  ». 

Obferuations  des  chofes  en  Damas.  cha.  xci.pag.332. 

De  la  monflre  de  ceux  qui  partent  en  trouppe  de  la  ville  de  Damas  pour: 

aller  à  la  Meque.  ch^xcif-pao-^S. 

Tortraic~id'vnfeigneur«4rahe.  P^g'SS?' 

Des  bajlimenS)&  plufieurs  autres  fngularîte^de  Damas.ch.xoif  p.33%. 
Voyage  de  Damas  au  mont  Liban.,  cha.xciiij  .pag.  3  40 . 

Des  antiquité^ de  la  ville  de  Cefaree  3  maintenant  nommée  Balbec. 

chap.xcv.  pagip^T. 

Que  l'ancienne  manière  de  manger  les  fèrmnces  de  Xerebinthes-  durèemoy- 

pQHrk.imrdhuyen.Cilkie^*Syrk^  cha.xcvi.pag^^ . 

'""  ~~  ~~"  i-  *, 


L  A     .T  A  B-L  E      - 
Delà  ville  deHamom^anciennsment  nommée  Emijfa.chaxcvîj.pag  545*. 
Des  tauernes  de  Turquie^ou  les  Turcs  boyuent  vne  manière  de  breuuage^no-  • 

tné  Pofia  ou  Zitum  5  différent  ala  bière.  cha.xcv1ii.pag.y46* 

De  U  ville  de  Tarfus ,  dont  efloit  fain£h  PauL  chap.xcix.pag.  347. 

Des  plaines  de  Cilicie:  &*  des  ciflernes  encauees  en  terre ,  qui  fe  remplirent 

d'eau  de  pluye.  '  cbap.cpag.349. 

Defcription  des  ruines  de  Marat.  chap .  ci.pag  .350. 

Delà  ville  de  Hdep  anciennement  nommée  Berrea  :&dela  Rheubarbe 

&Rbapontic.  #  cbap.cii.pagtfi. 

Spéciale  defcription  des  rues  félon  quelles  font  faites  es  villes  &  villages 

àeTurquie."  ^  chap.ci1i.pag.tf4. 

Voyage  delaviUe  de  Halep  en  ^dnîioche.  chaxiiii.pag.^. 

Delavilled'^tntioche.  cba.cv.pag.3y7. 

Obferuation  touchant  les  fingularite%j£^4ntioche.  cha.cvi.pag.3y9. 
Du  paffao-e  par  dejfus  le  plus  haut  du  mont  ^émanus.  cha.cvii.pag.3  60. 
De  la  ville  anciennement  nommée  ^idena  :  &  d'vne  befie  £^4 fie  nommée 

^4  dit  cba.cviii.pag.36  2. 

Voyage  par  dejjùs  le  montTaurus.  cha.cixpag.36y. 

Voyage  d'^dtdena  pour  pajfer  le  mont  Taurus.  cha.  ex  .pag.  36%. 

VortniSi  du  Cèdre.  pag.36%. 

Pertraiêl  du  Sapin.  ^  Pag'37°* 

Des  baings  chauds  naturels,  qui  font  fur  le  mont  Taurus  \&dela  vilie 

iHeraclee.  ^  cba.cxi.pag.3j0. 

Voyage  £Heraclee  a  Copte:  &  des  Cheures  qui  portent  la  fine  laine  du 

ctameloU     _  cha.cxii.pag.3j2. 

Delà  ville  iïconium.  cka.cxiii.pag.5jq.. 

Des  Orfeures deTurquie.  cha.cxiiii.pag^j^. 

D*U  ville  i^tchara.  cha.cxv.pag.y/6* 

Fin  de  la  cable  des  chapitres  du  fécond  liurc. 

LÀ    TABLE    CONTENANT   LES    CHÀ- 
pitresdu  tiers  liure. 

s  particulier  difeours  touchant  le  commencement  de  l'origine 
*      des  loix  des  Turcs.  chapitre  premier. pAg.37 9* 

?  De  quelle  aftuce  vfa  Mahomet  au  commencement  enfedui- 
^w^-^J     fmt  h  peuple  ignorant  pour  ï attirer  àfaloy.&  de  ceux 
qui  luy  aidèrent.  chaji.pag.  381. 


D  ES      CH  A  PITRES. 

Que toute la  croyance  desTurcs  ejl contenue ml **4lcoran  5 fait par  Maho- 
.  met»  cha.iij.pag.^2. 

DeSuerfisfêBes  '  qui  font  furuenues entre  les  Mabometiflcs  fm  le  fut  de 
leur  religion.  chd.iiij.pac.3S4. 

De  la  crainte  du  tourmet  £  enfer jiont  Mahomet  a  eîfouuentéles  Turcs:  & 
de  leurs  fepultures.  cha.v.pdg.$8$. 

D  e plufieurs  chofesfantafliques moult efiranges que  Mahomet aefcrit  ton-- 
•   chant  le  iugement.  cha.vi.pag.3%5. 

~£ldifant  voyage  que  Mahomet fein6l  auoir fait  en  paradis  la  nuic~l  en  dor- 
mant &  des  grandes folies  qu'il /acompte touchant  leparadis  des  Turcs, 
chapitre vij.  /*g>3.?^ 

Dont  vient  quelaloy  de  Mahomet  a  permis  aux  Turcs  Garnir  compagnie 
auec  les  efclaues femelles ,  fans  auoir  efgard  de  quelle  religion  elles Jont. 
chapitre  viij.  Pag-39  °  • 

Brïef  récit  du  paradis  feint  tel  que  Mahomet  l'a  promis  aux  Turcs ,  &  des 
chofesfantafliques  qu'il  racompte.  cha.ix.pag.^gu 

Dumaridge  des  Turcs ,  ç£*  dont  vient  qu'ils  ont  le  congé  de  fe  marier  aqua- 
trefemmes.  cba.x.pdg.394. 

Zd  manière  de  nourrir  les  enfans  en  Turquie.  cha.xi.pagi  9  5". 

Za  canelle  des  ma  (les  &  femelles.  »  pag.3  9  6. 

Des  arméniens  ,*#*  plufieurs  autres  nations  ChrefîiennesviumsenTur- 
<  quie.  '  *    cha.xij  pag^çj. 

Des  Juifs  hahitans  en  Turquie.  cha.xiii.jMg.  3  99. 

Du  trafic  &  marchexen  Turquie.  cha.  xiiii.pdg.40  2. 

Chofe  digne  de  grande  admiration  des  Turcs  qui  mangent  l 'Opium  3  pourfe 
-   rendre  plus  hardis  a  la  guerre.  cha.xv.pag.40  4. 

Desfignes  que  les  Turcs  amoureux  font  a  leurs  amoureufès  ;  £7*  de  t habille* 
ment  des femm^Turques.  cha.xvi.pag 40  6. 

Portraiftd'vncTurque édifie.  /?^*4°7* 

Que  les  Turcs  dyent  plufieurs  femmes  effoufees  qui  viuent  entre  elles  fans 
di f cor  dneidoufie  auec  les  cocuhmes  &  efclauesfemelles.ch.xvii.p.409. 
Vreuue  euidente  que  leTurc  peut  plus  facilement  ajfembler  cinq  cens  mille 
hommes  envnrcamp ,  &  vne  armée  de  deux  cens  galleres  3  qu'vn  autre 
Vrince  cent  mille.  cha.xv11i.pag.4xu 

D'vne petite  hachette propre  À  tout  vfage  tant  à  la guerre  comme  en paixy 
commune  aux  Turcs.  cha.xix.pdg.4i4. 

Des  Turcs  qui  retiennent  plufieurs  chofes  de  ï antiquité.  cha.xx.pag.  41  ) . 
Des  religieux  de  Turquie.  cha.xxi.^ag.4 1 6. 

t   il) 


LA      T  A  B  LE    f 

La  manière de garder  la  neige  $r»  la  glace  tout  ïefkê,  comme  font  les  Tmct. 

chapitrexxij.  '  pag.qij. 

De da manière de fe  hrdadiMer.de  Turquie.        ,  cba.xxiij*pag.^20. 

Viflinêîion  de  fbonneurjant  de  barbes  que  du  turban  des  Turcs,    chapitre 

xxiiij.  pag.qio. 

^iccoufvremens  des  plumes  ^dont  tes  Turcs  fe  parent.  .  cha.xxv.pag.  421. 
Vu-grand exercice  a  tous-  ceux  qui  apprennent  a  tirer  de  tare  par  les  villes  de 
:    Turquie.  ^cha.xxvi.pag.^2^. 

"De  plusieurs  apprefîs  des  Turcs  pour  manger.  cha.xxvij.pag.^2^  • 

De  la  circoncifion  des  Turcs.  cha.  xxviijpag.qiq.. 

Quvn  efclauepuijfe  contraindre  fon  maiflre  de  luy  mettre  à  chois  pour  fa 

rançon^ou  le  temps  de  le  feruir^pu  l'argent  qu'il  en  veutduoir+cb.xxix. 

pag.^26^ 
"Despreftres  de  Turquie^  desfeiences  des  Turcs.  cBa.xxx.pag.4. 3  J. 

Que  les preflres  des  Turcs  feruent  à 'or loges  en  Turquie 3  enans  les  heures  a 
;v   haute  voix  de  de/fus  les  clochers  des  Eglifes.  cha.xxxi.pagAS1* 

Continuation  du  chemin  ia  delaiffé^comme  aufii  des  mœurs  des  Turcs.  cbœ~ 

pitre  xxxii.  pag.fô$* 

Que  toutes  les  femmes  qui  viuent  en  Turquie Jte  q  uelque  loy  quelles  Jqyent3 
.  fefont  ordinairemmt  abatre  le  poil  des  parties  honteufes  par  la  vertu  dvn 

depilatoirej&nonpasaurAfoir*.  cha^xxhLpag.^^. 

Que  les  femmes  de  Turquie  font  belles  par  fingularitêJ&  nettes  comme  per- 
les. 'cba.xxxiiii.pag.q.3j. 
La  receptedont  lesfemmesfe  teignent  les  cheueux  <&*  les  four  cils  en  noir3& 

les  hommes  vieux  la  barbe*  cha.xxxv.pag^.^1. 

Louange  âvne  beauté  excellente  félon  la  mode  des  Grecs.  chajxxxvi. 

pag.442. 
P  es  chofes  difficiles  à  croire  que  lesbafieleurs  de  Turquie  font  en  public. 
,   chapitre  xxxvtL  pag.q.q.%. 

J>e  la luiBede  Turquie.  cha.xxxviii.pag*^^. 

Que  les  Turcs  vont  hardiment  fur  la  corde.  cha.xxxixfag.4.4  y. 

Des  chiens  Je  Turquie^  de  la  chaffedes  Turcs.  cha.xlpag.^6. 

Les  noms  desplantes,  trmuees  au  mont  Olympe..  cba.xli.pag.q.q'j^ 

JPortraiBdelaMelefèouLarix.  cha^/^g. 

De  l'ancienne  viïïe  de  Bourcey  quiefioitlefiege  des  Empereurs  desTurcs 

cha.xlif.  pag.^o* 

Quelesouuragesdes  Turcs  font  fort  bienfaits^  que  leurshabillemesfont 

bimxoufiT^  "     "  ï^xliii.pag.^t^ 


LE   PREMIER   LIVRE 

;     T>ES     OBSERVATIONS    D  E 

PLV  SIEVRS     SINGVLARITEZj. 

&  chofes  mémorables  de  diuers 
pays  cftranges. 


Par  Pierre  Belon  du  Mans^ 

Que  nature  conduiftnt  vn  chacun  en  ce  mondefavdiuerjèsvopesy 
fan  que  le  but  de  tous tend  idiuerfes  fins» 

Chapitre  premier. 

\ O mbi en  qu'ayons  entreprins  <£c 
i  mettre  les  chofes  mémorables ,  Se  les- 
[  fîngularitez  des  pays  effranges  par  e£- 
\  cric  en  ce  liurc^ainfi  que  les  auons  ob- 
,  fèruccs  :cc  neantmoins  ne  pretendos 
j  fouz  fombre  de  ce  tiltre,  forelorre  vn^ 
autre  qui  pourrafairc  micux,ains  fin- 
.  citer  d^auantage  à  fon  deuoir.  Et  ja- 
r foie  que  pluûears  anciens  Se  moder- 
nes ayent  par  cy  deuant  eferit  telle  ou 
fèmbiable  matière  en  leurs  voyages  Se  nauigations ,  toutesfois 
pourecqu'auons  obferuétout  le  contenu  de  ceprefent  trai&é» 
Fauons  hardiment  ofé  mettre  en  lumière ,  fans  auoir  crainte  àcs, 
calomnies  d'autruy  :  Car  fi  q.Uelqu'vn  contre  ecft  œuure  auec 
les  eferics  des  fufdi&Sjnous  fommes  aûeurerqu  on  ne  nous  pour- 
ra iuftement  reprocher  qu'ayons  rien  traduià  defautruy ,  linon 
àcs  bons  autheurs  anciens ,  Se  defquels  nous  fommes  quelque- 
fois aydez  en  exprimant  les  noms  des  animaux  Se  des  plantes ,  Se 
autres  fcmblables  chofes  appellees  par  noms  propres  ,  miles  en.; 

A. 


%  PREMIER     LIVRE     DES     SINÔVIA* 

noUrc  vulgaire  Français.  Et  pource  que  telles  chofes  n'auroienc 
par  cy  deuant  efté  examinées  ne  miles  en  noftre  langue ,  n  accor»- 
decsauec  les  cfcrits  des  anciens  autheurs,  la  difficulté  en  a  cfté 
d'autant  plus  laborieufe.  Ceux  qui  entreprennent  vn  voyage 
loingtaineneftrangepays  pour  leur  affaire  particulier,  fonteô- 
munement  plus  curieux  de  chercher  les  chofes  neccfTaires  pour 
mettre  fin  à  leur  deliberation,que  d'employer  leur  temps  à  quel- 
ques autres  obferuacions,  dont  ils  n'ont  cognoiffance:  de  laqueî* 
le  chc#è  il  appert  par  le  trafïic  d'vn  marchand ,  lequel  combien 
q^iHftfaitplufîcurs  voyages  en  Indie,  &  Terre  neuue,  néant- 
moins  n'ayant  autre  but  que  bienremployer  Ton  argent  enachet 
de  marchadife,  ne  fe  fbucic  d  acquérir  infinies  fingularitez  qu'vn 
homme  curieux  pourroit  bien  obferuer.  L'excufe  y  eft  que  telles 
'chofes ne luy  duifent en  rien,  &  aufïiquclescfprits  &  arfe&ions 
humaines  font  tellement  différentes ,  que  û  piufïeurs  mefmeméc 
d*  vue  compagnie  chejnment  enfemblc  par  quelque  payseftran- 
gc,à  grand'  peine  en  trouuera  Ion  deux  qui  s'addonnent  à  obfer- 
uer vne  mefme  chofè  :  car  l'vn  fera  enclin  à  noter  cecy ,  &  l'autre 
cela  :  ioint  qu'il  n'eft  homme ,  tant  foit  diligent ,  qui  puiffe  fuffi- 
famment  examiner  toutes  chofes  parle  menu  :  &  toutesfois  les 
chofes  mémorables  doiucnteftrc  fort  bien  confédérées  auâtque 
d'en  faire  certain  iugement  :  Car  il  fault  neceflairement  que  les 
merques  eferires  conuienent  auec  la  chofe  qu'on  deferit.  Si  nous 
fommes  déportez  deferire  en  ce  lieu  des  chofes  qui  fefonttrou- 
uees  es  pays  plus  voifîns ,  comme  nées  à  noftre  porte  >  ce  n'a  elle 
fansraifon  :  car  noftre  vouloir  a  efté  pîuftoft  deferire  des  chofes 
eftrangcres  :  d'autant  que  telle  eftoit  laffe&ion,qui nous  a ftimu- 
Ié  d'entreprendre  les  voyages.  Eftans  donc  arriuez au  pays  des 
Grecs  &  Turcs,  commançafmes  à  eferire  toutes  chofes  cyrieufe- 
ment  :  car  nous  trouuons  que  ce  qu'allions  cherchans ,  &c  dont 
n'euffions  peu  en  auoir  l'intelligence  flnon  là,  retient  encor'  pour 
l'heure  prefçnte,  les  mcfmes  noms  que  les  anciens  autheurs  nous 
ont  laiâe  par  eferit  pour  les  nous  fignifier.  Mais  pource  que 
voyons  pluûeurs  chofes  fort  vulgaires  en  noftre  vfage  ,  6c 
desquelles l'appellation  eft  fi  commune,  qu'il  nefe  trouue  hom- 
me ne  femme  qui  ne  les  vueille  maintenir  pour  celles  qui  fonc 
ainfi  nommées  du  nom  vulgaire ,  lequel  toutesfois  leur  eft  faufe- 
mentattribué;  auons  bien  voulu  prefèntement  nous  mettre  en 


OBSERVEES    FAR   F.    SELON.  3 

deuoirde  monftrer  qu'onaabufe  en  l'appellation  de  plufieurs 
chofes  moult  vulgaires. 

Quon  ne  fie  doit trop  fier  aux  appellations  des chofes  jncor  quelles  foyent 
vulgairement  nommées \fi  elles  ne  Combien  correjpondantes  aux  deferiptios 
des  anciens^  conuenantes  a  la  chofe qu'on  deferit* 
Chapitre    1 1* 

o  v  s  mettrons  plufieurs  plantes  vulgaires  &  animaux 
!  cogneus  pour  exemple,  à  fin  dcdemonftrer  que  leurs 
nomsvulgaires  leur  font  faufeenent  impofèz.  Ce  que 
'•  parauanture  ne  ferons  fans  defpîaire  à-quelques  vns. 
Toutesfois  fi  quelqu'vns'en  trouue  offenie,  qu'il  le  nous  face 
entendre,  fi  bon  luy  feroble ,  &  nous  luy  rcfpondrons  comme  â 
appartiendra.  Nous  voulons  donc  maintenir  que  noftre  nation 
&  bonne  partie  de  celle  qui  obéit  z  l'Eglife  Romaine ,  n'a  par  cy 
deuant  eu  la  cognoifTance  de  l'herbe  de  Thym:  attendu  que  cel- 
le que  nous  cultiuons  en  noz  jardins,  n'eft  ne  Thym ,  n'efpecc  de  fh^^ 
Thyrmainseftefpecc  de  Serpouîet.L^Hyfïbpeauffi  &îaSarictte  Hyjjope. 
que  nous  auons  en  commun  vfage,nc  font  celles  dont  les  anciens  surUnc 
Grecs  vfoient  en  médecine.  Parquoy  donc  difons  que  û*  les  cho- 
ies que  nous  nommons  par  noms  propres ,  ne  eonuiennens  auec 
la defeription  defdits  anciens,  il  fault eôclure  que  ce  ne  font  cel- 
les qu'ils  ont  entendu.  Noftre  Thym  en  foit  exemple ,  duquel 
l'appellation  eft  fi  commune  à  tous ,  qu'il  n'y  à-celuy  de  quelque 
condition  qu'il  foit ,  qu'il  ne  la  fçache  appeller  &:  nomer  de  nom 
Thym,&:  neantmoins  ce  nom  luy  eft  faufemét  donné.  Car  l'her- 
be que  nous  appelions  Thym,  n'eft  pas  celle  à  qui  ce  nom  puiile 
conuenir,  ains  à  vne  autre  qui  croift  communément  par  le  pays 
de  Grèce.  Et  faut  necefïâi  renient  que  l'herbe  qui  obtient  ce  nom 
de  Thym ,  fuyuant  la  traduction  de  Theophrafte  &  Biofcoride, 
foit  toute  couuerte  de  petites teftes  quivontenappointât^eftroi- 
etesparlepied,  comme  font  celles,  du  Stcechas ,  à  qui  elles  font  &&&&& 
comparées:  &.  à  la  fimilitudcdefqueUes,.  les  verrues  pend  an  tesa 
que  nous  voyons  furcroiftxe  à quelques  vns,tant  au  nez  qu'es  par- 
ties honteu fes, ont  efté  nommées  par  les  Grecs  Thymia ,  comme 
Eefmoigne  Celfu.s. Toutesfois  l'herbe  que  nous  appelions  Thynv 
û  a^as.tfilleStmcrques  xauffi  n'eft-  ce  pas  elleà  quice  no  de  Thynx 

■M. 


-4  *X£MI^B.    ilV&B    DES    SÏN:G:V:tÀ. 

p uiflé cbnuenir,c  eft  à  fçauoir  duquel  les  aucttes  recueillent  f ex-* 
mlmettw.    ccncncmiciprcs d'Athènes  au  mont  Hyjnejtus,  &en$iciïeau 
Mumtl~  mont  % bîa  > &  leGilieî  les-autheurs  £our  celle  raifon  appellent 
CMÀHyhUÙ.  ^ttkum&HyhUum.  Pourfembkbîe  raifon,  combien  que  l'hcr- 
sfym.        be  que  nous  nommons  vulgairement  le  ThynijCroiftè  copieufe? 
mentiairuageésguarigues  de  Prouence  &  Languedoc,fans  eftre 
cultiué,  refTemblanc  a  celle  de  noz  iardins  :  toutesfois  n'ayant  les 
merques  defllifiiitcs ,  ne, peut  eftre  le  vray  Thym.  Toutesfois  le 
^ray  Thym  eft  fi  fréquente  abondant  par  tout  le  pays  de  Grèce, 
que  les  montaignes  ne  font  veues  verdoyer  d'autre  herbe  fàuuagc 
•qui  y  naiffe  plus  volontiers  ,  auquel  lieu  il  fait  fa  fleur  félon  Fen- 
4roic  de  la  terre  ou  il  naift  :  Car  l'vne  fois  eft  toute  blanche:  l'au- 
tre toute  de  couleur  de  ciel ,  ou  purpurée  :  Fautrefois  meilee  des 
=deux.  Mais  pourec  que  nous  n'auonscncor'point  accouftunie 
<l'en«cukkier  en  noz  iardms ,  il  nous  eft  incogneu.  Et  comme  le 
Thym  a  baillé  nom  aux  verrues  pen  dates,  il  a  au  Ai  donné  le  nom 
à  vnpqîuonde  TeGn  anciennement  nommé  Thymus  ou  Thy- 
rfymdm    malus^  que  les habitans  de  Lode  en  Lombardie  appellent  Ther- 
ourhymm*  raera,ou  Thcmoîov 

foïfm.  Quata  la  Sariette  q  les  Grecs  moment  Thnè***  &  le  vuîgai- 

Tbemero.  rc  Tribi,  il  faut  pour  obtenir  ce  no ,  qu  elle  foit  chargée  d'efpics; 
^f0'  carainfiîe  dit  Diofcorick.Maispource  que  ne  voyons  point  que 
^;  la  noftre  des  iardins  foit  chargée  d'efpics ,  aufli  fault  il  confefTec 

que  ce  n'eftf  as  celle  dont  les  anciens  vfoiét  en  leurs  medicamés. 
Nous  ne  «difons  pas  que  la  noftre  des  iardins  ne  foit  celle  mefme 
qui  de  tout  temps  a  cftè  cognene  eftre  propre  auz  potages,  Se 
pat  ce  dediec  à  la  euifine.  Mais  celle  qu'on  mefloit  es  médecines, 
Se  qui  eft  fàuuagc  en  Grèce,  nous  eft  incogneuc  :  car  nous  n'en 
auons  aucunement  ,  &c  toutesfois  eft  commune  en  tous  lieux  de 
siif  Grèce.  Ce  mefme  fault  entendre  de  l'HySope  ,  quieft  dedeux 

-  *  manières  :  car  l'vne  eft  champeftre,  croiflânt  en  tous  lieux  indif- 
féremment es  pays  du  leuant,tan  tés  collines,  que  fur  les  grands 
chemmsdeŒiçie,deThrace,  Phrygie,  qu'en  plufieurs  autres 
pays.  L'autre  efpecceftfatiue,  que  nous  cognoiftbns,  cultiuee 
en  noziardins,mais  beaucoup  différente  à  la  fauuage,&  dont  les 
Grecs  ont  autrefois  compofé  leurs  médecines. 

Nous  auons  amené  l'exemple  de  ces  plantes  moult  commu- 
nes èc  cogneues  4'yn  chacun ,  afin  de  donnera  entendre  que  ne 


OBSERVE-ES     $Mt     *.   SELON.   .  ;  r  $ 

nom  fdmmcs  pas  toujours  tant  fié  à l'appellation  vulgaire ,  que 
les  babitans  des  prouinces  nous  nommoyeht  en  exprimant  les 
chofes  que  voulions  eferire ,  que  premièrement  ne  les  confldc- 
raffions  diligemment  j  autrement  euflions  efté"  fouuent  trompez. 
Car  comme  levujgaire  François  nommant  le  Plafnc^afaiâ:  pc-  P/^ 
fèràpiuficursgens  que  ce  (bit  le  Platane, qui  toutesfois  eft  vnc  rUtane, 
efpece  durable  :  tout  ainfi  peuît auenir  à vneautre  nation  Et  de  ErMc. 
cefte  appellation  de  Plafne,  combien  qu'il  n  en  naiffevne  feule 
plante  en  tout  le  pays  du  Roy,ne  cultiuee  ne  fauuagc,  neatmoins 
coûte  la  France  eft  abufce  en  fa  commune  appellation  :  car  mef- 
mementlcs  hommes  dodes  &  autres  gens  d'aTi&onté,voyâs  que 
IcPlafhc.portcIa  fuciile  comme  vigne,  &  que  la  description  de 
Platane  eft  de  porter  telles  fuciiîes  ,ont  conclud  à  vne  iêule  mer- 
que  que  ledit  Plafne  eft  glatanus,  &  toutesfois  cela  eft  faux:  car 
le  Platanus  portedespillules  rondes ,  {èmblabîes  aux  feméces  du 
Xantium  à  qui  Diofcoride  les  a  comparées  :  &  font  groûes  com- 
me noix ,  pendantes  en  forme  de  grappe  :  ce  que  ne  fait  noftre 
Plafne,  qui  les  porte  à  la  façon  d'vn  leurre  de  fauconnier.  Et  à  fin 
depouuoirmonftrerà  l'expérience  que  nous  en  auons  aucune- 
ment en  tout  le  pays  de  France ,  auons  cy  apressnis  fon  portraiâ: 
contrefait  au  vif. 

L'herbe  auffi  que  nous  nommons  îoubaA^aefté  maintenue  i^^e. 
iufques  a  F heu*c  prefènte  pour  plante  de  Sm&erwuum  :  mais  à  #p«««*». 
la  vérité  il  n'en  eft  rien  :  Car  auons  veu  que  SwnjxrmuA  croift 
copicufèment  en  Crète,  Cojrg>hu,&  Zacintjie,en  manière  de  pe- 
tit arbrhTeaubaut  d'vnecouldec,  &  quelque  fois  de  deux  >  ayant 
le  fuft  gros  comme  îcpoulce,  changé  de  fueilks  à  la  ibmmicé,  qui 
ïentournent de  toutes  parts  correspondant  en  toutes  fortes  à  la 
ddeription  de  Diofcorides.Et  fomnies  efmerueillezdcceuxqui 
•en  de&riuant  èc portrayant  telleschofes ,  ne s'en font auifez :  car 
:  celay  que  les  modernes  ontpeind  pour  ïoubarbe ,  eft  le  CcttU^ 
^^^fe^^desanciens.LefemblableeftaucnuauMeurierblanc,  cotlleion 
6c  àquelque  autre  plante,  eipece  d*Erable,que  pîufîeurs  d'vn  cô-  dterum.  " 
mua  confentement ,  ont  dit  eftre le  Sycomore.  Et  toutesfois  le  nàamer 
SyjCoraate.eftiî  rare,  qu'il  ne  fut  onç  veu  fauuage,  ne  eukiué  nô  ^MC- 
plus  en  Grèce  qu  cnltaiie.  N  eft  il  doc  pas  difficile  qu'on  le  puif-  s>'omofe- 
iè  auoir  veu  naiftre  enFrance?  Aufll  nous  difons  le  meime  des  oy- 
4èaux,£ej^ents*& autres  beftes  texrcftrss :  des mineraux^pierres, 

A  iîj 


Mtrfil 

smd. 


fREMIES.     LiyRE      I>ES     SINGVIA. 

Le  portrai&du  Platane.  &chofes  métalliques; 

Noftre  Chardonne- 
ret, qui  tient  Ton  ap* 
pellation  du  chardon* 
îèmble  eft-re  celuy  que 
les  Grecs-nommerenc 
Acanthis  ,  toutefois 
Achantis  n'eft  pas  le 
Chardôneret.  Et  fi  le 
vulgaire  François  nô* 
me  quelques  ferpents 
a(piçs,e'eft  par  erreur: 
car  il  n'y  en  a  aucuns 
en  France;ne  auiîî  des 
Murènes ,  que  noftre 
vulgaire  eftirae  eûre 
Laproycsme  de  Can^ 
cre  de  riuiere  qu'on  a 
fàufemcnt  attribué  à 
&os  Efcrcuiiles.  Au  (fi 
chacun  penfc  que  Le 
Salpeftre  eft  Nitre  > 
mais  auons  prouuéau 
liure  intitulé  De  me- 
dicato  funere,que  ce- 
la eft  faux  JEt  tout  ain- 
j  ^  fî  que  nous  knpofons 
âsp^*  desfâuxnom&àqueU 
/^^^*ques  chofes  qui- nous 
font  vulgaireSjtout  ainfi  en  auons  nous  aucunes  moult  commu- 
nes ,  dont  ignorons  le  vray  nom.  Il  n'y  a  païfàn  en  Gafcogne  qui 
ne  fâche  nom-mer  la  Salmandrevn  Mirti^cn  SauQyevnePiuui- 
jî£j  car  on*la  voit  quand  il  pîeu  t  :  au  Maine  vn  Sourd,car  il  fènv 
Me  qu'elîefcit  fburde:3é  toutefois  aucun  ne  feait  que  c  eft  la  Sal- 
mandre.  Pa^quoy,  ne  fe  faut  pas  fier  aux  noms  vulgaires  des  pro^ 
uinces ,  pour  exprimer  les  choies ,  qu'on  n  ait  premièrement  c5- 
fèré&:  bien  examiné  les  eferits  des  autheurs.  Et  amenais  ces  exe» 
fleSjVjûulons  dire  qu'il  faut  chercher  la.verité  des  chofes  in  co 


OBSERVEES     PJLR     *;    BELOS,  7 

gneucspar  celles  qu'on  cognoift.  Mais  comme  les  hommes  qui 
le  (entent  de  franc  ccenr ,  généreux,  &  bien  naiz:reprochlts  Fi  in- 
famie euidente  qu'ils  cognoifTent  en  vn  home,  qui  le  loucpour- 
ce  qu'il  efl  gentil-homme ,  &  tontesfois  faid  ade  de  vilain ,  di- 
rent en  leur  commun  prouerbe,  qu'il  n'y  a  rien  de  commun  entre 
k  vilain  &  l'homme  noble  :  Tout  ainfi  dirons  qu'il  n-y  a  compa- 
raifon  entre  vn  ho  m  me  de  bon  fçauoir  &c  vn  ignorant ,  non  plus 
que  d'vn  homme  de  franc  cœur  à  vn  enuieux.  Par  ainfi  refuteros 
les  caîumnies  de  certains  hommes  de  mauuaifè  grâce  qui  n'ont 
onc  fait  apparoiflre  choie  d'eux  mefmes ,  dont  on  les  doiue  efti- 
mer  fçauants:à  fin  que  celuy  d'entf  eux  qui  a  le  plus  eûayé*  à  nous 
nuire,  fc  trouue  greffe  befte ,  dauoir  fi  fort  blafmé  noftre  curio- 
fité.Ceiluy  alleguoit  la  couftume  ancienne,difant  que  nos  peres 
auoyent  vefeu  heureusement ,  fans  chercher  tant  de  petites  fub- 
tiîitez  qui  ne  font  neceflàires  ;  difànt  aufîïque  corne  ils  s'en  font 
pafïèz,  que  nous  pouuons  bien  faire  le  femblable ,  àc  qu'ils  n'ont 
pas  laiffé  fans  cela  à  viure  fàins ,  &  à  fe  guérir  quand  ils  eftoyent 
malades ,  &  que  telles  chofes  doiuent  eftre  remifes  àgens  de  plus 
grand  loifir,  ou  à  ceux  qui  cherchent  les  chofes  plus  par  eut iofi-: 
té,que  pour  l'y  tilitç.  A  tel  ignorant  voulons  bien  reipondre  per- 
tinemment,  que  les  hommes  du  temps  iadis  qui  n'auoyent  Fin- 
uention  de  faire  du  pain ,  ont  vefeu  bien  fains ,  &:  fe  font  guéris 
quand  ils  eftoient  malades,  viuants  tant  feulement  dcgland,  co  -  ^,n^ 
me  ont  fait.les  Arca4es,Nous  voudrions  donaque  tels  ignorais, 
félon  la  couftume  a»cienne,{è  contentaient  de  viure  atiec  le  feul 
gland  :  ou  des  feules  figues^omme  ont  fait  les  Athéniens  :  ou  de  ^Athéniens. 
poires  fauuages ,  comme  firent  iadis  les  Tyrinthiens  :  ou  bien  dsTyinéum. 
ÇanneSjOu  Rofeaux ,  comme  les  Indiens  :  ou  de  ï)ade$ ,  corn-  In*uns- 
me  les  Caïmans  ;  ot|  de  MU  ,  comme  les  Sacmathes  iX*\\À$:frffunï 
grains  deTerebintfae ,  comme  les  Perfcs  :  &  nous  lait&$CDjt  le  Fcr^ 
Bon  pain  de  froment ,  blafmants  les  inuenteurs  d'iceluy ,  com- 
me trop  curieux.  Nous  voudrions  pareillement  .que  mefpri-; 
fans  Farchitedure  ,  comme  chofe  .curieuie  ,  .&  de  laquelle  tes ,  - 

anciens  fe  fpn^pafîéz  ,  ils  delailTaifent. leurs.  maifons.,&;  alîafr. 
fcnt  habiter  es  cauernes  ,  ou  fous  les  arbres  &  forefts.  Et  il  par 
cecy  ne  fè  fentent  fuffifâmment  confutez,defirerions  qu'ils  bîaf- 
maffent  la  curiofité  d' Ariftote  :  lequel  nous  enfèignant  les  diffé- 
rences des  animaux, ne  s'eft  contenté  nous deferire leurs  mer- 

A  iiij 


$  PKEMIER.    LIVRE     I>E?    SIHGVLA. 

qucs  extérieures  :ains  ob&ruant  les  amtomies  d'vn  [chacun  5  a 
voulu  com  ter  les  colles  ècs  fcrpés,nonibrer  les  boyaux  des  poif» 
fons ,  des  oyiêaux ,  &  parties  des  corps  de  cous  animaux.  Aufli 
Hippocrates  &  Galien  nçfefont  eonseritczde  ce  que  fouloyenc 
Êiire leurs ançe{trcs.,Mliis  tels  ignorans  fe  font  exprès  bandez  les 
yeux,&:  voluntajrement  aueuglez,  pour  nous  apprefterà  rire  :  de 
h  vie  dcfquels  Ion  pourroic  faire  vne  farce  prefte  aiouer  à  cha- 
que heure:çar  à  larnaniere  de.seourtifans .,.  ils  veulent  ignorer  ce 
qu  ilsriedëfirentveoir  nefçauoir:veu  rnefmement  que  lVfage&* 
l'aage  renouuelle&meliorc  toutes  choies  àivtilité  commune.. 
Car  ceuxqui  font  hommes  y  le  Içauent  accommoder  en  viuant. 
félon  que  nature  leur  apprend ,  laiffins  le  pire ,  ÔC  choifnTans  le 
meilleur  pour  leur  vtilicc  Ji  que  lesvns  de  fauuages  &  champê- 
tres ,  font  deuenus  domeftiques  &:  priuez,  &r  ont  diucrfèment 
changé  leurs  aJ&dions  :  dont  les  Cages  en  prenant  finguliere  de- 
îè&auoa  a  entendre  les  chofes  naturelles,  voulants  s'aûeurcrde 
la  naifue  gerfe&ion  des  legitimcs/e  font  mis  à  fpeculer  8c  difecr- 
ner  le  vray  du  faux  :  tellement  que  fi  vn  homme  en  contrefaifant 
artificiellemét  vne  pierre  preeieufe ,  vn  métal ,ou  autre  telle  cho- 
ie ,  aupit  approché iî  près  du  natAi rel ,  qu'il  l'eu ft  rendue  corref- 
gondante  a  la  naturelle  5  non  feulement  en  forme ,  mais  auffien 
toutes  autres  qualitez:fi  eftee  que  la  viuacité  de  l'efpritinge- 
nicuxTie  cefie  delà  contempler3,examiner>&  expérimenter ,  iuf- 
ques  à  ce  qu'il  ait  entendu  fi  elle  eft  fauiè  &  adultérine ,  ou  vraye 
&  légitime.  Et  de  ce  faire  neft  homme  qui  àiufte  caufèlefceue 
reprendre  ou  b!afmer,ne  dire  que  ceft  curiofité  fans  vtilité.Par-,. 
quoypouuong  conclure  que  l'ignorant  ne  nous  peutraifonna- 
blement  arguer  de  curiofité  inutilCjOu  non  necciîàirc.  Mais  laif. 
*  fants  leurs  friuolcs  &  oifiues  allégations  yte  retournants  à  parler 
deschofês  finguliercs  des  pays  eftranges  y il  a  fcmJblé  n  eftre  hors 
de  propos ,  auant  que  procéder  au  récit  âcs  chofes  de  Turquie, 
toucher  en  pafiànt  quelque  petit  mot  de  fine  de  Crète  *qui  efi 
****'•  maintenantnommee  Candie  :  attendu  que  c  eft  Fvne  des  eftapes 
en  noftre  voyage, ouauons  le  plus  longuement  atr-efté. 

Brief 


Or.BSE'RVrEFS     P/A.ÏL  "P.     BELCrN.  5 

Brief  difcoursâes  fmguUrite^ie  Crète  r& 'particulière  obferuatwrp des 
mœurs  des  Grecs.  Chapitre    ni- 

•.  Es  ampleurs  de  toutes  bonnes  fciences&;  disciplines 
que  nous  rcuerôs  pour  lekmrd'huy^font  pour  la  nieil- 

;  leurc partie  ifïus  de  Grèce s  laquelle  (comme  fortune 
J  permet  que  les  chofes  fè  changent  foudainement }  de 
riche  &  opulente  qu'elle  eftoitancienneraent,  &  bien  garnie  de 
genslettrezen  toutes  difciplines,  ^.dominante  par  fa  vertu  fur 
vne  grande  partie  du  monde,  eft  maintenat  reduide  en  tel  cftat, 
qu'il  n'y  axefié  vn  feul  pied  de  terre  qui  ne  foit  rendu  tributaire 
fous  le  ioug  àcs  Turcs ,  ou  fous  la  feruitude  des  Vénitiens.  Le  Grèce  tribu» 
Turc  en  tient  la  plus  grande  partie,en  terre  fermée  en  mer:mais tMrc- 
ee  que  les  Vénitiens  en  tiennent ,  eft  feulemenrcn  la  mer.  Les 
Grecs  quifont  fous  les  Vénitiens,  ont  quelque  peu  meilleur  par-  Crecsrr, 
ti  au  regard  de  lareligion , .  que-n  ont  ceux  qui  font  tributaires  au  ju  Tur^ 
Turc:&faifant  comparaifondesvn^aux  autres ,  trouuons  que  Grecs  ferfs 
tout  ainfi  que  ceux  qui ibnc  en  la  fubiedion  des  Turcs  ,fegou-  des  remues, 
uernent  félon  la  manière  de  faire  des  Turcs -tout  ainfi  ceux  qui  Grecs  mre= 
font  fous  le  ioug  des  Vénitiens  ,jè  gouuementà  la  Vénitienne,  j^^g?»* 
Tous  les  Grecs  tant  de  l'vn  party  que  de  lautre5font  pour  le  iour-^**^ 
d'huy  en  fimerueilleux  règne  d'ignorance^u'il  n  yaaucune  vil- 
le en  tout  leur  pays^ou  il  y  ait  vniuerfiié:&  auiEne  prennent  au- 
cun plaifir  à  faire  apprendre  IcsJetrres  Si  feienees  aleurs  enfans. 
Tous indirferemmet parlentvn langage  corrompu delantique: 
mais  les  vns  plus  élégant  que  les  autres:  toutefois-leurs  parolles 
approchent  plus  du  bon  Grec ,  que  les  paroles  de  l'Italien  n  ap- 
prochent du  Latin.  Ceux  des  villes  qui  font  fousles  Vénitiens, 
parlent  auiïi  bien  Italien  comme  Grecimais  les  villagcoisne  par- 
lent que  pur  GrecTout  ainfi  eft  des  Grecs  du  pays  ou  domine  le 
Turc  :car  ceux  des  grandes  villes  parlent  Turc  Se  Grec  :  mais 
es  villages  ils  ne  parlent  que  Grec.  Les  Grecs  n'ont  delaiiîéles 
antiques  appellations  des  chofes  appelîees  par  noms  propres^  fi- 
non  es  lieux  ou  ils  ont  efté  le  plus  fréquentez  des  autres  nations  : 
&  beaucoup  plus  es  villes  fituees  aux  riuages ,  qu'en  terre  fermer 
Car  ayans  depuis  long  temps  trairîqué  auecles  étrangers  3  tant. 
Xurcs  que  Italiens.,  ont  emprunté  des  didions  qu'ils  ont  méfiées. 

IL 


TO  PR-EMmt     XIVRE     "DES      S^NWL*. 

auec  leur  vulgaire,  choie  que  prou  lierons  eftre  vrayeen  nommât 
pi  ^eurs  fKàSbsis  qoi  ibmcomœu  aétnen  t  pefchez  es  rkiages  de 
Crète  :  car  le  poiiïbnque  les  anciens  nommoienc  Sphyrsena  ,&; 
cSforna  lequel  les  habitans  de  lé  Smiroé  &  Metelin ,  nomment  Sphyrna, 
Lfefcomé.  &à  Marlèillc,^ourcequUleftfcmblableàvne  cheuilkd'auitorH 
:&J%o  mm*  Pefèfcomé^  cft  nommé  enCretc  de  nom  vulgaire  Grec  qui  tient 
no.  fa  ricalienjLuczo  marino,qui  eft  à  dire  Brochet  dei-nçr:mais  ce, 

brochet.       ^ ia différence  duMerlus  anciennement  nommé  Afeikis , qu'ils 
'^Yy      -'^ommetit maintenant  Gaideropfaro. Tout  ainfî  eildesipays  de 
'^   t^      Grèce  fubie&s au Tura  qui ont  (emblablemét  changé lesanciés 
PO».         noms  Grecs>&  en  ont  prinsde  modernesen  langage  T.  urcquois. 
barbeau.      En  exemple  dequoy  mettons  le  poiiïbn  que  nous  nommons  va 
jtyftus.       Barbeau^ui  auoit  anciennement  nomMyftus,  ils  îenommenc 
Miéaédt*.  maintenant  Multachato,  poutre  qu'il  porte  des  mouâaebes ,  de 
Cy^ims     4^1^  partieltâiienne^;  Turquoife*  £n  nommant  vue  Carpe, 
sxfabduk.,  ^tf.js  ^[^^ appeîler Cvprinus,  maintenant  ils  dientSafan- 
'fjT       baluk.Ce  mefmeont Ma  les  Turcs  en  leur  endroi^empruntans 
.déù.        des  Grecs  beaucoupde  vocables  pour  exprimer  les  chofes  qu'ils 
^4^Me.    ont  trouuees^n  Grèce  5defqueîs  ils  nauoient  point  les  appella- 
tions,ne  cognonlànce  >.  -car  en  nommant  quelques  particuliers 
coiffons  de  Grece^ils  dient  en  leur  langage  Glanos  Baluk,&:  auf- 
û  CheîlaSalnlc ,  quieft  adiré  Glanis  pouTon , èc  Anguille poif- 
fon  :  Car  Baiuk  en  leur  langue,  eâà  dire  pouTon.  Celle  chofe  ne 
Semble  trop  impertinentes  car  vnenation  arriuanten  vnlieu  ou 
«lie  Croatie  quelque  choie  qui  n  a  point  de  nom  propre  en  fa  lan- 
gue ,  n  ayant  iauthoriré  d'en  pouuoir  inuenter  vn ,  a  bien  liberté 
l'emprunter  le  nom  des  étrangers  pour  s  en  feruir.  Toutainii 
comme  nous  faifons  àcs  animaux,  &  drogueries  qui  font  appor- 
tées des  Indes,  leiqueis  nous  nommons  des  mefmes  noms  quel* 
•les  ont  apporté  de  leurs  pays  :  comme  appert  par  vnc  petite  befte 
T  apportée  du  Brefîi ,  qu'ils  ont  nommée  Tatou,qui  eft  vne  efpcce 

de  HeriiTon  que  lesancicns  n'ont  pas  cogneu:mais  pourec  qu'on 
lagarde  emplie  de  Bourre(car  elle  cft  eouuertc  d'efeorce  dure)  il 
y  en  a  eu  qui  l'ont  nommée  Ichneumon  :  mais  cela  eft  faux ,  car 
îchneamon.  telle  befte-nc  participe  rien  de  la  nature  de  l'Ichneumo.  Les  Fra- 
çois  mefmes  n'ont  ils  pas  emprunté  quelques  dictions  des  Ara- 
bes?Car  nommans  leCedria  des  anciens^ils  le  nomment  du  Ço- 
tranouCatran  ;  qukîftdicaon-Arabe.  Il  n'y  a  raifeur  de  bateaux 


OK  SERVE  ES:    PA'ït"    P.    BELOK.  H~ 

&?»«iise$>qdi  ne  la  fçache  cognoUfare ,  6c  qu'elle  ièrt  à  poiucr  les 
y,ailfeaux  de  marine  :  Il  n y  a  greffier  de  ferraille  qui  n'en  aie ',  6c 
vendéen  fabou  tique.  Et  combien  que  les  Grecs. ne  retiennent 
Gonftamrnent  ia*mefme  appellation  des  chofes  en  va  Heu  com- 
me en  l'au  tre ,  fi  eft-ce  qu'ils  approchent  grandement  des  di&ios 
antiquesJ&  principalementés.eboiês  r*6meespar  iioibs  propres.: 

Que  les  Grecs  efimts  trïbutdm  fous  le  iougdés  feignetm  efirmgersy 
[^comportent  Çeh&U  couftume  de  v'mre  de  kumfuferiewrs. 
Chapitre  1 1 J  r. 

,.  ¥  s  s  i  fauîril  feauoir  qac  tous  les  Grecs  neparfent  pas  ungagriw 
\  vn  roefme  langage  vulgaire  :  car  les  vnsen  vn  pays  le  Gréa. 
I  parlent  meilleur,  lesautresen  vn  autre  le  parlent  plus 
r  mauuais.Etpource  quclearsâccentsneconuicnncnt 
pas  les  vns  auec  les  autres,  il  nousfottuient  auoir  fouuent  ouy  les 
petits  garçons  de  père  de  Conftantinoble,  fc  mocqner  du  langa- 
ge des  étrangers  quiy  viennent  par  mer  :-&  mefmement  les  ho- 
mes s  en  gaudifïent  les  vns  les  autres  ,  comme  font  les  François 
eontrefaifàns  le  Hcard,  ou  autre  langage  qui  n'eu;  pasJ?rançois. 
Efcriuans  la  couftume  en  gênerai  des  hommesviuansàla.  Grec- 
que,nous  a  femblé  bon,faire  diftindion  des  artifans  6c  villageois 
d'auec  les  Gentils- hommes  &  bourgeois  :  Car  ceux  qui  ont  le 
plusàdefpendre,  &  qui  tiennent  leur  réputation  de  grandeur^ 
font  veftusde  veftemens  corrcfpondans  àlacouftumedèleur  {ci— 
gneur.  Ceux  qui  foncfous  les  Vénitiens  ,-foet  veftus  àvla  Véni- 
tienne :6c  s'ils  font  fous  les  Turcs,  ils  font  veftus  à<la  Turque.- 
Mais  le  menu  peuple,  tant  dcrvnparty  que  de  Vautre,  foit  des- 
iUcs ,  ou  de  terre  ferme  y  retient  quelque  ehofe  de  fon  antiquités 
car  ils  portent  ordinairement  leurs  cheueux  longs ,  6c  font  ton- 
dus de  la  partiede  deuant  au  deflus  du  ftom^Sc  vfentde gros  bô~ 
nets  doubles.  Les habi tans  des  ifles  iè  trouuent  viure  en  leur  reli- 
gion, prefqwe  d'vne  manière  &  faço  défaire  :  Se  mefmemét  ceux 
de  CyprejRhodeSjEemno^C^o^mbjos^T^n^jFathmo^eo,^ 
MetclinjCoffujZantejNâxia  ^Crete,&autres mfuîans  quifbnc 
demeurez  en  la  foy  Chreftienne,encor .qu'ils  foyent  deftous  le 
Tiirc ,  comme  aufE  les  autres  déterre  ferme  d'Europe  &A£c.- 
Tous  en  général  n'ont  gueted*vteniilcs,daEKfnage5noi>  plus  q*JCw 


I£    .  •  PRE  MI. EU    liyit    !DE;S     SINGVLA. 

les  Turcs*:  & necouchent  fur  li&s déplume.  Vray  eft  qu'ils  ont 
Bjhjmxts,    <Jes  eontrepointes  ou  matcelas  nommées  Eftramats  5  faites  de 
<-r^    bourre  ou  de  laine,  pour  fè  coucher.  Tous  eftimentehofe  odieu- 
hoyiétdLu*  &  mettre  de  l'eau  dedans  leur  vin?  &  encorpour  i'heute  prefente 
tJtuK  beyuent  d'autan  tiWn  à l'autre,  principalement  ceux  deCrete. 

Ils  font  en  ce  differens  aux  Allemans  en  bcuuant  d  autant^que  les 
Allemans  boyuent  à  grands  traicts ,  mais  les  Grecs  boyuent  fou- 
uentâ:  àpetits  traicts  de  forte  maluaifie.  Auffi  eft-ce  qu'  ancien- 
Grdcxn.      ncmcntjConimc  encor  maintenant  ton  difoit  Qv&can  pour  en- 
TÀhi  des    tcnâvclnebrUrL   Maispourcequ'enbenuantàlaGreque,  il  y  a 
créa.         quelques  ceremonies,il  nous  femble  bon  les  dire.  Il  faut  enten- 
dre que  les tables  des  Grecs  font  ordinairement  moult  bancs ,  Se 
ont  couliume  de  boire  à  La  rengette,  ne  perdanspoint  l'ordre:  Ec 
G.  quelqu'un  demandoit  du  vin  hors  fonreng  s  ilferoit  réputé 
inciuil.  Etceluyquieftleplus  pront  à -donner  à  boire,  tient  le 
porau  vin,verfantàtoute  la  troupe,  La  cou ft urne  eftde  boire 
auec  vn  petit  voirre  fanspied.,  &£>oke  tout  ce  quiauraefté  verfé 
dedans,ny  laiiàntpasvj)e  feule  goure  de  vin.  Ilssinuitentquel- 
quesfois  à  boire  à  lamaniere  des  Allemans ,  &  alorsils  s eotr ac- 
collent.,  {ètouchansla  main  Fvn  de  l'autre ,,  Se  puis  kèaifans  &: 
lappliquans  au  front ,  &  de  la  s  enttebaifans  en  la  ioue  tant  dex- 
trequefeneftre:  mais  alors  ils  n'obferuent  pas  les  rangs  enbeu- 
uant.  Et  pource  qu'ils  boy  uent  le  fort  vin  à  petits  traicts,  &:  que 
cela  lésai  tere:  ils  ont  toufîours  la  cruche  à  leau  auprès  d  eux ,  & 
boyuentà  roefmes,de  grands  trâictsd'eau  pour  fe  defalterer  :  au- 
trement leur  foif ne  feroit pas  eftanchee.  Les  femmes  n'aCiftent 
point  à  leurs  banquets ,  &  ne  font  prefentes  quand  ils  boy  uent  &: 
mangent  en  compagnie.  Celte  chofe  leur  a  efté  de  tous  temps  en 
^fage:  dont  Macrobe  autheur  ancien  eft  tefmoing.  Telle  ma- 
nière de  viuré  fut  de  fon  temps  à  Rome,  comme  auffi  eftoit  du 
temps  de  Platon  en  Grèce  :  Car  ledit  Macrobe  au  Hure  fécond, 
chapitre  neuiiefme^allegant  ce  que  Platô  en  auoiteferit,  dittels 
mots  :  Et  non  magts  inter  minuta  pocula ,  &c.  En  mangeant  (  dit-il) 
•l'on  nefonnemot:  mais  quand  vient  à  s'inuiter  de  boire,  qui  eft 
àpetits  traicts, chacun  iafe.  Ses  parolles  font  telles  :  Primismenfis 
pfi  epttlas  iam  remotis ,  &  dtfcurfimvariantibits  poculis  mmuùoYtbm^ 
letxibw  quumfumituYUcitos  effîcere,  potws  loquaces.  Peu  après  dit  que 
les  Parthes  en  banquetant  ne  permettoyent  que  leurs  femmes 


OBSERVEES     VAJ%   't.    BEI. 0 ^  '    Jf 

îuflènt  prefentes,mais  fculementleurs  côcubines  ;  mais  il  a  prins 
cecy  d'-Herodote  :  toutainfi \cû  bcauancsc^cuc  traiter  Ic&cko- 
£cs  fèrieufes.   L'ancienne  manière  des  Ethniques  de  pleurer^  mmiere 
peur  les  morts  dure  encore  pour  l'heure  prefente  lid^pays  àc  de  fleurer 
Grèce  ,  comme  auifi  es  autrespays  des  Albanois  >  jBu|gares,jw«-  fo. 
Croaces^  SerafTes  ?:Seruiens  ,  Valiaques ,  -Sclauons  ,  &  JDal- rnom. 
mates  ,  Se  autres  qui  tiennent  le  party  des  Grecs.  Mais  e  eft 
vne-chofe  la  plus  fantaftiquey  qu'il  eft  poffible  de  penier  :_  car 
quand  quelqu  vn  éft  trefpafTé ,  les  femmes  s'aûembleat  en  vn. 
certain  lieu  afïigné  ,  Se  désole  fin  mâtin  auantiour,  elles  com- 
mencent -vn  hurlement  fe  battans  la  poictrinc,  &:  s  efgratignans 
les  ioues,  en  salongeant  Se  tirant  les..cheueux  ,  tellement  que  rieurs  de 
ceft  grand  pitié  de  les  veoir  :  &  à  fin de  mieux  faire  tëîmyfterc,/'7»^ ts" 
elles  louent  vne  femme  qui  a  bonne  voix,&  chante  plus  gros  que  nAm  u  & 
lesautœs  ,pour  faire  entendre  lespaufes.,  &  accents  :  Se  pleurent    recîm% 
ainfijCommcnçans  aux  louanges  du  trefpafTé  depuis  fa  naiûance^ 
continuent  au  narrer,  iufques  à-fa  mort.  Il  aduient  moult  fouuec 
en  ce  dueil,que  les  femmes  fe  battent  à  bon  efcicnt,&-queiqucs- 
fbis  les  ieunes  filles  s'efgtatignen*  tout  le  vifage.  Et  combien  que 
les  ieigneurs  de  Vcnife  qui  dominent  en  pluiieurs  nies  ou  les  ha- 
bitans  ont  cette  couftu  me  de  pleurer  les  morts,comme  à  Corfu, 
Cypre,&  Crète,  au  oyent  quelquefois  défendu  qu'on  ne  îespleu- 
raftplus  à  la  Grecque,  toutesfois  les-habitans  n'ont  laiûepour 
cela  de  le  continuer:  car  les  homtp.es  mefmes  s'en  trouuoyent 
intetefTez.  La  couftume  eft  que  les  femmes  des  Gtscs  ne  fe  mon- 
firent  en  public  :  &,  toutesfois  s'il  y  a  quelque  belle  femme  en  la 
ville  ou  l'on  pleure  le  trefpafTé  :  elle  fe  fendra  moult  heureufè  d'à.- 
uoir  trouué  foccafion  de  monftrer  fa  beauté,  accompaignant  les 
autres  par  la  ville:  attendu  qu'elles  vont  en  trouppe  toutes  efche- 
uelees  Se  efpoi&rinees,  monftrans  leur  belle  charnure.  En  ces  en- 
trefaites les  hommes  s'y  trouuent  auffi,  aya&Sjan moins  îeplaifir 
de  voir  celle  fois  les  femmes  &  filles  de  leurs  vôiiïns  bien  à  leqt 
aife  4  car  de  les  voken  autre  fàifon,  il  n'y  a  pas  gand  ordre^obien 
quele  fpedacle  eft  d'hommes  d'opinions  diuerfes  :  pourec  que 
les  vns  s'y  crouuent  attain&s  de  ialouûe»  les  autres  dlamour, 

....  :     "  . ..  ,    •:.  .',....■•■";    ,  '.    .B  iîj- .  ■ 


Ife  P-R-E-Mïî-El-K^    tïV^&E     DES     Sï;îJCfIA» 

aà/S»»ïa^«  i«  ^ri»c2^(^  i^sc^e  /*!/!?  <&  C^?^;  v        Chapitre  v> 

t  E  s  trais  principales  mx>ntaignes  de  Çreteont  châV 
r  gé  leurs  noms an  ciens..  Celles  quiaurresfois  auoiéç 
i  nom  %euci  /ont  main  tenantinDramees  de  Madara,  ^ 
£  aiatremenr  la  Sphachie.  Lemo^tldaeftniaintcnat. 
ïnomméFfilûriti:  ^  ï>*£feeft  nomme  Serbie  ,&ea 
quçlquesendroicts  Laili.Eiics  fontriLiaLi£es5quek  neige  les  cou- 
ucecaur  î'hçyuer  ;  Combien  que  les  Cyprès  y  etoifent  ça  &là  en- 
tre les,  rochers  des  vallées,  Çefte  I$e  aquinze  cens  vingt  mille  de  - 
circuit  :  ê£  pourse  qu'il  y-a  cane  de  montaignes ,  Ion  n  y  trouue 
-  guère  de  plaines.  Rarquoy  y  a  beaucoup  de  pays  en  frifche ,  qui- 

toutesfois  ne  font  demoindee  reuenu  âuxfeigneurs  >.que  la  terre 
fertile  :  Car  lebeftial  y,trouue  bons  pafturages.  Bs  y  font  nourrir- 
grands  trouppeanx  de  £i?^  &  Cheures,  qui  leur, 
rendent  groffefomme  d'argent  des  fourmages  plaines.  Eftans. 
ferla.  Commué  du  mont  Ida,  auons  facilement  veu  la  mer  des. 
deux  coftez4e  raie*  Ce  n'eft  pas  à  tort  que  lesCretes  furent  an- 
24*deCrde-  eiennemcntdediezi^nianercarencorpour  leiourd'huy  fuiuant, 
c^fte-antkiuicévs'addonnent  par  vn  inftincl  naturel  ,.&  des  leur 
enfanceàtirer  del  arc  Scythique;^mefmementvn  petit  enfant 
du  beriêau courrouiTé  ëc  pleurant,  s'appaife  en  ïuy  monftrant 
feulemenEvn  arc,<*u îuy baillant  vne  ôefcjbe  en  la  main:  au  âls'cn. 
Crêtes  ^xiU feaaent  ils bié  mieux ayderque ne  font lesTures  mefmes.Et tour 
^jarwer.ainfiqu^nciennement  ils  combattoy.ent..^illamment  dcflusla. 
sciâmes,     rner:  au  &  en  cor  r^ur  l'heure  pretente  font  n  dexttes,  habilles.  ôc 
hardis  fur  leurs  petite  nauires  nommez  Squiraccs ,..  qu'ils  fe  dcf.. 
fendent  de  fort  grand  courage  en  combattant  leurs. ennemis. 
Nous, difen-s  cecy  pour  nous  è&re  trouuez  au  lieu  d'expérien- 
ce, ou,  nous  lesauoàs  veu.  en  befongne  aûaillisdes  P,y rates  en--, 
tre  Zacintàe  ou  Aîzante ,  &  Ccrigo  ou  Citharec ,  demenans  fi 
b^en  lœ  tnains^  que  deux  fuâes,  en  temr>£  calme,  n'ofoyent  loin- ... 
èeeàz  ççes  y#  petit  Squirace  de  Candie.Cefte  ifle  deCreteeft 
malaîfeeàââailîir  par  force,  &  ne  ppuuât  y  venir  que  par  mer,&: 
a? ant  difcomm#ditë  de  ports ,  eft  de  ce  grandement  rendue  for- . 
tâfee.11  cft  bien  vray  que  les  habitans  des  villes  &  Chafteaux  for- 
cez. ⣠ reroparez.de  murailles  n  ont  pas  fautes  de  bons  ha.urçs*  ^ 


•-cornèa  la  ville  de  la  Cance,Candic,Sccie5  Vouiifiucni,  C&fàmcs  £«* 

SclmcsSphachic-Maishors  des/ufdites  villcs,lcsparcsibncfoit  ^V* 

*ares,pada  co'fte:fc  ce>qu  ily  en  a  fonï  moult  cfloigncz  des  villes,  ro2i,rmni 

defqucisncn  fçauaiîS^ircoucer4flevn:bon,rmanvRièal  nôme^^. 

^Sude^qui  eft-par  le  decrierede  la  ville  dcîaCance  :  &;  c£  celuy  selmo.  . 

ou  lesgaletcs  de&arberouffc  abordèrent  en  prcnanctcrrc  en  l'If-  sphfchx. 

4c,à  Ja  dernière  guerre  du  Turc  contrc-les  Vénitiens.  Mais,  coni-  sud*. 

me  auons  dit,  ils  ne  firent  rieen  l'ifcCar  l'incommodité  du  lieu, 

&  lef  eu  de  gens  qu'ils  eftoyent ,  les  cotraignit  de  fc  rembarquer 

incontinent  (ans  coup  frapper.  Il  n'y  a  maintenant  en  toute  bile  Trois  y%e. 

•de  Crete,que  trois  villes  qui  foyentde  grandi  nom.  La  principale  principale; 

•eft  nommée  Candic,qui  ait  oit  anciennement  nom  Matium:àor>t  âzcnte. 

•toute  l'ifledeCreteàpnns  ton  appellation  moderne.  Lafecon-  MMtum. 

.de  ville  en  gradeur  d  après  Candie,  a  nom  laCanée,  qui  ancien-  c->*™/    u 
nemcntauoit  nom  Cydonv&  fut  celle  dont  les  coings  turent  no-  ^^ 
mez  Oydomx.  La  tierce  d'après  cft  nommée  Jtethymo ,  quelesan- 
cicnsappelloyentXi^rJ^wwrcikrcft  quelque  peudifcoïiimodéc 
de  bonport  pour  nauires&  galères,  d'autant  qu'il  ne  peut  encrer 

^leans  fin  on  des  petites  barques  :  mais  la  Canée  &  Candie  ont  de 
créions  ports  pour  toutes  cfpeccs  de  vaifîcaux ,  &  font  treifcien 

fermez  &;  défendus  de  tous  vens.  Voik  quant  aux  trois  principa- 
les villes-peuplées  ;  mais  quant  aux  chafteaux  de  petite  citOite  ii- 
tuezçà  &  là  par  Fiile-,  il  nous  à  fcmblc  boles  toucher  legiercmét. 

'Celuy  de  Voulipnaà , qui eftoit anciennement: nommé Parwrmus,  ronlfeem. 
cil  encor  pour  ie-prefent  en  fon  entier ,  entre  laCycie  &  Candie,  ïxnamm 
-iituéibr  vn  haut,au  riuage:&:  y  a  qnelqucgoufFrc  de  mer  efpou-  &tu  ou  cr 
nentabîe  au  cofté  gauche.  L'autre  nommé  Cytie,&  ancienne- "f- 
menttytam,  cft  iaquatriefmcflace  forte  de  Crete:carauf£  bien, 
eft-cc  vne  petite  ville  peuplée ,  fituée  tout  au  bas  bout  de  Fille ,  à 
•Poppouce de Hhodes ,  tellement:  qu'il  n'y  a  que  cent  mile  à tra- 
<uerfer|>armcr  d'vne  ifle  à  l'autre  :  fçauoir  cil  delà  ville  de  Rlio- 
>dcsà  la  ville  delà  Cytie.  Il  y  a  encor  deux  autres  petis  Chafteaux 
<m  plus  haut  bout  de  Hfle,  LVn  eft  du  cofté  de  la  mer  Egée  re-     , 
o-a rdant  le  Septentrion,  nommé  -Chyfemo ,  U  anciennement Vyfi-  ->J4l,*ln** 
mum ,  quafi  tout  ruiné  :  maisau  demeurant  encor  reftenc  fes  mu- 
railles antiques  en  leur  entier.  Ilneft  pas  fioié  en  haut  lieu ,  mais 
au  bas,à  vntraid  d'arc  du  nuage.  A.  demie  lieue  àzXhpfamù  tirant 
vers  Qtnofou*,  ou  ÇapoJjwU*  ion  trouueks  ruines  d'v  ne  ancien-  €&<>##*.  ] 

A    iiij 


t6  '      PREMIER     EIfO     Vr-ZS    SI  H  G  V.  LA. 

bc  ville  furvnc  colline  à  demy  mile  de  la  mer ,  ou  eneor  font  ren- 
flées les  veftiges  des  murailles,&:  fi grande  quantité  des  belles  cî- 
fternes , qu'il n'y.aceluy qui les puiffëcontempler iinon  par'gra^ 
Hekmco  cd*  niiracle  îles babitans  laj*omment  tdto  Bëlemcocattro.  Les  mu- 
jr0^  railles  du  porc,  font  maintenat  quafi  comblées  de  fable,  qui  ren- 

dent grand  tefmaoigoageqaelleaanciennem 
ville.  Aj'oppofe  de  Ghyfatno,trauerfant  i'i{ïevlon  trouuc  v-ïvau- 
seltw*,       tre  chafteau  eAeué  fur  vn^ecic  eauftaïuqui  ànoni  Selino,fitué  au 
riuagedela.mèr.Êncof  y,a  vne  autre  vilîe-qu'ô  nomme  laSpha- 
sphacbit,.    çic^qui  ivèil mu;rée> mais eft  va  grand  village?efpars  ça  &: ià?,ikué ' 
au  pendancdeçellescreshauresmocaignes  yiadis  nommées  Leu- 
teuamçn*.  ci  rnoilteS3&;  a  pceient  les  inoncs  de  la  SphacKie.  Ily  a  feulement 
vn  petit  Ghafteau  pour  faire  tefte  contre  les  courfaires,  ou  à  pei- 
ne y  a  logis  pour  le  chaftelain.  Les  habitans  de  ce  village  font  les 
pjus  belliqueux.^:,  meilleurs  tireuçs.d-ar^qni  foyent en  toute  H£ 
le:  aufïi veulent  Msauoir  leurs  arcs  plus  forts  .que  Iqs  habitans  des 
autres  contrées.  Quelque  chofè  qu'on  ait  anciennementdit  des 
ileuues  de  Crète,  ne  nous  à  feeu  perfuader  qu'il  y  en  ait  vn  feu! 
îiauigabie  en  toute  f  iflé,  ne  qui  peut  feulement  porter  vn  petit 
feateau.Ii  eft  feieu  vràyquil  y  à  plufieurs  grands  ruifTeaux ,  àedh. 
cdoedjfe.     kfqnels  la  Goloçafie  croifkdê  ion  bon  gré  fansy.eûre  cukiuée: 
qui  a~fembié  chofe  moult  nôuuelic  d'y  en  auoir  trouué  en  ilgrad* 
Cancres  /«Quantité.  Etauflides  cacres  d'eau  douce.  La  température  du  cli* 
matik.       tpat.de  Çretç >  &L  l'oportunité  de  l'eau  àss  ruiileaux ,  donnent 
mo-ye.n  aux  habkans du  pays  de  dreffer  moult  beaux  iardinages, 
&  vergers  d'excellente  beauté,^  en  grand1  quantéjquileur  Ton* 
de  grand  reuenu  :  dont  les  vns  font  en  pays  û  plaifant ,  qu  vn  ho~ 
me  ne  s'ennuy  roit  de  les  contempler ,  &;  principalement  es  pol- 
ira-.*»*, fcâionsd'vngenl-homme  Vénitien*  qu'ils  nomment  lefeigneur 
cqcoBdroc*  ip3npraocefcp.garoG?p  ^lequel  nous  arou  flou  rs  faict  bonora- 
JkmUner^  bîementtrai&er  en  toutes  fes  places  &  maifons3&:  auffi  fai&mo- 
ûliîuer.       ftrer  les  chofes  iingulieres  du  pays.  Les  vergers  font  pour  la  plus 
Grenadier,  part  plantez  d'Àmandriers,  01  iuiers5  Grenadiers ,  Xuiubicrs ,  Fi  - 
'ûAsxgim.-  guiers*  Vautres  tels  arbres  fr.uictiers,  Se  entre  antres  de  moult 
omnium.  gran4s  Oranger  s^Çittonniers, Pommiers  d'Àdam^Eoncieres: 
Tomnm      ^  des  fruités,  d'iceux  les  Grecs  expriment  le  ius ,  Se  en  remplit- 
jy™*    lent  des toneauXjdontJls  pharget  leurs  fquiraces,  qu'ils  enuoiet 
^  ~  *    WBiî^ja.Xuiquiejtant  en.Cpaftantinople  qu'ailleurs }  dont  les 
"  '  "  Turcs 


OBSERVEES      PAR     P.    BELON.  ÎJ 

Turcs  fcfcruent  grandcmét  en  leurs  potages,au  lieu  de  verd  ius: 
aufll  eu;  bien  vendu  en  détail  es  mefmesboutiques,efquelles  Ion 
vend  le  poiftbn  faîé,  &  le  Gaxum.  Il  y  a  quelques  endroi&s  en  Garum 
Crète,  ou  croiftent  les  Palmiers ,  tant  grands  que  petits  :  Se  prin-  palmiers  & 
çipalementlclong  d'vn  riuageou  ruifîeau,qui  fort  d'vne  fontai-  crête. 
ne  en  abiftne  d'eau  ùàcé ,  que  les  Crêtes  nommet  en  leur  vulgai-  ^dmiro,. 
re  Al miro.  Mais  ils  ne  portée  aucun  fruichCar  le  climat  de  Crè- 
te eft  trop  froid  pour  les  Palmiers. 

Du  faux  Labyrinthe  de  Crète. &  des  ruynes  de  quelques  villes  de  Tlfle» 
Chapitre    vi. 

E  Labyrinthe  qui  dure  pour  le  iourd'huy  en  Crète,  Faux  idy* 
neft  pas  celuy  duquel  les autheurs  anciens  ont  faict  rmt^e  ^ 
mention.  Car  cel  uv  qu'on  monftre  maintenant  ,  eft  Crfie' 

r  .         j    ,  .  T  i  ,  Ida  rnons, 

ntne  aux  racines  de  la  monraigne  Ida,  vulgairement  _r, 
nommée  Piiloriti.  Ce  Labyrinthe  neft  autre  chofe 
quvnepierrerie  :  Se  toutesfois  tous  les  habitans  de  Crète  la  fça- 
uent  enfcigner  fouzee  faux  nom  de  Labyrinthe.  Ceftoit  vne 
quarriere  de  pierre  dure  Se  bien  belle  ,  que  l'on  ttroit  ancienne- 
ment par  quartiers  >  du  temps  qu'on  fabriquoit  les  édifices  de  la 
ville  de  Gortina  Se  Gnofos ,  qui  anciennement  eftoyent  les  prin- 
cipales villes  de  toute  Me ,  comme  il  appert  par  fes  ruines.  Et 
tout  ainfi  comme  il  faut  auoir  des  guides  du  prochain  village  de  * 
la  grande  pyramide  d'Egypte  nommée  Buiïris  ,  pour  monftrer  Bxjtr*+ 
le  chemin ,  Se  allumer  dedans  ladite  Pyramide  :  auiïi  faut  il  auoir 
des  guides  d'vn  village,  qui  eftoit  anciennement  la  ville  de  Gno-  Gnûj0^ 
fosjioignant  ladite  quarriere  ou  pierrerie ,  pour  monftrer  le  che- 
min à  ceux  qui  y  veulent  entrer.  Il  eft  bien  vray  qu'ilyaleans 
pluueursdeftoursçà&  la  de  collé- &  d'autre,  comme  il  pourroic 
auoir  eavn  Labyrinthe  artificiel  :  mais  ceftuy  ne  prouient  ftnon 
delà  où  ont efté entaillées  les  pierres.  Laquelle  chofê ion  peut 
prouuer  par  les  veftiges  Se  ornières  des  roues  de  charrette ,  Se  par 
les  petites  pierres  murées  ça  Se  là>au  coité  du  chemin'.  Les  ruines 
âc  Cortina  font  moult  grandes  5  Se  y  a  encores  pour  le  prêtent 
quelque  petit  nombre  de  coïomnes  droictes ,  plantées  en  terre,  .  - 

&vn  petit  village  qui  eft  vulgairement  nommé  Metaria.  Les  ,,t   . 
pierres  des  murailles  ont  eue  enieuees  hors  de  là,  d'autant  qu  cl- 

-      "      C  "     • 


ît  ?RIMIER     LIVRE     "DES    SINGVLA, 

les  eftoyent  de  pierre  de  taille,tirees  de  la  fufdite  quarriere,&  ont 
efté  tranfportees  aifément  :  car  la  mer  n'en  eft  guère  loing.  Il  y  a 

zethym  aufl*  vn  torrent  9ui  defeend  de la.montaigne:  Se  croy  que  ceft 
-celuy  que  Strabo  &:  Solin  nomment  Lethyus.  que  Ton  peut  paf- 
ferà  gué  fans  planche  ne  bateau,  Il  y  a  auflî  vn  condui &  d'eau  fur 
des  grandes  arches,  qui  eft  encor  en  Ton  entier,  faifant  moindre 

fUtMpz  pluiieurs  moulins .  Pareillement  y  a  grande  quantité  de  Placancs 
en  la  vallée ,  dont  fort  la  fontaine:  mais  toutes  laifTent  leurs  fueiî- 
les rhyucr.  AufFia  quelques  arches  Se  murailles  d'Eglifè  de  grof- 
fèeftoffe  parmy  les  ruines  qui  font  reliées  debout ,  Se  pluiieurs 
voûtes  de  fort  ciment  Se  brique  par  dcfTus  le  ruifleau  de  Le- 
thyus:  qui  (anoftreaduis)  ont  efté  fai&es  pour  redre  le  lieu  égal, 
Si  faire  laplacc  ou  Ton  tenoit  le  marché  en  la  ville. 


!Ui^on. 


Ôfo 


d'Oife. 
Fouktourtt. 
2a  SonHe* 
iiere. 
C'iflttq  du 

grgujHri 


Comment  les  Crêtes  font  le  Ladanvn.  Chapitre  v  i  r. 

Ntre  les  notables  chofes  que  Ton  peut  voir  en 
Crète,  eft  la  manière  de  faire  le  Ladanon ,  qui  eft 
vne  drogue  des  plus  renommées  qui  foit  en  noz. 
«perfoms.Il  n'y  eft  pas  faid  de  la  plante  de  Ledon, 

ainfi  que  les  anciens  ont  eftimé:  mais  d'vn  autre 

petit  arbrifleati ,  nommé  Ciftus,  dont  y  a  fi  grande  quantité,quc 
les  montagnes  du  pays  en  font  toutes  couuertes.  Sa  nature  eft 
telle ,  qu'eftat  verd  en  toutes  faifons,  après  qu'il  a  perdu  fes  rieurs 
-&fiieilles  du  printemps,  &seft  defpomilé  de  fes  fueiîles  d'hy- 
oer,  ilfc  reueft  d'autres  nouuelles  fueiîles  ,  quafi  lanugineufes 
pour  Fefté^qui  sengrefTent  à  la  chaleur  du  Soleil  d Vne  vligineufe 
rofeepardeffus  :  Se  d'autant  que  le  chauldeft  plus  violent  que 
l'efté,  d'autant  plus  croift  la  fufdite  rofee  defTus  ces  fueiîles.  Il  y  a 
vne  efpeccde  ce  Ciftus ,  croiffant  fauuage  par  les  Landes  àOife 
au  pays  du  Maine,&:  principalement  ioignantle  bourg  de  Foule- 
tourte ,  près  delà  Soulletiere  (  qui  eft  le  lieu  de  noftre  naiffance) 
correipondantes  en  toutes  merques  àceluy  de  Grèce,  excepté 
qucceluyduMainenesengreffe  point  de  rofee,  comme  fait  le 
Ciftus  de  Grèce  :  aufïi  eft  il  beaucoup  plus  petit.  Les  Grecs  re- 
cueillans  ledit  Ladanon,  ont  la  manière  de  préparer  vn  inftru- 
ment  qu'ils  nom  ment  en  leur  vulgaire  Ergaftiri.Ceft  inftrument 
a  le  fuft  quafi  comme  celuy  d'vn  rafteau  fans  dents,lequel  ils  gar- 


OBSER.TEES      FAK     P.   BELOST.  ï£ 

mÏÏentdepluneursconroyes  decuirquincft  pas  conroyé  ,  qui 
font  pendantes  audit  inftrument.    Ils  frottent  lcfdi&es  con- 
royes  doucement  contre  lefdi&s  arbriiTeaux  :  lors  la  fufdktc      y 
rofee  s'attache  contre  les  conroyes,  lefquelles  il  faut- tenir  au 
Soleil  ardent,quand'i  on  en  veut  ofter  le  Ladanon ,  qu'on  rafcle 
auec  vn  coufteau.  Faire  le  Ladanon,  eft  vn  labeur  quafi  intoléra- 
ble :  Car  il  faut  eftre  tout  le  iourau  Soleil  par  les  montaigmes ,  es 
plus  chaudsiours  caniculaires  de-tout  l'efté.  Telouurageeftcô-^^f*5 
munement  de  Caioieres ,  Ceftà  dire  des  religieux  de  Grèce,   "&tï™tleU~' 
l'endroit  en  Crète ,  ou  l'on  en  face  plus  grande  quantité  >eft  vers  MM"  * 
le  pied  du  mont  lda,au  village  nommé  Ciguaiinus  ,  &  auprès  de 
Milopotamo. 

lïh/npoijfon nommé Searu$\moult fréquent  au  nuage  de  Crète,  & 
toutesfois  rares  es  autm  contrées. 

Chapitre      vi-fci. 

L  y  a  vn  poifTon  grancf  comme  vn7  Rouget  barbe, 
moult  commun  en  Crète  5  nommé  Scarusrdoatlc3#.(WÏK 
anciens  autheursont  fait  grande  mention  :  car  il  fut 
i  k  temps  iadis  es  délices  Romaines,  tenant  le  premier- 
Keu  en  dignité  entre  tousles  poiflbns.  L'on  n'a  point  accouftu- 
mé-d'en  voir  en  noz  riuages,non  pliis  en  i'Qoccean,  qa'en  la  mer 
Méditerranée, &  ofons  aiTeurcr  qu'on  ne  le  trcuue  point  au  Pro- 
pontideen  rHcllefpont,nau  pont*Euxin,n'auiTien  l'Adriatique-- 
car  nous  l'y  auons  cherché.  Et  toutesfois  il  eft  fi  frequét  en  quel- 
ques endroicts  des  riuages  de  Crète,  qu'on  n'y  en  pefche  aucun 
autre  plus  commun.  Et  pource  quvonle>trouueen  vnemefme 
contrée ,  &  quafien  mefme  faifba-  que  Ton  a  aceouftuméfaire  le 
Ladanon  :  &  auifi.queîa  plus  grande  pefche  en  eftau  temps  lJti^aC3^ 
qu  on  amaile  ledit  Ladanon :!ors  nous  trouuafmes^iles  voir  tous 
deux  d'vn  voyage  quaii  plus  par  hazard  de  fortune ,  que  de  pro- 
pos délibéré.  Défia  auions  fèiourné  en  riflè-vnc,  longue  efpace 
de  temps,  toutesfois  pour  ne  nous  eftre  trouuezà  prop.os.nauios 
veu  ne  i  vn  ne  l'autre.  Mais  eftaas  embarquez  pour  palier  de 
Rhethymoàlaville  de  Candie,  aduint  qucles  courfaires nous 
rencontrans  fur  mer ,  forcèrent  noftre  vaiïfeau  degaignetîa  co~ 
fcenaeMillo£Otamo&  Cigalinus.^  Les  mariniers  abandonne^ 

C    il 


20  PREMIER     LIVRE      DES      SINGVLA. 

renda  barque  fuyants  fur  terre  pourfefauuer  en  la  montaigne: 
i£s  voitrfei*  toutesfoispoprcequeceneftlacouftume,que  les  courfàires  dc- 
t&  nejume*  ]ajfl£nt  jCQr  Vaiiîeau  pour  fuyuir  ceux  qui  fuyent  fur  tcrre,ils  pil- 
te£e  lerenc  feulement  les  hardcs,laiflàns  le  vaiiîeau  là,auec  ce  qu'ils  ne 

poiiuoient  emporter.  Mais  en  nous  fàuuant  par  les  montaignes, 
courufmes,de  frayeur,  iufqucs  à  tant  que  trouu allions  vn  mona- 
ftere  de  Caloieres  en  la  vallée  ioignant  le  riuagc ,  ou  pour  lors  le- 
uoyentlcs  nafles  qu'ils  auoyent  ja  tendues  à  prendre  les  Scares. 
Etpourceque  feiournafnies  la  quelque  iour,  eufmes  bonloifir 
d'enquérir  la  raifon  pourquoy  ces  poiffons  y  font  fi  frequens  ,  Se 
surAâ.  rares  ailleurs.  Nous  trouuafmcs  que  le  Scarus  eftant  poiflbnfa- 
xarile,en  outre  ce. qu'il  demande  habiter  entre  les  rocs  ,  illuy 
faut  aufîî  nourriture  conforme  à  fon  eftomach,qui  eft  vne  petite 
lierbe  dont  il  fe  paift ,  Se  qui  ne  croiftpoint  ailleurs  :  Se  le  Scârus 
,  eftant  frïant  de  cefte  herbe -,  demeure  volontiers  en  celle  partie 

fcota-elT  ^c  riflc* 0r  les  Caioieres  Vautres  villageois  du  lieu,  cognoifTans 
sfarm.   *'    la  namre  du  Scarus ,  Su  fçachans  bien  qu'il  eft  friant^de  l'herbe 
ïhafeôles.     àcs  Phafeoies,en  fement  par  les  champs,  dont  ils  luy  font  les  ap- 
pafts  pour  le  prendre,  mettans  les  fueilles  fur  iour  dedans  les  nat 
îes  en  la  mcr,gardans  les  filiquespour  eux,&:  les  Scares  entrez  de- 
dans relient  prifonniers ,  autrement  ils  feroyent  difHciles  àpef- 
cher*.  car  ils  ne  fe  prennent  guère  à  la  ligne, &  bien  peu  à  la  traîne. 
Et  à  caufe  qu'ils  ont  dédié  ladite  herbe  des  Phafeoles  aux  Sca- 
scarouotano  ^^ils  h  nomment  vulgairement  Scarouotano.  Les  Scares  vont 
sdfes.        à  grandes  compagnies ,  comme  les  Salpes ,  &  font  delà  couleur 
Rougets  har*  approchante  des  Rougets  barbez.  Nous  ne  voulons  cy  amener 
î>e\  toutes  les  merques  de  Scarus  :  car  nous  Fauons  amplement  def. 

crit  ailleurs  auec  tous  autres  poiûons.  Encor  auons  bien  voulu 
adioufter  vne  chofë  notable  :  c'eft  qu'eftans  en  telle  fuite  iufqu  es 
bien  tard  fans  manger,  le  Caloiere  nous  en  ayan rapporte  vn  cuit 
Se  embroché  à  leur  mode,  veifmes  qu'ils  leur  fichet  vne  brochet- 
te par  lagueuîe  au  trauers  du  corps  pour  les  roftir  fur  les  charbos: 
mais  ainfi  qu'il  droit,  il  fembioit  proprement  à  vne  perfonne 
riant  :  carie  Scarus  a  les  dents  ordonnez  comme  vn  homme ,  Se 
ayant  îes  leures  retirées  par  la  chaleur  du  feu ,  il  fembloitpropre- 
ment  voir  la  bouche  d'vn  home  riant  .Ce  qui  eft  le  meilleur  de  ce 
poiflbn ,  eft  l'herbe  qu'il  mange ,  de  laquelle  on  trouue  toufiou  rs 
grand  quantité  en  fon  cftomach.  Ha  auifilefoye  moult  grand, 


OBSERVEES     PAR     P.    SELON.      ^  21 

quifertàîuyfairefafaucc.  Car  eftant  battu  auec  les  trippes,  fèl 
ic  vinaigre,donne  bongouftà  toutlcpoiffon.  Et  à  fin  qu'on,  en-* 
jcendc  dequelpoiffon  auons  parlé?en  auons  cy  mis  ie  portraiâ;.  j 

PortraiB  ivn  poijfon  de  Crète ,  nomme  Scarus* 


>    Les  noms  français  de  plufieurs  espèces  doifeau*  obferue^  en  Grèce >con- 
fere^auec  leurs  appellations  antiques.  Chapitre    i  x. 

»  E  qui  maintenant  nous  induicr  à  parler  des  oifêaux 
,  en  particulier  9eft  que  nous  eftans  trouuezenvnpe- 
»  ris ■  vaiffeau  fur  mer ,  au  printemps  entre  Fifle  de  Za- 
^^^v^vsj  cinthe&Cyrarée  :  diuerfes  efpeces  d  oifeaux  paûa- 
gersfercndirenrànouslaflcz  dedans  le' vaiffeau.  Etpatceaprif 
mes  des  lors  à  les  fçauoir  recognoiftre  de  noms  vulgaires.  Mais 
les  ayans  amplement  deferits  en  fept  Iiurcs ,  fumTt  maintenant 
d'en  toucher  vn  petit  mot  d'vn  chacun.  Et  pour  autant  que  fça- 
uons  bien  qu'il  y  a  plufieurs  gens  en  doute ,  à  içauoir  il  les  ani- 
maux viuans  es  autres  pays  de  leuant ,  ont  mcfme  corpulence  Se 
figure  que  ceux  que  nous  cognoiffons  en  ces  pays  cy ,  auons  efté 
meus  de  leur  faire  entendre  gue  telles  y  font  toutes  manières  de 
beftes/nfeaux,  ferpens3poiffons3  &  plantes,  que  celles  que  nous 
voyons  en  nos  ptouinces:&:  que  s'il  y  a  duference,on  la  trouuera 
manifefte  en  toute  lefpece.  Il  eft  bien  vray  qu'ils  en  ont  beau- 
coup de  fortes  que  nous  ne  voyons  pas  en  nos  pays ,  que  les  an- 
Ci  iij 


%%  PREMIER     tlVUE    DES    SI  N  G  VTA.. 

ciens  ont  nommez  de  propres  noms ,  &  en  cela  trauailîonsà  les 
fcauoir.Commentdoncvn  AlematjFrançoiSjOu  d'autre  nations 
pourra  trouuer  nom  vulgaire  en  fa  langue  pour  tourner  ou  ex- 
primer le nô  d'vn  oifeaue(lranger,s'il  neft  veu  en  Ton  pay s?Nous 
baillerons,  exemple  de  eeluy  que  ks  Grecs  ont  nommé  Merops* 
Se  les  Latins  Apiafier ,  qui  eft  oifeau  il  commun  en  Crète ,  qu'il 
nya,-endroitenrifk  ou  Ion  nelevoyevoler,&itotîtesfois  eft£ 
rare  ailleurs ,  que  rnefmsr&ent  les  Grecs  de  terre  ferme  ne  le  co- 
gnoijGTent  point.  A  peine  a  efté  iamais  veu- voler  en  ïtaîie:ce  ncat- 
moins les  François,les  Alcmans  ,.&-  autres  de  cefte. Europe,  ont 
penie  que  no&re  Mcfangefuft  Merops,côbien  que  cela  foit  faux 
'[/Ckion.      car Meropseft  vn oyfeau  de  la  grofleur.  d'vn  Eftourneau  ,  qui 
Mamnet     neft  mou  Je  bon  à-<manger,&  fi  eft  prefque  femblable  à  1*  Alcion, 
fefémr.      qUC  nou&nornmons  Martinet .pcfclieur.il  n'eft  plus  appelle  Me- 
MeUjfoph^..  rôp&cn  CreteiainsMelifTophagOjqui  femble  didion  correfpon- 
&  r  danteàlaLatine  Apiaftencarilprendfapafturedlauettes  envo- 

Me^nge.     lantcn  Fair  ^kraaniere  ac$  Hirondelles.  Une  vole  guère feul5. 
-*Zoio  mais  en  compagnie,  &  fur  tout  le  long  des  montaignes  ou  croift 
e,     le  vray  Thym,pour  manger  les  auettes ,  dont  il  a  prins  fon  nom. 
Gorge  rou*  Et  combien  que  î&Mefange,  que  les- Grecs  nomment  Parus,  ê£ 
les  Italiens  Sparnoczolo,en  face -grand  dcgaft:&  auffi  que  la  Ru- 
bcline,ou  Gorge  rouge ,  nommée  Rubecula,  que  les  Vénitiens 
nomment  Pettoroifo  ,fepaiiîe des  auettes  :  toutefois. ne  l'vn  ne 
i-autreagaigné  lenom de  Apiafter, cemnre Ion  auoitparcyde- 
uant  pente.  Et  à  fin  d'en  ofter  Ferreux  auons  propofé  en  bailles.  * 
la  vraye  pemciure^. 


Tarws. 
Sfurnoc. 


fiubecuLt. 
Pàtorûjfo. 


OBSERVEES    S  A  Jl     P.    B  XL  O  N, 


1$  Jjortrafâ  iu  Merop,  quon  pourrait  bien 
nommer  en  François ,  <3uefpier% 


Ceft  oifeau  eft  de  la  plus  belle  couleur  qu  on  puiae  voir ,  ex- 
quife  corne  celle  d'vn  beau  Papegaut.il  fe  fait  ouyr  debië  ioing,  ?*?%*&> 
faiiànt  vn  Ton  ou  voix  celle  que  feroit  vn  homme  en  tublarr^ayac 
îa  bouche  cîofe  en  rondeur, qui  chanteroitjgtulgruruururubauf^ 
û  hauît -comme  vn  Loriot.  Sa  beauté  exquife  inuite  les  petis  gar.  Lûr-ot 
çons  de  Crète  à  le  prendre  auec  des  Cigales ,  comme  aufS  font 
les  grandes  Hirondelles,  nommées  Apodes.  Et  pour  ce  faire,  apodes, 
mettent  vne  efpingle  crochue  en  forme  dvn  hameibn  par  le  tra-  cïgiUs. 
uers  d'vne  Cigale ,  à  laquelle  ils  attachent  vn  filet,  dont  ils  tien- 
nent le  bout.  La  Cigale  eftan  t  ainfî  attachée ,  ne  laiflè  pas  de  vo- 
ler en  l'air. Adonc le Merops laduifàntjdcf céd de roideur,&; aua.- 
le  la  Cigale  en  volant:lefpingle  crochue  le  retient  à  ce  filet3&  de- 
meure prins  par  ce  moyen.  Loifcau  que  nous  nommons  Coqu, 
que  les  Grecs  nommoyent  anciennement  Coccix,  les  Crêtes  ie  ^^ 
nomment  maintenant  Decodo  :  &:  Decodo  eflàdirc  dixhuiâ.  ptC0g^ 

C  iiij 


Wte. 

pmmàiett. 

CuUàhgA 

l&ùpotogas. 

Siiforada, 

^dttagen. 

^/CttAgM. 

Çanejteti.sre. 


TerdrU  bU- 
çbes. 


frxncolm. 
fetrAQ. . 
GaUo-Cedro* 

Faisabruiat. 


24  PREMIER     LIVRE     DES     SIKGVLA. 

Mais  iîsles  nomment  ainfi,pouf  ce  qu'il  femble  que  le  Coqu  pro- 
nonce dccodo  en  chantant.L'oifeau  que  nous  nommons  Berge- 
ronnet'e,(èmblabIeà  la  Lauandiere,  Se  les  Latins  Culicilega,  Se 
anciennement  Knipologos,  les  Grecs  la  nomment  maintenant 
Sufurada.  Et  Attagen  y  eft  nommé  Taginari.  Quelques  vns  le 
nomment  Attagas3comrneauiït  à  Conftantinoblc,  Et  ayans  co- 
gneu  ledi£fc  Attagen  moult  femblab]e  à  noftre  Canne  petiere> 
suons  cherche  quelque  merque,  qui  les  diftinguaft.  Ceftquela 
Canne  petiercn'a  pas  les  ïambes  chargées  dep!umes,mais  TAtta- 
gen  les  à  patues5&:  à  auffi  le  bec  noir3court,&:  fort,&:  eft  de  moin- 
dre corpulence  que  la  Canne  petiere.  Mais  au  refte  font  prefque 
femblables  en  couleur: touresfois  l'Àttagen  eft  incoftant  en  cou- 
leuncarlon  en  voit  de  tous  blancs ,  que  penfonseftre  ceux  qu'on 
appelle  en  Sauoyc  les  Perdris  blanches.  Ce  que  Pline  a  nommé 
Lagopodes:car  elles  font  toutes  b  lâches,  Se  ont  les  iambes  char- 
gées de  pîumeSjComme  a  l'Àttagen^  ne  font  de  û  grofTe  ftature. 
Etdefai&eftans  à  Venife,au  logis  demolieur  deMoruiiler,  lors 
qu'il  eftoit  ambaûadeur  pour  le  Roy,veifmes  des  Attagen  s  blacs: 
mais  les  Italiens  appellent  tant  les  vns  que  les  autres^Francolins.. 
L'oifeau  que  les  Romains  nommèrent  Tetrao  >  Se  lequel  les  Ita- 
liens nomment  pour  le  iourd'huy  Gallo  Cedrone  ,&  en  Auuer- 
gne vn  Faifan  bruyant^  en  Sauoye  vn  Coc  de  bois ,  eft  fouiient 
veu  parlesforeftsdes  hautes  montagnes  de  Crete5deux  fois  plus 
gros  qu' vn  Chappon?ayant  vue  tache  rouge  de  chaque  cofté^oi- 
gnant  les  yeuxfur  les  tempes  ^  tout  ainû  qu'vn  Faifan  :  Se  de  force 
qu'il  eft  noir  deuant  l'eftomach^fes  plumes  en  reioifent,  comme 
le  col  d  vn  Ramierm'ayantrien  de  blanc  finon  es  a?lles:ayat  fem- 
biablement  les  iambes  pelues  de  plumes ,  comme  a  TAttagen  ,  Se 
k  Perdris  blanche  de  Sauoyc  >  Se  la  GelKnote  de  bois.. 


Zes  noms  Grecs  âe  plufiems  autm  oifiaux,  conferezjtuec  lesappelÎMos, 
Itançoifess  .'■  Chapitre  x. 

Es  oifèaux  qne  les  anciens  Grecs  nommoyent  Cicla?, 
Se  les  Latins  Turdi  ySe  nous  Griues ,  Mauuis ,  Irak 
lcs,&  Tourets ,  y  font  maintenant  nommez  Schy  no- 
poulii ,  quafi  difàns  oifeau  de  Lentifque.  Et  pource. 
^SïejpaiiTeûCauiÏÏdes  bacques  de  Myrche ,  ils  les  nomment 
"-'""  ailleurs 


.   -OBSERVEES  "pa^j  p;  "bel  ok;        '  iy 

ailleurs  Myrtopoulli.  Mais  tels  oifeauxfont grand  nommage  en  yArttpouM. 
paysdes  01iuicfs.Ccluy'qû'Ariftotc.nomma,Vifciuorum9  eft  dir  rifaucrm 
en  François  vne grande  Griue,qui  eft  le  premier  en  Ton  genre.  Il  crîue. 
eft  plusgros  que  nul  desautres.  Le  fécond  qu'Ariftotea  nommé        _ 
Piïarem.eft  communément  nomme .-en  noftrclangue  Licorne.il-  T'lUrii* 
eft  de  la  groftèur  d'vn  Merîc.Le  tiers  qu'il  nôma  IliactmT,eft  vul-    ,        "     . 
gairement  dit  vn  Mauiiis ,  qui  eft  le  plus  petit  de  tous  xSe  le  plus  MauuiSm 
iaune  au  pîy  des  deux  ailles  ,  Se  par  défions  le  ventre  :  Se  eft  de  la  Efloumeau, 
groftèurd'vn  Eftourneau.  Loilêan  que  nous  nomons  vn  Roite-  çoltckt: 
kt,îls  le  nômen  t  en  leur  vulgaire  TriIato,qui  eft  en  ce  eorr  efpon-  Trocbilos, 
dantàlantiqueTrochilos,  lequel  ils  fçauét  fort  bien  distinguer  Tettlg°n. 
d'vn  autre  moindre  que  luy, qu'ils  nomment  Tcttigon,&:  les  La-  Ty*mn™-- 
tins  Tyrannas,&:  les  François  vn  Poul,Soucie,ou  Sourcicle  :  car  p<M^  ' 
il  a  les  plumes  iau-nes  fur  la  tefte  de  cofté&  d  autre  en  manière  de.       ~ 
erefte,qui  luy  ombrent  les  yeux  comme  àrnotts  les  fourcilsjdont  " 
ifagaignéce  nom  François,  &n'eft  guère  plus  gros  qtteft ynt  fyrroeoraxS 
Sauterellc.Les  Chouettes  ou  Choucas,  que  les  Picards  nommer  swrapoU 
£raues,qui  ont  le  bec  Se  pieds  rouges,qu  Ariftote  nomma  Gora-  K2**u&. 
kias,Pline  Pyrrocoraces/ont  moukfrequentes  à  la  fornmité  des  p^^ 
hautes  montagnes  de  Me  :  les  Grecs  les  nomment -maintenant  A0°  C°'^ 
Scurapola  JLoifèau  que  Ariftote  a  nommé  Kianos,  Se  Pline  Ce- 
ruleo  { lequel  ypource  qu'il  hante  les  rochers  des  hautes  montai* 
gncs,&  eft  femblable  à  vn  Merle,  a  change  fannerm  )  eft  mainte-  2>urdu. 
nant  appelle  PetrocoHipho.  Il  eft  de  moindre  corpulence  qu  vn 
Merle, Se  eft  totalement  bleu ,  &  eft  moult  exquis  a  tenir  en  cage 
pour  chanter.Àuffi  a  il  la  voix  de  mefme  le  Merle.  Nous  ne  fçau- 
rions  le  nommer  en  François  :cac-nous  neTauons  aucunement 
en  ce  pays,non  plus  qu  en  Italie,  filon ii  enapportoit  en  cage:car 
Ion  en  defniche  quelquefois  des  petis,pourleuxapprendre  à  par- 
ler. Et  comme  Ariftote  a  cogneu  trois  espèces  -de  Merles  :  Auiîî  M&lesnùrs. 
ont  des  Merles  noirs ,  Se  blancs  ,'qu'ilsnomment  comme  les  an-      f     ^  ^ 
ciens  Grecs  Coffiphos.Et  encore  vne  tierce  efpecc,  dont  Acifto-  ^^0^ 
ce  a  parlé,  qui  de  nom  propre  François  eft  appelle  Merle  au  col--  J*^^ 
licr,pource  qu  il  a  vne  ligne  blanche  fous  la  gorge^vers  la  poiebi-  ^^ 
bc  ,  qui  luy  tourne  tout  le  coî,&  duquel on  en  v  ois  grande  qu  an- 
îké^n  la  vallée  de  Morienne ,  Se  par  les  vallées  de  Sauoye.  L'oy- 
feauquonnommeen  plufieurs  lieuse  France  Dixhuiet,.&à^^ 
laris  vn  Vaonem>&  que  les  Romains  nommèrent  ancienne-  rmnsm^ 

n . 


Parcus. 
ly€ex» 


Sferdris. 
Cotumo, 


:¥otamïilA, 


£6  -rUFMTER     LIVRE     DES     SÏNaVXA. 

ment  Parais ,  Se  les  Italiens  appellent  Paoncello ,  cft  nommé  eh 
vulgaire  Grec  de  fon  antique  appellation  Àex  r.pour  ce  qu'il  crie 
fouucnt  comme  vne  Cheure.Les  autres  dtfènt  Taosagrios,  c*eft 
à  dire  Paon  fauuage.-car  il  porte  vne  huppeeîeuec  deflus  fa  telle, 
comme  fait  vn  Paon,  la  manière  d'vnCocheuis,  Ils  n'ont  point 
jic  Perdris  goaches  ou  grifes  en  Crète  :  Mais  en  ont  des  rouges 
groiTes  comme PouHes,  qu'ils  nomment  vulgairemétCoturno, 
-qui  eft  di&ion  quifcmble  eftre  empruntée  des  Italiens.  L'oifeau 
qui  anciennement  auoit  nomCuruca,que  nous  nommons  ea 
François  vneFauuettc  brune,y  eft  maintenant  nommé  Potami- 
da.  Ils  nous  ont  afieuré  quellenourrift  communément  le  petit 
du  CoqUjCombieîqu'il  y  en  ait  plufieurs  autres  qui  le  nourriffent 
zutVii  toutesfbis  ceftuy  là  ienourrift  particulièrement  plus  que 
les  autres  oifeaux.Il  y  ena  qui  veulent  que  Potamidacft  vn  Rof- 
fîgnoî  :  Se  à  dire  vray  le  penfions  ainfcmais  auons  trouué  depuis 
que  le  Roflignol  y  eft  nommé  Àdoni  ou  Aidoni.De  laquelle  ap- 


^'m^Àe'  PeîIaîion  voyons  mefmement  que  les  François  en  cognoifïenc 
'  deux  efpeces„  Tvne  de  bois,  l'autre  de  muraille: qui  cft  celuy  que 
les  Grecs  ont  anciennement  nommé  Phoenicurus  ,&  les  Latins 
Rubicilla.  MaisPotamidaeftantoifeau  différent  au  Roflignol, 
aies  pieds  &:  le  bec  de  couleur  plombée  tirant  fur  le  cendré.  Il  cft 
nommé  en  vulgaire  François  Fauuette  brune,ou  grande  Fauuet- 
tcàla  différence  delà  roufle  nommée  Troglodites.L'oifeau  auf- 
û  que  les  Grecs  nômerent  anciennement  Jigotilax,&:  les  Latins 
Caprimulgus  ,  eft  vulgairement  cogneu  en  rifle  de  Crète s  ouître 
l'opinion  de  Solin  Se  d  autres-.  Se  d  autat  qu'il  voie  la  nuià  par  les 
villes,  Se  fai&vncry  moult  effrayant,  nous  l'auons  nommé  vnc 
Fre%e ,  ou  bien  Effraye.  Il  ne  voit  le  iour  non  plus  qu  Vne  Che- 
ueche  ou  Charmant.  Quelques  vnsprononcét  vne  Orfaye:mais 
ce  nom  eft  deu  à  vn  au  tre  oifeau,nomme  O  flifragus,  dont  parle- 
rons au  liure  des  oifeaux  en  deferiuant  Nicfcicorax.  CefteFre- 
fàye  eft  quaiï  de  la-couleur  &.grorTeur  d  Vn  Coqu ,  Se  fait  fon  nid 
en  noftre payses  hautes  tours,&;  espertuis  des  Eglifes.Cellcs  qui 
viuent  en  Crete^e  font  entre  ks  rocs  :'par  les  montaignes  le  long 
de  la  mer ,  ou  elles  font  grands  dommages  aux  pafteuts,  qui  n  oc 
accoaftumé  mettre  leurs  Cheures  de  nuiâ:  en  tait,d'autant  qu  el- 
les fuccent  le  laid  des  tétines  des  Cheures.  Ouide  en  a  parlé, 

£trJx,aitk    quand  il  dit  :  CœfmMcmmrla£leatiâvifcera  rofiris*  £Jl  illis  Stnghus 


C âsho'ps. 
:FhœmmrM. 

J>ot4tnicU. 

^muette. 


'^gegotiUx. 
<CœprimuL 

Frejaye.  - 

Effraye. 

■Cbeuecbe. 

Cbabmnt. 

Orfaye. 

O&fr&ms. 


OBSERVEES     PAR    ?.    BELON.  ZJ 

ttomen  fednommis  huitts.  Caufi ,  qucrd  horrendt  firidere  noffefolet. 

Les  noms  antiques  & modernes jant  François  que  Grecs  deplufteurs  au*  - 
tresOifeaux. 

Chapitre:  xi... 

^*V&@  ^  tous  oifsaux^lont  auons  eu  cognoifïânee,n  en  auôs  laotien 
"     *      g  vea  aucû  qui  n'euft  quatre  doigts  es  pieds  y  excepté  le  Gui!^ùt- 
. :PIuuicr5le  Guillemot, la  Canne Betiere, l'Oftardc  &  ^J^"' 
la  Pie  dé  mer,  qui  fut  ancienement  nommée  Hxmz-  pùdemcr 
topus.  C  eft  vn  oifeau  rareà  voken  nos  nuages ,  combien  qu'on  jj^tmotopis. 
l'y  ait  quel  quefois  veu  .11  eft  de  la  corpulence  d'vne  Àigrete,  ay  ar  aigrette. 
les  ailles  comme  vne  mouetej&le  corfaged'vn  Flambant,  que  iLmbant^. 
'  les  Latins  nommentPhœnieoptcrus:le  beclôgde  quatre  doigts,  Tbœxucofte* 
comme  celuy  delà  Becca{ïe,doataucunsîenommentaufil3cc-  rm- 
cafïè  de  raerrmais  eft  différente  en  rôdeur  à  tous  autres  b'ecsd'oi-  ££CCa"e 
féaux  paluftreSj  qui  Font  rond:car  ceftuy  cy  ràapplati  &  agu  par 
le  bout,&  quelque  peivnoir  à  l'extremitéicar  tout  le  refte  efl  rou- 
ge.Jouteia  tefte  &  le  col  eft  noir ,  S^auffi  tout  le  demis  des  xllcs- 
blanc  par  4e  trauers  :  dont  il  a  prinsfon  appellation  Françoifc.Et 
eft  blanc  deffous  les  ailles  Se  le  ventre.    Sa  queue  eft  noire  par  le 
bout,longuc  corne  celle  <£vn  Canard.  Il  a  deu-x  orteils  ou  doigts- 
âefes  pieds  qui  fè  tiennent  enfcmble:celuy  qui  eft  en  dedans ,  eft-: 
fèparé.Il  n'a  point  depetitergoDderHerejCÔme  onttousoifèaux 
de  riuiere  :  &  auïEa  hs  pieds  délicats  5c  mois ,  &mon  pas  fecs  & 
durs  comme  les  autres.  Il  a.laiambe  longue  de  trois  doigts.  Les 
doigts  defes  pieds  font  courts,^:  ont  vn  ongle  voûté,  côme  font  ; 
les  ongles  des  Oftardes.   Ilxftdechaitmauuaife,  dure  ,&  fort  op&de.^- 
noire:&afeiargueii  ou  gofler  moult  grand^large^  robufte:  La  B€a^-.' 
Beccafte^qui  auoit  anciennement  nom  Àfcolopax  5  fe  refent  en-  ^^^ 
cor  quelque  peu  de  fon  antique  appellation  G  teque  :  car  encor  ^iW». 
pour  le  iourd'huyja  nomment  Xilornitha/ceft  à  dire.Boulle.de  ^£lÙUSue. 
bois,quieft  conforme  à  fàdidion  Latine  Gallinago.  Ilsnomcnt  chxmochiU^ 
les  Alouettes  Ghamocruladi^îes  Raaiiers  Piaafîàlls  n  otpoint  dî: 
nom  plus  propre  pour^ex  primer  les  Corliz-,  quede  Je&appeller  ^°^ 
^crimiti3ceft  à4ïte,ne2lIpng.  Les  Gtecs  n'ont  dictions  en  leur  ~*ft  .. 
vulgaire  pour  dMlinguer les  oifeauxde  nuicte  il  proprement  que  ^f;  -t: 
n9&4fei&ns:  Çarils.nQmmenj:  indifeemr&eûtles  Sarcelks&:  V^&T  ~ 


*8  PREMIER.     L'ÎV-HE     DES     STOGV'LX. 

■Morî&ons.    xforillons  idc  nom  de  Cannes ,  qu'ils  appellent  Pappi.  Il  yavne 
P^*      ,  particulière  efpecc  de  Plongeon  de  mer  en  Crète ,  nageant  entre 
p  1g?0**  *  deux eaux /différente  au  Cormarant  ,&auxautres  Plongeon-s 
^omurant.  nommez Mergi: qui çft  celuyqu'AriftoteanomméEthia.  Les 
.Mewts.       habitans  du  nuage  de  Crète  l'appellent  Vuttamaria  &  Calicate- 
.Ethu.         zu.  ïl  eft  de  la  groffeur  dVne  Sarcelle^blanc  par  deflbus  le  ventre, 
toifeaux  de  ^oir  dëiîus  k  telle  Se  fur  le  dos ,  deflus  les  •asiles^  Se  aufïi  toute  la 
■Û5rtft        «queue.  Il  n'a  nul  ergot  derriere^uflî  eft  il  feul  entre  cous  oifeaux 
--ayans  le  pied  plat3à  quieela  conuienne.Sa plume  dont  il  efteou- 
Hiert,eft  fin  duuet,  tenant  fort  à  la  peau.  Son  bec  eft  moult  tran- 
chant par  les  bords,  ,-creux  Se  quaii  plat ,  qui  eH  couuert  de  du- 
uetjufqnes  bien  auant,noir  deflus  Se blanc  deflbus  :  Se  a  le  fomec 
plongeon  de  delà  tefte  large. Celle  manière  de^etit  Plongeon  de  riuiere ,  que 
muere.       }es  François  nomment  ?vn  Caftagneux  ,  n'eft  point  cogneu  en  * 
eblom.       Grece.Le  Verdicr  nommé  en  Grec  Chloris ,  Se  en  Latin  Lutea, 
ÎJ^'  '      s'appelle  en  vulgaire-Grec  AflarandoSjde  diàion  correspondant 
seront     *'TC*  ce^c  ^u  PaYs  ^u  ^aine  >ou  lon  a  accouftuméle  nommer  va 
Frinniu    -Scrranc.  Les  oifeaux  que  les  Latins  ont  nomm  é  Fdngilîa?  5que 
Tlnfons.      -les  François  nomment  Pinfons  ,  font  dicls  en  Grec  Fririgilari, 
sptfe.         -ne  tenans  rien  de  leurs  anceftres ,  qui  les  nommoyent  Spifx: 
oroftî(*.    xomme aufllccux  qu'ils  nommoyent  anciennement  Orofpiza:s 
Monmm    g^  q^^ous  appellonsMontainsisu  Pinfons  d'Ardaine ,  n'y  font 
smfom.      :4j^iBgLîez  d'autre  nom  que  decommun  Frin.gilaro ,  qui  eft  pur 
rT*]'       Italien,  qui  Je  nomme  Fringuello.  NosBruans  leurs  font  auffi. 
Floms.        comiuuns  :  Mais  ils  ont  oublie  a  les  nommer  de  noms  Grecs  an- 
sporruitk  <ciens  Anti ■:  car  eux  ayans  -aprins  -tes  noms  Latins ,  les  nomment 
Mouette.     Flori.  AufFmemmcntvn  Paffereau  en. leur  vulgaire  Sporguitis* 
iAro$. /       £t  vne  Mouette  Laros.  Vn  Chardonneret >  qui  aneiennernenj: 
^chardineret  s^ppdiojt  Pikilis ,  Se  en  Latin  Carduelis ,  eft  nommé  Guardelli, 
j  m    ou  bien  Stragalino.  Combien  que  ce  nom  Chardonneret  con- 
J^lfo    uienneàceluy  que  les  Grecs  ont  nommé  Acanthis  5  lequel  les 
jàmus.    '    Latins  ontdid  Spinus ,  quieft  noftre  Serin ,  toutesfois  ils  lenô- 
jerm.         ment  maintenant  Spiqidia.  Il  n*y,a  chofe  â  fréquente  en  Crète 
~"     que  le  Piuoine ,  que  Ion  voit  voler  deffus  les  petits  buiffons  :  Se 
pource  que  c  eft  vn  petit  oyfeau  ayant  la  tefte  Se  h  queue  Se  vnc 
partie  du  corps  noire  ,pluiîeurs  le  nomment  vulgairement  A  f- 
proçolpSjCeâà^direjBlanccul.  Mais  ce  nom  luy  aefté  donné  au 
cotraitcicar  il  y  en  a  vn  autre  qui  eft  particulièrement  nomé  Cul 


OBSERVEES      VA'R     P.    B;ElON.  £Ç 

-fchnc,quicft  celuy  que  les  Latins  nommèrent  Vitis  flora ,  &  les  p^^- 
Grecs  Oenanthi.  Quelques  autres  nommée  le  Piuoine  plus  pro-  ^^ 
prement  de  diction  aftez  correfpondente  Melanocephali ,  c  eft  à  ,  ^ 
dire,  tefte  noire.  Les  anciens  Grecs  le  nommèrent  Mclancon- mùmorU 
phos,&  en  Italie  Atricapilla3qui  eft  vne  mefincchofe  auec  Zika-^.. 
}isîiequellcsFrançois.ontnomm«'Papafighioii  Becafigui,&  les  ^ttrlapU 
Latins  Ficedula.  Celuy  qucîes  anciens  nommèrent  Ortygome- 1*--- 
tta,c 'eft  à  dire  ISftere  des  Cailles,  eft  peu  commun  en  Crète  :  mais  f^ff" 
es  autres  lieux  de  Grèce  il  eft  auiïï  commun  comme  en  Italie  ou  ££*y£^M 
enFrace.'Ceft  vn  oifeau  qui  enfuie  les  Caiilescn  quelques  mer-  w'  * 
ques  :  Et  ayanrdc  ce  defFauten  luy  de  ne  voler  guère  bien  ,  en  re.  M„e  ^ 
compenfë  nature  la  fait  courir  legierement.  Les  François  le  nô-  oulles. 
«ment  vn  Rafle,  &  en  Italie  le  Roy  des  Cailles.  Et  entant  que  le^>. 
dit  Rafle  eft  noir ,  &  hante  toufiours  l'eau ,  il  rcffcmble  qnafi  vne  ^lelem. 
Poulie  d'eau,  que  les  Italiensappelknt?vnapQulica:  mais  il  eft  *'  ca" 
beaucoup  plus  petit,  &  n'eftpas  du  tout  u  noir ,  &  eft  bigarré  de 
blanc  pardeffous  les  adles ,  &  par  les  deux  coftés.  Sa  queue  eft 
roufTe  par deurou=s,&éft  courte  comme  à  tous  autres  oy  féaux  de 
riuiere.  Son  bec  eft  long  de  deux  doigts,mais  en  comparaifôn  de    .-. 
laBecaffejCheualiet^CorliZjqui^onçfortlong,  pouuokeftre  seccafe. 
dit  Court.  Les  Vautours,  Aigles,  &Faucons  font  leuxs  nids  en  chmdter 
Crete,non  pas  es  xrhefnesà:  es  arbres,  commefont  lesaxitres  oi-  C°T^un 
féaux  :  mais  es  rocheriqui  refondent  fur  lamer  ,;quaiî  perrdans  J^*n* 
comte  bas,  en  lieu  moule  difficile  &£  precipiteux.  A  peinepourr  F^0^ 
zaitlian  les  voir,n'eftoic  qu'on  fuft  euvn  vaifTeau  •>  les.regardans 
•de  iamer.  Parquoy  les  vouïans defnicker,  #autauoir  vne  longue 
xoide  qu'on  laifle-pendrêie  long  du  roc,  donc  le  bout  eft  attaché 
deâkstefatfte  delà  montagne  a  quelque pau  fiché  en  terre*  Vn 
payfan  .deuallele  long.de la  corde ,  iniques  a  tant,  qu'il  paraient 
au lieu oueft:  le  nid  du  Vautou  r,puis  retourne  à  montpar  la  mef- 
me  cordepax  laqueileil  eftoit  defeendu.  Autrement  mettent  vn 
•petit  garfon  dedans  vne  grandecorbeille,  qu'ils  dcuallenc  de  def 
fus  le  roc  contre  bas:  &  quandifleftparueniiaunid^Jors  il  met  retours 
Jes  oiièaux  en  fa  cQrbeillG,&  Ce  fait  retirer  àmortt.  Les  Vautours  *4»»^ 
tant  les  tannez  quenoiTs,6:equenteiit  fur  les  raoneaignes  de  Cre-  ^autoim 
te^oupaiftlebeftailjrauifEintlesaigncaux  &:  cheureaux,  &  les  *^^  r 
lieures  qu'ils  trou  uenc  au  defcouuerc.  Parquoy  les  pafteurs sel-  ^.  £  * 
&yenc  de  les  prendre  pour.y  auoir  du  gain  g  1  carilsles  eicorehec>  '?##<**$. 

D   iij 


5°  PREMIER,    LIVÎtrE      &E$-SINGVLA... 

Sç  vendent  les  selles  aux  artilliers,  qui  s'en  feruen t  à  faire  des  am-L 
pennons  aux  flefehes  :  Se  la  peau  aux  pelletiers,  qui  la  conroyenc 
pour  en  faire  fourrures  ,  qui  font  vendues  bien  cher.  Ils  nommée 
ideonk  ■      *çs  Faucons  en  vulgaù*e,  Falconi,  combien  que  vn  Fauconnier  y 
sierâx.      eft  nommé  Hjieracari,dela  lignification  de  Hierax,qui  eft  terme 
sure.         gênerai  conuenantà  tous  oyfeaux  de  proye.  Aufli  ne  diftinguenc 
^utùur.     i]s  pas  lçs  oyfeaux  de  proye  par  noms  propres ,  fi  bien  corne  font  - 
Gpfault.    nos  Fauconiers  :  Carie  Sacre,  Autou^Gerfault^Lamer,  Se  Tter- , 
Jfa£y     celetsfont  confondus  auec  le  Faucon ,  fans  faire  diftindion  de- 
MtUn.  *      kurs  cfpeces.  Le  Milan  qu'ils  fouloyent  anciennement  nommer 
ichhyno^     Ichtynos,eft maintenant nommé Ucadurus.  Etpoureequ'auos 
iMxdHnts.^  trai&édetous  oyfeaux  ça  autre  œuure  ou  en  baillons  les  por-, 
traicl;s3nous  n  en  dirons  autre  chofe  pour  l'heure  prefente. 

Chapitre  xii. 

zhaUnges.    ^^ÊÈ^fëh'^'s  ^tctes  %aueac  nommer  les  Phalanges  Splia- 
SfhjJUng.    Jgj.  ^^^^  Jangi,  qui  font  petitesbefes  yenimeufes,  quelque 
Vefcrïfuon,  ®  ^^^fe  pexi  plus  grandes  qu  vjae  Araignée ,  ayans  huicl: 
du  2bdm*  £z*  "||â=||||  ,pieds,quatre  de  chaque  coitérchâque  pied  ou  iam- 
&l<m?  ^       SS*u4».u>i4^.  t>c.a  quatre  articulations ,  $e on  t  deux  ongles  fort 
deîiezjen  chaqueiambe  *.  qui  font  voûtez  en  crochet .:  dont  les 
deux  ïambes  de  deuantile  chaque  coftç  font  pour  marcher  en  a- 
liant,  &:les.deux  autres  de  derrière  font  pour  le  conduire  en  ar- 
rière. Us  habitent  toujours  en  va  trou  oblique  ,  profond  de 
deux  pieds  en  terre,dedans  lequel  ils  entrent  ^reculons,  Se  tirent 
leur  mangeaille  après  eux  iSe muniffent  l'entrée  aqec  des  fefiqs 
pour  le  tenirjrauiioursouuert ,  ouilsfetiennent  ordinairement. 
Leux  corps eft  eed ré  par  deffus,&  .de  la  partie  de  deu at,  ont  deux 
taches  rougeaftres  par  Henusle  dos  tôe û  on  les  renuerfè,  on  leur 
trpuueravne  tache  noire  en  l'endroitou  Jeurs  pieds  tiennent  at-  . 
tachezaucprps.  Leurventreeitiaune:  Se  qui  voudra  fçauoir  de 
•  •  -    quoy  ils  peuuenrntiire, leur  regardekbottche,^:  Ton  verra  deux 
petits  efguilloas  noirs,reflemblans  à  ceux  de  la  Scolppen4re:dc£ 
quels  ils  mordent,  Se  dont  ils  feferuent  à  tenir  leurmangeaille. 
Ils  font  les  toilles  à  la  manière  des  Araignées,  &viuentdemou- . 
ehes  &  papillons. Ils  ponnent  enuiron  foixate  petits  œufs,  qu'ils^ 


OBSERVEES     PAR     J.'BELOK.  ?I 

couucnt a  leur  poi&rine ,  dont  les  petits  font  cfclos  :  lefquclsils. 
portent  defïbus  leur  ventre ,  iufques  à  ccqu  ils  foyent  grands.  Ils 
ont  le  corps  velu;  :  maispource  qu'ils  ne  font  pas  dvne  mcGne 
corpulence,iis  cauent  leur  trou  félon  la  capacité  de  leur  corps:  8C 
auons  obferué  qu'ils  différent  félon  leurs  diuerfes  iiles.Il  y  a  guer- 
re mortelle  entre  ce  petit  animal,  &.vne  .manière  de  moucha 
gucfpc  que  lesl-atins  ont  nommée  Ichneumô;  laqucllcparnous  ichnewmn, 
cftre  trouuez  à  robferuer,defcrirons  cy  après  au  fécond  iiure ,  ou 
parlerons  de  l'Ichneumôn  d'Egypte. 

DW  efpece  de-Bouc fimUigt fréquent  en-  Cmeflucles  français  nom* 
ment  Bouc  efam.  Chap.    tfii-k. 

^ç  E  s  Loups  ne  viuent  pointen  Tiflc  de  Crète  :  parquoy  ll  »}*#* 
'^  ofeBtfeurement  laiflfcr  i  pus  'leurs  animaux  aux  châps  ^.j^* 
i  paiftredenuicr  fans  en  auoir  crainte  5  principale-:  £<>uc  ^n 
;  ment  leurs  Brebis,&;  Moutons,nommez  Striphoche- 
ri.  Si  les  habicans  du  pays  peu uenr  prendre ks-faons  des  Boucs 
cftains  (dont  y  a  grande  quantité)  errants  par  les  montaignes ,  ils 
les  nourriflent  auec  lesCheures  princes,  &  ks  rendent  appnuoi- 
fez.  Mais  les  fauuages ,  dont  y  a  grande  quantité-, font  à  ceux  qui 
les  peuucnt  prendre,  ou  tuer.  Leur  grandeur  n'excède  pointla 
iufte  corpulence  d'vnc  Cheure  ptiuec  :  maise|lcs  ont  bienautanc 
de  chair  comme  vn  grand  Cerf ,  couuertes  de  mefme  poil  fauue 
Se  court,  non  pas  de  Cheure.  Lesiiiaflcs  portenr  grande  barbe 
brune,chofe  qui  n  auient  à  nul  autreàyant  lepoilde  Cerf ,  finon 
(comme  penfons)  à  Hippellaphus.  Ils  deuiennent  gris  en  vieillit»  -#'#*&• 
fant ,  &  portent  vne  iignç  noire  deûus  l'efch^ne.  Nous  en  auons  ■/***• 
auul  en  nos  montaignes  y  U  principalement  en  lieux  precipiteux 
de  difficile  accez.  Ceftbicn  dequoy  s'efmcrueiller  de  voir  vn  fî 
petit  corps  d'animalporterde  fîpefan  tes  branches  de  corncs,det 
quelles  en  auons  tenu  de  quatre  coudées  de  long.  Elles  ontautat  cornes  de 
de  rayes  par  le  trauers  comme  le  BouCjOuChcures  ont  dannees.  futrecoul- 
Auflien  auons  trouué  deux  difFcrences,  comme  auons  fai&ap-^"^  ^Sr 
paroiftrcparladiuerfité  de  leurs  cornes  appprtees  de  Cypre  &>DJ™ïJmci 
Crete,dont  auons  fait  prefentà  monfieur  le^n  Choul,  Baiily  des  *^ 
montagnes  de  Lyon.  Nous  auons  quelquesfois  prins  loiûr  de  les  J 
voirpreudre  Ôc  vanner  aux  chiens  des  habitans  de  Grèce.  Il  y  a 

D     iiij 


pt  BEMIiR     LIVRE,    DES    SINGV1A. 

despayfans  fur.iafommitédes  hautes  montagnes  de  Crète,  & 
boiixireurs  dclarc ,  &principalcmententour  la  montagne  de  la 
Sphachie&Madara,  qu'ils  îesnaurentdc  leurs  flèches  de  vingt 
&:  cinq  pas  de  loing:&àce  faire  mènent  des  femelles  qu'ils  .ont, 
nourries  &:  appriuoifees  de  ieunefTe^lcs  lient  à  quelque  pafïâgs. 
cnlamontagBe,oulesmaâesron£accouftumé  paiTer..  Le  tireur, 
fetientàcofté,  caché  derrière  quelque  buiffon  à  roppofitedu 
vent,  fçachantbien  quele  Bouc eftain  eft  de.fj  grand  fensd'odo- 
rcr,qu  il  le  fentiroit  de  cent  pas.  Le  malle  trouvant  la  femelle  en- 
fon  chemin  ,s'arrefte,  &lorslepayfan  luy  tiredefon  arc.  Et  fi 
d'auenture.  le  Bouc  eftaian'sft  guère  nauré ,  ou  que  le  fer  ln.y  foie 
demeuré  au  corps,  il  eflmaiftreàfcmcdeciner:  car  il  va  trou* 
I>i8mnum.  uer  du  Dictannum  (qui  eft  vne  herbe  attachée  aux  rochers  de 
.  '       Grete)  laquelle  il  broufte ,  &.  par  tel  moy  ea  fe  guerift  bien  toft. 

Ccft  grand  merueillc  de  l'agilité  de  cefte,bcfte  ,  qui  eft  de  îà 
'"  nature. du  Gheuteul  :_  car  tous  deux  fe  tiennent  encre  les  au- 
près 'rochers  de  difficile  accez  :  mais  le  Bouc  eûain  faultc  <Tva 
rocher  fur  l'autre  de  plus  de  fix  pas  dmterualle  ,  chofe  quafi 
incroyable  a  qui  ne  lauroit.veue  :  &  d'autant  que  nous  fom- 
mes  trouuez  en  lieu  commode  d'en  recouurer  la  naifue  pein- 
mrci-l'aiions  cy.feift.mcttre  en  ccjicu  portraicte  au  naturel. 

pormicî 


OBSERVEES     PAR.     P.     BELOS*. 
vortrai&dttBovceftam* 


35 


Tf^vn  mouton  de  Crète nommé \$trep ficheras  :  auecvn  dîjçoftrs  qui-en— 
fiîgne  que  cejique  Licorne*  Chapitre  X I .  ï  1 1-. 

j-L  y  avne  manière  de  Mourons  en  Crète,  qui  font  en... 
•  grands  trouppeaux  aufll  communs  que  les  autres ,  &c 
j  principalement  au  mont  Ida.,  que  les  paileors-nom- 
!  ment  Striphocheri  :  qui  font  en  ce  diUèmblables  aux  stnjhù&œil 
noitres,qiuls  portent  les  cornescoutes  droi&es»Ce  mouton  n  elt. 
en  rien  différent  au  commun ,.  excepté  que  comme  les  Béliers 
portent  les  cornes  tortues,ceftuy  là  les  porte  toutes-droicïes  con- 
tre mont,  comme  vne  Licorne,  qui- font  eanneleesen  viz.  Lors  . 
qu  en  veifmes  de  fi  grands  trouppeaux,  ignorans  que  les  anciens  * 
cri  eu  fient  faiâ:  mention ,  nous  vint  en  iouuenance  de  chercher 
s^Jseftoyenten  rien  participons  delà  Licorne.  Ce  nom  a  fait  en-  2jCùfn^ 
u&tcn  propos ..de  la  Licorne,  laquelle,  voy  os  eftre  maintenit  en  û 


54  PREMIER     LIVRE     DES      ST"NGVLÂ. 

haute  eftimation  Se  pris,  que  ceft  bien  à  s'en  efmerueiller:,  vea 
<mefmement  qu  elle  nefufi:  anciennement  en  aucune  réputation 
-pour  médecine  :  car  il  elle  y  euft  efté ,  iîeft  a  croire  que  les  au- 
theursne  s'en  fufient  voulu  taire.  Ariftoteabienditquiiyavn 
cm-.  animal  nommé  Orix ,  au  genre  de  pied  fourchu ,  qu'on  nomme 

Fnicornc.     Vnicome  :  mais  il  n'a  enc  parlé  de  la  vertu  de  fa  corne. Columel- 
Diumam*^  îeaufïi  a  bien  cogneu  Orix  ,  difant  qu'on  le  garde  enfermé  es  pa« 
m*u*!°ï*Ai  ftiz  Se  parez  murez ,  auec  les  autres  animaux.  Et  fi  les  Romains, 
***'*       qui  eftimoyent  tant  les  chofes  rares,  eu  fient  au  fil  bien  ouy  parler 
.Les  somains  &c  *eu  r  temps  d'vne  fi  grande  -vertu  qu'on  dit  eftre  en  la  Licorne, 
ontio-nortU  ils  ne  Feu  fient  pas  iaifie  en  arrière.  Pas  ne  difons  qu'ils  ne  l'efti- 
yertu  de  U  maflent  precieufe  Se  rare ,  mais  non  pas  pour  s'en  feruir  en  mede- 
îjcorne.       cine,comme  nous faifons  maintenant.  Parquoy  voulans  en  par- 
ler clairemenr,ne  difiimulas  rien  de  ce  qu'il  nous  en  femble,trou- 
uons  que  la  Licorne,  que  les  anciens  ont  cogneue ,  deuroitefire 
noire  :  Se  toutesfeis  celle  que  nous  auons,  efi:  blanche.  Quel  au- 
theurancien,  Grec  ou  Latm,auons  nous,  qui  face  foyqu'vnepe- 
3enti  de    rite  pièce  de  chofcincogneueJ&  que  fçauons  eftre  fouuent  de  cléc 
jghart.       de  Rohart,doiue  valoir  trois  cens  ducats  ?  L'on  nous  a  monftré 
des  morceaux, pour  fçauoir  fi  la  cognoifilons,  qu'on  aueit  acce- 
ptez pour  Licorne  au  pris ,  à  la  valeur  de  trois-cens  ducats,5  -qui 
toutesfois  eftoient  rouelles  de  dents  de  Rohart.  Vn  feul  iElian 
nous  efi:  autheur  que  la  Licorne  a  vertu  en  médecine ,  mais  il  en- 
tend ^qu'elle  efi:  noire.£t  voyans  que  la  noftre  efi:  d'autre  couleur, 
dirons  qu'elle  efi:  différente  à  celles  des  anciens:  veu  mefinement 
qu'il  dît  que  c'efi:  vn  Afne  Indique,  qui  la  porte  au  front,  Se  de  la- 
quelle la  couleur  du  dehors  efi:  rougeaftre ,  le  defibus  efi:  blanc, & 
le  dedans  efi:  noir,  Pline  parlant  de  la  Licorne,  a  tourné  les  mef- 
Tmcùme.     mcs  paroX]es  d' Arirtote.  Vmcorne  (dit  il)  .Afinus  tantum  Indicus/o- 
dilus***  ^ iiàAvngulcu  Puis  après  dit  :  Vnicome  bifulcum  Orix  :  tellement  qui! 
orix'.  appert  par  ces  mots  qu'il  y  a  deux  manières  de  beftes  qui  portent 

vnc  fèule£orne,defquelles  l'vne  efi:  Afinus  Indicus ,  qui  n'a  pas  le 
\yt[nefm--  piedfourchu:  &  l'autre  Grix,qui  Pa  fourchu.  Vrayeftqueles  A£» 
M4ge.  nes  fautiagcs,qu'on  nomme  en  Latin  Onagri,n'ont  point  decor- 
ù1MgP'  „  ne.  Par  ainfi  faut  entendre  que  les  Licornes  font  de  quelque  au- 
GrUef4d=  tre  ^e^c  ^  jont  n'auons  aucune  defeription  ..Mais  entant  qu'on 
^  "  voit  les  Licornes  en  diuers  endroi&s.on  ne  les  peut  nier:  car  mel- 
znrope.       msaicnt  I  on  en  pourroit  trouuer  vne  vingtaine  toutes  entière* 


OBSERVEES      PAR     Ei    BELCCN.  3?  ' 

«rr  noftre  Europe ,  &  autant  de  rompues  :  &:  defqnelies  Ton  en 
mon  ftre  deux  ,au  threfor  defàind  Marc  à  Venifc ,  chacune  lon- 
gue enuiron  dvne  coudée  Se  demie,  plus  grofTes  par  vn  bout  que 
par  l'autre:  dont  le  plus  gros  bout  n'excède  point  crois  pouîces 
aflèmblez  enfcmble ,  qui  font  bien  mcrqnez,  rcfpondantes  à  ce 
que  les  autheurs  ont  eferit  de  la  corne  de  î'Afnc  Indiquerais  au 
refte  les  autres  enfeignes  n'y  font  pas .  ÀufC  fçauons.que  celles  du  Licorne  de  s. 
Roy  d'Angleterre  font  cannelées  Se  tournées  en  viz,  comme  aufïi  z>™*m°uk 
eft  celle  de  fainâ  Denis ,  quleftimons  la  plus  grouequi  ait  oncq  «^^ 
eftéveue.  Ceft  la  chofe  digne  déplus  grande  recommandation 
que  nulle  autre  qu'ayons  veue  ,  procrée  d'aucun  animal.   Elle 
eft  naturelle ,  Se  non  artificielle:  en  laquelle  on  trouue  toutes  les 
merques  qui  conuiennent  à^ne  autre  corne  d'animal  :'&  pource  . 
qu'elle  a  eau itékans,  eftàprefuppofer  qu'elle  ne  tombe  à  l'ani- 
mal qui  la  porte,n5  plus  qu'àla  Gafelle,Chamois5&  Bouc  eftain: 
au  contraire  defquels  celles  des  E>àims}Gerfs^  Se.<Z  heureux  tom- 
bent. Il  n'y  a  homme, quelque  grandqtf  il  foit ,  qui  n'ait  peine  de 
toucher  iufques  à  la  fummité  de  îa  fufdite  Licorne  du  Roy ,  qui 
eftàfaincfc  Denis,  tant  eft  longue:  car  elle  aiept  grands  pieds  de  *j>as&-: 
hauteur.  11k  ne  pefè  que  treize  Hures  Se  quatre  onces^touf  esfois 
à  la  foupefet-fèmbk  en  auoir  plus  dedixhui&.  Saiîgure  eft  droi- 
dément  comme  celle  d'vn  sierge  >  large  par  le  bas  >  Se  petit  à  pc-^ 
tic  vient  en agrcilifFant  iufques  au  botît-:  aufîi  fa  groffeur  ne  peut 
eftre  empoigneexi  vne  main .  Ay  ani^cinq  doigts  en  diamètre  :  &: 
qui  l'entourne  d  vne  corde  Se la  mefore^  y. trouue  vne  paùkne  Se 
trois  doigts.  Elle  eft  quelque  peu  raboteuiè  deuersla  partie  de  la-' 
refte  :  mais  eft  quafili(Tee&  brunie  par  les  autres  endroicts.  Ereft- 
cannelée  de  légères  cauitez  5  en  maniere^deviz ,  quivne  font  pas 
profondes ,  commençans  depuis  la  partie  de  la  tefte^  Se  finiiTans- 
à  l'extrémité ,  faifàns  leur  tour  de  dexcre  à  feoiftre ,  prenans  leur- 
tour  comme  les  coquilles  des  Limats  3  ou  bien  vn  bois  extourné 
de  cheurefueil.  Sa  couleur  n'eft  toute  blanche  :  car  Finiure  du 
temps-1'a-qiïeîquepeuobicurcie.  Etleeftcreuiêpairle^ros-bDuc 
plus  d'vn  pied  en  auant,  fçanoireften  1  endroit  ou  eft  enchafTè- 
t'os  par  k  dedans ,  qui  la  tient  ferme  contre  k  tefte,  Ceft  de  là. 
qu'on  peut  iuger  qu'elle  ne  tombe  point  de  la  tefte  de  la  belle  qui 
la  porte.  Voyant  donc  que  c  eft  vn  faix  fi  pelant  fur  la  telle  d'vne 
befts.  j  faut  pcnfer.Que  l'animal  qui  la  porte  ne  peut  xftïe  de 


$6  PREMIEB.   XI VUS     DES     SÏKGVLA. 

streg/kbe*    moindre  corfagc  qu'vn  grand  Bœuf.  Le  Screpfîcheros  ( dont  a- 
m-  uons  cy  deuant  parlé ,  &  qui  aaufïi  les  cornes  droi&es,  cannelées 

Se  retorfes  en  viz  )  n'excede  point  la  iufte  grandeur  d'vn  Mou- 
ton.  Cy  après  eft  mis  fon  vray  portrait,  non  que  layons  retire 
de  quelque  autkeur:  car  il  nyaperfbnne  qui  en  ait  encores  rien 
dit ,  outrece  que  nous  en  lifons  fon  nom  en  Pline  :  ne  baillé  au- 
tre figu  re  que  cefte  cy. 

J?ortrd5i  de  Strepjlcberos^ou  Mouton  de  Crète* 


V* vite  pierre  de  Crète  ^dont  SoîinafaiB  mention  5  n&mmee  Vatfdm 
..'■'.  ld<eus.  Chapitre  xv. 

§  ïen  auôs  vouttt  adioufrer>que  la  pierre  que  Solin  no* 

~  meDaâylusIdsus^aiurcsBeîemnites,^ nousfau- 

fement  Lapis  Lyncis, a  prins  fon  nom  ài\  mont  Ida, 

de  Crete.dont  on  là  trouua  premièrement.  Mais  ou- 


OBSERVEES     PAR.    'ï.'ÏE'LO'K.  57 

trccc  qu'elleefttrouuceenCrete,nousrauonsau{ïïveuc  cnvnc 
montagne  voifïne  à  Luxam  bourg, qu'on  nomme  le  monc  fàinâ: 
Iarj,celle  fois  que  le  Roy  François  père  âcs  lettres ,  feifl  fortifier 
Jedid  mont:  car  après  que  les  pionniers  eurent  caué  trois  pas  en 
terrera  plus  grandepartie  dece  qu'ils  bechoicntjeftoit  Da&ylus 
Idaeus.Lesmarchans  la  vendent  en  leurs  boutiques,lanommans 
Lapis  Lyncis.  Mais  ccflpar  vn  faux  nom ,  qui  conuient  àFÀm-  */*»ww*» 
breiaunc ,  dont  parlerons  cy  après.  ne' 

Ve/criptionduplus  bautmont  de  Crète ^ne  les  Grecs  nomment  vulgaire' 
ment  Pfdorit^andennement  ldd:&  les  plantes  quiy  naijfent. 
Cbapttre  XV I. 

'  S  t  a  N  s  fus  le  couper  du  mont  Ida ,  îe  defcriuifmes  MônsI^ 
!  comme  s'enfuit.  Le  faiftedu  mont  Ida  efl  qua  fi  poin- 
)  tu  comme  vnc  pome  de  Pin ,  fkué  fur  la  fommité  des 

J  autres  montagnes.  Et  combien  que  toute  la  maffe  de 

celle  montagne  arriue  iufques  aXvne  Se  l'autre  orée  de  la  mer,  èc 
cft  appellce  de  ce  nom  Ida  :  toutesfois  celle  qui  eft  la  plus  haute 
pardeîîus  les  autres,  eft celle  qui  particulièrement  a  obtenu  ce  Mo    ^ 
nom. Il  eft  bien  vray  que  le  monc  Madara  s  eftend  en  plus  grand'  M^mf_ 
largeur  &  grofTeur  que  le  mont  Ida  :  ce  neantmoins  il  n'efl  pas  û 
haut  eleué  en  l'air.  Les  Crêtes  ont  changé  le  nom  àceftemonta-  pfihrUL 
gne  Ida,&:  font  nommé  Pfîloriti.Sur  le  fofdi&faifle  au  plus  haut 
delà  montagne ,  il  y  a  vne  petite  chapelle  :  mais  ce  n'eft  quvnc 
maifbnnette ,  qui  cft  feulement  faiCte  de  pierres  maffonnees  fans 
chaux,  l'vnc  fur  l'autre  en  manière  d'vne  voûte,  pour  fèruirdc 
couuerture.  Elle  efl  en  lien  fi  haut  que  fôuuentcsfois  les  vents  y 
foufflent  fi fort,  qu'ils  tranfportent  les  petites  pierres  de  là.  Va 
peu  plus  bas  au  dcrTous  de  ladicle  chapelle ,  Ion  voit  vne  planurc 
cnuironnée  de  montagnes  de  tous  collez ,  en  laquelle  il  vient 
grande  abondance  de  paflurages ,  ou  les  Moutons  &  Cheures  de 
Crète  s'engreflent  durant  leite.  Si  quelqu  vn  eflantlà  monté  fur 
ledid  faifle  de  la  montagne,  regardoit  de  toutes  parts,  peu  sert 
faudroitquilneveifl:lecircuitderi{le,&auiïiles  autres  iilescir- 
conuoifinesdeCtetc^onmieeilMilo^engo^icengOj&Cy-^^ 
thera,  Vautres  de  l'Archipelago.  Uintemperature  de  Fair  efl  il  CiC£;Lm 
grand  defTus  celle  montagne  ,  comme  cil  autO  fur  toutes  autres  cjsberd. 

E  iij 


Srahles. 
Cbefnes 
l>erds.  . 

^€rbouJien 

^/£ndrach= 
nés. 

fhilLie*.. 

Ofi. 

Mejftne. 
Ganm&. 
Cyprès. 

Pic&t. 

Chxmœlea. 

Tbjmalœa. 


Cfalergo, 

Mdtbio 

di&krg({> 


$  PREMIEE     LIVRE     DES     STîTGVfcÀ. 

dexceflîue  hauteur,qu'vn  homme  aux  plus  chauds  iours  camcu* 
laires  à  l'heure  de  midy ,  encore  que  le  temps  fuft  fans  vent ,  n'y. 
peut  durerfans  endurer  vn  moult  grand  froid.  Aufîi  n'y  a  il  au- 
cun habitat  ny.en  hyuer,ny  en  efté.Ia  foit.que  les  pafteurs  y  mei- 
nent leurs brebispaiilre fur iour,  toutesfoisils  les semeinent au 
foiren  la  vallée.  Regardant  celle  partie  du  montqui  eft  tournée 
a  l'Orient,lon  voit  des  fpatieufes  campagnes  qui  arrinent  à  Tes  ra- 
cines ,  efquelles  il  y  a  de  moult  plaifantes  Se  froides  fontaines. 
Celle  partie  qui  regarde  la  ville  de  Candie,  eft  bien  munie  de  fo- 
leftsjefquellc.&les.  Erables  font  fort  madrez,  Se  Chefnes  verds  en 
quantité ,  &  autres nommez  Acillacas.  La  partie  qui  .regarde le 
.  midvjn'eft  pas  ornée. de  hautes  fprefts,mais  trop  biéice  quelques 
arbres  qui  ailleurs  ne  font  que  petis  arbriiTeaux  :  fçauoireftAr- 
bouiierSjAnd^âchneSjEleptinijC  eft  adiré  Phillica^nommees  en 
Latin  AlaternijCifti^  autres  tels  arbres  que  nous  nations  point 
par  deça:&  eft  l'endroiâ:  ou  eft  faiâ  le  Ladanum.  L'autre  partie 
qui  regarde  la  Meffarie3c  eft  à  dire  la  plaine  ou  eft  fituee  Gortina, 
eft  moult  fréquentée  en  Cyprès, en  Joignez  x  que  les  Latins  nom- 
ment Piceat,.ÀufE  y  croisent  Charaaelea,^  Thy  mçlxa,  Se  petits 
Cedres,qui  eCtcelk  partie  ou  eft  monftré  le  faux  Labyrinthe.il  y 
agrandnombrede  Boucs  fauuages  qu'on  voit  en  troupeaux  par 
lafufdi&e  montagne ,  Se  Heures.  Nous  y  auons  efté  en  trois  fai- 
sons, &  par  trois  dîners  chemins  :  mais  onc.nauons  feeu  trouuer 
quelque  endroit  ou  le  Rubusldxus  na%ui£LXç  NeeiorLqui  a 
fleur  blanche, fleurift  en  Au ril  à  my  chemin  de  la  montagne  près -, 
dvn  village  nommé  Chamerachi  fur  le  chemin  de  Candie.  Le 
-chemin  de  la  montagne  de  la  partie  de  l'Occident  ,  eft  bien  fore 
difficile  à monterxar  il  eftlbxt  en  pendât}quafî  au ftidroicl:  com- 
me qui  monteroit  par  vue  efehelle.  Là  y  a  vn  village  au  pied  du 
niontjduquej  commençante monter5lon  compte fept mille  iu£- 
quesàlafommité,  Ilfemble  que  la  partie  qui  regarde  l'Orienr, 
ibirplus  tempérée  que  les  autres  :  car  tout  auto-ur  desracines  du 
mant5 lajterrey eftmoultgraft'e  Se humide*;  ou il  y  a  au flï  moult 
grand  nombre  de  villages^&r  ou  toutes  chpfesfcnt  fort  bien  cul- 
tiuees,  en  arbres  fruâiers,  vignes  &oliuiers,  Se  par  les  champs 
l'on  feme  toutes  efpeces  de  legumess&:  du  bled.  Toute  cefte  maf- 
fe  de  quelque  grande  eftendue  queilefoit,  eft  dominée  des  feir 
gneurs  ChaleFges,  fçauoir  eft  du  feigneur  Anthoine  Se  Iviathieç  . 


OB"SEfcVE~ES     PAR     P.    B'ELOtf.  s  59 

^uxfrercs ,  qui  ont  tôufiours  obtenu  îc  premier  lieu  en  dignité 
&;  noblefTe  en  toute tifle ,  depuis  mille  ans  en«ça:de  laquelle  cho-  * 
h  nous  parlerons  encor par  cy  après. 

Les  noms  des  arbres  &  herbes  exquifes ,  qui  naijfent  fauuages  autour  du 
mont'lâa  de  Crète  :&  la  manière  de  cueillir  la  graine  defcarlate. 
Chapitre  xvn. 
àOnnement  ne  pou uons  parler  des  plantes  naiffan- 
Z  tes  au  territoire  de  ce  mont  Ida ,  quene  mettios  cto1****™** 
fanant  la  grandecourtoifie  Se  bonne  nature  de  ^^'ZonTIelî' 
jpîeurs  les  Gaîergcs,qui  en  font  Seigneurs >  Se  ont  le  sphachïe. 
^plus  grand  cvcdït  en  toute l'ifle  de  Crète.  Car  com-  Antonio 
me  le  (èigneur  Ioan  Francefco  Baroczodc  lavilledeRhetimo,  CaUrgo. 
nous  feit  (èurement  conduire  par  (es  gensfur  le  mont  de  la  Spha- 
chie&:  Madara  :  tout  ainû*  moniteur  lé  Cheualicr  Antonio  Ca~ 
krgode Candie  gentilhomme  Venitiea,  nous baiilagensdefk 
maifon  pour  guides ,  Se  donna  viures  neceflàires  pour  demeurer 
quelques  iours  iûr  ledit  monnearcherchâs  les  plantes  nous  dor- 
mions au  foir  dedans  les  mandres  ,  c'eft  à  dire  logettes  des  pa- 
fteuts^  ou  ils  font  leurs  fourmages.  Le  fèpuîchrede  Iupiter ,  tel  se^ukhe  ai 
que  les  anciensl'ont  d'eferit -,  e&  encoxmôffaré'pourîeiourd'huy,  i"?**** 
qui  dure  en  Ton  cntier.Or  fau  tAl  entendre  que  ladicfce  montagne 
eft  de  moult  grande  eilendue,  Se  que  fes  racines  touchent  à  l'vne 
Se  à  l'autre  orée  de  la  mer  ,&  que  ùm  territoire  efl  moult  large  Se 
fpacieux.  Car  mefmement  les  racines  commenccnti>ien  près  de 
la  ville  de  Candie,  &:eliïituecaubeau  milieu  de  Tifle  ii  haulte 
efleuee  ,  qu'il  y  a  toujours  de  la  neige  fur  le  fommet ,  Su  au 
plus  chaud  de  l'efté  il  y  fait  û  grand  rroit  qu'on  n'y  fçaurolt 
durer  :  combien  qu'au  bas  es  vallées  il  fait  affez  grand  chaud: 
efquelles  entre  autres  plantes  mémorables  ,  il  croift  des  Szu-  Pomme$  ^ 
gers  qui  portent  des  pommes  bonnes  à  manger  :  defquelles  rA^e. 
\ç,*>  pay&ns  rempîiflent  leurs  fàcs  ,  qu'ils  charger  à  leur  col 
pour  les  porter  vendre  aux  villes  prochaines.  Ils  les  trouuent 
attachées  aux  fueilles  au  commencement  du  mois  de  May  .Elles 
font groffes  corne vne  galle,couuertes  de  poil  par  deflliSj  &font 
douces  Se  plaifantes  à  manger.  Audit  temps  de  May  cueillent 
auffi  les  rieurs  des  Câpriers  efpineux,  qu'ils  porter  fcmblablemét  &&&. 
au  marché/ans  élire  autrement  confitcs3ûnori  bonHucs^  quel- 

E  iiy 


40.  PREMIER.     LIVRE    DES    SINCVEA. 

Mmdrjgù*  qjjç  pCU  fajees> LçS  Mandragores  mafles&  femelles}lesdeux  for «~ 

^  ces  de  Peonejque  le  vulgaire  des,Grecs  nomme  Pfiphedile,croif~ 

Tfoh'edik    &nc  cn  chaque  vallée  humide ,  ayans  la  fleur Hanche.  La  plante- 

Tmriuml    nommée  Tragium,y  eft  trou  uee  le  lôg  des  ruiflèaux  auec  la  fleur 

itantoptx*  iauîne,  &  la  femence-comme  de  la  Ceciîiane.  L'herbe  de  Léon- 

Ion.-  tope*alon  ayant  moult  gro  fies  racines,  y  floriren  hyuer  comme 

MeUlot.       ia  Mandragore.  Le  vray  Melilot  odorant  croift  par  les  collines 

*^7eft^mf'  herbeufes  quafi  fcmblable  à  l'Arreflebeuf,  qu'on  die  Ononis.  La. 

°M^^'htm    M'ârïolaine  >  tellequenous  I'auons  en  nos  iardins ,  y  eft  trouuce 

'     naiftre  de  Ton  bon  gré, flori fiant  de  rouge  àla  fui  de  Iuin,  laquel- 

Mdtherlna.  *e  *cs  payfàns  nommétMatherina.  Il  n'y  a  rien  plus  çomun  qu'eft: 

Treffle.        le  Treffle  >  furnommé  Menianthes.  L'herbe  de  Heîiochryfbn  y 

BdÏQchry= .  fiorift  à  la  fin.de  Iuin  >  fi  abondantc.defTus  les  montaignes ,  qu'il 

Jf^,       .   n'y  a  guère  autre  chofe  en  celle  part  ou  elle  naift  :  laquelle  pour 

Ugochimif  cf|revn  douxxepaireaux  heures ,  tout  le  peuple  du  pays  lafçaik 

Jl  '  l     -  nommer  Lagoehimithia.Par  Hehochry fon,  pas  n  entendos no- 

trma.         "?c  ^"^chas  citnna:çar  comme  Hjterony  mo  Hungaro  Medeaa, 

iXgeratojÇ  nous  en  monftra  en  Crete^efteelle  quia  nom  Agerato»  Xe  Ne- 

Nerïon  bUc.  rion  qui  porte la  fleur  blâchc,ne{e trou ue  en  Cretc3  ûnon  es  val- 

Erabfe.  ^  ]Ces  dumot  lèpres  du- village  nommé  Camerachi .  .Les  Erables 

^£s*^  croifiàns  par  les  froides  motagnes ,  que  les  payfans  nommée  Af- 

n0J- 1    h    pk^^nos^ont  le  kois  plus  madréau  mont  Ida^u 'en  nulles  au- 

A  kc  ^  tïCS  P^ccs.  Les  arbuftesde  Andrachneyont  retenu  cemefme 

nom^  auflî  Acylaca,&:  Philyca  ,  qui  font  moult  grands  arbres . 

ogres,       portans  du  gland.  Quant  au  Gy  près ,  ils  ne  viennent  pas  en  pays 

deforefts,  comme  piufieurs  ont  eftimé;  car  ils  croifient  vn  çà , 

l'autre  là5en  diuerfes  contrées  des  montagnes ,  foit  qu'ils  n'y  ayet 

point  efté  fèmez  ;  toutesfois  ils  cherchent  la  partie  méridionale, 

êc  (ont  de  telle  nature  ,  quencares  qu'on,  les  ait  couppezparie 

piedje  tronc  toutesfois  ne  laiflepas  à  teiecter  plufieurs  rameaux. 

Les  Cyprès  en  ce  lieu  lànes'eleueht  pas  en  hauteur  ,  mais  trop    , 

bien  s'amufènt  àçroiftre  en  efpeflèur.  Auffi  voie  on  des  caflès  de, 

Gypres  moult,  larges  y  fïi&es  en  la  ville  de  Candie.  Ils  croifient , 

aufîl  bié  es  moatagnes-iiommees  Leuci5autremeiit  la  Sphachiea 

lem  mote$ -commc  ils  font  au  mot  Ida^ommé  Pfiioritû  L'herbe  de  Traga- 

wnhj  cznt\ÏSL  y  croift  en  moult  grande  quatité.mais  fèulemétau  coup- 
ai? Pjtimtt,        ,     J  ,    ,&      t,    *     ■      %  .  r      /,',*■ 
Tmmatha^ct  ^es  montagnes  :  de  laquelle  nous  en  auons  oblcrue  de  deux.. 
■•        '  manières.  Nous  maintenôsque l'on  n'y  arrjafîè  point  ià gumme, 

'CQUibien-, 


OBSERVEES     PAR    V.     BELOK.-  41 

combien  que  quelques  vns  l'ayent  inconsidérément  mis  par  c{-J>eHX1*t't0 
cïitiSc  Ci  nous  voulions  mettre  en  dcuoir  de  leprouuer  ne  vool-  TeT^er*' 
dirions  que  l'authorité  du  principal  feigneur  de  f  ifle,  moniteur  îe  J^^  rA&** 
Cheualier  Antonio  CalergOjdetiant  lequel  il  nous  foùuiétauoir  ^ntmio~ 
mis  cefte  proportion  en  suant.  L'herbe  de  StaphifagreyerQiftcJ^'o. 
fauuao-e  quaii  en  tous  lieux..  Llierbe  nommée  Coris  y  efr  moult  sufûlfxgn. 
frequéte,  laquelle  entre  toutes  autres  a  la  racinedu  plus  mauuais  Cork. 
gouft  à  noftre  gré3  d'autant  que  la  gouftans  elle  nous  ait  prouoe- 
qué  à  vomir  :  chofe  que  nulle  autre  ne  flftonc.  L  arbufle  d' Ana-  _.  —"" 

gy ris  croift  quaii  fur  tous  lesgrands  chemins ,  û  puant  qu'il  £ziz      A&nf~ 
mal  à  la  teite,&;  y  re&ient  encor  fon  nom  ancien.  Le  vulgaire  1  ap-  Tithymdm 
pelle  Anagyros.  Il  eft  de  fi  mauuais  gouft ,  queles  Ghetires  aifa-  arlorefcens., 
mecs  ne  le  veulent  brouter..  Nous  y  auons  veu  le  Tithy  maie  ar-  Pendroidss, 
borc(cent,furnommé  Dendroides^à  la  hauteur  de*  deux  homes,  FeruU. 
ayant  le  tronc  de  la  grofTeur  de  la  cuiûk.  L'herbe-de  Thapiîa,  Fe-  T^tfiA-_ 
rula^ibanotis^  Sefeli5y  font  moult  fréquentes  JI  y-croiftaum  ^er™tîS~ 
vn  petit  arbrirTeau,  que  le  vulgaire  nomme  Àgriomeiea,  pource  ^l0me4t 
qu'il  porte  des  petites  pommettes  rcfTcmblantes  aux  poires.C'eft  j^ 
vn  arbrifîèau  qu'on  netrouue  en  aucun  lieu  en  France}iinon  de£ 
ius  les. rochers  de  Fontainebleau  vou  il  croift  mouft  volontiers. 
iTarbriffeau  qnils  nommenterrSauo^e  vn  Malàucier^efk  nom-  Mdwciev^ 
me  en  Crète  Codomalo.  Ayans  expreffement  cherché  l'Helle-  Beutàor^ 
bore  noir  en  l'iilc  de  Cretem'en  auons  onc  iccu  trouuèr,  &:  fem- 
mes d'opinion  qu'il  n'y  en  naiffe  point5non  plus  du  blanc  que  du 
noir.  Mais  bien  s'y  trouue  vne  quatdefme  ef pece  d' Anilolochia5  ^tnjtdù* 
différente  aux  trois  autres  ^qui  ont  efté  defentes  par  les  anciens,  chu. 
&  qui  monte deffus  les  arbres  èc  les  afioilièàlamanierede  l'E-Epbedr*... 
phedra  Se  du  Smiiax:mais  au  refte conuient  en  kieilles,  ficurs3fe-  sJ^itUXr.m 
mcnce5racisBes,gouft,&:  odeurauecClematkis  LeEeuenudela  ^■m^I*>i*- 
graine  d'efcarlace  nommée  Goecus  baphica,  eil  moult  grand  en  {^^ 
Grete:&:  pource  que  la  cueillir  eft  ouuragç  depafteurs  è£  petites  clrxirj>, 
marmailles,  les  plus-grands  nes'yveulentamufer.  On  la  trouue  i^èxruïe:  - 
au  mois  de  ïuin  demis  vn  petit  ar-briilèau  efpece  de  chefne  verd  lAmmuwr- 
qui  porte  du  gîand5auqùcl  temps  elleeft  de  blanc  en  couleur  ce-  &  cuttlUr  l& 
dree^ioinde  fans  queue,&  attachée  au  troc  de  fondit  arbrifTeau.  ?™mf  ** 
Et  pource  que fes  fueilles  font  poignantes  comme  la  faeille  de  ejcxr*l'~ •_ 
Houx ,  les  bergers  ont  vne  petite  fourchette  en  la  main  gauche 
{^Xjclmcrjcsrari^^  iadexxre, 

'  -  "  E., 


ij.2,  PUE  MI  ES.     LIVRE    DES    SINGVLA. 

dont  ils  coupent  les  petites  branches,  dcfquellesilsoftentîeftli* 
des  petites  vefeies  ou  excrefcence,qu'auonscydeuant  appelle 
graine  d  cfcarlate.  Et  font  lcfdides  vefeies  rondes  de  la  groffeur 
•dVn  petit  pois ,  percées  d'iceluy  cofté  qui  touchoitau  bois.  Or 
font  elles  pleines  de  petits  animaux  rouges  viuans ,  qui  ne  font  fi 
gros  que  Cirons ,  ou  Lendes  3lcfquels  forcent  hors',  &lauTentla 
coque  vuide.  Et  eft  la  couftume  que  les  petis  garfons  qui  les  ont 
«cueillisses  portent  chez  vn  receueur  qui  les  acheté  tous  à  la  me- 
sure. Il  les  crible  &  fepare  de  leurs  coques ,  dont  il  fait  de  petites 
pelotes  de  la  grofleurd'vn  œuf,  les  maniant  doucement  du  bout 
écs  doigts  :  car  s'il  les  eftraignoit  fort ,  ils  fe  refouldroyent  en  jus, 
dont  la  couleur  feroit  inutile.  Parainfî  il  y  a  deux  fortes  de  ladi- 
te teinture, fçauoir  eft  de  coques,  &  de  la  pouîpe:&  pource  que 
îadi&e  poulpe  vaut  mieux  à  teindre ,  aiulî  coufte  elle  quatre fois 
plus  que  la  coque.  Outre  les  deux  fufdidcs,  il  s'en  trouue  encor 
vne  autre  forte, dont  nul  ancien  ne  moderne  a  fait  mention:elie 
n'aift  de/Tus  les  Myrtes  àia  mcfme  façon  que  la  fufdide ,  ôc  eft  vn 
cxcrefcence  qui  a  aafïî  vn  fèul  animal  viuant  dedans  fa  coque. 

:    Brief récit,  de  plufieurs autres  plantez  fiuuages^de  lafifdi&e  ijle. 
Chapitre    xvni. 

2>iiï2»um  ÏËim3$!^  Ntre  autres  plantes  de  Crete,lc  Didannum  eft  in- 
|  iîgne,qui  à  peine  peut  croiftre  fur  terre  :  aufli  vient 
î  il  toujours  es  entre-deux  &  fentes  des  rochers ,  6c 

jhon  autre  part,  &  n'eft  trouue  ailleurs  qu'en  Cre- 

$fiidù&&*=  ^^^^O  teimais  le  Pfcudodidannu m  fe  trouue  bien  naif- 
mHm'  fane  ailleurs.  Il  eft  vulgairement  nommé  Cromido  filo.  Les  le- 

trons  y  font  nommez  Zucho,  Se  l'Aulne  Schlitro.  Les  Laidues 
viorne.  Marôulla:le  Cheurefuei  Agioclima.La  Viorne  Clemaczida.  La 
cichor'ee.  Cichoree  Pycra,  &  l'Ortie  Zuchnida  :  &  l'arbre  de  Lotus  Caca- 
utm.  uia.Les  luiubiers  Zinziphia.  La  férule  Artica.  Le  Polift  Denai- 
Grigmum.  da.Trois  efpeces  différentes  d'Origanum, floriflent  au  commen- 
ce*.       cement  de  Iuin  :  mais  particulièrement  Onitis  veut  naiftre  entre 

\t<>  rochers  es  collines  de  la  partie  la  plus  feche  que  regarde  le  mi- 
BerAclcoti*  ày:Sc  le  Heracleoticum  au  contraire  eherche  les  lieux  humides: 
€mh  '  &  ceiuy  qui  tient  le  nom  de  Sylueftre ,  ne  tient  ne  de  l'vn  ne  de 
"    "  lautreiçar  il  croift  plus  volontiers  le log  des  hayes es  paftis,qu  es 


O  3"  S  E  R  iT  E  E  S     P  A  R     P,  BEtON.'  43  ; 

îieux  defcouuerts.  Il  y  a  vn  Chardon  moult  fréquent  en  Crète, 
lequel  tous  {çauent  nommer  en  Grec  vulgaire  Afcolimbros.Les  ty0™"*****- 
Latins  aufïi  anciennement  le  nommèrent  de  nom  Grec  Glyeiri-  ^  .  ^ 
zon,difrerét  toutesfois  à  la  Regueîifïè.  Il  croift  fàuuagc  par  tout,  j>e^M^*. 
ayant  la  fleur  iaulne,&  eft  îacticineux.  Lon  en  mange  les  racines  '    , 

&  fuerlles auant qu'il  ait  fait  la  tige.Nous cftans à Rauéne,l'auôs* 
veu  vendre  au  rnarchéauee  les  autres  herbes ,  8c  à  Anconne  ,ou 
les  femmes  qui  les  arrachoyent  de  terre ,  les  nommoy  ent  Riuci.  ^^ 
Auffi  l'auons  veu  cueillir  au  territoire  de  Rome ,  auquel  lieu  les 
habitans  le  nomment  Spinaborda.  Ceft  ceîuy  dont  les  moder-  jp^enfa 
nés  autheu  rs  Grecs  parlen  tje  nommant  Afcolimbrous.Plme  en 
jplufîeurs  lieux ,  &  au  vingt  &:  vniefme  liure ,  chapitre  fèizieftnc 
parlant  des  Chardons ,  faifant  différence  des  ÀrtichauldsàSco-  ArtlcLadé^ 
limas ,  femble  qu'il  veut  entendre  que  l'Artichauld  foit  comme 
Carduus:&  puis  il  dir:  Scoïïmus  quoyueflôret feroi& ebv.Vuisapvcs  Sco^msta^^ 
il  adioufte:S«?Z«»#s  cwdmrum  generis  ab-îis  difiat^  qubd  t&âix,  dus  uefr 
cend&efkdcco&d*  Galicn  mefme  n'a  il  pas  parlé  du  Scoîimus  &de 
Cinara  en  vn  mefme  chapitre?  Parquoy  nous  pouuons  accorder 
à  ceux  qui  veulent  que  l'Artichauld  fauuagcdoiueeftre  nommé 
Carduus  JU  le  cultiué  Scoîimus  y  veaque  le  fauuage  demeure 
toufiours  efpineux.  Le  Chardon  que  les  Grecs  nommerentan- 
ciennement  Aeanos ,  a  maintenant  emprunté  vn  nom  ruftique  ^tanos.- 
defcendudu  Acanou,en  À conachiat lequel  nomluyeft  vraye-  Achûnxc^a; 
ment  bien  deu:car  luy  eftant  fur  tous  autres  efpineux,  fait  que  les 
plantes  poignantes  ayent  non  Acanaces.  La  Thymeîée ,  relie  ^mA^*' 
que  la  deferiuit  Diofcorids:,  eu:  trouuee  naiftre  en  Crète ,  diflbe-    Jfme     - 
rente  à  celle  que  les  Aîemas  nous  font  voir  en  peinture.  La  plan- 
te nommée  Gladiolus  ou  Xiphius,  croift  parles  guerets ,  &  for-  dadidaf,. 
tant  de  terre  au  printemps ,  ne  prodûift  que  vnc  fueille  hors  peu  xifblus. 
làrgette,&  longue  de  huit  doigts^qui  fe  termine  en  appointant,  Tiiymdhts. 
traflee  de  fepr.nefs  ;  du  feing  de  laquelle  en  fort  vne  autre  moin-  Myrf™lt&- 
dre  que  la  fufdi&e,&  confequemment  la  tierce^en  après  le  cauîe  T*™£?^-  - 
£b  monftre  chargé  de  fleurs ,  difppfèes  par  ordre  de  la  plus  belle.^ 
couleur  d  efcarîate  v&.  fi  finement  viue  ^qu'elle  n  a  comparaifon 
ertrougeur  :..&  s'on  la  tire  auecfaracme  hors  de  terre ,  on  la  peut  ;. 
darder  comme  vn  trait  :  attendu  que  fa  racine  eft  groflè  ÔC  ronde . 
comme  la  tefte  dvn  matras ,  &  que  Ces  fueilles  feruent  dampen- 
**ojns*quifontfeuiei^^ — 

F.  y. 


44  PREMIER     LIVRE     DE-S     SINGVLA. 

Tehkk  bedeTithymalus  Mirfynites  croifttantàla  montagne  qu  au  tK 
T&âmtbes.  uagC  en  Crccc:comme  aufti  fait  Paralios.  L'herbe  de  Securidaca 
Z*!!?erSr  eft  vulgaire  par  leschamps,laquelle  ils  nomment  Pelekk  Les  ar~ 
jjt^iûml'  kres de  Tercbinthes,  Lauriers,  Atboufiers ,  &  Lentifques',  &  les 
Cèdres.  petisCedres  y  retiennent  leurs  noms  anciés.  Comme  auffi  i'  Af- 
^xUtho>  palathos,&:  vnautremoult  îuy  refemblanr, qu'ils noment  Achi- 
GMphSon.  nopoda.  Les  riuagesde  lamerblanchhTent  de  l'herbe  de  Gna- 
Bulhus  &*«-,phaUpn:  sar  ecluy  que  les  herboriftes  ont  peine,  eft  baftard.  Ef- 
■r~  -quels  nuages  lesracines  que  Thcophrafte  nomme  Bulboslitto- 

cfo  *  Tdit*  ra^es^  &  ^onC  nos  dtoguiftes  ^François  vendent  les  racines  pour 
m  Squilles  ou  Scilles,yçroiirentabondamment,Les  Choux  rauua- 

chwefice.  ges  naùTent  par  les  rochers  du  port  de  laSude.  Le  Chamxfyce  Se 
soldanelU.  la  Solda  nelle  croifTcnt-volontiers  es  fablôs  des  riuages.  Le  Dra- 
Dracïkulm.  cunculus  ayant  îafueiMe  de  Lierre ,  fe  trouue  feulement  es  lieux 
Mdtnms.  jlumi<Jes  de  la  Sphachie,  Mais  l'autre  que  nous  cognoiiïbns, 
Atwtt  "croift m&#crcmmcnt enplufieurs lieux  de l'ifle. L arbriflèau de 
rnus  et-  |^ajjmus  y  a  nom  p0ur  je  jour^huy  Halimatia  ,  fi  fréquent  par 
jjia  toute  Tifle,  que  grande  partie  des  hayes  en  font  fai&es:  _&  a  les  ci- 

lomhxrhe.  mes  bonnes  à  manger,  L'arbriflêau  que  nous  nommons  Agnus 
rfymhra.  ,caûus,3£  anciennement  Agnos ,  y  a  nom  Liia.  L'herbe  de  ïom- 
•Trik  -barbe  y  croift en  arbrifleau.  Le  vray  Thym  y  eft  iï  frequet  5  qu'ils 
Sf^fa  le  brtiflent  au  lieu  debois.  L'herbe  de  Thymbra ,  que  les  Grecs 
de  nom  vulgaire  nomment  Tbibi ,  c'eftà  dire  Sariette  fauuage, 


tuge. 

Efttbimum  CÏO&cs  ^ux maigres  ôc fteriks,  &  principalement  au  territoire 
™      "     de  Rcthimo:fur  lefquelles  deux  herbes,  &  principalement  fur  le 
TrMus.      Thym,  croift  l'Epithymum.  L'herbe  de  Tribulus  terreftre  fait 
^StrimU.    fouucnt  grand  dommage-aux  terres ,  Se  principalement  aux  Lé- 
gumes ,  laquelle  ils  nomment  vulgairement  Atriuolo.  ïcy  faut 
^ue  dirons  que  ceux  qui  expofent  Fercriture  faincte ,  ou  il  eft  cf- 
jCtit>deTribulif ficus,  difàns  que  Tribulus  eft  vn  Chardo,font  abu- 
fez  :  car  Tribulus  eft  vne  herbe  dont  Ion  n'a  point  es  contrées  de 
Bekotr&pi».  France^u  moins  du  tcrreftre:car  l'aquatique  eft  ce  que  nous  nô- 
uèUocortx.  mons  macîes  ou  Chaftaignez  d'eau.  L'herbe  de  Heliotropium 
^itréHlis.  y  eft  nornee Beliocorta: Atta&ilis Arda&ila:Orobanche,Lycos. 
^€fjaBtU.  jl$nont  point  d'Hyiïbpeen  toute  l'ifle,  nô  plus  fauuage  que  do- 
orobanebe.  mcftiqUe:majs  en4nheu  jes  Apoticaires  vient  d'vne  mefchâte 
%fope.      petite  herbe  adultérine.  Le  Stœcas  y  croift  fauuage  en  pîuûeurs 
stœcL  '      endrois.Entre  autres  choies  exquifes  touchât  les  plates ,  pouuos 


1DBSERVEFS    TAU     î.  "BETOS.  4f 

-àtrc  auoir  vea  quelque  chofe  fingulicre  au  iardin  des  frères  Mi-  scmmanee. 
neurs  en  îa ville  de  C£die3cômeeft  Scamonee,S^Apios:  îefquels  ^^ 
toutcsfois  croifTent  fauuage  par  les  montagnes,  comme  auflî  fait  9**^ 
Tarbre  de  Styrax.  La  plate  de  Ricinus,pource  qu  elle  ne  fe  meure 
point  Fàyoer ,  &  dure  plufieurs  années ,  deuient  en  arbre  fi  haut, 
qu'il  faut  vne  efchelle  à  monter  deffus.  Le  Coton  &  la  Sezame  y  Coton. 
font  de  grand  reuenu  :  on  les  fcme  en  terre  au  mois  d'Aiml.  L'on  sésame. 
y  fait  du  Catran ,  &  de  îa  poix ,  &  principalement  fur  les  monta- 
.  o-nes  de  Leuci ,  autrement  nommez  de  la  Sphachie  ,  ou  il  croift 
grand  nombre  de  Pins  fauuagcSjautrement  nommez  Picese.  L'v- 
ne  des  choies  de  Crète  qu'auons  crouué  plus  mémorable  >  eft  vne 
plaine  nommée  Sethie ,  &  Lafti  de  moult  grande  eftendue  fur  la 
furnmitédes  hautes  montagnes ,  quelque  peu  au  defibs  de  Vou- 
lifmcni,en  terre  ferme  au  milieu  de  Fifle>tirant  vers  la  ville  de  Se- 
thie.  La  terre  en  eft  labourable,  ou  il  croift  grande  quantité  de™^ 
bleds^  de  légumes  y  &  de  Orobus,  qui  eft  vne  manière  de  legu-  Qj^ 
me  dont  nous  vfons ,  qu encor  n'a  trouué  aucun  nom  François. 
Ce  qui  faitq  ladiceplaine  foitfi  fertile ,  eft .-l'eau  des  ruuTeaux,qui 
defeendent  des  collines^dontelle  eft  enuironnee  de  routes  parts. 
Il  naift  des  petites  poires  fauuagcs  en  Crète ,  différentes  aux  no-  Poires  fi^ 
ftres,  qu'ils  nomment  Achladas»  Les  pokes  fauuages  y  ont  nom  m£h, 
Agufaga.  A  peine  pourroit  on  voircellemanicre  d'Afparges  en  ^ 
Crète ,  tel  le  que  nous  cultiuons  en  noz  iardins  :  car  ils  n'ont  que  Corrui^ 
la  fàuuage nommée  Corroda,qui  y  croift  en  tous  lieux.  Mais  ou- 
tre cefte  la ,  ils  en  ont  encor  vne  autre  efpece  qui  de  nom  propre 
vulgaire  •&  ancien  eft  appellee  Poîytricha.  L'inconftante  Heur  ïolytrich*. 
d'Anémone  y  eft  transfigurée  en  plus  de  dix  couleurs.  Les  Cigal-  ^™™»e* 
lesy  font  nommées  Symphogna:  quieftauffienleurvfagelenô 
d'vne  vieille  :  &  l'herbe  de  Confonde  maieu r ,  Stecouli.  Au  dcC-  steCÙ 
fus  du  Chafteau  de  Chifamoj  en  celle  part  de  îa  montagne  ou  eft 
fituc  vn*monafterc  de  Caloieres  nommé  fainâ:  Iean  de  Preder- 
mos ,  croift  vne  efpece  d'Àrtichauld  fàuuagejque  les  pafteurs  no- 
»  tuent  Agriocinara,  duquel  la  racine  eft  a  v.ne  coudée  de  long^  ^rtkhmi 
groiTe  comme  la  iambe,  noire  dehors  &  dedans,  faite  en  £otmçfe**g* 
;  de  poire ,  laquelle  maintenons  çftre  celle  que  les  droguiftes  ven-  ^Srl0^méfm 
dentpourCoftus  Indicus.  Nous  entendons  celle  racine  noire rx 
qu'ils  nomment  Coftus  :  &  croyons  quelle  eftoit  des  le  temps 
ancien  en  vlàge.  Elle  porte  des  teftes  comme  rÀrtichauld,  que 

F     iij 


4^  PREMIER    LIVRE     ]>ES    SINGVIA. 

f^f*™  espafteursappetcntpourles  manger  crues.  Sa  fleur  eft  commua 
cUmtUw  n^menc  Wançhe  :  combien  qu'il  y  en  ait  de  purpuree ,  &  de  bon- 
mm  nc  0<kur-  Sesraçines  font  pareilles  à  celles  du  Chamelseon  blac, 

&fesfucillesauCham#leonnoir.  Elleeft  difïemblabîe  aux  au- 
tres Artichaulds  fauuages  qui  croiffent  en  plufieurs  lieux  d'Italie. 
Pourneanr  aeftéf  eint  par  aucuns  le  Chamelseon  noir  &  blanc 
entre  noj  autres  herbes;  car  ne  l'vne  ne  1  autre  naiflent  aucune- 
ment ny  en  Alcmaigne ,  ny  en  France ,  ny  aufllen  Italie ,  dont 
ÇxrUne.      voyons  <lue  *es  trois/ufdi&es  nations  (faufleur  honneur )  en  ont: 
eftéabufees  :  Car  nelarCarlinc,ny  autres  telschardons,  ne  font 
Chamelsçon  nok  ne  blanc.  Du  noir  en  parlerons  ailleurs.  Le 
blanc  faid  vne  racine  groffè  comme  la  cuiflc,&  longue  d'vn  bon 
pied,  &  quelquesfois  d'vnc  coudée ,  ft  fort  odorante  que  l'ayan  t 
en  vne  çhâbre/ait  tout  fentirla  poudre  de  violette/i  fort  qu'elle 
çhïmdœon  entefte.  Les  pafteurs  de  Crète ,  Se  petits  garçons^des  villages ,  Se 
^^    n  principalement  de  Rethimo,en  cueillent  la  gumme,dôt  les  fem- 
mes vient  à  mafehe^comme  à .Çhio  de  maftic3&:  à  Lemnos  de  k 
\yùanthm.  gummedeChoudrilla.  Ils  nomment.ic  Chamelseon  blanc  Co- 
^Cçxnthm   la,on  Chamelasons.  L'herbe  d'Àcâthus  mol  y  croift  en  plufîeurs 
fmmgc      lieux  humides:  maisl'A.canthus  efpineux  eft  fauuage  croiftànr 
ononis.       par  ies  champs  &  par  les  fentiers.  L/.vfage  de  co'nEre  les  tendrôs 
zpngtum,   j»Ononis  n'eft  pas  aboly  en  Crète  5  ne  de  manger  les  cvmes  de 
mmn.       JEryngmm,:  mais  il  faut  entendre.que  tel  Eryngium  y  eft  marin,. 
nauTànt  au  riuage  de  la  mer3 différent  à  celuy  qui  naift.au  lieu  me* 
diterranee.  En  fommes  l'ifle  de  Çrete  produit  beaucoup 4c  plan- 
tes^ autres  ïïngularite^  qu'on  ne  trouue  point  ailleurs.  Aufti  a 
.    elle  eu  de  tout  temps  l'honneur  de  porter  des  plantes  genereufes* . 
Macrobe  au  cinquiefme  chapitre  du  fèptiefme  liure  des  Saturna- 
ânyd  point  *Cs^e  ^moigne  eQ  ccù&-Coite.  SfdnecmQnJiyofis  carnibusabjUnetis^ 
àg  serpens    ùfeircnt&poteulis  tefikubs  Caftorttm ,  £?*  venenata  corpora  Viperarumi: 
Venimeux    qmbus admifcet'îsquicqmimtrit InS^qmcqmddçuehïtHrherbAmm^ qui* 
mCrete.      bksCretagenerofeeft^ Quant  aux  ferpens \  nous  en  auons  obferué. 
opbis.        en  Crète  feulement  trois  différences  y  dont  les  payfans  en  nonK 
oebendra^  mentiVneOpbis^&râutreOchendraJ'autreTéphloth  Etvou- 
Tfphlotu     jons  ^jçn  conformer  ce  qui  a  eftéanciennement  dit  >  qu'il  n  y  ait 
point  befte  venimeufe  en  Crète.  Car  mefmement  en  pourcha£-. 
fandVndesicrpens,  qu  auons  dit  eftre  nommé  de  nom  propre - 
Qpbiss Qoftrc guideea leuant  vne  pierre  ou  il  s'eftoitçaçhi dçf*-. 


OBSERVEES     PAS.     P.  BEION,  47 

Ibtis ,  fut  mordu  defTus  la  main  iufques  au  fâng  ,  &  toutesfois  ii 
ïi'eut  autre  manque  l'eigratigncure. 

Ve  la  maludifie  de  Candiejiommee  Priamnium  vinum:  &  qu'elle  ri  eft 
faiâfa  ailleurs.  Chapitre  x  1  x. 

•  E  vin  que  nous  appelions  Maluaifie,eft  feulement  fait  Mduaife. 
en  Crète  :  Ô£  ofons  affeurer  que  celuy  qui  eft  tranfpor- 
j  te  le  plus  ioing ,  comme  en  Allemagne ,  France ,  An- 
!  gleterre,  aefté  premièrement  cuid:  Car  les  nauires 
qui  abordent  en  Crète  pour  tranfporter  la  Maluaiûc  en  eftrange 
pays,  fè  veulent  expreûement  charger  de  celle  de  Rethymo,  fça- 
chans  bien  qu  elle  fè  garde  moult  long  temps  en  fa  bonté  ,  &:  que 
d'autant  qu  elle  eft  plus  trauaiileejClle  eft  d  autant  plus  excellete. 
Or  en  la  ville  de  Rethymo  anciennement  nommée  Rhythymna, 
y  a  de  grandes  chaudières  le  long  de  la  marine  au  riuage ,  qui  fer- 
ment au  temps  des  vendanges  à  faire  bouilir  leurs  vins.Pas  ne  âi- 
fons  toutesfbis  que  toutes  Maluaifîes  foyent  boullies  :  Car  celles 
du  territoire  de  la  Canec,&  delà  ville  nommée  Candie,  qui  font 
feulement  tranfportces  en  Italie,defqueiles  on  n'a  pas  peur  qu  el- 
les s'aigrifTent ,  ne  font  pas  boullies.  Mais  rafraifchifTans  leurs 
vins  par  chacun  an,amendent  les  vieux  auec  le  nouucau ,  Se  ren- 
forcent le  nouucau  auec  le  vieil.Les  vins  de  Crète  anciennemét,  ™mnmm 
comme,  ençor  maintenant,  eftoyent  doux.  LaMaîuaifie  aefté  Creîlc^m 
appeîlce  par  nom  propre  Pramnium  vinum,  comme  il  appert  -^mm». 
par  les  mots  de  Diofcoridc,qui  dit  en  cefte  manière  :  Cretkum  co-  Trotofon. 
gnoimneautPrdmràum ,autProtof>on.  Ioint qu'Homère a exprefTe- Mufeatd 
ment  &  grandement  loué  le  vin  de  Crere,par  luy  nommé  Pram-  ^dtl£m 
nium.  L'ifle  de  Crète  donne  au fli  d'excellent  Mufcatel,duqueî  y  j^ .!f 
enadehatifauant  îafaito£t,  &:  d'autre  qu'on  fait  envendenges:  tar 
lefquelsnc  paffent  gucresle  deftroitde  Gilbatar.  Et  eft  à  noter  Mdmifie 
qu'il  y  a  aum"  de  Mufcatel  &  delaMaluaifîe  de  deux  fortes  ,  fça-  douce. 
uoir  eft  de  douce  ,  &  d'autre  qui  n  eft  point  douce,que  les  Itahés  Maluaijte 
appellent  garbe,ceft  à  dire  ce  que  les  François  nomment  verd  ou^^. 
rude  en  vin  :  laquelle  ne  nous  eft  point  apportée  par  deçà,  pource 
qu  eUen'eft  cui&e  comme  la  douce^  ne  fe  garde  â  long  temps» 
.      .-  F    iiij 


tomo  Bar  a  * 


mms   des 

Qretes. 


Tyrrhica 
filtatw. 
Dardes 
Crêtes. 


4&  PREM-IER     LIVRE     DES     SltfGVLA.. 

V  e  F  ancienne  manière  de  danjsr  auec  les  armes^npmmee  Py  rrhica  ■ 
fattatio..  Chapitre  xx. 

S  t  a  n  s  en  vn  village  champeftte,  au  logis  du  fei- 
gncur  Ipan  Antonio  Barochzo,a(ïez  près  de  la  vil- 
i  le  de  la  Sphachle-,  vifmes  les  pay  fans  des  villages, 
d'alentour  affemblez  à  vne  fèftejes  vns  auec  leurs 
^ ,amoureufes,&  les  autres  auec  leurs  femmes,  telle- 
ment qu'il  y  auoit  mouk  grande  compagnie. ..  Et  après  auoir  bien 
beu,  ils ;  {émirent  à  danfèr  au  plus  grand  chaud  du  iour,  non  pas 
en  l'ombre,  mais  au  foleil,  encor  que  ce  fuit  le  plus  ardent  iour  de 
toutlemoys  deluillet.  Et  combien  que  lefdits  payfans  fufTenc 
chargez  dermes,  toutesfois  ne  cefTerent  de  danfer  iufques  à  la 
nuid.  Ces  payfans  font  quaûtoufiours  en  chemifeblâchejCein* 
de  d'vne large  coroye  y  ayant  vne  large  boucle,  &  ont  des  brayes . 
de  toile,mais  la  chemife  neft  pas  enciofc  dedas.  Au  lieu  de  chauf- 
fes &  fduliers,  ils  portent  des  bottes-,  qui  leur  .montent  iuiques  à 
la  ceinture,,  à  laquelle  font  attachées  :  leuï-chemhe  pend  par  de- 
uant  &  par  derriere.Aïn{Iaecouftrez,&  chargez  d'vne  trouffc,ou 
il  y  a  cent  cinquante  flèches  ou  enuiron^ien  ordonnées,  laquel- 
le ils  porrent  derrière  le  dos ,  &  d'vn  arc  bendé  pendant  au  bras, 
Qucnefcharpe,  ôcâ'vnc  rapière  au  cofté  :  ils  s'efforcenuie  faire 
leurs  plus  beaux iàuts  .-&  ne  penferoyent  auok  bonne  grâce,  s'ils 
nauoyent!  toutxela  fur  eux..  Ceftedanfe  en  armes  des  .Crêtes, 
fèmble  fe  refentir  de  la  danfe  des  anciens  Curetés ,  nommée  par 
les  Latins  Eyrtkicafakaùo.  Les  Grecs  ainfi  danfans  ont  en  vfage 
trois  mefures  :  rvnefaitlepas,fautansdeuant  eux  d'vn  pied  fur 
l'autre,  comme  font  les. Allemans:  T^tre  citquau"  comme  les 
branfles  qu'on  daafe  es  villages  de  France  :  la  tierce  eft  eftrange: 
car  ils  remuent  ores  Fvn  des  pieds  en  auant  ôc  en  arrière,  ores 
l'autre  comme  le  premier:  &fereipondentïesvns  aux-autres  en 
chantante  danfànt à  leuïs  chaulons  ^tantoft  enfond  ,  l'autre 
fois  en  long ,  Se quelquesfois  deux  ideux*  &:  fautent  à  puirîance. 
Il  ne  fat  on c  que  les  Grecs  n'ayent  eu  ceu&ume  de  chanter  en 
déniant  ;  car  Ariftoxe  le tefmoigne  au  premier  chapitre  du  ieptié* 
me  liure^ou  il  dit  en  cefte  manière.  Vox  ïvsy  qui  rem  veneream  inci- 
pjmtAgerCi  mutawnfômmaJfierÎQï^iw^  inàpit.  ~éb~ 
"    ■  "■  Jtinennhtë::- 


aBSERVEES     PAR    T.     BEEaH.  45^ 

Jimentibm  verb ,  À  contrario  fit  3  &fi  curam  adhiheant  :  quoâ  aliquifa- 
ëuntex  ijs  quichorekindulgentv  Les  femmes  ont  couftume  que  leur 
couurechefeft  feulement  ietté  dcfïuslatefre,  comme vn  voile, 
fans cftre attache:  &.  leurs ;pof&rines  $c  efpaules  font  toufiour& 
defcouuertes  :  car  elles  n'ont  aucun  v&ge  de  colerettes  :  parquoy 
elles  font  toutes  noires  &halleesiu  Soleiî3&  ne  portent  point  de 
bas  dechauueSjCe  que  voulons  eftrc  entendu  des  villageoifes,le£. 
quelles  Ton  voit  bien  en  public  :  mais  les  Grecques  des  villes  font 
toufîours  enfermées ,  &  ne  vont  guère  que  lanuict ,  non  plus  à- 
l'Egliic  qu  a  fè  vifîtes  fvnc  1  autre.  Et  pource  que  noftre  pro, 
pos  nous  tire  à  autre  matière,  nous  déporterons  d*efcrire  plus 
amplement  des  chofes  de  Crète  ,  d'autant  que  la  navigation 
eft  iî  prochaine  qu'on  voit  iournellement  gens  qui  y  vont  &: 
en  reuiennenx  :  Ôc  commencerons  ^parler  des  ehofèV  de  Tur- 
quie. 

Que  tout  homme* ayant  commandement  m  paffepm£<un Bâcha ^ou- 
du  Turc  s  eflant  habillé  à  la  mode  des  Turcs  ,  menant  vn guide auecfqy,pour  - 
jèruiri interprète  ou  tmeheman^  peut  cheminer  fmrement  partout  le  pays, 
des  Turcs.  Chapitre    xxi. 

O  m  b  1  en  que  les  Turcs  s'àrtèrnblent  ordinaire-  Carxuatmes< 
ment  en  grandes  trouppes ,  quils  nommentCa- 
rauannes ,  pour  aller  plus  feurement  par  pays  ,  û 
eft-ce  qu'vn  homme  eîtant  habillé  à  leur  mode, 

1, ayant  vn  iaufeonduit  delà  porte,  ceft  à  .dire  vn 

paffeport  de  la  court  du  grand  fèigneur ,  Scvn  droguement  pour 
kiy  fecuir  de  guide,  pourraaller  par  tousles  pays  ou  bon  luy~fem~- 
blera,  hors  mis  par  les  défères  &  dangereux  gaf&ges  de  frontière, 
©r  fi  quelque  autre  meu  de  mefmc  defir  vouloir  efTayerlefera- 
hlable  de  ce  qu  auons  tait ,  il  n'a  femblé  hors  de  propos  d'en  met- 


tre vn  petit  mot  par  eferit.  Ceft*  quandarriuafmes  LConftanri- 

Bople  la  première  fois^pour  ne  confumer  vn  loifir  en  pareffe,  J^'. 

nous  pauîons  tous  les  iours  le  canal  4u  portquifepare  Peredè  £*m»^ 


^onitantmople,  afin  que  voyans  par  lesboutiques  les  cho£es?*rlepysdè 
que  les  Turcs  ontaccouftumé  vendre ,  euffionsTintelligeoce  de  Turque*. 
eequrlsont,  donttfauons  point  l'vfage.  Etpource  faire  com- 
modément ,  apiçsauoir a»uucyu%aaric  Turc,  doâsenÀra- 

a. 


5°  PÎLE-MIER     LIVRE      DES  ^T^GVlA, 

be,conuinfmes  de  prix  auccîuy ,  pour  efcrire  vne  table  de  toutes 
les  efpcces  des  marchandifes  ,  drogueries  ,  &  autres  matières 
qu'on  vend  par  les  boutiques  de  Turquie ,  laquelle  contenoit  la 
■table  d'Auicenne ,  eferite  en  langage  Arabe ,  contenant  enfom- 
-mc  touteschofes  qui  leur  font  apportées  d'efttange  pays.Et  pour 
en  parler  fommaircment,  ce  fut  i'vne  des  chofes  qui  nous  aie 
mieux  inftruit&:  aidé  àfçauoir  ce  que  voulions  apprendre.    Car 
quand  ladite  table  fut  paracheuce ,  le  Turc  nous  lifoit  toutes  les 
parolles  Fvne  apresl'autre.  Et  ainfi  qu'il  les  lifoit ,  efcciuions  de 
noftre  lettre  le  sienne  mot  qu'il  auokefcrit  en  fon  vulgaire,  tel 
qu'il  Fanait  proféré  en  Arabe.  En  après  nous  failions  monftrer 
la  chofe  qu'il  auoit  nommée,  à  fin  que  layans  veue  ,  cfcriuif- 
fionsen  noftre langage  audeflous  de fon  eferiturc  la  chofe  qu'a- 
uioas  cogneue ,  voulans  par  ce  moyen  la  pouuoir  demander  ail- 
leurs quand  en  au  rions  affaire  :&  quelque  part  que  nous  foyons 
trouuezpar  le  pays  de  Turquie,  nousenfommes  grandement 
&ruiz  entre  les  Turcs.  Car  eftans  appeliez  pour  donner  aide  à 
•quelque  maladies ,  quand  voulions  auoir  quelque  chofe  d' vne 
boutique  de  drogueur (  car  il  n'y  a  aucuns  Apoticaires)  fi  ne  la 
|jouuions  bien  proférer  en  leur  langage  ,  nous  en  montrions 
.  ~ .    .         lefcrk ,  à  fin  que  le  marchand  qui  la  vendoit ,  la  peuft  mieux  en- 
tendre. Cclaa  cftê  vn  vray  moyen  de  nous  faire  voir  les  fimples 
qui.ontcefTéd'eftreen  cours  de  marchandife,  &  defqucls  noz 
«jarchands  qui  trafiquent  en  Turquie,  n'ont  accouftumé  nous 
entioyer.  Et  donnons  [ceft  honneuriau  trahie  de  marchandi- 
se*^ faïe  ?  que  luy  deuons  référer  tout  ce  que  nous  auons  de  fingu- 
xours  de  mur  lier des  ioingtaines  parties  du  monde.    Et  qu'il  ne  foit  vray, 
ichxndlfe.     aurions  nous  des  efpiceries,  dekCanelle,  Girofrle  ,  Mufca- 
CtneBe.       £cs  ^  povure  5  &  autres  telles  çhofes  femblables ,  fans  elle  » 
Cir°F'd\-     Q&  cft  cau^e  ^uc  Plufieurs  drogues  Singulières ,  Se  chofes  ex- 
^oywe  S     ceiientes  qui  eftoyent  anciennement  tant  cogneues  ,  foyent 
^momum.  maintenant incogncues,finon  qu'elles  onteeue  d'eftre  en  cours 
rmUnthi'  demarchandife  ?  La  terre  a  elle  ce$é  de  produire  FAraomum, 
a*.  Terebinthine ,  Calamus  odoratus ,  Ammi,  Coiius,  Acacia ,  &: 

cdâmm     autres  chofes  fembîables,qui  eiloyent  anciennement  en  fi  grand 
odorat,*.     v^c  ?  jj  çc  £au£  âflfeurer  qUc non ,  &  aduouer  qu'elles  demeurent 
/Cmnu      en  chemin  ,  par  faute  qu'elles  nç  trouucht  qui  les  face  pafler  deçà 
lamcr.  Maiseftans  en  leuant  en  auoas  fait  recognoiftre  grand 


Coft'M. 


acacia. 


OBSERVEES      PAR     P.    BETON.  fï 

nombre  aux  marchands ,  qui  pour  eftreà  eux  incogneucs,  re- 
layent là;  mais  maintenant  commencent  à  cftre  communes en 
vente, tant  à  Venife,  qu'en  plusieurs  autres  iieux  :  Se  principale- 
ment le  vray  Nitre ,  Cardamomum  maicur  ,  la  vraye  Terebin- 
thine,&  autres  chofes  femblables,  dont  parlerons  plus  àplain  Nitre. 
au  commentaire  fur  Diofcoride.  Et  nous  aiTeuronsque  fi  nous  Cardamome 
vouhonsmettse en denoir de prouuer,que  premièrement  ayons rmew. 
rapporté  grand  nombre  de  telles  drogues  que  nous  n  auos  point,  Terebintkl~- 
Se  que  nous  n!eufîions  peu  reGouurer  pour  or  ne  argent,pas  nati* **' 
rions  faute  de  tefmoings  fuffifans. 

Que  lesTun  évertuent. vne  me fmeâiciion  ou  vocable  de 
leur. {lettres. en  plm  de 'vingt  Çones* 

Ctiap^  xxî;i;- 

E  s  anciens  ont.  eu  vnc  manière  de  terre  en  rrroufe 
grande  recommen dation  en  plufieurs  médecines, 
:  Se  encor  pourJ'eiourd'huy  eft  en  auffi  grand  vfzgc 
;  qu  elle  fut  onc.    Les  Latins  la  nomment  Terra  . 

'  Lemnia ,  ou  terra  figillata ,  Se  les  François  terre  ^u  ^£L 
fcîlee.  Cefte  terre  eft  fi  fîngnlierc ,  que  les  ÀmbafTadeurs  qui  re- 
tournent de  Turquie  ,  en  apportent  ordinairement  pour  en 
faire  prefent  aux  grands  fèigneurs.  Car? entre  autre  chofeseî- 
}e  eft  propre  contre  lapefte,  Se  toutes  defluxions.  L  on  en  vend 
bien  chez  les  drogueurs  ,  qui  obtient  le  nom  de  terre  fel\ce>K 
mais  eft.  pour  la  plus  part  fophiftiquee  :  aulfi.  ne  s  en  trouueen 
tout  le  mondé,  fïnon  en  Fifle.de  Lemnos.  Et  pource  qu'auiûns 
intention  de paiïèr en  Letnnos,  nous  enquifmes  foigneuièmentv 
auant  partir  de  Conftantinople ,  quel  moyen  ont  les  marchands^ 
d'en  rccoiïurer,  Se  feifmes  tant  qu'en  trouuafmes  de  dixhuict  for- 
tes d'impreffion.  Ày ans  donc  recouuré  des  féaux  de  toutes  efpe- 
ccsv qu'on  vendoitlors  à  Gonûantinople,  Jes  pprtafmcs  mon-» 
ftrer  à  vn  Turc  doc"te  en  Arabe,  pour  fçauoir  quelle  raifbn  il  y  a- 
uoitd  en  trouuer  de  tan rde  fortes.  Le  Turc  après  les  auoir  tou- 
tes leiics  ,  refpondit  que  toutes  ne  contenoyent  autre  choie ,  ilna 
deux  mots  en  Arabe ,  Tin  imaciuon ,  qui  vaut  autant  à  dire  que^ 
ÏOTcièilee.;  Se  quele  feau  qui  auoide  plus  d  eferiture ,  figrûfioie^ 

G   ii     ■'         . 


*p  PREMIER    XÏTRÏ     DES  'SINGVIA. 

Je  mefinc  mot  que  celuy  qui  en  auoit  le  moins.  Toutes  ces  terres 
font  formées  en  petits  paftilles,,c'eft  à  dire  "tourteaux  ou  petits 
pains ,  qui  pefènt  iufques  à  quatre  dragmes  la  pièce,  les  vns  plus, 
les  autres  moins.  Et  d'autant  que  les  cara&eres  defdits  paftiîles, 
n'auoycntpasmefme  impreffion  deferiture ,  nous  entendifmes 
que  cela  ne  venoit  d'autre  choie ,  fînon  que  les  Turcs  peuuent  di- 
^uerfement  changer  leurs  lettres  ou  charaderes  ,  pour  exprimer 
vue  mefme  fignification.  Encory  avne  autre  raifon  s  ceft  que 
diuers  feigneurs  &  gouuerneurs  de  l'hic  en  ont  eu  charge ,  &:  en 
ont  fait  diuers  fèaux5Il  n'y  a  pas  faute  de  trompeurs,qui  la  fçauet 
ialfifîer  fi naifuement,  qu'ils  lafont  reflèmblerà la  naturelle.  Et 
pour  faire  voir  les  characteres  diuerfement  imprimez  es  paftiîles 
îur  diuerfes  terres ,  icy  en  font  les  portrai&s  retirez  de  deiïus  les 
icauXjfèlon  les  diuerfîtez  àcs  terres. 


Dtferenies 
€Jjtece$  detet- 
refiBce. 


Defèription  des  différentes  efycces  defdùBes  terres  feïïees  %  &  des  fe 'aux 
qu W  a  imprimé dejftts*  Chapitre  xxiii* 

Près  auoir  retiré  tous  féaux  &  différentes  efpeces  des 

terres  que  peufmes  rccouurer  :  propofafmes  pafler  en 

|  Lemnos  pour  en  fçauoir  la  vérité ,  &  pour  apprendre 

^àdifeerner  lesvrayes  des.  faufes  :  Scies  defcriuifmes 


ÔBSERTEES    PAÏL  >.    BE'î-ON.  ft 

^comme  s'enfuit.  Le  plus  antique  fêau  au  récit  des  Grecs ,  &  des 
Turcs  ,  entre  les  terres ,  eft  dVne  forte  qui  n'eft  gueres  plus  large 
que  le  pouîee ,  Se  n  a  que  quatre  lettres  en  tout  :  dont  celles  qui 
font  à  cofté,font  comme  deux  crochets  :  &  les  au  très  lezîtes  du 
milieu  fort  entortillées  ,  comme  ferait  le  chara&ere  équivaut 
autant  à  dire  corne  vne  once  medidnale:&  par  le  milieu  du  feau, 
entre  toutes  les  lettres  il  n'y  a  que  quatre  points  :  duquel  {eau  la 
terre  eft  AgrafTe,  quelle  femblecftre  deCmf9  de  obéit  aux  dens, 
quand  on  la  mafchc ,  &  n'eft  gueres  fàblonncufe.  Sa  couleur  eft 
xlepaflcen  rougiffant  fur  l'oofcur.  II  y  en  aencor  d*vnc  autre 
^ôrte,qu  i  eu  en  petis  pains  de  la  grandeur  de  la  fufdicke  :  mais  les 
chara&cres  du  feau  font  vn  peu  plus  grands^  n'y  a  que  trois  let- 
tres en  tout  j  aueefèpt  péris  points  :  dont  la  terre  eft  vn  peu  plus 
jrougiflanteque  la  première  ,  &  à  quelque  aigreur  au  gouft  :  Se 
quand  on  la  mafèhe,on  y  trouue  plufîeurs  petites  pierres  fàblon- 
îiçùfès.  Elle  eft  plus  maigre  que  la  fufdi&e  :  mais  cft  autant  cfti- 
mee  en  bonté.  Encor  y  a  vne  forte  de  péris  pains  ou  paftiiïcs  de 
terre  fêlîec,  de  la  memie  grandeur  des  fufdiâes  :  mais  les  lettres 
font  différentes  :  car  elle  a  comme  vn  crochet  refïèmblant  à  vn 
àaim  à  prendre  le  poiffon  :  qui  eft  entre  deux  autres  lettres  ,  re£- 
fcmblans  au  chirrred'vne  once,  quieft  tel  £.  &  fa  couleur  eft  dif- 
férente aux  deux  au  très  deffufdiâesxar  elle  eft  mouchetée  de  pe- 
tites taches  de  terre  blanche  mefleeaucc  la  rouge. La  quatriefme 
efpece  eftplusclaircen  rougeur  ,  &  plus  pafle  que  nulle  des  au- 
tresrde  laquelle  auons  obferué  trois  différences  de  féaux  en  mef- 
me  terre.  La  terre  fellee  plus  commune  en  Conftantinople  ,  eft 
pour  la  plus  part  falfîfice ,  Se  eft  formée  en  plus  grands  tourteaux 
que  ne  font  les  autres ,  auffi  eft  d'autre  couleur  :  car  les  autres  ti- 
rent fur  le  rouge, mais  cefte  là  eft  de  iaune  paillé.  Et  ainli  comme 
clic  cft  faufe ,  aufïi  ion  en  trouue  en  plus  grand*  quantité.  Encor 
en  trouue  Ion  de  deux  autres  eipeees  différentes  tant  enforme 
qu  en  lettres,lefqueiles  on  eftimeeftrc  du  nôbre  des  plus  vrayes, 
&n*ont  différence  finon  quelVuccft  plus  chargée  de  fâblo  que 
n'eft  l'autre:&:  ont  quafi  vne  mefme  fàueur ,  aufh  font  elles  rares. 
Lon  en  trouue  encor  vne  autre  efpece  qui  eft  falûfîee  auec  du  So^  ^r* 
Bolus  Armcnus  deftrempé,&;  puisfellé,&:  dvn  feau  de  charade-  mm*i' 
tes  dirferens  aux  deux  dernieres,raais  de  mefme  grandeur  :  &  n'a 
que  deux  lettres  en  tout ,  qui  font  fort  retorfes*.  Il  y  en  a  encore 

G  iij 


f4T  PREMIER;     fclVRE     BES     SÏNGVL1'. 

a  vne  autre  forte  formée  en  pains  mal  baftis ,  qui  font  plus  rond* 
que  nuls  des  autres,&;  font  de  lagroffeur  d'vne  noiXjqui  feroyent 
quafl  comme  iaîets,n  eft-pk  qu'ils  font  quelque  peu  aplatis  enJcs. 
felIant.Nous  lesauôs  trouiiezHsftre  des  plus  nets  que  nuls  autres.. 
Encor  cft.vnc autre  cfpccede  feau  peu  comun  par  les  boutiques,, 
lequel  auorts  feulement  trouuéen  deux  boutiquesàConftanti-, 
rïppie:aufïï  fon  prix  eflplus  haut  que  nul  àcs  autres ,  &c  eft  de  fat- 
ueur  plus  aromatique %  tellement  qu'on  diroitàl^fprouuer  au, 
gouft ,  que  Ion  y  ait  adîoufte  quelque  chofe  qui  luy  donne  telle, 
faueur  :  mais  ceft  le  naturel  de  laterre  qui  eft teHc  Ç  eft  l'vn.des 
féaux  ouilyarleplus  dé  characleres  en  l'imprcuTori.  La  terre  en 
eft  quelque  peu  fabîonneufe ,  de  couleur  rougiffante  en  ob'fcur.. 
Yoila  donc  que  toutes  les  terres  fellees.  nefont  pas  d'vne  mefmCv 
couleur  :  car  fouuet  aduient  qu'on  les  rrouue  des  fa  veine  de  plus 
blanche  couleur ,  1  autre  fois  plus-  rouge  ±Jk  quelquefois  jnefteq 
àts  deux.Cèuxquiapptouuét  la  terre  fellee  au  gouft,  en  on-rplus 
certain  iugement,la  trouuans  aromatique  en  la  bouche,  Se  quel- 
que peu  fabîonneufe  :  que  les  autres  qui  eflàyent  de  la  faire  pédre 
à  la  langue.  Tou tes  lcfquelles  différences  efcriuifrnes  Sc.mifmes 
en  peinture,eftans  à  Conftantinople ,  &  les  portafmesen  Pifleds 
z*  terre  fel*hcmnQsiQu.cMG\\çxig£  veine  dont  Ion  tire  i  celle  terre.  Mais  Ion 
Igeft urée  n'ar^kuacçouftumé  en  tirer  iînon  àyn  feul  iour  de l'année  àxe* 
-   "f  ■     exprefïementdedié.qui  eft  le  fïxiefme  iour  du  mois  d'Àouft.  Ol 

fixtejmeimr^    •*-  ■    2    A      n        ■         1  r         j  t 

a^£ouB  auant,quc  partir  de  Conftantinople,  nousenqunmes  detous  les, 
mariniers  d'vne  barque  qui  eftoit  arriuec.de  Lemnos,  s'ils  auoiet 
apporté dç  lajterre:spus refpondirent  qu'il  eftoit,  impofïiblc  en 
spukathi.de-  recouurer,fïnon  parles  mains  de  celu.yquieftSoubacïuen  Tifle: 
£$mms*  -,  &,que  fi  layoulions  voir-naturelle,ilconuenait  y  aller  en  perfhn- 
nercar  ileft-defendtiaux  habitas  furpeinede  perdre  la  tefte,  d'en 
tranfpotter.-Xls  difoyent  d  auantage  que  û*  quclqu  vn.des  habitas 
en  auoit  feulement. vendu  vn  petit  tourtelet ,  ou  qu'il  fut  trouuq 
en  auoir  enià  maifôniàns  lefceu.de  ion  gouuerneur ,  il.feroit  .iu* 
gé  à  payer  vue  grande  fbmmc  d'argent;car  il  n  eft  permis  d'en  de? 
partir  fînon  audit  Scmbachi  quijtient  iatren  tement  de  nfle,&:  en 
paye  letjibBt  au  Tare,  T.outes  leiquelles  chofès  augmentèrent 
le  dciTrqu'auions  de  l'aller  voir  enfaveine.il  nous  conuint  auoit 
premièrement  vnfàufconduit^ qu'ils  appellent  commandement 
parjequeî  peu/fions  aller  par  lepays  de  Turquie  plus  feureme&tî. 


*Ô'B$ÉÎLVEE*S     *A!L     P.    BELOK.  fr 

lequel  obtinfmes  facilement  parla  faueur&  crédit  de  monfîeur  g*&  ^ 
duFumet,qui  pour  lors  eftoitembafladcuncarmonficur  d'Ara-  ^nftmt^ 

-  n    •      t  r  Fumet  en* 

raonteftoitabfcnt.  uerste^md 

Turc. 
Voyage  de  Conflantinofleà  lemnosjfle  eniamerBgee^  nommée  en  vul- 
gaire Italien  Stulimene*  Chapitre   xxini. 

î  Yans  trouué  vn  Brigacin  qui  alloi  ta  Salonichi,  qui 
Éeftvne  grande  ville  anciennement  nommée  Thef-  TbeJJaomu 
|{àIoniea,&pafToitpar  Lemnos:aprcs  qu'eufmes  fait 
i  les  appareils  pour  noftre  voyage,môtaimes  fur  mer, 
w    -  f*&  feifmcs  voile.  Si  le  vent  cft^uoràblc -,  ion 'va-xic 

Conftantinople  à  Lemnos  en  moins  de  quatre  tournées.  Nous 
nauigeafmesparlePropontide^vinfmesàGaiipoli ,  ou  nous 
ne  demeurafmcs  quvn  iour.  Or  puis  qu'il  vic^c  à  propos  delà  ïia- 
uigation  du  Propontide ,  nous  dirons  que  ccft  la  plus  commode  oaUpoU.^ 
de  toutes  autres  mers ,  Ôraufïi  en  donnerons  la  raifor*.  Ocft  xauiganan, 
que  la  mer  de  tout  le  pont  Euxin  Se  du  Propontide  ne  Ce  hau-  .^   0?on* 
fe ,  n  abaiflè ,  Se  ne  croift  au  cours  de  k  Lune  ,  comme  fait 
la  nier  Oceane,&  bonne  partie  de  la  mer  Méditerranée  :  Se  aufë 
qu'ils  ont  les  vauTeaux  propres  pour  telles  mers  qui  nofttny  flux  propontide 
nyreâux.  Le  Propontide,  Hellefpont  ,&les  Bofphores  font  in-  &eUe$onte 
ceflàmmenten  perpétuel  cpurant,comme  auâi  font  les  ifles  Cy-  &  &  Bofi 
élades ,  Se  grande  partie  de  la  mer  Egec  :  tellement  queû  d  aûea-  îoorK  ™ 
turevn  vaifïèaufe  trouue  en  plaine  mer  en  temps  calme  &ian s  ^^' 
vent,il  decherra  de  fon  chemin  plus  de  dix  miKe  pour  iour,  à  rai- 
fon  du  grand  cours  des  eaux  qui  tom  bent  du  pot  Euxin  au  Pro- 
pontide, &de  là  par  rHeltefpont  Se  les  Cyclades  entrent  en  la 
mer  Mediterranec.De  laquelle  chofe  trouuons  qu  anciennemée 
plu {îeursfe font  efmerueillez  :  car  mefmement  Plide  ne  Tapas 
voulu  taire,qui  au  treiziefmc  chapitre  du  quatorzkfme  îiure,  die 
en  cefte  manière  :  Noneflomittenâamultommopiniopriufquam  dègre- 
diamurÀPonto^  qui  maria  omnia inferioraillo tapitena/ci^non  Gaditano 
frète  %exiftimai*ere  3 baudimprobabili argumente  ,  quoniam  zfîus  femper  è 
Ponte  profluem^mnqtiamreeiprocetur.C'cù.  à  dire,ii  ne  faut  pas  met- 
tre en  arrière  l'opinion  de  pluiieurs ,  auant  que  nous  déporter  du 
Pont  :  lcfquels  ont  cuidé  que  les  mers  inférieures  prinflent  naif- 
fance  en  ce  chef  là ,  Se  non  pas  au  deftroict  de  Gibakar  t  defqueîs 

G  iiij 


f&'  03.S,E-JLV/E1E     FAR.     K,    BiLO-N» 

l'argument îj'eftimprobable^aria  maree,c'elt.:à dire,  le  ôux s  *cC- 
coulant  toujours du  Pont,ne  retourne iamais en  arrière.  Quant 
w.^«-»,,;r-*nous  no^rc  opinion  eft  que  ce  Heu  là.foit  la  fource  de  toutes 
fdncedsU    mcrs  5  vca  niclrasment  qu  ri  tombe  contre  basgrande  quantité 
«>«•  .&**&  d'eau,  laquelle  ne  retou rne  iamais  comremont ,  &  fau,t  neceffai- 
terrmee      rement  qu'elle  ait  aufïr  paflàge  à  fortir  hors  de  la  Méditerranée 
source  de     par  le  deftroit  de  Giba!tar,qu  o  nomme  en  Latin,  Gjditammfre- 
tmtesmsn,  *#»*.  Autrement  elle  regorgeroit  fur  la  terre  ySc  noyeroit  tous  les 
pays  circonuoifîns^  Quand  nous  fufmes  fortis  hors  la  bouche  de 
lliellefpont,  &  entrez  en  plaine  campagne  de  mer  Egée  ^eftans 
trois  brigantins  de  confèruc,nous  eftions  fans  vent,  &  eftoit  déf- 
ia bien  tard  que  nous  auifafmes  trois  voiles  de  pirates ,  qui  nous 
contraignirent  gaigner  le  port  de  Me  dlmbros,  bu  le  vent  con- 
traire nous  print ,  &  força  de  demeurer  deux  iours  entiers.  Le. 
tiers  iour*  nous  fèrtifmes  en  pkine  campagne  de  mer  3  &:  àforee 
d'auirons  gaîgnafmes  de  bonne  heure  fille  de  Lemnos,&  palTaP 
mes  entre  deux  pointeSjl'vne  de  Lemno  pommée  Blaua ,  l'autre 
3&u*.        dlmbronommec  Aulaca/e  regardans  l'vn  l'autre  àvdixhui&mik 
^pdaca*     l<?ing,  Quand&imes  defçendus  en  terre  ,&  que  eufnies  fait  en- 
tendre aux  gouverneurs  de  l'iûe  qu'eftions  làvenus  pour  voir  la 
mine  de  la  terre  fcllee ,  ils  nous  mirent  hors  d  efpoir  de  la  voir ,  £ , 
ne  retournios  le&icfme  iour  d' Aouft.  Mais  ayans  feiourné  lon- 
gue efpace de, temps  en  plusieurs  villages  de  rifle,  &eftansfou- 
uent  appelleZipour  .vpir  Ici  Grecs  Se  Turcs  malades  ,  auons  eu. 
grande  occaiion  de  nous  faire  monftrer  les diueriltez  delà  terre: 
&  principalement  en  la  ville  de  Lemnos.  Car  l'vn  des  principaux 
de  f  iflp  logé  là  haut  au  çhafreau  dedans  là  roche  >  qui  pour  lors . 
eltoit  malade ,  nous  dpnnamoyen  deyoirtoutes  les  efpeces  qui 
croient  en  la  ville ,  îuy  ayans  fait  entendre  qu'il  falLoit  que  chpi- 
fixons  pour  fa  médecine  la  meilleure  de  toutes  celles  qu  on  nous 
mpnûrer©ic3  dont  la  plus  part  eft  oit  uns  aucune  imprefiion  de 
feâus  -,  . 


OFSXJtVTEES     PAR     P.    B'EION.  57- 

IPefcription ^zriiïeis&  ruines  de Lemnas.   ..    Chapitre    xxv. 

