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fl .Z&J0J4
LES
OBSERVATIONS
DE PLVSIEVRS
SINGVLARITEZ ET CHOSES
MEMORABLES, TROVVEES
en Grece^fieJudéeJBgypte^Arabie, ôc
aucres pays eftranges , rédigées en
trois liureSjPar Pierre Beion
du Mans.
'Meueu^de nouveau £r augmentezjte ligures*
Le Catalogue contenant les p!us notables çhofes yç{z
en la pagefuyuante*
?5^i
m
A PARIS,
Chez Hierofmc âe Marner, &: îa vcufàc Guillaume Caueîîat^.
au mont S.Hilairc5à lenfeigne du Pélican.
M. D. LXXXVIII.
«4VS.C PRIVILEGE J>V &OB
f -
ê -
m- .
L£ CATALGGVE CONTENANT
les plus notables chofès de ce
prefent liure.
Les appellations antiques des arbres & autres plantes ydes/èrpents, despoif
fons^des oi féaux ^ & autres befles terreflresy conférées auec les noms Fra-
cois modernes : &plufieurs vrais portraiBs iiceux ntire^du naturel^
non encores veu^parcy deuant.
Les mœurs & façons de viure de diuerjès nations en Grece>& Turquie: &
les veflemens d'i ceux*
Les antiquite^g? ruines deplujieurs villes illuflres en *Afie & Grèce.
La defcnptiondu Caire lemfdem^p amas ^ntioche , Burfe y .Alexandrie^
& plu fieurs autres villes du Leuant^auec leurs noms modernes.
La defcriptim de plufeurs monts celebre%j>ar les anciens Prêtes & Hifto-
riens*
glufîeursdifcoursfur les chemins en diuers voyages par Egypte , .Arabie,
tAfie^gp Grèce ^-contenons diuerfes chofes des antiques conférées auec
lesmodemes.
+Ample difeours fur la vraye origine du fin or ^ fur les principales mines
d'or & d argent dugrand Turc*
A TRESILLVSTRE ET REVEREN-
DISSIME SEIGNEVR FRANÇOIS CARDINAL
de-Tournoi 5 fingHlie* & libéral Mecenas des hommes.
Jtudieux de 'vertu > Pierre Belon fin treshumble
domefiique firuiteur falut & en."
Uere groffceritL
Onseignevr, c eiï a bon droiét que
( les gens doâes vous ont en admiration, &
k & que le peuple eftranger affeâé ànoftre
- république y comme anfE le François , a
grandement loué Se eftimé l'excellence de voftre bon
iugement, & magnifié voftre prudence & vertu; cas
entre tous autres illuftres prélats , voas auczfinguiic^
rement aimé Se honoré les lettres , aduancé les let-
trez, & par voâre fpeciaie faueur enflammé & pro-
meu leurs eftudes > faifant cEoifir plusieurs enfans Se
autres plus aagez de bon efprit , que vous entrete-
nez & faites inftruire Se endoâriner en tous arts pas
les vniuerfîtez Se en voz collèges de T o vm o n, Se
autres qu'auez édifiez Se bien munis de gens experts
Se fçauans. Les feienees Se difeiplines qui fopt main-
tenant familières Se communes à noftre nation, ont
raifon de vous aduouer pour leur patron , d'autans
qu enfouftenant le pelant faiz de noftre république^
vous auez prins pîaifïr de leur donner commet
cernent , Se efleuer les gentils- efprits y Se. les aduan*-
eer fèloa leurs qualkez,& aufli les employer en cei.
qraoy. ont e&é trouuez enclins Se fuffifans po^t.femisà
EPHTRE.
"iVtilité commune. Delleft enfuiuyquejeseiprits des
hommes , quiauparauant eftoyét comme endormis &
détenus aflbpiz en vn profond fommeil d'ancienne i-
gnorance,ontcomencé à sefueiller, Se forcir des tene-
bres,ou fi long ceps cftoyent demeurez enfeueliz: & en
forçant , ont ic£té hors Se tiré en euidëce toutes efpeces
de bonnes difeiplincs : lefquelles à leur tant heureufe Se
defirable renaiffitnce,tout ainfi que les nouuelles plates
après Fafpre laifon de Fhy uer reprennent leu r vigueur à
la chaleur du Soleil, &font confotées delà douceur du
printéps : femblabiement ayans trouué vn incoparable
Mecenas, Se fauorabie reftaurateur fi propice n arrefte-
rent gueres à pulluler Se à produire leurs bourge6s;pui$
cfmaillâs leurs draios,& couurâs leurs tiges de nouuelle
verdure,&paruenuesenleur faifon d'efté gracie ux5cha-
cun s'eft trelbien ornée de moult belles fleurettes: dont
ayans puis engendré le fruid dele&able Se à meftima-
ble bonté, n'y a eu celle qui n'en ait fait prefent pour le
payemêtdesprimices du reuenu àfon fouuerain orna-
teur,& gracieux foleihduquel le bening afped les auoit
toutes remifes en vigueur.Ceftoit le Roy magnanime,
treflage,trefpuiirant,& prudent,François premier de ce
îiormauqueLeomme libéral Mecenas des hommes ftu-
dieux de vertu , il ny auoit celuy qui ne s'employait de
toutfon pouuoir faire prefent de quelque chofe hone-
ftc : mais fur tout des fruiâs cueilliz au deledlable iar-
din , entez de greffes exquifes furlesplantes de Miner-
ue^u'il aimoit dvne finguliere afFedion. Auffi eftoit il
de ftbenigne Se libérale nature , qu'il ny eut onc hom-
îue,'eftranger,oudefanation, luy preientant aucune
ciiofe , tant feuft elle petite, qu'il m Fait humainement
E P I S T fc &
îcceue , & fore bien rémunéré celuy qui la prefen-
coit,de don Royal, & honorable guerdo.ParquQy tous
en gênerai fuyuoy ent i'exéple de ce tant vertueux & in-
comparable prince , père des Ccicnccs : tellement que fit
court fembloit quelque belle A cademie^u ancien e ef-
cole de Philoiophie,cn laquelle cftoit mofttee laTheo-
rique,&: pra&ique de toute vertu.DonCjtnonfeigneur,
poureeque les Mules vous ont cognu fingulierement
entre tous autres ennemy capitaine l'ignorance, eft ans
aileurees-de pîufieurs fciéces qui font infufesea voftre
diuiriefprit toutes d'vncomun confenteméteognoif-
fans bien voftre noble cœur, vous prefenterent la pal-
me^ deflors vous ayans eleu pour leur chef,voulurent
vouscollkuerfouuerainPhebus fur l'armonie de leurs
inftrumens des refonantes Mufiques bien accordées: à
fin qu'en- celle excellente Mufique fon beau Théâtre
Royal,feuft décoré par voftre affiilance : fçacbans auffi
que les lettres Greques & Latines vous font fi familie-
res,que tout ce que lifez des bons autheurs,en Théolo-
gie, Phiiofophie, Aftrologie, Cofmographie , ou Hi-
ftoires,vous le lifez au melme lâgage de leurs autheurs:
efquelles feiences & lettres Greques , vous elles d autât
plus excellenr,que des voftre ieune aage vous auez grâ~
dément trauaillé à les apprendre, & y auez fort bien elle
ihftruiâ: : & auffi que pour l'heure prefente le pi us grâd
piaille que puiffiez prendre,ell d'employer le téps con-
uenablc à lire les plus excelles autheurs anciens. Et fuy-
uât celle naturelle excellence de voftre diuin efprit, qui
s'ell toufiours dele&é en la contemplation des choies
naturelles, defquellesvous elles fouucrain admirateur:
après qu'eultes cogneu le defir que i auoy c de paruenir
a iij
EPÎSTRE.
alintelfigencc des chofes concernantes la matière des^
mediçamens Se des places {.laquelle le ne pouuoye bon-
nement acquérir finon parvne loingtaine peregrina-
tion)il vous pleut me comander les aller voir es régions
loingtaines -, Se les chercher iufques aux lieux de leurs
milTaoce, chofe que ie n'euffe peu ny ofé entreprendre
fans voftre aide , fçachant que la difficulté euft efté es
frais Se defpês,qu'il m'y a conuenu faire. Parquoy ayâr,
auec Payck de Dieu , Se par le moyen de voftre liberali-
té,acheué le voyage,qui ne m'a efté moins vtiie Se déle-
ctable, que difficile Se laborieux, ôc nç-.voulant perdre
ce repos & loifîr duquel ie fuis à-prefenc par voftre bé-
nignité iouiflant , iay cy réduit par eicrit en noftre-lan-
gueles chofes mémorables ôc fïngularitcz, félon que
les y ay obferuees & choifies ça ôc là, ainfî quelles mot
fembié dignes de récit: afin .de vous faire apparoiike
que ie n ay du toutfruftxé voftre in tëtion. D autre parc
à fin que noftre nation , qui fçaic quelle affection vous
portez àJTvtilité publique, fe fenre aucunemée du fruiâ:
de cefte miéne pérégrination, dont vous eftes autheur:
Se qu vn bien eft d'autant pIusiouable,qu'il eft plus co-
mun: i'ay.traidté cefte mienne obferuation en noftre
vulgaire François, & rédigé en trois Iiures,ie plus fidè-
lement qu'il ma efté poiTiblern'vfant d'autre artifice ou
élégance d'oraifon, finon d'vne forme iîmple., narrant;
les chofes au vray ainfi que les ay trouuees es pays-eftrâ-
ges : rendant à chacun ion appellation Franco:! e ou il
m'a efté poifible deluy trouuer vn nom vulgaire. Des-
quelles chofes, poSblequclacognoifiance n'en fera,
moins vtile&plaifànre, que l'abus ancien prouenâtde
ligaorance de pluileixrs,d6 1 i'ay cogneu la vexûé^elloit.
EPISTRÏ.
dommageable & pernicieux. Et en prenant liberté dV
ûendre mes difeours plus îoing, ie tfay voulu omettre
quelques topographies 5r particulières <Jefcriptions
des lieux qui m'ont femblé mémorables > les reprefen-
cantàmon poflible,& mettant quafi deuant les yeux
•des Le&eurs^ainfî que moymefme les ay veues. le tou-
cheray des mœurs ôc façons de viure de maintenant tac
des Turcs , des IuifsJ, que des Grecs. Lequel mien petit
labeur d'aage encor iuuenil, i'ay bié ofé vous prefenter,
Monfcigneur , ne prétendant que par fi peu de chofe ie
mepuifliacquiterde mon deuoir enuers vous , mais
fouz efpcrance qu auec l'aide denoftre Seigneur, & ce
qu il a pieu à noftretrefmagnanimejtresheureux^cle-
ment Roy me maintenir au nombre de fes efcoliers,& à
la bénignité & libéralité de monfeigneur le Chancelier
François Oliuier, me donner moyen pour entretenir
mes eftudes. Vous voyreez, en bref autre mien ceu-urc
en la traduction de Diofcoride en noftre langue, & co-
mmîmes en iceluypourfatisfaireàvofke treflouable
defir , fur la cognoiiTance tant des plantes étrangères
dlrurope^Afie, Se partie d'Afrique, que des oifeaux^
ferpens, poiiTons, & autres animaux terreftres 5 que i ay
obfeué par terre & met, & par les portséspaysduLe-
uantme propofant en tout ce que ï en eïcrijtnettre cho-
fe que ie naye premièrement veuërà fin quefuiuant
voftre commandement l'ayant mife au vray, félon que
nature la produide 5 vn chacun ièpuiffe pcrfhader de
affeurer de la lire à la vérité.
Monfeigneur y ie fupplie ireshumblemem le Créateur
vous donner en fa grâce entière projperité.
®evoJîrematfon en l'abbaye de JknB Germain
iespre^lespam. 1553*
PREFACE.
<T.^=5a^"??l ^^^^fe^y O v t ainfi que les hommes font compofizje corps
if'ffêff^ r%^^v & d'âme , femblablemtnt leurs œuures & entre- .
^^fer/l C ^vSST prinfes fuynent lesvnes la nature du corps 3 &les
^■f" ÏÂ Î^K^Ér'^ Autres ce'te de l esprit : &Ji les œuures du corps &
CfS Jfea3 ^tSSîL ^e ^e^}Ylt fmt excellentes > tout amfi font de me~
^$&$\ moire perdurable. Car comme les hommes [ont »rf-
saK^^ turellement enclins à conuoitet bruit & reno ^pour-
leur gloire ££r* louangeiaufii sefludlent ils de ï acquérir en- diuer fis manières».
Les vnsparla pmjjknce du corps 3 les autres parla vivacité de leffirlt. Les
forces d * Hercules j 'ont célébrées en toutes hiftoires : Alexandre & Pompée
ont obtenu lefitmom 'de o-radeur^gp Ce far de vaiUantife &hardiejfe. Mais-
Blato>*s4rijlote:>& autres Philofophes contemplatifs ïont acquis par lafuh'
iihtédeleur entendement 5 &- profonde érudition. Les autres par mefme
moyen ayansjuiuy quelque honefleeîfierance^ riay ans fait difficulté de s' ex-
pofer itdiuers périls ^fentans efîre beaucoup plus raijonnable de pou-rchafi
fer leur gloire parles facuke^de-lentendementy en ont femblabiement gai-*
<mé renommée immortelle. "Dont T>emocnte en porte bontefinoignave 3/e«-
quel pour le grand de Çtr qu'il auoit £ acquérir U praçllque des fiiencess
c'efi k dire Inexpérience aufii bien que la Théorique ,& principalement d'*A-
fironomie ^7* G eometrie ^vendit fin patrimoine a Ces frères } afinèeploief
l'argent delà vents en lointaines pérégrinations par des pays d' Egpptejn-
die^& Chaldeegour paruenir aux Gymnofophifles^ puis après retourner-
en ^Athènes auec grande reput aîion^ &y efire honoré par finfiçauoir.Plu"
fieurs autres Je font grandement illufirez^ pur moult petite occafion% mais
non fans avoir beaucoup profité k ïvtilité publique. Me finement grand n fi-
bre de Roy s ay ans feulement laijje leurs noms à quelques plantes, & autres
chofes^defquelles ils furent inventeurs >en ont rendu leur renommée tmmor-
telîe.MitbridatesRoydePonty&de tant d'autres prouinces , encorquil
mjî obtenu plufiems viBbiresen diuer fis batailles* & eu fi Ivfitge &fcie~
€e de xxij. langues y ejquelles il oyoit 0* refpondoit à toutes nations qui luy.
efioyem.fMeBes ; nés 'efi. il pas rend® glus renommé 0plus tUufire pour
■ ■ , ; imfeuï.
PREFACE
<vn feuî médicament qu'il compofa , auquel il laiffa fon nom 2 que pour l'o-
pulence & grandeur de fon Royaume} Tandis que la terre produira la Cen~
toirejle nom de Chiron Centaurus , qui fut maijïre dEfculaptus , demeurera
imprimé en la mémoire des hommes, La Gentiane n'a elle pas rendu Gen-
dus Royd'Eficlauonie plus renommé , que n'ont fait toutes fis richcffesïïLy-
Çimachus Roy de Macédoine 5 & Eupator qui domina en Thrace^ n'ont ?/%,
pas perpétué leurs noms parles plantes ? lubaRoy de Mauritanie > ^Achil-
les Grec, TeucerJeRoy Clymenon^ & plusieurs autres grands pe-r formages
âyans donné leurs noms a certaines plantes > ne s en font ilx^pas refirué
éternelle renommée 1 Grand nombre d 'autres sefforcans de vaincre toutes
difficultés 3 ont par fimUable defir fuyui loingtaines pérégrinations-, aufi
quelles frai eur s des naufrages en la perilleufi me? 5o» la tourmente des
vents impétueux bat tans les nauirest & brifians entre les vndes agitées par-
les orao-es^ula crainte de perdre leur liberté es mains des Pyrates mhumainsy
ne les dangereux paff âges parles affres rochers^ ne ïintemperature du chaud
excejiif ou de l'extrême froidure fie le$nuit~ls obficurcies des nuées pluuieu-
Jês fouldroiantes de [horrible tonnerre ^ ne le danger de paffer les deferts in-
habite^pour la crainte des beftes fàuuages 3 n'ont eu pouuoir de reprimer
ï ardeur deleur noble courage ia enflammée en leur cœur généreux , qui /^
Payent mis fin a leur délibération. Vlyffis en a ejléejhmé & mgé de tout le
monde le plus fige & prudent d'entre les autres princes illufires 5 tant pour
auoir obfeméla diuerfité des mœurs de plufieurs hommes > que pour auoir
veu ht diuerfité des villes & des- pays effranges . Uevo dotefbwdore^ Stra-
ho3^rrianus<>& plufieurs autres anciens 5 nous ont laijjéieurs loingtains
voyages parefint 5 defiquel'xj-es hommes ont receu bénéfice inefirmabie ^at-
tendu que tous leurs trauaux tombent au foulagemsnt 0- repos de la posté-
rité. Car nous efians ànojire ai fi en lieu de fèureté^ nayans crainte des pé-
rils 0* dangers, li fions Ihifioire qui nous donne cognoijjance dinfimes cho-
fisacquifies par innumerables trauaux 5 & incredihles miftyss d'autruy. Or~
pourcequeles chofies finguheres prinfis-des plantes 3 animaux 5 g? miné-
raux pour la plm grande partie nous font enuoyees parle bénéfice des pe-
re <rr mations 3fiam lefquelles.il nous efi difficile. & dutout bnpojîible auom
part es dons& richefjes des terres efiranges^ nous dehberafines les aller voir
fur les lieux de leur naijfiance. Et À aufi que la cognoi [fiance iicelhs nous-
eufl eflé d'autant plus malaifie yvoulufines auparavant tirer la perfpecliue-.
de leurs effigies des Hures de nos ancefires 5 pour T imprimer ennofîre ideei-
& alors ofafmes entreprendre les aller chercher au loing par les pays ejlra-
gesfîefyeunsjMtrexeccmpsnfe pom nos peines que de les voh en vigueur*
PREFACE.
Tuis donc quede propos délibéré nofire defir nous droit la, pour les troutw
ou par monts , ou par vaux , plaines campagnes ^& ombrageufi forefis en*
diuer fis parties du monde , nofire intention napas eflédu toutfrujlree.
Car en les cherchant & recognoijfant , plufieurs autres chofes d % abondant
fie font offertes 4 nous tant en ^éfie qu'en Grèce , dignes d'efire ccmmuni -
quees a noflrenation : lejqueîles nous a fimblé bon obferuer & rédiger par
efcrit ainft fuccin&emenu Car fi eufiions défera entièrement toutes les cho-
fis que nommerons , nous eufiions eu crainte d'ennuyer le leBeur de prohxi"
te.LefqueUes obforuations auons propofé deferire en trois lwres\ defquel-%lc
premier comprendra quelques fingularite\du mont ^ithos^deïisle de Lcm~
nos & plu fieurs autres chofis de Grèce* Le ficond contiendra la defeription
des ruines de Trqye^ &Je plufieurs autres villes lUufires en ^éfie : &y ad-
ioufierons la defiription d'vn voyage par -mer 3 de Conflantinople en Ale-
xandrie^ de la au Caire mfques au mont Sinai& delà en Ieruftlem^ &
confequemment a ConfiantinopieXe tiers fera entendre la manière moder-
ne de viure des Turcs ycommeT auons defiriteefiamrefidens defiiourau mi-
lieu de Turquie* Et afin de nelaiffer le leEieuren doute du temps auquel auos
efcrit cefle oh feruationjious a fimblé bon faire entendre que nofire départ
fui du Viuant du Roy François fan mil cinq cens quarante fix^gr le retour^
•l'an mil cinq cens quarante neuf: par ce moyen tout le voyage n'a duré trois
ans complets. *Au furplus après auoir confideréque les hommes croiffenten
fçauoirde plus en plus les vns par deffusles autres 3 & que tout ce que nous
mettons en euidence noyant authorité que de nous mefmes 3 rieftgrandemet
frifé^ il nous a fimblé ' conuenable amener quelquesfois les pajfages des bons
mtheursrfow donner authorité 'aux chofes que dirons par cy après.
LÀ TABLE DES CHAPITRES
du premier Hure des fingularitez^bfèruees
par Pierre Bclon du Mans-
, Ve nature coduifant im chacun en ce monde par dî-
ner [es vqyes If ait que le but de tous tendâjtuerjes>
fins, chapitre premier. par. i.
' Quon ne Je doit trop fier aux appellations des cho*-
[es ^encor quelles foyent vulgairement nommées y
fi elles ne font bien correspondantes aux defcrip*-
tions des anciens , & conuenantes lia chafeqjéon
defcnpZr chap.it. pag. 3.
JLe portrait! du Platane Pa^*
Brief difcours des fengularkezi de Crète r & particulière ohferuation des
_ moeurs des Grées. chapaiipag. 5^
Que les Grecs efians tributaires fous leioug des feignems efirangevs-^cùm-
* portent félon hcoufiume de viure de leurs faperieurs. cha. tiii.pag.il ^
Ohferuation des principaux lieux de ïisle de Crète. chap.v.pag.i^.
Du faux labyrinthe de Crète: s& des ruines de quelques villes deïide+.
chaprvL ■■■—' B^1?*
Comment les Crêtes font le Ladanon. » chap.vir.pag.1% *.
Wvn poiffon nommé S carus ^moult fréquent au riuagede Crète ^toutes,-
fois rare es autres contrées. chap.vi11.pag.19*.
Les noms François de plu fieurs-e >fpecesiïoifeaux.ûhferu£%jn Grèce ^ & cïL-
fere^auec leurs appeÏÏatiûns antiques^ • cbapjx.pag.zu
Le portrait! du Merops. pag. 2.3.
Les noms Grecs de plufieurs autres 01 féaux ^confere^uec leurs appeUams-
Françoifes. chap.x.pag.z^.
Les noms antiques & modernes tant François que Grecs %de plufieurs au-
. très oi féaux. chap. xi. pag.zj^
"Befcription dvn petit animal commun en Crète ^ nommé phalangion^
chap. xiu p*g. $<à»
Wune efpece de Roue fauuage frtquent m Creterque les François nomment
vnBoucefiain^ cèap.xiiLpag^.
Le partraiEiduBoucefiain^. _£•*£• 3>*
2> 'vn Mouton de Crète nomméStrepficherQSiauecvn difeoursquim feigne
que cefi que Licorne. " ' * ■ cbap.xiiii.pag.%.
MrmiBde Strepficherou pag.56^
LA T À B L E
Tfvne pierre de Crète dont Solin a fait mention, nommée Da&ylus idem.
chapitre.xv. Pag&
Defcriptiondu plus haut mont de Crète 3 que 'tes Grecs nomet vulgairemet
Vfûoritl.anciennement IÀa\& les plantes quiy croiffent.ch.xvi.pag.yj>.
Les nomsdesarbres & herbes' exquifes qui naijfent fauuages autour dumot
Jck:0^hmanier€dci^UirU^£r4»e^/€arlatte: chap.xvij. pag.59.
Brief récit de plusieurs autres plates fauuages de lafufdiSle ifle.cxviiLp. 42-.
Ve laMaluaifie de Candie nommée Pr -omnium vmum& quelle n'eftfai-
te ailleurs. ckap.yux.pag.4j.
Del* ancienne. manière de danfermec les armes ^nommée, Pyrrhtcajaitatio.
chapitres* . '•'■',■■■ Hb'48*'
Quetout homme ayant vn commandement ou paffeportd'vnBacha^oudu
Turc3efiant habillé À la mode des Turcs ^menant \% me. guide auec foy^pom
fermr £ interprète ou truchement ypeut cheminer feurement par tout le
pays des Turcs. ~ ,,chap.xxi.pag.49*
Que les Turcs efcnuentiwe mefme Atâton w*vocabk 'de leurs lettres en
plus de vingt fortes. .,. chap.x%it^ag^ï.
Defcriptiondes différentes espèces des terres fellees 3 & des féaux qu'on a
imprimezdeffus. . chap.xx1iLPOg.5z.
Voyage de Confiatinople à Lemnosjfie en la mer Bgee^ nommée en vulgai -
reltalienStalimene. chap:x%i'm.pag.^,
Defcriptiondes villes & mines de Lemnos. cbap.xxv.pag.ff*
Les noms des plantes communes naiffantes en XrsU de Lenos.ch.xxvi.p.59.
Queles grands fiigneurs de Turquie viuans aleur mode, fe nourri ffent me-
caniquement \p 'ay ans aucunes délices. . . .-. thap.xxvn.pag.6z.
Ladefcriptïodu lieu en Lenos ou lopredla ttrrepGiirfeeUer.c.xxviu.p.64.
vqy les chapitres.zz.z$.i 4.2,5. & 16. touchant le pays deLemnos.
■Que les chofes viles & de petite eftime font rendues precieufes par ceremo -
nies: &que les chofes de petite valeur prennent autkorité,eftans anoblies
dehfuperftitton. ^ jhap.xy.ix.pag. 6$.
Zes nomsdes poiffons freques au riuage de ïisle de Lenos.ch.xxx ,pag. 6%.
De la o-umme de Codnlle^ autres chofes fmgulieres^auec les noms des fer-
pensqu on cognoiflviure en lisle deLemnos. chap.xxxi.pag.-jo.
Le portraiBduferpentCenchris. P^'7°*
De toifire qu'on pefçhe communément au riuage de ïisle de Lemnos.
chap.xxxii. Pjg'72-
D'vne fiurcedes baings chauds en Lemnos& des monajî ères des religieux
Grecs. :chap:xxziii.pag.'7$«
DES tHAMTRESi
Voyage delemnoscntijledeTaJfos. '.-...- cb^plxxxiiifpag.j^
la defcription du mont ^ithos : & éscbofis mémorables qrtmy trouué,
ehap.xxxv. . PaS*7^
QtCjlyapourkiourcthuy de cinq a famille Caloieres Grecs yviuas aumot
^tbosyéff>arsç*er laparlesmonafleres. cbap.xxxvLpdg.79> '
:Que tomlesmonafleres du mont ^étbosfont forts pour refifter aux putes*
>&quclesPyrates ne leur font pas grandes 'violences. çbjcxxvif.pag.'J,9%
Que leniont \Athos efl eftimé en telle réputation aux Grecs , comme Rome
aux Latins. cha.xxxviijpag.So.
lesnoms de tous les monafleresfcs nombrant par orkefommençant a ter-
^referme, ,: . .: V ' . — :;%. : /- cha.xxxix+pagr&<u
Jtaifbnpouvquoy plufieurs Hures ont efléruîne^&perdM-enGr£ce:&de
la fondation des monafleresdumont^ithos. cba.xl.pag.2p
Be quelques cerimonies en l'Eglifedes Grecs. & de tignorance qui efl entre
■; lesgemiEgltfeenGrece. - . ^ cbajdt.pag&$.
&e&plantesfengulieresdu mont ^hos,pitouemmmmrdlememfansefire
y cultiuees. - -'■■..■ ééjdij.pâg^
portraiB de l'herbe nommée ^ipios. p*g$> S.
les noms des arbres toufiours verds venants famages par les vdlees-dumot
*Athos. . : xhap.xliij,pag:8&
les noms en gênerai des<trbres (^arbriffeaux^ quauons obfcruczjn àuers
pays efiretovfwurs verds. ^ xba.xI1iy.pag.S9»
PortratâdelaSwffe. P*g-9°*
Obferuatiûn désireux circomoifins qù on peut regardereftantfirlefatftt
. du mont ^étbos. cha.xlv.pag.9 1-.
les Cdoieres ou moines du mont ^ithos font bs arts mécaniques, -ebapt-
trexlvï. f*g~9A?
®es Cancres £*au douce jpuife tiennent é raijfeduxparkstnontagnes^éf-
. ferentslno^efcreuijfes. .chajavu.pag.96-.
VeFeflrangcmaniere de viure des religieux Grecs : & hleur aufieï-efaco,
fuperflition& cérémonies touchât le boire & manger.chajclviij.fr. 96.
Voyage dumont *4tbos a Salonify: & des poiffons rares quonypefche.
chap^xlix. . ./*g; 9&
PortraiB de la Lamoufle.en François Sauterelle. pag.99.
Des mines d'or &4iargentdugrandfiigneuri ^ ample difeatm detorï*
. ginedufincr. ' ' cha.Lpag.ioQ*
^utredifcours détordu Veru^& des Indes^&aupU manière comment
ksmetalkires affinent for dont lesducats dugrandTurcfontforge^ &
e ty
£ A T ABlî
quHlny a que ivne forte d'or de ducat en toute Turquie» chaJi.pag.lo^ù
Doteft venu toccafio des fables qd an a rjicotees delà toi fan dor.c.lij.p.lo S
Defcription de plusieurs autres jwgulariîezjrouuees es fufdites mines 3 ^*
automnes montagnes dudit pays,. chajiij.p. 1 1 4.
La figure du Cotiledon, pag. 118.
£es noms de pîufeurs bejhesfkwages*. cha. liii) .pag. 119*
PortraiB. du Chamois pag. i 2 o •
PortraiSïdu Trageî'apbus^ou houe ceruier. pag.i22+
VqyagedeSiderocapfiaBucepbalay &dela rimer e Strimone^ & despoif
fônsqucnypefcbe. cha.lvfag.123.
Defcriptiondeplufieurs anùquiîezj& ruines des villes en Macedome^^
. dePhilippi&Vbihppopoû^ cha.lvi.pag.126*
T>efcription de la ville de Bucephala^ qui sappeïïoitauparauant Chalafirea,
maintenant la CauaUe. . cha.lvii.pag.129*
Que les murailles qui durent encor de préjentfur le mont Hemws.mwjhrent
la feparati an des forces de Macédoine & de Thrace.. th.lviii.pag. 1 fLÏ
Quil n'y dit aucunes hojîeleries en Turame^ak qu'on trùuue des hofyltaux
a fe loger. ckaJix+pag.i$2\
J^ugranichemmdela'ÇauaUekConfiantinople^ cba.lx,pag+ï3$+
D'vinMresnancienne place.enThrace^iûmmee CypfeUa; avec lamanterede
fmeléun% »-:\ ■ ' - . ; .. ~(à&Jbci.%agiyi\
"Btfgrand chemin pafftnt quonfaifoit anciennement ^ venatiè KomeÀ-Co-
ftantinople. chajxii.pag.ï^
T}eUrm§n,rwnnueli4£r'fy & des pillcries des
Turcs*: chaJxiiLpag.iqi.
Que plu fems nattons ien vont hors de leur pays en certain teps de* tannée^
0*puis s*en retournent en autre faifbn. chamhiiii;pagrî^s .
Que les arbres nvmme%Terebintbes portent vne efpece de galles \qui font en
. grand vjage en Turquie. cbaJxv.pagjL^^
Que lesTurcsaUanspar pay s font petite déîfenfe. cha.lxvLpag.ltf»
Qve les Turcs font-gens quifeauent mieux charger & dejeharger bagage en
.. allant par pay s. cha IxviLpag.i^.6*
De la Ville qui efloit and ennement nommée Perinth^maintenat RoAofte,
&deHeradec. choix viiJ.pag.ï^
De la trejgrandefileçe &modefùe des Turc&aUansparpaysxh.lxix.pmi^j\.
J>e la ville de P ère & de Confiantinople. } chdxx.pag.l$o.
J/efcri-ption.des rames de Nicomedie^ de ce qui y eft maintenant* chapir
Vtelxxi^ pag.L$2,,
t> £ S CH A- M T %lf.
Que les nations du levant aiment mieux manger du ' poijfon que de U chair \
cbap.lxxij.- P*g-ip-
Que la manière de pefcher au Propontideefldemoult grand profit, chapitre.
txxiif. t Pa&l*±
De plusieurs autres manières depefchér au Propont idem chapitre Ixxuij.
pag.l$6.
De lamanieredepefcherla nui&aufeu auec le Tridents& deplufieurs au-
tres du Propontiâe. chap.lxxv.pag.1%9.
Des antiquttc^&plufiturs4Utresfingularite%jlc Confiantinople. chapitre
Ixxvi. pag.162.
ZeportraiBdelaGenette. $a&lH*
Fin de la" table des chapitres du premier Tiurc.
LA TABLE CONTENANT LES
chapitres du fécond liure»
i Ve les voyages faits par mer font de temps incertain : & le
voyage de Confiantinople en Alexandrie, chapitre
premier.pag.l6 9.
^$Des villes antiques fituees a la riue du Propantidedu cofiéde
ThraceJ? de lavilledeGallipoli. chap.ij .pag.ij a.
Defcription du Bofyhore de Thrace y 0* des thafteaux nomme^Sejlus &
, *sébydœ^& des ruines de Scamandria. * chap.iij.pag.lj 2.
PortraiSidclamerHeïïefponte&deTroyc* pag.ij^
VortraiSîdetarhrepignefauuage. P*g'l75-
Vartkuliere deferiptio du chajieau d\^ihydm^ui eftl'vne des clefs de Tur*
quie. chap.iiii.pag.ij6.
Quonpeut voir les mines de Troye clairement de la mer. cba.v*pag. 1 7 8.
Defcription des ruines de Troye* ch0.vi.pag.ij9.
Delisle de MeteUn,& du Promontoire. cha.vii.pag.l'è$+
SuccinBc defcription de ceqtfauonsobferuéen l'islc & ville de Chto : &
qtfonnetromeleMaflichquelL cè^.viy.pag.iBy.
Delisle de S^mos. ' cha.1x.pag.1SS.
Difcourspour diffinir que cefi que Courfaire. cha.x.pag.iS8.
VjelisledePathmos. cha.xi.pdg.19 3,
Del'kledeCo^ays d'Hyppocrates. cha.xijfag.194.
Singularite^objèruces en Rhodes. cba.xiîj.pag<i$^
<
nu
Ii A T A IL E
Màdefîtedesfilùts Turcs : 0* d'vnferpent nommé îaculm: <& de toifeau*.
nommé Onocrotalus^ ch4.xiiij.pcig.19ji
LeportraiBduferpentlaculus. pag.içS*.
Voyage de Rhodes en Alexandrie. cha.xv.pag. 19 9.
Que les mariniers nauigeoient anciennement fans F aiguille & quadrants*
fans auotr vfage de la pierre d'aimant. chap.xvi.pag. 1 o 1.
Quil n'y a que deux grandes bouches âuNilnamgables^ ou les grands vaif-
feaux ronds puiffent entrer. cha.xvii.pag. 2 o 2»
Sommaire du chemin de Conflantinçple en Alexadrie. ch.xviij. pag. 203.
P« deuxwiUes d Alexandrie june en Egypte 3 0* l'autre qui ejloit Colonie
des Romains en Phrigie. chap.xix.pag.2 o 4,
J>ortrai£l de la ville d Alexandrie^ PaZ'1Q &•■
P e la befle anciennement nùmmee Hyena^<& maintenant Ciuette.cha.xx»
PortraiçtdelaCiuette* pag. 20$.
Difcours de diuerfeschofes d'Alexandrie: & des obelifques^& gros colojfe^
des Egyptiens» ■ chap.xxi. pag. 20&
Que Jchneumon efi-encor pour le iourdhuy garde prmé en plufieurs maifons
- (t Egypte^ le combativn autre qui 'efijujit nommé 'Jchneumon Vefya
auec lePhalangion^, cba.xxij.pag.iu*.
Portraiêi du Rat de Pharaon, " pag.212..
D es moeurs des Alexandrins: & des dejèrts de fain&Macano :& de plu-
fieurs autres chofesd Alexandrie. cha.xxiij.pag.ziq..
Voyage delà ville d'Alexandrie au grand Caire. chap. xxnïypag. 2x6.
Des chofesfinwlierestrouuees entre la ville, dï Alexandrie & laviUe de
Rofette. chap.xxv. pag. 21 7. .
De la ville de mofette ^àla bouche du Nil nommée Qftium Canopicum*
chap.xxvi. pag.2iç*„
DespefcheuYsduNiL - chap.XXviLpag.220^
Voyage par eau &e Rofette.au Caire : &■ de plufieurs chofes qui font fur le
■NiL chap.xxviihpag.22U.
Des grandes villes & villages et Eoypte,fituees far le Nil le long des riua-
ges^cherchansk commodité de l'eau. chap.xxix. pag. 2.23.
Que le Nil mis en comparai foy eji quafi femblable à la riuiere du Pau.:
chap.xxx. pag.220,.
Quelques particuhrite^Je l 'Egypte & des Egyptiens; ch.xxxi.pag. 227.
Defcripiion de plufieurs oi féaux Çg autres animaux oh femelle' long du* .
Nd*._ " ' .■-..■-• çfr^xxxii. pag.22%.
D E SC H APIT R E S.
PortraiM du Crocodile :■ pag.z$o.
De la différence des bateaux qui nauigent fut le Nil: & des arbres plus com-
muns qui font ésiaràins du Caire. chap. xxxiii. pag. z$î.
Que plufieurs ayentmd penfé que les Chameleons vefquiffent du feul vent
. fans rien manger. ^ chap.xxxiii.p4g.z12
De nofire arriuee au Caire ? &dccc que nous y auons veu. chapitre. xxxv.
... ^-z35.
PortraiB des femmes & hommes du Caire & d Egypte. pag. ztf.z$6.
Des maifons du Caire , des iardinages 3&dela tour qui enfeigne la creue du
Nil pour fçauoir la fertilité de l'année. chap. xxxvi.pag. 239.
Tortrai&duCaJïiev. pag.z^o.
Defcription de la ville du Caire & de fin Chafleau. chapitre.xxxvii.
pag. 24Z.
PortraiB du Sycomore,. pag»z44*
D'vn grand conduiB d'eau qui ejî entre les ruines de Babylone:& de la vil-'
le du Caire qui porte l'eau du Nil la haut pour abbreuuer le Chafieau.
cbapitre.xxxviii. Pa^z4S*
Defcription du Baume.chap.xxxix. ~ pag.z^6.
If vn grand obelifque tout droiB auprès du Caire, & des arbres naiffans
dedensleiardindelaMateree. ' cbap.xl.pag.24s>.
Que telle manière de gentramaffee que nommons Egpptiens%font aujîibien
trouuez^en Egypte que es autres pays. chap.xli.pag.z5i.
Obferuations des Pyramides. c0ap.xlii.pag.z5z.
Obferuation de la féconde Pyramide. ' . chap.xliii.pag.z55.
De la troifiefme petite Pyramide iEppte. chap.xlmupag.z56.
De plufieurs autres Pyramides d Egypte. chap .xlv.pag.2 57.
Du grand Coloffe nome par Hérodote \Andro$~fhinx& par Pline Sphm-
ge, qui efl en fculpture deuant les Pyramides. cbap.xlvi.pag.z5S.
De la Mumie:& de l'ancienne manière de confire ou embaumer & en/eue-
lir les corps en Egypte. chap.xlvii.pag.z6l.
Des violes des Egyptiens. chap. xlv'ui. pag. z6z.
De la Giraffeque les arabes nomment Zurnapay& les Grecs & Latins
Chamelopardalis. chap.xlix.pag.z6$.
PortraiB de la Giraffe/ ^ pag.z6$.
Vvn moult beau petit boeuf à Afrique 3 que les anciens Grecs nommèrent
Bubalus. chapl.pag.z64.
PortraiB du Bœuf d* Afrique. p*g. 166.
&vne autre manière de Cerf rejfemblant à vn Vain , anciennement nomé
LA TABLE
\Axts , & de la Gafclle anciennement nommée Orix. cha.U .pag.zGj.
Des baflelleries qu'on fait au Caire 3 & d'une efyece de Guenon nomme
Callitnches. chaJij.pag.26S.
Detapprefl que font ceux qui vont en voyage du Caire a la Meque.
cha.liij. pag.zà}.
La defeription de noflre voyage du Caire au mont Sinai auec vne recepte
finguliere pour apprefeer la chair à gens qui vont en voyages loingtains.
cha.lnij. pag.269.
Figure de la Vipère. ' pag.zji*
La defeription ivn puis trejprofonden F trahie deferte. cha.lv. pag.zy 5.
Des plantes qui croijfent parles fablons autour du Sues, cha.lvi.pag.zj4.
PortraiB de t acacia- .. pag.zjq.
Z>e douze fontaines ameres de Moyfedont Pline a fait mention.
cha.lvij. Pag-275*
Vu Canal de lamer rouge. cha* hii/pag.ij 6.
Tfvn arbre de Rhamnus qui <roifl aux riuages de la mer Rouge.
cha.lix. pag.ijj.
Deplufeeurs arbres d '^érable 3 & de ceux qui portent la laine: & des
Chameleons. cha.lx.pag.zjZ.
PortraiB du Chamèleon- pag. 278.
Du premier village que trouuafmes aîlans au mont Sinai. cb.Hi.pag.z%o.
Du mont de Sinai. cha.hifpag.z2z.
'Defeription du mont Sinai& du mont Oreb. cha .hitj .pag.2%3.
PortraiB du mont de S mai. pag. 2 83 : .
DW autre monaflere fitué au pied du mont Orebs & du rocher dont ijiit
ïeau aux enfans ilfrael. cba.hitij.pag.2X4.
Des places £7* lieux JainBs en la montagne de Sinai. cha.Hv.pag. 2% 6.
Voyage du mont de SmatauT or. cha.Uvi.pag.2Sj.
Defeription de la ville & chafleau du Tor : & des fmgularite^ du nuage
, delà mer rouge. cha.lxvij.pag.2%9.
Desbateaux & barques de la mer rouge. cha.hv1ijpag.29L
Computation du chemin pariournees^du Tor au Caire, cha.hix .pag. 2 93 . '
Du port du Sues au nuage delà mer rouge. cha.hx.pag.294.
PortraiB du ferpent allé. p*g • 2 9 6 •
D es vafes de Porcelaine que loved au Caire^<& duNitre. ch.hy.i pa.29%.
Que timbre iaunenefl minerai comme plufieurs onteftimé, ams eftgum-
meiarbre. cha.hxfpag.299.
De noflre départ d* Caire pour aller en Ierufalem. cha.hxiifpag^oo.
DES, CHAFITRES.
D'vn petit arbre d'Egypte toufiours verd , qui teint en couleur rouge.
.. chapitre Jxxiiij. pag.301.
De plu fieurs bourgades en Empte>fkr le chemin de Iemfalem. chapitre
. hxv. .'■'•*■ ^.302.
De ïejlrange & difficile chemin qui efi entre le Caire & Iemfalem.
chalxxvi. ' pag. 304»
Du nitre & d'vn petit Cancre de la plus merueilleufe compkxion quenul-
. le autre chofe qui foit en nature. cha. hxvij. pag. 30 6.
De plufieurs arbres , oï féaux ^* autres chofes fmgulieres produises en la
terre de Palefiine. cha.hxviij pag.30%.
De la ville de Ga%am. cha.hxix.pag. 3 10»
De la ville de Rama. cka.lxxx.pag.iit.
De Iemfalem^ui ejl fituee entremontagnes. cha.lxxxi.pag.312.
Briefue computation du chemin Centre le Caire & lerufalem.cha.lxxxij,.
SuccinSîe defcription des fainBs lieux de Jerufalem. ch.lxxxiij.pag.31 4.
Du fepulchrenojlre Dame en la vallée de lof aphat.cha.lxxxïiij.pag.316.
Du fepulchre de noflre Seigneur: & des ruines de Iemfalem. cha Ixxxv.
pag.31^
Du defert ou fut tenté nojlre Seigneur : & dufleuue lordain.
'...- cha.hxxvi. pag. 319^
DeBetbleem&Ebron. cha.lxxxviji.pag.322.
Voyage par terre ferme de Iemfalem en Conflantinople: & quels awres ef~
pineux font frequens au territoire de Ierufalem. ch a.hxxviif. pag.3 2 J.
Defcription d'vn homme ^Arabe& de Nazareth > ou fut annoncé a nojlre
Dame quelle conceuroit nojlre Seigneur. cha.hxxh.pa.32j.
Vortrjtic~i d'vn villageois ^4vabe. Pag'329'
Du lac Gène far eth & mer Thiberiadis. cha-.xc.pag.33 o ».
Obferuations des chofes en Damas. cha. xci.pag.332.
De la monflre de ceux qui partent en trouppe de la ville de Damas pour:
aller à la Meque. ch^xcif-pao-^S.
Tortraic~id'vnfeigneur«4rahe. P^g'SS?'
Des bajlimenS)& plufieurs autres fngularîte^de Damas.ch.xoif p.33%.
Voyage de Damas au mont Liban., cha.xciiij .pag. 3 40 .
Des antiquité^ de la ville de Cefaree 3 maintenant nommée Balbec.
chap.xcv. pagip^T.
Que l'ancienne manière de manger les fèrmnces de Xerebinthes- durèemoy-
pQHrk.imrdhuyen.Cilkie^*Syrk^ cha.xcvi.pag^^ .
'"" ~~ ~~" i- *,
L A .T A B-L E -
Delà ville deHamom^anciennsment nommée Emijfa.chaxcvîj.pag 545*.
Des tauernes de Turquie^ou les Turcs boyuent vne manière de breuuage^no- •
tné Pofia ou Zitum 5 différent ala bière. cha.xcv1ii.pag.y46*
De U ville de Tarfus , dont efloit fain£h PauL chap.xcix.pag. 347.
Des plaines de Cilicie: &* des ciflernes encauees en terre , qui fe remplirent
d'eau de pluye. ' cbap.cpag.349.
Defcription des ruines de Marat. chap . ci.pag .350.
Delà ville de Hdep anciennement nommée Berrea :&dela Rheubarbe
&Rbapontic. # cbap.cii.pagtfi.
Spéciale defcription des rues félon quelles font faites es villes & villages
àeTurquie." ^ chap.ci1i.pag.tf4.
Voyage delaviUe de Halep en ^dnîioche. chaxiiii.pag.^.
Delavilled'^tntioche. cba.cv.pag.3y7.
Obferuation touchant les fingularite%j£^4ntioche. cha.cvi.pag.3y9.
Du paffao-e par dejfus le plus haut du mont ^émanus. cha.cvii.pag.3 60.
De la ville anciennement nommée ^idena : & d'vne befie £^4 fie nommée
^4 dit cba.cviii.pag.36 2.
Voyage par dejjùs le montTaurus. cha.cixpag.36y.
Voyage d'^dtdena pour pajfer le mont Taurus. cha. ex .pag. 36%.
VortniSi du Cèdre. pag.36%.
Pertraiêl du Sapin. ^ Pag'37°*
Des baings chauds naturels, qui font fur le mont Taurus \&dela vilie
iHeraclee. ^ cba.cxi.pag.3j0.
Voyage £Heraclee a Copte: & des Cheures qui portent la fine laine du
ctameloU _ cha.cxii.pag.3j2.
Delà ville iïconium. cka.cxiii.pag.5jq..
Des Orfeures deTurquie. cha.cxiiii.pag^j^.
D*U ville i^tchara. cha.cxv.pag.y/6*
Fin de la cable des chapitres du fécond liurc.
LÀ TABLE CONTENANT LES CHÀ-
pitresdu tiers liure.
s particulier difeours touchant le commencement de l'origine
* des loix des Turcs. chapitre premier. pAg.37 9*
? De quelle aftuce vfa Mahomet au commencement enfedui-
^w^-^J fmt h peuple ignorant pour ï attirer àfaloy.& de ceux
qui luy aidèrent. chaji.pag. 381.
D ES CH A PITRES.
Que toute la croyance desTurcs ejl contenue ml **4lcoran 5 fait par Maho-
. met» cha.iij.pag.^2.
DeSuerfisfêBes ' qui font furuenues entre les Mabometiflcs fm le fut de
leur religion. chd.iiij.pac.3S4.
De la crainte du tourmet £ enfer jiont Mahomet a eîfouuentéles Turcs: &
de leurs fepultures. cha.v.pdg.$8$.
D e plufieurs chofesfantafliques moult efiranges que Mahomet aefcrit ton--
• chant le iugement. cha.vi.pag.3%5.
~£ldifant voyage que Mahomet fein6l auoir fait en paradis la nuic~l en dor-
mant & des grandes folies qu'il /acompte touchant leparadis des Turcs,
chapitre vij. /*g>3.?^
Dont vient quelaloy de Mahomet a permis aux Turcs Garnir compagnie
auec les efclaues femelles , fans auoir efgard de quelle religion elles Jont.
chapitre viij. Pag-39 ° •
Brïef récit du paradis feint tel que Mahomet l'a promis aux Turcs , & des
chofesfantafliques qu'il racompte. cha.ix.pag.^gu
Dumaridge des Turcs , ç£* dont vient qu'ils ont le congé de fe marier aqua-
trefemmes. cba.x.pdg.394.
Zd manière de nourrir les enfans en Turquie. cha.xi.pagi 9 5".
Za canelle des ma (les & femelles. » pag.3 9 6.
Des arméniens ,*#* plufieurs autres nations ChrefîiennesviumsenTur-
< quie. ' * cha.xij pag^çj.
Des Juifs hahitans en Turquie. cha.xiii.jMg. 3 99.
Du trafic & marchexen Turquie. cha. xiiii.pdg.40 2.
Chofe digne de grande admiration des Turcs qui mangent l 'Opium 3 pourfe
- rendre plus hardis a la guerre. cha.xv.pag.40 4.
Desfignes que les Turcs amoureux font a leurs amoureufès ; £7* de t habille*
ment des femm^Turques. cha.xvi.pag 40 6.
Portraiftd'vncTurque édifie. /?^*4°7*
Que les Turcs dyent plufieurs femmes effoufees qui viuent entre elles fans
di f cor dneidoufie auec les cocuhmes & efclauesfemelles.ch.xvii.p.409.
Vreuue euidente que leTurc peut plus facilement ajfembler cinq cens mille
hommes envnrcamp , & vne armée de deux cens galleres 3 qu'vn autre
Vrince cent mille. cha.xv11i.pag.4xu
D'vne petite hachette propre À tout vfage tant à la guerre comme en paixy
commune aux Turcs. cha.xix.pdg.4i4.
Des Turcs qui retiennent plufieurs chofes de ï antiquité. cha.xx.pag. 41 ) .
Des religieux de Turquie. cha.xxi.^ag.4 1 6.
t il)
LA T A B LE f
La manière de garder la neige $r» la glace tout ïefkê, comme font les Tmct.
chapitrexxij. ' pag.qij.
De da manière de fe hrdadiMer.de Turquie. , cba.xxiij*pag.^20.
Viflinêîion de fbonneurjant de barbes que du turban des Turcs, chapitre
xxiiij. pag.qio.
^iccoufvremens des plumes ^dont tes Turcs fe parent. . cha.xxv.pag. 421.
Vu-grand exercice a tous- ceux qui apprennent a tirer de tare par les villes de
: Turquie. ^cha.xxvi.pag.^2^.
"De plusieurs apprefîs des Turcs pour manger. cha.xxvij.pag.^2^ •
De la circoncifion des Turcs. cha. xxviijpag.qiq..
Quvn efclauepuijfe contraindre fon maiflre de luy mettre à chois pour fa
rançon^ou le temps de le feruir^pu l'argent qu'il en veutduoir+cb.xxix.
pag.^26^
"Despreftres de Turquie^ desfeiences des Turcs. cBa.xxx.pag.4. 3 J.
Que les preflres des Turcs feruent à 'or loges en Turquie 3 enans les heures a
;v haute voix de de/fus les clochers des Eglifes. cha.xxxi.pagAS1*
Continuation du chemin ia delaiffé^comme aufii des mœurs des Turcs. cbœ~
pitre xxxii. pag.fô$*
Que toutes les femmes qui viuent en Turquie Jte q uelque loy quelles Jqyent3
. fefont ordinairemmt abatre le poil des parties honteufes par la vertu dvn
depilatoirej&nonpasaurAfoir*. cha^xxhLpag.^^.
Que les femmes de Turquie font belles par fingularitêJ& nettes comme per-
les. 'cba.xxxiiii.pag.q.3j.
La receptedont lesfemmesfe teignent les cheueux <&* les four cils en noir3&
les hommes vieux la barbe* cha.xxxv.pag^.^1.
Louange âvne beauté excellente félon la mode des Grecs. chajxxxvi.
pag.442.
P es chofes difficiles à croire que lesbafieleurs de Turquie font en public.
, chapitre xxxvtL pag.q.q.%.
J>e la luiBede Turquie. cha.xxxviii.pag*^^.
Que les Turcs vont hardiment fur la corde. cha.xxxixfag.4.4 y.
Des chiens Je Turquie^ de la chaffedes Turcs. cha.xlpag.^6.
Les noms desplantes, trmuees au mont Olympe.. cba.xli.pag.q.q'j^
JPortraiBdelaMelefèouLarix. cha^/^g.
De l'ancienne viïïe de Bourcey quiefioitlefiege des Empereurs desTurcs
cha.xlif. pag.^o*
Quelesouuragesdes Turcs font fort bienfaits^ que leurshabillemesfont
bimxoufiT^ " " ï^xliii.pag.^t^
LE PREMIER LIVRE
; T>ES OBSERVATIONS D E
PLV SIEVRS SINGVLARITEZj.
& chofes mémorables de diuers
pays cftranges.
Par Pierre Belon du Mans^
Que nature conduiftnt vn chacun en ce mondefavdiuerjèsvopesy
fan que le but de tous tend idiuerfes fins»
Chapitre premier.
\ O mbi en qu'ayons entreprins <£c
i mettre les chofes mémorables , Se les-
[ fîngularitez des pays effranges par e£-
\ cric en ce liurc^ainfi que les auons ob-
, fèruccs :cc neantmoins ne pretendos
j fouz fombre de ce tiltre, forelorre vn^
autre qui pourrafairc micux,ains fin-
. citer d^auantage à fon deuoir. Et ja-
r foie que pluûears anciens Se moder-
nes ayent par cy deuant eferit telle ou
fèmbiable matière en leurs voyages Se nauigations , toutesfois
pourecqu'auons obferuétout le contenu de ceprefent trai&é»
Fauons hardiment ofé mettre en lumière , fans auoir crainte àcs,
calomnies d'autruy : Car fi q.Uelqu'vn contre ecft œuure auec
les eferics des fufdi&Sjnous fommes aûeurerqu on ne nous pour-
ra iuftement reprocher qu'ayons rien traduià defautruy , linon
àcs bons autheurs anciens , Se defquels nous fommes quelque-
fois aydez en exprimant les noms des animaux Se des plantes , Se
autres fcmblables chofes appellees par noms propres , miles en.;
A.
% PREMIER LIVRE DES SINÔVIA*
noUrc vulgaire Français. Et pource que telles chofes n'auroienc
par cy deuant efté examinées ne miles en noftre langue , n accor»-
decsauec les cfcrits des anciens autheurs, la difficulté en a cfté
d'autant plus laborieufe. Ceux qui entreprennent vn voyage
loingtaineneftrangepays pour leur affaire particulier, fonteô-
munement plus curieux de chercher les chofes neccfTaires pour
mettre fin à leur deliberation,que d'employer leur temps à quel-
ques autres obferuacions, dont ils n'ont cognoiffance: de laqueî*
le chc#è il appert par le trafïic d'vn marchand , lequel combien
q^iHftfaitplufîcurs voyages en Indie, & Terre neuue, néant-
moins n'ayant autre but que bienremployer Ton argent enachet
de marchadife, ne fe fbucic d acquérir infinies fingularitez qu'vn
homme curieux pourroit bien obferuer. L'excufe y eft que telles
'chofes ne luy duifent en rien, & aufïiquclescfprits & arfe&ions
humaines font tellement différentes , que û piufïeurs mefmeméc
d* vue compagnie chejnment enfemblc par quelque payseftran-
gc,à grand' peine en trouuera Ion deux qui s'addonnent à obfer-
uer vne mefme chofè : car l'vn fera enclin à noter cecy , & l'autre
cela : ioint qu'il n'eft homme , tant foit diligent , qui puiffe fuffi-
famment examiner toutes chofes parle menu : & toutesfois les
chofes mémorables doiucnteftrc fort bien confédérées auâtque
d'en faire certain iugement : Car il fault neceflairement que les
merques eferires conuienent auec la chofe qu'on deferit. Si nous
fommes déportez deferire en ce lieu des chofes qui fefonttrou-
uees es pays plus voifîns , comme nées à noftre porte > ce n'a elle
fansraifon : car noftre vouloir a efté pîuftoft deferire des chofes
eftrangcres : d'autant que telle eftoit laffe&ion,qui nous a ftimu-
Ié d'entreprendre les voyages. Eftans donc arriuez au pays des
Grecs & Turcs, commançafmes à eferire toutes chofes cyrieufe-
ment : car nous trouuons que ce qu'allions cherchans , &c dont
n'euffions peu en auoir l'intelligence flnon là, retient encor' pour
l'heure prefçnte, les mcfmes noms que les anciens autheurs nous
ont laiâe par eferit pour les nous fignifier. Mais pource que
voyons pluûeurs chofes fort vulgaires en noftre vfage , 6c
desquelles l'appellation eft fi commune, qu'il nefe trouue hom-
me ne femme qui ne les vueille maintenir pour celles qui fonc
ainfi nommées du nom vulgaire , lequel toutesfois leur eft faufe-
mentattribué; auons bien voulu prefèntement nous mettre en
OBSERVEES FAR F. SELON. 3
deuoirde monftrer qu'onaabufe en l'appellation de plufieurs
chofes moult vulgaires.
Quon ne fie doit trop fier aux appellations des chofes jncor quelles foyent
vulgairement nommées \fi elles ne Combien correjpondantes aux deferiptios
des anciens^ conuenantes a la chofe qu'on deferit*
Chapitre 1 1*
o v s mettrons plufieurs plantes vulgaires & animaux
! cogneus pour exemple, à fin dcdemonftrer que leurs
nomsvulgaires leur font faufeenent impofèz. Ce que
'• parauanture ne ferons fans defpîaire à-quelques vns.
Toutesfois fi quelqu'vns'en trouue offenie, qu'il le nous face
entendre, fi bon luy feroble , & nous luy rcfpondrons comme â
appartiendra. Nous voulons donc maintenir que noftre nation
& bonne partie de celle qui obéit z l'Eglife Romaine , n'a par cy
deuant eu la cognoifTance de l'herbe de Thym: attendu que cel-
le que nous cultiuons en noz jardins, n'eft ne Thym , n'efpecc de fh^^
Thyrmainseftefpecc de Serpouîet.L^Hyfïbpeauffi &îaSarictte Hyjjope.
que nous auons en commun vfage,nc font celles dont les anciens surUnc
Grecs vfoient en médecine. Parquoy donc difons que û* les cho-
ies que nous nommons par noms propres , ne eonuiennens auec
la defeription defdits anciens, il fault eôclure que ce ne font cel-
les qu'ils ont entendu. Noftre Thym en foit exemple , duquel
l'appellation eft fi commune à tous , qu'il n'y à-celuy de quelque
condition qu'il foit , qu'il ne la fçache appeller &: nomer de nom
Thym,&: neantmoins ce nom luy eft faufemét donné. Car l'her-
be que nous appelions Thym, n'eft pas celle à qui ce nom puiile
conuenir, ains à vne autre qui croift communément par le pays
de Grèce. Et faut necefïâi renient que l'herbe qui obtient ce nom
de Thym , fuyuant la traduction de Theophrafte & Biofcoride,
foit toute couuerte de petites teftes quivontenappointât^eftroi-
etesparlepied, comme font celles, du Stcechas , à qui elles font &&&&&
comparées: &. à la fimilitudcdefqueUes,. les verrues pend an tesa
que nous voyons furcroiftxe à quelques vns,tant au nez qu'es par-
ties honteu fes, ont efté nommées par les Grecs Thymia , comme
Eefmoigne Celfu.s. Toutesfois l'herbe que nous appelions Thynv
û a^as.tfilleStmcrques xauffi n'eft- ce pas elleà quice no de Thynx
■M.
-4 *X£MI^B. ilV&B DES SÏN:G:V:tÀ.
p uiflé cbnuenir,c eft à fçauoir duquel les aucttes recueillent f ex-*
mlmettw. ccncncmiciprcs d'Athènes au mont Hyjnejtus, &en$iciïeau
Mumtl~ mont % bîa > & leGilieî les-autheurs £our celle raifon appellent
CMÀHyhUÙ. ^ttkum&HyhUum. Pourfembkbîe raifon, combien que l'hcr-
sfym. be que nous nommons vulgairement le ThynijCroiftè copieufe?
mentiairuageésguarigues de Prouence & Languedoc,fans eftre
cultiué, refTemblanc a celle de noz iardins : toutesfois n'ayant les
merques defllifiiitcs , ne, peut eftre le vray Thym. Toutesfois le
^ray Thym eft fi fréquente abondant par tout le pays de Grèce,
que les montaignes ne font veues verdoyer d'autre herbe fàuuagc
•qui y naiffe plus volontiers , auquel lieu il fait fa fleur félon Fen-
4roic de la terre ou il naift : Car l'vne fois eft toute blanche: l'au-
tre toute de couleur de ciel , ou purpurée : Fautrefois meilee des
=deux. Mais pourec que nous n'auonscncor'point accouftunie
<l'en«cukkier en noz iardms , il nous eft incogneu. Et comme le
Thym a baillé nom aux verrues pen dates, il a au Ai donné le nom
à vnpqîuonde TeGn anciennement nommé Thymus ou Thy-
rfymdm malus^ que les habitans de Lode en Lombardie appellent Ther-
ourhymm* raera,ou Thcmoîov
foïfm. Quata la Sariette q les Grecs moment Thnè*** & le vuîgai-
Tbemero. rc Tribi, il faut pour obtenir ce no , qu elle foit chargée d'efpics;
^f0' carainfiîe dit Diofcorick.Maispource que ne voyons point que
^; la noftre des iardins foit chargée d'efpics , aufli fault il confefTec
que ce n'eftf as celle dont les anciens vfoiét en leurs medicamés.
Nous ne «difons pas que la noftre des iardins ne foit celle mefme
qui de tout temps a cftè cognene eftre propre auz potages, Se
pat ce dediec à la euifine. Mais celle qu'on mefloit es médecines,
Se qui eft fàuuagc en Grèce, nous eft incogneuc : car nous n'en
auons aucunement , &c toutesfois eft commune en tous lieux de
siif Grèce. Ce mefme fault entendre de l'HySope , quieft dedeux
- * manières : car l'vne eft champeftre, croiflânt en tous lieux indif-
féremment es pays du leuant,tan tés collines, que fur les grands
chemmsdeŒiçie,deThrace, Phrygie, qu'en plufieurs autres
pays. L'autre efpecceftfatiue, que nous cognoiftbns, cultiuee
en noziardins,mais beaucoup différente à la fauuage,& dont les
Grecs ont autrefois compofé leurs médecines.
Nous auons amené l'exemple de ces plantes moult commu-
nes èc cogneues 4'yn chacun , afin de donnera entendre que ne
OBSERVE-ES $Mt *. SELON. . ; r $
nom fdmmcs pas toujours tant fié à l'appellation vulgaire , que
les babitans des prouinces nous nommoyeht en exprimant les
chofes que voulions eferire , que premièrement ne les confldc-
raffions diligemment j autrement euflions efté" fouuent trompez.
Car comme levujgaire François nommant le Plafnc^afaiâ: pc- P/^
fèràpiuficursgens que ce (bit le Platane, qui toutesfois eft vnc rUtane,
efpece durable : tout ainfi peuît auenir à vneautre nation Et de ErMc.
cefte appellation de Plafne, combien qu'il n en naiffevne feule
plante en tout le pays du Roy,ne cultiuee ne fauuagc, neatmoins
coûte la France eft abufce en fa commune appellation : car mef-
mementlcs hommes dodes & autres gens d'aTi&onté,voyâs que
IcPlafhc.portcIa fuciile comme vigne, & que la description de
Platane eft de porter telles fuciiîes ,ont conclud à vne iêule mer-
que que ledit Plafne eft glatanus, & toutesfois cela eft faux: car
le Platanus portedespillules rondes , {èmblabîes aux feméces du
Xantium à qui Diofcoride les a comparées : & font groûes com-
me noix , pendantes en forme de grappe : ce que ne fait noftre
Plafne, qui les porte à la façon d'vn leurre de fauconnier. Et à fin
depouuoirmonftrerà l'expérience que nous en auons aucune-
ment en tout le pays de France , auons cy apressnis fon portraiâ:
contrefait au vif.
L'herbe auffi que nous nommons îoubaA^aefté maintenue i^^e.
iufques a F heu*c prefènte pour plante de Sm&erwuum : mais à #p«««*».
la vérité il n'en eft rien : Car auons veu que SwnjxrmuA croift
copicufèment en Crète, Cojrg>hu,& Zacintjie,en manière de pe-
tit arbrhTeaubaut d'vnecouldec, & quelque fois de deux > ayant
le fuft gros comme îcpoulce, changé de fueilks à la ibmmicé, qui
ïentournent de toutes parts correspondant en toutes fortes à la
ddeription de Diofcorides.Et fomnies efmerueillezdcceuxqui
•en de&riuant èc portrayant telleschofes , ne s'en font auifez : car
: celay que les modernes ontpeind pour ïoubarbe , eft le CcttU^
^^^fe^^desanciens.LefemblableeftaucnuauMeurierblanc, cotlleion
6c àquelque autre plante, eipece d*Erable,que pîufîeurs d'vn cô- dterum. "
mua confentement , ont dit eftre le Sycomore. Et toutesfois le nàamer
SyjCoraate.eftiî rare, qu'il ne fut onç veu fauuage, ne eukiué nô ^MC-
plus en Grèce qu cnltaiie. N eft il doc pas difficile qu'on le puif- s>'omofe-
iè auoir veu naiftre enFrance? Aufll nous difons le meime des oy-
4èaux,£ej^ents*& autres beftes texrcftrss : des mineraux^pierres,
A iîj
Mtrfil
smd.
fREMIES. LiyRE I>ES SINGVIA.
Le portrai&du Platane. &chofes métalliques;
Noftre Chardonne-
ret, qui tient Ton ap*
pellation du chardon*
îèmble eft-re celuy que
les Grecs-nommerenc
Acanthis , toutefois
Achantis n'eft pas le
Chardôneret. Et fi le
vulgaire François nô*
me quelques ferpents
a(piçs,e'eft par erreur:
car il n'y en a aucuns
en France;ne auiîî des
Murènes , que noftre
vulgaire eftirae eûre
Laproycsme de Can^
cre de riuiere qu'on a
fàufemcnt attribué à
&os Efcrcuiiles. Au (fi
chacun penfc que Le
Salpeftre eft Nitre >
mais auons prouuéau
liure intitulé De me-
dicato funere,que ce-
la eft faux JEt tout ain-
j ^ fî que nous knpofons
âsp^* desfâuxnom&àqueU
/^^^*ques chofes qui- nous
font vulgaireSjtout ainfi en auons nous aucunes moult commu-
nes , dont ignorons le vray nom. Il n'y a païfàn en Gafcogne qui
ne fâche nom-mer la Salmandrevn Mirti^cn SauQyevnePiuui-
jî£j car on*la voit quand il pîeu t : au Maine vn Sourd,car il fènv
Me qu'elîefcit fburde:3é toutefois aucun ne feait que c eft la Sal-
mandre. Pa^quoy, ne fe faut pas fier aux noms vulgaires des pro^
uinces , pour exprimer les choies , qu'on n ait premièrement c5-
fèré&: bien examiné les eferits des autheurs. Et amenais ces exe»
fleSjVjûulons dire qu'il faut chercher la.verité des chofes in co
OBSERVEES PJLR *; BELOS, 7
gneucspar celles qu'on cognoift. Mais comme les hommes qui
le (entent de franc ccenr , généreux, & bien naiz:reprochlts Fi in-
famie euidente qu'ils cognoifTent en vn home, qui le loucpour-
ce qu'il efl gentil-homme , & tontesfois faid ade de vilain , di-
rent en leur commun prouerbe, qu'il n'y a rien de commun entre
k vilain & l'homme noble : Tout ainfi dirons qu'il n-y a compa-
raifon entre vn ho m me de bon fçauoir &c vn ignorant , non plus
que d'vn homme de franc cœur à vn enuieux. Par ainfi refuteros
les caîumnies de certains hommes de mauuaifè grâce qui n'ont
onc fait apparoiflre choie d'eux mefmes , dont on les doiue efti-
mer fçauants:à fin que celuy d'entf eux qui a le plus eûayé* à nous
nuire, fc trouue greffe befte , dauoir fi fort blafmé noftre curio-
fité.Ceiluy alleguoit la couftume ancienne,difant que nos peres
auoyent vefeu heureusement , fans chercher tant de petites fub-
tiîitez qui ne font neceflàires ; difànt aufîïque corne ils s'en font
pafïèz, que nous pouuons bien faire le femblable , àc qu'ils n'ont
pas laiffé fans cela à viure fàins , & à fe guérir quand ils eftoyent
malades , & que telles chofes doiuent eftre remifes àgens de plus
grand loifir, ou à ceux qui cherchent les chofes plus par eut iofi-:
té,que pour l'y tilitç. A tel ignorant voulons bien reipondre per-
tinemment, que les hommes du temps iadis qui n'auoyent Fin-
uention de faire du pain , ont vefeu bien fains , &: fe font guéris
quand ils eftoient malades, viuants tant feulement dcgland, co - ^,n^
me ont fait.les Arca4es,Nous voudrions donaque tels ignorais,
félon la couftume a»cienne,{è contentaient de viure atiec le feul
gland : ou des feules figues^omme ont fait les Athéniens : ou de ^Athéniens.
poires fauuages , comme firent iadis les Tyrinthiens : ou bien dsTyinéum.
ÇanneSjOu Rofeaux , comme les Indiens : ou de ï)ade$ , corn- In*uns-
me les Caïmans ; ot| de MU , comme les Sacmathes iX*\\À$:frffunï
grains deTerebintfae , comme les Perfcs : & nous lait&$CDjt le Fcr^
Bon pain de froment , blafmants les inuenteurs d'iceluy , com-
me trop curieux. Nous voudrions pareillement .que mefpri-;
fans Farchitedure , comme chofe .curieuie , .& de laquelle tes , -
anciens fe fpn^pafîéz , ils delailTaifent. leurs. maifons.,&; alîafr.
fcnt habiter es cauernes , ou fous les arbres & forefts. Et il par
cecy ne fè fentent fuffifâmment confutez,defirerions qu'ils bîaf-
maffent la curiofité d' Ariftote : lequel nous enfèignant les diffé-
rences des animaux, ne s'eft contenté nous deferire leurs mer-
A iiij
$ PKEMIER. LIVRE I>E? SIHGVLA.
qucs extérieures :ains ob&ruant les amtomies d'vn [chacun 5 a
voulu com ter les colles ècs fcrpés,nonibrer les boyaux des poif»
fons , des oyiêaux , & parties des corps de cous animaux. Aufli
Hippocrates & Galien nçfefont eonseritczde ce que fouloyenc
Êiire leurs ançe{trcs.,Mliis tels ignorans fe font exprès bandez les
yeux,&: voluntajrement aueuglez, pour nous apprefterà rire : de
h vie dcfquels Ion pourroic faire vne farce prefte aiouer à cha-
que heure:çar à larnaniere de.seourtifans .,. ils veulent ignorer ce
qu ilsriedëfirentveoir nefçauoir:veu rnefmement que lVfage&*
l'aage renouuelle&meliorc toutes choies àivtilité commune..
Car ceuxqui font hommes y le Içauent accommoder en viuant.
félon que nature leur apprend , laiffins le pire , ÔC choifnTans le
meilleur pour leur vtilicc Ji que lesvns de fauuages & champê-
tres , font deuenus domeftiques &: priuez, &r ont diucrfèment
changé leurs aJ&dions : dont les Cages en prenant finguliere de-
îè&auoa a entendre les chofes naturelles, voulants s'aûeurcrde
la naifue gerfe&ion des legitimcs/e font mis à fpeculer 8c difecr-
ner le vray du faux : tellement que fi vn homme en contrefaifant
artificiellemét vne pierre preeieufe , vn métal ,ou autre telle cho-
ie , aupit approché iî près du natAi rel , qu'il l'eu ft rendue corref-
gondante a la naturelle 5 non feulement en forme , mais auffien
toutes autres qualitez:fi eftee que la viuacité de l'efpritinge-
nicuxTie cefie delà contempler3,examiner>& expérimenter , iuf-
ques à ce qu'il ait entendu fi elle eft fauiè & adultérine , ou vraye
& légitime. Et de ce faire neft homme qui àiufte caufèlefceue
reprendre ou b!afmer,ne dire que ceft curiofité fans vtilité.Par-,.
quoypouuong conclure que l'ignorant ne nous peutraifonna-
blement arguer de curiofité inutilCjOu non necciîàirc. Mais laif.
* fants leurs friuolcs & oifiues allégations yte retournants à parler
deschofês finguliercs des pays eftranges y il a fcmJblé n eftre hors
de propos , auant que procéder au récit âcs chofes de Turquie,
toucher en pafiànt quelque petit mot de fine de Crète *qui efi
****'• maintenantnommee Candie : attendu que c eft Fvne des eftapes
en noftre voyage, ouauons le plus longuement atr-efté.
Brief
Or.BSE'RVrEFS P/A.ÏL "P. BELCrN. 5
Brief difcoursâes fmguUrite^ie Crète r& 'particulière obferuatwrp des
mœurs des Grecs. Chapitre ni-
•. Es ampleurs de toutes bonnes fciences&; disciplines
que nous rcuerôs pour lekmrd'huy^font pour la nieil-
; leurc partie ifïus de Grèce s laquelle (comme fortune
J permet que les chofes fè changent foudainement } de
riche & opulente qu'elle eftoitancienneraent, & bien garnie de
genslettrezen toutes difciplines, ^.dominante par fa vertu fur
vne grande partie du monde, eft maintenat reduide en tel cftat,
qu'il n'y axefié vn feul pied de terre qui ne foit rendu tributaire
fous le ioug àcs Turcs , ou fous la feruitude des Vénitiens. Le Grèce tribu»
Turc en tient la plus grande partie,en terre fermée en mer:mais tMrc-
ee que les Vénitiens en tiennent , eft feulemenrcn la mer. Les
Grecs quifont fous les Vénitiens, ont quelque peu meilleur par- Crecsrr,
ti au regard de lareligion , . que-n ont ceux qui font tributaires au ju Tur^
Turc:&faifant comparaifondesvn^aux autres , trouuons que Grecs ferfs
tout ainfi que ceux qui ibnc en la fubiedion des Turcs ,fegou- des remues,
uernent félon la manière de faire des Turcs -tout ainfi ceux qui Grecs mre=
font fous le ioug des Vénitiens ,jè gouuementà la Vénitienne, j^^g?»*
Tous les Grecs tant de l'vn party que de lautre5font pour le iour-^**^
d'huy en fimerueilleux règne d'ignorance^u'il n yaaucune vil-
le en tout leur pays^ou il y ait vniuerfiié:& auiEne prennent au-
cun plaifir à faire apprendre IcsJetrres Si feienees aleurs enfans.
Tous indirferemmet parlentvn langage corrompu delantique:
mais les vns plus élégant que les autres: toutefois-leurs parolles
approchent plus du bon Grec , que les paroles de l'Italien n ap-
prochent du Latin. Ceux des villes qui font fousles Vénitiens,
parlent auiïi bien Italien comme Grecimais les villagcoisne par-
lent que pur GrecTout ainfi eft des Grecs du pays ou domine le
Turc :car ceux des grandes villes parlent Turc Se Grec : mais
es villages ils ne parlent que Grec. Les Grecs n'ont delaiiîéles
antiques appellations des chofes appelîees par noms propres^ fi-
non es lieux ou ils ont efté le plus fréquentez des autres nations :
& beaucoup plus es villes fituees aux riuages , qu'en terre fermer
Car ayans depuis long temps trairîqué auecles étrangers 3 tant.
Xurcs que Italiens., ont emprunté des didions qu'ils ont méfiées.
IL
TO PR-EMmt XIVRE "DES S^NWL*.
auec leur vulgaire, choie que prou lierons eftre vrayeen nommât
pi ^eurs fKàSbsis qoi ibmcomœu aétnen t pefchez es rkiages de
Crète : car le poiiïbnque les anciens nommoienc Sphyrsena ,&;
cSforna lequel les habitans de lé Smiroé & Metelin , nomment Sphyrna,
Lfefcomé. &à Marlèillc,^ourcequUleftfcmblableàvne cheuilkd'auitorH
:&J%o mm* Pefèfcomé^ cft nommé enCretc de nom vulgaire Grec qui tient
no. fa ricalienjLuczo marino,qui eft à dire Brochet dei-nçr:mais ce,
brochet. ^ ia différence duMerlus anciennement nommé Afeikis , qu'ils
'^Yy -'^ommetit maintenant Gaideropfaro. Tout ainfî eildesipays de
'^ t^ Grèce fubie&s au Tura qui ont (emblablemét changé lesanciés
PO». noms Grecs>& en ont prinsde modernesen langage T. urcquois.
barbeau. En exemple dequoy mettons le poiiïbn que nous nommons va
jtyftus. Barbeau^ui auoit anciennement nomMyftus, ils îenommenc
Miéaédt*. maintenant Multachato, poutre qu'il porte des mouâaebes , de
Cy^ims 4^1^ partieltâiienne^; Turquoife* £n nommant vue Carpe,
sxfabduk., ^tf.js ^[^^ appeîler Cvprinus, maintenant ils dientSafan-
'fjT baluk.Ce mefmeont Ma les Turcs en leur endroi^empruntans
.déù. des Grecs beaucoupde vocables pour exprimer les chofes qu'ils
^4^Me. ont trouuees^n Grèce 5defqueîs ils nauoient point les appella-
tions,ne cognonlànce >. -car en nommant quelques particuliers
coiffons de Grece^ils dient en leur langage Glanos Baluk,&: auf-
û CheîlaSalnlc , quieft adiré Glanis pouTon , èc Anguille poif-
fon : Car Baiuk en leur langue, eâà dire pouTon. Celle chofe ne
Semble trop impertinentes car vnenation arriuanten vnlieu ou
«lie Croatie quelque choie qui n a point de nom propre en fa lan-
gue , n ayant iauthoriré d'en pouuoir inuenter vn , a bien liberté
l'emprunter le nom des étrangers pour s en feruir. Toutainii
comme nous faifons àcs animaux, & drogueries qui font appor-
tées des Indes, leiqueis nous nommons des mefmes noms quel*
•les ont apporté de leurs pays : comme appert par vnc petite befte
T apportée du Brefîi , qu'ils ont nommée Tatou,qui eft vne efpcce
de HeriiTon que lesancicns n'ont pas cogneu:mais pourec qu'on
lagarde emplie de Bourre(car elle cft eouuertc d'efeorce dure) il
y en a eu qui l'ont nommée Ichneumon : mais cela eft faux , car
îchneamon. telle befte-nc participe rien de la nature de l'Ichneumo. Les Fra-
çois mefmes n'ont ils pas emprunté quelques dictions des Ara-
bes?Car nommans leCedria des anciens^ils le nomment du Ço-
tranouCatran ; qukîftdicaon-Arabe. Il n'y a raifeur de bateaux
OK SERVE ES: PA'ït" P. BELOK. H~
&?»«iise$>qdi ne la fçache cognoUfare , 6c qu'elle ièrt à poiucr les
y,ailfeaux de marine : Il n y a greffier de ferraille qui n'en aie ', 6c
vendéen fabou tique. Et combien que les Grecs. ne retiennent
Gonftamrnent ia*mefme appellation des chofes en va Heu com-
me en l'au tre , fi eft-ce qu'ils approchent grandement des di&ios
antiquesJ& principalementés.eboiês r*6meespar iioibs propres.:
Que les Grecs efimts trïbutdm fous le iougdés feignetm efirmgersy
[^comportent Çeh&U couftume de v'mre de kumfuferiewrs.
Chapitre 1 1 J r.
,. ¥ s s i fauîril feauoir qac tous les Grecs neparfent pas ungagriw
\ vn roefme langage vulgaire : car les vnsen vn pays le Gréa.
I parlent meilleur, lesautresen vn autre le parlent plus
r mauuais.Etpource quclearsâccentsneconuicnncnt
pas les vns auec les autres, il nousfottuient auoir fouuent ouy les
petits garçons de père de Conftantinoble, fc mocqner du langa-
ge des étrangers quiy viennent par mer :-& mefmement les ho-
mes s en gaudifïent les vns les autres , comme font les François
eontrefaifàns le Hcard, ou autre langage qui n'eu; pasJ?rançois.
Efcriuans la couftume en gênerai des hommesviuansàla. Grec-
que,nous a femblé bon,faire diftindion des artifans 6c villageois
d'auec les Gentils- hommes & bourgeois : Car ceux qui ont le
plusàdefpendre, & qui tiennent leur réputation de grandeur^
font veftusde veftemens corrcfpondans àlacouftumedèleur {ci—
gneur. Ceux qui foncfous les Vénitiens ,-foet veftus àvla Véni-
tienne :6c s'ils font fous les Turcs, ils font veftus à<la Turque.-
Mais le menu peuple, tant dcrvnparty que de Vautre, foit des-
iUcs , ou de terre ferme y retient quelque ehofe de fon antiquités
car ils portent ordinairement leurs cheueux longs , 6c font ton-
dus de la partiede deuant au deflus du ftom^Sc vfentde gros bô~
nets doubles. Les habi tans des ifles iè trouuent viure en leur reli-
gion, prefqwe d'vne manière & faço défaire : Se mefmemét ceux
de CyprejRhodeSjEemno^C^o^mbjos^T^n^jFathmo^eo,^
MetclinjCoffujZantejNâxia ^Crete,&autres mfuîans quifbnc
demeurez en la foy Chreftienne,encor .qu'ils foyent deftous le
Tiirc , comme aufE les autres déterre ferme d'Europe &A£c.-
Tous en général n'ont gueted*vteniilcs,daEKfnage5noi> plus q*JCw
I£ . • PRE MI. EU liyit !DE;S SINGVLA.
les Turcs*: & necouchent fur li&s déplume. Vray eft qu'ils ont
Bjhjmxts, <Jes eontrepointes ou matcelas nommées Eftramats 5 faites de
<-r^ bourre ou de laine, pour fè coucher. Tous eftimentehofe odieu-
hoyiétdLu* & mettre de l'eau dedans leur vin? & encorpour i'heute prefente
tJtuK beyuent d'autan tiWn à l'autre, principalement ceux deCrete.
Ils font en ce differens aux Allemans en bcuuant d autant^que les
Allemans boyuent à grands traicts , mais les Grecs boyuent fou-
uentâ: àpetits traicts de forte maluaifie. Auffi eft-ce qu' ancien-
Grdcxn. ncmcntjConimc encor maintenant ton difoit Qv&can pour en-
TÀhi des tcnâvclnebrUrL Maispourcequ'enbenuantàlaGreque, il y a
créa. quelques ceremonies,il nous femble bon les dire. Il faut enten-
dre que les tables des Grecs font ordinairement moult bancs , Se
ont couliume de boire à La rengette, ne perdanspoint l'ordre: Ec
G. quelqu'un demandoit du vin hors fonreng s ilferoit réputé
inciuil. Etceluyquieftleplus pront à -donner à boire, tient le
porau vin,verfantàtoute la troupe, La cou ft urne eftde boire
auec vn petit voirre fanspied., &£>oke tout ce quiauraefté verfé
dedans,ny laiiàntpasvj)e feule goure de vin. Ilssinuitentquel-
quesfois à boire à lamaniere des Allemans , & alorsils s eotr ac-
collent., {ètouchansla main Fvn de l'autre ,, Se puis kèaifans &:
lappliquans au front , & de la s enttebaifans en la ioue tant dex-
trequefeneftre: mais alors ils n'obferuent pas les rangs enbeu-
uant. Et pource qu'ils boy uent le fort vin à petits traicts, &: que
cela lésai tere: ils ont toufîours la cruche à leau auprès d eux , &
boyuentà roefmes,de grands trâictsd'eau pour fe defalterer : au-
trement leur foif ne feroit pas eftanchee. Les femmes n'aCiftent
point à leurs banquets , & ne font prefentes quand ils boy uent &:
mangent en compagnie. Celte chofe leur a efté de tous temps en
^fage: dont Macrobe autheur ancien eft tefmoing. Telle ma-
nière de viuré fut de fon temps à Rome, comme auffi eftoit du
temps de Platon en Grèce : Car ledit Macrobe au Hure fécond,
chapitre neuiiefme^allegant ce que Platô en auoiteferit, dittels
mots : Et non magts inter minuta pocula , &c. En mangeant ( dit-il)
•l'on nefonnemot: mais quand vient à s'inuiter de boire, qui eft
àpetits traicts, chacun iafe. Ses parolles font telles : Primismenfis
pfi epttlas iam remotis , & dtfcurfimvariantibits poculis mmuùoYtbm^
letxibw quumfumituYUcitos effîcere, potws loquaces. Peu après dit que
les Parthes en banquetant ne permettoyent que leurs femmes
OBSERVEES VAJ% 't. BEI. 0 ^ ' Jf
îuflènt prefentes,mais fculementleurs côcubines ; mais il a prins
cecy d'-Herodote : toutainfi \cû bcauancsc^cuc traiter Ic&cko-
£cs fèrieufes. L'ancienne manière des Ethniques de pleurer^ mmiere
peur les morts dure encore pour l'heure prefente lid^pays àc de fleurer
Grèce , comme auifi es autrespays des Albanois > jBu|gares,jw«- fo.
Croaces^ SerafTes ?:Seruiens , Valiaques , -Sclauons , & JDal- rnom.
mates , Se autres qui tiennent le party des Grecs. Mais e eft
vne-chofe la plus fantaftiquey qu'il eft poffible de penier :_ car
quand quelqu vn éft trefpafTé , les femmes s'aûembleat en vn.
certain lieu afïigné , Se désole fin mâtin auantiour, elles com-
mencent -vn hurlement fe battans la poictrinc, &: s efgratignans
les ioues, en salongeant Se tirant les..cheueux , tellement que rieurs de
ceft grand pitié de les veoir : & à fin de mieux faire tëîmyfterc,/'7»^ ts"
elles louent vne femme qui a bonne voix,& chante plus gros que nAm u &
lesautœs ,pour faire entendre lespaufes., & accents : Se pleurent recîm%
ainfijCommcnçans aux louanges du trefpafTé depuis fa naiûance^
continuent au narrer, iufques à-fa mort. Il aduient moult fouuec
en ce dueil,que les femmes fe battent à bon efcicnt,&-queiqucs-
fbis les ieunes filles s'efgtatignen* tout le vifage. Et combien que
les ieigneurs de Vcnife qui dominent en pluiieurs nies ou les ha-
bitans ont cette couftu me de pleurer les morts,comme à Corfu,
Cypre,& Crète, au oyent quelquefois défendu qu'on ne îespleu-
raftplus à la Grecque, toutesfois les-habitans n'ont laiûepour
cela de le continuer: car les homtp.es mefmes s'en trouuoyent
intetefTez. La couftume eft que les femmes des Gtscs ne fe mon-
firent en public : &, toutesfois s'il y a quelque belle femme en la
ville ou l'on pleure le trefpafTé : elle fe fendra moult heureufè d'à.-
uoir trouué foccafion de monftrer fa beauté, accompaignant les
autres par la ville: attendu qu'elles vont en trouppe toutes efche-
uelees Se efpoi&rinees, monftrans leur belle charnure. En ces en-
trefaites les hommes s'y trouuent auffi, aya&Sjan moins îeplaifir
de voir celle fois les femmes & filles de leurs vôiiïns bien à leqt
aife 4 car de les voken autre fàifon, il n'y a pas gand ordre^obien
quele fpedacle eft d'hommes d'opinions diuerfes : pourec que
les vns s'y crouuent attain&s de ialouûe» les autres dlamour,
.... : " . .. , •:. .',....■•■"; , '. .B iîj- . ■
Ife P-R-E-Mïî-El-K^ tïV^&E DES Sï;îJCfIA»
aà/S»»ïa^« i« ^ri»c2^(^ i^sc^e /*!/!? <& C^?^; v Chapitre v>
t E s trais principales mx>ntaignes de Çreteont châV
r gé leurs noms an ciens.. Celles quiaurresfois auoiéç
i nom %euci /ont main tenantinDramees de Madara, ^
£ aiatremenr la Sphachie. Lemo^tldaeftniaintcnat.
ïnomméFfilûriti: ^ ï>*£feeft nomme Serbie ,&ea
quçlquesendroicts Laili.Eiics fontriLiaLi£es5quek neige les cou-
ucecaur î'hçyuer ; Combien que les Cyprès y etoifent ça &là en-
tre les, rochers des vallées, Çefte I$e aquinze cens vingt mille de -
circuit : ê£ pourse qu'il y-a cane de montaignes , Ion n y trouue
- guère de plaines. Rarquoy y a beaucoup de pays en frifche , qui-
toutesfois ne font demoindee reuenu âuxfeigneurs >.que la terre
fertile : Car lebeftial y,trouue bons pafturages. Bs y font nourrir-
grands trouppeanx de £i?^ & Cheures, qui leur,
rendent groffefomme d'argent des fourmages plaines. Eftans.
ferla. Commué du mont Ida, auons facilement veu la mer des.
deux coftez4e raie* Ce n'eft pas à tort que lesCretes furent an-
24*deCrde- eiennemcntdediezi^nianercarencorpour leiourd'huy fuiuant,
c^fte-antkiuicévs'addonnent par vn inftincl naturel ,.& des leur
enfanceàtirer del arc Scythique;^mefmementvn petit enfant
du beriêau courrouiTé ëc pleurant, s'appaife en ïuy monftrant
feulemenEvn arc,<*u îuy baillant vne ôefcjbe en la main: au âls'cn.
Crêtes ^xiU feaaent ils bié mieux ayderque ne font lesTures mefmes.Et tour
^jarwer.ainfiqu^nciennement ils combattoy.ent..^illamment dcflusla.
sciâmes, rner: au & en cor r^ur l'heure pretente font n dexttes, habilles. ôc
hardis fur leurs petite nauires nommez Squiraccs ,.. qu'ils fe dcf..
fendent de fort grand courage en combattant leurs. ennemis.
Nous, difen-s cecy pour nous è&re trouuez au lieu d'expérien-
ce, ou, nous lesauoàs veu. en befongne aûaillisdes P,y rates en--,
tre Zacintàe ou Aîzante , & Ccrigo ou Citharec , demenans fi
b^en lœ tnains^ que deux fuâes, en temr>£ calme, n'ofoyent loin- ...
èeeàz ççes y# petit Squirace de Candie.Cefte ifle deCreteeft
malaîfeeàââailîir par force, & ne ppuuât y venir que par mer,&:
a? ant difcomm#ditë de ports , eft de ce grandement rendue for- .
tâfee.11 cft bien vray que les habitans des villes & Chafteaux for-
cez. ⣠reroparez.de murailles n ont pas fautes de bons ha.urçs* ^
•-cornèa la ville de la Cance,Candic,Sccie5 Vouiifiucni, C&fàmcs £«*
SclmcsSphachic-Maishors des/ufdites villcs,lcsparcsibncfoit ^V*
*ares,pada co'fte:fc ce>qu ily en a fonï moult cfloigncz des villes, ro2i,rmni
defqucisncn fçauaiîS^ircoucer4flevn:bon,rmanvRièal nôme^^.
^Sude^qui eft-par le decrierede la ville dcîaCance : &; c£ celuy selmo. .
ou lesgaletcs de&arberouffc abordèrent en prcnanctcrrc en l'If- sphfchx.
4c,à Ja dernière guerre du Turc contrc-les Vénitiens. Mais, coni- sud*.
me auons dit, ils ne firent rieen l'ifcCar l'incommodité du lieu,
& lef eu de gens qu'ils eftoyent , les cotraignit de fc rembarquer
incontinent (ans coup frapper. Il n'y a maintenant en toute bile Trois y%e.
•de Crete,que trois villes qui foyentde grandi nom. La principale principale;
•eft nommée Candic,qui ait oit anciennement nom Matium:àor>t âzcnte.
•toute l'ifledeCreteàpnns ton appellation moderne. Lafecon- MMtum.
.de ville en gradeur d après Candie, a nom laCanée, qui ancien- c->*™/ u
nemcntauoit nom Cydonv& fut celle dont les coings turent no- ^^
mez Oydomx. La tierce d'après cft nommée Jtethymo , quelesan-
cicnsappelloyentXi^rJ^wwrcikrcft quelque peudifcoïiimodéc
de bonport pour nauires& galères, d'autant qu'il ne peut encrer
^leans fin on des petites barques : mais la Canée & Candie ont de
créions ports pour toutes cfpeccs de vaifîcaux , & font treifcien
fermez &; défendus de tous vens. Voik quant aux trois principa-
les villes-peuplées ; mais quant aux chafteaux de petite citOite ii-
tuezçà & là par Fiile-, il nous à fcmblc boles toucher legiercmét.
'Celuy de Voulipnaà , qui eftoit anciennement: nommé Parwrmus, ronlfeem.
cil encor pour ie-prefent en fon entier , entre laCycie & Candie, ïxnamm
-iituéibr vn haut,au riuage:&: y a qnelqucgoufFrc de mer efpou- &tu ou cr
nentabîe au cofté gauche. L'autre nommé Cytie,& ancienne- "f-
menttytam, cft iaquatriefmcflace forte de Crete:carauf£ bien,
eft-cc vne petite ville peuplée , fituée tout au bas bout de Fille , à
•Poppouce de Hhodes , tellement: qu'il n'y a que cent mile à tra-
<uerfer|>armcr d'vne ifle à l'autre : fçauoir cil delà ville de Rlio-
>dcsà la ville delà Cytie. Il y a encor deux autres petis Chafteaux
<m plus haut bout de Hfle, LVn eft du cofté de la mer Egée re- ,
o-a rdant le Septentrion, nommé -Chyfemo , U anciennement Vyfi- ->J4l,*ln**
mum , quafi tout ruiné : maisau demeurant encor reftenc fes mu-
railles antiques en leur entier. Ilneft pas fioié en haut lieu , mais
au bas,à vntraid d'arc du nuage. A. demie lieue àzXhpfamù tirant
vers Qtnofou*, ou ÇapoJjwU* ion trouueks ruines d'v ne ancien- €&<>##*. ]
A iiij
t6 ' PREMIER EIfO Vr-ZS SI H G V. LA.
bc ville furvnc colline à demy mile de la mer , ou eneor font ren-
flées les veftiges des murailles,&: fi grande quantité des belles cî-
fternes , qu'il n'y.aceluy qui les puiffëcontempler iinon par'gra^
Hekmco cd* niiracle îles babitans laj*omment tdto Bëlemcocattro. Les mu-
jr0^ railles du porc, font maintenat quafi comblées de fable, qui ren-
dent grand tefmaoigoageqaelleaanciennem
ville. Aj'oppofe de Ghyfatno,trauerfant i'i{ïevlon trouuc v-ïvau-
seltw*, tre chafteau eAeué fur vn^ecic eauftaïuqui ànoni Selino,fitué au
riuagedela.mèr.Êncof y,a vne autre vilîe-qu'ô nomme laSpha-
sphacbit,. çic^qui ivèil mu;rée> mais eft va grand village?efpars ça &: ià?,ikué '
au pendancdeçellescreshauresmocaignes yiadis nommées Leu-
teuamçn*. ci rnoilteS3&; a pceient les inoncs de la SphacKie. Ily a feulement
vn petit Ghafteau pour faire tefte contre les courfaires, ou à pei-
ne y a logis pour le chaftelain. Les habitans de ce village font les
pjus belliqueux.^:, meilleurs tireuçs.d-ar^qni foyent en toute H£
le: aufïi veulent Msauoir leurs arcs plus forts .que Iqs habitans des
autres contrées. Quelque chofè qu'on ait anciennementdit des
ileuues de Crète, ne nous à feeu perfuader qu'il y en ait vn feu!
îiauigabie en toute f iflé, ne qui peut feulement porter vn petit
feateau.Ii eft feieu vràyquil y à plufieurs grands ruifTeaux , àedh.
cdoedjfe. kfqnels la Goloçafie croifkdê ion bon gré fansy.eûre cukiuée:
qui a~fembié chofe moult nôuuelic d'y en auoir trouué en ilgrad*
Cancres /«Quantité. Etauflides cacres d'eau douce. La température du cli*
matik. tpat.de Çretç > &L l'oportunité de l'eau àss ruiileaux , donnent
mo-ye.n aux habkans du pays de dreffer moult beaux iardinages,
& vergers d'excellente beauté,^ en grand1 quantéjquileur Ton*
de grand reuenu : dont les vns font en pays û plaifant , qu vn ho~
me ne s'ennuy roit de les contempler , &; principalement es pol-
ira-.*»*, fcâionsd'vngenl-homme Vénitien* qu'ils nomment lefeigneur
cqcoBdroc* ip3npraocefcp.garoG?p ^lequel nous arou flou rs faict bonora-
JkmUner^ bîementtrai&er en toutes fes places & maifons3&: auffi fai&mo-
ûliîuer. ftrer les chofes iingulieres du pays. Les vergers font pour la plus
Grenadier, part plantez d'Àmandriers, 01 iuiers5 Grenadiers , Xuiubicrs , Fi -
'ûAsxgim.- guiers* Vautres tels arbres fr.uictiers, Se entre antres de moult
omnium. gran4s Oranger s^Çittonniers, Pommiers d'Àdam^Eoncieres:
Tomnm ^ des fruités, d'iceux les Grecs expriment le ius , Se en remplit-
jy™* lent des toneauXjdontJls pharget leurs fquiraces, qu'ils enuoiet
^ ~ * WBiî^ja.Xuiquiejtant en.Cpaftantinople qu'ailleurs } dont les
" ' " Turcs
OBSERVEES PAR P. BELON. ÎJ
Turcs fcfcruent grandcmét en leurs potages,au lieu de verd ius:
aufll eu; bien vendu en détail es mefmesboutiques,efquelles Ion
vend le poiftbn faîé, & le Gaxum. Il y a quelques endroi&s en Garum
Crète, ou croiftent les Palmiers , tant grands que petits : Se prin- palmiers &
çipalementlclong d'vn riuageou ruifîeau,qui fort d'vne fontai- crête.
ne en abiftne d'eau ùàcé , que les Crêtes nommet en leur vulgai- ^dmiro,.
re Al miro. Mais ils ne portée aucun fruichCar le climat de Crè-
te eft trop froid pour les Palmiers.
Du faux Labyrinthe de Crète. & des ruynes de quelques villes de Tlfle»
Chapitre vi.
E Labyrinthe qui dure pour le iourd'huy en Crète, Faux idy*
neft pas celuy duquel les autheurs anciens ont faict rmt^e ^
mention. Car cel uv qu'on monftre maintenant , eft Crfie'
r . j , . T i , Ida rnons,
ntne aux racines de la monraigne Ida, vulgairement _r,
nommée Piiloriti. Ce Labyrinthe neft autre chofe
quvnepierrerie : Se toutesfois tous les habitans de Crète la fça-
uent enfcigner fouzee faux nom de Labyrinthe. Ceftoit vne
quarriere de pierre dure Se bien belle , que l'on ttroit ancienne-
ment par quartiers > du temps qu'on fabriquoit les édifices de la
ville de Gortina Se Gnofos , qui anciennement eftoyent les prin-
cipales villes de toute Me , comme il appert par fes ruines. Et
tout ainfi comme il faut auoir des guides du prochain village de *
la grande pyramide d'Egypte nommée Buiïris , pour monftrer Bxjtr*+
le chemin , Se allumer dedans ladite Pyramide : auiïi faut il auoir
des guides d'vn village, qui eftoit anciennement la ville de Gno- Gnûj0^
fosjioignant ladite quarriere ou pierrerie , pour monftrer le che-
min à ceux qui y veulent entrer. Il eft bien vray qu'ilyaleans
pluueursdeftoursçà& la de collé- & d'autre, comme il pourroic
auoir eavn Labyrinthe artificiel : mais ceftuy ne prouient ftnon
delà où ont efté entaillées les pierres. Laquelle chofê ion peut
prouuer par les veftiges Se ornières des roues de charrette , Se par
les petites pierres murées ça Se là>au coité du chemin'. Les ruines
âc Cortina font moult grandes 5 Se y a encores pour le prêtent
quelque petit nombre de coïomnes droictes , plantées en terre, . -
&vn petit village qui eft vulgairement nommé Metaria. Les ,,t .
pierres des murailles ont eue enieuees hors de là, d'autant qu cl-
- " C " •
ît ?RIMIER LIVRE "DES SINGVLA,
les eftoyent de pierre de taille,tirees de la fufdite quarriere,& ont
efté tranfportees aifément : car la mer n'en eft guère loing. Il y a
zethym aufl* vn torrent 9ui defeend de la.montaigne: Se croy que ceft
-celuy que Strabo &: Solin nomment Lethyus. que Ton peut paf-
ferà gué fans planche ne bateau, Il y a auflî vn condui & d'eau fur
des grandes arches, qui eft encor en Ton entier, faifant moindre
fUtMpz pluiieurs moulins . Pareillement y a grande quantité de Placancs
en la vallée , dont fort la fontaine: mais toutes laifTent leurs fueiî-
les rhyucr. AufFia quelques arches Se murailles d'Eglifè de grof-
fèeftoffe parmy les ruines qui font reliées debout , Se pluiieurs
voûtes de fort ciment Se brique par dcfTus le ruifleau de Le-
thyus: qui (anoftreaduis) ont efté fai&es pour redre le lieu égal,
Si faire laplacc ou Ton tenoit le marché en la ville.
!Ui^on.
Ôfo
d'Oife.
Fouktourtt.
2a SonHe*
iiere.
C'iflttq du
grgujHri
Comment les Crêtes font le Ladanvn. Chapitre v i r.
Ntre les notables chofes que Ton peut voir en
Crète, eft la manière de faire le Ladanon , qui eft
vne drogue des plus renommées qui foit en noz.
«perfoms.Il n'y eft pas faid de la plante de Ledon,
ainfi que les anciens ont eftimé: mais d'vn autre
petit arbrifleati , nommé Ciftus, dont y a fi grande quantité,quc
les montagnes du pays en font toutes couuertes. Sa nature eft
telle , qu'eftat verd en toutes faifons, après qu'il a perdu fes rieurs
-&fiieilles du printemps, &seft defpomilé de fes fueiîles d'hy-
oer, ilfc reueft d'autres nouuelles fueiîles , quafi lanugineufes
pour Fefté^qui sengrefTent à la chaleur du Soleil d Vne vligineufe
rofeepardeffus : Se d'autant que le chauldeft plus violent que
l'efté, d'autant plus croift la fufdite rofee defTus ces fueiîles. Il y a
vne efpeccde ce Ciftus , croiffant fauuage par les Landes àOife
au pays du Maine,&: principalement ioignantle bourg de Foule-
tourte , près delà Soulletiere ( qui eft le lieu de noftre naiffance)
correipondantes en toutes merques àceluy de Grèce, excepté
qucceluyduMainenesengreffe point de rofee, comme fait le
Ciftus de Grèce : aufïi eft il beaucoup plus petit. Les Grecs re-
cueillans ledit Ladanon, ont la manière de préparer vn inftru-
ment qu'ils nom ment en leur vulgaire Ergaftiri.Ceft inftrument
a le fuft quafi comme celuy d'vn rafteau fans dents,lequel ils gar-
OBSER.TEES FAK P. BELOST. ï£
mÏÏentdepluneursconroyes decuirquincft pas conroyé , qui
font pendantes audit inftrument. Ils frottent lcfdi&es con-
royes doucement contre lefdi&s arbriiTeaux : lors la fufdktc y
rofee s'attache contre les conroyes, lefquelles il faut- tenir au
Soleil ardent,quand'i on en veut ofter le Ladanon , qu'on rafcle
auec vn coufteau. Faire le Ladanon, eft vn labeur quafi intoléra-
ble : Car il faut eftre tout le iourau Soleil par les montaigmes , es
plus chaudsiours caniculaires de-tout l'efté. Telouurageeftcô-^^f*5
munement de Caioieres , Ceftà dire des religieux de Grèce, "&tï™tleU~'
l'endroit en Crète , ou l'on en face plus grande quantité >eft vers MM" *
le pied du mont lda,au village nommé Ciguaiinus , & auprès de
Milopotamo.
lïh/npoijfon nommé Searu$\moult fréquent au nuage de Crète, &
toutesfois rares es autm contrées.
Chapitre vi-fci.
L y a vn poifTon grancf comme vn7 Rouget barbe,
moult commun en Crète 5 nommé Scarusrdoatlc3#.(WÏK
anciens autheursont fait grande mention : car il fut
i k temps iadis es délices Romaines, tenant le premier-
Keu en dignité entre tousles poiflbns. L'on n'a point accouftu-
mé-d'en voir en noz riuages,non pliis en i'Qoccean, qa'en la mer
Méditerranée, & ofons aiTeurcr qu'on ne le trcuue point au Pro-
pontideen rHcllefpont,nau pont*Euxin,n'auiTien l'Adriatique--
car nous l'y auons cherché. Et toutesfois il eft fi frequét en quel-
ques endroicts des riuages de Crète, qu'on n'y en pefche aucun
autre plus commun. Et pource quvonle>trouueen vnemefme
contrée , & quafien mefme faifba- que Ton a aceouftuméfaire le
Ladanon : & auifi.queîa plus grande pefche en eftau temps lJti^aC3^
qu on amaile ledit Ladanon :!ors nous trouuafmes^iles voir tous
deux d'vn voyage quaii plus par hazard de fortune , que de pro-
pos délibéré. Défia auions fèiourné en riflè-vnc, longue efpace
de temps, toutesfois pour ne nous eftre trouuezà prop.os.nauios
veu ne i vn ne l'autre. Mais eftaas embarquez pour palier de
Rhethymoàlaville de Candie, aduint qucles courfaires nous
rencontrans fur mer , forcèrent noftre vaiïfeau degaignetîa co~
fcenaeMillo£Otamo& Cigalinus.^ Les mariniers abandonne^
C il
20 PREMIER LIVRE DES SINGVLA.
renda barque fuyants fur terre pourfefauuer en la montaigne:
i£s voitrfei* toutesfoispoprcequeceneftlacouftume,que les courfàires dc-
t& nejume* ]ajfl£nt jCQr Vaiiîeau pour fuyuir ceux qui fuyent fur tcrre,ils pil-
te£e lerenc feulement les hardcs,laiflàns le vaiiîeau là,auec ce qu'ils ne
poiiuoient emporter. Mais en nous fàuuant par les montaignes,
courufmes,de frayeur, iufqucs à tant que trouu allions vn mona-
ftere de Caloieres en la vallée ioignant le riuagc , ou pour lors le-
uoyentlcs nafles qu'ils auoyent ja tendues à prendre les Scares.
Etpourceque feiournafnies la quelque iour, eufmes bonloifir
d'enquérir la raifon pourquoy ces poiffons y font fi frequens , Se
surAâ. rares ailleurs. Nous trouuafmcs que le Scarus eftant poiflbnfa-
xarile,en outre ce. qu'il demande habiter entre les rocs , illuy
faut aufîî nourriture conforme à fon eftomach,qui eft vne petite
lierbe dont il fe paift , Se qui ne croiftpoint ailleurs : Se le Scârus
, eftant frïant de cefte herbe -, demeure volontiers en celle partie
fcota-elT ^c riflc* 0r les Caioieres Vautres villageois du lieu, cognoifTans
sfarm. *' la namre du Scarus , Su fçachans bien qu'il eft friant^de l'herbe
ïhafeôles. àcs Phafeoies,en fement par les champs, dont ils luy font les ap-
pafts pour le prendre, mettans les fueilles fur iour dedans les nat
îes en la mcr,gardans les filiquespour eux,&: les Scares entrez de-
dans relient prifonniers , autrement ils feroyent difHciles àpef-
cher*. car ils ne fe prennent guère à la ligne, & bien peu à la traîne.
Et à caufe qu'ils ont dédié ladite herbe des Phafeoles aux Sca-
scarouotano ^^ils h nomment vulgairement Scarouotano. Les Scares vont
sdfes. à grandes compagnies , comme les Salpes , & font delà couleur
Rougets har* approchante des Rougets barbez. Nous ne voulons cy amener
î>e\ toutes les merques de Scarus : car nous Fauons amplement def.
crit ailleurs auec tous autres poiûons. Encor auons bien voulu
adioufter vne chofë notable : c'eft qu'eftans en telle fuite iufqu es
bien tard fans manger, le Caloiere nous en ayan rapporte vn cuit
Se embroché à leur mode, veifmes qu'ils leur fichet vne brochet-
te par lagueuîe au trauers du corps pour les roftir fur les charbos:
mais ainfi qu'il droit, il fembioit proprement à vne perfonne
riant : carie Scarus a les dents ordonnez comme vn homme , Se
ayant îes leures retirées par la chaleur du feu , il fembloitpropre-
ment voir la bouche d'vn home riant .Ce qui eft le meilleur de ce
poiflbn , eft l'herbe qu'il mange , de laquelle on trouue toufiou rs
grand quantité en fon cftomach. Ha auifilefoye moult grand,
OBSERVEES PAR P. SELON. ^ 21
quifertàîuyfairefafaucc. Car eftant battu auec les trippes, fèl
ic vinaigre,donne bongouftà toutlcpoiffon. Et à fin qu'on, en-*
jcendc dequelpoiffon auons parlé?en auons cy mis ie portraiâ;. j
PortraiB ivn poijfon de Crète , nomme Scarus*
> Les noms français de plufieurs espèces doifeau* obferue^ en Grèce >con-
fere^auec leurs appellations antiques. Chapitre i x.
» E qui maintenant nous induicr à parler des oifêaux
, en particulier 9eft que nous eftans trouuezenvnpe-
» ris ■ vaiffeau fur mer , au printemps entre Fifle de Za-
^^^v^vsj cinthe&Cyrarée : diuerfes efpeces d oifeaux paûa-
gersfercndirenrànouslaflcz dedans le' vaiffeau. Etpatceaprif
mes des lors à les fçauoir recognoiftre de noms vulgaires. Mais
les ayans amplement deferits en fept Iiurcs , fumTt maintenant
d'en toucher vn petit mot d'vn chacun. Et pour autant que fça-
uons bien qu'il y a plufieurs gens en doute , à içauoir il les ani-
maux viuans es autres pays de leuant , ont mcfme corpulence Se
figure que ceux que nous cognoiffons en ces pays cy , auons efté
meus de leur faire entendre gue telles y font toutes manières de
beftes/nfeaux, ferpens3poiffons3 & plantes, que celles que nous
voyons en nos ptouinces:&: que s'il y a duference,on la trouuera
manifefte en toute lefpece. Il eft bien vray qu'ils en ont beau-
coup de fortes que nous ne voyons pas en nos pays , que les an-
Ci iij
%% PREMIER tlVUE DES SI N G VTA..
ciens ont nommez de propres noms , & en cela trauailîonsà les
fcauoir.Commentdoncvn AlematjFrançoiSjOu d'autre nations
pourra trouuer nom vulgaire en fa langue pour tourner ou ex-
primer le nô d'vn oifeaue(lranger,s'il neft veu en Ton pay s?Nous
baillerons, exemple de eeluy que ks Grecs ont nommé Merops*
Se les Latins Apiafier , qui eft oifeau il commun en Crète , qu'il
nya,-endroitenrifk ou Ion nelevoyevoler,&itotîtesfois eft£
rare ailleurs , que rnefmsr&ent les Grecs de terre ferme ne le co-
gnoijGTent point. A peine a efté iamais veu- voler en ïtaîie:ce ncat-
moins les François,les Alcmans ,.&- autres de cefte. Europe, ont
penie que no&re Mcfangefuft Merops,côbien que cela foit faux
'[/Ckion. car Meropseft vn oyfeau de la grofleur. d'vn Eftourneau , qui
Mamnet neft mou Je bon à-<manger,& fi eft prefque femblable à 1* Alcion,
fefémr. qUC nou&nornmons Martinet .pcfclieur.il n'eft plus appelle Me-
MeUjfoph^.. rôp&cn CreteiainsMelifTophagOjqui femble didion correfpon-
& r danteàlaLatine Apiaftencarilprendfapafturedlauettes envo-
Me^nge. lantcn Fair ^kraaniere ac$ Hirondelles. Une vole guère feul5.
-*Zoio mais en compagnie, & fur tout le long des montaignes ou croift
e, le vray Thym,pour manger les auettes , dont il a prins fon nom.
Gorge rou* Et combien que î&Mefange, que les- Grecs nomment Parus, ê£
les Italiens Sparnoczolo,en face -grand dcgaft:& auffi que la Ru-
bcline,ou Gorge rouge , nommée Rubecula, que les Vénitiens
nomment Pettoroifo ,fepaiiîe des auettes : toutefois. ne l'vn ne
i-autreagaigné lenom de Apiafter, cemnre Ion auoitparcyde-
uant pente. Et à fin d'en ofter Ferreux auons propofé en bailles. *
la vraye pemciure^.
Tarws.
Sfurnoc.
fiubecuLt.
Pàtorûjfo.
OBSERVEES S A Jl P. B XL O N,
1$ Jjortrafâ iu Merop, quon pourrait bien
nommer en François , <3uefpier%
Ceft oifeau eft de la plus belle couleur qu on puiae voir , ex-
quife corne celle d'vn beau Papegaut.il fe fait ouyr debië ioing, ?*?%*&>
faiiànt vn Ton ou voix celle que feroit vn homme en tublarr^ayac
îa bouche cîofe en rondeur, qui chanteroitjgtulgruruururubauf^
û hauît -comme vn Loriot. Sa beauté exquife inuite les petis gar. Lûr-ot
çons de Crète à le prendre auec des Cigales , comme aufS font
les grandes Hirondelles, nommées Apodes. Et pour ce faire, apodes,
mettent vne efpingle crochue en forme dvn hameibn par le tra- cïgiUs.
uers d'vne Cigale , à laquelle ils attachent vn filet, dont ils tien-
nent le bout. La Cigale eftan t ainfî attachée , ne laiflè pas de vo-
ler en l'air. Adonc le Merops laduifàntjdcf céd de roideur,&; aua.-
le la Cigale en volant:lefpingle crochue le retient à ce filet3& de-
meure prins par ce moyen. Loifcau que nous nommons Coqu,
que les Grecs nommoyent anciennement Coccix, les Crêtes ie ^^
nomment maintenant Decodo : &: Decodo eflàdirc dixhuiâ. ptC0g^
C iiij
Wte.
pmmàiett.
CuUàhgA
l&ùpotogas.
Siiforada,
^dttagen.
^/CttAgM.
Çanejteti.sre.
TerdrU bU-
çbes.
frxncolm.
fetrAQ. .
GaUo-Cedro*
Faisabruiat.
24 PREMIER LIVRE DES SIKGVLA.
Mais iîsles nomment ainfi,pouf ce qu'il femble que le Coqu pro-
nonce dccodo en chantant.L'oifeau que nous nommons Berge-
ronnet'e,(èmblabIeà la Lauandiere, Se les Latins Culicilega, Se
anciennement Knipologos, les Grecs la nomment maintenant
Sufurada. Et Attagen y eft nommé Taginari. Quelques vns le
nomment Attagas3comrneauiït à Conftantinoblc, Et ayans co-
gneu ledi£fc Attagen moult femblab]e à noftre Canne petiere>
suons cherche quelque merque, qui les diftinguaft. Ceftquela
Canne petiercn'a pas les ïambes chargées dep!umes,mais TAtta-
gen les à patues5&: à auffi le bec noir3court,&: fort,&: eft de moin-
dre corpulence que la Canne petiere. Mais au refte font prefque
femblables en couleur: touresfois l'Àttagen eft incoftant en cou-
leuncarlon en voit de tous blancs , que penfonseftre ceux qu'on
appelle en Sauoyc les Perdris blanches. Ce que Pline a nommé
Lagopodes:car elles font toutes b lâches, Se ont les iambes char-
gées de pîumeSjComme a l'Àttagen^ ne font de û grofTe ftature.
Etdefai&eftans à Venife,au logis demolieur deMoruiiler, lors
qu'il eftoit ambaûadeur pour le Roy,veifmes des Attagen s blacs:
mais les Italiens appellent tant les vns que les autres^Francolins..
L'oifeau que les Romains nommèrent Tetrao > Se lequel les Ita-
liens nomment pour le iourd'huy Gallo Cedrone ,& en Auuer-
gne vn Faifan bruyant^ en Sauoye vn Coc de bois , eft fouiient
veu parlesforeftsdes hautes montagnes de Crete5deux fois plus
gros qu' vn Chappon?ayant vue tache rouge de chaque cofté^oi-
gnant les yeuxfur les tempes ^ tout ainû qu'vn Faifan : Se de force
qu'il eft noir deuant l'eftomach^fes plumes en reioifent, comme
le col d vn Ramierm'ayantrien de blanc finon es a?lles:ayat fem-
biablement les iambes pelues de plumes , comme a TAttagen , Se
k Perdris blanche de Sauoyc > Se la GelKnote de bois..
Zes noms Grecs âe plufiems autm oifiaux, conferezjtuec lesappelÎMos,
Itançoifess .'■ Chapitre x.
Es oifèaux qne les anciens Grecs nommoyent Cicla?,
Se les Latins Turdi ySe nous Griues , Mauuis , Irak
lcs,& Tourets , y font maintenant nommez Schy no-
poulii , quafi difàns oifeau de Lentifque. Et pource.
^SïejpaiiTeûCauiÏÏdes bacques de Myrche , ils les nomment
"-'"" ailleurs
. -OBSERVEES "pa^j p; "bel ok; ' iy
ailleurs Myrtopoulli. Mais tels oifeauxfont grand nommage en yArttpouM.
paysdes 01iuicfs.Ccluy'qû'Ariftotc.nomma,Vifciuorum9 eft dir rifaucrm
en François vne grande Griue,qui eft le premier en Ton genre. Il crîue.
eft plusgros que nul desautres. Le fécond qu'Ariftotea nommé _
Piïarem.eft communément nomme .-en noftrclangue Licorne.il- T'lUrii*
eft de la groftèur d'vn Merîc.Le tiers qu'il nôma IliactmT,eft vul- , " .
gairement dit vn Mauiiis , qui eft le plus petit de tous xSe le plus MauuiSm
iaune au pîy des deux ailles , Se par défions le ventre : Se eft de la Efloumeau,
groftèurd'vn Eftourneau. Loilêan que nous nomons vn Roite- çoltckt:
kt,îls le nômen t en leur vulgaire TriIato,qui eft en ce eorr efpon- Trocbilos,
dantàlantiqueTrochilos, lequel ils fçauét fort bien distinguer Tettlg°n.
d'vn autre moindre que luy, qu'ils nomment Tcttigon,&: les La- Ty*mn™--
tins Tyrannas,&: les François vn Poul,Soucie,ou Sourcicle : car p<M^ '
il a les plumes iau-nes fur la tefte de cofté& d autre en manière de. ~
erefte,qui luy ombrent les yeux comme àrnotts les fourcilsjdont "
ifagaignéce nom François, &n'eft guère plus gros qtteft ynt fyrroeoraxS
Sauterellc.Les Chouettes ou Choucas, que les Picards nommer swrapoU
£raues,qui ont le bec Se pieds rouges,qu Ariftote nomma Gora- K2**u&.
kias,Pline Pyrrocoraces/ont moukfrequentes à la fornmité des p^^
hautes montagnes de Me : les Grecs les nomment -maintenant A0° C°'^
Scurapola JLoifèau que Ariftote a nommé Kianos, Se Pline Ce-
ruleo { lequel ypource qu'il hante les rochers des hautes montai*
gncs,& eft femblable à vn Merle, a change fannerm ) eft mainte- 2>urdu.
nant appelle PetrocoHipho. Il eft de moindre corpulence qu vn
Merle, Se eft totalement bleu , & eft moult exquis a tenir en cage
pour chanter.Àuffi a il la voix de mefme le Merle. Nous ne fçau-
rions le nommer en François :cac-nous neTauons aucunement
en ce pays,non plus qu en Italie, filon ii enapportoit en cage:car
Ion en defniche quelquefois des petis,pourleuxapprendre à par-
ler. Et comme Ariftote a cogneu trois espèces -de Merles : Auiîî M&lesnùrs.
ont des Merles noirs , Se blancs ,'qu'ilsnomment comme les an- f ^ ^
ciens Grecs Coffiphos.Et encore vne tierce efpecc, dont Acifto- ^^0^
ce a parlé, qui de nom propre François eft appelle Merle au col-- J*^^
licr,pource qu il a vne ligne blanche fous la gorge^vers la poiebi- ^^
bc , qui luy tourne tout le coî,& duquel on en v ois grande qu an-
îké^n la vallée de Morienne , Se par les vallées de Sauoye. L'oy-
feauquonnommeen plufieurs lieuse France Dixhuiet,.&à^^
laris vn Vaonem>& que les Romains nommèrent ancienne- rmnsm^
n .
Parcus.
ly€ex»
Sferdris.
Cotumo,
:¥otamïilA,
£6 -rUFMTER LIVRE DES SÏNaVXA.
ment Parais , Se les Italiens appellent Paoncello , cft nommé eh
vulgaire Grec de fon antique appellation Àex r.pour ce qu'il crie
fouucnt comme vne Cheure.Les autres dtfènt Taosagrios, c*eft
à dire Paon fauuage.-car il porte vne huppeeîeuec deflus fa telle,
comme fait vn Paon, la manière d'vnCocheuis, Ils n'ont point
jic Perdris goaches ou grifes en Crète : Mais en ont des rouges
groiTes comme PouHes, qu'ils nomment vulgairemétCoturno,
-qui eft di&ion quifcmble eftre empruntée des Italiens. L'oifeau
qui anciennement auoit nomCuruca,que nous nommons ea
François vneFauuettc brune,y eft maintenant nommé Potami-
da. Ils nous ont afieuré quellenourrift communément le petit
du CoqUjCombieîqu'il y en ait plufieurs autres qui le nourriffent
zutVii toutesfbis ceftuy là ienourrift particulièrement plus que
les autres oifeaux.Il y ena qui veulent que Potamidacft vn Rof-
fîgnoî : Se à dire vray le penfions ainfcmais auons trouué depuis
que le Roflignol y eft nommé Àdoni ou Aidoni.De laquelle ap-
^'m^Àe' PeîIaîion voyons mefmement que les François en cognoifïenc
' deux efpeces„ Tvne de bois, l'autre de muraille: qui cft celuy que
les Grecs ont anciennement nommé Phoenicurus ,& les Latins
Rubicilla. MaisPotamidaeftantoifeau différent au Roflignol,
aies pieds &: le bec de couleur plombée tirant fur le cendré. Il cft
nommé en vulgaire François Fauuette brune,ou grande Fauuet-
tcàla différence delà roufle nommée Troglodites.L'oifeau auf-
û que les Grecs nômerent anciennement Jigotilax,&: les Latins
Caprimulgus , eft vulgairement cogneu en rifle de Crète s ouître
l'opinion de Solin Se d autres-. Se d autat qu'il voie la nuià par les
villes, Se fai&vncry moult effrayant, nous l'auons nommé vnc
Fre%e , ou bien Effraye. Il ne voit le iour non plus qu Vne Che-
ueche ou Charmant. Quelques vnsprononcét vne Orfaye:mais
ce nom eft deu à vn au tre oifeau,nomme O flifragus, dont parle-
rons au liure des oifeaux en deferiuant Nicfcicorax. CefteFre-
fàye eft quaiï de la-couleur &.grorTeur d Vn Coqu , Se fait fon nid
en noftre payses hautes tours,&; espertuis des Eglifes.Cellcs qui
viuent en Crete^e font entre ks rocs :'par les montaignes le long
de la mer , ou elles font grands dommages aux pafteuts, qui n oc
accoaftumé mettre leurs Cheures de nuiâ: en tait,d'autant qu el-
les fuccent le laid des tétines des Cheures. Ouide en a parlé,
£trJx,aitk quand il dit : CœfmMcmmrla£leatiâvifcera rofiris* £Jl illis Stnghus
C âsho'ps.
:FhœmmrM.
J>ot4tnicU.
^muette.
'^gegotiUx.
<CœprimuL
Frejaye. -
Effraye.
■Cbeuecbe.
Cbabmnt.
Orfaye.
O&fr&ms.
OBSERVEES PAR ?. BELON. ZJ
ttomen fednommis huitts. Caufi , qucrd horrendt firidere noffefolet.
Les noms antiques & modernes jant François que Grecs deplufteurs au* -
tresOifeaux.
Chapitre: xi...
^*V&@ ^ tous oifsaux^lont auons eu cognoifïânee,n en auôs laotien
" * g vea aucû qui n'euft quatre doigts es pieds y excepté le Gui!^ùt-
. :PIuuicr5le Guillemot, la Canne Betiere, l'Oftardc & ^J^"'
la Pie dé mer, qui fut ancienement nommée Hxmz- pùdemcr
topus. C eft vn oifeau rareà voken nos nuages , combien qu'on jj^tmotopis.
l'y ait quel quefois veu .11 eft de la corpulence d'vne Àigrete, ay ar aigrette.
les ailles comme vne mouetej&le corfaged'vn Flambant, que iLmbant^.
' les Latins nommentPhœnieoptcrus:le beclôgde quatre doigts, Tbœxucofte*
comme celuy delà Becca{ïe,doataucunsîenommentaufil3cc- rm-
cafïè de raerrmais eft différente en rôdeur à tous autres b'ecsd'oi- ££CCa"e
féaux paluftreSj qui Font rond:car ceftuy cy ràapplati & agu par
le bout,& quelque peivnoir à l'extremitéicar tout le refte efl rou-
ge.Jouteia tefte & le col eft noir , S^auffi tout le demis des xllcs-
blanc par 4e trauers : dont il a prinsfon appellation Françoifc.Et
eft blanc deffous les ailles Se le ventre. Sa queue eft noire par le
bout,longuc corne celle <£vn Canard. Il a deu-x orteils ou doigts-
âefes pieds qui fè tiennent enfcmble:celuy qui eft en dedans , eft-:
fèparé.Il n'a point depetitergoDderHerejCÔme onttousoifèaux
de riuiere : & auïEa hs pieds délicats 5c mois , &mon pas fecs &
durs comme les autres. Il a.laiambe longue de trois doigts. Les
doigts defes pieds font courts,^: ont vn ongle voûté, côme font ;
les ongles des Oftardes. Ilxftdechaitmauuaife, dure ,& fort op&de.^-
noire:&afeiargueii ou gofler moult grand^large^ robufte: La B€a^-.'
Beccafte^qui auoit anciennement nom Àfcolopax 5 fe refent en- ^^^
cor quelque peu de fon antique appellation G teque : car encor ^iW».
pour le iourd'huyja nomment Xilornitha/ceft à dire.Boulle.de ^£lÙUSue.
bois,quieft conforme à fàdidion Latine Gallinago. Ilsnomcnt chxmochiU^
les Alouettes Ghamocruladi^îes Raaiiers Piaafîàlls n otpoint dî:
nom plus propre pour^ex primer les Corliz-, quede Je&appeller ^°^
^crimiti3ceft à4ïte,ne2lIpng. Les Gtecs n'ont dictions en leur ~*ft ..
vulgaire pour dMlinguer les oifeauxde nuicte il proprement que ^f; -t:
n9&4fei&ns: Çarils.nQmmenj: indifeemr&eûtles Sarcelks&: V^&T ~
*8 PREMIER. L'ÎV-HE DES STOGV'LX.
■Morî&ons. xforillons idc nom de Cannes , qu'ils appellent Pappi. Il yavne
P^* , particulière efpecc de Plongeon de mer en Crète , nageant entre
p 1g?0** * deux eaux /différente au Cormarant ,&auxautres Plongeon-s
^omurant. nommez Mergi: qui çft celuyqu'AriftoteanomméEthia. Les
.Mewts. habitans du nuage de Crète l'appellent Vuttamaria & Calicate-
.Ethu. zu. ïl eft de la groffeur dVne Sarcelle^blanc par deflbus le ventre,
toifeaux de ^oir dëiîus k telle Se fur le dos , deflus les •asiles^ Se aufïi toute la
■Û5rtft «queue. Il n'a nul ergot derriere^uflî eft il feul entre cous oifeaux
--ayans le pied plat3à quieela conuienne.Sa plume dont il efteou-
Hiert,eft fin duuet, tenant fort à la peau. Son bec eft moult tran-
chant par les bords, ,-creux Se quaii plat , qui eH couuert de du-
uetjufqnes bien auant,noir deflus Se blanc deflbus : Se a le fomec
plongeon de delà tefte large. Celle manière de^etit Plongeon de riuiere , que
muere. }es François nomment ?vn Caftagneux , n'eft point cogneu en *
eblom. Grece.Le Verdicr nommé en Grec Chloris , Se en Latin Lutea,
ÎJ^' ' s'appelle en vulgaire-Grec AflarandoSjde diàion correspondant
seront *'TC* ce^c ^u PaYs ^u ^aine >ou lon a accouftuméle nommer va
Frinniu -Scrranc. Les oifeaux que les Latins ont nomm é Fdngilîa? 5que
Tlnfons. -les François nomment Pinfons , font dicls en Grec Fririgilari,
sptfe. -ne tenans rien de leurs anceftres , qui les nommoyent Spifx:
oroftî(*. xomme aufllccux qu'ils nommoyent anciennement Orofpiza:s
Monmm g^ q^^ous appellonsMontainsisu Pinfons d'Ardaine , n'y font
smfom. :4j^iBgLîez d'autre nom que decommun Frin.gilaro , qui eft pur
rT*]' Italien, qui Je nomme Fringuello. NosBruans leurs font auffi.
Floms. comiuuns : Mais ils ont oublie a les nommer de noms Grecs an-
sporruitk <ciens Anti ■: car eux ayans -aprins -tes noms Latins , les nomment
Mouette. Flori. AufFmemmcntvn Paffereau en. leur vulgaire Sporguitis*
iAro$. / £t vne Mouette Laros. Vn Chardonneret > qui aneiennernenj:
^chardineret s^ppdiojt Pikilis , Se en Latin Carduelis , eft nommé Guardelli,
j m ou bien Stragalino. Combien que ce nom Chardonneret con-
J^lfo uienneàceluy que les Grecs ont nommé Acanthis 5 lequel les
jàmus. ' Latins ontdid Spinus , quieft noftre Serin , toutesfois ils lenô-
jerm. ment maintenant Spiqidia. Il n*y,a chofe â fréquente en Crète
~" que le Piuoine , que Ion voit voler deffus les petits buiffons : Se
pource que c eft vn petit oyfeau ayant la tefte Se h queue Se vnc
partie du corps noire ,pluiîeurs le nomment vulgairement A f-
proçolpSjCeâà^direjBlanccul. Mais ce nom luy aefté donné au
cotraitcicar il y en a vn autre qui eft particulièrement nomé Cul
OBSERVEES VA'R P. B;ElON. £Ç
-fchnc,quicft celuy que les Latins nommèrent Vitis flora , & les p^^-
Grecs Oenanthi. Quelques autres nommée le Piuoine plus pro- ^^
prement de diction aftez correfpondente Melanocephali , c eft à , ^
dire, tefte noire. Les anciens Grecs le nommèrent Mclancon- mùmorU
phos,& en Italie Atricapilla3qui eft vne mefincchofe auec Zika-^..
}isîiequellcsFrançois.ontnomm«'Papafighioii Becafigui,& les ^ttrlapU
Latins Ficedula. Celuy qucîes anciens nommèrent Ortygome- 1*---
tta,c 'eft à dire ISftere des Cailles, eft peu commun en Crète : mais f^ff"
es autres lieux de Grèce il eft auiïï commun comme en Italie ou ££*y£^M
enFrace.'Ceft vn oifeau qui enfuie les Caiilescn quelques mer- w' *
ques : Et ayanrdc ce defFauten luy de ne voler guère bien , en re. M„e ^
compenfë nature la fait courir legierement. Les François le nô- oulles.
«ment vn Rafle, & en Italie le Roy des Cailles. Et entant que le^>.
dit Rafle eft noir , & hante toufiours l'eau , il rcffcmble qnafi vne ^lelem.
Poulie d'eau, que les Italiensappelknt?vnapQulica: mais il eft *' ca"
beaucoup plus petit, & n'eftpas du tout u noir , & eft bigarré de
blanc pardeffous les adles , & par les deux coftés. Sa queue eft
roufTe par deurou=s,&éft courte comme à tous autres oy féaux de
riuiere. Son bec eft long de deux doigts,mais en comparaifôn de .-.
laBecaffejCheualiet^CorliZjqui^onçfortlong, pouuokeftre seccafe.
dit Court. Les Vautours, Aigles, &Faucons font leuxs nids en chmdter
Crete,non pas es xrhefnesà: es arbres, commefont lesaxitres oi- C°T^un
féaux : mais es rocheriqui refondent fur lamer ,;quaiî perrdans J^*n*
comte bas, en lieu moule difficile &£ precipiteux. A peinepourr F^0^
zaitlian les voir,n'eftoic qu'on fuft euvn vaifTeau •> les.regardans
•de iamer. Parquoy les vouïans defnicker, #autauoir vne longue
xoide qu'on laifle-pendrêie long du roc, donc le bout eft attaché
deâkstefatfte delà montagne a quelque pau fiché en terre* Vn
payfan .deuallele long.de la corde , iniques a tant, qu'il paraient
au lieu oueft: le nid du Vautou r,puis retourne à montpar la mef-
me cordepax laqueileil eftoit defeendu. Autrement mettent vn
•petit garfon dedans vne grandecorbeille, qu'ils dcuallenc de def
fus le roc contre bas: & quandifleftparueniiaunid^Jors il met retours
Jes oiièaux en fa cQrbeillG,& Ce fait retirer àmortt. Les Vautours *4»»^
tant les tannez quenoiTs,6:equenteiit fur les raoneaignes de Cre- ^autoim
te^oupaiftlebeftailjrauifEintlesaigncaux &: cheureaux, & les *^^ r
lieures qu'ils trou uenc au defcouuerc. Parquoy les pafteurs sel- ^. £ *
¥c de les prendre pour.y auoir du gain g 1 carilsles eicorehec> '?##<**$.
D iij
5° PREMIER, LIVÎtrE &E$-SINGVLA...
Sç vendent les selles aux artilliers, qui s'en feruen t à faire des am-L
pennons aux flefehes : Se la peau aux pelletiers, qui la conroyenc
pour en faire fourrures , qui font vendues bien cher. Ils nommée
ideonk ■ *çs Faucons en vulgaù*e, Falconi, combien que vn Fauconnier y
sierâx. eft nommé Hjieracari,dela lignification de Hierax,qui eft terme
sure. gênerai conuenantà tous oyfeaux de proye. Aufli ne diftinguenc
^utùur. i]s pas lçs oyfeaux de proye par noms propres , fi bien corne font -
Gpfault. nos Fauconiers : Carie Sacre, Autou^Gerfault^Lamer, Se Tter- ,
Jfa£y celetsfont confondus auec le Faucon , fans faire diftindion de-
MtUn. * kurs cfpeces. Le Milan qu'ils fouloyent anciennement nommer
ichhyno^ Ichtynos,eft maintenant nommé Ucadurus. Etpoureequ'auos
iMxdHnts.^ trai&édetous oyfeaux ça autre œuure ou en baillons les por-,
traicl;s3nous n en dirons autre chofe pour l'heure prefente.
Chapitre xii.
zhaUnges. ^^ÊÈ^fëh'^'s ^tctes %aueac nommer les Phalanges Splia-
SfhjJUng. Jgj. ^^^^ Jangi, qui font petitesbefes yenimeufes, quelque
Vefcrïfuon, ® ^^^fe pexi plus grandes qu vjae Araignée , ayans huicl:
du 2bdm* £z* "||â=|||| ,pieds,quatre de chaque coitérchâque pied ou iam-
&l<m? ^ SS*u4».u>i4^. t>c.a quatre articulations , $e on t deux ongles fort
deîiezjen chaqueiambe *. qui font voûtez en crochet .: dont les
deux ïambes de deuantile chaque coftç font pour marcher en a-
liant, &:les.deux autres de derrière font pour le conduire en ar-
rière. Us habitent toujours en va trou oblique , profond de
deux pieds en terre,dedans lequel ils entrent ^reculons, Se tirent
leur mangeaille après eux iSe muniffent l'entrée aqec des fefiqs
pour le tenirjrauiioursouuert , ouilsfetiennent ordinairement.
Leux corps eft eed ré par deffus,& .de la partie de deu at, ont deux
taches rougeaftres par Henusle dos tôe û on les renuerfè, on leur
trpuueravne tache noire en l'endroitou Jeurs pieds tiennent at- .
tachezaucprps. Leurventreeitiaune: Se qui voudra fçauoir de
• • - quoy ils peuuenrntiire, leur regardekbottche,^: Ton verra deux
petits efguilloas noirs,reflemblans à ceux de la Scolppen4re:dc£
quels ils mordent, Se dont ils feferuent à tenir leurmangeaille.
Ils font les toilles à la manière des Araignées, &viuentdemou- .
ehes & papillons. Ils ponnent enuiron foixate petits œufs, qu'ils^
OBSERVEES PAR J.'BELOK. ?I
couucnt a leur poi&rine , dont les petits font cfclos : lefquclsils.
portent defïbus leur ventre , iufques à ccqu ils foyent grands. Ils
ont le corps velu; : maispource qu'ils ne font pas dvne mcGne
corpulence,iis cauent leur trou félon la capacité de leur corps: 8C
auons obferué qu'ils différent félon leurs diuerfes iiles.Il y a guer-
re mortelle entre ce petit animal, &.vne .manière de moucha
gucfpc que lesl-atins ont nommée Ichneumô; laqucllcparnous ichnewmn,
cftre trouuez à robferuer,defcrirons cy après au fécond iiure , ou
parlerons de l'Ichneumôn d'Egypte.
DW efpece de-Bouc fimUigt fréquent en- Cmeflucles français nom*
ment Bouc efam. Chap. tfii-k.
^ç E s Loups ne viuent pointen Tiflc de Crète : parquoy ll »}*#*
'^ ofeBtfeurement laiflfcr i pus 'leurs animaux aux châps ^.j^*
i paiftredenuicr fans en auoir crainte 5 principale-: £<>uc ^n
; ment leurs Brebis,&; Moutons,nommez Striphoche-
ri. Si les habicans du pays peu uenr prendre ks-faons des Boucs
cftains (dont y a grande quantité) errants par les montaignes , ils
les nourriflent auec lesCheures princes, & ks rendent appnuoi-
fez. Mais les fauuages , dont y a grande quantité-, font à ceux qui
les peuucnt prendre, ou tuer. Leur grandeur n'excède pointla
iufte corpulence d'vnc Cheure ptiuec : maise|lcs ont bienautanc
de chair comme vn grand Cerf , couuertes de mefme poil fauue
Se court, non pas de Cheure. Lesiiiaflcs portenr grande barbe
brune,chofe qui n auient à nul autreàyant lepoilde Cerf , finon
(comme penfons) à Hippellaphus. Ils deuiennent gris en vieillit» -#'#*&•
fant , & portent vne iignç noire deûus l'efch^ne. Nous en auons ■/***•
auul en nos montaignes y U principalement en lieux precipiteux
de difficile accez. Ceftbicn dequoy s'efmcrueiller de voir vn fî
petit corps d'animalporterde fîpefan tes branches de corncs,det
quelles en auons tenu de quatre coudées de long. Elles ontautat cornes de
de rayes par le trauers comme le BouCjOuChcures ont dannees. futrecoul-
Auflien auons trouué deux difFcrences, comme auons fai&ap-^"^ ^Sr
paroiftrcparladiuerfité de leurs cornes appprtees de Cypre &>DJ™ïJmci
Crete,dont auons fait prefentà monfieur le^n Choul, Baiily des *^
montagnes de Lyon. Nous auons quelquesfois prins loiûr de les J
voirpreudre Ôc vanner aux chiens des habitans de Grèce. Il y a
D iiij
pt BEMIiR LIVRE, DES SINGV1A.
despayfans fur.iafommitédes hautes montagnes de Crète, &
boiixireurs dclarc , &principalcmententour la montagne de la
Sphachie&Madara, qu'ils îesnaurentdc leurs flèches de vingt
&: cinq pas de loing:&àce faire mènent des femelles qu'ils .ont,
nourries &: appriuoifees de ieunefTe^lcs lient à quelque pafïâgs.
cnlamontagBe,oulesmaâesron£accouftumé paiTer.. Le tireur,
fetientàcofté, caché derrière quelque buiffon à roppofitedu
vent, fçachantbien quele Bouc eftain eft de.fj grand fensd'odo-
rcr,qu il le fentiroit de cent pas. Le malle trouvant la femelle en-
fon chemin ,s'arrefte, &lorslepayfan luy tiredefon arc. Et fi
d'auenture. le Bouc eftaian'sft guère nauré , ou que le fer ln.y foie
demeuré au corps, il eflmaiftreàfcmcdeciner: car il va trou*
I>i8mnum. uer du Dictannum (qui eft vne herbe attachée aux rochers de
. ' Grete) laquelle il broufte , &. par tel moy ea fe guerift bien toft.
Ccft grand merueillc de l'agilité de cefte,bcfte , qui eft de îà
'" nature. du Gheuteul :_ car tous deux fe tiennent encre les au-
près 'rochers de difficile accez : mais le Bouc eûain faultc <Tva
rocher fur l'autre de plus de fix pas dmterualle , chofe quafi
incroyable a qui ne lauroit.veue : & d'autant que nous fom-
mes trouuez en lieu commode d'en recouurer la naifue pein-
mrci-l'aiions cy.feift.mcttre en ccjicu portraicte au naturel.
pormicî
OBSERVEES PAR. P. BELOS*.
vortrai&dttBovceftam*
35
Tf^vn mouton de Crète nommé \$trep ficheras : auecvn dîjçoftrs qui-en—
fiîgne que cejique Licorne* Chapitre X I . ï 1 1-.
j-L y avne manière de Mourons en Crète, qui font en...
• grands trouppeaux aufll communs que les autres , &c
j principalement au mont Ida., que les paileors-nom-
! ment Striphocheri : qui font en ce diUèmblables aux stnjhù&œil
noitres,qiuls portent les cornescoutes droi&es»Ce mouton n elt.
en rien différent au commun ,. excepté que comme les Béliers
portent les cornes tortues,ceftuy là les porte toutes-droicïes con-
tre mont, comme vne Licorne, qui- font eanneleesen viz. Lors .
qu en veifmes de fi grands trouppeaux, ignorans que les anciens *
cri eu fient faiâ: mention , nous vint en iouuenance de chercher
s^Jseftoyenten rien participons delà Licorne. Ce nom a fait en- 2jCùfn^
u&tcn propos ..de la Licorne, laquelle, voy os eftre maintenit en û
54 PREMIER LIVRE DES ST"NGVLÂ.
haute eftimation Se pris, que ceft bien à s'en efmerueiller:, vea
<mefmement qu elle nefufi: anciennement en aucune réputation
-pour médecine : car il elle y euft efté , iîeft a croire que les au-
theursne s'en fufient voulu taire. Ariftoteabienditquiiyavn
cm-. animal nommé Orix , au genre de pied fourchu , qu'on nomme
Fnicornc. Vnicome : mais il n'a enc parlé de la vertu de fa corne. Columel-
Diumam*^ îeaufïi a bien cogneu Orix , difant qu'on le garde enfermé es pa«
m*u*!°ï*Ai ftiz Se parez murez , auec les autres animaux. Et fi les Romains,
***'* qui eftimoyent tant les chofes rares, eu fient au fil bien ouy parler
.Les somains &c *eu r temps d'vne fi grande -vertu qu'on dit eftre en la Licorne,
ontio-nortU ils ne Feu fient pas iaifie en arrière. Pas ne difons qu'ils ne l'efti-
yertu de U maflent precieufe Se rare , mais non pas pour s'en feruir en mede-
îjcorne. cine,comme nous faifons maintenant. Parquoy voulans en par-
ler clairemenr,ne difiimulas rien de ce qu'il nous en femble,trou-
uons que la Licorne, que les anciens ont cogneue , deuroitefire
noire : Se toutesfeis celle que nous auons, efi: blanche. Quel au-
theurancien, Grec ou Latm,auons nous, qui face foyqu'vnepe-
3enti de rite pièce de chofcincogneueJ& que fçauons eftre fouuent de cléc
jghart. de Rohart,doiue valoir trois cens ducats ? L'on nous a monftré
des morceaux, pour fçauoir fi la cognoifilons, qu'on aueit acce-
ptez pour Licorne au pris , à la valeur de trois-cens ducats,5 -qui
toutesfois eftoient rouelles de dents de Rohart. Vn feul iElian
nous efi: autheur que la Licorne a vertu en médecine , mais il en-
tend ^qu'elle efi: noire.£t voyans que la noftre efi: d'autre couleur,
dirons qu'elle efi: différente à celles des anciens: veu mefinement
qu'il dît que c'efi: vn Afne Indique, qui la porte au front, Se de la-
quelle la couleur du dehors efi: rougeaftre , le defibus efi: blanc, &
le dedans efi: noir, Pline parlant de la Licorne, a tourné les mef-
Tmcùme. mcs paroX]es d' Arirtote. Vmcorne (dit il) .Afinus tantum Indicus/o-
dilus*** ^ iiàAvngulcu Puis après dit : Vnicome bifulcum Orix : tellement qui!
orix'. appert par ces mots qu'il y a deux manières de beftes qui portent
vnc fèule£orne,defquelles l'vne efi: Afinus Indicus , qui n'a pas le
\yt[nefm-- piedfourchu: & l'autre Grix,qui Pa fourchu. Vrayeftqueles A£»
M4ge. nes fautiagcs,qu'on nomme en Latin Onagri,n'ont point decor-
ù1MgP' „ ne. Par ainfi faut entendre que les Licornes font de quelque au-
GrUef4d= tre ^e^c ^ jont n'auons aucune defeription ..Mais entant qu'on
^ " voit les Licornes en diuers endroi&s.on ne les peut nier: car mel-
znrope. msaicnt I on en pourroit trouuer vne vingtaine toutes entière*
OBSERVEES PAR Ei BELCCN. 3? '
«rr noftre Europe , & autant de rompues : &: defqnelies Ton en
mon ftre deux ,au threfor defàind Marc à Venifc , chacune lon-
gue enuiron dvne coudée Se demie, plus grofTes par vn bout que
par l'autre: dont le plus gros bout n'excède point crois pouîces
aflèmblez enfcmble , qui font bien mcrqnez, rcfpondantes à ce
que les autheurs ont eferit de la corne de î'Afnc Indiquerais au
refte les autres enfeignes n'y font pas . ÀufC fçauons.que celles du Licorne de s.