^Ous  trouuonsqueLemnos  eft  nommée  en  Italien  st^mene. 

jStaliraene ,  de  no  corrompu  de  deux  dirions  Gre- 
ques vulgaires, Sto  3&  LimnL  Sto'  eftàdire  A.,.& 

*  Lirani ,  Lemnos.  La  ville  qui  eft  maintenant  nom- 

;mee,  Lemnos.,  auois  nom  anciennement  Myrina.  *&*?*•■ 
Elle  cil  de  petite  eftimation  :  toutesfois  cft  encor  en  ion  entier. 
Laquelle  eftqnafi  de  la  mefme  façon  qiteftle  chafteau  de  Cor-  Co  r 
phu,ou  la  ville  de  Caualle,  autrement  dicte  Bucephala  :.Car  elle.  caLuè. 
eft  dcAus  vne  colline  auancee  en  la  me^ayan  t  deux  plages ,  IVne;  BucepbiL. 
dcçàjautre  delà',  en  forte  que  l'entrée  quieft  deuers  terre-ferme, 
cft  moult  eftroi&e-La  coliineou  eft  fituee  la  ville ,  eft  cntournee 
de  vieilles  murailles3&  a  vn  chafteau  au  faifte  demis  la  roche  ,  ou 
il  y  a  gardesx>rdinairemcntjnaaque-la  ville  ou  le  chafteau  foir  te- 
nu pour  lieu  de  fortereiTe ,  mais  pour  reûfter  aux  Courfaires  $c 
Galères  ou  fuftcs^û"  elles  venoict  pour  l'affaillir  à  la  dcfpourueue: 
&  faut  dire  que  lagardequ  y  fondes  Xurcs,eftpar  manière  d  aç- 
qu.it,&:pour  tenir  Ta  terre  ferme  de,  Hfle  enobeiflance  &:  crainte 
de  s  eileucr  Se  rebeller ,  ou  bienjidlamettre  es  mains  des  Chrc-     r  .. 
fliens.Or quant àia ville d'Ephef&ajmaintenant  dide  Cochyno,  ^°e/1*' 
elle  eft  pour  l'heure  prefente  en  tout  &  par  tout  deshabitée  &   °C  JP°' 
minée  :  car  les  villes  qu'anciennement  eftoient  en  pays  diiïicile» 
&  auoyent  leur  fituation  mal  à  propos  pour  les  commoditezne- 
ceftaires  des  habitans  &  principalement  d  eau  douce,fontaliees 
en  décadence ,  qui  depuis  n ontefté  rebafties.  Mous  trouuaimes  Tt0î*?inies 
que  le  pois  de  iixliures  de  bo  vin  ne  couftoit  plus  d'vn  afpre ,  qui  ^m  ^m 
eft  trois  pintes  de  Paris  poux  vn  carolus.  Les  habitans  de  ladite  ^mr^n  °^c 
ville,pour  mieux  succomoder  5  ©nt  bafty  des  maifons  en  h  plai-  ^Ja  y^tt 
ne3ioignar  les  portes  hors  la  ville ,  en  fone  que  Ion  y  voievn  tref-  im  urolus. 
grand  &  pîàifànt  village  3ou  il  y  agrande  quantité  de  vignes»: 
Toutel'ifleeftiîoflue.de  petites  collines;  mais  pour  cela  elle  ne  TaJf0S- 
laifte  d  auok  entre  deuxide  belles  campagnes  de  bonne  terre  la-  s9ros- 
bourable.Xoutes  les  autres  ifles  quifout  en  la  mer ,  les  plus  pjro-  ÏÏ^f 
chaînes  de  Lemnos,foo  tplus  hautes  de  mon tagneSîCor|ime  font  cUhm  d&- 
TafTos^yrosîTenedoSjImbrosXe  chafteau  de  la  ville  de  Lem-  z&mos.  _ 
Eiasji!a  que  dejix  portevGcHe-qui;  cnoc.cn  k  baffe  vilk  ,;dtda. 


5$  PREMIER.     LÏVUE    DES    S  IN  G  VI  A. 

difficile  accès  :  d'autant  qu'elle  eft  entaillée  en  roc  :  aum*  y  a  il  ta 
pont,  lequel  quand  eft  leué,  le  lieu  qui  eft  fort  bas.*  eft  précipité 
îufques  à  la  marine.  L'autre  porte  eft  à  la  fommité  de  la  colline, 
dont  la  montée  eft  fïroide,qu'vn  cheual  n'y  fçauroit  monter.  La 
ville  &  le  chafteau  n  ont  pas  beaucoup  de  maifbns ,  &  n'y  a  pas 
grande  fortereftè  qui  peuft  refifter  à  vne  violence  faite  a  force 
d'armes. Tous  les  deux  ports, tan td'vn  cofté  que  d'autre^  font  af- 
,•       fez  mal  feurs,  d'autant  que  les  vaiffeaux  font  fubie&s  aux  vens.  - 
*Myrrhinlu   ^a  vi^c  ^e  Leoinos  ou  My rrhinc  eft  moins  habitée  qu  elle  ne  fat 
onc:  toutesfois  la  terre  ferme  de  l'iâc  eft  plus  fre&ueufe  §L  abon- 
dante en  toutes  cho&s,quleliencfutie  temps  pafle.Etcncor  que. 
Fuie  ne  foit  moult  grande,  £eft-cc  qu'elle  a  foixante&:  quinze, 
villages  de  colnpte  fait,habitez  d'hommes  tous  diligés  &  riches, 
cultiueurs  delegumages ,  &:  toutes  autres  chofes ,  comme  font 
Pois^ebues,Ciches,Serres5  Lentilles,  Bleds,  Vins,Chairs,  For- 
mages, Laines,  Lin,  Chamure,  Ilfaut  en  tendre  qu'en  toutes  les 
iïlcs  de  Grèce , qui  font  en  la  mer  Méditerranée ,  &  ou  Ion  parle 
Grec,les  habitas  Ce  trouuas  en  fourcté  fous  la  puiûançê  du  Turc, 
n'entendent  ûnon  à  viure5&nontaucunfoingdc  garder  les  for- 
cereflès  :  car  les  Turcs  les  ofte'npdecefte peine.  De  là  vient  qu'ils 
-aiment  autant  demeurer  aux  champs  corne  en  la  ville.  Ils  fo  ren- 
Grtcsenirc*  gentàcuîtiuer  la  terre.  Leur  langage  n'eft  point  mué  entr'eux 
tmuleur  U*  pOUr  |a  vcm3C  des  Tutcs,&  aufïî  n'ont  changé  leur  religion.  Des 
gtgeo*rdi>  ft)ixante&  quinze  villages  qui  fontenl'iflc ,  n'en  auons  oneques 
£im'  trouué  que  deux  ou  trois ,  ou  Ion  ne  parlait  Grec ,  &  qui  ne  fuf. 

font  Chrcftiens.  Vray  eft  que  ceux  qui  s'y  tiennent  es  forterefTcs, 
font  Turcs,roâis  ceux  des  villages  font  Grecs.  Vn  vieillard  natif 
de  fifle ,  difoit  que  iamais  le  pays  n  auoit  efté  û  bien  cultiué  ,  ne 
plus  riche,  &  n'y  a  eu  plus  dépeuple  qu'il  y  a  niaintenat.  Laquel- 
le chofo  il  faut  attribuer  à  la  paix  de  longue  durée ,  qu'ils  ont  eue 
fans  eftre  moleftez.  L'ifle  eft  abondante  en  cheuaux  de  couleur 
cuMns.  iàuue ,  qui  font  communément  petis ,  &  font  tous  Guildins  de 
naturc^conimeen  Angleterre ,  fans  qu'il  s'en rrouue aucun  trot- 
xictièc  font  fi  petis,qu  a  grand  peine  s'en  rrouueroit  vn  qui  valuft 
r  îepris  de  dix  ducats.Ils  font  de  corps  trappe &ramaft*é.  L'ifleeft 

^f*  fc  «ftcndac  plus  en  longueur  qu'en  largeur,  d'Orient  en  Occident, 
^^ÎL  <k  fotte  quequand  le  Soleil  fe  va  coucher,  îobreHu  mot  Athos, 
quieftà-plus  dchuit  liâtes  de  là,  vient  icfpodre  fur  le  portj&def- 


OBSERVEES-    ?AR     P.    BrELON".  jf 

&s  le  bout  de  fille,,  qui  cftan  eoftéfeneftredc  Lénos  :  chofeque 
obfcruafraes  le  deuxieftne  iour  de  luim  Car  îc  mont  Athos  eft  fî 
haut,  quencoresque  le  Soleil  ne  fuft  bien  bas^eantmoins  l'om- 
bre touchoit  la  {ènéftre  corne  de  ttfle.'Nousiuyuifmes  lecourâx 
d'vn  petit  ruiflèau,qui  pafTe  pat  auprès  du  yijlage^pres.le  port.en 
k  plaine,  venant  d'vn  rocher ,  qui  n  eft  qua  demie  lieue  de  la  vhV 
le.  Sa  fontaine  qui  combe  de  bien  haut , eft  vulgairement  nomec 
Catara&i.  La  plus  commune  plante  qui  foit  en  HUe,  eft  l'herbe  Cat-tra^ 
de  Chamadeon  noir ,  qui  fait  vne  fleur  de  couleur  celefte^iî  naifr  c"AWtt^m 
ne,que  fans  eftre  vaincue  y  elle  pourroit  ptouoequer  l'afur  au  pa-  ™ir\ 
rangon  d  excellence  &  beauté  afuree.  Elieeft  tant  haute  en-cou-  Cjan" 
leur ,  quclc  Ciel  &  les  blauets  ,  &  couleur  Cyanee  mife  auprès 
d'elle,feroit  txouuee  pallirX'herbc  que  nous  appelions  chardoa 
benoift,ou  beneift^y  vient  de  Ton  bon  gré ,  errant  par  les  campa~ 
gnes ,  fans  que  rinduftriç  du  iardjnier  îc  contraigne.  Les  Grecs 
l'appellent  de  diction  corrompue  Gaid'eraçantha ,  qui  vaut  autat 
à  dire^omme  efpine  d'afnc.  L'herbe  d' Afphodelies  eft  coramu-  Guideruan* 
ne  par  toutes  les  montagnes.  L'herbe  qu'on  appelle  en  Crète  Àf-  ^fàUdelLcs 
colimbros^y.cftnommce  Scombrouolo^c'eftà  dire  Chardon  du  ^éfiolim* 
Macreau .  Celle  efpecede  chardon  rend  du  laid  ^  comme  la  Ci-  W. 
coree,&  fait  fa  fleuriaufne^quLeftibrt  doux  à  manger.  Et  ne  cç>-  scôkrouoU 
gnoiftbns  racine  cultiueeen  iardinjjde  meilleur  gouft  que  l'herbe  c^eru^ 
d' Afcolimbros ,  fuffent  les  Clier-uis  &  Pafter.aques~  Et  pource  ?ii^mtfie^ 
que  Pline  efcriuit  que  les  habitans.de  Lemnqs  adoroycntîes  oy- 
feaux ,  que  les  Romains  nommoyent-e»  ce  temps  là  Gracculi,  Grâce*!*, 
d'autant  quils  mangeoyent  lesfauïterclîes-derinV,  auonsefté 
meus  d'enquérir  quel  oyieau  auoit  nom  Gracculus:mds  nous  en 
parlerons  au  iiurc5ou  baillerons  portraj&s  de  tous  les  ovieaux. . 

Lcsjioms  des  plantes  communes  y  naijJantes.mUjle  de  Lemnos. . 
Chapitre    xxyi. 
3  Ous  auons  veu  le  Pfiliumcroiftre.  gar  les  champs  pùntesdë- 
l  de  Lemnos,&  le  Thîajpj  §c  DrabaXe  Sou  cher  tat  Lemnos. 
i  rondquelong.Les  dgççes  des  Çomzcs  le  longues  rfilmm.- 
fruiffeaux.  LaLampfanç,  qui  eft \T*eier&equine  T&f*. 

jeroiftn e Fr^emltalie:parcenpjQseft.incogneue.  b****:  . 

Lon  y  trouucaufïidcplufieurs  cfpecesde^onçs^duPauliotjde  ?*V**/ 
rApparicoirc^u  Cotyledon^derAppemaieur  Se  miaeur^queles  j^J^ 

H  ij. 


£o  PREMIER     LIVRE    DIS     SINGVLA. 

thïptnthe-  Grecs  nomment  maintenant  Pattimadilîa:  Atra&iks  ,  Scorpiok- 
mon  efi  Un  <jCSîScorpjuroSjChry{à'nthemoii>laquclIcilsmangétcruc:Mcn- 
*Jr&TT     taftrum,Mariolaine  fauuage,  AfpaIatus,Synonis, toutes  les  efpc- 
jÂutranx.  ces  ^c  F°ugere  >  Moron ,  Brufcus ,  Capilkis  Vencris , Langue  de 
Bsmu.       Cerf,  Hcmionitis,  Barbe  de  Bouc ,  Tithy  malle  mafle ,  Cicoree, 
solixnelle.    ScordionjOrcanette^Serpentarre^lufieurs  efpeces  de  Niellc,de 
ch*m*fyce.   l'herbe  nommée  Millegrana ,  autrement  di&c  Hernia.  Laiclues 
^ùrefehatfi  fauuageslChouxfauuages,qui  pendent  aux  rochers  le  long  de  la 
SCabbd-      I"^rin^5Gl^anel^caamxfyce3Daiîcus>ArreflebeufJScabieu- 
J'-    lij       le,Foingde  Bourgogne, qu'ils  appellent  Â  triuola,ou  bien  Arrio- 
Bwrorurnc.  uoio  duineîme  nom  du  Tribulus  tcrreltrc:Ozeilîe,Pauot  cornu, 
2Terton.       Parcllcs,Nerion5Hippofelinôn,  Afcyron,  Ilcx,  Pïmpineiie,  Co- 
^Afocynon.  combrefatfuage^halatiSjOrtic  Romaîne5Polypode,Apocyno. 
&ffc.         Peplis,  arbres  de  Peupliers  blancs  Se  noirs.  Il  y  croift  beaucoup 
d'autres  plantes  que  'nc:ponuons  exprimer  de  noms  Latins  ne 
François ,  ne  de  nbs^rècs  antiques  :  Iefquelles  toutesfoisauons 
deferites  Se  nommées  du  nom  vulgaire ,  pour  faireentedre  quei- 
îe-manierede  plantes  (e  pcuuent  trouuer  en  ces  pays  là ,  qui  ne 
.    croisent  point  par  deçà.  Entres  autres  eftvne  manière  d'herbe 
quelesGrecsderÂrchipelago&deCrete&de  Nicomedieap- 
s&cophAgo.  pelant  vulgairement  Sarcophago  :  mais  les  habitans  de  Lemnos 
fbrocaUda.  Rappellent  Phrocalida.  Ceux  de  Phrygie  l'appellent  Mauronia, 
oZZTa    comme  en  Lcfbos.  Les  Italiens  Crabonella.Ilyavneautreher- 
J&drïyît.  t>e  qia'ilz  nomment  Andrayda,  vne  autre  Aguroupes,vne  autre 
^%«roupçs.  Coutuzufonnada3quineftpas  Papaiïerrhœas,vn  autre  Achinc- 
CacbmêjïQ*   poda,ou  Cachynopoda ,  que  les  habita ns  a maiïènt  pour  beufler. 
■**-  Ils  recueillent  auffi  en  temps  deftcles  feftuz  de  l'herbe  vulgaire- 

ment nommée  Agurupes ,  Se  font  le  femblable  des  tyges  des  Af- 
phodellesfeiches,d'au tant  qu'ils  ont  cherté  de  bois  :  Se  auffi  que 
leur  territoire  eftmal  feant  à  produire  des  arbres,  ilnon  cultiuez. 
La  partie  de  Fifle  qui  eftla  plus  orientale  ,  &  la  plus  feiche,efl: 
moins  habile  à  produire  arbres.  Mais  la  partie  de  l'Occident  Se 
de  midy^ft  quelque  peu  humide,&  plus  verde.Lesendroi&s  ou 
crohTent les  arbres ,  Se  lietrx humides  entre  les  petites  môtagnes, 
prodùïsét'des  arbres  frniclr!êrs,comeFig.uiersJNoiçrsîAmâdiers, 
&qaclquépèû  dT-olïiners.Il  y  croi-ft  aufïï  deux  fortes  de  IuiubictS, 
zniuhleru  ^oz  l'vnë  âes-efpeées  eft  aflèz  cogneuc  en  Frâçe ,  laquelle  on  nô  - 
oUutfire.     mc  fàufèment  en  pînfieuts  lieux,'tant  à  Paris  qu  ailleurs ,  OJiua- 


OBSERVEES     -5ÂR    >.    BELON.   •     ~~  6l 

lire,  mais  c'cft  I-uiubicr  blanc ,-  lequel  Columeîle  n'a  pas  ignore:  lùi&îtf 
■donc  à  Paris  Se  autres  villes  circonuoifînes  il  y  agrandeqoantitc  ^5* 
qui  ne  portent  point  defruiëbou  s'ils  en  -pottcnc.il  ne  mcurïft  pas  Nr.mmà-  ■ 
|>arraictement.  Ceux  de  Lemnos  font  eouftumiers  d  cipendre ^  hditam 
les  fleurs  de  Nerion,  &;  les  attacher  deffus  les  branches  des  Grc-  de  zemnai 
nadiers,  voulans  entendre  par  cela  que  telles  rieurs  ayen c  vertu  creiude^ 
de  prcfèruér  les  Grenades,  Se  engarder  que  les  Grenardiers  ne 
perdent  leur  fleur  :  8c  afTeurent  que  cela  puifïê  défendre  les  Gre- 
nades de  ne  fe  rendre  pas.    Tous  les  habitans  de  rifle  en  faute  0ngmum' 
de  Origanu  ont  àccouftumé  de  cueillir  vne  herbe  par  les  hayes, 
dont  vn  chacun  garde  en  fa  maifon  bonne  quantïté,&:  s'en  fèruet 
àmangeraueclepoiflbn;  laquelle  nomenc  vulgairement  Lago-  urùchymc* 
chy  meni5c'eft  à  direGifte  de  heure  :  fa  fàueur  Se  odeur  conuien-  nt 
nent  auec  l'Origami  m  d'Heraclee,  &ralesfueillcs  femblabl.es  à 
l'herbe  de  Mille  fueilîes.  Sa  femence  eft  en  torchetz  ,  comme  f  e- 
roit  vne  pilule  d'ortie Romaine*  Nous  îaconteniplafmes  âïligc- 
met,  8c  gouftafmes  :  & :nc  trouuafmcs  onechofe qui  reprefentaft 
plus  le  vray  Ammi,  quelle  faifoit.  Ccft  donc  à  bondroict  qu'ils  ^mm; 
s'en  feruent  tant  au  poiffonfrais  que  falé ,  8c  l'accompaigncnt  de 
Fenugrec  pour  faire  bonne  faulcel  Les  Grecs  nomment  vulgai-  ïmugrtc. 
xement  Paliuros^'arbre,  que  pîufieurs  on  c  penfé  eftre  la  tierce  ef-  Pdiums. 
pece  de  Rhamnus  :  chofe  que  pouuons  afleurer  vraye:  car  vn  des  $*"&&'* 
habitans  de  nfle  nous  dit  qu'il auoit  douleur  delà picqurcd'vne 
efpine  nommée  Apaluira.  Nous-aliafmes  auec  iuy  à  la  montagne  sPjui    ~ 
pourvoir  l'arbre  3  &  trou uafmes  que  ce  qu'il  appclloit  Apaluira, 
n'eftoit  autre  choie  q  ce  Paliurus.  Leurs  bayes  font  faites  de  l'ar* 
brifïèau  deRhamnuSjlequel  vientlibremenc  en  Lemnos,  &  n'y  a 
pas  perdu  fon  nom  ancien  :  car  le  vulgaire  le  nomme  Rhamnos. 
Lesplus  hauts  monts  qui  fbyent  en  toute  rifle-,  font  du  cofté  de 
Maccdoine,au  riuagc  qui  regarde  l'occidenc,  qui  eft  fur  la  corne 
gauche  de  Tille ,  lefqueîles  les  anciens  appellerét  Soace.  Comme  ~Sûdce 
faifiÔs  tirer  des  racines  de  Chamadcô  noir",  aflèz  près  d'vn  village 
qui  .s'appelle  Liuadochorio ,  plufîeursGrecs  8c  Turcs  enpafTant  zW*- 
leur  temps  venoyent  regarder  l'herbe  8c  racine  que  fàifîons  arra-  chm*. 
cher  de  terre  :  car  nous  les  faifions  treçher  8c  enfiler  pour  mieux 
les  defeicher.  Les  Turcs  qui  nous  veoyet  empefehez  à  tel  affaire, 
en  vouioyent  fèmblablement  tailler  8c  manier  comme  nous  :  8$ 
pour  autant  qirtl  raifok  grand  chaud,  èc  qu  vn  chacun  eftoit     - 

H    iij 


&%  PREMIER.     LITRE     B-ES      SIKGVBA. 

mouillé  defueut:  ceux  qui  auoyétto^ 

ma?leon)&  rHii&apres  s'abbacoyent  la  fucur ,  ou  fe  touchoyent  le 

vûage  pour  fe  gratter  de  la  main ,  de  laquelle  ils  auoyent  couché 

les  racines , il s'eleuoit par  apresvn  fi grand^demangement fur  la 

vertumsr*   peau  qu'ils  auoyent  touchée  ^  qu'il  fembloit  proprement  y  eftre 

mlleufe  (k  vn  feu  bruûant  :  car  laracine  du  Chamadeon-noir  eft  de  relie  for- 

chamdeon  cc &  ycrajjque  Celle  eftappîiquee  fur  la  peau,ellc  renflammé  tel* 

®°ir:     x     lement,  que  toutes  les  fquilles-&:  orties  de  ce  mon  de  n'en  fçau- 

sXmU€S'       rx>yenc  faire  la.cenciefme  partie  :  mais  ledemangement  ne  fè  ma- 

nifeflp  pas  fi  toft.  OxaduintquVne  heure  ou- deux  après,  nous- 

commençafines  tousen  gênerai  ^àauoir  la  peau  tellemencenflâ- 

mec  endiuers  endroicls  du  vifâge ,  que  nousauions  le  vMagc  plus 

rouge  que  fàng  :  &i  d'autant  que  nous  le  frottions  plus ,  d'autant 

plus  croiffojt  la.dcmangeaifon  JStaus  eftionsaupres  d  vne  fonçai» 

ïmm-      ne  deffous  vn  Plarane,&:  vn  chacun  au  commencemen  t  n'en  fai- 

fcic  que  rire^  eftoit  le  pafîèccmps  plaidant  r  mais  fiiE  la£ails  fe 

.mirent grandement  en  choîere:  &n'euftefté  que  nous  excufàfi- 

.  mes  de  n'auoir  onc  e%rouue  que  l'herbe  euft  celle  vertu  y  ils  nous 

euflfenc  faic  de  la  fafcheric.  Noftre  exeufe  enuerseuxfucacce- 

gece  :  veu  qu'auions  le  mefme  mal  qiuls  enduroyenc.C'eft  grand 

eas  qu'en  fi  peu  de  racine  nous  ayons  expérimente  figrande  ver- 

^       tu,à  noftre  dommage.  Le  Chameleon  blanccroift  en  aum*  grai> 

Uon  Uam    de -qualité  en  celle  partie  de  Corfa,appellee  Lefchimo}&  csplai- 

&fchïmo.  '  nes  &Q  CrctCjCommc  le  noir  en  Lemnos.Les  médecins  Eranço is 

^doijioiar*  &  AJlemans  onc  pour  néant  prins  peine  à  peindre  le  Chamadeon 

SnierdeU  blanc&  noir^car  ilsji  en  ont  point  veu3&  pouuons  dire  qu'il  n'en  . 

feigneuriede  croift  point  en  Italie  :  car  oultre  quauons  cherché  les  plantes  par 

remfea  ?&  Jtalie5pouuos  eftre  afteurczde  Méfier  Àloifio  herbario^ardinier 

T^e>  de  la  feigneuric  de  Venife  du  iardin  de  Padoue ,  qu'il  ne  nous  en 

defdira  poinc  :  car  luy  mefme  afïèure  les  auoir  auffi  cherchées ,  & 

encorne  les  y  auoir  trcuuees.. 

Que  tes  grands feigneurs  de  h  Turquie  vîuans  a  leur  modèle  noumffent. 
mechamquement^n^ns.aucunes délices ,         Chapitre,  xxv  il. 

.    ,.     f*§§jp!|  &uy  °iu  *  eftoic  le  Lieutenant  en  ljflc  de  Lemnos  pour  le 
BreS^n  Soubachi ,  fè  nommoic  vulgairemec  le  Yàiuodc:  duquel 
1  failloic  auoir  permiffion  pour  aller  celle  parc  ou  fegretL 


t>  B  S  E  R  v'-ï  ES     P  A  R     *.    B  £  L  O  #.  6^ 

k  terre  fèllce  :  &  nous  ayans  inuité  à  fon  difncr,&  traiâé  de  me£ 
meluy,  nous  a  baille  occafïon  deferire  de  quelle  forte  les  Turcs 
ont!accouftumé  de  feftoyer  leurs  hoftes  qu'ils  ont  înuitez  en 
leurs  priuezfçftins.  II  ne  faut  douter  que  s'ils  vouîoyent  traieter 
quelque  Ambafïadeurou  autrepîus<lelicatement,qu'ils  ne  trou- 
uafïênt  èien  inuention  d'apprefter  les  viades  plus  exquifès,  qu'on 
ne  nous  a&iâ:  à  cefb  fois  :  mais  nous  dironsfeulemet  ce  dequoy 
ils  fèpâfTent  ordinairement.  LepremicrmctzfurdeCocombres 
cruds  fans  vinaigre  ne  huillc^u'ils  mangent  aînû*  fans  nulle  autre 
faufè,  finon  auec  du  fel.  Et  après  nous  eufmes  des  oignons  crudsy 
&  deMouronnecrue,&  au  demeurant  delà  fbuppe  defourment 
boullUjdu  miel  &  du  pain.  Et  pourautant  qu'en  la  compagniey 
auoit  des  Grecs  Chreftiés  ,  nous  beufmes  du  tin,  que  lesGaîoîe- 
res,-qui  fè  tiennent  auprès  de  là  ,  auoyent  apporte.  De  telle  ma- 
nière fe  trai&cnt  les  Turcs  en  leurs  banquets,  &:  neft  pas  queftiô  - 
d'auoir  vne  fer«iettc,nc  nappe  blanche.  Les  Turcs  ne  font  aucu- 
ne difficulté  de  conuerfer  auec  les  Ghreâiens,  ay mas  mieux  fans 
comparaifon  pra&iquer  auec  eux,  qu'ils  ne^ibnt  auec  les  lu  ifs. 
Les  Turcs  {ont  extrêmement  auaricieux  :  mais  ce  n'eft  pas  fans  Turcs  duari= 
raifbn.  Il  ne  nous  defplaift  de  l'auoir  expérimenté  tant  de  fois.  w«w?. 
Gar  mefmcment  le  iourenfuyuant  que  nous  prétendions  partir 
deLiuadoChorio  ,pour  aller  voir  le  lien  ou  eft  prinfe  la  terre 
feliee,  le  Vaiuode  nous  fdt  défendre  d'y  aller ,  &  aux  guides  de 
ne  nous  mener  vers  celle  part,  quepremieremét  nous  ne  luy  euf- 
fions  payé  deux  ducats ,  &  fallut  bon  gré  ou  malgré  que  nous  les 
luy  baillaûlons.  Le  commandement  qu'auions  de  la  porte  ,  ne 
nous  fèruoitde  rien  en  ce  cas  :  car  fans  rien  farder  fon  langagc,ou 
s'-excufèr  autrement;,  il  nous  faifbit  entendre  que  fi  voulions  voir 
le  lieu  quepretcndiqns,  fay4>aiilafIîons  ks  deux  ducats ,  ou  au- 
trement nous  en  retournaffions.  Laquelle  choie  auons  voulu 
eferirenour  donner  àen  tendre  combien  font  grandes  les  mange- 
ries  des  Turcs  3  quand  l'on  a  à  paûer  fous  leur  merci.  Ils  ne  font 
pîaiûr  fînon  pour  argent  comptant ,  &c  font  tirans  à  l'argent  plus 
qu'autre'gcns  du  monde  :-&  sfikn'y  auoic  vaillant  qu  vn  dé- 
niera piller  ,  ils  le  veulent  auoir ,  &  n'en  pardonneront  pas  . 
maille.  Ils  font  cela  à  caufe  que  tel  fera  vn  fêui  mois  ou  vn  •  '  ^ 
an ,  tant  du  plus  que  du  moins  Gouueroeur  d'vne  prouin- 
ce,  laquelle  il  luy  e*>nuicndra»la.iuer  ^  &  aller  en  prendre  vne 
,  H     iiij 


$4  PREMIER    LÏVH£     DES.    SINGTLA, 

autre  a  mille  lieues  de  la:  parcelaayansoccafiondepillet  ,  tane. 
foit  eîlcpetitCjils  ne  la  veulent  laifTerpaiTer. 

Za  defcrifiion  du  lieu  en  Lemnos0dznt  en  prend  Ut  erre  pour [eller*. 
Chapitre      xxviii. 

Près  que  le  Vaiuode  eut  baillé  permiifion,noust 

mifmes  en  chemin  pour  aller  vers  la  montagne :&: 

[  en  rccompenfe  il  nous  donna  quelque  nombre  de. 

I  féaux  de  la  terre  fcllee,&  nous  bailla  vngeniffaire> 

L  j  pour  nous  accompagner.  Nous  aHafmes  loger  au. 

prochain  village  nommé  Rapanidi ,  quin'eftpas  lôing  du  porc 

&tHtnidk     qu'on  appelle  Hecatoncephales.  Il  n'y  a  point  plus  de  trois  lieues 

depuis  le  village  de  Liuado  corio  iufques  à  Rapanidi  >  &:  eftan$: 

cinq  de  compagnie,  allajmes  premièrement  voir  les  ruines  de.E-. 

pheftia,ou  Ton  voie  encores  le  vieil  chafteau  qu.afi  coutdefropu.- 

La  mer  bat  tout  ioignant  contreja  muraille3&:  n'y  a  pas  vne  feule, 

habitation  :  &.toutesfois  fon  port  cft  plus  beau  que  n'eft  ceiay  de. 

4  I.emnos3&  eft  plus  feur  à  tous  vents  en  toutes  faifons,  Epheftia,, 

cft  directement  à  l'oppofite  de  Samothrace,  qui  n'eft  pas  à  quatre. 

lieues loingderiile^Neus  partifmes  du  Chaftelet  ruiné  prenans, 

le  chemin  par  le  coing  de  la  muraille  à  main  feneftrc,allans  vers  la. 

colline,  qui  n'eft  gueres  plus  loing  de  là,  qu'à  lavifee  de  quatre 

trai&s  d'arc. Entre  la  motagne  èc  le  port,il  y  a  vne  petite  chapelle . 

nômee  Sotira ,  en  laquelle  les  Caîoieres  de  Lenos  s  aftmblent  le 

soûu,        fixiefmc  iour  d'Àouft,qui  eft  le  propre  iour  qu'on  tire  kterre  de 

-fa veine.  La  chappeile  fufdi&ecft  feulement  faite  de  quelques 

petites  murailles  qui  foufticnncnt.vne  cou.uerturc.de  pierre.  Par». 

tans  de  la  fufdite  petite  chappeliette,en  allant  droit  versle  mont, 

nous  trou  uaimes  deux  fentiers^'vn  à  dextre,  1  autre  àfeneftre ,  fe 

rapportans  àdeux-fontaines  diftantes  l'vnc  de  l'autre  enuiron  vn . 

traid  d'arc.  Celle  de  main  dextre  ne  tarit  point  l'efté:  mais  celle 

qui  eft  à  main  gauche  tarit  toutefciche:  &pour  eftrc  lelieuhu- 

mide,  il  y  vient  feulement  quelques  ioncs.  Nous  montafmes  à 

ehcual  parle  cofté  d  extre,ou  il  ne  croift arbre  quelconque,fmon 

qu'il  y  a  vn  Carroubier,vn  Sureau,&  vn  Saule,qui  font  vmbrage 

fur  la  fontaine ,  ou  il  y  a  des  degrez  fàits^de  pierre  pour  monter  là 

a&àeffusj  cellepartjou  ronprendia.terreàfeller.  L'on  monte  par, 

v.  "  .'.  ~~ d.eflus 


.     OBSERVEES     fcAR    K     FELON,  6f 

èc&m  la  texte ,  &  vient-on  vers  l'autre  lieu  humide  :  &  à  la  'main    ^  ^  °*  - 
fcneftre  quelque  peu  au  deiïus  Ton  voie  1  endroit  ou.  eft  la  terre  lontrenett*  - 
que  l'on  tire  le  ftxiefmeiourd'Àouft.  Erpource  qu'on  la  prendà  rj^ 
veine  ouucrte,  on  n'y  voit  autre  chofe  finon  vn  pertuis  oblique 
qui  eft  recouuert  de  terre.  Et  quand  vn  eftranger  feroit  là^encore 
qu'on  luy.monftraft  l'endroit,,  il  ne fçauroit  deuiner  ou  eft  la  , 
bouche  :  car  elle  eft  cfto|ippee  de  terre ,  &nous  a  efte  impolfible 
delà  faire  ouurir.  Laraifoneft  que  l'on  n'a  accouftunié  lavoir    . 
finon  à  vn  feul  iour  de  lan^quife  faitauec  grandes  cérémonies  $£. 
grands  appareils^    -■„ 

«'  ?  Que  les  chofes  viles  &  de  petite  eflime^Jànt  rendues  frecieufes  par  ccre- 
'montes.:  <&*  que  les  chofes  de  petite  valeur  prennent  authorité  ejians  .enno**- 
Uiesdelafuperfikion^  Chapitre  xxix.. 

A  r  cefte  terre  nous  prouuerons  combien  les  céré- 
monies donnent  authorité  aux  chofes  viles  qui  de 
fby  font  de  petite  valeur  :  car  comme  ainfifoit  que 
la  terre  dont  parlons  eft  de  moult  grande  vertu,  itscennu*.- 

toutesfois  &  elle  eftoit  £  commune  qu'il  ne falluft  y^*8*.0* 

qu'en  aller  prendre  à  qui  en  voudroic  auoir ,  le  douaire  >. que  les  r^f -Js' 
hommes  luy  attribuent  pour  fa  vertu^roit  vilipcdé^  fi  on  ne  Fa-    ^' 
«oit  rendue  precieufe  par  grandes  cérémonies  :  tellement  que  £ 
oaauoittrouué  vneveineen  quelque  autre  contrée  de  lifte  de 
meïmc  terre ,  que  celle  de  Cochino,  nous  ne  doutons  que  les 
iGrecs  ne  feuTcnt  difficulté  d'en  vfcr5£  les  Caloicres  nauoieritaf- 
ûftéquandonlatireroit,  5c  qu  on  y  euft  cslebrc  les  cérémonies 
aceouftumecs  :  ôiencores  qu'ils  en  eu  ftbnt  dumefme  lieu  de  Cc- 
chino^ilsferoyentfcrupuled^n  vfer ,  ou  den bailler  àautruy,!! 
tïle  n  auoit cfté  tirée  du  nxiefrue  iour  à'  Aouft  :  rftimas  que  quel-  - 
.que  partie  de  fa  vertu  doiue  procéder  des  chofes  faites  par  l'artifi- 
ce des  hommes  qui  afiiftent  &;  aydentà  cefacrifice  :  Se  eftime-  - 

-royentia  vertu  mille  s'ils nelaveoyent tirer..  Nous  monftrerons 

par  quelques  autres  exemples  que  les  cérémonies  &fupcrftitïons  , 
ont  le  pouuoir  qu'auons  dit:Sc  pource  que  les  cftrangers  n'en  ont  - 
entendu  la  façon,prendrons  la  racine  de  llris,  pour  exemple:  la- 
quelle combien  qu'on  la  trouue  croifïànt  abondamment  par  les 
montagnes  de  Macédoine^  qu  die  oc  fuft  dnhampris  ea  vente*. 


66  .     PREMIER     1IVXE     DES    S  INC  V  LA* 

;     •         chez  les  marchands  :  tou  tesfois  l'on  a  eftimé  qu'il  n  eftoit  lohlbîe 
à  vn  chacun  de  la  pouuoir  cueillir  3  ains  falloir  que  ce  fuft  vn  ho- 
me chafte ,  Se  falloit  abreuer  la  terre  crois  mois  deuant ,  auec  dé 
l'eau  fucree.Voulans  par  telles  cérémonies  appaifer  la  terre ,  Se  la 
pacifier.  Et  auftl  falloir  faire  plusieurs  autres  fuperftitions  que 
Cojecr*trtce,  Theophraftc  a  deferites.  Ceft  pourquoy  lafufdite  racine  cftoit 
verm  da    anciennement  nommée  Confecratrice. *Tout  ainfi  peut  on  dire 
Gimàtàef*  <|a  qu,;s  je  c[iefne  que  les  Druides  çueilïoyent  auec  vne  faucille 
**•  d  or ,  Se  plufîeurs  autres  grades  cérémonies  que  Pline  a  deferites. 

Il  eft  manifefle  que  les  cérémonies  ont  eflé  faites  en  la  terre  CcU 
lec  diuerfement:  Se  que  la  terre  félon  diuers  temp  s ,  a  eu  diuerfes 
manières  de figillations.  Car  des  le  temps  de  Diofcoride,  qui  ef- 
criuit long  temps auant  Galienjon  auoicaccouftumé méfier du 
fang  du  Bouc  auec  la  terre  pour  faire  des  formes  de  tourteaux  :$c 
fuyuant  Cela  ilfe  doit  entendre  que  l'on  euftaccouftumé  de  faire 
quelques  cérémonies  en  tuant  les  Boucs  confacrez  à  Venus ,  la- 
quelle ainfi  que  recitét  les  fables  5  feit  que  les  femmes  de  Lemnos 
ientoyent  mauuaife  odeur  corne  font  les  Boucs^  de  ce  les  maris 
les  ayâs  dédaignez,  toutes  d*vn  comun  confentemét  tueret  tous 
les  hommes  de  l'ifle.  Ceft  de  là  que  la  preftrefTe  les  felloit  dvn 
feau  qui  auoit  l'image  d'vne  Cheure ,  dont  ils  ont  pris  leur  nom 
sfhragidd  Grec  Sphragida  segos3qui  vaut  autant  à  dire  que  feau  d'vnc  Che- 
*£*"'  ure.  Car  d'autant  que  la  Cheure  Se  le  Bouc  eftoyent  commu- 

némenr  confacrez  en  Tisle^'on  mesîoit  leur  fang  auec  iafufdide 
terre.  Arifto te  a  auffi  racompté  qu'on  a  veu  vn  Bouc  en  Lemnos, 
Se  aufli-vn  engendré  du  fufdit  qui  auoyent  du  îai£tcommeles 
Cheures  :  mais  il  racompte  comme  pour  choie  prodigieufe.  Ga- 
Voytge  de  ]jen  voulant  fçauoir  la  vérité  de  cefte  terre ,  Se  en  venat  de  Troie, 
Gatte»  de^    ^ui  pQUr  |ors  s»appeii0it  Alexandria,  colonie  habitée  des  Ro- 
#™*  ***   mains ,  Se  allât  à  Rome,pana  par  Lemnos,&  enquift  fi  l'on  auoic 
encor  tel  vfâge  que  Ton  meflaft  le  fang  de  Bouc  auec  la  terre  auâc 
frit  de  G&  que  la  fcller.  Mais  îuy  eftan  t  en  Lemnos  au  propre  lieu  dont  par- 
iicn.  îons,trouua  que  Ion  auoir  defaccouftumé  tel  vfage.  Et  en  racon- 

tant la  manière  de  faire  qu'il  y  trouua,efcrir,  qu'vne  preftrefTe  al- 
loit  efpendre  du  fourmec&  de  l'orge  deffus  la  terre ,  faifant  dau- 
r  très  cérémonies  a  la  couftume  du  pays.  Et  après  elle  en  emplit  vn 
chariot,&  la  feit  mener  auec  foy  en  la  ville  d'Epheftia.  Cela  a  ra- 
compte Galicn,&  beaucoup  d'auantage  que  ne  voulôs  d  eferire. 


OBSERVEES     PAR.     P.   BELON.  6j 

à  caufc  de  bricueté.  C'cft  grand  cas  que  de  fi  longue  antiquité  la 
terrcfellce  eft  en  vfage>&  a  eu  pris  entre  les  hommes  :  mcfmcmct 
des  îe temps  d'Hometc  s  Se  d'Hérodote,  qui  ont  vefeu  iôg  temps 
auant  Diofcoride  Se  Galien^lic  fut  en  Ci  grand  honneur  qu'on  la 
j-endift  Auguftcpar  cérémonies.  Mais  au  temps  prefent ,  de  ce  . 
qu'en  au  ons  veu ,  &:  ouy  dire  en  l'ifle ,  les  fufdites  deux  premières 
cérémonies  ont  dencailli>&  en  ont  accouftumé  vnc  autre^aqucl- 
le  n'auons  point  veue  :  car  nous  n'auons  pas  cfté  en  rifle  le  fixief- 
me  iourd'Aouft  :  mais  pouuons  bien  faire  récit  à  la  vérité  ,  félon 
ce  que  plus  de  fix  cens  hommes  nous  onteonfermé,  en  la  forte 
qu'ils  l'ont  veue  célébrer  toute  leur  vie.  C'eft  que  les  plus  grands 
perfon  nages  Se  les  principaux  de  Fifle  s'aflèmblent  tant  les  Turcs 
que  les  Grecs  preftres  Se  Caloieres  :  Se  vont  en  cette  petite  chap-  Grammes 
pelle  nommée  Sotiraj&en  célébrant  vnemcfTe  à  la  Grecque  z-demamttr 
uec  prières }  vont  tous  enfemble  accompagnez  des  Turcs,&  mo-  *^'%£ 
tent  fur  la  colline  qui  neftquadcuxtraids  d'arc  de  la  chappellc:  CTr^' 
&  font  beicher  la  terre  par  cinquante  ou  foixante  hommes ,  iuf- 
ques  à  tant  qu'ils  l'ayent  defcouuerte ,  Se  qu'ils  foyent  venus  à  la 
veine:  Se  quand  ils  font  venus  iufques  à  la  terre ,  alors  les  Caloie- 
res en  remplirent  quelques  turbes  ou  petits  facs  de  poil  de  bettes, 
lefquels  ils  baillent  auxTurcs  qui  font  là  prefens/çauoir  au  Sou- 
bachi^u  au  Vayuode  :  Se  quand  ils  en  ont  prins  autant  qu'il  leur 
en  faut  pour  cette  fois,alors  Se  des  l'heure  meûne  ils  referment  S£ 
recouurét  la  terre  par  les  ouuriers  qui  font  encorcs  là  prefens.En 
après  le  Soubach  i  cnuoye  la  pïufpart  de  la  terre  qui  a  etté  tiree,au 
grand  Turc  à  Conftantinople.  Le  refte  il  la  vend  aux  marchâds. 
Et  à  fin  que  perfonne  n'en  puuîe  auoir  finon  par  leurs  mains ,  ils 
tiennent  la  rigueur  telle  aux  habitans^qu'il  feroit  impoffible  à  va 
home  mettant  vingt  outiriers  en  befongne  toute  vne  nuicr,  qu'il 
peuft  paruenir  iufques  à  la  veine  de  la  terre ,  que  l'on  ne  s'en  ap- 
perceutt  bien.  Ceux  qui  afliftent  quand  on  la  tire  de  fa  vcine3  en 
peuuent  bien  prendre  chacun  quelque  petite  quantité  pour  leur 
vfage;  mais  ils  n'en  oferoyent  vendre  qu'il  fuftfceu.  Les  Turcs 
font  moins  fcrupuîeux  que  les  Grecs  a  Se  que  beaucoup  d'autres  Turcs  pm 
cations.  Ils  permette*  que  les  Grecs  Chrettiens  facët  leurs  prie-  firupulmx^ 
res  (lir  la  terre  fellce  en  leurs  prefenecs,  Si  eux  mefmes  ailiftent  Se 
■zy  dent  aux  Grecs.  Ets'ileft  vrayeeque  nouscnontditles  plus 
vieuXjteUe  faço  de  faire  d'auoireleu  vn  feul  iour  en  vn  an}leur  fut 

M 


6%  TREMîER     LIVRÏ     DESSINGiTU. 

ryenh'uns     introduite  du  temps  que  les  Vénitiens  dorninoyent  à  Lcmnos,&: 
rjagnem  de  aQX  ^  ^e  ja  mcr  £gce, La  terre  de  h  coîlinc,n'eft  pas  fi  fterile  de 
.Lemnos.      f0y^ue  \e  fourment  qui  eft  fèmé  par  dcflus,h'y  viënc  bien .  Il  n'y 
a  ceîuy  des  habitans  de  Fifle  de  Lemnos  qui  nefçache  quelque 
chofedeVulcan.  Et  tout  ainfique  les  petits  enfans  de  Me  de 
iFaïïe  de     Corfula,  fçaueçt  raconter  lliiftoire  du  Daulphin ,  comme  ficelle 
ïVukm,       auoitefté  faite  de  n  agueres  :  toutainfieft  en  Lemnos  raconté  de 
Vulean,mais  diuerfement  -car  les  vns  difent  qu'en  tombant  luy 
&  Ton  cheual  fe  rompirent  les  cuiffes ,  &  qu'au  lieu  mefme  par  la 
vertu  de  la  terre  il  fut  preftement  guery.  Les  autres  veulent  dire 
que  ce  fut  vne  branche  feulement,  Se  qu'il  fut  contraint  de  de- 
meurer là  iufques  à  tant  qu'il  fut  gueri  :  laquelle  opinion  refenr 
quelque  petite  fcincillc  de  fon  antiquité.  Il  n'y  a  point  de  gens 
députez  pour  garder  la  terre,  &  n'y  a  aucun  veftige  de  clofturc  àc 
muraille  qui  ait  onc  eftéfaide  pour  la  garder-,  comme  l'on  a  cy 
deuant  penfé.  . 

*      LtsnomsdespQtJJonsfrequentsaurîuajrederisk.       Chapitre  XX  x. 

^^^Van  d  nous  eufmes  entourné  ladite  montagne,  re- 

^fmïdï.     ^^^^^  tournai  mes  au  vil  lage  de  Rapanidi ,  qui  n'en  eft  qu  a 

^^^Wn  fix  trai&s  de  boulle,ioignantla  montagne  de  Cochi- 

^^^•^  no.  Nous  l'appelions  montagne ,  non  pas  que  ce  foit 

vn  haut  mont,mais  vn  tertre  en  manière  de  couftau. Car  elle  n  eft 

"  pas  fi  dirficile,ne  de  la  moitié  fi  grade  qu  eft  Montmatre  ioignât 

.  Taris  :.  mais  eft  comme  vn  petit  couftau ,  par  lequel  les  bœufs 

Xm*.         ;pourroyet  bien  mener  vne  charrette  iufques  à  la  fummité.  Quad 

:'CénÂ-         nous  arriuafmes  à  Rapanidi ,  il  nous  fut  apporté  plufieurs  poif- 

serran.        £Qns  ^g  auojc  pefché  au  port  qui  n'eft  qu  atrois  iec1:s  de  boulle 

^rbt        àc  iàjdefquels  y  en  a  qu'on  pefché  à  la  ligne,  comme  eft  vne  forte 

$knni.        ^c  poiflbn,qa  ils  nomment  Cano ,  &  anciennement  Cana ,  &:  à 

&Um'        Marfèilie  vn  Serran,&  à  Gènes  Bolafib.  Vn  autre  auffi  vulgaire- 

^ther'm*.   ment  nommé  Ropho ,  &:  anciennement  Orphus.  Les  poiilbns, 

sam.         qu'on  auoit  pefché  à  la  traine,eft'oyent  Blenni ,  Glini,  A  tiierina^, 

**&-         Sarg^Gobi^Merula^Turdi,  &  de  ceux  que  les  Grecs  appelloyét 

'2dar7e'      anciennement  Iulides ,  maintenant  Sgourdelles ,  qui  font  ceux 

hluùs        que  les  Vénitiens  pour  leur  beauté  nomment  Donzcilcs,&  àGe- 

ZlurMcs,  nesZigureiles.  Il  nous  futimpoifible  de  trouuer  des  Grecs  da 


..     OBSERVEES  >AR  >.   ¥EIOK.  6$ 

'village ,  qui  voulurent  monftrer  de  la  terre ,  pour  la  crainte  des 
"T4ïrcs/moivvn<iu  volage ,  qui  nous  en  Eà  recouurer.vn  fac  ,  la- 
quelle il  nous  ïiura  en  cachettes ,  &  chemina  toute  la  nuit  enfuy- 
uantpournous  l'apportera  la  ville  de  Lemnos  :  car  s'ileuftefté 
aceuféle  Soubachiluyeuftfait  coufter  beaucoup  de  fon  bien. 
Nous  trouuafmes  beaucoup  de  diuerfitez  de  terre  en  diuers  vil- 
lages de  Hfle  :  mais  il  n'y  eut  oneques  homme  qui  nous  en  mon- 
ftraft  de  la  fellec ,  finon  en  quelques  maifons  de  Myrine  ,  qui  eft 
appellee  Lemnos.  Aufïi  nous  a  eftéafTeuré  que  l'endroit  dot  Ion 
a  accouftumé  tirer  de  la  terre  de  tout  temps,  n  a  point  changé  de 
place.  Il  n'a  pas  tenu  à  faire  diligence  que  n'ayons  trouué  les  ve- 
ûiges  du  Labyrinthe  en  Talc  de  Lemnos:&:  croyons  que  s'il  yen  ufyrinthe 
eufteu  quelque  veftige  de  refte ,  l'cuiTions  trouuecauflî  bien  cô-  deiemnes, 
me  auons  fait  les  autres  chofes.  L'iile  de  Lemnos  eft  trefmaî  gar- 
nie  d'arbrcs.-car  il  n'y  en  a  de  fauuages  en  quantité ,  finon  autour  ^  Hs' 
cki  village  Rapanidi,ou  il  y  a  vneforeftd'£fcuîus\  îefquelsonne  rdonic 
couppe  point  pour  brufler ,  d'autant  qu'ils  rendent  vne  drogue, 
que  les  Grecs  &  les  Italiens  appellent  de  la  Velonie.  Des  calices 
&  gland  d'Efculusfqûi  eft  vn  arbre  toufiours  verd  )  ils  fe  fèruent 
,pouraccouftrer&  conroyer  les  cuirsrlaquelle  Velonie  ils  ne. traf 
portent  point  hors  de  Tifle^ais  la  referuent  à  leur  vfage  &  prou- . 
flt.Depuislaplace,  dont  Ion  prend  la  terre  en  la  montagne  de  la 
CoilinejiufquesàlavilledeLemnoSjiln'yaqucdouzemilîepas. 
Apres  qu  eufmes  veu  tous  les  endroits  de  Tille ,  retournatmes  au, 
village  de  Lynado  Chorio,  &:  prinfmes  congé  denoftregeniiTai- 
re.Les  iours  enfuyuans  demeurafmes  érrans  par  Me ,  attendans 
barque  de  paûragc:>&:  trouuafmes  vn  homme  de  Chio,quis'cftpic 
fait  médecin  enLcmnos,hommc  fort  ignorant  enlart  de  méde- 
cine; toutesfois  il  y  auoit  gaigné  plus  <le  trois  cens  ducats  en 
mefins  de  deux  ansrcarnous  croyons  qu'il  n'y  eut  oneques  gens 
plurprompts  àfe  faire  medecincr,  que  ceux  de  l'iile. ils  ne  payée 
pas  en  argent  content  3  mais  donnent  de  ce  qu'ils  ont  :  les  vns"de 
lorge^les  autres  du  formage ,  les  autres  des  aux  Se oignons ,  jSc  de 
la  femence  de  lin  :  defquciles  chofes  nous  faifions^auiïi  bien  na- 
ître proufit  5  comme  fi  c'euft  efté  de  l'argent  :  car  auïTi  bien  nous 
en  eaft  il  fallu  acheter  pour  noftrevfage.. 

-.-.  .   <■. . -.'  .•     .         ,.-■■.      •    -  -H  113 


7° 


PREMIER     LIVRE    ^ES     SINCVLA. 


Cencbriti. 
Zapbiati. 
Ocbendrd. 
Sâgittart. 


De  U  Gumme  de  Condrille^  autres  cbofesjîngulieres^uec  les  noms  des 
SerpcnsflHon  cognoîfl  v'mreenïiJledeLemnos. 
Chapitre    xxxi. 

[*E  temps  pendant  que  cheminafmes  par  nfle,donnaf- 
|tnes  ordre  par  diuers  moyens  de  prendre  en  vie  tou- 
rnes les  diuertitez  des  Serpens  qui  viuent  par  rifle,  le(- 
'  quels  detranchafmcs  foigneufement  &  anatomifak 
mes.  Et  pourec  qu'ils  y  font  nommez  vulgairement  par  noms 
propres  du  paysJesefcnuifmeSjComme  s'enfuit.  Cenchriti ,  La- 
phiatijOchendrajSagittari ,  Tephlitiou  Tephlini ,  Nerophidia. 
Toutes  lefquelles  appellations ,  encores  qu'elles  foyent  vulgai- 
res ,  neantmoins  elles  reièntent  quelque  chofe  de  leur  antiquité; 
"M  *  car  ccmY  qu'^s  nomment  Cenchnti,efl  ceîuy  mefme  que  les  an- 
Nerophidîa.  cicnsaPPc^°yencCenchris:  duquel  ayans  fait  retirer  lenaifpor-* 
crncîrh.      trait/aiions  voulu  cy  reprefèntcr. 

Le  portraiB  d#  Serpent  nommé  Cencbm* 


skfhk  1  Laphiatieftcelay  qu'ils  appcîloyétEîaphis.Ochedran'eflau- 
2cb*.  m  que celuy  qu'ils nomoient  -autrement  Echis  ou  Echidna ,  le- 
rïLï  *     ^     toutcsfoisircft  pas  la  vraye  Yiperc.Le  Scrpet  nommé  Àm- 


OBSERVEES  >A5.   P.    SELON.  71 

phifbçria,  retient  le  mefme  mot  antique.Ceîuy  qui  Te  nomme  Sa-  ~*»*fi*&4* 
gittari ,  eft  celuy  que  les  anciens  appelloyent  Iacuîus  :  toutesfbis  **  , 
ceux  de  Lcmnos  neconuiennentpas  auec  ceux  d'Andros  &:Pa-  Torpt^ 
r os  en  l'appellation  de  ce  Serpent :car  le  Iaculus  eft  moucheté  de  0cuut^ 
taches  noires  par  deûxis  le  dos,  qui  expriment  naifuemét  la  pein- 
ture  d'vn  œil ,  comme  fait  le  dos  du  poiflbn  qui  s'appelle  Torpé- 
do, &  que  Pline  a  nommé  Oculata-.à  la  differéce  de  Melanurus.  MeUnwrm. 
Celuy  qui  eft  appelle  Tephliti  ou  Tephlotis^  conuient  auec  le    .       .. 
nom  ancien  de  Tiphlini  :  mais  nous  en  baillons  les  portraits ,  6c  pjj^"'- 
deferiuons  tous  au  iiure  de  la  nature  des  ferpens.Lcs  Phalangiôs        n^on* 
de  Lemnos  d'autant  qu'ils  font  d'vne  feule  couleur,  font  en  cela 
dirferens  à  ceux  de  Crète  Se  de  Zacinthe.Eftans  en  Lemnos,ayas 
veu  fi  grande  quantité  de  Chamasleo  noir,  pen&fmes  que  pour- 
rions facilement  recouurer  de  la  gumme  du  blanc  :6c  à  fin  àen 
auoir  plusaifêment ,  demandafmes  aux  habitans  s'ils  auoyent 
point  décolle  :  caria  gumme  de  Chamadeon ,  6c  aufïi  l'herbe  de 
Chamadeon  blanc}s'appelleen  Grec  Colla.  Eteftans  adreitezà  Coi^ 
vn  menufier,  rcfpondit  qu'il  en  pourroit  bien  trouuer  :  Se  de  fait 
il  nous  apporta  de  celle  qu'il  appelloit  Colla  :  toutesfoiscen'e- 
ftoit  pas  de  la  gumme  de  Charaxleon  blanc ,  mais  c'eftoit  de  la 
colle  de  l'herbe  qui  s'appelle  Chondrilla.  Ils  s'en  feruent  à  coller  chon^^ 
les  Luts  ,  6c  autres  ouurages  de  Marqueterie  :  laquelle  colle 
s'engendre  à  la  racine  de  ladicte  herbe  de  Chondrilla ,  par  le  bé- 
néfice^ vertu  d'vn  ver,  lequel  fe  nourrifsât  de  ïa  racine  de  l'her- 
4>e,s'cnfcrme  dedans  vnc  petite  boftêtte  de  la  grofïèur  d' vne  feb- 
uc,faitc  de  la  liqueur  lacticineufe  qui  forede  ladi&e  racine.Ceux 
de  Lemnos  la  cognoifient ,  6c  fçauent  appeiler  par  vn  vulgaire 
nom  propre  Colla.  La  cire  que  les  anciens  appelloyent  Propo-  ?    ,. 
•lis ,  eft  plus  iaune  en  Lemnos  que  n'eft  la  commune  ,  ia  ioit  que    °*° 
couftumierement  elle  (oit  noiraftre  aillcurs.Les  plantes  qui  font 
au  cofté  d'Orient,aupres  de  la  colline  de  la  terre  fêîlee,fbnt  Tha-  Thapfx. 
pfia,&  Centaurium  minus.Us  ont  en  grad  vfàgcdefèmer  le  Cot-  CmtMa-'ium 
ton ,  &:  la  Sefàme.  Il  n'y  a  celuy  d'eux  qui  ne  fâche  que  l'herbe  mir>*^ 
d'Andraida  baillée  en  bruuage,  vaille  contre  les  douleurs  de  le-  CopOÏK 
ftomach,&  de  la  poidrinc.  Les  payfans  des  villages  font  couftu-  ^^j'u. 
miers4'obferuer  diligemment  les  lieux  afprcs  6c  montueux ,  ou  f;<r^m 
croiflent  les  figuiers  fauuages,defqucls  ilz  cueillent  des  rameaux  /âfwm. 
la  vigiicdeJa  fiind  Iehan^  les  mettent  defliis  les  figuiers  dôme* 

I  iiij 


72-  P.&i  M  I^S,     £:i  y.îl  I-    DES     S  ï  î*  G  V  LA ... 

iHques,&  par  ce  promettent  que  le  fruiâ  ferafauué  contre  tou- 
tes incutûons  qui  luy  peuucnt  venir.  Les  fontaines  y  font  foi-, 
gaeufêment bien  recueillies ,  d'autan t qu'ils  font  grande  profef- 
fîon  de  iarditiagcs5&:  entre  autres  chofès  cultiuent  volontiers  des 
aux  &  des  oignons  :.&s'adonnentgrandement  àefleuer  des  Co- 
cpbtes  j  quifont  tes  plus  fàuoureux  qu'il  eft  pofïible.  Ils  les  man- 
gent aucedu  pain,fins  huilîe  ne  vinaigre.  Et  quad  quelque  amy 
furuient  dedas  leiardin,îe paylan  choiûra  vn  Cocombre ,  lequel 
il  tiendra  de  la  main  gauche  tout  droit,  puis  l'efeorchera  en  lon- 
gueur iufqyes  au  pied,  &  iaifïèra  prendre  l'efeorce  par  deflusfa 
main5en  la  manière  drvnceftoille.En  après  il  îe  fendtaen  quatre^ 
&  là  le  départira  pat  honneur  auxailifbrhs  :  Se  fins  autre  fàuce  le 
mangent.  Laquelle  chofe  auons  eferite  pour  eftre  eftrange  de 
npflremode:toutesfoisàlaleur>elleeften  lieu  de  trefgrade  non» 
neiletéjçomrne  pourroit  eftre  à  nous  de  départir  y  ne  bône  poire* , 
.-.  '.  ''  '  •* 

"Btîoiftre  (p<m  pefche  communément  au  nudgeâs  lifts  de  Letnnos., 
Chapitre    xxxn. 

Lny  a  aucunes  riuiercs  en  Lemnos.-parquoy  Jeshabi- 

^  n   -   3  Wik  %*&&  cans  ne n°ns  ont onc  nômé  vri  {èul  poiûon  d  eau  dou- 
Pefckenesde  fêjfêl   fK3  .  ,.,  i  ^  S, 

Lemnos. 


ce:maispource  qu'ils  ont  de  treibelles  pcfchericsau 
Gaidcropo*  £2*&S»5  riuagc  delà  mer,  ils  enc  grade  commodité  de  poifloh 
d$-    "  ■    de  marine. Et  entant  qu'auosveupefcner  des  Oi lires  qu'ils  nom- 
ment Gaideropoda  fiions  a  fembié  bon  deneferire  la  manière-».. 
Çeftquclepefcheurtientvne  longue  perche  ferrée  d'vn  fer  plat 
parle  bout,  pourdonner  de  grands,  coups  defïiis  les  Oiftres,  qui 
ïè  tiennent  attachées  aux  rocs,pendantes:&:  après  qu'il  les  a  aba- 
'  tues  en  la  mer ,  il  les  efleue  auec  vne  main  de  fer  qu'il  tient  à  lau- 
jffmjfottsde  tre  kout  ^c  *a  perche.,  dont  il  fe  fert  anm*  à  pefcher  les  BerifTons 
mer.       '    delamer.  Telle  manière  d'Oiftre  eft  grandement  differenteàla ., 
noilreicar  fes  efcailles  s  entretiennent  fi  fort  à  deux  crampons3 
qu'on  agrande  peine  à  les  ouurir.  Et  pource  qu'ils  refTcmblent  à 
vn  fer  d'afoe. ,  les  Grecs  îes.nommenten  leur  vulgaire  Gaidero- 
ppja^ecft  à  dire  pied  d  aine.  Elle  ne  nourrit  aucun  petit  cancre^ 
comme  la  vulgaire.  Partans  de  la  ville  de  la  Myrina  ,.fuyuans  vn 
2a$inm.      petit  canalou  ruiiïèler,nommé  Salinari,&:  tenans  le  chemin  qui 
va  à  vn  moulin  à  vent ,  qui  eil  à  main  dcxcre,fur  vn  petit  couftaiia 

vers  . 


^OBSERVEES     PAR     P.    BELON.  73" 

vers  Te  port  de  Candie,trouuafmes  vn  lieu  fterile ,  finon  de  quel- 
ques .Chamelxons  noirs  ,  mais  au  demeurant  en  quelque  lieu 
blancs.Et  trouuansJa  terre  rouge,  nous  mifmes  à  befcher&  àcf~ 
eouurir  vne  veine  de  terre ,  de  laquelle  prinfmes  quelque  quan- 
tité^ conferafmcs  aucc  celle  d'Epheftia ,  &  eonûderafmcs  dili- 
gemment ,&:  trouuafmes  quclleconuenoit  en  toutes  merques 
auec  celle  que  le  payfan  nous  auoit  apporté  deRapanidi.  Etc5-  ferm  fcttees 
meauonsdit ,  toutes  les  terres  fellees  ne  font  pas  d'vnemefme^^^ 
couleur  :  car  il  aduient  quelquefois  que  la  veine  fè  trouuerapîus  f^ C0Ua 
blanche, l'autre  fois  pi  us  rouge,  &  quelquefois  meflee  des  deux.    Hn* 
Les  Cordonniers  de  Lemnos  vfent  de  terre  grafTe  pour  coller 
leurs  cuirs,  en  lieu  de  colle  :  nous  n'entendons  toutefois  que  la 
terre  de  la  montagne  de  Cochino  foitgraflfe^ains  eu  d' vne  parti- 
culière maigreur5quafi  comme  eft  la  margue. 

;    T>*<une  fottree  de  baings  chauds  en  Lemnos  >  &  des  monafieres  des  reli- 
gieux Grecs. ,  Chapitre    xxxiii. 

,  L  n'y  a  ifîe  en  toute  la  mer  de  l'Archipeîago ,  ou  il  n'y 
:  ait  quelque  monaftere  de  Caloieres  Chreftiens,com- 
*  me  aufli  en  Lemnos.  Le  monaftere  de  Lemnos ,  n  eft  Monaftere 
i  guère  loing  du  village  nommé  Liuado  chorio,  kquel  ^  ^»»«.  - 
de  no  propre  s'appelle  Agio  Paulitico.  Il  y  a  vne  fourœ  de  bains 
chauds  en  Me,que  les  Grecs  nomment  vulgairement  Thermes:  *£j%. 
de  laquelle  Peau  n'eft  pas  fi  chaude  que  de  plufîeurs  autres  :  car  'u^noT 
ion  fc  peut  plonger  dedans  Teau  ainfi  qu  plie  fort  de  la  fource:qui  Thermo 
cft  vne  chofe  que  tous  autres  baings  qu auons  veu ,  foit  en  Phry- 
g.ic,Cilicie,  Arabic^MaGedoincJtalic,  Alcmagnea&Frâcc,  n'ont 
en  la  forte:  car  il  faut  IaifFer  refroidir  les  eaux.  Aufli  n'y  ail  pas 
grand  edi£ïce,maîs  feulement  vne  petite  chambrette^n  laquelle 
vn  chacun  fe  peut  aller  defpouiiler ,  &delà  entrer  en  vne  autre 
chambre  voutee ,  ou  il  y  a  feulement  vne  grande  auge  de  pierre 
creufe,qui  auoit  anciennement  ferui  defcpulchre.  Cefte  eau  n'a 
pas  groffe  fource  :  parquoy  il  ne  s'y  peut  baigner  plus  d'va  hom-  - 
m.ç  pu  deux  à  la  fois* 

K 


Tljàs. 


Seyrôs. 


Marhrede 
Tafos. 
Tort  de 

Tkdjfos. 


Sag/taFerus 


$uce$hâk. 


74  *  REMI  EU     LïVft-E-.DI-S     SINGVLA* 

K<ragr  de  Lemnos  en  l'ifle  de  Tajjos.       Chapitre,   x  x  X 1 1 1  î . 

E  là  pafTafmes  en  Tifle  de  TafTos,qui  efl  moult  vok 
fine  à  Lemnos,  accompagnez  de  deux  Caloieres. 
Nous  eftions partis  auant  iour  hors  du  port ,  &à 
iourouucrt  eftions  il  auancez  en  mer,  que  nous 
_  eftions  quafi  en  my  chemin  d'entre  Lenos  Se  Taf- 
fos  :  mais  il  s'efleua  vn  vent  contraire  fi  impétueux  ,  que  nous  ne 
peufmes  remédier  qu'il  ne  nous  contraignit  defeendre  en  Hfïe 
deScyros^quieftcinquante  mille  au  deâfousde -Lemnos.  Nous 
couru  fines  Fortune  û  irnpctueufe  l'efpace  de  quatre  heures ,  que 
bous  .arriuafmes  au  port  de  Scyros  auant  qu'il  fuft  nuid.  En  la- 
quelle va  de  treshautes  montagnes.  Leiourenfuyuant  nous  fif- 
mes  voile  pour  gaigner  Me  de  TafTos ,  Se  eufmes  afTez  bon  téps 
àf  venir:&  y  demeurafmes  trois  iours,errans  çà  Se  là,puis  il  nous 
fallut  fuyuir  la  barque  qui  alloità  MontefanttOjautrement  dit  le 
mont  Athos.  Il  ne  faut  s'efmerueiller  files  Romains  eurent  iadis 
le  marbre  de  TafTos  en  reuerenec  Se  recommendation  :  car  les 
montagnes mefmes qui  fontenriûe,&Ies  rochers  font  de  plus 
beau  marbre  Se  le  plus  blanc,  qui  le  puiûe  trouuer.  Le  port  de  la 
avilie  monôre  qu  ellea  efté  autrefois  quelque  grand  chofe.  Les 
montagnes  de  l'ifle  font  fréquentes  en  Sapins  Se  Picees  ,&ya 
moult  grande  quantité  de  Thapfîa  Ferula.  Lon  void  encores  en 
quelques  endroicts  de  l'ifle  des  grands  monceaux  des  Scories, 
cxûàdirc  reccemens du  minerai ,  qui  monflrent  euidemmenc 
qu  on  y  a  tiré  grande  quantité  de  metaux,qui  nous  a  fembîé  con- 
uenir  aucc  ce  qu  en  a  dit  Hérodote ,  efcriuan  t  que  TafTus  a  efté 
yne  ville  illuftre  des  mines  d'or  Se  d'argent.  Il  nous  fut  monftré 
quelques  mcdalles  d'arget,efquelles  eftoit  eferiten  lettres  Grec- 
ques chofè  qui  vaut  autant  à  dire,que  Roy  de  Taffus.Thucidide 
autheurGrecalaûTéparefcrkqiuLaprefîdé  en  fon  temps  aux 
minières  de  TafTus.Les  Taffiens  eftoient  fous  Alexandre  le  grad: 
car  encores  que  l'ifle  foit  près  deThrace,toutesfoiselleeft  ioi- 
gnant  Macédoine ,  moult  près  du  port  de  Bucephala  :  Se  du  port 
de  TaiTas ,  il  n'y  a  plus  de  deux  lieues  Se  demie  iufques  en  terre 
ferme  de  Macédoine.  Les  minières  de  ThalTus  rendoyent  an- 
ciennement tous  les  ans  quatre  vingts  taiens  à  Philippe  Se  A  le- 


-     OBSERVEES     PKK     P.     BEIOK..  7$ 

xandrc  :  mais  maintenant  Ion  n'y  befôngne  plus ,  &  ne  rendent 
plus  rien. Eftas  partis  de  rifiedeTaffos^our  aller  au  mot  Athos^  - 
ne  fufmes  que  quatre  heures  que  n'arriuaflions  au  monafte- 
re  de  Liato  pedi  ,  qui  eft  Tvn  des  principaux  monafteres  qui 
foitenl'IflhmoSjdctoutlemontÀthos.  -    :~  .jjïbmos. 

%a  defeription  du  mont  ~4thosy  &  des,  chafes  mémorables  quony  trouve. 
Chapitre*,   xxxv» 

A  montagne  que  deferirons  maintenat ,  eft  nom-  ^t}j0^ 
■  meeenGrec  Âthos  ,.&:en  Italien  Montefànâo.  Motels, 
Nous  ne  fçauons  auoir  eferit  chofe  qui  ait  mieux 
1  mérité  d'eftre  eferit  plus  par  le  menu ,  qtic  ce  mot: 
caries  anciens  hiftoriens  en  ont  tant  parlé ,  que 
leurs eferits àLbon  droict le  rendent.  admirable.  Et  vrayement  il 
eft  d'eftrange  façon.Ceqni  a  premièrement  efté-efcritpar  Héro- 
dote^ touchant  les  Perfes  de  ce  mont  Athos,  &  que  Xerxes  le  feie 
entailler  par  le  pied  audeftroid  en  ce  peu  d'intcrualle  de  terre, 
pour  faire  paflèr  fes  nauires ,  nous  femble  eftre  totalement  faux-, 
toutesfois  ne  Tofpns  bonnement  affetirer.  Si  eft-cc  que  quand 
paflàfmes  par  là ,  y  prinfmes  garde  tout  expreâèmeat:  car  partis 
de  la  ville  de  HieriuoSjponr  voir  û  verrions  quelqueveftige  d'en^ 
tailleures  &  foftbyeures  ^.n'y  en  auons  point  trouue:  ou  pour  le 
moins  s'il  en  y  a  eUjdlesfont  comblées  pour  le  prefent.  Côhierr 
qu'il  y  ait  pi  u (leurs  nations  en  diaerfès  parties  du  monde^  tenans 
la  loy  Çhreftjenne  en  différentes  façonsvtedantes  à  Iefus  Chriit,  chefs  foutu* 
toutesîois  il  n'y  en  a  aucune  qui  n'ait  coftitué  vn  chef  pour  cù.vcramse»  U 
fouuerainenfon  Eglife..  Et  maintenons  que  Yobci&.ncçàcYE-re^c^re^ 
glifè  Greque  eft  de  plus  grande  eftendue  que  celle  des  h2xins:fiennef°H: 
iefquels  Grecs  pour  eftre  feparez  de  F  Eglife  Roraaine^nt  choiii  f™: 

1  -         i    r  •         i      •  *?•  -r  v  i     t       -         t-    Plus  de  n**-- 

vne  autre  manière  de  hure ,  beaucoup  différente  aia  Laune-  Et  îims  cy^ 
tout  ainiî  que  les  Latins  recognoiïTcntvn  feul  chef  de  leur,  Egli-  ^iejm£s  en, 
fe,  qui  a  foniiege  à  Rome  ,&:  auquel  toutes  nations  tenans  fon  Tokijfance-  -. 
parti  obeiffent  :  Semblablement  les*fouuerains  .chefs  de  l' Eglife  des  Grecs,. 
orientale  font  nomme?  Patriarches  ^defquels  les  lièges  font  di- 1**  desu*~- 
uerfement  affignezrcar  il  y  a  plusieurs  nations5encores  quelle  ne tins*- 
parlent  Grec ,  qui  font  fubie&es  &.  obeiiTantes  aux  Patriarches,. 
Les  Portes  &  Hiftoriens.  go  t  grandement  .^endu  cefte  monta*- 

K  i j 


manière  de 
■■■  religieux 
v  Grecs. 


:3em  fere. 
rZeUemere. 


rlhrtfhcsde 
;  Grèce  font 
■.marieîÇ. 
Vie  dés  Ol- 
■loterej. 


'(Srujfes. 

^dâ^Ètes. 

Bulgares. 

Mojcamtes. 

$ufciens. 

Tolom. 

J&engrdois. 

DeZojfem. 


76  PREMIER     LIVRE     DES     SINGVLÀ. 

gneilluftrce  :  auffiaeftéde  touc  temps  dediee  pour  les  religieux 
Grecs  :  &  croyons  que  du  temps  des  Ethniques  il  y  habitoit  au  ni 
des  religieux  dédiez  aux  idoles.  Il  n'y  a  finon  vne  feule  différen- 
ce de  religieux  par  toute  Grèce, qui  de  nom  propre  fontappellez 
Caloieres ,  &  Calogria  pour  les  femelles.  Lequel  nom  rendu  en 
nofïre  langue,reprefente  ce  que  le  vulgaire  appelle  vn  beau  père. 
Toutesfois  Caloiere  fignifie  proprement  bon  vieillard,  &  Calo- 
gria bonne  vieille.  Pour  lefquelsîc  mont  Àthos  fut  ancienne- 
ment dcdié,&  eurét  priuilege  qui  encore  dure  pour  le  iou  td'huy, 
que  nul  autre  Grec  ne  Turc  y  puifTe  habirer,  s'il  n'eft  Caloieres. 
Ces  Caloieres  ne  fe  marier  iamais,cobië  que  les  preftres  deGrece 
lefoyét.  Iîssabftienêt  toute  leur  vie  de  manger  chair,&:laplus 
part  du  téps  de  poifTon  qui  a  fang,principalement  en  leurs  caref- 
mes.  Ils  vicient  moult  aufterement ,  &  n'ont  chofe  qui  leur  foie 
en  plus  commun  vfage  que  les  Oliucs  confides,dirTerentes  à  cel- 
les que  nous  auons  accouftumé  confire  en  ce  pays  :  car  les  leurs 
font  noires  &  meures)qui  fc  gardent  fans  faulce3  comme  font  les 
prunes  cuides.  Et  d  autant  qu'il  y  a  bienfix  mille  Galoieres,ha- 
bitans  en  plufîeurs  endroi&s  de  la  fufdide  montagne  ,  en  la- 
quelle il  y  a  près  de  vingt  &  quatre  grands  monafteres  antiques, 
bien  fondez  &  fortifiez  de  hauts  murs ,  efpars  ça  &  là ,  tant  au  ri- 
uage  de  la  mer  qu'en  terre  ferme,efqueIzauons  entré,&:auiïi  que 
ceux  qui  les  viennent  voir  font  repeuz  fans  rien  payer  :  il  nous 
femble  n'eftre  hors  de  propos  les  reprefenter,&lcs  mettre  tous 
par  ordre  félon  qu'ils  font  fittiez  5  &:  adioufter  leurs-noms  pro- 
pres ,  fçachans  bien  que  c'eftlàoii  les  cérémonies  Greques  font 
fort  bien  maintenues  &  rciglees  en  leurs  eglifes ,  &:  que  par  cela 
les  fufdi&s  Caloieres  font  tenus  plus  religieux  ,  que  ceux  qui 
n  ont  efté nourris  audit  mont  Àthos.  Les  nations  qui  ont  fuiuy 
le  party  des  Grecs ,  font  Circaiïès ,  Valaques  ,  Bulgares  3  Mof- 
couitcs,Rufciens, grande  partie  des  Polons,&:de  Mengrelie, 
de  la  Bofïbna  ,  &  d'Albanie  ,  &  d'Efclauonie  ,  auec  quelques 
Tartares ,  Se  aufli  ceux  de  Scruie ,  &  Croates.Somme,toutes  na- 
tions habitans  au  contour  du  pont  Euxin  ,  tant  aux  riuagcs 
qu'en  terre  ferme,  ont  fuiuy  le  party  des  Grecs  :  Lefquelz  auec 
tous  les  detTufdias  ,  tiennent  les  Caloieres  du  mont  Athos  en 
plus  grande  veneration,&  eftiment  en  leurs  pays,  leur  attribuant 
quelque  chofe plus  quilz  nefonc  aux  autres  ,  qui  nont  efté  en 


'Ô^SE^VEES      VAX     P.    BELoV.  '  JJ 

*îafufdite  montagne.  Et  les  Turcs  mcfmes  qui  dominer  fur  tou-  ^éUaw. 
'  tes  les  contrées  qu  auons  Mâitcs ,  leur  font  de  grandes  aumofoes  %£££' 
*  pour  la  bonne  vie  ,Se  grande  obfêruation  des  cérémonies  qu'ils  Seru-ms[ 
maintiennent/ Les  religieux  des  monafteres  du  mont  de  Sinai,  Cr0ÂteSm 
'■  du  mont  Liban,dcs  deferts  de  fain&  Antoine,  de  îa  ville  du  Tor,  Religieux  d» 
Vautres  lieux  fituez  bien  auantàlacofte  de  la  mer  rouge ,  d'  An-  mont  sinai, . 
tioche,d' Alex£drie,de  Ierufaiem,de  JSourfc,de  Damas ,  Se  autres  cr  J*  ™** 
plufieurs  monafteres  cfpars  çà  Se  là  en  Afie,pat  le  pays  des  Turcs,  *"*». 
font  beaucoup  plus  prifez  des  Chreftiens  d'auoir  demeuré  au 
\montAthos.  Tous  les  monafteres,&:  religions  de  i'Afie}qu'au6s 
nomez  eftans  en  l'obey  fiance  du  grand  Turc ,  défendeurs  ferui-   ?air\mhe> 
ces  au  mefrne  langage  qu'ils  font  en  Grèce.  Et  combien  que  le  des  Grecs. 
fouuerain  de  l'Eglife  Grecque,n6rné  Patriarche ,  ait  fon  fiege  en 
la  ville  de  Conftantinople,  neantmoins  il  y  en  a  encore  plufieurs  ^runhe 
autres  de  mefme  nom,  &degaîle  puiûancc,  es  pays  ouilsprefi-  £™"*m' 
dent.  Car  le  Patriarche  d'Alexandrie  commande  abfolumët  aux 
hom mes  tenans  le  party  des  Grecs ,  viuans  en  Egypte  Se  Arabie, 
Sez  vn  grand  logis  au  Caire,qu'auons  veu,  qui  neft  guère  moin- 
dre cfue  le  logis  du  Patriarche  de  Conftantinople ,  qui  de  nom 
propre  eft  nommé  Patriarchat.  Vn  autre  Patriarche  a  fon  fiege  Patriarche 
en  Damas,  qui  commande  abfolument  à  tous  les  monafteres  &:  ds^AtM^ 
gens  de lareligion  Grecque  fe  tenans  en  Syrie  :  Se  eft  fubiet  de  fe 
trouuer  lequinziefmekmr  da  mois  d'Aouft^u  monaftere  deflus 
le  mont  Liban,pour  y  célébrer  la  meffe.  En  cor  y  en  a  vn  autre  en  ■pmuLrc]}e 
Antiochc,  qui  commande  aux  monafteres  Se  autres  Chreftiens  £^ntioche. 
Grecs,de  Barut,de  Tripoli,de  Halep,  Se  en  autres  plufieurs  lieux  tatrUrche 
cnAfie.  Le  grâd  Turc  iaiflèviure  les  fufdits  Patriarches  en  leurs  de  conpn* 
religions,moyennantquilenaitletribut.  L'on  dit  queceluy  de  tl^UJ^ 
Conftantinople  paye  douze  mille  ducats,tant  pour  le  fufdit  mot  ^J^ 
Athos,que  pour  les  autres  monafteres  d'Europe.  Orquandl'vn  Meîr^0^ 
defdits  Patriarches  eft  trefpafte,les  Euefques  Se  Mecropolites,qui  ^ 
font  comme  à  nous  nos  Cardinaux ,  s'afTemblcnt  pour  en  refaire 
vn  autre.  Et  eft  à  noter  que  nul  ne  peut  eftre  Patriarche  s'il  n'a 
premièrement  efté  Métropolite,  qui  eft  chofè  conforme  à  Pinfti- 
tutio  papale.Des  fix  mille  religieux  qu'auons  nommé  Caloieres, 
viuans  en  la  fgfdite  montagne ,  ne  penfez  pas  qu  il  en  y  ait  vn  oi-. 
fèux:car  ils  fortent  de  leurs  monafteres  de  grand  marin ,  chacun 
auec  (on  ouftil  en  la  main,portans  du  bifcuit,&:  quelques  oignôs 

K    iij 


:7&  PREMIER.     IIVRE     DES     STNGVLjC 

en  vn  biftàc  defTus  Tefpauîe ,  IVn  vne  houe  ,  l'autre  vn  pic,  1  autre 
MéienJes  vnc*~crPc*  Chacun  trauaillepourlc  mefnage  de  fonmonaftere- 
o&faxs .■'  Lcsvns  befehent  lcsvignes,  les  autres  bufehent  les  bois,  les  au- 
tres fabriquent  les  nauires.  Et  ne  içaurions  en  faire  meilleure  co- 
paraifbn  qu'à  la  famille  d'vn  Prince ,  mettant  vnececonomie  en> 
commun  :  Car  les  vns  font  coufturiers»,  les  autres. mafTons ,  les 
autres  charpentiers,lcs  autres  d'autres  meftiers,  trauailîanstous- 
en  commun:  iufques  à  fiîer  la  laine  dont  leurs  cheniifes  6c  vefte-" 
mens  font  faits:  aufafont  ils  habillez  moult  pauuremcnt^refTem- 
hlans  qmfî  à  ceux  que  nommons  hermites  6c  enfumez.,autremeo 
nommezîes  bons  hommes.  Nous  les  euffions  nommé  moynes 
félon  noftre  commun  parler-,  qui  abnfons  de  cefte  didion:  car 
moyneoumonachose{làdirevnfeul3commcpourroiteftre  vn. 
vn  hermite,que  maintenant  ils  nommet  au  mont  Athos  diMiom 
heïZit?0*  ^e  Phileremos.  Paur  bien  figurer  cefte  montagne  ,  adonner  à: 
Firure'dtt  entendre  comme  elle  eftiàite  ,il  -faut  fuppoicr  voir  vn  homme 
mot  \s£thos.  renuerféeftendu  en  la  mer  en  longueur  de  l'Occident  au  midy. 
Defcnplon  Cefaifanty  l'on  aur-alaperfpe&iue  de  cefte  montagne.  Elle  eft. 
de  tout  k    longuetrois  iourneesde  chemin.  Et  tout  ainfî  que  flvnliomme 
m&^€thùs.  eftoit  renuerle  nageant  fur  l'eau,  6c  touchait  des  pieds  atinuagc^. 
1  endrokqui  feroitioignant  les  pieds,  feroit  plus  eftroit  que  nul- 
le autre  partie  du  corps,  6c  confequemment  le  corps  s'eîargi- 
roit  iufques  aux  cfpauîes ,  &  de  là  s  eftreciroit  à  l'endroit  du  col,  > 
puis  la  tefte  apj>aroiftroit  ronde  eleuee  plus  haute  que  le  corps:, 
fèmblablement  il  y  a  vne  tres^haute  motagne  au  bout  dudit  mot 
Athos,queFon  voit  en  la  raer  de  plus  de  trente  lieues  îoing,&eft 
l'endroit  ou  eft  la  tefte  de  ladite  montagne.  Et  diroit  l'on  propre- 
ment à  la  regarder  de  loing  de  defTus  les  montagnes  de  Macedoi- 
~  ne ,  qu'on  y  voit.la  forme  d'vn  homme  renuerle  :.  car  comme  le 

menton  6c  le  nez  d'vn  homme  renuerfé  Lterre  font  eileuezcon- 
tremont>&  delà  vn  peu  après  l'on  voit  vninterualle  entre  le  me- 
U>n  Se  la  poidrine,  lequel  fè  reg refente  par  l'efface  de  celle  eau;- 
,  te  qui  defeend  du  mentonàla  gorge  :  tout  ainfi  l'on  voit  la  mon- 
tagne s  eilargir  en  efface, mon  ftrant  les  hauteurs  des  efpauîes  a  6c. 
confequemment fe reduifant en eftrcciflànt :  tellement que  l'on, 
£2ut  figurer  le  milieu  du  corps  en  l'endroit  du  nombrilrpuis  après, 
en  s'engroffiftant  encores  commepourroit  eftre  l'endroit  âcs  ha- 
ches 3  6c  gourfuyuaju  iufques  à  la  part  des  genoux,  fe  monftraas. 


-OBSERVEES    SA'R    >.     BEL  ON.  79 

-cîîeuczéontremont,  comme  fi  vn  homme  couché  à  la  renuerfc 
auoic  reciré  (es  ïambes  à  fbyl  Puis  des  genoux  fùy  uant  les  ïambes 
vient  tellement  en  cftrccifïàntjOu  il  conioin&à  terre  ferme ,  que 
lefufHit  corps de  ce  cheronefTe  du  mont  Àthos,fêmble auoir  efte 
expreflèment  contrefait  par  Fmduftrie  des  hommes,  pour  repré- 
senter le  corps  d'vn  homme  couché  à  la  reuerfe.  Parquoy  accor-  , 
dons  facilement  à  ce  qui  a  efté  dit  d'vn  archîtc&e  nommé  Dino-  Dtmeràtes. 
crates ,  qui  vouîoit  perfuader  à  Àlexadre  d'édifier  la  forme  dvn 
homme  rcnuerfc,qui  tiendroit  vne  ville  en  fa  main ,  Se  en  l'autre 
auroitvnecouppe,  dont  fortiroic  de  l'eau |>our  abbreuuertous 
venans. 

Qtfjly  a  pour  leiourd'huy  âe  cinq  àfix  mille  Caloieres  Grecs  viuittts 

au  mont\Athos,  ejpars  cà  0*  la  par  les  moxafleres. 

Chapitre    xxxvi» 

O  v  t  le  corps  de  cette  montagne  eft  de  difficile  yix  m^e 
acceztant  pour  gens  de  pied  ,  qucdêcheuaî:  en  caloieresti» 
►  laquelle  on  pourroit  nombrer  cinq  ou  fix  mille  uansaumot 
Caloieres ,  habitans  es  monaftercs ,  qui  fpecifiez  <s£thos. 

par  le  menu  font  infques  a<i  nombre  de  vingt  Se  xxnjl-  mùm 

trois  à  vingt  Se  quatre.  Et  n'y  amonafterequin^ait,  l'vn  portant  nafereJf4' 
Fautrc,*pîus  de  deux  cens  religieux  :  car  en  l'vn  il  y  en  a  troiscens, mo 
en  l'autre  deux  cens ,  en  l'autre  cent-cinquante  ,en  l'autre cent:Sc 
ainfî  des  autres  confequem ment, tant  du  plus  que  du  moins. 

fQue  tous  les  monaft ères  àumont \Athosfini forts  pour  reffler aux 
pyrates^  quelespyrates  ne  leur  font  pas grandes 
violences.  Chap.    xxxvii. 

E  s  vingt  Se  trois ,  ou  vingt  Se  quatre  monafteres  qui 
•  font  en  ceux  montagne,  il  n'y  en  a  point  qui  ne  foyen  t  Momfiem 
>  forts ,  Se  bien  fermes  de  muraille,  tant  pour  fbuftenir  lien  forts, 
la  violece  des  ennemiSjS'ils  eftoyent  afTaillis,  que  pour 
refifter  aux  courfaires  de  mer  s'il  en  eftoit  befoin.  Car  pour  au- 
tant qu'ils  font  aux  riuages  de  la  mer,  les  pyrates  leur  pourroyent  ^j^r™ 
faire  de  Tempcfchement  s'ils  n'cfloy  et  forts  en  leurs  monafteres .  pûJ^ 
Tourcsfois  iceux  pvrates  encorcs  qu'ils  foyent  Turcs  ennemis  cdoieres. 

K   iiij 


$Or  PREMISH    LIVRE     DES-   SÏNGVXA» 

dc  toute  humanité^  eft  ce  que  communément  ils  ne  leur  dcniâV- 
dent  ricn,&  ne  font  grand  effort  à  leur  faire  defpîaifir.  lufticea 
iupceâUeu  |ieu  cntreics  brigands  :  &  le  droit  de  raifon  fe  peut  debatre  entre 
m\  *  "*  îes  mefehantes  gens.  Car  encores  qu'ils  foyjec  les  plus  pernicieux 
^"f  '"        du  monde ,  &  contraires  à  la  religion ,  toutesfois  ayans  quelque 
difcretion,&:  remors  en  leurs  confeiences ,  ne  violent  les  Caloie- 
res  du  mont  Àthos  :  ains  eux  qui  n'efpargncroyec  père  ne  mère, 
frère  ne  fœur3parent  ou  amy  qu'ils  ne  védiflentà  purs  deniers  co- 
îans5ont  quelque  |mfnnâ:  qui  les  induit  à  fupporter  les  Caloie- 
res.  Ces  pyrates  de  mer  ne  pourfuyuent  pas  les  hommes  feulemét- 
pour  leur  argentjmais  pour  leur  corps,  Se  pour  les  vendre ,  en  les 
rendant  efclaucs  :  car  ils  peuuentauoir  cinquante  ducats  de  chat , 
queefclaue. 

Que  le  memt  *Athos  efl  eflimé 'en  telle  réputation  aux  Grecs \comrm 
Rome  aux  Latins,  Chapitre      xxxvin. 

IL  ne  fut  onc3des  le  commencement  que  les  Grecs  ont 

ieferit,  que  kfufdite  montagne  n'ait  efté  grandement 

^renommée  :  aum"  le  nom  qu'elle  tient  l'emporte.  Elle 

iclt  maintenant  aux  Grecs  en  telle  réputation  de  fain- 

cleté  comme  eft  Rome  aux  Latins.  Les  Grecs  la  nomment  en 

Zrfgfinerôs.  lçQT  vulgaire  Àgionoros.  Ceux  qui  cheminent  par  ladite  mon- 

tagne/oit  en  voyage,  ou  pour  autres  affaires ,  font  tepeuzpat  les 

monafteres,  fans  rien  payer  :  mais  il  ne  baillent  autre  chofe  fîoon 

cedequoyilsviuenteuxmefmes,  fçauoireftdesoîiuesconrl&es, 

des  oignons  cruds,des  febues  trempées  en  eau.puis  falecs,  du  bif- 

cuit ,  rarement  du  pain  frais  5  &  quelquesfois  du  poiffon  frais  ou 

falé/Car  ils  fontaux  nuages  de  la  mer.  Tous  les  monafteres  ne 

font  pasfort  près  les  vns  des  autres:  &  les  principaux  detouteia 

mpntagnciie  font  que  deux  en  nombre,dont  hm  fe  nomme  Va- 

tapedi,  l'autre  Agias  laura»  La  commodité  que  leur  apporte  la. 

mer,  efl  grande  tarit  pour  la  nauigation  qui  leur  ameine  toutes 

chofes  de  dehors ,  que  pour  leur  feruir  es  peieberies  qui  leur  font 

grandement  à  propos.  En  pafTant  le  temps  samufen  ta  pefcher  le 

ïatejux  des     iffon  en  \z  mer>0u  ils  ont  moult  grand  proufit.  Et  pour  ce  faire 

™™  ^    plus  commodément ,  ils  font  des  bateaux  de  gros  troncs  de  Pla- 

s  -  m'-     tane  5  &  fans  grande  difficulté  ne  defpenfe  font  chaque  bateau 

'-■     -  -  '  'v  àvn 


OBSERVEES      UR     P.    BELOK.  Sî 

cTvn  feul  trôc.Ils  abatent  l'arbre  par  le  pied,puis  creufent  le  troc, 
&  façonnent  à  la  manière  des  bateaux,qui  feruent  à  pafTcr  la  Son- 
ne où  Seine.  Autrement  ils  affembient  deux  pièces  creufecs,  Se 
chcuillees  en  forme  de  bateau  :  dcfquels  peuuent  entrer  aufîî  a- 
uanten  îâmerentempspaifible&calme^ommeileftnecefTairc 
à  la  pefcherie.  Et  tiennent  leurs  filets  fouleuez  de  congourdes  en 
défaut  de  liege,  comme  le  Pont  &Propontidedefcorce  de  pins.     t 
Le  monaftere  nommé  Agias  Laura,  eft  l'vndes  principaux  de  ^|^ 
toute  la  montagne ,  &  eft  fitué  au  pied  du  plus  haut  mont3qui  eft  ™*2om 
3e  vray  mont  Athos,regardant  la  partie  de  Lemnos  :  auquel  mo-  ^^ 
naftere  il  y  a  bien  trois  cens  Caloieres.Nous  voulons  donc  nom- 
mer les  monafteres  qui  font  efpars  par  les  montagnes ,  du  cofté 
de  terre  ferme  de  Macédoine.  , 

Les  noms  de  tous  les  monafteres ^îesnombrxnt  par  ordre 3commençsnt 
à  terre  ferme.  Chapitre  xxxix. 

S  À  r  t  a  n,  s  de  Macédoine  >  &  entrans  par  le  premier  Htm^os. 
grand  village-nommé  Hierizos  qui  eftvn  peu  au  de£- 
fus  du  deftroit  5&  de  là  allans  le  long  de  la  marine: 

j  quand  on  a  laiûe  ledit  village  de  Hierizos ,  l'on  entre      -     „ 

au  deftroit  nommé  Àladicfna»  Plus  outre  Ton  vient  à  Prulacas:  ^J^ 
&  de  là  on  monte  vne  colline  qui  s'appelle  Magaiiuigla.  Ccft  le  ^^/J,^ 
lieu  ou  l'on  fait  le  guetiour&nuiâ,  &  principalement  quandil     "  '   ^ 
y  a  foupçon  de  pyratesen  mer.  Il  n'y  a  pas  long  temps  que  Hieri- 
zos n'eftoit  qu'vn  grand  village  ,  mais  depuis  huiâ  ans  le  grand  slsr'^ 
Turc  la  faitenclorre  de  muraille,  &  fortifier,  pour  la  crainte  des 
Pyrates.  DeMegaîiuigîa  cheminant  plus  outre  ,  Ton  rencontre 
la  première  fontaine  deftus  le  chemin  :  puis  quand  on  commet 
ce  à  entrer  au  territoire  du  fufdit- mont,  &  qu'on  a  defiapaûe  le 
deftroit  qui  conioinâ:  la  montagne  à  Macédoine  ,  &  qu'on  a 
paue  ladite  fontaine  que  les  Grecs  nôment  ProtoneroJ'on  trou- 
ue  le  monaftere  nommé  Sguraf.  Tirantplus  outre  allant  vers  le 
leuantenfuyuantîeriuage,  l'ontrouucvn  autre  monaftere  no-  Frotonsro 
me  Chelandari.  Puis  après  l'on  trouue  le  monaftere  nomméSi-  %^jk  .   . 
meon,qui  eft  vn  trefbeau  &  plaifant  monaftere  :  toutefois  celuy  J^^    '-  * 
qui  vient  après  qui  fe  nomme  Vatopcdi ,  eft  encor  plus  grand  &;  yAîù^. 
plus  pkiiànt  &C,  riche.  De  Vatopedi  continuant  chemin ,  l'oa  - 


Ttntocrdto*  gj,  PREMIER     LIVRE     S?  ES    SINGViÀ. 

roi*.  Vienc  à  Pantocratorou  :  Se  de  là  à  Yucro  5  qui  eft  ailîs  deflus 

7am>.        yne   ccij:c  butteau  nuage.  De  Yuero l'on  vaà  Philotheou.  De 
Tklotberou.  phiIochcou  on  vient  au  monaftere  de  Caracoul ,  lequel cftquafi 
TxmT     <ks  derniers  :  car  celuy  qui  eft  au  bouc  du  mont  aux  racines  de  la 
haute  montagne  Athos,eft  nommé  Laura.  En  après  partant  du 
monaftere  de  Agias  Laura>en  cou  rnanc  de  l'autre  cofte^on  trou- 
ue  femblablement  d  autres  monafteres  tant  au  riuage  comme  en 
terre  ferme  ,  ainiî  comme  on  auoit  fait  par  le  coîté  qu'auons 
•     die.  Suyuant  le  tour  du  mont  partant  de  Laura  le  premier  mo- 
naftere eft  nomme  Agiou  Paulou,  lequel  regarde  Tille  de  Scytos. 
r4fr*7>*»  ^utre  momfterçqtû  s'enfuit,  eft  Dionifio..  Plus  outre  eft  le 
ht  monafterenommëGlygoriou:&delâlonvientaRumo,quielt 

Dionifio.     dépendant  de  Rufïïe.  Puis  après  on  trouue  les  monafteres  de 
Glygoriou,   Xenopho ,  Archangelos ,  Diocherio ,  Se  Caftamoniti  :  lefqucîs 
*£fi°-        monafteres  font  autour  îâ  montagne  ioignant  la  mer.  Ceux 
xenopho.         .  fonc  lc    .  s  efl0ignez  du  riuage  par  les  plaines  Se  vallées, 
^ciwtge^  ^       fonc  dedans  lcs  forefts  fonc  Caftamoniti,  Simon  petra, 
Diocherio     Ichares  protato,  Cothleomuz  ,  Philotheou.  Nul  ne  doit  s'ef- 
Cthmonm  mcruciller  que  tant  de  monafteres  ayent  efte  baftisla  dedans: 
simonpetra.  Car  te  pays  eft  fi  long  qu'il  dure  trois  îournees,  Se  a  de  large 
ichxres  fro*  pius<|c  demie iournee.  Ces  monafteres  ont  des  faindes  reliques 
txt0: .         en  leurs  Eelifcs ,  Se  ont  de  beaux  pèlerinages.  Lcs  Eglifes  font 
CothUom»l£on  b.en  fournics  &  bien  bafties  ,  ou  les  Caloieres  vont  tous 
les  iours  chanter  le  feruice.  Tout  ce  qu'ils  dient ,  eft  en  langage 
Grec.  L'ontrouuoit  anciennement  des  bons  liures  Grecs ,  ef- 
*   critsàiamain  en  ladide  montagne  :  Car  les  Grecs  àcs  fufdits 
ùmes  crées  monafteres  eftoyentle :  temps  pafle  beaucoup  plusdodcs,-  qui  s 
efoits  4  U   ne  font  pour  l'heure  prefente.  Maintenant  il  n'y  en  a  plus  nuls 
*"*         qui  fçachent  rien  :  Se  feroit  impoflible  qu'en  tout  lemont  Athos, 
frnurouuaft  en  chaque  monaftere  plus  d  vn  feui  Caloiere  fça- 
uant.  Qui  en  voudroit  auoir  des  iiuresen  théologie  efcntsa  la 
main,  on  y  en  pourroit  bien  trouuer.mais  il  n'en  ont  n'en  poefie, 
hiftoire$,a'en  Philofophie. 


QB  SERVIES     £AK     F.    B'ELOVt.      ■  $£ 

"    Kaifonpourquoyplufieurs Hures  ont  efléruine^^  perdus  en  Grèce  ^  & 
de  la  fondation  des  monxfteYesdumont^éthos.        Chapitre    XL. 

[  L  faut  que  nous  attribuÔsecfterornedcs  lin-rcs  Grecs,  ^ *fiurre& 
|  à  la  nonchallance  &:  ignorance  qui  a  efté  encre  les  fignoranec 
i  peuples  des  pays  de  Grèce,  qui  fe  font  totalement  £orecs. 

[.abaftardis.  Ec  non  feulemet  de  .noftre  memoi  refais 

aufli  depuis  longtemps,  ilnyacupcrfonnedc  {çauoir  en  toute 
Grèce.  Soit  qu'il  yen  aie  es  quelques  vns  içauans  de  la  diction 
Greque&  Latine  ï  mais  nous  entendons  de  fipuqir  acquis  par 
cftude,  comme  maintenant  cft  par  tout  le  pays  êes  Latins.  En- 
tretous les  fix  mille  Caloieres,qurfont  par  la  montagne,en  frgr£-  Catoiera 
demultitude,  à  peine  en  pourroir  on  trouuer  deux  ou  troirde./*»*  **»* 
chaque  monaftcrejquiiçachendnreaceferke  rGarks  prélats  de  £»**««► 
MLglifeGrecquey&Ics Patriarches, ennemis  delà  prflfofbphic 
excommunièrent  tous  les  preftres  &  religieux  qui  tiendroyent  ir- 
urcsy&  en  eferiroyent  ou  liroyent  autres  qu'en  theologie:&  don- 
noyent  à,  enrendie  aux  amres hommes  qui!  neftoit licite  aux 
Chtcfocns^eftudlec  en  poclie^ pbilofophic.  Les  gens  d'Eglife 
auoyent  peine  d'cxcojamuniement>.dont  ils  nepocuoyent  eftre 
abfbus  finon  par  quelques  grandesieunes;&  certain  pris  d'argec,- 
ôc  autrespunitions  corporelles  pour  la  pénitence,  auant  que  de- 
ftre abfous.Tous  les  monafteres fanons  cydcBxs nommez,fa*   j^,;^ 
rent  anciennement  fondez  par  diuerfès  nations  jXariteftrangcs  des  mono/te* 
que  àcs  Grecs  mefmes-,  &  ont  efté  rentez  en  diuerfes  parties  du  «ii«  mon* 
monde.  Il  yen  a  plufîeurs  encor  pour  leiourd'huy^ui  rcçoiucnt  <s&k>i. 
leurs  reuenuzemioyez  de  Ruffie,îes  autres  de  Valîachic,  les  au- 
tres de  Trapizosde,les  autres  d  autres  lieux  d'Italie,  &  de  Rome. 
Les  Caloiercs  de  Vatopedi  difoiet  quekur  monaftere  eftoit  reté 
de  quclqueeglifede  Rome,dôt  ils  nereçcuoiét  plus  rié.Et  qu  en- 
cores  que  les  Rumens  èc  Valîaques ,  &  ceux  de  laBoflèna,  Se  de 
Mengrehe,&  de  Scrcaïfie,&  ceux  de  Mofcouie,foyét  tributaires  Mofiome^ 
au  Turc,&  de  langage  differet  les  vns  des  autres,&  diflèmblable 
au  Grec  :  tou  tesfois  en  reeoiucn  tencores  quelquesrentcs  r  mais 
quils  ont  perdu  celle  des  Latins-  fous  ceux  qu  aidons  cy  defîus 
Bommczfc  maintiennent  à  la  Grecque,&  ne  fe  gouuement  pas  i. 
Mï.atine.  Paria  Latine  entendons  tous  ceux  qui  obey  fient  ait: 


$4  PREMIER     IIVRE     I>E$      SINGVXA. 

commandement  du  Pape.  Et  pourautant  qu'il  n'y  a  point  de  df- 
uerfiré  d'habits  entre  les  Caloicres ,  ils  Ce  cognoifTent.quafi  tous 
(Grecs  n'ont  ks  vns5desautres,lavicdcfqueIseftforteftrange.  Ils  ne  portent 
.au  ivïe  forte  point  de  chemifè  de  chanure  ne  de  lin ,  mais  de  laine  qu'ils  filent 
derdigimx.  eux  mefmes:&  ont  leur  habit  de  la  couleur  &  de  la  mefme  façoa 
des  religieux, que  nous  nommons  les  enfumez.  Il  n'y  a  pas  vn  de 
quelque  monaftere  que  ce  foit ,  qui  ne  face  quelque  meftier  mç- 
chanique:&  ne  louent  iamaisdes  ouuriers  pour  faire  leurs  be- 
ibngnes:mais  s'il  y  a  quelque  chotfê  à  faire  pour  le  monaftere, tous 
enfemble  le  feront,ou  bien  fera  faiâ:  par  particuliers ,  comme  vi- 
gnes  à  tailler,labourer  les  terres,amcner  du  bois,faire  les  iardina^ 
cdoieres     ges,  entedreaux  pefcheries,tous  enfêmblément  defpefchent  la£ 
fçmentS*  faire  du  monaftere.  Les  vns  {ont  cordonniers ,  qui  font  les  fou- 
Merswfiïm*  licrs  aux  autres ,  &  les  rabiîient  quand  ils  font  rompus.  Les  au- 
tres font  coufturiers ,  qui  taillent  les  robes  :  &  eux-mefmes  les 
coufcnt.Les  autres  font  eharpétiers,poûr  faire  barques,bateaux, 
&  autres  chofès  de  charpenteric.  Les  autres  entendent  au  mou- 
lin :  les  autres  font  maçons,  Se  ainû  confèquemment  de  tous  au- 
tres meftiers.C'eft  vnc  œconomiCjConeeraantele  proffir  du  mo- 
naftere :  laquelle  eftant  ainfî  gouuernee ,  eft  grandement  diftère- 
QtAc^deU^  tât  des  moeurs  que  de  façon  de  viure,  aux  monafteres  desLa- 
r  gto  Grec*  ^ Q&  ^a  rcj  jgjon  Grecque  eft  ainfî  réglée  entre  eux ,  que  fi  quel- 
*  *  que  pauure  homme  veuf,ou  autrement  ii  quelque  ieune  homme 

fê  veut  ofter  du  monde,^  fè  veu  t  rendre  Caloicre,fi  d  auenture  il 
a  quelque  peu  de  bien ,  il  viendra  en  commun  au  monaftere.  Ils 
ne  s'appelle  point  par  nom  de  frçre,mais  de  père  Se  de  fils.  Les  vns 
y  font  receuz  pour  labourer  les  terresjou  pour  becher,ou  pour  bi- 
ner: &  feront  employez  à  ceàquoyils  font  plus  habiles.  Et  s'ils 
fçauent  lire  la  lettre  Grecque,  on  qu'ils  foyent  quelque  peu  do- 
ctes, ils  auront  quelque  fois  plus  d'authorité  que  les  autres  :  Car 
ils  fèrontrnipîoyezpour  chanter  deuant  les  autres  :  d autat  qu'ils 
ontceftecouftumeen  leurs  Eglifès,quilfaut  que  quelqu'vn  leur 
lifè  publiquement  ce  que  les  autres  doiuent  prononcer  en  chan- 
tant.On  trouue  peu  de  Caloieres  qui  foyent  preftres,&  qui  dient 
meflè.-  Et  encores  qu'ils  foyent  preftres  au  monaftere,  ils  ne  font 
pour  cela  exempts  de  trauailler  en  ceuures  manuelles,  corne  tous 
les  autres  pères  :  Se  faut  que  chacun  mette  la  main  àla  pafte.  De 
là  vient  qu'ils  ne  s'amufent  n  a  eftudier ,  n'a  eferire  ;  Se  ne  fçauent 


OBSERVEES   TAB.     P.   BELON.  $f 

|>as  feulement  apprendre  à  Hrc  en  leur  langage  :  ainfî  Conxen  mer- 
ueilleux  regrie  a?  ignorance." '.«.'■■•■■  _ 

De  quelques  cérémonies  enfEglife  des  Grecs ,  &  de  l'ignorance  qui  efi 
wtrelesgmsdEgBfcçnÇjycce*..  Chapitre   xli. 

'  Efia auons die,  que généralement  rous  lesGrecs ,  Se  nàrUn&es 
I  ceux  qui  enfument  leurparty,obeiûent  au  comraan-  de  Grèce. 
dément  des  Patriarches.  Chaque  contrée  a  le  fien ,  Se  MMwsoheifi 

-  r.  .i *  y  en  a  vn  en  Alexandrie ,  qui  toutefois  a  Ton  logis  au^fjf*      " 

Caire, vn  en  Damas  ,~Vn-<cnConftantînople.  Tous  les  Caloieres^  -*e  n^ 
du  mont  Athos  obcifTcnt :  entièrement  au  Patriarche  de  Con- 
ftantinople ,  Se  font  tout  ainfi  qu'il  leur  commade,  cftans  à  fà  de- 
notion  ,  comme  nous  foim  mes!  celle  dti  Pape»  Les  Caloicres  du 
mont  Athos ,  qui  vont  demeurer  par  les  autres  monafteres  de 
Grece,ou  en  autres  parties  âtrmo^&  foâtplus  eftimezquc  ceux 
qui  n'y  ontpointeftér&mcfmcment  ceux  de  lerufalem ,  du  mot 
de  Sinai,du  mont  de  Liban.du  Caire, de  Damas,de  Bulgarie  ,  de 
Ruffie ,  BofîènajYaîîachie^Mofco.ate^Albanie ,-,-  Efclauonic ,  Se 
autres  qui  font  es  autres  pays ,  eiqûcls  Ion  parle  langue  diueriè  à 
la  Greque,  eftimentlcsCaloieresdu  mont  Athos.  Laraifoneft, 
qu'ils  font  profeffion  de  mieux  obfcruer4ess  cérémonies  que  les 
autres  qui  viuent  à  la  Greque.  Ils  ont  auflides  Chandelles ,  & 
lampes  allumées  en  leurs  EgUfes>  &  des  ftaraesde  relief,  Se  des 
images  en  peinture,  comme  ont  les  Latins  >  Se  vient  au/fi  de  clo- 
ches. Mais  les  Grecs  qui  font  fous  les  Vénitiens,  ont  plus  de  li- 
berté que  ceux  qui  font  efclaues  du  Turc*  Tant  les  vns  que  les 
autres  ont  vn  fer  efpais  de  trois  doigts ,  long  comme  le  bras  ,  Se 
quelque  peu  voûté  en  arc ,  pendu  à  la  porte  de  TEglife ,  attaché  à  c^0^  des 
vn  clou,lequel  rend  vn  fon  pçefque  femblable  à  vne  cloche ,  ay  at  G****** 
îe  fon  clair  comme  vn  métal': xSe  n'ont  point  d  autre  fbnnerie  de 
cloches  en  la  montagne,que  ce  fer.  Quand  il  faut  venir  aux  priè- 
res, ils  font  tous  appeliez  au  fon  du  fer  defTufdit.Ils  ne  nourriûcnt 
-en  tout  le  mont  ne  Poulie  ne  Pigeon, n'autre  oifeau  domeftique, 
ne  Vachc,Cheure,ne  Mouton  :  car  ils  ne  magent  point  de  chair» 
Ilscognoiffent  les  oifçaux  feulement  de  les  ouyr  nommer  entre- 
eux.  Et  pourec  qu'ils  ne  mangent  point  de  chair  ils  n  en  prenenc 
aucuns.  Toutesfois  auons  obfcrué  que  *çcluy  qu'on  appelle  au 

L  iij 


g£  PREMIER     tlVRE    ETES    S'INGVIA. 


Maine  vn  Pinfon  Royal,&:  àPaTis  vn  Gros bec5&  lequel  Arifb-  *"**» 
te  &  les  Grecs  nommoyent  Malacocranefs ,  &  les  LatinsMolli-  ^ ^ 
<;eps,aprinslamefmefigmfication  dcGrosbecea  leur  langage:  MdUcocr^ 
s,  1-  ^^t-ir /*-;Y%>5fixn'n'inr  nar  fMarhrifTeaux.aue  les  François  nom-  nix 


mène  vnTercoou  a  uiwi^ui  i»  «wt*««w  ~«  — j ----- *  — ~v- 

cnGrccIynx,y  eftauâi commun, nommé  de  1  appellation  dvn  r«m 
Alcion.  Il  n'y  a  lieu  en  tout  ce  monde  mieuxà  propos  pour  ma-  T™^ 
naftereSjquelemoncÀchos.  iyr?L 

tftre  cultivées.  Chapitre    xlil 

Emont Àràosefl:  herbufurtoas  autres Iieux,on  ££*  a<W 
ayons  onques  mis  le  pied:  &  a  y  a  plate  infîgnc  qui^  *• 
ne  fort  cogneuc  par  le  mefme  nô  ancie^que  ïheœ 
phTai3£,Diofcoride^;GataI^ 
imjjukunr^   L'herbe  donc  prouiencvnc  petite  rachre,  que  les 
anciens  nômoient  Apios,y  cft  maintenant  nomraeeChamxpy-  -^^. 
<*!a,&ayaCaloiereentout  le  monequine  {cache bien qaclle^^^ 
eâiaxaduc.  Etpourccqusevoyonsipluâeurs  grands  perfonnages  *>*- 
auoirefté,  trompez  en  prenant  vue  autre  pour.  eUe,&aufliqu  ils 
en  ont  fait  faufe  peinture  t  nous  a  femblé  bon  en  bailler  le  por- 
trait,que  auons  fait  retirer  d'vne  qu  auions  gardée  viij.  mois  fans 
<$reenterrce,&:fur  la  fin  i:ayâs  renufcen  tœp^duifitfesfucil- 
ks,fleurs  &:  femeneçs  >  telles  qu'on  peutvôir  en  la  précédente  fi- 
gure. Les  Caloieresdu.montÂthosontpriuilegejqu'iînepeut 
habiter  autre  en  tout  le  corps  de  ladite  montagne ,  fmoneux: 
parquoy  ilz  la  rendent  cuitiuee  à  arbresJbi&icrs,  vignes,  &:  oli- 
ujers.Ce  lieu  leur,  eft  bien  deu;car  ileft  kant a  gens/otakes-s;#-_ 
gne  d  cftre  comparé  à  vn  paradis  de  délices,  pour  gens  qui  aimée 
afetenirauxeharaps.  Hippogloûon y efl .mouk  fréquente  ,  Ur.^i^f 
quelle  ilz  nomment  Coraco  votano,c  eft  à  dire  l'herbe  de  laCor-^». 
neillc.  Hellébore  noir  y  croift en  plufteurs  vallées  M  n'y  a  habi-  corxco 
tancentout.temontsquine^ 

pelle  Alatcrnus ,  de  fon  vray  nom  ancien  ,  duquel  Theophrafte  MjûJ^u 

auoit  vfé,Philica;maisà  Corphu  &  en  Crète  ils  le  nomment  Elç-  pW^ 

prinos  ;  car  il  a  fa  fueille  entre  le  cheûie  verd  &  l'Oliuc ,  comme  ^^ 

-  Plme;a:  cfçr,«.  k'atbrc  que  nous  nommons  Favifteau,,  eft  moult  Fou/ta 

L  iiij 


teraus. 


Cetmu. 


%%:     .  ?  RE  Mil  B,     LITRE     DE  S     S  IN  G  V  £  Aw 

Oxy&         fréquent  en  ce  moiît:mais  tous  le  nomment  Oxya:duqucîOxya 
parlerons  cy  après  plus  au  long*  attendu  qu'au  ons  long  temps 
cheminé  par  la  montagne  pour  le  trouucr ,  péfans  que  Oxya  fuflr 
arbre  diffèrent  au  Foufleau.  L  arbre  qucles  anciens  ont  nommé- 
ofîrU.  .      Qftria,y  retient  en  cor  fon  nom  antique.  Ceftccluy  que  nous 
mijbe.,     .  nommons  Haiftre,qui  cft  moult  fréquent  par  tout  le  mot,  Nous 
efmerueillons  que  quelques  hommes  de  noflre  nation, dott.es  &: 
cognoifFans  les  chofes ,  font  tombez  en  ceiierreur  de  penfer  que 
le  Cerrus  des  Latins  fuftceluy  que  noftre  vulgaire  appelle  Hai- 
ftre3veu  mefmementqiie  le  Haiftre  neporte  point-  de  gland ,  & 
'^€m.        que  O ftria  cft  û  bien  deferit  eaTheophrade.  Aria  aufïry  retient 
^iUcà^    fon  nomantique:combien  que  les  habitans  du  motlda  en  Crète 
la  nomment  Acilaca.  Considérant  Ja  grande  cômodité  des  ruif~- 
féaux  venas  des  claires  fontaines; qui  y  font  fi  frequétes ,  faut  no- 
terjquç quelque  part  qu'on  fe  vueillc  pourmencr  en  l'ombre  y\oti 
£b  rtrbuueen  il  grand'  confuiion  de  plantes  deî icieu fes ,  qu'il  n'y 
a  cfprit  y  tant  fafché  fçauroit-iï  eftre ,  qui  ne  foit  incontinent  re- 
créé de  fi  grand. nombre  d  arbres  excellens ,  qui  font  ombrage 
-      .de  perpétuelle  verdure,  comme  s'il  au  oit  cftéexpretTement  balU 
pour  vn  iardin  champeftre.  Etpuis  qu'il  vient  à  propos  de  parler 
des  plantes  qui  feruét  de  verdure  en  ce  mont,  nous  les  nômerons 
lVne  après  l'autre.. ' 

*  les. noms âes-arhm  toufioars-verds  ^iienans  ftuuagespar les vxUees  â& 
mont  *s4thos.-  .  .  •  :.    ...    Chapitre   x  L 1 1 1. 

Lauriers.  ?f?&]Éi^  ^  s  hauts  Lauriers ,  &  Oliuiers  fauuages  y  répriment 
oliuiersjàu*  £■  Pfâ§z}§  en  tout  temps  l'ardeur  excefTiuc  du  Soleil  :  Et  les  Ar- 
uAges.  ^  g  K?s|zf  b°u6^s"<picommun£mcnc f°nt aillcursarbrifTeaux., 
^rboufiers!  ^.ffi^gj  y  deuiennent  graïuîs arbres. .  Les  Andrachnes  y  font 
Anrachnts.  £rCqUens  pour  feruir  de  tonnelles.  Aria^  Philica,ou  Alatcrnus,les 
phihca.  Chefnes  vers  croiûans  en  moult  haulte  fuftaye  y  couurent  les 
^cUtènw.  montagnes  ,&:  au  flî  les  Picees &: Sapins.  Les  Myrchesàla  large.. 
chefnes  fueilic  tantfteriîes  que  portans  fruit5&  les  Neriôs  rougis  y  croif- 
")fers-  fènt  en  hauteur  exceffiue  :  dont  les  troncs  viennent  efgaux  en 

ïicees.  groâèur  aux. Figuiers.  Le  Smilax  teuis  monte  iufques àla  fum- 
Sa?™jr  mité  des  plus  hauts  Platanes ,  s  affaifTant  fur  les  branches  de  ra- 
Nerlom  mcâUX  d'iceux ,  faifant  ombrage  de  perpétuelle  verdeur  contre 
smilax.'  l'injure  du  froid  ?  impetuofité  des  vens y  &  la  véhémence  du  -  So-. 
•       '  '  leiL. 


OBSERVEES    FAR.    P.    FErOîT.  % 

feiî.  Mais  puis  qu'il  y  a  plusieurs  autres  arbres  toufiours  verds, 
outre  ceux  quauons  nommé  du  mont  Àthos,auons  occafton  de. 
les  adioufteren  ce  lieu. 

Les  noms  engenevd  des  arbres  &>arbrijjèauxi  qu'auons  obferûéen  imers 
fttys  ejîre  toufiours  verds.  Chapitre    xliiii. 

?  Vis  donc  qu'il  vient  à  propos  de  deferire  les  Plantes' 
/toufiours  verdes,il  nous  a  fèmblé  raifonnable  com- 
J  macer  par  les  plus  hauts  arbres  de  îaterre,  qui  font 
»  les  Cèdres.  Dr  nous  ne  prétendons  les  deferire  par-  Cejm  jeS 
>  ticulierement ,  mais  feulement  furHt  les  nommer  rie. 
fuccirî&ementencelieu.  Outre  lesfufdiâs  hauts  Cèdres  de  Sy-  Cedmdefy* 
rie5i  1  y  en  a  d'autres  péris  de  L'y  cie^defquels  la  fueille  eft  poignan-  «* 
te  :  &  par  ce  furent  furnommez  des  Grecs  Oxycedri ,  en  ce  con-  0xyce^r't- 
rraires  aux  autres  efpeccs  de  Ccdresie  Phenice}qui  ont  îesfueil-  cfniât' 
les  mouifes.  Les  MyrthesXonc.de  ce  nombre ,  combien  qu'ilz  ^"nù 
fôyent  de  diuerfes  fortes  :  les  vns  font  blacs,les.autres  font  noirs,  *  * 
les  autres  ont  la  fueille  cftroicle ,  &  les  autres  l'ont  large.  Encore 
y  en  a  il  vne  quinte  efp.ece  5  qui  nous  eft  fréquente  5  fçauoir  eft 
celle  qui  eftfeulcment  cultiucc  es  iardins  des  régions  froides.  - 
Tous  arbres  conifères  autrement  nommez  refiniferes,  excepté  le 
Larix ,  font  aufti  de  ce  nombre  :  lefquels  à  £n  de  les  fpecifier  par 
noms  François-,  les  dirons  tels  que  les  habkans  des  villes  &  villa- 
ges de  Sauoye &  Auucrgne nous ontaprins.Etàfin  quilz fovent .-.. 
entendus  ,  Tes  approprierons  auec  leurs  noms  anciens.  Ce  que 
maintenant  les  François  nomment  Aleuo,  auoit  nom  Pinafter,  ^âeuo. 
arbre  que  les  Grecs  n'ont  cogneu ,  difTerent  toutesfois  au  Pin  *«"#»". 
fauuage.  Ceux  que  nous  nommons  SuirTes,  font  du  genre  des  &*£***£?- 
Sapins ,  dont  les  \ns  font  malles  5  &:  les  autres  femelles ,  lefquelz  f /^*    n 
nommerons  Sapini  ou  Abietes  feemina^  Car  celuy  qui  ancien-  ^T       * 
nement  s'appelloit  Abies,  eft  différent  à  Sapin  us.  Vray  eft  que  Sjpa.. 
Abicsatrois  noms  François  :  car  les  vns  i  appellent  du  Sapin  ,  les  ^ùï^ 
autres  du  Vergno  y  les  autres  du  Sajp  :  mais  Sapinus  en  Latin  ,  eft  safm. 
npmmé.cn  François  de  la Suiffe.  Ecàfiade le  diftinguçr mieux,  v^l0'~ 
en  auonscymis  la  peinture.  .  SA?* 

Lsarbrc  tant  commun  partoute  Grèce ,  que-  les  anciens  nom-  Sm^-: 
mpyentPjcça^apluijeuts.  aorns  François  s,  cas  nous  tramions  P  -     • 


■aneucs. 
mi. . 


Pignets. 
pinsjdtfttd* 


Melefe. 
Orangers. 
Pommiers 
X^îàxm. 
Cttres. 
Foncière*. 
Citrons. 
IJmons. 
Carriers. 
Houx. 
^/Ccdcia. 
^fria. 
Cahiers. 
Palmes. 
Séné. 

Thxmstrin= 
des. 

^€ndrxch= 
nés. 

phylîca. 
Bïume. 
Btdx. 
Çypre's. 
Efiulus, 
Serras, 
ydagmda. 
Epbedrx. 
Sfaabdjk. 
Bruyère, 
phxnx. 
CijUs. 
Ijedon. 
Gknsl>ne 
guentmi. 
Xyerre. 
Hdiwm. 


$0  PREMIER     IIVRE.DES    SÎNGVLA. 

que  des  àabitans  du  Lionnois  fur  le  mont  de  Tarare ,  les  vns  ïc 
nomment  Pignets ,  les  autres  des  Pins  fauuages  :  mais  l'appella^ 
tion  Françoifè  dont  vfent  les  Sauomens  &  Âuuergnats ,  luy  efl 
plus  confiante  à  Pignets,  quelle  n'eft  aux  Pins  fauuages.  L'arbre 
le portratâdcU Suffi.  de  Larixnc  croift  point 

!  en  Grèce.  Les  François 
il     If'ifeli?  ^  ^tj^       •  lapaient  Mclefe  :  elle 
~  ~  '  ""  feulle  entre  les  conifères, 

deipoùille  fes  fueilîcs 
rhyuer:mais  cecy  eftfpe- 
cifiépius  pat*  le  menu  au 
liure  intitulé  de  Arbori- 
busconiferis.  LesOran- 
gers,  les  Pommiers  d'A- 
dam,Ies  Citres,autremec 
nommez  Pondères*,  les 
Citrons  ou  Limons  font 
auflidecenombre.Auui 
y  a  plusieurs  fortes  deCa- 
priers  qui  font  toujours 
verds-.dont  les  vns  croif- 
set  par  les  afpres  rochers 
de  Crece  y  aucuns  efpi- 
neux ,  les  autres  fans  ef- 
pines.LeHoux,  Acacia^ 
Aria,  ou  Àcillaca ,  les  ar- 
bres qui  portent  îaCaf- 
fe,&  les  Palmes,  le  Séné, 
Je.  Thamarindes  ,  les  ar- 
bres frequens  par  Grèce 
nommez  Andrachnes, 
Phy  iica ,  Larbrc  de  Bau- 
me ,  les  Buix  Jes  Cyprès, 
vn  arbre  de  Trapifonde 
qui  porte  des  Cerifes,Efculus  &  Serrus ,  autrement  nommé  Va- 
lagnida ,  Ephedra  ou  Anabafis ,  la  Bruyère,  Phana ,  Larbriffeau 
de  Ciftus,Ledon,&:  celuy  qui  eft  nome  Gïans  vnguentaria ,  font 
arbres  verds  en  tour  temp&Xyerre  blanc  &  noir,  Halimus.  L'ar- 


OBSERVEES     PAU    P.    SELON.  $1 

bve  de  Henné  naifkntehEgypte^utrcmcnt  nommé  Àlcana,eft  Bffine' 
en  ce  différent  au  Cyprus  ou  Liguftrum  ,  que  les  François  nom-  i£f"jUe 
mencduTroefne>pourcequii  fc  derpoiiilie  rhyuerdefesfueil-  Cqccu^ 
les,  maïs  le  Henné  les  retient.  L'arbre  nommé  Ucx ,  en  François  Gene^nm, 
Chefne  verd,&  l'arbriifeau  nommé  Coccus*  en  François  graine  unners. 
d'cfcarîatte,  Se  les  Geneuriers  /tant  grands  que  petis ,  Se  cinq  ef~  u»tifytem. 
peces  de  Lauriers  5  dont  l'vn  eft  fans  odeur.larbre  nommé  Len-  ùemm. 
tifque,donteft  faitleMaftich,  Licium  ,  Se  celuy  qui  porte  la  lai-  p*M- 
ne,îe  Romarin.  L'arbrede  Sebef&s^comore,  arbre  particulier  £*£    . 
en  Egypte  t  Se  le  Sauinicr  tant  premier  que  feconcb  Se  i'acbre  de  ^f  ". 
Thuya,&;  celuy  qui  porte  le  Liège  ,  M-£  L'arbre  des  Caroubiers,  ^hym. 
leNerion,&  Oenoplia-autrementappellé  Napeca,  croifTantpar  n^ca. 
îa  terre  d'Egypte ,  Se  Syrie:  Percea ,  Polcmonia ,  Se  vne  efpece  de  cenet 
Genefts  qui  croiffent  par  les  défères  d'Arabie.  La  plante  nommée  ^r^- 
Tragium5venant  en  Crète.  Acacia  altéra ,  Se  les  Myrobalaniers3  ^^^. 
Se  auffi  les  Saugiers  de  Crete/qui  portent  des  pommes  bonnes  a  £&* 
manger. Et  l'arbre-nommé  Anapala,font  verds  en  toutes  faifons.  ^J^. 
Laquelle  chofe  fçauons,n on  pour  l'auoir  leu  es  eferits  d'autruy, 
mais  pooF  l'auoir  obferué:car  nous  n'en  auos  eferir  aucune  cho- 
fesquenousmefmesnayonsveue.  Nous laiftbnsày mettre plu- 
fieurs  petites  plantes  qui  communément  ne  fe  defpoiiillét  point  Frelo»~ 
Miy  uer,comme  eft  le  Frelon,ie  vray  Thym^la  Sariette  de  Grèce,  Sariettr 
&  autres  telles  chofes ,  voulans  feulement  nommer  lss.  arbres  Se 
arbu  ftes.  Quelques  autres  corne  eft  le  Tercbinthe  ontefté  nom-  rberelmlx 
brez  du  reng  des  arbres  tou  ûours  verds ,  toutesfois  ne  les  auons 
voulu  eferire  >  ayans  crouuc  par  expérience  qu'il  en  eftoit  au- 
trement. 

Ob/èruation  des  Ueux  cbrconuolfens^quon  peut regarder ^eftxntfur h 
faifiedumont^thos.  '  Chapitre      xlv. 

I L  y  a  vne  manière  de  Caatharidcs  au  m  ont  A*hfîs<!i£  sttfnfik- 
I  fâ*  ferente  aux noftres  vulgaires,  que  les  Grecs  nomme-  Canthânics»- 
~srent  Bupreftis.  Elle  feroyent  de  façon  femblableaux 

{ Cantharides  communes- ,  n'eftoit  qu  elles  font  iau- 

acs ,  Se  font  fort  puantes ,  Se  plus  groifes ,  indifféremment  nour- 
2>ies,tant  fur  les  plantes  des  RonccSjCichorees,  Qttics,  Conifcsi. 
^u autres  herbages.  LesCaloieres  kfçaiicntBomer  de  lcu£aozo« 


$%  -niMiïîi  arv^CE   des    singvi/à. 

rwjfrijlL  ancien  Vouprifti.EUes  ont  desadîes  à  voler  comme  les  mouches. 
Ils  nous  donnèrent  raifon  formante  de  leur  appellation  ,  chofe 
qu'ils  ont  experimetéeà  leur  grand  donimage.Car  quand  les  be* 
fteschcualines&  autres  animaux  ruminans,  paifTent  l'herbe  que 
elles  ont  touchée ,  ilz  en  meurent  enflez .  Et  comme  la  morfurc 

:?refer.  de  la  vipère  nommée  Prefter ,  eft  vn  venin  pernicieux  aux  hom- 
mes, tout  ainfî  1  efpecc  de  Cantharide  iaune  qn'auos  derïhs  nora- 
mee,eft  vne  prefentepoifon  aux  bœufs:&;  croyons  qu'aufn  feroft 
aux  hommes-.  La  raifon  pourquoy  les  Grecs  l'ont  anciennement 
nommée  Bou prédis 5  eft  queilvnboeufou  vache,  que  les  Grecs 
nomment  Bous,en  paillant  l'herbe,  mangeoit  vne  telle  mouche, 
il  en  mourroit  prefentement  :  Se  bien  fouucnt  meurent  d'auoir 
feulement  mangé  liierbe  qu'elles  ont  touché.  Lon  trouue  en  cor 
autre  etymoïogiede  fon  appellation  antique,en diuerfes  maniè- 
res es  autheurs.Les  Platanes  du  mont  Àthos  peu  tient  eftre  com- 


*Cedres. 


Tlatanes..     ^^  eQ  nalîCeurâUX  Cèdres  du  mont  Liban,  &aux  hauts  Sa- 
.S£mïaxafre.  n  ai  ftre  fur  les  buiftbns,  Se  par  les  hay  es  de  la  montagne.  Lefem- 


ra. 


pins  dti  mont  Olympe  Se  Aman .  Le  Smilax  afpera  aime  aufli  \ 
naiftre  fur  les  buiftbns,  Se  par  les  hay  es  de  la  montagne.  Le  fem- 
blâble  fait  la  plante  de  Smilax  îxuis  ,  laquelle,  entendons  diftin- 
xmiUxU-  -guer  de  la  fatiueou  cultiuee  qui  porte  les  febues  de  diuerfè  cou- 
^k     "       leur  .Elle  aime  particulièrement  ànaiftre  en  hauteur  exceffiue  au. 
mont  Àthos ,  iufqucs  à  gaigner  la  fbmmité  des  plus  hauts  arbres 
•      r      des  Platanes ,  &cmpeftrer  leur  fuftpar  deffus  les  rameaux.  Elle 
2T         eft  de  la  nature  de  la  vigne  fauuage^qui  incefTamment  sefleuc  en 
jihedrx.      hauteur,&;principalenient  fî  elle  trouue  lieu  propice  à  s'appuyer. 
CommcaufS  fait  la  plante  d'Ephedra.  Si  par  fortune  le  Smilax, 
duquel  parlons  maintenant3tronue  vn  arbriffeau  qui  de  fa  natu- 
re ne  s'efleue  en  hauteur ,  auffi  ne  s'augmétera-il  en  rien  qui  pui£ 
fe  faire  arTaifTer  l'arbriiTeau ,  deftus  lequel  il  eft  appuyé.  Mais  au 
contraire, s'il  trouue  vn  haut  arbre,il  ne  cédera  qu'il  naitgaigné 
la  fommité ,  Se  fuft  l'arbre  haut  iufques  au  ciel.    Pas  n  efperions 
que  de  la  bouche  dVn  ruftique,  à  qui  demandafmes  le  nomdï- 
celle  plante  de  Smilax ,  eirft  deu  y  ffir  vne  fi  propre  didion ,  pour 
exprimer  le  nom  antique  de  fdn  appellation  :  Car  en  fon  vuîgai- 
smlUchla.    re  çrec  ^  [\  ja  nomma  Smilachia.   Le  plus  haut  de  tout  le  mont 
Àthos,  Se  quieftieplus  célébré,  eft  au  bout  du  Cheroneffe.  Et 
-n  r       pource  qu'il  eft  haut  efleué  en  l'air  ,  il  y  aquafi  toufiours  de  la 
P'Jà*  neige,  qui  dureiu%es.àl'efté.  Le  faille  eft  en  tout  fteriie ,  Se 


moi 


SbsÏb.Vies  Vas.  -*.  beloh.  23 

<  de  rochers  trefafprcs  &  difficiles.  Eftans  fur  le  plus  naut  faille  de 
la  montaigne ,  regardans  vers  la  parue  de  Septentrion  >  qui  eft  le 
cofté  ou  la  neige  refte  plus  long  teps  fans  fe  fondre,Ia  trouuions 
plus  fertile  ^abondante  es  arbres:  auffi  produit  le  plus  aherocs 
par  les  vallées.  La  partie  du  mont  qui  regarde  le  midy  >elt  aride, 
fterile^  fans  arbres,&  principalement  vers  la  fommite.La  fom- 
mitédelamotagne  eftfaite  corne  vnepoireicar  elle  eft  pometue 
fronde.  Il  ya  vnechappclledeffus  le  plus  haut  couper  :  cnla.  <£^ 
quelle  les  Caloieres  d?Agias  Laura  (  qui  eft  vn  monaftere  feue  J^ 
aux  racines  de  la  montagne)  vont  dire  vnféruice  en  enantanta 
vn  certain  iour  de  Tannée.  Leiour  eft  députe  entreux,  lequel 
tous  les  monaftcresfçauét  bien,  Se  croyons  que  ce  foit  aja  noitre 
Dame  d' Aouft.  Quad  nous  fufrocs  à  la  fommite  du  mot  Atnos 
îiousveoyons  clairement  îesiâes&les  paysàlentour    comme  ^ 

Ca(randria,qu'ils  nomment  Schiato,Scyros,Lemnos,T^os  ba,  J*^ 
mothrace,Imbros:lefqoelles  ifles  nous  voyons  quafi  aufli  a  clair,  ^^ 
quefi  elles  euffent  efté  plus  près  de  nous.  11  fait  mcefiamment  vn  -Lem0Sm 
froid  extrême  là  haut  deffus  le  mont:  encores  que  nous  y  fumons  Taps. 
en  plein  midy  aux  plus  chauds  iours  de  lefté,&:  que  l'air  foft  fans  s*moéwe. 
vent  toutesfois  il  y  faifoit  vnfroid  extreme,tellement  que  nous  ir^ros. 
a'ypeufmesgueres  durer.  De  la  defeendans-par  lapartie  qui  rc-^ 
garde  le  midy , nous  començafmes  à  approcher  du  pied  du  mont, 
ou  nous  trouuafmes  des  forefts  de  Sapins ,  &  de  Picecs ,  qui  font 
quelque  peu  différents  à  ceux  qui  font  ésferefts  de  Crète",  &:  a 
ceux  qui  naiffent  es  montagnes  d*Auuergne  :  car  leurs  Cônes  ou 
pommettes  font  de  telle  nature  qu  elles  tiennent  fi  fort  au  ra- 
meau ,  que  quand  on  les  attache  par  force ,  Ion  en  leue  vn  cf- 
clat  du  bois,quant  &  la  queuë:aum  font  polies  &  non  rabo-  ^ 
teufes  comefonties  autres.  Nousy  trouuafmes  delà  ternie,  &;  nu€e'dxnû^ 
grand' quantité  de  Feucedanon,  &Centoire  maieur.  L'on  ne  Cmumum 
trouue  aucun  chemin  par  la  montagne,  quelque  part  qu  on  aille,  ^^ 
qu'il  ne  faille  touûours  monter  ou  defeendre  :  car  tout  le  pays 

eft  inégal  •        •  ,   ... 

0  M  îij 


£d 


£■4  PREMIER     LIVRE      DES     SINGTIA. 

Les  Gdoîeres^ou  moines  du  mont\Athosjont  les  arts  mechantQuer* 
Chapitre    xlv  i. 

S&  À  auons  deferit  par  cy  deuant  que  les  Caloieres  fiîenr 
-*  leurs  laines  eux  mefmes  ;  parquoy  penfons  qu'il  eft  co- 
uenable  d'en  eferire  la  manière,  veu  mefmementque- 
leur  quenoille,  fufeau,&pefon,nefontfemblabîesà' 
Xs^caLïfr  ceux  dont  nous  vfons.  Leur  quenoille  eft  faite  de  Cane  ou  Rolk 
ro.  feau,fufnommé  Donax  :  Se  eft  taillée  feulement  entre  les  nœuds- 

Poaax.       de  trois-  articulations  :  en  forte  que  la  quenoille  n'a  que  deux 
pieds  de  longueur.  Ils  coupent  ladi&e  Canne  entre  les  articula- 
tions^ fin  de  faire  vnpertuis  par  dedans,qu  ilsfichet  trois  doigts 
delamaângauche,fçauo-ireftlepettt  Se  les  deux  autres  d'après,  fe 
referuans  le  pouce  Se  le  doigt  prochain  d'iceluy,  pour  tirer  la  lai- 
ne Se  la  diftribuer  au  fî!ec,&  1  adminiftrer  au  fufëau.  La  haute  ar- 
Mdwmde  ticulation  de  la  Canne,eft  en  manière  de  fourchette,  qui  fèrtàen- 
fler  des  Ca*  fourcherla  laine,  pour  mieux  tenir  en  la  quenoille.  Le  Caloiere 
kiertb.       filant  en  la  manière  de  Ton  pays,ne  fiche  pasià  quenoille  a  fonco^ 
'r~"  fté ,  mais  la  tient  feulement  de  trois  doigts  elcueeen  l'air.  Ils  ne 
font  point  grands  appareils  pour  leur  laine  :  car  il  leur  fuifit  de  1  a- 
uoir  lauee  c£eau  chaude ,,  Se  quelque  peu  cardée.  Et  par  ce  faut 
que  le&feau  fok  fak  de  mefme,  Se  correfpondant  à  la  quenoille. 
Ce  n'eft  donc  grande  merucillc,  fi  anciennement  les  a^jtheurs 
Grecs  nommèrent  quelques  herbes  de  nom  de  quenoille,  fufèau^ 
\&t*BiUs.  Se  pefbn  :rea*  encore  maintenant  l'herbe  de  AtracHlis  leur  fèrt  de 
fufèau,aufli  fon  fufteft  droicl  Se  poly,comme  s'il  auoit  cfté  rabo- 
té par  art.  Et  en  cas  qu'ils  ne  fe  ieruent  du  fuft  d' Atra&ilis ,  ils 
vfent  d'vne  petite  verge  déliée  ,  ou  bacquette  moins  grofTe  qu  eft 
fe  petit  âoigt^ d'vne-mefme  grofieur, tant  par  les  deux  bouts ,  que 
par  le  milieu,&  y  attachent  vn  fer,à  la  façon  d'vn  hameçon  à  pef^ 
T$m  des    ctter^qui  fevt  d'accrocher  le  fil ,  pour  pendre  le  fufeau .  11  eft  be- 
mt®.        foing  que  le  pefon  foit  correspondant  à  la  quenoille  Se  fufèaur 
auffin  eft  rien  femblabîeauecceluy  duquel  les  femmes  fe  fcruet 
à  noftrcvfage.  Etpourcequeîepefbn  nacftéinuentéfinopour 
filer  plus  commodément ,  Se  pour  donner  branle  &  poix  an  fu- 
feau ,  auons  bien  voulu  faire  entendre  que  le  pefon  des  Grecs  cfi 
ej^ore  maintenant  tel  que  lesanciens  l'ont  deferit ,  quia  exi  aur- 


OBSERVEES      FAR     P.    SELON.  $<} 

thorïté  de  donner  nom  à  vne  herbe  Se  poiffon  nommée  Sphon- 
dilion,  quefçauons  efke  plus  fréquente  en  Angleterre,  qu'en  S?*°*&1& 
France.  Leditpefbn  des  G  recs  refTembîe  à  la  m  oitiédvne  poire 
coupée  en  deux  parties  parle  trauers,  eftant  percée  par  le  milieu, 
«ayant  nulles  dents.  Us  tiennent  ledit  pefon  en  filant  contre- 
mont,&:  la  queue  du  fufèau  contrebas,  Se  retordent  lefil  d'entor- 
iure  correspondante  à  celle  de  ce  pays.  Nous  croyons  qu'il  n'y 
aitonc  eu  ville  fermée  en  tout  le  circuit  du  mont  Atbos  :  car  il 
n'y  en  a  aucuns  vefh'ges:  auiîî  fèmbleque  Vranopolis  ,  Palaeo-  frr^0/^ 
triura,ThyfTus,  Cleonc ,  Apolîonia  ?  CafTera,  que  Pline  anom-  ^jj^*™* 
mccSjfuflent  feulement  petits  villages  es  endroich  ou  font  main-  cieme  ' 
tenant  fituez  les  monafteres.  Nous  trouuafmcsvnCaîoicrequi  ^poÛonU 
eftoitnouuellementvenudelavillede  Sophie,  pour  demeurer  Cajfera. 
au  mont  Athos,  bon  ouurier  de  faite  âcs  bouteilles  de  clifiè,auec  Bouteilles  de 
>àcs  fions  de  Saules ,  ou  des  efeorces  du  Tillet ,  ou  bien  du  bois  c%fe* 
d'Ofier,  ou  de  cimes  de  Chaftaigner  ,  ou  autre  tel  bois  aiféà 
ployerjCommeefirefcorce d'Orme.  Apres  qu'il  auoitacheué  le 
corps  de  la  bouteille, Se  bien  cîifTéjencores  reftoitàl'eftanehenSÉ 
pour  ce  faire,  il  prenoit  de  la  refîne  de  Picea  nommée  Pefkine,  xefoegr^e 
&:en  Latin  Spagas,  de  diction  dont  Pline  a  vfé:  laquelle  eftant  despccesrfc 
grafTe&lente,iliacuifoit  vnpeu,  Se  chaudement  la  iettoitde-  mecfeffyne. 
dans  la  bouteille:  alors  la  refine  en  remplifïànt  les  pertuisdes  o-  sp^: 
fiers , Se eftoupant  lescauitêz  descliffes,  deuenoit  dure,  Se  par  -Bo*mi^s 
telle  manière  rendoit  la  bouteille  eftanchee.  Telles  bouteilles  de  reJmee>' 
clïfïè  refînées  font  de  la  meilleure  façon  que  Ton  fçachc  deman- 
der pour  gens  qui  von t  par  chemin  :  car  elles  ne  font  fubiectes  à 
fè  fendre  au  Soleil  comme  le  bois ,  n  afc  rompre ,  comme  de  ter- 
re :  Se  ne  font  pefàntes  comme  d  eftairu  Et  d'autant  qu'elles  font 
îegicres  Se  de  longue  durée,  Se  que  les  ouuriers  qui  les  font  fe  tic- 
nent  à  Sophie,ccux  qui  les  vendent  par  les  ifîes  de  Grèce ,  les  ap- 
pellent bouteilles  de  Sophie,  qui  eft  vne  ville  de  Grèce  au  pays  de 
Seruie.  Defquelles  bouteilles  de  cliifc  les  Valaques3Bulgares,  Se 
Sercafifes  vfent  moult  volontiers. 

M    iiij 


5>6  Pl£ M  1ER.     L I V K  E     D  E.S      S I N  C  V  L  A. 

Des  Cancres  £eandouce^  c^ui Ce  tiennent  es  ruiffeauxparles  montagnes^ 
différents \tt  no%Efcrewffes*  Chapitre  XLV  il. 

t  N  cheminant  par  la  montagne,  eftans  à  pied,  noffre 
Iguidenous  efguara hors  du  chemin  cogneu ,  n  ayans    . 
\  porté  des  viurcs  auec  nous,  &  nepeufmes  arriaer  au 
*c=?G=3»i  loir  ou  nous  prétendions  :  car  d'aller  à  cheual  parles 
montagnes  de  ce  territoire,qui  ne  {uyuroit  legrand  chemin,il  n'y 
auroit  point  d'ordre:  nyauffi  à  pied ,  finon  d'vne  gayeté  de  cceu^ 
&,  d'vne  délibérée  volonté,d'vne  indefati  gable  labeur.  À  la  parfin 
eftans  arriuez  le  foir  à  yn  ruiffelet ,  trouuafmes  tant  de  Cancres,, 
qui  ne  reffemblent  pas  aux  Efcreuiffes^que  Ton  en  euft  peu  pren- 
dre mille  prefentement  en  vninftant.  Le  Caloiere  les  mangeoic 
cruds,&  nous  arTeuroit  qu'ils  eftoyent  meilleurs  que  cuids.Nous 
en  mangeafmes  auec  lu  y  .3  &  ne  nous  fouuient  auoir  onc  trouué 
gouft  en  viande  qui  ait  fernblé  plus  délicieux,  &  fa-uoureux,  ou 
fuft  pour  IVrgente  neceffité  de  faim ,  ou  pour  la  nouueauté  de  la 
cSp*  d'eau  viande.  Quand  eufmesveu  que  ces  Cancres  de  flçuue  ertoyent 
dwee.  .       dinemblables aux  Efcreuiffes ,  nous  penfions  qu'ils fuuent  venus 
^#--;   delamer:  mais  retournans  en  derrière,^  regardans  le  colle  de  la. 
mer,  trouuafmes  le  lieu  (î  haut  & de .difficile  açcez,  qu'il n'eftoiç 
pas  poffible  qu'ils  y  euffent  peu  monter  :  U  y  regardant  déplus 
Cancres  de  preSjtrouuafmes  qu'il  y  auoit  grande  différence  entre  eux  &:  ceux 
mer.  de  la  mer ,  &  là  notafmes  exprenement  qu'il  y  a  des  Cancres  es 

Etegi*  aru*  fleuues,  différents  aux  Efcrcuiffes.  Nous  trouuafmes  vne  forte 
<&  j  d'herbe  en  la  vallée  nommée  Elegia,de  laquelle  ils  prénét  les  ra- 

meaux,dot  fe  feruent  pour  efcrire:car  ne  les  Turcs ,  ne  les  Grecs 
ne  fçauent  nullement  eferire  auec  vn  tuyau  d'vne  plume  d'Gye* 

Tïtl'eftrawe  manière  de  vivre  des  religieux  Grecs  :  &  de  leur  anjlers 
façon^fuperjîition^  cérémonies  jonchant  le  boire  & 
manger.  Chapitre  xlvi il. 

I  en  auons  voulu  eferire  vue  effrange  manière  de  vi- 
ure  d'vn  Câloicre ,  pour  faire  entendre  comme  les  au- 
tres ont  de  couftu  me  de  fetrai&er.  Le  lendemain  e- 
ftans  arriuez  au  monaftere  nomme  Simeon ,  vn  des 

Caloicrcs 


'OttS'Efc'VEÉÏ     *À**.    BELOK.  97 

Caloieres malade  afthmatique,quicftoit forgeroou  marefchal, 
auoitvneficbutclcntc:  &  auec  tout  cela  auoit  vne  forrgrande 
toux  &toufioursaltcrê:lcqaclnousconuyantafon  dnner,aa 
temps  d'vn  Saracofti.c  cft  à  dire,  vn  de  leurs  carefmes,nous  don- 
na de  ce  qu'il  auoit  en  délices.  Ces  Caloieres  ne  inagent  du  poif-  u**#h** 
fonquiaitrangïduraiuietcm?sdeleurscarefmes:  qui  eft  la  rai- ^  ^ 
fonpourquoyilfaut  qu'ils  viuent  d'herbes,  &  autres  tels  appa- <*- 
reils "maigres  quand  ils  ieunenr.  Ilnousappora uk  la  Roquette, 

enons.tt  de  beaux  petits  Ailiers  verds.  Toutes  lefquelles  herbes  PûW4^ 
ils  prennent  es  iardins  de  la  communauté  dumonafterc,  comble 
que  quelques  vns  en  cultiucnt  en  particulier.  Et  mengeafmcs  les 
herbes  fufditcs  crues  fans  huile  ne  vinaigre  :  car  telle  eft  lacou< 
ftumedeviuredecespauuresgens  ^.11  nous  apporta auffi,  des 
Oliues noires  confîdes ,  qu'ils  appellent  Demarties  ,  dubifcmt  £" 
bien  noir ,  &  du  vin.  Ces  Caloieres  pour  n  auoir.  occafion-  de  J>emartii^ 
chauffer  bien  fouuent  le  four,  vfentde  bifeuit.  Il  appel  a  deux  de  mJfonir^ 
fes  compagnons,  qui  apportèrent  quelques  poiffonslalez&dei-^. 
feichez,Seiches,  Pourpres ,  &  Cafterons.  Et  en  ce  temps  la  peu-  seiches. 
lient  bien  manger  déroutes  efpecesdeCancre^eLimaxdemer,  p««i«. 

&««qu^  °f  ^  f^ 

eequ ihr/ontfang.  Le  pauuremalade  fe  coplaignoit  den  auoir  ^ 
point  d?ar>petit.  Difoit  que  n  euft  efte  qu  il  gardoit  des  noix  de-  ^^ 
puis  le  commencement  de  fa  maladie  pour  manger,  il  euft  die  ^ 
long  temps  a  enterré  :  &  pëfoit  ne  tenir  fa  vie  d  autre  ehefe,d  au- 
tant Quelles  luv  donnoyent  appétit  de  manger  du  pam ,  qu'il 
trempoit  en  l'eau,  fcdesOîiuesfalees.  Ces  Caloieres  commen-  ateflk* 
centtoufiouïsleursrepasparOignonscrudsaueedcs  Àux:&le  <*â  » 
principal  de  leur  difner  font  Oliues  falees ,  &  rebues  trempées  en 
feau,&  finiftent  par  Roquette^  Greffon  aleneis:  &:  de  quelque 
eftat ou  condition  qu  ils  foyent/ains  ou  malades,n  ont  l'vfage  dé- 
mettre de  l'eau  dedans  levin.  Quand  cufmesveu  la  manière  de 
viure de  ceftuy  cy' ,  luy  voulans perfuader qirilmangeaftde  bon 
poiffon  frais ,  fçachansqu'il  eftoit  fort  maigre  >  &  que  ion  corps- 
eftoit  fort  çxtenué^efpondit  que  quand  il  luy  euft  eonuenu  pte- 
"     fentement  mourir,  il  n'en  euft  voulu  manger,encore  moins  de  la- 
chair.  Telle  opinion  de  viure  ainû>'cft  pas  feulement  es  Caloic- 
les,  ne  es  preftres  Vautres  gens  dXglifede  Grèce  ,.. mais  au iîiaiu 


%     $%  PREMIER     LIVRE     DES     SING.V1.JU 

^Mcomraun  populaire,  qui  pour  mourir  ne  voudroyent  (pendant 
/Anieurcâœrme)  manger  dupoi/Ton<iuiaang,n,autrccliofcgraflc: 
/mutions    ^anc  il  foin  aufteresjà.obferucr  telles  fuperftitions, 

Jùperftitlm» 

fis,  VoyAg:  du  mont  ^thos  à  Salonïfy  :  &  desfoijfons^res^uon 

ypefcht.  Cbafr      xiix. 

E  s  monafteres  qui  font  fituez  au  riuage  de  îa  mer, 
comme cftLaura,  Yucro,  Vatopedi&  plufîeurs-au- 

I  cres,ne  veulent  laiûer  leurs  nacelles  larmier  au  porc  ne 

j:<Q**&l  au  riuage  dalamcnprincipalemëtceux  qui  n'ont  leur 
port  bien  four  :  parquoy  ils  les  tirent  hors  de  l'eau ,  &  pu  is  les  en- 
fermer en  quelque  lieu , ou  les  portes  font  faites  de  fer,  à  fin  qu'el- 
les puiffcntrellfter.au  feu  des  pyrates,  11  n'y  a  pas  grande  quantité 
^eîonsports  à  lenteur  dek montagne ,  fînon  à  Vatopedi,  &rà 
Xaura  :aurlkiefement  beaucoup  déforment.  Mais  eux  qui  çul- 
tiuent  les  vignes,  Oliuiers ,  Figues,  Oignons,  Aux,Febues  Se  lé- 
gumes ,  font  cfchange  de  leurs  biens  auec  les  mariniers  qui  leurs 
apportent  le  bled ,  ou  bien  l'achètent  à  pur  argent.  Nous  auons 
Maidins  i»  veu  des  moulins  en  ce  mont  qui  meulent  àfi  peu  d'eau ,  que  le 
mont^A*    ruiffeann  a  fon  cours  plus  gros  que  le  bras.  Car  ils  maiïbnnétvn 
cefèniouer  en  lieu  bas,ayant  la  partie  d'enhaut  bien  large.  Le  bas 
-eft  fait  en  eilreciflant  comme  vn  antonnouer ,  ou  il  y  a  vn  pertuis 
-dontl'eau  fort  de  fîgrande  roideur,quc  donnant  contre  vne  peti- 
te reuefake  d'autre  manière  que  ne  font  les  noftres,elle  pourroit 
faire  tourner  quelque  grande  meule  qu'on  vou  droit.  Ils  amafîènt 
les  bayes  des  Lauriers ,  dont  y  a  grande  quantité  par  les  vallées, 
■     ^  j     dont ils  expriment  rhuile,qu  ils  enuoyent  vendre  par  les  villes  de 
MayesdeLtu*  ^  a^ckie>Bulgaric)Seruie,&  autres  lieux  circonuoifins.  Us  y  pef- 
rier.         vchent  des  Ours  de  mer,que  ceux  de  Naples  &:  Miïïine,nommcnt 
oundemer*  Ma&acara,  qui  font  quaû  femblables  à  vn  Homar ,  mais  ils  n'ont 
Mdjfitcara.   point  de  force  non  plus]  que  la  Lapgufte ,  co  mme  an  lfi  ne  font 
jiomar.      entournez  de  picquerons  non  plus  que  le  Homar  :  car  la  Lan- 
zangufte     gUfte  çft  piCqUantc  par  tout  le  defïus  du  dos  ,  commeeft  i' Yrai- 
Trxigne  de   gncjç  mer#  £t  ^c  fajc  ce  £ut  fe  ce  poiflTon  duquel  Suétone  ente- 
sdomcli     ùlt  >  e^criuanc  ^u  merfait  de  Tibère  Ccfar ,  qui  fei  t  defehirer  tau  t 
Thejfdomcx  kvifage  d  vn  pauure  pefcheuraucc  la  dure  efcorcedVneLan- 
gqftç.  Nous  la  poviuons  bien  nommer  Sauterelle  de  mer,  Car 


OBSERVEES     FAH     F.     BELOtf.  $$? 

ce*  que  les  Marfeillois  dient  en  langue  corrompue  Langufte, 
pounroiteftre  appelle  en  pur  François  Sauterelle.  Parquoyvou- 
îanscxcufcrlafauteaduenueenrmipreffion,  faite  en  noftre  ab~ 
fencc,  fur  la  tranfpofkion  delà  figure  de  ce  pouTon  à  vn  autre 
chapitre  au  iiure  àcs  poifFons  >.  en  auons  voulu  admonncftec 
kle&eur.. 


Portraifâ delà  Languftf,  que  les  Grecs  nomment  Carabm^, 
&  en  François. Sauterelle*. 


Eftàns  partis  du  mont  Athos  pouraïïer  a  Salônichi,y  arriuaf-  , 
mes  facilement  en  deux  ioumces.  Salonichi  eft  grande  ville  bien  T° T\ <  \ 
renommée  &  riçhe>anciennement  nommée  Theffalonica,  de  la-  T°ej**  °**** 
quelle  fainâ:  Paul  a^faid  mention.  Elle  eft  fituec  en  Thefïalie, 
ioignant  Màcedoîne,ou  la  pefteauoitteîîemét  débauché  les ha- 
bitans>quilsJaiucoyentia.-viile>&:  abandonn  oient  leurs  biens.  Les 
Turcs  entre  toutes  autres  nations  font  ies-gens  qui  font  le  moins  Les-  Tur& 
d'cftime  de  hanter  ceux  qui  font  frappez.de  pefte  :  choie  qtVauos.  ****.  Peur 
aperecue  à Salonichi.No^ne  fufmes  q  deux  iours  en  chemin,  ve-  ^^fffe" 
aâsdkSalonichiaux  minières  de-Siderocapfa  en  Màcedoinc,qui . 

N.  ij 


IOO  PREMIER     LIVRE     DES    SÏNGV-LA. 

j&ryfim*  cj|  ccî;]c  place  anciennement  nommée  Chryfîtes  :  maintenant 
eft  vit  village  dauflî  grand  reuenu  au  Tu rc,pour  la  grande  quan-r 
titè  de  1  or  &  de  l'argent  qu'on  y  fait,  que  la  plus  grande  ville  de 
toute  Turquie  :&  toutesfois  n'a  pas  long  temps  qu'on  a  comme- 
ce  de  nouueau  à  tirer  la  mine  pour  faire  l'or  Se  l'argent.  Le  village- 

$Ucr6Cdpfa.  eftolt  auparauant  mal  bafty,  mais  maintenant  il  fcmble  à  vnc  vil- 

loacbimjtal  le.Siderocapfà  eft  entre  les  vallées  au  pied  d'vn  mot  afti  s  deiTas  vn 
hau tau  pendant d'vne  montagne,  laquelle  ne  fçaurions  mieux 
comparer, qu'à  la  ville  de  Ioachimftal  au  pays  de  Bohefme,  nom- 

raUisi&ach  meeen  Latin,  rallis  IoachimicaXcs  métaux  que  l'on  tire  à  Sidero- 
capfa,font  caufes  que  les  hommes  qui  tirent  la  mine,fe  foyent  re- 
gez  là,&  Tayent  rendue  plus  peuplée.  Ils  y  ont  fait  de  tre&eaux 
iardins  Se  vergers,  &ry  a  de  l'eau  par  tout  qui  rend  les  iardinages 
beaucoup  plus  commodes:&:  fur  tout  les  vignes  qui  font  aux  en- 
uirons,font  fort  bien  cultiuees.  Ceux  qui  habitent  aux  minières 
de  Siderocapfa,font  gens  ramaffez ,  Se  vfent  dclangagc  différent, 
comme  Efclau  on,  Bulgare,  Grec,  Aibanois. 

Ves  mines  dor&  d'argent  dugrand/èigneur,  &  ample  difeours  de 
l'origine  du  fin  Qr.  Chapitre      L. 

1  Iderocapfa  eft  fituée  en  Macédoine  ioignant  Seruic. 

'  Et  penfbns  que  c  eft  le  lieu  duquel  Diodore  aeferit, 

*rtir<&  wL  ^^nc  ;  *luc  Pbilippes  père  d'Alexandre  le  grand,feit 

siâerteapfa.  tgîisgSl  premièrement  forger  des  Philippusd  or,quandCre- 

ThliftMs  *  nîdas  eut  rctrouuc  les  mines,  Se  les  eut  mis  en  valeur  :  &:  dit  que 

for.  des  ce  temps  là  elles  rendoyent  chaque  année  mille  talents  d'or, 

Se  beaucoup  d'auantage.  Les  ouuriers  merallaires ,  qui  y  befon- 

gnent  maintenant,font  pour  la  plus  part  de  nation  Bulgare.  Les 

payfans  des  villages  circonuoifins,qui  viennent  au  marché,  font 

Chreftiens,&:  parient  la  langue  Seruienne  Se  Grecque.  Les  Iuifs 

çn  cas  pareil  y  font  fi  bien  multipliez ,  qu'ils  ont  fait  que  la  langue 

Efpagnoîle  y  eft  quafi  commune:  Se  parlans  les  vns  aux  autres,ne 

parient  autre  langage.  Nous  arreftafmes  quelque  peu  plus  long 

temps  à  Siderocapfa  ,  pour  regarder  les  mines,  &auiTiqu'a- 

'•  liions  delir  de  fçauoir  la  manière  comment  l'or  eft  tiré  hors 

<**£»»*  de  fa  veine.    Et  entant  que  l'or  eft  le  plus  parfait ,  Se  le  plus 

pur  de  tous  les  métaux  3  Se  qu'on  luy  a  donné  tant  de  diuers 


OBSERVEES    V AU     P.  3EIOK.  101 

aorns  en  Europe,  auons  bien  voulu  examiner  s*ii  les  ac^ue- 
roit  en  fit  minière  i  mais  auons  crouué  que  Ton  impurité  ne 
procède  que  de  l'infidélité  de  ceux  qui  font  caufe  de  le  méfier.  . 
Les  orfeures  &  les  monnoyeurs  îuy  attribuent  diuersnoms ,  le 
mettans  en  eftime  de  plus  haut  pris  Fvn  que  l'autre,  dont  l'vneft 
^itordcducat^autreordcfcujrautreor  de  maille,  l'autre  or 
de  piftolet ,  le  Faifans  valoir  vingt  caratzj'autrcdixhuia^ainfi 
4es  autres,tant  du  plus  que  du  moins.Mais  tels  noms  &:  di^nitez 
ontprinsleurnaiffanccen  diuers  pays,ouilaefté  adultère»  fo- 
phiftiqué,&:  falfifié  par  l'infidélité  de  ceux  qui  l'ont  méfié  &muî- 
tiplié  auecautres  meflanges  de  métaux  de  moindre  valeur  ,  & 
moins  purs  qu'il  n'eft.  Laquelle  multiplication  a  efté  inuentee  à 
la  volonté  de  ceux  qui  l'augmentent  es  efpeces  des  monnoyes  ^ 

moderncs.GarlcsDucats^rcusPhîlippus^ngelots^ortuga-^W^^ 
loifes,  font  diuerfement  forgez  d  or  pur  ou  impur.  L'inuention-^  or' 
n'en  eft  pas  moderne  :  car  nous  trouuons  que  desie  temps  de  la 
grandeur  des  Romains,  la  Republique  ne  pouuant  fournir  a  la 
defpcfê  de  Ces  guerres,diminuoit  quelquesfois  le  pois  de  la  mon- 
Bovcpourgaignerdefifus  :  comme  auffi  fophiftiquoit  le  pur  ar- 
gent ,  &  y  mefloit la  hui&iefme  partie  d'erain  pour  l'augmenter. 
Nature  n'àiamais  pris  pafFetcmpsà  faire vne  plus  parfaite  fub-  PafiBio» 
{lance  élémentaire,  que  l'or  :car  il  eft  autant  pur  &  net  en  fa  qua-  ie  tor. 
lité ,  comme  font  les  amples  elemens ,  defqucïz  il  eft  compofé.  Qu^tédc 
Ge  n'eft  donc  pas  à  tore  fi  nous  l'auons  en  prix  d'excellence  fur  *or* 
toutes  autres richeflès,!&  l'eftimonsànoftre  iugemcnteftreplus 
précieux  que  les  autres  métaux  :  Car  naturcs'eftanteibatueàle 
compofer  proportionné  d'égale  quantité ,  bien  correfpondantc 
en  fy  mmetrie  des  elemens,!  a  rendu  de  fon  origine  ia  purifié ,  co^ 
me  font  les  mefmes  elemens  fimples:&  par cefte  conion&ion  de- 
lémens  enfemble  en  vertu  égale ,  a  engendré  vne  tant  délicate  & 
parfaite  mixtion  d'indiflblublc  vnion ,  compofant  fi  fidèlement  xVtf^£ 
fa  iiaifon,  qu'elle  en  à  fait  vne  pafte  incorruptible,  qui  eft  perma- 
nente à  toute  éternité  en  fon  excellence  &  bonté.  C'eft  la  caufe    . 
pourquoy  il  ne  peut  eftrc  vaincu  des  iniures  d'antiquité ,  &  qu'il 
ne  peut  contenir  en  fcy ,  ne  fupporter  vne  excrcfcence  &  fuper-r 
fiuité  de  rouille.  Car  combien  qu  ildemeu  re  enfeuely  en  leau, 
ou  en  feu ,  quelque  longue  efpacc  de  temps ,  toutesfois  il  n'en  eft 
iamais  taché,  ny  en  acquiert  autre  qualité  fans  aucun  déchet. 

N  iij 


IOi  PKZteltK     tlV  RE     DES     SIKGVLAl  ^         />- 

C'eft  le  priuilege  qu'il  a  particulier  par  défais  tous  autres  mé- 
taux. Les  minières  de  Siderocapfa  rendent  vne  moult  grande 
fomme  d'or  &d'argent  à  l'Empereur  des  Turcs:car  ce  que  le  grad' 
Turc  reçoit  chaque  mois  de  fa  part/ans  en  ce  coprendre  le  gaing 
des  ouuriers  ,  monte  à  la  fomme  de  dixhuid  mille  ducats  par 
mois  quelquefois  trente  mille,  quelquefois  plus,  quelquefois- 
DizhwB     moins.Les  rentiers  nous  ont  dit  nauoir  fouuenance  qu  ellesay  et- 
mil  ducats    moins  rapporté  depuis  quinze  ans,quc  de  neuf  à  dix  mille  ducats 
fArchaftc:  par tnois^ou-r ledroicl dudiû-grand feigneur.Les metauxy  font1 
""toumm  â®ncz Par  le  IàDCur  tanc  <&s  Albanois  ,.Grecs ,  Iuifs,  Vallaques,, 
befinZms  Ce£caifcs,&Seruiés,que  des  Turcs.  Il  y  a  de  cinq  à  fix  cens  four- 
esrmtesde  neaux  efpars  par  les  montagnes  de  Siderocapfa,  qui  fondent  or- 
sideroaffd.  dinairement  la  mine  :  &  n'y  à  fourneau  qui  n'ait  fes  particuliers 
cinq  cens     rnaiftres ,  qui  y  font  befongner  à  leurs  defpens.  Les  ouuriers  qui 
fonrïXMx.    befehent  la  mine  dedans  terre ,  &squi  tirent  àmont ,  n'ont  point 
Caducée.      ]»v{^ge  fe  eaducce,qui  en  Latin  eft  n ommee  Virga  diuina,  donc 
Virgo.   ni*.  jeSjy  cm£s  vfenc  en  efpiant  les  veinesimais-iàns autre  fort  ne  cal- 
%'rite7:      euîation  fuyuent  félon  ce  qu  iîz--onti:rouué  en  befehant.  Les  e£ 
MarcAJite^  pece&de  Pyritez^ou  Marcafkez,  y  font  de  diuerfes  couleurs.  Hz. 
çbryfico&t.  ne  trouuent  point  d'or  ne  d'argent  tout  pur ,  fans  auoiréfté  fon- 
cojpdtim^.  du.  Il  n'y  a  point  deChryfocolla,ne  de  Cobaltum:&  ne  fe  férues 
point  de  charbon  de  terre.  Il  n'y  a  aucunes  rieurs  en  leurs  mines, 
ïlz font l'exco&ion  des  métaux autremet  qu'en  Alemagne.Lor- 
donnanec  &  raifon  faite  entre  -les  metalîaires  y^eibbienabièr  uee 
comme  esautres  pays:&  celuy  qui  departoit  l'argent  d'auecl'or, 
par  la  vertu  de  Peau  forte,eftoitChreftien  Arménien.  Les  noms 
dont  ilz  vfènt  pour  le  iourdhuy  à  Siderocapfa -en  exprimant  les 
chofes  metaliiqucs,ne  font  pas  Grees^e  Turcs  :  carJes  A4emans 
qui  commencèrent  nouuellement  à  befongner  aux  fuidides  mi- 
nes ,  ont  enfèigné  aux  habitans  à  nommer  les  chofes  métalliques 
esxcrres  &  inftrumens  des  minieres,cn  Aîeman,que  les  eftragers 
soittiaues    tant  Bulgares  que  Turcs.ont  retenu.  Les  boutiques  fontdirfe- 
d&  mmes.    rentes  à  celles  d'Alemagnc.  liront  coufiume  de  befongner-  tou- 
teîafepmainc,  çommençansle  Luridy ,  &  finif&nsîè  V-endred^ 
aufoir,  d'au  tant  que  les  Iuifs  ne  font  rien  le  Samedy.  Toutes  les 
cheminées  ou  fourneaux  >  font  faites  le  long  des  ruiffeàux-  :  Car  il 
faut  que  la  roue  qui  efleue  les  fourBcts ,  fbit  virée  par  la  force  de 
ilcau.  Il  y  a  fept  ruiflêaux  qui  font  tourner  lefdi&es  roues.  Les  . 


suiffcaux  fc  nomment  ainfi  comme  s  enfuit.  Le  premier  Pianizç, 
rautreAmerpach;rautreKyprich.  Ceux  de  la  partie  d'Orient: 
s'appellent  Rofchetslfvotz.  Les  Fourneaux  ou  lonforïdksPy- 
cites,font  de  petkecftoife,&:  font  feulement  couuers  de  merram 
&:  de  membrures  debois ,  en  forme  d*appantis.   Les  cheminées 
'  fontlarges,&fontamïes  au  milieu  de  la  maifon,  renforcées  de 
forte  maiTonnerie  par  le  derrière  ,  maispar  ledeuant  -fontdclc- 
giere  clofture  qu'ils  rompent  le  vendredy  au  foincar  eftans  ainu 
faites,  quelque  peu  voûtées  yrcçoyucntvnc fumée  ou  foycblan- 
cheyanciennement  nommée  Spodos.au  lieu  ou  donne  la  flamme  ^j^ 
enfondant  iamme:îaqucllefuye  sattachcàlacheminee^n  sex-  ?*?el 
Valant  de  la  vapeur  du  métal.  Le  vulgaire  des  Grecs  la  nomme  ra?uU  ^ 
Papehïes  autres  la  nomment  Papula.de  laquelle  ilz  n  ont  point  Pmtbvx. 
^'vfage^&rn'cft  en  aucune  eftimation  entre  eux.  Lonytrouue 
■    auffi  du  Pompholix,qui  eft  quelque  peu  plus  blanche  que  la  fuf-  ^^  ^ 
di&c  :  &:  qui  vouldroit  en  recueillir ,  tant  de IVnc  que  de  l'autre,  min^ 
loncn  tronueroit  facilement  dix  Hures  toutes  les  fepmainescs 
cheminées  des  fourneaux.  LesfoufHets  de  la  boutique  font  tous 
^rois,ayant  le  nez  contre  terre,  au  fond  de  la  cheminée.  Hz  font 
«fïeuez  &  "abbaiflèz  des  bras  qu'vne  roue  enuoye,  qui  eft  tournée 
iorsdclamaifonpar  la  force  de 1 eau.  La  roue  a  deux  croifecv 
qui  font  huit  bras  ,  fichez  par  le  milieu  au  trauers.  Les  quatre 
.  premiers  bras  prenait  les  foufflets^  les  autres  quatre  ne  feruent 
.pas  continuellement  :  car  ilz  font  dédiez  à  faire  foufiier  des  au- 
tres foufflets,  qui  feparent  le  plomb  dauec  l'argent.  Lafufdi&e 
cheminée  ou  fourneau  a  vnc  grande  bouche ,  par  laquelle  on  îc- 
âc  le  charbon  Se  la  mine  pour  fondre ,  ores  de  hm ,  ores  de  lau- 
tre.Et  y  a  deux  péris  percuis  en  la  cheminée.  L'vn  eft  en  bas  con- 
tre terre,par  ou  s'efcoule  la  mine  fondue  :  l'autre  pertuis  eft  quel- 
que peu  plus  hault  au  milieu  de  la  chemince  qui  eft  le  fpiracle  du 
ventquifort  pariài&lefeu  ayant  affaire  de  s  exhaler ,  prendrait 
pariceiuy  pertuis.  La  matière  qui  fort  par  le  pertuis  d'embas,  de- 
ualleauecfonexcremét,qui  toufîourscftau  deflus,&:  faut  qu'on 
Tofte  continuellement  de  deflus  le  métal  qui  eft  au  fond,  en  vn  ^^ 
petit  pertuis  ioignantle  fourneau.  Et  pour  autant  quelesexcre-  J^^_ 
mens,qui  font  les  plus  legers/ont  inutiles" ,  les  ouuners  les  oftent  ^^^ 
-  peu  à  peu  ,&:  les  ie&enticarcn  fc  refroidifiant  fontvnecrouftc 
iurlemetalaquilzoftcntauccvneverge  de  fer  ;  mais  i'or&lar- 

N  iiij 


Î04  FREMfEît     I.ITRE     I>ES     SINGVLA. 

<rent  &  le  plomb  qui  font  méfiez,  Se  font  plas  pefàns  >  fc  tiennent 
au  fond.La  manière  de  feparer  le  plomb  d'auec  l'argent ,  eft  faite- 
non  par  la  forée  du  feu  de  charbon ,  mais  feulement  à  la  flamme 
de  feu  de  gros  bois,  qu'on  foufïïeviolcntement.  Il  faut  pour  tel 
affaire  que  les  foufHets  foyent  couchez  d'autre  manière  que  les 
premiers  :  car  les  deffufdids  font  droids  Vfouftenus  fur  le  nez  :  Se 
ceux  qui  font  pour  feparer  le  piob,font  couchez  obliques ,  fout- 
flex  par  mcfme  moyen  par  laforce  de  leau ,  Se  eleuez  de  quatre 
bras5comme  auons.dit.Le  plomb  ,'^qui  fort  ainfi  foufHé  à  la  flam- 
me du  bois,  eft  différent  à  celuy  qui  eft  fondu  aucc  le  charbonr 
&:  ne  femble  pas  eftre  plomb ,  mais  pluftoft  excrément  de  metaL 
MoUui-       Le  vuigaire  des  Grecs  l'appelle  Moliui,  qui  n'eft  autre  chofe  que 
x^W.     plomb  en  corps  de  Ly tharge,  qu'on  appelle  Molibda?na:iâquellc 
Moiiâqu.  puis  après  eft  refondue  pour  en  faire  le  plomb.  Et  d'autant  que 
l'argent  en  fera  mieux  purifîé,d'autant  en  ferail  plus  fin.  Les  La- 
tins ont  nomme  l'excrément  de  l'argent  Scoriacé eft  ce  qu'on  dit 
S~mA*        en  parolle  deshonnefte  inerde  d'argent ,  laquelle  les  mecallaires 
iedent  comme  chofe  du  toutinutile.  Les  Grecs  1  appellent  vufc- 
itptetK      gairement  Lefchen  :-  Se  toutesfois  c  eft  vne  didion  que  les  Aie- 
mans  leur-  ont  apris.  Quand  iî^veulent  recuire  la  Galène,  c  eft  a 
direenfaimlexcodion,  après  qu'ilz  l'ont  quelque  peu  commi- 
nuee^ilz  la  iedent  deflus  du  feu  de  charbon  &  de  bois ,  qu  iîz  ont 
G&M*      Jà  fait  en  la  place.  Leur  Galène  eftâc  dure  comme  pierre  de  Mar- 
bre ,  fêroit  autrement  forte  ala  fournaife ,  s'ilz  n'en  faifoyent  ex- 
codion.  Bz.la  mettentauee  beaucoup  de  bois  Se  du  charbon,fai- 
fans  vn  lit  de  Galène ,  Se  confequemment  méfient  les  vns  parmy 
ks  antres.  Se  y  mettent  le  feu ,  iufques  àce  qu'elle  ait  change  de 
couleur:puis  la  mettent  fondre  en-la  cheminée.  Liuius  defenuac 
é&fa.     les  mines  de  Siderocapfa,  anciennement  nommée  Chryiite,  dit 
que  les  Roys  de  Macédoine  eurent  bonne  iffue  de  leurs  guerres^ 
pour  le^grand  rcuenu  du  tribut  que  leur  rendoyent  leurs  mines, 
Se  furent  illuftres  Se  renommez  par  l'or  Se  l'argent  Macédonien. 
Àuffi  faut  il  croire  que  fans  cela  Philippe  ne  fuit  venu  au  bout  de 
fes  entreprises,  neauffi  Alexandre fon  fiizneuftpasentrepnns 
chofes  fî  difficiles.Mais  par  luy  les  Roy s  ont  fait  de  grads  efforts. 
ëùrchefâe  parquc,yfaut  donner  l'honneurau  fcul  or  Se argent  d  au  oir  mis 
toumenm*  ûn  ^caucoup  4'entreprinfes  Se  fortes  guerres,  dont  il  auoit  efte 
îm"  autheur,Paulus  ^Emylius  Romain ,  après  auoir vaincu  le  Roy. 

Eerfeus^ 


OKSERVEtS     VKK    V.    BILOM.  IOf 

Perfeus  défendit  aux  Macédoniens  de  ne  tirer  plus  d  or  de  leurs 
mines  à  fin  de  diminuer  la  richcfFe  des  Macédoniens,»  croiltrc 
celle dès  Romains. ^  Solinus  eft  auflïauthcur ,que  les  mmesde 
Macédoine  ont  efté  riches  en  fin  or. 

^utridifcoursde  Ford»Pem,(^às  Indts-.&aufiL  minwecom- 
mmtksrJtiMrestffmtntîorMtl"  ducMdvgxmdTurcfomforgtxs 
&qu,l»yaqtteivneforted'ordeiK*teritouteTur<iMe. 
Chapitre     Li. 

,  E^randTurcafaitexpreflèment  commader  qne 
•  YovSC  l'argent  de  Siderocapfa  foit  purifié  &  affine? 
,  fidelemen^ainfi  qu'il  faut.  Dcûa  auons  dit  com- 
[  mëtlouaaccouftumé  defeparerleplombd'auec. 
jsgç^J  l'or  &:  l'argent  :  mais  il  n'y  a  pas  grandes  cérémo- 
nies en  feparant  l'or  d'auee  l'argent.  Cela  eft  fait  tant  feulement 
t>ar  la  vertu  de  Peau  forte ,  dont  vn  Arménien  en  a  la  charge ,  le- 
Lelapresquilaparcyrargentd'auecror.illefaitbatreenlame! >  Pmr  t§Btr 
de  forme  quarrced'vn  pied  de  large,»  de  deux  pieds  de  long ,  »  j  „, 
de  1  cfpoiffeur  du  dos  d'vn  rafoir.Lefquelles  il  met  en  vn  vaifleau 
bien  proprement  pour  les  faupouldrer  faifant  premièrement  va 
lia  d'vne  pouldre  copofee  du  fel.d'alÛ de  glas,»  de  tuile  broyée, 
mettant  vn  carreau  d'or  défias  vn  lit  de  iadide  mixture  puis  le 
eouurant  de  pouldre,»  mettantvn  autre  carreau  par  deffus,puis- 
aprescouurantainfi  confequément » enuelopant  leslamesdor 
dcladiaemixture^mettanttoutesleslamcslesvnesfurlesau- 
tres enfemblemcnt .,  »  arroufees  devinaigre.  Puisapres  aucc la 
force  de  feu  fait  decharbon  .fonclaiffees  calciner  &  affiner  tout 
vniour  artificiel  iufquesàtant  que  l'or  foit  bien  purine,  ^du- 
quel en  après  font  forgez  les  ducats:lefquelziaparfaitsfontpor- 
tcz  à  Conûantinople.  Voyla  donc  comment  les  hommes  fegou-  tMu* 
«ernansparleursloix.ontvouluquel-ordeducatihftpreferea^^ 

tousautrWçâchân5^^1^1"^11^^1161"*11""^0" 
d-ormoflnoyé.ontcommunémenteftemcneZ.L'ormoflnoyeea 

Turquiecftfinordeducat:.lequeledtant  obeiflant  &  délicat, 
qu'il  fe  peut  facilement  ployer  amiablement.  Duquel  la  fplen- 
deurxomme  aufli  de  tout  autre,encore  qu'il  foit  manie  de  mains- 
^esJn'eftr^-fouaaineontamint,mais.touûcairsdemeureclair: 


î 


IQ6  premier,    liv^re    dis    singvlà. 

&beau  en  fà couleur  naturelle.  Mais  les  autres  métaux  frottez 
Contre  quelque  chofe,  laifïent  vne  teinture  de  leur  couleur  :  ce 
que  nc-tait  ror,qui  ne  laiffe  point  le  lieu  coloré ,  ne  de  iaune  ,  ne 
de  noir.  Cen*eft  donc  de  merucille  il  fa  fèulecouîeur  nous  inuitc 
à  l'aimcr,mcfmemcnt  qu'elle  refïèmbîe  auoir  quelque  participa- 
tion auec  les  rayons  du  Soleil,  6c  a  tant  de  vertu  a  que  comme  (a 
beauté  fc  prefènte  planante  à  noz  yeux ,  tout  ainfl  vn  chacun  le 
defire  Se  fouhaitte.  L'or  mangé  en  quelque  forte  que  ce  foit ,  en- 
tier, ou  en  Hmetïre,ou  en  fueilic^ne  peut  nuireà  la  vie, corne  font 
les  autres  mctaux:mais  pluftoftconrbrtc  grandement  le  cœur^Sc 
rtftuâeîor.  la  vertu  vitale.  Etcobicn  que  les  ancicnsCrecs  nayent  rien  eferic 
de  telle  vertu,  tot*cesfois  les  autheurs  Arabes  l'ont  trouué  par  ex- 
periéce.  Mais  à  l'ombre  de  fa  vertu,queîques  trôpeurs  ont  eu  oc- 
Trdmftnt  ca£on  $£&  faire  de  trefgrands  abbus  :  lefquelz  trompeurs ,  vou- 
w  on  fait  m  j2ns  âUOir  vn  nom  plus  excellent  que  de  medecin,fe  font  fait  ap- 
peller  guerifïèurs  :  faignans  auoir  trouué  quelque  vertu  nouuel  - 
le  en  l'Or  :  &  l'ont  fait  mafehercn  doubles  ducats  par  quelques 
ieunes  enfans,ies  nourrifïàns  à  leur  mode,fè  faifans  referuer  la  fa- 
îiue  pour  faire  vfer  aux  malades.  Mais  pource  que  ce  font  trom- 
peries euidentes/fommes  d'opinion  que  déformais  on  ne  les  laif- 
lê  impunis. 

J>ôntefevetiu  Zvcatfion  des  faites  qù on  a  racontées  deU  toifon  dur. 

Chapitre    lu. 

Àintesfois  auons  ouy  efmouuoir  difputcs  entre 

►  gens  de  fçauoir,doutas  fi  Ion  trouuoit  de  For  auec 

le  fablon  es  riuieres,come  Ion  a  eftimé:de  ce  auos 

efté  incitez  d'en  coter  briefuement  quelque  petit 

^^  w  _  mot  en  cefè endroit.  Il  eft  certain  que  les  hommes 

ont  de  tous  temps  cherché  l'orje  mieux  à  propos  qu'il  leur  a  efté 

pofîîble.  Au  ffi  l'expérience  leur  ayat  apris,  que  celuy  qui  eft  mef* 

léâueclcfâblondes  riuieres  ,  eftant  plus  pefant&cn  fi  menus 

grains  &:  déliez ,  va  au  plusparfond ,  &  donne  peine  à  le  feparer. 

Parquoy  s  eftans  imaginé  vne  induftrieufè  manière  de  le  tirer, 

l'ont  recueilly  auec  des  peaux  de  moutons  à  tout  la  laine.  Cela 

jiousfait  prefuppofèrqu'ilzn'auoyentencor  l'vfage*du  vifarget* 

duquel  l'on  vfè  maintenant.  Car  telle  manière  de  le  feparer  auec 

les  peaux  de  moutons,eft  hors  d'vfage.Mais  de  cefte  manière  de 


FaMesfir 
la  taifa» 
d'ûr, 


ïlmdesth 
mères. 


<  CfB  SERVE  SJ    PAR   ¥.    BEXOîT.  IOJ 

feparer  l'or  &le  trier  d'auec  le  fablon,  eft  nec  vne  fable  far  la  toi- 
fon  d'or.  Ceft  que  lafon  auee  Tes  Argonautes  ayant  nauigé  en  ?f£jf™  u 
Pont,&  paruenus  à  vn  flcuuc  Phafis,ou  les  paifans  le  feparoyent  \oirm£or^ 
auec  la  toifon ,  eurent  grand  argument  d'en  reciter  beaucoup  de 
ehofes  à  leur  retour:  mais  ce  qu  on  peut  dire  d  eux ,  eft  quafi  fem-  pUuues  %d. 
blabîe  à  ce  quedirons  des  Efpagnols  &  Fortugalois ,  en  parlant  ont  des 
de  l'or  du  Féru.  Car  ce  qui  a  mis  les  Argonautes  en  bruit  ,.n  a  pasgramsdor. 
efté  vne  toifon  ou  peau  de  Belier-.mais  ça  effié  l'or  qu'ils  en  rapor- 
terent  en  leurs  vaiffeaux.  Combien  que  Pline  aicde&t-mis  quel- 
ques noms  àcs  riuieres  qui  ont  bruit  d'auoïr  de  1  or  auec  leur  fa- 
blon:Sieft-ce  que  les'auons  bien  voulu  inférer  en  ce  lîeu.Lc  Ta-  Ta„uh 
gus,en  Efpagne:Ebrus,en  ThracerLe  Rhin,  &  Danpbe,  en  Aie-  .gfc. 
magne:  Ganges,en  Indie:Pa&olus ,  en  Hongrie  :  Le  Thciin  qui  shin. 
fort  du  lac  Verbanus:&Abdonaqaifortdu  lacLarius:Àda,&  le  &*»&* 
Pau  en  Italie, font  renommez  déporter  l'or  mené  auec  le  fablon.  ^^ 
Et  pource  que  fçauons  qu'il  y  a  beaucoup  de  natios  qui  ont  opi-  ^t    ' 
nion,que  les  poifTons  nourris  es  riuieres  qui  ont  bruit  dauoir  de  j^^'jrah^ 
h>r,s,cnnournffent)&:  le  prennent  pour  paftureài  nous  a  fembïé  ^, 
auoir  trouué  occafion  d'en  dire  quelque  petit  mot,&:  cftre  chofe  ^é?dom. 
digne  de  noftre  obferuation,d'en  enquérir  la. vérité: Car  les  habi-  ucm&rm. 
tans-dc  Pfcfquere  au  riuage  du.  lacde  Garde^&  aulli  de  Salo  >fe  ^dx. 
font  perfuadez  que  les  Carpions  de  leur  lac,fc  nousriflent  de  pur  ^|^ 
or. Et  pour  ne  parler  de  ûloing,gradc  partie  des  habirâ\duiion-  ^ 
nois  penfent  fermement  que  les  poifTons  nômez,  Hûbles  &  En> 
blon^nc  mangent  autre  viande  que  de  i'or.  Il  n'y  a  payfan  au  cô-  Bimhles. 
tour  du  lac  duBourget  qui  ne  voulu  ft  maintenir  que  leslauarets,  Emhlom. 
qui  font  poifTons  qu'on  vend  iour-nellementà  Li5  5  ne  s'appaftëc  ucd*s<wr* 
que  du  fin  or.   Ceuxaumduriuage  du  las  de  Pàladrou  en  Sa-^ 
uoye penfent  que  rEmblon>&  auml'Ombre ne  viucnt  d'autre  *£££ 
chofe  que  de  ft>r.  En  cas  pareil ,  ceux.de  Lode  au  pays  du  Mila-  Lode^ 
nois3nous  ont  dit  que  le  poifïbn  nommé  Thcmolo  ^ou  Thème-  7^^^ 
ro,&  an  ciennement  Thy  malus  ,  s'engrefïè  de  la  pafturedclor:  rhjmuL$&, 
mais  ayans  regarde  plus  curieufement  es  eftamachs  &m\  chacu n, 
&  obferué  chaque  chofe  enfaifantleurs  anatoraies  vanons  trou- 
vé par  lcu,  rs  entrailles^u'ilz  viuent  d'autres  ehofes  &  non  de  1er: 
&  que  les  LauaretSjHumbles^OiBbres^mblôs^arpionSjThe- 
mcrcs,n  ont  eftomach  qui  puîné  digérer  Tor  :  combië  que  les  ho- 
mes du  paï$4ifcnx  en  cômû  proueibe^e  les  poifsos  nourris  d'a^ 
*  O  i] 


loS  *REM'I£&    LIV2R.Ï     DI£    SÏNGVLàJ 

fontexcellens  par  dcffus  les  autres  :  voulans  entendre  des  defTu£. 
di&s,qu i  furpafTent  tous  autres  poifTons  de  riuiere  en  bonté  feu- 
lement. Mais  le  vulgaire  ignorant  îa  chofe  à  la  veritéjiafTeure  cô- 
£0r  tîefi  mc  ^  clic  cftoit  vraye.  Il  eft  tout  arrefté  que  quelque  part  que  l'or 
troméfinon  ^°lt  trouué,cft  affiné  auec  grand'  peine  Se  grade  dçfpenfe,  n  exce- 
4uecdej}e»M  ptant  non  plus  celuy  du  Peru  que  de  l'Indie.  Les  Efpagnoîs  fa- 
«f.  cent  Se  auancent  tant  qu'iîz  voudront  de  leur  crédit,  6c  efcriuent 

Miracles  des  miracles  de  FOr  du  Peru  :  toutesfois  il  appert  en  quelques  pafïà- 
EftAznok.    gCS  .£ç  jeurs  efcrjt$5  ea  ja  nauiganon  des  ifles  Occidentales ,  qu'il 
tordit  Verw.^  &ut  fondre  de  fa  mine ,  comme  en  tous  les  autres  lieux  d'Eu- 
rope. Et  qui  les  voudroit  croire,  il  fèmbîeroit  que  chacun  arri- 
iV  iirUie.  uant  en  Indie,moyennant  qu  ille  vouîuft  bêcher ,  corne  qui  aba- 
troit  vne  vieille  mafurc ,  feroit  quitte  de  l'emballer  pour  le  char- 
ger fur  nauircs.  Mais  il  appert  que  cela  eflfaux:car  la  plus  grand* 
Groupent,  partie  de  celuy  que  les  marchands  ont  rapporté  ,  cftoit  de  celuy 
que  les  gens  du  pays  leur  ont  trocqué  à  l'échange  d'autres  hardes, 
6e  principalement  àcs  ioyaux  de  femmes.  Soit  quelles  Efpa- 
Bitt'm  des    gnols  en  ayent  apporté  moule  grande  quantité  à  celle  première 
Efëtgnok.    fois  qu'iîz  y  furent  ,  il  ne  faut  pas  qu'iîz  y  retournent  maintenant 
duperai     pour  la  féconde,  pour  en  recouurer  autant  :  car  ce  qu'iiz  rirent 
lors  qu'iîz  arriuerent ,  ïc  peut  comparer  à  l'exploict.  dVn  fergent, 
qui  dcfgâgc  vn  pauure  homme,îu  y  emportant  tout  ce  qu'il  trou- 
uede  métal  en  fàmaifbn  ,  qu'il  auoitia  de  long  temps  amafïe 
pour  fon  vfage.  Or  fi  le  fergent  a  emporté  vne  fois  le  bien  qu'il 
a  trouue  chez  vn  pauure  homme  3  quel  cfpoir  prendra  le  pauure 
payfàn  d'en  recouurer  autant ,  fïuon  long  temps  après  ?  Le 
fèmblable  faut  entendre  des  Efpagnols  ,  qui  arriuans  lapremie- 
iflesdiêTeru*  rc  fois  es  ifles  du  Peut,  bufqucrent  amenèrent  il  bien  les  mains 
à  celle  fois  ,  quilz  pillèrent  tout  l'or  Se  l'argent  que  les  Indiens 
auoyent  ia  de  long  temps  amafTé  par  les  petits.  Pofons  le  cas 
qu'iîz  en  veulent  maintenant  retourner  quérir  autant ,  ne  fau- 
dra-il pas  qu'iîz  donnent  terme  aux  Indiens  delà  leur  amaiTcrî 
Mais  à  la  vérité  il  leur  conuiendra  attendre  moult  Î5g  temps ,  ou 
bien  mettre  moult  de  gens  en  ceuure ,  Se  faire  la  defpcnfe  qui  y 
eft  requife  :  caries  Indiens  l'auoyent  tiré  des  minières  par  la  for- 
.      ,      ce  du  feu,  tout  airifî  que  nous  faifons  en  Europe.  Nousîeprou- 
j»ëem       ueros  par  ce  qu  eux-mefmcs  en  ont  efent.  Et  entât  que  les  Indies 
n'ôcaucun  vûge  de  monnoye ,  il  eft  à  prefuppofèr  que  leur  argée 


Ô* SERVAIS     Î'AU     *.  'BIXO^'  109 

•&orcftoic  forgé  en  vtcnfiics.  Soit  que  les  minières  des  Indiens 
foyent  plus  fertiles  qu'elles-ne  font  ailleurs ,  plus  faciles,  Se  de 
joindre  defpenfe  qu'en  Europe,  ou  bien  que  leurs  fleuues  ren- 
dent l'or  méfié  auccq  le  kblon  dc^mciïïeure  forte  que  par  deçà: 
Si  cft-ce  qu'il  faut  grande  manufadure  Se  defpcnfe  à  toutes  les 
«leux  fortes,  auec  longueur  de  temps  pour  le  feparcr  de  fesim- 
*nundicitez,&:  non  comme  pluficurs  auoyent  par  cy  deuant  Pen"   -        „ 
fé  qu'on  le  trouuaft  ja  formé  en  lingots ,  Se  que  tous  ceux  qui  al-  u  o      or- 
loy  ent  le  quérir,  n auoy et  la  peine  que  de  l'empaqueter  à  douzai- 
nes^ l 'embalierpour  le  mieux  charger  fur  les  nauires.  Et  que  la  u^  ^ 
chofenefbit  tout  au  contraire,  lesmefmes  autheurs  parîansdu  indespifon. 
Roy  des  Indes  qu'ils  firent  prifonnicr,  recognoiffen  t  par  lcursiL  mer. 
lires  qu'il  y  a  beaucoup  de  maifons  députées  à  fondre  lor  Se  far- 
.gent,&  que  For  minerai  du  platpays  eft  beaucoup  plusdifficiïe  à 
amaflérqueceluy  des  montagnes,  qui  font  deffus les  riches  par- 
ties duPeru,  SÉquclor  des  montagnes  eft  méfié  deftain&dc 
foufFrCj&quepourlefeparerdc  l'incorporation  des  autres  me- 
taux,iis  allument  vn  grand  feu  ardent  Se  vif  en  la  montagne,  le- 
quel en  echauifant  le  fouffire  ,deflie  l'argent  de  la  coiondion  des 
autres  metaux,&  fait  efcouler  l'argent  Se  ruiffeler  tout  net.  Def- 
quelles  parolles  prinfe  du  Hure  des  Efpagnois,il  eft  manifefte  que 
l'or  Se 1  argent  y  eft  arfinc  Se  tiré  des  veines  de  mcfmc  manière  que 
nous  faifons  par  deçà:  car  quelque  part  qu'on  le  prenne,  il  faut 
coufiours  entendre ,  qu'il  cft  minerai  :  Se  par  confequent  accom- 
pagné de  pluficurs  autres  métaux.  Parquoy  s'ils  en  ont  quelque 
foisapportégrandequantitéàvncQup,çaeftédclarançon  des 
Roys,  Se  de  Tefchange  qu'ils  ont  trafiqué  de  leurs  marchandifes. 
.  Nous  auons  dit  cela>  pource  que  plutîeurs  penfoyent  que  lbr  eft 
fi  commun  en  ce  pays  là,qu  on  n'y  ferraftles  cheuaux,&  les  char- 
rettes,^ charrues  q  de  pur  or.  Lor  de  l'Inde  orietalceftauiîibié  0r^hR^ 
tirédes mines  comme  celuy  des  ifles  occidétales  du  Peru.  Pour  ^^ 
les  ifles  orien  taies  de  lTnde,encëdons  les  pays  d'Ethiopie,ou  do- 
mine le  Preftre  Ian.  Les  lettres  eferitesen  Latin ,  Se  qu'on  peut 
voir  imprimées ,  que  le  fufdit  Preftre  Ian  efcriuoit  n  a  pas  long  jA»  & 
temps  au  Roy  de  Portugal ,  font  foy  qu'il  luy  promettoit  mille  «S*« 
*    fois  cet  mille  dragmes  d  or,qui  eft  la  fomme  d'vn  millio  de  drag-    en 
mes,moy  ennant  qu'il  feift  la  guerre  contre  le  Turc.  Et  de  fait  le 
Preftre  Ian  layMUa  gens  de  guerre^  argentpour  le  combatre* 
;"*'.■  O    iij 


1*6  PREMIER     LITRE      DES     S'X'N<TVL  A. 

Ccft  vnc  moult  grande,  fomme  d'or  qu'vn  million  de  dragmes 
baillées  a  vn  coup  par  les  Indiens  au  Roy  de  Portugal:*  toutes- 
fois  ceneftpasàdire  qu'il  n'ait  fallu  moult  defpendre  àlet-ker 
Lettres  du    àcs  mines .  Ledit  Prefbe  ïan  enuoya  vne  autre  lettre  au  Roy  de 
rreftreim.   Portugal ,quatre  ou  cinq  ans  après  lapremiere,  par  laquelle  il  luy 
prioic  qu'il  luy  cauoyaftgcns  du  pays  des  Chreftiens  ,  de  toutes 
fortes  de  mefticrs,&  fur  tout  des  bons  ouuriers  à  eftendre  l'or  en 
£ueille,&  tailler  medalles,bons  monnoyeurs,.&:graueursen  ec  8c 
.     argent.  Confequemment  de-bons  Imprimeurs ,  pour  luy  impri- 
mer des  liures  en  moulle  :  mais  fur  toutes  autres  chofes  deman- 
doit  grand  nombre  d  ouuriers  bien-experts  es  mines ,  fçachaos 
fortifiée  requis  à  ges  metaïlaires,  cognoiflans  la  purité  des  veines 
de  tous  métaux,  &  qui  eufïèntla  feience  de  bien  feparer  1  or& 
forgent  de  fa  veine,  d'aucc  les  autres  fortes  demetaux.  Parquoy 
"cft  manifefte  par  les  CuCâites  lettres  „  quetout  For  ôc  forgcn&des 
Indes  orientales,  eft artificiellement  tire  de  ces  mines  par  Findu- 
c  ftrie  &  grandlabeur  des  metaïlaires,  don t  les  vns  font  mieux  ex- 
perts cafort  que  ne  font  les  autres:  &  que  le  meftier  n'eft  pas  égal 
a*ous,non  feulement  de  fon  pays,  mais  auffi'du  pays  d'Europe  ôc 
x*&t  tio   ^Afîc*  Ecdcvray  pluûcurs metaïlaires  fepaEtirentdcs mines  de 
M  4ZI  ^eme' &  dc  Saxonie,  &auflidu  pays  d'Memagne^pour  aller 
èsEfiagnob  b&Q*Zneten  Indie  :  qui  y  furent  eonduiâs  aux.defpéns  du  Roy 
mctët  fa,  fcl~ormg^-  Partant,  ifoppert  qu'ils  ont  accouftumé  en  toutes 
lesdeux  Indes  tirer  1  or  âcs  mines  auecgrofiè  âefpenfe  ôc  logueur 
de  temps,comme  nous  faifons  en  Europe ,  &  que  les  Efpagnols 
opt  eu  tort  d'en  auoir  parlé  fiauantagcufcment,fçach⣠ bie  qu'ils 
orlorient  n^ncfcf'moYcnt?^^ vérité.  Età  fin  d'en parler  mieux,  auoss 
mloceitë'  chfrchc  llCQ  Pour  Pro"uer  que  For  tiré  Se  affiné  des  veines  d'Oc 
ordefeptenlf^^  ckau&fin  &  paiÊût queftccluy  qu'on  a  tiré  des  mines 
tmu~        a  Orient: &  eeîuy  du  feptentrion. ,  comme  celuy.  de midy.  Car 
ordemidj.  combien  que  l'Orient  eft  plus  chaud  Se  fee  que  le  pays  del'Occi- 
dent:&  que  le  Septentrion  eft  plus  froid.&  humide  que  le  Midy: 
toutesfoisFotnelaiife  pas  d'au oirfa.co£ion  auffi  parfaiteen  vn 
Beucommeen  l'autre:  car  celuy  du  pays  le  plu  s  froid  du  monde 
crcaufliparfaitcommeaupluschaud  d'Ethiopie.  Nouiaevou- 
lonsquel  expérience  pour  leprouuer.  Attendu  que  toutl'or,qui 
eft  tire  des  minesde  quelque  veine  que  ce  foit,s'il  a  elle  aiSné,efl 
rnitwûi  garfaicen  vne  gartdu  monde  comme  en  l'autre  :n'ayât 


-OBSERVEES     fAR    *.  .*E;LO'«>  H€ 

e^ârdàlatemperaturcdulicudechalcar  ou  froidure, de  iiccité 
ou  humidité.  Et  à  fin  que  ce  difeours  ne  foie  trouuérropafpre, 
nous  le  voulons  demonftrerpar  raîfbn  correfpondantc  à  Ja  choie 
ta  CàitcEt  difbns  que  £  quelqu'vn nous  apportoit  de  1  'ofd'Ethio- 
pie,qui  eft  le  plus  chaud  pays  du  mondc,ja  purifié  &  affiné  forçat 
de  fa  mine  :  éc  en  feift  comparaifon  auec  vn  autre  qu'on  auroic 
apporté  dVn  autre  pays  le  plus  fèptenttionaL&:  le  plus  froid  qui 
{bit:  &  qu'vn  autre  feift  le femblabîc  de  celuy  de  l'Orient ^  vnau- 
tre  auffi  de  l'Occident:  touseftans  affinez  viendront  à  vne  mef- 
me  valeur,  &"  môftrcront  mefme  couleur  fur  la  pierre  de  touche. 
Careftans  affinez  par  lapuiflànce  du  feu,Fon  trouueraîa  pafte  de 
celuy  de  Septentrion,qui  ne  fera  ne  pirene  meilleurc,ne  n  auroic  _ 
différence  àcclle  du  Midy.  Et  que  tous  les  quatre  feroyentainil 
pendus  demefme  qualité.  Les  autres  métaux ,  &fuft-ce  de  ceux 
qui  font  les  mieux  affinez ,  font  d  autre  nature.  Car  quant  à  eux, 
ils  font  blcfTez  pour  bien  peu  d'iniurp.  Mais  l'or ,  encor  qu'il  fuft  ^  ^^s 
tiré  plus  délié  que  ne  font  les  fîletsde  la  toile  d'vnc  Iraigne,&:  en-  mt,t^ 
icueiy  entre  les  plus  corrofifs  medicamens  iubiimé  &  Verdet,fel  -- 
&  vinaigre,  encor  qu  il  y  demeuraft  deux  mille  ans,  il  ne  feroit 
pour  cela  çorrompu,maisau  contraire  y  feroit  affiné.  Or  fidaue- 
ture  il  fe  trouuoit  queiqu  vn  qui  en  contredifantàcecy ,  propo- 
fàft  quelques  animaux  ou  plantes5oif  leurs  fruids  pour  exemple, 
&  nous  niaft  ce  qu'en  auons  eferit ,  allegant  qu'vn  fruict  eft  plus 
parfait  en  vn  pays  qu'en  l'autre ,  Se  auffi  qu'vn  animal  eft  plus  fain 
en  vne  contrée  qu'en  l'autre  :  difant  auffi  que  îe  fer,  l'aciérie  cuy- 
ure,Iepiomb,&  l'argent ,  font  plus  fins  en  vn  lieu  qu'en  vn  autre, 
nous  luy  conreflerons  ces  choies  fufdi&es  eftre  vrayes ,  mais  nie- 
rons qu'il  y  ait  choie  en  nature  qui  dure  à  reternité ,  &  refifte 
contre  toutes  iniurcs ,  comme  fait  l'or.  Parquoy  toutes  les  cho- 
fes  fufdites  eftans  fubiectes  à  altération,  fc  muent  &  corrom- 
pent pour  peu  de  choie  ,  &c  acquièrent  vne  qualité  bonne  ou 
rnauuaife  en  naiftàntôd  en  prenant  fin.  C'eft  de  là  que  quand  el- 
les font  en  leur  vigueur  ,.  elles  ne  font  pas  tout  vn.  Mais  For  torinemw* 
eft  incorruptible  ,  qui  tfeft  point  fubied  à  telles  mutations, f&k. 
&  toufiours  tant  que  le  monde  fera  5  auffi  ièra  il  permanent  :  $c 
qui  plus  eft ,  ne  l'air ,  ne  les  autres  cléments ,  ne  les  vents  ?  ne  la 
mer,nc  nuifènt  n'aident  à  lehafter  ou  tarder,  corne  plufieurs  onc 

O    iiij 


lAftyS  a 


jli  PREMIER     tIVRB     DES     S^NGVLÀ.      ..'_'. 

penférmahCeft  fa  nature  qui  le  rend  tek  Àuant  partir  deSidc- 
rocapfa,montafmes  defitis  la  foramicé  de  la  plus  haute  montagne 
vo4fme  :  nous vifmes  toutàela-ir  Fiflede  Lénosr&  lemôt  Athos, 
qui  font  dedans  la  mer  Méditerranée.  Puis  regardans  vers  terre 
fermede  Macédoine,  veoyonsvn  pays  inégal  &montueux,  qui 
itfaysœ    duretantquelaveuefepcuteftendreenloing.D'aiiatageveoyÔs 
idoine,  deux  lacs,  qui  ne  font  qu  a  demie  petite  iournec  delà.  Outre  ce 
on  pouuoit  aifément  difeerner  les  pays  des  miniers,  &  les  chenu- 
uesen  ut*  nee$  &  tom  le&  fourncaux>  qui  fontefpars  ça  &  là  par  les  fufdices. 
cedwe*.      mon\agnes  >  tant  de  coite  d'Orient  que  d'Occident.  En  après 
veoyons  les  deux  riuages  du  pied  du  mont  Athos,de  la  part  ou  il 
eft  conioind  à  Macédoine  :  &:  femble  il  à  le  voir  de  loing ,  qu'il  y 
ait  bien  peu  de  diftance  ornais  eftans  là ,  trouuafmes  qu  ily  a  plus 
d  vn  demy  quart  de  lieue  de  iargeur.La  plus  grande  partie  des  ar- 
M^Jfres.      kres      { çQnt  fauuages  par  les  montagncs,font  Haiftres ,  que  les 
qfin*.        Q^csnommcncOftri^Foutean^qiulsnommcntOxi^Chef- 
^Tx^    nes,Chaitaigniers.Les cultiuez des iardins.font Poiriers , Pora- 
chtfies       miers,  Amandiers^oiers^liuiers^Ccrifiers.  Le  commencemec 
eûfi^     de  ce  village  de  Sidcrocapfa  a  efté  de  toute  antiquité  en  eftre,qui 
^w»        auoit  défailli  quelque  temps  :  mais  depuis  douze  on  quinze  ans 
il  s  eft  grandement  augmenté.  Nous  y  veifrnes  faire  vas  médecin 
fedé"ne     nefuDerftitieufe,dont  auons  bien  voulu  efcrirekreccpte.Cefuc 
fop}mm      .v  *Turc  medecinant  vn  luiffort  malade  de  la  rate,en  pnnt  la 
JS*  rnefure  aucc  du  papier  par  deffus  le  ventre  :  &r  porta  la  mefure  à: 

<çn  ieuneNoyer,&:  coupa  autant  de  f  on  efeorce  que  la  mefure  de 
la  rate  cftoitgrandc  :  &  anec  plufieurs  paroiles  en  Turc  qtfil  dift, 
&:  autres  cérémonies  faites,retournaau  Iufè&  luy  mift l'efcorce 
defTu  s  le  ventre  :  en  après  il  la  pendit  en  la  cheminée  aucc  vn  n\. 
&  afTeura  au  Iuif  que  comme  l'efcorce  feicheroit ,  tout  ainfi  forL 
mal  diminueroit..Et  pourec  qu'afliftafmes  à  celle  médecine ,  Ta- 
lions bien  v=ouîaefcrire.Mais  le  Turc  nous  fembla  affezmauuais 
médecin  d'auoir  cherché  la  rate  au  milieu  du  ventre  fur  le  nom- 
bri^qui  eftoitJgne  quiliuft mauuais  anatomiftcNous  trouuaf- 
sç&L       mesdeux  efr/eces  de  Serpensen  ce  lieu, que  n'àuios  encorepoint 
saptk        veu  ailleurs:  Les  Grecs  de  leur  commun  vulgaire  nous  les  nom-- 
*?*•  moyent  Sapidités  autres  Sapiti,qui  font  diâions  corrcfpondan- 

Tyntes'  r  tes  à  ce  que  les  anciens  appclloyent  ScpsouSips.  Les  Pyrites,©  u- 
*»#&*-  Mârquâficcs  de  Siderocapfa  ont  changé  leur  nom  Grec  à  vn, 
^  ^  *  "  effranger;: 


cariÎB'yaceluy  aeshabitâns,qaclquiiroic9eftrangcr  ou  Grec, 
qui  ne  les  nomme  Ruda.  Les  autres  difent  Qwtz  ouRuz,  aia^/ 
Manière  des  Allemans.  Et  eu  l'cxcrement  que  les  Latins  nom-^^ 
ment  Scotia,  les  métal  laites,  tant  Serniens,  Bulgares,  Albanois,  ^^, 
luifs/Turcs^ue  Grecs  la  nomment  du  nom-Aieman  Schlakna. 
Il  y  a  encorcs  v  ne  autre  efpece  d'excrément  différent  à  Schlaken: 
&n'y  aceluy  quUiele  fçachenommer  Lesken ,  quieft  pluspe- 
fant  que  le  Schlaken.  Ce  nom  nous  fcmble  pluftoft  eftre  Alternai 
que  Grec  :  qui  eft  vne  efeume  fpongieufe  Si  legicre ,  comme  eft 
Fefcumedvn  métal  :  carilefttiré  nageant  par  dcffuslaminc  de 
îbr  Si  l'argent  fondue,  Si  eft  ietté  hors  de  la  maifon.Car  quelque 
part  qu'on  fonde  le  metal,onnes'en  fert  non  plus  que  d  vn ^excré- 
ment inutile.  Mais  le  Lesken,ou  Leskena,eft  bien  fort  pcfant,6? 
fert  d'auantage  que  le  Schlaken  :car  les  Alternas  &  Bohcmcs^cn  ^_ 
feruent  à  méfier  auec les  autres  métaux.  Et  comme  le  Stimmi,  ^\^ 
que  les  Latins  nomment  Antimoniurn,  eft  vn  métal  commun,  nmm 
refîemblant  au  Lesken,prouenant  de  mefmc  manière ,  Si  mefme 
matière,  Si  qualifemblable  en  toutes  fortes,  Se  fût  desEyntes 
d'or  Si  d-argent/eruanc  grandement  aux  fondeurs  de  cloches,  Se 
aux  potiers  d'eftain,  Se  principalement  à  ceux  qui  fondes  mi- 
rouers,&  aux  fondeurs  de  lettres  :  toutainfi  le  fufdu:  Leske  pour- 
voit bien  feruir  méfié  auec  autres  ehofes.Mais  il  n  eft  trou  ueper- 
fonne  a  Siderocapfa  quile  vucillc  faire  feruir  :  &:  toutefois  fouî- 
mes certains  qu'il  feroit  fort-propre  à  fondre  auec  du  fer  pour  fai- 
re des  boulets  d'artillerie  :  Se  les  amenderoit  grandement ,  &  ci- 
par<meroit  beaucoup  de  la  defpcnfe.  Sieft-ce  quenelevouluf- 
mes^direàperfonncde  ce  pyslà,  d'autant  qu'il  nous  fembleroir 
auoir  fait  vn  grand  mal  :  veu  mcfmement  qu'il  yen  avne  fi  gran- 
de quatité  par  tous  les  endroias  de  la  motagnc,qu'on  en  trouue^ 
roit  facilement  dcuxmilionsdeliures.  Et  non  pas  feulement  la- 
part  ou  1  on  fond  maintenant  les  minières,  mais  auifrou elles  onc 
efté  fondues  le  temps  pafîé  en  diuers  lieux  de  ladi&e  montagne. 
Mous  nel'auons  feeu  nommer  autrement ,  n  ayans  point  entedu 
fon  nom  ancien  :  car  les  Grecs  qui  font  par  les  minières,  ne  rene- 
nentquebien  peu  des  noms  anciens.  Les  habitans  du  territoire 
de  Siderocapfa ,  font  grand  amas  des  fueilles  de  l'arbritTeau ,  que 
les  Arabes  ont  nommé  Sumac,&les  Grecs  Rhus^u'ils  trouuenc  ^. 
€r.oifFantparlcfdites  moatagnes  :  drfquene^lsefpoifTifleaticurs  ^ 


Eftidtts. 
Myrthcs. 
Chejhei. 


Semence, 
de  Sttmxc. 


I£4  PREMIER     LÏV2LE     DJ&S     SINGVIA, 

peaux,  &  tannent  leurs  cuirs  :  Comme  ceux  d'Egypte  font  des  -fi- 
ïiques  d'vn  arbre  qui  leur eft  fréquent,  nommé  Acacia  :  Se  com- 
me ceux  de  Grèce  &  Anatoliefont  des  calices  des  glands  d'E£. 
culus:  &ceuxd'Efclauonie,  de  Myrthcs  noirs:  Se  en  France, 
d  efeorces  de  Chcfhes;  Se  en  Lefbos'&  en  Phrygie ,  d  efeorces  de 
Pins  fauuages  nommez  Picea.  Ec  d'autant  qu'ils  ont  abondance 
du  fu&litarbrilleau ,  ils  en  chargent  les  barques  pour  tranfporter 
ailleurs;  duquel  ils  recueillent  aunl  le  fruiâ  diligemment  pour 
vendre  :  lequel  après  qu'ils  l'ont  quelque  peu  defleiché ,  ils  effor- 
cent, prenans  feulement  la  petite  peau  rouge  qui  eft  defTus,  ÔC 
iettent le  noyau  durquieftdedans3&:  la  vendent  par  les  marchez 
pour  fauJpoudrcr  leurs  viandes,foit  ris^bouillons^rouets,  Se  au- 
tres telles  meneftres  faites  à  leur  mode. 


B^rtts  me= 
tÂlkjues. 

Dœmon 

Jdetâllictâ. 


Symts 
£abron. 
23 Hable me* 
tallifte. 


Machines 
metAÏlifUS. 


Vejcrîptiondeplujïeurs  autres  fwjruhrhezjrouuees  es JùfS-tes  mines y 
&  autour  des  montajmesdudît pays.  Chaf>+        Lin,. 