Roy d'Angleterre font cannelées Se tournées en viz, comme aufïi z>™*m°uk
eft celle de fainâ Denis , quleftimons la plus grouequi ait oncq «^^
eftéveue. Ceft la chofe digne déplus grande recommandation
que nulle autre qu'ayons veue , procrée d'aucun animal. Elle
eft naturelle , Se non artificielle: en laquelle on trouue toutes les
merques qui conuiennent à^ne autre corne d'animal :'& pource .
qu'elle a eau itékans, eftàprefuppofer qu'elle ne tombe à l'ani-
mal qui la porte,n5 plus qu'àla Gafelle,Chamois5& Bouc eftain:
au contraire defquels celles des E>àims}Gerfs^ Se.<Z heureux tom-
bent. Il n'y a homme, quelque grandqtf il foit , qui n'ait peine de
toucher iufques à la fummité de îa fufdite Licorne du Roy , qui
eftàfaincfc Denis, tant eft longue: car elle aiept grands pieds de *j>as&-:
hauteur. 11k ne pefè que treize Hures Se quatre onces^touf esfois
à la foupefet-fèmbk en auoir plus dedixhui&. Saiîgure eft droi-
dément comme celle d'vn sierge > large par le bas > Se petit à pc-^
tic vient en agrcilifFant iufques au botît-: aufîi fa groffeur ne peut
eftre empoigneexi vne main . Ay ani^cinq doigts en diamètre : &:
qui l'entourne d vne corde Se la mefore^ y. trouue vne paùkne Se
trois doigts. Elle eft quelque peu raboteuiè deuersla partie de la-'
refte : mais eft quafili(Tee& brunie par les autres endroicts. Ereft-
cannelée de légères cauitez 5 en maniere^deviz , quivne font pas
profondes , commençans depuis la partie de la tefte^ Se finiiTans-
à l'extrémité , faifàns leur tour de dexcre à feoiftre , prenans leur-
tour comme les coquilles des Limats 3 ou bien vn bois extourné
de cheurefueil. Sa couleur n'eft toute blanche : car Finiure du
temps-1'a-qiïeîquepeuobicurcie. Etleeftcreuiêpairle^ros-bDuc
plus d'vn pied en auant, fçanoireften 1 endroit ou eft enchafTè-
t'os par k dedans , qui la tient ferme contre k tefte, Ceft de là.
qu'on peut iuger qu'elle ne tombe point de la tefte de la belle qui
la porte. Voyant donc que c eft vn faix fi pelant fur la telle d'vne
befts. j faut pcnfer.Que l'animal qui la porte ne peut xftïe de
$6 PREMIEB. XI VUS DES SÏKGVLA.
streg/kbe* moindre corfagc qu'vn grand Bœuf. Le Screpfîcheros ( dont a-
m- uons cy deuant parlé , & qui aaufïi les cornes droi&es, cannelées
Se retorfes en viz ) n'excede point la iufte grandeur d'vn Mou-
ton. Cy après eft mis fon vray portrait, non que layons retire
de quelque autkeur: car il nyaperfbnne qui en ait encores rien
dit , outrece que nous en lifons fon nom en Pline : ne baillé au-
tre figu re que cefte cy.
J?ortrd5i de Strepjlcberos^ou Mouton de Crète*
V* vite pierre de Crète ^dont SoîinafaiB mention 5 n&mmee Vatfdm
..'■'. ld<eus. Chapitre xv.
§ ïen auôs vouttt adioufrer>que la pierre que Solin no*
~ meDaâylusIdsus^aiurcsBeîemnites,^ nousfau-
fement Lapis Lyncis, a prins fon nom ài\ mont Ida,
de Crete.dont on là trouua premièrement. Mais ou-
OBSERVEES PAR. 'ï.'ÏE'LO'K. 57
trccc qu'elleefttrouuceenCrete,nousrauonsau{ïïveuc cnvnc
montagne voifïne à Luxam bourg, qu'on nomme le monc fàinâ:
Iarj,celle fois que le Roy François père âcs lettres , feifl fortifier
Jedid mont: car après que les pionniers eurent caué trois pas en
terrera plus grandepartie dece qu'ils bechoicntjeftoit Da&ylus
Idaeus.Lesmarchans la vendent en leurs boutiques,lanommans
Lapis Lyncis. Mais ccflpar vn faux nom , qui conuient àFÀm- */*»ww*»
breiaunc , dont parlerons cy après. ne'
Ve/criptionduplus bautmont de Crète ^ne les Grecs nomment vulgaire'
ment Pfdorit^andennement ldd:& les plantes quiy naijfent.
Cbapttre XV I.
' S t a N s fus le couper du mont Ida , îe defcriuifmes MônsI^
! comme s'enfuit. Le faiftedu mont Ida efl qua fi poin-
) tu comme vnc pome de Pin , fkué fur la fommité des
J autres montagnes. Et combien que toute la maffe de
celle montagne arriue iufques aXvne Se l'autre orée de la mer, èc
cft appellce de ce nom Ida : toutesfois celle qui eft la plus haute
pardeîîus les autres, eft celle qui particulièrement a obtenu ce Mo ^
nom. Il eft bien vray que le monc Madara s eftend en plus grand' M^mf_
largeur & grofTeur que le mont Ida : ce neantmoins il n'efl pas û
haut eleué en l'air. Les Crêtes ont changé le nom àceftemonta- pfihrUL
gne Ida,&: font nommé Pfîloriti.Sur le fofdi&faifle au plus haut
delà montagne , il y a vne petite chapelle : mais ce n'eft quvnc
maifbnnette , qui cft feulement faiCte de pierres maffonnees fans
chaux, l'vnc fur l'autre en manière d'vne voûte, pour fèruirdc
couuerture. Elle efl en lien fi haut que fôuuentcsfois les vents y
foufflent fi fort, qu'ils tranfportent les petites pierres de là. Va
peu plus bas au dcrTous de ladicle chapelle , Ion voit vne planurc
cnuironnée de montagnes de tous collez , en laquelle il vient
grande abondance de paflurages , ou les Moutons & Cheures de
Crète s'engreflent durant leite. Si quelqu vn eflantlà monté fur
ledid faifle de la montagne, regardoit de toutes parts, peu sert
faudroitquilneveifl:lecircuitderi{le,&auiïiles autres iilescir-
conuoifinesdeCtetc^onmieeilMilo^engo^icengOj&Cy-^^
thera, Vautres de l'Archipelago. Uintemperature de Fair efl il CiC£;Lm
grand defTus celle montagne , comme cil autO fur toutes autres cjsberd.
E iij
Srahles.
Cbefnes
l>erds. .
^€rbouJien
^/£ndrach=
nés.
fhilLie*..
Ofi.
Mejftne.
Ganm&.
Cyprès.
Pic&t.
Chxmœlea.
Tbjmalœa.
Cfalergo,
Mdtbio
di&krg({>
$ PREMIEE LIVRE DES STîTGVfcÀ.
dexceflîue hauteur,qu'vn homme aux plus chauds iours camcu*
laires à l'heure de midy , encore que le temps fuft fans vent , n'y.
peut durerfans endurer vn moult grand froid. Aufîi n'y a il au-
cun habitat ny.en hyuer,ny en efté.Ia foit.que les pafteurs y mei-
nent leurs brebispaiilre fur iour, toutesfoisils les semeinent au
foiren la vallée. Regardant celle partie du montqui eft tournée
a l'Orient,lon voit des fpatieufes campagnes qui arrinent à Tes ra-
cines , efquelles il y a de moult plaifantes Se froides fontaines.
Celle partie qui regarde la ville de Candie, eft bien munie de fo-
leftsjefquellc.&les. Erables font fort madrez, Se Chefnes verds en
quantité , & autres nommez Acillacas. La partie qui .regarde le
. midvjn'eft pas ornée. de hautes fprefts,mais trop biéice quelques
arbres qui ailleurs ne font que petis arbriiTeaux : fçauoireftAr-
bouiierSjAnd^âchneSjEleptinijC eft adiré Phillica^nommees en
Latin AlaternijCifti^ autres tels arbres que nous nations point
par deça:& eft l'endroiâ: ou eft faiâ le Ladanum. L'autre partie
qui regarde la Meffarie3c eft à dire la plaine ou eft fituee Gortina,
eft moult fréquentée en Cyprès, en Joignez x que les Latins nom-
ment Piceat,.ÀufE y croisent Charaaelea,^ Thy mçlxa, Se petits
Cedres,qui eCtcelk partie ou eft monftré le faux Labyrinthe.il y
agrandnombrede Boucs fauuages qu'on voit en troupeaux par
lafufdi&e montagne , Se Heures. Nous y auons efté en trois fai-
sons, & par trois dîners chemins : mais onc.nauons feeu trouuer
quelque endroit ou le Rubusldxus na%ui£LXç NeeiorLqui a
fleur blanche, fleurift en Au ril à my chemin de la montagne près -,
dvn village nommé Chamerachi fur le chemin de Candie. Le
-chemin de la montagne de la partie de l'Occident , eft bien fore
difficile à monterxar il eftlbxt en pendât}quafî au ftidroicl: com-
me qui monteroit par vue efehelle. Là y a vn village au pied du
niontjduquej commençante monter5lon compte fept mille iu£-
quesàlafommité, Ilfemble que la partie qui regarde l'Orienr,
ibirplus tempérée que les autres : car tout auto-ur desracines du
mant5 lajterrey eftmoultgraft'e Se humide*; ou il y a au flï moult
grand nombre de villages^&r ou toutes chpfesfcnt fort bien cul-
tiuees, en arbres fruâiers, vignes &oliuiers, Se par les champs
l'on feme toutes efpeces de legumess&: du bled. Toute cefte maf-
fe de quelque grande eftendue queilefoit, eft dominée des feir
gneurs ChaleFges, fçauoir eft du feigneur Anthoine Se Iviathieç .
OB"SEfcVE~ES PAR P. B'ELOtf. s 59
^uxfrercs , qui ont tôufiours obtenu îc premier lieu en dignité
&; noblefTe en toute tifle , depuis mille ans en«ça:de laquelle cho- *
h nous parlerons encor par cy après.
Les noms des arbres & herbes exquifes , qui naijfent fauuages autour du
mont'lâa de Crète :& la manière de cueillir la graine defcarlate.
Chapitre xvn.
àOnnement ne pou uons parler des plantes naiffan-
Z tes au territoire de ce mont Ida , quene mettios cto1****™**
fanant la grandecourtoifie Se bonne nature de ^^'ZonTIelî'
jpîeurs les Gaîergcs,qui en font Seigneurs > Se ont le sphachïe.
^plus grand cvcdït en toute l'ifle de Crète. Car com- Antonio
me le (èigneur Ioan Francefco Baroczodc lavilledeRhetimo, CaUrgo.
nous feit (èurement conduire par (es gensfur le mont de la Spha-
chie&: Madara : tout ainû* moniteur lé Cheualicr Antonio Ca~
krgode Candie gentilhomme Venitiea, nous baiilagensdefk
maifon pour guides , Se donna viures neceflàires pour demeurer
quelques iours iûr ledit monnearcherchâs les plantes nous dor-
mions au foir dedans les mandres , c'eft à dire logettes des pa-
fteuts^ ou ils font leurs fourmages. Le fèpuîchrede Iupiter , tel se^ukhe ai
que les anciensl'ont d'eferit -, e& encoxmôffaré'pourîeiourd'huy, i"?****
qui dure en Ton cntier.Or fau tAl entendre que ladicfce montagne
eft de moult grande eilendue, Se que fes racines touchent à l'vne
Se à l'autre orée de la mer ,& que ùm territoire efl moult large Se
fpacieux. Car mefmement les racines commenccnti>ien près de
la ville de Candie, &:eliïituecaubeau milieu de Tifle ii haulte
efleuee , qu'il y a toujours de la neige fur le fommet , Su au
plus chaud de l'efté il y fait û grand rroit qu'on n'y fçaurolt
durer : combien qu'au bas es vallées il fait affez grand chaud:
efquelles entre autres plantes mémorables , il croift des Szu- Pomme$ ^
gers qui portent des pommes bonnes à manger : defquelles rA^e.
\ç,*> pay&ns rempîiflent leurs fàcs , qu'ils charger à leur col
pour les porter vendre aux villes prochaines. Ils les trouuent
attachées aux fueilles au commencement du mois de May .Elles
font groffes corne vne galle,couuertes de poil par deflliSj &font
douces Se plaifantes à manger. Audit temps de May cueillent
auffi les rieurs des Câpriers efpineux, qu'ils porter fcmblablemét &&&.
au marché/ans élire autrement confitcs3ûnori bonHucs^ quel-
E iiy
40. PREMIER. LIVRE DES SINCVEA.
Mmdrjgù* qjjç pCU fajees> LçS Mandragores mafles& femelles}lesdeux for «~
^ ces de Peonejque le vulgaire des,Grecs nomme Pfiphedile,croif~
Tfoh'edik &nc cn chaque vallée humide , ayans la fleur Hanche. La plante-
Tmriuml nommée Tragium,y eft trou uee le lôg des ruiflèaux auec la fleur
itantoptx* iauîne, & la femence-comme de la Ceciîiane. L'herbe de Léon-
Ion.- tope*alon ayant moult gro fies racines, y floriren hyuer comme
MeUlot. ia Mandragore. Le vray Melilot odorant croift par les collines
*^7eft^mf' herbeufes quafi fcmblable à l'Arreflebeuf, qu'on die Ononis. La.
°M^^'htm M'ârïolaine > tellequenous I'auons en nos iardins , y eft trouuce
' naiftre de Ton bon gré, flori fiant de rouge àla fui de Iuin, laquel-
Mdtherlna. *e *cs payfàns nommétMatherina. Il n'y a rien plus çomun qu'eft:
Treffle. le Treffle > furnommé Menianthes. L'herbe de Heîiochryfbn y
BdÏQchry= . fiorift à la fin.de Iuin > fi abondantc.defTus les montaignes , qu'il
Jf^, . n'y a guère autre chofe en celle part ou elle naift : laquelle pour
Ugochimif cf|revn douxxepaireaux heures , tout le peuple du pays lafçaik
Jl ' l - nommer Lagoehimithia.Par Hehochry fon, pas n entendos no-
trma. "?c ^"^chas citnna:çar comme Hjterony mo Hungaro Medeaa,
iXgeratojÇ nous en monftra en Crete^efteelle quia nom Agerato» Xe Ne-
Nerïon bUc. rion qui porte la fleur blâchc,ne{e trou ue en Cretc3 ûnon es val-
Erabfe. ^ ]Ces dumot lèpres du- village nommé Camerachi . .Les Erables
^£s*^ croifiàns par les froides motagnes , que les payfans nommée Af-
n0J- 1 h pk^^nos^ont le kois plus madréau mont Ida^u 'en nulles au-
A kc ^ tïCS P^ccs. Les arbuftesde Andrachneyont retenu cemefme
nom^ auflî Acylaca,&: Philyca , qui font moult grands arbres .
ogres, portans du gland. Quant au Gy près , ils ne viennent pas en pays
deforefts, comme piufieurs ont eftimé; car ils croifient vn çà ,
l'autre là5en diuerfes contrées des montagnes , foit qu'ils n'y ayet
point efté fèmez ; toutesfois ils cherchent la partie méridionale,
êc (ont de telle nature , quencares qu'on, les ait couppezparie
piedje tronc toutesfois ne laiflepas à teiecter plufieurs rameaux.
Les Cyprès en ce lieu lànes'eleueht pas en hauteur , mais trop ,
bien s'amufènt àçroiftre en efpeflèur. Auffi voie on des caflès de,
Gypres moult, larges y fïi&es en la ville de Candie. Ils croifient ,
aufîl bié es moatagnes-iiommees Leuci5autremeiit la Sphachiea
lem mote$ -commc ils font au mot Ida^ommé Pfiioritû L'herbe de Traga-
wnhj cznt\ÏSL y croift en moult grande quatité.mais fèulemétau coup-
ai? Pjtimtt, , J , ,& t, * ■ % . r /,',*■
Tmmatha^ct ^es montagnes : de laquelle nous en auons oblcrue de deux..
■• ' manières. Nous maintenôsque l'on n'y arrjafîè point ià gumme,
'CQUibien-,
OBSERVEES PAR V. BELOK.- 41
combien que quelques vns l'ayent inconsidérément mis par c{-J>eHX1*t't0
cïitiSc Ci nous voulions mettre en dcuoir de leprouuer ne vool- TeT^er*'
dirions que l'authorité du principal feigneur de f ifle, moniteur îe J^^ rA&**
Cheualier Antonio CalergOjdetiant lequel il nous foùuiétauoir ^ntmio~
mis cefte proportion en suant. L'herbe de StaphifagreyerQiftcJ^'o.
fauuao-e quaii en tous lieux.. Llierbe nommée Coris y efr moult sufûlfxgn.
frequéte, laquelle entre toutes autres a la racinedu plus mauuais Cork.
gouft à noftre gré3 d'autant que la gouftans elle nous ait prouoe-
qué à vomir : chofe que nulle autre ne flftonc. L arbufle d' Ana- _. —""
gy ris croift quaii fur tous lesgrands chemins , û puant qu'il £ziz A&nf~
mal à la teite,&; y re&ient encor fon nom ancien. Le vulgaire 1 ap- Tithymdm
pelle Anagyros. Il eft de fi mauuais gouft , queles Ghetires aifa- arlorefcens.,
mecs ne le veulent brouter.. Nous y auons veu le Tithy maie ar- Pendroidss,
borc(cent,furnommé Dendroides^à la hauteur de* deux homes, FeruU.
ayant le tronc de la grofTeur de la cuiûk. L'herbe-de Thapiîa, Fe- T^tfiA-_
rula^ibanotis^ Sefeli5y font moult fréquentes JI y-croiftaum ^er™tîS~
vn petit arbrirTeau, que le vulgaire nomme Àgriomeiea, pource ^l0me4t
qu'il porte des petites pommettes rcfTcmblantes aux poires.C'eft j^
vn arbrifîèau qu'on netrouue en aucun lieu en France}iinon de£
ius les. rochers de Fontainebleau vou il croift mouft volontiers.
iTarbriffeau qnils nommenterrSauo^e vn Malàucier^efk nom- Mdwciev^
me en Crète Codomalo. Ayans expreffement cherché l'Helle- Beutàor^
bore noir en l'iilc de Cretem'en auons onc iccu trouuèr, &: fem-
mes d'opinion qu'il n'y en naiffe point5non plus du blanc que du
noir. Mais bien s'y trouue vne quatdefme ef pece d' Anilolochia5 ^tnjtdù*
différente aux trois autres ^qui ont efté defentes par les anciens, chu.
& qui monte deffus les arbres èc les afioilièàlamanierede l'E-Epbedr*...
phedra Se du Smiiax:mais au refte conuient en kieilles, ficurs3fe- sJ^itUXr.m
mcnce5racisBes,gouft,&: odeurauecClematkis LeEeuenudela ^■m^I*>i*-
graine d'efcarlace nommée Goecus baphica, eil moult grand en {^^
Grete:&: pource que la cueillir eft ouuragç depafteurs è£ petites clrxirj>,
marmailles, les plus-grands nes'yveulentamufer. On la trouue i^èxruïe: -
au mois de ïuin demis vn petit ar-briilèau efpece de chefne verd lAmmuwr-
qui porte du gîand5auqùcl temps elleeft de blanc en couleur ce- & cuttlUr l&
dree^ioinde fans queue,& attachée au troc de fondit arbrifTeau. ?™mf **
Et pource que fes fueilles font poignantes comme la faeille de ejcxr*l'~ •_
Houx , les bergers ont vne petite fourchette en la main gauche
{^Xjclmcrjcsrari^^ iadexxre,
' - " E.,
ij.2, PUE MI ES. LIVRE DES SINGVLA.
dont ils coupent les petites branches, dcfquellesilsoftentîeftli*
des petites vefeies ou excrefcence,qu'auonscydeuant appelle
graine d cfcarlate. Et font lcfdides vefeies rondes de la groffeur
•dVn petit pois , percées d'iceluy cofté qui touchoitau bois. Or
font elles pleines de petits animaux rouges viuans , qui ne font fi
gros que Cirons , ou Lendes 3lcfquels forcent hors', &lauTentla
coque vuide. Et eft la couftume que les petis garfons qui les ont
«cueillisses portent chez vn receueur qui les acheté tous à la me-
sure. Il les crible & fepare de leurs coques , dont il fait de petites
pelotes de la grofleurd'vn œuf, les maniant doucement du bout
écs doigts : car s'il les eftraignoit fort , ils fe refouldroyent en jus,
dont la couleur feroit inutile. Parainfî il y a deux fortes de ladi-
te teinture, fçauoir eft de coques, & de la pouîpe:& pource que
îadi&e poulpe vaut mieux à teindre , aiulî coufte elle quatre fois
plus que la coque. Outre les deux fufdidcs, il s'en trouue encor
vne autre forte, dont nul ancien ne moderne a fait mention:elie
n'aift de/Tus les Myrtes àia mcfme façon que la fufdide , ôc eft vn
cxcrefcence qui a aafïî vn fèul animal viuant dedans fa coque.
: Brief récit, de plufieurs autres plantez fiuuages^de lafifdi&e ijle.
Chapitre xvni.
2>iiï2»um ÏËim3$!^ Ntre autres plantes de Crete,lc Didannum eft in-
| iîgne,qui à peine peut croiftre fur terre : aufli vient
î il toujours es entre-deux & fentes des rochers , 6c
jhon autre part, & n'eft trouue ailleurs qu'en Cre-
$fiidù&&*= ^^^^O teimais le Pfcudodidannu m fe trouue bien naif-
mHm' fane ailleurs. Il eft vulgairement nommé Cromido filo. Les le-
trons y font nommez Zucho, Se l'Aulne Schlitro. Les Laidues
viorne. Marôulla:le Cheurefuei Agioclima.La Viorne Clemaczida. La
cichor'ee. Cichoree Pycra, & l'Ortie Zuchnida : & l'arbre de Lotus Caca-
utm. uia.Les luiubiers Zinziphia. La férule Artica. Le Polift Denai-
Grigmum. da.Trois efpeces différentes d'Origanum, floriflent au commen-
ce*. cement de Iuin : mais particulièrement Onitis veut naiftre entre
\t<> rochers es collines de la partie la plus feche que regarde le mi-
BerAclcoti* ày:Sc le Heracleoticum au contraire eherche les lieux humides:
€mh ' & ceiuy qui tient le nom de Sylueftre , ne tient ne de l'vn ne de
" " lautreiçar il croift plus volontiers le log des hayes es paftis,qu es
O 3" S E R iT E E S P A R P, BEtON.' 43 ;
îieux defcouuerts. Il y a vn Chardon moult fréquent en Crète,
lequel tous {çauent nommer en Grec vulgaire Afcolimbros.Les ty0™"*****-
Latins aufïi anciennement le nommèrent de nom Grec Glyeiri- ^ . ^
zon,difrerét toutesfois à la Regueîifïè. Il croift fàuuagc par tout, j>e^M^*.
ayant la fleur iaulne,& eft îacticineux. Lon en mange les racines ' ,
& fuerlles auant qu'il ait fait la tige.Nous cftans à Rauéne,l'auôs*
veu vendre au rnarchéauee les autres herbes , 8c à Anconne ,ou
les femmes qui les arrachoyent de terre , les nommoy ent Riuci. ^^
Auffi l'auons veu cueillir au territoire de Rome , auquel lieu les
habitans le nomment Spinaborda. Ceft ceîuy dont les moder- jp^enfa
nés autheu rs Grecs parlen tje nommant Afcolimbrous.Plme en
jplufîeurs lieux , & au vingt &: vniefme liure , chapitre fèizieftnc
parlant des Chardons , faifant différence des ÀrtichauldsàSco- ArtlcLadé^
limas , femble qu'il veut entendre que l'Artichauld foit comme
Carduus:& puis il dir: Scoïïmus quoyueflôret feroi& ebv.Vuisapvcs Sco^msta^^
il adioufte:S«?Z«»#s cwdmrum generis ab-îis difiat^ qubd t&âix, dus uefr
cend&efkdcco&d* Galicn mefme n'a il pas parlé du Scoîimus &de
Cinara en vn mefme chapitre? Parquoy nous pouuons accorder
à ceux qui veulent que l'Artichauld fauuagcdoiueeftre nommé
Carduus JU le cultiué Scoîimus y veaque le fauuage demeure
toufiours efpineux. Le Chardon que les Grecs nommerentan-
ciennement Aeanos , a maintenant emprunté vn nom ruftique ^tanos.-
defcendudu Acanou,en À conachiat lequel nomluyeft vraye- Achûnxc^a;
ment bien deu:car luy eftant fur tous autres efpineux, fait que les
plantes poignantes ayent non Acanaces. La Thymeîée , relie ^mA^*'
que la deferiuit Diofcorids:, eu: trouuee naiftre en Crète , diflbe- Jfme -
rente à celle que les Aîemas nous font voir en peinture. La plan-
te nommée Gladiolus ou Xiphius, croift parles guerets , & for- dadidaf,.
tant de terre au printemps , ne prodûift que vnc fueille hors peu xifblus.
làrgette,& longue de huit doigts^qui fe termine en appointant, Tiiymdhts.
traflee de fepr.nefs ; du feing de laquelle en fort vne autre moin- Myrf™lt&-
dre que la fufdi&e,& confequemment la tierce^en après le cauîe T*™£?^- -
£b monftre chargé de fleurs , difppfèes par ordre de la plus belle.^
couleur d efcarîate v&. fi finement viue ^qu'elle n a comparaifon
ertrougeur :..& s'on la tire auecfaracme hors de terre , on la peut ;.
darder comme vn trait : attendu que fa racine eft groflè ÔC ronde .
comme la tefte dvn matras , & que Ces fueilles feruent dampen-
**ojns*quifontfeuiei^^ —
F. y.
44 PREMIER LIVRE DE-S SINGVLA.
Tehkk bedeTithymalus Mirfynites croifttantàla montagne qu au tK
T&âmtbes. uagC en Crccc:comme aufti fait Paralios. L'herbe de Securidaca
Z*!!?erSr eft vulgaire par leschamps,laquelle ils nomment Pelekk Les ar~
jjt^iûml' kres de Tercbinthes, Lauriers, Atboufiers , & Lentifques', & les
Cèdres. petisCedres y retiennent leurs noms anciés. Comme auffi i' Af-
^xUtho> palathos,&: vnautremoult îuy refemblanr, qu'ils noment Achi-
GMphSon. nopoda. Les riuagesde lamerblanchhTent de l'herbe de Gna-
Bulhus &*«-,phaUpn: sar ecluy que les herboriftes ont peine, eft baftard. Ef-
■r~ -quels nuages lesracines que Thcophrafte nomme Bulboslitto-
cfo * Tdit* ra^es^ & ^onC nos dtoguiftes ^François vendent les racines pour
m Squilles ou Scilles,yçroiirentabondamment,Les Choux rauua-
chwefice. ges naùTent par les rochers du port de laSude. Le Chamxfyce Se
soldanelU. la Solda nelle croifTcnt-volontiers es fablôs des riuages. Le Dra-
Dracïkulm. cunculus ayant îafueiMe de Lierre , fe trouue feulement es lieux
Mdtnms. jlumi<Jes de la Sphachie, Mais l'autre que nous cognoiiïbns,
Atwtt "croift m&#crcmmcnt enplufieurs lieux de l'ifle. L arbriflèau de
rnus et- |^ajjmus y a nom p0ur je jour^huy Halimatia , fi fréquent par
jjia toute Tifle, que grande partie des hayes en font fai&es: _& a les ci-
lomhxrhe. mes bonnes à manger, L'arbriflêau que nous nommons Agnus
rfymhra. ,caûus,3£ anciennement Agnos , y a nom Liia. L'herbe de ïom-
•Trik -barbe y croift en arbrifleau. Le vray Thym y eft iï frequet 5 qu'ils
Sf^fa le brtiflent au lieu debois. L'herbe de Thymbra , que les Grecs
de nom vulgaire nomment Tbibi , c'eftà dire Sariette fauuage,
tuge.
Efttbimum CÏO&cs ^ux maigres ôc fteriks, & principalement au territoire
™ " de Rcthimo:fur lefquelles deux herbes, & principalement fur le
TrMus. Thym, croift l'Epithymum. L'herbe de Tribulus terreftre fait
^StrimU. fouucnt grand dommage-aux terres , Se principalement aux Lé-
gumes , laquelle ils nomment vulgairement Atriuolo. ïcy faut
^ue dirons que ceux qui expofent Fercriture faincte , ou il eft cf-
jCtit>deTribulif ficus, difàns que Tribulus eft vn Chardo,font abu-
fez : car Tribulus eft vne herbe dont Ion n'a point es contrées de
Bekotr&pi». France^u moins du tcrreftre:car l'aquatique eft ce que nous nô-
uèUocortx. mons macîes ou Chaftaignez d'eau. L'herbe de Heliotropium
^itréHlis. y eft nornee Beliocorta: Atta&ilis Arda&ila:Orobanche,Lycos.
^€fjaBtU. jl$nont point d'Hyiïbpeen toute l'ifle, nô plus fauuage que do-
orobanebe. mcftiqUe:majs en4nheu jes Apoticaires vient d'vne mefchâte
%fope. petite herbe adultérine. Le Stœcas y croift fauuage en pîuûeurs
stœcL ' endrois.Entre autres choies exquifes touchât les plates , pouuos
1DBSERVEFS TAU î. "BETOS. 4f
-àtrc auoir vea quelque chofe fingulicre au iardin des frères Mi- scmmanee.
neurs en îa ville de C£die3cômeeft Scamonee,S^Apios: îefquels ^^
toutcsfois croifTent fauuage par les montagnes, comme auflî fait 9**^
Tarbre de Styrax. La plate de Ricinus,pource qu elle ne fe meure
point Fàyoer , & dure plufieurs années , deuient en arbre fi haut,
qu'il faut vne efchelle à monter deffus. Le Coton & la Sezame y Coton.
font de grand reuenu : on les fcme en terre au mois d'Aiml. L'on sésame.
y fait du Catran , & de îa poix , & principalement fur les monta-
. o-nes de Leuci , autrement nommez de la Sphachie , ou il croift
grand nombre de Pins fauuagcSjautrement nommez Picese. L'v-
ne des choies de Crète qu'auons crouué plus mémorable > eft vne
plaine nommée Sethie , & Lafti de moult grande eftendue fur la
furnmitédes hautes montagnes , quelque peu au defibs de Vou-
lifmcni,en terre ferme au milieu de Fifle>tirant vers la ville de Se-
thie. La terre en eft labourable, ou il croift grande quantité de™^
bleds^ de légumes y & de Orobus, qui eft vne manière de legu- Qj^
me dont nous vfons , qu encor n'a trouué aucun nom François.
Ce qui faitq ladiceplaine foitfi fertile , eft .-l'eau des ruuTeaux,qui
defeendent des collines^dontelle eft enuironnee de routes parts.
Il naift des petites poires fauuagcs en Crète , différentes aux no- Poires fi^
ftres, qu'ils nomment Achladas» Les pokes fauuages y ont nom m£h,
Agufaga. A peine pourroit on voircellemanicre d'Afparges en ^
Crète , tel le que nous cultiuons en noz iardins : car ils n'ont que Corrui^
la fàuuage nommée Corroda,qui y croift en tous lieux. Mais ou-
tre cefte la , ils en ont encor vne autre efpece qui de nom propre
vulgaire •& ancien eft appellee Poîytricha. L'inconftante Heur ïolytrich*.
d'Anémone y eft transfigurée en plus de dix couleurs. Les Cigal- ^™™»e*
lesy font nommées Symphogna: quieftauffienleurvfagelenô
d'vne vieille : & l'herbe de Confonde maieu r , Stecouli. Au dcC- steCÙ
fus du Chafteau de Chifamoj en celle part de îa montagne ou eft
fituc vn*monafterc de Caloieres nommé fainâ: Iean de Preder-
mos , croift vne efpece d'Àrtichauld fàuuagejque les pafteurs no-
» tuent Agriocinara, duquel la racine eft a v.ne coudée de long^ ^rtkhmi
groiTe comme la iambe, noire dehors & dedans, faite en £otmçfe**g*
; de poire , laquelle maintenons çftre celle que les droguiftes ven- ^Srl0^méfm
dentpourCoftus Indicus. Nous entendons celle racine noire rx
qu'ils nomment Coftus : & croyons quelle eftoit des le temps
ancien en vlàge. Elle porte des teftes comme rÀrtichauld, que
F iij
4^ PREMIER LIVRE ]>ES SINGVIA.
f^f*™ espafteursappetcntpourles manger crues. Sa fleur eft commua
cUmtUw n^menc Wançhe : combien qu'il y en ait de purpuree , & de bon-
mm nc 0<kur- Sesraçines font pareilles à celles du Chamelseon blac,
&fesfucillesauCham#leonnoir. Elleeft difïemblabîe aux au-
tres Artichaulds fauuages qui croiffent en plufieurs lieux d'Italie.
Pourneanr aeftéf eint par aucuns le Chamelseon noir & blanc
entre noj autres herbes; car ne l'vne ne 1 autre naiflent aucune-
ment ny en Alcmaigne , ny en France , ny aufllen Italie , dont
ÇxrUne. voyons <lue *es trois/ufdi&es nations (faufleur honneur ) en ont:
eftéabufees : Car nelarCarlinc,ny autres telschardons, ne font
Chamelsçon nok ne blanc. Du noir en parlerons ailleurs. Le
blanc faid vne racine groffè comme la cuiflc,& longue d'vn bon
pied, & quelquesfois d'vnc coudée , ft fort odorante que l'ayan t
en vne çhâbre/ait tout fentirla poudre de violette/i fort qu'elle
çhïmdœon entefte. Les pafteurs de Crète , Se petits garçons^des villages , Se
^^ n principalement de Rethimo,en cueillent la gumme,dôt les fem-
mes vient à mafehe^comme à .Çhio de maftic3&: à Lemnos de k
\yùanthm. gummedeChoudrilla. Ils nomment.ic Chamelseon blanc Co-
^Cçxnthm la,on Chamelasons. L'herbe d'Àcâthus mol y croift en plufîeurs
fmmgc lieux humides: maisl'A.canthus efpineux eft fauuage croiftànr
ononis. par ies champs & par les fentiers. L/.vfage de co'nEre les tendrôs
zpngtum, j»Ononis n'eft pas aboly en Crète 5 ne de manger les cvmes de
mmn. JEryngmm,: mais il faut entendre.que tel Eryngium y eft marin,.
nauTànt au riuage de la mer3 différent à celuy qui naift.au lieu me*
diterranee. En fommes l'ifle de Çrete produit beaucoup 4c plan-
tes^ autres ïïngularite^ qu'on ne trouue point ailleurs. Aufti a
. elle eu de tout temps l'honneur de porter des plantes genereufes* .
Macrobe au cinquiefme chapitre du fèptiefme liure des Saturna-
ânyd point *Cs^e ^moigne eQ ccù&-Coite. SfdnecmQnJiyofis carnibusabjUnetis^
àg serpens ùfeircnt&poteulis tefikubs Caftorttm , £?* venenata corpora Viperarumi:
Venimeux qmbus admifcet'îsquicqmimtrit InS^qmcqmddçuehïtHrherbAmm^ qui*
mCrete. bksCretagenerofeeft^ Quant aux ferpens \ nous en auons obferué.
opbis. en Crète feulement trois différences y dont les payfans en nonK
oebendra^ mentiVneOpbis^&râutreOchendraJ'autreTéphloth Etvou-
Tfphlotu jons ^jçn conformer ce qui a eftéanciennement dit > qu'il n y ait
point befte venimeufe en Crète. Car mefmement en pourcha£-.
fandVndesicrpens, qu auons dit eftre nommé de nom propre -
Qpbiss Qoftrc guideea leuant vne pierre ou il s'eftoitçaçhi dçf*-.
OBSERVEES PAS. P. BEION, 47
Ibtis , fut mordu defTus la main iufques au fâng , & toutesfois ii
ïi'eut autre manque l'eigratigncure.
Ve la maludifie de Candiejiommee Priamnium vinum: & qu'elle ri eft
faiâfa ailleurs. Chapitre x 1 x.
• E vin que nous appelions Maluaifie,eft feulement fait Mduaife.
en Crète : Ô£ ofons affeurer que celuy qui eft tranfpor-
j te le plus ioing , comme en Allemagne , France , An-
! gleterre, aefté premièrement cuid: Car les nauires
qui abordent en Crète pour tranfporter la Maluaiûc en eftrange
pays, fè veulent expreûement charger de celle de Rethymo, fça-
chans bien qu elle fè garde moult long temps en fa bonté , &: que
d'autant qu elle eft plus trauaiileejClle eft d autant plus excellete.
Or en la ville de Rethymo anciennement nommée Rhythymna,
y a de grandes chaudières le long de la marine au riuage , qui fer-
ment au temps des vendanges à faire bouilir leurs vins.Pas ne âi-
fons toutesfbis que toutes Maluaifîes foyent boullies : Car celles
du territoire de la Canec,& delà ville nommée Candie, qui font
feulement tranfportces en Italie,defqueiles on n'a pas peur qu el-
les s'aigrifTent , ne font pas boullies. Mais rafraifchifTans leurs
vins par chacun an,amendent les vieux auec le nouucau , Se ren-
forcent le nouucau auec le vieil.Les vins de Crète anciennemét, ™mnmm
comme, ençor maintenant, eftoyent doux. LaMaîuaifie aefté Creîlc^m
appeîlce par nom propre Pramnium vinum, comme il appert -^mm».
par les mots de Diofcoridc,qui dit en cefte manière : Cretkum co- Trotofon.
gnoimneautPrdmràum ,autProtof>on. Ioint qu'Homère a exprefTe- Mufeatd
ment & grandement loué le vin de Crere,par luy nommé Pram- ^dtl£m
nium. L'ifle de Crète donne au fli d'excellent Mufcatel,duqueî y j^ .!f
enadehatifauant îafaito£t, &: d'autre qu'on fait envendenges: tar
lefquelsnc paffent gucresle deftroitde Gilbatar. Et eft à noter Mdmifie
qu'il y a aum" de Mufcatel & delaMaluaifîe de deux fortes , fça- douce.
uoir eft de douce , & d'autre qui n eft point douce,que les Itahés Maluaijte
appellent garbe,ceft à dire ce que les François nomment verd ou^^.
rude en vin : laquelle ne nous eft point apportée par deçà, pource
qu eUen'eft cui&e comme la douce^ ne fe garde â long temps»
. .- F iiij
tomo Bar a *
mms des
Qretes.
Tyrrhica
filtatw.
Dardes
Crêtes.
4& PREM-IER LIVRE DES SltfGVLA..
V e F ancienne manière de danjsr auec les armes^npmmee Py rrhica ■
fattatio.. Chapitre xx.
S t a n s en vn village champeftte, au logis du fei-
gncur Ipan Antonio Barochzo,a(ïez près de la vil-
i le de la Sphachle-, vifmes les pay fans des villages,
d'alentour affemblez à vne fèftejes vns auec leurs
^ ,amoureufes,& les autres auec leurs femmes, telle-
ment qu'il y auoit mouk grande compagnie. .. Et après auoir bien
beu, ils ; {émirent à danfèr au plus grand chaud du iour, non pas
en l'ombre, mais au foleil, encor que ce fuit le plus ardent iour de
toutlemoys deluillet. Et combien que lefdits payfans fufTenc
chargez dermes, toutesfois ne cefTerent de danfer iufques à la
nuid. Ces payfans font quaûtoufiours en chemifeblâchejCein*
de d'vne large coroye y ayant vne large boucle, & ont des brayes .
de toile,mais la chemife neft pas enciofc dedas. Au lieu de chauf-
fes & fduliers, ils portent des bottes-, qui leur .montent iuiques à
la ceinture,, à laquelle font attachées : leuï-chemhe pend par de-
uant & par derriere.Aïn{Iaecouftrez,& chargez d'vne trouffc,ou
il y a cent cinquante flèches ou enuiron^ien ordonnées, laquel-
le ils porrent derrière le dos , & d'vn arc bendé pendant au bras,
Qucnefcharpe, ôcâ'vnc rapière au cofté : ils s'efforcenuie faire
leurs plus beaux iàuts .-& ne penferoyent auok bonne grâce, s'ils
nauoyent! toutxela fur eux.. Ceftedanfe en armes des .Crêtes,
fèmble fe refentir de la danfe des anciens Curetés , nommée par
les Latins Eyrtkicafakaùo. Les Grecs ainfi danfans ont en vfage
trois mefures : rvnefaitlepas,fautansdeuant eux d'vn pied fur
l'autre, comme font les. Allemans: T^tre citquau" comme les
branfles qu'on daafe es villages de France : la tierce eft eftrange:
car ils remuent ores Fvn des pieds en auant ôc en arrière, ores
l'autre comme le premier: &fereipondentïesvns aux-autres en
chantante danfànt à leuïs chaulons ^tantoft enfond , l'autre
fois en long , Se quelquesfois deux ideux* &: fautent à puirîance.
Il ne fat on c que les Grecs n'ayent eu ceu&ume de chanter en
déniant ; car Ariftoxe le tefmoigne au premier chapitre du ieptié*
me liure^ou il dit en cefte manière. Vox ïvsy qui rem veneream inci-
pjmtAgerCi mutawnfômmaJfierÎQï^iw^ inàpit. ~éb~
" ■ "■ Jtinennhtë::-
aBSERVEES PAR T. BEEaH. 45^
Jimentibm verb , À contrario fit 3 &fi curam adhiheant : quoâ aliquifa-
ëuntex ijs quichorekindulgentv Les femmes ont couftume que leur
couurechefeft feulement ietté dcfïuslatefre, comme vn voile,
fans cftre attache: &. leurs ;pof&rines $c efpaules font toufiour&
defcouuertes : car elles n'ont aucun v&ge de colerettes : parquoy
elles font toutes noires &halleesiu Soleiî3& ne portent point de
bas dechauueSjCe que voulons eftrc entendu des villageoifes,le£.
quelles Ton voit bien en public : mais les Grecques des villes font
toufîours enfermées , & ne vont guère que lanuict , non plus à-
l'Egliic qu a fè vifîtes fvnc 1 autre. Et pource que noftre pro,
pos nous tire à autre matière, nous déporterons d*efcrire plus
amplement des chofes de Crète , d'autant que la navigation
eft iî prochaine qu'on voit iournellement gens qui y vont &:
en reuiennenx : Ôc commencerons ^parler des ehofèV de Tur-
quie.
Que tout homme* ayant commandement m paffepm£<un Bâcha ^ou-
du Turc s eflant habillé à la mode des Turcs , menant vn guide auecfqy,pour -
jèruiri interprète ou tmeheman^ peut cheminer fmrement partout le pays,
des Turcs. Chapitre xxi.
O m b 1 en que les Turcs s'àrtèrnblent ordinaire- Carxuatmes<
ment en grandes trouppes , quils nommentCa-
rauannes , pour aller plus feurement par pays , û
eft-ce qu'vn homme eîtant habillé à leur mode,
1, ayant vn iaufeonduit delà porte, ceft à .dire vn
paffeport de la court du grand fèigneur , Scvn droguement pour
kiy fecuir de guide, pourraaller par tousles pays ou bon luy~fem~-
blera, hors mis par les défères & dangereux gaf&ges de frontière,
©r fi quelque autre meu de mefmc defir vouloir efTayerlefera-
hlable de ce qu auons tait , il n'a femblé hors de propos d'en met-
tre vn petit mot par eferit. Ceft* quandarriuafmes LConftanri-
Bople la première fois^pour ne confumer vn loifir en pareffe, J^'.
nous pauîons tous les iours le canal 4u portquifepare Peredè £*m»^
^onitantmople, afin que voyans par lesboutiques les cho£es?*rlepysdè
que les Turcs ontaccouftumé vendre , euffionsTintelligeoce de Turque*.
eequrlsont, donttfauons point l'vfage. Etpource faire com-
modément , apiçsauoir a»uucyu%aaric Turc, doâsenÀra-
a.
5° PÎLE-MIER LIVRE DES ^T^GVlA,
be,conuinfmes de prix auccîuy , pour efcrire vne table de toutes
les efpcces des marchandifes , drogueries , & autres matières
qu'on vend par les boutiques de Turquie , laquelle contenoit la
■table d'Auicenne , eferite en langage Arabe , contenant enfom-
-mc touteschofes qui leur font apportées d'efttange pays.Et pour
en parler fommaircment, ce fut i'vne des chofes qui nous aie
mieux inftruit&: aidé àfçauoir ce que voulions apprendre. Car
quand ladite table fut paracheuce , le Turc nous lifoit toutes les
parolles Fvne apresl'autre. Et ainfi qu'il les lifoit , efcciuions de
noftre lettre le sienne mot qu'il auokefcrit en fon vulgaire, tel
qu'il Fanait proféré en Arabe. En après nous failions monftrer
la chofe qu'il auoit nommée, à fin que layans veue , cfcriuif-
fionsen noftre langage audeflous de fon eferiturc la chofe qu'a-
uioas cogneue , voulans par ce moyen la pouuoir demander ail-
leurs quand en au rions affaire :& quelque part que nous foyons
trouuezpar le pays de Turquie, nousenfommes grandement
&ruiz entre les Turcs. Car eftans appeliez pour donner aide à
•quelque maladies , quand voulions auoir quelque chofe d' vne
boutique de drogueur ( car il n'y a aucuns Apoticaires) fi ne la
|jouuions bien proférer en leur langage , nous en montrions
. ~ . . lefcrk , à fin que le marchand qui la vendoit , la peuft mieux en-
tendre. Cclaa cftê vn vray moyen de nous faire voir les fimples
qui.ontcefTéd'eftreen cours de marchandife, & defqucls noz
«jarchands qui trafiquent en Turquie, n'ont accouftumé nous
entioyer. Et donnons [ceft honneuriau trahie de marchandi-
se*^ faïe ? que luy deuons référer tout ce que nous auons de fingu-
xours de mur lier des ioingtaines parties du monde. Et qu'il ne foit vray,
ichxndlfe. aurions nous des efpiceries, dekCanelle, Girofrle , Mufca-
CtneBe. £cs ^ povure 5 & autres telles çhofes femblables , fans elle »
Cir°F'd\- Q& cft cau^e ^uc Plufieurs drogues Singulières , Se chofes ex-
^oywe S ceiientes qui eftoyent anciennement tant cogneues , foyent
^momum. maintenant incogncues,finon qu'elles onteeue d'eftre en cours
rmUnthi' demarchandife ? La terre a elle ce$é de produire FAraomum,
a*. Terebinthine , Calamus odoratus , Ammi, Coiius, Acacia , &:
cdâmm autres chofes fembîables,qui eiloyent anciennement en fi grand
odorat,*. v^c ? jj çc £au£ âflfeurer qUc non , & aduouer qu'elles demeurent
/Cmnu en chemin , par faute qu'elles nç trouucht qui les face pafler deçà
lamcr. Maiseftans en leuant en auoas fait recognoiftre grand
Coft'M.
acacia.
OBSERVEES PAR P. BETON. fï
nombre aux marchands , qui pour eftreà eux incogneucs, re-
layent là; mais maintenant commencent à cftre communes en
vente, tant à Venife, qu'en plusieurs autres iieux : Se principale-
ment le vray Nitre , Cardamomum maicur , la vraye Terebin-
thine,& autres chofes femblables, dont parlerons plus àplain Nitre.
au commentaire fur Diofcoride. Et nous aiTeuronsque fi nous Cardamome
vouhonsmettse en denoir de prouuer,que premièrement ayons rmew.
rapporté grand nombre de telles drogues que nous n auos point, Terebintkl~-
Se que nous n!eufîions peu reGouurer pour or ne argent,pas nati* **'
rions faute de tefmoings fuffifans.
Que lesTun évertuent. vne me fmeâiciion ou vocable de
leur. {lettres. en plm de 'vingt Çones*
Ctiap^ xxî;i;-
E s anciens ont. eu vnc manière de terre en rrroufe
grande recommen dation en plufieurs médecines,
: Se encor pourJ'eiourd'huy eft en auffi grand vfzgc
; qu elle fut onc. Les Latins la nomment Terra .
' Lemnia , ou terra figillata , Se les François terre ^u ^£L
fcîlee. Cefte terre eft fi fîngnlierc , que les ÀmbafTadeurs qui re-
tournent de Turquie , en apportent ordinairement pour en
faire prefent aux grands fèigneurs. Car? entre autre chofeseî-
}e eft propre contre lapefte, Se toutes defluxions. L on en vend
bien chez les drogueurs , qui obtient le nom de terre fel\ce>K
mais eft. pour la plus part fophiftiquee : aulfi. ne s en trouueen
tout le mondé, fïnon en Fifle.de Lemnos. Et pource qu'auiûns
intention de paiïèr en Letnnos, nous enquifmes foigneuièmentv
auant partir de Conftantinople , quel moyen ont les marchands^
d'en rccoiïurer, Se feifmes tant qu'en trouuafmes de dixhuict for-
tes d'impreffion. Ày ans donc recouuré des féaux de toutes efpe-
ccsv qu'on vendoitlors à Gonûantinople, Jes pprtafmcs mon-»
ftrer à vn Turc doc"te en Arabe, pour fçauoir quelle raifbn il y a-
uoitd en trouuer de tan rde fortes. Le Turc après les auoir tou-
tes leiics , refpondit que toutes ne contenoyent autre choie , ilna
deux mots en Arabe , Tin imaciuon , qui vaut autant à dire que^
ÏOTcièilee.; Se quele feau qui auoide plus d eferiture , figrûfioie^
G ii ■' .
*p PREMIER XÏTRÏ DES 'SINGVIA.
Je mefinc mot que celuy qui en auoit le moins. Toutes ces terres
font formées en petits paftilles,,c'eft à dire "tourteaux ou petits
pains , qui pefènt iufques à quatre dragmes la pièce, les vns plus,
les autres moins. Et d'autant que les cara&eres defdits paftiîles,
n'auoycntpasmefme impreffion deferiture , nous entendifmes
que cela ne venoit d'autre choie , fînon que les Turcs peuuent di-
^uerfement changer leurs lettres ou charaderes , pour exprimer
vue mefme fignification. Encory avne autre raifon s ceft que
diuers feigneurs & gouuerneurs de l'hic en ont eu charge , &: en
ont fait diuers fèaux5Il n'y a pas faute de trompeurs,qui la fçauet
ialfifîer fi naifuement, qu'ils lafont reflèmblerà la naturelle. Et
pour faire voir les characteres diuerfement imprimez es paftiîles
îur diuerfes terres , icy en font les portrai&s retirez de deiïus les
icauXjfèlon les diuerfîtez àcs terres.
Dtferenies
€Jjtece$ detet-
refiBce.
Defèription des différentes efycces defdùBes terres feïïees % & des fe 'aux
qu W a imprimé dejftts* Chapitre xxiii*
Près auoir retiré tous féaux & différentes efpeces des
terres que peufmes rccouurer : propofafmes pafler en
| Lemnos pour en fçauoir la vérité , & pour apprendre
^àdifeerner lesvrayes des. faufes : Scies defcriuifmes
ÔBSERTEES PAÏL >. BE'î-ON. ft
^comme s'enfuit. Le plus antique fêau au récit des Grecs , & des
Turcs , entre les terres , eft dVne forte qui n'eft gueres plus large
que le pouîee , Se n a que quatre lettres en tout : dont celles qui
font à cofté,font comme deux crochets : & les au très lezîtes du
milieu fort entortillées , comme ferait le chara&ere équivaut
autant à dire corne vne once medidnale:& par le milieu du feau,
entre toutes les lettres il n'y a que quatre points : duquel {eau la
terre eft AgrafTe, quelle femblecftre deCmf9 de obéit aux dens,
quand on la mafchc , & n'eft gueres fàblonncufe. Sa couleur eft
xlepaflcen rougiffant fur l'oofcur. II y en aencor d*vnc autre
^ôrte,qu i eu en petis pains de la grandeur de la fufdicke : mais les
chara&cres du feau font vn peu plus grands^ n'y a que trois let-
tres en tout j aueefèpt péris points : dont la terre eft vn peu plus
jrougiflanteque la première , & à quelque aigreur au gouft : Se
quand on la mafèhe,on y trouue plufîeurs petites pierres fàblon-
îiçùfès. Elle eft plus maigre que la fufdi&e : mais cft autant cfti-
mee en bonté. Encor y a vne forte de péris pains ou paftiiïcs de
terre fêlîec, de la memie grandeur des fufdiâes : mais les lettres
font différentes : car elle a comme vn crochet refïèmblant à vn
àaim à prendre le poiffon : qui eft entre deux autres lettres , re£-
fcmblans au chirrred'vne once, quieft tel £. & fa couleur eft dif-
férente aux deux au très deffufdiâesxar elle eft mouchetée de pe-
tites taches de terre blanche mefleeaucc la rouge. La quatriefme
efpece eftplusclaircen rougeur , & plus pafle que nulle des au-
tresrde laquelle auons obferué trois différences de féaux en mef-
me terre. La terre fellee plus commune en Conftantinople , eft
pour la plus part falfîfice , Se eft formée en plus grands tourteaux
que ne font les autres , auffi eft d'autre couleur : car les autres ti-
rent fur le rouge, mais cefte là eft de iaune paillé. Et ainli comme
clic cft faufe , aufïi ion en trouue en plus grand* quantité. Encor
en trouue Ion de deux autres eipeees différentes tant enforme
qu en lettres,lefqueiles on eftimeeftrc du nôbre des plus vrayes,
&n*ont différence finon quelVuccft plus chargée de fâblo que
n'eft l'autre:&: ont quafi vne mefme fàueur , aufh font elles rares.
Lon en trouue encor vne autre efpece qui eft falûfîee auec du So^ ^r*
Bolus Armcnus deftrempé,&; puisfellé,&: dvn feau de charade- mm*i'
tes dirferens aux deux dernieres,raais de mefme grandeur : & n'a
que deux lettres en tout , qui font fort retorfes*. Il y en a encore
G iij
f4T PREMIER; fclVRE BES SÏNGVL1'.
a vne autre forte formée en pains mal baftis , qui font plus rond*
que nuls des autres,&; font de lagroffeur d'vne noiXjqui feroyent
quafl comme iaîets,n eft-pk qu'ils font quelque peu aplatis enJcs.
felIant.Nous lesauôs trouiiezHsftre des plus nets que nuls autres..
Encor cft.vnc autre cfpccede feau peu comun par les boutiques,,
lequel auorts feulement trouuéen deux boutiquesàConftanti-,
rïppie:aufïï fon prix eflplus haut que nul àcs autres , &c eft de fat-
ueur plus aromatique % tellement qu'on diroitàl^fprouuer au,
gouft , que Ion y ait adîoufte quelque chofe qui luy donne telle,
faueur : mais ceft le naturel de laterre qui eft teHc Ç eft l'vn.des
féaux ouilyarleplus dé characleres en l'imprcuTori. La terre en
eft quelque peu fabîonneufe , de couleur rougiffante en ob'fcur..
Yoila donc que toutes les terres fellees. nefont pas d'vne mefmCv
couleur : car fouuet aduient qu'on les rrouue des fa veine de plus
blanche couleur , 1 autre fois plus- rouge ±Jk quelquefois jnefteq
àts deux.Cèuxquiapptouuét la terre fellee au gouft, en on-rplus
certain iugement,la trouuans aromatique en la bouche, Se quel-
que peu fabîonneufe : que les autres qui eflàyent de la faire pédre
à la langue. Tou tes lcfquelles différences efcriuifrnes Sc.mifmes
en peinture,eftans à Conftantinople , & les portafmesen Pifleds
z* terre fel*hcmnQsiQu.cMG\\çxig£ veine dont Ion tire i celle terre. Mais Ion
Igeft urée n'ar^kuacçouftumé en tirer iînon àyn feul iour de l'année àxe*
- "f ■ exprefïementdedié.qui eft le fïxiefme iour du mois d'Àouft. Ol
fixtejmeimr^ •*- ■ 2 A n ■ 1 r j t
a^£ouB auant,quc partir de Conftantinople, nousenqunmes detous les,
mariniers d'vne barque qui eftoit arriuec.de Lemnos, s'ils auoiet
apporté dç lajterre:spus refpondirent qu'il eftoit, impofïiblc en
spukathi.de- recouurer,fïnon parles mains de celu.yquieftSoubacïuen Tifle:
£$mms* -, &,que fi layoulions voir-naturelle,ilconuenait y aller en perfhn-
nercar ileft-defendtiaux habitas furpeinede perdre la tefte, d'en
tranfpotter.-Xls difoyent d auantage que û* quclqu vn.des habitas
en auoit feulement. vendu vn petit tourtelet , ou qu'il fut trouuq
en auoir enià maifôniàns lefceu.de ion gouuerneur , il.feroit .iu*
gé à payer vue grande fbmmc d'argent;car il n eft permis d'en de?
partir fînon audit Scmbachi quijtient iatren tement de nfle,&: en
paye letjibBt au Tare, T.outes leiquelles chofès augmentèrent
le dciTrqu'auions de l'aller voir enfaveine.il nous conuint auoit
premièrement vnfàufconduit^ qu'ils appellent commandement
parjequeî peu/fions aller par lepays de Turquie plus feureme&tî.
*Ô'B$ÉÎLVEE*S *A!L P. BELOK. fr
lequel obtinfmes facilement parla faueur& crédit de monfîeur g*& ^
duFumet,qui pour lors eftoitembafladcuncarmonficur d'Ara- ^nftmt^
- n • t r Fumet en*
raonteftoitabfcnt. uerste^md
Turc.
Voyage de Conflantinofleà lemnosjfle eniamerBgee^ nommée en vul-
gaire Italien Stulimene* Chapitre xxini.
î Yans trouué vn Brigacin qui alloi ta Salonichi, qui
Éeftvne grande ville anciennement nommée Thef- TbeJJaomu
|{àIoniea,&pafToitpar Lemnos:aprcs qu'eufmes fait
i les appareils pour noftre voyage,môtaimes fur mer,
w - f*& feifmcs voile. Si le vent cft^uoràblc -, ion 'va-xic
Conftantinople à Lemnos en moins de quatre tournées. Nous
nauigeafmesparlePropontide^vinfmesàGaiipoli , ou nous
ne demeurafmcs quvn iour. Or puis qu'il vic^c à propos delà ïia-
uigation du Propontide , nous dirons que ccft la plus commode oaUpoU.^
de toutes autres mers , Ôraufïi en donnerons la raifor*. Ocft xauiganan,
que la mer de tout le pont Euxin Se du Propontide ne Ce hau- .^ 0?on*
fe , n abaiflè , Se ne croift au cours de k Lune , comme fait
la nier Oceane,& bonne partie de la mer Méditerranée : Se aufë
qu'ils ont les vauTeaux propres pour telles mers qui nofttny flux propontide
nyreâux. Le Propontide, Hellefpont ,&les Bofphores font in- &eUe$onte
ceflàmmenten perpétuel cpurant,comme auâi font les ifles Cy- & & Bofi
élades , Se grande partie de la mer Egec : tellement queû d aûea- îoorK ™
turevn vaifïèaufe trouue en plaine mer en temps calme &ian s ^^'
vent,il decherra de fon chemin plus de dix miKe pour iour, à rai-
fon du grand cours des eaux qui tom bent du pot Euxin au Pro-
pontide, &de là par rHeltefpont Se les Cyclades entrent en la
mer Mediterranec.De laquelle chofe trouuons qu anciennemée
plu {îeursfe font efmerueillez : car mefmement Plide ne Tapas
voulu taire,qui au treiziefmc chapitre du quatorzkfme îiure, die
en cefte manière : Noneflomittenâamultommopiniopriufquam dègre-
diamurÀPonto^ qui maria omnia inferioraillo tapitena/ci^non Gaditano
frète %exiftimai*ere 3 baudimprobabili argumente , quoniam zfîus femper è
Ponte profluem^mnqtiamreeiprocetur.C'cù. à dire,ii ne faut pas met-
tre en arrière l'opinion de pluiieurs , auant que nous déporter du
Pont : lcfquels ont cuidé que les mers inférieures prinflent naif-
fance en ce chef là , Se non pas au deftroict de Gibakar t defqueîs
G iiij
f&' 03.S,E-JLV/E1E FAR. K, BiLO-N»
l'argument îj'eftimprobable^aria maree,c'elt.:à dire, le ôux s *cC-
coulant toujours du Pont,ne retourne iamais en arrière. Quant
w.^«-»,,;r-*nous no^rc opinion eft que ce Heu là.foit la fource de toutes
fdncedsU mcrs 5 vca niclrasment qu ri tombe contre basgrande quantité
«>«• .&**& d'eau, laquelle ne retou rne iamais comremont , & fau,t neceffai-
terrmee rement qu'elle ait aufïr paflàge à fortir hors de la Méditerranée
source de par le deftroit de Giba!tar,qu o nomme en Latin, Gjditammfre-
tmtesmsn, *#»*. Autrement elle regorgeroit fur la terre ySc noyeroit tous les
pays circonuoifîns^ Quand nous fufmes fortis hors la bouche de
lliellefpont, & entrez en plaine campagne de mer Egée ^eftans
trois brigantins de confèruc,nous eftions fans vent, & eftoit déf-
ia bien tard que nous auifafmes trois voiles de pirates , qui nous
contraignirent gaigner le port de Me dlmbros, bu le vent con-
traire nous print , & força de demeurer deux iours entiers. Le.
tiers iour* nous fèrtifmes en pkine campagne de mer 3 &: àforee
d'auirons gaîgnafmes de bonne heure fille de Lemnos,& palTaP
mes entre deux pointeSjl'vne de Lemno pommée Blaua , l'autre
3&u*. dlmbronommec Aulaca/e regardans l'vn l'autre àvdixhui&mik
^pdaca* l<?ing, Quand&imes defçendus en terre ,& que eufnies fait en-
tendre aux gouverneurs de l'iûe qu'eftions làvenus pour voir la
mine de la terre fcllee , ils nous mirent hors d efpoir de la voir , £ ,
ne retournios le&icfme iour d' Aouft. Mais ayans feiourné lon-
gue efpace de, temps en plusieurs villages de rifle, &eftansfou-
uent appelleZipour .vpir Ici Grecs Se Turcs malades , auons eu.
grande occaiion de nous faire monftrer les diueriltez delà terre:
& principalement en la ville de Lemnos. Car l'vn des principaux
de f iflp logé là haut au çhafreau dedans là roche > qui pour lors .
eltoit malade , nous dpnnamoyen deyoirtoutes les efpeces qui
croient en la ville , îuy ayans fait entendre qu'il falLoit que chpi-
fixons pour fa médecine la meilleure de toutes celles qu on nous
mpnûrer©ic3 dont la plus part eft oit uns aucune imprefiion de
feâus -, .
OFSXJtVTEES PAR P. B'EION. 57-
IPefcription ^zriiïeis& ruines de Lemnas. .. Chapitre xxv.
^Ous trouuonsqueLemnos eft nommée en Italien st^mene.
jStaliraene , de no corrompu de deux dirions Gre-
ques vulgaires, Sto 3& LimnL Sto' eftàdire A.,.&
* Lirani , Lemnos. La ville qui eft maintenant nom-
;mee, Lemnos., auois nom anciennement Myrina. *&*?*•■
Elle cil de petite eftimation : toutesfois cft encor en ion entier.
Laquelle eftqnafi de la mefme façon qiteftle chafteau de Cor- Co r
phu,ou la ville de Caualle, autrement dicte Bucephala :.Car elle. caLuè.
eft dcAus vne colline auancee en la me^ayan t deux plages , IVne; BucepbiL.
dcçàjautre delà', en forte que l'entrée quieft deuers terre-ferme,
cft moult eftroi&e-La coliineou eft fituee la ville , eft cntournee
de vieilles murailles3& a vn chafteau au faifte demis la roche , ou
il y a gardesx>rdinairemcntjnaaque-la ville ou le chafteau foir te-
nu pour lieu de fortereiTe , mais pour reûfter aux Courfaires $c
Galères ou fuftcs^û" elles venoict pour l'affaillir à la dcfpourueue:
& faut dire que lagardequ y fondes Xurcs,eftpar manière d aç-
qu.it,&:pour tenir Ta terre ferme de, Hfle enobeiflance &: crainte
de s eileucr Se rebeller , ou bienjidlamettre es mains des Chrc- r ..
fliens.Or quant àia ville d'Ephef&ajmaintenant dide Cochyno, ^°e/1*'
elle eft pour l'heure prefente en tout & par tout deshabitée & °C JP°'
minée : car les villes qu'anciennement eftoient en pays diiïicile»
& auoyent leur fituation mal à propos pour les commoditezne-
ceftaires des habitans & principalement d eau douce,fontaliees
en décadence , qui depuis n ontefté rebafties. Mous trouuaimes Tt0î*?inies
que le pois de iixliures de bo vin ne couftoit plus d'vn afpre , qui ^m ^m
eft trois pintes de Paris poux vn carolus. Les habitans de ladite ^mr^n °^c
ville,pour mieux succomoder 5 ©nt bafty des maifons en h plai- ^Ja y^tt
ne3ioignar les portes hors la ville , en fone que Ion y voievn tref- im urolus.
grand & pîàifànt village 3ou il y agrande quantité de vignes»:
Toutel'ifleeftiîoflue.de petites collines; mais pour cela elle ne TaJf0S-
laifte d auok entre deuxide belles campagnes de bonne terre la- s9ros-
bourable.Xoutes les autres ifles quifout en la mer , les plus pjro- ÏÏ^f
chaînes de Lemnos,foo tplus hautes de mon tagneSîCor|ime font cUhm d&-
TafTos^yrosîTenedoSjImbrosXe chafteau de la ville de Lem- z&mos. _
Eiasji!a que dejix portevGcHe-qui; cnoc.cn k baffe vilk ,;dtda.
5$ PREMIER. LÏVUE DES S IN G VI A.
difficile accès : d'autant qu'elle eft entaillée en roc : aum* y a il ta
pont, lequel quand eft leué, le lieu qui eft fort bas.* eft précipité
îufques à la marine. L'autre porte eft à la fommité de la colline,
dont la montée eft fïroide,qu'vn cheual n'y fçauroit monter. La
ville & le chafteau n ont pas beaucoup de maifbns , & n'y a pas
grande fortereftè qui peuft refifter à vne violence faite a force
d'armes. Tous les deux ports, tan td'vn cofté que d'autre^ font af-
,• fez mal feurs, d'autant que les vaiffeaux font fubie&s aux vens. -
*Myrrhinlu ^a vi^c ^e Leoinos ou My rrhinc eft moins habitée qu elle ne fat
onc: toutesfois la terre ferme de l'iâc eft plus fre&ueufe §L abon-
dante en toutes cho&s,quleliencfutie temps pafle.Etcncor que.
Fuie ne foit moult grande, £eft-cc qu'elle a foixante&: quinze,
villages de colnpte fait,habitez d'hommes tous diligés & riches,
cultiueurs delegumages , &: toutes autres chofes , comme font
Pois^ebues,Ciches,Serres5 Lentilles, Bleds, Vins,Chairs, For-
mages, Laines, Lin, Chamure, Ilfaut en tendre qu'en toutes les
iïlcs de Grèce , qui font en la mer Méditerranée , & ou Ion parle
Grec,les habitas Ce trouuas en fourcté fous la puiûançê du Turc,
n'entendent ûnon à viure5&nontaucunfoingdc garder les for-
cereflès : car les Turcs les ofte'npdecefte peine. De là vient qu'ils
-aiment autant demeurer aux champs corne en la ville. Ils fo ren-
Grtcsenirc* gentàcuîtiuer la terre. Leur langage n'eft point mué entr'eux
tmuleur U* pOUr |a vcm3C des Tutcs,& aufïî n'ont changé leur religion. Des
gtgeo*rdi> ft)ixante& quinze villages qui fontenl'iflc , n'en auons oneques
£im' trouué que deux ou trois , ou Ion ne parlait Grec , & qui ne fuf.
font Chrcftiens. Vray eft que ceux qui s'y tiennent es forterefTcs,
font Turcs,roâis ceux des villages font Grecs. Vn vieillard natif
de fifle , difoit que iamais le pays n auoit efté û bien cultiué , ne
plus riche, & n'y a eu plus dépeuple qu'il y a niaintenat. Laquel-
le chofo il faut attribuer à la paix de longue durée , qu'ils ont eue
fans eftre moleftez. L'ifle eft abondante en cheuaux de couleur
cuMns. iàuue , qui font communément petis , & font tous Guildins de
naturc^conimeen Angleterre , fans qu'il s'en rrouue aucun trot-
xictièc font fi petis,qu a grand peine s'en rrouueroit vn qui valuft
r îepris de dix ducats.Ils font de corps trappe &ramaft*é. L'ifleeft
^f* fc «ftcndac plus en longueur qu'en largeur, d'Orient en Occident,
^^ÎL <k fotte quequand le Soleil fe va coucher, îobreHu mot Athos,
quieftà-plus dchuit liâtes de là, vient icfpodre fur le portj&def-
OBSERVEES- ?AR P. BrELON". jf
&s le bout de fille,, qui cftan eoftéfeneftredc Lénos : chofeque
obfcruafraes le deuxieftne iour de luim Car îc mont Athos eft fî
haut, quencoresque le Soleil ne fuft bien bas^eantmoins l'om-
bre touchoit la {ènéftre corne de ttfle.'Nousiuyuifmes lecourâx
d'vn petit ruiflèau,qui pafTe pat auprès du yijlage^pres.le port.en
k plaine, venant d'vn rocher , qui n eft qua demie lieue de la vhV
le. Sa fontaine qui combe de bien haut , eft vulgairement nomec
Catara&i. La plus commune plante qui foit en HUe, eft l'herbe Cat-tra^
de Chamadeon noir , qui fait vne fleur de couleur celefte^iî naifr c"AWtt^m
ne,que fans eftre vaincue y elle pourroit ptouoequer l'afur au pa- ™ir\
rangon d excellence & beauté afuree. Elieeft tant haute en-cou- Cjan"
leur , quclc Ciel & les blauets , & couleur Cyanee mife auprès
d'elle,feroit txouuee pallirX'herbc que nous appelions chardoa
benoift,ou beneift^y vient de Ton bon gré , errant par les campa~
gnes , fans que rinduftriç du iardjnier îc contraigne. Les Grecs
l'appellent de diction corrompue Gaid'eraçantha , qui vaut autat
à dire^omme efpine d'afnc. L'herbe d' Afphodelies eft coramu- Guideruan*
ne par toutes les montagnes. L'herbe qu'on appelle en Crète Àf- ^fàUdelLcs
colimbros^y.cftnommce Scombrouolo^c'eftà dire Chardon du ^éfiolim*
Macreau . Celle efpecede chardon rend du laid ^ comme la Ci- W.
coree,& fait fa fleuriaufne^quLeftibrt doux à manger. Et ne cç>- scôkrouoU
gnoiftbns racine cultiueeen iardinjjde meilleur gouft que l'herbe c^eru^
d' Afcolimbros , fuffent les Clier-uis & Pafter.aques~ Et pource ?ii^mtfie^
que Pline efcriuit que les habitans.de Lemnqs adoroycntîes oy-
feaux , que les Romains nommoyent-e» ce temps là Gracculi, Grâce*!*,
d'autant quils mangeoyent lesfauïterclîes-derinV, auonsefté
meus d'enquérir quel oyieau auoit nom Gracculus:mds nous en
parlerons au iiurc5ou baillerons portraj&s de tous les ovieaux. .
Lcsjioms des plantes communes y naijJantes.mUjle de Lemnos. .
Chapitre xxyi.
3 Ous auons veu le Pfiliumcroiftre. gar les champs pùntesdë-
l de Lemnos,& le Thîajpj §c DrabaXe Sou cher tat Lemnos.
i rondquelong.Les dgççes des Çomzcs le longues rfilmm.-
fruiffeaux. LaLampfanç, qui eft \T*eier&equine T&f*.
jeroiftn e Fr^emltalie:parcenpjQseft.incogneue. b****: .
Lon y trouucaufïidcplufieurs cfpecesde^onçs^duPauliotjde ?*V**/
rApparicoirc^u Cotyledon^derAppemaieur Se miaeur^queles j^J^
H ij.
£o PREMIER LIVRE DIS SINGVLA.
thïptnthe- Grecs nomment maintenant Pattimadilîa: Atra&iks , Scorpiok-
mon efi Un <jCSîScorpjuroSjChry{à'nthemoii>laquclIcilsmangétcruc:Mcn-
*Jr&TT taftrum,Mariolaine fauuage, AfpaIatus,Synonis, toutes les efpc-
jÂutranx. ces ^c F°ugere > Moron , Brufcus , Capilkis Vencris , Langue de
Bsmu. Cerf, Hcmionitis, Barbe de Bouc , Tithy malle mafle , Cicoree,
solixnelle. ScordionjOrcanette^Serpentarre^lufieurs efpeces de Niellc,de
ch*m*fyce. l'herbe nommée Millegrana , autrement di&c Hernia. Laiclues
^ùrefehatfi fauuageslChouxfauuages,qui pendent aux rochers le long de la
SCabbd- I"^rin^5Gl^anel^caamxfyce3Daiîcus>ArreflebeufJScabieu-
J'- lij le,Foingde Bourgogne, qu'ils appellent  triuola,ou bien Arrio-
Bwrorurnc. uoio duineîme nom du Tribulus tcrreltrc:Ozeilîe,Pauot cornu,
2Terton. Parcllcs,Nerion5Hippofelinôn, Afcyron, Ilcx, Pïmpineiie, Co-
^Afocynon. combrefatfuage^halatiSjOrtic Romaîne5Polypode,Apocyno.
&ffc. Peplis, arbres de Peupliers blancs Se noirs. Il y croift beaucoup
d'autres plantes que 'nc:ponuons exprimer de noms Latins ne
François , ne de nbs^rècs antiques : Iefquelles toutesfoisauons
deferites Se nommées du nom vulgaire , pour faireentedre quei-
îe-manierede plantes (e pcuuent trouuer en ces pays là , qui ne
. croisent point par deçà. Entres autres eftvne manière d'herbe
quelesGrecsderÂrchipelago&deCrete&de Nicomedieap-
s&cophAgo. pelant vulgairement Sarcophago : mais les habitans de Lemnos
fbrocaUda. Rappellent Phrocalida. Ceux de Phrygie l'appellent Mauronia,
oZZTa comme en Lcfbos. Les Italiens Crabonella.Ilyavneautreher-
J&drïyît. t>e qia'ilz nomment Andrayda, vne autre Aguroupes,vne autre
^%«roupçs. Coutuzufonnada3quineftpas Papaiïerrhœas,vn autre Achinc-
CacbmêjïQ* poda,ou Cachynopoda , que les habita ns a maiïènt pour beufler.
■**- Ils recueillent auffi en temps deftcles feftuz de l'herbe vulgaire-
ment nommée Agurupes , Se font le femblable des tyges des Af-
phodellesfeiches,d'au tant qu'ils ont cherté de bois : Se auffi que
leur territoire eftmal feant à produire des arbres, ilnon cultiuez.
La partie de Fifle qui eftla plus orientale , & la plus feiche,efl:
moins habile à produire arbres. Mais la partie de l'Occident Se
de midy^ft quelque peu humide,& plus verde.Lesendroi&s ou
crohTent les arbres , Se lietrx humides entre les petites môtagnes,
prodùïsét'des arbres frniclr!êrs,comeFig.uiersJNoiçrsîAmâdiers,
&qaclquépèû dT-olïiners.Il y croi-ft aufïï deux fortes de IuiubictS,
zniuhleru ^oz l'vnë âes-efpeées eft aflèz cogneuc en Frâçe , laquelle on nô -
oUutfire. mc fàufèment en pînfieuts lieux,'tant à Paris qu ailleurs , OJiua-
OBSERVEES -5ÂR >. BELON. • ~~ 6l
lire, mais c'cft I-uiubicr blanc ,- lequel Columeîle n'a pas ignore: lùi&îtf
■donc à Paris Se autres villes circonuoifînes il y agrandeqoantitc ^5*
qui ne portent point defruiëbou s'ils en -pottcnc.il ne mcurïft pas Nr.mmà- ■
|>arraictement. Ceux de Lemnos font eouftumiers d cipendre ^ hditam
les fleurs de Nerion, &; les attacher deffus les branches des Grc- de zemnai
nadiers, voulans entendre par cela que telles rieurs ayen c vertu creiude^
de prcfèruér les Grenades, Se engarder que les Grenardiers ne
perdent leur fleur : 8c afTeurent que cela puifïê défendre les Gre-
nades de ne fe rendre pas. Tous les habitans de rifle en faute 0ngmum'
de Origanu ont àccouftumé de cueillir vne herbe par les hayes,
dont vn chacun garde en fa maifon bonne quantïté,&: s'en fèruet
àmangeraueclepoiflbn; laquelle nomenc vulgairement Lago- urùchymc*
chy meni5c'eft à direGifte de heure : fa fàueur Se odeur conuien- nt
nent auec l'Origami m d'Heraclee, &ralesfueillcs femblabl.es à
l'herbe de Mille fueilîes. Sa femence eft en torchetz , comme f e-
roit vne pilule d'ortie Romaine* Nous îaconteniplafmes âïligc-
met, 8c gouftafmes : & :nc trouuafmcs onechofe qui reprefentaft
plus le vray Ammi, quelle faifoit. Ccft donc à bondroict qu'ils ^mm;
s'en feruent tant au poiffonfrais que falé , 8c l'accompaigncnt de
Fenugrec pour faire bonne faulcel Les Grecs nomment vulgai- ïmugrtc.
xement Paliuros^'arbre, que pîufieurs on c penfé eftre la tierce ef- Pdiums.
pece de Rhamnus : chofe que pouuons afleurer vraye: car vn des $*"&&'*
habitans de nfle nous dit qu'il auoit douleur delà picqurcd'vne
efpine nommée Apaluira. Nous-aliafmes auec iuy à la montagne sPjui ~
pourvoir l'arbre 3 & trou uafmes que ce qu'il appclloit Apaluira,
n'eftoit autre choie q ce Paliurus. Leurs bayes font faites de l'ar*
brifïèau deRhamnuSjlequel vientlibremenc en Lemnos, & n'y a
pas perdu fon nom ancien : car le vulgaire le nomme Rhamnos.
Lesplus hauts monts qui fbyent en toute rifle-, font du cofté de
Maccdoine,au riuagc qui regarde l'occidenc, qui eft fur la corne
gauche de Tille , lefqueîles les anciens appellerét Soace. Comme ~Sûdce
faifiÔs tirer des racines de Chamadcô noir", aflèz près d'vn village
qui .s'appelle Liuadochorio , plufîeursGrecs 8c Turcs enpafTant zW*-
leur temps venoyent regarder l'herbe 8c racine que fàifîons arra- chm*.
cher de terre : car nous les faifions treçher 8c enfiler pour mieux
les defeicher. Les Turcs qui nous veoyet empefehez à tel affaire,
en vouioyent fèmblablement tailler 8c manier comme nous : 8$
pour autant qirtl raifok grand chaud, èc qu vn chacun eftoit -
H iij
&% PREMIER. LITRE B-ES SIKGVBA.
mouillé defueut: ceux qui auoyétto^
ma?leon)& rHii&apres s'abbacoyent la fucur , ou fe touchoyent le
vûage pour fe gratter de la main , de laquelle ils auoyent couché
les racines , il s'eleuoit par apresvn fi grand^demangement fur la
vertumsr* peau qu'ils auoyent touchée ^ qu'il fembloit proprement y eftre
mlleufe (k vn feu bruûant : car laracine du Chamadeon-noir eft de relie for-
chamdeon cc & ycrajjque Celle eftappîiquee fur la peau,ellc renflammé tel*
®°ir: x lement, que toutes les fquilles-&: orties de ce mon de n'en fçau-
sXmU€S' rx>yenc faire la.cenciefme partie : mais ledemangement ne fè ma-
nifeflp pas fi toft. OxaduintquVne heure ou- deux après, nous-
commençafines tousen gênerai ^àauoir la peau tellemencenflâ-
mec endiuers endroicls du vifâge , que nousauions le vMagc plus
rouge que fàng : &i d'autant que nous le frottions plus , d'autant
plus croiffojt la.dcmangeaifon JStaus eftionsaupres d vne fonçai»
ïmm- ne deffous vn Plarane,&: vn chacun au commencemen t n'en fai-
fcic que rire^ eftoit le pafîèccmps plaidant r mais fiiE la£ails fe
.mirent grandement en choîere: &n'euftefté que nous excufàfi-
. mes de n'auoir onc e%rouue que l'herbe euft celle vertu y ils nous
euflfenc faic de la fafcheric. Noftre exeufe enuerseuxfucacce-
gece : veu qu'auions le mefme mal qiuls enduroyenc.C'eft grand
eas qu'en fi peu de racine nous ayons expérimente figrande ver-
^ tu,à noftre dommage. Le Chameleon blanccroift en aum* grai>
Uon Uam de -qualité en celle partie de Corfa,appellee Lefchimo}& csplai-
&fchïmo. ' nes &Q CrctCjCommc le noir en Lemnos.Les médecins Eranço is
^doijioiar* & AJlemans onc pour néant prins peine à peindre le Chamadeon
SnierdeU blanc& noir^car ilsji en ont point veu3& pouuons dire qu'il n'en .
feigneuriede croift point en Italie : car oultre quauons cherché les plantes par
remfea ?& Jtalie5pouuos eftre afteurczde Méfier Àloifio herbario^ardinier
T^e> de la feigneuric de Venife du iardin de Padoue , qu'il ne nous en
defdira poinc : car luy mefme afïèure les auoir auffi cherchées , &
encorne les y auoir trcuuees..
Que tes grands feigneurs de h Turquie vîuans a leur modèle noumffent.
mechamquement^n^ns.aucunes délices , Chapitre, xxv il.
. ,. f*§§jp!| &uy °iu * eftoic le Lieutenant en ljflc de Lemnos pour le
BreS^n Soubachi , fè nommoic vulgairemec le Yàiuodc: duquel
1 failloic auoir permiffion pour aller celle parc ou fegretL
t> B S E R v'-ï ES P A R *. B £ L O #. 6^
k terre fèllce : & nous ayans inuité à fon difncr,& traiâé de me£
meluy, nous a baille occafïon deferire de quelle forte les Turcs
ont!accouftumé de feftoyer leurs hoftes qu'ils ont înuitez en
leurs priuezfçftins. II ne faut douter que s'ils vouîoyent traieter
quelque Ambafïadeurou autrepîus<lelicatement,qu'ils ne trou-
uafïênt èien inuention d'apprefter les viades plus exquifès, qu'on
ne nous a&iâ: à cefb fois : mais nous dironsfeulemet ce dequoy
ils fèpâfTent ordinairement. LepremicrmctzfurdeCocombres
cruds fans vinaigre ne huillc^u'ils mangent aînû* fans nulle autre
faufè, finon auec du fel. Et après nous eufmes des oignons crudsy
& deMouronnecrue,& au demeurant delà fbuppe defourment
boullUjdu miel & du pain. Et pourautant qu'en la compagniey
auoit des Grecs Chreftiés , nous beufmes du tin, que lesGaîoîe-
res,-qui fè tiennent auprès de là , auoyent apporte. De telle ma-
nière fe trai&cnt les Turcs en leurs banquets, &: neft pas queftiô -
d'auoir vne fer«iettc,nc nappe blanche. Les Turcs ne font aucu-
ne difficulté de conuerfer auec les Ghreâiens, ay mas mieux fans
comparaifon pra&iquer auec eux, qu'ils ne^ibnt auec les lu ifs.
Les Turcs {ont extrêmement auaricieux : mais ce n'eft pas fans Turcs duari=
raifbn. Il ne nous defplaift de l'auoir expérimenté tant de fois. w«w?.
Gar mefmcment le iourenfuyuant que nous prétendions partir
deLiuadoChorio ,pour aller voir le lien ou eft prinfe la terre
feliee, le Vaiuode nous fdt défendre d'y aller , & aux guides de
ne nous mener vers celle part, quepremieremét nous ne luy euf-
fions payé deux ducats , & fallut bon gré ou malgré que nous les
luy baillaûlons. Le commandement qu'auions de la porte , ne
nous fèruoitde rien en ce cas : car fans rien farder fon langagc,ou
s'-excufèr autrement;, il nous faifbit entendre que fi voulions voir
le lieu quepretcndiqns, fay4>aiilafIîons ks deux ducats , ou au-
trement nous en retournaffions. Laquelle choie auons voulu
eferirenour donner àen tendre combien font grandes les mange-
ries des Turcs 3 quand l'on a à paûer fous leur merci. Ils ne font
pîaiûr fînon pour argent comptant , &c font tirans à l'argent plus
qu'autre'gcns du monde :-& sfikn'y auoic vaillant qu vn dé-
niera piller , ils le veulent auoir , & n'en pardonneront pas .
maille. Ils font cela à caufe que tel fera vn fêui mois ou vn • ' ^
an , tant du plus que du moins Gouueroeur d'vne prouin-
ce, laquelle il luy e*>nuicndra»la.iuer ^ & aller en prendre vne
, H iiij
$4 PREMIER LÏVH£ DES. SINGTLA,
autre a mille lieues de la: parcelaayansoccafiondepillet , tane.
foit eîlcpetitCjils ne la veulent laifTerpaiTer.
Za defcrifiion du lieu en Lemnos0dznt en prend Ut erre pour [eller*.
Chapitre xxviii.
Près que le Vaiuode eut baillé permiifion,noust
mifmes en chemin pour aller vers la montagne :&:
[ en rccompenfe il nous donna quelque nombre de.
I féaux de la terre fcllee,& nous bailla vngeniffaire>
L j pour nous accompagner. Nous aHafmes loger au.
prochain village nommé Rapanidi , quin'eftpas lôing du porc
&tHtnidk qu'on appelle Hecatoncephales. Il n'y a point plus de trois lieues
depuis le village de Liuado corio iufques à Rapanidi > &: eftan$:
cinq de compagnie, allajmes premièrement voir les ruines de.E-.
pheftia,ou Ton voie encores le vieil chafteau qu.afi coutdefropu.-
La mer bat tout ioignant contreja muraille3&: n'y a pas vne feule,
habitation : &.toutesfois fon port cft plus beau que n'eft ceiay de.
4 I.emnos3& eft plus feur à tous vents en toutes faifons, Epheftia,,
cft directement à l'oppofite de Samothrace, qui n'eft pas à quatre.
lieues loingderiile^Neus partifmes du Chaftelet ruiné prenans,
le chemin par le coing de la muraille à main feneftrc,allans vers la.
colline, qui n'eft gueres plus loing de là, qu'à lavifee de quatre
trai&s d'arc. Entre la motagne èc le port,il y a vne petite chapelle .
nômee Sotira , en laquelle les Caîoieres de Lenos s aftmblent le
soûu, fixiefmc iour d'Àouft,qui eft le propre iour qu'on tire kterre de
-fa veine. La chappeile fufdi&ecft feulement faite de quelques
petites murailles qui foufticnncnt.vne cou.uerturc.de pierre. Par».
tans de la fufdite petite chappeliette,en allant droit versle mont,
nous trou uaimes deux fentiers^'vn à dextre, 1 autre àfeneftre , fe
rapportans àdeux-fontaines diftantes l'vnc de l'autre enuiron vn .
traid d'arc. Celle de main dextre ne tarit point l'efté: mais celle
qui eft à main gauche tarit toutefciche: &pour eftrc lelieuhu-
mide, il y vient feulement quelques ioncs. Nous montafmes à
ehcual parle cofté d extre,ou il ne croift arbre quelconque,fmon
qu'il y a vn Carroubier,vn Sureau,& vn Saule,qui font vmbrage
fur la fontaine , ou il y a des degrez fàits^de pierre pour monter là
a&àeffusj cellepartjou ronprendia.terreàfeller. L'on monte par,
v. " .'. ~~ d.eflus
. OBSERVEES fcAR K FELON, 6f
èc&m la texte , & vient-on vers l'autre lieu humide : & à la 'main ^ ^ °* -
fcneftre quelque peu au deiïus Ton voie 1 endroit ou. eft la terre lontrenett* -
que l'on tire le ftxiefmeiourd'Àouft. Erpource qu'on la prendà rj^
veine ouucrte, on n'y voit autre chofe finon vn pertuis oblique
qui eft recouuert de terre. Et quand vn eftranger feroit là^encore
qu'on luy.monftraft l'endroit,, il ne fçauroit deuiner ou eft la ,
bouche : car elle eft cfto|ippee de terre , &nous a efte impolfible
delà faire ouurir. Laraifoneft que l'on n'a accouftunié lavoir .
finon à vn feul iour de lan^quife faitauec grandes cérémonies $£.
grands appareils^ -■„
«' ? Que les chofes viles & de petite eflime^Jànt rendues frecieufes par ccre-
'montes.: <&* que les chofes de petite valeur prennent authorité ejians .enno**-
Uiesdelafuperfikion^ Chapitre xxix..
A r cefte terre nous prouuerons combien les céré-
monies donnent authorité aux chofes viles qui de
fby font de petite valeur : car comme ainfifoit que
la terre dont parlons eft de moult grande vertu, itscennu*.-
toutesfois & elle eftoit £ commune qu'il ne falluft y^*8*.0*
qu'en aller prendre à qui en voudroic auoir , le douaire >. que les r^f -Js'
hommes luy attribuent pour fa vertu^roit vilipcdé^ fi on ne Fa- ^'
«oit rendue precieufe par grandes cérémonies : tellement que £
oaauoittrouué vneveineen quelque autre contrée de lifte de
meïmc terre , que celle de Cochino, nous ne doutons que les
iGrecs ne feuTcnt difficulté d'en vfcr5£ les Caloicres nauoieritaf-
ûftéquandonlatireroit, 5c qu on y euft cslebrc les cérémonies
aceouftumecs : ôiencores qu'ils en eu ftbnt dumefme lieu de Cc-
chino^ilsferoyentfcrupuled^n vfer , ou den bailler àautruy,!!
tïle n auoit cfté tirée du nxiefrue iour à' Aouft : rftimas que quel- -
.que partie de fa vertu doiue procéder des chofes faites par l'artifi-
ce des hommes qui afiiftent &; aydentà cefacrifice : Se eftime- -
-royentia vertu mille s'ils nelaveoyent tirer.. Nous monftrerons
par quelques autres exemples que les cérémonies &fupcrftitïons ,
ont le pouuoir qu'auons dit:Sc pource que les cftrangers n'en ont -
entendu la façon,prendrons la racine de llris, pour exemple: la-
quelle combien qu'on la trouue croifïànt abondamment par les
montagnes de Macédoine^ qu die oc fuft dnhampris ea vente*.
66 . PREMIER 1IVXE DES S INC V LA*
; • chez les marchands : tou tesfois l'on a eftimé qu'il n eftoit lohlbîe
à vn chacun de la pouuoir cueillir 3 ains falloir que ce fuft vn ho-
me chafte , Se falloit abreuer la terre crois mois deuant , auec dé
l'eau fucree.Voulans par telles cérémonies appaifer la terre , Se la
pacifier. Et auftl falloir faire plusieurs autres fuperftitions que
Cojecr*trtce, Theophraftc a deferites. Ceft pourquoy lafufdite racine cftoit
verm da anciennement nommée Confecratrice. *Tout ainfi peut on dire
Gimàtàef* <|a qu,;s je c[iefne que les Druides çueilïoyent auec vne faucille
**• d or , Se plufîeurs autres grades cérémonies que Pline a deferites.
Il eft manifefle que les cérémonies ont eflé faites en la terre CcU
lec diuerfement: Se que la terre félon diuers temp s , a eu diuerfes
manières de figillations. Car des le temps de Diofcoride, qui ef-
criuit long temps auant Galienjon auoicaccouftumé méfier du
fang du Bouc auec la terre pour faire des formes de tourteaux :$c
fuyuant Cela ilfe doit entendre que l'on euftaccouftumé de faire
quelques cérémonies en tuant les Boucs confacrez à Venus , la-
quelle ainfi que recitét les fables 5 feit que les femmes de Lemnos
ientoyent mauuaife odeur corne font les Boucs^ de ce les maris
les ayâs dédaignez, toutes d*vn comun confentemét tueret tous
les hommes de l'ifle. Ceft de là que la preftrefTe les felloit dvn
feau qui auoit l'image d'vne Cheure , dont ils ont pris leur nom
sfhragidd Grec Sphragida segos3qui vaut autant à dire que feau d'vnc Che-
*£*"' ure. Car d'autant que la Cheure Se le Bouc eftoyent commu-
némenr confacrez en Tisle^'on mesîoit leur fang auec iafufdide
terre. Arifto te a auffi racompté qu'on a veu vn Bouc en Lemnos,
Se aufli-vn engendré du fufdit qui auoyent du îai£tcommeles
Cheures : mais il racompte comme pour choie prodigieufe. Ga-
Voytge de ]jen voulant fçauoir la vérité de cefte terre , Se en venat de Troie,
Gatte» de^ ^ui pQUr |ors s»appeii0it Alexandria, colonie habitée des Ro-
#™* *** mains , Se allât à Rome,pana par Lemnos,& enquift fi l'on auoic
encor tel vfâge que Ton meflaft le fang de Bouc auec la terre auâc
frit de G& que la fcller. Mais îuy eftan t en Lemnos au propre lieu dont par-
iicn. îons,trouua que Ion auoir defaccouftumé tel vfage. Et en racon-
tant la manière de faire qu'il y trouua,efcrir, qu'vne preftrefTe al-
loit efpendre du fourmec& de l'orge deffus la terre , faifant dau-
r très cérémonies a la couftume du pays. Et après elle en emplit vn
chariot,& la feit mener auec foy en la ville d'Epheftia. Cela a ra-
compte Galicn,& beaucoup d'auantage que ne voulôs d eferire.
OBSERVEES PAR. P. BELON. 6j
à caufc de bricueté. C'cft grand cas que de fi longue antiquité la
terrcfellce eft en vfage>& a eu pris entre les hommes : mcfmcmct
des îe temps d'Hometc s Se d'Hérodote, qui ont vefeu iôg temps
auant Diofcoride Se Galien^lic fut en Ci grand honneur qu'on la
j-endift Auguftcpar cérémonies. Mais au temps prefent , de ce .
qu'en au ons veu , &: ouy dire en l'ifle , les fufdites deux premières
cérémonies ont dencailli>& en ont accouftumé vnc autre^aqucl-
le n'auons point veue : car nous n'auons pas cfté en rifle le fixief-
me iourd'Aouft : mais pouuons bien faire récit à la vérité , félon
ce que plus de fix cens hommes nous onteonfermé, en la forte
qu'ils l'ont veue célébrer toute leur vie. C'eft que les plus grands
perfon nages Se les principaux de Fifle s'aflèmblent tant les Turcs
que les Grecs preftres Se Caloieres : Se vont en cette petite chap- Grammes
pelle nommée Sotiraj&en célébrant vnemcfTe à la Grecque z-demamttr
uec prières } vont tous enfemble accompagnez des Turcs,& mo- *^'%£
tent fur la colline qui neftquadcuxtraids d'arc de la chappellc: CTr^'
& font beicher la terre par cinquante ou foixante hommes , iuf-
ques à tant qu'ils l'ayent defcouuerte , Se qu'ils foyent venus à la
veine: Se quand ils font venus iufques à la terre , alors les Caloie-
res en remplirent quelques turbes ou petits facs de poil de bettes,
lefquels ils baillent auxTurcs qui font là prefens/çauoir au Sou-
bachi^u au Vayuode : Se quand ils en ont prins autant qu'il leur
en faut pour cette fois,alors Se des l'heure meûne ils referment S£
recouurét la terre par les ouuriers qui font encorcs là prefens.En
après le Soubach i cnuoye la pïufpart de la terre qui a etté tiree,au
grand Turc à Conftantinople. Le refte il la vend aux marchâds.
Et à fin que perfonne n'en puuîe auoir finon par leurs mains , ils
tiennent la rigueur telle aux habitans^qu'il feroit impoffible à va
home mettant vingt outiriers en befongne toute vne nuicr, qu'il
peuft paruenir iufques à la veine de la terre , que l'on ne s'en ap-
perceutt bien. Ceux qui afliftent quand on la tire de fa vcine3 en
peuuent bien prendre chacun quelque petite quantité pour leur
vfage; mais ils n'en oferoyent vendre qu'il fuftfceu. Les Turcs
font moins fcrupuîeux que les Grecs a Se que beaucoup d'autres Turcs pm
cations. Ils permette* que les Grecs Chrettiens facët leurs prie- firupulmx^
res (lir la terre fellce en leurs prefenecs, Si eux mefmes ailiftent Se
■zy dent aux Grecs. Ets'ileft vrayeeque nouscnontditles plus
vieuXjteUe faço de faire d'auoireleu vn feul iour en vn an}leur fut
M
6% TREMîER LIVRÏ DESSINGiTU.
ryenh'uns introduite du temps que les Vénitiens dorninoyent à Lcmnos,&:
rjagnem de aQX ^ ^e ja mcr £gce, La terre de h coîlinc,n'eft pas fi fterile de
.Lemnos. f0y^ue \e fourment qui eft fèmé par dcflus,h'y viënc bien . Il n'y
a ceîuy des habitans de Fifle de Lemnos qui nefçache quelque
chofedeVulcan. Et tout ainfique les petits enfans de Me de
iFaïïe de Corfula, fçaueçt raconter lliiftoire du Daulphin , comme ficelle
ïVukm, auoitefté faite de n agueres : toutainfieft en Lemnos raconté de
Vulean,mais diuerfement -car les vns difent qu'en tombant luy
& Ton cheual fe rompirent les cuiffes , & qu'au lieu mefme par la
vertu de la terre il fut preftement guery. Les autres veulent dire
que ce fut vne branche feulement, Se qu'il fut contraint de de-
meurer là iufques à tant qu'il fut gueri : laquelle opinion refenr
quelque petite fcincillc de fon antiquité. Il n'y a point de gens
députez pour garder la terre, & n'y a aucun veftige de clofturc àc
muraille qui ait onc eftéfaide pour la garder-, comme l'on a cy
deuant penfé. .
* LtsnomsdespQtJJonsfrequentsaurîuajrederisk. Chapitre XX x.
^^^Van d nous eufmes entourné ladite montagne, re-
^fmïdï. ^^^^^ tournai mes au vil lage de Rapanidi , qui n'en eft qu a
^^^Wn fix trai&s de boulle,ioignantla montagne de Cochi-
^^^•^ no. Nous l'appelions montagne , non pas que ce foit
vn haut mont,mais vn tertre en manière de couftau. Car elle n eft
" pas fi dirficile,ne de la moitié fi grade qu eft Montmatre ioignât
. Taris :. mais eft comme vn petit couftau , par lequel les bœufs
Xm*. ;pourroyet bien mener vne charrette iufques à la fummité. Quad
:'CénÂ- nous arriuafmes à Rapanidi , il nous fut apporté plufieurs poif-
serran. £Qns ^g auojc pefché au port qui n'eft qu atrois iec1:s de boulle
^rbt àc iàjdefquels y en a qu'on pefché à la ligne, comme eft vne forte
$knni. ^c poiflbn,qa ils nomment Cano , & anciennement Cana , &: à
&Um' Marfèilie vn Serran,& à Gènes Bolafib. Vn autre auffi vulgaire-
^ther'm*. ment nommé Ropho , &: anciennement Orphus. Les poiilbns,
sam. qu'on auoit pefché à la traine,eft'oyent Blenni , Glini, A tiierina^,
**&- Sarg^Gobi^Merula^Turdi, & de ceux que les Grecs appelloyét
'2dar7e' anciennement Iulides , maintenant Sgourdelles , qui font ceux
hluùs que les Vénitiens pour leur beauté nomment Donzcilcs,& àGe-
ZlurMcs, nesZigureiles. Il nous futimpoifible de trouuer des Grecs da
.. OBSERVEES >AR >. ¥EIOK. 6$
'village , qui voulurent monftrer de la terre , pour la crainte des
"T4ïrcs/moivvn<iu volage , qui nous en Eà recouurer.vn fac , la-
quelle il nous ïiura en cachettes , & chemina toute la nuit enfuy-
uantpournous l'apportera la ville de Lemnos : car s'ileuftefté
aceuféle Soubachiluyeuftfait coufter beaucoup de fon bien.
Nous trouuafmes beaucoup de diuerfitez de terre en diuers vil-
lages de Hfle : mais il n'y eut oneques homme qui nous en mon-
ftraft de la fellec , finon en quelques maifons de Myrine , qui eft
appellee Lemnos. Aufïi nous a eftéafTeuré que l'endroit dot Ion
a accouftumé tirer de la terre de tout temps, n a point changé de
place. Il n'a pas tenu à faire diligence que n'ayons trouué les ve-
ûiges du Labyrinthe en Talc de Lemnos:&: croyons que s'il yen ufyrinthe
eufteu quelque veftige de refte , l'cuiTions trouuecauflî bien cô- deiemnes,
me auons fait les autres chofes. L'iile de Lemnos eft trefmaî gar-
nie d'arbrcs.-car il n'y en a de fauuages en quantité , finon autour ^ Hs'
cki village Rapanidi,ou il y a vneforeftd'£fcuîus\ îefquelsonne rdonic
couppe point pour brufler , d'autant qu'ils rendent vne drogue,
que les Grecs & les Italiens appellent de la Velonie. Des calices
& gland d'Efculusfqûi eft vn arbre toufiours verd ) ils fe fèruent
,pouraccouftrer& conroyer les cuirsrlaquelle Velonie ils ne. traf
portent point hors de Tifle^ais la referuent à leur vfage & prou- .
flt.Depuislaplace, dont Ion prend la terre en la montagne de la
CoilinejiufquesàlavilledeLemnoSjiln'yaqucdouzemilîepas.
Apres qu eufmes veu tous les endroits de Tille , retournatmes au,
village de Lynado Chorio, &: prinfmes congé denoftregeniiTai-
re.Les iours enfuyuans demeurafmes érrans par Me , attendans
barque de paûragc:>&: trouuafmes vn homme de Chio,quis'cftpic
fait médecin enLcmnos,hommc fort ignorant enlart de méde-
cine; toutesfois il y auoit gaigné plus <le trois cens ducats en
mefins de deux ansrcarnous croyons qu'il n'y eut oneques gens
plurprompts àfe faire medecincr, que ceux de l'iile. ils ne payée
pas en argent content 3 mais donnent de ce qu'ils ont : les vns"de
lorge^les autres du formage , les autres des aux Se oignons , jSc de
la femence de lin : defquciles chofes nous faifions^auiïi bien na-
ître proufit 5 comme fi c'euft efté de l'argent : car auïTi bien nous
en eaft il fallu acheter pour noftrevfage..
-.-. . <■. . -.' .• . ,.-■■. • - -H 113
7°
PREMIER LIVRE ^ES SINCVLA.
Cencbriti.
Zapbiati.
Ocbendrd.
Sâgittart.
De U Gumme de Condrille^ autres cbofesjîngulieres^uec les noms des
SerpcnsflHon cognoîfl v'mreenïiJledeLemnos.
Chapitre xxxi.
[*E temps pendant que cheminafmes par nfle,donnaf-
|tnes ordre par diuers moyens de prendre en vie tou-
rnes les diuertitez des Serpens qui viuent par rifle, le(-
' quels detranchafmcs foigneufement & anatomifak
mes. Et pourec qu'ils y font nommez vulgairement par noms
propres du paysJesefcnuifmeSjComme s'enfuit. Cenchriti , La-
phiatijOchendrajSagittari , Tephlitiou Tephlini , Nerophidia.
Toutes lefquelles appellations , encores qu'elles foyent vulgai-
res , neantmoins elles reièntent quelque chofe de leur antiquité;
"M * car ccmY qu'^s nomment Cenchnti,efl ceîuy mefme que les an-
Nerophidîa. cicnsaPPc^°yencCenchris: duquel ayans fait retirer lenaifpor-*
crncîrh. trait/aiions voulu cy reprefèntcr.
Le portraiB d# Serpent nommé Cencbm*
skfhk 1 Laphiatieftcelay qu'ils appcîloyétEîaphis.Ochedran'eflau-
2cb*. m que celuy qu'ils nomoient -autrement Echis ou Echidna , le-
rïLï * ^ toutcsfoisircft pas la vraye Yiperc.Le Scrpet nommé Àm-
OBSERVEES >A5. P. SELON. 71
phifbçria, retient le mefme mot antique.Ceîuy qui Te nomme Sa- ~*»*fi*&4*
gittari , eft celuy que les anciens appelloyent Iacuîus : toutesfbis ** ,
ceux de Lcmnos neconuiennentpas auec ceux d'Andros &:Pa- Torpt^
r os en l'appellation de ce Serpent :car le Iaculus eft moucheté de 0cuut^
taches noires par deûxis le dos, qui expriment naifuemét la pein-
ture d'vn œil , comme fait le dos du poiflbn qui s'appelle Torpé-
do, & que Pline a nommé Oculata-.à la differéce de Melanurus. MeUnwrm.
Celuy qui eft appelle Tephliti ou Tephlotis^ conuient auec le . ..
nom ancien de Tiphlini : mais nous en baillons les portraits , 6c pjj^"'-
deferiuons tous au iiure de la nature des ferpens.Lcs Phalangiôs n^on*
de Lemnos d'autant qu'ils font d'vne feule couleur, font en cela
dirferens à ceux de Crète Se de Zacinthe.Eftans en Lemnos,ayas
veu fi grande quantité de Chamasleo noir, pen&fmes que pour-
rions facilement recouurer de la gumme du blanc :6c à fin àen
auoir plusaifêment , demandafmes aux habitans s'ils auoyent
point décolle : caria gumme de Chamadeon , 6c aufïi l'herbe de
Chamadeon blanc}s'appelleen Grec Colla. Eteftans adreitezà Coi^
vn menufier, rcfpondit qu'il en pourroit bien trouuer : Se de fait
il nous apporta de celle qu'il appelloit Colla : toutesfoiscen'e-
ftoit pas de la gumme de Charaxleon blanc , mais c'eftoit de la
colle de l'herbe qui s'appelle Chondrilla. Ils s'en feruent à coller chon^^
les Luts , 6c autres ouurages de Marqueterie : laquelle colle
s'engendre à la racine de ladicte herbe de Chondrilla , par le bé-
néfice^ vertu d'vn ver, lequel fe nourrifsât de ïa racine de l'her-
4>e,s'cnfcrme dedans vnc petite boftêtte de la grofïèur d' vne feb-
uc,faitc de la liqueur lacticineufe qui forede ladi&e racine.Ceux
de Lemnos la cognoifient , 6c fçauent appeiler par vn vulgaire
nom propre Colla. La cire que les anciens appelloyent Propo- ? ,.
•lis , eft plus iaune en Lemnos que n'eft la commune , ia ioit que °*°
couftumierement elle (oit noiraftre aillcurs.Les plantes qui font
au cofté d'Orient,aupres de la colline de la terre fêîlee,fbnt Tha- Thapfx.
pfia,& Centaurium minus.Us ont en grad vfàgcdefèmer le Cot- CmtMa-'ium
ton , &: la Sefàme. Il n'y a celuy d'eux qui ne fâche que l'herbe mir>*^
d'Andraida baillée en bruuage, vaille contre les douleurs de le- CopOÏK
ftomach,& de la poidrinc. Les payfans des villages font couftu- ^^j'u.
miers4'obferuer diligemment les lieux afprcs 6c montueux , ou f;<r^m
croiflent les figuiers fauuages,defqucls ilz cueillent des rameaux /âfwm.
la vigiicdeJa fiind Iehan^ les mettent defliis les figuiers dôme*
I iiij
72- P.&i M I^S, £:i y.îl I- DES S ï î* G V LA ...
iHques,& par ce promettent que le fruiâ ferafauué contre tou-
tes incutûons qui luy peuucnt venir. Les fontaines y font foi-,
gaeufêment bien recueillies , d'autan t qu'ils font grande profef-
fîon de iarditiagcs5&: entre autres chofès cultiuent volontiers des
aux & des oignons :.&s'adonnentgrandement àefleuer des Co-
cpbtes j quifont tes plus fàuoureux qu'il eft pofïible. Ils les man-
gent aucedu pain,fins huilîe ne vinaigre. Et quad quelque amy
furuient dedas leiardin,îe paylan choiûra vn Cocombre , lequel
il tiendra de la main gauche tout droit, puis l'efeorchera en lon-
gueur iufqyes au pied, & iaifïèra prendre l'efeorce par deflusfa
main5en la manière drvnceftoille.En après il îe fendtaen quatre^
& là le départira pat honneur auxailifbrhs : Se fins autre fàuce le
mangent. Laquelle chofe auons eferite pour eftre eftrange de
npflremode:toutesfoisàlaleur>elleeften lieu de trefgrade non»
neiletéjçomrne pourroit eftre à nous de départir y ne bône poire* ,
.-. '. '' ' •*
"Btîoiftre (p<m pefche communément au nudgeâs lifts de Letnnos.,
Chapitre xxxn.
Lny a aucunes riuiercs en Lemnos.-parquoy Jeshabi-
^ n - 3 Wik %*&& cans ne n°ns ont onc nômé vri {èul poiûon d eau dou-
Pefckenesde fêjfêl fK3 . ,., i ^ S,
Lemnos.
ce:maispource qu'ils ont de treibelles pcfchericsau
Gaidcropo* £2*&S»5 riuagc delà mer, ils enc grade commodité de poifloh
d$- " ■ de marine. Et entant qu'auosveupefcner des Oi lires qu'ils nom-
ment Gaideropoda fiions a fembié bon deneferire la manière-»..
Çeftquclepefcheurtientvne longue perche ferrée d'vn fer plat
parle bout, pourdonner de grands, coups defïiis les Oiftres, qui
ïè tiennent attachées aux rocs,pendantes:&: après qu'il les a aba-
' tues en la mer , il les efleue auec vne main de fer qu'il tient à lau-
jffmjfottsde tre kout ^c *a perche., dont il fe fert anm* à pefcher les BerifTons
mer. ' delamer. Telle manière d'Oiftre eft grandement differenteàla .,
noilreicar fes efcailles s entretiennent fi fort à deux crampons3
qu'on agrande peine à les ouurir. Et pource qu'ils refTcmblent à
vn fer d'afoe. , les Grecs îes.nommenten leur vulgaire Gaidero-
ppja^ecft à dire pied d aine. Elle ne nourrit aucun petit cancre^
comme la vulgaire. Partans de la ville de la Myrina ,.fuyuans vn
2a$inm. petit canalou ruiiïèler,nommé Salinari,&: tenans le chemin qui
va à vn moulin à vent , qui eil à main dcxcre,fur vn petit couftaiia
vers .
^OBSERVEES PAR P. BELON. 73"
vers Te port de Candie,trouuafmes vn lieu fterile , finon de quel-
ques .Chamelxons noirs , mais au demeurant en quelque lieu
blancs.Et trouuansJa terre rouge, nous mifmes à befcher& àcf~
eouurir vne veine de terre , de laquelle prinfmes quelque quan-
tité^ conferafmcs aucc celle d'Epheftia , & eonûderafmcs dili-
gemment ,&: trouuafmes quclleconuenoit en toutes merques
auec celle que le payfan nous auoit apporté deRapanidi. Etc5- ferm fcttees
meauonsdit , toutes les terres fellees ne font pas d'vnemefme^^^
couleur : car il aduient quelquefois que la veine fè trouuerapîus f^ C0Ua
blanche, l'autre fois pi us rouge, & quelquefois meflee des deux. Hn*
Les Cordonniers de Lemnos vfent de terre grafTe pour coller
leurs cuirs, en lieu de colle : nous n'entendons toutefois que la
terre de la montagne de Cochino foitgraflfe^ains eu d' vne parti-
culière maigreur5quafi comme eft la margue.
; T>*<une fottree de baings chauds en Lemnos > & des monafieres des reli-
gieux Grecs. , Chapitre xxxiii.
, L n'y a ifîe en toute la mer de l'Archipeîago , ou il n'y
: ait quelque monaftere de Caloieres Chreftiens,com-
* me aufli en Lemnos. Le monaftere de Lemnos , n eft Monaftere
i guère loing du village nommé Liuado chorio, kquel ^ ^»»«. -
de no propre s'appelle Agio Paulitico. Il y a vne fourœ de bains
chauds en Me,que les Grecs nomment vulgairement Thermes: *£j%.
de laquelle Peau n'eft pas fi chaude que de plufîeurs autres : car 'u^noT
ion fc peut plonger dedans Teau ainfi qu plie fort de la fource:qui Thermo
cft vne chofe que tous autres baings qu auons veu , foit en Phry-
g.ic,Cilicie, Arabic^MaGedoincJtalic, Alcmagnea&Frâcc, n'ont
en la forte: car il faut IaifFer refroidir les eaux. Aufli n'y ail pas
grand edi£ïce,maîs feulement vne petite chambrette^n laquelle
vn chacun fe peut aller defpouiiler , &delà entrer en vne autre
chambre voutee , ou il y a feulement vne grande auge de pierre
creufe,qui auoit anciennement ferui defcpulchre. Cefte eau n'a
pas groffe fource : parquoy il ne s'y peut baigner plus d'va hom- -
m.ç pu deux à la fois*
K
Tljàs.
Seyrôs.
Marhrede
Tafos.
Tort de
Tkdjfos.
Sag/taFerus
$uce$hâk.
74 * REMI EU LïVft-E-.DI-S SINGVLA*
K<ragr de Lemnos en l'ifle de Tajjos. Chapitre, x x X 1 1 1 î .
E là pafTafmes en Tifle de TafTos,qui efl moult vok
fine à Lemnos, accompagnez de deux Caloieres.
Nous eftions partis auant iour hors du port , &à
iourouucrt eftions il auancez en mer, que nous
_ eftions quafi en my chemin d'entre Lenos Se Taf-
fos : mais il s'efleua vn vent contraire fi impétueux , que nous ne
peufmes remédier qu'il ne nous contraignit defeendre en Hfïe
deScyros^quieftcinquante mille au deâfousde -Lemnos. Nous
couru fines Fortune û irnpctueufe l'efpace de quatre heures , que
bous .arriuafmes au port de Scyros auant qu'il fuft nuid. En la-
quelle va de treshautes montagnes. Leiourenfuyuant nous fif-
mes voile pour gaigner Me de TafTos , Se eufmes afTez bon téps
àf venir:& y demeurafmes trois iours,errans çà Se là,puis il nous
fallut fuyuir la barque qui alloità MontefanttOjautrement dit le
mont Athos. Il ne faut s'efmerueiller files Romains eurent iadis
le marbre de TafTos en reuerenec Se recommendation : car les
montagnes mefmes qui fontenriûe,&Ies rochers font de plus
beau marbre Se le plus blanc, qui le puiûe trouuer. Le port de la
avilie monôre qu ellea efté autrefois quelque grand chofe. Les
montagnes de l'ifle font fréquentes en Sapins Se Picees ,&ya
moult grande quantité de Thapfîa Ferula. Lon void encores en
quelques endroicts de l'ifle des grands monceaux des Scories,
cxûàdirc reccemens du minerai , qui monflrent euidemmenc
qu on y a tiré grande quantité de metaux,qui nous a fembîé con-
uenir aucc ce qu en a dit Hérodote , efcriuan t que TafTus a efté
yne ville illuftre des mines d'or Se d'argent. Il nous fut monftré
quelques mcdalles d'arget,efquelles eftoit eferiten lettres Grec-
ques chofè qui vaut autant à dire,que Roy de Taffus.Thucidide
autheurGrecalaûTéparefcrkqiuLaprefîdé en fon temps aux
minières de TafTus.Les Taffiens eftoient fous Alexandre le grad:
car encores que l'ifle foit près deThrace,toutesfoiselleeft ioi-
gnant Macédoine , moult près du port de Bucephala : Se du port
de TaiTas , il n'y a plus de deux lieues Se demie iufques en terre
ferme de Macédoine. Les minières de ThalTus rendoyent an-
ciennement tous les ans quatre vingts taiens à Philippe Se A le-
- OBSERVEES PKK P. BEIOK.. 7$
xandrc : mais maintenant Ion n'y befôngne plus , & ne rendent
plus rien. Eftas partis de rifiedeTaffos^our aller au mot Athos^ -
ne fufmes que quatre heures que n'arriuaflions au monafte-
re de Liato pedi , qui eft Tvn des principaux monafteres qui
foitenl'IflhmoSjdctoutlemontÀthos. - :~ .jjïbmos.
%a defeription du mont ~4thosy & des, chafes mémorables quony trouve.
Chapitre*, xxxv»
A montagne que deferirons maintenat , eft nom- ^t}j0^
■ meeenGrec Âthos ,.&:en Italien Montefànâo. Motels,
Nous ne fçauons auoir eferit chofe qui ait mieux
1 mérité d'eftre eferit plus par le menu , qtic ce mot:
caries anciens hiftoriens en ont tant parlé , que
leurs eferits àLbon droict le rendent. admirable. Et vrayement il
eft d'eftrange façon.Ceqni a premièrement efté-efcritpar Héro-
dote^ touchant les Perfes de ce mont Athos, & que Xerxes le feie
entailler par le pied audeftroid en ce peu d'intcrualle de terre,
pour faire paflèr fes nauires , nous femble eftre totalement faux-,
toutesfois ne Tofpns bonnement affetirer. Si eft-cc que quand
paflàfmes par là , y prinfmes garde tout expreâèmeat: car partis
de la ville de HieriuoSjponr voir û verrions quelqueveftige d'en^
tailleures & foftbyeures ^.n'y en auons point trouue: ou pour le
moins s'il en y a eUjdlesfont comblées pour le prefent. Côhierr
qu'il y ait pi u (leurs nations en diaerfès parties du monde^ tenans
la loy Çhreftjenne en différentes façonsvtedantes à Iefus Chriit, chefs foutu*
toutesîois il n'y en a aucune qui n'ait coftitué vn chef pour cù.vcramse» U
fouuerainenfon Eglife.. Et maintenons que Yobci&.ncçàcYE-re^c^re^
glifè Greque eft de plus grande eftendue que celle des h2xins:fiennef°H:
iefquels Grecs pour eftre feparez de F Eglife Roraaine^nt choiii f™:
1 - i r • i • *?• -r v i t - t- Plus de n**--
vne autre manière de hure , beaucoup différente aia Laune- Et îims cy^
tout ainiî que les Latins recognoiïTcntvn feul chef de leur, Egli- ^iejm£s en,
fe, qui a foniiege à Rome ,&: auquel toutes nations tenans fon Tokijfance- -.
parti obeiffent : Semblablement les*fouuerains .chefs de l' Eglife des Grecs,.
orientale font nomme? Patriarches ^defquels les lièges font di- 1** desu*~-
uerfement affignezrcar il y a plusieurs nations5encores quelle ne tins*-
parlent Grec , qui font fubie&es &. obeiiTantes aux Patriarches,.
Les Portes & Hiftoriens. go t grandement .^endu cefte monta*-
K i j
manière de
■■■ religieux
v Grecs.
:3em fere.
rZeUemere.
rlhrtfhcsde
; Grèce font
■.marieîÇ.
Vie dés Ol-
■loterej.
'(Srujfes.
^dâ^Ètes.
Bulgares.
Mojcamtes.
$ufciens.
Tolom.
J&engrdois.
DeZojfem.
76 PREMIER LIVRE DES SINGVLÀ.
gneilluftrce : auffiaeftéde touc temps dediee pour les religieux
Grecs : & croyons que du temps des Ethniques il y habitoit au ni
des religieux dédiez aux idoles. Il n'y a finon vne feule différen-
ce de religieux par toute Grèce, qui de nom propre fontappellez
Caloieres , & Calogria pour les femelles. Lequel nom rendu en
nofïre langue,reprefente ce que le vulgaire appelle vn beau père.
Toutesfois Caloiere fignifie proprement bon vieillard, & Calo-
gria bonne vieille. Pour lefquelsîc mont Àthos fut ancienne-
ment dcdié,& eurét priuilege qui encore dure pour le iou td'huy,
que nul autre Grec ne Turc y puifTe habirer, s'il n'eft Caloieres.
Ces Caloieres ne fe marier iamais,cobië que les preftres deGrece
lefoyét. Iîssabftienêt toute leur vie de manger chair,&:laplus
part du téps de poifTon qui a fang,principalement en leurs caref-
mes. Ils vicient moult aufterement , & n'ont chofe qui leur foie
en plus commun vfage que les Oliucs confides,dirTerentes à cel-
les que nous auons accouftumé confire en ce pays : car les leurs
font noires & meures)qui fc gardent fans faulce3 comme font les
prunes cuides. Et d autant qu'il y a bienfix mille Galoieres,ha-
bitans en plufîeurs endroi&s de la fufdide montagne , en la-
quelle il y a près de vingt & quatre grands monafteres antiques,
bien fondez & fortifiez de hauts murs , efpars ça & là , tant au ri-
uage de la mer qu'en terre ferme,efqueIzauons entré,&:auiïi que
ceux qui les viennent voir font repeuz fans rien payer : il nous
femble n'eftre hors de propos les reprefenter,&lcs mettre tous
par ordre félon qu'ils font fittiez 5 &: adioufter leurs-noms pro-
pres , fçachans bien que c'eftlàoii les cérémonies Greques font
fort bien maintenues & rciglees en leurs eglifes , &: que par cela
les fufdi&s Caloieres font tenus plus religieux , que ceux qui
n ont efté nourris audit mont Àthos. Les nations qui ont fuiuy
le party des Grecs , font Circaiïès , Valaques , Bulgares 3 Mof-
couitcs,Rufciens, grande partie des Polons,&:de Mengrelie,
de la Bofïbna , & d'Albanie , & d'Efclauonie , auec quelques
Tartares , Se aufli ceux de Scruie , & Croates.Somme,toutes na-
tions habitans au contour du pont Euxin , tant aux riuagcs
qu'en terre ferme, ont fuiuy le party des Grecs : Lefquelz auec
tous les detTufdias , tiennent les Caloieres du mont Athos en
plus grande veneration,& eftiment en leurs pays, leur attribuant
quelque chofe plus quilz nefonc aux autres , qui nont efté en
'Ô^SE^VEES VAX P. BELoV. ' JJ
*îafufdite montagne. Et les Turcs mcfmes qui dominer fur tou- ^éUaw.
' tes les contrées qu auons Mâitcs , leur font de grandes aumofoes %£££'
* pour la bonne vie ,Se grande obfêruation des cérémonies qu'ils Seru-ms[
maintiennent/ Les religieux des monafteres du mont de Sinai, Cr0ÂteSm
'■ du mont Liban,dcs deferts de fain& Antoine, de îa ville du Tor, Religieux d»
Vautres lieux fituez bien auantàlacofte de la mer rouge , d' An- mont sinai, .
tioche,d' Alex£drie,de Ierufaiem,de JSourfc,de Damas , Se autres cr J* ™**
plufieurs monafteres cfpars çà Se là en Afie,pat le pays des Turcs, *"*».
font beaucoup plus prifez des Chreftiens d'auoir demeuré au
\montAthos. Tous les monafteres,&: religions de i'Afie}qu'au6s
nomez eftans en l'obey fiance du grand Turc , défendeurs ferui- ?air\mhe>
ces au mefrne langage qu'ils font en Grèce. Et combien que le des Grecs.
fouuerain de l'Eglife Grecque,n6rné Patriarche , ait fon fiege en
la ville de Conftantinople, neantmoins il y en a encore plufieurs ^runhe
autres de mefme nom, °aîle puiûancc, es pays ouilsprefi- £™"*m'
dent. Car le Patriarche d'Alexandrie commande abfolumët aux
hom mes tenans le party des Grecs , viuans en Egypte Se Arabie,
Sez vn grand logis au Caire,qu'auons veu, qui neft guère moin-
dre cfue le logis du Patriarche de Conftantinople , qui de nom
propre eft nommé Patriarchat. Vn autre Patriarche a fon fiege Patriarche
en Damas, qui commande abfolument à tous les monafteres &: ds^AtM^
gens de lareligion Grecque fe tenans en Syrie : Se eft fubiet de fe
trouuer lequinziefmekmr da mois d'Aouft^u monaftere deflus
le mont Liban,pour y célébrer la meffe. En cor y en a vn autre en ■pmuLrc]}e
Antiochc, qui commande aux monafteres Se autres Chreftiens £^ntioche.
Grecs,de Barut,de Tripoli,de Halep, Se en autres plufieurs lieux tatrUrche
cnAfie. Le grâd Turc iaiflèviure les fufdits Patriarches en leurs de conpn*
religions,moyennantquilenaitletribut. L'on dit queceluy de tl^UJ^
Conftantinople paye douze mille ducats,tant pour le fufdit mot ^J^
Athos,que pour les autres monafteres d'Europe. Orquandl'vn Meîr^0^
defdits Patriarches eft trefpafte,les Euefques Se Mecropolites,qui ^
font comme à nous nos Cardinaux , s'afTemblcnt pour en refaire
vn autre. Et eft à noter que nul ne peut eftre Patriarche s'il n'a
premièrement efté Métropolite, qui eft chofè conforme à Pinfti-
tutio papale.Des fix mille religieux qu'auons nommé Caloieres,
viuans en la fgfdite montagne , ne penfez pas qu il en y ait vn oi-.
fèux:car ils fortent de leurs monafteres de grand marin , chacun
auec (on ouftil en la main,portans du bifcuit,&: quelques oignôs
K iij
:7& PREMIER. IIVRE DES STNGVLjC
en vn biftàc defTus Tefpauîe , IVn vne houe , l'autre vn pic, 1 autre
MéienJes vnc*~crPc* Chacun trauaillepourlc mefnage de fonmonaftere-
o&faxs .■' Lcsvns befehent lcsvignes, les autres bufehent les bois, les au-
tres fabriquent les nauires. Et ne içaurions en faire meilleure co-
paraifbn qu'à la famille d'vn Prince , mettant vnececonomie en>
commun : Car les vns font coufturiers», les autres. mafTons , les
autres charpentiers,lcs autres d'autres meftiers, trauailîanstous-
en commun: iufques à fiîer la laine dont leurs cheniifes 6c vefte-"
mens font faits: aufafont ils habillez moult pauuremcnt^refTem-
hlans qmfî à ceux que nommons hermites 6c enfumez.,autremeo
nommezîes bons hommes. Nous les euffions nommé moynes
félon noftre commun parler-, qui abnfons de cefte didion: car
moyneoumonachose{làdirevnfeul3commcpourroiteftre vn.
vn hermite,que maintenant ils nommet au mont Athos diMiom
heïZit?0* ^e Phileremos. Paur bien figurer cefte montagne , adonner à:
Firure'dtt entendre comme elle eftiàite ,il -faut fuppoicr voir vn homme
mot \s£thos. renuerféeftendu en la mer en longueur de l'Occident au midy.
Defcnplon Cefaifanty l'on aur-alaperfpe&iue de cefte montagne. Elle eft.
de tout k longuetrois iourneesde chemin. Et tout ainfî que flvnliomme
m&^€thùs. eftoit renuerle nageant fur l'eau, 6c touchait des pieds atinuagc^.
1 endrokqui feroitioignant les pieds, feroit plus eftroit que nul-
le autre partie du corps, 6c confequemment le corps s'eîargi-
roit iufques aux cfpauîes , & de là s eftreciroit à l'endroit du col, >
puis la tefte apj>aroiftroit ronde eleuee plus haute que le corps:,
fèmblablement il y a vne tres^haute motagne au bout dudit mot
Athos,queFon voit en la raer de plus de trente lieues îoing,&eft
l'endroit ou eft la tefte de ladite montagne. Et diroit l'on propre-
ment à la regarder de loing de defTus les montagnes de Macedoi-
~ ne , qu'on y voit.la forme d'vn homme renuerle :. car comme le
menton 6c le nez d'vn homme renuerfé Lterre font eileuezcon-
tremont>& delà vn peu après l'on voit vninterualle entre le me-
U>n Se la poidrine, lequel fè reg refente par l'efface de celle eau;-
, te qui defeend du mentonàla gorge : tout ainfi l'on voit la mon-
tagne s eilargir en efface, mon ftrant les hauteurs des efpauîes a 6c.
confequemment fe reduifant en eftrcciflànt : tellement que l'on,
£2ut figurer le milieu du corps en l'endroit du nombrilrpuis après,
en s'engroffiftant encores commepourroit eftre l'endroit âcs ha-
ches 3 6c gourfuyuaju iufques à la part des genoux, fe monftraas.
-OBSERVEES SA'R >. BEL ON. 79
-cîîeuczéontremont, comme fi vn homme couché à la renuerfc
auoic reciré (es ïambes à fbyl Puis des genoux fùy uant les ïambes
vient tellement en cftrccifïàntjOu il conioin&à terre ferme , que
lefufHit corps de ce cheronefTe du mont Àthos,fêmble auoir efte
expreflèment contrefait par Fmduftrie des hommes, pour repré-
senter le corps d'vn homme couché à la reuerfe. Parquoy accor- ,
dons facilement à ce qui a efté dit d'vn archîtc&e nommé Dino- Dtmeràtes.
crates , qui vouîoit perfuader à Àlexadre d'édifier la forme dvn
homme rcnuerfc,qui tiendroit vne ville en fa main , Se en l'autre
auroitvnecouppe, dont fortiroic de l'eau |>our abbreuuertous
venans.
Qtfjly a pour leiourd'huy âe cinq àfix mille Caloieres Grecs viuittts
au mont\Athos, ejpars cà 0* la par les moxafleres.
Chapitre xxxvi»
O v t le corps de cette montagne eft de difficile yix m^e
acceztant pour gens de pied , qucdêcheuaî: en caloieresti»
► laquelle on pourroit nombrer cinq ou fix mille uansaumot
Caloieres , habitans es monaftercs , qui fpecifiez <s£thos.
par le menu font infques a<i nombre de vingt Se xxnjl- mùm
trois à vingt Se quatre. Et n'y amonafterequin^ait, l'vn portant nafereJf4'
Fautrc,*pîus de deux cens religieux : car en l'vn il y en a troiscens, mo
en l'autre deux cens , en l'autre cent-cinquante ,en l'autre cent:Sc
ainfî des autres confequem ment, tant du plus que du moins.
fQue tous les monaft ères àumont \Athosfini forts pour reffler aux
pyrates^ quelespyrates ne leur font pas grandes
violences. Chap. xxxvii.
E s vingt Se trois , ou vingt Se quatre monafteres qui
• font en ceux montagne, il n'y en a point qui ne foyen t Momfiem
> forts , Se bien fermes de muraille, tant pour fbuftenir lien forts,
la violece des ennemiSjS'ils eftoyent afTaillis, que pour
refifter aux courfaires de mer s'il en eftoit befoin. Car pour au-
tant qu'ils font aux riuages de la mer, les pyrates leur pourroyent ^j^r™
faire de Tempcfchement s'ils n'cfloy et forts en leurs monafteres . pûJ^
Tourcsfois iceux pvrates encorcs qu'ils foyent Turcs ennemis cdoieres.
K iiij
$Or PREMISH LIVRE DES- SÏNGVXA»
dc toute humanité^ eft ce que communément ils ne leur dcniâV-
dent ricn,& ne font grand effort à leur faire defpîaifir. lufticea
iupceâUeu |ieu cntreics brigands : & le droit de raifon fe peut debatre entre
m\ * "* îes mefehantes gens. Car encores qu'ils foyjec les plus pernicieux
^"f '" du monde , & contraires à la religion , toutesfois ayans quelque
difcretion,&: remors en leurs confeiences , ne violent les Caloie-
res du mont Àthos : ains eux qui n'efpargncroyec père ne mère,
frère ne fœur3parent ou amy qu'ils ne védiflentà purs deniers co-
îans5ont quelque |mfnnâ: qui les induit à fupporter les Caloie-
res. Ces pyrates de mer ne pourfuyuent pas les hommes feulemét-
pour leur argentjmais pour leur corps, Se pour les vendre , en les
rendant efclaucs : car ils peuuentauoir cinquante ducats de chat ,
queefclaue.
Que le memt *Athos efl eflimé 'en telle réputation aux Grecs \comrm
Rome aux Latins, Chapitre xxxvin.
IL ne fut onc3des le commencement que les Grecs ont
ieferit, que kfufdite montagne n'ait efté grandement
^renommée : aum" le nom qu'elle tient l'emporte. Elle
iclt maintenant aux Grecs en telle réputation de fain-
cleté comme eft Rome aux Latins. Les Grecs la nomment en
Zrfgfinerôs. lçQT vulgaire Àgionoros. Ceux qui cheminent par ladite mon-
tagne/oit en voyage, ou pour autres affaires , font tepeuzpat les
monafteres, fans rien payer : mais il ne baillent autre chofe fîoon
cedequoyilsviuenteuxmefmes, fçauoireftdesoîiuesconrl&es,
des oignons cruds,des febues trempées en eau.puis falecs, du bif-
cuit , rarement du pain frais 5 & quelquesfois du poiffon frais ou
falé/Car ils fontaux nuages de la mer. Tous les monafteres ne
font pasfort près les vns des autres: & les principaux detouteia
mpntagnciie font que deux en nombre,dont hm fe nomme Va-
tapedi, l'autre Agias laura» La commodité que leur apporte la.
mer, efl grande tarit pour la nauigation qui leur ameine toutes
chofes de dehors , que pour leur feruir es peieberies qui leur font
grandement à propos. En pafTant le temps samufen ta pefcher le
ïatejux des iffon en \z mer>0u ils ont moult grand proufit. Et pour ce faire
™™ ^ plus commodément , ils font des bateaux de gros troncs de Pla-
s - m'- tane 5 & fans grande difficulté ne defpenfe font chaque bateau
'-■ - - ' 'v àvn
OBSERVEES UR P. BELOK. Sî
cTvn feul trôc.Ils abatent l'arbre par le pied,puis creufent le troc,
& façonnent à la manière des bateaux,qui feruent à pafTcr la Son-
ne où Seine. Autrement ils affembient deux pièces creufecs, Se
chcuillees en forme de bateau : dcfquels peuuent entrer aufîî a-
uanten îâmerentempspaifible&calme^ommeileftnecefTairc
à la pefcherie. Et tiennent leurs filets fouleuez de congourdes en
défaut de liege, comme le Pont &Propontidedefcorce de pins. t
Le monaftere nommé Agias Laura, eft l'vndes principaux de ^|^
toute la montagne , & eft fitué au pied du plus haut mont3qui eft ™*2om
3e vray mont Athos,regardant la partie de Lemnos : auquel mo- ^^
naftere il y a bien trois cens Caloieres.Nous voulons donc nom-
mer les monafteres qui font efpars par les montagnes , du cofté
de terre ferme de Macédoine. ,
Les noms de tous les monafteres ^îesnombrxnt par ordre 3commençsnt
à terre ferme. Chapitre xxxix.
S À r t a n, s de Macédoine > & entrans par le premier Htm^os.
grand village-nommé Hierizos qui eftvn peu au de£-
fus du deftroit 5& de là allans le long de la marine:
j quand on a laiûe ledit village de Hierizos , l'on entre - „
au deftroit nommé Àladicfna» Plus outre Ton vient à Prulacas: ^J^
& de là on monte vne colline qui s'appelle Magaiiuigla. Ccft le ^^/J,^
lieu ou l'on fait le guetiour&nuiâ, & principalement quandil " ' ^
y a foupçon de pyratesen mer. Il n'y a pas long temps que Hieri-
zos n'eftoit qu'vn grand village , mais depuis huiâ ans le grand slsr'^
Turc la faitenclorre de muraille, & fortifier, pour la crainte des
Pyrates. DeMegaîiuigîa cheminant plus outre , Ton rencontre
la première fontaine deftus le chemin : puis quand on commet
ce à entrer au territoire du fufdit- mont, & qu'on a defiapaûe le
deftroit qui conioinâ: la montagne à Macédoine , & qu'on a
paue ladite fontaine que les Grecs nôment ProtoneroJ'on trou-
ue le monaftere nommé Sguraf. Tirantplus outre allant vers le
leuantenfuyuantîeriuage, l'ontrouucvn autre monaftere no- Frotonsro
me Chelandari. Puis après l'on trouue le monaftere nomméSi- %^jk . .
meon,qui eft vn trefbeau & plaifant monaftere : toutefois celuy J^^ '- *
qui vient après qui fe nomme Vatopcdi , eft encor plus grand &; yAîù^.
plus pkiiànt &C, riche. De Vatopedi continuant chemin , l'oa -
Ttntocrdto* gj, PREMIER LIVRE S? ES SINGViÀ.
roi*. Vienc à Pantocratorou : Se de là à Yucro 5 qui eft ailîs deflus
7am>. yne ccij:c butteau nuage. De Yuero l'on vaà Philotheou. De
Tklotberou. phiIochcou on vient au monaftere de Caracoul , lequel cftquafi
TxmT <ks derniers : car celuy qui eft au bouc du mont aux racines de la
haute montagne Athos,eft nommé Laura. En après partant du
monaftere de Agias Laura>en cou rnanc de l'autre cofte^on trou-
ue femblablement d autres monafteres tant au riuage comme en
terre ferme , ainiî comme on auoit fait par le coîté qu'auons
• die. Suyuant le tour du mont partant de Laura le premier mo-
naftere eft nomme Agiou Paulou, lequel regarde Tille de Scytos.
r4fr*7>*» ^utre momfterçqtû s'enfuit, eft Dionifio.. Plus outre eft le
ht monafterenommëGlygoriou:&delâlonvientaRumo,quielt
Dionifio. dépendant de Rufïïe. Puis après on trouue les monafteres de
Glygoriou, Xenopho , Archangelos , Diocherio , Se Caftamoniti : lefqucîs
*£fi°- monafteres font autour îâ montagne ioignant la mer. Ceux
xenopho. . fonc lc . s efl0ignez du riuage par les plaines Se vallées,
^ciwtge^ ^ fonc dedans lcs forefts fonc Caftamoniti, Simon petra,
Diocherio Ichares protato, Cothleomuz , Philotheou. Nul ne doit s'ef-
Cthmonm mcruciller que tant de monafteres ayent efte baftisla dedans:
simonpetra. Car te pays eft fi long qu'il dure trois îournees, Se a de large
ichxres fro* pius<|c demie iournee. Ces monafteres ont des faindes reliques
txt0: . en leurs Eelifcs , Se ont de beaux pèlerinages. Lcs Eglifes font
CothUom»l£on b.en fournics & bien bafties , ou les Caloieres vont tous
les iours chanter le feruice. Tout ce qu'ils dient , eft en langage
Grec. L'ontrouuoit anciennement des bons liures Grecs , ef-
* critsàiamain en ladide montagne : Car les Grecs àcs fufdits
ùmes crées monafteres eftoyentle : temps pafle beaucoup plusdodcs,- qui s
efoits 4 U ne font pour l'heure prefente. Maintenant il n'y en a plus nuls
*"* qui fçachent rien : Se feroit impoflible qu'en tout lemont Athos,
frnurouuaft en chaque monaftere plus d vn feui Caloiere fça-
uant. Qui en voudroit auoir des iiuresen théologie efcntsa la
main, on y en pourroit bien trouuer.mais il n'en ont n'en poefie,
hiftoire$,a'en Philofophie.
QB SERVIES £AK F. B'ELOVt. ■ $£
" Kaifonpourquoyplufieurs Hures ont efléruine^^ perdus en Grèce ^ &
de la fondation des monxfteYesdumont^éthos. Chapitre XL.
[ L faut que nous attribuÔsecfterornedcs lin-rcs Grecs, ^ *fiurre&
| à la nonchallance &: ignorance qui a efté encre les fignoranec
i peuples des pays de Grèce, qui fe font totalement £orecs.
[.abaftardis. Ec non feulemet de .noftre memoi refais
aufli depuis longtemps, ilnyacupcrfonnedc {çauoir en toute
Grèce. Soit qu'il yen aie es quelques vns içauans de la diction
Greque& Latine ï mais nous entendons de fipuqir acquis par
cftude, comme maintenant cft par tout le pays êes Latins. En-
tretous les fix mille Caloieres,qurfont par la montagne,en frgr£- Catoiera
demultitude, à peine en pourroir on trouuer deux ou troirde./*»* **»*
chaque monaftcrejquiiçachendnreaceferke rGarks prélats de £»**««►
MLglifeGrecquey&Ics Patriarches, ennemis delà prflfofbphic
excommunièrent tous les preftres & religieux qui tiendroyent ir-
urcsy& en eferiroyent ou liroyent autres qu'en theologie:& don-
noyent à, enrendie aux amres hommes qui! neftoit licite aux
Chtcfocns^eftudlec en poclie^ pbilofophic. Les gens d'Eglife
auoyent peine d'cxcojamuniement>.dont ils nepocuoyent eftre
abfbus finon par quelques grandesieunes;& certain pris d'argec,-
ôc autrespunitions corporelles pour la pénitence, auant que de-
ftre abfous.Tous les monafteres fanons cydcBxs nommez,fa* j^,;^
rent anciennement fondez par diuerfès nations jXariteftrangcs des mono/te*
que àcs Grecs mefmes-, & ont efté rentez en diuerfes parties du «ii« mon*
monde. Il yen a plufîeurs encor pour leiourd'huy^ui rcçoiucnt <s&k>i.
leurs reuenuzemioyez de Ruffie,îes autres de Valîachic, les au-
tres de Trapizosde,les autres d autres lieux d'Italie, & de Rome.
Les Caloiercs de Vatopedi difoiet quekur monaftere eftoit reté
de quclqueeglifede Rome,dôt ils nereçcuoiét plus rié.Et qu en-
cores que les Rumens èc Valîaques , & ceux de laBoflèna, Se de
Mengrehe,& de Scrcaïfie,& ceux de Mofcouie,foyét tributaires Mofiome^
au Turc,& de langage differet les vns des autres,& diflèmblable
au Grec : tou tesfois en reeoiucn tencores quelquesrentcs r mais
quils ont perdu celle des Latins- fous ceux qu aidons cy defîus
Bommczfc maintiennent à la Grecque,& ne fe gouuement pas i.