O  vs  allafmesexprcflèment  regarder  dedans  l'vn  des 
ipiracles  des  minières,  qui  auoit  n  a  pas  long  temps 
cité  d'vn  moult  grand  reuenu  à  fon  maiftre,  qui  efioit 
Iuif:  mais  auoit  cfte  contraint  de  l'abandonner,  com- 
bien qu'il  fut  abondant  en  métal  :  car  il  y  auoit  vn  efprit  metalli- 
quc,que  les  Latins  nomment  V&nion  MeiaÏÏiats.  Et  pour  autant 
qu'il  Ce  monftra  fouucntesfois  aux  hommes  en  la  forme  d'vne 
Chcure  portant  les  cornes  d'or,  ils  nommèrent  lepertuis  fufdit 
Hyaritscabron;&eftoitau  defïusdu  village  qui  s'appelle  Pia- 
u-its^n  la  montagne  bien  près  du  ruiffeau  nommé  Rotas.Mais  ce 
diable  métallique  eftoitû  mal  pîaifant,  que  nul  n'y  vouloit  aller 
n  en  compagnie ,  ne  fèulct,  La  peur  ou  frayeur  ne  les  engardoic 
pas  d'y  entrer:car  il  y  a  encor  d'autres  diables  metalliques:&:  mef 
mement  nous  fut  dit  qu'ils  ne  faifoyent  point  de  nuifànçe.  Il  y  en 
auoit  d'autres  quiaidoyentaux  ouuriersàtrauailleres  mines.Les 
machines  dont  ils  (c  fèment  à  tirer  la  mine ,  ne  font  pas  toujours 
d'vne  façon  :  Car  quelque  fois  la  veine  eft  û  baffe  Se  profonde  en 
terre  qu'il  faut  deux  cheuaux  à  les  vircr.Mais  quand  la  minen'eft 
pas  profonde  en  terre  ,  il  fuffift  de  quatre  hommes  à  la  mener. 
AuÂî  quelquefois  la  minière  eft  tirée  à  veine  deiconuerte.  Il  fut 
vn  temps  queles  mecallaires  fondans  la  mine  auoyent  grand  pei- 


OBSERVEES     PAS.     P.     BELOîf.  lïf 

ne  entour  leurs  fourneaux  ,  d'autant  que  le  pertuis  qui  c£au  mi- 
lieu du  fourneau,  par  ou  le  vent  des  foufflcts  aùTue,  s*eftoupoic 
fans  cedè ,  teileracnt  que  l'excrément  du  mecal  bouchoit  le  per-  ^^  ^ 
tuis,&  leur conuenoit  chafque  foislai(Fer  leur  befongne.  Mais  ^^ 
vn  iour,en  paffant  quelque eftranger  leur  cnièigna  vnc  experien-  mttdùrv. 
ce  pour  remédier  à  cefte  grande  dilcommodité  :  lequel  ils  r>cftr- 
merentpasfage  de  leur  auok  enfeignee  fans  qu'il  leur  couftaft 
rien .  Car  s'il  euft  eu  l'aduis  de  leur  demander  argent,ils  fe  fuffent     , 
facilement  cotifez  à  luy  donner  fix  mille  efeus,  leur  faifant  von: 
rexpericneeiquiefttell^queCcommeauonsditqueîachcmince  u  maniers 
eft  derai&ele  vendredy  au  £>k5&:  en  après  refaite  lelundy  enfoy-  dcfonJxeL 
Bant  :  auquekemps  le  fourneau  Sda  place  font  refroidis  )  quand  mmc.      ^ 
le  deuant  de  la  cheminée  eft  refait ,  ils  iettent  force  charbon  au 
fond  dufourneaa  ;  puisictsent  dcflïïs  vn  lia:  de  vcine}puis  vn  Ma: 
de  chat  bon,&  ainfi  mettent  delvn  Se  de  i'autre,tant  qucla  che^ 
minée  foit  pleine.  Cela  font  ils  touûourspourla  première  fois, 
&:  puis  après  allument  le  feu  au  charbon,6i  laiflentefcoulcrl'eaa 
defluslarouë^aquclle  en  tournant  fait  fouffter  lefeu ,  quin'arre- 
fteguereàallumer  le  charbon  :&  petttàpetit  en  feconfummac 
&  diminuant  fait  fôndtcla  mine.  La  foufEcrie  dure  aia£iour& 
nuid  fans  ceife:&:  comme  le  charbon  februfle  ,  te  la  veine  fe 
fondais  iettent  dedans  le  fourneau  d'vne  pierre  blanche  rompue 
à  petits  morceaux,  afin  que  le  percuis  du  venende  bouche.  Cefte 
pierre  eft  rel  uyfante  5e  graueleufe  quHlsaiomment  en  deux  fortes 
feîoa<Huerfes  nationsXar  les  Seruiens,Bu  égares  5  Vallaques ,  Se 
TurcslanommentVacouiticos,  ouVarouimicos,oubicn  d'vn 
autre  nom  Grec  Affucft.    Cefte  eft  la  pierre  ,  que  leur  mon-  r*emK» 
ftra  celuy  duquel  auons  parlé  cy  deflus  :  &  faut  qu'ils  en  iet-  *sw*& 
tent  en  la  cheminée  trois  ou  quatre  fois  le  iour  ^pias^otrrnoms 
félon  que  le  metail  fait  de  clofture  au  pertwis en  -fe  fondant>  par 
lequel  le  vent  a  ion  nTue.il  y  a  vn  vilbgc  au  defTus  de  Sidcrocapfa 
fituéfurlafommitc  de  la,montagnc  aucofté  du  Soleil  leuant^pa»^ 
nommé  Fiauits^ui^eft  moult  difcommode:au0i  eft  il  fealemeniL 
faitdepetkes-maifonnettes  couuertes  de  Limandes  &  de  mer- 
rain.   Làbas  au  pied  de  la  montagne  ,-iLy  a  vn  autre  grand  viHa-  ^ 
ge  nommé  Seriné.  Eftans.fur  le  mont,  tromiafmes  dagrands  ^ 
monceaux  de  Scoria  ou  Schlakcn  au  deffus  de  Piauits.Et  pourec  ^^ 
qu'ileftioingdes  ruifTeaux^auionscancxuvricJoutc^fçauoirE 

R   ij. 


Serine; 
ScorU- 


III 6  PREMIER    XTVR'B     DES      SINGVLÂ. 

au  temps  pafTé  l'on  saidoit  de  vent  au  lieu  d  eau  pour  fouffler -la 
mine  :  Carainfiqueconfiderions  qu'il  n'y  auoit  aucun  ruifTeau, 
&  qu'il  n  eftoit  rien  plus^ray  qu'on  y  euft  fondu  du  métal,  péfaf- 
mes  qu'on  n'auoit  point  l'vfage  de  fçauoir  adapter  les  roues  qui 
font  mainrenat  virées  à  force  d  eau  pour  faire  fbufrîer  les  métaux 
en  fondât  la  minermais  qu'o  agitoit  les  foufrlets  par  le  labeur  des 
hommes.  Toutesfois  {cachant  que  les  anciens  auoycnt  grande 
'Commoditede  tirer  Se  parfaire  les  métaux,  en  fondoyent  en  gra- 
nde quantité.  Trouuaimes  quelques  ieuncs  garfons  Grecs,  qui  al- 
loyent  cueillans  vne  forte  de  Bruyère, q«e  toute  la  Grèce  nomme 
vulgairement  Phana.  Quand  voulufmes  fçauoir  la  différence, 
qui  en;  entre  la  Bruyère  &  Phana,ils  nous  f  apprindrent  bien  aife- 
éhana.       ment,  mon  ftrans  la  difFeréce  des  deux  à  vne  feule  enfeigneiCeft, 
muyere.       que  allans  chercher  de  ladite  Bruyère  Phana ,  pour  faire  du  feu, 
neportpyent  aucua  ferrement  auec  eux  pour  l'arracher:  car  eftat 
z     tirée  ,eft  aifement  arrachée  de  bien  peu  de  force  auec  toutes  fes 
racines  :  ce  que  ne  fait  la  Bruyère  que  l'on  ne  pourroit  arracher 
fanshoyau.  Phana  met  fes  racines  obliques  fur  la  terre,  Sen  en- 
tre point  auât  non  plus  qi*e  fait  l'arbrificau  de  Ciftus,&  le  Troef 
'CbMck      pC.  Lamer  qui  anciennement  auoit  nom  Chalcis ,  n'eft  gueres 
qu'à  vn  quart  de  lieuë  de  Seriné ,  ou  il  y  a  v  n  port  affez  feu  r  pour 
4es  barques,  quieft  au  fond  delà  pîageau  fufditfme  nômé  Chal- 
cis. Il  y  a  plus  de  fix  mil  hommes  befongnans  ordinairement  es 
mines  de  Syderocapfa  :  Se  pour  autant  que  le  village  de  Seriné  eft 
-quaûioignant  la  mer,  Se  que  les  fourneaux  en  font  plus  près  y  les 
ouuriers  viennent  làfe  pourueoir  de  viures-.&:auffi  que  les  bar- 
ques qui  font  au  portées  y  apportét  de  toutes  parts.  Apres  qu'on 
afondu  toutelafepmaine,  &:qu,onarenduleroetaî,&feparéle 
".AfS.         plomb  de  l'or  Se  argent ,  Se  que  For  Se  l'argent  font  bien  purifiez: 
jefamn  aiorsilnereftefinonà  les  partir  par  l'eau  forte.  Et  encor  que  For 
foit  net ,  fi  eft-ce  qu'il  eft  purifié  encore  vne  autre  fois ,  Se  af- 
finé à  la  manière  qu  auons  dicte  :.  Se  de  là  il  cil:  ie£é  en  lin- 
gots ,  Se  puis  tiré  en  verges  longues  de  deux,  ou  trois  toifes  de 
longueur,  rondes,.&;  groifes  comme  le  doigt.  Puis  on  les  fi- 
gue de  petites  coches ,  à  fin  de  les  tailler  par  petites  rouelles 
du  poix  d*yn  ducat  :  car  elles  font  ainfi  miles  par  petits  mor- 
ceaux auec  vn  cifeau  ,  Se  marteau  :  Se  puis  après  on  les  ap,- 
platift. d'auantage  en les  pc&nt  à  la  balance..  Et  font  coiçr 


'.y   fb'lSERVEE-S     PAU    >.    BELOÏ.  Ï17 

>gneés,  &  fellecs  en 'ducats  en  ce  lieu  mefmeSjpuisportees  à  Con- 
Santinopîe. 

Le  lac  qu'ils  nomment  denom  vulgaire  Pefcliiac^cra  bien  Co-    ^, . 
'uiosm'eft  qu'à  deux  journées  de  Saloniki ,  &  à  demie  ioiïrnce  de  coJk' 
Siderocapfarou  il  y  a  diucriès  efpeces  de  poiffons ,  lefquels  auons 
"voulu  particulièrement  voir,  llz  y  pefchent  vne  forte  de  poiffon 
?que  les  habitans nomment  Laros ,  quia  donné  nom  à  vn  oifeau  l»o$. 
•que  les  Grecs  nomment  Laros,&:  les  Latins  Gauia,  que  les  Fran-  a^x 
*çois  appellet  vne  Mouette ,  &:  ceux  de  Dieppe  &:  du  Haure  neuf  Mouette- 
l'appellent  vne  Mauue.  Et  pource  que  la  Mouetteeft  friande  de  "  mCm 
ce  petit  poiffon  nommé  Laros  ,  en  a  prins  le  nom.  Nous  appor-  clxrU. 
-taimes  des  poifibns ,  qu'ils  nomment  Claria»  En  les  montrant 
en  public ,  il  s'affcmbla  plusieurs  ïuifs  couftum iers  de  les  mager>  ïuifs  m  Sfi 
:quf  difbient  que  ce  poiffon  anoit  des  efcailles,&:  quepour  cela  ils  ?**. 
.en  pouuoyent  bien  mâger.Car  les  ïuifs  quelque  part  qu'ils  foier, 
.ne  mangent  iamaispoiilbn  qui  n'ait  efcaiîle.  Mais  n'y  en  voyans 
aucunes ,  les  inifmes  en  telle  doute ,  &  en  fi  grande  difp'uzc  encre 
.eux ,  qu'ils  cftoycnx  prefts  à  Ce  donner  des  coups  de  poing.  Ceux 
-qui  eftoyent  venus  nouuellement  d'Efpagne ,  aceufoyent  les  au- 
tres,imputans  cela  à  mauuaife  couftume.Lcs  preftres  qui  eftoiec 
làprefèns,efpluchans  chaque  chofepar  le  menu  ,  rcgardansle 
ipoifTon  plus  exactement ,  trouuercnt  quelques  rudimens  d'ef- 
•cailles.  Alors  conuindrent  enfemble,  ayans  conclud  que  fans 
icrupule  ils  en  pouuoyent  bien  manger:  &  toutesfoistrouuons 
^que  Claria  n  a  point  d'sfcailles ,  Se  que  c'eft  ce  que  ceux  de  Lion 
nomment  vne  Lotte,  &  à  Paris  vne  Barbote.   Nous  trouuafmes  &>&. 
-auiïi  vn  petit poifïbn  qu'ils  appellent  Liparis , ceft  à  dire gras:lc-  Burbote. 
;quel  les  autheurs  ont  îaiflfé  fansdefeription  3  &:  n  en  auons  que  le  Pm^;- 
feul  nom  en  Pline.  Les  poiffons  qu'on  pefcheaudiâ:  lac  de  Col- p^ 
lius  j  font  nommez  vulgairement  de  leurs  propres  noms  ainû^*! 
somme  s'enfuitiPerchi,  Pleft^PIatancs,  LipareSjTurneSjGn'ua-  j^^ 
di,Scbella,SchurnucaJPofufraHa3Cheronïa}Cla.ria.G!anos.Lei-Gri«jWfi. 
quels  noms  des  poiffons  deffufdicts ,  les  villageois  de  Pifchar,  de  scheiU. 
E.edinaj&c  de  Couios,  qui  font  fituezau  riuage  du  lac/çauetcx-  sehurmex. 
primer  en  leur  vulgaire.Nous  auons  veu  apporter  encor  d'autres  ^fij^^ 
petis  poiffons  de  mer  au  marché  5  qu'on  prenoità  la  bouchexl'vn  3^™u' 
petit  ruiffelet:  les  Grecs  le  nomment  Gyllari,  qu'eftimïons  eCtïc  Gi^ 
jscuxque  Etuhidem9  appelle  Gelariis;mais  tels  petis  poiffons^ue  cjlLrl 


Mulets. 
Cepbalopola. 

dlteri. 
Cottledon, 
VmbiUcm 
yenms.^ 


IlS  PREMIER     LrVRE    DES    SrNCTIA. 

font  autres  que  petis  Mulets, que  les  habitans  du  Propontidena- 
ment  Cephalopola.  Eftans  les  vallées  de  ce  territoire  humides, 
&  aufli  que  c  eft  pays  de  montagne ,  toutes  les  herbes  capillaires, 
Afplenon,Loncliïtis  akera>Coti!edon3&  plantes  qui  aimét  l'hu- 
meur, y  naiflènt  volontiers.-  CeCotiredon  autrement  nommé 
Vmbilwu$.Vencris*iiïc$.à\i  toutfirare^qu'onneletrouuebien  en 
_    *       j  „    .,  ,  piufieurs  lieux  de  noftrc 

l*>  rrance:touterois  pource 

que  laitons'  fait  retirer 
auec  fa  fleur ,  Ôc  qu'encoi* 
n'a  clic  mis  en  peinture, 
en  auons  cy  mis  le  pos- 
erai et 

Nous  auos  nommé  ces 
kerbes  ,  non  qu'il  n'y  en 
naiffe  encor  de  pluficurs 
autres  manières.  Toutes- 
fois  pour  ce  que  lors  que 
eftions  furie  lieu  n'en  ef- 
criuifmes  d'auâtage ,  auf 
fi  n'en  auos  cy  .voulu  plus 
adioufter.  Et  quelque 
part  que  nous  foyôs  trou- 
ucz,raut  penfèr  qu'auons 
eferic  iournellement  ce 
qu auos  aoté  en  ce  Liurev 
Et  lors  que  voulions  rete- 
nir ïesnoms  des  plantes 
que  veoiôs  celle  iournee-, 
failïons  diligence  de  met- 
tre quelque  petit  rameau 
oufueiiîe  de  chaque  plS- 
Ntc  dedans  vn  fac  :  ÔC  lors 
squeftions  arriuezaaipit 
à  repos,ou  en  l*o&sbfe,ti- 
rions  chaque  fueille  hors 
àa  Ùlc  ,  l'vne  après  l'autre,  &  refermions  ainfiquela  vcoyos:  qui 
çjfccaufe  qu'en  auons  nomm%  tant  par  cy  deuan  t ,  comme  auiSu 


Oî SERVES S     PAR    P.    BELOK.  lï$ 

Ferons  cy  après, de  moult  vulgaires',  qui  font  cogneues  dVn  cha- 
cunJParquoy  ce  qui  a  fait  que  les  ayons  ainfi  eferites ,  eft  qu  auos 
voulu  faire  en  tendre,  qu'on  les  trouue  en  ces  lieux  là ,  tout  ainil 
comme  es  noftres  :  ioinct  queportionstoufîours  vn  pic  quant  Se 
nous  pour  les  defraciner,  comtBC  auffi  pour  tirer  les  fçrpens  de 
terre,lors  que  les  veoyons  aller  fe  cacher-en  quelques  pertuis. 

Les  noms  de  plu/ieurs  hefles  fwuages.  Chapitre    Liin. 

^Ous  eftans  enquis  des  beftes  fàuuages  qu'ilz  co- 
Ignoifïènt  errer  en  leurs  plaines  Se  montagnes,nous  ?Ltogm. 
^ies  ont  fpecifîecs  par  noms  propres  vulgaires  com-  -couuidk 
)mc  s  enfuit  :  Platogni ,  Gouuidia  agria ,  Agrimia,  *£"*■ 
J  Zarcadia5Agriomochtera,Squanzocheros,Laphi,  <s%"y- 
AîopusJLycos,Lagos.PourPîatogni,ilz  entendent  noz  Daims:  ^^^ 
psur  Gouuidia  agria,  Bœufs  fauuages  ,  pour  Àgrimia,  Boucs  ^^ 
eftains;.  pour  Zarcadia,Cheureaux:,pour  Agriomochcera,  San-  Sfun^oche-- 
glienpour  Squanzochcros,Porcs  efpics,  ou  Hcriftbns  :  pour  La-  ros. 
phi,Ccrfs:pourAlopus,Regnards:pour  Lycos,  Loups:pour  La-  Lq>hi. 
gos,Lieures*Et  pource  que  fçauons  que  la  difficulté  de  les  rendre  ^°f^ 
par  noms  François  Se  Latins  n  eft  petite ,  il  nous  a  femblé  neftre  L^\ 
hors  de  propos,d'enefcrire  quelque  petit  mot:&  prendre  le  com-    <* 
mencement  parleCheurcul,quieftplus  frcquétenpays  de  mon- 
tagne qu'en  plaine.  Quant  eft  donc  à  ce  qu'ilz  nomment  Zarca- 
dia,trouuons  eftre  diction  approchante  à  Dorcas.  Solin  efcriuac 
Capreamen  Latin,  entend  la  befte  que  les  François  nomment  &?***> 
Bouceftara,  Toutesfois  Theodorus  à  l'imitation  de  Pline  tour-  DJrcM- , 
nant  Ariftote5pour  Dorcada,  a  toujours  rendu  Caprea,  Cène-  c ■    ■£ 
antmoins  il  eft  tout  manifefte  que  le  Cheuteul ,  (  lequel  les  Ro-    r 
mains  de  didion  Italienne  nommetCaptiolo,&  lequel  Ion  vend 
l'hyuer  en  Rome  àialiure)  porte  de  petites  cornes  ramées,  quai! 
femblabîes  à  celles  d'vn  Cerf,  &:  à  qui  elles  tombent  tous  les  ans. 
Il  eft  de  corpulence  femblabîeàvn  Cerf,  excepté  qu'il  eft,pius 
petit  :  mais  a  cela  de  particulier  qu'il  n'a  en  tout  point  de  queue: 
chofe  qu'Ariftote  aja  notée.   Ceft  celuy  qu'Ariftote  a  nommé 
Dorcus.  Nous  voulons  prouucr  qu'il  conuientauec  celuy  que 
Pline  nomme  Caprea,fm  on  qu'il  y  a  quelque  petite  difficulté  au 
cexte  :  mais  le  lifant  en  celte  forte  n  y  aura  aucune  difficulté.  C** 
Xi -V-.-:  .'_■"  •:■     '  •  ■■■  "■     P  iiij  '   '■ 


Dotchs. 
Zax. 
J)orx, 
Dorcalis. 


Chdmùy.: 

Cerna*. 

ffird.-. 


Iio  PREMIER     LIVRE     DES     SINGVLÀ. 

prêts  (  dit-il  )  ramofa  dédit  nama,fed  paru*.  Puis  après  pour  nec ,  Kfez 
&  difant ,  &fecitvtCeruisdecidua.  Vous  aurez  lamefme  fentence 
d'Ariftote ,  qui  eferit  du  Cheureul,en  cefte  forte. 
InterComigera  (  dit-il  )  omnium  quœ  explorât*  h wbemus ^minimum  T>or~ 
■cas  eft  in  ceruino  quoque  génère  numeundus ,  *vt  quiComua  babeat  omni- 
bus annis  deciàua.  Les  Grecs iont  nommé  diuerfemcnt.  Les  vns 
Dorcus  :  les  autres  Zax ,  ou  Dorx,  ou  Dorcalis.  Columella  a  dk 
Capreolus..VoikdoncqueleCheureulaeftécog«eu  des  anciês, 
duquel  eftant  l'appellation  vulgaire  ^quaiî  en  tous  lieux  eft  co- 
gneudvn chacun.  Nous  auons  voulu  adioufterîe  portraid  du. 
Chamois ,  queies  Grecs  ont  nommé  Cemas.Lc  Roy  le  nomme- 
vu  Yfard,  mais  c  eft  vne  antique  didion  Fxançoife.  Les  Latins 
1  ont  nommé  Ru picapra:  car  leur  demeure  eft  entre  les  durs  &; 
afpres  rochers ,  tant  pour  y  dormir  lanuid,  comme  pour  fe  reri- 
ret'fur  iour  après  qu'ils  ont  mangé  les  herbes  âts  vallées. 

Et  à  fin  que  chacun  entende  de  quel  animal  prétendons  parler^ 
î?auans fait  reprefen ter  au  naturel. 

LeportmBduÇbamolf^ouTfcrd. 


Site . 


OBSERVEES     FAR     P.    BELQST.  IZV 

Si  les  cornes  de  ceft  Yfard ,  ou  Chamois  eftoyent  ramecs ,  Ion 
potirroit  dire  que  c?eft  de  luy  que  Plinca  entendu,parlant  de  Ca- 
prca,.quan d il  difbit:  Kecfccit  vî  Cem'&  décidât.  Car  ils  ne  laiffen t 
point  leurs  cornes  Fhyuer  non  plus  que  les  Boucs  cftains  :  mais 
ne  les  ayat  point  ramées,  auffi  ne  peut  eftre  Caprea  Jl  a  bien  l'ha-, 
bitu3edu  Cheureul  Se  le  pelage  de  femblable  façon  ,  mais  eft  de 
diuerfè  nature.Ses  cornes  font  noires  :  petites  &  rondes,,  cfteuees 
au  deuant  du  front,entre  les  deux  ycux/ccroehecs  à  i'cxtremitér 
defquelles  eftfouucnt  aduenu  qu'en  fè  grattant  le  derrière  des 
feiîès ,  il  £c  les  met  en  la  chair  fi  auant,  qu'il  ne  les  en  peut  reti- 
rer, Se  ainiî  meurt  :  car  elles  font  reuirees  en-  manière  d'vn  cro- 
eher.il  eft  de  moindre  coriage  qu'vn  Daim ,  Se  Bouc  eftain,  ayac 
vnc  ligne  noire  le  long  de  leipine  du  dos.  Ses  oreilles  font  plus 
longues  que  celles  dVn  Mouton.  Son.  pelage eft  3c  couleur  fàu- 
uc,  ayant  vnc  ligne  noire  de  chaque  cofté,  toute  droide  le  long 
dumufeau,  venant  de  ^racine  des  cornes,  &paflant  par  def- 
fus  les  yeux  finift  defïûs  Tes  leures-Àufïia  quafi  corne  vne eftoiî- 
leau front.  Le  defïùs  de  fa  queue eft noir,  affez  bien'garny  de 
poil  ;  Se  eft  ronde  Se  longue  càm me  celle  3 Vn  Daim .  L'appella- 
tion Françoife  du  Chamois ,  nous  fèmblc  n'eftre  moderne ,  ains  clamoîs. 
eft  yenue  de  la  Greque  Cernas,  dont  JElian  a  fait  mention.  En~^Cemas- 
cor  auons  à  parler  dvnc  autre  befte  decefte  cfpccc ,  à  laquelle 
ïà'ayanstronuénom  François  à  propos,aiionsefté  contrain&s  de- 
l'exprimer  par  fon  nom  ancien,  que  lesautheurs  luy  ont  baillé, 
corapoft  du  Bouc  Se  du  Cerf,  Se  nommé  Tragelaphus.-  Il  eft  rr^Wm^. 
femblable  en  pelage  au  Bouceftaki,  mais  il  ne  porte  point  de 
Barbe.  Ses  cornes au ffi  ne  luy  tombent  point:  qui  font  fembla- 
bïes  à  celles  dVnc  Cheure  :.  mais  font  quelques  fois  entorfes 
comme  à  vn  Belier.Son  mufeau  Se  le  deuant  du  £ront&  aureilles. 
font  de  Mouto,ayant  auffi  la  bourfc  des  genitoires  de  BelieTjpen- 
date  Se  mouît-grofie. Ses  quatre  iambes,  (bnt-blaches  femblables  - 
à  celles  d'vn  Mouton  .*Scs  cuiiiês  en  1 endroit  de  defteus  la  queue 
font  bîanchcSjla queue. noire.  Il  porte lepoiî  fi  longen  Tendroict 
de  l'eftomac^  deifus  &j  deffousle  col3qu' il  fembk  eftre  barbé.Il 
a  les  crins  défi  us  les  efpaules  ,&<£eia  poiâr^c  Ion  gs  de  couleur 
Boire,ayant  deux  tafehes  grifes^vaejen  chaque  cofté  des  ÛlcsiSe . 
auffiîl  a  les  narines  noires  &.  le  mulèau-bEc^ôme  auffi  eiitout  le 
dejffous  du  ventre.  Or  pource  que  parlons  cy  après  de  rHippela-r 


&ipfck* 


m,  *rfmifhl    tivîLS  i>rs    sïngvw, 

phus,  voulons  faire  entendre  queîe  Roy  François  auoitvnche- 
ual  qui  auoit  le  derrière  de  Cerf,  &  par  cela  plufieurs  penfoyenc 
quii  deufteftre  nommé  Hippeïaphus:  raais-eek  ne  peut  eftre. 
Car  Ariftote  entend  que  Hippeïaphus  porte -des  cornes.  Aufk 
dit  on  quele  fufdia  eftoitengedré  d'vn  Cerf,  quiauoit  failli  vne 
iumenren  vn  bois  :  ce  qui  n  eftpas  de  Hippeïaphus  :  car  Hippe- 
ïaphus eft  animai  par  foy,tel  que  dirons  ey  après.  Refte  mainte^ 
mnt  àmettre  leportraiadccc  Trageîaphus ,-vcu  meimement 
,gu*il  n'aencor  pointeûé  vcuailleurs. 

PortraiBdeTugelctphiif. 


^  ^ousauonsditquelesGrecsnommentlesDaims-enle^ 

PW*.  ^afre  Platogna^WcnnerrientPlatycerotas:  toutefois  lonnc 

*2&£*  SepoinL 

*£  f^rqueLiMerpreteso^renduBama   II W"^£*? 

#~  dSSulenceduckauiH  eft^us -grand  que  le  Choure»!, 


œais-dîferent  en  couleur.  Vn  Daim  porte  plus  petite  tcCtequc  le 
Cerf.  Àuffi  Ces  cornçs  luy  tombée  tous  les  ans  comme  a  vn  Cerr, 
fcfquellesil  aaduanceesen  auanc  outre  lacouftumedes  autres- 
II  eft  fauuc  deffus  l'ekhine,ayat  vne  ligne  noire  par  deflus  le  dos. 
SaqucuccftlongucquiUiypcadiu%cs-(ùricply^^rrcts,co- 
me  à  vn  VeauJA  aduient rouwetcsfoisqucleurscoâeifontmou- 
chetez  de  taches  blanches,  qu'ils  perdent  en  v-ieilhflant-  comme 
aum^ aduient  fouuent  que; les  f^^^^  cemesd* 

tellement  qu'on  les  iugeroit  eflre  eheures,n  cftoit  qu  elles  ont  le  ^  ^, 
poil  moult  court.  Loo-  fait  monftrc -de. fes  cornes  dcxccUcntc  ce^te^ 
grandeur  en-dïuers  îieux^ome  font  celles  qu'on  voiten  lajnon-  ^ 
teedu  chafteau  d*Âmboife.Lonvoitauir^necn%ic  entaillée^ 
pierre  d'vn  autre  befte  decegenrc/ac^iloiiamislescornesdu 
.  vrayanknal  qui  lesauoit  portées:  qui  nous  afemble;  digne  d'en 
faire  mention  :  &:  croyons  queceû  celuyqa'Ariftote-a  nomme  BMU$m 
Hippelaphus.attendu  qu'il  a  dcîa^arbe-commele  Bouc  eton. 

Q  uoy  qu'il  en foitceftoit vn  animal  moultrare , U  penions  que, 
sWeuû  cftéveuem France,  on  ne  l'euft  pas  fait,  reprefenter  ca 
effigicHe  relief  auecfes  cornes  au  palais d'vn  Roy v. 

poifnfqvwyfiefçhc.  Chapitre-!.*.. 

E  Siderocapfâ allant  pat  mer  àk  ville  delaGaual-  qbm!U.;- 
>le5qui  anciennement  auoknom Bucephala,ii  n'y  Mucefbd^ 
"auroit  que  demie  iourneede  chemin:  mais  allant 
par  tcrreil  y.en  a  deux  grandes ,  ô^  fautiong  temps 
^  ^^r  fuy uir  la  mer  :  car  le  chcmiruourooye  fe courbant  ^^ 
en  arc  ,  pource  que  c  eftvnc  plage  ooiinc  profond ,  qui  contient  j^. 
tant  ceïuy  de  Cbalcis,que  de  Stximone.  Hefl  moult  fréquent  en  ^0çAa^ 
lierbes  &  arbrûTeaux.Les  plantes  d'Àndrofaces,  Ciiamxfyce,  &  cUm^^m^ 
Soïdandîe»  autrement  nommée  ThalafTocrambe,  &îesefpeces  SoUmd^r 
de  Tiihy malks^My rfmites ,  Ôd  Paralios  5  Cont^û  fréquentes  par  le  ridé** 
riuage5qu'on  ne  voit  guère  chok  plus  commune..  Nous  auions  "??r" 
hmeràdexcrc^terrefcrmeàfencftre.  Il nousfalloit quelque  ™£^ 
fois  pafler  des  petites  collines  ,  ouk&Terebinthesncxroiflent  ^^ 
ms  en  arbres  moult  hauts>commc  ils  fonten  Me  de£ortu  .Mais  Tmbm!kt^ 
ciajitjcpaysafprc.de.mctiers ,  fe  costcasenr  de  croiilre  hauts, 


IZ4  PUE  M II*.     LIVRE     DES    -SIK'CVLÀ. 

^frk        comme  Couldriers.  Les  plus  hauts  arbres  eftoyent  Aria  &  Phy- 
vhyUu.      Yxc%  :  lefquels  pource  que  nous  ne  les  auons  point ,  n'ont  aucun 
Côrmms.     nQm  ^  nofae  langue.Retouraezau  riuagc»&  nous  deftournans 
7a  m        quelque  peu  par  les  forefts,  parlions  pardcfïbus  des  Cormiers  èc 
apm.        ^  Frefnes,qui  ne  font  gueres  moins  hauts  que  les  Sapins.Nous. 
paftafmes  le ruifTcâu  qui  fort  du  lac  de  Pefchar,  autremét  die  Co- 
tiios  :  mais  pource  que  c  eftoit  au  cœur  de  Fefté ,  nous  le  panions 
au  riuage  de  la  mer  à  fèc  :  car  l'eau  fe  perdoit  par  deffous  le  fable. 
Nous  carnpafmes  en  la  plaine  auprès  dudit  ruifTeau  en  l'ombre 
de  moult  hauts  arbres  de  Tercbinthes  près  le  riuage  de  la  mcxSc 
trouuafmesdes  pefchcurs  qu'il  eftoit  défia  vefprc,  qui  d'vnc  trai- 
necdefîlctsàvnc  fois  auoyent  prins  enuironfoixantediuerfitcz 
depoifTonsqu'obfcruafmes  &  deicriuifmesfurîe  champ. Le  fine 
stnmordus   d'auprès  le  mont  A  thos  ,  autrement  dit  Strimonius  fin  us  ,  eft fi  . 
/mus.  Iarge,&  profond,  qiui  nous  dura  prefque  vn  iourrpeu  après  Payas 

Wtctk,.:    laûfC}toumans  bride  par  terreferme  vers  la  ville  de  Tncala,an- 
f*^-         ciennement  nommée Trica.ou  maintenant  eft  le fiege d'vn  San- 
siçupur.  giagnar^ou  Capitaine  en  Macedoine:&  eft  pour  l'heure  prefente 
vne  des  meilleures  villes  de  tout  le  pays  :  en  laquelle  on  trouue  - 
grande  quantité  de  bleds  pour  charger  les  nauires  qui  viennent 
àkbouche  de  Strimone5de  iaquellela  ville  neft  pas  loing.Nous 
trouuafmeslariuiere  de  Strimonecn  chemin,  nommée  en  vui- 
mmnard.    gaire  Marmara,qui  vient  de  deuers  laditte  ville  de  Tricah:&ar- 
€"es'         rkiafmes  premièrement  à  Ceres  anciennement  nommée  Crano, 
mm'      qui  eft  vne  autre  grande  ville  affifeen  beau  plat  pays  de  Thrace, 
&qtraûcn  Macédoine.  La  riuierede  Strimone  eft  maintenant 
appellee  de  pluûeurs  noms  en  vulgairc:Car  la  part  ou  elle  fait  des 
lacs,  elle  prend  le  nom  des  villages  quifont  aprcsXon  yoit  gran- 
de quantité  de  Cygnes  &:  autres  oyfeaux  de  riuierede  femblabie 
X^       corpulence^uAriftote aappcllcz Peiccanes , U Pline Onocro- 
!™L  tali>qiii  fe  nourriffent  en  la  fufdicle  riuierç.  Elle  va  lentement   fc 
■%£mxa.-n  a  pas  les  bords  de  Ton  lift  moult  hauts  ,  fcn'cft  pas  profonde: 
grcjfeXde    pour  laquelle  chofe  eft  fort  hcrbcufc:&  y  a  fi  grande  quantité  4e 
Tnbu&s.      Macles,que  ce  n'eft  pas  à  tort  fi  les  anciens  ont  eferit  que  de  leur 
Mddes-       temps  on  y  euft  acouftumé  engrefler  les  cheuaux  de  l'herbe  des 
Tribdm.      Macies>autrctaent  nommée Tribuius.Ce  flcuuecft  large  en  plu- 
fîeurs  cndroids,&  es  autres  lieux  fort  eftroid.il  eft  fouuent  rete- 
nu parefciufes  ,  qui  font  expreffeoicnt  faites  pour  les  moulins, 


0*B  SERVIE  ES     PÂU     P.   BEION.  *2-5 

-comme  es  rioicres .de  ce  pays  cy.  Les  roues  ne  font  pas' virées  de  ^^«^ 
l'eau  qui  paffe  par  vn  augesou  canal ,  mais  à  la  façon  des  moulins  ^™^ 
^juifonc  nageants  fur  Loyre:  excepte  qu'ils  ne  font  pas  de  plan-  ckerip^ 
ches  fi  larges.  Les  mou'fniers  qui  mcullcnt  mr  la  riuiere  de  Stri-  c^/^     . 
mone,  parlent  Grec  :  defquels -auos  aprins  à  nommer  les  poifTons  cU^no». 
de  nom  vulgaire  tels  qu'ils  pcfchcnt  en  la  riuiere^omme  s  enfuit:  clams. 
Cherifcaria,Ccphaios,<Slaignô  ouGlano^ceft  à  dire  SilurusJau-  fc. 
trement  Hicna>PIacancs>Chelli,Turncs ,  Grinadies,  Mouftaca-  ^M* 
tosouMyftus,quieftvn  Barbeau.Lcs  Anguilles  y  font  ^neex-^^ 
-ccflmcgrandeurJLa  riuiere  s'appelle  auffi  Marmata,pource  qu'il  ^^ 
y  a  vngrâd  pont  tout  de  bois  au  deflbus  dtrvillage  nommé  Mar-  Turnes^ 
mara,  lequel  Abrahin  Bâcha  rlft  faire  :  &:  que  deuant  le  village  il  Grinadies. 
y  a  vn  grand  cftang,qui  s  appelle  de  mefme  nom  Marmara*  Plu-  Mouftac** 
iîeurs  Rauires,comme  de  Ragoufes ,  Se  de  Chio,  Se  des  parties  de  *«• 
Grece,&  de  Venifc  ,  Se  quelque  fois  d'Egypte  entrent  en  labou-  ^^ 
chede  ccfkuuc:  &làen  peu  de  temps  trouuent  autant  degrain  ^     -^ 
qu'il  leur  en  faut  pour  leur  charge.  Les  nauires  ameinent  de  la  £exC£filHS 
marchandife  à  vendre  du  pays,dont  ils  font  partis ,  Se  entrent en  grandeur. 
ta  bouche  du fleuue  bien  vne  lieue  en  ^pay  s,&:  y  font  quelquefois  Marmara 
deux  mois  en  temps  d'hyuer  :  &  après  qu  ils  ont  vendu  ce  qu'ils  ^tl!lUe^ 
aucy  eut  apporté^  puis  rechargé  du  fourment ,  Iaincs,ôucuirs,  <^4°FolL 
ils  s'en  retournent  au  printemps»  L'on  voit  les  ruines  d'vne  ville 
à  l'entrée  de  la  bouche  de  Scrimone,  qui  eft  en  tout  deshabitee: 
laquelle  les  payfâns  du  pays  nomment  Chryfopoli»  Toutcsfois  <kyfy0fa> 
Pline  met  Chryfopolis  bien  près  de  Calcédoine. 

Continuais  noftre  cbemin  allafmes  voir ia ville qu  onnom- 
me  vulgairement  Ccres,&  anciennement  Cranon:  ou  nous  ne  <>^°»: 
rcftafmesqucdeuxiours:&dc  Cercs  allafmes  à  la  ville  de  Trica-  Mff£ 
^anciennement  nommée  Trica  :  Se  de  Trtcala  reprifmesnoitrc    * 
chemin  pour  venir  vers  la  ville  de  Philippi,coâoyans  vne  grande 
montagne  vulgairement  nommée  Defpota.  Nous  eftions  en 
vne  treigrande  plaine ,  en  pays  de  plate  câpagne,  fertile  en  bleds, 
Se  arroufee  par  canaux,moult  fréquente  en  villages.Nous  lailfaf-  ï*ngm. 
mes  le  mont  Pangeusà  dextre,ou  encore  maintenant  on  tire  des 
métaux  d'argent  des  minières  de  la  moatagne.  Ils  la  nomment 
Malaca-,  ou  bien  Caftagna.  Tous  les  habitans  de  Tricaîa  Se  de  ^^ 
Cercs  parlent  Grec  vulgaire:  mais  les  Iuifs  qui  y  font,  parlent  ^^ 
Efpagnol  &  Aileman.  Les  villageois  parlent  Grec  Se  Scruien. 


TsrftL 

Mitcedonlco. 

Coudomdo. 

SeUno. 
Mines  de 
ïangeus. 
Cuis  des 
Cbejkes.  i 


TaUurtts. 
ifctmtMt. 


l%4  PRvEMIEÎl     LîITlll     DES      StNGVLAi 

Eftansen  Macédoine,  ne  fufmes  oncen  ville  ne  village  que"  tous?:" 
les  payfans  ne  nous  aycnt  nommé  le  Perfil  dont  nous  vfons ,  Ma-^ 
cedoniki ,  ou  Maccdonico  i  auili-font  ils  es  autres  lieux  Je  Grc— 
cCjexcepcé  enCypre,ou  ils  le  nomment  Coudomalo:  mais  TA^ 
che  eft  généralement  nommée  en  tous  lieux  Selirvo  :  laquelle  ils 
cukiuent-diligemmentcs  lieuxiiumides,  Se  la  mangent  crue^Ea- 
venant  à  Philippijpaftans  par  les- minières  deCaftagna,cMendi£' 
mes  qu'elles  ne  bailloient  que  de  l'argent  &  du  pîomb3&  quelque 
fois  bien  de  Fo^aum*  les  veifmes  feulement  en  paflànt,fans  yarre-- 
£r^r.Quelquepart.qu'eu{ïions  au  parauant  eftévnoxis  n'auionsia- 
mais  veu  de  Guis  deims  des  Ghefues  :  mais  paiTans  .parJafareir, 
qui  eft  en  la  campagne,  au  profond  du  fine  nomniéChalcis,  ert 
trouuafmes  en  abondance.  Il  n'y  a  Chefne  entre  le  mont  Athos 
fur  le  chemin,  Centre  la  ville  de  Ceres&  de  Tricak  ,  ou  il-na 
eroiffe  du  Guis  '.  qui  eften  tout  différent  à  ceïuy  que  nous  voyôs 
croifteees  Pommiers>£oiriers?&:  autres  arbres  ':.&:  n'y  a  villageois, 
qui  ne  le  fçacjae  nommer-  Qxo  :earib  font  jdc  tresforte  gluz  de  fa, 
graine.  Les>eharaps  labourables  de  ce  pa-ys^  &_  principalement . 
ceux  qui  font  versles  couftaux,font  grandement  gaftez  d'arbrif- 
ïeaux  de  Paliurus^  dclarbre  deRhanus:  earilsgaignerit^grani  ; 
pays  en  fe  trainaqt  par  ja  terre,  labourable» 

Description  deplufieurs  antîquite%j&*  ruines  des  villes  en  &Uts?*  -  - 
.       doMe&dephUipptt&PbilippQpoli. 


TricaU. 
Ruines  de 
Pbilipp 


fbili 


Chapitre      LVï. 

I  n  y  aque  deux  tournées  de  Trica  ou  Tricala,  iufqûes 
aux  ruinesMe  Philippi:  qui  eft  pour  le  prefent  totalle» 
met  ruinée.  ïln'y  a  pas  trois  iournees  entières  dc.Phu 
_^_  lippi  à  Philippopoli ,  qui  auiïi.  eft  vne  grande  ville  ea 
Fmeïopolk  Miccdoine.  Mais  pour  ce  que  Macédoine  eftenciofe  du  fleuue 
Strimoac ,  les  au  theursJa  mettent  en  Thrace.  Philippopolis  au- 
parauant  s  appclloit  Penejopoîis:  mais  d  autant  que  Philippe  pè- 
re d'Alexandre  print  plaiiiiàl'aagmejQter ,  il  les  nomma  de  fort 
..,.-     ..  nom,rvne Philippi,  &  l'autre  Philippopoli.  Philippieftoit ,  Se 
t  t$ofou.  cncor  cft  ^fitùçc  fur  ie  grand  chemin  de  terre  fcrmc^llant  de  Ro- 
j^een  Afie>&à  JS^nitetiaoglciioindqu'çUc.n'cft  guère  loing. 


•*3elâ  mer  :  mais  Philippopoli  cft  en  terre  ferme.  Le  grand  che- 
-minallantdeRomeàConftantinople,  du  temps  des  Romains, 
«eftoitdêpaffer  la  ville  nommée  Brundufmm.&trauerfer  le  canal 
-de  la  mer  Adriatique  y  &arriacr  pour  prendre  port  à  la  Vaîonnc, 
ou  à  Duras:  Se  de  la  fumant  le  grand  chemin^pal&r-.pat'Phiiippi, 
Se  aller  s'embarquera  la  Caualle,&  de  là  pafTer  en' Alexandrie  de 
Troyc.  Nous  fuîmes  deux  iours  à  voir  les  ruines de  Philippi,qiïi 
maintenat  n  cft  qu  vn  viIlagc,ou  il  n'y  a  que  cinq  ou  fix  maifons, 
bafties  hors  le  circuic-des  muraillcs^pres de  Feau.  *  Phiiippî  eft  en 
mcfmc fîtuation ,  &bafti  de  mefine  façon  qu'eft  Thiiippepolî. 
CarPhïlippi  enceind  Se  contient  vne-gran  de-plaine ,  Se  vne  par- 
tie de  la  prochaine  montagne,iufques  à  lafommîtéjOuk  murail- 
le comprend  vn  chafteau  bien  fait,  qui  eft  demis  la  montagne:  Se 
a  des  cifternes  qui  font  encores  entières.  Les  murailles  de  Philip- 
pi  fentquafkocalcment  ruinees/aites  de  brique  Se  de  ciment,  Se 
en  quelques  cndroi&s  de-pierre  de  taille,mais  fans  aucuns  foffez, 
ne  dou ues.  C  eft  la  ville  dont  Galien  avarié  :  lequel  s'eftant  par- 
ty  deTroycpour  aller  à  Rome  (  mais  Troie  en  ce  temps  là  sap-  Troie  aùm 
peMoit  Alexandrie)  pafTapar  le  -chemin -qu  auotisdit  :  Car  après  nï^ydex*»» 
qu  il  eut  efteea*Lemnos,il  luy  conuient paffer  par  la  ville  de  Phi-  <&*• 
lippi,quieftfîtuee  en  plaine <iu-coftc  de  leuanc,  ayant  la  monta- 
gne du  cofté  d'Occident  5quUuyfert  de  forterciTc.  Laplaineeft  Guinuitm 
û  humide,quellefeinbleeftre quafi vnmatrctSjOutesGuimauues  -imm. c^ 
portent  la  fleur  kane ,  comme  font-celle*  que  Theophrafte  àïàfa. 
croiftre  près  Athènes  au  lacOrchomcnu  s.  Uherbe  de  Cy tifus 
eft  moult  fréquente  par  les  prairies  de  Thrace  Se  Macédoine  >  de 
laquelle  nous  n'auons  n'en  France  nen  Italie.  Il  n'y  a  lieu  ou 
Ton^puifte  voir  de  plus  grands  fêpulchres  de  pierres  de  marbre 
par leschamps-3  qua-Philippi ,  qui  ont  efte  prinfes en  lamon ta- 
gn^qui  cft  enfermées  mu  raûîes  dedans  le^k-cuirde  la  ville:car 
elles  font  manques  de  pur  marbre  -blanc.  L'on  voit  encor  mainte-  * 

nant  pluheursefcrits  reftez  des.geftes  des  Romains ,  entaillez  en 
lettres  Latines  furie  marbre  en  pluûeurs  endroits  de  la  motagne. 
L'ifle  deTaiTos  n'eft  qu  a  demie  iournee  de  là,dc!aquelle  lonpre-  ^4^ 
noit  le^plus  blanc  Se  le  plus  beau  marbre  détour  le  monde  :  Se 
•xroyons  que  ces  beaux  tôbeaux  de  marbre  qui  font  par  les  chaps 
ilir  Ic^rad  cheminjeuflent  efté  apportez  de  Taffos.En tre  tous îc£ 


Ï2.8"  PREMIER     LIV~RE      DES     STîTGVIrAv 

septdcmdcs  qUejs  ccîuy  qui  cft  demeure  le  plus  cntier,efldu  médecin  d*  Me~ 
Tlbemx ^rXân^rc>ouencorP°urleiourd'huy  l'on  voie  fon  epitaphe  eferir 
ksebam/s.    en  Grcc,mais  partie  corrompu  de  lettres  Seruiennes  ^lequel  l'oa 
ne  peut  bonnement :Iirc.  Ec  comme  les  fepuîehreseftoyentd'v- 
ne  feule  pierre  etcu  fée,  iôgue  de  deux  toifes,&  demie  toife  de  lar- 
ge^ de  la  hauteur  d'vnehomme:  auffrauoyent  ils  leur  couuer- 
çle  par  defïiis  tout  d'vne  pièce.  L'excellence  &:  la  grandeur  de  la^ 
ville  fè  peut  comprendre  par  le  grand  nombre  des  fepulchres:  car 
anciennement  les  riches  Grecs  eftoyét  mis  en  fepultureentom- 
beauxde  marbre  hors  en  la  campagne ,?  à  fin  que  les  habitans  des 
villes  fufïènt  exempts  de  la-  mauuaife  odeur  des  corps  :  d  autant, 
qu'ils  n'auoyent  accoutumé  de  brufler  les  corps  en  Grèce,  ou  de 
Coufiume    les  couurir  dé  terre  comme  en  Italie,  comme  nous  faifons  main- 
'ientmerks.  tenant.,Et  pour  ne  parler  de  fi  loing,  les  Italiens  ont  main  tenant 
^  erk-    autre  coufhime  d'enterrer  les  corps,  différente  à  la  noftre:  carils, 
font  des  cauernes  voûtées  en  plusieurs  endroi&s  des  Eglifes ,  les- 
quelles n'ont  linon  vn  gertuis  par  le  defïus  fait  comme  de  la  bou- 
che d'vn  puisqu'ils  ferment  d^vne  feule  pierre  ronde ,  à  laquelle, 
tient  vn  anneau de  fer  ,  par  lequel  on  leuela  pierre  quand  itefi 
hcfoing.  Et  quand  on  apporte  vn  corps,ils  le  laiffent  couler  leas^ 
fans  le  couurir  de  terre  :  puis  bouchent  ledit  permis  auecfa  pier- 
re,qu'iis  plaftren t  tou t  à  Fentour.  M  y  a  vn  village  en  la  plaine ,  à. 
vn  quart  de  lieue  de  Çhilippi,nommé  Bolifce,ou  vifmes  vne  grâV 
ZoUfie.        ^e  Pierrc  de  marbrc,ay  an  t  (es  mots:  N*m&  mufisin  teflamentoiqu'ils. 
font  fèruir  d  auge  à  vn  puis.  Bïé  peu  au  delà  de  Philippi/uy  uat  1er 
grand  chemin  il  y  x  vne  grande  pierre  quarree  toute  droi&e ,  co^ 
mêle  bout  d' vn  obclifque,efcrite  deîettres  Latines ,  qui  câ  le  fè- 
pulchrede  C.  Vibîus  Cor.  Qtsartus.  Les  habitas  du  pays  en  font: 
Mangeoire  vnc  fable  cmfcnxxçûimzns>  que  c'cùh  mangeoirede  laiument 
du&eud    ^Alexandrele  grand.  Mais  paria  iument  faut  entendre  Buce— 
^Akxadr^V^^-  Us  nous  menèrent  le  voir  par  grande  fpecialité-.  Elle  eft 
*  moult  groflc&.hautcidroidc  ôc  creufe  parle  bout  d'en  haut.  Lit 
Caualie.      ville  de  la  Caualleejblà  tout  loignane,  qui  fut  nommée  du  nom, 
àa  chenal  d'Alexandre  :  de  laquelle  nous  parlerons  cy  après.  Les 
ruines  de  Bhilippi  monrtret  auffi grande  admiration  que  de  nul- 
tnle  ïht  *e  autrc  vi^e*  ^ais  nous  ztvibuons  cela  à  la  commodité  des  pier-  - 


res,veu  mefmcmentquela  veine  du  marbre  eft  enfermée  dedans  . 
la  vêle.  Hy  avn  trefbeauampitheatre  eflçué  depuis  terre  iufques . 


OBSERVEES      VAK     P.    BELON.  12*$ 

lia  {bmmicé,  qui  encorcft  refté  tout  entier  iufques  àmaincenar:  Diueraheâ*- 
'&;  durerait  long  temps  fi  les  Turcs  n'cnîeuoyent  les  degrez  qui îres* 
font  taillez  de  marbre-  Il  n  eft  pas  en  forme  ouale,  comme  eft  le 
théâtre  d'Otrichoîi ,  ou  bien  ecluy  de  Rome ,  mais  en  rondeur,. 
commeàNimes,ouàVeroniie:  car  il  n'eft  pas  fermé  de  toutes 
parts.  Le  lien  par  lequel  Ton  y  entre,  regarde  le  midy ,  qui  deptiis 
la  fommité  iufques  en  terre  eft  tout  ouuert  à  claire  veue*  Il  fut 
fait  en  lieu  fort  commode:  Car  il  eft  engraué  en  plufieurs  lieux 
en  la  montagne,  fait  de  marbre  par  degrezXa  chofe  plus  antique  T ,     ,   ^ 
qui  a  refté  debout  en  Philippe  font  quatre  gros  pilliers  d'énorme  DJmCUns 
gronreur&:  hauteur,  qui  font  àcs  reliques  du  temple  deDiuus  dim. 
Claudius  :  ou  il  y  acncor  infinies  ftatues  &  groiîes  colomnes  de 
marbre  entaillées  à  la  Dorique  Se  Ionique ,  de  mcrucilleufe  ftra- 
c~ture,&:  de  grand  artifice.  Ayans  trouué  vn  Caloiere  de  ta  mon- 
tagne nommée  Caftagna,  nouspartifmes  de  Phiiippi pourvoir  atones. 
les  monafteres  qui  font  fur  ladite  montagne,  defquels  y  en  a^qua-  Fmfijexu^- 
tre  en  nombre.  Les  arbres  qui  croiftènt  en  icelle ,  font  Platanes,   g*Tfùl' 
Foufteaux,  Arboufiers,Àndracbnes ,  Chefnes verds ,  Aria,  Ala-  ^:  "  "  ' 
ternus,Sapins,&;Pinsfauuages ,  Efcuîus.  L  arbre  que  les  Mace-^.^ 
doniens  nommèrent  anciennement  Cornailier  remelle  y  que  les  ^ycUtemaà^ 
François  pourleiourdluiy  à  l'imitation  des  Latins  ont  nommé  sxngmas^ 
àcs  Sanguins,ne  croiiîent  gueres  moindres  en  cefte  montagne  làv 
que  font  noz  grands  Cornaillers  malles. 

Vejcription  de  la  ville  de  Bucephala  3  qui  sappeÏÏoit  auparauam  Çhdfr    ■ 
jlred,mawtenantla  Caualle...  Chapitre      lv  1 1._ 

f|y^j^^\  Près  queufmes  cheminé  par  ladite  montagne  Féipace 
ilBI^II  de  deux  iours,arriuafmescn  vn  iour&  demv  à  la  ville  lAC:tt^Jf- 
»gœ  de  la  Cauaile,qui  anciennement,auant  qu  Alexandre  ^yÇ^ 
•Jcfi^p^reuftnommeeBucephala,  auoitnom  Chalaftrea,  3c      ~ 
ne  fallut  pas  que  retournafîioris  à  Philippirmais  lahlàfmes  le  che- 
min fur  main  gauche.  La  Caualle  eft  vne  ville  qui  fut  ainiî  appel- 
lee  du  cheual  dAlexandre nommé  Bucephalus.  Piuiieursliiants  Bucyh+hk:- 
les  eferits  de  Pline ,  fe  font  mis  en  doute ,  à  fçauoir  en  quel  pays  Ifw*s  In~~ 
eft  édifiée  B  a  cephala.  Car  quand  il  defetit  le  âeuue  Indus,  il  dit      *~ 
que  la  ville  de  Bueephala  eftoit  le  chef  de  trois  villes  que  les  Azc- 
lùçns  habiçoyent  ?  qui  fut  ainix  .nommée  pource  que  le  càeuaL 

R. 


ï'3©  TREMIES.     1IVRE     DES     STtfG^LA, 

d'Alexandre  y  auoit  efté  mis  en  fèpulturc.  Mais-ledit  Pline  e'fcri* 
uantde  Grecc,àlafin  du  chapitre parlanc  d'Acha-ieditBucepha- 
i  i  luseftrevnport,lequclilconioin&auec  Anthedon.  -Et  Mêla  e£- 
criuant  de  Grecc3&:  principalement  de  Macédoine,  met  Anthe- 
don  :  &:  peu  après  mettant  les  fines  &  les  promontoires  du  Peîo~ 
ponefe,iî  nomme  le  fine  ditBucephalondelaparticd'Qrient:  &: 
par  Ton  dire  il  eft  tout  manifefte  que  Bucephalon  eftoit  vn  pro- 
montoire ou  vn  fine.  Il  faut  entendre  que  Bucephaîa  de  Grèce 
*eft  vne  ville  fur  vne  butte  auanceeen  la  mer ,  quin'eft  qu'à  deux 
lieues  loing  de  Philippi,&  eft  maintenant  vne  tresbelle habita- 
tion: &  n'y  a  pas  long  temps  qu'elle  eftoit  deferte,&  tonte  ruinée. 
Mais  depuis  que  les  Turcs  retournèrent  de  la  guerre  de  Hongrie, 
3ude.  &  qu'ils  amenerenttous  les  luifs  qu'ils  trouuerent  dedans  Bude, 

fé-    .       Peft,&  AIbacegal,ou  Àlbereal ,  &:  qu'ils  les  eurent  enuoyezha- 
^clhered.     biterà  la  Caualle5àTricala  ou  Trica,&  à  Ceres,ou  Cranon  5elîe  a 
Cranon.       xouCiouxs  depuis  efte  habitée:  &  maintenant  il  y  a  pi  us  de  cinq 
'  fffe*         ^cens  luifs  aucc  les  Grecs  &.  les  Turcs.  La  fîtuation  delà  ville  eft 
-  ^uafi  telle  qu  eft  celle  de  la  ville  de  Lernnos  : carellecft  ainfien- 
^îofe  d  eau  de  la  mer  de  toutes  parts3excepté  la  partie  de  derrière, 
qui  eft  fort  eftroi£te.  Il  y  a  vn  grand  porr5  mais  au  demeurant  mal 
feur  :  qui  eft  caufe  que  quand  les  Galiottes  ou  freguates  y  feiour- 
*nent,on  les  tire  en  terre  :  &  auiïi  les  fuftes  &  barqises4  car  le  porc 
xi  eft  pas  bien  défendu  de  tous  vents  :  combien  qu'à  vn  befoing 
elles  y  peuuenr  endurer  îatempefte ,  mais  non  fanseftre  trauail- 
et/tenus  m*  lces.  Il  y  a  enoot  moult  grande  quantité  de  ciftérnes  dedans  le 
4i fus.         circuit  de  la  ville,  qui  font  toutes  entières  :  qui  nous  faifoyent 
jjeknicQ      fouucnir  d'vne  autre  ruine  ancienne  de  Crète  nommée  Helenico 
tefro-        paillocaftro,  qui  eft  en  la  motagne  vn  peu  au  delà  de  QuiiTamus. 
Qujfamm.  ,Qc&c^emes  antiques  font  hites  de  û  fort  cimétjqu'ellcs  ne  pre- 
drontnon  plus  fin,que  fera  vne  pierre  de  marbre  dur.  La  Caual- 
le  eft  l'vne  des  clefs  de  Macédoine,  tout  ainû  que  Philippe  appe  1- 
Mtgnep.    loit  la  Magnefîe  vne  clef delà  Grèce. 


:    OBSERVEES    PAR.     F.     BELONV  J$l 

$tie  les  murailles  qui  auvent encore  de  prejentjûr  le  mont^  Emus  ^mon~ 
JïrentUfepxMtiûn  des  forces  de  Macédoine  <&  deThrxce^ 

Chapitre        lviii. 

?  L.y  atioitautresfoisvn  mur  de  ibrterelTe  au  deflusde 
\  la  Caualîe,qui  encor  eft  demeuré  en  Ton  entier ,  quafi 
\  d'vn  quart  de  lieue  de  longueur ,  fïtué  furie  plus  haut 
(  faille  de  la  prochaine  montagne  :  &  n  y  a  rien  plus 
vray  qu'il  feparoit  les  limites  dé  Thraee-d'auec  Macédoine:  mais 
entendez  des  forces  Se  puilTancedes  Royaumes.  Car  les  Cofmo-  Mîirjefor^ 
graphes  ontexpreffementexcîos  les  villes  de  Philippi  &  Philip-  tereflh  des 
popoîi  hors  Macédoine:  qui  toutesfois  efloyent  1  es  villes  capi-  Mac^doniëL. 
taies  du  territoire  àcs  Macédoniens  ,.&  toutesfois  font  deçà  le  strumne 
fleuuede  Strimone.  Ce  mur  quienclaft  le  pafïàge  au  deiïus  de- 
la  Cauaïle,eil  voûte,  &  a  deux  co-nduicfcs  par  dedans  quaû  fèm- 
blablesau  mur,  quiferêddepuisfainct  Pierre  de  Romeiufquaix* 
Ghafteau  fainà  Ange,  fait  en  manière  ds  galerie.  Au  bout  de  ce 
mur  fur  le  haut  de  la  motagne,y  a  vne  grolTeiour,  qui  efloit  pour; 
faire  force  contrcle  cofte  delhrace .  In  y  a  pas  logjemps  q^A- 
brahin  Bâcha  reflaura  vn  conduit  deau^ui  auoiteïlé  autresfois 
fait  par  les  Roys  de  Macédoine, dont  le  courant  de  la  fontaineeli 
conduit  de  plus  de  trois  lieues  delà  iufqucs  en  la.ville  delà  Ca- 
tjallc-,&  vient  d'vne  haute  montagne ,  toujours  fuyuant  la  colle, 
par  le  conduicl; ,  iufques  à  tant  quelle  trouue  vne  vallée  :&:  à  fîn- 
de  la  faire  pailèr,il  a  fallu  luy  faire  de  grandes  arches  hautes  à  l*e- 
quipollent,. pour  la  rendre  delà  montagne  cnla. ville.,  eivforte. 
que  les  arches  dudiLConduicl:  ont  plus  de  trente  toiles  en  hau- 
teur :  où  pour  la  grande  commodité  àcs  eaux  de  celle  fontaine,la. 
ville  qui  elloitdeshabicee,  a  elle  rendue  fort  peuplée.  L'ille  àc  rort^   ^ 
Talfosquielloit  anciennement  le  port  àcs  Galleres  d'Aîexan-  fces  d\xk^ 
drie^n'eiloit  qu'à  deux  lieues  de  la  Caualle. Ledit  Bâcha  £cït  auifi  xandrie. 
enfermer  la  ville  de  neufues  murailles ,  pu  trouuafrnes  de  Feicri-  r*Jfos. 
cure  Latine  delfus  des  pierres,  qu'on  y  auoit  autresfoiselcriteau 
temps  que  les  Romains  dommoyent  fur  la  Grece:kquelle  auons 
£eriree,ainu  que  s'enfuit. 


.gni  prem'ieb.    livre    ides  sikgvla. 

P.  BoftiUus.P.S.U  PbiUdelpbuspetram  infiriorem  excidit>thuhmft~ 
àtjvbi  nomma  cultorfcripfit  &fculj{it.  Sac.  Vrbano.  S. P. 

Toutes  lcfquclles lettres eftoyent en labafe- dvne  groile  mu- 


raille. 


Quil  ny  a  aucunes  hoflehries  en  Turquie  5  mais  quon  trouue  des 
hôpitaux  a  fe  loger.  Chapitre      LU. 

C^3$£Q  Galant  donner  à  entendre  qu'il  n  y  a  point  dliofteïe- 
3Ïn'yfaus   WmM  ries  en  Turqui^parleronsd'vn  grand  édifice  qu'Abra- 
?      t*  WÊËk  hin  Bâcha  feit  édifier  àla  Cauaîle,  que  les  Turcs  ac 
ÏT        mM  DompraprcappcilcnVvnCatbachara.Ufcicauffivnc 
ikW  Mofquee  ioignatfon  hofpitalpour  nourrira  loger  tous  pailans. 
M'fi»«.      Etnousfeulementeftans  trois  de  compagnie,  auccnozmoncu- 
res,y  auons  efté  nourris  trois  iours  /ans  qu'ils  s'en  ioyent  nulle- 
ment fâchez^  fans  qu'il  nous  ait  rien  coufte.  Nous  auons  a  par- 
ler fouuent  de  ce  nom  de  Car  bachara:  parquoyconuient  pren- 
dre  ceftuicv  pour  exemple  des  autres.  Nous  ne  pouuons  le  nom- 
mer autrement  en  Franc  ois,finon  vn  Carbachara:  &  pour  le  fça- 
uoirdonneràentendre,ilfautfuppofcr premièrement  qu  iln  y  x 
point  d'hoftelerics  es-pays  ou  domine  le  Turcme  de  lieux  pour  le 
logis  fMi*  iocrer  s  finon  dedans  celles  maifons  publiques ,  appeliees  Carba- 
fusde  T»r*  chDâra  nUi  ont  efté  faites  en  diuerfes  manières  :  mais  celle  mame- 
*"''  re  qui  eft  la  plus  commune,  eït,  que  les  grands  fçigneurs  qui  font 

deuenus  riches  en  la  maifon  du  Turc ,  ou  bien  en  quelque  autre 
Fondons  forte  qucccfoic  ,  ayans  voulu  faire  quelque  bonne  œuure en ^  ce 
JesT«m.  mode,*:  penfans  icelle  eftre  profitable  a  leur  faluc,  font  faire  tels 
édifices  par  charité  :  car  ils  ne  cogrioiffenc  parents  qu'us  ayenc 
aufquels  ils  vueillent  faire  aucun  bien.  Nous  en  dirons  la  raifon 
ailleurs.Pefans  doc  faire  vn  fouuerain  bie  par  tels  ouuragcs,  font- 
faire  plufieurs  belles  réparations  au  bien  public,comme  quelque 
beau .ponc,ou  quelque  beau  Carbachara:^  tout  loignant  le  Car- 
bachara,  quelque  belle  Mofquee,  éloignant  la  Mofquee  tonc- 
quelque  bcaubaing.Et  pour  maintenir  tous  othciersarairc :1e  1er- 
uice  qu'il  faut  leans^ant  àla  Mofquee  qu'au  Caxbachara,ils  do^ 
nent  des  rentes  pour  fournir  aux  frais  &  dcfpcDS.comroc  a  payer 
le  bois  qu'on  v  brufle ,  payer  des  preftres  qui  font  ordonnez  pour 
iEakc  les  pricre$,&:direlefcruice:auffi  payer  l'huile  U  lacirequi 


MDBSEÎIV1ES    tÂU     P.     ÎErON.  "t# 

cftbruflcces  Mofqueess&  autres  çhofes  neccifaires  pourîescui- 
fwies,&:  pour  ceux  qui  acouftrent  à  manger.aux  païfans.Quant  à 
ceux  qui  viennent  loger  au  Carbachara  ,  il  faut  nccefïàiremenc 
qu'iiz  portent  leurs  vtenfiIesaueceux,commclodiers  ou  efclaui- 
neSjOueftramats  pour  dormir,linges ,  &:  au  très  befongnes  :  Car 
on  ne  baille  autre  chofe  au  Carbachara ,  fmon  vnc  petite  cham- 
bre vuide  :ic  faut  qu  vn  chacun  fe  férue  àece  qu'il  auraapporté. 
À  l'arriuec  vn  chacun  defployc  fes  hardes  :  Se  s'il  a  affaire  d'eau,  il 
luy  conuiendraen  allerquerirau  mcfmevaiffeau  qu'il  aura  por- 
tc.Et  quand  le  potage  du  Carbachara  ou  hofpitai  fera  cuit>i!  faut 
forcer  fon  efcuelle,  qui  en  veut  auoir.   Lon  y  donne  auffi  de  la 
chair  &  du  pin.  Et  pourec  que  les  Turcs  nomment  leurs  potages  votaga  da 
par  nom  propre,  nous  auonsbien  voulu  fpecifier  quelle  chofe  ils  Turcs 
baillent  auxpaflànsparaumofncs.  Nul  ne  vient  là  qui  foitrefo-  Trvhan*. 
fe/oit  Iui^ChrcftienJdolatr^ouTurc.Sur  tout  baillent  libéra-  ^T^" 
lemenr  du  potage  fait  de  Trachana,ou  de  Bohourt.ou  de  Afcos,    / 
oudeRis,  Les  habitansdcriïîe^deMeteiin  fçauentaccouftrer^-* 
du  fourment  ,&:  le  compofer  auec  dulaicl  aigre.  Premièrement 
ils  boullent  ledit  fourment  :  en  après  ils  le  refeichent  auSoîeil,  Se 
en  font  vne compofîtiô^ui  de  nom  propre  eft  appellee  Bohourt. 
CeBohourt  eft  tranfporcé  de  Meteïin5:&:enuoyé  par  toute  Tur-  *««**• 
quietdont  ils  fèlèruent  grandement  en  potages.  :  Ils  font  encore 
yneautre  forte  de  droguede  fourment  audit  Metelin ,  qu  ils  no- 
mentTrachana  ,  laqu  elle  n  eft  moins  requife  que  la  première.  Trac^d, 
C  eft,à  noftreaduis*  celle  qu  on  appeMoit  anciennement  en  Grè- 
ce Se  Italie y  Maza.  LVfage^le  ces  deux dides  drogues  Bohourt,  m*Q 
&  Trachanajcft  fi  grand  par  toute  Turquie  >  qu'il  ne  fe  peut  dire 
plus;Carilsncfontbon  repas  qu  ils  ri  en  facent  cuire  en  leurs  po- 
tages.Iis  ont  le  Risen  figrand  vfàge,  qu'ils  ea  defehargent  pour 
îc  moins  fix  nauircs ,  par  chacun  an ,  au  port  de  Ccnftantinople, 
qui  leur  viennent  d'Egypte.  Ilsontauifi.vneefpecedc  légume, 
en  moult  grand  vfage  qu'on  leur  apporte  d'Egypte  par  mer ,  que 
les  Grecs  appellent  Afcos ,  du  nom  corrompu  de  Aphace.  lis  en  ^feos, 
fontprouitïondefaifon,  pour  en  départir  mdifeemment.  La^#*»» 
façon  de  faite  leur  cuiiine  eft mouk  différente  à  la  noftfc  :  car  ^ 

"  quandlachaircftcuiae5ilslariraithorsdupotvôr-puismettent £%*£ 
dedans  ce  dequoy  ils  veulent  pour  efpoillir  ïcbouillon.  Et  pour-  yj^ 
cequ'ils^nfont  quantité  ,  aufti  ils  le  meûent  auce  vneiongue^„  Tum„ 
*  Riij 


134  PREMIER    LIVRE     DES.  SrNGVLÀ; 

pale  de  bois.  Ils  n  onepoint  de  cables  pour  manger  defïus.  Par- 
quoy  s'aflèent  à  plaide  terre ,  &  là  defployent  vne  ronde  pièce  de 
cuyr  pour  fe  feruir  de  nappe  ,  qu'ils  tiennent  lacée  comme  vns 
bourfe.  Il  n'y  a  aucun  en  Turquie  ,  quelque  grand  feigne ur  qu'il 
foit,qui  ne  veule  bien  porterfoncoufteau  à  fa  ceinture.  Chacun 
porte  fa  cueillicr  :  ce  leur  eft  moyen  de  ne  s'cngreffër  guère  les 
doigts.  Car  aum  n'ont  ils  i'vfage  de  ferujettes.  Vray  eft  que  géné- 
ralement tous  portent; des  gf  an dsmouch oks  qu'ils  fon t  feruir  à 
fe  torcher  les  doigts.Nul  Turc  quel  qu'il  Toit  3  n'a  honte  de  fè  lo- 
ger dedans  relie  manière  dofpitaîjne  de  prendre  raumofne  en.  la 
forte  qu'auxms  dit.Gar^eft  lafaçon  de  faire  du  pays.  L  effranger 
n'aura  pas  moins  que  le  pîm  grand  peribnnage^Ce  quen  auons 
efcrit,foit  feulement  entendu  des  lieux  ou  font  fondées  telles  au- 
mofnes5comme  eft  àBucephala.  Le  fufdit  Bâcha  feit  telle  répa- 
ration à  la,  Gaualle,  qu'en  oiure  ce  qu'il  feit  mener  l'eau  de  la  fon- 
taine  iufques  au  plus  haut  de  la  ville  pat  .defïus  les  arches  baâiei 
à  grands ftaiz^ufti  l'enuoya  à  fàMofquee ,  &  à  fon  baing,,  &  par 
toutes  les  places  delà  ville.  Ilyfcitaufiïtraniporter  trois  fepuk 
chres  drpierre  dematbre^qui  eftoyent  à  vn  quart  de  lieue  delà* 
en  vn  champ  Jefquelsil feit  ni ettte  défions  les  fontaines  v  pour 
feruir.de baû%s à ahreuuej'  les  &heuaux> des paflâns».  Ces  quatre 
ièpulchres  font  eicfits  ajnfi  comme  fenfuit  ;  F;  €.  \st$fer9*Atria^ 
nus Mpntanus^Bqm  publîco  honorants, item  omnmentis  decurionatus^ 
&iniuralkis  pontifex ^  fl&mxn  âiui  ClaudkPhilippis.  >Ann*  xxiij.  Hic 
S.  E..  L'autre,  fèpiuchrc  eft  de  la  mefrne  mefare  du  fufdicfc ,  ayans 
telles  parolles  xÇpmdu  P.  fil.  ^tsjrilia  fie.  dim  ^4ug*  +Arm.  xxxv. 
H.  S.  £  JLe  tiers  fepuîchrc  eft  ainil  eferit  :  Comelu  longa  *4s~}rili& 
r      mdter^nn*ix*H.S.EAls  font  chacun  d'y  nze  pieds  delôg,  cinq 

^2£mï  ^e  ixaut  ' &  fix  dc  larsc*  Qb?1^^15  ]es  &m mcs  Turquc$  >  <iui 

tJ™^**  ont  quel  quepeu  debien  3  font  faire  de  telles  réparations  &  edifî- 
-  *      ces,&:  donnent  par  teftament  ce  quelles  ont  aux  foldats  de  guér- 
ie»/? opmio  re  ,  afin  qu'ils  s  efforcent  mieux  à  combatrexontre  les  Chreftiés: 
des  femmes  car  c\\cs  ont  ceftefaufe.opinion ,  que  c'eft  lemoyen  pour  fiuuer. 
desTws...    içurameparlamprçdes.Chreftienstuezdelamaindeceuxàqui 
elles  ont  lahTé  teUe&aumofnes.Faifans  vn  médicament  Ivn  Sple- 
:  -    setique  àla  Caualle ,  trouuafines  la  manière  de  faire  ,ce  que  les. 
sktpwK  anciens  appelloyent  Elatcrium,tel  qu'on  le  faïfoit  le  temps  patte,; 
"~~  .     fçauQir.eftsïegier&  blanc,  ^  dételle  nature  qu'il  brufte aa feu,. 


t>BSERVTE*S    PAU   P;    BTIOM.  ïff 

comme  la  greffe.  Nous  croyons  que  de noftre  temps  n'y  a  per- 
fon  ne  qui  fè  puifle  vanter  d  en  auoir  veu  vendre  de  tel.  Nous  en 
dirons  dauan  tage  ailleursenaurr-e  langage^quanddefcrirons  les 
plan  tesen  particulier» 

Vu  grand chemin  de  laCaualleà  Conflantinople.      Chapitre  L  x. 

r^^£^^Rcnans  le  chemin  de  BucephalaàCÔitantinopîe, 
ptrouuafmes  encor -d'autres  murailles  fèmblablesà 
^celles  de  deffus  le  mont  de  la  Cauaile,  quieftoyent 

>  defTus  îafommité  de  la  montagne  d'EmuSjquifont 

►  à  deux  lieues  de  la  Cauaile ,  fermées  contre  la  cofte 
de  Thrace,tcnans  le  paflàge  de  Macédoine ,  bouché  par  deflus  le 
mont.  -Et  de  là  defcendifmes  en  vne  campagne  de  grande  eften- 
du^fetpresduriuagedelame^ayans  l'ifle  deTaflbsàdextre, MontEnms* 
&Ies  hautes  montagnes  d'Emus  nous  dcmeuroyentàfèneftre, 
lefquclies  nous  auios  défia  trauerfees,  {ans  y  auoir  iamais  veu  au- 
cun Cyprès.  Nous  paflafmes  vne  riuiere  que  les  Grecs  appellent 

en  leur  vulgaire  Meftrorles  Turcs  la  nomment  Charafou,  qui  eft  Mejho. 
à  dire  fleure  noir.  Son  appellation  couiendroit  bien  auec  le  fleu-  chaxapM. 
ne  Meîas,qui  donna  nom  à  vne  plage,qui  s  appelle  Melanicus  fi  - 
nus  :  mais  ce  n  eft  pas  luy.Nous  en  parlerons  cy  aprcs.Car  ce  pre-  Me^\ 
fent  fleuue  eft le  fleuue Nefus,qui  defccn& dumont  Emus,com-  f^"™ 
me  auiE  fait  le  fleuue  de  Strimonc  :  &  auflî  que  le  mont  Emuseft^^ 
comme  vn  mur  de  fortereflè  entre  Thrace  &c  Macédoine ,  telle- 
ment que  Nne  des  extremitez  du  mont  eft  entre  le  fleuue  Stri- 
monc ,  &  le  fleuue  Nefus.  La  riuiere  de  Nefus  eft  fort  lente ,  &  zrtfûs. 
toutesfois  elle  meine  beaucoup  de  grauois .,  &  eft  peu  moindre 
que  la  riuiere  de  Strimone: &  va  droi&ement  fc  rendre  deflusl^  strimûne- 
le  de  Thaflbs,  fçauoir  eft  plus  près  du  bout  que  regarde  Samo- 
thracc,que  de  la  corne  qui  regarde  le  mont  Athos.  La  riuiere  de 
Strimone,dc  laqllc  nous  auôs  parlé,  ièreden  la  mer  entre  le  mot 
Athos  &  rifle  deTaflbs^deJaqueUelamera  peins  le  nô ,  qui  s'ap- 
pelle le  Strimonicus  finusXe  pont  qui  eft  fur  la  riuiere  Nefus,e& 
3e  bois,  corne  eft  celuy  quieft  fur  la  riuiere  deStrimone:  maisîl 
a  eft  pas  fi  lôg  Nous  trouuaimes  des  pafteurs  au  bout  du  pot,  qui  MovtonsYo- 
&ifoyét  roftu  des  moucos  entierSjexcepték  tefte,pour  vedreaux^0**  *** 
pailàij&ieiquekjilsAUQitt^  **** 

K  iiij  ■ 

l 


M*  P-REMUB.     LITRE     BES     StNCVLA'. 

mais-ils  auovcnt  vuidé  les  tripes , ,&  auoyent  rccoufu  fejentre. 
Naine  pourroit  croire  qu'vne  fi  grotte , mafte.de  chair  le  peuft 
cuire  en  roftiflant^qui  ne  l'auroit  veu.Toutesfois  ce  n'eft  pas  eho- 

13  fent  au  pays^Anatolie  ,  duquel  les  plrens  font  vn  peu  plusn- 
Turl  chcs.ilsmettentroilirvabœuftoucentier/embrocheenque- 
Bœiifrofil  que  <>tos  cheuron ,,  &  mettent  vn  mouron  tour  entier  dedans  le 
mt  citigr, .  bœuf'  &  dedans  le  ventre  dudid  mouton  vne  poulie ,  &  dedans 
'     lcv.entredelapoullcvn œuf.  Puis  quand  ilsontrecoufuleven- 

trcdubœu&Jslcfon^ 

fufdiaes  viandes  de dedasle  bœuf  fepeuuet  cuyre  itifqu  al  œur. 

Toutes  les  chairs  ainfi  cuides  font  mangées  par  les  pare^de  1  en- 
£mt  circoacis,en  faifant  vn  feftin.  Ces  parleurs  quanos  <ht?tren- 
chentlemoutonpar  pièces  quand  il  eftcuiû,,* :1c vendent  ca 
détail  aux  pa&ns.  Nous  campafmes  deifous  des  Saules  uu  bout 
du  pont  pour  repofer  nozmotures,  &achetafmes  de  celte  chair, 
que  nous  iugeafmes  plus  fauoureufe  que  fi  elle  euâ  efte  cuicte: 
-      par  pièces.  Tantoft  après  auoir  difné,  nous  repnfmesnoitre  che- 
■  min  &  fifincs  vne  afFez  bonne  iournee.  Car  nous  vmimes  loger 
3»KÛK-      îufquesalavilledeBouron.quiencor  retient  fon  nom  ancien.., 
"'"■".    Elle  c&  fiait*  auprès  du  lac  qu'on  appelloit  Biftonicus  lacus. 
<&T"*       Noltre  chemin  foc  par  vne  plaine  prairie  moult  herbeute  ,cou- 
Mh*mms.    uerccdeCynfu^Haiimus^Rhamnus,  lequel couccsfois-ncft. 

*  ■    Je  s-eflcuerenarbriffeau  fort  ramu  fans  efpines ,  comme  en  Crè- 
te ,  toutesfoisil  s'efpand  par -terre  en  cette  prairie  a  la  mode  des 
aprlmefi  Câpriers efpineux.  Nous trouuions de ïlierbe de Scordiontouc 
pLx.       ioignaritlavilîedeBour65laquellepoure{lrefitueeenvnegran^ 
'      deplainehumidcioignantvnlacd'eaufalee5peuteftre  cempa- 
àttodus     rêJcn  fadeur  à  Aiguës  mortes.  Lelac  de  Bouron  ou  Butomus, , 
^CHS'         cftdccSandrcucnuaupays.  Car  il  y  a defort bonnes peichenes. 
La  me'r  en  ceftendroidlànecroift  ne  diminue  iamais  ,non  plus 
que Êiit la  merde Ponc,^  du  Propontide ,  &  deFHeïlefponr, 
comme  auifi  vne  grande  partie  de  la  mer  Egée.  Ils  y  peienent 
iéUs.        moulcgrandequantité de  petits  poiflons  femblables  aux  Ab.es, 
i&Wr-    que  les  Grecs  de  Bouron  nomment  Lilinga,&à  Conftannnopfe 
*?"?+     LicorinL  Ccft  celuv  que  Gaiien  a  nommé  Lentifcus ,  les  1  ari-~ 
vmè^    fi      yncYandoife^ff  aux  autrespays-vn  Dacc.  Ils  les  accoufiiet; 
■  -  -   ■  cpmme. 


©•B'SrRVESS     PAR     P.    BELON-.  ï$7* 

eomtneÂous  faifons  les  harengs.  Car  après  qu'ils  les  ont  vn  peu 
falé,  puis  fait  fumer,  ils  les  defciçhcnt ,  &renuoyentàcharcces 
$t  bacelees  en  pluûeurs  lieux  de  Greee ,  &:  iufques  en  Italie  mef-  Jo-^ 
me:  Us  les  préparent  de  mefme  façon  comme  ceux  de  la  Boiane  Scm.    ^ 
fondes  Scourances.  Nous  ne  trouuoDsdirTcréçe  entre  les  Scou- 
rances d'Albanie,  &  Licorini^non  qu'ils  font  plus  petis.La  plus 
grande  partie  de  Bouron  font  pefchcurs.Catay  ans  la  commodi- 
té du  fufdict  lac  fi  fréquent  en  poitton,ils  s'addonnent  volontiers 
à  en  prendre.Les  Afparages  de  Grèce,  qu'ils  appellent  Corruda,  ^^p* 
ont  la  fueille  picquantermais  les  cultiuez  des  iardinsyont  la  fueiU 
fc  mouffë,trouuans  lit  terre  de  cefte  capagne  tant  à  leur  gré,qu*Bs 
y  font  fi  frequens ,  qu'on  ne  lavoir  verdoyer  d'autre  chofe.  Nous 
trouuafmes  vne petite  bourgade  nommée  Commercine ,  qui  cft  d>mcr6m.. 
à-demie  iournee  de  Bouro ,  ou  il  y  auoit  de  toutes  fortes  de  vian- 
des que  nous  volufmes  acheter.  É  y  a  les  mines  d*vn  petit  chafte- 
lct,dedans  lequel  eftiisglife  àcs  Grecs Chrcftiens;:car  k^vitia^ 
ge  eft  habité  des  Grecs  ,&  peu  de  Turcs. 

D 'vne  trefanaenne  place  en  Thrace  nommée  CypJçJh  :  auec  h  maniera 
de fair-e l'alun,  Cbapave.  lxi. 

Près  que  nous  enfmes  demeuré  campez,  quelque 
efpacede  temps  ioignant  la  ville  de  Commercine      r 
fous  les  arbresd'Efculus  &;  Aria,  nous  reprifees  la  y?j€  '  »  ^  ' 
i  campagne  3  ayans  les  montagnes  à  main  gauehe;5£ 
«.  ^-  - .  w  »/  arriualmes  à  vn  autre  vilhgc  nommé  CypièUa; 
Nôus  voulions  expteûement  paner  parÇypfelîa,à£n  de  voir  fai^ 
sç  l'Alun  de  glaz ,  pour  J'obferuer  :  &:  nousy  tiafmcs  trois  jours 
S^dcmiaulieu  de  fâ minière.  Quelque  paraque  FAI  unie  face 
©nierait  prcfque  touficursLveinedeicouuerte,lcauoireâ  que 
la  minière  n'eft  guère  profonde  :iieft-ce<ja?à.Cyp|clla  ilyades  d^5^r^ 
endroitsou  la  pierre  eft  ri  ree  de  la  profondeur  de  fixtoifes.Ce  vil- 
lage de  Cypfelia-cft.cn  Xhrace,  vulgairement  nommé  partie  en. 
Grec,partie  en  Turc,Chapfylar.  La  plus  grande  partie  des  babi^ 
tans  font  Turcs,  peu  y  en  a  qui  foyent  Grccs,I£y  a  bien  quelques 
luifsjdcfqueis  Tvn  tenoit  rarrentemét  dureuenu  de  V  Muni  chez 
lequel  nous  logeaimes  pour  mieux  entendreia  vérité  de  îarna-^^ 
sûece dde&ire  ;  &,t£ouua£mes  que  F  Alan  qulon  fait  en  Icalicà  T(m^  *" 


1^8  PREMIER     I.ÏTK.E    WE  S   SI  KG  VI. À. 

.  Tolfaau  territoire  du  Pape ,  con aient  auec  ccluy  dcChapfyîar* 

murccbe- -comme  auons  peu  voir  venans  de  Ciuica  Veche ,  allans  à  Rome 
au  temps  de  la  création  du-Papeîule  troifiefme,nous  deftournas 
quelque  peu  du  grand  chemin  pour  pafïèr  par  la  Tolfe.  L'Alun 
qu'ils  font  à  Chapfylar,  eft  parfait  &:  afïmé  au  lieu  mefme  dont  la 
pierre  eft  tirée  delà  miniere,&  eftpar  ce  moyen  de  moindre  dcf- 
pcnfc  que  n  eft  celuy  qu'on  fait  à  Tolfe,  quilfaut  porter  de  fa  veL 
Be  par  charretes  iufques  au  lieu  ou  Ion  le  cuid,  Et  combien  que 
l'Alun  ne  foit  cfpoiffi  que  de  lexiuc  de  la  cendre  faite  de  îapierre 
-de  la  mine9  laquelle  il  faut  premièrement  brufler  :  toutesfoisil 
,n  eft  pas  permis  a  chacun  qui  veut  en  faire  :  mais  feulement  à  ce- 
luy qui  âprins  le  tribut  du  reuenu  de  fà  mine.  La  première  eft 
prinfc  iuftement  es  racines  de  la  montagne ,  que  croyons  eftre  le 
mont  Serrion.  Lcdid  village  de  Cypfeîla  eft  à  cofte  du  graddic  • 
_  Jttin  qui va  de  Duras  à  Conftantinople,fîtui  au  lieu  ou  Ion  corn- 
CmjfmdeU  mence  à  monter  pour  gagner  ledefTus  de  la  montagne.On  laifle 
%m*  les  mines  quelque  peu  à  feneftre.  La  pierre  eft  tirée  de  fa  mine 
auec  trefgrande  difficultés  pour  autant  qu'elle  eft  tant  dure,  ils 
la  rampent  a  grands  coups  demarteau.,&  de  cifèau:puis  ibnt-cui- 
re,come  qui  en  voudroitfairede  lachaux  ou  du  plâftre.  Et  d'au- 
tant  que  le  bois  eft  à  commandement  ,  &  qu'il  ne  faut  porter  la 
pierre  plus  loing  que  la  mine ,  les  ouuriers  la  font  au  mefme  en- 
•droid  dontik  ont  tiré  la  mine:parquoy  iceux  ouuriers  prennent 
1  le  faire  en  ta£che  :  Car  chacun  a  fà  petite  logette  ou  niaifonnet- 
te,  dedans  laquelle  font  trois  ou  quatre  auges  de  bois  dedans  ter- 
re, efquclleson  verfè  la  lexiue  iufquesà-ce que  l'Alun  foit  glacé, 
Se  reduid en  roche  relque  nousje  voyonsXa  pierre  dont  eft  fait 
l'Alun ,  au  commencemet  eft  maffonnec  en  voûte,  &c  flamboyce 
de  feu  legier ,  comme  qui «cuirodr  du  plaftre  :  car  fi  elle  eftoit  par 
trop  cuide,lafûbûarice  de  l'Alun  qu'elle  contient, s'euaporeroit 
par  la  force  du  feu  ;  mais  demeurant  ainfî  dure ,  &  mile  à  la  pluye 
Morgue,  deux  ou  trois  mois,  fè  rend  de  foymefme  en  poudre.  Car  tout 
Marne.  akiû  que  la  Margue,ou  Marne,  delaquelîe  les  chips  font  engref- 
fèz,non  incontinent,&  du  commencement  que  fà  giebc  eft  fref. 
chement  tirée  de  {àperricre,  eft  attendrie  &comminuee  en  pou- 
dre ,  mais  demeurant  quelque  cfpace  de  temps  à  l'air ,  fe  difTout 
peu  à  peu,tant  aux  roufecs  delà  nuid,  qu'aux  piuyes  de  iour  %  &5 
gelées  d'hyuer ,  tellcmeat  qu  a  la  fin  elle  fè  rend  fondue  parla 


OBSERVEES     PAR    P.    FELON",  l& 

fengÉfôor  de  temps  ,  fe  méfiant  auec  la  terre ,  fuppliant  au  défaut 
<Je  fiVrnïer  :  tout ainfi  cefte  pierre  dure  feulement  roftic  de  legierc 
iarrune,rcftc  en  fon  entier^comme  fi  le  feu  ne  luy  auoit  point  fait 
de  mutation ,  &  ayant  demeuré- quelques  iours  fous  le  ciel,  cil  fi 
fortattendric  desroufeesde  la*nui& ,  &  pluyesdciour,quepcu 
de  temps  après  eft  toute  conuejtic  en  cendre.  Les  pierres  de  la 
minière  d'Alun  n'ayans  point  eftéroftics,mifes  en  maflbnncrics,  #«■«*  &  If 
&  ouurages  de  murs ,  font  permanentes ,  comme  fondes  autres mmt  *-^~ 
pierres .  A  près  que  la  fufdicte  pierre  eft  rédigée  en  cendre,foit  par 
la-  pluye  natoreile,au  par  celle  qu'on  luy  à  fair,par  art,cft  à  la  par- 
fin  cuiâreauec  de  l'eau  donc  Ion  fait  deJakxiue,  laquelle  eft  mifo 
en  des  au ges  quarrees",  ou en-ées  pots  de  teste  ou  de  bois ,  &  là  le 
eongelccn  dix  ou  douzeiours.  Telle  eft  la  façon  qu'ils  tiennent 
à  Chapfyîar  en  faifanU'Àlun  :  lequel apporté  en  Italie  eft  furno^ 
mé  Mun  de  Mereîra.  -  Mais  pouree  qu'il  y  en  ad»  rouge  &~ du 
blanc^nous  ofons  bien  dire  quclamieexle  l'Alun  bknc  peut  auf-  ^mdr 
fi  faire  le  rouge.  Car  la  couleur  ne  gi(k  qu  en  la-fàçon  de  le  faire,  ^J^y^- 
félon  que  la  cédre  aura eftê  bien  ou  mal  trai&ee.  UAlun  faitvne> 
efeume  queplufîeurs  ouuricrs  des  minières  d'Alun  gardent,dontr 
ils  font  vne  peintm?e*ouge  ,  qui.  de  nom  François  eft  nommée 
tercedeMacharon  -.laquelle  toutefois  n'eft  point  gardée  à  Chz- ^àunrauge. 
pfylar.  Ceft  ce  qui  fait  qu'on  voit  les  vallées  rougir  de  telle  efeu-^^^^ 
me,que  les  torrens  ont  emporté  auecl  eau.  delà  pjtiy  e~  €  ***** 

Z3#  gmnd  chemin  pajpnt^tfon  faifoit  anciennemmt^e»sni  k  Roms- 
kÇonjiant'mofhi  Chapitre    lxi:» 

rOntinuans  noftre  cliemin  vers  Conftantinopîc,  S6 
*  commençans  àmonterla  môtagne^ftans  defia  quel- 
1  que  peu  rnotez. ,  regardasdérriere  nous, .nous  veoyôs  ^0J^ms. 
bien  à  clair  le  chemin  que  nous  auionsfaàt  depuis  le  Ua& 
lac  Biftonius5qui  maintenant  eft  appelle  fiouroa, duquel  Ari- 3owm: 
ftote ,  au  buitiefme  liuredes  animaux ,  treziefrae  chapitre^  par- 
lé en  cefte  mzmQVC.Qiànetkm  m&iùim  Lacubusgcnera  plurapijcium 
mm&mmtrj&miapertUTfreft^gr  inBiJîcmidiLMMfluriindjrencmbabm- 
tur.  Nous  veoyons  le  village  de  Commcrcine, qui  eftikuéenvnc  ^      . 
trefgrandc  plaine.  Le  chem  in.de  cefte  pkineeftoi  de  droicl  gra4 
chemin  ancien  5  pour  aller  de  Rome  à  Conftantinopîc ,  &:  eftoit 

S.ij 


14^  MLE^'IER     X.IVRE     DES     SINGVLA." 

paué  de  moule  grofTcs  pierres  taillées  à  l'antique  :  Car  venans  de 
Bôùron  à  Commercinc ,  &puis  de  Commercine  à  Chapfilar,. 
Grandche*  attendu  que  c  eftoic  vn  chemin  difficile  de  terre  grafïè  ,  les 
minâe^ome  Romains  le  firent  pauer ,  &encor  pour  le  iourd'huy  refte  en 
à  confiant*  fon  entier.  Nous  pouuons  prouuer  par  cela  que  les  Romains 
*?fk         anciennement  faifoyent  ce  chemin  en  venant  de  Rome  paf- 
fant  en  Afïe  ,  Se  aufli  que  louurage  de  ce  paué  monflrc  qu'il 
n'eft  pas  d  vn  petit  compagnon  ;  Car  on  voit  la  terre  pauee 
^  tout  droict.  Et  pour  aller  chercher  les  addrefTes,on  laifTe  mainte- 
nant le  paué  à  dextre  ,  l'autre  fois  à  feneftre  :  Se  en  quelques  en- 
droi&s  il  entre  es  bois  taillis: &  y  a  des  grâds  arbres  entre  les  pier- 
semum.      rcs  du  paué,quifont  furcreuz  depuis  ce  temps  là.  Nous  montât- 
mes  ladi&e  montagne  Serrium3qui  cft  moult  difficile  en  beau- 
coup d'endroi&s*  En  laquelle  Ion  voit  que  le  rocher  a  efté  taille 
en  plusieurs  lieux  à  la  poin&e  du  cifeau ,  &  au  très  ferremen  s  qui 
iZgitudede  n>a  C&G  fait iàns  grande  defpcnce.  Cet  ouuragc  nous  fait  penfer 
U  Grecs,      qwe  le  grand  chemin  de  Rome  allant  à  Conftantinople  ,  eftoit 
grandement  fréquenté.  Et  aufïï  que  Pline  efcriuant  les  iongitu- 
des  delà  Grece,ies  prend  toufîours  à  Dirrachium  ,qui  eft  vne  vil- 
leaupresd^  la  Vallonne,maintenant  nommée  Duras.-fçauoir  cft 
mrM        au  port  ou  venoient  defeendre  en  Grece,ccux  qui  s'eftoient  par- 
tis d*Italic,apresquilzauoyentpafré  le  Canal  de  la  mer  Adriati- 
querdifant  que  de  Conftantinople  à  Duras ,  il  y  a  de  compte  fait 
ièpt  cens  Se  vnze  mille. Et  veut  que  foit  la  longitude  du  Propon- 
tide  à  la  mer  Adriatique.  Nous  arriuafmes  en  vn  vilhge  habité 
âes  Grecs  fur  la  fumniiré  du  mont,  ou  il  fallut  predre  deux  hom- 

'smettt  mcs  ^C  Plc<^  ?our  nous  Su^er  >  Pour  Pms  grande  fèureté ,  par  la 
Jfauer.  montâgp-e  :  en  laquelle  il  y  a  grande  quantité  de  celle  herbe  mal 
nommée  en  François  Sariette  d'hyuerjque  nous  trouuions  naif- 
'lAmfâtea*  fànte  abondamment  par  hs  rochers  ;  laquelle  auions  dcûa  veue 
tredephify*  en  Crète ,  Se  peu  deiours  au  parauant  dedans  l'Amphithéâtre  de 
P-  Philippi:&  depuis  la  trouuafmes  defTas  les  montagnes  de  Spole- 

IStf  teen  Italie^n  la  marche  d' Ancone.Mais  pource  qu'on  la  trouue 

Traçrorù**   ^â communecn  noz  iardins}nous  dirons  fon  nom  ancien ,  tel 
mm.         <ïuc  louons  aprins  des  habitans  de  Crète ,  Se  de  l'ifle  Cy  tharee, 
qui  nous  l'ont  vulgairement  nommée  Tragarigani  :qui  vau  t  au- 
tant à  dire  comme  Tragoriganum . 


0~BSER^1ES     pà*.     P.   SELON.  T4X 

&ckmtere  nommée  Marîjfa,  anciennement H ebrus  :  &desfilr 
lerie$de$Tur&.  Chapitre  LXIH. 

m  X.  ny'a  point  de  pont  fur  la  riuicre  Mariffa:  parquoy  il  umgk. 
f§|  la  faut  pafTerpat  bateau.  La  côuftume  du  pays  eft  que 
ÉjM  vn  homme  Se  fa  monture  ne  payent  qu  vn  afpre  pour 
^rarjjjB  paflà^e  :  toutesfois  nous  n  en  fufmcs  pas  quittes  pour 
quinze  pour  nous  &  noftre  guide  :  car  1  auarice  des  Turcs  cft  tel-  ^^ 
Ie,que  quand  ils  fctrouucntvnpeuaduantagez  fur  lescftrâgers,  'na^tia  des 
ils  pillent  tout  ce  qu'ils  peuuent  :  &:  bon  gré  ou  mal  gre  fauc  que  TurcSm 
la  perfonne  paye  ce  qu'ils  veulent  auoir.  Car  les  mangeries  y  font 
.  <ellcsJquiis  ne  pairdonneroyent  pas  à  leur  père,  quâd  ils  ont  quel- 
■  que  petite  occafion  de  prendre,  A  I'oppofite  du  port,  àladiftan- 
ce  d*vn  quart  de  lieue  nous  laiflàfmes  vnc  belle  petite  villcrte^qui  ^ 
^appelle  Vire,  aiTifecnfort  beau  pays  au  pendant  dVncouftau,     *  ' 
qui  eft  fermée  de  murs  antiques.  Cefte  riuiereau  iourd'huy  ap-  ^r^ 
peliec  de  tous  en  vulgaire  Marifia^eftoit  anciennement  nommée 
Heprus.  Les  habitans  des  villages  circonuoifins  de  la  riuicre  He-  Héros. 
brus  ont  la  pratique  de  tirer  de  grands  monceaux  de  fabïon  en 
temps  d'efté  quand  la  riuicre eft  petite ,  içachans  qu'il  y  aleans 
quelque  petite  quantité  de  grains  d  or:&  iesrecullcnt  affczloing 
du  riuagc ,  à  fin  que  quand  elle  defgorge^nc  les  emmeine.  Car  en  0rmmé 
Ceparanclor,  &  le  lauant  d'auec  le  iàblon  5  ils  afiêmblent  des  aix  Muep^wm 
trouez  pour  îelaueraucc  l'eau  de  la  riuicre:  s'ils  trouuentqueî- 
•que  petite  portion  d'or ,  c'eft  aucc  moult  grand'  peine ,  defpen- 
fç^longucur  detemps:&auflïquefansvifargcntilsne  peuuet 
rien  faire  qui  vaille.  Les  fleuues  Strimone  &:  Nefus  fc  rendent  en  ^^ 
tnefme endroiâ  delà  mer  %  l'vn  au  cofte  d  embas  de  Fifle  de  Taf-  ^ 
£os,&  l'autre  au  epfté  d'en  haut»  Mais  Hebrus  fè  va  rendre  deuât  Sjanoty^ 
Tifle  deSamothrace:quieft  chofe  que  Pline  a  défia  notée.  La  rî- 
uiere  va  fi  lentement  ,  qu'il  fcmble  qu'elle* ne  fi(  bouge.  L'eau 
enefttroublc,  toutesfois  fort  douce ,  &  fi  froide  au  cœurdefte 
qu  on  diroit  quelle  eft  glacée  :&  y  a  beaucoup  de  Tamatifi^es 
par lçsriuages.  Ellefecourbe  fouuentv&  fe  retourne  ainji que 
faitlaSeineentreParis&Pontoyfe.  Il  <Wcçnd  tant  dxau  des 
montagnes  en  hy  uer  quelle  en  eft  rauifl ante  3  &  inonde  vnc  prai- 
rie de  moult  grande  çftendue3qui a  cfté  nommée  Dorifclisaenla> 

S    iij 


T$U/  -PREMIER.     BIVR-S     DES      SIKGVLA-. 

quelle  Xerxes  nombra  fonexercite  allant  en  Grèce.  Et  pour  aui 
gonjeut      tant  qu£  celle  grande  prairie  eft  plongée  rhyuer  comme  vn  lieu 
ampus.       marcfcageuXjpn  n'y  -baftift  nuls  villages,t»a4s ony  nourrift  l'efté- 
grand  nombre  de  chenaux.  Le  grand  feigneur  mefme  y  en  fait: 
- .  àoarrir.eri  temps  d'eux  pî us  de  miilc-;-&  croyons  que  les  particu- 
liers des  villages  n y  en  nourriflent- guère  moins-  de  cinq  cens.  La- 
prairie  cftfi  nette  qu'il  ne  s'y  nouTrifèTaulpe^Serpér^SouriSjRat*. 
ne  Mulot  :  £ar  l'inondation  de  l'hyuer  les  chaiTe  tous.  JL'on  y  voit 
croiftre  l'herbe  de  Gytifus  en  piuueurs  lieux.  Les  villages  qui  fonr 
•      £tuez  au  tou-r  des  prairies  3  font  le  long  des  collines  r  car  citant  la 
prairie  entoumee  de  toutes  parts  des  collines  &  montagnes  bien* 
arroufees  :  font  moult  propres  pour  le  labourage,&:  bien  accom- 
modées de  chofes  ncceSaires.  Les  payfans  y-  font  grandement- 
^Akions  de  multipliez.  Les  ocees delà nuiere  font  en  quelques  cndroi&safc 
nmere.       fezhauts,ou  les  Aidons  de  riuiere,  vulgairement  nommez  Mar- 
MdfT*T    rinets  pefebejars  ,,  êc  auâS les  Hirondelles,  iknpîcment  appe liées- 
Merêps.      Martinetssfdnt  leursnids  en  terre ,  comme  aufïi  fait  l'oifeau  no^ 
%Afufta',  ■  m&  Merops ,  ou  Apiafter ,  que  les-habitans  de  Crète  nomment 
Meltfopb&,  Meîiffophago.Ayanseulieu  d'obfcrucrlefdits  Alcions;  trouuaf- 
ff*.  mes  qu'ils  ne  differcafcn  rien  de  ceux qui  font  es  nuages  de-  nc*z> 

fleuues  :  car  leurs  nids  font  ainfi.  faits  darefks  &  efcailles  de  pe- 
tits poiilbnSjComme  les  nofères.  Les  villageois  plus  voifins  de  la- 
riuiereMariflV^fént  îesjardins  félon  le  courts  de  la  riuiere  en  la* 
fufdidcpîairle  rrcara)4ans grande comiîïoâitéd eau ,  ioinâ:  que- 
Coùom       Ccii  moult  banne  terre,ils  cultiuent  des  Melons ,  Copous ,  Ci* 
trouilles,  Cougoudes,  Cocombres ,  &:  autres  (èmblabîes  fruids 
deûc.  Ils  nous  ontaflèuré  que  le  Colocafïèy  croift  aufïi  en  quek 
quesendroi&s  :  dont  ne  pouuons  rien  affermer.  Nous  oommen- 
fafmcsà  trou uer  les  couftaux  >  ànfiue  de  ladi&e  campagne  ,  &c 
entrer  en  pays  de  montagnettes,  earfe-kfquelles  obferuafraes* 
vnce/pece  d'Erabic  d&tcn  te  à  toutes  les  fortes  quauions  aupa- 
Erdle.       rauant  vcues.Cc  fut  la  Hxkfrne  elpece  entre  les  différences  qu  a- 
six  ejj>ece$    uonsrcmerqué.BUe  vient  en  petit  arbrifleau,delaquelle  parleros> 
àgrMe.     ailleurs  pius  à  plain  3  en  defeiuan  t  lesaf bres.  Nous  srouuafmes' 
Melmtcm   4^ baiogs  natuEellemcat  chauds  en  terre  ferme  à  lbppofite  de-, 
™jL.      ^c  timbre-:  Se  eftions  au  droid  du  flenue  nommé  Melane ,  êc 
delà  plage  du  mefme nom^qui  enferme  Galipoîi  en  fon  cheronev 
ft-3  dedans  lequel  eftSeftus  à  l'oppofitc  d'Abydus.,  II  y  a  deux» 


Sources  chaudes  en  ces  baings .,  i'vnc  qui  a  cfté  deputeepemr  ks 

hommes ,  &  f  autre  pour  les  femmes  :  &  comme  il  ne  coufte  rien 

àfc lauer4edans,tout  ainfî  n'y  aîlperfonne  qui  les  nettoyé  :  âuûl 

font  ikmoultords.  L'on  yoit  les  ruines  d'vne  ville,  &  des  mu^,  Macroni^ 

railles  de  grande  eftendue^queles  autheuts  ont  nommé  Macron-  chos. 

tiebos,  qui  font  ioignant  lefdits  baings  ,  &cnfermoycnt  le  paftâ- 

ge  contre  les  ennemis  qui  endommageoyent  la  Thrace. 

Que  plufteun nations*  en  vont hors  deiettrpays  en  certain  temps  de 
tannee,& puis  s' en  retournent  en  autre  Jkijbn.         Ckap.    LXini. 

[  N  continuant noftre campagne, cheminas versCon- 
!  ftantinopîe ,  trouuions  de  grands  bendes  depauures 
[  payfans  AîbanoiSjautrement  appeliez  £rgatcssquirc~  ^limok 
î  tournoyent  en  leur  pays  :  Ôivenoyent  de  Turquie,  de  ■E^^ 
trauailïer.  Il  leur  aduknt -comme  aux  Lombards  &  5auoifîensr 
qui  s  m  vont  kors-de  leur  pays  en  certain  temps  de  Tannée,  puis 
s'en  retournent^!}  l'autre.  Ces  panures  payfaos  Aibanois  forcent 
hors  de  leur  pays  en  trouppepour  aller  viure  ailleurs:  car  leur  pais 
eft  fterik.  Ils  vont  moirTonnerles'blcdspar  Turquie  en  cfté  pour 
gaîgncr  de  l'argent.  Lefquels  arriuans  h pay s  fertiles  de  bleds, 
comme  esplainesde  Macedoine,&  deTbrace,  ou -bien  en  Àna- 
tolic,font  employez  par  les  Turcs  àrecuëillir  lesèkds,&  en  pur- 
ger le  grain.  Et  aptcs^uelafaiion  eft  pafTee^s  en  retournent  viure 
auçc  leurs  femmes.  Ils  ont  vnefaçon  de  faire  en  feiant4eèkd,dc 
plus  grande  induftric  que  n  eft  la  ïrançoife;  wB  leurs  faucilles  T4U^^  ^ 
font  quel  que  peu  di£Fcrentcs,pourcc  qu'elles  font  flattes ,  larges,  ^^^ 
&  fans^knts,  &r  qu'elles  font  moins  courbées»  lis  les  tiennent  de 
la  main  dextre  enfeiam,  ayas  vn  bois  courbe  en  la  main  gauche, 
qui  eft  quelque  peu  voûté  &:  pointu  à  l'extrémité  ;  dedans  lequel 
il  y  a  trois  permis  pour  y  £cher  trois  doigts  de  la  main  feneftre, 
fçauoir  eft  le  plus  petit,  le  fécond, &  le  tiers  d'après.  Car  ils  fè  re- 
fèruent  lcpoulce,&:  l'autre  prochain,  tous  nuds,pour  mieux  em- 
potgnefk'bkd  ;  Se  ouurans  la  main ,  £t  empoignans  le  bled,  Us 
f cient  beaucoup  plus  grande  poignée.  Apres  cela  ils  battencle 
bled,  non  pas  aux  fléaux ,  comme  en  noftre  pays ,  mais  aucc  ks 
bœufs,  comme  par  toute  Grèce  :  &  en  ce  faîfant  trament  des  aix     ^  ^.^ 
lardez  de  pierre  de  Caflidoine,qui  minent  la  paille,  &  la  rendent  4^^^ 
feoiffee.  Et  pource  qu  auons  comparé  ks  fufdits  Aibanois  aux «^     v 

S    iiij 


s     ï$4>  BRBMÏ'S*    IjIV*.B-     PB*    SIN^V-LA"» 

Sauoiûens  &  Lombards,  voulons  dire  que  nous  fommes  trouuez- 
files  voir  partir  en  trouppe,à  la  manière  des  Eftourneaux.Les  Sa- 
uoifiens  vont  en  Italie  feier  du  bois  de  Poupie,!e  long  du  Pau  :  &:. 
des  Çhefhes  vcrds,c  eft  àdire  llices  par  le  Friol,comme  au  flifon  t 
j^iePô«-,de  toutes  autres  fortesde  boisdurparla  Tofcanc  Ôc  Romaine: 
fie.  mais  les  Sauoificns  font  en  ce  contraires  aux  Al banois,  que  les, 

^dbmok    Albanois  fortet  de  leur  pays  au  fin  cœur  de  rcfté,puis  s'en  retour-: 
S4wijiens,    nencen  Automne:&  les  Sauoifiens  ,  au  contraire  partent  en  Au- 
tomne,^  retournent  au  printemps.  Car  d'autant  qu'ils  habitent, 
par  les  montagnes,  les  neiges  les  empefehent  de  rien  faire  tout 
rhyuer  :  &  auSi  que  le  bois  qu'ils  fcientrhyucren  Italie,  eft  dur^ 
ouil  faut  grandement  trauailler,  qui  eft  v'nc  befongne  qu'ils  Jne. 
pourroyen  t  pas  faire  l'efté:&  que  s'ils  demeuroy  et  en  leu  r  pay  sjils~ 
sqmo       ïèroyent  oy  feux.tout  l'hyuer.  Mais  en  efté  retournezen  leur  pays . 
%^-       trouuent  des  bois  de  Sapins,  Pignets ,  Melefes,  &  autres  fembla- 
fojwds     ^^  bois  tendres,qui  leur  donnent  moindre  peine  à  les  fcierl'efté. 
"•  '  ■     "au  chaud.  Ceux  de  Lombardiefont  comme  les  Albanois  &  Sa- 
uoifiens :  Car  ils  fe  partent  par  bendes,s'accompagnans  en  troup- 
pes  iufques  autant  qu  ils  foyènt  hors  de  leur  pay  s:  mais  en  entrant., 
en  Allemagnc,Francc,Flandre,Danernarch,&  autres  pays  plus 
loingtains,  ils  fefeparent,  chacun  à  part  foy  arriuans  au  lieu  pro- 
pofc,rammonans  les  cheminées  çà&  là  Thyuer.  Mais  retournas^, 
ils  font  comme  les  Cigognes,quiarriuent  fèul  àfeuî.  Voila  com- 
ment les  hommes  de  diuers  pays  font  contraints  aller  chercher 
leur  vie  quelque  temps  de  1  année  en  autres  régions  que  la  leur. 
Mghvtts.      Les  Àibanoisançienriemenrsnommez.Epirotes ,  font  Chreftiés, 
&  parlent  vne  langue  à  part  foy différente  à  la  Grecque.  Il  eft  bie. 
vray  qu'ils  fuyuent la  religion  des  Grecs  :  &  d'autant  qu'ils  font 
confins  de  Grèce ,  ils  fçauent  auffi  le  langage  Grec.  Et  quand  ils 
font  retournez  en  leur  pays  ^  ils  viuent  tout  rhyuer  de  l'argent 
qu'ils  ontgaignél'efté.  Us  font  quafï  tons  nudspieds,&  font  ex-. 
tremementpauures,gensdepetitedefpenfe,&de  grand  trauail. 
Par  ce  point  ils  ne  faillcnt  iamais  itrouuer  de  la  befongoe  tout 
1  efté  aux  champs  es  villages  des  Tu  rcs  :  car  les  Xu  rcs  fon  t  pareC . 
fèux;&:  de  petit  trauail  au  labourage,lents,tardifs,  &  qui  tempo- 
'***        rifènt  grandement  en  leurs  afTaires.Suyuans  noftre  chemin,nous 
Gtâïdoine*  trouiû°ns  des  pierres  de  Iafpe  de  piufieurs  couleurs  par  les  cam- 
'  '"        Pâgnes?&  femblablement  des  pierres  de  Caflidoine,  &;  mcfmc», 

ment^ 


CrrSERVBlS-     FAR     *.    BEXaîî.  *4J- 

met  les  murs  des  maifons  des  villages  en  ceft  endroieY  fontqweU 
que  fois  baftis  de  pierre  de  Iafpe&  de  Çaffidoine.       * 

£#« /« -arbres nomme^^erehinthes  >ponmtvneeJJ>eeerde  Galles  t  ^ 
li>nten^4nà^fage:enTurqHie^.  Chapitre     lxv. 

Es  payfansdcThrace  Se  de  Macédoine  yfçachansîe*7^  &' 
grad  vfagedes  Galles  du  Terebinthe  quictoiiïcnt  par  Tfnknthe^.  ^ 
\  les  collines ,  les  ayans  à-leur  commandement  ^ne  lai£- 
■  fênt  pérore  l'œcafion  degamgqu'ils.y  precendenr;car 
ils  vont  cueillir  des  pommettes  fur  la  fia  de  Iuin  defibus  les  fueil- 
les,oa  bien  au  pied  du  rameau  qui  porte  laicmence  en  grappe,  Ss 
îàtrouuent  vne  petite  Galle  yague&creufc  dedas^dèlagroiFeur 
dVncnoifille:  laquelle  fi  on  lai&^rçeroiftre,  deuiendroic  longue  Cùrm  & 
à  la  façon  d*vne  petite  corne  r  mais  ils  la.cueillen  t  encor  petite  yS&  lkT^m^ 
la  vendent  chèrement- pour  teindre  les  fines  foyes  en  la  ville  de 
Bource.Nous  eontiuuafmes  noftre  chemin  par  Thrace:&  trou- 
iiafmes  vne  Garauanne ,..  ou  compagnies  de  muletiers  veaans  de: 
Saîoniki,qui  ailoyentàConftantinople  y&.  logeafme^en  va  vil- 
lage nomme  Aignegic. 

Or  pour  ce  que  les  Grecs  ne  mangent  pointles  Xortue^non  7ùTiU£î— 
plus  des  terreftres  Se  de  mer,  que  d  eau  dôuce,elles  font  fi  frequéV  ''■"/' 

tes par  les  champs  de  Gr  ece>&  principalement  de  Thrace,  qu  on  -\v  .  ' 

les  voit  ordinairement  par  les  grands  chemins,qui  font  fort  grof^  ^  = 

fes  Se  graffes.  Et  neftoit  que  les  iardiniers  les  craignent  grande—  1^  ^ 

ment,  d'autant  qu'elles  mangent  les  herbes  qui  commencent  h .  ~:Ê> 

proiker,&'fur  tour  appetent  les  Melons,  les  Bepons,le  Cotoa,& 
îaSe&me ,  perfonne  ne  les  tueroit.  Mais  quand  les  iardiniers  les^ 
trou  uent  dedans  leurs  iardins  ^ils  lesruent  :  puis  les  cmijallenta- 
queîquehaye.- 

Que  les  Turcs  allam  par  pays  font  petite  dé^enfe^      Chapitre  1     l  x  v  I.  - 

!  Eiour  enfuyuant  continuas  nojftre  chemin ,  trouua£  ^rifioLogs. 
\  m  es  que  les  champs  eftoyenrmouit  frequensen  Ari-  k*g*» 
1  (tologe  longue.  Nous  y  trouvions  auffi  de  la  vraye  sJjf°Pem 
JHyflbpe,de  deux  efpeces  de  Polio»,  Se  duChama>^J^r 
dry  s;nous  trouuions  toutes  chofes  ànous  neceflàircs  pour  viurc 

T 


fQS' 


iU 


fmnth'M. 


14^  PREMIER     LIVRE     DES      SINGVI.A. 

par  tes  villagcSjCommc  bcurrcjœufsjvolaiilcjpain ,  fourmage,  & 
lai&age.  Tous  les  voi&uriers  &:  muletiers  de  la  Carauanne  fe 
fournirent  dvne  forte  de  laid  aigre,nomé  Oxy  gala ,  qu'ils  portée 
dedasdes  fachets  de  toile  pédus  aux  bafts  de  leurs  beftes.  Et  com- 
bien quekdit-lai&foitrgrandcment  humide,  toutesfois  il  reftoit 
enfermé  dedans  la  toiîfe ,  fanspoint  percer  le  linge,  LesCrecs  &: 
Turcs  ont couftumedeprendre des  aux  egouflez,  &  îesbatreen 
quelque  vaifleau  de  bois  :  puis  les  mefler  auec  de  i'Oxy  gala.  Ceft 
vne  viande  de  grand  feigneur,  tant  elle  eft  plaifantc  à  manger  :  8£ 
de  laquelle  non  feulementlesvoi&uriers  ont-accouftiime  man- 
ger,mais  «affiles  plus  grands  feigneurs  delà  court  du  Turc.  Et 
qui  ne  voudra  croire  que  ce  ne  foit  viande  fi  exquife  que  difons, 
l'expérience  en  eft  facile.  Ceft  vne  viande  que  les  Turcs  ont  ca 
commun  vfâge5&  ont  opinion  que-eek  les  refraichift  en  efté,5& 
les  rechauffe^ivhyuer.  Nous  laiflamics  1c  chemin  deGalipolià 
main  gaachc,&  prinfmes  le  chemin  vers  Rodôfto^quiancierrnc- 
ment  eftoit  nommé  Perinthus,Nous  repofafmes  fur  iour  deffous 
desNoiers  pour  refraifehir  noz  montures.  Puis  reprinfrnes  le 
chemin  :  &  le  foir  campafmes  en  la  plaine  :  &  là  nous  remparaf- 
mes  des  charges  des  marchandifes  de  la  Carauanne ,  pour  nous 
tenir  enplus  grande  feurcté  :  &  doimiimes  là* 

QueïesTuYCsfont lesgens qui fçauentle  mieux  charger  &  décharger 
bagage en  allant  far  paysfiue  mis  autres.  Chapitre 


lxvii. 


Mabiiete'à 
(charger  O" 


msà^ nousafembîé  bonmettre  par  eferit vne  chofe  que 
§§*  auons  obferué  chez  les  Turcs,  de  laquelle  ils  font  ou- 
9  urierstanten  paix  qu  en  guerre.  Ceft  leur  manière  de 
ussssf^sa  charger  $c  defcharger  leurs  bagages  furcheuaux,cha- 
,--  «  mcaux,ou  mulets.  Cinq ouiîxhommeseurct  defehargé  au  foir, 
""*'  &rechargéau  matin,  û  habillement  toutes  les  beftes  delaCara- 
uanne,qui  eftoy  eBt  en  nombre  cent  cinquante ,-  qu'onc  ne  n  ous 
en  apperceufmes.  Trois  hommes  fans  plus  peuuent  charger  cent 
cheuaux  en  moins  d'vn  quart  d'heur^moy  ennant  que  le  faix  foit 
lié  à  leur  manière  de  faire.  Il  eft  neceilàire  que  chaque  balle  foit 
liée  de  deux  croix  par  les  deux  bouts ,  &  que  les  cordes  foyent  at- 
tachées à  la  manière  que  s'enfuit.  Quand  deux  hommes  auront 
leué  fvne  des  balles  iufques  deffus  le  baft ,  il  faut  que  le  tiersmur 


OBSERVEES      PAR     ?.   BTïtON.        v<  *47 

^icrcmboudclacordcderautreballcquicftcncoraDas,^ 
Scdcscroixdccdlcquîcftdcfiachargeefur  cdubafU! fautauf- 
Luelescordesdela  haute  foyenc  femblablement  cmbouclecs 
dclacordcdelabaliedembas^quelVndeccuxquiauo^aidc 
àlcucrlaprcmicrcballc.aidcàicuctivuiwc:  carvn  fcul  fumt  a  la 
tenir  fur  la-bcfte  -M  les  deux  autres  prennent  chacun  vnboutde 
la  corde,dont  chacune  balle  n'en  a  (mon  vne  &  la  repaient  par 
kplushautdelacroix,  &  i'eftraignent  &  lafehent  félon  quils 
veulentquelachargefoitpîus  haute  ou  plus  baflé, .Alalarifcnc 
îon2ueoucourtecommeilsvcuieBt.nsattae^ntics^d^p^ 

ledehors,  àâh  quelles  en  foyent  pluftoit  dci&ites  au  &«.  Les 
fardcauxfontarTisdeffusles  baftsde  tmicrs  en  aoix-bourgi^ 
anonnc/Vnhommefeulpeutàrarriueedefchargeirtouslesche, 

uauxde  la  compagnie^  vninftant.,  deuiantchaquehout.de  la 
fufdtte  coÉde,&  peut  lalaiûet  eheoic  fi  également  de  chaque  co- 
fté,  qu'elle  defeend  de  mefme  balance.  Celuy  quiîesdeuaîle  en 
tenantlacordepourroitlcsarreftcrtoutesdeux  en  mefmcmefu- 
re  &  hautcur}à  demy  pied  de  terre.  Vn  petit  enfant  pourroit  dé- 
charger cent  cheuaux  en  moins  d  vn  quart  d  heure ,  tans  que  pas 
vnedes  cliargespjinrfaukea.toinbant. 

TldAviKt<pi§oitMci^emMW 

Redoftoi&deHeradée. 

-,  -■       Chapitre-     ;'LX¥iH>»-    ;       .       :    : 

■  Ossé&onscrcKPcrin^  7mnù*, 

\  pafraâncsvneriuiercpar.defi^^^^^  ^^ 

l  eftre  ïaxiuiere.  Àrzus.  Les  Turcs  la.nommcnt  Chuqt- 
E  ^&£&  tout  certain  qu'elle  va,tomSer  au.  Froppnti-  ^ 
de  entre  Çalipoîi  S^doftp.  Rpdoïlû  ctone  ville  auJiuage  ^ 
du  Propontidc,qui à noftrcaduis, anciennement  auoitnoni Pe- 
rinthus.Combien  qu'il  yayedesgensquipenfentqucPennthus 
fuft celle  quîoanommc  maintenant Heraclce.  Rodofto  efttorç 
antique, fans  im*railles.Suyuansie grand  cliemm  de  Conftan- 
tinopie,nous  laiffafmes  la  ville  d'Heraclee  àmaingauchc:  qui 
n'eft  pas  droidcmcntfur  le  grand  chemin,  mais  en  eft  eflongnee 
«l'vn  traid  d'arbalefte.Heraclee  a  reteou  fon  nom  anciemlequel 
îî^îS..afoUicité.d,enquerir.quclleaeftc]araifon  pourquo-y  le-. 


■Ut  PREMIER     LIVRE     PES  *STÏÏGVLA, 

mield'HcracleefurnoméHeracieû,  eftoic  venimeux.  Or  faut-Il 
&cruUim  fçauoir  qu'il  y  a  pluûeurs  Heraclccs:  mais  cefte-cy  cften  Thrace. 
,mdyaum»  nous  écroulions  autre  raifon,finonquily a  beaucoup  de Cha- 
U^Jecn  inaelcon  noir  par  la  région ,  qui  kit  vne  cxcrefcence  à  fa  racine, 
mir  xiommeeîxïa .,  qui  cft  vn  pernicieux  &  dangereux  venin ,  U  tue 

ceux  qui  en  mangcnt,tou  t  en  vn  infbtnt.  Et  fi  les  moufehes  a  miel 
v  prennent  la  matière  de  leur  miel  deflfus  Tes  fleurs,nous  ne  doutos 
duc  le  miel  ne  foit  vnpernicieux  venin  à  l'homme:  toutesfois  n'i- 
gnorons pas  que  les  Auettcs  ne  prennent  aucunement  la  matière 
de  leur  miel  defTus  les  fleurs ,  comme  phifieurs  ont  penfc  :  ains  le 
ïecueiliet  de  defTus  les  fucilles  lors  qu'il  s'y  cft  fait  vnegrafle  rou~ 
fee  du  cîcl.  Nous  continuâmes  noftre  chemin,  &  paflafnies  pat 
sMvrx-      auprès  delaviliedeSeliuree,  qui  anciennement  eftoit  nommée 
seUmhrid.    Selimbria.Quand nous fufmcsà  deux iournees de  Conftantino- 
pîc,arriuans  à  demie  lieue  près  delà  ville  de  Seîiuree,trouuafraes 
lesexcremétsdvnmetairurlegrandcheminaunuagedehmer, 
qui  monftrent  qu'anciennement  il  y  ait  eu  des  minières:  &  com- 
bien qu'ayons  diligemment  confîderé  ledit  excrément ,  toutes- 
fois  tfauons  bonnement  peu  fçauoir  de  quel  métal  ileftoit.  Les 
veftiges  &  ruines  des  édifices  qui  auoyent  cfté  baftisencelieu, 
font  foy  qu'il  y  ait  eu  autrefois  des  fourneaux  pour  fondre  du 
.       ,  métal.  Àuffi  il  y  a  grands  monceaux  de  Scories ,  qui  eft  ce  qu'on 
***"-*  ditenFrâçoismerdedemctanqu'ony  voicen  phifieurs  endroits. 
2ZZF  Letempspafleenfondantlesmetauxon  les  fouffloit  par  la  force 
'     des  hornmcs,&  non  par  l'eau,  comme  l'on  fait  maintenait  :  tou- 

tesfoisil  y  a  quelques  ru irTeaux  làauprcs ,  lefquels  a  noftre  adins 

Ton  euft  peu  adapter  s'ils  eufTent  eu  l'vfage  de  fc  feruir  d  eau  a  rai- 

"  rctournerlesroucspoutfoufflerlaminicre:  ainfiquenousauQS 

-.      decouftume.  En  cherchant  les  plantes  qui  foncau  tm*oir^dc 

'  Seliuree,xrouuafmes  vne  herbe  ladicineufe,  ayant  fucilles  fera- 

,   •      biabies  au  Nerion ,  &  fleurs  de  mefmc ,  mais  en  toutes  merques 

fT  ^%luspetite:Saiavoirde  loing,  elle  rcffcmbloic  auMonde 

Nerion.      Crète  :  maisàla  voir  de  plus  près ,  fembloit  mieux  a  1  herbe  de 

Tr^on  ^Lyfimachiapurpurea.   Auffi  trouuafmes  duCynfus,  délaie. 

crac         menec  duquel  cueilhfmes  largement.  Partans  de  ces  ancien- 

LjfimachU  ncs  minieIes  ,  qui  font  fur  le  grand  chemin  loignant  le  bord 

purpm*.     ^   k.  mcr   noOS  vinfmcs  loger  à  Seliuree  ,  qui  a  vn  tort  beau 

**""-      petitchafteau,aflisdeffiisvncoftau.Seliurcenepeutbonnemcrïc 


ÔB  SERVIES    f  VU •'■>.  •  fc.E^Ï/O-'ift.  &f# 

ôfereâppcllcc  vilîe,<i'aucanc  qu'il  n'y  appoint  de  murailles;  Les 
inaifons ,  lest>aings  ,  les  Mofqueesfbnt  au  deflbus  du  chafteau. 
^outlcboBrgcftfituéen  pendanr.quieftfort  fomblableàlâYi!- _^  ^m 
le  de  la  Rie  en  Ânglcterre,cômme  anffi  eft  Gaîipoli.Be  Seliuree^^*^ 
voulans  aller  au  grand-chemin  de  Conftantinoplc,  il  faut  ache- 
ter de  monter  fur  le  eouftau,&rcontinuer  la  campagne.  Lanl  us 
grande  partie  des  maifons  de  Seliuree/ont  quelque  peu  îoing  du 
port.  Les  grands  nauires  arriuent  communémsitt  à  Seiiuree , 
|>oùr  acheuer  de  {êçharget  des  marchâdifes  qui  leur  font  appor- 
tées d' Andrenopîe,  &  de  terre  ferme  de  Thrace,  Se  Bulgarie.  En 
exemple  dequoy  lors  que  f>aûafmes. par  ià,vn  nauke  Vénitien 
^achcuok  fa  charge  des  marchandifes  quiluy  eftoyent  apportées, 
non  feulement  des  pays  defTufdicts,  maisaufft  èà  natolie,  coin-  ^ZnxtoUt. 
nie  feroyent  laines,  cuks,cotron,Anatoîie  ou  Natolie  eftdeiMu-  *ta*oU 
tre  part  de  l'Hellefpont  :  Se  les  Turcs  difent  Anatoii ,  qui  dfc  vn  -^g^  - 
mot  Grec ,  par  lequel  on  figmfïe  le  leuant  :  mais  communément  A*£*£* 
Ion  appelle  le  pays  en  Afic  on  domine  le  Turc,  de  ce  nom  d'Àna-  p^f 
tolie  :  car  departac  l'Europe  tle  l'Afie  par  le  deftroict  des  Bofpho-  Lyjle 
tes  du  Propentide  Se  rHellefpont ,  tout  le  pays  qui  eft  par  delà  a  carie. 
nom  Anatolic  :  tellement  que  quand  les  Grecs  parlent  de  l'Àna-  **pU*g»* 
tolie,ils  comprennent  beaucoup  d'autres  prouinecs ,  fçauoir  eft  Ljœ. 
toute  la  Phrvgie^aiathicBithyaie^Pon^Lydie^ane^Paphi^  *£M£ 
£o'nic,Lyeie^Magnefie,Cappadoce,  Se  Comagene.  Et  s'ils  veu-  J      ' 
lent  parler  de  quelque  befongne  ou  marchandife  par  excellence       * 
«juifoit  del'vn  des  pays  deuufdict^il  leur  fu&afauoir  di&ccftre 
<rAnatolie. 

'      Chapitre    lxix. 

;  N  ce  temps  que  pafîafmes  par  Seiiuree  »  il  y  auok 
;  vne  compagnie  de  Turcs  qui  eftoy  et  enuiro  qua- 
\"  tre  miile,logcz  tant  par  les  Carhacharas  Se  autres 
•  lieux  de  la  ville ,  comme  aûffi  dehors  fous  les  ar- 
Kugteè^mzJ*  bres.Touseftoyentgens  de  chenal,  d'vne  bande: 
qui  alloycnt  au  camp  du  grad  Turc  coBtrele  Roy  de  Perfe,  mais 
fepartirent  long  temps  auant  iourd'vnefiience  fi  grande  ,  que 
ïi6Q5aitrcs,«picncaspareilauions  ptopofé  denous  leuer  auant 

T  iij 


If  a  V K  E  MI  E  &     I 1  f%  1     DE  S     S  IK G  V  t"  A . 

le  iour,n*cn  ouyfmesiamais  rien, combien  qu'ils fuiTent  ioignants 
nous.Ce  nous  fembîa  chofè  digne  de  récit ,  que  fi  grande  croupe 
foie  peu  partir  fans  faire  aucun  bruit.  M  n'y  a  qu'vne  iournee  de* 
puis  Seîiureciufqu  a  Conftantinopîc ,  tout  par  pays  defcouuerr^ 
&  fans  arbres .  Il  faut  paflèr  deux  pots  de  bois  trois  lieues  au  deçà/ 
de  ConftantinoplejdefquelsJe  premier <eft  bien  petit ,  r&ais  le  fe- 
cadefbbeaucoup  plus  long^qui  eftnomé  Buikchegmeghi.  .Tout 
?****,  ]ç  pays  de  Thrace  fè  pourront  comparer  à  Picardie  :  car  il  eft  ainfl 
£àns  arbres /ayant  de  moult  grandes  plaines  ,&enaucuns  lieux 
des  collines  Jl  y  a  vu  vhMage  entreries  deux  pon  t$:&:.  d'autant  que 
c£eft  %n  grand pafïage, Ion  y  trouue  dés  viures  en  tous  temps  pour 
l'argent.  Tous  les  deux  ponts,  premier  &  fecôd,font  faits  de  bois- 
deffus  des  eftangs  falcz,qui  entrent  de  la  mer  en  terre  ferme,con> 
me  vn  goulphe  :  ou  il  y  a  plu  fleurs  bafleaux  qui  fèruentà  pafTer 
d*v n  village  en  autre^  aufïià  pefcher.  Il  y  a  pluileursmouîins  à 
vent/elon  îeriuagedudit  lac  ^que  nous  kiffionsàonain  quelle: 
^meulent  à  huit  agiles  ou  bras,  comme  auflitous  antres  moulins 
Mm&màe]  àventen  Turquie,  &:  non  à  quatre  comme  les  noftees,  Etc5me 
Turquie.  il  y  a  deux  ponts  à  pafTer  %  tout  ainfl  y  a  il  deuxiacs  qui  fe  conioi- 
gnent.en  vn.-defqyels  le*euenu  du  porfibn  qu'on  y*pefchc ,  eft  de  ' 
grande eftirnation.  l,on  trouue  vn  logis  de  plaifance  de  l'Empe- 
reur des  Turcs  au  delà  du  village  de  Buikcliegtïieghy,fitué:fur  va 
couftau  dedans  vn  bois  de  haute  fuftaye ,  tout  enfermédemu- 
raillc.Les  arbres  de  ce  bo^foutCouldriers^Çhemes^uîineauXj 
Erefhes,SauJcs1Plaranes,&:  arbres  de  Lotu s,  qui  on mo-cn  Fran-r 
ittits.  çois  Micacouliers^AJa  parfln  arriuafmes  à  Conftantinopîc  pour 
Mtçacedimia  deuxiefmc  fois, Si  là  mifmes  fin  à  ce  voyage,  qui  fuftvexs  le  c&- 
mencernent  du  rnoys  d^Aoufh 

T>tU viU.ç àe, Pert ^de ConJjUnmoplc* .  Chapitre. .  LXX. 

i  Vant  parlerde  Confrantinople^noas  a  fèmbîé  bon  e£ 
crire  premièrement  de  la  ville  de  Pere,qui  eft  à  parfoy 
xparee  de  ConftantinoplCjdù  trauers  d'vn  canal ,  cô- 
_L  _,„  jajc  font  plufîeurs  autres  villes  que  nous  voyons  eftrc 
vis  à  vis ï'vne  de  l'autre  au  riuagede  quelque  riuiereicome  pourr 
roit  eftrela  Cite  &c  CarcafTonne ,  Bcaucairc  &  Tarafcon  :  tclle=r 
XQS&t  que  pour  aller  de  Conftantinopje  en  Père ,  il  faut  pafïêr  le. 


O  B  '$«**  «  S   *A*H  '*•    Bï  t  Ô K.      -     v  *î* 

«ttiêcft  <fe  là  quelle  a prins  fon  nom  :  car  Père  n'cft  a  due  aime 
•xhofeqtfoatt^oo  dclà.Ellee£tfitueeen  pédant  deâbs  vue  colli- 
ne. Si  quelque  eftrager arriueàCôMtinopîeou  a  Pcre,par  mer 
ou  par  terre^I  ne  trouuera  point  d'hoftelcrie  pour  fc  loger  :  par- 
quoy  cÔuiéta  vnchacun^llat  par  Turquie  porter  les  hatdcsiur- 
quoy  i&êvcuc  coucher  de  nuid.Toutefoisquad  quelque  cftran- 
âer  arriueenConftantinopleoucnPere,ilnepeutcftrequiI  ne 
uouue logis  en  vnefaçon  ou  en  âutre,ioina  qlesCarbacharats,  l        ,^ 
qui  fondes  logis  publiques  de  Turquie ,  ne  défaillent  ïamais  par  ^esdeTms 
ksvilies:&  auffi  qu'il  n'y  a  hommede quelque  nation ,  aumoms^ 
poinrlaolus-grande  partic^ai  ne  trouuc  quelque logis  a  te  reti- 
rer :  Car  communément  chafque  perfonne  fe  retire  chez  celuy 
qu'il  aura  entendu  eftre  de  fon  pays.Suyuant  cela  %  fçachant  bien 
quetoutes  republiques  &  grands  feigneurs  d'Europe  ont  leurs 
Ambatfadeursà  Conftantinople^principalemetquand  lap<ux 
eft  vniuerfelle  entrclcs  princes ,  &  que  les  Àmbaflâdeurs  rai :dcs 
republiques,que  des  feigneurs  Chreftiens,  comme  celuy  defra-  Ev^A^ 
cc,dcVcnife;deRagouib,Ghio,Florence>Tranfyluanie5Hogne  iamU^ 
&autres',fc.tiennentcommunémenrenPerc  ,  excepte  celuy  de  »**. 

Œm»crra,x«ricûl^ 

queTerfonne  fe  retire .par deuers  eux.  Mais  les  François  particu- 

liereWntentreautrcsnatipnstrouueDtcommunemetmeilleuç 

party  :car  ils  font  mieux  recueillis  denoftre  Àmbafladeur^font 
toufiourslesmieuxvenus^quenefonclcs  autreschez  leurs  Am- 
ba{fadeurs:&au01qucles  François  (ètrouuans  en  effrange  pays, 
fçauentfuppûrterlesvnslesautres^s'aimcrmieuxquenefont 
les  autres  notions. La  libéralité  de  monfieiird'AramontÀmbai. 
fadeur  pour  le  Roy  *ers  legrand  feigncur,donnc  témoignage  de  Qmtoifieie 
cequenauônsdir:carilatant  aimé  àfaircplaifiratousccux  ^mtmfiatr 
lanationFrançoifc,ouquieftoyent  du  party  François^quilnar-  £MJmùttt, 
rlua  onc  hommeà  Conftantinopîe,  de  quelque  condiaon  qu  il 
fulLs'addreÛantàïuy.quilnaithurr^nementreçeu^faittrai. 
der  en  fon  logis.  Sa  libéralité  fepeutaufS  prouuer  par  le  grand 
nombre  d'efeiaues  Chreftiens  qu'il  a  deliurez  de  la  mam  des 
Turcs  àfespropresdeniers.  Etquand  quelques  François  vien- 
nent à  CÔftantinople,  outre  ce  qu'il  leur  fait  donner  tout  ce  que 
leureftneceflkire^uailesfaitreueftirs'usnontdeshabillemes. 

D'auantagc^maifon  eu  ouucrte  à  toutes  gens.  Etquandvn 


Ij&  PREMIER-     LIVRE     DES     SINGVXA. 

itharditéde  François  cftennuyé  d'eftreence  pays  la ,  il  luy  donne  de  l'argent» 
menfieur  fcjon  f0n  eftat,autant  qu'il  luy  en  faut  pour  retourner  en  France., 
d>Ar4mont-  £c  s,jj  cagnoift  qu'il  foit  de  race  noble,apres  l'auoir  tratôé  hono-  : 
rablement  comme  foymefme>fînabîemçnt  il  luy  fait  donet  moi> > 
tares  &  autres  chofes  necefSires.Et  comme  il  nes'ennuia  iamais  ; 
de  la  defpeme  qull  luy  ait  conuenu  faire  pour  1  arriuee  des  plus-; 
grâds  perfonnagçs,  tout  ainfi  il  ne  dèfdaigna  iamais  de  faire  plai-  ; 
iïr  aux  plus  petis  compagnons.  Et  layans  expérimenté  en  noftrev 
endroit  .ferions  dignes  délire  nommez  ingras  fi  n'en  rendions, 
tefmoignage  :  car  nous  fommesaffeurez  quil  n'y  a  homme  qui, 
nous  fçache  contredire  d'vn  feui  mot  de  tout  ce  qu  en  auons  dit>v 
sri  n'eftoitJnàque>&:qu'ii  ne  refufaft  d  accorder  àla  vérité.. 

J^fcrlptmAs  mm$  dçNmmedk,  <&  dëceqtfiycjl.mamtemnî^    • 
Chapitre:    lxxu 

.*'o    die   ^J^J^^  Tans féiournéàCc^ftantinople}partifmcs  pour alîe^ 
^°m  '*  WÊÊÈm  voir  les  ruines  de  la  ville  de  Nicomedic -,  qui  n'ont  en- 
WÊÈ^  cor  point  perdu  leutnomancien.Nicomedie  eftoitfi-: 
«&ISP&.  tuée deÉus vn couftau .Le tour  de fes murailles cfiolr 
fyfcrlpim  forCgrand,qui.commençoit  au  bas  du  port ,  &  comprenok  tout 
desminesds  ^  ^zut  fafaçzz  dtïfusvne  colline.,  La  ville  eft.totalementrui- 
mQwêk<  nec  ^  m^s  le  touc  ^u  çhafteau  eft  en  fon  entier  fitué  en  haut  lien 
deflus le eouitaq^çomprins  dedans  le  ciccuit  des  muraiïles.ïl  n'y 
a  pas  plus  de  trois  toiles  de  diftence  dVne  tour  des  muraillesdti 
chafteaaiufqucs  à  l'autre  vtant  il  eftoit  de  grande  fortereue  :,lef~ 
quelles  font  faites  de  telles  cuiâss&ioin&es  de  fort  ciment- 
%  afEette  e&en  pkifant  lieu  àçSks  lafoinmité  d'vne  petite  mon- 
ca<me.Il  y  a  grande  commodité  d'eau  des  fontainesaqui  font  eau- 
&%  ierendreiîabité5partie.de  Turcs ,  partie  de  Grecs.  Les  cha- 
piteaux &:  tronçons  dçs  pilliers  &c  grottes  colomnes  de  ce  cha- 
■fléau  9  montrent  qucNieomedie  ait  autrefois  efté  puiûantc  vil-  - 
le.  Àufn  y  ayons  recouuert  de  moult  belles  medalles  antiques 
Greques^  I^unes.Nauigant par lesjoreesde îamer,  regardant- 
contre  terre  aux  images,  Ion  voïtles  poiffons  que  les  Latins ont 
aommé.Pinna>fichezr&:  arrangez  de  bout,qu  on  dicoitquafi  vok- 
^'       va  iambo  enterre:aufli  eft-ce  queles  Latins  l'ontnommé  enau-. 

tœnpn^PttnaJEftfcqael^ 
"- •  -  '  "  -  ~  phe,; 


OBSERVEES     PAU     *.    BIIOK.  l$$ 

phe  de  Nicomedic,au  dedans  du  Propon  tide ,  obferuafmcs  qu'il  D™°»efes. 
y  en  a  neuf,qu  onvoit  bien  aclair  de  dedans  Conftantinoplc,qui Vrot0' 
anciennement  eftoyent  nommées  Demoncfès.  La  première  eft  rf^^ 
maintenant  appellce  àes  Grecs  Proco.  L'autre  d  après ,  Bergus.  ^or^0 
LatierccJfulcdelCorbo.  La  refte  des  autres ,  font  petites  ifles,  proconefar 
qui  n'ont  pas  noms  propres.  ILy  en  a  bien  d  autres  qui  font  plus  Marmara. 
bas  vers  l'Hellcfpont,  mais  pluiieurs  d'icelles  ont  changé  leurs  Besbicus. 
noms  anciens  :  car  celle  qui  s  appelloit  anciennement  Procone-  GJ<M»»a. 
fus>eft  maintenant  nommée  Marmara:  Se  Beibicus,  Galomino. 

Que  les  nations  du  Leuant  aiment  mieux  manger  dupoijfpnyqtte  de  la  chah. 
Chapitre    lxxii. 

\  Vant  que  nous  déporter  de  parler  âcs  rieherTcs  db 
)  Propontidc,fçachans  qu  iicft  abondant  en  toutes  e£- 
(  pecesde  poifTons,  difons  qu'il  n  eft  de  moindre reue- 

[nu,  qu'vn  pays  de  terre  ferme  de  bon  pafturage  eft  en 

animaux  :  c  eft  de  là  que  tout  le  peuple  de  Turquie  „  Se  de  Grèce 
*ft  plus  friand  de  poifTon  qu'il  n  eft  de  chair.  Les  hab itans  de  ter- 
re ferme  en  noftre  France  qui  ont  le  poiftbn  en  fi  grandhorreury 
-nous  femblent  l'auoir  plus  par  opinion,qu  autrement.  Nous  en- 
-tendons  de  ceux  qui  par  opiniaftretc  manget  la  chair  en  cachet- 
tes les  vendredis,  Se  à  peine  ont  du  poifïb.n  à  manger  le  dimaçhe. 
-Àuffi  ne  trouuôs  nous  point  par  les  eferits  des  anciens  autheu.rs» 
que  la  chair  ait  anciennement  efté  tant  cftimcc,qu  elle  nefuft  in- 
férieure au  poiflbn  .Et  les  religieux  d'Egypte  s'abftenoict  de  man- 
ger du  poilîbn  toute  leur  vie,  voulas  inférer  par  cela  qu'ils  efto.iêc 
priuez  dételle  delice5cÔme  pourroiteftre  en  la  noftre  de  ne  man- 
der point  de  chair.  Ce  mefprHèmcnt  de  manger  chair  Se  eftjmcr 
le  poiflbn,afait  que  les  anciens  Grecs,&  Latins,..aycnt  moins  co- 
gneu  les  oifeaux  qles  poiflons.  Autîï  les  médecins  ont  plus  parlé- 
des  diuerfes  efpeces  des  poifTons  en  leurs  liures  ècs  aHmes  >  qu'ils 
n  on t  fait  des  oifeaux  Se  des  beftes  rerrcftres:&:  ne  trou  nos  point 
-que  les  Empereurs  Se  grands  {cigneurs  Romainsayent  cftiméles  ottm. 
oifeaux  en  leurs  banquets^comme  lonfair  maintenant  ^excepté  Fruy0^ 
quelque  Griuc  Se  Francolimcar  ils  auoyent  tous  pontons  en  de-  *£££* 
lices ,  plus  que  toute  autre  manière  de  gibbier  :  tellement  que  la  ^0$. 
ÇerdriXjFaiiànjBeccauc^Pluuier^&aurjes^uifcjstw  premier  ^^T 

V 


Engins  a 
prendre  le 
foijfon. 


Îf4  PREMIER     riVM    DIS     *INGVLA*~ 

devrez  es  friandifes  des  François ,  n  ont  point  efté  eftimee  es  re~ 
pasdes  plus  friands  anciens  Empereurs  Romains.  Encores  diros 
d'auantage ,  que  lcgrand  Turc  mefmes,fes  predece{Teurs5&  tous 
-ceux  de  Ùl  court,mettent  plus  leur  defîr  à  manger  du  poifTon  que 
deîachain&nevoitlon  gueredegibbieraumaFché  deCoftan- 
tinopîe.  Parquoyeftant  le  lieu  abondant  enpoifTon  ,  s'eftudient 
xle  le  prendre  en  oUuerfès  jnamercs..,  comme  ion  verra  cy  après. 

Que  U  minière  de  pefcher  a»  Propontide,  eft  de  moult  grxnd  profit. 
Chapitre        lxxiil 

Vis  qu  il  vient  a  propos,  nous  parlerons  prefente- 
ment  de  la  manière  de  pcfcher  du  Pr^poncide ,  6ç 
premièrement  de  celle  qui  rapporte  plus  grad  pro- 
fit. La~merdeConftantinople  eft  plus  abondante 
-pg-^^fâr  en  ponTons ,  que  ne  font  les  autres  mers  :  parquoy 
les  habitans  iè  rendent  plus  induftrieux  à  les  peicher.  L'eau  dou- 
<:c  qui  tombe  des  grands  fleuucs  en  la  mer  maicur,&:  qui  puis  eft 
meflec  auec  l'eau  de  la  mer ,  eft  moult  feâte  à  nourrir  les  poifTons 
du  Pont  Se  Propotidc.  Ces  eaux  fe  vie  nnét  rendre  en  la  Meditcr- 
*ance,lefqucllcs  en  pafTant  parle  Ptopontide  ne  croifTent  &  n'ap- 
peaffcntiamais,nayans  aucun  relus.  Les  poifTons  ont  leur  fai- 
foadcputeeJe^paCerd'vneTner  en  l'autre  ,  &onc  heure  de  ne 
bouger,  &:  heure  de fe  pourmener.  Cefte  chofe  eftant  afTezco- 
gneuedes  habitans  du  Propontide/ont  cômunémcnt  plus  nour- 
ris de  poiiïbn  que  de  chair,  Parquoy  ils  choifiiTent  les  endroids 
•en  la  mer,ou  les  poifTons,felo  leur  aduis  ,  ont  cou  ftume  fréquen- 
ter plus  foiment,&  principalement  vers  les  ri^^  en  lieu  qui 
n eft  grandemet  profond.Iis  dreflènt  deux  poutres,  hautes  com- 
me vn  mas  de nauire,  qu'ils  fifehent  dtoictes  en  la  mer,  de  diftan- 
cc  l'vne  del'autre  cnuiron  de  quarante  à  cinquâte  pas:fur  la  fom- 
XBÎté  dcfquelles  Ion  fait  des  k>gcttes,a  fin  qu'vn  homme  ou  deux 
ayent lieu  a  fc  tenir  deffus  en  faifant  le  guet  au  poifTon,  Ces  pou- 
très  ont  des  baftons  fichez  au  trauers  pour  monter,  &c  defeendre. 
Les  logettes  leurs  feruent  pour  les  défendre  de  la  chaleur  du  So- 
leil,&  des  pluyes.Eftas  la  haut  encruchez ,  font  commeceux  qui 
fontleguetaux  vignes:carsilsaduifent  vne  bendc4c poifTons  le 
pourmenans,l'vn  compagnon  aduertift.i'aucre  de  faire  bon  guet, 


OBSERVEES    PAR    P.    BELO.tîr  Tfâ 

ï  fin  que  les  voyans  entrer  au  parquet,  chacun  tircvne  corde  de 
fon  cofté\qui  tient  à  vn  rets  qui  eft  dedans  l'eau  /fait  de  tel  artifi- 
ce quclcuansicretsquicftaufonddelca^cnfermcnt  les  port- 
ions dedans  le  parquet.  Or  pour  donner  à  entendre  comme  il  eft 
ordonné^  faut  prefuppofer  que  k  rets  eft  quarté,  Srriéf  attache 
auec  des  cordes  aux  quatre  coings  •  &  que  les  deux  cornières  qui 
fontefloignecs  des  hautes  poutres ,  font  plus  aduacees  en  la  mer, 
attachées  à  la  forait»  te  de  deuxPaux  fichez  en  tetrejefqueîs  n  ap- 
paioH&nt  guère  hor>dc  reau:&  que  les  deuxeoings  du  rets  eftas 
attachez  aux  Faux  y  demeurent  immobiles.  Il  faut  aufuqueles 
deux-autres  coings  du  rets  foyent  attachez  de  cordes  qui  refpo- 
dent  là  haut  à  ceux  qui  font  dedans  les,  loges  à  couuert».  Letets 
■ainfi  tenu  parles  quatre  coings  eftant  la  maitiéaufontdelamcr 
foudain  que  les  poiûonnicrs  oui  raifoyét  légueront  veulcs  poif- 
fons.venir  vêts  leurs  rcts,il  s'admoneftenr  lvn  l'autre-  Car  quand 
les  poifTons  qui  vont  eatrouppe  fontentrezauparquet,ilz  tirenc 
leurs  cordes  :  &  par  ainfi  les  poifTons  reftentcnclosleans  par  dei- 
fous.  Alors  Te  poifïbnnierauant defeédre,  attache  fa  corde  pour 
tenir  1e  rets  haulféipuis  defeed  par  les  cheuilles  qui  font  aux  deux 
cefkz-.de  fa  poutre,&:  là  bas  trouue  fa  nacelle  attachée  au  Pau,  6c 
fansfaircfeiour,gafcheverslecoftédefon  compagnon  -,  lequel 
luy  baiflevn  peu  fa  cor-dc,*  entre  dedans  le  parquet  auesfa  bar-  : 

qtiette  ou  nacelle  ySc  va  en  efleuant  les  filets  ^ommençanta-vn  f^  - 
àcs  bouts,&touuourscontinuantiufqucsàixqu-ilaitccduttlcs  Jjim?ugne^ 
■  poifTonsàfeccnvncoingdcfruslerets:puis  cnïeuelcs  çoi^ons PeUmjés^ 
en  fon  bateau:&  de  làretoùrne  de  rechef  amont  attendant  d'au-  cboUôs. 
très  poiflbns. Hz  prennent indifferemméttontes efpecesdepoif-  Dorudes. 
fondas  tel  engin:commc  Sphy  renes^ue  les  Proucoçaux  nom,  ^tMtx- 
ment  Pefèfcome: comme  auffi  desObladcs ,  Lampugnes  vEela--  £0*-  . 
mides^holios^orades^Dcntaux^alpes^Sargs^ulets ,  Rou-  Jj^ 
gets)Perches}Surs,Mcncs,GirolesJ&:  autres  fcmblabksdefquclz  ^^ 
ï\z  pefchentfèlon  diuersterur^^rincipalen3enEer4eâé.eivtemps  Ver%e^ 
caime,quand  la  mer  eft  pacifiquê^-faus  tant—Car  entempefte  aa 
les  hommes  eftant  là  haut;  ne  verroyentpasfi  bien-dedans  1  eau,  .  Jtoet- 
commeilz.foncquandlameraeûpoinragitec.  ^  9raUs-. 

V/ij-  ... 


ïj£  PREMIER.    LIVRE     DH     SINGVLA. 

Dcplufieurs  autres  manières  de pefcher  auPropontide. 
Chapitre    lxxiiii. 

Lyacncor  plufieurs  autres  manières  de  pefcher  au 
!  Propontide ,  qui  font  aufli  communes  à  toutes  gens, 
;  commecftpefcheràlatraine,quicftla  plusfcure,&s 
i  cogneuc  des  autres  nations.Mais  pource  que  tous  pet 
cjicurs  de  cefte  mer,  n'vfent  de  liège  à  fouftenir  leur  rets ,  comme 
ils  fonten  la  mer  Occanc  &  Méditerranée ,  quelques  vus  ont  àc% 
efeorces  Iegieres  en  commun  vfage ,  dcfquelles  ils  fe  fèruent  au 
Efcorcesde  lieu  du  Hege,comme  eft  celle  de  l'arbre  de  Pins  Se  Pignccs ,  qu'ils 
piasfruans  apportent  de  la  mer  maicur.  'Plufieurs  autres  feferuent  décou- 
la lien  de.  courdcs,comme  es  lacs  de  Maccdoine.Nous  Tommes  fouuente- 
%* *»*  fois  partis  de  Conftantinopîe  aucc  les  efquifs  des  pefcheurs  de 
Hc  mn-  pcrCjCol3t  expreffement  pour  voir  les  poiflbns  qu'on  pcfchoit  au 
riuage  des  iftes  de  Marmara,^  de  Beibico,&  au  goulfedela  Mo* 
tanee  :  car  après  qu'ils  ont  prins  beaucoup  de  poifTons  ils  s'en  re- 
tournent incontinent,  &  les  apportent  vendre  à  Conftantino- 
pîe. La  manière  de  pcfcheràla  tratte,ceftàdireàla  Traine,eâ 
teilc-.c cft,qu  il  faut  qu'ils  foyent  deux  bateaux  de  compagnie ,  Se 
qu'ils  a\cnt  à  Force  de  cordage  pour  leurs  rets.  Il  faut  aufli  que  la 
plage  ou  ils  vont  pefcher,  foit  nette  de  rochers ,  &  que  le  lieu  ou 
iîstircntlepoiffondelatraince,foitbiencfgaI.  Ils  ie&ent  leurs 
rets  en  la  merefpars  de  leur  cftendue:chafque  batteau  attache  Tes 
cordes  au  bout  du  rets  :  lors  prennent  le  chemin  vers  terre  trai- 
nans  &  amenans  les  filets  vers  la  riue.  Et  quand  la  corde  ny 
peut  arriuer  ,  ils  voguent  à  force  de  rames  :  Se  faut  que  les  cor- 
des foyent  de  mefîne  longueur.  Ils  ont  celle  maxime  de  ne  ti- 
rer iamais  l'vne  fans  l'autre.  Car  quand  les  deux  bouts  des  cor- 
des font  arriuez; au  bort ,  ils  defeendent  de  leurs  bateaux  di- 
fbans  quelques  vingts  pas  Tvn  de  l'autre ,  Se  commencent  à  tirer, 
&entcndençauxTxcadsdes  cordcsys'iîs  font  plus  àduancez  l'vn 
que  lautte ,  ScCe  le  foutà  fçauoir ,  à  fin  qu  îlz  tirent  cgallement. 
Et  quand  les  £lets  s  approchent  près  de  terre ,  les  poiffonniers 
s  approchent  aufli.  Et  quand  ils  font  venus  iufqucsau  bout  des 
cordes ,  tous  attirent  les  rets  en  les  emmenant  egallcment  vers 
terre,puis  quâd  ils  font  venus  iufques  à  la  pochc,ils  font  diligen- 


OBSE&TEES    PAR  •■*'.    BELQÏ*.  *f? 

ceqacicspoiflbns  n'cfchappentpardrfrous.  Ec  s'ils  ont  pcfche  **»!»«• 
Quelques  Pouiprcs,us  leur  ouuren  t  les  iambes»  &aueclesdents 
leun-ompent  le  bec,qui  eft  fembkbîeà  ecluy  d'vn  Papegaut.Car 
quinelescueroic,  ils  efchapperoyent  hors  du  bateau.  S'ils  ont 
prinsdcsMurcnes^ilsiesempoignentauecdes  tenailles  par  def-  ^r«r«i«. 
iûs  lcchinon  du  coV&lcur  rompent  les  mafehoueresauee  vn  ba- 
llon ^aufliîcurfi:oiaenttoutlecorps:autrcmentelIeslcsmor- 
droyent ,  s'ils  les  prenoyent  auec  k  main  :  car  elles  ont  les  dents 
grandes  commeefguillons^nvn  long  bec.  Etsils  ont  prins  des 
Paftinaccs^aufllleurcoupentfoudainement Iaqueuë  :  ce  quenc 
font  les  pefchcurs dcnoftrcOcean,  qui nouslescnuoyenta  Fa-      - 
ris,©»  à  Rouen  aucc  rcfguillon.  Et  combien  que  ces  Paftinaces  TaJlmdCK. 
Payent  point  trouué  de  nom  François  ,  toutesfois  les  Panfiens 
ks  nomment  Raves  5pourcequxllesrencmbient  aux  Rayes.  Ils 

y  prennendndifferem^ 

-bien  que  poûuonsmaintenir^u  ils  ne  peTchenc  point  de  Scarus.  USarmut 
•Encoryavneautreparticulieremanieredepefcherauquarrelet,^  trome 
quieftfeuiemcntenvfageàceuxquifont  habitansau  nuage  en- ^„,  m 
-tour  Conftantinople,&:  principalement  à  ceux  quifont  à  main  tropmul*, 
gâucbe  allant  aufepnlchredc  BarberoufTe:  Car  tous  lesefclaues 
Irpagnols^urquelsildonalibçrté^infe  font  faits  Turcs/e  font 
retirez  &  habituez  aux  riuages  du  Propontide,  ou  ils  ontiait  de 
beaux  baftimens  &  iardinages  fur  le  nuage  :  d  autant  que  le  grad 
Ceigneur  a  donné  quelques  liber|cz&  priuiieges  à  ccuxquibafti- 
^oycntdeâuskcofte.  Par  cela  ils  ont  fait  des  maifons  demis  piî- 
-lotiz,8d  fur  pierres  ramaflees  iufques  dedans ieau.Carcommea- 
*uons  dit,k  mer  de  ce  pays  de  Pont,d«  Propontidc,  &  Hellefpot, 
^bosncpartiederEgecne  cçoift  ncappetuTe  iamais,  mais  eft 
vn  perpétuel  courant.  Or  fine  il  entendre  que  ce  rets  ne  fe  fi-  ^ihaift^ 
non  à  prendre  le  menupokfon,  comme  Àthcrincs  &  Cabaflons,  ^j^ 
&  toutesfortes de petitspouTons qui cbcrchcntlc riuage3&  qui 
«nccroiôcnt en  grandeur.  Par  cekfes  feneftres  ou  permis  font 
"  fort  déliez.  ïlfcroit  femblableà  vntruble,neftoit  que  k  toile  en  TruUc 
eft  moult  grande  au  regard  de  ceux  ècs  riuiercs.Elle  eft  attachée 
au  quatre  coingsà  des  baftons courbez &:croifez,tenans à  vnîôg 
manche,  qui  eftfouftenudvne  poutre-droide  cochée  à  îafom- 
mité  en  manière  de  fourchette.fur  laquelle  eft  appuyé  le  manche 
dudit  quarrelet  fouftenu  en  balance,  en  manière  que  quandon  a 

V    iij  ' 


J5$  PREMIER     LIVRE     DES     S-ÏNtiTLA^ 

defcendu  le  rets  en  la  mer ,  l'autre  bout  du  manche  eft  hàtiÏÏe  es 
rair^auqùel  eft  attachée  vne  petite  corde  qu*ôn  tire  contre  bas ,  à 
t-  r  fin  denîeucr  le  rets  hors  de  la,mer:  Ion  les  paiiTons  qui  demeurée. 
^  £*  /»/?&  dedans  le  quarrelet ,  reftent  pendus  fur  la  toille.  La  commodité 
au  proton*  Se  le  profit  delà pefcherie  de  cefte  mer  du  Propontide-a'rendu 
ùde.  Conftantinopîe  tellement  augmenté  yqu  on  y  baftit  vilîages  de 

Congres,      tous  eoftez.  Les  Congres  n'y  font  point  fréquents,  corne  en  l'O- 
céan. Aufiï  la  manicrede  les  pefcher  n'y  eft  point  telle:  Car  d'au- 
rant  que  l'Océan  fè  retire  en  arrière-,  les  poiflbnniers  vont  es  pays 
xoce.Mt.     ^cxociiers  s  ou  iis  trouuent  quelques  petits  poiffons  deftbus  les 
pierres  reftez  au  fec  ^nommez,  Exoceti ,  qu'ils  enfilent  de  leurs 
*   haims  tenus  a  deux  cordelles  attachées  aux  pierres  auant  que  la. 
mer  foitreuenue:.car  quand  le  flot  de  lamerarccouuertîesro- 
ehers,lors  les  Congres,Rayes,Chicns,  &:  Chats  de  mer  trouuans 
leur  apâftde  tels  petits  poifïbns ,  qu  ils  auallent  cnfemble  auec 
î4iaim,font  côtrainds  de  demeurer  attachez  aux  rocs.Puis  quad 
la  mer  s  eft  efioignee,  les pcfcheurs  retournans  à  leur  apaft,  trou-  " 
uentles  poifïbns  demeurez  à  Cec.  Nature  feitec  petit  Exocetus 
moult  à  propos  pour  feruir  à  tel  apaftixar  corne  il  aime  àdemeu- 
rer  ï{ec  &:  fe  contenir  fans  eau  defibus  l'es  pierres ,  couramn  les 
poiflbnniers  le  fçauent  trouuer  pour  s'en  feruir.  Ceft  la  raifon 
BtocetuAf     pourquoy  les  Grecs  l'ont  anciennement  nommé  Exocetus.  Les 
R°' S M*   moc^erncs  Grecs  les  nomment  Glinos ,  defquels  il  y  en  a  au  Pro- 
Utée        poatide  qui  portenda  crefte  fut  la  tefte  comme  vn  Cpc*  Et  pour 
ce  qu'iront  de  grands  dents,&  qu'ils  mordent  bien  fort ,  les  ha- 
bitans  de  Comafco,  à  la  bouche  du  Pau ,.  le  nomment  vne  Vul- 
Pulpe.        pc,à  Matfeiile  vne  Bauecque  ;  mais  noftre  Océan  ne  luy  a  encor 
FAm^ue.    point  donné  de  nom.  L'autre  manière  de  pefcher  commune  à 
gens  de  marine,  .&  principalement  des  Galères  &  Nauires  cftans 
fur  mer ,  eft  qu'i ceux  ne  font  iamais  fans  leurs  filets ,  defquels  en. 
ont  deux  fortes.  Les  vns  font  tendus  en  leau,  fouftenus  de  liege^ 
fans  eftrc  attachez  nulle  part:  defquels  y  en  a  qui  font  doubles,  _ 
ou  les  poifïbns  allans  &  venans  par  la  mer,s'cmpeftrent  commar- 
■C  -  nenient  dçdan.s.lcs  anneaux, &  demeurent  prins». 


OBSERVEES     PAU     P.    ,'BELON.  1]9 

Ttelt  manière  de pcfchcrk  mi£h auj "etttauech trident  :&  depbtfieuYS 
mresduPropQntide.  Chapitre,    lx.xv. 

r  A  mer  de  Pont  ,  &  celle  àcs  Bofphores  &  Propontidc  &Jcbcr  h 
font  toufiours  en  mefme  hauteur  :  ou  les  habitais  onr  muâ  au 
\  vne  manière  de  pefchcr  la  nuid  au  feu ,  grandement  ft*. 
vv^:^  profitable:  qui  eft  faite  en  cefte  manière.  Il  faut  deux 
hommes  dedans  vne  nacelle  ou  barquette  bien  legiere,  dont  l'vn 
vogue  de  deux  auirons,  vn  de  chafque  cofte  du  bateau:  l'autre eft 
à  genoux  au  fin  bout  du  bateau  auec  du  feu  ftambant  fait  de  bois 
de  Tede ,  qui  cftà  cofté  de  luy ,  pendu  en  vn  flambeau  au  bord, 
hors  du  bateau .  Et  pource  que  ledit  bois  de  Tede  leur  eft  en  û 
commun  vfagepour  pefcher,il  eft  vendu  par  les  marchez  des  vil-  B°^eTede' 
lages^appellé  vulgairement  Dadi.  Ceux  quipetchent  au  trident, 
ne  défirent  pas  la  clarté  de  la  Lune  :  car  d'autant  que  le  temps  eft 
plus  obfcur,d  autant  eft  il  meilleur  pour  le  pefcheurXequel  eftat  Tnàent  ^ 
ainfi  à  genoux,  tenant  fon  trident,qui  a  cinq  ou  fix  fourcherons,  fefthems. 
regardant  en  l'eau  attentiuemét,  s'il  aduife  quelque  poiilon  dor- 
mant ,  il  haulfe  la  main  pour  faire  ligne  à  fon  compagnon  qu'il  : 
approche  ou  reculle  le  bateau ,  faifant  figne  de  la  mamouucrte^^* 
ou  ferrée  :<;ar  par  tels  fignes  fon  compagnon  entend ,  Se  conduit  ormen  " 
Je  bateau  çàou  là.  11  ne  faut  qu'ils  parlent Tvnà  l'autre:  car  l'air 
retentiuant  dedans  l'eau,  viédroit  iufquesaux  ouyes  des  poifTons  ^  ro;jrms 
dormans ,  qui  les  cfueillcroit  &  fcroitfuyr;  &  aufE  qu'il  y  a  des  oyentcUir. 
poifTons  qui  oyentplus  clair  les  vns  que  les  autres.  Parquoy  ils 
conduisent  le  bateau  ii  bellement ,  mettans  les  auirons  en  l'eau  lî 
doucement ,  que  les  poifTons  n'en  oyent  tien.  Il  faut  auffi  que  le 
temps  foit  fans  vcnr,&:  quel  eau  foitpaifible,  &  que  le  lieu  nefoit 
trop  profond.  Les  poifTons  nay  ment  à  dormir  es  lieux  trop  abif- 
mez:<Stendormantils  touchent  contre  terre,  ou  font  appuyez  à 
à  quelque  pierre  :&  de  fait  ils  ont  fommeil  ne  plus  ne  moins  que 
les  animaux  terreftres  :  dont  il  y  en  a  qu'on  a  ouy  quelques-  ^£mmmx 
fois  ronfler.  Car  comme  ainfi  foit  que  tous  animaux  qui  oot  f»  °»*  ce£ 
■  ceruellc,  ne  peuucnt  viure  fans  dormir  :  tout  ainli  tous  poif-  Z^ù^ 
fons  qui  ont  ceruellc,  ne  peuuent  fe paffer  de  dormir.    La-^^T 
quelle  chofe  Pline  fuiuant  l'authorùé  d'Ariftotc ,  a  mis  cneicrir.  mr% 
*       -           ■                                                      y    «ij      '  " 


fmtffres: 
fotenes. 

Cajferons. 

Mulets» 
Dentals. 
Fageaux* 


*6o  ^emiu    uns    bes   sikcvla. 

Combien qu  A&uariusautheur  Grec  mettoit  l'appétit  de  dor- 
mir et*  Tcftomach.  Le  pefchewr  aduifant  le  poifloa  endormy* 
darde  fan  ttidcntdc  roideur/elo  ce  qu*ii  .voi*ïepoif&n  à  fa  main 
cftrc  oblique ou  detrauers}pourl,accaindredefrus4,erchigne:  ôc. 
le  trident^qui  a  des  hakrisrecrochez^eramponne  le  poifTon  frap- 
pé^ fenîcue  dedans  le  bateau  .Celle  manière  de  pefcher  la  nuîct 
au  feu  auec  le  trident,eft  moult  propre  à  pefcher  Pourprcs,Totc- 
nessCaflèrons ,  &:  auffi  mdifferemmet  toutes  efpeces  de  poiuons- 
quiSontereailks><;omeBarsaMâigtes,Muiets)Dentals>  Pageaux- 
Auffî  pcfchent  aux  haïras  ou  hamenons  en  cefte  manière.  Ils  at- 
tachentdeux  ou  trois  cens  haims,&  les  difpoient  par  ordre  le  lôg: 
d»vnecordefou{lenuedecoucourdesy&:lesappaftét  de  chair  ou 
de  poifTon ,  &  les  portent  au  fok  enukon  vne  lieue  ou  demie  a- 
cat  en  la  mer ,  &  les  biffent  toute  nuiâ*  à  fin  que  les  poifîbns-  qui 
chercher  à  fc  paiftrescomme  fontMurcnes,  Anges^hatsJUy  csy 
Chiens,&  autres  rembîablcs3dcmeurent  prins  aux  haims.Le  len- 
demain matin  s'il  n'y  a  tempefte^ils  vont  querk  leurs  haimsqu  ils 
cognoiffcntdebicn  loing,  pource  qu'ils  les  ont  marquez  auec 
grades  coucourdes  qu'ils  y  ont  attachées^  de  là  rapporter  leurs 
haims,&  ce  qu'ils  y  ont  prins.  Il  y  a  quelques  villes  en  Italie,  ou 
ugncA  m    vn  homme  feuî  pefche  de  quatre  on  cinq  lignes  à  la  foiSjqu'il  fait 
mode  ijt**  ccnîr  ^  entxedeux  des  bois  de  quelque  pont:  car  ce  pendant  qu'il 
^  appafte  1'v.ne,  les  autres  quitiennent  es  ioinctures  des  bois ,  font 

autant  que  fi  le  pefeheur  mefme  les  tenok  en  fa  main  :  Car  ainfi 
que  le  poulbn  s y  pred  ,Je  pefcheur  a  loifir  de  rappafter  les  autres, 
jeu*.       LamanieredeperchcrlesMaquereauxauPropontide^ftmoulc 
*tmx.        différente  à  celle  de  l'Océan.  Car  prenat  les  Maquereaux  en  1 0- 
cean>ilraut  defcendreleslignes  trainantes  parla  meren  tourme- 
te:&  doutant  que  la  tourmente  cft  plus  violente,  &  que  la-nauire 
va  plus  vifte,d autant  plus  l'on  en  prendra.  Mais  les  Grecs  n'ont 
cU  •        point  cefte  manière  ,ains  feulement  à  la  traincjouautrcmétauee 
rJ£  em*  les  rets.  11  n'y  a  poifTon  qui  foie  plus  commun  au  marché  de  Con~ 
pereur  cl*  ftantinopîe  que  Gianis  :  mais  les  Iuifs  n'en  mangent  point ,  pour 
iZwt  ce  qu'il  n'a  aucunes  efcailles.  L'on  y  trouue  ordinairement  du 

mDAuphinyefi  poïfïbn  empcreur,que  les  Latins  ont  nom  é-Giadius.  Les  Turcs^ 
m  délices  des  Grecsju  jfs  ^  &  tolltc  auCre  nation  du  leuant  ne  mange  point  du. 
mn^:  Dauphin,  qui  eftceluy  que  nous  auons  en  délices  es  iours  mai- 
WrjoHw.  lc  vuigairc  nommé  Marfouin.  Mais  pource  qu'il  y  en  a. 

^  de  deux. 


gejcheralt 
Ugnek  ht 


OBSERVEES      PAR     V.    BELOK.  T&l 

dedeux  fortes^ciuy  qu'on  nomme  vne  Gye  eftle  v.ray  Dauphin; 
laquelle  chofc  auonsfufHfamrnêx  ptouuee  auîiurc  des  poiûons. 
Uefitoutarrefféquenoz  Cekrins  font  ceux  que  les  autres  na-  ^-^. 
tions  nomment  Sardines  ou -Sar délies.  Nous  en  auonsdiligem-  SArMes^ 
ment  examiné  Ieseflfcigncs.au  Propontide,  comme  auûl en  l'O-  carum. 
ccan,  oun'auonsrr-ouuéd'ifferencede^vn  à  l'autre,  fînon  en  la  vinaigre? 
grandeur ,11  y  eut  vneliqueur  nommeeGarum,qui  eftoit ancien-  Grecs  er  ^ 
nernenten auflî grand  vfage  à&ome,comme nous eftlc  vinaigre  r*r"^^. 
pour  l'heure  prefente.  Nous  l'auons  trouuee  en  Turquie  en  aufli^f^?^ 
grand  cour&qu'elle  fut  ïamais.-Ilny.aboutique  de  poifipnmer  Qe[^ 
qui  n  en  ait  à  vendre  enConitantiBopIe.  Tels  vendeurs  efroyent  Ha.rmmm. 
nommcz-Cerarij,,,  qui  n'ont  encorgaigné  aucun  nom  François,  pifagaroL 
qui  ne  les  voudroit  nommer  Harcnniers ,  &  toutesfois.  ont  bien-  •; 

trouué  appellation  vulgaire  en  Italie.  .Car  les.Rjomainsiesnom~ 
ment  Pifcigaroli  :  qui efidi&ion procedente.  de  l'appellation dit 
poiflon.&  du  G'arum.  Les  Pifcigaroics  de  Confhntinopié  font 
pour  la  plus  part  en  Père  ,  qui  appreftent  iournellemcnt  des  poif- 
fo  n  sf raiz,  &i  es  ex  pofent  en  vente  délia  frits:  defquelsoftans  les< 
tripes  &  ouyes ,  &  les  metrans  tremper  en  la  faulmure  >  la  font 
couertiren  Garû.  Toutesfois  il  peut  grandemët  chaloir  de  quel 
po-uTon  il  ioic  fait  :  car  il  n'y  a  guère  que  le  Trachu  rus  que  les  Ve- 
nitiens  nomment  5uro,& les  Maquereaux,  quileur  puifFentfer-  T™1*™' 
uir  à  en  faire.  Cefte  liqueur  de  Garnmeiloit  anciennement  tant  jLfm"*/ 
cftimcc,quc  Pline  la  nomme  liqueur  ttcs-exquife,difantqu'il  nf  y  ^  M,fs  m 
auoit  rie»  déplus  requis  à  Rome-Mais  il  dit  qtViî  y  en  auoit  de  uur  manioc 
pluficurs  fortes.  Et  de  fait  nous  croyons  bien  qu'on  en  peut  auûl  delmtu  • 
faire  de  poiiïbns  ayans  cfcaiile.JEt  pour  monftrer  que  les  lu  ifs* 
ont  de  tous  temps  obfèrué  leur  aufterité  en  leur  manière  de  vi- 
ure,nous  mettrons  les  mots  de  Pline,parlant  de  ce  Gzxum^Aliuà 
<îmQaâc$imonummfnpcYftiîwnem{&  ■ 

quodfit.èpîjczbaâfquamd,  cArentihus.  C'cft  à.dire:L  autre  forte  de  Ga- 
rum  eft  dedice  à  la  chaftetédes  fuperftkions ,  Se  aufïi  aux  Iuifs 
facrez  <-:  qui  eft  fait  de  poiflbns  qui  n'ont  point  defcaille.  Si-  nous, 
n'eutuons  feeu  qu'ils  obferuent-encor  pour  le  iaurd'huy  de  nvicr 
du  commun  Garum,  nous  n'eu  liions  pas  dit  cecy  :  Car  aui&onc 
ils  quelques  apprefts  particuliers  qui  font  expreiïèaiét  faits  pour 
leur  vfage  ;  comme  auffieft  vne  forte  dedrogue  faite  d'œafsd'E-  au]ir  . .. 
fturgconjquc  cousnommec  Caaiar,qui  eil  ù  commune  es-  repas 


162.  PREMIER     LIVRE      DES     SINGVLA* 

des  Grecs  &:  Turcs ,  par  tout  le  leuant ,  qu'il  n'y  a  ecluy  qui  n'en 
mange  excepté  les  Iuifs  :  fçachans  que TEfturgeon  eft  fans  efcail- 
k.  Mais  ceux  qui  habitent  à  la  Tana,  qui  prennent  moult  grande 

™*'  quantité  de  Carpes,  fçauent  leur  mettre  les  œufs  à  part  :  &  les  fa- 

ler  en  telle  forte  qu'ils  font  meilleurs  qu'on  ne  pourroit  bonne- 

Ctuùrrôige  ment  penfer,&:  en  font  du  Cau^ar  rouge  pour  les  Iuifs,qu'on  véd 
auffiàConâantinople.  Toutes  ces  choies  font fpecifiees  parle 
menu  en  deux  Hures ,ouauons  mis  les  portraidsdctouspoiûbns. 

Chapitre      lxxvi. 

Conm'mo*  g=§fi^S  AvilîedcCoftantinopIceftfitueeenvnlieu  îemieux 
flefititec  en  fe  ^^p\  à  propos  pour  la  grandeur  d\n  prince,que  nulle  autre 
fmUUe*.  il  fegsp  ville  de  tout  le  monde:car  elle  a  fi  grande  commodité 
W%?^    ^^^^  de  la  marine  5quiiferoitimpoiTiblcà  tout  homme  de 

*Co*âLi»   cùerciîer  iieu  micux  *  propos- L>on  n>y  voic  ricn  de  Plus  anci(îue» 
'  que  ce  que  les  Empereurs  Romamss&  depuis  les  Grecsyonteri* 

gé.  Bien  voulons  dire  qu'vn  feul  Conftâtin  a  plus  defpouillé  Ro- 
me de  (es  ornemens  d'antiquité^pour  les  tranfporter  à  Conftanti- 
noplc,que  vingt  autres  Empereurs  n'auoyent  bafty  en  cent  ans. 
Aufïï  tout  ce  qu  on  y  voit  de  beau  &  d'antique ,  eft-ce  qu'on  y  a 
,.       autresfois  tranfportè  de  Rome.  Entre  au  très  chofeseftvne  colo- 
%wodro*    nedePorphircquin'eftguereloingdu  temple  de  faindeSophic. 
tJ       *    II  y  a  auflivn  Hippodrome,  quieftok  vnechofcfumptueufe Se 
ob&fatt     magnifique  :  dedans  lequel  on  voit  deux  obelifques  ,  dont  lvn 
firdé.         eftoitreueftudel'ames  d'erain  ,puis  dorées  zauflin'cft  il  fait  que 
de  pierres  de  marbre  liées  auec  fer  &  plomb.  L  autre  obehfque  y 
a  eux  apporté  d'Egypte,  qui  n'eft  pas  tout  entier.  Encor  y  a  leans, 
vn  ferpent  d*erain  fondu  d  exceiHue  groflèu^efleué  droid  en  ma- 
éSa£T  nJercdecolomne.  Conâantinopleenfermeaumbien  feprmon- 
Trois  murs  tagnes  au  circuit  de  fes  muraulcs,côme  fait  Rome.  Elle  eft  cein- 
mtour  con*  âede  trois  murailîes,mais  appert  qu'on  les  a  faites  à  diuerfes  fois: 
fiantlnofU.  car  Ion  voit  les  bouts  de  plutieurs  pillicrs  de  marbre,  auoirefté 
Eglife  des, miScnlamaflronnerie:quidemonftrentquecelaaefléfaitàgrâd 
sofik.        hafte.UEglife  de  faindeSophie  eft  le  plus  beau  baftimét  que  nul 
autrequ  on  voyereftédebout,quieft  bien  autrechofeque  lcPa- 
theondc  Rome:  car  tout  le  dedans  de  l'Eglifc  eft  fait  envouteà 


OBSERVEES  fÀR     F-    BELOiT.  I6J 

ckitevoveParleaeffus,&:eftfouftcnudcffus  piUietsdcfmmar- 

'  tredediuefescoukurs.&yaquaû.^parmamcrcdcd.re.aucac 

deportesqucdcioiuscnlWEtpourcequ-eleeftmofqueedc 

Turcs  les  Chtcfticns  n'y  ofcnr  m«tre:  les  pieds  :  »1  eft  bien  vray 
cu-ilcftpermisauxaueftiens&Iuifsdefeœettretoatlc  corps 
leans  ^regarder  des  portes.  Quiconque  Vauraveuë  ne  pren-  auW. 

S^d-ad^iraciondeV^P-t0^6 R°7'  ^ *5£ 
nomme  en  vulgaire  fafflaeManeRotonde.Ecnouscfinetuerl-2ffa^ 

lons  comme  Ion  fait  fi  grand  cas  de  ce  Pawheon.veuquefan  e- 

dificerfeftdefigrande  induftrie.  comme  Ion  crier  Car  chaque 

petit maffonpcutbienconceuoirk  manicrede  fafaçon  touten 

yninirant:carcftantla  bafefi  maffiue.&lçsmuraillesficfpoif- 

fcs.nenousafemblédirHcilcd'yadioufter  la  voûte  a  claire  voyc 

MaisfainaeSophieeftbienautrechofc.qtn  eft  ouurage  fait  de 

tuulcparledehorscommelePantheon.&aumreueftudemar- 

brepar  le  dedans.  Mais  au  lieu  que  le  Panthéon  eft  nuffif te 
cftofe  de  toutesParts,fainae  Sophieeftlarge/pacieufe  &  délice 
en  touslieux.  Ceaeftépatron  aux  Turcs  a  faire  leurs  Mofquees. 
a  {a  femblance  :  tellement  que  de  demie'  douzaine  de  moult  ex- 
cellentes.quionteftébaftiedepuiscentans  n)enaaucuneqm 
n-a.teftéfaitefurlepatrondefainaeSoph.e.Lonyoitlesrumes^^ 
d-vnpalaismoultantique,  quelc  vulgaire  nomme  le  Pala*  de 
Constantin.  LeTurcyfait  noutrirf«£lephans>&  aunes  beftes 
douces. Uyavnlieu  en  Conftantinopje,  ou  le  grand  Turctait 


attachccnoiequcnauwi»^".--- TT'Tw.-  <ù  ™f  «c<»>&«- 

lesdetackentfc manient,*  ratach«r,t quand.4s»culent,&  mei-        F 
mementlcsmeinentquelquefoispatla^ille.  ^pourcequune    i 
fut  onc  que  les  grands  feigneurs  „  quelques  barbaresqu"ils  ayenc 
eftln-avétcu  plaifir  de  veoir les  animaux  fingulicrs  &rares«oiic 
ainfichaquenationdupaysou  domine  le  Turc,  ayant  pris  que,- 
auc  anirrul£àuua2e5renuoyeà  Cooaanrinople,&  lai  Empereur. 
kfaiSrir&gfrderfoigneufement.  Ily  auoiedes  jH»P»«- jjg  - 
cÎLzdesAfnfs/auuag^.desH.rifl^iMesPorsdpicsOurs^ 

Loups  Ceruiers,&  Onces,qu*on  r.Ômeautremer  Linccs.  H  a  ck  ^^ 
jaiiufqucs.-aux plus ipecites  beii^çQmrneE^min«,.riQiiîcesen£^^ 


-1^4  PRE  M  I  El    X  IVRE     DES     S  TNG  V  LÀ." 

Latin  Mures Pondci,  cefiàdire  Rats  de  Pont,  qu'ils  ne  nôUrrif- 
Mm  Fonu*  fem  foigneufemens.  Il  y  auoit  auffî  deux  petites  befles ,  reffem- 
bkn tes  fifort  à  viïChat5qu'elles  ne  nous  fembloyent  différer  fino 
en  grandeur3aufqueîs  n'auons  feeu  trouucr  nom  ancien. II  fut  vn 
temps  que  lespenfïons  eftreLinces:  car  nous  prenions  les  Onces 
pour  Panthères  ;  toutesfois  n'auonsfceu  refbuldre  quelles  befles 

.cefufTcnt.  Ceftmerueilie  comme  ils  fçauent  traicler  toutes  ces 
belles  là  fi  doucement ,  qu'ils  les  rendent  grandement  appriuoi- 
fees:  comme  auffi  les  Genettes,  qu'ils  kiffent  efchapper  par  k 

«£oaifon3priuees  comme  Chars* 


.  TJmthm 


Jxj}ortrd&  de  UGsrxm. 


Gmetit, 


Etd'âutant que"Pere &  Conftantinople  font quafi vne mef- 
mechofe,~&:  qu'un  y  a  que  le  port  entre  deux,  lequel  il  conuienc 


OBSERVEES     PAR     P.   BELOX»  -  l€$ 

tfbuuentpafTer  ;  Lon  crouue  des  palpeurs  auec  les  bateaux  quall 
-aufïi  drus  que  mouches ,  qui  font  communément  panures  efcîa- 
ues.Ceux  qui  tranfportent  les  fardeaux  des  nauires  es  mag-aûns,  _  ,  c  .    , 

n  ii  r  •  r-  .  .       i  &t     .  «  Portefaix  de 

font  pour  la  plus  parc  Egyptiens,  &neiont,point  moins  de  huid  confiant* 
*  ou  dix  pour  beaderCar  ayans  à  defèharger  de  moult  grandes  ba-  «<«,&. 
les  pefantcs}&:  gros  fardeaux,tels  qu'on  a  accoutumé  porter  fur 
ncfs:commeauffiàtranfporterlesvai(leaux  pleins  devinais  les 
portent  tous  brandis,  faifansvncvoix  enfemblc&mcfmes  ao 
cens  :  &  marchans  tous  enfemble  vont  mefmcs  pas.  Il  y  a  beau-    . 
■coup  de  gens  à  Conftâtinoplequi  font  diuers  meftiers  que  nous .  *m  *™ôn- 
ignorons:car  comme  ils  n'ont  pointl'impreffion ,  auffieft-ce  vn£  ftMtinop!c. 
reigle  générale  que  tous  efcriuent  fur  le  papier  bruny.  Ilzncront  mijfure  du, 
point  de  papier  en  Turquie  :'mais  1  achètent  des  marchas  Italies,  fqier* 
qui  le  leur  apportent  par  mer  .Ceux  qui  bruniiïènt  le  papier ,  ont 
vn  aix  fort  bien  ioinct,fait  de  pièces  de  buis ,  qui  eft  quelquepeu 
voûté  en  dedas,furquoy  ilz  appuyent  le  papier^  fin  qu'en  le  frot- 
tant deffus  il  préneMbre  :  mais  pour  le  îifïcr  ilz  encrent  vnepier- 
re de Caffidoine ou  ïafpc  au  trauers  d'vn  bâton  long dvneeoe- 
dee,&:  tenans  les  deux  bouts,rrottent  le  papicrauec  la  pierre  def- 
fus ledid  aix  de  buis. Les  Turcs  aiment  à  auoir  leurs  cfpees  qu'iîz 
nommétCimcterreSjnon  pasainfiluyfances  comme  les  noftres, 
mais  damafqtiinees  :  ceit  à  dire  ternies  de  coites  d'autre  :  pzr- FourbiJJèun 
quoy  les  armuriers-fçauenc  détremper  du  fel  Armoniac,  &  verd,  dsrurfiic 
&:  auec  du  vinaigre  dedans  quelque  efeueile ,  ou  ilz  mettent  la 
poincte  du  Cimeterredequel  errant  tenu  debout,  laiiTentcouiler 
de  ladicte  mixture  tout  le  long  du  iour  par  dcilus:car  cela  mange 
vn  peu  le  fer  ou  acier,myuant  la  veine  qu'il  trouue  en  longueur^ 
qui  îuy  donne  bonne  grâce, -d'autant  qu'on  le  brunift  par  après 
poureftrepîusplaifàntàîaveuë.  Les  ouuriers  qui  font  les  guai- 
nes  des  couteaux  &:  cimeterres ,  ont  auiîi  Finduilnede  rendre  le  T       *-m 
cuir  grené  de  moult  belle  façon  ,dot  pàrleros  ailleurs..  Les  Turcs  mou  tapie** 
ont  les  pierres  fines  en  aufii,ou  plus  grande  eftimation,  que  nous  /&-  fines.    . 
îi'auons  par  deçà.  E  t  de  v  ray  ilz  en  ont-de  plus  de  fortes  que  noz  Ldchçmx 
ioialiets,  Etentreautres  eft  celle  qubnnomme  de  faux  nom,  La-  Cenu- 
chryma  cerui:&:  vne autre  nommée  Soulta  Meheure  :  mais  nous  ^ff** 
*en  parlerons  ailleurs  plus  au  long.  Il  y  a  piuiieurs  boutiques  qui  ^^ms. 
neviuent4autrcmeftierq\ie  défaire  des  peintures  fur  les  toiles 
de  couleur.  Et pource  qu'ilz  font  louuragc  foudainemenc  beau, 

X  iij 


■j66-  premier    livre    des    singvla. 

&  ians grand* pcine.nous  en  dirôs  cy  la maniere-.C'ett  qu'ilz  em> 
pefent  premièrement  de  la  toile  de  coton  ou  de  lin ,  laquelle  ilz 
tiennent  eftedue  bien  roide,foit  iauneyou  blcuë>ou  d'autre  cou- 
kurjaqueîle  ilz  liflent  &  poliflèiit  premièrement. Et  ont  vne  for- 
me taillée  en  bois,o.n  il  y  a  quelque  belle  fieiiretterlaquelle  forme 
ilzfrottent  de  couleur  y  comme  quâd  Ion  imprime  quelque  cho- 
fc en  mouîeilaquelle  ilz mettent deûus  la  toille tendue,&la frot- 
ter par  deflus/aifans  que  la  peinture  demeure  fur  la  toile,  &  ainfi 
infh  ment  continuansi  ^ont  de  beaux  ouuragcs  fans  grand*  peine.IÎ  y  à  vne 
Jtmufaue  manière  d*in ftrument  de  manque  fait  de  tuyaux  de  cannes,  dont 
les  Turcs  qui  en  fçauent  fonner,ont  quafi  aufll  bonne  grace,co- 
xne  s'ilz  diiby et  d' vne  rîufte  d'Aleman.  Et  de  fait  vn  Turc  pafîlinc 
parla  rue,difant  de  ceft  inftrument ,  nous  feit  péfer  &  à  ceux  qui 
cltoyenten  la  (aie du  logis  demonûeur  d'Aramont ,  que  ccfuft 
vne  fiufte  d'Àîeman  ,mais  regardans  par  la  feneftre ,  veifmes  que 
l'inftr  h  ruent  efloit  fait  de  la  propre  manière  comme  font  les  pi- 
»     gnes  ou  chalumeaux  des  faneurs ,  ayant  vingt  &:  quatre  canons: 
fmeurs  *    ^s autrcs  n>en  onc  (luc  dixniu&-  Qiè? nc Suroît ouyy ne  pourrok 
Mmmâcheu*  bonnement  croire  qucdVn  inftrumétquinouscftfordidejdcuCr. 
resde  c<m*    procéder  fi  grand  douceur  de  mufique.  Quiconque  ira  voir  les 
fkeAiix.        boutiques  des  ouuriers  qui  font  les  mâches  des  couteaux  en  C6- 
ftantinopie  >  trouucra  pluralitez.de  dets  &  de  cornes  d'animaux: 
Def*j*      car  meimement  y auons  trouu-e  de  celles  du  Bubalis ,  des  GazeL- 
%^ms      testée  de  plusieurs  autres  manières,  apportées  du  contour  des  ri- 
odoratL.     «âges  delà  mer  maieur  :  cômeauflî  deux  manières  de  dents  d'E~ 
^caàa.  '     lephant ,  &  de  Rohard  :  Se  en  trouucra  encor  d'autres  qui  n'ont 
^îcAulh.     aucun  nom  vulgaire-  Qui  voudra  recouurer  du  vray  Calamus 
tsûnomum.  odoratusvil  conuient  aller  es  boutiques  dcsmarchands5$£  dema- 
^nrm.       der  Carraboufcsirc:&:  pour  Acacia  Jeur  prononcer  Akakia:Aca- 
mpellii*.     calis>Kefmefen:Amomum>Aamama:Ammî,Ameos:Napellus} 
aaZLm,  BifchrSuccre,  Alhafos^Tigala:  Armala3Harmel  :  Racines  de  Ben 
i^Kukmm.  album  &  rubeumaBehem  hamer,&  Behen  Abias:Car  ks  herbes 
que  nous  penfons  eftrc Ben  album  &  rubeum  3  n'approchèrent 
jamais  de  ladefcription  des  anciens.  Hz  vendent  les  femences  de 
Menthe».    Hebulben5que  nous  n'ânonsen  vfagem'auiC  vne  noix  groiTe  co?- 
me  les  deux  poings,pîeine  de  petis  grains  par  dedans,  bonsàmâV 
ger,doux  comme  noifiîles,qu  ilz  nomment  Coulcoul,c  eft  à  dire 
noix,  de  Coulco^LQui  voudroit  recouurer  de  ce  que  nozapotir 


OBSERVEES     PAR    P.    BEION»  T&J 

caîrcs  nomment  Cajamus  aromat!cusyil  faudroit  leur  demander  ^^ 
deFAcoron.  Iîzn*vfent.  pas  des  Colocinthes  pluraees^aisca-  ^.or^* 
tieresqui  eft  grand  crrcur.Tous  vendent  de  la  femence  verde  du  Tereymi^ 
Terebinthe>&:dcfa  refinequi  eftdure.Ilz  vendétîcBrion  moult  Brlon_ 
différent  à  noftre  Moufle  :  car  nous  errons  penfans  que  la  Moufle  uoujfe. 
eft  Vfnca,&  eux  le  nomment  Vfnech  en  le  vendit.  Les  autheurs  ^bfmthe 
louent  FAbfinthe  Pontiquc,  îaquclleauons  veu  vendre*  vfer  es  Tomtfie. 
boutiques  de  Conftantinople ,  qui  eft  correfpondantc  en  toutes 
enfeignesà  celle  qui  croift en  noz  iardins  ,  excepté  que  celle  de 
Pont  eft  trouuec  fauuagc.  Nous  auons  cuoecafionde  nousef- 
merueiller,que plufieurs  de  noftre  Europe  doutans  de cefte  Ab- 
finthc,ne  voulans  vfer  de  la  vraye,  ont  prins  vne  mefehante  peti- 
te herbette,cfpcce  d'Auronc,en  Ton  lieu,qui  n'a  aucune  vertu:5£ 
ont  deîaifle  la  noftre  vulgaire  cultiuee,qui  eft  la  vraye  Pontiquc, 
par  mefme  erreur  conforme  à  celle  des  Vénitiens,  qui  ont  rcçcu 
quelque  certaine  petite  herbette  en  vfage,naiflaot  en  gtâd*  quan- 
tité par  les  montagnes  fie  Frieul ,  pour  la  vraye  Hyflbpe  ,  &  ont 
deîaifle  de  ne  plus  vfer  de  la  cultiuee  ,  faifant  croiftre  vne  petite 
erreur  deux  fois  plus  grande  qu  elle  n'eftoit.  Ceux  de  Conftanti- 
nople,  qui  ont  tant  de  diuerfitéde  drogues  en  leurs  boutiques 
que  c  eft  confufion ,  n'yfent  de  ï'Hyflbpe  ne  iauuage  ne  domefti- 
que  qu'en  faute  :  car  ilz  la  nomment  &  prennent  pour  le  Thym, 
&  en  fon  lieu  vfent  d'vne  petite  herbette  inutile ,  que  les  anciens 
n'ont  point  cogneue.  pt  par  confequent  n'ont  Fvfagc  du  Thym  T^m  ^ 
de  Grecc-.car  ilz  cueillent  la  vraye  Hyffbpe:&:  par  erreur  la  nom-  Byjfo^ 
mans  Thy m,fe  trouuent  fans  vraye  Hyflbpc,conftituans  vneau-  ^ontic 
tre  en  fon  lieu  .Qui  vouldra  trouuer  duRhapontic/e  face  mon-  %beub#he- 
ftrer  de  la  Rheubarbe:car  ilz  ne  le  fçauent  diftinguer ,  ains  le  nô- 
mentdenomdeRheubarba&quilchoiiifle  les  racines  longues 
&  noires  par  le  deflus ,  $c  qui  font  femblabîcs  à  la  Ccntoire  par  le 
dedans.  Il  eft  manifefte  quil  y  a  différence  aflez  grande  entre  la 
R  heubarbe  &  le  Rhappntic.  Et  pource  qu  en  parlerons  ,  tant  de 
ï  vn  que  de  Fautre,com  me  aufli  de  tous  animaux,plantcs,&  cho-? 
fes  medicinalcs,au  commentaire  qu'auons  eferit  en  cefte  langue. 
&r  Diofcoride}nous  en  tairons  pour  le  prefent  ,  &  ferons  fin  ace 
premier  liure. 

lin  du  premier  Uurc  ■      *~  ■ 

.  X  ixij 


A  Y     LECTEVR. 


Qurce  que  nous  lifons  infnkdifcours  des  pérégrinations  de 
j  plusieurs  hommes ,  tant  denoftre  temps  que  des  anciens  qui 
}  ont  voyagé  far  terre  &  mer  :  aujîi  tr  ornons  que  ceux  qui 
y  Je  font  voulu  méfier  des  cbofes  qui  efloyent  hors  de  leur  c&- 
gnoijfance  qu'ils  n'entendaient  pas^font  fouuent  conuain- 
cus  de  menfonge.Nous  mettons  l 'exemple  ds.ee  qu'on  nom-  - 
me  maintenant  Mumie^  de  laquelle  quelques  vns  s'auançans  par  trop ^no  - 
y  ans  les  bonnes lettres^  &  les  chofès  naturelles  >ont  prononcé  quelleejifai- 
te  de  corps  humains.  fùbmerge^  es  Câblons  mauums  es  deferts  d'Afrique. 
ou  i^rabie.  Mais  quand  fpeci fierons  les  cbofes  quauos  obferuees.  en  Egy- 
pte ,  nous  prouuerons  la  Mumie  efire  bien  autre  chofe  que  ce  que  le  vulo-aire 
penfe,&  que  les  Grecs  &  Latins  ne  l'ont  pas  ignorée.  Parquoy  ejeriuans  ce 
jeçond  hure  fie  prétendons  non  plus  y  en  mettre ^qu'auons  oculawement  ob- 
Jèruéi  ou  bienen  prenant  tauthofité  des  anciens  autheurs  ^  approuuerons  ce 
quen  e fermons  en  plufteurs  cbofes  ^dont  pretmdons  parler.Et  nous  fentans 
auoir  liberté  de  pouuoir  plainement  eferire  les  cbofes  qui  fe  font  offertes  À 
nous, félon  que  les  voulions  examiner, en  auosfait  ample  difcours}fms  rien 
difiimuler 'de -ce qu'il  nomen.a  femble.  Mais  pourautant  que  la  faueur  <&* 
crédit  démon fieur  du  fumet  ^gentil  homme  de  la  chambre  du  Roy3  à  ce  faire 
nous  a- grandement  aidé,  dignes  ferios  deJhenote^dingratitudeiJi  ne  con- 
férions librement  luyeflre  beaucoup  redeuables  :  car  nous  auons  eu  £mteïïi~  . 
gencedeplufieurs  chofesen  fes  voyages  s  efquelsila  vfedegrandes  courtoi- 
fies  en  noftreeniroiB-  Nous  htrouuafmes  à  Confiantinople  ejiatpour  lors 
*Ambaffadeurpourle  Roy  Hery  deuxiefme  vers  le grand Seigneur ^auquel  il ;. 
trouua grande  faueur:  Carilluy  bailla  gens  exprès  de  fa  court  pourluyfai^ 
yeefcc?te>  &  le  conduire  ferrement  en  tous  Les  pays  &  prouinces  ou  il  vou* 
hit  aller.  Et  efiant  bien  accompagné  d'honorables  Gentils  hommes  Iran- 
§phy&  aujUde  Geniffaires£haouX)&  droguemans  5  acheua  honorable* 
ment  de  moult  grands  £?*  laborieux  voyages  par  les  pays  de  Turquie  >  com% 
m^on.voma  par  cy  après, 

'       "  '..  Ï,E. 


LE  SECOND  LIVRE 

DE  .PLVSIEVRS    SIUGVLARLTEZ*, 

ET     C  H  O  S  E  S      WLE  MO  &.  A  BLE  S. 

obfcruccs  en  dîners  pays  çftratiges, ., 
Par  PierreBeîonxiu  Mans. 

£»?  les  voyages  faits  par  mer  font Jetemps  mcmànï&Uvc$xge:d*- 
^onjiantinopltmldexandrte.  Chapitre    i. 

»  Es  hommes -propo&ns  faire  voyages  ÇKi^r,  ne- 
peuuentxienaû'eurerdu  temps  à  &  vérité. D'au  tac 
que  les  navigations  eftans  fubieâ:esaiîxvcnts5ad- 
..-  uîent  le  pjBsfmîuentqae  les  vaiffeauxta-nt  grands 
ir*^-— ip4  que  petis  >d'auirons  &  de  voile,  galères  ou  nauires, 
quientemps-profpere  ayansle  ventàpropos  vaurÔsfait  vn  voya- 
ge en  huid  iours,  en  autre  temps  ne  le  pourront  parfaire  en  deux  •. 
mois.  Vray-eftqucle..marimerfaifarxt  difeours  du  voyage  quu- 
cntreprend,pèut  bien  computer  le  temps  de  fa  navigation ,  mais , 
il  ne  le  tient  pas  pour  chofe  certaine:po»rce  que  quandles  vents 
font  bien  à  propos  poar  aller  celle  part  ou  Ion  a  propofé,  alors  on., 
nlarrefte  gneresàacheuerTon  voyage.  liaous  eft  aduenuqua- 
uons  efté  rendus  en  treize  iours  depuis  le  deitroidds  Proponxi- 
de  de  Conftantinople iufqu  a¥enife -,  auquel  voyageîon  a  quel- 
quefois accouftuméeftre  fîx mois  demis  la  mer.Mamtenant  que  ■: 
voulons  deferire  le  voyage  de  Conftantinopic  en  Àlexadrie  vH- - 
k^EgvpteVilnous  faut  faire  entendre  que  les  nauires  des  Ara-. 
bes,&  principalement  d'Egypte  ^ntleurfaifon  députée :pourfe 
mettre  en  chemin  à  aller  de  Confkntinopk  en  Alexandrie  :  ÔC 
partentcommunémentvers  kfindu  moisd'Aouftrcarlesvents- 
Septcnmonaux^eftàdiredeBîze/ontdepluslonguedureeen- 
Septembre^u  en  nulle  autre  faifon  de  te  nce.  Et  pour  ne  laifter  v 
l^rdrcûbonnxoc^Q^^ 


ZJO  SECOND     LIVRE    DES    SINGVLA. 

de  Gonûântûioplffcn  ce  temps  là,poury  aller.,  Mais  pour  venir 
•die  Alexandrie  en  Conftantinople ,  iîz  partent  vers  le  printemps: 
caries  vents  Au ftres,qui  font  vens  demidy,y  cptinuentau  prin- 
temps plus  long  temps  constamment  qu'en  n^lîe  autre  faifon. 
Nous dcfpîoyafmes  les  voiles  qu'il  eftoit  défia  vefpre,coîitinuans 
noftre  chemin  lanuict,  &  le  iour  enfuiuant  aueo  bon  veoc  deSi- 
frôpontule.  ze:&nêfufmesplus  dVniour&vnenui&furlamer ,  que  nous 
jncojfolisji*  n'euf£ons  paiïecoutlc  Propontide.  De  tel  nom  eït  appelîee  celle 
'**'    /rt  * mer>  ^u*      en*our  Conftantiriople  ,  laquelle  eft  enfermée  des 
cenu*    J     ^eux  Bo{phorçs,&  a  deux  profonds  goulphes  ou  fines  :  l'vn  de  la 
Montanee  anciennement  dirle  SinedeNicoppJis,rautre  de  Ni- 
comedie  anciennement  nomme  Aftacenus  fmus.Le  iour  d'après 
çftan  s  en  plaine  campagne  de  mer ,  ayans  le  pays  de  Phrygie  d  ti 
rofté  gauche ,  &  le  pays  de  Thrace  à  dextre  ,  pafîafmes  toute  la 
mer  du  Propontide  qui  n'eft  pas  large ,  aum*  eit  çîîeentournec  de 
monragnes^tellemefltquçquandquclqu'vnièroitau  milieu  ,  il 
ne  laiâferoit  pas  à  voir  terre  ferme  de  tous  coftez:&:  plufîeurs  ifles 
qu  auons  nommées  pat  cy  deuant.  Le  matin  enfuyuant  nous  ar- 
riuafmes  à  Galipoli^ou  nousreftafmcs,  &:  ancrafmes  en  la  Plage. 

7>es  villes  antiques Jkuees2Iariue  du  Pwpontiâe^dq  cofie de Thrace:  & 
delà  ville  de GaUpoU*  Chapitre    1 1. 

Àîipolieftdiftantcdc Conftantinpple  quatre  bon- 
gSpoU.      WÊÊi^iÈ nes  *ournccs  j  <lu*  peuuerit  cftre  cnuiron  trente  ûx 
~  HeueSjOU  il  n'y  a  point  de  port  pou  r  grands  nauires. 
Vray  cft  qu'il  y  a  plage  fuffifante  :  &  à  la.  vérité  tout 
le  Propontide  &  Hellcfpont  pourroit  quafï  eftrc 
appelle  Plage*.car  Ion  trouue  le  fond  par  tout.  Allant  par  terre  de 
'  Çonilantinople  à  Galipoli ,  enfuyuant  le  riuage  de  la  mer  du  co- 
ûé  de  Thtace^lon  pafïè  par  quatre  villes  antiques,qui  encor  pour 
le  iourd'hoy  tetiennet  leurs  noms  ancïens5&  ne  font  murées  non 
plus  que  toutes  autres  villes  es  pays  ou  domine  le  grand  Turc.  La 
seUmbru.    prermerc  vi]jc  eft  Selimbria ,  maintenant  di&e  Seli urée ,  ou  il  y  a 
%  Unu       Porc  Pour  P^î^es  barques,  Se  plages  pour  grands  nauires.   La  fc- 
Terintbûs.    condeeft  Hcraclec,anciennement  nommée  Per inthus ,  qui  a  vn 
trcfbeau  port,  grand  &:  fpacieux  pour  nauires  &:  galères.  La  tier- 
ce cil  Rodofto.  La  quartceft  Galipoli ,  qui  eft  vn  grand  village 


OBSERVEES 


SAR     P.    BELOHV  J7* 


OBSERVEES     fak.     '■    ""*■""•,      .„         i    n  ~ 

ponTdefinit.&oulaboucWH^^ 

nuis  Galipol  pat  le  deftroiâqui  dure  enutron  deux  lieues  mf- 

Ccs àfa Lt  Egée, tootcelaeftappellé  Hcllefpont    LcsTutcs  c^mt 

de  mer,  tant  grands  qoe  petits;  de  quelques  pays^qu dz foyent, 
voXn  fortif horsdeceaeftroia.fontcontramasde farrete,. 
&  parkràceuxdclagarde  de  GalipoK,*  prendreleur  paffeport, 
ÊÇefenterau  deWdu  Bofphote ,  à Tvn  desdeux ^ 
ûcaux  Vrayeftqu'vn  vaii&auqui  aUra.prmsfonpaÛeportaCo- 
EtLocJeVet^emptdeleptendreàGalip^U  :  fieft-cepooe 

eranAnanirc  qui  veutfortir  hors  deTurqmç  par  ce  deftroid,  d* 
luelque nation qu'eîLe foi£,fe doit teair aneré wo»s  lours durât, 

uire-&  n'en  excepteroyent  pas  vn  qui  ne  fou  viute.Les  Vcnmes, 

librement.  Ce  qu'on  ne  peut  pasfawecnfottantliorsxaruaa- 
uSenfetrouuoitq^lqueefdaue.fugit^  cache dedansle 
nau  ie  ouautrechofedefenduedemporterdeTurquie  ,  Jlcur 

mèsdeuxioursàGalipoli^allafmesaamonaaerc  dvn  Auguo 
SnauUencorfonElufcàkmodedesChreftiensLannschez 

tellement  qullz  nous  affeura  qu'il  porte  fer*  fois  l'an  &meûrût 
flfeuae^toutesfaifons.  Qnvoit  quelques  fP^".^ '^^ 
quesdcsRoys,  &  EmpcteuBdeTh^^^^^î^^*^ 
'blen^Irepetites.moptapettes.delqueUestoatlepaysdeThra- 
ceeâboffu    On  en  voÏTdeloing  plufieurs  autres  au  dcffiisde» 

&tlcsltandes}faites  pat  atti^commeaufli  font  elles  Lepoc* 


IJ%  TJHÎMÏÏll    LrVfLE     DES    ■mWGVtïk» 

FuftcSjGaliiotcSjBrigantins  &Maonncs,  qui  font  celle  manière 
.MAùtmeL    ^Q  vaiileaux  que  les  Latins  ont  appelle  de  mot  Grec  Hippagi y& 
&lîîA8»     qU  j  fetnenc^  pafTercheuaux  &  chameaux  d'Europe  en  Natolic. 
T)c  relies  naaircs  dicte  Maonnes  Ion  en  void  tous  les  matins 
grand  nombre  arriuera  Con^lantinople,  qui  <:oufturmcrcment 
,font-condui&es  par  les  Geniûaires  du  grand  feigneur.  Elles  font  . 
;  ouuertes  par  le  derrière  :;parquoy  le  chenal  ou  chameau  entrc4à 
dedans  comme  en  vne  eftable^ms  aucune  dirÏÏcuké.On  void  les 
-Galères  tireesàfec  apport  de  Galipoli  ,1e  long  du  *riuagc  deflbs 
-des  Pilotis,  couuertcs  de  Limandes  &merrcin  ,  fait  en  maniéré 
<d  arfenal.Lon  y  trouue  toutes  fortes  de  viures  au  marché  y  com- 
me à  ConftatinapleXa  villc-eft  habitée  de  Grecs,Iuifs,&:  Turcs. 
*Ceft  vn  fbntgrandpaflage  d'Europe  en  Natoiie.  Quand  nous 
;eufmesefté  deux  ioursà  Gai ipoli,nousfeifmes  voile  pour  conti- 
nuer noftre  chemin:  quand  nous  fufmes  aux  Chaftcaux,  nous 
ancrages  pour  la  féconde  fois.  Car  nul  nau  ire  (comme  auons 
<di&)  effranger  ou  Turc,  ne  defeend  par  ce  deftroicl:  qu'après 
auoir  ancré  à  Galipoli ,  ne  luy  conuienne  s  arrefter  de  rechef  as. 
.     .        ^eftroiadesChafteauxiiîlevaifTeau^nâuire,  ou  galère  chargé  de 
ïnarchandifeeft  effranger-,  illuyconuient  demeurer  troisiours 
-continuellement  attendant  Ta  depefehe.  Mais  fi  le  vanlèau  eft 
Turc,&  que  le  vent  foit  a  proposez  ont  cela  de  priuilege ,  pour 
ri  auoir  occaiion  deperdee  temps ,  qu  on  le  •depefclie  âcs  4e|>rc-. 
mieriour.    ■ 

Pefcription  du  Boîj>hore  de  fluet  :  &  des  Chajîeaux  nomme^Sefttts 
*&  ^bydusi  &  des  ruines  de  Scamandria.  Chapitre    m. 

E  deftroit  des  Chafteaux  eft  large  peu  moins  d'vn  dc- 
i  my  quart  delieue.C'eftoit  anciennement  Se  encor  eft 
^Àm*     1*18151^  le  lieu  ou  font  ficuez  les  Chafteaux  de  Seftus  &:  Aby- 
_J  dus.Et  eft  le  heu  dent  les  -Poëces-onc  prins  leur  argu- 
ment de  deferire  là  fable  de  Hero&leander.  -Le  Chaftcaudu 
codé  d'Aûenômé  Abydus^eft  refait  de  nou  ueau  en  forme<par- 
ree,fituce  en  lieu  marefeageux.  Le  circuit  de  la  muraille  du-Cha- 
.fteauentournevnehauretour  quarree,  faice  à  l'antique  ,  qui  eft 
encore  en  fon  entier-,que  les  Turcs  ont  rehaufee  à  k-fommiçé,  &: 
^arniedartilierie- par  dc&js.  -Il  y  a-quatrejictits -boulfeucrs-bwa 


-o'ïSÏHVfiES     *À*    f  •    B^O^' 


175 


•fctf 


en 


ponSr  1  UifledeMarm^^ 


M^rMcrMcdi^rrancc.    p 


o 


.0- 
o 


Y  ïïj 


Çf4  PRE.MIÎ-R     LIVRg     DES     S  INC  V  LA. 

"foibies,  aux  quatre  coings  de  la  carrure  du  tour  des.murailîes;. 
Et  fcmble  qcc  chafteau,pour  eftre  vue  clef  de  Turquie,  neft  gue- 
resfort.  La  pierre  dequoy  ils  l'ont  fortifié,  a  eftéprinfe  des  ruines. 
#*»m^^"Viîc  prochaine 

sommée  Scamandria,qui  eft  fitueeen  terre  ferme  d'Afie  mineur, 
&n'eft  qu'à  demie  lieue  de  la  mer,  &  &demie  petite  ioumee  des, 
ehafteaux.  Lon^voitvnc  fumptueuie  ruine  de  baftimens  ma- 
gnifiques.de  fort  beau  marbre  blanc ,  Se  descolonnes  taillées  ea 
toutes  foetes  d  ouurages  :  aum*  pluficurs  beaux  6c  fpacieux  chapi- 
teaux quarrez.  Elle  eft  fituee  defTus  vn  haut,ayant  vne  trefgrande- 
campagrrc,large,fpacieufe,&  belle  prairie,  qui  l'entourne  par  les 
deux  coftez.  Le  lieu  eft  marefeageux  ertl'hy  uer  :  mais  eft  tout  Ccc 
en  cfté.  Nous  y  auons  veu  vae  groflè  pierre  taillée  en  relief  ^  à  la 
perfpediued  vn  perfonnage  vertu  d'vn  haubert  à  l'antique ,  vne 
armure  à  kpoidriiie ,  vn  motion  emplumé  vbridé  par  deflbus  la, 
gorge:  vn  bouclier  long  &  enfeu^vne  efpee-eourbec  en  façon  de: 
cimeterre,  non  fainde  par  lecQrps,.mais  pendante  au  col  en  ef- 
charpe,fait  cr  excellent  artifice.  Nous  croyons  que  ce  baftimenc. 
cftoit  vn  temple  magnifique,  dédié  à  quelque  Dieu  :  &  mainte- 
nant les  Tur-cs  emportent  les  pierres  à  la  mer,  pour  les  porter  au. 
fufditchafteai^donten  ontfaitlafortercfrc.  L'autre  chafteaude* 
r  Seftus  eu  crvEjLirope,  affis  au  Clicconefe.de  Thrace ,  ioignant  vn, 

Mào        inouîcgranavillagehabité  de  Grecs, nommé Maito.  Seftuseft; 
DefiripUm  ûmézix  has.dtVne montagne,  en  façon  de  Trefrle.,  La  première 
4»  cb*fcw*ouvdnmti&i  duchafteau,  eft  en  façon  dé  dois  demis,  cercles 
iA&fiiu.     ioinâs  Pvn  à  l'autre...  La  féconde  entourne  la  première  de  mefme 
façonacn  forte^ue  Fvnecnfexme  l'autre.  Uentour  de  la  muraille: 
eft  triangle ,  duquel  forn  <fcs  coings  regarde  iuftement  la  monta- 
gne, ayantyne  tour  deflps  le  haut,  quidefend  Içehafteau  deia 
montagne.  Deceftetourdcfcendantenlarncr ,  deux  adlesdeia 
muraille  viennent  enfermer  la  tour  au  dedans  ,ea  forte  que  les 
murailles  des  ehafteaux  quis'eftendent  le  logdaâuage  tant  d'vn 
cofté  que  dautte,font  garnies  de  bones  pièces dîartHierie*  ptçftes 
àjefchargerslleftpjt  bcfoiBg',poiir  arrefter  les  vaîfïcauxqui  s'en 
voudroyéïfûirfàa^cog^ 
r^é:duf      c^aft^a  q«ic^^c<>|ic^Àfie,noiiim|Abydus,eftgarny  tout 
**    *     dejiiefmes  pièces  d  artillerie  :  toutesfoil  pource  qu'il  eft  de  plus, 
^rade  côfcquêc^aiiiTi  eft  il  plus  fort,&  beaucoup  plus  fongneufe: 


OBS"ERVï£S     ÏÀH     *.  11LON.  ïf$ 

lêmcnt  gardé.Cduy  quieft  en  Europe  ?  eft  faible  au  regard  de  la 
montagne  qui  luy  domine.  En  paflànt  par  i'Heîîefpont ,  on  voir 
les  montagnes  reueftues de  belle  forefts  de  Pins  fauuages  nom-, 
mecs  en  Latin  Piecx  :  les  habirans  prennent  de  fon  bois  nommé 
Tcdai  qui  eftaat  allume  efclâirc  de  foymefme  comme  vne  ehan-r^. 