Mï.atine. Paria Latine entendons tous ceux qui obey fient ait:
$4 PREMIER IIVRE I>E$ SINGVXA.
commandement du Pape. Et pourautant qu'il n'y a point de df-
uerfiré d'habits entre les Caloicres , ils Ce cognoifTent.quafi tous
(Grecs n'ont ks vns5desautres,lavicdcfqueIseftforteftrange. Ils ne portent
.au ivïe forte point de chemifè de chanure ne de lin , mais de laine qu'ils filent
derdigimx. eux mefmes:& ont leur habit de la couleur & de la mefme façoa
des religieux, que nous nommons les enfumez. Il n'y a pas vn de
quelque monaftere que ce foit , qui ne face quelque meftier mç-
chanique:& ne louent iamaisdes ouuriers pour faire leurs be-
ibngnes:mais s'il y a quelque chotfê à faire pour le monaftere, tous
enfemble le feront,ou bien fera faiâ: par particuliers , comme vi-
gnes à tailler,labourer les terres,amcner du bois,faire les iardina^
cdoieres ges, entedreaux pefcheries,tous enfêmblément defpefchent la£
fçmentS* faire du monaftere. Les vns {ont cordonniers , qui font les fou-
Merswfiïm* licrs aux autres , & les rabiîient quand ils font rompus. Les au-
tres font coufturiers , qui taillent les robes : & eux-mefmes les
coufcnt.Les autres font eharpétiers,poûr faire barques,bateaux,
& autres chofès de charpenteric. Les autres entendent au mou-
lin : les autres font maçons, Se ainû confèquemment de tous au-
tres meftiers.C'eft vnc œconomiCjConeeraantele proffir du mo-
naftere : laquelle eftant ainfî gouuernee , eft grandement diftère-
QtAc^deU^ tât des moeurs que de façon de viure, aux monafteres desLa-
r gto Grec* ^ Q& ^a rcj jgjon Grecque eft ainfî réglée entre eux , que fi quel-
* * que pauure homme veuf,ou autrement ii quelque ieune homme
fê veut ofter du monde,^ fè veu t rendre Caloicre,fi d auenture il
a quelque peu de bien , il viendra en commun au monaftere. Ils
ne s'appelle point par nom de frçre,mais de père Se de fils. Les vns
y font receuz pour labourer les terresjou pour becher,ou pour bi-
ner: & feront employez à ceàquoyils font plus habiles. Et s'ils
fçauent lire la lettre Grecque, on qu'ils foyent quelque peu do-
ctes, ils auront quelque fois plus d'authorité que les autres : Car
ils fèrontrnipîoyezpour chanter deuant les autres : d autat qu'ils
ontceftecouftumeen leurs Eglifès,quilfaut que quelqu'vn leur
lifè publiquement ce que les autres doiuent prononcer en chan-
tant.On trouue peu de Caloieres qui foyent preftres,& qui dient
meflè.- Et encores qu'ils foyent preftres au monaftere, ils ne font
pour cela exempts de trauailler en ceuures manuelles, corne tous
les autres pères : Se faut que chacun mette la main àla pafte. De
là vient qu'ils ne s'amufent n a eftudier , n'a eferire ; Se ne fçauent
OBSERVEES TAB. P. BELON. $f
|>as feulement apprendre à Hrc en leur langage : ainfî Conxen mer-
ueilleux regrie a? ignorance." '.«.'■■•■■ _
De quelques cérémonies enfEglife des Grecs , & de l'ignorance qui efi
wtrelesgmsdEgBfcçnÇjycce*.. Chapitre xli.
' Efia auons die, que généralement rous lesGrecs , Se nàrUn&es
I ceux qui enfument leurparty,obeiûent au comraan- de Grèce.
dément des Patriarches. Chaque contrée a le fien , Se MMwsoheifi
- r. .i * y en a vn en Alexandrie , qui toutefois a Ton logis au^fjf* "
Caire, vn en Damas ,~Vn-<cnConftantînople. Tous les Caloieres^ -*e n^
du mont Athos obcifTcnt : entièrement au Patriarche de Con-
ftantinople , Se font tout ainfi qu'il leur commade, cftans à fà de-
notion , comme nous foim mes! celle dti Pape» Les Caloicres du
mont Athos , qui vont demeurer par les autres monafteres de
Grece,ou en autres parties âtrmo^& foâtplus eftimezquc ceux
qui n'y ontpointeftér&mcfmcment ceux de lerufalem , du mot
de Sinai,du mont de Liban.du Caire, de Damas,de Bulgarie , de
Ruffie , BofîènajYaîîachie^Mofco.ate^Albanie ,-,- Efclauonic , Se
autres qui font es autres pays , eiqûcls Ion parle langue diueriè à
la Greque, eftimentlcsCaloieresdu mont Athos. Laraifoneft,
qu'ils font profeffion de mieux obfcruer4ess cérémonies que les
autres qui viuent à la Greque. Ils ont auflides Chandelles , &
lampes allumées en leurs EgUfes> & des ftaraesde relief, Se des
images en peinture, comme ont les Latins > Se vient au/fi de clo-
ches. Mais les Grecs qui font fous les Vénitiens, ont plus de li-
berté que ceux qui font efclaues du Turc* Tant les vns que les
autres ont vn fer efpais de trois doigts , long comme le bras , Se
quelque peu voûté en arc , pendu à la porte de TEglife , attaché à c^0^ des
vn clou,lequel rend vn fon pçefque femblable à vne cloche , ay at G******
îe fon clair comme vn métal': xSe n'ont point d autre fbnnerie de
cloches en la montagne,que ce fer. Quand il faut venir aux priè-
res, ils font tous appeliez au fon du fer defTufdit.Ils ne nourriûcnt
-en tout le mont ne Poulie ne Pigeon, n'autre oifeau domeftique,
ne Vachc,Cheure,ne Mouton : car ils ne magent point de chair»
Ilscognoiffent les oifçaux feulement de les ouyr nommer entre-
eux. Et pourec qu'ils ne mangent point de chair ils n en prenenc
aucuns. Toutesfois auons obfcrué que *çcluy qu'on appelle au
L iij
g£ PREMIER tlVRE ETES S'INGVIA.
Maine vn Pinfon Royal,&: àPaTis vn Gros bec5& lequel Arifb- *"**»
te & les Grecs nommoyent Malacocranefs , & les LatinsMolli- ^ ^
<;eps,aprinslamefmefigmfication dcGrosbecea leur langage: MdUcocr^
s, 1- ^^t-ir /*-;Y%>5fixn'n'inr nar fMarhrifTeaux.aue les François nom- nix
mène vnTercoou a uiwi^ui i» «wt*««w ~« — j ----- * — ~v-
cnGrccIynx,y eftauâi commun, nommé de 1 appellation dvn r«m
Alcion. Il n'y a lieu en tout ce monde mieuxà propos pour ma- T™^
naftereSjquelemoncÀchos. iyr?L
tftre cultivées. Chapitre xlil
Emont Àràosefl: herbufurtoas autres Iieux,on ££* a<W
ayons onques mis le pied: & a y a plate infîgnc qui^ *•
ne fort cogneuc par le mefme nô ancie^que ïheœ
phTai3£,Diofcoride^;GataI^
imjjukunr^ L'herbe donc prouiencvnc petite rachre, que les
anciens nômoient Apios,y cft maintenant nomraeeChamxpy- -^^.
<*!a,&ayaCaloiereentout le monequine {cache bien qaclle^^^
eâiaxaduc. Etpourccqusevoyonsipluâeurs grands perfonnages *>*-
auoirefté, trompez en prenant vue autre pour. eUe,&aufliqu ils
en ont fait faufe peinture t nous a femblé bon en bailler le por-
trait,que auons fait retirer d'vne qu auions gardée viij. mois fans
<$reenterrce,&:fur la fin i:ayâs renufcen tœp^duifitfesfucil-
ks,fleurs &: femeneçs > telles qu'on peutvôir en la précédente fi-
gure. Les Caloieresdu.montÂthosontpriuilegejqu'iînepeut
habiter autre en tout le corps de ladite montagne , fmoneux:
parquoy ilz la rendent cuitiuee à arbresJbi&icrs, vignes, &: oli-
ujers.Ce lieu leur, eft bien deu;car ileft kant a gens/otakes-s;#-_
gne d cftre comparé à vn paradis de délices, pour gens qui aimée
afetenirauxeharaps. Hippogloûon y efl .mouk fréquente , Ur.^i^f
quelle ilz nomment Coraco votano,c eft à dire l'herbe de laCor-^».
neillc. Hellébore noir y croift en plufteurs vallées M n'y a habi- corxco
tancentout.temontsquine^
pelle Alatcrnus , de fon vray nom ancien , duquel Theophrafte MjûJ^u
auoit vfé,Philica;maisà Corphu & en Crète ils le nomment Elç- pW^
prinos ; car il a fa fueille entre le cheûie verd & l'Oliuc , comme ^^
- Plme;a: cfçr,«. k'atbrc que nous nommons Favifteau,, eft moult Fou/ta
L iiij
teraus.
Cetmu.
%%: . ? RE Mil B, LITRE DE S S IN G V £ Aw
Oxy& fréquent en ce moiît:mais tous le nomment Oxya:duqucîOxya
parlerons cy après plus au long* attendu qu'au ons long temps
cheminé par la montagne pour le trouucr , péfans que Oxya fuflr
arbre diffèrent au Foufleau. L arbre qucles anciens ont nommé-
ofîrU. . Qftria,y retient en cor fon nom antique. Ceftccluy que nous
mijbe., . nommons Haiftre,qui cft moult fréquent par tout le mot, Nous
efmerueillons que quelques hommes de noflre nation, dott.es &:
cognoifFans les chofes , font tombez en ceiierreur de penfer que
le Cerrus des Latins fuftceluy que noftre vulgaire appelle Hai-
ftre3veu mefmementqiie le Haiftre neporte point- de gland , &
'^€m. que O ftria cft û bien deferit eaTheophrade. Aria aufïry retient
^iUcà^ fon nomantique:combien que les habitans du motlda en Crète
la nomment Acilaca. Considérant Ja grande cômodité des ruif~-
féaux venas des claires fontaines; qui y font fi frequétes , faut no-
terjquç quelque part qu'on fe vueillc pourmencr en l'ombre y\oti
£b rtrbuueen il grand' confuiion de plantes deî icieu fes , qu'il n'y
a cfprit y tant fafché fçauroit-iï eftre , qui ne foit incontinent re-
créé de fi grand. nombre d arbres excellens , qui font ombrage
- .de perpétuelle verdure, comme s'il au oit cftéexpretTement balU
pour vn iardin champeftre. Etpuis qu'il vient à propos de parler
des plantes qui feruét de verdure en ce mont, nous les nômerons
lVne après l'autre.. '
* les. noms âes-arhm toufioars-verds ^iienans ftuuagespar les vxUees â&
mont *s4thos.- . . • :. ... Chapitre x L 1 1 1.
Lauriers. ?f?&]Éi^ ^ s hauts Lauriers , & Oliuiers fauuages y répriment
oliuiersjàu* £■ Pfâ§z}§ en tout temps l'ardeur excefTiuc du Soleil : Et les Ar-
uAges. ^ g K?s|zf b°u6^s"<picommun£mcnc f°nt aillcursarbrifTeaux.,
^rboufiers! ^.ffi^gj y deuiennent graïuîs arbres. . Les Andrachnes y font
Anrachnts. £rCqUens pour feruir de tonnelles. Aria^ Philica,ou Alatcrnus,les
phihca. Chefnes vers croiûans en moult haulte fuftaye y couurent les
^cUtènw. montagnes ,&: au flî les Picees &: Sapins. Les Myrchesàla large..
chefnes fueilic tantfteriîes que portans fruit5& les Neriôs rougis y croif-
")fers- fènt en hauteur exceffiue : dont les troncs viennent efgaux en
ïicees. groâèur aux. Figuiers. Le Smilax teuis monte iufques àla fum-
Sa?™jr mité des plus hauts Platanes , s affaifTant fur les branches de ra-
Nerlom mcâUX d'iceux , faifant ombrage de perpétuelle verdeur contre
smilax.' l'injure du froid ? impetuofité des vens y & la véhémence du - So-.
• ' ' leiL.
OBSERVEES FAR. P. FErOîT. %
feiî. Mais puis qu'il y a plusieurs autres arbres toufiours verds,
outre ceux quauons nommé du mont Àthos,auons occafton de.
les adioufteren ce lieu.
Les noms engenevd des arbres &>arbrijjèauxi qu'auons obferûéen imers
fttys ejîre toufiours verds. Chapitre xliiii.
? Vis donc qu'il vient à propos de deferire les Plantes'
/toufiours verdes,il nous a fèmblé raifonnable com-
J macer par les plus hauts arbres de îaterre, qui font
» les Cèdres. Dr nous ne prétendons les deferire par- Cejm jeS
> ticulierement , mais feulement furHt les nommer rie.
fuccirî&ementencelieu. Outre lesfufdiâs hauts Cèdres de Sy- Cedmdefy*
rie5i 1 y en a d'autres péris de L'y cie^defquels la fueille eft poignan- «*
te : & par ce furent furnommez des Grecs Oxycedri , en ce con- 0xyce^r't-
rraires aux autres efpeccs de Ccdresie Phenice}qui ont îesfueil- cfniât'
les mouifes. Les MyrthesXonc.de ce nombre , combien qu'ilz ^"nù
fôyent de diuerfes fortes : les vns font blacs,les.autres font noirs, * *
les autres ont la fueille cftroicle , & les autres l'ont large. Encore
y en a il vne quinte efp.ece 5 qui nous eft fréquente 5 fçauoir eft
celle qui eftfeulcment cultiucc es iardins des régions froides. -
Tous arbres conifères autrement nommez refiniferes, excepté le
Larix , font aufti de ce nombre : lefquels à £n de les fpecifier par
noms François-, les dirons tels que les habkans des villes & villa-
ges de Sauoye & Auucrgne nous ontaprins.Etàfin quilz fovent .-..
entendus , Tes approprierons auec leurs noms anciens. Ce que
maintenant les François nomment Aleuo, auoit nom Pinafter, ^âeuo.
arbre que les Grecs n'ont cogneu , difTerent toutesfois au Pin *«"#»".
fauuage. Ceux que nous nommons SuirTes, font du genre des &*£***£?-
Sapins , dont les \ns font malles 5 &: les autres femelles , lefquelz f /^* n
nommerons Sapini ou Abietes feemina^ Car celuy qui ancien- ^T *
nement s'appelloit Abies, eft différent à Sapin us. Vray eft que Sjpa..
Abicsatrois noms François : car les vns i appellent du Sapin , les ^ùï^
autres du Vergno y les autres du Sajp : mais Sapinus en Latin , eft safm.
npmmé.cn François de la Suiffe. Ecàfiade le diftinguçr mieux, v^l0'~
en auonscymis la peinture. . SA?*
Lsarbrc tant commun partoute Grèce , que- les anciens nom- Sm^-:
mpyentPjcça^apluijeuts. aorns François s, cas nous tramions P - •
■aneucs.
mi. .
Pignets.
pinsjdtfttd*
Melefe.
Orangers.
Pommiers
X^îàxm.
Cttres.
Foncière*.
Citrons.
IJmons.
Carriers.
Houx.
^/Ccdcia.
^fria.
Cahiers.
Palmes.
Séné.
Thxmstrin=
des.
^€ndrxch=
nés.
phylîca.
Bïume.
Btdx.
Çypre's.
Efiulus,
Serras,
ydagmda.
Epbedrx.
Sfaabdjk.
Bruyère,
phxnx.
CijUs.
Ijedon.
Gknsl>ne
guentmi.
Xyerre.
Hdiwm.
$0 PREMIER IIVRE.DES SÎNGVLA.
que des àabitans du Lionnois fur le mont de Tarare , les vns ïc
nomment Pignets , les autres des Pins fauuages : mais l'appella^
tion Françoifè dont vfent les Sauomens & Âuuergnats , luy efl
plus confiante à Pignets, quelle n'eft aux Pins fauuages. L'arbre
le portratâdcU Suffi. de Larixnc croift point
! en Grèce. Les François
il If'ifeli? ^ ^tj^ • lapaient Mclefe : elle
~ ~ ' "" feulle entre les conifères,
deipoùille fes fueilîcs
rhyuer:mais cecy eftfpe-
cifiépius pat* le menu au
liure intitulé de Arbori-
busconiferis. LesOran-
gers, les Pommiers d'A-
dam,Ies Citres,autremec
nommez Pondères*, les
Citrons ou Limons font
auflidecenombre.Auui
y a plusieurs fortes deCa-
priers qui font toujours
verds-.dont les vns croif-
set par les afpres rochers
de Crece y aucuns efpi-
neux , les autres fans ef-
pines.LeHoux, Acacia^
Aria, ou Àcillaca , les ar-
bres qui portent îaCaf-
fe,& les Palmes, le Séné,
Je. Thamarindes , les ar-
bres frequens par Grèce
nommez Andrachnes,
Phy iica , Larbrc de Bau-
me , les Buix Jes Cyprès,
vn arbre de Trapifonde
qui porte des Cerifes,Efculus & Serrus , autrement nommé Va-
lagnida , Ephedra ou Anabafis , la Bruyère, Phana , Larbriffeau
de Ciftus,Ledon,&: celuy qui eft nome Gïans vnguentaria , font
arbres verds en tour temp&Xyerre blanc & noir, Halimus. L'ar-
OBSERVEES PAU P. SELON. $1
bve de Henné naifkntehEgypte^utrcmcnt nommé Àlcana,eft Bffine'
en ce différent au Cyprus ou Liguftrum , que les François nom- i£f"jUe
mencduTroefne>pourcequii fc derpoiiilie rhyuerdefesfueil- Cqccu^
les, maïs le Henné les retient. L'arbre nommé Ucx , en François Gene^nm,
Chefne verd,& l'arbriifeau nommé Coccus* en François graine unners.
d'cfcarîatte, Se les Geneuriers /tant grands que petis , Se cinq ef~ u»tifytem.
peces de Lauriers 5 dont l'vn eft fans odeur.larbre nommé Len- ùemm.
tifque,donteft faitleMaftich, Licium , Se celuy qui porte la lai- p*M-
ne,îe Romarin. L'arbrede Sebef&s^comore, arbre particulier £*£ .
en Egypte t Se le Sauinicr tant premier que feconcb Se i'acbre de ^f ".
Thuya,&; celuy qui porte le Liège , M-£ L'arbre des Caroubiers, ^hym.
leNerion,& Oenoplia-autrementappellé Napeca, croifTantpar n^ca.
îa terre d'Egypte , Se Syrie: Percea , Polcmonia , Se vne efpece de cenet
Genefts qui croiffent par les défères d'Arabie. La plante nommée ^r^-
Tragium5venant en Crète. Acacia altéra , Se les Myrobalaniers3 ^^^.
Se auffi les Saugiers de Crete/qui portent des pommes bonnes a £&*
manger. Et l'arbre-nommé Anapala,font verds en toutes faifons. ^J^.
Laquelle chofe fçauons,n on pour l'auoir leu es eferits d'autruy,
mais pooF l'auoir obferué:car nous n'en auos eferir aucune cho-
fesquenousmefmesnayonsveue. Nous laiftbnsày mettre plu-
fieurs petites plantes qui communément ne fe defpoiiillét point Frelo»~
Miy uer,comme eft le Frelon,ie vray Thym^la Sariette de Grèce, Sariettr
& autres telles chofes , voulans feulement nommer lss. arbres Se
arbu ftes. Quelques autres corne eft le Tercbinthe ontefté nom- rberelmlx
brez du reng des arbres tou ûours verds , toutesfois ne les auons
voulu eferire > ayans crouuc par expérience qu'il en eftoit au-
trement.
Ob/èruation des Ueux cbrconuolfens^quon peut regarder ^eftxntfur h
faifiedumont^thos. ' Chapitre xlv.
I L y a vne manière de Caatharidcs au m ont A*hfîs<!i£ sttfnfik-
I fâ* ferente aux noftres vulgaires, que les Grecs nomme- Canthânics»-
~srent Bupreftis. Elle feroyent de façon femblableaux
{ Cantharides communes- , n'eftoit qu elles font iau-
acs , Se font fort puantes , Se plus groifes , indifféremment nour-
2>ies,tant fur les plantes des RonccSjCichorees, Qttics, Conifcsi.
^u autres herbages. LesCaloieres kfçaiicntBomer de lcu£aozo«
$% -niMiïîi arv^CE des singvi/à.
rwjfrijlL ancien Vouprifti.EUes ont desadîes à voler comme les mouches.
Ils nous donnèrent raifon formante de leur appellation , chofe
qu'ils ont experimetéeà leur grand donimage.Car quand les be*
fteschcualines& autres animaux ruminans, paifTent l'herbe que
elles ont touchée , ilz en meurent enflez . Et comme la morfurc
:?refer. de la vipère nommée Prefter , eft vn venin pernicieux aux hom-
mes, tout ainfî 1 efpecc de Cantharide iaune qn'auos derïhs nora-
mee,eft vne prefentepoifon aux bœufs:&; croyons qu'aufn feroft
aux hommes-. La raifon pourquoy les Grecs l'ont anciennement
nommée Bou prédis 5 eft queilvnboeufou vache, que les Grecs
nomment Bous,en paillant l'herbe, mangeoit vne telle mouche,
il en mourroit prefentement : Se bien fouucnt meurent d'auoir
feulement mangé liierbe qu'elles ont touché. Lon trouue en cor
autre etymoïogiede fon appellation antique,en diuerfes maniè-
res es autheurs.Les Platanes du mont Àthos peu tient eftre com-
*Cedres.
Tlatanes.. ^^ eQ nalîCeurâUX Cèdres du mont Liban, &aux hauts Sa-
.S£mïaxafre. n ai ftre fur les buiftbns, Se par les hay es de la montagne. Lefem-
ra.
pins dti mont Olympe Se Aman . Le Smilax afpera aime aufli \
naiftre fur les buiftbns, Se par les hay es de la montagne. Le fem-
blâble fait la plante de Smilax îxuis , laquelle, entendons diftin-
xmiUxU- -guer de la fatiueou cultiuee qui porte les febues de diuerfè cou-
^k " leur .Elle aime particulièrement ànaiftre en hauteur exceffiue au.
mont Àthos , iufqucs à gaigner la fbmmité des plus hauts arbres
• r des Platanes , &cmpeftrer leur fuftpar deffus les rameaux. Elle
2T eft de la nature de la vigne fauuage^qui incefTamment sefleuc en
jihedrx. hauteur,&;principalenient fî elle trouue lieu propice à s'appuyer.
CommcaufS fait la plante d'Ephedra. Si par fortune le Smilax,
duquel parlons maintenant3tronue vn arbriffeau qui de fa natu-
re ne s'efleue en hauteur , auffi ne s'augmétera-il en rien qui pui£
fe faire arTaifTer l'arbriiTeau , deftus lequel il eft appuyé. Mais au
contraire, s'il trouue vn haut arbre,il ne cédera qu'il naitgaigné
la fommité , Se fuft l'arbre haut iufques au ciel. Pas n efperions
que de la bouche dVn ruftique, à qui demandafmes le nomdï-
celle plante de Smilax , eirft deu y ffir vne fi propre didion , pour
exprimer le nom antique de fdn appellation : Car en fon vuîgai-
smlUchla. re çrec ^ [\ ja nomma Smilachia. Le plus haut de tout le mont
Àthos, Se quieftieplus célébré, eft au bout du Cheroneffe. Et
-n r pource qu'il eft haut efleué en l'air , il y aquafi toufiours de la
P'Jà* neige, qui dureiu%es.àl'efté. Le faille eft en tout fteriie , Se
moi
SbsÏb.Vies Vas. -*. beloh. 23
< de rochers trefafprcs & difficiles. Eftans fur le plus naut faille de
la montaigne , regardans vers la parue de Septentrion > qui eft le
cofté ou la neige refte plus long teps fans fe fondre,Ia trouuions
plus fertile ^abondante es arbres: auffi produit le plus aherocs
par les vallées. La partie du mont qui regarde le midy >elt aride,
fterile^ fans arbres,& principalement vers la fommite.La fom-
mitédelamotagne eftfaite corne vnepoireicar elle eft pometue
fronde. Il ya vnechappclledeffus le plus haut couper : cnla. <£^
quelle les Caloieres d?Agias Laura ( qui eft vn monaftere feue J^
aux racines de la montagne) vont dire vnféruice en enantanta
vn certain iour de Tannée. Leiour eft députe entreux, lequel
tous les monaftcresfçauét bien, Se croyons que ce foit aja noitre
Dame d' Aouft. Quad nous fufrocs à la fommite du mot Atnos
îiousveoyons clairement îesiâes&les paysàlentour comme ^
Ca(randria,qu'ils nomment Schiato,Scyros,Lemnos,T^os ba, J*^
mothrace,Imbros:lefqoelles ifles nous voyons quafi aufli a clair, ^^
quefi elles euffent efté plus près de nous. 11 fait mcefiamment vn -Lem0Sm
froid extrême là haut deffus le mont: encores que nous y fumons Taps.
en plein midy aux plus chauds iours de lefté,&: que l'air foft fans s*moéwe.
vent toutesfois il y faifoit vnfroid extreme,tellement que nous ir^ros.
a'ypeufmesgueres durer. De la defeendans-par lapartie qui rc-^
garde le midy , nous començafmes à approcher du pied du mont,
ou nous trouuafmes des forefts de Sapins , & de Picecs , qui font
quelque peu différents à ceux qui font ésferefts de Crète", &: a
ceux qui naiffent es montagnes d*Auuergne : car leurs Cônes ou
pommettes font de telle nature qu elles tiennent fi fort au ra-
meau , que quand on les attache par force , Ion en leue vn cf-
clat du bois,quant & la queuë:aum font polies & non rabo- ^
teufes comefonties autres. Nousy trouuafmes delà ternie, &; nu€e'dxnû^
grand' quantité de Feucedanon, &Centoire maieur. L'on ne Cmumum
trouue aucun chemin par la montagne, quelque part qu on aille, ^^
qu'il ne faille touûours monter ou defeendre : car tout le pays
eft inégal • • , ...
0 M îij
£d
£■4 PREMIER LIVRE DES SINGTIA.
Les Gdoîeres^ou moines du mont\Athosjont les arts mechantQuer*
Chapitre xlv i.
S& À auons deferit par cy deuant que les Caloieres fiîenr
-* leurs laines eux mefmes ; parquoy penfons qu'il eft co-
uenable d'en eferire la manière, veu mefmementque-
leur quenoille, fufeau,&pefon,nefontfemblabîesà'
Xs^caLïfr ceux dont nous vfons. Leur quenoille eft faite de Cane ou Rolk
ro. feau,fufnommé Donax : Se eft taillée feulement entre les nœuds-
Poaax. de trois- articulations : en forte que la quenoille n'a que deux
pieds de longueur. Ils coupent ladi&e Canne entre les articula-
tions^ fin de faire vnpertuis par dedans,qu ilsfichet trois doigts
delamaângauche,fçauo-ireftlepettt Se les deux autres d'après, fe
referuans le pouce Se le doigt prochain d'iceluy, pour tirer la lai-
ne Se la diftribuer au fî!ec,& 1 adminiftrer au fufëau. La haute ar-
Mdwmde ticulation de la Canne,eft en manière de fourchette, qui fèrtàen-
fler des Ca* fourcherla laine, pour mieux tenir en la quenoille. Le Caloiere
kiertb. filant en la manière de Ton pays,ne fiche pasià quenoille a fonco^
'r~" fté , mais la tient feulement de trois doigts elcueeen l'air. Ils ne
font point grands appareils pour leur laine : car il leur fuifit de 1 a-
uoir lauee c£eau chaude ,, Se quelque peu cardée. Et par ce faut
que le&feau fok fak de mefme, Se correfpondant à la quenoille.
Ce n'eft donc grande merucillc, fi anciennement les a^jtheurs
Grecs nommèrent quelques herbes de nom de quenoille, fufèau^
\&t*BiUs. Se pefbn :rea* encore maintenant l'herbe de AtracHlis leur fèrt de
fufèau,aufli fon fufteft droicl Se poly,comme s'il auoit cfté rabo-
té par art. Et en cas qu'ils ne fe ieruent du fuft d' Atra&ilis , ils
vfent d'vne petite verge déliée , ou bacquette moins grofTe qu eft
fe petit âoigt^ d'vne-mefme grofieur, tant par les deux bouts , que
par le milieu,& y attachent vn fer,à la façon d'vn hameçon à pef^
T$m des ctter^qui fevt d'accrocher le fil , pour pendre le fufeau . 11 eft be-
mt®. foing que le pefon foit correspondant à la quenoille Se fufèaur
auffin eft rien femblabîeauecceluy duquel les femmes fe fcruet
à noftrcvfage. Etpourcequeîepefbn nacftéinuentéfinopour
filer plus commodément , Se pour donner branle & poix an fu-
feau , auons bien voulu faire entendre que le pefon des Grecs cfi
ej^ore maintenant tel que lesanciens l'ont deferit , quia exi aur-
OBSERVEES FAR P. SELON. $<}
thorïté de donner nom à vne herbe Se poiffon nommée Sphon-
dilion, quefçauons efke plus fréquente en Angleterre, qu'en S?*°*&1&
France. Leditpefbn des G recs refTembîe à la m oitiédvne poire
coupée en deux parties parle trauers, eftant percée par le milieu,
«ayant nulles dents. Us tiennent ledit pefon en filant contre-
mont,&: la queue du fufèau contrebas, Se retordent lefil d'entor-
iure correspondante à celle de ce pays. Nous croyons qu'il n'y
aitonc eu ville fermée en tout le circuit du mont Atbos : car il
n'y en a aucuns vefh'ges: auiîî fèmbleque Vranopolis , Palaeo- frr^0/^
triura,ThyfTus, Cleonc , Apolîonia ? CafTera, que Pline anom- ^jj^*™*
mccSjfuflent feulement petits villages es endroich ou font main- cieme '
tenant fituez les monafteres. Nous trouuafmcsvnCaîoicrequi ^poÛonU
eftoitnouuellementvenudelavillede Sophie, pour demeurer Cajfera.
au mont Athos, bon ouurier de faite âcs bouteilles de clifiè,auec Bouteilles de
>àcs fions de Saules , ou des efeorces du Tillet , ou bien du bois c%fe*
d'Ofier, ou de cimes de Chaftaigner , ou autre tel bois aiféà
ployerjCommeefirefcorce d'Orme. Apres qu'il auoitacheué le
corps de la bouteille, Se bien cîifTéjencores reftoitàl'eftanehenSÉ
pour ce faire, il prenoit de la refîne de Picea nommée Pefkine, xefoegr^e
&:en Latin Spagas, de diction dont Pline a vfé: laquelle eftant despccesrfc
grafTe&lente,iliacuifoit vnpeu, Se chaudement la iettoitde- mecfeffyne.
dans la bouteille: alors la refine en remplifïànt les pertuisdes o- sp^:
fiers , Se eftoupant lescauitêz descliffes, deuenoit dure, Se par -Bo*mi^s
telle manière rendoit la bouteille eftanchee. Telles bouteilles de reJmee>'
clïfïè refînées font de la meilleure façon que Ton fçachc deman-
der pour gens qui von t par chemin : car elles ne font fubiectes à
fè fendre au Soleil comme le bois , n afc rompre , comme de ter-
re : Se ne font pefàntes comme d eftairu Et d'autant qu'elles font
îegicres Se de longue durée, Se que les ouuriers qui les font fe tic-
nent à Sophie,ccux qui les vendent par les ifîes de Grèce , les ap-
pellent bouteilles de Sophie, qui eft vne ville de Grèce au pays de
Seruie. Defquelles bouteilles de cliifc les Valaques3Bulgares, Se
Sercafifes vfent moult volontiers.
M iiij
5>6 Pl£ M 1ER. L I V K E D E.S S I N C V L A.
Des Cancres £eandouce^ c^ui Ce tiennent es ruiffeauxparles montagnes^
différents \tt no%Efcrewffes* Chapitre XLV il.
t N cheminant par la montagne, eftans à pied, noffre
Iguidenous efguara hors du chemin cogneu , n ayans .
\ porté des viurcs auec nous, & nepeufmes arriaer au
*c=?G=3»i loir ou nous prétendions : car d'aller à cheual parles
montagnes de ce territoire,qui ne {uyuroit legrand chemin,il n'y
auroit point d'ordre: nyauffi à pied , finon d'vne gayeté de cceu^
&, d'vne délibérée volonté,d'vne indefati gable labeur. À la parfin
eftans arriuez le foir à yn ruiffelet , trouuafmes tant de Cancres,,
qui ne reffemblent pas aux Efcreuiffes^que Ton en euft peu pren-
dre mille prefentement en vninftant. Le Caloiere les mangeoic
cruds,& nous arTeuroit qu'ils eftoyent meilleurs que cuids.Nous
en mangeafmes auec lu y .3 & ne nous fouuient auoir onc trouué
gouft en viande qui ait fernblé plus délicieux, & fa-uoureux, ou
fuft pour IVrgente neceffité de faim , ou pour la nouueauté de la
cSp* d'eau viande. Quand eufmesveu que ces Cancres de flçuue ertoyent
dwee. . dinemblables aux Efcreuiffes , nous penfions qu'ils fuuent venus
^#--; delamer: mais retournans en derrière,^ regardans le colle de la.
mer, trouuafmes le lieu (î haut & de .difficile açcez, qu'il n'eftoiç
pas poffible qu'ils y euffent peu monter : U y regardant déplus
Cancres de preSjtrouuafmes qu'il y auoit grande différence entre eux &: ceux
mer. de la mer , & là notafmes exprenement qu'il y a des Cancres es
Etegi* aru* fleuues, différents aux Efcrcuiffes. Nous trouuafmes vne forte
<& j d'herbe en la vallée nommée Elegia,de laquelle ils prénét les ra-
meaux,dot fe feruent pour efcrire:car ne les Turcs , ne les Grecs
ne fçauent nullement eferire auec vn tuyau d'vne plume d'Gye*
Tïtl'eftrawe manière de vivre des religieux Grecs : & de leur anjlers
façon^fuperjîition^ cérémonies jonchant le boire &
manger. Chapitre xlvi il.
I en auons voulu eferire vue effrange manière de vi-
ure d'vn Câloicre , pour faire entendre comme les au-
tres ont de couftu me de fetrai&er. Le lendemain e-
ftans arriuez au monaftere nomme Simeon , vn des
Caloicrcs
'OttS'Efc'VEÉÏ *À**. BELOK. 97
Caloieres malade afthmatique,quicftoit forgeroou marefchal,
auoitvneficbutclcntc: & auec tout cela auoit vne forrgrande
toux &toufioursaltcrê:lcqaclnousconuyantafon dnner,aa
temps d'vn Saracofti.c cft à dire, vn de leurs carefmes,nous don-
na de ce qu'il auoit en délices. Ces Caloieres ne inagent du poif- u**#h**
fonquiaitrangïduraiuietcm?sdeleurscarefmes: qui eft la rai- ^ ^
fonpourquoyilfaut qu'ils viuent d'herbes, & autres tels appa- <*-
reils "maigres quand ils ieunenr. Ilnousappora uk la Roquette,
enons.tt de beaux petits Ailiers verds. Toutes lefquelles herbes PûW4^
ils prennent es iardins de la communauté dumonafterc, comble
que quelques vns en cultiucnt en particulier. Et mengeafmcs les
herbes fufditcs crues fans huile ne vinaigre : car telle eft lacou<
ftumedeviuredecespauuresgens ^.11 nous apporta auffi, des
Oliues noires confîdes , qu'ils appellent Demarties , dubifcmt £"
bien noir , & du vin. Ces Caloieres pour n auoir. occafion- de J>emartii^
chauffer bien fouuent le four, vfentde bifeuit. Il appel a deux de mJfonir^
fes compagnons, qui apportèrent quelques poiffonslalez&dei-^.
feichez,Seiches, Pourpres , & Cafterons. Et en ce temps la peu- seiches.
lient bien manger déroutes efpecesdeCancre^eLimaxdemer, p««i«.
&««qu^ °f ^ f^
eequ ihr/ontfang. Le pauuremalade fe coplaignoit den auoir ^
point d?ar>petit. Difoit que n euft efte qu il gardoit des noix de- ^^
puis le commencement de fa maladie pour manger, il euft die ^
long temps a enterré : & pëfoit ne tenir fa vie d autre ehefe,d au-
tant Quelles luv donnoyent appétit de manger du pam , qu'il
trempoit en l'eau, fcdesOîiuesfalees. Ces Caloieres commen- ateflk*
centtoufiouïsleursrepasparOignonscrudsaueedcs Àux:&le <*â »
principal de leur difner font Oliues falees , & rebues trempées en
feau,& finiftent par Roquette^ Greffon aleneis: &: de quelque
eftat ou condition qu ils foyent/ains ou malades,n ont l'vfage dé-
mettre de l'eau dedans levin. Quand cufmesveu la manière de
viure de ceftuy cy' , luy voulans perfuader qirilmangeaftde bon
poiffon frais , fçachansqu'il eftoit fort maigre > & que ion corps-
eftoit fort çxtenué^efpondit que quand il luy euft eonuenu pte-
" fentement mourir, il n'en euft voulu manger,encore moins de la-
chair. Telle opinion de viure ainû>'cft pas feulement es Caloic-
les, ne es preftres Vautres gens dXglifede Grèce ,.. mais au iîiaiu
% $% PREMIER LIVRE DES SING.V1.JU
^Mcomraun populaire, qui pour mourir ne voudroyent (pendant
/Anieurcâœrme) manger dupoi/Ton<iuiaang,n,autrccliofcgraflc:
/mutions ^anc il foin aufteresjà.obferucr telles fuperftitions,
Jùperftitlm»
fis, VoyAg: du mont ^thos à Salonïfy : & desfoijfons^res^uon
ypefcht. Cbafr xiix.
E s monafteres qui font fituez au riuage de îa mer,
comme cftLaura, Yucro, Vatopedi& plufîeurs-au-
I cres,ne veulent laiûer leurs nacelles larmier au porc ne
j:<Q**&l au riuage dalamcnprincipalemëtceux qui n'ont leur
port bien four : parquoy ils les tirent hors de l'eau , & pu is les en-
fermer en quelque lieu , ou les portes font faites de fer, à fin qu'el-
les puiffcntrellfter.au feu des pyrates, 11 n'y a pas grande quantité
^eîonsports à lenteur dek montagne , fînon à Vatopedi, &rà
Xaura :aurlkiefement beaucoup déforment. Mais eux qui çul-
tiuent les vignes, Oliuiers , Figues, Oignons, Aux,Febues Se lé-
gumes , font cfchange de leurs biens auec les mariniers qui leurs
apportent le bled , ou bien l'achètent à pur argent. Nous auons
Maidins i» veu des moulins en ce mont qui meulent àfi peu d'eau , que le
mont^A* ruiffeann a fon cours plus gros que le bras. Car ils maiïbnnétvn
cefèniouer en lieu bas,ayant la partie d'enhaut bien large. Le bas
-eft fait en eilreciflant comme vn antonnouer , ou il y a vn pertuis
-dontl'eau fort de fîgrande roideur,quc donnant contre vne peti-
te reuefake d'autre manière que ne font les noftres,elle pourroit
faire tourner quelque grande meule qu'on vou droit. Ils amafîènt
les bayes des Lauriers , dont y a grande quantité par les vallées,
■ ^ j dont ils expriment rhuile,qu ils enuoyent vendre par les villes de
MayesdeLtu* ^ a^ckie>Bulgaric)Seruie,& autres lieux circonuoifins. Us y pef-
rier. vchent des Ours de mer,que ceux de Naples &: Miïïine,nommcnt
oundemer* Ma&acara, qui font quaû femblables à vn Homar , mais ils n'ont
Mdjfitcara. point de force non plus] que la Lapgufte , co mme an lfi ne font
jiomar. entournez de picquerons non plus que le Homar : car la Lan-
zangufte gUfte çft piCqUantc par tout le defïus du dos , commeeft i' Yrai-
Trxigne de gncjç mer# £t ^c fajc ce £ut fe ce poiflTon duquel Suétone ente-
sdomcli ùlt > e^criuanc ^u merfait de Tibère Ccfar , qui fei t defehirer tau t
Thejfdomcx kvifage d vn pauure pefcheuraucc la dure efcorcedVneLan-
gqftç. Nous la poviuons bien nommer Sauterelle de mer, Car
OBSERVEES FAH F. BELOtf. $$?
ce* que les Marfeillois dient en langue corrompue Langufte,
pounroiteftre appelle en pur François Sauterelle. Parquoyvou-
îanscxcufcrlafauteaduenueenrmipreffion, faite en noftre ab~
fencc, fur la tranfpofkion delà figure de ce pouTon à vn autre
chapitre au iiure àcs poifFons >. en auons voulu admonncftec
kle&eur..
Portraifâ delà Languftf, que les Grecs nomment Carabm^,
& en François. Sauterelle*.
Eftàns partis du mont Athos pouraïïer a Salônichi,y arriuaf- ,
mes facilement en deux ioumces. Salonichi eft grande ville bien T° T\ < \
renommée & riçhe>anciennement nommée Theffalonica, de la- T°ej** °****
quelle fainâ: Paul a^faid mention. Elle eft fituec en Thefïalie,
ioignant Màcedoîne,ou la pefteauoitteîîemét débauché les ha-
bitans>quilsJaiucoyentia.-viile>&: abandonn oient leurs biens. Les
Turcs entre toutes autres nations font ies-gens qui font le moins Les- Tur&
d'cftime de hanter ceux qui font frappez.de pefte : choie qtVauos. ****. Peur
aperecue à Salonichi.No^ne fufmes q deux iours en chemin, ve- ^^fffe"
aâsdkSalonichiaux minières de-Siderocapfa en Màcedoinc,qui .
N. ij
IOO PREMIER LIVRE DES SÏNGV-LA.
j&ryfim* cj| ccî;]c place anciennement nommée Chryfîtes : maintenant
eft vit village dauflî grand reuenu au Tu rc,pour la grande quan-r
titè de 1 or & de l'argent qu'on y fait, que la plus grande ville de
toute Turquie :& toutesfois n'a pas long temps qu'on a comme-
ce de nouueau à tirer la mine pour faire l'or Se l'argent. Le village-
$Ucr6Cdpfa. eftolt auparauant mal bafty, mais maintenant il fcmble à vnc vil-
loacbimjtal le.Siderocapfà eft entre les vallées au pied d'vn mot afti s deiTas vn
hau tau pendant d'vne montagne, laquelle ne fçaurions mieux
comparer, qu'à la ville de Ioachimftal au pays de Bohefme, nom-
raUisi&ach meeen Latin, rallis IoachimicaXcs métaux que l'on tire à Sidero-
capfa,font caufes que les hommes qui tirent la mine,fe foyent re-
gez là,& Tayent rendue plus peuplée. Ils y ont fait de tre&eaux
iardins Se vergers, &ry a de l'eau par tout qui rend les iardinages
beaucoup plus commodes:&: fur tout les vignes qui font aux en-
uirons,font fort bien cultiuees. Ceux qui habitent aux minières
de Siderocapfa,font gens ramaffez , Se vfent dclangagc différent,
comme Efclau on, Bulgare, Grec, Aibanois.
Ves mines dor& d'argent dugrand/èigneur, & ample difeours de
l'origine du fin Qr. Chapitre L.
1 Iderocapfa eft fituée en Macédoine ioignant Seruic.
' Et penfbns que c eft le lieu duquel Diodore aeferit,
*rtir<& wL ^^nc ; *luc Pbilippes père d'Alexandre le grand,feit
siâerteapfa. tgîisgSl premièrement forger des Philippusd or,quandCre-
ThliftMs * nîdas eut rctrouuc les mines, Se les eut mis en valeur : &: dit que
for. des ce temps là elles rendoyent chaque année mille talents d'or,
Se beaucoup d'auantage. Les ouuriers merallaires , qui y befon-
gnent maintenant,font pour la plus part de nation Bulgare. Les
payfans des villages circonuoifins,qui viennent au marché, font
Chreftiens,&: parient la langue Seruienne Se Grecque. Les Iuifs
çn cas pareil y font fi bien multipliez , qu'ils ont fait que la langue
Efpagnoîle y eft quafi commune: Se parlans les vns aux autres,ne
parient autre langage. Nous arreftafmes quelque peu plus long
temps à Siderocapfa , pour regarder les mines, &auiTiqu'a-
'• liions delir de fçauoir la manière comment l'or eft tiré hors
<**£»»* de fa veine. Et entant que l'or eft le plus parfait , Se le plus
pur de tous les métaux 3 Se qu'on luy a donné tant de diuers
OBSERVEES V AU P. 3EIOK. 101
aorns en Europe, auons bien voulu examiner s*ii les ac^ue-
roit en fit minière i mais auons crouué que Ton impurité ne
procède que de l'infidélité de ceux qui font caufe de le méfier. .
Les orfeures & les monnoyeurs îuy attribuent diuersnoms , le
mettans en eftime de plus haut pris Fvn que l'autre, dont l'vneft
^itordcducat^autreordcfcujrautreor de maille, l'autre or
de piftolet , le Faifans valoir vingt caratzj'autrcdixhuia^ainfi
4es autres,tant du plus que du moins.Mais tels noms &: di^nitez
ontprinsleurnaiffanccen diuers pays,ouilaefté adultère» fo-
phiftiqué,&: falfifié par l'infidélité de ceux qui l'ont méfié &muî-
tiplié auecautres meflanges de métaux de moindre valeur , &
moins purs qu'il n'eft. Laquelle multiplication a efté inuentee à
la volonté de ceux qui l'augmentent es efpeces des monnoyes ^
moderncs.GarlcsDucats^rcusPhîlippus^ngelots^ortuga-^W^^
loifes, font diuerfement forgez d or pur ou impur. L'inuention-^ or'
n'en eft pas moderne : car nous trouuons que desie temps de la
grandeur des Romains, la Republique ne pouuant fournir a la
defpcfê de Ces guerres,diminuoit quelquesfois le pois de la mon-
Bovcpourgaignerdefifus : comme auffi fophiftiquoit le pur ar-
gent , & y mefloit la hui&iefme partie d'erain pour l'augmenter.
Nature n'àiamais pris pafFetcmpsà faire vne plus parfaite fub- PafiBio»
{lance élémentaire, que l'or :car il eft autant pur & net en fa qua- ie tor.
lité , comme font les amples elemens , defqucïz il eft compofé. Qu^tédc
Ge n'eft donc pas à tore fi nous l'auons en prix d'excellence fur *or*
toutes autres richeflès,!& l'eftimonsànoftre iugemcnteftreplus
précieux que les autres métaux : Car naturcs'eftanteibatueàle
compofer proportionné d'égale quantité , bien correfpondantc
en fy mmetrie des elemens,! a rendu de fon origine ia purifié , co^
me font les mefmes elemens fimples:& par cefte conion&ion de-
lémens enfemble en vertu égale , a engendré vne tant délicate &
parfaite mixtion d'indiflblublc vnion , compofant fi fidèlement xVtf^£
fa iiaifon, qu'elle en à fait vne pafte incorruptible, qui eft perma-
nente à toute éternité en fon excellence & bonté. C'eft la caufe .
pourquoy il ne peut eftrc vaincu des iniures d'antiquité , & qu'il
ne peut contenir en fcy , ne fupporter vne excrcfcence & fuper-r
fiuité de rouille. Car combien qu ildemeu re enfeuely en leau,
ou en feu , quelque longue efpacc de temps , toutesfois il n'en eft
iamais taché, ny en acquiert autre qualité fans aucun déchet.
N iij
IOi PKZteltK tlV RE DES SIKGVLAl ^ />-
C'eft le priuilege qu'il a particulier par défais tous autres mé-
taux. Les minières de Siderocapfa rendent vne moult grande
fomme d'or &d'argent à l'Empereur des Turcs:car ce que le grad'
Turc reçoit chaque mois de fa part/ans en ce coprendre le gaing
des ouuriers , monte à la fomme de dixhuid mille ducats par
mois quelquefois trente mille, quelquefois plus, quelquefois-
DizhwB moins.Les rentiers nous ont dit nauoir fouuenance qu ellesay et-
mil ducats moins rapporté depuis quinze ans,quc de neuf à dix mille ducats
fArchaftc: par tnois^ou-r ledroicl dudiû-grand feigneur.Les metauxy font1
""toumm â®ncz Par le IàDCur tanc <&s Albanois ,.Grecs , Iuifs, Vallaques,,
befinZms Ce£caifcs,&Seruiés,que des Turcs. Il y a de cinq à fix cens four-
esrmtesde neaux efpars par les montagnes de Siderocapfa, qui fondent or-
sideroaffd. dinairement la mine : & n'y à fourneau qui n'ait fes particuliers
cinq cens rnaiftres , qui y font befongner à leurs defpens. Les ouuriers qui
fonrïXMx. befehent la mine dedans terre , &squi tirent àmont , n'ont point
Caducée. ]»v{^ge fe eaducce,qui en Latin eft n ommee Virga diuina, donc
Virgo. ni*. jeSjy cm£s vfenc en efpiant les veinesimais-iàns autre fort ne cal-
%'rite7: euîation fuyuent félon ce qu iîz--onti:rouué en befehant. Les e£
MarcAJite^ pece&de Pyritez^ou Marcafkez, y font de diuerfes couleurs. Hz.
çbryfico&t. ne trouuent point d'or ne d'argent tout pur , fans auoiréfté fon-
cojpdtim^. du. Il n'y a point deChryfocolla,ne de Cobaltum:& ne fe férues
point de charbon de terre. Il n'y a aucunes rieurs en leurs mines,
ïlz font l'exco&ion des métaux autremet qu'en Alemagne.Lor-
donnanec & raifon faite entre -les metalîaires y^eibbienabièr uee
comme esautres pays:& celuy qui departoit l'argent d'auecl'or,
par la vertu de Peau forte,eftoitChreftien Arménien. Les noms
dont ilz vfènt pour le iourdhuy à Siderocapfa -en exprimant les
chofes metaliiqucs,ne font pas Grees^e Turcs : carJes A4emans
qui commencèrent nouuellement à befongner aux fuidides mi-
nes , ont enfèigné aux habitans à nommer les chofes métalliques
esxcrres & inftrumens des minieres,cn Aîeman,que les eftragers
soittiaues tant Bulgares que Turcs.ont retenu. Les boutiques fontdirfe-
d& mmes. rentes à celles d'Alemagnc. liront coufiume de befongner- tou-
teîafepmainc, çommençansle Luridy , & finif&nsîè V-endred^
aufoir, d'au tant que les Iuifs ne font rien le Samedy. Toutes les
cheminées ou fourneaux > font faites le long des ruiffeàux- : Car il
faut que la roue qui efleue les fourBcts , fbit virée par la force de
ilcau. Il y a fept ruiflêaux qui font tourner lefdi&es roues. Les .
suiffcaux fc nomment ainfi comme s enfuit. Le premier Pianizç,
rautreAmerpach;rautreKyprich. Ceux de la partie d'Orient:
s'appellent Rofchetslfvotz. Les Fourneaux ou lonforïdksPy-
cites,font de petkecftoife,&: font feulement couuers de merram
&: de membrures debois , en forme d*appantis. Les cheminées
' fontlarges,&fontamïes au milieu de la maifon, renforcées de
forte maiTonnerie par le derrière , maispar ledeuant -fontdclc-
giere clofture qu'ils rompent le vendredy au foincar eftans ainu
faites, quelque peu voûtées yrcçoyucntvnc fumée ou foycblan-
cheyanciennement nommée Spodos.au lieu ou donne la flamme ^j^
enfondant iamme:îaqucllefuye sattachcàlacheminee^n sex- ?*?el
Valant de la vapeur du métal. Le vulgaire des Grecs la nomme ra?uU ^
Papehïes autres la nomment Papula.de laquelle ilz n ont point Pmtbvx.
^'vfage^&rn'cft en aucune eftimation entre eux. Lonytrouue
■ auffi du Pompholix,qui eft quelque peu plus blanche que la fuf- ^^ ^
di&c : &: qui vouldroit en recueillir , tant de IVnc que de l'autre, min^
loncn tronueroit facilement dix Hures toutes les fepmainescs
cheminées des fourneaux. LesfoufHets de la boutique font tous
^rois,ayant le nez contre terre, au fond de la cheminée. Hz font
«fïeuez & "abbaiflèz des bras qu'vne roue enuoye, qui eft tournée
iorsdclamaifonpar la force de 1 eau. La roue a deux croifecv
qui font huit bras , fichez par le milieu au trauers. Les quatre
. premiers bras prenait les foufflets^ les autres quatre ne feruent
.pas continuellement : car ilz font dédiez à faire foufiier des au-
tres foufflets, qui feparent le plomb dauec l'argent. Lafufdi&e
cheminée ou fourneau a vnc grande bouche , par laquelle on îc-
âc le charbon Se la mine pour fondre , ores de hm , ores de lau-
tre.Et y a deux péris percuis en la cheminée. L'vn eft en bas con-
tre terre,par ou s'efcoule la mine fondue : l'autre pertuis eft quel-
que peu plus hault au milieu de la chemince qui eft le fpiracle du
ventquifort pariài&lefeu ayant affaire de s exhaler , prendrait
pariceiuy pertuis. La matière qui fort par le pertuis d'embas, de-
ualleauecfonexcremét,qui toufîourscftau deflus,&: faut qu'on
Tofte continuellement de deflus le métal qui eft au fond, en vn ^^
petit pertuis ioignantle fourneau. Et pour autant quelesexcre- J^^_
mens,qui font les plus legers/ont inutiles" , les ouuners les oftent ^^^
- peu à peu ,&: les ie&enticarcn fc refroidifiant fontvnecrouftc
iurlemetalaquilzoftcntauccvneverge de fer ; mais i'or&lar-
N iiij
Î04 FREMfEît I.ITRE I>ES SINGVLA.
<rent & le plomb qui font méfiez, Se font plas pefàns > fc tiennent
au fond.La manière de feparer le plomb d'auec l'argent , eft faite-
non par la forée du feu de charbon , mais feulement à la flamme
de feu de gros bois, qu'on foufïïeviolcntement. Il faut pour tel
affaire que les foufHets foyent couchez d'autre manière que les
premiers : car les deffufdids font droids Vfouftenus fur le nez : Se
ceux qui font pour feparer le piob,font couchez obliques , fout-
flex par mcfme moyen par laforce de leau , Se eleuez de quatre
bras5comme auons.dit.Le plomb ,'^qui fort ainfi foufHé à la flam-
me du bois, eft différent à celuy qui eft fondu aucc le charbonr
&: ne femble pas eftre plomb , mais pluftoft excrément de metaL
MoUui- Le vuigaire des Grecs l'appelle Moliui, qui n'eft autre chofe que
x^W. plomb en corps de Ly tharge, qu'on appelle Molibda?na:iâquellc
Moiiâqu. puis après eft refondue pour en faire le plomb. Et d'autant que
l'argent en fera mieux purifîé,d'autant en ferail plus fin. Les La-
tins ont nomme l'excrément de l'argent Scoriacé eft ce qu'on dit
S~mA* en parolle deshonnefte inerde d'argent , laquelle les mecallaires
iedent comme chofe du toutinutile. Les Grecs 1 appellent vufc-
itptetK gairement Lefchen :- Se toutesfois c eft vne didion que les Aie-
mans leur- ont apris. Quand iî^veulent recuire la Galène, c eft a
direenfaimlexcodion, après qu'ilz l'ont quelque peu commi-
nuee^ilz la iedent deflus du feu de charbon & de bois , qu iîz ont
G&M* Jà fait en la place. Leur Galène eftâc dure comme pierre de Mar-
bre , fêroit autrement forte ala fournaife , s'ilz n'en faifoyent ex-
codion. Bz.la mettentauee beaucoup de bois Se du charbon,fai-
fans vn lit de Galène , Se confequemment méfient les vns parmy
ks antres. Se y mettent le feu , iufques àce qu'elle ait change de
couleur:puis la mettent fondre en-la cheminée. Liuius defenuac
é&fa. les mines de Siderocapfa, anciennement nommée Chryiite, dit
que les Roys de Macédoine eurent bonne iffue de leurs guerres^
pour le^grand rcuenu du tribut que leur rendoyent leurs mines,
Se furent illuftres Se renommez par l'or Se l'argent Macédonien.
Àuffi faut il croire que fans cela Philippe ne fuit venu au bout de
fes entreprises, neauffi Alexandre fon fiizneuftpasentrepnns
chofes fî difficiles.Mais par luy les Roy s ont fait de grads efforts.
ëùrchefâe parquc,yfaut donner l'honneurau fcul or Se argent d au oir mis
toumenm* ûn ^caucoup 4'entreprinfes Se fortes guerres, dont il auoit efte
îm" autheur,Paulus ^Emylius Romain , après auoir vaincu le Roy.
Eerfeus^
OKSERVEtS VKK V. BILOM. IOf
Perfeus défendit aux Macédoniens de ne tirer plus d or de leurs
mines à fin de diminuer la richcfFe des Macédoniens,» croiltrc
celle dès Romains. ^ Solinus eft auflïauthcur ,que les mmesde
Macédoine ont efté riches en fin or.
^utridifcoursde Ford»Pem,(^às Indts-.&aufiL minwecom-
mmtksrJtiMrestffmtntîorMtl" ducMdvgxmdTurcfomforgtxs
&qu,l»yaqtteivneforted'ordeiK*teritouteTur<iMe.
Chapitre Li.
, E^randTurcafaitexpreflèment commader qne
• YovSC l'argent de Siderocapfa foit purifié & affine?
, fidelemen^ainfi qu'il faut. Dcûa auons dit com-
[ mëtlouaaccouftumé defeparerleplombd'auec.
jsgç^J l'or &: l'argent : mais il n'y a pas grandes cérémo-
nies en feparant l'or d'auee l'argent. Cela eft fait tant feulement
t>ar la vertu de Peau forte , dont vn Arménien en a la charge , le-
Lelapresquilaparcyrargentd'auecror.illefaitbatreenlame! > Pmr t§Btr
de forme quarrced'vn pied de large,» de deux pieds de long , » j „,
de 1 cfpoiffeur du dos d'vn rafoir.Lefquelles il met en vn vaifleau
bien proprement pour les faupouldrer faifant premièrement va
lia d'vne pouldre copofee du fel.d'alÛ de glas,» de tuile broyée,
mettant vn carreau d'or défias vn lit de iadide mixture puis le
eouurant de pouldre,» mettantvn autre carreau par deffus,puis-
aprescouurantainfi confequément » enuelopant leslamesdor
dcladiaemixture^mettanttoutesleslamcslesvnesfurlesau-
tres enfemblemcnt ., » arroufees devinaigre. Puisapres aucc la
force de feu fait decharbon .fonclaiffees calciner & affiner tout
vniour artificiel iufquesàtant que l'or foit bien purine, ^du-
quel en après font forgez les ducats:lefquelziaparfaitsfontpor-
tcz à Conûantinople. Voyla donc comment les hommes fegou- tMu*
«ernansparleursloix.ontvouluquel-ordeducatihftpreferea^^
tousautrWçâchân5^^1^1"^11^^1161"*11""^0"
d-ormoflnoyé.ontcommunémenteftemcneZ.L'ormoflnoyeea
Turquiecftfinordeducat:.lequeledtant obeiflant & délicat,
qu'il fe peut facilement ployer amiablement. Duquel la fplen-
deurxomme aufli de tout autre,encore qu'il foit manie de mains-
^esJn'eftr^-fouaaineontamint,mais.touûcairsdemeureclair:
î
IQ6 premier, liv^re dis singvlà.
&beau en fà couleur naturelle. Mais les autres métaux frottez
Contre quelque chofe, laifïent vne teinture de leur couleur : ce
que nc-tait ror,qui ne laiffe point le lieu coloré , ne de iaune , ne
de noir. Cen*eft donc de merucille il fa fèulecouîeur nous inuitc
à l'aimcr,mcfmemcnt qu'elle refïèmbîe auoir quelque participa-
tion auec les rayons du Soleil, 6c a tant de vertu a que comme (a
beauté fc prefènte planante à noz yeux , tout ainfl vn chacun le
defire Se fouhaitte. L'or mangé en quelque forte que ce foit , en-
tier, ou en Hmetïre,ou en fueilic^ne peut nuireà la vie, corne font
les autres mctaux:mais pluftoftconrbrtc grandement le cœur^Sc
rtftuâeîor. la vertu vitale. Etcobicn que les ancicnsCrecs nayent rien eferic
de telle vertu, tot*cesfois les autheurs Arabes l'ont trouué par ex-
periéce. Mais à l'ombre de fa vertu,queîques trôpeurs ont eu oc-
Trdmftnt ca£on $£& faire de trefgrands abbus : lefquelz trompeurs , vou-
w on fait m j2ns âUOir vn nom plus excellent que de medecin,fe font fait ap-
peller guerifïèurs : faignans auoir trouué quelque vertu nouuel -
le en l'Or : & l'ont fait mafehercn doubles ducats par quelques
ieunes enfans,ies nourrifïàns à leur mode,fè faifans referuer la fa-
îiue pour faire vfer aux malades. Mais pource que ce font trom-
peries euidentes/fommes d'opinion que déformais on ne les laif-
lê impunis.
J>ôntefevetiu Zvcatfion des faites qù on a racontées deU toifon dur.
Chapitre lu.
Àintesfois auons ouy efmouuoir difputcs entre
► gens de fçauoir,doutas fi Ion trouuoit de For auec
le fablon es riuieres,come Ion a eftimé:de ce auos
efté incitez d'en coter briefuement quelque petit
^^ w _ mot en cefè endroit. Il eft certain que les hommes
ont de tous temps cherché l'orje mieux à propos qu'il leur a efté
pofîîble. Au ffi l'expérience leur ayat apris, que celuy qui eft mef*
léâueclcfâblondes riuieres , eftant plus pefant&cn fi menus
grains &: déliez , va au plusparfond , & donne peine à le feparer.
Parquoy s eftans imaginé vne induftrieufè manière de le tirer,
l'ont recueilly auec des peaux de moutons à tout la laine. Cela
jiousfait prefuppofèrqu'ilzn'auoyentencor l'vfage*du vifarget*
duquel l'on vfè maintenant. Car telle manière de le feparer auec
les peaux de moutons,eft hors d'vfage.Mais de cefte manière de
FaMesfir
la taifa»
d'ûr,
ïlmdesth
mères.
< CfB SERVE SJ PAR ¥. BEXOîT. IOJ
feparer l'or &le trier d'auec le fablon, eft nec vne fable far la toi-
fon d'or. Ceft que lafon auee Tes Argonautes ayant nauigé en ?f£jf™ u
Pont,& paruenus à vn flcuuc Phafis,ou les paifans le feparoyent \oirm£or^
auec la toifon , eurent grand argument d'en reciter beaucoup de
ehofes à leur retour: mais ce qu on peut dire d eux , eft quafi fem- pUuues %d.
blabîe à ce quedirons des Efpagnols & Fortugalois , en parlant ont des
de l'or du Féru. Car ce qui a mis les Argonautes en bruit ,.n a pasgramsdor.
efté vne toifon ou peau de Belier-.mais ça effié l'or qu'ils en rapor-
terent en leurs vaiffeaux. Combien que Pline aicde&t-mis quel-
ques noms àcs riuieres qui ont bruit d'auoïr de 1 or auec leur fa-
blon:Sieft-ce que les'auons bien voulu inférer en ce lîeu.Lc Ta- Ta„uh
gus,en Efpagne:Ebrus,en ThracerLe Rhin, & Danpbe, en Aie- .gfc.
magne: Ganges,en Indie:Pa&olus , en Hongrie : Le Thciin qui shin.
fort du lac Verbanus:&Abdonaqaifortdu lacLarius:Àda,& le &*»&*
Pau en Italie, font renommez déporter l'or mené auec le fablon. ^^
Et pource que fçauons qu'il y a beaucoup de natios qui ont opi- ^t '
nion,que les poifTons nourris es riuieres qui ont bruit dauoir de j^^'jrah^
h>r,s,cnnournffent)&: le prennent pour paftureài nous a fembïé ^,
auoir trouué occafion d'en dire quelque petit mot,&: cftre chofe ^é?dom.
digne de noftre obferuation,d'en enquérir la. vérité: Car les habi- ucm&rm.
tans-dc Pfcfquere au riuage du. lacde Garde^& aulli de Salo >fe ^dx.
font perfuadez que les Carpions de leur lac,fc nousriflent de pur ^|^
or. Et pour ne parler de ûloing,gradc partie des habirâ\duiion- ^
nois penfent fermement que les poifTons nômez, Hûbles & En>
blon^nc mangent autre viande que de i'or. Il n'y a payfan au cô- Bimhles.
tour du lac duBourget qui ne voulu ft maintenir que leslauarets, Emhlom.
qui font poifTons qu'on vend iour-nellementà Li5 5 ne s'appaftëc ucd*s<wr*
que du fin or. Ceuxaumduriuage du las de Pàladrou en Sa-^
uoye penfent que rEmblon>& auml'Ombre ne viucnt d'autre *£££
chofe que de ft>r. En cas pareil , ceux.de Lode au pays du Mila- Lode^
nois3nous ont dit que le poifïbn nommé Thcmolo ^ou Thème- 7^^^
ro,& an ciennement Thy malus , s'engrefïè de la pafturedclor: rhjmuL$&,
mais ayans regarde plus curieufement es eftamachs &m\ chacu n,
& obferué chaque chofe enfaifantleurs anatoraies vanons trou-
vé par lcu, rs entrailles^u'ilz viuent d'autres ehofes & non de 1er:
& que les LauaretSjHumbles^OiBbres^mblôs^arpionSjThe-
mcrcs,n ont eftomach qui puîné digérer Tor : combië que les ho-
mes du paï$4ifcnx en cômû proueibe^e les poifsos nourris d'a^
* O i]
loS *REM'I£& LIV2R.Ï DI£ SÏNGVLàJ
fontexcellens par dcffus les autres : voulans entendre des defTu£.
di&s,qu i furpafTent tous autres poifTons de riuiere en bonté feu-
lement. Mais le vulgaire ignorant îa chofe à la veritéjiafTeure cô-
£0r tîefi mc ^ clic cftoit vraye. Il eft tout arrefté que quelque part que l'or
troméfinon ^°lt trouué,cft affiné auec grand' peine Se grade dçfpenfe, n exce-
4uecdej}e»M ptant non plus celuy du Peru que de l'Indie. Les Efpagnoîs fa-
«f. cent Se auancent tant qu'iîz voudront de leur crédit, 6c efcriuent
Miracles des miracles de FOr du Peru : toutesfois il appert en quelques pafïà-
EftAznok. gCS .£ç jeurs efcrjt$5 ea ja nauiganon des ifles Occidentales , qu'il
tordit Verw.^ &ut fondre de fa mine , comme en tous les autres lieux d'Eu-
rope. Et qui les voudroit croire, il fèmbîeroit que chacun arri-
iV iirUie. uant en Indie,moyennant qu ille vouîuft bêcher , corne qui aba-
troit vne vieille mafurc , feroit quitte de l'emballer pour le char-
ger fur nauircs. Mais il appert que cela eflfaux:car la plus grand*
Groupent, partie de celuy que les marchands ont rapporté , cftoit de celuy
que les gens du pays leur ont trocqué à l'échange d'autres hardes,
6e principalement àcs ioyaux de femmes. Soit quelles Efpa-
Bitt'm des gnols en ayent apporté moule grande quantité à celle première
Efëtgnok. fois qu'iîz y furent , il ne faut pas qu'iîz y retournent maintenant
duperai pour la féconde, pour en recouurer autant : car ce qu'iiz rirent
lors qu'iîz arriuerent , ïc peut comparer à l'exploict. dVn fergent,
qui dcfgâgc vn pauure homme,îu y emportant tout ce qu'il trou-
uede métal en fàmaifbn , qu'il auoitia de long temps amafïe
pour fon vfage. Or fi le fergent a emporté vne fois le bien qu'il
a trouue chez vn pauure homme 3 quel cfpoir prendra le pauure
payfàn d'en recouurer autant , fïuon long temps après ? Le
fèmblable faut entendre des Efpagnols , qui arriuans lapremie-
iflesdiêTeru* rc fois es ifles du Peut, bufqucrent amenèrent il bien les mains
à celle fois , quilz pillèrent tout l'or Se l'argent que les Indiens
auoyent ia de long temps amafTé par les petits. Pofons le cas
qu'iîz en veulent maintenant retourner quérir autant , ne fau-
dra-il pas qu'iîz donnent terme aux Indiens delà leur amaiTcrî
Mais à la vérité il leur conuiendra attendre moult Î5g temps , ou
bien mettre moult de gens en ceuure , Se faire la defpcnfe qui y
eft requife : caries Indiens l'auoyent tiré des minières par la for-
. , ce du feu, tout airifî que nous faifons en Europe. Nousîeprou-
j»ëem ueros par ce qu eux-mefmcs en ont efent. Et entât que les Indies
n'ôcaucun vûge de monnoye , il eft à prefuppofèr que leur argée
Ô* SERVAIS Î'AU *. 'BIXO^' 109
•&orcftoic forgé en vtcnfiics. Soit que les minières des Indiens
foyent plus fertiles qu'elles-ne font ailleurs , plus faciles, Se de
joindre defpenfe qu'en Europe, ou bien que leurs fleuues ren-
dent l'or méfié auccq le kblon dc^mciïïeure forte que par deçà:
Si cft-ce qu'il faut grande manufadure Se defpcnfe à toutes les
«leux fortes, auec longueur de temps pour le feparcr de fesim-
*nundicitez,&: non comme pluficurs auoyent par cy deuant Pen" - „
fé qu'on le trouuaft ja formé en lingots , Se que tous ceux qui al- u o or-
loy ent le quérir, n auoy et la peine que de l'empaqueter à douzai-
nes^ l 'embalierpour le mieux charger fur les nauires. Et que la u^ ^
chofenefbit tout au contraire, lesmefmes autheurs parîansdu indespifon.
Roy des Indes qu'ils firent prifonnicr, recognoiffen t par lcursiL mer.
lires qu'il y a beaucoup de maifons députées à fondre lor Se far-
.gent,& que For minerai du platpays eft beaucoup plusdifficiïe à
amaflérqueceluy des montagnes, qui font deffus les riches par-
ties duPeru, SÉquclor des montagnes eft méfié deftain&dc
foufFrCj&quepourlefeparerdc l'incorporation des autres me-
taux,iis allument vn grand feu ardent Se vif en la montagne, le-
quel en echauifant le fouffire ,deflie l'argent de la coiondion des
autres metaux,& fait efcouler l'argent Se ruiffeler tout net. Def-
quelles parolles prinfe du Hure des Efpagnois,il eft manifefte que
l'or Se 1 argent y eft arfinc Se tiré des veines de mcfmc manière que
nous faifons par deçà: car quelque part qu'on le prenne, il faut
coufiours entendre , qu'il cft minerai : Se par confequent accom-
pagné de pluficurs autres métaux. Parquoy s'ils en ont quelque
foisapportégrandequantitéàvncQup,çaeftédclarançon des
Roys, Se de Tefchange qu'ils ont trafiqué de leurs marchandifes.
. Nous auons dit cela> pource que plutîeurs penfoyent que lbr eft
fi commun en ce pays là,qu on n'y ferraftles cheuaux,& les char-
rettes,^ charrues q de pur or. Lor de l'Inde orietalceftauiîibié 0r^hR^
tirédes mines comme celuy des ifles occidétales du Peru. Pour ^^
les ifles orien taies de lTnde,encëdons les pays d'Ethiopie,ou do-
mine le Preftre Ian. Les lettres eferitesen Latin , Se qu'on peut
voir imprimées , que le fufdit Preftre Ian efcriuoit n a pas long jA» &
temps au Roy de Portugal , font foy qu'il luy promettoit mille «S*«
* fois cet mille dragmes d or,qui eft la fomme d'vn millio de drag- en
mes,moy ennant qu'il feift la guerre contre le Turc. Et de fait le
Preftre Ian layMUa gens de guerre^ argentpour le combatre*
;"*'.■ O iij
1*6 PREMIER LITRE DES S'X'N<TVL A.
Ccft vnc moult grande, fomme d'or qu'vn million de dragmes
baillées a vn coup par les Indiens au Roy de Portugal:* toutes-
fois ceneftpasàdire qu'il n'ait fallu moult defpendre àlet-ker
Lettres du àcs mines . Ledit Prefbe ïan enuoya vne autre lettre au Roy de
rreftreim. Portugal ,quatre ou cinq ans après lapremiere, par laquelle il luy
prioic qu'il luy cauoyaftgcns du pays des Chreftiens , de toutes
fortes de mefticrs,& fur tout des bons ouuriers à eftendre l'or en
£ueille,& tailler medalles,bons monnoyeurs,.&:graueursen ec 8c
. argent. Confequemment de-bons Imprimeurs , pour luy impri-
mer des liures en moulle : mais fur toutes autres chofes deman-
doit grand nombre d ouuriers bien-experts es mines , fçachaos
fortifiée requis à ges metaïlaires, cognoiflans la purité des veines
de tous métaux, & qui eufïèntla feience de bien feparer 1 or&
forgent de fa veine, d'aucc les autres fortes demetaux. Parquoy
"cft manifefte par les CuCâites lettres „ quetout For ôc forgcn&des
Indes orientales, eft artificiellement tire de ces mines par Findu-
c ftrie & grandlabeur des metaïlaires, don t les vns font mieux ex-
perts cafort que ne font les autres: & que le meftier n'eft pas égal
a*ous,non feulement de fon pays, mais auffi'du pays d'Europe ôc
x*&t tio ^Afîc* Ecdcvray pluûcurs metaïlaires fepaEtirentdcs mines de
M 4ZI ^eme' & dc Saxonie, &auflidu pays d'Memagne^pour aller
èsEfiagnob b&Q*Zneten Indie : qui y furent eonduiâs aux.defpéns du Roy
mctët fa, fcl~ormg^- Partant, ifoppert qu'ils ont accouftumé en toutes
lesdeux Indes tirer 1 or âcs mines auecgrofiè âefpenfe ôc logueur
de temps,comme nous faifons en Europe , & que les Efpagnols
opt eu tort d'en auoir parlé fiauantagcufcment,fçach⣠bie qu'ils
orlorient n^ncfcf'moYcnt?^^ vérité. Età fin d'en parler mieux, auoss
mloceitë' chfrchc llCQ Pour Pro"uer que For tiré Se affiné des veines d'Oc
ordefeptenlf^^ ckau&fin & paiÊût queftccluy qu'on a tiré des mines
tmu~ a Orient: & eeîuy du feptentrion. , comme celuy. de midy. Car
ordemidj. combien que l'Orient eft plus chaud Se fee que le pays del'Occi-
dent:& que le Septentrion eft plus froid.& humide que le Midy:
toutesfoisFotnelaiife pas d'au oirfa.co£ion auffi parfaiteen vn
Beucommeen l'autre: car celuy du pays le plu s froid du monde
crcaufliparfaitcommeaupluschaud d'Ethiopie. Nouiaevou-
lonsquel expérience pour leprouuer. Attendu que toutl'or,qui
eft tire des minesde quelque veine que ce foit,s'il a elle aiSné,efl
rnitwûi garfaicen vne gartdu monde comme en l'autre :n'ayât
-OBSERVEES fAR *. .*E;LO'«> H€
e^ârdàlatemperaturcdulicudechalcar ou froidure, de iiccité
ou humidité. Et à fin que ce difeours ne foie trouuérropafpre,
nous le voulons demonftrerpar raîfbn correfpondantc à Ja choie
ta CàitcEt difbns que £ quelqu'vn nous apportoit de 1 'ofd'Ethio-
pie,qui eft le plus chaud pays du mondc,ja purifié & affiné forçat
de fa mine : éc en feift comparaifon auec vn autre qu'on auroic
apporté dVn autre pays le plus fèptenttionaL&: le plus froid qui
{bit: & qu'vn autre feift le femblabîc de celuy de l'Orient ^ vnau-
tre auffi de l'Occident: touseftans affinez viendront à vne mef-
me valeur, &" môftrcront mefme couleur fur la pierre de touche.
Careftans affinez par lapuiflànce du feu,Fon trouueraîa pafte de
celuy de Septentrion,qui ne fera ne pirene meilleurc,ne n auroic _
différence àcclle du Midy. Et que tous les quatre feroyentainil
pendus demefme qualité. Les autres métaux , &fuft-ce de ceux
qui font les mieux affinez , font d autre nature. Car quant à eux,
ils font blcfTez pour bien peu d'iniurp. Mais l'or , encor qu'il fuft ^ ^^s
tiré plus délié que ne font les fîletsde la toile d'vnc Iraigne,&: en- mt,t^
icueiy entre les plus corrofifs medicamens iubiimé & Verdet,fel --
& vinaigre, encor qu il y demeuraft deux mille ans, il ne feroit
pour cela çorrompu,maisau contraire y feroit affiné. Or fidaue-
ture il fe trouuoit queiqu vn qui en contredifantàcecy , propo-
fàft quelques animaux ou plantes5oif leurs fruids pour exemple,
& nous niaft ce qu'en auons eferit , allegant qu'vn fruict eft plus
parfait en vn pays qu'en l'autre , Se auffi qu'vn animal eft plus fain
en vne contrée qu'en l'autre : difant auffi que îe fer, l'aciérie cuy-
ure,Iepiomb,& l'argent , font plus fins en vn lieu qu'en vn autre,
nous luy conreflerons ces choies fufdi&es eftre vrayes , mais nie-
rons qu'il y ait choie en nature qui dure à reternité , & refifte
contre toutes iniurcs , comme fait l'or. Parquoy toutes les cho-
fes fufdites eftans fubiectes à altération, fc muent & corrom-
pent pour peu de choie , &c acquièrent vne qualité bonne ou
rnauuaife en naiftàntôd en prenant fin. C'eft de là que quand el-
les font en leur vigueur ,. elles ne font pas tout vn. Mais For torinemw*
eft incorruptible , qui tfeft point fubied à telles mutations, f&k.
& toufiours tant que le monde fera 5 auffi ièra il permanent : $c
qui plus eft , ne l'air , ne les autres cléments , ne les vents ? ne la
mer,nc nuifènt n'aident à lehafter ou tarder, corne plufieurs onc
O iiij
lAftyS a
jli PREMIER tIVRB DES S^NGVLÀ. ..'_'.
penférmahCeft fa nature qui le rend tek Àuant partir deSidc-
rocapfa,montafmes defitis la foramicé de la plus haute montagne
vo4fme : nous vifmes toutàela-ir Fiflede Lénosr& lemôt Athos,
qui font dedans la mer Méditerranée. Puis regardans vers terre
fermede Macédoine, veoyonsvn pays inégal &montueux, qui
itfaysœ duretantquelaveuefepcuteftendreenloing.D'aiiatageveoyÔs
idoine, deux lacs, qui ne font qu a demie petite iournec delà. Outre ce
on pouuoit aifément difeerner les pays des miniers, & les chenu-
uesen ut* nee$ & tom le& fourncaux> qui fontefpars ça & là par les fufdices.
cedwe*. mon\agnes > tant de coite d'Orient que d'Occident. En après
veoyons les deux riuages du pied du mont Athos,de la part ou il
eft conioind à Macédoine : &: femble il à le voir de loing , qu'il y
ait bien peu de diftance ornais eftans là , trouuafmes qu ily a plus
d vn demy quart de lieue de iargeur.La plus grande partie des ar-
M^Jfres. kres { çQnt fauuages par les montagncs,font Haiftres , que les
qfin*. Q^csnommcncOftri^Foutean^qiulsnommcntOxi^Chef-
^Tx^ nes,Chaitaigniers.Les cultiuez des iardins.font Poiriers , Pora-
chtfies miers, Amandiers^oiers^liuiers^Ccrifiers. Le commencemec
eûfi^ de ce village de Sidcrocapfa a efté de toute antiquité en eftre,qui
^w» auoit défailli quelque temps : mais depuis douze on quinze ans
il s eft grandement augmenté. Nous y veifrnes faire vas médecin
fedé"ne nefuDerftitieufe,dont auons bien voulu efcrirekreccpte.Cefuc
fop}mm .v *Turc medecinant vn luiffort malade de la rate,en pnnt la
JS* rnefure aucc du papier par deffus le ventre : &r porta la mefure à:
<çn ieuneNoyer,&: coupa autant de f on efeorce que la mefure de
la rate cftoitgrandc : & anec plufieurs paroiles en Turc qtfil dift,
&: autres cérémonies faites,retournaau Iufè& luy mift l'efcorce
defTu s le ventre : en après il la pendit en la cheminée aucc vn n\.
& afTeura au Iuif que comme l'efcorce feicheroit , tout ainfi forL
mal diminueroit..Et pourec qu'afliftafmes à celle médecine , Ta-
lions bien v=ouîaefcrire.Mais le Turc nous fembla affezmauuais
médecin d'auoir cherché la rate au milieu du ventre fur le nom-
bri^qui eftoitJgne quiliuft mauuais anatomiftcNous trouuaf-
sç&L mesdeux efr/eces de Serpensen ce lieu, que n'àuios encorepoint
saptk veu ailleurs: Les Grecs de leur commun vulgaire nous les nom--
*?*• moyent Sapidités autres Sapiti,qui font diâions corrcfpondan-
Tyntes' r tes à ce que les anciens appclloyent ScpsouSips. Les Pyrites,© u-
*»#&*- Mârquâficcs de Siderocapfa ont changé leur nom Grec à vn,
^ ^ * " effranger;:
cariÎB'yaceluy aeshabitâns,qaclquiiroic9eftrangcr ou Grec,
qui ne les nomme Ruda. Les autres difent Qwtz ouRuz, aia^/
Manière des Allemans. Et eu l'cxcrement que les Latins nom-^^
ment Scotia, les métal laites, tant Serniens, Bulgares, Albanois, ^^,
luifs/Turcs^ue Grecs la nomment du nom-Aieman Schlakna.
Il y a encorcs v ne autre efpece d'excrément différent à Schlaken:
&n'y aceluy quUiele fçachenommer Lesken , quieft pluspe-
fant que le Schlaken. Ce nom nous fcmble pluftoft eftre Alternai
que Grec : qui eft vne efeume fpongieufe Si legicre , comme eft
Fefcumedvn métal : carilefttiré nageant par dcffuslaminc de
îbr Si l'argent fondue, Si eft ietté hors de la maifon.Car quelque
part qu'on fonde le metal,onnes'en fert non plus que d vn ^excré-
ment inutile. Mais le Lesken,ou Leskena,eft bien fort pcfant,6?
fert d'auantage que le Schlaken :car les Alternas & Bohcmcs^cn ^_
feruent à méfier auec les autres métaux. Et comme le Stimmi, ^\^
que les Latins nomment Antimoniurn, eft vn métal commun, nmm
refîemblant au Lesken,prouenant de mefmc manière , Si mefme
matière, Si qualifemblable en toutes fortes, Se fût desEyntes
d'or Si d-argent/eruanc grandement aux fondeurs de cloches, Se
aux potiers d'eftain, Se principalement à ceux qui fondes mi-
rouers,& aux fondeurs de lettres : toutainfi le fufdu: Leske pour-
voit bien feruir méfié auec autres ehofes.Mais il n eft trou ueper-
fonne a Siderocapfa quile vucillc faire feruir : &: toutefois fouî-
mes certains qu'il feroit fort-propre à fondre auec du fer pour fai-
re des boulets d'artillerie : Se les amenderoit grandement , & ci-
par<meroit beaucoup de la defpcnfe. Sieft-ce quenelevouluf-
mes^direàperfonncde ce pyslà, d'autant qu'il nous fembleroir
auoir fait vn grand mal : veu mcfmement qu'il yen avne fi gran-
de quatité par tous les endroias de la motagnc,qu'on en trouue^
roit facilement dcuxmilionsdeliures. Et non pas feulement la-
part ou 1 on fond maintenant les minières, mais auifrou elles onc
efté fondues le temps pafîé en diuers lieux de ladi&e montagne.
Mous nel'auons feeu nommer autrement , n ayans point entedu
fon nom ancien : car les Grecs qui font par les minières, ne rene-
nentquebien peu des noms anciens. Les habitans du territoire
de Siderocapfa , font grand amas des fueilles de l'arbritTeau , que
les Arabes ont nommé Sumac,&les Grecs Rhus^u'ils trouuenc ^.
€r.oifFantparlcfdites moatagnes : drfquene^lsefpoifTifleaticurs ^
Eftidtts.
Myrthcs.
Chejhei.
Semence,
de Sttmxc.
I£4 PREMIER LÏV2LE DJ&S SINGVIA,
peaux, & tannent leurs cuirs : Comme ceux d'Egypte font des -fi-
ïiques d'vn arbre qui leur eft fréquent, nommé Acacia : Se com-
me ceux de Grèce & Anatoliefont des calices des glands d'E£.
culus: &ceuxd'Efclauonie, de Myrthcs noirs: Se en France,
d efeorces de Chcfhes; Se en Lefbos'& en Phrygie , d efeorces de
Pins fauuages nommez Picea. Ec d'autant qu'ils ont abondance
du fu&litarbrilleau , ils en chargent les barques pour tranfporter
ailleurs; duquel ils recueillent aunl le fruiâ diligemment pour
vendre : lequel après qu'ils l'ont quelque peu defleiché , ils effor-
cent, prenans feulement la petite peau rouge qui eft defTus, ÔC
iettent le noyau durquieftdedans3&: la vendent par les marchez
pour fauJpoudrcr leurs viandes,foit ris^bouillons^rouets, Se au-
tres telles meneftres faites à leur mode.
B^rtts me=
tÂlkjues.
Dœmon
Jdetâllictâ.
Symts
£abron.
23 Hable me*
tallifte.
Machines
metAÏlifUS.
Vejcrîptiondeplujïeurs autres fwjruhrhezjrouuees es JùfS-tes mines y
& autour des montajmesdudît pays. Chaf>+ Lin,.
O vs allafmesexprcflèment regarder dedans l'vn des
ipiracles des minières, qui auoit n a pas long temps
cité d'vn moult grand reuenu à fon maiftre, qui efioit
Iuif: mais auoit cfte contraint de l'abandonner, com-
bien qu'il fut abondant en métal : car il y auoit vn efprit metalli-
quc,que les Latins nomment V&nion MeiaÏÏiats. Et pour autant
qu'il Ce monftra fouucntesfois aux hommes en la forme d'vne
Chcure portant les cornes d'or, ils nommèrent lepertuis fufdit
Hyaritscabron;&eftoitau defïusdu village qui s'appelle Pia-
u-its^n la montagne bien près du ruiffeau nommé Rotas.Mais ce
diable métallique eftoitû mal pîaifant, que nul n'y vouloit aller
n en compagnie , ne fèulct, La peur ou frayeur ne les engardoic
pas d'y entrer:car il y a encor d'autres diables metalliques:&: mef
mement nous fut dit qu'ils ne faifoyent point de nuifànçe. Il y en
auoit d'autres quiaidoyentaux ouuriersàtrauailleres mines.Les
machines dont ils (c fèment à tirer la mine , ne font pas toujours
d'vne façon : Car quelque fois la veine eft û baffe Se profonde en
terre qu'il faut deux cheuaux à les vircr.Mais quand la minen'eft
pas profonde en terre , il fuffift de quatre hommes à la mener.
AuÂî quelquefois la minière eft tirée à veine deiconuerte. Il fut
vn temps queles mecallaires fondans la mine auoyent grand pei-
OBSERVEES PAS. P. BELOîf. lïf
ne entour leurs fourneaux , d'autant que le pertuis qui c£au mi-
lieu du fourneau, par ou le vent des foufflcts aùTue, s*eftoupoic
fans cedè , teileracnt que l'excrément du mecal bouchoit le per- ^^ ^
tuis,& leur conuenoit chafque foislai(Fer leur befongne. Mais ^^
vn iour,en paffant quelque eftranger leur cnièigna vnc experien- mttdùrv.
ce pour remédier à cefte grande dilcommodité : lequel ils r>cftr-
merentpasfage de leur auok enfeignee fans qu'il leur couftaft
rien . Car s'il euft eu l'aduis de leur demander argent,ils fe fuffent ,
facilement cotifez à luy donner fix mille efeus, leur faifant von:
rexpericneeiquiefttell^queCcommeauonsditqueîachcmince u maniers
eft derai&ele vendredy au £>k5&: en après refaite lelundy enfoy- dcfonJxeL
Bant : auquekemps le fourneau Sda place font refroidis ) quand mmc. ^
le deuant de la cheminée eft refait , ils iettent force charbon au
fond dufourneaa ; puisictsent dcflïïs vn lia: de vcine}puis vn Ma:
de chat bon,& ainfi mettent delvn Se de i'autre,tant qucla che^
minée foit pleine. Cela font ils touûourspourla première fois,
&: puis après allument le feu au charbon,6i laiflentefcoulcrl'eaa
defluslarouë^aquclle en tournant fait fouffter lefeu , quin'arre-
fteguereàallumer le charbon :& petttàpetit en feconfummac
& diminuant fait fôndtcla mine. La foufEcrie dure aia£iour&
nuid fans ceife:&: comme le charbon februfle , te la veine fe
fondais iettent dedans le fourneau d'vne pierre blanche rompue
à petits morceaux, afin que le percuis du venende bouche. Cefte
pierre eft rel uyfante 5e graueleufe quHlsaiomment en deux fortes
feîoa<Huerfes nationsXar les Seruiens,Bu égares 5 Vallaques , Se
TurcslanommentVacouiticos, ouVarouimicos,oubicn d'vn
autre nom Grec Affucft. Cefte eft la pierre , que leur mon- r*emK»
ftra celuy duquel auons parlé cy deflus : & faut qu'ils en iet- *sw*&
tent en la cheminée trois ou quatre fois le iour ^pias^otrrnoms
félon que le metail fait de clofture au pertwis en -fe fondant> par
lequel le vent a ion nTue.il y a vn vilbgc au defTus de Sidcrocapfa
fituéfurlafommitc de la,montagnc aucofté du Soleil leuant^pa»^
nommé Fiauits^ui^eft moult difcommode:au0i eft il fealemeniL
faitdepetkes-maifonnettes couuertes de Limandes & de mer-
rain. Làbas au pied de la montagne ,-iLy a vn autre grand viHa- ^
ge nommé Seriné. Eftans.fur le mont, tromiafmes dagrands ^
monceaux de Scoria ou Schlakcn au deffus de Piauits.Et pourec ^^
qu'ileftioingdes ruifTeaux^auionscancxuvricJoutc^fçauoirE
R ij.
Serine;
ScorU-
III 6 PREMIER XTVR'B DES SINGVLÂ.
au temps pafTé l'on saidoit de vent au lieu d eau pour fouffler -la
mine : Carainfiqueconfiderions qu'il n'y auoit aucun ruifTeau,
& qu'il n eftoit rien plus^ray qu'on y euft fondu du métal, péfaf-
mes qu'on n'auoit point l'vfage de fçauoir adapter les roues qui
font mainrenat virées à force d eau pour faire fbufrîer les métaux
en fondât la minermais qu'o agitoit les foufrlets par le labeur des
hommes. Toutesfois {cachant que les anciens auoycnt grande
'Commoditede tirer Se parfaire les métaux, en fondoyent en gra-
nde quantité. Trouuaimes quelques ieuncs garfons Grecs, qui al-
loyent cueillans vne forte de Bruyère, q«e toute la Grèce nomme
vulgairement Phana. Quand voulufmes fçauoir la différence,
qui en; entre la Bruyère & Phana,ils nous f apprindrent bien aife-
éhana. ment, mon ftrans la difFeréce des deux à vne feule enfeigneiCeft,
muyere. que allans chercher de ladite Bruyère Phana , pour faire du feu,
neportpyent aucua ferrement auec eux pour l'arracher: car eftat
z tirée ,eft aifement arrachée de bien peu de force auec toutes fes
racines : ce que ne fait la Bruyère que l'on ne pourroit arracher
fanshoyau. Phana met fes racines obliques fur la terre, Sen en-
tre point auât non plus qi*e fait l'arbrificau de Ciftus,& le Troef
'CbMck pC. Lamer qui anciennement auoit nom Chalcis , n'eft gueres
qu'à vn quart de lieuë de Seriné , ou il y a v n port affez feu r pour
4es barques, quieft au fond delà pîageau fufditfme nômé Chal-
cis. Il y a plus de fix mil hommes befongnans ordinairement es
mines de Syderocapfa : Se pour autant que le village de Seriné eft
-quaûioignant la mer, Se que les fourneaux en font plus près y les
ouuriers viennent làfe pourueoir de viures-.&:auffi que les bar-
ques qui font au portées y apportét de toutes parts. Apres qu'on
afondu toutelafepmaine, &:qu,onarenduleroetaî,&feparéle
".AfS. plomb de l'or Se argent , Se que For Se l'argent font bien purifiez:
jefamn aiorsilnereftefinonà les partir par l'eau forte. Et encor que For
foit net , fi eft-ce qu'il eft purifié encore vne autre fois , Se af-
finé à la manière qu auons dicte :. Se de là il cil: ie£é en lin-
gots , Se puis tiré en verges longues de deux, ou trois toifes de
longueur, rondes,.&; groifes comme le doigt. Puis on les fi-
gue de petites coches , à fin de les tailler par petites rouelles
du poix d*yn ducat : car elles font ainfi miles par petits mor-
ceaux auec vn cifeau , Se marteau : Se puis après on les ap,-
platift. d'auantage en les pc&nt à la balance.. Et font coiçr
'.y fb'lSERVEE-S PAU >. BELOÏ. Ï17
>gneés, & fellecs en 'ducats en ce lieu mefmeSjpuisportees à Con-
Santinopîe.
Le lac qu'ils nomment denom vulgaire Pefcliiac^cra bien Co- ^, .
'uiosm'eft qu'à deux journées de Saloniki , & à demie ioiïrnce de coJk'
Siderocapfarou il y a diucriès efpeces de poiffons , lefquels auons
"voulu particulièrement voir, llz y pefchent vne forte de poiffon
?que les habitans nomment Laros , quia donné nom à vn oifeau l»o$.
•que les Grecs nomment Laros,&: les Latins Gauia, que les Fran- a^x
*çois appellet vne Mouette , &: ceux de Dieppe &: du Haure neuf Mouette-
l'appellent vne Mauue. Et pource que la Mouetteeft friande de " mCm
ce petit poiffon nommé Laros , en a prins le nom. Nous appor- clxrU.
-taimes des poifibns , qu'ils nomment Claria» En les montrant
en public , il s'affcmbla plusieurs ïuifs couftum iers de les mager> ïuifs m Sfi
:quf difbient que ce poiffon anoit des efcailles,&: quepour cela ils ?**.
.en pouuoyent bien mâger.Car les ïuifs quelque part qu'ils foier,
.ne mangent iamaispoiilbn qui n'ait efcaiîle. Mais n'y en voyans
aucunes , les inifmes en telle doute , & en fi grande difp'uzc encre
.eux , qu'ils cftoycnx prefts à Ce donner des coups de poing. Ceux
-qui eftoyent venus nouuellement d'Efpagne , aceufoyent les au-
tres,imputans cela à mauuaife couftume.Lcs preftres qui eftoiec
làprefèns,efpluchans chaque chofepar le menu , rcgardansle
ipoifTon plus exactement , trouuercnt quelques rudimens d'ef-
•cailles. Alors conuindrent enfemble, ayans conclud que fans
icrupule ils en pouuoyent bien manger: & toutesfoistrouuons
^que Claria n a point d'sfcailles , Se que c'eft ce que ceux de Lion
nomment vne Lotte, & à Paris vne Barbote. Nous trouuafmes &>&.
-auiïi vn petit poifïbn qu'ils appellent Liparis , ceft à dire gras:lc- Burbote.
;quel les autheurs ont îaiflfé fansdefeription 3 &: n en auons que le Pm^;-
feul nom en Pline. Les poiffons qu'on pefcheaudiâ: lac de Col- p^
lius j font nommez vulgairement de leurs propres noms ainû^*!
somme s'enfuitiPerchi, Pleft^PIatancs, LipareSjTurneSjGn'ua- j^^
di,Scbella,SchurnucaJPofufraHa3Cheronïa}Cla.ria.G!anos.Lei-Gri«jWfi.
quels noms des poiffons deffufdicts , les villageois de Pifchar, de scheiU.
E.edinaj&c de Couios, qui font fituezau riuage du lac/çauetcx- sehurmex.
primer en leur vulgaire.Nous auons veu apporter encor d'autres ^fij^^
petis poiffons de mer au marché 5 qu'on prenoità la bouchexl'vn 3^™u'
petit ruiffelet: les Grecs le nomment Gyllari, qu'eftimïons eCtïc Gi^
jscuxque Etuhidem9 appelle Gelariis;mais tels petis poiffons^ue cjlLrl
Mulets.
Cepbalopola.
dlteri.
Cottledon,
VmbiUcm
yenms.^
IlS PREMIER LrVRE DES SrNCTIA.
font autres que petis Mulets, que les habitans du Propontidena-
ment Cephalopola. Eftans les vallées de ce territoire humides,
& aufli que c eft pays de montagne , toutes les herbes capillaires,
Afplenon,Loncliïtis akera>Coti!edon3& plantes qui aimét l'hu-
meur, y naiflènt volontiers.- CeCotiredon autrement nommé
Vmbilwu$.Vencris*iiïc$.à\i toutfirare^qu'onneletrouuebien en
_ * j „ ., , piufieurs lieux de noftrc
l*> rrance:touterois pource
que laitons' fait retirer
auec fa fleur , Ôc qu'encoi*
n'a clic mis en peinture,
en auons cy mis le pos-
erai et
Nous auos nommé ces
kerbes , non qu'il n'y en
naiffe encor de pluficurs
autres manières. Toutes-
fois pour ce que lors que
eftions furie lieu n'en ef-
criuifmes d'auâtage , auf
fi n'en auos cy .voulu plus
adioufter. Et quelque
part que nous foyôs trou-
ucz,raut penfèr qu'auons
eferic iournellement ce
qu auos aoté en ce Liurev
Et lors que voulions rete-
nir ïesnoms des plantes
que veoiôs celle iournee-,
failïons diligence de met-
tre quelque petit rameau
oufueiiîe de chaque plS-
Ntc dedans vn fac : ÔC lors
squeftions arriuezaaipit
à repos,ou en l*o&sbfe,ti-
rions chaque fueille hors
àa Ùlc , l'vne après l'autre, & refermions ainfiquela vcoyos: qui
çjfccaufe qu'en auons nomm% tant par cy deuan t , comme auiSu
Oî SERVES S PAR P. BELOK. lï$
Ferons cy après, de moult vulgaires', qui font cogneues dVn cha-
cunJParquoy ce qui a fait que les ayons ainfi eferites , eft qu auos
voulu faire en tendre, qu'on les trouue en ces lieux là , tout ainil
comme es noftres : ioinct queportionstoufîours vn pic quant Se
nous pour les defraciner, comtBC auffi pour tirer les fçrpens de
terre,lors que les veoyons aller fe cacher-en quelques pertuis.
Les noms de plu/ieurs hefles fwuages. Chapitre Liin.
^Ous eftans enquis des beftes fàuuages qu'ilz co-
Ignoifïènt errer en leurs plaines Se montagnes,nous ?Ltogm.
^ies ont fpecifîecs par noms propres vulgaires com- -couuidk
)mc s enfuit : Platogni , Gouuidia agria , Agrimia, *£"*■
J Zarcadia5Agriomochtera,Squanzocheros,Laphi, <s%"y-
AîopusJLycos,Lagos.PourPîatogni,ilz entendent noz Daims: ^^^
psur Gouuidia agria, Bœufs fauuages , pour Àgrimia, Boucs ^^
eftains;. pour Zarcadia,Cheureaux:,pour Agriomochcera, San- Sfun^oche--
glienpour Squanzochcros,Porcs efpics, ou Hcriftbns : pour La- ros.
phi,Ccrfs:pourAlopus,Regnards:pour Lycos, Loups:pour La- Lq>hi.
gos,Lieures*Et pource que fçauons que la difficulté de les rendre ^°f^
par noms François Se Latins n eft petite , il nous a femblé neftre L^\
hors de propos,d'enefcrire quelque petit mot:& prendre le com- <*
mencement parleCheurcul,quieftplus frcquétenpays de mon-
tagne qu'en plaine. Quant eft donc à ce qu'ilz nomment Zarca-
dia,trouuons eftre diction approchante à Dorcas. Solin efcriuac
Capreamen Latin, entend la befte que les François nomment &?***>
Bouceftara, Toutesfois Theodorus à l'imitation de Pline tour- DJrcM- ,
nant Ariftote5pour Dorcada, a toujours rendu Caprea, Cène- c ■ ■£
antmoins il eft tout manifefte que le Cheuteul , ( lequel les Ro- r
mains de didion Italienne nommetCaptiolo,& lequel Ion vend
l'hyuer en Rome àialiure) porte de petites cornes ramées, quai!
femblabîes à celles d'vn Cerf, &: à qui elles tombent tous les ans.
Il eft de corpulence femblabîeàvn Cerf, excepté qu'il eft,pius
petit : mais a cela de particulier qu'il n'a en tout point de queue:
chofe qu'Ariftote aja notée. Ceft celuy qu'Ariftote a nommé
Dorcus. Nous voulons prouucr qu'il conuientauec celuy que
Pline nomme Caprea,fm on qu'il y a quelque petite difficulté au
cexte : mais le lifant en celte forte n y aura aucune difficulté. C**
Xi -V-.-: .'_■" •:■ ' • ■■■ "■ P iiij ' '■
Dotchs.
Zax.
J)orx,
Dorcalis.
Chdmùy.:
Cerna*.
ffird.-.
Iio PREMIER LIVRE DES SINGVLÀ.
prêts ( dit-il ) ramofa dédit nama,fed paru*. Puis après pour nec , Kfez
& difant , &fecitvtCeruisdecidua. Vous aurez lamefme fentence
d'Ariftote , qui eferit du Cheureul,en cefte forte.
InterComigera ( dit-il ) omnium quœ explorât* h wbemus ^minimum T>or~
■cas eft in ceruino quoque génère numeundus , *vt quiComua babeat omni-
bus annis deciàua. Les Grecs iont nommé diuerfemcnt. Les vns
Dorcus : les autres Zax , ou Dorx, ou Dorcalis. Columella a dk
Capreolus..VoikdoncqueleCheureulaeftécog«eu des anciês,
duquel eftant l'appellation vulgaire ^quaiî en tous lieux eft co-
gneudvn chacun. Nous auons voulu adioufterîe portraid du.
Chamois , queies Grecs ont nommé Cemas.Lc Roy le nomme-
vu Yfard, mais c eft vne antique didion Fxançoife. Les Latins
1 ont nommé Ru picapra: car leur demeure eft entre les durs &;
afpres rochers , tant pour y dormir lanuid, comme pour fe reri-
ret'fur iour après qu'ils ont mangé les herbes âts vallées.
Et à fin que chacun entende de quel animal prétendons parler^
î?auans fait reprefen ter au naturel.
LeportmBduÇbamolf^ouTfcrd.
Site .
OBSERVEES FAR P. BELQST. IZV
Si les cornes de ceft Yfard , ou Chamois eftoyent ramecs , Ion
potirroit dire que c?eft de luy que Plinca entendu,parlant de Ca-
prca,.quan d il difbit: Kecfccit vî Cem'& décidât. Car ils ne laiffen t
point leurs cornes Fhyuer non plus que les Boucs cftains : mais
ne les ayat point ramées, auffi ne peut eftre Caprea Jl a bien l'ha-,
bitu3edu Cheureul Se le pelage de femblable façon , mais eft de
diuerfè nature.Ses cornes font noires : petites & rondes,, cfteuees
au deuant du front,entre les deux ycux/ccroehecs à i'cxtremitér
defquelles eftfouucnt aduenu qu'en fè grattant le derrière des
feiîès , il £c les met en la chair fi auant, qu'il ne les en peut reti-
rer, Se ainiî meurt : car elles font reuirees en- manière d'vn cro-
eher.il eft de moindre coriage qu'vn Daim , Se Bouc eftain, ayac
vnc ligne noire le long de leipine du dos. Ses oreilles font plus
longues que celles dVn Mouton. Son. pelage eft 3c couleur fàu-
uc, ayant vnc ligne noire de chaque cofté, toute droide le long
dumufeau, venant de ^racine des cornes, &paflant par def-
fus les yeux finift defïûs Tes leures-Àufïia quafi corne vne eftoiî-
leau front. Le defïùs de fa queue eft noir, affez bien'garny de
poil ; Se eft ronde Se longue càm me celle 3 Vn Daim . L'appella-
tion Françoife du Chamois , nous fèmblc n'eftre moderne , ains clamoîs.
eft yenue de la Greque Cernas, dont JElian a fait mention. En~^Cemas-
cor auons à parler dvnc autre befte decefte cfpccc , à laquelle
ïà'ayanstronuénom François à propos,aiionsefté contrain&s de-
l'exprimer par fon nom ancien, que lesautheurs luy ont baillé,
corapoft du Bouc Se du Cerf, Se nommé Tragelaphus.- Il eft rr^Wm^.
femblable en pelage au Bouceftaki, mais il ne porte point de
Barbe. Ses cornes au ffi ne luy tombent point: qui font fembla-
bïes à celles dVnc Cheure :. mais font quelques fois entorfes
comme à vn Belier.Son mufeau Se le deuant du £ront& aureilles.
font de Mouto,ayant auffi la bourfc des genitoires de BelieTjpen-
date Se mouît-grofie. Ses quatre iambes, (bnt-blaches femblables -
à celles d'vn Mouton .*Scs cuiiiês en 1 endroit de defteus la queue
font bîanchcSjla queue. noire. Il porte lepoiî fi longen Tendroict
de l'eftomac^ deifus &j deffousle col3qu' il fembk eftre barbé.Il
a les crins défi us les efpaules ,&<£eia poiâr^c Ion gs de couleur
Boire,ayant deux tafehes grifes^vaejen chaque cofté des ÛlcsiSe .
auffiîl a les narines noires &. le mulèau-bEc^ôme auffi eiitout le
dejffous du ventre. Or pource que parlons cy après de rHippela-r
&ipfck*
m, *rfmifhl tivîLS i>rs sïngvw,
phus, voulons faire entendre queîe Roy François auoitvnche-
ual qui auoit le derrière de Cerf, & par cela plufieurs penfoyenc
quii deufteftre nommé Hippeïaphus: raais-eek ne peut eftre.
Car Ariftote entend que Hippeïaphus porte -des cornes. Aufk
dit on quele fufdia eftoitengedré d'vn Cerf, quiauoit failli vne
iumenren vn bois : ce qui n eftpas de Hippeïaphus : car Hippe-
ïaphus eft animai par foy,tel que dirons ey après. Refte mainte^
mnt àmettre leportraiadccc Trageîaphus ,-vcu meimement
,gu*il n'aencor pointeûé vcuailleurs.
PortraiBdeTugelctphiif.
^ ^ousauonsditquelesGrecsnommentlesDaims-enle^
PW*. ^afre Platogna^WcnnerrientPlatycerotas: toutefois lonnc
*2&£* SepoinL
*£ f^rqueLiMerpreteso^renduBama II W"^£*?
#~ dSSulenceduckauiH eft^us -grand que le Choure»!,
œais-dîferent en couleur. Vn Daim porte plus petite tcCtequc le
Cerf. Àuffi Ces cornçs luy tombée tous les ans comme a vn Cerr,
fcfquellesil aaduanceesen auanc outre lacouftumedes autres-
II eft fauuc deffus l'ekhine,ayat vne ligne noire par deflus le dos.
SaqucuccftlongucquiUiypcadiu%cs-(ùricply^^rrcts,co-
me à vn VeauJA aduient rouwetcsfoisqucleurscoâeifontmou-
chetez de taches blanches, qu'ils perdent en v-ieilhflant- comme
aum^ aduient fouuent que; les f^^^^ cemesd*
tellement qu'on les iugeroit eflre eheures,n cftoit qu elles ont le ^ ^,
poil moult court. Loo- fait monftrc -de. fes cornes dcxccUcntc ce^te^
grandeur en-dïuers îieux^ome font celles qu'on voiten lajnon- ^
teedu chafteau d*Âmboife.Lonvoitauir^necn%ic entaillée^
pierre d'vn autre befte decegenrc/ac^iloiiamislescornesdu
. vrayanknal qui lesauoit portées: qui nous afemble; digne d'en
faire mention : &: croyons queceû celuyqa'Ariftote-a nomme BMU$m
Hippelaphus.attendu qu'il a dcîa^arbe-commele Bouc eton.
Q uoy qu'il en foitceftoit vn animal moultrare , U penions que,
sWeuû cftéveuem France, on ne l'euft pas fait, reprefenter ca
effigicHe relief auecfes cornes au palais d'vn Roy v.
poifnfqvwyfiefçhc. Chapitre-!.*..
E Siderocapfâ allant pat mer àk ville delaGaual- qbm!U.;-
>le5qui anciennement auoknom Bucephala,ii n'y Mucefbd^
"auroit que demie iourneede chemin: mais allant
par tcrreil y.en a deux grandes , ô^ fautiong temps
^ ^^r fuy uir la mer : car le chcmiruourooye fe courbant ^^
en arc , pource que c eftvnc plage ooiinc profond , qui contient j^.
tant ceïuy de Cbalcis,que de Stximone. Hefl moult fréquent en ^0çAa^
lierbes & arbrûTeaux.Les plantes d'Àndrofaces, Ciiamxfyce, & cUm^^m^
Soïdandîe» autrement nommée ThalafTocrambe, &îesefpeces SoUmd^r
de Tiihy malks^My rfmites , Ôd Paralios 5 Cont^û fréquentes par le ridé**
riuage5qu'on ne voit guère chok plus commune.. Nous auions "??r"
hmeràdexcrc^terrefcrmeàfencftre. Il nousfalloit quelque ™£^
fois pafler des petites collines , ouk&Terebinthesncxroiflent ^^
ms en arbres moult hauts>commc ils fonten Me de£ortu .Mais Tmbm!kt^
ciajitjcpaysafprc.de.mctiers , fe costcasenr de croiilre hauts,
IZ4 PUE M II*. LIVRE DES -SIK'CVLÀ.
^frk comme Couldriers. Les plus hauts arbres eftoyent Aria & Phy-
vhyUu. Yxc% : lefquels pource que nous ne les auons point , n'ont aucun
Côrmms. nQm ^ nofae langue.Retouraezau riuagc»& nous deftournans
7a m quelque peu par les forefts, parlions pardcfïbus des Cormiers èc
apm. ^ Frefnes,qui ne font gueres moins hauts que les Sapins.Nous.
paftafmes le ruifTcâu qui fort du lac de Pefchar, autremét die Co-
tiios : mais pource que c eftoit au cœur de Fefté , nous le panions
au riuage de la mer à fèc : car l'eau fe perdoit par deffous le fable.
Nous carnpafmes en la plaine auprès dudit ruifTeau en l'ombre
de moult hauts arbres de Tercbinthes près le riuage de la mcxSc
trouuafmesdes pefchcurs qu'il eftoit défia vefprc, qui d'vnc trai-
necdefîlctsàvnc fois auoyent prins enuironfoixantediuerfitcz
depoifTonsqu'obfcruafmes & deicriuifmesfurîe champ. Le fine
stnmordus d'auprès le mont A thos , autrement dit Strimonius fin us , eft fi .
/mus. Iarge,& profond, qiui nous dura prefque vn iourrpeu après Payas
Wtctk,.: laûfC}toumans bride par terreferme vers la ville de Tncala,an-
f*^- ciennement nommée Trica.ou maintenant eft le fiege d'vn San-
siçupur. giagnar^ou Capitaine en Macedoine:& eft pour l'heure prefente
vne des meilleures villes de tout le pays : en laquelle on trouue -
grande quantité de bleds pour charger les nauires qui viennent
àkbouche de Strimone5de iaquellela ville neft pas loing.Nous
trouuafmeslariuiere de Strimonecn chemin, nommée en vui-
mmnard. gaire Marmara,qui vient de deuers laditte ville de Tricah:&ar-
€"es' rkiafmes premièrement à Ceres anciennement nommée Crano,
mm' qui eft vne autre grande ville affifeen beau plat pays de Thrace,
&qtraûcn Macédoine. La riuierede Strimone eft maintenant
appellee de pluûeurs noms en vulgairc:Car la part ou elle fait des
lacs, elle prend le nom des villages quifont aprcsXon yoit gran-
de quantité de Cygnes &: autres oyfeaux de riuierede femblabie
X^ corpulence^uAriftote aappcllcz Peiccanes , U Pline Onocro-
!™L tali>qiii fe nourriffent en la fufdicle riuierç. Elle va lentement fc
■%£mxa.-n a pas les bords de Ton lift moult hauts , fcn'cft pas profonde:
grcjfeXde pour laquelle chofe eft fort hcrbcufc:& y a fi grande quantité 4e
Tnbu&s. Macles,que ce n'eft pas à tort fi les anciens ont eferit que de leur
Mddes- temps on y euft acouftumé engrefler les cheuaux de l'herbe des
Tribdm. Macies>autrctaent nommée Tribuius.Ce flcuuecft large en plu-
fîeurs cndroids,& es autres lieux fort eftroid.il eft fouuent rete-
nu parefciufes , qui font expreffeoicnt faites pour les moulins,
0*B SERVIE ES PÂU P. BEION. *2-5
-comme es rioicres .de ce pays cy. Les roues ne font pas' virées de ^^«^
l'eau qui paffe par vn augesou canal , mais à la façon des moulins ^™^
^juifonc nageants fur Loyre: excepte qu'ils ne font pas de plan- ckerip^
ches fi larges. Les mou'fniers qui mcullcnt mr la riuiere de Stri- c^/^ .
mone, parlent Grec : defquels -auos aprins à nommer les poifTons cU^no».
de nom vulgaire tels qu'ils pcfchcnt en la riuiere^omme s enfuit: clams.
Cherifcaria,Ccphaios,<Slaignô ouGlano^ceft à dire SilurusJau- fc.
trement Hicna>PIacancs>Chelli,Turncs , Grinadies, Mouftaca- ^M*
tosouMyftus,quieftvn Barbeau.Lcs Anguilles y font ^neex-^^
-ccflmcgrandeurJLa riuiere s'appelle auffi Marmata,pource qu'il ^^
y a vngrâd pont tout de bois au deflbus dtrvillage nommé Mar- Turnes^
mara, lequel Abrahin Bâcha rlft faire : &: que deuant le village il Grinadies.
y a vn grand cftang,qui s appelle de mefme nom Marmara* Plu- Mouftac**
iîeurs Rauires,comme de Ragoufes , Se de Chio, Se des parties de *«•
Grece,& de Venifc , Se quelque fois d'Egypte entrent en labou- ^^
chede ccfkuuc: &làen peu de temps trouuent autant degrain ^ -^
qu'il leur en faut pour leur charge. Les nauires ameinent de la £exC£filHS
marchandife à vendre du pays,dont ils font partis , Se entrent en grandeur.
ta bouche du fleuue bien vne lieue en ^pay s,&: y font quelquefois Marmara
deux mois en temps d'hyuer : & après qu ils ont vendu ce qu'ils ^tl!lUe^
aucy eut apporté^ puis rechargé du fourment , Iaincs,ôucuirs, <^4°FolL
ils s'en retournent au printemps» L'on voit les ruines d'vne ville
à l'entrée de la bouche de Scrimone, qui eft en tout deshabitee:
laquelle les payfâns du pays nomment Chryfopoli» Toutcsfois <kyfy0fa>
Pline met Chryfopolis bien près de Calcédoine.
Continuais noftre cbemin allafmes voir ia ville qu onnom-
me vulgairement Ccres,& anciennement Cranon: ou nous ne <>^°»:
rcftafmesqucdeuxiours:&dc Cercs allafmes à la ville de Trica- Mff£
^anciennement nommée Trica : Se de Trtcala reprifmesnoitrc *
chemin pour venir vers la ville de Philippi,coâoyans vne grande
montagne vulgairement nommée Defpota. Nous eftions en
vne treigrande plaine , en pays de plate câpagne, fertile en bleds,
Se arroufee par canaux,moult fréquente en villages.Nous lailfaf- ï*ngm.
mes le mont Pangeusà dextre,ou encore maintenant on tire des
métaux d'argent des minières de la moatagne. Ils la nomment
Malaca-, ou bien Caftagna. Tous les habitans de Tricaîa Se de ^^
Cercs parlent Grec vulgaire: mais les Iuifs qui y font, parlent ^^
Efpagnol & Aileman. Les villageois parlent Grec Se Scruien.
TsrftL
Mitcedonlco.
Coudomdo.
SeUno.
Mines de
ïangeus.
Cuis des
Cbejkes. i
TaUurtts.
ifctmtMt.
l%4 PRvEMIEÎl LîITlll DES StNGVLAi
Eftansen Macédoine, ne fufmes oncen ville ne village que" tous?:"
les payfans ne nous aycnt nommé le Perfil dont nous vfons , Ma-^
cedoniki , ou Maccdonico i auili-font ils es autres lieux Je Grc—
cCjexcepcé enCypre,ou ils le nomment Coudomalo: mais TA^
che eft généralement nommée en tous lieux Selirvo : laquelle ils
cukiuent-diligemmentcs lieuxiiumides, Se la mangent crue^Ea-
venant à Philippijpaftans par les- minières deCaftagna,cMendi£'
mes qu'elles ne bailloient que de l'argent & du pîomb3& quelque
fois bien de Fo^aum* les veifmes feulement en paflànt,fans yarre--
£r^r.Quelquepart.qu'eu{ïions au parauant eftévnoxis n'auionsia-
mais veu de Guis deims des Ghefues : mais paiTans .parJafareir,
qui eft en la campagne, au profond du fine nomniéChalcis, ert
trouuafmes en abondance. Il n'y a Chefne entre le mont Athos
fur le chemin, Centre la ville de Ceres& de Tricak , ou il-na
eroiffe du Guis '. qui eften tout différent à ceïuy que nous voyôs
croifteees Pommiers>£oiriers?&: autres arbres ':.&: n'y a villageois,
qui ne le fçacjae nommer- Qxo :earib font jdc tresforte gluz de fa,
graine. Les>eharaps labourables de ce pa-ys^ &_ principalement .
ceux qui font versles couftaux,font grandement gaftez d'arbrif-
ïeaux de Paliurus^ dclarbre deRhanus: earilsgaignerit^grani ;
pays en fe trainaqt par ja terre, labourable»
Description deplufieurs antîquite%j&* ruines des villes en &Uts?* - -
. doMe&dephUipptt&PbilippQpoli.
TricaU.
Ruines de
Pbilipp
fbili
Chapitre LVï.
I n y aque deux tournées de Trica ou Tricala, iufqûes
aux ruinesMe Philippi: qui eft pour le prefent totalle»
met ruinée. ïln'y a pas trois iournees entières dc.Phu
_^_ lippi à Philippopoli , qui auiïi. eft vne grande ville ea
Fmeïopolk Miccdoine. Mais pour ce que Macédoine eftenciofe du fleuue
Strimoac , les au theursJa mettent en Thrace. Philippopolis au-
parauant s appclloit Penejopoîis: mais d autant que Philippe pè-
re d'Alexandre print plaiiiiàl'aagmejQter , il les nomma de fort
..,.- .. nom,rvne Philippi, & l'autre Philippopoli. Philippieftoit , Se
t t$ofou. cncor cft ^fitùçc fur ie grand chemin de terre fcrmc^llant de Ro-
j^een Afie>&à JS^nitetiaoglciioindqu'çUc.n'cft guère loing.
•*3elâ mer : mais Philippopoli cft en terre ferme. Le grand che-
-minallantdeRomeàConftantinople, du temps des Romains,
«eftoitdêpaffer la ville nommée Brundufmm.&trauerfer le canal
-de la mer Adriatique y &arriacr pour prendre port à la Vaîonnc,
ou à Duras: Se de la fumant le grand chemin^pal&r-.pat'Phiiippi,
Se aller s'embarquera la Caualle,& de là pafTer en' Alexandrie de
Troyc. Nous fuîmes deux iours à voir les ruines de Philippi,qiïi
maintenat n cft qu vn viIlagc,ou il n'y a que cinq ou fix maifons,
bafties hors le circuic-des muraillcs^pres de Feau. * Phiiippî eft en
mcfmc fîtuation , &bafti de mefine façon qu'eft Thiiippepolî.
CarPhïlippi enceind Se contient vne-gran de-plaine , Se vne par-
tie de la prochaine montagne,iufques à lafommîtéjOuk murail-
le comprend vn chafteau bien fait, qui eft demis la montagne: Se
a des cifternes qui font encores entières. Les murailles de Philip-
pi fentquafkocalcment ruinees/aites de brique Se de ciment, Se
en quelques cndroi&s de-pierre de taille,mais fans aucuns foffez,
ne dou ues. C eft la ville dont Galien avarié : lequel s'eftant par-
ty deTroycpour aller à Rome ( mais Troie en ce temps là sap- Troie aùm
peMoit Alexandrie) pafTapar le -chemin -qu auotisdit : Car après nï^ydex*»»
qu il eut efteea*Lemnos,il luy conuient paffer par la ville de Phi- <&*•
lippi,quieftfîtuee en plaine <iu-coftc de leuanc, ayant la monta-
gne du cofté d'Occident 5quUuyfert de forterciTc. Laplaineeft Guinuitm
û humide,quellefeinbleeftre quafi vnmatrctSjOutesGuimauues -imm. c^
portent la fleur kane , comme font-celle* que Theophrafte àïàfa.
croiftre près Athènes au lacOrchomcnu s. Uherbe de Cy tifus
eft moult fréquente par les prairies de Thrace Se Macédoine > de
laquelle nous n'auons n'en France nen Italie. Il n'y a lieu ou
Ton^puifte voir de plus grands fêpulchres de pierres de marbre
par leschamps-3 qua-Philippi , qui ont efte prinfes en lamon ta-
gn^qui cft enfermées mu raûîes dedans le^k-cuirde la ville:car
elles font manques de pur marbre -blanc. L'on voit encor mainte- *
nant pluheursefcrits reftez des.geftes des Romains , entaillez en
lettres Latines furie marbre en pluûeurs endroits de la motagne.
L'ifle deTaiTos n'eft qu a demie iournee de là,dc!aquelle lonpre- ^4^
noit le^plus blanc Se le plus beau marbre détour le monde : Se
•xroyons que ces beaux tôbeaux de marbre qui font par les chaps
ilir Ic^rad cheminjeuflent efté apportez de Taffos.En tre tous îc£
Ï2.8" PREMIER LIV~RE DES STîTGVIrAv
septdcmdcs qUejs ccîuy qui cft demeure le plus cntier,efldu médecin d* Me~
Tlbemx ^rXân^rc>ouencorP°urleiourd'huy l'on voie fon epitaphe eferir
ksebam/s. en Grcc,mais partie corrompu de lettres Seruiennes ^lequel l'oa
ne peut bonnement :Iirc. Ec comme les fepuîehreseftoyentd'v-
ne feule pierre etcu fée, iôgue de deux toifes,& demie toife de lar-
ge^ de la hauteur d'vnehomme: auffrauoyent ils leur couuer-
çle par defïiis tout d'vne pièce. L'excellence &: la grandeur de la^
ville fè peut comprendre par le grand nombre des fepulchres: car
anciennement les riches Grecs eftoyét mis en fepultureentom-
beauxde marbre hors en la campagne ,? à fin que les habitans des
villes fufïènt exempts de la- mauuaife odeur des corps : d autant,
qu'ils n'auoyent accoutumé de brufler les corps en Grèce, ou de
Coufiume les couurir dé terre comme en Italie, comme nous faifons main-
'ientmerks. tenant.,Et pour ne parler de fi loing, les Italiens ont main tenant
^ erk- autre coufhime d'enterrer les corps, différente à la noftre: carils,
font des cauernes voûtées en plusieurs endroi&s des Eglifes , les-
quelles n'ont linon vn gertuis par le defïus fait comme de la bou-
che d'vn puisqu'ils ferment d^vne feule pierre ronde , à laquelle,
tient vn anneau de fer , par lequel on leuela pierre quand itefi
hcfoing. Et quand on apporte vn corps,ils le laiffent couler leas^
fans le couurir de terre : puis bouchent ledit permis auecfa pier-
re,qu'iis plaftren t tou t à Fentour. M y a vn village en la plaine , à.
vn quart de lieue de Çhilippi,nommé Bolifce,ou vifmes vne grâV
ZoUfie. ^e Pierrc de marbrc,ay an t (es mots: N*m& mufisin teflamentoiqu'ils.
font fèruir d auge à vn puis. Bïé peu au delà de Philippi/uy uat 1er
grand chemin il y x vne grande pierre quarree toute droi&e , co^
mêle bout d' vn obclifque,efcrite deîettres Latines , qui câ le fè-
pulchrede C. Vibîus Cor. Qtsartus. Les habitas du pays en font:
Mangeoire vnc fable cmfcnxxçûimzns> que c'cùh mangeoirede laiument
du&eud ^Alexandrele grand. Mais paria iument faut entendre Buce—
^Akxadr^V^^- Us nous menèrent le voir par grande fpecialité-. Elle eft
* moult groflc&.hautcidroidc ôc creufe parle bout d'en haut. Lit
Caualie. ville de la Caualleejblà tout loignane, qui fut nommée du nom,
àa chenal d'Alexandre : de laquelle nous parlerons cy après. Les
ruines de Bhilippi monrtret auffi grande admiration que de nul-
tnle ïht *e autrc vi^e* ^ais nous ztvibuons cela à la commodité des pier- -
res,veu mefmcmentquela veine du marbre eft enfermée dedans .
la vêle. Hy avn trefbeauampitheatre eflçué depuis terre iufques .
OBSERVEES VAK P. BELON. 12*$
lia {bmmicé, qui encorcft refté tout entier iufques àmaincenar: Diueraheâ*-
'&; durerait long temps fi les Turcs n'cnîeuoyent les degrez qui îres*
font taillez de marbre- Il n eft pas en forme ouale, comme eft le
théâtre d'Otrichoîi , ou bien ecluy de Rome , mais en rondeur,.
commeàNimes,ouàVeroniie: car il n'eft pas fermé de toutes
parts. Le lien par lequel Ton y entre, regarde le midy , qui deptiis
la fommité iufques en terre eft tout ouuert à claire veue* Il fut
fait en lieu fort commode: Car il eft engraué en plufieurs lieux
en la montagne, fait de marbre par degrezXa chofe plus antique T , , ^
qui a refté debout en Philippe font quatre gros pilliers d'énorme DJmCUns
gronreur&: hauteur, qui font àcs reliques du temple deDiuus dim.
Claudius : ou il y acncor infinies ftatues & groiîes colomnes de
marbre entaillées à la Dorique Se Ionique , de mcrucilleufe ftra-
c~ture,&: de grand artifice. Ayans trouué vn Caloiere de ta mon-
tagne nommée Caftagna, nouspartifmes de Phiiippi pourvoir atones.
les monafteres qui font fur ladite montagne, defquels y en a^qua- Fmfijexu^-
tre en nombre. Les arbres qui croiftènt en icelle , font Platanes, g*Tfùl'
Foufteaux, Arboufiers,Àndracbnes , Chefnes verds , Aria, Ala- ^: " " '
ternus,Sapins,&;Pinsfauuages , Efcuîus. L arbre que les Mace-^.^
doniens nommèrent anciennement Cornailier remelle y que les ^ycUtemaà^
François pourleiourdluiy à l'imitation des Latins ont nommé sxngmas^
àcs Sanguins,ne croiiîent gueres moindres en cefte montagne làv
que font noz grands Cornaillers malles.
Vejcription de la ville de Bucephala 3 qui sappeÏÏoit auparauam Çhdfr ■
jlred,mawtenantla Caualle... Chapitre lv 1 1._
f|y^j^^\ Près queufmes cheminé par ladite montagne Féipace
ilBI^II de deux iours,arriuafmescn vn iour& demv à la ville lAC:tt^Jf-
»gœ de la Cauaile,qui anciennement,auant qu Alexandre ^yÇ^
•Jcfi^p^reuftnommeeBucephala, auoitnom Chalaftrea, 3c ~
ne fallut pas que retournafîioris à Philippirmais lahlàfmes le che-
min fur main gauche. La Caualle eft vne ville qui fut ainiî appel-
lee du cheual dAlexandre nommé Bucephalus. Piuiieursliiants Bucyh+hk:-
les eferits de Pline , fe font mis en doute , à fçauoir en quel pays Ifw*s In~~
eft édifiée B a cephala. Car quand il defetit le âeuue Indus, il dit *~
que la ville de Bueephala eftoit le chef de trois villes que les Azc-
lùçns habiçoyent ? qui fut ainix .nommée pource que le càeuaL
R.
ï'3© TREMIES. 1IVRE DES STtfG^LA,
d'Alexandre y auoit efté mis en fèpulturc. Mais-ledit Pline e'fcri*
uantde Grecc,àlafin du chapitre parlanc d'Acha-ieditBucepha-
i i luseftrevnport,lequclilconioin&auec Anthedon. -Et Mêla e£-
criuant de Grecc3&: principalement de Macédoine, met Anthe-
don : &: peu après mettant les fines & les promontoires du Peîo~
ponefe,iî nomme le fine ditBucephalondelaparticd'Qrient: &:
par Ton dire il eft tout manifefte que Bucephalon eftoit vn pro-
montoire ou vn fine. Il faut entendre que Bucephaîa de Grèce
*eft vne ville fur vne butte auanceeen la mer , quin'eft qu'à deux
lieues loing de Philippi,& eft maintenant vne tresbelle habita-
tion: & n'y a pas long temps qu'elle eftoit deferte,& tonte ruinée.
Mais depuis que les Turcs retournèrent de la guerre de Hongrie,
3ude. & qu'ils amenerenttous les luifs qu'ils trouuerent dedans Bude,
fé- . Peft,& AIbacegal,ou Àlbereal , &: qu'ils les eurent enuoyezha-
^clhered. biterà la Caualle5àTricala ou Trica,& à Ceres,ou Cranon 5elîe a
Cranon. xouCiouxs depuis efte habitée: & maintenant il y a pi us de cinq
' fffe* ^cens luifs aucc les Grecs &. les Turcs. La fîtuation delà ville eft
- ^uafi telle qu eft celle de la ville de Lernnos : carellecft ainfien-
^îofe d eau de la mer de toutes parts3excepté la partie de derrière,
qui eft fort eftroi£te. Il y a vn grand porr5 mais au demeurant mal
feur : qui eft caufe que quand les Galiottes ou freguates y feiour-
*nent,on les tire en terre : & auiïi les fuftes & barqises4 car le porc
xi eft pas bien défendu de tous vents : combien qu'à vn befoing
elles y peuuenr endurer îatempefte , mais non fanseftre trauail-
et/tenus m* lces. Il y a enoot moult grande quantité de ciftérnes dedans le
4i fus. circuit de la ville, qui font toutes entières : qui nous faifoyent
jjeknicQ fouucnir d'vne autre ruine ancienne de Crète nommée Helenico
tefro- paillocaftro, qui eft en la motagne vn peu au delà de QuiiTamus.
Qujfamm. ,Qc&c^emes antiques font hites de û fort cimétjqu'ellcs ne pre-
drontnon plus fin,que fera vne pierre de marbre dur. La Caual-
le eft l'vne des clefs de Macédoine, tout ainû que Philippe appe 1-
Mtgnep. loit la Magnefîe vne clef delà Grèce.
: OBSERVEES PAR. F. BELONV J$l
$tie les murailles qui auvent encore de prejentjûr le mont^ Emus ^mon~
JïrentUfepxMtiûn des forces de Macédoine <& deThrxce^
Chapitre lviii.
? L.y atioitautresfoisvn mur de ibrterelTe au deflusde
\ la Caualîe,qui encor eft demeuré en Ton entier , quafi
\ d'vn quart de lieue de longueur , fïtué furie plus haut
( faille de la prochaine montagne : & n y a rien plus
vray qu'il feparoit les limites dé Thraee-d'auec Macédoine: mais
entendez des forces Se puilTancedes Royaumes. Car les Cofmo- Mîirjefor^
graphes ontexpreffementexcîos les villes de Philippi & Philip- tereflh des
popoîi hors Macédoine: qui toutesfois efloyent 1 es villes capi- Mac^doniëL.
taies du territoire àcs Macédoniens ,.& toutesfois font deçà le strumne
fleuuede Strimone. Ce mur quienclaft le pafïàge au deiïus de-
la Cauaïle,eil voûte, & a deux co-nduicfcs par dedans quaû fèm-
blablesau mur, quiferêddepuisfainct Pierre de Romeiufquaix*
Ghafteau fainà Ange, fait en manière ds galerie. Au bout de ce
mur fur le haut de la motagne,y a vne grolTeiour, qui efloit pour;
faire force contrcle cofte delhrace . In y a pas logjemps q^A-
brahin Bâcha reflaura vn conduit deau^ui auoiteïlé autresfois
fait par les Roys de Macédoine, dont le courant de la fontaineeli
conduit de plus de trois lieues delà iufqucs en la.ville delà Ca-
tjallc-,& vient d'vne haute montagne , toujours fuyuant la colle,
par le conduicl; , iufques à tant quelle trouue vne vallée :&: à fîn-
de la faire pailèr,il a fallu luy faire de grandes arches hautes à l*e-
quipollent,. pour la rendre delà montagne cnla. ville., eivforte.
que les arches dudiLConduicl: ont plus de trente toiles en hau-
teur : où pour la grande commodité àcs eaux de celle fontaine,la.
ville qui elloitdeshabicee, a elle rendue fort peuplée. L'ille àc rort^ ^
Talfosquielloit anciennement le port àcs Galleres d'Aîexan- fces d\xk^
drie^n'eiloit qu'à deux lieues de la Caualle. Ledit Bâcha £cït auifi xandrie.
enfermer la ville de neufues murailles , pu trouuafrnes de Feicri- r*Jfos.
cure Latine delfus des pierres, qu'on y auoit autresfoiselcriteau
temps que les Romains dommoyent fur la Grece:kquelle auons
£eriree,ainu que s'enfuit.
.gni prem'ieb. livre ides sikgvla.
P. BoftiUus.P.S.U PbiUdelpbuspetram infiriorem excidit>thuhmft~
àtjvbi nomma cultorfcripfit &fculj{it. Sac. Vrbano. S. P.
Toutes lcfquclles lettres eftoyent en labafe- dvne groile mu-
raille.
Quil ny a aucunes hoflehries en Turquie 5 mais quon trouue des
hôpitaux a fe loger. Chapitre LU.
C^3$£Q Galant donner à entendre qu'il n y a point dliofteïe-
3Ïn'yfaus WmM ries en Turqui^parleronsd'vn grand édifice qu'Abra-
? t* WÊËk hin Bâcha feit édifier àla Cauaîle, que les Turcs ac
ÏT mM DompraprcappcilcnVvnCatbachara.Ufcicauffivnc
ikW Mofquee ioignatfon hofpitalpour nourrira loger tous pailans.
M'fi»«. Etnousfeulementeftans trois de compagnie, auccnozmoncu-
res,y auons efté nourris trois iours /ans qu'ils s'en ioyent nulle-
ment fâchez^ fans qu'il nous ait rien coufte. Nous auons a par-
ler fouuent de ce nom de Car bachara: parquoyconuient pren-
dre ceftuicv pour exemple des autres. Nous ne pouuons le nom-
mer autrement en Franc ois,finon vn Carbachara: & pour le fça-
uoirdonneràentendre,ilfautfuppofcr premièrement qu iln y x
point d'hoftelerics es-pays ou domine le Turcme de lieux pour le
logis fMi* iocrer s finon dedans celles maifons publiques , appeliees Carba-
fusde T»r* chDâra nUi ont efté faites en diuerfes manières : mais celle mame-
*"'' re qui eft la plus commune, eït, que les grands fçigneurs qui font
deuenus riches en la maifon du Turc , ou bien en quelque autre
Fondons forte qucccfoic , ayans voulu faire quelque bonne œuure en ^ ce
JesT«m. mode,*: penfans icelle eftre profitable a leur faluc, font faire tels
édifices par charité : car ils ne cogrioiffenc parents qu'us ayenc
aufquels ils vueillent faire aucun bien. Nous en dirons la raifon
ailleurs.Pefans doc faire vn fouuerain bie par tels ouuragcs, font-
faire plufieurs belles réparations au bien public,comme quelque
beau .ponc,ou quelque beau Carbachara:^ tout loignant le Car-
bachara, quelque belle Mofquee, éloignant la Mofquee tonc-
quelque bcaubaing.Et pour maintenir tous othciersarairc :1e 1er-
uice qu'il faut leans^ant àla Mofquee qu'au Caxbachara,ils do^
nent des rentes pour fournir aux frais & dcfpcDS.comroc a payer
le bois qu'on v brufle , payer des preftres qui font ordonnez pour
iEakc les pricre$,&:direlefcruice:auffi payer l'huile U lacirequi
MDBSEÎIV1ES tÂU P. ÎErON. "t#
cftbruflcces Mofqueess& autres çhofes neccifaires pourîescui-
fwies,&: pour ceux qui acouftrent à manger.aux païfans.Quant à
ceux qui viennent loger au Carbachara , il faut nccefïàiremenc
qu'iiz portent leurs vtenfiIesaueceux,commclodiers ou efclaui-
neSjOueftramats pour dormir,linges , &: au très befongnes : Car
on ne baille autre chofe au Carbachara , fmon vnc petite cham-
bre vuide :ic faut qu vn chacun fe férue àece qu'il auraapporté.
À l'arriuec vn chacun defployc fes hardes : Se s'il a affaire d'eau, il
luy conuiendraen allerquerirau mcfmevaiffeau qu'il aura por-
tc.Et quand le potage du Carbachara ou hofpitai fera cuit>i! faut
forcer fon efcuelle, qui en veut auoir. Lon y donne auffi de la
chair & du pin. Et pourec que les Turcs nomment leurs potages votaga da
par nom propre, nous auonsbien voulu fpecifier quelle chofe ils Turcs
baillent auxpaflànsparaumofncs. Nul ne vient là qui foitrefo- Trvhan*.
fe/oit Iui^ChrcftienJdolatr^ouTurc.Sur tout baillent libéra- ^T^"
lemenr du potage fait de Trachana,ou de Bohourt.ou de Afcos, /
oudeRis, Les habitansdcriïîe^deMeteiin fçauentaccouftrer^-*
du fourment ,&: le compofer auec dulaicl aigre. Premièrement
ils boullent ledit fourment : en après ils le refeichent auSoîeil, Se
en font vne compofîtiô^ui de nom propre eft appellee Bohourt.
CeBohourt eft tranfporcé de Meteïin5:&:enuoyé par toute Tur- *««**•
quietdont ils fèlèruent grandement en potages. : Ils font encore
yneautre forte de droguede fourment audit Metelin , qu ils no-
mentTrachana , laqu elle n eft moins requife que la première. Trac^d,
C eft,à noftreaduis* celle qu on appeMoit anciennement en Grè-
ce Se Italie y Maza. LVfage^le ces deux dides drogues Bohourt, m*Q
& Trachanajcft fi grand par toute Turquie > qu'il ne fe peut dire
plus;Carilsncfontbon repas qu ils ri en facent cuire en leurs po-
tages.Iis ont le Risen figrand vfàge, qu'ils ea defehargent pour
îc moins fix nauircs , par chacun an , au port de Ccnftantinople,
qui leur viennent d'Egypte. Ilsontauifi.vneefpecedc légume,
en moult grand vfage qu'on leur apporte d'Egypte par mer , que
les Grecs appellent Afcos , du nom corrompu de Aphace. lis en ^feos,
fontprouitïondefaifon, pour en départir mdifeemment. La^#*»»
façon de faite leur cuiiine eft mouk différente à la noftfc : car ^
" quandlachaircftcuiae5ilslariraithorsdupotvôr-puismettent £%*£
dedans ce dequoy ils veulent pour efpoillir ïcbouillon. Et pour- yj^
cequ'ils^nfont quantité , aufti ils le meûent auce vneiongue^„ Tum„
* Riij
134 PREMIER LIVRE DES. SrNGVLÀ;
pale de bois. Ils n onepoint de cables pour manger defïus. Par-
quoy s'aflèent à plaide terre , & là defployent vne ronde pièce de
cuyr pour fe feruir de nappe , qu'ils tiennent lacée comme vns
bourfe. Il n'y a aucun en Turquie , quelque grand feigne ur qu'il
foit,qui ne veule bien porterfoncoufteau à fa ceinture. Chacun
porte fa cueillicr : ce leur eft moyen de ne s'cngreffër guère les
doigts. Car aum n'ont ils i'vfage de ferujettes. Vray eft que géné-
ralement tous portent; des gf an dsmouch oks qu'ils fon t feruir à
fe torcher les doigts.Nul Turc quel qu'il Toit 3 n'a honte de fè lo-
ger dedans relie manière dofpitaîjne de prendre raumofne en. la
forte qu'auxms dit.Gar^eft lafaçon de faire du pays. L effranger
n'aura pas moins que le pîm grand peribnnage^Ce quen auons
efcrit,foit feulement entendu des lieux ou font fondées telles au-
mofnes5comme eft àBucephala. Le fufdit Bâcha feit telle répa-
ration à la, Gaualle, qu'en oiure ce qu'il feit mener l'eau de la fon-
taine iufques au plus haut de la ville pat .defïus les arches baâiei
à grands ftaiz^ufti l'enuoya à fàMofquee , & à fon baing,, & par
toutes les places delà ville. Ilyfcitaufiïtraniporter trois fepuk
chres drpierre dematbre^qui eftoyent à vn quart de lieue delà*
en vn champ Jefquelsil feit ni ettte défions les fontaines v pour
feruir.de baû%s à ahreuuej' les &heuaux> des paflâns». Ces quatre
ièpulchres font eicfits ajnfi comme fenfuit ; F; €. \st$fer9*Atria^
nus Mpntanus^Bqm publîco honorants, item omnmentis decurionatus^
&iniuralkis pontifex ^ fl&mxn âiui ClaudkPhilippis. >Ann* xxiij. Hic
S. E.. L'autre, fèpiuchrc eft de la mefrne mefare du fufdicfc , ayans
telles parolles xÇpmdu P. fil. ^tsjrilia fie. dim ^4ug* +Arm. xxxv.
H. S. £ JLe tiers fepuîchrc eft ainil eferit : Comelu longa *4s~}rili&
r mdter^nn*ix*H.S.EAls font chacun d'y nze pieds delôg, cinq
^2£mï ^e ixaut ' & fix dc larsc* Qb?1^^15 ]es &m mcs Turquc$ > <iui
tJ™^** ont quel quepeu debien 3 font faire de telles réparations & edifî-
- * ces,&: donnent par teftament ce quelles ont aux foldats de guér-
ie»/? opmio re , afin qu'ils s efforcent mieux à combatrexontre les Chreftiés:
des femmes car c\\cs ont ceftefaufe.opinion , que c'eft lemoyen pour fiuuer.
desTws... içurameparlamprçdes.Chreftienstuezdelamaindeceuxàqui
elles ont lahTé teUe&aumofnes.Faifans vn médicament Ivn Sple-
: - setique àla Caualle , trouuafines la manière de faire ,ce que les.
sktpwK anciens appelloyent Elatcrium,tel qu'on le faïfoit le temps patte,;
"~~ . fçauQir.eftsïegier& blanc, ^ dételle nature qu'il brufte aa feu,.
t>BSERVTE*S PAU P; BTIOM. ïff
comme la greffe. Nous croyons que de noftre temps n'y a per-
fon ne qui fè puifle vanter d en auoir veu vendre de tel. Nous en
dirons dauan tage ailleursenaurr-e langage^quanddefcrirons les
plan tesen particulier»
Vu grand chemin de laCaualleà Conflantinople. Chapitre L x.
r^^£^^Rcnans le chemin de BucephalaàCÔitantinopîe,
ptrouuafmes encor -d'autres murailles fèmblablesà
^celles de deffus le mont de la Cauaile, quieftoyent
> defTus îafommité de la montagne d'EmuSjquifont
► à deux lieues de la Cauaile , fermées contre la cofte
de Thrace,tcnans le paflàge de Macédoine , bouché par deflus le
mont. -Et de là defcendifmes en vne campagne de grande eften-
du^fetpresduriuagedelame^ayans l'ifle deTaflbsàdextre, MontEnms*
&Ies hautes montagnes d'Emus nous dcmeuroyentàfèneftre,
lefquclies nous auios défia trauerfees, {ans y auoir iamais veu au-
cun Cyprès. Nous paflafmes vne riuiere que les Grecs appellent
en leur vulgaire Meftrorles Turcs la nomment Charafou, qui eft Mejho.