-.       délie  :  duquel  ils  fpnr  la  Poix  noire. 
P-ôrtyai&dei'éCrbre  Picea  ^autrement      poi#  noire ,  $£  la  Ccdria,  Cedn*- 
.   ^     nommé  Pignctfauudge.  que  les  François  appel-  ^  ratt' 

1er  du  nom  Arabe  Quo- 
dran,<»ù  Qu^rrarij  &:en 
;'  Àuignbn  du  Cade  cet- 
:  bin  :  &  pource  qu'on  la 
vend  à  bon  marché  ,  les 
nauires  étrangères  qui 
arriuent  ïï^cn  emportée 
grande  quâtiré,  &:  queï- 
quesfois  s'en  chargêt& 
:  garni flène.  Les  Turcs  la 
merjeen t  -dedans  des  ou- 
:  dres,ou  de  brebis ,  ou-de 
r  cheu  res  :  car  elle  eu  fore 
^liquide.  Cba(queoudrc 
r  ou  peau  plaine ,  ne  cou-, 
'  ftc plus  d'vn^ demy  du- 
cat.-Elle  eâ  beaucoup 
plus  liquide  que  celle 
qu'on  apporte  dedas  àcs 
barils  des  montagnes  de 
Bordeaux.  Ceft  lachofe 
dont  anciennemêteeux 
du  pays  d'Egypte  fe  fer- 
uoyent  pour  confèruer 
lès  corps  morts^onteft^ 
faite  celiedexirogêic  que . 
nous  appelions  Mumie, 
de  laquelle  parierosplus  Mmue' 
k  amplement  cy  après.  Les 
mariniers  fe  fexuent  maintenant  du  iit  Qiiacran  ioindre  kscoc- 
:.;.t  Y    iiïj 


M 


'ij6-  Vr.emier.htre    des    stngt-la". 

zTfbh  l  -'  des^esnauircs»  &àmeflcrauecla  Poix  déterre  ^appelîeePiflàV 
tjtajtb*  to-.fphalturn  :  que  Ton  prend  ;au  deffus  de  Ragoufe  dedans  terre, 
ppur  les  fondre  enfembîe,  afin  que  le  P-ifTafphaltum  ou  poix  de- 
terre  deuienne  plus  molle}&  plus  du&ible  :  car  d'elle  m  cime  elle 
'  eft  fort  feichc.  JEc  ne  pourrait  feruir  fans  cftrc  méfiée  aucc  le  Ce- 
dria^  qu auons  drteftrefaiten  Phrygie.  Et  à  fin  de  faire  entendre 
quel  arbre  eft  celuy.que.no minons  Pignetfauuage,  nousenauôs . 
cv  deuant  mis  laportrai&ure  ,  ja  foit  que  layons  amplement, 
défont  au  I.iure.  Latin  des  arbres  conifères. 

'L.esnua^esdeia.rnerderMellcfpont&du  Propontide,  iet-. 
Isdgt^      tent  tçefgrande  quantité  d'AIga  îacifolia ,  qui  eft  vne  herbe  croif- . 
fànt  parla  mer ,  comme  le  foing  dedans  vn  pré.  Les  habicans  la  -, 
trouuansau  riuage  3  la  tirent  &  dcfèichcnt  pour  s'en  feruir.  Itela . 
mçiîent  aucc  de  la  terre  graifc ,  à  fin  d'en  couurir. leurs  maifons, 
car  elle  eft  îongue,large-&:obeifrante>faifant  bonne  mixture  de 
tprçfris^aufti  que  leurs  maifonsfbnt  couuertes  en  retraces.  Ceftc 
Mdifonsdes  b.9ucne  de  mer  court  fort  impetueufèment:dot.  aduient  quelle 
Turafint .  apporte  plufieursexcremésàbord^qui nefontpas  datout inuti- . 
cwuertes  en  tes:  commwft  la  cinquiefme  efpecc  dtAJcionium>  dont  Diofco- 
terra^       ride  a  faiç  mention  Jequel  les  habitans  de  Samothtacejlmbro  ,& 
^âcionjum.  Lcmno  5  appellent  eta  langage  vulgaire ,  ArkeilH  :  duquel  il  y  ail . 
«<£r*siUh     grande  quantité  en  l'ifle  de  Bejbiço ,  qui^eft  vne  des  ifles  du  Pro- 
pontide5quelquepeu  audcftbus  de  Marmara ,  qu  on  en  pourroic 
auoirà  charger  nauires;qui  toutefois  eft.vendu  bien  cher  par  les  . 
boutiques  des  drogueursde  Venifèa&  d'autres  narjons.Mais  ont 
Sfum*  m&  laifle  de  le  nommer  par  fon  nom  ancjé}car  pource  qu'il  eft  legiers 
y$*  &  reflèm  bîe  à  vne  efeume ,  ils  le  nomment  vulgairement  Spuma  * 

<Jto*t*tes.  maris.  Àuifi  y  auons  trou  ué  de  1*  Antipates, 

de  Turquie.  Chapitre}   mi. 

j.  E  Chafteau  dé  Seftus  5  qu  auons  par  cy  deuant  deferit. 
rxn  Europe,  eft  de  moindre  importance:  auiîî  n  eft  il . 
V  pas  grandemec  fortifié  :  mais  cclu'y  d'Abydus  cft  quel- 
que peu  plus  fort.  Eçpource  que  nous^çntrafrnesde- 
darjSjdfrons  briefuemçnt  ce  que  nous  y  auons  veu.il  eft  déforme, 
^arjra^&afoffczàl^  Ses  rnu- 

v  -    \  railles 


-OBSERVÉES    PAK    y.    BELON.  '  177 

^milieu.faitcenmanieredcdoiigconiquicftcellemcfmcqin^^^ 
eftStquiidlesTurcspcmdfent  le ch^cau  fut  les  Grecs.  Les. 

artilleries  qui  font  leans.nefofit  pas  montées  furroues,  a.ns  font 
eotre  tetrc,appuyees  d'vn  fort  mut  pat  le  detricK.tellcmet  qu  el- 
fes ne  fe  peuuét  ne  tccullct  n'aduâcer  :  fcfont  toutes  d-yne  regee 
In  nombre  de  vingt&fept,regatdanSàfild*au  deffuslamer  II 
vavn  villagcioignantehafquecfaafteau.tant  aScftusquaAby-  ■  & 

L:maiscfluy  #Abydoseftlcplusgrand.  Auquel  lieu  eftant  le  ^ 
mardvvingt&huiaiefmeioutd'Aouft.ve.fmesvolervncgrad  ^ 

bendcdeCigoignes.quUu  logement  de  teneurs  cftoyent  de 
„oulquatrLllleillesvenoyentdeJapamedeRuflîe,&Tar; 
■«rie:  car  elles  trauerfoyent  le  canal  de  l'Hellefpont  en_croix 
Bourguignonne..  Lefquelles quand  forent  comme  audeffusde 
HfledeTenedc-.alorstownoyercntlongucmcntenhmaflon.lui- 

«ans  les  vncs  les  antres  :  &  fe  mirent  en  vn  rondeau ^cercle  :  Se 
delàfediftribucrentparpetites-bendesauantquedeseflongne? 
delabouche  duPropontide-.&ainfiefparfcsfe.tetptasdcvmgt 
hendes  oartans  les  vnes  après  les  autres,  tirans  iufteroent  au  nu- 

commeauffi  font  les  tiuages  de  rHellefpontXes  hab.tansy  font 
kursbalaisdel'herbedeLepidon   que  les  Grecs  nommentvul-       ^ 
gairementSarapidUlyauoitplusdecent  Turcs  pafEgersdedas 
S,ftre  nauire.qui  alloyent  de  Conftantinoplecn  Egypte  :  Car  le 
voyageeftbeaucoupplusbrefpatmetque^rtene.commefe-  . 

ronsapparoiftreparcyapres.Chafquepaflagereftqu.ttedeten 
pafrao-e.payantvnducatpourvoiaare.  L«marchadsd Egypte, 
ivan^vendu  leut  matchandife  a  Conftantinopic,ne  voulans  s  en 
retourner  vuides  en  leur  pays,  enleuent  grand  nombre  de  paOa- 
«ers  pour  mener  au  Caire,&  autres  lieux  i-Egyptc.Noftre  mai- 
re eftoit  ancré  au  port  d'Abydus,  attendant  que  tout  noftre  cas 
fuftapprefté.Cependantnouspourmenanslc  long  de  quelques 
petitsruùTeauxfalez, trouuafmes vneefpecede ferpent terreftre  *pr  *~ 
^ifcnourriftcommunementtout  leiourenk  mer   tou«,nfi^jJ- 
quelacouleuurecnreaudoUcc:nuis1lv1entdormlrianulafur  'J Jt^ 

la  tetre.il  eft  quafi  de  couleurrouge.mais  il  y  a-d  autres  couleurs 
âcgrismcâccspauiiy. 


îjS  PREMIER     iIVRE      DES     SINGVLA. 

Qupnpeut  voir  les  mines  de  Trqye  clairement  dsLmcr* 

Chapitre        v. 
£g  O  v  s  partifmes  des  chafteaux  au  matin  aucc  bon  venc 
1 1  fauorablc  3  que  les  mariniers  nomment  Maiftre  tre- 
âK>  monfane,&commençafmcsàfordrhorsdudeftroiâ: 
'  de  rHdîcfpont,&  entrer  en  plaine  campagne  de  mer 
Méditerranée,  qui  n  eu;  qua  trois  lieues  d'Abydus ,  laifFafmes  le 
-cheronefè  à  gauche,  dedans  lequel  eftvn  promontoire  que  les 
anciens  appeiloyentMaftu{îa,ouefl:oyent  le  tombeau  d'Hecuba, 
xY&  £im*  ^^{èpulchrcdeP.roec.(3aus.  Peu  après  Fiflc  d'Imbros ,  quieft 
h-os.  .quelque peu  moindre quecclle de  Lefbos ,  mais  Tes  montagnes 

Lesbùs.       &>nï  plu*  Sauces  :  nous  la  lakTafmes  à.  cofté  dextre  :  Car  elle  cft 
fore  près  du  riuage  de  Thrace.  Puis  quand  nous  eufmcs  aduancé 
^Iusoucre.nous  eftions  afTez  foingen  la  mer ,  quand  comméça£- 
-mesàveoir  Fifle  de  Lemnos,  qui  eft  plus  auant que  celle  dlm- 
brosi laquellepouec&rebafFe^  &T n auoir  nulles  hautes  monta- 
tgnes^ne  nous  apparouToit  que  bien  peu.  Entrans  plus  auant  en  la 
=mer  Méditerranée  auec  bon  vent  maiftral ,  nous  tenions  no- 
ftre  chemin  plus  près  de  terre  du  coûc  d'Afieà  main  feneftre. 
Car  û  noaseuéjonsprkis  ieenemin  à  dextre,nous  eu  fiions  iaillé 
lechemm  du  Canal  dcCàio,ou  il  falloit  aller.  Approchans  à  la 
poin&e  de  terreferme,appellée  Catio  de  Genillari^anciennemec 
nommée  Sigseum ,  nous  vifmes  d'aflez  près  les  ruines  d'vn  chap- 
iteau ancknnement  nommé  CaputGymncfèum,  qui  môftrent 
<Um  âe      qu'il  eft  fort  antique,  lequel  nous  apperceufmcs  dallez  loi  ng:  car 
Gtnifcri.    il-eâenleué<lcCusvn  promontoire.  La  muraille  de  cechafteau. 
sigmm.      cftoitfaite  de  brique^  de  fort  ciment.  Il  y  a  leans  de  trefgrandes 
CAfut  Gym*  cifternes  y  &  de  grandes  caucs,  lefquelles  fufmcs  vcoir  lors  quai- 
atfwm.      lafmcs  àTroye  :  noftrc  nauire  pafTa  entre  l'ifle  de  Tenedo ,  que 
nous  laiCafmes  à  main  dcxtre,&  les  ruines  de  Troye,quc  nous  a- 
uions  à  main  fcneftre. 


OBSERVEES     PAUL     P.    BELOK.  rjp . 

Vefcription  des  ruines  de Troye.  Chapitre  vu 

»  V  a  n  t  aux  ruines  deTroye,on  les  voie  d'âfïcz  loing:  I^nes  & 
\  Caries  murailles  delà  ville  font  en  queiquesendroits  Ttaïes.. 
1  encorestoutes droides.  Et  pource que  les  auons efté 

?  voir  par  terre*  en  dirôs  ce  qu  oen  voit  de  refte:&  fuy- 

raanc  noitrenauigation  dirons  aufll  ce  qu'on  en  voie  de  la  mer.- 
Qm  y  voudroit  aller  de  Conftantinople  par  mer,îl  faudroit  def- 
cendreà  Abydusaudeftroi&deschafteanx:  Caril  n'y a que de-  ' Montld^ 
mreioumee.  Et  après  les  auoir  veues ,  pour  veok  de  beaux  pays,  ^  0iym*c 
il  faudroit  retourner  par  deffus  le  mont  Ida,  en  Phrygie  r  &  aulîl  m  zhngie. 
par  demis  lemont  Olympe  &  Orminium/ayuantle  grand  che-  Lem&»t  se*- 
min  ordinaire  qui  va  en  la  ville  de  Bourfe.  Le  monc  Olympe  cft  »**> 
quaû  auffi  haut  que  le  mont  Senis  :  toutesfoisil  nreft  de  chemin 
tant  difficile.  Et  qui  ne  voudroic  paner  par  ces  lieux  îà^on pour- 
roit  prendre  la  voye  de  Galipoli,  &  retourner  à  Conftantinople  Dej^i?tiùnf 
par  terre  ferme  fur  le  nuage  de  Thrace.  Troyc  cft  fituee  en  pen-  ^  mioei  & 
dac  fur  vn  couftau,qui  apparoiil  bié  acier  de  la  mer.  Car  aufli  eft  Troyc. 
elle  le  long  du  riuage.  Eftâs  entre  Tenedor&  les  ruines  de  Troyc,  CamfiaB^ 
paflfafmes  droid  entre  deux  poindes  :  l'vne  cft  au  bas  par  delà  ^"* 
Troyc,deuât  Me  de  Metelinjaquelle  poinde  ils  nomec  mainte-  ^ri^Hm' 
nat  Cauo  fanda Maria,&  anciennemk  Iarganû.  L'autre  eftà  la 
fin  de  Tcnedo.  Entre  lefqucllcs  poindes  noftre  vaiûêan  fetrou- 
ua  fans  venr,  Nous  veoy  ons  des  arches  qui  font  encores  debout, 
fabriquées  à  l'antique  >  au  pied  d'vne  petite  montagne  ou  pro- 
montoire, faides  de  ciment  &  de  brique-   Veo-yons  auiîi  les 
ruines  des  deux  chafteaux  du  promontoire  au  riuage*  de  la-mer, 
plus  bas  au  deflous  ,  qui  eftoyentenceinds  dedans  la  ville-  Les 
habitans  qui  font  entour  Troye  ,  font  partie  Grecs  ,  partie 
Turcs,  partie  Arabes  :  tous  lefquels  nomment  le  territoire  vul- 
gairement Troada.  Ce  n'a  eflé  fans  raifon  que  la-magniocen-  ttomIL. 
ce  &'  grandeur  de  la  ville  de  Troye  ,  cftant  iî  grande.qu  elle 
cil ,  a  etëé  célébrée  des  Poètes  anciens.   Les  ruines  des  baiti- 
mens  qu'on  y  voit  encores  pour  le  iourd'huy  ,  fonc  û  admira- 
bles à  regarder  r  que  bonnement  on  ne  pourvoit  exprimer  leur 
grandeur  ûnon  par  beaucoup  de  langage.  L  entour  des  murail-r 
tesxcndfuâi&ai  teimoigpage  de  la  grâdeur  dela-vilie:lcfquelic£. 


-ISo  PREMIER.     LIVRE     DES      SINGVX.Â. 

cftoyent  faites  de  larges  pierres,rarcs,  &  fort  fpongieufes ,  noira- 

ftres,durcs,taillccscnformeqaarree,  qu'on  droit  dés  pierreries 

^r0St        d'vn  prochain  promontoîre,nommc  Aflbs.  Dont  le  fiïcpeftrc  a 

Floi\y€fî*   efte  anciennement  nommé  FÎos  ^4jix  Pctr*.  On  voit  encor  les 

Petr*.         tours  ruinées,  qui  cftoycnt  es  mefmes  murailles.  II  ne  faut  pas 

adioufter  foy  à  ceux  qui  difent  que  toutes  les  ruines  font  démo* 

lies.  Les  fondemens  âcs  murailles  do  circuit  de  la  viîleapparôif- 

Erreur  de  ^  fent  cncores,qui  font  renforcez  en  quelques  endroids  de  pilliers 

.■cmxya  fe*  &cfperons  larges  de  deux  toifes.  Nous  fufmes  quatre  heures  à 

setfueTroye  j»  nt  ur cancàpied  ou  acheual.L'on  v  voit  des  grandes  fepultu- 

neaitefîecfl         .        »      .       r        n  >  r  ■     Kv       •       r 

^fce  res  de  marbre  hors  le  circuit  des  murailles,  raites  a  1  antique,  tou- 

^etndchres    tes  d'vne  pierrc,en  manière  d'vn  grand  coffre,  d5t  les  couuercles 
Mmarbrede  font  par  tout  entiers  :  îefquels  font  au  defcouuert  fur  les  plus 
Troye.         grands  chemins  paflans.  Les  ruines  des  deux  fufditschafteaux, 
Des  ch&*  faiCs  de  belle  pierre  de  marbre,{ê  voyent  encor  en  leur  entier ,  &: 
fiemxdîUo.  nQ  j^  fçaurojt  on  rUîner  &  abolir  du  tout.Celuy  qui  eft  au  riuagc 
«leJa  mer  au  plus  bas  lieu  de  Troyc  eft  eftendu  en  longueur  en 
manière  de  deux  plates  formes;  duquel  les  murailles  font  mer* 
:  qaetees  de  marbre  rouge  Se  blanc.  L'autre  chafteau  eft  au  fbm- 
met  delà colline  de  l'autre  çofté  de  la  muraille  dedans  lentour 
de  la  ville.  De  ce  haut  chafteau  regardant  contrebas,  on  voit 
.quafi  toute  la  ville, Se  aufïi  quafi  toute  la  plaine  càpagne  :  duquel 
'*  Ifo  les  murs  fantqueîque  peu  aduancez  hors  lecircuitdes  murailles. 
phmd  àe  *  ^Prcs  qù'eufmcs  entournéles  ruines  des  murailles,  commençaf- 
troye.        mes  à  regarder  le  dedans  de  la  villc,qui  ne  font  que  ruines  confu- 
fes:  entre  lefquclîes  on  y  voit  vnc  grande  bazede  plateforme 
quarree,  faire  de  pierre  taillée  de  trefgrande  eftoffei  Se  croyons 
auoireftë  le  pied  de  quelque  haut  phanal  oulanterne,  quimon^ 
ftroic  lefeu  lanuicr  aux  nauigans.  D  auanragciî y  a  pluûcurs ci- 
fternes  en  leur  cntier,pu  l'eau  de  la  pi uyc  eftoit  refer  uce,  d'autant 
qu'il  n  y  auoit  en  tout  ce  territoire ,  que  bien  peu  d  eau  de  fontai- 
ne, fînon  vne  qui  eft  là  bas  auprès  du  port.  L'on  voit  encores  les 
ruines  des  "Eglifès  qui  furent  baftics  du  temps  que  les  Chreftiens 
yhabiterentjdefqueîîes  grandes  parties  des  murailles  font  de* 
Troye  a  #5  meurt:es  debout:  Se  entre  elles  on  voitdcs  croix  entaillées  dedans 
flufiewrsfoîs  feSp£errcS($e  marbre.  £ilcâefté  tant  de  fois  ruinée,  qu'il  n'y  eft 
demeure  cdiflcecntien  au-ffi  eft  maintenat  du  tout  dcshabiree,&: 
a!y  apsrfenns  qui^y  pûiSetcnbjà  caufe  dc4a-fterilitc.de  la-terrc, 


&  la  grande  incommodité  de  l'eau.  Il  d  y  avillage  ne  maifona 
plus  d'vnc  lieue  à  la  ronde ,  tant  lepayseft  fterile  &  fablpnneux. 
il  y  croift  peu  d  arbres  fruidicrs.Ceux  d'Efculus  font  d'aflez  grad  ^yes  ^ 
reuenu  pour  lctcrritoireidefquelzleshabitans  du  contour  cueil-  Efcui^m 
Ientlesgrands  auec  leurs  coques eftans en cores tendres  ,  &les 
-abatent  auec  desperches  ,  à  la  façon  de  ceux  qui  abarét  des  noix: 
puis  ilz  les  laifTcntdefeichcrdcffous  l'arbre,  nayans  peur  que  les. 
.pourceaux  les  leurmangét ,  d'autat  qu'ils  n'en  nourriffent  point.  ^ 

Et  quand  ils  font  fecs ,  ils  les  amaffent ,  &  les  portent  vendre  par       ^^ 
fâchées  furies  chameauxaux  prochaines  villes  ,commc  a  Bout-  ^^/^ 
fc,ou  à  Galipoli.  Ils en préparent  les  ciiirs,coutainfi  que  nous  les  ^w. 
tannons  d  efeorec  battue ,  &  en  Egypte  àcs  fxliques  d'Acacia ,  en  s&fiesfo 
Italie  des  fueiilcs  deMyrthcs,&:  en  Grèce  de  Sumactu  En  cefte^w. 
grade  efpacc  de  la  fufdi&e  ruine,il  y  a  vnc  belle  campagne  8c  fpa- 
cieufe ,  où  maintenanx  on  feme  du  Cotton ,  U  de  la  Sefamc ,  qui  ^ ;&  ^ 
eft  vneherbe  de  grad  reuenu:car  de  la  Sefameils  font  leurs  huùV  ^^ 
lesen Turquie.Ouireplusilsy femcntvneefpecedeMclons,qui  J 
croiffent  fans  cftre  arroufez,&:  font  de  telle  nature ,  qu'ils  fe  peu- 
vent garder  rout  vn  hyucr  (ans  fc  corrompre  aucunement.-  Et 
toutesfois  ils  font  vrais  Melons ,  qu'onpeut  bien  manger  àiafar 
con  des  autres  dés  l'heure  qu'on  les  a  oftez  de  leur  plantcrmais  ils 
fontenccdifFerens,qu*ilsfeconferuet  tout  rhyuer,  fcquafi  tout 
fefté  enfuyuant.   Et  pour  monftrer  que  ce  font  vrais  Melons, 
ofonsafTeurer  que  Fherbe  cftde  femblable  %on,&:  le  gouft  n  eu 
guercs  différent  à  ceux  que  nous  auons  pardeçà  :  auffi  en  ont  ils 
•bien  des  noftres.  Ils  y  femét  vne  autre  forte  de  fxuid»  qui  de  nom 
Arabe  cft  appelle  Copous ,  commun  par  toute  Turquie  &  Grcr  aq»m. 
-ceimais  les  Grecs  qui  fuy  uen  t  l'antiqu  ité,le  nomment  Chimoni-  cbwmubs 
cha ,  les  Latins  d  vnc  certaine  appellation  Greque,  Anguria, les  Ç^J*' 
Arabes,  Napeca.Cefte  di&ion  Anguria  luyeft donnée impro*     * 
prement  :  car  Anguria n'eft  autre  chofeûnon  le  Cocombre  que 
nous  cognoiffons.  Lonvoitde  graadsColoiTes  dedans Troye^ 
couchez  par  terre,  taillez  à  l'antique ,  &  y  a  vn  eadcoiâ  aïTez  près 
du  Chaftea^de  la  ruer  ^  ou  il  y  a  vn  moult  grad  amas  de  marbres: 
&  croyons  que  quelqu'vn  lesy  ait  mis  par  cutioiité:  car  cela  ne 
s'eft  peu  £airc  ûnon  par  grande  defpenie.Encor  ya  quelques  por- 
tes  au  circuit  de  la  muraille ,  qui  pourie  iourd'huy  iont  prcfques 
entières  ,  SqurmdplcmcaïLvne  qui  efl  Eidacollincau  co&é  da 

Z  iij 


5^  PREMIER     tlVUl    DIS     SINGVLA. 

m&  f/\  ^z^em  ?*r  ^quelle  15  fortoit  allâten  la  plaine.Aum  y  a  vn  î'og 
'ûto  e       ^râS^  m«r^il^  fort  hautcveaforcee  defperons  par  derrière ,  qui 
*     *      fort  hors  du  circuit, &  s'en  va  ioignant  la  campagne  vers  le  monc 
Ida.  L'autre  portail  qui  eftoitouuertdti  cofté  des  prairies,&qui 
defeendoi  t_vers  les  baings  chauds ,  eft  encore  entier.  Les  autres 
portes  qui  fons du  cofté  de  la, marine  ,  {ont  grandement  ruinées, 
&  n'y  a  que  bien  peu  de  veftiges*.  Nous  trouuafmcs  vn  pilier  de 
marbre  blanc  fiche  en  terre,  mais  au  demeurant  à  demi  couché, 
quiauoitcefte  infeription  ainfi  ordonnée  ,  tantd  vn  cofté  que 
,  d'autre  :  Bnperœtor  CœftrMav.  ^éuy.  ^éntoninus  Piu*Felix  Pamcus 
.    M*ximu%Germanicus  Mœximus*  Tnh*P.ulmp+Po.  xv.Maxïm&s  Imp. 
Cof,  in  mpmuimiam^Jïam per  viam  (?  flumina  pontïbm  Çubiugmuiu 
.        Toutcsieiquelles  parolles  cftoyentd-vn  cofté  du  pilier,tatcon^ 
-fii  mees  d'antûju  ité,qu  a  peine  les  pouuions  lire .  De  l'autre  cofté 
du  piliereftoyent  eferites  autres  parolles,  defqueUesle  commen- 
cementeft ,  Imp.  C<efer*s4ujrm  J^ioclemno  régnante.  Nous  n'en  auôs 
peu  lire  autre chofe. 
ganêw.         Quant  c&  des  fleuues  de  Simois  &  Xan  thus,  tant  célébrez  par 
simok  '     "ks  ^°ctes,qui  arr-oufoyentles  prairies  de  Troye,n*en  rapportons 
iautreaoiittelie,âîîô  qccfbcKfî  petits ruiûelets,ou à  peine ie  peut 
nourrir:ne  Loche  ne  Veron  ^car  ils  font  en  eftéà  fèc  ,  &  en  hyuer 
:vne  Oye  à  grand'  peine  y  pourroit  elle  nager  dedans.  Si  auons  e£« 
meu  doute  fur  ces  fleuues,  cen*eft  pas  chofe  nouuclle  :  car  des  le 
fcmpsd'Àriftoteon  ae  le  fçauoit  trouuer.   £t  qu'il  ne  foit  vray, 
qu'on  life  le  doaxiefme  chapitre  du  tiers  liure  de  l'hiftoire,  en  ce> 
ftc  foïtciScamanderetkmamnis  flouas  reideve  ottes  credituriquamobrem 
^mtbumproSt&mmètQnuncupAtumc&Hùmero&M^ 
roefi  Àriitote  vouloir  dire  ^qu'Homère  a  prins  Scamander  pour 
Xamhus:carXantiHîseftàdire>rlauus.Soit  doc  mis  en  queftiorii 
àlçauoir  fi  Xanthus  Se  Scamandereft  vne  mefmc  chofe..  Le  che- 
min de  Troye  pour  aller  aux  baings  chauds  regarde  l'Occiden  t, 
Jk  a  Ion  le  vifage  vers  Fifte  de  Lcfbos,  qui  n'eft  pas  diftante  à  deux 
lieues  deJà.Tenedoen  eftauffi  fort  prés ,  tcllemét  qu'il  n'y  a  qu'à 
paftèr  le  Canal  d  entredeux.  Les  baings  naturellement  chauds, 
se  font  qu'àidemie  lieue  de  Troye:ou  ily  a  tant  de  fepu  lehres  fur 
le  chemin. ,  qu'il  en  eiè^ord^tellemenup'ilz  y  fontencores  plus 
fiequens ,  que  ceux  de  defïus  le  chemin  venant  de  Phiiippi  à  ia 
C^uâHc  LesiègukhKs  |èmb|eflteftre  des.Q:ecs-çax,ODy.vjoi$. 


OBSIB-VEÏ-S     ÏÀ&     t.    BïlOlf.  '*$ 

deslettres  Grcquescombien  qu'il  y  en  ait  aufli  des  Latins  com- 
me il  appmmr  les  lettres  Latines.  Eftans  plus  près  des  bamgs 
cbaudsTnous  veoyos  de  fumptueux  édifices  magnifiquemet  rail- 
lez à  l'antiqucîcn  l'vn  defquelz  on  lit, /«.'«o,  en  m  autre,  Mmir^ 
W.Ccbralqu'auonsditfortitducircuicdes.muraiUes.cfteiten- 

duenlongueur.lcquclnauonsfuyui  ÛnonentourTroye.  lou- 
tesfoisnozguidesdifoyëtquileaiongdevingtmil.  Quoyq"11 
cnfoit.c'eftquelquechofedegrand  ,  &croyons  que  cefto.tvr> 

fort  qui  teno.tcontreterrc  ferme.  Il  s'eftend  deuersle  coftedu 
rnondda.quin'eftguerequadeuxoutroisJicuesdeTroyc.A^  ^ ^ 
fi  difoYcntqu''»  ne  Ptcnoit  fin  finon  augoulphe  de  Satehe.  V  ray  ^fc 
eft  qu'il  ne  continue  pas  en  fa  hauteur.Si  qu'on  le  voit  abatu  a  de- 
mYquartdclieucdeTroye:maisqueptusloingdclaviletiauiU 

haut  cômeileft  prcsdeTroyc.Ces  baings  chaudsont  trois  four, 
ces  falees  ,  dequoyflrvpourroitbicnfaùedufel.commeonfaïc 
desautres fourcés falees.  Laquelle  cbofclon  peut  bien cognoi- 
ftre  parleurs  ruifTcaux.lefquelz  leSolcil  renden  efte  cousconge- 
lezdefel.Ccfontceux  dont  Pline  a  parlé  au  liurç  trente-ûxiel- 
încchapitrefixicfmcouil  dit:^#rx0i«<&:carlelieuouilzfont  u„fr. 
£cuczeftnomméZ^Xesvoutesrabriqueesalant,quc  Eûtes 
deciment&jdebrique/ontencorcdebour.alvnedeiquellesoa     .. 
nefebaignepointicarlamuraillcacomblélafontaine  :  maisya 
vne  petite  maifon  de  léger  édifice  à l'vnc  des  fources  ,  ou  Ion  fe 
baigne  La  M&âc  vouten'eft  pasedificefi  fumptueux  ,  qu  elt 
celuy  qu'on  voités  baingsdu  mont  Taurus. 

VttifledeMetelm^&duPromontûtre.      Chapitre    vu. 

>  Ourretourneraupropasquauiôslaiue,&; repren- 
dre les  arres  de  noftre  nauigabon ,  il  faut  entendre 
'  quenouseftionscnlamcràroppofirc  de  latuiat-  CMpmBi 
\  de  poinde ,  appellee  Cauo  fancta  Maria ,  ancien-  i,urU. 
£ykVr?W  nement  Syaeum.ou  nous  veoyos  l'endroit  des  rui- 
nlXnchaltcauancicn.quccroyonseftreçeluyd'Ach.lles.Et 

de  fait  ony  voit  encores  vne  grofe  butte  de  terre  en  manière 
d'vncpetitcmôtagnc.quipoflibleeftletombeaudAch.nes.que 

ceuxdeMetelin  feirent  fairecn.fon  honneur. JNouspefofmes 
Strechcmiatoutceiour^unodepuisledeftroiadesChafteaux 

JU  ni) 


Vfn  de;  Me* 
tdùt,. 


MeteUn* 


Bouhourt. 
Crimnoîi. 

Mérite, 


Cb^fieaude 

Mctdln, 


9ft£  . 


lÈfy  SE-COIÎD     LIVRE     DES    SIN«^^A* 

iufqucs  àfoppofite  de  Me  de  Mçtelin  ;  car  le  vent  nous  pouîfôie 
lentement.  Lanuid  enfuyuant  fut  auflifans  vent  ne  pour  nous*, 
ne  contre  nous.Le  iour  d'après  noftre  nauire  eftoit  encor  vis  à  vis , 
du  Chafteau  de  la  ville  de  Mçtelin ,  qui  eftîa  plus  grade  vil  le  qui 
ioit  en  Hfte  de  Leibossde  laquelle  ville  tou  te  Me  a  prins  ce  nom; . 
Ellecft  habitée  de  Turcs.  Mais  les  habitans  de  la  campagne  qui, 
cultiuent  lescharaps  ôclcs  vignes, font  quafi  tous  Grecs.  Le  via 
dçMeteîin  entre  tous  autres  eft  bien  reçeu  àCônftantinople ,  & 
çftquafi  tout  clairet.  Et  à  ffn de  le  rendre  plus  coloré,  ilzfçauent 
omettre  de  la  (èmen ce  des  hiebles  ,  (èlonladoclrine  queiesluifs 
leur  ont  aprins.Les  autres  vins  qu'on  apporte  de  Chio ,  &  autres 
iâcs  Cyclades  à  Côftanunoplej.ne  font  pas  vendus  à  û  grand  pris,.., 
que  celuy  de  Mçtelin  ,  lequel  on  peut  difeerner  au  gouft  d'auec 
les  autres.MecelineftvneiflecontrePhrygie,  moult  fertile.  Elle 
nourrit  de  forts  Gheuaux5qui  font  bas&:  trappes.  Elle  eft  de  grad 
reuenu,  tant  de  formages  que  de  bons  fourmens.  Defquelzlon 
fait  moult  grande  quantité  de  deux  fortes  de  drogues  >  dont  les,. 
Turcs  fèfèruent  en  leurs  potages ,  qui  s'appellent  en  Ture.5Tvne. 
Trachana,&:  l'autre  Bbuhourrjquiontefté  anciennement  appel- 
leesCrimnon&Maza.  Les  Turcs  en  vient  pour  l'heure  présen- 
te, tant  en  paix  comme  en  guerrercomme  au  ai  faîfoyent  les  exer- 
cites  Romaines  de  Maza.  Nous  ne  fcifmes  pas  grand  ioumee,  6c 
eftionsài'oppofite  du  rocher  en  la  mer  Egée  entre  Chio  &  Te- 
nedorîequel  pource  qu'il  fèmble  à  je  voir  de  loing ,  à  vne  cheure, 
fèmblablement  toute  icellc  mera  prins  fbn  nom  de  ce  rocher: 
car  ce  que  les  Grecs  appellent  ^£ga  >  vaut  autant  à  dire  comme 
Gheure. 

Le  iour  diaprés  vn  vent  Grecà  la  quarte  de  Trcmontane  com- 
mença a  nous  fauorizet  :  U  pour  autant  qu'il  eftoit  lent ,  il  nous 
faifbit  feulement  coftoyer  I'ifle  de  Mçtelin^  que  nous  auions  à  fe-  .\ 
neftre.Nous  vepyos  fonChaûeau  de  bie  loing:car  il  auoit  efté  re- 
blanchi de nouueau5auffip^\'il,eftciïcuédeffus  vn  couftau.  Il  eft. 
ûtué  au  coftç de  YQcciàent,  regardant  lïfle  deTenedo.  Et  eft 
fait  à  la  mode  antique,^  par  confequent  neftmouk  fortXa  ville 
eft  près  du  port,qui  eft  tre£beau,&  grand  a  &  bien  feur  pour  tou- 
tes nauires.  Le  vent  ne  iè  changea  point  tout  le  iour,&eftions 
défia  aflfezjoing de  Meteîin,  quand  nous  veifmcs  I'ifle  de  Pfara> 
que  nous ki|ï^mesàço^^  prochaine 

du  C.auo„ 


OBSERVEES     PAR     P.   BELON..  1$$: 

Gatto  de  Maftichi,ou  fenoat  riflcn  t  des  Àfnesiauuagcs ,  différés 
à  eeax  qui  font  par  les  campagnes  d^Affyric  ,&  ne  petîucntviurc 
ailleurs:car  iîz  meurent  s*ilz  font  tranfportez  hors  de  Ià:&  laiflât- 
mes  de  plus  voir  CauoMaftichi,  ancieanemenrnomméPhana^- 
Car  le  mcfmc  vêt  quelque  peu  plus  gaillard  fe  renforça  fui  le  vef- 
pre,iequei  nous  redit  à  nuid  clofe  bié  près  de  Chio.Nous  paûaf- 
mes  vn  deftroid  en  ce  canal  de  Chio,qui  eft  encre  rifle  &  la  poin- 
etc  de  Magncfie,dont  nous  eftions  û  près,  que  nous  euïTions  pea- 
iecter  vne  pierre  de  noftre  nauire  iufques  en  terre.  Cefte  Magne- 
fie n'eft  pas  celle  qui  eft  arroufee  du  fleuuc  Mcander  en  Theflâlic  Magnifie.. 
ducofte  de  Grèce  à  quinze  mille  cfEphefus i  mais  eft  ioignanc 
"Chio:laquelie  nous  reftoic  à  noftre  main  gauche  ,&  Chio  à  dex- 
tre.L'vnc  des  montagnes  de  Chio  eftoit  moult  haute  au  décade  feUenmm^-, 
nous,qui  fe  nomme  Pellencum.  Nousarriuaimesà  Chio,  &  an- 
crafmes  au  canal  cnuiron  la nuid  en  attendant  leiour- 

SuecinBe  defeription  de  ce  quamns  obfèruéen  tijle  &  ville  de  £hm  & 
qu'on  ne  trouueh  Maftic3que  IL. 
Chapitre       viii. 

L  appert  par  les  iournees ,  qu  avions  cy  defïus  racom- 
;  ptees3qiul  ne  faut  que  deux  iours  de  bon  temps  à  vc- 
j  nir  des  Chaftcaux  de  l'Hclleipont  à  Chio  ;  car  nous  y  c&o  tr£té*~ 

[  ârriuafmeslc  troiûefmeiour  de  noftre  nauigation-Si  taire  a» 

toft  qu'il  fuft  iour,nous  defcendifmes  pour  aller  voir  la  vilky.qni  Twrc- 
eft  petite, fouec  au  riuagc  de  lamer,du  cofté  deNatoiie,  au  pied 
d  vne  montagne  expofeeau  leuant.  Elle  eft  tributaire  au  Turc, 
&  paye  doazemille  ducats  par  an;  pour  les  maintenir  en  leurs  li~ 
bertez.  Mais  ne  leur  eft  permis  de  k  fortifier^  Le  porteft petite 
maisaffez  bon  pour  Galères  Vautres  fortes  de  moindres  naui- 
*es,ô£  grandes  barques.  Les  plus  grands  nauires  trouucnt  lieu  à 
s*ancrcr  dedans  le  canal  fans  entrer  au  port.  La  feule  ifte  deiChio 
entre  toutes  les  autres  baille  le  Maftic ,  combien  que  Galien  au  ^*M-~ 
fccond  de  Glaucon  loue  le  Mâftic  Egyptien  :  toutefois  fçauons- 
que  pour  lciourd'huy  il  ay  en  a  qu'en  Chio5ou  les  arbres  de  Len-  ^j^oai*. 
Éfques y  font cuîtiuezaaiee  telle  diligence  ±  qtnl  n'y  fontmoin-        ^ 
dredefpence&  labeur  en  les  culnuant ,  que  font  noz  vignerons 
aux  vigQCS^Etd'auraiiE  afeuciarîrincip2ierichei&  des.babitarisîda.; 


Femmes  de 
Chio  font 
courtoifes. 


l%6  SECOND     II-TRE     DES      SÏKGVLA^ 

cefte  ifle,  eft  cônftitueeen  Maftic,  par  cela  ilz  oncen  grande  re- 
commandation de  prendre  grand  foingàaccouftrer  lerdic^s  ar- 
bres de  Lentiftjues.  Et  comme  les  Oliuiers  &  autres  ceîz  arbres 
frui&iers  veulent  eftreobferuez&raccouftrez  femblablemét  les 
Lentiiques  nedonneroyent  guère  degummequin'yprendroit 
foing ,  ainfl  qu'il  eft  requis.  Les  Lcntifques  qui  croulent  par  le 
Langucdoc,Prouence>&  Italie,font  tels  que  ceux  de  Chio,  tou- 
tesfois  ne  rendent  point  de  Maftic.il  y  a  vne  particulière  mine  de 
terre  verde  en  l'ifle  de  Chio ,  qui  reprefente  grandement  la  cou- 
leur du  verd<le  gris  ,  qu'on  nomme  par  Turquie  terre  de  Chio: . 
t-outesfois  ce  n'eft  cefte  cy  qu'on  entendoit  anciennement  pour 
TerracbU  Terra  Giiia  :  car  cefte  terre  verde  a  efté  nommée  par  Vitruue, 
rheodotiôn.  Thcodotion.  Ii  n'eft  autre  ville  ou  les  gens  foyent  plus  courtois, 
qu'ils  font  à  Chio.  Aufïï  cft  ce  le  lieu  de  la  meilleure  demeure 
que  (cachions  à  tioftre-gré,&:  ou  les  femmes  font  plus  courtoifes 
ôc  belles.  Elles  rendent  vn  infalîible  tefmoignage  de  leur  antique 
beauté  :  car  comme  vne  nymphe  en  lifte  de  Chio  furpafTantla 
neige  en  blancheur, fut  appellee  de  nom  Grec  Chione ,  c'eft  à  di- 
re neige ,  tout  ainfiTifle  prenant  le  no  de  la  nymphe  fut  furnom- 
mee  Chio. Les  homes  aum*  y  font  fort  amiables.  Et  combien  que 
elle foit  ifle  Greque,  tou tesfois  pour  la  plus  part  Ion  y  vit  à  la  Fra- 
ke,c  cft  à  direà  la  façon  Latine.Neantmoins  plufteurs  d'eux  font 
Grecs  ,  &  veulent  viurc  à  la  Greque  ,  tellement  qu'il  eft  loifïble  à 
vr>chacun  deehoiftr  teflire  telle  manière  de  viure  qu'il  vouldra. 
Lesobfcruations  des  deux  religion*  font  grandement  dirferen- 
tes.Car  ceux  qui  font  vrais  Grecs ,  sllz  voyent  quelcun  des  leurs 
manger  du  poiffon  ayant  fang  en  quarefme ,  ilz  s'en  fcandalize- 
ront  grandement.  Commettront  iîs)n'es  tu  pas  R  omeos  ï  vou- 
lansrntendre  par  cela,  comme  s'ils  demandoyent ,  Et  toy  n'es  ta 
pas  Grec  ?  Car  ceux  qui  fe  gouuernent  félon  la  façon  Greque ,  y 
font  nommez  Romei:&  ceux  qui  obeifTentà  l'Eglife  Latine,{ça- 
uoireftau  commendementdu  Pape,font  furnommez  Franki.Et 
d'autant  qu'il  cft  défendu  aux  Grecs  de  manger  poiiTon  qui  ait 
ingénieur  quarefme ,  ils  trouuent  mauuais  fi  vn  de  leur  reigle 
en  mange. La  religion  en  leur  nation  cft  fort  bien  obferuee.Mais 
ceux  de  Chio  eftans  partie  Genetxois  Sd  Italiens ,  partie  Grecs  Se 
tributaires  au  Tarc,viuent  en  toutes  libertez  accouftumecs  que 
is Turc  leur  mainxient.Auantquclafcigne.urie de  Ghia tombaft 


cornet. 


•     OBSERVEES    PAR   P.    BELOM.-  1S7 

fous  la  puuTancedu  Turc,elle  cftoit  abfolument  en  la  puiûance 
des  Gencuois.Mais  depuis  qu'elle  futau.Turc5ellenclcureft  pas 
tant  fubieerc  comme  elle  fouioitXar  elle  fait  maintenant  Ton  ré- 
giment &rgouuernement  à  fon  appétit,  &  non  pas  comme  ceux 
de  Gennes  veulent.  Comme  auffi  fait  la  feigneuriç  de  Ragoufc» 
qui  eft  femblablemcnt  tribu  taireau  Turc.  Leur  parler  eft  partie 
Grcc,partie  Italie  corrompu^ommceft  le  Geneuois  :  aufîi  leurs 
habilicmens&  manière  de  viure  fonràlaGcncuoife.  Lercuena 
du  Maftic  decefte  ifle  eft  ilgrand,qullscn  baillent  au  Turcûxxur  %euenudn,- 
la  Comme  de  quatre  ou  cinq  mille  ducats  par  an,endeductlQnde  Mâftk, 
la  fomme  de  leur  trîbu t  v  &  luy  vendent  le  quintal  au  pris  décent 
&  cinq  ducats.La  refte  ilsla  referuent  pour  eux.  Les  marchands 
François  voyas  qui!  eft  toufiours  à  vn  pris^enfent  &  dient  com- 
munément que  quand  ilz  en  ont  recueilli  vnc  certaine.quantité^ 
ils  en  iecten  t  la  relie  .Mais  cela  eft;  faux  :  car  .comme  nous  auons 
dit,  ils  font  grandes  defpenfes  à  accoutrer  &  entretenir  lcs'Len- 
tifques.Mais  pource  qivilz  en  deliurét  au  Turc  pour  quatre  mil-  - 
le  ducats  par  chacun  an,feroit  leur  ruine  s'ilz  haulfoyét  ou  diini- 
mioyem  Con  pris.  Apres  que  le  vent  Auftral  qui  auoit  efte  quel- 
que temps  contraire ,  fut  cefle ,  nous  feiûnes  voile,  partifmes  de  - 
Chio,&nauigafmesauec  vent  Grec  affez  bon>cotinuansnoftre 
chemin  vers  Alexandrie.  La  première  ifle  que  nou&aduifafmes 
de  loing,fut  Icarie,qui  eft  maintenat  nommée  Nicarie^que  nous  îc£Jie~. 
laifTafmes  à  cofté  dextre:&ne  fufmes  gueres  fur  merquenous  ne  *iC£rie* 
veiûtons  lifle  de  Samos3qui  nous  apparoiffoiede  bien  loing:Car  S£m&^ 
il  y  a  de  moult  haultes  montagnes  en  icelie.  C  eft  vne  petite  ifle 
dureflbrtdela  feigneuricdeChio  ,  qui  n  eft  pas- large  >  maiseft 
eftendue  enlongucu  r-Eile  n'a  guercs  haucesmontagncs,auûi  n'a 
gueresde  bois ,  mais  il  y  croift  beaucoup  de  bled,  &  bonspaftu- 
rages  pour  Brebis  ,  dont  ilz  font  à  force  formages.   Cefteiflca 
bons  ports  :  &  n'eftoit  la  peur  des  Courfaires ,  elle  (  commeauiE 
pkifieurs  autres  iflettes  deshabiteesjferoitredue  mieux  culciuee. 
Car^uandle  moindre  Couriaire  de  mer  y  y  ientjfaiiant  quelque  : 
.peudeifort  fut  eux^ils les  prennent  efclaues;&  les  metcçcçaGa-  - 
Jere  par  force.  Quelque  peu  plusauant  en  la  mer  nous- veoyons^- 
ï ifledlosentre  Lcarie  &  Naxic>cn  laquelle  on  dit  Homère  ^ok^!^^^ 
<3ttK.ço£buclyv 


s8S 


SECOND     LIVRE     DES     SIN^VLA* 


Veîisle  de  Samos. 


Chapitre    ix. 


Sjwvh. 


Cereeàui 
mms. 


iCoitrfaire. 


fhtiC 


p0o: 


'lue  de  Samos  encor  qu  elle  foie  grande,  toutesfois 
elle  eft  maintenant  quaû  deshabicee.  Oeft  grand 
chofcqu'vne  ifle  comme  Samos  ,  qui  a  cinq  cens 
quatre  vingt  huiâ:  milles  de  tour  ?  doiuc  refter  dc- 
ji^^^^w^  &rcc> veu mefmement  qu'elle  fuft  anciennement  fi 
célébrée  &  puiflânte,  qu'elle  faifoit  tefte  à  la  force  des  Atheniés, 
La  crain&edes  pirates  fait  qu'elle  foie  deshabicee,  en-forte  que 
înaintenantiin'yapasvn  feul village  ,  &.parconfcqucncilny  a 
point  debeftial.Elie  eft  plus  ronde  que  longue  ou  large:&  eft  te- 
parée  delà  terre  d'  Aile  d*  vn  feul  Canal,qui  n  eft  gueres  large.  La 
partiede  fiflequi  regarde  le  Septentrion  ,  &  l'Occident,  a  vne 
moukhaulte  montagne  detrefapres  rochers ,  laquelle  _monta- 
gnefutnommee  de  nom  propre,  Cercecius:&  font  lefdids  ro- 
chers quaftinaccembles.  Nous  auions  vn  marinier  Grec  en  no- 
ftrcnauire,quiauoitefté  parl'iûe  de  Samos  ,  qui  difoityauoir 
veu plufieursruiiîeaiïx:car nous  nela.veoyos  que  de  lamenvray 
eft  que  n'en  eftions  guercloing.Samos  eft  grandement  abondan- 
te en  bois  de  moult  haute  fuftaye,dont  les  Courfaires  en  bie  peu 
<Ie  temps fepeuuent  armer  de  fuftes,pour  aller  piller  &  courir 
iurlamer. 

®ifcounfourdffimrciue>eeft  que  Cour  faire,         Chapitre,     x. 

l  AispourcequeccmotdeCourfàire  n  eft  bien en- 
)  tédu  es  régions  Mcditcrranees,  &:  que  nousfom, 
{  mes trouuez entre  leurs  rnains^  nous  en  voulons 
\  maintenant  donner  l'intelligence.  Ccfttout  vn 
^^^^  de  dire  Courfaire ,  ou  Pirate  de  mer.  Et  pour  dé- 
clarer en  peu  de  parolles  qui  le  maintient  en  eftre,  &  dont  il  pred 
fon  commencement ,  il  nous  faut  prefuppoier  que  trois  ou  qua- 
tre hommes  duidsàla  marine  ,&  hardis  fe  mettent  al'aduentu- 
xe,qui  des  le  premier  commencement  font  panures,  n'ayans  que 
quelque  petite  barque  ou  frégate  ,  ou  quelque  brigantin  mal 
equippémiais  au  refte  ont  vne  boete  de  quadran  à  nauiger,  nom- 
mee  leBufïblo ,  qui  eft  le  quadran  de  marine  :  U  ont  aufli  quel- 


OBSERVEES     9X%'V.    BELOK.  *$9 

«uepcu ^appareil de guerrte,  fçauoircft, quelques  armes  legie- 
Liourcombatre  de  plus  loing.  Pondeur viurei Isontvn  fac 
defarine,  &  quelque  peu  de  bifeuit,  vn  bouc  d'huile,  du  miel, 
quelques  liaecs  d'aux  &  oignos,vn  peu  de  fel,  qui  eft  pour  la  pro- 
uifion  dvn  mois.  Apres  que  cela  eft  fait,  ils  fe  mettent  al'auan-   Fmefdr. 
turc,  vogans  celle  part  ou  prétendent  du  profit.  Ec  file  vendes  Coures. 
contrainade  fe  tenir  en  porc,  ils  tireront  leur  barque  en  terre, 
qu  ils  couuriront  de  rameaux  d'arbres ,  Se  tailleront  du  bois  aucc 
leurs  coignees,&  allumeront  du  feu ,  auecleur  fufil ,  &  lareront 
vn  tourteau  de  leur  farine,  qu'ils  cuiront  à  la  mefme  manière  que 
les  foldats  Romains  faifoyent  le  temps  paflfé  en  guerre ,  qui  por- 
toventvnctuiïeoulamedecuyure,oudefcrbatu,quils  appuy- 
oyentdeffus  deux  pierrcs,puis  faifoyent  du  feu  dcûous,  ayans  B**h*te 
mifeia  Paftcdcflus:   &  comme  la  lame  s'efchaurfoii : ,  ainli^  & 
donnoit  la  chaleur  à  la  pafte,  dont  en  cuifoyent  du  pain.  Ce  pen- 
dant ayans  ainfi  fait  leurs  appareils,  il  ne  peut  eftre  qu'en  vn  mois 
ou  deux  ils  ne  facent  quelque  bon  butin.  Et  fa  fortune  leur  per- 
met qu'ils  punTenc  trouuervne  bonne  rencontre  ,  ils  feront  en 
peu  de  temps  grandement  foulagcz.  Quoy  qui!  en  foit  ils  nejpcu- 
uentgâignerchofetantfoitellepetite, qu'elle  nelesefleue  Diea 
haut.  Etpourcequcc'eft  vne  pefte  fi  contagieufe  qu  Reprend 
en  vn  iour  d'Aile  en  Afrique,il  n  y  a  celuy  qui  ne  la  craigne  gran- 
dement ,  &  s  en  donne  de  garde.  Ccft  vn  mal  public ,  qui  rend 
les  gens  de  terre  ferme  contrainds  les  efpier  en  la  mer ,  &  ics  oo- 
feruereiilamanierequedirons:Ceft,quiln-yafommetdemo- 

tagnes  es  ifles  de  la  mer,ou  aux  riuages  de  terre  ferme ,  ou  l'on  ne 
mette  des  gardes  le  long  du  iour,  quifontïe  guet,efpianssils 
verront  de  tels  Courfaires  nauigans  par  la  mer.  Et  -s  ils  voyent 
quelque  vaifTeau,  ils  iugeront  &  cognoiftront  facilement  la  raço 
du  vaiffeau ,  s'il  eft  de  Courfaire  ou  non  :  car  ils  ne  peuucnt  tenir 
fi  bonne  mine  qu'on  ne  fedeffie  deux.  Par  cela  ils  vont .  counours  ^^ 
fc  cachas  &  muflàns  cà&  labour  prendre  quelque  chofe  a  la  del-  defeomnr 
paurucuc.  Si  les  efpiôs  ont  veu  quelques  tels  vaiffeaux  en  mer,ils  fa  Co*j*> 
lumentdufeuauecleurfufil.Maisdautantquelefeuncfepeut^ 
voir  de  iour,ils  ont  expreffement  apprefté  quelque  chofe  qui  red 
grade  fumée.  Et  s'ils  font  pluficurs  vaiffeaux,ils  tons  de  la  rumec 
endiuersendroias:  car  pluralité  de  fumée  %ni£e  qu'ils  voyent 
diuets  vaiiTeaux.  Partclfignc  tous  les  habitons  de,  prochains 

AA  «j 


190  PREMIER     LIVRE     DES     SJNGVLA. 

ports  en  fontaduertis,&:  s'en  dôhent  de  garde.  Et  les  autres  guet- 
teurs qui  font  defïus  les  autres  montagnes ,  encor  qu'ils  n'ayent 
veu  que  la  fumée ,  neantmoins  ne  laifteront  pourtant  de  faire  le 
fembîable.  Et  quand  viendra  fur  le  faillir  du  iour,ils  font  du  feu 
clair  5  qu'vn  chacun  regarde.  Car  la  couftume  des  mariniers  eft 
telle,que  quandle  iour  commence  à  s'obfcurcir  au  foir  y  tous  re- 
gardent  vers  les  lieux  ou  Ton  fait  le  guet,  fçachans  que  les  gardes 
font  tous  lesfoirs  vn  feu  clair  en  figne  de  feureté  :  &  appellent 
cela,que  la  cofte  ou  bien  que  la  mer  eft  nette:  comme  au  contrai- 
re quand  ils  voyentpîufieursfeux ,  que  la  cofte  eft  trouble.  Et  fi 
la  garde  de  la  montagne  a  fait  deux  feux ,  cela  fignifie  qu'il  a  veu 
deux  vaiflèaux  ennemis  :1e  fembîable  eft  de  trois,  de  quatre,  Se 
ainfi  des  autres.  Mais  s'il  en  monftre  pluficurs  fans  nombre,  tout 
ainfi  les  vaifteaux  qu'il  aura  veu,  feront  tant  qu'il  ne  les  a  feeu  cô- 
jHer..Cc  figne  de  feu  fe  fait  autant  en  tem ps  de  paix  qu'en  guerre, 
cntousendroict's.  Ceft  vne  chofe  d'auffi  bonne  inuennon  que 
nulîeautre  qui  ait  iatnais  eftétrouuce  par  utilité  publique,.  Car 
il  ne  faut  qu'vn  efpion  à  vne  garde  pour  en  aduertir  tout  vn  pays: 
quin  cftpas  inuention  nouuelle.  Et  les  gardes  fe  refpondans  de 
fvn  à  l'autre,  font  tellement  que  ceiuy  qui  en  eft  bien  l'oing ,  ad- 
uertitaufli  bien  celuy  qui  eft  encor  plus  loing,  comme  fi  luy  mef- 
melauoit  veu:  &  fel  entrefont  à  fçauoir  en  mefmc  heure  d'vn 
mefme  iour  à  plus  de  cent  cinquante  lieues  loing.  Herodo- 
t,e  recite  que  les  habitans  de  Schiro  peurent  aduertir  les  Grecs 
de  trois  galères  que  Xerxes  leur  auoit  prinfes  déplus  de  trente 
lieues  loing.  Telle  manière  de  feux  eft  tout  ainfi  obferuee  en  An- 
gîeterre,principaîement  en  temps  de  guerrc,comme  es  iûes  de  la 
mer  Egée,  Car  a  vn  feul  figne  de  feu ,  qu  ils  font  fur  la  prochaine 
montagne ,  ils  amailèront  toutes  les  contrées  voifines  en  armes 
•mm^mes  m  mojns  dc  trois  heures,&  chacune  fçachant  ou  il  fe  faut  rendre 
'sCourjai*  ^^  repoulfcr  les  ennemis,  ne  les  laifife  predre  terre  en  leur  pays. 
Toutes  îefqûelles  choies  les  Courfaires  ne  ignorent  pas  ;  Aufil 
vont  ils  communément  de  nuid,  &  prennent  terre  quelque  part 
ou  ils  fçauront  le.  lieu  eftre  bon  pour  eux,à  fin  de  couurit  leur  fré- 
gate de  rameaux.  Pendant  que  leur  frégate  eft  tirée  à  fec,  ont  loi- 
fir  de  guetter  quelqu'vn  qui  viendra  des  villages/oit  pour  garder 
le  beftial,ou  pour  aller  à  l'eau,ou  faire  quelque  autre  négoce  :  le- 
quel ils  prendront  JSg  mettront  à  la  chaine  pour  fèruir  à  ,v  oguer*. 


OBSERVEES     PAR     P.     BÏLOK.    '    '  I91 

S'ils  font  gens  d'cfprit,&  qu'ils  ayen  t  feulement  régné  deux  mois, 
ils  £urôt  bien  peu  mène  les  mains,s'iîs  n'ont  gaigné  quelque  dou- 
zaine dîiommcs  efclaucs,  lefquels  ainfi  multiplians  d'vne  frégate 
viendront  à  vn  brigantin^vn  brigantin  a  vnc  fufte,  d'vne  fufte  a 
vne  Galiotte,&  d'vne  Galiotte  à  vne  galère.  Et  fi  de  fortune  ils  fe  panades 
trouuent  deux  bendes  de  Courfaîrcs  enferabie ,  lors  fe  aliians  fe  curfi** 
trouuent  grandement  affeurez:  car  auffi  bien  font  ils  ennemis, 
tant  de  leurs  amis  mefmes  que  des  plus  effranges  du  monde  :  car 
s'ils  trouuoycnt  de  leurs  parens  mcfmc,ils  nelescfpargneroyent 
pas.  S'il  fetrouue  feulement  deux  Courfaires  de  compagnie,  ils 
oferon  tbien  entreprendre  d alTaillir  vnc  Squirafi^vne  Marcilia-  Sfdrxce. 
ne,vn  Luc,&  autres  tels  petits  vaiffeaux  de  marine.  MaK  ils  n'o-  MérctiU** 
feront  entreprendre  daflaillir  vne  grand  nauire,moyennat  quel-  z*. 
le  ait  quelque  peu  d'artillerie.  Voila  donc  comme  les  Courfaires  - 
pillent  fur  mer,&:  petit  a  petit  fe  font  plus  pniftans&  formidables 
à  toutes  gens  qui  habitent  es  ifles ,  tellement  que  les  pauures  pai- 
fans  font  en  vne  crainde  plus  grande,que  n'eft  loyfeau  fur  la  bra- 
che  :  car  quand  on-nefonge  pas  en  eux,  on  lésa  à  la  queue.  Et 
mefmementlespefcheurs  cftans  auriuage,  &  toutes  efpeccs  de 
petits  vaifteaux  ,quelque  part  qu'ils  foyent ,  font  quafi  toujours 
en  crainte.  Et  pour  en  amener  v  n  exemple,nous  eftans  en  Me  de  p^ 
Paxo,anciennement  nommée  Ericufa,pres  Corfu,  pendat  que-  \ncur^ 
fiions  auec  neftre  guide,  cherchans  quelques  plantes ,  les  Cour- 
faires emmenèrent  les  paffagers  qui  nous  auoyent  amené  là.  Vnc 
autresfois  vn  grand nauirc  Venitien,nommc  la  Priola,eftant  an- 
cré en  vn  port  d'vne  iile  de  iarchipelago ,  maintenant  nommée-^ 
Zia,&  anciennement  Cio,  attendant  qu'il  feit  bon  vent  pour  al-  £ 
1er  à  Conftantinopie  :  vnebarque  fortkdu  port  de  liûed'Andro- 
auec  bon  vent,&  vint  en  noftre  port,ou  elle  arriua  bien  tard ,  la- 
quelle vne  autre  barque  de  Courfaires  fuyuoit  ,  &  ruft  en- 
trée dedans  le  port  quant  &  quant  elle  ,  ûnon  que  les  Cour- 
faires v  veirent  noftre  nauire,  &  par  cela  ils  allèrent  fe  cacher 
en  vn  autre  port  qui  eftoic, derrière  Tille  :  car  il  eftoit  défia 
nuid.Mais  le lendemaiin auant  le  iourte  pirates  qui  eftoyent' 
huid  en  nombre,  de  compagnie  :  fe  vindrent  cacher  dedans 
les  rofeaux  ,  attendans  le  poind  du  iour  ,  efperans  entrer  en 
la  barque  qu'ils  trouuemy  en  t  au  nuage,  &  remmener  par  for-. 

ccaiwcccnxqittcftaYcntdcd^ 

A  A    iiîj 


Jmt  a 


V}*L  PREMIER     LIVRE     DES      SINGVLA. 

uns  îefccours  que  nous  leur  donnafraes»  Ec  fi  toft  que  ceux  qut 
cftoyenten  la  barque fecogneurenteftre  furprins ,.  les  hommes 
pîu&fortife  ietterent  en  lajrner,  pour  eux  fauuer  en  nageântrmais 
les  autres  quteftoyent  rcftcz,auec  les  femmes  &  enfans ,  demeu- 
rèrent pdfbnniers.Ces  Caurfaires  cftoyent  û  hardis,qu'ils  ofoyét 
entreprédredcles  emmener  hors  du  porc  en  noftre  prefence,  qui 
eftions  en  grand  nombre..  Mais  le  patron  de  la  Priola  deftafcha 
vn  fauconneau,  &:  feit  appreftet  les  arquebufters  fur  le  bord  du 
nauire,&  de- rechef  leur  cira  ync  cou  leur  me,  qui  les  contraignit 
de  lâiflèrk  barque.,  Gar  aufSpour  forcir  du  port  ,ilseuil*:nt  efté 
-    ^  .^n-  contrain&s  d'approcher  affez  presde  noftre  nauire.  Et  par  cefu- 

jL.es  Courjdi*  r.  t  ti  ,-> 

m  ne  tuer*  renc  rorccz  «c  retourner  en  leur  barque.Ces  pauurcs  gens  qui  ve- 
pas  les  hoat?  noycflt.de.  Me  à^AndrOjCuflcnt  efté  faits  efclaues  des  Turcs,fans 
mes.  noftre  aide.  Iamais  les  Turcs  ne  tuent  les  hommes  qu'ils  pren- 

U.  ydeur  nent ,  foit  fur  mer  ou  fur  terre,mais  les  vendent.  $i  c  cft  quelque 
&ynejcUue.  belle  ieu ne  femme  ,  ilslavendentquatre  vingts  ou  cent  ducats* 
ites  mmm,  vne  vjcjj{c  vaud'roic  trente  ou  quarante  ducatSiquelqueieune  pc- 
fûurfioy  ^  tiCgarç0njS'ii  cf|-  <jc  t>eîle  corpulence  ",  vauldra  de  quarante  à  cin- 
'  quante ducats.  Sic eftvn homme robufte de  bonne  quadrature- 
3£bien  fourny  y  il  vaudra  foixanteducats.  Voila  la  raifon  pour- 
quoy  lesnaukesvot  toujours  armees>&  pourquoy  lesvaiiTcaux. 
<pi  ne  font  poim  armez,  font  toufiours  en  crainSe*  Ayansafïèz 
parlé  des  Cou  rfaires,retournerons  à  parler  de  noftre  nauigation. 
Lèvent  Greceftoit  celuy  qui  fajfoicpournous,qui  nous  côdnua 
toute  nuiefc,  en  forte  que  laifïafmes  Samos  à  Sencftre ,  &  paflàf- 
mes  le  deftroicr  d'entre  l'Hic  de  Samos  &  Nicarie.  11  eftoit  en core- 
grand  iour  quand  nous  paftàfmes  auprès  de  deux  petits  rochers^, 
qui  font  tant  renommez  en  tic  les  mariniers,  nommez  les  four- 
neaux, pource  queceft  vntrefdangercux  paftàge^  lefquels  ont 
prins  leur  nom  vulgaire  Aqs  Grecs,qui  les  ont  anciennement  nô~ 
niez  Ipni^c  eft  à  dite  FurniMnais  les  anciens  n'entendoyet  pas  de 
ceux  cy,ains.d!auttes  rochers  qui  font  à  la  bouche  dufteuue  Pe- 
»eus>  auprès  de  Theflàlie..  Ceux  cy  font  grandement  à  craindre, 
melmement  quanâil  les  faut  pafïèr  denuid.  La  carte  ànauiguer 
les  marque  du  nom  de  Fourneaux.  Et  pour  autant  qu'il  faut  paf- 
fèr  parla  ,  ou  bien  prendre  vn  moult  grand  tour  en  la  mer,  va 
chacun  de  nous  auoit  grand  peur  :  car  il  cft  fouuentaduenu  que 
^ueJbjues  natures  y  fi^t|£riesjerito»Emente.  Cominuans  noftre 
'■  chemin*. 


2&  four» 
neaMx. 
fyni, 
Èetttm 


OBSERVEES     .F  AU     F.   BELOtf.  ^95 

chemiir,  non  s  paiTafmes  auprès  dVnc  autre  ifle  nommée  Gaide-  <*"?»* 
romfo,qui  eft  à  dire  i'ifle  des  afnes  :  &  tout  ainfi  qu'elle  cil  desha-  mJù* 
bitee,auifi  n'eft  elle  en  aucun  renom . 

VetiftedePatbmos.  Chapitre     XI. 

O  v  s  auions  l'ifle  de  Pathmos  (  ou  faintt  ïean  l'E- 
uangeîiftcfutenexil,  Se  efcriuit  Ton  Apocalypfe)  à  ***»*■ 
:  main  gauche,  en  laquelle  les  montagnes  font  moult 
*  hautes  :  car  on  les  voit  de  bien  loing.  Elle  eft  vulgai- 
rement nommée  Parmofa  ,  Se  eft  habitée  de  Chrefticns  Grecs. 
Aufll  eft  bien  auant  en  la  mer  au  de  là  de  i'ifle  Icarie.  Les  habitas  farmofi. 
de  cefte  ifle  viuent  en  toute  liberté  Chrefticnnc  à  la  Grecquc,co- 
me  aufli  font  tous  autres  des  ifles  de  Grèce ,  qui  payer  le  tribut  au 
Turc.  Il  eft  bien  vray  que  les  magiftrats&s  chefs  des  villes  font 
communément  Turcs.  Le  port  de  Pathmos  eft  aflèz  grand  pour 
fuftcs5gaîercs>&  petits  nauires.  Toute  i'ifle  eft  fertile  en  grain ,  Se 
y  a  abondance  de  toutes  fortes  de  lcgumes,auflî  y  a  vn  monaftere 
de  Caloieres  Grecs,  auquel  on  voit  la  main  d'vn  trefpafle,  à  la- 
quelle les  ongles  croiflent  comme  ceux  d'vn  homme  viuant,  &: 
combien  qu'on  les  luy  rongne,  neantmoins  ils  rcuiennent  grads 
au  boutd'vncefpacede  temps.  Les  Turcs  oet  eu  occaflon  dédi- 
re que  cefte  main  eft  d'vn  de  leurs  prophètes.  Mais  les  Grecs  diet 
quec'eftlamainde  faind  Iean  qui  efcriuit  leans  F  Apocalypfe. 
Continuans  noftre  chemin  le  vent  Grec,  vifmcs  Fifle  de  Lipfos  à  zjpfis, 
dextre  aflez  auant  en  la  mer ,  qui  eft  petite ,  Se  deferte.  Bien  toft 
après  paflàfmes  I'ifle  de  Pharmaco:  mais  eftdutoutdeshabitee, 
laquelle  on  nommoit  anciennement  Pharmacufà.  Ce  fut  près 
de  cefte  ifle  ou  les  Courfaircs  prindrent  Csefar  efclaue ,  lors  qu'il    ?""' 
alloit  à  Rhodes  eftudier  pour  ouyr  Apollonius  Molo.AyanspaA  ^r/w/ 
fé  Pharmaco,nous  arriuafmes  en  vne  ifle  qui  cftoit  anciennemét  pùse/cU**, 
appelleeIreon,maintcnantonlanomme  Lcro.  Elle  eft  habitée  in&n. 
des  Chrcfticns  Grecs:&  eft  droi&cment  à  l'oppofitc  d'vne  poin-  zéro, 
àc  è  Afie ,  bien  aduanece  en  la  mer,  que  la  carte  à  nauiger  appel-  &**  "** 
le  Cortoio.  On  y  voit  des  chafteaux  antiques  fituez  fur  les  col-  *°k. 
lines,  Se  petits  couftaux.Les  montagnes  de  Lcro,  font  beaucoup 
plus  hautes  que  celles  de  Samos  :  Se  eft  fort  bien  cultiuee  par  les 
Turcs  SC  Grecs  Chrcfticns.  Nous  paflàfmes  outre,  Se  vinfmes  à 

BB 


1^4  SKOND     LIVRE     DÎS  '«ING^IÀ. 

Càmm.     \  vne  autre  grande  Ifle  nommée  Calimno  ,  habitée  de  Grecs. 
-Chreftiens.  PafTans  outre  nous  -atriuafmescn  vne  autre  ifle  no- 
jermo.       mcePfètmo,en  laquelle  y  a  deux  ou  trois  villes ,  &  pîufieurs  vil- 
lages, La  terre  eft  cultiuee  par  le  labeur  des  Chreftiens  Grecs. 
jjesmyrne.   Nous  auions  la  ville  nommée  le  Smyrne>à  main  gauche ,  qui  eft 
smyrm       pour  leiourd'huy  lvnc  des  villes  la  plus  riche ,  6c  du  plus  grand 
môûkgrojfe  cralicdemârchândifede  toutîc  pays  de  Natolie,  qui  auoic  an- 
>^/#  ^cien  nemerit  nom  Smvrrîa.  Il  nous  falloir  pafler  vne  poin&cà 
Jte\ ,  .       1  opDoiîte de l'ifle de  Pfermo ,  qui fortde  Natolie .  ôc  entre  bien 
c      Q(rQ    auamenjamer,queIacarteanauiguernommemainteaantCa- 
uo  iioflb,&:  anciennemët  Erithris,qui  fîgnific  chef  rouge.Nous 
-eufmesgraade  difficulté  à  la  paflèr  ;  car  le  temps  cftoit  obfcur ,  Se 
auflî  que^c'eftoitenuiron  l'heure  de minuicl:.  Le  mauuais  temps 
contraire  aous  furprint ,  tellement  que  nous  n'allions  que  d'vn 
des  ceftez  de  la  voileà  Force.   C  cftoit  vn  vent  maiftral  fî  fort  im- 
pétueux, qu  il  auoit  rendu  la  merefmeuë,  ^courroucée.  Le  len- 
demain au  matin  nous  commençafmes  à  entrer  au  canal  de  fifle 
de  Co^qui  eft  à  cofté  de  terre  ferme ,  appelle  le  pays  de  Halicar- 
SaHatrndp  naflè  :  6c  n'eft  que  de  cinqlieues  de  large.  Là  mer  qui  eft  entre  Sa- 
fi.  mos  &  liûe  de  Co ,  eft  tant  pleine  de  petites  ifîes ,  qu'on  ne  les 

pourrait  bonnement  nombrer  fmon  à  grand' peine:  toutes  lef- 
sjorades.     quelles  eft oyent  anciennement  appellees  Sporades. 


"Bêtifie de Co,j>ay$  d'IZipfwcram.  Chapitre      xu. 

Vand  îeiour  fat  venu,  eftansja  bien  aduancez  de- 
dans le  canal ,  nousveoyons  bienàckr  toute  l'iflcde 
Co,  quieftlepaysdôteftoitHippocrates.  Les  Turcs 
_  •  »,„•  _  »*%**^p  îa.nommcntStancou.  Ses  montagnes  nous  apparoif- 
pép-dtes.  foyent  plus  hautes  que  de  nulle  autres  des  ifles  que  nous  euflions 
encor  veucs  :  car  elles  ne  font  gueres  moins  hautes  que  celles  de 
Crète.  Laville  de  Co  eft  toute  habitée  de  Turcs ,  &c  en  toute 
fiflen'yaquedeux  villages  habitez  de  Grecs.  Le  Chafteau  &c 
mlUdeCa.  lâ  ville  de  Co  font  pareillement  appeliez  Stancou,  il  eft  affis  en 
haut  lieu ,  fait  à  tours  rondes ,  plus  grandes  que  celuy  de  Mete- 
îin,ou  deTenedoJ^a  ville  eft  en  bas  lieu,  ïîtueeau  riuage  deffous 
le  chafteau.  Ccfteifle  eft  bien  fertile  &  abondante  en  animaux, 


Co. 
Stancou, 


»        OBSERVEES     ?  À'K     P.    EE L Ô  N.  Ijrj 

&cf£ 'plus  longue  que  large.  Nous  la  coftoyafmes  moule  long 
temps  auec  vent  fauotable,  en  nauigant  auec  toutes  les  voiles: 
car  la  tempefte  nous  auoit  cefle.  Lors-  mifmes  tous  les  adioufte-  ' 
mens  pour accroiftre  la  voile.  LaifTans f  ifle  de  Co  à  main  dextte, 
entrafmes  au  canal  de  Rhodes-Encorefiions  bien  loing  de  la  vil- 
Ie,que  nous  la veoyons  deflus  vn< petit  couûau  afïlfc  en  vnc  poin- 
debien  aduanccc:.&  pource  qu'il  y  a- des  hautes  tours ,  &  fanais .bmmL- 
ou  lanternes  quiefclairent  pour  addrerïêr  Jesnauires à  bon  port: 
nouslaveoyons  déplus,  loing.  Quand  nous  commençafmes  à 
approcher,  trouuafmesce  que  l'on  dit  auoirefté  i  ancienne  ville 
de  Rhodes,  fkueedeïlus  vne  petite  butte  ronde ,  près  le  riuage 
de  la  mer,diftante  deux  lieues  de  la  ville  de  prefent;^:  dit  on  qu'il 
y  auoit  vn  contient  pourlescheualiers  de  la  religions  &quoatrc 
ce  qu'il  y  a.beau  logis,  que  le  lieu  efl:  en  bonne  fortcrefïe ,  5£.qu'il 
-e^naintenant  fongneufement  gardé  parles  Turcs.  Eftans  ak 
parfin  arriuez  à  Rbodes,iettafmesles  ancres,  &  defeendiimes  c&. 
terre,  &  ailafmes  voir  la.  ville». 


Smmlante^ohpruees  en  Rhodes.       Chapitre      x  r  i  r. 

,  A  ville  de  Rhodes  eft  partie  dcfTusvncouftau  en  pen-   ,. .. 
\  dant}pârtiele  long  du  riuage.  La  plus  part  des  habitas  ^~ 
!  des  villages  de  Tille  ,  font  Grecs,  qui  peuuent  bien 
[  entrer  &  vcnitleiour  befongoer  en  la  ville,  &  appor- 
ter vedreleursviures-au  marché,  &  ont  congé  d'y  demeurer  tout 
le  iour  :  mais  les  Turcs  ne  leur  permettent  ^coucher  la  nuicfc,tanc 
poutle  foufpeçon qu'ils ont  dereuolte D  .que de  trahifon.  Nous 
ne  voulons  entendre  qu'en  toute  là  ville  Htj'y  couche  bien  quel- 
ques Chre{tiens;carnieiînemcnt  pluheurs  de  leurs-efHauesfonc 
Chreflicns.    La  {èigneurie  de  Yenifè  y  entretient  vn  fadeur 
pour  le  trafic  de  la  marchandife  ,.qui  ne  s'en  defîoge  point  \^l rjUatrfau^ 
Buid,  combien  qoe-cous^ceux  de  fa  famille  (byent  Chrcfticns.  Zwr«H*i«w 
Le  grand  Turc  y  tient  ordinairement  <;inq^  galères  forcées,  en-^odes. 
dont  le  capitaine  eft  commis  pour  purger  la  mes- des-  meur-  oaleres  far^~ 
fions  qu'ont  accoutumé  de  faire  les  Courfaires  pçar  les  lues  aesduiMr^~ 
Cyclades ,  Sporadcs  ,  &:  autres  lieux  de  Grèce  appartenansau 
Tiirc.,3  &_auffi,paur  cenir  la  mer  Méditerranée;  en  fobicdio%  , 
\  :    :...  '  'SB.  ij .. 


I$6  PREMIER     LIVRE     DES     SINCVLA. 

Se  tout  le  refte  de  Grèce  en  feurcté.  Car  il  fait  ordinairement  des 
courfèsauec  les  fufditcs  galères  :  &  s'il  y  a  quelque  nouuclle  de 
Courfaire  qui  foie  en  pays ,  ledit  capitaine  necefîe  iufques  à  tant 
qu'il  l'ait  trouué.  Tous  les  baftimens  des  cheualiersde  Rhodes, 
tant  François  que  d'autre  nation,  font  en  cor  par  tou  t  en  leur  en- 
Lts  Tum  ne  tier.Carîes  Turcs  n'ôtrié  ofté  des  armoiries,  peindures/culptu- 
demoltjfent  res,&  engraueures ,  &efcriteaux  qu'ils  y  ont  trouué.  Et  encor 
rien.  pOUr  je  iourd'huy  s'en  peuuent  lire  plusieurs  inferiptions  tant  en 

François  qu'en  Italien.  Nous  difons  en  outre  que  les  Turcs  ont 
touûourseuceftecouftume,que  quelque  chafteau  oufortcrefTe 
qu'ils  ayent  iarnais  pris  ,  eft  demeuré  au  mefmc  eftat  en  quoy  ils 
l'ont  trouué  :  car  ils  ne  dcmoliflcnt  jamais  rien  des  édifices  Se  en- 
graueures. Leiourenfuyuantnous  allafmes  voir  quelques  pro- 
chains villages  hors  la  ville,  &  fufmes  à  lameiTedes  Caloicres 
Grecs,  Se vifmes leurs  iardins  moult  bien  cultiuez  dcGrenar- 
diers,Orangers,  Iuiubiers ,  arbres  de  Sebcftes ,  dont  ils  ont  tref- 
grande  quantité^  font  la  gluz  auec  fbn  fruid,  Auffi  y  a  des  Fi- 
^Arhres  de    guiers,  Amadiers,&:  Oliuiers.Leshabitas  des  villages  de  Rhodes, 
sebefies.       viuet  félon  la  religion  Grecque, &:  gardent  encor  les  vocables#des 
çhodies  iti*  choies  ayans  noms  propres.  La  garde  que  les  Turcs  font  de  nuid 
uent  à  U    \  Rhodes,  Se  autres  chafteaux  en  Turquie,  eft  faite  à  haute  voix: 
Greci^-      car  ils  fè  refpondent  les  vns  autres ,  Se  non  pas  au  fon  des  cloches 
nuitit  Rho-  commc  1 '<>n ^it  es  villes  d'Italie,  &à  Ragoufe.  Les  murailles  de 
fe         '  Rhodes  font  au  mcfme  eftat  en  quoy  elles  cftoyent  quand  ils  les 
forcèrent  des  mains  des  cheualiers  :  Se  n'y  a  efté  depuis  augmen- 
té ne  diminuéjrenforcéjnarîoibly.  L'on  y  trouué  à  acheter  de 
beaux  ouurages  de  foye faits  à  i'eguille,  Se  principalement  des  pa- 
uillons  de  lids.  Ils  font  leurs  ouurages  de  diuerlès  couleurs ,  en 
manière  de  poinds  croifez.  Leportraid  eft  de  fueiîlages ,  Se  eft 
différent  à  l'ouuragc  Tu'rquois,&  à  ecluy  qui  eft  faid  à  Chio ,  Se 
en  Cyprc. 


OBSERVEES     EAU    E.    BELON.  197 

Modeflie  des  foldats  Turcs  ;  &  £vn  ferment  nommé Uctâuii  &*detoi- 
feau nommé Onocrotalus.  Chapitre,    xiiii. 

k  Ous  y  veifmes  vn  oifcau  priué,nommé  Onocrota- 
i  lus.IÎ  alloit  par  la  ville  :  duquel  obfèruans  la  gran- 
;  deur,  trouuafmes  qu'il  n'eftoit  du  tout  û  grâdquc 
'  eft  le  Cigne.  Il  eft  tout  blac,&:  beaucoup  plus  gros 
^  qu'vne  Oy  c.  Ses  iambes  font  comme  celles  des  Ci- 
guës, te  le  pied  de  mcfmc  façon  ,  mais  font  de  couleur  cendrée, 
couucrte  de  dur  cuir.  Ceù.  vn  oifeau  gay,hetté,&  vioge,  qui  tiet 
fà  tefte  droide  &:  efleuee.  Son  bec  eft  large  te  canelc ,  poindu  te 
recroché  par  le  bout.ïi  porte  des  plumes  fur  fâ  tefte  par  le  derriè- 
re, qui  luy  font  quafi  vne  crefte  comme  à  vn  Vanneau  :te  quand  il 
vole ,  va  battant  des  ailles  comme  vn  Cigne.  Il  fè  paift  aufil  bien 
fur  l'eau  fàîee,qu'en  l'eau  douce.  Nous  prouuerons  en  autre  ceu- 
ure,ou  auos  mis  le  portraid  des  oifeaux  t  que  ceftuy  eft  le  Peîica,  ?dican. 
d5t  nous  taifons  pour  cefte  heure ,  à  caufede  brieruetc. Entre  les 
chofes  fîngulieres  de  cefte  ifle,auons  veu  le  fèrpent  nommé  ïacu- 
Ias,mouchcté  de  petites  taches  deffus  le  do^reflèmblantcs  à  des 
petis  yeux ,  tout  ainfi  que  font  les  taches  de  deffus  le  dos  d'vn     -,, 
Tremble,  nommé  en  Latin  Torpédo.  Nous  le  trouuafmes  def-  ^ ,  * 
fous  vn  Câprier  efpineux  hors  la  ville  ,  celle  part  ou  le  Turc 
■auoit  planté  fon  artillerie  quand  il  affiegea  Rhodes.  Les  Grecs  le 
nomment  maintenant  en  leur  vulgaire  Saetta  ,c*eftà  dire  Sagit-  &etu 
ta,  te  les  Turcs  Ochiîannc ,  les  anciens  Acontias.  Il  a  trois  paul-  ^Aconùd*. 
mes  de  longueur,  te  n'eft  plus  gros  que  le  petit  doigt.  Sa  couleur 
eft  cendrée  tirant  fur  la  couleur  de  laid,  &  eft  totalement  blanc 
deûous  le  ventre,ayant  des  efcailles  deffus  le  dos,&:  tablettes  dc£ 
4  fous  le  ventre  à  la  manière  des  autres.  Il  eft  noir  deÏÏus  le  col ,  te 
taché  de  deux  lignes  blanches ,  qui  commencent  des  la  tefte ,  te 
fuyuent  tout  le  long  du  dos  iufques  à  la  queue.  Les  taches  dont  il 
eft  moucheté,ne  font  plus  larges  qu'eft  vnc  Lentille.  Mais  eftan  c 
fon  dos  cendré ,  les  taches  noires  font  rondes  ,  entournees  d'vn 
cercle  bîanc.Nous  parlcrôs  de  fon  anatomie  ailleurs  plus  à  plai^ 
en  deferiuant  tousiérpens  parle  menu.  Toutesfois  ayans  eu  fon 
naif  portraid,  i'auons  mis  en  ce  Heu. 

■   .        \.  BB  H) 


SECOND.  LIVRE     DS£     S^NGT'l  Aw-'- 

2xj>ortrai&  h  UchIms ■ -y  autrement  dit  *4  contins.. 


Mawoca». 


Àuârveifrnes  defchargervn  brigantindcffus.  lariue  dupors, 
plein  d'vne  drogue  propre  en  médecine  ,  appellce  Srorax  rouge. 
Les  Grecs  la  .nomment  main  tenant  Mauroeapno.  Et  nous  a  Ion 
dje  qu'il  croift  en  Tifle  :  mais  poiircè  que  ceux  qui ibntYoyages 
pno  P;ar  m^r> nc  P^uent  s  abiencer  loing  de  leur  vaifieau ,  n  auons  eu 

ioiûr  de  nous  efearter  pour  aller  voir  fon  arbre:car  quand  les  ma- 
riniers ont  ïe  temps  a  propos ,  ilzne  retarderoyent  pour  homme 
viuant.Nous  voulons  inférer  par  cela ,  que  ceux  qui  ont  fuyui  les 
Nduigneurs  nauigations  dedansles galères  ou  nauires  ,  n  ont  peu  beaucoup 
far  mer  ne     vojr  <|e  la  terrc  >  attendu  quiîz  font  toufiours  fubiects  d'atendre 
^TTïoiT~'  kur  vafflfêau.  Àyans  pris  garde  aux  foldats  Tnrcs  qui  font  le  guet 
oheiffanee     aux  portes  de  Rhodes^uons  eu  occaiion  d'eferire  la  grande  con- 
des  foldats  rinenee  Se  obeiflance  âes  gens  de  guerre  du  Turc:  car  combien 
7fyrcs»._         q.u  il  yeuft  vingt  ou  trente  hommes  au  x  portes  de  la  ville ,  qui  les 
gardent  {bigneufement ,  to.utesfoisceft.oit  auec  fi  grande  filence 
Se  rnodeftie^qu  on  n'y  oyoit  non  plus  de  bruict}que  s'il  n'y  euft  eu 
perfonn,e:&  fembloit  plufr.oft.qnc  ce  fuuint  artifans,que  gens  de 
guerre:mais  ancc.ee  tiennent  granité  de  Sénateurs.  Et.de  vcay  ilz 
Ibnt  fi  paifîbles  en  toutes  leurs  affaires,  qu'il  n'y  auoit  aucûd  eux 
quieiifï  aucune  armure ,  non  pas  feulement  vne  efpee.  11  n'y  a 
maintenant  que  deux  grandes  portes  ouuertes  en  Rhodes ,  l'vne 
cft fiirje port/autreau çofié de  terre  ferme >Se  vne  fàufe-  porte 
?*?fins4e    £a  v  Ichzdm  du  gran  d  maiftre.  Les  pay  fans  de  fine  venas  au  mar- 
^da.        ché  vendre  leurs  Cheureaux ,  fromages ,  beurre  s.&:  autres  telles 
prouiûons»  font  acoufhrez  de  mefine  façonque  font  les  pay  (àn$ 
de  Crète.  Hz  font  noirs  Se  ridez  par  le  v ilage  ,  ayans  les  cheueux; 
longs5pen4ans  iufques  defTus  !es  èfpaules,  Se  porten  c  de  gros  bon* , 


.    .WS'ÏKVÏES    "PATt     vl     BEXOtf.  l£9 

nets  doubles.  Leuxpourpoint  eft-dc cuir  fans  manches  r  lâche- 
mife  pendante  deuant&  derrière,  &:  portent  des  botes  de  cuir, 
qui  leur  montent  fi  haut,  qu'ilz  les  arrachent  au  pourpoint.  Hz 
.  ont  des  brayes  detoiilc  deffus  leurs  chemifès.  Celuy  qui  n'auroit 
acouftumè  les  voir,pcnfcrpit  que  ce  fuflènt  gés  mafquez,tcffem- 
blans  totalement  à  ceux  quiiouet  lesmatacinsxar  ilz  font  acou- 
ftrez  comme  font  ces  gens  mafquez  qui  vont  faifans  les  boutons 
au  temps  de  Garenne  prenant,  à  Rome  &:Venifc.  Hz  vendent 
leurs  hardes  aux  Turcs,qui  les  payent  comptant,fans  leur  en  fai- 
re aucun  tort. .  Lon  peut  facilementaperceuoir  par  les  ruines  de 
dehors  la  ville ,  qu'il  y  a  aurresfoîs  eu  de  grande  fauxbqurgs  en- 
tour  .Rhodes,  qui  furent  totalement  defîaits  au  fîege  du  Turc,  &C  Fauxhmgs 
encor  n'ont  elle  rebaftis.  Toutesfois  il  y  a  quelques  villages  qui-^^^ 
ne  font  gueres  plus  loing  des  portes  ,qu  a  la  portée  d'vn  arc  ,  Se 
font  Habitez  de  Grecs  &ç  de Turcs  :.&ou  les  Galoieres  ont  vn 
monaftere.  :  ;:  - 

Voyage  de  Rhodes  en  Alexandrie.  Chapitre    XV. 

i  Yans  ja-feiourné  quelques  iours  en  Rhodes  &ex- 
\  pedié  lesanaircs ,  retoumafinespour  fuyure  noârc 
nauigation  :  &  cufmes  vent  maiftral,&  nousfalluc 
aller  long  temps  à  Force  ,ceft  à  dire  furie  coftedu 
nauirc  :  car  il  nous  conuenok  gaigner  vne  poinde 
que  l'on  appelle  Cauo  dei  Bo ,  iufques  là  haut  audefïus  de  Rho-  Cdueddse, 
àcs.  Ccft  le  lieu  ou  les  galères  Turquoifes  arrivèrent  première- 
menr,îors  que  le  Turc  print  terre  en  Fine ,  quand  il  affiegea  la  vir-  ,„, 
le.  Quand  nous  eufmes  gaigné  cellepoinde,lois  vn  vcntde  tre- 
montanc,c*eft  adiré  fèptentriona^nous  donnaenpouppe  rnouk 
fauorable,&  tournafmes  la  proue  droiâ:  vers  Alexandrie ,  choi- 
fuTans  noftre  chemin  dedroid  &U&  ayans  le  vent  à  propos ,  fucét 
mis  tous  les  adiouftemens  àla  voile>   Ceftce  que  les  Italiens  ap-  Nauigtrk 
pellentnaui^uerà voile  jFrançoJfe^&fçrnble  qu'ilz  ayent  faid  ^oiUiran* 
cefte  dirTerencepour  Je  regard  de  laXatine,qui  cil  triangle,  atte-  îQifi- 
duque  la  Françoifc  eft  quarree:^  aufïi  que  le  Bourdon  eft  appel-  ^.^  ^^ 
lévoile  Latine.  Le  bon  vent  nous  fut  fauorable  toute  la  nuid  :  &  l^Qm^ 
quandilfut  iour,nouscftions  défia  fiauant  en  lamcr,que  nous .^^ 
auions  perdu  l'ifle  de  veue  :  lequel  vent  continua  iufques  à  midy* 

BB  iiij 


ZOO  SECOND     Liy^E     DES    SINGVLA. 

Lequel  ayant  ce(&y&c  eftat  la  mer  en  bonaffe  ,&  le  temps  calme, 
voulufmes  fçauoiren  quel  endroit  pouuions  cflre.   Nousco- 
gncufmes  pac  la  carte  à  nauiger  que  nous  citions  défia  à  la  moitié 
duchemimcarlonvaauecbonvent  de  Rhodes  en  Alcxadrieen 
moins  de  trois  iours,&  trois  nuiâ:s.Quand  les  mariniers  fe  trou-, 
uent  fans  vent  en  plaine  mer  >  le  vaineau  ne  fe  remue  no  plus  que 
s'il  eftoit  dedans  vn  port.  Alors,  chacun  fe  metàioucrjàpcfcher, 
&:  à  fe  baigner ,  ne  faifans  difficulté  de  fe  ie&er  en  la  mer ,  &:  faire 
le  plonge5,pafïàns  d'vn  cofté  à  l'autre  par  défions  le  nauire.  Ceft 
Faijfem  %.  *ors  <¥xc  les  mariniers  ont  peur  des  Courfaires  :  car  en  temps  cal- 
ràffem      meilnyapetitvaifïêaulongjçeftàdire  d'auirons  ,  qui  ne  face 
rond,         grande  peur  à  vrvbien  grand  nauire  ron,d.  Mais  quand  il  faitvet, 
les  petis  vaifTeaux  n  ont  pas  feulement  peur  des  galeres:car  ils  ef- 
chappenttoufioursàlavoile.  LevcntdeSiroc  commença  petit 
à  petit  j&iè  renforça  fur  le  vcfpre ,  iufquesaeftre  moult  impé- 
tueux: lequel  nous  contraignit  plier  toutes  les  voiles,&:  nous  co- 
tenter  d  vne petite ,  qu  il  nou^  conuint  defeendre  iufqncs  à  my- 
mas3&  la  renforcer  de  bonnes  gommenes  &  gros  chables.  Le  fu£ 
di&  vent  fè  changea  en  vent  de  ponent  :  qui  fut  aûez  bon ,  te  qui 
continua  toute  la  nuiâ:.  Mais  fur  le  poind  du  iourte  vent  de  tre- 
montane  retourna  nous  fauorifer  :  lors  commençafmes  à  defpc- 
cher  grand  chemin,  faifans  pour  le  moins  de  quatre  à  cinq  lieues 
pour  heure ,  auffi  eft-ce  le  plus  vifte  qu'on  puiûe  aller  fans  tour- 
mente. Les  mariniers  appellent  cela  aller  en  fortune.  Le  difeours 
de  cefte  nauigation  eft  tel ,  qup  depuis  le  deftroid  de  Conftanti- 
noplepour  aller  noftre  droiâ:  chemin ,  il  falloir  quclapouppe  de 
noftre  nauire  regardai  le  Septentrion  ,  &  que  la  proue  fuft  virée 
au  Midy  :  car  allant  de  Conftantinople  en  Alexandrie ,  Ion  va  de 
droite  ligne  de  Septentrion  à  Midy  .Or  puis  que  fommes  entrez 
û  auant  en  ce  difeours  touchant  la  nauigation  ,  il  nous  a  fcmblc 
bon  ne  nous  en  déporter,  que  n  eufïions  premièrement  parlé  de 
celle  des  anciens,  quieftoit  beaucoup  plus  difeommode  quelle 
n  eft  maintenan t^comme  il  apperra  en  ce  fuyuant  chapitre» 


OBSERVEES     ?▲&--*•    WION. 


,£«*  /«  marÎMennuuigeéyent  Anciennement  fins  ImguiJîe^  qtktdftm^ 
&fans auoir vfigc delà  pierre d'^4im4ntm  Chapitre    xvi. 

*  Esanciensauoyent  plus  grande  difficulté  en  leurs  fime£^ 
nauigations  que  nausn auons  maintenat  :  car  lors  mAnt% 
'  n'en  paix,n'en  guerre  ilz  n auoyent  adrelïès ,  finon 
de  la  conie&ure  de  l'Orient ,  Soleil  couchant ,  Se- 
^^^^  j  ptentrion ,  &  Midy :ou  des  cftoilles.&:  Soleil  qu'iiz 
veoyent  de  iour  Se  de  nui&}&:  le  plus  fouucnt  ne  perdoy  et  point 
la  terre  de  veue.Mais  maintenant  que  tout  le  monde  a  cogneu  la 
vertu  de  la  pierre  de  raimant,lanauigationcft.  fi  facile }  que.deux 
hommes  ofent  sauenturcr  à  tous  propos  aucc  vne  petite  barque, 
à  tous  heurts.aux  plus  impétueux  vens,&trauerfer  la  merree  que 
les  ancies  neuûent  ofé  faire  n  y  entreprédre  en  plain  iour  >  lors  q 
ilz  nauoyent  l'aiguille  &  quadran  frottée  auec  la  pierre  d'aimanr,  ^^ 
Cefteeft  la  pierre  autrement  nommée  lapis  HercukusTou  Ma-  ^^. 
gnes,&Sidcruis,&  en  Italien  Calamita:  en  laquelle  Ion  trouue  M^ne$. 
vertus  contrairesxar  l'vn  des  bouts  fait  que  l'aiguille  regarde  en  s'ident'^ 
tout  temps  la  partie  de  Septentriôy&  l'autre  bout  le  Midy  -Nous  cdimiu.. 
trouuons  que  celuy  qui  inuentà  premièrement;  l'viage  de  iàdi&c 
picrre,auoit  nom  Fïauius.  Mais  le  premier  qui  ait  eferit  telle  ver-  *f  ma^ 
tu,eft  Albert  le  granddequel  ayant  trouue  qu  elle eftoit  en  vfàge  *J^%™£ 
des  fon  temps,penfa  que  la  pra&iqucen  fuft  antique  TSc  qu  An-  Y^îLxnp 
ftoteeuft entendu  cefte  vertu.  Toutefois  ,-ny  Ariftote  >  ny  ceux  y^^i^ 
qui  vindrent  long  temps  après  luy^'en  cogneurent  on  c  laver  tu,-  jn&me.. 
&  que  l'vn  des  bouts  feift  que  le  fer  fe  tournait  vers  Septentrion, 
&  l'autre  bout  feift  le  contraire.  Ariftotecogneut  bien  qu'elle 
attiroit  le  fer  :  mais  il  n  entendift  onc  qo  elle  ièruift  anx  nauiga-  ^       ^ 
tions.L'am^itédeceftcdi&ion  d'aimant  a  donné  couleurà<pei-  J^J^^ 
ques  Alchimiftes  d'en  inuenter  des  tromperies,  promenas  quel-  ^  " 
ques  fubulitez  en  chofes  d'amour  ,  monftrans,  que  comme  elle 
peut  attirer  le  fer,  elle  attiroit  aufii  les  amoureufes  volontez  des 
perfonnes-.maïs  celaeft fauxrô^à  cefaireont beaucoup  plus  loué 
la  blanehc/çachans  qu  elle  eft  plus  dimxileSdrare  a  trouuer.que 
kcommunequi eft  de couleur  defef ^  Lon  trouue  maintenant- 
grande  quantit^deceif  aimant  en  vne  iile  delà  mer  Mcditerra- 
nefi;nQmmee''EîJba ,  &  andennementïlna  ,,-nmeca- l'oppofitadû: 

CC 


*oa  SECOND     liYllï   DIS     SINGV1A, 

*"*  PJombin ,  au  territoire  de  Florence ,  ou  elle  ne  coufte  pas  beau* 

™^^      cou|>,£ncor en  parlerons dauantage  en  la  vie  de  Mahomet.    .  " 

Qtulnyaque  deux  grandes  bouches  du  Nil  nauigaUes  5  o»  is 
grands  vaiffeaux  ronds  puijfent  entrer* 
Chapitre    xv  zi*    , 

•  N  Sacre  îaffe  de  voler  fè  vinrafleoir  entre  Rhodes 
&  Alexandrie,  dcfïiis  fentemnede  noftrc  nauire, 
ou  il  demeura  bien  deux  heures.  Piufieurs  Cailles 
Y.  quivenoyent  dedcuctsSeptentrion,tirans  au  Mi-^ 
a  %,£ifentauulprifës  dedans  noftre  nauire.  Cela 
nous  baillaailèurance  que  les  Cailles  font  paflègeres  :  car  defia  au 
,  parauajit  en  auions  obfèrué  d'autres  au  prin tem  ps ,  lors  que  paf- 

^fptf*'    fions  delMe  nomme.  Alzante,autrement  âiâc  Zacinthus ,  allas 
Nerrot^te,  *^a Moree*  autrement nommée  Negroponte.  Là veifrnes auiH 
&         *  que  les  Cailles  verians  de  la  partie  du  Midy ,  alloyent  au  Septen- 
trion pour  y  demeurer  tout  lefté;  lors  en  veifrnes,  prendre  grand 
sombre  auec  autres  dmerûtcz  d'oifeaux  pafïàgers,  qui  s'eftoyen  t 
.--'.;..  fcmbjablcmcnc  rendus  là  dedans  noftrc  vaiiTeau.  Encor  veifrnes 
vaauttc  oifcau  incogneu  à  tous  ceux  du  nauire ,  qui  cftoit  gros 
comme  vn  Coqu3tirantàla  couleurd'vn  Mauuis.Auifi  vcoyons 
Qnocmdes  vo^cr^cs  Onocrotaîes  venans  du  ^ofté  de  Septentrion  ,  qui  ai- 
du  kede     |°ycr*t  vers  leMidy:qai.foBt  ©y féaux  qu'on  ne  cognoift  aucune- 
Mantove.    s*ent  en  France  n'en  Italie  ,  fïnon  quelque  fois  qu'on  en  voit  au 
m  lac  de  Mantoue:maïs  ilz  s'en  retournent  f  hyuer.  Toute  la  iour- 
ticefutiâns  vent,  comme  auul  grande  partie  de  la  nui&cnfuyuat. 
Le  lendemain  cufmcs  aûez  bon  vent  de  Grèce,  &  continuas  no- 
ftrc ehemin,entrafmcs  en  vn  endroiddela  mer,  que  l'eau  du  Nil 
Mouche Ju    venant  de  la  bouche 4c  Damiate,  auoit  troublé  &:  peina:  d  autre 
xïldeDA*  couleur  que  fpa  naturel ,  tellement  que  la  mer  en  eftoit  blanche. 
mate.        Cefutvnemerquequienfeignaaux  mariniers  qu'ilz  neftoyent 
„  gueresloing  de  la  terre  d'Egypte ,  laquelle  ne  nousapparoiftbit 
Ep$te  efi    encores  point.  Car  tout  le  territoire  d'Egypte  eft  en  lieu  bas, 
*#•  n'ayant  aucunes  motagnes  qui  fè  puifTent  voir  delà  mer.  Il  eftoic 

défia  bien  tard  quand  nous  entrafmes  en  cefte  eau  trouble ,  ôc  ne 
faifoit  pas  grand  vent:  par  cela  nous  ancrafmesen  plaine  mer  à 
aonante  toUçs  d'eau.  La  couftumç  des  Maures,  c'eft  à  dire  Egy-; 


OBSERVEES     PAR.     F»   BE-XOIT.  tO$ 

«tiens,  venans  de  Çonftantinople,  efl;  quand  ilz  fè  trouuent  Bien  *&>$! 
tard  en  icelle  eau  trouble,  ne  fçachans  s'ilz  fonttrop  bas, on  haut man"  . 
du  port  d*Àlexandric,ou  de  la  bouche  du  Nil,de  iceter  Fancie  en 
h  mer,iufques  au  lendemain  marin,  afin  quayans  afïèz  deiour, 
iîzpuùTent  recoçnoiftrc  le  lieu  &  l'endroit  ou  il  leur  faut  aller 
preadre  port.  Et  s?ilz  eognotflfent  qu'iîz  ayent  monté  trop  hauty 
iîz  pourront  auec  le  temps  baiûer  pour  regaigner  le  port.  Nous  r  »'> 

paflafmes  la  nui&,cftant  la  mer  en  bonaûe,&  le  lendemain  ayans 
tiré  les  ancres  du  profond  de  l'eau ,  Se  dcfpioyc  les  voiles  y€oïtis 
hors  de  l'eau  dudid  courat,nousnauigafmcs  ^cn  par  la  mer,  que 
ncntraiïions  pourîafccondcfbisenvneaucre  eauducourâtdt* 
Nil  venant  de  la  partie  de  Rofette.  Ces  deux  eaux  ibnt  les  plus 
grands  courans  du  Nil,  dot  le  dernier  auoit  teind  la  mer  de  verd 
en  iaune  paille ,  qui  ne  nous  dura  plus  de  demie  lieue  de  largeur, 
que  nousn  entraînons  en  la  mer  cerulee*  La  chofe  qui  nous  ap- 
parut première  en:Egypte,rut  leChafteaifede  Ro&tte^qui  ck  vne  dkapj»d& 
iournee  &  demieau  demis  d'Alexandrie.  Eftans  encor  en  plaine  *^*?\ 
campagne  de  mer ,  regardans  qu'elle  çhofe  nous  apparoiftroit  h. pdmter^ 
première,  ne  veoyons que  les  Palmiers  &  Sycomores,  &  la  haute  ^^£ 
colomnede  Pompée,  qui  eft  fur  le  Promontoire  vau  dcûus  d- A-  Fom^ 
lexan  dtie  :  Car  d  autant  que  la  terre  eft  fi  haûe  &  fans  montagne, 
elle  n'apparoift  poind  de  loing.  Il  eftoitdcfia  tard  quand  nous 
entrafmes  au  port,  qui  fut  caufe  que  noos  .Gcfortifmcs  point  du 
sauirc  pour  ce  iûur  là.. 

Sommaire  du  ch'cmin  ikCùnfimtmoplem^Vexmètie%. 

Chapitre    xvjiu,    ■. 


om 


fN  peut  cognoiftre:  par  f  obferuation  âcs  iour-  JNto^iwaw 
j  ncesdecefteprefenie.nauigarion  par-mer  y  ,quon  g^^^. 
;  peut  commodément  acheucr  le  voyage  en  quinze  tinofUe» 
\  iournees ,  moyennant  qi^oa-  aklcvent  fauorabk  ^xaki^ 

l  comme  nousiettfraej^Er|>0tà»repcter  nofk&ehe- 

min  par  iournees ,  finousnjcfuûlïOOspointjdemcurezà.GalHpo- 
K  au  deftroï&dcs  Chafteaux,  autrement  dfek  I&fg&xaçfe&àla-- 
-ville  dcChio,  nà  Rhodcs,nous  eu  mos  parfais  tout  ce  voyage  car 
hiîi<3tiours.Car dcHhodcs  en  &Lexandpc  jiQusBç&foes^taais» 
'  CCiL        " 


204  SECOND    XIV  B.E.      DES     S I  N"C  V  LA, 

:iours  &  trois  nuids ,  &  de  Chio  à  Rhodes  il  ne  fallut  que  deux 
iours&:deuxnuids,&  dcCoftatinopleàChiopeuton  venir^n 
deux  Jours  &  trois  nuids.'  Voila  comme  on  depefchc  beaucoup 
de  chemin- en  peu  d'heure, moyennant  que  le  vent  ibit  fauorablc. 

Des  deux  villes  à  ^Alexandrie  fjne  en  Erypte^Q*  l'autre  qut  efloit 
Colonie  des  Romains  en  Phrygie.  Chapitre      xix. 

g  E  lendemain  matin  nous  defcendifmes  du  nauire,  &ç 
-■■ali'amies  en  la  ville  d'Alexandrie.  Auant  que  parler 
[  d'Alexandrie,  dirons  premièrement  qu'il  y  a  eu  diuer- 
Dîuerps       ^v-H^.^4  Ces  Aiexandrics  :  mais  fur  toutes  y  en  a  eu  deux  reno- 
^lexan^     mees  :  Car  mefmcmcnt  des  le  temps  des  Romains  la  ville  de 
drtes.  ^   _.  Troyc  îagrande  ayant  efté  refaite  par  eux ,  .&:  y  ayans  enuoyé  des 
^Alexadne  cqlonies:Romaincs  >  la  nommèrent  Alexandrie ,  dont  Pline  faic 
euvhrygu,   mentîon)  commc auifi  AnneusSeneca en  la  mort  de  Cîaudius 
Caviar  :  Quero  (dit-il)  fororem  fttamftttltè  ftuâere,  ^ithenh  dimidiumJH- 
cet *Alexmâri&  totum&nnum  :  Car  c'eitoit  lors  vnc  eftude  pour  les 
.    "'Latins-:  &:  cft  celle  dont  Galien  a  fouuentesfois  parlé,  lequel  n'a 
-.  latnaîs  entendu  fînon  de  cefte  Alexandrie, ou  eftoit  Troye,  &  no 
lAhxxnlne  Jc  l'Alexandrie  d'Egypte  :  laquelle  chofe  on  peut  aflez  cognoi- 
d>  Egypte      fcQ  par  fes  eferits.  Il  fufKft  pour  le  prefent  traider  fuccindernenc 
£^sm  *'  les  chofesexquifès  concernantes  noftre  obfcruation  :  cardeferi- 
re  de  h  ville  d'Alexandrie  par  le  men  u  après  tant  de  grands  per- 
fonnages^e  ne  fëroit  que  rcdiâ:c.  Elle  eu:  fituec  en  pays  fablon- 
neux-defllîsvnepoinde,cardvn  cofté  elleà.  la  mer  Mcditcrra- 
nee5  &  de  l'autre  codé  eft  le  grand  lac  Mareotis ,  de  moult  gran- 
de eftendue.  Les  mefmes  muraiHes  qu'Alexandre  le  grand  feie 
anciennement  édifier,  font  enebr  en  leur  entier,  mais  Je  dedans 
delavilleneftpourlaplufpart  que  ruine  des  anciens  baftimens. 
Elle  fut  exprefîement  ruinée  quand  le  Roy  de  Frace  auec  le  Roy 
deCypre  forcèrent  le  Soldan  de  la  laifler  :  lequel  voyant  ne  la 
pouuoir  garder ,  la  feit  démolir.  Mais  depuis  on  y  a  reedifîé  des 
-maîfôns  peu  à  peujelon  qu'on  y  a  voulu  habiter.  Et  n'eitoit  que 
lcs.marchands  Chreftiensy  -tiennent:"  quelques  hommes  pour  le 
trafEc^s  marchandées,  elle  feroii  bien  peu  de  chofe.  On  yap- 
Pam  $Eç-y=  Porte  toutes  fortes  de  viures  ,'tant  du  pays  d'Egypte ,  que  de  Cy- 
pUt      ^  pre^des autres  lieux  voiiins.  Ld  para  :quicft  fait  en  ce  pays  là, 


OBSERVEES     VlK     V.    BELOK.  2,0J 

&  en  Syne,cft  formé  en  tortcaux ,  applaty  en  fouaues ,  demis  le- 
quel "ilz 'ont  couftume  femer  de  la  nigeile  franche.  Parquoy  on 
trouuecellcfemencecn  vcrïte  à  grandes  fâchées  parles  marche?, 
&  es  boutiques  des  marchads.Ilyadetoutcs  fortes  devinsquo 
apporte  par  mer  de  diuers  lieux  :  car  mefmcmcn  t  Cypre  n'en  clt 
gucrcsloing.Lcschairs,tancdc.Moutpn  que  de Chcurcau ,  de 
Vcau,&  Bœuf,y  font  moult  fauoureufes.Ils  ont  grande  quantité 
d cfpeces  de  Cheures,qu on  nomme  Gazellcs^cfqucllesancien-  v  • 
ncment les  Grecs  nommoyentOrigcs,quilz  tuent  alaharqu*. 
bufe  par  les  campagnes  :  car  elles  y  vont  en  trouppes.Lon  y  trou^ 
lïeauuudespoulles^desœufs.Àlexandrieeftfituecenlieuabo- 

danten  poiflbn  ,  ounousauons  recogneu  des  Brèmes  de  mer, 
Bars  MaWes,Dentauls,  Mulets,  Rayes,  Anges  >  Chiens,  Gour- 
nau*.  Mais'  encor  y  en  a  plufieurs  autres  qui  leur  font  apportez 
duNiUtantfraïsquefalcz.  Hz  on  tauffi^es  Grenades,  Moute,  _ 
Limons,Oranges>Pônçiçres>  Figues  de  Figuier,  *  Figues  de  M-  ^fc 
comorcs,  &  Carrubes ,  &  plufieurs  autres  fortes  de  rrmets ,  que  Mmf^ 
nous  n'auons  point.  Hz  ont  auffi  de  toutes  fortes  de  fcguraesyiçl-  ami^ 
quclzlercnoracftgrand.  Auffi  font  Hz  opulcns  en  coûtes  fortes 
de  b!edsscomme  Ri^Orge^ar^utremec  dit  Epeautrc.La  plan- 
te appelleedes  Grecs  Doîicos,y  portela  fleur  îaune.AuCi  outils 
grandequantitédeiafemécedVneefpecedepois,queies  Grecs  *££^ 

n\>ramêt£ai*ri,lesVcniricns-M^ 

&lcs  François  des  Certes.   Quiconque  voudra  fçauoir  quelle  ^^ 
chofeabondeleplusenvne  ville,  aille  fepourmener  par  les  pla- 
ces  aux  iours  des  marchez  ou  Ion  vend  le  gibier ,  le  poiflon ,  her- 
bagcsjefruiaagc ,  &  autres  hardes  :  &  il  comprendra  en  peu  de 
tcmpsleschofesdcquoy  les  habitansontleplusrchofcqui  nous        ^ 

a  efté  manifefte  en  Alexandrie.  Les  Egyptiens  ne  font  guère  de  ^^-^ 
repas  quiîz  n'ayent  vne  manière  de  racine ,  nommée  de  la  Coio-  Cûlou^ 
xalffc.Vilz  font  cuireaueclachair.  Ellceft  de  grand  rcuenu  a 
toute  Egypte  :  auffieft-cclachofeqdfony  vend  lemieux  parles 
.marchez  des  villes  &  villages.  Or  puis  que  fommes  en^  propos 
d5 Alexandrie,fuy  uan t  noftre  obferuation,auons  cy  retire  la  ngu- 
re  d'icclle,  pour  la  reprefenter  au  naturel.  .         " 

CC  nj 


TE.RÏtE  F.ERJ4.E   D'AF&IÇVE* 


OfcSERVÏES    >AR    P.    TSEXOÏ*.  *<>7 
VeUbefte anciennement nommée Hyma^  maintenant  Ciuette. 
Chapitre       x  x»                              *• 
E  confuîquicftoitlorsen  Alexandrie  pour  îc  fait  des 
Fk>rcntki$,auoit  vne  Ciuette  fi  priucc ,  que  fe  iouant 
aucc  les  homes  elle  leur  mordoit  le  nez ,  les  aureilles, 
fe^râC»  &  les  tares.,  fans  faire  aucun  mal  :car  ils  lauoyent 
nourrie  "dés  fa  naiflânee  du  laid  des  mammelles  de  femme.  C  eâ 
chofcrareàvoirqu'vnebeftcfi  farouche &:  maîaifec  aappnuoi- 
fc^deurcnnefipriuee.  Les  anciens  ont  bien  cogneu  la  Ciuette:  ^      r 
&:  prouucronsbïen  par  leur  authorité^uclle  doit  cftrcnommee  ^M 
Hy*na,combien  qu'ils  n'auoyent  iamais  apperceu  qu  elle  rendiit  raiereho^ 
vn  exercment  de  fi  grand  odeur  :  toutesfois  l'on  trouuc  bie  qu  il  nfrrmtc 
y  ait cuvnccfpece  de  Panthère  odoriférante.  Lcsautheursont 
parie  de  Hy  çna  comme  de  befte  fauuagc  du  pays  d*  Afrique  :  qui 
nousfakpenfcTquelaCiucttcencctemps  là  neêoit  point  gar- 
dée en^gc.  Mais  nous  Fayansapprinoifce,  nous  eft^^^ 
reuenuqu  elle  neftoit  anciennement.  Auffilenom  dont  nous 
rappellons,cfî  emprunte  àcs  autheurs  Arabes:  car  nous  auosde-  Sej0UaM% 
iaûTé  fon  ancien.Ellc  eftaappe  comme  vn  Bedouaut  ou  Taiffon,  râfo». 
mais  de  plus  grande  corpulence:  &:  fçachant^eile  a  vn  coduid, 
outre  celuy  de  fa  nature,  dont  on  tire  la  Ciuette,  pîufieurs  liions 
L-hiftoire  dcHya^pcnfoycnt queHyxnafuftvn  Blcreau   Bc- ^^ 
douau^ouTaiCTo^quiefttoutvn.  Mais  les  anciens  ^Ariftotc^^ 
ontnommélcBiercau/Throcus,  EUeporte  iescrin^noirsdcaus 
lecol,&lelongderefpincdudos ,  lefquels  eiledreffe quand  eft 
eourrouflee,  tout  ainfi  que  fait  vn  pourceau  les  ûens.  CeftdeJa 
quelepoifTon  nommé  Glanisa  auffi  cfié  nommé»  Hyaena.  Son  Gkms. 
mufeaueft  plus  poindu  que  celuy  <frmchat,&  a  fcmblablement 
delabarbc.  Elle  a  les  yeux  relu  y  fans  &  rouges,  ^  a  deux  uches 
noires  fur  les  yeux.  §es  aureilles  font  rodcs,approchatcs  de  celle 
d'vn  Bîereau.Ellealecorpsmouchccé/çauoircftqucicchapeft 
de  blanchaftre/urquoy  font  affifes  des  taches  noires:comc  aufli 
fes  ïambes  &  pieds  font  noirs ,  comme  ceux  d'vn  Ichncumon.Sa  idmtumèik 
queueeftlonguc,noirepar  défrayant  quelques  taches  blachcs 
pardefTous.  Son  paRuragceft chair  :  &eft  de  cor fage agile. Voi- 
la la  4cfcripti  on  de  la  Ciuctte.Maintcnant  qu'on  la  confère  aucc 
cclledeHyama:&  parla  on  voirra  que  ce  que  nous  nommons 
maiatenanxCittÇ"e,eftreHya:nadcsanciens.  ... 
"*'                      -                       CC    iiij  * 


JVoS  SECOND     LIVRE     DES      SINGVLÀ. 

Z,çportmB  dcU  Çwetteq&  on  mmmok  anciennement  IJytm* 


B*Uie  Co* 
tonne dePç: 


l&fcottrs  de  Suerfés  chofes  £\AÏexAn£ne:  &  des  ohelifques  ,  &  (nos 
eolojjès des  Égyptiens,.  Chapitre     xxi» 

E  iour  d'après  alîafmes  voir  la  haute  Colonne  de 
Pompée ,  hors  de  la  ville ,  def&is  vn  petit  promon- 
toire^ d'emy  quart  de  lieue  d'Alexandrie,  La  Co- 
lonne cil  d'admirable  efpoifïeur,  8c  dedefmefuree 
hauteur ,  plus  grofTe  que  nulle  autre  qu'ayons  ia- 
mais  veue.Les  Colonnes  d'Àgrippaau  Panthéon  de  Rome  Rap- 
prochent en  rien  de  Ton  efpoiueur  &  grofTcur.. Toute  la  mâflè  tac 
de  la  CoIonc,du  chapireau^que  de  la  forme  cubique,  efl  de  pier- 
ï}erreT7ke*   re  Thebaique,  de  la  mefme  pierre  dont  furent  faits  tous  les  Obc~ 
k^ue.       lifqacs  qui  ont efïé reEirezd'Egypte.L'o  did que Cefar  la feit éri- 
ger làpour  la  vi&oirequil  obtint  contre  Pompée.  Ccfte  Colon- 
■-   *nceft iî grofTe,  qu'il ferbit  maintenant  impoffiblc  de trouuervn 
ouurierqui  par  engins  îapeuft  tranfportcraiîleurs. Quand  on  efl: 
deffiis  ce  promontoire,  Ton  voit  bien  loing  en  la  mer,  corne  aurïL 
Uc  Mareo^cnzcnc^cvmc'  tournant  le  vifage  vers  le  midy,-on  voit  le  lac 
^  Mareotis  large  &:  fpacieux  ,  cnuironné  de  forças  de  palmiers., 

D'AJexandriç  au  fufdidlacn  ya  pas  demie  lieue. Les  campagnes- 

font. 


.OBSERVEES    TAR     F.BELQK^  %09' 

font  pourlaplusgrandepartiedefablon  mouuanc,  qui  feroycnc 
ftcrilesn'eftoicqa'itvcroiftd'ynchcrbe  nommée  Harmala  ,  &C  ^^^ 
aufli  des  Câpriers  fans  clpincs,  qui  portent  celle  manière  de  grot- 
Tes  câpres  qui  nous  font  apportées  da  ce  pays  la.  Car  les  petites  ckpUrsn*» 
câpres  viennent  es  Câpriers  efpineux  ,  qui  perdent  leurs  focihcs  rW 
en  hyuer.  Mais  les  Câpriers  fans  efpines.  d'Egypte    &  ceux  qui  Twn,~ 
font  Arborcfcens  en  Arabie ,  ne  perdent  point  leurs  fueihes.Les  tf*^ 
Tamarifques  ay  ment  grandement  à  croiftre  par  les  fabionsen  ce 
territoire,*  toutesfois  ailleurs  ils  ^cherchent  que  les  Iieuxhu- 
mides.  Lafufdite herbe dcHànnalacft  moule  femolaDieaMo- 
lv.  Ceft  vnc  efpece  de  rue  fauuage  que  les  Arabes ,  Egyptiens  &c 
Turcs  ont  àprefent  en  diuers  vfages.  Us  ont  couftume  de  sea- 
parfumer  tous  les  matins,  &  fe  perfuadent  par  cela  qu  ils  dechai- 
fent  tous  mauuaisefprits^:claadûnnérigrandv%eatelleher. 
bc ,  &  à  fafemenec  qu'il  n  y  a  fi  petit  mercier  qu'il  n'en  tienne  en 
fa  boutique,  conrnie  il  c  eftoit  quelque  precieufe  drogue.  Àpo>-  ^^j^. 
lôdorus  autheur  ancien  a  attribué  au  Souchet  ce  qu'auons  dit  de  y^ 
Harmala.difantquelcs  Barbares  ne  forcent  iamais  de  leur  mai-  ^k 
fon ,  qu'ils  ne  foyent  premièrement  perfumez  de  Souchet.  Cela 
.nousiquelquefoisfaitpenferquervrageeneftancienEntreles 
■    Ghofcsfinffiilicrcsîauenousauonsveuen  Alcxandne.lonc  deux 
/Vienilles,  aucrcmcc  appeilees  Obelrfques,qui  font  près  le  parais 
d'Alexandrie.  L  vnc  eildroidc,  &  entière  :  l'autre  eft  couchée  Se  ohd^ 
rompue. CcUequieftdroiaeeftbcancoup-plusgrandcquelau-  £^UXM*-  • 
trequiefteouchee.  Elle  pourroit  eftre  comparée  en  groflfcur a  dru. 
vnequieilàfainaPierreàRome.  Quand  P«lûnsd'vnObeii£- 
que/nous  parions  d'vne  des  choies  de  ce  monde  qui  eft  de  a  pius  ^  **" 
Grande  admiration,*  dont  l'on  eft  en  doute,  pourquoy  elles  ont  'A 
efté  taillées  fi  eftranges.  Si  l'on  n'en  voyoitqne  trois  ou  quatre, 
fon  auroicraiion  de  dire  qu  ils  ont  efte  taillez  par  la  cunoAite  de 
quelque  Roy  :  mais  voyons  qu'il  y  en  a  pluûeurs  ,  dont  les  vus 
font  moult  grands,  comme  font  ceux  qu'on  voit  derrière  laMi- 
iierûe  à  Rome,  &c  en  vne  place  près  le  Panthéon  ,:,&  la-haut  a  Ara- 
•    cœli   &  que  les  autres  font  moult  grands ,  comme  ceux  que  1  on, 
voit  au  Populo,  ■&  au  palais  du.  Pape  :  -{cachant  au  tu  qu'ils  font 
•entaillez  de  caraderes  Egyptiens  ou  lettres  Hiéroglyphiques^ 
pouuons  conclure  qu'ils  ont  efté  anciennement  taillez  pour  tuei- 
ue  furies fcDukhrc&otteftoyentconfiz  ksxoxpscn  leurs fcpul- 


HO  SE-COND     LIVRE     DES     Srl-iFGWL** 

turcs  au  pays  d'Egypte ,  &  non  pas  pour  dédier  atfcx  tcmpIes.Pïuv 
:J***?esl?tem  fieurs  voyans  vne  pierre  toute  d'vne  pièce  raafliue,fi  grandc,fi  le- 
r<g%ài*     gtre,  fîgrofTe,&  fi  bien  polie,ne  peuuent^roire  qu'elle  ne  foit  fai- 
ffarg.jt     te  de  mixtions  car  tous  Gbelifqucs  font  entaillez  de  pierre  The- 
hûmie.        baiqùc,  qui  eft  toute grenee  de  diuers  grams^yans  deux  ou  trois 
.ifiremium.  couleurs)commelapoiclrinedV«;Eftournfeau.  Qui  eftlaraifon 
poiirquoy  les  Grecs  la  nommèrent  iadis  Pfaronium  :  car  Pfaxos 
jcnGreceftàdire  vn  Eftourneau.  Mais  ils  penfent  mal  :  carfagri- 
eelure  ou  granelurc  luy  procède  de  la  nature  du  rochcr9qui  eft  de 
telle  couleur. Ce  qui  rend  les  Gbelifqucs  fi  admirables,  eft  dcles 
voirfaits  toute dVneièole  pierre,come  qui  imagineroit  vne  tou- 
relle quarree  faite  toute  d'vne  feule  piece.Tousîes  Obelifqucs  q 
on  voit  maintenant  à  Rome,cftoycntja  entaillez  en  Egypte?auac 
pocher  des  que  Romulus  euftmislepieden  Rome.  Le  rocher  dont  ils  ont 
obeUfaues.   eft£  pnns ,  eft  tellement  continué  fans  y  auok  aucunes  veines, 
<juc  Ton  y  po^rroit  trotruer  la  pierre  fortable  à  tailler  vne  tour 
-d vne  pièce ,  plus  grofife  &  pluslongue  que  ne  font  les  tours  no- 
toc  Dame  de  Paris,  silcftQitpou%lequ  on  la  peu  ft  car 
Ton  voirra  vac  moatagne  de  deux  lieues  de4ong  toute  de  pierre 
roaffiue  fans  aucune  veine.,  de  laquelle  caillant  lesColofTes  mi 
Obelifques4e  tcllelanguetrr  &  groCeur  qu'on  voudraj'on  trou- 
vera la  matière.  Il  y  a  trois  petites  montagnes  dedans  le  circuit 
des  murs  d' Alexandiie,qui  font  nommées  les  montagnes  des  ba- 
rmnes.       ncufcs ^  ^omme  cc  <m'on  aomme  à  Paris  les  voiries.  Les  beaux 
Jtmnta^  conduidsdJeau,ksgra€3descifternes,  &lespuisoufe  vient  ren~ 
%mdrk     drcleNil/ontvrayementchofesdignesdcvoirjlefquelsôntefté 
faits  de  fi  bonne  efto£e,ôdi  fumptueux,qu'ilsfontencor  en  leur 
.;•"  entier:  anflieftoyent ils  ncceflàires.  Les  habitans  d'Alexandrie 
les  rcmpliiTent^eau  vnefeukfois  Tan  ,  quand  le  Nil  a  inondé  E- 
■gypte,dont  il  leur  conuientèoirc  tout  le  long  de  l'année. Elle  en- 
4:re  par  vn  grand  canal  j  qui  remplift  premieremetîes  cifternes  de 
la  viiiCjOu  elle  fê  purifie,&  rend  claire.  Toute  la  ville  d'Alexâdrie 
eft  baftie  deflus  belles  cifternes  &  voûtes.  Elle  fut  anciennement 
baftic  de  forte ma-ffonnerie  de  pierre  &  de  tuillejd'autant  qu'il  ne 
$<&  de  P^^toiâ  que  bien  peu  de  bois  en  Egypte ,  finon  de  Palmiers ,  qui  y 


tmœ. 


fontfcequents  :  mais  ils  ne  valent  rien  à  en  faire  ouurage  de  char- 
%f£Z'     penterie.  Les  pay fans  d'Egypte  vont  par  les  campagnes  cherchas . 
^      les  Palmiers  auortez^ufqueis  ils  coupent  la  fommité,&;  là  trou- 


OBSERVEES      PAR     fr   B1IOS.  «X 

Qcnt  vne  blanche  mouelle ,  qu'ils  portent  vendre  en  Alexandrie, 
■faquelteifc mangent  crue:  &  alegouft  d'Artichaut.  Ceftceque 
les  anciens  ont  nommé  Mouelle  ou  cer-ueau  de  la  Palme ,  &  les  ^^  ^ 
"  Grecs  Enccphalon.  Mais  il  faut  entendre  qui!  y  adcpîufieuxs  P4^ 
fortes  de  Palmes:  car  mcfmeraent  en  auons  obferuc  vne  autre  cmkum^ 
efpece  efpineufe  en  Crcte^iffèrentcà celle queles,  mariniers ap-  rdme. 
portent  d;£fpagnc  par  mer,nommcc  Ccphaioni:qui  font  ces  pe-  £****>* 
titesPalmettcs  que  les  greffiers  fcefpiciers  de  Rouen  &  Paris  ve-  ^"^ 
dent  toutes  frefehes  en  leurs  boutiques,quinc  cooÛcnwjuequa- 
trc.ou  cinqfols  la  pièce. 

nterfonsiE^tei&lecombrtdvnMtYequieftMjîimm 
Vejj>AjtueclePk~ctUn<non.  Ch*$.~      xxtu 

,  Eshabitansd^lexadricnotîrriflentvnebefteno-' 
r  mee  Ichncumo»iqoi  eft  particulieremenwroBuee  ******** 
,  ervEgyptc.On  les  peut  appriuoifer  es  maifonstouc 
UinfîcoHimevnCna^ott.vnGBien.  Le  vulgaire*- 
o^^^vo  *»*cJ  ceffé  de  plus  le  nommer  par  fon  nom  ancien -.car  ils 
le  nommenren  leur  langage  Rat  de  Pharaon  Or  auons  nous  yea 
aucles  paufans en  apportoyent  des  petits  vendre  au  marche  d  A-  ^  ii  vh* 
lexandrie   ou  ils  font  bien  recueillis  pour  nourrir  es  maifons ,  a  r*on. 
caufe qu'ils  chaflendes  Rats ,  tout  ainfi-quc  fait  k  Belette  :  & 
auffiquMsfontfriandsdesferpents5.dont-ils  fcpaiflcnwndifac. 
ment  Ccft  vn  petit  animal  oui  fe  tient  le  plus  nettement^uil  eft 
ooffiblc  Ccux-qui  l'ont  fait  peindre  àiifcretion  fans  fcuiow  veu% , 
ne  lont  peu  bien  exprimer ,  comme  on  peut  voir  parceprefenc 
nortraid  :  caries  peintures quienonceûcéfakes  a  plaitancrccie* 
nen t  rien  du  naturel^ais  faut  entendre  que bqueue  foit  adiou- 

Heeau  portraid  comme  l'on  peut^coir^yaptes.-. 


SECOND     IÏVR.E     DES      SINGVI.A-. 

■Le  parmi  51  defàçknmmm^qudes  Egyptiens  nommmt 
Rat  de  Pharaon. 


Le  premier  que  veifmcs  en  Alexandrie  ,  fut  es  ruines  du  cha» 
ichneuman  ftcaU}icquei  auoitprins  vne  Poulie  qu'il  mangeoic.  II  eft  caute- 
leux en  efpiant  fa  pafture  :  car  il  seletie  far  les  pieds  de  drriçre  :  Se 
Taftitrao-ede  *pand  il  a  aduifé  fa.  proye,il  va  fe  traînant  contre  terre, &  fe  darde 
ïichnemio.  impetueufement  furcc  qu'il  veut  cftrangler,fe  paiflant  indirïerë- 
ment  de  toutes  viandes  viues,  comme  d'Efcharbots  ,  Lézards, 
Chameieons ,  &c  généralement  de  toutes  efpeces  de  Serpens ,  de 
Grcnouilles,Rats,  Se  Souris ,  Se  autres  telles  choies.  Il  eft  friane 
êes  oifeaox,&:  principalement  des  Poulies  èe  poullets  :  Se  quand 
il  eft  courrourTé,!!  fe  herifïbnne  faifànt  drefîèr  {on  poil,  qui  eft  de 
-deux  couleurs,cJeft  à  fçàuoir  blachaftre  ou  iaune  par  interualles, 
Se  gris  par  l'autre, rude  &dur,commevn  dur  poil  de  Loup.  Il  eft 
-de  corpulence  plus  longu-e  Se  plus  trappe  que  n  eft  vn  Chat ,  &: 
alemufèaunoir&poiotu'comnïe.celuy  d?vn  Furet,  Se  fans  bar- 
be. Haies  aureiîîes  courtes  Se  rondes,  Se  eft  découle  ur  grifà- 
iî:reatirant  tur  ieiannerpaiîlé,toatainfi  que  ecîuy  des  Guenons 
,     nommées  Cercopkheci.  Ses  iambes  font  noires,&:  a  cinq  doigts 
^s  pieds  de  derrière .,  dont  l'ergot  de  laparxie  de  dedans  eft  court. 


OBSERVEES      PAR     V-  >ï'Ï.OÏT.  *?f 

Sa  queue  cft  longue  ^cftgroflc  en  iceluy  endroit  qui  touche 
.aurabla&alalaDgotc&lcs  dents jleCha^lavncparcicuhcrc 
marque  qu'on  ne  trouuc  point  es  autres  animaux  à  quatre  pieds, 
^quiafàitpenfer  aux  authçurs  que  les  maries  portaient  aufli^^^^ 
bien  que  les  femellcsre'efî  qu'il  a  vn  moukgrand  pertuis  tout  en-  dm&  de  ^ 
tourne  de  poil ,  hors  le  c5duid  de  rexcrcmcnr,reflèmblant  quafi  Fidmem». 
au  membre  honteux  des  femelles.-lcquel  cor^uid  il  ouurc  quad 
il  a  o-rand  chaud.  Mais  le  condûid  de  l'excrément  ncîaifle pour- 
tant eftrc  fcrmé,en  forte  qu'il  a  vne  catiité  leans.II  porte  les  gem- 
toires  comme  vn  Chat,  &  craînd  grandement  le  vent.  Combien 
"  que  celle  befte  foit  pente,toutcsfois  elle  eft  û  dextre  &  agile,  que 
elle  ne  craint  à  fe  hazarder  contre  vn-grandChien:&: ^mefmcmec 
û  elle  trouue  vn  Chat ,  elle  1  cftranglc  en  trois  coups  de  dents.  Et 
source  quelle  aie  mufeau  ilpoindu ,  auffia  peinede  mordre  en 
vnegroflema{re,&nejçauroitmordrclamaind'vnhommeayat 

le  poing  clos.  Les  authçurs  en  ont  didpluûeurs  autres  choies,  & 
principalement  de  la  guerre  qu'il  a  contre  l'Afpic,  &  au  ffi  qu'il 
<leftrui&  les  œufs  du  Crocodile  ,  &quil  eftmoukvigiiant,luy 
^ttribuans  beaucoup  de  vertus  fmguiieres,que  n'auons  mis  en  ce  ^  - 
lieupoureuiterprolixité^penransratisfaircd'enbailleriadetcn- 
ption.Mais  pour-ce  qu'il  v  a  encore  vne  autrepetite  befte ,  qui  cîï-icUeumo» 
cfpece  de  mouche  gucfpe,nommee  aufli  Ichneumon  Vefpa ,  qui  ytf*.    . 
ineirxguerreTiiortelleaue^lePhalangion,&pourcequauom 
veulcurcombat.housafcmblcbonladcfcrirecncelicu  :  ^cït  f 
vneefpece  d'infecte  fans  fang  ,  ayant  lecorfagedvneauette  ou  auecUs    r 
<ruefpe;quieâmoukfembkbleàvnbiengrandfocmyaîlk  ,-dc^        - 
.moindre-corpulence  que  la ,gucipe,&  fait  aufli  fon  pertuis  en  xc^JebaaimM% 
ie  comme  le  Phalangion.  Et  toutesfois  &  quantes  quelle  trou- 
uc le  Phalangion3eîle  en  cft  fuperieure  :  toutesfois  laflaillanren 
fon  creux  5  s'en  retourne  fouuent  fans  rien  faire.  Aduint  ence  co- 
bat  que  l'Ichneumon  Vcfpa  trouuant  le  Phalangion  à  lefcart 
hors  de  ion  pertuis ,  le  trainoitaprés  foy  par  force.,  ainficomme 
Icformy  faitvncfpidcblé:&lcconduifoitpar  tout  ou  il  vouloir, 
combien  que  ce  ne  fuft  fans  grande  peine.  Car  le  Phalangion  fe 
retenant auec  les-crochecs  de  fes  pieds  9  faifoit  grand'  refiftence: 
piais  Mchncumon  le  piquoit.cn  diuers  endroids  deion  corps 
aucevn  aiguillon , qu'il  tkcàk manière desAucttcs,  &eft*nc 
laffédelera^ 


2*4-  S-ECOND     LIVRE      DES    SINGTLA- 

balefte:&  rcucnant  chercher  Ton  Phaîangion  ^ne  le  troauant  en 
l'endroid  ou  il  fauoit  laiffé,  fuy  uoic  Ces  pas  à  la  trace ,  comme  s'il 
îeseuft  fentisà-1  odeiir,comme  les  Chiens  après  le  Lieure.  Lors  il 
lerepiquoit  plus  de  cinquante  fois:  Etfe  remettant  aie  trainerje 
conduira  fa  fàntaile;,&  là- acheu  oit  de  le  tuer.  Yoyansksmar- 
reaux&Au*  chandife  qui  font  en  refemeés  magafîns  d'Alexandrie ,  drogue- 
tntebes,.       ries,&.  autres  fîngularitez ,  nous  auons  trou  né  des  peaux  d'Au- 
truches,auec  leurs  plumes  en  moult  grand*  quantité.  Car  quand 
les  Ethiopiens  les  ont  tuées ,  ilz  les  efcorchentJDc  la  chair  ilz  en 
viuent,  mais  troquent  les  peaux  àtefchange  auec  toutes  les  plu- 
mes pour  d'autres  hardes  :  lefquclles  puis  les  marchands  appor- 
tent vendre  en  A4exâ^ric,&  de  là  font  diftribuees  en  diue^ 
P4»4ckesdes  de  Turquie:  caries  Turcs  ont  auifi-bien  vfage  d'en  faire  pana- 
rf^-..        cbes, &£  les  porter  à  lear  turbant ,  eo-mme  en  France  es  armets, 
nîx>rions,  &  acouâremens  dé  teftcLes  iardins d'Alexandrie -,  & 
de  toute  Egyptc^hors  mis  au  riuage  du  Nil ,  font  malaifèz  :  car  il 
faut  incefTamment  tirer  1  eau  par  engins  auec  les  bœufs  pour  as?- 
roufer  la  terre.  Leur  Iofuim  eft  différent  au  noftre:car  celuy  làa 
itfutmmt*  fa  fteuriaune  5  moult  odpriferente..  Les  rofes  auif)  y  ont  la  fleur 
*£.-.  iaunÇjmais  fans  odeur.  ^ 

"Des  mœurs  des  Turcs  alexandrins  3  &  des  deferts  de  fàmél  ^Macarh  . 
'     & de -plu fieurs  autres  çhofes  d'Alexandrie..        Chapitre,     xxiii. 

s.Mdcarlo.    É^F§$ÈtIn<l ÏOUrnees  au  dclar  d'Alexandrie  tirant  -vers  Afri- 
|^^^^âr  que3il  y  a  des  deferts  qu  o  nomme  les  deferts  dcùi^Gt 

|||||p§f  ¥?cHio>c3ui ^té^confinsdfffainaAi^i^ouha-- 

s*Anthôw.  ^g^ff^,,  bieen  t  des  Cal  oieres  Ara  bes  y  qu  i  <:on  a  iennent  en  la 

religion  auec  les  Grecs:&  y  a  plufeurs  monaâéres  méfiez  d*Ara- 

besauccles  Grecs.  Eftanscn  Alexandrie  tronuafmes  quelques 

Gentiîs-bomxïîes  Vénitiens  qui  en  eftôyent  n  agueres  retournez 

Tammndei.àom  les  ws  par  cariofité  auoyent  rapporté  des  rameaux  &flçiïrs 

pierres /£jJ*deTha  marin  des  ,  qui  croisent là.   Q-n  y  trouueaufïi  fi-grandc 

ëh  qualité  de  pierres  d'Aigle^-qu'H  en  y*  a  charger  nauires:  defquek 

ofites.,       }^  j^  nwchands  apportoyent  anciennement  decelicu  là  à  Ra- 

p^raw^1116'  eàrKinccfcritqucla  pierre  Aquilinefu-rnommecCiiîîtes 

>^il  'cftoit  rrouuee  naiffan  te  en  Egypte  prés  la  ville  de  Copto.Lcs  an*  ' 

cieasnous -ont. lai£evnfccret  par  eferit  poufefprouaervnla?^ 


OBSERVEES    fA'H    F.    BEL  ON.     -        _     '      «fr. 

Ton  auec  îa  pierre  d'Aigle ,  qui  dure  encor  pour  le  iourd'huy  en- 
tre les  Grccs,&  duquel  Diofcoridca  fait  fpeciale  mention  :  mais 
ïïo.c  le  déclareras  totalement.  Quand  les  Grecs  veulent  cognoi- 
ftre  le  larron ,  il  faut  quilz  affembient  cous  ceux  qui  font  foufpe- - 
çonnez  du  cas,&  à  ce  faire  s'accordent  de  s'y  trouver.  Il  y  a  gran- 
des ceremonies:car  les  Caloier es  font  cela  en  difant  pluOeurs  pa- 
rollcs.-Faifens  vneipafte  fans  leuain,ilzforment  des  petis  pains  de 
la  groffeur  d'vn<Euf:&:  faut  que  chacun  de  l'afTemblee  mange  fes 
trois  pains,chacun  en  vnmorceau,&  les  auallc  fans  boire.  Nous 
fommestrouuezàcnvoir  faire  l'expérience  :  &ceîuy  qui  auoit 
commis  le  larrecin,  ne  peut  onc  aualler  fon  troi£efme$>etit.pain: 
'  &  Ce  cuidant  efforcer ,  seftrangla  quafi  :  ains  ne  le pouuant  aual- 
îer,îeTecracha.  Les  religieux  de  Grèce  gardent  cela  comme  pour 
vn  fecrer:&  ne  le  veulent  dircNous  auôs  entendu  que  c'eft  auec 
îa  pierre  de  l'Aigle ,  de  laquelle  mettant  vn  peu  de  pondre  parmy  ^^ 
k  pafte  en  forment  leurs  pains.Le  licu.quc  Cxùtt  nommoitPha^ 
ms,qui  lors  eftok  ifle,efl  mamtenat  en  terre  ferme,  &  y  a  vn  cha- 
"'  fteau  mal  aifé ,  &  fort  incommode  :  car  il  y  faut  porter  l'eau  cha^- 
que  iour  par  Chameaux,prinfe  des  cifternes  d'Alexandrie.  Tous 
lesba^in^ensd'Alexadriefontcouuertsen  terraffe, comme auf- 
fifbnt communernet  tousceux  de  tutquie^'Ar^bie,  &éc  Gre- 
ce,ou  les  habitans  fe  mettétknuiapour  dormir  aufrais^n  tout 
temps,tant  en  hyucr,commc  en  cfté.  Les  Egypties  &  Arabes  fur  £^tj-MS 
toutes  autres  nations  dorment  en  tout  temps  au  deicouuert  fans  ^ 
aucun  lia  :  &  moyennant  qu'iïzaycnt  feulement  qaelquepcnt 
manteau  ou  counerturepar  demis  eux,  iiznc  fc  fcrucient:&:  n  ont 
aucunv%e  delids,  fçachansqueîa  plume  kutfcroitfortdan- 
gereufe.  Ce  n'eft  donc  pas  de  mcrueille  aies  gens  de  ce  pays  la, 
ont  peu  obferucr  fi-exaâemcnt  le  cours  des  cftoillcs  :  car  îîz  les 
voyent-à  toutes  heures  delà  niu&,tant  quand  elles  fe  îeuent,que 
quand  elles  fe  couchent  :  ioind  que  le  temps  n'y  eft  point  cou- 
uert.  Le  naturel  des  Alexandrins  eft  de  parler  Arabe,  ou  More:  trieriez 
niais  les  Turcscûans  meaezauec  eux,  vfent  dcîigage  beaucoup  ^Uxadrhts 
différente  auffi  pource  qui!  y  a  pluûeurs  Iuifs3Italiés,&  Grecs^ 
Ion  y  parlediuers  langages.  Autresfoisontfceu  parler  Grec:  car 
quand  Alexandre  gaigna  l'Egypte  &baftit  Alexandrie  ,  il  eft  a 
pref uppofer  qu'en  y  biffant  des  colonies  de  fon  pays ,  îa  langue 
Greque  y  cftoit  meflee  :  &  de  fait  il  y  ades  Calo^eres ,  Iacobitcs, 
^  DD  iiij 


23&  SEC  ONl>     LITRE    BES    SÏNGTIA. 

&  Grccsjqut-y.onc-vn  logis  pour  Patriar chat aucc  leur  Egîifëf  m 
rendiroid  ou  anciennement  eftoit  le  corps  de  fain&Ma-rc,  auantr 
que  les  Vénitiens  rèuffent  enlcué  pour  remportera  Venife.  Les- 
Latins  &  les  Iuifs  aufïi  y  ont  fëmblablcmenc  leur  Eglife  à  part... 
Entre  les  fingukrkez  que  kconful  des  Florentins  nousmoftra: 

sjfik  voyant  que  cherchions  les  drogueries ,  nous  feit  goufter  d'vne 

racine  que  les  Arabes,  nomment  Bifch  :  laquelle  caufa  fi  grande 
chaleur  en  la  bouche,  qui  nous  dura  deux  iours,  qu'il  nousfem- 
bloity  auoir  du  feu.  Plufieurs  modernes  ontprefque  meurdry  les- 
auctçurs  Arabes  pour  eefte.ïacinc:&  leur  ont  tant :  donné  àcàcf- 
rnenties,  Se  fait  d'iniure  à  tort, qu'il  feroit  honte  de  le  dire:&  ton- 
tesfois eux-mefmes  ne  kcogneurent  iamais.  Elle eft  bien  petite, 

mpettus.  comme  vn  petit  naueau.Les  autres  Font  nommée  Napellus ,  qui 
eft.fi  commune  aux  drogueurs  Turcs ,  qu'il  n'y  a  celuy  qui  tfer* 
vende. 

ICayage  de  la  ville  d'Alexandrie  au  grand  Caire» 
Chapitre,    xxiur. 

(Près auoir  demeure  quelques  iotirs  en  Alexandrie^ 

)  feifmes  noz  appreffo  pour  aller  au  Gaire..  Lon  y  peut 

{.aller  par  deuxchemins3i5vn  eft  plus  long5par  le  Nil:8£ 

H'autre  plus  court,  par  terre.    Maispourautantquek 

Nil  auoit  inondé  l'Egypte ,  nous  alkfmes  à  Rofette  pour  nous 

ambarquer  furie  Nil.  Quand  nous  fufmesàdemic  lieue  hors  la 

ville  à' Alcxandrie,entra(mesen  vnefpacieufe  campagne  fablon* 

neufe,en  laquelle  croiîlènt  diuerfes  herbes ,  entre  lefqu elles  y  ea 

^Ambillk  a  vne  çpC  f  cs  Grecs  nommer  Anthillis,  &  les  Arabes  Kalirkqueî- 

*$p  le  ceux  du  pays  font  defeicher  pour  brufler,d  autanf  qu'ilz  n'ont. 

quebien  peu  debois:&encuifàntk  chaux aueccefteherbe,onc 

double  gain ,  1-vn  cà  quïlz-  portent  vendre  la  chaux  en  Alexan- 

•     driej'aurre  eit  qu'ilz  gardent  foigncufèment  les  cendres  de  i'heiv 

beque  nousnommons  de  kfbuldc^quilz  vendentaux  Venitiés. 

OnJmde    Elles  s  cndurciffcnt  comme  pierres?&  en  font  grandamas ,  tellc- 

fyuldn.       ment  qu'ilz  en  peuuent  charger  les  naukes  des  marchands  ,  qui 

les  viennent  acheter  pour  porter  à  Venifc,pour  en  faire  les  verres 

cUiÏÏùuxàe   ^  Criftailin.  Ceux  qui  font  les  verres  à  Maran  de  Venifejla  mef- 

Pm&s.        lent aiiec  des  cailloux  qulkfont  apporter  dcPauie  par  le  Teiîn: 

kfquels.^ 


OBSERVEES    PAR   P.    BïlON.  i*7 

lefquclz  proportionnez  auec  la  cendre ,  font  la  pafte  du  plus  êa 
verre  de  Criftallin.  Mais  les  François  ayans  n'a  pas  long  temps.  ^^^ 
commencé  à  faire  les  verres  Criftallins  ,ont  fait  feruir  lefablon  ^ 
d'Eftempesaulieu  des  cailloux  du  Teûn  :  que  les  ouuricrs  ont 
trouué  meilleur  que  ledi&  caillou  de  Pauie.  Mais  ils  n'ont  enco- 
rcs  feeu  inuenter  chofe  qui  puifle  {èruir  au  lieu  de  la  fufdi&e  cen- 
dre, ains  faut  qu'ils  aillent  en  acheter  en  Prouence.  Cefte  chofe 
nous  fait  penfer  que  ce  foit  la  mefme  qu'ils  apportet  de  Syrie  par 
lamer.Vray  eft  qu'en  Frâçois elle cfl: nommée  delà  Souîde ,  pre-  ^^ 
nant  fon  appellation  dvne  autre  herbe  nommée  Soldanelle ,  la-  So\^^^ 
quelle  bruflee  fait  cendre  de  mefme  vertu,&  de  laquelle  Ion  peut 
vfêr  en  défaut  de  la  Surienne. 

Des  chofes  fingulicrestroumes  entreh  viiïe^uélexandrte^  &  U 
ville  de  àofitte.  Chapitre    xx  v. 

i  Oustrouuionsîespaftcursfur  les  chemins  par  les 
|  champs  à  deux  lieues  d,Àlcxadric>pai«*ànslcsÇhc- 
;  uiesàtrouppeaux^quiontles  aureiîles  pendantes- 
>  fi  longues ,  qu'en  outre  ce  qu'elles  leur  trainent  par 
aï*nï&®&x&  terrc  >  d'auantage  les  ont  recrochecs  plus  de  trois, 
doives  contre  mont.  Leurs  pafteurs  ncvoulans  perdre  temps  >  en> 
la  campagne  ventent  le  fable,cherchans  des  monnoyes  antiques^ 
Car  il  aduient  quelquefois  qu'ilz  trouuent  des  mcdalîcs  &  mon- 
noyés  d'or  fin  &  d'argent.  Le  pays  que  nous  auions  au  cofté  dex-  ^ 
trc,eftoit  fpacieufes  campagnes  fablonncufes>ou  il  ne  croiflbit  fi-  ^  fô^' 
non  quelques  Capriers,&:  de  la  fafdi&e  herbe  de  Kali,&  de  Har- ™ 
mala.  Le  pays  qui  nous  eftoit  a  main  feneftre^ftoit  quelque  peu  ^ 
plus  cleué,ou  nous  veoy  ons  des  grands  villages  efpandus  ça  &  là  armait,- 
entre  les  forefts  de  Palmiers  .Quand  nous  eufmes  cheminéenui- 
ron  trois  lieues ,,  nous  trouuaimes  de  l'eau  douce  bonne  à  boire* 
qui  fembloit  vne  fontaine^mais  ce  n'eftoit  finon  vne  cruche  rem* 
plie  de  l'eau  du  Nii^qu  on  auoit  apporté  là  fur  Chameaux  dedas* 
des  oudres ,  dont  quelque  Turc  entretenoit  le  rempliflàge  pour 
l'amour  de  Dieu:Car  ikeftiment  grande  aumofne ,  &  mérite  de 
mettre  de  l'eau  furies  grands  chemins  pour  abbrcuuer  les  pa£ 
fans.Car  tant  s'en  faut  qu  on  y  puifie  recouurer  du  vin ,  que  inef- 
mement  es  villes  ceft  beaucoup  de  trouuer  de  l'eau  ftcfchc-Les 

EE. 


2Z&  '  SE  C  OND     ri  VI  E      DES     SING  V X  A. 

.  Palmiers  en  ecftendroiâ:,&quafî  par  toute  Egypte,font  moult 

pdL   d r  kauts:defquclz  y  cn  a  qu*  mr  vn  fcùî  tronc  portent  vingt  gros  ar- 
">»  iro^      ^res  %arez  *cs  vns  des  au  tres,ayans  tous  vnemefme  origine  àcC- 
fus  le  pied  d'vne  Touche,  Lanuid  nousfurprinten  chemin  :par- 
quoy  fufmes  long  temps  à  cheminer  ai  obfcur,fuyuans  le  riiiâgc 
delà  mer  Méditerranée,  quenous  autons  à  main  gauche  ;  &  ne 
Bousarreftafmes  iufquesàtantque  fuifionsvenusàl'eau  douce 
d Vn  àcs  premiers  ruiàeaux  du  Nil  :  lequel  nous  pafTafmes  à  gué 
tou  t  ioignant  le  bord  de  la  mer  ,  ou  aous  trou  uafmes  feulement 
_       vne  loge  de  pefcheurs ,  en  laquelle  il  n'y  auoit  que  du  fel  pour  fa- 
mùtargm     1er  les  po«Tonsv&:  aùffi  les  Botargues  quo  fait  des  œufs  des  £oi£. 
Mulets.       fbns  nommez  Mulets,  que  les  ancies  appelloyent  Cephaîi.Nous 
CefiS.       capafmes  là ,  &:  paflàfmcs  la  nuid  au  ferain  aucc  noz  Chameaux 
&  montures.  GepremierruifTeau  du  canal  du  Nil>neft  celuy  qui 
■CâMftcw»  £uc  nomm£  Canopicum>  Nili  oftium  :  &  n  auons/ceu  quel  nom 
*  il  auoit  anciennement.  Il  n  elt  pas  moult  parfond  :  car  nous  1  a- 

uons^afleà  gué,&:  mefmement  du  temps  que  le  Nil  auoit  inon- 
dé l'Egypte.  Nous  partifmes  le  iourenfuyuant  dudit  ruiffeau, 
cbeminans  par  campagnes  fàblonneufes,efquellcs  ne  croifïbyéc 
Tdmmffies  nulz  arbres  fînon  des  Xamarifques,  qui  viennent  en  grande  hau- 
cemv&qjortent  des  Galles .,  que  les  Arabes  nomment  de  no  pro- 
-chrmafd.   pre  moderne  Chermafel.  Lefquclîes  le  temps,  pafTé  eftoyent  gra- 
dément  en  vfàge  de  médecine, &  en  cours  de  marchandifcNous 
fùyuions  la  mer,&  trouuions  des  petis  M^rthes  noirs, qui  ne  s  e£ 
leuencpas  fort  haut  de  terre  :  car  le  vent  marin  les  tourmente  in- 
"cefïamment.  Les  Myrthcs  aiment  à  naiftre  le  long  de  la  mer,  qui 
eu  caufe  qu'ils  ont  efté  dédiez  à  Venus,  fuy  uant  la  fable  des  Poë- 
Mirtlesde*  tes,qui  difent  qu'elle  aprinsianaulance  cn  la  mer.  Apres  auoir 
l^rem&.  longtemps  fuy  ui  la  mer,nous  entrafmes  en  vne  campagne  de  fa- 
ble mouuant,  ounousveoyons  des  petites  montagnes  de  fable 
menu  que  le  vent  auoit  aiTemblé.  Cefie  campagne  eftoit  fterile, 
tellement  qu'en  quelque  forte  que  ce  fuft,  il  n'y  croiffoit  vne  feu- 
%ofette.       le  herbe.  Nous  arri uafmes  ce  ïbir  à  la  ville  nommée  Rofctte,  que 
%Afcht.       icS  Mores appellet  Rafchit  :  qui eft fituee fur  le riuageprcs d'vne 
des  grandes  bouches  du  Nil.  Les  habitans  de  cefte  ville  font  di- 
3^"        hgens  à  bien  cultiuer  les  iardinages ,  cfquelz  c  roi  (lent  àcs  Mufès 
auna  je    de  l'herbe  de  Papyrus,des  Canes  de  fucrc,de  Colocaflès,  àcs  Sy- 
faa^         coraores.  Les  Sycomores  font  arbres  de  verdeur  Ci  exquife ,  que  - 


-.    OÇSEÏtVEES     PAR     ?.    BELON,  **9 

■fznscontrcâiâ.  ilz  vainquent  tous  autres  en  verdure.  Hz  y  culti-  CoUujfes. 
«ent  auffi  vne  forte  de  racine  que  les  Italiens  nomment  Dolce-  ^Twr^- 
guiniXe^gâmsîeons  fetroimentfrcquensdeflus  Fefpecedar-  tàJnmsaU 
briûeau -,  qui eft  n oramé  Rhamnus  al  tera„  Lequel  Caméléon  fc  terA 
tranfmueeu  plufieurscotueurs.Gommunémentileu;  verd,  tirât  camekon. 
rurlciaunc, quelque foisfur  le  bleu.  Cela  efl  caufe  qu'on  ne  le  Nourriture 
peu  t  facilement  apperceuôir  :  car  eftant  affis  defïùs  les  rameaux  &*  cameleo, 
qui  fontreueftus  de  verdeur  pareiîlc,combicn  qu'on  regarde  eu-  Nature  du, 
rieufement  ,  toutesfois  Ion  a  peine  à  le  trouuer.  Il  fç  nourrit  de  aw  on~ 
Moufches,Cheniiles,£fcharbots,  &  Sauterelles ,  viuant  à  la  ma- 
nière des  Serpens,quimangenttoutesiortcs  de  petites  beftes  in- 
fectes, lefquelles  auons  fouuét  trouue  regardas  en  ion  eâomach^ 
quand  en  raiiions  lanatomie.  Aucuns  ont  ditquelesCamcleos 
viuent  feulement  de  vent.  Qr  efl  il  qu'vn  Caméléon  demeurera, 
y  n  an  en  vie  fànsjrien  mangep,  qui  neft  pas  choie  difficile;  àcroi-r 
re*.car  nous  auons  veu  des  Serpens  de  diuerfes  fortes  viure  j'efpa- 
ce  de  dix  mois  ,.  fans  leur  donner  aucune  choie  à-manger.  Vray 
eft  qu'il  faut  lent  bailler  queîquefois,vn  peu  d^eau  à  boire. 

"Oekv^l&de RofettekUbomhe au JSrU ^nommée  OJlmmCAnopicum*    *ïfct^ 
Chapitre     x.xvl. 

jOfêtte  efl  vne  belle  ville,  fans  muraiîles.Les  Vem-  oÇ^-ier     ^. 
tiens  y  tiennent  vn  officier  nemmé  vn  Conful ,  ou  ^  ymit'tm^, 

.  bien  eflautremcnt  appellé'vn  Bâillé ,qjii  leur  ièrr  en  toutes, 
pour  le  trafïïc  de  la  marchandiic.Les  grands  naui-  "Mile»  £e* 

1  respeiment  aborder  dedans  le  Nil,,  iufqucs  à  ioin-g?/"'- 
dreles  maifbns  de  la  ville»  Il  n'y  a  ville  au  pays  du  Turc  fur  les  ha- 
ureSjtanx;  foit  elle  petite,  ou  les  Vcnitiês  n'ay  ear  quelqu'vn  pour 
les  admonnefter  des  marçhandifès,tataux  ports  des  fleuues ,  que~ 
de  la  mer,  ou ea terre  ferme  :  qui  euVvn  grand  bien  pour  eux ,  Se 
dont  il  aduient  qu'iizont  nouuelles  de  toutes,  les  parts  du  mon- 
de. Auffi  fçauent  ilz  en  quel  pris  font  les  marchandées  desna-  - 
tions  ioingtaines  ,,  qui  efUa.  caufe  qu'ilzpaffenttoutes  au  très,  ré- 
publiques es  chofes  de  traffic*  Et  f  ilz  fçauent  qu'il  y.ait  quelque 
marchandife  à  enleu  er  de  qoejquc  port,  lors  ilz  expediront  leurs 
gens,àrln  qu'ilzen  puifrentauoirle^ain.  Il  y  f  ynj^tjtChafoau- 
aifcftp.rcs4tt.Nil»  ioi^nançKofctte^Utué  du^coftéxledeuers  Àte- 

EE    ij^  : 


ZlO  SECOND     LIVRE     DES     SINGVLA, 

xandrie.  ïl  n  y  a  pas  bonnement  deux  lieues  depuis  la  bouche  du 
Nil  iufques  à  Rofettc.O  n  y  parle  Arabe ,  comme  par  toute  Egy- 
pte. Plu fieurs  Iuifsy  habitent,  quife  fontfibicn  multipliez  par 
tous  les  pays  ou  domine  le  Turc,  qu'il  n'y  a  ville  ne  village  quilz 
n'y  habitent  Se  ayent  multiplié.  Auffi  parlent  iïz  toutes  langues: 
chofequinousabienferui ,  non  feulement  à  nous  interpréter, 
maisaufllànousracompterlcs  chofes  comme  elles  cftoyenten 
ce  pays  là.  Nous  trouuafmes  de  telle  manière  de  viures  au  mar- 
ché de  Rofette  qu'en  Alexandrie.  Les  forefts  de  Palmiers  font 
vmbre  à  la  viile.Lcs  maifons  font  faites  tout  ainfiqu  elles  font  au 
Caire.  Hz  ont  grande  commodité  du  bois  quilz  rapportent  de 
Conftantinople  en  leurs  nauires:  CaraliansàConftantinople, 
ont  toufiours  leur  chargea  pour  ne  venir  àvuide  fe  chargent  de 
bois  pour  baftir  en  leurs  pays  i.  car  il  n'y  en  a  point  qui  vaille  en 
«  Egypte.  Les  animaux  d'Egypte  pour  l'abondance  du  pafturage, 

x-  &  la  bonne  nourriture  des  herbes  arroufcesduNil,&iatempc- 

„  ,     raturedu Climat, fontdcgrande  ftature.  Les  Beuffles ,  Bœufs, 

MoutosaE*  ^,  r^\ „  ir„.,  \iA,.mnc  Kr  Ph^nres  v  fonr  mouk 


mtc~ 


Chameaux,Cheuaux,Àfnc$,Moutons  &  Cheures  y  fonr  mouk 
grands.  Les  Moutonsy  font  fort  gros  ÔC  gras ,  qui  ont  la  queue 
tramante  iufques  en  terre,  fort  large,  fcefpoifle.  Davantage  il 
leur  pend  vne  peau  le  long  du  coi,  tout  ainfi  que  fait  le  fanon  aux 
bœufs,  qu'on  appelle  en  Latin  Palearia ,  &  font  rcueftus  de  laine 
noiraftre. 


xxvii. 


CtQtÀUf. 


VespefchmrsdHJSriL  Chapitre 

TfgSLyaplufieurs  gens  à  Rofette,  qui  ne  viuent  que  du 
gtâgaing  quilz  font,pcfchans  le  poiifon  du  Nil  :&  ont 
cefte  chofe  particulière ,  qu'ilz  vfcnt  en  leurs  barques 
&:naffellcs  des  facs  qui  font  fous  la  gorge  des  oifeaux 


que  Pline  a  nommez  Onocrotaîi ,  qui  tiennent  quafi.  emman- 
chez au  bec  del'oifeauàla  forme  dvne  raquette  ,  dontfe  fer- 
uentaefgoutter  leur  bateau.Et  quand  telz  becs  font  liez  deuers 
la  partie  de  la  cefte,fonc  c5me  vn  cercle  en  rondeuncar  quad  roi- 
feau  eftoit  en  vie,ii  vfoit  de  cefac  corne dVn  fécond  eftomach  :  a 
fin  que  quad  il  auoit  beaucou p  auallé  des  coquilles  &  moulles,& 
elles  fentas  la  chaleur  feftoyetouuertcs,il  y  euftlcas  plusgtadej- 
pace^  les  ayâs  reuomics,mâgcaft  leur  chair  feparecs  des  coqml- 


O  B S EHV1Ï S    * À K    V*  lEEOlf,  lit 

îe$.Cefàc  cft  de  telle  nature ,  que  l'humidité  ne  le  peut  corrom-  ^^ 
pre ;  parquoy  il  dureiong  temps  aux  pefchcurs.  Pour  Onocrota-  Bouest4^ 
lusnous  n'entendons  pas  nos  Butors ,  quiont  nom  en  Latin  Bo-  p^ 
aesuuriy  &font  vn  cry  comme  vn  Bœuf:  ne  auffi  des  Pales ,  qui  P^r4^  , 
ontlcbeclargeàFextremité:  maisde  ceux  qiTAriftote  nomme cignet. 
Peîccanes.  Ils  nagentfur  ïeau  à  la  manière  des  Cignes  &  Gyes,&:  qyes. 
font  gros  6c  corpulens,c6mc  vn  grand  Cygne,&,  font  tous  blâcs, 
ayans  les  ïambes  6c  pieds  larges,  entre  cendré  6c  noir. 

Voyage  par  caU^deRofette  au  Caire  ;  &  deplttfteurs  chofes  qui 
font  fur  le  NiU  Chapitre     xxvili. 

Ovs  motafmes  en  barque  defTus  le  Nil  pour  aller  au 
►  Caire,  &  aucc bon  vent  de  Trcmontancfauorable, 
!  qui  nous  donnoit  en  pouppe ,  cxpediafmcs  bien  toft 
wwr+^nofae chemin.  Le  NildefcendduMidyau  Septen- 
trion,^ nous  falloir  aller  contre  le  courant  de  i'eau  .Quand  nous 
fiifmcs  quelque  peu  auancez,  &:  queufmespafTé  à  l'autre  riue, 
chacun  femiftàterre  pour  cheminer  le  long  du  Nil.  Ceftoitvn 
moult  grand  plaifîr  de  voir  le  pays  fi  herbu.  Ceux  qui  fuyuent  le 
courant  du  Nil  aiians  au  Caire,ne  vont  pas  par  le  pluscourt  chc- 
min,a  raïfon  de  fes  deftours.  La  plus  grande  partie  des  beaux  vil-  f1!U    j£s 
lages  d'Egypte,  font  baftis  le  long  du  Ni!,tant  pour  la  cominodi-^£ 
té  de  l'eau  douce  qui  inôde  la  terre,  que  pour  arroufer  les  iardins. 
On  en  voit  auffi  quelques  autres  à  cofté,eflongnez  du  Nil  :  mais 
ont  faute  d'eau ,  grande  partie  de  l'année.  Nous  arriuafmcs  à  vn 
village  nôméAnguidie.  Plus  outre  en  trouuafmcs  vn  autre  plus  ^f™^ 
grand,nomme"Mahateïimie:  puis  allafmes à  Dibi ,  6c  de  làà  vue  3^r* 
petite  ville,! demie iourneede  Rofettc,  appeilec  Nantubes  y  qui  ^ 
tient  les  deux  riuagcs  du  Nil,comme  peut  eftrc  Beaucaire  6c  Ta-  Nmtu^^ 
rafcon.  Le  Nil  en  ceftendroid  n  eft  point  plus  large  en  fonça-  Elmime. 
nal,qu  eft  le  Rofnc  à  Lion.  Plus  outre  nous  trouuafmesle  villa- 
ge nommé  Elminie.  Nous  depefchafmes  beaucoup  de  chemin 
cefteiournee  :  cafnous  auions  bon  vent  à  propos.  Les  iardinages 
de  ce  lieu  6c  les  terres  eftoyentja  inondées  du  Nil  >  &  enuirpnees 
de  forefts  de  Palmiers  de  tous  çoftez.  Auffi  les  terres  y  font  fepa- 
rees  parhayes  faiâes  de  l'arbrifTeau  de  Rhamnus ,  d  itèrent  à  no- ^^^^^ 
ftre  Groifelier.  Auffi  trouuios  àc$  Tainarifqucs  chargez  de  leurs 

EE  iij 


Z-Z-%  SECOND     LITRE;     DES"     SINGVLA, 

Grofihcr.    Galles.  Les  champs  en  pluficuxs endroits  eftoycnccnfemcnfe 
mlh        de ^iz  5PâPyrus>&  Mufa,fir  ésautrc&cndroicb  de  Colocane.  Et 
coliàfe..    Pource  %ue  cefte-  Çolocai&  cfUuffi:  nommée  Lotus ,  8c  Febuè 
z<>^        d?Egypte,ayas  veu  qu'ils  ne-nous  auoit  de  rie  feruy  faire  diligëce 
Febuz  d'E*  àc  chercher  de  Tes  feineces,&  que  niefrae  ceux  du  Caire  s'en  fons 
£#**.        mpeques,  voulons  inférer  quelle  n'en  a  point:auonseu  occafion 
d'enquérir  laraifonpourquoy  lesaucheurs  anciens  l'ont  nômee 
Febue  d'Egypte ,  fçachans  bien  qu'elle  ne  produit  aucunes  Feb- 
ues.JSfous  maintenons  qu'il  en  croiflparles  ruifTeaux  de  Crète: 
car  nous  y  en  auons  trouui  de  fàuuage:  mais  les. Egyptiens  la  cul- 
tiuent  diligemment.  Etala pgrfin auons trpuué lârfource  de l'er- 
reur.C  eft,qu'Herodote  tref-ancien  autheur  a  parlé  de  deux  for- 
tes d'herbes  venans  au  Nil  ,  dont  l'vne  auoit  la  racine  ronde  qui 
'  eft  la  Coîocafîè  :  l'autre  porte  quelques  chofes  en  vne  tefte ,  qui 
refîèmblentà  noyaux  d'Oliues.  Les  autres  autheursquiiont  ve- 
nuz depuis luy.,.fuyxians  les. enfeignesl'vn  de  l'autre,  en  difènc 
ainiï  que  bon  leur  fcmble..  Car  meimement  quandTheophrafte 
dit  que  faracineeflefpineufe}ilfetrouue  autrement.  Diofcorids 
a  dicquafimcfmes  paroiles-que  Theophrafb,  defcriuantlaFeh^ 
ued'Egypte.  Et  Pline  l'ayant  traduict  d  eux ,  dit  femblabtes  cho- 
Fa&kEgy*    fès.Parquoy  ferons  bien  d  opiniô  que  pour  Faba  AEgyptia  nous 
pw*.  entendions.îes  vrayes  Febues  à  manger ,  nées  en  Egypte.  Galiea 

mefrnes  nous  fembje  auoir entendu  des  Febues  communes  Kaur 
îiure  des  aliments  >qu an dilparîe^des  Febues  d'Egypte.  Et  pour 
efclaircir  ce  que  Pline  dit  que  les  Egyptiens  fontdiuerfes  fortes 
de  vaiflèauxauecfesfu  cilles,  faut  entendre  qu  elles  font.larges, 
&parcelailstrouûrènt&  plient  comme  vncornet,en  forte  qu'ils 
mfeduxde  peuuent  puyfer  de  l'eau  du  Nil,&  la  boire  :  car  après  qu'ils  en  ont. 
Mies  de    bcu,i!slesiettent.  A  la  fin  nous  arriuafmes  à  vn  grand  village  no- 

JB°mmial     m^  ?£~^~^*  ^e  Pavs  ^%yPtc  Ii0US  apparoiiToit  tout  plongé  ea 

J'eau ,  excepté  qu'il  y  a  des  digtics  en  aucuns  endroi&s  5  efleuecs 

pour  aller  dvn  village  à  J'autre.  Les  habitans  pour  obuier  à  l'ino- 

datian  du  Nil ,  font  contraints  faire  les  maiibns  des  villages  es 

lieuxpluscmincnts,  defqoelslon  en  voit  grande  quantité;  car 

lc„pays  eft  piat:&; lesmaifons  eftans  baftics  de  graffe  terre  du  lieu, 

,  v      ayans  la  couuertureenappoin&ifïànt  en  façon  d'vne  rufche  à 

faMg^    miel,  apparoilTenjude  bien  jojng.  Ils  en  couurent  aufli en  terrait 

-'-        fcs3en  façon  de  plate  forme ,  $ui  eft  vne  modk  çpmn^une  àtoiuç 


0"B  SERVIES     Ï1X    :î.   BELoST.  Zl$~ 

'Grèce  &  Turquie.  Ils  ont  fi  grande  difeommodité  de  bois  &de  . 
pierre,qiTC  leurs  maifbns  ne  font  que  petites  logettes:  Car  il  n'y  a 
non  plusd'e^>ace  leans ,  qu'en  vn  petit  tect  à  loger  ïçs  oyes.  La 
raifon  eft  qu'ils  dormen  ^bornent,  &  mangent  ordinairemcntdee 
horsaudefcouuert  defTous  les  arbres,  ou  bien  poureuiterîa  ver- . 
mine  ,  ou  pour  chercher  la  frefeheur  :  car  il  n'y  fait  point  de 
pluyes  l'hyiier.  Et  l'Efté  ils  ne  cherchent  point  la  freicheur  en 
leurs  loges,ains  defTous  les  Palmiers^  Les  Tamarifqoes  croifTent 
en  Egypte indirferemmét,tantcn lieuxhnmides , quenpays  fec, 
tellemét  qu'on  en  voit  des  petites  foreuses  lieux  aridcs,toiït  ainfî 
que  fur  les  riuages  humides.  Lefquels  TaTnarifques  font  fichar»- 
gez  de  l'excrefeence  qu'auons  nommée  Galle,  que  peu  s'en  faut 
que  les  branches  n'en  rompent.  Ce  nousfembla  chofe  fort  nou~  Caflor 
ueîle  de  voir  ce  mois  de  Septembre  vn  oifeau  de  riuiere,  lequel  6*feM*- 
les  François  (pourcequ'iJ  îsm  dommage  es  eâangs.,  commevn  £l™re- 
Caftor)  le  nomment  vnBicurc,  &  les  Latins  Vulpanfèr,  pour-  VuîAnJ&r- 
'  menant  fes  petits  nouvellement  efcîos  dedans  le  Nil.  Les  oifeaux 
de  riuîercsqui  communément  fe  retirent  des  pays  Septétrionaux 
es  tempsd'hy  uct ,  fe  vont  rendre  en  Egypte ,  &  làcouuent  leurs   - 
petits^  s'en  retournent  i'Eftéyfuyahtsk  violente  chaleur  du  fo- 
îeil,  qui  leur  fètoit  intolérable, 

J>es grandes  villes  &  villages  £ Eppte^fitue^Jîat k  Ntîje longées 
riuages ^ottrU  commodité de 7Vua.. -.-.-'..  . 

Chapitre      xxix,  .      . 

1  Àiîàns  par  Berimbaljplufîcurspcrits  garïbss£gy- 
)  ptiens  fe  iettoyent  dedans  l'eau  au  courant  du  Nil»  ; 
|  pour  pefcher  du  pain  qu'on  leur  iettoit  exprefïè- 
ment  du  bateau ,  à  fin  d'en  auoir  le  pîaifir  dclcs    - 
voir  fi  bien  nager.  Ils  ne  font  non  plus  d  eftime  de 
fè  mettre  en  l'eau ,  que  fçroyent  petits  Canards» 
Continuan  s  noftre  chemin  auec  vent  de  TVemonrane>arriua£- 
mes  en  vn  grad  village  nommé  Sindou,  &  à  main  dcxîre  eft  Dîu- 
ruth.  Et  tant  fifmes'q  nous  vinfmcs  loger  à  vne  grade  ville  nomee  St^doM- 
Foua.  C  eftoit  anciennemet  vne  ville  grade  eôme  le  Caire:&  en-  Jf"1*  * 
cor  pour  le  iourd'huy  il  n'y  a  aucune  ville  en  ccrj&  fçrme  d'Egypjçc 
■' .  j  '  "  EE  iiij 


Berimhd. 


£Z4  SECOND    LIVRE     DES    SINGVLA. 

après  le  Caire,  qui  foit  plus  grande  que  Foua.  Elle  eft  beaucoup 
plus  grande  que  Rofètte.  A  l'oppofitc  de  laquelle  y  a  vne  grande 
ifle  cultiuee  de  cannes  de  fuccre ,  de  Sycomores ,  Palmiers  ,.  Co- 
îocafîès,  &  toutesfortes  de  légumes  &  bleds  r5c  de  riz ,  qui  encre 
autres  chofes  eft  de  grand  reuenu  à  Egypte.  Nous  paffafmes  la 
nuid  à  Foua,attcndans  le  iour  :  &  encore  que  nous  eu  (lions  bon 
vent,les  mariniers  ne  fevouloyenc  fier  à  nauiguer  de  nuiclences 
endroids  là,d  autant  qu'il  y  a  plufieu  rs  deftours  ou  le  Nil  eft  fort 
raniflant.  Il  a  Ton  cours  quafi  auuxvifte  que  la  riuiere  de  Loirc,ou 
peu  s'en  faut.  Il  y  a  des  endroids  ou  il  va  quelques  fois  droide- 
ïiient,  &  ou  l'on  peut  nauiguer  la  nuid  à  voile  defpîoye  auec  bon 
vent  fans  auoir  point  de  crauide  :  car  il  y  eft  plus  lent  que  là  ou 
il  prendfes.deftouts.. 

Que  le  Nil  mis  en  compxmfon  ,  eft  quafîfemhîahle  l  ht  nwerz 
du  Pau.  Chapitre     xxx. 

Peine  pourrok  on  trouuer  riuiere  en  noftre  Euro- 
pe mieux  approebate  du  Ni^que  le  Pau  y  au  moins 
depuis  Ferrareiufquesàlamer:  car  Tony  peut  fa- 
cilement monter  à  voile  deiployee  contre  le  cou- 
rantde  l'eau:  chofe  qu'on  peut  au  m  faire  enXo  ire, 
comme  au  Nil,&  au  Pau .  Mais  celle  de  Loire  neft  pas  profonde. 
ToutesJcs  manières  des  barques  &:  vaifïeaux  du  Nil,.font  dmem- 
blablcs  aux.  bateaux  &  barques  àcs  autres  riuieres  :  autli  eft  ce 
chofe<*enerale  que  les  bateaux  font  différents  en  tous  lieux,  fêla 
la  nature  des  fleuucs  :  car  les  hommes  s  efforeans  d'approprier  les 
vaiieaux,  félon  lanaturedu  lieu^nfiiynent  proprement  le  cours 
de  la  riuiere.Car  comme  la  riuiere  du  Tibre  eft  moult  rauiftante* 
7^         ayant  fon  lid  &  canalmoult  profond*  &  les  riues  moult  hautes^ 
faut  que  quand  ils  branûent  à  la  riue  3  ou  fe  garrent  ,.fi  le  vaifTeau 
n  au  oit  les  deux  bouts  aufli  haut  que  les  orées  du  Tibre ,  il  fau- 
meaux  ia  droit  qu'ikeuCent  vne  efchelle  ,  parquoy  les  vaiûeaux  y  font 
Tihr^         eftroids>re#emblansà.vn  croiuant:Car  les  proues  &  les  pou  ppes 
font treshautes  y  fe  terminans  en  poindes  eileuees  contremont. 
Faut  auflique  les  gouuernaux  foyent  emmanchez  à  quelque  îô- 
gue  perche,&:  que  lé gouuerneur  ibit  bien  haut  :  autremec  ceîuy 
quiçoniduklebatcau^nefourroit  voir  fon  chemin,  s'il  neftoic 

cncxuchâ 


Jim». 


OBSERVEES     PAU    *.     BELON.  22,J 

encruché  bien  hau  t.Mais  !c  Nii  ayant  les  bords  à  âeur  d'ea^por- 
te  les  bateaux  bas,larges  &  plats.Les  bateaux  du  Pau  font  courts,  **£**  ** 
profonds,couuerts,  rondelets  :  &onc  ieurgouucrnail  aucofté,  ^^  ^ 
comme  aufîî  ceux  du  Tibre ,  &  du  Pau ,  qui  peuucnt  defeendre  PaUt 
en  la  mer,  &  aller  iufques  à  Venife.  Les  bateaux  qui  font  de  long  $ateaux  <k 
corfa^e,  &  qui  n'ont  lcau  profonde ,  comme  en  Loire,  ont  le  seine. 
gouucrnail  derrière  en  timon  ,  &c  en  Seine.  Les  bateaux  du  Nii 
ne  font  pas  communément  moult  grand.  Ceux  qui  ont  prins  oc- 
casion de  dire  qu'il  y  a  des  eaux  qui  peuucnt  porter  plus  grands 
bateaux  &  plus  pefants  fardeaux  les  vns  que  les  autres  en  mcfme 
profondeur  :  mais  mettans  la  riuiere  d'Aifc  en  exemple ,  qui  cftat  Jf^ere 
plus  cftroi&e  que  Loire,porte  trois  fois  plus  de  charge ,  attribuas  t^ft. 
cela  à  1  eau  ,  &'  non  à  la  profondeur,fembîent  n'auoir  fuffifànt  ar- 
gument. Mais  pource  quececy  ne  gift  qu'en  i'experien  ce^ce  dou- 
te eft  bien  aifé  à  vérifier.  Quand  le  Nil  eft  grand  inondant  tour 
le  pays,aîors  il  eft  trefgrand ,  &  porte  de  trcfgrands  bateaux ,  qui 
n'y  nauiguent  fmon  durant  l'inondation  :  car  quand  le  Nil  eft  ta- 
ry,l'on  monftre  certains  endroits  ou  vn  homme  eftant  à  cheuat 
le  peut  pafïèr  à  gué.  Le  Nil  eft  nauigabicà  la  voile.Car  ne  les  mo- 
taignes  ne  beaucoup  deforefts  ne  luy  oftcntlc  vent  non  plus 
qu'au  Pau.  EtcommclcsPoupîesnai&ntauriuageduPau,quL 
oftentleventaux  mariniers  en  quelques  cndroi&s.,  toutamiieft 
des  Palmes  fur  le  Nil,  Les  pefchcurs  du  Nil  ont  cela  de  commun  ?enaeim^ 
aucc  ceux  du  Pau ,  que  tous  deux  ont  de  l'eau  au  fond  de  leur  ba-  Nl^ 
tcau,marchans  toutesfois  par  deûTus  vne  claye  tiiTuCvainû  demeu- 
re leur  poifïbn  aurons  du  tout  en  vie ,  &  marchent  fur  leur  claye 
iàns  auoir  les  pieds  mouillcz.Continuans  noftre  chemin,&  eftas 
quelque  peu  au  defîus  du  villagcde Sindô  veoy os l'entrée du  Ca-  Su*f*f\ 
Bai  qu'Alexandre  feit  encaucr  pour  conduire  l'eau  en  Àîexadrie, ,  j^jJ^ 
pour  réplir  les  ciftcrneSjpuis,  &:  fontaines  de  la  ville  ilequeinous 
îaiflafmes  à.  main  gauche.  La  terre  quienfuft  ofteeen  faifant  fou 
fbfte,fe  voit  encore  de  cofté  &  d'autreauxbocdsdu  canal,&n'cfi 
ladite  entrée  qu'à  vn  quart  de  lieue  dudit  grand  villagenommc 
Sindon.  Le  pays  que  nous  defcouurions  à  main  dextre ,  eftoit- 
quelque  peu  plus  elîeué  que  n'eft  celuy  du  cofté  de  feneftre  : aufli 
cftilplusiablonneux,  &pat  confequent  d'autant  que  le  Niine: 
touche  pas  iufques-  là}en  eft  plus  fterile^  Mais  le  collé  du  feneftrer 
qui  eft  bas  &  piacànondede  leau  du  Nil,eft  rendu  fertile  &  hcE^ 

EE 


OifteiixctE* 
gypte.  ..... 


Vxtitours. 
Sucre  Egy» 
ptten. 


Bouffies 
^Egypte. 


Egyfties  hos 
Bdgeurs.    .- 
Vefiemms 
Je;EgyptuL 


12.6  SE^ÔN0     LÏV«RE     DES    $INGV3LÀ. 

beux.ou  les  oylcaux  de  rhiicre  fè retirent  l'hy uer  ,  defqucîs  on  en 
voit  les  champs  Se  prairies  blanchir ,  ^principalement  deCi- 
gognes,queles  Egyptîensàbon  droi&ayment,  d  au  tan  c  que  les 
grenouilles  s'y  engendrent  en  fi  grande  abondance,quc  fans  elles 
on  n'y  y  étroit  rien  de  plus  frequét,  &  auffi  qu'elles  deftruifent  les 
ierpents  d'Egypte,  $c  les  auallent  tous  entiers  «Mais  de  Fautrc-co- 
fié  fablonneux  elené  ,  on  y  voit  les  Vautours ,  Sacres  Egyptiens, 
Milans  ,&  autres  fortes  d'oifeanx  de*  charongne  ;  entre  lefquels 
celuy  que  nommons  Sacre  Egyptien  y  eft  plus  fréquent  que  nui 
autre ,  ayant  le  corfage  de  Corbeau,4a  telle  de  Milan  Je  bec  entre 
-Corbeau  &:  Aigles  car  il  eftvn  peu,  croche  par  le  bout.  Ses  iam- 
bës  Se  pieds  entre  le  Corbeau  &  l'oifeau  de  proye.  Nous  trouuôs 
vn  ojfeau  de  tel  nom  es  eferitures  d'Hérodote ,  &  autres  anciens: 
&femble  que  c'eft  celuy  qu'ils  nomment  Accipker  Aegyptius. 
Il  eft  delà  couleur  d'vn  Sacre:  mais  on  en  peut  obfcruer  de  diuer- 
fes  couleurs.  Nous  moftrerons  fon  portraid  au  liure  des  oifeaux» 
Les  Bouffies  font  en  l'eau  durant  l'inondation  iufques  au  ventre, 
paiffans  l'herbe  contre  terre,  mettans  la  tefteen  Veau  iufques  aux 
efpaules  :&  quand  ils  ont  paiftu  l'herbe,  ils  tirent  la  tefte  hors 
l'eau  ,puis  maiêhcnt  l%crbe ,  &  l'auallent  ea  l'air  :  car  nul  animal 
ayac  poulmo,nonplus  les  oy  féaux  &:  beftes  à  quatre  pieds,  n  au.fïi 
les  Baleincs,Dauphins,  &  tous  autres  qui  mafehent ,  ne  peuuent 
aualler  leur  mangeailîe  dedans  leau  :  de  telle  manière  font  nour- 
ris durant  l'inondation .  Il  eft  impoifible  de  trouver  meilleurs  na- 
geurs que  font  les  Egyptiens^  eft  ncceÏÏàirc  qu'ils  le  foyenr.Car- 
il  leur  conuient  fouuent  nager  dvn  village  à  rautre,durant  i'ino- 
dation,pour  les  affaires  qu'ils  ont  les  vns  auecles  autres ,  &  pour 
cefteaecefllté  ils  font  auffi  veftus  de  mefme  :  car  ils  ont  vnc  lon- 
gue chemife èlanche^qui  n  apas  grande  façon,&  vne  manière  de 
manteau  fans  coufture,fait  de  laine,comme  vn  long  tapis  legicr, 
dont  ils  s'entortillent  les  cipaules,&:  vne  partie  du  corps, n'ayans 
autre  habillement  en  allant  par  pays.  Et  s'il  leur  conuient  paftèr 
vne  eau  parfonde ,  ils  entortillée  leur  man  tcau  &  chemife  autour 
de  leur  tefte9en  manière  d'vn  diadème ,  &;  ainfi  nouants  pcuueht 
çrauerfer  l'inondation  du  Nil.  Et  s'ils  ont  à  aller  plus  k>mg  ,  ils 
traînent  des  ioncs  après  eux,iufques  à  ce  que  terre  failler&quand 
ûs  (entent  terre  leur  cftre  faillie ,  alors  ils  fe  foulagcnt  en  nouant, 
eu  s'appuyaht  deffus  Jeurs  ioncs.  Le  mefme  vent  de  Tremontane 


OBSERVEES     PAR     P.     BELOW.  '     %2J 

«oqsfeîfoit  defpefçhcr  grand  chemin  :  &  cftansencorc  à  plus  de 
quarante  mille  au-  deflfous  du  Cakc,nous  commençafmes  avoir  mU^ 
les  Pvramidcs,donr  les  autheurs  ont  rat' fait  mcnciô:car  elles  font 
en  haut  Heu  fort  expofé  aîa  veue  de  ceux  qui  nau  iguent  defïtis  le 
Nil  :,qui  eft  ce  que  Pline  ^entendu  par  ces  mots  :  Saȏ  conSficua 
vndiquenakigantthits.  Les. Egyptiens  ne  lesfçachans  appeller  Pyra-  rharao». 
mides,les  nomment  Pharaons.  Elles  fontencor  plus  admirables 
à  les  regarder  de  près  :  que  les  autheurs  ne  les-ontdefcrites  ;.com- 
me  ferons  apparoiftrecy  après. 

Quelques  payûetdariu^de  l'Egypte  >  &des  Egyptien^- 

Chapitre       xxxr-  -       . 

,.  L  n'eft  nation  qui  retienne  tant  defonantk|uitevque  ^f-* 
;  fontles  Egyptiens  : carencox pourle  iourd-huy  nom  £sE£^n£~ 
l  les  voyons  es  villes  accouftrez  de  mefmcs  veftements  Mamere  & 

^ J.  que  les  anciens  ont  deferit.  Tou  tel*  Egypte  n'a-pas  zc-fere  comte* 

eouftunvé  faire  efeierre  les.  pouliets  fous  les  agiles,  de  leur  nacre,  Usmfi-.  e&- 
ains  ont  des  fours  faits  par  arxiflce  r  comme-nous.  auons  veu ,  ou  zçfte~ 
chafque  fois  ils  mettent  trois  ou  quatre  mille  ceufs ,  iefqucls  {ça- 
lient  il  bien  gouuerner,&  leur  tempérer  la  chaleur  5  qu'ils  les  font 
efclorretoutenv.n  temps  :  quin'eàpasir-uentiûnJiiQdernc^car- 
A  ri  ilote  au:  fixieûne  J>e  animdihus  3  chapitre  fécond ^QÏtxLcha 
dit  :  Iricttbitu  ^i&fœtiïexdudi.natur*  ramo e^Monumm  tu  fdum&uâr 
dperiuntur  1feà*tUm,Fj>Qnte  in  terr* vt  m  ^Aepptû  abruta  fmùpuhàem. 
procréant*  Ces  fours  font  communs  à  piuiieurs  villageois  .qui  y. 
apporteront  Jeu  rs-œufs  couueide.diuer  fes:  parts.  Ils,  tbnrde&le-* 
uces  de  peurque  le  Nil  ne  deikoxdejefqoelbes  tlsfcoforeeot  aucc 
fagots  de  paille, de  cannes  de  {uccrc3de  Halirnus:)&:  Rhamnus,&  H£mm^ 
Tamarifques,à  fin  de  tenir  le  Nil  en  fon  liét.Leiour  fuyuaat  con-  ^bxmnus. 
ûntians  noftrenauigation,ayans  le  vent  en  pouppe., autant  fauo-  Tamjnjft^ 
rable  que  nous  euSions^peu  demander  ,  trouualines  quelques 
endroits  ou  le -Nil  &  repiiodcfoiuicntcsrois  ^  &c>  d'autant  que 
fufmes  en  vnentlroicl:  ou  les  Palmiers  empefehoient  le  vent  qu'il 
«efoufflaft  en  nofbc  voilejilfalluoqucles  bateliers  defccndiûent 
&;  titaâent  noftre  barque  à  force  de  brasy&  furet  forcez  de  paffer 
deiautee  çoâç^pouteuitcrlaibrccdu  couratdu  Nil.Et  aimique; 


Crex. 


Corlk 
Cheuéker. 


lifts  noir. 
H<snutQ* 


Côrmardst 


$utùr, 
aigrette. 

\y£rabesce* 
rcmommx. 


ix8  second   i iv'k e    © e s    s i ng v l a. 

le  ventcftoitfoiblc,  eftans  paftèz  de  l'autre  part,  dcfccndifmcs 
du  bateau  ,  &  ne  feiournafmcs  linon  quelque  peu  de  temps  que 
neuftions  bon  vent. 

"Defcription  deplufieurs  oyfaux,  &  autres  Animaux  obferue^ 
IclongétNil.  Chapitre     xxxii. 

E  pays  d'Egypte  cftant  fi  tiede  fhyuer ,  Se  paluftre, 
nourrit  plufieurs  oifeaux  de  riuiere,&:  entre  autres  ce- 
îuy  que  les  Grecs  Se  Ariftote  ont  nommé  Crcx.Nous 

lauons  recogneu  à  fa  voix  ;  car  il  cft  crjart,  Se  comme 

le  Vanneau  dit  JEx  ,  tout  airifi  ceftuy  cy  en  volant  prononce 
Crex,Crex  :  Se  lors  le  defcriuifmes  comme  s'enfuit. Uoifeau  no- 
me Crex,eft  de  corfàge  entre  le  Corlis  Se  le  Cheualie^ayant  aufïi 
le  bec  Se  les  Ïambes  entre  les  deux.  Ses  ïambes ,  cuiifes  Se  pieds 
font  Boks^commc  auffî  cft  fa  tefte  :  mais  le  dçfTus  du  col ,  la  poi- 
trine Se  dpaules  font  blanches ,  le  dcfTus  du  corps  tient  du  cen- 
dré>ayant  vnc  ligneblanchc  de  trauers  en  chafque  asile.  Il  prend 
fa.  mangeaille  en  terre,  Secn  l'air ,  à  la  manière  du  Vanneau ,  que 
les  anciens  Grecs  ont  nommé  -^Ex ,  Se  fait  ainfi  grand  bruit  des 
selles  en  volant.  Nous*eroyons  qu'il  n'eft  point  veu  entre  les  oy- 
fèauxcognusde  noms  François,  combien queufiions penfc  au 
parauant  quela  BargCjeftoit  Crex,entant  que  Hérodote  Ta  com- 
pare en  grandeur  à l'vnc  des  eipeces  de  Toifeau  nommé  Ibis.  Au 
parauant  auions  eferit  ceft  ïbis  noir ,  peniant  qu'il  fut  Hxmato- 
pus  :  niaisayans  depuis  obfèrué  fes  mœurs,  auons  arreftéquece 
n*cftHxmatopus,ains  Ibis  noir:  duquel  Hérodote premierenict 
a  fait  mention,puis après  luy ,  Ariftote.  Il  eft  de  corpulence  d'vn 
CorliSjOu  quelque  peu  moindre ,  totalement  noir ,  ayant  la  tefte 
dvnGormarant,  le  bec  contre  la  tefte  plus  gros  quelepoulce, 
mais  poin&u  par  le  bout  Se  voûté ,Se  quelque  peu  courbe.  Se  tout 
rougc,commeauftilcs  cuifïès  Se  lesiambes.Tl^eû  toutainfihauc 
eniambé  comme  vn  Butor,  que  Pline  a  nommé  Bostaurus,& 
Ariftote  Ardea  fteîlaris ,  Se a  le  col  ainû  long  quvne  Aigrette, 
en  forte  que  quand  veifmes  ledit  Ibis  noir  la  première  fois,  il 
nous  fcmbla  en  habitude  Se  contenance  à  vn  Butor.  Les.E- 
gyptiens  ,  Mores  ou  Arabes ,  font  plus  fuperftitieux  Se  céré- 
monieux en  leur  religion  que  oc  font  les  Turcs  ;  Se  ja  foie  que 


OBSERVEES     VAX     *.     EELÔÎÏ.  Ï2>9 

tous  deux  foyent  d  vnc  mefme  loy,tendans  à  Mahomet ,  U  fub- 
ieds  au  grand  Turc,  qui  lésa  vaincus  en  bataille  ,  toutesfois  les 
Turescftimcnt  quelque  faindeté  es  Arabes  plus  qucneuxmcf- 
mcs.Laraifoneft  queFAicoran  fut  eferit  en  Arabe,  quia  depuis  ^«^ 
eftétranflatécnTurquois  :  ôcaufli  que  les  plus  dodes  Turcs  ne 
font  pas  profcffiô  du  langage  Turquois,  mais  de  l'Arabie.  Leurs 
caradheres  font  vnc  mefme  chofe, toutesfois  la  langue  eft  diucr- 
FcAuflilcs  Turcs  n'ont  point  de  lettres  qui  ne  foyent  venues  des 
Arabes.  Quand  nous  defeendions  du  bateau  aux  nuages  du  Nil 
pour  entrer  es  villages  .,  nous  entendions  les  Mores  chanter  ea 
leurs  mofquccs,c  eft  à  dire  Egîifes ,  qui  fe  refpondent  les  vns  aux 
autres  de  voix  alternatiucs ,  à  la  manière  des  préfixes  Latins ,  fai- 
fans  quafî  mefmcs  acccns,&  mefmes  paufecs ,  comme  font  ceux 
qui  chantent  les  Pfeaumes  en  Latin  :  qui  eft  chofe  qu'on  ne  fait 
point  entre  les  Turcs,  qui  ont  dur  langage  Se  rude  à  la  comparai-  ~~%*  **■ 
fon  de  rArabe,qui  eft  moult  aifé  à  toutes  chofes  qu'on  veut  met- 
tre en  rythme.  Aufli  l' Alcoran  eft  eferit  en  verfets  de  rythme.  En 
approchant  du  Caire,  à  quatre  lieues  au  deftbus  de  la  ville ,  nous 
veifmcs  Tendroid  ou  le  canal  du  Nil  fc  départ  en  deux  rameaux;  ukp&te 
defqueîz  l'vn  defeendantà  gauche,  va  paûeràRofctte  ,  «juiefi «&>-*»*• 
Oftium  Canopicum ,  d  ou  nous  venions.  L'autre  defeend  à  dex-  °Pum  ^ 
tre,  &  fc  rend  en  Damiatc ,  ou  eft  Oftium  Pelufiacum.  Par  cela  *T^^ 
nous  pouuons  aflèurcr  que  le  Nil  n  a  que  deux  principales  grau-  /^^ 
des  bouches  nauigables  pour  grands  vaiûcaux ,  ou  pour  le  plus  DamiAm, 
en  a  trois  grandes  en  tout.  Nous  ne  difons  pas  qu'il  n'ait  beau- 
coup de  petits  ruifleîets,mais  il  n  a  que  ces  deux  principaux  naui- 
gables.  H  peut  bien  cftre  que  quelques  vns  font  nauigables  en 
certains  endroids  au  temps  de  l'inondation;  mais  en  au  tre  temps 
ce  font  petis  ruifleaux  qu  on  paûc  à  gue  au  riuage  de  la  mcr,com-  Deux^ 
me  nous  auos  fait  quand  nous  auôs  paffé  le  pet  t  canal  entre  Aie*  ^  ^  ^ 
xandrie&:  Rofctte.  Lèvent  nous  continua  iufques au  Caire ,  ou  ^^ 
noftrc  nauigation  finit.  Nous  defccndifmes  à  vn  grand  village 
nommé  Boulac,qui  eft  du  tenât  du  Caire,  fitué  au  riuage  du  NiL 
Auant  nous  déporter  de  parler  du  Nil,  dirons  premièrement  de 
quelques  beftes  qu'on  a  accouftumé  d'y  trouuer ,  ÔC  entre  autres 
du  Crocodile  dont  cy  après  eft  le  pertraid. 

FF  iij 


2.JO:  SECOND     EIVK.E     DES     SINGVIiA. 

goYtrai&du  Crocodile  poijjhn  du  À/77.. 


Nous  envoyons  came  par  miracle  en  plusieurs  Eglifes  &:places 

publiques  de  »oftreEurope:raais  11  y-en  aauiB  qui  îop.tterrcfrres. 

.  Celuyaufllqueles  Latins  &c  les  Grecs,ont  noraraé  Hlppopo- 

Bippopou*   ^^^  qui-eitàdirc  Cheual  de  riaierc.   Nous  trouuons  que  les 

chtîtdderU.  Latins  fuyuans  les  brifecs  des  Grecs,ne  changèrent  point  le  nom 

mère.  Greeà  rHippopotaouis-  :.  lequel  combien  qu'il  lignifie  en  Latin 

Efupfx*    Bqmis  .fluHuttïlis-^  toutesfois  cousles  Latinsl'ont  touiïours  appelle 

*fat*hs>.       deibnappellatio  Greque  Hippopotamus.  Ecfctnblequ  ihl-aycc 

ainu  voulu  fairc.pouria  raifon  que  dirons.  C'eft,  que  quand  Hz 

ont  veu  celle  beàe  ne  rcfTcmbier  en  rien  au  Cheual ,  ilz  ne  l'ont 

pas  voulu  nommer,  en  leur  langage ,.  mais  onc  retenu  la  diction 

Greque.  Eten  cecy.il fau t  de  de uxf  hoiès fene ,  ou  bien queles 

RonyairiS.n'aycntcogneurHippppoEamusdesGrecs  ,  ou  bien 

que  Lanknal  qo  ilz  efîimoy ent  pourxel ,  fuft  autre  que  celuy .que 

les  Grecs  nômoyencHippopotanius.  Et.fi  celuy  qury.futappor- 

Triwj&es    té^quand  Àuguftemumpha  de  Cleoparra,  comme  eferit  Dion, 

4ssr%om&»s..  ^^^icsaiitrçs-qoi  fixent  monftxczésieuxde  M.  Scaurus ,  6> 

auxtriumphes  de  Bûmpee  >  eiloyent.Hippopotamcs \  nous  ne 

faifons  doute  que  n'en  ay  os  baillélcs.vtais  parrrai&s  au  liurc  que 

auons  diuuîgué  de  tous  poiflbnsrçar  1  animal  qu'auons  veu  viuaç. 

àtCojxftaniinople  >  apporté  du  Ni^conuenoic  en  toutes  marques 


OBSERVEES      PAR     P.    BELON»  -l$t 

suce  ceux  qu  on  voie  grauez  en  diuerfes  mcdales-des  Empereurs. 
Aufurplus,  de  ccqui  cft  de  Ton  hiftoire ,  l'ayans  eferit  ailieurs  en 
Fraçois  &en  Latin,*nedirosautrechofe^ourîepre{ênç.Lefleu- 
uc  du  Nil  nourrit  pîufîeurs  autres  poiffons  moult  renommez  lef- 
quelz  toutesfois  ne  voulons  fpecifier  en  ce  licu:finô  entant  que  le  Brochet. 
Brochet  y  eftfrcquét,  Se  que  nous  auos  difficulté -de  luy  trouuer 
vue  appellation  antique,voulons  dire  qu  il  fut  anciennement  ap-        . 
pelle  Oxyrinchus.  Lonypcfchc  auffi  deux  efpcces  de  poiffons  °^T^S 
ronds,gros  comme  iateûc,  dont  les  peaux  font  emplies  de  bour-  Q^J 
reoa  foing,&  nous  font  çnuoyecs  par  la voye  desmarchads.  Les  0rcfoSt 
Grecs  les  nomment  v  u igai rement  Flafcopfari ,  &  les  Latins  O r-  crocodiles, 
bis,  ou  bien  de  nom  GrecOrchis  :  car  ilz  (ont  ronds  comme  vnc 
bouteille.   II  y  en  a  au  flfi  vn  ,  dont  au  lieu  d  efcaille ,  l'efcorce  cft 
tonte  dos  :  parquoy  on  la  garde  tout  ainfi  que  la  peau  du  précè- 
dent. Les  Crocodiles  (ont  auffi  particuliers  nourriffons  du  Nil: 
dcfquelz  nous  en  voyons  les  peaux  qu'au  en  tous  lieux. 

La  différence  des  bateaux  qui  nauiguent  Çur  le  Nil  :  #*  h  no™  des  4r- 
bres  plus  communs  qui  font  es  iardms  du  Caire. 

Chapitre.    X  XX I  Ti.  . 

Yansacheué  noftrc  nauigation  fur  leNil,  &-pri's 
terre  ferme  au  village  de  Boulac,  qui  eftlelieuou 
les  Gerbes  &  Barques,  &  autres  fortes  de  vaiffeaux  Juicxux&M, 
du  Nil  aborder, pour  fèdefcharger  deccqu'ilzap-  -x^ 
w*&m&eps&  portée  au  Caire,  obfêruafmcs  les  vaifièaux  du.  Nil, 
appeliez  Gerbes,qui  font  en  trois  ou  quatre  différences.  Les  vns  p^.^ 
font  bas.plats^largesyfortcoursay  reguard  de  leur  largeur  Les  duxdu  N& 
autres  font  plus  grands  &:  larges,mais  ramaflez  quaû  en  rondeur. 
Les  plus  grands  feroyent  quati  fèmblables  aux  bateaux  de  Seine,  crxnisb^ 
fino  qu'ilz  font  beaucoup  plus  courts.Ilz  portent  plus  grâds  faix  "**x  du 
quç  les  autres,  &  principalemét  les  pailles  des  fuercs  du  grad  {cï-Nl^ 
gneur:&ne  nauiguét  q  durât  ftnÔdatio,&ncdeicédétpoinrplus 
bas  que  le  village  de  Foua.Ilz  vot  à  voile  Latinc.Les  pi  us  petis  de 
tous  fontpîatSjbas  &  larges,allâs  à  voile  quarree,&nc  fejlûignéc 
fort  îoing  de  Boulac ,  feruans  feulemét  à  pafl'cr  le  Niî,&  à  porter 
les  prouvions  des  y  illages  au  Caire  ,&  paffer  le  beftial  d'vnc  nue 

FF  iîij 


zy&  SECOND     Ï.ÎVS.E    DIS     SINGVLA. 

certes.  \  i'autrc .Les  Gerbes  qui  vont  iufques  en  Damiette  &:  Alexad rie,; 
roilesuti*  fonj-mcnccs  à  voiles  Latines,  ô£peuuent  entrer  en  la  mer  en  Bo- 
* *A'  naflc  &  enxemps  calme.  Maisiï  la  mer  s'cfmouuoit  en  tempefte, 

elles  ne  refifteroyent  pas-longuement.Parquoy  quand  ilz  fe  veu- 
lent mettre  en  chemin ,  ilz  choithTent  vn  temps  doux  5  &  que  le 
vcntfoitbienàpropos.Nousobferuafmesauiîi  les  arbres  des  iar- 
dins ,  qui  eftoyent  Sicomores  y  Palmiers  >  CafEers ,  Grenadiers, 
Qxangers,  Acacia,  Tamarifqucs. 

gue  ftufieur*  âyentimtfenp que  les  Chamdcons  vefcujfent  dufiul  vzt7 
~  '    '  Chantre    xxxiin. 

I  Vandne  vcoyôs  point  de  bois  taillis  pour  faire  fa- 

)  gots,ou  deforefts  à  coupper  pour  faire  eharbon(3£ 

toutesfois  pour  fpndre  les  métaux  5  dont  y  a  touf- 

iourseugrande  quantité  en  Egypte ,  cftoit  neceA 

^,  1  foire  d  en  auoirbeaucoup)auonsobfcrué  de  quel 

bois  ilz  auoyent  le  plus  icar  pour  leur  vfage  ilz  fc  feruent  des  Ra~ 

mcaux  de  CafTe,  Tamarifques  Rhamnus  y  Sycomores ,  Napcca^ 

Mitd  t?s=  Roufeaux,  Paîmicrs:mais  en  la  parfin  n'auôs  rien  trouu c  de  plus 

£#**'         abondant5que  les  pailles  de  Sucre„&  au  m"  que  celte  chofe  eft  co- 

Pailles  4^ forme  àj'anthorité  des  anciens ,  qui  fçachansqu'ilzauoyent  af- 

^'Uesde     ^^^înatiereàfondreleuror,  ont  dit  (comme  auffieft  eferic 

lterUd&     cn  ^me  )  Pi****  ùptimèlijmk  £sferrumquefti»<litur,fed&  \Aegyptm 

térie*.        Pa&ro  ipakkmwm+Çzi  le  principal  des  métaux  d'Egypte  a  tout- 

iours  efté en  or.  Les  hayes  qui  font  des  iardinages  auprès  du  Cai- 

cltmUonu  rc^fontentous  lieux  couuertcs  de Chameleons^  principalemet 

le  long  des  riuages  du  Nil  >:  cn  forte  qu'en  peu  de  temps  nous  en 

veifmes  grand  nombre.  Ce  n'eft  pas  fans  caufe  qu'ilz  fe  tiennent 

^T       fur  les  buiiTons  :  car  les  Yiperes  &  Ceraftes  les  auallcnt  entiers, 

quand  elles  les  peuucnt  prendre.  Q^md  les  Chameleons  veu- 

j£  W.     lent  manger,  ilz  cirent  leurs  languesiongues  quafi  de  demy  piedy 

rondes  comme  la  langue  d'vn  oifèau  nommé  Pic  verd  ,»  fembîa- 

Mes  à  vn  verm  dererrei&àrextremltc  d'icelles  ont  vn  gros  nœud 

^jongieux,  tenant  comme  gîuz,  duquel  ilz  attachent  les  infc&cs^ 

-    fçauoir  eft,Sautcrellcs>aicni!les>&  Moufches ,  &  les  attirent  en 

cb^kos  la gucuîc-  *!z  portent  hors  leurslangues,  les  dardans  de roideur 

Jm  °m*  aufliviftement  >  qu  vnc  arb.akfts  ou  vn  arç.fait  le  traid.  Nature 

aucoit: 


OBSERVEES    PAR,    P.    SELON.  Ifî 

auroitfait  tortàceuVanimal,deiuy  auoir  baillé  ligue, cftomach, 
&  in  cciUns,  fi  elle  luyauoit  dénié  de  ne  manger  point,  comme 
pluficursontpenfL 

t>enoJlre  arriuee  au  Cdirc^  &  decequentmsyattons  vtttu 
Chapitre    xxxv* 

StansàBoulacattendans  les  montures  pour  aller  swUc 
\  au  Catre,ce  pendancauÔsouy  vne  choie  qui  nous 
1  a  fcmblé  fort  nouueîîe ,.  &  digne  d'eftre  eferite: 
•  Oeft  y  qu'vne  trouppe  de  femmes  en  nombre  de 
_  dixoudouzcpaflànsparlaruejfaifansvncfaluta-^^^^ 

tion  à  la  manière  d'Egypte^  toutes  enfèmbîe  firent  vne  voix  qu'a-  fc  femmes 
liions  ouye  auparauant  en  quelques  villages  auriuage  du  Nil:  tnE^ps.. 
mais  nous  auoitefté  impofiibledepouuoir  fonger  quelle  chofe 
c  eftoir.car  les  femmes  ne  vont  iamais  par  la  ville  qu  elles  n'ayenc 
levifàge  couuert  :  non  pour  quelque  beauté  exquifc  qu'elles 
ayent,  mais  pour  obfèruer  le  commandement  de  Mahomet.  Car 
mefmemët  les  Ethiopiennes,  qui  onda  couleur  plus  noire  qu'vn  Femmes^s, 
charbonnier  3  fe  couurent  le  vifage  d'vn  mafque  a  tout  ainûque  Mahomet*^ 
fait  la  plus  belle  Turque  d'Aûe.    Parquoy  nous  eftoit  difficile ps.  mafc- 
d'entendre  cornent  ce  faiibit  cefte  voix,tanr nous  fèmblok  nou-  fx&» 
uellc:ô£  ayans  ouy  ictter  vn  tel  cry  par  plusieurs fois,qui  iembloit 
cftre  quelque  confufè  harmonie ,  auons  entendu  que  les  femmes 
ouurans  la  bouche  le  plus  qu  elles  peuucnty  font  ifîlr  leur  voix  en 
fauffet,remuans  la  langue  entre  les  dens,la  retirans  vers  le  palais, 
&  font  vn  accent  agu ,  tel  que  font  les  femmes  des  villages-fur  la  Maf^uesde^- 
fin  de  leur  cry,en  vendant  le  laid  à  Paris.  Elles  fe  mafquem:àr-/>»M»es  /&- 
feremment  félon  les  diuerfitez  des  pays,  La  façon  dcsvillageoi-<g;/r^ 
fès  Arabes  &  Egyptiennes  eft  vne  mafqueure  la  plus  laide  de  tou- 
tesxar  elles  fe  mettent  feulement  quelque  toile  de  coton  noire 
ou  d  autre  couleur  deuant  les  yeux,  qui  leur  pend  deuant  le  vifa- 
ge en  appoinctifTant  vers  le  menton  corne  la  mufelierc  d'vne  da- 
moifelle  appcllee  vne  barbute  >&  à  fin  d  auoir veue  au  trauers  de 
ce  Iinge,elles  font  deux  trous  à  l'endroit  des  deux  yeux,  tellemet  n 

qu  elles  eflansain fi  aceouflrees  5  refFemblent  eeuxquife  battent Bdtm'  ^«^ 
le  Vendredi  fainecà  Rome  ou  en  Auignon.  Mais  celles  des  plus  1^S^edâ- 
grades  villes  fuyuent  la  manière  quelles  ont  aprins  des  Turques,  Tuxmxu 


2.^4  SECOND      LIVRE    D"£  S    SINGVLÂ. 

qui  mettent  vn  petit  voile  tiffu  des  poilz  de4a  queue  d'Vn  chenal, 
au  deuant  du  vifage.  Et  celles  qui  [ont  dcpîus  grand  cit-ar,ont  vn 
fin  linge  délié  deuant  la  face.  Parquoy  voulons  faire  celle  corn- 
paraifondeccluyquivoudroic  efcrire  de  leurs  veftemens,  àvn 
qui  entreprédroic  de  faire  la  peieâure  de  tous  les  habis  des  rem  - 
mes  du  pays  de  France,!  calie,ou  Alcmaigne  :  car  il  voirroit  infi- 
nité de  coiffures  dVn  mefme  pays  cftrc  différentes  encre  elles ,  Se 
ne  reilembler  rien  à  leurs  vohînes  :  tout  ainfi les  Egyptiennes  ont 
grâd'dirfeiececn.parure  auec  les  Turques.  Hz  n  ont  point  acou- 
ilamé  non  plus  enJEgypte ,  Turquie,  qu  en  Grèce,  de  découper 
les  liabiilemens  des  femmes,  n  y  des  hommes.  N'auiTî  n'y  a  diftin- 
&ion  ordonnée  à  cognoi  fore  les  perfonnes  de  diuerfes  loix  à  por- 
ter liabiilemens  de  diuerfes  couieurs:car,commeauons  dit,  clic 
.  eft  feulernent.au  turband.Les  Chreftieo  s  le  portent  bigarré,tan - 
tofr.de.pcrs,tantoftde  rouge,  Scies  ïuifz  le  portent  iaune  :  Car  il 
eft  feulement  permis  aux  Turcs  de  le  porter  blanc  ou  verd  :  mais 
le  verdeÛ:  feulement  concédé  à  ceux  qui  fedient  de  la  lignée  de 
Mahomet.  Laconfideration  de  l'acouftremenc  de.tefte  que  por-. 
tcntlesEgyptiepeseltmQuitànoter.-car  il  eft  antique,  tel  qu'on 
peut  voir  portraiclfur  diuerfes  medales.  Lesautheurs  l'ont  nom-. 
Coronxy  lut»  ^  TuYYitum  CAbitis  omamentum^o^i  tumtam  corommyou  vnMmturri- 
■utunaa.  ^m#Commequi  diroit  coiffure  efleuee  en  manière  de  tour.  Doc 
l'vne  porte  des  patins  haut  efleucz  de  terre  ,  &  l'autre  porte  des 
botiocsiMrecsparictalo«,àIamanicr-cdcsT-urqu.cs,Ecpuis  que 
tellemaniercdex:oirTuTcferefenttântdefonantiquité,auoseité 
meuzd'obferuer, voyans  rnefmemet qu'il  fembiequcnoz Poè- 
tes Latins  en  ay  entrait  mention.  Donc  vouîans  mieux  faire  voir 
domine  elles  font  pare.es  ,  en  auons  fait  voir  les  portraictsen  ce 
lieu,  ternettansey  après  à  faire  voir  ceux  des  Turques  d'Aile. 


OBS  ERV  EXS     VA&V:  BÎIO  tf. 


t$f 


'  ZspQrtrciiShdz deuic  femmes  du*C aire dlueffement  l'sjïms  ^jdon, 
'  '  :  qu 'elles  fantejhtns  tnieurs  mùfons. 


*34  SECOND     LIVRE     DES     SINGVtX. 

l4mn  portraift  ivne  femme  iEppte  5  félon  qtfeïïe  efi 
acoufiree  allant  parla  ville  <k  Caire. 


O* SERVE ES     PAR     P.    BEL  ON.  'l$6 

Nous  aïlafmcs  au  Caire ,  ou  il  n'eft  licite  à  vn  effranger  y  entrer  à 
chcual,s'il  n'eft  grand  feigneur ,  ou  en  la  compagnie  d'vn  qui  îe 
foit  :  mais  n'eft  pas  deshonnefte  aux  habîtans  ou  cftrangcrs  dal-  CflJ^ 
1er  fur  les  afocs.  Car  les  Gentilsho  mrnes  du  Gai  re  &  fol  dats  du  mes  ^  a/m 
Turc  vot  en  parade  à  chcual  en  courte  houfïe  auffi.  bien  que  Ton 
fait  en  France  :  &:  fefont  referuez  les  cheuaux  pour  eux ,  ne  vou- 
lants permettre  ce  priuilege  aux  mechaniques.  Les  femmes  auffi 
vont  communément  fur  Afnes  baftez ,  ayans  vn  tapis  par  defTus. 
Parquoy  fçachans  que  chafque  nation  retient  de  la  naifucté  de 
fon  terricr5pour  ne  confondre  le  naturel  des  Egyptiés  auec  celuy 
des  TurcSjâuons  cy  fait  reprefenter  vn  bourgeois  du  Caire  à  chc- 
uaî,auec  fa  femme  allant  à  1  efbat3efhnt  montée  fur  vn  A  fne ,  fe~ 
Ion  te  manière  du^pays. 


De  Boulac  au  Caire ,  il  n'y  a  que  demie  lieue.  PafTans  par  les 
vergers,  veoyons pluficurs  beaux  arbres  frui&iers.  11  ne  croift 

G  G   iij 


23S  SECOND-     L-IVrRE-     1>E  S"     SINGV'LA^ 

nulsTanurindescn  Egypte  flnô  qu'ils  y  foyent  femez  parcurio- 
fitémous  en  çrouuafmes  yn.autre  des  mafiires  du  Caire  près  Bou- 
Ca&ers        lac,&  quelques  Ljmons  fauuages,  qui  iamais  ne  font  le  fruiefc 
seleftièrs.     P'us g£9s  qu'vn  oeufde  pigeo.  Les  arbres  de.Cafneirs.  j.S.ebeftiers, 
pdmiersï     Palmiers3.&  Sycomores,,  y  çroiiTcnt-bien-fart  hauts..  Eitans^rri- 
.uez  au  Çaire,il  a  efté  licite  à  y  n  chacun  ;  de  nofke  compagnie  al- 
ler par  la  ville  fans  guide:  car  à  quelque  hçure.qu'ayons  voj.ilu.al-. 
leroupar-dedans,  ou  par  dehors, nous^n'auons  eu  aucun  empef- 
chement,ne  crainte  d'en  auoirdommage.  D'auantage  nous  vou- 
zfrrxwers  *  *ons  di.requc-fi.vja cftr.anger  e$apr  yeftn  de  robe  longue ,  ycuc-al- 
en  Egypte,    1er  parcoures  le^illes^es  Tuixs,-,i}i}e  luy  fera  £*iz  aucun_m.aî,n:Q 
samiami*    p^usqu  a.vn  habitant  <ka ,  pays.- .Sur. k foi r  l'on  voit  vne  forte.cie. 
tos.  petit  Lézard  fe  pourmenânt  le  long  des  muraille^  qui  yienc;jGï;V 

TurcntaU.    gerJes  mouches.  Les  Grecs  l'ont  appelle  en  leur  vulgaire  Samia- 
VhA^ngion.  mfCOS;>|es  Italien sTaxentoîa,  les  ancies  Chaîcidica  lacerta.  Mais 
pour  ce  que  les  modernes  confondent  ce  nom  de  Tarentoîa  auec 
le  Phalangion;&:  que  le  mot  Italien  Tarentoîa  ou  bien  Teraatu- 
la,prendfon  etymologiedela  terre,  &  toutesfois  n'eftant appel- 
lation antique,il  nous  conuiendroit  long  propos  à  expofer  le  fuf- 
dit petit  Lézard ,  nommé  Chaîcidica  lacerta,  duquel  parlerons 
chxlcidica,  pjusàplainen  autre  paiTage^ïî  èft  fouuent  adûenu  à  plufieurs 
lacerta.  •  £n  mctcanc  qUeiCUe .çhofe  avne région eftrange par  efcrir5 

i     „„    r   pcnfenteitre  de  îeurmueiition  :  3c  toutesrois  s'ils  liicnc  les  au- 

des  MohJ*    r  -  ,.  s 

cherons  d»  tueurs  anciens ,  troimenkcn  eux  propos  quaii  icmblables  a  ceux 
Caire.        jjuiisontobferuc  :  Toucainfi,  quand  veifmesquc  chafeun  de 
Confins       nous  eftoit h  petfecuté  des  moucherons  que  nous  nomons  Cou- 
Motfches,  .  fmSjla  nnicl;  en  dormac  au  _Caire,qu'il  {cm bloit  le  lendemain  qu e 
nous  eu  liions  la  rougeole ,  nous  i'auions  mis  en  eferit ,  meccans 
.  w—        .    aùfii.qtf *i  cft  neceffaire  de  fe  tenir  le  vifage  caché,  cerman  t  dc£- 
-~     '    fouspàuillons  ,ou  bien  fe  tenir  à  mont  fur  les  terraiTes  des  mai- 
ions  à  1  air.  Toufesfois  hfans  Hérodote,  nous auons  trouu é  qu'il 
auoitjefia  efcritçhofes  fèmblablcs.  Les  Egyptiens ,  dit-il ,  fe  fer- 
■  ^  _j-  -  -  uent  knuicldckursrets  à  faire  pauillons  de  peur  des  moufehes, 
Calices  (?Ep &orÀ  ils  fe  feïuefft  le  io«r  à  predre  le  poifibn  de  leur  âcuue. Quad 
adus.         les  Egyptiens  accou  firent  les  cuirs,ils  n'vfcnr  point  d'cfcorccs  do 
Tmf^'   cbc^ncs,comme  en  France,  ne  des  calices  a  Eiculus ,  comme  en 
phJm°eS'  Afie^cdeiaeillesdeXcnr/ques ,  Terebinthes,ou  de  Rhus ,  co- 
ïkca'cia.     râccn  drece3mais  vient  dçslnliqucs  derarbrcd'Àcacia;quils  *■" 


••OBSERVEES    :P  A  K    t%      BELO^,  .     ïfr- 

aent-àgrads  fâchées  és'bburiques  du  Caire^comme aufrrderher--  •  . 
bedeCaliou  Ancilis-pouriâtcincture.  Eftansam  Ca ire,  &  cher-  ^-^ 
chans  diiigemmét  plufleurs  drogues,  desquelles  les  aurheurs  ont 
efcrit,nous  auons  recogneu  qu'ils  en  ont  beaucoup  en.  vfage,  que 
les  marchans  ne  nous  apportent  point  5  comme  Nirrc  ,-  Acacia, 
Calamusodoratus,  Amomum}Coflus,  Ben  album ,  &:  plufieurs 
autres  fcmblables. 

Des  maifens  du  Cairejes  iardinages ,  grdek  tour  qui  enfeigne  la  creue  du 
'■   Nil  jour  [garnir  la  fertilité  de  l'année.       Chapitre    .xxxvi. 

,  E  s  baftimc'nsdu  chafteau  du  Caire,  les  belles  cham-  chafieaui» 
>  bres  &  faïcs,  &  les  peintures  qui  y  font, 'rendent  tef-  Cotre. 
\  moignagçdé'Umagnificccc'des-Cercailés,  qui  d  ami- 
fe^^^J  noyent  n'a  pas  long  temps  à  l'Egypte.,  déuant  que  le. 
Turc  les  euft  vaincus  en  bataille.  Les  murailies-y  font  reuefrûés  ; 
de  marbre-à  la"  hauteur  d'vn  homme  tout  à  l'en  tour  des  portes^, 
feneflres/çauoir  eft  vne  lifiere  de  plus^' vn  pied  de  large,  faite  de  Marqueterie 
marqueterie  à  la  E>amafquine,auec:desNaccresdeperlevi?£bë-  au,  ebafiem 
ne,de'<Zri{til,de'Marbreîde'CoraîJ&- verre  coloré.  On  voitau-mr^  Caire. 
de  patciis-ouurages  en  quelques  maifonsdu  Caire.  La  plus  part  ^onesf  ^ 
des  maifons  font  couuertes  en  terraffes  à  double  cftage.  Ils  font  J^f^ 
faire  les  portes  de  leurs  logis  fi  petites  :^c  batTes  >.«jplvo  cheual  n\^ 
peut  entrer:  qui  effeaufè  quitte  faut  courber  quand  ob  entre"* 
kans.  Les  ferrures  font  communément  faites  de  bofs~;ôf -y  a  âuitt 
grand  artifice  comme  en  vnc  ferrure  de  fcr.G'cft  vne  chofe  com- 
mune atout  le  pays,fur  qui  domine  le  Turc,pour  eflrc  exepts  de 
loger les^hcuaux  enteps  dcgucrre,de  faire  tes  portes  des  maifos 
biëba¥ïès\  TôtttesfoFs  les  portes  des  maifons  des  grads  feigneurs, 
font  pareilles  à  celles  des  pays  d'Europe.Les  oifeaux  qu  auôs  no- 
mez  Sacres  Egypties/ont moult frequés en Eg^pte,&:  nesabfé-  SJCns  E{ry» 
tehrgucTës-dù  pays.Les  Milas  au£fi  yjônt teursn i$s4u  reps  qu'ils  piem. 
font  abfes^e  noftte  regiô:&  y  font  Upriuez^qu'ils  viçnBfiufques  mOms. 
aux  feneftres.des  maïfons,&:  y  .vitiéc  de Dadcs,lk.pafsci^£ilé en  r&  & 
Europe  pour  euiter  la  grande  chaleur  du  Soleil  .|-a  ville  du  Caire:  Caire- 
eft  fort  grande  &  fpacieufe,  non  du  tout  enuironnee  de  muraille, 
pource  que  la  plus-grade  partie  de  la  vilîeeft  fermée  d'vfte-brçehc^ 
dvr  Niî,quiîuy  ferc de  muraille  ,  c^mmoau&i-fait  gsâxiè$aK-ic4tt— 

G  G    iiij 


2.2.8  SECOND     LIVRE     DES     SINCVLA. 

Nil.  C'eft  vn  petit  canal  qui  a  cftc  fait  par  art,  aux  defperisdcs 
vn  bras  du  £mpCrcL1rs  Roniains,lors  qu'ils  dominoyenten  Egyptc,àl'oppo* 
NilpajJefAr  £[ce  duquel  on  voit  vn  baftiment  fait  en  manière  de  forte  tour, 
ù  tour  <U  duquel  on  prend  l'eftimation  de  la  fertilité,  &  le  iugement  de  la 
k  creue  du  rente  que  pourra  valoir  le  reuenude  l'Egypte  cefte  année  là.  Et 


Pûrtvaiêi  du  Cafôer. 


isrit    '  .  ,      -  fçachans  que  le  Mil 

cft  autheur  de  la  fer- 
tilité d'Egypte,  ceux 
qui  font  déléguez  à 
ceft  afaire,fe  trouuet 
à  vn  certain  iour  die» 
pour  voir  cobie  lcNil 
eft  creu  en  hauteur» 
Et  fil  eau  eftiufques 
à  iceluy  haut  permis^ 
qui  eft  en  ladite  tour^ 
alors  ils  aperçoyuent 
entièrement  qu'elle 
fertilité  rendra  la  ter- 
re d'Egypte.  Et pour 
ce  qui!  n'a  pas  ac- 
couftumêcroùlrc  tat 
vnc  année  que  l'au- 
tre ,  ils  ont  diucrsfi- 
gnes  pour  fçauoir  à 
peu  près  ce  que  le 
pays  rendra  l'année  à 
vcnir.On  trouue  par 
efc rit  que  le  rcuenu 
d*Egiptc  eftoit  moult 
grand  du  temps  que 
les  Romains  en  c- 
ftoyent  feigneurs,le- 
quel  a  beaucoup  di- 
.  minué  depuis:  mai* 
il  faut  entendre  que 
pour  lors  les  Romains  n  efpargnoycn*  rien  à  y  &ire"dcfpcfe  pour 
krçnirefcrtile.  Nous  auansprins  grande  mcrueille  d'auoirveu 

figrandc 


rf^1 


OBSERVEES     ?  AU     î.   SELON»-  241 

&  grande  quantité  de  Caflicrs  es  iardins  du  Caire  ,  &  par  Egypte,  &!***• 
Se  toutesfois  les  autheurs  anciens  n'en  ont  fait  aucune  mention: 
earmcflnementThcophrafte,  qui  a  quaû*  parlé  de  toutes  autres 
planres  d'Egypte ,  n'en  fait  mention.  Mais  il  faut  dire  de  Théo- 
phrafte  parlant  des  plantes,  tout  ainfi  comme  d* Ariftote  des  ani-  i^UrSté 
maux.  Car  comme  diuerfes  nations  ©bcifïànts  aux  commande-  i^dexïdre 
mens  d'Alexandre  apportoyent  diuerfes  efpeccs  d'Animaux  \mum rhco* 
ÀriftotCjlors  qu'il  en  efcnuoitlliiftoirc:  aufli  cftoit  il  necefl^ire  firtf*  &* 
que  par  mcfme  moyen  diueriês  nations  feiflènt  rapport  des  plan-  ^nr0t9- 
tes  à  Thcophrafte  quand  il  les  deicriuoit.  Et  appert!  fon  hl ftoi- 
re  qu  il ne Ta  fait  fans  grandedcfpcnfe,  &  d'hommes.qui  ontefté 
expreflement  cnuoycz  en  diuers  endroi&s  du  monde ,  pour  les 
obferuer.  PaFquoy  ne  trouuansaucun  paflàge  en  tou  t  fon  ceo- 
ure,qui  peut  conuenk  à  la  Caflè ,  auôs  conclud  qu  iî  n'en  apoinr, 
parlé  r  n*eftoit  au  çroificfme  chapitre  du  quatriefinc  Hure ,  on  il 
die  qu'on  luy  a  rapporté  qu'il  y  a  fi  gros  arbres  autour  du  Caire:     ^^ 
que  trois  hommes  ne  les  fçauroyentembrafler.  Aufli  les  Caffîers  ^^^ 
font  aufli gros  &  hauts  comme  noz  noyers,  ayans  la  fuciile  de 
mefmCjCommc  ilappert  par  fa  figure ,  ou  Farbreeft  rcprcfèntéaa 
naturel.  Ce  neft  demerucille  fi  L'Egypte  elt abondante eaherba- 
ges  de  iardins  :ear  ayans  là  chaleur  mouk  grandc,&  pouuansar- 
roufèr  leurs  herbes  auec  facilité,  font  fbigneux  àfèmcr  en  temps 
opportun.QuadlcNil  cftgrâd,ils  n'ont  q  faire d'arroufer  5maà. 
trop  bien  auant,&  après  il  leur  faut  prendregrandfoing.Et  pour  ^  ±  ^ 
ceqûclcsconduiclsvenansdu  Nil  ne  font  pas  profonds,  ils  ont  3^/^ 
des  engins  propres  à  puifèr  1  eau,qui  font  de  diuerfes  façons.  En»  <&>  moufa» 
tre  autres  en  ont  yn  qui  ne  peut  fèruir  finon  ou  l'eau  cil  bien  hau- 
te :  aufli  la  façô  n*en  cft  difficile  :  car  ils  mettêt  deux  paulx  droits,, 
fourçheuz  à  la  fommité,pour  fouftenir  vne  perche  en  manière  de 
gibet,  pour  y  attacher  vne  poiiîe.à  deux  anfes ,  ou  bien  vn  grand 
plat  de  bois,  pendant  auec  deux  cordes.  Et  faut  que  deux  hom- 
mcs,l'vn  d'vn  cofté,&:  l'autre  de  l'autrc^a  tiennent,cftans  en  l'eau 
iufqucs  au  nombril,&  en.1  efbranlat  bien  fort,  efpuifençdcleau, 
&  ainfi  qu'ils  le  laaccnc  de  force  en  kiettant  deffus  la  terre  du 
iardin. 

HH 


2.4^ 


S^ECOKD     LIVRE     DES     SINGVLA. 


Ville  .ai 
Ctire,;t 


Ze  Cxire 
moindre 
quon  ne 
l'etîime. 


'xHxfttau  .du 
£urt. 
Mont&e  du 
chxjrexu. 


Pkamide. 


Vefcyiptiûn  delà  ville  du  Caire ,  &  defon  cbafleau. 
Chapitre     xxxvi  I. 

À  ville  du  Caire  eft  pkis  longue  que  large ,  ou  il  n'y  a 
queles  hommes  qui  fe  méfient  de  trafiquer ,  non  plus 
quepartoutlepays  de  Turquie,  Les  femmes,  les  fil- 

_____ lcs,&  petits  cnfans ,  ne  fortét  guercs  àcs  n\aifons  pour 

fe  trouuer  en  public.  Et  croyons  fi  le  menu  peuple  auoit  de  cou- 
terne  aller  courir  .fe  monftrantpar  la  vilje  >■&  les  femmes  vendit 
{cnt&c  acheta  fient  comme  en  nozpays,que  la  ville  en  fcmblerpit 
eftre  beaucoup  plus  peuplée:  car  quant  au  peuple ,  il  n'y  eft  pas  fi 
■frequentcommeic  commun  bruitcrie.  Elle eft  fitueeen  triâgle, 
pource  que  le  chafteau  qui  eft  au  plus  haut  de  la  ville ,  eftant  aifis 
iuo'hem^nçag.ne,'ÇÛ:droic^emeGt'à.l'yn  des.anglps.  Parquoy  qui 
-ièpartiroir  du  chafteau,. &  fuyurok  îà  muraille  en  defcendantde 
la  partie  du  midy,  l'on  feviendroit  rendre  àvn  autre  angle  de  la 
ville,  Puis  fepactant  de  rechef,  venant  vers  le  Septentrion,  ioa 
viendra  droiààKautre coing -delà  ville,  qui  eft  le  troificfme  an- 
-glp.và;U  rnaniere  dvn  a  Grec.  Et  fe  partat  de  ce  troihefme  coing, 
^our;mo«£crvers-Ie  chafteau  ^  Ton  auraachetié  le  tour  delà  ville. 
•Il  y  aprefqueautarudernaifons  hors  le  circuit  des  murailles  que 
■dedans  laviile ,  dont  pîufieurs  fe  font  trompez  d  auoir  penfé  que 
îavillenefuft  point  murée.  Le  chafteau  eft  affisfur  dur  rocher, 
dedans  lequel  rocher  on  a  taillé  desdegrez,  pour  y  monter  plus 
facilemen^refTembîans  quafi  à  ceux  qui  font  au  chafteau  d'Am- 
i)oifê  :  car  la  fituation  d-u  chafteau  du  Caire  eft  ainfi  en  haut  lien, 
ê£  quafi  de  figure  ronde» 6c  y  a  pîufieurs  grofTes  tours  rondes ,  fai  - 
tces  à  i'antique,qui  toutesfois  font  de  petite  eftoffe.Et  pource  qu'il 
cft  en  fi  haut  lieu,il  y  a  vneviz  quarrecdu  cofté  du  iardin ,  faite  à 
.efcalîns, comme  celle  du  Palais  defainct  Pierre  de  Rome,  parla- 
.quellclescheuaux,chameaux&:afnes  peuucnt  facilement  mon- 
t-er^hargez..  La  court  çlc  ce  chafteau  eft  gran  de  &  fpacicu  fe ,  &  le 
logis  fort  plaifant  &  en  bel  ajr  :  -car  regardant  des  feneftres  çà  &: 
là,  tant  que  la  v  eue  fe  peuteftendre,  l'on  voit  quafi  tout  le  pays 
d'Egypte  2  ne  plus  ne  moins  comme  qui  feroit  fur  le  plus  haut  de 
Tvne  des  piramides.  Le  chafteau  du  Caire  mis  en  comparaifon 
aux  lieux  de  forcereffe^nc  doit  eftre  eftimé  guère  fort.  Quelques 


OBSERVEE?    FAR     *'.    BELONS  243 

vns  vouîans  coparer  Paris  au  Caire,  veuléc  que  le  Caire  fuft  an-  Tarii- 
ciennement  nommé  Is,  &  que  pour  pareille  grandeur  ,  on  a  pro- 
noncé Par  Is,quau*  pareille  à  la  ville  nommée  Is.  Et  de  fait  il  y  eue 
vne  ville  de  moulcgrand  renom- appeîlee  Is.dont  Hérodote  a  fait  B  Y  ^ 
mention^  mais  ce  n'eft  pas  le  Caire  :  earilditquls  eftoitàhuiâ:  ^  * 
iourncesde-Babylonc ,  nômee  de  l'appellation  d'vn  fleuue  de  ce 
nom,qui  paiTe  par  dedans  la  ville,&:  de  là  fe  rend  dedans  Euphra- 
tes.  Les  habitans  du  Caire  eftans  trauailîez  de  l'ardeur  du  foleil, 
font  contrain&s  de  chercher  1  ombre  desarbres  de  verdure:  par-  SJC 
qtvoy  ils  cuîtiucnt  &  eîcuent  les  Sycomores  en  plufienrs  endroits 
du  Caire>&  paries  carre&urs,&  par  les  places  publiques  :  &  nc~ 
ftoit  que  îauons  amplement  deferit  auec  les  arbres  de  perpétuel- 
le verdure,en  dirions  d,auantage,toutesfois5en  aiu>ns  bien  voulit 
mettre  la  peÎ4icl:iirccy  apres^  , 

L'on  peut  au  J* obferuer  plusieurs  petites  herbettes.  ramplns 
fur  les  hayes,  qui  ne  naiflent  aucunement  en  noftre  Europe  :  &: 
principalement  vne  manière  de  Campanettc  îacticineufe  r  qui 
fait  la  feméce  en  vne  longue  gouffe ,  comme  celle  du  Smilax  fau~ 
nage,  qui  eil:  moult  reiîemblant  à  la  Seamonee:car  d*vne  feule 
racine,  il  s'efleueiî grand  nombre  de  rameaux  que  fouuentles 
hayes  qui  pour  la  plus  part  font  de  Tamarifques ,  Oenophiâj  Se 
Rhamnus>&  les  murs  qu'ils  font  de  terre  grailc^en  font  tous  cou- 
verts par  deiTus, comme pourroyeteftre les  noftres  de  lierre:  Car 
de  lierre  il  n'en  croifl  point  en  Egypte. 

EH  ij 


■one. 
mus. 


Herle  d& 


:*44 


SECOND     LIVRE     DES      SINGYIA-, 


ïafeftML 


Portraiêi  du  Sycomore, 
■ /k\  X^r\  Ilsontauflivnepo- 

JÊ6  *•  /âf*}Ù*~ —  rite  force  dlicrbc,qui 

cft  fpcciale  à  ce  pays 
là,  laquelle  en  mon- 
tac  haut ,  fait  cotuirir 
les  tonnelles  de  ver- 
deur, &  la  faut  faire 
monter  auec  des  per- 
ches turques  aux  fc- 
neftres  des  maifons. 
La  chofe  du  Caire  le 
.plus  à  eftimer  eft  le 
Bafcflan,  c'eft  à  dire 
vnlicu  enferme,  ou 
Ton  ven4  l'argéterie 
&  orfeuerie,ouuragc 
de  foyc ,  Se  aucunes 
•fortes  de  drogueries 
precieufes  :  auquel 
lieu  il  y  a  ordinaire- 
ment grande  multi- 
tude de  gens  aifem- 
blez.-carils  conuie- 
nent  leans  pour  né- 
gocier enfeble,  quaû* 
comme  au  Palais  à 
Paris,ouàîabourfe 
_  àAnuerSj  ouaucha- 

geàLion.  Ets'ilyaricn  de  nouucau&:  de  beau  en  la  ville,  il  le 
faut  aller  voir  là.  Quelquvn  de  noftretrouppcmiftvn  doute  en 
MofaueesAu  auant,à  fçauoir  s>l  y  auoft  autant  de  Mofquces  au  Caire,qu  il  y  a 
Cure.         de  grandes  Eglises  principalesen  Parisi  Plufieurs  ayans  pris  gar- 
de,  tromi  érent  qu'ils  s  en  fau  t  Bien  peu* 


Farts, 
lion. 


<©BSE*.VXfcS     VAK    t*     ÏSLO-N,  UJ  \ 

t^vn grand  conduiSl  àeau  qui  efl  entre  les  ruines  de  Babylon^ta  vil- 
4e  du  Caire ,  qui  porte  l'eau  du  2v"//,  là  haut  pour  abbreuuer  le  chajteau. 
Chapitre     xxxvm. 

>  Ous  partifmes  du  Caire  pour  aller  voie  la  vieille 
|  villcdu  Caire,qui  ancienneméteftoit  appeliec  Ba~ 
;  bylô,fitueeau  defTus  de  la  ville  du  Caire  :  combien      , 
'  qu'il  y  aie  vne  autre  Rabylo  en  AfTyric  qtfo%ngm-.  a^  m' 
r^ww—  me  au.  iourd'huy  Bagadat,fituee,  en  Mefopotamie.  Ba^aL 
Nous  y  veilmes  les  ruines  de  plufieurs  édifices  antiques ,  faits  de 
brique  &  déciment ,  qui  fembloyent  auoir  efté  baftimés  de  gra- 
de magnificence  v  &  y  a  maintenant  vn  petit  village  ou  fe  tiennét 
quelques  Chrcftiens  Arméniens  &  Grecs,qui  nous  monftrerent 
vnc  belle  chapelle  aiTez  bien  faite >  laquelle  vn  médecin  Chce- 
ftien  auoit  fait  fabriquer  en  l'honneur  de  noftre  Dame.  Il  y  a  vne 
voûte  en  Jadi&c  Eglife  au  defïbus  terre, ou  noftre  Dame  fe  cacha 
auec  noftre  Seigneur  quand  il  eftoit  perit,au  temps  qu'iiz  eftoiet 
fugitifs  de  ludee  pour  la  tirannie  d'Herodes.  Nous  trouuafmcs 
vn  conduid  d'eau  en  chemin  de  plus  de  trois  cens  arches  3  qui  eft 
vn  peu  au  dcfTus  du  Caire  :  fait  d'affez  bonne  cftorfe  de  pierre  de 
tailîe,pour  conduire  l'eau  du  Nil  au  Chafteau  du  Caire ,  qu'on  y  ^^ 
ie&e  par  engin  s ,  c'eft  à  fçauoir  par  la  force  des,  Bceufs  3  quifont 
tourner  de  grandes  roiies,qui  eleuans  l'eau  du  Nil,la  icclcnt  lias. 
Les  Mores  ou  Egyptiens  font  les  pkrs  récréatifs  que  gens  qu'on  usEgyptim* 
puhlè  cognoiftre  :  car  ilz  font  toujours  prefts  à  fauter ,  ou  à  dan-  font  recréa 
fer,ou  à  faire.quelque  gambade;  qui  eft  vne  chofe  qui  ne  leur  eft  *$•  . 
pas  nouuclle  :  car  Flauius  Vopifcus  a  laine  par  eferit  que  les  Egy-  ^sr^ 
ptiens  cftoyent  grands  vcriificateu  rs  &  ioucurs  de  farces,&  touf-  ^^— 
iours  prefts  à  fauter.  Hz  font  en  ce  point  grandement  contraires  *~^   - 
aux  Turcs:Car  les  Turcs  font  naturellemet  mornes,  lents,  & :  pa-  Tum  mor, 
reffeux.  Les  femmes  des  Mores  de  la  vilk  du  Caire  fçauent  fon-  nés. 
ner  d'vne  manière  d'infini  ment  nomme  Cinghi»  qui  eft  auiïï  co-  ànghi. 
gneuenConftantinople.  Il  n'eft  guère  moins  armonieuxqu'eft  mT- 
vneàarpe;  &C  combien  qu  il  n'eft  de  grand  mufique ,  toutesfois  ^f0^ 
ijeêplaifantàl'ouye,  moyennant  qu'on  chante  en  le  formant.  ^T* 
Les  Mores  o u  Egyptiens  ont  plus  grand  vfàge  de  M uuque  que 
lcs.Turçs>&  prktcipakiacat  de  hauts-bois  &  de  vioUes  :  &.oforas 
*        '       •  HH  «j 


*âfir  s e eo'ND    lit srr ■  dis    si-kc-- v e a*. 

dire  que  les  Turcs  n'en  fçauent  autre  chofe  d'honnefte ,  fînoa  ecr 

que  les  Mores  leur  ont  aptins.  -  "i 

Vefcriptiondu-Baume.  Chapitre    xxxix. 

fpSpQpfe  Ousallafmes  voir  vn  iardin  en  vnviMage  bu  croifTçmr 
BMme.        §jjfcSii  fj  cs  Baumes,qui  neft  pas  û  loing  du  Caire,que  de  Paris 
I|iR&V*  )à  m  Laïdit.Ec  d'autant  que  le  Baume  cft  vue  plante  re- 
I^SE&Js  aommeexprccicuifè  y&  rare  ,  auons  voulu  eferire  tout 
ce  qu'il  nous  a  fèmblé  appartenir  à  fan  difeours.  Nousfçations  : 
qu'il  y  a  quelques  hommes  qui  pen&nt;qu.é  les  Baunies-de  la  Ma- 
teree  y  ay  en  telle  apportez  de  Iudee  :  mais  montrerons  cy  après 
qu*il  n'en  cft  rien.  $z  font  dedans  vn  grand  iardin  enfermez  en 
vn  petit  parquet  de  muraille,  que  Ion  dit  y auoir  efté  fait  depuis 
SmUxn.      <îuc  lc^mc  a  cfte^'Egypte-des  mains  du  Souldan :  8c  ait  on  que 
ce  fut  vn  Bâcha, qui eftoit  lieutenant  pour  le  Tur^qui  les cftima- 
dignes  dauoir  clofture  à  part  eux.  Lors  que  les  veifmes ,  il  n'y  en 
a-uoit  que  neuf  ou  àh.  plantes,qui  ne  rendetaucune  liqueur.  En- 
tre les  merques-que  les  anciens  nous  ont  enièigné  pour  cognoi— 
Bmmttoup  fac  ie Baume^ftjqu'il  doit eftre  verden  tous  temps.  Toutesfois 
wtrs  l>erd.   cc^  ^£  ja  Materec  près  du  Caire  n*auoft  que  bien  peu  de  fueil- 
ies  au  mois  de  Septembre  :  qui  nous  fembla  chofe  nouuellc  :  car 
les  autres  arbres  qui  fe  tiennent  verds  en  hyuer-,  ne  fe  dcfpouillêt 
deleurs  fueilîes  iinon  au  printemps ,  lors  que  les  bonro-eôs-  nou- 
ueaux  font  reuenus.Telz  arbres  font  plus  verds  en  Àutône, qu'ils 
ne fontau  printemps. Mais lesautresqui  fe  defpouillent  de  leurs- 
fueillcsjes  ie&éc  en  hyuer,pour  renouuelîcr  en  efhL Ccft  pour- 
teume:  ram  cïUoy  ** naus a ^cmi>]<;nors  <k propos  que- larbriiTeau du  Baume 
fitetiUs. J     ^  defpomllaft  en  efte-pour  fc reueftir  l'hyuencar  lors  que  le  veif- 
.    _  "       aies,tout  ce  qu'il  auoit  defueiiles,eftoyent  notmellemcnt  pro- 
duises. Bonnementnepouuons  exprimer  la-iuite  grandeur  du- 
âit  arbrifïèau  de  Baume:Car  tous  ceux  qui  eiioyenten  ce  iardin, 
Bauoient  que  des  petis  rameaux  déliez,  peu  couuerts  de  fueilîes: 
auiEn'y  auoit  il  queles-troncs  d'vn  pied  de  haut  ,,-qur  neftoyent. 
gucrcspîus  gros  que  le  poulce»  Quelque  part  que'naiuentles 
muimfdu  Baumes,  ilz  ne  pailentgueres  deux  coudées  ou  trois  de  hauteurr 
mime.       &  à'V-nfied  dé  terref'e^andencen  rameaux  grefies,  qtw  commu- 
némeâtneiôn*  point  plus-grosque  lcmy-m-à\rxc  pjùme-d'Oyc»:, 


OBSEB.VÏÏ5     ?A-R     *.    BEL  ON,  247 

Les  Baumes  de  la-Materec  auoyent  efté  nouueîlemcnt  retaillez, 
cr  forte  qu'il  n'y  auoit  de  refteque  les  cicqtsdont  fortoyent  les 
rudimens  des  rameauxà  venir»  Car  le  Baume  enfuit  la  nature  de: p^^fa 
]avigne,laquelleilfaut  necerTairement  rongner  tous  les  ans, ou  ^^^^ 
autrement  elle  f  empire.  Lesfufdi&s  fiosdu  Baume  auoyent  l'ef- 
corce  rougeaftre  par  le  deffus}&  portoyent  les  fueilles  verdes  or- 
données à  la  manière  du  Lcntifque  ,  ceftàfçauoir  de  coûéèc  . 
d'autre,comme  nous  voyons  es  fueilles  des  rofiers ,  ou  de  frefne, 
ounoyers  :  toutesfois  la  grandeur  n'excède  point  la  fueille  des 
pois  ciches,&:  eft  faite  de  telle  faço,  que  la  dernière  fuçillette.qui;, 
eft-au  bouti  fait  que  le  nombre  en  foie  i  m  par:  tellement  que-eomr  • 
ptant  les  fueillettes  de  toute  lafueiIle,on  y  en  trouue  trois,  cinq, 
ou  fept,&:  n'auons  guercs  veu  quelles  paflent  en  nombre  de  fept. 
La  fueille  de  l'extrémité  eft  plus  grande  que  les  autres  qui  fuyuet: 
catcîles  viennent 'çonfcquem menççn  amoindrifTant  y  comme  il , 
aduienràlafueille  de  Rue.  Nç>us:trouupns_quç  Pline  a  totale- 
ment  enfuyui  ce  que  Theophrafteen  a  e/cr^çommeauifi  Diof- , 
coride:  &cheminanspar  mefme trace  ontefcritquefesfucilies 
font  approchantes  des  fueilles  de  1a  Ruc:ce  qu'auons  trouue  vé- 
ritable. Or  ppurce  qu'avions  pafTé  trop  de  legjer  fur  le  Çaumeà- 
k  Materce,  &c  nel'auions  pas  bien  obferuela  première  fais  a  re.~ 
tournafmes  voir  pour  La  feconde,&:  ayans  trouue  moyen  d'en;  rc- 
couurer  vn  petit  rameau, duquei  gouftafmes,  &:  auifi  de  fès  fueil- 
les., les  trouuafmes  cftre  quelquepeuadfrringerjteSjaucc  vn  gouft 
-  yn&ueax, $c au .demeurant aromatique.  :  maisj-efcôrce  des  ra- 
meaux eft  encor  plus  odorante.  Le  rameau  eftveftu  de  deux  ef-  ^f*'4*^* 
corces:îa première  eft  rougeaftre  par  le  dehors,  &  couurc  corn-  BuiiTM- 
me  vn  parchemin  fur  l'autre  de  deirous,qui  eft  verde,  qui  touche 
au  bois.Ceilc  efeorcegouftee  baille  vnefaueur  entre  l'encens  £é 
la  fueille  de  Tercbinche,approchant  à  la  faueur  de  fariette  laùua- 
ge,  qui  eft  vnefaueur  fortplaifante  ,  Se  frottée  entre  les  doigts, 
rient  de  l'odeur  du  Cardamome.  Le  bois  en  eft  blanc  ,&  n'a  non 
plusse  fàucur  ne  d'odeur  qu'vn  autrebevis  inutile.  lia  les  rame- 
aux droiâ^fort  greflgs,qui  nefont  que  petites  verges  delieesLau- 
tour  defqudLz  les  fueilles accent hx>rs  fans^ardcr'o^ejÇeil^mec 
q^el'vne&rxmajqtqn^^  .«-  :-'. 

&;ainfi  confcquxmmeatdiftans  l;vne  àc  l'autr^cncournàns  rare- 
ment lapent  rameau j& (.comme  auons  deûadjt  )  chaque  fueille 


248  SECOND     LTV  ILE    D>I  S     smGVLÀv 

eft  tellement  composée ,  qu'en  vn  mejmc  pied  il  y  cnaiufqucsa* 
trois,ou  cinq,ou  fept.  Ayans  defcichc  noftrc  rameau  de  Baume, 
&:  conféré  auec  le  Xyllobalfamum  qui  eft  vendu  es  boutiques 
des  marchands,rauons  trouué  conuenir  en  toutes  merques. Les 
opinions  des  autheurs  qui  ont  efcritdu  Baume,  fontfidiuerfes^ 
queû*  nefeuffions  veu  nous  mcfmcs  ,  n'en  eu  (fions  oféefcrirc  vn 
feulmot  après  eux  ,  &  ferions  bien  d'opinion  qu'il  n'yenaonc 
efté  cultiuéenla  plaine  de  Icrico,comme  ion  a  eferit.  Orpource 
qu'en  auons  veu  TarbrifTeau  5  Se  bien  conflderé ,  il  nous  a  femblé 
bon  en  faire  tel  difeours  que  pefons  appartenir  à  vne  chofe  qu'on 
veut  curieufemcntobferuer.  Nous  auons  trouué  par  expérience 
x^iloldff  que  le  bois  vulgairement  nommé  Xyllobalfamum ,  qui  eft  védu 
mum.        par  les  marchands,apporté  de  l'Arabie  heureufe  5  conuient  auec 
CArpobdfc  celUy  d'Egypte  qui  eft  cultiué  à  la  Matcrec,  Et  faut  de  deux  cho- 
tmm-         tes  l'vnejoubien  que  le  bois  nommé  Xyîiobalfamum,&  lefruiâ: 
nomméCarpobalfamum ,  teîz  que  nousauons.cn  cours  de  mar- 
chandife,foyét  faux ,  ou  bien  que  celuy  quieft  cultiué  en  Egypte 
au  iardin  delaMatcreerqu  on  eftime  vray  Baume,  foit  faux.  Car 
les  voyans  conueni  r  en  tou  tes  chofes,  feacha$  bien  que  c  erc  tout 
vn,vouîons  mamtenir^  conclure  que  celuy  qu  on  vend  fous  le 
nomde  bois  de  Baume,  eft  celuy  qui  de  tous  tempsaefté  en  vfa- 
ge.  Le  Baume  cft  pourleionrd*huy  feulement  cultiué  en  Egypte 
près  du  Caire,&  cobien  que  Theophraftea  efté  d'opinion  qu'on 
n'en  trouué  point  de  fauuage ,  toutesfois  ofôns  constamment  af- 
fèurer  que  de  tout  temps  il  y  en  a  eu,&:  encor  a  maintenat  en  l'A- 
rabie hcureufc,dont  le  bois  &  le  fruiâ:  ont  efté  apportez  de  tou- 
te antiquité  par  mefmevoyedes  marchands  quinous  apportent 
les  autres  marchandises  d'Arabie.    Et  voulons  prouuer ,  qu'ilz 
eftoyent  cogneusentre  les  marchands ,  comme  eftoyet  les  autres 
drogueriesrchofè  que  pouuonsfacilement  proiracr  par  les  com- 
positions des  medicamés,efquclles  Ion  auoit  acouftumé  de  tous 
mthrUttts.  temps  en  meilcr.  Mithridates  nelesmettoit-ilpascnfonmcdi- 
stmencedu  camêt?Ne  les  trouuoit-on  pas  à  acheter  es  boutiques>Ccla  prou- 
Baume n*    ueDiofcoride  >&  complaignant  dequoy  Ion  fbphiftiqubit  la  fc- 
**•  mcflce  du  Baume desfon  tcm^sXarpùhtlfamtm  (dit-il  \]adulterat»p 

UMtgut.  femJyieljyçèricQ  fim&tfuod œpetxa dppïdà defertur.  Pour  Petra oppidû 
entendons  la  Mequc.  Il  dit  kinûduboisiEtltjwf génère  yuodXyiïG* 
halfimum.  vocant  ^robotur  recens ^Jkrmento^  temt,  ff*lmm>  odoratutn^ 

c^màmtenm 


0  B  S  E  R  VE  ES    P  A X    P.    BI L O N»  Z49 

Mtfdantenusoffûbaifamumjpirans.  Par  lesquelles  parolles  il  eft  touc 
ïnanifefte  qu'il  cftoiten  commun  vfagc  auec  les  autres  drogues. 
Encoreft-il  tout  manifefte  par  îesparolles  de  Diodore  Sicilien  -?  orfi,s,a 
cref-ancien  liifloricnjdefcriuantîcs  rkhcfFcs  de  l'Arabie  heuTCu- 
fc:difant  qu  elleproduit  le  Baume  es  lieux  maritimes.  H  ne  veuc 
donc  pas  entendre  que  ce  foie  du  Baume  cultiué,mais  qu'il  croi£ 
fe  fauuage.  Paufanias  a-au{£efcrit  que  le  Baume  eftoit  vn  arbrif-  ?au£im&, 
feau  de  i'Arabie^Les  autheurs  ne  faccordent  en  parlant  du  Bau- 
me :  Straboeferit  qu'il  eroifien  Syrie  auprès  dti  lac  Gcncfàreth  ~0, 
entre  le  mont  Liban,&  l'Àntiliban.  Les  autres  autheurs  veulent 
que  la  feule  région  de  Iudec  le  produife,&  qu'il  ne  faille  toucher 
les  rameaux  pourenauoir  la  liqueur  vfîn on  auec  dés  fèrcemens 
d'os  ou  de  verre»  difàns  que  ù.  Ion  blefïbit  le  tronc  du  Baumeauee 
le  fer  pour  en  auoirrbuyle,qu'il£èmourroit  incontinent  jCorce-  ComeUm 
Mus  Tacitus  eferit  que  quand Ion  metdu  fer  aupres,il  f  effraye  de  Tm***,  - 
grand'  peur  qu'il  ena  :.-&•  c^ue  par  cela  il  le  faut  entamer  auec  au- 
îces  inftrumens  qu'auec  le  fer  a  autrement  Ion  rien  auroic  point, 
deliqueur.Nouscnqueransdu  Baume  aux  marchands  du  Caire 
lors  que  conférions  noftre  rameau ,  ilz  difbyent  que  tout  le  Xyl- 
lobalfamum^  le  Carpobalfàmura  qu'ilz  auoycnt  iamais  vendu,, 
venoitauec  les  autres  drogues  qu'on  apportoitde  laMequc3&s 
quedeleur.temp.s  iîz  auoyent-fouuenance  dauoirveu  les  Bau- 
mes qui  font  pour  le  iourd'huy  à  la  Matcree^auoirelté  apportez  .- 
de  l'Arabie  heureufe,  auec  grande  defpenic  du  Souldan.  Ex  pour 
autant  que  tant  de  gens  le  nous  ont  afleure  y  auons  trouuéque  le.  ~ 
pquuions  bien  eferire  fans-aucun  fciupule,&  iànsricn  dimmuler  ^ 
de  ce  qu'il  nous  en  a  fêmblé. 

B^^W^^^/o»* droiSh  auprès  du  Cairei&  des  arbres .       ^PJ  *. 
naijfans  dedans le  iardm  delà  Materee.-  **.. 

Chapitre     XL 

»0n  voit  pîttâêurs arbres  de  Sdbcftescxrcc  iatdki  de  'sdxfie£ 
s  la  Matcree,^  àzs  Sycomores  >  qu  ilziiommcnt  fî-  ®comôres: 
l  guiers  de  Pharaon.  Leurs  figues  fèroyent  fcmbla-  *jp««*  & 
v  blés  aux  noftres  5  n'eftoit  quelles  font  rouges  par  ^y*°t  c 

" efTus.grofïcs  corne vn ceuf,^<|uafi toufîours fen-  c'£^  f*~ 

d&cs.  ËUes  aeyaient  rien  feiches  :  car  elles  font  maigres  &4ures, 

'  IL. 


25«0  SECOND     LIVUE     DES     SÏNGVLA. 

pleines  de  grains,aufTi  font  de  mauuaisgouft  &  fade,&  principa- 
lement à  ceux  qui  n'onc  pas  acouftumé  d  en  manger.  Les  humi- 
des ont  quelque  peu  meilleure  grace;&  pour  les  bien  louer ,  elles 
ne  valent  guercs ,  combien  qu  elles  foyent  dVn  grand  rcuenu  au 
sa/eKe.      "  pays  de  toute  Egypte. L'herbe  de  Bafclic  eft  femec  par  les  campa- 
gnes d'Egypte ,  croulant  trois  fois  plus  grande  qu'en  ce  payscy. 
Ilz  la  manget  comme  nous  faifons  des  autres  herbagcs.Lespom- 
Me  Animes.  mes  ^es  ^f  eîanzanes,que  nous  nommos  pommes  d  amour5vien- 
lient  en  grand'  quantité  par  les  campagnes  fabloneufes,  defqucl- 
les  ils  ont  de  deux  ou  trois  fortes,  blanches  &  rouges ,  longues  & 
rondes.Theophrafte,à  noftre  aduis,  lanommeMalinatalam:car 
parlant  àcs  choies  de  rEgypte,il  dit  en  cefte  forte  :  Locis  autan  are- 
noJîsbdudproculdfluuîonafiiturterrcnum).quodMalmatalamappeUant. 
Hz  en  mangent  quaû*  à  tous  leurs  repas,  cuictes  deflbus  la  cendre, 
y      y,  boulucs ,  ou  fri&es.  Le  lieu  nousïut  monftré  en  ce  iardin  de  la 
^rriuee  de  Materee ,  ou  noftre  Seigneur  &  noftre  Dame  furent  long  temps 
nofheDame  logez  quand  ilzarriuerent  en  Egypte  ,  fuyansde  Iudee  de  peur 
mEgype.     d'Hcrodes.Et  mefmemet  y  a  vnc  feneftre,  ou  noftre  Dame  met- 
toit  noftre  Seigneur  pour  repofer.  JLàeft  vne  fontaine  qui  arrou- 
Fontxine  Jm  çc  lcsiardins  des  Baumes,en  laquelle  ilz  difent  que  noftre  Dame 
w  baignoit  fouuent  noftre  Seigneur,&  y  lauoit  fes  drappelets.  Il  eft 

oh&r'ues  tout  arre&é que  les obelifques ont  efté  entaillqz  pour  merquer 
obel'fquesdt  les.fepulch.res  des  Roys  d'Egypte ,  corne  au fîi  furent  les  Pyrami- 
Uuaxerce.  des,&:autresgros  Coloflès  :defquelz  obelifques  il  y  en  a  vn  tout 
droict  dedans  vn  champ,quclque  peu  au  delà  de  la  Materee ,  qui; 
jîiftodro*  cft  beaucoup  plus  haut  &  plus  gros  que  ceux  qui  font  en  Aîexan- 
me-  drie,ou  que  celuy  qui  eft  dedans  l'Hippodrome  de  Conftantino- 

plc.  Quand  nous  îeufmes  veu ,  tournafmes  bride  vers  le  Caire, 
nous  deftournans  de  noftre  chemin ,  en  déclinant  à  mai»  dextre 
pour  aller  voir  vn  autre  iardin ,  qui  n'eu:  qu'à  vnelieuc  du  Caire, 
ou  il  y  a  vne  grande  &  fpacieufe  falle,  qui  fut  faite  par  les  Cercaf- 
£cs  au  temps  que  le  Souldan  eftoit  fèigneur  d'Egypte.Ceftuy  édi- 
fice eft  vne  grade  efpace  pauee  degrade$~pierresquarrees,&:cft 
couverte  deffus  en  manière  de  tërraffc  5  pour  défendre  du  folcil, 
dot  la  couuerture  eft  fouftenue  à  pilîiers  de  pierre  de  taille  à  clai- 
res voyes.Le  Nil  y  arriue  tout  joignant  les  murailles ,  non  pas  le 
courant,mais  quand  il  inonde.  Au  cofté  de  leuant  de  cefte  falle, 
il  y  a  vn  beau  petit  iardin  y  dedans  lequel  fon  t  pluiieurs  arbres  de 


OBSERVEES     PXK     ?.   BEtOK»  4:$! 

Cafïès,.des  arbres  de  Henne,dcs  Roûers ,  &  Iofuim  iaunc  :  mais  i°fiimiau* 
aux  coftcrdexScptccrion  &  lAiâyfiy  a  deux  péris  releruouets  en  m- 
manière  de  viuiers ,  qui  feruent  à  garder  l'eau  pour  boire.   Tout 
ce  baftimenteft  peind  par  le  defllis.  Les  poutres  &aix  font  de 
palmiers.  Depuis  que  TÉgypte  eft  rendue  tributaire  au  Turc ,  il 
a  toujours  continué  tomber  en  décadence*  • 

Que  telle  manière  degent  ramajfee ,  que  nous  nommons  Egyptiens  3font 

au&hientrouuezjm  Egyptetcjués autres  pays. 
*:•-  Chapitre    xli~ 

r  L  n'y  a  lien  en  tout  le  monde  qoi  fort  exempt  de  telle  fm*x  Fgf*- 
j;  panure  gent  ramaiïèe  que  nous  nommons  de  ùixxpticns. 
tnom  Egyptiens,,  ou Baumiens:eat  mefmement  efias  ^m»m% 
^encre  la Mâtereeôc  le  Caire^nous-en  trouuîos  de  gra- 
des compagriics)&:  auiii  le  long  du  Nil,  en  plufreurs  villages  d'E- 
gypte, campez  defïbus  des  Palmiers^qui  eftôyét  auffi  bien  eftran- 
gers  en  ce  pays  là  comme  Hz  font  aux  noftres^ Et  pource  que  leur  yailacBe, 
origine  eft  de  Vallachie  ou  Bulgarie ,  ib  fçauent  parler  pluûeurs 
Jang^es^  font  Chrcftiens.  Les  Italiens  les  nomment  Singuani. 
Hz  ont  priuiîege  des  Turcs  qu'il  eft  ioiûble  aux  femmes  Singua-  singuank 
ses  de  fc  proftituer  publiquement  à  toussant  aux  Chrefticns  co-  f^fi0* 
me  aux  Turcs  mefines  : .&  ont  vnc  maifon  dedans  Perc  de  Con-  Pf    £uu" 
frantinople  auec  pluûeiirs  chambres  „  ou  chacun  peut  entrer  ii-  m  pere  ^ 
brement/ans  que îaiuftice Turquoife  leur  puifïê rien  dire.   Et  cij&nncde 
pour  le  moins  y  a  vne  douzaine  de  femmes  qui  fe  tiennent  ordi- 
nairement leans^Cefk  gents-'entremefleen  Grèce  v  Turquie,  8£ 
Egypte  de  travailler  en  ouurage  de  fer,&;  f  y  troiRien t  de  fort  bos 
ouuriers  en  ce  racftier  là.  Eux-mefmes  font  leur  cbarboidefquek 
auons entendu  que  celuy  quieft fait  de  cicots  &  racines  de  brie- 
r^eft  le  meilleur  à  faire  ouurage  de  fer,  d'autant  qu'il  TendurcifL 
Quand  nous  eufmes  demeuré  quelques  ioumees  au  Caire,ayans 
propofé  d'aller  voir  hs  Pyramides,apresauoirfait  l'apprcft  ncccC- 
faire  ,  fottifmeshors  la  ville  par  la  porte  dsmidy  y  &c  trouuamics 
les  barques  quinous  paiïèrét  le  Nil,  Lonn'y  va  point  qu'en  gran- 
de compagnieicar  autrement  on  feroit  en  danger  d'élire  detrou£- 
{£..  Pat  cela  vn  Sangiac  auec  pluûeurs  Spâhizfeirentefeorteà 
monûeur  de  Fumerai  axoute  lacompagnic  qui  le  fuyuoit. 

II  ij 


:iji 


SECOND     LIVRÏ    DES     SÏNGVÎ.A* 


Objèruation  des  Pyramides. 


^Chapitre    XL  H. 


^tiennes. 


Catran. 
Nïtre, 


'En  dcfpîaifè  aux  ouurages  &  antiquités  Romaines, 
elles  ne  tiennent  rien  de  la  grandeur  Se  orgueil  des 
Pyramides.  Les  Egyptiens  attendans  la  rcfurre&ion 

des  morts,auoycnt  couftume  de  cofirc  les  corps^our 

les  faire  durer  à  l'éternité,  Au  fli  eft-ce,  ce  que  nous  vfons  pour  le 
iourd'huyfbusle  nom  de  Mumie  ,  nevoulans  pas  les  brufler, 
comme faifbyent les  Latins,  ne  les  enterrer,  comme  les  Grecs: 
car  ilz  efiinaoyént  que  le  feu  eft  vn  animant  qui  deuore  &  confu- 
me  toutes'chofès ,  &:  qu  après  feftrc  bien  faouîé ,  luy  meimes  & 
ce  qu'il  a  deuore  periffent.  Aufïi  ne  vouloyent-ilz  point  enterrer 
les  corps,de  peur  que  les  verras  ne  les  mangeaffent.  Et  pour  eui- 
ter  tous  ccsinconuemenSjiîz  les  confifbycnt  anciennement  auec 
du Catran  &  du Nitre:&:apres quiîzles  auoyentcoficl:s,lesmct- 
teyent  dedans  des  fèpulchres ,  enfermez  deffous  quelque  grofFc 
maâè  de  pierrc.Et  de  fait  choififToiét  les  lieux  les  plus  fteriles  que 
ilz  pouuoyent  trouucr,pour  les  fepul  turcs.  Tellement  que  le  lieu 
ou  font  les  Pyramides,eft  moult  deferr.  Elles  font  delà  le  Nil  en- 
uiron  quatre  lieues  loingdu  Gaire.  Nous  le  paflafmcs  tant  à  voi- 
le qu*à  rauiron,au  dcfTous  de  hfle,qui  eft  vis  à  vis  du  Caire  :  &  ne 
nous  fut  afTezauoir  vne  fois  paffe  le  courant  de  Peau  :  car  quand 
nous  rcufmes  arriuezau  rkiage  dedelà,nous  fuyuifmcs  vne  lôguc 
chaufïce ,  ou  il  y  auoit  des  arches  de  pierres ,  &  en  quelques  en- 
droids  de  petits  pots  de  bois ,  ou  nous  pafÊons  fans  bateau.Mais 
à  la  fia  cftans  venus  bien  près  du  village  de  Bufy  ris ,  ou  l'eau  du 
Nil  auoit  rompu  les  arches  du  pont  de  pierrc,il  nous  fallut  parler 
par  bateau.  Et  depuis  le  village  de  Bufyris ,  il  y  a  encore  vne  autre 
longue  chaulïèe,  qui  fè  va  terminer  au  defert  des  Pyramides.  Le 
courant  du  Nil  pour  la  première  fois  fe  départ  bien  haut  au  def- 
MAMtis  L*  fcs  ju  Cairc^aifant  vn  canal,  qui  va  tomber  dedas  le  lac  Mareo- 
CM'  ris ,  fuyuant  toufiours  icelle  cofte  deferte  de  la  partie  d'Afrique. 

Gela  nous  i^ifoit  doutera  fçauoir  il  deuionsentendre  que  ce  ra- 
meau fèpare  l'Egypte  de  l'Afrique  :  car  il  pafTe  ioignat  le  pied  des 
pyramides ,  feparat  dVn  cofté  la  terre  fertile  d'Egypte,&  de  i'au- 
cre  la  ftcrile.Parquoy  le  NiîpafTant  le  long  du  Caire,  n'eft  pas  en- 


:M]yris. 


ÔfeSE'B.VEES    Vâr   >.  "BE'LOW.  ïf$ 

t lerccar  il  y  a  defîa  dcparty  de  fes  rameaux  bien  haut  à  main  gau- 
che en  vn  canal.,  qui  va  tomber  dedans  le  lac  Mareotis.,  Quand  Mmùt'iS- 
eufmcs  pafféje  HiL,  &  que  nous  eftionsdu-  cofté  des  Pyramides, 
.alors  nous  fanions  tout  entier  entre  nous  &  le  Gaire.  Farquoy  de 
quelque  part  qu'on  vueille  prendre  l'Egypte ,  elle  ne  peut  faillir  à 
réprefènter  la  figure  du  Delta  :  car  ûbien  on  lentournoit,  &  l'on 
^ommençaftau  ïacMareotis  fuyuant  contremontde  droi£bîi- 
gnc,iu(ques  au  deifus  de&Pyramides.,  Ôcàc  là  defeendant  à  Da-  to^- 
roiate,quieft.oftium  Pelufîacû,  n'en  auroit  on  pas  fait vnepoin-  ^x^rie- 
"&cî  EtquidefcendroirdeDamiatecn  Alexandrie,  n'acheuera  j™*mVe* 
Ton  pasles  deux  autres?  qui  fèroitlaiîn  du  triangle  commevn  A. 
<^juand  nous  fufmcs  à  paffer  la  leuec  de  Bufyris ,  qui  eftoit  rom- 
pueen  vn  endroid ,  ou  l'eau  da  Nil  y  fait  vn  lac  (  dont  les  Grecs 
ontprinsoçcafiond'inuenterdes^blesdc  leurfleuue  Lethcs&: 
Stix:  caries  corps  embaumez  qu'on  portoitcnièpulture^aiToyêc 
en  bateau  par  deffus  ledid  lac,  qui auoit  totalement  dcfhordé  êc 
rompu  la  chauffée.  )  Ceux  qui  eftoyent  bien  montez ,  ne  irenc 
^difficulté  de  le  paffer  à  gué  fuy  uans  les  guides, mais  les  autres  mal 
montez  attendirent  le  bateau.  Toutesfois  quelques  vnss'eftans 
<ïefpouillcz ,  menans  leurs  montures  parlelicoi^le^eurcnt  paf- 
fer ayas  feau  iufques  deflbus  les  aiffelles.  Les  Mores  du  prochain 
village  nous^ccompagncrcncpoui:  môter  deffusles  Pyramides, 
^&  nous  montrèrent  le  chemin.  Elles  font  fituez  moult  loing  de 
la  me^mais  ne  font  qu'à  trois  icts  de  pierre  de  l'eau  du  NiLIl  fera-  tnàm&i 
ble  à  voir  les  Pyramides  que  ce  foyent  montagnes  de dcfmefurce 
grandeur ,  Auffi  ont  cfté  làaâeniblees  par  moult  grand  trauail  Se 
labeur  des  hommes.  Le  lieu  ou  elles  font  fituecs ,  cil  fort  fàblon- 
neux  &:  ftcrile  ;  duquel  Pline  a  eferit ,  fuyuant ce  qu'en  a  dit  Hc~ 
Todote,en cefte manière:  *drou  Lttèpura  àrcwnlentisjîmiiitudinc. 
Laplus  grade  Pyramide  pour  cftrc  en  lieu  vn  peu  plus  bas  q  la  fc- 
code,  apparoir  de  loing eftre  plus  petitermais  de  près  ék  fe mo- 
ntre fans  coparaifbn  beaucoup  plus  grande.  Véritablement  elles 
font  plus  admirables  que  ne  les  ont  deferites  les  hiftoriens,  def- 
quelles  la  plus  grande  eft  faite  à  degrez  par  le  dehors.  Nous  auos 
mefuré  fa  baze,qui  a  crois  cens  vingtquatre  pas  d'vn  coing  à  lau- 
trc,lcfquelscomptafmes^eftendansvn  peu  les  ïambes.  Gommé-  M  r  ',, 
^çans  à  compter  du  pied  de  ladi&e  Pyramide  en  montant,  trou-^^ 
iuûncs  enuiroa  deux  cens  cinquante  degrez,  defqucls  chacun     **' 

II  iij 


1^4  SECOND    tîVXE     RES     SINGVtA. 

degré  eft"  de  la  hauteur  de  cinq  femelles  d'vn  foulier  à  neufs 
poin<£bv  Eftans àla  fQmmité,veoyons  bienà  cler  la  ville  du  Cai# 
se  de  là  le  Nil>du  cofté  de  i'  Arabie  dcfertc,&de  l'autre  cofté  nous 
retournons  vcrsleSeptentnon,vcoyons  tout  le  pays  d'Egypte  ca- 
me fubmergé,femblant  quelque  grand'  mer.  Puis  tournans  le  vi- 
iàge  vers  le  Midy  > qui  eftle.  cofté  d'Afrique  ^ne  veoyonsfinon  le 
fàbkm  fterile.  Ayansconfideréla  partie  de  îa  Pyramide  qui  re* 
garde  le  feptentrion,  la  trouuafmes  beaucouprjlus  gaftee  que  les 
autres  coftez.  Laraifbneft ,  que  l'humidité  tant  des  roufees  de 
Ctuiâ:  que  du  Nil , agitée  pades-vcntsTeptentrionanx ,  la  ruinent 
*  grandement^  vèu  mefmemeat  que  les  au  très  coftez^ou  <^u  leuan  t 
ou  deMtdy,n  eftans  point :  touchez.de  ilHiumidité ,  ne  font  point 
gaftez:Car  le  vent  de  Bifè  en  Egypte  eft  humide,au  contraire  des 
autrespays  ou  ildefeiche.  VoMajquant  à  l'extérieure  partie  de  la^ 
di^peemierc  grande  Pyramide*Maintenant  voulons  parler  dés. 
conâmB m  intérieures  parties^ Nous entràfrncs leans  par  vn  eonéui&quat* 
bfyw****'  ré,ou  l'on  n'y  peut  aller  fans  fè  courbencar  il  eft  en  fkuation  traf- 
aerfè ,  venantde  haut  contre  bas.  11  femble  que  Fouurier  en  ceft 
endroid amonftré  l'auoir  fàkauec  bonneraifon  :.  Gar  qui  l'eufl 
lait  obliqae,ôn»euft  peu  auoir  de  la  clarté  enîa  Pyramide,  En- 
transleans-,  tenions  chacun  vne  chandelle  de  cire  allumée  en  la. 
main^&  n'y  gouuion  s  entrer  qu!vn  au  coup:  car  eftans  patuenus 
au  bout  du  permis  d'embas*  pour  entrer  à  la  eau ité  ,  il  fallut  fe 
coucher  à  plat  fus  le,  ventre  contre  terre ,  rampansà  la  manicre- 
desfèrpcnts: encore  panions  nous malaifement.. Quand  nous 
fufmes  àcàzm  la  Pyramide ,  trouuafmes  leans  vn  lieu  vuide  :  &c 
deîàxirans  à  gauche,  trouuafmes  vne  autre  efpace  d'vn  conduit 
de  galerie  quarrce,affez  bien  entaillée,  qui  va  de  bas  en  haut ,  ou 
vn  homme  peut  aller  tout  droid:  car  il  y  a  large  efpace  v&  haute 
cauités&  eft  fans  degrez  pour  y,  monter,  pauec  de  grandes  pierres 
&:  larges^monit  polies,  &:  gliflantes  .Mais  on  fe  prend  aux  accou- 
doueurs  quifont  des  deux  eoûez,pour  s  aider  à  grimpcr.Et  quad 
chambre  e»  on  a  montéquinze  ou  ièize  pas  5  lors  on  entre  en  vne  belle  cham- 
k&widt*bTc,qnatïcc  deux  pas  de  long  v&quatrepasdelarge,  qui  eft  de 
quatre  àfixtoifes  de  hauteur:  dedans  laquelle  nous  trouuafmes 
vn  coffre  de  marbre  noir  4  fait  d' vne  feule  pièce ,  àla  mode  dvne 
caiffe,  long  de  douze.picds ,  &  cinq  de  hauteur,  &  autant  de  lar?- 
geur  j  qui  eft  fàaç  couuef  de.  C  eftoitie  fepukhrcjd'vn.Roy  dlL- 


O B  S  EU  VS  E  S    1?  A R    P.   :B  EtON.  Z$$ 

gyprc,pour  lequel  lapyramide  foc  faite.  Le  fcpulchre  4e  marbre  -sepâchem 
noir  futmis  dedans  ladite  chambre  en  faifànt  ia  mâflbnnede  de  "ty*™** 
la  Pyramide.  Nous  en  retournafmes>&  en  descendant  parce  fpa- 
tieux  condu i&  auions  le  vifage  tourné  vers  le  Septentrion.  Et 
quand  nous  fufmeshorsjil  nous  fallut  retourner  à  main  gauche, 
ou  trouuafmes  vn  puis,qui  eft  maintenant  quaft  comblé  de  pier- 
re. Toute  l'hiftoire  de  ces  Pyramides  eft  eferite  en  Hérodote, 
Diodore,  &  plufieurs  autres  Grecs ,  defqueîs  PJine  eicriuant  en  ?*  tUiS*n 
Latin ,  a  di  t  que.ee  puis  eft  moult  paribnd \  ô&ji'y  a  rien  û*  vray  ^ramt  • 
quo  en  droit  l'eau  pour  feruir  à  la  maffonperie^&abbrçuuer  les 
ouuriers  t  car  le  dedan  s  eft  fait  de  fort  ciment  ,  à<cbaux  Se  à  fable, 
qui  eft  figne  qu'il  y  a  fallu  de  l'eau.  Quand  nous.fufmcs  retour- 
nez en  la  première  cauîté  9 &  marchans  plus  outre ,  trouuafmes 
quelquepetite  efpaceà  rnaiagauche^iqui  a  ainfiefterompue:  car 
autrement  eîîeeft  tonte  mai&e*  NQtis.y  trctuuaônç;sdesSpuriz 
chàuues  différentes  aux  noftres,^  a  celles qu^auionsauparauant  J^^ 
veucs  dedas  le  labyrinthe  de  Crète:  carjes  npftres  n'ont  la  queue 
plusjogue  que  les  adles,mais  celle  delà  Pyramide  ont  vne  queue 
qui  paiTc  quatre  doigts  outre  les  ailles",  longue  comme  aux  Sou- 
riz,  Nous  {ôrtifmes  de  la  Pyramide ,  &  allaïmes  veoir  la  féconde. 
Nous  auons  deferit  cefte  grande  Pyramide  la  première ,  comme 
fùrpaflànt  toutes  autres  en  gradéur  &  orgueil ,  comme  auffi  c'eft 
elle  que  tous,  autheurs  anciens  ont  entendu  eftre  admirable  à  la 
regardec.Le  meilleuj:  archer  qui  feront  afa  fommitç5Sç  tirant  vne 
flecheen  Pair,  à  peine  pourroit  l'enuqyer  horsdefa  bazcvqu*e]îe 
netombaftfutles  degrez;  car^comme  auons  dit,  elle  eft  de  de£- 
mefuree  largeur. 


Ohferumon  de  U  *  féconde  Pyramide. 
Chapitre     x  L 1 1 1. 

Seconde  fy* 
,  'Autre  Pyramide  qui  eft  féconde  en  grandeur ,  n  a  runùdcfim 
!  point  de  degrez  par  dehors  :  auffi  ne  peut  on  monter  degre\ 
\  defTus ,  &.  pour  autant  quelle  eft  fituee  quelque  peu 

!  au  defTus  de  la  précédente  en  plus  haut  lieu ,  appa- 

roît  deloing  eftrc.îa  plus  grande:  &  à  la  voir  de.pres, on  trou ue 
3e  cotraire.  Elle  eft  de  forme  quarree  corne  la  première,  &  côblec 
iufques.àla  fQramité.Laprecçdéee  a  vne.efpacc deflûs  le  faifte de 

II    iiij 


st$* 


%$&  S  E,.C  0-|T  IK  L  I  V >R  %,   DES    S.I  N  G  V  Z  Aw 

deux  pas  en  4'amcïIC  >  tellement  que  cinquante  hommes  fe  peu*- 
uent  tenir  deflus  :  mais  celle  cy,a  le  faille  en  apoinctant ,  ou  il  ne 
fçauroit  y  auoir  cfpacc,erç  laquelle  vn  homme  fe  peufl  tcnir.Elle 
cft  réchauffée  de  ciment  par  dehors;. donç.<;elle  partie  qui  regarda 
le  Septentrion  ,cft  cpnfumce  de  l'humidité,  que  les  vents  luy  en- 
uoyentdc  Teau  du  Nil,&:  des  roufees  de  la  nuid,  comme  à  la  gra- 
de. Ses  Steliions  que  les  Grecs  nomment  Coloris,  font  moule 
fréquent autour.de  ces  Pyramides ,  &  es  cauitez des  fepulchres, 
qui  {ont çà Se  là  par  ladiûe  campagne.  Ils  felogent  es  entredeux; 
Tarantes  ^s  plcrr£s>&  prennent-des  mpufçhes  :  ebofe  qu'auons  facilemét 
Crocodile*,  obfcruee.  Ils  (eroyent  femblables  aux  Tarcntes  qui  fréquentent 
a*?x  maifons,n  eftpiç  qu'ils  font  plus  membrus,&  ont  la  tefte  plus 
plattç  &  groftb.Çe  (ont  ceux  qui  font  celle  drogue  que  les  anciés 
nommèrent  Cr  ocodilea ,  &  que  no^drogueurs  appellent  main- 
tenant Stef eus  LaceTitK  aum\prouknt  elle  de  leurs  excremen ts^ 
Les  Turques  sen  fardent  le  vi(àge.  Lbn  en  vend  par  toutes  les 
boutiques  des  drogueurs  de  Turquie,  comme  auffi  eft  en  affeze 
grand  v(àge  en  npftre  Europe» 


Stercas , 

Lacerti. 


Tmfiefm 
Pyramide, 
Monte  te? . 


Safdten.- 
thiopCHS, 


Tymmide 
de^ome. 


''^ytmfieJ^:j^iteVyrMkf£ff]^te%^      Chapitre,    xliiii,, 

A-  trôiflefme .Pyramide  efl beaucoup  moindre  que  ne. 
font  les  deux- précédentes  :  elleeft  en  cor  en  fbnen- 
rier^n'ayant  auetîne  tàclïe  de  ruine,  vnrierspîûs  gran~~ 

^ deque  celle  qui  èft  près  de  Monte  teftacco  à  Rûrnc3 

allant  àS.  Pol^fur  le  chemin  d'Oftia.  Qc&c  troî'fiefme  Pyramide 
rta  non  plus  d'ouucrture  en  toute  la  matlè ,  que  fi  elle  venoit  dé- 
lire faites  car  la  pierre ,  dont  elle  cftfaite ,  cft  d'vne  forte  de  mar- 
bre nommé  Ba^lten5âutremétappeîlé.lapis  iEthiopicus,  qui  eft 
plus  dure  que  le  fin  fer  .Ccfte  forte  de  pierrc,cft  celle  dont  pour  la, 
plus  grande  partie^  tous  les  Sphinges  des  Egyptiens  ont  efté  mis 
en  fculpture,  tels  qu  on  voit  à  Rome  au  Gapitole,  &qui?nc  efté 
autresfois  entaillez  par  les  Egyptiens.  Celle  troificfme  petite  Py-, 
ramide  eft  cnçpr  plus  auant  vn  bon  trai£t  d'arc  que  n'eft  la  fécon- 
de. Nousl'appellons  petite  au  regard  des  deux  grades  fufdi&es: 
car  encore quecellede. Rome  cft reueftuc  par  dehors  de  cinqua- 
te  ordres  de  pierres  de  marbfe  blanc  j  lifTec  ôc  polie,  comme  en 
celle  ^E^ptCjfieft-cequel^uurier  quîja  feit,  ne  monftra  grand 
*  -"''  v  "~         "       "  ouurage 


.OBSERVEES      PAR      P.    BEL  ON.  Z57 

ouurage  au  regard  de  la  moindre  qui  foit  en  Egypte, dont  Ton  en 
voit  plus  deçetefpaifçs  çà&:  là  par  Ja.fufdi&c  campagne:toutes- 
fois  il  n'en  y  apas  yaefeuleainiî  ruinée  ,  côme  çft  celle  de  Rome. 
Auiïi  au  regard  des  autres.,  îapouupos;  appellcr'modcrne  :  Car 
mefmcment  le  dedans  n'eft  que  ciment/ait  de  tuile ,  de  chaux,&: 
de fablon:  lequel  s'eftant  auallé -.en  terre,  a  forcé  la  reuefturc  de 
marbre ,  tellement  que  les  qyarrjares  fpnc  ja  ruinées  aux  quatre 
coings3ou  plufkurs  arhres^&:  herbes de TerçHuriies ,  Carriers,  Terehmhcs. 
GeneiKRonces,  Lariers  fans  odeur,Teucrium ,  Akiyne  ^trou-  CaPrl(T5' 
uans  place  entre  lesefpaccs  mal  ioincfceSjOnt  fait  leurs  racines  :  Se  T"T!°n' 
n  eftoit  que  les  pierres  en  font  liées  auec  du  fert  &  du  ploaib  >  el- 
les fuffent  pieça  tombées  par  tçrrc. 

De plufieurs  autres  Pyramides <t Egypte*        Chapitre     xlv. 

V  t  re  les  trois  fufditcs,nous  enauons  veu  grand  no-   r  r 
bre  d'autres  petites  3  qui  font  ça  &  làcfparfcs  par  la  ca-  ^c^hr^ 
pagne  ,  fïtuees  en  la  mefme  planurc  d'Afrique  :  entre  mu^s  £E^ 
;  iefquelles  y  en  a  pluficurs  autres  moindres  de  perke^^. 
eilorfe,&  fepulchres  de  diuerfesfaçons^uieftoy  et  députez  pour  sepjtkbra 
les  fepultures  de  ceux  qu  on  conrlfbit  auec  du  Carran ,  Se  cki  Mi-  ^Hm- 
treen  Egypte,  Se  auec  du  bitumenen  ludec.  Les  hiftoriens  ont  Cutr-ia- 
eferit,  que  les  Egyptiens  faifoyent  baftir  leurs  fepuîchres  iclon  Q^j- 
leur  richeflfc  :  car  les  plus  riches  faifoyent  quelque  choie  plus  CùiJr^ 
fu  mptueufey  comme  Obelîfqites,  Coloflês  5  Pyramides  ^&Lceux  jy^rnuks. 
des  autres  d'après  eftoyent médiocres  :  Se  ay^auokii  pauure  qui 
rfeuft  quelques  petites  pierres ailemblces pour  fon  fepulchre.  Le 
lieu  ou  font  iefdks fèpuichres ,  cà  il  difeommode  Se  deière ,  que     . 
perfo  nne  n*y  fçau*oi  t  habiter,  Se  n. y  pourroir ncplaier  ne  femer.  *f*    * 
C'efr  de  ce  lieu  que  Placon  ordonna  par  fes  loix,  que  les  lïmx.  fte- 
riles  fu ffent  dédiez  aux  iepulchres  des  mores  j  laquelle  choie  les 
Grecs  obferuent,  comme  au  ffi  font  maintenant  lesXurcs  à  l'imi- 
tation des  Arabes  .-car  ils  eoeerrem:  leurs  morts  es  lieux  piefreux 
vers  quelques  cou  ftauxqui  ne  pourçoyenc  ricaprodu  ire.  Et  pour 
ce  quclèSphingeou  Aiidrolphmgev,  duquel  lesanciensonc  tant  tfûmg*~- 
parlé, eil  encor en fonentier cnla fufdide  campagne  ftcriieaucc  af'4^* 
les  Pyramides  3  il  nous  a femblé  boa  ne  paiïèt  outre  fans  en  dire-'^    <^ 
vn  petit  mot.:  ;  ■■■•'■■'    ■■'-— :;  -  -  •*  -  •**  :  ■     - -'~*i: .     ..  ._     ...... 

KK 


1  5 S  S  E M:  O  K  D     LIVRE     DIS    S I  N  G  V X'A. 

J^ugrAndÇ-olofle  nommé jxtr  Hérodote  *s4ndro?j>hmx ,  &.par  Pline  . 

Sfbinge ,  ^#*  £/?  enfculpture  deumtlesJ?yramides. 

Chapitre        xlvï, 

Y  a  n  s  bien  confideré  vnc  moult  grade  tefte  de  picr* 
J  rc  quieô  îoignanti'eau  du  Nil  quelque  peuau  defTous 
»  de  la  grande  Pyramide ,  auons  eu  occa&on  d'admirer 

w  _  _j  les  ouuragcs  Egyptiens,  Et  combien  que  Pline  ay  t 

-Colofe  3m  beaucoup  excédé  en  la  mefuredes  Pyramides,  toutesfois  iUefté 
sphinre.      p'«s  raifonnablc  delcrïuant  le  CotoÉïc  du  Sphmge^qui  cil  au  co- 
fté  dextre  de  la  grande  pyramide  de  là  bas;vers  le  coàé  d'Orient. 
Nous  ne  voulons  grandement  arrefter  à  la  description  desSpkin- 
.ges  :  car  véritablement  tout  ce  quia  efte  peinct  &refcrit  deceft 
animal ,  tant  parles  Ethiopiens  qu'Egyptiens,  eftfablc.  Et  mef- 
merneat  D iodore  les delctiuant  n  a  feeu  en  d  i re  autre  chofe,fin© 
Te'mBure     q^ilsfontfemblabIesàkpeinclurequ'oîienfait3mais  qu'ils  font 
Mssphmgei.  vn  peu  plus  gras,  ôc  qu'ils  font  de  douce  nature»  Cela  difoit  Dio- 
vhenixea    dore  qui  veut  que  nous  cognoiffions  les  Sphinges  par  la*peinttu* 
p'm&me.     renomme  auâî  Hérodote  dit  du  Phenrx,  Mais  il  fa-ut-que  nous 
diûons  qu'il  y  a  moult  longtemps -qu'ion  auoit  actfouftumé  de 
voirlapeinâurcdesSphinges  &  Phénix,  fuis  que  défia  des  ce 
temps  là  on  les  cognohToit  par  la  peinture.  Parquoy  ay  ans  vou- 
loir de  recognoiftre  les  Sphingesp>ar  les  pein&urcs,  rrousauons 
.  cherché-en  tous  lieux  ou  ils  ont  eftéengrauez  êc  entaillez ,  pour 
voir  de  quelle iigurc  ils  dtoyent.  Mais  ks  ayans  troiuié  fidiuerfe- 
ment  portraidsendkierfesfculptures&reucrsdc  mcdaîcs,  que 
mefmemct  de  dix  ou  douze  antiques  qui  font  à  Rome,  les  vns  au, 
ïifdun.      Capitolefintaillez en  marbrede  Bafaken  ou  pierre  iEchiopique, 
PierreTbe*  -  ^  âuCKSCn  vnc  g&cïlc  au  Palais  du  Pape  au  iardin  de  Belvcder, 
-Meddes      entaillez  depierreThebaique  de  mefme  les  aiguilles  ou  obelif- 
-i^mufle.  ques  j  n'y  ^n  ^  vn  qui  conuienne auec  l'autre -:  6C  queceux  qu'on 
Msddei      voit  partraiâs  es  medalesd'Auguûe,&:  d*  Adrian ,  font  différents 
i^£drUn.  auxfufdirs grauez  cB-pietrc.»  bous auonseu  liberté  de  conclure 
%oy#rdfois.  quec'cftpurc fable  ccqui  en â-eûédid» comme montrerons par 
spbmgesJe  Cya^VCSm  Le  Roy  François  reftaurateur  deslettres,&: peredetou- 
moain'*    tevercuen  feitietter  deux  en  fonte  aiTezobfcurs,  retirez  de  ceux 
Mt*u.   *      ^c  Rom ^lefquels  on  peut  encor  à prefent  voir  à  Fontainebleau, 


aucclcsantiquaiUcs  du  Roy,qui  aufli  n'ont  fimilitude  auec  ceux 
des medalicsd'Augufte,:&  qui  piœeft,  nous  n'en  auons  point 
fc.cu.voir  qui  sonujço&ent  auec  ksnaarques  que  Pline  leur  a  a*> 
tribuees.  Les-vns  oncles  tettes  le  long du^ventrejes  autres  les  ont. 
en  la  poi&rinc  ,  comme  il  appert  en  celuy  qu'on  voit  deûous  le* 
bras  du  grand  coîofTe  de  marbre  reprefentant  le  Nil,  tant  es  mô~ 
noyes  d' Adria,  qu'en  celuy  quj  çft  à  Rome  au  iardin  de  Belvcder. 
Les  autres, les  ont  lelong  du  ventre  >  comme  ceux  des  monnoyes 
d'Au^ufte.  Les  autres  n'en  ont  point  du  tc*ut»comme  ceux  qu'on? 
voira  Rome  en  Bafalten  &  pierre  Thebaique.  Nous  voulons 
maintenant  parler  du  Sphinge  d' Egypte ,  que  Hérodote  a  nom  - 
me  AnoVofptoic^dijqud  S.pabOvPline^.pluficurs  autres  an- 
theurs  ontfair  mention.  Pline  parlant  des  Pyramides  &;de  cefte. 
Sphinge,dit  :  \Anteha6  eft  Sphinx  >  vel  mugu  rmr&ncU  5  qua  jfrlueJhri'À 
fimtccolmtium*  Tputcsfois l'ayant nommé.Sphingc,n  entend li- 
non .v-ne  teftedc<tefmefurçc,  grandeur-,  comme  il-  appert,  par  fes    .^& 
mots: Eft autcmfaxonatJtrjilichbom^{dit-i\ }  &±itbricA*  ÇopâisMO-  r^mx. 
ftyictmh'ttit* fier fyonterrLcentum  duos  pçdes  colligit  ;  lûngitudo  pcdttmcen-  * 
tum  qmdr*<rmt atrium  eft^lûtudo  àjventreAdfummtfmapicemm  capits 
fexAgntddHorum.  Celle  pierre  eftamTq  deffus  vnc.  forme  eu  bique, 
qui  n  eft  qu'vnegrSde&cecntaillçejquî  regarde  verdie  Caire.  La 
proportion  de  laquelle  tant  de  la  face  comme  du  nez-,  des  yeuxk 
deJabouchc,du  froncîdnmenton>&:  autres  parties,  eitfibie  gar- 
dee,qu  on-ne  peut  nier  qu  clic  ne  foie  faite  de  moult  g^^nâ  artifi- 
ce, Et  touecsfois  elle  n'a  aucune  fiimiitude  auec  les  ancres  engra-     . 
ueurcs  des  S^hinges.  Le  Roy  François  pl-us  g;âd  admirateur  des  Frunçoh?^ 
chofes  hautaines  que  nui  autre,auoit  délibère  faite  ietter  vn  ncr-  tdnurjte&r 
cules  de  fonte  :  6ù  véritablement  il  l'eut  fait  s'il  n  euft  cfté  preue-  aei'  ^p^ 
nu  de  mort:  carie  oacron  a  duré  Ions  temps  à  Parisàl'hûltcl  àc£r*n  ?*    , 

Xr    ,,      '         .  .      *        :  >       &s      .r         ■  •     '•    j      3     JZckuUs  du. 

N^iifi,  qui.auoit  de  cinquante  deux  a.  cinquante  trois  pieds  de  Rûy  j^^ 
hauteur .,  Se  s'il  î'cull  acheue ,  il  eft  à  croire  que  .fortouurage  cuit  ?.,> 
effacé  toutes-cel  les  que  les  Empereurs  Romains  S»:  ./Egyptiens* 
fèirenc  onc  ériger.  Quelques  autres  penfent  qu'il  entendoie  faire 
vn  Mars,  car  lçs^patrons  citoyen- cleila  gro(foyez  pour  faire  vae 
.  Venus  de  la  mefme  grandeur.  Ceux  qui  l'ont  veu  ,  en  ont  pàr.s 
moult  grande  admiration  :  mais  nous  leur  en  voulons  mettre,  vn     ,  ^   , 
autre  en  parangon.  Cclt  celuy  de  Mercure  que  Lenoaorus  ar- ^^  J 
chite&c  auoic  crigèiîn  Auuergne  5  &:  qui  depuis  citant  a ppcilc  a' 

K.K    ij 


±$0       '  SECO  W  IIVRE-    t)  E  S    5 1 K  G  V  L  A. 

Romcfcit  çeluy  du  Soleil,que  Néron  feit  érigera  Rhodez,  tout 

maffif  de  fin  marbre ,  quicfïoitiuftçment  deux  fois  auffi  grand. 

„   j      querHerctiîcsdiiRoy:  çarconinaeccîuy  du Roy  auoiteinquan- 

pierre  de    tc "deux  pieds  &:  demy;,  celu-y  de  Rhodez  auoic  cent  cinq  pieds. 

foixxnte  çr  Mais  celte  pierre  dont  nous  parlons  eft  encor  de  plus  grande 

irv'xpcds.    merùeille  :  car  eftant  mafTiue,a  en  hauteur  foixate  &  trois  pieds. 

Pline  luy  donnèrent  quarante  &:  trois  pieds  de  longueur.  Les 

Sphingésnc  nous  arrcfte'nt -pas  en  ce  propos.  C'en;  îa  grandeur 

&:  {ubliiBiré-de ce  Colofte ,  qui n  eft  de  moindre  inerueille qu'eft 

vn  grand  obelifqae.  Nous  voulons  bien  maintenir  que  les  Ro-r 

mains  n'ont  iamais  fait  faire  chofe  d'vnemaflède  pierre  qui  puif 

fe  corriparoiftre  etV  fui)îimicé'&  magnificence  d'ouuragc  à  vne 

pyramidc,vn  obcîifque,  &  tfU'Sptimgcdont  nous  parlons.  Aufli 

ce  qu'ils  ont  iamais  fait  de  grand3aeftc  àTimitatiô  des  Egypties: 

^mefmemcntlesefHgies  des*  Sphinges  qu'on  -voit  maintenant 

au  Capkole,ont  cfté  apportées  d-Egyptc:&  croyons  que  ce  aefté 

depuis  le  -temps dcPîine  :  car  ils  ne  tienrsent  aucune  merque  de 

ce  qu'il  efc rit  du  Sphinge,dcfquelsn  y  a  pas  vn  qui  ait  netettes  ne 

ailles:  car  ce  qu'on  voit  porter  selles, font  peintures  de  Chimères 

&c  Harpies.dont parlerons  au  liure  des  oy  féaux ^  &:  non  pas  des 

Sphinges:  Nous  ne  voudrions  nommer  les  ftatuesdes  Romains, 

chimères      antiques}en  comparaifon  des  antiques  Egyptiennes  :  car  mcfme- 

fortsn*  *  ft.  mcnt  voyôsentre  les  reliques  des  ruines  &;  antiquitez  qu'on  voit 

'  *  à  Rome5qu'il  n'y  a  rien  plus  antique,  que  ce  qu'ils  ont  tranfporté 

\Antifilte\à^  pays  d'Egypte.  Rcâe  maintenant  que  diïions  dontîeSphin- 

de^ome.   '  geeftvenu  aux  Egyptiens:  C'eft,  que  durant  le  ligne  de  Léo ,  $c 

virgo,  le  Nil  arronfeîes  terres  de  l'Egypte  :  &  les  Egyptiens  vou- 

lansfignifler  leurs  richefles,  ont  exprimé  vn  monfrrecnfculptu- 

/;    ,  r  te,ayantledeuant  d'vne  vierge,&  le  derrière  de  Lion,&  Font  nô* 

^j? l£j£ %  me  Sphinx-:  &pource  que  c  eft  vne  chofefaicte  à  plaifir,  on  les 

d  *   voitâintidiuersen  fculpture*  Tcfmoing  en  eft  la  fufdite  grotte 

teftede  Sphinge.  Et  n'y  a  rien  plus  vray  qu  cllca  ferui  deicpul- 

chre  à  la  manière  âcs  Pyramides  &  obeliiques  :  Car  Pline  dit: 

tAm&fium  regem  fUtmt  in  e4  conditum.  Et  pou  rce  que  Funus  conikum% 

Fmutton*   efteequenous nommons fàufement la Mumie, voulons prefen- 

dltum:       tementmonftrercn  quelle  manière  on  la  faiibic. 


OBSERVEES     BAH     î.     BELOH.  "*6t 

jyelaMumie,& del *  ancienne  manicreàe confire  ou jembaumer &  en-*  ieimor^ 
feuSt 'des  corps  en  Egypte*;  Chapitre    XLVii. 

>  Es  Egyptiens  attendans  la  rcfurrcâion  des  morts,citi-  confire  Us 

moyent  grand  mefFaia  de  faire  confb.mmer  les  corps  *re$ajfe\ 

\  humains  es  elcmcns^it^terre^eau,  ou  feu.  Car  ,  com- 

!  meauôsdit ,  Zoroaftes  Pliiïolôpheleur  enfeigna  que  ZôrW^- 

îe  feu  eft  vn  animant  qui  dcuore  toutes  chofes ,  &:  puis  fe  meurt 

luy  rnefme,  auec  cela  qu'il  a  engîouty.  Par  cela  ne  voulut  que  les 

corps  fuiTent  btuflez  en  Egypte  à-la  mode  des  autresnations ,  ne 

enterrez  î  mais  qu'ils  fufïent  confias ,  pour  eftre  preferuez  àcs 

ternis.  Â^iTiPomponius  Mêla,  parlant  des  corps  embaumezen  mûa.» 

Egypte!,  les  appelle  en  Latin  funera  meàïcata^  comme  aufE  Pline  Fj*ner*nx* 

Sematacorpora.  Et  de  fait  ils  les  confifoiét  fi  bien  à  l'éternité,  qu'ilz   "***• 

■  «    j  "r       c  ■    a.      i  ii"    Seruata  cor-. 

durent  encor,&  dureront  fans  fin  :  quieit  cela  que  nous  appellos     ^ 
MumierLa  manière  de  confire  les  corps  en  Egy  pte • ,  a  eâé  diucr- 
fè.-car  qui  pouuoit  plus  defpendre ,  eftoit  le  mieux  traicté:&  aufiï 
qui  pouuoit  faire  plus  grande  dcfpenfe>faifoit  la  plus  fumptueu- 
fèièpulture  :  ^n^ymo^roit  homme  qui  ne fuftconficl  5  en  quel- 
le forte  que  ce  fuft.  Nous  prenons  iefdi&s  corps  confias  les        . 
nommans  Momie  :  &  toùtcsfois  lesautfacnrs  Arabes  deferiuans  Ma3^em 
laMumiCjentendoyentdccelledroguenommeeenGrec  Piilaf-  ^Zf^* 
phakon5dontauons  défia  parlé  au  premier  iiure.  L'yfàge  defdits       ^ 
corps  embaumez  en  Egypte  jCeftà  dire  nofheMnmie^eftenfi 
grand  vfage en  France,quc  le  Roy  François  reftauratcur  des  let-  %oyFr*nçok 
tres}nalloit nulle part3que {es fornmeliers ne  apporcafi^ènt tou£-  refiaurxteur 
ioursquant&luyen  la  ferriere  enfembie  auccla  Reubarbc:&:  ^ktms. 
au&queluymefmc  en  portoû  fur  luy.  Ceux  qui  pour  affermer, 
leurs  menterics  touchant  cefte  Mumie,  ont  feint  vne  merde  fa- 
blon  agitée  par  les  vents,  cngi-oudiTant  les  corps  deceux  qui  paf^ 
fent  les  défères  d'.Afriquc3ou  d'Arabie ,  ont  crompé  beaucoup  de 
gcns.'cat  combien  que  les  corps  periflent  en  ces&blons ,  toutes- 
fois  eftan s  fubieas  à  putréfaction ,  ne  pcuuen e  fe  refcntir  que  de 
ce  dont  ilz  font  compofez.  Ceux  qui  ontpeintles  Cartes,  &  ont  &#&$>!<>. 
merqué  les  endroicts  dont  Ion  prenoit  la  Mumie,ont  bien  mon- 
tré en  ceft  endroict  qu'ils  auoyent  peu  de  iugement  &  cognoif- 
fàr.ce  de  telle  mariere.  Mais  pour  montrer  qu'ils  en  ont  menty, 

KK  iij 


Zé2,  S5GOND     IilVJl.E    DIS      SINGViAw. 

le  voulons  prouuer  par  TheophraftCjDiofcoridcjGalienjHero^ 

dotej-IippQcrates  >  Diodoré ,  Strabo ,  &c  Pline  :  lefquels,parlans 

d5 Egyptc,onccxprcfIèmc8.t  eferit  que  les  corps  fuilkn t  coafcme& 

cçdrU.       Par  *â  drogue  nommée  Cedria  :  defquels  pendant,  le  temps  que 

nous  citions  au  Caire ±  en  furent  apportez  trois  qu'on  auoit  na- 

Ztittremt*. gueres trouucz^és fufdi&s  fepuîehres.v.  Nousfommes  entrera 

nleredefe*  pluficqrs  chambres  des  fepulchresen  ladite  plaine  :-car  les  vns^, 

fnkhres.      font  en  vouteje&autresen  manière  de  petise  chambre ,  dcfquefë 

Ion  en  voit  vn  nombre  inâny  par  les  campagnes  entre  les  fufdi- 

£tes  Pyramides.  Uyauoit  Ci  grande  quantité,  de  mouches  en  ce. 

territoire  celle. part  ou  fontikuees  les  Pyramides,qu'ainfi  que  les 

fanions,  leuer  en  panant Jair en  retcntiffoit.Nous  troauafmcs  de. 

rithymalùs-  rherbedcTithymaluspîatiphylloSjCroifTantlàâupres.Nou.sde^ 

fkuphilLos. ,  difmes  pour  difner  au  riuage  du  Nil  au  dcfïbus  des  Pyramidesi 

car  l'appreft  des  viures  auoitefté  fait^qu'on  yauoit  expreffement. 

porté:  &  retournafmss  parle  mcfme  chemin  ou  nous  agionsau. 

parauantLpaiTé*  Quand  nous  fufmesàJa  r-iue  du  courant4u  Nil, 

trouuafmes  des  Gentils  hommes  Arabes  campez  en  leurs  tentes, 

attendans  expreûcmcnt  mon.ueur  du  Fumet ,  pour  lu  y  faire  plai- 

£>:&. luy  auo.ycnt  apprefté  le  banquet.  Et pç*urce  qu'ilz.auoyent 

deux  joueurs  de  violes  aueceux,qui  eniouant  cbantoyçnteji- 

fçmbleàja  mode  Egyptienne  ^en  trouuafmes  l'harmonie  ailés 

plaifantejaqueîle  nous  a  femblc  bon  mettre  en  ceftendroicl:. 

Tï&yJQh de&Egypùens,  .  Chapitre.,  xl.vï-ïï. 

SlTVSiliif£s  v^°^es  ^cs  CuCdidis  Egyptiens  n'ont  qu'vne  cor» 
rt.çkdes      )gi  ^^^^'de  tendue,  ou  deux  pour  le  plus ,  quincftqucde 
EQftuos.    gp  |yj|Bp  £>ye &  Cbeuaîj  finis  eftreentorfe ,.  tellement  que  la 
Un  SnilSk  corde  tac  de  1  archet^que.du  violon  font  d'.vne  mef- 
l^g^^^^^qie  façon.  Le  col  du  violon  çfl  longrauffj  a  il  affaire 
de  longues  touches.  Le  çhçualcp.n'eft  pas  appuyé  deffus  vne  ta- 
ble de  boiSjComme.font  les  n.oHres5  non  plus  que  leurs  Lues  Se 
Guiternes  :  mais  fur  vne  peau  de  poiffpn  pefché,au  Nil ,  pommé 
^^  •      GlaniSjCollee  par  defîbus  le  bois,  La  refte  du  corps  de  ce  Violon 
efi  faite  comme  vne  boite  platte,  qu  ilz  tiennent  appuyée  contre 
terre  a  vn  longfer  qui  fort  du  corps  dudit  Violon.  Car  ilznelcs 
appuient  poiotCur  l'efpaule.  ïîz  ciiantoycnt  enfemble  à  voix  paT 


«OBSERVEE*    :tAl    "P.  'BEIO^.  ^3 

!ïeiîle,qu  il  faifoit  afïèz  bon  ouyncar  ce  qu'ilz  châtét ,  eft  en  ryth- 
'mc.NpusarnuafinesauCairclemcrnieiourr ,  ou  demourafmes 
long  temps  (ans  en  bouger.  Les  marchands  qui  ont  leurs  bouti- 
ques au  Caîre,font  (3e  âiuer{èsnations,c5meîuif$,Turcs,Grecs, 
&:  Arabes.  Mais  les  Iuifs.pour  la  plus  grande  partie  y  parient  Es- 
pagnol, Italien  ,  Turc^Grec^  Arabe. 

t)e  1$  Gtraffe  3  que  Us  arabes  nomment  Zurnapd*)&  les  Grecs  &  Lœ- 
tins  Camekpdrdwt.  Chapitre  xLix. 

•*r 
|  Lncfutoncquc  les  grands  Seigneurs  quelques  bar- 
-  bares  qu  ilz  ayent  cfté ,  n'aimâflent  qu'on  leur  prefen- 
l  tâftlcsbcftes  d'eftranges  pays.  Aufll  en  auons  veu  plu- 
I  fleurs  au  Chafteau  du  Caire,  qu'on  y  a  apportées  de 
toutes  parts  :  entre  lefquellcs  cil  celle  qu'iîz  nomment  vulgaire- 
ment  Zurnapa.  Les  Latins  l'ont  anciennement  appellee  Came-  C^X^ 
ïopardalis,  à  vn  nom  compofé  de  Licpard  Se  Chameau  :  car  elle  ^ 
eft  bigarrée  des  taches  d'vn  Liepard  3  &  a  le  col  long  -comme  vn 
Chameau.  C'cft  vne  befte  moult  belle  Se  de  la  plus  douce  nature 
qui  foit.aquafî  comme  vne  brebis  fautant  amiable  que  nulle 
autre  befte  fauuage.  Elle  a  la  tefte  prefquc  fèmblableà  celle d W 
Cerf,  hors  mis  la  grandeur:  portant  des  petites  cornes  moufles 
detix  doigts  de  long  y  couuertcs  de  poil.  Mais  entant  qu'il  y  a  di- 
ftin&ion  de  mafle  à  lafcmellejCcllcs  des  maîles  font  plus  logues: 
mais  au  demeurant  tant  le  mafle  que  la  femelle  ont  les  aureilles 
grandes  comme  d'vne  vache,la  langue  d'vn  Bœuf,&noire,n*ayas 
point  de  dents  deflus  la  machelicre:lecoï  long ,  droicl:  ,■'&  grefle: 
les  crins  déliez  Se  ronds  :  les  iambes  grefles ,  hautes  deuant ,  Se  il 
bafles  par  derrière,  qu'elle  femble  eftre  debout.  Ses  pieds  font 
fem.blables.  à  ceux  d'vn  Bœuf.  Sa  queu£  luy  va  pendante  iufqucs 
deflus  les  iarets/ronde^yant  les  poil  plus  gros  trois  fois  que  n  eft 
celuy  d'vn  Cheual.  Elle  eft  fore  greile  au  trauers  du  corps.  Son 
poil  eft  blanc  Se  roux.  Sa  manière  de  faire  eft  fèmblableà  celle 
d'vn  Chameau. 


2.^4  SECON'D     LITRE 

PartraiB  de  la  Girajfe. 


XnfraloSr 


DES     SINGVLA. 


Quand  elle  court ,  les 
deux  piedz  de  dcuant  vôt 
enfemble.  Elle  fè  couche 
le  ventre  contre  terre  ,  Se 
a  vne  durté  à  la  poitrine 
&:  aux  cuifTes  comme  va 
Chameau.  Elle  ne  fçau- 
roit  paiftre  en  terre eftant 
debout  fans  cflargir  gran» 
démenties  iamhes  de  dc- 
uant ,  encore  eftee  auec 
grande  difficulté.  Par- 
quoy  il  eft  aifé  à  croire 
quelle  ne  vit  aux  champs 
finon  des  branches  des  ar- 
bres ,  ayant  le  col  ainfi 
long  y  tellement  qu'elle 
pourroic  arnuer  de  la  te- 
ffce  à  la  hauteur  d'vne  de- 
mie picque.  Et  1  ay  ans  faic 
retirer  au  naturel,  en  auos 
bien  voulu  icy  mettre  le 
portraid. 


T>,fun  moult  beau- petit  Bœuf  à'^éfrique  3  que  les  anciens  Grecs  nom» 
mermtBitbalus,  Chaptre    L. 

E  plaifir  quVn  homme  curieux  peut  receuoir  de  ren- 
contrer vn  animal.eft.rage  Se  fmgulierjefi:  de  luy  trou- 
uer  quant  &  quant  Ton  nom  ancien  3  pour  le  fçauoir 

exprimer  :  car  celuy  qui  a  quelque  chofe  à  deicrire, 

ans  la  nommer  de  nom  propre  ,  fembie  faire  coruceden  pren- 
dre la  peine .   Parquoy  nous  eilans  trouuez  à  voir  vn  petit 
\  Bœuf d'Afriquejtrappe  Se  ramafTé ,  gras ,  poly ,  de  perit  corfage5 
I  bien  formé,foudainemet  nous  tomba  en  la  mémoire  que  c'eftoir, 
;  celuy  que  les  Grecs  auoyenc  anciennement  nommé  Bubalos: 

mais 


OBSERVEES    PAR.   *.    BELON.'  l6$ 

mais  faut  prendre  garde  que  l'affinité  des  di&ios  ne  trompe ,  pre- 
nant Je  Bouffie  pour  ceftuy  cy.Nous  trouuafmes  en  îuy  toutes  les 
merques  requifes  à  Bubalus.   Et  de  fait  il  auoit  efté  apporré  au  0HJJie\ 
Caire  du  pays  d'Afamie  ,  cobien  que  Ion  en  trouue  autfi  en  Afri- 
que.U  eftoit  défia  vieiî,eftant  de  plu  s  pence  corpulence  que  neft 
vn  Cerf, mais  plus  trappe  &:  plus  grand  qa'vn  Cheureul  ,  fi  bien 
trouffé  Se  compaflé  de  tous  {es  membreSjqn'il  en  eftoiefort  plai- 
fant  à  la  veue:car  fon  poil  cftam:  de  couleur  faune,  {embloiu  eîirc 
bruni,tant  eftoit  poly  Se  reluifant.Son  poil  eft  plus  roux  tirant  au 
fauue,deftbus  le  ventre,que  deifus  le  dosrcar  il  eft  quafi  brun  .Ses- 
pieds  icmblent  à  ceux  d'vn  Bœuf.  Auffi  a  il  les  iambes  trappes,^ 
courtes.Son  col  eft  gros  &"  cou  rt,ayant  quelque  petit  rani^qu  on 
nomme  en  Latin  Pal&trk.  -Uala.teftc.dc  Bœuf  y  fur  laquelle  £qs 
cornes  font  eîeuees  deiTus  vn  os,  fur  le  fommet  de  la  tefte,  noires, 
&:  beaucoup  cochées ,  comme  celles  d'vne  Gazelle ,  ôc  copaftèes 
en  manière  de  croififant,  desquelles  il  nefe  pourroit  grandement 
défendre ,  attendu  que  les  bouts  font  tournez  contre la  téfte.  Il 
porte  les  au rcilles  de  vache.  Ses  efpaules  font  quelque  peu  eîe- 
uees ,  &  bien  fournices.  Sa  queue  luy  pend  comme  a  la  Gi- 
rarTe  iufques  au  pîy  des  iarets ,  &:  eft  ainfi  garnie  de  poilsnoirs, 
deux  fois  plus  gros  que  les  foyes  de  la  queue  d Vn  Chcual.il  brait 
comme  fait  vn  Bœuf,mais  non  fi  haut.Somme,  que  fi  quelquvn 
faignoit  voir  vn  petit  Bœuf  poly,bien  trappe  ,fauue,&  reîuifant, 
ayant  les  cornes  en  croiiTanc5haut  eleuees  fur  la  tefte,  aura  la  per- 
fpe&iue  d'vn  tel  animal. Etpource  que  1  au  ans  nommé  Bubalus, 
d'vn nom conuenant au  Boufle^l fault confeffer librement  que 
fommes  ignorans  du  nom  ancien  du  Bouffie  :  car  combien  que 
nous  n'en  ayons  aucuns  pardcçà,toutcsfoisilz  font  fi  communs 
en  Italie,  Grèce,  &  Aûe,  qu'on  ne  voit  autre  animal  plusfrequét.     ~-  ^ 
Par  ainfi  nous  fcmbleroit  chofe  eftrage,  fi  Ariftote^qui  a  defpen-  J^jJZ 
du  la  valeur  de  fept  cens  cinquante  mil  efeus  de  l'argent  d'Alc- j^ 
xandre,au  prochas  des  animaux,  n'en  auoit  fait  aucune  médon.  Libéralité 
Nous  difons  bien  qu'il  a  parlé  de  Bubalus  enplufieurs  paiTagcs,  JjJexMks. 
Raccorderons  bien  qu'il  veut  entendre  du  Bouffie:  mais  les  au- 
tres autheurs  nous  mettenten  doute,  àfçauoir  s'ilauroit  point 
entendu  de  celle  petite  befte,  dont  auons  parlé  cy  defTus:car  Pli- 
ne àïv.Infïgnia  Umenboum  ferorum  gencrà,  Btibdos  bifontes^GXcelkntî- 
fte&vi  &velecit4ti  VrQs^mbmm^ermmvulms  Bubdùmmmrnm      "~ 

""""  '"   '     LL 


léé  SECOND     XTVH  E    Dï  S    SXNG  V  LA.' 

imponit  5  cum  ià-gignat  *dfiktf9  vmli  fatius  ceruiue  quadam  fimïlitudU 
ne.  Solin  a  die  tout  le  femblable.  Toutes  les  merques  que  Pline 
baille  à  Ton  Bubalus  ,  conuiennentàcc  qu'auonsditdecepetic 
Bœu£  Parquoy  auons  facilement  conclud  que  Pline  Se  Solin 
pour  Bubalusn'ayent  pas  entendu  du  Bouffie.  Etayansfait  por- 
traire  iepetit  Bubalus  fur  le  lieu,en  auons  cy  rais  la  figure. 

ï,e  portraiSi  du  B  œuf 'd 'Afrique. 


Tyvne  autre  manière  de  Cerf  rejTemblant  a  vn  Daim  3  anciennement 
nommé  .sixisi  &  de  la  Gabelle ^anciennement nommée 
Orix.        Chapitre      Li. 

Vûl  y  aupic  mafle  &  femelle  d'vnc  manière  de  Cerf 
[ou  Daim  en  la  coure  de  ceChafteau ,  que  n'auons 
,  oncïceu  cognoiftre3{înon  que  par  {bufpecon  nous 

auons  imagine  que  c'eft  Axis>duqucl  Pline  a  parlé 
'  en  fon  huicfciefme  liure ,  chap.  vinuefme ,  en  cefte 
mattiereri»  Jndia  &pferamnomirie  *4xinjïinnuti  pelle  5  pluridus  cane- 


OBSERVEES    t  A  R     t.    BEI  O  Nr  ^7 

Soribufquemaculis  Jacram  Libero  patri.  Tous  deux  eftoyent  fans 
cornes,  &auoycntla  queue ;  longue  comme  vn  Daim  ,  qui  leur 
pendoitiufquesfurFepîydes  iarecs:qui  dônoitàcognoiftre  que 
ce  n  eftoit  pas  vn  Cerf*  Et  de  fait  lors  que  les  veifmes  les  penfions 
eftre  Daims: mais  les  ayans  mieux  confidercz,&:  auffi  que  n'igno- 
rions pas  les  marques  d'vn  Daim,reiectons  celle  opinion.  La  fe- 
melle eiï  moindre  que  le  maije.  Toute  leur  peau  eftoit  mouche- 
tée détaches  rondes  &  Wanehes,ay  ans  le  champ  du  corps  de  fau- 
ue  couleur  fur  le  iaunaftre,  blanches  défions  le  ventre,  en  ce  dif- 
férent aux  taches  de  la  Girafle,car  la  Giraffeaie  champ blanc,&: 
les  taches  phenicees/emees  par  deffu  s  aflez  larges,  mais  non  pas 
ronfles  comme  en  cefte  befte  Axis.  Hz  retintent  de  voix  plus  ar- 
.gentine  &  claire,  ôc  plusaërec  que  le  Ccrfxar  les  auons  ouy  bre- 
rc.Parquoy  ayans  eu  beaucoup  de  marques  manifeftes  qu'ils  n*c- 
ftoyent  ne  Daims,  ne  Cerfs  v  les  auons  facilement-  voulu  nomer 
Axis.  Encor  y  auoit  des  Gazelles  prmees,prin£ès  du  fauuage ,  qui  ^k™- 
refTembîent  proprement  à  vn-Cheureul,quifont  du  cordage  d'vn 
Y  fard  ou  Chamois  Se  en  couleur^baflês  deuant  ^hautes  derrière, 
à  la  façô  d'vn  Lieure.Eiies  ont  vne  ligne  noire  par  defllis  les  yeux 
comme  le  Chamois,&  beellent  en  criant  tout  ainli  qu'vne  Che- 
ureunais  font  fans  barbe.  Leur  poil  efttougeaftre  ,  tirant  furie 
iaune  paillé,î>kn  poly  &  luyfantXedeuat  delà  poictrine,  le  der- 
rière des  feflès  eft  blanc  comme  à  vn  Daim^  La  queue  eft  blan- 
che par  le  deflb&ss&:  brune  par  deftus:qui  leur  pend  fur  le  ply  des 
iarets comme  celle  d'vn  Daim..  La  Gazelle  court  montant  légè- 
rement par  lesrnontagnes ,  beaucoup  plus  vifte  qu  a  la  vallée  >  Se 
va  roidement  à  la>campagne.Elietient  fesaureilles  droicres  com- 
me vn  Cerf:fes  iambes  font  grefles ,  &  a  les  pieds  fourchus.  Son 
-  çoleillong  &:  grefle  comme  au  Chamois.  Les  cornesdes  mafles 
font  plus  grandes  que  des  femelles  ,quiferoycnt  toutes  dToictes, 
n^eftoit  qu'elles  font  quelque  peu  crochues  par  vn  bout ,  &:  font 
plus  longues  que  celles  d'vn  Chamois.  Àuili  font  faites  en  ma- 
nière de  Lune.  On  les  appriuoife  :  car  leur  demeure  eft  à  la  caxn-- 
pagne  en  lieux-fteriles  èc  (ans  eau. 

LL  it 


Daim. 


Ck&mois,  . 


%€% 


SECOND     IIVRE      DES    SÏNGTLA. 


singes  ache* 

\y£jheïcm= 

trefùpmtli 

mort. 

Guenons. 

Miimous. 

Cynoceçhdk 


Cercàpike* 

€es. 

Cebns. 


T>es  hafîtlmcs  qu'on  fait  au  Caire  :  c£*  ivnt  é]>ece  de  Guenon  nommé 
Callitriches.  Chapitre    lu.    - 

Es  Arabes  font  beaucoup  de  lingeries  &  bafteleries 
au  Caire ,  qu'on  ne  voie  pointa  Conftantinople;& 
en  faifànt  leurs  ieux  ilz  battent  vn  tabourin  aucc  les 
ssscszs^  doigts  3  &  s'accordent  en  chantant  au  fon  de  leur  ta- 
bourin comme  ifc  veulent  :  car  le  tabourin  n'eft  enfonfé  que  par 
vn  des  bouts:&  la  clifTe  plus  large  que  de  ilx  doigts ,  ou  il  y  a  plu- 
sieurs pièces  de  cuyure  qui  fonnent  quant  &c  quant  :  lequel  ilz 
tiennent  auec  la  main  gauche ,  le battans  auec  la  dextre.  Iîz  ont 
grande  facilité  d'apprendre  des  flngcries  à  plufieurs  fortes  debe- 
ftes  :  &  entre  autres  ilz  en  apprennent  à  des  Cheurcs,&:  les  fellér, 
&  mettent  des  Singes  à  Chenal  defïus  s  Rapprennent  laCheure 
à  faire  bonds35c  ruer  comme  font  lesCheuaux.  Aufll  apprennes 
à  des  Afnes  à  contrefaire  le  mort  ,enfe  veautrant  par  terre  ,  qui 
font  fcmblant  de  ruer  aux  Singes  qui  montent  deffus.  Audi  ont 
des  Guenons  apprinfes ,  qui  eft  chofe  rare  à  voir:  car  elles  font 
communément  inconftantes.  Auffi  ont  de  ces  gros  Maimous, 
que  les  anciens  ont  nommé  Cynocephali,  û  fages  &  bien  apprins 
qu  ilz  vont  d'homme  à  homme  qui  regardent  iouer  le  baftelcur, 
&  leur  tendent  la  main,  faifans  fîgne  qu'on  y  mette  de  largcnt:&: 
l'argent  qu  on  leur  baille ,  le  portent  à  leur  maiftre.  Ilz  appren- 
nent plufieurs  fortes  de  Singes  en  cefte  manière.  Et  entre  autres 
y  en  a  des  diffères  aux  no ftres  :  defquclz  eft  celuy  que  Plinc,pour 
la  grand'  beauté  de  fes  cheucux  Se  de  fon  poil,  a  nommé  Callitri- 
ches. Il  eft  totalement  iaune  comme  fil  d  or  ,  &  eft  du  genre  des 
Cercopitheccs,  qu  Ariftotc  nomme  Cebus:car  il  a  la  queue  lon- 
gue comme  ont  les  Guenons, 


©BSEUVEES    IAR    P.     BELOK.  Z&? 

f>e  l'appyeji  que  font  ceux  qui  vont  en  voyage  au  Caire  à  la  Meque. 
Chapitre      lui.  ; 

:  Ntant  qu'vne  Caraiiannc  fe  départ  tous  les  ans  du 
[Caire  pour  aller  à  la  Meque,  p!  u  lieu  r  s  Turcs  fe  trou- 
!  uenc au  Caire pourfuyuk  ladiâcCaraaajine.G'cftv.n 
_  )  voyage  d'aller  en  deuotion  pour  Mahomet  :,  non  que 
ce  (oit  fa  fepulture,mais  que  ceft  voyage  de  deuotion.  Et  pource 
qu'il  faut  paffer  beaucoup  de  pays  deferts  fans  trouuer  aucunes 
villes  ne  maifons  ,  ils  font  leurs  appareils  necefTairesà  tout  le 
voyage.  Et  entre  autres  ckofesportenr,  des  pois  chiches  cui&s 
fans  eau,qui  font  feulement  roftis  dedans  vne  grande  poéUe.  Et 
y  a  pluûVurs  boutiques  duCaire  qui  ne  viuét  d  autre  meftier  que  ry*!*  du 
d'en  faire  ainfi griller.  Aufficn  ontilsfacilemétia  depefchc:  Car  ^eJ 
il  n'y  a  celuy  qui  n'en  acheté  autat  qu'il  luy  en  £zi\t  pour  faite  fon  J^J^ne 
voyage.  Les  Turcs  aîlans  à  la  Meque  3  font  deux  voyages  i  l'vn  en 
Almedine  ,ou  gift  le  corps  de  Mahomet  :  l'autre  à  la  Meque  pour 
trafiquera:  marchander:  Car  ils  en  rapportent  grande  quantité 
de  drogues ,  &r  marchandifes.  C'eft  celle  que  les  ancies  autheurs 
ont  nommée  Petra  :  dont  nous  parlerons^  plus  amplement  au 
troifîefmc  Hure. 

La  defeription  de  nofire  voyage  du  Caire  au  mont  $inaî:  auec  vne 
recepte finvulierc pour appreflerlachairagens qui  Vote en. 
voyage  loingtain.         Chapitre      Liin. 

^Pres qu'eufmesfait nos prouifionsde  chofes necef-  J^n^££ 
Haires  pour  vn  û  long  voyage  corne  du  Caire  au  mont ^ 
1  Sinai,  fortifmes  parla  porte  qui  regarde  le  feptentrio, 
^^>jlf  &tronuafmesvne  Garauanne  campée  bien  près  du 
Caire5le  long  d'vne  roofquee,  attédans  que  toute  la  trouppe  fuit. 
apprcftecrCar  Ton  ne  s'ofe  pas  efearter  par  le  pays  d' Àrabie/i  l'on 
n'eftengrand'bande.Parquoy-mofieurdeFumetayacvingtge- 
niffaircs  pour  fa  garde ,  fe  vint  camper  le  long  du  Nil  :  ou  nous 
cmpîifmcs  noz  vaiffeaùx  &  noz  oudres  de  l'eau  du  fleuiie,faifans 
prouifionpour  trois  iours  ,  tant  pour  noz  montures  que  pour 
nous.  Il  nous  falloir  pafTerpar  les  deferts ,  ou  n'y  a  ne  fontaines, 
■•.•■■.-'  .-  ,,     ...t    .... ... .,    LL  iij    , .-,. 


tj'ky  S E CON  15    I ï  V R'r '■  "D  É3*-   S -tfWG V t  À» 

ne  ruiflTeaux:&  auions  apporté  viurcs  du  Caire  autant  qu'il  eftoit 
befcwng  pour  aller  &;  rcuenir:  içauoircft,vn  Chameau  chargejdc 
bifcuit,  pour  ceux  qui  fttyuoienc  la.  compagnie  de  mondit  fieur 
du  Fumet,quieftoyent  en  grâd  nombre.  Nous  chargeantes  auffi. 
vn Chameau  de  chair  préparée  pouv'îc  voyage.,  ainlî  qu'il  s'en- 
fuie. L'on  tuagrand  nombre  de  iVtourons,  qu'on  fie  bouillir  de- 
hachezen  pièces».  Enapreslonfepara  la  chair  des  os,qu'on  tailla 
àpetismorccaux,groscorarnelebo.utdu  poulec,  puis  fut  bouU 
lue  en  de  la-  greiîe  mfques  à  la  confumpri5*dc  l'humidité  aqoeufe 
qui  eftoit  dedans ,  auec  des  oignons  cui&s.  Cela. fait ,  fut  falce., 
efpicee,puis  rmfcen  banls.Cefte  viande cfi bonne  à  garder  long 
temps  :  Car  encore  quîon  l!ait  portée  quinze  tournées ,.  en  la  ré- 
chauffant^ y  adiouftant  vn  oignon  il  femble  que  ce  fait  vne  fri- 
caf^c^aifchementfaitedaiourmefme,  qui  nous  fembîa  fors 
bonae  viande ,  eftans  es deferis.  Cefte  iotirnee  fut  extrememenc 
chaude;  car  il  ncfaifoitpointcb vent.  Nous  parTafmcs  la  nuid 
deffouznozteatesioignantleriuagedu  Nik&r  deiogeafmes  dés 
kminuid  pour  cheminer  à  la  fraifeheur  :  &  parlions  les  fablons 
ByofcUme-  fteriles&:  mois,. ou  il  ne  croiil  finon  vne  efpece  de  Hyofciamc 
noire.-  noire,en  (Lgr-ande  abondance  qu'on  ne  voit  verdoyer  les  campa- 
gnes d'autre  eiipfè  que  de  cela  :  des  fejpçn ces  de  laquelle  les  Egy- 
ptiens font  de  l'huile  pour  brufler^  auili  s'en  feruent  à  plusieurs 
autres  chofes.  Le  lendemain  s'elleua  vn  petit  vent  qui  rafraifehit 
tout  le  iour:  car  il  abatoit  la  véhémente  chaleur  du  foîcil.  No- 
f*ts enEn* (tre  chemin cflok droicl: au.leuant.  Mous  trouuafmes  vne  forte 
fte.  de  Rats  en  cefie  campâgue^qui  viuçnt  feulement  de  ladite  femé- 

ce  d'Hyofciame.  Us  font  cendrez  derTus ,  &  blancs  deflbus ,  de 
cx>rfage  affezlongs^ayans  la  queue  longue,  &:  le  mufeau  poinciu: 
lesquels  il  eftoit  facile  obfouer  :  car  quelque  part  que  foyx>ns  al- 
.  lez^auons toufioarseu v.n r>iç% quant  & nous ,  duquel fouiiïàrçs 
dedans-later re  les  ridons  (khots^comme  auifi  tous  ferpens.  Seu^ 
lement  cheminafmes  iufques  au  midy,&  campafmes  deilbus  nos 
tentes  pour  repofet  les  Chameaux.^  montures  :  &abbrcuuaf- 
mesJesmonturesauiQkauec  l'eau  desoudres  que  nous  auions 
•  prifeau  Nil..  Les. Chameaux  ne  beurent  point  :  car  ils  peu-uent 
demeurer  trois  ou  quatre  iours  fans  boire.  Ceuxqui  ont  dit  que 
les  Arabcsallans  paries-deferts,chantentàleurs  Chameaux  pour 
leur  donner  meilleur  courage  de  chemineront  eu  raiion  :  car  les 
chamaliers-rnefurans  les  pas  des  Chameaux  &  les  f uy uans  à  pied  „ 


font  mefmcs  paufcs  en.  Jeurs  chafons ,  &:  de  la  mefrae  mefurç  que 
jes  pas  des  chameaux.  Nous  derneurafmes.  campez  iufquçs  à  la 
minuit-  Lanuiâ:  nous  fut  froide:  carie  vent  eltoit  fort  nébu- 
leux 6c  froid.  Les  brouillarts  y  mouillent  en  Septembre  comme 
feroitiaroufee  du  mois  de  May  en  Europe:&  toutesfois  les  iours 
y  fontexceffiuement  chauds.  Nous  partifmcs  tantoft  après  pour, 
cheminer  à  la  fraifcheur.C'eftoit  la  ymnek  que  no/us.  citions  par- 
tis du  Caire;  6c  cheminafines  long  temps  la  nui&,$:  arriuafees  a 
iourouuert  au  puiz  du  Sues ,  ou  nous  dcmcurafmes  tout  le  iour. 
Ce  puiz  n'eft  qu'à  vne  lieue  Se  demie  de  la  ville,  6c  cft  enfermé  en 
vn  petit  chaftelet.  L'eau  en  eftfalee  :  toutesfois  pour  o  en  auoir 
point d autre,  les paffans  &:  habitans  du  Sues  -font  contraincïs 
d'en  boire:  car  ils  n'en  ont  point  d'autrc^ls  ne  hipportét  du  Nil, 
eombien  qu'il  y  ait  vne  tresbeHe&  grande  eifterne  au  çhafteau  rnectshrne, 
du  Sues,qui  s'épiift  vne  ou  deux  fois  la  de  i  eau  de  la  pîule-.car  co- AU  Sue'' 
biçîJ  qu  il  n'ypleut  pas fouuent,  toutesfois  quand  il  y  pleut^c'eft 
d'aifez  bonne  forte. LeauMe  cepuiz  ncfeagoçrcfinon  à  abbreit- 
uerles  Chameaux  6c  Cheuàux:  car  communément  les  paiTâns  en 
apportent  pour  leur  prouiûon.  En  allant  voiries  herbes  àece 
terntoire,&cftans  quel  que  peu  efloignez  par  la  plaine,  trouuaf- 
mes  de  rAmbrofîa,Sene ,  Roiès  qu'oii  dit  de  Iericho ,  Colocy  n-        f    r 
rhes,  Acacia,  Paliurus  d'Àgathocies  3  que  Theophrafte  a  deferit,  ^'Jr°jU' 
&  vne.particuliere  efpece  de  genets,&  de  deux  manières  de  Rha:     ^  ^  /f> 
nus,&:  de  l'axbre  que  les  Grecs  du  Caire  nomment  Oenoplia.  Là  n^o. 
prinfmes  vne  V  iperc,. 6c  deux  Ceraftes  mafie  Se  femelle ,  qu'ana*  ?diurm. 
tomifafmes  6c  defcnuifmcs,par  le  menu,  &Templifmes  les  peaux  ^mnm. 
débourre  :Sc  combien  qu'ayons  fait  plus  long  dif cours  de  cefte  oenoplu. 
Cerafte auec les  autres  ierpens ,  toutesfois  ne  voulons  palier  ou-  v^"e' 
tre  fans  faire  en  tendre  quelle  a  deux  petites  eminencesau  deflus  Cojjf£r 
des yeux,comme des petis grains dorge,qui (embknt à deu^-pe-  ^e},mm^ 
rites  cornes,  dont  Ariftoce  a  fait  mention  ,  qui  lésa  nommez 
Colubros  Thebunos*  Mais  corne  tous  autheurs  qui  fuyuét  les  eferits 
l'vn  de  l'autre ,  taillent  quand  le  premier  a  faiily  :  tout  ainfi  Soiin 
fuy liant  les  parolles  de  Pijnc>  a  mal  dit  queja  Ceraftc  portail:  S.  ^J%^ 
cornesxar  no9au5s  CQgjieu  lecôtrairc.EUe  a  les  déts  Cemb  labiés  à  Sra'°* 
celle  de  la  V ipere,&  erHa  mefme façô.  No9  fçauos  qu'il  y  a  grade 
differëce  entre  les  Vipères  feîo  les  pays  ou  elles  Cot  nourriesrcar  la  ^wi4*>AS 
curioiîté  de  les  cognoiftre,a  fait  qu'en  auos  trouuc  en  Angleterre,  trktare. 

LL  ii£j""  —  •-*"' 


ZJi.  SECOND  'LIVRE     DES     ^INGViA.^ 

France,îtaIie}Grece ,  Afie ,  &  Egypte ,  différences  en  corfage  & 
couleur  les  vncs  aux  autres  y&  de  quelques  autres  contrées  de 
France.  Pour  Vipère  entendons  lesferpcnts  que  les  habitans  de 
Tourainc&:  du  Maine  nomment  Âfpicsr&auonstcfmoins  qu'il 
y  en  a  aufîien  Àuuergne:  Car  "eftans  près  du  monaftere  des  Mi- 
nimes ou  bons  hommes  que  monfeignent  l'Euefque  de  Clair- 
montj  M.  Guillaume  du  Prat  a  -édifié  auprès  de  Beauregard  :  vn 
%ené  des    apoticaire  de  fa  famille  nommé  René  des  Prez3  du  pays  du  Mai- 
Pretypoti*  nc  >  natif  de  FoulctourteYen  print  vne  auec  îa  main  nue  prefent 
cotre  mors   \e^t  fjcur>&  couce  £a  trouppe  qui  le  fuyuoi^penfant  que  fuit  vne 
ne  ifere  Qqxùçxixxtç,  :  &  Bit  mors  au  ponlce  :  dont  foudainement  eut  tout 
J    '      le  bras  enflé,  auec  û  grands  accidents  qu'on  le  garda  pour  mort 
Fefpace  de "huiet  iours3dont  il  en  cfchappâ.  Les  Ceraftes  comme 
aufliîes  Vipères  en  toutes  parts,rendent  leurs  petits  en  vie,  com- 
me aaflî  fait  la  Salmandre.  Et  ponree  qu  Ànftote  en  vn  partage 
au  dernier  chapitre  du  cinquiefme  Hure  de  l'hiftoire  parlant  de  la 
Viperedit en cefte manière  :  Parît catuks  obwlutos membrants ,  que 
tertta  djemmpuntur.  Euenkinterdum^  vt  qui  in  vtero  adhuc/ùnt,  abrojïs 
membrankperrurnpant.  Parit  enimfinptlis  diebusfinmlos  3  &pfores  qu&- 
'viorjnth  Cela  nous  a  baillé  îe  defir  de  voiries  œuurcs  admirables 
de  nature ,  Savoir  les  Vipères  pregnantes.  Mais  nous;  a  femblc5 
£iuuc  la  veritérqu  elles  les  rendent  fans  tuniques. Laquelle  chofe 
-auonsicyexpreScment  voulu  cotter,à  fin  dadmonefler  quel- 
qu*vn  dcnoftre  incertitude^  qui  le  pourra  obfèruer,  &:  quelques- 
fois  nous en  rendre aûeurez en nofire  doute. 

Cefle  eftfa  figure  £<vne  Viper t- 


OBSERVEES     Ï^AR.     P.    BEL  ON.  273 

Encore  trou'uafmes  plufieurs  autres  plantes  en  Iadi&e  pîanu- 
rc  que  ne  peufmcs  exprimer  par  nom  antique  ne  moderne  :  Se 
campafmes  Se  repofafmes  en  ce  lieu ,  eftant'Ia  trouppe  fur  vnc 
platte  formeioignant  ledit  puiz. 

La  defeription  dvnpwççjres-profondyen  l'^rabUdefirte, 
Chapitre     LV. 

Epuiz^ontauonspar^merire  que  difionsfà  façon:     -~    ^ 
,  carde  vray  iî  eft  eftrange.  Il  a  elle  fait  a  grands  fraiz  w^^ 
*  au  temps  pafTéjîors  que  le  Souldan  dominoit  en  Egy-  Mairie, 
f  pte  ,&  ce  à  fin  de  rendre  le  Sues  mieux  accommodé 
d'eau:&  auiïi  que  ceuxqui  vont  &  viennent  par  ces  pays  là ,  puif- 
fent  abbreuer  leurs  beftes.  C'eft  vu  petit  baftiment  renfermé  de 
muraillej&eftquarréen  manière  de  Chafteîct,  ou  il  y  a  vn  engin  Co*!*  ï 
exprefièment  fait  pouriirer  l'eau  du  puiz  qui  cft  trcs-profondya-  *££• 
ucc  vne  roue  virée  par  ia^oxeede  deux  Bœufs  :  deffus  laquelle  ■*'"■• 
roue  font  fouftenues  deux  cordes  attachées  Tvnc  contreîautre, 
à  vn  pied  de  diftance  :  Se  au  long  des  cordes ,  il  y  a  plufieurs  petits 
pots  :&  ainfi  qucles  Bœufs  font  tourner  la  roue ,  auiR  virenx  les 
cordes  en  hauçantlcau  hors  du  puiz  par  le  moyen  defdits  poj  s 
qui  simplifient  là  bas,&  eftans  venus  en  haut  ils  s  cfpadent  ainfi 
que  la  roue  tourne ,  &  en  fe  verfant  font  tomber  i  eau  en  vnc  au-  cifterne  d» 
ge  qui  eft  defibus  la  roue ,  dont  Feau  s'en  court  par  vn  canal ,  &  ^74 
fort  hors  du  circuit  delà  muraille,  &  fe  va  rendre  en  des  cifternes  sucs. 
hors  ledit  Chaftelet:  quiaefté  quelque  peu  fortifié  pour  tenir  les 
gens  dedans  en  feuretéenfembleauecJeur  beftiaL  Cefte  àcfcn- 
ption  nous  férue  au  récit  de  tous  ceux  des  iardinages  d'Egypte; 
car  ils  font  quafi  tous  faits  fuyuant  ce  qu  auons  dit  de  ceftuv-cv. 

MM     '     ' 


274 


SECOND     LIVRE     DES    SÎNGVLA. 


PûrtrdB  de  acacia* 


IpUntei  des 
phtdm,  â 
lieux àeferts. 

Gumme. 


Gtimmi 
Arabie  um. 


Quelles  plantes  croijfent parles fablons3  autour  au  Sues, 
Chapitre       L  v  i. 

Tf^Ê  L  ne  faut  quvne  heure  &  demie  pour  aller  duditpuiz 

1  '^^  iufques  au  Sucs  :  car  il  n'y  a  qu'vne  lieue  Se  demie. 

Jm  Quad  nous eufmcs  demeuré  vn  iour  tout  entier,  par- 

■wlfetifmes  long  temps  auant  lai  minuict,  Se  nevouluimes 

entrer  en  la  ville  du  Sues  iufques  au  retour.  Quand  le  iour  clair 

fut  venu  ,  nous  eftions 
deua  à  la  cofte  de  la  mer 
rouge-,  ayans  îe^Sues  à 
derny-  quart  de  lieue  de 
nous.  Et  paiTafmes  vn 
defert  ftcrile  ,  ou  il  ne 
croifToit  vne  feule  plan- 
te-, fars  plufïcurs  arbres 
d'Acacia ,:  dont  la  gum- 
me eft  diligemment  re- 
cueillie par  les. Arabes, 
Se  efl:  celle  dont  nous  w 
fons  en  Europc,en  gum- 
mant  l'en  cre  Se  les  tein- 
tures: ibit  quaucûs  mo- 
dernes ayent  penfé  aur 
tremet,  toutesfois  prou- 
uerons  au  Hure  des  ar- 
bres toujours  verds,que 
c'eft  celle  quelesancies 
ont  appelle  en  Latin  Gu- 
mi  ^trabicum.  Sa  fueille 
cft  ii  déliée  qu'en  prenât 
vn  rameau  on  le  peut 
couurirauec  le  pouce:&: 
fi  l'on  compte  lesfueil- 
les ,  l'on  trouuera  en  a- 
uoir  couuert  trois  cens 

cinquante.  Les  habitans frappêç  fur -fes. rameaux, Se  font  tomber 


OBSERVEES     PAR    P.     BELON.  ZJf 

tes  fuciîîcs à  terre  aucc  vne  longue  perche ,  à  fin  de  les  faire  man- 
gera leurs  moutons.  N  ous  auons  cy  rais  le  portraid  du  fufdic  ar- 

bre,contre£tit au  naturel. 

Quand  nous  euirnes  paiTé  quelque  peu  au  delà  du  Sucs  ,  en~ 
trafmesenvne  fpacieufe  campagne  verdoyante  de Sene,  qui  y 
croift  fans  eftrc  (emé,tel  qu'on  no9  l'apporte  par  la  voye  des  mar- 
chands. Le  Sene  qu*on  vend  es  bou  tiques  des  drogueurs  ou  ne-  sent. 
gociateurs,  eft  de  deux  manifeftes  différences ,  comme  il  appert 
par  fon élection, dont l'vnc a  les fem-ences en  filiques  plâtres, re- 
courbées en  manière  de  faux,  èc  duquel  la  fueille  eftpoinctue.  r- 
L'autre  a  auffi  les  Cliques  plattes  comme  la  précédente ,  mais  el-  ^nf  * 
les  font  beaucoup  plus  larges,&  moins  courbées  en  faux,  &:  dont 
îafueilleeft  moune,qui  ne (c  termine  en  poinde corn  me  celle  du 
premier.  Le  premier  eft  le  meilleur^uC!  eft  il  nommé  Sene  de  le- 
uant.  L'autre  eft  nommé  Sene  moyen  3  qui  eft  de  moindre  opéra- 
tion. Cefte  diuerfité  vient  de  ce  qu'il  y  a  deux  dincts  pays  qui  le 
produifènt ,  &"  par  ainii  nous  font  apportez  par  diuerfes  voyes. 
L'affinité  des  choies  qui  fe  reffcmblent  Tvne  à  l'autre  3  a  fait  que 
fouuent  y  ayons  veu  venir  erreur ,  comme  eft  ia  aduenu  du  Sene, 
&  de  ce  Bagucnaudier ,  qui  eft  maintenant  commun  en  noziar-  Btgimuu* 
dins.  Pluiieursl'ontapprouué  eftre  efpece  de  Sene  :  toutesfois  dier. 
c'eft  choie  fàufe  :  car  il  n'a  vertu  qui  puiffe  cqnucnir  auec  k  Sene^ 
qui  eft  du  nombre  des  plantes  tounoars  verdes.  Nous  feifmes 
trois  ftations  depuis  le  Caire  iufques  au  Sues.  La  première  auoit 
efté  au  riuage  du  Nil,deiTous  des  arbres  de  Dadiers  :  La  féconde 
en  la  fufdite  campagne:  La  tierce  au  fufditpuiz. du  Sues.  U  eft  ne- 
ceifaire  en  allant  parce  chemin  là^qu  on  fuyue  les  logis  députez, 
qu'auons  nomme  ftations. 

De  l'e4u  des  dou^efonuims  ameres  de  Moyfe^  dont  Pline  ajkit 
mention.  Chapitre      LVii. 

!  Ontinuans  noftre  cheaun ,  &  eftans  arriuez  dratfez  Fonu'wes 
%  bonne  heure  aux  douze  fontaines,  poiàfraes  là.  L  eau  ancres.  ^ 
l  en  eft  moult  falee  &  amere ,  &  dit  on  que  ce  font  les  ;??*%  fQ^ 

i  douze  fontaines  dont  il  eft  faid  mention  en  k  Bi-  tM™r    ■ 

ble:  carmeimementilslcs  noment  les  fontaines  de  Moyfc.Eilcs  '^e'' 
font  datout  en  lieu  fabloneux  &  fterilc3en vue  trcfgrade  capagne 

MM    ij 


Zj6  SECOND     LIVRE     DES     SINCVLÀ. 

nitreufc,  fore  large &  fpacieufe  :  &  font  diftantel'ync  de  l'autre 

plus  de  cinquante  pas,  non  toutesfoisd  vne  mefmemefurc  :  car 

IVnc  cft  à  cent  pas,l*autre  à  cinquante ,  tât  du  plus  que  du  moins. 

Toutes  les  fources  fortent  de  terre ,  ayant  vn  petit  tertre  ou  pro- 

.    montoire:  defquelles  l'eau  s'efpand  en  plusieurs  ruiffeaux  ,  qui 

font  en  manière  de  fontaines  d'eau  courante,  qui  peu  de  temps 

après  auoir  couru ,  fe  perdent  dedans  le  fable.  Le  Soleil  nous  a- 

uoitfort  altérez,  tellement  que  nousfufmes  contraints  de  boire 

de  l'eau  falee,  de  laquelle,  encore  qu'elle  fuftamere  àcaufe  du 

•       Nitrc,il  n'y  auoit  ceiuy  de  noftre  compagnie  qui  n'en  beuft ,  Se  la 

re  trouuaft bonetcar  i'alteratio qu'vn  chacun  auoit, eneftoit  caufe. 

Otad  de  U  Vu  canal  de  la  mer  rouge.  Chapitre      lviii. 

mer  rouge. 

A  fin  de  la  mer  rouge  cft  au-  village  du  Sucs ,  ou  il  y  a 
vn  Arccnaî  pour  les  galères  du  Turc,qu'on  a  tirées  au 
fec  en  temps  d'hyuer  ;  car  la  plage  ou  port  n'eft  pas  bie 
fèurea  tous  vents.  Cefte  mer  rouge  n'eft  linon  vn  ca- 
nal eiSToid,  non  plus  large  que  Seine  entre  Haurcrlcur  Se  Hon- 
Bdwreftewr.  defteur,ou  Ton  peut  nauiguer  maîaifement  Se  en  grand  péril  :  car 
Bondeflcur.  lesrochcrs  y  font  moult  fréquents.  Quelques  vns  quiontouy 
E4»  (U  U    parîer  Jc  ceftc  mcr,penfent  que  lcau,ou  la  terre,  ou  fablon  en  eft 
n  '■*      rouge  ,  mais  il  n'en  eft  rien.  Son  canal  s'eftend  du  Septentrion  à 
^  "         Midy ,  Se  fe  commence  au  Sues  ,  Se  va  quelque  rrente  mille  de 
droiâe  ligne  :  mais  quelque  peu  au  âcl^  des  douze  fontaines,il  fe 
courbe  vn  peu  vers  l'occident.  La  campagne  ou  nous  eftions, 
eftoit  quafï  égale  en  hauteur  au  riuage  de  la  mer  rouge  :  mais  de 
l'autre  cofte  y  a  de  treshautes  montagnes  pierreufes,  qui  entour- 
ncntlamer.  Il  n'y  a  que  deux  traic~fcs.  d'arc  des  fontaines  ameres 
iufques  à  la  mcr,&  enuiron  vne  lieue*  iufques  aux  montagnes  que 
nous  veoyons  à  main  gauche.  Apres  que  le  rlot  rut  retire ,  y  re- 
nxerchafmes  plufleurs  fortes  de  petits  poiffons,  de  coquilles  ,  Se 
autres  exercmens  de  marine:  entre  icfqucls  veifmes  vne  cinquief 
me  efpece  de  Heriffons  de  mer,que  n'auions  veu  aiîleurs-.cÔbien 
Bmjfom  de  qU^cn  eu  riions  ia  obferué  de  quatre  fortes  différentes  l'vne  à  l'au- 
^  tre.  Toutes  coquilles  y  croisent  en  merucilleufe  grandeur,  ou 

pour  îeclimatjou  pouria  température  de  fair,ou  pour  la  nourri- 
turc  qu'ils  y  trouucnt. 


mer 
rou 


OSSI&VEES     PAR.     ?.    BELON.  ZJJ 

jyw^&rc  de  Rhmnu$yquic¥otftMX  nuages  de  la  mer  rouge. 
Chapitre*    Lix. 

i  Oustrouuions  vn  arbrifleau  refiêmblantà  Rham- 
\  nus  altéra,  naifîànt  le  long  de  la  marine,  ayant  Ces 
;  fueilles  fortefpoiflès,faîces>&:  blanchaftres.Scs  ra- 
•  mcauxfontcfpineux,maisd'efpincsm.oufiès,  co- 
rne en  l'arbrifTeau  de  Rhamnus  d'Europe.  Au  fil 
vcoyonsles  pas  des  Cheuretccs  fàuuagcs,appel  lecs  Gazelies/lm-  G&lellc;. 
primez  comme  eft  la  figure  d'vn  cœur  dedans  le  fable,  par  ou  el- 
les auoyentcheminé:car  le  iablon  y  eft  égal.  Elles  defeendét  des 
prochaines  monragnes,&:  viennent  boire  aux  fontaines  quauos 
dides^  au fïi  brou fter  cefteefpcced^rbrifïèau.  Pline  a  fait  tref- 
ampîe  mention ,  dcfdi&es  fontaines ,  qu'il  nomme  Fontes  amari, Fotes  d™r}1' 
aupafTage  ouilcfcritque  Ptolomee  amena  vne  foffe  pour  met- 
tre la  mer  auec  le  Nil,laquelle  eftoit  large  de  cent  pieds,hau  te  de 
trente,îonguede  trente  fept  mille.  Et  quand  il  futarriué  iufques 
aux  fontaines  ameres,il  cefïà  de  mener  la  mer  plus  outre:car  û  el- 
le fefuftmeflee  auec  le  Nil,  le  pays  d'Egypte  n'eufl  plus  eu  d'eau 
douce  pour  boire.Ou  bien3cedit-ilspourcequela  terre  d'Egypte 
n'eft  point  trois  coudées  plus  haute  quciamcr.Nouscampafines 
pour  la  quatriefme  fois  depuis  le  Caire ,  &c  la  croificfme  fois  de- 
puis le  Nil.Àyans  rempîy  noz  oudres  d'eau,  continuafmes  noftre 
chemin  par  campagnes  pierreufês,feiches,&:  fans  arbres,excepté 
quelques  genêts  qui  naiflènt  parla  campagne.  Le  grand  chaud 
nous  dura  tout  le  iouncar  le  vent  feptentrional  qui  nous  auoit  ra- 
fraifehis  les  iours  precedens ,  auoit  du  tout  ccKé.  Et  encore  que 
l'eau  de  noz  oudres^rife  aux  fontaines  ameres ,  fuft  falec  &:  pua- 
te,  efchauffee  du  foleil ,  quati  bouillante  ,  fi  eft  ce  que  nous  n'en  v  ,  - 
auions  pas  a  demy  pour  boire  par  chemin:carla  chaleur  &  l'ai-  amereim 
teration  saugmentoit  en  la  bcuuant  chaude 3 laquelle  nenous 
permettoit  eftancher  kfoif. 


MM  iij 


Chameleom 
rouges  &* 
hlancs. 


tTJ%  SECOND     LIVRE      DES     SINGV^A. 

Ve  plufieurs  arbres  durable  :  &de  ceux  qui  portent  la  laine  :  &  des 
Chamdeons.  Chapitre.    ,lx. 

^  Ous  trouuafmcs  des  Chameîeos  diffères  en  plufieurs 
merques  àceux  d*Egypcc,d  autac  qu'ils  font  de  moin- 
|  ^  dre  corpulence  l  &  ont  le  champ  blanc  ,  bigarré  de 
rouge,  ne  tenant  riende  la  couleur  des  autres.  Nous 
deienrons  l'vn  $c  l'autre  ailleurs  plus  au  long ,  au liure  des fer- 
pens  :  toutesfois  il  nous  a  fernble  bon  en  bailler  le  portraict  en  ce 
lieu,pour  monftrer  qu'elle  efl  fa  figure. Ioind  que  nous  en.au.oiis 
defiaamplement  parlé  par  cydeuant. 

Le  j)ortrai6î  du  Chameleon* 


cJt(dUu  Nous  veoyons  les  Gazelles  feutrages  ,  paiiTans  par  les  campa- 
gnes,courans  à  grandes  bades.  Nous  arreftafmes  enuiron  le  mi- 
dy  pour  repofer  les  montures ,  &  pour  cuiter  le  grand  chaud  def- 
£bus  noz  tentes.  Quand  la  nuid  fut  venue  nous  rechargea  fmes 
bagage, àirn decheminer  lanui&au  fraiz .,  & commençafmesa 
trouuer  quelques  petites  montagnes  &  collines  ,&;  eftans  parue- 
nus  à  vne  petite  fontaine ,  &  ayans  recouuert  des  befles  en  vie5 
que  certains pafleurs  conduifoyent d'vn  lien  en  autre., les appre- 


OBSERVEES     VAi-"i.     BELOH.  VJV 

fl-afmes  à  mager  iU  là  campafmcs  pour  la  cinquiefme  fois.  Nous  f^LT 
fdfmcs  du  feu  aucc  du  bois  de  Tamarifquc&de  l'arbre  qui  por-  ;£J»  * 
te de la;laine,&: aucc.celuy  de  F  Acaeia &  Oenoplia/eifmes  cuire  ^^ 
la<:hairfraifche.  Nous  pourmenanspar  ces  petites  montagnes,  CA^dn 
trouuafmes  des  Cappriers  qui  eftoyent  patuenus  à  la  hauteur  de  horefiens. 
petits  figuiers ,  tellement  qu'il  nous  failloic  monter  deffns  l'arbre 
pourauoir  de  fon  fruiçfc.qui  cft gros  comme  vn  œuf  de  poulie,  5c 
dedanslequelfafemenœ.eiienclofe.-fescapprcsfantgroires  co- 
rne noix.  Qui  gou fie  de  fa  femence,  la  trouue  chaude  comme 
poiure,comme  auffi  en  eft  la  Cappre:&  tout  ainfi  comme  les  L6- 
bards  fe  feruent  de  mouûarde  blanche  à  mettre  en  la  vernache 
pour  ia  garder  de  bouillir  &  demeurer  long,  sçmpsg^uce  3  tout 
ainfî  les  Arabes  fe  feruent  des.fçmences  des  cappriers  pour  met- 
tre en  leurs  vins  pour  les  maintenir  doux ,  comme  auilî  Auiccne     . 
auoitia  coté.  Nous  trouuons  qu'Hérodote  a  premièrement  fait  ^_  Si 
mentionduftfdiaarJ>re^  ar 

phraftCjPlinc,^  plufieurs  autres  en  ont  "eferit.  Il  eft  du  nombre 
de  ceux  qui  demeurent  toujours  verds.   Leur  laine  eft  plus  fine 
que  la  foye,de  laquelle  les  Arabes  filent  de  trefbeaux  linges  >  plus 
déliez  &  firçs,  que  ne  font  ceux  qui  font  faits  de  finefoy  e,  &  plus 
blancs  que  ceux  de  cotton.  Cela  fe  peut  bien  prouuer  par  fes  pô- 
mes  qu  auons  rapportées  Se  moftreesvefquelleseft  trouuee gran- 
de quantité  de  laine.  Nous  cefTafmes  de  cheminer  en  campagne, 
&€ntrafmesen  pays  des  môcagnes,  5c  en  pays  plus  fterilc>&:  ians 
herbes  ne  arbres,que  n  eftoyent -.les  autres  dcferts3que  nous  au  ios 
iapaffez.Et  ayans cciTé  de  cofloyer  la  mer?iaUÎa{mes  l'Arabie  dé- 
ferre ,  &enrrafmes  en  la  pierreuie  ,  &  campafmes  cefoir  en  vne 
plainejquieftenformed^xmphitcatreicarelleefrtoujecnuiron- 
nee  de  montagnes ,  linon  en  vn  endroicl:.  Ce  tut  noilxeiixieiiiie 
logis.  J^prcs  qu'eufmes  repofé  &:  que  le  chaud  futappaiié ,  che- 
minarmestoutlerefteduiour,&:lanuicl:cniuyuant.  Et  quand 
îe  poinct  du  iour  fut  venu,  retournafmes  encor  à  la  raencar  quâd 
nous  la  laiffaimesj  elle  faifoitvndeitour,fe  courbant  en  arc.  Il 
jxousconuint  cheminer  cnuiron  trois  traicts  d'arc  dedans  l'eau  le 
long  du  riuage,pnis  la  laifrcr,&  entrer  en  vne  grande  bouche>en- 
tre  montagnes  iablonneufes,ou  nous  trouvions  de  rechet  autres 
arbres  lanigères ,  &  Cappriers  arborefees.  Côùnuans  noicre  che- 
min ,  après  auoir  patTé  entre  ces  moutagnes ,  nous  encraimes.cn 
"  MM"  iiij 


2$0  SECOND     LIVRE      BES,   SINGVLA, 

vnc  campagne ,  ou  veifmcs  grandes  croupes  de  Gazelles  ,"qni  vi- 

uentfiloingdeleau  ,  qu'auons  prïns  argument  d'ofer  affermer .. 

quelles  ne  boiuent  poincou  pour  le  moins  fi  elles  boiuent  ,  e'elc 

-  rarement:chofe  qui  n'eu:  pas  fort  à  croire ,  que  les  anciens  ont  ja 

coté*,  ioinct  que  plufieurs  autres  berces  pcuuent  viure  fans  boircy 

cerafies.      Se  mefmement  les  Brebis  du  pays  d'Angleterre  ne  boiuent aucu- 

riper®.       nement }  comme  auffi  les  Ccraftes  &  Vipères  entre  tout  le  genre 

chamelew  £cs  ferpens  fe  paflènt  de  boire.Comroe  au iîl  font  les  Chameleos, 

liment  long  ^  -  pCUuent viure plus d'vn an  fans  rien  manger.  Quand  nous 

Temps  j  m    cufmcs  cheminé  long  temps ,  &  qu'il  commença  à  faire  chauds. 

demeurafmes  pour  euiter  la  chaleur  du  iour ,  &  fi  toft  quelle  fut 

pafiee5aprcs  auoir  rechargé  bagage  ,  nous  cheminafines  toute  la 

nuid  au  fraîs:&  entrafmes  en  des  lieux  de  rochers  fort  difficiles: 

auffi  eft  ce  le  commencement  des  rochers  de  l'Arabie  pierreufè* 

"Du  premier  village  que  trauuajmes  yaUans  au  mont  Sinak 
Chapitre     LXi. 


Village  m 
l^ixable. 


?h< 


E  iour  venuynous  eftions  défia  entrez  en  vnc  gran- 
de ouucrture  entre  moult  hautes  montagnes  qui 
eftoyent  tant  à  dextre  qu'à  feneftre  s  quand  corn- 
mcnçafmes  à  trouuer  vn  beau  ruùTeau  d'eau  dou- 
ce de  claire  fontaine ,  venant  d'vnc  montagne  de 
bien  îoing.  Ce  fut  la  première  eau  droi&ement  douce  courante, 
que  nous  euffions  trouué  furie  chemin  depuis  le  Caire.  Nous 
trouuaimcs  vn  grand  viîlagcà  l'entrée  de  cefte  bouche  ,  habité 
uugou.  d'Arabes ,  nommé  Pharagou ,  ou  il  n'y  auoic  que  trois  ou  quatre 
maifons  baftics  :  car  les  villages  de  ces  pays  là  ne  eonfiftent  pas 
en  maifons  eleuees^nais  au  nombre  d'hommes  qui  habitent  àcC- 
fbus  les  Palmiers  au  defcouuert,ou  deflous  les  rocherstcar  ils  ca~ 
tient  leurs  habitations  en  terre^comme  Ion  voit  aduenir  en  Tou- 
raine,  &  Lodunois ,  &:en  plufieurs  autres  lieux  le  long  des  riuie- 
Isùhres  fru*  rcs  de  noftre  France.  Vn  Geniffairc  y  tua  vne  corneille  auec  fa 
Bien  de  harquebonfc,laqueîleilprefèntaàmonfieurdeFamet.  Le  villa-* 
ge  de  Pharagou  nous  fembla  plaifant ,  au  regard  àcs  pays  que 
nous auions  cheminé  :  car  il  y  a  bel  ombrage  de  Grenadiers,  PaU 
miers301iuiers>Figuiers,Poiriers>&  autres  arbres  frui&iers.  C'cft 
le  premier  village  que  nous  ayos  trouué  depuis  le  Caire,  excepté 

le  Sucs, 


OBSERVEES    PAR    P.  'BEL  ON.  2,St 

le  Sucs.  Apres  que  fufmes  refraifehis  de  l'eau  douce,  Se  en  eufmcs 
beu  noflre  beau  faoul,  &rrenouuelléla  prouifion ,  Se  rempîy  noz 
oudrcs,&  rccouuerc  de  la  chair  fraifche,cornmc  poulailles ,  che- 
ures,moutons ,  Se  aulfi  des  frniclz ,  fçauoir  eft  ,  pommes ,  poires, 
grenades,  Se  raiflns  frais ,  &  que  chacun  fc  fut  repofé ,  pcniàfmcs 
à  recharger  bagage,&  continuer  noftre  chemin.  Les  hommes  de  nommes  de 
ce  pays  font  côcens  d'habiter  deflbus  les  palmiers  au  defcouuerc,  couUu,r£o* 
qui  eft  la  caufe  qu'ilz  font  de  couleur  d'Oîiue.  Et  pource  qu'il  ne  ^5- 
pleut  gueres  fur  eux,il  leur  fufBft  auoir  leurs  maifons  faites  de  ra-  ' 
xneaux  de  Palmiers,appuyees  encontre  les  tronczjpour  les  défen- 
dre quelque  peu  delà  véhémence  du  Soleil. Les  Alhes,Cheuaux, 
Chameaux, Mo^toSjCheureauXjBœufSjVaches^heureSjpoul- 
Ies,&  autres  animans  de  ce  pays,  font  beaucoup  plus  petits ,  Se  de 
moindre  corfage.que  ceux  d'Egypte.   Nous  montafmes  là  haut 
fur  la  roche  ,  ou  trouuafmes  des  arbres  de  Balanus  Myrepllca,  tdtwMj* 
croiftans  à  la  hauteur  d'vn  bouleau^entre  les  rocs ,  ayâs  auftl  leurs  re£rca" 
rameaux  de  mefme  façon. Oeft  vn  arbre  blanc  par  le  tronc:telle- 
ment  que  quanden  veifmcs  vn  de  loing,penfions  fermemét  que 
ce  fuft  vn  arbre  de  bouleau. Les  habitans  de  Pharagou  font  diii— 
gens  à  recueillir  la  femece  de  ceft  arbre,  de  laquelle  ilz  font  gran- 
de quantité  d'huile.   Cequiienousfeittrouucr,  eftqueveiimcs 
des  femences  auec  les  (ilîques,quifc  fendent  en  trois^qu  vn  Ara- 
be du  pays  au  oit  là  amaffees  en  vn  monceau  auprès  du  village.  En 
obferuant  les  herbes  qui  croisent  dedas  ce  runfeau ,  trouuafmes 
cclles-mefmcs  qui  fontes  ruiffeaux  d'Europe,  comme  Balfamite, 
Pauliot3Conifc,  Moron ,  Creftbn  Se  Ioncz.   Nous  fuyuifmes  le 
ruirTeau,allans  contremont  par  la  vallée ,  paiTans  par  deftbuz  des 
foreftz  de  Palmiers.  Tout  ce  iour  continuafmes  les  vallées  entre 
les  montagnes  qui  font  du  tenant  du  mont  Sinai  Se  arreftamies. 
quelque  peu  noz  montures  pour  repofer  fur  iour  iufques  à  la 
nuia^delàchcminafmcstoutenuia^arriuafmes  au  pied  des 
hautes-montagnes  de  Sinai,  qu'il  commençoitdefia élire iour,&  ^ZTd* 
dormifmes  vn  peu  au  pied  du  mont ,  Se  n'arreihfmes  gueres  que  shuk      ' 
ne  rcpnnffions  noftre  chemin  par *ne  difficile  montée ,  pour  ar- 
nucraufommetdc  Sinai.  Elle  eft  faite  artificiellement  à  degrez 
de  pierre  taillée^  quelquefois  engrauee  dedans  le  dur  rocher,  à 
fin  démener  les  Chameaux  ,  Se  autres  animaux  plus  aifcmenr, 
dcûus  la  montagne.  Lon  n  y  meinc  gueres  de  Chameaux  :  car  le 
voyage  cil  trop  difficile  pour  cux.Cefte  montée  dure  bien  demie 

NN 


iSi  SECOND    -Lirai'   DES     $lKGVt£ 

Jieuc.  Quand  nous  cufmcs  gaigné  le  haut ,  il  nous  fallut  encor 
cheminer  plus  de  deux  lieues  encre  les  motagnes ,  qui  font  com- 
me buttes  rondes,çà  &  là ,  disantes  les  vnes  des  autres,  (ituees  au 
plus  haut  faifte,defTus  la  plus  grande  montagne  :  6c  y  en  a  de  plus 
grandes  les  vnes  que  les  autres.  Iieftoit  après  Midyauant  que 
nousfuflions  arriuezau  monaftere  :  Se  toutesfois  nous  auions 
commencé  à  monter  la  montagne  des  le  poind  du  iour. 


VttmontdcSindi. 


Chapitre 


Moatde 
Sinà. 

Maronites. 

Monomère 
du  mont  $i= 

AgiatLaurd* 


Mont  StnaL 
0pnt  Or  eh 


Oulans  maintenant  parler  du  mont  de  Sinai,&n'y 
ayant  rien  de  plus  fameux  que  le  monaftere,  nous 
a  fèmblé  bon  premiercméteferire  que  les  religieux 
qui  fc  tiennent  leans ,  font  Chrefticns  Maronites 
viuans  à  la  Grequedcfquclz  eftans  ia  long  temps  au 
parauant  aduertis  de  noftrc  venue  j  vindrent  au  deuant  de  nous, 
&nous  reçeurent  humainement.  Leur  monaftere  eft  fait  à.  la 
mode  de  ceux  qui  font  au  mont  Athos  en  Macédoine ,  reflem- 
blant  quaiîàccîuyqui  eft  nommé  Agias  Laora.  L'eglife  dece 
monaftere  eft  en  bas  Lieu  ,  comme  aufti  cil  le  monaftere  d'Iucro. 
II  y  a  ordinairement  enuiron  foixante  Caîoieres  Màronitcs,dont 
les  vns  font  Grecs,  les  autres  font  Syriens ,  les  autres  Arabes ,  te- 
nans  toutesfois  le  nom  de  Caîoieres ,  &  viuans  à  la  Greque.  Hz 
font  comme  fi  les  religieux  Alcmas,  ltaliens,Efpagnols  eftoyent 
auec  les  François  :  car  il  bien  iîz  parlent  diuers  langages ,  toutef- 
fois  n'ont  qu'vne  rncfme  reîigion.Scmbîablemcnt  les  Maronites 
qui  font  religieux  Chrefticns  Arabes,&  les  Grecs  ne  font  quVne 
mefme  religion,qui  Ce  nomment  tous  du  nom  de  Caîoieres.  Les 
pèlerins  qui  vont  au  mont  Sinai,font  logez  dedans  le  monaftere: 
car  il  n'y  a  point  de  logis  ailleurs.  Il  eft  affis  en  vne  vallée  au  pied 
du  mont  Orcb.  Il  y  a  leans  moult  grande  commodité  d'eau  :  car 
vn  ruiftêau  venant  de  la  montagne  defeend  leans ,  qui  remplift 
leur  ciftcrncd'eau,qui  eft  moult  claire/roïde, douce,  &  parfaite 
en  toutes  qualitez.  Ce  monaftere  eft  en  la  vallée  entourne  de 
hautes  mu  railles,  tellement  qu'iîz  peuuent  tenir  fort  leans  contre 
lesennernisquilesvoudroyent  aftaillir.  Ilyaaufll  vncmofquee 
leans  pour  les  Arabes  ôc  Turcs ,  &  logis  député  pour  eux  :  car  les 
Portraiâl  dit  mont Swai>  . 


Sinaïfûrlcqudnottre Seigneur baiila  fàLojr  àMbyfe. 

LemontSinaï. 


2C. 

ï  haulteui 
inaï. 


Cefte  montagne  eft 
les  autres  du  pays  de 


plus  haulce  que  toutes 
l'Arabie  pierreufe 


Oulcre  ceftc  Mer  rou- 
ge ion  voie  les  monts 

%     àc  S.  Antoine  &  de  S# 

\    M<icario. 

5  é  « 
-5"  S  ^  * 

6  JJ  rz^iî 
§•2  §<4I 

.,       4-»       W     •-• 

„  C  g  y  g 

^    «    G    g       - 

iiM    o  _B  g  q 

f)   s    wU 

>>  S  i     SJS  S. 


^  OBSERVEES     PAR     P.    B  E  LON.  lS| 

Chrcftîcns  n'ypeuuent  venir  qu'iîz  ne  foyéc  accompagnez  d' A-  rcrgacii*^ 
rabes  Turcs.il  y  a  de  trefbeaux  vergers  par  les  vallées  du  mont  de  mont  Stmf- 
Sînaijou  iîz  cultiuent  des  vignes ,  des  légumes ,  Se  y  plantent  des 
herbes,commechoux,lai&ues,bettesioignons>auix)porreau^,8£ 
telles  autres  herbes  vulgaires.  Hz  y  cuîtiuent  aufii  des  arbres  frui- 
diers  de  diuerfes  efpeceSjà:  principalement  des  Amandiers. 

"De fonction  du  mont  S'mtù ,  £7*  dumontOrcb. 
Chapitre     lxiii. 

\  Près  que  nous  eufmcs  difhé  dedans  le  monaftere ,  Se 
\  que  la  chaleur  fut  pafTee,  nous  deliberafmes  aller  fur 
j  le  mont  Oreb:&  eufmcs  des  Caîoieres  pour  nous  gui- 
\  der ,  à  fin  qu 'en  pafTant ,  ilz  nous  enfeignaflènt  toutes 
les  chofès  ûngulicres  de  ce  mont:&  fuyuifmes  le  ruifTeau  qui  def- 
cénd  au  monaftere.  Vn  Caloicre  aagé  de  foixante  Se  dix  ans,  vint  **ommgp 
en  noftre  copagnie  auffi  difpofé  d'ailer  que  nui  autre  de  la  troup-  ^L|T 
pe,qui  eft  vn  grâd  iîgne  de  grande  fanté  aux  habitans  de  ce  m5t: 
car  tous  citions  à  pied.  Nous  regardions  l'Orient  en  montant  la 
♦montagne ,  Se  quand  nous  fufmes  quelque  peu  plus  haut  en  vn 
lieu  au  deffouz  de  la  fummité  du  mont  Orcb,trouuafmcs  vneef-  Mont  orel. 
pace  en  la  vallee,ou  eft  vne  Eglife  faite  au  lieu  ou  Heîie  fe  tenoit,  Ej&fideS* 
De  là  pourfuyuans  contremont  nous  trouuafmes  des  degrez 
faits  de  pierre  de  taille:&:  vn  portail  qui  anciennement  cftoit  fer- 
jzié  fur  le  commencement  àcs  degrez  pour  enfermer  ce  cofîé  là,, 
tellement  que  qui  voudroit  y  tenir  fort  ,-Ion  nepourroit  defeen- 
dre  du  mont  pour  y  venir.Nous  montafmcs  iufquesau  plus  haut 
faiftCjOu  nous  trouuafmes  vne  autre  Eglife  qui  eftdefFus  ce  mot 
Orcbjlequel  mont  a  efté  habité,  Se  non  ecluy  de  Sinai  ^car  Sinai 
c ft  aride,  &ceftu y  cy  a  grande  commodité  deîafontaine.  Dîo-  ,  ^     ,    " 
dore  efcrluant  du  pays  des  Iuifzà  parlé  de  ce  mont ,  le  nommant  p^JL*. 
la  région  des  Àbbatees,en  Latin ,  ^bbaîœorum.Gàïil  dit  qu'il  y  a  ^ùhxttes^ 
vn  rocher  trefmu  ny,<Sc  ou  il  ne  fau  t  guère  de  ges  à  le  garder  pour 
faire  force ,  d'autant  qu'il  n'y  a  qu'vn  feul  lieu  dirEcilc  Se  malaifé 
àmontcr.Il  nous  femble  qu'il  vacille  entendre  de  ce  Heu  icy  :  car 
il  n'y  en  a  point  d'autre  en  tout  leur  pays  à  qui  cefte  marque  puif- 
fe  conuenir,ûnon  à  ce  mont  Qreb.Les  guides  nous  monltroyene 
ks  lieux  fain&z  parle  ruenu  >^PriflC^Paien^enc  ce  dont  la  Bible. 

NN  ii. 


2.84  SECOND      LÏVUE    DES    SINGVLÀ, 

clfiernefir  £^z  Itiention.  Nous  auons  leu  les  noms  de  plufieurs  François  cC- 

Ufâifte  d»   cdc2  en  la  muraillcde  la  chappellc  de  deflus  le  mont  Oreb ,  qui 

mont  de  st*  auQyCnc  cu  ç\zifc  àc  fe  mettre  en  eferit  en  ce  lieu  là.  Defccndans 

n4f'  contre  bas  nous  veifmes  vne  grande  eifterne  faite  entre  deux  ro- 

chers,vn  peu  à  cofté  deiadi&e  chapelle  nommée  Agiafma>ou  eft 

referuée  ï  eau  de  la  pluye,de  laquelle  nous  beumes.-car  vn  de  noz 

suides  auoit  cxprcfTement  porté  vn  chaudero  &c  vne  corde  pour 

en  tirer.  Nous  montafmes  la  montagne  du  cofté  d'Orient  :  mais 

nous  la  defcendifmes  de  l'autre  cofté  de  l'Occident  :  au  pied  de 

d    a*  laquelle  eft  fitué  vn  petit  monaftere  nommé  Saranda  Pâteres>ou 

tereT       * noas  allafracs  loger  cefte  nui&ee  là. 

JD  W  Autre  monaftere  fitué  au  pied  du  mont  Oreb:&*  du  rocher 

dont  if  h  l'eau  aux  enfans  d'ifael. 

Chapitre    lxiiii. 

,  E  petit  monaftere  dépend  du  premier, &  y  a  vne  Egli- 

1  fe.Il  eft  appelle  le  monaftere  de  Quarétapadri.Nous 
y  veifmes  des  iardins  :  efquelz  y  a  beaucoup  de  fortes 
Kjss^zéra  de  frui&z.  Nous  y  trouuafm.es  pain ,  vin  ,  &:  Oliucs 
confi&es.  Et  partifmes  le  lendemain  pour  aller  monter  au  moc 
de  Sinai  par  le  cofté  d'Orient,regardans  le  Midy.  Sinai  eft  beau- 
coup plus  haut  que  le  mont  Oreb:  &  tout  ainfi  que  le  mot  Athos 
fait  vmbre  à  Lemnos ,  quand  le  Soleil  fc  va  coucher,  toutainfiîe 
mont  Sinai  fait  vmbre  au  mont  Oreb  quand  le  Soleil  fe  lieue. 
Quand  nous  fufmes  fur  le  couppet  du  mont ,  regardions  que 
celtoit  roche  trefdure,de  couleur  de  fer ,  qui  toutesfois  neft  fans 
herbes  :  car  il  y  a  grande  quantité  d'Abfinthium  Seriphium ,  qui 
porte  cefte  petite  femence  que  nous  appellos  Barbotine,ou  more 
aux  vers:&  du  Pânaces  Afclepium,Conifa,&:Eupatoire  àcs  Ara- 
bes. Ileftaftiegéde  toutes  parts  des  montagnes  tout  alentour, 
&;eft  beaucoup  plus  haut  que  n'eft  le  mont  Oeta  en  Gtccc ,  oa 
quelemontdldaen  Crète  :  maisànoftre  aduis  ilneft  pointu* 
haut  que  le  mot  Olympe  de  Phrygie.  Toutesfois  il  cftfihautquc 
quand  nous  tournions  la  face  vers  le  midy,  veoyons  facilement 
les  deux  bordz  du  Sine  Arabique^u'on  appelle autremec  la  mer 
rouge,&  la  veoyons  fe  courber  en  forme  d'arc  Angiois  :  outre  ce 
que  veoyons  aifement  les  motagnes  ou  eft  fitué  le  monaftere  de 


QMTtntA* 

fadri. 


Zrfthôs 
Lemnos. 


Z/dfirahiu. 

Seriphium. 

JBarbotine. 

Pa&Aces 

<AfiUp!J. 

Comf1. 

Eufatoire. 

Oeta. 

Ut. 

Qljmjie, 


OBSERVEES      PAR     P,    BELON,  1%$ 

S.ÀntoinCjOu  de  S.Macario,qui  eft  es  defèrts  ioignans  à  l'Ethio-  s.  Antoine. 
pje  au  delà  de  la  mer  rouge,  ou  encore  habitent  des  Calojeres  SMACmo- 
Chreftiens, &c  Armeniens,autrement  nommez  Maronites.  Éna- 
près  nous  recournans  de  la  partie  qui  regarde  rOrient,tant  que  îa 
veuë  s'eft  peu  eftendrejnauons  veu  finon  pays  de  montagnes  yào 
treshauts  &afpres  rochers,qui  eft  l'Arabie  pierreufe^contigueau 
mont  Sinai.  Puis  nous  retournans  vers  le  Septentrion ,  èc  regar- 
dans  par  demis  le  mont  Orcb,qui  n'eft  diftant  de  là ,  qu'vne  lieuë 
&  demiCjVeoyons  encor  le  pays  de  rochers  &  fréquentes  monta- 
gnes,conioincl:es  au  cofte  de  l'Orient ,  qui  eft  îa  partie  ou  eft  û~ 
tuée  îerufalcm  :  car  lerufàlem  eft  iituee  en  pays  de  montagnes 
qui  font  cotigues  au  territoire  du  mot  de  Sinai.  Regardas  la  par- 
tie de  l'Occident,  ne veoyons  autre  chofe  finon  1* Arabie  defèrte,  sArahlc  de* 
fterile,&  fablonncufe ,  que  nous  auions  ia  paiTec  venans  du  Cai-  Prte- 
rc,£d  de  là  regardans  entre  l'Occident  &  le  Septentrion  ,  pource 
que  le  temps  eftoit  clair  &  ferain  ,  nous  poumons  difeerner  fen~ 
droiddcla  mer  Mcditerranee,quicftdiftanîeàcinqiourneesde 
là:  non  pas  que  voulions  entendre  que  la  veillions  bien  à  clair. 
Il  y  aaufti  vne  fontaine  qui  fort  de  ce  mefme  cofté  de  la  monta- 
gne, &  pafte  au  fufdicr  monafterc  dit  Quarentapadri ,  &:  arroufe 
la  vallée  Ôc  les  iardins  des  Calojeres.  La  plaine  n'eft  guère  plus 
large  defïiis  le  plus  haut  couppet  du  mont,qu'eft  le  fommet  de  la 
grande  Pyramide,  c'eft  à  fçauoir  de  quatre  pas.  Mais  venant vn 
peu  plus  bas,le  lieu  eft  plus  fpacieux  :  &:  n  y  peut  on  monter  fino 
aucc  vne  grande  difficultéjpourcc  que  les  pas  ne  font  à  degrez^ 
que  le  roc  eft  fort  droiâ:.  Nousdcfcendifmesaufufditmonafte-  -  : 

re  des  Quarante  percs,ou  noos  foupafmes  &  couchafmes  :  puis  Mùnufiere 
retournafmesau  monaftere  de iainàe Catherine,  donc  nous e-  kfen&e 
liions  partis  le  iour  précèdent.  Le  rocher,  duquel  Feaufortoit Catkmne- 
quand  Moyfe  le  frappa  de  fa  verge,  nous  fut  monftréfurleche-^Hio^ 
min,qui  eft  vnegrofTe  pierre  malfiue,  droiâ:e,de  mefme  grain  ^oni:Uxsé- 
de  la  couleur  qu'eft  la  pierre  Thebaiquc,dont  les  aiguilles,  c  eft  à 
dire  Obelifques,font  faits,  comme  auiîi  eft  îa  Colomae  de  Pom- 
pée d'Alexandrie.  Elle  eft  grenelée  de  diuerfès  couleurs ,  comme 
la  pierre  Thebaique  :  laquelle  chofe  a  fait  pëferà  pluficurs  vovas 
les  aiguilles  ou  Obelifques  fi  maffif ,  que  ce  fuft  vne  pierre  artifl-    ?  * . 
ciellement  collée ,  mais  cela  eft  du  tout  faux:  Car  c'eft  la  plus  du-  °H%^; 
re  pierre  au  ferremét- que  nulle  qu'on  cognoifïè.  Ceftuy  eftlero-  ^t^*"^ 

NN    iij 


dumotSi- 


2.86  SECOND:  LIVRE     DES    SINGVXA. 

cher  dont  forcit  l'eau  pour  abbreuuer  les  enfans  d'Ifracl.  Toutes- 
fois  il  eft  ioignant  vn  ruiffeau  courant  qui  vient  de  la  fommité  du 
mont  Sinai.  Cela  nous  fait  penfer  ou  quece  n'eftpas  ceîuy  que 
frappa  Moyfe,ou  qu'il  n'y  euil encor  point  d*eau  en  ce  ruiiTeau  \h 
mais  fàuf  meilleur  ingénient ,  nous  pcnferions  que  les  Calojeres 
dcuroyent  monftrcr  le  roc  à  la  fource  delà  fontaine  y  dont  fort 
l'eau  là  haut  de  defTous  la  montagne.  •        .  . 

&euxjat»3s  p^5  pUces  &  lieux  fainëts  en  la  montamc  de  Sinai. 

Chapitre        lxv. 

?àj|  E  iour  précèdent  nous  auions  trau erfé  par  deflusîa 
\  fummité  du  mont  Oreb  :  mais  ce  iour  nous  lent  ou  r- 
\  nafraes  par  îepied3&:  paûafinespar  le  lieu  ou  les  enfans 
rewàz  ^J^^^^rro^t  fcirenr  le  veau  de  fonte ,  que  puis  adorèrent. 
fonie~  Les  v^ojeres  de  ce  monaftere ,  &  des  autres  deferts ,  tant  de  S. 
&ferts  des  Anthoine ,  que  de  fainâ:  Macario ,  ne  rccueillentguere  de  bled; 
^Lthoine!  mais  le  patriarche  quieftau  Caire ,  leur  en  enuoye  tous  les  ans* 
Foijfonsdit  &:  aufîi  des  légumes  du  pays  d'Egypte.  Ceux  qui  font  en  la  ville 
Tor.  du  Tor3au  riuage  de  la  mer  Rouge ,  leur  cnuoyent  pareillement 

Trouvons  Jcs  poi/Ibns  fccs^ntre  lefquels  auons  rccognu  des  Sal pcs,  Sargs, 
du  won$e=  $pares>  Brèmes  de  mer,jadefeiche2i.  Ils  ont  aunl  prouiiiô  d'Oli- 
te  de  sirua.  UQ$  c5fiâ:es&  légumes. Ils  nourrirent  du  beftial  es  vallées  humi- 
Sj£*  desmon  pour  en  manger  la  chair ,  mais  pour  la  vendre ,  &  pour 
spam.  auoir  pcofictfurlalaine>&:  nourrir  leurs  cfclaues  ;  &  les  habitans 
Bremmesde  des  valleeSjpour  faire  des fourmages,&iaidages:car  *es religieux 
wov  Grecs  ne  mangent  ne  fourmage,ne  beurrejiïe  chair.  Ils  cukiuen  t 

les  yignes,&  iement  les  terres  de  quelque  peu  de  légumes.  La  ter- 
re qui  cft  arrouièe  entre  les  vallées  &  lieux  humides,eft  aiîcz  bien 
tempérée  :  ^car  celte  haute  montagne  n  eft  pas  fi  froide  comme 
font  les  hautes  montagnes  en  Europe  :  &  auïîi  n'eft  pas  iî  chaude 
comme  eftle  bas  pays.  Ces  montagnes  font  fi  fterilcs  &c  feiches 
qu  ob  n'y  peut  rien  eu  ltiuer,ïmon  bien  peu,  celle  part  ou  il  y  a  de 
l'humidité.  Nous  couehafmes  ce  foir  au  monaftere iàin&e  Ca- 
therine.. Le  lendemain  l'on  nous  monftra  la  challe  >  en  laquelle 
:%elifKsde  fo-Qj^sreiiq^esacsosdefainde  Catherine,  qui  eft  ordinaire- 
^^  jQ*  mempendueenrEglife.  Ils  célèbrent  la  mefiè  à  la  Grcque  fore 
Konorablement..  11  y a  plusieurs  belles  pein&ures  en  l'Eglife  >  &: 


""-    "'  OBSERVEES     PAR    P.     B  EX  O  N»  2&% 

autres  reliques  des  fain&s.  Les  Turcs  qui  voue  en  voyage  au  mot 
Sinai,  ontaufll vne  mofquec  lcans,  quin'eft  en  rien  comprin- 
fç  de  l'Eglife  des  Chreftiens  :  Car  les  Turcs  mefines y  vontaufll 
pardeuotion.  LesCalojeresont  accouftumé  donner  à  manger 
aux  étrangers ,  tant  Turcs  que  Chreftiens  :  mais  c'eft  de  choie 
quiçouftc  peu.  Ilscuifenc  quelque  riz,  fonrment,  febucs,  ou 
des  pois,  qu'ils meccenc  dedans  vn  plat  de  bois  au  milieu  de  la 
court,  fans  aucune  nappe,  auec  quelque  peu  de  pain,  Se  cou- 
ronnent ce  plat  de  cueillers  :  Se  chacun  qui  vient  là ,  fe  met  à  la 
mode  des  Arabes ,  fçauoir  eft  appuyé  fur  le  deuant  des- pieds ,  &  Man(r  ^ 
affis  dcfTus  fès  talons.  Cefte  façon  eft  commune  à  tous  Arabes.  ^Y%^ 
Mais  les  Turcs  fontautrement:  car  ils  fe  mettent  afïis  dciTus  la 
terre  tout  à  plat  à  la  manière  des  coufturiers.  Le  Schccarabac-  ... 
compagne  de  fès  Gentilshommes ,  qui  auoit  accompagné  mon- 
teur de  Fumet  depuis  le  Caire  ,  fe  mettoit  tout  ainii  que  fâi- 
foyent  les  autres  Arabes  de  fa  trouppe.    Les  Calojcres  auoycnt  ,. 

de  la  Manne  liquide  recueillie  en  leurs  montagnes,  qu'ils  appel-  ^^ 
lent  Tcreniab  in,  à  la  différence  de  la  dure:  Car  ce  que  les  au- -Mane  être. 
theurs  Arabes  ont  appelle  Tereniabin  ,  eft  gardée  en  pots  de  MïelM  Ce* 
terre  comme  miel ,  &:  la  portent  vendre  au  Caire  :  qui  eft  ce  dre. 
qu'Hippocrates  nomma  miel  du  Cèdre,  &  les  autres  Grecs  ont  %<fàJ* 
nommé  roufee  du  mont  Liban  :  qui  eft  difïèrenteà  la  manne  »«*  *»-**! 
blanche  feichc.  Celle  que  nous  auons  en  France,  apportée  de 
Brianfon,  recueillie  deflus  les  Melefès  à  la  fommité  des  plus  hau- 
tes montagnes,  eft  dure,  différente  àîafufdi&e.  Parquoy  cftant 
la  manne  de  deux  fortes ,  1  on  trouue  au  Caire  de  l' vne  &  de  Fau- 
tre  es  boutiques  des  marchands ,  expofec  en  vente.  L'vne  eft  ap-  Termié'm. 
peliee  Manne,  Sl  eft  dure  :  l'autre  Tereniabin ,  &:  eft  liquide  :  Se 
pource  qu  en  auons  fait  plus  long  difeours  au  Hure  des  arbres 
toufîours  vcrds,n  en  dirons  autre  chofe  en  ce  lieu. 

Voyage  dtt  mont  SinaîauTor.  '  Chapitre      lxvi. 

i  Vant  que  partiales  Caloiercs  nous  donnèrent  des  ba- 
I  ftons  longs,  gros ,  pôliz ,  aflezpcfànts  :  &  nous  dirent  *&g^ 
J  qu'ils eftoyent de  l'arbre  duquel  lavcrgcdcMoyfce-^0^ 
^  ftoi  t  faite,  &:  dont  il  frappa  le  roc  pour  faire  fortir  Tcau 
auxenfansdlfraei.  Ccft  arbrerefïcmbleroità  l'Acacia,  n'eftoie 

NN    iiij 


£SS  SECOND     LIVRE     DES      SÏNGVLÀ. 

qu'il  n'a  aucun  neuds.  Nous  prifmes  le  chemin  pour  aller  vers  h 
ville  du  Tor,  laifîàns  le  chemin  par  ou  nous  eftions  venus  :  &  n'y 
a  que  deux  iournees.  Nous  veoyons  des  Gazelles  à  grandes  ban- 
des courir  par  les  motagnes  de  Sinai,îe  long  des  rochers  :  &:  d'au- 
tant qu  elles  ne  font  point  chances,  elles  fc  multiplient  en  grand 
nombre,  comme  trouppeaux  demoutons.  Nous  repofafmesla 
nui&en  îacapagne:  puis  le  lendemain  ayas  recharge  de  bon  ma- 
'ydSnthm  tin>gaignafmesvcrs ~celIe  montagne  qu'il  nous  falloir  pana:  en 
smihmm  '  ^e  iournee5quieft  fort  faicheuf^entre  le  Totale  montSinai. 
Jéfinùum  Les  montagnes  en  ccfr  endroid  ne  portent  pour  la  plus  grand* 
marmitm,    partie  finon  Abfmthium  Seriphium^  Ponticum, Ambrofia  A- 
ouPoticum  rabtrm;Eupatoriom3  Papaucr  corniculatû ,  &  arbres  de  Balanus 
pytwrcor*  myrepfica,&  vneefpece  de  Geneft  Arabique,differentau  noftre 
71mwZr II  y  croJi^auffi  Ndes  Câpriers  entre  les  ouuerturcs  des  rochers, 
repfa        raoultdifferens  à  ceux  qui  viennent  en  arbre,  àraufTiàceuxqui 
cfr/à     -Baiffent  en  Grcce,nous  paffafmes  la  fufdite  montagne,  qui  nous 
^/i^ô^fôcp^sa^^eadefcendrcqu'àla  monter:  carnouseufmcsplus 
magnum,    de  defeente  que  de  montec.attendu  qu  cilions  en  haut  lieu  .Eftas 
Cologntbes.  fa  quelque  peu  defeendus  ,  trouuafmes  vne  belle  fontaine  qui 
C^fc^couroitleiongdc  noftre  chemin,  &  ftiuifmes  le  ruiffeau  lono- 
m&es-        temps.  Nous  trouuafmes  quelques  plantes  d'Acacia,  &  d'Heliot 
tropium  magnum,quî  reffcrnbloit  eftre  vn  petit  arbriiTeau^yant 
trois  coudées  de  haut.  Ilyaauifi  vneefpece  d'Hyofciame  ,  qui 
vient  quafi  enarbufte,  qui  cil:  moult  odoriférante  &grafFe.  L'on 
y  voit  auffi  des  Colocynthes,  &c  des  Cocombres  fauuages,  qui 
font  différents  en  efpece  a  ceux  que  nous  voyons  es  paysd'Aûe, 
6c  Europe.    Quand  eufmes  defeendu  la  montagne  ,  il  n  efloic 
guère  après  midy  que  commençafmes  a  entrer  en  vne  ipacicu- 
fe  campagne  entre  ladi&e  montagne  Se  h  mer  Rouge ,  en  la- 
quelle nous  campafmcsle  foirpour  nous  repofer,  àbien qua- 
tre iieuës  loing  du  Tor.  Nous  repartifmes  peu  de  temps  après 
la  minuid ,  &  arriuafmes  au  Tor  auant  iour.  Les  Colocynthes 
crQiffentfauuages  par  cefte  campagne  en  û  grande  abondance 
■     f:  gplî  n'y  â  rien  plus  fréquent. 

Vefcriptioa 


0-B-SEB.VEES     PAR.     t.    BELOîf.  Z%? 

j)efmptîon  ieîaviUe  ^ chaflemduToY:  &  desfmguUrhe^jiit 
riuao-e  de  la  mer,  Ronge.  Chapitre     lxvii. 

[Stans  arriuez au Tor* &:  campez  dcflbus  noz ten- pefîripûon 
l  tesen  la  pîaine,,allafraes  voir  la  ville.Nous  la  nommos  dui>illage. 
\  villc,mais  ce  net  qu'vn  petit  village  :  car  le  Tor ,  en-  du  Tor. 

___ |cor  qu'il  tienne  nom  de  ville,  toutesfois,  entant  que    . 

c'eft  vu  pafTagc  fameux  &:  de  grande  renommée ,  &  que  c'eft  vn 
port  de  la  mer  Rouge  ,  &:  auflï  que  le  pays  eft  difeommode  pour 
îes;habitans,c'cft  beau  cou  p  de  v  oir  vn  tel  village  en  lieu  Ci  fterile. 
Il  nousfot  monftré  à  demie  lieue  du  Tor  en  la  campagne  les  qua-  Quarante 
rante  palmes ,  desquelles  eft  fait  mention  en  la  Bible  :  auprès  def^^j. 
quels  va  vn  petit  baing  naturel  d'eau  chaude ,  qui  n'eft  gueres 
plus  grand  qu=Vne  petite  fontaine  :  fon  mifïéau  iefcoule  quelque 
peu  loin g,rnais  il  fc  perd  incontinent  dedans  le  fable,  La  grande 
difeommodité  du  lieu  ou  eft  fituec  le  Tor,  fait  que  beaucoup  de 
gens  n'y  habitent  point  :  car  ils  n  ont  ne  bois^n'eau  douce,  qui  ne 
les  va  quérir  bien  loing  delà:  ÔC  mefmement  le  port  n  eft  guère 
feur  :  car  il  eft  grandement  defcouuert  à  tous  vents.  Auffîn  eft  ce 
pas  bonnement  vn  port,mais  pluftoft  vne  plage.  La  fituation  du 
village  eft  vn  peu  efleuee:  caria  mersenrkqnelqucsfoisiufques 
à  inonder  en  la  campagne,  &:  extourner  le  village.  Il  y  a  vn  petit 
chafteîet  de  pierre  de  taille,qula  quatre  tours  aux  quatre  coings,, 
faites  de  bien  peu  d'eftoffer  &  eft  ûtuéenîieufablonncux  ,  tout 
ioignant  le  village  du  Tor,  qui  n'a  ne  fofiêz  ne  eau  douce  >  imoa 
vn  puiz  qui  eft  tout  ioignant,dont  l'eau  en  eft  falee,  &  delaqucU 
le  l'on  pourroit  boire  à  vn  befoing  en  fau  te  d  autre  meilleure.  La 
largeur  de  ce  chafteau  que  comprennantiès  murailles,  eft  feule-  c^feaH^ 
ment  de  foixante  pas,&  de  quatre  vingts  de  longueur,, de  tels  pas 
qu  on  chemine  en  marchant  légèrement  :  tellemen  t  que  letrou- 
uons  de  la  mefme  longueur  Se  largeur  de  la  falc  du  Palais  de  Par- 
fis. Vne  grande  partie  du  Tor  eft  habitée  de  Iuiis &  de  Chré- 
tiens :  qui  font  Grecs,Arabes,  &  Arméniens,  AuiE  y  a  vne  Egli- 
fc  de  Calojercs  fornommez  Maronites  ,,  Nous  fufmes-  à  leur 
meiTe, qu'ils  chantèrent  honorablement ,  partie  en  Arabe,  partie       .     , 
en  Arménien ,  partie  en  Grec.  Ce  n  eft  point  leur  couftumede  fed*^ 
s'afTeoireftans  à  la  melfe  durant  leur  feruice.  Et  pource  que  la  ^  tot^ 

QQ 


±5>0  SECOND     LIVRE     DES     SINGVLA, 

meûe  dure  long  temps,  ils  baillent  des  croftés  ouefchafTesà  vn 
chacun  pour  s  appuyer  par  deftbus  les  aifïèlles.  Ils  y  ont  grand 
marche  de  poiffons  fecs ,  auxquels  ils.  fendent  les  ventres  quand 
ils  les  prennent,  puis  les  Talent  vn  peu  Se  les  feichent  au  Soleil:&; 
ainiîpreparezlcspeuuent  garder  à  long  temps.  Entre  ceux  qu'y 
Sars^         auonsrecogneu,onte{téBars,que  les  Latins  nomment  I»/?/,^ 
xttpL        ^Vmbr^quc  nous  appelions  Maigres,  Se  Bremmes  de  mer ,  nom- 
.Mâkrcs. .    mees  Canthari,  Se  Dentals.  Auffi  pefchent  ils  grande  quantité 
■rmbr*,       de  Sargs  Se  Sparcs  Se  Orades.  Pas  ne  dirons  Dorades  :  car  l'Onu 
Bremmes  de  aCqU>on  nommeàMarfcilîe  ,  eft  différente  de  la  Dorade  de  i'O- 
"*%    •     cean.  Les  Salpes  y  font  beaucoup  plus  grandes  Se  fréquentes 
Grade"'     <îu'en  *a  mcr  Méditerranée.  Il  y  croift  vnecipece  de  Corai  que  les 
VorÀe.      Arabes  cognoiftênt  par  nom  propre  Chauein ,  qui  eft  tout  veule 
CorddeU    & -creux  par  le  dedans ,  ayant  infinis  petits  canaux  :  Se  pourec 
merrouge.    q^'il  eft  beau,&  qu'il  y  en  a  quantité  par  tout ,  ils  en  pendent  àcs 
pièces  le  long  des  portes,  tanr  de  la  mosquée  que  du  Carbafcha- 
ra.  Elles  ont  deux  coudées  de  long^groftès  comme  la  cuifTed'vn 
homme:  dont  la  couleur  eft  partie  blanche  Se  rouge.  Auffi  y  a- 
u?ts^€r**  uons  veu  vnc  manière  de  pierre  que  les  anciens  nommèrent  Lapis 
bien*.         iAYxbicm.  Nous  n  auions  efpoir  de  la  cognoiftre  n'euft  efté  vn 
Caloicrc  quwious  en  monftra  quelques  boulles ,  Se  difoit  lesa- 
noir  apportées  de  faincl:  Macario ,  qui  eft  de  l'autre  cofté  de  la 
merRougejàl'oppofiteduTor:  auquel  lieu  y  en  a  auffi  grande 
quantité  comme  des  cailloux  es  autres  contrées.  La  pierre  eft 
^       s  ^3îonde}pcfante  ^effemblant  à  la  Marcafite d'or, ayant  les  grains 
foÂspJu  qui  ont  carrures  d'Androdamas,§  Le  Tor  eft  vn  repos  dcsCara- 
y^eduTor.  uannes ,  qui  apportent  les  drogues  de  laMeque  Se  de  l'Arabie 
heureufe  Nous^auonsquelepoyure,legmgembre5mufcadess 
^irofles,kque,fang  de  dragon ,  Se  macis  y  abordent ,  dcfquelles 
eh  veifmes  charger  vne  Car-auanne  qui  s'en  partit  auec  nous.  Ec 
-aucc  cecy  eut  la  charge  de  vingt  Chameaux  qui  portoyent  feule- 
ment de  ces  coquilles  rondes  dequoy  l'on  fait  les  pendans  des 
cîefs^ri  Europe:  maiseeux  du  Caires  en  fèruent  àpolir  le  papier 
&  les  toiles  de  couleur,quifont  gunimees,  defqueiies  ils  s'habil- 
lent &veftcnt3  comme  auffi faifoyende  temps .  pafTc.  : 


OBSERVAIS     PAR.     F.   B  EX  ON.  2#l 

Deshattaux&harqutsdelamerRQUge.       Chapitre      Lxvrir. 

,  Es  barques  ,cfquifsJ&  autres  forces  de  vahTeaux  qui  w*^ror. 
1  font  aux  pauures  gens  des  villes  fkuces  fur  la  mer 
!  Rouge  &  du  Tor,  font  ioin&es  auec  des  cordes  de 
_J  Palmiers.  Ec  combien  qu  elles  ne  foyenc  pas  û  bien 
ferrées  que  û  elles  eftoyent  clouées  de  doux  de  fer,  (i  cil-  ce  qu  ils 
n'ont  point  de  crainte  que  la  mer  y  entre  :  car  ils  les  fçauenc  il  bic 
cheuiller,calfufter,&:  eftancher  auec  de  la  poix,qu*ils  nauiguent 
bien  feu rernenc.  Ceux  qui  ont  penfe  que  les  nauires  ne  furent 
clouées  de  fer  en  quelque  pays,de  peur  de  la  pierre  d'Aimant,ont 
eflé  abufèz  :  car  fï  bien  la  pierre  d'Aimant  a  vertu  naturelle  d'at-  ^fimaat 
tirer  le  fer  à  foy,fi  cft-cc  qu'il  ne  faut  croire  qu  elle  ait  pouuoir  de 
retenir  vn  bateau  pour  eftrc  ferré  de  doux  defer,ne  l'attirer  à  foy 
de  loing.  Mais  c  eft  qu'ils  n  ont  point  d'arbres  haut  efîeuez,  dont 
les  bois  pu iffent  endurer  eÛxe  clouez  Se  auffi.  que  les  gens  du  pays 
font  pauurcs,qui  n'ont  moyen  de  faire  defpenfe  ,  Se  qui  n'ont  pas 
îcs  doux  à  leur  commendcmcnt,&;  qu'ils  n'ont  nul  métal  duquel 
ils  en  peuffent  forger  :  Se  encores  quainiifoit  qu'ils  en  ayent %  &: 
n'eftant  pas  fvfàge  de  ioindre  les  nauires  auec  du  fer  ou  de  cuy- 
ure,eomme£àifoycntles-anciens ,  ayans  le  fçauoirde  les  pouuoir 
biencoudre^ils  les  font  fans  aucune  defpefe.  Oeft  lacaufepour- 
quoy  leurs  vaiûeaux  {ont  moult  petits,def  quels  ils  te  contentent, 
tant  pour  les  pefcheries,qu'à  faire  leur  trafic»^  en  temps  d'eux 
paffer  le  canaî,&  aller  çà  Se  là  par  la  mer  rouge.ï!  cfivray  queioa 
y  voit  des  grandes  houlques.nauires,  galères ,  Se  autrcs-vaiflêaux 
de  routes  manieres^mais  ils  font  étrangers.  Quoy  qu'il  en  foit,la  #<>«%*«- 
Dauigation  en  la  mer  rouge  eft  moult  perilleuie  pour  la  multitu- 
de Se  fréquence  des  rochers.  Nous  trouuafmes  vne  forte  d'viftre  _  -j-r^ 
a  la  riuc  du  Tor ,  que  les  Grecs  nommèrent  anciennement  Tri-  ^^ 
dadma^nais  maintenant  ks  aomment vulgairement  Agano,ou  ^a-^on. 
Agano.  Elles  font  beaucoup  plus  grandes  que  celles  de  la  mer 
Illyrique  ou  Méditerranée, &  différentes  à  celles  que  les  habitas 
dcLernnos_&  Eubee  nomment  Gaideropoda*  ou  Acynopoda.  ^W^po^ 
Elles  font  auiTifrequéces  par  le  riuage,comme  font  les  nôftres  en  T 

l'Océan:  Se  les  Caloieres  de  ce  pays  là  fe  les  font  dédies  pour  leur  ^^i^4 
manger.  Nous  trouuafmcs  ds  bon  vin  au  Tor  ;  car  les  habitans 

OO    ij 


DaBes  mol 
la. 


Tortues  de 


"l$Z  SECOND     LIVRE     DES    SIKCVLA, 

Chrcfticn  s,  Arabes,  Armeniens,&  Grecs  cultiuent  les  vigncs,diu 
quel  furent  remplis  nozbaraux&ouldres.  L'eau  qu'on  boit  au 
Tor  eft  à  demie  lieuë  de  là,qui  n'eft  gueres  bonne  :  car  elle  eft  ni- 
fantôme i*  treufe&fàlîee,  laquelle  ils  vont  querirà  chargcs.Il  y  avneruë  en 
Tor%  ce  village  qui  eft  couucrte  à  la  modedes  autres  lieux  d'Egypte: 

car  les  habitans  (è- tiennent  deflbus  pour  s'exempter  de  la  véhé- 
mente chaleur  du  Soleil.  Les  Palmiers  qui  font  en  la  campagne, 
font  leurs  datées  grafTes,rouges,&:  molles ,  qui  font  grandement 
hamides,&  de  différente  nature  à  celles  des  autres  pay  s.Parquoy 
les  habitans  font  contratn&s  lcsefcacher  dedans  des  fportes,ceft 
adiré  paniers  tifTuz  de  faeilîcs  de  Palmiers ,  &  les  fouler  comme 
on  fait  les  figues  es  cabas,defqu  elles  on  fait  quaft  comme  vne  pa- 
fte,  qui  fe  peut  garder  long  temps,  comme  auffi  fait  on  celle  des 
Tamarindes.  La  principale  nourriture  des  habitans  eft  de  telles 
da&es.  Ils  pefchent  de  moult  belles  &  grades  tortues  de  mer,  qui 
ont  Feicorce  grande  comme  eft  la  porte  d'vnc  maifon.  Il  fut  vn 
temps  que  les  Chreftiens  n'en  ofoyent  mangcr,pource  que  le  Pa- 
triarche d'Alexandrie  auoit  excommunié  tous  ceux  qui  en  man- 
geroyent:  mais  depuis  ils  ont  eftéabfouls,  &  en  mangent  main- 
tcnant.Nous  partifmes  du  Tor  pour  retourner  au  Caire,prcnans 
le  chemin  par  la  fufditc  campagne,  ayans  le  mont  de  Sinai  à  dex- 
trc,&  la  mer  rougeà  feneftrc,&  la  Tremontane  deuât  nous.Pour 
Tremotane  entendons  celle  petite  eftoillcquieftftabîeauCiel, 
a  cofté  des  fept  eftoilles  que  nous  nommons  le  chariot,  qui  eftoic 
û  baflè  qu'il  n  apparoiffoit  quafi  rien  du  chariot ,  lors  qu'il  eftoic 
plongé  bas  cni'orizon.En  pafTant  par  la  campagne  du  Tor,  nous 
veifmes  de  beaux  &:  dçlc&abies  iardins  près  de  la  fontaine ,  en- 
clos de  muraille  faite  de  terre  &  de  paille, &n'y  fçauroit  on  entrer 
finon  par  les  portes.  Continuansnoftre  chemin,  trouuions  vne 
petite  forte  de  Lézardée  la  grandeur  des  Scinques,  courant  par 
la  campagne.  Les  Arabes  le  nomment  Dhab.  Nous  trouuions 
auffi  des  Stellions,defquels  les  Arabes  recueillent  les  excremens, 
qu'ils  portent  vendre  au  Caire  ,  nommez  en  Grec  Crocodi- 
lea.  De  là  les  marchans  les  nous  apportent  vendre.  Noftre 
chemin  eftoit  par  fablon  fterile&  pierreux  ,  ou  trouuions  vn 
petit  animal  reiTemblant  à  vn  Phalangion  ,  qui  a  huicl  pieds, 
quatre  de  chacun  cofté  ,  courant  par  le  fable  &  montant  aux 
ïambes  des  cheuaux ,  les  fait  regimber  &:  tourmenter  :  mais 


Scinques. 
Dhok, 
Stellions. 
Crocodile*. 


Ô B  S  E  R  V  E  E  $      PAS.   P.     B  E LO *T»  tp$  ~ 

lès  çondu&eurs  des  Chameaux  nommez  Chameliers  aduertis 
de  cecy,ont  vn  balay  tout  preft  pour  les  abatre  inc5pncnt.Nous 
lailîàfnies  le  riuage  -du  canal  de  la  mer  rouge ,  pour  entrer  vn 
peu  vers  terre ,  ou  trouuafmes  vnc  fontaine  d'eau  à  demy  douce, 
Se  quelque  peu  falee,  de  laquelle  Ion  abbreuua  le  foir  les  Cha- 
meaux.Nous  campafmcs  là  au  près ,  puis  cheminarmes  auat  iour 
le  long  du  riuagcdelamer.  Et  pour  le  cfeftour  d'vne  montagne 
nous  fallut  entrer  dedans  lcau.  Nousauîons  la  terre  à  dextre ,  Se 
le  cofte  du  canal  à  feneftre.  Puis  rentrafmes  en  la  plaine  campa- 
<me:&  fallut  que  nous  millions  en  bon  ordre  Se  équipage,  ?wt  ^^  ^ 
îa  crainde  que  nous  auions  des  Arabes:car  nous  fufmcs  aduertis /^^ 
qu'îlz  f cftoy en t  afïcmblez  pour  nous  combatre}à  fin  de  nous  pil- 
ler. Les  vingt  geniflfaircs, le  Sacharab ,  Se  Arabes ,  auecla  compa- 
gnie que  menoitmonfieur  de  Fumct,auec  le  refte  des  gens  qui  le  houppe  & 
fuyuoyent,eftoyent  prcftzde  les  receuoir^'ilz  fufTent  venus  nous  monfteur  & 
aflaillir,-  il  eftoit  défia  bien  tard.  Nous  cheminafmeslong  temps  Fumet- 
en  bon  ordre,  &:  pour  la  craincte  que  nous  en  auions,  campafmes 
d  afïèz  bonne  heure.Et  ia  foit  que  nous  euflions  fait  grande  dili- 
gence ce  iour  là,toutesfois  ayans  rcmply  noz  oudres  d'eau,  Se  re- 
chargé bagagdjcheminafmcs  bié  deux  heures  iufques  à  î'obicur^ 
Se  campafmes  en  ia  campagne,  ou  paflafmes  la  nuiciee.  Le  len- 
demain nous  chcminafmes  par  fablons  molz  Se  arides.  Le  foir 
nous  arriuafmes  en  vn  lieu  mol  Se  humide,  Se  repofafmes  entre 
des montagncSjOu il croifïbit  du  Tamarix,  des Genefts,  Acacia, 
Ioncs  furnommez  Holofcrurni ,  fouchet  rond.  Làveifmesdes  r^marifftes 
petits  oifeaux  fc  loger  fur  les  Tamarifques  que  rcgardafmesat-  cemts. 
tentiuement ,  voir  û  en  pourrions  rccognoiftrcrcar  cela  fc  refèn  t  ss&xi*- 
de  quelque  admiration,voir  les  oifeaux  viurc  en  lieu  û  fterile:cn-  #0%«23M* 
trelcfquellcs  efpeces  auons  obfèrué  des  PaiffeteauXjBruants ,  Se 
Linottes  :  aufli  auons  veu  voler  des  Vautours  Se  Corbeaux  ce 
mcfme  iour. 

Commutation  du  chemin  par  'tournées  Jiu  Tôt  au  Caire.  Chapitre    lxix. 

J  Artans  de  ce  lieu ,  nous  retournafmes  au  mcfme  che- 
min que  nous auions laiffé , lors quallafmcs au  mont 
Sinai:&  rentrafmes  au  deftour  delà  mer  rougeen  cel- 
le partjQu  elle feflargit  en  plage.  Il  nous  fallut  paflèr 

OO  iii 


3^4  SECOND     CIVILE-    EKES      SINGTÊA» 

Mades  en    en  ]'caii  jufqucs  aux  fangîes  des  Chameaux ,  qui  eftoit  ià  pourîa 
psrre.         féconde  fois.  Nous  trouuafmes  vne  pierre  ronde  au  riuage,grofïc 
^  e,   Se  large  comme  yn  tcfton ,  que  pcnfions  eftre  vne  racdalle  { car 
zoban         e^e  rcflcmbloit  à  du  fer  )  ou  eftoyent  naturellemet  eferkes  quel- 
Dou7e  fin?  <pes  lettres  Hébraïques: qui  nous  feift  fouuenir  des  pierres  qu'a- 
ùines.        moqs  autrefois  trouuees  en  Bretagne  y  ou  les  macles  font  expri- 
mées v  qui  font  les  armes  de  nioniieur  de Rohaxu  Nous  appro- 
ehafmesce foir  des  douze fontakie&ameres»ou  defk au  parauant 
au  ions  feiourne: •&  nepouoans  arriner  iufques  là ,  campafmes  à 
demie  lieue  près: car  noz  beftes  eftoyet  îafles,  Se  le  iour  nous  fail- 
loit.Le  lendemain  eftans  partis  auant  iour,&:  arriuez  aux  fontai- 
nes,ampljfmes  noz  oudresdeau:&  cotinuans  le  mefme  chemin 
ou  nous  âuions  paue,deft-oumafmcs  pour  paiîèr  le  Sucs,  ou- nous 
arriuafmesàmidy.  Si  computions  le  chemin  par  iournees ,  ainii 
que  i  auons  fait  venans  du  Tor  au  Sues  ,  n'y  en  trouuerions  que 
cinq  Se  demies  toutesfcis  allions  en  grande  diligence.   La  mec 
de  ce  canal^nc  auf&le  fablon  <ics  nuages,,  ne  font  pas  rouges , .  co- 
rne ion  auoit  penfé ,  ains  ce  nom  luy  eft  impofé  pour  autre  occa- 
Erithra.       fiomcar  il  y  eut  vn  Roy,lequel  les  Grecs  nommèrent  Erithra,qui 
FjtythrœHm  dominoit  en  Egypte ,  qui  donna  nom  à  cefte  mer ,  Se  s'appella  en 
nwe.  Latin  Erydbraeîi  mare ,  qui  eftàdire  la  mer  rouge.  Elle  a  (on  flux 

Se  reflux  commela  mer  Oceane:a.uiÏÏ  n  eft  ce  qu'vn  brasqui  fore 
de  la  grand  mer,&  entre  en  terre  ferme  d'Arabie ,  Se  y  faitvn  ca- 
^^     *~  naljîequel  auoit anciennemenr  nom  Sine  Arabiquc,mais  l'ayant 
changera  prins  le  nom  de  mer  rouge, du  Roy  Erythra,quiinuen- 
ta  l'viâgc  de  fabriquer  les  nauires  :  car  quand  ilz  nauiguoy  ent-au 
J^femx.      parauantjCeftoit  fur  des  rafeaux  faits  de  bois ,  comme  on  en  fais 
mxance.     poucleiourcThu^furia  Durance,&  autres  fleuues  violens. 

J)%portdeS"ue$aurruagedelamerrouge*. 
Chapitre     lxx. 

^   *Lufkurs  modernes  veulent[quc  le  Sucs  eft  le  lieu 
Z&fitm.     '(gjj  Jm||  ]S&  cjui  anciennement  fouloit  auoir  nom  Arfinoe  :  ce 
iquifembieeftrcvrayfemblahle,  entant  qu'il  eft  le 
;  premier  port  de  la  mer  rouge  ,  Se  le  prochain  du 
M~*-*=*m*  Caire.  Il  print  cefte  appellation  depuis  Alexandre 
mkmms.  k  grand: car  nous  trouuons  que  Ptolemxus  Lagus  auoit  efte 


OïSïlVÎES     ÎA1     ^.     *ELONV  2.$$ 

o'ffcffcur  de  l'Egy  pte,&  marié  fa  fille  nommée  Arfinoa,  d'excel-  ugm' 
?  «beauté, àXvfimachus  Roy  de  Macédoine  ,  pour  laquelle  ^Jm\ 
ptolom*usPhiladclj>hus  fonfrere  édifia  cefte  ville  de  ion  nom,  /îoiem^ 
au'il nomma  Arfinoc.  Le  Sues  eft  vn  lieu  moult  dîfcornmode:  P^/^/a 
par  cela  il  n'eft  gueres  habité  :  car  il  n'y  a-point  de  bône  eau  don-  ^m. 
ce  à  près  de  deux  lieues  à  lcntour.  Tout  ce  qu'on  y  peut  voir,  eft 
va  petit  Chafteaa,foible,a  la  façon  antique ,  quelque  peu  cfleué 
au  dejGTusd'vn  petit  tertre.Les  grandes  defpencesquc  le  Turc  y  a  CAicnsfor* 
fait  ,tfont  peu  rendre  le  Sues  gueres  meilleur  :  car  il  y  a  figrande  ™s£"%* 
difeommodité  de  toutes  chofes3qu'on  n'y  peut  habiter.Les  gale-  $m^ 
res  que  le  grand  Turc  y  feit  fabriquer,  y  font  retirées  à  fec,  que 
nousauons  vcues,de  trente  à  quarante.  Elles  furent  amenées  de 
Conftantinople  par  mer  iofques  au  Nil ,  &  par  le  Nil  au  Caire, 
ou  elles  furent  mifes  en  pièces ,  &  portées  par  le  menu  fur  Cha- 
meaux ÔC  par  charettes  iufques  au  Sues ,  Se  la  furet  refaites  entiè- 
rement.  Le 'port  y  eft  mal  feur  :  car  ce  neft  qu'vne  plage ,  qui 
n'eft  défendue  de  tous  vents.  Il  eft  mal  aifé  nauiger  en  la  mer 
rouge:  car  le  canal  eft  plain  de  rochers,  qui  n'apparoiftent  pas 
hors  de  l'eau.  Toutes  les  expéditions  &  armées  de  mer  que  fait 
k  Turc  pour  enuoyer  contre  les  IndienSjfont  faites  au  Sues.  Ec. 
raefmemcnt  lors  qu'eûions  par  ce  chemin  ^trouuafeies  quaran- 
te ou  cinquante  Chameaux  qu'on  y  auoitenuoyé  du  Caire,  qui 
aîloyent  quérir l'eau  auee leur  harnoisdecuir,  laquelle  ilz  pre- 
noyent  au  puiz  de  Sues  ,  qui  eft  à  deux  lieues  de  là  ,  pour  en 
fourni  ries  galères  que  le  Bâcha  lieutenant  ou  Viceroy  en  Egy- 
pte depefchoir  en  Indie^pourfaireia  guerreà vne ville nomme^ ;  .: 
le  Zibit ,  qui  f'eftqit  nagueres  reuokec.  -  Laquelle  eau  encore  Zthia 
qu  elle  foit  falee  Se  aniere  ,  fi  eft  ce  que  les  mariniers  en  boy- 
uentpar  faute  d'autre  plus  douce^  Nous  conxinuafmes  neftre 
chehyïn^pour  venir  aivCaire.   Et  qua«d  nous  fufmes  à  my  che- 
min entre  fepuiz/ &:  \c  Sues,  trouuaîme  s  àcs  guetteurs  dciTusdcs 
efchaffaux  faits  en  la  manière  de  ceux  qui  gardent  les  raifins  es 
vignes,defqucîz  y  en  au  dit  plufieurs  endroicts  par  la  campagne. 
Et  fu  r  chacun  efc haffaut  y  auoit  deux  ou  trois  hommes,  à  fin  que 
voyant  de  loingfil  y  auoit  aucune  embu/ejà^èfe  peuiTent  aduer- 
tirlcs  habitans  de  la  ville  àfedonner  dc~gardc,;quieft  chofe  to- 
talement conforme  à  ce  que  Pline  racompte  des  regards  ou  ef- 
chauguettes  des  Carthaginois  nommez  en  Latin  fpccula  ,  dont  speatU. 
-'  ^  OO  liij 


Ktferez 


Cewjre. 


1$&  SECOND.     IITRE.     Z>ES     &INGVLA^ 

îlzfc  feruoyent  lors  que  les  Romains  leur  faifoyent  la  guerres 
Car  ilz  en  auoyéc  de  celles  par  les  plaines  de  leur  pays  qui  cft  vni 
comme- vne  mer, g£defert  comme  eftceîu y  de  Sues.  Eftaas  arri-  ; 
uezaudicl:  puizde  Sues  pour  la  féconde  fois ,  repofafrnes  deCus 
les  pîactes  formes  iufques  au  foir  bien  tard  :  puis  rechargeafmes 
noz  Chameaux  à  deux  heures  de  nnicl:ô£  ainfî  cheminans  en  di- 
ligence coûte nuiâ:;,  &  couc  leiour  enfuyuant  fans  nous^  repofer> 
arri-uafmes  au  riuage  du  Mil ,  qu'il  eftok  deûV  bien  tard  ,  &£  cou- 
chafmesau  rnefme  lieu  dont  nous  eftions  partis  en  allant  au  mot . 
Sinaù  Icy  finit  noitre  voyage  du  mont  Sinai  ^lequel  nous  para- 
cheuafmes  en  vingt  iours  y.  &:  de  neuf  ou  dix  Chenaux  qu'on  y, 
auoit  menez }  iîi^en  rctournaque  trois  :  car  la  celte  mourut  par 
chem-in.Les  Ârabesne  îeurdonnoyent  à  manger  que  des  febucs 
&  de  l'orge^tout  ainfi  comme  aux  Chameauxidefquelz  Chame* 
aux  en  mourut  aufEla  plus  grande  partie.  Ce  iourd'huy  enuiron 
midyvn  Arabe  conducteur-  des  Chameaux  âduifant  vne  vipère 
deloingen  ïa  çampagne5:ayant  feulement  ie&é  vn  cry  en  fbn  lan- 
gage à  (es  compagnons,  Vipere^vipere,  coururent  la  tuera  coups 
depierre  ;  qui  nous  fait  dire  qinlz  les  ayent  en  grande  horreur- 
Les  Vipères  &  Ceraftes  d'Egypte  ont;  la  peau  fort  obeiifanter 
choie  quauons  cogneué  en  les  rempliifant  :  caries  ayansefeor- 


Kortraiëi  du  Serpent  &lli* 


chce£> 


OBSERVEES     PAR    P.    BELON,  l$J 

chees  &  emply  leurs  peaux  de  bourre,cllcs  en  eftoyent  deux  fois 
p[lis  greffes  que  le  naturel ,  qui  cft  chofe  qui  n  auient  pas  à  celles 
des  autres  régions.  Ily  a  plufieurs  autres  ferpens  par  Egypte ,  doc 
n'auons  point  parlé:  car  les  plus  dangereux  font  ceux  quauons 
ait.  Etpourceque  nous  fommes  trouuez  à  voir  des  corps  em- 
baumez &:  tous  entiers, de  certains  ferpés  adlez,  Se  qui  ont  pieds,  , 
qu'on  dit  voler  de  la  partie  d'Arabie  en  Egypte ,  en  au  ons  cy  de- 
uant  mis  le  portraift,reniettans  à  en  dire  dauantage  au  Hure  àcs 

Serpens. 

Nous  trouuafmes  vnc  trouppe  de  paifms  Arabes  ou  Egypdes 
fur  le  chemin,  que  le  Bâcha  auoit  fait  prendre  par  force  ,  parle 
pays  d'Egypte, poi|r  mener  voguer  à  l'auiron  en  galère  à  l'expédi- 
tion qu'aiionscy  deuantdi&c.  Quand  le  Bâcha  du  Caire,quieft 
lieutenant  pour  le  Turc  en  Egy  pte,arme quelques  galères,  il  fait 
prendre  des  gens  indifféremment  parle  pays  (  car  ilz  n*oferoyent  okifacedes 
refufer  puis  que Ccft  pour  le  feruice  du  grand  fcigneur)lefquelz  Hfubiefts  du 
fait  mettre  es  galères  de  Sues,non  pas  qu'ilzy  foyent  cnchaifnez:  Turc. 
car  on  les  îaiffe  retourner  en  leurs  maifons  quand  ilz  font  reue- 
nus  du  voyage.  L'obeiflance  eft  Ci  grande  entre  les  fubie&s  du 
Turc,  queperfonne  n'ofe  refiilcr  à fon  vouloir.  Hz  prennent  les 
hommes  fans  auoir  efgard  de  perfonne  :  &c  faut  que  les  Chreftiés 
qui  font  au  Caire  .  fe  tiennent  en  leurs  maifons  fans  fortir  hors 
pendant  ce  temps  îà:car  ilz  prennent  ceux  qu  iîz  trouvent  parles 
rues.  Les  foldatsTurcs  que  mena  monfieur  de  Fumet  en  tout  le 
voyage,  portèrent  autant  de bifeuit qu'iîz  mangèrent allans &c 
venans  du  Caire  au  mont  de  Sinai:&  encor  en  rapportèrent  :  qui 
nous  fembla  moult  grande  continence  en  leurfaçon  de  viure:ce 
que  les  hommes  d'vne  autre  nation  ne  fçauroyent  faire.  Nous 
campafmes  vnc  partie  de  la  nui&ec  au  riuage  du  Nik&  le  lende- 
main matin  chargeafmes  les  Chameaux,&rctournafmes  au  Cai^ 
re  pour  la  féconde  fois  s  ou  nous  demeurafmes  long  temps  fans 
partir.  Le  voyage  du  Caire  au  Sues ,  eft  le  cemitere  des  Chaîne^ 
aux  d'Egypte  ôc  d'Arabie  :  car  ilz  y  demeurent  en  faifant  ce  che- 
minlà ,  comme  il  appert  par  îesofïèmens  qu'on  voit  demeurez  le 
long  des  chemins ,  &:aufïi  quelles  Vautours  fréquentent  moule 
en  ce  chemin  là ,  defquelz  nous  en  vcifmes  le  iour  précèdent  de  K?**0*? 

.  »'T*.  .A  ,  .         .        *  .        i         ont  ùyfeawt 

moult  grandes  compagnies,  qui  ettoyent  bien  cinquante  en  crut-7   •  -^Mm, 
que  trouppe  :  &  of ons  dire  que  des  oifeaux  ayant  l'ongle*  cro-  m*m~ 


■yaijfeaux  a 
Porcelaine. 


Murrhina. 
Forceiaine, 


yigm 


sdpeftre. 
Hitre. 


298  SECOND      LIVRE       DES     SÎNGVLA* 

chu,  il  n'y  a  que  des  Vautours  qui  aillent  par  bandes. 