à dire fleure noir. Son appellation couiendroit bien auec le fleu- chaxapM.
ne Meîas,qui donna nom à vne plage,qui s appelle Melanicus fi -
nus : mais ce n eft pas luy.Nous en parlerons cy aprcs.Car ce pre- Me^\
fent fleuue eft le fleuue Nefus,qui defccn& dumont Emus,com- f^"™
me auiE fait le fleuue de Strimonc : & auflî que le mont Emuseft^^
comme vn mur de fortereflè entre Thrace &c Macédoine , telle-
ment que Nne des extremitez du mont eft entre le fleuue Stri-
monc , & le fleuue Nefus. La riuiere de Nefus eft fort lente , & zrtfûs.
toutesfois elle meine beaucoup de grauois ., & eft peu moindre
que la riuiere de Strimone: & va droi&ement fc rendre deflusl^ strimûne-
le de Thaflbs, fçauoir eft plus près du bout que regarde Samo-
thracc,que de la corne qui regarde le mont Athos. La riuiere de
Strimone,dc laqllc nous auôs parlé, ièreden la mer entre le mot
Athos & rifle deTaflbs^deJaqueUelamera peins le nô , qui s'ap-
pelle le Strimonicus finusXe pont qui eft fur la riuiere Nefus,e&
3e bois, corne eft celuy quieft fur la riuiere deStrimone: maisîl
a eft pas fi lôg Nous trouuaimes des pafteurs au bout du pot, qui MovtonsYo-
&ifoyét roftu des moucos entierSjexcepték tefte,pour vedreaux^0** ***
pailàij&ieiquekjilsAUQitt^ ****
K iiij ■
l
M* P-REMUB. LITRE BES StNCVLA'.
mais-ils auovcnt vuidé les tripes , ,& auoyent rccoufu fejentre.
Naine pourroit croire qu'vne fi grotte , mafte.de chair le peuft
cuire en roftiflant^qui ne l'auroit veu.Toutesfois ce n'eft pas eho-
13 fent au pays^Anatolie , duquel les plrens font vn peu plusn-
Turl chcs.ilsmettentroilirvabœuftoucentier/embrocheenque-
Bœiifrofil que <>tos cheuron ,, & mettent vn mouron tour entier dedans le
mt citigr, . bœuf' & dedans le ventre dudid mouton vne poulie , & dedans
' lcv.entredelapoullcvn œuf. Puis quand ilsontrecoufuleven-
trcdubœu&Jslcfon^
fufdiaes viandes de dedasle bœuf fepeuuet cuyre itifqu al œur.
Toutes les chairs ainfi cuides font mangées par les pare^de 1 en-
£mt circoacis,en faifant vn feftin. Ces parleurs quanos <ht?tren-
chentlemoutonpar pièces quand il eftcuiû,,* :1c vendent ca
détail aux pa&ns. Nous campafmes deifous des Saules uu bout
du pont pour repofer nozmotures, &achetafmes de celte chair,
que nous iugeafmes plus fauoureufe que fi elle euâ efte cuicte:
- par pièces. Tantoft après auoir difné, nous repnfmesnoitre che-
■ min & fifincs vne afFez bonne iournee. Car nous vmimes loger
3»KÛK- îufquesalavilledeBouron.quiencor retient fon nom ancien..,
"'"■". Elle c& fiait* auprès du lac qu'on appelloit Biftonicus lacus.
<&T"* Noltre chemin foc par vne plaine prairie moult herbeute ,cou-
Mh*mms. uerccdeCynfu^Haiimus^Rhamnus, lequel couccsfois-ncft.
* ■ Je s-eflcuerenarbriffeau fort ramu fans efpines , comme en Crè-
te , toutesfoisil s'efpand par -terre en cette prairie a la mode des
aprlmefi Câpriers efpineux. Nous trouuions de ïlierbe de Scordiontouc
pLx. ioignaritlavilîedeBour65laquellepoure{lrefitueeenvnegran^
' deplainehumidcioignantvnlacd'eaufalee5peuteftre cempa-
àttodus rêJcn fadeur à Aiguës mortes. Lelac de Bouron ou Butomus, ,
^CHS' cftdccSandrcucnuaupays. Car il y a defort bonnes peichenes.
La me'r en ceftendroidlànecroift ne diminue iamais ,non plus
que Êiit la merde Ponc,^ du Propontide , & deFHeïlefponr,
comme auifi vne grande partie de la mer Egée. Ils y peienent
iéUs. moulcgrandequantité de petits poiflons femblables aux Ab.es,
i&Wr- que les Grecs de Bouron nomment Lilinga,&à Conftannnopfe
*?"?+ LicorinL Ccft celuv que Gaiien a nommé Lentifcus , les 1 ari-~
vmè^ fi yncYandoife^ff aux autrespays-vn Dacc. Ils les accoufiiet;
■ - - ■ cpmme.
©•B'SrRVESS PAR P. BELON-. ï$7*
eomtneÂous faifons les harengs. Car après qu'ils les ont vn peu
falé, puis fait fumer, ils les defciçhcnt , &renuoyentàcharcces
$t bacelees en pluûeurs lieux de Greee , &: iufques en Italie mef- Jo-^
me: Us les préparent de mefme façon comme ceux de la Boiane Scm. ^
fondes Scourances. Nous ne trouuoDsdirTcréçe entre les Scou-
rances d'Albanie, & Licorini^non qu'ils font plus petis.La plus
grande partie de Bouron font pefchcurs.Catay ans la commodi-
té du fufdict lac fi fréquent en poitton,ils s'addonnent volontiers
à en prendre.Les Afparages de Grèce, qu'ils appellent Corruda, ^^p*
ont la fueille picquantermais les cultiuez des iardinsyont la fueiU
fc mouffë,trouuans lit terre de cefte capagne tant à leur gré,qu*Bs
y font fi frequens , qu'on ne lavoir verdoyer d'autre chofe. Nous
trouuafmes vne petite bourgade nommée Commercine , qui cft d>mcr6m..
à-demie iournee de Bouro , ou il y auoit de toutes fortes de vian-
des que nous volufmes acheter. É y a les mines d*vn petit chafte-
lct,dedans lequel eftiisglife àcs Grecs Chrcftiens;:car k^vitia^
ge eft habité des Grecs ,& peu de Turcs.
D 'vne trefanaenne place en Thrace nommée CypJçJh : auec h maniera
de fair-e l'alun, Cbapave. lxi.
Près que nous enfmes demeuré campez, quelque
efpacede temps ioignant la ville de Commercine r
fous les arbresd'Efculus &; Aria, nous reprifees la y?j€ ' » ^ '
i campagne 3 ayans les montagnes à main gauehe;5£
«. ^- - . w »/ arriualmes à vn autre vilhgc nommé CypièUa;
Nôus voulions expteûement paner parÇypfelîa,à£n de voir fai^
sç l'Alun de glaz , pour J'obferuer : &: nousy tiafmcs trois jours
S^dcmiaulieu de fâ minière. Quelque paraque FAI unie face
©nierait prcfque touficursLveinedeicouuerte,lcauoireâ que
la minière n'eft guère profonde :iieft-ce<ja?à.Cyp|clla ilyades d^5^r^
endroitsou la pierre eft ri ree de la profondeur de fixtoifes.Ce vil-
lage de Cypfelia-cft.cn Xhrace, vulgairement nommé partie en.
Grec,partie en Turc,Chapfylar. La plus grande partie des babi^
tans font Turcs, peu y en a qui foyent Grccs,I£y a bien quelques
luifsjdcfqueis Tvn tenoit rarrentemét dureuenu de V Muni chez
lequel nous logeaimes pour mieux entendreia vérité de îarna-^^
sûece dde&ire ; &,t£ouua£mes que F Alan qulon fait en Icalicà T(m^ *"
1^8 PREMIER I.ÏTK.E WE S SI KG VI. À.
. Tolfaau territoire du Pape , con aient auec ccluy dcChapfyîar*
murccbe- -comme auons peu voir venans de Ciuica Veche , allans à Rome
au temps de la création du-Papeîule troifiefme,nous deftournas
quelque peu du grand chemin pour pafïèr par la Tolfe. L'Alun
qu'ils font à Chapfylar, eft parfait &: afïmé au lieu mefme dont la
pierre eft tirée delà miniere,& eftpar ce moyen de moindre dcf-
pcnfc que n eft celuy qu'on fait à Tolfe, quilfaut porter de fa veL
Be par charretes iufques au lieu ou Ion le cuid, Et combien que
l'Alun ne foit cfpoiffi que de lexiuc de la cendre faite de îapierre
-de la mine9 laquelle il faut premièrement brufler : toutesfoisil
,n eft pas permis a chacun qui veut en faire : mais feulement à ce-
luy qui âprins le tribut du reuenu de fà mine. La première eft
prinfc iuftement es racines de la montagne , que croyons eftre le
mont Serrion. Lcdid village de Cypfeîla eft à cofte du graddic •
_ Jttin qui va de Duras à Conftantinople,fîtui au lieu ou Ion corn-
CmjfmdeU mence à monter pour gagner ledefTus de la montagne.On laifle
%m* les mines quelque peu à feneftre. La pierre eft tirée de fa mine
auec trefgrande difficultés pour autant qu'elle eft tant dure, ils
la rampent a grands coups demarteau.,& de cifèau:puis ibnt-cui-
re,come qui en voudroitfairede lachaux ou du plâftre. Et d'au-
tant que le bois eft à commandement , & qu'il ne faut porter la
pierre plus loing que la mine , les ouuriers la font au mefme en-
•droid dontik ont tiré la mine:parquoy iceux ouuriers prennent
1 le faire en ta£che : Car chacun a fà petite logette ou niaifonnet-
te, dedans laquelle font trois ou quatre auges de bois dedans ter-
re, efquclleson verfè la lexiue iufquesà-ce que l'Alun foit glacé,
Se reduid en roche relque nousje voyonsXa pierre dont eft fait
l'Alun , au commencemet eft maffonnec en voûte, &c flamboyce
de feu legier , comme qui «cuirodr du plaftre : car fi elle eftoit par
trop cuide,lafûbûarice de l'Alun qu'elle contient, s'euaporeroit
par la force du feu ; mais demeurant ainfî dure , & mile à la pluye
Morgue, deux ou trois mois, fè rend de foymefme en poudre. Car tout
Marne. akiû que la Margue,ou Marne, delaquelîe les chips font engref-
fèz,non incontinent,& du commencement que fà giebc eft fref.
chement tirée de {àperricre, eft attendrie &comminuee en pou-
dre , mais demeurant quelque cfpace de temps à l'air , fe difTout
peu à peu,tant aux roufecs delà nuid, qu'aux piuyes de iour % &5
gelées d'hyuer , tellcmeat qu a la fin elle fè rend fondue parla
OBSERVEES PAR P. FELON", l&
fengÉfôor de temps , fe méfiant auec la terre , fuppliant au défaut
<Je fiVrnïer : tout ainfi cefte pierre dure feulement roftic de legierc
iarrune,rcftc en fon entier^comme fi le feu ne luy auoit point fait
de mutation , & ayant demeuré- quelques iours fous le ciel, cil fi
fortattendric desroufeesde la*nui& , & pluyesdciour,quepcu
de temps après eft toute conuejtic en cendre. Les pierres de la
minière d'Alun n'ayans point eftéroftics,mifes en maflbnncrics, #«■«* & If
& ouurages de murs , font permanentes , comme fondes autres mmt *-^~
pierres . A près que la fufdicte pierre eft rédigée en cendre,foit par
la- pluye natoreile,au par celle qu'on luy à fair,par art,cft à la par-
fin cuiâreauec de l'eau donc Ion fait deJakxiue, laquelle eft mifo
en des au ges quarrees", ou en-ées pots de teste ou de bois , & là le
eongelccn dix ou douzeiours. Telle eft la façon qu'ils tiennent
à Chapfyîar en faifanU'Àlun : lequel apporté en Italie eft furno^
mé Mun de Mereîra. - Mais pouree qu'il y en ad» rouge &~ du
blanc^nous ofons bien dire quclamieexle l'Alun bknc peut auf- ^mdr
fi faire le rouge. Car la couleur ne gi(k qu en la-fàçon de le faire, ^J^y^-
félon que la cédre aura eftê bien ou mal trai&ee. UAlun faitvne>
efeume queplufîeurs ouuricrs des minières d'Alun gardent,dontr
ils font vne peintm?e*ouge , qui. de nom François eft nommée
tercedeMacharon -.laquelle toutefois n'eft point gardée à Chz- ^àunrauge.
pfylar. Ceft ce qui fait qu'on voit les vallées rougir de telle efeu-^^^^
me,que les torrens ont emporté auecl eau. delà pjtiy e~ € *****
Z3# gmnd chemin pajpnt^tfon faifoit anciennemmt^e»sni k Roms-
kÇonjiant'mofhi Chapitre lxi:»
rOntinuans noftre cliemin vers Conftantinopîc, S6
* commençans àmonterla môtagne^ftans defia quel-
1 que peu rnotez. , regardasdérriere nous, .nous veoyôs ^0J^ms.
bien à clair le chemin que nous auionsfaàt depuis le Ua&
lac Biftonius5qui maintenant eft appelle fiouroa, duquel Ari- 3owm:
ftote , au buitiefme liuredes animaux , treziefrae chapitre^ par-
lé en cefte mzmQVC.Qiànetkm m&iùim Lacubusgcnera plurapijcium
mm&mmtrj&miapertUTfreft^gr inBiJîcmidiLMMfluriindjrencmbabm-
tur. Nous veoyons le village de Commcrcine, qui eftikuéenvnc ^ .
trefgrandc plaine. Le chem in.de cefte pkineeftoi de droicl gra4
chemin ancien 5 pour aller de Rome à Conftantinopîc , &: eftoit
S.ij
14^ MLE^'IER X.IVRE DES SINGVLA."
paué de moule grofTcs pierres taillées à l'antique : Car venans de
Bôùron à Commercinc , &puis de Commercine à Chapfilar,.
Grandche* attendu que c eftoic vn chemin difficile de terre grafïè , les
minâe^ome Romains le firent pauer , &encor pour le iourd'huy refte en
à confiant* fon entier. Nous pouuons prouuer par cela que les Romains
*?fk anciennement faifoyent ce chemin en venant de Rome paf-
fant en Afïe , Se aufli que louurage de ce paué monflrc qu'il
n'eft pas d vn petit compagnon ; Car on voit la terre pauee
^ tout droict. Et pour aller chercher les addrefTes,on laifTe mainte-
nant le paué à dextre , l'autre fois à feneftre : Se en quelques en-
droi&s il entre es bois taillis: & y a des grâds arbres entre les pier-
semum. rcs du paué,quifont furcreuz depuis ce temps là. Nous montât-
mes ladi&e montagne Serrium3qui cft moult difficile en beau-
coup d'endroi&s* En laquelle Ion voit que le rocher a efté taille
en plusieurs lieux à la poin&e du cifeau , & au très ferremen s qui
iZgitudede n>a C&G fait iàns grande defpcnce. Cet ouuragc nous fait penfer
U Grecs, qwe le grand chemin de Rome allant à Conftantinople , eftoit
grandement fréquenté. Et aufïï que Pline efcriuant les iongitu-
des delà Grece,ies prend toufîours à Dirrachium ,qui eft vne vil-
leaupresd^ la Vallonne,maintenant nommée Duras.-fçauoir cft
mrM au port ou venoient defeendre en Grece,ccux qui s'eftoient par-
tis d*Italic,apresquilzauoyentpafré le Canal de la mer Adriati-
querdifant que de Conftantinople à Duras , il y a de compte fait
ièpt cens Se vnze mille. Et veut que foit la longitude du Propon-
tide à la mer Adriatique. Nous arriuafmes en vn vilhge habité
âes Grecs fur la fumniiré du mont, ou il fallut predre deux hom-
'smettt mcs ^C Plc<^ ?our nous Su^er > Pour Pms grande fèureté , par la
Jfauer. montâgp-e : en laquelle il y a grande quantité de celle herbe mal
nommée en François Sariette d'hyuerjque nous trouuions naif-
'lAmfâtea* fànte abondamment par hs rochers ; laquelle auions dcûa veue
tredephify* en Crète , Se peu deiours au parauant dedans l'Amphithéâtre de
P- Philippi:& depuis la trouuafmes defTas les montagnes de Spole-
IStf teen Italie^n la marche d' Ancone.Mais pource qu'on la trouue
Traçrorù** ^â communecn noz iardins}nous dirons fon nom ancien , tel
mm. <ïuc louons aprins des habitans de Crète , Se de l'ifle Cy tharee,
qui nous l'ont vulgairement nommée Tragarigani :qui vau t au-
tant à dire comme Tragoriganum .
0~BSER^1ES pà*. P. SELON. T4X
&ckmtere nommée Marîjfa, anciennement H ebrus : &desfilr
lerie$de$Tur&. Chapitre LXIH.
m X. ny'a point de pont fur la riuicre Mariffa: parquoy il umgk.
f§| la faut pafTerpat bateau. La côuftume du pays eft que
ÉjM vn homme Se fa monture ne payent qu vn afpre pour
^rarjjjB paflà^e : toutesfois nous n en fufmcs pas quittes pour
quinze pour nous & noftre guide : car 1 auarice des Turcs cft tel- ^^
Ie,que quand ils fctrouucntvnpeuaduantagez fur lescftrâgers, 'na^tia des
ils pillent tout ce qu'ils peuuent : &: bon gré ou mal gre fauc que TurcSm
la perfonne paye ce qu'ils veulent auoir. Car les mangeries y font
. <ellcsJquiis ne pairdonneroyent pas à leur père, quâd ils ont quel-
■ que petite occafion de prendre, A I'oppofite du port, àladiftan-
ce d*vn quart de lieue nous laiflàfmes vnc belle petite villcrte^qui ^
^appelle Vire, aiTifecnfort beau pays au pendant dVncouftau, * '
qui eft fermée de murs antiques. Cefte riuiereau iourd'huy ap- ^r^
peliec de tous en vulgaire Marifia^eftoit anciennement nommée
Heprus. Les habitans des villages circonuoifins de la riuicre He- Héros.
brus ont la pratique de tirer de grands monceaux de fabïon en
temps d'efté quand la riuicre eft petite , içachans qu'il y aleans
quelque petite quantité de grains d or:& iesrecullcnt affczloing
du riuagc , à fin que quand elle defgorge^nc les emmeine. Car en 0rmmé
Ceparanclor, & le lauant d'auec le iàblon 5 ils afiêmblent des aix Muep^wm
trouez pour îelaueraucc l'eau de la riuicre: s'ils trouuentqueî-
•que petite portion d'or , c'eft aucc moult grand' peine , defpen-
fç^longucur detemps:&auflïquefansvifargcntilsne peuuet
rien faire qui vaille. Les fleuues Strimone &: Nefus fc rendent en ^^
tnefme endroiâ delà mer % l'vn au cofte d embas de Fifle de Taf- ^
£os,& l'autre au epfté d'en haut» Mais Hebrus fè va rendre deuât Sjanoty^
Tifle deSamothrace:quieft chofe que Pline a défia notée. La rî-
uiere va fi lentement , qu'il fcmble qu'elle* ne fi( bouge. L'eau
enefttroublc, toutesfois fort douce , & fi froide au cœurdefte
qu on diroit quelle eft glacée :& y a beaucoup de Tamatifi^es
par lçsriuages. Ellefecourbe fouuentv& fe retourne ainji que
faitlaSeineentreParis&Pontoyfe. Il <Wcçnd tant dxau des
montagnes en hy uer quelle en eft rauifl ante 3 & inonde vnc prai-
rie de moult grande çftendue3qui a cfté nommée Dorifclisaenla>
S iij
T$U/ -PREMIER. BIVR-S DES SIKGVLA-.
quelle Xerxes nombra fonexercite allant en Grèce. Et pour aui
gonjeut tant qu£ celle grande prairie eft plongée rhyuer comme vn lieu
ampus. marcfcageuXjpn n'y -baftift nuls villages,t»a4s ony nourrift l'efté-
grand nombre de chenaux. Le grand feigneur mefme y en fait:
- . àoarrir.eri temps d'eux pî us de miilc-;-& croyons que les particu-
liers des villages n y en nourriflent- guère moins- de cinq cens. La-
prairie cftfi nette qu'il ne s'y nouTrifèTaulpe^Serpér^SouriSjRat*.
ne Mulot : £ar l'inondation de l'hyuer les chaiTe tous. JL'on y voit
croiftre l'herbe de Gytifus en piuueurs lieux. Les villages qui fonr
• £tuez au tou-r des prairies 3 font le long des collines r car citant la
prairie entoumee de toutes parts des collines & montagnes bien*
arroufees : font moult propres pour le labourage,&: bien accom-
modées de chofes ncceSaires. Les payfans y- font grandement-
^Akions de multipliez. Les ocees delà nuiere font en quelques cndroi&safc
nmere. fezhauts,ou les Aidons de riuiere, vulgairement nommez Mar-
MdfT*T rinets pefebejars ,, êc auâS les Hirondelles, iknpîcment appe liées-
Merêps. Martinetssfdnt leursnids en terre , comme aufïi fait l'oifeau no^
%Afufta', ■ m& Merops , ou Apiafter , que les-habitans de Crète nomment
Meltfopb&, Meîiffophago.Ayanseulieu d'obfcrucrlefdits Alcions; trouuaf-
ff*. mes qu'ils ne differcafcn rien de ceux qui font es nuages de- nc*z>
fleuues : car leurs nids font ainfi. faits darefks & efcailles de pe-
tits poiilbnSjComme les nofères. Les villageois plus voifins de la-
riuiereMariflV^fént îesjardins félon le courts de la riuiere en la*
fufdidcpîairle rrcara)4ans grande comiîïoâitéd eau , ioinâ: que-
Coùom Ccii moult banne terre,ils cultiuent des Melons , Copous , Ci*
trouilles, Cougoudes, Cocombres , &: autres (èmblabîes fruids
deûc. Ils nous ontaflèuré que le Colocafïèy croift aufïi en quek
quesendroi&s : dont ne pouuons rien affermer. Nous oommen-
fafmcsà trou uer les couftaux > ànfiue de ladi&e campagne , &c
entrer en pays de montagnettes, earfe-kfquelles obferuafraes*
vnce/pece d'Erabic d&tcn te à toutes les fortes quauions aupa-
Erdle. rauant vcues.Cc fut la Hxkfrne elpece entre les différences qu a-
six ejj>ece$ uonsrcmerqué.BUe vient en petit arbrifleau,delaquelle parleros>
àgrMe. ailleurs pius à plain 3 en defeiuan t lesaf bres. Nous srouuafmes'
Melmtcm 4^ baiogs natuEellemcat chauds en terre ferme à lbppofite de-,
™jL. ^c timbre-: Se eftions au droid du flenue nommé Melane , êc
delà plage du mefme nom^qui enferme Galipoîi en fon cheronev
ft-3 dedans lequel eftSeftus à l'oppofitc d'Abydus., II y a deux»
Sources chaudes en ces baings ., i'vnc qui a cfté deputeepemr ks
hommes , & f autre pour les femmes : & comme il ne coufte rien
àfc lauer4edans,tout ainfî n'y aîlperfonne qui les nettoyé : âuûl
font ikmoultords. L'on yoit les ruines d'vne ville, & des mu^, Macroni^
railles de grande eftendue^queles autheuts ont nommé Macron- chos.
tiebos, qui font ioignant lefdits baings , &cnfermoycnt le paftâ-
ge contre les ennemis qui endommageoyent la Thrace.
Que plufteun nations* en vont hors deiettrpays en certain temps de
tannee,& puis s' en retournent en autre Jkijbn. Ckap. LXini.
[ N continuant noftre campagne, cheminas versCon-
! ftantinopîe , trouuions de grands bendes depauures
[ payfans AîbanoiSjautrement appeliez £rgatcssquirc~ ^limok
î tournoyent en leur pays : Ôivenoyent de Turquie, de ■E^^
trauailïer. Il leur aduknt -comme aux Lombards & 5auoifîensr
qui s m vont kors-de leur pays en certain temps de Tannée, puis
s'en retournent^!} l'autre. Ces panures payfaos Aibanois forcent
hors de leur pays en trouppepour aller viure ailleurs: car leur pais
eft fterik. Ils vont moirTonnerles'blcdspar Turquie en cfté pour
gaîgncr de l'argent. Lefquels arriuans h pay s fertiles de bleds,
comme esplainesde Macedoine,& deTbrace, ou -bien en Àna-
tolic,font employez par les Turcs àrecuëillir lesèkds,& en pur-
ger le grain. Et aptcs^uelafaiion eft pafTee^s en retournent viure
auçc leurs femmes. Ils ont vnefaçon de faire en feiant4eèkd,dc
plus grande induftric que n eft la ïrançoife; wB leurs faucilles T4U^^ ^
font quel que peu di£Fcrentcs,pourcc qu'elles font flattes , larges, ^^^
& fans^knts, &r qu'elles font moins courbées» lis les tiennent de
la main dextre enfeiam, ayas vn bois courbe en la main gauche,
qui eft quelque peu voûté &: pointu à l'extrémité ; dedans lequel
il y a trois permis pour y £cher trois doigts de la main feneftre,
fçauoir eft le plus petit, le fécond, & le tiers d'après. Car ils fè re-
fèruent lcpoulce,&: l'autre prochain, tous nuds,pour mieux em-
potgnefk'bkd ; Se ouurans la main , £t empoignans le bled, Us
f cient beaucoup plus grande poignée. Apres cela ils battencle
bled, non pas aux fléaux , comme en noftre pays , mais aucc ks
bœufs, comme par toute Grèce : & en ce faîfant trament des aix ^ ^.^
lardez de pierre de Caflidoine,qui minent la paille, & la rendent 4^^^
feoiffee. Et pource qu auons comparé ks fufdits Aibanois aux «^ v
S iiij
s ï$4> BRBMÏ'S* IjIV*.B- PB* SIN^V-LA"»
Sauoiûens & Lombards, voulons dire que nous fommes trouuez-
files voir partir en trouppe,à la manière des Eftourneaux.Les Sa-
uoifiens vont en Italie feier du bois de Poupie,!e long du Pau : &:.
des Çhefhes vcrds,c eft àdire llices par le Friol,comme au flifon t
j^iePô«-,de toutes autres fortesde boisdurparla Tofcanc Ôc Romaine:
fie. mais les Sauoificns font en ce contraires aux Al banois, que les,
^dbmok Albanois fortet de leur pays au fin cœur de rcfté,puis s'en retour-:
S4wijiens, nencen Automne:& les Sauoifiens , au contraire partent en Au-
tomne,^ retournent au printemps. Car d'autant qu'ils habitent,
par les montagnes, les neiges les empefehent de rien faire tout
rhyuer : & auSi que le bois qu'ils fcientrhyucren Italie, eft dur^
ouil faut grandement trauailler, qui eft v'nc befongne qu'ils Jne.
pourroyen t pas faire l'efté:& que s'ils demeuroy et en leu r pay sjils~
sqmo ïèroyent oy feux.tout l'hyuer. Mais en efté retournezen leur pays .
%^- trouuent des bois de Sapins, Pignets , Melefes, & autres fembla-
fojwds ^^ bois tendres,qui leur donnent moindre peine à les fcierl'efté.
"• ' ■ "au chaud. Ceux de Lombardiefont comme les Albanois & Sa-
uoifiens : Car ils fe partent par bendes,s'accompagnans en troup-
pes iufques autant qu ils foyènt hors de leur pay s: mais en entrant.,
en Allemagnc,Francc,Flandre,Danernarch,& autres pays plus
loingtains, ils fefeparent, chacun à part foy arriuans au lieu pro-
pofc,rammonans les cheminées çà& là Thyuer. Mais retournas^,
ils font comme les Cigognes,quiarriuent fèul àfeuî. Voila com-
ment les hommes de diuers pays font contraints aller chercher
leur vie quelque temps de 1 année en autres régions que la leur.
Mghvtts. Les Àibanoisançienriemenrsnommez.Epirotes , font Chreftiés,
& parlent vne langue à part foy différente à la Grecque. Il eft bie.
vray qu'ils fuyuent la religion des Grecs : & d'autant qu'ils font
confins de Grèce , ils fçauent auffi le langage Grec. Et quand ils
font retournez en leur pays ^ ils viuent tout rhyuer de l'argent
qu'ils ontgaignél'efté. Us font quafï tons nudspieds,& font ex-.
tremementpauures,gensdepetitedefpenfe,&de grand trauail.
Par ce point ils ne faillcnt iamais itrouuer de la befongoe tout
1 efté aux champs es villages des Tu rcs : car les Xu rcs fon t pareC .
fèux;&: de petit trauail au labourage,lents,tardifs, & qui tempo-
'*** rifènt grandement en leurs afTaires.Suyuans noftre chemin,nous
Gtâïdoine* trouiû°ns des pierres de Iafpe de piufieurs couleurs par les cam-
' '" Pâgnes?& femblablement des pierres de Caflidoine, &; mcfmc»,
ment^
CrrSERVBlS- FAR *. BEXaîî. *4J-
met les murs des maifons des villages en ceft endroieY fontqweU
que fois baftis de pierre de Iafpe& de Çaffidoine. *
£#« /« -arbres nomme^^erehinthes >ponmtvneeJJ>eeerde Galles t ^
li>nten^4nà^fage:enTurqHie^. Chapitre lxv.
Es payfansdcThrace Se de Macédoine yfçachansîe*7^ &'
grad vfagedes Galles du Terebinthe quictoiiïcnt par Tfnknthe^. ^
\ les collines , les ayans à-leur commandement ^ne lai£-
■ fênt pérore l'œcafion degamgqu'ils.y precendenr;car
ils vont cueillir des pommettes fur la fia de Iuin defibus les fueil-
les,oa bien au pied du rameau qui porte laicmence en grappe, Ss
îàtrouuent vne petite Galle yague&creufc dedas^dèlagroiFeur
dVncnoifille: laquelle fi on lai&^rçeroiftre, deuiendroic longue Cùrm &
à la façon d*vne petite corne r mais ils la.cueillen t encor petite yS& lkT^m^
la vendent chèrement- pour teindre les fines foyes en la ville de
Bource.Nous eontiuuafmes noftre chemin par Thrace:& trou-
iiafmes vne Garauanne ,.. ou compagnies de muletiers veaans de:
Saîoniki,qui ailoyentàConftantinople y&. logeafme^en va vil-
lage nomme Aignegic.
Or pour ce que les Grecs ne mangent pointles Xortue^non 7ùTiU£î—
plus des terreftres Se de mer, que d eau dôuce,elles font fi frequéV ''■"/'
tes par les champs de Gr ece>& principalement de Thrace, qu on -\v . '
les voit ordinairement par les grands chemins,qui font fort grof^ ^ =
fes Se graffes. Et neftoit que les iardiniers les craignent grande— 1^ ^
ment, d'autant qu'elles mangent les herbes qui commencent h . ~:Ê>
proiker,&'fur tour appetent les Melons, les Bepons,le Cotoa,&
îaSe&me , perfonne ne les tueroit. Mais quand les iardiniers les^
trou uent dedans leurs iardins ^ils lesruent : puis les cmijallenta-
queîquehaye.-
Que les Turcs allam par pays font petite dé^enfe^ Chapitre 1 l x v I. -
! Eiour enfuyuant continuas nojftre chemin , trouua£ ^rifioLogs.
\ m es que les champs eftoyenrmouit frequensen Ari- k*g*»
1 (tologe longue. Nous y trouvions auffi de la vraye sJjf°Pem
JHyflbpe,de deux efpeces de Polio», Se duChama>^J^r
dry s;nous trouuions toutes chofes ànous neceflàircs pour viurc
T
fQS'
iU
fmnth'M.
14^ PREMIER LIVRE DES SINGVI.A.
par tes villagcSjCommc bcurrcjœufsjvolaiilcjpain , fourmage, &
lai&age. Tous les voi&uriers &: muletiers de la Carauanne fe
fournirent dvne forte de laid aigre,nomé Oxy gala , qu'ils portée
dedasdes fachets de toile pédus aux bafts de leurs beftes. Et com-
bien quekdit-lai&foitrgrandcment humide, toutesfois il reftoit
enfermé dedans la toiîfe , fanspoint percer le linge, LesCrecs &:
Turcs ont couftumedeprendre des aux egouflez, & îesbatreen
quelque vaifleau de bois : puis les mefler auec de i'Oxy gala. Ceft
vne viande de grand feigneur, tant elle eft plaifantc à manger : 8£
de laquelle non feulementlesvoi&uriers ont-accouftiime man-
ger,mais «affiles plus grands feigneurs delà court du Turc. Et
qui ne voudra croire que ce ne foit viande fi exquife que difons,
l'expérience en eft facile. Ceft vne viande que les Turcs ont ca
commun vfâge5& ont opinion que-eek les refraichift en efté,5&
les rechauffe^ivhyuer. Nous laiflamics 1c chemin deGalipolià
main gaachc,& prinfmes le chemin vers Rodôfto^quiancierrnc-
ment eftoit nommé Perinthus,Nous repofafmes fur iour deffous
desNoiers pour refraifehir noz montures. Puis reprinfrnes le
chemin : & le foir campafmes en la plaine : & là nous remparaf-
mes des charges des marchandifes de la Carauanne , pour nous
tenir enplus grande feurcté : & doimiimes là*
QueïesTuYCsfont lesgens qui fçauentle mieux charger & décharger
bagage en allant far paysfiue mis autres. Chapitre
lxvii.
Mabiiete'à
(charger O"
msà^ nousafembîé bonmettre par eferit vne chofe que
§§* auons obferué chez les Turcs, de laquelle ils font ou-
9 urierstanten paix qu en guerre. Ceft leur manière de
ussssf^sa charger $c defcharger leurs bagages furcheuaux,cha-
,-- « mcaux,ou mulets. Cinq ouiîxhommeseurct defehargé au foir,
""*' &rechargéau matin, û habillement toutes les beftes delaCara-
uanne,qui eftoy eBt en nombre cent cinquante ,- qu'onc ne n ous
en apperceufmes. Trois hommes fans plus peuuent charger cent
cheuaux en moins d'vn quart d'heur^moy ennant que le faix foit
lié à leur manière de faire. Il eft neceilàire que chaque balle foit
liée de deux croix par les deux bouts , & que les cordes foyent at-
tachées à la manière que s'enfuit. Quand deux hommes auront
leué fvne des balles iufques deffus le baft , il faut que le tiersmur
OBSERVEES PAR ?. BTïtON. v< *47
^icrcmboudclacordcderautreballcquicftcncoraDas,^
Scdcscroixdccdlcquîcftdcfiachargeefur cdubafU! fautauf-
Luelescordesdela haute foyenc femblablement cmbouclecs
dclacordcdelabaliedembas^quelVndeccuxquiauo^aidc
àlcucrlaprcmicrcballc.aidcàicuctivuiwc: carvn fcul fumt a la
tenir fur la-bcfte -M les deux autres prennent chacun vnboutde
la corde,dont chacune balle n'en a (mon vne & la repaient par
kplushautdelacroix, & i'eftraignent & lafehent félon quils
veulentquelachargefoitpîus haute ou plus baflé, .Alalarifcnc
îon2ueoucourtecommeilsvcuieBt.nsattae^ntics^d^p^
ledehors, àâh quelles en foyent pluftoit dci&ites au &«. Les
fardcauxfontarTisdeffusles baftsde tmicrs en aoix-bourgi^
anonnc/Vnhommefeulpeutàrarriueedefchargeirtouslesche,
uauxde la compagnie^ vninftant., deuiantchaquehout.de la
fufdtte coÉde,& peut lalaiûet eheoic fi également de chaque co-
fté, qu'elle defeend de mefme balance. Celuy quiîesdeuaîle en
tenantlacordepourroitlcsarreftcrtoutesdeux en mefmcmefu-
re & hautcur}à demy pied de terre. Vn petit enfant pourroit dé-
charger cent cheuaux en moins d vn quart d heure , tans que pas
vnedes cliargespjinrfaukea.toinbant.
TldAviKt<pi§oitMci^emMW
Redoftoi&deHeradée.
-, -■ Chapitre- ;'LX¥iH>»- ; . : :
■ Ossé&onscrcKPcrin^ 7mnù*,
\ pafraâncsvneriuiercpar.defi^^^^^ ^^
l eftre ïaxiuiere. Àrzus. Les Turcs la.nommcnt Chuqt-
E ^&£& tout certain qu'elle va,tomSer au. Froppnti- ^
de entre Çalipoîi S^doftp. Rpdoïlû ctone ville auJiuage ^
du Propontidc,qui à noftrcaduis, anciennement auoitnoni Pe-
rinthus.Combien qu'il yayedesgensquipenfentqucPennthus
fuft celle quîoanommc maintenant Heraclce. Rodofto efttorç
antique, fans im*railles.Suyuansie grand cliemm de Conftan-
tinopie,nous laiffafmes la ville d'Heraclee àmaingauchc: qui
n'eft pas droidcmcntfur le grand chemin, mais en eft eflongnee
«l'vn traid d'arbalefte.Heraclee a reteou fon nom anciemlequel
îî^îS..afoUicité.d,enquerir.quclleaeftc]araifon pourquo-y le-.
■Ut PREMIER LIVRE PES *STÏÏGVLA,
mield'HcracleefurnoméHeracieû, eftoic venimeux. Or faut-Il
&cruUim fçauoir qu'il y a pluûeurs Heraclccs: mais cefte-cy cften Thrace.
,mdyaum» nous écroulions autre raifon,finonquily a beaucoup de Cha-
U^Jecn inaelcon noir par la région , qui kit vne cxcrefcence à fa racine,
mir xiommeeîxïa ., qui cft vn pernicieux & dangereux venin , U tue
ceux qui en mangcnt,tou t en vn infbtnt. Et fi les moufehes a miel
v prennent la matière de leur miel deflfus Tes fleurs,nous ne doutos
duc le miel ne foit vnpernicieux venin à l'homme: toutesfois n'i-
gnorons pas que les Auettcs ne prennent aucunement la matière
de leur miel defTus les fleurs , comme phifieurs ont penfc : ains le
ïecueiliet de defTus les fucilles lors qu'il s'y cft fait vnegrafle rou~
fee du cîcl. Nous continuâmes noftre chemin, & paflafnies pat
sMvrx- auprès delaviliedeSeliuree, qui anciennement eftoit nommée
seUmhrid. Selimbria.Quand nous fufmcsà deux iournees de Conftantino-
pîc,arriuans à demie lieue près delà ville de Seîiuree,trouuafraes
lesexcremétsdvnmetairurlegrandcheminaunuagedehmer,
qui monftrent qu'anciennement il y ait eu des minières: & com-
bien qu'ayons diligemment confîderé ledit excrément , toutes-
fois tfauons bonnement peu fçauoir de quel métal ileftoit. Les
veftiges & ruines des édifices qui auoyent cfté baftisencelieu,
font foy qu'il y ait eu autrefois des fourneaux pour fondre du
. , métal. Àuffi il y a grands monceaux de Scories , qui eft ce qu'on
***"-* ditenFrâçoismerdedemctanqu'ony voicen phifieurs endroits.
2ZZF Letempspafleenfondantlesmetauxon les fouffloit par la force
' des hornmcs,& non par l'eau, comme l'on fait maintenait : tou-
tesfoisil y a quelques ru irTeaux làauprcs , lefquels a noftre adins
Ton euft peu adapter s'ils eufTent eu l'vfage de fc feruir d eau a rai-
" rctournerlesroucspoutfoufflerlaminicre: ainfiquenousauQS
-. decouftume. En cherchant les plantes qui foncau tm*oir^dc
' Seliuree,xrouuafmes vne herbe ladicineufe, ayant fucilles fera-
, • biabies au Nerion , & fleurs de mefmc , mais en toutes merques
fT ^%luspetite:Saiavoirde loing, elle rcffcmbloic auMonde
Nerion. Crète : maisàla voir de plus près , fembloit mieux a 1 herbe de
Tr^on ^Lyfimachiapurpurea. Auffi trouuafmes duCynfus, délaie.
crac menec duquel cueilhfmes largement. Partans de ces ancien-
LjfimachU ncs minieIes , qui font fur le grand chemin loignant le bord
purpm*. ^ k. mcr noOS vinfmcs loger à Seliuree , qui a vn tort beau
**""- petitchafteau,aflisdeffiisvncoftau.Seliurcenepeutbonnemcrïc
ÔB SERVIES f VU •'■>. • fc.E^Ï/O-'ift. &f#
ôfereâppcllcc vilîe,<i'aucanc qu'il n'y appoint de murailles; Les
inaifons , lest>aings , les Mofqueesfbnt au deflbus du chafteau.
^outlcboBrgcftfituéen pendanr.quieftfort fomblableàlâYi!- _^ ^m
le de la Rie en Ânglcterre,cômme anffi eft Gaîipoli.Be Seliuree^^*^
voulans aller au grand-chemin de Conftantinoplc, il faut ache-
ter de monter fur le eouftau,&rcontinuer la campagne. Lanl us
grande partie des maifons de Seliuree/ont quelque peu îoing du
port. Les grands nauires arriuent communémsitt à Seiiuree ,
|>oùr acheuer de {êçharget des marchâdifes qui leur font appor-
tées d' Andrenopîe, & de terre ferme de Thrace, Se Bulgarie. En
exemple dequoy lors que f>aûafmes. par ià,vn nauke Vénitien
^achcuok fa charge des marchandifes quiluy eftoyent apportées,
non feulement des pays defTufdicts, maisaufft èà natolie, coin- ^ZnxtoUt.
nie feroyent laines, cuks,cotron,Anatoîie ou Natolie eftdeiMu- *ta*oU
tre part de l'Hellefpont : Se les Turcs difent Anatoii , qui dfc vn -^g^ -
mot Grec , par lequel on figmfïe le leuant : mais communément A*£*£*
Ion appelle le pays en Afic on domine le Turc, de ce nom d'Àna- p^f
tolie : car departac l'Europe tle l'Afie par le deftroict des Bofpho- Lyjle
tes du Propentide Se rHellefpont , tout le pays qui eft par delà a carie.
nom Anatolic : tellement que quand les Grecs parlent de l'Àna- **pU*g»*
tolie,ils comprennent beaucoup d'autres prouinecs , fçauoir eft Ljœ.
toute la Phrvgie^aiathicBithyaie^Pon^Lydie^ane^Paphi^ *£M£
£o'nic,Lyeie^Magnefie,Cappadoce, Se Comagene. Et s'ils veu- J '
lent parler de quelque befongne ou marchandife par excellence *
«juifoit del'vn des pays deuufdict^il leur fu&afauoir di&ccftre
<rAnatolie.
' Chapitre lxix.
; N ce temps que pafîafmes par Seiiuree » il y auok
; vne compagnie de Turcs qui eftoy et enuiro qua-
\" tre miile,logcz tant par les Carhacharas Se autres
• lieux de la ville , comme aûffi dehors fous les ar-
Kugteè^mzJ* bres.Touseftoyentgens de chenal, d'vne bande:
qui alloycnt au camp du grad Turc coBtrele Roy de Perfe, mais
fepartirent long temps auant iourd'vnefiience fi grande , que
ïi6Q5aitrcs,«picncaspareilauions ptopofé denous leuer auant
T iij
If a V K E MI E & I 1 f% 1 DE S S IK G V t" A .
le iour,n*cn ouyfmesiamais rien, combien qu'ils fuiTent ioignants
nous.Ce nous fembîa chofè digne de récit , que fi grande croupe
foie peu partir fans faire aucun bruit. M n'y a qu'vne iournee de*
puis Seîiureciufqu a Conftantinopîc , tout par pays defcouuerr^
& fans arbres . Il faut paflèr deux pots de bois trois lieues au deçà/
de ConftantinoplejdefquelsJe premier <eft bien petit , r&ais le fe-
cadefbbeaucoup plus long^qui eftnomé Buikchegmeghi. .Tout
?****, ]ç pays de Thrace fè pourront comparer à Picardie : car il eft ainfl
£àns arbres /ayant de moult grandes plaines ,&enaucuns lieux
des collines Jl y a vu vhMage entreries deux pon t$:&:. d'autant que
c£eft %n grand pafïage, Ion y trouue dés viures en tous temps pour
l'argent. Tous les deux ponts, premier & fecôd,font faits de bois-
deffus des eftangs falcz,qui entrent de la mer en terre ferme,con>
me vn goulphe : ou il y a plu fleurs bafleaux qui fèruentà pafTer
d*v n village en autre^ aufïià pefcher. Il y a pluileursmouîins à
vent/elon îeriuagedudit lac ^que nous kiffionsàonain quelle:
^meulent à huit agiles ou bras, comme auflitous antres moulins
Mm&màe] àventen Turquie, &: non à quatre comme les noftees, Etc5me
Turquie. il y a deux ponts à pafTer % tout ainfl y a il deuxiacs qui fe conioi-
gnent.en vn.-defqyels le*euenu du porfibn qu'on y*pefchc , eft de '
grande eftirnation. l,on trouue vn logis de plaifance de l'Empe-
reur des Turcs au delà du village de Buikcliegtïieghy,fitué:fur va
couftau dedans vn bois de haute fuftaye , tout enfermédemu-
raillc.Les arbres de ce bo^foutCouldriers^Çhemes^uîineauXj
Erefhes,SauJcs1Plaranes,&: arbres de Lotu s, qui on mo-cn Fran-r
ittits. çois Micacouliers^AJa parfln arriuafmes à Conftantinopîc pour
Mtçacedimia deuxiefmc fois, Si là mifmes fin à ce voyage, qui fuftvexs le c&-
mencernent du rnoys d^Aoufh
T>tU viU.ç àe, Pert ^de ConJjUnmoplc* . Chapitre. . LXX.
i Vant parlerde Confrantinople^noas a fèmbîé bon e£
crire premièrement de la ville de Pere,qui eft à parfoy
xparee de ConftantinoplCjdù trauers d'vn canal , cô-
_L _,„ jajc font plufîeurs autres villes que nous voyons eftrc
vis à vis ï'vne de l'autre au riuagede quelque riuiereicome pourr
roit eftrela Cite &c CarcafTonne , Bcaucairc & Tarafcon : tclle=r
XQS&t que pour aller de Conftantinopje en Père , il faut pafïêr le.
O B '$«** « S *A*H '*• Bï t Ô K. - v *î*
«ttiêcft <fe là quelle a prins fon nom : car Père n'cft a due aime
•xhofeqtfoatt^oo dclà.Ellee£tfitueeen pédant deâbs vue colli-
ne. Si quelque eftrager arriueàCôMtinopîeou a Pcre,par mer
ou par terre^I ne trouuera point d'hoftelcrie pour fc loger : par-
quoy cÔuiéta vnchacun^llat par Turquie porter les hatdcsiur-
quoy i&êvcuc coucher de nuid.Toutefoisquad quelque cftran-
âer arriueenConftantinopleoucnPere,ilnepeutcftrequiI ne
uouue logis en vnefaçon ou en âutre,ioina qlesCarbacharats, l ,^
qui fondes logis publiques de Turquie , ne défaillent ïamais par ^esdeTms
ksvilies:& auffi qu'il n'y a hommede quelque nation , aumoms^
poinrlaolus-grande partic^ai ne trouuc quelque logis a te reti-
rer : Car communément chafque perfonne fe retire chez celuy
qu'il aura entendu eftre de fon pays.Suyuant cela % fçachant bien
quetoutes republiques & grands feigneurs d'Europe ont leurs
Ambatfadeursà Conftantinople^principalemetquand lap<ux
eft vniuerfelle entrclcs princes , & que les Àmbaflâdeurs rai :dcs
republiques,que des feigneurs Chreftiens, comme celuy defra- Ev^A^
cc,dcVcnife;deRagouib,Ghio,Florence>Tranfyluanie5Hogne iamU^
&autres',fc.tiennentcommunémenrenPerc , excepte celuy de »**.
Œm»crra,x«ricûl^
queTerfonne fe retire .par deuers eux. Mais les François particu-
liereWntentreautrcsnatipnstrouueDtcommunemetmeilleuç
party :car ils font mieux recueillis denoftre Àmbafladeur^font
toufiourslesmieuxvenus^quenefonclcs autreschez leurs Am-
ba{fadeurs:&au01qucles François (ètrouuans en effrange pays,
fçauentfuppûrterlesvnslesautres^s'aimcrmieuxquenefont
les autres notions. La libéralité de monfieiird'AramontÀmbai.
fadeur pour le Roy *ers legrand feigncur,donnc témoignage de Qmtoifieie
cequenauônsdir:carilatant aimé àfaircplaifiratousccux ^mtmfiatr
lanationFrançoifc,ouquieftoyent du party François^quilnar- £MJmùttt,
rlua onc hommeà Conftantinopîe, de quelque condiaon qu il
fulLs'addreÛantàïuy.quilnaithurr^nementreçeu^faittrai.
der en fon logis. Sa libéralité fepeutaufS prouuer par le grand
nombre d'efeiaues Chreftiens qu'il a deliurez de la mam des
Turcs àfespropresdeniers. Etquand quelques François vien-
nent à CÔftantinople, outre ce qu'il leur fait donner tout ce que
leureftneceflkire^uailesfaitreueftirs'usnontdeshabillemes.
D'auantagc^maifon eu ouucrte à toutes gens. Etquandvn
Ij& PREMIER- LIVRE DES SINGVXA.
itharditéde François cftennuyé d'eftreence pays la , il luy donne de l'argent»
menfieur fcjon f0n eftat,autant qu'il luy en faut pour retourner en France.,
d>Ar4mont- £c s,jj cagnoift qu'il foit de race noble,apres l'auoir tratôé hono- :
rablement comme foymefme>fînabîemçnt il luy fait donet moi> >
tares & autres chofes necefSires.Et comme il nes'ennuia iamais ;
de la defpeme qull luy ait conuenu faire pour 1 arriuee des plus-;
grâds perfonnagçs, tout ainfi il ne dèfdaigna iamais de faire plai- ;
iïr aux plus petis compagnons. Et layans expérimenté en noftrev
endroit .ferions dignes délire nommez ingras fi n'en rendions,
tefmoignage : car nous fommesaffeurez quil n'y a homme qui,
nous fçache contredire d'vn feui mot de tout ce qu en auons dit>v
sri n'eftoitJnàque>&:qu'ii ne refufaft d accorder àla vérité..
J^fcrlptmAs mm$ dçNmmedk, <& dëceqtfiycjl.mamtemnî^ •
Chapitre: lxxu
.*'o die ^J^J^^ Tans féiournéàCc^ftantinople}partifmcs pour alîe^
^°m '* WÊÊÈm voir les ruines de la ville de Nicomedic -, qui n'ont en-
WÊÈ^ cor point perdu leutnomancien.Nicomedie eftoitfi-:
«&ISP&. tuée deÉus vn couftau .Le tour de fes murailles cfiolr
fyfcrlpim forCgrand,qui.commençoit au bas du port , & comprenok tout
desminesds ^ ^zut fafaçzz dtïfusvne colline., La ville eft.totalementrui-
mQwêk< nec ^ m^s le touc ^u çhafteau eft en fon entier fitué en haut lien
deflus le eouitaq^çomprins dedans le ciccuit des muraiïles.ïl n'y
a pas plus de trois toiles de diftence dVne tour des muraillesdti
chafteaaiufqucs à l'autre vtant il eftoit de grande fortereue :,lef~
quelles font faites de telles cuiâss&ioin&es de fort ciment-
% afEette e&en pkifant lieu àçSks lafoinmité d'vne petite mon-
ca<me.Il y a grande commodité d'eau des fontainesaqui font eau-
&% ierendreiîabité5partie.de Turcs , partie de Grecs. Les cha-
piteaux &: tronçons dçs pilliers &c grottes colomnes de ce cha-
■fléau 9 montrent qucNieomedie ait autrefois efté puiûantc vil- -
le. Àufn y ayons recouuert de moult belles medalles antiques
Greques^ I^unes.Nauigant par lesjoreesde îamer, regardant-
contre terre aux images, Ion voïtles poiffons que les Latins ont
aommé.Pinna>fichezr&: arrangez de bout,qu on dicoitquafi vok-
^' va iambo enterre:aufli eft-ce queles Latins l'ontnommé enau-.
tœnpn^PttnaJEftfcqael^
"- • - ' " - ~ phe,;
OBSERVEES PAU *. BIIOK. l$$
phe de Nicomedic,au dedans du Propon tide , obferuafmcs qu'il D™°»efes.
y en a neuf,qu onvoit bien aclair de dedans Conftantinoplc,qui Vrot0'
anciennement eftoyent nommées Demoncfès. La première eft rf^^
maintenant appellce àes Grecs Proco. L'autre d après , Bergus. ^or^0
LatierccJfulcdelCorbo. La refte des autres , font petites ifles, proconefar
qui n'ont pas noms propres. ILy en a bien d autres qui font plus Marmara.
bas vers l'Hellcfpont, mais pluiieurs d'icelles ont changé leurs Besbicus.
noms anciens : car celle qui s appelloit anciennement Procone- GJ<M»»a.
fus>eft maintenant nommée Marmara: Se Beibicus, Galomino.
Que les nations du Leuant aiment mieux manger dupoijfpnyqtte de la chah.
Chapitre lxxii.
\ Vant que nous déporter de parler âcs rieherTcs db
) Propontidc,fçachans qu iicft abondant en toutes e£-
( pecesde poifTons, difons qu'il n eft de moindre reue-
[nu, qu'vn pays de terre ferme de bon pafturage eft en
animaux : c eft de là que tout le peuple de Turquie „ Se de Grèce
*ft plus friand de poifTon qu'il n eft de chair. Les hab itans de ter-
re ferme en noftre France qui ont le poiftbn en fi grandhorreury
-nous femblent l'auoir plus par opinion,qu autrement. Nous en-
-tendons de ceux qui par opiniaftretc manget la chair en cachet-
tes les vendredis, Se à peine ont du poifïb.n à manger le dimaçhe.
-Àuffi ne trouuôs nous point par les eferits des anciens autheu.rs»
que la chair ait anciennement efté tant cftimcc,qu elle nefuft in-
férieure au poiflbn .Et les religieux d'Egypte s'abftenoict de man-
ger du poilîbn toute leur vie, voulas inférer par cela qu'ils efto.iêc
priuez dételle delice5cÔme pourroiteftre en la noftre de ne man-
der point de chair. Ce mefprHèmcnt de manger chair Se eftjmcr
le poiflbn,afait que les anciens Grecs,& Latins,..aycnt moins co-
gneu les oifeaux qles poiflons. Autîï les médecins ont plus parlé-
des diuerfes efpeces des poifTons en leurs liures ècs aHmes > qu'ils
n on t fait des oifeaux Se des beftes rerrcftres:&: ne trou nos point
-que les Empereurs Se grands {cigneurs Romainsayent cftiméles ottm.
oifeaux en leurs banquets^comme lonfair maintenant ^excepté Fruy0^
quelque Griuc Se Francolimcar ils auoyent tous pontons en de- *£££*
lices , plus que toute autre manière de gibbier : tellement que la ^0$.
ÇerdriXjFaiiànjBeccauc^Pluuier^&aurjes^uifcjstw premier ^^T
V
Engins a
prendre le
foijfon.
Îf4 PREMIER riVM DIS *INGVLA*~
devrez es friandifes des François , n ont point efté eftimee es re~
pasdes plus friands anciens Empereurs Romains. Encores diros
d'auantage , que lcgrand Turc mefmes,fes predece{Teurs5& tous
-ceux de Ùl court,mettent plus leur defîr à manger du poifTon que
deîachain&nevoitlon gueredegibbieraumaFché deCoftan-
tinopîe. Parquoyeftant le lieu abondant enpoifTon , s'eftudient
xle le prendre en oUuerfès jnamercs.., comme ion verra cy après.
Que U minière de pefcher a» Propontide, eft de moult grxnd profit.
Chapitre lxxiil
Vis qu il vient a propos, nous parlerons prefente-
ment de la manière de pcfcher du Pr^poncide , 6ç
premièrement de celle qui rapporte plus grad pro-
fit. La~merdeConftantinople eft plus abondante
-pg-^^fâr en ponTons , que ne font les autres mers : parquoy
les habitans iè rendent plus induftrieux à les peicher. L'eau dou-
<:c qui tombe des grands fleuucs en la mer maicur,&: qui puis eft
meflec auec l'eau de la mer , eft moult feâte à nourrir les poifTons
du Pont Se Propotidc. Ces eaux fe vie nnét rendre en la Meditcr-
*ance,lefqucllcs en pafTant parle Ptopontide ne croifTent & n'ap-
peaffcntiamais,nayans aucun relus. Les poifTons ont leur fai-
foadcputeeJe^paCerd'vneTner en l'autre , &onc heure de ne
bouger, &: heure de fe pourmener. Cefte chofe eftant afTezco-
gneuedes habitans du Propontide/ont cômunémcnt plus nour-
ris de poiiïbn que de chair, Parquoy ils choifiiTent les endroids
•en la mer,ou les poifTons,felo leur aduis , ont cou ftume fréquen-
ter plus foiment,& principalement vers les ri^^ en lieu qui
n eft grandemet profond.Iis dreflènt deux poutres, hautes com-
me vn mas de nauire, qu'ils fifehent dtoictes en la mer, de diftan-
cc l'vne del'autre cnuiron de quarante à cinquâte pas:fur la fom-
XBÎté dcfquelles Ion fait des k>gcttes,a fin qu'vn homme ou deux
ayent lieu a fc tenir deffus en faifant le guet au poifTon, Ces pou-
très ont des baftons fichez au trauers pour monter, &c defeendre.
Les logettes leurs feruent pour les défendre de la chaleur du So-
leil,& des pluyes.Eftas la haut encruchez , font commeceux qui
fontleguetaux vignes:carsilsaduifent vne bendc4c poifTons le
pourmenans,l'vn compagnon aduertift.i'aucre de faire bon guet,
OBSERVEES PAR P. BELO.tîr Tfâ
ï fin que les voyans entrer au parquet, chacun tircvne corde de
fon cofté\qui tient à vn rets qui eft dedans l'eau /fait de tel artifi-
ce quclcuansicretsquicftaufonddelca^cnfermcnt les port-
ions dedans le parquet. Or pour donner à entendre comme il eft
ordonné^ faut prefuppofer que k rets eft quarté, Srriéf attache
auec des cordes aux quatre coings • & que les deux cornières qui
fontefloignecs des hautes poutres , font plus aduacees en la mer,
attachées à la forait» te de deuxPaux fichez en tetrejefqueîs n ap-
paioH&nt guère hor>dc reau:& que les deuxeoings du rets eftas
attachez aux Faux y demeurent immobiles. Il faut aufuqueles
deux-autres coings du rets foyent attachez de cordes qui refpo-
dent là haut à ceux qui font dedans les, loges à couuert». Letets
■ainfi tenu parles quatre coings eftant la maitiéaufontdelamcr
foudain que les poiûonnicrs oui raifoyét légueront veulcs poif-
fons.venir vêts leurs rcts,il s'admoneftenr lvn l'autre- Car quand
les poifTons qui vont eatrouppe fontentrezauparquet,ilz tirenc
leurs cordes : & par ainfi les poifTons reftentcnclosleans par dei-
fous. Alors Te poifïbnnierauant defeédre, attache fa corde pour
tenir 1e rets haulféipuis defeed par les cheuilles qui font aux deux
cefkz-.de fa poutre,&: là bas trouue fa nacelle attachée au Pau, 6c
fansfaircfeiour,gafcheverslecoftédefon compagnon -, lequel
luy baiflevn peu fa cor-dc,* entre dedans le parquet auesfa bar- :
qtiette ou nacelle ySc va en efleuant les filets ^ommençanta-vn f^ -
àcs bouts,&touuourscontinuantiufqucsàixqu-ilaitccduttlcs Jjim?ugne^
■ poifTonsàfeccnvncoingdcfruslerets:puis cnïeuelcs çoi^ons PeUmjés^
en fon bateau:& de làretoùrne de rechef amont attendant d'au- cboUôs.
très poiflbns. Hz prennent indifferemméttontes efpecesdepoif- Dorudes.
fondas tel engin:commc Sphy renes^ue les Proucoçaux nom, ^tMtx-
ment Pefèfcome: comme auffi desObladcs , Lampugnes vEela-- £0*- .
mides^holios^orades^Dcntaux^alpes^Sargs^ulets , Rou- Jj^
gets)Perches}Surs,Mcncs,GirolesJ&: autres fcmblabksdefquclz ^^
ï\z pefchentfèlon diuersterur^^rincipalen3enEer4eâé.eivtemps Ver%e^
caime,quand la mer eft pacifiquê^-faus tant—Car entempefte aa
les hommes eftant là haut; ne verroyentpasfi bien-dedans 1 eau, . Jtoet-
commeilz.foncquandlameraeûpoinragitec. ^ 9raUs-.
V/ij- ...
ïj£ PREMIER. LIVRE DH SINGVLA.
Dcplufieurs autres manières de pefcher auPropontide.
Chapitre lxxiiii.
Lyacncor plufieurs autres manières de pefcher au
! Propontide , qui font aufli communes à toutes gens,
; commecftpefcheràlatraine,quicftla plusfcure,&s
i cogneuc des autres nations.Mais pource que tous pet
cjicurs de cefte mer, n'vfent de liège à fouftenir leur rets , comme
ils fonten la mer Occanc & Méditerranée , quelques vus ont àc%
efeorces Iegieres en commun vfage , dcfquelles ils fe fèruent au
Efcorcesde lieu du Hege,comme eft celle de l'arbre de Pins Se Pignccs , qu'ils
piasfruans apportent de la mer maicur. 'Plufieurs autres feferuent décou-
la lien de. courdcs,comme es lacs de Maccdoine.Nous Tommes fouuente-
%* *»* fois partis de Conftantinopîe aucc les efquifs des pefcheurs de
Hc mn- pcrCjCol3t expreffement pour voir les poiflbns qu'on pcfchoit au
riuage des iftes de Marmara,^ de Beibico,& au goulfedela Mo*
tanee : car après qu'ils ont prins beaucoup de poifTons ils s'en re-
tournent incontinent, & les apportent vendre à Conftantino-
pîe. La manière de pcfcheràla tratte,ceftàdireàla Traine,eâ
teilc-.c cft,qu il faut qu'ils foyent deux bateaux de compagnie , Se
qu'ils a\cnt à Force de cordage pour leurs rets. Il faut aufli que la
plage ou ils vont pefcher, foit nette de rochers , & que le lieu ou
iîstircntlepoiffondelatraince,foitbiencfgaI. Ils ie&ent leurs
rets en la merefpars de leur cftendue:chafque batteau attache Tes
cordes au bout du rets : lors prennent le chemin vers terre trai-
nans & amenans les filets vers la riue. Et quand la corde ny
peut arriuer , ils voguent à force de rames : Se faut que les cor-
des foyent de mefîne longueur. Ils ont celle maxime de ne ti-
rer iamais l'vne fans l'autre. Car quand les deux bouts des cor-
des font arriuez; au bort , ils defeendent de leurs bateaux di-
fbans quelques vingts pas Tvn de l'autre , Se commencent à tirer,
&entcndençauxTxcadsdes cordcsys'iîs font plus àduancez l'vn
que lautte , ScCe le foutà fçauoir , à fin qu îlz tirent cgallement.
Et quand les £lets s approchent près de terre , les poiffonniers
s approchent aufli. Et quand ils font venus iufqucsau bout des
cordes , tous attirent les rets en les emmenant egallcment vers
terre,puis quâd ils font venus iufques à la pochc,ils font diligen-
OBSE&TEES PAR •■*'. BELQÏ*. *f?
ceqacicspoiflbns n'cfchappentpardrfrous. Ec s'ils ont pcfche **»!»«•
Quelques Pouiprcs,us leur ouuren t les iambes» &aueclesdents
leun-ompent le bec,qui eft fembkbîeà ecluy d'vn Papegaut.Car
quinelescueroic, ils efchapperoyent hors du bateau. S'ils ont
prinsdcsMurcnes^ilsiesempoignentauecdes tenailles par def- ^r«r«i«.
iûs lcchinon du coV&lcur rompent les mafehoueresauee vn ba-
llon ^aufliîcurfi:oiaenttoutlecorps:autrcmentelIeslcsmor-
droyent , s'ils les prenoyent auec k main : car elles ont les dents
grandes commeefguillons^nvn long bec. Etsils ont prins des
Paftinaccs^aufllleurcoupentfoudainement Iaqueuë : ce quenc
font les pefchcurs dcnoftrcOcean, qui nouslescnuoyenta Fa- -
ris,©» à Rouen aucc rcfguillon. Et combien que ces Paftinaces TaJlmdCK.
Payent point trouué de nom François , toutesfois les Panfiens
ks nomment Raves 5pourcequxllesrencmbient aux Rayes. Ils
y prennendndifferem^
-bien que poûuonsmaintenir^u ils ne peTchenc point de Scarus. USarmut
•Encoryavneautreparticulieremanieredepefcherauquarrelet,^ trome
quieftfeuiemcntenvfageàceuxquifont habitansau nuage en- ^„, m
-tour Conftantinople,&: principalement à ceux quifont à main tropmul*,
gâucbe allant aufepnlchredc BarberoufTe: Car tous lesefclaues
Irpagnols^urquelsildonalibçrté^infe font faits Turcs/e font
retirez & habituez aux riuages du Propontide, ou ils ontiait de
beaux baftimens & iardinages fur le nuage : d autant que le grad
Ceigneur a donné quelques liber|cz& priuiieges à ccuxquibafti-
^oycntdeâuskcofte. Par cela ils ont fait des maifons demis piî-
-lotiz,8d fur pierres ramaflees iufques dedans ieau.Carcommea-
*uons dit,k mer de ce pays de Pont,d« Propontidc, & Hellefpot,
^bosncpartiederEgecne cçoift ncappetuTe iamais, mais eft
vn perpétuel courant. Or fine il entendre que ce rets ne fe fi- ^ihaift^
non à prendre le menupokfon, comme Àthcrincs & Cabaflons, ^j^
& toutesfortes de petitspouTons qui cbcrchcntlc riuage3& qui
«nccroiôcnt en grandeur. Par cekfes feneftres ou permis font
" fort déliez. ïlfcroit femblableà vntruble,neftoit que k toile en TruUc
eft moult grande au regard de ceux ècs riuiercs.Elle eft attachée
au quatre coingsà des baftons courbez &:croifez,tenans à vnîôg
manche, qui eftfouftenudvne poutre-droide cochée à îafom-
mité en manière de fourchette.fur laquelle eft appuyé le manche
dudit quarrelet fouftenu en balance, en manière que quandon a
V iij '
J5$ PREMIER LIVRE DES S-ÏNtiTLA^
defcendu le rets en la mer , l'autre bout du manche eft hàtiÏÏe es
rair^auqùel eft attachée vne petite corde qu*ôn tire contre bas , à
t- r fin denîeucr le rets hors de la,mer: Ion les paiiTons qui demeurée.
^ £* /»/?& dedans le quarrelet , reftent pendus fur la toille. La commodité
au proton* Se le profit delà pefcherie de cefte mer du Propontide-a'rendu
ùde. Conftantinopîe tellement augmenté yqu on y baftit vilîages de
Congres, tous eoftez. Les Congres n'y font point fréquents, corne en l'O-
céan. Aufiï la manicrede les pefcher n'y eft point telle: Car d'au-
rant que l'Océan fè retire en arrière-, les poiflbnniers vont es pays
xoce.Mt. ^cxociiers s ou iis trouuent quelques petits poiffons deftbus les
pierres reftez au fec ^nommez, Exoceti , qu'ils enfilent de leurs
* haims tenus a deux cordelles attachées aux pierres auant que la.
mer foitreuenue:.car quand le flot de lamerarccouuertîesro-
ehers,lors les Congres,Rayes,Chicns, &: Chats de mer trouuans
leur apâftde tels petits poifïbns , qu ils auallent cnfemble auec
î4iaim,font côtrainds de demeurer attachez aux rocs.Puis quad
la mer s eft efioignee, les pcfcheurs retournans à leur apaft, trou- "
uentles poifïbns demeurez à Cec. Nature feitec petit Exocetus
moult à propos pour feruir à tel apaftixar corne il aime àdemeu-
rer ï{ec &: fe contenir fans eau defibus l'es pierres , couramn les
poiflbnniers le fçauent trouuer pour s'en feruir. Ceft la raifon
BtocetuAf pourquoy les Grecs l'ont anciennement nommé Exocetus. Les
R°' S M* moc^erncs Grecs les nomment Glinos , defquels il y en a au Pro-
Utée poatide qui portenda crefte fut la tefte comme vn Cpc* Et pour
ce qu'iront de grands dents,& qu'ils mordent bien fort , les ha-
bitans de Comafco, à la bouche du Pau ,. le nomment vne Vul-
Pulpe. pc,à Matfeiile vne Bauecque ; mais noftre Océan ne luy a encor
FAm^ue. point donné de nom. L'autre manière de pefcher commune à
gens de marine, .& principalement des Galères & Nauires cftans
fur mer , eft qu'i ceux ne font iamais fans leurs filets , defquels en.
ont deux fortes. Les vns font tendus en leau, fouftenus de liege^
fans eftrc attachez nulle part: defquels y en a qui font doubles, _
ou les poifïbns allans & venans par la mer,s'cmpeftrent commar-
■C - nenient dçdan.s.lcs anneaux, & demeurent prins».
OBSERVEES PAU P. ,'BELON. 1]9
Ttelt manière de pcfchcrk mi£h auj "etttauech trident :& depbtfieuYS
mresduPropQntide. Chapitre, lx.xv.
r A mer de Pont , & celle àcs Bofphores & Propontidc &Jcbcr h
font toufiours en mefme hauteur : ou les habitais onr muâ au
\ vne manière de pefchcr la nuid au feu , grandement ft*.
vv^:^ profitable: qui eft faite en cefte manière. Il faut deux
hommes dedans vne nacelle ou barquette bien legiere, dont l'vn
vogue de deux auirons, vn de chafque cofte du bateau: l'autre eft
à genoux au fin bout du bateau auec du feu ftambant fait de bois
de Tede , qui cftà cofté de luy , pendu en vn flambeau au bord,
hors du bateau . Et pource que ledit bois de Tede leur eft en û
commun vfagepour pefcher,il eft vendu par les marchez des vil- B°^eTede'
lages^appellé vulgairement Dadi. Ceux quipetchent au trident,
ne défirent pas la clarté de la Lune : car d'autant que le temps eft
plus obfcur,d autant eft il meilleur pour le pefcheurXequel eftat Tnàent ^
ainfi à genoux, tenant fon trident,qui a cinq ou fix fourcherons, fefthems.
regardant en l'eau attentiuemét, s'il aduife quelque poiilon dor-
mant , il haulfe la main pour faire ligne à fon compagnon qu'il :
approche ou reculle le bateau , faifant figne de la mamouucrte^^*
ou ferrée :<;ar par tels fignes fon compagnon entend , Se conduit ormen "
Je bateau çàou là. 11 ne faut qu'ils parlent Tvnà l'autre: car l'air
retentiuant dedans l'eau, viédroit iufquesaux ouyes des poifTons ^ ro;jrms
dormans , qui les cfueillcroit & fcroitfuyr; & aufE qu'il y a des oyentcUir.
poifTons qui oyentplus clair les vns que les autres. Parquoy ils
conduisent le bateau ii bellement , mettans les auirons en l'eau lî
doucement , que les poifTons n'en oyent tien. Il faut auffi que le
temps foit fans vcnr,&: quel eau foitpaifible, & que le lieu nefoit
trop profond. Les poifTons nay ment à dormir es lieux trop abif-
mez:<Stendormantils touchent contre terre, ou font appuyez à
à quelque pierre :& de fait ils ont fommeil ne plus ne moins que
les animaux terreftres : dont il y en a qu'on a ouy quelques- ^£mmmx
fois ronfler. Car comme ainfi foit que tous animaux qui oot f» °»* ce£
■ ceruellc, ne peuucnt viure fans dormir : tout ainli tous poif- Z^ù^
fons qui ont ceruellc, ne peuuent fe paffer de dormir. La-^^T
quelle chofe Pline fuiuant l'authorùé d'Ariftotc , a mis cneicrir. mr%
* - ■ y «ij ' "
fmtffres:
fotenes.
Cajferons.
Mulets»
Dentals.
Fageaux*
*6o ^emiu uns bes sikcvla.
Combien qu A&uariusautheur Grec mettoit l'appétit de dor-
mir et* Tcftomach. Le pefchewr aduifant le poifloa endormy*
darde fan ttidcntdc roideur/elo ce qu*ii .voi*ïepoif&n à fa main
cftrc oblique ou detrauers}pourl,accaindredefrus4,erchigne: ôc.
le trident^qui a des hakrisrecrochez^eramponne le poifTon frap-
pé^ fenîcue dedans le bateau .Celle manière de pefcher la nuîct
au feu auec le trident,eft moult propre à pefcher Pourprcs,Totc-
nessCaflèrons , &: auffi mdifferemmet toutes efpeces de poiuons-
quiSontereailks><;omeBarsaMâigtes,Muiets)Dentals> Pageaux-
Auffî pcfchent aux haïras ou hamenons en cefte manière. Ils at-
tachentdeux ou trois cens haims,& les difpoient par ordre le lôg:
d»vnecordefou{lenuedecoucourdesy&:lesappaftét de chair ou
de poifTon , & les portent au fok enukon vne lieue ou demie a-
cat en la mer , & les biffent toute nuiâ* à fin que les poifîbns- qui
chercher à fc paiftrescomme fontMurcnes, Anges^hatsJUy csy
Chiens,& autres rembîablcs3dcmeurent prins aux haims.Le len-
demain matin s'il n'y a tempefte^ils vont querk leurs haimsqu ils
cognoiffcntdebicn loing, pource qu'ils les ont marquez auec
grades coucourdes qu'ils y ont attachées^ de là rapporter leurs
haims,& ce qu'ils y ont prins. Il y a quelques villes en Italie, ou
ugncA m vn homme feuî pefche de quatre on cinq lignes à la foiSjqu'il fait
mode ijt** ccnîr ^ entxedeux des bois de quelque pont: car ce pendant qu'il
^ appafte 1'v.ne, les autres quitiennent es ioinctures des bois , font
autant que fi le pefeheur mefme les tenok en fa main : Car ainfi
que le poulbn s y pred ,Je pefcheur a loifir de rappafter les autres,
jeu*. LamanieredeperchcrlesMaquereauxauPropontide^ftmoulc
*tmx. différente à celle de l'Océan. Car prenat les Maquereaux en 1 0-
cean>ilraut defcendreleslignes trainantes parla meren tourme-
te:& doutant que la tourmente cft plus violente, & que la-nauire
va plus vifte,d autant plus l'on en prendra. Mais les Grecs n'ont
cU • point cefte manière ,ains feulement à la traincjouautrcmétauee
rJ£ em* les rets. 11 n'y a poifTon qui foie plus commun au marché de Con~
pereur cl* ftantinopîe que Gianis : mais les Iuifs n'en mangent point , pour
iZwt ce qu'il n'a aucunes efcailles. L'on y trouue ordinairement du
mDAuphinyefi poïfïbn empcreur,que les Latins ont nom é-Giadius. Les Turcs^
m délices des Grecsju jfs ^ & tolltc auCre nation du leuant ne mange point du.
mn^: Dauphin, qui eftceluy que nous auons en délices es iours mai-
WrjoHw. lc vuigairc nommé Marfouin. Mais pource qu'il y en a.
^ de deux.
gejcheralt
Ugnek ht
OBSERVEES PAR V. BELOK. T&l
dedeux fortes^ciuy qu'on nomme vne Gye eftle v.ray Dauphin;
laquelle chofc auonsfufHfamrnêx ptouuee auîiurc des poiûons.
Uefitoutarrefféquenoz Cekrins font ceux que les autres na- ^-^.
tions nomment Sardines ou -Sar délies. Nous en auonsdiligem- SArMes^
ment examiné Ieseflfcigncs.au Propontide, comme auûl en l'O- carum.
ccan, oun'auonsrr-ouuéd'ifferencede^vn à l'autre, fînon en la vinaigre?
grandeur ,11 y eut vneliqueur nommeeGarum,qui eftoit ancien- Grecs er ^
nernenten auflî grand vfage à&ome,comme nous eftlc vinaigre r*r"^^.
pour l'heure prefente. Nous l'auons trouuee en Turquie en aufli^f^?^
grand cour&qu'elle fut ïamais.-Ilny.aboutique de poifipnmer Qe[^
qui n en ait à vendre enConitantiBopIe. Tels vendeurs efroyent Ha.rmmm.
nommcz-Cerarij,,, qui n'ont encorgaigné aucun nom François, pifagaroL
qui ne les voudroit nommer Harcnniers , & toutesfois. ont bien- •;
trouué appellation vulgaire en Italie. .Car les.Rjomainsiesnom~
ment Pifcigaroli : qui efidi&ion procedente. de l'appellation dit
poiflon.& du G'arum. Les Pifcigaroics de Confhntinopié font
pour la plus part en Père , qui appreftent iournellemcnt des poif-
fo n sf raiz, &i es ex pofent en vente délia frits: defquelsoftans les<
tripes & ouyes , & les metrans tremper en la faulmure > la font
couertiren Garû. Toutesfois il peut grandemët chaloir de quel
po-uTon il ioic fait : car il n'y a guère que le Trachu rus que les Ve-
nitiens nomment 5uro,& les Maquereaux, quileur puifFentfer- T™1*™'
uir à en faire. Cefte liqueur de Garnmeiloit anciennement tant jLfm"*/
cftimcc,quc Pline la nomme liqueur ttcs-exquife,difantqu'il nf y ^ M,fs m
auoit rie» déplus requis à Rome-Mais il dit qtViî y en auoit de uur manioc
pluficurs fortes. Et de fait nous croyons bien qu'on en peut auûl delmtu •
faire de poiiïbns ayans cfcaiile.JEt pour monftrer que les lu ifs*
ont de tous temps obfèrué leur aufterité en leur manière de vi-
ure,nous mettrons les mots de Pline,parlant de ce Gzxum^Aliuà
<îmQaâc$imonummfnpcYftiîwnem{& ■
quodfit.èpîjczbaâfquamd, cArentihus. C'cft à.dire:L autre forte de Ga-
rum eft dedice à la chaftetédes fuperftkions , Se aufïi aux Iuifs
facrez <-: qui eft fait de poiflbns qui n'ont point defcaille. Si- nous,
n'eutuons feeu qu'ils obferuent-encor pour le iaurd'huy de nvicr
du commun Garum, nous n'eu liions pas dit cecy : Car aui&onc
ils quelques apprefts particuliers qui font expreiïèaiét faits pour
leur vfage ; comme auffieft vne forte dedrogue faite d'œafsd'E- au]ir . ..
fturgconjquc cousnommec Caaiar,qui eil ù commune es- repas
162. PREMIER LIVRE DES SINGVLA*
des Grecs &: Turcs , par tout le leuant , qu'il n'y a ecluy qui n'en
mange excepté les Iuifs : fçachans que TEfturgeon eft fans efcail-
k. Mais ceux qui habitent à la Tana, qui prennent moult grande
™*' quantité de Carpes, fçauent leur mettre les œufs à part : & les fa-
ler en telle forte qu'ils font meilleurs qu'on ne pourroit bonne-
Ctuùrrôige ment penfer,&: en font du Cau^ar rouge pour les Iuifs,qu'on véd
auffiàConâantinople. Toutes ces choies font fpecifiees parle
menu en deux Hures ,ouauons mis les portraidsdctouspoiûbns.
Chapitre lxxvi.
Conm'mo* g=§fi^S AvilîedcCoftantinopIceftfitueeenvnlieu îemieux
flefititec en fe ^^p\ à propos pour la grandeur d\n prince,que nulle autre
fmUUe*. il fegsp ville de tout le monde:car elle a fi grande commodité
W%?^ ^^^^ de la marine 5quiiferoitimpoiTiblcà tout homme de
*Co*âLi» cùerciîer iieu micux * propos- L>on n>y voic ricn de Plus anci(îue»
' que ce que les Empereurs Romamss& depuis les Grecsyonteri*
gé. Bien voulons dire qu'vn feul Conftâtin a plus defpouillé Ro-
me de (es ornemens d'antiquité^pour les tranfporter à Conftanti-
noplc,que vingt autres Empereurs n'auoyent bafty en cent ans.
Aufïï tout ce qu on y voit de beau & d'antique , eft-ce qu'on y a
,. autresfois tranfportè de Rome. Entre au très chofeseftvne colo-
%wodro* nedePorphircquin'eftguereloingdu temple de faindeSophic.
tJ * II y a auflivn Hippodrome, quieftok vnechofcfumptueufe Se
ob&fatt magnifique : dedans lequel on voit deux obelifques , dont lvn
firdé. eftoitreueftudel'ames d'erain ,puis dorées zauflin'cft il fait que
de pierres de marbre liées auec fer & plomb. L autre obehfque y
a eux apporté d'Egypte, qui n'eft pas tout entier. Encor y a leans,
vn ferpent d*erain fondu d exceiHue groflèu^efleué droid en ma-
éSa£T nJercdecolomne. Conâantinopleenfermeaumbien feprmon-
Trois murs tagnes au circuit de fes muraulcs,côme fait Rome. Elle eft cein-
mtour con* âede trois murailîes,mais appert qu'on les a faites à diuerfes fois:
fiantlnofU. car Ion voit les bouts de plutieurs pillicrs de marbre, auoirefté
Eglife des, miScnlamaflronnerie:quidemonftrentquecelaaefléfaitàgrâd
sofik. hafte.UEglife de faindeSophie eft le plus beau baftimét que nul
autrequ on voyereftédebout,quieft bien autrechofeque lcPa-
theondc Rome: car tout le dedans de l'Eglifc eft fait envouteà
OBSERVEES fÀR F- BELOiT. I6J
ckitevoveParleaeffus,&:eftfouftcnudcffus piUietsdcfmmar-
' tredediuefescoukurs.&yaquaû.^parmamcrcdcd.re.aucac
deportesqucdcioiuscnlWEtpourcequ-eleeftmofqueedc
Turcs les Chtcfticns n'y ofcnr m«tre: les pieds : »1 eft bien vray
cu-ilcftpermisauxaueftiens&Iuifsdefeœettretoatlc corps
leans ^regarder des portes. Quiconque Vauraveuë ne pren- auW.
S^d-ad^iraciondeV^P-t0^6 R°7' ^ *5£
nomme en vulgaire fafflaeManeRotonde.Ecnouscfinetuerl-2ffa^
lons comme Ion fait fi grand cas de ce Pawheon.veuquefan e-
dificerfeftdefigrande induftrie. comme Ion crier Car chaque
petit maffonpcutbienconceuoirk manicrede fafaçon touten
yninirant:carcftantla bafefi maffiue.&lçsmuraillesficfpoif-
fcs.nenousafemblédirHcilcd'yadioufter la voûte a claire voyc
MaisfainaeSophieeftbienautrechofc.qtn eft ouurage fait de
tuulcparledehorscommelePantheon.&aumreueftudemar-
brepar le dedans. Mais au lieu que le Panthéon eft nuffif te
cftofe de toutesParts,fainae Sophieeftlarge/pacieufe & délice
en touslieux. Ceaeftépatron aux Turcs a faire leurs Mofquees.
a {a femblance : tellement que de demie' douzaine de moult ex-
cellentes.quionteftébaftiedepuiscentans n)enaaucuneqm
n-a.teftéfaitefurlepatrondefainaeSoph.e.Lonyoitlesrumes^^
d-vnpalaismoultantique, quelc vulgaire nomme le Pala* de
Constantin. LeTurcyfait noutrirf«£lephans>& aunes beftes
douces. Uyavnlieu en Conftantinopje, ou le grand Turctait
attachccnoiequcnauwi»^".--- TT'Tw.- <ù ™f «c<»>&«-
lesdetackentfc manient,* ratach«r,t quand.4s»culent,& mei- F
mementlcsmeinentquelquefoispatla^ille. ^pourcequune i
fut onc que les grands feigneurs „ quelques barbaresqu"ils ayenc
eftln-avétcu plaifir de veoir les animaux fingulicrs &rares«oiic
ainfichaquenationdupaysou domine le Turc, ayant pris que,-
auc anirrul£àuua2e5renuoyeà Cooaanrinople,& lai Empereur.
kfaiSrir&gfrderfoigneufement. Ily auoiedes jH»P»«- jjg -
cÎLzdesAfnfs/auuag^.desH.rifl^iMesPorsdpicsOurs^
Loups Ceruiers,& Onces,qu*on r.Ômeautremer Linccs. H a ck ^^
jaiiufqucs.-aux plus ipecites beii^çQmrneE^min«,.riQiiîcesen£^^
-1^4 PRE M I El X IVRE DES S TNG V LÀ."
Latin Mures Pondci, cefiàdire Rats de Pont, qu'ils ne nôUrrif-
Mm Fonu* fem foigneufemens. Il y auoit auffî deux petites befles , reffem-
bkn tes fifort à viïChat5qu'elles ne nous fembloyent différer fino
en grandeur3aufqueîs n'auons feeu trouucr nom ancien. II fut vn
temps que lespenfïons eftreLinces: car nous prenions les Onces
pour Panthères ; toutesfois n'auonsfceu refbuldre quelles befles
.cefufTcnt. Ceftmerueilie comme ils fçauent traicler toutes ces
belles là fi doucement , qu'ils les rendent grandement appriuoi-
fees: comme auffi les Genettes, qu'ils kiffent efchapper par k
«£oaifon3priuees comme Chars*
. TJmthm
Jxj}ortrd& de UGsrxm.
Gmetit,
Etd'âutant que"Pere & Conftantinople font quafi vne mef-
mechofe,~&: qu'un y a que le port entre deux, lequel il conuienc
OBSERVEES PAR P. BELOX» - l€$
tfbuuentpafTer ; Lon crouue des palpeurs auec les bateaux quall
-aufïi drus que mouches , qui font communément panures efcîa-
ues.Ceux qui tranfportent les fardeaux des nauires es mag-aûns, _ , c . ,
n ii r • r- . . i &t . « Portefaix de
font pour la plus parc Egyptiens, &neiont,point moins de huid confiant*
* ou dix pour beaderCar ayans à defèharger de moult grandes ba- «<«,&.
les pefantcs}&: gros fardeaux,tels qu'on a accoutumé porter fur
ncfs:commeauffiàtranfporterlesvai(leaux pleins devinais les
portent tous brandis, faifansvncvoix enfemblc&mcfmes ao
cens : & marchans tous enfemble vont mefmcs pas. Il y a beau- .
■coup de gens à Conftâtinoplequi font diuers meftiers que nous . *m *™ôn-
ignorons:car comme ils n'ont pointl'impreffion , auffieft-ce vn£ ftMtinop!c.
reigle générale que tous efcriuent fur le papier bruny. Ilzncront mijfure du,
point de papier en Turquie :'mais 1 achètent des marchas Italies, fqier*
qui le leur apportent par mer .Ceux qui bruniiïènt le papier , ont
vn aix fort bien ioinct,fait de pièces de buis , qui eft quelquepeu
voûté en dedas,furquoy ilz appuyent le papier^ fin qu'en le frot-
tant deffus il préneMbre : mais pour le îifïcr ilz encrent vnepier-
re de Caffidoine ou ïafpc au trauers d'vn bâton long dvneeoe-
dee,&: tenans les deux bouts,rrottent le papicrauec la pierre def-
fus ledid aix de buis. Les Turcs aiment à auoir leurs cfpees qu'iîz
nommétCimcterreSjnon pasainfiluyfances comme les noftres,
mais damafqtiinees : ceit à dire ternies de coites d'autre : pzr- FourbiJJèun
quoy les armuriers-fçauenc détremper du fel Armoniac, & verd, dsrurfiic
&: auec du vinaigre dedans quelque efeueile , ou ilz mettent la
poincte du Cimeterredequel errant tenu debout, laiiTentcouiler
de ladicte mixture tout le long du iour par dcilus:car cela mange
vn peu le fer ou acier,myuant la veine qu'il trouue en longueur^
qui îuy donne bonne grâce, -d'autant qu'on le brunift par après
poureftrepîusplaifàntàîaveuë. Les ouuriers qui font les guai-
nes des couteaux &: cimeterres , ont auiîi Finduilnede rendre le T *-m
cuir grené de moult belle façon ,dot pàrleros ailleurs.. Les Turcs mou tapie**
ont les pierres fines en aufii,ou plus grande eftimation, que nous /&- fines. .
îi'auons par deçà. E t de v ray ilz en ont-de plus de fortes que noz Ldchçmx
ioialiets, Etentreautres eft celle qubnnomme de faux nom, La- Cenu-
chryma cerui:&: vne autre nommée Soulta Meheure : mais nous ^ff**
*en parlerons ailleurs plus au long. Il y a piuiieurs boutiques qui ^^ms.
neviuent4autrcmeftierq\ie défaire des peintures fur les toiles
de couleur. Et pource qu'ilz font louuragc foudainemenc beau,
X iij
■j66- premier livre des singvla.
& ians grand* pcine.nous en dirôs cy la maniere-.C'ett qu'ilz em>
pefent premièrement de la toile de coton ou de lin , laquelle ilz
tiennent eftedue bien roide,foit iauneyou blcuë>ou d'autre cou-
kurjaqueîle ilz liflent & poliflèiit premièrement. Et ont vne for-
me taillée en bois,o.n il y a quelque belle fieiiretterlaquelle forme
ilzfrottent de couleur y comme quâd Ion imprime quelque cho-
fc en mouîeilaquelle ilz mettent deûus la toille tendue,&la frot-
ter par deflus/aifans que la peinture demeure fur la toile, & ainfi
infh ment continuansi ^ont de beaux ouuragcs fans grand* peine.IÎ y à vne
Jtmufaue manière d*in ftrument de manque fait de tuyaux de cannes, dont
les Turcs qui en fçauent fonner,ont quafi aufll bonne grace,co-
xne s'ilz diiby et d' vne rîufte d'Aleman. Et de fait vn Turc pafîlinc
parla rue,difant de ceft inftrument , nous feit péfer & à ceux qui
cltoyenten la (aie du logis demonûeur d'Aramont , que ccfuft
vne fiufte d'Àîeman ,mais regardans par la feneftre , veifmes que
l'inftr h ruent efloit fait de la propre manière comme font les pi-
» gnes ou chalumeaux des faneurs , ayant vingt &: quatre canons:
fmeurs * ^s autrcs n>en onc (luc dixniu&- Qiè? nc Suroît ouyy ne pourrok
Mmmâcheu* bonnement croire qucdVn inftrumétquinouscftfordidejdcuCr.
resde c<m* procéder fi grand douceur de mufique. Quiconque ira voir les
fkeAiix. boutiques des ouuriers qui font les mâches des couteaux en C6-
ftantinopie > trouucra pluralitez.de dets & de cornes d'animaux:
Def*j* car meimement y auons trouu-e de celles du Bubalis , des GazeL-
%^ms testée de plusieurs autres manières, apportées du contour des ri-
odoratL. «âges delà mer maieur : cômeauflî deux manières de dents d'E~
^caàa. ' lephant , & de Rohard : Se en trouucra encor d'autres qui n'ont
^îcAulh. aucun nom vulgaire- Qui voudra recouurer du vray Calamus
tsûnomum. odoratusvil conuient aller es boutiques dcsmarchands5$£ dema-
^nrm. der Carraboufcsirc:&: pour Acacia Jeur prononcer Akakia:Aca-
mpellii*. calis>Kefmefen:Amomum>Aamama:Ammî,Ameos:Napellus}
aaZLm, BifchrSuccre, Alhafos^Tigala: Armala3Harmel : Racines de Ben
i^Kukmm. album & rubeumaBehem hamer,& Behen Abias:Car ks herbes
que nous penfons eftrc Ben album & rubeum 3 n'approchèrent
jamais de ladefcription des anciens. Hz vendent les femences de
Menthe». Hebulben5que nous n'ânonsen vfagem'auiC vne noix groiTe co?-
me les deux poings,pîeine de petis grains par dedans, bonsàmâV
ger,doux comme noifiîles,qu ilz nomment Coulcoul,c eft à dire
noix, de Coulco^LQui voudroit recouurer de ce que nozapotir
OBSERVEES PAR P. BEION» T&J
caîrcs nomment Cajamus aromat!cusyil faudroit leur demander ^^
deFAcoron. Iîzn*vfent. pas des Colocinthes pluraees^aisca- ^.or^*
tieresqui eft grand crrcur.Tous vendent de la femence verde du Tereymi^
Terebinthe>&:dcfa refinequi eftdure.Ilz vendétîcBrion moult Brlon_
différent à noftre Moufle : car nous errons penfans que la Moufle uoujfe.
eft Vfnca,& eux le nomment Vfnech en le vendit. Les autheurs ^bfmthe
louent FAbfinthe Pontiquc, îaquclleauons veu vendre* vfer es Tomtfie.
boutiques de Conftantinople , qui eft correfpondantc en toutes
enfeignesà celle qui croift en noz iardins , excepté que celle de
Pont eft trouuec fauuagc. Nous auons cuoecafionde nousef-
merueiller,que plufieurs de noftre Europe doutans de cefte Ab-
finthc,ne voulans vfer de la vraye, ont prins vne mefehante peti-
te herbette,cfpcce d'Auronc,en Ton lieu,qui n'a aucune vertu:5£
ont deîaifle la noftre vulgaire cultiuee,qui eft la vraye Pontiquc,
par mefme erreur conforme à celle des Vénitiens, qui ont rcçcu
quelque certaine petite herbette en vfage,naiflaot en gtâd* quan-
tité par les montagnes fie Frieul , pour la vraye Hyflbpe , & ont
deîaifle de ne plus vfer de la cultiuee , faifant croiftre vne petite
erreur deux fois plus grande qu elle n'eftoit. Ceux de Conftanti-
nople, qui ont tant de diuerfitéde drogues en leurs boutiques
que c eft confufion , n'yfent de ï'Hyflbpe ne iauuage ne domefti-
que qu'en faute : car ilz la nomment & prennent pour le Thym,
& en fon lieu vfent d'vne petite herbette inutile , que les anciens
n'ont point cogneue. pt par confequent n'ont Fvfagc du Thym T^m ^
de Grecc-.car ilz cueillent la vraye Hyffbpe:&: par erreur la nom- Byjfo^
mans Thy m,fe trouuent fans vraye Hyflbpc,conftituans vneau- ^ontic
tre en fon lieu .Qui vouldra trouuer duRhapontic/e face mon- %beub#he-
ftrer de la Rheubarbe:car ilz ne le fçauent diftinguer , ains le nô-
mentdenomdeRheubarba&quilchoiiifle les racines longues
& noires par le deflus , $c qui font femblabîcs à la Ccntoire par le
dedans. Il eft manifefte quil y a différence aflez grande entre la
R heubarbe & le Rhappntic. Et pource qu en parlerons , tant de
ï vn que de Fautre,com me aufli de tous animaux,plantcs,& cho-?
fes medicinalcs,au commentaire qu'auons eferit en cefte langue.
&r Diofcoride}nous en tairons pour le prefent , & ferons fin ace
premier liure.
lin du premier Uurc ■ *~ ■
. X ixij
A Y LECTEVR.
Qurce que nous lifons infnkdifcours des pérégrinations de
j plusieurs hommes , tant denoftre temps que des anciens qui
} ont voyagé far terre & mer : aujîi tr ornons que ceux qui
y Je font voulu méfier des cbofes qui efloyent hors de leur c&-
gnoijfance qu'ils n'entendaient pas^font fouuent conuain-
cus de menfonge.Nous mettons l 'exemple ds.ee qu'on nom- -
me maintenant Mumie^ de laquelle quelques vns s'auançans par trop ^no -
y ans les bonnes lettres^ & les chofès naturelles >ont prononcé quelleejifai-
te de corps humains. fùbmerge^ es Câblons mauums es deferts d'Afrique.
ou i^rabie. Mais quand fpeci fierons les cbofes quauos obferuees. en Egy-
pte , nous prouuerons la Mumie efire bien autre chofe que ce que le vulo-aire
penfe,& que les Grecs & Latins ne l'ont pas ignorée. Parquoy ejeriuans ce
jeçond hure fie prétendons non plus y en mettre ^qu'auons oculawement ob-
Jèruéi ou bienen prenant tauthofité des anciens autheurs ^ approuuerons ce
quen e fermons en plufteurs cbofes ^dont pretmdons parler.Et nous fentans
auoir liberté de pouuoir plainement eferire les cbofes qui fe font offertes À
nous, félon que les voulions examiner, en auosfait ample difcours}fms rien
difiimuler 'de -ce qu'il nomen.a femble. Mais pourautant que la faueur <&*
crédit démon fieur du fumet ^gentil homme de la chambre du Roy3 à ce faire
nous a- grandement aidé, dignes ferios deJhenote^dingratitudeiJi ne con-
férions librement luyeflre beaucoup redeuables : car nous auons eu £mteïïi~ .
gencedeplufieurs chofesen fes voyages s efquelsila vfedegrandes courtoi-
fies en noftreeniroiB- Nous htrouuafmes à Confiantinople ejiatpour lors
*Ambaffadeurpourle Roy Hery deuxiefme vers le grand Seigneur ^auquel il ;.
trouua grande faueur: Carilluy bailla gens exprès de fa court pourluyfai^
yeefcc?te> & le conduire ferrement en tous Les pays & prouinces ou il vou*
hit aller. Et efiant bien accompagné d'honorables Gentils hommes Iran-
§phy& aujUde Geniffaires£haouX)& droguemans 5 acheua honorable*
ment de moult grands £?* laborieux voyages par les pays de Turquie > com%
m^on.voma par cy après,
' " '.. Ï,E.
LE SECOND LIVRE
DE .PLVSIEVRS SIUGVLARLTEZ*,
ET C H O S E S WLE MO &. A BLE S.
obfcruccs en dîners pays çftratiges, .,
Par PierreBeîonxiu Mans.
£»? les voyages faits par mer font Jetemps mcmànï&Uvc$xge:d*-
^onjiantinopltmldexandrte. Chapitre i.
» Es hommes -propo&ns faire voyages ÇKi^r, ne-
peuuentxienaû'eurerdu temps à & vérité. D'au tac
que les navigations eftans fubieâ:esaiîxvcnts5ad-
..- uîent le pjBsfmîuentqae les vaiffeauxta-nt grands
ir*^-— ip4 que petis >d'auirons & de voile, galères ou nauires,
quientemps-profpere ayansle ventàpropos vaurÔsfait vn voya-
ge en huid iours, en autre temps ne le pourront parfaire en deux •.
mois. Vray-eftqucle..marimerfaifarxt difeours du voyage quu-
cntreprend,pèut bien computer le temps de fa navigation , mais ,
il ne le tient pas pour chofe certaine:po»rce que quandles vents
font bien à propos poar aller celle part ou Ion a propofé, alors on.,
nlarrefte gneresàacheuerTon voyage. liaous eft aduenuqua-
uons efté rendus en treize iours depuis le deitroidds Proponxi-
de de Conftantinople iufqu a¥enife -, auquel voyageîon a quel-
quefois accouftuméeftre fîx mois demis la mer.Mamtenant que ■:
voulons deferire le voyage de Conftantinopic en Àlexadrie vH- -
k^EgvpteVilnous faut faire entendre que les nauires des Ara-.
bes,& principalement d'Egypte ^ntleurfaifon députée :pourfe
mettre en chemin à aller de Confkntinopk en Alexandrie : ÔC
partentcommunémentvers kfindu moisd'Aouftrcarlesvents-
Septcnmonaux^eftàdiredeBîze/ontdepluslonguedureeen-
Septembre^u en nulle autre faifon de te nce. Et pour ne laifter v
l^rdrcûbonnxoc^Q^^
ZJO SECOND LIVRE DES SINGVLA.
de Gonûântûioplffcn ce temps là,poury aller., Mais pour venir
•die Alexandrie en Conftantinople , iîz partent vers le printemps:
caries vents Au ftres,qui font vens demidy,y cptinuentau prin-
temps plus long temps constamment qu'en n^lîe autre faifon.
Nous dcfpîoyafmes les voiles qu'il eftoit défia vefpre,coîitinuans
noftre chemin lanuict, & le iour enfuiuant aueo bon veoc deSi-
frôpontule. ze:&nêfufmesplus dVniour&vnenui&furlamer , que nous
jncojfolisji* n'euf£ons paiïecoutlc Propontide. De tel nom eït appelîee celle
'**' /rt * mer> ^u* en*our Conftantiriople , laquelle eft enfermée des
cenu* J ^eux Bo{phorçs,& a deux profonds goulphes ou fines : l'vn de la
Montanee anciennement dirle SinedeNicoppJis,rautre de Ni-
comedie anciennement nomme Aftacenus fmus.Le iour d'après
çftan s en plaine campagne de mer , ayans le pays de Phrygie d ti
rofté gauche , & le pays de Thrace à dextre , pafîafmes toute la
mer du Propontide qui n'eft pas large , aum* eit çîîeentournec de
monragnes^tellemefltquçquandquclqu'vnièroitau milieu , il
ne laiâferoit pas à voir terre ferme de tous coftez:&: plufîeurs ifles
qu auons nommées pat cy deuant. Le matin enfuyuant nous ar-
riuafmes à Galipoli^ou nousreftafmcs, &: ancrafmes en la Plage.
7>es villes antiques Jkuees2Iariue du Pwpontiâe^dq cofie de Thrace: &
delà ville de GaUpoU* Chapitre 1 1.
Àîipolieftdiftantcdc Conftantinpple quatre bon-
gSpoU. WÊÊi^iÈ nes *ournccs j <lu* peuuerit cftre cnuiron trente ûx
~ HeueSjOU il n'y a point de port pou r grands nauires.
Vray cft qu'il y a plage fuffifante : & à la. vérité tout
le Propontide & Hellcfpont pourroit quafï eftrc
appelle Plage*.car Ion trouue le fond par tout. Allant par terre de
' Çonilantinople à Galipoli , enfuyuant le riuage de la mer du co-
ûé de Thtace^lon pafïè par quatre villes antiques,qui encor pour
le iourd'hoy tetiennet leurs noms ancïens5& ne font murées non
plus que toutes autres villes es pays ou domine le grand Turc. La
seUmbru. prermerc vi]jc eft Selimbria , maintenant di&e Seli urée , ou il y a
% Unu Porc Pour P^î^es barques, Se plages pour grands nauires. La fc-
Terintbûs. condeeft Hcraclec,anciennement nommée Per inthus , qui a vn
trcfbeau port, grand &: fpacieux pour nauires &: galères. La tier-
ce cil Rodofto. La quartceft Galipoli , qui eft vn grand village
OBSERVEES
SAR P. BELOHV J7*
OBSERVEES fak. '■ ""*■""•, .„ i n ~
ponTdefinit.&oulaboucWH^^
nuis Galipol pat le deftroiâqui dure enutron deux lieues mf-
Ccs àfa Lt Egée, tootcelaeftappellé Hcllefpont LcsTutcs c^mt
de mer, tant grands qoe petits; de quelques pays^qu dz foyent,
voXn fortif horsdeceaeftroia.fontcontramasde farrete,.
& parkràceuxdclagarde de GalipoK,* prendreleur paffeport,
ÊÇefenterau deWdu Bofphote , à Tvn desdeux ^
ûcaux Vrayeftqu'vn vaii&auqui aUra.prmsfonpaÛeportaCo-
EtLocJeVet^emptdeleptendreàGalip^U : fieft-cepooe
eranAnanirc qui veutfortir hors deTurqmç par ce deftroid, d*
luelque nation qu'eîLe foi£,fe doit teair aneré wo»s lours durât,
uire-& n'en excepteroyent pas vn qui ne fou viute.Les Vcnmes,
librement. Ce qu'on ne peut pasfawecnfottantliorsxaruaa-
uSenfetrouuoitq^lqueefdaue.fugit^ cache dedansle
nau ie ouautrechofedefenduedemporterdeTurquie , Jlcur
mèsdeuxioursàGalipoli^allafmesaamonaaerc dvn Auguo
SnauUencorfonElufcàkmodedesChreftiensLannschez
tellement qullz nous affeura qu'il porte fer* fois l'an &meûrût
flfeuae^toutesfaifons. Qnvoit quelques fP^".^ '^^
quesdcsRoys, & EmpcteuBdeTh^^^^^î^^*^
'blen^Irepetites.moptapettes.delqueUestoatlepaysdeThra-
ceeâboffu On en voÏTdeloing plufieurs autres au dcffiisde»
&tlcsltandes}faites pat atti^commeaufli font elles Lepoc*
IJ% TJHÎMÏÏll LrVfLE DES ■mWGVtïk»
FuftcSjGaliiotcSjBrigantins &Maonncs, qui font celle manière
.MAùtmeL ^Q vaiileaux que les Latins ont appelle de mot Grec Hippagi y&
&lîîA8» qU j fetnenc^ pafTercheuaux & chameaux d'Europe en Natolic.
T)c relies naaircs dicte Maonnes Ion en void tous les matins
grand nombre arriuera Con^lantinople, qui <:oufturmcrcment
,font-condui&es par les Geniûaires du grand feigneur. Elles font .
; ouuertes par le derrière :;parquoy le chenal ou chameau entrc4à
dedans comme en vne eftable^ms aucune dirÏÏcuké.On void les
-Galères tireesàfec apport de Galipoli ,1e long du *riuagc deflbs
-des Pilotis, couuertcs de Limandes &merrcin , fait en maniéré
<d arfenal.Lon y trouue toutes fortes de viures au marché y com-
me à ConftatinapleXa villc-eft habitée de Grecs,Iuifs,&: Turcs.
*Ceft vn fbntgrandpaflage d'Europe en Natoiie. Quand nous
;eufmesefté deux ioursà Gai ipoli,nousfeifmes voile pour conti-
nuer noftre chemin: quand nous fufmes aux Chaftcaux, nous
ancrages pour la féconde fois. Car nul nau ire (comme auons
<di&) effranger ou Turc, ne defeend par ce deftroicl: qu'après
auoir ancré à Galipoli , ne luy conuienne s arrefter de rechef as.
. . ^eftroiadesChafteauxiiîlevaifTeau^nâuire, ou galère chargé de
ïnarchandifeeft effranger-, illuyconuient demeurer troisiours
-continuellement attendant Ta depefehe. Mais fi le vanlèau eft
Turc,& que le vent foit a proposez ont cela de priuilege , pour
ri auoir occaiion deperdee temps , qu on le •depefclie âcs 4e|>rc-.
mieriour. ■
Pefcription du Boîj>hore de fluet : & des Chajîeaux nomme^Sefttts
*& ^bydusi & des ruines de Scamandria. Chapitre m.
E deftroit des Chafteaux eft large peu moins d'vn dc-
i my quart delieue.C'eftoit anciennement Se encor eft
^Àm* 1*18151^ le lieu ou font ficuez les Chafteaux de Seftus &: Aby-
_J dus.Et eft le heu dent les -Poëces-onc prins leur argu-
ment de deferire là fable de Hero&leander. -Le Chaftcaudu
codé d'Aûenômé Abydus^eft refait de nou ueau en forme<par-
ree,fituce en lieu marefeageux. Le circuit de la muraille du-Cha-
.fteauentournevnehauretour quarree, faice à l'antique , qui eft
encore en fon entier-,que les Turcs ont rehaufee à k-fommiçé, &:
^arniedartilierie- par dc&js. -Il y a-quatrejictits -boulfeucrs-bwa
-o'ïSÏHVfiES *À* f • B^O^'
175
•fctf
en
ponSr 1 UifledeMarm^^
M^rMcrMcdi^rrancc. p
o
.0-
o
Y ïïj
Çf4 PRE.MIÎ-R LIVRg DES S INC V LA.
"foibies, aux quatre coings de la carrure du tour des.murailîes;.
Et fcmble qcc chafteau,pour eftre vue clef de Turquie, neft gue-
resfort. La pierre dequoy ils l'ont fortifié, a eftéprinfe des ruines.
#*»m^^"Viîc prochaine
sommée Scamandria,qui eft fitueeen terre ferme d'Afie mineur,
&n'eft qu'à demie lieue de la mer, & &demie petite ioumee des,
ehafteaux. Lon^voitvnc fumptueuie ruine de baftimens ma-
gnifiques.de fort beau marbre blanc , Se descolonnes taillées ea
toutes foetes d ouurages : aum* pluficurs beaux 6c fpacieux chapi-
teaux quarrez. Elle eft fituee defTus vn haut,ayant vne trefgrande-
campagrrc,large,fpacieufe,& belle prairie, qui l'entourne par les
deux coftez. Le lieu eft marefeageux ertl'hy uer : mais eft tout Ccc
en cfté. Nous y auons veu vae groflè pierre taillée en relief ^ à la
perfpediued vn perfonnage vertu d'vn haubert à l'antique , vne
armure à kpoidriiie , vn motion emplumé vbridé par deflbus la,
gorge: vn bouclier long & enfeu^vne efpee-eourbec en façon de:
cimeterre, non fainde par lecQrps,.mais pendante au col en ef-
charpe,fait cr excellent artifice. Nous croyons que ce baftimenc.
cftoit vn temple magnifique, dédié à quelque Dieu : & mainte-
nant les Tur-cs emportent les pierres à la mer, pour les porter au.
fufditchafteai^donten ontfaitlafortercfrc. L'autre chafteaude*
r Seftus eu crvEjLirope, affis au Clicconefe.de Thrace , ioignant vn,
Mào inouîcgranavillagehabité de Grecs, nommé Maito. Seftuseft;
DefiripUm ûmézix has.dtVne montagne, en façon de Trefrle., La première
4» cb*fcw*ouvdnmti&i duchafteau, eft en façon dé dois demis, cercles
iA&fiiu. ioinâs Pvn à l'autre... La féconde entourne la première de mefme
façonacn forte^ue Fvnecnfexme l'autre. Uentour de la muraille:
eft triangle , duquel forn <fcs coings regarde iuftement la monta-
gne, ayantyne tour deflps le haut, quidefend Içehafteau deia
montagne. Deceftetourdcfcendantenlarncr , deux adlesdeia
muraille viennent enfermer la tour au dedans ,ea forte que les
murailles des ehafteaux quis'eftendent le logdaâuage tant d'vn
cofté que dautte,font garnies de bones pièces dîartHierie* ptçftes
àjefchargerslleftpjt bcfoiBg',poiir arrefter les vaîfïcauxqui s'en
voudroyéïfûirfàa^cog^
r^é:duf c^aft^a q«ic^^c<>|ic^Àfie,noiiim|Abydus,eftgarny tout
** * dejiiefmes pièces d artillerie : toutesfoil pource qu'il eft de plus,
^rade côfcquêc^aiiiTi eft il plus fort,& beaucoup plus fongneufe:
OBS"ERVï£S ÏÀH *. 11LON. ïf$
lêmcnt gardé.Cduy quieft en Europe ? eft faible au regard de la
montagne qui luy domine. En paflànt par i'Heîîefpont , on voir
les montagnes reueftues de belle forefts de Pins fauuages nom-,
mecs en Latin Piecx : les habirans prennent de fon bois nommé
Tcdai qui eftaat allume efclâirc de foymefme comme vne ehan-r^.
-. délie : duquel ils fpnr la Poix noire.
P-ôrtyai&dei'éCrbre Picea ^autrement poi# noire , $£ la Ccdria, Cedn*-
. ^ nommé Pignctfauudge. que les François appel- ^ ratt'
1er du nom Arabe Quo-
dran,<»ù Qu^rrarij &:en
;' Àuignbn du Cade cet-
: bin : & pource qu'on la
vend à bon marché , les
nauires étrangères qui
arriuent ïï^cn emportée
grande quâtiré, &: queï-
quesfois s'en chargêt&
: garni flène. Les Turcs la
merjeen t -dedans des ou-
: dres,ou de brebis , ou-de
r cheu res : car elle eu fore
^liquide. Cba(queoudrc
r ou peau plaine , ne cou-,
' ftc plus d'vn^ demy du-
cat.-Elle eâ beaucoup
plus liquide que celle
qu'on apporte dedas àcs
barils des montagnes de
Bordeaux. Ceft lachofe
dont anciennemêteeux
du pays d'Egypte fe fer-
uoyent pour confèruer
lès corps morts^onteft^
faite celiedexirogêic que .
nous appelions Mumie,
de laquelle parierosplus Mmue'
k amplement cy après. Les
mariniers fe fexuent maintenant du iit Qiiacran ioindre kscoc-
:.;.t Y iiïj
M
'ij6- Vr.emier.htre des stngt-la".
zTfbh l -' des^esnauircs» &àmeflcrauecla Poix déterre ^appelîeePiflàV
tjtajtb* to-.fphalturn : que Ton prend ;au deffus de Ragoufe dedans terre,
ppur les fondre enfembîe, afin que le P-ifTafphaltum ou poix de-
terre deuienne plus molle}& plus du&ible : car d'elle m cime elle
' eft fort feichc. JEc ne pourrait feruir fans cftrc méfiée aucc le Ce-
dria^ qu auons drteftrefaiten Phrygie. Et à fin de faire entendre
quel arbre eft celuy.que.no minons Pignetfauuage, nousenauôs .
cv deuant mis laportrai&ure , ja foit que layons amplement,
défont au I.iure. Latin des arbres conifères.
'L.esnua^esdeia.rnerderMellcfpont&du Propontide, iet-.
Isdgt^ tent tçefgrande quantité d'AIga îacifolia , qui eft vne herbe croif- .
fànt parla mer , comme le foing dedans vn pré. Les habicans la -,
trouuansau riuage 3 la tirent & dcfèichcnt pour s'en feruir. Itela .
mçiîent aucc de la terre graifc , à fin d'en couurir. leurs maifons,
car elle eft îongue,large-&:obeifrante>faifant bonne mixture de
tprçfris^aufti que leurs maifonsfbnt couuertes en retraces. Ceftc
Mdifonsdes b.9ucne de mer court fort impetueufèment:dot. aduient quelle
Turafint . apporte plufieursexcremésàbord^qui nefontpas datout inuti- .
cwuertes en tes: commwft la cinquiefme efpecc dtAJcionium> dont Diofco-
terra^ ride a faiç mention Jequel les habitans de Samothtacejlmbro ,&
^âcionjum. Lcmno 5 appellent eta langage vulgaire , ArkeilH : duquel il y ail .
«<£r*siUh grande quantité en l'ifle de Bejbiço , qui^eft vne des ifles du Pro-
pontide5quelquepeu audcftbus de Marmara , qu on en pourroic
auoirà charger nauires;qui toutefois eft.vendu bien cher par les .
boutiques des drogueursde Venifèa& d'autres narjons.Mais ont
Sfum* m& laifle de le nommer par fon nom ancjé}car pource qu'il eft legiers
y$* & reflèm bîe à vne efeume , ils le nomment vulgairement Spuma *
<Jto*t*tes. maris. Àuifi y auons trou ué de 1* Antipates,
de Turquie. Chapitre} mi.
j. E Chafteau dé Seftus 5 qu auons par cy deuant deferit.
rxn Europe, eft de moindre importance: auiîî n eft il .
V pas grandemec fortifié : mais cclu'y d'Abydus cft quel-
que peu plus fort. Eçpource que nous^çntrafrnesde-
darjSjdfrons briefuemçnt ce que nous y auons veu.il eft déforme,
^arjra^&afoffczàl^ Ses rnu-
v - \ railles
-OBSERVÉES PAK y. BELON. ' 177
^milieu.faitcenmanieredcdoiigconiquicftcellemcfmcqin^^^
eftStquiidlesTurcspcmdfent le ch^cau fut les Grecs. Les.
artilleries qui font leans.nefofit pas montées furroues, a.ns font
eotre tetrc,appuyees d'vn fort mut pat le detricK.tellcmet qu el-
fes ne fe peuuét ne tccullct n'aduâcer : fcfont toutes d-yne regee
In nombre de vingt&fept,regatdanSàfild*au deffuslamer II
vavn villagcioignantehafquecfaafteau.tant aScftusquaAby- ■ &
L:maiscfluy #Abydoseftlcplusgrand. Auquel lieu eftant le ^
mardvvingt&huiaiefmeioutd'Aouft.ve.fmesvolervncgrad ^
bendcdeCigoignes.quUu logement de teneurs cftoyent de
„oulquatrLllleillesvenoyentdeJapamedeRuflîe,&Tar;
■«rie: car elles trauerfoyent le canal de l'Hellefpont en_croix
Bourguignonne.. Lefquelles quand forent comme audeffusde
HfledeTenedc-.alorstownoyercntlongucmcntenhmaflon.lui-
«ans les vncs les antres : & fe mirent en vn rondeau ^cercle : Se
delàfediftribucrentparpetites-bendesauantquedeseflongne?
delabouche duPropontide-.&ainfiefparfcsfe.tetptasdcvmgt
hendes oartans les vnes après les autres, tirans iufteroent au nu-
commeauffi font les tiuages de rHellefpontXes hab.tansy font
kursbalaisdel'herbedeLepidon que les Grecs nommentvul- ^
gairementSarapidUlyauoitplusdecent Turcs pafEgersdedas
S,ftre nauire.qui alloyent de Conftantinoplecn Egypte : Car le
voyageeftbeaucoupplusbrefpatmetque^rtene.commefe- .
ronsapparoiftreparcyapres.Chafquepaflagereftqu.ttedeten
pafrao-e.payantvnducatpourvoiaare. L«marchadsd Egypte,
ivan^vendu leut matchandife a Conftantinopic,ne voulans s en
retourner vuides en leur pays, enleuent grand nombre de paOa-
«ers pour mener au Caire,& autres lieux i-Egyptc.Noftre mai-
re eftoit ancré au port d'Abydus, attendant que tout noftre cas
fuftapprefté.Cependantnouspourmenanslc long de quelques
petitsruùTeauxfalez, trouuafmes vneefpecede ferpent terreftre *pr *~
^ifcnourriftcommunementtout leiourenk mer tou«,nfi^jJ-
quelacouleuurecnreaudoUcc:nuis1lv1entdormlrianulafur 'J Jt^
la tetre.il eft quafi de couleurrouge.mais il y a-d autres couleurs
âcgrismcâccspauiiy.
îjS PREMIER iIVRE DES SINGVLA.
Qupnpeut voir les mines de Trqye clairement dsLmcr*
Chapitre v.
£g O v s partifmes des chafteaux au matin aucc bon venc
1 1 fauorablc 3 que les mariniers nomment Maiftre tre-
âK> monfane,&commençafmcsàfordrhorsdudeftroiâ:
' de rHdîcfpont,& entrer en plaine campagne de mer
Méditerranée, qui n eu; qua trois lieues d'Abydus , laifFafmes le
-cheronefè à gauche, dedans lequel eftvn promontoire que les
anciens appeiloyentMaftu{îa,ouefl:oyent le tombeau d'Hecuba,
xY& £im* ^^{èpulchrcdeP.roec.(3aus. Peu après Fiflc d'Imbros , quieft
h-os. .quelque peu moindre quecclle de Lefbos , mais Tes montagnes
Lesbùs. &>nï plu* Sauces : nous la lakTafmes à. cofté dextre : Car elle cft
fore près du riuage de Thrace. Puis quand nous eufmcs aduancé
^Iusoucre.nous eftions afTez foingen la mer , quand comméça£-
-mesàveoir Fifle de Lemnos, qui eft plus auant que celle dlm-
brosi laquellepouec&rebafFe^ &T n auoir nulles hautes monta-
tgnes^ne nous apparouToit que bien peu. Entrans plus auant en la
=mer Méditerranée auec bon vent maiftral , nous tenions no-
ftre chemin plus près de terre du coûc d'Afieà main feneftre.
Car û noaseuéjonsprkis ieenemin à dextre,nous eu fiions iaillé
lechemm du Canal dcCàio,ou il falloit aller. Approchans à la
poin&e de terreferme,appellée Catio de Genillari^anciennemec
nommée Sigseum , nous vifmes d'aflez près les ruines d'vn chap-
iteau ancknnement nommé CaputGymncfèum, qui môftrent
<Um âe qu'il eft fort antique, lequel nous apperceufmcs dallez loi ng: car
Gtnifcri. il-eâenleué<lcCusvn promontoire. La muraille de cechafteau.
sigmm. cftoitfaite de brique^ de fort ciment. Il y a leans de trefgrandes
CAfut Gym* cifternes y & de grandes caucs, lefquelles fufmcs vcoir lors quai-
atfwm. lafmcs àTroye : noftrc nauire pafTa entre l'ifle de Tenedo , que
nous laiCafmes à main dcxtre,& les ruines de Troye,quc nous a-
uions à main fcneftre.
OBSERVEES PAUL P. BELOK. rjp .
Vefcription des ruines de Troye. Chapitre vu
» V a n t aux ruines deTroye,on les voie d'âfïcz loing: I^nes &
\ Caries murailles delà ville font en queiquesendroits Ttaïes..
1 encorestoutes droides. Et pource que les auons efté
? voir par terre* en dirôs ce qu oen voit de refte:& fuy-
raanc noitrenauigation dirons aufll ce qu'on en voie de la mer.-
Qm y voudroit aller de Conftantinople par mer,îl faudroit def-
cendreà Abydusaudeftroi&deschafteanx: Caril n'y a que de- ' Montld^
mreioumee. Et après les auoir veues , pour veok de beaux pays, ^ 0iym*c
il faudroit retourner par deffus le mont Ida, en Phrygie r & aulîl m zhngie.
par demis lemont Olympe & Orminium/ayuantle grand che- Lem&»t se*-
min ordinaire qui va en la ville de Bourfe. Le monc Olympe cft »**>
quaû auffi haut que le mont Senis : toutesfoisil nreft de chemin
tant difficile. Et qui ne voudroic paner par ces lieux îà^on pour-
roit prendre la voye de Galipoli, & retourner à Conftantinople Dej^i?tiùnf
par terre ferme fur le nuage de Thrace. Troyc cft fituee en pen- ^ mioei &
dac fur vn couftau,qui apparoiil bié acier de la mer. Car aufli eft Troyc.
elle le long du riuage. Eftâs entre Tenedor& les ruines de Troyc, CamfiaB^
paflfafmes droid entre deux poindes : l'vne cft au bas par delà ^"*
Troyc,deuât Me de Metelinjaquelle poinde ils nomec mainte- ^ri^Hm'
nat Cauo fanda Maria,& anciennemk Iarganû. L'autre eftà la
fin de Tcnedo. Entre lefqucllcs poindes noftre vaiûêan fetrou-
ua fans venr, Nous veoy ons des arches qui font encores debout,
fabriquées à l'antique > au pied d'vne petite montagne ou pro-
montoire, faides de ciment & de brique- Veo-yons auiîi les
ruines des deux chafteaux du promontoire au riuage* de la-mer,
plus bas au deflous , qui eftoyentenceinds dedans la ville- Les
habitans qui font entour Troye , font partie Grecs , partie
Turcs, partie Arabes : tous lefquels nomment le territoire vul-
gairement Troada. Ce n'a eflé fans raifon que la-magniocen- ttomIL.
ce &' grandeur de la ville de Troye , cftant iî grande.qu elle
cil , a etëé célébrée des Poètes anciens. Les ruines des baiti-
mens qu'on y voit encores pour le iourd'huy , fonc û admira-
bles à regarder r que bonnement on ne pourvoit exprimer leur
grandeur ûnon par beaucoup de langage. L entour des murail-r
tesxcndfuâi&ai teimoigpage de la grâdeur dela-vilie:lcfquelic£.
-ISo PREMIER. LIVRE DES SINGVX.Â.
cftoyent faites de larges pierres,rarcs, & fort fpongieufes , noira-
ftres,durcs,taillccscnformeqaarree, qu'on droit dés pierreries
^r0St d'vn prochain promontoîre,nommc Aflbs. Dont le fiïcpeftrc a
Floi\y€fî* efte anciennement nommé FÎos ^4jix Pctr*. On voit encor les
Petr*. tours ruinées, qui cftoycnt es mefmes murailles. II ne faut pas
adioufter foy à ceux qui difent que toutes les ruines font démo*
lies. Les fondemens âcs murailles do circuit de la viîleapparôif-
Erreur de ^ fent cncores,qui font renforcez en quelques endroids de pilliers
.■cmxya fe* &cfperons larges de deux toifes. Nous fufmes quatre heures à
setfueTroye j» nt ur cancàpied ou acheual.L'on v voit des grandes fepultu-
neaitefîecfl . » . r n > r ■ Kv • r
^fce res de marbre hors le circuit des murailles, raites a 1 antique, tou-
^etndchres tes d'vne pierrc,en manière d'vn grand coffre, d5t les couuercles
Mmarbrede font par tout entiers : îefquels font au defcouuert fur les plus
Troye. grands chemins paflans. Les ruines des deux fufditschafteaux,
Des ch&* faiCs de belle pierre de marbre,{ê voyent encor en leur entier , &:
fiemxdîUo. nQ j^ fçaurojt on rUîner & abolir du tout.Celuy qui eft au riuagc
«leJa mer au plus bas lieu de Troyc eft eftendu en longueur en
manière de deux plates formes; duquel les murailles font mer*
: qaetees de marbre rouge Se blanc. L'autre chafteau eft au fbm-
met delà colline de l'autre çofté de la muraille dedans lentour
de la ville. De ce haut chafteau regardant contrebas, on voit
.quafi toute la ville, Se aufïi quafi toute la plaine càpagne : duquel
'* Ifo les murs fantqueîque peu aduancez hors lecircuitdes murailles.
phmd àe * ^Prcs qù'eufmcs entournéles ruines des murailles, commençaf-
troye. mes à regarder le dedans de la villc,qui ne font que ruines confu-
fes: entre lefquclîes on y voit vnc grande bazede plateforme
quarree, faire de pierre taillée de trefgrande eftoffei Se croyons
auoireftë le pied de quelque haut phanal oulanterne, quimon^
ftroic lefeu lanuicr aux nauigans. D auanragciî y a pluûcurs ci-
fternes en leur cntier,pu l'eau de la pi uyc eftoit refer uce, d'autant
qu'il n y auoit en tout ce territoire , que bien peu d eau de fontai-
ne, fînon vne qui eft là bas auprès du port. L'on voit encores les
ruines des "Eglifès qui furent baftics du temps que les Chreftiens
yhabiterentjdefqueîîes grandes parties des murailles font de*
Troye a #5 meurt:es debout: Se entre elles on voitdcs croix entaillées dedans
flufiewrsfoîs feSp£errcS($e marbre. £ilcâefté tant de fois ruinée, qu'il n'y eft
demeure cdiflcecntien au-ffi eft maintenat du tout dcshabiree,&:
a!y apsrfenns qui^y pûiSetcnbjà caufe dc4a-fterilitc.de la-terrc,
& la grande incommodité de l'eau. Il d y avillage ne maifona
plus d'vnc lieue à la ronde , tant lepayseft fterile & fablpnneux.
il y croift peu d arbres fruidicrs.Ceux d'Efculus font d'aflez grad ^yes ^
reuenu pour lctcrritoireidefquelzleshabitans du contour cueil- Efcui^m
Ientlesgrands auec leurs coques eftans en cores tendres , &les
-abatent auec desperches , à la façon de ceux qui abarét des noix:
puis ilz les laifTcntdefeichcrdcffous l'arbre, nayans peur que les.
.pourceaux les leurmangét , d'autat qu'ils n'en nourriffent point. ^
Et quand ils font fecs , ils les amaffent , & les portent vendre par ^^
fâchées furies chameauxaux prochaines villes ,commc a Bout- ^^/^
fc,ou à Galipoli. Ils en préparent les ciiirs,coutainfi que nous les ^w.
tannons d efeorec battue , & en Egypte àcs fxliques d'Acacia , en s&fiesfo
Italie des fueiilcs deMyrthcs,&: en Grèce de Sumactu En cefte^w.
grade efpacc de la fufdi&e ruine,il y a vnc belle campagne 8c fpa-
cieufe , où maintenanx on feme du Cotton , U de la Sefamc , qui ^ ;& ^
eft vneherbe de grad reuenu:car de la Sefameils font leurs huùV ^^
lesen Turquie.Ouireplusilsy femcntvneefpecedeMclons,qui J
croiffent fans cftre arroufez,&: font de telle nature , qu'ils fe peu-
vent garder rout vn hyucr (ans fc corrompre aucunement.- Et
toutesfois ils font vrais Melons , qu'onpeut bien manger àiafar
con des autres dés l'heure qu'on les a oftez de leur plantcrmais ils
fontenccdifFerens,qu*ilsfeconferuet tout rhyuer, fcquafi tout
fefté enfuyuant. Et pour monftrer que ce font vrais Melons,
ofonsafTeurer que Fherbe cftde femblable %on,&: le gouft n eu
guercs différent à ceux que nous auons pardeçà : auffi en ont ils
•bien des noftres. Ils y femét vne autre forte de fxuid» qui de nom
Arabe cft appelle Copous , commun par toute Turquie & Grcr aq»m.
-ceimais les Grecs qui fuy uen t l'antiqu ité,le nomment Chimoni- cbwmubs
cha , les Latins d vnc certaine appellation Greque, Anguria, les Ç^J*'
Arabes, Napeca.Cefte di&ion Anguria luyeft donnée impro* *
prement : car Anguria n'eft autre chofeûnon le Cocombre que
nous cognoiffons. Lonvoitde graadsColoiTes dedans Troye^
couchez par terre, taillez à l'antique , & y a vn eadcoiâ aïTez près
du Chaftea^de la ruer ^ ou il y a vn moult grad amas de marbres:
& croyons que quelqu'vn lesy ait mis par cutioiité: car cela ne
s'eft peu £airc ûnon par grande defpenie.Encor ya quelques por-
tes au circuit de la muraille , qui pourie iourd'huy iont prcfques
entières , SqurmdplcmcaïLvne qui efl Eidacollincau co&é da
Z iij
5^ PREMIER tlVUl DIS SINGVLA.
m& f/\ ^z^em ?*r ^quelle 15 fortoit allâten la plaine.Aum y a vn î'og
'ûto e ^râS^ m«r^il^ fort hautcveaforcee defperons par derrière , qui
* * fort hors du circuit, & s'en va ioignant la campagne vers le monc
Ida. L'autre portail qui eftoitouuertdti cofté des prairies,&qui
defeendoi t_vers les baings chauds , eft encore entier. Les autres
portes qui fons du cofté de la, marine , {ont grandement ruinées,
& n'y a que bien peu de veftiges*. Nous trouuafmcs vn pilier de
marbre blanc fiche en terre, mais au demeurant à demi couché,
quiauoitcefte infeription ainfi ordonnée , tantd vn cofté que
, d'autre : Bnperœtor CœftrMav. ^éuy. ^éntoninus Piu*Felix Pamcus
. M*ximu%Germanicus Mœximus* Tnh*P.ulmp+Po. xv.Maxïm&s Imp.
Cof, in mpmuimiam^Jïam per viam (? flumina pontïbm Çubiugmuiu
. Toutcsieiquelles parolles cftoyentd-vn cofté du pilier,tatcon^
-fii mees d'antûju ité,qu a peine les pouuions lire . De l'autre cofté
du piliereftoyent eferites autres parolles, defqueUesle commen-
cementeft , Imp. C<efer*s4ujrm J^ioclemno régnante. Nous n'en auôs
peu lire autre chofe.
ganêw. Quant c& des fleuues de Simois & Xan thus, tant célébrez par
simok ' "ks ^°ctes,qui arr-oufoyentles prairies de Troye,n*en rapportons
iautreaoiittelie,âîîô qccfbcKfî petits ruiûelets,ou à peine ie peut
nourrir:ne Loche ne Veron ^car ils font en eftéà fèc , & en hyuer
:vne Oye à grand' peine y pourroit elle nager dedans. Si auons e£«
meu doute fur ces fleuues, cen*eft pas chofe nouuclle : car des le
fcmpsd'Àriftoteon ae le fçauoit trouuer. £t qu'il ne foit vray,
qu'on life le doaxiefme chapitre du tiers liure de l'hiftoire, en ce>
ftc foïtciScamanderetkmamnis flouas reideve ottes credituriquamobrem
^mtbumproSt&mmètQnuncupAtumc&Hùmero&M^
roefi Àriitote vouloir dire ^qu'Homère a prins Scamander pour
Xamhus:carXantiHîseftàdire>rlauus.Soit doc mis en queftiorii
àlçauoir fi Xanthus Se Scamandereft vne mefmc chofe.. Le che-
min de Troye pour aller aux baings chauds regarde l'Occiden t,
Jk a Ion le vifage vers Fifte de Lcfbos, qui n'eft pas diftante à deux
lieues deJà.Tenedoen eftauffi fort prés , tcllemét qu'il n'y a qu'à
paftèr le Canal d entredeux. Les baings naturellement chauds,
se font qu'àidemie lieue de Troye:ou ily a tant de fepu lehres fur
le chemin. , qu'il en eiè^ord^tellemenup'ilz y fontencores plus
fiequens , que ceux de defïus le chemin venant de Phiiippi à ia
C^uâHc LesiègukhKs |èmb|eflteftre des.Q:ecs-çax,ODy.vjoi$.
OBSIB-VEÏ-S ÏÀ& t. BïlOlf. '*$
deslettres Grcquescombien qu'il y en ait aufli des Latins com-
me il appmmr les lettres Latines. Eftans plus près des bamgs
cbaudsTnous veoyos de fumptueux édifices magnifiquemet rail-
lez à l'antiqucîcn l'vn defquelz on lit, /«.'«o, en m autre, Mmir^
W.Ccbralqu'auonsditfortitducircuicdes.muraiUes.cfteiten-
duenlongueur.lcquclnauonsfuyui ÛnonentourTroye. lou-
tesfoisnozguidesdifoyëtquileaiongdevingtmil. Quoyq"11
cnfoit.c'eftquelquechofedegrand , &croyons que cefto.tvr>
fort qui teno.tcontreterrc ferme. Il s'eftend deuersle coftedu
rnondda.quin'eftguerequadeuxoutroisJicuesdeTroyc.A^ ^ ^
fi difoYcntqu''» ne Ptcnoit fin finon augoulphe de Satehe. V ray ^fc
eft qu'il ne continue pas en fa hauteur.Si qu'on le voit abatu a de-
mYquartdclieucdeTroye:maisqueptusloingdclaviletiauiU
haut cômeileft prcsdeTroyc.Ces baings chaudsont trois four,
ces falees , dequoyflrvpourroitbicnfaùedufel.commeonfaïc
desautres fourcés falees. Laquelle cbofclon peut bien cognoi-
ftre parleurs ruifTcaux.lefquelz leSolcil renden efte cousconge-
lezdefel.Ccfontceux dont Pline a parlé au liurç trente-ûxiel-
încchapitrefixicfmcouil dit:^#rx0i«<&:carlelieuouilzfont u„fr.
£cuczeftnomméZ^Xesvoutesrabriqueesalant,quc Eûtes
deciment&jdebrique/ontencorcdebour.alvnedeiquellesoa ..
nefebaignepointicarlamuraillcacomblélafontaine : maisya
vne petite maifon de léger édifice à l'vnc des fources , ou Ion fe
baigne La M&âc vouten'eft pasedificefi fumptueux , qu elt
celuy qu'on voités baingsdu mont Taurus.
VttifledeMetelm^&duPromontûtre. Chapitre vu.
> Ourretourneraupropasquauiôslaiue,&; repren-
dre les arres de noftre nauigabon , il faut entendre
' quenouseftionscnlamcràroppofirc de latuiat- CMpmBi
\ de poinde , appellee Cauo fancta Maria , ancien- i,urU.
£ykVr?W nement Syaeum.ou nous veoyos l'endroit des rui-
nlXnchaltcauancicn.quccroyonseftreçeluyd'Ach.lles.Et
de fait ony voit encores vne grofe butte de terre en manière
d'vncpetitcmôtagnc.quipoflibleeftletombeaudAch.nes.que
ceuxdeMetelin feirent fairecn.fon honneur. JNouspefofmes
Strechcmiatoutceiour^unodepuisledeftroiadesChafteaux
JU ni)
Vfn de; Me*
tdùt,.
MeteUn*
Bouhourt.
Crimnoîi.
Mérite,
Cb^fieaude
Mctdln,
9ft£ .
lÈfy SE-COIÎD LIVRE DES SIN«^^A*
iufqucs àfoppofite de Me de Mçtelin ; car le vent nous pouîfôie
lentement. Lanuid enfuyuant fut auflifans vent ne pour nous*,
ne contre nous.Le iour d'après noftre nauire eftoit encor vis à vis ,
du Chafteau de la ville de Mçtelin , qui eftîa plus grade vil le qui
ioit en Hfte de Leibossde laquelle ville tou te Me a prins ce nom; .
Ellecft habitée de Turcs. Mais les habitans de la campagne qui,
cultiuent lescharaps ôclcs vignes, font quafi tous Grecs. Le via
dçMeteîin entre tous autres eft bien reçeu àCônftantinople , &
çftquafi tout clairet. Et à ffn de le rendre plus coloré, ilzfçauent
omettre de la (èmen ce des hiebles , (èlonladoclrine queiesluifs
leur ont aprins.Les autres vins qu'on apporte de Chio , & autres
iâcs Cyclades à Côftanunoplej.ne font pas vendus à û grand pris,..,
que celuy de Mçtelin , lequel on peut difeerner au gouft d'auec
les autres.MecelineftvneiflecontrePhrygie, moult fertile. Elle
nourrit de forts Gheuaux5qui font bas&: trappes. Elle eft de grad
reuenu, tant de formages que de bons fourmens. Defquelzlon
fait moult grande quantité de deux fortes de drogues > dont les,.
Turcs fèfèruent en leurs potages , qui s'appellent en Ture.5Tvne.
Trachana,&: l'autre Bbuhourrjquiontefté anciennement appel-
leesCrimnon&Maza. Les Turcs en vient pour l'heure présen-
te, tant en paix comme en guerrercomme au ai faîfoyent les exer-
cites Romaines de Maza. Nous ne fcifmes pas grand ioumee, 6c
eftionsài'oppofite du rocher en la mer Egée entre Chio & Te-
nedorîequel pource qu'il fèmble à je voir de loing , à vne cheure,
fèmblablement toute icellc mera prins fbn nom de ce rocher:
car ce que les Grecs appellent ^£ga > vaut autant à dire comme
Gheure.
Le iour diaprés vn vent Grecà la quarte de Trcmontane com-
mença a nous fauorizet : U pour autant qu'il eftoit lent , il nous
faifbit feulement coftoyer I'ifle de Mçtelin^ que nous auions à fe- .\
neftre.Nous vepyos fonChaûeau de bie loing:car il auoit efté re-
blanchi de nouueau5auffip^\'il,eftciïcuédeffus vn couftau. Il eft.
ûtué au coftç de YQcciàent, regardant lïfle deTenedo. Et eft
fait à la mode antique,^ par confequent neftmouk fortXa ville
eft près du port,qui eft tre£beau,& grand a & bien feur pour tou-
tes nauires. Le vent ne iè changea point tout le iour,&eftions
défia aflfezjoing de Meteîin, quand nous veifmcs I'ifle de Pfara>
que nous ki|ï^mesàço^^ prochaine
du C.auo„
OBSERVEES PAR P. BELON.. 1$$:
Gatto de Maftichi,ou fenoat riflcn t des Àfnesiauuagcs , différés
à eeax qui font par les campagnes d^Affyric ,& ne petîucntviurc
ailleurs:car iîz meurent s*ilz font tranfportez hors de Ià:& laiflât-
mes de plus voir CauoMaftichi, ancieanemenrnomméPhana^-
Car le mcfmc vêt quelque peu plus gaillard fe renforça fui le vef-
pre,iequei nous redit à nuid clofe bié près de Chio.Nous paûaf-
mes vn deftroid en ce canal de Chio,qui eft encre rifle & la poin-
etc de Magncfie,dont nous eftions û près, que nous euïTions pea-
iecter vne pierre de noftre nauire iufques en terre. Cefte Magne-
fie n'eft pas celle qui eft arroufee du fleuuc Mcander en Theflâlic Magnifie..
ducofte de Grèce à quinze mille cfEphefus i mais eft ioignanc
"Chio:laquelie nous reftoic à noftre main gauche ,& Chio à dex-
tre.L'vnc des montagnes de Chio eftoit moult haute au décade feUenmm^-,
nous,qui fe nomme Pellencum. Nousarriuaimesà Chio, & an-
crafmes au canal cnuiron la nuid en attendant leiour-
SuecinBe defeription de ce quamns obfèruéen tijle & ville de £hm &
qu'on ne trouueh Maftic3que IL.
Chapitre viii.
L appert par les iournees , qu avions cy defïus racom-
; ptees3qiul ne faut que deux iours de bon temps à vc-
j nir des Chaftcaux de l'Hclleipont à Chio ; car nous y c&o tr£té*~
[ ârriuafmeslc troiûefmeiour de noftre nauigation-Si taire a»
toft qu'il fuft iour,nous defcendifmes pour aller voir la vilky.qni Twrc-
eft petite, fouec au riuagc de lamer,du cofté deNatoiie, au pied
d vne montagne expofeeau leuant. Elle eft tributaire au Turc,
& paye doazemille ducats par an; pour les maintenir en leurs li~
bertez. Mais ne leur eft permis de k fortifier^ Le porteft petite
maisaffez bon pour Galères Vautres fortes de moindres naui-
*es,ô£ grandes barques. Les plus grands nauires trouucnt lieu à
s*ancrcr dedans le canal fans entrer au port. La feule ifte deiChio
entre toutes les autres baille le Maftic , combien que Galien au ^*M-~
fccond de Glaucon loue le Mâftic Egyptien : toutefois fçauons-
que pour lciourd'huy il ay en a qu'en Chio5ou les arbres de Len- ^j^oai*.
Éfques y font cuîtiuezaaiee telle diligence ± qtnl n'y fontmoin- ^
dredefpence& labeur en les culnuant , que font noz vignerons
aux vigQCS^Etd'auraiiE afeuciarîrincip2ierichei& des.babitarisîda.;
Femmes de
Chio font
courtoifes.
l%6 SECOND II-TRE DES SÏKGVLA^
cefte ifle, eft cônftitueeen Maftic, par cela ilz oncen grande re-
commandation de prendre grand foingàaccouftrer lerdic^s ar-
bres de Lentiftjues. Et comme les Oliuiers & autres ceîz arbres
frui&iers veulent eftreobferuez&raccouftrez femblablemét les
Lentiiques nedonneroyent guère degummequin'yprendroit
foing , ainfl qu'il eft requis. Les Lcntifques qui croulent par le
Langucdoc,Prouence>& Italie,font tels que ceux de Chio, tou-
tesfois ne rendent point de Maftic.il y a vne particulière mine de
terre verde en l'ifle de Chio , qui reprefente grandement la cou-
leur du verd<le gris , qu'on nomme par Turquie terre de Chio: .
t-outesfois ce n'eft cefte cy qu'on entendoit anciennement pour
TerracbU Terra Giiia : car cefte terre verde a efté nommée par Vitruue,
rheodotiôn. Thcodotion. Ii n'eft autre ville ou les gens foyent plus courtois,
qu'ils font à Chio. Aufïï cft ce le lieu de la meilleure demeure
que (cachions à tioftre-gré,&: ou les femmes font plus courtoifes
ôc belles. Elles rendent vn infalîible tefmoignage de leur antique
beauté : car comme vne nymphe en lifte de Chio furpafTantla
neige en blancheur, fut appellee de nom Grec Chione , c'eft à di-
re neige , tout ainfiTifle prenant le no de la nymphe fut furnom-
mee Chio. Les homes aum* y font fort amiables. Et combien que
elle foit ifle Greque, tou tesfois pour la plus part Ion y vit à la Fra-
ke,c cft à direà la façon Latine.Neantmoins plufteurs d'eux font
Grecs , & veulent viurc à la Greque , tellement qu'il eft loifïble à
vr>chacun deehoiftr teflire telle manière de viure qu'il vouldra.
Lesobfcruations des deux religion* font grandement dirferen-
tes.Car ceux qui font vrais Grecs , sllz voyent quelcun des leurs
manger du poiffon ayant fang en quarefme , ilz s'en fcandalize-
ront grandement. Commettront iîs)n'es tu pas R omeos ï vou-
lansrntendre par cela, comme s'ils demandoyent , Et toy n'es ta
pas Grec ? Car ceux qui fe gouuernent félon la façon Greque , y
font nommez Romei:& ceux qui obeifTentà l'Eglife Latine,{ça-
uoireftau commendementdu Pape,font furnommez Franki.Et
d'autant qu'il cft défendu aux Grecs de manger poiiTon qui ait
ingénieur quarefme , ils trouuent mauuais fi vn de leur reigle
en mange. La religion en leur nation cft fort bien obferuee.Mais
ceux de Chio eftans partie Genetxois Sd Italiens , partie Grecs Se
tributaires au Tarc,viuent en toutes libertez accouftumecs que
is Turc leur mainxient.Auantquclafcigne.urie de Ghia tombaft
cornet.
• OBSERVEES PAR P. BELOM.- 1S7
fous la puuTancedu Turc,elle cftoit abfolument en la puiûance
des Gencuois.Mais depuis qu'elle futau.Turc5ellenclcureft pas
tant fubieerc comme elle fouioitXar elle fait maintenant Ton ré-
giment &rgouuernement à fon appétit, & non pas comme ceux
de Gennes veulent. Comme auffi fait la feigneuriç de Ragoufc»
qui eft femblablemcnt tribu taireau Turc. Leur parler eft partie
Grcc,partie Italie corrompu^ommceft le Geneuois : aufîi leurs
habilicmens& manière de viure fonràlaGcncuoife. Lercuena
du Maftic decefte ifle eft ilgrand,qullscn baillent au Turcûxxur %euenudn,-
la Comme de quatre ou cinq mille ducats par an,endeductlQnde Mâftk,
la fomme de leur trîbu t v & luy vendent le quintal au pris décent
& cinq ducats.La refte ilsla referuent pour eux. Les marchands
François voyas qui! eft toufiours à vn pris^enfent & dient com-
munément que quand ilz en ont recueilli vnc certaine.quantité^
ils en iecten t la relie .Mais cela eft; faux : car .comme nous auons
dit, ils font grandes defpenfes à accoutrer & entretenir lcs'Len-
tifques.Mais pource qivilz en deliurét au Turc pour quatre mil- -
le ducats par chacun an,feroit leur ruine s'ilz haulfoyét ou diini-
mioyem Con pris. Apres que le vent Auftral qui auoit efte quel-
que temps contraire , fut cefle , nous feiûnes voile, partifmes de -
Chio,&nauigafmesauec vent Grec affez bon>cotinuansnoftre
chemin vers Alexandrie. La première ifle que nou&aduifafmes
de loing,fut Icarie,qui eft maintenat nommée Nicarie^que nous îc£Jie~.
laifTafmes à cofté dextre:&ne fufmes gueres fur merquenous ne *iC£rie*
veiûtons lifle de Samos3qui nous apparoiffoiede bien loing:Car S£m&^
il y a de moult haultes montagnes en icelie. C eft vne petite ifle
dureflbrtdela feigneuricdeChio , qui n eft pas- large > maiseft
eftendue enlongucu r-Eile n'a guercs haucesmontagncs,auûi n'a
gueresde bois , mais il y croift beaucoup de bled, & bonspaftu-
rages pour Brebis , dont ilz font à force formages. Cefteiflca
bons ports : & n'eftoit la peur des Courfaires , elle ( commeauiE
pkifieurs autres iflettes deshabiteesjferoitredue mieux culciuee.
Car^uandle moindre Couriaire de mer y y ientjfaiiant quelque :
.peudeifort fut eux^ils les prennent efclaues;& les metcçcçaGa- -
Jere par force. Quelque peu plusauant en la mer nous- veoyons^-
ï ifledlosentre Lcarie & Naxic>cn laquelle on dit Homère ^ok^!^^^
<3ttK.ço£buclyv
s8S
SECOND LIVRE DES SIN^VLA*
Veîisle de Samos.
Chapitre ix.
Sjwvh.
Cereeàui
mms.
iCoitrfaire.
fhtiC
p0o:
'lue de Samos encor qu elle foie grande, toutesfois
elle eft maintenant quaû deshabicee. Oeft grand
chofcqu'vne ifle comme Samos , qui a cinq cens
quatre vingt huiâ: milles de tour ? doiuc refter dc-
ji^^^^w^ &rcc> veu mefmement qu'elle fuft anciennement fi
célébrée & puiflânte, qu'elle faifoit tefte à la force des Atheniés,
La crain&edes pirates fait qu'elle foie deshabicee, en-forte que
înaintenantiin'yapasvn feul village , &.parconfcqucncilny a
point debeftial.Elie eft plus ronde que longue ou large:& eft te-
parée delà terre d' Aile d* vn feul Canal,qui n eft gueres large. La
partiede fiflequi regarde le Septentrion , & l'Occident, a vne
moukhaulte montagne detrefapres rochers , laquelle _monta-
gnefutnommee de nom propre, Cercecius:& font lefdids ro-
chers quaftinaccembles. Nous auions vn marinier Grec en no-
ftrcnauire,quiauoitefté parl'iûe de Samos , qui difoityauoir
veu plufieursruiiîeaiïx:car nous nela.veoyos que de lamenvray
eft que n'en eftions guercloing.Samos eft grandement abondan-
te en bois de moult haute fuftaye,dont les Courfaires en bie peu
<Ie temps fepeuuent armer de fuftes,pour aller piller & courir
iurlamer.
®ifcounfourdffimrciue>eeft que Cour faire, Chapitre, x.
l AispourcequeccmotdeCourfàire n eft bien en-
) tédu es régions Mcditcrranees, &: que nousfom,
{ mes trouuez entre leurs rnains^ nous en voulons
\ maintenant donner l'intelligence. Ccfttout vn
^^^^ de dire Courfaire , ou Pirate de mer. Et pour dé-
clarer en peu de parolles qui le maintient en eftre, & dont il pred
fon commencement , il nous faut prefuppoier que trois ou qua-
tre hommes duidsàla marine ,& hardis fe mettent al'aduentu-
xe,qui des le premier commencement font panures, n'ayans que
quelque petite barque ou frégate , ou quelque brigantin mal
equippémiais au refte ont vne boete de quadran à nauiger, nom-
mee leBufïblo , qui eft le quadran de marine : U ont aufli quel-
OBSERVEES 9X%'V. BELOK. *$9
«uepcu ^appareil de guerrte, fçauoircft, quelques armes legie-
Liourcombatre de plus loing. Pondeur viurei Isontvn fac
defarine, & quelque peu de bifeuit, vn bouc d'huile, du miel,
quelques liaecs d'aux & oignos,vn peu de fel, qui eft pour la pro-
uifion dvn mois. Apres que cela eft fait, ils fe mettent al'auan- Fmefdr.
turc, vogans celle part ou prétendent du profit. Ec file vendes Coures.
contrainade fe tenir en porc, ils tireront leur barque en terre,
qu ils couuriront de rameaux d'arbres , Se tailleront du bois aucc
leurs coignees,& allumeront du feu , auecleur fufil , & lareront
vn tourteau de leur farine, qu'ils cuiront à la mefme manière que
les foldats Romains faifoyent le temps paflfé en guerre , qui por-
toventvnctuiïeoulamedecuyure,oudefcrbatu,quils appuy-
oyentdeffus deux pierrcs,puis faifoyent du feu dcûous, ayans B**h*te
mifeia Paftcdcflus: & comme la lame s'efchaurfoii : , ainli^ &
donnoit la chaleur à la pafte, dont en cuifoyent du pain. Ce pen-
dant ayans ainfi fait leurs appareils, il ne peut eftre qu'en vn mois
ou deux ils ne facent quelque bon butin. Et fa fortune leur per-
met qu'ils punTenc trouuervne bonne rencontre , ils feront en
peu de temps grandement foulagcz. Quoy qui! en foit ils nejpcu-
uentgâignerchofetantfoitellepetite, qu'elle nelesefleue Diea
haut. Etpourcequcc'eft vne pefte fi contagieufe qu Reprend
en vn iour d'Aile en Afrique,il n y a celuy qui ne la craigne gran-
dement , & s en donne de garde. Ccft vn mal public , qui rend
les gens de terre ferme contrainds les efpier en la mer , & ics oo-
feruereiilamanierequedirons:Ceft,quiln-yafommetdemo-
tagnes es ifles de la mer,ou aux riuages de terre ferme , ou l'on ne
mette des gardes le long du iour, quifontïe guet,efpianssils
verront de tels Courfaires nauigans par la mer. Et -s ils voyent
quelque vaifTeau, ils iugeront & cognoiftront facilement la raço
du vaiffeau , s'il eft de Courfaire ou non : car ils ne peuucnt tenir
fi bonne mine qu'on ne fedeffie deux. Par cela ils vont . counours ^^
fc cachas & muflàns cà& labour prendre quelque chofe a la del- defeomnr
paurucuc. Si les efpiôs ont veu quelques tels vaiffeaux en mer,ils fa Co*j*>
lumentdufeuauecleurfufil.Maisdautantquelefeuncfepeut^
voir de iour,ils ont expreffement apprefté quelque chofe qui red
grade fumée. Et s'ils font pluficurs vaiffeaux,ils tons de la rumec
endiuersendroias: car pluralité de fumée %ni£e qu'ils voyent
diuets vaiiTeaux. Partclfignc tous les habitons de, prochains
AA «j
190 PREMIER LIVRE DES SJNGVLA.
ports en fontaduertis,&: s'en dôhent de garde. Et les autres guet-
teurs qui font defïus les autres montagnes , encor qu'ils n'ayent
veu que la fumée , neantmoins ne laifteront pourtant de faire le
fembîable. Et quand viendra fur le faillir du iour,ils font du feu
clair 5 qu'vn chacun regarde. Car la couftume des mariniers eft
telle,que quandle iour commence à s'obfcurcir au foir y tous re-
gardent vers les lieux ou Ton fait le guet, fçachans que les gardes
font tous lesfoirs vn feu clair en figne de feureté : & appellent
cela,que la cofte ou bien que la mer eft nette: comme au contrai-
re quand ils voyentpîufieursfeux , que la cofte eft trouble. Et fi
la garde de la montagne a fait deux feux , cela fignifie qu'il a veu
deux vaiflèaux ennemis :1e fembîable eft de trois, de quatre, Se
ainfi des autres. Mais s'il en monftre pluficurs fans nombre, tout
ainfi les vaifteaux qu'il aura veu, feront tant qu'il ne les a feeu cô-
jHer..Cc figne de feu fe fait autant en tem ps de paix qu'en guerre,
cntousendroict's. Ceft vne chofe d'auffi bonne inuennon que
nulîeautre qui ait iatnais eftétrouuce par utilité publique,. Car
il ne faut qu'vn efpion à vne garde pour en aduertir tout vn pays:
quin cftpas inuention nouuelle. Et les gardes fe refpondans de
fvn à l'autre, font tellement que ceiuy qui en eft bien l'oing , ad-
uertitaufli bien celuy qui eft encor plus loing, comme fi luy mef-
melauoit veu: & fel entrefont à fçauoir en mefmc heure d'vn
mefme iour à plus de cent cinquante lieues loing. Herodo-
t,e recite que les habitans de Schiro peurent aduertir les Grecs
de trois galères que Xerxes leur auoit prinfes déplus de trente
lieues loing. Telle manière de feux eft tout ainfi obferuee en An-
gîeterre,principaîement en temps de guerrc,comme es iûes de la
mer Egée, Car a vn feul figne de feu , qu ils font fur la prochaine
montagne , ils amailèront toutes les contrées voifines en armes
•mm^mes m mojns dc trois heures,& chacune fçachant ou il fe faut rendre
'sCourjai* ^^ repoulfcr les ennemis, ne les laifife predre terre en leur pays.
Toutes îefqûelles choies les Courfaires ne ignorent pas ; Aufil
vont ils communément de nuid, & prennent terre quelque part
ou ils fçauront le. lieu eftre bon pour eux,à fin de couurit leur fré-
gate de rameaux. Pendant que leur frégate eft tirée à fec, ont loi-
fir de guetter quelqu'vn qui viendra des villages/oit pour garder
le beftial,ou pour aller à l'eau,ou faire quelque autre négoce : le-
quel ils prendront JSg mettront à la chaine pour fèruir à ,v oguer*.
OBSERVEES PAR P. BÏLOK. ' ' I91
S'ils font gens d'cfprit,& qu'ils ayen t feulement régné deux mois,
ils £urôt bien peu mène les mains,s'iîs n'ont gaigné quelque dou-
zaine dîiommcs efclaucs, lefquels ainfi multiplians d'vne frégate
viendront à vn brigantin^vn brigantin a vnc fufte, d'vne fufte a
vne Galiotte,& d'vne Galiotte à vne galère. Et fi de fortune ils fe panades
trouuent deux bendes de Courfaîrcs enferabie , lors fe aliians fe curfi**
trouuent grandement affeurez: car auffi bien font ils ennemis,
tant de leurs amis mefmes que des plus effranges du monde : car
s'ils trouuoycnt de leurs parens mcfmc,ils nelescfpargneroyent
pas. S'il fetrouue feulement deux Courfaires de compagnie, ils
oferon tbien entreprendre d alTaillir vnc Squirafi^vne Marcilia- Sfdrxce.
ne,vn Luc,& autres tels petits vaiffeaux de marine. MaK ils n'o- MérctiU**
feront entreprendre daflaillir vne grand nauire,moyennat quel- z*.
le ait quelque peu d'artillerie. Voila donc comme les Courfaires -
pillent fur mer,&: petit a petit fe font plus pniftans& formidables
à toutes gens qui habitent es ifles , tellement que les pauures pai-
fans font en vne crainde plus grande,que n'eft loyfeau fur la bra-
che : car quand on-nefonge pas en eux, on lésa à la queue. Et
mefmementlespefcheurs cftans auriuage, & toutes efpeccs de
petits vaifteaux ,quelque part qu'ils foyent , font quafi toujours
en crainte. Et pour en amener v n exemple,nous eftans en Me de p^
Paxo,anciennement nommée Ericufa,pres Corfu, pendat que- \ncur^
fiions auec neftre guide, cherchans quelques plantes , les Cour-
faires emmenèrent les paffagers qui nous auoyent amené là. Vnc
autresfois vn grand nauirc Venitien,nommc la Priola,eftant an-
cré en vn port d'vne iile de iarchipelago , maintenant nommée-^
Zia,& anciennement Cio, attendant qu'il feit bon vent pour al- £
1er à Conftantinopie : vnebarque fortkdu port de liûed'Andro-
auec bon vent,& vint en noftre port,ou elle arriua bien tard , la-
quelle vne autre barque de Courfaires fuyuoit , & ruft en-
trée dedans le port quant & quant elle , ûnon que les Cour-
faires v veirent noftre nauire, & par cela ils allèrent fe cacher
en vn autre port qui eftoic, derrière Tille : car il eftoit défia
nuid.Mais le lendemaiin auant le iourte pirates qui eftoyent'
huid en nombre, de compagnie : fe vindrent cacher dedans
les rofeaux , attendans le poind du iour , efperans entrer en
la barque qu'ils trouuemy en t au nuage, & remmener par for-.
ccaiwcccnxqittcftaYcntdcd^
A A iiîj
Jmt a
V}*L PREMIER LIVRE DES SINGVLA.
uns îefccours que nous leur donnafraes» Ec fi toft que ceux qut
cftoyenten la barque fecogneurenteftre furprins ,. les hommes
pîu&fortife ietterent en lajrner, pour eux fauuer en nageântrmais
les autres quteftoyent rcftcz,auec les femmes & enfans , demeu-
rèrent pdfbnniers.Ces Caurfaires cftoyent û hardis,qu'ils ofoyét
entreprédredcles emmener hors du porc en noftre prefence, qui
eftions en grand nombre.. Mais le patron de la Priola deftafcha
vn fauconneau, &: feit appreftet les arquebufters fur le bord du
nauire,& de- rechef leur cira ync cou leur me, qui les contraignit
de lâiflèrk barque., Gar aufSpour forcir du port ,ilseuil*:nt efté
- ^ .^n- contrain&s d'approcher affez presde noftre nauire. Et par cefu-
jL.es Courjdi* r. t ti ,->
m ne tuer* renc rorccz «c retourner en leur barque.Ces pauurcs gens qui ve-
pas les hoat? noycflt.de. Me à^AndrOjCuflcnt efté faits efclaues des Turcs,fans
mes. noftre aide. Iamais les Turcs ne tuent les hommes qu'ils pren-
U. ydeur nent , foit fur mer ou fur terre,mais les vendent. $i c cft quelque
&ynejcUue. belle ieu ne femme , ilslavendentquatre vingts ou cent ducats*
ites mmm, vne vjcjj{c vaud'roic trente ou quarante ducatSiquelqueieune pc-
fûurfioy ^ tiCgarç0njS'ii cf|- <jc t>eîle corpulence ", vauldra de quarante à cin-
' quante ducats. Sic eftvn homme robufte de bonne quadrature-
3£bien fourny y il vaudra foixanteducats. Voila la raifon pour-
quoy lesnaukesvot toujours armees>& pourquoy lesvaiiTcaux.
<pi ne font poim armez, font toufiours en crainSe* Ayansafïèz
parlé des Cou rfaires,retournerons à parler de noftre nauigation.
Lèvent Greceftoit celuy qui fajfoicpournous,qui nous côdnua
toute nuiefc, en forte que laifïafmes Samos à Sencftre , & paflàf-
mes le deftroicr d'entre l'Hic de Samos & Nicarie. 11 eftoit en core-
grand iour quand nous paftàfmes auprès de deux petits rochers^,
qui font tant renommez en tic les mariniers, nommez les four-
neaux, pource queceft vntrefdangercux paftàge^ lefquels ont
prins leur nom vulgaire Aqs Grecs,qui les ont anciennement nô~
niez Ipni^c eft à dite FurniMnais les anciens n'entendoyet pas de
ceux cy,ains.d!auttes rochers qui font à la bouche dufteuue Pe-
»eus> auprès de Theflàlie.. Ceux cy font grandement à craindre,
melmement quanâil les faut pafïèr denuid. La carte ànauiguer
les marque du nom de Fourneaux. Et pour autant qu'il faut paf-
fèr parla , ou bien prendre vn moult grand tour en la mer, va
chacun de nous auoit grand peur : car il cft fouuentaduenu que
^ueJbjues natures y fi^t|£riesjerito»Emente. Cominuans noftre
'■ chemin*.
2& four»
neaMx.
fyni,
Èetttm
OBSERVEES .F AU F. BELOtf. ^95
chemiir, non s paiTafmes auprès dVnc autre ifle nommée Gaide- <*"?»*
romfo,qui eft à dire i'ifle des afnes : & tout ainfi qu'elle cil desha- mJù*
bitee,auifi n'eft elle en aucun renom .
VetiftedePatbmos. Chapitre XI.
O v s auions l'ifle de Pathmos ( ou faintt ïean l'E-
uangeîiftcfutenexil, Se efcriuit Ton Apocalypfe) à ***»*■
: main gauche, en laquelle les montagnes font moult
* hautes : car on les voit de bien loing. Elle eft vulgai-
rement nommée Parmofa , Se eft habitée de Chrefticns Grecs.
Aufll eft bien auant en la mer au de là de i'ifle Icarie. Les habitas farmofi.
de cefte ifle viuent en toute liberté Chrefticnnc à la Grecquc,co-
me aufli font tous autres des ifles de Grèce , qui payer le tribut au
Turc. Il eft bien vray que les magiftrats&s chefs des villes font
communément Turcs. Le port de Pathmos eft aflèz grand pour
fuftcs5gaîercs>& petits nauires. Toute i'ifle eft fertile en grain , Se
y a abondance de toutes fortes de lcgumes,auflî y a vn monaftere
de Caloieres Grecs, auquel on voit la main d'vn trefpafle, à la-
quelle les ongles croiflent comme ceux d'vn homme viuant, &:
combien qu'on les luy rongne, neantmoins ils rcuiennent grads
au boutd'vncefpacede temps. Les Turcs oet eu occaflon dédi-
re que cefte main eft d'vn de leurs prophètes. Mais les Grecs diet
quec'eftlamainde faind Iean qui efcriuit leans F Apocalypfe.
Continuans noftre chemin le vent Grec, vifmcs Fifle de Lipfos à zjpfis,
dextre aflez auant en la mer , qui eft petite , Se deferte. Bien toft
après paflàfmes I'ifle de Pharmaco: mais eftdutoutdeshabitee,
laquelle on nommoit anciennement Pharmacufà. Ce fut près
de cefte ifle ou les Courfaircs prindrent Csefar efclaue , lors qu'il ?""'
alloit à Rhodes eftudier pour ouyr Apollonius Molo.AyanspaA ^r/w/
fé Pharmaco,nous arriuafmes en vne ifle qui cftoit anciennemét pùse/cU**,
appelleeIreon,maintcnantonlanomme Lcro. Elle eft habitée in&n.
des Chrcfticns Grecs:& eft droi&cment à l'oppofitc d'vne poin- zéro,
àc è Afie , bien aduanece en la mer, que la carte à nauiger appel- &** "**
le Cortoio. On y voit des chafteaux antiques fituez fur les col- *°k.
lines, Se petits couftaux.Les montagnes de Lcro, font beaucoup
plus hautes que celles de Samos : Se eft fort bien cultiuee par les
Turcs SC Grecs Chrcfticns. Nous paflàfmes outre, Se vinfmes à
BB
1^4 SKOND LIVRE DÎS '«ING^IÀ.
Càmm. \ vne autre grande Ifle nommée Calimno , habitée de Grecs.
-Chreftiens. PafTans outre nous -atriuafmescn vne autre ifle no-
jermo. mcePfètmo,en laquelle y a deux ou trois villes , & pîufieurs vil-
lages, La terre eft cultiuee par le labeur des Chreftiens Grecs.
jjesmyrne. Nous auions la ville nommée le Smyrne>à main gauche , qui eft
smyrm pour leiourd'huy lvnc des villes la plus riche , 6c du plus grand
môûkgrojfe cralicdemârchândifede toutîc pays de Natolie, qui auoic an-
>^/# ^cien nemerit nom Smvrrîa. Il nous falloir pafler vne poin&cà
Jte\ , . 1 opDoiîte de l'ifle de Pfermo , qui fortde Natolie . ôc entre bien
c Q(rQ auamenjamer,queIacarteanauiguernommemainteaantCa-
uo iioflb,&: anciennemët Erithris,qui fîgnific chef rouge.Nous
-eufmesgraade difficulté à la paflèr ; car le temps cftoit obfcur , Se
auflî que^c'eftoitenuiron l'heure de minuicl:. Le mauuais temps
contraire aous furprint , tellement que nous n'allions que d'vn
des ceftez de la voileà Force. C cftoit vn vent maiftral fî fort im-
pétueux, qu il auoit rendu la merefmeuë, ^courroucée. Le len-
demain au matin nous commençafmes à entrer au canal de fifle
de Co^qui eft à cofté de terre ferme , appelle le pays de Halicar-
SaHatrndp naflè : 6c n'eft que de cinqlieues de large. Là mer qui eft entre Sa-
fi. mos & liûe de Co , eft tant pleine de petites ifîes , qu'on ne les
pourrait bonnement nombrer fmon à grand' peine: toutes lef-
sjorades. quelles eft oyent anciennement appellees Sporades.
"Bêtifie de Co,j>ay$ d'IZipfwcram. Chapitre xu.
Vand îeiour fat venu, eftansja bien aduancez de-
dans le canal , nousveoyons bienàckr toute l'iflcde
Co, quieftlepaysdôteftoitHippocrates. Les Turcs
_ • »,„• _ »*%**^p îa.nommcntStancou. Ses montagnes nous apparoif-
pép-dtes. foyent plus hautes que de nulle autres des ifles que nous euflions
encor veucs : car elles ne font gueres moins hautes que celles de
Crète. Laville de Co eft toute habitée de Turcs , &c en toute
fiflen'yaquedeux villages habitez de Grecs. Le Chafteau &c
mlUdeCa. lâ ville de Co font pareillement appeliez Stancou, il eft affis en
haut lieu , fait à tours rondes , plus grandes que celuy de Mete-
îin,ou deTenedoJ^a ville eft en bas lieu, ïîtueeau riuage deffous
le chafteau. Ccfteifle eft bien fertile & abondante en animaux,
Co.
Stancou,
» OBSERVEES ? À'K P. EE L Ô N. Ijrj
&cf£ 'plus longue que large. Nous la coftoyafmes moule long
temps auec vent fauotable, en nauigant auec toutes les voiles:
car la tempefte nous auoit cefle. Lors- mifmes tous les adioufte- '
mens pour accroiftre la voile. LaifTans f ifle de Co à main dextte,
entrafmes au canal de Rhodes-Encorefiions bien loing de la vil-
Ie,que nous la veoyons deflus vn< petit couûau afïlfc en vnc poin-
debien aduanccc:.& pource qu'il y a- des hautes tours , & fanais .bmmL-
ou lanternes quiefclairent pour addrerïêr Jesnauires à bon port:
nouslaveoyons déplus, loing. Quand nous commençafmes à
approcher, trouuafmesce que l'on dit auoirefté i ancienne ville
de Rhodes, fkueedeïlus vne petite butte ronde , près le riuage
de la mer,diftante deux lieues de la ville de prefent;^: dit on qu'il
y auoit vn contient pourlescheualiers de la religions &quoatrc
ce qu'il y a.beau logis, que le lieu efl: en bonne fortcrefïe , 5£.qu'il
-e^naintenant fongneufement gardé parles Turcs. Eftans ak
parfin arriuez à Rbodes,iettafmesles ancres, & defeendiimes c&.
terre, & ailafmes voir la. ville».
Smmlante^ohpruees en Rhodes. Chapitre x r i r.
, A ville de Rhodes eft partie dcfTusvncouftau en pen- ,. ..
\ dant}pârtiele long du riuage. La plus part des habitas ^~
! des villages de Tille , font Grecs, qui peuuent bien
[ entrer & vcnitleiour befongoer en la ville, & appor-
ter vedreleursviures-au marché, & ont congé d'y demeurer tout
le iour : mais les Turcs ne leur permettent ^coucher la nuicfc,tanc
poutle foufpeçon qu'ils ont dereuolte D .que de trahifon. Nous
ne voulons entendre qu'en toute là ville Htj'y couche bien quel-
ques Chre{tiens;carnieiînemcnt pluheurs de leurs-efHauesfonc
Chreflicns. La {èigneurie de Yenifè y entretient vn fadeur
pour le trafic de la marchandife ,.qui ne s'en defîoge point \^l rjUatrfau^
Buid, combien qoe-cous^ceux de fa famille (byent Chrcfticns. Zwr«H*i«w
Le grand Turc y tient ordinairement <;inq^ galères forcées, en-^odes.
dont le capitaine eft commis pour purger la mes- des- meur- oaleres far^~
fions qu'ont accoutumé de faire les Courfaires pçar les lues aesduiMr^~
Cyclades , Sporadcs , &: autres lieux de Grèce appartenansau
Tiirc.,3 &_auffi,paur cenir la mer Méditerranée; en fobicdio% ,
\ : :... ' 'SB. ij ..
I$6 PREMIER LIVRE DES SINCVLA.
Se tout le refte de Grèce en feurcté. Car il fait ordinairement des
courfèsauec les fufditcs galères : & s'il y a quelque nouuclle de
Courfaire qui foie en pays , ledit capitaine necefîe iufques à tant
qu'il l'ait trouué. Tous les baftimens des cheualiersde Rhodes,
tant François que d'autre nation, font en cor par tou t en leur en-
Lts Tum ne tier.Carîes Turcs n'ôtrié ofté des armoiries, peindures/culptu-
demoltjfent res,& engraueures , &efcriteaux qu'ils y ont trouué. Et encor
rien. pOUr je iourd'huy s'en peuuent lire plusieurs inferiptions tant en
François qu'en Italien. Nous difons en outre que les Turcs ont
touûourseuceftecouftume,que quelque chafteau oufortcrefTe
qu'ils ayent iarnais pris , eft demeuré au mefmc eftat en quoy ils
l'ont trouué : car ils ne dcmoliflcnt jamais rien des édifices Se en-
graueures. Leiourenfuyuantnous allafmes voir quelques pro-
chains villages hors la ville, & fufmes à lameiTedes Caloicres
Grecs, Se vifmes leurs iardins moult bien cultiuez dcGrenar-
diers,Orangers, Iuiubiers , arbres de Sebcftes , dont ils ont tref-
grande quantité^ font la gluz auec fbn fruid, Auffi y a des Fi-
^Arhres de guiers, Amadiers,&: Oliuiers.Leshabitas des villages de Rhodes,
sebefies. viuet félon la religion Grecque, &: gardent encor les vocables#des
çhodies iti* choies ayans noms propres. La garde que les Turcs font de nuid
uent à U \ Rhodes, Se autres chafteaux en Turquie, eft faite à haute voix:
Greci^- car ils fè refpondent les vns autres , Se non pas au fon des cloches
nuitit Rho- commc 1 '<>n ^it es villes d'Italie, &à Ragoufe. Les murailles de
fe ' Rhodes font au mcfme eftat en quoy elles cftoyent quand ils les
forcèrent des mains des cheualiers : Se n'y a efté depuis augmen-
té ne diminuéjrenforcéjnarîoibly. L'on y trouué à acheter de
beaux ouurages de foye faits à i'eguille, Se principalement des pa-
uillons de lids. Ils font leurs ouurages de diuerlès couleurs , en
manière de poinds croifez. Leportraid eft de fueiîlages , Se eft
différent à l'ouuragc Tu'rquois,& à ecluy qui eft faid à Chio , Se
en Cyprc.
OBSERVEES EAU E. BELON. 197
Modeflie des foldats Turcs ; & £vn ferment nommé Uctâuii &*detoi-
feau nommé Onocrotalus. Chapitre, xiiii.
k Ous y veifmes vn oifcau priué,nommé Onocrota-
i lus.IÎ alloit par la ville : duquel obfèruans la gran-
; deur, trouuafmes qu'il n'eftoit du tout û grâdquc
' eft le Cigne. Il eft tout blac,&: beaucoup plus gros
^ qu'vne Oy c. Ses iambes font comme celles des Ci-
guës, te le pied de mcfmc façon , mais font de couleur cendrée,
couucrte de dur cuir. Ceù. vn oifeau gay,hetté,& vioge, qui tiet
fà tefte droide &: efleuee. Son bec eft large te canelc , poindu te
recroché par le bout.ïi porte des plumes fur fâ tefte par le derriè-
re, qui luy font quafi vne crefte comme à vn Vanneau :te quand il
vole , va battant des ailles comme vn Cigne. Il fè paift aufil bien
fur l'eau fàîee,qu'en l'eau douce. Nous prouuerons en autre ceu-
ure,ou auos mis le portraid des oifeaux t que ceftuy eft le Peîica, ?dican.
d5t nous taifons pour cefte heure , à caufede brieruetc. Entre les
chofes fîngulieres de cefte ifle,auons veu le fèrpent nommé ïacu-
Ias,mouchcté de petites taches deffus le do^reflèmblantcs à des
petis yeux , tout ainfi que font les taches de deffus le dos d'vn -,,
Tremble, nommé en Latin Torpédo. Nous le trouuafmes def- ^ , *
fous vn Câprier efpineux hors la ville , celle part ou le Turc
■auoit planté fon artillerie quand il affiegea Rhodes. Les Grecs le
nomment maintenant en leur vulgaire Saetta ,c*eftà dire Sagit- &etu
ta, te les Turcs Ochiîannc , les anciens Acontias. Il a trois paul- ^Aconùd*.
mes de longueur, te n'eft plus gros que le petit doigt. Sa couleur
eft cendrée tirant fur la couleur de laid, & eft totalement blanc
deûous le ventre,ayant des efcailles deffus le dos,&: tablettes dc£
4 fous le ventre à la manière des autres. Il eft noir deÏÏus le col , te
taché de deux lignes blanches , qui commencent des la tefte , te
fuyuent tout le long du dos iufques à la queue. Les taches dont il
eft moucheté,ne font plus larges qu'eft vnc Lentille. Mais eftan c
fon dos cendré , les taches noires font rondes , entournees d'vn
cercle bîanc.Nous parlcrôs de fon anatomie ailleurs plus à plai^
en deferiuant tousiérpens parle menu. Toutesfois ayans eu fon
naif portraid, i'auons mis en ce Heu.
■ . \. BB H)
SECOND. LIVRE DS£ S^NGT'l Aw-'-
2xj>ortrai& h UchIms ■ -y autrement dit *4 contins..
Mawoca».
Àuârveifrnes defchargervn brigantindcffus. lariue dupors,
plein d'vne drogue propre en médecine , appellce Srorax rouge.
Les Grecs la .nomment main tenant Mauroeapno. Et nous a Ion
dje qu'il croift en Tifle : mais poiircè que ceux qui ibntYoyages
pno P;ar m^r> nc P^uent s abiencer loing de leur vaifieau , n auons eu
ioiûr de nous efearter pour aller voir fon arbre:car quand les ma-
riniers ont ïe temps a propos , ilzne retarderoyent pour homme
viuant.Nous voulons inférer par cela , que ceux qui ont fuyui les
Nduigneurs nauigations dedansles galères ou nauires , n ont peu beaucoup
far mer ne vojr <|e la terrc > attendu quiîz font toufiours fubiects d'atendre
^TTïoiT~' kur vafflfêau. Àyans pris garde aux foldats Tnrcs qui font le guet
oheiffanee aux portes de Rhodes^uons eu occaiion d'eferire la grande con-
des foldats rinenee Se obeiflance âes gens de guerre du Turc: car combien
7fyrcs»._ q.u il yeuft vingt ou trente hommes au x portes de la ville , qui les
gardent {bigneufement , to.utesfoisceft.oit auec fi grande filence
Se rnodeftie^qu on n'y oyoit non plus de bruict}que s'il n'y euft eu
perfonn,e:& fembloit plufr.oft.qnc ce fuuint artifans,que gens de
guerre:mais ancc.ee tiennent granité de Sénateurs. Et.de vcay ilz
Ibnt fi paifîbles en toutes leurs affaires, qu'il n'y auoit aucûd eux
quieiifï aucune armure , non pas feulement vne efpee. 11 n'y a
maintenant que deux grandes portes ouuertes en Rhodes , l'vne
cft fiirje port/autreau çofié de terre ferme >Se vne fàufe- porte
?*?fins4e £a v Ichzdm du gran d maiftre. Les pay fans de fine venas au mar-
^da. ché vendre leurs Cheureaux , fromages , beurre s.&: autres telles
prouiûons» font acoufhrez de mefine façonque font les pay (àn$
de Crète. Hz font noirs Se ridez par le v ilage , ayans les cheueux;
longs5pen4ans iufques defTus !es èfpaules, Se porten c de gros bon* ,
. .WS'ÏKVÏES "PATt vl BEXOtf. l£9
nets doubles. Leuxpourpoint eft-dc cuir fans manches r lâche-
mife pendante deuant& derrière, &: portent des botes de cuir,
qui leur montent fi haut, qu'ilz les arrachent au pourpoint. Hz
. ont des brayes detoiilc deffus leurs chemifès. Celuy qui n'auroit
acouftumè les voir,pcnfcrpit que ce fuflènt gés mafquez,tcffem-
blans totalement à ceux quiiouet lesmatacinsxar ilz font acou-
ftrez comme font ces gens mafquez qui vont faifans les boutons
au temps de Garenne prenant, à Rome &:Venifc. Hz vendent
leurs hardes aux Turcs,qui les payent comptant,fans leur en fai-
re aucun tort. . Lon peut facilementaperceuoir par les ruines de
dehors la ville , qu'il y a aurresfoîs eu de grande fauxbqurgs en-
tour .Rhodes, qui furent totalement defîaits au fîege du Turc, &C Fauxhmgs
encor n'ont elle rebaftis. Toutesfois il y a quelques villages qui-^^^
ne font gueres plus loing des portes ,qu a la portée d'vn arc , Se
font Habitez de Grecs &ç de Turcs :.&ou les Galoieres ont vn
monaftere. : ;: -
Voyage de Rhodes en Alexandrie. Chapitre XV.
i Yans ja-feiourné quelques iours en Rhodes &ex-
\ pedié lesanaircs , retoumafinespour fuyure noârc
nauigation : & cufmes vent maiftral,& nousfalluc
aller long temps à Force ,ceft à dire furie coftedu
nauirc : car il nous conuenok gaigner vne poinde
que l'on appelle Cauo dei Bo , iufques là haut audefïus de Rho- Cdueddse,
àcs. Ccft le lieu ou les galères Turquoifes arrivèrent première-
menr,îors que le Turc print terre en Fine , quand il affiegea la vir- ,„,
le. Quand nous eufmes gaigné cellepoinde,lois vn vcntde tre-
montanc,c*eft adiré fèptentriona^nous donnaenpouppe rnouk
fauorable,& tournafmes la proue droiâ: vers Alexandrie , choi-
fuTans noftre chemin dedroid &U& ayans le vent à propos , fucét
mis tous les adiouftemens àla voile> Ceftce que les Italiens ap- Nauigtrk
pellentnaui^uerà voile jFrançoJfe^&fçrnble qu'ilz ayent faid ^oiUiran*
cefte dirTerencepour Je regard de laXatine,qui cil triangle, atte- îQifi-
duque la Françoifc eft quarree:^ aufïi que le Bourdon eft appel- ^.^ ^^
lévoile Latine. Le bon vent nous fut fauorable toute la nuid : & l^Qm^
quandilfut iour,nouscftions défia fiauant en lamcr,que nous .^^
auions perdu l'ifle de veue : lequel vent continua iufques à midy*
BB iiij
ZOO SECOND Liy^E DES SINGVLA.
Lequel ayant ce(&y&c eftat la mer en bonaffe ,& le temps calme,
voulufmes fçauoiren quel endroit pouuions cflre. Nousco-
gncufmes pac la carte à nauiger que nous citions défia à la moitié
duchemimcarlonvaauecbonvent de Rhodes en Alcxadrieen
moins de trois iours,& trois nuiâ:s.Quand les mariniers fe trou-,
uent fans vent en plaine mer > le vaineau ne fe remue no plus que
s'il eftoit dedans vn port. Alors, chacun fe metàioucrjàpcfcher,
&: à fe baigner , ne faifans difficulté de fe ie&er en la mer , &: faire
le plonge5,pafïàns d'vn cofté à l'autre par défions le nauire. Ceft
Faijfem %. *ors <¥xc les mariniers ont peur des Courfaires : car en temps cal-
ràffem meilnyapetitvaifïêaulongjçeftàdire d'auirons , qui ne face
rond, grande peur à vrvbien grand nauire ron,d. Mais quand il faitvet,
les petis vaifTeaux n ont pas feulement peur des galeres:car ils ef-
chappenttoufioursàlavoile. LevcntdeSiroc commença petit
à petit j&iè renforça fur le vcfpre , iufquesaeftre moult impé-
tueux: lequel nous contraignit plier toutes les voiles,&: nous co-
tenter d vne petite , qu il nou^ conuint defeendre iufqncs à my-
mas3& la renforcer de bonnes gommenes & gros chables. Le fu£
di& vent fè changea en vent de ponent : qui fut aûez bon , te qui
continua toute la nuiâ:. Mais fur le poind du iourte vent de tre-
montane retourna nous fauorifer : lors commençafmes à defpc-
cher grand chemin, faifans pour le moins de quatre à cinq lieues
pour heure , auffi eft-ce le plus vifte qu'on puiûe aller fans tour-
mente. Les mariniers appellent cela aller en fortune. Le difeours
de cefte nauigation eft tel , qup depuis le deftroid de Conftanti-
noplepour aller noftre droiâ: chemin , il falloir quclapouppe de
noftre nauire regardai le Septentrion , & que la proue fuft virée
au Midy : car allant de Conftantinople en Alexandrie , Ion va de
droite ligne de Septentrion à Midy .Or puis que fommes entrez
û auant en ce difeours touchant la nauigation , il nous a fcmblc
bon ne nous en déporter, que n eufïions premièrement parlé de
celle des anciens, quieftoit beaucoup plus difeommode quelle
n eft maintenan t^comme il apperra en ce fuyuant chapitre»
OBSERVEES ?▲&--*• WION.
,£«* /« marÎMennuuigeéyent Anciennement fins ImguiJîe^ qtktdftm^
&fans auoir vfigc delà pierre d'^4im4ntm Chapitre xvi.
* Esanciensauoyent plus grande difficulté en leurs fime£^
nauigations que nausn auons maintenat : car lors mAnt%
' n'en paix,n'en guerre ilz n auoyent adrelïès , finon
de la conie&ure de l'Orient , Soleil couchant , Se-
^^^^ j ptentrion , & Midy :ou des cftoilles.&: Soleil qu'iiz
veoyent de iour Se de nui&}&: le plus fouucnt ne perdoy et point
la terre de veue.Mais maintenant que tout le monde a cogneu la
vertu de la pierre de raimant,lanauigationcft. fi facile } que.deux
hommes ofent sauenturcr à tous propos aucc vne petite barque,
à tous heurts.aux plus impétueux vens,&trauerfer la merree que
les ancies neuûent ofé faire n y entreprédre en plain iour > lors q
ilz nauoyent l'aiguille & quadran frottée auec la pierre d'aimanr, ^^
Cefteeft la pierre autrement nommée lapis HercukusTou Ma- ^^.
gnes,&Sidcruis,& en Italien Calamita: en laquelle Ion trouue M^ne$.
vertus contrairesxar l'vn des bouts fait que l'aiguille regarde en s'ident'^
tout temps la partie de Septentriôy& l'autre bout le Midy -Nous cdimiu..
trouuons que celuy qui inuentà premièrement; l'viage de iàdi&c
picrre,auoit nom Fïauius. Mais le premier qui ait eferit telle ver- *f ma^
tu,eft Albert le granddequel ayant trouue qu elle eftoit en vfàge *J^%™£
des fon temps,penfa que la pra&iqucen fuft antique TSc qu An- Y^îLxnp
ftoteeuft entendu cefte vertu. Toutefois ,-ny Ariftote > ny ceux y^^i^
qui vindrent long temps après luy^'en cogneurent on c laver tu,- jn&me..
& que l'vn des bouts feift que le fer fe tournait vers Septentrion,
& l'autre bout feift le contraire. Ariftotecogneut bien qu'elle
attiroit le fer : mais il n entendift onc qo elle ièruift anx nauiga- ^ ^
tions.L'am^itédeceftcdi&ion d'aimant a donné couleurà<pei- J^J^^
ques Alchimiftes d'en inuenter des tromperies, promenas quel- ^ "
ques fubulitez en chofes d'amour , monftrans, que comme elle
peut attirer le fer, elle attiroit aufii les amoureufes volontez des
perfonnes-.maïs celaeft fauxrô^à cefaireont beaucoup plus loué
la blanehc/çachans qu elle eft plus dimxileSdrare a trouuer.que
kcommunequi eft de couleur defef ^ Lon trouue maintenant-
grande quantit^deceif aimant en vne iile delà mer Mcditerra-
nefi;nQmmee''EîJba , & andennementïlna ,,-nmeca- l'oppofitadû:
CC
*oa SECOND liYllï DIS SINGV1A,
*"* PJombin , au territoire de Florence , ou elle ne coufte pas beau*
™^^ cou|>,£ncor en parlerons dauantage en la vie de Mahomet. . "
Qtulnyaque deux grandes bouches du Nil nauigaUes 5 o» is
grands vaiffeaux ronds puijfent entrer*
Chapitre xv zi* ,
• N Sacre îaffe de voler fè vinrafleoir entre Rhodes
& Alexandrie, dcfïiis fentemnede noftrc nauire,
ou il demeura bien deux heures. Piufieurs Cailles
Y. quivenoyent dedcuctsSeptentrion,tirans au Mi-^
a %,£ifentauulprifës dedans noftre nauire. Cela
nous baillaailèurance que les Cailles font paflègeres : car defia au
, parauajit en auions obfèrué d'autres au prin tem ps , lors que paf-
^fptf*' fions delMe nomme. Alzante,autrement âiâc Zacinthus , allas
Nerrot^te, *^a Moree* autrement nommée Negroponte. Là veifrnes auiH
& * que les Cailles verians de la partie du Midy , alloyent au Septen-
trion pour y demeurer tout lefté; lors en veifrnes, prendre grand
sombre auec autres dmerûtcz d'oifeaux pafïàgers, qui s'eftoyen t
.--'.;.. fcmbjablcmcnc rendus là dedans noftrc vaiiTeau. Encor veifrnes
vaauttc oifcau incogneu à tous ceux du nauire , qui cftoit gros
comme vn Coqu3tirantàla couleurd'vn Mauuis.Auifi vcoyons
Qnocmdes vo^cr^cs Onocrotaîes venans du ^ofté de Septentrion , qui ai-
du kede |°ycr*t vers leMidy:qai.foBt ©y féaux qu'on ne cognoift aucune-
Mantove. s*ent en France n'en Italie , fïnon quelque fois qu'on en voit au
m lac de Mantoue:maïs ilz s'en retournent f hyuer. Toute la iour-
ticefutiâns vent, comme auul grande partie de la nui&cnfuyuat.
Le lendemain cufmcs aûez bon vent de Grèce, & continuas no-
ftrc ehemin,entrafmcs en vn endroiddela mer, que l'eau du Nil
Mouche Ju venant de la bouche 4c Damiate, auoit troublé &: peina: d autre
xïldeDA* couleur que fpa naturel , tellement que la mer en eftoit blanche.
mate. Cefutvnemerquequienfeignaaux mariniers qu'ilz neftoyent
„ gueresloing de la terre d'Egypte , laquelle ne nousapparoiftbit
Ep$te efi encores point. Car tout le territoire d'Egypte eft en lieu bas,
*#• n'ayant aucunes motagnes qui fè puifTent voir delà mer. Il eftoic
défia bien tard quand nous entrafmes en cefte eau trouble , ôc ne
faifoit pas grand vent: par cela nous ancrafmesen plaine mer à
aonante toUçs d'eau. La couftumç des Maures, c'eft à dire Egy-;
OBSERVEES PAR. F» BE-XOIT. tO$
«tiens, venans de Çonftantinople, efl; quand ilz fè trouuent Bien *&>$!
tard en icelle eau trouble, ne fçachans s'ilz fonttrop bas, on haut man" .
du port d*Àlexandric,ou de la bouche du Nil,de iceter Fancie en
h mer,iufques au lendemain marin, afin quayans afïèz deiour,
iîzpuùTent recoçnoiftrc le lieu & l'endroit ou il leur faut aller
preadre port. Et s?ilz eognotflfent qu'iîz ayent monté trop hauty
iîz pourront auec le temps baiûer pour regaigner le port. Nous r »'>
paflafmes la nui&,cftant la mer en bonaûe,& le lendemain ayans
tiré les ancres du profond de l'eau , Se dcfpioyc les voiles y€oïtis
hors de l'eau dudid courat,nousnauigafmcs ^cn par la mer, que
ncntraiïions pourîafccondcfbisenvneaucre eauducourâtdt*
Nil venant de la partie de Rofette. Ces deux eaux ibnt les plus
grands courans du Nil, dot le dernier auoit teind la mer de verd
en iaune paille , qui ne nous dura plus de demie lieue de largeur,
que nousn entraînons en la mer cerulee* La chofe qui nous ap-
parut première en:Egypte,rut leChafteaifede Ro&tte^qui ck vne dkapj»d&
iournee & demieau demis d'Alexandrie. Eftans encor en plaine *^*?\
campagne de mer , regardans qu'elle çhofe nous apparoiftroit h. pdmter^
première, ne veoyons que les Palmiers & Sycomores, & la haute ^^£
colomnede Pompée, qui eft fur le Promontoire vau dcûus d- A- Fom^
lexan dtie : Car d autant que la terre eft fi haûe & fans montagne,
elle n'apparoift poind de loing. Il eftoitdcfia tard quand nous
entrafmes au port, qui fut caufe que noos .Gcfortifmcs point du
sauirc pour ce iûur là..
Sommaire du ch'cmin ikCùnfimtmoplem^Vexmètie%.
Chapitre xvjiu, ■.
om
fN peut cognoiftre: par f obferuation âcs iour- JNto^iwaw
j ncesdecefteprefenie.nauigarion par-mer y ,quon g^^^.
; peut commodément acheucr le voyage en quinze tinofUe»
\ iournees , moyennant qi^oa- aklcvent fauorabk ^xaki^
l comme nousiettfraej^Er|>0tà»repcter nofk&ehe-
min par iournees , finousnjcfuûlïOOspointjdemcurezà.GalHpo-
K au deftroï&dcs Chafteaux, autrement dfek I&fg&xaçfe&àla--
-ville dcChio, nà Rhodcs,nous eu mos parfais tout ce voyage car
hiîi<3tiours.Car dcHhodcs en &Lexandpc jiQusBç&foes^taais»
' CCiL "
204 SECOND XIV B.E. DES S I N"C V LA,
:iours & trois nuids , & de Chio à Rhodes il ne fallut que deux
iours&:deuxnuids,& dcCoftatinopleàChiopeuton venir^n
deux Jours & trois nuids.' Voila comme on depefchc beaucoup
de chemin- en peu d'heure, moyennant que le vent ibit fauorablc.
Des deux villes à ^Alexandrie fjne en Erypte^Q* l'autre qut efloit
Colonie des Romains en Phrygie. Chapitre xix.
g E lendemain matin nous defcendifmes du nauire, &ç
-■■ali'amies en la ville d'Alexandrie. Auant que parler
[ d'Alexandrie, dirons premièrement qu'il y a eu diuer-
Dîuerps ^v-H^.^4 Ces Aiexandrics : mais fur toutes y en a eu deux reno-
^lexan^ mees : Car mefmcmcnt des le temps des Romains la ville de
drtes. ^ _. Troyc îagrande ayant efté refaite par eux , .&: y ayans enuoyé des
^Alexadne cqlonies:Romaincs > la nommèrent Alexandrie , dont Pline faic
euvhrygu, mentîon) commc auifi AnneusSeneca en la mort de Cîaudius
Caviar : Quero (dit-il) fororem fttamftttltè ftuâere, ^ithenh dimidiumJH-
cet *Alexmâri& totum&nnum : Car c'eitoit lors vnc eftude pour les
. "'Latins-: &: cft celle dont Galien a fouuentesfois parlé, lequel n'a
-. latnaîs entendu fînon de cefte Alexandrie, ou eftoit Troye, & no
lAhxxnlne Jc l'Alexandrie d'Egypte : laquelle chofe on peut aflez cognoi-
d> Egypte fcQ par fes eferits. Il fufKft pour le prefent traider fuccindernenc
£^sm *' les chofesexquifès concernantes noftre obfcruation : cardeferi-
re de h ville d'Alexandrie par le men u après tant de grands per-
fonnages^e ne fëroit que rcdiâ:c. Elle eu: fituec en pays fablon-
neux-defllîsvnepoinde,cardvn cofté elleà. la mer Mcditcrra-
nee5 & de l'autre codé eft le grand lac Mareotis , de moult gran-
de eftendue. Les mefmes muraiHes qu'Alexandre le grand feie
anciennement édifier, font enebr en leur entier, mais Je dedans
delavilleneftpourlaplufpart que ruine des anciens baftimens.
Elle fut exprefîement ruinée quand le Roy de Frace auec le Roy
deCypre forcèrent le Soldan de la laifler : lequel voyant ne la
pouuoir garder , la feit démolir. Mais depuis on y a reedifîé des
-maîfôns peu à peujelon qu'on y a voulu habiter. Et n'eitoit que
lcs.marchands Chreftiensy -tiennent:" quelques hommes pour le
trafEc^s marchandées, elle feroii bien peu de chofe. On yap-
Pam $Eç-y= Porte toutes fortes de viures ,'tant du pays d'Egypte , que de Cy-
pUt ^ pre^des autres lieux voiiins. Ld para :quicft fait en ce pays là,
OBSERVEES VlK V. BELOK. 2,0J
& en Syne,cft formé en tortcaux , applaty en fouaues , demis le-
quel "ilz 'ont couftume femer de la nigeile franche. Parquoy on
trouuecellcfemencecn vcrïte à grandes fâchées parles marche?,
& es boutiques des marchads.Ilyadetoutcs fortes devinsquo
apporte par mer de diuers lieux : car mefmcmcn t Cypre n'en clt
gucrcsloing.Lcschairs,tancdc.Moutpn que de Chcurcau , de
Vcau,& Bœuf,y font moult fauoureufes.Ils ont grande quantité
d cfpeces de Cheures,qu on nomme Gazellcs^cfqucllesancien- v •
ncment les Grecs nommoyentOrigcs,quilz tuent alaharqu*.
bufe par les campagnes : car elles y vont en trouppes.Lon y trou^
lïeauuudespoulles^desœufs.Àlexandrieeftfituecenlieuabo-
danten poiflbn , ounousauons recogneu des Brèmes de mer,
Bars MaWes,Dentauls, Mulets, Rayes, Anges > Chiens, Gour-
nau*. Mais' encor y en a plufieurs autres qui leur font apportez
duNiUtantfraïsquefalcz. Hz on tauffi^es Grenades, Moute, _
Limons,Oranges>Pônçiçres> Figues de Figuier, * Figues de M- ^fc
comorcs, & Carrubes , & plufieurs autres fortes de rrmets , que Mmf^
nous n'auons point. Hz ont auffi de toutes fortes de fcguraesyiçl- ami^
quclzlercnoracftgrand. Auffi font Hz opulcns en coûtes fortes
de b!edsscomme Ri^Orge^ar^utremec dit Epeautrc.La plan-
te appelleedes Grecs Doîicos,y portela fleur îaune.AuCi outils
grandequantitédeiafemécedVneefpecedepois,queies Grecs *££^
n\>ramêt£ai*ri,lesVcniricns-M^
&lcs François des Certes. Quiconque voudra fçauoir quelle ^^
chofeabondeleplusenvne ville, aille fepourmener par les pla-
ces aux iours des marchez ou Ion vend le gibier , le poiflon , her-
bagcsjefruiaagc , & autres hardes : & il comprendra en peu de
tcmpsleschofesdcquoy les habitansontleplusrchofcqui nous ^
a efté manifefte en Alexandrie. Les Egyptiens ne font guère de ^^-^
repas quiîz n'ayent vne manière de racine , nommée de la Coio- Cûlou^
xalffc.Vilz font cuireaueclachair. Ellceft de grand rcuenu a
toute Egypte : auffieft-cclachofeqdfony vend lemieux parles
.marchez des villes & villages. Or puis que fommes en^ propos
d5 Alexandrie,fuy uan t noftre obferuation,auons cy retire la ngu-
re d'icclle, pour la reprefenter au naturel. . "
CC nj
TE.RÏtE F.ERJ4.E D'AF&IÇVE*
OfcSERVÏES >AR P. TSEXOÏ*. *<>7
VeUbefte anciennement nommée Hyma^ maintenant Ciuette.
Chapitre x x» *•
E confuîquicftoitlorsen Alexandrie pour îc fait des
Fk>rcntki$,auoit vne Ciuette fi priucc , que fe iouant
aucc les homes elle leur mordoit le nez , les aureilles,
fe^râC» & les tares., fans faire aucun mal :car ils lauoyent
nourrie "dés fa naiflânee du laid des mammelles de femme. C eâ
chofcrareàvoirqu'vnebeftcfi farouche &: maîaifec aappnuoi-
fc^deurcnnefipriuee. Les anciens ont bien cogneu la Ciuette: ^ r
&: prouucronsbïen par leur authorité^uclle doit cftrcnommee ^M
Hy*na,combien qu'ils n'auoyent iamais apperceu qu elle rendiit raiereho^
vn exercment de fi grand odeur : toutesfois l'on trouuc bie qu il nfrrmtc
y ait cuvnccfpece de Panthère odoriférante. Lcsautheursont
parie de Hy çna comme de befte fauuagc du pays d* Afrique : qui
nousfakpenfcTquelaCiucttcencctemps là neêoit point gar-
dée en^gc. Mais nous Fayansapprinoifce, nous eft^^^
reuenuqu elle neftoit anciennement. Auffilenom dont nous
rappellons,cfî emprunte àcs autheurs Arabes: car nous auosde- Sej0UaM%
iaûTé fon ancien.Ellc eftaappe comme vn Bedouaut ou Taiffon, râfo».
mais de plus grande corpulence: &: fçachant^eile a vn coduid,
outre celuy de fa nature, dont on tire la Ciuette, pîufieurs liions
L-hiftoire dcHya^pcnfoycnt queHyxnafuftvn Blcreau Bc- ^^
douau^ouTaiCTo^quiefttoutvn. Mais les anciens ^Ariftotc^^
ontnommélcBiercau/Throcus, EUeporte iescrin^noirsdcaus
lecol,&lelongderefpincdudos , lefquels eiledreffe quand eft
eourrouflee, tout ainfi que fait vn pourceau les ûens. CeftdeJa
quelepoifTon nommé Glanisa auffi cfié nommé» Hyaena. Son Gkms.
mufeaueft plus poindu que celuy <frmchat,& a fcmblablement
delabarbc. Elle a les yeux relu y fans & rouges, ^ a deux uches
noires fur les yeux. §es aureilles font rodcs,approchatcs de celle
d'vn Bîereau.Ellealecorpsmouchccé/çauoircftqucicchapeft
de blanchaftre/urquoy font affifes des taches noires:comc aufli
fes ïambes & pieds font noirs , comme ceux d'vn Ichncumon.Sa idmtumèik
queueeftlonguc,noirepar défrayant quelques taches blachcs
pardefTous. Son paRuragceft chair : &eft de cor fage agile. Voi-
la la 4cfcripti on de la Ciuctte.Maintcnant qu'on la confère aucc
cclledeHyama:& parla on voirra que ce que nous nommons
maiatenanxCittÇ"e,eftreHya:nadcsanciens. ...
"*' - CC iiij *
JVoS SECOND LIVRE DES SINGVLÀ.
Z,çportmB dcU Çwetteq& on mmmok anciennement IJytm*
B*Uie Co*
tonne dePç:
l&fcottrs de Suerfés chofes £\AÏexAn£ne: & des ohelifques , & (nos
eolojjès des Égyptiens,. Chapitre xxi»
E iour d'après alîafmes voir la haute Colonne de
Pompée , hors de la ville , def&is vn petit promon-
toire^ d'emy quart de lieue d'Alexandrie, La Co-
lonne cil d'admirable efpoifïeur, 8c dedefmefuree
hauteur , plus grofTe que nulle autre qu'ayons ia-
mais veue.Les Colonnes d'Àgrippaau Panthéon de Rome Rap-
prochent en rien de Ton efpoiueur & grofTcur.. Toute la mâflè tac
de la CoIonc,du chapireau^que de la forme cubique, efl de pier-
ï}erreT7ke* re Thebaique, de la mefme pierre dont furent faits tous les Obc~
k^ue. lifqacs qui ont efïé reEirezd'Egypte.L'o did que Cefar la feit éri-
ger làpour la vi&oirequil obtint contre Pompée. Ccfte Colon-
■- *nceft iî grofTe, qu'il ferbit maintenant impoffiblc de trouuervn
ouurierqui par engins îapeuft tranfportcraiîleurs. Quand on efl:
deffiis ce promontoire, Ton voit bien loing en la mer, corne aurïL
Uc Mareo^cnzcnc^cvmc' tournant le vifage vers le midy,-on voit le lac
^ Mareotis large &: fpacieux , cnuironné de forças de palmiers.,
D'AJexandriç au fufdidlacn ya pas demie lieue. Les campagnes-
font.
.OBSERVEES TAR F.BELQK^ %09'
font pourlaplusgrandepartiedefablon mouuanc, qui feroycnc
ftcrilesn'eftoicqa'itvcroiftd'ynchcrbe nommée Harmala , &C ^^^
aufli des Câpriers fans clpincs, qui portent celle manière de grot-
Tes câpres qui nous font apportées da ce pays la. Car les petites ckpUrsn*»
câpres viennent es Câpriers efpineux , qui perdent leurs focihcs rW
en hyuer. Mais les Câpriers fans efpines. d'Egypte & ceux qui Twn,~
font Arborcfcens en Arabie , ne perdent point leurs fueihes.Les tf*^
Tamarifques ay ment grandement à croiftre par les fabionsen ce
territoire,* toutesfois ailleurs ils ^cherchent que les Iieuxhu-
mides. Lafufdite herbe dcHànnalacft moule femolaDieaMo-
lv. Ceft vnc efpece de rue fauuage que les Arabes , Egyptiens &c
Turcs ont àprefent en diuers vfages. Us ont couftume de sea-
parfumer tous les matins, & fe perfuadent par cela qu ils dechai-
fent tous mauuaisefprits^:claadûnnérigrandv%eatelleher.
bc , & à fafemenec qu'il n y a fi petit mercier qu'il n'en tienne en
fa boutique, conrnie il c eftoit quelque precieufe drogue. Àpo>- ^^j^.
lôdorus autheur ancien a attribué au Souchet ce qu'auons dit de y^
Harmala.difantquelcs Barbares ne forcent iamais de leur mai- ^k
fon , qu'ils ne foyent premièrement perfumez de Souchet. Cela
.nousiquelquefoisfaitpenferquervrageeneftancienEntreles
■ Ghofcsfinffiilicrcsîauenousauonsveuen Alcxandne.lonc deux
/Vienilles, aucrcmcc appeilees Obelrfques,qui font près le parais
d'Alexandrie. L vnc eildroidc, & entière : l'autre eft couchée Se ohd^
rompue. CcUequieftdroiaeeftbcancoup-plusgrandcquelau- £^UXM*- •
trequiefteouchee. Elle pourroit eftre comparée en groflfcur a dru.
vnequieilàfainaPierreàRome. Quand P«lûnsd'vnObeii£-
que/nous parions d'vne des choies de ce monde qui eft de a pius ^ **"
Grande admiration,* dont l'on eft en doute, pourquoy elles ont 'A
efté taillées fi eftranges. Si l'on n'en voyoitqne trois ou quatre,
fon auroicraiion de dire qu ils ont efte taillez par la cunoAite de
quelque Roy : mais voyons qu'il y en a pluûeurs , dont les vus
font moult grands, comme font ceux qu'on voit derrière laMi-
iierûe à Rome, &c en vne place près le Panthéon ,:,& la-haut a Ara-
• cœli & que les autres font moult grands , comme ceux que 1 on,
voit au Populo, ■& au palais du. Pape : -{cachant au tu qu'ils font
•entaillez de caraderes Egyptiens ou lettres Hiéroglyphiques^
pouuons conclure qu'ils ont efté anciennement taillez pour tuei-
ue furies fcDukhrc&otteftoyentconfiz ksxoxpscn leurs fcpul-
HO SE-COND LIVRE DES Srl-iFGWL**
turcs au pays d'Egypte , & non pas pour dédier atfcx tcmpIes.Pïuv
:J***?esl?tem fieurs voyans vne pierre toute d'vne pièce raafliue,fi grandc,fi le-
r<g%ài* gtre, fîgrofTe,& fi bien polie,ne peuuent^roire qu'elle ne foit fai-
ffarg.jt te de mixtions car tous Gbelifqucs font entaillez de pierre The-
hûmie. baiqùc, qui eft toute grenee de diuers grams^yans deux ou trois
.ifiremium. couleurs)commelapoiclrinedV«;Eftournfeau. Qui eftlaraifon
poiirquoy les Grecs la nommèrent iadis Pfaronium : car Pfaxos
jcnGreceftàdire vn Eftourneau. Mais ils penfent mal : carfagri-
eelure ou granelurc luy procède de la nature du rochcr9qui eft de
telle couleur. Ce qui rend les Gbelifqucs fi admirables, eft dcles
voirfaits toute dVneièole pierre,come qui imagineroit vne tou-
relle quarree faite toute d'vne feule piece.Tousîes Obelifqucs q
on voit maintenant à Rome,cftoycntja entaillez en Egypte?auac
pocher des que Romulus euftmislepieden Rome. Le rocher dont ils ont
obeUfaues. eft£ pnns , eft tellement continué fans y auok aucunes veines,
<juc Ton y po^rroit trotruer la pierre fortable à tailler vne tour
-d vne pièce , plus grofife & pluslongue que ne font les tours no-
toc Dame de Paris, silcftQitpou%lequ on la peu ft car
Ton voirra vac moatagne de deux lieues de4ong toute de pierre
roaffiue fans aucune veine., de laquelle caillant lesColofTes mi
Obelifques4e tcllelanguetrr & groCeur qu'on voudraj'on trou-
vera la matière. Il y a trois petites montagnes dedans le circuit
des murs d' Alexandiie,qui font nommées les montagnes des ba-
rmnes. ncufcs ^ ^omme cc <m'on aomme à Paris les voiries. Les beaux
Jtmnta^ conduidsdJeau,ksgra€3descifternes, &lespuisoufe vient ren~
%mdrk drcleNil/ontvrayementchofesdignesdcvoirjlefquelsôntefté
faits de fi bonne efto£e,ôdi fumptueux,qu'ilsfontencor en leur
.;•" entier: anflieftoyent ils ncceflàires. Les habitans d'Alexandrie
les rcmpliiTent^eau vnefeukfois Tan , quand le Nil a inondé E-
■gypte,dont il leur conuientèoirc tout le long de l'année. Elle en-
4:re par vn grand canal j qui remplift premieremetîes cifternes de
la viiiCjOu elle fê purifie,& rend claire. Toute la ville d'Alexâdrie
eft baftie deflus belles cifternes & voûtes. Elle fut anciennement
baftic de forte ma-ffonnerie de pierre & de tuillejd'autant qu'il ne
$<& de P^^toiâ que bien peu de bois en Egypte , finon de Palmiers , qui y
tmœ.
fontfcequents : mais ils ne valent rien à en faire ouurage de char-
%f£Z' penterie. Les pay fans d'Egypte vont par les campagnes cherchas .
^ les Palmiers auortez^ufqueis ils coupent la fommité,&; là trou-
OBSERVEES PAR fr B1IOS. «X
Qcnt vne blanche mouelle , qu'ils portent vendre en Alexandrie,
■faquelteifc mangent crue: & alegouft d'Artichaut. Ceftceque
les anciens ont nommé Mouelle ou cer-ueau de la Palme , & les ^^ ^
" Grecs Enccphalon. Mais il faut entendre qui! y adcpîufieuxs P4^
fortes de Palmes: car mcfmeraent en auons obferuc vne autre cmkum^
efpece efpineufe en Crcte^iffèrentcà celle queles, mariniers ap- rdme.
portent d;£fpagnc par mer,nommcc Ccphaioni:qui font ces pe- £****>*
titesPalmettcs que les greffiers fcefpiciers de Rouen & Paris ve- ^"^
dent toutes frefehes en leurs boutiques,quinc cooÛcnwjuequa-
trc.ou cinqfols la pièce.
nterfonsiE^tei&lecombrtdvnMtYequieftMjîimm
Vejj>AjtueclePk~ctUn<non. Ch*$.~ xxtu
, Eshabitansd^lexadricnotîrriflentvnebefteno-'
r mee Ichncumo»iqoi eft particulieremenwroBuee ********
, ervEgyptc.On les peut appriuoifer es maifonstouc
UinfîcoHimevnCna^ott.vnGBien. Le vulgaire*-
o^^^vo *»*cJ ceffé de plus le nommer par fon nom ancien -.car ils
le nommenren leur langage Rat de Pharaon Or auons nous yea
aucles paufans en apportoyent des petits vendre au marche d A- ^ ii vh*
lexandrie ou ils font bien recueillis pour nourrir es maifons , a r*on.
caufe qu'ils chaflendes Rats , tout ainfi-quc fait k Belette : &
auffiquMsfontfriandsdesferpents5.dont-ils fcpaiflcnwndifac.
ment Ccft vn petit animal oui fe tient le plus nettement^uil eft
ooffiblc Ccux-qui l'ont fait peindre àiifcretion fans fcuiow veu% ,
ne lont peu bien exprimer , comme on peut voir parceprefenc
nortraid : caries peintures quienonceûcéfakes a plaitancrccie*
nen t rien du naturel^ais faut entendre que bqueue foit adiou-
Heeau portraid comme l'on peut^coir^yaptes.-.
SECOND IÏVR.E DES SINGVI.A-.
■Le parmi 51 defàçknmmm^qudes Egyptiens nommmt
Rat de Pharaon.
Le premier que veifmcs en Alexandrie , fut es ruines du cha»
ichneuman ftcaU}icquei auoitprins vne Poulie qu'il mangeoic. II eft caute-
leux en efpiant fa pafture : car il seletie far les pieds de drriçre : Se
Taftitrao-ede *pand il a aduifé fa. proye,il va fe traînant contre terre, & fe darde
ïichnemio. impetueufement furcc qu'il veut cftrangler,fe paiflant indirïerë-
ment de toutes viandes viues, comme d'Efcharbots , Lézards,
Chameieons , &c généralement de toutes efpeces de Serpens , de
Grcnouilles,Rats, Se Souris , Se autres telles choies. Il eft friane
êes oifeaox,&: principalement des Poulies èe poullets : Se quand
il eft courrourTé,!! fe herifïbnne faifànt drefîèr {on poil, qui eft de
-deux couleurs,cJeft à fçàuoir blachaftre ou iaune par interualles,
Se gris par l'autre, rude &dur,commevn dur poil de Loup. Il eft
-de corpulence plus longu-e Se plus trappe que n eft vn Chat , &:
alemufèaunoir&poiotu'comnïe.celuy d?vn Furet, Se fans bar-
be. Haies aureiîîes courtes Se rondes, Se eft découle ur grifà-
iî:reatirant tur ieiannerpaiîlé,toatainfi que ecîuy des Guenons
, nommées Cercopkheci. Ses iambes font noires,&: a cinq doigts
^s pieds de derrière ., dont l'ergot de laparxie de dedans eft court.
OBSERVEES PAR V- >ï'Ï.OÏT. *?f
Sa queue cft longue ^cftgroflc en iceluy endroit qui touche
.aurabla&alalaDgotc&lcs dents jleCha^lavncparcicuhcrc
marque qu'on ne trouuc point es autres animaux à quatre pieds,
^quiafàitpenfer aux authçurs que les maries portaient aufli^^^^
bien que les femellcsre'efî qu'il a vn moukgrand pertuis tout en- dm& de ^
tourne de poil , hors le c5duid de rexcrcmcnr,reflèmblant quafi Fidmem».
au membre honteux des femelles.-lcquel cor^uid il ouurc quad
il a o-rand chaud. Mais le condûid de l'excrément ncîaifle pour-
tant eftrc fcrmé,en forte qu'il a vne catiité leans.II porte les gem-
toires comme vn Chat, & craînd grandement le vent. Combien
" que celle befte foit pente,toutcsfois elle eft û dextre & agile, que
elle ne craint à fe hazarder contre vn-grandChien:&: ^mefmcmec
û elle trouue vn Chat , elle 1 cftranglc en trois coups de dents. Et
source quelle aie mufeau ilpoindu , auffia peinede mordre en
vnegroflema{re,&nejçauroitmordrclamaind'vnhommeayat
le poing clos. Les authçurs en ont didpluûeurs autres choies, &
principalement de la guerre qu'il a contre l'Afpic, & au ffi qu'il
<leftrui& les œufs du Crocodile , &quil eftmoukvigiiant,luy
^ttribuans beaucoup de vertus fmguiieres,que n'auons mis en ce ^ -
lieupoureuiterprolixité^penransratisfaircd'enbailleriadetcn-
ption.Mais pour-ce qu'il v a encore vne autrepetite befte , qui cîï-icUeumo»
cfpece de mouche gucfpe,nommee aufli Ichneumon Vefpa , qui ytf*. .
ineirxguerreTiiortelleaue^lePhalangion,&pourcequauom
veulcurcombat.housafcmblcbonladcfcrirecncelicu : ^cït f
vneefpece d'infecte fans fang , ayant lecorfagedvneauette ou auecUs r
<ruefpe;quieâmoukfembkbleàvnbiengrandfocmyaîlk ,-dc^ -
.moindre-corpulence que la ,gucipe,& fait aufli fon pertuis en xc^JebaaimM%
ie comme le Phalangion. Et toutesfois & quantes quelle trou-
uc le Phalangion3eîle en cft fuperieure : toutesfois laflaillanren
fon creux 5 s'en retourne fouuent fans rien faire. Aduint ence co-
bat que l'Ichneumon Vcfpa trouuant le Phalangion à lefcart
hors de ion pertuis , le trainoitaprés foy par force., ainficomme
Icformy faitvncfpidcblé:&lcconduifoitpar tout ou il vouloir,
combien que ce ne fuft fans grande peine. Car le Phalangion fe
retenant auec les-crochecs de fes pieds 9 faifoit grand' refiftence:
piais Mchncumon le piquoit.cn diuers endroids deion corps
aucevn aiguillon , qu'il tkcàk manière desAucttcs, &eft*nc
laffédelera^
2*4- S-ECOND LIVRE DES SINGTLA-
balefte:& rcucnant chercher Ton Phaîangion ^ne le troauant en
l'endroid ou il fauoit laiffé, fuy uoic Ces pas à la trace , comme s'il
îeseuft fentisà-1 odeiir,comme les Chiens après le Lieure. Lors il
lerepiquoit plus de cinquante fois: Etfe remettant aie trainerje
conduira fa fàntaile;,& là- acheu oit de le tuer. Yoyansksmar-
reaux&Au* chandife qui font en refemeés magafîns d'Alexandrie , drogue-
tntebes,. ries,&. autres fîngularitez , nous auons trou né des peaux d'Au-
truches,auec leurs plumes en moult grand* quantité. Car quand
les Ethiopiens les ont tuées , ilz les efcorchentJDc la chair ilz en
viuent, mais troquent les peaux àtefchange auec toutes les plu-
mes pour d'autres hardes : lefquclles puis les marchands appor-
tent vendre en A4exâ^ric,& de là font diftribuees en diue^
P4»4ckesdes de Turquie: caries Turcs ont auifi-bien vfage d'en faire pana-
rf^-.. cbes, &£ les porter à lear turbant , eo-mme en France es armets,
nîx>rions, & acouâremens dé teftcLes iardins d'Alexandrie -, &
de toute Egyptc^hors mis au riuage du Nil , font malaifèz : car il
faut incefTamment tirer 1 eau par engins auec les bœufs pour as?-
roufer la terre. Leur Iofuim eft différent au noftre:car celuy làa
itfutmmt* fa fteuriaune 5 moult odpriferente.. Les rofes auif) y ont la fleur
*£.-. iaunÇjmais fans odeur. ^
"Des mœurs des Turcs alexandrins 3 & des deferts de fàmél ^Macarh .
' & de -plu fieurs autres çhofes d'Alexandrie.. Chapitre, xxiii.
s.Mdcarlo. É^F§$ÈtIn<l ÏOUrnees au dclar d'Alexandrie tirant -vers Afri-
|^^^^âr que3il y a des deferts qu o nomme les deferts dcùi^Gt
|||||p§f ¥?cHio>c3ui ^té^confinsdfffainaAi^i^ouha--
s*Anthôw. ^g^ff^,, bieen t des Cal oieres Ara bes y qu i <:on a iennent en la
religion auec les Grecs:& y a plufeurs monaâéres méfiez d*Ara-
besauccles Grecs. Eftanscn Alexandrie tronuafmes quelques
Gentiîs-bomxïîes Vénitiens qui en eftôyent n agueres retournez
Tammndei.àom les ws par cariofité auoyent rapporté des rameaux &flçiïrs
pierres /£jJ*deTha marin des , qui croisent là. Q-n y trouueaufïi fi-grandc
ëh qualité de pierres d'Aigle^-qu'H en y* a charger nauires: defquek
ofites., }^ j^ nwchands apportoyent anciennement decelicu là à Ra-
p^raw^1116' eàrKinccfcritqucla pierre Aquilinefu-rnommecCiiîîtes
>^il 'cftoit rrouuee naiffan te en Egypte prés la ville de Copto.Lcs an* '
cieasnous -ont. lai£evnfccret par eferit poufefprouaervnla?^
OBSERVEES fA'H F. BEL ON. - _ ' «fr.
Ton auec îa pierre d'Aigle , qui dure encor pour le iourd'huy en-
tre les Grccs,& duquel Diofcoridca fait fpeciale mention : mais
ïïo.c le déclareras totalement. Quand les Grecs veulent cognoi-
ftre le larron , il faut quilz affembient cous ceux qui font foufpe- -
çonnez du cas,& à ce faire s'accordent de s'y trouver. Il y a gran-
des ceremonies:car les Caloier es font cela en difant pluOeurs pa-
rollcs.-Faifens vneipafte fans leuain,ilzforment des petis pains de
la groffeur d'vn<Euf:&: faut que chacun de l'afTemblee mange fes
trois pains,chacun en vnmorceau,& les auallc fans boire. Nous
fommestrouuezàcnvoir faire l'expérience : &ceîuy qui auoit
commis le larrecin, ne peut onc aualler fon troi£efme$>etit.pain:
' & Ce cuidant efforcer , seftrangla quafi : ains ne le pouuant aual-
îer,îeTecracha. Les religieux de Grèce gardent cela comme pour
vn fecrer:& ne le veulent dircNous auôs entendu que c'eft auec
îa pierre de l'Aigle , de laquelle mettant vn peu de pondre parmy ^^
k pafte en forment leurs pains.Le licu.quc Cxùtt nommoitPha^
ms,qui lors eftok ifle,efl mamtenat en terre ferme, & y a vn cha-
"' fteau mal aifé , & fort incommode : car il y faut porter l'eau cha^-
que iour par Chameaux,prinfe des cifternes d'Alexandrie. Tous
lesba^in^ensd'Alexadriefontcouuertsen terraffe, comme auf-
fifbnt communernet tousceux de tutquie^'Ar^bie, &éc Gre-
ce,ou les habitans fe mettétknuiapour dormir aufrais^n tout
temps,tant en hyucr,commc en cfté. Les Egypties & Arabes fur £^tj-MS
toutes autres nations dorment en tout temps au deicouuert fans ^
aucun lia : & moyennant qu'iïzaycnt feulement qaelquepcnt
manteau ou counerturepar demis eux, iiznc fc fcrucient:&: n ont
aucunv%e delids, fçachansqueîa plume kutfcroitfortdan-
gereufe. Ce n'eft donc pas de mcrueille aies gens de ce pays la,
ont peu obferucr fi-exaâemcnt le cours des cftoillcs : car îîz les
voyent-à toutes heures delà niu&,tant quand elles fe îeuent,que
quand elles fe couchent : ioind que le temps n'y eft point cou-
uert. Le naturel des Alexandrins eft de parler Arabe, ou More: trieriez
niais les Turcscûans meaezauec eux, vfent dcîigage beaucoup ^Uxadrhts
différente auffi pource qui! y a pluûeurs Iuifs3Italiés,& Grecs^
Ion y parlediuers langages. Autresfoisontfceu parler Grec: car
quand Alexandre gaigna l'Egypte &baftit Alexandrie , il eft a
pref uppofer qu'en y biffant des colonies de fon pays , îa langue
Greque y cftoit meflee : & de fait il y ades Calo^eres , Iacobitcs,
^ DD iiij
23& SEC ONl> LITRE BES SÏNGTIA.
& Grccsjqut-y.onc-vn logis pour Patriar chat aucc leur Egîifëf m
rendiroid ou anciennement eftoit le corps de fain&Ma-rc, auantr
que les Vénitiens rèuffent enlcué pour remportera Venife. Les-
Latins & les Iuifs aufïi y ont fëmblablcmenc leur Eglife à part...
Entre les fingukrkez que kconful des Florentins nousmoftra:
sjfik voyant que cherchions les drogueries , nous feit goufter d'vne
racine que les Arabes, nomment Bifch : laquelle caufa fi grande
chaleur en la bouche, qui nous dura deux iours, qu'il nousfem-
bloity auoir du feu. Plufieurs modernes ontprefque meurdry les-
auctçurs Arabes pour eefte.ïacinc:& leur ont tant : donné àcàcf-
rnenties, Se fait d'iniure à tort, qu'il feroit honte de le dire:& ton-
tesfois eux-mefmes ne kcogneurent iamais. Elle eft bien petite,
mpettus. comme vn petit naueau.Les autres Font nommée Napellus , qui
eft.fi commune aux drogueurs Turcs , qu'il n'y a celuy qui tfer*
vende.
ICayage de la ville d'Alexandrie au grand Caire»
Chapitre, xxiur.
(Près auoir demeure quelques iotirs en Alexandrie^
) feifmes noz appreffo pour aller au Gaire.. Lon y peut
{.aller par deuxchemins3i5vn eft plus long5par le Nil:8£
H'autre plus court, par terre. Maispourautantquek
Nil auoit inondé l'Egypte , nous alkfmes à Rofette pour nous
ambarquer furie Nil. Quand nous fufmesàdemic lieue hors la
ville à' Alcxandrie,entra(mesen vnefpacieufe campagne fablon*
neufe,en laquelle croiîlènt diuerfes herbes , entre lefqu elles y ea
^Ambillk a vne çpC f cs Grecs nommer Anthillis, & les Arabes Kalirkqueî-
*$p le ceux du pays font defeicher pour brufler,d autanf qu'ilz n'ont.
quebien peu debois:&encuifàntk chaux aueccefteherbe,onc
double gain , 1-vn cà quïlz- portent vendre la chaux en Alexan-
• driej'aurre eit qu'ilz gardent foigncufèment les cendres de i'heiv
beque nousnommons de kfbuldc^quilz vendentaux Venitiés.
OnJmde Elles s cndurciffcnt comme pierres?& en font grandamas , tellc-
fyuldn. ment qu'ilz en peuuent charger les naukes des marchands , qui
les viennent acheter pour porter à Venifc,pour en faire les verres
cUiÏÏùuxàe ^ Criftailin. Ceux qui font les verres à Maran de Venifejla mef-
Pm&s. lent aiiec des cailloux qulkfont apporter dcPauie par le Teiîn:
kfquels.^
OBSERVEES PAR P. BïlON. i*7
lefquclz proportionnez auec la cendre , font la pafte du plus êa
verre de Criftallin. Mais les François ayans n'a pas long temps. ^^^
commencé à faire les verres Criftallins ,ont fait feruir lefablon ^
d'Eftempesaulieu des cailloux du Teûn : que les ouuricrs ont
trouué meilleur que ledi& caillou de Pauie. Mais ils n'ont enco-
rcs feeu inuenter chofe qui puifle {èruir au lieu de la fufdi&e cen-
dre, ains faut qu'ils aillent en acheter en Prouence. Cefte chofe
nous fait penfer que ce foit la mefme qu'ils apportet de Syrie par
lamer.Vray eft qu'en Frâçois elle cfl: nommée delà Souîde , pre- ^^
nant fon appellation dvne autre herbe nommée Soldanelle , la- So\^^^
quelle bruflee fait cendre de mefme vertu,& de laquelle Ion peut
vfêr en défaut de la Surienne.
Des chofes fingulicrestroumes entreh viiïe^uélexandrte^ & U
ville de àofitte. Chapitre xx v.
i Oustrouuionsîespaftcursfur les chemins par les
| champs à deux lieues d,Àlcxadric>pai«*ànslcsÇhc-
; uiesàtrouppeaux^quiontles aureiîles pendantes-
> fi longues , qu'en outre ce qu'elles leur trainent par
aï*nï&®&x& terrc > d'auantage les ont recrochecs plus de trois,
doives contre mont. Leurs pafteurs ncvoulans perdre temps > en>
la campagne ventent le fable,cherchans des monnoyes antiques^
Car il aduient quelquefois qu'ilz trouuent des mcdalîcs & mon-
noyés d'or fin & d'argent. Le pays que nous auions au cofté dex- ^
trc,eftoit fpacieufes campagnes fablonncufes>ou il ne croiflbit fi- ^ fô^'
non quelques Capriers,&: de la fafdi&e herbe de Kali,& de Har- ™
mala. Le pays qui nous eftoit a main feneftre^ftoit quelque peu ^
plus cleué,ou nous veoy ons des grands villages efpandus ça & là armait,-
entre les forefts de Palmiers .Quand nous eufmes cheminéenui-
ron trois lieues ,, nous trouuaimes de l'eau douce bonne à boire*
qui fembloit vne fontaine^mais ce n'eftoit finon vne cruche rem*
plie de l'eau du Nii^qu on auoit apporté là fur Chameaux dedas*
des oudres , dont quelque Turc entretenoit le rempliflàge pour
l'amour de Dieu:Car ikeftiment grande aumofne , & mérite de
mettre de l'eau furies grands chemins pour abbrcuuer les pa£
fans.Car tant s'en faut qu on y puifie recouurer du vin , que inef-
mement es villes ceft beaucoup de trouuer de l'eau ftcfchc-Les
EE.
2Z& ' SE C OND ri VI E DES SING V X A.
. Palmiers en ecftendroiâ:,&quafî par toute Egypte,font moult
pdL d r kauts:defquclz y cn a qu* mr vn fcùî tronc portent vingt gros ar-
">» iro^ ^res %arez *cs vns des au tres,ayans tous vnemefme origine àcC-
fus le pied d'vne Touche, Lanuid nousfurprinten chemin :par-
quoy fufmes long temps à cheminer ai obfcur,fuyuans le riiiâgc
delà mer Méditerranée, quenous autons à main gauche ; & ne
Bousarreftafmes iufquesàtantque fuifionsvenusàl'eau douce
d Vn àcs premiers ruiàeaux du Nil : lequel nous pafTafmes à gué
tou t ioignant le bord de la mer , ou aous trou uafmes feulement
_ vne loge de pefcheurs , en laquelle il n'y auoit que du fel pour fa-
mùtargm 1er les po«Tonsv&: aùffi les Botargues quo fait des œufs des £oi£.
Mulets. fbns nommez Mulets, que les ancies appelloyent Cephaîi.Nous
CefiS. capafmes là , &: paflàfmcs la nuid au ferain aucc noz Chameaux
& montures. GepremierruifTeau du canal du Nil>neft celuy qui
■CâMftcw» £uc nomm£ Canopicum> Nili oftium : & n auons/ceu quel nom
* il auoit anciennement. Il n elt pas moult parfond : car nous 1 a-
uons^afleà gué,&: mefmement du temps que le Nil auoit inon-
dé l'Egypte. Nous partifmes le iourenfuyuant dudit ruiffeau,
cbeminans par campagnes fàblonneufes,efquellcs ne croifïbyéc
Tdmmffies nulz arbres fînon des Xamarifques, qui viennent en grande hau-
cemv&qjortent des Galles ., que les Arabes nomment de no pro-
-chrmafd. pre moderne Chermafel. Lefquclîes le temps, pafTé eftoyent gra-
dément en vfàge de médecine, & en cours de marchandifcNous
fùyuions la mer,& trouuions des petis M^rthes noirs, qui ne s e£
leuencpas fort haut de terre : car le vent marin les tourmente in-
"cefïamment. Les Myrthcs aiment à naiftre le long de la mer, qui
eu caufe qu'ils ont efté dédiez à Venus, fuy uant la fable des Poë-
Mirtlesde* tes,qui difent qu'elle aprinsianaulance cn la mer. Apres auoir
l^rem&. longtemps fuy ui la mer,nous entrafmes en vne campagne de fa-
ble mouuant, ounousveoyons des petites montagnes de fable
menu que le vent auoit aiTemblé. Cefie campagne eftoit fterile,
tellement qu'en quelque forte que ce fuft, il n'y croiffoit vne feu-
%ofette. le herbe. Nous arri uafmes ce ïbir à la ville nommée Rofctte, que
%Afcht. icS Mores appellet Rafchit : qui eft fituee fur le riuageprcs d'vne
des grandes bouches du Nil. Les habitans de cefte ville font di-
3^" hgens à bien cultiuer les iardinages , cfquelz c roi (lent àcs Mufès
auna je de l'herbe de Papyrus,des Canes de fucrc,de Colocaflès, àcs Sy-
faa^ coraores. Les Sycomores font arbres de verdeur Ci exquife , que -
-. OÇSEÏtVEES PAR ?. BELON, **9
■fznscontrcâiâ. ilz vainquent tous autres en verdure. Hz y culti- CoUujfes.
«ent auffi vne forte de racine que les Italiens nomment Dolce- ^Twr^-
guiniXe^gâmsîeons fetroimentfrcquensdeflus Fefpecedar- tàJnmsaU
briûeau -, qui eft n oramé Rhamnus al tera„ Lequel Caméléon fc terA
tranfmueeu plufieurscotueurs.Gommunémentileu; verd, tirât camekon.
rurlciaunc, quelque foisfur le bleu. Cela efl caufe qu'on ne le Nourriture
peu t facilement apperceuôir : car eftant affis defïùs les rameaux &* cameleo,
qui fontreueftus de verdeur pareiîlc,combicn qu'on regarde eu- Nature du,
rieufement , toutesfois Ion a peine à le trouuer. Il fç nourrit de aw on~
Moufches,Cheniiles,£fcharbots, & Sauterelles , viuant à la ma-
nière des Serpens,quimangenttoutesiortcs de petites beftes in-
fectes, lefquelles auons fouuét trouue regardas en ion eâomach^
quand en raiiions lanatomie. Aucuns ont ditquelesCamcleos
viuent feulement de vent. Qr efl il qu'vn Caméléon demeurera,
y n an en vie fànsjrien mangep, qui neft pas choie difficile; àcroi-r
re*.car nous auons veu des Serpens de diuerfes fortes viure j'efpa-
ce de dix mois ,. fans leur donner aucune choie à-manger. Vray
eft qu'il faut lent bailler queîquefois,vn peu d^eau à boire.
"Oekv^l&de RofettekUbomhe au JSrU ^nommée OJlmmCAnopicum* *ïfct^
Chapitre x.xvl.
jOfêtte efl vne belle ville, fans muraiîles.Les Vem- oÇ^-ier ^.
tiens y tiennent vn officier nemmé vn Conful , ou ^ ymit'tm^,
. bien eflautremcnt appellé'vn Bâillé ,qjii leur ièrr en toutes,
pour le trafïïc de la marchandiic.Les grands naui- "Mile» £e*
1 respeiment aborder dedans le Nil,, iufqucs à ioin-g?/"'-
dreles maifbns de la ville» Il n'y a ville au pays du Turc fur les ha-
ureSjtanx; foit elle petite, ou les Vcnitiês n'ay ear quelqu'vn pour
les admonnefter des marçhandifès,tataux ports des fleuues , que~
de la mer, ou ea terre ferme : qui euVvn grand bien pour eux , Se
dont il aduient qu'iizont nouuelles de toutes, les parts du mon-
de. Auffi fçauent ilz en quel pris font les marchandées desna- -
tions ioingtaines ,, qui efUa. caufe qu'ilzpaffenttoutes au très, ré-
publiques es chofes de traffic* Et f ilz fçauent qu'il y.ait quelque
marchandife à enleu er de qoejquc port, lors ilz expediront leurs
gens,àrln qu'ilzen puifrentauoirle^ain. Il y f ynj^tjtChafoau-
aifcftp.rcs4tt.Nil» ioi^nançKofctte^Utué du^coftéxledeuers Àte-
EE ij^ :
ZlO SECOND LIVRE DES SINGVLA,
xandrie. ïl n y a pas bonnement deux lieues depuis la bouche du
Nil iufques à Rofettc.O n y parle Arabe , comme par toute Egy-
pte. Plu fieurs Iuifsy habitent, quife fontfibicn multipliez par
tous les pays ou domine le Turc, qu'il n'y a ville ne village quilz
n'y habitent Se ayent multiplié. Auffi parlent iïz toutes langues:
chofequinousabienferui , non feulement à nous interpréter,
maisaufllànousracompterlcs chofes comme elles cftoyenten
ce pays là. Nous trouuafmes de telle manière de viures au mar-
ché de Rofette qu'en Alexandrie. Les forefts de Palmiers font
vmbre à la viile.Lcs maifons font faites tout ainfiqu elles font au
Caire. Hz ont grande commodité du bois quilz rapportent de
Conftantinople en leurs nauires: CaraliansàConftantinople,
ont toufiours leur chargea pour ne venir àvuide fe chargent de
bois pour baftir en leurs pays i. car il n'y en a point qui vaille en
« Egypte. Les animaux d'Egypte pour l'abondance du pafturage,
x- & la bonne nourriture des herbes arroufcesduNil,&iatempc-
„ , raturedu Climat, fontdcgrande ftature. Les Beuffles , Bœufs,
MoutosaE* ^, r^\ „ ir„., \iA,.mnc Kr Ph^nres v fonr mouk
mtc~
Chameaux,Cheuaux,Àfnc$,Moutons & Cheures y fonr mouk
grands. Les Moutonsy font fort gros ÔC gras , qui ont la queue
tramante iufques en terre, fort large, fcefpoifle. Davantage il
leur pend vne peau le long du coi, tout ainfi que fait le fanon aux
bœufs, qu'on appelle en Latin Palearia , & font rcueftus de laine
noiraftre.
xxvii.
CtQtÀUf.
VespefchmrsdHJSriL Chapitre
TfgSLyaplufieurs gens à Rofette, qui ne viuent que du
gtâgaing quilz font,pcfchans le poiifon du Nil :& ont
cefte chofe particulière , qu'ilz vfcnt en leurs barques
&:naffellcs des facs qui font fous la gorge des oifeaux
que Pline a nommez Onocrotaîi , qui tiennent quafi. emman-
chez au bec del'oifeauàla forme dvne raquette , dontfe fer-
uentaefgoutter leur bateau.Et quand telz becs font liez deuers
la partie de la cefte,fonc c5me vn cercle en rondeuncar quad roi-
feau eftoit en vie,ii vfoit de cefac corne dVn fécond eftomach : a
fin que quad il auoit beaucou p auallé des coquilles & moulles,&
elles fentas la chaleur feftoyetouuertcs,il y euftlcas plusgtadej-
pace^ les ayâs reuomics,mâgcaft leur chair feparecs des coqml-
O B S EHV1Ï S * À K V* lEEOlf, lit
îe$.Cefàc cft de telle nature , que l'humidité ne le peut corrom- ^^
pre ; parquoy il dureiong temps aux pefchcurs. Pour Onocrota- Bouest4^
lusnous n'entendons pas nos Butors , quiont nom en Latin Bo- p^
aesuuriy &font vn cry comme vn Bœuf: ne auffi des Pales , qui P^r4^ ,
ontlcbeclargeàFextremité: maisde ceux qiTAriftote nomme cignet.
Peîccanes. Ils nagentfur ïeau à la manière des Cignes & Gyes,&: qyes.
font gros 6c corpulens,c6mc vn grand Cygne,&, font tous blâcs,
ayans les ïambes 6c pieds larges, entre cendré 6c noir.
Voyage par caU^deRofette au Caire ; & deplttfteurs chofes qui
font fur le NiU Chapitre xxvili.
Ovs motafmes en barque defTus le Nil pour aller au
► Caire, & aucc bon vent de Trcmontancfauorable,
! qui nous donnoit en pouppe , cxpediafmcs bien toft
wwr+^nofae chemin. Le NildefcendduMidyau Septen-
trion,^ nous falloir aller contre le courant de i'eau .Quand nous
fiifmcs quelque peu auancez, &: queufmespafTé à l'autre riue,
chacun femiftàterre pour cheminer le long du Nil. Ceftoitvn
moult grand plaifîr de voir le pays fi herbu. Ceux qui fuyuent le
courant du Nil aiians au Caire,ne vont pas par le pluscourt chc-
min,a raïfon de fes deftours. La plus grande partie des beaux vil- f1!U j£s
lages d'Egypte, font baftis le long du Ni!,tant pour la cominodi-^£
té de l'eau douce qui inôde la terre, que pour arroufer les iardins.
On en voit auffi quelques autres à cofté,eflongnez du Nil : mais
ont faute d'eau , grande partie de l'année. Nous arriuafmcs à vn
village nôméAnguidie. Plus outre en trouuafmcs vn autre plus ^f™^
grand,nomme"Mahateïimie: puis allafmes à Dibi , 6c de làà vue 3^r*
petite ville,! demie iourneede Rofettc, appeilec Nantubes y qui ^
tient les deux riuagcs du Nil,comme peut eftrc Beaucaire 6c Ta- Nmtu^^
rafcon. Le Nil en ceftendroid n eft point plus large en fonça- Elmime.
nal,qu eft le Rofnc à Lion. Plus outre nous trouuafmesle villa-
ge nommé Elminie. Nous depefchafmes beaucoup de chemin
cefteiournee : cafnous auions bon vent à propos. Les iardinages
de ce lieu 6c les terres eftoyentja inondées du Nil > & enuirpnees
de forefts de Palmiers de tous çoftez. Auffi les terres y font fepa-
rees parhayes faiâes de l'arbrifTeau de Rhamnus , d itèrent à no- ^^^^^
ftre Groifelier. Auffi trouuios àc$ Tainarifqucs chargez de leurs
EE iij
Z-Z-% SECOND LITRE; DES" SINGVLA,
Grofihcr. Galles. Les champs en pluficuxs endroits eftoycnccnfemcnfe
mlh de ^iz 5PâPyrus>& Mufa,fir ésautrc&cndroicb de Colocane. Et
coliàfe.. Pource %ue cefte- Çolocai& cfUuffi: nommée Lotus , 8c Febuè
z<>^ d?Egypte,ayas veu qu'ils ne-nous auoit de rie feruy faire diligëce
Febuz d'E* àc chercher de Tes feineces,& que niefrae ceux du Caire s'en fons
£#**. mpeques, voulons inférer quelle n'en a point:auonseu occafion
d'enquérir laraifonpourquoy lesaucheurs anciens l'ont nômee
Febue d'Egypte , fçachans bien qu'elle ne produit aucunes Feb-
ues.JSfous maintenons qu'il en croiflparles ruifTeaux de Crète:
car nous y en auons trouui de fàuuage: mais les. Egyptiens la cul-
tiuent diligemment. Etala pgrfin auons trpuué lârfource de l'er-
reur.C eft,qu'Herodote tref-ancien autheur a parlé de deux for-
tes d'herbes venans au Nil , dont l'vne auoit la racine ronde qui
' eft la Coîocafîè : l'autre porte quelques chofes en vne tefte , qui
refîèmblentà noyaux d'Oliues. Les autres autheursquiiont ve-
nuz depuis luy.,.fuyxians les. enfeignesl'vn de l'autre, en difènc
ainiï que bon leur fcmble.. Car meimement quandTheophrafte
dit que faracineeflefpineufe}ilfetrouue autrement. Diofcorids
a dicquafimcfmes paroiles-que Theophrafb, defcriuantlaFeh^
ued'Egypte. Et Pline l'ayant traduict d eux , dit femblabtes cho-
Fa&kEgy* fès.Parquoy ferons bien d opiniô que pour Faba AEgyptia nous
pw*. entendions.îes vrayes Febues à manger , nées en Egypte. Galiea
mefrnes nous fembje auoir entendu des Febues communes Kaur
îiure des aliments >qu an dilparîe^des Febues d'Egypte. Et pour
efclaircir ce que Pline dit que les Egyptiens fontdiuerfes fortes
de vaiflèauxauecfesfu cilles, faut entendre qu elles font.larges,
&parcelailstrouûrènt& plient comme vncornet,en forte qu'ils
mfeduxde peuuent puyfer de l'eau du Nil,& la boire : car après qu'ils en ont.
Mies de bcu,i!slesiettent. A la fin nous arriuafmes à vn grand village no-
JB°mmial m^ ?£~^~^* ^e Pavs ^%yPtc Ii0US apparoiiToit tout plongé ea
J'eau , excepté qu'il y a des digtics en aucuns endroi&s 5 efleuecs
pour aller dvn village à J'autre. Les habitans pour obuier à l'ino-
datian du Nil , font contraints faire les maiibns des villages es
lieuxpluscmincnts, defqoelslon en voit grande quantité; car
lc„pays eft piat:&; lesmaifons eftans baftics de graffe terre du lieu,
, v ayans la couuertureenappoin&ifïànt en façon d'vne rufche à
faMg^ miel, apparoilTenjude bien jojng. Ils en couurent aufli en terrait
-'- fcs3en façon de plate forme , $ui eft vne modk çpmn^une àtoiuç
0"B SERVIES Ï1X :î. BELoST. Zl$~
'Grèce & Turquie. Ils ont fi grande difeommodité de bois &de .
pierre,qiTC leurs maifbns ne font que petites logettes: Car il n'y a
non plusd'e^>ace leans , qu'en vn petit tect à loger ïçs oyes. La
raifon eft qu'ils dormen ^bornent, & mangent ordinairemcntdee
horsaudefcouuert defTous les arbres, ou bien poureuiterîa ver- .
mine , ou pour chercher la frefeheur : car il n'y fait point de
pluyes l'hyiier. Et l'Efté ils ne cherchent point la freicheur en
leurs loges,ains defTous les Palmiers^ Les Tamarifqoes croifTent
en Egypte indirferemmét,tantcn lieuxhnmides , quenpays fec,
tellemét qu'on en voit des petites foreuses lieux aridcs,toiït ainfî
que fur les riuages humides. Lefquels TaTnarifques font fichar»-
gez de l'excrefeence qu'auons nommée Galle, que peu s'en faut
que les branches n'en rompent. Ce nousfembla chofe fort nou~ Caflor
ueîle de voir ce mois de Septembre vn oifeau de riuiere, lequel 6*feM*-
les François (pourcequ'iJ îsm dommage es eâangs., commevn £l™re-
Caftor) le nomment vnBicurc, & les Latins Vulpanfèr, pour- VuîAnJ&r-
' menant fes petits nouvellement efcîos dedans le Nil. Les oifeaux
de riuîercsqui communément fe retirent des pays Septétrionaux
es tempsd'hy uct , fe vont rendre en Egypte , & làcouuent leurs -
petits^ s'en retournent i'Eftéyfuyahtsk violente chaleur du fo-
îeil, qui leur fètoit intolérable,
J>es grandes villes & villages £ Eppte^fitue^Jîat k Ntîje longées
riuages ^ottrU commodité de 7Vua.. -.-.-'.. .
Chapitre xxix, . .
1 Àiîàns par Berimbaljplufîcurspcrits garïbss£gy-
) ptiens fe iettoyent dedans l'eau au courant du Nil» ;
| pour pefcher du pain qu'on leur iettoit exprefïè-
ment du bateau , à fin d'en auoir le pîaifir dclcs -
voir fi bien nager. Ils ne font non plus d eftime de
fè mettre en l'eau , que fçroyent petits Canards»
Continuan s noftre chemin auec vent de TVemonrane>arriua£-
mes en vn grad village nommé Sindou, & à main dcxîre eft Dîu-
ruth. Et tant fifmes'q nous vinfmcs loger à vne grade ville nomee St^doM-
Foua. C eftoit anciennemet vne ville grade eôme le Caire:& en- Jf"1* *
cor pour le iourd'huy il n'y a aucune ville en ccrj& fçrme d'Egypjçc
■' . j ' " EE iiij
Berimhd.
£Z4 SECOND LIVRE DES SINGVLA.
après le Caire, qui foit plus grande que Foua. Elle eft beaucoup
plus grande que Rofètte. A l'oppofitc de laquelle y a vne grande
ifle cultiuee de cannes de fuccre , de Sycomores , Palmiers ,. Co-
îocafîès, & toutesfortes de légumes & bleds r5c de riz , qui encre
autres chofes eft de grand reuenu à Egypte. Nous paffafmes la
nuid à Foua,attcndans le iour : & encore que nous eu (lions bon
vent,les mariniers ne fevouloyenc fier à nauiguer de nuiclences
endroids là,d autant qu'il y a plufieu rs deftours ou le Nil eft fort
raniflant. Il a Ton cours quafi auuxvifte que la riuiere de Loirc,ou
peu s'en faut. Il y a des endroids ou il va quelques fois droide-
ïiient, & ou l'on peut nauiguer la nuid à voile defpîoye auec bon
vent fans auoir point de crauide : car il y eft plus lent que là ou
il prendfes.deftouts..
Que le Nil mis en compxmfon , eft quafîfemhîahle l ht nwerz
du Pau. Chapitre xxx.
Peine pourrok on trouuer riuiere en noftre Euro-
pe mieux approebate du Ni^que le Pau y au moins
depuis Ferrareiufquesàlamer: car Tony peut fa-
cilement monter à voile deiployee contre le cou-
rantde l'eau: chofe qu'on peut au m faire enXo ire,
comme au Nil,& au Pau . Mais celle de Loire neft pas profonde.
ToutesJcs manières des barques &: vaifïeaux du Nil,.font dmem-
blablcs aux. bateaux & barques àcs autres riuieres : autli eft ce
chofe<*enerale que les bateaux font différents en tous lieux, fêla
la nature des fleuucs : car les hommes s efforeans d'approprier les
vaiieaux, félon lanaturedu lieu^nfiiynent proprement le cours
de la riuiere.Car comme la riuiere du Tibre eft moult rauiftante*
7^ ayant fon lid & canalmoult profond* & les riues moult hautes^
faut que quand ils branûent à la riue 3 ou fe garrent ,.fi le vaifTeau
n au oit les deux bouts aufli haut que les orées du Tibre , il fau-
meaux ia droit qu'ikeuCent vne efchelle , parquoy les vaiûeaux y font
Tihr^ eftroids>re#emblansà.vn croiuant:Car les proues & les pou ppes
font treshautes y fe terminans en poindes eileuees contremont.
Faut auflique les gouuernaux foyent emmanchez à quelque îô-
gue perche,&: que lé gouuerneur ibit bien haut : autremec ceîuy
quiçoniduklebatcau^nefourroit voir fon chemin, s'il neftoic
cncxuchâ
Jim».
OBSERVEES PAU *. BELON. 22,J
encruché bien hau t.Mais !c Nii ayant les bords à âeur d'ea^por-
te les bateaux bas,larges & plats.Les bateaux du Pau font courts, **£** **
profonds,couuerts, rondelets : &onc ieurgouucrnail aucofté, ^^ ^
comme aufîî ceux du Tibre , & du Pau , qui peuucnt defeendre PaUt
en la mer, & aller iufques à Venife. Les bateaux qui font de long $ateaux <k
corfa^e, & qui n'ont lcau profonde , comme en Loire, ont le seine.
gouucrnail derrière en timon , &c en Seine. Les bateaux du Nii
ne font pas communément moult grand. Ceux qui ont prins oc-
casion de dire qu'il y a des eaux qui peuucnt porter plus grands
bateaux & plus pefants fardeaux les vns que les autres en mcfme
profondeur : mais mettans la riuiere d'Aifc en exemple , qui cftat Jf^ere
plus cftroi&e que Loire,porte trois fois plus de charge , attribuas t^ft.
cela à 1 eau , &' non à la profondeur,fembîent n'auoir fuffifànt ar-
gument. Mais pource quececy ne gift qu'en i'experien ce^ce dou-
te eft bien aifé à vérifier. Quand le Nil eft grand inondant tour
le pays,aîors il eft trefgrand , & porte de trcfgrands bateaux , qui
n'y nauiguent fmon durant l'inondation : car quand le Nil eft ta-
ry,l'on monftre certains endroits ou vn homme eftant à cheuat
le peut pafïèr à gué. Le Nil eft nauigabicà la voile.Car ne les mo-
taignes ne beaucoup deforefts ne luy oftcntlc vent non plus
qu'au Pau. EtcommclcsPoupîesnai&ntauriuageduPau,quL
oftentleventaux mariniers en quelques cndroi&s., toutamiieft
des Palmes fur le Nil, Les pefchcurs du Nil ont cela de commun ?enaeim^
aucc ceux du Pau , que tous deux ont de l'eau au fond de leur ba- Nl^
tcau,marchans toutesfois par deûTus vne claye tiiTuCvainû demeu-
re leur poifïbn aurons du tout en vie , & marchent fur leur claye
iàns auoir les pieds mouillcz.Continuans noftre chemin,& eftas
quelque peu au defîus du villagcde Sindô veoy os l'entrée du Ca- Su*f*f\
Bai qu'Alexandre feit encaucr pour conduire l'eau en Àîexadrie, , j^jJ^
pour réplir les ciftcrneSjpuis, &: fontaines de la ville ilequeinous
îaiflafmes à. main gauche. La terre quienfuft ofteeen faifant fou
fbfte,fe voit encore de cofté & d'autreauxbocdsdu canal,&n'cfi
ladite entrée qu'à vn quart de lieue dudit grand villagenommc
Sindon. Le pays que nous defcouurions à main dextre , eftoit-
quelque peu plus elîeué que n'eft celuy du cofté de feneftre : aufli
cftilplusiablonneux, &pat confequent d'autant que le Niine:
touche pas iufques- là}en eft plus fterile^ Mais le collé du feneftrer
qui eft bas & piacànondede leau du Nil,eft rendu fertile & hcE^
EE
OifteiixctE*
gypte. .....
Vxtitours.
Sucre Egy»
ptten.
Bouffies
^Egypte.
Egyfties hos
Bdgeurs. .-
Vefiemms
Je;EgyptuL
12.6 SE^ÔN0 LÏV«RE DES $INGV3LÀ.
beux.ou les oylcaux de rhiicre fè retirent l'hy uer , defqucîs on en
voit les champs Se prairies blanchir , ^principalement deCi-
gognes,queles Egyptîensàbon droi&ayment, d au tan c que les
grenouilles s'y engendrent en fi grande abondance,quc fans elles
on n'y y étroit rien de plus frequét, & auffi qu'elles deftruifent les
ierpents d'Egypte, $c les auallent tous entiers «Mais de Fautrc-co-
fié fablonneux elené , on y voit les Vautours , Sacres Egyptiens,
Milans ,& autres fortes d'oifeanx de* charongne ; entre lefquels
celuy que nommons Sacre Egyptien y eft plus fréquent que nui
autre , ayant le corfage de Corbeau,4a telle de Milan Je bec entre
-Corbeau &: Aigles car il eftvn peu, croche par le bout. Ses iam-
bës Se pieds entre le Corbeau & l'oifeau de proye. Nous trouuôs
vn ojfeau de tel nom es eferitures d'Hérodote , & autres anciens:
&femble que c'eft celuy qu'ils nomment Accipker Aegyptius.
Il eft delà couleur d'vn Sacre: mais on en peut obfcruer de diuer-
fes couleurs. Nous moftrerons fon portraid au liure des oifeaux»
Les Bouffies font en l'eau durant l'inondation iufques au ventre,
paiffans l'herbe contre terre, mettans la tefteen Veau iufques aux
efpaules :& quand ils ont paiftu l'herbe, ils tirent la tefte hors
l'eau ,puis maiêhcnt l%crbe , & l'auallent ea l'air : car nul animal
ayac poulmo,nonplus les oy féaux &: beftes à quatre pieds, n au.fïi
les Baleincs,Dauphins, & tous autres qui mafehent , ne peuuent
aualler leur mangeailîe dedans leau : de telle manière font nour-
ris durant l'inondation . Il eft impoifible de trouver meilleurs na-
geurs que font les Egyptiens^ eft ncceÏÏàirc qu'ils le foyenr.Car-
il leur conuient fouuent nager dvn village à rautre,durant i'ino-
dation,pour les affaires qu'ils ont les vns auecles autres , & pour
cefteaecefllté ils font auffi veftus de mefme : car ils ont vnc lon-
gue chemife èlanche^qui n apas grande façon,& vne manière de
manteau fans coufture,fait de laine,comme vn long tapis legicr,
dont ils s'entortillent les cipaules,&: vne partie du corps, n'ayans
autre habillement en allant par pays. Et s'il leur conuient paftèr
vne eau parfonde , ils entortillée leur man tcau & chemife autour
de leur tefte9en manière d'vn diadème , &; ainfi nouants pcuueht
çrauerfer l'inondation du Nil. Et s'ils ont à aller plus k>mg , ils
traînent des ioncs après eux,iufques à ce que terre failler&quand
ûs (entent terre leur cftre faillie , alors ils fe foulagcnt en nouant,
eu s'appuyaht deffus Jeurs ioncs. Le mefme vent de Tremontane
OBSERVEES PAR P. BELOW. ' %2J
«oqsfeîfoit defpefçhcr grand chemin : & cftansencorc à plus de
quarante mille au- deflfous du Cakc,nous commençafmes avoir mU^
les Pvramidcs,donr les autheurs ont rat' fait mcnciô:car elles font
en haut Heu fort expofé aîa veue de ceux qui nau iguent defïtis le
Nil :,qui eft ce que Pline ^entendu par ces mots : Saȏ conSficua
vndiquenakigantthits. Les. Egyptiens ne lesfçachans appeller Pyra- rharao».
mides,les nomment Pharaons. Elles fontencor plus admirables
à les regarder de près : que les autheurs ne les-ontdefcrites ;.com-
me ferons apparoiftrecy après.
Quelques payûetdariu^de l'Egypte > &des Egyptien^-
Chapitre xxxr- - .
,. L n'eft nation qui retienne tant defonantk|uitevque ^f-*
; fontles Egyptiens : carencox pourle iourd-huy nom £sE£^n£~
l les voyons es villes accouftrez de mefmcs veftements Mamere &
^ J. que les anciens ont deferit. Tou tel* Egypte n'a-pas zc-fere comte*
eouftunvé faire efeierre les. pouliets fous les agiles, de leur nacre, Usmfi-. e&-
ains ont des fours faits par arxiflce r comme-nous. auons veu , ou zçfte~
chafque fois ils mettent trois ou quatre mille ceufs , iefqucls {ça-
lient il bien gouuerner,& leur tempérer la chaleur 5 qu'ils les font
efclorretoutenv.n temps : quin'eàpasir-uentiûnJiiQdernc^car-
A ri ilote au: fixieûne J>e animdihus 3 chapitre fécond ^QÏtxLcha
dit : Iricttbitu ^i&fœtiïexdudi.natur* ramo e^Monumm tu fdum&uâr
dperiuntur 1feà*tUm,Fj>Qnte in terr* vt m ^Aepptû abruta fmùpuhàem.
procréant* Ces fours font communs à piuiieurs villageois .qui y.
apporteront Jeu rs-œufs couueide.diuer fes: parts. Ils, tbnrde&le-*
uces de peurque le Nil ne deikoxdejefqoelbes tlsfcoforeeot aucc
fagots de paille, de cannes de {uccrc3de Halirnus:)&: Rhamnus,& H£mm^
Tamarifques,à fin de tenir le Nil en fon liét.Leiour fuyuaat con- ^bxmnus.
ûntians noftrenauigation,ayans le vent en pouppe., autant fauo- Tamjnjft^
rable que nous euSions^peu demander , trouualines quelques
endroits ou le -Nil & repiiodcfoiuicntcsrois ^ &c> d'autant que
fufmes en vnentlroicl: ou les Palmiers empefehoient le vent qu'il
«efoufflaft en nofbc voilejilfalluoqucles bateliers defccndiûent
&; titaâent noftre barque à force de brasy& furet forcez de paffer
deiautee çoâç^pouteuitcrlaibrccdu couratdu Nil.Et aimique;
Crex.
Corlk
Cheuéker.
lifts noir.
H<snutQ*
Côrmardst
$utùr,
aigrette.
\y£rabesce*
rcmommx.
ix8 second i iv'k e © e s s i ng v l a.
le ventcftoitfoiblc, eftans paftèz de l'autre part, dcfccndifmcs
du bateau , & ne feiournafmcs linon quelque peu de temps que
neuftions bon vent.
"Defcription deplufieurs oyfaux, & autres Animaux obferue^
IclongétNil. Chapitre xxxii.
E pays d'Egypte cftant fi tiede fhyuer , Se paluftre,
nourrit plufieurs oifeaux de riuiere,&: entre autres ce-
îuy que les Grecs Se Ariftote ont nommé Crcx.Nous
lauons recogneu à fa voix ; car il cft crjart, Se comme
le Vanneau dit JEx , tout airifi ceftuy cy en volant prononce
Crex,Crex : Se lors le defcriuifmes comme s'enfuit. Uoifeau no-
me Crex,eft de corfàge entre le Corlis Se le Cheualie^ayant aufïi
le bec Se les Ïambes entre les deux. Ses ïambes , cuiifes Se pieds
font Boks^commc auffî cft fa tefte : mais le dçfTus du col , la poi-
trine Se dpaules font blanches , le dcfTus du corps tient du cen-
dré>ayant vnc ligneblanchc de trauers en chafque asile. Il prend
fa. mangeaille en terre, Secn l'air , à la manière du Vanneau , que
les anciens Grecs ont nommé -^Ex , Se fait ainfi grand bruit des
selles en volant. Nous*eroyons qu'il n'eft point veu entre les oy-
fèauxcognusde noms François, combien queufiions penfc au
parauant quela BargCjeftoit Crex,entant que Hérodote Ta com-
pare en grandeur à l'vnc des eipeces de Toifeau nommé Ibis. Au
parauant auions eferit ceft ïbis noir , peniant qu'il fut Hxmato-
pus : niaisayans depuis obfèrué fes mœurs, auons arreftéquece
n*cftHxmatopus,ains Ibis noir: duquel Hérodote premierenict
a fait mention,puis après luy , Ariftote. Il eft de corpulence d'vn
CorliSjOu quelque peu moindre , totalement noir , ayant la tefte
dvnGormarant, le bec contre la tefte plus gros quelepoulce,
mais poin&u par le bout Se voûté ,Se quelque peu courbe. Se tout
rougc,commeauftilcs cuifïès Se lesiambes.Tl^eû toutainfihauc
eniambé comme vn Butor, que Pline a nommé Bostaurus,&
Ariftote Ardea fteîlaris , Se a le col ainû long quvne Aigrette,
en forte que quand veifmes ledit Ibis noir la première fois, il
nous fcmbla en habitude Se contenance à vn Butor. Les.E-
gyptiens , Mores ou Arabes , font plus fuperftitieux Se céré-
monieux en leur religion que oc font les Turcs ; Se ja foie que
OBSERVEES VAX *. EELÔÎÏ. Ï2>9
tous deux foyent d vnc mefme loy,tendans à Mahomet , U fub-
ieds au grand Turc, qui lésa vaincus en bataille , toutesfois les
Turescftimcnt quelque faindeté es Arabes plus qucneuxmcf-
mcs.Laraifoneft queFAicoran fut eferit en Arabe, quia depuis ^«^
eftétranflatécnTurquois : ôcaufli que les plus dodes Turcs ne
font pas profcffiô du langage Turquois, mais de l'Arabie. Leurs
caradheres font vnc mefme chofe, toutesfois la langue eft diucr-
FcAuflilcs Turcs n'ont point de lettres qui ne foyent venues des
Arabes. Quand nous defeendions du bateau aux nuages du Nil
pour entrer es villages ., nous entendions les Mores chanter ea
leurs mofquccs,c eft à dire Egîifes , qui fe refpondent les vns aux
autres de voix alternatiucs , à la manière des préfixes Latins , fai-
fans quafî mefmcs acccns,& mefmes paufecs , comme font ceux
qui chantent les Pfeaumes en Latin : qui eft chofe qu'on ne fait
point entre les Turcs, qui ont dur langage Se rude à la comparai- ~~%* **■
fon de rArabe,qui eft moult aifé à toutes chofes qu'on veut met-
tre en rythme. Aufli l' Alcoran eft eferit en verfets de rythme. En
approchant du Caire, à quatre lieues au deftbus de la ville , nous
veifmcs Tendroid ou le canal du Nil fc départ en deux rameaux; ukp&te
defqueîz l'vn defeendantà gauche, va paûeràRofctte , «juiefi «&>-*»*•
Oftium Canopicum , d ou nous venions. L'autre defeend à dex- °Pum ^
tre, & fc rend en Damiatc , ou eft Oftium Pelufiacum. Par cela *T^^
nous pouuons aflèurcr que le Nil n a que deux principales grau- /^^
des bouches nauigables pour grands vaiûcaux , ou pour le plus DamiAm,
en a trois grandes en tout. Nous ne difons pas qu'il n'ait beau-
coup de petits ruifleîets,mais il n a que ces deux principaux naui-
gables. H peut bien cftre que quelques vns font nauigables en
certains endroids au temps de l'inondation; mais en au tre temps
ce font petis ruifleaux qu on paûc à gue au riuage de la mcr,com- Deux^
me nous auos fait quand nous auôs paffé le pet t canal entre Aie* ^ ^ ^
xandrie&: Rofctte. Lèvent nous continua iufques au Caire , ou ^^
noftrc nauigation finit. Nous defccndifmes à vn grand village
nommé Boulac,qui eft du tenât du Caire, fitué au riuage du NiL
Auant nous déporter de parler du Nil, dirons premièrement de
quelques beftes qu'on a accouftumé d'y trouuer , ÔC entre autres
du Crocodile dont cy après eft le pertraid.
FF iij
2.JO: SECOND EIVK.E DES SINGVIiA.
goYtrai&du Crocodile poijjhn du À/77..
Nous envoyons came par miracle en plusieurs Eglifes &:places
publiques de »oftreEurope:raais 11 y-en aauiB qui îop.tterrcfrres.
. Celuyaufllqueles Latins &c les Grecs,ont noraraé Hlppopo-
Bippopou* ^^^ qui-eitàdirc Cheual de riaierc. Nous trouuons que les
chtîtdderU. Latins fuyuans les brifecs des Grecs,ne changèrent point le nom
mère. Greeà rHippopotaouis- :. lequel combien qu'il lignifie en Latin
Efupfx* Bqmis .fluHuttïlis-^ toutesfois cousles Latinsl'ont touiïours appelle
*fat*hs>. deibnappellatio Greque Hippopotamus. Ecfctnblequ ihl-aycc
ainu voulu fairc.pouria raifon que dirons. C'eft, que quand Hz
ont veu celle beàe ne rcfTcmbier en rien au Cheual , ilz ne l'ont
pas voulu nommer, en leur langage ,. mais onc retenu la diction
Greque. Eten cecy.il fau t de de uxf hoiès fene , ou bien queles
RonyairiS.n'aycntcogneurHippppoEamusdesGrecs , ou bien
que Lanknal qo ilz efîimoy ent pourxel , fuft autre que celuy .que
les Grecs nômoyencHippopotanius. Et.fi celuy qury.futappor-
Triwj&es té^quand Àuguftemumpha de Cleoparra, comme eferit Dion,
4ssr%om&»s.. ^^^icsaiitrçs-qoi fixent monftxczésieuxde M. Scaurus , 6>
auxtriumphes de Bûmpee > eiloyent.Hippopotamcs \ nous ne
faifons doute que n'en ay os baillélcs.vtais parrrai&s au liurc que
auons diuuîgué de tous poiflbnsrçar 1 animal qu'auons veu viuaç.
àtCojxftaniinople > apporté du Ni^conuenoic en toutes marques
OBSERVEES PAR P. BELON» -l$t
suce ceux qu on voie grauez en diuerfes mcdales-des Empereurs.
Aufurplus, de ccqui cft de Ton hiftoire , l'ayans eferit ailieurs en
Fraçois &en Latin,*nedirosautrechofe^ourîepre{ênç.Lefleu-
uc du Nil nourrit pîufîeurs autres poiffons moult renommez lef-
quelz toutesfois ne voulons fpecifier en ce licu:finô entant que le Brochet.
Brochet y eftfrcquét, Se que nous auos difficulté -de luy trouuer
vue appellation antique,voulons dire qu il fut anciennement ap- .
pelle Oxyrinchus. Lonypcfchc auffi deux efpcces de poiffons °^T^S
ronds,gros comme iateûc, dont les peaux font emplies de bour- Q^J
reoa foing,& nous font çnuoyecs par la voye desmarchads. Les 0rcfoSt
Grecs les nomment v u igai rement Flafcopfari , & les Latins O r- crocodiles,
bis, ou bien de nom GrecOrchis : car ilz (ont ronds comme vnc
bouteille. II y en a au flfi vn , dont au lieu d efcaille , l'efcorce cft
tonte dos : parquoy on la garde tout ainfi que la peau du précè-
dent. Les Crocodiles (ont auffi particuliers nourriffons du Nil:
dcfquelz nous en voyons les peaux qu'au en tous lieux.
La différence des bateaux qui nauiguent Çur le Nil : #* h no™ des 4r-
bres plus communs qui font es iardms du Caire.
Chapitre. X XX I Ti. .
Yansacheué noftrc nauigation fur leNil, &-pri's
terre ferme au village de Boulac, qui eftlelieuou
les Gerbes & Barques, & autres fortes de vaiffeaux Juicxux&M,
du Nil aborder, pour fèdefcharger deccqu'ilzap- -x^
w*&m&eps& portée au Caire, obfêruafmcs les vaifièaux du. Nil,
appeliez Gerbes,qui font en trois ou quatre différences. Les vns p^.^
font bas.plats^largesyfortcoursay reguard de leur largeur Les duxdu N&
autres font plus grands &: larges,mais ramaflez quaû en rondeur.
Les plus grands feroyent quati fèmblables aux bateaux de Seine, crxnisb^
fino qu'ilz font beaucoup plus courts.Ilz portent plus grâds faix "**x du
quç les autres, & principalemét les pailles des fuercs du grad {cï-Nl^
gneur:&ne nauiguét q durât ftnÔdatio,&ncdeicédétpoinrplus
bas que le village de Foua.Ilz vot à voile Latinc.Les pi us petis de
tous fontpîatSjbas & larges,allâs à voile quarree,&nc fejlûignéc
fort îoing de Boulac , feruans feulemét à pafl'cr le Niî,& à porter
les prouvions des y illages au Caire ,& paffer le beftial d'vnc nue
FF iîij
zy& SECOND Ï.ÎVS.E DIS SINGVLA.
certes. \ i'autrc .Les Gerbes qui vont iufques en Damiette &: Alexad rie,;
roilesuti* fonj-mcnccs à voiles Latines, ô£peuuent entrer en la mer en Bo-
* *A' naflc & enxemps calme. Maisiï la mer s'cfmouuoit en tempefte,
elles ne refifteroyent pas-longuement.Parquoy quand ilz fe veu-
lent mettre en chemin , ilz choithTent vn temps doux 5 & que le
vcntfoitbienàpropos.Nousobferuafmesauiîi les arbres des iar-
dins , qui eftoyent Sicomores y Palmiers > CafEers , Grenadiers,
Qxangers, Acacia, Tamarifqucs.
gue ftufieur* âyentimtfenp que les Chamdcons vefcujfent dufiul vzt7
~ ' ' Chantre xxxiin.
I Vandne vcoyôs point de bois taillis pour faire fa-
) gots,ou deforefts à coupper pour faire eharbon(3£
toutesfois pour fpndre les métaux 5 dont y a touf-
iourseugrande quantité en Egypte , cftoit neceA
^, 1 foire d en auoirbeaucoup)auonsobfcrué de quel
bois ilz auoyent le plus icar pour leur vfage ilz fc feruent des Ra~
mcaux de CafTe, Tamarifques Rhamnus y Sycomores , Napcca^
Mitd t?s= Roufeaux, Paîmicrs:mais en la parfin n'auôs rien trouu c de plus
£#**' abondant5que les pailles de Sucre„& au m" que celte chofe eft co-
Pailles 4^ forme àj'anthorité des anciens , qui fçachansqu'ilzauoyent af-
^'Uesde ^^^înatiereàfondreleuror, ont dit (comme auffieft eferic
lterUd& cn ^me ) Pi**** ùptimèlijmk £sferrumquefti»<litur,fed& \Aegyptm
térie*. Pa&ro ipakkmwm+Çzi le principal des métaux d'Egypte a tout-
iours efté en or. Les hayes qui font des iardinages auprès du Cai-
cltmUonu rc^fontentous lieux couuertcs de Chameleons^ principalemet
le long des riuages du Nil >: cn forte qu'en peu de temps nous en
veifmes grand nombre. Ce n'eft pas fans caufe qu'ilz fe tiennent
^T fur les buiiTons : car les Yiperes & Ceraftes les auallcnt entiers,
quand elles les peuucnt prendre. Q^md les Chameleons veu-
j£ W. lent manger, ilz cirent leurs languesiongues quafi de demy piedy
rondes comme la langue d'vn oifèau nommé Pic verd ,» fembîa-
Mes à vn verm dererrei&àrextremltc d'icelles ont vn gros nœud
^jongieux, tenant comme gîuz, duquel ilz attachent les infc&cs^
- fçauoir eft,Sautcrellcs>aicni!les>& Moufches , & les attirent en
cb^kos la gucuîc- *!z portent hors leurslangues, les dardans de roideur
Jm °m* aufliviftement > qu vnc arb.akfts ou vn arç.fait le traid. Nature
aucoit:
OBSERVEES PAR, P. SELON. Ifî
auroitfait tortàceuVanimal,deiuy auoir baillé ligue, cftomach,
& in cciUns, fi elle luyauoit dénié de ne manger point, comme
pluficursontpenfL
t>enoJlre arriuee au Cdirc^ & decequentmsyattons vtttu
Chapitre xxxv*
StansàBoulacattendans les montures pour aller swUc
\ au Catre,ce pendancauÔsouy vne choie qui nous
1 a fcmblé fort nouueîîe ,. & digne d'eftre eferite:
• Oeft y qu'vne trouppe de femmes en nombre de
_ dixoudouzcpaflànsparlaruejfaifansvncfaluta-^^^^
tion à la manière d'Egypte^ toutes enfèmbîe firent vne voix qu'a- fc femmes
liions ouye auparauant en quelques villages auriuage du Nil: tnE^ps..
mais nous auoitefté impofiibledepouuoir fonger quelle chofe
c eftoir.car les femmes ne vont iamais par la ville qu elles n'ayenc
levifàge couuert : non pour quelque beauté exquifc qu'elles
ayent, mais pour obfèruer le commandement de Mahomet. Car
mefmemët les Ethiopiennes, qui onda couleur plus noire qu'vn Femmes^s,
charbonnier 3 fe couurent le vifage d'vn mafque a tout ainûque Mahomet*^
fait la plus belle Turque d'Aûe. Parquoy nous eftoit difficile ps. mafc-
d'entendre cornent ce faiibit cefte voix,tanr nous fèmblok nou- fx&»
uellc:ô£ ayans ouy ictter vn tel cry par plusieurs fois,qui iembloit
cftre quelque confufè harmonie , auons entendu que les femmes
ouurans la bouche le plus qu elles peuucnty font ifîlr leur voix en
fauffet,remuans la langue entre les dens,la retirans vers le palais,
& font vn accent agu , tel que font les femmes des villages-fur la Maf^uesde^-
fin de leur cry,en vendant le laid à Paris. Elles fe mafquem:àr-/>»M»es /&-
feremment félon les diuerfitez des pays, La façon dcsvillageoi-<g;/r^
fès Arabes & Egyptiennes eft vne mafqueure la plus laide de tou-
tesxar elles fe mettent feulement quelque toile de coton noire
ou d autre couleur deuant les yeux, qui leur pend deuant le vifa-
ge en appoinctifTant vers le menton corne la mufelierc d'vne da-
moifelle appcllee vne barbute >& à fin d auoir veue au trauers de
ce Iinge,elles font deux trous à l'endroit des deux yeux, tellemet n
qu elles eflansain fi aceouflrees 5 refFemblent eeuxquife battent Bdtm' ^«^
le Vendredi fainecà Rome ou en Auignon. Mais celles des plus 1^S^edâ-
grades villes fuyuent la manière quelles ont aprins des Turques, Tuxmxu
2.^4 SECOND LIVRE D"£ S SINGVLÂ.
qui mettent vn petit voile tiffu des poilz de4a queue d'Vn chenal,
au deuant du vifage. Et celles qui [ont dcpîus grand cit-ar,ont vn
fin linge délié deuant la face. Parquoy voulons faire celle corn-
paraifondeccluyquivoudroic efcrire de leurs veftemens, àvn
qui entreprédroic de faire la peieâure de tous les habis des rem -
mes du pays de France,! calie,ou Alcmaigne : car il voirroit infi-
nité de coiffures dVn mefme pays cftrc différentes encre elles , Se
ne reilembler rien à leurs vohînes : tout ainfi les Egyptiennes ont
grâd'dirfeiececn.parure auec les Turques. Hz n ont point acou-
ilamé non plus enJEgypte , Turquie, qu en Grèce, de découper
les liabiilemens des femmes, n y des hommes. N'auiTî n'y a diftin-
&ion ordonnée à cognoi fore les perfonnes de diuerfes loix à por-
ter liabiilemens de diuerfes couieurs:car,commeauons dit, clic
. eft feulernent.au turband.Les Chreftieo s le portent bigarré,tan -
tofr.de.pcrs,tantoftde rouge, Scies ïuifz le portent iaune : Car il
eft feulement permis aux Turcs de le porter blanc ou verd : mais
le verdeÛ: feulement concédé à ceux qui fedient de la lignée de
Mahomet. Laconfideration de l'acouftremenc de.tefte que por-.
tcntlesEgyptiepeseltmQuitànoter.-car il eft antique, tel qu'on
peut voir portraiclfur diuerfes medales. Lesautheurs l'ont nom-.
Coronxy lut» ^ TuYYitum CAbitis omamentum^o^i tumtam corommyou vnMmturri-
■utunaa. ^m#Commequi diroit coiffure efleuee en manière de tour. Doc
l'vne porte des patins haut efleucz de terre , & l'autre porte des
botiocsiMrecsparictalo«,àIamanicr-cdcsT-urqu.cs,Ecpuis que
tellemaniercdex:oirTuTcferefenttântdefonantiquité,auoseité
meuzd'obferuer, voyans rnefmemet qu'il fembiequcnoz Poè-
tes Latins en ay entrait mention. Donc vouîans mieux faire voir
domine elles font pare.es , en auons fait voir les portraictsen ce
lieu, ternettansey après à faire voir ceux des Turques d'Aile.
OBS ERV EXS VA&V: BÎIO tf.
t$f
' ZspQrtrciiShdz deuic femmes du*C aire dlueffement l'sjïms ^jdon,
' ' : qu 'elles fantejhtns tnieurs mùfons.
*34 SECOND LIVRE DES SINGVtX.
l4mn portraift ivne femme iEppte 5 félon qtfeïïe efi
acoufiree allant parla ville <k Caire.
O* SERVE ES PAR P. BEL ON. 'l$6
Nous aïlafmcs au Caire , ou il n'eft licite à vn effranger y entrer à
chcual,s'il n'eft grand feigneur , ou en la compagnie d'vn qui îe
foit : mais n'eft pas deshonnefte aux habîtans ou cftrangcrs dal- CflJ^
1er fur les afocs. Car les Gentilsho mrnes du Gai re & fol dats du mes ^ a/m
Turc vot en parade à chcual en courte houfïe auffi. bien que Ton
fait en France : &: fefont referuez les cheuaux pour eux , ne vou-
lants permettre ce priuilege aux mechaniques. Les femmes auffi
vont communément fur Afnes baftez , ayans vn tapis par defTus.
Parquoy fçachans que chafque nation retient de la naifucté de
fon terricr5pour ne confondre le naturel des Egyptiés auec celuy
des TurcSjâuons cy fait reprefenter vn bourgeois du Caire à chc-
uaî,auec fa femme allant à 1 efbat3efhnt montée fur vn A fne , fe~
Ion te manière du^pays.
De Boulac au Caire , il n'y a que demie lieue. PafTans par les
vergers, veoyons pluficurs beaux arbres frui&iers. 11 ne croift
G G iij
23S SECOND- L-IVrRE- 1>E S" SINGV'LA^
nulsTanurindescn Egypte flnô qu'ils y foyent femez parcurio-
fitémous en çrouuafmes yn.autre des mafiires du Caire près Bou-
Ca&ers lac,& quelques Ljmons fauuages, qui iamais ne font le fruiefc
seleftièrs. P'us g£9s qu'vn oeufde pigeo. Les arbres de.Cafneirs. j.S.ebeftiers,
pdmiersï Palmiers3.& Sycomores,, y çroiiTcnt-bien-fart hauts.. Eitans^rri-
.uez au Çaire,il a efté licite à y n chacun ; de nofke compagnie al-
ler par la ville fans guide: car à quelque hçure.qu'ayons voj.ilu.al-.
leroupar-dedans, ou par dehors, nous^n'auons eu aucun empef-
chement,ne crainte d'en auoirdommage. D'auantage nous vou-
zfrrxwers * *ons di.requc-fi.vja cftr.anger e$apr yeftn de robe longue , ycuc-al-
en Egypte, 1er parcoures le^illes^es Tuixs,-,i}i}e luy fera £*iz aucun_m.aî,n:Q
samiami* p^usqu a.vn habitant <ka , pays.- .Sur. k foi r l'on voit vne forte.cie.
tos. petit Lézard fe pourmenânt le long des muraille^ qui yienc;jGï;V
TurcntaU. gerJes mouches. Les Grecs l'ont appelle en leur vulgaire Samia-
VhA^ngion. mfCOS;>|es Italien sTaxentoîa, les ancies Chaîcidica lacerta. Mais
pour ce que les modernes confondent ce nom de Tarentoîa auec
le Phalangion;&: que le mot Italien Tarentoîa ou bien Teraatu-
la,prendfon etymologiedela terre, & toutesfois n'eftant appel-
lation antique,il nous conuiendroit long propos à expofer le fuf-
dit petit Lézard , nommé Chaîcidica lacerta, duquel parlerons
chxlcidica, pjusàplainen autre paiTage^ïî èft fouuent adûenu à plufieurs
lacerta. • £n mctcanc qUeiCUe .çhofe avne région eftrange par efcrir5
i „„ r pcnfenteitre de îeurmueiition : 3c toutesrois s'ils liicnc les au-
des MohJ* r - ,. s
cherons d» tueurs anciens , troimenkcn eux propos quaii icmblables a ceux
Caire. jjuiisontobferuc : Toucainfi, quand veifmesquc chafeun de
Confins nous eftoit h petfecuté des moucherons que nous nomons Cou-
Motfches, . fmSjla nnicl; en dormac au _Caire,qu'il {cm bloit le lendemain qu e
nous eu liions la rougeole , nous i'auions mis en eferit , meccans
. w— . aùfii.qtf *i cft neceffaire de fe tenir le vifage caché, cerman t dc£-
-~ ' fouspàuillons ,ou bien fe tenir à mont fur les terraiTes des mai-
ions à 1 air. Toufesfois hfans Hérodote, nous auons trouu é qu'il
auoitjefia efcritçhofes fèmblablcs. Les Egyptiens , dit-il , fe fer-
■ ^ _j- - - uent knuicldckursrets à faire pauillons de peur des moufehes,
Calices (?Ep &orÀ ils fe feïuefft le io«r à predre le poifibn de leur âcuue. Quad
adus. les Egyptiens accou firent les cuirs,ils n'vfcnr point d'cfcorccs do
Tmf^' cbc^ncs,comme en France, ne des calices a Eiculus , comme en
phJm°eS' Afie^cdeiaeillesdeXcnr/ques , Terebinthes,ou de Rhus , co-
ïkca'cia. râccn drece3mais vient dçslnliqucs derarbrcd'Àcacia;quils *■"
••OBSERVEES :P A K t% BELO^, . ïfr-
aent-àgrads fâchées és'bburiques du Caire^comme aufrrderher-- • .
bedeCaliou Ancilis-pouriâtcincture. Eftansam Ca ire, & cher- ^-^
chans diiigemmét plufleurs drogues, desquelles les aurheurs ont
efcrit,nous auons recogneu qu'ils en ont beaucoup en. vfage, que
les marchans ne nous apportent point 5 comme Nirrc ,- Acacia,
Calamusodoratus, Amomum}Coflus, Ben album , &: plufieurs
autres fcmblables.
Des maifens du Cairejes iardinages , grdek tour qui enfeigne la creue du
'■ Nil jour [garnir la fertilité de l'année. Chapitre .xxxvi.
, E s baftimc'nsdu chafteau du Caire, les belles cham- chafieaui»
> bres & faïcs, & les peintures qui y font, 'rendent tef- Cotre.
\ moignagçdé'Umagnificccc'des-Cercailés, qui d ami-
fe^^^J noyent n'a pas long temps à l'Egypte., déuant que le.
Turc les euft vaincus en bataille. Les murailies-y font reuefrûés ;
de marbre-à la" hauteur d'vn homme tout à l'en tour des portes^,
feneflres/çauoir eft vne lifiere de plus^' vn pied de large, faite de Marqueterie
marqueterie à la E>amafquine,auec:desNaccresdeperlevi?£bë- au, ebafiem
ne,de'<Zri{til,de'Marbreîde'CoraîJ&- verre coloré. On voitau-mr^ Caire.
de patciis-ouurages en quelques maifonsdu Caire. La plus part ^onesf ^
des maifons font couuertes en terraffes à double cftage. Ils font J^f^
faire les portes de leurs logis fi petites :^c batTes >.«jplvo cheual n\^
peut entrer: qui effeaufè quitte faut courber quand ob entre"*
kans. Les ferrures font communément faites de bofs~;ôf -y a âuitt
grand artifice comme en vnc ferrure de fcr.G'cft vne chofe com-
mune atout le pays,fur qui domine le Turc,pour eflrc exepts de
loger les^hcuaux enteps dcgucrre,de faire tes portes des maifos
biëba¥ïès\ TôtttesfoFs les portes des maifons des grads feigneurs,
font pareilles à celles des pays d'Europe.Les oifeaux qu auôs no-
mez Sacres Egypties/ont moult frequés en Eg^pte,&: nesabfé- SJCns E{ry»
tehrgucTës-dù pays.Les Milas au£fi yjônt teursn i$s4u reps qu'ils piem.
font abfes^e noftte regiô:& y font Upriuez^qu'ils viçnBfiufques mOms.
aux feneftres.des maïfons,&: y .vitiéc de Dadcs,lk.pafsci^£ilé en r& &
Europe pour euiter la grande chaleur du Soleil .|-a ville du Caire: Caire-
eft fort grande & fpacieufe, non du tout enuironnee de muraille,
pource que la plus-grade partie de la vilîeeft fermée d'vfte-brçehc^
dvr Niî,quiîuy ferc de muraille , c^mmoau&i-fait gsâxiè$aK-ic4tt—
G G iiij
2.2.8 SECOND LIVRE DES SINCVLA.
Nil. C'eft vn petit canal qui a cftc fait par art, aux defperisdcs
vn bras du £mpCrcL1rs Roniains,lors qu'ils dominoyenten Egyptc,àl'oppo*
NilpajJefAr £[ce duquel on voit vn baftiment fait en manière de forte tour,
ù tour <U duquel on prend l'eftimation de la fertilité, & le iugement de la
k creue du rente que pourra valoir le reuenude l'Egypte cefte année là. Et
Pûrtvaiêi du Cafôer.
isrit ' . , - fçachans que le Mil
cft autheur de la fer-
tilité d'Egypte, ceux
qui font déléguez à
ceft afaire,fe trouuet
à vn certain iour die»
pour voir cobie lcNil
eft creu en hauteur»
Et fil eau eftiufques
à iceluy haut permis^
qui eft en ladite tour^
alors ils aperçoyuent
entièrement qu'elle
fertilité rendra la ter-
re d'Egypte. Et pour
ce qui! n'a pas ac-
couftumêcroùlrc tat
vnc année que l'au-
tre , ils ont diucrsfi-
gnes pour fçauoir à
peu près ce que le
pays rendra l'année à
vcnir.On trouue par
efc rit que le rcuenu
d*Egiptc eftoit moult
grand du temps que
les Romains en c-
ftoyent feigneurs,le-
quel a beaucoup di-
. minué depuis: mai*
il faut entendre que
pour lors les Romains n efpargnoycn* rien à y &ire"dcfpcfe pour
krçnirefcrtile. Nous auansprins grande mcrueille d'auoirveu
figrandc
rf^1
OBSERVEES ? AU î. SELON»- 241
& grande quantité de Caflicrs es iardins du Caire , & par Egypte, &!***•
Se toutesfois les autheurs anciens n'en ont fait aucune mention:
earmcflnementThcophrafte, qui a quaû* parlé de toutes autres
planres d'Egypte , n'en fait mention. Mais il faut dire de Théo-
phrafte parlant des plantes, tout ainfi comme d* Ariftote des ani- i^UrSté
maux. Car comme diuerfes nations ©bcifïànts aux commande- i^dexïdre
mens d'Alexandre apportoyent diuerfes efpeccs d'Animaux \mum rhco*
ÀriftotCjlors qu'il en efcnuoitlliiftoirc: aufli cftoit il necefl^ire firtf* &*
que par mcfme moyen diueriês nations feiflènt rapport des plan- ^nr0t9-
tes à Thcophrafte quand il les deicriuoit. Et appert! fon hl ftoi-
re qu il ne Ta fait fans grandedcfpcnfe, & d'hommes.qui ontefté
expreflement cnuoycz en diuers endroi&s du monde , pour les
obferuer. PaFquoy ne trouuansaucun paflàge en tou t fon ceo-
ure,qui peut conuenk à la Caflè , auôs conclud qu iî n'en apoinr,
parlé r n*eftoit au çroificfme chapitre du quatriefinc Hure , on il
die qu'on luy a rapporté qu'il y a fi gros arbres autour du Caire: ^^
que trois hommes ne les fçauroyentembrafler. Aufli les Caffîers ^^^
font aufli gros & hauts comme noz noyers, ayans la fuciile de
mefmCjCommc ilappert par fa figure , ou Farbreeft rcprcfèntéaa
naturel. Ce neft demerucille fi L'Egypte elt abondante eaherba-
ges de iardins :ear ayans là chaleur mouk grandc,& pouuansar-
roufèr leurs herbes auec facilité, font fbigneux àfèmcr en temps
opportun.QuadlcNil cftgrâd,ils n'ont q faire d'arroufer 5maà.
trop bien auant,& après il leur faut prendregrandfoing.Et pour ^ ± ^
ceqûclcsconduiclsvenansdu Nil ne font pas profonds, ils ont 3^/^
des engins propres à puifèr 1 eau,qui font de diuerfes façons. En» <&> moufa»
tre autres en ont yn qui ne peut fèruir finon ou l'eau cil bien hau-
te : aufli la façô n*en cft difficile : car ils mettêt deux paulx droits,,
fourçheuz à la fommité,pour fouftenir vne perche en manière de
gibet, pour y attacher vne poiiîe.à deux anfes , ou bien vn grand
plat de bois, pendant auec deux cordes. Et faut que deux hom-
mcs,l'vn d'vn cofté,&: l'autre de l'autrc^a tiennent,cftans en l'eau
iufqucs au nombril,& en.1 efbranlat bien fort, efpuifençdcleau,
& ainfi qu'ils le laaccnc de force en kiettant deffus la terre du
iardin.