Ttes  Vafis  de  Porcelaine  3  que  Ion  vend  au  Caiye:&  duNltre^ 
Chapitre   lxxi, 

Yp§  Ly  a  grande  quantité  devanTeaux  de  Porcclaîne,qnc 
i^>  les  marchands  vendent  en  public  au  Caire.  Et  les 
"îl^voyans  nommez  d'vne  appellation  modernc,&:  cher- 
^chansleuretymologieFrançoifqauonstrouuéqu'ilz 
font  nommez  du  nom  que  tient  vne  efpece  de  coquille  nommée 
Murex:car  les  François  dient  coquille  de  Porcelaine.  Mais  l'af- 
finité de  la  diction  Murex  correspond  àMurrhina.  Toutcsfois 
ne  cherchonsîiety moîogie  qtre du  nom  Franeois,en  ce  que  nous 
difons  vaiffeâuxdePorceîainejfçacrians  que  les  Grecs  nomment 
la  Mirxhe  de  Smirna.Les  vaifleaux  qu'on  vend  pour  le  iourd'huy 
ennozpays,nommczde  Porcelaine,  ne  tiennent  tache  de  la  na- 
ture des  anciens  :  Et  combien  que  les  meilleurs  puuriers  d'Italie 
n'en  Font  point  detelzitoutesfois  ilz  vendét  leurs  ouuragespour 
vaiflfeatix  de  Porcelaine,  combien  -qu'ilz  n'ont  pas  la  matiere-de 
mefme.  Ge  nom  Porcelaine  enY  donné  à  pluiieurs  coquilles  de 
mer.  Et  pource  qu'vn  beau  vai  fléau  d'vne  coquille  de  nier  ne  fc 
pourroit  rendre  mieux  à  propos  fuyuant  le  nom  antique ,  que  de 
lappeiler  de  Porcelaine,  auons  penfé  que  les  coquilles  polies  Sz 
luykntes  .,  rcfiembîans  à  Nacre  de  perles ,  ont  quelque  affinité, 
auec  la  matière  des  vafes  de  Porcelaines  antiques  :  ioinct  auiTi 
que  le  peuple  François  nomme  lespatenoftres  faites  de  gros  vi- 
gnols.,  patenoftres  de  Porcelaine.  Les  fufdits  vafes  de  Porcelai- 
ne fonu;ranfparans,&  cou  fient  bie  cher  au  Caire,  &:  difent  met- 
mement  quilz  les  apportent  des  Indes.  Mais  cela  ne  nous  fem- 
bîa  vray  fcmblable  ;  car  on.  n'en  voirroit  pas  fi  grande  quantité, 
ne  de  ii  grandes  pièces  ,  fil  les  falloir  apporter  dcfiloipg.  Vne 
c%uiere„vn  pot,ou  vn  autre  vaiiTeau  pou£perite  qu  elle  ipit,  cou- 
£iq  vn  ducat  ;  ïi  c'eft  quelque  grand,vafe  ;  il  cpuftera-dauantage. 
Nous  troquons  vne  moult  grande  opiniaftretc  cn.plaficars  per- 
sonnages d'Europe ,  qui  foufciennentque  noftuelaîpcftrecftle 
Nitredes  anciens ,  &  toutesfois  il  n'y  a  vne  feule  fcintille  de  Ni- 
tre.en  tout  le  pays  des  Cln:efuens,f il  n'eft  apporte  de^dehors,  qui 
toutefois  efttant  commun  au  .Caire,  .que  dix  libres  ne  couftenc 


OBSIRYIES     ÎAR     P.    BEL  ON.  1^9 

«asvnmaidin.Hzs'en  feruentaux  teintures  ,  &  àertamer  leurs 
vafès  Se àacouftrer  leurs  cuirs  ,  raeflé  auec  les  filiqtics  d'Acaciav 
Nous  auons  veu  les  M  ofquees  faites  de  bel  ouurage  hors  la  vilîc 
du  Caire-,  que  plufîeurs  grands  feigneurs  ont  fait  ériger  depuis  cï^nei  dn 
peu  de  temps  en  ça:car  vn  Bâcha  ou  Sangiac,ou  autre  officier  du  Mofaas. 
o-rand  Turc ,  voulant  laifTer  chofe  mémorable  de  foy„  fait  fabri- 
quer telz  édifices  pour  1  amour  de  Dieu ,  &  ioignades  Mofquees 
fait  faire  des  eifternes  à  referuer  i*eau ,  à  fin  que  les  paflàns  y  puif- 
fènt  abbrcuuer  leurs  belles,  Se  les  hommes  fe  lauer  iel5  leur  cou- 
ftumc&fe plonger leans  :  carilzpenfent  eflreabfoulzdctous 
leurs  péchez,  fuyuant  la  promené  de  Mahomet ,  ayans  laué  leurs  EmxzAr* 
corps.  Les  Arabes  mettent  communément  de  Feau  par  les  lieux  dees  e»m» 
publies,^  en  font  porter  par  des  gens ,  qui  en  donnent  à  tous  al-  hUc. 
lans&venansjans  en  rien  demander  ,  finonque  celuy  a- qui  ilz 
la  donnent  en  vôuluO:  bailler  de  fon  bon  gré.Il  n'y  a  carrefour  ne 
au  Caire,ncés  autres  villes  d'Egypte  ,  ou  de  Syrie,  comme aufli 
de  Turquie,ou  il  n'y  .ait  quelque  grand  pot  plein  d'eau,que  tous> 
les  ioursilzemplifTent,  pour  abbreuuer  ceux  qui  ont  foïf.  Delà* 
vient  qu'iîz  n'ontpoint  de  honte  de  diluer  enrue vne de  manger 
en  public  Jlz  achètent  ce  qu'ilz  veu  lent.  manger5au  marché:puis  -les  Tum 
vont  faâèoir  tout  auprès  de  quelque  vaifleau  plein  d'eau  :  Sclïm^m*  c» 
dechaufTeront leurs ibuliers  pour saflèoir contre  terre , Se man~^2~r?r-    „ 
geront  en  prefènec  de  tout  le  monde.   Le  foing  qu'an  vend  au    îom£d  £= 
Caire,neftpasdcpré,commceft  celuy  que  nous  recueillons  me^^.  lC 
de  rameaux  de  chien  dent  /comme  celuy  qu'on  amaiîe  par  entre  Ui  âdzdts. 
les  rochers  des  ides  Gidadesiraais  c'eft  foing  de  trefie  temé,qui  a 
le  cauie  ou  fuit  tout  creux  :.&  eft  lié  par  poignées ,  puis  diftribné 
en  braïfees. Les  Chenaux  lemangent  mouk  volontiers.  .,  v     . 

Quel  membre  iaunenejt  minerai ,  comme  phtftews  ont.efljmé^aini  efi% 
gumme d'arbre.  k  Chapitre*     lxxii. 

.  Ambre  iaunc  dequoyTont  faites  les  patenoitres 
d'Ambre  ,  nTcfl:  en  moindre  réputation  entre  les  ^i..re.n-.u 
Arabcs}Syriens>Egyptiens,&:Indiens,qu'ilel':w;>  :c 
trelesChreftiens  :-car  les  Turcs  le  porten:  auill 
_      _    ^.bien en patenoftres  comme  par  deçà, &  r»;:ii:di~ 
fenc  le  chapelet  àleur  mode  ;  Se  outre  ce  qu'ilz  en  tca-z  ces  p^:e- 
^ PP   : 


300  SECOND     LIVRE      DES     SINGVLA. 

noftres ,  ilz  s  en  feruent  aufll  à  diuers  autres  vfàges ,  comme  à  or- 
ner les  bafts)brides,&  Telles  des  Cheuaux,  mules ,  Se  Chameaux. 
Nousen  auons  veu  de  grandes  fâchées au  Caire ,  qui  n'eftoit en- 
corestaillé:&eftoit  par  morceaux,gros  comme  les  deux  poings, 
&  à  quelques  vns  lefcorce  de  larbre  qui  le  produit  y  eftoit  encor 
attachee.Il  eft  à  prcfuppofèr  que  l'arbre  ou  il  croift  cft  fort  grand: 
ce  qu'on  peut  imaginer  à  voir  Ton  efeorce,  qui  eu:  deiice,licéc,  Se 
bié  polie,  ô£  tenue:&  y  en  a  qui  font  plus  larges  que  la  main.  Plu- 
sieurs ont  eftimé  que  l'Ambre  iaune  eft  vne  fluente  liqueur  terre- 
ftre,qui  fè  rend  en  la  mcr,ou  elle  s'endurcift,  difàns,quc  les  vents 
famhrei/4,  laiectentésorcesdes  régions  maritimes.  Mais  cefte  opinion  fè 
au  fond  de  peutprouuereftrc  faufè,  en  faifant  experiencede  la  faire  nager 
hm.  fur  l'eau  ,  Se  fi  l'Ambre  ne  nage  ,  comment  pourra  eftrc  vray  ce 

qu'ilz  en  difènt?  Parquoy  ayans  îeu  tout  ce  que  les  anciens  eu 
on t  cfctit^Se  tant  de  fois  trouué  fbn  efeorce  attachée  à  la  gumme, 
tiendrons  auec  Diodorc ,  qui  dit  nommément  que  c'eft  gurnmc 
d'arbre,  qui  a  vertu  d'attirer  le  fer  à  foy,comme  la  pierre  d'Aimat, 
moyennant  qu  elle  foit  premièrement  frottée  :  laquelle  chofe 
Diodes  Se  Theophrafte,  Se  quelques  autres  auoyent  ja  obferué: 
ce  qu*auons  trouué  eftrc  véritable.  Elle  obtient  encor  plufieurs 
noms  Grecs  Se  Latins3commc  Succinum,Lincurium5Lapis  lin- 
ciSjPlcrigophoron. 

Ve  nofire départ  du  Cairerfour  aller  en  Ierufàlem.   Chapitre,    lxxiii. 

chemin  du   (S^^feSf  ^  pendant  faifions  noz  apprefts  pour  parfaire  noftre 

çdreenie*   %  $§CffF&é  voyage  vers  Ierufàlem ,  Se  trouuer  montures^  nous 

riifdem.^     i\^^^|  garnir  de  viures5  comme  nous  auions  fait  auant  aller 

g^lplliâ  au  mont  Sinai.  Le  chemin  de  Ierufàlem  eft  fait  plus 

communément  auec  Cheuaux  Se  mules  que  fur  Chameaux. Le? 

Turcs  Se  Arabes  vouîans  partir  en  temps  d'efté  en  vn  loingtain 

voyage ,  achètent  des  Tamarindcs  ,  qui  font  en  grand  vfage  en 

Tmdrindes*  Turquie  ,  tellement  qu  il  n'y  a  année  qu'on  n'en  vende  au 

Caire  plus  de  trois  mille  liures  ,  non  pour  médecine  ,  mais 

pour  leur  eftancher  la  foif.    PafTant  par  les  rues ,  Se  regardant 

Trfie      Par  ^es  £r^hs  dedans  les  mofquees  du  Caire ,  Ion  voit  de  moult 

marhremti*  beaux  grands  vafès  de  toutes  fortes  de  marbre  faits  à  l'antique: 

oms*  &  croyons  qu'ilz  ayent  anciennement  feruy  aux  fepultures  de 


OBSERVEES      PAR.     F.    BELOî?»  ^         $01 

'^cplufîcorsbcftcs  qu'ils  îàloycnt  dedans;  car  entant  quîîs  cfti- 
moyenc  plufieurs  beftes  facrees,iîs  les  confifoyenr.  Se  mpttoyent 
en  tels  grands  va(ès  pour  leur  feruir  de  i cpulchrcs.  Mais  fes  hom- 
nies  eftoyent  autrement  confias,  comme  auons  délia  cfit  par  cy 
deuant.  Les  habirans  du  Caire  nommans  les  feigneurs  du  temps 
du  Souidan,les  appellent  pour  le  iourd'huy  CercafTes,qui  nous  a  Cercajfa. 
fèmblé  nouucautéjOyans  vnc  appellation  tant  antique ,  &:  dont 
Hérodote  a  fait  mcntion,demcurer  moderne.  Le  Bâcha  du  Cai- 
re y  gouuernc  tout  fon  train  à  la  mode  des  Turcs,  &  no  '£.  la  vraye 
mode  des  Arabes  ou  égyptiens.  Et  ayansveu  la  manière  de  fai- 
re,dont  il  vfa enuers  monficur  de  Fumetjlors  qu'iialla luy  faire  la 
rcucrencc,&:  prendre  congé  de  luy,nous  fèmble  digne  d'eftre  mi- 
fê  en  ceft  endroiâ.Iifeit  mettre  tous  iès  genifïàires  en  bon  ordre, 
qui  eftoyent  richement  veftuz ,  les  vns  de  drap  d'or  &  foye  colo-  Mode/fades 
ree,  les  autres  d'autres  fortes  de  vcloux  figuré,  tous  fans. efpce, Tmcs- 
piftolet^'armesquelconques,  &tenoyentles  mains  croifeesâ: 
ioîncl:es,qui  eft  fignifiance  de  la  grande  obey  fiance  des  Turcsrcar 
ils  ne  veulent  les  armes  finon  pour  la  guerre. Les  Arabes  ont  cou- 
ftume  de  porter  des  poignards ,  mais  les  Turcs  n'ont  point  encor 
tel  vfage:tontcsfois  ils  ont  d  autres  armes  plus  profitables  pour  le 
temps  de  paix,  &dc  guerre  ,  dont  auons  défia  parle  cy  defius. 
Quand  nozapprefts  pour  le  chemin  furent  faits,  peniâfmcs  de 
nous  en  retourner  par  terre  ,  prenans  noftrc  chemin,  vers  le- 
ru&lcm. 

&vn petit  arbre  £  Egypte  tùuficursverdfluiteinB  en  cou* 
leur  rouge.  Chapitre      lxxiiii. 

Amedy, vingt  &:  neufiefme  d'O  dobre,  mil  cinq  cens 
trente  fept,  fortifmcsà  nui&clofc  hors  la  ville,  ôc 
i  vinfmes  coucher  deflbus  l'appentis  dVne  mofquce, 
1  qui  n  eft  qu  a  vn  quart  de  lieue  de  la  ville.  Le  dimen- 
chccniuyuant  delogcafmes  auant  iour  pour  aller  vers  Ierufaiem. 
Le  pays  d'Egypte  lors  inondé  du  Nil,  nous  demeuroit  àmaiâ 
gauche ,  ou  veoyons  les  villages  entre  les  forefts  de  Palmiers  ca 
lieux  eminents.  Nous  trouuafmcs  vn  petit  arbriftèau  nommé  ^^ 
Henné  ou  A  lcanna  ^qu'ils  taillent  &:  cukiuent  diligen^ment ,  ôc  ^.^n*. 
font  dïceluy  des  beaux  petits  bois  taillis.  Les  Latins  interprétas 

PP     iij 


lîgujïrum. 
Troefhe. 


mime, 
yfitge   de 
teinture  de 
Benne. 
Ongles  des 
homes  teints 


fO%  SBCONB     LIVRE      DES     SINGTLA. 

les  Arabes  ont  die  que  c'eft  nbftre  Troefne  ,'  appelîee  en  Latia 
Liguftrum,  mais  cela  eft  faux:  d'autant  que  le  Troefne  eft  arbre 
différent  à  ceftuy  là.  Ce  Henné  croift  à  la  hauteur  d'vnGrena* 
dier  :  maïs  eftant  taillé  neiede  ûuo  des  menus  drajons,  ain.fi  que 
Touârepour  font  les  oufiers.Lleft  de  grand  reuenuen  Egypte  ;.  car  ils  defei- 
teindre  en   client  fes  fueilles  pour  mettre  en  poudre,  àfairede  la  teinture 
pour  teindre  en  iaunc.  Le  reuet3u.de  cefte  poudre,  eft  défi  haut 
prix  par  le  pays,ou  domine  le  Ture,qu'ile(l  de  dixauid  mille  du- 
cats de  gabelle  :.car  les  femmes  de  tous  les  pays  de  Turquie  ont: 
ceuftumefe  teindre  les  mains^es  pieds  &  partie  des  cheueuxen 
couleuriaune  ou  rouge  :&:  ks  hoaimesle  .teignent  les  ongles  ea 
en  rouge,      rouge  auee  la lufdicte  pondre.;  Dauantage  en  y  adiouftant.  de. 
^AluDjik  teignent  les  cheuetïXiks  petits  enfantant  mafles  que 
femelles  ries  crins,  les  pieds  ,.&Llaqueue*  des  çheuaux.  Les  fem- 
mes; de  ce  pays  là  penfen  t  qu  efoit  chofe  honçfte  Se  bien  fean  te  À 
leur  beaute,auoir  partie  des  cuiiTes  ,<&  depuis  le  nombril  en  bas~ 
yfmdeU   & 'fes  parties  honteufes  teinctes  ea  couleur  iaunc  :  laquelle  fça- 
foudre£^4^cm  faire  de  cefte  poudre  lors  qu'elles  fortent  du  baing  l  car  for- 
canna.        tans  des  eftuues  la  couleur  fe  prend  mieux  qu'en  autre  temps. 
L'vfege  eaeft  fi  grand  ,  que  non  feulement  les  Turcs  en  vfent, 
mais  iWea  porte  eaVallachiejRuirie,  &Boffcna.  Parquoyle 
peuple  ne  fc  poiiuant  paner  de  cefte  poudre ,  la  gabelle  en  mon  te 
àmoult  grand  reuenu.  Il  aduient  fouuentesfois  que  les  naukes 
d^Alexandrie  viennent  a  Conftantinople  chargées  de  telle  pou- 
dre, qui  eft  incontinent  enleuee&  vendue.  A  la  fortie  du  Caire 
nous  fuyjjifmes  long  temps  le  canal  qui  va  defeendre  en  Damia- 
te.Etpourcequeilionspartisàla  minuid,.  nous  eûions  auanc 
iour  au  chemin  par  ou  nous  auions  paûe  allans  au  Sues» 

/Beplufieurs  bourgades  en  Egypte  for le  chemin  de  lemfdem. 
Chapitre         U.xv. 

O  v  s. pauafmcs  des graa des  capagnesde  fabionmol, 

efquelles  IcspayiàBSCuîtiuët  vneefpecede  Citrouil- 

îcs,do;nt  l'yfàge.  eft  fi  grand  au  Caire,  que  tous  les  mz- 

w<^*.«~.v'  tins  du  moisde  Septembre,  &0&obre,  Ion  voit  les 

chameaux  venir  de  toutes  parts  chargez  de  tel  fruid.  Il  eft  de 

moult  grand  jeueiia^r  il  aç  coufte  guère  àeileuer  durant  l'ipo- 


cittmilla* 


O  B  S  E;  B.  %  E  E  S     EAU;  £.    BEI,  O  K>  .  $03 

-Ration  du  Nil.  Cefteeluy  que  Auiccnnc  Se  Serapion  ontnom- 


-una. 


méBatega  :  mais  maintenant les  Egyptiens  le'nommentCopus,  *  e&A 
en  I'appcllation  duquel  plufîeurs  fè  font  trompez",  îe  nommans  ^ZHl^ 
Anguria ,  mais  cc&  par  erreur  :  car  Anguria  eft  vne  di&ion  de-  Cocomhn. 
notant  le  Cocombre.  Ils  croifTent  quelqucsfois  fi  gros ,  que  qua- 
tre ou  fix  chargent  vn  Chamcau,&  qu'vn  homme  en  feroit  char- 
gé d'vn.  Nous  couchafmes  ce  foir  en  plaine  campagne.  Le  iour 
cnfuyuantpourfuyuansnoftre chemin,  arriuafmesen  vngrand 
viîîage,nommé  le  Caucqmous  arreftafmes  là,  pour  nous  fournir  UCiiUCi' 
de  viurcs  fur  le  chemin  fterileqiul  nous  falloir  pafïèr  :  &:  trou- 
uafmesRiz^oiSjFcbucSjOeufsjPommeSjPoires,  Raifins,  Da- 
des,  -Figues»  Il  ne  çroift  autre  herbe  par  les  fufdids  fablons  que 
derHyofciamc  noirc^uireueftit  les  capagnes  de  verdure.Nous 
partifmcstard  du  Cauçq,&.  cheminafmes  toute  la  nuid  iufques  Hycfa^ne 
au  village  de  Cataro,qui  n'eft  fitué  guère  loing  du  Nil,en  vn  lieu  no*re- 
efleué  &:  aflez  eminent.  Nousyeftions  au  temps  dcleur<:aref-   uî4r0' 
me  :parquoy  la  fommité  des  hautes  tours  ou  clochers  des  Mof- 
queeseftpycnttousentournez  de  lampes  ardentes  qui  efcîerent 
toute  nuictÇefte chpfe eftauffifaitepar  tout  le  pays^duTurc ou 
ils  font  Mahometiftes.  Mais  les  tourelles  des.  Mofquces  des  Ara** 
bcs  font  ence  differétes  à  celles  des  Turcs  a  que  celles  des  Arabes 
ont  trois  eftagc$:mais  celles  des  Turcs  n'en  ont  qu'vne.Leurs  ca- 
refmcs  durept«çiiaçun  vne  lune:&:  le  iour. qu'ils  ieuncncjne  man» 
gentnçboyuçnt qu'ilspa^ent  premiçrpment veu  Iescfto:l]es3ou 
qu'il  ne  foit  nuid  obfcure:puis  baquetent  route  nuid.  Cataro  eft 
auffi  grand  qu-e  leCauoq^&tué  à  1  arçcdiVNil.  Il  eft  entourné  de 
Palmiers.jLon  y  cultiue  des  beaux  iardins.Car  la  commodité  de 
^eaujy  eftgrade:parquoy  il;çft  de  grand  renom.  Çontinuaas  no-r 
ftrechcmin.nous  vinfmes rcpofcçiidz  moturesà  vn  autre  village    .„ 
nome  Bilbez,ou  no9  difnafmes,&:  demeurafmes  le refte  du  iour,  l  e<^ 
tant  pour  cuiter  la  chaleur,quc  pour  repoferjes  montures.  Nous 
y  trou uafrnçs  des  y iurqs.au  inarçhéjcommeau  Caucq.  Parias  du 
fufdid  village,ô£  ailansentre  Orient.^  le  Septentrion j ne  veoyos 
rien  4 dextre  que  lacapaghe  iîerile:  mais  au  codé  feneftre  veoyos 
jepaysqucleNilarroufe,  quiefl  fertile  &  cultiue,  ouilyapiu-        . 
fours  villages  &  forefts  de  Palmiers,  &  Sycomores ,  que  nous  ^^ 
yepyons.de  bien loiag,  Nous. trouuafmcs des  Çazeiles à  grands 
bendes,quicouroyentpat :1a  fufditecampagDe:  ouaousre£ofat- 
mes  ce  foir:& cftoit  pour  le  tiers,  logis  depuis  îc  Caire. 


J04 


SECOKD     IlfRE     DIS.   $IKC?IA. 


Pe  lefirange  &  difficile  chemin  qui  eft  entre  le  Caire  &  Itrujâlem. 
Chapitre        lxxvi. 

E  Mardy jour  de  Toufïain&s ,  aîîafmes  feulement 
s*Utia.  ^ï  Y&$ëlê$  gaigner  le  village  de  Saîatia  ,  ou  nous  repofafmes 
toutleiour.  Oeftvn  volage  ou  les  maifons font 
'  faites  de  rameaux  de  Palmiers ,  agencez  contre  les 
troncs  des  arbres:&:  toutesfbis  eft  village  de  grand 
renom.  H  y  a  bien  quelques  petites  maifonnettes  ;  mais  ccft  peu 
dechofè.Lcspayfans  y  font  des  petis  parquets  en  quarré  auec  des 
rouièauXjpour  enfermer  leurs  Oycs>  Poulies  y  &  Canes.  Nous  y 
trouuafmes des  Chameaux ,  Cheureaux ,  Poulies ,  œufs ,  ovge> 
painîvin>&  autres  viures  à  acheter.  Et  pource  qull  nous  fallorç 
paflèr  vnc  fpacieufe  campagne  &  dangereufe  des  larrons ,  encor 
que  nous  cuûlons  des  GenifTaircs,  iîfallut  toutesfois  que  nous 
louaffions  dix  Arabes  bien  equippez  pour  nous  accompagner. 
Les  Arabes  portent  communément  des  longues  picques  fur  les 
efpaulescftansàeheual.  Anpartirde  Saîatia, entrafmcs  en  cam- 
pagnciftcriles  qui  nous  durèrent  plus  de  cinq  heures,  dont  l'vne 
eftoit  verdoyate  de  Tamarifques^ync  efpecc  de  Rhamnus  y  qui 
a  la  femence  rouge ,  différent  à  celuy  qui  croift  en  Grèce ,  qui  la 
Tdmdrifam  portcnojrc.  Depuis  le  Caire  fuyuans  noftre  chemin ,  nous  n'a- 
^-  uions  poxnt  raitprouilion  d  eau >  auiii  en  auions  nous  touiiours 

trouué  par  tous  les  villages  ou  nous  auions  paffé  :  mais  ce  iour- 
d'huy  fufmes  contraints  d'emplir  nos  oudres  :  Car  le  pays  que 
nous  deuions  pa{ïèr,eft  fans  eau.  Ce  iourd'huy  pafTafmes  le  cou- 
rant du  Nil  par  trois  fois ,  ay  ans  l'eau  iufques  aux  fangles  de  noz 
jnotures:  laquelle  pource  qu'elle  eft  meflecauecla  mer,eft  amerc 
&  falee.Nous  trouuafmes  aufïi  des  ponts  larges ,  mais  non  guère 
longs.  Eftansja  forris  hors  des  ruiffeaux  falez,  nous  arreftafmcs 
"  pour  paûer  la  nuid  derrière  les  ruines  d'vn  Carbafcara.  Le  iour 
fuyuant  eftoit  plus  fàfchcux  à  paflêr  que  nous  ne  pcnfions:car 
nousrcntrafmesen  vn  paysdefablon  morfondant  &mouuant. 
Et  faut  que  les  Muletiers  cnucloppcnt  les  pafturons  des  Mulets 
&  Chcuaux,autrementiis  s  cntretailleroyent.  Apres  qu  eufmes 
chemine  par  le  fàblon*  arriuafmes  en  vnc  vallée  ou  nous  veifînes 
quelque  sombre  de  Palmiers  ioignant  vnpuiz  d  eau  douçaftre, 
*  .  '  dont 


*  O  B  S  E-RT  E  ES     PiR     f.    B  E  LOS."  JO? 

dont  les  Catauannes font  abbtcuuccs.L  eau  en  cft  tirée  àuec  vne 
tom à  la  mode  d'Egypte.  Gontinuans  chemin ,  vinfases  ce  fbir 
au  village  nommé  Belba.  Ceft  vn  petit  ehafteau  quarté ,  fituéen  ~- 
la  région  de  Paîmira,quineftgueresloingdek  mer  Mediterra- P4^x 
née ,  Se  eft  entre  Egypte  &:  Syrie.  Nous  eftions  en  fort  defert  Se 
fabîon neux,mais  au  refte  moult  abondât  en  forcfls  de  Palmiers. 
Belba  effc  quafî  à  deux  journées  de  Salaria.  Les  murailles  font  de 
petite  cftorîc,au&  les  baftimens  qui  font  leas^c  font  guère  plus 
grands  que  petits  tects  à  loger  les  Veaux  :  &:  toutesfois  nous  y 
trouuafmes  maintes  fortes  de  viures  à  acheter.  Les  gens  de  ce 
pays  font  maigres,noirs ,  &  hallez  du  fbleil ,  qui  ne  s'afleent  pas 
ainfi  comme  les  Turcs  qui  saccropifient  aplat  de  terre ,  les  Ïam- 
bes en  croix,  à  la  manière  de  noz  coufturiers  :  mais  les  Arabes  fê 
tiennentacculcz  deuxis  la  poinerc  des  pieds,  faifans  queles  talos 
leurferuentdefîege:&ainfî  paflènt  les  iours  entiers  fans  felaf- 
fêr,non  plus  que  nous  faifons  eftas  affis  deffiis  vne  cfcabeîle.  Car  i 

l'ayans  accouftumé  de  ieunefïè,continuet  toute  leur  vic.Et  d'au- 
tant qu'ils  font  en  pays  fablonneux ,  s'ils  s'affeoyen  t  a  la  manière 
des  Turcs  en  pays  de  &blon,il  leur  feroit  fàfcheux  à  caufè  du  fa- 
ble^ gafteroyent  leurs  veftemens.  Les  Arabes  ,  Arméniens,  & 
Turcs  ont  pour  la  pîufpart  leurs  chemifès  teindes  en  bleu ,  6c  en  chamfis  Sa 
portent  rarement  âcs  blachcs  :  &  toutesfois  ils  ne  font  pas  moult Turcsiei** 
pouilleux  :  car  ils  vont  fouucnt  aux  eft«uucs  ouiis  Ce  baignent  & 
nettoyent.  Ces  Arabes  ne  dorment  point  que  fiir  la  terre  dure, 
n'ayans  que  âcs  nattes  de  rouleaux ,  ou  de  raeilles  de  Palmiers  à 
fècoucher,&nontrvfagcdeîinceux.  Ilyauoit  vne  Carauanne 
qui  alloit  en  Ierufalem3&:  nous  attendoit  près  vn  puiz  en  la  plai- 
ne à  deux  lieues  dudit  ehafteau  de  Belba  :  duquel  l'eau  eft  nitreu- 
iê  :  car  le  lieu  eft  aufli  nitreux ,  toutesfois  nous  en  beufmes  par 
faute  d'au tre.  La  Carauane  partit  à  minu  i&,  que  nous  laiïïàfines- 
aîler  dèuant ,  &  partifmcs  trois  heures  après  eux.  La  mer  Médi- 
terranée eftoit  à  main  gauche, que  coftoyafmes  long  temps.  Ne- 
ftre  chemin  eftoit  droiâ:  au  foleil  îcuant.  Nous  auançafmes  vn 
peu  noftre  chemin  pour  trouuer  îadietc  Carauanne  :  laquelle  ac^ 
compagnafmesiufquesau  foir  :  &campafmcsau  riuageioignac  f 
lamèr,ou  nousfeifmcs  peudefeiour  :&  àvnquartdelieuëdclà 
foffoyafmcs  entre  deux  petis  tertres  de  fablon  mouuant  à  dernier 
toife  de  profond^ou  nous  trouuafmes  de  l'eau  douce,  qui  fortoiE 


*$o6  SECOND     LIVRE     D*S    SIKGViA, 

trouble  &  blanche;  de  laquelle  nous  rernplifmes  noz  bouteilles 
&  oudres.  Nous  auions  les  montagnes  du  moût  •  Sinai  à  main 
.-     r   r     dextre,quenous  veoyons  bien  à  clair.  Ceux  qui  veulent  prendre 
Tapfia.      '  lcdroiâ:  chemin  pour  aller  du  Caire  en  Ierufalem ,  ne  pafïènt 
ubanotîdes.  pas  par  Belba  ne  Salarie:  mais  nous  l'eflongnafmcs  «cherchans 
Tamarifyues  la  commodité  du  Nil  &:  des  bons  villages.  Mais  ceux  qui  vont 
^foànon.  par  l'autre  chemin  portent  l'eau  ■&  les  viures  de  tout  le  voya- 
ge.   Nous  trou uafmes  de  l'Ambrofia,  Tapfia  5<3cscfpeces  de 
Libanotidcs ,  Tamarifqucs  ,  te  Apocinon  3  naifTanspar  les  cam- 
pagnes. ■> 

&u  ÏÏÎtrc&£vn  petit  Cancre  de  UpT.mmerueilleufecomplexionquc 
\nulle  autre  chofè  qui  fait  en  nature. 
£baju     ixxv.il. 


mtre. 


'  Yans  feiourne  tout  le  iour  derîbuz  noz  tentes/uy- 
l  uifmes  la  Carauanne,,  &  entrafmes  en  vn autre ca- 
\  pagne  qui nous-durafix  heures  dechemin.  A  iour 
ouuertsious  «defcendifmes  en  vne  campagne  plus 
w  'bafïb^outccouuerccdcNâtre^uepcnrionseftre 

du^l7^^yattCa*nûrc^rc  :  0U  *cs  Chenaux  &  Chameaux  im- 
sJù  &r       prinioyent  lesi*eftigcs  de  leurs  pieds  dedens.  Nous  ne  lénifions 
^  pasûtoft  cogneu  „  n'euAcfté  qu'en  auions  auparauant  veu  au 

Caire, qui  toucesfcss  n  eft  pas  Salpeûre  :  car  il  vient  naturelle- 
mentJequciil  rautcognoiftrc  aux  marques  que  luy  ont  baillé  le? 
anciens  au  Eheitrs  :  Ccft,qtfcn  le  brufiant  il  fait  beaucoup  de  cè- 
dre z Jasais le Saîpeftrc  eftant  bruâc  n'en  fait  point,  auffi\neft  il 
pasNitrc.  Cefte campagne  nous  dura  bien  demie  lieue.  Eftans 
tôufettes.    plus  aduancezjtrouuafmcsla  mer  ;  &cchcminafmes  long  temps 
diUm  de     le  loBgde  la  marinc,ou  nous  veoyons  grand  nombre  de  rouficc- 
mer,  tes  &  de  chiens  de  mer  qui  fe  repaifibyent  en  fc  pourmenant  au 

riuagc.  Nous  y  trouuafmes  vne particulière  efpcce  de  Cancrc,de 
nature  fôorcftrange,-  ccft  qu  au  plus  grand  chaud  de  i'efté ,  en- 
core que  k  Soleil  foit  en  &  plus  grande  chaleur ,  toutesfois  il 
ibrthors  delamer,& yenafigrande  multitude,  quelaterreea 
eftcouucrtc,  &fcvaefbatant  le  long  de  la  mer,  courant  parle 
iàble  à  trois  trai&s  darc ,  qui  n  eft  guercs  plus  gros  qu'vnc  petite 
diaftagneuourcsfois  U  court  fi  vifte,  qu  vn  homme  apeine  de  le 


OBSERVEES     P  A  BL    F.     BELONi  507 

fuyurc  :&qui  pluscft,  ayant  eftéle  iourau  fecàla  véhémente 
cWeur  du  Soleil,  ilfe  retire  la  nuid  en  la  mer.  Ariftote  l'appelle  c*ncercm° 
Cancer  curfor.  Il  eftlNm  des  animans  le  plus  admirable  que  nul  au-^' 
tre  qu'ayons  iaraais  veu.  Plusieurs  fe  font  trompez  de  le  mettre 
au  nombre  des  poifTonscetacces ,  le  nommans.  Dromon  ,  c  e&à 
dire  curfor  :  mais ,  comme  auons  dit ,  il  eft  de  petite  corpulence, 
&  duquel  auons  fuffifamment  baillé  la.  defeription  au  liqrc  des 
poifïbns.  Les  nu i&s  n'ont  efté  kobfcures  en  tou t  aoftrc  voyage* 
que  nous  n'ayons  peu  voirxequiefroûen  noftre  chemin.  Ce 
.vefpreeftans^quelquepeu  efeartez  delà  Carauanne ,,  va-  Sangiae 
qui  alloit  vcrslernfalcm,  contrefeit  vn  faux  alarme ,  faifant  fenv 
blanc  que  fufïbnt  les  Arabes.  Mais  'quand  nous-  cufmes  cogneu 
fa  tromperie ,  nous  n  en  monfrraûnes  grand  compte  :  car  les  ge- 
nifîàires  qulaccompagnoycnc  monucur  de  Fumet  5.  eftoyent: 
hommes  hardis  &  bienequippez.  Nous  çftios  partis  long  jemps  -      ; 
auant  iour ,  laiflâBs  le  nuage  delà  mer  Méditerranée  :  &  à  îous     ■"  "' . 
ouuert  la.  Carauanjue&  le  Sauiac  fc  repoferent  pour  obéir  à  qucL 
ques  Marannes  Iuirs  quieftoyent  à  Iatrouppe  ,  &  luy  auoyent 
donné  quelque  prefenr  pour,  tes  attendre»,  Lçs.di&s-  ayans.faiç 
plusL£ncment}prindreatadpa»çagele  Ycudrçdy^auipir  s  ôêgai- 
gnerent  quelque  peu  le  deuant  pour  {c  sepoier  :  car  ils  ont  de 
co.ufrumc  de  ne  travailler  le  iour  du  Samcdy .  Le  lendemain  qui 
elloix  le  Samcdy ,..  eilans.  bien  accompagnez ,  gaignafmcs  le  de- 
nant ,  &  vinfmcs  loger  en  vn  Carbaehara  muré  >, près dvn  grand 
yillagc,quieû:faiten£ormcde  chafteau.  Nous  achetafmcsdcs 
viures  aux  villages  :  &  commcnçafmes  ce  foir  à  trpuuer  la  terre 
graflè ,  Se  laiiïèr  les  Tablons.  Nous  y  trouuafmes  de  l'herbe  nom-  smirma»^ 
mec  Smyrnium ,  qui  y  croift  copieufement ,  &  au®  A  rabroua,  ^i^rofut: 
Algatertia,  Anchuia,  &  Ligufticunu  Depuis  le  Gaire  iufques  ^^^ 
en  ce  lieu  nous  ne  trouuafmes  point  d'autres  arbres  que  Pal-^^^, 
miers,  &  arbres  lanigères ,.  dont  les  pommes  font  plaine  4c  lair 
ac-delicc.»  dont  auo,nsdejGa  cy  deuant  parlé. 

■  ■■'■-  .:'..."'.:     .'    •       :QSi±3 


J°$ 


SECOND    LIVRE     DES     SÏNGVXÀ. 


Bdanusmy- 

repftca. 

Smyrmum. 


Sycomores. 


Ziï&enfm 
Chameaux 
4&Turfiie. 


Veplufieurs  arbrcsyoifeauxi&  autres  chofesfineuUcresgrodmSics  en  U, 
terre de Palefime.  Chapitre      lxxviii. 

S  t  a  n  s  encor  deflfus  le  couftau  ,auant  arriucr  au  Car- 
bakhara,  trou  uafmcs  l'arbre  nommé  Balanus  myrc- 
pfica:  lequel  au  regard  de  ceux  d'Arabie,  eft  moule 
grandjfcmblanrà  vn  Bouîeau,autremcnt  nommé  Be~ 
r:ula  :  près  duquel  y  auoit  grande  quantité  de  Smyrnium,  dont  la 
jfèmencecft  ronde  comme  Coriandre,  &  moult  odoriférante. 
Approchans  du  Carba{chara,veoyons  quelques  arbres  verdoyas 
d'aflèz  loing^ui  nous  mîréten  doute,  àiçauoir  quclz  arbres  c'e- 
ftoyent:&:  coniîderans  qu'ils  auoyent  leurs  branches  à  la  fummi- 
té^en  manière  d,vnt>ouquet,&  lerronc  gros,  faifàns  bel  vmbra- 
gç ,  te  ayans  les  fueillcs  afîernblecs  bien  près  bvne  de  l'autre ,  co* 
gneufuaes  quec'eftoyent  des  Sycomores,qui  eftoyent  mis  par  or- 
arc  parla  campagnc,tout  ainfi  comme  font difpofez  noz  noyers. 
Aufli  y  auoit  des  arbres  que  les  Grecs  ont  nommé  Oenoplia ,  les 
autres  Napeca,  qui  eftoyent  autour;du  puiz  du  Carbafehara.  Ce 
Carbafehara cft  la  borne  êc  premier  commen  cernent  delà  terre 
fetilc4e  Paleftinc.  La  plus  grande  partie  des  portes  des  Carbaf- 
charas  d'Egypte  &  Syrie  font  communément  de  fer,&  ont  leans 
vnccourt,au  milieu  de  laquelle  il  y  a  vne  plattc  forme ,  furquoy 
les  paffans  fè  campent  :  &  tout  autour  des  murailles  y  a  des  por- 
ches par  le  dcdcm,pour fè  retirer  la  nuict  quand  il  pleut,  &  auffi. 
le  iour  quand  il  fait  grand  chaud.  Nous  parTafmcs  toute  la  nui& 
enfermezen  ce  Carbafchara,ou  nous  feifmes  le  guet, pour  le  fou- 
fpeçondes  larrons  Arabes  :  car  on  nous  auoit  rapporté  qu'ils  n'e- 
ftoyentgueresloing  delà.  LaCarauanne  qui  eftoit  demeurée 
derrière,  chemina  toute  nuict,  &  nous deuançaauant  iour:  la- 
quelle nous  peufmes  ouyrde  bien  loing  :  parquoy  nous  ap- 
preftafrnes  incontinent  pour  deflogerauecellc.  Les  Seigneurs 
de  Turquie  vont  aum*  bien  en  îicticre  comme  en  Europe  :  mais 
au  lied  gpcjàms  auons  des  Mulets  ils  fe  feruent  de  Cha- 
meaux. La  coufturne  eft  que  quand  quelque  Sangiac  ou  au-i 
tre  Carauannc  de  plus  grand'  bende  chemine  par  ces  pays  là, 
qu'il  y  ait  vne  gtofTc  cloche  pendue  au  col  d'vn  Chameau}qu'on 
oicdebienloing,pour  aduertir  toute  la  trouppade  s'emrefuyure. 


OBs'EÎLVEES      FAR  ».     SELON,  $©£ 

Eftas  entre  la  ville  de  Gazara,qui  cfl  la  première  ville  qu'on  tr«u« 
ueau  pays  d*£gyptc,&  Bclba,  trouuafmcs  des  campagnes  en  fri-    „ 
chc,ou  il  y  afigrand'  quatité  de  rats &  mulots ,  que  û  n?eftoit  que  p^"  /ww 
nature  y  enuoye  moult  grand*  quantité  des  oifeaux  qu'Àriftote  ^^X. 
nomme  Percnopteri,&  les  François  Boudrees ,  pour  les  deftrui- 
redes'habitans  ne  pourroyent  femer  aucun  grain  qui  ne  fuft  ma- 
ge. Il  y  croift  des  Squilies,Thapfia  y  Ferula,  Polium,  Haftuk  rc-  liq/U. 
gia.Nous  paflàfmes  par  campagnes  bien  cukiuees  de  bled,  legu-  Fertt^- 
mes,&  arbres  rrui&icrsXcshay  es  qui  fèparer  les  terres,  font  fai-      f*£ 
tes  de  Rhamnus  &:  Haîy  mus ,  fur  lefquellcs  auons  veu  voler  de  ^*fu  n* 
telz  oifeaux  que  ceux  qu  apellôs  Pies  griefehes ,  qui  mangent  ^fCmnu^ 
fouriz, corne  les  Crécerelles.  Auflî  veoyons  voler  plufîeurs  Vau-  sdymus. 
tourSj&autrcs  oifeaux  de  charongne  ,  telz  qu'auons  cy  deuant  r'iesgrief- 
nommé  Sacres  d'Egypte,  &: en  Latin  Àccipitres  iEgyptij.Qucl- <&*> 
qués  vnsde  noftre  compagnie  les  npmoyent  Pélicans,  les  voyas  ^aMt0U^s- 
femblables  à  ceux  qu'on  met  en  peinture ,  baillansdc  leur  fang  à  Sacres 
îeurspetitz.  Mais  pourecque  ce  mot  Pélican  nousatrauailléà'^^ 
enquérir  quel  oifèau  c'en:  f  auons  bien  voulu  faire  entendre  que  onocrotdus. 
eeluy  qu'on  doitprendre  pour  Pelica,eft  celuy  qu'on  eferit  auoir  phinis. 
deux  cftomacs,autremcnt  nommé  Onocrotalus,pout  lequel  Al-  ofifrdgus. 
bertaefté  trompé ,  1  ayant  prins  pour  Oflifragus  :  car  Oflifragus: 
cft  celuy  que  îesGrecs  nomment  Phinis:qui  a  donné  argument  à 
beaucoup  de  gents  de  parler  du  Phénix ,  qui  tourcsfois  cft  difFe- 
ret  à  celuy  que  lcs-Latins  ontnommé  OfHfragus,icquel  on  peine 
dcfTus^nnidjdefchirantiâ  poitrine  pour  repaiftre  fês  petits  co- 
rne il  appert  en  l'hiftoire  qu'Ariftote  a  deferite  de  fbn  Phinis ,  êc 
Pline  depuis  dcfcriuatrOffifragus  luy  a  attribué  toutes  les  mer- 
quesqu  Ariftotca  fait  au  Phinis,  qui  cft  plus  grand  qu'vn  Aigle,  ^%^ 
&  qui  en  cft  du  prochain  genre  ,  ayant  l'ongle  crochu  ;  duquel  la 
pafturc  cft  de  chair.    Sa  couleur  eft  decendree  en  blancheur ,  $c 
ne  voit  pasbïen  clair.  Il  fait  fon  nid  &  vit  rcligieufèment:&:  eftac 
de  bénigne  naturc,&:  de  prouifion  ,  nourrift  les  petits  de  l'Aigle  > 

quand  clk  lésa  deîaiftezjles  rcceuant,&  les  noumftknt  foigneu- 
fcw^catySc  les  gardant  chèrement,  iufques  à  tant  qu'ilz  fbyent  a£- 
fèz  grafndsvLcs  Frânçoi^cognoifîènt  vn  oifèau,  qu'iîz  nomment 
du  nom  conuenant au  Phinis,  qu'auons  dit  cftte  nomme  en  La- 
râOCifragus,rappcllansyne-OiT%ye  :  ^toutesfois  l'Om-aye  Qfra^ 
n-eii|>as. celuy qui dok  c4tenkc6nona4à';«arc,cftilquianom 


3$0-  SECOND"    LIVRE     DE*     SI  K  GTE  Av. 

Halietus  ,vmiseniacinquiefme  efpece  encre  les  Aigles.  Oh  îe- 
void  communément  fur  lesriuieres  &cftang$,prenatlcpoinonv; 
fè  laifïant  tomber  de  lair  de  grande  roideur  comme  vue  pierre:&: 
en  fendant  leau  fe  paift  du  poifîbn  qu'il  prend.Lcquelcombien 
qu'il  tienne  ce  nom,  François  d'Cnraye  »nc  doit  eftre  nomme 
Qififragus.  Nous  cheminafmcs  quatre  heures  par  plaines  cam- 
pagnes fans  arbres.  A,  la.  fin  arriuafmes  à  Gazaro ,  qui  eft  la  pre-, 
Hiierc  ville  qu'on  trouueentrant.en  Iudeeid:  campafmes  defîbus> 
wî  Palmier.,  en  vil  iardin^courtoignant la  viïïe.. 

EtU-mUede  Gazayo..  Chapitre txxrx. 

*  Azaro  n  eftpas  murce.  Il  y  a  vn  Chafteau  quarré 

l  fait  à^'antique ,  eueué:defi%s  vn  couûau ,  qui  n'eft 

|guerefort,çra  il  y  adefiegç  d  vn  Sangiac.  EUciG&fU 

:  tuec  en  lieu  fertile  de  Figuiers, 01iuieFs>Iuiubîers> 

s  pom  micrsîgrenadiers,&:  vignes.  Il  y  a  quelques  pak 

miers ,  mais  leurs  fruichfe  meuriflènt.  mouktard  :  car  le  climat 

n  eft  affez  chaud v  Byauoit  défia,  trois  mois  pafTez  qne  les  pal* 

miers  dr£gyp£c&  d'Arabie  auoyent  meury  leurs  dafteSj&tou^ 

tesfois  iîz.eitoy  et  en  cor  verds  à  Gazaro.  11  y  avne  manière  de  Le? 

sttttm^.    z&tàz  noirs  nommez  Scellions ,  quaû  aufligros  qu'eft  vnepetite 

Ikletté.  J^ejur  ventre  fort  enfié»&  la*efte  grofle  ^dcfquelz  le  pays 

de  Iudee^  Syrie  eft  béen  garny  .^Nous  y  veifmcs  auûSvn  oifeau^ 

qui,  à^nodre  aduiSjpafle  tous  autres  en  plaifànt  chant  ramage  ;  Se 

rtnatkor      croyons  qu'il  a  efté  nomme  par  les  anciens  Venxtica  auvs.  Il  eft  vn 

«**.  peu  plus  gros  qu Vn  eftourneau .  -Son  plumage  eft  blanc  par  defc 

Molli&f^    f  buz  je  ventre,&  eft  cendré  dcftiis  le  dos  comme  ceiuy  de  l'oifcau 

nommé  Molliceps ,  qu'on  appelle  en  François  vn  Gros  bec.  La 

queue  noire ,  qui  luy  pafte  les  asl-les,commc  àvnc  Pic.  Il  vole  à  la 

façon  d'vn  Piuerd.  Nous  trouuafmcs  toutes  fortes  de  viurcsà 

Gt&ro.      acheter  au  marché  de  Gazaro ,.  comme  pain,  vin,  poulk^ceufz* 

Les  Grecz  Turcs  &.  Arabes  qui  habitent  à  Gazaro^fqntfort  dili-r 

gens à-cultiuer  leurs  vignes.  Nousfeiournafmes  campez  iufque^s 

au  fbir ,  te  partifmes  bien  tard ,  &  cheminafmcs  toute  nui&  vers 

Kama  par  belles  campagnes.  A  iou  t  puuert  vifraes  des  villages  fi\  " 

tuez  fur  les  cauftanx  lcïongdes  campagnes  cultiuecs  de  toutes 

fg£tes  4p  grainsvrNcrus  vcoy  ong  ^qlej:-  des  Q nocrotalçs  en  gran* 


•O^BSiEîlVEES    PAU     F.   B2LON.  $ïf  ■ 

•  Ses  baticles  vers  la  mer ,  Se  auflî  allions  droid  au  Septentrion, 
#yans  le  dos  tourne  au  Midy.  Et  pource  que  le  venc  de  Siroc 
fruifloit  bien  -fore ,  nous  oyons  les  flots  de  la  mer  braire  :  car 
aous  n'en  eftions  pasfort  loing.   Les  arbres  d'Oenoplia  ou  Na-  0mofa. 
peca  y  font  de  la  grandeur  de  noz  Poiriers ,  ayans  le  fruid  gros 
^comme  vne-pomme  fauuage  :  qui  luy  reflemblede  fibres  que  Ion 
prendrait  4*  vn  .pour  Fautrc.   Aulfi  eft  il  doux  auec  vnc  aigreur 
amiable-,  ayant  vn  petit  noyau  au  dedans  v gros  comme  ecluy 
dvncOiiuc.   C'eft  arbre  <eft  fréquent  en  Egypte, Syrie  èc  Ar- 
ménie, &  tourcsfois  il  n'y  en  apoint  en  Grèce ,  ne  auflî  par  tou- 
te Europe.;  Il  eft  vexd  en  toutes  faifons  :  parquoy  1e  portrait  fe- 
ra mis  au  Hure  des  arbres  toufiours  verds.   N  ous  trouuafmcs  en  cannes  de 
chemin  vnc  campagnc-cuîtiuce  de  Cannes  de  fuccre  &  Coloczf- fiare. 
£c ,  arroufee  de  l'eau  qu'on  tire  d'vn  puiz.  De  là  arriuafmcs  à  Ra-  Co^4^- 
ma^o  u  nous  demeurafmes  tout  le  iour. 

DelaviUedeRama.  Chapitre    LXXX. 

Àma  a  anciennement  elle  vnc  grande  ville ,  com-  j^ma,  ' 
me  il  appert  par  fes-tu4'nes:car  les  Cifternes  &  voû- 
tes qu  on  y  voit ,  font  plusgrandçs  que  celles  d'À- 
lexandrie,mais  non  pas  en  5  grand  nombre.  La  fi*- 
_  _  *  tuation  de  Rama  eft  en  terre  graffe  &  féconde  :  Se 
pou^  autant  quelle  eft  deferte ,  &:  qu  a  peine  y  a  douze  maifons 
habitées ,  les  champs|>ouc  laplufpart  demeurent  en  frichcGra- 
dc  pattiedes  habkans  font  Grecs.  Lon  cukiue  du  fourment  y  de 
lorge ,  des  légumes ,  Se  vn  peu  de  vignes.  Nous  trou uafmcs  de 
laxhair ,  pain ,  vin ,  Se  autres  vîmes  à  acheter.  La  féconde  cfpc-    .     .      ^ 
ce  d'Acacia  y  croift  en  abondances  Se  auflî  vn  atbriûeau  cfpi-^  4CU    £* 
aeux  que  croyons  nauoir  efte  deferit  des  anciens  ,  tcmtcsfois^^^ 
auons  eu  foupeon  qu'il  fut  arbre  de  Mïrrhe.  Il  eft  tortu ,  efpais^ 
munideipines  poignantes, duquel  les  fùeilles  font  fêmblablcs. 
à  l'Acacia,  mais  quelque  peu  plus  grandes.  Partans  de  Rama, 
auant,  qu'il  fuft  iour ,  cheminafxnes  par  grandes  campagnes  do 
ferre  graffe:  en  laquelle  Ion  ppurrok bien cultjucr quelque  bon 
grain.  Mais  les  habitans.  du  pays  parcûeux  de  leur  profid  n'y  la- 
bourent ûnon  par  manière  d'acquit.  IUoramençoit  defkàeftrc 


$12.       ^  SECOND     LIVRE    DÈS    SÏNfcV£:À. 

l'aube  quand  cntrafmesen  la  vallée  entre  les  montagnerde  le* 
rufolem.Et quand  nous  fufmcs  quelque  peu  auancez  lcans ,  ay as 
les  montagnes  fort  precipiteu Ces  de  cofte  &  d'autre ,  trouuafmcs 
quelques  Arabes  defcendansdeça&:  delà  ,  qui  faifbyent  grand 
bruit  fur  les  couftaux,lefquelz  fi  toft  qu'ils  nous  apperçeurêt^dcf 
cendirent  pour  nous  demander  argent,faignans  nous  vouloir  a£ 
faillir  parforccimais  nous,qui  auions  efté  aduertis  quetelle  que- 
.  naillc  rançonnent  les  paffans  efhrangers ,  quand  ilz  font  lesplus 

Crabes  de*  fortSn>cn  fcjfmcs  pas  grand  eftimc.Eux,qui  pour  leur  couuertu- 
pafùi  '  rcfaignent  eftre pour  la  garde  du  pays  du  grand  f  eigneur ,  turent 
contentez  d'vne  petite  fomme  d'argent.  Aufïi  n'eufïènt  ilz  ofé 
vfer  de  force  :  car  outre  la  trouppe  qui  fuyuoit  monfieur  de  Fu- 
met, il  auoit  aufïi  dix  Geniffaircs  de  renfort  qu'il  auoit  pris  à  Ga» 
zan^que  le  Sangiac  luy  auoit  baillez.  Aufïi  ont  ilz  bien  ccfteaftu- 
ce  que  lors  que  les  pèlerins  font  en  trouppe  pour  leur  pouuoir  re- 
fifter,  ilz  ne  les  afïàillent  iarhais. 

D elerujàtem, qui efl fitué entre montagnes*    Chapitre    lxxxi. 

Es  montagnes  font  fi  abondantes  en  toutesefpeces 
d  arbres  &  herbes fauuages  &  aromatiques,  qu  on  les 
sàdtCrete.  IÇS^^J  peut  comparer  au  mont  Ida  de  Crète  ,xommc  aufïi 
T  -£  8ÈIËIIÊI cn  tempérance^  autre  habitude.  La  terre  cultiuec 

twCmT^.    Par^cn*ls  te  rochers ,  cft  faite  en  manière  d'efchelons,  qui  mon- 
*        ftre  la  diligence  des  ïuifs  du  temps  paffé  en  accou  ftrant  les  ter- 
res :  qui  rendoyent  leur  territoire, lequel  de  foy  eft  pierreux  &  in- 
i>i&genfe     fertile,cultiué  $c  abondant  en  fruiârs.  La  mefmc  diligéee  de  cul- 
des  anciens   tiuer  les  montagnes  pierreufes,  eft  aufïi  veue"  au  pays  de  Grèce  es 
&***'        ifîes  de  la  mer  Egcc,entre  îcfquelles  en  auons  veu  plufieurs  main- 
tenant deshabitees ,  ou  à  peine  pcuucnt  eftre  nourris  cent  ho m- 
mes,quiennourrifToyentlctemps  paffe  plus  defix  mille,  com- 
me il  appert  par  les  collines  &  petites  montagnes ,  qui  autresfois 
onteftémafïbnncesdcgrofTc  eftoffcàefchelons  pour  retenir  la 
zU.  terre  qui  pendoit  contre  bas  ,  pour  rairc  naiftre  les  plantes.  Les 

Milos.         iilcs,de  Zia,Miïos,  Andros,Naxia,Paros ,  &  plufieurs  autres  ont 
^Cndras'      par  ce  moyen  efté  tellement  accouftrees  des  anciens  GrecSjqu'ils 
^**        les  rendoyent  plus  fertiles  que  la  terre  d'vne  plaine  campagne. 
Scmblabiemendes  Iuifs  ayans  leur  territoire  fterile ,  mal  à  pro- 
pos 


OBSERVEES    PAR    P.    BELON.  3T5 

éos  à  porter  vignes  Se  fruits ,  auoyent  rendu  les  collines  fertiles  ^n&raeh 
par^rand  labeur,dont  iouuragc  de  la  mâfTonneric  dure  depuis  le  nes- „ 
temps  qu'iîz  eftoyen t  feigneurs abfoluz  de  Ierufalem ,  qui  mon-  Tk"s' 
ftrelagrande  diligence  &  dcfpencc  ,  &:  fe  refent  quelque  chofe  cyfneyerd 
de  fa  grandeur  ancienne.  Les  arbres  que  nous  auons  recognu  Tereh'mthesl 
nâiffans  faunages  par  les  montagnes  en  ce  territoire,  font  An-  lentifyues. 
drachnes,  Piçees,Aria,Chemes  verds.Terebi^thes,  Lentifques.  cifius. 
Les  lier beseftoycntCiftus^edon^ymbrajSmilaxafpera,  Ma-  Leion. 
ronjOriganumheracleoticUjTragoriganum,  Saugers  ,  Stachis,  Cot1^0^ 
Rue  fauuage,  Afphaki  tes  trifolium,  Cycîaminus,  Vmbilicus  feu  ^J™" 
CotyîedonjThymus.  Lon  trouue  aufïi  de  l'hy  flbpe  fauuage",  dtf-  J^Z' 
ferente  à  la  n  offre  du  iardin,  de  laquelle  toutesfois  lon  n  en  trou-  smilax  afi 
ue  aucunement  en  Crcte.La  partie  des  fufdi&es  montagnes  qui  jera. 
regarde  l'occident ,  eft  trefopuîete  en  vignes,  en  arbres  fruiâiers,  Maron. 
Oliuiers  Se  figuiers,  &  grenadiers ,  au  regard  des  autres  qui  ne  onganum. 
portent  que  les  arbres  fteriles.  xerxcleo* 


Briefue commutation  au  chemin  ientrele  Caire  &  Jcrufidem.  nu~ 

Chapitre     lxxxii.  saugt 


tieum. 

■ort£4 


-en. 
Stachis. 


L  eft  manifefte  parla  computation  qu'auons  faite  fur  %uefAuua* 
le  chemin  ,  qu'il  n'y  a  que  neuf  iournees  du  Caire  en  ge; 
Ierufaîem,ou  dix  pour  le  pius.Vray  eft  que  nous  auiôs  Cîf!Mnî* 
_ww_  ^z  a^cz  b°nnc  diligence  de  cheminer.   Car  nous  mm' 
eftions  partis  du  Caire  le  famedy  vingt  Se  ncufiefme  d'O&obre,  computâûl 
&;arriuafmescn  Icrufaiemle  mardy  hui&iefme  de  Nouembre.  du  chemin 
Apres  que  nous  fufmesfur  les  montagnes  t  &eufmes  chemine  du  Caire  m 
quatre  lieues  ,  trouuafmes  vne  fontaine  aux  pieds  des  ruines  forufiltm. 
<l*vne  Eglifè,qui  auoit  autresfois  efté  vn  monaftere:commc  &ap- 
pertparlespein&urcs  ,  &  croyons  quelle  eftoit  des Chrcftiens 
Latins,ou  il  y  a  encor  quelque  apparence  de  clofture.  Nous  di- 
nafmes  ià,&  puis  après  allafmes  coucher  en  Ierufàlem.  Les  pèle- 
rins qui  yarriuent  fe  vont  loger  félon  la  religion  qu'ilzfuyuet:  çeUgieux: 
Car  f  ilz  font  de  FEglifè  Romaine ,  que  ceux  de  ce  pays  là  appel-  ^m. 
lent  cftrc  Latins,ilz  logent  au  monaftere  des  Cordcîiers ,  qui  eft  $$gieux: 
hors  de  la  ville^affis  deflus  le  mont  Sion  :  mais  f  ilz  font  de  la  rcli-  J^ 
gionGreque,  ilz  logent  auec  les  Calojercs'Grecs  ,  qui  ont  leur  %£!^* 
logis dcdâsk  ville prcsdafepulchre.  Etfikfoût du  pays (kPre* 

RR 


P4  SECOND     LIVRE     DES      SIXCVLaI 

-  ,-'  ftrelehan,  iiziogcntaucc  les  religieux  Indois.  Tout  ainfîfaut 

-dire  des  autres  nations  Chrétiennes,  comme  Géorgiens ,  Se  Ar- 
iBeniens.Les  Cordeliers  font  communément  trente  ou  quaran- 
te dedans  le  monafterc  :  entre  lefquelz  Ion  en  trouue  de  pîufîcurs 
nationsrtoutesfois  la  plus  grand  part  eft  Italienne.  Hz  côduifent 
les  pèlerins  par  tous  les  lieux  fain&sdu  territoire  entourlerufa- 
Droguement  lem.  Aufïi  tiennent  ordinairement  vn  interprète  à  leurs  dcfpens, 
des  felerim   ]CqUe|  ilz  nomment  droguement ,  qui  icait  parler  Turc,  Arabe, 
eoj£r.tjaleœ.  Qrçc^  IcaliemS:  autres  pour  parler  aux  gens  du  pays,&  refpon- 
dre  pour  les pelerins,&:  les  conduire  par  tous  les  lieux  fain&s.Les 
Cordeliers  font  la'garde  toutes  les  nui&z  en  leur  monaftere,ayas 
chacun  fon  heure  déterminée,  fe  tçnans  deftus  les  murs ,  pource 
que  lemonafterc  eft  hors  la  ville.  La  peur  qu  ilz  ont  du  larrecin 
~*  .  des  Arabes ,  eft  grande  :  Car  en  cor  que  leu  rs  mu  railles  lo  nt  bien 
hautes ,  û*  eft-cequ  ilz  ont  peur  que  les  habitans  du  plat  pays  ne 
lcsaïTaillent. 


XuccmHe  defeription  desjâin£is  lieux  de  lerufdem. 
Chapitre     lxxxiii. 

E  territoire  de  lerufalcm  eft  aftez  bien  cultiué ,  Se 
'  principalement  autour  de  la  ville.  Hz  font  leurs  vi- 
gnes auec  diligence.  Il  y  croift  des  p5miers,aman- 
diers, figuiers,  Se  oliuiers  5  defquelz  ilzrecuillcnc 
oUmers  de  S^^M^L^^  beaucoup  d'huyle.  Mais  les  Oliuiers  ont  vnepar- 
imtpdem.  riculiereenfêigne,qui  lesfaireftre  dirferens  auxautres  :  c  eft,que 
Guisdoli*  nz portent  le  guis,chargc  de  femences  rouges,  au  grand  domma- 
mer-  ge  des  habitans  ;  car  il  les  rend  fteriles.    L'or  Se  l'argent  que  les 

Gordeliers  de  lerafàlem  <iefpendent ,  leur  eft  enuoy  é  de  toutes 
partz  du  pays  des  Latins  :  car  ilz  ont  leurs  aumofnes  affignees  en 
diuerfes  contrées  dJEurope,qui  font  recueillies  par  les  Gardiens 
de  l'ordre::  Se  en  ont  principalement  en  Cyprc,France,  Se  Italie. 
Ilz  nous  ont  dicfcqu'ilz  fbuloyenten  aupiren  Alemagne5&  An- 
glererre^mais^uilz n'en  reçoiucnt  plus  rien.  Il  n'y  a  autre  religio 
en  Ierufalem  du  party  <les  Latins  que  les  fufdi&z  Cordeliers.  Le 
jjeuxfrniïs  ^n^crïiam  matin  au  poincl:  du  iour  quelque  nombre  de  Corde- 
iôrsieriifdle,  hers  nouscoduiùrent  viilter  les  lieux  fainas  autour  dclerufale, 
Se  commençafmcs  comme  {'enfuit.  La  première  chofe  qui  nous 


O'FS  E  KV  S  £  S  '    P'A  8.     P»     B'E  I  ON.  315 

fut  monftree  fortas  du  monaftere  s  foc  le  lieu  ou  noftre  Seigneur 
fcith  Cène  auec  Tes  difei pies: mais  les  Turcs  rauoycnc  vfurpc  fui: 
tes  Cordeliers ,  &;  en  ont  fait  Mofquce  dediee  à  Mahomet ,  qui 
eft'tout  joignant  le  monaftcrc  âcs  Cordeliers.  Mais  mon/leur 
d'Aramont  le  leur  a  depuis  fait  rendre.  Quad  nous  fufmes  quel- 
que peu  éloignez  du  monaftere,iIz  nous  monftrercntlelieu  oti 
les  bras  des  I'uifz  qui  vouloyent  empefeher  les  difciplcs -d'empor- 
ter le  corps  de  noftre  Darae,dcmeurcrent  retirez:  qui  eftioignat 
h  porte  de  la  ville.  Plus  outre  fuyuanc  la  muraille  de  la  ville,  vif-  r*iï*J*io* 
mes  le  Heu  ou  pleura  Saine*  Pierre  quand  il  eut  nié  noikc  Scï-W    j  , 
gneur,pres  la  vallée  àc  Iofaphat.  Suy  uant  Jadictc  mu  raille ,  eft  le  4wk 
temple  des  vicrges/itué  à  vn  coing  de  la  ville}qu  i  eft.  maintenant  Ti^e'Angu»- 
Mofquce  des  Turcs^Quelquc  peu  au  deflbuz  en  la  mefme  encoi-  1ère. 
gneureeftvne  pierre  triangulaire  ,  qu'ilzdient  eftre  celle  delà-  Torrent  de 
quelle  i'eferiture  fain&e  afait  mention  au  VCczurnciLapidemouem  Ce^ron- 
reprobauer&ntxdïficantcs.Dc  là  defeen  das  en  .la  vatfee  de  Iofaphat,  LUn^es^c 
pafïàfmcs  le  torrent  de  Cedron  ,qui  n'eft  qu'à  vn  ie&  de  pierre  no^reJei*' 
de  la  ville.  Il  n'y  a  point  d'eau  finon  quâdilaplcur&yavnepicr-    ^'* 
rCjOtî  fontengrauez.les  pas  que  feit  noftre  Seigneur  tombant  du  sepulchrcs 
pont.ïoignant  lequel -y  a-deux  fcpuîchrcs,  qui  font  entaillez  de-  magmffte* 
dans  le  toc ,  faits  en  Pyramide  Plukeurs  penfent  que  ce  foyenc 
les  fepulchres  de  Hicremie  &Efaye.-Suyuans  la  colline^  allans 
contremont,veifmes  le  lieu  ou  eftoit  l'arbre  auquel  lu das  fe  pen- 
dit. Quand  nous  cufmcs  entouraé  la  colline  iufqaesàperdrela 
ville  de  veuëmous  vifme&vne  chapelle  par  terre  qu'on  did  auoic 
eftéla  maifon  de  IaMagdelainerioignant  laquelle  trouuaimesla 
pierre  fur  laquelle  eftoit  afïïs  noftre  Seigneur  quand  elle,  luypar^ 
la  de  refufeiter  le  Lazare  :  ce  lieu  n  eft  pas  àvn  quart  de  lieu  ài~ 
fiant  de  îerufalemjvlarchans  plus  outre  trouuafmes  vn  petit. vil- 
lage ou  eft  le  fepulchredu  Lazare  que  noftre  Seigneur  refufeita:  s¥*khre  ^ 
ëc  pour  le  voit,  il  fallut  defeendre  en  vae  voûte  grande  .corne  vne  ^*^e" 
chambre ,  fabriquée  de  bonne  matTonnede  :  dedans  laquelle  cft 
vue  tumbe  à  la  hauteur  d'vn  autel  5  cm  les  pèlerins  fou  ueot  font 
dire îameiTe.  Sortant hors}& retournant  vcrslçrufakn^ciblen- 
droiclou  eftoit  le  Sycomore  que  noftre  Seigneur  maadift.  Cefte  $*°»ore 
eft  la  partie  qui  cft  nommée  Bethanie.  Montans  contrcmôc  vers 'maif*t: 
le  territoire  nommé  Bethphagé,  qui  cft  pays  boftu  &  pierreux,  f^TT^} 
$xiSmG$  lecbemifl  àmain  dcxire.,  qui  tire  fut  Ic-mont  Oiiuet  :  ôc  "^  "^ 

RPv.ii 


$l£     '  SECOND     LIVRE      DES     SINGVLAÎ 

ainfïfuyuans  les  fûmmitez  des  tcrres,veoyons  les  confins  de  bie^ 
loingjd  autant  que  nous  cflions  au  plus  haut  lieu  qui  foit  entour 
Ieaifalcm.  Nous  aliafmes  par  le  lieu  ou  noftrc  Seigneur  pafïà 
"""  quand  il  feit  fon  entreeen  Ierufalem ,  &:  la  ou  il  monta  fur  lafne 
qu'il  feit  deflier  pour  luy  eflre  amenéauec  fon  pouîain.Eftans  en 
ce  haut  licu,&  nous  retournans  vers  la  partie  du  Midy ,  vcoyons 
la  plaine  de  Iericho  ,  &aufïi  la  mer  morte  autrement  nommée 

Mdreytp  ^are  Afphaltites,  en  laquelle  Sbdome  &  Gomorrc abyfmerent. 

fba  mes.  £^r  ja  mcfmc  montagne ,  nous  retournans  à  gauche,  les  Corde- 
liers  nous  moftrerent  le  lieu  ou  les  disciples  feirent  plufîcurs  cho- 
fcs.  Eftans  deffus  la  fufdi&e  colline  dXDliuct  5  veoyons  Ierufalem 
bien  àcler ,  d'autant  que  nous  cftionsen  lieu  fitué  plus  haut  que 
k  ville.  De  là  pafTafmes  par  le  lieu  ou  noftre  Seigneur  di&,  Va  tibi 
Ierufalem* 

&      *  Vu  /épukbre  noftrc  ~Damey  en  la  vallée  de  lofaphat. 

■    Chapitre     lxxxiiii. 

SSW^^  L  y  a  vne  chapelle  au  haut  du  mont  Oliuec ,  "que  hs 

/^gw<fo..5Hgj  gpï  Chreftiens  ont  fabriquée  t  dedans  laquelle  Ion  vois 

ftedsdeno*  §s|n  ^gsj  l'vn  des  veftiges  des  pas  qu'imprima  Tvn  des  pieds  de 

Jbreseigneur,  'gffi^jgg  noftre  Seigneur  quand  il  monta  aux  cieux:car  l'autre 

a  efté  tranfporté ,  qu'on  dit  eftre  maintenant  au  pays  des  latins. 

Il  y  a  vne  autre  petit  tertre  de  hauteur  égale  ,  ou  il  y  a  vncautre 

chapelle,qui  tumbe  parterre  cntuine.Reprcnans  noftre  chemin 

M0tôlîuet.:  vers  Ieru{àlem,dcfcendans  parle  pied  du  mont  OHuct,nous  paf- 

s.Efiienne    fafmcs  par  vn  fèntier  ou  S.  Paul  eftoit,  lors  qu'o  lapidoit  S.  Eftie- 

%^'        ne.  Defccndans plus  bas ,  nous  veifmcs  les  trois  pierres  furquoy 

les  difcipîcs  cftoyent  dormans,  quand  noftre  Seigneur  prioit. 

Item  ou  noftre  Seigneur  fut  pris,&  ou  S.Pierre  couppa  Taurcil- 
le  à  Malchus.  Toutes  ces  places  qu  auons  nommées  ne  font  qu'à 
deux  ou  trois  traiûz  darc  l'vne  de  1  autrc.RepâfTans  par  le  p5t  du 
Torrent  de    Torrêt  de  Ccdro,quenous  auiôs  ja  pafTé  en  allant,  veifmcs  le  lieu 
Ceèron.       en  la  vallée  de  Iofàphat,  ou  Ion  dit  que  noftrc  Seigneur  fua  fang 
yafcede  lo*  &  eau :OU  jon  a fajC  vnc  chapelle.  A  cofté  de  laquelle eft  la  fepul- 
emdchr  de  turcc^c  no&vc  Dame,  &de  Sain&e  Anne,  Ce  fepulchre  eft  en 
ncêrenamt.  vne  voûte  dciîous  terre,  qui  eft  faite  de  greffes  pierres  de  tail- 
le, fouftenue de groûes  colonnes  de  pierres.  Les  degrez  paur 


OBSEUVIES      fAH     P.    BELON.  $VJ 

âcCccnâtc  là  bas  ,  font  bien  larges  :  car  la  chappcllc  eft  fous 
terre.  L'on  penfe  que  fàinâe  Heleinc  merc  de  Conftantin  la  feie 
fairc,cnfèmblc  la  muraille  qui  entourne  le  faind  fèpulchrcNous 
fbrrifmcs  hors  la  vallée  de  Iofàphat ,  prenans  noftrc  chemin  vers 
la  porte  dorée,  auquel  lieu  on  nous  monftra Tendroici  ou  les  Ro- 
mains rompirent  la  muraillc>quand  ils  prindrent  Ierufalem^ors 
que  Titus  &  Vefpaflcn  l'afïiegerenr.  La  porte  par. ou  noftrc  Sci~  Porte  dora. 
gneurentraenlerufalcm,  eft  la  porte  dorec,  par  laquelle  nous 
n!entra{mes  pas ,  car  elle  n'eftoit  ou  uerte  :  mais  coftoyafmes  la 
murailleiufqucsaumontde  Sion.  Nous  fcùmesle  fufHit  voya- 
ge auantdifher:  carie  chemin  n'eftoit  gueres  long,  Lerefte  du 
iour  fut  dédié  à  aller  voir  les  prochains  lieux  alentour  du  mona- 
ftere,  comme  eft  vn  lieu  ou  il  y  a  des  permis ,  ou  les  corps  qui  y 
font  mis^fbnt  côfommez  en  vingt  &  quatre  heures.  Vn  peu  plus 
bas  a  cofté  nous  vcifmes  la  Pifcine  probatique,qui  arroufè  la  val-  T^fcme^ 
lee  de  Iofàphat.De  ce  Heu  nous  partifmcs  pour  aller  voir  le  fepul-      ^f" 
chre  denoftre  Seigneur  qui  eft  dedans  la  ville ,  en  vne  grande  E-  mB  j*    . 
glife  que  fain&c  Hélène  mère  de  Conftantin  feit  édifier.  Il  con-  con&mtm 
uient  à  vn  chacun  qui  veut  entrer  au  fepulchrc ,  bailler  neuf  du- 
cats ,  &  n'y  a  perfonne  qui  en  foit  exempt ,  ne  pauurc  ne  riches. 
AufH  ecluy  qui  aprins  la  gabelle  du  fepuichreàferme,paychuiâ: 
mille  ducats  au  feigneur:  qui  eft  la  eaufe  pourquoy  les  tentiers 
rançonnent  les  pelerins,ou  bien  ils  n'y  entreront  point.  Les  Cor- 
deliers  &  Calojercs  Grecs,  Se  autres  manières  de  religieux  Chrc- 
ftiens  ne  payent  rien  pour  y  entrer.  Les  Turcs  le  gardent  en  gran-  ?ifMS  Seis 
de  reuerence,  ■&  y  entrent  aucc  grade  dcuotion.  L'on  dit  que  \csgnwn  m  u* 
Pifans  impofèrent  ceftefomme  de  neuf  ducats,iors  qu'ils  eftoy et  rujàkm. 
feigneurscnlerufalcm,  &  qu'elle  aefte  ainû  maintenue  depuis 
leur  temps.  7" 

Vitfeptdçhre denoftre  Seigneur,  &  des  ruines  de  Iemftlem. 
Chapitre        lxxxv. 

-  ■*-.'•■■ 

Erufalem  a  efté  reueftu  de-hautes  murailles  neufues  towfila» 

;  depuis  peu  de  temps  en  ça  :  toutesfois  de  petite  eftof-  ^tù^néde 

"  fcj&fortfoibieSjquinepourroyentreûfleraucanori.^*^^  " 

Lcsmaifonsyfontcouuertes  en  terrafte.  Les  bouri-*^^* 

ques  qui  font  es  g  randes  rues  font  vouteeS|Comme  celles  d'Aie- 

RR   iij 


■-j-lS  SECOND     É'ÏTRE      DES    STKGVIA. 

xandric.  Toutesfoislacomparaifon  n  eft  pas  égale:  car  les  voir- 
ies de  lerufalem  font  de  pierre  détaille,  de  fuperbe  édifice,  qui 
en  quelques  endroits  reftenten  leur  entier,  depuis  le  temps  que 
lesluifsydominoyent.  Les  marchands  qui  vendent  les  drogue* 
ries  de  Ierufalem  >  parlent  piufieurs  langages ,  tout  ainfi  comme 
Voti^iutU  au  Caire.  Les  nations  Chrétiennes  le  plus  fouucnc  enuoycnc 
msCbreftU  des  hommes ,  plus  ou  moins,  félon  la  contrée,  pour  habiter  en  la 
ennsi  MM»*.vilîe,&  fe  tenir  au  fèpulchre  :  dont  adulent  que  i  on  compte  dou- 
MurfreL*  ^langues  de  la  religion  Chreftienne ,  différentes  l'vnc  à  l'autre: 
%!m'  ,-  -  &  fàito-n  compte  qu'il  y  en  a  douze  principales.  Toutesfois  n'y 
cteltine  en  trouuonsque  hûi& ,  dont  la  nation  Latine,  qu'ils  appellera 
Romaine.  '  Franke,eft  préférée  deuanc  toutes  les  autres ,  &  cncloft  tous  les 
crequs.       oheyfTans  de  FEglife  Romaine.  La  féconde  eft  la  Greque5qin  eft 
.w^mflB/«w.appcliecervleur langage Romxos:  de  laquelle  i'obeiiTance  n'eft 
teolntts.     p0jnt  au  commandement  du  Pape ,  mais  ont  leurs  Patriarches  à 
Géorgiens,    parc>  Lâ  trojflcfme  nation  eft  F  Arménienne ,  qui  approche  plus 
CTt      ,  de  noz  cérémonies  que  la  Greque.  Les  autres  nations  confeque- 
u7emZ*    ment,comme  font  les  ïacobites ,  qui  font  delà  religion  côucrtie 
indiens.  '    àlafoy  par  fain&Iaqucsle  Maieur.  Les  autres  font  Géorgiens, 
^Abycmi.     qui  eft vne  aation  qui  fcgouuerne  par  Ces  loix,&  quiefeioignans 
mromtes.   ]£S  Perfes.ayans  leurs  confinsà  Fin  die  orientale,  &  qui  n'ont  efte 
fubiugaez  de  perfonne:auffi  font  ils  feigneurs  abfoulz  d'eux  mef- 
mes.Les  autres  fontnommez  Chreftiens  de  la  ceinture ,  qui  ont 
prias' le  furnonr  de  Coft  es,  quifurent  reduicts  àlafoy  par  S. 
Thomas..  Les.autres -foa't  Indiens ,  qui  y.  fônnenuoyez  au  pays 
auquel  domine  Je  preftre  Iean  :  &  font  rorcuoirs ,  appeliez  A  by- 
cini.Et  pource  qu'ils  foat  baptifez  en  fcu,îls  portentxrois  bruftu- 
res ,  vne  entre  les.deux  yeux  au  deifus  du  nez,Ies  deux  autres  fonc- 
pres  des-temples:&  ne  font  pas  fi  noirs  quples  Ethiopiens,^  iom 
circoncis.  Les  autres  fofit  Neftoricns ,  les  autress'appelîcnt  Ma- 
'      ionic.es*  qui  eft  vne  roefinc  choie  aae'c  les  Arabes,  Lcfqudles  na- 
tions ont  chacune  vne  chappcllc  à  part  foy:  pource  que  tous  dif- 
férent en  Quelques  poinds:  Se  font  entretenus  de  l'argent  que 
Jeurejîuoyenc Iespnnccs;de  leurs  prouinces.  Les  Grecs  tiennent 
îe  CœujjquioDtla  garde  du  lieu  de  Caluaire>&  les  Latins  ont  la. 
cvJwKrdegnfe  du5epulchre.  Les  religie.ux.de  toutes  les  fufditcs  nations 
Cahwre*     C[ircûiCDncscntrcnclcans>&  fortent  quand  ils  veulent  fans  rie» 
payet,L'Egîifedeee  kio£/epulcluedenoftre  S.eigneur.enfeœ^ 


OBSERVEES     "PAR     P.    B«EL0tf;%  $1$ 

^^t]ccircukdeCaîiiaïrc,quic£len Hcuplac,  &;nohei5 tacmu-Car^ens ** 
gne,commeplufietitsooteftimé.  Elle  eft  haute,  &  cûde  forme  CTf^a 
ronde.  Ilyavneouuertureà  claire  veue.  £c  au  milieu  de  cefte^    "^ 
rondeurleS.fepuîchredenoftre  Seigneur eft  defibu.s au  milieu  cye'j^ùs 
dcîanefjdedens  ienccînâ:  d'vne  petite'chappelle  couucrte  cnpeSel^n£Ur 
voûte  ronde,toute  de  fin  marbre.  Le  gardien  des  Cordelicrs  du 
mont  Sion  a  de  couftume  bailler  vnc  certification  aux  pèlerins 
quionteftéenuoyczpar quelquviijàfin queceleurfoit  tefmoi- 
gnage  qu'ils  ontefté  là,  lequel  contient  toutes  autres  choies  par 
le  meau,que  n'âuons  pas  fpecifîé  en  ce  lieu  à  caufe  de  briefueté. 

P»  defert  oufuttenténoftre  Seigneur:  &  dufleme  J  or  dam. 
Chapitre        lxxxvi. 

Ovsappreftaimesnoz  montures,  à  fin  que  fu  filons   T 
'  preftslej  en  demain  pour aller  au  fieuue4orckin  :  &  /^^  ûr= 
;. ayans couché defïbus  des  Oliuiershorsla  ville,  par- 
>  tifmes  de  bon  matin  auantiour,allans  entre  le  Soleil 
Jeuant&Mldyïki{ranslepoIe_Arâ:ique  à  gauche.  Il  commcn-;«:w. 
çoit  a  eftre  iour  lors  que  defccndifmes  en  la  plaine  de  Iericho:; 
mais  auant  que  nous  fuyions  arnuez ,  aduifaf  mes  vnc  bende  dey***™  de 
Chameaux  de  loing  ,qui  paiffoycnt  les  faeilles  des  arbres  de  My-  Miro^ôians' 
robolans  citrins  eftansfurmain  gauche:dont  plufieurs  de  noftre 
bende  eurent  grand  peur ,  penfàns  que  ce  fuflènt  les  Arabes  qui 
nousefpiaftènt:  Se  de  fait  les  GeniiTaires  quelcSagiaçauok bail- 
le pour  accompagner  monfïeur  de  Fumcc,refterçnt  tout  coy,qui 
en  leur  langage  difoycnt  telles  chofes:  Les  Arabes  font  aduertis  TufillanimU 
de  noftre  venue.  Lors  de  putilîanimité  &  grand  peur  qu'ils  a-  te^ss  Turcs" 
uoyent,  efteignirent  le  feu  de  lefmorfè  de  leurs  harquebuzes, 
voulansmonilferpartelfigneque  quand  les  Arabes  nous  vien-  „  di'<lè  de 
droyentafFaillir,  ne  les  trouuans  en  defenfe,  ne  leur  demande- ^„/^r  de 
royentrien,  .&  ne  feroyent  dommage  quaux.Chreftiens.  Mais  Fumet. 
rnonfîeur  de  Fumet  homme  vrayement  hardy,bien  accompagné 
de  demie  douzaine  d'honnorables  gcntilshomes  François,comc 
de  la  maifbn  de  Roftin,dc  S.  Aubin  en  Picardie ,  de  Perdigal  en 
Gafcogne,  du  Val,&  pîuneursautres,auec  le  refte  de  les  ges ,  efc. 
quels  eftoit  auffi  M.Iufte  Tenellejhomc  de  lettre,  que  le  feu  Roy 
Ir  raçois  reftaurateur  des  feiecesy  auoit  cnuo  yépour  chercher  àcs 
.     .-.:•',;"""" "'    * '     *'""*    R  R   iiij  ''"  '" 


$20  SECOND     LIVRE     DES     SINGVlA. 

liâtes  Grccs,ayans  chacun  la  harquebuze  en  la  main',  luy  mefmc 
fe  mift  à  pied  le  premier,^  commanda  à  vn  chacun  de  fa  compa- 
gnie le fuyure.  Toutesfois  les  Geniflàires  n  eftoyét  encor  defeé- 
dus  en  la  plaine,ains  demeuroy  et  derrière  pour  voir  l'ifTue.  Mais 
quand  nous  eufmes  cheminé  longtemps,  nous  rcmontafmes  à 
cheual  :  alors  les  Geniftàires  eftans  encor  fur  la  montagne,  voyas 
que  nous  ne  trouuions  pcrfonne,defcendirét  en  la  plaine^  nous 
fuy  uircn  t  :  car  ils  apperceurent  bien  que  ce  qu'il  les  auoit  tant  cf- 
pouuentez,eftoycnt  des  Chameaux  qui  paiftbyent  en  la  campa- 
• ,  gne.  Nous  arriuafmes  au  village  ou  autrefois  la  ville  de  Icricho 

auoit  efté  édifiée, ou  maintenant  n'y  a  finon  vne  mefehante  tour 
quarree,  qui  n'eft  guère  plus  forte  qu  vn  colombier.  Les  plantes 
naiflàns  en  cefte  pIaine,nous  ont  fait  fouuenk  de  parler  d  vne  pe- 
tite herbette  que  quelques  moines  trompeurs  ont  appelîee  Rofè 
$ofisdeTeri*  <je  Icricho  :  &pource  qu  elle  s'ouure  quand  on  luy  met  le  pied 
^t    .       de  la  racine  en  lcau,ont  eu  couleur  dmuenter  vne  tromperie  a£- 
^ud^ues      &z  tolcr  ablc,pour  donner  admiration  à  ceux  qui  la  regarderoîét, 
%£££      difans  qu'elle  s'ouure  feulement  la  vigile  de  Noël ,  ou  quand  les 
femmes  fonten  trauail  d'enfant.Ceux  qui  ignorent  fa  nature,pe- 
fènt  qu'elle  ne  fe  punTe  ouurir  en  autre  temps  :  Se  toutesfoîs  eft 
chofè  faufe.  Ils  ont  pris  leur  argument  fur  la  fain&e  efcriture,qui 
dit iSiatt plantatiavojkmlerickû. Mais l'efcriture s'entend  delà cô- 
munerofe  rouge  ou  incarnate,&:  non  de  teMe  manière  de  plante; 
de laquelleplufieurs  autres  ont  efté  aufll  trompez  en  laîfaifant 
r^mnmm;  mettre  en  portrai&urc,  lanommans  Amomum  :  Se  toutesfoîs 
'n'eftpasAmomum.  Nousl'auionsjatrouuceen  Arabie deferte 
auriuagcdeîamerrouge^croifrantc  par  les  fablons;  &  n'en  croift 
aucunement  en  Icricho.  La  campagne  de  lerichoeftentournee 
$?**&&  <fc  montagnes  de  tous  coftez:  ioignant  laquelle,  èc  ducofté  de 
*         Midy  eft  la  mer  morte ,  qui  n'a  point  d'iflne  à  fortir,mais  fe  vuide 
dehors  par  dedens  la  terre.  Regardans  vers  le  Septentrion ,  nous 
veoyons  la  partie  d'où  vient  la  naifïànce  du  fleuue  Iordain ,  qui 
paftfe  par  le  milieu  de  la  plaine  de  Icricho.  Et  regardans  vers  la 
partie  de  rOricnt,nous  veoyons  les  montagnes  de  l'Arabie  pier- 
reufè ,  qui  ne  font  pas  loing  de  là,aufS  font  elles  du  tenant  de  Ces 
racines."  Mais  du  cofté  d'Occidcnt,nous  veoyons  les  montagnes 
Mwholms  ^c  ^rufaîem.  Les  arbres  qui  portent  le  Licion ,  naiflent  en  cefte 
Gxwl      plainc>&anfl5  les  arbres  qui  portent  les  Myrobolans  Citrins^u 

noyau 


OBSERVEES     PAR     P.    BEION.  $11 

noyau  desquels  les  habitans  font  de  l'huile.  L'arbrifïêau  d*  Aca- 
cia akera  y  croift  à  grand  foifon.  Le  fleuue  Iordain  vient  de  Sc^Cdcu  ^ 
ptentrion  au  midy^qui  n'a  le  li&  de  fon  canal  guère  plus  large  que  ***" 
vn  petit  garçon  ne  ic&aft  vne  pierre  au  delà  :  car  il  n  y  a  guère  plus 
de  fept  ou  huiertoifes,  comme  aufïi  neft  pas  beaucoup  parfond; 
dedens  lequel  1  es  pèlerins  on  t  accouftumé  fe  baigner.  Il  eft  fi  pe- 
tit qu'on  ncfçauroit  mener  vn  bateau  par  deflusicar  il  y  croift  des 
Saules  noirs,Tamarifqucs ,  Agnus  caftus  Jk.  beaucoup  de  fortes  SM^C  notr- 
de  cannes  &  roiêaux^  dont  les  Arabes  ont  vfageen  beaucoup  de  TânMnfft£S' 
fortes*  Car  il  y  en  a  vne ,  dont  ils  font  leurs  iauelots  &:  dards ,  Se  jj^'fe 
laces  légères.  Et  au  Ai  vne  autreforte,  dequoy  ils  font  des  flèches,  unm 
qui  valent  cinq  afprcs  la  pièce:  &  n'y  a  guère  que  les  grands  fei-  Fkcùs  de 
gneurs  qui  en  tiret  à  l'arc.  Les  Turcs,  Grecs,  Arméniens,  Arabes,  canne. 
Perfès,  Iuifs,  Egyptiens,  n'ont  Fvfage  d'cfçrireauecvneplume  £%^* 
doyfèau  :  parquoy  efcriuans  auec  cefte  efpece  de  rofeau  qu'on 
nomme  Elcgia,la  recueillent  diligemment,  dont  nous  en  ank>ns 
aufïi  trouuéés  ruiflèauxdu  mont  Athos*  Apres  que  nous  eufmes 
veu  ce  fleuue ,  5^1a  mer  morte ,  nous  paflàfmcs  auprès  d'vn  cha- 
fteau  tout  ruiné ,  qui  eft  aflis  fur  le*  haut  d'vn  petit  tertre»  De  là 
nous  alîafmes  vers  la  fontaine  que  Pline  a  appellee  Çalliroé ,  que  c*ïïtro*. 
onditeflred*Heli|ee.  Aece,ànoftreaduis,fânommce  FûnsfoHs.Fonsfi^ 
L'eau  en  eft  fort  claire  &  froide,  &  court  à  gros  ruiflêau.  Et  s'il  eft 
vray  qu'on  aitiamaiscultiué  du  Baume  en  cefte  plaine,  il  eft  à 
prefuppofêr  que  ce  ne  fuft  loing  de  cefte  fontaine.Nous  ne  vou-  Jjes^aQes  m 
Ions  accorder  auec  quelques  grands  personnages,  qui  ont  eu  opi-  nem'ijfmt 
nion  qu'il  y  euft  de  fî  exccîlétes  Da&es  en  cefte  planure  :  car  ayas pïm  m  L 
veu  que  les  Palmiers  qui  y  font  maintenant,  n'y  meurùTent  leurs  fane  de 
fruiersen  pcrfe&ion  ferions  bien  d*opinion,qu  ils  n'y  ayet  iamais  a*"^. 
rien  valu .  Si  l'on  ne  vouloit  dire  que  le  climat  fuft  change  depuis  Cre^on' 
ce  temps  là^&  toutesfois  cela  ne  fè  peut  faire.  Le  ruiffeau  de  cefte  _  _^  ' 
fontaine  produid  du  CrefTon,de  la  Bal{àmite,Jôcs,  &  autres  tcU  jjm  m  n0m 
les  plantes,  comrneennoz  pays.  Nous  repeufmeslà  en  Vombtc  jhe  feigneur 
desMyrobalan!ers&:  Figuiers  qui  luy  font  ombrage.  Dch  nous  ieufia, ,'  . 
montafmes  par  des  étendions  de  pierre ,  au  lieu  ou  noftre  Sci- 
gncurieufna ,  qui  n'eft  guère  loing  de  la  fontaine  :  ou  il  y  a  trois 
voûtes  entaillées  dedens  le  roc,qui  font  les  vnesfur  ksautres,  ea 
aaanicre  de  faites ,  6c  continuafmesde  monterau  plus  haut  de  la 
moiitagne^ou  le  diable  voulut  tenter  noûrc  Seigneur.L'ori  y  vois 

SS 


Jll  SECOND     XIVRE     DES     SINGVLA. 

encore  les  veftigesoivne  chappellc  qu'on  y  auoit  édifice.  Nous 
defcendifmes  de  là ,  &  prinfmes  noftre  chemin  pour  retourner 
■Défert  de  s.  cn  -lcrufklca.1 .  Les  Chrcftiens  auoyent  fait  faire  vne  chappeiîe  au 
Sauter  île     defert  oufainft  lean  prefehoit  &  baptizoit ,  qui  eft  maintenant 
Jœpkrls.  *"   ruinée  par  terre ,  qu'on  voit  près  le  fleu ue  ïordain .  Il  eft  facile  à 
xroire  quefaind  lean  eftant  au  defert  peuft  viurc  de  Sauterelles: 
<armefmemcnt  les  autheors  Grecs  ont  eferit  qu'il  y -a  vne  forte 
de  Sauterelle  nommée  Aphros ,  ou  Onos ,  dont  les  Africains  vi- 
rent: &  pource que cefont  celles  dont faind  lean  viuoitjlauons 
voulu  efcrircxarles  Africains  mefmesles  mangeoyent  delicieu- 
fement,no  par  medecine,mais  pour  nourriture.  Nous  retournai 
.  mes  en  Ieruiàiem,ou  difpofafmes  d'aller  en  Bethîehcm. 


skron. 


Œeihlehem. 
Terâànthe. 


®eBethîeb?m,  &Ebro®. 


<hap.     iXXXYli- 


Sumpttieufe 
Fglife  en 
BethkeMû* 
mafiere  en 
Bethlehem. 
JJm  delà, 
pâfjknce  de 
nojfye  Sel' 


E  lendemain cftansrcuenusdifner  au  monaftere  des 
Cordcliers,  feifmesnoz  apprefts  pour  aller  en  Bethîe- 
hcm, oailn  y  a  que  deux  lieues.  Quand  nous.euf- 
L^^aŒmgi  chemine  demie  Hcac  ^  nous  ttouuafoies  vn 
o-rand  arbre  delerebinthe,  ou  noftre  Dame  fe  fouîoit  repofer  en 
venant  de  Bethlchem  en  Ietufiuem  ,  qui  eftfituc  furlechemin 
près  d'vn  champ  tout  feméd'vnc  petite  pierre  ronde ,  de  la  grof- 
ùm  &  forme  d'vn  petit  Chiche.  Le  vulgaire  dit  qu'il  y  eut  vn  ho- 
me qui  femoit  des  pois,  &  noftre  Dame  pana  par  là  >  &  luy  de- 
manda qu'il  faifok  :  il  tefpondit ,  ie  feme  des  pierres:  &c  depuis  ce 
temps  Ià,la  terre  eft  demeurée  pierreufe ,  c5me  fi  ces  pois  fuflent 
tranimuez en  pierres*  L'on  trouuc  vne  grande  cifterne  entaillée 
dedens  le  roc,  le  long  du  grand  chemin  à  vn  ie&  de  pierre  dudiâ: 
Tcrebinthe,qin  Ce  rempîift  d'eau  -quand  il  pleut,  6c  qui  eft  bonne 
à  boire.  AîlansainfilepasiKmsocfufmcs  que  deux  heures  àar- 
riuer  en  Bethlchem^ qui  eft  vnperit  village  mal  bafty  de  petites 
maifonnettes,-  &  n'y  a  rien  de  beàu9(mon  vn  grand  &  fumptueux 
monaftere  de  Cordcliers  :  duquel  l'Eglife  eft  magnifiquement 
reueftue  de  marbres,  que  fainde  Helenç  feit  faire >  fouftênu  déf- 
ilé grofles  colonnes  de  marbre  ,  reueftu  à  lenteur  de  pierres  de 
marbre.  Mais  les  Turcs  ont  enleue  kCdïâcs  reueftures  pour  or- 
ner leursMofquecs,&;  le  temple  qu'on  appelle  dcSalomon,  qui 
c.ft  maintenant  Mofquee>  dediee  aux  Maliometiftes.  Les  Cor- 


O  3TS  £  R  VEES     P  A  R'    F.     B  E  L  O  tf .  523 

deîîers  nous  rnonftrerent  lelicudcdens  vnechappellevoutce,ou  sefdàre  d& 
no&œ  Seigneur,  nafqmt  de  te  vierge  Marierai  cft  deflTous  la  gra-  S-f^fi"'- 
deEglife-  L!on  nou&monftrales  fèpuîchres  de  S.  Icrofme&  de  f"^-^ 
{es  difciples  &  des  Innoccns,eneïos  en  ladi&e  Eglifc.  Ayans  dif-  ^J|Lm. 
néenBethlehem*  dcfçendiimesvnpcti  plus  outre,  ou  il  y  ades  ^4n>». 
beaux  Qiiuiers  &  Figuiers,  auprès  defquels  eft  le  lieu  ou  l'Ange  Tragoriga, 
çintannoficerattx.pafteurs  que  noftr=e  Seigneur  deuoit  nafquk-,  »*>»- 
auquel  lieu  y  eut  aut  resfois  vne  petite  ehappellc ,  qui  eft  mainte-  Zlfls", 
aât  ruince>&  n'y  a  plus  fino  vne  voûte,  fur  laquelle  l'on  trouue  de  7*0!nlBrs\ 
de  l'herbe  Maron,&.du  Tragoriganû^giSjThy  mbra5Onitis,&  ^** 
de  TGriganû  Hcraeleotieii.  ;  Mous  retouraafmes  au  raonaftere  sepdchres 
d'alTez  bonne  heure  ,,  &  dreftafmes  noftreappreft  pour  aller  en  ë^zlamçr- 
Ebron,  voir  les  fepuîchrcs  d'Adam ,  d'Abraham ,  ïfaac  &  ïacob.  ^cbrahxm. 
Lbn  trouue  motures  à  louer  en  Ierufalera  pour  aller  par  toutou 
l'on  veut, tant  Mules  ,,  Àmes^que  Cheuaux.  Il  n'y  a  que  fept  ou 
fe«L^fej^l4Ete.^l!?m.^-£fe9.n<<  Nous  partifmes  de  Bct hfehc 
auant  iour^  &  paftaimes  par  pays  de  montagnes  moult  falcheux; 
&  arriuafmesen  Ebron  d  allez  bonne  heure, Les  fepulchres  d'A-* 
dam,Abraham,&  Ifaaefont.dedcns  vne  Mofqueedc  Turcs,  ou 
les  Chrefticns  n  entret]point,mais  ils  les  regardent  par  vn  permis 
qui  eft.cn  la  muraille.  Les  Juifs  nous  voulaient  donner  à  enten- 
dre qu'ily  a  vn  pays  par  delà  Ebron  habité  des  luifs ,  dont  ils  onç 
îiouuelles  ,  quand  ils  veulent ,  non  par  les  luifs  ,  priais  par  autres 
gens  :  car  il  y  a  vn  f&uue  qui  court  touuours,  hors  mis  que  le  Sa- 
i?iedy  il  Te  tari  ft  totalement  en  Ton  lier  :  mais  pourec  qu'iceux,qui 
n'ofent  aller  le  iourdtiSamedy-,nepeuuent  partir  de  ià,  &  aulîî 
que  ledier  fieuue  n  eft  nauigable ,  par  cela  leur  conuient  demeu-  Mettfonge 
rer^ne  fè  peuuent  voir  l'vn  l'autre.  Or  cft  il  manireile  que  cela  anciena£- 
cft  menfonge ,  &  qui  n'eft  pas  nouuclle;:  Car  Pli  ne  a  eferit  chofe 
fèmblablean  chapitre  premier  du  trente  &  vnicfme  iiurc ,  difan£  ' 
qu'il  y  a  vn  ruiflèau  en  lydec  qui  Te  tarift  tous  les  iours  du-  SamcT 
dy.    Mais  nous  eftans  en  Iudeeauonsfceu  que  ceft  choie  faiw 
fe  ,.,comrae  au  fli  cft  ce  que  plu ûeu  rs  r>enfencr  que  )cs  lu  ifs  per-r 
dent-  de  leur-  iâng  ïe  Vcndredy  faincï  » .   Et  nçus  cftaas  aucç 
cuxau  Vendredy fàinc^^.rLauonsonc ap^erce^quils  perdaient.  */£&«£*» 
fang  non  plus  qu'es  autres  iours  de  la  fcpmaine*    Le  lieu  ou  *rZ^\ 
Abraham  eftoit  lors  qu'il  en  veit  trois  ,  &  en  adora  vn  ,  Très  ^>  *    °^' 
ixditi  (p  vatmadowitrià:  nous  fuunonftré  hors  le  village  d'Ebron, 

SS.    if/      ' 


3*4  SECOND    LIVRE     DE!     SINGVLA. 

Ttr&'mth.  dcflus  lcfofTé  d'vn  champ ,  ou  fut  créé  Adam:  &eftmcrquêdVti 
Fon$  ftgtu*  Tcrcbinthcqui  a  trois  arbres  fortans  d'vn  tronc.  Les  ruines  d'E* 
tHS'(f     du  ^ron  monftrcnc  W^  a  c*^  autrefois  mieux  habité  qu'il  n'eft. 
*sîew        Nousretournafmescnlerufalem,  prenansnoftrc  chemin  vers  la 
"  ' .    *       fontaine  appcllcc  FonsjîgmtttStte  trouuafmes  telles  plates  en  che- 
min, que  font  celles  que  vcifmes  entre  Rama  &  Icru&icm.  En 
retournant5paflafmes  par  le  village  ou  fàinâ:  Iean  nafquit,&  vei£ 
mes  vne  Eglife  ruinée  que  les  Chrefticns y  auoycnt autresfois  fai- 
te.  Le  village  eft  habité  d'Arabes ,  dedens  lequel  y  a  des  cifternes 
faites  en  manière  de  viuierrcar  il  ya  vne  petite  fontaine  qui  court. 
Là  au  deffus  eft  le  lieu  ou  fain&e  Anne  vint  vifiter  fainde  Eliza- 
i>eth,qui  eft  en  vn  couftau  ou  il  croift  grand  nombre  d'O liuiers. 
Nous  arriuafroes  cefoir  au  monaftere  des  Cordeliers  de  Ierufa- 
lem,ou  nous  couchafmcs  :  &  le  lendemain  vifitans  toutes  chofes 
par  le  menu  en  la  ville,  allafmes  coucher  au  fainâ:  fepulchre  de 
noftre  Seigneur  :  car  il  eft  permis  aux  pèlerins  défaire  porter  à 
manger  leans ,  &  y  demeurer  iufques  à  trois  iours ,  s'ils  y  veulent 
cftre,oû  bien  y  aller  tant  de  fois  qu'ils  voudron  t,moyennant  (co- 
rne auons  dit)  qu'ils  ayent  payé  les  neuf  ducats ,  qu'il  conuient 
%wm  de    bailler  à  tous  ceux  qui  y  veulent  entrer.  Les  rues  de  Ierufalem  ou 
ierufalem.    |cs  marchands  ont  leurs  boutiques ,  font  couuertes  en  voûte,  co- 
méaufïi  es  autres  villes  de  Turquie.  Elles  font  renforcées  de 
grands  cfperons ,  &  reueftues  par  derrière  de  forts  arcs  boutans. 
slende  San  Icruralcm  e&  fie£c  <*c  Sangiacat.  Auffi  y  ail  vn  Sangiac,  ayat  cer- 
çâcmicru*  tain  nombre  de  Spahiz,qui  font  comme  foidats  à  cheuai.  Sâgiac 
Jakm.         eft  à  dire  vn  gouuerneu  r  de  pays.Les  Spahiz  ne  vont  point  fc  tc- 
office  de     nir  çà&  là  par  les  villages  qui  font  au  tour  de  Ierufalem,cômc  en 
sangiac.      Grèce  ou  Afiexar  les  paifàns  ne  les  veulent  pas  foufrrù  :  qui  eft  la 
office desan  cmçc  qu»jis  fonc  aucG  le  Sangiac  en  la  ville.  Il  eft  eftrangc  qu  vne 
■  g*  mokk.  oigce<je  Sangiac  en  Turquie  foit  mobile  comme  clleeft  :  cartel 
n'aura  tenu  fon  office  finon  demy  an  en  vne  ville ,  qu'ayant  receu 
vn  feul  commandement  du  Ture,luy  conuiendra  quitter  la  pla- 
ce à  vn  autre.Et  quelque  fois  tel  viendra  d* Afrique  en  Europc,ou 
en  Afic,  ou  il  fera  bien  fîx  mois  fur  chemin  auant!que  luy&fa 
compagnie  foyent  venus  au  lieu  ou  il  fe  doit  arrefter  :  &  fi  tantoft 
après  il  eft  mande  en  vne  autre  place,  il  ne  fera  refus  d'y  aller:  & 
parainfi  vferafa  vie  tantoft  çà,  tantoft  là  en  perpétuel  mouue- 
ment  :  comme  aufti  font  tous  officiers  &  gens  de  guerre  du 


O  B  S  EXVIES     PAR     P.    BILÔ  N.  $1$ 

Turc.  If  y  a  cnuiron  quelque  douze  Sangiacats  en  "tout  îc  pays  MoUUte 
de  Syrie,  Iudee ,  &  Damas ,  qui  font  baillez  aux  fauoris  des  Ba-  j^*  °$u 
chats  refîdens à  Côftantinople»  Oeft  là  que  le  Turc  cnuoye  ceux  D^f^9 
qu'ilveucaduanccr:  parquoyilz fêles  changent  Ivn  à  l'autre  par^£  ^  * 
levouloirdufupcrieur,en  forte  que  pourrions  comparer  cela  à^^ 
la  donation  qu'on  fait  des  offices  &gouucrncmcns  des  prouin- 
ccs,n*cftoitquc  les  offices  font  perpctuclz  :  mais  les  Sangiacats 
font  baillecs^changeeSjOU  oftees  au  plaifir  du  Prince-:  car  chacun 
d'eux  voulant  augmenter  leurs  cftats  ,  briguent  Se  font  prefens 
auxBaehats  pour  leur  changer  leurs  offices  de  Sangiacat  à  des 
meilleurs.  Ain  fi  montent  de  degré  en  degré,fclon  la  faueur  qu'ils 
peuuent  auoir,de  laquelle  chofè  le  Sangiac  qui  eftoit  lors  en  Ic- 
rufâIem,nous  fait  foy  :  car  après  qu'il  eut  demeuré  vn  an  à  la  Ta- 
na,quieft  ville  au  fond  delà  mermaicur,fon  office  lu  y  fut  chan- 
gée^ fut  cnuoyé  en  la  Morce ,  qui  autrement eft  appeilec  le  Pe- 
loponnefe.  Et  quand  ilyeutdcmcurédemyan,iiibtenuoyéen 
lerufaîern.  Nous  auons  baillé  ceftuycypoûrexeniple  :  carainfî 
cfl  il  de  tous  autres  Sangiacats. 

Voyage  far  terre  ferme  5  de  Ierufaîem  en  Vantas  :  (?  quels  arbres  ef}i- 
-  neux  font  frequens  au  territoire  de  lerufahm. 

Chapitre    ixxxvin. 

Hcrchans  les  plantes  entournoyans  les  murs  de  Ic- 
i  rufàlcm , auons veu dvne  cfpece  dTly  ofeiame  qui 
ne  croift  point  en  Europe:&  en  les  examinant  dili- 
gemment 3  pource  que  defirions  fçauoir  qu  elles 
•  cfpines  trouucrions,  pour  entendre  de  quelle  efpc- 
cc  eftoit  celle  dont  fut  faite  la  couronne  de  noftre  Seigneur,  &: 
n'y  ayanstrouué  rien  defpmeux5  plus  fréquent  que  le  Rhamnus3  KiAmniiS 
dont  nous  a  fèrnblé  que  fa  couronne  fuft  d*vn  tel  arbre  :  car  nous 
n'y  auons  veu  croiftre  nulles  ronces  ou  autre  chofe  efpincufè.  II 
y  a  bien  quelques  Câpriers  efpineux:parquoy  voyans  que  les  Ita- 
liens appellent  vulgairement  le  Rhamnus,Spina  fàn&a  (&  prin- 
cipalement entour  Maccraca,&  à  Pezaro,auqucl  lieu  auos  trou-  sPm*fi»&< 
uclcs  hayes  n'eftre  faites  d autres  arbres ,  comme  auffi  en  Ierufa-  *?&*• 
lern)  Panons  bien  voulu  mettre  en  ce  paflàgc  ,  ioindquelcsan-^0*^ 
ctem  Arabc&nommcnt  Farbre,  duquel  fut  faite  la  couronne  Al-  ^&»|^ 

S  S    iiij 


3-2.6  SECOND      LIVRE    DES    SINGVLA. 

ban  fegi,  que  les  interprètes  tournent  en  Latin  Corona  fphet.Lcs. 
arbres  feuidiers  du  territoire  de  Icrufalem^  font  Figuiers,  OlU 
uiers,Grenadiers,  Iuiuiners,  Pruniers,. Parquoy  fçaehans  que  les 
marchands  des  villes  onttouiîours  tenu  les  bois  de  plufieurs  for- 
tes d'arbres  en  vente  es  magazins  &  es  chantiers,  comme  ion  fait 
encore  maintenant^  eftdifHcile  de  pourpenfer  de  quelle  marie- 
cbemm  de    re  eftoit  la  croix, finon  des  defFufdich.Npus  féifmes  noz.apprefts 
lerufilemen  gour  aller  de  îerufaîeen  Damas,  ou  il  n'y  a que  cinq  petites  iour- 
Pamat.        nccs\&c  partifmes  le  mardy  au  foir  de  Ierufalem  &c  arriuafmes  en 
£>amas  d'aftlrzbonne  heure  le  Dimenche  enfuyuant.il  eftoit  def 
ia  tard  quand  nous-  fortifmes  de  la  ville  ,  &allafmes  loger  en  vn 
Garbafcfef  a  quaiï-ruiné ipres  dJvne  fontaine  courante  en  vn  vil- 
tàfire.         UgcoomméEIpirc,  diftant  à  deux  lieues  &  demie  de  Ierufalem, 
Le§  ruines  de  ce  village  monftrent.quç  c'eftoit  anciennement 
quelque  grand  bourg.  Lan  dit  que  ç  eft  le  lieu  dont  noftre  Da- 
me rctaurnaquerir  noilf  eSeigneur  quand  il  demeura  en  Ieruia- 
lçmrpour  députer  au  temple  entre  les  docteurs.  Ce-territoire  ef| 
fertile  en  vignes,  Figuiers  ÔC  OHuiers.  Noftre  chemin  eftoit  vers 
Sefame.       le  Seprcntrio.Pourfuiuans  noftre  chemin  partifmes  à  la  minuicl:, 
Coton.        ^  gafiîons  par  les  terres  enfemencees  de  S-efame  &;  de  Coton: 
Ejculus._      ayansJes  montagnas à^e^tour.deoous,  verdoyantes  d'Efculus, 
-stria.         Aria,llex,&:  de  petis  arbres  de  Coccus,dontilz  cueillent  la  grai- 
Coccus         ned'Efcarlate  ,  que  les  habitans  vendent  aux  marchands  VenU 
tiens ,  qui  l'achètent  en  toutes  les  parties  du  monde.  Auflî  trou- 
[interna.  uaCmes  <&$  arbres  de  Eleprinosou  Alinterna ,  Tcrebinthus,& 
zjgx.         arbres  aommez  Andrachncs  :  &  veifmes  les  hecbes  de  Tragori- 
onitk.        ganum,Zigis,Onitis,Maron,  &  de  quelques  cfpeces  de  Libauo- 
M**on- .      tis.  Qu'on  ne  trouuemauuais  Ci  ne  nommons  Libanotis  Rofma- 
jjb<mot#~     rinicarauiBji  eft  il  qu'vnecinquiefmeefpece.Nousdefcendions, 
toufîours  quelque  peu, car  Ierufalem  eft  lîtuee  en  haut  lieu^:  aulîi 
de  quelque  part  que  on  y  vienne, il  y  faut  toufiours^nôter.  Nous 
fçifmes  grande  diligence  :  carnoz  monturcss'eftoyentrepofecs 
mpolofi.     çjï  Ierufajcm  :  &;  arriuafmes  à  Midy  à  Napolofa,  qui  (à  noftre  ad- 
snhem.        uis}auo4t  anciennement  nom  Sichar,  ou  Sichem„  fituee  au  terri- 
s*wk-      tojre  fa  Samarie> .&  depuisfut  appeilee  Neapo liserés  de  laquel- 
le font  veucs  les  ruines  d'yne  petite  Eglife  eu  vne  vallée ,  à  demy 
Tu7i  h     <lu*r^ ^c ueue>ou. çftpjtjc puiz  J©rs  que  npftre Seigneur dcmâda^ 
j*^Li»c.  «tel  eau  àja  Samaritaine:  rQauitcnanc  il  n\  a  que  la  place  dedans, 


*C*  B'S^*>  V  E  £  5  -  P  A^K  1P;     B  ELO^S.  ^7 

^^i  champ  au  coftédextrc  d'vn  grand  chemin  en  venant  en  ça, 

îsJous  arreftafmes  àNapolofàjOu  paû^fmcstoutela  refte  duiour 

campez  deiTouz  des  nieuriers  blancs.  Les  collines  de  ('Napôlo£i 

ïonthic  cultiuees  d'arbres  frai&iers.  Les  Oliuiers  croiûen t  grc*s> 

8c  fc  chargent  deguis,ayans  lafemence  rougcçommc  enïeruià- 

lem  ,  oui  ne  font  pas  fi  fertiles,  comme  ceux  qui  fontkurs  fions 

greflcs  &  déliez.  Ilzcultiuent  des  meuriers  blancs  pour  nourrir 

les  vcrms,don  tilz  filent  la  foye^&  aufii  les  figues  croifïàns  en  pc-  ^g^ de Sy* 

rlsarbrespour  nourrir  les  verms  de  leurs  fùcilles.  Les£guesd'£-  cor»°rs. 

gypte  &  Arabie  font  rnaigres,&  font  les  figues  quaûaufll  feiches- 

que  celles  de  Sycomore. 

£>efcripùon  £vn*  homme  dérobe:  &  de  N*2&reth  ,  ou  fut  annoncée 
-n&ftrel>ame  quelle  conceuroiïnoJlreSeijmeit*. 
€bcLfkrt    lxxxix 

E  iour  fuyuant  nous  partumes  de  la  ville  de  Na~.  „    tr 
polofà ,  qui  eu;  fituec  fur  le  pendant  d  vn  couftau, 
ou  il  y  a  vn  petit  Chafteau  à  i  atique»  C"c&  vn  paf- 
fàge  ou  il  faut  payer  deux  ducats  pour  homme,  al- 

lanc  ou  venant  de  Icrufàlcm.  Nous  cheminafmes 

long  temps  auant iour5panans4nontagnes  &  vallées.  Nous  arri- 
uafmcslc  foir  àNazareth,qui  eft  vn  petit  village, ou  nous  vifmes  ^?^ 
le  lieu  ou  l'Ange  fàluanoâre  Dame.  Le  pays  eftarroufé par  ruif- 
feaux  qui  viennent  des  montagnes ,  &  fontaines  :  îefquete  ils  cô- 
duiïènt  par  canaux  efpandus  çà  &:  là  :  tellement  qu'il  eft  rédufer- 
cilc.Le  \i\hgc  de  Nazareth  eft  habité  d'Arabes.  La  chapelle  qui 
a  elle  faite  aujieu  ou  fut  l'Annonciation  noftre  Dame,  cft  petite, 
■en  voute,ou  il  faut  defeendre  pardegrcz:car  clic  eft  deiTouz  ter- 
re. Lon  y  voit  les  ruines  d'vne  Eglife  qui  fut  autresfois  faite  du 
temps  que  les  Chrefliens  y  dominoyent.  Nous  pafïàfmes  le  rcflc 
du  iour  à  vifiter  les  lieux  de  Nazarcck ,  qui  eft  ficué  entre  petites 
montagnes  firequcntc&en  eaux.Nazaretîi eft  fi.tuë  au  pays  de  Ga- 
lilée. Les  habitans  y  font/de  petite  &rgreftç  ftaturc ,  comme  auiîî 
font  tous  autres  Arabes^  Leur  vciiementçftvnehotjppelande^^^»^ 
rifluc  de  poil  de  cheure,  bigaree-de  blanc  &;  de  noir,  fîmplcmcnt  ^fî^fim 
coufue,&:  fànsaucunefaçon  ^npiîçlu^qua^fàciqtii  leur  pend    ^"^ 
iufques  au  gras  des  ïambes.  Iîz^ortent  vnc  large  ceinture  de 

.  S  S  iiij 


P&  SE CQMVf     L IV ETE      DES     S  I N G V LA. 

cuir,largc  de  quatre  doigts ,  ceinte  par  dciïus.  Et  d'autant  que  la 
boucle  en  cft  plus  krgeji  autant  en  penfen  t  ilz  eftre  plus  braucs. 
Hz  portent  vn  poignard  voûté  en  arc,  non  pas  pendu  à  la  ceintu- 
re,mais  tenu  ferré  aneclaceinture  contre  la  coite.  Leurs  chemi- 
fes  parlent  k  houpeîande,pendan&iufques  aux  talons.Leurs  mâ- 
ches fon t  au  ffi  fort  larges,  &  parlent  outre  celles  de  larobbe.  Hz 
portent  des  chapeaux  pointus,  &  repliez  à  la  mode  de  la  coeffe 
duTurcdeVenife ,  dont  la  couleur  eft  noire  à  la  différence  des 
coerTurcs  des  Egyptiens,  qui  les  portent  rouges-  Et  font  enfour- 
nez d'vne  grofiè  fetuietre  de  Coton.  Hz  ne  portent  point  de 
brayes,&;nxontvfage  de  bas  ne  de  haut  de  chauffes  ,  mais  leurs 
^  femmes  en  portent ,  comme  auffi  font  les  Turques.  Leurs  fou» 
hers  fonthauts  iufques  à  la  chenille  du  pied.  -Quand  iîz  vont  par 
pays ,  en  quelque  temps  que  cclbit  >  tant  en  compagnie  que  feu- 
îets ,  &  en  paix  èc  en  guerre ,  hy  uex  ou  cfté ,  iîz  ont  touûours  le 
bras  dextre  tiré  tout  nud  hors  des  manches ,  &  aufli  l'efpaule ,  &: 
^ff^/^lamoyt  édeîapoicfcrine  defcouuerte,àfln  que  s'il  venoitàpro- 
£*'  pos  j.iizpeuffent mieux  tirer  de  l*arc  :  &  aulfi  qu'ayans  les  bras 

nuds ,  ilzfoyent  mieux  à  deliure  pour  combatre ■:";  voulans  mon- 
ftrer  par  cela  qu'ils  font  géts  hardis.  Mais  les  autres  qui  font  quel- 
que peu  plus  riches  font  veftus  de  drap ,  totitesfois  ne  différents 
rien  à  la  façon  de  faire  des  deffufdi&s  y  defquels  en  auons  mis  le 
portraicL 

portraicî 


OBSERVEES    PAR   P.    BELON.  3^ 

portmft  ivn  villageois  *drabe. 


Les arcs& Carquois  qu'ilz  portent, font  differensaux autres sAmia 
de  Turquie.  Les  arcs  des  Arabes  reflemblent  mieux  aux  Grecs  Tu™: 
qu  aux  arcs  Turquoisf  car  les  Turcs  d'Afie  portent  vn  petit  arc  ^  V* 
bien  troufTé ,  fort  courbé ,  &  tendu  bien  roide  :  mais  les  arcs  àcs  ^/  de  Cr£a 
Crctcseftans  de  deux  fortes,  ceux  qu'on  faitàla  Sphagie,apec  tCm 
les  cornes  de  Bouc  eftain ,  &  ceux  quon  fait  en  Candie ,  auec  les  £0m  ej&n. 

TT  """ 


33©  SECOND     LIVRE      -DES     SINGVLA. 

Soupes,        cornes  de  Bouflesjont  plus  grands  que  les  Turquois  :  Se  comme 

ilz  font  plus  grands  que  les  Turquois,  aufrl  ont  ilz  à  faire  déplus 

rC  e*rtï-  l°ngucs  &  groflcs  flefches,  tout  ainfi  que  ceux  des  Arabes  qui  \cs 

'laques.  ont  grands ,  au  (fi  leur  faut  vfer  de  grandes  flefches ,  au  contraire 
des  Turcs ,  qui  les  ont  petites.  Ec  les  arcs  des  Tartares  Se  Valla- 
ques,  furpaffent  tous  les  fufdirz  en  largeur  &  longueur  :  toutef- 
fois  font  foibles.  Tous  les  fufdi&z  arcs  n'ont  que  faire.de  bracie- 
res,ne  de  gands,comme  ont  les  Angîois,  Se  ceux  du  BrefiJ ,  &  au- 
tres qui  tiret  auec  vn  arc  de  bois.Les  Turcs,  Crêtes,  Arabes, Tar- 
tares vïans  des  arez  colez,  «ont  point  de  gands  en  tirant  de  leur 

anneau  à  arc,mais  au  lieu,(e  feruent  d'vn  périt  anneau  d'y  uoirè,ou  de  Cor- 

tirerdeFarc.  nc,ou  buis.  Les  plus  fumptueux  en  portent  dW&Tdargent  fur 
lefqucîz  ilz  font  plusieurs  marqueteries  auec  des  pierres  luy  fan- 
tes  par  dcfîus,  qui  toutesfois  n'eft,  inuention  moderne,  ain s  très 
antique  Car  les  anciens  Grecs  médecins,  comme  a^ufïl  Galicn, 
voulans  exprimer  la  forme  de  celle  partie  qui  eft  dedans  la  gor- 
ge,que  les  Latins  appellent  Larmx&lcs  François  la  luette,la  font 
femblable  à  t  anneau  quelesThracesontaccouftumé  mettre  en 
îeurpouce dextre,quând  ilz  tirent  deleurs  arcs  :  Se  de hk  tel  an- 
neau que  les  Turcs  ont  accouftumé  de  porter  au  pouce  ,  quand 
ilz  tirent  de  rarc,efl  totalement  femblable  à  la  luette. 

Quitte  Geneftmh  3  &  merXiberiadis;  Chapitre    x  c. 

*  dus  cheminafmes  peu,que  vinfmes  ata  riuage  de  la. 
!  mer Tiberiadis,"qui  eft  vn  eftang-ou  Ion  prend  des 
}  Carpes,Brochets,  Tanches ,  &:  Cheuefnes»  Nops 
'  pafïafmes  aux  racinesde  la  Colline  ounoïtre  Sçi- 
'  gneur  repeut  cinq  mille  hommes  de --deux  petits 
poiffons,  Se  cinq  pains  d'orge.  Toutceiournetroiraafmes  que 
campagnes  ûcriles ,  excepté  en  quelques  endroi&z  en  lieux  hu^ 
midesjou  les  habitans  cukiuët  des  Coîocaiîes,  choux  à  pommes, 
Moujh.  bettes  à  la  groupe  racine,  oignon  s,  &  aux,&  quelque  peu  de  Mou- 
Ndfeca.  £Q$t  La  plaine  <iela  mer  Tiberiadis  eftgarnfe  d'arbres  deNapeca, 
•en  manière  d'vn  haut  taillis.  Ceftuy  arbre  eftefpineux  qui  porte 
les  frui&z  doux  Se  bons  à.manger.  Ces  arbres  pour  cftre  fi  fqrt 
ejpineuxont  ga&éles  feiches  campagnes,  tellement  qu'on  ne  les 
-enfeiaence  poinr ,,  ioind  que-  les  habitans  trouuans  affez  de 


OBSERVEES     PAR     F.     BELON.  £ï 

terre  à  labourer,  cultiuent  feulement  les  lieux  faciles  &  humides,  capbamaw. 
Nous  paffafmes  par  le  village  de  Capharnaon,ou  il  y  a  moule  bel-  ^J^ 
les  fontaines.  Rcgardansau  cour  du  LacTiberiadis,  veoyons  le  ^/^ 
pays  de  Gai  ilec,3dc  village  de  Bechfaida,  dont  Saind  Pierre  & 
Saind  André  nafquirent  iSc  aufîi  Chocozaim ,  à  qui  noftreSci-  cborofym. 
«meur  donna  malédiction.  Les  villages  ion t  main tcnanthabkcz 
des  luifz ,  qui  ont  nouuellement  bafty  en  cous  lieux  autour  du 
îac  &pouryauoirinuçnté  des  pefchcries  ,  l'onc  rendu  peuplé, 
qui  eftoit  auparauant  défère»  Ce  lac  n'eft  de  fi  grande  eitendue 
qu'on  ne  puiffe  bien  voir  facilement  la  terre  de  tous  couftez.Cô- 
tinuaiis  noftre  chemin  ,nous  en  vimmes  coucher  à  vn  Carbacha- 
ra,  qui  eftoic  roue  ioignant  le  courant  dufieuuc  ïordain,quc 
nous  paffafmes  deffusvn  pont  de  pierre-  Les  Arabes  voulurent; 
faire  quelque  violence  ,.mais  nous  leur  refiftafmes  vkicment,  5c 
de  force.  Ce  Garbaehara  neft  guère  loing.des  villages  i  par  ce  les 
payfans  nous  apportèrent  des  poulailles ,  des  œufs ,  &  du  painà 
vendrc,des  figucs,raiûns,  Iuiubes  blanches  &  rouges.  Nous  par-  Ju^s  ^^ 
tifmcs  le  lendemain  au  matin  de  ce  Carbachara ,  &  cheminaf-  /oes  ^^^ 
mes  par  pays  moult  pierreux,  comme  auffi  le  no  qu'il  tient  5 1  cm-^-«. 
portc:car  le  pays  pour  eftre  ainfiafpre  &  rude ,  eft  nommé  Regio  Trachmïtk 
Trachonitis.  11  y  croift.de  l'arbre  de  Cocçns  &  d'EicuIus,  que  les  reglû* 
Grecznommoyent  anciennement  PiarypJ}yllon,i£  maintenant  Coj?f'm 
Velaguida.  Hz  portent  le  gland  gros  comme  vn  œuf  de  Pigeon,  f^^dx 
duquel  les  hommes  pourroyentviure  en  temps  de  famine  :^ar  p/^kfc 
il  approche -quelque  peu  du  gouftde  la  Chaftaigne.   Et  dou- 
tant qu'ilz  nenourrifTent  nulz  pourceaux  ,,ce  gland  eft  perdu. 
Surlemidy  nous  entrafmes  en  vne  campagne  ou  la  pluyenous 
print ,  qui  nous  duraiufques  au  foir  qif  arriuafmcs  en  vn  Carba- 
chara ,  à  bien  trois  lieues  de  Damas.  Nous  campafmcs  defTouz 
la  tente ,  près  d'vn  village  ioignant  le  Carbafchara  :  car  grand 
nombre  de  paiTaas  feftoyent  retirez  de  bonne  heure:&  aufli  que 
la  pluye  les  auoic  engardez  de  partir.  Le  lendemain  trouuafœes- 
les  campagnes  bien  labourées  &fertiks>& grande  quantité  de 
Villages.  Nous  auions  les  montz.de  Tripolisqmeftoycntdeiïa 
couuerts  de  neige,$:  le  pais  de  Phœnice  a  main  ga&che.Et  entras 
en  la  plaine  deDamas,eftâs  encor  dciïus  vn  coullau,nous  veoyos 
laviiîe  de  bié  ioing  :Car  elle  eft  ilcuecen  vn  bas  lieu  en  plat  pays. 
Les  faules  &;  hautz  pouplieis  blaocs  &  noirs  croiifenc  par  la, 

TT  ij        *      * 


33*  SICOND     LIVRE     DES      SINGVLA. 

campagne,qui  nous  la  faifoycnt  refTembler  eftre  fituée  entre  fo- 
refts.Car  ilya  grande  quantité  de  vergiers ,  qui  font  arroufez  de 
leau qui  tumbe des  montagnes  par eanaux.-qui ainfi arroufans  la 
campagne ,  la  rendent  fertile.  Il  n'y  a  que  fîx  iournees  de  Icrufa- 
Icm  en  Damas  :  parquoy  il  ne  coufte  que  deux  ou  trois  ducats" 
pour  m5cure  de  chaque  perionne.  Nous  arriuafmes  d'afTez  bon- 
ne heure  en  la  ville. 


chryforoas. 


Murailles  de 
Damas. 
Tours  des 
murs  de  D  A* 
mas. 


Obfèrudt'ion  des  chofes  de  Ddmas. 
Chdftîre    xci. 

TjSg  L  y  a  fi  grande  commodité  d'eau  en  Damas,du  flcuuc 
Chryforoas ,  que  quafi  chacun  a  vne  fontaine  tant  en 
n.  w*t>jf°n  iardin  qu'à  fon  logis.   Les  rues  de  la  ville  font 
iszfêéi  eftroi&es ,  &:  mal  droi&es.  Le  Bazarc ,  c  efl  à  dire  le 


Portes  du 
Caire  cou* 
uertesde 
cuir. 


Medéàmde 
Syrie. 


marché  ,  eft  fort  beau ,  &:  eft  couuert  par  le  deffus.  Les  maifons  y 
fontaiïèz  bien  bafties:  mais  ce  qui  eftle  plus  beau ,  font  les  por- 
ches à  claires  voyes ,  pour  f  y  refrefehir.  Les  murailles  de  la  ville 
font  doubles, comme  à  Conftantinople.  Les  fofTez  ne  font  gue- 
res  parfonds,efquelz  ils  cultiuent  des  Meuricrs  blâcs  pour  nour- 
rir les  verms  quifontîafoye.  Les  tours  des  deux  murailles  font 
moult  près  à  près  :  Car  il  y  a  vne  grande  tour  quarree  entre  deux 
autres  petites,  qui  font  rondes,  &  font  plus  grades  l'vne  quel'au- 
tre.IlyavnpetitChaft.eau  quarré  hors  le  circuit  des  murailles, 
ÔC  toutesfois  il  fêmble  eftre  enclos  en  la  ville  :  car  les  fauxbourgs 
font  deux  fois  plus  grands  que  la  ville ,  auiïi  les  marchez  font  te- 
nus es  fauxbourgs.  Mais  les  Bazares  &:  Bafeftans  font  dedans  le 
circuit  âcs  murailles.  Les  portes  de  la  ville  font  couuertes  de  la- 
mes de  fer ,  au  contraire  de  celles  du  Caire  qui  font  couuertes  de 
cuir.Du  cofté  de  leuat  il  y  a  vne  tour  quarree,au  haut  de  laquelle 
y  a  vne  infeription  en  chara&eres  Arabiques ,  qu'on  dict  y  auoir 
efté  mife  depuis  quellefut  reprinfe  des  mains  des  Chreftiés  :  Car 
vnpeu  plus  bas  Ion  voit  deux  Hz  entaillez  fur  marbre^ui  font  les 
armesde  France  ou  Florence.  Au  cofté  defquclles  eft  vn  Lion, 
qui  a  faicl:  penfèr  à  pîufieurs  que  ce  fuflent  les  armoiries  de  Fran- 
ce &  Fioréce. Les  boutiques  des  artifàns  font  corne  au  Caire.Les 
medecins,lors  qu'iîz  font  appeliez  à  voir  vn  malade  en  ce  pays  là, 
eux  mefmes  font  diligence  de  faire  rcçouurcr  les  drogues.-car  ilz 


OBSERVEES      ?AR     P.    BELON."  353 

marchadét  aux  malades,&  fèlo  la  maladie  ils  entreprénent  de  les 
gucrir:&  ne  leur  fera  liuré  tout  l'argét,q  premicremét  ils  ne  foyet 
î  gueriz.  Parquoy  nous  (èmblc  qu'ils  ont  telle  manière  de  medeci- 
ner,queles  fçauans  Grecs  Se  Arabes  anciens  fouioyent  auoircn 
vfâge,lors  qu'ils  feruoyenteux  mcfmcs  de  Chirurgien  Se  Apoti- 
cairc.  Mous  ne  voulons  toutesfois  entendre  qu'ils  nefufTent  en 
grand  honneur  comme  au  fli  font  pour  le  prefènt  :  mais  poûToîe 
qu'il  n'y  en  auoit  tac  en  toutes  parts  -,  comme  au  fil  n'y  auoir  point 
tant  de  iuges  Se  Aduocats ,  Se  plufieurs  autres  telles  gens  de  iufti- 
cc  que  nous  voyons  maintenant.  Mais  comme  les  hommes  non  t 
en  ce  monde  que  trois  principales  chofes  recommandées  en  vi- 
uant,fame,le  corps,&  les  biens,  Se  que  l'amccft  la  partie  en  l'ho- 
me la  pi  as  diuine  :  auffî  chacun,  penfant  de  leur  falut,encor  qu'ils 
fuffent  Ethniques,  ont  touuours  eu  les  hommes  de  leur  Théolo- 
gie en  fouueraine  dignité.  Voyla  donc  quant  à  lame.  Apres  l'âme  El*mîm' 
n'ayans  rien  plus  cher  que  le  corps,  &rdefirans  leurfànté ,  ont  eu 
les  médecins  en  grand  honneur  :  car  puis  que  la  fanté  eft  prepe- 
fee  aux  biens ,  les  hommes  aiment  mieux  perdre  les  biens ,  que  le 
corps  :  parquoy  font  contents  qu'il  leur  cou  fte,  Se  rccouurer  £m- 
té.  Auffi  vouians  garderie  bien  que  par  labeur  Se  induftrieauoyec 
acquis  ,&iouyr  pacifiquement  du  ûen,  ont  eu  ics  Aduocats  Se 
gens  de  iuftice  en  vénération.  S'accordansdedefpendre  vne  par- 
tie de  leur  bien  pour  le  payement  des  ges  de  iufticc ,  à  fin  de  iou  vr 
paifiblemcnt  de  l'autre.  Anciennement  comme  encor  mainte- 
nanties  republiques  bien  gouuernees  ne  font  peu  pafïer  des  trois 
fufditseftats ,  qu'il  n'y  enaittouiiours  eu ,  û*  eft-ce  que  nous  ne 
voyos  point  qu'ils  foyét  tant  multipliez  es  autres  regios  corne  en 
lanoftre.  Il  ne  faut  point  de  Sergent  en  Turquie  pour  adiourner 
vn  homme.  Mais  quiconque  voudra  mener  quelqu'vn  au  iuge, 
•aille  luy  mcfmetrouucr  celuy  à  qui  il  a  affaire ,  Se  luy  die  qu'il  vie- 
ne  à  la  iuftice  de  Dieu,alors  fil  y  a  d'autres  Turcs  prefens,il  n'ofe- 
rarefufer,  &aîlanstrouuerleiuge  quiie  tient  aflis  tout  le  iour 
deiTouz  vnappentizpresdefa  roaifon ,  débattront  leurcaufeen 
iapreiènce,&:  fur  le  champ,  le  iuge  ordonnera  ainii  que  bon  luy 
enfemblcra.  Parquoy  ne  leur  faut  point  de  foliciteurs,  Procu- 
reurs^ Adu  ocats.Ceux  qui  vendent  les  drogues  fimples,en  ont 
au0î  de  compofees  :  entre  îefquelles  auons  rcmerché  en  leurs 
boutiques  la  confe&ioa  Ancardine3Memdat,  Se  Thcriaoue, 

TT  il) 


^l8  $;E.CO  ND     LITRE      DES    SINGVLA. 

Drogues  co*  philonium,Con£ectia  Hamech,Miel  ro&t,Viplat,conferires--dc-- 
yofees  >»-'ro(cs  de  Stœchados ,  Loch  de  pulmon  dcregnard ,  huiles  à  Ab- 
4wsmT*r>  £im^e  &  d' Afpic,Sc  de.Menthe.  Les  marchandifes  font  vendues 
**"'  en  Damas  &  en  Syrie  à vn  pois  nommé  vn  Rotulo,qui  pefefept 

Wulo.  liurcs^co-mmc-aiiflx.cn  Egypte^  Ce  que  nous  eftimans  prunes  de 
Prmes  de  Damas,  ne  font  femblabïes  à  celles  quHls-cuciUcptcn.eçpayslà: 
Sam**.  nousentendons  des  noftres .  peu  tes -noires  douces,  qui  fontles 
Comçofttm  plus  communes  :  6c  fondes  meilleures  que  nous  .auons  en  vfage. 
es  bout**.  Qc\\cs  de  Damas  font  chèrement. vendues  au  pays  meimes ,  6c 
pesdeDd*.  çQm pJus gro{res.qa»vnernoix-,ftrmesfousJa de.nt.„,&:  douces  auçc 
mM*  vn  peu  d'aigreur..Seulemcnt  les  auons  veu  feiches  :-£ac  nous  ri  y 

eftionspasau  temps  des  verdes.Defquellcs  le  noyau  eft  plus  grad 
6c  plat,quegros  ôc  rond.  Il  y  a  des  boutiques  qui  ne  font  autre 
ouurageen  Danias,que  monder  le.  coton,  le  feparant  de  fa  feme- 
Mondeun    ce.  ijs  ontvn  fer  quart  e<Tv.n  pied  de  long:,,  deux  doigts  d'efpois, 
duquel  preffans  le eoton'defTus  vn  aix ,  la  femence  qui eftronde 
fuit  deuant  le  fer ,  6c  par  ce  moyen  elle  eft  feparee  d'auec  le  coto. 
Dsnourri{TentIcsChcuaux&  Chameaux d'Eruiala&d'Eruura, 
qui  font petites femences  qu'on  feme allez  en  France ,  &  toutes- 
fois  n  ont  aucun  nom  Franc  ois.  Et  d'autant  que  les ^veiunes  cC- 
corchez ,  6c  qu'ils  apparoiuoyent  rouges ,  ne  les  euifioas  peu  ca~ 
gnoiftre  fans  en  voir  des  entiers.Le  fuccre  noramé  Alhafur ,  qui 
lAlhtfa,    croift.furvnc  herbe  en  Egypte  par  le  moyen  d'vnpctitverm  ref- 
femblant  à.vn  efcharbot-  ',  quis'enferme  jeans ,  6c  en  baftiitia 
maifon,eftcn  grand  vfageen  Damas  ,  comme  au  (fi  par  toute 
TigalU.      Turquie,  qu'il  n  ya.ccluy  quine  fçachc  le  nommer  en  TurcT> 
Uficm.  *kgalîa.  Il  eft  en  petites  pullules  groffes  comme  noifilles,  en  ce  con- 
**w-  traire  au  (uccre  blanc,  qu'il  defa-ltere  qjjand  on  le  mange  ou  boit. 

Les  autheurs  Arabes  font  tefmoins  que  le  blanc  augmente  la 
fpif  piuftoft  que  i'eftancher.  Le  fuccre  Alhafur  encor  récent,  eft 
û  teraperé.qu'il  cftanche  la  foif incontinent,  6c  guariftia  toux  en 
briefue  efpace  de  temps.  Il  y  a  grand  nombre  de  ïuifs  en  Damas, 
6c  font  enfermez  à  part,comme  en  Auignan:  Mais  les  Àxmenies 
6c  Grecs  qui  font  en  la  ville,  habitent  q à  6c  là  fans  eftre  enfermez. 
Les  Vénitiens  tiennent  vjî  officier  en  Damas  poux  le  trafic  de  la 
marchandife:  qui  eft  comme  vn  conful,  Baille,  oaBaillif.  11 
sneine  des  artifans  de  Vcnife  pour  s  en  feruir.  Careftanthonv 
m&Àc  reputation,  meine  vn  couftoïicr,. cordonnier  >  barbier, 


de  coton. 

ErttiaU. 


OBSERVEES     PAR     P.    BïLÛS.  ffi 

snedecin&apoticaircveftusà  la  manière  de  fon  j>ays,  comme  chafiem  â* 
au$  de  plufïeurs  autres  meftiers.  Il  y  avn  Bâcha  en  Damas  Damas- 
comme  au  Caire,  quia  fon  logis  hors  la  ville*  Il  ne  fe  tient  pas    *  M  am 
au  Chafteau  de  peur  de  rébellion  :  Car  vn  de  Tes  predccefTeurs 
gaigna  n*  bien  l'amour  du  peuple,  qu'il  vouioit  fe  faire  feigneur 

-  abfoîu^  &  fortir  en  plaine  campagne  auec  fes  gens  contre  ceux 
que  le  Turc  y  auoit  enuoycz  pour  le  combatte.  En  ces  entrefai- 
tes il  auoit  promis  aux  gens  de  fà -compagnie ,  qu'il  leur  donne- 
roicle  pillage  des  lui£s.  Mais  fortune  permiû  qu'il  fuit  vaincu,  &c 
fut  defaiten  bataille:  dont  les  lu  ifs  ièircnt  grande  feâe,  &.  en- 
cotfe  glorifient  maintenant,  difans  que  la  victoire  du  Turcco--»,-.^  ^ 
treledict  Bâcha ,  fut  àcaufè  qifil  auoit  délibéré  les  piller,  &  en  juifs. 
mémoire  ils  en  célèbrent  vnc  fefte  tous  les  ans,  à  tel  i  ou  r  que  le-  E$oir  des 
àiù.  Bâcha  fut  défait  ,:&  dient  auoir  eicrit  i  celle  victoire  en  leurs  ^fi- 

'  regiârcs.  Il  n'y  a aucun  luifviuantpourle  iourd'huy,  qui  n ait  Mofms & 
cfpok  de  voir  Ierufalem  retourner  en  leurs  mains  .    C'e£t^w*       , 
pourquoy  ils  tiennent  les  faicts  en  regiftres  de  toutes  choies       ,  ■« 
qui  fe  font.  Les  moutons  de  Syrie  n'ont  pas  la  queue  filon* 
gue  ceux  d'Egypte ,  mais  ils  Font  bien  auffigrofle  èc  large.  LV- 
fage  delagnmmcdeCondrilîeyeftgrand,  &la  vendent  com- 
munément comme  les  drogues .    Car  les  femmes  s'en  fèruent 
poul  mafeher  au  lieu  de  mairie.  Ce&c  gumme  eft  faiete  par  1  ar- 
tifice d*vn  petit  verm,  qui  s'cnlerme  auec  ia  gumme  de  ladicre 
racine,  laquelle  il  ronge  &  perce ,  dont  il  {brtdulaicbquisen- 
durcift  en  manière  dVne  .petite  noifette  :  qui  eft  recueillie  par 
ceuy  qui  la  vont  cherchant  par  les  campagnes:  &  la  vendent  aux 
marchands  des  villes.  Et  comme  les  femmes  de  Crète  n'ayans 
Tvfàge  de  ladite  gu  mme  de  Condrillc,fc  feruent  de  celle  de  Cha-  <^»»»*  & 
meicon  blanc,  &  leshabitans  deTiilede  Chio  vfent  de  celle  àe^^kon 
Mailic  ;  tout  ainû  les  Perfès  vfent  de  gumme  de  Terebinthe,qui  '     à- 
peut  eftre  mafehee  fans  prendre  aux  dents ,  ne  fans  ïc  confumet  ^V^;^ 
cala  bouche,çommeles  deffuidides. 


33* 


SECOND     LIVRE     DES     SINGVLA. 


Ve  la  monftre  de  ceux  qui partent  en  trouppe  de  la  ville  de  Damas  pour 
aller  àk  Meque.  Chapitre      x  c  i  i. 

Endant  le  temps  que  nous  cftions  en  Damas ,  nous 
veifmesappreïtervne  Carauanne  qui  faifoit  fa  mon- 
ftre pour  aller  à  la  Meque ,  c'eft  à  dire  en  voyage  pour 

l'amour  de  Mahomer.  Ceftvne  trouppe  de  gens  qui 

fe  dépare  de  Damas  deux  fqis  par  chacun  an.  Il  y  a  quelques  fois 
mille  hommes  de  compagnie,  &c  quelquefois  deux,  l'autre  fois 
trois.  Maisauantfe  départir,  ils  font  leurs  monftres,  qui  eft  bel- 
le chofè  à  voir:  car  ils  la  font  auec  grand  pompe  &  parade.  Les 
Turcs  viuans  en  Europe,qui  veulent  faire  ce  voyage,pcuuentai- 
yoydgen*   1er  par  deux  chemins.  Les  vns  s'embarquent  à  Conftantinople, 
kMefue,     fe  vonc  au  Qzitc .  Câr  jj  fe  Repart  fembîablement  vne  Carauanne 
duCaire,quivatouslesansvne  fois  à  la  Meque.  Mais  ceux  qui 
font  en  Aûe  /ont  beaucoup  plus  grande  commodité  de  faire  le 
voyage  par  Damas,que  par  le  Caire.  Premièrement  ils  fontap- 
preft  de  Chameaux,  qui  eft  le  fondement  du  voyage  ,  d'autant 
qu'ils  durent  longtemps  fans  boire ,  êc  qu'il  leur  conuient  pafler 
dcsdeferts;&parain{iilsn'y  meinent  point  de  Cheuaux,pource 
Lapompe^de  qU'ilsne  peuuent  fupporter  la  foif  fi  longuement.  Le  plus  beau 
U  uuume.  jg  ja  mon£rc  cft  jc  vo jr  vne  chafle  ornée  de  fon  ciel  bien  frangé, 
accompagnée  de  plufîeurs  prophètes  de  Mahomet ,  portée  fur  le 
dos  d'vn  Chameau ,  en  laquelle  ils  mettent  le  liure  de  TAlcoran, 
qui  contient  la  loy  que  leur  bailla  Mahomet ,  qui  eft  defTusvn 
coiffinct.  Les  feigneurs  &  habitans  delà  ville  de  Damas, comme 
font  les  Spahisdu  Sangiac  $r  Bâcha,  &:  autres  gentils  hommes 
Turcs  leur  preftent  des  cheuaux  pour  faire  ladite  monftre  parla 
ville.  Entre  autres  ornemens  &  parures  de  cheuaux ,  ils  ont  cer- 
tains poils  de  queues  de  bœufs  d'Indie,dont  les  poils  font  déliez 
%œufi£m*  &  blancs.  Ils  les  eftiment  tant ,  que  chaque  queue  eft  vendue  tel- 
dk  le  fois  quatre  ducats,l'autre  fois  cinq:  car  ils  font  déliez  &  beaux: 

aufîî  n'y  a  il  que  les  grands  feigneurs  qui  en  ayent.  Ils  les  font  pe- 
dre  deflbus  la  gorgedes  chenaux.  Ceft  vne  chofe  de  moult  gran- 
de brauade  de  voir  quelque  grand  feigneur  Turc  àchcuaî  :  car 
auec  ce  qu'ils  oncles  eftriuieres  courtes,  &  les  eftrieux  moult  lar- 
ges,  ils  n'ont  aucunes  molettes  a  leur  efperons,  &  portent  leurs 

cimeterres 


OBSERVEES     PAR.     P.    SELON.  557 

cimeterres  entre  la  (elle  Ôdleur  cuilTe,  &:  quelque  petit  fouet  en 
la  main.  Parquoy  pour  le  faire  apparoiftre  mieux  au  naturel ,  en 
attonscy  fait  reprefènter  vn  à  cheual  :  auecîa  parure  qu'ils  por- 
tent en  leur  pays. 


PortmEl  dvn  des  feignews  Circajfes ,  ou  arabes  a  chenal, 

qui.ejîqyent  des  plu*  riches  feigneurs  d* EppteJ.ùrs 

que  le  SoulcUny  dominait . 


YV 


Chichesro* 

Brmtbid. 

Bouhourd. 
Traçant. 


StrârUde 
Damas. 


Merle  an 
colier. 

Canepettere. 
%a/lede  ge* 
net. 

pluuier. 
Perdris  Ux* 
che. 


53S  SECON0     LIVRE     DES     SIKGVLA. 

Ils  meinent  aufli  des  ioueurs  de  hauts  bois,  &fonncurs  deta- 
bourins  en  leur  Carauanne ,  pour  les  accompagner  en  tout  le 
yoyage:  auflî  meinentaueceux  vne  vingtaine  de  Fauconneaux 
pour  la  feureté  déboute  la  Carauanne,  de  peur  d'eftre  deftronfïez 
fur  le  chemin  des  Arabes  par  les  defèrts.  La  mon ftre  générale  du- 
re deux  ou  trois  iours  :  mais  ils  ont  ioifîrvn  mois  pour  fc  garnir 
de  viures  propres  cnJeur  voyage.  Parquoy  ya  pluficursvbouti- 
<jues  en  Damas ,  tour,  ainfi  comme  au  Caire,  qui  ne  font  autre 
ouuragc  queroftir  des  pois  chiches  ,  qu'ils  appellent  de  nom 
Grec  vulgaire  Eruithia,  lefquels  ainilroftiz  &:  deieichez  en  des 
grandes  poefles  d'airain ,  font  moult  propresà  ceux  qui  vont  au, 
loing.  Ils  portent  dubifciîit ,  &  de  la  chair  falee,  puis  feichee ,  &s 
des  raiilns  cuits ,  du  nz,du  bouhourd ,  &:  de  Tracana ,  qui  font 
bleds  cui&s  auec  du  laift,puis  defeichez. 

Des  haflimens  3  &:0ufîeurs  autres finvttlaYÎte%jie>V amas. 
Chapitre      x  c  1,1  1. 

\  n'y  a  autre  gibier  en  Damas  plus  înfîgne  que  hs  Per« 
drisdeccpayslà.  Telles  perdris  font  moindres  que  les 
rouges  $c  gouafehes  ou  grifes.  La  couleur  de  deflus 
leur  dos&  du  col  eft  comme  eeîuy  d'vne  BccafTe:  mais 
les  asiles  font  d'autre  couleur:  car  celles  de  la  partie  voiflneda 
corps^font  blanches,brunes,&:  faillies , 6clcs dix grofTes  pennes 
font  cendrées.  Lcdehrbusdes-â?ilcs&  du  ventre  -eil blanc:  aufiî 
porte  vnxrarcant  autour  de  la  poiefrine  comme  celuydu  Merle 
au  colier,ou  d  vne  Cane  petiere,  qui  eft  de  rouge,iaune,&r  fauuc. 
Le  defTous  du  col  &  de  la  telle ,  le  bec ,  &  les  yeux  eft  de  Perdris» 
Sa  queue  cû  courte.  Nous  l'euflians  eferite  comme  efpece  de 
Rafle  de  genec,ou  de  Pluuier'jrieuil;  efté  que  fes  ia*nbes  font  cou- 
vertes de  plu  meSjCOinrae  à  vne  Perdris  blanche  de  Sauoyc,ou  vn 
Pigeon  patc.  Il  y  a  vne  moult  grande ,  belle ,  &  infigne  Mofquee 
en  Damas,  faite  de  treibel  ouuragc  :  8c  aufli  vn  Bafeftan ,  qui  eft 
vn  lieu  député  ou  l'on  vend  les  plus  chères  marchandifès ,  &:  plus 
riches  de  la  ville,  cornmefont  &yes  de  toutes  couleurs ,  orfeuric, 
^rgenterie,pierres  orientales ,  Cimeterres}felles,brides,  Se  autres 
tels  ouuragesde  haut  pris.,  &aufti  Efclaues  mafles  &:  femelles» 
Toutes  choies  en  Turquie  font  vendues  commeaTencat.il  n'y  a 


,      OBSERVEES      PAR     F.    SELON.  5$> 

vilfecn-cc  pays  làjpour  petite  qu'elle  foit,  qui  n'aie  vnBa(cftan:&: 
n y  avii-agequi n aitfon  marché,appellé le Bazare.  Les baftimes  ^  4W* 
de  Damas  font  comparez  de  mefme  architecture  que  font  ceux     >- 
du  Caire ,  qui  font  fore  bien  appropriez  pour  auoir  iafrefcheufv 
Et  tout  ainii  que  les  régions  fcptentrionales  font  deseftuues- 
pour  fe  tenir  chaudement,tout  ainfien  Damas  font  fiâtes  en  ma- 
Bière  de  porehe3ayans  les  fcneflres  aux^deuxeoftez  afTez  baffes,  à 
fin  qu  eftans  aiîis  contre  terre  3  ils  ayent  1 airamfi-bas ,  dont  ils  en 
recoiuent  la.  frefeheur..  Les  grosraifms  qu'on  nous  apporte  es 
grands  bœftes  de  Platane ,  font  vrais  raifins  de  Damas ,  que  les 
Arabes  nomment  Zabebcn.Nous  croyons  qu'il  n'y  a  aucunes  mi-  zihéen: 
nés  fur  le  territoire  de  Damas ,  comme  plufieursont  penfé ,  dont 
l'on  fonde  l'acier:  car  celuy  que  nous  appelions  Damafquin,y  eâ  vicier,  de 
ieulementr'afBné&  purifié.  Nous  auons  enquis  s'il  yen z\±oitDama*' 
quelque  mine,  mais  auons  entendu  que  non».  Le  fer,raeier>&  le  0mrag?  . 
cuyure  y  eftans  apportez  d'ailleurs,  y  recoiuent  la  trempe  &  la    amAJimh 
préparation  qui  les  rend  plus  parfaits.  Et  de  vray  ils  font  gens  qui 
feauent  fort  bien  grauer  &;  entailler  fur  l'acier  &  1  airain.  L'ouu  ra- 
ge en  xrain,acier  &  cuyure  fait  en  Damas^ft  incontinent  enieué 
êc  porté  au  Caire,  &  àConftantinople.  Parquoy  Ton  trou  uera 
plus  d'ouuc âge  Damafquin  à  Conftantinoplc,  5c  à  meilleur  mar- 
clié^qu'en  Damas  mefme:  car  quand  les  ouoriers  ont  fait  quel- 
que belle  bef  ongne,  ils  le  vendent  aux  marehands3qui  puis  après 
le  tranfportcnt  ailleurs.  Suyuant  Je  canal  de  la  petite  nuierc  an- 
ciennement nommée Chryforoas ,  qui  paiîé par dedensla  villes 
duquel  partie  arroufè  la  campagne  i  l'on  va  aux  iardïn-s  qui  fbnr 
hors  la  ville.  Ceux  qiii-ont  dict  que  ce  fleuue eft  commencement 
du  fleuue  Iordain ,  font  en  ce  trompez^ Sou uent  auons  dit ,  qu'il 
nVapointd'hofteîeries  partout  le  pays  ou  domincle  Turc  :  qui 
cft  caufe  que  Fan  voie  piufieurs  beaux  Carbafcbaras  en  la  ville  de 
Damas,  au  Caire ,  &  par  les  villes  de  Turquie.  Mais  les  Arabes 
les  appellent  vn  Kan.Ils  font  faits  comme  grandes  ha!les,ou  tous  ^n^ 
paffans  tant  eftrangers  que  du  -pays  y  font  logez  fans  ries  payer, 
âumoinsbien  peu  de  chofè, 

VV.   ij 


34o 


SECOND     LIVRE     DES      SINGVLA. 


Vqyare  de  Damas  au  mont  Ljban.         Chapitre    x c -il iï. 

i§  O  v  r  continuer  noftre  chemin  vers  Conftantinople, 
«  nous  feifmes  nos  apprcfts  &:  fortifmes  bien  tard  hors 
J  ville^  ayans  îc  vifage  tourné  au  Septentriô  ,  allafmes 

}  seulement  iufques  au  pied  de  la  prochaine  montagne 

dont  deicend  le  ruiffeau  qui  paffe  par  la  ville,  Se  campafmcs  au 
jardinages  ferajn  au  pjcj  fa  mont#  Le  lendemain  montafmcs  vne  fort  droi- 
de  Dama*.  ^  montée  :  &  quand  nous  fufmes  à  mont ,  veifmes  la  ville  de 
moultgrand'eftendue:  qui  nous  fembîa  moult  grande.  Caries 
jardinages  verdoyans  d  arbres  de  diuerfes  fortes ,  font  quaii  con- 
fuzauec  la  villeen  celle  belle  plaine  vnie:aulli  font  ils  bien  arrou- 
fez  de  l'eau  qui  defeend  du  ruiffeau ,  qui  tombe  fi  impetaeufe- 
ment  de  la  montagne ,  qu'il  fait  retentir  tous  les  enuirons.  Mais  , 
quand  il  cft  defcenduenla  plaine,  il  eftfi  bien  tempéré  qu'il  fe 
peut  conduire  Se  diirribuer  en  vne  infinité  de  peds  canaux  tels 
que  les  habitans  veulent.  Auffi  ont  ils  eu  le  bruit  de  tous  temps 
d'eftre  grands  iardiniers*.  ce  que  Pline  na  pas  ignoré  ,  qui  dir, 
Sjria  in  bonis  operofefëma.  Çeft  la  plus  belle  plaine,  &  plus  fru- 
<âueufeque  nulle  autre  qu'ayons  oncqveu.  Auffi  les  habitans 
prennent  grande  peine  à  la  rendre  fertile.  Eftans  defeendus  de 
cefte montagne ,  noustrouuafmes  de  petites  collines,  oui! va 
pluûeurs  villages  qui  cnltiuent  la  terre  aucc diligence:  auffi  ia 
terre  eft  fort  graffe,  Se  fçauent  bien  conduire  l'eau  ,  prenans  le 
tour  de  ces  petites  montagnes.  Les  feps  des  vignes  font  fort  gros, 
vignes  de  Se  les  rameaux  fort  fpacieux.  Les  habitans  entendent  bien  com- 
■&'*•  me  illa  faut gouuerncr:  car  ils  la  plantent  fi  loing  fvnedel'au- 

tre,qu  on  pourroit  mener  vne  charrette  entre  deux.  Ce  n  eft  doc 
pas  grand  merucille  û  les  raifins  font  fi  beaux,  Se  le  vin  fi  puiffant: 
comme  au  contraire  il  y  a  en  quelques  contrees,ou  il  n'eil  gueres 
plus  fort  que  Peau  :  car  les  habitans  plantent  les  feps  fi  près  à  près 
IVn  de  l'autre,  qu'à  peine  y  a  il  efpace  pour  mettre  les  pieds  encre 
deux  pour  la 'labourer.  Les  charues  du  plat  pays  de  Syrie  font  dif- 
férentes aux  noftres  :  car  deux  petits  Afnes  ou  failiiz  Bœufs  tire- 
ront vne  charue  fans roiies,  faite  de  bois  de  Poupiier,  quia  deux 
focs  fort  îegers.Ils  n'ont  pas  grad  peine  a  labourer  :  car  ils  ne  font 
qu  egratigner  la  terre  par  le  deiïus:auffi  labourer  ils  dvn  bié  petit 


OBSERVEES     PAR     P.    BEiON,  541 

foc  uns  coutre:parquoy  rapportent  leur  charuë  fur  leur  col  quad 
ils  f en  vont  à  la  maifon,  ehofè  que  Pline  auoit  ja  noté.  Syria  (  dit- 
il)  tenui  falcoarat.Lz  façon  des  vignes  de  Syrie  eft  différente  à  cel- 
le du  vignoble  de  ïerufalem  :  car  elles  ont  les  feps  quafl  de  quatre  jj,0UrA~t 
coudées  de  haut ,  fouftenus  d'efchalats  plantez  par  ordre,îabou~  desyne 
rez  entre  deux  auec  la  charuë:  &  portent  cinqou  iix  gros  fermés,  vignes  de 
efpars  en  longueur  de  cofté  &:  d'autre. ,  mifes  par  ordre.  Mais  la  Syrie. 
plus  part  des  vignes  de  ïerufalem  fe  fouftiennent  d'elles  mefmes  Ment  Liban. 
fans  aoDUV,  qui  ne  font  difpofees  par  ordre.  Tant  chemin afmes.  EuPaîori1*™ 

rr    /'^    .         v       ■•   i  tu  •    n.    •    j   r  ïambes  bla* 

que  commencions  a  voir  le  mont  Liban,  qui  eitoit  délia  couuert   ^. 
de  neige.  Nous  y  trouuions  de  l'Eupatorium  de  Mefue  ,  Aluyne  /#;^roaa 
pontique,Centoire  mineur,Iuiubiers  blâcs  Se  rouges,  Poupliers,  *•#. 
Se  de  deux  fortes  de  petis  Cèdres ,  ceft  à  fçauoir  du  poignant ,  Se 
de  celuy  qti i  a  la  rueiile  moulTe.  Les  habitans  cultiuent  des  poi-  Poupliers. 
riers,pommiers,abricoticrs,amandiers.  Nous  arriuafmes  ce  foir 
en  vn  village  nommé  CalcGUS,  &logeafmesenvnCarbafchara  Cc*r^      . 
entaillé  dedans  le  roc  fait  en  voûte,  comme  aufS  les  maifons  du  ^r  ^P™1* 
village  font  de  telle  manière.  Le  lendemain  enfuyuant ,  prenans  ^ww; 
le  chemin  du  mont  Liban  pour  aller  paffer  à  Tripoli ,  laiffions 
i'Antiliban  à  cofté  gauche  entre  nous  Se  le  pays  de  Phenice ,  qui  ^tnt'Man. 
efteonioindàlaSyrie.  Ilyavn  m  on  aftere  de  Caîojeres,  Maro- 
nites &  Grecs deffus le faiftedu  mont  Liban,  qui  monftrcnt  les  Cèdres  du 
hauts  Cèdres,  femblablesàceuxdont  Salomon  feit  édifier  fon  mùntLlbm' 
temple,  pour  eftre  perdurable.  C'eft  vn  arbre  qui  eft  feu  1  entre 
tousautres(exceptéleSapin)qui  porte  fbn  fruité  ton fiourseîeué 
vers  leciel.U  porte  de  groffes  pommes  dures,  qui  reflembleroyet 
celles  du  Pin,  n'eftoit  qu  elles  font  plus  polies. 

"Des  antiquite^Je  la  ville  de  Cejàree  5  maintenant  nommée  Balbec. 
Chapitre    xcv. 

'  O  us  tournaimes  bride  pour  venir  par  Balbec,  qui  eft  bMcc. 
;  vne  antique  ville  de  Phenice,  de  grande  renommée, 
i  aflife  aux  racines  du  mont  Liban.  Approchas  de  Bal-  - 
•  oec,trouuafmes  vn  fepulchre  en  la  campagne,foufte- 
>  pilliers  courts  Se  ronds  ,  faits  de  la  pierre  Thebaiquc, 
dont  le  frifte  eftoit  vne  voûte  de  groffes  pierres  deffus,  qui  fe  ter- 
mine en  poinde.  La  ville  de  Balbec  eft  iituee  en  beau  lieu >  Se  eft 

VV  iij 


J41  SECOND'    LTV  RE       DE~S;    SINCmAv. 

maintenant  quafi  toute  ruinee.Ses  ruines  monftrent  qu'elle  aauv 
tresfoisefte  quelque  chofede  grand.    Il  y  a  vn  Chafteau  qui  eft 
.      ,      quafi  entier  ,  ou  Ion  voie  neuf  hautes  colonnes- plus  groftès  que 
Baket         celles  de  l'Hippodrome  de  Conftantinople.    Et  au  {fi  vne  autre 
colonne  droioie au  deiTus de la.vilîe  ,..  quafi  femblable  à. celle  ds 
Bbmpee  près  d'Alexandrie  :  fur  laquelle  vjl  vn  chapiteau  quarré, 
qui  cft  la  couuerture  de  ladide  colône.  Il  y  a  pluiieurs  p!atesibr~ 
mes  de  pierre  de  taille  dedans  la.villeyfaites  en  manière  de  fepul- 
chresjnfcrites  des  lettres  Arabiques.    Les  habitans  font  pou r  la 
plnfpart  luifz  >  qui  dient  que  ce  fut  Salomon  qui  kfcitbaftir. 
aune  Von*  Mais  ceft  celle  qui  eftoit  nommée  Ccfaree  de  Philippe  5  dont  S* 
tâwes  ivk     Paul&it  mention  d'y  auoir  eiterc'eft  là  auprès  ou  pafîent  les  fbn» 
jordADK.     taincs  du  Iorda-in .  Les  murailles  ne  font  guère  hautes ,  mais  fonc 
de  h  plus  belle  emaalleure  de  pierre  qu'-en  viiîe  de  tout  le  monde, 
Carceftvn  édifice  le  pïus  fumptucux  qu'on  fçauroit  regarder, 
ouiln'y  anulzfofîcz.  Vn  home  curieux  des  antiquitez  ne  pour» 
ZxntùmtéZ  roity.ok.CQUt.  ce  qui  eft  à  Balbec  en  huit  iours  :  car-il  y  a  plusieurs 
deCefiree.^   chôïes  antiques ,  &:  fort-notables  ^  qui  font  hors  de  noflre  obier* 
uation^uiïin'y  arreftafmes  nous  pas  lôg  temps.  Nous  y  trouuaf- 
mes  du -vin  >.&  feimies  prouifion  de  viures ,  '6c  dinafmes  là ,  &:  fur 
le vefgrc  réprimes  noftre  chemin..  Mous  trouuafmes  vne  plate 
forme  faite  de  pierre  de  groffe  eftorre  de  maffonnerie/ituec  fur  le 
pendant  d^vn  couftau ,  ayant  vingt  &:  cinq  pas  de  longueur,  &: 
quinze  de  largeur3fpacicufe  par  le  dedens  r  dont  f es  murailles  ne 
fontgueres  rrautes^toutesfois  font  de  defmefuree  efpoiiîeur.  Ar- 
ia?^,       ducale foir  en  vn  village  nommé  Lubon ,  nous  trouuafmes  va 
édifice  antique  ,  fait  par  les  Romains  >  qui  eft  encor  tout  entier, 
de  greffes  pierres  maffîucs  de  deux  coifes  de  largeur.  Ce  village 
-  eft  bien -ombragé  d'Ormeaux  Ôc  Noyers  :  &eft  arroufé  d;vn  rtrif» 
'^€$tult'des  ^aa  C3ui  àefccnà  ^c  *a  montagne.  Au  partir  de  là,  nous  vinfmes 
probes?      gaigner  vne  plaine.  Quand  nous  fuîmes  vn  peu  aduancez,  corn- 
mençafmesà  moriter  vne  colline ,  ou  nous  trouuafmes  des  Ara- 
bes ,  qui  venoyent  vers  nous-  d'vne  grande  affeuraace  pour  nous 
combatre^quiauoyentlcs  brasxirez  hors  des  manches3pour  plus 
ra^Untife:  2L\Çcmcnt  &  fièrement  ruer  les  pierres ,  &  mieux  tirer  de  Tare  „  en 
j?  monjiwt  £Qltc  qUC  |es  Xurcs  qui  eftoyent  en  noftre  trouppe,  ne  vouloyenc 
pointîe  mettre  en  defenie,ains{èretireret  à  part,  Parquoy  mon- 
feiir  de  Fumçtaaccoirjpagriç  de  piufieursgemils-hommes  Fian* 


OBSERVEES     PAR     *.   3  ECOm  $$£ 

çdis,lcur  ayant  fait  tefte^les  repbulfii  vaillanimcn  t,mxisncm  fans 
yauoir  des  bleffez  dVne:part&«l'autre.  Noospaflafmesnoôre 
clici»^*^ necheminafmcs  gueres  que  ne  viniEons  en  vne  gran- 
de plaine,qui  cftièmblable à  celle  de  Damas,en  laquellel'eau  eft 
conduicl:eparpetïtsrui$èletz,cn  force  que  tout  le  territoire  eft 
rendu  fertiîe:car  ilz  ont  les  champs  vnis,comme  me^efquclz  co- 
duifànsFeau  tout ainfiquik veulent ,  les  rendent  fertiles.  Lon Mewien 
voit,grand  nombre  de  villages  de  coké&  d'autre  r  qui  cultiueDt  ™ancs: 
les  arbres  diligemmen  t-.mais  fur  tout  les  Meuners,coks  &:  blâcs, Meumrs 
que  nous  penfons  mal  eftre  Sycomores  :  Se  nourrifTent  gradqua-  -  •»*  »    •_ 
cité  de  ^serms  à  faire  la  foye.  Hz  cukiucnt  les  Mcuriers  noirs  &;  Fi-  ^;m. 
guiers  en  forme  de  bois  tailîisicar  les  fueiîks qui  en  lomnouoei-  ^Ahfmth'm 
lementprodui&cs  en  font  plus  tendres  3  d'autant  que  lefiQneûfenpbwm. 
de  mefmes  bourgeons  de  l'année.  Nous  trouuions  au  m  de  l'her-  -^ftefi  md 
bed'Àbfînthiumferiphiura,  Eupatoirede  Mefue,croiiïàns  {^x.^iemx 
les  çhemins.Il  e{t  bien  rareen -Syrie  &  A-fie  de  voirqucîque  beau*  Am?s* 
bairiment  par  les  champs.  C  eftquç  laplus.grand'  partie  des  ho-: 
mesduleuant,&detoutcAûe  ,  comme  Egyptiens  >  Syriens  &,. 
Arabes,{bntefclaucs  >&,par  ainfine  font  point  de  grands  bafti- 
mens  par  les  champs,commc  Ion  fait  en  Europe.  De  ce  aduient 
que  les  pays  pour  la  plus  grand'  partie  ion*  deîhuez  d  agricultu- 
re. Et  comme  ilz  ne  baftilfent  point  aux-champs,  les  baâimes  des 
villes  font  mefmemenr  de  moult  petite  eftorîc,  Laraifoneneft, 
que  lanoblefTe  au  pays  du  Turc  n'eft  pas  fcmblablc  à  celle  des 
autres  pays  des  Chreftieps ,  qui  y  viennent  de  père  en  6iz,  Mùs^oLlefedâ 
celuy  entre  les  Turcz  tiendra  la  première  dignité  après  le  grand  Turquie. 
jfeigneurjqui  ne  feaitdonc  il  eû^nequi  (ont  fes  pere,&:mere5  ains^g^v/* 
quiconquç-eft.payé  de fouke du  Turc ,  f  e-ftime élire  autant  gen-  TliriH^ 
til-hqmmecomrac  eft  le grand.Turc  mefme.  Cela  donc  ne  leur  0rilm^ 
vient  de  pereen  filZjCommeauxgentilz-homcs  Latins^  Qtçcs.  n°°  "Me' 
Toutesfois  la  noblciîè  neftainfï  eftimee  en  vn  pays  comme  en 
lautre:car  la  plus  grande  partie  des  nobles  en  Itaiie,commc  Flo- 
rentins, Venitiens,&:  de  plusieurs  autres  républiques,  font  le  tra- 
£c  demarchandife,$:  aucresjpra&iques,  qavn  homme  de  noftre 
région  nepcutcxerQ^-làr|sper:dre  ion  tiître  de.nobîefïè.  Chofè 
que  trouuons  conforme  à  ce  qifHerodoteaefcrit  touchant  l'an- 
cienne noblefle  des  Egyptiens  ,quii\;itimoyent  plus  que  les  au- 
tres hommes  du  pays,  pour  n'exercer  les  artz  mechaniques  3  & 


344  SECOND    XÏVRE     DES     SÏNGVLÀ.V 

poureftreles  premiers  appeliez  à  la  guerre,  à  laquelle  dignité  ilz. 
heritoyent  de  père  en  filz.  Et  pource  que  les  républiques  ont  eu 
diuers  iugemens  en  la  noblefte  des  hommes  ,  nous  voulons  dU 
re  quelle  cil  ainû*  qu'on  la 'veut  eftimer.   Ariftote  a  ainfi  dit; 
Nubile  enim ,  tdefl  >  qupdex  bono  proditt  aenere  :  jrenerofomautemyquoâ 
non  kfu&  natura  degmerxuit.  Par  ainii  îlconclud  ,  que  qui  eftle- 
gitioaement  engendré  de  père  &  mère  de  race  non  corrompue* 
cft  noble  ;  aum*  il  nomme  généreux  celuy  qui  n'eft  point  aba- 
ftardi  du  noble.  Le  plus  grand  honneur  &  bien  que  puifTe  auok 
vn  homme  en  Turquie,  cft  de  faduouer  eftre  efclaue  du  Turc, 
comme  en  noftre  pays  difons  eftre  feruiteur  de  quelque  Prin- 
ce. Et  pource  que  partie  du  bien  des  efclaucs  retourne  au  Turc 
après  leur  mort,  ceux  qui  ont  dequoy ,  ne  lemploycnt  pas  en 
baftimens  :  aum"  les  maifons  des  Turcs  font  petites  logettes ,  au 
regard  des  noftres.  Continuans  noftre  chemin  ,auionsles  mon» 
tagnes du  Liban  à cofté gauche,  6c  celles  qui  eftoyent  ioignanc 
noftre  chemin ,  e||pyent  verdoyantes  des  arbres  de  Terebinthes^ 
Andrachnes ,  Arboufîcrs  >&  Eîeprin.  Nous  perdifmes  le  mont 
1a keL       Liban  de  veue ,  lequel  auions  pâfïe  les  iours  precedens  :  ÔC  com- 
mençafmes  àtrauerfer  des  montagnes  ,  lefquellcs  fefîargiftans 
de  cùûcôc  à  autre  v  extournent  vne  grands  campagne  ,  en  la- 
quelle nous  defcendifmes  au  pays  de  Cilicie.  Apres  que  nous 
eufmes  cheminé  vn  peu  par  la  plaine  >  nous  repofafmes  vn  peu 
en  vn  Carbafchara.   Les  Carbafcharas  des  Turcs  en  Aiïefonc 
faits  d'autre  forte  que  ceux  des  Arabes  :  car  les  portiers  àcs^ 
vont  point  Çarbafcharas  vendent  Forge  aux  paftàns  pour  donner  à  leurs 
iypSe  /*  Chameaux  :  car  dauoine  ilz  n'en  ont  point  en  ce  pays  là.  Ce^ 
uoiae.         luy  qui  vend  ceft  orge  ,  en  paye  la  gabelle  au  Turc.  Ce  iour- 
chmtéx  des  d'huy  noftre  iournee  fut  petite  ;  car  nous,  logeafmes  deaanc 
TuranemZ*  ^idy  àcaufe  des  bleiTez. 

&»*"*  Que 

forge*  •  ^" 


OBSERVEES     PAU     P.     BElON.  $45 

Que ^ancienne manière  de  manger  les  femences  de  Terehinthes ,  dure  en- 
cor pour  le  iourdbuy  en  Cilicie  &  Syrie. 
Chapitre      xcvi. 

Aintenant  ne  voulons  pafTervnechofe,  qui  nous 
|  |)  fembia  eftrange,{ans  la  dire  :  c'eft  que  trouuafmes 
\  va  payfan  Arabe  au  prochain  village  de  noftre 
Carbachara ,  qui  menoic  vn  chameau  chargé  de 
_  _'  femences de  Tcrebinthes:car  les  prochaines  œo-  1**?  j". 

tagnes'font  couuertes  de  telz  arbres,dont  Hz  recueillent  la  gum-  Terebmthine 
me,  qu'ilz  portent  vendre  en  Damas.  Mais  celle  que  Ion  vend  au  y£fAmie. 
Caire,eft  apportée  du  pays  d'Afamie.Lc  pays  que  les  Turcs  nom-  Mefopota* 
ment  Afàmic,les  Latins  le  nommèrent  Chaldaïque,  dont  Baby^  «**. 
lone  eft  le  chef,  comprenant  toutesfois  la  Mefopotamie  &  Àf-  ^B™- 
fyrie.  Parquoy  les  Turcs  comprennent  toutes  les  deux  en  Àfà- 
mie,  fçauoir  eft  la  Mefopotamie  &  Aftyrie.  Nous  auons tcfmoi- 
gnage  des  autheurs  dignes  deftre  ouys,  qu'il  y  a  plus  de  deux  mil 
ans  que  les  hommes  auoyent  vfàge  de  manger  celles  graines  de 
Terebinrhes,&  que  les  Perfes  en  ont  vefeu  auant  i  vfàge  du  pain» 
Cefte  femence  eft  de  û  exquife  couleur  bleue  ,  qu'elle  furpaiïc 
toute  aucre  couleur  azurée  :  aufîi  tous  les  anciens  autheurs  Ara-  Craaum^lm 
hes  h  admet  Granum  vtrideicàx  elle  tire  entre  le  verd  &  le  cerulec. n  " 

"De la  ville  de  Hamous ,  anciennement  nommée  Emijfa. 
Chapitre     xcvn. 

E  iour  venu,  nous  cotinuafmcs  noftre  chemin  par 
'  la  fufdi&e  fpacieufe  campagne  ,  ou  trou  u ions  de 

l'herbe  de  Smirnium  &  Leontopetalon  :  &  paftàf- 

mes  par  la  ville  que  les  Arabes  nomment  Hamza,  smrnium. 

les  Turcs  Haman,&:  anciennement  EninTa.  Cefte  zeomoma* 
ville  eftoit  anciennement  bien  m  urec  de  pierre  de  taille, 8c  encor  Ion. 
pour  le  prétention  voitfes  murailles  debout-.aufUily  a  vntercre  &*»%£ 
eleué  moult  haut  dedans  le  circuit  des  murs,qu'on  voit  aifement  H*™**- 
de  toute  la  pîaine^eflus  lequel  eft  ficué  vn  Chafteau ,  qui  futan-  E™]Jh 
ciennement  édifié  par  les  Romains.  Encor  y  a  vn  fepulchreà  ^  re 
double  eftage  ,  hors  la  ville  >  haut  cleué  en  forme  de  Pyra- 

XX 


54^    .  SECOND     'LIVRE     DIS     SIK'GVIA.' 

midcquarree,  fabriqué  de  fortement,  qui  eft  infèrit  des  lettres 
Câim  c*far.  Q.Cques  ^ 'vn  epitaplïe  de  Caius  Csefar.  H  y  a  grand  trafic  de  foye 
en  HamouzraufTi  nourrifTent  iîz  les  verras  moult  diligemment: 
car  iîz  ont  les  iardms  arroufèz  commodément  des  ruiilèaux  ve- 
nans  des  montagnesî&  rendans  la  plaine  fertile.  Hz  cultiuent  les 
figuiers  5c  meuriers  dedans  les  champs  arroufez^aum*  plufieurs 
arbresiruicHers.  Leur  commun  ouurage  eft  de  faire  desmou- 
chouers  &  couurechefs  bigarrez ,  meflez  en  partie  âc  foye  Ôc  de 
Mouchoum  £|  ^,Qr  ^uj£  en  £Qm ^e  ç      |3jânc|ie  roU2c  &  iaune,  entremef- 

vlee  de  fila  or,  que  lontçait  nommer  par  toute  Turquie ,mou. 
chouers  de  Hamouz.  La  ville  eft  titueeen  vne  fpacieufe  &:  plaine 
campagne,  ou  paffent  des  beaux  ruifteaux  par  dedans.  Le  tour 
àcs  murs  eft  quafi  entier ,  mais  le  dedans  eft  ruiné,&  n'y  a  rien  de 
beau  avoir  que  le  Bazarc,  c'eft  à  dire  le  marche ,  &:  Bafeftan ,  qui 
eft-faitàlafaçon  de  Turquie.  Les  murailles  monftrent  bien  que 
la  villea  efte  autresfois  quelque  grande  chofe ,  auffi  eft  elle  attife 
en  bon  pays.  Nous  trouuaftnes  de  toutes  fortes  de  victuailles.  Ec 
d'autant  que  les  Grecs,  Armeniens,&  Iuifs  font  efpars  par  toutes 
villes  entre  les  Turcs,ceb  eft  caufè  qu'ayons  toufiours  trouué  du 
vin  par  toutcsles  villes ,  ou  nous  arnuions. 


Chaufet. 
ZMum. 

Pufeo, 
Thufid. 


ôxt&Atum. 


£>es  tduernesde  Turquie  5  ou  les  Turcs  hoiuent  vne  manière  de  breuuage^ 

nommé Pofca  ou  Zitum^,  différent  à  laBiere. 

Chapitre      xcvin. 

Remierement  obfèraafmes  en  Hamouz,quel'vfa- 
ge  de  fairelebreimage  ancien, nommé  Poica,n'eft 
du  tout  aboly,&:  voulons  dire  en  outre ,  qu'il  n'y  a 
ville  en  Aûeouilnyaitdes  tauernes  qui  vendent 

__ le  fufHicï  breuuage.  Hz  le  nomment  vnlgaircmenc 

Chou{fet,quieftceluy  que  les  anciens  Grecs  ont  nommé  Zi- 
tum ,  les  Latins  Pofca,ou  Pufca,ou  Phufca,des  mefmcs dictions 
Latinesdonc  Suétone  &  Columelle  ont  vfé ,  comme  aufli  Sera- 
pium,&  Auicemieen  ont  fait  mention.  C'eft  vn  breuuage  blanc 
comme  laid ,  efpois ,  &  bien  nourriCnt ,  &:  entefte  beaucoup 
ceuxquien  boyuent  par  trop  ,  iufques  à  lesyurer.  Lon  apenfé 
quePofcha  fiift  Oxicratum  ,  mais  c'eft  bien  autre  choie.-  car 


.  O B ■$  E  JL V.  E  £  S    1? & K   F.    B  E  tO  N.  347 

~Qxîcratamcftjccllc  ehofc  qui  eft  maintenant  en  vfage  és-vaif- 
feaux  Grecs  &:  Italiens ,  Se  mefmement  les  Churmes  des  nauircs 
&  Galères  Vénitiennes  en  boyucnt  ordinairement  :  Car  eftans 
far  mcr,font  contrain&s  de  garder  les  eaux  mouît  long  temps, 
iufqucs à  f  empirer  Se  empuantir.    Et  pour  luy  ofter  le  mauuaïs 
gouft  quelle  a  acquis  d'auoir  long  temps  demeuré  dedans  les 
vaifFeaux,lon  y  méfie  quelque  peu  de  vinaigre,  qui  luy  donne  va 
moult  phifant  gouft,&;  cela  eft  OxycraturnTMais  Pofca  ou  Po£ 
fez  ou  Cbouflet  différent  à  la  Biere,eft  ce  que  les  anciens  ont  no-    . 
mé  Curme,moult  dirTerentà  rOxycratum.  Le  Gurmi  (  c  eft  à  ai-  ^^ 
re  Bière  )  eft  fait  de  grains  entiers  &:  quelquesfois  caftez.  Mais  le 
Zitum  ou  Pofca  maintenant  nommé  Poifet,eftfait  de  farine  rai- 
£è  en  pafte5qu'on  fait  cuire  dedans  vne  grande  chaudiere,puis  oa 
ie&e.vne  bouîe  de  ladi&e  pafte  dedans  de  l'eau ,  qui  incontinent 
boule  d'elle  mcfme  Se  fechauiïè  fansfeu, tellement  qu'il  en  eft 
faite  vne  beuuette  efpoifle.  Son  efeume  eft  blanche  Se  legere,que 
les  femmes  Turques  achètent  volontiers  à  fe  £àrder,d*autant  que  £emefte  er 
elle  rend  la  chair  moult  délicate  Se  tendre>&  faut  qu  elles  en  por-  p0ljfe. 
tent  aux  bains  pour  f  en  frotter.  C'eft  vne  enièigne  au  Zitum  que  Efeume  ds 
les  anciens  au  theurs  n'ont  pas  ignorée.  Parquoy  ne  fe  faut  abu-  pfia. 
fer  penfant  qu'Oxycratum  {bit  Pofca,mais  trop  bien  que  Zitum 
Se  Pofca  eft  vne  mefme  chofe,dirferecà  la  Bierc,que  difonsauoir 
nom  Curmi  :  Se  pour  prouuer  que  Pofca  n'eft  pas-  Oxycramm, 
vn  fèul  pafîage en  Suétone  fatisfaif,qui  ditquVn  efclaue  de l'Em- 
pereur fugitif  fut  trouuéen  la  ville  de  Capuc  vendant  du  Pofca, 
Se  fil  n'y  euft  eu  autre  chof&en  ce  breuuage  non  plus  qu'en  Oxy- 
cratum ,  il  eft  manifefte  que  fa  tauerne  euft  efté  mal  achalandée^ . 
&£n'cuft  pas  fait  grandprofit. 

•  PeUviUeàeT.iLvfiiSydonteJîokSxmEîPâuL     Chapitre     xcix. 

j  Artans  de  Hamouz  long  temps  auantiou^paftàfmcs 
4  de  nuid  vn  lieu  fîtué  fur  la  colline,  qu'on  dit  eftre  les  seo^ofoUs, 
^ruines  de  la  ville  qui  auoit  nom  Sebaftopoîis  ,  ouen- 
l  cor  pour  l'heure  prefente  Ion  void  pi  ufkurs  colonnes 
droites ,  que  les.  vns  dient  eftre  du  palais  d'Herodes ,  les  autres 
d'Herodien.  Mais  la  commune  opinion  des  gens  du  pays  eft  que- 
ce  font  piliiers  d'vne  Eglife  Saind  Iean  :  difanc  que  ce  fur, 
"    .  *  *'    XX. ij.' 


Orous. 
^Martia. 
Irk 
Sdh<eu$  CAtn- 

-F* 


Borna. 

Uamjà. 
Tarfus. 


wft* 


Pays  de  S. 

Paul. 

GifcaUs. 


54S  ^  SECOND      LIVRE    DES    SINGVLA. 

là  ou  il  fut  décollé.  Delà  dcfccnàiCmcs  envnc  vallée  pour  paflèr 
vncriuïcredenus  vnpont  de  pierre,  que  plusieurs  eftimenteftrc 
Orous,lcs  autres  Iris,îes  autres  Martia:elledcfcend  impetueufe- 
ment,  &  fait  mouldre  des  moulins.  Puis  nous  fallut  remonter 
pourgaigncrla  plaine,  qui  (à  noftre  ^auis)auoit  anciennement 
nom  Saba;us  campus ,  qui  eft large  &fpacieufe  d'vne  bone  iour- 
nee ,  totalement  fterile  d'arbres.  Lon  y  femë  de  la  Scfame  &  du 
Coton  :&ainficontinuans  noftre  chemin  arriuafmcsenlaville 
de  Hama,ou  autrement  Hamfa,  qui  eft  celle  qu'on  nommoit 
anciennement  Tarfus  :  Elle  eft  à  demie  iournec  de  Hamous.  Il  y 
a  quelques  gens  modernes  qui  penfent  que  Hamous  eft  Apamia 
des  anciens.Cefte  ville  eft  afïife en  vne  vaîlee,laquelle  eft  ancien- 
nement moult  peuplée ,  comme  il  appert  par  fes  murs  de  grande 
eftendue,&  ruines  qui  y  font.il  y  a  vn  Chafteau  ruiné ,  efleué  fur 
vnecoIline,commeceluy  deHamous.Lon  y  voicpluficurs  gran- 
des^; hautes  tours  antiques.  Nous  nefçaurioos mieux  accom- 
parex  ce  pays  de  Cilicie  ou  eft  fitué  Tarfus,  fîno  à  la  Beaufe.Vray 
eft  que  le  long  des  orces  du  fleuue  Cidnus,  qui  pafle  par  le  milieu 
delà  ville,il  y  croift  des  Figuie^Meuriers,  NQvers,&  autres  ar- 
bres;  fruitiers: mais  les  champs  font  fans  arbres. La  grande  corn^ 
modité  de  la  riuierc  qui  arroufe  les  iardins  auec  de  moult  hautes 
roues,fait  qu'il  foit  aftez  bien  peuplé  :  car  eftant  le  lia:  de  la  riuie- 
rebienbas  ,  &  l'eau  de ces  grandes  roues»  leuee  par  canalz,ferc 
aufliaux  baîngs  &  cftuues  de  la  ville.  Il  y  a  anfïi  de  grandes  Mof- 
quees  âftèz  bien  bafties  :  mais  les  maifons  font  mal  efparfes  ça  Se 
là  deflus  des  collines.  Lon  paffe  la  riuiere  qnafi  à  gué.  Elle  eft  ar- 
reftee  par  petites  efelufes,  qui  font  moudre  des  moulins.  Aufti  il 
n'y  a  qu'vn  petit  pont  de  bois.  Hama  ou  Tarfus  eft  le  pays  de 
Saind  Paul ,  non  pas  qu'il  fut  n'ay  ià:car  il  eftoit  natif  d'vn  villa- 
ge nommé  Gifcalis  au  pays  de  Galilée  ioignant  la  mer  Tiberia- 
dis.Nousnefeiournafmes  pas  longuemetàTarfusxar  après  que 
noz  montures  eurent  repeu  a  nous  continuafmes  noftre  che- 
min. 


OBSERVEES     PAR    P.     BELON,  "     549 

Vespldncsde  Cilicie  ^&  dès  cifternes  encaueesmterre^  quiferem- 
pltjfmt  d'eau  depluye.  Chapitre       c. 

J  Ourfuyuas  noftre  chemin  par  pays  déterre  argilleuv 
5  fe*&  campagnes  fpacieufes  fans  eaux ,  nous  fembloic 
'  cheminer  au  pays  de  Beaufe,ou  au  pays  de  Lodunois: 
^a?&9i>ç*A  car  l'ori  ne  fçauro*c  cauer  vne  aulne  en  cefte  terre  de 
Cilicie,  qu'on  n'y  rrouue  la  roche ,  tout  ainfi  comme  à  Loudon  Tufuu' 
letuffeau.  Leshabitansde  Cilicie  curieux  de  leur  vie,  ont  bien 
feeu trouuer  inuention de  garder  leau delapluyepourleur vfa- 
ge,&abbrcuuerleur  beftial:  car  ils  ont  fait  des  cifternes  dedens 
le  roc  deftbus  terre,laiflans  vne  petite  gueule  en  haut,par  ou  Feau 
ventre.  Etfî  quelquesfois  leau  des  cifternes  leur  faut,  ils  font 
contrainds  en  aller  quérir  à  plus  de  quatre  lieues  de  là.  Conti- 
nuans  la  campagne  nous  ne  vcifmes  vne  feule  herbe ,  excepté  des       ,   , n 
Afphodelîes  &r  quelques  Férules.  Ce  pays  eftant  femblable  à  vne  F^^ 
Beaufe,eft  différent  en  labourage,  d'autant  qu'ilya  aflèz  d'agri- 
culture en  Beaufe ,  mais  il  y  en  a  peu  en  Cilicie  :  auiîl  faut  qu'ils 
aillent  quérir  le  boisxs  montagnes  voiiïnes ,  à  plus  de  deux  iour- 
nées  de  là.Pour  ce  défaut  ils  fement  les  terres  d'vne  forte  de  grain, 
que  les  Italiens  ne  François  ne  cognoiflènt  point.Ilcft  quafifèm- 
blabîcau  Sorgo  de  Lombardie,  auffi  ne  diffère  finon  en  couleur:  ZBÏu^ 
car  le  Sorgo  eft  rougeaftre ,  &  l'autre  eft  blanc  :  duquel  ne  trou-     d 
uons  aucune  mention  ésautheurs  Grecs  &  Latins  :  ûnon  que  les  Bmamm. 
Arabes  l'ont  nommé  Hareoman.  Les  habitans  ferrent  fon  chau- 
me qui  eft  gros  comme  le  pouce ,  &  en  font  le  feu  en  lieu  d'autre 
bois.  Ils  ont  les  meulles  en  leurs  maifons  dot  ils  meuliet  le  grain, 
&  font  vne  pafte  dure  qu'ils  eftendent  fort  delice,laquelle  ils  cui- 
fentàla  chaleur  du  Soleil:  ou  bien  à  la  manière  qu'vfoyent  an- 
ciennement les  foldats  Romains  ,  lcfqueîs  efchaurïà'ns  vne  tui- 
le à  la  flambe  du  feu  ,  fouftenue  de  deux  pierres  par  les  deux 
bou  ts,e(lcndans  la  pafte  deffus ,  fe  cuifoit  à  la  chaleur  de  la  tuile. 
Les  payfàns  des  villages  font  cuire  leur  pain  en  telle  manière. 
Mais  ceux  des  villes  le  fçauent  bien  cuire  au  four.  Au  parauant  a- 
uions  trouué  ce  mcfme  bled  croiflant  en  Epire  ou  Albanie ,  du- 
quel les  payfans  en  apportent  grades  fâchées  au  marche  de  Cor- 
phuydont  ceux  de  lifte  nourriftenc  les  pigeons.  Nous  ne campaC- 

XX    iij 


3)-,a  SECQ  KW  XIV  RE     D  F  S    S  IN  G  VIA. 

mes  pas  ce  foir  au  Carbafchara  :  car  la  pîuyc  nou£  contraignit  de- 
meurer en  vn  village,  ou  nous  trouuafrnesdu  pain  cui&  àlamo- 
de  fufdi&e ,  commcauflîautres  fartes  de  viures  v&  bon  marché 
d'œufs&  poulies.  Le  lendemain  pârtifmesdcbon  matin  pour 
œcompenferlaiourneepTccedcnte,quiauoiteit.é  petite:  &  nous 
dura  celle  campagne  iufques  au  vefpre ,  que  nous  trouuafmes  le 
pays  de  montagnettes,abondantes  en  arbriiTeau  de  la  graine  d'ef 
carlate».  Nous  arriuafmes  aux  ruines  de  Marat  fur  le  vefpre ,  qui 
eftoit  deûa.tard^ 


J%efcrtj?tt<m  des  mines  dé  M%r<it. 


cBap.,    e  r. 


Marat. 
Maroma». 


lujfice  dés 
Turcs. 

Mmlere 
<Fempder 
Us  hommes,, 


Àrataeftévnegrande  ville ,  qui  eft  maintenant  tou- 
te en  ruine.  Nous  penferionsaifement  quelle  fut  an- 
ciennement nommée  Maronias:toutesfois  ne  Pofons 
^r,  ,  „afteurer.  Oe-ft  merueilîe,,  veu  qu'il  y  a  fontaines  Se 
ruiffeàux ,  qu'elle  n'eft  autrement  habitée.  11  y  a  feulement  quel- 
ques Mofquees ,  &  bien  peu  de  maifons  délions  des  voûtes.  Les 
ruines  montrent  qu'elle  a.eftéautrefois  belle  ville.  Nous  y  trou- 
uafmes vn  hommeempalé  àk  mode  des  Turcs.  Telleeft leur  iu- 
ftice,  quequand  quelque  délinquant  ou  forfaiteureftc6uaincu? 
on  îuy  lie  les mains  Se  les  iambes  à  quatre  paux  fichez  en  terre,  Se 
puis  ont  vn  palis  de  bois  qu'ils  fourrent  par  le  fondement,  Se  le 
frapper  à.coups  de  mailletsjufques  àfaire  fortir  le  bout  par  quel- 
que endroid  du  corps  près  deîatefte  :  puis  l'eleuent  tout  droid 
eftant  là  fiché.  Le  pauure  homme  demeure  là-empalé  les  iambes 
contrebas^  les  bras  cftendns.  Telle  manière  dempaler  n'eft  fa- 
çon moderne  :xar  Hérodote  fait  mention  (  quand  il  parle  de  la 
fèpukure  des  Scythes,  qui  font  ceux  dont  les  Turcs  font  defeen- 
dus)  que  quand  le  Roy  des  Scythes  eftoit  trefpaffé ,  entre  autres 
cerimonies  qu on  auoitaccoufturaé  faire,  l'on  eftfangloit  cin- 
quante ieunes  garçons de  Ces  efdaues ,  qu  ils'eropaloyent  &  fl- 
choyent  aueç  vn  pau  le  long  de  lefpine  du  dos  iniques  à  Ja  tefte: 
$C  puis  enterroientk  partie d  embas  du  pàu  enserre  à  1  entourda 
ïèpulchredeleurRoyl.Nous  difons  donc  que  cela  fe  refent  de 
l'antiquité  &  des  couftumes  de  leurs  anceftres,  nentedans  feule- 
ment que  de  la  manière  dempaler:  car  on  ne  le  fait-plus,  àcaufè 
^Içuïfcpiikurc.  Marat  eft  à  my  chemin  d'entre k ville  de. Xax- 


OBSERVEES     PAU     P.    BEXON.  #2 

ïon&Hâîep.  Lescâpagnesdece  territoire  font  femees  dcfour- 
ment,  orge ,  cocon ,  &  fêfàme ,  efquclles  il  ne  croifb  va  feu!  haut 
arbre,  ne  petit  arbrifïèau.  Nous  dormifmes  dedans  vn  Carbaf- 
chara.  Le  lendemain  continuafmes  chemin  par  vne  campagne 
àuffi  vnie  qucfMa  plaine  mer  :  qui  nous  dura  tout  le  iour.  La  ter- 
re y  cft  labourée  à  la  façon  qu  auons  di&e ,  parlans  de  Syrie.  Le 
principal  du  rcuenudu  pays  eftîe  coton  &lafefame ,  qu'ils  fe- 
mentaumoysde  Iuin.  Noûs'nc  faifons  "point  de  doute  qui  ac- 
couftumeroie  d'en  fèmer  en  France,  qu'elle  n'y  peufi  aufil  bien 
venir  qu'en  Afic.  Décelé  pays  dltalicencfttefmoing,  qui  du  ^       , 
temps  des  Romains  eftoit  enfemenfé  de  fefa*ne&:  coton  :  miis,mo^ 
maintenant  il  n*y  en  a  vne  feule  plante.  Le  coton  nefi  pas  demy 
an  en  terre  :  car  on  le  moy  {Tonne  en  Septembre^  le  feme  Ton  en 
May  ou  Iuiliet  :  mais  il  le  faut  refemer  tous  les  ans.  Toutefois  en 
auons  crouué  es  iardins  du  Caire,excedant  la  hauteur  d'vn  hom- 
me, qui  dure  fans  mourir.  Il  y  a  encore  vne  autre  manière  de  co-  ^mx     m 
ton,qu'on  apporte  des  Indes  ou  du  Brefîl, moult  différent  à  celuy 
quinaift  en  Afie  :  car  celuy  du  Brefil  fait  fafemence  grofTe  icCQtm  ^ 
•noire,  afiembleeen  petits  monceaux  ,  comme  de  dix  à  douze  BrefiL 
grains enfêmblc,  au  contraire  de  celuy  qui  croift  en  Afic-,  qui  la 
portegrainà  grain.  Il  eftoii  défia  bien  tard  quand  trouuafmcs 
vnruiffeau  qui  s'cfcoulle  vers  Halep:  &  ayanspaâe  le  ruifieau, 
laiuafmes  la  terre  molle ,  &  entrafines  en  pays  pierreux  de  mon-      •.     -. 

tagnes  &  rochcrs.Nous  commeçafmes  a  voir  des  Oiiuiers,  nom-  nr  y™** 

&  .  .  j  ti     •  ■    i-  j         '£**** de 

mieTSjpoinerSjprunierSjâmandiers.  Il  n  y  a  que  crois  lieues  de  ce  j^* 

ruifTeau  iufques  a  Halep ,  ou  arnuafmes  bien  tard ,  &  logeafmes 

chez  vn  gentiiiiomme  Vénitien  ,  que  la  feigneurie  de  Vernie 

y  encretientpour  le  trafic  de  k  marchandif e. 

De  la  ville  de Hdlep^anàenncmmt  nommée B errât: &deh  Rheubarhe, 
&  Rhapontic.  Chapitre      en, 

i  Àîepaeftéenrenomde  grandeur  détente  antiquité: 
î  car  cefl  la  ville  de  tout  l'Orient  qui  eft  du  plus  grand 
J  trafic  :  auffi  eft-ce  le  fiegedeComagene.  L'on  penfè 
lè^Z^Sè^c  qu'elle  a  prins  fon  nom  en  Arabe  ,  entant  comme      .  « 
A^cpu  ett  la  première  lettre  de  l'alphabet,  tout  ainfi  Halepcft      *?' 
la  premiers  ville  de  la  région  ou  elle  eftfkuce.  Nous  fçauons 

XX    îïij 


Jjlerafolis. 
JBcrrea. 


%heubarle. 

%ka,fonuc. 

%bexbdrbe 

deSeni. 

qheularbe 

des  Indes. 

qbeubdrbe 

^^€j^rïe. 


3^2  SECOND      LIVRE     DES     SINCVLA. 

qu'il  y  a  au  theurs  modernes  quipenfent  que  ceft  elle  qu'on  no- 
moic anciennement  Hierapolis ,  combien  que  Gillius  a  efté  d  o« 
pinionquelleauoit  nomBerrea*  Les  Carauannes  qui  viennent 
de  Petfe,desIndes5deMefopotamie,  &r  autres  parties  d'Orient, 
fê  defchargcntà  Halep.  Ceux  qui  veulent  aller  en  Indie,  Perfe, 
ou  autres  parties  du  leuant,  trouuent  toufiours  marchands  qui 
vont  5c  qui  viennent en  Halep.  Et  pour  autant  que  ceft  vne  vil- 
le ou  toute  là  marchandage  de  leuant  ardue,  les  Vénitiens  y  tien- 
nent vn  Conful ,  comme  AmbafTadeur  ,  à  fin  d'enleuer  les  mar- 
chandifes  pour  enuoyer  es  prochains  ports  de  la  mer  Méditerra- 
née, comme  à  Tripoli  &  Baruk.  Et  à  fin  qu'ils  ayent  meilleure 
prâdique  des  marchandifes  de  rOriét,iîs y  font  nourrir  plufieurs 
de  leurs  enfans,comme  aufiî  es  pays  eftranges ,  ou  ils  apprennent 
le  langage  du  pays,  6c  la  manière  de  faire  des  habitans/  Quand 
il  arriue  vne  Carauanne  chargée  de  quelque  marchandée  en 
Halcp,eileeftenleuee  du  lour  au  lendemain  :  car  il  y  a;  des  riches 
marchands  en  argént,qui  l'achètent  incontinent.  Là  plus  gran- 
de partie  des  Rheubarbes  qui  font  apportées  en  Europe,  ont  efté 
acheptcesàHalep,  ou  les  habitans  font  couftumiers  d'en  voir 
quelques  fois  arriuer  douze  chameaux  d'vne  compagnie  tous 
chargez  de  Rheubarbc,  apportée  du  pays  d'Âfamie,  oùelleeft 
diligemment  cultiuee.  One  n'auons  trouué  homme  qui  nous  ait 
ditauoirveuquelleefUapîantedela  Rheubarbe,  de  la  vertu  de 
laquelle  Mefue  au theur  Arabe  en  a  amplement  parié  :  mais  il  n'a 
onc  fait  aucune  mention  du  Rhaponric ,  dont  lés  Grecs  ont  tant 
faitd  eftime  :  Se  luy ,  qui  eftoit  demeurant  ou  en  Damas ,  ou  en 
Halep,  dit  qu'on  y  apportoit  les  Rheubarbes  de  (on  temps  du 
pays  âcs  Indes  Se  de  Seni,qui  cft  à  dire  du  pays  d'Afamie  ou  AiTy- 
rie,&en  tiers  lieu  de  Barbarie,  quartement  de  Turquie.  Et  dit 
âuffiqucles  gens  d  a  pays  mettoyent  les  pièces  deRheubarbe  tre- 
per  en  de  l'eau  pour  en  tirer  la  fubftancc,  laquelle  eftant  cfpoïf- 
îie  Se  defèichee ,  en  faifoyent  des  Trochifques ,  Se  que  puis  après 
refeichoyeut  les  pièces  de  Rheubarbe^u'ils  apportoyent  vendre 
aux  marchands.  Cela  pouuoit  bien  eftre ,  que  les  marchands  fai- 
foyent cela  de  {on  temps  :  mais  maintenant  fçachans  qu'ils  onc 
grand  prouffit  en  la  Rheu barbe, Se  que  chaque  nation  la  tient  en 
v&gc,  ils  la  cultiuent  fi  foigneufèment  ;  qu'ils  l'ont  en  fi  grande 
*qiiantici,que  celle  fois  qu'eftionsen  Halep  >lon  en  donnoit  dix 

liures 


OBSERVEES     PAR    P.     BELOîlV  JJJ 

Hures  pour  douze  ducats.  Toùtesfois  clic  n'eft  pas  toufîoursen 
vnpris:carquandîaCarauanncn*cn  apporte  que  bien  peu  d'À- 
fàmie,ceîa  eft  caufe  de  la  rendre  plus  chère  Tannée  d'après.  Elic 
cil  cuîtiuee  en  A  faillie,  c'eft  à  dire  Mcfopotamie,  auquel  lieu  ils- 
lafementdegrene:  &rfait  Tes  racines  grofTes  comme  la  Coule- 
uree5&  quand  ils  l'ont  defracinec ,  ils  la  taillcm  par  rouelles  pour 
la  defeicher  :  Se  en  fê  defeichant  ainû*  que  l'humidité  ieconibru- 
me,les  pièces  en  deuiennent  ridées.  Parquoy  pluûeurs  la  voyans 
aînfi  retiree,onr  penfé  que  cela  prouient  de  i'exprefÏÏon ,  Se  tou- 
resfois  l'expérience  montre  que  cela  eft  le  contraire.  Et  pour  en 
eftre  plus  certains,nous  cftansenquis  des  marchands  qui  viennec 
en  Halep,à  fçauoir,fi  on  en  fait  infuuon;  auos  trotiué  que  peu  de 
gens  en  ont-1'vfage  au  lieu  ou  elle  eft  culttuce ,  Se  qu  ils  vfent  peu 
de  medicamens  prins  de  Rheubarbc.  Quand  iifons  les  autheurs 
de  noftre  temps ,  difputans  de  la  Rheubarbe ,  .en  trouuons  qui 
font  en  doute ,  àièauoirfîles  anciens  Tout  cogneue  :  car  neus  rc-  *}?*îQnns~ 
putons  les  autheurs  Arabes  pour  modernes  au  regard  des  Grecs. 
Parquoy  voyans  que  Mefue  la  diftingue  en  quatre  cfpeces  >  Se 
qu'il  n'a  point  parlé  du  Rhapontic,  Se  fçachans  que  les  Carauan^ 
nés  d'À&mie  n  apportentque  de  la  Rheubarbe^  auons  faeiiemét 
conclud  que  là  ou  Mefue  a  nommé  la.  quatriefme   efpccc  de 
Rheubarbe  du  pays  de  Turquie  >  il  entend  du  Rhapontic.  Età^*""^. 
dire  le  vray,le  Rhapontic  eft  moult  fembîableàla  Rheubarbe:     ^l*16- 
&r  combien  que*ne  voulons  entendre  que  çcft  tout  vn,toutcsfois  ç^nxx 
il  eft  manifefte  qulls  approchent  grandement  de  la  vertu  Tvn  de  Styrlx. 
Vautre.  Les  principales  gummes  Se  cfpiceries3comme  eft  Galba-  ^tfafœtidz. 
numxOpoponax3  Styrax,  Àûa fœtida>Scrapinum>&  autres  telles^  serxpimm» 
nous  font  apportées  par  lavoye  de  Halep  :  Se  k  Scammonée.  Tnpok 
Les  dades  dures  font  apportées  en  Halep  d'Aiàmie  :  car  celles  c^°4em  & 
d'Egypte  Se  Afrique  font  û  grafles ,,  quelles  font  empaftees  en-  Bt^'  v 
fèmblc ,  Se  ne  fepeuuent  garder  à  part.il  n'y  a  que  trois  iournecs  ™a™ 
de  Halep  à  Tripol^qui  eft  le  lieu  ou  les  Vénitiens  abordent  pour 
charger  leurs  nauires  des  matchandifes  qu'ils  achètent  en  Ha~- 
Icp.  Tout  le  lendemain  fut  dédié  à  voir  la  ville  ,qui  peuteftre  cô- 
parce  en  grandeur  à  Orléans.  Au  milieu  de  laquelle  y  a  vnc  butte, 
ronde ,  dcuus  laquelle  eft  vn  chafteau y  qui  a  fes  douues  plaines  . 
deau.  AufliyavnSangiacauec  fes  foldats.- Les  murailles  font 
iaitçs  ai  antique  JBt  Sautant  qu  il  eft  en  lieu  ^minent ,  on  k  voie 

YY 


3£4  SECOND    LIVRE     DES     SINGVIA. 

de  plus  loing.  Il  y  auoit  vn  Àfncfàuuagc  nommé  Onagcr,  cnfeiv 
ondger.  m£  dedans  jes  douucs ,  différent  toutefois  à  1* Afne  Indique  qui 
^cjmHs  »*ponc  vne  Licornc.  Au ffi  y  veifmes  vn  oyfcau  quaû*  fembîable  à 

vne  Grue,mais  plus  petit  de  corpulence ,  ayant  les  yeux  bordez 
crus  L&  àc  rouge,la  queue  de  Heron}&  fa  voix  moindre  que  d'vnc  Grue: 
Udrîca.       Se  croyons  que  ccil  celuy  que  les  anciens  ont  nommé  la  Grue 

Balearique. 

Spéciale  deferiptian  des  rues  filon  quelles  font  fûtes  es  villes  &  villa- 
ges deTurqwe*  Chapitre     CI  il. 

|  Amais  les  charrettes  ne  pafTent  par  les  rues  des  bour- 
!  gades  Se  villes  de  Turquie,  nauffi  par  les  marchez, 
t  Car  il  y  a  vn  chemin  au  milieu  de  la  rue ,  qui  eft  ex- 
!  preffement  fait  pour  efgouter  l'eau,  &  pour  le  pafTage 
des  cheuaux.  Les  chemins  font  haufèzaux  deux  coftez  de  la  rue 
en  façon  de  bancs,  qui  font  couuerrs  de  petits  appentiz  poureui- 
ter  la  pluye ,  Se  la  chaleur  de  Fefté.  Et  pource  que  les  Turcs  por- 
tent des  robes  longues  tramantes  iufqucs  en  terre ,  s'ils  n'auoyéc 
telle  manierede  faire  es  vill.es,ils  feroyent  toufioursçrotez.  Telle 
façon  eu  généralement  obferuee^non  feulement  en  Haîep,tnais 
*&*de$  >/^  au  j£  par  coutc  Turquie.  De  là  vient  que  les  rues  des  villes  ne  font 
iesjmspme.  ^  pâUces  ^  &  p0ur  cu  jter  \cs  poudres  par  les  marchez  Se  bafe- 
ftans,qu  on  fait  voler  auec  les  habits  en  temps  d'elle,  chacun  qui 
tient  boutique ,  donne  vn  afprc  par  moy s  pour  ie&er  de  l  eau  de- 
uanc  fà  boutique,laquelle  vn  homme  porte  dedens  vn  oudre ,  ar- 
roufant  tous  les  matins  en  la  rue.  Le  Turc  tient  toutes  les  bouti- 
ques Se  ouurouers  des  villes  en  fa  main,&  les  loue  aux  marchads, 
Se  ne  veut  permettre  que  les  hommes  y  tiennent  leur  mefnage 
au  lieu  ou  cft  affis  le  marché.  Car  Mahomet  défend  que  les  fem- 
Femmes  de  mes  Payent  à  vendre^achcterjne  fe  monûrer  en  publicXes  ou- 
Taram  ne  uriers  quels  qu'ils  foyent,  fe  contenter  du  gain  qu'ils  font  le  iour, 
yotdtt  mar*te  ne  fe  trauaillét  point  la  nui&.Nous  arreftafmes  quelques  iours 
thé.  en  Hûcp:Se  feifmes  le  circuit  des.  murailles,qui  font  de  plus  gra- 

de eftenduc  quecelks  de  Damas,ayans  des  encoigneures  en  plu- 
yilî-  /£**  ficurs  cndroich,comme  es  murailles  de  Ieru  falem.Lcs  tours  qui 
m  ^'    ibnt  à  l*entour,  font  loing  les  vncs  des  autres.  Halep  à  huict  por- 
tes^ agrand  nombre  de  vignes  Se  vergers  Se  beaux  iardinages  à 


-   O  BSTE  >Rjv E  E  5    P  Al    P.    B  E LON.  $?$ 

Fentour  des  murailles ,  ou  ils  cultiuent  des  choux  cabuz,  des  lai- 

érueSjbetccSjporreaux^ignôs,  pour  védrcau  marché.Lcs  Turcs 

Ce  fèruentdcs  antiques  monnoyes  &  medaies ,  à  faire  des  poix  à  f- e     im* 

pefèronces,dcmieonces,dragmes:quieft  caufe  qu'en  auons  re~  " 

couuert  en  plufieurs  lieux  de  Greques  y  Se  Latines  -,  &  quand  en. 

voulions  trouuer,  allions  par  les  boutiques  dernandans  Giaur 

manguour,  c'eft  à  dire  monnoye  de  Chrcfticns:  ÔC  alors  nous 

ayansentendu,mon{troyentcela  qu'ilsen  auoyent»  Les  Turcs, 

A  rabes,Egyptiens,ô£  toutes  autres  nations  duleuanc  fu  bicch  au 

Turc,n'ont  autre  diuerûté  de  monnoye  finon  ou  d'or  ou  d'argét. 

L'or  monnoyé  qu'ils  ont ,  eft  fin  or  de  ducat.  L'argent  eft  fin  ar-  Motmoye  & 

gent^non  meflé,ains  purifié.  Encoryavneautre  forte  de  mon-  ruraux 

noyé  en  Turquie,  quieft  appelîec  Mangoures,  qui  eft  de  pur  cui- . 

ure,  dont  fêize  ne  valient  qu'vn  afpre  :  &  pource  qu'ils  pefent  Mangourss. 

beaucoup ,  lonna  pasaccouftuméde  s'en  charger ,  ains  ontefté  Marfie  &*' 


faits  à  fin  que  quad  Ion  acheté  quelque  chofe  d'vne  boutique,  on  ior  ^ 
s'en  férue  à  rendre  le  refre  d' vrvafptc.  La  marque  qu'ils  font  à  l'or  C* 
&  l'argentjcft  de  lettres  Arabiques ,  &  n'ont  en  tout  ûno-nvnc  ef- 
pece  de  monnoye  nommée  vn  Afpre ,  qui  vaut  autant  qu'à  nous 
vn  Carolus.  Les  Arabes  èc  Egyptiens  ont  vne  forte  de  monnoye  ^ffire. 
qu'ilsnomment  Meidin,  qui  vaut  vn  alpee  &  demy-  Metdi». 

Voyage  de  U  v'Ahie  Hxlep  m^éntioche.  Cbap.   ciiu.- 

;,  £  s  habitans  d'Halep  parlent  Arabe ,  &  non  Turc-xar 
?  le  parler  des  habitans  d  Egypte, Arabie,,  Syrie,  Gihcie,. 
lôc  autres  circonuoifins  5eit  Arabe.  Apres  Midy  par-  langage 
J6_?5iSj-ies_j  tifmes  de  Halep ,  pour  aller  voir  Antioche ,  &:  chemi-  syne- 
nafmcs  par  belles  campagnes  labourées  &  arroufees  de  beaux  m*f° 
ruifTcaux.  Ce  foir  logeafmes  de  bonne  heure  en  vn  village  qui  cft 
appelle  Farrou  :  près  duquel  y  a-: vne  haute  colonne  antique 
fans  chapiteau  ,  qui  c&  toute  droi&e  dedans  vn  champ.     Le 
.touc  venu  prifmes  le  chemin  d' Antioche  ,  &  après  qu  eufmes 
vn  peu  cheminé  ,  &  laide  la  campagne  ,  entrafmes  en  va 
pays  pierreux:  &  failoit.bien  fouuent  pafler  par  deiîus  des 
petites  montagnes,  &  quelqucsfois  fuyuir  les  couilaux.  Nous 
veifmes  Tes  ruines  d'vn  Chafteau;,  à  k  porte  duquel  ilyauoit 
du  Lierre  blaac3_qui  nous  fut  chofeaouiicllexar  nous  n'-en  auios. 

^YY    ij.. 


^6  S  EC0  ND     LIVRE     DES     S  I  KC  V  LA. 

point vea  depuis  Corfu.  Auflî  crouuioGs  de  larbrifTeâU  d'An- 

1$err}k^.  ^racnnc  naiflàns  par  les  couftaux,  dont  chacun  en  cueillit  plu- 

M      fieurs  rameaux  auec  le  fruiâ:  pour  porter  auec  foy ,  Se  le  manger 

fœkc  du    Par  chemin  :  car  il  eftoit  roeur  pour  lors.  Auffi  eft  il  de  fi  belle 

ziege porte  couîeur,qu'il  inuite  les  gens  à  le  manger.  Il  pend  par  trochets,de 

framhoifes.   la  grofïèur  Se  couleur  des  framboifes ,  Se  mol  comme  vn  grain 

d'vn  Arboufier,&  de  Liège  ,  ayant iafaueur  du  frui&  quinaift 

fur  l'arbre  du  Liège.  Àufli  trouuions  des  arbres  d'Aria,  &  d'Efcu- 

lus,Terebinthes,  &:  Eleprinos,  que  les  Latins  appellent  Alatcr- 

nuSjles  Italiens  habitans  de  Termi,&  de  Narni,  Alinterno.  Coi> 

tinuans  noftrc  chemin  par  ces  vallées  nous  trouuafmes  vn  logis 

.  ancien  en  ruine ,  delà  forte  d'vn  monaftere,  ou  auoit  vne  belle 

tour  au  milieu,que  laifiàfmes  à  feneftre.  Auiîi4aiflàfmcs  vn  beau 

logis  ruiné,fait  de  pierres  de  taille,  ou  font  veuès  quelques  lettres 

Latines,  qui  monftre  auoir  efté  bafty  par  les  Romains.  Nous 

pafïàfmes  vn  rui{ïèau,qui  dés  la  fourec  venant  de  fà  fontaine  ren- 

doit  tant  deau,que  noz  Chameaux  y  furent  iufques  aux  fangles. 