HH
2.4^
S^ECOKD LIVRE DES SINGVLA.
Ville .ai
Ctire,;t
Ze Cxire
moindre
quon ne
l'etîime.
'xHxfttau .du
£urt.
Mont&e du
chxjrexu.
Pkamide.
Vefcyiptiûn delà ville du Caire , & defon cbafleau.
Chapitre xxxvi I.
À ville du Caire eft pkis longue que large , ou il n'y a
queles hommes qui fe méfient de trafiquer , non plus
quepartoutlepays de Turquie, Les femmes, les fil-
_____ lcs,& petits cnfans , ne fortét guercs àcs n\aifons pour
fe trouuer en public. Et croyons fi le menu peuple auoit de cou-
terne aller courir .fe monftrantpar la vilje >■& les femmes vendit
{cnt&c acheta fient comme en nozpays,que la ville en fcmblerpit
eftre beaucoup plus peuplée: car quant au peuple , il n'y eft pas fi
■frequentcommeic commun bruitcrie. Elle eft fitueeen triâgle,
pource que le chafteau qui eft au plus haut de la ville , eftant aifis
iuo'hem^nçag.ne,'ÇÛ:droic^emeGt'à.l'yn des.anglps. Parquoy qui
-ièpartiroir du chafteau,. & fuyurok îà muraille en defcendantde
la partie du midy, l'on feviendroit rendre àvn autre angle de la
ville, Puis fepactant de rechef, venant vers le Septentrion, ioa
viendra droiààKautre coing -delà ville, qui eft le troificfme an-
-glp.và;U rnaniere dvn a Grec. Et fe partat de ce troihefme coing,
^our;mo«£crvers-Ie chafteau ^ Ton auraachetié le tour delà ville.
•Il y aprefqueautarudernaifons hors le circuit des murailles que
■dedans laviile , dont pîufieurs fe font trompez d auoir penfé que
îavillenefuft point murée. Le chafteau eft affisfur dur rocher,
dedans lequel rocher on a taillé desdegrez, pour y monter plus
facilemen^refTembîans quafi à ceux qui font au chafteau d'Am-
i)oifê : car la fituation d-u chafteau du Caire eft ainfi en haut lien,
ê£ quafi de figure ronde» 6c y a pîufieurs grofTes tours rondes , fai -
tces à i'antique,qui toutesfois font de petite eftoffe.Et pource qu'il
cft en fi haut lieu,il y a vneviz quarrecdu cofté du iardin , faite à
.efcalîns, comme celle du Palais defainct Pierre de Rome, parla-
.quellclescheuaux,chameaux&:afnes peuucnt facilement mon-
t-er^hargez.. La court çlc ce chafteau eft gran de & fpacicu fe , & le
logis fort plaifant & en bel ajr : -car regardant des feneftres çà &:
là, tant que la v eue fe peuteftendre, l'on voit quafi tout le pays
d'Egypte 2 ne plus ne moins comme qui feroit fur le plus haut de
Tvne des piramides. Le chafteau du Caire mis en comparaifon
aux lieux de forcereffe^nc doit eftre eftimé guère fort. Quelques
OBSERVEE? FAR *'. BELONS 243
vns vouîans coparer Paris au Caire, veuléc que le Caire fuft an- Tarii-
ciennement nommé Is, & que pour pareille grandeur , on a pro-
noncé Par Is,quau* pareille à la ville nommée Is. Et de fait il y eue
vne ville de moulcgrand renom- appeîlee Is.dont Hérodote a fait B Y ^
mention^ mais ce n'eft pas le Caire : earilditquls eftoitàhuiâ: ^ *
iourncesde-Babylonc , nômee de l'appellation d'vn fleuue de ce
nom,qui paiTe par dedans la ville,&: de là fe rend dedans Euphra-
tes. Les habitans du Caire eftans trauailîez de l'ardeur du foleil,
font contrain&s de chercher 1 ombre desarbres de verdure: par- SJC
qtvoy ils cuîtiucnt & eîcuent les Sycomores en plufienrs endroits
du Caire>& paries carre&urs,& par les places publiques : & nc~
ftoit que îauons amplement deferit auec les arbres de perpétuel-
le verdure,en dirions d,auantage,toutesfois5en aiu>ns bien voulit
mettre la peÎ4icl:iirccy apres^ ,
L'on peut au J* obferuer plusieurs petites herbettes. ramplns
fur les hayes, qui ne naiflent aucunement en noftre Europe : &:
principalement vne manière de Campanettc îacticineufe r qui
fait la feméce en vne longue gouffe , comme celle du Smilax fau~
nage, qui eil: moult reiîemblant à la Seamonee:car d*vne feule
racine, il s'efleueiî grand nombre de rameaux que fouuentles
hayes qui pour la plus part font de Tamarifques , Oenophiâj Se
Rhamnus>& les murs qu'ils font de terre grailc^en font tous cou-
verts par deiTus, comme pourroyeteftre les noftres de lierre: Car
de lierre il n'en croifl point en Egypte.
EH ij
■one.
mus.
Herle d&
:*44
SECOND LIVRE DES SINGYIA-,
ïafeftML
Portraiêi du Sycomore,
■ /k\ X^r\ Ilsontauflivnepo-
JÊ6 *• /âf*}Ù*~ — rite force dlicrbc,qui
cft fpcciale à ce pays
là, laquelle en mon-
tac haut , fait cotuirir
les tonnelles de ver-
deur, & la faut faire
monter auec des per-
ches turques aux fc-
neftres des maifons.
La chofe du Caire le
.plus à eftimer eft le
Bafcflan, c'eft à dire
vnlicu enferme, ou
Ton ven4 l'argéterie
& orfeuerie,ouuragc
de foyc , Se aucunes
•fortes de drogueries
precieufes : auquel
lieu il y a ordinaire-
ment grande multi-
tude de gens aifem-
blez.-carils conuie-
nent leans pour né-
gocier enfeble, quaû*
comme au Palais à
Paris,ouàîabourfe
_ àAnuerSj ouaucha-
geàLion. Ets'ilyaricn de nouucau&: de beau en la ville, il le
faut aller voir là. Quelquvn de noftretrouppcmiftvn doute en
MofaueesAu auant,à fçauoir s>l y auoft autant de Mofquces au Caire,qu il y a
Cure. de grandes Eglises principalesen Parisi Plufieurs ayans pris gar-
de, tromi érent qu'ils s en fau t Bien peu*
Farts,
lion.
<©BSE*.VXfcS VAK t* ÏSLO-N, UJ \
t^vn grand conduiSl àeau qui efl entre les ruines de Babylon^ta vil-
4e du Caire , qui porte l'eau du 2v"//, là haut pour abbreuuer le chajteau.
Chapitre xxxvm.
> Ous partifmes du Caire pour aller voie la vieille
| villcdu Caire,qui ancienneméteftoit appeliec Ba~
; bylô,fitueeau defTus de la ville du Caire : combien ,
' qu'il y aie vne autre Rabylo en AfTyric qtfo%ngm-. a^ m'
r^ww— me au. iourd'huy Bagadat,fituee, en Mefopotamie. Ba^aL
Nous y veilmes les ruines de plufieurs édifices antiques , faits de
brique & déciment , qui fembloyent auoir efté baftimés de gra-
de magnificence v & y a maintenant vn petit village ou fe tiennét
quelques Chrcftiens Arméniens & Grecs,qui nous monftrerent
vnc belle chapelle aiTez bien faite > laquelle vn médecin Chce-
ftien auoit fait fabriquer en l'honneur de noftre Dame. Il y a vne
voûte en Jadi&c Eglife au defïbus terre, ou noftre Dame fe cacha
auec noftre Seigneur quand il eftoit perit,au temps qu'iiz eftoiet
fugitifs de ludee pour la tirannie d'Herodes. Nous trouuafmcs
vn conduid d'eau en chemin de plus de trois cens arches 3 qui eft
vn peu au dcfTus du Caire : fait d'affez bonne cftorfe de pierre de
tailîe,pour conduire l'eau du Nil au Chafteau du Caire , qu'on y ^^
ie&e par engin s , c'eft à fçauoir par la force des, Bceufs 3 quifont
tourner de grandes roiies,qui eleuans l'eau du Nil,la icclcnt lias.
Les Mores ou Egyptiens font les pkrs récréatifs que gens qu'on usEgyptim*
puhlè cognoiftre : car ilz font toujours prefts à fauter , ou à dan- font recréa
fer,ou à faire.quelque gambade; qui eft vne chofe qui ne leur eft *$• .
pas nouuclle : car Flauius Vopifcus a laine par eferit que les Egy- ^sr^
ptiens cftoyent grands vcriificateu rs & ioucurs de farces,& touf- ^^—
iours prefts à fauter. Hz font en ce point grandement contraires *~^ -
aux Turcs:Car les Turcs font naturellemet mornes, lents, & : pa- Tum mor,
reffeux. Les femmes des Mores de la vilk du Caire fçauent fon- nés.
ner d'vne manière d'infini ment nomme Cinghi» qui eft auiïï co- ànghi.
gneuenConftantinople. Il n'eft guère moins armonieuxqu'eft mT-
vneàarpe; &C combien qu il n'eft de grand mufique , toutesfois ^f0^
ijeêplaifantàl'ouye, moyennant qu'on chante en le formant. ^T*
Les Mores o u Egyptiens ont plus grand vfàge de M uuque que
lcs.Turçs>& prktcipakiacat de hauts-bois & de vioUes : &.oforas
* ' • HH «j
*âfir s e eo'ND lit srr ■ dis si-kc-- v e a*.
dire que les Turcs n'en fçauent autre chofe d'honnefte , fînoa ecr
que les Mores leur ont aptins. - "i
Vefcriptiondu-Baume. Chapitre xxxix.
fpSpQpfe Ousallafmes voir vn iardin en vnviMage bu croifTçmr
BMme. §jjfcSii fj cs Baumes,qui neft pas û loing du Caire,que de Paris
I|iR&V* )à m Laïdit.Ec d'autant que le Baume cft vue plante re-
I^SE&Js aommeexprccicuifè y& rare , auons voulu eferire tout
ce qu'il nous a fèmblé appartenir à fan difeours. Nousfçations :
qu'il y a quelques hommes qui pen&nt;qu.é les Baunies-de la Ma-
teree y ay en telle apportez de Iudee : mais montrerons cy après
qu*il n'en cft rien. $z font dedans vn grand iardin enfermez en
vn petit parquet de muraille, que Ion dit y auoir efté fait depuis
SmUxn. <îuc lc^mc a cfte^'Egypte-des mains du Souldan : 8c ait on que
ce fut vn Bâcha, qui eftoit lieutenant pour le Tur^qui les cftima-
dignes dauoir clofture à part eux. Lors que les veifmes , il n'y en
a-uoit que neuf ou àh. plantes,qui ne rendetaucune liqueur. En-
tre les merques-que les anciens nous ont enièigné pour cognoi—
Bmmttoup fac ie Baume^ftjqu'il doit eftre verden tous temps. Toutesfois
wtrs l>erd. cc^ ^£ ja Materec près du Caire n*auoft que bien peu de fueil-
ies au mois de Septembre : qui nous fembla chofe nouuellc : car
les autres arbres qui fe tiennent verds en hyuer-, ne fe dcfpouillêt
deleurs fueilîes iinon au printemps , lors que les bonro-eôs- nou-
ueaux font reuenus.Telz arbres font plus verds en Àutône, qu'ils
ne fontau printemps. Mais lesautresqui fe defpouillent de leurs-
fueillcsjes ie&éc en hyuer,pour renouuelîcr en efhL Ccft pour-
teume: ram cïUoy ** naus a ^cmi>]<;nors <k propos que- larbriiTeau du Baume
fitetiUs. J ^ defpomllaft en efte-pour fc reueftir l'hyuencar lors que le veif-
. _ " aies,tout ce qu'il auoit defueiiles,eftoyent notmellemcnt pro-
duises. Bonnementnepouuons exprimer la-iuite grandeur du-
âit arbrifïèau de Baume:Car tous ceux qui eiioyenten ce iardin,
Bauoient que des petis rameaux déliez, peu couuerts de fueilîes:
auiEn'y auoit il queles-troncs d'vn pied de haut ,,-qur neftoyent.
gucrcspîus gros que le poulce» Quelque part que'naiuentles
muimfdu Baumes, ilz ne pailentgueres deux coudées ou trois de hauteurr
mime. & à'V-nfied dé terref'e^andencen rameaux grefies, qtw commu-
némeâtneiôn* point plus-grosque lcmy-m-à\rxc pjùme-d'Oyc»:,
OBSEB.VÏÏ5 ?A-R *. BEL ON, 247
Les Baumes de la-Materec auoyent efté nouueîlemcnt retaillez,
cr forte qu'il n'y auoit de refteque les cicqtsdont fortoyent les
rudimens des rameauxà venir» Car le Baume enfuit la nature de: p^^fa
]avigne,laquelleilfaut necerTairement rongner tous les ans, ou ^^^^
autrement elle f empire. Lesfufdi&s fiosdu Baume auoyent l'ef-
corce rougeaftre par le deffus}& portoyent les fueilles verdes or-
données à la manière du Lcntifque , ceftàfçauoir de coûéèc .
d'autre,comme nous voyons es fueilles des rofiers , ou de frefne,
ounoyers : toutesfois la grandeur n'excède point la fueille des
pois ciches,&: eft faite de telle faço, que la dernière fuçillette.qui;,
eft-au bouti fait que le nombre en foie i m par: tellement que-eomr •
ptant les fueillettes de toute lafueiIle,on y en trouue trois, cinq,
ou fept,&: n'auons guercs veu quelles paflent en nombre de fept.
La fueille de l'extrémité eft plus grande que les autres qui fuyuet:
catcîles viennent 'çonfcquem menççn amoindrifTant y comme il ,
aduienràlafueille de Rue. Nç>us:trouupns_quç Pline a totale-
ment enfuyui ce que Theophrafteen a e/cr^çommeauifi Diof- ,
coride: &cheminanspar mefme trace ontefcritquefesfucilies
font approchantes des fueilles de 1a Ruc:ce qu'auons trouue vé-
ritable. Or ppurce qu'avions pafTé trop de legjer fur le Çaumeà-
k Materce, &c nel'auions pas bien obferuela première fais a re.~
tournafmes voir pour La feconde,&: ayans trouue moyen d'en; rc-
couurer vn petit rameau, duquei gouftafmes, &: auifi de fès fueil-
les., les trouuafmes cftre quelquepeuadfrringerjteSjaucc vn gouft
- yn&ueax, $c au .demeurant aromatique. : maisj-efcôrce des ra-
meaux eft encor plus odorante. Le rameau eftveftu de deux ef- ^f*'4*^*
corces:îa première eft rougeaftre par le dehors, & couurc corn- BuiiTM-
me vn parchemin fur l'autre de deirous,qui eft verde, qui touche
au bois.Ceilc efeorcegouftee baille vnefaueur entre l'encens £é
la fueille de Tercbinche,approchant à la faueur de fariette laùua-
ge, qui eft vnefaueur fortplaifante , Se frottée entre les doigts,
rient de l'odeur du Cardamome. Le bois en eft blanc ,& n'a non
plusse fàucur ne d'odeur qu'vn autrebevis inutile. lia les rame-
aux droiâ^fort greflgs,qui nefont que petites verges delieesLau-
tour defqudLz les fueilles accent hx>rs fans^ardcr'o^ejÇeil^mec
q^el'vne&rxmajqtqn^^ .«- :-'.
&;ainfi confcquxmmeatdiftans l;vne àc l'autr^cncournàns rare-
ment lapent rameau j& (.comme auons deûadjt ) chaque fueille
248 SECOND LTV ILE D>I S smGVLÀv
eft tellement composée , qu'en vn mejmc pied il y cnaiufqucsa*
trois,ou cinq,ou fept. Ayans defcichc noftrc rameau de Baume,
&: conféré auec le Xyllobalfamum qui eft vendu es boutiques
des marchands,rauons trouué conuenir en toutes merques. Les
opinions des autheurs qui ont efcritdu Baume, fontfidiuerfes^
queû* nefeuffions veu nous mcfmcs , n'en eu (fions oféefcrirc vn
feulmot après eux , & ferions bien d'opinion qu'il n'yenaonc
efté cultiuéenla plaine de Icrico,comme ion a eferit. Orpource
qu'en auons veu TarbrifTeau 5 Se bien conflderé , il nous a femblé
bon en faire tel difeours que pefons appartenir à vne chofe qu'on
veut curieufemcntobferuer. Nous auons trouué par expérience
x^iloldff que le bois vulgairement nommé Xyllobalfamum , qui eft védu
mum. par les marchands,apporté de l'Arabie heureufe 5 conuient auec
CArpobdfc celUy d'Egypte qui eft cultiué à la Matcrec, Et faut de deux cho-
tmm- tes l'vnejoubien que le bois nommé Xyîiobalfamum,& lefruiâ:
nomméCarpobalfamum , teîz que nousauons.cn cours de mar-
chandife,foyét faux , ou bien que celuy quieft cultiué en Egypte
au iardin delaMatcreerqu on eftime vray Baume, foit faux. Car
les voyans conueni r en tou tes chofes, feacha$ bien que c erc tout
vn,vouîons mamtenir^ conclure que celuy qu on vend fous le
nomde bois de Baume, eft celuy qui de tous tempsaefté en vfa-
ge. Le Baume cft pourleionrd*huy feulement cultiué en Egypte
près du Caire,& cobien que Theophraftea efté d'opinion qu'on
n'en trouué point de fauuage , toutesfois ofôns constamment af-
fèurer que de tout temps il y en a eu,&: encor a maintenat en l'A-
rabie hcureufc,dont le bois & le fruiâ: ont efté apportez de tou-
te antiquité par mefmevoyedes marchands quinous apportent
les autres marchandises d'Arabie. Et voulons prouuer , qu'ilz
eftoyent cogneusentre les marchands , comme eftoyet les autres
drogueriesrchofè que pouuonsfacilement proiracr par les com-
positions des medicamés,efquclles Ion auoit acouftumé de tous
mthrUttts. temps en meilcr. Mithridates nelesmettoit-ilpascnfonmcdi-
stmencedu camêt?Ne les trouuoit-on pas à acheter es boutiques>Ccla prou-
Baume n* ueDiofcoride >& complaignant dequoy Ion fbphiftiqubit la fc-
**• mcflce du Baume desfon tcm^sXarpùhtlfamtm (dit-il \]adulterat»p
UMtgut. femJyieljyçèricQ fim&tfuod œpetxa dppïdà defertur. Pour Petra oppidû
entendons la Mequc. Il dit kinûduboisiEtltjwf génère yuodXyiïG*
halfimum. vocant ^robotur recens ^Jkrmento^ temt, ff*lmm> odoratutn^
c^màmtenm
0 B S E R VE ES P A X P. BI L O N» Z49
Mtfdantenusoffûbaifamumjpirans. Par lesquelles parolles il eft touc
ïnanifefte qu'il cftoiten commun vfagc auec les autres drogues.
Encoreft-il tout manifefte par îesparolles de Diodore Sicilien -? orfi,s,a
cref-ancien liifloricnjdefcriuantîcs rkhcfFcs de l'Arabie heuTCu-
fc:difant qu elleproduit le Baume es lieux maritimes. H ne veuc
donc pas entendre que ce foie du Baume cultiué,mais qu'il croi£
fe fauuage. Paufanias a-au{£efcrit que le Baume eftoit vn arbrif- ?au£im&,
feau de i'Arabie^Les autheurs ne faccordent en parlant du Bau-
me : Straboeferit qu'il eroifien Syrie auprès dti lac Gcncfàreth ~0,
entre le mont Liban,& l'Àntiliban. Les autres autheurs veulent
que la feule région de Iudec le produife,& qu'il ne faille toucher
les rameaux pourenauoir la liqueur vfîn on auec dés fèrcemens
d'os ou de verre» difàns que ù. Ion blefïbit le tronc du Baumeauee
le fer pour en auoirrbuyle,qu'il£èmourroit incontinent jCorce- ComeUm
Mus Tacitus eferit que quand Ion metdu fer aupres,il f effraye de Tm***, -
grand' peur qu'il ena :.-&• c^ue par cela il le faut entamer auec au-
îces inftrumens qu'auec le fer a autrement Ion rien auroic point,
deliqueur.Nouscnqueransdu Baume aux marchands du Caire
lors que conférions noftre rameau , ilz difbyent que tout le Xyl-
lobalfamum^ le Carpobalfàmura qu'ilz auoycnt iamais vendu,,
venoitauec les autres drogues qu'on apportoitde laMequc3&s
quedeleur.temp.s iîz auoyent-fouuenance dauoirveu les Bau-
mes qui font pour le iourd'huy à la Matcree^auoirelté apportez .-
de l'Arabie heureufe, auec grande defpenic du Souldan. Ex pour
autant que tant de gens le nous ont afleure y auons trouuéque le. ~
pquuions bien eferire fans-aucun fciupule,& iànsricn dimmuler ^
de ce qu'il nous en a fêmblé.
B^^W^^^/o»* droiSh auprès du Cairei& des arbres . ^PJ *.
naijfans dedans le iardm delà Materee.- **..
Chapitre XL
»0n voit pîttâêurs arbres de Sdbcftescxrcc iatdki de 'sdxfie£
s la Matcree,^ àzs Sycomores > qu ilziiommcnt fî- ®comôres:
l guiers de Pharaon. Leurs figues fèroyent fcmbla- *jp««* &
v blés aux noftres 5 n'eftoit quelles font rouges par ^y*°t c
" efTus.grofïcs corne vn ceuf,^<|uafi toufîours fen- c'£^ f*~
d&cs. ËUes aeyaient rien feiches : car elles font maigres &4ures,
' IL.
25«0 SECOND LIVUE DES SÏNGVLA.
pleines de grains,aufTi font de mauuaisgouft & fade,& principa-
lement à ceux qui n'onc pas acouftumé d en manger. Les humi-
des ont quelque peu meilleure grace;& pour les bien louer , elles
ne valent guercs , combien qu elles foyent dVn grand rcuenu au
sa/eKe. " pays de toute Egypte. L'herbe de Bafclic eft femec par les campa-
gnes d'Egypte , croulant trois fois plus grande qu'en ce payscy.
Ilz la manget comme nous faifons des autres herbagcs.Lespom-
Me Animes. mes ^es ^f eîanzanes,que nous nommos pommes d amour5vien-
lient en grand' quantité par les campagnes fabloneufes, defqucl-
les ils ont de deux ou trois fortes, blanches & rouges , longues &
rondes.Theophrafte,à noftre aduis, lanommeMalinatalam:car
parlant àcs choies de rEgypte,il dit en cefte forte : Locis autan are-
noJîsbdudproculdfluuîonafiiturterrcnum).quodMalmatalamappeUant.
Hz en mangent quaû* à tous leurs repas, cuictes deflbus la cendre,
y y, boulucs , ou fri&es. Le lieu nousïut monftré en ce iardin de la
^rriuee de Materee , ou noftre Seigneur & noftre Dame furent long temps
nofheDame logez quand ilzarriuerent en Egypte , fuyansde Iudee de peur
mEgype. d'Hcrodes.Et mefmemet y a vnc feneftre, ou noftre Dame met-
toit noftre Seigneur pour repofer. JLàeft vne fontaine qui arrou-
Fontxine Jm çc lcsiardins des Baumes,en laquelle ilz difent que noftre Dame
w baignoit fouuent noftre Seigneur,& y lauoit fes drappelets. Il eft
oh&r'ues tout arre&é que les obelifques ont efté entaillqz pour merquer
obel'fquesdt les.fepulch.res des Roys d'Egypte , corne au fîi furent les Pyrami-
Uuaxerce. des,&:autresgros Coloflès :defquelz obelifques il y en a vn tout
droict dedans vn champ,quclque peu au delà de la Materee , qui;
jîiftodro* cft beaucoup plus haut & plus gros que ceux qui font en Aîexan-
me- drie,ou que celuy qui eft dedans l'Hippodrome de Conftantino-
plc. Quand nous îeufmes veu , tournafmes bride vers le Caire,
nous deftournans de noftre chemin , en déclinant à mai» dextre
pour aller voir vn autre iardin , qui n'eu: qu'à vnelieuc du Caire,
ou il y a vne grande & fpacieufe falle, qui fut faite par les Cercaf-
£cs au temps que le Souldan eftoit fèigneur d'Egypte.Ceftuy édi-
fice eft vne grade efpace pauee degrade$~pierresquarrees,&:cft
couverte deffus en manière de tërraffc 5 pour défendre du folcil,
dot la couuerture eft fouftenue à pilîiers de pierre de taille à clai-
res voyes.Le Nil y arriue tout joignant les murailles , non pas le
courant,mais quand il inonde. Au cofté de leuant de cefte falle,
il y a vn beau petit iardin y dedans lequel fon t pluiieurs arbres de
OBSERVEES PXK ?. BEtOK» 4:$!
Cafïès,.des arbres de Henne,dcs Roûers , & Iofuim iaunc : mais i°fiimiau*
aux coftcrdexScptccrion & lAiâyfiy a deux péris releruouets en m-
manière de viuiers , qui feruent à garder l'eau pour boire. Tout
ce baftimenteft peind par le defllis. Les poutres &aix font de
palmiers. Depuis que TÉgypte eft rendue tributaire au Turc , il
a toujours continué tomber en décadence* •
Que telle manière degent ramajfee , que nous nommons Egyptiens 3font
au&hientrouuezjm Egyptetcjués autres pays.
*:•- Chapitre xli~
r L n'y a lien en tout le monde qoi fort exempt de telle fm*x Fgf*-
j; panure gent ramaiïèe que nous nommons de ùixxpticns.
tnom Egyptiens,, ou Baumiens:eat mefmement efias ^m»m%
^encre la Mâtereeôc le Caire^nous-en trouuîos de gra-
des compagriics)&: auiii le long du Nil, en plufreurs villages d'E-
gypte, campez defïbus des Palmiers^qui eftôyét auffi bien eftran-
gers en ce pays là comme Hz font aux noftres^ Et pource que leur yailacBe,
origine eft de Vallachie ou Bulgarie , ib fçauent parler pluûeurs
Jang^es^ font Chrcftiens. Les Italiens les nomment Singuani.
Hz ont priuiîege des Turcs qu'il eft ioiûble aux femmes Singua- singuank
ses de fc proftituer publiquement à toussant aux Chrefticns co- f^fi0*
me aux Turcs mefines : .& ont vnc maifon dedans Perc de Con- Pf £uu"
frantinople auec pluûeiirs chambres „ ou chacun peut entrer ii- m pere ^
brement/ans que îaiuftice Turquoife leur puifïê rien dire. Et cij&nncde
pour le moins y a vne douzaine de femmes qui fe tiennent ordi-
nairement leans^Cefk gents-'entremefleen Grèce v Turquie, 8£
Egypte de travailler en ouurage de fer,&; f y troiRien t de fort bos
ouuriers en ce racftier là. Eux-mefmes font leur cbarboidefquek
auons entendu que celuy quieft fait de cicots & racines de brie-
r^eft le meilleur à faire ouurage de fer, d'autant qu'il TendurcifL
Quand nous eufmes demeuré quelques ioumees au Caire,ayans
propofé d'aller voir hs Pyramides,apresauoirfait l'apprcft ncccC-
faire , fottifmeshors la ville par la porte dsmidy y &c trouuamics
les barques quinous paiïèrét le Nil, Lonn'y va point qu'en gran-
de compagnieicar autrement on feroit en danger d'élire detrou£-
{£.. Pat cela vn Sangiac auec pluûeurs Spâhizfeirentefeorteà
monûeur de Fumerai axoute lacompagnic qui le fuyuoit.
II ij
:iji
SECOND LIVRÏ DES SÏNGVÎ.A*
Objèruation des Pyramides.
^Chapitre XL H.
^tiennes.
Catran.
Nïtre,
'En dcfpîaifè aux ouurages & antiquités Romaines,
elles ne tiennent rien de la grandeur Se orgueil des
Pyramides. Les Egyptiens attendans la rcfurre&ion
des morts,auoycnt couftume de cofirc les corps^our
les faire durer à l'éternité, Au fli eft-ce, ce que nous vfons pour le
iourd'huyfbusle nom de Mumie , nevoulans pas les brufler,
comme faifbyent les Latins, ne les enterrer, comme les Grecs:
car ilz efiinaoyént que le feu eft vn animant qui deuore & confu-
me toutes'chofès , &: qu après feftrc bien faouîé , luy meimes &
ce qu'il a deuore periffent. Aufïi ne vouloyent-ilz point enterrer
les corps,de peur que les verras ne les mangeaffent. Et pour eui-
ter tous ccsinconuemenSjiîz les confifbycnt anciennement auec
du Catran & du Nitre:&:apres quiîzles auoyentcoficl:s,lesmct-
teyent dedans des fèpulchres , enfermez deffous quelque grofFc
maâè de pierrc.Et de fait choififToiét les lieux les plus fteriles que
ilz pouuoyent trouucr,pour les fepul turcs. Tellement que le lieu
ou font les Pyramides,eft moult deferr. Elles font delà le Nil en-
uiron quatre lieues loingdu Gaire. Nous le paflafmcs tant à voi-
le qu*à rauiron,au dcfTous de hfle,qui eft vis à vis du Caire : & ne
nous fut afTezauoir vne fois paffe le courant de Peau : car quand
nous rcufmes arriuezau rkiage dedelà,nous fuyuifmcs vne lôguc
chaufïce , ou il y auoit des arches de pierres , & en quelques en-
droids de petits pots de bois , ou nous pafÊons fans bateau.Mais
à la fia cftans venus bien près du village de Bufy ris , ou l'eau du
Nil auoit rompu les arches du pont de pierrc,il nous fallut parler
par bateau. Et depuis le village de Bufyris , il y a encore vne autre
longue chaulïèe, qui fè va terminer au defert des Pyramides. Le
courant du Nil pour la première fois fe départ bien haut au def-
MAMtis L* fcs ju Cairc^aifant vn canal, qui va tomber dedas le lac Mareo-
CM' ris , fuyuant toufiours icelle cofte deferte de la partie d'Afrique.
Gela nous i^ifoit doutera fçauoir il deuionsentendre que ce ra-
meau fèpare l'Egypte de l'Afrique : car il pafTe ioignat le pied des
pyramides , feparat dVn cofté la terre fertile d'Egypte,& de i'au-
cre la ftcrile.Parquoy le NiîpafTant le long du Caire, n'eft pas en-
:M]yris.
ÔfeSE'B.VEES Vâr >. "BE'LOW. ïf$
t lerccar il y a defîa dcparty de fes rameaux bien haut à main gau-
che en vn canal., qui va tomber dedans le lac Mareotis., Quand Mmùt'iS-
eufmcs pafféje HiL, & que nous eftionsdu- cofté des Pyramides,
.alors nous fanions tout entier entre nous & le Gaire. Farquoy de
quelque part qu'on vueille prendre l'Egypte , elle ne peut faillir à
réprefènter la figure du Delta : car ûbien on lentournoit, & l'on
^ommençaftau ïacMareotis fuyuant contremontde droi£bîi-
gnc,iu(ques au deifus de&Pyramides., Ôcàc là defeendant à Da- to^-
roiate,quieft.oftium Pelufîacû, n'en auroit on pas fait vnepoin- ^x^rie-
"&cî EtquidefcendroirdeDamiatecn Alexandrie, n'acheuera j™*mVe*
Ton pasles deux autres? qui fèroitlaiîn du triangle commevn A.
<^juand nous fufmcs à paffer la leuec de Bufyris , qui eftoit rom-
pueen vn endroid , ou l'eau da Nil y fait vn lac ( dont les Grecs
ontprinsoçcafiond'inuenterdes^blesdc leurfleuue Lethcs&:
Stix: caries corps embaumez qu'on portoitcnièpulture^aiToyêc
en bateau par deffus ledid lac, qui auoit totalement dcfhordé êc
rompu la chauffée. ) Ceux qui eftoyent bien montez , ne irenc
^difficulté de le paffer à gué fuy uans les guides, mais les autres mal
montez attendirent le bateau. Toutesfois quelques vnss'eftans
<ïefpouillcz , menans leurs montures parlelicoi^le^eurcnt paf-
fer ayas feau iufques deflbus les aiffelles. Les Mores du prochain
village nous^ccompagncrcncpoui: môter deffusles Pyramides,
^& nous montrèrent le chemin. Elles font fituez moult loing de
la me^mais ne font qu'à trois icts de pierre de l'eau du NiLIl fera- tnàm&i
ble à voir les Pyramides que ce foyent montagnes de dcfmefurce
grandeur , Auffi ont cfté làaâeniblees par moult grand trauail Se
labeur des hommes. Le lieu ou elles font fituecs , cil fort fàblon-
neux &: ftcrile ; duquel Pline a eferit , fuyuant ce qu'en a dit Hc~
Todote,en cefte manière: *drou Lttèpura àrcwnlentisjîmiiitudinc.
Laplus grade Pyramide pour cftrc en lieu vn peu plus bas q la fc-
code, apparoir de loing eftre plus petitermais de près ék fe mo-
ntre fans coparaifbn beaucoup plus grande. Véritablement elles
font plus admirables que ne les ont deferites les hiftoriens, def-
quelles la plus grande eft faite à degrez par le dehors. Nous auos
mefuré fa baze,qui a crois cens vingtquatre pas d'vn coing à lau-
trc,lcfquelscomptafmes^eftendansvn peu les ïambes. Gommé- M r ',,
^çans à compter du pied de ladi&e Pyramide en montant, trou-^^
iuûncs enuiroa deux cens cinquante degrez, defqucls chacun **'
II iij
1^4 SECOND tîVXE RES SINGVtA.
degré eft" de la hauteur de cinq femelles d'vn foulier à neufs
poin<£bv Eftans àla fQmmité,veoyons bienà cler la ville du Cai#
se de là le Nil>du cofté de i' Arabie dcfertc,&de l'autre cofté nous
retournons vcrsleSeptentnon,vcoyons tout le pays d'Egypte ca-
me fubmergé,femblant quelque grand' mer. Puis tournans le vi-
iàge vers le Midy > qui eftle. cofté d'Afrique ^ne veoyonsfinon le
fàbkm fterile. Ayansconfideréla partie de îa Pyramide qui re*
garde le feptentrion, la trouuafmes beaucouprjlus gaftee que les
autres coftez. Laraifbneft , que l'humidité tant des roufees de
Ctuiâ: que du Nil , agitée pades-vcntsTeptentrionanx , la ruinent
* grandement^ vèu mefmemeat que les au très coftez^ou <^u leuan t
ou deMtdy,n eftans point : touchez.de ilHiumidité , ne font point
gaftez:Car le vent de Bifè en Egypte eft humide,au contraire des
autrespays ou ildefeiche. VoMajquant à l'extérieure partie de la^
di^peemierc grande Pyramide*Maintenant voulons parler dés.
conâmB m intérieures parties^ Nous entràfrncs leans par vn eonéui&quat*
bfyw****' ré,ou l'on n'y peut aller fans fè courbencar il eft en fkuation traf-
aerfè , venantde haut contre bas. 11 femble que Fouurier en ceft
endroid amonftré l'auoir fàkauec bonneraifon :. Gar qui l'eufl
lait obliqae,ôn»euft peu auoir de la clarté enîa Pyramide, En-
transleans-, tenions chacun vne chandelle de cire allumée en la.
main^& n'y gouuion s entrer qu!vn au coup: car eftans patuenus
au bout du permis d'embas* pour entrer à la eau ité , il fallut fe
coucher à plat fus le, ventre contre terre , rampansà la manicre-
desfèrpcnts: encore panions nous malaifement.. Quand nous
fufmes àcàzm la Pyramide , trouuafmes leans vn lieu vuide : &c
deîàxirans à gauche, trouuafmes vne autre efpace d'vn conduit
de galerie quarrce,affez bien entaillée, qui va de bas en haut , ou
vn homme peut aller tout droid: car il y a large efpace v& haute
cauités& eft fans degrez pour y, monter, pauec de grandes pierres
&: larges^monit polies, &: gliflantes .Mais on fe prend aux accou-
doueurs quifont des deux eoûez,pour s aider à grimpcr.Et quad
chambre e» on a montéquinze ou ièize pas 5 lors on entre en vne belle cham-
k&widt*bTc,qnatïcc deux pas de long v&quatrepasdelarge, qui eft de
quatre àfixtoifes de hauteur: dedans laquelle nous trouuafmes
vn coffre de marbre noir 4 fait d' vne feule pièce , àla mode dvne
caiffe, long de douze.picds , & cinq de hauteur, & autant de lar?-
geur j qui eft fàaç couuef de. C eftoitie fepukhrcjd'vn.Roy dlL-
O B S EU VS E S 1? A R P. :B EtON. Z$$
gyprc,pour lequel lapyramide foc faite. Le fcpulchre 4e marbre -sepâchem
noir futmis dedans ladite chambre en faifànt ia mâflbnnede de "ty*™**
la Pyramide. Nous en retournafmes>& en descendant parce fpa-
tieux condu i& auions le vifage tourné vers le Septentrion. Et
quand nous fufmeshorsjil nous fallut retourner à main gauche,
ou trouuafmes vn puis,qui eft maintenant quaft comblé de pier-
re. Toute l'hiftoire de ces Pyramides eft eferite en Hérodote,
Diodore, & plufieurs autres Grecs , defqueîs PJine eicriuant en ?* tUiS*n
Latin , a di t que.ee puis eft moult paribnd \ ô&ji'y a rien û* vray ^ramt •
quo en droit l'eau pour feruir à la maffonperie^&abbrçuuer les
ouuriers t car le dedan s eft fait de fort ciment , à<cbaux Se à fable,
qui eft figne qu'il y a fallu de l'eau. Quand nous.fufmcs retour-
nez en la première cauîté 9 & marchans plus outre , trouuafmes
quelquepetite efpaceà rnaiagauche^iqui a ainfiefterompue: car
autrement eîîeeft tonte mai&e* NQtis.y trctuuaônç;sdesSpuriz
chàuues différentes aux noftres,^ a celles qu^auionsauparauant J^^
veucs dedas le labyrinthe de Crète: carjes npftres n'ont la queue
plusjogue que les adles,mais celle delà Pyramide ont vne queue
qui paiTc quatre doigts outre les ailles", longue comme aux Sou-
riz, Nous {ôrtifmes de la Pyramide , & allaïmes veoir la féconde.
Nous auons deferit cefte grande Pyramide la première , comme
fùrpaflànt toutes autres en gradéur & orgueil , comme auffi c'eft
elle que tous, autheurs anciens ont entendu eftre admirable à la
regardec.Le meilleuj: archer qui feront afa fommitç5Sç tirant vne
flecheen Pair, à peine pourroit l'enuqyer horsdefa bazcvqu*e]îe
netombaftfutles degrez; car^comme auons dit, elle eft de de£-
mefuree largeur.
Ohferumon de U * féconde Pyramide.
Chapitre x L 1 1 1.
Seconde fy*
, 'Autre Pyramide qui eft féconde en grandeur , n a runùdcfim
! point de degrez par dehors : auffi ne peut on monter degre\
\ defTus , &. pour autant quelle eft fituee quelque peu
! au defTus de la précédente en plus haut lieu , appa-
roît deloing eftrc.îa plus grande: & à la voir de.pres, on trou ue
3e cotraire. Elle eft de forme quarree corne la première, & côblec
iufques.àla fQramité.Laprecçdéee a vne.efpacc deflûs le faifte de
II iiij
st$*
%$& S E,.C 0-|T IK L I V >R %, DES S.I N G V Z Aw
deux pas en 4'amcïIC > tellement que cinquante hommes fe peu*-
uent tenir deflus : mais celle cy,a le faille en apoinctant , ou il ne
fçauroit y auoir cfpacc,erç laquelle vn homme fe peufl tcnir.Elle
cft réchauffée de ciment par dehors;. donç.<;elle partie qui regarda
le Septentrion ,cft cpnfumce de l'humidité, que les vents luy en-
uoyentdc Teau du Nil,&: des roufees de la nuid, comme à la gra-
de. Ses Steliions que les Grecs nomment Coloris, font moule
fréquent autour.de ces Pyramides , & es cauitez des fepulchres,
qui {ont çà Se là par ladiûe campagne. Ils felogent es entredeux;
Tarantes ^s plcrr£s>& prennent-des mpufçhes : ebofe qu'auons facilemét
Crocodile*, obfcruee. Ils (eroyent femblables aux Tarcntes qui fréquentent
a*?x maifons,n eftpiç qu'ils font plus membrus,& ont la tefte plus
plattç & groftb.Çe (ont ceux qui font celle drogue que les anciés
nommèrent Cr ocodilea , & que no^drogueurs appellent main-
tenant Stef eus LaceTitK aum\prouknt elle de leurs excremen ts^
Les Turques sen fardent le vi(àge. Lbn en vend par toutes les
boutiques des drogueurs de Turquie, comme auffi eft en affeze
grand v(àge en npftre Europe»
Stercas ,
Lacerti.
Tmfiefm
Pyramide,
Monte te? .
Safdten.-
thiopCHS,
Tymmide
de^ome.
''^ytmfieJ^:j^iteVyrMkf£ff]^te%^ Chapitre, xliiii,,
A- trôiflefme .Pyramide efl beaucoup moindre que ne.
font les deux- précédentes : elleeft en cor en fbnen-
rier^n'ayant auetîne tàclïe de ruine, vnrierspîûs gran~~
^ deque celle qui èft près de Monte teftacco à Rûrnc3
allant àS. Pol^fur le chemin d'Oftia. Qc&c troî'fiefme Pyramide
rta non plus d'ouucrture en toute la matlè , que fi elle venoit dé-
lire faites car la pierre , dont elle cftfaite , cft d'vne forte de mar-
bre nommé Ba^lten5âutremétappeîlé.lapis iEthiopicus, qui eft
plus dure que le fin fer .Ccfte forte de pierrc,cft celle dont pour la,
plus grande partie^ tous les Sphinges des Egyptiens ont efté mis
en fculpture, tels qu on voit à Rome au Gapitole, &qui?nc efté
autresfois entaillez par les Egyptiens. Celle troificfme petite Py-,
ramide eft cnçpr plus auant vn bon trai£t d'arc que n'eft la fécon-
de. Nousl'appellons petite au regard des deux grades fufdi&es:
car encore quecellede. Rome cft reueftuc par dehors de cinqua-
te ordres de pierres de marbfe blanc j lifTec ôc polie, comme en
celle ^E^ptCjfieft-cequel^uurier quîja feit, ne monftra grand
* -"'' v "~ " " ouurage
.OBSERVEES PAR P. BEL ON. Z57
ouurage au regard de la moindre qui foit en Egypte, dont Ton en
voit plus deçetefpaifçs çà&: là par Ja.fufdi&c campagne:toutes-
fois il n'en y apas yaefeuleainiî ruinée , côme çft celle de Rome.
Auiïi au regard des autres., îapouupos; appellcr'modcrne : Car
mefmcment le dedans n'eft que ciment/ait de tuile , de chaux,&:
de fablon: lequel s'eftant auallé -.en terre, a forcé la reuefturc de
marbre , tellement que les qyarrjares fpnc ja ruinées aux quatre
coings3ou plufkurs arhres^&: herbes de TerçHuriies , Carriers, Terehmhcs.
GeneiKRonces, Lariers fans odeur,Teucrium , Akiyne ^trou- CaPrl(T5'
uans place entre lesefpaccs mal ioincfceSjOnt fait leurs racines : Se T"T!°n'
n eftoit que les pierres en font liées auec du fert & du ploaib > el-
les fuffent pieça tombées par tçrrc.
De plufieurs autres Pyramides <t Egypte* Chapitre xlv.
V t re les trois fufditcs,nous enauons veu grand no- r r
bre d'autres petites 3 qui font ça & làcfparfcs par la ca- ^c^hr^
pagne , fïtuees en la mefme planurc d'Afrique : entre mu^s £E^
; iefquelles y en a pluficurs autres moindres de perke^^.
eilorfe,& fepulchres de diuerfesfaçons^uieftoy et députez pour sepjtkbra
les fepultures de ceux qu on conrlfbit auec du Carran , Se cki Mi- ^Hm-
treen Egypte, Se auec du bitumenen ludec. Les hiftoriens ont Cutr-ia-
eferit, que les Egyptiens faifoyent baftir leurs fepuîchres iclon Q^j-
leur richeflfc : car les plus riches faifoyent quelque choie plus CùiJr^
fu mptueufey comme Obelîfqites, Coloflês 5 Pyramides ^&Lceux jy^rnuks.
des autres d'après eftoyent médiocres : Se ay^auokii pauure qui
rfeuft quelques petites pierres ailemblces pour fon fepulchre. Le
lieu ou font iefdks fèpuichres , cà il difeommode Se deière , que .
perfo nne n*y fçau*oi t habiter, Se n. y pourroir ncplaier ne femer. *f* *
C'efr de ce lieu que Placon ordonna par fes loix, que les lïmx. fte-
riles fu ffent dédiez aux iepulchres des mores j laquelle choie les
Grecs obferuent, comme au ffi font maintenant lesXurcs à l'imi-
tation des Arabes .-car ils eoeerrem: leurs morts es lieux piefreux
vers quelques cou ftauxqui ne pourçoyenc ricaprodu ire. Et pour
ce quclèSphingeou Aiidrolphmgev, duquel lesanciensonc tant tfûmg*~-
parlé, eil encor en fonentier cnla fufdide campagne ftcriieaucc af'4^*
les Pyramides 3 il nous a femblé boa ne paiïèt outre fans en dire-'^ <^
vn petit mot.: ; ■■■•'■■' ■■'-— :; - - •* - •** : ■ - -'~*i: . .. ._ ......
KK
1 5 S S E M: O K D LIVRE DIS S I N G V X'A.
J^ugrAndÇ-olofle nommé jxtr Hérodote *s4ndro?j>hmx , &.par Pline .
Sfbinge , ^#* £/? enfculpture deumtlesJ?yramides.
Chapitre xlvï,
Y a n s bien confideré vnc moult grade tefte de picr*
J rc quieô îoignanti'eau du Nil quelque peuau defTous
» de la grande Pyramide , auons eu occa&on d'admirer
w _ _j les ouuragcs Egyptiens, Et combien que Pline ay t
-Colofe 3m beaucoup excédé en la mefuredes Pyramides, toutesfois iUefté
sphinre. p'«s raifonnablc delcrïuant le CotoÉïc du Sphmge^qui cil au co-
fté dextre de la grande pyramide de là bas;vers le coàé d'Orient.
Nous ne voulons grandement arrefter à la description desSpkin-
.ges : car véritablement tout ce quia efte peinct &refcrit deceft
animal , tant parles Ethiopiens qu'Egyptiens, eftfablc. Et mef-
merneat D iodore les delctiuant n a feeu en d i re autre chofe,fin©
Te'mBure q^ilsfontfemblabIesàkpeinclurequ'oîienfait3mais qu'ils font
Mssphmgei. vn peu plus gras, ôc qu'ils font de douce nature» Cela difoit Dio-
vhenixea dore qui veut que nous cognoiffions les Sphinges par la*peinttu*
p'm&me. renomme auâî Hérodote dit du Phenrx, Mais il fa-ut-que nous
diûons qu'il y a moult longtemps -qu'ion auoit actfouftumé de
voirlapeinâurcdesSphinges & Phénix, fuis que défia des ce
temps là on les cognohToit par la peinture. Parquoy ay ans vou-
loir de recognoiftre les Sphingesp>ar les pein&urcs, rrousauons
. cherché-en tous lieux ou ils ont eftéengrauez êc entaillez , pour
voir de quelle iigurc ils dtoyent. Mais ks ayans troiuié fidiuerfe-
ment portraidsendkierfesfculptures&reucrsdc mcdaîcs, que
mefmemct de dix ou douze antiques qui font à Rome, les vns au,
ïifdun. Capitolefintaillez en marbrede Bafaken ou pierre iEchiopique,
PierreTbe* - ^ âuCKSCn vnc g&cïlc au Palais du Pape au iardin de Belvcder,
-Meddes entaillez depierreThebaique de mefme les aiguilles ou obelif-
-i^mufle. ques j n'y ^n ^ vn qui conuienne auec l'autre -: 6C queceux qu'on
Msddei voit partraiâs es medalesd'Auguûe,&: d* Adrian , font différents
i^£drUn. auxfufdirs grauez cB-pietrc.» bous auonseu liberté de conclure
%oy#rdfois. quec'cftpurc fable ccqui en â-eûédid» comme montrerons par
spbmgesJe Cya^VCSm Le Roy François reftaurateur deslettres,&: peredetou-
moain'* tevercuen feitietter deux en fonte aiTezobfcurs, retirez de ceux
Mt*u. * ^c Rom ^lefquels on peut encor à prefent voir à Fontainebleau,
aucclcsantiquaiUcs du Roy,qui aufli n'ont fimilitude auec ceux
des medalicsd'Augufte,:& qui piœeft, nous n'en auons point
fc.cu.voir qui sonujço&ent auec ksnaarques que Pline leur a a*>
tribuees. Les-vns oncles tettes le long du^ventrejes autres les ont.
en la poi&rinc , comme il appert en celuy qu'on voit deûous le*
bras du grand coîofTe de marbre reprefentant le Nil, tant es mô~
noyes d' Adria, qu'en celuy quj çft à Rome au iardin de Belvcder.
Les autres, les ont lelong du ventre > comme ceux des monnoyes
d'Au^ufte. Les autres n'en ont point du tc*ut»comme ceux qu'on?
voira Rome en Bafalten & pierre Thebaique. Nous voulons
maintenant parler du Sphinge d' Egypte , que Hérodote a nom -
me AnoVofptoic^dijqud S.pabOvPline^.pluficurs autres an-
theurs ontfair mention. Pline parlant des Pyramides &;de cefte.
Sphinge,dit : \Anteha6 eft Sphinx > vel mugu rmr&ncU 5 qua jfrlueJhri'À
fimtccolmtium* Tputcsfois l'ayant nommé.Sphingc,n entend li-
non .v-ne teftedc<tefmefurçc, grandeur-, comme il- appert, par fes .^&
mots: Eft autcmfaxonatJtrjilichbom^{dit-i\ } &±itbricA* ÇopâisMO- r^mx.
ftyictmh'ttit* fier fyonterrLcentum duos pçdes colligit ; lûngitudo pcdttmcen- *
tum qmdr*<rmt atrium eft^lûtudo àjventreAdfummtfmapicemm capits
fexAgntddHorum. Celle pierre eftamTq deffus vnc. forme eu bique,
qui n eft qu'vnegrSde&cecntaillçejquî regarde verdie Caire. La
proportion de laquelle tant de la face comme du nez-, des yeuxk
deJabouchc,du froncîdnmenton>&: autres parties, eitfibie gar-
dee,qu on-ne peut nier qu clic ne foie faite de moult g^^nâ artifi-
ce, Et touecsfois elle n'a aucune fiimiitude auec les ancres engra- .
ueurcs des S^hinges. Le Roy François pl-us g;âd admirateur des Frunçoh?^
chofes hautaines que nui autre,auoit délibère faite ietter vn ncr- tdnurjte&r
cules de fonte : 6ù véritablement il l'eut fait s'il n euft cfté preue- aei' ^p^
nu de mort: carie oacron a duré Ions temps à Parisàl'hûltcl àc£r*n ?* ,
Xr ,, ' . . * : > &s .r ■ • '• j 3 JZckuUs du.
N^iifi, qui.auoit de cinquante deux a. cinquante trois pieds de Rûy j^^
hauteur ., Se s'il î'cull acheue , il eft à croire que .fortouurage cuit ?.,>
effacé toutes-cel les que les Empereurs Romains S»: ./Egyptiens*
fèirenc onc ériger. Quelques autres penfent qu'il entendoie faire
vn Mars, car lçs^patrons citoyen- cleila gro(foyez pour faire vae
. Venus de la mefme grandeur. Ceux qui l'ont veu , en ont pàr.s
moult grande admiration : mais nous leur en voulons mettre, vn , ^ ,
autre en parangon. Cclt celuy de Mercure que Lenoaorus ar- ^^ J
chite&c auoic crigèiîn Auuergne 5 &: qui depuis citant a ppcilc a'
K.K ij
±$0 ' SECO W IIVRE- t) E S 5 1 K G V L A.
Romcfcit çeluy du Soleil,que Néron feit érigera Rhodez, tout
maffif de fin marbre , quicfïoitiuftçment deux fois auffi grand.
„ j querHerctiîcsdiiRoy: çarconinaeccîuy du Roy auoiteinquan-
pierre de tc "deux pieds &: demy;, celu-y de Rhodez auoic cent cinq pieds.
foixxnte çr Mais celte pierre dont nous parlons eft encor de plus grande
irv'xpcds. merùeille : car eftant mafTiue,a en hauteur foixate & trois pieds.
Pline luy donnèrent quarante &: trois pieds de longueur. Les
Sphingésnc nous arrcfte'nt -pas en ce propos. C'en; îa grandeur
&: {ubliiBiré-de ce Colofte , qui n eft de moindre inerueille qu'eft
vn grand obelifqae. Nous voulons bien maintenir que les Ro-r
mains n'ont iamais fait faire chofe d'vnemaflède pierre qui puif
fe corriparoiftre etV fui)îimicé'& magnificence d'ouuragc à vne
pyramidc,vn obcîifque, & tfU'Sptimgcdont nous parlons. Aufli
ce qu'ils ont iamais fait de grand3aeftc àTimitatiô des Egypties:
^mefmemcntlesefHgies des* Sphinges qu'on -voit maintenant
au Capkole,ont cfté apportées d-Egyptc:& croyons que ce aefté
depuis le -temps dcPîine : car ils ne tienrsent aucune merque de
ce qu'il efc rit du Sphinge,dcfquelsn y a pas vn qui ait netettes ne
ailles: car ce qu'on voit porter selles, font peintures de Chimères
&c Harpies.dont parlerons au liure des oy féaux ^ &: non pas des
Sphinges: Nous ne voudrions nommer les ftatuesdes Romains,
chimères antiques}en comparaifon des antiques Egyptiennes : car mcfme-
fortsn* * ft. mcnt voyôsentre les reliques des ruines &; antiquitez qu'on voit
' * à Rome5qu'il n'y a rien plus antique, que ce qu'ils ont tranfporté
\Antifilte\à^ pays d'Egypte. Rcâe maintenant que diïions dontîeSphin-
de^ome. ' geeftvenu aux Egyptiens: C'eft, que durant le ligne de Léo , $c
virgo, le Nil arronfeîes terres de l'Egypte : & les Egyptiens vou-
lansfignifler leurs richefles, ont exprimé vn monfrrecnfculptu-
/; , r te,ayantledeuant d'vne vierge,& le derrière de Lion,& Font nô*
^j? l£j£ % me Sphinx-: &pource que c eft vne chofefaicte à plaifir, on les
d * voitâintidiuersen fculpture* Tcfmoing en eft la fufdite grotte
teftede Sphinge. Et n'y a rien plus vray qu cllca ferui deicpul-
chre à la manière âcs Pyramides & obeliiques : Car Pline dit:
tAm&fium regem fUtmt in e4 conditum. Et pou rce que Funus conikum%
Fmutton* efteequenous nommons fàufement la Mumie, voulons prefen-
dltum: tementmonftrercn quelle manière on la faiibic.
OBSERVEES BAH î. BELOH. "*6t
jyelaMumie,& del * ancienne manicreàe confire ou jembaumer & en-* ieimor^
feuSt 'des corps en Egypte*; Chapitre XLVii.
> Es Egyptiens attendans la rcfurrcâion des morts,citi- confire Us
moyent grand mefFaia de faire confb.mmer les corps *re$ajfe\
\ humains es elcmcns^it^terre^eau, ou feu. Car , com-
! meauôsdit , Zoroaftes Pliiïolôpheleur enfeigna que ZôrW^-
îe feu eft vn animant qui dcuore toutes chofes , &: puis fe meurt
luy rnefme, auec cela qu'il a engîouty. Par cela ne voulut que les
corps fuiTent btuflez en Egypte à-la mode des autresnations , ne
enterrez î mais qu'ils fufïent confias , pour eftre preferuez àcs
ternis. Â^iTiPomponius Mêla, parlant des corps embaumezen mûa.»
Egypte!, les appelle en Latin funera meàïcata^ comme aufE Pline Fj*ner*nx*
Sematacorpora. Et de fait ils les confifoiét fi bien à l'éternité, qu'ilz "***•
■ « j "r c ■ a. i ii" Seruata cor-.
durent encor,& dureront fans fin : quieit cela que nous appellos ^
MumierLa manière de confire les corps en Egy pte • , a eâé diucr-
fè.-car qui pouuoit plus defpendre , eftoit le mieux traicté:& aufiï
qui pouuoit faire plus grande dcfpenfe>faifoit la plus fumptueu-
fèièpulture : ^n^ymo^roit homme qui ne fuftconficl 5 en quel-
le forte que ce fuft. Nous prenons iefdi&s corps confias les .
nommans Momie : & toùtcsfois lesautfacnrs Arabes deferiuans Ma3^em
laMumiCjentendoyentdccelledroguenommeeenGrec Piilaf- ^Zf^*
phakon5dontauons défia parlé au premier iiure. L'yfàge defdits ^
corps embaumez en Egypte jCeftà dire nofheMnmie^eftenfi
grand vfage en France,quc le Roy François reftauratcur des let- %oyFr*nçok
tres}nalloit nulle part3que {es fornmeliers ne apporcafi^ènt tou£- refiaurxteur
ioursquant&luyen la ferriere enfembie auccla Reubarbc:&: ^ktms.
au&queluymefmc en portoû fur luy. Ceux qui pour affermer,
leurs menterics touchant cefte Mumie, ont feint vne merde fa-
blon agitée par les vents, cngi-oudiTant les corps deceux qui paf^
fent les défères d'.Afriquc3ou d'Arabie , ont crompé beaucoup de
gcns.'cat combien que les corps periflent en ces&blons , toutes-
fois eftan s fubieas à putréfaction , ne pcuuen e fe refcntir que de
ce dont ilz font compofez. Ceux qui ontpeintles Cartes, & ont &#&$>!<>.
merqué les endroicts dont Ion prenoit la Mumie,ont bien mon-
tré en ceft endroict qu'ils auoyent peu de iugement & cognoif-
fàr.ce de telle mariere. Mais pour montrer qu'ils en ont menty,
KK iij
Zé2, S5GOND IilVJl.E DIS SINGViAw.
le voulons prouuer par TheophraftCjDiofcoridcjGalienjHero^
dotej-IippQcrates > Diodoré , Strabo , &c Pline : lefquels,parlans
d5 Egyptc,onccxprcfIèmc8.t eferit que les corps fuilkn t coafcme&
cçdrU. Par *â drogue nommée Cedria : defquels pendant, le temps que
nous citions au Caire ± en furent apportez trois qu'on auoit na-
Ztittremt*. gueres trouucz^és fufdi&s fepuîehres.v. Nousfommes entrera
nleredefe* pluficqrs chambres des fepulchresen ladite plaine :-car les vns^,
fnkhres. font en vouteje&autresen manière de petise chambre , dcfquefë
Ion en voit vn nombre inâny par les campagnes entre les fufdi-
£tes Pyramides. Uyauoit Ci grande quantité, de mouches en ce.
territoire celle. part ou fontikuees les Pyramides,qu'ainfi que les
fanions, leuer en panant Jair en retcntiffoit.Nous troauafmcs de.
rithymalùs- rherbedcTithymaluspîatiphylloSjCroifTantlàâupres.Nou.sde^
fkuphilLos. , difmes pour difner au riuage du Nil au dcfïbus des Pyramidesi
car l'appreft des viures auoitefté fait^qu'on yauoit expreffement.
porté: & retournafmss parle mcfme chemin ou nous agionsau.
parauantLpaiTé* Quand nous fufmesàJa r-iue du courant4u Nil,
trouuafmes des Gentils hommes Arabes campez en leurs tentes,
attendans expreûcmcnt mon.ueur du Fumet , pour lu y faire plai-
£>:&. luy auo.ycnt apprefté le banquet. Et pç*urce qu'ilz.auoyent
deux joueurs de violes aueceux,qui eniouant cbantoyçnteji-
fçmbleàja mode Egyptienne ^en trouuafmes l'harmonie ailés
plaifantejaqueîle nous a femblc bon mettre en ceftendroicl:.
Tï&yJQh de&Egypùens, . Chapitre., xl.vï-ïï.
SlTVSiliif£s v^°^es ^cs CuCdidis Egyptiens n'ont qu'vne cor»
rt.çkdes )gi ^^^^'de tendue, ou deux pour le plus , quincftqucde
EQftuos. gp |yj|Bp £>ye & Cbeuaîj finis eftreentorfe ,. tellement que la
Un SnilSk corde tac de 1 archet^que.du violon font d'.vne mef-
l^g^^^^^qie façon. Le col du violon çfl longrauffj a il affaire
de longues touches. Le çhçualcp.n'eft pas appuyé deffus vne ta-
ble de boiSjComme.font les n.oHres5 non plus que leurs Lues Se
Guiternes : mais fur vne peau de poiffpn pefché,au Nil , pommé
^^ • GlaniSjCollee par defîbus le bois, La refte du corps de ce Violon
efi faite comme vne boite platte, qu ilz tiennent appuyée contre
terre a vn longfer qui fort du corps dudit Violon. Car ilznelcs
appuient poiotCur l'efpaule. ïîz ciiantoycnt enfemble à voix paT
«OBSERVEE* :tAl "P. 'BEIO^. ^3
!ïeiîle,qu il faifoit afïèz bon ouyncar ce qu'ilz châtét , eft en ryth-
'mc.NpusarnuafinesauCairclemcrnieiourr , ou demourafmes
long temps (ans en bouger. Les marchands qui ont leurs bouti-
ques au Caîre,font (3e âiuer{èsnations,c5meîuif$,Turcs,Grecs,
&: Arabes. Mais les Iuifs.pour la plus grande partie y parient Es-
pagnol, Italien , Turc^Grec^ Arabe.
t)e 1$ Gtraffe 3 que Us arabes nomment Zurnapd*)& les Grecs & Lœ-
tins Camekpdrdwt. Chapitre xLix.
•*r
| Lncfutoncquc les grands Seigneurs quelques bar-
- bares qu ilz ayent cfté , n'aimâflent qu'on leur prefen-
l tâftlcsbcftes d'eftranges pays. Aufll en auons veu plu-
I fleurs au Chafteau du Caire, qu'on y a apportées de
toutes parts : entre lefquellcs cil celle qu'iîz nomment vulgaire-
ment Zurnapa. Les Latins l'ont anciennement appellee Came- C^X^
ïopardalis, à vn nom compofé de Licpard Se Chameau : car elle ^
eft bigarrée des taches d'vn Liepard 3 & a le col long -comme vn
Chameau. C'cft vne befte moult belle Se de la plus douce nature
qui foit.aquafî comme vne brebis fautant amiable que nulle
autre befte fauuage. Elle a la tefte prefquc fèmblableà celle d W
Cerf, hors mis la grandeur: portant des petites cornes moufles
detix doigts de long y couuertcs de poil. Mais entant qu'il y a di-
ftin&ion de mafle à lafcmellejCcllcs des maîles font plus logues:
mais au demeurant tant le mafle que la femelle ont les aureilles
grandes comme d'vne vache,la langue d'vn Bœuf,&noire,n*ayas
point de dents deflus la machelicre:lecoï long , droicl: ,■'& grefle:
les crins déliez Se ronds : les iambes grefles , hautes deuant , Se il
bafles par derrière, qu'elle femble eftre debout. Ses pieds font
fem.blables. à ceux d'vn Bœuf. Sa queu£ luy va pendante iufqucs
deflus les iarets/ronde^yant les poil plus gros trois fois que n eft
celuy d'vn Cheual. Elle eft fore greile au trauers du corps. Son
poil eft blanc Se roux. Sa manière de faire eft fèmblableà celle
d'vn Chameau.
2.^4 SECON'D LITRE
PartraiB de la Girajfe.
XnfraloSr
DES SINGVLA.
Quand elle court , les
deux piedz de dcuant vôt
enfemble. Elle fè couche
le ventre contre terre , Se
a vne durté à la poitrine
&: aux cuifTes comme va
Chameau. Elle ne fçau-
roit paiftre en terre eftant
debout fans cflargir gran»
démenties iamhes de dc-
uant , encore eftee auec
grande difficulté. Par-
quoy il eft aifé à croire
quelle ne vit aux champs
finon des branches des ar-
bres , ayant le col ainfi
long y tellement qu'elle
pourroic arnuer de la te-
ffce à la hauteur d'vne de-
mie picque. Et 1 ay ans faic
retirer au naturel, en auos
bien voulu icy mettre le
portraid.
T>,fun moult beau- petit Bœuf à'^éfrique 3 que les anciens Grecs nom»
mermtBitbalus, Chaptre L.
E plaifir quVn homme curieux peut receuoir de ren-
contrer vn animal.eft.rage Se fmgulierjefi: de luy trou-
uer quant & quant Ton nom ancien 3 pour le fçauoir
exprimer : car celuy qui a quelque chofe à deicrire,
ans la nommer de nom propre , fembie faire coruceden pren-
dre la peine . Parquoy nous eilans trouuez à voir vn petit
\ Bœuf d'Afriquejtrappe Se ramafTé , gras , poly , de perit corfage5
I bien formé,foudainemet nous tomba en la mémoire que c'eftoir,
; celuy que les Grecs auoyenc anciennement nommé Bubalos:
mais
OBSERVEES PAR. *. BELON.' l6$
mais faut prendre garde que l'affinité des di&ios ne trompe , pre-
nant Je Bouffie pour ceftuy cy.Nous trouuafmes en îuy toutes les
merques requifes à Bubalus. Et de fait il auoit efté apporré au 0HJJie\
Caire du pays d'Afamie , cobien que Ion en trouue autfi en Afri-
que.U eftoit défia vieiî,eftant de plu s pence corpulence que neft
vn Cerf, mais plus trappe &: plus grand qa'vn Cheureul , fi bien
trouffé Se compaflé de tous {es membreSjqn'il en eftoiefort plai-
fant à la veue:car fon poil cftam: de couleur faune, {embloiu eîirc
bruni,tant eftoit poly Se reluifant.Son poil eft plus roux tirant au
fauue,deftbus le ventre,que deifus le dosrcar il eft quafi brun .Ses-
pieds icmblent à ceux d'vn Bœuf. Auffi a il les iambes trappes,^
courtes.Son col eft gros &" cou rt,ayant quelque petit rani^qu on
nomme en Latin Pal&trk. -Uala.teftc.dc Bœuf y fur laquelle £qs
cornes font eîeuees deiTus vn os, fur le fommet de la tefte, noires,
&: beaucoup cochées , comme celles d'vne Gazelle , ôc copaftèes
en manière de croififant, desquelles il nefe pourroit grandement
défendre , attendu que les bouts font tournez contre la téfte. Il
porte les au rcilles de vache. Ses efpaules font quelque peu eîe-
uees , & bien fournices. Sa queue luy pend comme a la Gi-
rarTe iufques au pîy des iarets , &: eft ainfi garnie de poilsnoirs,
deux fois plus gros que les foyes de la queue d Vn Chcual.il brait
comme fait vn Bœuf,mais non fi haut.Somme, que fi quelquvn
faignoit voir vn petit Bœuf poly,bien trappe ,fauue,& reîuifant,
ayant les cornes en croiiTanc5haut eleuees fur la tefte, aura la per-
fpe&iue d'vn tel animal. Etpource que 1 au ans nommé Bubalus,
d'vn nom conuenant au Boufle^l fault confeffer librement que
fommes ignorans du nom ancien du Bouffie : car combien que
nous n'en ayons aucuns pardcçà,toutcsfoisilz font fi communs
en Italie, Grèce, & Aûe, qu'on ne voit autre animal plusfrequét. ~- ^
Par ainfi nous fcmbleroit chofe eftrage, fi Ariftote^qui a defpen- J^jJZ
du la valeur de fept cens cinquante mil efeus de l'argent d'Alc- j^
xandre,au prochas des animaux, n'en auoit fait aucune médon. Libéralité
Nous difons bien qu'il a parlé de Bubalus enplufieurs paiTagcs, JjJexMks.
Raccorderons bien qu'il veut entendre du Bouffie: mais les au-
tres autheurs nous mettenten doute, àfçauoir s'ilauroit point
entendu de celle petite befte, dont auons parlé cy defTus:car Pli-
ne àïv.Infïgnia Umenboum ferorum gencrà, Btibdos bifontes^GXcelkntî-
fte&vi &velecit4ti VrQs^mbmm^ermmvulms Bubdùmmmrnm "~
"""" '" ' LL
léé SECOND XTVH E Dï S SXNG V LA.'
imponit 5 cum ià-gignat *dfiktf9 vmli fatius ceruiue quadam fimïlitudU
ne. Solin a die tout le femblable. Toutes les merques que Pline
baille à Ton Bubalus , conuiennentàcc qu'auonsditdecepetic
Bœu£ Parquoy auons facilement conclud que Pline Se Solin
pour Bubalusn'ayent pas entendu du Bouffie. Etayansfait por-
traire iepetit Bubalus fur le lieu,en auons cy rais la figure.
ï,e portraiSi du B œuf 'd 'Afrique.
Tyvne autre manière de Cerf rejTemblant a vn Daim 3 anciennement
nommé .sixisi & de la Gabelle ^anciennement nommée
Orix. Chapitre Li.
Vûl y aupic mafle & femelle d'vnc manière de Cerf
[ou Daim en la coure de ceChafteau , que n'auons
, oncïceu cognoiftre3{înon que par {bufpecon nous
auons imagine que c'eft Axis>duqucl Pline a parlé
' en fon huicfciefme liure , chap. vinuefme , en cefte
mattiereri» Jndia &pferamnomirie *4xinjïinnuti pelle 5 pluridus cane-
OBSERVEES t A R t. BEI O Nr ^7
Soribufquemaculis Jacram Libero patri. Tous deux eftoyent fans
cornes, &auoycntla queue ; longue comme vn Daim , qui leur
pendoitiufquesfurFepîydes iarecs:qui dônoitàcognoiftre que
ce n eftoit pas vn Cerf* Et de fait lors que les veifmes les penfions
eftre Daims: mais les ayans mieux confidercz,&: auffi que n'igno-
rions pas les marques d'vn Daim,reiectons celle opinion. La fe-
melle eiï moindre que le maije. Toute leur peau eftoit mouche-
tée détaches rondes & Wanehes,ay ans le champ du corps de fau-
ue couleur fur le iaunaftre, blanches défions le ventre, en ce dif-
férent aux taches de la Girafle,car la Giraffeaie champ blanc,&:
les taches phenicees/emees par deffu s aflez larges, mais non pas
ronfles comme en cefte befte Axis. Hz retintent de voix plus ar-
.gentine & claire, ôc plusaërec que le Ccrfxar les auons ouy bre-
rc.Parquoy ayans eu beaucoup de marques manifeftes qu'ils n*c-
ftoyent ne Daims, ne Cerfs v les auons facilement- voulu nomer
Axis. Encor y auoit des Gazelles prmees,prin£ès du fauuage , qui ^k™-
refTembîent proprement à vn-Cheureul,quifont du cordage d'vn
Y fard ou Chamois Se en couleur^baflês deuant ^hautes derrière,
à la façô d'vn Lieure.Eiies ont vne ligne noire par defllis les yeux
comme le Chamois,& beellent en criant tout ainli qu'vne Che-
ureunais font fans barbe. Leur poil efttougeaftre , tirant furie
iaune paillé,î>kn poly & luyfantXedeuat delà poictrine, le der-
rière des feflès eft blanc comme à vn Daim^ La queue eft blan-
che par le deflb&ss&: brune par deftus:qui leur pend fur le ply des
iarets comme celle d'vn Daim.. La Gazelle court montant légè-
rement par lesrnontagnes , beaucoup plus vifte qu a la vallée > Se
va roidement à la>campagne.Elietient fesaureilles droicres com-
me vn Cerf:fes iambes font grefles , & a les pieds fourchus. Son
- çoleillong &: grefle comme au Chamois. Les cornesdes mafles
font plus grandes que des femelles ,quiferoycnt toutes dToictes,
n^eftoit qu'elles font quelque peu crochues par vn bout , &: font
plus longues que celles d'vn Chamois. Àuili font faites en ma-
nière de Lune. On les appriuoife : car leur demeure eft à la caxn--
pagne en lieux-fteriles èc (ans eau.
LL it
Daim.
Ck&mois, .
%€%
SECOND IIVRE DES SÏNGTLA.
singes ache*
\y£jheïcm=
trefùpmtli
mort.
Guenons.
Miimous.
Cynoceçhdk
Cercàpike*
€es.
Cebns.
T>es hafîtlmcs qu'on fait au Caire : c£* ivnt é]>ece de Guenon nommé
Callitriches. Chapitre lu. -
Es Arabes font beaucoup de lingeries & bafteleries
au Caire , qu'on ne voie pointa Conftantinople;&
en faifànt leurs ieux ilz battent vn tabourin aucc les
ssscszs^ doigts 3 & s'accordent en chantant au fon de leur ta-
bourin comme ifc veulent : car le tabourin n'eft enfonfé que par
vn des bouts:& la clifTe plus large que de ilx doigts , ou il y a plu-
sieurs pièces de cuyure qui fonnent quant &c quant : lequel ilz
tiennent auec la main gauche , le battans auec la dextre. Iîz ont
grande facilité d'apprendre des flngcries à plufieurs fortes debe-
ftes : & entre autres ilz en apprennent à des Cheurcs,&: les fellér,
& mettent des Singes à Chenal defïus s Rapprennent laCheure
à faire bonds35c ruer comme font lesCheuaux. Aufll apprennes
à des Afnes à contrefaire le mort ,enfe veautrant par terre , qui
font fcmblant de ruer aux Singes qui montent deffus. Audi ont
des Guenons apprinfes , qui eft chofe rare à voir: car elles font
communément inconftantes. Auffi ont de ces gros Maimous,
que les anciens ont nommé Cynocephali, û fages & bien apprins
qu ilz vont d'homme à homme qui regardent iouer le baftelcur,
& leur tendent la main, faifans fîgne qu'on y mette de largcnt:&:
l'argent qu on leur baille , le portent à leur maiftre. Ilz appren-
nent plufieurs fortes de Singes en cefte manière. Et entre autres
y en a des diffères aux no ftres : defquclz eft celuy que Plinc,pour
la grand' beauté de fes cheucux Se de fon poil, a nommé Callitri-
ches. Il eft totalement iaune comme fil d or , & eft du genre des
Cercopitheccs, qu Ariftotc nomme Cebus:car il a la queue lon-
gue comme ont les Guenons,
©BSEUVEES IAR P. BELOK. Z&?
f>e l'appyeji que font ceux qui vont en voyage au Caire à la Meque.
Chapitre lui. ;
: Ntant qu'vne Caraiiannc fe départ tous les ans du
[Caire pour aller à la Meque, p! u lieu r s Turcs fe trou-
! uenc au Caire pourfuyuk ladiâcCaraaajine.G'cftv.n
_ ) voyage d'aller en deuotion pour Mahomet :, non que
ce (oit fa fepulture,mais que ceft voyage de deuotion. Et pource
qu'il faut paffer beaucoup de pays deferts fans trouuer aucunes
villes ne maifons , ils font leurs appareils necefTairesà tout le
voyage. Et entre autres ckofesportenr, des pois chiches cui&s
fans eau,qui font feulement roftis dedans vne grande poéUe. Et
y a pluûVurs boutiques duCaire qui ne viuét d autre meftier que ry*!* du
d'en faire ainfi griller. Aufficn ontilsfacilemétia depefchc: Car ^eJ
il n'y a celuy qui n'en acheté autat qu'il luy en £zi\t pour faite fon J^J^ne
voyage. Les Turcs aîlans à la Meque 3 font deux voyages i l'vn en
Almedine ,ou gift le corps de Mahomet : l'autre à la Meque pour
trafiquera: marchander: Car ils en rapportent grande quantité
de drogues , &r marchandifes. C'eft celle que les ancies autheurs
ont nommée Petra : dont nous parlerons^ plus amplement au
troifîefmc Hure.
La defeription de nofire voyage du Caire au mont $inaî: auec vne
recepte finvulierc pour appreflerlachairagens qui Vote en.
voyage loingtain. Chapitre Liin.
^Pres qu'eufmesfait nos prouifionsde chofes necef- J^n^££
Haires pour vn û long voyage corne du Caire au mont ^
1 Sinai, fortifmes parla porte qui regarde le feptentrio,
^^>jlf &tronuafmesvne Garauanne campée bien près du
Caire5le long d'vne roofquee, attédans que toute la trouppe fuit.
apprcftecrCar Ton ne s'ofe pas efearter par le pays d' Àrabie/i l'on
n'eftengrand'bande.Parquoy-mofieurdeFumetayacvingtge-
niffaircs pour fa garde , fe vint camper le long du Nil : ou nous
cmpîifmcs noz vaiffeaùx & noz oudres de l'eau du fleuiie,faifans
prouifionpour trois iours , tant pour noz montures que pour
nous. Il nous falloir pafTerpar les deferts , ou n'y a ne fontaines,
■•.•■■.-' .- ,, ...t .... ... ., LL iij , .-,.
tj'ky S E CON 15 I ï V R'r '■ "D É3*- S -tfWG V t À»
ne ruiflTeaux:& auions apporté viurcs du Caire autant qu'il eftoit
befcwng pour aller &; rcuenir: içauoircft,vn Chameau chargejdc
bifcuit, pour ceux qui fttyuoienc la. compagnie de mondit fieur
du Fumet,quieftoyent en grâd nombre. Nous chargeantes auffi.
vn Chameau de chair préparée pouv'îc voyage., ainlî qu'il s'en-
fuie. L'on tuagrand nombre de iVtourons, qu'on fie bouillir de-
hachezen pièces». Enapreslonfepara la chair des os,qu'on tailla
àpetismorccaux,groscorarnelebo.utdu poulec, puis fut bouU
lue en de la- greiîe mfques à la confumpri5*dc l'humidité aqoeufe
qui eftoit dedans , auec des oignons cui&s. Cela. fait , fut falce.,
efpicee,puis rmfcen banls.Cefte viande cfi bonne à garder long
temps : Car encore quîon l!ait portée quinze tournées ,. en la ré-
chauffant^ y adiouftant vn oignon il femble que ce fait vne fri-
caf^c^aifchementfaitedaiourmefme, qui nous fembîa fors
bonae viande , eftans es deferis. Cefte iotirnee fut extrememenc
chaude; car il ncfaifoitpointcb vent. Nous parTafmcs la nuid
deffouznozteatesioignantleriuagedu Nik&r deiogeafmes dés
kminuid pour cheminer à la fraifeheur : & parlions les fablons
ByofcUme- fteriles&: mois,. ou il ne croiil finon vne efpece de Hyofciamc
noire.- noire,en (Lgr-ande abondance qu'on ne voit verdoyer les campa-
gnes d'autre eiipfè que de cela : des fejpçn ces de laquelle les Egy-
ptiens font de l'huile pour brufler^ auili s'en feruent à plusieurs
autres chofes. Le lendemain s'elleua vn petit vent qui rafraifehit
tout le iour: car il abatoit la véhémente chaleur du foîcil. No-
f*ts enEn* (tre chemin cflok droicl: au.leuant. Mous trouuafmes vne forte
fte. de Rats en cefie campâgue^qui viuçnt feulement de ladite femé-
ce d'Hyofciame. Us font cendrez derTus , & blancs deflbus , de
cx>rfage affezlongs^ayans la queue longue, &: le mufeau poinciu:
lesquels il eftoit facile obfouer : car quelque part que foyx>ns al-
. lez^auons toufioarseu v.n r>iç% quant & nous , duquel fouiiïàrçs
dedans-later re les ridons (khots^comme auifi tous ferpens. Seu^
lement cheminafmes iufques au midy,& campafmes deilbus nos
tentes pour repofet les Chameaux.^ montures : &abbrcuuaf-
mesJesmonturesauiQkauec l'eau desoudres que nous auions
• prifeau Nil.. Les. Chameaux ne beurent point : car ils peu-uent
demeurer trois ou quatre iours fans boire. Ceuxqui ont dit que
les Arabcsallans paries-deferts,chantentàleurs Chameaux pour
leur donner meilleur courage de chemineront eu raiion : car les
chamaliers-rnefurans les pas des Chameaux & les f uy uans à pied „
font mefmcs paufcs en. Jeurs chafons , &: de la mefrae mefurç que
jes pas des chameaux. Nous derneurafmes. campez iufquçs à la
minuit- Lanuiâ: nous fut froide: carie vent eltoit fort nébu-
leux 6c froid. Les brouillarts y mouillent en Septembre comme
feroitiaroufee du mois de May en Europe:& toutesfois les iours
y fontexceffiuement chauds. Nous partifmcs tantoft après pour,
cheminer à la fraifcheur.C'eftoit la ymnek que no/us. citions par-
tis du Caire; 6c cheminafines long temps la nui&,$: arriuafees a
iourouuert au puiz du Sues , ou nous dcmcurafmes tout le iour.
Ce puiz n'eft qu'à vne lieue Se demie de la ville, 6c cft enfermé en
vn petit chaftelet. L'eau en eftfalee : toutesfois pour o en auoir
point d autre, les paffans &: habitans du Sues -font contraincïs
d'en boire: car ils n'en ont point d'autrc^ls ne hipportét du Nil,
eombien qu'il y ait vne tresbeHe& grande eifterne au çhafteau rnectshrne,
du Sues,qui s'épiift vne ou deux fois la de i eau de la pîule-.car co- AU Sue''
biçîJ qu il n'ypleut pas fouuent, toutesfois quand il y pleut^c'eft
d'aifez bonne forte. LeauMe cepuiz ncfeagoçrcfinon à abbreit-
uerles Chameaux 6c Cheuàux: car communément les paiTâns en
apportent pour leur prouiûon. En allant voiries herbes àece
terntoire,&cftans quel que peu efloignez par la plaine, trouuaf-
mes de rAmbrofîa,Sene , Roiès qu'oii dit de Iericho , Colocy n- f r
rhes, Acacia, Paliurus d'Àgathocies 3 que Theophrafte a deferit, ^'Jr°jU'
& vne.particuliere efpece de genets,& de deux manières de Rha: ^ ^ /f>
nus,&: de l'axbre que les Grecs du Caire nomment Oenoplia. Là n^o.
prinfmes vne V iperc,. 6c deux Ceraftes mafie Se femelle , qu'ana* ?diurm.
tomifafmes 6c defcnuifmcs,par le menu, &Templifmes les peaux ^mnm.
débourre :Sc combien qu'ayons fait plus long dif cours de cefte oenoplu.
Cerafte auec les autres ierpens , toutesfois ne voulons palier ou- v^"e'
tre fans faire en tendre quelle a deux petites eminencesau deflus Cojjf£r
des yeux,comme des petis grains dorge,qui (embknt à deu^-pe- ^e},mm^
rites cornes, dont Ariftoce a fait mention , qui lésa nommez
Colubros Thebunos* Mais corne tous autheurs qui fuyuét les eferits
l'vn de l'autre , taillent quand le premier a faiily : tout ainfi Soiin
fuy liant les parolles de Pijnc> a mal dit queja Ceraftc portail: S. ^J%^
cornesxar no9au5s CQgjieu lecôtrairc.EUe a les déts Cemb labiés à Sra'°*
celle de la V ipere,& erHa mefme façô. No9 fçauos qu'il y a grade
differëce entre les Vipères feîo les pays ou elles Cot nourriesrcar la ^wi4*>AS
curioiîté de les cognoiftre,a fait qu'en auos trouuc en Angleterre, trktare.
LL ii£j"" — •-*"'
ZJi. SECOND 'LIVRE DES ^INGViA.^
France,îtaIie}Grece , Afie , & Egypte , différences en corfage &
couleur les vncs aux autres y& de quelques autres contrées de
France. Pour Vipère entendons lesferpcnts que les habitans de
Tourainc&: du Maine nomment Âfpicsr&auonstcfmoins qu'il
y en a aufîien Àuuergne: Car "eftans près du monaftere des Mi-
nimes ou bons hommes que monfeignent l'Euefque de Clair-
montj M. Guillaume du Prat a -édifié auprès de Beauregard : vn
%ené des apoticaire de fa famille nommé René des Prez3 du pays du Mai-
Pretypoti* nc > natif de FoulctourteYen print vne auec îa main nue prefent
cotre mors \e^t fjcur>& couce £a trouppe qui le fuyuoi^penfant que fuit vne
ne ifere Qqxùçxixxtç, : & Bit mors au ponlce : dont foudainement eut tout
J ' le bras enflé, auec û grands accidents qu'on le garda pour mort
Fefpace de "huiet iours3dont il en cfchappâ. Les Ceraftes comme
aufliîes Vipères en toutes parts,rendent leurs petits en vie, com-
me aaflî fait la Salmandre. Et ponree qu Ànftote en vn partage
au dernier chapitre du cinquiefme Hure de l'hiftoire parlant de la
Viperedit en cefte manière : Parît catuks obwlutos membrants , que
tertta djemmpuntur. Euenkinterdum^ vt qui in vtero adhuc/ùnt, abrojïs
membrankperrurnpant. Parit enimfinptlis diebusfinmlos 3 &pfores qu&-
'viorjnth Cela nous a baillé îe defir de voiries œuurcs admirables
de nature , Savoir les Vipères pregnantes. Mais nous; a femblc5
£iuuc la veritérqu elles les rendent fans tuniques. Laquelle chofe
-auonsicyexpreScment voulu cotter,à fin dadmonefler quel-
qu*vn dcnoftre incertitude^ qui le pourra obfèruer, &: quelques-
fois nous en rendre aûeurez en nofire doute.
Cefle eftfa figure £<vne Viper t-
OBSERVEES Ï^AR. P. BEL ON. 273
Encore trou'uafmes plufieurs autres plantes en Iadi&e pîanu-
rc que ne peufmcs exprimer par nom antique ne moderne : Se
campafmes Se repofafmes en ce lieu , eftant'Ia trouppe fur vnc
platte formeioignant ledit puiz.
La defeription dvnpwççjres-profondyen l'^rabUdefirte,
Chapitre LV.
Epuiz^ontauonspar^merire que difionsfà façon: -~ ^
, carde vray iî eft eftrange. Il a elle fait a grands fraiz w^^
* au temps pafTéjîors que le Souldan dominoit en Egy- Mairie,
f pte ,& ce à fin de rendre le Sues mieux accommodé
d'eau:& auiïi que ceuxqui vont & viennent par ces pays là , puif-
fent abbreuer leurs beftes. C'eft vu petit baftiment renfermé de
muraillej&eftquarréen manière de Chafteîct, ou il y a vn engin Co*!* ï
exprefièment fait pouriirer l'eau du puiz qui cft trcs-profondya- *££•
ucc vne roue virée par ia^oxeede deux Bœufs : deffus laquelle ■*'"■•
roue font fouftenues deux cordes attachées Tvnc contreîautre,
à vn pied de diftance : Se au long des cordes , il y a plufieurs petits
pots :& ainfi qucles Bœufs font tourner la roue , auiR virenx les
cordes en hauçantlcau hors du puiz par le moyen defdits poj s
qui simplifient là bas,& eftans venus en haut ils s cfpadent ainfi
que la roue tourne , & en fe verfant font tomber i eau en vnc au- cifterne d»
ge qui eft defibus la roue , dont Feau s'en court par vn canal , & ^74
fort hors du circuit delà muraille, & fe va rendre en des cifternes sucs.
hors ledit Chaftelet: quiaefté quelque peu fortifié pour tenir les
gens dedans en feuretéenfembleauecJeur beftiaL Cefte àcfcn-
ption nous férue au récit de tous ceux des iardinages d'Egypte;
car ils font quafi tous faits fuyuant ce qu auons dit de ceftuv-cv.
MM ' '
274
SECOND LIVRE DES SÎNGVLA.
PûrtrdB de acacia*
IpUntei des
phtdm, â
lieux àeferts.
Gumme.
Gtimmi
Arabie um.
Quelles plantes croijfent parles fablons3 autour au Sues,
Chapitre L v i.
Tf^Ê L ne faut quvne heure & demie pour aller duditpuiz
1 '^^ iufques au Sucs : car il n'y a qu'vne lieue Se demie.
Jm Quad nous eufmcs demeuré vn iour tout entier, par-
■wlfetifmes long temps auant lai minuict, Se nevouluimes
entrer en la ville du Sues iufques au retour. Quand le iour clair
fut venu , nous eftions
deua à la cofte de la mer
rouge-, ayans îe^Sues à
derny- quart de lieue de
nous. Et paiTafmes vn
defert ftcrile , ou il ne
croifToit vne feule plan-
te-, fars plufïcurs arbres
d'Acacia ,: dont la gum-
me eft diligemment re-
cueillie par les. Arabes,
Se efl: celle dont nous w
fons en Europc,en gum-
mant l'en cre Se les tein-
tures: ibit quaucûs mo-
dernes ayent penfé aur
tremet, toutesfois prou-
uerons au Hure des ar-
bres toujours verds,que
c'eft celle quelesancies
ont appelle en Latin Gu-
mi ^trabicum. Sa fueille
cft ii déliée qu'en prenât
vn rameau on le peut
couurirauec le pouce:&:
fi l'on compte lesfueil-
les , l'on trouuera en a-
uoir couuert trois cens
cinquante. Les habitans frappêç fur -fes. rameaux, Se font tomber
OBSERVEES PAR P. BELON. ZJf
tes fuciîîcs à terre aucc vne longue perche , à fin de les faire man-
gera leurs moutons. N ous auons cy rais le portraid du fufdic ar-
bre,contre£tit au naturel.
Quand nous euirnes paiTé quelque peu au delà du Sucs , en~
trafmesenvne fpacieufe campagne verdoyante de Sene, qui y
croift fans eftrc (emé,tel qu'on no9 l'apporte par la voye des mar-
chands. Le Sene qu*on vend es bou tiques des drogueurs ou ne- sent.
gociateurs, eft de deux manifeftes différences , comme il appert
par fon élection, dont l'vnc a les fem-ences en filiques plâtres, re-
courbées en manière de faux, èc duquel la fueille eftpoinctue. r-
L'autre a auffi les Cliques plattes comme la précédente , mais el- ^nf *
les font beaucoup plus larges,& moins courbées en faux, &: dont
îafueilleeft moune,qui ne (c termine en poinde corn me celle du
premier. Le premier eft le meilleur^uC! eft il nommé Sene de le-
uant. L'autre eft nommé Sene moyen 3 qui eft de moindre opéra-
tion. Cefte diuerfité vient de ce qu'il y a deux dincts pays qui le
produifènt , &" par ainii nous font apportez par diuerfes voyes.
L'affinité des choies qui fe reffcmblent Tvne à l'autre 3 a fait que
fouuent y ayons veu venir erreur , comme eft ia aduenu du Sene,
& de ce Bagucnaudier , qui eft maintenant commun en noziar- Btgimuu*
dins. Pluiieursl'ontapprouué eftre efpece de Sene : toutesfois dier.
c'eft choie fàufe : car il n'a vertu qui puiffe cqnucnir auec k Sene^
qui eft du nombre des plantes tounoars verdes. Nous feifmes
trois ftations depuis le Caire iufques au Sues. La première auoit
efté au riuage du Nil,deiTous des arbres de Dadiers : La féconde
en la fufdite campagne: La tierce au fufditpuiz. du Sues. U eft ne-
ceifaire en allant parce chemin là^qu on fuyue les logis députez,
qu'auons nomme ftations.
De l'e4u des dou^efonuims ameres de Moyfe^ dont Pline ajkit
mention. Chapitre LVii.
! Ontinuans noftre cheaun , & eftans arriuez dratfez Fonu'wes
% bonne heure aux douze fontaines, poiàfraes là. L eau ancres. ^
l en eft moult falee & amere , & dit on que ce font les ;??*% fQ^
i douze fontaines dont il eft faid mention en k Bi- tM™r ■
ble: carmeimementilslcs noment les fontaines de Moyfc.Eilcs '^e''
font datout en lieu fabloneux & fterilc3en vue trcfgrade capagne
MM ij
Zj6 SECOND LIVRE DES SINCVLÀ.
nitreufc, fore large & fpacieufe : & font diftantel'ync de l'autre
plus de cinquante pas, non toutesfoisd vne mefmemefurc : car
IVnc cft à cent pas,l*autre à cinquante , tât du plus que du moins.
Toutes les fources fortent de terre , ayant vn petit tertre ou pro-
. montoire: defquelles l'eau s'efpand en plusieurs ruiffeaux , qui
font en manière de fontaines d'eau courante, qui peu de temps
après auoir couru , fe perdent dedans le fable. Le Soleil nous a-
uoitfort altérez, tellement que nousfufmes contraints de boire
de l'eau falee, de laquelle, encore qu'elle fuftamere àcaufe du
• Nitrc,il n'y auoit ceiuy de noftre compagnie qui n'en beuft , Se la
re trouuaft bonetcar i'alteratio qu'vn chacun auoit, eneftoit caufe.
Otad de U Vu canal de la mer rouge. Chapitre lviii.
mer rouge.
A fin de la mer rouge cft au- village du Sucs , ou il y a
vn Arccnaî pour les galères du Turc,qu'on a tirées au
fec en temps d'hyuer ; car la plage ou port n'eft pas bie
fèurea tous vents. Cefte mer rouge n'eft linon vn ca-
nal eiSToid, non plus large que Seine entre Haurcrlcur Se Hon-
Bdwreftewr. defteur,ou Ton peut nauiguer maîaifement Se en grand péril : car
Bondeflcur. lesrochcrs y font moult fréquents. Quelques vns quiontouy
E4» (U U parîer Jc ceftc mcr,penfent que lcau,ou la terre, ou fablon en eft
n '■* rouge , mais il n'en eft rien. Son canal s'eftend du Septentrion à
^ " Midy , Se fe commence au Sues , Se va quelque rrente mille de
droiâe ligne : mais quelque peu au âcl^ des douze fontaines,il fe
courbe vn peu vers l'occident. La campagne ou nous eftions,
eftoit quafï égale en hauteur au riuage de la mer rouge : mais de
l'autre cofte y a de treshautes montagnes pierreufes, qui entour-
ncntlamer. Il n'y a que deux traic~fcs. d'arc des fontaines ameres
iufques à la mcr,& enuiron vne lieue* iufques aux montagnes que
nous veoyons à main gauche. Apres que le rlot rut retire , y re-
nxerchafmes plufleurs fortes de petits poiffons, de coquilles , Se
autres exercmens de marine: entre icfqucls veifmes vne cinquief
me efpece de Heriffons de mer,que n'auions veu aiîleurs-.cÔbien
Bmjfom de qU^cn eu riions ia obferué de quatre fortes différentes l'vne à l'au-
^ tre. Toutes coquilles y croisent en merucilleufe grandeur, ou
pour îeclimatjou pouria température de fair,ou pour la nourri-
turc qu'ils y trouucnt.
mer
rou
OSSI&VEES PAR. ?. BELON. ZJJ
jyw^&rc de Rhmnu$yquic¥otftMX nuages de la mer rouge.
Chapitre* Lix.
i Oustrouuions vn arbrifleau refiêmblantà Rham-
\ nus altéra, naifîànt le long de la marine, ayant Ces
; fueilles fortefpoiflès,faîces>&: blanchaftres.Scs ra-
• mcauxfontcfpineux,maisd'efpincsm.oufiès, co-
rne en l'arbrifTeau de Rhamnus d'Europe. Au fil
vcoyonsles pas des Cheuretccs fàuuagcs,appel lecs Gazelies/lm- G&lellc;.
primez comme eft la figure d'vn cœur dedans le fable, par ou el-
les auoyentcheminé:car le iablon y eft égal. Elles defeendét des
prochaines monragnes,&: viennent boire aux fontaines quauos
dides^ au fïi brou fter cefteefpcced^rbrifïèau. Pline a fait tref-
ampîe mention , dcfdi&es fontaines , qu'il nomme Fontes amari, Fotes d™r}1'
aupafTage ouilcfcritque Ptolomee amena vne foffe pour met-
tre la mer auec le Nil,laquelle eftoit large de cent pieds,hau te de
trente,îonguede trente fept mille. Et quand il futarriué iufques
aux fontaines ameres,il cefïà de mener la mer plus outre:car û el-
le fefuftmeflee auec le Nil, le pays d'Egypte n'eufl plus eu d'eau
douce pour boire.Ou bien3cedit-ilspourcequela terre d'Egypte
n'eft point trois coudées plus haute quciamcr.Nouscampafines
pour la quatriefme fois depuis le Caire , &c la croificfme fois de-
puis le Nil.Àyans rempîy noz oudres d'eau, continuafmes noftre
chemin par campagnes pierreufês,feiches,&: fans arbres,excepté
quelques genêts qui naiflènt parla campagne. Le grand chaud
nous dura tout le iouncar le vent feptentrional qui nous auoit ra-
fraifehis les iours precedens , auoit du tout ccKé. Et encore que
l'eau de noz oudres^rife aux fontaines ameres , fuft falec &: pua-
te, efchauffee du foleil , quati bouillante , fi eft ce que nous n'en v , -
auions pas a demy pour boire par chemin:carla chaleur & l'ai- amereim
teration saugmentoit en la bcuuant chaude 3 laquelle nenous
permettoit eftancher kfoif.
MM iij
Chameleom
rouges &*
hlancs.
tTJ% SECOND LIVRE DES SINGV^A.
Ve plufieurs arbres durable : &de ceux qui portent la laine : & des
Chamdeons. Chapitre. ,lx.
^ Ous trouuafmcs des Chameîeos diffères en plufieurs
merques àceux d*Egypcc,d autac qu'ils font de moin-
| ^ dre corpulence l & ont le champ blanc , bigarré de
rouge, ne tenant riende la couleur des autres. Nous
deienrons l'vn $c l'autre ailleurs plus au long , au liure des fer-
pens : toutesfois il nous a fernble bon en bailler le portraict en ce
lieu,pour monftrer qu'elle efl fa figure. Ioind que nous en.au.oiis
defiaamplement parlé par cydeuant.
Le j)ortrai6î du Chameleon*
cJt(dUu Nous veoyons les Gazelles feutrages , paiiTans par les campa-
gnes,courans à grandes bades. Nous arreftafmes enuiron le mi-
dy pour repofer les montures , & pour cuiter le grand chaud def-
£bus noz tentes. Quand la nuid fut venue nous rechargea fmes
bagage, àirn decheminer lanui&au fraiz ., & commençafmesa
trouuer quelques petites montagnes & collines ,&; eftans parue-
nus à vne petite fontaine , & ayans recouuert des befles en vie5
que certains pafleurs conduifoyent d'vn lien en autre., les appre-
OBSERVEES VAi-"i. BELOH. VJV
fl-afmes à mager iU là campafmcs pour la cinquiefme fois. Nous f^LT
fdfmcs du feu aucc du bois de Tamarifquc&de l'arbre qui por- ;£J» *
te de la;laine,&: aucc.celuy de F Acaeia & Oenoplia/eifmes cuire ^^
la<:hairfraifche. Nous pourmenanspar ces petites montagnes, CA^dn
trouuafmes des Cappriers qui eftoyent patuenus à la hauteur de horefiens.
petits figuiers , tellement qu'il nous failloic monter deffns l'arbre
pourauoir de fon fruiçfc.qui cft gros comme vn œuf de poulie, 5c
dedanslequelfafemenœ.eiienclofe.-fescapprcsfantgroires co-
rne noix. Qui gou fie de fa femence, la trouue chaude comme
poiure,comme auffi en eft la Cappre:& tout ainfi comme les L6-
bards fe feruent de mouûarde blanche à mettre en la vernache
pour ia garder de bouillir & demeurer long, sçmpsg^uce 3 tout
ainfî les Arabes fe feruent des.fçmences des cappriers pour met-
tre en leurs vins pour les maintenir doux , comme auilî Auiccne .
auoitia coté. Nous trouuons qu'Hérodote a premièrement fait ^_ Si
mentionduftfdiaarJ>re^ ar
phraftCjPlinc,^ plufieurs autres en ont "eferit. Il eft du nombre
de ceux qui demeurent toujours verds. Leur laine eft plus fine
que la foye,de laquelle les Arabes filent de trefbeaux linges > plus
déliez & firçs, que ne font ceux qui font faits de finefoy e, & plus
blancs que ceux de cotton. Cela fe peut bien prouuer par fes pô-
mes qu auons rapportées Se moftreesvefquelleseft trouuee gran-
de quantité de laine. Nous cefTafmes de cheminer en campagne,
&€ntrafmesen pays des môcagnes, 5c en pays plus fterilc>&: ians
herbes ne arbres,que n eftoyent -.les autres dcferts3que nous au ios
iapaffez.Et ayans cciTé de cofloyer la mer?iaUÎa{mes l'Arabie dé-
ferre , &enrrafmes en la pierreuie , & campafmes cefoir en vne
plainejquieftenformed^xmphitcatreicarelleefrtoujecnuiron-
nee de montagnes , linon en vn endroicl:. Ce tut noilxeiixieiiiie
logis. J^prcs qu'eufmes repofé &: que le chaud futappaiié , che-
minarmestoutlerefteduiour,&:lanuicl:cniuyuant. Et quand
îe poinct du iour fut venu, retournafmes encor à la raencar quâd
nous la laiffaimesj elle faifoitvndeitour,fe courbant en arc. Il
jxousconuint cheminer cnuiron trois traicts d'arc dedans l'eau le
long du riuage,pnis la laifrcr,& entrer en vne grande bouche>en-
tre montagnes iablonneufes,ou nous trouvions de rechet autres
arbres lanigères , & Cappriers arborefees. Côùnuans noicre che-
min , après auoir patTé entre ces moutagnes , nous encraimes.cn
" MM" iiij
2$0 SECOND LIVRE BES, SINGVLA,
vnc campagne , ou veifmcs grandes croupes de Gazelles ,"qni vi-
uentfiloingdeleau , qu'auons prïns argument d'ofer affermer ..
quelles ne boiuent poincou pour le moins fi elles boiuent , e'elc
- rarement:chofe qui n'eu: pas fort à croire , que les anciens ont ja
coté*, ioinct que plufieurs autres berces pcuuent viure fans boircy
cerafies. Se mefmement les Brebis du pays d'Angleterre ne boiuent aucu-
riper®. nement } comme auffi les Ccraftes & Vipères entre tout le genre
chamelew £cs ferpens fe paflènt de boire.Comroe au iîl font les Chameleos,
liment long ^ - pCUuent viure plus d'vn an fans rien manger. Quand nous
Temps j m cufmcs cheminé long temps , & qu'il commença à faire chauds.
demeurafmes pour euiter la chaleur du iour , & fi toft quelle fut
pafiee5aprcs auoir rechargé bagage , nous cheminafines toute la
nuid au fraîs:& entrafmes en des lieux de rochers fort difficiles:
auffi eft ce le commencement des rochers de l'Arabie pierreufè*
"Du premier village que trauuajmes yaUans au mont Sinak
Chapitre LXi.
Village m
l^ixable.
?h<
E iour venuynous eftions défia entrez en vnc gran-
de ouucrture entre moult hautes montagnes qui
eftoyent tant à dextre qu'à feneftre s quand corn-
mcnçafmes à trouuer vn beau ruùTeau d'eau dou-
ce de claire fontaine , venant d'vnc montagne de
bien îoing. Ce fut la première eau droi&ement douce courante,
que nous euffions trouué furie chemin depuis le Caire. Nous
trouuaimcs vn grand viîlagcà l'entrée de cefte bouche , habité
uugou. d'Arabes , nommé Pharagou , ou il n'y auoic que trois ou quatre
maifons baftics : car les villages de ces pays là ne eonfiftent pas
en maifons eleuees^nais au nombre d'hommes qui habitent àcC-
fbus les Palmiers au defcouuert,ou deflous les rocherstcar ils ca~
tient leurs habitations en terre^comme Ion voit aduenir en Tou-
raine, & Lodunois , &:en plufieurs autres lieux le long des riuie-
Isùhres fru* rcs de noftre France. Vn Geniffairc y tua vne corneille auec fa
Bien de harquebonfc,laqueîleilprefèntaàmonfieurdeFamet. Le villa-*
ge de Pharagou nous fembla plaifant , au regard àcs pays que
nous auions cheminé : car il y a bel ombrage de Grenadiers, PaU
miers301iuiers>Figuiers,Poiriers>& autres arbres frui&iers. C'cft
le premier village que nous ayos trouué depuis le Caire, excepté
le Sucs,
OBSERVEES PAR P. 'BEL ON. 2,St
le Sucs. Apres que fufmes refraifehis de l'eau douce, Se en eufmcs
beu noflre beau faoul, &rrenouuelléla prouifion , Se rempîy noz
oudrcs,& rccouuerc de la chair fraifche,cornmc poulailles , che-
ures,moutons , Se aulfi des frniclz , fçauoir eft , pommes , poires,
grenades, Se raiflns frais , & que chacun fc fut repofé , pcniàfmcs
à recharger bagage,& continuer noftre chemin. Les hommes de nommes de
ce pays font côcens d'habiter deflbus les palmiers au defcouuerc, couUu,r£o*
qui eft la caufe qu'ilz font de couleur d'Oîiue. Et pource qu'il ne ^5-
pleut gueres fur eux,il leur fufBft auoir leurs maifons faites de ra- '
xneaux de Palmiers,appuyees encontre les tronczjpour les défen-
dre quelque peu delà véhémence du Soleil. Les Alhes,Cheuaux,
Chameaux, Mo^toSjCheureauXjBœufSjVaches^heureSjpoul-
Ies,& autres animans de ce pays, font beaucoup plus petits , Se de
moindre corfage.que ceux d'Egypte. Nous montafmes là haut
fur la roche , ou trouuafmes des arbres de Balanus Myrepllca, tdtwMj*
croiftans à la hauteur d'vn bouleau^entre les rocs , ayâs auftl leurs re£rca"
rameaux de mefme façon. Oeft vn arbre blanc par le tronc:telle-
ment que quanden veifmcs vn de loing,penfions fermemét que
ce fuft vn arbre de bouleau. Les habitans de Pharagou font diii—
gens à recueillir la femece de ceft arbre, de laquelle ilz font gran-
de quantité d'huile. Cequiienousfeittrouucr, eftqueveiimcs
des femences auec les (ilîques,quifc fendent en trois^qu vn Ara-
be du pays au oit là amaffees en vn monceau auprès du village. En
obferuant les herbes qui croisent dedas ce runfeau , trouuafmes
cclles-mefmcs qui fontes ruiffeaux d'Europe, comme Balfamite,
Pauliot3Conifc, Moron , Creftbn Se Ioncz. Nous fuyuifmes le
ruirTeau,allans contremont par la vallée , paiTans par deftbuz des
foreftz de Palmiers. Tout ce iour continuafmes les vallées entre
les montagnes qui font du tenant du mont Sinai Se arreftamies.
quelque peu noz montures pour repofer fur iour iufques à la
nuia^delàchcminafmcstoutenuia^arriuafmes au pied des
hautes-montagnes de Sinai, qu'il commençoitdefia élire iour,& ^ZTd*
dormifmes vn peu au pied du mont , Se n'arreihfmes gueres que shuk '
ne rcpnnffions noftre chemin par *ne difficile montée , pour ar-
nucraufommetdc Sinai. Elle eft faite artificiellement à degrez
de pierre taillée^ quelquefois engrauee dedans le dur rocher, à
fin démener les Chameaux , Se autres animaux plus aifcmenr,
dcûus la montagne. Lon n y meinc gueres de Chameaux : car le
voyage cil trop difficile pour cux.Cefte montée dure bien demie
NN
iSi SECOND -Lirai' DES $lKGVt£
Jieuc. Quand nous cufmcs gaigné le haut , il nous fallut encor
cheminer plus de deux lieues encre les motagnes , qui font com-
me buttes rondes,çà & là , disantes les vnes des autres, (ituees au
plus haut faifte,defTus la plus grande montagne : 6c y en a de plus
grandes les vnes que les autres. Iieftoit après Midyauant que
nousfuflions arriuezau monaftere : Se toutesfois nous auions
commencé à monter la montagne des le poind du iour.
VttmontdcSindi.
Chapitre
Moatde
Sinà.
Maronites.
Monomère
du mont $i=
AgiatLaurd*
Mont StnaL
0pnt Or eh
Oulans maintenant parler du mont de Sinai,&n'y
ayant rien de plus fameux que le monaftere, nous
a fèmblé bon premiercméteferire que les religieux
qui fc tiennent leans , font Chrefticns Maronites
viuans à la Grequedcfquclz eftans ia long temps au
parauant aduertis de noftrc venue j vindrent au deuant de nous,
&nous reçeurent humainement. Leur monaftere eft fait à. la
mode de ceux qui font au mont Athos en Macédoine , reflem-
blant quaiîàccîuyqui eft nommé Agias Laora. L'eglife dece
monaftere eft en bas Lieu , comme aufti cil le monaftere d'Iucro.
II y a ordinairement enuiron foixante Caîoieres Màronitcs,dont
les vns font Grecs, les autres font Syriens , les autres Arabes , te-
nans toutesfois le nom de Caîoieres , & viuans à la Greque. Hz
font comme fi les religieux Alcmas, ltaliens,Efpagnols eftoyent
auec les François : car il bien iîz parlent diuers langages , toutef-
fois n'ont qu'vne rncfme reîigion.Scmbîablemcnt les Maronites
qui font religieux Chrefticns Arabes,& les Grecs ne font quVne
mefme religion,qui Ce nomment tous du nom de Caîoieres. Les
pèlerins qui vont au mont Sinai,font logez dedans le monaftere:
car il n'y a point de logis ailleurs. Il eft affis en vne vallée au pied
du mont Orcb. Il y a leans moult grande commodité d'eau : car
vn ruiftêau venant de la montagne defeend leans , qui remplift
leur ciftcrncd'eau,qui eft moult claire/roïde, douce, & parfaite
en toutes qualitez. Ce monaftere eft en la vallée entourne de
hautes mu railles, tellement qu'iîz peuuent tenir fort leans contre
lesennernisquilesvoudroyent aftaillir. Ilyaaufll vncmofquee
leans pour les Arabes ôc Turcs , & logis député pour eux : car les
Portraiâl dit mont Swai> .
Sinaïfûrlcqudnottre Seigneur baiila fàLojr àMbyfe.
LemontSinaï.
2C.
ï haulteui
inaï.
Cefte montagne eft
les autres du pays de
plus haulce que toutes
l'Arabie pierreufe
Oulcre ceftc Mer rou-
ge ion voie les monts
% àc S. Antoine & de S#
\ M<icario.
5 é «
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§•2 §<4I
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„ C g y g
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iiM o _B g q
f) s wU
>> S i SJS S.
^ OBSERVEES PAR P. B E LON. lS|
Chrcftîcns n'ypeuuent venir qu'iîz ne foyéc accompagnez d' A- rcrgacii*^
rabes Turcs.il y a de trefbeaux vergers par les vallées du mont de mont Stmf-
Sînaijou iîz cultiuent des vignes , des légumes , Se y plantent des
herbes,commechoux,lai&ues,bettesioignons>auix)porreau^,8£
telles autres herbes vulgaires. Hz y cuîtiuent aufii des arbres frui-
diers de diuerfes efpeceSjà: principalement des Amandiers.
"De fonction du mont S'mtù , £7* dumontOrcb.
Chapitre lxiii.
\ Près que nous eufmcs difhé dedans le monaftere , Se
\ que la chaleur fut pafTee, nous deliberafmes aller fur
j le mont Oreb:& eufmcs des Caîoieres pour nous gui-
\ der , à fin qu 'en pafTant , ilz nous enfeignaflènt toutes
les chofès ûngulicres de ce mont:& fuyuifmes le ruifTeau qui def-
cénd au monaftere. Vn Caloicre aagé de foixante Se dix ans, vint **ommgp
en noftre copagnie auffi difpofé d'ailer que nui autre de la troup- ^L|T
pe,qui eft vn grâd iîgne de grande fanté aux habitans de ce m5t:
car tous citions à pied. Nous regardions l'Orient en montant la
♦montagne , Se quand nous fufmes quelque peu plus haut en vn
lieu au deffouz de la fummité du mont Orcb,trouuafmcs vneef- Mont orel.
pace en la vallee,ou eft vne Eglife faite au lieu ou Heîie fe tenoit, Ej&fideS*
De là pourfuyuans contremont nous trouuafmes des degrez
faits de pierre de taille:&: vn portail qui anciennement cftoit fer-
jzié fur le commencement àcs degrez pour enfermer ce cofîé là,,
tellement que qui voudroit y tenir fort ,-Ion nepourroit defeen-
dre du mont pour y venir.Nous montafmcs iufquesau plus haut
faiftCjOu nous trouuafmes vne autre Eglife qui eftdefFus ce mot
Orcbjlequel mont a efté habité, Se non ecluy de Sinai ^car Sinai
c ft aride, &ceftu y cy a grande commodité deîafontaine. Dîo- , ^ , "
dore efcrluant du pays des Iuifzà parlé de ce mont , le nommant p^JL*.
la région des Àbbatees,en Latin , ^bbaîœorum.Gàïil dit qu'il y a ^ùhxttes^
vn rocher trefmu ny,<Sc ou il ne fau t guère de ges à le garder pour
faire force , d'autant qu'il n'y a qu'vn feul lieu dirEcilc Se malaifé
àmontcr.Il nous femble qu'il vacille entendre de ce Heu icy : car
il n'y en a point d'autre en tout leur pays à qui cefte marque puif-
fe conuenir,ûnon à ce mont Qreb.Les guides nous monltroyene
ks lieux fain&z parle ruenu >^PriflC^Paien^enc ce dont la Bible.
NN ii.
2.84 SECOND LÏVUE DES SINGVLÀ,
clfiernefir £^z Itiention. Nous auons leu les noms de plufieurs François cC-
Ufâifte d» cdc2 en la muraillcde la chappellc de deflus le mont Oreb , qui
mont de st* auQyCnc cu ç\zifc àc fe mettre en eferit en ce lieu là. Defccndans
n4f' contre bas nous veifmes vne grande eifterne faite entre deux ro-
chers,vn peu à cofté deiadi&e chapelle nommée Agiafma>ou eft
referuée ï eau de la pluye,de laquelle nous beumes.-car vn de noz
suides auoit cxprcfTement porté vn chaudero &c vne corde pour
en tirer. Nous montafmes la montagne du cofté d'Orient : mais
nous la defcendifmes de l'autre cofté de l'Occident : au pied de
d a* laquelle eft fitué vn petit monaftere nommé Saranda Pâteres>ou
tereT * noas allafracs loger cefte nui&ee là.
JD W Autre monaftere fitué au pied du mont Oreb:&* du rocher
dont if h l'eau aux enfans d'ifael.
Chapitre lxiiii.
, E petit monaftere dépend du premier, & y a vne Egli-
1 fe.Il eft appelle le monaftere de Quarétapadri.Nous
y veifmes des iardins : efquelz y a beaucoup de fortes
Kjss^zéra de frui&z. Nous y trouuafm.es pain , vin , &: Oliucs
confi&es. Et partifmes le lendemain pour aller monter au moc
de Sinai par le cofté d'Orient,regardans le Midy. Sinai eft beau-
coup plus haut que le mont Oreb: & tout ainfi que le mot Athos
fait vmbre à Lemnos , quand le Soleil fc va coucher, toutainfiîe
mont Sinai fait vmbre au mont Oreb quand le Soleil fe lieue.
Quand nous fufmes fur le couppet du mont , regardions que
celtoit roche trefdure,de couleur de fer , qui toutesfois neft fans
herbes : car il y a grande quantité d'Abfinthium Seriphium , qui
porte cefte petite femence que nous appellos Barbotine,ou more
aux vers:& du Pânaces Afclepium,Conifa,&:Eupatoire àcs Ara-
bes. Ileftaftiegéde toutes parts des montagnes tout alentour,
&;eft beaucoup plus haut que n'eft le mont Oeta en Gtccc , oa
quelemontdldaen Crète : maisànoftre aduis ilneft pointu*
haut que le mot Olympe de Phrygie. Toutesfois il cftfihautquc
quand nous tournions la face vers le midy, veoyons facilement
les deux bordz du Sine Arabique^u'on appelle autremec la mer
rouge,& la veoyons fe courber en forme d'arc Angiois : outre ce
que veoyons aifement les motagnes ou eft fitué le monaftere de
QMTtntA*
fadri.
Zrfthôs
Lemnos.
Z/dfirahiu.
Seriphium.
JBarbotine.
Pa&Aces
<AfiUp!J.
Comf1.
Eufatoire.
Oeta.
Ut.
Qljmjie,
OBSERVEES PAR P, BELON, 1%$
S.ÀntoinCjOu de S.Macario,qui eft es defèrts ioignans à l'Ethio- s. Antoine.
pje au delà de la mer rouge, ou encore habitent des Calojeres SMACmo-
Chreftiens, &c Armeniens,autrement nommez Maronites. Éna-
près nous recournans de la partie qui regarde rOrient,tant que îa
veuë s'eft peu eftendrejnauons veu finon pays de montagnes yào
treshauts &afpres rochers,qui eft l'Arabie pierreufe^contigueau
mont Sinai. Puis nous retournans vers le Septentrion , èc regar-
dans par demis le mont Orcb,qui n'eft diftant de là , qu'vne lieuë
& demiCjVeoyons encor le pays de rochers & fréquentes monta-
gnes,conioincl:es au cofte de l'Orient , qui eft îa partie ou eft û~
tuée îerufalcm : car lerufàlem eft iituee en pays de montagnes
qui font cotigues au territoire du mot de Sinai. Regardas la par-
tie de l'Occident, ne veoyons autre chofe finon 1* Arabie defèrte, sArahlc de*
fterile,& fablonncufe , que nous auions ia paiTec venans du Cai- Prte-
rc,£d de là regardans entre l'Occident & le Septentrion , pource
que le temps eftoit clair & ferain , nous poumons difeerner fen~
droiddcla mer Mcditerranee,quicftdiftanîeàcinqiourneesde
là: non pas que voulions entendre que la veillions bien à clair.
Il y aaufti vne fontaine qui fort de ce mefme cofté de la monta-
gne, & pafte au fufdicr monafterc dit Quarentapadri , &: arroufe
la vallée Ôc les iardins des Calojeres. La plaine n'eft guère plus
large defïiis le plus haut couppet du mont,qu'eft le fommet de la
grande Pyramide, c'eft à fçauoir de quatre pas. Mais venant vn
peu plus bas,le lieu eft plus fpacieux : &: n y peut on monter fino
aucc vne grande difficultéjpourcc que les pas ne font à degrez^
que le roc eft fort droiâ:. Nousdcfcendifmesaufufditmonafte- - :
re des Quarante percs,ou noos foupafmes & couchafmes : puis Mùnufiere
retournafmesau monaftere de iainàe Catherine, donc nous e- kfen&e
liions partis le iour précèdent. Le rocher, duquel Feaufortoit Catkmne-
quand Moyfe le frappa de fa verge, nous fut monftréfurleche-^Hio^
min,qui eft vnegrofTe pierre malfiue, droiâ:e,de mefme grain ^oni:Uxsé-
de la couleur qu'eft la pierre Thebaiquc,dont les aiguilles, c eft à
dire Obelifques,font faits, comme auiîi eft îa Colomae de Pom-
pée d'Alexandrie. Elle eft grenelée de diuerfès couleurs , comme
la pierre Thebaique : laquelle chofe a fait pëferà pluficurs vovas
les aiguilles ou Obelifques fi maffif , que ce fuft vne pierre artifl- ? * .
ciellement collée , mais cela eft du tout faux: Car c'eft la plus du- °H%^;
re pierre au ferremét- que nulle qu'on cognoifïè. Ceftuy eftlero- ^t^*"^
NN iij
dumotSi-
2.86 SECOND: LIVRE DES SINGVXA.
cher dont forcit l'eau pour abbreuuer les enfans d'Ifracl. Toutes-
fois il eft ioignant vn ruiffeau courant qui vient de la fommité du
mont Sinai. Cela nous fait penfer ou quece n'eftpas ceîuy que
frappa Moyfe,ou qu'il n'y euil encor point d*eau en ce ruiiTeau \h
mais fàuf meilleur ingénient , nous pcnferions que les Calojeres
dcuroyent monftrcr le roc à la fource delà fontaine y dont fort
l'eau là haut de defTous la montagne. • . .
&euxjat»3s p^5 pUces & lieux fainëts en la montamc de Sinai.
Chapitre lxv.
?àj| E iour précèdent nous auions trau erfé par deflusîa
\ fummité du mont Oreb : mais ce iour nous lent ou r-
\ nafraes par îepied3&: paûafinespar le lieu ou les enfans
rewàz ^J^^^^rro^t fcirenr le veau de fonte , que puis adorèrent.
fonie~ Les v^ojeres de ce monaftere , & des autres deferts , tant de S.
&ferts des Anthoine , que de fainâ: Macario , ne rccueillentguere de bled;
^Lthoine! mais le patriarche quieftau Caire , leur en enuoye tous les ans*
Foijfonsdit &: aufîi des légumes du pays d'Egypte. Ceux qui font en la ville
Tor. du Tor3au riuage de la mer Rouge , leur cnuoyent pareillement
Trouvons Jcs poi/Ibns fccs^ntre lefquels auons rccognu des Sal pcs, Sargs,
du won$e= $pares> Brèmes de mer,jadefeiche2i. Ils ont aunl prouiiiô d'Oli-
te de sirua. UQ$ c5fiâ:es& légumes. Ils nourrirent du beftial es vallées humi-
Sj£* desmon pour en manger la chair , mais pour la vendre , & pour
spam. auoir pcofictfurlalaine>&: nourrir leurs cfclaues ; & les habitans
Bremmesde des valleeSjpour faire des fourmages,&iaidages:car *es religieux
wov Grecs ne mangent ne fourmage,ne beurrejiïe chair. Ils cukiuen t
les yignes,& iement les terres de quelque peu de légumes. La ter-
re qui cft arrouièe entre les vallées & lieux humides,eft aiîcz bien
tempérée : ^car celte haute montagne n eft pas fi froide comme
font les hautes montagnes en Europe : & auïîi n'eft pas iî chaude
comme eftle bas pays. Ces montagnes font fi fterilcs &c feiches
qu ob n'y peut rien eu ltiuer,ïmon bien peu, celle part ou il y a de
l'humidité. Nous couehafmes ce foir au monaftere iàin&e Ca-
therine.. Le lendemain l'on nous monftra la challe > en laquelle
:%elifKsde fo-Qj^sreiiq^esacsosdefainde Catherine, qui eft ordinaire-
^^ jQ* mempendueenrEglife. Ils célèbrent la mefiè à la Grcque fore
Konorablement.. 11 y a plusieurs belles pein&ures en l'Eglife > &:
""- "' OBSERVEES PAR P. B EX O N» 2&%
autres reliques des fain&s. Les Turcs qui voue en voyage au mot
Sinai, ontaufll vne mofquec lcans, quin'eft en rien comprin-
fç de l'Eglife des Chreftiens : Car les Turcs mefines y vontaufll
pardeuotion. LesCalojeresont accouftumé donner à manger
aux étrangers , tant Turcs que Chreftiens : mais c'eft de choie
quiçouftc peu. Ilscuifenc quelque riz, fonrment, febucs, ou
des pois, qu'ils meccenc dedans vn plat de bois au milieu de la
court, fans aucune nappe, auec quelque peu de pain, Se cou-
ronnent ce plat de cueillers : Se chacun qui vient là , fe met à la
mode des Arabes , fçauoir eft appuyé fur le deuant des- pieds , & Man(r ^
affis dcfTus fès talons. Cefte façon eft commune à tous Arabes. ^Y%^
Mais les Turcs fontautrement: car ils fe mettent afïis dciTus la
terre tout à plat à la manière des coufturiers. Le Schccarabac- ...
compagne de fès Gentilshommes , qui auoit accompagné mon-
teur de Fumet depuis le Caire , fe mettoit tout ainii que fâi-
foyent les autres Arabes de fa trouppe. Les Calojcres auoycnt ,.
de la Manne liquide recueillie en leurs montagnes, qu'ils appel- ^^
lent Tcreniab in, à la différence de la dure: Car ce que les au- -Mane être.
theurs Arabes ont appelle Tereniabin , eft gardée en pots de MïelM Ce*
terre comme miel , &: la portent vendre au Caire : qui eft ce dre.
qu'Hippocrates nomma miel du Cèdre, & les autres Grecs ont %<fàJ*
nommé roufee du mont Liban : qui eft difïèrenteà la manne »«* *»-**!
blanche feichc. Celle que nous auons en France, apportée de
Brianfon, recueillie deflus les Melefès à la fommité des plus hau-
tes montagnes, eft dure, différente àîafufdi&e. Parquoy cftant
la manne de deux fortes , 1 on trouue au Caire de l' vne & de Fau-
tre es boutiques des marchands , expofec en vente. L'vne eft ap- Termié'm.
peliee Manne, Sl eft dure : l'autre Tereniabin , &: eft liquide : Se
pource qu en auons fait plus long difeours au Hure des arbres
toufîours vcrds,n en dirons autre chofe en ce lieu.
Voyage dtt mont SinaîauTor. ' Chapitre lxvi.
i Vant que partiales Caloiercs nous donnèrent des ba-
I ftons longs, gros , pôliz , aflezpcfànts : & nous dirent *&g^
J qu'ils eftoyent de l'arbre duquel lavcrgcdcMoyfce-^0^
^ ftoi t faite, &: dont il frappa le roc pour faire fortir Tcau
auxenfansdlfraei. Ccft arbrerefïcmbleroità l'Acacia, n'eftoie
NN iiij
£SS SECOND LIVRE DES SÏNGVLÀ.
qu'il n'a aucun neuds. Nous prifmes le chemin pour aller vers h
ville du Tor, laifîàns le chemin par ou nous eftions venus : & n'y
a que deux iournees. Nous veoyons des Gazelles à grandes ban-
des courir par les motagnes de Sinai,îe long des rochers : &: d'au-
tant qu elles ne font point chances, elles fc multiplient en grand
nombre, comme trouppeaux demoutons. Nous repofafmesla
nui&en îacapagne: puis le lendemain ayas recharge de bon ma-
'ydSnthm tin>gaignafmesvcrs ~celIe montagne qu'il nous falloir pana: en
smihmm ' ^e iournee5quieft fort faicheuf^entre le Totale montSinai.
Jéfinùum Les montagnes en ccfr endroid ne portent pour la plus grand*
marmitm, partie finon Abfmthium Seriphium^ Ponticum, Ambrofia A-
ouPoticum rabtrm;Eupatoriom3 Papaucr corniculatû , & arbres de Balanus
pytwrcor* myrepfica,& vneefpece de Geneft Arabique,differentau noftre
71mwZr II y croJi^auffi Ndes Câpriers entre les ouuerturcs des rochers,
repfa raoultdifferens à ceux qui viennent en arbre, àraufTiàceuxqui
cfr/à -Baiffent en Grcce,nous paffafmes la fufdite montagne, qui nous
^/i^ô^fôcp^sa^^eadefcendrcqu'àla monter: carnouseufmcsplus
magnum, de defeente que de montec.attendu qu cilions en haut lieu .Eftas
Cologntbes. fa quelque peu defeendus , trouuafmes vne belle fontaine qui
C^fc^couroitleiongdc noftre chemin, & ftiuifmes le ruiffeau lono-
m&es- temps. Nous trouuafmes quelques plantes d'Acacia, & d'Heliot
tropium magnum,quî reffcrnbloit eftre vn petit arbriiTeau^yant
trois coudées de haut. Ilyaauifi vneefpece d'Hyofciame , qui
vient quafi enarbufte, qui cil: moult odoriférante &grafFe. L'on
y voit auffi des Colocynthes, &c des Cocombres fauuages, qui
font différents en efpece a ceux que nous voyons es paysd'Aûe,
6c Europe. Quand eufmes defeendu la montagne , il n efloic
guère après midy que commençafmes a entrer en vne ipacicu-
fe campagne entre ladi&e montagne Se h mer Rouge , en la-
quelle nous campafmcsle foirpour nous repofer, àbien qua-
tre iieuës loing du Tor. Nous repartifmes peu de temps après
la minuid , & arriuafmes au Tor auant iour. Les Colocynthes
crQiffentfauuages par cefte campagne en û grande abondance
■ f: gplî n'y â rien plus fréquent.
Vefcriptioa
0-B-SEB.VEES PAR. t. BELOîf. Z%?
j)efmptîon ieîaviUe ^ chaflemduToY: & desfmguUrhe^jiit
riuao-e de la mer, Ronge. Chapitre lxvii.
[Stans arriuez au Tor* &: campez dcflbus noz ten- pefîripûon
l tesen la pîaine,,allafraes voir la ville.Nous la nommos dui>illage.
\ villc,mais ce net qu'vn petit village : car le Tor , en- du Tor.
___ |cor qu'il tienne nom de ville, toutesfois, entant que .
c'eft vu pafTagc fameux &: de grande renommée , & que c'eft vn
port de la mer Rouge , &: auflï que le pays eft difeommode pour
îes;habitans,c'cft beau cou p de v oir vn tel village en lieu Ci fterile.
Il nousfot monftré à demie lieue du Tor en la campagne les qua- Quarante
rante palmes , desquelles eft fait mention en la Bible : auprès def^^j.
quels va vn petit baing naturel d'eau chaude , qui n'eft gueres
plus grand qu=Vne petite fontaine : fon mifïéau iefcoule quelque
peu loin g,rnais il fc perd incontinent dedans le fable, La grande
difeommodité du lieu ou eft fituec le Tor, fait que beaucoup de
gens n'y habitent point : car ils n ont ne bois^n'eau douce, qui ne
les va quérir bien loing delà: ÔC mefmement le port n eft guère
feur : car il eft grandement defcouuert à tous vents. Auffîn eft ce
pas bonnement vn port,mais pluftoft vne plage. La fituation du
village eft vn peu efleuee: caria mersenrkqnelqucsfoisiufques
à inonder en la campagne, &: extourner le village. Il y a vn petit
chafteîet de pierre de taille,qula quatre tours aux quatre coings,,
faites de bien peu d'eftoffer & eft ûtuéenîieufablonncux , tout
ioignant le village du Tor, qui n'a ne fofiêz ne eau douce > imoa
vn puiz qui eft tout ioignant,dont l'eau en eft falee, & delaqucU
le l'on pourroit boire à vn befoing en fau te d autre meilleure. La
largeur de ce chafteau que comprennantiès murailles, eft feule- c^feaH^
ment de foixante pas,& de quatre vingts de longueur,, de tels pas
qu on chemine en marchant légèrement : tellemen t que letrou-
uons de la mefme longueur Se largeur de la falc du Palais de Par-
fis. Vne grande partie du Tor eft habitée de Iuiis & de Chré-
tiens : qui font Grecs,Arabes, & Arméniens, AuiE y a vne Egli-
fc de Calojercs fornommez Maronites ,, Nous fufmes- à leur
meiTe, qu'ils chantèrent honorablement , partie en Arabe, partie . ,
en Arménien , partie en Grec. Ce n eft point leur couftumede fed*^
s'afTeoireftans à la melfe durant leur feruice. Et pource que la ^ tot^
QQ
±5>0 SECOND LIVRE DES SINGVLA,
meûe dure long temps, ils baillent des croftés ouefchafTesà vn
chacun pour s appuyer par deftbus les aifïèlles. Ils y ont grand
marche de poiffons fecs , auxquels ils. fendent les ventres quand
ils les prennent, puis les Talent vn peu Se les feichent au Soleil:&;
ainiîpreparezlcspeuuent garder à long temps. Entre ceux qu'y
Sars^ auonsrecogneu,onte{téBars,que les Latins nomment I»/?/,^
xttpL ^Vmbr^quc nous appelions Maigres, Se Bremmes de mer , nom-
.Mâkrcs. . mees Canthari, Se Dentals. Auffi pefchent ils grande quantité
■rmbr*, de Sargs Se Sparcs Se Orades. Pas ne dirons Dorades : car l'Onu
Bremmes de aCqU>on nommeàMarfcilîe , eft différente de la Dorade de i'O-
"*% • cean. Les Salpes y font beaucoup plus grandes Se fréquentes
Grade"' <îu'en *a mcr Méditerranée. Il y croift vnecipece de Corai que les
VorÀe. Arabes cognoiftênt par nom propre Chauein , qui eft tout veule
CorddeU & -creux par le dedans , ayant infinis petits canaux : Se pourec
merrouge. q^'il eft beau,& qu'il y en a quantité par tout , ils en pendent àcs
pièces le long des portes, tanr de la mosquée que du Carbafcha-
ra. Elles ont deux coudées de long^groftès comme la cuifTed'vn
homme: dont la couleur eft partie blanche Se rouge. Auffi y a-
u?ts^€r** uons veu vnc manière de pierre que les anciens nommèrent Lapis
bien*. iAYxbicm. Nous n auions efpoir de la cognoiftre n'euft efté vn
Caloicrc quwious en monftra quelques boulles , Se difoit lesa-
noir apportées de faincl: Macario , qui eft de l'autre cofté de la
merRougejàl'oppofiteduTor: auquel lieu y en a auffi grande
quantité comme des cailloux es autres contrées. La pierre eft
^ s ^3îonde}pcfante ^effemblant à la Marcafite d'or, ayant les grains
foÂspJu qui ont carrures d'Androdamas,§ Le Tor eft vn repos dcsCara-
y^eduTor. uannes , qui apportent les drogues de laMeque Se de l'Arabie
heureufe Nous^auonsquelepoyure,legmgembre5mufcadess
^irofles,kque,fang de dragon , Se macis y abordent , dcfquelles
eh veifmes charger vne Car-auanne qui s'en partit auec nous. Ec
-aucc cecy eut la charge de vingt Chameaux qui portoyent feule-
ment de ces coquilles rondes dequoy l'on fait les pendans des
cîefs^ri Europe: maiseeux du Caires en fèruent àpolir le papier
& les toiles de couleur,quifont gunimees, defqueiies ils s'habil-
lent &veftcnt3 comme auffi faifoyende temps . pafTc. :
OBSERVAIS PAR. F. B EX ON. 2#l
Deshattaux&harqutsdelamerRQUge. Chapitre Lxvrir.
, Es barques ,cfquifsJ& autres forces de vahTeaux qui w*^ror.
1 font aux pauures gens des villes fkuces fur la mer
! Rouge & du Tor, font ioin&es auec des cordes de
_J Palmiers. Ec combien qu elles ne foyenc pas û bien
ferrées que û elles eftoyent clouées de doux de fer, (i cil- ce qu ils
n'ont point de crainte que la mer y entre : car ils les fçauenc il bic
cheuiller,calfufter,&: eftancher auec de la poix,qu*ils nauiguent
bien feu rernenc. Ceux qui ont penfe que les nauires ne furent
clouées de fer en quelque pays,de peur de la pierre d'Aimant,ont
eflé abufèz : car fï bien la pierre d'Aimant a vertu naturelle d'at- ^fimaat
tirer le fer à foy,fi cft-cc qu'il ne faut croire qu elle ait pouuoir de
retenir vn bateau pour eftrc ferré de doux defer,ne l'attirer à foy
de loing. Mais c eft qu'ils n ont point d'arbres haut efîeuez, dont
les bois pu iffent endurer eÛxe clouez Se auffi. que les gens du pays
font pauurcs,qui n'ont moyen de faire defpenfe , Se qui n'ont pas
îcs doux à leur commendcmcnt,&; qu'ils n'ont nul métal duquel
ils en peuffent forger : Se encores quainiifoit qu'ils en ayent % &:
n'eftant pas fvfàge de ioindre les nauires auec du fer ou de cuy-
ure,eomme£àifoycntles-anciens , ayans le fçauoirde les pouuoir
biencoudre^ils les font fans aucune defpefe. Oeft lacaufepour-
quoy leurs vaiûeaux {ont moult petits,def quels ils te contentent,
tant pour les pefcheries,qu'à faire leur trafic»^ en temps d'eux
paffer le canaî,& aller çà Se là par la mer rouge.ï! cfivray queioa
y voit des grandes houlques.nauires, galères , Se autrcs-vaiflêaux
de routes manieres^mais ils font étrangers. Quoy qu'il en foit,la #<>«%*«-
Dauigation en la mer rouge eft moult perilleuie pour la multitu-
de Se fréquence des rochers. Nous trouuafmes vne forte d'viftre _ -j-r^
a la riuc du Tor , que les Grecs nommèrent anciennement Tri- ^^
dadma^nais maintenant ks aomment vulgairement Agano,ou ^a-^on.
Agano. Elles font beaucoup plus grandes que celles de la mer
Illyrique ou Méditerranée, & différentes à celles que les habitas
dcLernnos_& Eubee nomment Gaideropoda* ou Acynopoda. ^W^po^
Elles font auiTifrequéces par le riuage,comme font les nôftres en T
l'Océan: Se les Caloieres de ce pays là fe les font dédies pour leur ^^i^4
manger. Nous trouuafmcs ds bon vin au Tor ; car les habitans
OO ij
DaBes mol
la.
Tortues de
"l$Z SECOND LIVRE DES SIKCVLA,
Chrcfticn s, Arabes, Armeniens,& Grecs cultiuent les vigncs,diu
quel furent remplis nozbaraux&ouldres. L'eau qu'on boit au
Tor eft à demie lieuë de là,qui n'eft gueres bonne : car elle eft ni-
fantôme i* treufe&fàlîee, laquelle ils vont querirà chargcs.Il y avneruë en
Tor% ce village qui eft couucrte à la modedes autres lieux d'Egypte:
car les habitans (è- tiennent deflbus pour s'exempter de la véhé-
mente chaleur du Soleil. Les Palmiers qui font en la campagne,
font leurs datées grafTes,rouges,&: molles , qui font grandement
hamides,& de différente nature à celles des autres pay s.Parquoy
les habitans font contratn&s lcsefcacher dedans des fportes,ceft
adiré paniers tifTuz de faeilîcs de Palmiers , & les fouler comme
on fait les figues es cabas,defqu elles on fait quaft comme vne pa-
fte, qui fe peut garder long temps, comme auffi fait on celle des
Tamarindes. La principale nourriture des habitans eft de telles
da&es. Ils pefchent de moult belles & grades tortues de mer, qui
ont Feicorce grande comme eft la porte d'vnc maifon. Il fut vn
temps que les Chreftiens n'en ofoyent mangcr,pource que le Pa-
triarche d'Alexandrie auoit excommunié tous ceux qui en man-
geroyent: mais depuis ils ont eftéabfouls, & en mangent main-
tcnant.Nous partifmes du Tor pour retourner au Caire,prcnans
le chemin par la fufditc campagne, ayans le mont de Sinai à dex-
trc,& la mer rougeà feneftrc,& la Tremontane deuât nous.Pour
Tremotane entendons celle petite eftoillcquieftftabîeauCiel,
a cofté des fept eftoilles que nous nommons le chariot, qui eftoic
û baflè qu'il n apparoiffoit quafi rien du chariot , lors qu'il eftoic
plongé bas cni'orizon.En pafTant par la campagne du Tor, nous
veifmes de beaux &: dçlc&abies iardins près de la fontaine , en-
clos de muraille faite de terre & de paille, &n'y fçauroit on entrer
finon par les portes. Continuansnoftre chemin, trouuions vne
petite forte de Lézardée la grandeur des Scinques, courant par
la campagne. Les Arabes le nomment Dhab. Nous trouuions
auffi des Stellions,defquels les Arabes recueillent les excremens,
qu'ils portent vendre au Caire , nommez en Grec Crocodi-
lea. De là les marchans les nous apportent vendre. Noftre
chemin eftoit par fablon fterile& pierreux , ou trouuions vn
petit animal reiTemblant à vn Phalangion , qui a huicl pieds,
quatre de chacun cofté , courant par le fable & montant aux
ïambes des cheuaux , les fait regimber &: tourmenter : mais
Scinques.
Dhok,
Stellions.
Crocodile*.
Ô B S E R V E E $ PAS. P. B E LO *T» tp$ ~
lès çondu&eurs des Chameaux nommez Chameliers aduertis
de cecy,ont vn balay tout preft pour les abatre inc5pncnt.Nous
lailîàfnies le riuage -du canal de la mer rouge , pour entrer vn
peu vers terre , ou trouuafmes vnc fontaine d'eau à demy douce,
Se quelque peu falee, de laquelle Ion abbreuua le foir les Cha-
meaux.Nous campafmcs là au près , puis cheminarmes auat iour
le long du riuagcdelamer. Et pour le cfeftour d'vne montagne
nous fallut entrer dedans lcau. Nousauîons la terre à dextre , Se
le cofte du canal à feneftre. Puis rentrafmes en la plaine campa-
<me:& fallut que nous millions en bon ordre Se équipage, ?wt ^^ ^
îa crainde que nous auions des Arabes:car nous fufmcs aduertis /^^
qu'îlz f cftoy en t afïcmblez pour nous combatre}à fin de nous pil-
ler. Les vingt geniflfaircs, le Sacharab , Se Arabes , auecla compa-
gnie que menoitmonfieur de Fumct,auec le refte des gens qui le houppe &
fuyuoyent,eftoyent prcftzde les receuoir^'ilz fufTent venus nous monfteur &
aflaillir,- il eftoit défia bien tard. Nous cheminafmeslong temps Fumet-
en bon ordre, &: pour la craincte que nous en auions, campafmes
d afïèz bonne heure.Et ia foit que nous euflions fait grande dili-
gence ce iour là,toutesfois ayans rcmply noz oudres d'eau, Se re-
chargé bagagdjcheminafmcs bié deux heures iufques à î'obicur^
Se campafmes en ia campagne, ou paflafmes la nuiciee. Le len-
demain nous chcminafmes par fablons molz Se arides. Le foir
nous arriuafmes en vn lieu mol Se humide, Se repofafmes entre
des montagncSjOu il croifïbit du Tamarix, des Genefts, Acacia,
Ioncs furnommez Holofcrurni , fouchet rond. Làveifmesdes r^marifftes
petits oifeaux fc loger fur les Tamarifques que rcgardafmesat- cemts.
tentiuement , voir û en pourrions rccognoiftrcrcar cela fc refèn t ss&xi*-
de quelque admiration,voir les oifeaux viurc en lieu û fterile:cn- #0%«23M*
trelcfquellcs efpeces auons obfèrué des PaiffeteauXjBruants , Se
Linottes : aufli auons veu voler des Vautours Se Corbeaux ce
mcfme iour.
Commutation du chemin par 'tournées Jiu Tôt au Caire. Chapitre lxix.
J Artans de ce lieu , nous retournafmes au mcfme che-
min que nous auions laiffé , lors quallafmcs au mont
Sinai:& rentrafmes au deftour delà mer rougeen cel-
le partjQu elle feflargit en plage. Il nous fallut paflèr
OO iii
3^4 SECOND CIVILE- EKES SINGTÊA»
Mades en en ]'caii jufqucs aux fangîes des Chameaux , qui eftoit ià pourîa
psrre. féconde fois. Nous trouuafmes vne pierre ronde au riuage,grofïc
^ e, Se large comme yn tcfton , que pcnfions eftre vne racdalle { car
zoban e^e rcflcmbloit à du fer ) ou eftoyent naturellemet eferkes quel-
Dou7e fin? <pes lettres Hébraïques: qui nous feift fouuenir des pierres qu'a-
ùines. moqs autrefois trouuees en Bretagne y ou les macles font expri-
mées v qui font les armes de nioniieur de Rohaxu Nous appro-
ehafmesce foir des douze fontakie&ameres»ou defk au parauant
au ions feiourne: •& nepouoans arriner iufques là , campafmes à
demie lieue près: car noz beftes eftoyet îafles, Se le iour nous fail-
loit.Le lendemain eftans partis auant iour,&: arriuez aux fontai-
nes,ampljfmes noz oudresdeau:& cotinuans le mefme chemin
ou nous âuions paue,deft-oumafmcs pour paiîèr le Sucs, ou- nous
arriuafmesàmidy. Si computions le chemin par iournees , ainii
que i auons fait venans du Tor au Sues , n'y en trouuerions que
cinq Se demies toutesfcis allions en grande diligence. La mec
de ce canal^nc auf&le fablon <ics nuages,, ne font pas rouges , . co-
rne ion auoit penfé , ains ce nom luy eft impofé pour autre occa-
Erithra. fiomcar il y eut vn Roy,lequel les Grecs nommèrent Erithra,qui
FjtythrœHm dominoit en Egypte , qui donna nom à cefte mer , Se s'appella en
nwe. Latin Erydbraeîi mare , qui eftàdire la mer rouge. Elle a (on flux
Se reflux commela mer Oceane:a.uiÏÏ n eft ce qu'vn brasqui fore
de la grand mer,& entre en terre ferme d'Arabie , Se y faitvn ca-
^^ *~ naljîequel auoit anciennemenr nom Sine Arabiquc,mais l'ayant
changera prins le nom de mer rouge, du Roy Erythra,quiinuen-
ta l'viâgc de fabriquer les nauires : car quand ilz nauiguoy ent-au
J^femx. parauantjCeftoit fur des rafeaux faits de bois , comme on en fais
mxance. poucleiourcThu^furia Durance,& autres fleuues violens.
J)%portdeS"ue$aurruagedelamerrouge*.
Chapitre lxx.
^ *Lufkurs modernes veulent[quc le Sucs eft le lieu
Z&fitm. '(gjj Jm|| ]S& cjui anciennement fouloit auoir nom Arfinoe : ce
iquifembieeftrcvrayfemblahle, entant qu'il eft le
; premier port de la mer rouge , Se le prochain du
M~*-*=*m* Caire. Il print cefte appellation depuis Alexandre
mkmms. k grand: car nous trouuons que Ptolemxus Lagus auoit efte
OïSïlVÎES ÎA1 ^. *ELONV 2.$$
o'ffcffcur de l'Egy pte,& marié fa fille nommée Arfinoa, d'excel- ugm'
? «beauté, àXvfimachus Roy de Macédoine , pour laquelle ^Jm\
ptolom*usPhiladclj>hus fonfrere édifia cefte ville de ion nom, /îoiem^
au'il nomma Arfinoc. Le Sues eft vn lieu moult dîfcornmode: P^/^/a
par cela il n'eft gueres habité : car il n'y a-point de bône eau don- ^m.
ce à près de deux lieues à lcntour. Tout ce qu'on y peut voir, eft
va petit Chafteaa,foible,a la façon antique , quelque peu cfleué
au dejGTusd'vn petit tertre.Les grandes defpencesquc le Turc y a CAicnsfor*
fait ,tfont peu rendre le Sues gueres meilleur : car il y a figrande ™s£"%*
difeommodité de toutes chofes3qu'on n'y peut habiter.Les gale- $m^
res que le grand Turc y feit fabriquer, y font retirées à fec, que
nousauons vcues,de trente à quarante. Elles furent amenées de
Conftantinople par mer iofques au Nil , & par le Nil au Caire,
ou elles furent mifes en pièces , & portées par le menu fur Cha-
meaux ÔC par charettes iufques au Sues , Se la furet refaites entiè-
rement. Le 'port y eft mal feur : car ce neft qu'vne plage , qui
n'eft défendue de tous vents. Il eft mal aifé nauiger en la mer
rouge: car le canal eft plain de rochers, qui n'apparoiftent pas
hors de l'eau. Toutes les expéditions & armées de mer que fait
k Turc pour enuoyer contre les IndienSjfont faites au Sues. Ec.
raefmemcnt lors qu'eûions par ce chemin ^trouuafeies quaran-
te ou cinquante Chameaux qu'on y auoitenuoyé du Caire, qui
aîloyent quérir l'eau auee leur harnoisdecuir, laquelle ilz pre-
noyent au puiz de Sues , qui eft à deux lieues de là , pour en
fourni ries galères que le Bâcha lieutenant ou Viceroy en Egy-
pte depefchoir en Indie^pourfaireia guerreà vne ville nomme^ ; .:
le Zibit , qui f'eftqit nagueres reuokec. - Laquelle eau encore Zthia
qu elle foit falee Se aniere , fi eft ce que les mariniers en boy-
uentpar faute d'autre plus douce^ Nous conxinuafmes neftre
chehyïn^pour venir aivCaire. Et qua«d nous fufmes à my che-
min entre fepuiz/ &: \c Sues, trouuaîme s àcs guetteurs dciTusdcs
efchaffaux faits en la manière de ceux qui gardent les raifins es
vignes,defqucîz y en au dit plufieurs endroicts par la campagne.
Et fu r chacun efc haffaut y auoit deux ou trois hommes, à fin que
voyant de loingfil y auoit aucune embu/ejà^èfe peuiTent aduer-
tirlcs habitans de la ville àfedonner dc~gardc,;quieft chofe to-
talement conforme à ce que Pline racompte des regards ou ef-
chauguettes des Carthaginois nommez en Latin fpccula , dont speatU.
-' ^ OO liij
Ktferez
Cewjre.
1$& SECOND. IITRE. Z>ES &INGVLA^
îlzfc feruoyent lors que les Romains leur faifoyent la guerres
Car ilz en auoyéc de celles par les plaines de leur pays qui cft vni
comme- vne mer, g£defert comme eftceîu y de Sues. Eftaas arri- ;
uezaudicl: puizde Sues pour la féconde fois , repofafrnes deCus
les pîactes formes iufques au foir bien tard : puis rechargeafmes
noz Chameaux à deux heures de nnicl:ô£ ainfî cheminans en di-
ligence coûte nuiâ:;, & couc leiour enfuyuant fans nous^ repofer>
arri-uafmes au riuage du Mil , qu'il eftok deûV bien tard , &£ cou-
chafmesau rnefme lieu dont nous eftions partis en allant au mot .
Sinaù Icy finit noitre voyage du mont Sinai ^lequel nous para-
cheuafmes en vingt iours y. &: de neuf ou dix Chenaux qu'on y,
auoit menez } iîi^en rctournaque trois : car la celte mourut par
chem-in.Les Ârabesne îeurdonnoyent à manger que des febucs
& de l'orge^tout ainfi comme aux Chameauxidefquelz Chame*
aux en mourut aufEla plus grande partie. Ce iourd'huy enuiron
midyvn Arabe conducteur- des Chameaux âduifant vne vipère
deloingen ïa çampagne5:ayant feulement ie&é vn cry en fbn lan-
gage à (es compagnons, Vipere^vipere, coururent la tuera coups
depierre ; qui nous fait dire qinlz les ayent en grande horreur-
Les Vipères & Ceraftes d'Egypte ont; la peau fort obeiifanter
choie quauons cogneué en les rempliifant : caries ayansefeor-
Kortraiëi du Serpent &lli*
chce£>
OBSERVEES PAR P. BELON, l$J
chees & emply leurs peaux de bourre,cllcs en eftoyent deux fois
p[lis greffes que le naturel , qui cft chofe qui n auient pas à celles
des autres régions. Ily a plufieurs autres ferpens par Egypte , doc
n'auons point parlé: car les plus dangereux font ceux quauons
ait. Etpourceque nous fommes trouuez à voir des corps em-
baumez &: tous entiers, de certains ferpés adlez, Se qui ont pieds, ,
qu'on dit voler de la partie d'Arabie en Egypte , en au ons cy de-
uant mis le portraift,reniettans à en dire dauantage au Hure àcs
Serpens.
Nous trouuafmes vnc trouppe de paifms Arabes ou Egypdes
fur le chemin, que le Bâcha auoit fait prendre par force , parle
pays d'Egypte, poi|r mener voguer à l'auiron en galère à l'expédi-
tion qu'aiionscy deuantdi&c. Quand le Bâcha du Caire,quieft
lieutenant pour le Turc en Egy pte,arme quelques galères, il fait
prendre des gens indifféremment parle pays ( car ilz n*oferoyent okifacedes
refufer puis que Ccft pour le feruice du grand fcigneur)lefquelz Hfubiefts du
fait mettre es galères de Sues,non pas qu'ilzy foyent cnchaifnez: Turc.
car on les îaiffe retourner en leurs maifons quand ilz font reue-
nus du voyage. L'obeiflance eft Ci grande entre les fubie&s du
Turc, queperfonne n'ofe refiilcr à fon vouloir. Hz prennent les
hommes fans auoir efgard de perfonne : &c faut que les Chreftiés
qui font au Caire . fe tiennent en leurs maifons fans fortir hors
pendant ce temps îà:car ilz prennent ceux qu iîz trouvent parles
rues. Les foldatsTurcs que mena monfieur de Fumet en tout le
voyage, portèrent autant de bifeuit qu'iîz mangèrent allans &c
venans du Caire au mont de Sinai:& encor en rapportèrent : qui
nous fembla moult grande continence en leurfaçon de viure:ce
que les hommes d'vne autre nation ne fçauroyent faire. Nous
campafmes vnc partie de la nui&ec au riuage du Nik& le lende-
main matin chargeafmes les Chameaux,&rctournafmes au Cai^
re pour la féconde fois s ou nous demeurafmes long temps fans
partir. Le voyage du Caire au Sues , eft le cemitere des Chaîne^
aux d'Egypte ôc d'Arabie : car ilz y demeurent en faifant ce che-
minlà , comme il appert par îesofïèmens qu'on voit demeurez le
long des chemins , &:aufïi quelles Vautours fréquentent moule
en ce chemin là , defquelz nous en vcifmes le iour précèdent de K?**0*?
. »'T*. .A , . . * . i ont ùyfeawt
moult grandes compagnies, qui ettoyent bien cinquante en crut-7 • -^Mm,
que trouppe : & of ons dire que des oifeaux ayant l'ongle* cro- m*m~
■yaijfeaux a
Porcelaine.
Murrhina.
Forceiaine,
yigm
sdpeftre.
Hitre.
298 SECOND LIVRE DES SÎNGVLA*
chu, il n'y a que des Vautours qui aillent par bandes.
Ttes Vafis de Porcelaine 3 que Ion vend au Caiye:& duNltre^
Chapitre lxxi,
Yp§ Ly a grande quantité devanTeaux de Porcclaîne,qnc
i^> les marchands vendent en public au Caire. Et les
"îl^voyans nommez d'vne appellation modernc,&: cher-
^chansleuretymologieFrançoifqauonstrouuéqu'ilz
font nommez du nom que tient vne efpece de coquille nommée
Murex:car les François dient coquille de Porcelaine. Mais l'af-
finité de la diction Murex correspond àMurrhina. Toutcsfois
ne cherchonsîiety moîogie qtre du nom Franeois,en ce que nous
difons vaiffeâuxdePorceîainejfçacrians que les Grecs nomment
la Mirxhe de Smirna.Les vaifleaux qu'on vend pour le iourd'huy
ennozpays,nommczde Porcelaine, ne tiennent tache de la na-
ture des anciens : Et combien que les meilleurs puuriers d'Italie
n'en Font point detelzitoutesfois ilz vendét leurs ouuragespour
vaiflfeatix de Porcelaine, combien -qu'ilz n'ont pas la matiere-de
mefme. Ge nom Porcelaine enY donné à pluiieurs coquilles de
mer. Et pource qu'vn beau vai fléau d'vne coquille de nier ne fc
pourroit rendre mieux à propos fuyuant le nom antique , que de
lappeiler de Porcelaine, auons penfé que les coquilles polies Sz
luykntes ., rcfiembîans à Nacre de perles , ont quelque affinité,
auec la matière des vafes de Porcelaines antiques : ioinct auiTi
que le peuple François nomme lespatenoftres faites de gros vi-
gnols., patenoftres de Porcelaine. Les fufdits vafes de Porcelai-
ne fonu;ranfparans,& cou fient bie cher au Caire, &: difent met-
mement quilz les apportent des Indes. Mais cela ne nous fem-
bîa vray fcmblable ; car on. n'en voirroit pas fi grande quantité,
ne de ii grandes pièces , fil les falloir apporter dcfiloipg. Vne
c%uiere„vn pot,ou vn autre vaiiTeau pou£perite qu elle ipit, cou-
£iq vn ducat ; ïi c'eft quelque grand,vafe ; il cpuftera-dauantage.
Nous troquons vne moult grande opiniaftretc cn.plaficars per-
sonnages d'Europe , qui foufciennentque noftuelaîpcftrecftle
Nitredes anciens , & toutesfois il n'y a vne feule fcintille de Ni-
tre.en tout le pays des Cln:efuens,f il n'eft apporte de^dehors, qui
toutefois efttant commun au .Caire, .que dix libres ne couftenc
OBSIRYIES ÎAR P. BEL ON. 1^9
«asvnmaidin.Hzs'en feruentaux teintures , & àertamer leurs
vafès Se àacouftrer leurs cuirs , raeflé auec les filiqtics d'Acaciav
Nous auons veu les M ofquees faites de bel ouurage hors la vilîc
du Caire-, que plufîeurs grands feigneurs ont fait ériger depuis cï^nei dn
peu de temps en ça:car vn Bâcha ou Sangiac,ou autre officier du Mofaas.
o-rand Turc , voulant laifTer chofe mémorable de foy„ fait fabri-
quer telz édifices pour 1 amour de Dieu , & ioignades Mofquees
fait faire des eifternes à referuer i*eau , à fin que les paflàns y puif-
fènt abbrcuuer leurs belles, Se les hommes fe lauer iel5 leur cou-
ftumc&fe plonger leans : carilzpenfent eflreabfoulzdctous
leurs péchez, fuyuant la promené de Mahomet , ayans laué leurs EmxzAr*
corps. Les Arabes mettent communément de Feau par les lieux dees e»m»
publies,^ en font porter par des gens , qui en donnent à tous al- hUc.
lans&venansjans en rien demander , finonque celuy a- qui ilz
la donnent en vôuluO: bailler de fon bon gré.Il n'y a carrefour ne
au Caire,ncés autres villes d'Egypte , ou de Syrie, comme aufli
de Turquie,ou il n'y .ait quelque grand pot plein d'eau,que tous>
les ioursilzemplifTent, pour abbreuuer ceux qui ont foïf. Delà*
vient qu'iîz n'ontpoint de honte de diluer enrue vne de manger
en public Jlz achètent ce qu'ilz veu lent. manger5au marché:puis -les Tum
vont faâèoir tout auprès de quelque vaifleau plein d'eau : Sclïm^m* c»
dechaufTeront leurs ibuliers pour saflèoir contre terre , Se man~^2~r?r- „
geront en prefènec de tout le monde. Le foing qu'an vend au îom£d £=
Caire,neftpasdcpré,commceft celuy que nous recueillons me^^. lC
de rameaux de chien dent /comme celuy qu'on amaiîe par entre Ui âdzdts.
les rochers des ides Gidadesiraais c'eft foing de trefie temé,qui a
le cauie ou fuit tout creux :.& eft lié par poignées , puis diftribné
en braïfees. Les Chenaux lemangent mouk volontiers. ., v .
Quel membre iaunenejt minerai , comme phtftews ont.efljmé^aini efi%
gumme d'arbre. k Chapitre* lxxii.
. Ambre iaunc dequoyTont faites les patenoitres
d'Ambre , nTcfl: en moindre réputation entre les ^i..re.n-.u
Arabcs}Syriens>Egyptiens,&:Indiens,qu'ilel':w;> :c
trelesChreftiens :-car les Turcs le porten: auill
_ _ ^.bien en patenoftres comme par deçà, & r»;:ii:di~
fenc le chapelet àleur mode ; Se outre ce qu'ilz en tca-z ces p^:e-
^ PP :
300 SECOND LIVRE DES SINGVLA.
noftres , ilz s en feruent aufll à diuers autres vfàges , comme à or-
ner les bafts)brides,& Telles des Cheuaux, mules , Se Chameaux.
Nousen auons veu de grandes fâchées au Caire , qui n'eftoit en-
corestaillé:&eftoit par morceaux,gros comme les deux poings,
& à quelques vns lefcorce de larbre qui le produit y eftoit encor
attachee.Il eft à prcfuppofèr que l'arbre ou il croift cft fort grand:
ce qu'on peut imaginer à voir Ton efeorce, qui eu: deiice,licéc, Se
bié polie, ô£ tenue:& y en a qui font plus larges que la main. Plu-
sieurs ont eftimé que l'Ambre iaune eft vne fluente liqueur terre-
ftre,qui fè rend en la mcr,ou elle s'endurcift, difàns,quc les vents
famhrei/4, laiectentésorcesdes régions maritimes. Mais cefte opinion fè
au fond de peutprouuereftrc faufè, en faifant experiencede la faire nager
hm. fur l'eau , Se fi l'Ambre ne nage , comment pourra eftrc vray ce
qu'ilz en difènt? Parquoy ayans îeu tout ce que les anciens eu
on t cfctit^Se tant de fois trouué fbn efeorce attachée à la gumme,
tiendrons auec Diodorc , qui dit nommément que c'eft gurnmc
d'arbre, qui a vertu d'attirer le fer à foy,comme la pierre d'Aimat,
moyennant qu elle foit premièrement frottée : laquelle chofe
Diodes Se Theophrafte, Se quelques autres auoyent ja obferué:
ce qu*auons trouué eftrc véritable. Elle obtient encor plufieurs
noms Grecs Se Latins3commc Succinum,Lincurium5Lapis lin-
ciSjPlcrigophoron.
Ve nofire départ du Cairerfour aller en Ierufàlem. Chapitre, lxxiii.
chemin du (S^^feSf ^ pendant faifions noz apprefts pour parfaire noftre
çdreenie* % $§CffF&é voyage vers Ierufàlem , Se trouuer montures^ nous
riifdem.^ i\^^^| garnir de viures5 comme nous auions fait auant aller
g^lplliâ au mont Sinai. Le chemin de Ierufàlem eft fait plus
communément auec Cheuaux Se mules que fur Chameaux. Le?
Turcs Se Arabes vouîans partir en temps d'efté en vn loingtain
voyage , achètent des Tamarindcs , qui font en grand vfage en
Tmdrindes* Turquie , tellement qu il n'y a année qu'on n'en vende au
Caire plus de trois mille liures , non pour médecine , mais
pour leur eftancher la foif. PafTant par les rues , Se regardant
Trfie Par ^es £r^hs dedans les mofquees du Caire , Ion voit de moult
marhremti* beaux grands vafès de toutes fortes de marbre faits à l'antique:
oms* & croyons qu'ilz ayent anciennement feruy aux fepultures de
OBSERVEES PAR. F. BELOî?» ^ $01
'^cplufîcorsbcftcs qu'ils îàloycnt dedans; car entant quîîs cfti-
moyenc plufieurs beftes facrees,iîs les confifoyenr. Se mpttoyent
en tels grands va(ès pour leur feruir de i cpulchrcs. Mais fes hom-
nies eftoyent autrement confias, comme auons délia cfit par cy
deuant. Les habirans du Caire nommans les feigneurs du temps
du Souidan,les appellent pour le iourd'huy CercafTes,qui nous a Cercajfa.
fèmblé nouucautéjOyans vnc appellation tant antique , &: dont
Hérodote a fait mcntion,demcurer moderne. Le Bâcha du Cai-
re y gouuernc tout fon train à la mode des Turcs, & no '£. la vraye
mode des Arabes ou égyptiens. Et ayansveu la manière de fai-
re,dont il vfa enuers monficur de Fumetjlors qu'iialla luy faire la
rcucrencc,&: prendre congé de luy,nous fèmble digne d'eftre mi-
fê en ceft endroiâ.Iifeit mettre tous iès genifïàires en bon ordre,
qui eftoyent richement veftuz , les vns de drap d'or & foye colo- Mode/fades
ree, les autres d'autres fortes de vcloux figuré, tous fans. efpce, Tmcs-
piftolet^'armesquelconques, &tenoyentles mains croifeesâ:
ioîncl:es,qui eft fignifiance de la grande obey fiance des Turcsrcar
ils ne veulent les armes finon pour la guerre. Les Arabes ont cou-
ftume de porter des poignards , mais les Turcs n'ont point encor
tel vfage:tontcsfois ils ont d autres armes plus profitables pour le
temps de paix, &dc guerre , dont auons défia parle cy defius.
Quand nozapprefts pour le chemin furent faits, peniâfmcs de
nous en retourner par terre , prenans noftrc chemin, vers le-
ru&lcm.
&vn petit arbre £ Egypte tùuficursverdfluiteinB en cou*
leur rouge. Chapitre lxxiiii.
Amedy, vingt &: neufiefme d'O dobre, mil cinq cens
trente fept, fortifmcsà nui&clofc hors la ville, ôc
i vinfmes coucher deflbus l'appentis dVne mofquce,
1 qui n eft qu a vn quart de lieue de la ville. Le dimen-
chccniuyuant delogcafmes auant iour pour aller vers Ierufaiem.
Le pays d'Egypte lors inondé du Nil, nous demeuroit àmaiâ
gauche , ou veoyons les villages entre les forefts de Palmiers ca
lieux eminents. Nous trouuafmcs vn petit arbriftèau nommé ^^
Henné ou A lcanna ^qu'ils taillent &: cukiuent diligen^ment , ôc ^.^n*.
font dïceluy des beaux petits bois taillis. Les Latins interprétas
PP iij
lîgujïrum.
Troefhe.
mime,
yfitge de
teinture de
Benne.
Ongles des
homes teints
fO% SBCONB LIVRE DES SINGTLA.
les Arabes ont die que c'eft nbftre Troefne ,' appelîee en Latia
Liguftrum, mais cela eft faux: d'autant que le Troefne eft arbre
différent à ceftuy là. Ce Henné croift à la hauteur d'vnGrena*
dier : maïs eftant taillé neiede ûuo des menus drajons, ain.fi que
Touârepour font les oufiers.Lleft de grand reuenuen Egypte ;. car ils defei-
teindre en client fes fueilles pour mettre en poudre, àfairede la teinture
pour teindre en iaunc. Le reuet3u.de cefte poudre, eft défi haut
prix par le pays,ou domine le Ture,qu'ile(l de dixauid mille du-
cats de gabelle :.car les femmes de tous les pays de Turquie ont:
ceuftumefe teindre les mains^es pieds & partie des cheueuxen
couleuriaune ou rouge :&: ks hoaimesle .teignent les ongles ea
en rouge, rouge auee la lufdicte pondre.; Dauantage en y adiouftant. de.
^AluDjik teignent les cheuetïXiks petits enfantant mafles que
femelles ries crins, les pieds ,.&Llaqueue* des çheuaux. Les fem-
mes; de ce pays là penfen t qu efoit chofe honçfte Se bien fean te À
leur beaute,auoir partie des cuiiTes ,<& depuis le nombril en bas~
yfmdeU & 'fes parties honteufes teinctes ea couleur iaunc : laquelle fça-
foudre£^4^cm faire de cefte poudre lors qu'elles fortent du baing l car for-
canna. tans des eftuues la couleur fe prend mieux qu'en autre temps.
L'vfege eaeft fi grand , que non feulement les Turcs en vfent,
mais iWea porte eaVallachiejRuirie, &Boffcna. Parquoyle
peuple ne fc poiiuant paner de cefte poudre , la gabelle en mon te
àmoult grand reuenu. Il aduient fouuentesfois que les naukes
d^Alexandrie viennent a Conftantinople chargées de telle pou-
dre, qui eft incontinent enleuee& vendue. A la fortie du Caire
nous fuyjjifmes long temps le canal qui va defeendre en Damia-
te.Etpourcequeilionspartisàla minuid,. nous eûions auanc
iour au chemin par ou nous auions paûe allans au Sues»
/Beplufieurs bourgades en Egypte for le chemin de lemfdem.
Chapitre U.xv.
O v s. pauafmcs des graa des capagnesde fabionmol,
efquelles IcspayiàBSCuîtiuët vneefpecede Citrouil-
îcs,do;nt l'yfàge. eft fi grand au Caire, que tous les mz-
w<^*.«~.v' tins du moisde Septembre, &0&obre, Ion voit les
chameaux venir de toutes parts chargez de tel fruid. Il eft de
moult grand jeueiia^r il aç coufte guère àeileuer durant l'ipo-
cittmilla*
O B S E; B. % E E S EAU; £. BEI, O K> . $03
-Ration du Nil. Cefteeluy que Auiccnnc Se Serapion ontnom-
-una.
méBatega : mais maintenant les Egyptiens le'nommentCopus, * e&A
en I'appcllation duquel plufîeurs fè font trompez", îe nommans ^ZHl^
Anguria , mais cc& par erreur : car Anguria eft vne di&ion de- Cocomhn.
notant le Cocombre. Ils croifTent quelqucsfois fi gros , que qua-
tre ou fix chargent vn Chamcau,& qu'vn homme en feroit char-
gé d'vn. Nous couchafmes ce foir en plaine campagne. Le iour
cnfuyuantpourfuyuansnoftre chemin, arriuafmesen vngrand
viîîage,nommé le Caucqmous arreftafmes là, pour nous fournir UCiiUCi'
de viurcs fur le chemin fterileqiul nous falloir pafïèr : &: trou-
uafmesRiz^oiSjFcbucSjOeufsjPommeSjPoires, Raifins, Da-
des, -Figues» Il ne çroift autre herbe par les fufdids fablons que
derHyofciamc noirc^uireueftit les capagnes de verdure.Nous
partifmcstard du Cauçq,&. cheminafmes toute la nuid iufques Hycfa^ne
au village de Cataro,qui n'eft fitué guère loing du Nil,en vn lieu no*re-
efleué &: aflez eminent. Nousyeftions au temps dcleur<:aref- uî4r0'
me :parquoy la fommité des hautes tours ou clochers des Mof-
queeseftpycnttousentournez de lampes ardentes qui efcîerent
toute nuictÇefte chpfe eftauffifaitepar tout le pays^duTurc ou
ils font Mahometiftes. Mais les tourelles des. Mofquces des Ara**
bcs font ence differétes à celles des Turcs a que celles des Arabes
ont trois eftagc$:mais celles des Turcs n'en ont qu'vne.Leurs ca-
refmcs durept«çiiaçun vne lune:&: le iour. qu'ils ieuncncjne man»
gentnçboyuçnt qu'ilspa^ent premiçrpment veu Iescfto:l]es3ou
qu'il ne foit nuid obfcure:puis baquetent route nuid. Cataro eft
auffi grand qu-e leCauoq^&tué à 1 arçcdiVNil. Il eft entourné de
Palmiers.jLon y cultiue des beaux iardins.Car la commodité de
^eaujy eftgrade:parquoy il;çft de grand renom. Çontinuaas no-r
ftrechcmin.nous vinfmes rcpofcçiidz moturesà vn autre village .„
nome Bilbez,ou no9 difnafmes,&: demeurafmes le refte du iour, l e<^
tant pour cuiter la chaleur,quc pour repoferjes montures. Nous
y trou uafrnçs des y iurqs.au inarçhéjcommeau Caucq. Parias du
fufdid village,ô£ ailansentre Orient.^ le Septentrion j ne veoyos
rien 4 dextre que lacapaghe iîerile: mais au codé feneftre veoyos
jepaysqucleNilarroufe, quiefl fertile & cultiue, ouilyapiu- .
fours villages & forefts de Palmiers, & Sycomores , que nous ^^
yepyons.de bien loiag, Nous. trouuafmcs des Çazeiles à grands
bendes,quicouroyentpat :1a fufditecampagDe: ouaousre£ofat-
mes ce foir:& cftoit pour le tiers, logis depuis îc Caire.
J04
SECOKD IlfRE DIS. $IKC?IA.
Pe lefirange & difficile chemin qui eft entre le Caire & Itrujâlem.
Chapitre lxxvi.
E Mardy jour de Toufïain&s , aîîafmes feulement
s*Utia. ^ï Y&$ëlê$ gaigner le village de Saîatia , ou nous repofafmes
toutleiour. Oeftvn volage ou les maifons font
' faites de rameaux de Palmiers , agencez contre les
troncs des arbres:&: toutesfbis eft village de grand
renom. H y a bien quelques petites maifonnettes ; mais ccft peu
dechofè.Lcspayfans y font des petis parquets en quarré auec des
rouièauXjpour enfermer leurs Oycs> Poulies y & Canes. Nous y
trouuafmes des Chameaux , Cheureaux , Poulies , œufs , ovge>
painîvin>& autres viures à acheter. Et pource qull nous fallorç
paflèr vnc fpacieufe campagne & dangereufe des larrons , encor
que nous cuûlons des GenifTaircs, iîfallut toutesfois que nous
louaffions dix Arabes bien equippez pour nous accompagner.
Les Arabes portent communément des longues picques fur les
efpaulescftansàeheual. Anpartirde Saîatia, entrafmcs en cam-
pagnciftcriles qui nous durèrent plus de cinq heures, dont l'vne
eftoit verdoyate de Tamarifques^ync efpecc de Rhamnus y qui
a la femence rouge , différent à celuy qui croift en Grèce , qui la
Tdmdrifam portcnojrc. Depuis le Caire fuyuans noftre chemin , nous n'a-
^- uions poxnt raitprouilion d eau > auiii en auions nous touiiours
trouué par tous les villages ou nous auions paffé : mais ce iour-
d'huy fufmes contraints d'emplir nos oudres : Car le pays que
nous deuions pa{ïèr,eft fans eau. Ce iourd'huy pafTafmes le cou-
rant du Nil par trois fois , ay ans l'eau iufques aux fangles de noz
jnotures: laquelle pource qu'elle eft meflecauecla mer,eft amerc
& falee.Nous trouuafmes aufïi des ponts larges , mais non guère
longs. Eftansja forris hors des ruiffeaux falez, nous arreftafmcs
" pour paûer la nuid derrière les ruines d'vn Carbafcara. Le iour
fuyuant eftoit plus fàfchcux à paflêr que nous ne pcnfions:car
nousrcntrafmesen vn paysdefablon morfondant &mouuant.
Et faut que les Muletiers cnucloppcnt les pafturons des Mulets
& Chcuaux,autrementiis s cntretailleroyent. Apres qu eufmes
chemine par le fàblon* arriuafmes en vnc vallée ou nous veifînes
quelque sombre de Palmiers ioignant vnpuiz d eau douçaftre,
* . ' dont
* O B S E-RT E ES PiR f. B E LOS." JO?
dont les Catauannes font abbtcuuccs.L eau en cft tirée àuec vne
tom à la mode d'Egypte. Gontinuans chemin , vinfases ce fbir
au village nommé Belba. Ceft vn petit ehafteau quarté , fituéen ~-
la région de Paîmira,quineftgueresloingdek mer Mediterra- P4^x
née , Se eft entre Egypte &: Syrie. Nous eftions en fort defert Se
fabîon neux,mais au refte moult abondât en forcfls de Palmiers.
Belba effc quafî à deux journées de Salaria. Les murailles font de
petite cftorîc,au& les baftimens qui font leas^c font guère plus
grands que petits tects à loger les Veaux : &: toutesfois nous y
trouuafmes maintes fortes de viures à acheter. Les gens de ce
pays font maigres,noirs , & hallez du fbleil , qui ne s'afleent pas
ainfi comme les Turcs qui saccropifient aplat de terre , les Ïam-
bes en croix, à la manière de noz coufturiers : mais les Arabes fê
tiennentacculcz deuxis la poinerc des pieds, faifans queles talos
leurferuentdefîege:&ainfî paflènt les iours entiers fans felaf-
fêr,non plus que nous faifons eftas affis deffiis vne cfcabeîle. Car i
l'ayans accouftumé de ieunefïè,continuet toute leur vic.Et d'au-
tant qu'ils font en pays fablonneux , s'ils s'affeoyen t a la manière
des Turcs en pays de &blon,il leur feroit fàfcheux à caufè du fa-
ble^ gafteroyent leurs veftemens. Les Arabes , Arméniens, &
Turcs ont pour la pîufpart leurs chemifès teindes en bleu , 6c en chamfis Sa
portent rarement âcs blachcs : & toutesfois ils ne font pas moult Turcsiei**
pouilleux : car ils vont fouucnt aux eft«uucs ouiis Ce baignent &
nettoyent. Ces Arabes ne dorment point que fiir la terre dure,
n'ayans que âcs nattes de rouleaux , ou de raeilles de Palmiers à
fècoucher,&nontrvfagcdeîinceux. Ilyauoit vne Carauanne
qui alloit en Ierufalem3&: nous attendoit près vn puiz en la plai-
ne à deux lieues dudit ehafteau de Belba : duquel l'eau eft nitreu-
iê : car le lieu eft aufli nitreux , toutesfois nous en beufmes par
faute d'au tre. La Carauane partit à minu i&, que nous laiïïàfines-
aîler dèuant , & partifmcs trois heures après eux. La mer Médi-
terranée eftoit à main gauche, que coftoyafmes long temps. Ne-
ftre chemin eftoit droiâ: au foleil îcuant. Nous auançafmes vn
peu noftre chemin pour trouuer îadietc Carauanne : laquelle ac^
compagnafmesiufquesau foir : &campafmcsau riuageioignac f
lamèr,ou nousfeifmcs peudefeiour :& àvnquartdelieuëdclà
foffoyafmcs entre deux petis tertres de fablon mouuant à dernier
toife de profond^ou nous trouuafmes de l'eau douce, qui fortoiE
*$o6 SECOND LIVRE D*S SIKGViA,
trouble & blanche; de laquelle nous rernplifmes noz bouteilles
& oudres. Nous auions les montagnes du moût • Sinai à main
.- r r dextre,quenous veoyons bien à clair. Ceux qui veulent prendre
Tapfia. ' lcdroiâ: chemin pour aller du Caire en Ierufalem , ne pafïènt
ubanotîdes. pas par Belba ne Salarie: mais nous l'eflongnafmcs «cherchans
Tamarifyues la commodité du Nil &: des bons villages. Mais ceux qui vont
^foànon. par l'autre chemin portent l'eau ■& les viures de tout le voya-
ge. Nous trou uafmes de l'Ambrofia, Tapfia 5<3cscfpeces de
Libanotidcs , Tamarifqucs , te Apocinon 3 naifTanspar les cam-
pagnes. ■>
&u ÏÏÎtrc&£vn petit Cancre de UpT.mmerueilleufecomplexionquc
\nulle autre chofè qui fait en nature.
£baju ixxv.il.
mtre.
' Yans feiourne tout le iour derîbuz noz tentes/uy-
l uifmes la Carauanne,, & entrafmes en vn autre ca-
\ pagne qui nous-durafix heures dechemin. A iour
ouuertsious «defcendifmes en vne campagne plus
w 'bafïb^outccouuerccdcNâtre^uepcnrionseftre
du^l7^^yattCa*nûrc^rc : 0U *cs Chenaux & Chameaux im-
sJù &r prinioyent lesi*eftigcs de leurs pieds dedens. Nous ne lénifions
^ pasûtoft cogneu „ n'euAcfté qu'en auions auparauant veu au
Caire, qui toucesfcss n eft pas Salpeûre : car il vient naturelle-
mentJequciil rautcognoiftrc aux marques que luy ont baillé le?
anciens au Eheitrs : Ccft,qtfcn le brufiant il fait beaucoup de cè-
dre z Jasais le Saîpeftrc eftant bruâc n'en fait point, auffi\neft il
pasNitrc. Cefte campagne nous dura bien demie lieue. Eftans
tôufettes. plus aduancezjtrouuafmcsla mer ; &cchcminafmes long temps
diUm de le loBgde la marinc,ou nous veoyons grand nombre de rouficc-
mer, tes & de chiens de mer qui fe repaifibyent en fc pourmenant au
riuagc. Nous y trouuafmes vne particulière efpcce de Cancrc,de
nature fôorcftrange,- ccft qu au plus grand chaud de i'efté , en-
core que k Soleil foit en & plus grande chaleur , toutesfois il
ibrthors delamer,& yenafigrande multitude, quelaterreea
eftcouucrtc, &fcvaefbatant le long de la mer, courant parle
iàble à trois trai&s darc , qui n eft guercs plus gros qu'vnc petite
diaftagneuourcsfois U court fi vifte, qu vn homme apeine de le
OBSERVEES P A BL F. BELONi 507
fuyurc :&qui pluscft, ayant eftéle iourau fecàla véhémente
cWeur du Soleil, ilfe retire la nuid en la mer. Ariftote l'appelle c*ncercm°
Cancer curfor. Il eftlNm des animans le plus admirable que nul au-^'
tre qu'ayons iaraais veu. Plusieurs fe font trompez de le mettre
au nombre des poifTonscetacces , le nommans. Dromon , c e&à
dire curfor : mais , comme auons dit , il eft de petite corpulence,
& duquel auons fuffifamment baillé la. defeription au liqrc des
poifïbns. Les nu i&s n'ont efté kobfcures en tou t aoftrc voyage*
que nous n'ayons peu voirxequiefroûen noftre chemin. Ce
.vefpreeftans^quelquepeu efeartez delà Carauanne ,, va- Sangiae
qui alloit vcrslernfalcm, contrefeit vn faux alarme , faifant fenv
blanc que fufïbnt les Arabes. Mais 'quand nous- cufmes cogneu
fa tromperie , nous n en monfrraûnes grand compte : car les ge-
nifîàires qulaccompagnoycnc monucur de Fumet 5. eftoyent:
hommes hardis & bienequippez. Nous çftios partis long jemps - ;
auant iour , laiflâBs le nuage delà mer Méditerranée : & à îous ■" "' .
ouuert la. Carauanjue& le Sauiac fc repoferent pour obéir à qucL
ques Marannes Iuirs quieftoyent à Iatrouppe , & luy auoyent
donné quelque prefenr pour, tes attendre», Lçs.di&s- ayans.faiç
plusL£ncment}prindreatadpa»çagele Ycudrçdy^auipir s ôêgai-
gnerent quelque peu le deuant pour {c sepoier : car ils ont de
co.ufrumc de ne travailler le iour du Samcdy . Le lendemain qui
elloix le Samcdy ,.. eilans. bien accompagnez , gaignafmcs le de-
nant , & vinfmcs loger en vn Carbaehara muré >, près dvn grand
yillagc,quieû:faiten£ormcde chafteau. Nous achetafmcsdcs
viures aux villages : & commcnçafmes ce foir à trpuuer la terre
graflè , Se laiiïèr les Tablons. Nous y trouuafmes de l'herbe nom- smirma»^
mec Smyrnium , qui y croift copieufement , & au® A rabroua, ^i^rofut:
Algatertia, Anchuia, & Ligufticunu Depuis le Gaire iufques ^^^
en ce lieu nous ne trouuafmes point d'autres arbres que Pal-^^^,
miers, & arbres lanigères ,. dont les pommes font plaine 4c lair
ac-delicc.» dont auo,nsdejGa cy deuant parlé.
■ ■■'■- .:'..."'.: .' • :QSi±3
J°$
SECOND LIVRE DES SÏNGVXÀ.
Bdanusmy-
repftca.
Smyrmum.
Sycomores.
Ziï&enfm
Chameaux
4&Turfiie.
Veplufieurs arbrcsyoifeauxi& autres chofesfineuUcresgrodmSics en U,
terre de Palefime. Chapitre lxxviii.
S t a n s encor deflfus le couftau ,auant arriucr au Car-
bakhara, trou uafmcs l'arbre nommé Balanus myrc-
pfica: lequel au regard de ceux d'Arabie, eft moule
grandjfcmblanrà vn Bouîeau,autremcnt nommé Be~
r:ula : près duquel y auoit grande quantité de Smyrnium, dont la
jfèmencecft ronde comme Coriandre, & moult odoriférante.
Approchans du Carba{chara,veoyons quelques arbres verdoyas
d'aflèz loing^ui nous mîréten doute, àiçauoir quclz arbres c'e-
ftoyent:&: coniîderans qu'ils auoyent leurs branches à la fummi-
té^en manière d,vnt>ouquet,& lerronc gros, faifàns bel vmbra-
gç , te ayans les fueillcs afîernblecs bien près bvne de l'autre , co*
gneufuaes quec'eftoyent des Sycomores,qui eftoyent mis par or-
arc parla campagnc,tout ainfi comme font difpofez noz noyers.
Aufli y auoit des arbres que les Grecs ont nommé Oenoplia , les
autres Napeca, qui eftoyent autour;du puiz du Carbafehara. Ce
Carbafehara cft la borne êc premier commen cernent delà terre
fetilc4e Paleftinc. La plus grande partie des portes des Carbaf-
charas d'Egypte & Syrie font communément de fer,& ont leans
vnccourt,au milieu de laquelle il y a vne plattc forme , furquoy
les paffans fè campent : & tout autour des murailles y a des por-
ches par le dcdcm,pour fè retirer la nuict quand il pleut, & auffi.
le iour quand il fait grand chaud. Nous parTafmcs toute la nui&
enfermezen ce Carbafchara,ou nous feifmes le guet, pour le fou-
fpeçondes larrons Arabes : car on nous auoit rapporté qu'ils n'e-
ftoyentgueresloing delà. LaCarauanne qui eftoit demeurée
derrière, chemina toute nuict, & nous deuançaauant iour: la-
quelle nous peufmes ouyrde bien loing : parquoy nous ap-
preftafrnes incontinent pour deflogerauecellc. Les Seigneurs
de Turquie vont aum* bien en îicticre comme en Europe : mais
au lied gpcjàms auons des Mulets ils fe feruent de Cha-
meaux. La coufturne eft que quand quelque Sangiac ou au-i
tre Carauannc de plus grand' bende chemine par ces pays là,
qu'il y ait vne gtofTc cloche pendue au col d'vn Chameau}qu'on
oicdebienloing,pour aduertir toute la trouppade s'emrefuyure.
OBs'EÎLVEES FAR ». SELON, $©£
Eftas entre la ville de Gazara,qui cfl la première ville qu'on tr«u«
ueau pays d*£gyptc,& Bclba, trouuafmcs des campagnes en fri- „
chc,ou il y afigrand' quatité de rats & mulots , que û n?eftoit que p^" /ww
nature y enuoye moult grand* quantité des oifeaux qu'Àriftote ^^X.
nomme Percnopteri,& les François Boudrees , pour les deftrui-
redes'habitans ne pourroyent femer aucun grain qui ne fuft ma-
ge. Il y croift des Squilies,Thapfia y Ferula, Polium, Haftuk rc- liq/U.
gia.Nous paflàfmes par campagnes bien cukiuees de bled, legu- Fertt^-
mes,& arbres rrui&icrsXcshay es qui fèparer les terres, font fai- f*£
tes de Rhamnus &: Haîy mus , fur lefquellcs auons veu voler de ^*fu n*
telz oifeaux que ceux qu apellôs Pies griefehes , qui mangent ^fCmnu^
fouriz, corne les Crécerelles. Auflî veoyons voler plufîeurs Vau- sdymus.
tourSj&autrcs oifeaux de charongne , telz qu'auons cy deuant r'iesgrief-
nommé Sacres d'Egypte, &: en Latin Àccipitres iEgyptij.Qucl- <&*>
qués vnsde noftre compagnie les npmoyent Pélicans, les voyas ^aMt0U^s-
femblables à ceux qu'on met en peinture , baillansdc leur fang à Sacres
îeurspetitz. Mais pourecque ce mot Pélican nousatrauailléà'^^
enquérir quel oifèau c'en: f auons bien voulu faire entendre que onocrotdus.
eeluy qu'on doitprendre pour Pelica,eft celuy qu'on eferit auoir phinis.
deux cftomacs,autremcnt nommé Onocrotalus,pout lequel Al- ofifrdgus.
bertaefté trompé , 1 ayant prins pour Oflifragus : car Oflifragus:
cft celuy que îesGrecs nomment Phinis:qui a donné argument à
beaucoup de gents de parler du Phénix , qui tourcsfois cft difFe-
ret à celuy que lcs-Latins ontnommé OfHfragus,icquel on peine
dcfTus^nnidjdefchirantiâ poitrine pour repaiftre fês petits co-
rne il appert en l'hiftoire qu'Ariftote a deferite de fbn Phinis , êc
Pline depuis dcfcriuatrOffifragus luy a attribué toutes les mer-
quesqu Ariftotca fait au Phinis, qui cft plus grand qu'vn Aigle, ^%^
& qui en cft du prochain genre , ayant l'ongle crochu ; duquel la
pafturc cft de chair. Sa couleur eft decendree en blancheur , $c
ne voit pasbïen clair. Il fait fon nid & vit rcligieufèment:&: eftac
de bénigne naturc,&: de prouifion , nourrift les petits de l'Aigle >
quand clk lésa deîaiftezjles rcceuant,& les noumftknt foigneu-
fcw^catySc les gardant chèrement, iufques à tant qu'ilz fbyent a£-
fèz grafndsvLcs Frânçoi^cognoifîènt vn oifèau, qu'iîz nomment
du nom conuenant au Phinis, qu'auons dit cftte nomme en La-
râOCifragus,rappcllansyne-OiT%ye : ^toutesfois l'Om-aye Qfra^
n-eii|>as. celuy qui dok c4tenkc6nona4à';«arc,cftilquianom
3$0- SECOND" LIVRE DE* SI K GTE Av.
Halietus ,vmiseniacinquiefme efpece encre les Aigles. Oh îe-
void communément fur lesriuieres &cftang$,prenatlcpoinonv;
fè laifïant tomber de lair de grande roideur comme vue pierre:&:
en fendant leau fe paift du poifîbn qu'il prend.Lcquelcombien
qu'il tienne ce nom, François d'Cnraye »nc doit eftre nomme
Qififragus. Nous cheminafmcs quatre heures par plaines cam-
pagnes fans arbres. A, la. fin arriuafmes à Gazaro , qui eft la pre-,
Hiierc ville qu'on trouueentrant.en Iudeeid: campafmes defîbus>
wî Palmier., en vil iardin^courtoignant la viïïe..
EtU-mUede Gazayo.. Chapitre txxrx.
* Azaro n eftpas murce. Il y a vn Chafteau quarré
l fait à^'antique , eueué:defi%s vn couûau , qui n'eft
|guerefort,çra il y adefiegç d vn Sangiac. EUciG&fU
: tuec en lieu fertile de Figuiers, 01iuieFs>Iuiubîers>
s pom micrsîgrenadiers,&: vignes. Il y a quelques pak
miers , mais leurs fruichfe meuriflènt. mouktard : car le climat
n eft affez chaud v Byauoit défia, trois mois pafTez qne les pal*
miers dr£gyp£c& d'Arabie auoyent meury leurs dafteSj&tou^
tesfois iîz.eitoy et en cor verds à Gazaro. 11 y avne manière de Le?
sttttm^. z&tàz noirs nommez Scellions , quaû aufligros qu'eft vnepetite
Ikletté. J^ejur ventre fort enfié»& la*efte grofle ^dcfquelz le pays
de Iudee^ Syrie eft béen garny .^Nous y veifmcs auûSvn oifeau^
qui, à^nodre aduiSjpafle tous autres en plaifànt chant ramage ; Se
rtnatkor croyons qu'il a efté nomme par les anciens Venxtica auvs. Il eft vn
«**. peu plus gros qu Vn eftourneau . -Son plumage eft blanc par defc
Molli&f^ f buz je ventre,& eft cendré dcftiis le dos comme ceiuy de l'oifcau
nommé Molliceps , qu'on appelle en François vn Gros bec. La
queue noire , qui luy pafte les asl-les,commc àvnc Pic. Il vole à la
façon d'vn Piuerd. Nous trouuafmcs toutes fortes de viurcsà
Gt&ro. acheter au marché de Gazaro ,. comme pain, vin, poulk^ceufz*
Les Grecz Turcs &. Arabes qui habitent à Gazaro^fqntfort dili-r
gens à-cultiuer leurs vignes. Nousfeiournafmes campez iufque^s
au fbir , te partifmes bien tard , & cheminafmcs toute nui& vers
Kama par belles campagnes. A iou t puuert vifraes des villages fi\ "
tuez fur les cauftanx lcïongdes campagnes cultiuecs de toutes
fg£tes 4p grainsvrNcrus vcoy ong ^qlej:- des Q nocrotalçs en gran*
•O^BSiEîlVEES PAU F. B2LON. $ïf ■
• Ses baticles vers la mer , Se auflî allions droid au Septentrion,
#yans le dos tourne au Midy. Et pource que le venc de Siroc
fruifloit bien -fore , nous oyons les flots de la mer braire : car
aous n'en eftions pasfort loing. Les arbres d'Oenoplia ou Na- 0mofa.
peca y font de la grandeur de noz Poiriers , ayans le fruid gros
^comme vne-pomme fauuage : qui luy reflemblede fibres que Ion
prendrait 4* vn .pour Fautrc. Aulfi eft il doux auec vnc aigreur
amiable-, ayant vn petit noyau au dedans v gros comme ecluy
dvncOiiuc. C'eft arbre <eft fréquent en Egypte, Syrie èc Ar-
ménie, & tourcsfois il n'y en apoint en Grèce , ne auflî par tou-
te Europe.; Il eft vexd en toutes faifons : parquoy 1e portrait fe-
ra mis au Hure des arbres toufiours verds. N ous trouuafmcs en cannes de
chemin vnc campagnc-cuîtiuce de Cannes de fuccre & Coloczf- fiare.
£c , arroufee de l'eau qu'on tire d'vn puiz. De là arriuafmcs à Ra- Co^4^-
ma^o u nous demeurafmes tout le iour.
DelaviUedeRama. Chapitre LXXX.
Àma a anciennement elle vnc grande ville , com- j^ma, '
me il appert par fes-tu4'nes:car les Cifternes & voû-
tes qu on y voit , font plusgrandçs que celles d'À-
lexandrie,mais non pas en 5 grand nombre. La fi*-
_ _ * tuation de Rama eft en terre graffe & féconde : Se
pou^ autant quelle eft deferte , &: qu a peine y a douze maifons
habitées , les champs|>ouc laplufpart demeurent en frichcGra-
dc pattiedes habkans font Grecs. Lon cukiue du fourment y de
lorge , des légumes , Se vn peu de vignes. Nous trou uafmcs de
laxhair , pain , vin , Se autres vîmes à acheter. La féconde cfpc- . . ^
ce d'Acacia y croift en abondances Se auflî vn atbriûeau cfpi-^ 4CU £*
aeux que croyons nauoir efte deferit des anciens , tcmtcsfois^^^
auons eu foupeon qu'il fut arbre de Mïrrhe. Il eft tortu , efpais^
munideipines poignantes, duquel les fùeilles font fêmblablcs.
à l'Acacia, mais quelque peu plus grandes. Partans de Rama,
auant, qu'il fuft iour , cheminafxnes par grandes campagnes do
ferre graffe: en laquelle Ion ppurrok bien cultjucr quelque bon
grain. Mais les habitans. du pays parcûeux de leur profid n'y la-
bourent ûnon par manière d'acquit. IUoramençoit defkàeftrc
$12. ^ SECOND LIVRE DÈS SÏNfcV£:À.
l'aube quand cntrafmesen la vallée entre les montagnerde le*
rufolem.Et quand nous fufmcs quelque peu auancez lcans , ay as
les montagnes fort precipiteu Ces de cofte & d'autre , trouuafmcs
quelques Arabes defcendansdeça&: delà , qui faifbyent grand
bruit fur les couftaux,lefquelz fi toft qu'ils nous apperçeurêt^dcf
cendirent pour nous demander argent,faignans nous vouloir a£
faillir parforccimais nous,qui auions efté aduertis quetelle que-
. naillc rançonnent les paffans efhrangers , quand ilz font lesplus
Crabes de* fortSn>cn fcjfmcs pas grand eftimc.Eux,qui pour leur couuertu-
pafùi ' rcfaignent eftre pour la garde du pays du grand f eigneur , turent
contentez d'vne petite fomme d'argent. Aufïi n'eufïènt ilz ofé
vfer de force : car outre la trouppe qui fuyuoit monfieur de Fu-
met, il auoit aufïi dix Geniffaircs de renfort qu'il auoit pris à Ga»
zan^que le Sangiac luy auoit baillez. Aufïi ont ilz bien ccfteaftu-
ce que lors que les pèlerins font en trouppe pour leur pouuoir re-
fifter, ilz ne les afïàillent iarhais.
D elerujàtem, qui efl fitué entre montagnes* Chapitre lxxxi.
Es montagnes font fi abondantes en toutesefpeces
d arbres & herbes fauuages & aromatiques, qu on les
sàdtCrete. IÇS^^J peut comparer au mont Ida de Crète ,xommc aufïi
T -£ 8ÈIËIIÊI cn tempérance^ autre habitude. La terre cultiuec
twCmT^. Par^cn*ls te rochers , cft faite en manière d'efchelons, qui mon-
* ftre la diligence des ïuifs du temps paffé en accou ftrant les ter-
res : qui rendoyent leur territoire, lequel de foy eft pierreux & in-
i>i&genfe fertile,cultiué $c abondant en fruiârs. La mefmc diligéee de cul-
des anciens tiuer les montagnes pierreufes, eft aufïi veue" au pays de Grèce es
&***' ifîes de la mer Egcc,entre îcfquelles en auons veu plufieurs main-
tenant deshabitees , ou à peine pcuucnt eftre nourris cent ho m-
mes,quiennourrifToyentlctemps paffe plus defix mille, com-
me il appert par les collines & petites montagnes , qui autresfois
onteftémafïbnncesdcgrofTc eftoffcàefchelons pour retenir la
zU. terre qui pendoit contre bas , pour rairc naiftre les plantes. Les
Milos. iilcs,de Zia,Miïos, Andros,Naxia,Paros , & plufieurs autres ont
^Cndras' par ce moyen efté tellement accouftrees des anciens GrecSjqu'ils
^** les rendoyent plus fertiles que la terre d'vne plaine campagne.
Scmblabiemendes Iuifs ayans leur territoire fterile , mal à pro-
pos
OBSERVEES PAR P. BELON. 3T5
éos à porter vignes Se fruits , auoyent rendu les collines fertiles ^n&raeh
par^rand labeur,dont iouuragc de la mâfTonneric dure depuis le nes- „
temps qu'iîz eftoyen t feigneurs abfoluz de Ierufalem , qui mon- Tk"s'
ftrelagrande diligence & dcfpencc , &: fe refent quelque chofe cyfneyerd
de fa grandeur ancienne. Les arbres que nous auons recognu Tereh'mthesl
nâiffans faunages par les montagnes en ce territoire, font An- lentifyues.
drachnes, Piçees,Aria,Chemes verds.Terebi^thes, Lentifques. cifius.
Les lier beseftoycntCiftus^edon^ymbrajSmilaxafpera, Ma- Leion.
ronjOriganumheracleoticUjTragoriganum, Saugers , Stachis, Cot1^0^
Rue fauuage, Afphaki tes trifolium, Cycîaminus, Vmbilicus feu ^J™"
CotyîedonjThymus. Lon trouue aufïi de l'hy flbpe fauuage", dtf- J^Z'
ferente à la n offre du iardin, de laquelle toutesfois lon n en trou- smilax afi
ue aucunement en Crcte.La partie des fufdi&es montagnes qui jera.
regarde l'occident , eft trefopuîete en vignes, en arbres fruiâiers, Maron.
Oliuiers Se figuiers, & grenadiers , au regard des autres qui ne onganum.
portent que les arbres fteriles. xerxcleo*
Briefue commutation au chemin ientrele Caire & Jcrufidem. nu~
Chapitre lxxxii. saugt
tieum.
■ort£4
-en.
Stachis.
L eft manifefte parla computation qu'auons faite fur %uefAuua*
le chemin , qu'il n'y a que neuf iournees du Caire en ge;
Ierufaîem,ou dix pour le pius.Vray eft que nous auiôs Cîf!Mnî*
_ww_ ^z a^cz b°nnc diligence de cheminer. Car nous mm'
eftions partis du Caire le famedy vingt Se ncufiefme d'O&obre, computâûl
&;arriuafmescn Icrufaiemle mardy hui&iefme de Nouembre. du chemin
Apres que nous fufmesfur les montagnes t &eufmes chemine du Caire m
quatre lieues , trouuafmes vne fontaine aux pieds des ruines forufiltm.
<l*vne Eglifè,qui auoit autresfois efté vn monaftere:commc &ap-
pertparlespein&urcs , & croyons quelle eftoit des Chrcftiens
Latins,ou il y a encor quelque apparence de clofture. Nous di-
nafmes ià,& puis après allafmes coucher en Ierufàlem. Les pèle-
rins qui yarriuent fe vont loger félon la religion qu'ilzfuyuet: çeUgieux:
Car f ilz font de FEglifè Romaine , que ceux de ce pays là appel- ^m.
lent cftrc Latins,ilz logent au monaftere des Cordcîiers , qui eft $$gieux:
hors de la ville^affis deflus le mont Sion : mais f ilz font de la rcli- J^
gionGreque, ilz logent auec les Calojercs'Grecs , qui ont leur %£!^*
logis dcdâsk ville prcsdafepulchre. Etfikfoût du pays (kPre*
RR
P4 SECOND LIVRE DES SIXCVLaI
- ,-' ftrelehan, iiziogcntaucc les religieux Indois. Tout ainfîfaut
-dire des autres nations Chrétiennes, comme Géorgiens , Se Ar-
iBeniens.Les Cordeliers font communément trente ou quaran-
te dedans le monafterc : entre lefquelz Ion en trouue de pîufîcurs
nationsrtoutesfois la plus grand part eft Italienne. Hz côduifent
les pèlerins par tous les lieux fain&sdu territoire entourlerufa-
Droguement lem. Aufïi tiennent ordinairement vn interprète à leurs dcfpens,
des felerim ]CqUe| ilz nomment droguement , qui icait parler Turc, Arabe,
eoj£r.tjaleœ. Qrçc^ IcaliemS: autres pour parler aux gens du pays,& refpon-
dre pour les pelerins,&: les conduire par tous les lieux fain&s.Les
Cordeliers font la'garde toutes les nui&z en leur monaftere,ayas
chacun fon heure déterminée, fe tçnans deftus les murs , pource
que lemonafterc eft hors la ville. La peur qu ilz ont du larrecin
~* . des Arabes , eft grande : Car en cor que leu rs mu railles lo nt bien
hautes , û* eft-cequ ilz ont peur que les habitans du plat pays ne
lcsaïTaillent.
XuccmHe defeription desjâin£is lieux de lerufdem.
Chapitre lxxxiii.
E territoire de lerufalcm eft aftez bien cultiué , Se
' principalement autour de la ville. Hz font leurs vi-
gnes auec diligence. Il y croift des p5miers,aman-
diers, figuiers, Se oliuiers 5 defquelz ilzrecuillcnc
oUmers de S^^M^L^^ beaucoup d'huyle. Mais les Oliuiers ont vnepar-
imtpdem. riculiereenfêigne,qui lesfaireftre dirferens auxautres : c eft,que
Guisdoli* nz portent le guis,chargc de femences rouges, au grand domma-
mer- ge des habitans ; car il les rend fteriles. L'or Se l'argent que les
Gordeliers de lerafàlem <iefpendent , leur eft enuoy é de toutes
partz du pays des Latins : car ilz ont leurs aumofnes affignees en
diuerfes contrées dJEurope,qui font recueillies par les Gardiens
de l'ordre:: Se en ont principalement en Cyprc,France, Se Italie.
Ilz nous ont dicfcqu'ilz fbuloyenten aupiren Alemagne5& An-
glererre^mais^uilz n'en reçoiucnt plus rien. Il n'y a autre religio
en Ierufalem du party <les Latins que les fufdi&z Cordeliers. Le
jjeuxfrniïs ^n^crïiam matin au poincl: du iour quelque nombre de Corde-
iôrsieriifdle, hers nouscoduiùrent viilter les lieux fainas autour dclerufale,
Se commençafmcs comme {'enfuit. La première chofe qui nous
O'FS E KV S £ S ' P'A 8. P» B'E I ON. 315
fut monftree fortas du monaftere s foc le lieu ou noftre Seigneur
fcith Cène auec Tes difei pies: mais les Turcs rauoycnc vfurpc fui:
tes Cordeliers , &; en ont fait Mofquce dediee à Mahomet , qui
eft'tout joignant le monaftcrc âcs Cordeliers. Mais mon/leur
d'Aramont le leur a depuis fait rendre. Quad nous fufmes quel-
que peu éloignez du monaftere,iIz nous monftrercntlelieu oti
les bras des I'uifz qui vouloyent empefeher les difciplcs -d'empor-
ter le corps de noftre Darae,dcmeurcrent retirez: qui eftioignat
h porte de la ville. Plus outre fuyuanc la muraille de la ville, vif- r*iï*J*io*
mes le Heu ou pleura Saine* Pierre quand il eut nié noikc Scï-W j ,
gneur,pres la vallée àc Iofaphat. Suy uant Jadictc mu raille , eft le 4wk
temple des vicrges/itué à vn coing de la ville}qu i eft. maintenant Ti^e'Angu»-
Mofquce des Turcs^Quelquc peu au deflbuz en la mefme encoi- 1ère.
gneureeftvne pierre triangulaire , qu'ilzdient eftre celle delà- Torrent de
quelle i'eferiture fain&e afait mention au VCczurnciLapidemouem Ce^ron-
reprobauer&ntxdïficantcs.Dc là defeen das en .la vatfee de Iofaphat, LUn^es^c
pafïàfmcs le torrent de Cedron ,qui n'eft qu'à vn ie& de pierre no^reJei*'
de la ville. Il n'y a point d'eau finon quâdilaplcur&yavnepicr- ^'*
rCjOtî fontengrauez.les pas que feit noftre Seigneur tombant du sepulchrcs
pont.ïoignant lequel -y a-deux fcpuîchrcs, qui font entaillez de- magmffte*
dans le toc , faits en Pyramide Plukeurs penfent que ce foyenc
les fepulchres de Hicremie &Efaye.-Suyuans la colline^ allans
contremont,veifmes le lieu ou eftoit l'arbre auquel lu das fe pen-
dit. Quand nous cufmcs entouraé la colline iufqaesàperdrela
ville de veuëmous vifme&vne chapelle par terre qu'on did auoic
eftéla maifon de IaMagdelainerioignant laquelle trouuaimesla
pierre fur laquelle eftoit afïïs noftre Seigneur quand elle, luypar^
la de refufeiter le Lazare : ce lieu n eft pas àvn quart de lieu ài~
fiant de îerufalemjvlarchans plus outre trouuafmes vn petit. vil-
lage ou eft le fepulchredu Lazare que noftre Seigneur refufeita: s¥*khre ^
ëc pour le voit, il fallut defeendre en vae voûte grande .corne vne ^*^e"
chambre , fabriquée de bonne matTonnede : dedans laquelle cft
vue tumbe à la hauteur d'vn autel 5 cm les pèlerins fou ueot font
dire îameiTe. Sortant hors}& retournant vcrslçrufakn^ciblen-
droiclou eftoit le Sycomore que noftre Seigneur maadift. Cefte $*°»ore
eft la partie qui cft nommée Bethanie. Montans contrcmôc vers 'maif*t:
le territoire nommé Bethphagé, qui cft pays boftu & pierreux, f^TT^}
$xiSmG$ lecbemifl àmain dcxire., qui tire fut Ic-mont Oiiuet : ôc "^ "^
RPv.ii
$l£ ' SECOND LIVRE DES SINGVLAÎ
ainfïfuyuans les fûmmitez des tcrres,veoyons les confins de bie^
loingjd autant que nous cflions au plus haut lieu qui foit entour
Ieaifalcm. Nous aliafmes par le lieu ou noftrc Seigneur pafïà
""" quand il feit fon entreeen Ierufalem , &: la ou il monta fur lafne
qu'il feit deflier pour luy eflre amenéauec fon pouîain.Eftans en
ce haut licu,& nous retournans vers la partie du Midy , vcoyons
la plaine de Iericho , &aufïi la mer morte autrement nommée
Mdreytp ^are Afphaltites, en laquelle Sbdome & Gomorrc abyfmerent.
fba mes. £^r ja mcfmc montagne , nous retournans à gauche, les Corde-
liers nous moftrerent le lieu ou les disciples feirent plufîcurs cho-
fcs. Eftans deffus la fufdi&e colline dXDliuct 5 veoyons Ierufalem
bien àcler , d'autant que nous cftionsen lieu fitué plus haut que
k ville. De là pafTafmes par le lieu ou noftre Seigneur di&, Va tibi
Ierufalem*
& * Vu /épukbre noftrc ~Damey en la vallée de lofaphat.
■ Chapitre lxxxiiii.
SSW^^ L y a vne chapelle au haut du mont Oliuec , "que hs
/^gw<fo..5Hgj gpï Chreftiens ont fabriquée t dedans laquelle Ion vois
ftedsdeno* §s|n ^gsj l'vn des veftiges des pas qu'imprima Tvn des pieds de
Jbreseigneur, 'gffi^jgg noftre Seigneur quand il monta aux cieux:car l'autre
a efté tranfporté , qu'on dit eftre maintenant au pays des latins.
Il y a vne autre petit tertre de hauteur égale , ou il y a vncautre
chapelle,qui tumbe parterre cntuine.Reprcnans noftre chemin
M0tôlîuet.: vers Ieru{àlem,dcfcendans parle pied du mont OHuct,nous paf-
s.Efiienne fafmcs par vn fèntier ou S. Paul eftoit, lors qu'o lapidoit S. Eftie-
%^' ne. Defccndans plus bas , nous veifmcs les trois pierres furquoy
les difcipîcs cftoyent dormans, quand noftre Seigneur prioit.
Item ou noftre Seigneur fut pris,& ou S.Pierre couppa Taurcil-
le à Malchus. Toutes ces places qu auons nommées ne font qu'à
deux ou trois traiûz darc l'vne de 1 autrc.RepâfTans par le p5t du
Torrent de Torrêt de Ccdro,quenous auiôs ja pafTé en allant, veifmcs le lieu
Ceèron. en la vallée de Iofàphat, ou Ion dit que noftrc Seigneur fua fang
yafcede lo* & eau :OU jon a fajC vnc chapelle. A cofté de laquelle eft la fepul-
emdchr de turcc^c no&vc Dame, &de Sain&e Anne, Ce fepulchre eft en
ncêrenamt. vne voûte dciîous terre, qui eft faite de greffes pierres de tail-
le, fouftenue de groûes colonnes de pierres. Les degrez paur
OBSEUVIES fAH P. BELON. $VJ
âcCccnâtc là bas , font bien larges : car la chappcllc eft fous
terre. L'on penfe que fàinâe Heleinc merc de Conftantin la feie
fairc,cnfèmblc la muraille qui entourne le faind fèpulchrcNous
fbrrifmcs hors la vallée de Iofàphat , prenans noftrc chemin vers
la porte dorée, auquel lieu on nous monftra Tendroici ou les Ro-
mains rompirent la muraillc>quand ils prindrent Ierufalem^ors
que Titus & Vefpaflcn l'afïiegerenr. La porte par. ou noftrc Sci~ Porte dora.
gneurentraenlerufalcm, eft la porte dorec, par laquelle nous
n!entra{mes pas , car elle n'eftoit ou uerte : mais coftoyafmes la
murailleiufqucsaumontde Sion. Nous fcùmesle fufHit voya-
ge auantdifher: carie chemin n'eftoit gueres long, Lerefte du
iour fut dédié à aller voir les prochains lieux alentour du mona-
ftere, comme eft vn lieu ou il y a des permis , ou les corps qui y
font mis^fbnt côfommez en vingt & quatre heures. Vn peu plus
bas a cofté nous vcifmes la Pifcine probatique,qui arroufè la val- T^fcme^
lee de Iofàphat.De ce Heu nous partifmcs pour aller voir le fepul- ^f"
chre denoftre Seigneur qui eft dedans la ville , en vne grande E- mB j* .
glife que fain&c Hélène mère de Conftantin feit édifier. Il con- con&mtm
uient à vn chacun qui veut entrer au fepulchrc , bailler neuf du-
cats , & n'y a perfonne qui en foit exempt , ne pauurc ne riches.
AufH ecluy qui aprins la gabelle du fepuichreàferme,paychuiâ:
mille ducats au feigneur: qui eft la eaufe pourquoy les tentiers
rançonnent les pelerins,ou bien ils n'y entreront point. Les Cor-
deliers & Calojercs Grecs, Se autres manières de religieux Chrc-
ftiens ne payent rien pour y entrer. Les Turcs le gardent en gran- ?ifMS Seis
de reuerence, ■& y entrent aucc grade dcuotion. L'on dit que \csgnwn m u*
Pifans impofèrent ceftefomme de neuf ducats,iors qu'ils eftoy et rujàkm.
feigneurscnlerufalcm, & qu'elle aefte ainû maintenue depuis
leur temps. 7"
Vitfeptdçhre denoftre Seigneur, & des ruines de Iemftlem.
Chapitre lxxxv.
- ■*-.'•■■
Erufalem a efté reueftu de-hautes murailles neufues towfila»
; depuis peu de temps en ça : toutesfois de petite eftof- ^tù^néde
" fcj&fortfoibieSjquinepourroyentreûfleraucanori.^*^^ "
Lcsmaifonsyfontcouuertes en terrafte. Les bouri-*^^*
ques qui font es g randes rues font vouteeS|Comme celles d'Aie-
RR iij
■-j-lS SECOND É'ÏTRE DES STKGVIA.
xandric. Toutesfoislacomparaifon n eft pas égale: car les voir-
ies de lerufalem font de pierre détaille, de fuperbe édifice, qui
en quelques endroits reftenten leur entier, depuis le temps que
lesluifsydominoyent. Les marchands qui vendent les drogue*
ries de Ierufalem > parlent piufieurs langages , tout ainfi comme
Voti^iutU au Caire. Les nations Chrétiennes le plus fouucnc enuoycnc
msCbreftU des hommes , plus ou moins, félon la contrée, pour habiter en la
ennsi MM»*.vilîe,& fe tenir au fèpulchre : dont adulent que i on compte dou-
MurfreL* ^langues de la religion Chreftienne , différentes l'vnc à l'autre:
%!m' ,- - & fàito-n compte qu'il y en a douze principales. Toutesfois n'y
cteltine en trouuonsque hûi& , dont la nation Latine, qu'ils appellera
Romaine. ' Franke,eft préférée deuanc toutes les autres , & cncloft tous les
crequs. oheyfTans de FEglife Romaine. La féconde eft la Greque5qin eft
.w^mflB/«w.appcliecervleur langage Romxos: de laquelle i'obeiiTance n'eft
teolntts. p0jnt au commandement du Pape , mais ont leurs Patriarches à
Géorgiens, parc> Lâ trojflcfme nation eft F Arménienne , qui approche plus
CTt , de noz cérémonies que la Greque. Les autres nations confeque-
u7emZ* ment,comme font les ïacobites , qui font delà religion côucrtie
indiens. ' àlafoy par fain&Iaqucsle Maieur. Les autres font Géorgiens,
^Abycmi. qui eft vne aation qui fcgouuerne par Ces loix,& quiefeioignans
mromtes. ]£S Perfes.ayans leurs confinsà Fin die orientale, & qui n'ont efte
fubiugaez de perfonne:auffi font ils feigneurs abfoulz d'eux mef-
mes.Les autres fontnommez Chreftiens de la ceinture , qui ont
prias' le furnonr de Coft es, quifurent reduicts àlafoy par S.
Thomas.. Les.autres -foa't Indiens , qui y. fônnenuoyez au pays
auquel domine Je preftre Iean : & font rorcuoirs , appeliez A by-
cini.Et pource qu'ils foat baptifez en fcu,îls portentxrois bruftu-
res , vne entre les.deux yeux au deifus du nez,Ies deux autres fonc-
pres des-temples:& ne font pas fi noirs quples Ethiopiens,^ iom
circoncis. Les autres fofit Neftoricns , les autress'appelîcnt Ma-
' ionic.es* qui eft vne roefinc choie aae'c les Arabes, Lcfqudles na-
tions ont chacune vne chappcllc à part foy: pource que tous dif-
férent en Quelques poinds: Se font entretenus de l'argent que
Jeurejîuoyenc Iespnnccs;de leurs prouinces. Les Grecs tiennent
îe CœujjquioDtla garde du lieu de Caluaire>& les Latins ont la.
cvJwKrdegnfe du5epulchre. Les religie.ux.de toutes les fufditcs nations
Cahwre* C[ircûiCDncscntrcnclcans>& fortent quand ils veulent fans rie»
payet,L'Egîifedeee kio£/epulcluedenoftre S.eigneur.enfeœ^
OBSERVEES "PAR P. B«EL0tf;% $1$
^^t]ccircukdeCaîiiaïrc,quic£len Hcuplac, &;nohei5 tacmu-Car^ens **
gne,commeplufietitsooteftimé. Elle eft haute, & cûde forme CTf^a
ronde. Ilyavneouuertureà claire veue. £c au milieu de cefte^ "^
rondeurleS.fepuîchredenoftre Seigneur eft defibu.s au milieu cye'j^ùs
dcîanefjdedens ienccînâ: d'vne petite'chappelle couucrte cnpeSel^n£Ur
voûte ronde,toute de fin marbre. Le gardien des Cordelicrs du
mont Sion a de couftume bailler vnc certification aux pèlerins
quionteftéenuoyczpar quelquviijàfin queceleurfoit tefmoi-
gnage qu'ils ontefté là, lequel contient toutes autres choies par
le meau,que n'âuons pas fpecifîé en ce lieu à caufe de briefueté.
P» defert oufuttenténoftre Seigneur: & dufleme J or dam.
Chapitre lxxxvi.
Ovsappreftaimesnoz montures, à fin que fu filons T
' preftslej en demain pour aller au fieuue4orckin : & /^^ ûr=
;. ayans couché defïbus des Oliuiershorsla ville, par-
> tifmes de bon matin auantiour,allans entre le Soleil
Jeuant&Mldyïki{ranslepoIe_Arâ:ique à gauche. Il commcn-;«:w.
çoit a eftre iour lors que defccndifmes en la plaine de Iericho:;
mais auant que nous fuyions arnuez , aduifaf mes vnc bende dey***™ de
Chameaux de loing ,qui paiffoycnt les faeilles des arbres de My- Miro^ôians'
robolans citrins eftansfurmain gauche:dont plufieurs de noftre
bende eurent grand peur , penfàns que ce fuflènt les Arabes qui
nousefpiaftènt: Se de fait les GeniiTaires quelcSagiaçauok bail-
le pour accompagner monfïeur de Fumcc,refterçnt tout coy,qui
en leur langage difoycnt telles chofes: Les Arabes font aduertis TufillanimU
de noftre venue. Lors de putilîanimité & grand peur qu'ils a- te^ss Turcs"
uoyent, efteignirent le feu de lefmorfè de leurs harquebuzes,
voulansmonilferpartelfigneque quand les Arabes nous vien- „ di'<lè de
droyentafFaillir, ne les trouuans en defenfe, ne leur demande- ^„/^r de
royentrien, .& ne feroyent dommage quaux.Chreftiens. Mais Fumet.
rnonfîeur de Fumet homme vrayement hardy,bien accompagné
de demie douzaine d'honnorables gcntilshomes François,comc
de la maifbn de Roftin,dc S. Aubin en Picardie , de Perdigal en
Gafcogne, du Val,& pîuneursautres,auec le refte de les ges , efc.
quels eftoit auffi M.Iufte Tenellejhomc de lettre, que le feu Roy
Ir raçois reftaurateur des feiecesy auoit cnuo yépour chercher àcs
. .-.:•',;"""" "' * ' *'""* R R iiij ''" '"
$20 SECOND LIVRE DES SINGVlA.
liâtes Grccs,ayans chacun la harquebuze en la main', luy mefmc
fe mift à pied le premier,^ commanda à vn chacun de fa compa-
gnie le fuyure. Toutesfois les Geniflàires n eftoyét encor defeé-
dus en la plaine,ains demeuroy et derrière pour voir l'ifTue. Mais
quand nous eufmes cheminé longtemps, nous rcmontafmes à
cheual : alors les Geniftàires eftans encor fur la montagne, voyas
que nous ne trouuions pcrfonne,defcendirét en la plaine^ nous
fuy uircn t : car ils apperceurent bien que ce qu'il les auoit tant cf-
pouuentez,eftoycnt des Chameaux qui paiftbyent en la campa-
• , gne. Nous arriuafmes au village ou autrefois la ville de Icricho
auoit efté édifiée, ou maintenant n'y a finon vne mefehante tour
quarree, qui n'eft guère plus forte qu vn colombier. Les plantes
naiflàns en cefte pIaine,nous ont fait fouuenk de parler d vne pe-
tite herbette que quelques moines trompeurs ont appelîee Rofè
$ofisdeTeri* <je Icricho : &pource qu elle s'ouure quand on luy met le pied
^t . de la racine en lcau,ont eu couleur dmuenter vne tromperie a£-
^ud^ues &z tolcr ablc,pour donner admiration à ceux qui la regarderoîét,
%£££ difans qu'elle s'ouure feulement la vigile de Noël , ou quand les
femmes fonten trauail d'enfant.Ceux qui ignorent fa nature,pe-
fènt qu'elle ne fe punTe ouurir en autre temps : Se toutesfoîs eft
chofè faufe. Ils ont pris leur argument fur la fain&e efcriture,qui
dit iSiatt plantatiavojkmlerickû. Mais l'efcriture s'entend delà cô-
munerofe rouge ou incarnate,&: non de teMe manière de plante;
de laquelleplufieurs autres ont efté aufll trompez en laîfaifant
r^mnmm; mettre en portrai&urc, lanommans Amomum : Se toutesfoîs
'n'eftpasAmomum. Nousl'auionsjatrouuceen Arabie deferte
auriuagcdeîamerrouge^croifrantc par les fablons; & n'en croift
aucunement en Icricho. La campagne de lerichoeftentournee
$?**&& <fc montagnes de tous coftez: ioignant laquelle, èc ducofté de
* Midy eft la mer morte , qui n'a point d'iflne à fortir,mais fe vuide
dehors par dedens la terre. Regardans vers le Septentrion , nous
veoyons la partie d'où vient la naifïànce du fleuue Iordain , qui
paftfe par le milieu de la plaine de Icricho. Et regardans vers la
partie de rOricnt,nous veoyons les montagnes de l'Arabie pier-
reufè , qui ne font pas loing de là,aufS font elles du tenant de Ces
racines." Mais du cofté d'Occidcnt,nous veoyons les montagnes
Mwholms ^c ^rufaîem. Les arbres qui portent le Licion , naiflent en cefte
Gxwl plainc>&anfl5 les arbres qui portent les Myrobolans Citrins^u
noyau
OBSERVEES PAR P. BEION. $11
noyau desquels les habitans font de l'huile. L'arbrifïêau d* Aca-
cia akera y croift à grand foifon. Le fleuue Iordain vient de Sc^Cdcu ^
ptentrion au midy^qui n'a le li& de fon canal guère plus large que ***"
vn petit garçon ne ic&aft vne pierre au delà : car il n y a guère plus
de fept ou huiertoifes, comme aufïi neft pas beaucoup parfond;
dedens lequel 1 es pèlerins on t accouftumé fe baigner. Il eft fi pe-
tit qu'on ncfçauroit mener vn bateau par deflusicar il y croift des
Saules noirs,Tamarifqucs , Agnus caftus Jk. beaucoup de fortes SM^C notr-
de cannes & roiêaux^ dont les Arabes ont vfageen beaucoup de TânMnfft£S'
fortes* Car il y en a vne , dont ils font leurs iauelots &: dards , Se jj^'fe
laces légères. Et au Ai vne autreforte, dequoy ils font des flèches, unm
qui valent cinq afprcs la pièce: & n'y a guère que les grands fei- Fkcùs de
gneurs qui en tiret à l'arc. Les Turcs, Grecs, Arméniens, Arabes, canne.
Perfès, Iuifs, Egyptiens, n'ont Fvfage d'cfçrireauecvneplume £%^*
doyfèau : parquoy efcriuans auec cefte efpece de rofeau qu'on
nomme Elcgia,la recueillent diligemment, dont nous en ank>ns
aufïi trouuéés ruiflèauxdu mont Athos* Apres que nous eufmes
veu ce fleuue , 5^1a mer morte , nous paflàfmcs auprès d'vn cha-
fteau tout ruiné , qui eft aflis fur le* haut d'vn petit tertre» De là
nous alîafmes vers la fontaine que Pline a appellee Çalliroé , que c*ïïtro*.
onditeflred*Heli|ee. Aece,ànoftreaduis,fânommce FûnsfoHs.Fonsfi^
L'eau en eft fort claire & froide, & court à gros ruiflêau. Et s'il eft
vray qu'on aitiamaiscultiué du Baume en cefte plaine, il eft à
prefuppofêr que ce ne fuft loing de cefte fontaine.Nous ne vou- Jjes^aQes m
Ions accorder auec quelques grands personnages, qui ont eu opi- nem'ijfmt
nion qu'il y euft de fî exccîlétes Da&es en cefte planure : car ayas pïm m L
veu que les Palmiers qui y font maintenant, n'y meurùTent leurs fane de
fruiersen pcrfe&ion ferions bien d*opinion,qu ils n'y ayet iamais a*"^.
rien valu . Si l'on ne vouloit dire que le climat fuft change depuis Cre^on'
ce temps là^& toutesfois cela ne fè peut faire. Le ruiffeau de cefte _ _^ '
fontaine produid du CrefTon,de la Bal{àmite,Jôcs, & autres tcU jjm m n0m
les plantes, comrneennoz pays. Nous repeufmeslà en Vombtc jhe feigneur
desMyrobalan!ers&: Figuiers qui luy font ombrage. Dch nous ieufia, ,' .
montafmes par des étendions de pierre , au lieu ou noftre Sci-
gncurieufna , qui n'eft guère loing de la fontaine : ou il y a trois
voûtes entaillées dedens le roc,qui font les vnesfur ksautres, ea
aaanicre de faites , 6c continuafmesde monterau plus haut de la
moiitagne^ou le diable voulut tenter noûrc Seigneur.L'ori y vois
SS
Jll SECOND XIVRE DES SINGVLA.
encore les veftigesoivne chappellc qu'on y auoit édifice. Nous
defcendifmes de là , & prinfmes noftre chemin pour retourner
■Défert de s. cn -lcrufklca.1 . Les Chrcftiens auoyent fait faire vne chappeiîe au
Sauter île defert oufainft lean prefehoit & baptizoit , qui eft maintenant
Jœpkrls. *" ruinée par terre , qu'on voit près le fleu ue ïordain . Il eft facile à
xroire quefaind lean eftant au defert peuft viurc de Sauterelles:
<armefmemcnt les autheors Grecs ont eferit qu'il y -a vne forte
de Sauterelle nommée Aphros , ou Onos , dont les Africains vi-
rent: & pource que cefont celles dont faind lean viuoitjlauons
voulu efcrircxarles Africains mefmesles mangeoyent delicieu-
fement,no par medecine,mais pour nourriture. Nous retournai
. mes en Ieruiàiem,ou difpofafmes d'aller en Bethîehcm.
skron.
Œeihlehem.
Terâànthe.
®eBethîeb?m, &Ebro®.
<hap. iXXXYli-
Sumpttieufe
Fglife en
BethkeMû*
mafiere en
Bethlehem.
JJm delà,
pâfjknce de
nojfye Sel'
E lendemain cftansrcuenusdifner au monaftere des
Cordcliers, feifmesnoz apprefts pour aller en Bethîe-
hcm, oailn y a que deux lieues. Quand nous.euf-
L^^aŒmgi chemine demie Hcac ^ nous ttouuafoies vn
o-rand arbre delerebinthe, ou noftre Dame fe fouîoit repofer en
venant de Bethlchem en Ietufiuem , qui eftfituc furlechemin
près d'vn champ tout feméd'vnc petite pierre ronde , de la grof-
ùm & forme d'vn petit Chiche. Le vulgaire dit qu'il y eut vn ho-
me qui femoit des pois, & noftre Dame pana par là > & luy de-
manda qu'il faifok : il tefpondit , ie feme des pierres: &c depuis ce
temps Ià,la terre eft demeurée pierreufe , c5me fi ces pois fuflent
tranimuez en pierres* L'on trouuc vne grande cifterne entaillée
dedens le roc, le long du grand chemin à vn ie& de pierre dudiâ:
Tcrebinthe,qin Ce rempîift d'eau -quand il pleut, 6c qui eft bonne
à boire. AîlansainfilepasiKmsocfufmcs que deux heures àar-
riuer en Bethlchem^ qui eft vnperit village mal bafty de petites
maifonnettes,- & n'y a rien de beàu9(mon vn grand & fumptueux
monaftere de Cordcliers : duquel l'Eglife eft magnifiquement
reueftue de marbres, que fainde Helenç feit faire > fouftênu déf-
ilé grofles colonnes de marbre , reueftu à lenteur de pierres de
marbre. Mais les Turcs ont enleue kCdïâcs reueftures pour or-
ner leursMofquecs,&; le temple qu'on appelle dcSalomon, qui
c.ft maintenant Mofquee> dediee aux Maliometiftes. Les Cor-
O 3TS £ R VEES P A R' F. B E L O tf . 523
deîîers nous rnonftrerent lelicudcdens vnechappellevoutce,ou sefdàre d&
no&œ Seigneur, nafqmt de te vierge Marierai cft deflTous la gra- S-f^fi"'-
deEglife- L!on nou&monftrales fèpuîchres de S. Icrofme& de f"^-^
{es difciples & des Innoccns,eneïos en ladi&e Eglifc. Ayans dif- ^J|Lm.
néenBethlehem* dcfçendiimesvnpcti plus outre, ou il y ades ^4n>».
beaux Qiiuiers & Figuiers, auprès defquels eft le lieu ou l'Ange Tragoriga,
çintannoficerattx.pafteurs que noftr=e Seigneur deuoit nafquk-, »*>»-
auquel lieu y eut aut resfois vne petite ehappellc , qui eft mainte- Zlfls",
aât ruince>& n'y a plus fino vne voûte, fur laquelle l'on trouue de 7*0!nlBrs\
de l'herbe Maron,&.du Tragoriganû^giSjThy mbra5Onitis,& ^**
de TGriganû Hcraeleotieii. ; Mous retouraafmes au raonaftere sepdchres
d'alTez bonne heure ,, & dreftafmes noftreappreft pour aller en ë^zlamçr-
Ebron, voir les fepuîchrcs d'Adam , d'Abraham , ïfaac & ïacob. ^cbrahxm.
Lbn trouue motures à louer en Ierufalera pour aller par toutou
l'on veut, tant Mules ,, Àmes^que Cheuaux. Il n'y a que fept ou
fe«L^fej^l4Ete.^l!?m.^-£fe9.n<< Nous partifmes de Bct hfehc
auant iour^ & paftaimes par pays de montagnes moult falcheux;
& arriuafmesen Ebron d allez bonne heure, Les fepulchres d'A-*
dam,Abraham,& Ifaaefont.dedcns vne Mofqueedc Turcs, ou
les Chrefticns n entret]point,mais ils les regardent par vn permis
qui eft.cn la muraille. Les Juifs nous voulaient donner à enten-
dre qu'ily a vn pays par delà Ebron habité des luifs , dont ils onç
îiouuelles , quand ils veulent , non par les luifs , priais par autres
gens : car il y a vn f&uue qui court touuours, hors mis que le Sa-
i?iedy il Te tari ft totalement en Ton lier : mais pourec qu'iceux,qui
n'ofent aller le iourdtiSamedy-,nepeuuent partir de ià, & aulîî
que ledier fieuue n eft nauigable , par cela leur conuient demeu- Mettfonge
rer^ne fè peuuent voir l'vn l'autre. Or cft il manireile que cela anciena£-
cft menfonge , & qui n'eft pas nouuclle;: Car Pli ne a eferit chofe
fèmblablean chapitre premier du trente & vnicfme iiurc , difan£ '
qu'il y a vn ruiflèau en lydec qui Te tarift tous les iours du- SamcT
dy. Mais nous eftans en Iudeeauonsfceu que ceft choie faiw
fe ,.,comrae au fli cft ce que plu ûeu rs r>enfencr que )cs lu ifs per-r
dent- de leur- iâng ïe Vcndredy faincï » . Et nçus cftaas aucç
cuxau Vendredy fàinc^^.rLauonsonc ap^erce^quils perdaient. */£&«£*»
fang non plus qu'es autres iours de la fcpmaine* Le lieu ou *rZ^\
Abraham eftoit lors qu'il en veit trois , & en adora vn , Très ^> * °^'
ixditi (p vatmadowitrià: nous fuunonftré hors le village d'Ebron,
SS. if/ '
3*4 SECOND LIVRE DE! SINGVLA.
Ttr&'mth. dcflus lcfofTé d'vn champ , ou fut créé Adam: &eftmcrquêdVti
Fon$ ftgtu* Tcrcbinthcqui a trois arbres fortans d'vn tronc. Les ruines d'E*
tHS'(f du ^ron monftrcnc W^ a c*^ autrefois mieux habité qu'il n'eft.
*sîew Nousretournafmescnlerufalem, prenansnoftrc chemin vers la
" ' . * fontaine appcllcc FonsjîgmtttStte trouuafmes telles plates en che-
min, que font celles que vcifmes entre Rama & Icru&icm. En
retournant5paflafmes par le village ou fàinâ: Iean nafquit,& vei£
mes vne Eglife ruinée que les Chrefticns y auoycnt autresfois fai-
te. Le village eft habité d'Arabes , dedens lequel y a des cifternes
faites en manière de viuierrcar il ya vne petite fontaine qui court.
Là au deffus eft le lieu ou fain&e Anne vint vifiter fainde Eliza-
i>eth,qui eft en vn couftau ou il croift grand nombre d'O liuiers.
Nous arriuafroes cefoir au monaftere des Cordeliers de Ierufa-
lem,ou nous couchafmcs : & le lendemain vifitans toutes chofes
par le menu en la ville, allafmes coucher au fainâ: fepulchre de
noftre Seigneur : car il eft permis aux pèlerins défaire porter à
manger leans , & y demeurer iufques à trois iours , s'ils y veulent
cftre,oû bien y aller tant de fois qu'ils voudron t,moyennant (co-
rne auons dit) qu'ils ayent payé les neuf ducats , qu'il conuient
%wm de bailler à tous ceux qui y veulent entrer. Les rues de Ierufalem ou
ierufalem. |cs marchands ont leurs boutiques , font couuertes en voûte, co-
méaufïi es autres villes de Turquie. Elles font renforcées de
grands cfperons , & reueftues par derrière de forts arcs boutans.
slende San Icruralcm e& fie£c <*c Sangiacat. Auffi y ail vn Sangiac, ayat cer-
çâcmicru* tain nombre de Spahiz,qui font comme foidats à cheuai. Sâgiac
Jakm. eft à dire vn gouuerneu r de pays.Les Spahiz ne vont point fc tc-
office de nir çà& là par les villages qui font au tour de Ierufalem,cômc en
sangiac. Grèce ou Afiexar les paifàns ne les veulent pas foufrrù : qui eft la
office desan cmçc qu»jis fonc aucG le Sangiac en la ville. Il eft eftrangc qu vne
■ g* mokk. oigce<je Sangiac en Turquie foit mobile comme clleeft : cartel
n'aura tenu fon office finon demy an en vne ville , qu'ayant receu
vn feul commandement du Ture,luy conuiendra quitter la pla-
ce à vn autre.Et quelque fois tel viendra d* Afrique en Europc,ou
en Afic, ou il fera bien fîx mois fur chemin auant!que luy&fa
compagnie foyent venus au lieu ou il fe doit arrefter : & fi tantoft
après il eft mande en vne autre place, il ne fera refus d'y aller: &
parainfi vferafa vie tantoft çà, tantoft là en perpétuel mouue-
ment : comme aufti font tous officiers & gens de guerre du
O B S EXVIES PAR P. BILÔ N. $1$
Turc. If y a cnuiron quelque douze Sangiacats en "tout îc pays MoUUte
de Syrie, Iudee , & Damas , qui font baillez aux fauoris des Ba- j^* °$u
chats refîdens à Côftantinople» Oeft là que le Turc cnuoye ceux D^f^9
qu'ilveucaduanccr: parquoyilz fêles changent Ivn à l'autre par^£ ^ *
levouloirdufupcrieur,en forte que pourrions comparer cela à^^
la donation qu'on fait des offices &gouucrncmcns des prouin-
ccs,n*cftoitquc les offices font perpctuclz : mais les Sangiacats
font baillecs^changeeSjOU oftees au plaifir du Prince-: car chacun
d'eux voulant augmenter leurs cftats , briguent Se font prefens
auxBaehats pour leur changer leurs offices de Sangiacat à des
meilleurs. Ain fi montent de degré en degré,fclon la faueur qu'ils
peuuent auoir,de laquelle chofè le Sangiac qui eftoit lors en Ic-
rufâIem,nous fait foy : car après qu'il eut demeuré vn an à la Ta-
na,quieft ville au fond delà mermaicur,fon office lu y fut chan-
gée^ fut cnuoyé en la Morce , qui autrement eft appeilec le Pe-
loponnefe. Et quand ilyeutdcmcurédemyan,iiibtenuoyéen
lerufaîern. Nous auons baillé ceftuycypoûrexeniple : carainfî
cfl il de tous autres Sangiacats.
Voyage far terre ferme 5 de Ierufaîem en Vantas : (? quels arbres ef}i-
- neux font frequens au territoire de lerufahm.
Chapitre ixxxvin.
Hcrchans les plantes entournoyans les murs de Ic-
i rufàlcm , auons veu dvne cfpece dTly ofeiame qui
ne croift point en Europe:& en les examinant dili-
gemment 3 pource que defirions fçauoir qu elles
• cfpines trouucrions, pour entendre de quelle efpc-
cc eftoit celle dont fut faite la couronne de noftre Seigneur, &:
n'y ayanstrouué rien defpmeux5 plus fréquent que le Rhamnus3 KiAmniiS
dont nous a fèrnblé que fa couronne fuft d*vn tel arbre : car nous
n'y auons veu croiftre nulles ronces ou autre chofe efpincufè. II
y a bien quelques Câpriers efpineux:parquoy voyans que les Ita-
liens appellent vulgairement le Rhamnus,Spina fàn&a (& prin-
cipalement entour Maccraca,& à Pezaro,auqucl lieu auos trou- sPm*fi»&<
uclcs hayes n'eftre faites d autres arbres , comme auffi en Ierufa- *?&*•
lern) Panons bien voulu mettre en ce paflàgc , ioindquelcsan-^0*^
ctem Arabc&nommcnt Farbre, duquel fut faite la couronne Al- ^&»|^
S S iiij
3-2.6 SECOND LIVRE DES SINGVLA.
ban fegi, que les interprètes tournent en Latin Corona fphet.Lcs.
arbres feuidiers du territoire de Icrufalem^ font Figuiers, OlU
uiers,Grenadiers, Iuiuiners, Pruniers,. Parquoy fçaehans que les
marchands des villes onttouiîours tenu les bois de plufieurs for-
tes d'arbres en vente es magazins & es chantiers, comme ion fait
encore maintenant^ eftdifHcile de pourpenfer de quelle marie-
cbemm de re eftoit la croix, finon des defFufdich.Npus féifmes noz.apprefts
lerufilemen gour aller de îerufaîeen Damas, ou il n'y a que cinq petites iour-
Pamat. nccs\&c partifmes le mardy au foir de Ierufalem &c arriuafmes en
£>amas d'aftlrzbonne heure le Dimenche enfuyuant.il eftoit def
ia tard quand nous- fortifmes de la ville , &allafmes loger en vn
Garbafcfef a quaiï-ruiné ipres dJvne fontaine courante en vn vil-
tàfire. UgcoomméEIpirc, diftant à deux lieues & demie de Ierufalem,
Le§ ruines de ce village monftrent.quç c'eftoit anciennement
quelque grand bourg. Lan dit que ç eft le lieu dont noftre Da-
me rctaurnaquerir noilf eSeigneur quand il demeura en Ieruia-
lçmrpour députer au temple entre les docteurs. Ce-territoire ef|
fertile en vignes, Figuiers ÔC OHuiers. Noftre chemin eftoit vers
Sefame. le Seprcntrio.Pourfuiuans noftre chemin partifmes à la minuicl:,
Coton. ^ gafiîons par les terres enfemencees de S-efame &; de Coton:
Ejculus._ ayansJes montagnas à^e^tour.deoous, verdoyantes d'Efculus,
-stria. Aria,llex,&: de petis arbres de Coccus,dontilz cueillent la grai-
Coccus ned'Efcarlate , que les habitans vendent aux marchands VenU
tiens , qui l'achètent en toutes les parties du monde. Auflî trou-
[interna. uaCmes <&$ arbres de Eleprinosou Alinterna , Tcrebinthus,&
zjgx. arbres aommez Andrachncs : & veifmes les hecbes de Tragori-
onitk. ganum,Zigis,Onitis,Maron, & de quelques cfpeces de Libauo-
M**on- . tis. Qu'on ne trouuemauuais Ci ne nommons Libanotis Rofma-
jjb<mot#~ rinicarauiBji eft il qu'vnecinquiefmeefpece.Nousdefcendions,
toufîours quelque peu, car Ierufalem eft lîtuee en haut lieu^: aulîi
de quelque part que on y vienne, il y faut toufiours^nôter. Nous
fçifmes grande diligence : carnoz monturcss'eftoyentrepofecs
mpolofi. çjï Ierufajcm : &; arriuafmes à Midy à Napolofa, qui (à noftre ad-
snhem. uis}auo4t anciennement nom Sichar, ou Sichem„ fituee au terri-
s*wk- tojre fa Samarie> .& depuisfut appeilee Neapo liserés de laquel-
le font veucs les ruines d'yne petite Eglife eu vne vallée , à demy
Tu7i h <lu*r^ ^c ueue>ou. çftpjtjc puiz J©rs que npftre Seigneur dcmâda^
j*^Li»c. «tel eau àja Samaritaine: rQauitcnanc il n\ a que la place dedans,
*C* B'S^*> V E £ 5 - P A^K 1P; B ELO^S. ^7
^^i champ au coftédextrc d'vn grand chemin en venant en ça,
îsJous arreftafmes àNapolofàjOu paû^fmcstoutela refte duiour
campez deiTouz des nieuriers blancs. Les collines de ('Napôlo£i
ïonthic cultiuees d'arbres frai&iers. Les Oliuiers croiûen t grc*s>
8c fc chargent deguis,ayans lafemence rougcçommc enïeruià-
lem , oui ne font pas fi fertiles, comme ceux qui fontkurs fions
greflcs & déliez. Ilzcultiuent des meuriers blancs pour nourrir
les vcrms,don tilz filent la foye^& aufii les figues croifïàns en pc- ^g^ de Sy*
rlsarbrespour nourrir les verms de leurs fùcilles. Les£guesd'£- cor»°rs.
gypte & Arabie font rnaigres,& font les figues quaûaufll feiches-
que celles de Sycomore.
£>efcripùon £vn* homme dérobe: & de N*2&reth , ou fut annoncée
-n&ftrel>ame quelle conceuroiïnoJlreSeijmeit*.
€bcLfkrt lxxxix
E iour fuyuant nous partumes de la ville de Na~. „ tr
polofà , qui eu; fituec fur le pendant d vn couftau,
ou il y a vn petit Chafteau à i atique» C"c& vn paf-
fàge ou il faut payer deux ducats pour homme, al-
lanc ou venant de Icrufàlcm. Nous cheminafmes
long temps auant iour5panans4nontagnes & vallées. Nous arri-
uafmcslc foir àNazareth,qui eft vn petit village, ou nous vifmes ^?^
le lieu ou l'Ange fàluanoâre Dame. Le pays eftarroufé par ruif-
feaux qui viennent des montagnes , & fontaines : îefquete ils cô-
duiïènt par canaux efpandus çà &: là : tellement qu'il eft rédufer-
cilc.Le \i\hgc de Nazareth eft habité d'Arabes. La chapelle qui
a elle faite aujieu ou fut l'Annonciation noftre Dame, cft petite,
■en voute,ou il faut defeendre pardegrcz:car clic eft deiTouz ter-
re. Lon y voit les ruines d'vne Eglife qui fut autresfois faite du
temps que les Chrefliens y dominoyent. Nous pafïàfmes le rcflc
du iour à vifiter les lieux de Nazarcck , qui eft ficué entre petites
montagnes firequcntc&en eaux.Nazaretîi eft fi.tuë au pays de Ga-
lilée. Les habitans y font/de petite &rgreftç ftaturc , comme auiîî
font tous autres Arabes^ Leur vciiementçftvnehotjppelande^^^»^
rifluc de poil de cheure, bigaree-de blanc &; de noir, fîmplcmcnt ^fî^fim
coufue,&: fànsaucunefaçon ^npiîçlu^qua^fàciqtii leur pend ^"^
iufques au gras des ïambes. Iîz^ortent vnc large ceinture de
. S S iiij
P& SE CQMVf L IV ETE DES S I N G V LA.
cuir,largc de quatre doigts , ceinte par dciïus. Et d'autant que la
boucle en cft plus krgeji autant en penfen t ilz eftre plus braucs.
Hz portent vn poignard voûté en arc, non pas pendu à la ceintu-
re,mais tenu ferré aneclaceinture contre la coite. Leurs chemi-
fes parlent k houpeîande,pendan&iufques aux talons.Leurs mâ-
ches fon t au ffi fort larges, & parlent outre celles de larobbe. Hz
portent des chapeaux pointus, & repliez à la mode de la coeffe
duTurcdeVenife , dont la couleur eft noire à la différence des
coerTurcs des Egyptiens, qui les portent rouges- Et font enfour-
nez d'vne grofiè fetuietre de Coton. Hz ne portent point de
brayes,&;nxontvfage de bas ne de haut de chauffes , mais leurs
^ femmes en portent , comme auffi font les Turques. Leurs fou»
hers fonthauts iufques à la chenille du pied. -Quand iîz vont par
pays , en quelque temps que cclbit > tant en compagnie que feu-
îets , & en paix èc en guerre , hy uex ou cfté , iîz ont touûours le
bras dextre tiré tout nud hors des manches , & aufli l'efpaule , &:
^ff^/^lamoyt édeîapoicfcrine defcouuerte,àfln que s'il venoitàpro-
£*' pos j.iizpeuffent mieux tirer de l*arc : & aulfi qu'ayans les bras
nuds , ilzfoyent mieux à deliure pour combatre ■:"; voulans mon-
ftrer par cela qu'ils font géts hardis. Mais les autres qui font quel-
que peu plus riches font veftus de drap , totitesfois ne différents
rien à la façon de faire des deffufdi&s y defquels en auons mis le
portraicL
portraicî
OBSERVEES PAR P. BELON. 3^
portmft ivn villageois *drabe.
Les arcs& Carquois qu'ilz portent, font differensaux autres sAmia
de Turquie. Les arcs des Arabes reflemblent mieux aux Grecs Tu™:
qu aux arcs Turquoisf car les Turcs d'Afie portent vn petit arc ^ V*
bien troufTé , fort courbé , & tendu bien roide : mais les arcs àcs ^/ de Cr£a
Crctcseftans de deux fortes, ceux qu'on faitàla Sphagie,apec tCm
les cornes de Bouc eftain , & ceux quon fait en Candie , auec les £0m ej&n.
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33© SECOND LIVRE -DES SINGVLA.
Soupes, cornes de Bouflesjont plus grands que les Turquois : Se comme
ilz font plus grands que les Turquois, aufrl ont ilz à faire déplus
rC e*rtï- l°ngucs & groflcs flefches, tout ainfi que ceux des Arabes qui \cs
'laques. ont grands , au (fi leur faut vfer de grandes flefches , au contraire
des Turcs , qui les ont petites. Ec les arcs des Tartares Se Valla-
ques, furpaffent tous les fufdirz en largeur & longueur : toutef-
fois font foibles. Tous les fufdi&z arcs n'ont que faire.de bracie-
res,ne de gands,comme ont les Angîois, Se ceux du BrefiJ , & au-
tres qui tiret auec vn arc de bois.Les Turcs, Crêtes, Arabes, Tar-
tares vïans des arez colez, «ont point de gands en tirant de leur
anneau à arc,mais au lieu,(e feruent d'vn périt anneau d'y uoirè,ou de Cor-
tirerdeFarc. nc,ou buis. Les plus fumptueux en portent dW&Tdargent fur
lefqucîz ilz font plusieurs marqueteries auec des pierres luy fan-
tes par dcfîus, qui toutesfois n'eft, inuention moderne, ain s très
antique Car les anciens Grecs médecins, comme a^ufïl Galicn,
voulans exprimer la forme de celle partie qui eft dedans la gor-
ge,que les Latins appellent Larmx&lcs François la luette,la font
femblable à t anneau quelesThracesontaccouftumé mettre en
îeurpouce dextre,quând ilz tirent deleurs arcs : Se de hk tel an-
neau que les Turcs ont accouftumé de porter au pouce , quand
ilz tirent de rarc,efl totalement femblable à la luette.
Quitte Geneftmh 3 & merXiberiadis; Chapitre x c.
* dus cheminafmes peu,que vinfmes ata riuage de la.
! mer Tiberiadis,"qui eft vn eftang-ou Ion prend des
} Carpes,Brochets, Tanches , &: Cheuefnes» Nops
' pafïafmes aux racinesde la Colline ounoïtre Sçi-
' gneur repeut cinq mille hommes de --deux petits
poiffons, Se cinq pains d'orge. Toutceiournetroiraafmes que
campagnes ûcriles , excepté en quelques endroi&z en lieux hu^
midesjou les habitans cukiuët des Coîocaiîes, choux à pommes,
Moujh. bettes à la groupe racine, oignon s, & aux,& quelque peu de Mou-
Ndfeca. £Q$t La plaine <iela mer Tiberiadis eftgarnfe d'arbres deNapeca,
•en manière d'vn haut taillis. Ceftuy arbre eftefpineux qui porte
les frui&z doux Se bons à.manger. Ces arbres pour cftre fi fqrt
ejpineuxont ga&éles feiches campagnes, tellement qu'on ne les
-enfeiaence poinr ,, ioind que- les habitans trouuans affez de
OBSERVEES PAR F. BELON. £ï
terre à labourer, cultiuent feulement les lieux faciles & humides, capbamaw.
Nous paffafmes par le village de Capharnaon,ou il y a moule bel- ^J^
les fontaines. Rcgardansau cour du LacTiberiadis, veoyons le ^/^
pays de Gai ilec,3dc village de Bechfaida, dont Saind Pierre &
Saind André nafquirent iSc aufîi Chocozaim , à qui noftreSci- cborofym.
«meur donna malédiction. Les villages ion t main tcnanthabkcz
des luifz , qui ont nouuellement bafty en cous lieux autour du
îac &pouryauoirinuçnté des pefchcries , l'onc rendu peuplé,
qui eftoit auparauant défère» Ce lac n'eft de fi grande eitendue
qu'on ne puiffe bien voir facilement la terre de tous couftez.Cô-
tinuaiis noftre chemin ,nous en vimmes coucher à vn Carbacha-
ra, qui eftoic roue ioignant le courant dufieuuc ïordain,quc
nous paffafmes deffusvn pont de pierre- Les Arabes voulurent;
faire quelque violence ,.mais nous leur refiftafmes vkicment, 5c
de force. Ce Garbaehara neft guère loing.des villages i par ce les
payfans nous apportèrent des poulailles , des œufs , & du painà
vendrc,des figucs,raiûns, Iuiubes blanches & rouges. Nous par- Ju^s ^^
tifmcs le lendemain au matin de ce Carbachara , & cheminaf- /oes ^^^
mes par pays moult pierreux, comme auffi le no qu'il tient 5 1 cm-^-«.
portc:car le pays pour eftre ainfiafpre & rude , eft nommé Regio Trachmïtk
Trachonitis. 11 y croift.de l'arbre de Cocçns & d'EicuIus, que les reglû*
Grecznommoyent anciennement PiarypJ}yllon,i£ maintenant Coj?f'm
Velaguida. Hz portent le gland gros comme vn œuf de Pigeon, f^^dx
duquel les hommes pourroyentviure en temps de famine :^ar p/^kfc
il approche -quelque peu du gouftde la Chaftaigne. Et dou-
tant qu'ilz nenourrifTent nulz pourceaux ,,ce gland eft perdu.
Surlemidy nous entrafmes en vne campagne ou la pluyenous
print , qui nous duraiufques au foir qif arriuafmcs en vn Carba-
chara , à bien trois lieues de Damas. Nous campafmcs defTouz
la tente , près d'vn village ioignant le Carbafchara : car grand
nombre de paiTaas feftoyent retirez de bonne heure:& aufli que
la pluye les auoic engardez de partir. Le lendemain trouuafœes-
les campagnes bien labourées &fertiks>& grande quantité de
Villages. Nous auions les montz.de Tripolisqmeftoycntdeiïa
couuerts de neige,$: le pais de Phœnice a main ga&che.Et entras
en la plaine deDamas,eftâs encor dciïus vn coullau,nous veoyos
laviiîe de bié ioing :Car elle eft ilcuecen vn bas lieu en plat pays.
Les faules &; hautz pouplieis blaocs & noirs croiifenc par la,
TT ij * *
33* SICOND LIVRE DES SINGVLA.
campagne,qui nous la faifoycnt refTembler eftre fituée entre fo-
refts.Car ilya grande quantité de vergiers , qui font arroufez de
leau qui tumbe des montagnes par eanaux.-qui ainfi arroufans la
campagne , la rendent fertile. Il n'y a que fîx iournees de Icrufa-
Icm en Damas : parquoy il ne coufte que deux ou trois ducats"
pour m5cure de chaque perionne. Nous arriuafmes d'afTez bon-
ne heure en la ville.
chryforoas.
Murailles de
Damas.
Tours des
murs de D A*
mas.
Obfèrudt'ion des chofes de Ddmas.
Chdftîre xci.
TjSg L y a fi grande commodité d'eau en Damas,du flcuuc
Chryforoas , que quafi chacun a vne fontaine tant en
n. w*t>jf°n iardin qu'à fon logis. Les rues de la ville font
iszfêéi eftroi&es , &: mal droi&es. Le Bazarc , c efl à dire le
Portes du
Caire cou*
uertesde
cuir.
Medéàmde
Syrie.
marché , eft fort beau , &: eft couuert par le deffus. Les maifons y
fontaiïèz bien bafties: mais ce qui eftle plus beau , font les por-
ches à claires voyes , pour f y refrefehir. Les murailles de la ville
font doubles, comme à Conftantinople. Les fofTez ne font gue-
res parfonds,efquelz ils cultiuent des Meuricrs blâcs pour nour-
rir les verms quifontîafoye. Les tours des deux murailles font
moult près à près : Car il y a vne grande tour quarree entre deux
autres petites, qui font rondes, & font plus grades l'vne quel'au-
tre.IlyavnpetitChaft.eau quarré hors le circuit des murailles,
ÔC toutesfois il fêmble eftre enclos en la ville : car les fauxbourgs
font deux fois plus grands que la ville , auiïi les marchez font te-
nus es fauxbourgs. Mais les Bazares &: Bafeftans font dedans le
circuit âcs murailles. Les portes de la ville font couuertes de la-
mes de fer , au contraire de celles du Caire qui font couuertes de
cuir.Du cofté de leuat il y a vne tour quarree,au haut de laquelle
y a vne infeription en chara&eres Arabiques , qu'on dict y auoir
efté mife depuis quellefut reprinfe des mains des Chreftiés : Car
vnpeu plus bas Ion voit deux Hz entaillez fur marbre^ui font les
armesde France ou Florence. Au cofté defquclles eft vn Lion,
qui a faicl: penfèr à pîufieurs que ce fuflent les armoiries de Fran-
ce & Fioréce. Les boutiques des artifàns font corne au Caire.Les
medecins,lors qu'iîz font appeliez à voir vn malade en ce pays là,
eux mefmes font diligence de faire rcçouurcr les drogues.-car ilz
OBSERVEES ?AR P. BELON." 353
marchadét aux malades,& fèlo la maladie ils entreprénent de les
gucrir:& ne leur fera liuré tout l'argét,q premicremét ils ne foyet
î gueriz. Parquoy nous (èmblc qu'ils ont telle manière de medeci-
ner,queles fçauans Grecs Se Arabes anciens fouioyent auoircn
vfâge,lors qu'ils feruoyenteux mcfmcs de Chirurgien Se Apoti-
cairc. Mous ne voulons toutesfois entendre qu'ils nefufTent en
grand honneur comme au fli font pour le prefènt : mais poûToîe
qu'il n'y en auoit tac en toutes parts -, comme au fil n'y auoir point
tant de iuges Se Aduocats , Se plufieurs autres telles gens de iufti-
cc que nous voyons maintenant. Mais comme les hommes non t
en ce monde que trois principales chofes recommandées en vi-
uant,fame,le corps,& les biens, Se que l'amccft la partie en l'ho-
me la pi as diuine : auffî chacun, penfant de leur falut,encor qu'ils
fuffent Ethniques, ont touuours eu les hommes de leur Théolo-
gie en fouueraine dignité. Voyla donc quant à lame. Apres l'âme El*mîm'
n'ayans rien plus cher que le corps, &rdefirans leurfànté , ont eu
les médecins en grand honneur : car puis que la fanté eft prepe-
fee aux biens , les hommes aiment mieux perdre les biens , que le
corps : parquoy font contents qu'il leur cou fte, Se rccouurer £m-
té. Auffi vouians garderie bien que par labeur Se induftrieauoyec
acquis ,&iouyr pacifiquement du ûen, ont eu ics Aduocats Se
gens de iuftice en vénération. S'accordansdedefpendre vne par-
tie de leur bien pour le payement des ges de iufticc , à fin de iou vr
paifiblemcnt de l'autre. Anciennement comme encor mainte-
nanties republiques bien gouuernees ne font peu pafïer des trois
fufditseftats , qu'il n'y enaittouiiours eu , û* eft-ce que nous ne
voyos point qu'ils foyét tant multipliez es autres regios corne en
lanoftre. Il ne faut point de Sergent en Turquie pour adiourner
vn homme. Mais quiconque voudra mener quelqu'vn au iuge,
•aille luy mcfmetrouucr celuy à qui il a affaire , Se luy die qu'il vie-
ne à la iuftice de Dieu,alors fil y a d'autres Turcs prefens,il n'ofe-
rarefufer, &aîlanstrouuerleiuge quiie tient aflis tout le iour
deiTouz vnappentizpresdefa roaifon , débattront leurcaufeen
iapreiènce,&: fur le champ, le iuge ordonnera ainii que bon luy
enfemblcra. Parquoy ne leur faut point de foliciteurs, Procu-
reurs^ Adu ocats.Ceux qui vendent les drogues fimples,en ont
au0î de compofees : entre îefquelles auons rcmerché en leurs
boutiques la confe&ioa Ancardine3Memdat, Se Thcriaoue,
TT il)
^l8 $;E.CO ND LITRE DES SINGVLA.
Drogues co* philonium,Con£ectia Hamech,Miel ro&t,Viplat,conferires--dc--
yofees >»-'ro(cs de Stœchados , Loch de pulmon dcregnard , huiles à Ab-
4wsmT*r> £im^e & d' Afpic,Sc de.Menthe. Les marchandifes font vendues
**"' en Damas & en Syrie à vn pois nommé vn Rotulo,qui pefefept
Wulo. liurcs^co-mmc-aiiflx.cn Egypte^ Ce que nous eftimans prunes de
Prmes de Damas, ne font femblabïes à celles quHls-cuciUcptcn.eçpayslà:
Sam**. nousentendons des noftres . peu tes -noires douces, qui fontles
Comçofttm plus communes : 6c fondes meilleures que nous .auons en vfage.
es bout**. Qc\\cs de Damas font chèrement. vendues au pays meimes , 6c
pesdeDd*. çQm pJus gro{res.qa»vnernoix-,ftrmesfousJa de.nt.„,&: douces auçc
mM* vn peu d'aigreur..Seulemcnt les auons veu feiches :-£ac nous ri y
eftionspasau temps des verdes.Defquellcs le noyau eft plus grad
6c plat,quegros ôc rond. Il y a des boutiques qui ne font autre
ouurageen Danias,que monder le. coton, le feparant de fa feme-
Mondeun ce. ijs ontvn fer quart e<Tv.n pied de long:,, deux doigts d'efpois,
duquel preffans le eoton'defTus vn aix , la femence qui eftronde
fuit deuant le fer , 6c par ce moyen elle eft feparee d'auec le coto.
Dsnourri{TentIcsChcuaux& Chameaux d'Eruiala&d'Eruura,
qui font petites femences qu'on feme allez en France , & toutes-
fois n ont aucun nom Franc ois. Et d'autant que les ^veiunes cC-
corchez , 6c qu'ils apparoiuoyent rouges , ne les euifioas peu ca~
gnoiftre fans en voir des entiers.Le fuccre noramé Alhafur , qui
lAlhtfa, croift.furvnc herbe en Egypte par le moyen d'vnpctitverm ref-
femblant à.vn efcharbot- ', quis'enferme jeans , 6c en baftiitia
maifon,eftcn grand vfageen Damas , comme au (fi par toute
TigalU. Turquie, qu'il n ya.ccluy quine fçachc le nommer en TurcT>
Uficm. *kgalîa. Il eft en petites pullules groffes comme noifilles, en ce con-
**w- traire au (uccre blanc, qu'il defa-ltere qjjand on le mange ou boit.
Les autheurs Arabes font tefmoins que le blanc augmente la
fpif piuftoft que i'eftancher. Le fuccre Alhafur encor récent, eft
û teraperé.qu'il cftanche la foif incontinent, 6c guariftia toux en
briefue efpace de temps. Il y a grand nombre de ïuifs en Damas,
6c font enfermez à part,comme en Auignan: Mais les Àxmenies
6c Grecs qui font en la ville, habitent q à 6c là fans eftre enfermez.
Les Vénitiens tiennent vjî officier en Damas poux le trafic de la
marchandife: qui eft comme vn conful, Baille, oaBaillif. 11
sneine des artifans de Vcnife pour s en feruir. Careftanthonv
m&Àc reputation, meine vn couftoïicr,. cordonnier > barbier,
de coton.
ErttiaU.
OBSERVEES PAR P. BïLÛS. ffi
snedecin&apoticaircveftusà la manière de fon j>ays, comme chafiem â*
au$ de plufïeurs autres meftiers. Il y avn Bâcha en Damas Damas-
comme au Caire, quia fon logis hors la ville* Il ne fe tient pas * M am
au Chafteau de peur de rébellion : Car vn de Tes predccefTeurs
gaigna n* bien l'amour du peuple, qu'il vouioit fe faire feigneur
- abfoîu^ & fortir en plaine campagne auec fes gens contre ceux
que le Turc y auoit enuoycz pour le combatte. En ces entrefai-
tes il auoit promis aux gens de fà -compagnie , qu'il leur donne-
roicle pillage des lui£s. Mais fortune permiû qu'il fuit vaincu, &c
fut defaiten bataille: dont les lu ifs ièircnt grande feâe, &. en-
cotfe glorifient maintenant, difans que la victoire du Turcco--»,-.^ ^
treledict Bâcha , fut àcaufè qifil auoit délibéré les piller, & en juifs.
mémoire ils en célèbrent vnc fefte tous les ans, à tel i ou r que le- E$oir des
àiù. Bâcha fut défait ,:& dient auoir eicrit i celle victoire en leurs ^fi-
' regiârcs. Il n'y a aucun luifviuantpourle iourd'huy, qui n ait Mofms &
cfpok de voir Ierufalem retourner en leurs mains . C'e£t^w* ,
pourquoy ils tiennent les faicts en regiftres de toutes choies , ■«
qui fe font. Les moutons de Syrie n'ont pas la queue filon*
gue ceux d'Egypte , mais ils Font bien auffigrofle èc large. LV-
fage delagnmmcdeCondrilîeyeftgrand, &la vendent com-
munément comme les drogues . Car les femmes s'en fèruent
poul mafeher au lieu de mairie. Ce&c gumme eft faiete par 1 ar-
tifice d*vn petit verm, qui s'cnlerme auec ia gumme de ladicre
racine, laquelle il ronge & perce , dont il {brtdulaicbquisen-
durcift en manière dVne .petite noifette : qui eft recueillie par
ceuy qui la vont cherchant par les campagnes: & la vendent aux
marchands des villes. Et comme les femmes de Crète n'ayans
Tvfàge de ladite gu mme de Condrillc,fc feruent de celle de Cha- <^»»»* &
meicon blanc, & leshabitans deTiilede Chio vfent de celle àe^^kon
Mailic ; tout ainû les Perfès vfent de gumme de Terebinthe,qui ' à-
peut eftre mafehee fans prendre aux dents , ne fans ïc confumet ^V^;^
cala bouche,çommeles deffuidides.
33*
SECOND LIVRE DES SINGVLA.
Ve la monftre de ceux qui partent en trouppe de la ville de Damas pour
aller àk Meque. Chapitre x c i i.
Endant le temps que nous cftions en Damas , nous
veifmesappreïtervne Carauanne qui faifoit fa mon-
ftre pour aller à la Meque , c'eft à dire en voyage pour
l'amour de Mahomer. Ceftvne trouppe de gens qui
fe dépare de Damas deux fqis par chacun an. Il y a quelques fois
mille hommes de compagnie, &c quelquefois deux, l'autre fois
trois. Maisauantfe départir, ils font leurs monftres, qui eft bel-
le chofè à voir: car ils la font auec grand pompe & parade. Les
Turcs viuans en Europe,qui veulent faire ce voyage,pcuuentai-
yoydgen* 1er par deux chemins. Les vns s'embarquent à Conftantinople,
kMefue, fe vonc au Qzitc . Câr jj fe Repart fembîablement vne Carauanne
duCaire,quivatouslesansvne fois à la Meque. Mais ceux qui
font en Aûe /ont beaucoup plus grande commodité de faire le
voyage par Damas,que par le Caire. Premièrement ils fontap-
preft de Chameaux, qui eft le fondement du voyage , d'autant
qu'ils durent longtemps fans boire , êc qu'il leur conuient pafler
dcsdeferts;¶in{iilsn'y meinent point de Cheuaux,pource
Lapompe^de qU'ilsne peuuent fupporter la foif fi longuement. Le plus beau
U uuume. jg ja mon£rc cft jc vo jr vne chafle ornée de fon ciel bien frangé,
accompagnée de plufîeurs prophètes de Mahomet , portée fur le
dos d'vn Chameau , en laquelle ils mettent le liure de TAlcoran,
qui contient la loy que leur bailla Mahomet , qui eft defTusvn
coiffinct. Les feigneurs & habitans delà ville de Damas, comme
font les Spahisdu Sangiac $r Bâcha, &: autres gentils hommes
Turcs leur preftent des cheuaux pour faire ladite monftre parla
ville. Entre autres ornemens & parures de cheuaux , ils ont cer-
tains poils de queues de bœufs d'Indie,dont les poils font déliez
%œufi£m* & blancs. Ils les eftiment tant , que chaque queue eft vendue tel-
dk le fois quatre ducats,l'autre fois cinq: car ils font déliez & beaux:
aufîî n'y a il que les grands feigneurs qui en ayent. Ils les font pe-
dre deflbus la gorgedes chenaux. Ceft vne chofe de moult gran-
de brauade de voir quelque grand feigneur Turc àchcuaî : car
auec ce qu'ils oncles eftriuieres courtes, & les eftrieux moult lar-
ges, ils n'ont aucunes molettes a leur efperons, & portent leurs
cimeterres
OBSERVEES PAR. P. SELON. 557
cimeterres entre la (elle Ôdleur cuilTe, &: quelque petit fouet en
la main. Parquoy pour le faire apparoiftre mieux au naturel , en
attonscy fait reprefènter vn à cheual : auecîa parure qu'ils por-
tent en leur pays.
PortmEl dvn des feignews Circajfes , ou arabes a chenal,
qui.ejîqyent des plu* riches feigneurs d* EppteJ.ùrs
que le SoulcUny dominait .
YV
Chichesro*
Brmtbid.
Bouhourd.
Traçant.
StrârUde
Damas.
Merle an
colier.
Canepettere.
%a/lede ge*
net.
pluuier.
Perdris Ux*
che.
53S SECON0 LIVRE DES SIKGVLA.
Ils meinent aufli des ioueurs de hauts bois, &fonncurs deta-
bourins en leur Carauanne , pour les accompagner en tout le
yoyage: auflî meinentaueceux vne vingtaine de Fauconneaux
pour la feureté déboute la Carauanne, de peur d'eftre deftronfïez
fur le chemin des Arabes par les defèrts. La mon ftre générale du-
re deux ou trois iours : mais ils ont ioifîrvn mois pour fc garnir
de viures propres cnJeur voyage. Parquoy ya pluficursvbouti-
<jues en Damas , tour, ainfi comme au Caire, qui ne font autre
ouuragc queroftir des pois chiches , qu'ils appellent de nom
Grec vulgaire Eruithia, lefquels ainilroftiz &: deieichez en des
grandes poefles d'airain , font moult propresà ceux qui vont au,
loing. Ils portent dubifciîit , & de la chair falee, puis feichee , &s
des raiilns cuits , du nz,du bouhourd , &: de Tracana , qui font
bleds cui&s auec du laift,puis defeichez.
Des haflimens 3 &:0ufîeurs autres finvttlaYÎte%jie>V amas.
Chapitre x c 1,1 1.
\ n'y a autre gibier en Damas plus înfîgne que hs Per«
drisdeccpayslà. Telles perdris font moindres que les
rouges $c gouafehes ou grifes. La couleur de deflus
leur dos& du col eft comme eeîuy d'vne BccafTe: mais
les asiles font d'autre couleur: car celles de la partie voiflneda
corps^font blanches,brunes,&: faillies , 6clcs dix grofTes pennes
font cendrées. Lcdehrbusdes-â?ilcs& du ventre -eil blanc: aufiî
porte vnxrarcant autour de la poiefrine comme celuydu Merle
au colier,ou d vne Cane petiere, qui eft de rouge,iaune,&r fauuc.
Le defTous du col & de la telle , le bec , & les yeux eft de Perdris»
Sa queue cû courte. Nous l'euflians eferite comme efpece de
Rafle de genec,ou de Pluuier'jrieuil; efté que fes ia*nbes font cou-
vertes de plu meSjCOinrae à vne Perdris blanche de Sauoyc,ou vn
Pigeon patc. Il y a vne moult grande , belle , & infigne Mofquee
en Damas, faite de treibel ouuragc : 8c aufli vn Bafeftan , qui eft
vn lieu député ou l'on vend les plus chères marchandifès , &: plus
riches de la ville, cornmefont &yes de toutes couleurs , orfeuric,
^rgenterie,pierres orientales , Cimeterres}felles,brides, Se autres
tels ouuragesde haut pris., &aufti Efclaues mafles &: femelles»
Toutes choies en Turquie font vendues commeaTencat.il n'y a
, OBSERVEES PAR F. SELON. 5$>
vilfecn-cc pays làjpour petite qu'elle foit, qui n'aie vnBa(cftan:&:
n y avii-agequi n aitfon marché,appellé le Bazare. Les baftimes ^ 4W*
de Damas font comparez de mefme architecture que font ceux >-
du Caire , qui font fore bien appropriez pour auoir iafrefcheufv
Et tout ainii que les régions fcptentrionales font deseftuues-
pour fe tenir chaudement,tout ainfien Damas font fiâtes en ma-
Bière de porehe3ayans les fcneflres aux^deuxeoftez afTez baffes, à
fin qu eftans aiîis contre terre 3 ils ayent 1 airamfi-bas , dont ils en
recoiuent la. frefeheur.. Les grosraifms qu'on nous apporte es
grands bœftes de Platane , font vrais raifins de Damas , que les
Arabes nomment Zabebcn.Nous croyons qu'il n'y a aucunes mi- zihéen:
nés fur le territoire de Damas , comme plufieursont penfé , dont
l'on fonde l'acier: car celuy que nous appelions Damafquin,y eâ vicier, de
ieulementr'afBné& purifié. Nous auons enquis s'il yen z\±oitDama*'
quelque mine, mais auons entendu que non». Le fer,raeier>& le 0mrag? .
cuyure y eftans apportez d'ailleurs, y recoiuent la trempe & la amAJimh
préparation qui les rend plus parfaits. Et de vray ils font gens qui
feauent fort bien grauer &; entailler fur l'acier & 1 airain. L'ouu ra-
ge en xrain,acier & cuyure fait en Damas^ft incontinent enieué
êc porté au Caire, & àConftantinople. Parquoy Ton trou uera
plus d'ouuc âge Damafquin à Conftantinoplc, 5c à meilleur mar-
clié^qu'en Damas mefme: car quand les ouoriers ont fait quel-
que belle bef ongne, ils le vendent aux marehands3qui puis après
le tranfportcnt ailleurs. Suyuant Je canal de la petite nuierc an-
ciennement nommée Chryforoas , qui paiîé par dedensla villes
duquel partie arroufè la campagne i l'on va aux iardïn-s qui fbnr
hors la ville. Ceux qiii-ont dict que ce fleuue eft commencement
du fleuue Iordain , font en ce trompez^ Sou uent auons dit , qu'il
nVapointd'hofteîeries partout le pays ou domincle Turc : qui
cft caufe que Fan voie piufieurs beaux Carbafcbaras en la ville de
Damas, au Caire , & par les villes de Turquie. Mais les Arabes
les appellent vn Kan.Ils font faits comme grandes ha!les,ou tous ^n^
paffans tant eftrangers que du -pays y font logez fans ries payer,
âumoinsbien peu de chofè,
VV. ij
34o
SECOND LIVRE DES SINGVLA.
Vqyare de Damas au mont Ljban. Chapitre x c -il iï.
i§ O v r continuer noftre chemin vers Conftantinople,
« nous feifmes nos apprcfts &: fortifmes bien tard hors
J ville^ ayans îc vifage tourné au Septentriô , allafmes
} seulement iufques au pied de la prochaine montagne
dont deicend le ruiffeau qui paffe par la ville, Se campafmcs au
jardinages ferajn au pjcj fa mont# Le lendemain montafmcs vne fort droi-
de Dama*. ^ montée : & quand nous fufmes à mont , veifmes la ville de
moultgrand'eftendue: qui nous fembîa moult grande. Caries
jardinages verdoyans d arbres de diuerfes fortes , font quaii con-
fuzauec la villeen celle belle plaine vnie:aulli font ils bien arrou-
fez de l'eau qui defeend du ruiffeau , qui tombe fi impetaeufe-
ment de la montagne , qu'il fait retentir tous les enuirons. Mais ,
quand il cft defcenduenla plaine, il eftfi bien tempéré qu'il fe
peut conduire Se diirribuer en vne infinité de peds canaux tels
que les habitans veulent. Auffi ont ils eu le bruit de tous temps
d'eftre grands iardiniers*. ce que Pline na pas ignoré , qui dir,
Sjria in bonis operofefëma. Çeft la plus belle plaine, & plus fru-
<âueufeque nulle autre qu'ayons oncqveu. Auffi les habitans
prennent grande peine à la rendre fertile. Eftans defeendus de
cefte montagne , noustrouuafmes de petites collines, oui! va
pluûeurs villages qui cnltiuent la terre aucc diligence: auffi ia
terre eft fort graffe, Se fçauent bien conduire l'eau , prenans le
tour de ces petites montagnes. Les feps des vignes font fort gros,
vignes de Se les rameaux fort fpacieux. Les habitans entendent bien com-
■&'*• me illa faut gouuerncr: car ils la plantent fi loing fvnedel'au-
tre,qu on pourroit mener vne charrette entre deux. Ce n eft doc
pas grand merucille û les raifins font fi beaux, Se le vin fi puiffant:
comme au contraire il y a en quelques contrees,ou il n'eil gueres
plus fort que Peau : car les habitans plantent les feps fi près à près
IVn de l'autre, qu'à peine y a il efpace pour mettre les pieds encre
deux pour la 'labourer. Les charues du plat pays de Syrie font dif-
férentes aux noftres : car deux petits Afnes ou failiiz Bœufs tire-
ront vne charue fans roiies, faite de bois de Poupiier, quia deux
focs fort îegers.Ils n'ont pas grad peine a labourer : car ils ne font
qu egratigner la terre par le deiïus:auffi labourer ils dvn bié petit
OBSERVEES PAR P. BEiON, 541
foc uns coutre:parquoy rapportent leur charuë fur leur col quad
ils f en vont à la maifon, ehofè que Pline auoit ja noté. Syria ( dit-
il) tenui falcoarat.Lz façon des vignes de Syrie eft différente à cel-
le du vignoble de ïerufalem : car elles ont les feps quafl de quatre jj,0UrA~t
coudées de haut , fouftenus d'efchalats plantez par ordre,îabou~ desyne
rez entre deux auec la charuë: & portent cinqou iix gros fermés, vignes de
efpars en longueur de cofté &: d'autre. , mifes par ordre. Mais la Syrie.
plus part des vignes de ïerufalem fe fouftiennent d'elles mefmes Ment Liban.
fans aoDUV, qui ne font difpofees par ordre. Tant chemin afmes. EuPaîori1*™
rr /'^ . v ■• i tu • n. • j r ïambes bla*
que commencions a voir le mont Liban, qui eitoit délia couuert ^.
de neige. Nous y trouuions de l'Eupatorium de Mefue , Aluyne /#;^roaa
pontique,Centoire mineur,Iuiubiers blâcs Se rouges, Poupliers, *•#.
Se de deux fortes de petis Cèdres , ceft à fçauoir du poignant , Se
de celuy qti i a la rueiile moulTe. Les habitans cultiuent des poi- Poupliers.
riers,pommiers,abricoticrs,amandiers. Nous arriuafmes ce foir
en vn village nommé CalcGUS, &logeafmesenvnCarbafchara Cc*r^ .
entaillé dedans le roc fait en voûte, comme aufS les maifons du ^r ^P™1*
village font de telle manière. Le lendemain enfuyuant , prenans ^ww;
le chemin du mont Liban pour aller paffer à Tripoli , laiffions
i'Antiliban à cofté gauche entre nous Se le pays de Phenice , qui ^tnt'Man.
efteonioindàlaSyrie. Ilyavn m on aftere de Caîojeres, Maro-
nites & Grecs deffus le faiftedu mont Liban, qui monftrcnt les Cèdres du
hauts Cèdres, femblablesàceuxdont Salomon feit édifier fon mùntLlbm'
temple, pour eftre perdurable. C'eft vn arbre qui eft feu 1 entre
tousautres(exceptéleSapin)qui porte fbn fruité ton fiourseîeué
vers leciel.U porte de groffes pommes dures, qui reflembleroyet
celles du Pin, n'eftoit qu elles font plus polies.
"Des antiquite^Je la ville de Cejàree 5 maintenant nommée Balbec.
Chapitre xcv.
' O us tournaimes bride pour venir par Balbec, qui eft bMcc.
; vne antique ville de Phenice, de grande renommée,
i aflife aux racines du mont Liban. Approchas de Bal- -
• oec,trouuafmes vn fepulchre en la campagne,foufte-
> pilliers courts Se ronds , faits de la pierre Thebaiquc,
dont le frifte eftoit vne voûte de groffes pierres deffus, qui fe ter-
mine en poinde. La ville de Balbec eft iituee en beau lieu > Se eft
VV iij
J41 SECOND' LTV RE DE~S; SINCmAv.
maintenant quafi toute ruinee.Ses ruines monftrent qu'elle aauv
tresfoisefte quelque chofede grand. Il y a vn Chafteau qui eft
. , quafi entier , ou Ion voie neuf hautes colonnes- plus groftès que
Baket celles de l'Hippodrome de Conftantinople. Et au {fi vne autre
colonne droioie au deiTus de la.vilîe ,.. quafi femblable à. celle ds
Bbmpee près d'Alexandrie : fur laquelle vjl vn chapiteau quarré,
qui cft la couuerture de ladide colône. Il y a pluiieurs p!atesibr~
mes de pierre de taille dedans la.villeyfaites en manière de fepul-
chresjnfcrites des lettres Arabiques. Les habitans font pou r la
plnfpart luifz > qui dient que ce fut Salomon qui kfcitbaftir.
aune Von* Mais ceft celle qui eftoit nommée Ccfaree de Philippe 5 dont S*
tâwes ivk Paul&it mention d'y auoir eiterc'eft là auprès ou pafîent les fbn»
jordADK. taincs du Iorda-in . Les murailles ne font guère hautes , mais fonc
de h plus belle emaalleure de pierre qu'-en viiîe de tout le monde,
Carceftvn édifice le pïus fumptucux qu'on fçauroit regarder,
ouiln'y anulzfofîcz. Vn home curieux des antiquitez ne pour»
ZxntùmtéZ roity.ok.CQUt. ce qui eft à Balbec en huit iours : car-il y a plusieurs
deCefiree.^ chôïes antiques , &: fort-notables ^ qui font hors de noflre obier*
uation^uiïin'y arreftafmes nous pas lôg temps. Nous y trouuaf-
mes du -vin >.& feimies prouifion de viures , '6c dinafmes là , &: fur
le vefgrc réprimes noftre chemin.. Mous trouuafmes vne plate
forme faite de pierre de groffe eftorre de maffonnerie/ituec fur le
pendant d^vn couftau , ayant vingt &: cinq pas de longueur, &:
quinze de largeur3fpacicufe par le dedens r dont f es murailles ne
fontgueres rrautes^toutesfois font de defmefuree efpoiiîeur. Ar-
ia?^, ducale foir en vn village nommé Lubon , nous trouuafmes va
édifice antique , fait par les Romains > qui eft encor tout entier,
de greffes pierres maffîucs de deux coifes de largeur. Ce village
- eft bien -ombragé d'Ormeaux Ôc Noyers : &eft arroufé d;vn rtrif»
'^€$tult'des ^aa C3ui àefccnà ^c *a montagne. Au partir de là, nous vinfmes
probes? gaigner vne plaine. Quand nous fuîmes vn peu aduancez, corn-
mençafmesà moriter vne colline , ou nous trouuafmes des Ara-
bes , qui venoyent vers nous- d'vne grande affeuraace pour nous
combatre^quiauoyentlcs brasxirez hors des manches3pour plus
ra^Untife: 2L\Çcmcnt & fièrement ruer les pierres , & mieux tirer de Tare „ en
j? monjiwt £Qltc qUC |es Xurcs qui eftoyent en noftre trouppe, ne vouloyenc
pointîe mettre en defenie,ains{èretireret à part, Parquoy mon-
feiir de Fumçtaaccoirjpagriç de piufieursgemils-hommes Fian*
OBSERVEES PAR *. 3 ECOm $$£
çdis,lcur ayant fait tefte^les repbulfii vaillanimcn t,mxisncm fans
yauoir des bleffez dVne:part&«l'autre. Noospaflafmesnoôre
clici»^*^ necheminafmcs gueres que ne viniEons en vne gran-
de plaine,qui cftièmblable à celle de Damas,en laquellel'eau eft
conduicl:eparpetïtsrui$èletz,cn force que tout le territoire eft
rendu fertiîe:car ilz ont les champs vnis,comme me^efquclz co-
duifànsFeau tout ainfiquik veulent , les rendent fertiles. Lon Mewien
voit,grand nombre de villages de coké& d'autre r qui cultiueDt ™ancs:
les arbres diligemmen t-.mais fur tout les Meuners,coks &: blâcs, Meumrs
que nous penfons mal eftre Sycomores : Se nourrifTent gradqua- - •»* » •_
cité de ^serms à faire la foye. Hz cukiucnt les Mcuriers noirs &; Fi- ^;m.
guiers en forme de bois tailîisicar les fueiîks qui en lomnouoei- ^Ahfmth'm
lementprodui&cs en font plus tendres 3 d'autant que lefiQneûfenpbwm.
de mefmes bourgeons de l'année. Nous trouuions au m de l'her- -^ftefi md
bed'Àbfînthiumferiphiura, Eupatoirede Mefue,croiiïàns {^x.^iemx
les çhemins.Il e{t bien rareen -Syrie & A-fie de voirqucîque beau* Am?s*
bairiment par les champs. C eftquç laplus.grand' partie des ho-:
mesduleuant,&detoutcAûe , comme Egyptiens > Syriens &,.
Arabes,{bntefclaucs >&,par ainfine font point de grands bafti-
mens par les champs,commc Ion fait en Europe. De ce aduient
que les pays pour la plus grand' partie ion* deîhuez d agricultu-
re. Et comme ilz ne baftilfent point aux-champs, les baâimes des
villes font mefmemenr de moult petite eftorîc, Laraifoneneft,
que lanoblefTe au pays du Turc n'eft pas fcmblablc à celle des
autres pays des Chreftieps , qui y viennent de père en 6iz, Mùs^oLlefedâ
celuy entre les Turcz tiendra la première dignité après le grand Turquie.
jfeigneurjqui ne feaitdonc il eû^nequi (ont fes pere,&:mere5 ains^g^v/*
quiconquç-eft.payé de fouke du Turc , f e-ftime élire autant gen- TliriH^
til-hqmmecomrac eft le grand.Turc mefme. Cela donc ne leur 0rilm^
vient de pereen filZjCommeauxgentilz-homcs Latins^ Qtçcs. n°° "Me'
Toutesfois la noblciîè neftainfï eftimee en vn pays comme en
lautre:car la plus grande partie des nobles en Itaiie,commc Flo-
rentins, Venitiens,&: de plusieurs autres républiques, font le tra-
£c demarchandife,$: aucresjpra&iques, qavn homme de noftre
région nepcutcxerQ^-làr|sper:dre ion tiître de.nobîefïè. Chofè
que trouuons conforme à ce qifHerodoteaefcrit touchant l'an-
cienne noblefle des Egyptiens ,quii\;itimoyent plus que les au-
tres hommes du pays, pour n'exercer les artz mechaniques 3 &
344 SECOND XÏVRE DES SÏNGVLÀ.V
poureftreles premiers appeliez à la guerre, à laquelle dignité ilz.
heritoyent de père en filz. Et pource que les républiques ont eu
diuers iugemens en la noblefte des hommes , nous voulons dU
re quelle cil ainû* qu'on la 'veut eftimer. Ariftote a ainfi dit;
Nubile enim , tdefl > qupdex bono proditt aenere : jrenerofomautemyquoâ
non kfu& natura degmerxuit. Par ainii îlconclud , que qui eftle-
gitioaement engendré de père & mère de race non corrompue*
cft noble ; aum* il nomme généreux celuy qui n'eft point aba-
ftardi du noble. Le plus grand honneur & bien que puifTe auok
vn homme en Turquie, cft de faduouer eftre efclaue du Turc,
comme en noftre pays difons eftre feruiteur de quelque Prin-
ce. Et pource que partie du bien des efclaucs retourne au Turc
après leur mort, ceux qui ont dequoy , ne lemploycnt pas en
baftimens : aum" les maifons des Turcs font petites logettes , au
regard des noftres. Continuans noftre chemin ,auionsles mon»
tagnes du Liban à cofté gauche, 6c celles qui eftoyent ioignanc
noftre chemin , e||pyent verdoyantes des arbres de Terebinthes^
Andrachnes , Arboufîcrs >& Eîeprin. Nous perdifmes le mont
1a keL Liban de veue , lequel auions pâfïe les iours precedens : ÔC com-
mençafmes àtrauerfer des montagnes , lefquellcs fefîargiftans
de cùûcôc à autre v extournent vne grands campagne , en la-
quelle nous defcendifmes au pays de Cilicie. Apres que nous
eufmes cheminé vn peu par la plaine > nous repofafmes vn peu
en vn Carbafchara. Les Carbafcharas des Turcs en Aiïefonc
faits d'autre forte que ceux des Arabes : car les portiers àcs^
vont point Çarbafcharas vendent Forge aux paftàns pour donner à leurs
iypSe /* Chameaux : car dauoine ilz n'en ont point en ce pays là. Ce^
uoiae. luy qui vend ceft orge , en paye la gabelle au Turc. Ce iour-
chmtéx des d'huy noftre iournee fut petite ; car nous, logeafmes deaanc
TuranemZ* ^idy àcaufe des bleiTez.
&»*"* Que
forge* • ^"
OBSERVEES PAU P. BElON. $45
Que ^ancienne manière de manger les femences de Terehinthes , dure en-
cor pour le iourdbuy en Cilicie & Syrie.
Chapitre xcvi.
Aintenant ne voulons pafTervnechofe, qui nous
| |) fembia eftrange,{ans la dire : c'eft que trouuafmes
\ va payfan Arabe au prochain village de noftre
Carbachara , qui menoic vn chameau chargé de
_ _' femences de Tcrebinthes:car les prochaines œo- 1**? j".
tagnes'font couuertes de telz arbres,dont Hz recueillent la gum- Terebmthine
me, qu'ilz portent vendre en Damas. Mais celle que Ion vend au y£fAmie.