Heirim.      Nous  vinfmes  loger  au  pied  d'vn  chafteau  nommé  Heirim ,  tout 

romé,ûtué  en  pays  deshabité,  qui  eft.moult  grand'  perte:  car  s'il 

eftoit  cukiué,il  neferoit  moins  fertile  qu'eft  le  meilleur  endroicl: 

d'Italie.  Les  ruines  de  ce  chafteau  nommé  Heirim ,  font  efleuces 

fur  vne  butte  comme  ecluy  de  Halep  Se  d'Hamous.  Nous  ne 

pouùons  croire  que  dix  mille  hommes  l'aycnt  peu  cauer  en  deux 

ans,&  entailler  la  roche  pour  faire  les  fofTez  qui  y  font.  Il  fèrnblc 

que  nature  fè  foit  elbatue  à  faire  ce  petit  mont  deflus  le  roc  pour 

y  fabriquer  ledict  chafteau.  C'eft  le  dernier  endroiefc  de  Turquie 

Colocafe.     ou  croift  la  Colocafle ,  Se  les  moufes.  Les  arbres  de  l' Andrachnc 

Moujès.       $£  Aiaternus  y  croiflènt  par  les  rochers  en  la.  prochaine  colline. 

No9  ne  bruflafmes  point  d'autre  bois  à  acouftrer  le  foupper.No9 

ne  logeafmes  pas  au  Carbafchara ,  ains  en  vne  maifon  du  village: 

qui  eft  chofe  moult  rare, de  trouuer  ges  par  ce  païs  là,qui  logée  les 

paflant:&  fi  bié  ils  les  logét^Ceft  fculcmét  de  leur  baiiler  quelque 

lieu  défions  vn  porche,fans  autre  chofe  de  la  maifon,no  plus  que 

fi  l'on  eftoit  logédeflbus  vne  halle.  Chezcefthofte  obfcruafmes 

vne  chofe  digne  de  récit ,  c  eft  qu'il  auoit  vn  poignart  courbé  à  la 

faço  des  poignarts  Arabes,qui  n  eftoit  enrichi  d  or  ne  dargétjdu- 

ql  noftrcdrogucmétluy  en  voulut  bailler  quatre  ducats,  qu'il  re- 

fufa,difât  qu'il  en  aupit  coufté  fix  en  Damas:&  toutesfois  croyos 


OBSERVEES      PAR   P.     BELOK.  $$J 

-qu'o  n  en  trouueroit  pas  vn  cfcu  de  la  douzaine  dedas  la  meilleu- 
re ville  de  France.Ceft  hofte  çft  vn  de  ceux  qui  font  profcfllÔ  de 
loger  les  pa0àns  :  mais  il  faux  entendre  qu'il  ne  baille  ebofê  qui  J^* 
foie,  finon  les  parois  de  fa  maifonvuides  {ans  vteniiles.  Ilauoit 
plufieurs  vnguens,commeMetopium,  IU>{atum,&;  telles  autres 
fortes  ,  qui  font  en  commun  vfage  en  Syrie  &  Arabie,  &:  dont  ne 
tenons  compte,. 

_  Ve.lavillei^éntiochç.  Chapitre   cv. 

,  Eiour  d'après  trouuafmes  vnc  capagne  de  môuît 
grande  elftenduc»  ou  nous  paifafmeslariuierenô-  orous  tme* 
mee  Orous ,  qui  fè  va  rendreen  Antioche  :  car  le  re. 
lour  précèdent  nous  f  auîons  coftoyée.   Laquelle 
>  toutefois  nous  paûafmes  bie  haut  au  defTus  d' An- 
tioche tur  \n  beau  6c  grand  pont  en  vn  grand  lac  ,  que  croyons 
eftreccluy  qui  autrefois  eftoit  appelle  Stagnura  Meandriopolis. .     '  „ 
Nous  fuiuifmcs  long  temps  ladicle  riuiere  ,  iufquesà  ce  quelle  'j^r***'- 
entraft  dedans  le  Iac.il  n'y  a  que  deux  iournees  depuis  Halep  en 
Antioche.  Mais  pou rce  qu'il  auoit  pieu  ,  &:que  les  Chameaux 
qui  portoyent  le  bagage-,  alloyent  malaifement ,  nous  y  feifmes 
deux  iournees  &  demie.  Ce  n  'eftoit  pas  noftrcdroid  chemin  al- 
lans  à  Conftantinople,  de  pafler  en  Antioche, mais  nous  laiiîàf- 
mes  le  droict  chemin  à  main  dextre  pour  ali  er  voir  la  ville  qui  cft 
fituee  au  dcfïbuz  dudict  lac.    Or  failoit  il  aller  droict  au  mont 
Amanus,&  de  là  à  Adena:  toutesfois  pour  cftrc  allez  voir  An-  ^nwws. 
tioche,  ne  fufmes  exempts  de  le  pafïèr  :  lequel  pource  qu'il  appa- 
roift  noir ,  eft  nommé  en  Turc  &  Arabe ,  le.mont  noir.  La  ville 
d'Antiocheeiien  telle  fituation,quon  ne  lafçauroit  bonnement  £*«&*<«»*. 
deferireen  peu  de  parolles  :  caria  ôru&ure  des  murs  la  rendgra-  ^/întm^ 
dément  admirable  à  la  contempler,  plus  qu'vne  autre  ville  qui  fc- 
roit  édifice  en  la  plaine.  Elle  rend  certain  tefmoignage  qu'An - 
ciochuseftoit  de  magnanime  courage,  &:  prefque  de  grandeur 
incomparable.  Le  tour  des  murailles  de  la  ville  n  eft  rien  moins 
grand  que  de  Nicomedie  ou  Conftantinople.  Il  y  a  pluftcurs  ha- 
bitan&en  la  vilîe,Grecs,  Armeniés,Iuifs,  &:.Turcs.  Elle  eft  moult 
abondante  en  eaux  de  fontaines  ,  qui  fortent  des  rochers  enfer- 
mez au  circuit  des  murailles.   Il  yavn  descoftez  de  la  muraille 
qui  encemâ:  vne  montagne.  L'autre  coûc  s'eftend  par  la  fom- 

YYiij 


Comparais 
fon  <£y£n* 
tioche  a 


J5$  'SEC0¥I>     XITRE    MS    SrNWlA. 

micé  de  deux  montagnes,  qui  iuy  feruent  de  fouczxar  il  y  a  trois- 
hautes  montagnes  comprinles  au  circuit  des  murailles  ,  qui  ne 
font  petits  tertres  comme  à  Rome  ou  Conftàntinople ,  ains  font 
vrayes  hautes  montagnes.  Nous  ne  fçachorîs  ville  en  France  à 
qui  pu  ifïïons  comparer  Antioche,  qu'à  la  ville  de  Lyon.  Car  co- 
rne Lyon  enferme  les  hautes  montagnes  de  Saind  lus,  toutainfi, 
la  ville  d  Antioche  va  enceindre  des  hautes  montagnes  5  fur  lc£. 
quelles cft deaë le palaysd' Antiochns :  qui nyeft pas  du  tout rui- 
néXar  Ion  y  voit  pîufieurs  choies  en  leur  entier ,  corne  des  gran- 
des falles  &  chambres  :  8c  an  dl  âcs  ci fternes  faites  à  la  façon  de 
celles  du  palays  de  Philippi  en  Macédoine ,  de  defmefuree  gran- 
deur. La  maflbnr^ieduChafteau  d'Antiocbe^&du  tour  des 
murailles  de-la  ville  font  encor  en  leurentier.  Lô  y  voit  des  tours 
quarrees  près  à  près  l'vne  de  l'autre,  moult  hautes,ouîesouuriers 
n'ont  pas  efpargné  la  pierre  aies  fortifier.  Les  murailles  qui  font 
du  cofté  de  FOccident/ont  de  tel  artifice  »  qu'on  peut  mener  les 
charettes-&  Cheuaux  du  bas  de  lavilicau  haut  du  Chaftcau, 
tous  chacgez&:  montez  à  Chenal  par  l'entredeux  des  deux  vou- 
tcs,par  le  dedans  de  la  muraille..  Chaque  tour  a  fa  cifterne.  Les 
xnotagnes  d'entour  la  ville  font  rcueftucs  de  Chefnes  verds,  Aîin- 
t-ernus,grainc  d*Efcarlatc,  Andraclmes,Srœchados,$tacbis.-  Les 
Cigoigncsqui  font Tefté en  Europe- ,  fonda  nourries  partie  de 
l'hyuer,  comme  en  Egypte:&  auffi  des  Onocrotales,  6c  plufieurs 
autres  fortes  d  oifèaux  de  riuiere,qui  fe  nourrhTent  dedans  le  lac, 
qui  cft  au  deifus  de  la  ville  :  entre  lefquelz  auons  recogneu  celuy 
que  les  habitons,  du  riuagc  de  la  riuierc  de  Somme  nomment  des 
Cotées^  à  Paris  vn  Morillon,  &  lequel  les  anciens  nomrnoyenr 
Cotœoife*  Glauçium:  comme  au  £Ii  eftceluy.  qu'on  appelle  en  F  rançoisvne 
**f*  .  Piette. Les  Mourrons  qui  pai&nt  par  les  môtagnes,ont  la  queue 
GvXHcmm,  sxQuftçQ  forc  graife^d'vn  pied  de  large.  Les  habitans  de  ce  pay  s,Ô£ 
?lm£y£n*-  *Iua^  P*ir  toulc  Turquie  lie  font  le  painiinon  au  iour  la  iournee, 
tioefa.  mal  cuît,&:  mal  en  leuain.  Les  verms  de  foye  que  les  ItaliensnÔ- 
Camliers  ment  Caualiers  ,  font  de  grand  reuemi  au  territoire  d'Antioche, 
&  font  nourris  defbeilles  de  Figuiers  6c  Meuriers  culriiicz  le  15g, 
de  la  riuiere.IÎ  y*  a  de  treshautsPlatanes  àlentree  d' Antioche,dôc 
H  n  en  croift  aucuns  n'en  France  n  auili  en  Italie,  finon  quelques 
vns  cukiuez  à  Rome  &  autres  villes  par  fingularité.  Il  y  a  quel- 
que petite  quantité  de  Cannes  defuccre^Colocaires,  &  Moufes^ 


Platanes. 
Stucre. 

Colocajfes. 


OBSERVEES     PAU     P»     BELON.  ^    . 

qui  font cultiuccs  moult  diligemméc  en  quelques  iardins  d'An- 
tiochç.  Les  habitans  y  parlent  Arabe^ommç  en  Syrie. 

obfertMtion  touchant  les  fmgukritttJk«éntioc%c. 
Chapitre  ,  cvi. 

)  Out  le  iour  enfuyuant  fut  dédié  à  voir  les  fainds 

}  lieux  d'Antiochc ,  comme  la  porte  fàind  Paul,les  fe-  squkhres 

!  pulchrcs  de  plufieurs  fain&s.Lon  y  pourroit  voir  plu-  «esfMn&i. 

lueurs  autres  chofès  antiques,  qtiiîesçhcrchcroitpar 

Jemenu.Lony  trouue  de  toutes  fortes  de  vîures au  marché.  Les 
boutiques  des  drogueurs ,  &artifans  font  de  mefmc  comme  en 
Damas.Lcs  arbres  de  Lotus,  que  les  Fraçoîs  appellent  Micacou-  Lotus. 
licrs,croinent  en  la  ville  en  grande  quantité ,  &:  aufïl  es  prochai- 
nes montagnes  du  territoirc.Et  tout  ainfi  que  les  Poupliers  blâcs  MlCiUQU^rs 
&C  noirs »  &  arbres  fruictiers  font  que  la  plaine  de  Damas  refenx-  Pou? ien* 
ble  vneforeftjtout  ainfi  voyant  les  Platancs&:  Micacouliers,font 
apparoiftre  Antioche  comme  dedans  vn  bois.Les  baffo  desChe- 
uaux  des  voi&uriers  d'Antiochc  font  û  longs3qu'ilz  prennent  de- 
puis les  au reilles  pardeffuslecol  iufqucsàlaqueuc»  Les  pay  fans 
d'Antiochc  ne  font  fi  habiles  à  charger  leur  bagage  que  les  Turcs 
caries  baftslcur  font  mal  propres  au  fardeau.  Nous  partiimes 
après  difner  d'Antiochc  ,  &:  paflafmes  de  là  la  riuiere  nom-mee 
O  rous ,  que  nous  fuy  uifmes  long  temps  contre  mont.  La  terre  ùrom^ 
d*  Antioche  cil  figraffe  que  noz  Cheuauxenfondroyent  iufques 
aux  fangleSjpourcc  qu'il  auoit  pieu  les  iours  precedens.  Quand 
nous  eufmes  cheminé  quelque  temps ,  trouuafmes  des  ruiilcaux    _. 
venans  des  montagnes,  aux  riuesdefquelzcroiftNerion  Àgnus,  p^s  *  A** 
&:  de  très  hauîts  Platanes.Nous  allafmes  loger  à  Saramcli,  qui  eft       e' 
vn  .village  au  pied  d'vn  haut  mont  du  tenant  du  mont  Àmanus, 
qui  eft  fitué  en  lacampagne.Le  iour  d  après  necheminafmcs  que 
deux  lieues  que  ne  campainons  au  pied  d'vne  fort  haute  monta- 
gne ,ou  nous  arreftafmes  tout  le  iour  >  attendans  vn  Cheual  que 
xuonfieur.de  Fumet  enuoya  quérir  en  Antioche.  Ce  pendant 
ayans  monté  fur  cefte montagne ,  trouuafmes  les  forefls  toutes    . 
de  P ignés  nomez  en  Latin  picea,  fcmblabîesàccux  qui  vienne t  JS^ 
for  la  môcagncde  Tarare.ïl  v  croift  auUi  dc&arbrcs  d'Efcul^Ilex,  J 

Y  Y  iiij 


$66  SECfOHD     IÏV1EDÎS     SINGVLJU 

Tu'mnt^  Adrachne,OxycedrusY  aufljycroift  du  Poliuin -, Tragacantay 
CaHme.  Chamasdris ,  de  la  Carline ,  que  plufieurs  nomment  faufèment 
cktmekon.  (^haoacIcon.Nous  veifmcs  les  payfans  en  la  plaine  s  qui  ont  cou- 
ûume  de  faire  porrér  leurs  fardeaux  de  bois  fur  le  dos  de  leurs 
Bœufs,commeauffi  îc  bled,&:  autres  chofes  femblables,&  quel- 
quesfois  eux  mcfmcs  cftans  lafïèz  fe  font  porter  à  leurs  Bœufs:car 
eux  qui n  ont  pas  halte  s  en  feruent  comme  nous  dvn  ClieuaL  II 
nous  vendirent  des  poulies,  des  œufs,dc  la  chair  :  Se  ja  (bit  qu  ilz 
ioyent  campez  par  les  champs  defTouz  leurs  zetes  tout  l'efté,  tou- 
tefois ilz  font  accommodez  tout  ainfi  ,  comme  àla-vilicou  ai! 
village- 

&ypajfigep4y  de/fus  îe  plus hautfaifteàt mont  ^nutms* 
Chapitre     cvn. 

i  E  iour  enfùyuant  nous  allions  entre  le  Soleil  leuant 
\Sele  Septentrion -,'coftoyans  les  hautes  montagnes. 
I  Lemont  Amanus  eft  vulgairement  nommé  Monte 
fnegto,  c'cftàdire,  noir.  Toutesfois  Pline  cfcriuanc 
Mons  ater,  nà  pas  entendu  de  eeftuy  cy .  Il  nous  fallut  monter  la 
montagne  moule  droite,  Se  precipiteufe ,  Se  plus  fafcheufe  que 
nulle  autre  que  nous  euffiôs  encor  trouué».  Nous  tronuafmes  des 
hauts  Cèdres  comme  au  mont  Liban,&  du  Geneure  nuieur,  Se 
du  Sauinier,  comme  au  mont  Taurus..  Lfarbre  d'Ândrachne  y 
croiftencor  plus  haut  qu'en  la  montagne  d'Ida  en  Crète.  Nous 
fufmes  plus  de  fîx  heures  auant  qu'arriuer  à  la  fummité  de  la  mo- 
tagne:&  quand  nous  fufmes  au  plus  haut  faifte ,  regardans  celle 
part  dont  nous  venions ,  nous  veoyons  les  fummitez  des  monts 
de  Syrie  Se  Caire  x  Se  principalement  celles  que  nous  eftimons 
ïienu^  cçac  je  œont  picrius^ lequel  nous  auions  entourné  les  iours  pré- 
cédents par  fèsracinesmous  veoyons  aulïi  le  mont  Taurus  ,  qui 
74mn  rms,  apparoûToit  de  bien  loing  deuant  nous^ftendu  en  long,  qui  déf- 
ia commençoit  à  effare  couacrt  de  neige  par  le  coupetXadefeen- 
te  de  ceâemonEagne  ne  fut  fi  fafcheufe ,  que  la  montée  :  car  elle 
neftoitpasfidroide  en  àcfcend&m  qu'en  montant ,  &r  pource 
qriecheminionsal'obfcur  ,  vnde  noftre  compagnie  tomba  en 
vne  vallée  de  plus  de  quarante  toifes.de  haut  >  fans  que  iuy  ne  fon> 
Ciieual  fuâeat  bleflcz,  qui  fut  choie  efmerucillable  à  toute  la 

compa- 


^    .    OtSEIVEBS    V  Al     P.  -B  EX; OS.,  $£î 

compagnie.  Cefle montagne eft  fort-abondante en  dmeHesfor- 
tcsdepîantes.Noos  trouuafmes  desArboufiers^quin'eftoyent ^^  *- 
guère  moins  hauts  que  ceux  du  mont  Athos^uinaiffentésmô-  ^^^ 
f3<xnesvoifinesdurnona£!ere  dAgiasLauta.  Auifi ttouuios des  ^«Jfe 
hauts  arbres  d'  Aîaternus,qui  cora munément  font  arbnffeaux  es  rbymeUa. 
autres  lieux.  II  y  croift  du  Picca  &  Andrachne ,  Lauriers  à  large  cbameUx. 
fueilie.Defcendans  plus  bas  trouuafmes  des  My  rtes,qui  portent  &&*. 
le  fruid  blanc,  de  Thy  mehea  U  Chamelaea ,  &  de.  l'herbe  que  les  Krmt- 
Alemas  appellent  Keîlcr  Kruar,dif&rentc  aux  deux  deuufdides.  ^^ 
Quand  nous  fufmes  defeendus  le  mont ,  nous  rcpofafmes  le  log  Mont^m*. 
dvn  petit  ruineîer.  Nous  repeufmcs  au  riuage  de  la  mer  du  fine  ^im^ 
I  (ficus,  lequel  fe  courbanten  arc,  fait  v  ne  moult  grande  plage- 
Cefte  mer  eft  du  pays  de  Pamphihe  conioiu&e  d'vnepajrt  à  celle 
de  Ciîicie.  Eteftans  deffus  ledit  mot  Amadous  auions  la  mer  qui 
batoitaupieddeladi&e  montagne  >&  veoyons  bien  l'endroid. 
ou  le  mont  Taurus  prend  fon  commencement  au  riuage  oppofi- 
tcaCypre.Ce/temerbataupieddumunt.-Amanu5  >  &t  fi  quel- 
que n  iectoit  vue  pierre  d'en  haut ,  la  pourroit  facilement  ruer  en 
1  eau  de  la  mer  Méditerranée.  Il  nous  fallut  long  temps  fuyuir  le* 
orées  de  la  mer^  entourner  ledict  finc,&  pafTer.de  moult  beaux 
ruifTeanx.Continuans  noftre  plage  cheminaas par  le  riuage,  il 
nous  falloir  pafler  vn  autre  petit  mot  forteftroicl:  &  difficile ,  qui 
eftoitcouucrtde  Pignets  ,  au  delà  duquel  trouuafmes  vn  petit 
Chaftelet  au  pied  de  la  montagne  ,  ou  il  y  a  gardes  ordinaires, 
d'autant  queceftvn  paûàge  moult  fréquenté.- Nous  y  trouua£  château  g»? 
mes  de  plusieurs  fortes  de  yiuresà  achetcr,commc  pain,vin^  for-  dé  au,  mont. 
mage,chair  ,  &  orge  pour  les  montures.  Nous  defeendiftnes  yn  *Am*»~ 
peuaudeffouz  dudid  chaftellet ,  près  à'vn  ruiiîeau  deifouz  vn. 
Meurierblanc^quieft  celle  maniere'd'axbrequc  les  Frâçoïs  pré- 
sent pour  Sycomore.  Nous  fei&nes  bon  feu  toutelanuid  :  car 
nousauionsdu  bois  autant  que  nous  en  voulions  :  &  partifroes  j^Sm 
auant  iour ,  &cheminafmes  àrobfcur  par  pays  vny  &pbtenla  uniers... 
campagne ,  &  lors  que  le  iour  fut  venu,retournafmcs  au  riuage  cbefaes  -fcr&... 
dclamer.ou  noustrouuaimesvneriuiere^u'il  nous  fallut  pafler  *k****' r 
àguéau  riuage  de  la-mer  ,  que .poflible.ee  pourroit  eftre  li&s.  s™1**  *j2**; 
Nous  pâmons  par  lieux  fort plaifanstcar  les  chemins  (ont  bordez  r4* 
en  quelques  endroits  de  hauts  Loriers,  Chefhes  verds,  Platanes*. 
Snùlax  afpera ,  &  maintes  plantes  verdes. en  tout  temps.  Nous 

zz: 


$6l  SECOKT>     LIVRE       DES     SINGVLA. 

auions  les  montagnes  à  dextre,&;  la  mer  à  feneftre.  Ayans  paflela 
rlame  du.  rju  jerCjnous  entrafmes  en  celle  grande  plaine ,  en  laquelle  on  die 
^  *  A=  qu'Alexandre  &  Darius  combadrent.  Il  y  croift  vn  arbriffeau 
■Darius^  <3UC  nâinons  vcu  ailleurs,  qui  eft  moult  fembîable  au  Myrte.  II  y 
?oru  cih*  a  grande  abondance  de  Myrtes:niais  il  n'y  en  a  aucun  qui  ne  por- 
sue.  te  la  (cmence  blache.Nous  paflafmcs  par  dcftbs  vne  arche  moult 

antique,!aqueîle  les  autheurs  ont  nommé  Porta?  Cilicia2,faite  de 
èrique,&:  de  fort  cimenr,qui  eft  plus  dur  que  pierre  de  tailîe.Rc- 
gardât  çà  &  là  Ion  voit  la  campagne  comme  vn  amphiteatre  :  car 
les  hauts  monts  î'entournent  en  façon  de  demie  lune  pour  recc- 
Fruicisd^An  uoirîa  mcr  duditfine  Meus.  En  paftànt  par  defïbuz  lefdi&es 
irtchnes.  portes  de  Ciîicie ,  chacun  de  la  trouppe  voyant  les  arbres  de  Ân- 
drachnes  porter  leurs  fruiâsà  trochets ,  ja  rougis  $c  meu  rs ,  réf. 
femblans  àdesFrezes  ,  rompoit  des  rameaux  Ôc  les  aîloit  man- 
geant par  behemin.  Le  pays  eft  peu  habité  :  &  ce  qu'il  y  a  d'ha- 
bitass ,  ne  font  point  adonnez  à  la  pefcheric ,  n'au  fli  à  n'auiguer; 
tlont  iladuicnt  quenousn'auonsonc  veu  vn  fèul  bateau,  le  long 
decefteçofte  de  met.  Et  auii  le  pays  eft  mal  peuplé  &:  peu  habi- 
té degens:toutesfois  la  terre  eft  trefbien  arroufee  de  rui&aux.-car 
-nous  en  paflàfmes  plus  de  trente  en  deux  heures,  qui  fcfcouîoyéc 
en  la  mer,defcendâs  des  hautes  montagnes.  Apres  que  nous  fuf- 
mesefloignezdes  portes,  commcnçafmes  à  entrer  en  paysfteri- 
le,&  lieux  pierreux,^:  de  là  pafTafmcs  des  bois  quafi  comme  tail- 
lis,ou  naift  vn  petit  arbriflèau, dont  auons  ja  parlé,que  ne  içauos 
exprimer,  fine  le  nommons  Pfèudomyrthus.  Nous  trouuafmes 
rfitdomyr-  vnCarbafchara^ounousrepofàfmes ,  qui  n'eft  guère  loing  des 
thm.  villages. 

Vêla  ville  Anciennement  nommée \Aaena,  :  &  ivnt  befte  à*Afte 
nommée  *4&l  Chqitre    cyjii. 

>  L  y  a  vne  manière  de  petit  loup  par  Ciîicie  ,  Zc  auflï 

t  généralement  par  toute  Afîe ,  qui  emporte  &  dérobe 

f  toutee  qu'il  peut  trouucr  des  hardes  de  ceux  qui  dor- 

cii^Jmentl,efté  horsduCarbafchara.  Ceft  vne  befte  en- 

trexoup  &  Chien ,  duquel  pluileurs  autheurs  anciens  ,  Grecs 

&  Arabes ,  ont  fait  mention.   Les  Grecs  le  nomment  vulgai- 


.   Cff  SERVE  E-S     PAR     P.    SELON,  .  tfî  .      \. 

renient  Squilachi  :  &  croirions  que  c'eft  iuy  que  les  autheurs  Sj*jf&*-' 
Grecs  ont  nomme Chryfcos  v c'eftàdire.  Aureus lupus.  Il  eft  û.^^ 
larron  y  qu'il  vient  la  uui&  iufques  aux  gens  qui  dorment ,  &  cm- 
t>orte  ce  qu'il  peut  trouuer  >  comme  Chapeaux  >  bottes ,  brides»  r_ 
jbulièrs ,  &:  autres  bardes.  Ceft  animal  n'eft  guère  moins  grand 
qu'vn  loup.    Et  quand  il  eftnui&clofe  ,  il  abboyc  comme  vn 
Chien .  Il  ne  va  iamais  feul  >  mais  en  compagnie  :  iufques  à 
eftrc  quelque  fois  deux  cents  en  Ql  ttouppe ,  tellement  qu'il  n'y  a. 
rien  plus  fréquent  par  Cilicic.   Parquoy  allans  en  compagnie, 
font  vn  cry  Tvn  après  1  autre  ,  comme  vn  Chien  quand  il  dir> 
hau  hau.  Nous  les  oyons  âbboyer  toutes  les  nui&z:  ôc  n'eftoic 
que  les  Chiens  lesempefehent,  ilz  entreroyent  pritiémcnt  iuf- 
ques dedans  les  villages.  Il  eft  de  moult  belle  couleur  iaune, 
dont  les  habitans  font  ordinairement  fourrures  de  fa  peau  ^  qu'on 
y  vend  à  grand  marché.   Le  matin  enfuyuant  partans  dudicfc .^m 
Çarbafchara,pourfuyuans  noftrc  chemin  vers  Adena ,  trouuaf~^rJ^ 
mes  vn  pont  de  pierre  ,  &  paffafmes  vne  petite  branche  de  la  ri- 
mera que  poilible  eft  Pyramus,  ioignant  laquelle  eft  vn  Cha- 
fteau  à  main  dexcre  >  fitué  defTus  vn  roc  de  difficile  accès.  Delà 
fuyuifmes  long  temps  ladi&e  riuiere  iufques  à  venir  aux  ruines 
d'vne  ville ,  qui  (  à  noftrc  aduis  )  au  oit  nom  Csefarca  Ciliciavou  ^J**! 
nous  trouuafmes  vn  pont  pour  paftèr  la  riuiere.    Les  riuicres-de, 
ce  pays  là ,  encore  qu'elles  foyent  nauigables ,  ne  portent  poin& 
de  bateau  :  car  le  pays  neftant  peuplé ,  perfonne  ne  fe  fbucie  d'y- 
trartîquer.  Le  domaine  du  Soudan  d'Egypte  s'cftcndoit  iufques 
là,  Sjeftoitlcs  bornes  ,,quidiftinguoit  le  langage  Arabe  dauec 
le  Turquois ,  &:  qui  departoit  l'empire  àcs  Arabes  &  des  Turcs. 
La  première  bataille  qui  fefeitonc  entre  les  nations  Arabes  Se 
Turquoifcss  fuç  faite  en  celieulà,dont  eft  aduenu  queleiTurc 
'les  a  rengez  &gaignez  iufquesàiesrendreferfsà'fadeuocion.  Ea- 
cefte  ruinede  Cefaree  il  n'y  a  qu'vn  Carbafchara5&:  quelques  pe- 
tites maifons.  Quand  nous  cufmes  paiTé  le  pont  »nous  pourfuy* 
uifmes  le  couranede  leau^q  nous  auiôs  à  gauche,puis.entrafmcs 
en  ynefpacieufc  capagne  fterilç,qui  n'eft  poûedec  de  particuliers  ^jrtishla^ 
fino  de  ceux  qui  veulent  y  mener  paiftccleur  beftial.  Les  My  rtes- 
portéc  au  (fi  le  fxuiâ:  blac,&:  y  font  ii  freques,  qu  ilz  font  refsébler  p  ^ -  ^ 
eftrc  en  bois  taillis.  Nous  pamosdeftbuz  des  hauts  arbres  de  Te-  ^/J^    - 
sdaiothesj  qui  fbntdcsfoiefts  en  ceft  endroid ,  &  font  cfpars  ça 

"  '    ZZ.  il 


ejarear 
Crfkïa. 


5^4  SECOND     LIVRE      DES     SïNGTLA. 

&:Ià,mefîezauec  des  Pins  fauuagcs.  Celle  campagne  nourrift  de 
mouîc grands  troupeaux  de  moutons  &cheuccs,qui  font  de  grad 
reuenn  à  leurs  maiftres  ,  tant  en  beurres  qu'en  rourmages.  Et  ja 
VtuerQs  na*  ^oxl  <îue  *cs  beurrcs  foyent  differens  les  vns  des  autres  en  cle&ion 
tttresilehatr  ScbontCyQu  pour  la  befte  dont  ilzprouiennent,ou  pou  rie  paftu- 
ns.  rage,ou  del'ouurientoutesfois  ilz  nes'eiloignent  tant  du  naturel 

1  vn  de  l'autre, comme  fait  le  fourmage:cargouftant  le  beurre  de 
Formages     diuersammaux,dcs  Buffles,  Vaches,Iumens,Chameaux,Brebis, 
de  p^^^çheuresjon  ne  troaue  moult  grande  variété  :  mais  il  eft  bien 
jortes.        ^  contraire  des  formages  ,  veu  mefmcment  qu'on  les  peut  dif- 
cerner  à  les  odorer  feulement  Se  regarder ,  Se  les  peut  oiv  infaili- 
blemenc  iuger  en  les  gouftant:Or  eft  il  que  les  paifans  Turquois 
cfloignez  des  villes ,  errans  par  les  campagnes,  vont  gardans  leur 
bcftial  aux  champs  tout  l'efté  :  Se  ayans  faute  de  vaiffeaux  de  ter- 
Beurreg£rde'TCOU  ^c  bois,ttient  quelques  brebis  ou  cheures ,  Se  renuerfent  la 
esefionucs  çCmzCeon$vecen^uàfè>^^  de  beurre, 

maux  *  les  autres  de formage ,  &  gardent  la  panfe  foigneufementrcar  ilz 
îa  remplifïênt  auffi  de  beurre ,  qu'ilz  font  premièrement  bouillir 
Se  tefroidir,auant  que  de  le  mettre  leans.Chaque  panfe  en  c5tiec 
«miiron^de  trente àquarante  îiures:lcs  peaux  en  côtiennent  plus 
•de cinquante.  Nous  ne  difons  que  quelques  vns  n'ayent  l'vfagc 
d  accouftrede  beurre  en  d'autres  manières,  Se  faler  de  mefme  fa- 
çon que  nous  :  mais  cela  n  eft  fait  fïnon  es  confins  des  grofTes  vil- 
Mewrelie.  ks.Ccfte  chofe  eft  tout  ainfï  aux  habirans  de  Mengrelie ,  qui  am- 
^  "  plifTent  les  peaux  des  bœufs  Se  des  vaches,  fans  eitre  conroyees, 
aucc  du  beurre,toutes  frefchesefcorchees:&:  puis  l'enuoyetpour 
vcndre,àConftantinopIe,  tout  ainfi  qu'on  nous  apporte l'huylc 
de  Languedoc  dedans  des  peaux  de  Cheures.  Nous  ne  faifons 
doute,fi  cespayfans  auoycnt  des  vaiffeaux  commodes ,  qu  ilz  ne 
garderoyent  pas  leur  formages  en  des  oudres  :  car  ilz  n  oc  point 
dvfâgede  le garderen  pain. Et  entant  que  tel  formage  eft  diftri- 
bué  par  le  pays  de  Grèce ,  ou  les  marchands  le  vont  vendre ,  les 
Crées  le  nomment  de  nom  vulgaire  Dcrmatifl  hilatifineno  :  Se 
~  ne  difent  pas  ty  ri ,  qui  eft  à  dire  formage  ,  mais  fimpiement  ilz 
rappellent  fàîé  en  peau ,  comme  nous  faifons  quandnous  nom- 
mons du  falc,cntédans  par  ce  que  Ccft  du  porc.  Mais  eux  le  font 
à  îa  différence  d'vnc  autre  forte ,  qu'ilz  appellent  en  leur  vulgaire 
dorotyri.     Clorotyri/  qui  eft  à  dire,  formage  frais  ;  quieft  ccluyquc  Colu- 


O'B S ÏRVÏE'5     PXÏt     P.  *ELONV  $6$ 

mcîlcatiommécn  Latin  Cafeumvmdemy  non  pas  qu'il  foinrcrd,  OfemyirU 
mais  qu'il  eft  moL  Les  paftcurs  ne  coulent  Jamais  lelaiâ  no  plus  *• 
qu'en  Crète  :  toutesfois  les  Crêtes  ont  vn  rameau  d'Afpalathns  ^ 
à  la  bouche  de  leurs  pots,ou  bien  l'herbe  de  Rcble,  nommée  Àp-  ^^ 
parine  :  à  fin  que  fi  par  fortune  aduien  t  que  le  poil  s'y  arrefte ,  le  ^r^ar'me. 
formage  en  forte  plus  net.  Mais  le  formage  de  ces  Turcs  ainfi  Formage 
faléenpcaux^ft  communément  plain  du  poil  àes  beftes,  pour  ce  des  Turcs. 
qu'ils  ne  toulent  point  le  laitt^Contirruans  noftre  chemin,alliÔs  Tentes  &* 
droic\au  Septentrion ,&  trouuiôs  des  loges  Se  tentes  en  plufieurs  îayJam- 
lieux  par  les  campagncs,des  panures  payfàns,  quife  partent  Fefté 
des  villes  Se  villages  pour  aller  par  les  campagnes ,  iufques  à  l'hy- 
ucr,ou  ils  font  le  mcfmc  mefnage  qu'ils  feroyent  aux  villages  ou 
villes.  Et  quad  ils  ont  demeuré  huid  iours  en  vn  lieu,i!s  s'en  par- 
tent, &  vont  viure  en  vn  autre,  Se  emportent  leurs  tentcsfai&es 
de  cîifïès,couucrtes  de  feutres,  quant  &  eux.  Et  quand  ils  retour-      . 
nent  aux  villes,  ils  les  pîôyent  Se  gardent  diligemment  iufques  .à   rô*feur  m 
ce  que  le  froid  fok  paffé.  Et  voulons  bien  maintenir  que  les  habi-    •**• 
tans  du  paysd'Afie  endurent  àuffi  fort  hyucr  que  font  ceux  qui 
habitent  au  cœur  de  France.  Ils  font  parefîeux  Se  cultiuent  mal 
la  terre:  mefmemcnt  les  payfans  riches  veulent  toufiours  efttc 
affis,fàns  rien  faire  :  Se  neftoit  qu'ils  font  labourer  les  terres  pat 
leurs  efclaueSjil  n  y  auroit  que  bien  peu  de  terres  labourees.Nous 
arriuafmes  ce  iour  en  Àdena,  ou  nous  ouifmesnouuellcsdcla  Aj^ 
ville  d*  Anafarbe ,  à  qui  Ton  changea  fon  nom  en  Cadâr  augufta,  ^w^ 
donteftoyentOpian  &Dio{coride.  Les  Iuifs  nous  dirent  qu'il  cxfir  au* 
y  a  maintenant  vn  village  à  la  bouche  du  âeuue  qui  pafle  par  A-^/x 
dena,qui  eft  poflible  nommé  Tyberis ,  qui  retient  fon  nom  ancie  Tyberk. 
Adena,&  Adcnaeft  vnegrofïè  ville,  ccft  à  dire  grand  bourg,  Se 
de  grand  pafiage;  Il  y  a  vn  beau  pont  de  pierre ,  fort  large  &fpa- 
cieux.La  riuiere  eft  nën*ée  en  Turc  Schclikmark,qui  vient  d'Ar-  Sry;Lmari 
menie  rumeur,  pafïàiît  par  Lydie  &  Cilicie,  Se  vient  tomber  en  la  ^w^ 
mer  Méditerranée  au  defibus  de  Rhodes.  Elle  n'eft  pas  nauiga- 
ble  ,  pOLircc  qu'elle  meinc  moult  grande  quantité  degrajioïs: 
auccelle.  La  ville  d*  Adena  n'eft  pas  clofe  de  muraille.  Il  y  avn 
chafteau  qui  a  quatre  tours  quarrees,  qui  ne  font  gueres  fortes. 
Nous  y  trouuions  de  toutes  fortes  de  viurcs  a  Se  du  vin  :  car  il  y  a 
des  Grecs,des  Iuifs,&:  Arméniens:  Se  aufE  que  les  Turcs  mefmes 
cultiuent  les  vignes  pour  en  auoir  les  raifins.  Nous  commençât 

ZZ    iij 


$66-  SB;COKI>     BIV'RE     Er*E  S     SINGV'LA. 

cb&igemmt  mcsàauoir  changement  de  monnoye  :  car  nous  auions  aupara- 
de  monnoye^  uanC  vg  ^  ^ej4ins  par  Syrie ,  Egypte ,  &  Cijicie ,  ^fallut  que 
^m'fe  .  ceux  quien  auoyenc  de  refte  ,  les  cliangeafTent"  à  des  Auprès,  Le 
rJfo-  '  langage  Arabie  nous  défaillit  en  ce  lieu,&:  fe  changea  à  la  langue 
Tmc.  Turquoife.  Nousckangeafmes  de  montures  à  Adcna,  &  feifmes 

noz  prouidons  pour  trois  iours.  Les  Turcs  vendent  leu-rs  mar- 
çbandifes  au  poixoivalamefure,  fans  furuendreaucuneebofe,.. 
tellement  que  les  voifms  payent  autant  que  les  plus  eftranges  qui 
Tain  yndu  ^  vicnncncXc  pain  y  eft  vendu  au  poix,qui  eft  la  caufe  pourquoy 
**p>tx.       iisiccuifcntfortmal.  Auflfiontlachairfaleeen  grand  vfage:  &c 
quand  elle  a  prins  fel,ils  la  pendent  au  fec,&  k&en t. de  la-poudre 
de  Cumin  par  deflîis.  Ceux  qui  ont  efcrirquelcs  Turcs faifoyenc 
chair  fei*    defeicher  la  chair  pour  la  mettreen  poudre ,  &  en  vfer  en  temps 
chee  enTur*  de  guerre ,  femblent  lauoif  mal  entendu  :  car  nous  eftans  enquis 
îme*        ^'ileftoitvray^uons  trouué  le  contraire,  &  nauons  oncqenten- 
—  du  qu'en  Grec^n  en  Turquie,ne  Arabie, telle  manière  de  feicher 

lachaitfuften  vfage,  pour  en  faire  poudre.  La  chair  entrelardée 
de  greffe^ant  de  bœufs  que  moutons ,  y  eft  taillée  en  lefchcs  fort 
chair  àma*  eblices  &.  tenues  yfr,  quelque  peu  falees  :  puis  feichee.  Telle  chair 
gererm.      eu:  grandement  eftimee ,  tant  en  paix  comme  en  guerre  :  laquelle 
ils  mangent  crue  en  allant  par  chemin  auec  des  oignons.  Il  eft 
bien  vray  qu  en  Crète  &  Chio  les  payfans  ont  de  cou ftume  fei- 
cher vnlieure  tout  entier,ou  vn  Bouceftain,ou  mouto  en  pièces:, 
niais  eft  premièrement  quelque  peu  faîee,puis  eftendue  auec  des 
cfeiiflcs  ,  &  puis  mife  feicher  dedens  le  four.   Souuentesfois 
nousfcmmes  trouuez  en  plufleurs  maifons  des  payfans  parles 
montagnes  de  Crète,  ou  y  auoit  àss  Boucs  eftains  tous  entiers 
defeichez  en  cefte  forte  ,,  ô£  auflî  des  Cheureaux  &  agneaux: 
Mme*      m$\sxt\  vfage  neft  pas  en  Turquie:  caries  Grecs  font  cela  au 
•FMm'         temps  de  Carefme,  quand  ils  ont  tué  quelque  Heure  ou  Che- 
ure  iauuagc  ,  voulans  la  garder  pour  après  Pafqucs  :  car  ils 
rfont  point  l'vfàge  de  fàler  la  chair  en  falouers  ,  non  plus>quc 
g&r  toute  Turquie. 


OBSERVEES     FAR  >.  .  BE'LO».  3&7 

Voyage  par  dejfus  le  montTmrus.  Châtre    CIX. 

,  E  s  Turcs font  plufieursapprefts  à  manger  fur  lèche- 
J  ruin^ant  en  allant  par  pays  comme  a  ia  guerre  :"  encre 
!  lefqueîs  ont  vne  manière  de  faucifïès  en  vfàge  qu'on 
^^^ _J  appelle-en  vulgaire  Grec ,  Stopides.  EMes  font  faites  stofuUs.' 
aueedes  noix  cnfïïees*par  quartiers  de  la  longueur  d'vne  faucifie,  Sau"Ps  à* 
puis  trempée  dedas  du  vin  cuid  tout  chaud,  à  la  manière  de  ceux  ym  cm' 
quifonc  lachandelle.  Il  les faut  cou  urir  auec  du  mouft  petit  à  pe- 
tit,: &  non  pas  tout  à  vn  coup  Iuy  baillent  conuerturc,  maispar 
pluûcms  fois.Les  autres  y  mettent  de  la  farine  par  defTss,à  £n  de 
l'efpoifïirpluftoft.  Lon  en  peut  auffi  enfiler  de  mefmeauec  des 
figues,  amandes,auelaincs,&  autres  fruids  durs  :  &:  ainfi  engrof- 
iîes  auec  le  vin  cuid ,  en  font  vne  longue  chofe  rcflembîant  à  vnc 
andouilîe..  Telle  manière  de  fâucifles  font  communes  en  ce  pays 
Ià,quieft  vnèon  manger  pour  ges  qui  vontpar  chemin.  Lon  fait  7^7  j*^ 
-destapizen  Adena,Jmaisla  plus  grande  partie  font  faits  à  force  dena^ 
de  feu,à  la  manière  des  chappeaux  &  feutres  :  auffi  font  ce  propre- 
ment feutres  faits  en  manière  de  tapiz ,  defquels  les  Turcs  Ce  fer- 
uent  à  fe  coucher  defTus  allans  par  chemin  4  car  ils  font  légers  &:  . 
mois.  Ceux  quiontàpafTerlemontTaurus ,  font  leur  prouiuon 
à  Adcna  pour  trois  iours,auant  que  partir  :  car  d'Àdena  à  Hera- 
rlee  il  y  a  trois  iournees  par  pays  fterile.  Les  montures  couftent 
cinquante  mcidins,qui  eft  le  pris  d'vn  duça^&dixmcidins.  Les  sonnets 
liomes  de  ce  pays  là  portet  leurs  bonets  fèmblables  à  vne  c)izvl£- pointus. 
fèd'HippocraSjfçauoireftquelebout  le  plus  pointu  leur  pend 
furl'efpauïe  :  &  pourec  qu'ils  font  iaits  de  feutre^on  s  en  peut  fa- 
cilement feruir  à  pafTer  delà  gclec.  Il  eft  bien  vray  que  les  Turcs 
.dercputationq.ui  habitent  es  villes  &  villages,  comme  auffi  les  Tl^riAns 
xiches  portent  turbans  blancs ,  mais  les  pauu res  pay fans  vfènt  de 
tels  bonnets  quauonsdid.  Ceftc  manière  de  bonnets  nous  du- 
rcrét  depuis  Halep  iufques  à  Adcna  :  mais  à  Adena  veifmcs<fau- 
tres  qui  eftoyent  repliezd  autre  façoXcs  habitans  des  prouinces 
sVntrccognoifTent  à  telles  merqucs,comeaufli  font  aux  habits, 

ZZ    iiij 


#$■ 


SECOND     LIVRE     DES     SÎKGVLA. 


Voyage  d'~*4denaf>0krpajjer  k  mont  Tmyus.       Chapitre       ex . 

Artans  d'Adena,  allions  entre  Occidct  &  Septentrio. 
La  campagne  nous  dura  iufques  à  midy:  puis  comme- 
çafmesà^monterîemont  Taurus.  Nous  campafmes 
&  domiiimeseii-I'endroîâ:  ou  la  nuiefc  nous  furprint, 


Portrai£i  du  Cèdre* 


Ztôères  dw 
rwt,  lamps. 


Geneuners 
moteurs. 


èc  pource  que  le  teps 
efboit  ferein  9  ÔC  qu'il 
faifoit  froid ,  cotipaf- 
mes  plufieurs  petits 
Platanes,  A  ndrachnes, 
Nerions ,  Arbou fiers» 
&  feifmes  bon  feu  d  va 
Carroubier  ièc.Le  len- 
demain long  temps  a- 
uant  iour  nous  com- 
mençafmes  à  monter 
la  montagne  fort  diffi- 
cile. A  la  fummité  de 
laqile  trouuafmes  des 
Geneuriers  maieurs, 
qui  croifTent  hauts  co- 
rne Cyprès  3  dont  la  fe- 
mence  cft  douce  ,  &: 
grofle  come  vne  noix 
refTemblat  quafi  à  vne 
galle.  Leshabitans  du 
pays  les  mangent,  cho- 
ie quauons  apperceu* 
par  les  noyaux  qual- 
lionsamatfans  çà&  là 
le  long  du  chemin,  qui 
auoyent  efté  iettez  de 
ceux  qui  en  auoyent 
mangez  le  defïus.  Les 
noyaux  font  il  durs 
qu'on  ne  les  peut  rom- 
pre 


OBSERVEES      F  Alt     F»    BELOÏ*.  ,$6$ 

prcfinon  à  grands  coups  de  marteau,  longs  &  gros  comme  vnc 
petite  oliue.  Qcft  l'arbre  le  plus  finguîicr  après  le  Cèdre,  qui  foie 
fur  le  mont  Taurus,auffi  eft  il  tou-fiours  verd.  L'on  verra  fon  naif 
portraict  .&:  defeription  au  liurc  quauons  intitulé  de  uirhùtihm 
perpétua j ronde  vtventibm ,  c'eft  a  dire  des  arbres  de  perpétuelle  ver- 
dure. Nous  trouuions  auffi  des  arbres  de  Styrax  ,  de  Pignets  ou  styrax* 
Piçées.Nous  montafmes  la  montagne  en  demie  iournee:&  quad 
npusfufmesauhaur,nouslarTouuafrncscouucrtcdeneige.Àu^ 
iiyobfèruafmes  vne  forte  de  Sauinier,  qui  eft  celle  efpeceque^'*^ 
Diofcoridc  a  deferite:  Ou  bien  eft  Thuya  de  Theophraftc  êc  ^  n 
Homère*  Et  pourec  qu*auions  veu  les  années  précédentes  vn  ax-  ^L^ 
bte  à  Fontainebleau  au  iardin  du  Royvqn  an  noramoit  arbre  de 
vie,  qui  fufgpporté  du  pays  de  Canadas,  au  temps  du  feu  Roy 
François  presser  de  ce  nom  :  obferuafmes  diligemment  îcdiâ 
Sauinier  £ux  le  mont  t  &  ayans  deferit  l'vn  &  l'autre  par  le  menu, 
les  tcouuafmcs  fort  fcmblables,mais  différents  en  queîqucsmct- 
ques,  quexpofèrorisenefcriuantles  plantes  en  particulier.  Les  NAturc^ 
Platanes  croifïent  fur  ce  mont  encor  plus  grands  qu'en  Àntio-  p/^^^*^ 
chc ,  ôc  font  de  telle  nature,  qu'ils  defpouillcnt  leurs  efcorccscn 
hyuer,en  ce  contraires  à  l'arbre  d'Àndrachne  ;  car  Andrachne  fe 
defpourlle  de  fon  efeorec]  rouge  au  plus  grarid  chaud  de  Fefté,  z&tmdr 
pour  ic  rcueftir  d'vnc  cendrée,  qui  au  commencemec  eft  de  pafle  ï^ndt^h* 
couleur.  Mais  le  Platane  fe  defpotiille  de  fon  efeorce  plombée  **" 
J'hyuer,&  (èmueen  vnegrife»  Nousy  trouuafmes  des  hauts  Ce- 
drçSjdc  niefine  ceux  du  mont  Liban,  defqucls  pluûeurs  de  la  co- 
pagnic,ànoftrepcrfuafion  fc  garnirent  de  {es  pommes ,  qui  {ont 
quafifcmblabîesauxpommesde  Sapin  y  mais-:font  plusgroflesv 
&:  iifîces  y  &  regardent  contre  le  cicL   Maintenant  ne  voulons- 
confommertempsàdefcrire  ceft  arbre,  mais  anonsbicnvoulii 
en  bailler  le  portrait^  >.  pour  r&onftrcr  -  Nous  cheminafmcs, 
long  temps  furie  dos  de  celle  montapie,  mais  nous  nefHons, 
encor  fur  le  plus  haut  eoupet  :   car  nous  anions  d'autres 
montagnes,  tantàdcxrrcquafcncftrc.  Et  otpan<lnous  rufmcs* 
venuz  iufques  au  defïbûs  d'vn  chafteau ,  quieft  aifisià  faau t\  àc£^ 
fiisvnroc,,iiûus.çorrm^  Jl  côoiç 

défia  tard,  lors  que  trQuuafmes  vn  OirLafchafa  fur  le  che- 
min ^  qui  e(t  aux.  racines  dudid.  haut  mont.    Il  y  a  fi  grandes 


'37b  SÎCOND    LIVRE'    ?>ES 

ToYtYâi&duSxpin. 


^Ahh 


Melefe. 
Zanx. 
Sapinus." 

Biùffe. 

i/àeuo. 

PJnaftsr. 


#&^  **'> 


SINGVL  A. 

quarité  de  Cèdres  fur 
le faifte  du  mont ,  que 
nous  ne  veoyons  quaft 
autres  arbres  plus  fré- 
quents ,  &  toutesfois 
il  n'y  croifTnuls  Sa- 
pins-, que  les  ;Latins 
nommer  Abieres ,  qui 
toutesfois  reflemblenc 
les  Cèdres,  tellement 
qucdirêôns  le  Cèdre, 
ou  bien  le  Sapin  ,efpe- 
ce  de  Ceskè-.  Parquoy 
en  audtfè'bien  voulu 
bailler  le  portraid  fuy- 
uant  le  Ccdrc.  Àuffi 
n'y  croift  point  de  Me- 
lefe, q«c  les  Latins  no- 
ment  Larkcs:  ncSapi- 
nus ,  que  les  François 
nomment  Suif&s',  ne 
Aleuo,  autrement  no- 
mez  Pinaftri ,  duquel 
Aieuo  il-y  en  a  auffi  vn 
arbre  à  Fotainebleati, 
qui  fut  pareilleméc  ap- 
porté âc  Canada  ,  &: 
prefentéau  Roy  Fran- 
çois ,  auec  l'arbre  de 
vie.  - 


"Des  bain o-s  chauds naturels  ^ui  font  fur  le  mont  Taurus  :  &  delà  ville 


àcHeraclee. 


Chap. 


E  ion;  no9  arriuafmes  au  Carbâ'fchara  près  (f  vn  baing 
deau  naturellement  chaude.  Ce  baing  -eft  tout  mure 
de  brique  ,  &  eft  la  muraille  Semblable  à  celles  qui 
font  aux  baings  faîez  ioignant  les  ruines  de  iroyc. 


,.O^SERV-£E;$-    FAR,     P.    BELONr  "57! 

L  ean  en  fent  vn  peu  le  foulphrc ,  &  ne  fait  point  ccngcîcr  Tes  cx- 
cr-cmen*  en  pierrçs ,  çprmnc  cç.uxde.  Padqueou  de  Source  ;  car  J 
Boafçulcnie^tjçaii.dçs.hamgs^  fo-y  quinefè;.     . 

converti ft  en,  pierre, j^ais  an^l'cau  froide  ;  comme  sSjÇeUç  qui 

&>rt;d-vne  fontame  à,Mcdane  presr  de  Noiû  à  fix  lieues  près àç   - 

paris,en  la  terre  de  Mon  ficur  Iean  Brinon  feigneur  de  Villaines: 
&  auprès  de  CUircriiont-  eri^  Auuçrgr>e ,  ou  çû  yn  pont  de  pierre 
que  leeç^irs  de<l!eau  y,  a  fait;  te-lendcmain  nous'pourfuyuifrocs- 
lcruifleauqui  defeenden  la  pîaineydcuallans  contre  bas:  Mais  a- 
près  qu'eufmes  regaigné  le  deflus  d'vne  prochaine  montagne^nc 
trouuaimcs  plus  d'arbres.  Et  ne  chemin afmes  gueres  après  auoir  }u\uiiae 
laifle.le  Car.bafçhara,  que  ne  trouuamons  des  terres  labourables  ILw.. 
enclpfcs  de  hayes,|aites  d'vn  arbr-e^qucÇolumelienoirunc  Iuiu-  hùuh'm :A 
bicr  blaCjlequcl  porte  vn  fruicr  femblable  au  luiubier  rouge ,  ex-  ro*gr.   - 
cepré la  couleur  A  qu'ils  vendent  parles  marchez  des  villes.  Les 
Grecs  Je  nômét  en  vulgaire  Ziziphia^'vn  nom  corrompu  de  lu- 
iubier. Quand  nous cufmes cheminé  iufqucs  à  Midy  3  cftans  fur 
le  mont,  veoyons  bien  à  cler  Heraclee  de  moult  loing ,  qui  efi  u% 
tuceiàbasen  la  plaine,.  Touûouts  defeendions  contre  val  ,  $c 
veoyons  plufiçurs  villages  utuez  le long d'vne  montagne ,  qui  les 
defend  des  vents  de  Bize,&  du  X'taeikal.Noustrpuuions gras âe 
quantité  d'Àbimthe  &:  d'Ambrofia.,  La  plaine  d'Heracïée  eit, 
moult  fertile  &  culriuce  pârtou^auffi  y  a  planeurs  villages:car  les- 
ruifleauxqui  dcfçcndct  des  motagnes^rroufent  les  terres  des  iar- 
dins  &  vergers,  ou  ils  culnuen't  toutes  fortes  defiuitticrs ,  corne  ^alm. 
Pefchers^ÇomiailIei'SjPrimierSjPommiers^Poirk^ATn^ 
Grenardiers3Oragiersî&:  autres  tels  arbres  de  iardin.Il  y  a  vn  fort  ™  UpLint- 
grâd-villagepres  d'Heracîec,qui n*cft  habité  q. de  chrefties  Grecs,  «•#*'"&«■ 
qui  parlans  leur  langage  vulgaire  >  cft  pur  GrecÀiiiB  y  a  vn  autre 
<T  Arméniens  Chrcfiiens  :  tous  deux  .font  fore  diligens  à  cuîtiuer 
les  iardinagesxar  l'on  voit  lcursvigncs  fort  bié  labourées^  pouf  * 
auoir  i'eau.-à.comracndcnicnc,  ils  onz-de  toutes  fortes  d'herbes  en 
kurs  iardins, telles  que  nous  au 5s  es  noitres.Nous  arriuafmcs  biç  Seaclee 
tard  en  la  ville  d'Herac!  ce ,.  qui  cfl  la  première,  ville  au  .deçà  du  <&«•»* 
mÔtTaurus,&.  auiîi  eft  clic  iïeuee  au  pied  du  moc,ioignai  feszaci-  Tai?Ui\ .. 
nesX)r  faut  il  fçauoir  qu'il.y  apluûeuss  Hericiecs:iio9  auosja  par  p^  -^  _. . . 
léd'vnequicftau  riuageduProporidCjVoiiineàllodollo.Erpour  Vj^V    " 
sequ  auas  die  qRodoilo  auoitnaPcrinthus,auons  dit  en  eclieu  ^erintlus^. 

A  A  a    iju 


yjl  SECOND     LIVRE     DES     SIKGVIA. 

que  quelques  autheurs  modernes  debatenc  qu'Heracléc  du  Pro- 
pontide  doit  cftrc  nommée  Perinthuscmais  quant  à  nous,ja  nous 
■       y   ,  fbmmcscxcufcz  qucçacftc  lemoindredc  noftre  foucy  que  de 
ïropontiie   ren<3rc  ^s  nom«  anciens  aux  villes  qui  1  es  on  t  changez  à  des  rao- 
*  dernes.  Parquoy  Heraclce  duPropontide,foit  Perinthus  ,  ou 
Rodofto,nous  en  laiffons  l'examen  à  qui  le  voudra  entrcprédrce 
Nousy  crotmafmes  déroutes  fortes  de  viurcs,pain,vin,&  chair. 
L'on  nous  aanTcuré  que  la  plaine  d'Heraclcc  nourri  {Toit  des  ha- 
rats  de  plus  de  quatre  mille  cheuaux  par  an,  Se  desquels  Ion  en  ci- 
re plus  de  fix  cens  de  feruice  toutes  les  années.  Les  cheuaux  fonc 
fort  eftimez  en  Turquie ,  venans  de  ce  pays  là ,  &  font  nommez 
<&eu4ttx     cheuaux  Caramans.  Les  habicans  ayans  î  arbrifleau  de  Sumach 
Zardmans.    à  commaRdcment  es  montagnes  voifincs  ,  font  pronifion  de 
swmch      fruicl: ,  duquel  crouuaftnes  au  marché  d'Heraclee  à  grands  pleins 
Ûlcs,  dont  ils  donnent  gouft  d'aigreur  à  leurs  mangeailles,  &y 
adiouftent  des  aulx  batusauec  du  Tel ,  &en  faupoudrent  la  chair 
tant  cuicfce^boul  lie,  queroftic,  qui  la  rend  aigre  &  de  bonne  fa- 
«eue.  Nous  arreftafmcs  à  Heraclce  pour  rccouurer  des  montu- 
res^ y  fufmes  tout  le  iourcnfuyuaat.  Cefte  campagne  d'Hera- 
clee eft  longue  de  deux  iournees ,  qui  n  eu  habitée  ilnon  en  celle 
partie  ou  il  y  a  abondance  d'eau. 

Voyage  £Heraclée  k  Covncx  &  des  Cheures  qui  portent  iajtneîame 
dcCkamelot.  Chapitre       c  x  n. 

i  Yatistrotiué  montures  pour  aller  d'Heraclee  a  Co- 
\  gne,nommeccn  Latin  Jcomum.no^s  commença  (mes 
\  à  faire  chemin.  Les  montures  couftent  vn  ducat  Se 
i  demy  pour  pièce.  La  plaine  cft  arroufee  par  canaux 
comme  à  Damas.   Regardans  vers  le  pied  des  montagnes, 
veoyonsplufieurs  villages  moult  cflongnez  l'vn  de  l'autre.  L  her- 
be que  les  Grecs  nommèrent  Abfinthium  marinum,  y-eft  abon- 
dante, non  qu  elle  croiffe  en  ceft.  endroict  auprès  de  la  mer  (  car 
Zdpntlm  elle  cft  à  plus  de  quatre  iournees)  mais  ceft  que  noz  anceftres 
marmum.    jUy  jmpp{CTcnt  ce  nom ,  encor  quelle  naiffe  es  lieux  Méditerra- 
née me»   nces  LaCarnpagnc  blanchift  de  Sauge  menue, Se  de  Poiiû.Nous 
paflàfmcs  trois  ponts  de  bois  :  Car  les  canaux  &  ruiûeaux  y  fonc 
raoult  fréquents.  Iis'cfteua  vn  vencauftral  impétueux  Se  froid, 


.O  3  S  EïLY  E  E  S     »  A  R     P.    B  EXOV»  575  , 

<îuifi"otis^ouflaoiclcfablcauvi%caucc  grande  violence.  Noos 
pafTafmes  ioignaiw  vncmoatagncroBdCjqui-fetnbloit  cftre  faite 
par  artifice  humaine  çairelleeft  efïeuee  & entoûnice de foflez 
pleins  d'eau.  Continuant  ^ftre.chèrnwi  ettcrafrûevettiTapaysi 
fort  pierreux ,  qui  eft  rcl  que  le  paysou  eft  fitué  Fontainebleau: 
reftequ'il  n'y  a  nuls  arbres.  Nous  vinfines  loger  à  vn  Carbafchara 
delfus  legrand chemin  ioignant  vne  fontaine ,  dont  nous deflo- 
gcafmcs  auantiou*,<&:eDttafmes  en  kfgescapagnesiahs  arbres. 
Cheminans  par  la  campagne  veoy ons  les  montagnes  de  cofté  &s 
d'autre  bien  loing  de  nous ,  ou  il  necroift  nuls  arbres  finonàla 
|ûmniite,au  bas  defqtieîles  nous  trotiuions  feulement  de  l'Aluy-  iydi$nefî* 
ne  flifditl:c,appcîiee  Seriphium  niarimim,oT-derautre  Ponrique,  t'^ue. 
qui  nedirîere  enrien  à  la noftrede  iardt  in^hprs  misqu  elle  eft plus  \Ahnede 
blanche.  Les  Cheures  de  ce  pays  portent  la  laine  fideliee ,  qu'on  tArÇ^  ^  u 
îa  iugeroit  eftre plus  fine  quefbye:aufll  furpaffeelle  la  neige  en  ^^^ 
blancheu  r.  Ces  Cheures  cy  ne  font  point  plus  grandes  que  noz  ^^ 
Moutons ,  &  neics  tond  Ion  comme  lesOuailîes ,  mais  on  leur 
arrache  le  poil  :La  chair  eneft  autant  délicate  qucdeMouton^ 
ne  fent  point  la  fauuaginc.  Tous  les  plus  fins  Chamclotzondez,  cha.mcl<*\ 
ou  fanspndes,de  beauté  plus  excellente ,  font  faits  de  la  laine  de  wk\ 
telles Cheeres,defquelles  ou  femblables  wîElian  authcur-Grce ,  à 
noftrë  aduis,a  fait  mention,  Car  il  dit  que  les  Cheures  de  la  met 
Cafpie  fonttrcfbknches,  &  fans  grandes  cornes  :  defquellcs  le 
poil  eft  fi  mol ,  qu'il  peut  eftre  compare  ai^x  fines  laines  Miîefié- 
ncs ,  qui  font  laines  les  plus  délicates &:  fines  qu'on  %ache  trou- 
ocr.Mais  Pline  à  la  dtr&rcncc  de  celles  là ,  en  cfcrit  d'autre  (orte. 
Tonâentur  Caf>ne(âit-i  î  tyuodmagnis  v'dhsftmtm  magna  fa.m  Pkryg^       . 
wnâe  Oiiaafieri filent.  Std  quQdpmmtm  ea  êotjfura  m  Ciltao,  fit  tnfli- 
tuta.nommd  Cilicoâ  adiedj]e  écm*J\  appert  donc  que  les  Cheures 
font  de  diuerfes fortes.  Cciiesdu  Chatneiot  font  priuees>&  dif- 
férentes aux  noftrcs  :  car  elles  font  de  petite  corpulence  ,  &  ont 
petites  cornes.  Leur  poil  eftpios  blanc  quelancigc^iTez  lôguct, 
mais  plus  délié  qu  vn  cheueu»  Nous  n'auiôs  autre  herbe  plus  fre- 
quête  que  celle d'Ambrofia ,  fi  aromatique  que  nous  eftjons  en-  ^^^fi^ 
teftez  ne  plus  ne  moins  que  fi  enflions  efté  en  vne  caue  plaine  de 
vin  nouueaiuLes  habitans  la  cueillent,  &  sen  feruentà  fechauf-  ^€rmùur  ^ 
fer,  d'autant  qtfilz  n'ont  point  d'autre  bois,  Aufll  feichent  ilz  les  SreuaitCm 
bouiès  des  VacheSjCÔmeilz  font  a  i'Armour  de  Bretagne.  Cefte      ô 

AAa  iij 


37^  s  s  coaur  rx  Lr  k  s  au  e  s  r:  s  ik.CuY  t  &, 

capagne  dequoy  parlons  ,  eft  fore  defcr.ee  :  car  il  n'y  â  ne  ruifleaux: 
nefontames.  Nous  logçafmes  d'affez  bonne  heure  en  y  n  grand 
village  nom  me  Saïamsi  i;,  &  -trouuafôa-es:  çpi'ïlz  a^ip'y  ent  des  ,ba~ 
lai&djol'heike'dlAw^pfi^  pP>gnee,lii-  . 

uonsmonftréen  France  pacgrandeifingu'l  ad  té  :.ear  il  n'en.croift" 
pointde  fauuage  en  Europe,,  au  moins  qu'ayons  peu  fçauoir. 

,  : ,  -.    :  ■  .  l&èl&ïwilk £l:çQWttnè> .  -,    \  .  \ .  Çbapjtrç   ç,  x  M  U,      -..■_.. 

E  iour  d'après  partifmes.  dTfmîl ,  Se  continuafmes 
"  la  campagne^ui  nous  dura  iufques  à  Cogne,&:  lo— 
(  geafrjocs  dedans  vn  grand  Carbafchara.3imurai}- 
f  Iç  de  Cogne,  eifcfaicejde  pluiîeurs  forces. de  pierres, 
ST52^  comme  anfE, font  celles. de Conllantinople.  Ileft 
a>gne.        aifé  à  voir*que  les  murailles  de  Cogne  (ont  modernes  :  car  Ion  y 
voir  les  pierres  de  marbre  des->Eglifes ,  çu  ion  voir  encore  les  epi- 
taphes  en  lettres  Gœques^qui  montrent,  qu'elle  a  autrefois  efte; 
poiredec  par  lçs  Grecs  Cbreftiens.  ;Çar  les  croix  &c  les  veftiges- 
qu'on  y  voie,  ledemonftrenteuidemmcnrJLe  circuit  des-muraiU 
les  cft  en  rondeur  :  mais  les  cours  font  o^iarrees ,  rareSj&ç  peu  fre- 
îmmm.-    quenrçs.  La  ville  deCpgnç-anciennement  nommée  IconiCiii  çl^ 
gueres loingdesbauçes.inontagnes , déficelles  defeendepç plur 
fieursFuiâèauxqiii  paiîèncen  la  ville.  La  partie  de  la  ville  qui  c(t 
tournée  àJacampagne^regardc  le  îeuanr.  Il  y  a  vn  Hercules  rail- 
lé en  marbreàcelle  porte  de  la  ville  >  qui  eft  encre  l'Orient  Se  mi- 
dy.au  dehors.de  1^  muraille,  Joignant  vne^our^mais il  na  main- 
tenanç_poinc-detçfl;e  :  çarlesTurçs4a~luy  abbarirentn'à  pas  long 
tcmps.Ii  y  a  hui'd  portes  en  Cogne  comme  en  Halep.Elle  eft  ha- 
bkccÀe  Grecs,Turcs,  Arabcs>&  Armenies.Lcs  vignes  y  font  fo  '-. 
gneufèment  cukiuees  lauillnous  y  trouuafmes  de  bon  vin  y  que 
ksluifs  nous  vendirent,. Les  plus  beaux  bailimens  de  Cognex 
font  Mpfquces ,  les  baings ,  &  lcsCarbafcharas,    Lon  ny  brufle 
%(Àsfï'6n.    point  d'autre  bois  ûnon  que  du  grand  Geneurier,  &  de  la  tecon- 
hmji*  a       de efpece  de  Sauinier  v&  de  deux  petis Cèdres ,  &  du  ferment  de 
c%/ie-  :       Ledon  :  Lefquelz  quand  voulufmes  difçerner  pour  les  cognoi- 
frre,ni}lle  diligence  ne  nous  a  peu  fcruiràles  fpecirèerrcar  iizfonc 
de  mefme  couleur,  de  mefme  odeur  6c  faueur.  Toiisfix  ne  font-. 
gas  cpniiejcs  d'efeptee  dure  comme  les  autres  bois  xmais  de  ban- 


des  langues ;)esvncs  fur  les  autres  ,  comme  îa  vigne:  &  ônt.Tcs- 
ccetirs'-dta'dct^ns rouges ;,  entoumez  -d7vne  ''c-ou-ueftase*  blâriehé' 
oomïaéïe  Gai-ré  ul^êr^Së  ïl-ft&lesituflaris ^^^^trcdnîâ'fmes^ffe-^ 
renchéri  îkfumeë  n^â^Harfeôn  --qui deY6tf's*e'ftvhï  tomme  :dë 
Tille,  &legier  comme  de  Saule.  Tous,  excepte  le  Ledon  ,  portée 
refîné  plus  dure  qucleTcrebinthe.  Leurs  bais  ont  mcfme  durté,- 
&frailkùre  à  la^co^n-ce*  Tous  meur  ifTen t  leurs  fruietSre n  mefeic 
tèfi^d'hy^e^&WBEverdscncoutés^aiibns*    :;*  :     -  ' 

pes  Orfeures  de  Turquie.  Chapitre     c  x  1 1 1 1.  • 

|t  Es  Tutcs^forïe-quafi-aiîzFJ  grande  dcfpen&cn  îcur 

Ç "eikîroiébèTï l'o'rfeuéfie^uc «ou-sr&'ecrqtMlz  fonry 

cft-defbrt  bonne  matière.  Hz  aiment  à  porter  des 

anneaux  ,  &;  veulent  que  leurs  eoufteatix  foyenc 

__         J:bién  façonnez  :& -les  perdent :a'vne  chaîne  dar-    , 

géht ,  àôcWgâi ne éft  eriri chiedequeîqttes  belles garni-tûrès  d'oc  ... 
ou  d'argent;  Ocft  vne  couftu  me  commune  tant  aux  Turcs  cora-  - . 
meaux  Grecs  de  porter  les  coufteaux  pendansàla  ceinture  :-& 
font  communément  forgez  en  Hongric^ayansIc-maHche  moult  z>e**t  &%>* 
îongrmais  quand  ks  merciers  de  T-urquicîes  erttt:âchefez,lors  n*z- ^*- ' . 
Jes-baillent-aux  ouuricrs  powr  k-ur mettre  vn-  bout-,  qui  éfteo-m-  Ucarnt:   . 
munément  de  dent  de  Rohard,dont  y  eh  a  de  deux  fortes.  L'vne  ^teST 
eft  droi&cment  blanche  compacte,  reiTemblantà  la  Licorne  :  Se  TortiU  J'Ine 
cft iî dure quelacier a pejney  peut mëfcdrc,f iï iveè-bien  trempé,  du. 
L'autre  dent  de  Rohard  eft  courbes  comme  celle  dvn  Sanglier: 
qu'eulfibns  creu  cftre  denc  d'Hippopotame ,  n'euft  eftcTqa  aiîÔs 
veu  des  Hippopotames  en  vie,q^i  n  en  auoyent  pas  de  tciles.En- 
cor  les  emmanchent  ilz  defcaille  de  Tortue  d'Indic  ?  qui  font     ,.       , 
rranfparcntes  dérouleur  d'or-ccy  dont  fcmmanche<irod,vri.cou»-T^   ^ 
fteau^oufte^enuiroirv-n  décaties  ofe&ures  f&âz  accropis à  terre 
quand  ilz  befongnet,  Àuffiëû  kur  fourneau  au  milieu  de  la  bou- 
tiqueencontre  terre  fansekeminee:  &:  Ce  feruent  d'vn  feul  fouf- 
fkt;rondyq;u'ilz-haufent-&:-  ba^ïèflt  quandilz  veuknt  foumer. 
N^us^GUrmafmcs (ki*x4ours  àC'Qgné- pbôî  ^-ccbuurer  montu- 
res';devoîckîres  ,<3£pô'i«r  »oû*four-mr  de^iurcs:,&au4riquecc- 
ftoit  la  fefte  de  Noël .  A  près  que  nous  fuîmes  repoiez ,  n  ou  s  par- 
tifmes  aptes-dïmer  >  ^allafra-e-s-vers  la  montagne qiie  nous  auiôs 
-**'■'-  ^':--l  AAa  iiij 


pé  SECONI>     LIVfcE     DES     S-INPGVLA. 

à pafTer.  Il  comnionça  à.neiger ,  &;  couurir  la  tcrrc:qui  fut  caufc 

de  faire  çi^axcçnoz  guides  hors.du  chemin..  Quandnous  .fufmc* 

au  haut,  nouscheminafmes. ^pagjetapsjKÎr  fo*e$sdç  Piçec  :  & 

ayans.tr ouué  vn  village,il  nous  conuint  loger  dedans vn  Çarba£ 

chara.  Le  iour  d  après  nous  fût  difficile^  caufe  du  têps,aufTi  qu'il 

fàilloit  tantoft  monter^  tantoft  defcendrc.Ce  pays  cft  fort  peu- 

plé,&  y  a  grandcquantkc  dcydlages*  Et  encore .que  fuflîons  en> 

Qxigih.      ^yucr nous  trouuions  de  FOxygala],  qui  eft vjïdecpmmuneaux 

Turcs,&  principalement  en  temps  d'efté.ïlzlc  tiennent  préparé 

dedans  des  grandes. efeuel les,  qu'ilz  vendent  es  boutiques ,  def» 

quelles  le  taux  cft  faitvn  afprc  la  pièce  ,.  &  effc  fuffifantàfaouler 

quatre :  Turcs  •.Nous  se  cheminafnaes  guercs  ce  iour^uç-naus  ne, 

fumons  horçdes  mon  tagnes:&:  cntrafmes  en  lacampagn^^e  ï*a- 

phyiie,qui  eft  celle  région  qui  s'appelle  Caramanic-,.  laquelle  co- 

Zamçfyke*  pren^fouz  fov  Cilicie  &  Pamphylic  Elle  a  fept  Sangiacats  dcC- 

€aramAw?  &  charge.  Nous  chçmipafmes  entre, petits  arides  de  tre£ 

sm  S4ncrû*  fecaux.-fruifts  ^  laju^as  la  vûlc  .et  Apgouri  à  niain  dextrë^,  qui  an-» 

cAtsm£*ms  ciennement  eftoitnommee  Encyra.E.!le eftpour leiourd'huy  la. 

fhyUe,         ville  plus  renom mee  de  tout  ce  pays  là ,  pour  le  grand  transe  des. 

JîngùurK    Qhamelotz.Çar  il  n'y  a  ville  oujon  en  face  finon  là:  d'autant  <jue 

çnçyu.  v  ..^C^çuresd^nj:  eftprmie  î&ÀnçJaine  à  les  faireane  fe  trauucnt 

T'ch*    <pcnçes  contrées  de  Pampiiûie..   Continuais  noftte  chemin 

m^    vinfmcs,  loger  en  Àchara.. 

.. ..    ,    :v:-     Vel*.vttte£"4cb<irfo  Chapitre     cxv. 

Es  villes  de  Turquie  ne  font  pas  communément  mu- 
rées, non  plus  qu'eft  Achara ,  qui  eft  ville  en  l'Armé- 
nie minçur.Nous  y  aupns  yeu  des  pierres  infçrites  de 
_  lettres  Latine?  yqui  anciennement  feruoyent  de  fe- 

pulchrçSjQiais  maintenant  elles  feruçnrdçvaiucaux  à  tenir  1  eau 
defTouz  les  fontaines  pour  abbrcuuer  les  Çbcuaux  des  paflans^ 
Nouslogcafmcsau  Carbafchara..  Celle  ville  eft  près  d'y  n  grand 
eftagjarge &  fpaciçux^lequcl  nous  coffcoyafmes  lpg  téps:auquçl 
on  pçCçkp$\ ufieujrs  fortes  de  ppigons^  ent ce  a# trçs  a  Tanches^ 
£roctats><Carpes&;  Brèmes.  Nous  auons  patcy  deuant  compté 
lecheminpariournec,  d'autant  que  les  Turcs  ne  comptent  par 
ajjllcsqpmiuccn  Italie,  pçgar  lieu.es  comme  en.  France.  Nous, 
'...*."  gârtifmes 


OBSERVEES    PAR     P.    BELOKV  yjj 

pahifmes  et  Achara,  &  continuafmes  la  fufdi&e  campagne ,  en 
laquelle  ttouuionsdes  villages  fitusz  îe  long  des  collines ,  tan  c  au 
eoûe  dextre  que  feneftre.  Nous  dinafmcs  en  vn  petit village,ou 
noustrotiuafmesaûez  deviures.  Le  foir  nous  vinfœes  loger  en  c-4m^^ 
vne  autre  ville  nommée  Carachara,  qui  cft  à  dire  Chafteau  noir, 
ou  mifmes  fin  à  ce  voyage  pour  vn  temps.Et  pource  que  demeu- 
jrafmcs  là  y&r  paf&frnes  i'hyuer,&:  bonne  partie  du  printemps  cn- 
fuyuant ,  nous  pourmenant  par  les  lieux  circonuoiûns  ,.  euf- 
mes  loifîr  d'obferuer  plufîeurs  choies ,  touchant  les  moeurs  Se  fa- 
çon de  viure  des  Turcs.  Tout  homme  qui  fçait  quelque  meftier 
eft  toufiours  mieux  recueilîy  entre  les  Turcs,  quvn  autre  qui 
n'en  a  point.  Ceft  la  raifbn  pourquoy  les  cfclaues  que  les  Turcs 
prennent  en  guerre  fe  deliurent  de  feruitude  ,  les  vns  pluftoil 
que  les  autres.Car  ceux  qui  fçauent  mefticr  ont  incontinent  gai- 
gn é  l'argent  de  leur  rançon  tau  contraire  des  autres  qui  n  en  f  ça.- 
uent  point,  &  qui  font  conçràin&s  d'exercer  ouurages  mécani- 
ques :  car  ceux  chez  lefquelz  Hz  ont  à  demeurer,  les  font  charuer 
ou  garder  leurs  trouppeaux.Les  Geniflaires  mefmes  pour  la  plus 
part,  fçauent  ouurer  de  quelque  choie: car  cftans es  fcrailz on 
leurfaitapprendrcquclquebefongneen  ieuneffe.  Somme  qu'e- 
flans  les  mcfliers  nourriffons  des  perfbnncs  de  férue  condition, 
il  ne  fèrt  de  rien  en  ce  pays  là  de  s'allouer  effare  gentil-homme.  Il 
y  en  a  plufîeurs  qui  ne  vendent  que  du  pain1  chaud  pour  manger 
auec  le  mouft.Mais  pource  qu'il  y  a  difEcuîtcen  la  façon  de  leurs 
fours.,  dirons.de  quelle  manière  elleeft.  Ccft ,  qu'ilz  ont  de  telz 
grads  vafes  déterre  que  font  ceux  cfquclz  nousraifons  les  buées, 
que  nous  nommons  cuuiers  de  terre  tlefquelz  ilz  enterrent  en  la 
boutique  iufques  à  demy.  Et  eitant  le  cuuier  percé  au  fond,  ilz 
laiflent  vn  conduid.  rond  à  cofté  en  terre-,  tpi va  refpondkcau 
fbnddu cuuier.  Et  le  cuuier  eftant  couché,  quafî  de  trauers  ,  ê£ 
ayant  le  conduitfà  cofté  du  fond, fait  que  le  bois  ou  charbon 
qu'on  met  au  fond,  s  enflamme  facilement,  &efchauife  le  vafë: 
de  toutes  parts.  Le  boulanger  qui  a  fà  paftelcuee ,  faifant  des  ga- 
lettes tenues ,  les  metdefTusvne  cîiiïè  commele  dos  d'vn  panier,. 
Jarge  comme  vn  bonnet:  lequel  tenant  fa  main  .dedans  la  cliûe, 
applique  la  pafte  à  la  voûte  du  cuuier  qui  eâ  chaude  >.&:là  la  ga- 
lette demeure  pendue ,  &  fecuiâ:  tout  àibn  aifè^car  lonuriery 
cri  mettant  vne  pour  cuire  ^eri  ofte  vnc  autre  defîa  cuicbc~y£iL 


37$  Yl'CONB     LIVRE    DES    SlHGVLâ. 

ayant  pîuûcurs  qui  fc  tiennent  ainfi  pendues  aux  voûtes  du  vaiè» 
Et  pour  les  ©fter  ilavne  petite  fourchette  en  manière  de  hauec 
pour  les  acrocher  delà  main  gauche,  à  fin  que  tenant  vne  longue 
efpatuîecnfadextrc5iifacc  lafeher  prinfeàîa  galette,  &  la  face 
tomber  fur  Ton  hauct.  ÀtfflTi  eft  neceûaireque  louurier  n'ait  la 
barbe  trop  longue:car  elle  feroit  fubiede  à  (e  griller  à  la  flamme, 
qui  fait  cuire  lepain.  Les  habitans  enuoyent  acheter  de  cela ,  &: 
le  mandent  chaudement  auec  le  mouft, qui  leur  eft  au  lieu  de  gra- 
de friandife.  Cecy  eft  en  plus  grand  vfage  l'hyuer  qiren  temps 
d'efte  5  auquel  Ion  trouue  des  fruittz  &:  autres  hardes  à  manger. 
Maispource  que  ferons  apparoiftre  cecy  plusàplainautiersîi- 
ure  par  cy  aprcs,nousen  tairons  pour  le  prefent.Toutefois  auant 
que  de  pourfuiure  le  récit  de  telle  matière ,  il  nous  a  femblé  con- 
venable mettre  vn  difeours  àcs  loixque  donna  Mahomet  à  Tes 
fuppoftz,quafî  en  manière  de  parente{c,pour  faire  mieux  enten- 
dre que  la  Barbarie  &  beftifede  ce  faux  prophète  a  feduit  tout  ce 
pauure  peuple  ignorant  fà  Ioy,qui  eft  vn  vray  fonge  phantafti- 
que.Parquoy  mettans  un  à  ce  fécond  liure^ômencerons  le  tiers 
parles  plus  cuidentes  refueries,  dequoy  s  eft  fouuenu  Mahomet. 

fin  du  fécond  Hure. 


ÂV    LECTEVU. 


sss 


^g  Vts  au  Huons  trouue  noumiïe  occajion  en  deferiuant  ce  tiers 
+liure>de  fournir  traiBer  les  ftngularite^fûr  la  manière  de  vi- 
\  ure  des  ^ens  en  Turquie , félon  que  les  y  auons  obferuees  eftans 
-  „__j  refidens  en  ^i 'fie au  jm  cœur  d'iceUe  :  Nous  a  femblé  bon  auat 
toute  autre  cho ferres  auoir parlé  &  fait  particulier  difeours  des  mœurs 
de  diuerfes  nations  3  par  ou  amns  chemine  ,  toucher  quelque  petit  mot  des 
chofcsfmtaftiques  que  le  faux  prophète  Mahomet  leur  a  laijfé  en  fon  ^4l- 
tvranJSoit  que  noyons  mis  le  daBedes  tournées \mo'vs&  années  enceft  œu- 
ure, comme  plufiews  autres  qui  ont  deferit  leurs  voyages  joutesfois  quteon- 
quesdefirera  UfçauoirsuueiUeUre  la  préface du  premier liure3&  là  le  pour- 
ra voir  bienaulong.  Vefia  auons  fait  apparoiftre  par  gens  fufjifans  d'au- 
mïté &  de  fçAuoir,queri  auons  faute  detefmoins  aappromernozvoya- 
ges^dont eft cy  faite  mentiw*.  ,. 


r?9 


LE   TIERS   LIVRE   DE 

;'■  PLVSIEVRS    SINGVLÂÏUTEZ    ET 

CHOSES    MEMORABLES     O-BSEB.- 

uecs  en  diuers  pays  eûranges.. 

Par  Pierre  Retondu  Mans. 

Particulier  difeoum  touchant  le  commencement  de  ïorîywzdep 
lois  des  Tupcs*  Chapitre:    i. 

R  come auons défia  did-fur  la  ûndu  feeo-nd liure;, 
c  eft  gfâc?  refacrie  de  lire  ce  que  Mahomet  a  eferic: 
ésliuresdefor*Alcoran:parquoyfçachas  qu'auSs- 
eu  loifir  d'obferuer  beaucoup  de  cko  fes ,  fur  la  fa- 
çon &:  manière  de  viure  des  Turcs  x  &rprincipale- 
meHceftansdeiTeioiKe&Paphlagonie,ou  ckmeurafmes-quelquc  p,,^^. 
efpaccdeceps^nousaferablebôiTiectrcvnpentdircGursdeMa-  "^^ 
Cornet  à  part ,  tel  pomblc  que  personne  n'a,  encornais  en  noftrc 
Iangue,fans  totitesfois  que  perfonne  s'en  trouuea^ctinemêt  fea- 
àâlï£é>a  fin  qu'il  nous  Toit  plus  facile,  que  par  cy  après  puilH5s  fai- 
re.eatsndre  la-raifon  pourquoy  les  Mahomctiiies  fe  maintiennes 
en  telle  manière  de  viure, veu  mefmemenc  que  c'eft  choie  conue- 
naut  à  la  matière  que  prétendons  traiâxr.  1  n'y  a  pas  îo-no-  temps 
que  Mahomet  nafquit  en  vne  ville  de  l'Arabie  heureufe ,  nômee   '£'??' 
)a  Meque^qu  interprétons .Pccra,ou il  comcça4a4câc  des  Turcs,  coLumt  U 
êcz  ce  qu'ô^eferit  ce  fut  l'a  d'après  l'aduenemet  denoftre  Seigneur  Su  de  m**. 
fixeens &  vingt,&: mourut  Tan ûx  cens  quatre vingts  trois.Ess  homet. 
Turcs  ont  vn  liurenomc  Afear}qui  contient  route  la;vic  de  Ma- 
àometJequeî  ih  ticnnenr&:  obferuent  .11  efteomprins  leans  tout 
ce qu'il feitdepuis &naiuance  iufquesà  fa  mort, &: .que  ion père  ***&*&** 
auoit  nom  Abdola  Motalip ,  &  famete  Iminav-tousdeux  idolà-  homct' 
âres.Il  eferit  que  ledid:  Abdola,mx>ticuE  auat  que  Mahomet  naf-  y^^' 
«|uifh&  faaiicrcImin&mQutut  deux  ans  aptes  qu'elle  i  eue  enfan-  °'^~ 

MEij, 


$0  TIEÎLS     LIVRE      DES     SÏNCVLA^ 

téi&fpar  ce  poind  demeura  orphelin  de  perc  &  de  mcre.Àuffi  ef- 
cric  que-Mahomet  eft  iflli  de  la  lignée  d'Ifmael ,  né  de  Abraham, 
qui  eu  t  deux  filz ,  î'vn  de  Sara,nommé  ïfaaCjî'autrc  Ifmacl  filz  de 
Agar  :  &  qu'Ifmael  baftit  le  temple  de  la  Meque ,  qui  eft  le  pre- 
mier (ce  dit-il)  que  les  hommes  ont  édifié  au  monde.  Aufli  dit 
que  quand  Mahomet  auoit  quatre  ans ,  qu'il  alloit  pefchcr  auec 
d'autres  petits  garçons  :  &  îuy  eftant  feulet  en  vn  champ ,  l'ange 
Gabriel  veftu  d'ornemens  blancs  comme  neige ,  vintà  îuy  en  fi- 
gure humaine,  qui  le  printpar  la  main ,  le  tirant  à  part ,  &  l'ayant 
mené  derrière  vne  colline ,  Iuy  ouurit  la  poidrinc  d'vn  rafouer 
trenchant,&:  îuy  tira  lécœur,dont  il  ofta  vne  goufte  noire,  en  la- 
quelle les  Turcs  dien t  que  les  diables  tentent  les  hommes,&  que 
c'eft  chofe  commune  à  tout  homme  d'en  auoir  :  &:  qu'après  l'an- 
ge îuy  remiftle  cœur  en  Ton  lieu,  &  Iuy  nettoya  la  poi&rine ,  à  fin 
qu'il  ne  peu  (Harnais  plus  eftrc  tenté  du  diable  en  aucune  faifon. 
,  -  Voila  la  narration  que  le  liure  d'Afear  aeferit  touchant  le  pre- 
^(ïUeMd* mier  commencement  de  Mahomet.  Le  mefme  Afear  eferit  que 
bometï  "  Mahomet  eftant  en  laage  de  quinze  ans,  faifoit  fouuet  des  voya- 
ges en  Perfè,au  Caire,  &  en  Syrie,auec  vn  riche  marchand,nom- 
mé  Gadifa ,  qui  eftoit  mary  de  fa  coufine  germaine  ,  laquelle  il 
print  en  mariage  quandle  iufdicl  Gadifa  fut  mort,dont  il  engen- 
dra quatre  enfans,fçauoir  eft,  trois  filles  &  vn  filz  :  qui  fut  fa  pre- 
mière femme.  Et  ayant  prins  le  trafic  du  deffunâ: ,  fe  meflade 
marchandife,iufques  à  tant  qu'il  eut  trente  &hui&  ans  :&  lors 
fado nna à  vne  vie  folitaire  en  lieu  defèrt,  allant  tous  les  iours  fe 
cacher  en  vne  cauerne,qui  n'eftoit  guère  loing  de  la  Meque,ou  il 
demeuroit  iufques  à  la  nuicl:,&:  y  faifoit  fi  grande  abftinëce ,  quil 
fefèntoit  arfoiblir.  Aufli  dit,  qu'il  en  perdit  l'entendement,  en 
forte  qu'il  en  fut  iufques  à  refucr,  &  auoir  pluficurs  vifions:  Se  cn- 
tendoit  quelques  voix  fans  voir  perfonne,  lefquclles  il  racom- 
ptoit  toutes  les  nui&z  à  fa  femme  :  mais  elle  Iuy  difoit  que  ce 
eftoient  tentations  diaboliques: pour  laquelle  chofe  il  entra  en  fi 
grande  frenaifie,qu 'il  en  cuida  deuenir  infenfé ,  tant  qu'vn  iour  il 
fut  en  délibération  de  fe  précipiter  du  haut  d'vne  montagne. 
Quand  Mahomet  commença  fon  Aîcoran,  il  feit  femblant  que 
F AugeGabriel  le  deftourna  de  fon  opïniô,difât  que  l'Ange  eftoit 
venu  àluy  en  forme  humaine ,  ayant  des  selles  blanches ,  Iuy  di- 
iant:  Refiouy  toy  Mahomet ,  Dieu  fe  recommande  à  toy,  te  fai- 


OBSERVEES     PAR.     P.    BELOtf.   ,  $%?: 

fant  a  fçatioir  qu'il  faut  que  tu  foyes  fon  prophète.  Tu  es  la  plus  ' 
parfaite  de  toutesfes  créatures.  Aufli  dit  que  l'Ange  luy  monftra. 
feslettres ,  luy  difant  qu'il  les  leuft.  MaisMahomet  ayant.refpo- 
du  qu'il  ne  fçauroitlire,ditquel*Ange  luy  répliqua;  Mahomet  lis 
le  nom  de  ton  créateur ,  &  lors  fè  difparut  l'Ànge,&;  s'en  alla.  En- 
cor  eferit  Afear,que  Mahomet  retourna  moult  ioyeuxà  la  mai- 
fon>&  que  les  arbres,pierresÂ:  animaux  qu'il  rcncontroit,luy  fai- 
foyent  honneur,  6c  en  le  faisant,  difbyent  :  Mahomet ,  tu  feras  le 
ménager  de  D  ieu.  Toutes  iefquelles  chofès  il  racompta  à  fa.fem- 
mc  :  mais  elle  ne  le  vouloit  croire ,  ains  luy  difoit  que  c'eftoit  ten  -  •  _ 

ration  diabolique ,  dont  Mahomet  fut  de^plaifant ,  iufques  à  ea 
cftre  malade.  Aufli  dit  ledit  Àfear ,  que  lange  vint  lors  à  Mahor 
met,efrant  deflus  fon  Iict,luy  apporter  le  fécond  chapitre  de  l'Àl- 
coran,ou  il  y  auoitainfî eferit  :  Lcue  toy  ,  magnifie  ton  créateur, 
nettoyé  tes  habillemensj&rayes  en  horreurles  idoles  :  &queîors  y*9ltres  & 
Mahomet  appclla  fa  femme,  luy  récitât  cequ'il  auoit  fongé:  mais  ^COïm* 
qu'elle  efti  ma  que  ce  ne  fuft  finon  vncvifîon  Se  tentation  pareil- 
le à  celles  de  deuant.Dôr  Mahomet  fut  grandement  courroufle, 
&  deuint  plus  malade  qu'il  n'auoit  eux  au  parauatmaais  il  dit  que 
l'Ange  retourna  à  luy  à  l'heure  de  minuid  5  luy  apportant  le  tiers 
chapitre  de  l'Alcoran  enefcritjdontMahometretournaenfànté. 
Safemmeîuy  diftqu  elle  euftbien  voulu  voir  F  Ange:  mais  Maho- 
met refpondit qu'il  ne  feroit  poflible. 

T>t  quelle  afluce  vfa  Mahomet  au  commencement,  enjeduifintlepeuple 

ignûrantjjiôur  l'attirer  a  fa  loy\&âe  ceux  qui  luy 

ayderent.  Chapitre     il. 

S  t  a  n  t  Mahomet  en  délibération  d'ériger  nouueîlc  ^ 

fecte ,  eut  aflèz  bonne  fortune  à  fon  commencement:.  *t^f ^ 

(  car  outre  ce  qu*il  trouua  dos  Chrcfticns  àlaMeque, 
i  qui  auoyent  les  Hures  du  vftil  &  nouueau  teftament, 
Se  y  fçauoyent  quelque  chofe,  aufli  luy  ayderent  grandement  à 
•  parfairefon  Alcoran.  Etluy  qui  auoit  hanté  Se  pratiqué  beau- 
coup denations  en  Syrie,Iudee,<8£  Egypte,eftoitdefubtilenren- 
dement.Car  après  qu'il  auoit  fait  cfcrire^uelques  chapitres(qu  il 
difoit  luy  auoireûx  en uoyez  par  l'Ange  Gabriel  pour  mettre  en 
fon  Alcoran)  il  les  faifoi t  tranfcrirc,5c  bailloit  fèercttement  à  plu- 

BBb    iij 


$Sa.  XT'E'K  S     E  I  VR  r     DES    SÎNG  V  L  À. 

fieursdc  là  Meque,à  fin  qu'ils  les  apprinfTent  par  cœuncanTn^ofa 
.  les  communiquer  des  le  commencement,  finon  en  cachettes.  Or 
après  qtfvnfren  parent  pui&mt  Seigneur  delà  Meque nommé 
Homar,&  vn  autre  nommé  Vbecar ,  auec  plu fieurs  de  leurs  pa- 
rents eurent  délibéré  de  ne  fe  tenir  plus  cachex,  voulurent  décla- 
rer l'Alcoran  cîypublic> pour  laquelle  chofegrande  panie  des  ha- 
bitans  de  la  Meque  auoyent  déterminé  de  ruer  Mahomet ,  finon 
quilsaduifercnt  que-plufieursTeflimoyent  demoniacîe:-&  furet 
contents  de  le  huiler  en  fa  folie.  Mais  peu  après  ils  s''a{Temblercnc 
encor  denouueau  pour  le  mettre  en  prifon-  Dot  Mahomet  eftac 
aduerti  s  en  fuit  dés  l'heure ,  &  s'en  alla  en  vne  autre  ville  nômec 
Aîmedme,qui  cftà  deux  ioumecsioing delà  Meque  r  Se  perfua- 
da-à  ceux  de  (on  parti  qu'ilsmilTent  vne  poignée  de  cendres  fur 
la  tefte  de  leurs  chenaux ,  &  en  efpandiflènt  vne  autre  poignes  ea 
ïair^îiafTent  les  rennes  de  la  bride  de  leurs  cheuaux,  difansvm 
vers  de  l'Alcoran  eferitau  troiûefmeliureau,  dixhuitriefme  cha- 
pitre x&  qu'ils  fe  feroyemmuifib  les  à  ceux  qci  les  voudroyenc 
pourfuyure.  Toutes  les  chofes  touchant  ia.fai te ,  font  eferites  ea 
l'Alcoran  au  fécond  chapitre  du  p  rem  ierliure.  Et  ayant  demeu*- 
reen  Almedine,  ilfc  fortifia  de  gens  qui  prindrentfonparty.,  ÔC 
rendit  les  Iiiifs  tributaires  à  luy,&  vintà  la  Mequeauec  grpiTe  ar- 
mcQrSc£c  £it  feigneur  de  la.  ville  ,,  qu'il  fu£riug&  à  force  d'ar- 
mes. 

§ue  toute  ta  croyance  des  Turcs  efl  contenue  en  f*4lcoran  fait     , 
jutr  Mahomet^  Chaf*      i  li; 

1  Outes  les  fiiperfUtions  Se  foies  cerimonies  àès  Turcs- 

hprouiennent  des  enlèrgnemensde  V Alcoran.Et  cette 

r  a         r2^  ISS  diction  Àlcoran  ne  fignifle  autre  chofe  que  recueil 

ait  en  rith*'^®*^*''  aecbapîtresjooamasde  pleaumes.  On  lenomeauflî 

a^  par  autre  nô  Âlforcan.  Cïet  Alcorâ  eftat  touteferit  en  rythme  xCe 

termine  en  consonance  devers  ;  &  eft  îîeftroictemcnt  gardé;  qix- 

û  quelque  Turc auoit  mué  vnefeule  lettre  vou  changé  le  ftile,GUr 

vnaccenCjlaJoy  commande  qu'il  foit  Lapidé  dés  l'heure:  mcfme» 

Cet  Alcoran  rteftoit  pas  ente!  ordre  du  temps  de  Mafjomer^au- 

ofa^       quel  on  voit  maintenant  :  mais  après  qu'il  fut  mort,  vn  rien  geiv 

-       drenomjni Qfmen^qui fur le Rpy  rroifîefrjic  après luy,  princ Cas, 


OBSERVEES     PAR    P.     BEI  OH.  383 

«écrits  tels  qu'il  les  auoic  faits  en  fa  vie,  qui  cftoyent  en  vu  coffre, 
&lcs  meic  par  ordres  les  kitkula  par  chapkrcs,dont  il  feit  qua-,. 
treliures.  Le  premier  liure  contient  cinq  chapitres:  lefecondli- 
ure  en  contient  douze:  le  troificfme  en  contient  dixneuf  :  le  qua-  ' 

tricfmc  en  contient  cent  (bixantc&cinq.  Tous  lcfqucls  chapi- 
tres de  TAlcoran  font  nommez  par  noms  propres,&  nombrez  de 
compte  fait  deux  cens  &  vnze.Tous  Turcs  ont  le  fufdit  Alcoran 
en  fi  grande  reuerenec ,  qu'ils  le  baifènt  &  l'embraffent,  &  iurenc 
parluy  comme  par  Dieu.  Aufii  l'appellent  ils  le  liure  glorieux. 
V  Alcoran  contient  entièrement  toutes  les  loix  que  iamais  Ma- 
homet bailla  aux  Turcs ,  tant  de  ce  qu'ils  on  t  à  croire ,  &  à  faire, 
quecc  qu'ils  efpcrent  en  l'autre  ficelé  pour  les  bons  &:  mauuais; 
ÔC  au  m*  des  choies  qui  leur  font  défendues ,  du  boire  &:  du  man- 
ger. Mahomet  en  le  faifant  en  defroba  partie  du  nouueau,  partie 
du  vieil  teftament ,  comme  il  appert  en  ce  qu'il  efcrk  touchant  la 
création  du  monde:  Gar  il  racompre  leans comme  Adam  6c  Eue  *; 
péchèrent ,  &  fortirent  hors  de  Paradis ,  &  vindrent  en  terre  :  &: 
comme  les  Anges  péchèrent ,  &  qui  fut  caufè  de  les  faire  pécher. 
Dit dauantage  comme  Dieu  enuoya  Moyfe  pour  tirer  lesluifs 
horslacaçtiuitéd.e  Pharaon,&  comme  les  Iuifs  receurent  fa  loy, 
&  les  choies  qui  leur  aduindrent  au  partir  d'Egypte,^  comme  ûs 
adorerét  le  veau:8£  la  manière  comme  ils  payèrent  la  mer  rouge, 
ou  fut  noyé  Pharaon  :  &:  comme  il  péchèrent  contrefaifans  des 
faux  dieux.  Il  trai&e  aufh*  de  nofbre  Scigneur,&:  dcnoftreDamc: 
&:  du  my  ftere  de  la  natiu  iré3vie  &  miracles  de  noftre  Seigneur,^ 
defes  Euangiles,&:  delà  ioy  qu'il  bailla.Mahomct  dit  au  premier 
chapitre  du  premier  liure}&:  en  plufieurs  autres  lieux ,  chofès  de 
noûre  Seigneur,  comme  s'enfuie  :  Nous  dieu  (dit-il  )  auons 
donne  i'eferiture  à  Iefus  Chriit ,  '&.  l'auons  aidé  du  fainci  Efprit. 
Et  au  premier  chapitre  du  fécond  liurç  dit  pareillement  que 
Dieu  détermina  î'Alcoran  à  Mahomet ,  &  le  Tcftamcnt  & 
Euangilesà  Iefus  Chrifivpour  la  loy  dé  plufieurs  hommes.  Et  au. 
chapitre  fécond  du  premier  liure  traide  amplement  la  conceptio 
de  la  vierge  Marie ,  ou  il  expofe  quafi  toute  la  vilïtar ion  d'Elifa- 
beth.  Dont  les  glofeurs  fur  I'Alcoran  diienc  fur  ce.  pafîàge  que  cfyèursfir 
Iefus  Chrift  &  fa  merc,  furent  feulement  exempts  de  la  centation  p^£draa- 
diabolique:  &  accordent  que  noftrc  Dame  fut  fans  péché  origi- 
......  BBb   iiij        . 


3&k  T  * E R s    LIVRE    DES    SING V L à* 

nd.  Il  fait  expreffe  mention  de  la  natiuité  de  noftrc  Seigneur  au** 
premierçha^itrcdatroiUefnKîliure,  &de  toute  la  falutatibr*8c  " 
^cceUmces  à  ^Y^0  <&  ^ànnonciation .  Il  met  trois  excelîen  ces  de  noftre  Seî- 
nofhe sel*  gneurcnfbn Àîcoran.  Lapremiereau premier  liu re chapitre fè- 
œ*  r,  çondsque  Iefus  Chrift  monta  au  ciel  en  corps  ôc  en  ame.  La  fé- 
conde ef^qu'il  le  nomme  parole  de  Dieu ...  La  tierce  eft,  qu'il  l'ap- 
pelle efprit  de  Dîeu,comme  il  appert  audit  chapitre  troifîefme  du 
premier  îiuredudicl  Alcoran.  Lefquefles  excellences  PAlcoran. 
ne  les  attribua  jamais  à  nul  autre,ne  à  Moyfe ,  ne  à  Dauid  vou  A- 
braham,neauffià  îuy  mcfme.  Il  y  a  auiïî  mis  par  eferit  au  fécond 
chapitre  du  quatriefme  liure,que  Iefus  € hrift%au oit  les  fecrets 
des  cœurs  humains,^  fàifoit  refufeiter  les  morts,  Se  guerifïbit  les 
inaladicsineurabîes>&  enluminoit les  aueugles ,  &:  faifoit  parler 
les  muets.  Il  dit  aufïi  que  Tes  difciples  faifoy ent  miracles,qui  fur- 
pafïbyent  la  nature.  Mais  les  Turcs  fauorifans à  leur  faufe  fe&e^ 
expofènt  les  chofes  fufdites  à  la  louange  de  leur  Mahomet^  no 
pas  à  celle  de  noftrc  Seigneur. 

T>e  diuerfesfe&es  qui  font Jùruenues  entre  les  Mahometiflesfer  le  fait 
de  leur  religion.  Chapitre    iiij. 

11  *®$SK$£  Vtre  F  Aîcoran  les  Turcs  obfèruent  îes  commende- 

£#n4         ¥fêslén&  mens  a  vn  autre  hure ,  qu'ils  nomment  Z^una  de  Ma- 

j^^^^^  homet,qui  fignifie  chemin  ou  loy,c'eft  à  dire  fuyurele 

Wtrr^A  confèil  de  Mahomet:  lequel  liu refes  difciples  efcriue- 

rent  après  fà  mort.  Etcftant  paruenu  en  plufieurs  mains ,  les  vns 

y  adiouftoyent ,  les  autres  diminuoyent ,  ainfi  qu'il  leur  fembloit, 

-  bon  :  tellement  <ju*on  trouua  û  grande  confufion  &  contrariété 

k&M.  cfdictsliureSjque  ce  que  Mahomet  au  oit  dit  affirmatiacment:,  il 

home*.    *  cftoit ncgatinement;&s  eflcua  telle  diuifîon  en  fà  fèâc,  qu'il  faU 

lut  que  le  Aîcaliph}c  eft  à  dire  le  Rx>y  qui  dominoit  à  ceftegene- 

lydfhachL  ration,commandaft  à tous  Mahometiàes ,  que  celle  part  ou  loa 

trouucroitgens  do&es  en  l\Alcoran5qui  de  nom  propre  font  ap* 

^cali^h    peliez  AJphaçhi,  vinflèri  t  en  la  ville  de  Damas  pour  tenir  vn  GÔ- 

foDtmas.  cjie^  apportaient  tous  les  eferits  qu'ils  pourroyent  recouurcr. 

P^M*  Celafai&lediâ: Araliphou Roy,  de  deux  cens  qui  eiloycht  là 

kometifies*  venus,feit  choîfir  fîx  Alphaches,ceft.  adiré  fçauans:  &  des  fix  vn 

-  *  nomn^c  .Mufzjin fût  choifi le  premier^Bçcharilç  fécond  ,  Bubo-  . 

rayra. 


rayraîctroifiefm^Anncccy  lequatriefme,Atermindiîecinqic£- 
mc&  Dent  le  fixiefrne.  Lefquels  il frit  entrer  en  vne  chambre,  là 
oueftoyenrtous  îefdits  liures  qu'on  y  auoic  apportez  de  toutes 
parts.£teftaslà,chacun  d'eux  compofavn  liure  chohî  des  eferits- 
de  pluficurs  autres.  Puis  apresehacun  prciénta  fbn  îiurc  à  l'ÀIcà*- 
liph  ou  Roy,qu*il  les  bailla  aux  autres  feauans  pour  examiner  :  ÔC 
eemmanda  que  la refte  des  autres  liures  fufïênt  noyez  dedans  1er 
ruifleau  de  Damasanommé  en  Latin  Ckr?Jôro4t}&  en  Arabe  Adc- 
geje,  en  forte  q  de  la  charge  de  deux  ces  chameaux  n  en  refta  que- 
Iefdits  fix  lrures  nommezla  Zuna.Toute  la  refte  furent  iettez  de- 
dens  îc  ruifïcau ,  &  commanda  le  Roy  à  tous  Alphachcs ,  ceft  à 
dire  Théologiens  de  Mahomet  ,  qu'ils  nofàn'cnt  plus  alléguer 
aucune  au thorité  de  Mahomet  finon  ce  qui  cfloit  contenu  eidits 
fîx  liures  de  la  Zuna.  Et  depuis  il  y  eut  vn  dodeur  Théologie  de 
Mahomer^qui print Iefdits fix liures  de la  Zuna ,  rccueillans  tous- 
les  paffages ,  &  en  feit  vn  liure  >  qui  eft  nommé  le  liure  des  fleurs. 
Les  Turcstiennent  les  liures  de  la  Zuna,  cnla  mefmcaBthorité. 
que  l'Aîcoran  t  pour  laquelle  chofe  les  Turcs  reputent  le  fufdk 
Acaliph  pour  faind  homme.  £t  toutesfois  combien  que  tant  de 
dodeurs  de  leur  théologie  euflènt  affemblé  ce  qui  eftoit  efcrit  en 
fi  grand  nobee  d  autres,en  fîx  liures,toutesfois  pour  y  auoir  gran- 
des contrarierez  font  venus  beaucoup-dé  fchifmesenrte  eux. Car 
il  aduint que  depuis  ûs  fe  diuiferent  enquacre opinions^dont  en-    ff 
corepour  Hieure  prcfcntc-les  Pèrfes  font  cocredifans  aux  Turcs,  tzTurT** 
s appellan^heretiqucs  les  vns  lesautres.Et  n  eftoit  que  Ja  piiflàn-  mZ(k*v^ 
ce  du  Turc  lesabeaucoupvnis,  pour  les  conqueftesq^ilafaitcsmW  jj 
furie  Souldan  de  Babylone  ,&  que  la  %rie  y Egypte&  Mefopo*  xukomeà* 
tamieluyfont  tributaires  >  il  y  aurok  diuerfes  opinionscntrelesi** 
Batî'onSjàcaufèqu'ils  font  de  diuers  langages.  Les  Turcscroyent 
que  rAlcoraaefté faid en  vne nuidjes  autres^èntcnmmoisr 
laquelle  chofeadonae  moult  grande  authoraé  audit  Akoranv 
Maisleur  eroyasceeâfaufe:  Car  Mahoraetmefme  confefièqttU 
demeura  treze  ans  en  le  fafant  en  Almedine  >  &  dixans  àla  Mc~ 
que  Auffîles  chapitres  k  montrent  cuidemment*  defqucisicsv 
imsoncnom  propre  Medenia^  lesautresMechia. 

CCc  .    . 


$$4  TI/IK:    U.VRÏ     DE5    SINGVLA. 

Vêla  cttttnte  du  tourment  d'enfer  5  dont  Mahomet  a  effrouuentêles  Turca 
&  de  leurs  jepultures*  Chapitre     \\ 

sépultures    ^ë&5«&  Van^ îes  Turcs  mcttéï  queîqu'vn  en terre,apres  qu'ils 
MiTéércs.     W§M&g& ont  *au^  *c  corPs  >  &  cnucloppé  <i'vn  iinecul ,  ils  ne 
31^^^?  coufent  celle  partie  ne  des  pieds  nede  la  tefte ,  fli.yuac 
lïifefcîisà  quelque  commandement  de  Mahomet ,  qui  dit  que 
quan41e  rteipafîc  entre  en  fa  fepulture ,  deux  Anges  noirs  appel- 
iez par  nom  propre  en  Arabe  Mongir,  Guancquir ,  viennent  l'vn 
auec  vn  maillet  de&r^autre  auec  des  crochets  de  fer, qui  font  lc- 
uerlemoi:tàgcnouxî&  luy  remettent  l'amededçns  le  cqrps,tout 
aiofi.(  diti'  Alcoran)  <;omme  vn  homme  fè  veft  ùl  chemife:&  lors 
îcfdits  Anges  intertoguerom;  le  trcfpaffé ,  s'il  acreu  à  Mahomet, 
&:  s'il  a  bien  obferué  fa  îoy,&:  s'il  i  fait  bonncsœuurcs  en  ce  mon- 
de quand  il  viuoit,&  s'il  a  icufni  le  Carefme  des  Turcs  qu  on  no- 
%*&»>*»    jnc  Radaman^s'ila  bien  faitIesceremonies.de  la  Zala ,  &  s'il  a 
Urefmt  des^z^^  decimes^fait  des  aumofncs,;  Lors  fi  le  trefpaffé  rend 
Turcs'        bon  compte  àecs  Anges  noirs  ,  ils  le  bifferont  là ,  &:  s'en  iront: 
maisfoudain  il  y  en  viendra  deux  autres  blancs  comme  neige; 
-dont  l'va  mettra  fes  bras  pour  appuyer  &  celle  ,  &  luy  feruirde 
£heuct:&  l'autre  fe  mettra  à  fes  pieds,  &  legarderonr,îuy  faifans 
ztns^tnges.  COmpagnie  iufqucs  au  iour  du  iugement.Mais  fi  le  trefpafTc  rend 
mauuais  compte  de  fa  vie  aux  Anges  noirs  ,  fçauoirefl  qu'il  n'aie 
pas  creu  en  Mahomet ,  &  autres  chofes  fufdicles,  le  liurc  de  la 
Zuna  dit  que  l^Angc  noir  qui  tient  le  maillet  de  fer ,  luy  donnera 
M***     vnfigrandcoup  fur  la  tefte,  qu'il  fera  entrer  le  trefpaffé  neuf  au- 
sA*gp.       fies  dedens  terre  :  &  l'autre  Ange  noir  ne  cetera  de  le  tourmenter 
:defes  crochets  de  fer,  &  aumTautre  de  le  barre  de  fon  maillet,  OS 
Juydoimerce.touraentiufquesauiour  du  iugement.  Pour  lef- 
queîks  chofes  Jes  Turcs  efcfiuentlenom  àuecdu  faffran  fur  les 
corps  defdits  trefpaffez ,  &  font  les  fepulchres  vuides  pour  leur 
donner  cfpace  de  fe  mettre  à  genoux  ,&  y  en  a  qui  cou  urent  les 
fo{&sauccdes.ais,depeurquclafoflencfe  comble.  Ces  chofes 
ont  tant  efpouuenti  les  Turcs,  que  le  matin  ,quaad  ils  fondeur 
.  oraifon,  ils  difent  en  cefte  forte  en  leur  langage,  Seigneur  Dieu, 
Tôwimt  du  ddiurc  moy  ae  l'interrogation  des  deux  Anges ,  &:  du  tourment 
Jepdcbn.     ^^  fcpulchrc>&:  du  mauuais  chemin,  Amen,  Les  prières  pour  les 


OBSERVEES     FAR    F.'   BELQNV  ^ 

trcfesiflcz  que  fondes  Turcs  &  Turques  fut  les  foiïès!  des  cime-  p™w«  fwr 
«ères,  for>cfaice^à^cllefodo<icHtitcr tesdcfan&sdellntcrro-  ^  tr*î4e\ 
gationdes^&ux  Anges noirs. .-.  1  :.;.••.        .•■-  .  .   ' 

Z>  eplufieurs  chofesfmtafliques>  moult  étranges  que  Mahomet  refont  ' 
tûHch<tmleiuvèment.  Chapitre,   vu 

A  homet  ayantttaduicr  Ton  Àfcoran  de  pïuûeurs  p  a£- 
fages  de  la  Bible ,  a  mis  quelque  chofè  de  la  création 
!  du  mondc^l'hiftoired'AdamjIequcl  il  dit-que  Dieu 
l  fabriqua  de  fa  main  de  pu-fc:  tercey  &.  infpiraenluy 
Pefprit  de  vie  :  mars-que  le  pcchéd*Adam  féic  que  coos  les  de£cé- 
dans  de  lu  y,  furent  condamnez  à*  mourir..  Quantau  iour  du  iu- 
gementj  il  dit  quefur  la  £n  du  monde  vn  cornet  fonnera,,  5c  que 
lors  les  hommcsfurktcnre,  &  les  anges  du  cicLmouxcoaLipuî«= 
le  cornet  fonnera  vne  autre  rois^aufon  duquel  les  hommes  3d  les 
Anges  refufeiteront-  Dit  au  cinquiefme  chapitre  du  premier,  li- 
ure,que  tous-  les  animaux  de  kterre  ,.&  les  oy féaux  du  ciel  refuf- 
eiterontleiour  du  iugement.  Le  liure  de  la.  Zuna  dit,  que  les 
moutons  qui  (ont  tuez  leîowr  de  la  Pafqoe  des  Turcs ,  qu'ils  nô- 
rnent  Bairanjentreronten  P^acadisleiour  du  ragemeûE  i&quçlc  Mmton^m 
mouton  que  fàctiria  Abraham  aulieu  defon  fils  Ifaac^aaoitefté^*^^* 
nourry  en  Paradis  i'cfpace  de  quarante  ans,  &  que  FAnge  Ga-  ^f*- 
Mel  Tauoit  pofté,&  que  ledit  mouton  eftoit  de  couleur  noire.  SacnJiccsdc 
C'c&ia  raiibn  pourquoy  les  Turcs  tue&t  plûttears  moutons  pou* 
Sacrifier  le  iour  de  leurÉafq-ue,  combien  qu'ite  nefoyent  obligçz. 
d*cn  tuer  plus  dvarcar  le  liarc  de  la  Zuna^dit^que  tous  les  mou, 
cons  que  les  Turcson t  tué  pour  facrifier  le  iour  de  leat  Pafque> 
prieront  au  iour  du4ugement  pouc  ceux  qui  furent  g&ù(ç  de  les- 
faire  facri£er.  UAlcaran  ditsau  premier* chapitrera  premier  li- 
ure,  qu'il  y  a  deux  Angesenvnc/cauernexledansBabylocCjqui 
font  pendus  par  les  fourcils,qui  feront tourméteriufques  au  iour 
du  jugement.  Qrkglofcdit  fur  ce  paâage,  queDieu  cnuoya 
deux  Anges  ca  Bahy  kme ,  comme  iuges  entse  les  h  ômmes  de  la 
eite  .,  lefquels  defeendoyent-  du  ciel  tous  les,  matins^  remoix- 
toyeiitaitfoitj&  qavoionr  leuraduint  cronaer  vne  moult  belk 
femme  qui  fè  compkignoit.de  fon  mary  ;  mmz  elle  leur  plcuc 
tant  qulkla  prieieoLde  £mJcjhonn£ur  :,  &  elle  s'y  accorda, 

CCc  ij 


2?tgroman* 


i$6  tieHs  livxe  pis    singviaJ 

^moyennant  qu'ils  luy  enfeignaflcnt  l'oraifon  qui  leur  donnoic 
~vcr«u  dcmontccauxieLA  laquelle  ils  ohcyrcntmoulç  volotiers, 
& luy  cnfêignerent  roraifon.MaisauÛitoft  qu'elle Tçut  apprife, 
s'en  alla  au  ciel,&  les  Anges  pour  le  pèche  qu'ils  auoyéc  commis, 
perdirent  la  grâce  de  i'oraifon  :  tcllcmcnr  que  ne  pouuans  mon- 
ter aucicl,dcmourcrcnt  en  terre  :  aufqucls  JDieu  manda  qu'ils  e- 
leufFentîa  peine  pour  leurpcché ,  ou  en  ce  monde,  ou  en  l'autre: 
&:  ayaseîcalapeincencemonde,lesiugeaà  eârc  pendus  parles 
fourcils  iufques  au  iour  du  iugement.  On  dit  outre  rAlcorâ,que 
ces  deux  Anges  enfeignent  ioutnellement  l'art  de  Nigromancie 
aux  hommes  de  ce  pays  là,  Et  au  chapitre  dixneufiefme  du  troi- 
&c£mc  liure,!' Alcoran  dit  que  Dieu  meit  les  eftpilles  au  ciel  pour 
îa  beauté  de  ce  monde,  &  pour  la  garde  de  chaque  diable  malin: 
&:  que  pour  lechafier  quand  il  veut  efeouter  les  fecrets  de  para- 
disiaque eftoillc  courtapres  luy  auec  vn  tifon  enrlambé.  Le  li- 
urede  ia.Zuna  dit,quc  les  eftoillcs  font  tenues  pendantes  en  l'air, 
attachées  auec  des  chaînes  d'or,qui  font  là  pour  faire  la  gardexar 
Jcs  diables  viendroyent  ouyr  les  fecrets  de  paradis,  pour  les  reue- 
1er  aux  hommes  diuins. 

.  pUlJànt  voyage  que  Addhometfamt4uoîr  fait  enVaradis  lamiflcn 
dormant:  &  des  grandes  folies  qutlracompte  touchant  U 
paradis dcsTurcs.  Chaj>>   vu. 

i  A  nuicl  Mahomet  endormy,en  refuant  eu  tvnevifion 
3  qu'il  recita  le  lendemain,&  meit  en  eferit  :  par  laquel- 
u-^^-J  leil  a  fait  grad  bien  à  tous  ks  fuccefïcurs,fur  ce  poind, 
DefrôwUes    jgjg|§§}  que  les  defpouilles  de  la  guerre  font  attribuées  à  eux. 
deUgmre.  ^u{ficft-cei'vn  des  arcicles  qu  il  die  que  Dieu  luy  concéda  ca 
parîantauccluy.  Oreûoitil  couché  lanui&auec  Tvnedefesvn- 
ze  femmes  nommée  Axa,  qu'il  ay  moitié  mieux:  &:  s'efueillant 
àminuicT:,foBgeant  quonauoit  frappé  àià  porte,  il  dit  qu'il  £c 
Icuapour  l'ouurir:  ou  il  trouua  l'Ange  Gabriel  chargé  de  feptan- 
te  couples  d'elles ,  plus  blanches  que  neige ,  &:  plus  luifantes  que 
le  criftal:&:  auoit  vn  animal  auec  foy ,  plus  blanc  que  bu&,&  plus 
grand  quvn  Àfnc,  &  plus  petit  qu'vn  Mulet,  lequel  de  nom 
propre  il  appelle  en  Arabe  Alborach.    Il  eft  eferit  au  liure 
comme  Afcar ,  que  l'Ange  Gabriel  cmbraûa  Mahomet ,  & 


Paradis  des 
Turcs. 


OBSERVEES    *ÀH  Vw    BELOff.  ffîf 

cnî»cffibra$ànt ,  difh  OMahomct,Dieum'aenuoyépourte£t- 
luçr ,  &  raà  comjiiandc  de  te  mener  cefte  nuid  auec  moy  en  pa- 
jadis,  pour  voir  les  plus  grands  fecretz  qu  onques  filz  d'homme 
ji'a  vcu.Mahomct  rcfpondit  qu'il  en  eftoit  content.  Et  lange  dift: 
à  Mahomct:Monte  donc  fur  l'Alborach,&;  nous  en  allons.  Mais 
l'Alborachfè  rcculloit  ,à  qui  l'Angexlift  :  Pourquoy  ne  veux-tu 
queMahomct  monte  fur  toy  î  le  rafTeurc  que  iamais  meilleur 
homme  ne  monta ,  ne  montera,quc  Mahomet.Mais  î'Alborach 
rcfpondit  qu'il  n  en  feroit  rien ,quc  Mahomet  ne  luy  promit  pre- 
mièrement de  le  faire  entrer  quant  &  luy  en  paradis.Lors  Maho- 
met rcfpondit  à  l' Alborach^qu'il  feroit  la  première  befte  qui  a  en- 
tré en  paradis^Et  fbudain  Mahomet  monte  dcffus,&  lange  print 
les  refnes ,  &  cheminèrent  toute  nuict,  vers  Icrufâlem.  Le  liure 
d'Afêar  dit  que  Mahomet  ouit  la  voix  d'vne  femme  par  le  che- 
iiiin,qui  difbit-.O  Mahomct,Mahomct.  Et  l'ange  luy  dift  :  Que 
ncrefpondcz  vousà  cefte  voix  ?  Mahomet  ne  rcfpondit  rien»  £c 
continuant  icchcmin,ouit  encorcs  vnc  autre  voix,qui  appclloit, 
Mahomct,Mahomet.  Et  i*ange  luy  dift  qu'il  ne  refpondift  rien* 
Et  cftans  quelque  peu  plusauant,  Mahomet  demada  à  r*angc  qui 
f auoitainfï  appelle,  &  quelles  femmes  eftoyent  celles  là.  A  qui 
Gabriel  refpÔdit,quc  la  première  cft celle  qui  fait  le  cry^  diuuî- 
gue  la  loy  des  luifs  :  ôc  que  fil  euft  rcfpondu  à  cefte  voix  là  y  tous 
les  Turcs  fuflènt  deuenus  Iuifs,  &  que  la  féconde  eftoit  celle  qui 
publie  la  loy  des  Chrefticns:&  que  s'il  luy  eaft  rcfportdu,  tous  les 
Turcs  fê  fuÔènt  faits  Chrcftiens.Toft  apresarriuecent au  temple 
de  Icrufalemcou  Mahomet  &  Gabriel  entrèrent,  ou  ilz  trouue^ 
rent  tous  les  prophètes  ôc  mcfîàgcrs  qui  font  venus  ca  ce  monde, 
qui  vindrent  au  deuant  de  luy  à  la  porte  du  temple ,  le  reeeuant, 
évaluant  en  cefte  manière  :  Dieu  vous  gard,o la ioye  des  vrais 
rnefTagcrs ,  prophète  honorable  :  &  alors  ilz  le  portèrent  en  lair 
en  grande  folennitéiufques  dedans  la  grande  chapellei&depric- 
rent  qu  ilfeit  la  prière  pour  tous  5  en  fc  recommandant  àluy ,  Se 
qu'il  fe  fouuint  d'eux  en  parlant  à  Dieu.  Dit  en  ourre  que  Maho- 
met cftant  forty  du  temple,  trouuavne  efchclle  faite  de  lumière 
de  Dicu,qui  touchoit  au  ciel,  Gabriel  le  print  par  la  main  :  &  ar- 
riuans  au  premier  cicl,qui  eftoit  fait  de  fin  argent,  ou  les  cftoilîes 
pendoy  ent  à  des  chaînes  de  fin  or ,  &  font  aui&  grandes  qu'eft  la 
montagne  d  auprès  de  la  ville  d'Almcdiac,  nommée  Noho;Ga- 

CCc  iij 


^SS.  TÎERS      LIVRE     DES      SINGVLÂ. 

briel  frappa  à  la  porte  du  ciel.  Le  portier  demanda  qui  ceftoit  :iî 
rcfpondje  Aiis  l'ange  Gabriel,  6c  Mahomet  le  Prophète  &.amy 
deDieuauecmoy.  Et  ibu-dainque  le  portier  entendit  le  nom  de 
Mahomet ,  ouuric  la  porte  du  premier  ciel:ou  ilz  trouuerent  vu 
vie!  homme  tout  chenu,  qui  eftoit  Adam  rqui  eovbralïa  Maho- 
met,remerciant  Dieu  de  luy  auoir  donné  vn  tel  filz,  Se  fe  recom- 
manda grandement  a  Mahomet. Paiïàns  outre,trounans  des  an- 
ges de  plu&eurs  hgures,comme  de  bœufs ,  d'homes,  de  cheuaux, 
&d'oifeai>x(&  entre  autres  y  anoitvn  coq,  qui  auoit  les  pieds  au 
premier  cjd,&  la  telle  au  fecond)Mahomct  demada  à  l'ange  que 
tigflifîo-y ent  ces  chofes  là  ^  àqui  Fange  refpondit  y  que  les  anges 
philofiphk-  prient  Dieu  pour  ceux  de  la  terre:&:  que  ceux  qui  auoyent  forme 
deMnbomet.  d'hommes,  prioy  ent  pour  les  hommes  r&ceux  qui  auoyentror- 
J  me  de  bœufs,prioyentpour  lesbœurs,  6c  ainfi  des  autres.  Et  que 
ceux  qui  eftoyent  en  forme  de  coqs^ptioyet  pour  les  coqs:&  que 
quan  Ace  grand  coq  ehantoit,les,aut?escoqs  de  la  terre  6c  du  ciel 
chantoyent.  De  là  trouuansf  autre  cid  de- fia  or ,  frapperent^à  la 
portede  portier  dernandaqui  ceftoit:  Gabriel  refpondit ,  Gefl 
moy & Mahornet.Ilz  entreront leans , ou  ilz trouuerent partout 
le  nom  de  Dieu  6c  çetuy  de  Mahomet  en  eferit  en  cefte  manière^ 
Il  n'y  a  autre  que  Dieu,duquel  Mahomet  cft  le  prophète: 6c  trou- 
ucrcntNoé  toutçhcnu,quUmbrau^  Mahomet  6c  fe  recomman- 
da à  luy.  Pois  trouuerent  plulieurs  anges  de  figure  mcrusilleufe* 
dont  l'vne  auoît  les  pieds  au  fécond  ciel y6c  la  tefte  au  troifiefmci-. 
vne  main  ealeuant,  &  l*autre  en  occident*  De  là  montèrent  au 
tiers  ciel  fait  dVne  pierre  preckufc  :  otulz.  trouuerent  Abraham, 
&c  grand  nombre  d  anges  :  don t  i'vn  auoit  d'interuaiic  d' vn  œil  a? 
Tau  tre  feptance  mille  iou  rnees^  tenok  vn  Hure  en  îa  main  eferi, 
aant  Se  cfeçant  routes  chofes:&£  s  appelloit  l'ange  de  la  mort  >  ef- 
criuant  ieshommes  qui  nahîent ,  6c  effaçant  le  nom  de  ceux  qui 
meurent^  De  làmontcïent  au  quatriefme  ciel fait  de  finccfmc- 
mude>ou  ilz  trouuerent  loicphiâzude  Iacob}qui  falua  Mahomet> 
6c  fe  recommanda  àJuy ,:  Et  grande  quantité,  d'anges ,  dont  Tvn 
moûlt grand pleuroit  ;Jmais  ceftoit  pour  les  hommes , .qui  pou? 
leur  pèche  alloientes  enfcrXte  ^montèrent  au  cinqaicfme  ciel 
l  v  fait  de  fin  diamant,ou  ilztrouucrcnt  Moy  fc  ,  qui  fe  recommanda 

à  Mahomet:  6c  plus  grande  quantité  danges  qu'es  autres  ciclz,E$ 
d^&jmnœsat  m  ûwfetc ciel , fait  d! vu CaxbpuclCjpacûoiii. 


OfSEfcVEES     PAR     P.    «ElOW.  *% 

Ëtinâ  ïean  Baptiftc ,  qui  ic  recommanda  à  Mahomet.  De  là  aile- 
rentaufcptiefmeciel,quieftoit-fait  de  la  lumière  de  Dieu,ouilz 
trouuerencïefusChrift:&Mahomecre  recommanda  à  luy.-ouilz 
trouucrenr grand  nombre  d'anges. L'ange  print  congé  de  Maho- 
met. Il  commença  à  monter  par  lieux  difficiles,  ou  il  trouua  tant 
d  eaux,  tant  de  neiges,&  fe  lafla  tant  qu'il  n'en  pouuoit  plus,&  en 
ces  entrefaites  dit  qu'il  ouy  t  vne  voix  du  cieî,qui  luy  dift  :  O  Ma- 
homet,faluc  ton  crcateur,tuésbien  près  de  luy»  Et  veitfigrande 
lumière  qu'elle  luy  troubla  la  veue.  II  dit  que  Dieu  auoit  ièptan- 
témille  linges  de  lumière  de  Dieu  de£Tus  fa  face,  qu'il  n'en  eftoit 
plus  loing  que  deux  traicts  darbalaifte.  Et  dit  Mahomet  que 
Dieu  mjft  la  main  for  {on  ombre ,  qui  luy  feit  auoir  grand  fx*td» 
Il  dit  que  Dieu  parla  à  luy  en  ce  lieu ,  &  luy  bailla  plusieurs  com- 
mandemens  de  la  loy,&  luy  reuela  beaucoup  de  fecrers*£t  dit  le       .  . 
Iiure  Afèar  que  Dieu  luy  donna  cinq  choies,  qu'il  n'^noit  iamais  *f*  nn$ 
baillées  à  homme.  La  première,  que  Mahomet  eft  la  pluscieuee  ^^ 
-creatu  re  qu  i  fu  ft  n'au  ciel,  n'en  la  terre*  La  iècon  de ,  qu'il  eft  le 
plus  excclîen  1 6c  plus  honorable  gentilhomme  de  tous  les  filz  de 
Adam  au  iour  du  iugement.  La  tierce  choie ,  qu'il  eft  le  Rédem- 
pteur general,c  eft  à  dire  le  pardonneur  des  peçhez.  La  quattie£ 
me  eJkjjuSl  %ait  tous  les  îangages.La  cinquiefme  cft,que  les  dc£ 
fouilles  des  batailles  &c  desguerres  hiy  fuiïènt  deliureesXeliurc 
d'Aièar  dit  qu'il  commença  à  defeendre  par  ou  il  eftoit  monté,S£ 
qu'il  compta  à  l'Ange  Gabriel  tout  ce  que  luy  eftoit  aduenu  :  8c 
i'ângc  luy  dit^O  Mahomet,  Dieu  m'auoit  comandé  de  vous  con- 
duire en  ce  lieu  pour  vous  faire  voir  to9ies  fècrets.Mais  maintenir 
aîlos  en  enfer,à  fin  de  v<>ir  les  iècrets  de  là  baSjCÔnaelbnttourmé-  .     t  r 
tez  les  homes  par  les  diables.  Tontes  ceschoiès  fufHicles  efcriuit  m$c  °£ 
Mahomet  en  Ion  AIcorasq  moftrét  le  peu  d'étedemet  qu'il  auoit.  ^ -j^ 
Or  eft  il  que  Mahomet  deferiuac  le  paradis  qu  iljpmet  à  fès  Turcs, 
y  a  mis  cinq  choies.  La  première  cft,qu'il  y  a  des  maiibns.La  fècô- 
de  eft,qu  il  y  a  des  vten files.  La  tierce  eft,  qu'il  y  a  des  vîmes  pour 
boire  &:mâgcr.La  quarce  cft,qu'il  y  a  des  habiliemas.La  cinquiè- 
me eft,  qu'il  y  a  des  belles  femmes  pour  predre  plaiiir,  &  aufli  des  >   .    , 
beaux  cheuatix  bien  ornez  de  icllcs  &  brides,  enrichies  de  pierres  ^xj^^ 
grecieufes,  Suiuat  cela  il  die q  l'enfer  à  fep t  por tes  &  q  les  diables  *  ** 

iot  de  diueriès  fortes.Lcs  vus  sot  enchainez  de  chaines  de  fer,  les 

CCc  iiij 


4pO  TROHÏISME     llfRÉ     IXIS     SINéVEA^ 

autres  embrochez  aucc  des  broches  de  fer:&dit  que  les  hommes 
qui  y  font,boiucntmcef&niment  du  pîombibndu  ,&  mangent 
des  viandes  pourries^  des  pommes  d'vn  arbre,  donc  le  fruiâ  eft 
ïavraye  {burce  des  diables.  Toutes  lesquelles  chofes  auonscC- 
erites  pour  monftrer  le  peu  de  iugement  de  Mahomet ,  deferire 
chofes  fi  folaftres. 

T>ont  vient  que  îaloy  de Mahomet  a  permis*  aux  Turcs  d'auûir  comp*- 
gnieattecles  efclaues  femelles  ^ansauoirejgard  de  qmiïe  religion  elles font^ 
Chapitre    vin. 

,  Es  Turcs  pour  le  iotird'huy  femeflcnt  indifférem- 
ment aucc  les  cfckuessn'ayanscfgard  fi  elles  font 
IuifueSjOu  Chreftiennes  ^ou  idoîaftres.  Qui  leur 
futeoncedé par  laîoy,  desleviuant deMahomer». 

\  Car  il  aduint  que  Mahomet  ayant  plufieurs  fem-- 

mes  qui  auoycnt  creu  en  &loy,  le  Roy  des  ïacobites  îuy  fèit  pre- 
fent  dVne  moult  belle  efcîauc,puceîle  ïuifue  :  aVîaqueîle  Maho» 
metfutgrandementamoureuXj&nefepeutonc  tenir  qu'il  ne  lit 
eogneuft»  Mais  iès  femmes  f en  efians  apperçeues^e  le  peurent 
porter  patiemment^  luy  diren^que  s'il  continuons  y  qu'elles-fer 
fepareroyent  de  luy.  Mais  Mahomet  nefè  pouuant  contenir,  ca 
ibt  gran  dément  feandalizé.  Car  deux  de  Tes  femmes  fedepartï* 
rent  dîaucc4uyaqui  cUuulguerent  la  chofe  par  toute  la  ville  de  la. 
Meque.Luy  qui  eftoit  vigilant  &:  foigneux,  foudainement  pen& 
y  remédier  par  quelque  bon  moyen  .Et  1  c  rs  compofa  vn  chapitra 
de  fon  Alcoran,  faifant  loynouuelîepour  fes  fuppofts ,  fçauoit 
eit  qu'il  fuft  licite  à  tous  ceux  qui  tiendroyenc  fon  party,fc  méfier: 
, .  tou t  ainfi  auec  leurs  efclaues  fèmelleSjComme  auec  leurs  propres- 
aux  Turcs  &mmQ$ :  laquelle  loy  il  meit  au  commencement  du  chapitre  du 
four  ïoulr  quatriefineliure  de  Ton  Alcoran,lcquel  encore  pour  le  iourd'huy 
drsejikues.  a  nom,le  chapitre  de  ladefenfè ,  dont  les  mots  font  comme  s'en- 
fuit.  O  prophète,,  pourccjque  tu  voulois  détendre  ce  qui  t'eftoic 
licite  pour  complaire  à  tes  femmes  ,  fçaches  que  Dieu  a  permis 
que  tu  bailles  puiffance  aux  hommes  id  vfer  licitement  aucc  les 
eiclauesXe  prophète  auoiccommis  le  fecret  de  ce&e  lç*y  à  quel- 
ques vnes  de  Ces  femmes,  qui  l'ont  public  par  tout^  Nonobstant 
xous  jfemmes  fi  youlc£.vou  s  repentir  à  Dieu,,  trouuercz  vn  grandi 


OBSERVEES'    ?Ak     ?.    ï£LOK.  401 

4>ieruMaîs  fi  vous  demeurez  répudiées  de  Mahomet,{bn  créateur 
luy  donnera  d  autres  femmes  que  vous,tant  vierges  que  veufues, 
croyantes  en  faloy,  &:  qui  îay  feront  deuotes.  Quand  les  homes 
-de  h  Meque  eurent  leu  ce  chapitre ,  furent  bien  con  tensde  cefte 
loy,&  donnèrent  fàueur  à  Mahomet»  Lors  les  parens  des  {uCâi~ 
•des  femmes quvVeftoyentfeparccs,  vindrent  prier  Mahomet  de 
lesreccuoir.  Dontilfutmoukioycux  ;  car  il  ne  defîrou  autre 
chofe y  combien  qu'il  feift  fcmblant  dene les  vouloir  reprendre^ 
Et  depuis  cefte  heure  là,les  Turques  ont  vefcuriâns  iaioufîc  aucc 
les  efdaues^Et  faut  entendre  qu'vn  Turc  en  aura  vnc  cétaine  s'il 
veuît  :  mais  il  ne  peut  auoir  plus  de  quatre  femmes  efpouices  à, 
lafois* 

Bvief  récit  du  pavadis  feint,  tetquc  AUBomet  ta  pronùt  auxT»rcs:^ 
des  ebofes  fantastiques  qu'il  vacomgtc*  Chapitre     1  x~ 

r  Ahomct  parlant  delà  matière  «Jequoy  cft  fait  le  ciel, 
i  dit  que  Dieu  Ta  crée  de  fumee  >  &  qu'il  eâabîit  le  fir-  Tardais  dés* 
?  marnent  fui  la  poin&e  de  la  corne  d*vn  Bœuf»  S:  que  •&*&».  ' 
lie  tremblement  de  terre  prouient  de  l'émotion  de  ce 
boeuf,  lequel  ou  tremiflant  ou  fe  remuant,ayant  toute  la  terre  fur 
fa  corneja  fait  trembler*  Les  Turcs  croyent  maintenae  mille  fo- 
lies que  Mahomet  leur  afait  entendre^  Êtentre  autres  chofes  ilz  Sept.  y^^^ 
croyent  qu'il  y  afcpt  paradis,ouurez  d'or  Se  d'argent,  enrichisde  ^  rœs~ 
,  perles  &  pierres  prccicufes,efquelz  Mahomet  dit  qu'il  y  a  déplus 
beaux  palays  que  ceux  qu'on baffe  t  en  terre,  &  de  grandes  cham- 
bres^ grandes  fàHes:&  qu'il  y  a  desiardins plantez  d'arbres  frui- 
â:iers>dc  deux  ou  trois  fortes  de  chacu neefpccc  :  &  que  les  fon- 
taines &  belles  riuicres  courent  le  long  àcs  palays  :  dont  1  eau  des 
vnesfont  de  pur  laicr  ^  les  anrrcsdc  tre&on  miel ,  &  lesautresde 
vin  doux;&  au  milieu  du  paradis-il  y  a  vn  grand-  arbre ,  qui  con- 
tient tout  le  paradis,  dont  les  fueiiîes  font  d'or  $£  d'argent  *&  les- 
rameaux  tombcntiufqijesde{Iuslcsmurs;3<:  que  dedans  chaque 
fûeilte  le  nomde  Mahometeften  eferit  après  lenom  de  Dieu» 
G'cft  dece  paflage- que  les  Turcs  ont  prins la  plus  ûngu lieredâ- 
leurs  prières,  qu'ilz  difcnt  à  chaque  bout  de  chemin, comme s'è* 
foit.  2c  iith&iBc  aîlach  Mahomet  ra^gtoiîâh^ïXe  manière  que  fL 
vu  homme  Cl^cihciiaiioicimr^rudcmmic  prxwioncéxcsmots^ 

Dûi 


^1  TÏ-ER.-S     LI^TRE      DES    Sï-NtSYLÀ. 

il  luy  comriendroit  mourir,  ou  fe  faire  Turc  Hz  croyent  d*auan* 
.cage,  félon  que  leur  cnfeigncrAlcoran  ,  que  les  Turcs  feront  en 
paradis  rians,&:prcnans  plaifir,fans  auoir  foingnetrifteâ^eftans 
touftours  ioycux  Se  contens ,  atfis  deflus  des  tapis  &li&s  encour- 
tinez ,  Se  linceux  de  fatin  broché,&  d'efcarlacte  Se  foye,&:  les  fêl- 
ées de  leurs  cheuaux  Se  autres  paremes  feront  de  pierres  precieu  - 
ics^Se  fèferonrfemir  à  des  pages  aiiûl  beaux  que  font  les  pierres 
Clemux m  peeeieufes enchaffeesenfin  or,vcftusdc  liuree  de  &>ye,&:4  efear- 
turtdt*.  jatte verde ,  Se  de fatin  frize d'or.  Ain fiferu iront  les  Turcs  auec 
-tafTes&couppes  d'or  &  d'argent.  Ec  après  que  les  Turcs  auront 
beu  &mangé  leur  laoul  dedens  ce  paradis  >  alors  les  pages;  ornez 
de  leurs  ioyaux  Se  de  pierres  precieufès  Se  anneaux  aux .hras^ 
marns,iambes,&  aureiiles ,  viendront  aux  Turcs  chacun  tenant 
<Vn  beau  plat  d'or  en  ia main  ,  portant  vn  gros  citron  bu  Poncire 
<kdens,quelcs  Turcs  prendront  pour  odorcr&:  &ntir:&  foudain 
que  chaque  Turc  l'aura  approché  He  fon  nez ,  il  fortira  vnc  belle 
vierge  bien  aornec  dacouftremens^qui  cmbra&ra  le  Tt*r£,i  &:  le 
:  -.  Turc  clic ,  Se  demeureront  cinquante  ans  ainu*  cœbraffausï'va 

iaucrc,fans  fe  leucr  ne  feparcri'vn  de  l'autre,  prenans  enfemblc  le 
plaifiren  toutes  fortes.que  l'homme  peut  auoir  auec  vne  femme. 
£t  après  ciaquatc  ans,  Dieu  leur  dira:CXmes  feruiteurs  ,-puis  que 
vous  aBC&fait. grand*  chère  en  mon  paradis ,.  ie  vous  vueil  mon- 
trermon  vi(à.  Lors  oftera  le  lipge  de  deuant  fa  face.  Mais  les 
Turcs  tomberont  en  terre  de  la  clarté  qui  enforrira:&  Dieu  leur 
<lira:Leucz  vous  mes  feruiteurs,&  iouûïez  de  ma  gloire.-car  vous 
,ne  mourrez  iamaispîus,  Se  ne  receuerez  triûeffç  ne  defpiaifir.  Et 
ieuans  leurs  teftes ,  voirront  Dieu  face  à  face  :  Se  de  là  chacun  re- 
prenant fa  vierge,  la  mènera  dedans  fa  chambre  au  palais ,  ou  il 
trouucra  à  boire  Se  à  manger  :  &  faifant  grand  chère ,  en  prenan  t 
pkiitf  auec  &  vierge ,  parlera  fon  temps  ioyemement  fans  auoir 
peur  de  mourir. Yoila  que  Mahomet  a  racompeé  de,  fon  paradis, 
auec  plusieurs  autres  telles  folîies,  dont  nous  femble  que  l'origi- 
ne de  Sérails  des  Turcs  prouient  de  ce  que  Mahomet  a  dit  des 
pagçs  Se  des  vierges  du  paradis  :  car  il  dit  que  les  vierges  çhaftes 
forint  ainfieseées  4c  Dieu  en  paradis^  font  bien  gardées  &  rp- 
fermees  de nwailics.  Et  dit  Mahomeç ,  que  6  vned'elles  fbrtoit 
horsdu  Serrail  de  paradis  à  la  minuicl,  elle  donneroir  lumière  à 
y0ijtle.m6de,commcf4tAc  Soleil:&  que  fi  l'vne  d'elles  crachoic 


.     :    c*F'S#RV£ES    PAR,  -P.    &EXON.  '      -  ;.  3-59 

cîedensîa  mer , l'eau  en  deuiendroie  douce  comme  miel.  Auanc  fi"****; 
v^'nir k pacadis^es Tu^cs , nous  voulons direlaiàblç.du banquet  *nf**f* 
que  racompte  Mahomet,  lequelBieu  feit  aux  (zm£s  Turcs.  JEa 
premier  lieu  Mahomet  dit  que  Dieu  commanda  à  Gabriel  qu'il 
;  allait  quérir  les' clcfspoarduunr  le  paradis  ,&:  que hmge qui  les 
gatde,en  a  feptafcte  milic,j8£que  chaque-clef  à  fept  mille  lieues  de-    .  ■. . 
longX'ange  Gabriel  ne  pouuanrleuer  û  pcfàote  clef,  lefcit^ri- 
itendreà  Dieu,  Se  Dieu  luy  c&bfouoquemoû  nom  y&  celuy  db 
'  Mahatact,qgr  eft  mon  amy^Et  Gabriel  ayant  rêmoquc  les  fufdit* 
noms3chargeaîa  clef  fur  Tes  efpaules  >  &:.ouurit  le  paradis,  oui* 
:  trouua  vne  table  de  diamant ,  qui auoit  fept  cens  m  iîleiûurrtces 
-deiongueur^lasgeur ^touœ  enrournee  de  fcabelies&  chaires  .-■*■„.  ^ 
d*or  $£  d^axg^ntXncor  dit  qucles  Turcs,  epi  viendront  à  ce  ban- 
quet, trouueront  lanappe  mi£cr&.des-feruictt£souuj^es  de  foye 
£c  de  fil  d'or.  Chaque  Turc  aura  fon  fiege  ,  ou  û  fer&aiEs.,  Et.qu« 
les  Cnfàiis  pages  fè  mettront  à  feruir  à  ce  baii«|ttet^donansà3iàn> 
•ger  dc.diuerfes.fortcs  de  viandes  &froi&s ,  leur  bailla*  àJàoiccda 
,yin  8c  de  l'eau  des.riuiczes.de  paradis.Et  pour  ifluc  de  table ,  eha> 

.  quepage  apportera  le  poncirc  ou  gros  citron,  dont  auons  parie 
<£y  dcÛuSvMahometauiEa  promis.de  faireibn  baoqucqaprcsj^uc  Bdnfœie- 
.rJDieu  aura  fait  le  ûcd.  Il  y  a.yne  fontaine  en  paradis  (-jSMK^doju  M^omet 
■Feaueft  plas  blanche  que  laneige^.plusdoucequcle.mielvqtïi <UéX  Twra" 
xft  longue &. large  de  (eptante  miJk  iousneesv,  ou  iî  y  a/ plus  de 
;voirres  &c  rafles  à  boire ,  qu'il  n'y  a  d  eftoilies.  au  çieL    laquelle 
-Dieu  a  donnée  à  Mahomet,. pou  r.faire  que  tes  Tuscspaflèui  par 
;dedans,&  Mahomet  leur  prcioitecaà.boire,^  ceux  qui  en  boi- 
ront n'auront  iamais  plns.de  foif.Et  Mahomet  iortira  dededans^ 
,&  ira  choifk  tous  les  bos  Turcs  enenfer^qui  aaoyct  mérité  quel* 
que  pcineipoar  leur  générale  rédemption,  Mahometlesportera 
«niàibntaine  fu&k&e.Etpource  qu  ilziortiront.  noirs  &.bruiicz- 
derenfcr5luy  mcfmeiauera  leurs,  corps  en- rafoûtairiC;,^:  les  fer* 
■deuenir  blancs  comme  neige:&:  delà-il  les  portera  au.  paradis  des- 
autres Turcs..  Il  fau  t  entedre  que  les  prefeheuss  de  Turqu  ie  diet 

•  que  Mahomet  fc  traBJÛnticra  en.  mouroû;,.  &fera?  que-Ies  Turcs 
dciucndron&comriœpukrsii&v^^  f^f^ 

en  paradis^jl  fe  {écouta  leans^àfin  que  les,  fufdi&es  pulces  corn*.  ' 
&eatieans>&:  prennenUaibrmcdcs  autres  Turcs- 


4©4  TfcOISIESME     LIVRE      DES     SING.V1A. 

Des  mariages  des  Tvra:&  dont  vient  qu'ils  ont  le  congé  défi  marier  À 
quatre  femmes,  x  Chapitre    x. 

>  Ourîciourd'huy  les  Turcs  &  ceux  qui  enfuyucnc 
\  la  loy  de  Mahomc^nc  pcuuent  auoir  plus  de  qua- 
l  tre  femmes  cfpoufècsiqui  n'eft  pas  inftitutiô  nou- 
Quelle  i  cardes  îcviuant  de  Mahomet  il  permit  à 

_  _ >■  ceux  qui  voudroyent  enfuiure  faloy,  d'en  prendre 

^atte:mais*quant  à  luy,ayant  fait  vncloy  pour  foy  mcfme,  il  luy 
foc  licite  de  fè  marier  auec  autant  de  femmes  qu'il  luy  plairoic  en 
gumtiftm*  auoir.  Lo  trouueau  liure  <T  Afèar  qu'il  fè  maria  auec  quinze  fém- 
urs eftoufees  mcs,fàns  grand  nombre  des  efeiaues  qu'il  auoit  quant  &  quant: 
dcMtkomet*  &  qtfû  en  auoit  vnze  tout  à  la  fois.  II  rcit  vue  loy  qui  eft  mainte- 
nant obfcruee:c  eft,  qu'il  y  auroit  cqualité  entre  les  fcmmcSjpour 
<;fttc  également  trai&ees  entre  elles ,  tant  es  veftemens ,  au  boire, 
Zc  au  manger^qu'au  dormir:&  faifànt  autrement,  celle  qui  fè  (en» 
Cira  intetelècfe  peut  'plaindre  au  iuge,&  appcllcr  fon  mary  en 
droi&.Pour  cefte  raifon  pour  le  iourdliuy  la  fille  du  grand  Turc, 
oudvn  Bâcha  n'aura  aucun  priuilege  auec  fon  mary  ,  non  plus 
quelafiiledupluspauuredecoutcTurquie.  Parquoy  les  Turcs 
£c  peuuent  defmarier  pour  vn  ouy  &  nény  :car  fi  l'vne  de  fès  fem* 
mes  Ce  pîain&au  Cadi,&  que  fon  mary  la  vucille  quitter,  ilz  font 
defmariez  àes  Theure  mcfmc.Mahomet  cftant  encor  viuant,  feit 
wie  loy,que  nul  autre  fè  peut  marier  auec  les  femmes  qu'il  repu- 
dieroicEt  répudier  fâ  femme  en  ce  pays  là,  eft  quafi  comme  qui 
donneroit  congé  à  vnc  chambrière  en  France.  Mahomet  voulut 
auffi  qu'après  fà  mort  fès  femmes  ne  fè  peuuent  rcmaricr,cobien 
qu'il  en  euft  neuf  encor  viuantes  quand  il  mourut.  Il  eft  eferit  en 
vn  Hure  Arabe ,  intitulé  des  bonnes couftumes de  Mahomet,  le 
louât  de  Ces  vertus,^  de  fès  forces  corporelles ,  qu'il  fc  vantoit  de 
pca&iquer  Ces  vnze  femmes  en  vnc  mcfme  heure  l'vne  après  Pau- 
vre. Il  feic  au  flî  vnc  loy  qui  encor  eft  tcnue,quc  fi  vn  homme  a  rc^ 
pudic  fàfemmepar  trois  fois,qu  elle  ne  peut  retourner  à  luy  que 
ivnautreneiaitpremieremcutcogneue.  Les  Turcs  ont  ces  qua- 
tre chofès  defèndues,c*eft  à  fçauoir  de  ne  mager  fâng ,  de  la  chair 
de  porceau,&;  de  ce  qu'on  a  offert  aux  idoles ,  ôc  belles  qu'où  n'a 
point fâigaecs.  Les  efeiaues  au  temps  queviuoit  Mahomet,  &s 


OBSERVEES  :*à&    P.    SElaft.  4Ôf 

quelque  temps  apres,auoyent  liberté,  s'ils  fc  faifoyent  Mahorae-  dofis  de* 
tiftes  :  pourec  que  le  premier  qui  ercut  en  Mahomet,  fu  t  cfclaue,/"^  ***. 
auquel  iiauoit  promis  l'affranchir  s'il  vouloir  croire  en  luy  :  ce  wra*- 
quUfcit,&:  cutlrbcrté.  Le  liurc  de  la  Zuna  dit  ,  en  vne  loy ,  par  y, 

laquelle  rou t  cfclauc  I uif  ou  C hreftien  qui  fe  faifoit  Mahomcti- 
fte,cftoit  affranchy  outre  îegré  de  fon  maiftre  :  mais  elle  neft  pas 
obfcmec  pour  l'heure  prefente.  Icy  finirons  des  rifecs  de  Maho- 
met éprendrons  à  parler  des  Turcs*  N  oftfc  vulgaire  a  opinioà 
que  le  cercueil  de  Mahomet  eft  pendu  en  l'air  par  la,  vertu  de  la 
pierre d'aimant; U toutesfois cefte fable neft pas  de  l'inuention 
des  modernes  :  car  qui  lira  Pline,,  trouvera  les mcfmcs  propos  au 
quatorziefinc  chapitre  du  crentçcinqiefme  Hure,  ou  il  parle  de  la 
pierred'aimant  en  cefte  manière  :  Bodem  lapide  Démocrates  arebi-  Tiene&d* 
teSlus  ^AÏcxAtdnét  \  ^irfmoes  templum  concamerare  inchoauerat ,  vt  m  mMt- 
eofimaUchrum  eitu  eferro  fendere  in  acre  *uideretuy+ 

£4  manière  de  nourrir  les  enfans  en  Turquie. 
Chapitre        x  u 

i  Es  Turcs  ont  vriç  merucillcufc  manière  de  nourrir 
\  les  petits  enfans ,  mais  au  demeurant  aifec  :  Car  com- 
1  bien  qu'ils  munifTent  &cmrnailîottencle  petic  enfanc 

m  \  par  tous  endroits ,  toutesfois  ils  luy  laiflent  le  conduit 

de  derrière  tout  à  nud.  Cefaifànc  ,  ne  leur  conuientlauer  fi  fou- 
uent  leurs  drapeaux:  Car  leurs  berceaux  font  enfoncez  de  cuir  te- 
du  bien  roide,ou  ils  font  vn  pertuis  rond ,  defTus  lequel  les  fe/ïcs 
du  petit  enfant  font  toufiours  defTus  tout  à  nud:  Careftans  adîs  Berceaux  de 
oucouchczaudefiusdu  berceau  ,  ont  vn  petit  pot  large  par  le  TMr¥*#- 
haut ,  qui  rcfpond  droit  au  pertuis  du  berceau ,  à  fin  que  quand 
l'enfant  kit  Ces  affaires,  ne  les  refpendc  finondedens  ledit  j>oc. 
De  là  vient  qu'il  ne  leur  faut  point  tant  de  linges  comme  il  ïaut 
aux  enfans  nourris  à  noftrc  mode,&  ne  font  iamais  fi  puants ,  6c  pourriture 
ne  donnent  tant  de  fafcheric  ou  difficulté  à  les  nourrir  :  car  fi  bîe  des  enfms 
ils  commencent  à  croiftre,  &:  qu'ils  commencent  à  aller  tout  par  «»  Turquie. 
eux,  fi  cft-cc  qu'ils  ne  les  permettent  demeurer ,  qu'ils  ne  foyent 
aflis  furie  pertuis  du  Berceau,  iufques  à  tant  qu'ils  puiflent  tenir 
leur  vetre.  Orlcs  petits  enfans  cmmaillottezeftans  couucrts  par 
defTus  pifleroy  et  en  fi  peu  de  linge  qu'on  leur  baillc,n'eftoit  qu'ils 

DDd    iij 


l& 


T I B  .K.-.&  :  'X 1  V  fc  E     £KE  S   -S  I K  G  V  £  A  ï 


Za  cttnellepour  les  masUs. 


-o,  ~> 


La-cmdle-fouY-ksfemelles* 


y  mettent  ordure.  Ife. 
ont  de  petites  caneL 
■  les  faites  de  buys,que 
•  ~  on  trouse?  çèl  écrira 
chez  îesmerciers,  ex» 
-  preffeaiét  faites  pour 
;  feruir  aux  petits  en> 
fâ^yquir.foarcretïfès r&  croches  parvn  des  bouts ^-&?  ne  .font 
pas  pi  us  grofifcsxjuVrï  doigt^ne  îôgues  que  fix.  Le  bout  recraché 
fèrt  à  mettre  le  membre  du  périt  enfant.  Uoti  cm  fait  de  deux  ibr- 
tes,l'vn  pour  iesmafles,  &  l'autre  pour  les  femelles-  Celuy.  des 
ma.feeften  rond;  dételle  figure.  L'autrc-q^cftpoanla  femclr 
'-  .-"■  k$  c&  lom-g-,  fçaùoireft  que  ië-bout  foit-vaidé-,  pîu-s  large  en  lan  « 

gueuc,  corne 
ia^nftrecefte 
autre  figure». 
:Q*u  ne  fçau~ 
roit  la  manie» 
re  comme  ils. 
ksapphqueFj 
troirueroitdjf 

écuîté  dd'eatendfe^  G  e£,  quejquandils  Tes  veulent  faire  feruiï 
aux  enfaps.mâûc.s  yil$  leur  mettent  le  petit  bout  du  membre  de- 
dans la  çanelje>&  font  que  l'autre  boutpafTe  par  entre  lesiambçs, 
&que  Jç.coniûjri^dçJa  canciie  ré/ponde  par  derrière,  au  permis 
d£  poM  6i?.quejeau.!  tombeau  meiÈie.pot^Lii eildeffous  le  bet- 
-  <pbau^  Idr&rôbla&le&tat  Ha  femelle:  car  ils  luy  appliquent  l* 
canellecreufc  en  ligueur,  &.la  font  palier  par  entre  les  iam  bes>= 
à,  fin  que  reaatombededen^Ic  pot*.  Cefte  mode  eft  bien  feanrç 
apx  T^^qui&r^toufioursaflkdeffijsdes  tapis  >.&  tfeftojtcc- 
foman:içre>îçurs-cnfans  Icur&uilkroycnt  par  tout..  Us  ne  font 
.  ppintdebouUiev&n  ont  de  telles  nourritures  que  nous  auons 
accoutumé  bailler  aux  petits  enÊms  en  Europe.,  Les  femmes  ne 
.  kur;bailleiîU.uî^dipfefQ^3a.mamcîle>iufqucs  à  ce  qu'ils  ayenç 
yçfaii'Ptt  dixmpjs:>quiiCïfty»ç.feçQ«;Cornjnupeà  toutes  nations. 
<fo  teuaiy;,  qui  n'ont  poinç  aecon&umedpfajrc  delà  bouîliene 
«angç^jdalaiâ;  &  pour  n'aller  fi  loing,. le  plus  fouucntjes  Ita- 


toffsTndTmcs  ne  les  nourriiTent  que  de  la  mammeilemiqucsàcc 
aoilsaycrtr  vn  an  paiTé^Aprcs.vn  a»  le?,  nourc  tffes  Jeux  mafebac 
^ecc  qu'elles  mangent*  joaisïtirtout'dcsiKnx^iiec  ckp  aioL-car 
deiyouiljcdtfs  n'ont  point,  de  nouvelle,  parquoyfcilc;kurifoHt 
quelque  bonne  fouppe ,  ou  de  la  panade.  Quand  les  Turcs  veu* 
lent  leuer  leurs  enfans ,  il  nefon t ilnon  les  leuer  fur  le  permis  de  .  .  _ 
l«jiriwrccau>parcaniîpak»  fauçl&içr :ne : eflfuy er^ Quand ilont     .-  • 

«les  à  leur  mode ,  êcne  fe  feindrons,  deieur  faire  màngerdcs oi- 
gnons, qu  ii  mafehent  premièrement  a.ucc  eut  pain  ou  dckebair,. 
Scaixitcs  viandes,  Auûî  ndeur;  chautfiirquoy  iiles.  j&cffientdQr-r 
srâ.:.  car  il.  $one  aucun.  .Vftge  de.  pînmcv  La  œw'ftfwnc: jC&tellc 
pai!  roue  le.pays  -de  Turquie  y  cane  de  r%>hes  q^crîde&paujjre^ 
qu'ils  nc-font  tant  aflbttcz.  de  leurs  enfans  ^  comme  Ton  cû  aa 
pays  des  Latins»  . . 

:  -    Tmquic.  Chapitré      xri,    .      .  .    /  . 

[pi  V.  pTemiercomenoementdela  conqueâc  .tîe&Tur£% 
\ les  Arméniens, fbrcac Jcs  premiers  aifiaUiz-,  qoa&d  ris 
jfomrcnt  de,Scy  thie  :  cariciÂrmcfiiésquiioiseûoyét 
I  Chtcttiens,  fetrouuans  les  pks  fbib]es  perdirent  leur 
Royaume-.  Maisnonobftantcclafontcoiuaonf s  demeurez con-» 
ftanscnlafoy  Ghre&icnnc.  :  commeikappert  queocor  pour  Je 
iourdliuy  ilssienncnt  le  nom  paj touteTurquie.^  Car  nommait 
vn  Arménien  en  ce  pays  là,>  <It  entendu  &vn  Ghrefticn.  Si  va 
Arménien  ferend  Turc,il  copert  Ton  appellaxion.Onies.trou- 
ue  liabirer  par  les  villes  Se  villages  itifqu.es  outre.  l'Arménie,  6c 
en  rAfamie  v  &:  en  Àdtabcac,  jaKeridû _qusik  Roy  de  Pcrfe 
les fauf&e  yiuœ.co -feu -pays../  AûfS iorjc ils . gens  paiûblesâs  ^^.: 
humains  ,  &  font  communément,  pauurcs  agriculteurs ,  bons  ^îdiÀcnc. . 
iardmiers ,  èc  qui  accouftrent  bien  les  vignes.    Les.  preftresi3^  .. 
dcs.Armcoiens.ipntmariexcommc.ceux; des „Greçs  ,.&:  çclçs      >.j   - 
brericia  mcflcjax  caHce'  coûsme  les  -Latins  _>  M  fon*  fcuefei  *^^ '*"" 
de  mcfmcs  ornemens  de.  chappes:  &  chajfubles .":  &l$g  cctnfa-    rmemm^ 
crent  pas  en  grand  pain  comme  les  Grecs  y  mais  en  perâeoftiç 
comxuç  ki  Lacias,. Tous,  les  a&ftans  tefpo&dsnç.ajipreJ&r&eA 
i:.:?h  "  *     DDd    iiîj 


40$  TIERS     LIVRE     DES     S'INGVLA. 

chantant  en  Arménien.  Ilcft  permisà  toutes  les  religions  Chre~ 
{tiennes  viuans  en  Turquie  d  auoir  chacune  Ton  Eglifc  à  part. 
Car  les  Turcs  necontraignent  perfonne  de  viurc  à  la  mode  Tur- 
quoifè^ains  eft  permis  à  vn  chacun  viurcen  ù.  loy*  Ccft  ce  qui  a 
toufiours  maintenu  le  Turc  en  fa  grandeur  i  Car  s'il  conquefte 
chefllenseik  quelque  pays,  ce  luy  eft  afîèz  cFeftrc  obey  :  &  moyennant  qu'il 
Tttrfâe.      reçoyue  lejtnbut,il  nefè  foucic  des  âmes.  Parquoy  fouucntau5$ 
suljwes.     VCD pîuâcursvillages  par fepay s  de Thrace ,  les vns habitez fcu- 
VattAjtœ.    \cm£t  <jc  Bulgares^cs  autres  de  Vallaques ,  les  autres  de  Scrutes^ 
les  autres  de  la  Bomna,&  AlbanoiSjDalmates,Sclauonicns,tou$. 
tenansleur  religion  Chreftienne :  car  quand  leTiirc  eonqucft© 
vneprouince,il  fait  enîcuer  les  payfans  des  villages^  lescmioye. 
comme  colonies  pout  habiter  £c  eukiuer  les  lieux  entour  Con- 
âantinople  ou  ailleurs  qui  eftoyent  deferts.  Nous  fommes  trou- 
vez, quelquefois  par  lariuc  de  Pon^erransçà  Se  làen  telsvillage%, 
qu'en  va iour  nous  fommes  veu  ouyrcûxqou  nxdiucrfitcz  de  lan- 
gues Ch^cfUenncs  félon  diucrsvittages^Scwçntauo&saiEftéaa 
Qligièux'    feruicedes  Chrcftiens  ArmcnienSj  qui  viucnt  par  les  villes  de 
ssirmmiens..  Turquie  ^maisauons  trouue  qu'ils  approchent  plus  des  ceremo- 
chrtfïens,    nies  des  Latins ,  que  auDe  des  au  très  nations  Chrcftiennes .  Et 
trefujfesetk  combien  qu  il  dcaaeure  pîuûeuts-nations.  Chrétiennes  en  vnc 
TTTie'      ville  ou  vn  village  Turquois  y  toutesfois  quand  quelque  Arme- 
œmonit  ^nicnc&tttfyzfiéy  il  n'y  a. que- les  Arméniens  qui  conuoyent  lc- 
^frmmiew.  corPs  CTi  ccrrc  -les. Grecs  aofli  conuoyent  les  leurs  :  Car  l'vnc  re- 
ligion ne  çonuoye  pas/autre  :  &c  ne-fe  méfient  en  rien  desaffai^ 
tes  l'vn  de  lfautcc:qui  cfl  la  cauïe  pourquoy  l'on  voit  fouuct  cinq, 
ou  fix  cimetières  par  les  villes  de  Turquie ,  appartenans  diuerfe- 
mcntàpluûeurs  religions:  car  les  Turcs  l'endurent  facilement» 
Quand  le  preftre  des  Arméniens  dit  l'Euangilc ,  les  affiftans  ont: 
accouftume  de  fè  baifèr  àdêxtre  &  xfèncftrc  >  en  fîgne  defc  par- 
Tttmfont-  .  donner  rvnàl'autrc»  Les  affiftans  entendent  le  langage  Arme- 
asrUttxde    nien,que  lepreftre  leur  parle.  Tout  ce  qui  cil  eferit  en  Arménie 
jfcV^/>re»*  retient  quafi  tout  de  l'antiquité,  qui  eft commun  aucckurvul- 
ère  leurs,     gairc.  Les  Turcs fbnîi  moult  curieux  défaire  endoctriner  leurs. 
*$*«•       cnfànsen  kJettre  Arabique^&pour  cefairc  plus  comodemet,uV 
ont  raitexprefèmet  fabriquer des  porches^  lieux  publics  pour 
enuoycr  leurs  enfans  apprendre  à  lire  &:  à  efcrire,&  la  grammaire 
Arabique.  Les  filles  aufli  y  ^>nt  apprifes  pat  les  femmes  :  &  n'y  a, 
;..'.."•"  ûgetic 


Juifs  mnkfr 
m  Tut* 


Om$  E Ifc 7E E  S     * M R    *.    ÏEl»^  $99 

g  petit  village ,  ou  il  n'y  aie  de  tels  porches  ou  appenriz ,  ou  iour- 
"  Bellement  touslcs  garfonsdu  village  s  aflerablcnt.  Il  font  accro^  ^cenn^ 
©izà  plat  de  terre  cBlifàot;  qui  cûvne  façon  de  faire  moult  pro-  &&€  utm 
pre  aux  petits  enfans.  Car  cftans  en  ecfïe  forte ,  {ont  en  grand  re-  " 
nos.  Quand  les  ieuncs  enfans  difent  leur  leçon,  ils  branlcnc  tout 
kcorps  enauant  &  en arrière^  croyons  que  ceft pour! accent,, 
&  pour  la difEcul té  du  langage. 

X>esJmfsh(éhametpTmr^uicm        Chapitre   xn*~ 

j,  Es  îuifsqui  ontefte  chafiez  cfEfpagnc  &  de  Porto*- 
J  gai ,  ont  fi  bien  augmente  leur  ludaifmc  en  Turquie,, 
t  qu'ils  ont  prefquc  traduiér  toutes  fortes  de  liures  en 

___    l  leur  langage  Hcbraique  >  Se  maintenant  ils  ont  mis 

iiBprcflion  à  Cônftantinopîc  ,  fans  aucuns  poin&s.  Hs  y  im-  1UiP  i 
priment  au  ffi  en  Efpagnoi ,  Italien  %  Eatin ,  Crée,  &  Memânr^Jv 
mais  ils  n'impriment  point  en  Turc ,  ne  en  Arabe  :    car  il  ne  ^ 
îcurcft  pas  permis..  Les  Iuifsqui  font  par  Turquie,  içauent  or- 
dinairement parler  quatre  ou  çinqfortes  de  langages  :  dont  y  en 
a  pluficurs  quien  %auent  parler  dix  ou  douze.  Ceux  qui  (ç  para- 
rentd*Efpagnc,d,A)lemagnc>Hongrïe  y&  de  Bocfme^ont  appris* 
h  langage  à-leurs  enfans,&  les  enfans  on  t  apprins  la langue  de  îa~ 
nation  ou  ils  ont  àconueriè^comme  Gzcc ,  Efclauon,Turc ,  A» 
ïsabev  Arménien,  &  Italien.  B  y  en  a  peu  qni  {cachent  parler- 
François  :  car  aufli  n'ont  à  trafiquer  auccîcs  François.  11  ne  fut  jûfitrajjp- 
©ne  que  les  Inifs  nâyent  efte  grands  traffiqueurs  %  &  ontfeeu  ^mm., 
parler  pluficurs  fortes  de  langues  :  chofe  qui  fe  peut  facilement 
prouuecpârlcshiftoriens:^  auffique  l'eferiture  faincreen  faite- 
mention  -JZzt  lors  que  les  Irnfs  vindrent  de  toutes  parts  des  pays  „ 
eftranges  pour  cftreàJafefte  de  la  £entecouf£e  en  lerufalcm,  les  ^^^^ 
Apoftres  de  noftrc  Seigneur  n  eftoyenriamais  partis  de  Galilée , 
&  ne  (çauoyent  parier  que  la  langue  de  leur  pays  de  ludee^  ton* 
tcsfoisceiourlkvnchacuadeuxfçeut  parler  toutes  langues  de~ 
defïbusdc  ciel  :  &  les  luifs  qui  eftoyent  preieas ,  encurent  gran- 
de merueille  :  car  ceuxx|ui  eftbycnt  venuz du  pays  des  Eatthies^ 
&  les  autres  des  Mediens&;  Elamites  vde  Mcfopotamie, M  de 
toutes  parts  de  ludee ,  les  auttes  de  Gappadoce  ,  de  Pont  >  de 
^Afiei,dc2fidie>Eamp,hyîie>  &  Egypte,  &  des  parties  de  Èy-- 

£Ee 


4©ô  TIERS    LIVRE     DES     SINGVLA, 

4>fe,&  autres  qui  eftoyen  t  là  venus  de  Rome ,  aucc  plufîcurs  pro- 
fèlytes,c  eft  a  dire  ceux  qui  de  leur  bon  gré  s'eftoyét  renduz  lu  ifs, 
Sz  ceux  qui  cftoycntvcnuz  de  Crcte.&d'Arabie^yans  parler  les 
Apoftrcs^ftanstouseitonnez,  fe  demandoyent  les  vns  aux  au- 
tres ,Oux  cy  qui  parlcnt,nefont  ils  pas  Galilecns  î  &  toutesfois 
nous  oyons  vn  chacun  noltre  langage,  auquel  nous  fommes  nez. 
Ces  parolIcsTonc  eferitesés  a&cs  des  Apoftres  :  par  lefqueîlcs 
prouuons  que  de  toute  ancienneté  ils  trafftquoyenc  par  cous  les 
sjmfjate  ^s  ja  jjjou^ç.  La  (implicite  des  Turcs  aefte  rendue  plus  com- 
T*1*55     no'ree  pour  la  conuerfàtion  àcs  Iuifs  qu'ils  n  eftoyent  auantqu'  ils 

rendue  corn*  r     ~    F         _  .  ^  .*■    „  .    r  r         -       \ 

*«,/&.         les  eu  &nt  fréquentez  :  comme  auiïi  les  t  rançois  te  (ont  quelque 
peu  changez  pour  la  conuerfàtion  des  eftrrapgers ,  ou  pour  le. 
moins  leur  efprjrs  endormis  en  font  quelque  peu  plus  efueillcz. 
Les  Iuifs  quelque  part  qu'ils  foyenr,  fontcanteleux  plus  que  nul- 
le autre  narson.  Ils  ont  tellement  embraffé  tout  le  traffic  de  la 
•  '  -       .  marchandife  de  Turquie .,.  que  la  riçheffe&reuenu  du  Turcçft 
entre  leu  rs-mains.*  Car  ils  mettent  le  plu  s  haut  pris  à  la  recepte  du 
reuenu  des  prouinecs,  aftermans  les  gabelles ,  &;  l'abordage  des 
nauires  Se  autres  chofes  de  Turquie.  Ceil  la  caufe  qui  les  fait  s'ef- 
forcer d'apprendre-les  îagues  de  ceux  auec  lefquels  ils.  trafiquer. 
les  marchands  Iuifs  ont  cefte  aliuce \  que  quand  ils  viennent  en 
Italiens  portent  le  turban  blanc,  vouians  par  tel  %ne ,  qu'on  les 
luippor  en     ^      Turcs  :  car  on  y  prend  la  fov  d'vn  Turc  meilleure  que  cel- 
aeenTur*    lcdv.nluir.  Lesiiurs  voyageurs portent  le  turban  îaune:  &ies 
mues.         Armçniens3GrccsJvlaronitessIndiens ,  Cophrhes ,  &  toutesau- 
chrefiens    très  nations  de  religion  Chreftienne  le  portent  pers  ou  bigarré: 
portent  le     car  jcs  feuls  Turcs  le  portent  blanc.  Et  pource  qu auons  Ibuuen- 
twbaâhgtr  ccsf0js  eft£  contrainâs  nous  feruir  des  Iuifs,  &  les  hanter ,  auons 
re'  facilement  cogn eu  que  c'eà  la  nation  la  plus  fine  qui  foie ,  &  la. 

plus  pleine  de  malice.  Ils  ne  mangeront  iamais  de  la  chair  qu'vn 
scifmesentre  Turc,Grec,ou  Frankait  apprêtée:  êc  ne  veulent  rien  manger  de 
■Us iuifs.       gras,ne  des  Chreftiens,  ne  des  Turcs:  ne  boyuent  de  vin  que 
vende  le  Turc  ou  Chreftien.  Ils  ont  tant  de  dirficuitezentreux. 
iS^defçimieSjquc  plusieurs  font  d'opinion  contraire  les  vns  aux 
ïmfscùgnoip  autres.  Il  y  en  a  qui  ont  des  efclaues  Chreftiens  tant  malles  que 
jem^La-^  femelles,  quiîesfonttrauaillercndiuers  ouuragesleiourdcfa- 
<rm     J      medy,comme ai  imprimerie  a  Conitantinople5ou  a  iamarenan- 
dife:  Où  (c  feruent  des  femmes  Chreftiennes  efclaues  x  nç  faifans 


OBSERVEES     lAR'P.     BETLON.  *        ^  .' 40I 

autre  difficulté  de  fe  mcfler  aucc  elles  ne  plus  ne  moins  que  fi  el- 
les eftoyçnt  Iuifues.  Toutes  lefquelles  chofes  les  autres  reprou- 
tient  com  me  vnebcrefie  en  leur  loy^oulans  que  ft  vn  ïuif  a  ache- 
té vne  efclauc  Chrcftienne .  il  ne  la  doit  point  cognoiftre,  encans 
qu'elle  eft  Chrcftienne,  ne  faire  trauailler  fon  efclauc  au  fàmcdy, 
entant  qu'il  luy  fait  la  befongne,  Mais  les  autres  refpondent  que 
cela  ne  leur  eft  pas  défendu, entant  que  ce  font  ebofes  acheteesde 
leur  argent.  Et  de  bonne  meraoirc-vn  luif  médecin  fils  du  grand 
feigneureftant  à  Cognes,  au  oit  deux  belles  ieunes  Efpagnoiles 
efclaues  Chreftiennes ,  quiparloyent  aufïi  Italien ,  qu  il  cenoit 
pourfon  feruice ,  Sjenauoitcu  desenrans  i.U  toutesfois  ils  les 
vouloir  retiendrez  defqueiles  auons  ouy  dire  auoir  ducil  qu'il  leur 
falluft  tomber  es  mains  des  Turcs.  Car  quand  vn  xurc  a  ainû  te-  somme? 
nu  quelque  ieune  efclaue,  &  qu'il  en  a  eu  des  enfans  ,  il  la  reuen  d  Rendus  par 
au  plus  offrant  pour  en  auoir  argent,&  en  acheter  vne  autre.DSc  paratefo*: 
aduient  que  telle  femme  fe  trouucra  auoir  efté  venducaumar- 
ché-vingtfois  ,  trencefois ,  Se  les  hommes  au  cas  pareil  auoir  efte 
venduz  quarancefois ,  telles  fois  aux  luifs ,  telles  fois  aux  Tiircs^ 
Les  luifs  plus  fcrupuleux  veulent  nommément  qu'il  leur  foie 
prohibé  de  ne  vfèr  aee<;  les  femmes  étrangères  :  mais  qu'U  leur  Médecins  Je- 
eft  licite  s  ils  ont  vne  cfclaue  de  leur  loy^de  s'en  ferait  ainfî  que  Turfuc- 
bon  leur  femble.  Ceux  qui  medeeinenc  en  Turquie ,  par  Egypte, 
Syrie  &  Anatolie,&  autres  villes  du  pays  du  Turc,  font  pour  la 
plus  grande  partie  luifs  i  cou tesfois  il  y  en  a aufli  des  Turcs  :  &:  les 
Turcs  font  les  plus  içauans  v&  font  affez  bons  praticiens  :  mais 
au  demeurant  ils  on  c  bien  peu  des  autres  parties  requifes  aim  bo 
médecin. Il  eft  facile  aux  luifs  de  fçauoir  quelquechofe  cn-mede- 
einexar  ils  ont  la  comodité  des  liurcs  Grecs,Arabesa&Hebrieuxy 
qui  ont  efté  tournez  en  leur  langage  vulgaire,comme  Hippocra-  ^^  j 
tes>jStGalicn,Auiccone>Almanibr,ouRa{is.,ScrapiQn>  Vautres  ria0Um    \ 
aut  heurs  Arabes.  Les  Turcs  ontauflllcs  Hures  d>Ariftotc&  de  xjam-^ 
Platon  tournez  en  Arabe  &  en  Turc-  Les  drogueurs  ou  mate-  sktoa. 
rialiftes  qui  vendent  ordinairement  îes^  drogues  par  les  villes  Drcgueisn 
de  Turquie,  font  pour  la  pi  ufpart  hommes  luifs:  mais  lesTurcs  f^J^f^ 
font-  plus  fçauans  en  la  cognoiftance  d'icelles  ,  &;  ont  plus  de  ^/o:irri*4 
matières  medecinales ,.  c'eit  à  dire  des  drogues  {impies  en  ven- 
te, en  leurs  boutiques ,  que  n  auons  en  Europe  r  tellement  qm 
h  meilleur  Droguifte  deYcniie^  quelque  bien  fourny  qu  il  foir, 

EEc     ij 


^.01  TIERS     XWRE     BES     STN1CVÏ.A. 

n'aura  pas  tanedcpetitcs  drogueries  en  fà  boutique,  quVndro- 
Z&âles  °^gucur  de  Turquie  Nous  ne  difons  pas  en  quantité  de  poix,mais 
beaucoup  de  cn  diuerfîçe<Èc nombrc<lcs drogues  fimplcs.  Quand  le  médecin 
°£ltes'      a  fait  fa  recepte,  il  1 enuoye  au  drogu  ifte  pour  au  oir  des  drogues 
qu'il  demande  (car  il  n'y  a  point  de  ceux  que  nous  nommons  A- 
poticaires  )  &  là  prenant  les  hardes  en  détail  les  paye  prefente- 
roent  :  car  toutes  chofes  en  Turquie  fe  font  à  l'argent  comptant. 
Auffi  n'y  aiipoint  tantdc  paperas ,  ne  de  brouillats  de  debtes  à 
<credk,ne  de  papiers  iournaux:&:  de  voifin  à  voifin  en  toutes  mar- 
chandées detaiiices,nc  fc  fait  nonpîus  de  crédit,  que  fi  c'eftoy  ent 
4csplus  étrangers  d'Allemagne» 

Vutr4ffic7&  des  marcherez  Turquie* 
Chapitre    xiiii. 

E  s  Turcs  n'entreprennent  autre  chofe ,  que  ce  qui  eft 
requisà  leur  rnefticr.  Nous  entendons  des  marchands 
qui  vendent  à  la  vrayc&naifue  façon  des  Turcs,  ou 
^^^^  des  Grecs  :  Car  les  Iuifs  qui  furent  chaûcz  d'Efpagnc, 
mfschtfé^fc  quelques  Cbrcftiens  reniez,  ont  drefle  des  boutiques  tant  de 
àzfkàgM-  grofferie  que  de  quinquailleric  en  Conftantinople,  àla  façon  des 
Latins  y  quiefteaufe  qu'ils  trompent  6c  en  abufent ,  comme  en 
Europe ,  ou  l'on  voit  grand  nombre  de  boutiques  en  chaque  pe- 
tite villette  &  bourgade,  ou  à  peine  y  a  dix  ou  douze  fortes  de 
Turcs  >^*chofes,encor  font  elles  pourries  &  vieilles.  Les  Turcs  font  gens 
longuement,  qui  viucnt  longuement:  car  ils  font  peu  délicats  ,  viuans  à  tous 
propos  d'aulx  joignons,  ne  bcuuans  point  de  vin  finon  rare- 
ment. Mais  pourec  qu'en  temps  de  pefteils  ne  fe  gardent  de  rie, 
■    f     &  n'ont  point  peur  de  la  prendre ,  ils  y  font  fouuen t  trompez. 
T&p\ae    Yous  les  tapiz  coupez  qu'on  apporte  de  Turquie,  fon  t  feulement 
2£!w»    &its  àcçuis  la  ville  de  Cogne  en  Cilicie ,  iufqucs  à  Carachara  vil- 
mfcbame*lc  de  Paphlagonie.  Nousauons  dit  que  les  fins  chamelots  font 
lots.  taitsdepoil  de  cheures  à  Angouri,  qui  eft  la  première  ville  de 

Tafis  2<J>>  Cappadoce  :  &:  les  tapiz  font  auflî  faits  de  poil  de  cheures: 
&**•  mzis  ceux  qu'on  fait  au  Caire  ,  ne  font  guère  beaux  :  car  ils 
T^iu  çom  fcuicmcnt  tjffuz  cn  toillc  bigarec ,  Ceux  de  Adena  font 
^*        raids  en  feutres,  fort  légers  U  mois,  à  fe  coucher  dcûus.    Les 


Tares  ontlcs  marchez  par  les  villes^  villages  à  vn  certain  iour 
de  la  fèpmaine ,  tout  ainfiqùea  Europe.  Les  pay  fans  y  viennent 
des  champs  &  des  villages  pour  vendre  leurs  hcfongnas.  Lcsvns 
apportent  du  bois,les  autres  des  œufs ,  du  beurre ,  du  fourmage, 
de  lafoyc,dufîlï&:  ainfides  autresXcs  femmes  Iuifucs.qui  ont  li- 
berté d  aller  le  vifage  dcfcouucrt ,  font  communément  par  les 
marchez  de  Turquie  vendans  des  ouuragcs  faits  à  l'aiguille.  Et 
entant  que  laloy  de  Mahomet  défend  que  les  Turcs  nefe  trou-  ^J££ 
uent  en  public  à  vendre  ne  achcter5cllcs  les  font  vendre  aux  luif-'  ■  m 
*ics.Touccsfbis laloy  neft  gardée fieftroide qu'on  ne trouuc  bié ^ 
quelques  Turques  vendans  leurs  hardes  par  lesmarchez ,  ayans 
vn  voile  deuant  le  vifàge,au  trauers  duquel  peu  uent  bien  voir,&: 
quandellcs  veulent  parlcr,ncfont  que  hauccrle  voilcàla  maniè- 
re dvne  vificre  de  heaume.  Elles  vendent  ordinairement  feruiet- 
tcSjmouclîouerSiCouurechefSjCcintmTes  blanchc%fouilics  d*orik 
îiers,&  autres  tek  ouuragcs  déplus  grande  valeur,eommcpauil-' 
Jons  de  licts,&  garnitures  de  lias  en  diucrics  façons  que  les  luifs 
achètent  pour  vendreaux  étrangers.  Les  Turcs  prennent  plaint 
àauoirdulmgeblancj&bicnouurc,  tellement 4quilz  ncplain- 
dront  à  y  faire  defpece»  Lô  voirra  védec  deux  petits  mouchouers 
ouurez  vingt  a%rcs,  defquek  nous  ne  prefenterionsfîx  fbkaii  Qu^  ^ 
pays  de  FranecLon  fait  diuers  ouurages  fui le  linge  en  Tuf quic,  fw*Z 
mais  le  plus  commun  eft  tel3que  quandclïcs  le  veulent  piquer ,  U 
faut  premièrement  quelles  désignent  la  toile  dé  peinture:  la- 
quelle puis  foyuant  entre  deux  filz ,  tellement  que  i'ouurage  rc- 
|*refèntc  kpeintutc.  Nous  nouons  point  telle  manière  d'oaora- 
ge  en  vïâgc  ^ncla  manière  de  le  piquer*  Car  les  femmes  foy  uent 
i'cnttedeux  des  fîte  auec  vne  aiguillefort  dclice^cnfuy  uat  bpein- 
«ure^Hes  font  leurs  ouuragcsdc  diuerfes  couleurs  de  fcye*  A  pei* 
ne  pourtoiton  croire  en  narpaysqtie  rouurageiurlelmgecft 
bien  rcçeu  &  tenu  cher  en  Turquie:^:  qu'on  y  en  fait  gradequa* 
tité.La  raifoneft,  que  puifquc  lesfemmes  font  ordinaircmet  en- 
fermées^ qu  elles  n  ont  aucun  mefnage  à  faire ,  au  moins  quel- 
les semployent  à  faire  quelque  chofo.  Et  elles  n  ayans  le  filer  ea 
grand  viàgCjpaflèiit  leur  temps  à  faire  oourage  en  lingc^ 

ErEe  iij 


4°4  tikks:.  livre     des  '  sraGvrA. 

Chofe  digne  de  grande  admiration^es  Turcs^ui  mangent  l 'Opium,  pour 
fi  rendre  plus  barda  à  U  guerre*.  Chapitre    xv. 

£Eg&^Q£N  ne  peut  obfèruer  chofe  qui  fcmble  plus  digne  de 
opium.  ^ro^Sr  nocer  >  cluc  l'Opium  qui  eft  maintenant  fait  en  Tur- 
#$\$£g^  quic ,  &  principalement  à  Achara,  Carachara ,  Spar* 
Ttufcacwfc  cade,Emetclin<lCy&  es  autres  villes  eirconuoiïînes  de 
Paphlagonie ,  Cappadoce,  6c  Cilicic.  Hz  fement  les  champs  de 
Pauot  blanCjComme  nous  faifons  le  bled:&:  ont  tel  égard  en  le  Co 
mant,que  chaque  payfan  en  feme  autant  qu'il  penfe  auoir  de  gés 
à  le  recueillirJEjc  quand  1er  Pauot  a  produit  ies  tcftesyilzles  enrail* 
lent  de  légère  coupure  ,  dont  forrent  quelques  goûtes  dclaicV, 
qu^iîzlai&ntvnpeucrpoiffir.  Tel  payfan  en  cucillira  dix  liurcs, 
l'autre  £x,l  autre  plus  ou  moias ,  félon  la  diligence  des  gens  qu'il 
aura  mis  à  le  fairexar  ce  neft  pas  le  tout  d'auoir  enfemencé  beau- 
coup de  terre  ,jnaisdauoir  gens  aie  cueillir^  Nous.croyons  que 
fans  ce  qtie  les  Turcs  lont en  grand  vfage  >  il  feroit  hors  du  cours 
de  Marchandife ,  comme  pluiieurs  autres  drogues-qu'on  neco- 
gnoift  plus.  Il  n'y  a  Turcqui  n'en  acheté  :  &  n'eut  il  vaillant  quvn 
afpre ,  il  en  mettra  la  moiticen  Opium  >  &;  le. portera  touflo-urs 
auecfoy,tant  en  temps  de  paix  que»  guerre.  Vn  marchand  du 
'  pays  de  Natoîie  luifnous  aflèuraqu'il  n'y  auoit  année  qu'on  n'en 
enleuaftcinquâxe  Chameauxchargez ,  du  pays  de  Paphlagonie, 
C3ppadôcc,Galatie3&  CiIicie,pourtranfportcren  Pcrfe,Indie, 
&ca  noflreEurope,&  autres  pays  loingtains ,  &  auffi  par  taut  le 
pays  ou  le  grand  Turc  feigneurie.  Laquelle  chofe  euâions  creu 
malaifement,  iînon  quilnous.racomptapar  le  menu  ce  qu'on  en 
peut  emporter  de  chaque  village  des  confins  de  Garaehara  y  $$ 
des  au  tres..villes-de  Paphlagoaic,  Cappadoce,  Arménie  mineur, 
GranJ^fi*  &  Gailogrece.  ErdifoitaïUÏ^&elesPerfiensrauoyentenaoren 
ge  de  lopin  plus  grand  vfage  que  les  TUf  es..  Vn  iour  voulufmes  faire  expe- 
w  Twnjttie.  periecce^de  quelle  quantité  vn  homme  en  pourroit  vfer  à  la  fois 
fans  auoir  mal,&  trouusfrnes  vn  Geniiîàire  de  cognoiûance,  qui 
auoit  couftume  d'en  manger  chaque  iour,lcquel  en  mangea  lors 
en  noftre  prefence  le  pois  de  demie  dragme.  Et  le  iour  d'après, 
l'ayans  trpuué  près  la  boutique  d'vn  mercie^cn  feifmes  pefer  vnc 
dragme  que  luy  hailiafmcs  de  rechef,..  &  i  aualla  tput.à.vjie  fois^ 


OBSERVEES     PAR    *.    MLOfN.  4©? 

fans  que  iamais  nul  accident  luyaduint,  fors  qu'il  cftoït  comme 
mhj5iff)u&qua6.yB^ 

dcrnc.La  raifon  poujrqupy  ilz.en  mangent,  eft  qu'ilz  fe  periuaxlér 
en  eftre  plus  vaillans,&  craindre  moins  les  perilz  de  la  guerre ,  en 
fbete  que  quan  d  Iç  Turc  aflem b le  vne  armée ,  il  s'en  fait  fi  gran de 
di$.pation  >  qu  ijz  en,  defgarni{Ten  t  tout  le.  pays,  Hz  ont  vn  com- 
mun parlcrdc^encrçdî^pâHniiyrejVoiis.  au^zm^ngé  dei'Qpiû, 
qui  vaut  autant  quequî  diroit  à  vn  d'autre  pays ,  vous  cftes  yure. 
Vn  Arménien  Chrefiien  chez  lequel  auons  long  temps  logé,  en 
mangeoitfQUuept  deuant  nous  :  &rayansefprouué  l'Opium,  n'y 
woquafinés  autre,  accident  que  de/chauffer  la  poitrine»  &.npu  s 
troubler  quelque  peu  le  çerueai|,<S£  remet  en  dormant.  Qui.  vçm-^tufigrand 
droit  culduerlc  Pauot  en  Europe».  France»  Alemagne,  ou  Izûïç  >  froid  en  n& 
nous  croyons  qu'on  en  pourrait  aufli  bien  faire,  çommeen  Aue,  t°fofte» 
inoyennantqu'on,  prjnt  la  peine  <fo  le jceueillir^ainfi  qu'il  faut. Frmce- 
Car  leclimardç  Na*c*liee;ft  jhMS ^frçi4quç:ççluy;dePrance.1 1  cft 
fait  de  mefme  for^eque.lçs.autbcurs  ont  e{çrk.,$i  nous  en  auons 
point  pardeça  poflibie  eft.il  meflé  :  Caries  marchands  le  multi- 
plient auant.  qu'il  fojt  diftnfeuç  par  les  prouinces^&.ppur  autant 
qu'auons  çqgneu  à  quVJIcspierquçs^lffôut^hoifcl  aiipns  bien", 
voulu  eferire.  Le  mci.Iîeôr  eftforc.amçr^chaiKlau  gou&yut<^iil^ion^ 
enflamme  la  bouche.  Il  cil  de  couleur  iaunc  ,.tirant  fur  le  poil  de ■°?lum?ar* 
'  Lyon ,  rarnaifé  en  vne  mafTe  comme  vn  tas  de  petitsgrains  dedi-<    * 
uerfès  couleurs.  C.at  m  amaflàntledjtOpiam  les  grains  ont  efté , 
recueillis  deffus  les  tcïkçs  du  Pauot ,  jciqiîelz  amaflçz:;  enferable, 
s'entretiennent  comme  vn  tourteau.  L'odeur  eneft  iàfçheuiè  Se 
forte  :  &  encore  que  Ion  le  face  de  complexion  froide,  toutesfois 
il  enflamme  la  bouche.  L'Opium  eft  mis  en  tourteaux  àçs  Ie-pays 
de  Natolie,,  qui  n'exce^cn t  ^oin^quatre  onces,  pju  pouf  Jeplus 
demie  liure:mais  les  marchands  pour  y  gaigner  Je  multiplient  de .  ; 

inoitiéjtellemcnt  q;ie  les  mafïès  qui  partent^  boutiques  Véni- 
tiennes font  qua&d'vneliurc. 

,.         £E?  .ijii .         ,. 


4°&  TIERS'  EITRI     Ï>IS     &ÏNCVEA* 

t>e$  fijmcsque  les  Turcs  font  à  leurs  amoureups:  ^IhubiUement  d& 
fimmes  Turques.  Chapitre    xvi, 

'  Ource  qu'il  y  a  grand*  difficulté  de  voir  les  filles  &: 
^  femmes  du  pays  âc  Turquic^d'autat  eft  il  plus  di£ 
l  fieilede  parler  à  elles..  Parquoy  quand  quelque 
'  Turc  veut  faire  entendre  à>vnedamc,  le  defir  qu'il 

t  a  d  cftrc  fon  feruitcur ,  il  Fait  tant  qu'il  fcnouue  en 

quelque  lieu  ou  il  la-voii  de  loîng.  Les  femmes  de  Turquie  fe  tié- 
nent  communément  deflùs  les  maifbns,  car  elles  font  couuertcs 
en  teFra{fe.Dc  parler  àeWes.(cammc  auons  dit}  if  n  cft  pas  aifé  ,  5£ 
auffi  qu  allans  par  la  ville  elles  ont  le  vifage  couuert  :.mais  on  les. 
peut  bien  voir  deîoing.  Parquoy  le  Turcayant  appcrçeu  celle* 
dor>til  eft/eruiteur,  il  baufe  fa  tefte ,  &  met  lajnain  àla  gorge  ,  fe 
pinçant  la  peau  du  goficr ,  en  Pendant  vn  peu ,  luy  dénonçant  . 
BZtdue  ie    Par  ce*  %nc  3°*^  c&  ^  cfclaue  enchainc  v  &  luy  cft  fèruiteut 
extrême  fit*  d'extrcraefcruitudciçafen  ce  pays  là  ,  on  ne  peut  s'a  du  ou  er  de 
mué*.      plus  grande  extrémité,  que  de  fe  faire  efcîaue  enchainéde  quel» 
qu  vn.^  Et  fila  dame  fe  tient  coy  ,  ou  qu'elle  baifcla.main}il  en 
prend  bonflcefpmnce..Ceftchofe  trefdiifîcile  de  voirie  v-ifage 
dvne  belle  Turque  au  defcouuctt  ,&  eft  plus  difficile  crvvnîiea 
qu'en  autre  :car  leurs  maris  leur-oftent  l'vfage  des  feneftres ,  qui  ' 
ncfoycflten,trillis.  Ceftla<:ouftume tardes mariezqu  a marier., 
vieilles  .ou  jeunes ,  qu'elles  foyenr  totifiours  enfermées.  Elles  ne 
&rtcnr  point,  fîcen'eftpout  alîer  prier  pour  les  morts,  ou  aux 
baings  rmaiseltes  n'y  vont  guère  qu'en  compagniedautresièm- 
mes^:  y  vont  pluûcurs  fais  la  icpmaine  :  &  d'autant  que  les  fem-- 
mcsTurqucs  (somme  dit  Mahomet  )  ne  vont  point  en  paradis^ 
■wTo/W  auflinevoncclles  point  ll'Eglifc:  car  Mahomet  ne  l'a  permis. 
»  faLlk   Pource  (dit-il  )  qu'elles  ne  font  çircon  eifes  comme  leshommes* 
Pluûcurs  ont  eu  opinion  qu'il  y,a  vn  lieu  es  Eglifes  peur  les  Tur- 
ques :  toutesfois  nous  ofons aiTeurer  qu'il  n  y  en  a  pointrcar  nous- 
en  eftas  enquis^ousceuxà  qui  auons  parlé  ont  dit  qu'elles  n'en- 
trent point  es  Mpfquees.Toutcsen  general,tant  en  Turquie  que 
lxsT^ues  en  Arabie,^  pays  fubie&sau  xurc,  porrent.des  bray es  larges  ÔC 
faits,        longues  comme  chauffes  à  la  marine ,  qui  trainent  iufques  defilis 
ks  ibuliçts^  ,âUPAS  trouuc  .que  laraifon  &  couftume  de  cefte  re- 

doubicute:- 


OBSÏKVEES     *À*.     *.    BILOtf*  407 

«îoubîeurc  (  donc  Ion  s'cfmcmeilleroit  beaucoup  fi  la  difions) 
vient  delà,  dont  il  n'eft  licite  endure  dauantage>non  pas  feule- 
ment en  pareilles  couucrtes  :  car  c*cft  vne  obferuation  de  trop 
grande  cutiofité.  Et  pour  neaat  n'a  efté  dit  en  commun  proue  r- 
be ,  Diuers  pays  diuerfes  guifes.  Il  n  y  en  a  aucunes  qui  portent 
auant  pied ,  ains  l'ont  toufiours  tout  à  nud  dedens  les  fouliers  ou 
botincs ,  àc  communément  portent  quelques  carcans  ou  bracc- 
Jcts  en  tour  les  ïambes ,  au  demis  de  la  chenille  des  pieds  ,  qu  i  leur 
PortmB  ivneTurcjuc  i*A f[ic 


Nf- 


*4ot  ■  T  t  ï  R  S     "L I  V  Hï"  t>  ES    ÎIK  G  V  L  A. 

■eu  ornement  <lc  bonnegracc.  Lon  n'en  tronuera  pas  beaucoup 
"au  Caire*,  'qui  n'ayent  les  bras  &:  cuïrTes^ouurez  à  la  damafquwie; 
v<:àreftariVcs  oaings;  fc  forir  treffcrla  peati  felonia  poftraiéhirc, 
""A:  la  coUlènt'ribîfc  entre çn;fa  'peâtr ,  quïy  demeure ,  tellement 
-qu'on  leurvoit  des  cercles  fort  bien  marquerez  fur  les  btas,&  au- 
tres'endroich  du  corps  :  mais  telle  manière  défaire  n'eft  encor 
"Commune  anx^fémmes  d' Âfie^Èqpouree  quela  îoy  de  Mahomet 
ïeurderenddene  Fç  rrronftreren  public  le  vïfagedefcouuert ,  el- 
les ont toufiours vrrvoilefuxles  yeux  derTtrsïe  front  ,  &:  auffi  ont 
3a  gorge  &  les  mainscachees.  EM.es  portent  des  botines  de  cuir 
quifont  hautes  &  ferrées  paMe  Salon,  comme  Ion  voit  parla 
precedenre  peiner  ure,        /.'""/. 
Hthillemets     Les  robes  des  Turcs  fontrlànscoIets}&:  n'ont  point  de  mâches, 
des  Turcs.     ou  bjcn  e}jcs  fonc  fort  courtes,  &  quafi  toufiours  coupées  au  def. 
fus  du  coude.  Les  mefmçs  robes  des  hommes  contiennent  aufE 
auxfemmcs.Ilz  vfent  cc^mtmémcntde:piqueures,&  principa- 
lement deffus  la  foye:&r*auant  que  de  piquer,ilz  la  rayent  auec  vn 
fer  chaud,qui  luy  laifTe  vn  ply  imprimé,  &  qui  ne  s'efface  iamais, 
PourofierUs  non  plus  que  celu  y  dachameior.  Hz  ne  mettent  iamais  charne- 
ls <M*=  lot  ne  foyeen  befongnë,que  premièrement  ne  luy  ofient  les  plis, 
v*1**;    u   quiefl  chofe  facile  à  faire  :  car  comme  le  chamelot prend  fon  ply 
BMemêti  auec  la  chaleur^toutainii  la  chaleur  ren  peut  facilemet  ofter.La 
desTurfas.  iov<icMakomctveutque  les  femmes  foyent  fimplemctveftues: 
toutesfois  quand  elles  ^onthors ,  ou  aux  baings ,  ou  en  compa- 
gnie d'vnecfpoufèc ,  toutes  portent  acouftremens  de  fine  toile 
-blanche  par  le  deffus.  Et  pourec  quelles  ont  des  beaux  accou  (tre- 
menspar  dcfTous ,  qui  font  de  fine  foyc,elics  trouffent  les  blancs, 
à  fin  queceux  de  fine  foye  apparoiffent.  Leurs  manches  font  fore 
cfkoicl:es,&:  fiiongues  qu'elle  pafïènt  les  mains;car  la  loy  ne  veut 
pas  que  leur  mains  n  autre  choie  de  leur  chah:  apparoiffe  en  pu- 
-   .  rli     bîicXes  Turcs  &  Turques  portent  des  chauffes  fans  auant  pied: 
tïmLpàr* car  hommes  &  femmes  fc  lauent  les  pieds ,  les  mains ,  Se  les  bras 
teshoteufis.  iufqucsau  coude,  &  le  col  pareillement.  Quand  ilz  vontàleurs 
affaires  ncccfTaircs,ilz  portentdc  feau  en  vn  pot  à  bouquin  pour 
felaucr&ic  deuarft  &lcdcrrferc,gelaftilàpierre  fendanr,  Hz 
acouftument  telle  façon  aux  cnfans,tant  malles  que  femelles ,  & 
le  continuent  toute  leur  vie:car  Mahomet  ne  leur  a  permis  fc  fèr- 
uir  de  papier  au  autre  chofe  en  tel  affaire,  auquel  on  peuft  eferire 


îenomdçpicnpardcfrus.  Leurs. prjuez  font  accommodez  cfe 
telle  forte  \  qu'ilz  fon  t  vn.  pertuis  cftroicl:  &c  long  encontre  terre, 
ouainijracro.upii.lÊux  ekkcilc  fç  laiier  auec  la  main.  Çeit  le  par- 
don-que  MabûmeLl^tir'a  doope  vque  (c  lauans  fouuet  les  parties 
honteufes ,fe  purifient  de  leurVpechez.  De  Ikeft  venu  qu'ils  ont 
des  auges  pleines  d'eau  par  les  carrefours  des  vifles,enferroces  en 
quelque  pétïtcdoflure ,  là  o.u  les,  nom mes  entrent  pour  fç-lauer  à 
patt,&: les  femmes  à  pirçmais! en' leurs'  maifo'ns  leurs  priuczfbni 
communs*   .  •     - 

Que  les  Turcsayent  flufiems  femmes  efyoufees,  qui  viuent  entr  elles  fins 
'difcordne  iahujîe  auec  les  concuUnes  ^efçL^es  femelles.  ' 
'/.':'  ..   '.      Çbagitrc'  xvii-   ".'-.''     .  ."   "''.". 

Es  Turcs  font  naturellement  moult  auariefeux,  &  ^imâe^lâ 
grandement  tirans  à  largentiauffi  leur  plus  grande  °^™n  ** 
richeiïe  &,.traffic  e^d'aiioïrdçl  argent  comptant.  ^^sne 
Iin'y.a'au.éuné  "bquhçÏÏc  daquçfter/&:'parc6.n{c^0W^M,flsl 

_         quentpoihtde  plardoyeurs:carquandilsvcndcntr;<r/ïf»r*r' 

&  achètent  quelque  chofe^Iz  payent  l'argent  coptant.Les  hom-  ftk 
mes  ont f ceconomiç & adminiffration  delà maifôn  x  rie  laifFans.    v ...  ;    .,: 
aucun  gouvernement  a  îçùrs  feniincs.  Elles^n'ontxharge  de  rien  .    - 

que  des  enfans,&viurc  en  paix,  qui  eftehofe  du  tout  contraire  à-, 
la  façon  de  faire  des  Latins,  dcfquclz  les  femmes  prennent  non  ritf        ^ 
feulement  l'adminiftration  des  biens,mais  aumU  au&orite  &"  ab-  »^w. 
foluepuiflàncc  fur  tout  le  corps',  &:  fouuent  TotitTes  maiftreiTçs: 
mais  cft  bien  îç  contraire  chez  les  Turcs>qur  font  gens  de  mefna- 
ge:car  vn  qui  aura  crois  ou  quatre  femmes  5  efpoufecs,  &  fîx,  fept- 
ou  huid  5  ou  plu  fleurs  efclaues  femelles ,  les  tiendra  toutes  en  & 
deuotio,&  les  redra^enseble  eafî  bone  panecCjqu'il  n'aura  crain- 
te .de  iaîoufie  entre  Ces  femmes  £i  cfcîaues.L'â  raifon  eneft  cuide- 
te:ear  cobie  qu'il  leur  foît  permis  fe  marier  à  quatre  femmes  à  vn 
coupjtoutcsfois  elles  font  égales  en  puiffance:&  faut  entedre  que 
tat  les  femmes  q  les  efclaues  ont  efteachetees  à  beaux  deniers  eo-  FilUsdeTw 
ptas,d  autâx  que  la  çouftume  cft  3  que  quand  vn  Tùrcra  vnebcllc  îui€- 
£Uc  à  marier>ce  luy  eft  autat  d arget  coptât  en  fa  beurfe.  Les  Biles 
apportent  point  d'argent  de  douaire  i  ne  meubles  de  la  maifori 

EFf  ijv 


4IO  TIERS     tlÛï'-DES    S  I"K  G'V  L  A. 

de  leur  per c,ains  faut  que  ceux  qui  les  veulent  au  oir,Ies  achètent 

en  baillant  grand  fommc,&  les  kabilîent,&  lepere  les  liurera  aux 

plus  ofFrans,&  les  ayant  dclïurces,Tiefe  foucira  de  les  reuoir.  Par 

ainû  il  n  y  a  pas  fi  grand  lignage  de  parenté  en  Turquie ,  comme 

en  Europe.  Et  qu'il  ne  {bit  v*ay,les  Turcs  n'ont  point  de  furnom 

qu'on  puiflè  aduôuer  venir  d'antiquité ,  Se  par  confequent  n'ont 

aucun  tiltre  de  maifon  ancienne ,  ne  mefmement  le  grand  Turc 

n'en  a  aucun /mon  dés  Otonïaris:  maïs  les  payfans  n'ont  point  de 

di&ions  pour  nommer  leurs  parens  :  car  (  comme  auons  dit  )  ilz 

changent  fouuent  de  femmes.  Parquoy  il  y  a  peu  d'amitié  entre 

lespcres&cnfans.  Ceîuy  en  Turquie  qui  fera  le  fils  d!vneclclâ- 

F&desefcU*  ue,n'àura non  pfusoV  vitupère  que  s'il  eilort  fils  dvne  des  fem- 

««.  mes  légitimes  :  Se  n'aura  pas  honte  d'eftre  appelle  fils  d'efclaue- 

car  vne  efclaue  n'eft  pas  réputée  pour  aduhere.-comme  auifi  fi  vn 

Turc  auoit  efpoufé  la  fille  du  grand  feigneur ,  Se  qu'il  fuft  aufli 

"    .    .  marié  auec  y  né  des  plus  pauurcs  filles  dVn  homme  mechanique, 

;  ton  tesfois  faudra  que  la  fille  du  mechanique  foit  compagne  à  la 

fille  dti  grand  {eighèur.  L'es" femmes  efcîaues  feruéntà  tout  cela 

que  bon  femblc  au  Turc  :  Se  fi  elles  ont  des  enfans ,  ils  tiendront 

aufli  bien  leur  nom,  comme  ceux  de  leur  femmes  efpoufees.  Par 

Femmes  des^  ^^  jcurs  enfans  ^  portent  pas  grand  amour  au  père  &  à  la  mc- 

îruresnoat  \  r^nyn.fccrc  n*ayme  non  plus  fa fœùr,  qu'il  feroit fon  voifin.  Les 

aucmaedit.  fcmmcs  cncorcs  quelles  foyent  ainfiaffemblees,  s'acordent  bien 

cnfemblc:  careftans  enfermées  es  chambres  n'ont  non  plus  de 

crcdît-Tvnc  que  l'autre ,  Se  ne  fc  méfient  de  rien  >  finon  de  ce  que 

leur  mary  leur  acomandc.Aufïi  n  eft-cepas  lacouftume  enTur- 

Turan'ont^  qUjede  dire^adame  a  comandé  cela:ou  dire,  elle  veut  qu'il  foit 

mat  ^>^faicain{l.  Encs  ne  portent  point  de  gros  clauiers  pendus  à  leur 

'  ^  ceinture  pour  acquérir  le  nom  de  bonnes  mcfnagercSjains  au  cô- 

:traïrc  ne  manient  aucunes  clefs.  Elles  ne  cdnfoment  pas  vn  quart 

d'heure  le  iour  en  faùant  tout  leur  méfnagcîcar  ii  fuffit  à  vn  Turc 

pour  toutes  vtenfiles  de  mefnage  auoir  vn  tapis  par  terre  pour 

s'afièoincar  ils  n'ot  vfage  ne  defcabelles,ne  de  felles>nc  de  bâc,ne 

de  tabIe,ou  buffet ,  Se  le  plus  fouuét  n  ot  aucû  chaflid.  Ils  Bot  en 

tout  fino  quelques  couffins  pour  s"appuièr>&'qnâd  le  foir  eft  venu 

ils  cftedet  vn  lodier  pour  paffer  la  nui&cc:&îe  lédemain  matin  ils 

pliet  le  Iodier>&  le  mettét  dcfs*vn  ais5ou  le  pédet  à  vne  perche.Et 

y  a  peu  de  gens  qui  vfent  de  linceuls  :  car  les  homes  Se  les  femmes 


OBSEUVIES     PAR     P.   SELON»  4*1 

changcntlcfoir  de  braycs  de  linge  blanc,faites  comme  chaufles  à 
la  marinCjqu'ils  portée  la  nui&,Ils  n  ont  point  accouftume  d'em- 
pefcher  les  cfcîaues  à  fourbir  leurs  cfcucîlcs.  Auflï  ne  font  ils  pas 
grand  parure  de  vahTelîeicar  il  leur  fufEt  d  auoit  vn  pot  pour  tous 
potages  ,&  pour  toutes  fouppes  vne  cfcuelle  :  Se  ne  faut  point 
rinfer  les  voirres  :  car  toute  l'affcmblce  boit  à  vn  vaiffeau  de  cuir 
ou  de  bois.  Les  hommes  ont  en  grande  recommandatiô  de  por- 
ter leurs  turbans  fort  blancs  :  toutesfois  eux  mefmcsîes  îauent 
aux  bain  gsauec  leurs  b  rayes  &  chemifès,ou  bien  les  baillent  aux 
efclaues  descftuucs  à  bïanchir.Lcs  Turcs  nediffinentpas  lavail- 
lantifè  ainiî  come  nous  :  car  en  Europe  fi  quelqu'vn  cft  toufiours 
preft  à  fe  battrc,&  fçait  tourner  les  yeux  en  la  tefte,  Se  eft  balafre, 
iurcur,&  colère,  &  a  gaigne  le  point  cTauoir  démenti  vn  autre: 
icel  uy  fera  mis  en  pcrfpeâiue  d'vn  homme  vaillan  t,ioué  homme 
de  bien.  Mais  les  Turcs  en  temps  dcpaixfe  montrent  modeftes,  ^*  j^L 
SC  pofent  les  armes  en  leurs  maifons  pour  viure  pacifiquemét,  &jeSm 
ne  voit  on  point  qu'ils  portent  leurs  cimeterres  allans  par  îaville: 
mais  quand  ils  vont  à  la  guerre ,  lors  fçauen  t  ils  mettre  couteaux 
fur  table  quand  il  eft  temps,  6c  font  apparoiftre  leur  vaillatifcfur 
leurs  ennemis  :  6c  n'orra  Ton  dire  qu'ils  fe  foyent  batusentr'eux, 
Ets'iladncnoitquervncuftbatufon  compagnon ,  pour  ccîanc 
fera  il  cftimé  vaillant.  Ils  ont  vne  couftume  moult  icante  de  pu- 
nir les  délinquants  a  coups  debafton;  qui  cft  la  vraye  façon  d'hu* 
milicr  les  fuperbes,  6c  punir  ceux  qu'on,  ncveutpastuer:&fi 
fçauent  bien  faire  iufticc  des  malraideurs  d'autre  manière  plus 
violcnte,quand  ils  l'entreprennent. 

Prouve  emdente ,  que  le  Turc  peut plw facilement  ajfèmbler  cinq  cens  milk 

hommes  en  vncamp?&  vne  armée  de  deux  cens galeres^qu "vn vautre 

Prince  cent  mille.  Chapitre         xviiï. 

>  Ofons  le  cas  que  le  Roy  ait  îcué  vn  camp  de  cent  mil 
payfàns  pour  conduire  loingen  guerre,  ou  vne  armée 
\  de  deux  cens  galercs,&  autanrdc  nauircs.  Croira  l'on 
»  pas  qu'ils  endureront  mieux  letrauail  que  ne  feront 
autant  de  Gcntûshommcs?  6c  qu  ils  ne  fe  mourront  fitoft  pour 
froidjChaud,  faim,ou  autre  accident,  que  ceux  qui  font  plus  dé- 
licats î  Sctaifànt  de  la  vaiUantife^e  sous  accordera  i'onpas,  que 

FFf  iij 


4Ï£  -  T-IERS     LÏ-VRE     DSS     SINGVJLA. 

uTwcmet  OUy  >  Qui  croira  que  le  grand  Turc  allant  en  guerre,  pui{ïèmc~ 
fix  cens  nul  ncr  vne  {i  grande  armée  ?  L'on  dit  iufques  au  nombre  de  fix  cens 
hommes  en  ^jfi  ^jjj^,  Phificurs  s'en, efmerueillent:car  oyans  celle  roui- 
f*mç<igns*  CjtlwjC9CfticqcnCjcftrc  impoâible,tantpour  la  difficulté  qui  aduiec 
à  vne  fi  grande  trouppe  eftant  en  vn  camp- ,  que  mcfmement  vn 
Rpy.yn  Empereur  d'Europe ,  font  bien  empefehez  de  nourrir  v- 
ne. armée  qui  pafTe  cinquante  miL  borrunes..Toutcsrois  cela  qu'a- 
qonsdit  du  Turc  ne  fernblera  fi  difficile  >  moyennant  qu'on  face 
cpmparaifonxic  noftre manière  de viure à laleur.  Car  la  manière 
qu'ils  tiennent viuans  en  paix,enfeigncra  que  fi  grande  aficmblee 
peut  viure  en  guerre,  &  qu'il  {bit  au  fli  facile  au  Turc  mener  vn 
camp  d'vn  million  d'hommes,  qu'à  vn  prince  QircfUen,einqua- 
te  millc^Etpour  le  faire  brief,,leur  manière  de  viurc  cft  tant  au- 
ftereen  paix,  qu  elle  nous  fernblera  cftre  vne  vrayeguerre..  "  Ce 
neantmoins  viuans  de  telle  manière,  eftiment  ne  plus  ne  moins, 
qu  anous  viurc  en  délices  :  car  ils  y  font  accouftumez  dés  leur 
ieune.aagc.  .Geuxquionr  accpuftumé  coucher  en  draps ,  defïus 
la  plume  dedens  vnlî&,  &mâger  tous  les  jours  delà  foupe  chau- 
de^ boire  du  vin  dédite  à  tous  repas,  perdroyent  incontinent 
leur  courage  s'ils  defaccouftumoyent  ce  train  là:  éc  auffi  s'ils  ne 
veoyentleurs  biens  quelquesfois  1  an ,.  pu.  s'ils  efloyeat  trois  ou 
quatre  ans-fans  voit  leurs  parens,ou  en  auoir  nouucules  Jefàfchè? 
rontd'ennuy.  Mais  toutes  ces  chofes  ne  font  rien  aux  Turcs:  car 
la  vie  qu  ils  font  en  leurs  maifons,cft  encore  plus  auftcre,&eftroi- 
cre  que  n  cft  celle  qu'ilsfont  eftans  à  la  guerre.  Le  Turc  ne  fc&ïZ 
point  des  eftrangers  en  fes  guerres ,  &:  qui  plus  eft  ne  fe  fert  finon 
de  ceux  qu'il  foudoye  &  nourriflen  temps  de  paix  :  parquoy  cha-  ^ 
cun  ltiyxftantdeuot^eftpaifibie&fnpportepatiemmentlestra.-  " 
uauxdcla  guerre,encor  mieux  que  ne  fouloyent  faire  lés  légion- 
naires &:  foldats  Romains.. Parquoy  le  grand  Turc  au  contraire 
des  princes  Chreïliens  gaigne  beaucoup  lors  qu'il  fait  la  guerre, 
jKHircequ'il  vend  .lesprouifions.  Vn  foldat  Turc  ne  fe  faindra 
point  d  acheter  vu'  cheual  cinquante  efeus ,  &  neuft  il  que  cela 
vaillant  :  mais  il  fait  eftat  d'en  auoir  pour  fa  vic:car  les  Turcs  ont 
accoufluinéde  garde*  vn  cheual  vingt  ou  vingt  &  cinqans.Tanc 
.eux  quckurs  cheuaux  ne  couchent  que  fur  la  dure.Lcs  cheuaux- 
ne  mangent  iamais  ne  en  mangeoire ,  ne  en  râtelier ,  non  plus  en 
le^s.m^fonsqualaguerrc,  &nefeçpuciient  iamais  quefuda. 


OBSERVEES"    PAR     P.    BEL  ON»  41$ 

•**•«•  fons-caillcLa  richefle  des  foîdats  Turcs  ne  cofifte  en  terre, Les  "M"** 
Ticen maifons,maiscn^rgecçoptant:carsilsauoyetaçhetequel. ^    £  ^ 
ques  terresen  loir  vie ,  ce  feroit  pour  le  grand  Turc  après  leur  m  c^mt 
jnoTC.  Parquoy  ils  ne  bâftinentguercs  :-te  queîquepart  qu'ils  ail-  ^jy  ^ 
lcnc ,  ils  portent  le  mefme  potdecuiifre  dont  ils  fc  feruoyent  en  dure,  hyun 
temps  de  paix,  &  la  mcfeic  efcuclîc  creufe  ou  ils  mangeoyent:  er  éfté. 
aufH  toutes  leurs  vtenfilcs  qu  ils  auoyent  en  temps  de  pai£ ,  leur 
"feruent  en  guerre  :'te  ne  regrettent  point  leurs  biens:  car  ils  por- 
tent tout  quant  te  eux  :  te  ne  vont  iamais  fans  leur  fufii ,  foyent  à 
4eurmaifon,ouàla  guerre.  Leurbrcuuagen'cflquede  leau,  te  Twa  ^^ 
mandent  communément  des  aulx  te  oignons.  Que  fçauroyent  dehau. 
ils  donc  airoir pire^la  guerre  qu  en  leurs  maifons^  Somme  qu'ils 
<jnt  autant dauatagè fur  nous  au  meftierdela  guerre  dcftreplus 
ruftiqucs&paifans,  que  nous  auons  dauantage  fur  eux  en  paix 
*d  eftremieuxtraictez  ,  te  plus  nobles  qu  eux.  Et  pource  que  na- 
ture leur  a  donné  par  douaire  d'eftre  champêtres  dés  leur  ieune 
aagc3tout  ainfi  félon  leur  couftume  font  ils  mieux  apris  4  fc  %a- 
Cjueir  bien  camper  deflous  les  tentes  te  pauillons>  Et  pour  autant  turcs  gm 
qu'iîsont  de  la  toiilc  de  cotton  fort  legierc  te  douce  5iis  font  lemsruftftes. 
pauillons  &:  cordages  bcaucoupplusaifezqucles*noftres  de  lin  Grand  ifd* 
*ou  dechanurc.  Les  cordes  de  cotton  font  délicates,  molles  te  le- «g?  de  cotton 
gicrcs  ,  qui  iamais  ne  feroidiuentpourauoirefté  mouillées,  au  w  ^wf*f«- 
contraire  de  ccHesdes  pauiîlons  de  noftrc  £uropc,mal  feantes  te 
propres  ,  te  qui  s'cnt-orallentéfoct  àla^pluyc  -,  qu'à  grand  peine 
les  peut  on  manier.  Encor  que  les  Turcs  n  ayent  aucun  foupçon 
de  guerre^  que  les  chafteaux  foyent  en  pays  de  grande  feureré, 
û  eft-ce  qu'ils  y  font  la  garde^omme  s'il  y  auoit  guerre.  Nqus  les  rdourlm 
oyions  foir  te  matin  fonnâs les  tabourins,  te  faifans  vnc  merueil-  deTwrfue. 
4eefe  mélodie,  accordans  enfèmbîeauec  les  hauts  bois.  Us  ont 
deiïx  fortesde  tabourins  -,-  dont  y  en  a  des  petits  ,  quife  pcuuent 
^portera  cheual,&  qui  ncfont  enfoncez  que  d'vnbour.  Les  au- 
tres font  plus  grands  -,  enfoncez  par  les  deux  bouts  z  mais  ils 
*n'v{ent  pas  decourts  baftons  à  les  batre  comme  nous  faifons  :  te 
•auffi  ne  les  portent  pédus  au  col,  ains  en  les  bâtant  font  appuyez 
-contre  terre,  &  en  les  bâtant  frappent  les  deux  bouts ,  à  dextre 
"-te  à  feneftre  :  Car  de  la  main  dextre  ils  tiennent  vn  bafton 
-courbe  comme  camus  en  façon  de  billart,frappans!e£bnsdu 
-tabourra  à  dextre  ,  te  en  l'autre  main  fcncûre  tiennent  y&c 
.  •  --  FFf   iiij 


414  TÏER.S      LIVRE     M  S      &INGVLÀ. 

vergetcedclieequi  redouble  plus  foiruent  que  la  main  dextre.  Le 

7fJ°iïrm     tabourin  qui  eft  double  cfl  moult  facile  àporter  àcheuai,dontle 

Autre  maJ^  c^  d'erain,.&  Y  cn  a  tcmfiours  YD  plus  petit  que  l'autre  :  8c  faut 

nicresde  u*  <IUC  *c  Tabourineur  foie  courbé  contre  terre  en  les  batant,ou  bie 

hourins.       qu  H  les  aie  appuyez  quelque  part.  La  garde  quils  font  la  nuiâv 

Ug*rde<]uent&  pas  faite  à  clochettes^comme  nous  faifons  t  mais  ils  s'entre- 

fotlesTurcs^  parlent  crians&refpondansrvn  à  1  autre  à  haute  voix  -.laquelle 

chofè  auions  auparauant  obferuee  k  Rhodes.  Les  Arabes  ont 

appris  les  Turcs  à Tonnerres  hauts  bois  auccles  tabourins^  qui 

eft  moult  bonne  manière  tant  en  temps  de  guerre  que  de  paix.  Il 

n'y  a  Sangiac  qui  ne  loir  tenu  d*auoir  des  loueurs  de  tels  hauts 

bois ,  &  auHl  des  tabourins,  &:  principalement  là  ou  il  y  a  cha- 

fbaux  à  garder.  Les  hauts  bois  font  courts,  mais  larges  par  bas,&: 

foncvnbruiâ:  moult  efclatant.  llsfe  pcuuent  facilement  porter 

à  cheual,&  accorder  auec  les  deux  efpeccs  de  tabouxins.  Les  fol- 

dats  Turcs  portent  ordinairement  vnc  petite  coignee  pendue  à 

la  ccinture:auffi  eft-cc  vne  couftume  à  tous  Turcs ,  tat  riches  que 

pauures,d*enauoirvne,  tant  en  paix  comme  en  guerre,  qui  leur 

fert  en  deux- façons  dyne  c'eft ,  que  tvn  des  codez  de  k  coignee 

ou  hachette  tEenche,&  l'autre  eofbe eft  en  façon  de  marteau  .Dot 

ils  frappent  &  fichent  les  paux  de  leurs  tentes  en  terre.'  Le  coflé 

qui  taille,cbupe  le  bois  à.faire  les  piçqucs  >  &  pour  faire  le  feu  à  la 

campagne..  Celle  manière  de  hachette  eftmoukiolimentfaitCj 

dont  en  auons  bien :  voulu  eacfcrite  la  manière. 

jyvnepetiu  hachette pxopre  à  tout  ^ujkge-^  tant  à  la  guerre  comme  en  paix^ 
commune  aux  Turcs.»  Chapitre      X  1  X. 

tEvx  qu  i  font  telles  hachettes  cn  Turquie,  prennent 

|  vnc  niaûe  de  fer  pefànt  cnuiron  vnc  îiure  &  demie,, 

j  puis  la  percent  par  le  milieu  auec  vn  gros  poinffon  de 

3.kr.  L'vn  des  eoflez  de  la  hachette  pprte  yne  greffe  te- 

fie  de  marteau,&  l'autre  collé  tranche  JEt  faut  en  la  perçant  qu'il* 

en  laiffent  au  tour  du  poinffô  celle  part  ou  1  on  fera  ïe  percuis  qui 

empoignecale  mache,quafî  à  la  manière  d*vne  bocflé.  Les  poinf- 

fbns  font  de  diuerfes  façons.  Lesvfcsibnt  ronds,  les  autsesfont 

quarrez.  Barquoy  le  permis  de  la  hache  prend  la  forme  du  poinf- 

&n,&L  fimuiccei3&ircment  qu'il  eatre  par  dehors  en  cftf  ccif&n r,* 


OBSERVEE5.    FAR     F.     «ELOtf,  '415- 

fin  quclc  manche  entre  au  fïï  par  le  dehors.  Il  y  a  pluucursbouti-  J- 

quc&dc  Tourneurs  en  Conftantinopie ,  qui  ne  font  autre  chofe  <^k*&*. 
que  tourner  lebois  apporté  par  mer  pour  faire  lesmanches  :  car  'T'   .,r 
les  nauircs  qui  retournent  de  la  mer  Maieur,  viennent  fouucnt  Men<rrefa 
chargées  de  bois  d'Afphendannos,  c  cfi  à  dire  Erablede  monta-  jfm  ô 
.gnc,dedié  à-telles  emmanchures:. comme  aufïi  du  bois  decœr-  Tourneurs 
aailier3q^i  de  duxté  furpafïê tous  autres  bois.  L'onvoit  telle  fois  de  bois  en 
nauirearriuantdupaysde  Mengtelie  à  Conftantindpic,  toute  nvfû* 
chargée  de  bois  d>If,rouge&  blanc;  car  d'autant  que  les  Turcs 
ne  fefèruent  point  d  arcs  de  bois,  ils  ne  font  difficulté  de  mettre 
1  efeorce  des  Ifs  aucc  la  partiedu  cceur  pour  faire  de  tels  iȉcbe& 
nousentcndonsledchorsquiefl: blanc,  ^iededensquieftroiî-     ■  .    «  : 
ge.  Les  tourneurs  de  Turquie  befongnent  cftansaffis,  &:  n'ont 
point  de  perche  pendante  à  tourner  leur  bois ,  mais  aucc  vn  long 
archet  tenu  de-la  main  gauche,  £bnt  tourner  le  bois*^  delà  main 
dextre  tiennent  le  fer  qu'ils  renforcent  &  rafferminent  auecle 
pied,  prenans  le  fer  entre  les  deux  orteils ,  qu'ils  meinent  çà  &  là 
pourfairel*auuragc,qu,ils  fe  font  pfppofé  faire. 

J>esTuycs^quhetiennmtplt^ei^scbûpsdc^ti^uitS» 
Chapitre'     x  x. 

>  L  y  a  encor  bcaucoupde  chofèsentre  îesTurcsquifè; 
*  refentent  grandement  de  fexifiqyité  :  à.  l'expérience  £   n  n  ^ 
jdcquoy  voulons  amener  vue  façon  de  fc  brufler  les  rJ^  -     r 
j  membres  que  les  Turcs  font  eux  mcfmes  fans-  le  coiv- 
fcil  du  médecin.  Oefî,  que  quand  il  leur  furuient  quelque  deSu- 
xion,ou  mal  de  tefte,ou  fur  autre  partie  du  corps,  ilsbruflent  ice- 
hiy  endroid  auqc  de  l'eimorcc ,  ou  de  drapeau.  Mil  fixons  ans  ai 
gaffez  que  les-Grccs  en-  ont  fait  mention,; nommans  telle  bruflu-   ?. 
re,vftion  Arabique  :  &  eft  fi  bien  continuée  chez  les  Turcs  Se  A-  ^W 
rabes,  que  pluûeurs  ont  le  front  &c  les  temples  &  autres  endroits-  . 

des  membres  ticatrifezt  de  telle  brufluscs»  Nous  auons  trosué        " 
telle  manière  de  brufîure  auoir  moule  grande  verto..  Car  efrâos  à* 
Saîonichi  ville  de  Macédoine,  en  reifmes  rexpcricncc  fur  vne         ]  "  ' 
Iuifue,quc  guerifmes  d  vn  mal  de  tc&c,qu  iluy  auoit  duré  plus  de- 
ux ans,  ayant  pris  le  remède  que  Diofcoridc  faifoit  en  guerU&nc         ^     *  " 
lafdauaue:  feauoir  c^lây-mettant  des croecs  de  efeeure  ardanecs 

GGg 


■$l6  TIES.S    LIVS.E     Dï^     SINGVLA. 

Sieâec'me    cn  celle  foffe  qu'on  voit  à  la  racine  du  poulcc  en  la  ioin&urc  da 

"fà»gùenr  bras: &futaiïczîny enanairrais. cinq  pourla  guérir.  Les  Turcs 

Tmgriefmd  £ont  ^ica  autrcnj5£ j  car  au  mal  4e  tefte  ou  en  autre  partie  de  leurs 

^  *       corps ,  ils  prennent  de  la  tqille  de  coton  entortillée  ,  à  la  largeur 

d'vnfoudjquaûdclagroûcurd'vnenoix:  ouen défaut  de  toillc, 

prennentdc  i£fmorcedeharq.uebouze  ,.puis,r.cnrlamment  Se  la 

mettent  deiTus  Iciîeti  ou  ils  fentent  Mouleur ,  &  la  l.aùTent  bruk 

-    .      1er  iufqucs  à  tant  quelle  s'eftainde  d'elle  mefme,&  qu'elle  ait  fait 

cendre.. Ils  ontfigrande  patience  d  endurer  la  brufiure^ue  mef- 

memc^tootJa-conûance^ 

âfidcffasLÎachai^^d'çlle mçfme  fans.y  rien  faire. foi£rç&0*&e. 

Tuks  h*    Il&ne  mettent  neri  pour  cpnfolidçr  la  -bhïfîure:  finon  yji  peude 

^ardeux  à  cotton  pat. delïus  la  trace.  Les  xurçs  entourés  fortunes  pronon- 

toHiferils.    CCDC çemot0  Ajauata^ejï^di^Dieu  aidera.  Parquoy eftimâs 

Icutforwne^ç^çftipçcjfpntha^açdcu^  à  tous  périls  fur mex/ut 

Xcrie^autCûrjabats.:.  ;.  - .;-/.;.-.,.  :.  .    .      -:  -'  ::        '-"-    --     - 

V  es  Religieux  de  Turquie..         Chapitre    xxi. 

£  S/+Trirc^î3nt quelque  manière  de  gçnts  en.afcux,no- 

iriez  Demis,  qu'ils 'eflimcnt  du  tout  innocents  ,  Se 

pour  religieux ,  lefquels  ils  nomment  dVn  nom  qui 

^^^^^  _  approche  bien  près  des  Druides,  c'eft  à  fçauoïr  les  an- 

çiens,phiiofpphe;s.Grcçs.qui eûoyent  colonies. des  Atheniés qui 

The**.       fcpartirent;ÇtePhoçaîapour{c  venir  tenir  à  Marfeille,  laquelle 

ils  édifièrent.  Ces  Deruis  font  communément  tous  nudstanten 

hiuer  comme  en  efté,&:  ont  les  bras  Se  la  poiefrinc  pleine  de  cica- 

triçeobiîques&4ctraucrs,  qu  ils  fcfpnt  aucc  leurs  cou ftcaux. 

Mais  ontç^rdçnfc  coupant  de  faire  la  pîaye  plus  fouucntca 

%  .         îongqu'en  trauers; caries  mufclcscn font  moins  offcncez.Ils  ne 

f^s*^   viuent  iînon  des  aumofncs  que  les  Turcs  leur  donnent.  L'opinio 

pifàr         du  peuple  en  lendroid  de  tels  fols  ,  neft  moderne  :  car  mefme- 

"  ment  Platon  parlant  de  telles  gens  ,:attri.buqit  icçlje  folie  à y  ne 

yatiâttiL     eipecç  de  manie  ou  defurcur,difant  que  cela.prou;ict:d  vnecita-; 

*mrs;      .„  fîs,c'cft  à  dire  qui  faifoit  les  imaginations  qui  leur  venoyent  diui- 

ratictnotiù  nemenc  cn  prophétie  comme  aux  vaticinatcurs.  Ceft  ce  que  les 

fttmmie    ^nt  j^j  parlâns  de  l'imagination  ont  attribué  à  quelque  diuini- 

'*rj*rm'    t^commc  aufla  ont4it  des^  Sybiiics,  Cçftç;opinion  çft ■  auffi  riçv 


Vmitf. 


. ?.  4»-b  s  s ivns ;  p:à  s; '  &;  b  rto  w.  r  417 

:  5ocrarcs,qaidifoit  que  les  imaginations  des  variefnateurs  vc- 
jinyentdiuinement  par  manie  ou  fureur.  De  ce  aduient  que  les 
abufeursqui contrefont le&. rnfcnfez,  ont  gaigne le  nom  de  pro- 
phètes en  Turquie,  v  &-  fën*  cfriincz:  innocents  y-&  remis  pour 
'  vrays  religieux.  Ils  contrefont  îcsfols,,  &fe  coupent  &:  entartrer 
la  peau  à  leur  efeient ,  tant  de  la  poictrine  que  par  tous  les  bras:5£ 
pour  ce  qu'ils  ne  mettent  vnguent  dcfTus ,  la  cicatrice  demeure 
-  enflée ,  groïFe  comme  le  petit.doigr.  L'on  envoirra  pîuiîeurs  fi 
fort  déchiquetez  de  telles  lignes,,  que  cefkgrarid  xas  de  les  voir. 
Nous  ne  fçauons  qnellefurcur  prophétique  >  ou  cfpccc  dema- 
in e  fait  qu'ils  fedecouppentain  fi  la  peau,.  &:  fe  brufient  les  tem- 
ples. Quant  ànous,  efHmons  qu'ils  neifont  pas  fàges.U  y  a  de  tel- 
le forte  de gensmouit fîns'frctez,. qui  amaiSàithcaucoup  d'arget 
pour  faire  le  voyage  de  laMeque ,  te  aller  oagiit  Mahomet  :  car 
quand  ils  en  font  retournez  lors  fonr  nouxriz  entre  les  Turcs  cô* 
me  petits  Cadets.  L'enfcignc  qu'ils  portent  pour  monftrcr  qu'ils   ,   r. 
font  religieux  de  Mahomet ,  eft  .vne  peau  de  brebis  fur  leurs  ef-  ^.  /^.^ 
pâules  :  te  ne  portent  autre  veftement  fur  eux  -fin  on  vne  fexùc  der^uk. 
peau  de  mouton  ou  de  brebis ,  te  quelque  choie  deuant  leurs 
parties  honteufes.  Il  y  aplufieurs  de  tels  arîe&ez  en  diuers  lieux 
de  Turquie  „  comme  à  Conâantinoplc,  Damas;,  te  3U^  Caire, 
qu'on  voit  enrertez  dedens  dn.fourmcnt ,  t>udu  mil,,  qui  font  Z&jneux 
tous  nuds ,  te  n'en .partent  point  le  iour  :  ilsierv.eautrçotieansjdr  eœfr£v  - 
:Coite  te  a  autre ,  te  tiennent  des  proposa  entant  pour  rairc  rtre, 
.difans  chofes  impôuibles^outes  mal  à  propps,tour  ainû  comme 
^.uan:dles.enfansparkn£ksvns.aux-aucr£5»,I}s.rpnt  en  quelque,  ..:;     .. 
petite  maifonnette>&:  tout  le  tout  n'en  bougeront  \  te 'les  pafi.2ns.        :  ;  - 
qui  panent  par  labeur  iettenc  quelque  chofe  pour  viurc. 

I&miwierecU garder U nége&.hgUcetoutlfâ  commefoxt:  .  . 
:  .7.  .  .         lesTmcs,,  ..l.-.z..:  JCbjpàxez:  XX-H*;.;;.- -..*:..- . 


rffucSSjiX  S  tans  l'hyuer.en  Myfic  te.cn  Papbîagonie  ,  oWêr-  pour  garder 
jS  il!!?! ■aaûncs cn£Ju£eurs  lieux eommeils  ont  couftumede  l*  n%^ 
ÏÏG  -I^Tg* garder. la  sieige  te  h,..glzcc  qu'ils; vendent,  eu  dké 
•&ra^^>otir  rcfraifchix  les  brçuuages33piiH»£Z  fcbrbetsdLeur 
couitume  e(l  de  ne  boire  pointdc  vùv.parquoy  il  y  a  quelques 
.".  GCg    ij,   :... 


~4lS  TfcE^*    LJVJLSl    DES    SïNGViÀ.  '.    « 

Turcs  qui  ne  vivent  d'autre  meftier  en  cfté,que  de  faire  vnc  forte  * 
de  bteuuage  dotix,appellé  Cherbet.  Car  le.  vin  y  cft  nommé  Se- 
s"f'        rap.  Il  y  a  boutiques  a  cecxprcûes.Àurliy  a  diuerfes  manières  de 
Sorbet.  Les  vus  font  faits  de  figues,  les  autres  de  prunes  &c  de  poi- 
res}lcsLautres  d'abricots  Scàc  raifins ,  les  autres  de  miel  :  &:.  guand 
les  pafians,  comme  aufïi  les  liabitans  des  villes  ont  grand  forf  en 
cfté ,  ils  en  enuoyent  acheter  :  &  le  forbetiery  mcflc  de  la  neige 
pour  le  refroidir,ou  de  la  glace  :  aufïi  nelloit  cela,il  n  y  auroit  au- 
cun  plaifir  à  en  boire  :  car  vne  décoction  fai&c  en  efté ,  ne  fer  oit 
froid  au>c   ^mais  trouuce  froide  (ans  cela.  Il  ne  courte  qu'vnc  maille  pour 
UtJgL**   cn  boire  vpe  fois  fur  le  lieu  ja  refroidi  de  la  neige  qu'ils  y  ont  mef- 
lé»  En  lefaûant  ils  ont  double  gaing:  car  fi  bien  ils  ont  voulu  des 
ixgues,des  arrrtelines^es  prunçs,des  pefches&: autres  tels  frui&s, 
ils  ne  les  iettént  pas  pour  cela:  car  ils  les  vendent  à  part,  &  la  dé- 
coction à  part.  Il  y  a  tel  Grec,  ou  Arménien  au  pays  de  Natolic 
muets  de    ^  cnuoyera  la  charge  de  douze  chameaux  àcs  frui&s  de  Ces  ver- 
N**    '      giersvcndreàConltantiuopleouautresvillesliabiteesdeTurcs, 
expreflèment  dedic^à  faire  tels  breauages.  Nous  fçauons  qu'on 
cn  apporte  depuis  la  ville  d'Hcraclée  du  mont  Tau  rus ,  iufques  à 
Conftantinople:car  les  frui&s  cucilliz  en  celle  plaine  aux  racines 
du  mont ,  font  merucilleufcment  propres  pour  faire  lefdits  breu- 
■  y      .^  uages,  La  manière  qu  ontaccouftumé  les  Turcs  cn  coniêruant  la 
^T™*"  neige,  cft  telle.  Apres  qu'il  a  bien  neigea:  glacé, lors  quelevent 
pour  TM   &c  Bore,autremcnt  nommé  vent  de  Bifc,c  eft  à  fçauoir  celuy  qui 
rJcsgtrdet  vientd'entreie  Grec&  le  Septentrion  (quieft  le  plus  froid  vent 
h  new  tout  qui  foit)  eft  en  ùl  grande  vigueur ,  les  Turcs  recueillent  de  la  nci- 
fcftl         ge,cn  cmpliflâns  certaines  maifons  faites  en  voûte ,  ou  bié  en  ter- 
rafiè  qu'ils  auront  expreffement  faites  à  cela  cn  vn  lieu  moins  mc- 
ridional,comme  pourroit  cftre  en  bas  lieu,dcrriere  quelque  haut 
mur}ou  à  l'abri  d'yne  colline  :&c  faut  fairede  la  neige  tout  ainfi 
comme  qui  voudroit  faire  va  mur  de  mauonnefie ,  y  mettant  de 
laglaceparmy.  Cela  demeurera  plus  de  deux  années  fans  fe  fon- 
dre. Ceftc  façon  cft  communément  obfcruce  par  tout  le  pays  de 
Turquie.  Il  eft  certainque  cela  fc  pourroit  auffi  bien  faire  cn  F  ra- 
ce;: car  nousauons  veu  phifieurs  régions  en  climat  plus  chaud 
que  celuy  de  France,  onon  la  garde  tout  lcftc.  Une  fut  ôneque 
les  ancics  Afiatiqucs  n'ayet  gardé  la  neige  pour  l'cfté  :  &:  cn  outre 
vouions  maintenir  qu  elle  eftoit  auflien  tel  vfagcà  Rome  :  qui  fc 


.     O  B  S  E  R  V  EES     f  A tL     P«    B  El  6  3&  419 

peut  prouucr  par  plusieurs  lieux  de  Galien ,  Se  mefmcmcnt  en  la 
préface  de  Ton  luire  intitulé ,  La  méthode  de  medeciner ,  par  le-  ^v? 
quel  ilappertquenronxempslaneigecltoitcnaufri  grand  vfage  ^-J^ 
àRomejqu'elleeftmaintcnantenTurquic.C/eflaunlcedcquoy^^^^ 
Pline  fc  plaint ,  voyant  la fnandife  des  Empereurs  dcfbn  temps, garderU 
qui  correfpond  à  ce  qu'en  dit  Galien  :  Suétone  au  ffi  le  dit,  ou  ï\  neige. 
parlede  Nero.  J&eKpvodigte  ventris  (  dit  Çline^  hi  niuesr^  tili  gladem 
■potmt,mnùrnontium meôàluputemguî<e^vertuntt  Serttcttw algor<efli- 
èus  ïexçogiidtufquè  vtatiems  menfihm  nix  d<ûxt.  T>ecûqumt  ali]  (Ufuxs^ 
*nox&*nlashyem<tnt»  Auffi  dit  en  autre  paiVageiNeroni?  prmeipis  in- 
uentuMeJldecoqucre^uam,vùr6quedemijptm  innitte-refrigerarcju  vo- 
btbtm  frhorU  eontingit  fmè'vitiis  nms.Lz  neigedont  le  grand  Turc  M*nt  Hor= 
-y  Ce  en  fon  ferai! ,  luy  eftant  en  Con'ftanrinopie  5  eu:  apportée  du  minium. 
inontHorminiumjOudumontOlympercarils'eft  perfuadé  que  wàgepour 
celle  qu'on  gardées  loges  autour  de  Cocftantinopie,  neft  pas  fi  ^grand 
faine  que  ccllc-de  la  montagne  :  &  veut  d'auantage  quelle  foit  de   ™c'    . 
Tannée  precedente:&  de  &it  les  cfclaues  vont  fut  le  mont  en  teps  *"'*** 

cTe(té,&  dcfcen<lent  grande  quanrité  de  neige  ,  laquelle  ils  laif- 
iênt  là  pour  l'année  dapres ,  laquelle  on  va  quérir  par  mer.  Il  y  a 
-deux  fuftes  qui  fe  partent  toutes  les  fepmaines  de  Conûantino- 
ple  pour  mener  des  paffagersen  Bourfè',  qui  fonteonduictes  par 
quelques  Ianiuerots:S£  efbns  à  la  Montanee,  ou  dcfcencknt  les 
pairagcrSjcllcs  font  chargées  de  neige  pour  le  retourdaqucllc  ion 
defeend  de  la  prochaine  montagne  auec  les  eheuaux,  &  quâd  el- 
le arriueàConflantinopîe, on  la  porte  au  Scrrail  :  car  le  grand 
Turcenvfc  àrerrokiirfon  forbct.Les  Emba^deèrs  de^Frar*cc3  Emldfa* 
d'Efpaigne,Vcnife,  Ragoufc  ,  Florence-  Chio ,  Tranfiluanie^  datnenTur* 
Hongrie,  qui  font  plus  curieux  de  leur  breuuage  que  ne  font  les  îiue- 
Turcs ,  ne  veulent  pas  vfer  de  la  neige  mcflee  dedens  le  vin  ,.  ains 
mettent  tremper  le  vin  dedens  de  l'eau  que  la  neige  aura  refroidi, 
&  parce  point  ilz  bcuuent  ftaiz  tout  l'efté  fans  auoir  mis  la  neige 
ne  la  glace  en  leur  cftomach .  Vn  lopin  de  glace  de  la  groiTcur  du 
poing, refroidira  demie  tinee  d'eau  tout  en  vn  inftant,&  ne  cou- 
itéra  pas  vn  afprc, 

G  G  g  iij 


42Q  TJ2&S  :   I<ÎV&B.    'D.-3CS-   SXNG.yï-À.- 

JuAmmien  de febranditlev m  Turquie* 

,J>affiesÀei  •  -         .-..»•:«."  '  • -' -  r        -^    •    '■"*-•     -'-'•-'-     *•  '-  v    • 

r^r«.         ^¥f^!^  ^s  Turcs  font  belles  reftès;  as  temps dé  îeursPàl- 
Brandilieure  ^  fP§^2&  ques^mais  n'ont  choies  plus  exq.nife  que  de  {ebra- 
des  Turcs,     ^'kj^^ç  diller.  ;Qy.i  eft  çhofc^nërueilkttCejtant  iîz  fç  cflan- 
■  WÊ  ^^S^^^— ^-—^  ita^.iamaiiÀé^.e.ft-  &e&.&oi\ueik: 
|^^^^^  car  iîz  fcorandiïrcmtous  feuis».  Ils  font  vaçipoufe 
haute  potence,en  manière  jd-Vn  gibet  auec  deux  pilliers,à  laquel- 
.  le  iîz  pendent  deux  cordes  disantes  çnuiron  de  deux.  pieçUÎ'vne 
de  Fa  u  t  re,  at  tachées  à  deuxanneaux  de  bois ^  àiï  H  que-  ks  cordes 
obéi  fient  mieux  au  brandilleur.  tes:4e.uic.t>Qtrts  <i-es  cordes  d'a- 
bas  font  attachées  a  vne  planche  faite  comme y  ne  petite  feileà-fe 
fèoir,quiçft  attachée  par  les"  quatre  coings  ,  deûîis  laquelle  le 
brandilieur-en:  debout  :.&  en  fc  repliant  de  foy.mefm.e  fe  donne 
'•  -    --'  '  -  tel  branle  fans  que  nul  aiurçlepouiîç/qmtvaaufïi  haut  ou  plus 
"  '  *  jque  la  potenee.  Il  eft  debout  fur  la  planche,  &/e#ent  <ks  àcux 
mains  aux  cqrdcsqu'il  a,àco£té  de  luy.La  chofe  eft  quaii  incroya- 
ble, tant  iîz  fe  lancent  haut  en  aiiant ,  Se  en  arrière  :  car  la  potejv? 
-ce  a>bier>  douze  toifes  de  hauteur  :  &  quand-lè  brandilleur eâlaf. 
*femtm  ë'4>&c  ^b^-c  >1}  fë  afficddcffiis  U^Iânchc.,  Iîz  ont  bien  dau> 
i enfant*.  ^^  manières  de  bVandiilages  pour  lcspctits enfans  >  qui cri cho- 
fe mouic  puérile ,  mais  fantaftique 

•  ,;    ~   .pifiinÊiifi&ithhûY^ 

»'.-••'■      -\:  ::•."•-    •.."'.■.:  I"-^^^   'XXIIH»,;     .'  '  :S 

^   r    ^      €fc53?^3S*  Eux  d-entre  les  Turcs  oui  portent  k  Turban  verq\, 

dehononlle  W^®t  iP^f^rfgr^dACÇ^ûtanon  entrejes  autres:4seltii- 

Aiixrlrcî.    % ÈÉi^Éli^^ éçj?lus gçâde rçl igion  :auiu n'eft Jtiçijçc-pp ■  Tpr- 

^S^@^^  quie  de  porter  les  chauilès  on  habillcracns.vcrdilis 

J^ on  t  gardé  la  couleur  verde  pour  les  plus  nobles  de 

Txrmtsde    ]c-r  p.yS  ,  Voulans  %ni£er  par  cela  qu'iîz  font  de  la  ligneede 

Mtkmt.    Mahomec.Ccux  qui  ont  cité  deux  ou  trois  fois  à  kMcque/ofcnc 

bien  s*afFùbien-dn  Tprban  verd  ,  donc  ik  font  plus  honorez  des 

autres.  Iîz  ont  grande  cérémonie  à  porter  la  barbe ,  ou  à  ne  la 

|orter  pas.Çar  v&vieilhomme  la  portera  en  figne  de  fageflk  Les 


eSSERVB&S    PAR    **  ■  BÊLÔN;  4*£ 

ïctmes  portent  des  mouftaches  longues ,  comme  barbeaux  :  car 
ilznc  trouu  etoyent.  pasbonne  icancaiw  icune~  homme  de  por-^  Mouftaches 
tçrbarbe.CertcnQKaciteef^  ^  *** 

Arabes;  mais  iiz  ont  dit  qu'ik  poixoyenclesxhcu^xlongsycc 
eue  ne  fondes  Turcs» 

■^écou^Yementide phtmes^dont des Turcs :fcpare$t  -        '<"■■•■ 
.    .  .        Chdfàirt     XXV-.-  -   •'■*.:.  ,     .  : 

»  Es  pompeufes  brancries  &  folies  oiten  tarions  àcs  Gc- 
P  niffaires  delà  Court  du  Turc,  font  cftraugcs,  êc'^Tin^0J}mtati<m 
i jcipalemcnt-ties. £auori£èz  de  fa pcrfonne.^Car ilz sa—de; Turcs. 
jS  couftrcntaucc  desplumes  d'Autruche^,  £&àcs  panna-  %bïnt*:& 
<;hes  dclbifèan  nommé  Rhintaces,qui  font  en  vnemafïède  tre£ 
belles  plumes  de  lagroffeur.dVn  chapon,  ÔC-  procèdent  toutes  *       -  '  '- 
d!yri  petit  corps  ou.  il  "n'y.  a^lcukmentqnc  ia.pcau •-:  caT  ics  Arabes:* 
qui  les  vendent  leur  oiicntl£châir;Q^q^snicaâccnes  le  nom-: 
mçnt  Âpus ,  mais  nous  penfons  que  ce  foit  le  Phcenix ,  comme  :^w 
ferons  voie  plusàpîain  au  Hure  des  oifeaux.  Ces  Turcs  eftansp^aw*. 
a^nfi.&ardczdepluracs,,  rc^embkntpxoprcmentà^n  S. Michel, 
en  peiniurc,  Or.nc&nxilzpifâ'Ordinau-emciiraeriD&ezieû  ce&c~ 
parure ,  mais  feulement:  quand  le  grand  Turc  .va en  guerre ,  ou 
quand  iiz  font  en  campagneen  &  compagnies  Hz  onrdes  gran^- 
4es^lksJ^tesde:irc{bcllespluxncs  attachecs.ddrusJjcars  dpau-». 
lcSjCpmmeîQniiceuxqui.iouentlcs  Angcsides  mocalirx^n£o^ 
i*ope.Il faut fçauoir ^queies  Geni/Iàires ont acoaftumédeicunct  - .-.  ■/  •  ■«  ■'. 
£b  porter  vn  haut  diadème  fur  leur  tefte/ate  comme  le  chaperon 
d'vne  darapifclic ,  excepté  qu  il  cit  haut.cncruché ,  &  kur  prend 
tout  autour,  de  la  te&c,  Iteyfonc  teaitsme  longue  verge  :de  fer  ^j£^  'ÔS* 
d'Wpisd  &  demy  ;  fur Jaqttdléefc  ataché  sn xercie  .Lecerclc a:  v<w 
4.e  largeur  en  circonférence  au tâ&t  quc-po«rroit.cnxo«rncrlc. 
pouke  U  le  maùtre  doigt  /autour  duquel  Hz  portent  âcs  plumes  patuches  &* 
&c  plumaite>&  du  milieu  dccc:  ccrcieibrrvn  autre long  panache  fUmesda . 
faitdeteiieA^ 

terre  3  ^Çrcû^aj; âersiece.lejdQ^,  râ\t$uehaac à  rien?.*»*  fen  ori- 
gine commencerait  fpmrncç  de  la  % é&e.£§me  qjL*ç  voyant  telzhô- 
mes  ainiî  açouftrç?  &  deiguifc^ion.  d^oiç.quc  ce  fon.t.Gcans,  tar> 
il^.fon^.cipouucntablcs.  Car  le  cercle  qui  monte  ti  haut  au  def- 

GG^  iiij 


Ç&Z  TIERS      LIT  M     DES     SItfGVLJU 

fus  de  leur  tefte ,  ne  tient  à  rien  qu  aTacouftrement  de  tcfte,fans. 
cftre  bridé.  Chaque  Gcn  ifêiire  ouauxre  Turc  na  pas  loy  de  por*i 
ter  des  plumes  :  car  il  n'y  aque  ceux  qui  ont;  cfprouué  leur  verni 
en  tuant  les  ennemis  ala  guerre ,  qui  en  puiffent  iuftemécporter^ 
p«»i%  de  Celuy  qui  parte  beaucoup  de  plumes  ,  demonftre  par  tel  figne 
porter  des     qu'il  atué  beaucoup  de  gens:  &c  ecluy  dentr'eux  qui  nefe  peut 
i^wwav       vanter  dauoiç  tué  quelqii'vnjnà  raifojinable  periniûion  de  por- 
ter des  plumes.  Lé  foldat  Turc  allant  en  guerre^né  mené  aucun 
varlet^fînon  entant  qu'il  eft  Con  efclaue.  Les  GenifTaire  n'en  me-   . 
nent  aucunement  ;  car  eux  mefmcs  font  des  moindres  efclaues,. 
&eux  meûnes  portent  leurs  viures  &-  leurs  armes.  Vray  eft  que 
.de  cinq en^cïnq.ilz  ont  vn  cheual  à  porter  tout  leur  bagage ,  te 
Tum-menet  vne  tente. Les  Romains  faifoyentainû* ainciennementicar  on  lit 
$m  de  baga»  cn  ja  gQcrrc  de  ïugurtha ,  que  Metellus  par  vn  edit  contraignit 
ge  enguerre^  \^ommc  de  guerre  de  porter  Tes  viûres&  Tes  armes  quant  &L  foy^ 
&.dcffendit  qn'iîzneu$èntaueun~varlet..  Nous  voyons,  tncfmc- 
menr  les  Geniflaircs  de  lacourt  du  Turc  qui  font  les  plus  près  de 
farperfonne^entempsete paixeftredixàdixàvn  varier: maisea 
teps  de  guerre  font  cinq  à  cinq.Chacun  peut  voir  par  cela  quelle? 
Mfiendarti    grande ;  obeiûancc  eft  en  cefte  maifonlà.  U  ne  faut^  point  rafraU 
ésTum^    càitkseftendarts.desTurcs  :  car  pour  eftendarts  il  ont  àcs  poils 
de  la  queue d' vn  Cheual  >  colorez  de  diuerfes  couleurs  ,  emman- 
cliezau  bout  d'vnc  demie  pique.  C'eft  ctiofe  odieufeen  Turquie 
de  voir  les  habits  decoupez/oitveloux^ktin^fbye^ ou  drap.  Les 
Grecs,  &  tous  les  fubiects  du  Turceftans  habillez  àlcur  mode> 
$msfontri*  ne  découpent  rien  de  leurs  acouftremen  s.  Les  Turcs  s'habillent 
àxmentx*    &  aecouftrent  communément  de  veloux  figuré  de  diuerfes  cou* 
wfo*\      leurs,eornme  auiîî  de  fatin,&  d'autres  fortes  de  foyc  Et  allas  par 
paysportentleur  fi-fllyScosc  toujours  vne  lanterne  de  fer  blanc, 
"  -  &  de  la  chandelle  dedens ,  qui  eft  façon  moult  commune.  Cha~ 
conportc  facuei-llier pendue àfaceincture ,  Se aufïi vn  petit fàc 
de  cuir  pour  le  ici,,  mais  il  eft  compofé  comme  eftoit  ancienne- 
seïcÊHpoJZ'  ment  celuy  des  Grccs^La  compofition  eft  faite  d'aulx  batus  aucc 
•-'■•■•  lefèîjpui^defèiciié^-rcbaturdu^el  ayans  cm^ly  leur  fàchet  de^ 
cuir^ie  portentpour  fàler  leur  viande.  Ceft  vne  chofe  qui  excite 
meroeilicufement  i>appctit>&  leur  fait  bone  bouche,^  leur  con- 
forte l'cftomach  après  auoir  bien  beu  de  ï  eau  fraifehe. 

• ; ■....;      ,.:-  y*    .  "-   .      •-'    -■-    -  Vu-grand. 


•    OBSE&VÏB'S     PAU     P.    SELON.  42$ 

.  jj#  graniexcvcke  atout  ceux  qui  aprennent  étirer  âcîarc  par  les  villes 
deTttrqmc  Chapitre    xxvi. 

s  N  trouue  îcs  terrafTcs  entretenues  de  terre  molle  es 
1  villes  de  Turquie,  qui  ne  font  point  îaifFces  endurcir: 
>  car  il  y  a  Journellement  gens  couftumiers  à  tirer  de  * 
!  Tare.  Hz  ne  tirent  pas  de  loing ,  côme  Ion  fait  des  arcs 
debôiSjn'auiïi  leurs  flefebcs  ne  font  pas  fi  longues:  mais  tirent 
de  bien  près.  Celuy  qui  entretient  la  butte  >  la  mouille  tous  les 
iours,à  fin  que  l'argiftc  demeure  molle  :  &  la  tiennent  toufiours 
fànsqu'ellc  fe  defetchc.  Hz  tirent  de  fixpas,  &  s'eâSbr cent  de  tou- 
te leur  puifianec  à  percer  ta  terrafife  auec  leur-oefche.il  y  a  vn  ho- 
me derrière  vn  aix  ioignant  la  butte  >  qui  arrache  la  flefebe  de  la 
terre  chaque  fois  qu'on  a  tiré  :  &  la  ie&e  à  celuy  qu i  l'aura  tirée» 
Et  quand  vn  homme  aura  aHèz  tiré  ,  il  pendra  fan  arc  ioignant  la- 
butte,  &  payera  felor*la couftume.Lon  trouue  ordinakemet  tel- 
les buttes  ou  terrafifes  es  lieux  publics  par  les  villes  >  ou  les  Turcs 
vont  ordinairement  s'exerciter,  pu  Hz  tirer ôt  plus  de  centeoups 
qu*il  ne  leur  couftera plus  dvn  afpre. 

"De  plufieurs  apprejh  des  Turcs  pour  manger. 
Chapitre    xxvn. 

t  Es  Turcs  octdc  moult  bonnes "inuentions  de confi- 
•  tures  en  fàulmeres ,  qui  font  de  petite  valeur  ^qu'on 
!  vend  par  les  villes  de  Turquic-.car  ilz  eonfifent  les  ra-  Confitures  e» 
jnwv^wvJ  cincsdeBettes^quifontgroiTcs  corne  les  deux  poings  fitlmere. 
dontles  vnesfontblanchesouiauûaftrcs,&  les  aut^s  font  rou-  *£** hL^ 
ges3qui  font  celles  que  pîuficurs  ont  eftimécûre  raucs  ^mais  cela c     °* 
e£faux.Il2i.confifcntaufiides  gros  choux  cabusy&  des  grojOfes^ 
racines  de  raues,&:  des  racines  d*£nu  la  cam  pana .  Gcà  meihage 
àc  peu  de  dcfpcnfe  ^comme  aufli  eftoit  anciennemcnLengtarii 
-vfagcà Rome >.&c es  autres  villes  des  Romains :.&  ceux  qui  fai-      '      "  ; 
foyentcemefticrlàjS'appelloycntSalgamarij.  Ceftvnechofede  ■&&***£> 
grand  efpargnc  ;  car  quatre  compagnons  n'en  mangent  pas  poux 
plusd  va  caroluscavn  repas. 
*■-.'■;-— :-r -.-.r.:    *    -  Mtek 


^4>4  Tï;£RS    aj^RË     DES     SINGYLÂ. 

Ceftvnevkndequinefaut  point  cuire:car  elle  cft  toute  pre^ 
$c„<$ant.amii  fal.cç,  Jlzpnt:awifi  àcs  raifinsde  verkiftcpruit,  qui 
eft  grand  fouîagemenç.aux  Turc?  :  lequel  trempé  dedeas  du  vi- 
naigre &  de  la  femence  de  môuftarde.eft  vn  moule  plaifant  man- 
%outiqms  k  ger  crud  auec  du  pain.  Hz  ont  suffi  des  boutiques  qui  ne  font  au- 
rmredes      cre  chofe  qu'appre&er  des  teftes  de  mouton  auec  des  pieds  pour 
tcjtcsdemo»  yçaàï  o:  &quand  Hz-  les  paillent/çaucnt  les  puurir  habilement, 
'0/'*  &.tput  chaudement  les  mettent  en-vn  plat  auec  vn  peu  degrefle 

&  de  vinaigre  faulpoudrecs  de'fel  compofç  auec  des  âulx,&:  méf- 
ié auec  des  efeorces  de  la  femence  de  Sumac ,  anciennement  ap- 
sum4c  ^  Rhu^,Qbfqn-iorum.  Les  Turcs  npnt.point  de  hon.ee  de 

C^*         j8Wg<«apflMfe>&  les  grands fei^neurs. mefmes y  mandent or- 
TtoaVtuent  dWwmep_ç0. Tput  aing .que  îes.T.atçs  fontiiFus de vachiers & 
^»s  *&&'<>»  [jprgiers.femblabîement  ilz  en  retiennent touteslesenfeignes, 
&  iiimde.    çn  jçu  r  façon  de  viurc  :  car  ilz  pourroyenç  bien  auoir  moyen  de 
Çc çraiecer^  autre  viande^outesfois  ilz  aiment  plus  à  manger  des. 
dïpfes  de  lavage  qui  çouftcnç.pcu-,  que  d'employer  argent  en 
meilleures  chofes.  Il  y  a  tout  vn  bourg  en  Coftantinoplc  au  bouc 
McktL        du  port  du  coûé  de  Thracc,qui  ne  fait  autres  chofes  que  du  Mcl- 
cernée.      ca ,  du  Caimac ,  &  d'Oxygala.  Le  Caimac  cft  fait  de  cremrae  :  & 
oxyrda.     en  fait  on  en  diuerfes  manières.  C  cft  ce  que  les  Grecs  ont  nom- 
^ngdéu  méancicnncnacntÀphrogala.Àuffiontgradvfagc  delaRecui- 
jeauât.      ^e         lcs  Grccs  noiiimCnt  vuigairemec  Mifca.îi  ne  faut  point 
MlJitr*       s'enquérir  d'auantage  dont  ilz  font  iflus5  confiderant  leur  ma- 
nière de  vhkc.       . 

DeUcÏYcmcifionâes Turcs.  Chapitre    x x vi i u 

feg*^g|gg&  Es  Turcs  font  circoncis ,  mais  ne  font  pas  circon* 

&£one$o»  H.»y»  cis  le  hutôiefme  iour  d'après  leur  nauTance  à  la 

f*Imfi;  .  -gB  PfJiP  manicfcdesluifs ,  ains  la  huiûicfme ,  douziefme, 

Jes Turcs,      fjf  KÎ^Sl  ou  qinnziefme  année,  ou  plusou  moins  icloqu  il 

^gne'Âjrre  ^J^^^  eft  àproposX'enfancn'eftpointcirconcis  qu'il  ne 

Mahome*     fçache  Dien  refpondrc  ÔC  parlera  ceux  qui  le  circoncifent.  Il  faut 

*&:        .  qu  il  eleuc  le  doigt*  prochain  du  pouïee  :  car  en  tel  %ne  donne 

tefmoignagc  quil.confeffe  eftre  d  auec  Mahomet  :  lequel  doigt 

il  rient  tout  droi&.II  n'eft  permis  de  le  circoncire  au  cemple,ains 

enlamaifondcfcsparens:cariincft  licite  à  vn  qui  n'efteircon- 


.  ><fjf  S*M;V  E  E  S    -V  A  ■  K     P. ■  "  B  £  L  O  2*.'  ^SJ 

cis ,  entrer  en  la  mofquce  ou  Eglife.  Beaucoup  de  Turcs  s  affem- 
bîentàcellc  Circo-ncifion ,  Se  fontvn  fçftinà-lcur  mode:&c& 
•J-cn&nc  cïrconcis-cn  la  compagnie.  Le  Preftrç  prcrïd  des-  pincec- 
•ïes>&  dit  a  l'enfant  qu'il  luy veut  montrer cela  qu'il  faut  couper 
Je  lendemain ,  &:  amenant  la  peau  qui  furpafTe  par  àctfus  le  bouc 
cta  membrejdira  que  ce  fera  demain  qu'on  le  luy  coupera.  Alors 
s  en  irairnais  c'eft  pour  le  tromper .-  car  il  fe  retournera  corne  s'il 
auoit  oublié  quelque  ebofe)&  alors  luy  coupera  la  peau  auec  les 
pincettcs,qirii  auoit  défia  lice  Se  choifie,fans  que  l'enfant  endure 
grand  mal  :  Se  ne  fera  autre  chofe  que  luy  mettre  de  l'eau  falee  Se 
du  linge  par  deffus,&:  luy  guérira la  playeen-cefle  forte^  Et  pour 
aooirefté  circoncis  i  on  ne  luy  changera  pasfon  nom  queceîuy  Manière  & 
qu'on  luy  auoit  baillé  -le  iour  de  fît  naifTance}{irion  de  MufFulma,  circoncire!» 
cxc(k  à  dire  bon  Turc  circoncis.  Et  quand  l'enfant  a  efté  circôcis,  *rf*»t. 
Ion  en  fait  telle  fefte  comme  nous  feriôs  en  France  à  des  nopees. 
On  le  meneraaux  baings  par  grande  folennité,  5£quad  il  retour- 
ne à  la  maifon,lon  forme  des  tabourinsy&  luy  baillelon  vn  turba 
bîanc,quelquefois  femé de  fleurettes.  Puis  on  le  mené  àl'Eglife 
en  grand  triomphe.  Puis  chacun  luy  fait  prefent  félon  la  qualité. 
&  dignité  de  fon  lignage  > s'il  cfl  de  plus  grauc  parente,  arcade 
grand'  richeiTe  >  Ion  îay  baille  or^argent  Se  autres  dons ,  lefqueiz 
ceux  qui  ont  eftédu  banquet  Se  de  la  fefte ,  luy  ptefentenr.   Nql 
Chrefîien  n'eiifaiâ:  Turc  par  foree;mais  s'il  vent  de  ion  bon  gré 
fe  faire  Turc,il  eaeft  beaucoup  mieux  eftiiné.Ceux  qui  font  faits  jj^urcsn^ 
Tures-par  forec^come  qui  pour  iauucr  leur  vieièfon  t  faits  Turcs  fÙTC'£t  p0inc? 
n'en  feront  pas  tant  efrimez.Si  vn  Chreftien  eftoic  Croatie  auecr  'Us  ebrefiemr 
ques  vneTurquCjla  rigueur  veult  qu'il  meure3ou  bien  le  remède  *UurUy~. 
eft  qu'il  fe  face  Turc.Etû  vn  home  Chreftie  auoit  tué  vn  Turc,il- 
fauueroit  fà  vie  en  le  faiiantTarc,ou  en  payant  beaucoup  d'arge£ 
fe  rachetetomCar  H  n'yachofe  quelcoque  qui  ne  fe  face  par  argec 
en  ce  pays  IL  Si  vne  Chrétienne  qui  n'eit  pas  cic îaue,  eft  trou ueç 
auec  vn  Turc ,  il  faut  qu?  elle  foit  faite  Turque.  Mais  on  voit  peu  rmt  fe  fiï$- 
àegés  en  ce  pays  là  attains  de  crime  qui  mérite  la  mort., qui  p.uiflç  j?«w  "orgeat 
cfchapper  par  fe  faire  Turc  ,.qui  foit  exécuté:  car  pluileurspout  eaTurfH£. 
cfchapper  k  mort  fe  font  Turcs.  Le  SopliiquieilMahomerifle, 
appelle  les  Turcs  hérétiques ,  pource  q  les  femmes  des  Turcs  ne 
font  pointcircQcifeSjCome  font  les  femmes  de  ion  pays  :  auiïi  en 
tret  elles  es  MofcmecSjCe  q.ne*foat  les  femmes*  de  Turquie.Naos 

HHh  "ii 


^%6  TIERS      LIVRE     DES     SïKGYLA^ 

Turcs  ^p^içauonsauffique  les  Cophlcs  Chrcfticnncs  du  pays  de  Prcftrc 

U%hereti*    jç^n  en  £c^i0pie  croyans  en  Iefus  Chrift ,  font  circoncifes ;  car 

lms'      ,     eftant  la loy  tcilerque  lçs  femmes  doiaent  reccuoir  quelque  im- 

rZjHLofc  Pr^2î°n  &c  circoncifion,  iîz  leur  coupent  les  parties  appellcesca. 

djès.  Grec  Hymenca,en  Latin  Àla?  :  car  iîz  les  trouuent  correfponda- 

chreftienms  tes  au  prépuce  viril.  Ceux  qui  blafphement  Se  difentiniuresà 

.cïreoncifes.    Mahomet,  doiuent  mourir  :  mais  la  loy  les  abfout ,  s'ilz  fe  veu- 

&ymenca.   Jcnt  tendre  Turcs;  &:  à  telles  gens  ne  faut  autre  ccrimonie  que 

-/îLs'   .      fe  faire<:irconcire5&:  hauffer  le  doigt  tout  droid;  Se  par  tel  fîgne 

uaracjt.     feroncxurcs }  &  par  confequent  feront  deliurez  de  payer  la  ha- 

raczi  >  fçauoir  cil  du  tribut  qu  on  paye  au  feigneur.  Car  ceux  qui 

font  Iuifs  ou  Chrefticns ,  le  payent:duquel  les  Turcs  ouMuflul- 

mans,  ccft  à  dire  taillez,  en  fontexempts. 

■•  -      Q*tvn  Zfckuepuijfe  contraindre  fin  maiftre  de  luy  mette  a  chois  pour fa 
■  -  ■  ■  ■     rançon  ou  le  temps  de  le  feruir  ,  ou  l'argent  qrijl  en  veut  auoir. 
Chapitre,     xxix. 

DesEfcUuesll^^^^Si^  vn  Chreftien  efclauc  ou  prifonnier  en  Turquie 
1  sftant  auec  le  maiftre  qui  l'aura  acheté ,  fe  vouloir 
■  faire  Turc ,  il  n'aura  pourtant  liberté  par  ceia:car  en- 
w^_ j  cant  qu'il eft  efclauc ,  il  luy  conuient  feruir  fon  mai- 
{trc^&  faite  fa  befongne.  Vrayeft  qu'il  luy  pourroit  bien  bail- 
ler quelque  peu  de  liberté  d'auantage,  &  luy  amoindrir  les  an- 
nées de  fa  féru  itude  s'il  fefaifoit  Turc.  Ceft  laraifonponrquoy 
les  efclaues  ontaufïi  bon  temps  àperfeuerer  en  lafoy  Chrefûen- 
Wùrtjm  nC)  que  fe  fzite  circoncire  Se  eftre  Turcs.  La  fortune  àcs  efclaues 
dirnfcUut.  cn  Xurquie  pourroit  eftre  comparée  aux  feruiteurs  de  noftre  Eu- 
rope ;  car  ilz  participent  de  lafeîicité  félon  le  maiftre  qu'ilz  fer- 
uent.  S'ilz  font  auec  vn  bon  maiftre  qui  les  aime  bien ,  ils  font 
trai&cz  comme  luy  mefme,  Vn  efclauc  peut  contraindre  fon 
maiftre  de  deux  chofes  1  vne ,  ou  de  luy  taxer  fa  rançon ,  ou  bien 
luy  dire  le  temps  de  ion  feruice  :  car  vn  efclaue  allant  au  Ca- 
dijquieft  comme  vniuge  de  la  iuftice  ,  luy  pcutfâïrefa  plain- 
te ,  Se  luv  dire.  levueil  que  mon  maiftre  me  vende  à  vn  autre 
s'il  ne  me  taille  à  rançon  :  ou  bien  qu'il  me  baille  par  eferit  le 
temps  de  mon  feruice.  Et  faut  en  ce  cas  que  le  Câdi  face  iu- 
ftice ,  &  appellera  fon  maiftre.  Lors  l'efclaue  luy  demandera 


OBSERVIEZ     *AK     P.JIiON»  417 

combien  il  voudra  qu'il  luy  baille  en  argent,ou  combien  il  vou- 
dra qu'il îe feruc d'années.  Lors  le  maiftre  mctiefclaue  à choifïr 
Jequel  il aymera,micux,fc rachetée par argent,ouparferuice.  Et  feçcimre 
iirefclaue  n'a  bon  efprit  de  qu'il  n'efperc  gaigner  fa  rançon  en  ^rJL 
brieftemps,&  qu'il  puiffe  mieux  fournira  la  peine  quai  argent,  ter. 
il  choifira  le  ferukre.  Alors  le  maiftre  luy  baillera  dix  ans>ou  dou- 
ZCjOU  quinze  aie  feruir^  luy  en  baillera  lettre.  Et  quant  iefclauc 
aura  achcué  le  fèrui  cc.de  fes  âix.  ou.quinzcans,  il  luy  fera  librede 
sten  pouuoir  reuenir.  Mais  fil  cfclauc  fçait  meftier,  lors  il  choiû- 
ralargcnt  pour  fc  racheter,  &  demandera  terme  à  fon  maiftre:lc- 
quel  il  payera  félon  qu'ils  onteonuenu.  Nous  en  auonstrouué 
qui  Ce  font  rachetez  en  peu  de  temps.  Les  vns  en  deux  ans,  les  au- 
tres en  fix,  &:aïnfi  plus  ou  moins.  Carlil'efclaueiçait  meftier, 
il  trauaiiîe  grandement, &  paye  fon  maiftre  tous  les  mois  ou  tous 
les  quartiers.  Mais  les  cfclaucs  qui  font  tombez  es  makis  des  Py-  EfcUius  la 
rates, qui  ièruent  es  gaîeres,a  ont  iamais  plus  d'efperance  de  fc  ra-  pr**es. 
cheter  fînonbien  tard  :  careftans  auec  vn  Pyrate  quiaafrairede 
gensengalerc,il  les  tiét  pour  fon  feruicc,  aufquels  il  ofte  le  moyé 
de  pratiquer  en  terre.  Lesefclauesqui  font  auec  vn  homme  de 
moindre condition,ont  plusgradeipoirdcfcdeliurcr ,  que  ceux  Efthues  des 
qu  i  fon  t  auec  vn  grand  feigneur  :  car  Ton  ne  les  peu  t  contraindre  £rW>  fi* 
par  la  iuftice  du  Cadi:  car  il  c  eft  vn  Bacha,vn  Beglccbe,ou  vn  Sa-£»^. 
giac,ou  autre iemblabie ,  le  Cadi  n'a  puiflanec  fur  luy .  Parquoy 
faut  qu  vn  efclaue  cftan  t  en  ces  lieux  5  ait  patience  :  mais  auec  vn 
villageois,le  Cadi  îe  contraindra  de  faire  raifon  &  iu fticc.    Les 
Turcs  ont  l'huile  de  Sefame  en  tel  viàgc,  que  ceux <Ic  France  ont  Sufo  & 
Fhuilc  de  noix,&  en  Languedoc  l'huile  d  oliue;  ^d'autant  qu'on  sefime. 
la  fait  auec  grand  iabcur,e'eft  communément  ouuraged'cfclauc.  Bmk  <k 
Auflî  ne  la  fait  on  qu'en  hy  ucr*  Ils  trepent  la  {èmenec  dc]Scfàme  noiX- 
vingt  &  quatre  heures  en  eau  falee:  puis  la  mettent  en  la  placç,6£ 
la  battent  auec  de&maiilets  de  bois  deflus  vnc  fcrpillere  iufqucs 
à  ce  qu  elle  foit  efeorchec ,  puis  la  mettent  tremper  de  rechef  en 
dcreaufàlec,quifouftientreicorccàmont3  laquelle  ilsiettcnt. 
Puis  oilent  le  gra|n  du  fond,  qu'ils  feic lient  au  four ,  èc  le  meu- 
lent:&dcftors  l'huile  coule  molle  comme  mouftarde:  car  il  y  a 
peu  d'excremens.  Puis  l'ayans  fait  bouillir  lentement,  ieparent  îe 
marc.  C'eftvnc  huile  moult  douce  &  friande,  Se  qui  cil:  à  bon 
marché.  Nous  veoyons  que  les  Turcs  font  affis  à  plat  de  terre,  ô£ 

HHh    iij 


pour  mdger. 


^1%  TT E K  S   : L  r V ETE     D  t S    SI NGVLA. 

tes  Turcs fe  defchauflez^en  beuuant  Se  en  mangeant ,  comme  au  ffi  fai&yen* 
defihxHJfent  jcs  Romams  le  ternps  parlé  en  leurs  tricîins.  Les  triclins  des  Ro- 
"  mains eitoyent ce quenausnommops  ma^mtenanc  fales-ou lieux 
àmanger,  comme  font  les  cabarets^  &  qu'ilyauoit  des  appentis 
ou  table S-eleuees ,.  comme  nous  voyons  es  boutiques  des  cou  (lu- 
riersfurquoyils  coufent ,  &  falloir  monter  làdeiïus.  &  ofter  les 
fouHers:car  ils  a'ausyent  pas  les  pieds  deiïbusJa. table  comme  e& 
la  couftume  de  maintenant:  mais  tout  ainfî  comme  les  Turcs3  ils 
s'appuyoyent  aux  aureilîiers  qu  ils  auoyerit  defïb  us  leurs  coudes; 
Laquelle  chofè  Martial  au  Hure  cinquiefme^abienapprouuee: 
car  il  dLS  en  eefbe  manière:. 

.    DepGrfuifoleas^dfèrtMrprotinwivgem       - 

lut  erUciuc 06  OTQCgxmmque  liber. 
Pour  prouuer  que  tricîmiu  m  cû,  ce  que  les  François  appellent 
f  une  falejQu  lieu  à  manger,  il  furHra  prendre  l'authorité  de  Varro, 

JpC 'efê:  parlant  âcs  Poulies  dvLide,ou  il  dit ,  Meleagrides  nouijhmè  in  tviclh 
d'Inde  nwmgensarîummtrmemmJculma^,  Et  auiïi  de  Suétone  qui  enfair 
mention  en  plus  de  vingt  pauages,5£  entre  autres  parlant  de  Cav- 
iar dit:  CûnuiskttumajIiduÀperprouincu$duobustyklmiis>'vno  quo/àga- 
tipalleative^altero  quo  tegati  cum  iïluflrioribus prouinciar&m  difeubue- 
tant».  Et  en  autre paUage  eferit  in  ^Astgufla  t  Liui£  mptia*  obieest  :~  &t 
fœminajn  confidarem  ètrklinio.  vin  cotkm  in  cubiculum  abduEiam^c* 
Faifant  différence  delacuiûne  6c  de  la  chambre  au  triclimum3 
qui  eft  vn  lieu  député  pour  manger.  Et  ailleurs  :  "Dium  Claudia*  ad- 
.  htbebatvmni cœnje  &  hberpsfuos  cum.puem puellifque  nobïlïbm^qui  mo- 
.■  *  frvetc^adfalcml^orumJ^mtesvefcsrexUHr^neçtemerev'aquamtrtcli^ 
.  .  niodifafittïnifiAiftmus&cindczis,  Pline  auffi  parlant  des  Elcphâ\ 
dicqu'ils  cheminent  fi  doucement j.que  les  yoirres  pleins  de  vin 
de  ceux  qui  boyuent  es  tri  clins  fabriquez  deiTus  leurs  dos,  nefe 
rdpendent  point._Et.au  premier  chapitre  du  douziefme  liure 
parian.c  4u  Platane,iî  die  telles  paroiies.  ^iliudixemplum  Caijprin- 
(ipis&cJàxjfqueramorumîrdbibusfcamnxpatuU,  grineaepttlaîi,  cum 
ipfeparsejjet-vmbr^quinàecimconuiu^rum  acmmiflerij  capace  trkhnio^ 
qyam  cœmm  appel  Unit  illewidum.  Ceft  donc  ce  que  prétendons 
inférer,,  que quandies Turcs  mangent ,  font  affis h  plat.de  terre,, 
&  font  quelquefois  appuyez  d'orciiliejfs  deiTous  leurs  coudes  au 
deilas  quelque  tzblc  enleuee  de  terre  3  ou  bien  à  terre  deilus  vn 
tzpis  ^  que  cela  pourroic  eftre  no.mmç  triçjiaium.  ;"  car.  il  eft  coa> 


OS  SERVERS     $-AK    *.    BEION.  41j> 

forme  au  diredcs  anciens..  Ceft.chofe  commune  en  Turquie, 
<ara^auflLeftc.iE  kfemps.  paffëaux;Rojnains,,.  defeipruir  dss- 
efcîaufis touque*,  4cfql»elMCP9BQr^:cfl: :rc,  plu  &  tàfW&i^-'fapfr&s 
h  première inuention  ea.eft  venue:  dvne  femme  ,  qui  cft  de  k  TurcSm 
RoyneSemiramis.  C'eftoicync  Roy  ne  puiffanre  en  guerre,  qui  samrmis. 
feit  çhaftrer  pîuficurs  icuncs^garfons ,  qu'elle  commit  pour  ie 
.gQUuernempiùdc.fes fcmmçs :;&:  depuis  elle,  fa poftemé.a con- 
tinue te3'vfa*c ,  SC  principalement  au  pays  à  qui  elle  dorrtinoit. 
Quand  les  Turcs  commencèrent  à  faire  les  Eunuques  ,  il  nous 
Çjft  aduis  qu'ils  fouloyent  feulement  couper  les  genitoires  aux 
petits  garfons  y  comme  au fil  anciennement  faifoyent  les  Ro- 
raains  qui  leurlaifibyent  le  membre^,  qui  eftoit  çhofeçommune 
à  toutes  nations-;  mais  deuenuz  grands ,  ceux  qui  eftoyent  robu- 
ftes  ,-  encore*  qu'ils  fufïcnt  chaftrez  des  genitoires  ,  toutesfois 
nelaiffoycntàvferaiiec  lesfemmes.  Dont eftaduenu  que  quel- 
ques Impératrices  Romaines  les.  en  ayent.  mieux  aimez  :  car  ils 
nauoyent  pas  pui/ftnec  d  engendrer,  La  chofe  cil  impudique, 
&pouree  n'en  dirons  d'auantage.  Le  grand  Turc  eftant  aduer- 
ty  que  les  chaftrez  des  genitoires  ne  lahToy ent  pourtant  de  don- 
ncrplaiiîràfcs femmes  &£  concubines,  commença  déformais  à 
faire  couper  totalement  &  membre  &  genitoires.  Maiscefai- 
fant,  de  dix  ou  douze  que  Ion  en  auâmre  maintenante  faire  Eu- 
nuques, il  n'en  cfchapepas  ûx.  Plufîeurs  difenr  quelaraifon  cft 
aduenue  autrement-..  C  çft  qu  vn  iour  l'Empereur  voyant  vn  che- 
nal chaftré  faillir  vne  jument,  print  occaûon  de  leschaftrer  com- 
me auons  die. .  Les  cfclaucs  femelles  nepeuucnt  feruir  aux  Turcs 
fin  on  à  la  maiion3  pou rce quelles  n'oient  aller  en  public  Par- 
quoy  il  cft  plus  feant ,  '  que  les  chaftrez  feruent  les  femmes  Gitans 
en  la  compagnie  du  rnary  ,  que  fi  elles  eftoyent  feruics  par 
autres  femelles-  qui  ne  peuuent  aller  en  public  comme  les  maf- 
Ics  :  car  communément  vn  homme  ayant"  pi uiîeurs  femmes 
efpoufees ,  &  des  cfclaues  femelles,  &:  qu'il  neft  pas  licite  aux 
varlets  d'y  fréquenter  ,  chaque  grand  feigneur  riche  a  vn  cha- 
ftré 3  lequel  il  aime  grandement .,  &:  dont  il  fe  fie  beaucoup. 
Le  grand  Turc  méfme  a  fb uuent  fait  vnc  efclaue  £unu(iucf^^ 
chef  de  toute  fa  puiflanec  ,  ayanc  vnc  groffe  armée  en  fono-  *J*™ritt 
bcyïTance ,  ne  fc  défiant  de  ion  courage  ,  &  ne  pounant  pen-  ^ 
fer  qu'vne  fcincillc  de  couardife  peuft  fc  loger  en  fon  cœur. 

HHh  iiij 


4$0>  «B'.R'S      LIVRE     PIS     SINSVLJU 

¥n  Eunuque  du  Roy  d'Egypte  nomme  Ganymcdes,nc  refila  il 
pas  à Caefarxonere  tqutc  la-pu  iflance  Romaine  >  Nous  trouuorîi 
aufli  -<ja*il  y  a  eu  des  %.oys  Eunuqucsqui ontdominc  en  Perfc:  &C 
plufieurs  autres  Eunuques  ont efté moultgrands  feigneurs,  dont 
lesautheursont  affez  amplement  parlé.  Et  pour  ne  parler  de  fî 
loing^îe  Bâcha  mefmc,  qui  eftoit  lieutenant  pour  le  grand  Tur<> 
par  toute  EgypteiSyrie,&  A  rabicylors quenous  rufines au  Caire* ; 
eftoit  Eunuque,  auquel  le  grand  Turc  fe  fîoit  autant  qu  au  plus 
d&KanLms  ^zx^y  capitaine  de  fqn  Empire.  Les  Romains  toutcsfbis  ne  don^ 
^         noyent  iamais  tant  de  liberté  &  puiflance  à  leurs  Eunuques  ou 
chafttez  que  les- Turcs  font  txôme  auf&ont  fait  les  princes  d'O- 
rient de  toute  antiquité :^ar  nouslifons  que  plufieurs  Eunuques 
ont  refifté  aux.puiftances  Romaines.Encor  pour  f  heure  prcfènte 
les  Eunuques  en  Turquie  fe  ciennét  auuipriuezde  leurs  maiftres 
&  maiftrefIes,comme  s'ils  eftoyent  compagnôs.  Aufli  leurs  mai- 
ftres fefl^ut  d  eux,&  lesfbnt  tenir  compagnie  à  leurs  femmes ,  Se 
dormir  quant  ôc  elles  en  leurs  abfences,fàns  en  auoir  aucun  fcru~ 
gule  y  fçachans  que  comme  ils  leur  ont  ofté  tout  moyen  d'vfàge, 
auffi  leur  ont  ofté  tout  lappetit-  Àiiuîn  ya  veftige  quelconque 
de  chofeaed'àutrc-,  non  plus  que  dcdcnsl&  paulme  delà  main. 
Les  Eunuques  demeurent  à. garder  les  femmes  &  concubines  de 
leurs  maiftres  durant:  le  temps  de  la  guerrc,&  les  feruir  de  ce  qu'il 
Creâk  dss  leu*fânt.X*eftlaraifon  pourquoy  leurs  maiftres  leur  îaiûentle- 
Ettnt^uesjn.. $&$  fou uent  la  chargede  toute  la  maifon^  hes  Chrcftiens  aufli 
Turquie^     peuvent  bien  tenirdçsefclaucstant  mafles  que  femelles,  qu'ils 
achètent  a  leurs  deniers,  comme  au fE  font  les  luifs  :  mais  les 
Chreftiens  ne  les  luifs,  ncpeuuent  tenir  vn  Turc  efclaue.  Vn 
luif  peu  t  bien  tenir  vn  Chrcftien  tant  homme  que  femme,  com- 
natunlUtœi mc  âu&  vn  Chrefticn  peu  t.  tenir  vn  luif.  Mais  les  luifs  font  tan  t: 
haine  contre  cocfederezrentr'enx  &  pleins,  de  fineflè ,  qu'ils  ne  lauXcnt  iamais 
h  iùfi..      vn  de  leur  nation  efc|aue  :  car  s'il  cft  prins  fur  merou  fur  terrc,ea 
guerre  ou  en  paix^ils  fonttelle  diligence  de  lcrecouurer,  qu'il  n'y. 
demeurera  pour  argent.  Toutesrois  les  Turcs  les  ont  en  trefgran- 
de haine,3£  ne  Ics/ouffrent  pas  volontiers  en  paix,  qu'ils  ne  leurs 
duent  des  iniures>&  principalement  fur  les  grands  chemins . 


OBSERVEES,    PAR.    *.    ïEtON.  4^ 

.  IXes  freftres  de  Turquie ,  &  des  fâences  dey  7mc*. 
Chapitre      xxx. 

\  E  s  preftres  des  Turcs  ne  font  gueres  differens  des  nefrafe. 

J  gens  laiz  :  Se  ne  leur  eft  necefiàirc  auoir  tant  effaidic  :  Turcs. 

imais  leurfurfit  feulement  s'ils  fçauent  lire  l' Alcoran, 

<l  &.  interpréter  felcm  la  lettre  eferite  en  langue  Tur- 

quoife.  Ils  font  mariez.&  habillez  comme  les  autres  ,»  ayans  rien 
de  diffèrent >  Se  font  quelque  meftier  pour  viure  comme  font  les 
autres  hommes*  Les  vns  vendent,  ou  font.cordonniers  ^cour- 
riers,  Se  autres  arts mechaniques.  Pîuûcurs  gaigaent  îcurvka 
eferire  des  Hures  i  car  il  n'y  a  point  d'imprefïïon  en  Turquie  pour 
imprimer  en  TurcLeur  papier  eut  lifie  Se  frotte  à  forcent  quil 
dédient  clair  luyfânt&  poly comme vocfmail.  Les  -mircsàno-  IaTum 
fke  émulation  ont  fait  tcleflfortquils  font  maintenant  conubi 


ùQnwkmx 


me  cuiujuwv"  ~««  - — -  — ■■--  s,    —  -  -       "  "    "    7 tanwoneux 

teuxdesfeiencesd'Aftronomie,  Poefîc^ Philofophic  t  Se  non  de  infinie 
feulement  les  hommes  y  prenent  plaiûr ,  ains  ne  plaignentla  def-  leurs  enfants 
©eneequris  font,  tant  aux  enfans  malles  qu'aufli  aux  femelles,  xftïences. 
Mais  lcscfcolles  des  garfonsfont  feparces  des  filles  ,qui  vont  aux  Bfiolesdes. 
femmes  y&  les  garions  aux  hommes.  Us  ontauflfi  bien  la  manie-  7mci* 
ïe  de  faire  carmes-  ou  vers  proportionnez,  de  fyllabes  r  comme 
nous  auons  :  Se  font  quatrains ,  dizains ,  Se  fizains ,  obfcrucz  des 
fyllabes  dix ,  onze ,  ou  plus  ou  moins ,  en  forte  que  qui  orroit  le 
€hantd'vnTurc,diroitpropreimenteûre  d'Àlman».  Quand  les  mTmcs** 
Turcs  fe  marient*  ilsachetentlcurs femmes  àpurs  deniers  com-  chetent  leur* 
gtans.  De  douaire  en  ce  pays  là-il  n'eft  point  de  nouuelle  iSe  faut  fim»^ 
que  le  mary  paye  les  accouftremens  dont  elle  fera  veftue ,  Se  fi  a- 
prcs,îeurs  mariage  leurs  meurs  ne  peuucnt  conuenir  l'v.n  à-f autre 
ôuquellefoitftcrile,  lemaryiraau  iugeaquieAle  Cadi:  Se  la- 
prendra  congé  de  îalaifler  :  car  commeils  s  cftoyent  pris  fans  iu- 
remens  ,.tout  ainfi  fe  laiflentils  fans  autres  eerimonies.Si  vn-rurc 
eft  mort,  les  maâes  lenfeuelincnt  :  fi  ceft  vne  femelle  y  les  fem-  _^     _ 
mes.  Le  corps  eft  premièrement  laué ,  puis  après  eft  reueftu  de  s^&gUs" 
beaux  linges  blancs ,  après  porte  hors  la  ville  auec  grandes  cerc-  ^ 
monics.  Nul  n'eft  enterre  dedens  les  temples. -Leurs  prophètes  ^m 
qu'ils  appellent  Druydes ,  vont  deuant  le  corps  portans  des  cier- 
ges.; Jes  preftres  fuyuencle  corps  en  chantant ,  iniques  àrtanr: 

Ili 


Enterrement' 


t4|2.  TIERS     LIVRE     "DES    "SINGVIAv 

qu'ils  foyent  paruenuz  au  lieu  de  fà  fèpulture.Ils  ont  manière  en» 
tr'eux  de  vifitcrles  fepultures  ,  &:  prier  pour  les  morts*  Les  fem- 
mes y  viennent  à  trouppesà  certains  tours  députez ,  &  ont  les 
heures  afïignees.  Les  hommes  femblablement  :  mais  chacun  à 
part  foy,&  en  diuers  temps, 

,  Quelesprefîmdes  Turcs  feruent  horloges  enTurqtàe  >crians  les  heures 
-"-,',':  Àhmtevoixdeâeffuslesclochersàes&gUfts. 

Chapitre     xxxi. 

<  L  n'y  a  point  d'orîoges  en  Turquie ,  mais  en  ce  de~ 
'  faut  les  préfères  montent  au  faifie  des  clochers  deflus 
:  les  tourelles  fort  hautes  :  car  chaque  Eglïfe  appcîlee 

!  Mofquee  a  vne  ou  deux  tourcllcs,vne  à  chaque  coite, 

au  moins  fi  ce  font  Eglifes de  fondation  RoyaleXar  il  ne  leur  ell 

m  Turcs  fè  heite  de  faire  Mofq«ee.a  plus  d*vnerourellc,  excepté  les  grands 

font  oyrJe  feigneors.  Quand  lespreftres  font  fur  iafommité,  ils  crient  d'v- 

bimloing.    ne  voix  efcîatante  comme  vn  ohlicux  qui  a  perdu  foncorbillon: 

qui  nous  fâifoit  fouuenir  despaftourcîles  qui  chantent  es  landes 

du  Mainccntour  -Noël  :  car  les  Turcs  chantent  en  fauect.  Leur 

■■  voix  fepeuîdaitemcntouyrd'vn  grand  quart  de  lieue,  &  .quel- 

quesfoisde  demie  :&.  feroit  impouibleà  vn  homme  qui  n'auroic  . 
>    auparauatouy  tel  cry,croireque  la  voix  dvn  homme  puiueeftre 
entendue  de  fi  loing.  Ils  fontquelqucsfois  deux  ou  trois  à  chan- 
ter. Lespreftres  mettent  leurs  doigts  es  aureilles ,  &  fe  prennent 
à  crier  fi  haut  qu'ils  fonten  tendus  de  toute  la  ville  :  Ôc  difent  .cel- 
te parollcs  en  langage  Arabe,  LaUlah  Illcllah  Mehemmetlr- 
red  lui  Allah.  Ils  font  tel  cry  cinq  fois  le  iour,  vne  heure  auanc 
iour,à  iour  ouuert ,  àmidy,à  trois  heures ,  &  ànuicl:  clofe.  Tou- 
tes lefqueiîes  heures  ont  vn  nom  particulier  en  leur  langage.  Les 
Titres  fi  M.  Turcs  fe  donnent  afllgnation  àtclles  heures  pour  traffiquer  en* 
»a  dftgna*  fêmble,  ou  pour  fe  trouucr  quelque  part.  Les  Turcs  entrent  cô- 
tiondes       munéruent  es  Mofquccs  à  midy  :  mais  auant  qu'ils  entrent  leans, 
*****-'■     "  il  faut  que  chacun  felaue  les  main  s,  les  pieds,  &  les  parties  hon- 
teuses deuant_&  derrière^  à  la  fin  qu'ils  jettent  trois  fois  de  1  eau 
fur  leur  tefte.  Et  faut  qu'ils  entrent  les  pieds  defehauflez,  biffons 
fes  fouiiers  à  la  porte.   Et  sliis  fe  trouuoyent  par  les  champs 
quU  n'y  ait  point  d'eau,  Mahometa  concédé  aux  Turcs,  de 


ÔBSE-RVEES     PAK     Ei     BELON.    *  4$ 

prenne  de  la,  terre ,  &  d'en  pafler  par  defTus  Icu^ccflc  „  mains ,  &£ 
fouliers. 

Continuation  du  chemin  U  dehtijfe comme  aufîi  des  mœurs: 
des  Turcs.  Chapitré.       xxxii. 

\  Y  as  fèiourné  tout Phyucrcn  Turquie^  venu  le  prin- 
temps. :  nous  propofafmes  continuer  nofttc  chemin  le  Turcs  ne 
Avcts  Conftantinopîc.  Ceft  vne  reiglc  générale  que  >0»*2*^ 
„_._„!3  les  Turcsallans  par  pays  ne  font  iamais  trotter  leurs  ^* 
cheuaux/i  ce  n'eft  par  contrain&e  :  car  quand  la  necefïké  les  for- 
ce ,  &  principalement  à  la  guerre ,.  ils  nefpargncnt  ne  leurs  che- 
ùaux }  ne  leurs  eorps:auu>  ne  font  point  de  repues  fax  chemin  en 
allant  par  pays  5n  cftoit  en  efté  qu'ils  cheminaient  foir&  matin, 
euitans  la  chaleur  exceffiue  du  foleil.  Maiseftansà  chcual ,  vont  Twanefo* 
mangeant  le  long  du  chemin^  font  boire  leurs  cheuatix  le  long  ^iat    Jr 
du<  chemin  a  toutes  eaux.  C'eâ  de  là  qu'ils  ont  en  grande  recom-  ^f* 
mendatioa  faire  venir  les  fontaines  fur  les  grands  chemins  paT- 
fàns.  Or  puis  qu'ils  ne  s'arreftent  point  pour  dimer,  &s  vont  le  pas 
tout lelong dti-iour^l  elt.ncccffairc  qu'ils  facent prouiiîon  de vi- 
ures  le  iour  précèdent  pour  le  lendemain  ,.&  d'autant  plus  qu'ils 
ne  font  pas  délicats  ^anflife  contentent  ilsaucc  desoignons3auec 
du  pain,5^  quelques  rai(ins>,&:  autres  fruich  fees..  Ceft  vne  cho- 
ie commune  aux  tu  restant  grands  feigneurs  que  petirs  compa- 
gnons >.dcinanger  des  oignons  cruds.  Les  grands  ieigneurs  de 
Turquie  y  font  tellement  accouftu  mez ,  quils  ne  font  point  de 
repas  qu'ils  n'y, en  mangent  :  au  fli  eft  ce ,  ce  qui  les  maintient  en 
iànté.  Laraifon  eft  digne  d'vn  homme  fpeculatif:  car  eux  qui 
n'ont  pas  beaucoup  à.  defpendre  ^  ne  laiûent  pourtant  à  nourrir 
beaucoup  d'efclaues.  Vn  homme  &  deux  efclaues ,  &  troische- 
nauxjoe  defpendcnt chaque  iour  en  tout  Tvn  portant  l'autre  plus 
de&cafpres^ii  valet  fîx  Carolus.  NefedeuroitFon  donc  beau- 
coup efmerueillcr  qu'ils  ne  font  plus  fbuuent  malades  de  ne  bo:r^  Bonnecot^- 
quedere|u>&  en  change? fi  fouucnt;  Mais  noùsdirons  quilsoDc/^  aux  ^ 
celle  theriache  par  accident ,  quiieur  eil  vtiîe  en  deux  fortesd'v-  Turcs  4^^ 
ne eft ,  quc.les  aulx  &  oignos ,  qui  ne  leur  couftent  guerejes pre- Ier  ^°^" 
feruèt  de  toutes  xiuuaces  deseâuxilautre  qu'  ils  leurprouoquét  \^nm>cr4  - 
-'...»",,  ..    .    .    .      '  LU-  & 


4J4  TIÏRSLîyRE     D£'S  "SUTCViA. 

£âiue&  appétit  à  manger force  pain  CccJ  Si  ceux  quiont  legofict 
enflé  fi  gros  en  Lombardic  &  Sauoye  de  la  maladie  qu'ils  nom- 
^,  ment  le  Gos ,  qui  n'a  encor  point  trouué  de  nom  Latin ,  &:  que 

oupfes.  ^^  appelions  des  louppes ,  auoyent  aufli  accouftumé  manger 
des  oignon^ou  aulx  cruds  en  leurs  repas,il  eft  certain  qu'ils  ne  fc- 
xoyent  tourmcntczde cefte  maladielà  commenous  les  voyons: 
car  elle  ne  leur  prouient  que  du  feul  vfage  des  raauuaifcs  eaux, 
dont  les  Turcs  font  preferuez  par  îTfage  <f en]  manger  ordinaire- 
ment. Nous  pouuions  venir  àCôftantinoplepardeux  chemins, 
Mmt0  .^rvneftpar  dcfTuslemontOlympc,  qui  eft  le  plus  court  :  l'autre 
'pe*  eft  entourner  le  mont,  mais ecftuy  eft  le  plus  long.  Et  pour  autae 

que  les  neiges  eftoyent  fondues,  nous  prifmesnoftre chemin  pat 
îa  fbmmité  des  montagnes  dePhrygie,  qui  {bntplus  hautes  que 
fàfiUgùmt  jc  monc  Senis.  Nous  partans  de  la  prouince  de  Paphlagonîe,  en- 
<s*IUgrcu.  tTafmcs  en  iâ  région  «ommmcc  Galîogrcce,  ou  nous  trouuafmes 
Cute'-  vne  grande  ville  qui  auoit  anciennement  nom  Contieum,main- 
ST**  tenant^ft  appcUceCutc  Tant  le  chemin  qui  entourne  le  monc 
rheodo/u  que  l'autre  qui  paffe  par  la  fommité,eft  en  Gaîatic  ou  Galiogrecc. 
cangrorum  Carfortantdc  Paphlagonîe,  l'on  entre  en  Galatie.  La  ville  de 
soit.  Paphlagonie  la  plus  renommée  eft  celle  qu'on  nomme Totia, 

^onime*  ^ji  s*a0pclk>k  anciennement  Thcodofia  Gangrorum.  Quand 


ma.. 


l'on  eft  entré  en  Gaîatie,  fi  l'on  prend  le  chemin  de  main  gauche, 

^g™"""  ]»on  vienc  a  vne  viHc  anciennement  nommée  Cute.  Mais  fi  Ion 

€CS'         prend  le  chemin  à  dextre,i'on  pafFcparBoli,  qui  anciennement 

auoitnomÀbonimenia,  Tousleshabitansdu  pays  de  Natolic 

parloyent  anciennement  Grec?  car  mefmcment  toutes  les  ruines 

que  nousauons  veues  par  les  villes  de  Cilicie ,  Lycie ,  Paphîago- 

niCjCappadoce^amphyliCjBithynic,  &  Phrigie,  auoyent  touf- 

iours  quelques  epigrames  Grecs;  car  l'on  voitles  lettres  Greques 

aux  (èpolchres  &aux  édifices.  Et  pour  autant  qu'allant  le  fufdic- 

chemin  l'on  rencotre  deux  goulfcs,i'vn  de  la  Mptancc ,  èc  l'autre 

deNicomedie,ilfautprédrevn grand deftour,&:  venir pafter  le 

fleuue  Sangari  appelle  àcs  ancies  Sagaris ,  qui  fe  va  rendre  au  pot 

Euxin  :  &  y  a  vn  trcfbcau  port  de  pierre  :  &:  de  la  entourner  le  lac 

mcomedic.  ^uc  j>ôn  yoic  bien  à  clair  de  Nicomedie:  ôc  de  Nicomcdie  l'on  va 

Smlm:      toufiours  fuyuat  la  mer  du  Propotide  du  long  de  la  cofte  du  goul- 

^§£*      fede  Nicomedie^uquel  auos  défia  parlé  cy  deflus.  No9  trouuôs 

des  atitheurs  qui  ont  appelle  Cute  en  Latin  Cutia,  mais  Pline  la 


-O-BSXTLVEES   *A*    P.    BEIO.H.  ^  4ft 

îioxnmatdcfonnô  anctc  l'appelle  Contieû.Curc  a  efté&cft  en- 
cor  viUefortfameufe.EllcafonChafteauencorcn^  vu 
petit  tertre  i&r  a  de  bonnes  murailles.LeChaftcau .  eft  cfi  pédant» 
qui  prend  iufques  bien  près  de  la  ville.  Communément  Jfvn  des 
Bellcrbeis  de  la  Natolic  a  couftume  de  fe  tenir  à  Cute-.car  elle  eft 
maintenant  la  principale  ville  de  cefte  prouince  là.Mais  ancien- 
nement ceftoitvne  autre  nommée  Gordinus*  Il  n'y  apas  long  Gordmus, 
temps  quelc fite aifnédu  Roy  dePerfe  ,  qui  auoît  nom  Ifmael, 
vint  courir  &  gafter  le  pays  du  Turc  iufqucs  en  Galatie ,  n  ayant 
en  toute  fà  compagnie  que  de  quatre  à  cinq  mille  homes  moule 
vaillans  aux  armes:ilapprocha  iufques  à  Cute:&  ayant  là  trouué 
vn  Bâcha,  nommé  Coraguc ,  qui  eftoitviceroy^ui  s'efforça  de 
luvfaircrefiftcnceauecdcuxfbispiusde  gens  que n'auoit ledid 
fils  du  Roy  de  Perfe ,  tellement  que  s'eftant  mis  en  la  campagne»  Maille  d» 
îuy  liuralc  combat  le  fils  du  Roy  ayât  batu  {es  gens  Se  tuéledid  ^°>  ***fi 
Bacha,lc  fett  empaler^  couper  le  membre  viril,Sdc  luy  mettre  ^  k 
sntreles  dens&ie  laiflerlà.Puisa3iegealeChafteau5îequdilne  ^*      ^ 
fccut  prendre  :  car  yn  Bâcha  Eunuque  chaftré  venoit  à  grandes  ^ 
iournecs  au  fecours  auec  gtoffe  armée,  qui  le  contraignit  de  s'en 
tetourner. 

Qne  toutes  tes  femmes  qui  vïuent  en  Turqtde  5  de  quelque  loy  quelles 
foyent^fefont  ordinairement  abatre  le  poil  des  parties  honteufes  >0farh 
<vmu  d'vn  dépilatoire  }&*non  f as  au  r^foir. 
Chapitre    xxxiil. 

On  trouue  de  toutes  fortes  de  viitresà  acheter  au 

►  marché  de  Cute^ain,  vin ,  chair  :  car  il  y  a  <ks  Ar- 
méniens, des  Iuirs,&  des  Grecs.  Nous  trouuafmcs 

>  vnechofe  en  ceft  endrodel:  qui  nous  fembla  plus 

§p§^|  ûngulierc  que  nulle  autre  qu'euâions  au  parauant 

veueen  tout  noftrc  voyage.  Ceft  la  fôurce  d*vn  minerai  qu'ilz 
nomment  Rufma,  dont  nous  deûnons  fut  toutes  chôfesauoirj^/â*. 
l'intelligence,  ïîa  telle  vertu  que  s'ileft  redigé'cnpouldre,  puis 
deftrempéaucede  Peau,  il  faitvnvngucnt  dont  les  Turcs  îbnt 
tomber  le  poil  (ans  douleur  ou  £ns  foupçondc  faite  mal  quei- 
conqueXe  dépilatoire  Rufma  eft  en  fi  grand  vfage ,  que  toute  la  ^^^ 
Turquie  s'en  ferc  communément  :  &  n'y  a  ecluy  en  tout  le  pays 

ïli  iij 


jçfi  T  I- E  K5     'L I V  R  E     D  Ê  S      &XT5  GlV X  A. 

rertiida  oa  domine  îc  Turc, qui  ne  le  fçache  nommer ,  &:  qu'il  a  telle  ver- 
^mt4.  tu.Maisauffi  faut  il  entendre  quelesTurcs.&  Turques  ont cou- 
{tome  de  ne  porter  point  de  poil  en  aucune  partie  du.  corps ,  ex- 
cepté tes  cheucux^:  la  bàrbe,&:  eft  chofe  odicufe.d'en  auoir.Ç'eft 
delà  que  ce  métal  eft  en  û grande  recommandation,  que  le  Turc 
(ainilquelcsl-uifsnous  ont  dit)  en  prend  tous  les  ans  dixhuid 
mille  ducats  degabelle,  que  luypayeceluy  qui  en  a  pris  l'arren- 
tcmenùCeft  vne  chofe  fort  rvouuellc:,  cp'vn  mecal  de  fi  petite 
confequence ,  vaille  tant  à  fon  icigneur.  Nul  des  anciens  nemo- 
dernes ,  au  moins  qu'ayons  peu  fçauoir ,  n'en  a  encor  fait  aucune 
mention.  Celuy  qui  entendra  bien  fon  vfage  ,  cftimeraquafi  au- 
tant fà veine, qu'il  feroitvric  pure  mine  d'argent,  Ceft  que  le 
commûpeuple  a  fi  bien  accouftumé  d'en  vfer,  qtui  ne  s'en  pour- 
toit  maintenant  parler  ;  qu i  cft  caufe  que  fon  pris  s'augmente  de 
iour en iour.  Nous  dirons  premièrement  quelle  chofe  eft  Ruf- 
ma.  Ceft  vne  drogue  qui.  re&rmble  à  de  l'excrément  ou  merde 
de  fer,  finonqu!elle  eft  plus  légère,  noire  comme  quelque  cho- 
fe bruffecjaii fil  eft  ce  v  ne  mine  tirée  de  terre,  &  légèrement  bruf- 
ke.  Toutes  femmes.de  Turquie  qui  en  ont  affaire ,  en  vfent aux 
baings.Car  ieunes  &  vieilles ,  mariées  au  à  marier  au  mpjnsii  el- 
Qceptefour  ]es  onr  £n  p0j]  ^  dc  quelque  nation  ou  loy  quelles  foyent ,  Tur- 
^*fLeU  que53Greques,Armeiiienties,liiifues  ySc  Ghteftiennes  >en  vfent 
M/**»  ras  p0ur fq faire abàcre le  poil.  Qui  n  eft  pas  fans. raifon  :-car  quaiu à 
celles  qui  ay  ment  mieux,  le  faire  tumber  au  pfilothre  ou  depiia- 
toirequWrafoir;  îc  trouuent  àceft.  cffcàk  moult  à  propos.  Plu- 
fieurs habitans  d'Europe  ont  eifayé  faire  des  dépilatoires  auec  de 
la  chaux.  Se  de  L'orpiment ,  .mais  ont.trouué.  l'expérience  mal  à. 
propos ,  pource  qu'iîz  n'ont  bien  entendu  lviage..  Il  faut  necef- 
Tffahe  des  ^Tcmcm  que  ce!  a  fefa  ce  entrant  au  baing  ou  aux  eftuues.  Par- 
jewmes.  ^  voulonsmaintenant  en  feigne  tla..manicre  comme  ils  vfent 
dece  Rufma.-Âpres  qu'ilzi'ont  bacu  en  poudre  bien  fubtile,met- 
tent  la  moitié  autant  .de  chaux  viue,  que  de  Rufma  ,  qu'ilz  d'e- 
ilrempent  en  quelque  vaiiTeau  auec  de  l'eau  :  &.  quand  les  fem-  . 
mes  entrent  es  biings,  lors  oignent  les  parties  qu'elles  veulent 
eftrcfans poil. ,  bifians  la fufdicle  ccmpolidondefias,  autant  de 
temps  cornmeil  fautàcuire  vn  œuf: puis  aptes  efprouuent  file- 
poil  veult  tomber.  Car  quand  la  fueur  commencera  à  percer  la. 
■   peauâbrslcppil  commence»  àne  tenir  p!us,parJa.racJoe;ic.da 


ïuy  tncfmc  tombera  çn  le  lauant  feulement  d'eau  chaude,  moyen*  " 
n  ant  qu'on  ftmalle  de  la.main.Ce  Pfilothre  eft.fi  tempère  qu'iluc 
cui&ptfinty&laiffeia'^^  de.  poil» 

qui  autrement  abatu.au  rafoir,  eft  mai  gracieux  &  rude:cçla  fair, 
il  fcmble  qu  o  face vne  ieune  d'vne  vieille.  Les  femmes  fclc font 
dédiées  pour  elles,  voulansauoir  le  cuir  tendu  5c  poli,  qui  autre- 
ment abatu  fembleroitcftrerude  5c  ride  :  Mais  leshommcs,e£i- 
maas  telles  chofès  féminines  leur  eftre  mal  feantes ,  n  en  veulent 
point  vfer  :  car  ilz  le  veulent  exprciTcmcnt  abatre  au  rafoir. Voila 
la  raifon  pourquoy  telle  manière  de  drogue  eilen  vn  commun 
v  fage,,. tant  entre  les  pi  us.pauures  >  qu'entre  les  plus~riçhes  d'E- 
gypte., Arabie,  Syrie,  &  de  Turquie. .  Il  a  défia  pafîe  iufquesen 
Grèce  ,.&  cft  demeuré  là  :  car  il  'n'a  encor  point  dvfagc  entre  les 
gens  de  la  religion  Latine. 

;  Qve  les  femmesde  Turquie  font  belks  par  fmgukrhé>&  nettescomme 
perles,  h  Chapitre    xxxn i%* 

\  L  n'y  a  femme  de  quelque  laboureur  ou  -ruftique  en  Belles  femme 
Afie„  qui  n'ait  le  ceintfc  frais  comme  rofe,  la  chair  de-  *»  Turquie. 

rlicate.,  &  blanche  .  comme  lai&  ,  &.  lecuir  fi  -bien  ten- 

(  du ,  5c  vne  peau  fi  polie ,  qtfil  femblc  toucher  à  vn  fin 

veloux.  Et  entre  autres  inuentions  quelles  ont  à  ce  faire  ,(çauéc 
compofer  vne  manière  d  vnguent  auec  terre  grafiè ,  que  mainte- 
nant les  Grecs  nomment  Pilo  :  de  laquelle  parlerons  çy  après. 
Ceftc  terre  cft  la  mefmequi  eftoit  anciennement  en  fèmblable 
vfage  ,  nomme  par  les  Latins  Ttrrx  Chu.    Diofcoride  dit  ccsTerr^chU 
mots  touchant  fa  vertu  :  Extmdit  faiem  ,  &  emgat  atquejplen- 
didâm  reddit  :  colorera mfacie  &■  toto  corpore  comwendat  s  in  bdne'ts  pro      * 
nitro detero-euOn la  trouue auifi  en  plufieurs lieux  de  Phrygic ,  5C 
de  Turquie.,  &  mefroement  auons  veu  fa  veine  près  de  Lampfa-  umpfamm. 
cumàl'oppoiitedeGalipoîi.  Et  pource  que  l'vfage  en  eft  grand3  GaûpolL 
il  n'y  a  mercier  qui  n'en  vende  en  fa  boutique.  Quand  elles  de- 
ftrempent  cefte  terre ,  elle  fe  conuertit  en  forme  dvngucnt ,  du- 
quel entrans.au  baing,  fe frottent  foigneufement  tout  îecorPs^^^ 
5c  le  vifage,ôdauent  les  cheueux.Tl  feroit  irnpoffible  de  chercher  ^J^J^ 
chofes  mieux  à  propos  pour  la  fanté  des  Turcs  5c  Turques ,  qui^-8flS[ 

I.Ji         .    ...  :  ^* 


45$  TISSCS     LI-VLB      DES     SINGVIA. 

lesTiirjutt  boyuentde  l'eau  Se  mangent  chofes  crues ,  que  l'vfage  fréquent 
ont ksebe*  cjpilz&ntàçs baings,qui;cft chofcarTcz approuueepar les anciés 
ueuxmn  >.  j^orna|nsu:ar.j(2olumcllc  dit:  J2*MXz'f^'<»»  ciawfitrftCTw  JL«u:A»Kir  rxc€^- 

(àuon*  quimus.Jj2ich.ok  qui  plus  meut  les  femmes  d'Aile  d'auoir  de  cefte 
terre  rcc5  mandée  àfe  laucr,ô£non  de  fauon ,  ceft  que  leurs  che- 
ueuxdé  la  partie  de  derrière  font  tein&s  en  iaune5auecde  la  pou- 
dred'Alc&rma*  qui  ne  pourroit  bien  receuoirla  couleur  ,  û  elles, 
vfbyent  de  fàuon. Et  qui  plus  eft,Ics  cheueux défia  tein&s  en  iau~ 
ne,  fe  toumeroyeat  noirs  ou  rouges,fi  elles  y  mettoyent  du  fauô: 
qar  le  fau  on  qu i  de  fa  nature  eft  acre ,  pou  r  eftrc  fait  auec  de  la  fa- 
$urë--del'huiley&  de  laxhaux ,  les  rendrait  d'autrccouleur  :  mais 
degrerïans  leurs  teftes  de  lafu&ite  terre  ven  font  -beaucoup  plus 
propresà  receuoir  la  teinture.  Car  les  cheueuxde  défais  k  front 
fpnt  coupczrcn feneftres^ein&s en  couleur  noire,  qui  leur  pen- 
dent iufques  defFus  les  ioues,&:  à  la  moitié  du  front ,  comme  on?. 
fait  auxperits  enrans  d'Europe ,  &  cenxde  la  partie  de  derrière 
font  treifez Zc  liez  de  fine  foye  pendans  derrière  le  dos.  Et  dou- 
tant que  lateinturc  de  ceux_.de  defTuslefront  eft  plus  noire,d'au- 
tant  ont  elles ,  félon  la  couftume  y  meilleure  grâce;,  mais  ce  non 
fans  raifon  :  .car  tout  ainfi  que  Ion  peut  accroiftre  la  beauté  dvn 
viiàge  par  bîànchcur,tout  ainfi  eftans  blanches,  le  vifege  eft  ren- 
du plus  plairant.d'.cûre.^.mbré.decheueux  noirs.  Auicennc  tef- 
moigne  que  cefte  terre  de  toute  antiquité  a  eu  lieu  en  Arabie  Se 
en  Egypte  Se  Syrie  pour  laucr  les  cheueux  tau  fltil  la  nomme  Terra 
TertA  ca*iU-c*P*tt°**nh  **  l'appelle  au  Si  terre  à-manger,  difant  que  les  femmes 
lm*m*  greffes  prennent  fbuuent  appétit  d'en  manger  en  ce  pays  là.Elîes 
ont  auffîjes  fourcils  peih&s  de  mefine  teinture  noire,  comme  les 
cheueux  de  deuant  :  êc  d'autant  que  la  coulcuren  eft  plus  noire,, 
^«^^dautantplusefttrouuélevifagcbeaq.  Telle  façon  de  faire  n'efi 
f^/*f=  pâS  fcuiemcnt  obferuee  es  vilîes,mais  généralement  par  tous  vil-. 
TnthÉs*  tegcs<&  Turquânçar  ilzontles  baingsen  tous  lieux.  Ccn'eft  pas 
terexcëZce.  merueille  fi  les  femmes  d'Afie  ont  fi  beau  tcin&  :  car  elles  ne  font, 
point  touchées  de  la  Lune,ne  du  Soleil.*&:  ne  fortét  des  maifons, 
fjnon  qtiandelles  fe  vont  laucr  aux  baings,  pu  vont  aiicemeticrc 
prier  pour  les  jnorts.  Elles  vont  aux?  baings.deuxou  trois  foisla.; 
fepmaine^ou  elles  font  quatre  ou  cinq  heures  àfe  farder,  &mi- 
gnotter,  Se toutesfois il neleurcoufte  qu'vn  afprcàfaire tout  ce? 
<p  auonsdlt  Jolies  y  vont  en  grandes  compagnies ,  ou  les  homes 
;  "         *  aefa. 


ÔBSEUrEJES-     ?Àl    P*    BÏLOÎÎ.  43^ 

nefctrouuent  point:  car  elles  ont  leurs  baings  à  part  r  &  fi  elles 
vont  quelquefois  es  baings  des  hommes ,  ce  fera  en  quelque  iour 
député  en  la  fepmaine  :  car  il  y  a  àcs  endroi&s  ouïes  femmes  ont 
le  baing  pour  fe  lauer  après  Midy ,  d'autant  que  le  matin  eft  pour 
les  hommes.  Il  y  a  auflr  des  baings  en  certains  cndroi&s  ,  ouïes 
femmes  vont  feulement  le  Icudy  après  Midy  :  donc  par  erreur 
ainfi  que  voulions  entrer  en  vn  baing  comme  es  autres  iours ,  ne 
fçachans  point  tel  vfage  ,  trouuans  la  porte  ouuerte  comme  de 
couftume,  eftans entrez aedens,trouuafmes  vne grande  compa- 
gnie de  femmes  Turques,  quisappreftoyent  pour  aller  it  lauer: 
mais  fi  n  euffios  bien  {çeu  le  gaigner  de  viftefiè,nouseiri6s  en  pé- 
ril de  mourir  :  car  la  loy  de  Mahomet  eft  fi  rigojrcafè  en  ces  cas 
là,  qu'vn  homme  n'auroit  moyen  de  fe  fauuer ,  finon  en  contre- 
faîfant  du  fol  :  car  (  comme  auons  dit  )  les  Turcs  penfent  que  les 
fols  participent  de  quelque  faindeté  pour  leur  innocence.  Tout 
ainfi  comme  il  n'y  auoit  anciennement  aucun  édifice  à  Rome 
qui  monftraft  plus  grande  magnificence  que  les  baings  Se  les 
temples ,  aufli  ne  voit  on  rien  de  beau  par  les  vilies  de  Conftanti- 
nopie,&:  autres  lieux  de  Turquîe,que  les  Mofquees  Se  les  baings. 
Siccneftoitlagrandc  commodité  que  les  Turcs  Se  Turques  ont 
àcs  baings  à  fe  nettoyer  le  corps,  ce  feroit  grande  pitié  tant  ils  fe- 
royent  pou  ilîeux  Se  fales  :  mais  au  contraire  par  tel  bénéfice ,  ilz 
font  les  plus  nettes  gens  du  monde.  Auflï  leurs  baings  font  grads 
palais ,  Se  ne  coufte  que  la  valeur  d'vn  caroîus  pour  chaque  fois,, 
car  en  toutes  les  contrées  du  monde  il  y  a  vn  certain  taux,  ioincV 
que  les  baings  ont  efté  entous  pays  Se  de  toute  ancienneté  en  re- 
commandation enuers  les  hommes.Et  comme  tefmoigne  Iuuc- 
nai  Se  Horace,  le  taux  eftoit  de  payer  à  Rome  vn  talent ,  comme 
feroit  maintenant  en  Frace  de  payer  deux  fouîs.Loanefe  chauf- 
fe point  au  fortir  de  Ieans,non  plus  en  entrant  qu'en  fortanr,  auf 
fin  eft  on  fubicdàpaycrcotrets&:  bourrées-,  car  entrant  leâns^^.^. 
pour  aller  felaucr,lontrouuc  vne  grande  voûte  ronde,au  milieu  rurfuez. 
de  laquelle  il  y  a  communément  vne  bellcvfontaine  d'eau  froide^ 
©u  Ion  fe dcfpouitlc  fur  lappentis^ cnuclopc Ion  toutes fes har- 
des  dedens  fa  robe.  Alors  l'homme  des  baings  baille  deux  grands 
linges  de  toile  peintc,dont  l'vnc  fert  à  mettre  deuat  fcy,  Se  l'autre 
à  fe  couurir  le  dos  Se  la  teftc.Dc  là  ion  entre  dedens  le  baing ,  on 
ion  trouuepluûeurs fontaines  d'eau  chaude^  quand  Ion  fe  veut 

KKk 


,440  TI-ERS      LIVRE     DIS     SINGVLA. 

Iauer,rlnefaut  qu'ouurirvnecaneîle.  Et  alors  les  efclauesvicfr»" 
nent  laucr  les  hommes ,  &  les  frottent,  &  eftriilent ,  &  àcouftrêr» 
Il  fcroitlongàracomptcrlc  miftereparle  menu-.maisdifans  fuc- 
TV^aiw^-cindcmcc,  voila  qu'ilz  font^Or  eft  chofe  trop  deshoacfte  de  dcC- 
da-Uings.  couurir les  parties  honteufes  Ieans  :  parquoy  chacun  eft fort  bic 
^ntourné de  fon  linge*  Les  variées  du  baing  font  mettreà  dent, 
■celuy  qu'ils  traictai  t  v  ôc  là  le  poignafïènt  iuy  dcbaillans  &  em- 
•poignanslcs  mufcles  du  col,  deselpauies ,  du  dos ,  des  bras5,  des 
cuiftes.  Puis  après  lcmettansàlarenuerfe,font  tout  ainfïdela 
poi&rinc ,  îe  frottans  de  tous  coilez»  A  la  parjfin  iîz  iuy  rafent  la 
teftc:car  d'autre  partie  cela  ne  fait  pasî'efclauc:  mais  on  baillera 
bien  vn  rafoir3  &  alors  ceîuy  qui  fc  îaue ,  ira  en  yn  petit  lieu ,  qui 
cft  au  cofté  du  baing.-  &  là  Iuy  rnefmes  s'abbatra  le  poij  des  par- 
ties honteufes.  Ayant  fait  tout  cela,il  fort  &  va  fur  fon  appentis. 
Alors  le  maiftre  du  baing  Iuy  rebaille  deux  autres  linges  nets, 
Cecs.Sc  là  s  eflaye  honneftement ,  &  fe  reueft ,  Se  payant  vn  afpre, 
eft  quitte.  Voila  la  manière  de  faire  de  tout  le  pays  de  Turquie, 
qui  eft  moult  dhTcmblable  à  la  façon  de  France ,  ou  Ion  a  acou- 
ftumé  de  fê  coucher  en  vn  lia:  au  partir  des  cftuucs.  C  eft  à  bon 
droid  que  nous  nommons  les  noflres  eftuucs ,  au  regard  des  au- 
Efiumde  £res  qu'auons  nommez  baings.  Àufll  peut  on  bien  fçauoir  que 
France.  coûtes  autres  nations  d'Europe  n'en  vient  pas  comme  ion  fait  en 
France  :  car  nous  voyons  mefmement  en  toutes  les  villes  de  l'I- 
taîie,qu  on  ne  fc  couche  point  en  vn  liât  au  fortir  des  cftuues ,  no 
plus  qu  en  toutes  villes  du  pays  de  Bohême ,  Alemagne  &:  Hon- 
Bdmi^A*  grie.  Apres  les  baings  de  Turquie,  ne  trouuons  point  de  nation 
^w.  qui  approche  mieux  de  la  manière  des  baings  anciens ,  que  ceux 
des  Almans  :  car  ilz  fe  laucntprefque  auffi  fouucnt  comme  Ion 
faites  Turquie  :  &  mefmement  la  couftume  eft  5  que  comme 
quand  nous  donnons  argent  à  quelque  chambrière,  difons  pour 
£es  cpingïes,eux  difent  donner  pour  fon  baing.Nous  auons  trou- 
né  eftrange,qu'allans  au  baing  au  pays  des  Suiffes,  les  femmes 
chaftes  entrent  au ec  les  hommes  tant  eftrangers  que  voiûns.  Soie 
que  chacun  porte  fon  linge,  couurant  fès  parties  honteufes ,  tou- 
tesfois  voyans  les  femmes  nues  leans^pouree  que  la  couftume  du 
pays  en  eft  tellc,ilz  ne  le  crouuêx  mauuais ,  &  n  y  font  point  d'a&c 
deshonefte. 


SU; 


OBSERVEES      PAR   P.     BEEOK»  441 

ta  recepte  dont  les  femmes  fi  teignent  les  cheveux  &  lesjourcils  en  noir, 
&  les  hommes  vieux  la  barbe.  Chapitre   xxxv. 

.  Amaniere  de  compofèr  la  mixture,  dont  IcsTur-  ErainyufU 
ques&  Greques  vient  en  fe  teignant  les  fourciîs, \^es  yfium. 
eft  faite  diuedèracnt.  Nousauons  aprins  la  plus  Feretro»£ifi' 
commtine,  Se  de  laquelle  les  femmes  fçauent  \âf>*g»a- 
^ag^pçjBsar^  recepce.-  Elles  prennent  vne  petite- îame  derain  cSciijhe. 
bruflee ,  quorvappelle  xs  viluni ,  Se  en  vulgaire  Iralien  ,  feretro  0m2bAClttt' 
J'Efpagnar,  pefant  enuiron-  vne  dragme  ou  deux  :  Se  la  frottent 
légèrement  deffus  vne  pelle  de  fêr ,  êe  en  la  froifïans  la  mettent 
en  poudre  :  en  après  prennent  vne  bonne  galle  d'Htria  nommée 
Omphacicis^qu  elles  mettent  defTus  la  poudre.  Puis  prennent  va 
fer  chaud,  non  pas  tout  rouge,  &:  pefent  deffus  lagalie,qui  le  fond 
àla«  chaleur  :  puis  Farroufent  de  trois  ou  quatre  gouttes  d'eau. 
Puis  réchauffent  leus  fer  de  rechef,  Se  pefent  fur  la  galle  iufques 
à  tant  qu'elle  foktoute  fondue  Se  meâeeauecladicie  poudre  d*e- 
rain  bruflé.  Alors  la  mixtion  qui  en  vient  fex&cn  manière  d'ancre 
médiocrement  cfpoiâcvde  laquelle  lesiemmesen  prennent  auee 
4f.n  petit  bois  fait  en  façon  de  pinccau,-&  s'en  ftottent  les  fourciîs 
.elles  mefmes,.  en  fe  regardant  dedens  vn  miroir,.^  lalaifiènt  fei- 
cher.  Et  continuans  cinq  on  fix  fois  en  ceâc  forée  *fc  rendent  les 
fourciîs  plus  noirs  que  n'cftlc  poil  d'vne  taulpe.  A  la  fin  elles  ef- 
facent le  noir  qui  eft  attaché  à  la  peau  des  fourciîs  ,  fefrottans 
auee  vn  linge  mouillé.  Plufieurs  Pérores  femmes  Se  Biles  Gre- 
ques  fe  font  abatre  le  poii  des  fourciîs  aucc'du  Rufma.Puis  fe  tei- 
gnét  le  vifàgc  au  deiTus  de  iaxacine  des  fourciîs  auecladictc  mix- 
tion,faifans  la  peinture  courbée  en  arc,à  fin  qu-il  femblc  que  les 
fourciîs  foyent  eûcuez  en  croùTant»  Gela  eft  beau  à  voir  de  loing.^ 
mais  qui  approche  les  yeux  de  près  les-regardant  arxenriucment, 
le  trouue  laid.Combien  que  ce  neft  pas  ebofe  moderne:car  l'vfa- 
geenaefté  de  toute  ancienneté  comme  ferons  plus  aplani  voir. 
cn.ca  fiiy  uant  chapitre... 

K.KLk.  ij 


442,  TIERS      LIVRE      DES     SINGVLA. 

"Louange  dvnebeauté  excellente  félon  la  mode  des  Grecs . 
Chapitre    xxxvi. 

Lùtutjgede   ^^^S®  Vand  les  Grecs  vculét  louer  vnc  beauté  par  cxcel- 
heauttlU   W^^^^^  *cnce  >  &s  haulfentîa  main  ,  Se  la  ciment  à  cofté, 
Grenue.       !  |ll||§i|/|  môftrans  le  poulec  Se  le  premier  doigt,  ioin&s  cn- 
^^^^^^  femblcpar  les  extremitez,  fermez  en  rond ,  en  ai- 
<P^^&âpl  Tant  que  l'œil  deceîuy  dont  ilz  parlent ,  cft  aufli 
grand.C'eft  vn  prouerbe  ancien  moult  célébré  par  les  eferits  des 
Grecs  iuges  delà  beauté  féminine,  qui  furnommerét  les  femmes 
ïhayùfb*     d'excellente  beauté  en  vn  feul  mot  Platyophthaimos ,  qui  vaut 
thdmoh      autantàdirequelargesyciix.Maisc'eftàcaufe  àcs  fourciis  efle- 
Grmàyeux  ucz  qU  j  font auoir  bonne  graccaux  femmes  qui  ont  le  vifage  lar- 
fînttrouueX,gc.En  cas  pareil  quand  i!z  veulent  louer  la  beauté  d'vn  homme 
beaux  en      £Qn  rokuftCji|z  m0nftrcnt  le  mefme  cercle  qu'auos  di&  des  fem- 
Qm**         mcs:&  pour  adioufter  violence  à  leur  parler ,  ilz  diroyent  volon- 
tiers qu'il  a  les  yeux  auffi  grands  que  ceux  d'vn  bœuf.  Si  Ion  vou- 
loir obferuer  les  fiâmes  Se  antiques  medales  Se  peintures  des  an- 
ciens Grecs ,  Ion  y  trouucra  les  yeux  d'exceffiuc  grandeur  ,  au  re- 
gard de  ceux  des  medales  Latines,&;  les  cheueux  longs.Les  fem- 
mes des  Turcs  ne  font  pas  grand  exercice:car  elles  ne  fortét  gue- 
rcs  hors  du  logis,  finon  quand  elles  vont  fur  les  terraffes  des  mai- 
fons,ou  elles  demeurent  tout  le  iour,  Se  chantent  à  leur  mode  en 
compagnie  de  leurs  voifînes.Les  Greques  principalement  en  Pe- 
ijherté  des   rc  de  Conftantinople ,  ont  plus  de  liberté  qu'es  autres  villes  fub- 
femmesde    ic&es  au  TurCj  car  elles  vont  par  la  ville  aucc  vnc  grande  parure, 
pere-  Se  principalement  fi  leurs  maris  font  quelque  peu  riches ,  feront 

Parures  des  can£  £xc^cc$  &  aornees  de  parures ,  qu'elles  aurôt  les  doigts  char- 
femmes  Gre*  ^  ^  bagues  quafiiuiques  dcfiusle  bout  des  ongles^  ont  touf- 
^m'  iours  mille  petis  fatras  pendus  au  coi  auec  plufieurs  chaînes  tant 

faufesquevrayes,&  feront  ceindesde  quatre  ou  cinq  cein&u- 
res,les  vnes  de  fine  foy  e ,  les  autres  d'or ,  les  autres  entournecs  de 
pierreries  tant  bonnes  quemauuaifes.  Elles  font  richement  vc- 
ftucs  de  foyc,  tellement  quelles  portent  toute  leur  rïchcfTe  for  el- 
les pour  la  monftrer.  Mais  on  ne  ks  voit  en  tels  habits  que  les 
iours  de  feftes  ,  quafi  en  mefme  équipage  que  celuy  du  iour  de 
leurs  nopcesj&diroitonàlcsvoir  aller  par  la  ville  que  ce  font 
çfpoufees. 


&es  chofes  difficiles  &  croire ^ue  les  bafteîeurs  de  Turquie  font  en 
publk,  'Chapitre     xxxvn. 

t  E  s  Turcs  ont  des  loueurs  de  pafTcpafIe,&  bafteîeurs,  ^^  ^ 
\  tout  ainû*  que  nous  auons  en  Europe.  Ceux  qui  font  T„  ^ 
>  celles  chofes ,  fontapprins  de  ieunefïè  :  Se  ncfont  ia- 

[  mais  autre  meftier  duran  t  leur  vie^  lis  font  des  chofes 

qui  feroyent  difficiles  à  croire  qui  ne  les  auroit  veucs  :  comme  cft 
de  rompre  vn  pillon  de  fer  à  coups  de  poing, tellement quvn  ho- 
me donnant  quelque  centeine  de  coupsen  vue  mefmc  heure ,  le 
rompt  prefêntement.  Nous  auons  veu  vn  homme  portant  vn 
trefgrandchcuron  tout  droicr.  deffus  vnc  efpaulc  :  Se  fans  le  tou- 
cher Je  faifoit  fauter  fur  l'autre,  &  inceffamment  remuer  fans  le 
touchcr,le  faifant  fauter  çà  Se  là.  Ces  bafteîeurs  s  accompagnent 
en  fèmblc  vne  bendc  de  demie  douzaine,&  vont  par  les  pays  fuy- 
uans  les  villes  &  villages,  ou  ils  fçauent  qu'ils  trouuent  les  ges  a£»  „.  , 
fembîez  es  marchez  ,&.  là  font  mille  fïngeries  en  public,  comme  r^L^Jft 
marcher  les  pieds  nuds  deffus  des  cimeterres  trcnchants,rompre  traLj, 
&  départir  des  pieds  de  bœuferuds  aux  dents  fanscoufteau  ,  Se 
puis  après  prendre  les  os0Se  en  les  frappant  dcfïus  leurs  ïambes  les 
rompre  en  pièces.  Si  ne  l'euffions  veu  faire,à  peine  1 euffiôs  creu: 
mais  ne  pouuons  croire  qu'il  n'y  ait  de  la  tromperie:  car  après 
.qu'ils  ont  décharné  les  os  des  pieds  de  boeuf,  ilsfe  donnent  défi 
grands  coups  des  os  fur  leurs  bras  Se  iambes,quc  nous  cfmcruciî- 
lonsqucle  feu  n'en  fort,  &nc  cefTcnt  de  frapper  iufquesàtant 
qu'ils  ayent  rompu  lefdits  os  de  bœuf,  Se  ainfi  en  rompent  demie 
douzaine  les  vns  après  les  autres.  Si  telles  chofes  n  euffent  efté 
faites  en  la  prefènee  de  grands  perfbnnagcsdenoftrc  nation  ,  Se 
qui  font  encor  viuans ,  à  peine  l'euffions  voulu  eferire  :  mais  n  ca 
auons  fait  difficulté  fçachansque  n'aurions  faute  de  tcfmoings. 
Si  n  euffions  veu  quelques  autres  bafteîeurs  de  foible  corpulen- 
ce,faifans  auffi  ceftemefme  choie,  euffions  attribué  cela  à  la  ver- 
tu d'vn  homme  fort  par  fînguîarité,  plus  robufte  que  nul  autre, 
comme  eftoycntlcs  Athlètes  du  temps  pafTé,dont  Hippocrates 
&  Galicn  ont  tant  parlé.  Mais  voyans  que  plufîcurs  font  le  fèm-  f^f*  ^ 
blable,  ne  nous  fommes  peu  perfuader  qu'il  n'y  ait  de  FarFe&crle.  W**"* 
Ces  bafteîeurs  fe parquent  en  quelque  place.,  ou  ilyaaflèmblce 

KKk    iij 


^44  TXEB..S  .LJVJLE-    I>IS      S.INGVLA. 

de  beaucoup  de  m  onde  èïi  quelque  marché  :  &ce  pendant  que 
les  vns  font  des  bafteleries ,  las  autres  demandent  de  l'argens  aux 
•  /afliftansquiles  regardent.  Iln.ç.leutdonnequine  veult ,  mais  ils 
AesTims  'importunent  tant  que  les  vns  leur  en  donnent.  Us  demandent 
pour  l'amour  de  Dicii  :  car  ce  neft  point,  de  honte  entf  eux  de- 
mander pour  L'amour  de  Dieu.. 

BelïluiiïedeTtirqwes  Chapitre      xxxviii^ 

A  manière  de  îui&et  des  anciens  veft  encore  en 
vfage  chez  les  Turcs ,  telle  qu'elle eftoit  ancien'ne- 
meten  Grecc,&:  à  Rome.  Cë.fU'vn  des  plus  beaux, 
paffeceraps qu'on  pu i{fe voir  en  ce.pays  là.  Car  les 

hommes  qiiiluiâ£t,fon.t  tous  nuds»  excepté  qiuls 

ont  les  hauts  de  chauffes  de  fart  cuir  Hfïe  &  huilé»  &  poli  de  peur 
qu'ils  n jayent  prinfe  l'vn  a  l'autre.  Et  fi  d'aduenture  quelque  ieu- 
ne  homme-fc  trouue  prefent  quand  ils  luiâ:ent(  car  pluiieurs  ges 
syaffemblentpourles  regarder)  qui  ait  le  bruit  deftrerobufte 
&  fort,&:aitenuiede  sefprouuer  cotrevn  autre,  alors  quelqu'vn 
l'inuitera  en  luyfaifant  honneur^  s'il  fc  met  en  campagne.,  les 
bafteleurs  luy  bailleront  des-brayes  ou  hauts  de  chauffes  de  cuin 
&  là  fe  defpouilletoatjes  deux  fur  le  champ.  Ceux  qui  font  en- 
tour  eux-^ofriroat  de  leur  ayder  aies  defpouillcr ,  &  leur  tien- 
dront vne  rabc.au  quelque  linge  haufé  pendant  qu'ils  defpouil- 
îentîeurs  veftemens.  Quand  ils  font  prefts,ils  fe  mettent  en  pla- 
ce :  &  poupee  qu'ils  font  nuds ,  &  queleurs  chaujffes  leur.fpnLbié 
fèrreerfur  les  cuiurcs)qui  prennent  iufques.au  bas  des  genoux  ,  8c 
font  bien  ferrées  au  deCus  du  gras  de  la  iarabc ,  ils  n'ont  point  de 
prinfe,&;  par  ce  poinâ  font  lôg  temps  à*  entremettre, bas.  Ils  ont 
grand  difficulté  à  trouuer  prinfe  en  lui&ant:car  leurs  bras  &  tout 
j>imc*héùlc  corPs  &nc  gliffintt--  La  luide  càbcilc,  &  faut  pour  auoir  la  vi- 
imtrcah*  âoiresqus  lvn  mette  1  autre  fur4e  dos,  à  quoy  faire  y  a  grand'  pei- 
treà  k  îm  ne,  Si  bien  l'vn  cft  tombé  fur  le  codé  ou  à  genoux ,  &  que  le  com> 
Be  des      pagnon  foit  encor  debout ,  toutefois  il  n'aura  pas  vaincu  pour 
Tm^        ceiz  :  câr  il  e#  licite  à  cefte  iui&e  de  prendre  prinfe  par  tout  &  par 
les  ïambes  auû>,&  quand  ils  feioignent,ilss!engcredônent  le  clin- 
-   quet,&  s'ils fepcuucpt  tenir  par  le  poignet ,  ils  s'entrebâillent  h 
Um&*  Ils  feront  quelquefois  %  voçl  heuîeJVn  &  l'aucre^as  fe 


O  B-S^ÎLY  1 1 S    *  A*.     *,  ^  B  ÏX  ôtt*  ^J4J 

pouuoir -mettre -for  le  dos:  &  n!cniiuyroiuamais  à  ceux  qui  les 
regardcnt,tantlaiui&ccflpki{ante&  dauteufe,  &  là  ou  l'on  lu- 
ge plus  diuerfcment ,  tamoft  dVn ,  tantpfl:  d'autre*  Et  û  lVncft 
vaincu,ii  ne  fera  moinsdcfplaifànt  que  ccluy  qui  aurait  perdu  ic 
pris  à  refcrime.  Us  oignent  quelque  fois  le  corps  aucc  de  l'huile: 
Se  alors  il  fait  encor  plus  beau  voir  lalui&e:  car  leur  prinièeneft 
plus  difficile.  Ils  ont  leur  rufèà  cela ,  ne  plus  ne-moins  qu'ont  les 
Bretons  a  la  roanire  de  faire. 

Que  les  Turcs  vont  hardiment  fur  U  corde. 
Chapitre       xlcxix. 

jArchcrenlairdcfTuslacorden'eftpasde  rinuention  Dacetm  fir 
l  des  hommes  de  maintenant:  car  nous  voyons  lesef-  kcordes. 
|critsdcs  anciens  en  faire  mention  enplufrcurs  lieux:  SchosnoUtes 
*mais  il  n'y  a  nation  viuante  qui  fçache  mieux  aller  fur  Fmam^- 
la  corde  que  font  les  Turcs:  car  ils  l'apprennent  dés  leur  enfance, 
&:auâi  le  continuent  durant  leur  vie.  On  les  nommoit  ancien- 
nement Schœnobates  ou  Funambulû  lis  s'aflcmblentvne  gran- 
de bande  de  Turcs ,  iufqucs  au  nombre  de  hui&  ou  dix  qui  por- 
tent leur  cordage ,  &  autre  bagage  quant  &  eux.  Vn  chcual  fer* 
uira  afTcz  à  toute  la  troupe  :  car  ailans  par  pays  ils  nefont  pas  gra- 
des iournees  :  &  quand  ils  font  arriuez  en  quelque  village  3  lors 
fè  mettent  en  quelque  lieu  ipacieux  ou  ils  defployent  leur  baga- 
ge^ dreflènt  deux  hautes  pouftres  fichées  en  terre,  ou  ils  tendét 
deux  cordes ,  dont  l'vnc  eft moult  haute  deflus  l'autre.  Celle  qui 
cft  tendue  Iàheut ,  n'eft  pas  pour  faire  kurs  icux  :  car  ils  demeu- 
rent à  la  pîushaCe,,  ou  ils  font  quelquefois  demie  douzaine  a  la 
fois  :  &  dit  oit  on  à  ks  voir  que  ce  font  Efcureaux ,  tant  ils  font 
duicb  à  voltiger  fur  lacordcXa  corde  qui  cfi  tendue  la  plus  hau- 
te, cftièuîement  pour  ceux  qui  y  vont  aucompas  par  deïTus.  Ils 
font  leurs  ieux  en  public  :  car  aufli  font  leurs  cordes  tendues  en  la 
campagne.  Mais  quand  quelques  vns  d  entreux  font  defeenduz 
de  la  corde,  ils  vont  demandansau  peuple  qui  les  a  regardez:  & 
font  tant  importunsàdemander,  qu'il  y  a  bien  à  faire  à  les  cfcon- 
duire.  Il  fèroit  quaû  incroyable  à  pîufîeurs  û  ne  fpecîions  par  le 
men  u  ce  qu'ils  font.  Si  les  villageois  de  noftre  Europe  en  auoyct 
feulement  veu  la  quatriefme partie*  nous  nedoutons  que  la  plus 
-  "  KKk  iiij 


$4$  TÏ^KS     LI Y  B. 1    BIS     SI  KG  V  LA.       ^ 

grand*  part  d'iccux  ne  crcuft  que  ce  fuft  enchantement.  fyfais  ils 
font  cela  par  vf^ge^aptins  deicuneffe ,  comme  ceux  qui  font  les 
fcubrefauts  :  car  les  Turcs  n'en  font  point.:  Us  fe.  pendent  par  vn 
longtorfcç  de  cheueux  qui  eft  defius  leur  tefte  ,  comme  ceux  dV- 
turcs  **tlx  nefemmc.Tous  les  Turcs  ont  généralement  la  tefte  rafee ,  exce- 
tefieufa^  ptéfiirlefommet,  ou  ils  laifïènt  leurs  cheueux,,  à  fin  que  Maho- 
met trouue  prinfe  quad  ils  les  leucra  de  terre  le  iour  du  iugemet» 
Celagift  en  leur  volonté  de  les  auoir  courts  ou  longs.  Les  Turcs 
fcrafènt  la  tefte  Fvn  à  l'autre,  du  mefme  coufteau  duquel  ils  cou- 
pent leur  viande  î  car  ils  le  fçauent  fi  bien  aguifèr  qu'ils  le  font 
couper  comme  vn  safbir.  Toutesfois  il  y  a  àcs  barbiers  en  Tur- 
quie^ qui  vfent  des  rafoirs  qui  font  differens  feion  les  pays  :  Car 
ceux  de  Syrie  Se  d'Egypte  font  efpois  Se  pciànts,&  bien  trenchas: 
defquels  le  manche  n  eft  pas  courbe,  ayans  comme  vne  tefte  au. 
bout  :  &  pour  ce  que  l'acier  eft  damafquin ,  ils  ont  trcfborurcn- 
chanta 


&es  Chiem  de  Turquie >  &deh  chajje  des  Turcs* 
Chapitre       x  L. 


Chapitre 

ékiem  it  ¥yfâfâ§&  E s  chiens  que lcsTurcs  nourriftenten  Turqui>,n'ont 
targuie.  S  ^^^  quelques  maiftres  particuliers.  Toutesfois  les  maftins  . 
§  j5£*2jdes  villages  ne  laiflent  pas  d'eftre  nourriz  fans  entrer 
¥?  M^zStê  ésroaifons  :  car  il  y  a  toufiour s  des  tapiz  par  terre  par 
la  place.  Etpour  les  nourrir  ils  ont  quelques  pierres  creufes  au 
cofté  de  la  muraiikide  leurs  maifons,ou  ils  portent  le  demeurant 
àcs  potages  Se  du  pain  Se  ofïèments ,  à  fin  que  les  chiens  le  man- 
gent quand  ils  y  viendront.  Chaque  chien  fait  la  garde,  Se  de- 
meure ou-il  a  accouftutnc  d'eftre  nourri:  &  mefmement  H  engar- 
de  les  autres  chiensdfy  venir.  Et  chaflè  celle  cfpece  deioups  {au- 
uages  qu'ils  appellent  Àdils,qui  font  û  communs  par  Turquie:  Se 
métiers  de  ^es  engarde  d  entrer  es  villages.  Les  Leuriers  de  Turquie  ne  font 
rmrmis.  pas  ^  grands  comme  les  noftres  .>,  mais  font  de  la  hauteur  de  ceux 
que  nous  appelions  metifs  :  Se  ontainfi  la  queuëveîue,  les  aureil- 
les  pendantes  comme  les  leuriers  de  Crète:  Se  les  tiennent  atta- 
chezen  laifïc»  comme  nous  faifons  les  noftrcs.  Auffi  ont  des  Es- 
pagnols pour  chercher  la  Perdrix.  Ils  fçauent  voler  à  rEfpcruietj 
&  aFÀutour^au  Saerc^&;  an  Faucon.  Mais  quandiis  rccJamen c 

leus 


ôbsextïss  ;  pai.    r-  FEroîC.  447 

.  Jeor  oMcau>ils  leur  crient  feulement ,  houb  houb  :  qûï  eft  la  voix 
donnée  pout  les  appeiîet  à.  leur  mode»  Les  fauconniers  Turcs 
notent  feursoifeâuxfurlamaiDdextre,&  quelqnesfbisiesnour-  F^oimtm 
riû^ntauec  desxruis  de  P^uMe^duarcis^en  faute  dechairfraifebe., 
Ceuxqu  i  habitent  eu  pays  de  chaffe  ne  îaifïènt  perdre  i'oceafîon 
de  prendre  les  beftes  douces  ,  n'ayans  foing  de  noires  :  car  (corne 
auons  dit)  ils  ne  man^cnr  lacbairde  Porc»Mais  sjI aduenoit que 
les  chienseu&ntfu&qucouîeCkanglc  quelque befte ronfle,  ô£ 
qui  n'a  largement  feigne  ,ccuxqui  font  fcmpulcux  n  en  mange- 
ront point  :  car  (comme  auons  par  cy  deuant dit }  il  leur  en;  de£- 
fendu  de  manger  fang^nc  befte  quirfairefté  feignee:  Toutcsfois 
ilsneîaiu^rontdcrairepco'fttdelcufvcnaifûni car  ilsla  vendent 
aux  Chrcftiens  jfcacha&s  que  les  luifs  ont  auiE  cda  defTenda 
comme  eux. 

les  noms  desphntestYWuêesmchemmam^icjfakmmt 
Olympe,  Chapitre       X  L  i. 

Stans  partis  de  Contienm  >  ayans  fuiuy  le  chemin  par 
!  deifuslamontagne^our  venir  àCoBfta»tinoplc5,ar^ 
*  riuafmcsen  vnvMlagccntre  les  valleesdu  contenu  du 
i  mont  Olympe:  car  la  montagne  eltdc  moult  grand 
cftendue.  Nous  trouuious  grand*  quantité  de- la  plante  de  Tra- 
gacantha ,  de  laquelle  les  habkans  cueillent  la  gumme  que  nous- 
mettons  en  vfage.  Le  fen  demain  partifmes  k  iour  ouuert  contk 
nuans  à  la  mon  tagnc,qui  nous  duraient le  iour^Sc neiêimics  que 
k  rrauerfer.  Bilans  paruenus  au faifbynoustrouuaimesencores 
grand^  quantité  de  neige  :  car  la  grande  froideur  qui  eitià  haut 
Stuceen  la  moyenne  région  de  Lair^nesadoucift  jamais  Ceft  la 
f aifon  pourquoy  ûfàic  touûours  grand  froid  fur  la  ioœmicé'-des 
hautes  montagnes»,  Se  nés  en  defcouurcnt  iamais ,  &  quelanei- 
ge  ne  fe  fond  point  l'eft,é~  Nous  en  auons  l'exemple  des  monta* 
gnes  d'Ethyopie  y  ou  tout  le  mode  qui  habite  es  plamesve&bru£* 
le  de lexçcfEuc  chaleur  du  Soleil r&toutesfois  Tàeophrafte  par- 
lant  de  laMirrhe,  Encens  %Sz  Caflfia,  tefmoigne  que  les  monta* 
gnes  y  font  couuertes  de  neige  :  comme  auiE  eft  le  mont  Liban, 
en  Syrien  IciT^oatdelaSphachie^Ida^  Dideusen  Crète  rcec 
Beaaxmoins.Ic«mde£ûi;rje  maluaifieyeft  cueiilv  es  plaines voi^ 

'  LLi 


Jdttuua*' 


\2j4S  -ÏIETCS     J/IYStE     DES    -SINGV.LA. 

:  fines.  Ce  n'eft  donc  merueilles  û  nous  voyons  quelquesfois  grc£ 

■  ler.cn  cftélors  qu'il  fait  grand  chaud  en  rerre.  Nous  trouuions 

-desSauiniér&Giuuagcs, .  tels:q?ueccBX  :que:nous  auons.  cultiviez 

^xïbresdu  -cn noz'iardins,  qui  font  fifreijucnrscn  cb mont^-qu'oa-  ne  voir 

mmtQlym*  verdoyer  les  cou  ftaux  d'autre  arbre  plus  fréquent.  Les  Sapins  y 

jfc.  xcoiflent  en  excciEuc  hauteur,  qui  y  portentpeu  de  refîne.  Il  y  a 

cqueLquesaibres  d'E-feulus  r  &£.Oftria>. queics  François  nom ment 

:Àa  Haifoey&  auojesièm  blablœ.  Les  Piasiau  uagés  ao  m  ruez  Pb- 

-cesejfonrmoiikfrequens en  quelques  eèdrafets  des  fore{h;côm- 

-nieau{E  vneefpece  de  CheuicdifccntaunoftrCjlequel  croyons 

*que  les  anciens  n'ayent  cogacu:  câril  aies  glands  non  plus.gros 

Hellébore    :*pepetitcsfebues.  L'HeIkboré nbif  ypcoduklihxemcnt  la  Heur 

Jonjfant  de<iou%cy&  y  croi&cn  grand:  quantité., Geiik  le  premier  lieu  ouïe 

*ouge,         veimies  porter  la  fleur  rouge.  Nous  trouuafmes  vne  manière  de 

sedon.         plante  nommée  Ledon,  beaucoup  plus  grande  que  celle  de  Gre- 

F- s.  1   ce  :  te  *iu*; .cfl:.3)ffecer«c.cac^e€c*  AulU  trouuafmes  quelques 

figne  i       autres  arbres  ^plantes ,  desquelles  n'aimns.  nom  antique  à  les 

*     '        exprimer ,  que  remettons  en  autre  temps  à  deferirc.  Nous  con- 

"îinuafmes.Iesforc&sdePignets&deSapins,  &:  vinftnès  ce  foir 

caucher  en.  vb  autre  village  entre  les  môtagnes.  Nous  obfcruios 

expteffcmcatfiYoirrionsdcsMelcfcs,  que  les  Latins  nomment 

Lariçes.:  mais  nous  n'en  auons  trouuc  par  tout  ce  mont,  non 

plus  que  par  Aûc&:  Grèce.  Et  pour  autant  qu'il  n'en  croift  point 

en  Grèce  ne  Aûe,lcs  autheurs  Grecs  anciens,  neaufu  Theephra- 

ite&Dioicoiide&LGalicnnen  ont  point  parié,en tant  que  telle 

plante  Jcureilojt  incQgncuc,comme  auflî  à  rous.Nous  n'ignoras 

pas  que  Diofcoridc  &c  Galien  nayent -parlé  quelque  peu  de  fa 

gumme:  maislapîanteleuraeitéincogncue.  Etnouseimerueil- 

Ions  de  Pline ,  qui  en  parlant  de  Thuya ,.  a  penfi  qu!Homere  ea 

cuÛJtait mention:  mais  l'erreur  vicnt.qu  au.  lieu  ou  il  deuoit  metr 

"trePicea?il a  entendu, du  Larix..  Icy  ferons  voir  Ieportraict  de 

Larix,remettans  aie  fpecifier  par  le  menu  auec  les  arbres  conife- 

tcs.  Le  lendemain  nous  defcendifmes  toute  la-  montagne ,  ou 

n.'obferuafme5  finon  quelque  diftincb  efpece  dcPicea  y  dont  les 

cônes  ou  pommettes  nc.ibnt  gucres.pîus  gt&fe  qtieîe  bout  du 

.        .    petit  doigt.  Nous.troutjafmes  dcisiefmc  iarbriueau  que  les  ha- 

5?f*     *'  bôtans  dei'Abrutsea  Italie  appellent  en  vulgaireSpinaCerifola. 

Eftaas  ja  defeendus  hors  du  moar»  j)ousar.riuafmes.en  vne  gran- 


OrfSÊR'VEES  'SA*-'''*.' -     BËLOM.-  44^ 

cfe-ptanqjre  ,vnie  comme  k^mer,  oula  terre  eftmoukgraflc-,  en 
laquelle on  feme  du  riz  :  caroatreeeque  pluneurs  rpifleaux  de£- 
^endent  detouscoftez  cfes  m^^a^es}quilVroufc^>^&fODC 

-,     -  <    ;.- . .  '       -  :. -  -    "«  -  •  "-•'- ..,,:•;;_:  -  jis facilement:  conduits 


£7 aif port-rai  cï de  l&  Mehje  ou  Larix^ 


&  retenuz  par  cfclufès, 
&  vuidez  quad  on  veur. 
-Ce  n'eftûdc  mctncûlczfi 
les  Turcs  ont  fe.  Riz  en 
.grand  vfage  :  car  ils.  le 
fçauent  mieux  apprefter 
qne  nous.  Bc  qui  voudra 
faire  comme  cux,lc  mèt- 
re cuire  dedens  du  bouil- 
lon, &:  le  face  îonguemec 
bouillir  fans  le  remuer  :. 
car  g  le  remue  en,  bouil- 
ianc  gafte  tour,  comme 
ont  accouftumé faire  les         :    -~ 
Françoys„quid'vneonce    .   .  v    : 
enfonc  vne  grande  plai- 
ne poteeunais  %\z  façcri 
'3,.  des,-  Turcs  ih  en  iaudroic 
bien  vne  iiurc  entière^ 
Cefte  campagne  deiUz 
nous  dur£dcmyiaur,  À        ^c-t 
Yi£fhé  de  laquelle  nous 
patTafmes  par  vnc  bou- 
che entre  vallées,  ou  en- 
corcs  rétro  uuafmes  de 
l'arbriiTeau  de^Spina  ce>- 
rifoîa,  &de.ia  plante  &- 
phedra,  chargé  deieme- 
ccsrouges,  coinmccftlc 
Androiaccs  ,  qui  citoic  z?oc&* 
d'excefSue  hauteur  :  du-  Sm^x  '&# 
quel  lanature  eft  comme  celle  de Snùlax leuis,  qui  croiir  aumot  ~tàà»jz&:r 
Athos:car  s'il  trouue  vn  arbre  encore  ieuneail  luy  àédracôpagme 
en  croiilàntiLelkmentquciî  larhrc.s'ekuaic  iuiques.au  ciel,  aujîi 

LL1    ij  ' 


Sdpinsdc 
ÎEmui. 


trufi. 
Bkhynix. 


Siège  des 
Empereurs 
des  Turcs. 


Jtfye'ccU 
Roland. 


4JO  TIERS      LIVRE     DIS      SINGVLÀ. 

1  ferai  Ephedra.  A  l'exemple  dequoy  nous  auos  veu  des  platanes, 
qui  ne  font  gueres  moindres  en  hauteur-que  les  plus  hauts  fàpins 
idu.moDi  £mus,  quiauoyencconduid  i'Ephedra  iufques  à  la 
ibmmitc:  maislcSmibxlcuïs  a  quelque  chofe  d'auantage  que 
I'Ephedra,  ccft  qu'il  a  vertu  de  s  entortiller  :  maisceftuy  cy  de- 
meure feulement  aiïaùTé  ouiMètrouue  fans  clauicuîcs  :  &  s'il 
trouue  vnpcrit  arjbri{feau,il  demeure  petit,  &  ne  croift  non  plus 
que  s'îltrouuevne  muraille.  Nouslauonsau  parauantjanotéen 
Élclauonie ,  entre  Caftel  nouo  &:  Ragoufe  veche. 

De U  ville.  Je  Bource  >  ancimement  nommée  Prufa  ,  qui  efloit  le 
,  fiege  des  Empereurs  des  Turcs.        Chapitre      xlii. 

O  vsf  tcnionsjc  chemin  droid  pour  aller  à  la  ville 
deBourcc ,  qui  s'appeiloit  anciennement  Prufa: 
oueftoitJe  ficgedcs  Roys  de  Bithynie.  Pline  dit 
qu'elle  fut  édifice  d'Annibal  :  Jnttts  in  Bithynia  Pr«- 

_    ^    _  fit  (  dit-il  )  ab^tnnibale  [uh  Olympo  condtta.  Nous  la 

vcifmcsde  bien  ioing  ,11  tuée  aux  racines  du  mont  Olympe,  ou 
iiousarriuafmes  de  bonne  heure,  &reftafracs  long  temps  auant 
partir,  CetHvnc  des  villes  de  tout  le  monde  de  la  plusmerueil- 
Jcufe  foliation  :xar  .comme  ellceft  creuê,elle  s'eft  cfpandùc  parla 
montagne  :auûln  y  a  il  pointde  muraille.  Elleeft  déplus  gran- 
de eftedue  que  Lyonrcar  elle  cft  ièparceendiuers  lieux  par  les  ra- 
«cinesde  la  motagnc.Elîe  a  fes  vallées  qui  la  fepat  ér  ,faifàns  fes  par- 
.  tiesdiûates  Ivne  de  l'autre.  Quad  les  Empereurs  des  Turcs  des- 
cendirent à  leur  nouuel  aduenement  de  leur  pays ,  cftas  paruenus 
en  Phrygic,  &:  ne  pouuans  marcher  plus  outrc,ils  s  arrêtèrent  en 
Bource,ou  ils  conftitucrent  leur  fiege  Impérial. Mais  depuis  cent 
ans,ayanspcuàpcupafieen Europe,  après  qu'ils  eurent  gaigné 
-Com4antinopLc,ils  laûTerent  Bource ,  &  vindrenc  tenir  leur  fiege 
Impérial  à  Conftantinoplc.  Etencordeprefent  Bource  cft  aufîi 
riche  &auifi  peuplée  que  Conftâtinople  ,&  ofons  dire  d'auâxagc 
qu'elle  eft  plus  riche&:  mieux  peuplée.  La  grand  cfpee  de  Rolad 
pendencor.pour  l'iicure  prefente  à  la  porte  du  chafteau  de  Bour- 
ce.Lcs  Turcs  la  garder  chere  corne  quelque  reliquaire:car  ils  pe- 
fent  que  Roland  cftoir  Turc,  au  moins  s'il  peut  citre  vray  ce  que 
le  vulgaire  en penfe.  La  ridieû^dcBûurceprouicntdclaibyc: 


OBSERVEES    *ÀR     F.    BEION.  4JÏ 

car  il  oc  paflè  année  que  mille  chameaux  vcnans  de  Syrie  Se 
d'autre  pays  de  leuant  apportans  lafoyccn  Bourcc  ny  foyenc 
deicbargez  :  &:  y  font  accouftrecs>fiîees,tiiTues,&  mifes  en dkicrs 
ouuragcs  Se  diu  erfès  teinctures,en  diuerfès  façons:  car  Ics^  Turcs 
portent  leurs  habits  de  velours  figuré  de  diuerfès  couleurs, 
comme  aufli  font entremeflez d'or  Se  d'argent^  proprement 
façonnez. 

Que  les  ouurages  des  Turcs  5 font  fort bien  faits  :  &  que  les  habillement 
font  bien  cou  jus.  Chapitre    xliii» 

i  Es  Turcs  quelques  habillemensqu  ilz  facent ,  ou  de  Omfimim 
drap ,de  foye ,  chamelot ,-  ou  Moncayar  :  ilz  les  cou-  de  Turquie. 
fent  de  fine  foye,  &  font  cou  fture  qui  dure  plus  que  ^^^ 
le  drap.Nous  ofons  dire  que  les  habilicmens  qui  font  Mmc*j?ar. 
coûlusen  Turquie  ne  font  nullement  coufus  que  de  fil  de  foyc 
qui  principalemet  cft  filé  à  Bourcc.  Les  coufturiers  de  Turquie, 
fi  Ion  fait  comparaison  de  leurs  ouuragesàccux  qui  font  cou&s 
en  Europe ,  coufent  toutes  befongnes  mieux  Se  plus  elegammér, 
que  ne  font  ceux  du  pays  des  Latins  :  tellement  qu'on  diroit  que 
iouuraged'Europeneftqucrauaudagc  au  pris  duleuncarquel- 
que  chofcqueccfoit,cft  fi  proprement  reprins  qu'on  n'en  voie 
point  les  couftures ,  &  quelque  ouuragc  quïlz  facent,  cft  fi  bien 
fait  qu'on  n'en  fçauroit  que  redire. 

Ve$filtiers& cordonniers  deTurquic.         Cbdçitrt    XLXZIX. 

Es  cordonniers  8c  feîîicrs  coufcnt  fi  proprement  en 
cuit,qtvil  eâ  impoflibb  de  faire  mieux.Uz  n'ont  point  C£T™™*? 
lVfagedefoye  de  pourceau ,  ne  de  poix  pour  grefler  %^^' 
leurligneul  :  mais  ont  de  la  cire,  Se  Ce  fèrucnt  de  lon^Turamem 
gues  aiguilles  délices  :Se  après  qu  ilz  ont  broché  de  l'alcfnc^lz 
coufent  de  leurs  aiguilles  qui  font  vn  peu  courbées  :  communé- 
ment aufiTcoufçnt  tons  ouurages  de  cuirauec  de  la  foye.   Les 
foulicrs  des  Turcs  font  généralement  ferrez  deuant  Se  derrière,  soulimdes 
tant  aux  grands  feigneurs  qu'aux  payfans  de  village. L'Empereur  Turcifarre\ 
des  Turcs  mefme,  comme  auffi  les  Bachaz  les  portent  ferrez,  ne 
faiiànsdiftincliondelachauffare  feerce  des  payfans,  à  celle  àcs. 

LL1  iij 


45"^  TTER.3-     LIVRE      DES     SINGVI'A. 

grands .feigneurs ,  comme  auffi  font  ceux  des  femmes ,  illies ,  52 

So^iersneje  petits  enfans,. .Mais fàur  entendre,  qu-vn  foulier  rompu  en  Tur* 

^f^^uie  ne'fe  rabilîc.iamaift,  non  plus  .qu'vrae  Telle  de.  chenal  ..ïlauffi 

*L>.  '  **  .n'y  voit  Ion  âuamsTauetiers.ToutesTorccs  d'ornemens  &.pam-i- 

res  de  cheuaux,.&  toute  autre  matière  de  cuir  eft  coufucài'aigiiil- 

lçauc.çfil  de  foyc.  flnev&:  commeauons  dict  des  cordonniers  3  il 

faut  premièrement  piquer  de  l'alefnc  :  car  leurs  aiguilles  longues . 

&:  délices  n'ont  point  de  poin&e^ 

Des  Maréchaux  de TuY^uiti.  Chapitre     xlv... 

MdrecfawcL'  b&*^g&^.  N  Turquie  les  .Maréchaux, quelque  part  qu'iîz 
Japsjouffleh  5m  V^&0fà  fo  yen  tn'vfent  point  de  lbufHets,&:  n'ontque :  faire 
e&zmfuc.  4Ry  &fc^SS  de  charbon;  car  ilz  n'ont  point  de  forges.  Leurs 
^.^^^^&  fers  ne  pefènt  pas  la  moitié  tat  que  faitvn  de Genx 
^^t^lS^'  d'Eu  ropc,&  ne  faut  non  plus  de  matière  à  en  faire 
deuxen  Turquie  qu'il  en  faut  à  faire  vn-aillenrslllz  achètent  les 
fers  à  douzaines  iaeibàuchçz&  non  peFcez,commeaulîlfohiIes 
doux  à  cheuahles  vns  {ont  plus  grandsjes  autres  plus  péris,  mais 
puis  après  faut  les  aiTortir.;  car  eflan s  acçrç»pis  CQ-nieepufturiers, 
ilzles  façonnent  denti5renclui»çà;coups  de  marteau^  &  les  per- 
cent aucc  vn'poiniTondebonacier>&.  les  croient auec  vn  autre 
poinflbn-quarréo  fait  en  potence  pour  tenir  meilleure  prinfe  :  le- 
quel eftanc  bien  acéré  par  le  bout  ,croift  le  pertuis  du  fer  autant; 
Lesdoux  dés  qu'ilz  veulent.  Ilz  ne  cramponnent  pas  Tes  fers  de  leurs  cheuaux  : 
vwecktux.  carilzneiesfontiaaVais  voltigera  remues  :  Se  au  (il  que  les  clou  x 
dont  ilz  attachent  les  fers,ont  latefre  longue  &  groupe  à  ia "façon 
dVn  cœur  de  pigeon:  &:pource  qu'ilz  vont  touiiours  le  pas,  vn 
eheual  fera  vo  derny  an  fans  fe  déferrer.  C'eft .  vne  mode  moult 
louable*  que  denios  auoirâdioufleejors  qu'auos  parlé  de  ce  qui 
Tarùtf  des    'les rend  auan ragez  en  leurs  guerres-  Quand  -ilz -parent  le  pied  du 
piedsdeschs=  Cheaaî,ilzne  le  vuident  pas  creux  en  boutant  d'vn  boutoucs 
aaux.         appuyé  à  la  .çuifïè  ^  comme  nous  faifons ,  &.ne  voûtent  point  le 
.  pied  en  deden-s  >  mais  en  tirans  ilz  applacirTeat  le  pied  aueç  vn  fer 
j^.'ij^iargç-comme  h  main  3  ayant  fen  trenchant  retourné  y-ers  le  ma- 
'""  che.Les  Turcs  faifâns  voltiger  leurs  Cheuaux,  ne  leurs  donnent 
point  decourfès  à  remifes.  Parquoy  n'ont  que  faire  de  cram— 
genoer.  les &xs  dejeu.r  Ck.cP.aux  >  comme  au.flî,  .toutes  leurs. 


,  .*  O  S  S  EU.  V  E"E.'S  •-*  A*3t'    P.    "B  E'ITOH.  45$ 

■brides  n'ont  qû'vn  moult  peciemors.  Leseftrilics  des  Chenaux  tfr&eiZes 
/ont  dentelées  comme  les  -noftres  ,  mais  elles  n'ont  aucun  c*KtMUX*€i 

,.  _  -  Ti.r:s. 

ananchcj- ■-."«"-'*      -  - :.../.. 

Z>es-botichers  de  Turquie ,  &des  pierres  qui  fontes  fiels  iesfoeufs. 
Chapitre,      xlvi. 

.^  L  n'y  a  boucliers  qui  foyenc  plus  habilles  à  apprefter^™^^ 
P  les  chairs  fraifehes,  que  ceux  de  Turquie.  Tous  en      ^ 
É  quelque  lieu  qu  ilz  foyent^oncacoultumé-de  regarder 
j,  au  fiel  quand  ilz  ont  cuentre  quelque  bœuf,pour  voir 
s'il  y  a  point  ide  pierre  dcdensida.utaht  que  fbuuentcsroisiîs'y 
engcndrehmcpkrrc que  les. Arabes  ont  appelle  de  110m  propre 
Haraezi.  Auicenne  autheur  Arabe  adefcrit  fa  vertu  par  le  menu.  H*r*cQ 
Lesluifs  l'ont  en  grande  cftime  Se  honneur  plus  que  les  Turcsï 
cair  lcs,Turcs  eftansplus  Ûins  que-  lesluifs -,  n'en  ont  f>as  fi  grand 
arîaire^  Lès  Iuifs  fontcommuncmentmal  colorer,  &  t£>urmen- . 
tcz  de  la  iaunific,  Se  ont  cefteparticuliere  nature  qu'ilz  font  mor^ 
nés  &  melanchoîiqucSj  non  feulement:  en  Turqu  iesmais  en  Àle- 
magne,  Italie, Bocfœe,&: France  :•&  quelque. parrqujlzfoyent, 
iiz  font  lents-,  &  penûfs.  Ceux  qui  fontea  Turquie  ne  trouuenj^^^/0^ 
plus  fingulier  remède  poux  leur  makdie  que  â'vfcjéch  pierr^     ^ji" 
de  Haraezi.  Nous  auons  bien  voulu  toucher  ce  poirre ,  à  fin  que 
chacun  qui  liracecy ,  admonelte  les  bouchers  du  pays ,  de  faire 
çherchcresfielzdcs  bœufspoucy  trouuer^ditepjerre.  Ileiibié 
vray  qu  onifcn  «rouue  pas  en  cous  ûdz>  mais  entxc  vnc  dizaine     * 
quelqu'un  s'en  rrouuera  qui  en  aura  vne  ou  deux  ,  quelquefois 
trois.  Quand  ilz  efeorchent  vn  mouton  ou cheure ,  ik  font  fort 
foudains  à  la  fàignerjâufSs  abliiennent  ilz  de  tout  vfage  defang. 
Puisenîuy  oitacJa.peau,la  relcruct  fans laie&dre>à  fin  de  s'en  fer- 
uirpour  ouldrei  porter  quelque  liqueur^ Quand l&v. être  eu;  ou~ 
iiertjilz  coupent  le  petit  boyau  ioinctàîapanccau  defibuzdela 
caiUcttc,&:  de  là  choifirTent  eduy  qui  eft  côioinctau  gras  boyau> 
Scies  afTemblentenfembleparles  deux  boutsicclafair,  tirent  les 
laenîis  boyaux,  dû  ventre  >  n'y jaùfàns  aucune  greiTe;puistespen~ 
dencà  vncrochet ,  pQurfairç  ce  que  dirons  après,  Hz  vendent  là  u  c^eû. 
chair  àia  liurc ,  commeauûî  font  ilz  toutes  autres  choies  .*  &  la  ^^^  u 
fçauent  fi  bien  compartir,  que,  chaque,  partie  participe  des  os.  rmrc 

i--;..r         '  "        lu  îîîj —    "    * 


^4  XIMS    IITRE    DES     STN.GY.ÏiA. 

Si  quelque  Turc  a  vn  boeuf  ou  mouton  à  vendre  >  il  ne  le  vendra 
pas  à  vn.boûcher ,  mais  il  le  mènera  luy  mefmc  en  la  boutique 
pour  le  faire  tuer  aux  bouchers  y  îefquelzil  contentera  de,  leurs 
peines  ;  &  vendra  fa  chair  luy  mefme,  &:  en  reccura  l'argent  en  la 
vendant.Toutésfois  celle  manière  de  faire  n  eft  pas  toujours  ob~ 
feruce*  Car  les  bouchers  achètent  au fïi  le  beftial  par  les  villages 
&  parles  marchez  pour  les  vendre  en  détail  à  leur  profKt*  dedens. 
leurs  boutiques*  * 

&es  cordes  d'arcs  &  detuis  de  Turf  de*        th&çkrt   xlvil 

{Terift^r^^^C^i  Efoir  bien  tardvn  homme  portant  vnc  hotte  viendra 

'  par  les  boutiques  des  bouchets,.&  prendra  les  trippes 

qu'on  luy  a  gardées  le  iour  :  &  les  porte  à  ceux .-qui  en? 

font  de  toutesfortes  de  cordes.  Hz  feauent  fmguîie- 

rement  bien faire  celles  des  arcs.  Àufli  y  enaiî  grand  vfage  :.  car 
C&dedeiMt  leurs  arez  font  encordez  de  cordes  de  trippes.Quant  eft  aux  cor- 
des de  Lutj.ilz  en  font  de  roures  fortes.&  bien  fines ,  &  des  chan- 
terelles qui  montent  bien  aum  haut  que  les  nofbres  :  maiseîles  ne 
font  pas  fi  argentines  ,  d'autant  qu'elles  {ont  cordées  de  trois  cor- 
delîes ,  toutesfois  onfes  peut  fairelèruiràvn  Lut  de  Venifc  5ea 
défaut  d'autres.  Lon  trouue  de  telles  chanterelles  de  toutes  for-» 
tes  &  couleurs,  rouges,  perfcs,verdes ,  iaunes ,  blanches  :  &  n'y  a 
mercier  qui  n'en  vende  en  fa  boutique ,  comme  aum-  des  autres, 
fortes  de  corde?  de  Luc  qu'on  trou  ue  par  to  u  te  Tu  rquie.  El  les  y 
Quart  fer*  {ont  pJu-sffequentes  qu'en  Europe,  dont  pouuo-ns  bien  donner 
us  deiMtsm  ]â  râjfon  t c  eft,que  les  Turcs  ont  de  quatre  fortes  de  guiternes  & 
T#rfwe.      Lncs^dcfquelz  pluficurs  fçauentfonner  ou  des  vns  ou  desautres,. 
ee  quciï'auicnt  pas  en  France^'en  Italie  -.car  peu  de  gens  des  vil- 
lages le  entremeflent  de  iouer  du  Lut ,  ou  deGukerne.  Mais  en 
Turquie  pl^ueursen  fanent  {bnner  à  leur  mode» 

l)esl^t^^ielemsMCQràmi:urc^me^      Chapitre,   xlviii^ 

Vi  voudrok  cfclarcir  quelque  chofe  de  la  mufique: 
des  inârumcns  anciens  ,  auroit  meilleur  argument 
de  l'expérience  de  ceux  qu'on  voit  en  Grèce  &Tur^ 
quie>quc  de  ce  que  aous  en  txouuons  par  eferic .  Les. 

Turcs, 


Tursv&ntauflide  fiuftes,  qui  font  quafî  fairesàîa  manière  des  ?&*«&■ 
fiuftes  cT  Alemans ,  &  ont  fix  troux  cous  d'vne  rengee.  Mais  elles  Turf*1'- 
ont  plus  de  deux  coudées  de  long  :  L  embouchure  en  eft  moule 
difficile',  différente  à  toutes  autres  fortes  de  ftuftes  d'Europc.Car 
elles  font  perfees  tout  outre ,  lefquelles  il  faut  emboucher  par  le: 
grand  pertuis  denhaucParquoy  ceux  qui  en  fonnent  ont  le  plus 
ibuuent  couftumede  chanter  en  lesembouehanc.Nous  n  y  auos 
pas  troue é grade harmonicDefia au5s dit qu'iîz fçauet bie  iouer 
de  hauts  bois,de  tabourin,de  finghi,  de  Guiterne ,  de  Violes ,  ou 
'  rebecSjdeHeptacalamosrencor  voulons  adioufter  qu'ilz  ont  di-  „_     r 
uerfes  manières  de  Luts  ,  dont  les  plus  gros  ont  huid  cordes  r  Se  ^ 
font  fort  lourds ,  Se  ont  le  manche  médiocrement  long ,  tout  zut$d& 
droiet^ou  y  a  pluficurs  touches. L'accord  n  eft  rien  approchant  tupcs. 
i  accord  du  noftre  :  car  les  cordes  qui  fèruentàcegros  Luc ,  ne 
fan  t  pas  au  rang  âcs  noftrcs*  L'autre  forte  de  Lut  cft  de  moyenne 
grandeur ,  Se  plus  commune  que  n  eft  le  fufdit  :  Se  eft  femhlable 
à  vne  Guiterne  ,  mais  plus  harmonieux  ,  Se  beaucoup  plus  diffi- 
cile à  fonner  :  Se  n'a  que  fept  cordes  non  plus  que  noftre  Guiter- 
ne.Mais  l'accord  en  cft  différer,  Se  eft  moult  propre  àcfonner  des 
branfles  à  la  mode  Turquoifc  &  à  la  Gregcoife.  11  cft  plus  en  vfa- 
ge  entre  les  gens  de  marine ,  Se  principalcmetceux  que  les  Grecs 
nomment  Palameriti,  comme  de  la  Moree  y  Eubee ,  Se  illes  de  la  pa^merm-f 
mer  Egée, que  de  ceux  qui  font  refidens  en  terre  ferme  de  Nato-  <^eme  a* 
Me.  Il  n  y  a  point  de  couches  comme  à  la  Guiterne  --.mais  Fayans      * 
accordé  Se  mis  des  touches >nous  en  fommes  {èruis  pour  Guiccr- 
ne.  Elle  aauffi  vne  chanterelle  derrière  dcûusla  groifc  corde  du 
.  bourdon  >qni  monte  à-l'octaue  de  la  chanterelle  dedeuant.  Et 
pour  la  faire  fonnerfi  haut^ilz  la  îaiûent  courte,  ayant  facheuil- 
le  bien  bas  au  cofté  du  manche. La  tierce  forte  eft  plus  petite  que 
les  deux  précédentes ,  dont  le  manche  a  plusieurs  touches  qui  eft  ^     Gé- 
bien  de  cfeux  coudées  de  long^&  en  tour  n'àque  troisxordcs ,  Se  ^^ 
gour  en  peindre  la  figure,il  faut  ic  imaginer  voir  vne  cuillier  ayac 
le  manche  quarré  Se  bien  long.  Et  pour  autant  qu  elle  n'eft  pas 
fore  difficile  àfonner,&  n  cft  pas  de  haut  pris,comaumémér  clia* 
cunenioue.  Mais ceftàracierauecvnephimecomcàlaCitara^ 
comme  auffi  eft  de  la  grande.  Mais  celle  de  la  marine,qui  n'aau- 
curies  touches ,  fe  forme  tanten  raclant  Se  en  pinçant ,  comme  le. 


.3fi6  TIESlS     IltRI      DES     S1NGVXA. 

Lut  &  Gmtenie.  Elle  cftiaite  dVne  pièce  de  bois  qui  ne  fend  ia- 
mais ,  qui  eft  celle  efpece  de  Sauinierdont  auons  parlé  eftans  far 
3e  mot  Taurus.  La  moytié  de  fa  table  eft  de  Ton  bois  mefme,  mais 
1e  refte  eft  de  la  peau  d*vn  poiffon  ,  -qui  a  efte  diuerfèment  nom- 
mé: car  nous  crouuons  qu'il  a  efté  nomme  anciennement  5  Se 
Syenapifckpzv  Ariftote  Hyena  pifeis  >&  SiIurus.Mais  pour  l'heure  prefente 
sîlums.       lesGrecs  l'appellent  Glagnion.  Lecheualetdu  fufdit  Lut  cftaf- 
cUgnion.    fiS deflùsîa peau «hipoiflon,  qui  tient  les  cordes  hauceescom- 
2^iW^aJ'Cmeàvn¥iol<!>n.Lonentrouuedernadrez  ,qui  conftentplnsde 
Giwragede  £x<jucaîts:  &  fc-trouucgcns  de  marine  qui  ne  plaignent  point  les 
IrinnieUe  acheter  à  tel  pris.  Les  Turcs  paftent  toute  autre  nation  à  faire  de 
bel  outirageen  marqueterie, tant  en  marbre  &r  en  voirre,  comme 
en  bois.  Lon  trouue  des  petites  cadettes  pour  les  orfeures,  qui 
coufteront  vingt  ducats  la  pièce.  Les  vitres  dn  Caire  &•  au fîî  de 
Conftantinoplefontmarquetees^ie  diuerfes  couleurs  devoirre, 
àfuciïlagcs-&  ouurage  Damafquin.  Mais  ilz  font  premièrement 
îechampdepla-ftrcdeirusvn  moulle,  puis  y  attachent  levoirre: 
mais  telle  manière  eft  paffee  des  Arabes  aux  Turcs. 

Que  les  Turcs  font  bons  joueurs  lefchexj  &  du  grand  vfcge  qu'ils  ont  de 
la  rumme deTmguanta.  Chapitre     xlix. 


Turquie. 


'Turcs  hons 
loueurs  cCej= 


]  Es  Turcs  font  bons  loueurs  d*efchez,&  y  prennent 
grand  piailla  Hz  feront  quelquefois  vn  iour  entier 
fans  ceftèr  de  iouer:parquoy  portent  touflours  leurs 
_^  cfchez  quelque  part  qu'iîz  aillent  >  auec eux: mais 
ont  lëuieœenc  vn  linge  peina:  pour  tablier  à  iouer  defliis.  Lon  y 
trouue  des  cfchez  d'iuoire  de  relief  ou  les  perfonnages  font  en- 
taillez au  naturel,  &  nous  fcmble  qu'ilz  n'en  ont  aucun  qu'ilz 
recognoiffent  pour  celuy  que  nous  nommons  Reine.  Mais  en 
conftituent  vn  autre  d'autre  nom  en  fon  lieu.  C  eft  vn  ieu  qui 
leureft  bien  duid  :  car  eftans  accropis ,  panent  les  iours  entiers 
Gumme  en  pareflè  far>s  rien  faire.  Eftans  de  feiour  en  la  ville  de  Bource, 
Trxgacmt.  auons  apperçeu  que  i'vfagedc  la  gumme  qu'on  appelle  Traga- 
cant ,  eft  tellement  en  vfage ,  qu'on  y  en  confomme  plus  de  qua- 
trerailleliures  par  an /pour  donner  luftreàlafoyc,  Lespayfans 
de  Natolieaduerr-is  du  gaing,Ia  vôt  amaffans  par  les  pays  de  Mv- 
fic>Phrygic>Gallogccce>&  Paphlagonic  :6c  rapportent  vedre  en 


OB'SERTERS     ?AH    P;    BEtON^  457 

B'ourcc,donr  ilz reçoiuent  incontmenc  leur-argent  coptat.Cèux 
qui  ont  efcric  qu'on  l'apportoit  de. Crète  à  Venifc  5fQnt  grande- 
mec trôpez  Jlz  ont  encot  vne  autre  drogue  en  cornun  vfage,  que 
les anciens  n'ont  point.cogneue.  Oeft  vneforte  degalle,quiviéc 
deffus  les  Terebinthes,  dont  suons  parlé  au  premier  I|ure:qui  cft 
fort  comode  pour  kteinturedck  foye,qu'j*lzveuîent  colorer  di- 
uerfemenrjlzen  diflipent  tous  les  ans  plus  àcdx  mille  Hures.  El- 
les font  creufes  dedes^groffes  corne  petites  galles  Romaîncs,pK>- 
uenas  de  1  excreffence  des  fueilles  des  Terebinthes  maûcs,  cueil-  °f    fe  Tc* 
lies  au  printeps:S<:  qui  neles  cueilliroit  lots,  elles  croHhoyent  15- 
o-ues  d'vn  demy  pied,en£brmc  d Vne  corne.  Ilz  parlent  troiskn- 
crues-en  Bource^qui  font  quafi  cômunes  aux  babitans.  L'vne  Es- 
pagnole pour  les  Iuifs,i,autreGreque,&  l'autre  Turque,qiri  err  k 
plus  cornune.  Il  y  aauffi  quelques  familles  Arabes ,  &;  Arménie- 
nés ,  &  Italiennes.  La  feigneuriede  Vcnife  &:  Cbio  y  entretient 
des  hommes  pour  les  adueruû^mens-da  trafic  de  leuftnarchan- 
dife.  On  peut  aller  de  Bburce  aConftantinopîe  par  mer  ou  par 
terre.  Le  chemin  de  terre  eft  long  de  cinq  à  fix  iournees:mais  par 
eau  on  n'y  met  que  deux  ou. trois  iours.  EtdekvilledeBourceà 
k  mer  du  Propontide  n'y  a  que  demie  iournee-  Lon  va.  pafler  en 
vn  village  au  riuage  du  Goîphe  ou  Sine  de-k  Montanee-,  &raa-  sme&m* 
eiennement  nommé  le  Sine  de  Nicopolîs.Lc  vilkgc-eft nomme  SùfoiiS- 
k  Mon  tance,  moult  difeommode  pour  les  vaiffeaux  rear  il  n'y  a  D€HXruae% 
point  de  port.Patquoy  auflkoft  qu  ilz  y  fonr  arriuez,il  faut  les  ti-  *mramenm 
xer  à  fec,dc  peur  de  k  toutmetc  des  vens..  Les  habitans  de  k  Mo  -  u  w 
tanee  parlent  Grec,5dfont  bons  vignerons.!!  y  a-v-n  monaftere  de 
Caîoieres.  Le  grand  feigneury  tiens  ordinairementdenx  fuites,, 
voguees  par  des  efckucs  gcnifïàires,  qui  ne  railler  iamais  à  partir 
auxioursde  Mecredy,iî  la  tepefte  ne  les  retarde.L'vne  de  k  Mo- 
tance  pour  aller,  l'autre  de  CÔftantinoplc  pour  y  venir,^  mener 
ceux  qui  veulent  aller  Se  venir  de  Source  àConûantincple.  Es. 
quand  ilz  partent  de  k  Montanee^b  emmènent  k  fu  ûe  chargee. 
dc  neigc,qui  y  eft  apportée  du  prochain  mont,  du  tenant  de  ïO- 
îy mpe.Ii  y  a  eheuaux  de  voichirc  tout  expees  qui  k  y-apportent, . 
tellement  qu'ilzk  chargent  de  neige  en  deux  ioursXcs  habitans,. 
des  nuages  de  hHellefpont  &  du  Propontide ,  tant  deçà  comme 
delà,  font  quafi  tous  pefchcurs,  qui  parlent  Grec».  Vn  païiàn  du 
village  de  k  Montanee  emportait  des  herbes  enfarnaifon  ,  &£ 

MM.m  î'y 


CïWâJiU. 


&m£fwes* 


Cambraj, 


Informelle. 


4?£  TIERS     UTILS     DES     SIKGVXaI 

encre  autresauoit  de  celle  que  les  anciens  ont  nomme  Caucaîis. 

Il  nous  la  nommoit<3afcalitra:de  laquelle  ne  trouuans  le  por-» 

trai&és  herbiers  modernes,  &  Fay ans  cirée  au  naturel ,  Fanons 

'ctjpir  ^       v      bien  voulu  mettre  en  ce 

Pôrtratct  de  l  herbe  nommée  Caticalts*     i.       Tî    i 

lieu.  Hz  la  mangent  crue 

en  fàladc  ,  corne  auffi  les 
Xampfanes.  A  laparfin 
eftans  de  retour  à  Con- 
ftantinople,lors  quemô- 
fîeur  d'Aramotauoit  fuy- 
ui  le  grand  feigneur  au 
voyage  de  Perfè,trouua£- 
mes  vn  gentil-homme  de 
Bourges  vifTambaûadeur 
nommé  laques  de  Cam- 
bray ,  lieutenant  pour  le 
Roy,lequel  n'vfa  de  moin 
ire  courtoiiîe  ea  noftrc 
endroit  -qu'au oit  défia 
fait  mondit  fleur  d'Ara- 
m5t,  ioinct  que  pîufieurs 
de  ceux  que  monfieur  de 
Fumet  auoit  menez  auec 
Iuy,  eftoyent  demeurez  à 
Conftantinople:car  ou- 
tre les  gentil-homes  dont 
auons  parlé,  il  auoit  auffi 
mené  vn  homme  bie  let- 

tré  nommé  maiftre  lu  fie 

Tencîîe.que  le  feu  Roy  François  reftaurateur  des  lettres,  y  auoit 
cnuoyé ,  pour  recouurer  des  anciens  liures  Grecs. 

Vu  jardinage':  &  promptes  expériences  du  fçauoïr  des  Turcs:  &des 
fleurettes  qu'ils  ayment  en  bouquets.  Chapitre    L. 

Lnyagcnsquiiêdele&ent  de  porter  de  belles  fleu- 
;  rettes^nequilesprifent  plus  que  font  les  Turcs  :  car 
1  quandiîz  trouuenr  quelque  belle  girofflee ,  ou  autre 
\  élégante  fleurette  ,  encorcs  qu'elle  foit  fans  odeur, 


OBSERVEES     t&K     V.    BELOK.  45^ 

acantmoins  elle  ne  perdra  point  {on  prjs.  Nous  aymons  les  bou- 
quets de  pluficurs  fleurs  &:  petites  hérbettes  ©doriferentes  me£ 
ieescnfemblc,:  mais  les  Turcs  ne  fc  foucient  que  de  laveue,  de 
ne  veulent  porter  qu'vne  fleur  à  la  fois:&  encor  qu'ils  en  peuffent 
auoir  de  plusieurs  fortes ,  toutesfois  fuyuanr  le  commun  vfage,ils 
çn  portent  pîufieurs  feule  à  feule  dedens  le  rcplyde  leurs  turbas, 
Les  artifans  ont  communément  pîufieurs  fleurs  de  diuedès  cou- 
leurs deuant  eux,dcdens  quelque  vaifleau  plein  d'eau ,  pour  les 
tenir  fraifchemént  en  leur  beauté.  Parquoy  les  Turcs  ont  les  iar-  Tum  yom 
dinages en aufli grande recommédation que  nous,  &fontgraâ°  Urdimtn. 
diligence  de  recoirurer  des  arbres  étrangers ,  &  furtout  qui  por-  . 
tent  belles  fleurs,  &  n'y  pleignet  largcnt.  Il  y  a  des  arbres  en  leurs 
iardins  que  les  Grecs  nomment  en  leur  langage  vulgaire  Kro-  *ta»A- 
madâj  ou  Croraadia  ,  qui  font  de  la  hauteur  dVn  Amandier» 
Les  Turcs  le  nomment  Cromadia  ,*  du  nom  de  da&icr  :  car 
leur frui&eft  bon  à  manger.  Lcurfueiilceft  corne  celle  de  l'An-  arbres  n* 
drachne.  Les  belles  fleurs  y  font  tenues  rares,à  l'exemple  dequoy  fen&Unt 
nous auons veuvn  petit  arbrifleau  qui  porte  les  fueillcs  de  Lier-  miSme. 
re,  quieft  verden  tous  temps,&:  fait  fà  fleur  prefqucd'vne  coudée 
de  long,decouîeur  violette ,  entournant  le  ramcau,gros  comme 
vne  queue  de  Regnard  :  dont cft  venu  que  les  Turcs  le  nommas 
en  leur  langage ,  T'appellent  queue  de  Regnard.  Les  Lils  rouges  xils  rûugts. 
y  font  fi  communs,qu'il  n  y  a  ceîuy  qui  n'en  ait  des  plantes en  fon 
iardin.  Tels  Lils  rouges  font  différents  à  ceux  que  nousauons 
par  deçàjdefqucîs  la  fleur  reflèmblcaux  Lils  bîancscmais  lafucil- 
le  des  Lils  Turquois  efl  faite  comme  de  la  cane  nommée  Elegia, 
&  a  fa  racine  comme  celle  du  chiendent ,  finon  qu  elle  eft  beau- 
coup plus  grotte.  Parquoy  pluficurs  cftrangcrs  qui  viennent  à 
Gonftantinople  fur  nauires  de  dtuers  pays  apportent  les  racines 
des  plantes  qui  font  belle  fleur ,  &  ainfî  les  vont  vendans  par  les 
marchez ,  &  de  toutes  chofesqu  ils  apportent  font  argent.  Quad 
auons  dit  en  autre  lieu,  que  les  Grecs  ne  fè  foncier  des  herbes  qui 
ne  font  bonnes  à  manger,n'y  auons  comprins  les  Turcs ,  qui  ont 
maintenant  vaincu  les  Grccs,cn  donnant  nom  vulgaire  aux  her- 
bes:car  il  n'y  a  herbette  en  Turquie,pourucu  que  fà  fleur  ait  quel- 
que beauté ,  à  qui  les  Turcs  n'ayent  donné  quelque  nom  en  leur 
langage.  Et  entreautre  ifs  font  grande  eftime  du  Saifrâ  fauuage,  „  *•     r 
non  pour  ion  odeur  iculcmct ,  mais  pourec  qu  elle  recrée  la  veue    "^ 

MMm    iij 


4&>  TIE.R.S     LIVREE     DES     S-ÏN&YJïA*. 

Se  aufîîqu clic eftiQHmcntentaflèe,quafi comme  artificielle ,  & 

que  (es  fueillesfcmbîentcftre  liées  auec  la  fleur.  Les  Turcsont 

des  merueilleufes  expériences  de  plùficurs  chofes ,,  comme  pot>r 

faire  dormir  foudaineraent.  Voudroic  on  chofe  plus  fîngulierq 

que  de  crouuer  drogue  pour  faire  incontinant  dormir  que'qu'va 

qui.nepeutrepofer  ;  Ils  vôt  chez  vndroguifte  (car  ils  n'onr  point 

ckApoiicaires)  auquel  demandent  pour  demie  afpre  de  la  femece 

Tâtouh.      deTatouIa.  Puisla baillent  a  cJuy  qume  peut  dormir. Tatoula, 

n'eft  autre  chofe  que  ce  q,uc  les  Arabes  appellent  Nxïx  merci  r.  Se 

Nxxmete»  jcs  Qrecs  Solanurikfomniferum;  de  laquelle  nous  en  tronûafmes 

defauuageenlapîainedcIericho3presla  fontaine  d'Heîifée.Io- 

secepte  a     niusefcriuantde  l'Empereur  Seleirn,  did  qu'il  auoit  quelques 

fair&rejîouir  fois  accouftume  manger  dvne  femenee  qui  rend  les  gês  ioy.eux3t 

Se  ofte  la  mémoire  des  ebofesqui  rendent  les  hommes  penhfs-&* 

molefiezdes  chofes  hautaines,&:  que  quelques  heuresapres  que 

on  en  a.mangé ,  l'on  ne  demande" qu  a  fe  refiouyr ,  Se  ne  permet 

qu'on  fc  foucie  de  penfer  quelque  chofè  5,qui  rende  l'èfpnr  tour-, 

mérité.. Mais  il  nefçait  (dit-il)  qu'elle femence peut  eftre,  finon 

Nepmthes.   qu'il  luy  eûraduis  que  c'efl  Nepenthes.  Mais  nous  auons  veu, 

qu'ils  vfent  de  la  femence  d'vne  herbe  qui  eft  vulgairement  ven-, 

SUrmda.     due  par  les  marchez  de  Turquie ,  nommée  Harmala  ^efpcee  de. 

Rue  fauuagc,  dont  auons  défia  parlé  au  fécond  liurc.i.delaquel- 

lc  les  champs  Coût  tous  pleins  Se  les  hayes  par  toute  Turquie,  dot 

n'en  auons  point. en  noz.  pays.  En  cherchant  leurs  plantes ,  nous 

fommesfouuent.trouuezàvoirlesiardins  :  mais  onc  n'en  veif- 

mes  vn.  plus  magniiique  que  ccluy.de  laièigneurie  de^V^nifeà. 

Daniel  Bar.*  Padouëydontmcnfeigneur  Daniel  Barbares,  Patriarche  à"à~, 

laruf.         quilec,  homme  de  grande  en  treprinfe3&  excellent  en  {çauoii^cn, 

jardin  de    zc^l  i5aiîtheur.  Le  fécond  d  âpres}en  noflre  France  à  S.Mor  près 

T^°j^\      de  paris.  Les  arbres  qui  portent  les  Afaroîes  ,&:  autres  qui  por- 

Mor*  £S'  tendes  Brognoks,  font  communs  es  -iardins  de  Conftandno- 

^drôles.    PJe-QBaî)t  aox  autres  manières  d'arbres  frui&icrs,  corne  Aman- 

'  '     diers5PeichersJPommiers>&:  cels'communSjdefia  auôs  fait  enté-- 

dre  par .cy  devant  qu'ils  font  moukfoigneux  de  les  cultiucr^ 


O^BSlEïtVïES     ÏAR     P.   SElOK^  4'6ï 

%es  noms  de  quelques  animaux,  &  plantes  cueillies  au  nuage  au  Vont ,  & 
autres  trouuees  aumarchéde  Cwjîantinople  :  &  des  efloilles  qui  nuifent 
au  befiial en  Turquie.  Chapitre       u. 

L  y  a  vn  temps  en  l'année  que  les  Tares  n  ofent  laifier  Efioilles  fù 
leursbrebis  aux  champs  la  nuiçfc  paiflàns  au  defeou-  **a*   les 
uert.  La raifon  c^ainfi qu'ils  afTcurent, qu  ily  adeux^*- 
wwaofcr_J  efioilles,  lefqudies  fçauent  nommer  par  nom  propre, 
qu'an  appercoit  la  nuid  au  moisde  ïuillet  &  Aouft ,  &  venat&ir 
leur  zénith  vcrtical/i  les  brebis  haucét  la  cefte  &  en  ont  la  lueur, 
elles  en~meurent,mais  en  ce  temps  là  fi  on  les  met  la  nuid  au  cou- 
vert ne  meurent  pas.  Ils  afferment  auoïr  trouué  par  expérience 
i«fallible,eftre  chofe  vraye  :  &  pour  les  engarder  de  tel  accident, 
font  contrainâsdeies  mettre  la  nuid  à  couuert  durant  le  moisr 
de  ïuillet  &  Aouft.TeîIesehofes  n  auiennent  pas  par  tout  le  pays 
du  Turc ,  mais  feu  lement  en  au  cutis  end  roids  en  la  contrée  de 
Thrace.Et  qu'il  ne  foit  vrayjiîs  ne  mettent  iamais  leurs  brebis ea 
ted  finonen  ce  temps  là  :  car  mefinement  ne  les  y  mettent  pasea 
hyuer.  Plufieurs  autres  nations  n^ay  ans  telles  obferuations,  fou£ 
frans  grandes  pertes  pour  la  mortalité  de  leur  bçftial ,  &  ne  Ççz- 
chans  pourquoy  cela  leur  aduien 1 5  ont  penfé  que  cela  fe  face  pat 
quelques  cnforceîements  :  ce  qu'à  n  offre  aduis  Virgile  a  auiïî  en- 
tendu en  fes  Eglogues.  Cela  nousfut  premièrement  dit  à  Con-  . 
ôantinoplc.  Car  comme  plufieurs  entreprennent  de  faire  les 
fournitures  à  vn  certain  pris  3  ceux  qui  fourmuent  les  bouchers  vijeiwt 
s en  plcigncnr.  Chofe  que  depuis  auonsveuë  par  expérience:  car  Turc. 
nous  &:  vn  Vipcrier  Turc ,  cheminans  le  long  des  riuages  de  la. 
mer  de  Pont,cn  diuerfes  faifons  >  veifmcs  les  trouppeaux  des  bre- 
bis à  couuert  ;  &  entcndifmes  des  pafteurs  qu  en  autre  temps  de 
rannee,demeurentauferain.  Les  paftoureaux  nefçauoyentpas 
la  raifon  fufdidc  :  toutesfois  difoyent  bien ,  que  qui  les  laineroit  gerles  & 
la  nuid  dehors^lles  fe  mourroyent.  Àyans  cueilly  les  plates  que  arim  fit 
trouuionscnchemin,nouslcsefcriuionsfurie  champ ,  comme nujfmtm 
s'enfuit.  Ciftus  &  l'Hypociftis qui cftoit deffus faracine, y  croif-  n™ge  ** 
fent  fréquents.  Au  Ci  trouuafmes  trois  fortes  de  Gcnets.du  Che- 
urefueil,  Aphace.  La  plante  d'Androfemon  y  eft  plus  fréquente, 
naiûant  fauuage5quen  nulle  autre  contréc:nous  difonscelle  qles 

M*  M  m    iiij 


4^i  »  TIERS      ^XVK.W     I>ES    SINCVL4,. 

Italiens  appellent  Ceciiiane.  Toutes  les  fortes"  de  Plantain  s'y 
Oaltane.     crouuent.  £/h.erbe  de  LinâriajLampfanajMolàinejMilîe  fueille; 
odorifercnte,Lagochimeni ,  Condrille ,  Mauues  communes  S£ 
chryfintc*.  doubles>Praûrmav&:  Marru bium,  Chryiàntemon  y  cgx i  eft  herbe 
mo&  bonneà  manger,ChamomiHe,petis  Cèdres  des  deux  efpeces,  pc- 

tisGeneunerSjArboufîerSjPktanes^CoudrierSjHieblcSjSureau. 
AufEtrouuafmeslacompa&ion  des,  oflemens  d'vn  Dauphin  ai* 
xiuage^eneor  tous conioin&s  l'vri  àl'auirc.  Smilax  afpera,  Cor* 
ruda,Trifoliuni mentantes, Cauealis,  Fenoil  iauuage  j  Terebin- 
the^Nerion,  Pruniers  fauuages,Àigremoine,  Teucrium,  Andro- 
fkceSjÀrmoracheSjYrtieSj AfpaîathuSjAgourupes ,  Aron ,  deux 
fortes  de  Pâquerettes,  vne  efpccc  de  Coiifduldc ,  ayant  la  racine 
fonde  ,que  les  habitans  du  pays  nomment  Sterouli,  Fimpineîle^ 
Gaîiopfis,Calaminthc  ou  Caîament  ,.Origanum  Heracleoticû^ 
Queue  de  cheuaîJBuphthalmuSjParelles/Hellebore  noir ,  deux: 
efpeces  de  Fou  gère,  Pau otfauu âge ,  trois  fortes  de  Hyacinthes, 
deux  efpeces  de  Conize/çauoir dk  tierce  &  première, Satyrions3î 
¥ioles,Bruyerc,Ferule  ,qui  portoit  lois  fes  œufs  bons  à  manger^ 
oeufs  dé    Hyflbpe  fâuuage,  Meu,  Confouîde  quia  les  fleurs  iaunes ,  Con- 
kherbs  <U    fouide  qui  aies  fleurs  blanciics,Houbelon,  Afclepias,Cynoglo£ 
r  u     &im>àn  Souci  fauuage,  Ormeaux ,  Chamsedrys ,  Hermoda&cs, 
C°m2s       Chardon benail^Sidemtis^zeille,  Cbcfne,  Lorier,?aritoire^ 
fimnùttn^  Cichorce,R.o{cs(âuuagcsaCoiiuoluuls>Stachis>AfpcrgQla ,  Au- 
be efpine,arbre  deStyrax,Laurcolc,Orcanette,Lycop{is,Alater- 
nus,  /ralietrum ,  petit  Iris ,  trois  efpeces  de  Tithymales ,  le  Mafle, 
Myrfînires>&:  Heliofcopius.  Noustî^uuamiesdel'OrnitogaJo,. 
sorhut ttor?  Poup  tenoir,^  eeîuy  qu'appelions  du  xremble,  €hafraigncrs>. 
??     *^?  AulneSjSumach  j  Pouliot,  Sorbustorminaîis,  que  les  François, 
<w*         nomment  va  Aliiler,!  arbre  dequoy  on  fait  les  lardoueres ,  Ana- 
bau\ycrbcne,Penfteteon,de  deux  fortes, d'Erable».  Le  Viperier 
que  menionSjneantmoiasqiul  fuâ  xurc^toutesfois  fçauoit  bien-, 
exprimer  les  ferpents  que  trouua{mes,dc  nom  Grée  moderne:  8c 
2>nimés.      tout  ainû  comme  eftions  partis  pour  aller  trouuer  des  vipères  6c 
Jimko^  autres  ferpenrs^auifi en  trouuafmes  nous  quelques  vns.  Et  entre; 
autres  furent  ceax  que  les  anciens  nommèrent  Driini,  qu'ils  nom- 
ment maintenant  en  vulgaire  Dendrogailladc di&ion  qui  fç  re- 
fent  de  fon  antique  appellation.  Nous  n'en  auons  point  cogna 
d^u.tre  qui  deuienne  glus  grand  &  gros  que  ceituy  cy  ,.."&  qui  fif- 

rie  plus. 


$4.. 


OBSERVEES     PAR     *.    BELONV  46$ 

■fie  plus  fort.  Telles  fois  en  auons  prins  vn  û  gros ,  que  Fayans  mis 
envnfac,  pefoittantqu'vn  payfan  ne  le  peut  porter  deux  liciies 
,.  fur  Ton  dos  {ans  fe  repofer.  ta  peau  remplie  de  foin  eftoit  auûî 
grofTc  comme  vnc  groffe  iambe  d'homme" charnu.  Dételles 
pcauXjCommc  auflî  des  autres  cfpeces  de  ferpcnts.)oifcaux>beftes 
terreftres,  plan  tes  entières /emences  d'herbes  ûnguliercs ,  &  plu- 
sieurs chofes  de  mer,auions  remply  vne  grand  caiflê ,  &  mifcfur 
vne houîquc  Gencuoife  nommée  la  Delphina ,  appartenant  au  Delfom'. 
feigneur  Viualdi  :  dont  vn  nommé  François  Bmfquet  eftoit  ca- 
pitaine qui  deuoit  venir  defeharger  en  Angleterre,  mais  fut  prife 
des  Corfaires  &  menée  en  Àrgers,&  ainû*  fufmesfruftrez  de  cela. 
Or  s'il  y  a  fi  grande  affinité  entre  les  fèrpents  en  vie^qu  a  peine  les 
peut  ondifeerner,  ne  fe  faut  donc  efmerueiïler  fî  les  portrai&s 
qu'on  en  fait,  ou  il  n*y  a  que  du  noir  Su  blanc ,  s'cntrereflèmblent 
de  biéprcs.Toutesfois  ceftecy  eftla  naifue  peindure  de  Briinus. 


Nous  trotiuafmes aurÏÏ  îe-fbrpcnt  qui  a  vne  callofité  en  maniè- 
re de  bofTette  deiîus  le  front,lequeî5  à  noftreaduîs  v  effc  ccluyquc^jk 
les  anciens  ont  entendu  pour  Àfpis.  Car  comme  auons  dit ,  1er 
Françoys  trou  uans  vneV  ipere  au  fauuage^difentauoit  trouué  vn 
Aipis.  Mais  il  nous  fembla  trop  rare*,  carja  en  auons  trouué  en- 
Italie  ,  au  pays  de  l' Abru  ts.  Et  comme  le  Ceraitc  a  deux  petites 

NN-n 


•4^4  TIERS     LIVRE      DES    SINGVLA. 

eminétes  callofîtez  furies  yeux  en  manière  de  petites  cornettes, 
ccfttvy  yavncfeulc  bofîette,  &eftdcîa  couleur  de  J'Amphifbe- 
^Amphkbe* M*'  Défia  auons  amplement  parlé  de  la  Ccraftc  au  fécond  liure, 
m^  maintenant  nous  a  fcmblé  bon  la  reprefenteren  portraid,  n'en 

faifans autre difeours plus  long,  attendu  que  parlerons  ample- 
ment de  tous  ferpents  en  aucre  endroid. 


Au Hl  crouuafmcs  des  Saîmandres  que  nous  nommons  Sours, 

sdmmâres.  piuumcS)  &  Mirtils  :  qui  font  quafi  communes  en  tous  lieux. 

Muuînei      Aufïi  tronuions  des  Phalangions.  Retournans  le  long  des  orces 

i£rtik  '     ^c  *a  nier ,  arriuans  a  celle  bouche  en  l'endroid  du  Bofphore,cei- 

olfilmrd:   le  part  ou  commence  le  deftroid  du  Propontidc,  cftans  mon- 

Turftic.      tcz  defïbs  la  plus  haute  montagnetre  voiline,  rrouuafmes  vn  Oi- 

feleur  qui  prenoit  àçs  Efperurers  pafTagers ,  d'vnc  manière  qu  V 

uons  bien  voulu  efcrïrc.  Et  pour  au  tant  que  c'eitoit  vers  Je  corn- 

mencement  de  May,  lors  que  tous  oyfcauxfont  empefehez  à 

leurs  nids,  il  nousfèmbloic  rare  voir  tant  de  Milans  &  Efpcr- 

uiers,  venir  de  h  part  de  deu ers  îccoftédextredeia  mermaieur. 

Ejfermmde L'oifeleur les prenoit aucc grade indultrie, $: n'enfaiiîoit  pasvn, 

$&$age.       & enprenoitpiusdVnc douzainechaque heure.  Il  cfloit  cache 

derrière  vn  buifTon,&  auoitfair  vne  aire  vnie  &  quarrec  au  deuac 

quiauoit  enuiron  deux  pas  en  diamctrc,diilâtedeux  ou  trois  pas 

dubuiiïbn:  &  auoit  fiché  fix  baftons  au  tour  de  l'aire,  trois  de 


O  B  S  E  RTE  ES    PAR     P,     BELÔNr  46$ 

chaque  cofté ,  qui  eftoyent  de  la  groiFcur  du  pouce  ,  Se  de  la  hau- 
teur d'vn  homme  :  à  la  fbmmité  dcfquelz  y  auoit  en  chacun  vue   - 
coche  entailleedu  cofté  delà  place  :  Se  auoic  vn  rets  fort  dciié  de 
fil  verd,qui  eftoit  attaché  aux  coches  des  baftons,tcndu  à  la  hau- 
teur d'vn  homme,  Se  au  milieu  de  la  place  il  auoit  mis  vn  piquet 
de  la  hauteur  d'yn  coude,  au  faifte  duquel  eftoit  attaché  vnc 
cordelete  qui  refpondpit  à  l'homme  derrière  le  buiflbn.  À  la- 
quelle il  auoit  lié  plusieurs  petits  oifèaux  qui  paiftbyent  le  grain 
en  iairejefquelz  l'Oifeleurfaifoit  voleter  lors  qu'il  aduifoitl'e£- 
peruier  venant  du  çofté'delarncr  maieur.  Mais  TOifelcur  adui- 
îànt  rEfpcruicf  de  fort  Ioing ,  faifbit  voler  {es  oifeaux  par  la  pla- 
cc^'Efperuier  ayant  fi  bône  veue  qu'il  les  voit  d'vnc  demie  lieue,, 
prenoit  Ton  vol  à  adlesdefpîoyees,  Se  venoit  fi  roidementfrâppet 
dedens  le  filé  s  pcnfànt  prendre  les  pecits  oifeaux^qu  il  demeuroic 
encré  jeans  ,  enfcucly  dedcnsîeretz.  Alors  TOifeleur  le  prenoiî* 
Se  luy  fichoit  les  ailles  iufques  au  ply  dedens  vn  lmge  qui  eftoit  là 
tout preft, exprefle ment coufu,  &lioitlc  bas  desselles  auec les 
cuiflcs  Se  la  queue  audit  Efperuier,  Se  layant  cillé,  le  laiftbit  conr 
tre  terre  :  car  il  ne  le  pouuoit  remuer ,  ne  debatre.  Nous  nefçau- 
rionsquepcnïèr  de  quelle  part  venoyent  tant  d'Efperuiers  ;  car 
eftans  làarrcftez  deux  heures,  il  en  print  plus  de  trente ,  tellcmét 
qu'en  vn  iour  vn  homme  feulct  en  prencit  bien  près  d'vne  cen- 
taine.Les  Milans Se  Efperuiefs  venoyent  à!a  file*  qu'on  aduifak 
d'au (II  loing  que  la  veue  Ce  pouuoit  eftendre,.  Ceux  qui  vendent  Beri^  ~% 
les  herbes  au  marché  de  Conftannnopîe,cn  ont  de  pluiieursfor-  -^doumar- 
tes}dont  n'auons  cognoiftanec  n'vfàge,&:  principalcmcrau  prin-  ebédeCon* 
tcps,entre  lefquelles  vendent  ïes  LampfaneSjqq'ilz  appeliét  aufli/*»**0^ 
en  vulgaire  LapfanarMais  quand  elles  ont  pafîe  çn  dmc^Se  corn-  sAàe^- 
mencent  à  fleurir,  lors  ilz  les  appellent  Vrouues,&  en  les  man-"*'^ 
géant  crues,ont  faueur  de  R  ifort  :  mais  fi  on  les  fait  boullir ,  elles . 
deuiennentameres.  Hz  cultiuent  tellement  rAche,qu'ilz  la  font 
deuenir  douce,&,  la  mangent  crue  à  tous  repas,  Se  nomment  Se- 
lmo:mais  le  Perfil  eft  nommé  Macedonico.  Hz  vendent  auifi  les:, 
Afpargesde  Smilaxa(peraxqjti'iîz  nomment  Smïlachia.  Ces  AL— 
parges  font  bons  en  faîades  ,  comme  aufll  ceux  de  l'herbe  du- 
&au  noftre  Damejqu'ilz  nom  met  vulgairement  Eaabegîi  mcls- 
na,d'vn  mot  corrompu  fignifiant  vigne  noire.Maisà -An  cône,  ilz 
ies  appellent  Tamarou^LcsTurcs-dennent  les  marchez  parles  -.^^ 

NNa  ii  """"^ 


466  TIERS      LIVRE     DES     SINCVLA. 

villes  de  Turquie  par  chacun  iour  de  lafepmainc  :  car  à  ce  que 
tellcpîacç  tient  le  marché  en  Conftantinople  au  Lundy ,  l'autre 
piaeele  Mardy,&  en  Perc  au  Ieudy,&  ainfi  des  autres.  Et  s'il  y  a 
rien  de  rare ,  ils  ie  monftrcnt  ce  iour  là.  Parquoy  eftans  de  retour 
en  Conftantinople ,  &  nous  trouuans  fouuentcsfois  à  voir  leurs 
marchez^anons  trouuc  pluficurs  fiogularitez  apportées  d  effran- 
ges pays,&  principalcmententrc  les  drogues  de  certains  Theria* 
cleurs,qui  donnent  ordre  de  recouurcr  tout  ce  qu'ils  peuucnt  de 
nouueau ,  à  fin  que  les  monftrans  en  public ,  ils  facent  amas  de 
beaucoup  de  perfbnnes ,  aufquels  ils  vendent  quelque  chofede 
Deux  &«ï  leur  art.  Les  vns  font  monftre  des  ferpents  en  public:  mais  nous 
de  U  nature  n'en  dirons  autre  chofe  en  ce  lieu:  car  nous  en  auons  cCcvit  toutes 
des  ferpents,  chofes  par  le  menu,  au  deux  liuresou  auons  baillé  le  portraid 
auec  leurs  d'vn  chacun.  Les  autres  vendent  des  vnguents  &  racines  tant 
™fijor*  .  feulement^  de  la  mort  aux  verms,  &fouuentefoispafrcntd'E- 
gypteen  Conftantinople  :  car  nous  en  auons  recogneu  à  Confia- 
tinoplcqu  auions  ja  auparauant  veu  au  Caire}&  dont  auons  peu 
recouurir  certains  portràids  des  poi fions  du  Nil ,  que  ferons  ap- 
parpiftre  en  autre  œuure,au  liurc  des  poifTons.  Et  pource  que  ra- 
nimai dont  auons  defîa  cy  deuant  parlé,qu  on  nomme  vn  Tatou» 
efttrouuécntrc  leurs  mains,  lequel  toutesfois  cft  apporté  de  la 
Guinée, &  de  la  terre  neufue,dont  les  anciens  n'en  ont  point  par- 
léjneantmoins  nous  a  femblé  bon  d'en  bailler  le  portraicl. 


Txtoii. 


OBSEJtVEES     PAR.   P.     BEXOK.  4^7 

Lu  pcm&ure  du  Tatou. 


Ce  qui  fait  qu'on  voit  ceftebefte  ja  commune  en  pîuficurs  ca- 
binets ,  $c  eftre  portée  en  fi  loingtain  pays ,  eft ,  que  nature  la  ar- 
mée de  dure  efcoTce  Se  larges  efcaillcs  à  k  manière  dvn  corcelet> 
&aufîi  qu'on  peut  aifèment  ofter  fa  chair  de  leans  fans  rien  per- 
dre de  fa  naifuc  figure.Ia  Pauons  dit  cfpece  de  HerhTon  du  brelIL 
Car  elle  fe  retire  en  fesefcailles  comme  vn  Herifion  en  fes  efpi- 
nes.  Elle  n  excède  point  la  grandeur  d*vn  moyen  Pourcclcc  :  auiîî 
eft  elle  cfpece  de  Pourceau ,  ayant  ïambes ,  pieds ,  &c  mufeau  de 
mcfmc  :  car  on  la  deûa  veu  viureen  France3&  fe  nourrir  de  grain 
&  de  frui&s.Les  François  cognoifTent  vnc  autre  befte ,  nommée 
vn  Tartaret  ou  Tartarinjde  laquelle  ugriificacion  auos  bien  vou~ 
lu  faire  mention  en  ce  lieu?à  fin  que  l'affinité  des  di&ions  ne  tro  - 
pent,confondantle Tatou atxeleTartaret.Quantànous,  nous  TjltùMm 
prenons  le  Maimon  pour  le  Tartaret ,  qui  eft  ecluy  donr  Ariffco-  Tartaret.' 
te  a  fait  mention,qu  il  nomme  Simia  porcaria^  dont  auons  par 
cy  deuanc  parlé  en  faifant  mention  des  baftelerics  du  Caire  :  car  stmuporu* 
les  autres  nations  qui  le  nomment  vn  Maimon,  font  coutainfi  r^jmon 
comme  les  François  en  autres  contrées  qui  le  nomment  vn  Ma-  Mdifù^  ' 
got.Nousn'en  auons  point  baille  la  peinture,ncfait  defeription:     * 

.    -,         NNn  iij 


4-68     TIERS    LIVRE    DES    &I  N  G.   QBS,  PAR    F.   BELON. 

cm  nous  prétendons  le  mettre  en  autre  endroï&auec  plus  ample 
difeours  5  attendu  qu'encoc  y  a  difficulté  en  cefte  appellation 
Françoife,  d'autant  qu'il  y  a  quelques  vns  qui  défendent  que  le 
Magot  ou  Maimon  n^ft  pas  mefme  chofè  que  le  Tartarct. 

0r  maintenant  quepretendoris  finir  noftre  obferuation ,  auos 
bien  voulu  faire  entendre  au  lc&ëur ,  qu'il  ne  doit  trouuer  mau- 
uais  fiauons  quelquesfois  baillé  le  portrait  d'vn  animal  &  plan- 
teront n'eft  faite  grande  mention  :  pource  que  fi  enflions  deferic 
toutes  chofès  en  ce  liure,  ainfi  que  les  auons  nommccs,nous  euf- 
iîons  perdu  l'occafion  de  les  deferire  ailleurs  en  particuIicr.Tou- 
tefois  ou  loccafion  s  eft  adonnée,  auon  s  eftendu  norlre  parler  fur 
quelques  vnes  plus  ou  moinSjfèlon  l'opportunité  du  temps.Mars 
à  fin  que  les  autres  nations  participent  en  quelque  forte  denoz 
diicours,noiispretendonsles  mettre  quelquefois  en  autre  langa- 
ge,non  toutesfois en mefme ordre  &:  femblablcs propos quauos 
tenu  cy  dedens*  Ce  pendant , fi  le  le&eur  trouue  que  çeft  œuure 
lu  y  ait  profitc,rendc  grâces  à  monfêigneur  le  Cardinal  de  Tour- 
Eon,  noftre  trefiiberal  Mecenas&  maiftre5qui  a  fourny  auxfraix 
de  la  defpence  de  noz  voyages:&  après  à  noftre  libéral  jmagnani- 
me,&r  trefiage  Roy,qui  de  fa  çourtoifie.  &  bonté  vnous  aociroyé 
que  foyons  du.nombrc  de  fesefeoliers  :  comme.aufEfait  monfei* 
gneur  François  QJiuiçr^  Chancelier  de  France^ 

FI   N. 


il nefthomme parlant  de  diuerfès  cBojès ,  qui  puijje  Ci  bien  dire  3  que  tes 
feEleurs  Teuere$,enuicux\  &  de  mauvais  vouloir  ^ne  trouueni  à  redire  &  ca- 
htmnier+M,aU  nous  prions  ceux  qui  de  bon  %ele  accepteront  noftre  labcmy 
qu'ils  [apportent  les.  fautes  s'ils  en  trouvent  aucunes. 


De  rimprimcriedc Léon Caucllat le 2,4. Feurkr y  15É 
pour  Hierofme  dejk£araef&  la  veufue 
Guillaume  Cauellar. 


VIRTVTÎS    ET    GLORIA, 


C  O  M  E  S      I  N  V  1  D  I  A. 


m  C  §1 


:  pour  fàxacrueiHe,  lequel  â'àyantfiu*  ne  reflux  ,  de- 
xanec,  car  eftant  enuiroané'  déterre,  eft  ferme  de  tou- 
ides  riuicres  qui  entrer  dedïs  par  diuers  coftcz.Et  l'eau 
rt  hors  par  i'Helleipont,  iàas  «mais  remoater  ,  fepa- 


PORTRAICT   DÉ   L'ISLE  DE   LEKÎiSÏOS,   DV   MONT   ATH 

4cùrciigioad:cs  Grecs,  &  de  plufieurs  autres  lieux  de  Grcce&  l'Afîc,  retirez 

Obfcruations  des  fîngularicez  des  pays  effranges.  Par  P, 

Voycydcflbubzlespon 
TcrtcfermcenAfic.  ,     .  fouins,defquc 

Icy  eft  le  firge  d'vn  Bâcha  au  Château  de  Cuce. 


CHEF    DES .  CERÎMONIES 

tel ,  fiiy  uànt  la  defeription  des 
du  Mans. 


;  Dauphins.  Ce  font  ceux  que  les  François  mangent  en  grandes  délices:  mais  ils  les  nomment  Mar. 
ins  perfonne  n'a  encor  mis  les  vrais  portrai&s  es  autres  chartes  auant  ceux  cy. 


Zéros  iTttotnoii 
lcarie,}ï4xi:,et  tou- 
ia4UttreslJlti'â:U> 
des  <f  Sporade*  j  sot 
bn'oitees  partie  de 
Ttir»  ,  p^rus  de 
Créa  tributaires  au 
grundjcttrnettr. 

Maintes  choies  ne 
t-oie*  ont  rendu  II- 
lic  de  Lcmnos  me 
moiiblc  mus  entre 
autres  le  labnnthc 
de  pcdaius.&aufn 
les  forges  de  Vulcan 
qu'on  me  y  iuoir  e- 
ite.  La  terre  feellec 
continue  encor  mai 
tenant,*  ait  en  que 
les  Vénitiens  der- 
niers feigneurs  en 
l'ifie,  atunr que  1« 
Turcs  y  falLat  Ici 
xnaiftrcs)meircnt  tel 
le  inftitution  ce  !a 
tuer  feulement  vng 
fcul  jour  de  l'an  ,  le 
vj  lourdAouft.car 
à  la  vente  les  Tares 
cftans  venez  cnGre> 
ce ,  n  ot  né  roué  àes 
cenrcooiesaccoUfta 
fce'cs.comraç  a  l'cxé* 
pie  des  autres  Pro- 
uinces  eA  de  payer 
neuf  ducats  pour  en 
trerau  fairxft  frpul- 
chre  de  nofire  fe'g- 
nCLrenlcruiàlcsn. 
Nous  aucric  expre 
portraict  ccf*c  cïiaf - 
tepourdanreïpîai- 
firaux  actdcfiris*  a- 
rs-iteurs  du  bter"  pa- 
bhcpour  leur  faire 
\orrlaiitt3non:  àe£ 
villesdontGaliefla: 
faift  reennon  par?âc 
deiorSoyagce'nl"! 
&e  de  Léhos,  «ofieu 
uiefmcîiurccTcsiîm 
pics,  la  ou  Û  parle, 
les  différences;  ék$ 
terres  ,  âuqtrcl  îïetf 
erouuos  tefrnotgna- 
ge  que  de  fon  temps 
Troye  eiioit  aen»- 
raeeAlexanà-je.il  S, 
aufll  fafâ  raer-ticr» 
dcTnaflbs&ckPhi 
iippi  cj  chacû  poarr» 
voir  jcy.  C  eito.rle 
traieûdudroictcnc 
mm  paflànt  des  Ro- 
mains allans  d  E&ro~ 
Je  en  Aiic  fit  met. 
Ceux  qd  vont  par 
terre  pa&ra  Ga-hpô- 
*  alongent  lear  che- 
min :  mfais  par  me? 
Ion  coftoïc  Hfle  âr 
Samotrace  ,  Lénos, 
TaiTos,  Inïbrcà,  Te 
Eedos&  Meteïauât 

dejerre  fernfo  No" 
auôs  fait  autres  du- 
cour«  à  part  petrr 
l'explication  de  tou- 
tes fes  cnotfês  qui 
n'ont  peu  trouaer 
place  en"  ceft  cil- 
droit,  là  où  eôacun 
qui  cri  voudra  fça- 
uoir  da'ult'age,  pou» 
r,a  aVîoîr  recours ,  aa 
hure  de  mes  fingu- 
laritez  &  obfeiu*- 


La  déclaration  des  noms  imprimez  en  ce  portrait,  eft  amplement  deferipte  au  premier  Iiureies  Ol 
,  mont  Athos,  au  premier  fueillet  au  lime  des  portrai&s  des  Oyfcaux,incontincnt  après  l'Epiftr edu  Ik 
aux  Grecs,  comme  diriez  Rome  aux  Latins:  car  il  cft  habité  en  tous  lieux  par  les  Caloieres  Grecsqui  £ 
de  noftre  temps  d'eferire  qu'il  y  a  âuffi  des  religieufes:  mais  tant  s'en  faut  qu'il  y  en  ait ,  que  mefoemei 
cun  village  de  gcntsLaiz.        - 


4*>—  AllC  yit  mer. 
Ceux  <jui  vont  par 
terre  paSèr  à*  Galitxs 
li  aiongent  Icar  cîic- 
niin  :  niais  par  mer1 
loa  coftoie  Hâe  d<- 
Samotrace  ,Léj>os; 
Taflbs,  Inïbros,  Te- 
fledos&  Metcïauât 
cu'arriucr  au*  ports 
de  terre  ferrrfè.  No* 
auos  fait  autres  du- 
part  potfr 
1'exphcaaon  de  tou- 
tes Ces  chertés-  quï 
n'ont  peu  rrouûer 
place  etf  ceft  es- 
droit  ,  Il  où  Cûacun 
<}ui  en  voudra  fça- 
uoir  dauârage,  pour 
laauoîr  recours,  an 
hure  de  mes  £n^u- 
iaritez  &  obtciux- 


>bfèruations ,  &  de  toute  Flflc  de  Lemnos.  A  uffi  voirez  les  difeours  appartenants  à  ce 
ure.  Il  cft  mémorable  pourcequcc'eft  le  chef  des  cérémonies  de  Grèce,  eftanten  ce 
fe  tiennent  es  monaftercs  renfermez  de  muraille.  Ceft  ignorance  qui  a  efmeu  aucuns 
:nt  de  quatre  ou  cinq  mil  hommes  qui  viuent  là,  tous  font  Caloieres,  fans  y  auoir  au-