Caire,eft apportée du pays d'Afamie.Lc pays que les Turcs nom- Mefopota*
ment Afàmic,les Latins le nommèrent Chaldaïque, dont Baby^ «**.
lone eft le chef, comprenant toutesfois la Mefopotamie & Àf- ^B™-
fyrie. Parquoy les Turcs comprennent toutes les deux en Àfà-
mie, fçauoir eft la Mefopotamie & Aftyrie. Nous auons tcfmoi-
gnage des autheurs dignes deftre ouys, qu'il y a plus de deux mil
ans que les hommes auoyent vfàge de manger celles graines de
Terebinrhes,& que les Perfes en ont vefeu auant i vfàge du pain»
Cefte femence eft de û exquife couleur bleue , qu'elle furpaiïc
toute aucre couleur azurée : aufîi tous les anciens autheurs Ara- Craaum^lm
hes h admet Granum vtrideicàx elle tire entre le verd & le cerulec. n "
"De la ville de Hamous , anciennement nommée Emijfa.
Chapitre xcvn.
E iour venu, nous cotinuafmcs noftre chemin par
' la fufdi&e fpacieufe campagne , ou trou u ions de
l'herbe de Smirnium & Leontopetalon : & paftàf-
mes par la ville que les Arabes nomment Hamza, smrnium.
les Turcs Haman,&: anciennement EninTa. Cefte zeomoma*
ville eftoit anciennement bien m urec de pierre de taille, 8c encor Ion.
pour le prétention voitfes murailles debout-.aufUily a vntercre &*»%£
eleué moult haut dedans le circuit des murs,qu'on voit aifement H*™**-
de toute la pîaine^eflus lequel eft ficué vn Chafteau , qui futan- E™]Jh
ciennement édifié par les Romains. Encor y a vn fepulchreà ^ re
double eftage , hors la ville > haut cleué en forme de Pyra-
XX
54^ . SECOND 'LIVRE DIS SIK'GVIA.'
midcquarree, fabriqué de fortement, qui eft infèrit des lettres
Câim c*far. Q.Cques ^ 'vn epitaplïe de Caius Csefar. H y a grand trafic de foye
en HamouzraufTi nourrifTent iîz les verras moult diligemment:
car iîz ont les iardms arroufèz commodément des ruiilèaux ve-
nans des montagnesî& rendans la plaine fertile. Hz cultiuent les
figuiers 5c meuriers dedans les champs arroufez^aum* plufieurs
arbresiruicHers. Leur commun ouurage eft de faire desmou-
chouers & couurechefs bigarrez , meflez en partie âc foye Ôc de
Mouchoum £| ^,Qr ^uj£ en £Qm ^e ç |3jânc|ie roU2c & iaune, entremef-
vlee de fila or, que lontçait nommer par toute Turquie ,mou.
chouers de Hamouz. La ville eft titueeen vne fpacieufe &: plaine
campagne, ou paffent des beaux ruifteaux par dedans. Le tour
àcs murs eft quafi entier , mais le dedans eft ruiné,& n'y a rien de
beau avoir que le Bazarc, c'eft à dire le marche , &: Bafeftan , qui
eft-faitàlafaçon de Turquie. Les murailles monftrent bien que
la villea efte autresfois quelque grande chofe , auffi eft elle attife
en bon pays. Nous trouuaftnes de toutes fortes de victuailles. Ec
d'autant que les Grecs, Armeniens,& Iuifs font efpars par toutes
villes entre les Turcs,ceb eft caufè qu'ayons toufiours trouué du
vin par toutcsles villes , ou nous arnuions.
Chaufet.
ZMum.
Pufeo,
Thufid.
ôxt&Atum.
£>es tduernesde Turquie 5 ou les Turcs hoiuent vne manière de breuuage^
nommé Pofca ou Zitum^, différent à laBiere.
Chapitre xcvin.
Remierement obfèraafmes en Hamouz,quel'vfa-
ge de fairelebreimage ancien, nommé Poica,n'eft
du tout aboly,&: voulons dire en outre , qu'il n'y a
ville en Aûeouilnyaitdes tauernes qui vendent
__ le fufHicï breuuage. Hz le nomment vnlgaircmenc
Chou{fet,quieftceluy que les anciens Grecs ont nommé Zi-
tum , les Latins Pofca,ou Pufca,ou Phufca,des mefmcs dictions
Latinesdonc Suétone & Columelle ont vfé , comme aufli Sera-
pium,& Auicemieen ont fait mention. C'eft vn breuuage blanc
comme laid , efpois , & bien nourriCnt , &: entefte beaucoup
ceuxquien boyuent par trop , iufques à lesyurer. Lon apenfé
quePofcha fiift Oxicratum , mais c'eft bien autre choie.- car
. O B ■$ E JL V. E £ S 1? & K F. B E tO N. 347
~Qxîcratamcftjccllc ehofc qui eft maintenant en vfage és-vaif-
feaux Grecs &: Italiens , Se mefmement les Churmes des nauircs
& Galères Vénitiennes en boyucnt ordinairement : Car eftans
far mcr,font contrain&s de garder les eaux mouît long temps,
iufqucs à f empirer Se empuantir. Et pour luy ofter le mauuaïs
gouft quelle a acquis d'auoir long temps demeuré dedans les
vaifFeaux,lon y méfie quelque peu de vinaigre, qui luy donne va
moult phifant gouft,&; cela eft OxycraturnTMais Pofca ou Po£
fez ou Cbouflet différent à la Biere,eft ce que les anciens ont no- .
mé Curme,moult dirTerentà rOxycratum. Le Gurmi ( c eft à ai- ^^
re Bière ) eft fait de grains entiers &: quelquesfois caftez. Mais le
Zitum ou Pofca maintenant nommé Poifet,eftfait de farine rai-
£è en pafte5qu'on fait cuire dedans vne grande chaudiere,puis oa
ie&e.vne bouîe de ladi&e pafte dedans de l'eau , qui incontinent
boule d'elle mcfme Se fechauiïè fansfeu, tellement qu'il en eft
faite vne beuuette efpoifle. Son efeume eft blanche Se legere,que
les femmes Turques achètent volontiers à fe £àrder,d*autant que £emefte er
elle rend la chair moult délicate Se tendre>& faut qu elles en por- p0ljfe.
tent aux bains pour f en frotter. C'eft vne enièigne au Zitum que Efeume ds
les anciens au theurs n'ont pas ignorée. Parquoy ne fe faut abu- pfia.
fer penfant qu'Oxycratum {bit Pofca,mais trop bien que Zitum
Se Pofca eft vne mefme chofe,dirferecà la Bierc,que difonsauoir
nom Curmi : Se pour prouuer que Pofca n'eft pas- Oxycramm,
vn fèul pafîage en Suétone fatisfaif,qui ditquVn efclaue de l'Em-
pereur fugitif fut trouuéen la ville de Capuc vendant du Pofca,
Se fil n'y euft eu autre chof&en ce breuuage non plus qu'en Oxy-
cratum , il eft manifefte que fa tauerne euft efté mal achalandée^ .
&£n'cuft pas fait grandprofit.
• PeUviUeàeT.iLvfiiSydonteJîokSxmEîPâuL Chapitre xcix.
j Artans de Hamouz long temps auantiou^paftàfmcs
4 de nuid vn lieu fîtué fur la colline, qu'on dit eftre les seo^ofoUs,
^ruines de la ville qui auoit nom Sebaftopoîis , ouen-
l cor pour l'heure prefente Ion void pi ufkurs colonnes
droites , que les. vns dient eftre du palais d'Herodes , les autres
d'Herodien. Mais la commune opinion des gens du pays eft que-
ce font piliiers d'vne Eglife Saind Iean : difanc que ce fur,
" . * *' XX. ij.'
Orous.
^Martia.
Irk
Sdh<eu$ CAtn-
-F*
Borna.
Uamjà.
Tarfus.
wft*
Pays de S.
Paul.
GifcaUs.
54S ^ SECOND LIVRE DES SINGVLA.
là ou il fut décollé. Delà dcfccnàiCmcs envnc vallée pour paflèr
vncriuïcredenus vnpont de pierre, que plusieurs eftimenteftrc
Orous,lcs autres Iris,îes autres Martia:elledcfcend impetueufe-
ment, & fait mouldre des moulins. Puis nous fallut remonter
pourgaigncrla plaine, qui (à noftre ^auis)auoit anciennement
nom Saba;us campus , qui eft large &fpacieufe d'vne bone iour-
nee , totalement fterile d'arbres. Lon y femë de la Scfame & du
Coton :&ainficontinuans noftre chemin arriuafmcsenlaville
de Hama,ou autrement Hamfa, qui eft celle qu'on nommoit
anciennement Tarfus : Elle eft à demie iournec de Hamous. Il y
a quelques gens modernes qui penfent que Hamous eft Apamia
des anciens.Cefte ville eft afïife en vne vaîlee,laquelle eft ancien-
nement moult peuplée , comme il appert par fes murs de grande
eftendue,& ruines qui y font.il y a vn Chafteau ruiné , efleué fur
vnecoIline,commeceluy deHamous.Lon y voicpluficurs gran-
des^; hautes tours antiques. Nous nefçaurioos mieux accom-
parex ce pays de Cilicie ou eft fitué Tarfus, fîno à la Beaufe.Vray
eft que le long des orces du fleuue Cidnus, qui pafle par le milieu
delà ville,il y croift des Figuie^Meuriers, NQvers,& autres ar-
bres; fruitiers: mais les champs font fans arbres. La grande corn^
modité de la riuierc qui arroufe les iardins auec de moult hautes
roues,fait qu'il foit aftez bien peuplé : car eftant le lia: de la riuie-
rebienbas , & l'eau de ces grandes roues» leuee par canalz,ferc
aufliaux baîngs & cftuues de la ville. Il y a anfïi de grandes Mof-
quees âftèz bien bafties : mais les maifons font mal efparfes ça Se
là deflus des collines. Lon paffe la riuiere qnafi à gué. Elle eft ar-
reftee par petites efelufes, qui font moudre des moulins. Aufti il
n'y a qu'vn petit pont de bois. Hama ou Tarfus eft le pays de
Saind Paul , non pas qu'il fut n'ay ià:car il eftoit natif d'vn villa-
ge nommé Gifcalis au pays de Galilée ioignant la mer Tiberia-
dis.Nousnefeiournafmes pas longuemetàTarfusxar après que
noz montures eurent repeu a nous continuafmes noftre che-
min.
OBSERVEES PAR P. BELON, " 549
Vespldncsde Cilicie ^& dès cifternes encaueesmterre^ quiferem-
pltjfmt d'eau depluye. Chapitre c.
J Ourfuyuas noftre chemin par pays déterre argilleuv
5 fe*& campagnes fpacieufes fans eaux , nous fembloic
' cheminer au pays de Beaufe,ou au pays de Lodunois:
^a?&9i>ç*A car l'ori ne fçauro*c cauer vne aulne en cefte terre de
Cilicie, qu'on n'y rrouue la roche , tout ainfi comme à Loudon Tufuu'
letuffeau. Leshabitansde Cilicie curieux de leur vie, ont bien
feeu trouuer inuention de garder leau delapluyepourleur vfa-
ge,&abbrcuuerleur beftial: car ils ont fait des cifternes dedens
le roc deftbus terre,laiflans vne petite gueule en haut,par ou Feau
ventre. Etfî quelquesfois leau des cifternes leur faut, ils font
contrainds en aller quérir à plus de quatre lieues de là. Conti-
nuans la campagne nous ne vcifmes vne feule herbe , excepté des , , n
Afphodelîes &r quelques Férules. Ce pays eftant femblable à vne F^^
Beaufe,eft différent en labourage, d'autant qu'ilya aflèz d'agri-
culture en Beaufe , mais il y en a peu en Cilicie : auiîl faut qu'ils
aillent quérir le boisxs montagnes voiiïnes , à plus de deux iour-
nées de là.Pour ce défaut ils fement les terres d'vne forte de grain,
que les Italiens ne François ne cognoiflènt point.Ilcft quafifèm-
blabîcau Sorgo de Lombardie, auffi ne diffère finon en couleur: ZBÏu^
car le Sorgo eft rougeaftre , & l'autre eft blanc : duquel ne trou- d
uons aucune mention ésautheurs Grecs & Latins : ûnon que les Bmamm.
Arabes l'ont nommé Hareoman. Les habitans ferrent fon chau-
me qui eft gros comme le pouce , & en font le feu en lieu d'autre
bois. Ils ont les meulles en leurs maifons dot ils meuliet le grain,
& font vne pafte dure qu'ils eftendent fort delice,laquelle ils cui-
fentàla chaleur du Soleil: ou bien à la manière qu'vfoyent an-
ciennement les foldats Romains , lcfqueîs efchaurïà'ns vne tui-
le à la flambe du feu , fouftenue de deux pierres par les deux
bou ts,e(lcndans la pafte deffus , fe cuifoit à la chaleur de la tuile.
Les payfàns des villages font cuire leur pain en telle manière.
Mais ceux des villes le fçauent bien cuire au four. Au parauant a-
uions trouué ce mcfme bled croiflant en Epire ou Albanie , du-
quel les payfans en apportent grades fâchées au marche de Cor-
phuydont ceux de lifte nourriftenc les pigeons. Nous ne campaC-
XX iij
3)-,a SECQ KW XIV RE D F S S IN G VIA.
mes pas ce foir au Carbafchara : car la pîuyc nou£ contraignit de-
meurer en vn village, ou nous trouuafrnesdu pain cui& àlamo-
de fufdi&e , commcauflîautres fartes de viures v& bon marché
d'œufs& poulies. Le lendemain pârtifmesdcbon matin pour
œcompenferlaiourneepTccedcnte,quiauoiteit.é petite: & nous
dura celle campagne iufques au vefpre , que nous trouuafmes le
pays de montagnettes,abondantes en arbriiTeau de la graine d'ef
carlate». Nous arriuafmes aux ruines de Marat fur le vefpre , qui
eftoit deûa.tard^
J%efcrtj?tt<m des mines dé M%r<it.
cBap., e r.
Marat.
Maroma».
lujfice dés
Turcs.
Mmlere
<Fempder
Us hommes,,
Àrataeftévnegrande ville , qui eft maintenant tou-
te en ruine. Nous penferionsaifement quelle fut an-
ciennement nommée Maronias:toutesfois ne Pofons
^r, , „afteurer. Oe-ft merueilîe,, veu qu'il y a fontaines Se
ruiffeàux , qu'elle n'eft autrement habitée. 11 y a feulement quel-
ques Mofquees , & bien peu de maifons délions des voûtes. Les
ruines montrent qu'elle a.eftéautrefois belle ville. Nous y trou-
uafmes vn hommeempalé àk mode des Turcs. Telleeft leur iu-
ftice, quequand quelque délinquant ou forfaiteureftc6uaincu?
on îuy lie les mains Se les iambes à quatre paux fichez en terre, Se
puis ont vn palis de bois qu'ils fourrent par le fondement, Se le
frapper à.coups de mailletsjufques àfaire fortir le bout par quel-
que endroid du corps près deîatefte : puis l'eleuent tout droid
eftant là fiché. Le pauure homme demeure là-empalé les iambes
contrebas^ les bras cftendns. Telle manière dempaler n'eft fa-
çon moderne :xar Hérodote fait mention ( quand il parle de la
fèpukure des Scythes, qui font ceux dont les Turcs font defeen-
dus) que quand le Roy des Scythes eftoit trefpaffé , entre autres
cerimonies qu on auoitaccoufturaé faire, l'on eftfangloit cin-
quante ieunes garçons de Ces efdaues , qu ils'eropaloyent & fl-
choyent aueç vn pau le long de lefpine du dos iniques à Ja tefte:
$C puis enterroientk partie d embas du pàu enserre à 1 entourda
ïèpulchredeleurRoyl.Nous difons donc que cela fe refent de
l'antiquité & des couftumes de leurs anceftres, nentedans feule-
ment que de la manière dempaler: car on ne le fait-plus, àcaufè
^Içuïfcpiikurc. Marat eft à my chemin d'entre k ville de. Xax-
OBSERVEES PAU P. BEXON. #2
ïon&Hâîep. Lescâpagnesdece territoire font femees dcfour-
ment, orge , cocon , & fêfàme , efquclles il ne croifb va feu! haut
arbre, ne petit arbrifïèau. Nous dormifmes dedans vn Carbaf-
chara. Le lendemain continuafmes chemin par vne campagne
àuffi vnie qucfMa plaine mer : qui nous dura tout le iour. La ter-
re y cft labourée à la façon qu auons di&e , parlans de Syrie. Le
principal du rcuenudu pays eftîe coton &lafefame , qu'ils fe-
mentaumoysde Iuin. Noûs'nc faifons "point de doute qui ac-
couftumeroie d'en fèmer en France, qu'elle n'y peufi aufil bien
venir qu'en Afic. Décelé pays dltalicencfttefmoing, qui du ^ ,
temps des Romains eftoit enfemenfé de fefa*ne&: coton : miis,mo^
maintenant il n*y en a vne feule plante. Le coton nefi pas demy
an en terre : car on le moy {Tonne en Septembre^ le feme Ton en
May ou Iuiliet : mais il le faut refemer tous les ans. Toutefois en
auons crouué es iardins du Caire,excedant la hauteur d'vn hom-
me, qui dure fans mourir. Il y a encore vne autre manière de co- ^mx m
ton,qu'on apporte des Indes ou du Brefîl, moult différent à celuy
quinaift en Afie : car celuy du Brefil fait fafemence grofTe icCQtm ^
•noire, afiembleeen petits monceaux , comme de dix à douze BrefiL
grains enfêmblc, au contraire de celuy qui croift en Afic-, qui la
portegrainà grain. Il eftoii défia bien tard quand trouuafmcs
vnruiffeau qui s'cfcoulle vers Halep: & ayanspaâe le ruifieau,
laiuafmes la terre molle , & entrafines en pays pierreux de mon- •. -.
tagnes & rochcrs.Nous commeçafmes a voir des Oiiuiers, nom- nr y™**
& . . j ti • ■ i- j '£**** de
mieTSjpoinerSjprunierSjâmandiers. Il n y a que crois lieues de ce j^*
ruifTeau iufques a Halep , ou arnuafmes bien tard , & logeafmes
chez vn gentiiiiomme Vénitien , que la feigneurie de Vernie
y encretientpour le trafic de k marchandif e.
De la ville de Hdlep^anàenncmmt nommée B errât: &deh Rheubarhe,
& Rhapontic. Chapitre en,
i Àîepaeftéenrenomde grandeur détente antiquité:
î car cefl la ville de tout l'Orient qui eft du plus grand
J trafic : auffi eft-ce le fiegedeComagene. L'on penfè
lè^Z^Sè^c qu'elle a prins fon nom en Arabe , entant comme . «
A^cpu ett la première lettre de l'alphabet, tout ainfi Halepcft *?'
la premiers ville de la région ou elle eftfkuce. Nous fçauons
XX îïij
Jjlerafolis.
JBcrrea.
%heubarle.
%ka,fonuc.
%bexbdrbe
deSeni.
qheularbe
des Indes.
qbeubdrbe
^^€j^rïe.
3^2 SECOND LIVRE DES SINCVLA.
qu'il y a au theurs modernes quipenfent que ceft elle qu'on no-
moic anciennement Hierapolis , combien que Gillius a efté d o«
pinionquelleauoit nomBerrea* Les Carauannes qui viennent
de Petfe,desIndes5deMefopotamie, &r autres parties d'Orient,
fê defchargcntà Halep. Ceux qui veulent aller en Indie, Perfe,
ou autres parties du leuant, trouuent toufiours marchands qui
vont 5c qui viennent en Halep. Et pour autant que ceft vne vil-
le ou toute là marchandage de leuant ardue, les Vénitiens y tien-
nent vn Conful , comme AmbafTadeur , à fin d'enleuer les mar-
chandifes pour enuoyer es prochains ports de la mer Méditerra-
née, comme à Tripoli & Baruk. Et à fin qu'ils ayent meilleure
prâdique des marchandifes de rOriét,iîs y font nourrir plufieurs
de leurs enfans,comme aufiî es pays eftranges , ou ils apprennent
le langage du pays, 6c la manière de faire des habitans/ Quand
il arriue vne Carauanne chargée de quelque marchandée en
Halcp,eileeftenleuee du lour au lendemain : car il y a; des riches
marchands en argént,qui l'achètent incontinent. Là plus gran-
de partie des Rheubarbes qui font apportées en Europe, ont efté
acheptcesàHalep, ou les habitans font couftumiers d'en voir
quelques fois arriuer douze chameaux d'vne compagnie tous
chargez de Rheubarbc, apportée du pays d'Âfamie, oùelleeft
diligemment cultiuee. One n'auons trouué homme qui nous ait
ditauoirveuquelleefUapîantedela Rheubarbe, de la vertu de
laquelle Mefue au theur Arabe en a amplement parié : mais il n'a
onc fait aucune mention du Rhaponric , dont lés Grecs ont tant
faitd eftime : Se luy , qui eftoit demeurant ou en Damas , ou en
Halep, dit qu'on y apportoit les Rheubarbes de (on temps du
pays âcs Indes Se de Seni,qui cft à dire du pays d'Afamie ou AiTy-
rie,&en tiers lieu de Barbarie, quartement de Turquie. Et dit
âuffiqucles gens d a pays mettoyent les pièces deRheubarbe tre-
per en de l'eau pour en tirer la fubftancc, laquelle eftant cfpoïf-
îie Se defèichee , en faifoyent des Trochifques , Se que puis après
refeichoyeut les pièces de Rheubarbe^u'ils apportoyent vendre
aux marchands. Cela pouuoit bien eftre , que les marchands fai-
foyent cela de {on temps : mais maintenant fçachans qu'ils onc
grand prouffit en la Rheu barbe, Se que chaque nation la tient en
v&gc, ils la cultiuent fi foigneufèment ; qu'ils l'ont en fi grande
*qiiantici,que celle fois qu'eftionsen Halep >lon en donnoit dix
liures
OBSERVEES PAR P. BELOîlV JJJ
Hures pour douze ducats. Toùtesfois clic n'eft pas toufîoursen
vnpris:carquandîaCarauanncn*cn apporte que bien peu d'À-
fàmie,ceîa eft caufe de la rendre plus chère Tannée d'après. Elic
cil cuîtiuee en A faillie, c'eft à dire Mcfopotamie, auquel lieu ils-
lafementdegrene: &rfait Tes racines grofTes comme la Coule-
uree5& quand ils l'ont defracinec , ils la taillcm par rouelles pour
la defeicher : Se en fê defeichant ainû* que l'humidité ieconibru-
me,les pièces en deuiennent ridées. Parquoy pluûeurs la voyans
aînfi retiree,onr penfé que cela prouient de i'exprefÏÏon , Se tou-
resfois l'expérience montre que cela eft le contraire. Et pour en
eftre plus certains,nous cftansenquis des marchands qui viennec
en Halep,à fçauoir,fi on en fait infuuon; auos trotiué que peu de
gens en ont-1'vfage au lieu ou elle eft culttuce , Se qu ils vfent peu
de medicamens prins de Rheubarbc. Quand iifons les autheurs
de noftre temps , difputans de la Rheubarbe , .en trouuons qui
font en doute , àièauoirfîles anciens Tout cogneue : car neus rc- *}?*îQnns~
putons les autheurs Arabes pour modernes au regard des Grecs.
Parquoy voyans que Mefue la diftingue en quatre cfpeces > Se
qu'il n'a point parlé du Rhapontic, Se fçachans que les Carauan^
nés d'À&mie n apportentque de la Rheubarbe^ auons faeiiemét
conclud que là ou Mefue a nommé la. quatriefme efpccc de
Rheubarbe du pays de Turquie > il entend du Rhapontic. Età^*""^.
dire le vray,le Rhapontic eft moult fembîableàla Rheubarbe: ^l*16-
&r combien que*ne voulons entendre que çcft tout vn,toutcsfois ç^nxx
il eft manifefte qulls approchent grandement de la vertu Tvn de Styrlx.
Vautre. Les principales gummes Se cfpiceries3comme eft Galba- ^tfafœtidz.
numxOpoponax3 Styrax, Àûa fœtida>Scrapinum>& autres telles^ serxpimm»
nous font apportées par lavoye de Halep : Se k Scammonée. Tnpok
Les dades dures font apportées en Halep d'Aiàmie : car celles c^°4em &
d'Egypte Se Afrique font û grafles ,, quelles font empaftees en- Bt^' v
fèmblc , Se ne fepeuuent garder à part.il n'y a que trois iournecs ™a™
de Halep à Tripol^qui eft le lieu ou les Vénitiens abordent pour
charger leurs nauires des matchandifes qu'ils achètent en Ha~-
Icp. Tout le lendemain fut dédié à voir la ville ,qui peuteftre cô-
parce en grandeur à Orléans. Au milieu de laquelle y a vnc butte,
ronde , dcuus laquelle eft vn chafteau y qui a fes douues plaines .
deau. AufliyavnSangiacauec fes foldats.- Les murailles font
iaitçs ai antique JBt Sautant qu il eft en lieu ^minent , on k voie
YY
3£4 SECOND LIVRE DES SINGVIA.
de plus loing. Il y auoit vn Àfncfàuuagc nommé Onagcr, cnfeiv
ondger. m£ dedans jes douucs , différent toutefois à 1* Afne Indique qui
^cjmHs »*ponc vne Licornc. Au ffi y veifmes vn oyfcau quaû* fembîable à
vne Grue,mais plus petit de corpulence , ayant les yeux bordez
crus L& àc rouge,la queue de Heron}& fa voix moindre que d'vnc Grue:
Udrîca. Se croyons que ccil celuy que les anciens ont nommé la Grue
Balearique.
Spéciale deferiptian des rues filon quelles font fûtes es villes & villa-
ges deTurqwe* Chapitre CI il.
| Amais les charrettes ne pafTent par les rues des bour-
! gades Se villes de Turquie, nauffi par les marchez,
t Car il y a vn chemin au milieu de la rue , qui eft ex-
! preffement fait pour efgouter l'eau, & pour le pafTage
des cheuaux. Les chemins font haufèzaux deux coftez de la rue
en façon de bancs, qui font couuerrs de petits appentiz poureui-
ter la pluye , Se la chaleur de Fefté. Et pource que les Turcs por-
tent des robes longues tramantes iufqucs en terre , s'ils n'auoyéc
telle manierede faire es vill.es,ils feroyent toufioursçrotez. Telle
façon eu généralement obferuee^non feulement en Haîep,tnais
*&*de$ >/^ au j£ par coutc Turquie. De là vient que les rues des villes ne font
iesjmspme. ^ pâUces ^ & p0ur cu jter \cs poudres par les marchez Se bafe-
ftans,qu on fait voler auec les habits en temps d'elle, chacun qui
tient boutique , donne vn afprc par moy s pour ie&er de l eau de-
uanc fà boutique,laquelle vn homme porte dedens vn oudre , ar-
roufant tous les matins en la rue. Le Turc tient toutes les bouti-
ques Se ouurouers des villes en fa main,& les loue aux marchads,
Se ne veut permettre que les hommes y tiennent leur mefnage
au lieu ou cft affis le marché. Car Mahomet défend que les fem-
Femmes de mes Payent à vendre^achcterjne fe monûrer en publicXes ou-
Taram ne uriers quels qu'ils foyent, fe contenter du gain qu'ils font le iour,
yotdtt mar*te ne fe trauaillét point la nui&.Nous arreftafmes quelques iours
thé. en Hûcp:Se feifmes le circuit des. murailles,qui font de plus gra-
de eftenduc quecelks de Damas,ayans des encoigneures en plu-
yilî- /£** ficurs cndroich,comme es murailles de Ieru falem.Lcs tours qui
m ^' ibnt à l*entour, font loing les vncs des autres. Halep à huict por-
tes^ agrand nombre de vignes Se vergers Se beaux iardinages à
- O BSTE >Rjv E E 5 P Al P. B E LON. $?$
Fentour des murailles , ou ils cultiuent des choux cabuz, des lai-
érueSjbetccSjporreaux^ignôs, pour védrcau marché.Lcs Turcs
Ce fèruentdcs antiques monnoyes & medaies , à faire des poix à f- e im*
pefèronces,dcmieonces,dragmes:quieft caufe qu'en auons re~ "
couuert en plufieurs lieux de Greques y Se Latines -, & quand en.
voulions trouuer, allions par les boutiques dernandans Giaur
manguour, c'eft à dire monnoye de Chrcfticns: ÔC alors nous
ayansentendu,mon{troyentcela qu'ilsen auoyent» Les Turcs,
A rabes,Egyptiens,ô£ toutes autres nations duleuanc fu bicch au
Turc,n'ont autre diuerûté de monnoye finon ou d'or ou d'argét.
L'or monnoyé qu'ils ont , eft fin or de ducat. L'argent eft fin ar- Motmoye &
gent^non meflé,ains purifié. Encoryavneautre forte de mon- ruraux
noyé en Turquie, quieft appelîec Mangoures, qui eft de pur cui- .
ure, dont fêize ne valient qu'vn afpre : & pource qu'ils pefent Mangourss.
beaucoup , lonna pasaccouftuméde s'en charger , ains ontefté Marfie &*'
faits à fin que quad Ion acheté quelque chofe d'vne boutique, on ior ^
s'en férue à rendre le refre d' vrvafptc. La marque qu'ils font à l'or C*
& l'argentjcft de lettres Arabiques , & n'ont en tout ûno-nvnc ef-
pece de monnoye nommée vn Afpre , qui vaut autant qu'à nous
vn Carolus. Les Arabes èc Egyptiens ont vne forte de monnoye ^ffire.
qu'ilsnomment Meidin, qui vaut vn alpee & demy- Metdi».
Voyage de U v'Ahie Hxlep m^éntioche. Cbap. ciiu.-
;, £ s habitans d'Halep parlent Arabe , & non Turc-xar
? le parler des habitans d Egypte, Arabie,, Syrie, Gihcie,.
lôc autres circonuoifins 5eit Arabe. Apres Midy par- langage
J6_?5iSj-ies_j tifmes de Halep , pour aller voir Antioche , &: chemi- syne-
nafmcs par belles campagnes labourées & arroufees de beaux m*f°
ruifTcaux. Ce foir logeafmes de bonne heure en vn village qui cft
appelle Farrou : près duquel y a-: vne haute colonne antique
fans chapiteau , qui c& toute droi&e dedans vn champ. Le
.touc venu prifmes le chemin d' Antioche , & après qu eufmes
vn peu cheminé , & laide la campagne , entrafmes en va
pays pierreux: & failoit.bien fouuent pafler par deiîus des
petites montagnes, & quelqucsfois fuyuir les couilaux. Nous
veifmes Tes ruines d'vn Chafteau;, à k porte duquel ilyauoit
du Lierre blaac3_qui nous fut chofeaouiicllexar nous n'-en auios.
^YY ij..
^6 S EC0 ND LIVRE DES S I KC V LA.
point vea depuis Corfu. Auflî crouuioGs de larbrifTeâU d'An-
1$err}k^. ^racnnc naiflàns par les couftaux, dont chacun en cueillit plu-
M fieurs rameaux auec le fruiâ: pour porter auec foy , Se le manger
fœkc du Par chemin : car il eftoit roeur pour lors. Auffi eft il de fi belle
ziege porte couîeur,qu'il inuite les gens à le manger. Il pend par trochets,de
framhoifes. la grofïèur Se couleur des framboifes , Se mol comme vn grain
d'vn Arboufier,& de Liège , ayant iafaueur du frui& quinaift
fur l'arbre du Liège. Àufli trouuions des arbres d'Aria, & d'Efcu-
lus,Terebinthes, &: Eleprinos, que les Latins appellent Alatcr-
nuSjles Italiens habitans de Termi,& de Narni, Alinterno. Coi>
tinuans noftrc chemin par ces vallées nous trouuafmes vn logis
. ancien en ruine , delà forte d'vn monaftere, ou auoit vne belle
tour au milieu,que laifiàfmes à feneftre. Auiîi4aiflàfmcs vn beau
logis ruiné,fait de pierres de taille, ou font veuès quelques lettres
Latines, qui monftre auoir efté bafty par les Romains. Nous
pafïàfmes vn rui{ïèau,qui dés la fourec venant de fà fontaine ren-
doit tant deau,que noz Chameaux y furent iufques aux fangles.
Heirim. Nous vinfmes loger au pied d'vn chafteau nommé Heirim , tout
romé,ûtué en pays deshabité, qui eft.moult grand' perte: car s'il
eftoit cukiué,il neferoit moins fertile qu'eft le meilleur endroicl:
d'Italie. Les ruines de ce chafteau nommé Heirim , font efleuces
fur vne butte comme ecluy de Halep Se d'Hamous. Nous ne
pouùons croire que dix mille hommes l'aycnt peu cauer en deux
ans,& entailler la roche pour faire les fofTez qui y font. Il fèrnblc
que nature fè foit elbatue à faire ce petit mont deflus le roc pour
y fabriquer ledict chafteau. C'eft le dernier endroiefc de Turquie
Colocafe. ou croift la Colocafle , Se les moufes. Les arbres de l' Andrachnc
Moujès. $£ Aiaternus y croiflènt par les rochers en la. prochaine colline.
No9 ne bruflafmes point d'autre bois à acouftrer le foupper.No9
ne logeafmes pas au Carbafchara , ains en vne maifon du village:
qui eft chofe moult rare, de trouuer ges par ce païs là,qui logée les
paflant:& fi bié ils les logét^Ceft fculcmét de leur baiiler quelque
lieu défions vn porche,fans autre chofe de la maifon,no plus que
fi l'on eftoit logédeflbus vne halle. Chezcefthofte obfcruafmes
vne chofe digne de récit , c eft qu'il auoit vn poignart courbé à la
faço des poignarts Arabes,qui n eftoit enrichi d or ne dargétjdu-
ql noftrcdrogucmétluy en voulut bailler quatre ducats, qu'il re-
fufa,difât qu'il en aupit coufté fix en Damas:& toutesfois croyos
OBSERVEES PAR P. BELOK. $$J
-qu'o n en trouueroit pas vn cfcu de la douzaine dedas la meilleu-
re ville de France.Ceft hofte çft vn de ceux qui font profcfllÔ de
loger les pa0àns : mais il faux entendre qu'il ne baille ebofê qui J^*
foie, finon les parois de fa maifonvuides {ans vteniiles. Ilauoit
plufieurs vnguens,commeMetopium, IU>{atum,&; telles autres
fortes , qui font en commun vfage en Syrie & Arabie, &: dont ne
tenons compte,.
_ Ve.lavillei^éntiochç. Chapitre cv.
, Eiour d'après trouuafmes vnc capagne de môuît
grande elftenduc» ou nous paifafmeslariuierenô- orous tme*
mee Orous , qui fè va rendreen Antioche : car le re.
lour précèdent nous f auîons coftoyée. Laquelle
> toutefois nous paûafmes bie haut au defTus d' An-
tioche tur \n beau 6c grand pont en vn grand lac , que croyons
eftreccluy qui autrefois eftoit appelle Stagnura Meandriopolis. . ' „
Nous fuiuifmcs long temps ladicle riuiere , iufquesà ce quelle 'j^r***'-
entraft dedans le Iac.il n'y a que deux iournees depuis Halep en
Antioche. Mais pou rce qu'il auoit pieu , &:que les Chameaux
qui portoyent le bagage-, alloyent malaifement , nous y feifmes
deux iournees & demie. Ce n 'eftoit pas noftrcdroid chemin al-
lans à Conftantinople, de pafler en Antioche, mais nous laiiîàf-
mes le droict chemin à main dextre pour ali er voir la ville qui cft
fituee au dcfïbuz dudict lac. Or failoit il aller droict au mont
Amanus,& de là à Adena: toutesfois pour cftrc allez voir An- ^nwws.
tioche, ne fufmes exempts de le pafïèr : lequel pource qu'il appa-
roift noir , eft nommé en Turc & Arabe , le.mont noir. La ville
d'Antiocheeiien telle fituation,quon ne lafçauroit bonnement £*«&*<«»*.
deferireen peu de parolles : caria ôru&ure des murs la rendgra- ^/întm^
dément admirable à la contempler, plus qu'vne autre ville qui fc-
roit édifice en la plaine. Elle rend certain tefmoignage qu'An -
ciochuseftoit de magnanime courage, &: prefque de grandeur
incomparable. Le tour des murailles de la ville n eft rien moins
grand que de Nicomedie ou Conftantinople. Il y a pluftcurs ha-
bitan&en la vilîe,Grecs, Armeniés,Iuifs, &:.Turcs. Elle eft moult
abondante en eaux de fontaines , qui fortent des rochers enfer-
mez au circuit des murailles. Il yavn descoftez de la muraille
qui encemâ: vne montagne. L'autre coûc s'eftend par la fom-
YYiij
Comparais
fon <£y£n*
tioche a
J5$ 'SEC0¥I> XITRE MS SrNWlA.
micé de deux montagnes, qui iuy feruent de fouczxar il y a trois-
hautes montagnes comprinles au circuit des murailles , qui ne
font petits tertres comme à Rome ou Conftàntinople , ains font
vrayes hautes montagnes. Nous ne fçachorîs ville en France à
qui pu ifïïons comparer Antioche, qu'à la ville de Lyon. Car co-
rne Lyon enferme les hautes montagnes de Saind lus, toutainfi,
la ville d Antioche va enceindre des hautes montagnes 5 fur lc£.
quelles cft deaë le palaysd' Antiochns : qui nyeft pas du tout rui-
néXar Ion y voit pîufieurs choies en leur entier , corne des gran-
des falles & chambres : 8c an dl âcs ci fternes faites à la façon de
celles du palays de Philippi en Macédoine , de defmefuree gran-
deur. La maflbnr^ieduChafteau d'Antiocbe^&du tour des
murailles de-la ville font encor en leurentier. Lô y voit des tours
quarrees près à près l'vne de l'autre, moult hautes,ouîesouuriers
n'ont pas efpargné la pierre aies fortifier. Les murailles qui font
du cofté de FOccident/ont de tel artifice » qu'on peut mener les
charettes-& Cheuaux du bas de lavilicau haut du Chaftcau,
tous chacgez&: montez à Chenal par l'entredeux des deux vou-
tcs,par le dedans de la muraille.. Chaque tour a fa cifterne. Les
xnotagnes d'entour la ville font rcueftucs de Chefnes verds, Aîin-
t-ernus,grainc d*Efcarlatc, Andraclmes,Srœchados,$tacbis.- Les
Cigoigncsqui font Tefté en Europe- , fonda nourries partie de
l'hyuer, comme en Egypte:& auffi des Onocrotales, 6c plufieurs
autres fortes d oifèaux de riuiere,qui fe nourrhTent dedans le lac,
qui cft au deifus de la ville : entre lefquelz auons recogneu celuy
que les habitons, du riuagc de la riuierc de Somme nomment des
Cotées^ à Paris vn Morillon, & lequel les anciens nomrnoyenr
Cotœoife* Glauçium: comme au £Ii eftceluy. qu'on appelle en F rançoisvne
**f* . Piette. Les Mourrons qui pai&nt par les môtagnes,ont la queue
GvXHcmm, sxQuftçQ forc graife^d'vn pied de large. Les habitans de ce pay s,Ô£
?lm£y£n*- *Iua^ P*ir toulc Turquie lie font le painiinon au iour la iournee,
tioefa. mal cuît,&: mal en leuain. Les verms de foye que les ItaliensnÔ-
Camliers ment Caualiers , font de grand reuemi au territoire d'Antioche,
& font nourris defbeilles de Figuiers 6c Meuriers culriiicz le 15g,
de la riuiere.IÎ y* a de treshautsPlatanes àlentree d' Antioche,dôc
H n en croift aucuns n'en France n auili en Italie, finon quelques
vns cukiuez à Rome & autres villes par fingularité. Il y a quel-
que petite quantité de Cannes defuccre^Colocaires, & Moufes^
Platanes.
Stucre.
Colocajfes.
OBSERVEES PAU P» BELON. ^ .
qui font cultiuccs moult diligemméc en quelques iardins d'An-
tiochç. Les habitans y parlent Arabe^ommç en Syrie.
obfertMtion touchant les fmgukritttJk«éntioc%c.
Chapitre , cvi.
) Out le iour enfuyuant fut dédié à voir les fainds
} lieux d'Antiochc , comme la porte fàind Paul,les fe- squkhres
! pulchrcs de plufieurs fain&s.Lon y pourroit voir plu- «esfMn&i.
lueurs autres chofès antiques, qtiiîesçhcrchcroitpar
Jemenu.Lony trouue de toutes fortes de vîures au marché. Les
boutiques des drogueurs , &artifans font de mefmc comme en
Damas.Lcs arbres de Lotus, que les Fraçoîs appellent Micacou- Lotus.
licrs,croinent en la ville en grande quantité , &: aufïl es prochai-
nes montagnes du territoirc.Et tout ainfi que les Poupliers blâcs MlCiUQU^rs
&C noirs » & arbres fruictiers font que la plaine de Damas refenx- Pou? ien*
ble vneforeftjtout ainfi voyant les Platancs&: Micacouliers,font
apparoiftre Antioche comme dedans vn bois.Les baffo desChe-
uaux des voi&uriers d'Antiochc font û longs3qu'ilz prennent de-
puis les au reilles pardeffuslecol iufqucsàlaqueuc» Les pay fans
d'Antiochc ne font fi habiles à charger leur bagage que les Turcs
caries baftslcur font mal propres au fardeau. Nous partiimes
après difner d'Antiochc , &: paflafmes de là la riuiere nom-mee
O rous , que nous fuy uifmes long temps contre mont. La terre ùrom^
d* Antioche cil figraffe que noz Cheuauxenfondroyent iufques
aux fangleSjpourcc qu'il auoit pieu les iours precedens. Quand
nous eufmes cheminé quelque temps , trouuafmes des ruiilcaux _.
venans des montagnes, aux riuesdefquelzcroiftNerion Àgnus, p^s * A**
&: de très hauîts Platanes.Nous allafmes loger à Saramcli, qui eft e'
vn .village au pied d'vn haut mont du tenant du mont Àmanus,
qui eft fitué en lacampagne.Le iour d après necheminafmcs que
deux lieues que ne campainons au pied d'vne fort haute monta-
gne ,ou nous arreftafmes tout le iour > attendans vn Cheual que
xuonfieur.de Fumet enuoya quérir en Antioche. Ce pendant
ayans monté fur cefte montagne , trouuafmes les forefls toutes .
de P ignés nomez en Latin picea, fcmblabîesàccux qui vienne t JS^
for la môcagncde Tarare.ïl v croift auUi dc&arbrcs d'Efcul^Ilex, J
Y Y iiij
$66 SECfOHD IÏV1EDÎS SINGVLJU
Tu'mnt^ Adrachne,OxycedrusY aufljycroift du Poliuin -, Tragacantay
CaHme. Chamasdris , de la Carline , que plufieurs nomment faufèment
cktmekon. (^haoacIcon.Nous veifmcs les payfans en la plaine s qui ont cou-
ûume de faire porrér leurs fardeaux de bois fur le dos de leurs
Bœufs,commeauffi îc bled,&: autres chofes femblables,& quel-
quesfois eux mcfmcs cftans lafïèz fe font porter à leurs Bœufs:car
eux qui n ont pas halte s en feruent comme nous dvn ClieuaL II
nous vendirent des poulies, des œufs,dc la chair : Se ja (bit qu ilz
ioyent campez par les champs defTouz leurs zetes tout l'efté, tou-
tefois ilz font accommodez tout ainfi , comme àla-vilicou ai!
village-
&ypajfigep4y de/fus îe plus hautfaifteàt mont ^nutms*
Chapitre cvn.
i E iour enfùyuant nous allions entre le Soleil leuant
\Sele Septentrion -,'coftoyans les hautes montagnes.
I Lemont Amanus eft vulgairement nommé Monte
fnegto, c'cftàdire, noir. Toutesfois Pline cfcriuanc
Mons ater, nà pas entendu de eeftuy cy . Il nous fallut monter la
montagne moule droite, Se precipiteufe , Se plus fafcheufe que
nulle autre que nous euffiôs encor trouué». Nous tronuafmes des
hauts Cèdres comme au mont Liban,& du Geneure nuieur, Se
du Sauinier, comme au mont Taurus.. Lfarbre d'Ândrachne y
croiftencor plus haut qu'en la montagne d'Ida en Crète. Nous
fufmes plus de fîx heures auant qu'arriuer à la fummité de la mo-
tagne:& quand nous fufmes au plus haut faifte , regardans celle
part dont nous venions , nous veoyons les fummitez des monts
de Syrie Se Caire x Se principalement celles que nous eftimons
ïienu^ cçac je œont picrius^ lequel nous auions entourné les iours pré-
cédents par fèsracinesmous veoyons aulïi le mont Taurus , qui
74mn rms, apparoûToit de bien loing deuant nous^ftendu en long, qui déf-
ia commençoit à effare couacrt de neige par le coupetXadefeen-
te de ceâemonEagne ne fut fi fafcheufe , que la montée : car elle
neftoitpasfidroide en àcfcend&m qu'en montant , &r pource
qriecheminionsal'obfcur , vnde noftre compagnie tomba en
vne vallée de plus de quarante toifes.de haut > fans que iuy ne fon>
Ciieual fuâeat bleflcz, qui fut choie efmerucillable à toute la
compa-
^ . OtSEIVEBS V Al P. -B EX; OS., $£î
compagnie. Cefle montagne eft fort-abondante en dmeHesfor-
tcsdepîantes.Noos trouuafmes desArboufiers^quin'eftoyent ^^ *-
guère moins hauts que ceux du mont Athos^uinaiffentésmô- ^^^
f3<xnesvoifinesdurnona£!ere dAgiasLauta. Auifi ttouuios des ^«Jfe
hauts arbres d' Aîaternus,qui cora munément font arbnffeaux es rbymeUa.
autres lieux. II y croift du Picca & Andrachne , Lauriers à large cbameUx.
fueilie.Defcendans plus bas trouuafmes des My rtes,qui portent &&*.
le fruid blanc, de Thy mehea U Chamelaea , & de. l'herbe que les Krmt-
Alemas appellent Keîlcr Kruar,dif&rentc aux deux deuufdides. ^^
Quand nous fufmes defeendus le mont , nous rcpofafmes le log Mont^m*.
dvn petit ruineîer. Nous repeufmcs au riuage de la mer du fine ^im^
I (ficus, lequel fe courbanten arc, fait v ne moult grande plage-
Cefte mer eft du pays de Pamphihe conioiu&e d'vnepajrt à celle
de Ciîicie. Eteftans deffus ledit mot Amadous auions la mer qui
batoitaupieddeladi&e montagne >& veoyons bien l'endroid.
ou le mont Taurus prend fon commencement au riuage oppofi-
tcaCypre.Ce/temerbataupieddumunt.-Amanu5 > &t fi quel-
que n iectoit vue pierre d'en haut , la pourroit facilement ruer en
1 eau de la mer Méditerranée. Il nous fallut long temps fuyuir le*
orées de la mer^ entourner ledict finc,& pafTer.de moult beaux
ruifTeanx.Continuans noftre plage cheminaas par le riuage, il
nous falloir pafler vn autre petit mot forteftroicl: & difficile , qui
eftoitcouucrtde Pignets , au delà duquel trouuafmes vn petit
Chaftelet au pied de la montagne , ou il y a gardes ordinaires,
d'autant queceftvn paûàge moult fréquenté.- Nous y trouua£ château g»?
mes de plusieurs fortes de yiuresà achetcr,commc pain,vin^ for- dé au, mont.
mage,chair , & orge pour les montures. Nous defeendiftnes yn *Am*»~
peuaudeffouz dudid chaftellet , près à'vn ruiiîeau deifouz vn.
Meurierblanc^quieft celle maniere'd'axbrequc les Frâçoïs pré-
sent pour Sycomore. Nous fei&nes bon feu toutelanuid : car
nousauionsdu bois autant que nous en voulions : & partifroes j^Sm
auant iour , &cheminafmes àrobfcur par pays vny &pbtenla uniers...
campagne , & lors que le iour fut venu,retournafmcs au riuage cbefaes -fcr&...
dclamer.ou noustrouuaimesvneriuiere^u'il nous fallut pafler *k****' r
àguéau riuage de la-mer , que .poflible.ee pourroit eftre li&s. s™1** *j2**;
Nous pâmons par lieux fort plaifanstcar les chemins (ont bordez r4*
en quelques endroits de hauts Loriers, Chefhes verds, Platanes*.
Snùlax afpera , & maintes plantes verdes. en tout temps. Nous
zz:
$6l SECOKT> LIVRE DES SINGVLA.
auions les montagnes à dextre,&; la mer à feneftre. Ayans paflela
rlame du. rju jerCjnous entrafmes en celle grande plaine , en laquelle on die
^ * A= qu'Alexandre & Darius combadrent. Il y croift vn arbriffeau
■Darius^ <3UC nâinons vcu ailleurs, qui eft moult fembîable au Myrte. II y
?oru cih* a grande abondance de Myrtes:niais il n'y en a aucun qui ne por-
sue. te la (cmence blache.Nous paflafmcs par dcftbs vne arche moult
antique,!aqueîle les autheurs ont nommé Porta? Cilicia2,faite de
èrique,&: de fort cimenr,qui eft plus dur que pierre de tailîe.Rc-
gardât çà & là Ion voit la campagne comme vn amphiteatre : car
les hauts monts î'entournent en façon de demie lune pour recc-
Fruicisd^An uoirîa mcr duditfine Meus. En paftànt par defïbuz lefdi&es
irtchnes. portes de Ciîicie , chacun de la trouppe voyant les arbres de Ân-
drachnes porter leurs fruiâsà trochets , ja rougis $c meu rs , réf.
femblans àdesFrezes , rompoit des rameaux Ôc les aîloit man-
geant par behemin. Le pays eft peu habité : & ce qu'il y a d'ha-
bitass , ne font point adonnez à la pefcheric , n'au fli à n'auiguer;
tlont iladuicnt quenousn'auonsonc veu vn fèul bateau, le long
decefteçofte de met. Et auii le pays eft mal peuplé &: peu habi-
té degens:toutesfois la terre eft trefbien arroufee de rui&aux.-car
-nous en paflàfmes plus de trente en deux heures, qui fcfcouîoyéc
en la mer,defcendâs des hautes montagnes. Apres que nous fuf-
mesefloignezdes portes, commcnçafmes à entrer en paysfteri-
le,& lieux pierreux,^: de là pafTafmcs des bois quafi comme tail-
lis,ou naift vn petit arbriflèau, dont auons ja parlé,que ne içauos
exprimer, fine le nommons Pfèudomyrthus. Nous trouuafmes
rfitdomyr- vnCarbafchara^ounousrepofàfmes , qui n'eft guère loing des
thm. villages.
Vêla ville Anciennement nommée \Aaena, : & ivnt befte à*Afte
nommée *4&l Chqitre cyjii.
> L y a vne manière de petit loup par Ciîicie , Zc auflï
t généralement par toute Afîe , qui emporte & dérobe
f toutee qu'il peut trouucr des hardes de ceux qui dor-
cii^Jmentl,efté horsduCarbafchara. Ceft vne befte en-
trexoup & Chien , duquel pluileurs autheurs anciens , Grecs
& Arabes , ont fait mention. Les Grecs le nomment vulgai-
. Cff SERVE E-S PAR P. SELON, . tfî . \.
renient Squilachi : & croirions que c'eft iuy que les autheurs Sj*jf&*-'
Grecs ont nomme Chryfcos v c'eftàdire. Aureus lupus. Il eft û.^^
larron y qu'il vient la uui& iufques aux gens qui dorment , & cm-
t>orte ce qu'il peut trouuer > comme Chapeaux > bottes , brides» r_
jbulièrs , &: autres bardes. Ceft animal n'eft guère moins grand
qu'vn loup. Et quand il eftnui&clofe , il abboyc comme vn
Chien . Il ne va iamais feul > mais en compagnie : iufques à
eftrc quelque fois deux cents en Ql ttouppe , tellement qu'il n'y a.
rien plus fréquent par Cilicic. Parquoy allans en compagnie,
font vn cry Tvn après 1 autre , comme vn Chien quand il dir>
hau hau. Nous les oyons âbboyer toutes les nui&z: ôc n'eftoic
que les Chiens lesempefehent, ilz entreroyent pritiémcnt iuf-
ques dedans les villages. Il eft de moult belle couleur iaune,
dont les habitans font ordinairement fourrures de fa peau ^ qu'on
y vend à grand marché. Le matin enfuyuant partans dudicfc .^m
Çarbafchara,pourfuyuans noftrc chemin vers Adena , trouuaf~^rJ^
mes vn pont de pierre , & paffafmes vne petite branche de la ri-
mera que poilible eft Pyramus, ioignant laquelle eft vn Cha-
fteau à main dexcre > fitué defTus vn roc de difficile accès. Delà
fuyuifmes long temps ladi&e riuiere iufques à venir aux ruines
d'vne ville , qui ( à noftrc aduis ) au oit nom Csefarca Ciliciavou ^J**!
nous trouuafmes vn pont pour paftèr la riuiere. Les riuicres-de,
ce pays là , encore qu'elles foyent nauigables , ne portent poin&
de bateau : car le pays neftant peuplé , perfonne ne fe fbucie d'y-
trartîquer. Le domaine du Soudan d'Egypte s'cftcndoit iufques
là, Sjeftoitlcs bornes ,,quidiftinguoit le langage Arabe dauec
le Turquois , &: qui departoit l'empire àcs Arabes & des Turcs.
La première bataille qui fefeitonc entre les nations Arabes Se
Turquoifcss fuç faite en celieulà,dont eft aduenu queleiTurc
'les a rengez &gaignez iufquesàiesrendreferfsà'fadeuocion. Ea-
cefte ruinede Cefaree il n'y a qu'vn Carbafchara5&: quelques pe-
tites maifons. Quand nous cufmes paiTé le pont »nous pourfuy*
uifmes le couranede leau^q nous auiôs à gauche,puis.entrafmcs
en ynefpacieufc capagne fterilç,qui n'eft poûedec de particuliers ^jrtishla^
fino de ceux qui veulent y mener paiftccleur beftial. Les My rtes-
portéc au (fi le fxuiâ: blac,&: y font ii freques, qu ilz font refsébler p ^ - ^
eftrc en bois taillis. Nous pamosdeftbuz des hauts arbres de Te- ^/J^ -
sdaiothesj qui fbntdcsfoiefts en ceft endroid , & font cfpars ça
" ' ZZ. il
ejarear
Crfkïa.
5^4 SECOND LIVRE DES SïNGTLA.
&:Ià,mefîezauec des Pins fauuagcs. Celle campagne nourrift de
mouîc grands troupeaux de moutons &cheuccs,qui font de grad
reuenn à leurs maiftres , tant en beurres qu'en rourmages. Et ja
VtuerQs na* ^oxl <îue *cs beurrcs foyent differens les vns des autres en cle&ion
tttresilehatr ScbontCyQu pour la befte dont ilzprouiennent,ou pou rie paftu-
ns. rage,ou del'ouurientoutesfois ilz nes'eiloignent tant du naturel
1 vn de l'autre, comme fait le fourmage:cargouftant le beurre de
Formages diuersammaux,dcs Buffles, Vaches,Iumens,Chameaux,Brebis,
de p^^^çheuresjon ne troaue moult grande variété : mais il eft bien
jortes. ^ contraire des formages , veu mefmcment qu'on les peut dif-
cerner à les odorer feulement Se regarder , Se les peut oiv infaili-
blemenc iuger en les gouftant:Or eft il que les paifans Turquois
cfloignez des villes , errans par les campagnes, vont gardans leur
bcftial aux champs tout l'efté : Se ayans faute de vaiffeaux de ter-
Beurreg£rde'TCOU ^c bois,ttient quelques brebis ou cheures , Se renuerfent la
esefionucs çCmzCeon$vecen^uàfè>^^ de beurre,
maux * les autres de formage , & gardent la panfe foigneufementrcar ilz
îa remplifïênt auffi de beurre , qu'ilz font premièrement bouillir
Se tefroidir,auant que de le mettre leans.Chaque panfe en c5tiec
«miiron^de trente àquarante îiures:lcs peaux en côtiennent plus
•de cinquante. Nous ne difons que quelques vns n'ayent l'vfagc
d accouftrede beurre en d'autres manières, Se faler de mefme fa-
çon que nous : mais cela n eft fait fïnon es confins des grofTes vil-
Mewrelie. ks.Ccfte chofe eft tout ainfï aux habirans de Mengrelie , qui am-
^ " plifTent les peaux des bœufs Se des vaches, fans eitre conroyees,
aucc du beurre,toutes frefchesefcorchees:&: puis l'enuoyetpour
vcndre,àConftantinopIe, tout ainfi qu'on nous apporte l'huylc
de Languedoc dedans des peaux de Cheures. Nous ne faifons
doute,fi cespayfans auoycnt des vaiffeaux commodes , qu ilz ne
garderoyent pas leur formages en des oudres : car ilz n oc point
dvfâgede le garderen pain. Et entant que tel formage eft diftri-
bué par le pays de Grèce , ou les marchands le vont vendre , les
Crées le nomment de nom vulgaire Dcrmatifl hilatifineno : Se
~ ne difent pas ty ri , qui eft à dire formage , mais fimpiement ilz
rappellent fàîé en peau , comme nous faifons quandnous nom-
mons du falc,cntédans par ce que Ccft du porc. Mais eux le font
à îa différence d'vnc autre forte , qu'ilz appellent en leur vulgaire
dorotyri. Clorotyri/ qui eft à dire, formage frais ; quieft ccluyquc Colu-
O'B S ÏRVÏE'5 PXÏt P. *ELONV $6$
mcîlcatiommécn Latin Cafeumvmdemy non pas qu'il foinrcrd, OfemyirU
mais qu'il eft moL Les paftcurs ne coulent Jamais lelaiâ no plus *•
qu'en Crète : toutesfois les Crêtes ont vn rameau d'Afpalathns ^
à la bouche de leurs pots,ou bien l'herbe de Rcble, nommée Àp- ^^
parine : à fin que fi par fortune aduien t que le poil s'y arrefte , le ^r^ar'me.
formage en forte plus net. Mais le formage de ces Turcs ainfi Formage
faléenpcaux^ft communément plain du poil àes beftes, pour ce des Turcs.
qu'ils ne toulent point le laitt^Contirruans noftre chemin,alliÔs Tentes &*
droic\au Septentrion ,& trouuiôs des loges Se tentes en plufieurs îayJam-
lieux par les campagncs,des panures payfàns, quife partent Fefté
des villes Se villages pour aller par les campagnes , iufques à l'hy-
ucr,ou ils font le mcfmc mefnage qu'ils feroyent aux villages ou
villes. Et quad ils ont demeuré huid iours en vn lieu,i!s s'en par-
tent, & vont viure en vn autre, Se emportent leurs tentcsfai&es
de cîifïès,couucrtes de feutres, quant & eux. Et quand ils retour- .
nent aux villes, ils les pîôyent Se gardent diligemment iufques .à rô*feur m
ce que le froid fok paffé. Et voulons bien maintenir que les habi- •**•
tans du paysd'Afie endurent àuffi fort hyucr que font ceux qui
habitent au cœur de France. Ils font parefîeux Se cultiuent mal
la terre: mefmemcnt les payfans riches veulent toufiours efttc
affis,fàns rien faire : Se neftoit qu'ils font labourer les terres pat
leurs efclaueSjil n y auroit que bien peu de terres labourees.Nous
arriuafmes ce iour en Àdena, ou nous ouifmesnouuellcsdcla Aj^
ville d* Anafarbe , à qui Ton changea fon nom en Cadâr augufta, ^w^
donteftoyentOpian &Dio{coride. Les Iuifs nous dirent qu'il cxfir au*
y a maintenant vn village à la bouche du âeuue qui pafle par A-^/x
dena,qui eft poflible nommé Tyberis , qui retient fon nom ancie Tyberk.
Adena,& Adcnaeft vnegrofïè ville, ccft à dire grand bourg, Se
de grand pafiage; Il y a vn beau pont de pierre , fort large &fpa-
cieux.La riuiere eft nën*ée en Turc Schclikmark,qui vient d'Ar- Sry;Lmari
menie rumeur, pafïàiît par Lydie & Cilicie, Se vient tomber en la ^w^
mer Méditerranée au defibus de Rhodes. Elle n'eft pas nauiga-
ble , pOLircc qu'elle meinc moult grande quantité degrajioïs:
auccelle. La ville d* Adena n'eft pas clofe de muraille. Il y avn
chafteau qui a quatre tours quarrees, qui ne font gueres fortes.
Nous y trouuions de toutes fortes de viurcs a Se du vin : car il y a
des Grecs,des Iuifs,&: Arméniens: Se aufE que les Turcs mefmes
cultiuent les vignes pour en auoir les raifins. Nous commençât
ZZ iij
$66- SB;COKI> BIV'RE Er*E S SINGV'LA.
cb&igemmt mcsàauoir changement de monnoye : car nous auions aupara-
de monnoye^ uanC vg ^ ^ej4ins par Syrie , Egypte , & Cijicie , ^fallut que
^m'fe . ceux quien auoyenc de refte , les cliangeafTent" à des Auprès, Le
rJfo- ' langage Arabie nous défaillit en ce lieu,&: fe changea à la langue
Tmc. Turquoife. Nousckangeafmes de montures à Adcna, & feifmes
noz prouidons pour trois iours. Les Turcs vendent leu-rs mar-
çbandifes au poixoivalamefure, fans furuendreaucuneebofe,..
tellement que les voifms payent autant que les plus eftranges qui
Tain yndu ^ vicnncncXc pain y eft vendu au poix,qui eft la caufe pourquoy
**p>tx. iisiccuifcntfortmal. Auflfiontlachairfaleeen grand vfage: &c
quand elle a prins fel,ils la pendent au fec,& k&en t. de la-poudre
de Cumin par deflîis. Ceux qui ont efcrirquelcs Turcs faifoyenc
chair fei* defeicher la chair pour la mettreen poudre , & en vfer en temps
chee enTur* de guerre , femblent lauoif mal entendu : car nous eftans enquis
îme* ^'ileftoitvray^uons trouué le contraire, & nauons oncqenten-
— du qu'en Grec^n en Turquie,ne Arabie, telle manière de feicher
lachaitfuften vfage, pour en faire poudre. La chair entrelardée
de greffe^ant de bœufs que moutons , y eft taillée en lefchcs fort
chair àma* eblices &. tenues yfr, quelque peu falees : puis feichee. Telle chair
gererm. eu: grandement eftimee , tant en paix comme en guerre : laquelle
ils mangent crue en allant par chemin auec des oignons. Il eft
bien vray qu en Crète & Chio les payfans ont de cou ftume fei-
cher vnlieure tout entier,ou vn Bouceftain,ou mouto en pièces:,
niais eft premièrement quelque peu faîee,puis eftendue auec des
cfeiiflcs , & puis mife feicher dedens le four. Souuentesfois
nousfcmmes trouuez en plufleurs maifons des payfans parles
montagnes de Crète, ou y auoit àss Boucs eftains tous entiers
defeichez en cefte forte ,, ô£ auflî des Cheureaux & agneaux:
Mme* m$\sxt\ vfage neft pas en Turquie: caries Grecs font cela au
•FMm' temps de Carefme, quand ils ont tué quelque Heure ou Che-
ure iauuagc , voulans la garder pour après Pafqucs : car ils
rfont point l'vfàge de fàler la chair en falouers , non plus>quc
g&r toute Turquie.
OBSERVEES FAR >. . BE'LO». 3&7
Voyage par dejfus le montTmrus. Châtre CIX.
, E s Turcs font plufieursapprefts à manger fur lèche-
J ruin^ant en allant par pays comme a ia guerre :" encre
! lefqueîs ont vne manière de faucifïès en vfàge qu'on
^^^ _J appelle-en vulgaire Grec , Stopides. EMes font faites stofuUs.'
aueedes noix cnfïïees*par quartiers de la longueur d'vne faucifie, Sau"Ps à*
puis trempée dedas du vin cuid tout chaud, à la manière de ceux ym cm'
quifonc lachandelle. Il les faut cou urir auec du mouft petit à pe-
tit,: & non pas tout à vn coup Iuy baillent conuerturc, maispar
pluûcms fois.Les autres y mettent de la farine par defTss,à £n de
l'efpoifïirpluftoft. Lon en peut auffi enfiler de mefmeauec des
figues, amandes,auelaincs,& autres fruids durs : &: ainfi engrof-
iîes auec le vin cuid , en font vne longue chofe rcflembîant à vnc
andouilîe.. Telle manière de fâucifles font communes en ce pays
Ià,quieft vnèon manger pour ges qui vontpar chemin. Lon fait 7^7 j*^
-destapizen Adena,Jmaisla plus grande partie font faits à force dena^
de feu,à la manière des chappeaux & feutres : auffi font ce propre-
ment feutres faits en manière de tapiz , defquels les Turcs Ce fer-
uent à fe coucher defTus allans par chemin 4 car ils font légers &: .
mois. Ceux quiontàpafTerlemontTaurus , font leur prouiuon
à Adcna pour trois iours,auant que partir : car d'Àdena à Hera-
rlee il y a trois iournees par pays fterile. Les montures couftent
cinquante mcidins,qui eft le pris d'vn duça^&dixmcidins. Les sonnets
liomes de ce pays là portet leurs bonets fèmblables à vne c)izvl£- pointus.
fèd'HippocraSjfçauoireftquelebout le plus pointu leur pend
furl'efpauïe : & pourec qu'ils font iaits de feutre^on s en peut fa-
cilement feruir à pafTer delà gclec. Il eft bien vray que les Turcs
.dercputationq.ui habitent es villes & villages, comme auffi les Tl^riAns
xiches portent turbans blancs , mais les pauu res pay fans vfènt de
tels bonnets quauonsdid. Ceftc manière de bonnets nous du-
rcrét depuis Halep iufques à Adcna : mais à Adena veifmcs<fau-
tres qui eftoyent repliezd autre façoXcs habitans des prouinces
sVntrccognoifTent à telles merqucs,comeaufli font aux habits,
ZZ iiij
#$■
SECOND LIVRE DES SÎKGVLA.
Voyage d'~*4denaf>0krpajjer k mont Tmyus. Chapitre ex .
Artans d'Adena, allions entre Occidct & Septentrio.
La campagne nous dura iufques à midy: puis comme-
çafmesà^monterîemont Taurus. Nous campafmes
& domiiimeseii-I'endroîâ: ou la nuiefc nous furprint,
Portrai£i du Cèdre*
Ztôères dw
rwt, lamps.
Geneuners
moteurs.
èc pource que le teps
efboit ferein 9 ÔC qu'il
faifoit froid , cotipaf-
mes plufieurs petits
Platanes, A ndrachnes,
Nerions , Arbou fiers»
& feifmes bon feu d va
Carroubier ièc.Le len-
demain long temps a-
uant iour nous com-
mençafmes à monter
la montagne fort diffi-
cile. A la fummité de
laqile trouuafmes des
Geneuriers maieurs,
qui croifTent hauts co-
rne Cyprès 3 dont la fe-
mence cft douce , &:
grofle come vne noix
refTemblat quafi à vne
galle. Leshabitans du
pays les mangent, cho-
ie quauons apperceu*
par les noyaux qual-
lionsamatfans çà& là
le long du chemin, qui
auoyent efté iettez de
ceux qui en auoyent
mangez le defïus. Les
noyaux font il durs
qu'on ne les peut rom-
pre
OBSERVEES F Alt F» BELOÏ*. ,$6$
prcfinon à grands coups de marteau, longs & gros comme vnc
petite oliue. Qcft l'arbre le plus finguîicr après le Cèdre, qui foie
fur le mont Taurus,auffi eft il tou-fiours verd. L'on verra fon naif
portraict .&: defeription au liurc quauons intitulé de uirhùtihm
perpétua j ronde vtventibm , c'eft a dire des arbres de perpétuelle ver-
dure. Nous trouuions auffi des arbres de Styrax , de Pignets ou styrax*
Piçées.Nous montafmes la montagne en demie iournee:& quad
npusfufmesauhaur,nouslarTouuafrncscouucrtcdeneige.Àu^
iiyobfèruafmes vne forte de Sauinier, qui eft celle efpeceque^'*^
Diofcoridc a deferite: Ou bien eft Thuya de Theophraftc êc ^ n
Homère* Et pourec qu*auions veu les années précédentes vn ax- ^L^
bte à Fontainebleau au iardin du Royvqn an noramoit arbre de
vie, qui fufgpporté du pays de Canadas, au temps du feu Roy
François presser de ce nom : obferuafmes diligemment îcdiâ
Sauinier £ux le mont t & ayans deferit l'vn & l'autre par le menu,
les tcouuafmcs fort fcmblables,mais différents en queîqucsmct-
ques, quexpofèrorisenefcriuantles plantes en particulier. Les NAturc^
Platanes croifïent fur ce mont encor plus grands qu'en Àntio- p/^^^*^
chc , ôc font de telle nature, qu'ils defpouillcnt leurs efcorccscn
hyuer,en ce contraires à l'arbre d'Àndrachne ; car Andrachne fe
defpourlle de fon efeorec] rouge au plus grarid chaud de Fefté, z&tmdr
pour ic rcueftir d'vnc cendrée, qui au commencemec eft de pafle ï^ndt^h*
couleur. Mais le Platane fe defpotiille de fon efeorce plombée **"
J'hyuer,& (èmueen vnegrife» Nousy trouuafmes des hauts Ce-
drçSjdc niefine ceux du mont Liban, defqucls pluûeurs de la co-
pagnic,ànoftrepcrfuafion fc garnirent de {es pommes , qui {ont
quafifcmblabîesauxpommesde Sapin y mais-:font plusgroflesv
&: iifîces y & regardent contre le cicL Maintenant ne voulons-
confommertempsàdefcrire ceft arbre, mais anonsbicnvoulii
en bailler le portrait^ >. pour r&onftrcr - Nous cheminafmcs,
long temps furie dos de celle montapie, mais nous nefHons,
encor fur le plus haut eoupet : car nous anions d'autres
montagnes, tantàdcxrrcquafcncftrc. Et otpan<lnous rufmcs*
venuz iufques au defïbûs d'vn chafteau , quieft aifisià faau t\ àc£^
fiisvnroc,,iiûus.çorrm^ Jl côoiç
défia tard, lors que trQuuafmes vn OirLafchafa fur le che-
min ^ qui e(t aux. racines dudid. haut mont. Il y a fi grandes
'37b SÎCOND LIVRE' ?>ES
ToYtYâi&duSxpin.
^Ahh
Melefe.
Zanx.
Sapinus."
Biùffe.
i/àeuo.
PJnaftsr.
#&^ **'>
SINGVL A.
quarité de Cèdres fur
le faifte du mont , que
nous ne veoyons quaft
autres arbres plus fré-
quents , & toutesfois
il n'y croifTnuls Sa-
pins-, que les ;Latins
nommer Abieres , qui
toutesfois reflemblenc
les Cèdres, tellement
qucdirêôns le Cèdre,
ou bien le Sapin ,efpe-
ce de Ceskè-. Parquoy
en audtfè'bien voulu
bailler le portraid fuy-
uant le Ccdrc. Àuffi
n'y croift point de Me-
lefe, q«c les Latins no-
ment Larkcs: ncSapi-
nus , que les François
nomment Suif&s', ne
Aleuo, autrement no-
mez Pinaftri , duquel
Aieuo il-y en a auffi vn
arbre à Fotainebleati,
qui fut pareilleméc ap-
porté âc Canada , &:
prefentéau Roy Fran-
çois , auec l'arbre de
vie. -
"Des bain o-s chauds naturels ^ui font fur le mont Taurus : & delà ville
àcHeraclee.
Chap.
E ion; no9 arriuafmes au Carbâ'fchara près (f vn baing
deau naturellement chaude. Ce baing -eft tout mure
de brique , & eft la muraille Semblable à celles qui
font aux baings faîez ioignant les ruines de iroyc.
,.O^SERV-£E;$- FAR, P. BELONr "57!
L ean en fent vn peu le foulphrc , & ne fait point ccngcîcr Tes cx-
cr-cmen* en pierrçs , çprmnc cç.uxde. Padqueou de Source ; car J
Boafçulcnie^tjçaii.dçs.hamgs^ fo-y quinefè;. .
converti ft en, pierre, j^ais an^l'cau froide ; comme sSjÇeUç qui
&>rt;d-vne fontame à,Mcdane presr de Noiû à fix lieues près àç -
paris,en la terre de Mon ficur Iean Brinon feigneur de Villaines:
& auprès de CUircriiont- eri^ Auuçrgr>e , ou çû yn pont de pierre
que leeç^irs de<l!eau y, a fait; te-lendcmain nous'pourfuyuifrocs-
lcruifleauqui defeenden la pîaineydcuallans contre bas: Mais a-
près qu'eufmes regaigné le deflus d'vne prochaine montagne^nc
trouuaimcs plus d'arbres. Et ne chemin afmes gueres après auoir }u\uiiae
laifle.le Car.bafçhara, que ne trouuamons des terres labourables ILw..
enclpfcs de hayes,|aites d'vn arbr-e^qucÇolumelienoirunc Iuiu- hùuh'm :A
bicr blaCjlequcl porte vn fruicr femblable au luiubier rouge , ex- ro*gr. -
cepré la couleur A qu'ils vendent parles marchez des villes. Les
Grecs Je nômét en vulgaire Ziziphia^'vn nom corrompu de lu-
iubier. Quand nous cufmes cheminé iufqucs à Midy 3 cftans fur
le mont, veoyons bien à cler Heraclee de moult loing , qui efi u%
tuceiàbasen la plaine,. Touûouts defeendions contre val , $c
veoyons plufiçurs villages utuez le long d'vne montagne , qui les
defend des vents de Bize,& du X'taeikal.Noustrpuuions gras âe
quantité d'Àbimthe &: d'Ambrofia., La plaine d'Heracïée eit,
moult fertile & culriuce pârtou^auffi y a planeurs villages:car les-
ruifleauxqui dcfçcndct des motagnes^rroufent les terres des iar-
dins & vergers, ou ils culnuen't toutes fortes defiuitticrs , corne ^alm.
Pefchers^ÇomiailIei'SjPrimierSjPommiers^Poirk^ATn^
Grenardiers3Oragiersî&: autres tels arbres de iardin.Il y a vn fort ™ UpLint-
grâd-villagepres d'Heracîec,qui n*cft habité q. de chrefties Grecs, «•#*'"&«■
qui parlans leur langage vulgaire > cft pur GrecÀiiiB y a vn autre
<T Arméniens Chrcfiiens : tous deux .font fore diligens à cuîtiuer
les iardinagesxar l'on voit lcursvigncs fort bié labourées^ pouf *
auoir i'eau.-à.comracndcnicnc, ils onz-de toutes fortes d'herbes en
kurs iardins, telles que nous au 5s es noitres.Nous arriuafmcs biç Seaclee
tard en la ville d'Herac! ce ,. qui cfl la première, ville au .deçà du <&«•»*
mÔtTaurus,&. auiîi eft clic iïeuee au pied du moc,ioignai feszaci- Tai?Ui\ ..
nesX)r faut il fçauoir qu'il.y apluûeuss Hericiecs:iio9 auosja par p^ -^ _. . .
léd'vnequicftau riuageduProporidCjVoiiineàllodollo.Erpour Vj^V "
sequ auas die qRodoilo auoitnaPcrinthus,auons dit en eclieu ^erintlus^.
A A a iju
yjl SECOND LIVRE DES SIKGVIA.
que quelques autheurs modernes debatenc qu'Heracléc du Pro-
pontide doit cftrc nommée Perinthuscmais quant à nous,ja nous
■ y , fbmmcscxcufcz qucçacftc lemoindredc noftre foucy que de
ïropontiie ren<3rc ^s nom« anciens aux villes qui 1 es on t changez à des rao-
* dernes. Parquoy Heraclce duPropontide,foit Perinthus , ou
Rodofto,nous en laiffons l'examen à qui le voudra entrcprédrce
Nousy crotmafmes déroutes fortes de viurcs,pain,vin,& chair.
L'on nous aanTcuré que la plaine d'Heraclcc nourri {Toit des ha-
rats de plus de quatre mille cheuaux par an, Se desquels Ion en ci-
re plus de fix cens de feruice toutes les années. Les cheuaux fonc
fort eftimez en Turquie , venans de ce pays là , & font nommez
<&eu4ttx cheuaux Caramans. Les habicans ayans î arbrifleau de Sumach
Zardmans. à commaRdcment es montagnes voifincs , font pronifion de
swmch fruicl: , duquel crouuaftnes au marché d'Heraclee à grands pleins
Ûlcs, dont ils donnent gouft d'aigreur à leurs mangeailles, &y
adiouftent des aulx batusauec du Tel , &en faupoudrent la chair
tant cuicfce^boul lie, queroftic, qui la rend aigre & de bonne fa-
«eue. Nous arreftafmcs à Heraclce pour rccouurer des montu-
res^ y fufmes tout le iourcnfuyuaat. Cefte campagne d'Hera-
clee eft longue de deux iournees , qui n eu habitée ilnon en celle
partie ou il y a abondance d'eau.
Voyage £Heraclée k Covncx & des Cheures qui portent iajtneîame
dcCkamelot. Chapitre c x n.
i Yatistrotiué montures pour aller d'Heraclee a Co-
\ gne,nommeccn Latin Jcomum.no^s commença (mes
\ à faire chemin. Les montures couftent vn ducat Se
i demy pour pièce. La plaine cft arroufee par canaux
comme à Damas. Regardans vers le pied des montagnes,
veoyonsplufieurs villages moult cflongnez l'vn de l'autre. L her-
be que les Grecs nommèrent Abfinthium marinum, y-eft abon-
dante, non qu elle croiffe en ceft. endroict auprès de la mer ( car
Zdpntlm elle cft à plus de quatre iournees) mais ceft que noz anceftres
marmum. jUy jmpp{CTcnt ce nom , encor quelle naiffe es lieux Méditerra-
née me» nces LaCarnpagnc blanchift de Sauge menue, Se de Poiiû.Nous
paflàfmcs trois ponts de bois : Car les canaux & ruiûeaux y fonc
raoult fréquents. Iis'cfteua vn vencauftral impétueux Se froid,
.O 3 S EïLY E E S » A R P. B EXOV» 575 ,
<îuifi"otis^ouflaoiclcfablcauvi%caucc grande violence. Noos
pafTafmes ioignaiw vncmoatagncroBdCjqui-fetnbloit cftre faite
par artifice humaine çairelleeft efïeuee & entoûnice de foflez
pleins d'eau. Continuant ^ftre.chèrnwi ettcrafrûevettiTapaysi
fort pierreux , qui eft rcl que le paysou eft fitué Fontainebleau:
reftequ'il n'y a nuls arbres. Nous vinfines loger à vn Carbafchara
delfus legrand chemin ioignant vne fontaine , dont nous deflo-
gcafmcs auantiou*,<&:eDttafmes en kfgescapagnesiahs arbres.
Cheminans par la campagne veoy ons les montagnes de cofté &s
d'autre bien loing de nous , ou il necroift nuls arbres finonàla
|ûmniite,au bas defqtieîles nous trotiuions feulement de l'Aluy- iydi$nefî*
ne flifditl:c,appcîiee Seriphium niarimim,oT-derautre Ponrique, t'^ue.
qui nedirîere enrien à la noftrede iardt in^hprs misqu elle eft plus \Ahnede
blanche. Les Cheures de ce pays portent la laine fideliee , qu'on tArÇ^ ^ u
îa iugeroit eftre plus fine quefbye:aufll furpaffeelle la neige en ^^^
blancheu r. Ces Cheures cy ne font point plus grandes que noz ^^
Moutons , & neics tond Ion comme lesOuailîes , mais on leur
arrache le poil :La chair eneft autant délicate qucdeMouton^
ne fent point la fauuaginc. Tous les plus fins Chamclotzondez, cha.mcl<*\
ou fanspndes,de beauté plus excellente , font faits de la laine de wk\
telles Cheeres,defquelles ou femblables wîElian authcur-Grce , à
noftrë aduis,a fait mention, Car il dit que les Cheures de la met
Cafpie fonttrcfbknches, & fans grandes cornes : defquellcs le
poil eft fi mol , qu'il peut eftre compare ai^x fines laines Miîefié-
ncs , qui font laines les plus délicates &: fines qu'on %ache trou-
ocr.Mais Pline à la dtr&rcncc de celles là , en cfcrit d'autre (orte.
Tonâentur Caf>ne(âit-i î tyuodmagnis v'dhsftmtm magna fa.m Pkryg^ .
wnâe Oiiaafieri filent. Std quQdpmmtm ea êotjfura m Ciltao, fit tnfli-
tuta.nommd Cilicoâ adiedj]e écm*J\ appert donc que les Cheures
font de diuerfes fortes. Cciiesdu Chatneiot font priuees>& dif-
férentes aux noftrcs : car elles font de petite corpulence , & ont
petites cornes. Leur poil eftpios blanc quelancigc^iTez lôguct,
mais plus délié qu vn cheueu» Nous n'auiôs autre herbe plus fre-
quête que celle d'Ambrofia , fi aromatique que nous eftjons en- ^^^fi^
teftez ne plus ne moins que fi enflions efté en vne caue plaine de
vin nouueaiuLes habitans la cueillent, & sen feruentà fechauf- ^€rmùur ^
fer, d'autant qtfilz n'ont point d'autre bois, Aufll feichent ilz les SreuaitCm
bouiès des VacheSjCÔmeilz font a i'Armour de Bretagne. Cefte ô
AAa iij
37^ s s coaur rx Lr k s au e s r: s ik.CuY t &,
capagne dequoy parlons , eft fore defcr.ee : car il n'y â ne ruifleaux:
nefontames. Nous logçafmes d'affez bonne heure en y n grand
village nom me Saïamsi i;, & -trouuafôa-es: çpi'ïlz a^ip'y ent des ,ba~
lai&djol'heike'dlAw^pfi^ pP>gnee,lii- .
uonsmonftréen France pacgrandeifingu'l ad té :.ear il n'en.croift"
pointde fauuage en Europe,, au moins qu'ayons peu fçauoir.
, : , -. : ■ . l&èl&ïwilk £l:çQWttnè> . -, \ . \ . Çbapjtrç ç, x M U, -..■_..
E iour d'après partifmes. dTfmîl , Se continuafmes
" la campagne^ui nous dura iufques à Cogne,&: lo—
( geafrjocs dedans vn grand Carbafchara.3imurai}-
f Iç de Cogne, eifcfaicejde pluiîeurs forces. de pierres,
ST52^ comme anfE, font celles. de Conllantinople. Ileft
a>gne. aifé à voir*que les murailles de Cogne (ont modernes : car Ion y
voir les pierres de marbre des->Eglifes , çu ion voir encore les epi-
taphes en lettres Gœques^qui montrent, qu'elle a autrefois efte;
poiredec par lçs Grecs Cbreftiens. ;Çar les croix &c les veftiges-
qu'on y voie, ledemonftrenteuidemmcnrJLe circuit des-muraiU
les cft en rondeur : mais les cours font o^iarrees , rareSj&ç peu fre-
îmmm.- quenrçs. La ville deCpgnç-anciennement nommée IconiCiii çl^
gueres loingdesbauçes.inontagnes , déficelles defeendepç plur
fieursFuiâèauxqiii paiîèncen la ville. La partie de la ville qui c(t
tournée àJacampagne^regardc le îeuanr. Il y a vn Hercules rail-
lé en marbreàcelle porte de la ville > qui eft encre l'Orient Se mi-
dy.au dehors.de 1^ muraille, Joignant vne^our^mais il na main-
tenanç_poinc-detçfl;e : çarlesTurçs4a~luy abbarirentn'à pas long
tcmps.Ii y a hui'd portes en Cogne comme en Halep.Elle eft ha-
bkccÀe Grecs,Turcs, Arabcs>& Armenies.Lcs vignes y font fo '-.
gneufèment cukiuees lauillnous y trouuafmes de bon vin y que
ksluifs nous vendirent,. Les plus beaux bailimens de Cognex
font Mpfquces , les baings , & lcsCarbafcharas, Lon ny brufle
%(Àsfï'6n. point d'autre bois ûnon que du grand Geneurier, & de la tecon-
hmji* a de efpece de Sauinier v& de deux petis Cèdres , & du ferment de
c%/ie- : Ledon : Lefquelz quand voulufmes difçerner pour les cognoi-
frre,ni}lle diligence ne nous a peu fcruiràles fpecirèerrcar iizfonc
de mefme couleur, de mefme odeur 6c faueur. Toiisfix ne font-.
gas cpniiejcs d'efeptee dure comme les autres bois xmais de ban-
des langues ;)esvncs fur les autres , comme îa vigne: & ônt.Tcs-
ccetirs'-dta'dct^ns rouges ;, entoumez -d7vne ''c-ou-ueftase* blâriehé'
oomïaéïe Gai-ré ul^êr^Së ïl-ft&lesituflaris ^^^^trcdnîâ'fmes^ffe-^
renchéri îkfumeë n^â^Harfeôn --qui deY6tf's*e'ftvhï tomme :dë
Tille, &legier comme de Saule. Tous, excepte le Ledon , portée
refîné plus dure qucleTcrebinthe. Leurs bais ont mcfme durté,-
&frailkùre à la^co^n-ce* Tous meur ifTen t leurs fruietSre n mefeic
tèfi^d'hy^e^&WBEverdscncoutés^aiibns* :;* : - '
pes Orfeures de Turquie. Chapitre c x 1 1 1 1. •
|t Es Tutcs^forïe-quafi-aiîzFJ grande dcfpen&cn îcur
Ç "eikîroiébèTï l'o'rfeuéfie^uc «ou-sr&'ecrqtMlz fonry
cft-defbrt bonne matière. Hz aiment à porter des
anneaux , &; veulent que leurs eoufteatix foyenc
__ J:bién façonnez :& -les perdent :a'vne chaîne dar- ,
géht , àôcWgâi ne éft eriri chiedequeîqttes belles garni-tûrès d'oc ...
ou d'argent; Ocft vne couftu me commune tant aux Turcs cora- - .
meaux Grecs de porter les coufteaux pendansàla ceinture :-&
font communément forgez en Hongric^ayansIc-maHche moult z>e**t &%>*
îongrmais quand ks merciers de T-urquicîes erttt:âchefez,lors n*z- ^*- ' .
Jes-baillent-aux ouuricrs powr k-ur mettre vn- bout-, qui éfteo-m- Ucarnt: .
munément de dent de Rohard,dont y eh a de deux fortes. L'vne ^teST
eft droi&cment blanche compacte, reiTemblantà la Licorne : Se TortiU J'Ine
cft iî dure quelacier a pejney peut mëfcdrc,f iï iveè-bien trempé, du.
L'autre dent de Rohard eft courbes comme celle dvn Sanglier:
qu'eulfibns creu cftre denc d'Hippopotame , n'euft eftcTqa aiîÔs
veu des Hippopotames en vie,q^i n en auoyent pas de tciles.En-
cor les emmanchent ilz defcaille de Tortue d'Indic ? qui font ,. ,
rranfparcntes dérouleur d'or-ccy dont fcmmanche<irod,vri.cou»-T^ ^
fteau^oufte^enuiroirv-n décaties ofe&ures f&âz accropis à terre
quand ilz befongnet, Àuffiëû kur fourneau au milieu de la bou-
tiqueencontre terre fansekeminee: &: Ce feruent d'vn feul fouf-
fkt;rondyq;u'ilz-haufent-&:- ba^ïèflt quandilz veuknt foumer.
N^us^GUrmafmcs (ki*x4ours àC'Qgné- pbôî ^-ccbuurer montu-
res';devoîckîres ,<3£pô'i«r »oû*four-mr de^iurcs:,&au4riquecc-
ftoit la fefte de Noël . A près que nous fuîmes repoiez , n ou s par-
tifmes aptes-dïmer > ^allafra-e-s-vers la montagne qiie nous auiôs
-**'■'- ^':--l AAa iiij
pé SECONI> LIVfcE DES S-INPGVLA.
à pafTer. Il comnionça à.neiger , &; couurir la tcrrc:qui fut caufc
de faire çi^axcçnoz guides hors.du chemin.. Quandnous .fufmc*
au haut, nouscheminafmes. ^pagjetapsjKÎr fo*e$sdç Piçec : &
ayans.tr ouué vn village,il nous conuint loger dedans vn Çarba£
chara. Le iour d après nous fût difficile^ caufe du têps,aufTi qu'il
fàilloit tantoft monter^ tantoft defcendrc.Ce pays cft fort peu-
plé,& y a grandcquantkc dcydlages* Et encore .que fuflîons en>
Qxigih. ^yucr nous trouuions de FOxygala], qui eft vjïdecpmmuneaux
Turcs,& principalement en temps d'efté.ïlzlc tiennent préparé
dedans des grandes. efeuel les, qu'ilz vendent es boutiques , def»
quelles le taux cft faitvn afprc la pièce ,. & effc fuffifantàfaouler
quatre : Turcs •.Nous se cheminafnaes guercs ce iour^uç-naus ne,
fumons horçdes mon tagnes:&: cntrafmes en lacampagn^^e ï*a-
phyiie,qui eft celle région qui s'appelle Caramanic-,. laquelle co-
Zamçfyke* pren^fouz fov Cilicie & Pamphylic Elle a fept Sangiacats dcC-
€aramAw? & charge. Nous chçmipafmes entre, petits arides de tre£
sm S4ncrû* fecaux.-fruifts ^ laju^as la vûlc .et Apgouri à niain dextrë^, qui an-»
cAtsm£*ms ciennement eftoitnommee Encyra.E.!le eftpour leiourd'huy la.
fhyUe, ville plus renom mee de tout ce pays là , pour le grand transe des.
JîngùurK Qhamelotz.Çar il n'y a ville oujon en face finon là: d'autant <jue
çnçyu. v ..^C^çuresd^nj: eftprmie î&ÀnçJaine à les faireane fe trauucnt
T'ch* <pcnçes contrées de Pampiiûie.. Continuais noftte chemin
m^ vinfmcs, loger en Àchara..
.. .. , :v:- Vel*.vttte£"4cb<irfo Chapitre cxv.
Es villes de Turquie ne font pas communément mu-
rées, non plus qu'eft Achara , qui eft ville en l'Armé-
nie minçur.Nous y aupns yeu des pierres infçrites de
_ lettres Latine? yqui anciennement feruoyent de fe-
pulchrçSjQiais maintenant elles feruçnrdçvaiucaux à tenir 1 eau
defTouz les fontaines pour abbrcuuer les Çbcuaux des paflans^
Nouslogcafmcsau Carbafchara.. Celle ville eft près d'y n grand
eftagjarge & fpaciçux^lequcl nous coffcoyafmes lpg téps:auquçl
on pçCçkp$\ ufieujrs fortes de ppigons^ ent ce a# trçs a Tanches^
£roctats><Carpes&; Brèmes. Nous auons patcy deuant compté
lecheminpariournec, d'autant que les Turcs ne comptent par
ajjllcsqpmiuccn Italie, pçgar lieu.es comme en. France. Nous,
'...*." gârtifmes
OBSERVEES PAR P. BELOKV yjj
pahifmes et Achara, & continuafmes la fufdi&e campagne , en
laquelle ttouuionsdes villages fitusz îe long des collines , tan c au
eoûe dextre que feneftre. Nous dinafmcs en vn petit village,ou
noustrotiuafmesaûez deviures. Le foir nous vinfœes loger en c-4m^^
vne autre ville nommée Carachara, qui cft à dire Chafteau noir,
ou mifmes fin à ce voyage pour vn temps.Et pource que demeu-
jrafmcs là y&r paf&frnes i'hyuer,&: bonne partie du printemps cn-
fuyuant , nous pourmenant par les lieux circonuoiûns ,. euf-
mes loifîr d'obferuer plufîeurs choies , touchant les moeurs Se fa-
çon de viure des Turcs. Tout homme qui fçait quelque meftier
eft toufiours mieux recueilîy entre les Turcs, quvn autre qui
n'en a point. Ceft la raifbn pourquoy les cfclaues que les Turcs
prennent en guerre fe deliurent de feruitude , les vns pluftoil
que les autres.Car ceux qui fçauent mefticr ont incontinent gai-
gn é l'argent de leur rançon tau contraire des autres qui n en f ça.-
uent point, & qui font conçràin&s d'exercer ouurages mécani-
ques : car ceux chez lefquelz Hz ont à demeurer, les font charuer
ou garder leurs trouppeaux.Les Geniflaires mefmes pour la plus
part, fçauent ouurer de quelque choie: car cftans es fcrailz on
leurfaitapprendrcquclquebefongneen ieuneffe. Somme qu'e-
flans les mcfliers nourriffons des perfbnncs de férue condition,
il ne fèrt de rien en ce pays là de s'allouer effare gentil-homme. Il
y en a plufîeurs qui ne vendent que du pain1 chaud pour manger
auec le mouft.Mais pource qu'il y a difEcuîtcen la façon de leurs
fours., dirons.de quelle manière elleeft. Ccft , qu'ilz ont de telz
grads vafes déterre que font ceux cfquclz nousraifons les buées,
que nous nommons cuuiers de terre tlefquelz ilz enterrent en la
boutique iufques à demy. Et eitant le cuuier percé au fond, ilz
laiflent vn conduid. rond à cofté en terre-, tpi va refpondkcau
fbnddu cuuier. Et le cuuier eftant couché, quafî de trauers , ê£
ayant le conduitfà cofté du fond, fait que le bois ou charbon
qu'on met au fond, s enflamme facilement, &efchauife le vafë:
de toutes parts. Le boulanger qui a fà paftelcuee , faifant des ga-
lettes tenues , les metdefTusvne cîiiïè commele dos d'vn panier,.
Jarge comme vn bonnet: lequel tenant fa main .dedans la cliûe,
applique la pafte à la voûte du cuuier qui eâ chaude >.&:là la ga-
lette demeure pendue , & fecuiâ: tout àibn aifè^car lonuriery
cri mettant vne pour cuire ^eri ofte vnc autre defîa cuicbc~y£iL
37$ Yl'CONB LIVRE DES SlHGVLâ.
ayant pîuûcurs qui fc tiennent ainfi pendues aux voûtes du vaiè»
Et pour les ©fter ilavne petite fourchette en manière de hauec
pour les acrocher delà main gauche, à fin que tenant vne longue
efpatuîecnfadextrc5iifacc lafeher prinfeàîa galette, & la face
tomber fur Ton hauct. ÀtfflTi eft neceûaireque louurier n'ait la
barbe trop longue:car elle feroit fubiede à (e griller à la flamme,
qui fait cuire lepain. Les habitans enuoyent acheter de cela , &:
le mandent chaudement auec le mouft, qui leur eft au lieu de gra-
de friandife. Cecy eft en plus grand vfage l'hyuer qiren temps
d'efte 5 auquel Ion trouue des fruittz &: autres hardes à manger.
Maispource que ferons apparoiftre cecy plusàplainautiersîi-
ure par cy aprcs,nousen tairons pour le prefent.Toutefois auant
que de pourfuiure le récit de telle matière , il nous a femblé con-
venable mettre vn difeours àcs loixque donna Mahomet à Tes
fuppoftz,quafî en manière de parente{c,pour faire mieux enten-
dre que la Barbarie & beftifede ce faux prophète a feduit tout ce
pauure peuple ignorant fà Ioy,qui eft vn vray fonge phantafti-
que.Parquoy mettans un à ce fécond liure^ômencerons le tiers
parles plus cuidentes refueries, dequoy s eft fouuenu Mahomet.
fin du fécond Hure.
ÂV LECTEVU.
sss
^g Vts au Huons trouue noumiïe occajion en deferiuant ce tiers
+liure>de fournir traiBer les ftngularite^fûr la manière de vi-
\ ure des ^ens en Turquie , félon que les y auons obferuees eftans
- „__j refidens en ^i 'fie au jm cœur d'iceUe : Nous a femblé bon auat
toute autre cho ferres auoir parlé & fait particulier difeours des mœurs
de diuerfes nations 3 par ou amns chemine , toucher quelque petit mot des
chofcsfmtaftiques que le faux prophète Mahomet leur a laijfé en fon ^4l-
tvranJSoit que noyons mis le daBedes tournées \mo'vs& années enceft œu-
ure, comme plufiews autres qui ont deferit leurs voyages joutesfois quteon-
quesdefirera UfçauoirsuueiUeUre la préface du premier liure3& là le pour-
ra voir bienaulong. Vefia auons fait apparoiftre par gens fufjifans d'au-
mïté & de fçAuoir,queri auons faute detefmoins aappromernozvoya-
ges^dont eft cy faite mentiw*. ,.
r?9
LE TIERS LIVRE DE
;'■ PLVSIEVRS SINGVLÂÏUTEZ ET
CHOSES MEMORABLES O-BSEB.-
uecs en diuers pays eûranges..
Par Pierre Retondu Mans.
Particulier difeoum touchant le commencement de ïorîywzdep
lois des Tupcs* Chapitre: i.
R come auons défia did-fur la ûndu feeo-nd liure;,
c eft gfâc? refacrie de lire ce que Mahomet a eferic:
ésliuresdefor*Alcoran:parquoyfçachas qu'auSs-
eu loifir d'obferuer beaucoup de cko fes , fur la fa-
çon &: manière de viure des Turcs x &rprincipale-
meHceftansdeiTeioiKe&Paphlagonie,ou ckmeurafmes-quelquc p,,^^.
efpaccdeceps^nousaferablebôiTiectrcvnpentdircGursdeMa- "^^
Cornet à part , tel pomblc que personne n'a, encornais en noftrc
Iangue,fans totitesfois que perfonne s'en trouuea^ctinemêt fea-
àâlï£é>a fin qu'il nous Toit plus facile, que par cy après puilH5s fai-
re.eatsndre la-raifon pourquoy les Mahomctiiies fe maintiennes
en telle manière de viure, veu mefmemenc que c'eft choie conue-
naut à la matière que prétendons traiâxr. 1 n'y a pas îo-no- temps
que Mahomet nafquit en vne ville de l'Arabie heureufe , nômee '£'??'
)a Meque^qu interprétons .Pccra,ou il comcça4a4câc des Turcs, coLumt U
êcz ce qu'ô^eferit ce fut l'a d'après l'aduenemet denoftre Seigneur Su de m**.
fixeens & vingt,&: mourut Tan ûx cens quatre vingts trois.Ess homet.
Turcs ont vn liurenomc Afear}qui contient route la;vic de Ma-
àometJequeî ih ticnnenr&: obferuent .11 efteomprins leans tout
ce qu'il feitdepuis &naiuance iufquesà fa mort, &: .que ion père ***&*&**
auoit nom Abdola Motalip , & famete Iminav-tousdeux idolà- homct'
âres.Il eferit que ledid: Abdola,mx>ticuE auat que Mahomet naf- y^^'
«|uifh& faaiicrcImin&mQutut deux ans aptes qu'elle i eue enfan- °'^~
MEij,
$0 TIEÎLS LIVRE DES SÏNCVLA^
téi&fpar ce poind demeura orphelin de perc & de mcre.Àuffi ef-
cric que-Mahomet eft iflli de la lignée d'Ifmael , né de Abraham,
qui eu t deux filz , î'vn de Sara,nommé ïfaaCjî'autrc Ifmacl filz de
Agar : & qu'Ifmael baftit le temple de la Meque , qui eft le pre-
mier (ce dit-il) que les hommes ont édifié au monde. Aufli dit
que quand Mahomet auoit quatre ans , qu'il alloit pefchcr auec
d'autres petits garçons : & îuy eftant feulet en vn champ , l'ange
Gabriel veftu d'ornemens blancs comme neige , vintà îuy en fi-
gure humaine, qui le printpar la main , le tirant à part , & l'ayant
mené derrière vne colline , Iuy ouurit la poidrinc d'vn rafouer
trenchant,&: îuy tira lécœur,dont il ofta vne goufte noire, en la-
quelle les Turcs dien t que les diables tentent les hommes,& que
c'eft chofe commune à tout homme d'en auoir : &: qu'après l'an-
ge îuy remiftle cœur en Ton lieu, & Iuy nettoya la poi&rine , à fin
qu'il ne peu (Harnais plus eftrc tenté du diable en aucune faifon.
, - Voila la narration que le liure d'Afear aeferit touchant le pre-
^(ïUeMd* mier commencement de Mahomet. Le mefme Afear eferit que
bometï " Mahomet eftant en laage de quinze ans, faifoit fouuet des voya-
ges en Perfè,au Caire, & en Syrie,auec vn riche marchand,nom-
mé Gadifa , qui eftoit mary de fa coufine germaine , laquelle il
print en mariage quandle iufdicl Gadifa fut mort,dont il engen-
dra quatre enfans,fçauoir eft, trois filles & vn filz : qui fut fa pre-
mière femme. Et ayant prins le trafic du deffunâ: , fe meflade
marchandife,iufques à tant qu'il eut trente &hui& ans :& lors
fado nna à vne vie folitaire en lieu defèrt, allant tous les iours fe
cacher en vne cauerne,qui n'eftoit guère loing de la Meque,ou il
demeuroit iufques à la nuicl:,&: y faifoit fi grande abftinëce , quil
fefèntoit arfoiblir. Aufli dit, qu'il en perdit l'entendement, en
forte qu'il en fut iufques à refucr, & auoir pluficurs vifions: Se cn-
tendoit quelques voix fans voir perfonne, lefquclles il racom-
ptoit toutes les nui&z à fa femme : mais elle Iuy difoit que ce
eftoient tentations diaboliques: pour laquelle chofe il entra en fi
grande frenaifie,qu 'il en cuida deuenir infenfé , tant qu'vn iour il
fut en délibération de fe précipiter du haut d'vne montagne.
Quand Mahomet commença fon Aîcoran, il feit femblant que
F AugeGabriel le deftourna de fon opïniô,difât que l'Ange eftoit
venu àluy en forme humaine , ayant des selles blanches , Iuy di-
iant: Refiouy toy Mahomet , Dieu fe recommande à toy, te fai-
OBSERVEES PAR. P. BELOtf. , $%?:
fant a fçatioir qu'il faut que tu foyes fon prophète. Tu es la plus '
parfaite de toutesfes créatures. Aufli dit que l'Ange luy monftra.
feslettres , luy difant qu'il les leuft. MaisMahomet ayant.refpo-
du qu'il ne fçauroitlire,ditquel*Ange luy répliqua; Mahomet lis
le nom de ton créateur , & lors fè difparut l'Ànge,&; s'en alla. En-
cor eferit Afear,que Mahomet retourna moult ioyeuxà la mai-
fon>& que les arbres,pierresÂ: animaux qu'il rcncontroit,luy fai-
foyent honneur, 6c en le faisant, difbyent : Mahomet , tu feras le
ménager de D ieu. Toutes iefquelles chofès il racompta à fa.fem-
mc : mais elle ne le vouloit croire , ains luy difoit que c'eftoit ten - • _
ration diabolique , dont Mahomet fut de^plaifant , iufques à ea
cftre malade. Aufli dit ledit Àfear , que lange vint lors à Mahor
met,efrant deflus fon Iict,luy apporter le fécond chapitre de l'Àl-
coran,ou il y auoitainfî eferit : Lcue toy , magnifie ton créateur,
nettoyé tes habillemensj&rayes en horreurles idoles : &queîors y*9ltres &
Mahomet appclla fa femme, luy récitât cequ'il auoit fongé: mais ^COïm*
qu'elle efti ma que ce ne fuft finon vncvifîon Se tentation pareil-
le à celles de deuant.Dôr Mahomet fut grandement courroufle,
& deuint plus malade qu'il n'auoit eux au parauatmaais il dit que
l'Ange retourna à luy à l'heure de minuid 5 luy apportant le tiers
chapitre de l'Alcoran enefcritjdontMahometretournaenfànté.
Safemmeîuy diftqu elle euftbien voulu voir F Ange: mais Maho-
met refpondit qu'il ne feroit poflible.
T>t quelle afluce vfa Mahomet au commencement, enjeduifintlepeuple
ignûrantjjiôur l'attirer a fa loy\&âe ceux qui luy
ayderent. Chapitre il.
S t a n t Mahomet en délibération d'ériger nouueîlc ^
fecte , eut aflèz bonne fortune à fon commencement:. *t^f ^
( car outre ce qu*il trouua dos Chrcfticns àlaMeque,
i qui auoyent les Hures du vftil & nouueau teftament,
Se y fçauoyent quelque chofe, aufli luy ayderent grandement à
• parfairefon Alcoran. Etluy qui auoit hanté Se pratiqué beau-
coup denations en Syrie,Iudee,<8£ Egypte,eftoitdefubtilenren-
dement.Car après qu'il auoit fait cfcrire^uelques chapitres(qu il
difoit luy auoireûx en uoyez par l'Ange Gabriel pour mettre en
fon Alcoran) il les faifoi t tranfcrirc,5c bailloit fèercttement à plu-
BBb iij
$Sa. XT'E'K S E I VR r DES SÎNG V L À.
fieursdc là Meque,à fin qu'ils les apprinfTent par cœuncanTn^ofa
. les communiquer des le commencement, finon en cachettes. Or
après qtfvnfren parent pui&mt Seigneur delà Meque nommé
Homar,& vn autre nommé Vbecar , auec plu fieurs de leurs pa-
rents eurent délibéré de ne fe tenir plus cachex, voulurent décla-
rer l'Alcoran cîypublic> pour laquelle chofegrande panie des ha-
bitans de la Meque auoyent déterminé de ruer Mahomet , finon
quilsaduifercnt que-plufieursTeflimoyent demoniacîe:-& furet
contents de le huiler en fa folie. Mais peu après ils s''a{Temblercnc
encor denouueau pour le mettre en prifon- Dot Mahomet eftac
aduerti s en fuit dés l'heure , & s'en alla en vne autre ville nômec
Aîmedme,qui cftà deux ioumecsioing delà Meque r Se perfua-
da-à ceux de (on parti qu'ilsmilTent vne poignée de cendres fur
la tefte de leurs chenaux , & en efpandiflènt vne autre poignes ea
ïair^îiafTent les rennes de la bride de leurs cheuaux, difansvm
vers de l'Alcoran eferitau troiûefmeliureau, dixhuitriefme cha-
pitre x& qu'ils fe feroyemmuifib les à ceux qci les voudroyenc
pourfuyure. Toutes les chofes touchant ia.fai te , font eferites ea
l'Alcoran au fécond chapitre du p rem ierliure. Et ayant demeu*-
reen Almedine, ilfc fortifia de gens qui prindrentfonparty., ÔC
rendit les Iiiifs tributaires à luy,& vintà la Mequeauec grpiTe ar-
mcQrSc£c £it feigneur de la. ville ,, qu'il fu£riug& à force d'ar-
mes.
§ue toute ta croyance des Turcs efl contenue en f*4lcoran fait ,
jutr Mahomet^ Chaf* i li;
1 Outes les fiiperfUtions Se foies cerimonies àès Turcs-
hprouiennent des enlèrgnemensde V Alcoran.Et cette
r a r2^ ISS diction Àlcoran ne fignifle autre chofe que recueil
ait en rith*'^®*^*'' aecbapîtresjooamasde pleaumes. On lenomeauflî
a^ par autre nô Âlforcan. Cïet Alcorâ eftat touteferit en rythme xCe
termine en consonance devers ; & eft îîeftroictemcnt gardé; qix-
û quelque Turc auoit mué vnefeule lettre vou changé le ftile,GUr
vnaccenCjlaJoy commande qu'il foit Lapidé dés l'heure: mcfme»
Cet Alcoran rteftoit pas ente! ordre du temps de Mafjomer^au-
ofa^ quel on voit maintenant : mais après qu'il fut mort, vn rien geiv
- drenomjni Qfmen^qui fur le Rpy rroifîefrjic après luy, princ Cas,
OBSERVEES PAR P. BEI OH. 383
«écrits tels qu'il les auoic faits en fa vie, qui cftoyent en vu coffre,
&lcs meic par ordres les kitkula par chapkrcs,dont il feit qua-,.
treliures. Le premier liure contient cinq chapitres: lefecondli-
ure en contient douze: le troificfme en contient dixneuf : le qua- '
tricfmc en contient cent (bixantc&cinq. Tous lcfqucls chapi-
tres de TAlcoran font nommez par noms propres,& nombrez de
compte fait deux cens & vnze.Tous Turcs ont le fufdit Alcoran
en fi grande reuerenec , qu'ils le baifènt & l'embraffent, & iurenc
parluy comme par Dieu. Aufii l'appellent ils le liure glorieux.
V Alcoran contient entièrement toutes les loix que iamais Ma-
homet bailla aux Turcs , tant de ce qu'ils on t à croire , & à faire,
quecc qu'ils efpcrent en l'autre ficelé pour les bons &: mauuais;
ÔC au m* des choies qui leur font défendues , du boire &: du man-
ger. Mahomet en le faifant en defroba partie du nouueau, partie
du vieil teftament , comme il appert en ce qu'il efcrk touchant la
création du monde: Gar il racompre leans comme Adam 6c Eue *;
péchèrent , & fortirent hors de Paradis , & vindrent en terre : &:
comme les Anges péchèrent , & qui fut caufè de les faire pécher.
Dit dauantage comme Dieu enuoya Moyfe pour tirer lesluifs
horslacaçtiuitéd.e Pharaon,& comme les Iuifs receurent fa loy,
& les choies qui leur aduindrent au partir d'Egypte,^ comme ûs
adorerét le veau:8£ la manière comme ils payèrent la mer rouge,
ou fut noyé Pharaon : &: comme il péchèrent contrefaifans des
faux dieux. Il trai&e aufh* de nofbre Scigneur,&: dcnoftreDamc:
&: du my ftere de la natiu iré3vie & miracles de noftre Seigneur,^
defes Euangiles,&: delà ioy qu'il bailla.Mahomct dit au premier
chapitre du premier liure}&: en plufieurs autres lieux , chofès de
noûre Seigneur, comme s'enfuie : Nous dieu (dit-il ) auons
donne i'eferiture à Iefus Chriit , '&. l'auons aidé du fainci Efprit.
Et au premier chapitre du fécond liurç dit pareillement que
Dieu détermina î'Alcoran à Mahomet , & le Tcftamcnt &
Euangilesà Iefus Chrifivpour la loy dé plufieurs hommes. Et au.
chapitre fécond du premier liure traide amplement la conceptio
de la vierge Marie , ou il expofe quafi toute la vilïtar ion d'Elifa-
beth. Dont les glofeurs fur I'Alcoran diienc fur ce. pafîàge que cfyèursfir
Iefus Chrift & fa merc, furent feulement exempts de la centation p^£draa-
diabolique: & accordent que noftrc Dame fut fans péché origi-
...... BBb iiij .
3&k T * E R s LIVRE DES SING V L à*
nd. Il fait expreffe mention de la natiuité de noftrc Seigneur au**
premierçha^itrcdatroiUefnKîliure, &de toute la falutatibr*8c "
^cceUmces à ^Y^0 <& ^ànnonciation . Il met trois excelîen ces de noftre Seî-
nofhe sel* gneurcnfbn Àîcoran. Lapremiereau premier liu re chapitre fè-
œ* r, çondsque Iefus Chrift monta au ciel en corps ôc en ame. La fé-
conde ef^qu'il le nomme parole de Dieu ... La tierce eft, qu'il l'ap-
pelle efprit de Dîeu,comme il appert audit chapitre troifîefme du
premier îiuredudicl Alcoran. Lefquefles excellences PAlcoran.
ne les attribua jamais à nul autre,ne à Moyfe , ne à Dauid vou A-
braham,neauffià îuy mcfme. Il y a auiïî mis par eferit au fécond
chapitre du quatriefme liure,que Iefus € hrift%au oit les fecrets
des cœurs humains,^ fàifoit refufeiter les morts, Se guerifïbit les
inaladicsineurabîes>& enluminoit les aueugles , &: faifoit parler
les muets. Il dit aufïi que Tes difciples faifoy ent miracles,qui fur-
pafïbyent la nature. Mais les Turcs fauorifans à leur faufe fe&e^
expofènt les chofes fufdites à la louange de leur Mahomet^ no
pas à celle de noftrc Seigneur.
T>e diuerfesfe&es qui font Jùruenues entre les Mahometiflesfer le fait
de leur religion. Chapitre iiij.
11 *®$SK$£ Vtre F Aîcoran les Turcs obfèruent îes commende-
£#n4 ¥fêslén& mens a vn autre hure , qu'ils nomment Z^una de Ma-
j^^^^^ homet,qui fignifie chemin ou loy,c'eft à dire fuyurele
Wtrr^A confèil de Mahomet: lequel liu refes difciples efcriue-
rent après fà mort. Etcftant paruenu en plufieurs mains , les vns
y adiouftoyent , les autres diminuoyent , ainfi qu'il leur fembloit,
- bon : tellement <ju*on trouua û grande confufion & contrariété
k&M. cfdictsliureSjque ce que Mahomet au oit dit affirmatiacment:, il
home*. * cftoit ncgatinement;&s eflcua telle diuifîon en fà fèâc, qu'il faU
lut que le Aîcaliph}c eft à dire le Rx>y qui dominoit à ceftegene-
lydfhachL ration,commandaft à tous Mahometiàes , que celle part ou loa
trouucroitgens do&es en l\Alcoran5qui de nom propre font ap*
^cali^h peliez AJphaçhi, vinflèri t en la ville de Damas pour tenir vn GÔ-
foDtmas. cjie^ apportaient tous les eferits qu'ils pourroyent recouurcr.
P^M* Celafai&lediâ: Araliphou Roy, de deux cens qui eiloycht là
kometifies* venus,feit choîfir fîx Alphaches,ceft. adiré fçauans: & des fix vn
- * nomn^c .Mufzjin fût choifi le premier^Bçcharilç fécond , Bubo- .
rayra.
rayraîctroifiefm^Anncccy lequatriefme,Atermindiîecinqic£-
mc& Dent le fixiefrne. Lefquels il frit entrer en vne chambre, là
oueftoyenrtous îefdits liures qu'on y auoic apportez de toutes
parts.£teftaslà,chacun d'eux compofavn liure chohî des eferits-
de pluficurs autres. Puis apresehacun prciénta fbn îiurc à l'ÀIcà*-
liph ou Roy,qu*il les bailla aux autres feauans pour examiner : ÔC
eemmanda que la refte des autres liures fufïênt noyez dedans 1er
ruifleau de Damasanommé en Latin Ckr?Jôro4t}& en Arabe Adc-
geje, en forte q de la charge de deux ces chameaux n en refta que-
Iefdits fix lrures nommezla Zuna.Toute la refte furent iettez de-
dens îc ruifïcau , & commanda le Roy à tous Alphachcs , ceft à
dire Théologiens de Mahomet , qu'ils nofàn'cnt plus alléguer
aucune au thorité de Mahomet finon ce qui cfloit contenu eidits
fîx liures de la Zuna. Et depuis il y eut vn dodeur Théologie de
Mahomer^qui print Iefdits fix liures de la Zuna , rccueillans tous-
les paffages , & en feit vn liure > qui eft nommé le liure des fleurs.
Les Turcstiennent les liures de la Zuna, cnla mefmcaBthorité.
que l'Aîcoran t pour laquelle chofe les Turcs reputent le fufdk
Acaliph pour faind homme. £t toutesfois combien que tant de
dodeurs de leur théologie euflènt affemblé ce qui eftoit efcrit en
fi grand nobee d autres,en fîx liures,toutesfois pour y auoir gran-
des contrarierez font venus beaucoup-dé fchifmesenrte eux. Car
il aduint que depuis ûs fe diuiferent enquacre opinions^dont en- ff
corepour Hieure prcfcntc-les Pèrfes font cocredifans aux Turcs, tzTurT**
s appellan^heretiqucs les vns lesautres.Et n eftoit que Ja piiflàn- mZ(k*v^
ce du Turc lesabeaucoupvnis, pour les conqueftesq^ilafaitcsmW jj
furie Souldan de Babylone ,& que la %rie y Egypte& Mefopo* xukomeà*
tamieluyfont tributaires > il y aurok diuerfes opinionscntrelesi**
Batî'onSjàcaufèqu'ils font de diuers langages. Les Turcscroyent
que rAlcoraaefté faid en vne nuidjes autres^èntcnmmoisr
laquelle chofeadonae moult grande authoraé audit Akoranv
Maisleur eroyasceeâfaufe: Car Mahoraetmefme confefièqttU
demeura treze ans en le fafant en Almedine > & dixans àla Mc~
que Auffîles chapitres k montrent cuidemment* defqucisicsv
imsoncnom propre Medenia^ lesautresMechia.
CCc . .
$$4 TI/IK: U.VRÏ DE5 SINGVLA.
Vêla cttttnte du tourment d'enfer 5 dont Mahomet a effrouuentêles Turca
& de leurs jepultures* Chapitre \\
sépultures ^ë&5«& Van^ îes Turcs mcttéï queîqu'vn en terre,apres qu'ils
MiTéércs. W§M&g& ont *au^ *c corPs > & cnucloppé <i'vn iinecul , ils ne
31^^^? coufent celle partie ne des pieds nede la tefte , fli.yuac
lïifefcîisà quelque commandement de Mahomet , qui dit que
quan41e rteipafîc entre en fa fepulture , deux Anges noirs appel-
iez par nom propre en Arabe Mongir, Guancquir , viennent l'vn
auec vn maillet de&r^autre auec des crochets de fer, qui font lc-
uerlemoi:tàgcnouxî& luy remettent l'amededçns le cqrps,tout
aiofi.( diti' Alcoran) <;omme vn homme fè veft ùl chemife:& lors
îcfdits Anges intertoguerom; le trcfpaffé , s'il acreu à Mahomet,
&: s'il a bien obferué fa îoy,&: s'il i fait bonncsœuurcs en ce mon-
de quand il viuoit,& s'il a icufni le Carefme des Turcs qu on no-
%*&»>*» jnc Radaman^s'ila bien faitIesceremonies.de la Zala , & s'il a
Urefmt des^z^^ decimes^fait des aumofncs,; Lors fi le trefpaffé rend
Turcs' bon compte àecs Anges noirs , ils le bifferont là , &: s'en iront:
maisfoudain il y en viendra deux autres blancs comme neige;
-dont l'va mettra fes bras pour appuyer & celle , & luy feruirde
£heuct:& l'autre fe mettra à fes pieds, & legarderonr,îuy faifans
ztns^tnges. COmpagnie iufqucs au iour du iugement.Mais fi le trefpafTc rend
mauuais compte de fa vie aux Anges noirs , fçauoirefl qu'il n'aie
pas creu en Mahomet , & autres chofes fufdicles, le liurc de la
Zuna dit que l^Angc noir qui tient le maillet de fer , luy donnera
M*** vnfigrandcoup fur la tefte, qu'il fera entrer le trefpaffé neuf au-
sA*gp. fies dedens terre : & l'autre Ange noir ne cetera de le tourmenter
:defes crochets de fer, & aumTautre de le barre de fon maillet, OS
Juydoimerce.touraentiufquesauiour du iugement. Pour lef-
queîks chofes Jes Turcs efcfiuentlenom àuecdu faffran fur les
corps defdits trefpaffez , & font les fepulchres vuides pour leur
donner cfpace de fe mettre à genoux ,& y en a qui cou urent les
fo{&sauccdes.ais,depeurquclafoflencfe comble. Ces chofes
ont tant efpouuenti les Turcs, que le matin ,quaad ils fondeur
. oraifon, ils difent en cefte forte en leur langage, Seigneur Dieu,
Tôwimt du ddiurc moy ae l'interrogation des deux Anges , &: du tourment
Jepdcbn. ^^ fcpulchrc>&: du mauuais chemin, Amen, Les prières pour les
OBSERVEES FAR F.' BELQNV ^
trcfesiflcz que fondes Turcs & Turques fut les foiïès! des cime- p™w« fwr
«ères, for>cfaice^à^cllefodo<icHtitcr tesdcfan&sdellntcrro- ^ tr*î4e\
gationdes^&ux Anges noirs. .-. 1 :.;.••. .•■- . . '
Z> eplufieurs chofesfmtafliques> moult étranges que Mahomet refont '
tûHch<tmleiuvèment. Chapitre, vu
A homet ayantttaduicr Ton Àfcoran de pïuûeurs p a£-
fages de la Bible , a mis quelque chofè de la création
! du mondc^l'hiftoired'AdamjIequcl il dit-que Dieu
l fabriqua de fa main de pu-fc: tercey &. infpiraenluy
Pefprit de vie : mars-que le pcchéd*Adam féic que coos les de£cé-
dans de lu y, furent condamnez à* mourir.. Quantau iour du iu-
gementj il dit quefur la £n du monde vn cornet fonnera,, 5c que
lors les hommcsfurktcnre, & les anges du cicLmouxcoaLipuî«=
le cornet fonnera vne autre rois^aufon duquel les hommes 3d les
Anges refufeiteront- Dit au cinquiefme chapitre du premier, li-
ure,que tous- les animaux de kterre ,.& les oy féaux du ciel refuf-
eiterontleiour du iugement. Le liure de la. Zuna dit, que les
moutons qui (ont tuez leîowr de la Pafqoe des Turcs , qu'ils nô-
rnent Bairanjentreronten P^acadisleiour du ragemeûE i&quçlc Mmton^m
mouton que fàctiria Abraham aulieu defon fils Ifaac^aaoitefté^*^^*
nourry en Paradis i'cfpace de quarante ans, & que FAnge Ga- ^f*-
Mel Tauoit pofté,& que ledit mouton eftoit de couleur noire. SacnJiccsdc
C'c&ia raiibn pourquoy les Turcs tue&t plûttears moutons pou*
Sacrifier le iour de leurÉafq-ue, combien qu'ite nefoyent obligçz.
d*cn tuer plus dvarcar le liarc de la Zuna^dit^que tous les mou,
cons que les Turcson t tué pour facrifier le iour de leat Pafque>
prieront au iour du4ugement pouc ceux qui furent g&ù(ç de les-
faire facri£er. UAlcaran ditsau premier* chapitrera premier li-
ure, qu'il y a deux Angesenvnc/cauernexledansBabylocCjqui
font pendus par les fourcils,qui feront tourméteriufques au iour
du jugement. Qrkglofcdit fur ce paâage, queDieu cnuoya
deux Anges ca Bahy kme , comme iuges entse les h ômmes de la
eite ., lefquels defeendoyent- du ciel tous les, matins^ remoix-
toyeiitaitfoitj& qavoionr leuraduint cronaer vne moult belk
femme qui fè compkignoit.de fon mary ; mmz elle leur plcuc
tant qulkla prieieoLde £mJcjhonn£ur :, & elle s'y accorda,
CCc ij
2?tgroman*
i$6 tieHs livxe pis singviaJ
^moyennant qu'ils luy enfeignaflcnt l'oraifon qui leur donnoic
~vcr«u dcmontccauxieLA laquelle ils ohcyrcntmoulç volotiers,
& luy cnfêignerent roraifon.MaisauÛitoft qu'elle Tçut apprife,
s'en alla au ciel,& les Anges pour le pèche qu'ils auoyéc commis,
perdirent la grâce de i'oraifon : tcllcmcnr que ne pouuans mon-
ter aucicl,dcmourcrcnt en terre : aufqucls JDieu manda qu'ils e-
leufFentîa peine pour leurpcché , ou en ce monde, ou en l'autre:
&: ayaseîcalapeincencemonde,lesiugeaà eârc pendus parles
fourcils iufques au iour du iugement. On dit outre rAlcorâ,que
ces deux Anges enfeignent ioutnellement l'art de Nigromancie
aux hommes de ce pays là, Et au chapitre dixneufiefme du troi-
&c£mc liure,!' Alcoran dit que Dieu meit les eftpilles au ciel pour
îa beauté de ce monde, & pour la garde de chaque diable malin:
&: que pour lechafier quand il veut efeouter les fecrets de para-
disiaque eftoillc courtapres luy auec vn tifon enrlambé. Le li-
urede ia.Zuna dit,quc les eftoillcs font tenues pendantes en l'air,
attachées auec des chaînes d'or,qui font là pour faire la gardexar
Jcs diables viendroyent ouyr les fecrets de paradis, pour les reue-
1er aux hommes diuins.
. pUlJànt voyage que Addhometfamt4uoîr fait enVaradis lamiflcn
dormant: & des grandes folies qutlracompte touchant U
paradis dcsTurcs. Chaj>> vu.
i A nuicl Mahomet endormy,en refuant eu tvnevifion
3 qu'il recita le lendemain,& meit en eferit : par laquel-
u-^^-J leil a fait grad bien à tous ks fuccefïcurs,fur ce poind,
DefrôwUes jgjg|§§} que les defpouilles de la guerre font attribuées à eux.
deUgmre. ^u{ficft-cei'vn des arcicles qu il die que Dieu luy concéda ca
parîantauccluy. Oreûoitil couché lanui&auec Tvnedefesvn-
ze femmes nommée Axa, qu'il ay moitié mieux: &: s'efueillant
àminuicT:,foBgeant quonauoit frappé àià porte, il dit qu'il £c
Icuapour l'ouurir: ou il trouua l'Ange Gabriel chargé de feptan-
te couples d'elles , plus blanches que neige , &: plus luifantes que
le criftal:&: auoit vn animal auec foy , plus blanc que bu&,& plus
grand quvn Àfnc, & plus petit qu'vn Mulet, lequel de nom
propre il appelle en Arabe Alborach. Il eft eferit au liure
comme Afcar , que l'Ange Gabriel cmbraûa Mahomet , &
Paradis des
Turcs.
OBSERVEES *ÀH Vw BELOff. ffîf
cnî»cffibra$ànt , difh OMahomct,Dieum'aenuoyépourte£t-
luçr , & raà comjiiandc de te mener cefte nuid auec moy en pa-
jadis, pour voir les plus grands fecretz qu onques filz d'homme
ji'a vcu.Mahomct rcfpondit qu'il en eftoit content. Et lange dift:
à Mahomct:Monte donc fur l'Alborach,&; nous en allons. Mais
l'Alborachfè rcculloit ,à qui l'Angexlift : Pourquoy ne veux-tu
queMahomct monte fur toy î le rafTeurc que iamais meilleur
homme ne monta , ne montera,quc Mahomet.Mais î'Alborach
rcfpondit qu'il n en feroit rien ,quc Mahomet ne luy promit pre-
mièrement de le faire entrer quant & luy en paradis.Lors Maho-
met rcfpondit à l' Alborach^qu'il feroit la première befte qui a en-
tré en paradis^Et fbudain Mahomet monte dcffus,& lange print
les refnes , & cheminèrent toute nuict, vers Icrufâlem. Le liure
d'Afêar dit que Mahomet ouit la voix d'vne femme par le che-
iiiin,qui difbit-.O Mahomct,Mahomct. Et l'ange luy dift : Que
ncrefpondcz vousà cefte voix ? Mahomet ne rcfpondit rien» £c
continuant icchcmin,ouit encorcs vnc autre voix,qui appclloit,
Mahomct,Mahomet. Et i*ange luy dift qu'il ne refpondift rien*
Et cftans quelque peu plusauant, Mahomet demada à r*angc qui
f auoitainfï appelle, & quelles femmes eftoyent celles là. A qui
Gabriel refpÔdit,quc la première cft celle qui fait le cry^ diuuî-
gue la loy des luifs : ôc que fil euft rcfpondu à cefte voix là y tous
les Turcs fuflènt deuenus Iuifs, & que la féconde eftoit celle qui
publie la loy des Chrefticns:& que s'il luy eaft rcfportdu, tous les
Turcs fê fuÔènt faits Chrcftiens.Toft apresarriuecent au temple
de Icrufalemcou Mahomet & Gabriel entrèrent, ou ilz trouue^
rent tous les prophètes ôc mcfîàgcrs qui font venus ca ce monde,
qui vindrent au deuant de luy à la porte du temple , le reeeuant,
évaluant en cefte manière : Dieu vous gard,o la ioye des vrais
rnefTagcrs , prophète honorable : & alors ilz le portèrent en lair
en grande folennitéiufques dedans la grande chapellei&depric-
rent qu ilfeit la prière pour tous 5 en fc recommandant àluy , Se
qu'il fe fouuint d'eux en parlant à Dieu. Dit en ourre que Maho-
met cftant forty du temple, trouuavne efchclle faite de lumière
de Dicu,qui touchoit au ciel, Gabriel le print par la main : & ar-
riuans au premier cicl,qui eftoit fait de fin argent, ou les cftoilîes
pendoy ent à des chaînes de fin or , & font aui& grandes qu'eft la
montagne d auprès de la ville d'Almcdiac, nommée Noho;Ga-
CCc iij
^SS. TÎERS LIVRE DES SINGVLÂ.
briel frappa à la porte du ciel. Le portier demanda qui ceftoit :iî
rcfpondje Aiis l'ange Gabriel, 6c Mahomet le Prophète &.amy
deDieuauecmoy. Et ibu-dainque le portier entendit le nom de
Mahomet , ouuric la porte du premier ciel:ou ilz trouuerent vu
vie! homme tout chenu, qui eftoit Adam rqui eovbralïa Maho-
met,remerciant Dieu de luy auoir donné vn tel filz, Se fe recom-
manda grandement a Mahomet. Paiïàns outre,trounans des an-
ges de plu&eurs hgures,comme de bœufs , d'homes, de cheuaux,
&d'oifeai>x(& entre autres y anoitvn coq, qui auoit les pieds au
premier cjd,& la telle au fecond)Mahomct demada à l'ange que
tigflifîo-y ent ces chofes là ^ àqui Fange refpondit y que les anges
philofiphk- prient Dieu pour ceux de la terre:&: que ceux qui auoyent forme
deMnbomet. d'hommes, prioy ent pour les hommes r&ceux qui auoyentror-
J me de bœufs,prioyentpour lesbœurs, 6c ainfi des autres. Et que
ceux qui eftoyent en forme de coqs^ptioyet pour les coqs:& que
quan Ace grand coq ehantoit,les,aut?escoqs de la terre 6c du ciel
chantoyent. De là trouuansf autre cid de- fia or , frapperent^à la
portede portier dernandaqui ceftoit: Gabriel refpondit , Gefl
moy & Mahornet.Ilz entreront leans , ou ilz trouuerent partout
le nom de Dieu 6c çetuy de Mahomet en eferit en cefte manière^
Il n'y a autre que Dieu,duquel Mahomet cft le prophète: 6c trou-
ucrcntNoé toutçhcnu,quUmbrau^ Mahomet 6c fe recomman-
da à luy. Pois trouuerent plulieurs anges de figure mcrusilleufe*
dont l'vne auoît les pieds au fécond ciel y6c la tefte au troifiefmci-.
vne main ealeuant, & l*autre en occident* De là montèrent au
tiers ciel fait dVne pierre preckufc : otulz. trouuerent Abraham,
&c grand nombre d anges : don t i'vn auoit d'interuaiic d' vn œil a?
Tau tre feptance mille iou rnees^ tenok vn Hure en îa main eferi,
aant Se cfeçant routes chofes:&£ s appelloit l'ange de la mort > ef-
criuant ieshommes qui nahîent , 6c effaçant le nom de ceux qui
meurent^ De làmontcïent au quatriefme ciel fait de finccfmc-
mude>ou ilz trouuerent loicphiâzude Iacob}qui falua Mahomet>
6c fe recommanda àJuy ,: Et grande quantité, d'anges , dont Tvn
moûlt grand pleuroit ;Jmais ceftoit pour les hommes , .qui pou?
leur pèche alloientes enfcrXte ^montèrent au cinqaicfme ciel
l v fait de fin diamant,ou ilztrouucrcnt Moy fc , qui fe recommanda
à Mahomet: 6c plus grande quantité danges qu'es autres ciclz,E$
d^&jmnœsat m ûwfetc ciel , fait d! vu CaxbpuclCjpacûoiii.
OfSEfcVEES PAR P. «ElOW. *%
Ëtinâ ïean Baptiftc , qui ic recommanda à Mahomet. De là aile-
rentaufcptiefmeciel,quieftoit-fait de la lumière de Dieu,ouilz
trouuerencïefusChrift:&Mahomecre recommanda à luy.-ouilz
trouucrenr grand nombre d'anges. L'ange print congé de Maho-
met. Il commença à monter par lieux difficiles, ou il trouua tant
d eaux, tant de neiges,& fe lafla tant qu'il n'en pouuoit plus,& en
ces entrefaites dit qu'il ouy t vne voix du cieî,qui luy dift : O Ma-
homet,faluc ton crcateur,tuésbien près de luy» Et veitfigrande
lumière qu'elle luy troubla la veue. II dit que Dieu auoit ièptan-
témille linges de lumière de Dieu de£Tus fa face, qu'il n'en eftoit
plus loing que deux traicts darbalaifte. Et dit Mahomet que
Dieu mjft la main for {on ombre , qui luy feit auoir grand fx*td»
Il dit que Dieu parla à luy en ce lieu , & luy bailla plusieurs com-
mandemens de la loy,& luy reuela beaucoup de fecrers*£t dit le . .
Iiure Afèar que Dieu luy donna cinq choies, qu'il n'^noit iamais *f* nn$
baillées à homme. La première, que Mahomet eft la pluscieuee ^^
-creatu re qu i fu ft n'au ciel, n'en la terre* La iècon de , qu'il eft le
plus excclîen 1 6c plus honorable gentilhomme de tous les filz de
Adam au iour du iugement. La tierce choie , qu'il eft le Rédem-
pteur general,c eft à dire le pardonneur des peçhez. La quattie£
me eJkjjuSl %ait tous les îangages.La cinquiefme cft,que les dc£
fouilles des batailles &c desguerres hiy fuiïènt deliureesXeliurc
d'Aièar dit qu'il commença à defeendre par ou il eftoit monté,S£
qu'il compta à l'Ange Gabriel tout ce que luy eftoit aduenu : 8c
i'ângc luy dit^O Mahomet, Dieu m'auoit comandé de vous con-
duire en ce lieu pour vous faire voir to9ies fècrets.Mais maintenir
aîlos en enfer,à fin de v<>ir les iècrets de là baSjCÔnaelbnttourmé- . t r
tez les homes par les diables. Tontes ceschoiès fufHicles efcriuit m$c °£
Mahomet en Ion AIcorasq moftrét le peu d'étedemet qu'il auoit. ^ -j^
Or eft il que Mahomet deferiuac le paradis qu iljpmet à fès Turcs,
y a mis cinq choies. La première cft,qu'il y a des maiibns.La fècô-
de eft,qu il y a des vten files. La tierce eft, qu'il y a des vîmes pour
boire &:mâgcr.La quarce cft,qu'il y a des habiliemas.La cinquiè-
me eft, qu'il y a des belles femmes pour predre plaiiir, & aufli des > . ,
beaux cheuatix bien ornez de icllcs & brides, enrichies de pierres ^xj^^
grecieufes, Suiuat cela il die q l'enfer à fep t por tes & q les diables * **
iot de diueriès fortes.Lcs vus sot enchainez de chaines de fer, les
CCc iiij
4pO TROHÏISME llfRÉ IXIS SINéVEA^
autres embrochez aucc des broches de fer:&dit que les hommes
qui y font,boiucntmcef&niment du pîombibndu ,& mangent
des viandes pourries^ des pommes d'vn arbre, donc le fruiâ eft
ïavraye {burce des diables. Toutes lesquelles chofes auonscC-
erites pour monftrer le peu de iugement de Mahomet , deferire
chofes fi folaftres.
T>ont vient que îaloy de Mahomet a permis* aux Turcs d'auûir comp*-
gnieattecles efclaues femelles ^ansauoirejgard de qmiïe religion elles font^
Chapitre vin.
, Es Turcs pour le iotird'huy femeflcnt indifférem-
ment aucc les cfckuessn'ayanscfgard fi elles font
IuifueSjOu Chreftiennes ^ou idoîaftres. Qui leur
futeoncedé par laîoy, desleviuant deMahomer».
\ Car il aduint que Mahomet ayant plufieurs fem--
mes qui auoycnt creu en &loy, le Roy des ïacobites îuy fèit pre-
fent dVne moult belle efcîauc,puceîle ïuifue : aVîaqueîle Maho»
metfutgrandementamoureuXj&nefepeutonc tenir qu'il ne lit
eogneuft» Mais iès femmes f en efians apperçeues^e le peurent
porter patiemment^ luy diren^que s'il continuons y qu'elles-fer
fepareroyent de luy. Mais Mahomet nefè pouuant contenir, ca
ibt gran dément feandalizé. Car deux de Tes femmes fedepartï*
rent dîaucc4uyaqui cUuulguerent la chofe par toute la ville de la.
Meque.Luy qui eftoit vigilant &: foigneux, foudainement pen&
y remédier par quelque bon moyen .Et 1 c rs compofa vn chapitra
de fon Alcoran, faifant loynouuelîepour fes fuppofts , fçauoit
eit qu'il fuft licite à tous ceux qui tiendroyenc fon party,fc méfier:
, . tou t ainfi auec leurs efclaues fèmelleSjComme auec leurs propres-
aux Turcs &mmQ$ : laquelle loy il meit au commencement du chapitre du
four ïoulr quatriefineliure de Ton Alcoran,lcquel encore pour le iourd'huy
drsejikues. a nom,le chapitre de ladefenfè , dont les mots font comme s'en-
fuit. O prophète,, pourccjque tu voulois détendre ce qui t'eftoic
licite pour complaire à tes femmes , fçaches que Dieu a permis
que tu bailles puiffance aux hommes id vfer licitement aucc les
eiclauesXe prophète auoiccommis le fecret de ce&e lç*y à quel-
ques vnes de Ces femmes, qui l'ont public par tout^ Nonobstant
xous jfemmes fi youlc£.vou s repentir à Dieu,, trouuercz vn grandi
OBSERVEES' ?Ak ?. ï£LOK. 401
4>ieruMaîs fi vous demeurez répudiées de Mahomet,{bn créateur
luy donnera d autres femmes que vous,tant vierges que veufues,
croyantes en faloy, &: qui îay feront deuotes. Quand les homes
-de h Meque eurent leu ce chapitre , furent bien con tensde cefte
loy,& donnèrent fàueur à Mahomet» Lors les parens des {uCâi~
•des femmes quvVeftoyentfeparccs, vindrent prier Mahomet de
lesreccuoir. Dontilfutmoukioycux ; car il ne defîrou autre
chofe y combien qu'il feift fcmblant dene les vouloir reprendre^
Et depuis cefte heure là,les Turques ont vefcuriâns iaioufîc aucc
les efdaues^Et faut entendre qu'vn Turc en aura vnc cétaine s'il
veuît : mais il ne peut auoir plus de quatre femmes efpouices à,
lafois*
Bvief récit du pavadis feint, tetquc AUBomet ta pronùt auxT»rcs:^
des ebofes fantastiques qu'il vacomgtc* Chapitre 1 x~
r Ahomct parlant delà matière «Jequoy cft fait le ciel,
i dit que Dieu Ta crée de fumee > & qu'il eâabîit le fir- Tardais dés*
? marnent fui la poin&e de la corne d*vn Bœuf» S: que •&*&». '
lie tremblement de terre prouient de l'émotion de ce
boeuf, lequel ou tremiflant ou fe remuant,ayant toute la terre fur
fa corneja fait trembler* Les Turcs croyent maintenae mille fo-
lies que Mahomet leur afait entendre^ Êtentre autres chofes ilz Sept. y^^^
croyent qu'il y afcpt paradis,ouurez d'or Se d'argent, enrichisde ^ rœs~
, perles & pierres prccicufes,efquelz Mahomet dit qu'il y a déplus
beaux palays que ceux qu'on baffe t en terre, & de grandes cham-
bres^ grandes fàHes:& qu'il y a desiardins plantez d'arbres frui-
â:iers>dc deux ou trois fortes de chacu neefpccc : & que les fon-
taines & belles riuicres courent le long àcs palays : dont 1 eau des
vnesfont de pur laicr ^ les anrrcsdc tre&on miel , & lesautresde
vin doux;& au milieu du paradis-il y a vn grand- arbre , qui con-
tient tout le paradis, dont les fueiiîes font d'or $£ d'argent *& les-
rameaux tombcntiufqijesde{Iuslcsmurs;3<: que dedans chaque
fûeilte le nomde Mahometeften eferit après lenom de Dieu»
G'cft dece paflage- que les Turcs ont prins la plus ûngu lieredâ-
leurs prières, qu'ilz difcnt à chaque bout de chemin, comme s'è*
foit. 2c iith&iBc aîlach Mahomet ra^gtoiîâh^ïXe manière que fL
vu homme Cl^cihciiaiioicimr^rudcmmic prxwioncéxcsmots^
Dûi
^1 TÏ-ER.-S LI^TRE DES Sï-NtSYLÀ.
il luy comriendroit mourir, ou fe faire Turc Hz croyent d*auan*
.cage, félon que leur cnfeigncrAlcoran , que les Turcs feront en
paradis rians,&:prcnans plaifir,fans auoir foingnetrifteâ^eftans
touftours ioycux Se contens , atfis deflus des tapis &li&s encour-
tinez , Se linceux de fatin broché,& d'efcarlacte Se foye,&: les fêl-
ées de leurs cheuaux Se autres paremes feront de pierres precieu -
ics^Se fèferonrfemir à des pages aiiûl beaux que font les pierres
Clemux m peeeieufes enchaffeesenfin or,vcftusdc liuree de &>ye,&:4 efear-
turtdt*. jatte verde , Se de fatin frize d'or. Ain fiferu iront les Turcs auec
-tafTes&couppes d'or & d'argent. Ec après que les Turcs auront
beu &mangé leur laoul dedens ce paradis > alors les pages; ornez
de leurs ioyaux Se de pierres precieufès Se anneaux aux .hras^
marns,iambes,& aureiiles , viendront aux Turcs chacun tenant
<Vn beau plat d'or en ia main , portant vn gros citron bu Poncire
<kdens,quelcs Turcs prendront pour odorcr&: &ntir:& foudain
que chaque Turc l'aura approché He fon nez , il fortira vnc belle
vierge bien aornec dacouftremens^qui cmbra&ra le Tt*r£,i &: le
: -. Turc clic , Se demeureront cinquante ans ainu* cœbraffausï'va
iaucrc,fans fe leucr ne feparcri'vn de l'autre, prenans enfemblc le
plaifiren toutes fortes.que l'homme peut auoir auec vne femme.
£t après ciaquatc ans, Dieu leur dira:CXmes feruiteurs ,-puis que
vous aBC&fait. grand* chère en mon paradis ,. ie vous vueil mon-
trermon vi(à. Lors oftera le lipge de deuant fa face. Mais les
Turcs tomberont en terre de la clarté qui enforrira:& Dieu leur
<lira:Leucz vous mes feruiteurs,& iouûïez de ma gloire.-car vous
,ne mourrez iamaispîus, Se ne receuerez triûeffç ne defpiaifir. Et
ieuans leurs teftes , voirront Dieu face à face : Se de là chacun re-
prenant fa vierge, la mènera dedans fa chambre au palais , ou il
trouucra à boire Se à manger : & faifant grand chère , en prenan t
pkiitf auec & vierge , parlera fon temps ioyemement fans auoir
peur de mourir. Yoila que Mahomet a racompeé de, fon paradis,
auec plusieurs autres telles folîies, dont nous femble que l'origi-
ne de Sérails des Turcs prouient de ce que Mahomet a dit des
pagçs Se des vierges du paradis : car il dit que les vierges çhaftes
forint ainfieseées 4c Dieu en paradis^ font bien gardées & rp-
fermees de nwailics. Et dit Mahomeç , que 6 vned'elles fbrtoit
horsdu Serrail de paradis à la minuicl, elle donneroir lumière à
y0ijtle.m6de,commcf4tAc Soleil:& que fi l'vne d'elles crachoic
. : c*F'S#RV£ES PAR, -P. &EXON. ' - ;. 3-59
cîedensîa mer , l'eau en deuiendroie douce comme miel. Auanc fi"****;
v^'nir k pacadis^es Tu^cs , nous voulons direlaiàblç.du banquet *nf**f*
que racompte Mahomet, lequelBieu feit aux (zm£s Turcs. JEa
premier lieu Mahomet dit que Dieu commanda à Gabriel qu'il
; allait quérir les' clcfspoarduunr le paradis ,&: que hmge qui les
gatde,en a feptafcte milic,j8£que chaque-clef à fept mille lieues de- . ■. .
longX'ange Gabriel ne pouuanrleuer û pcfàote clef, lefcit^ri-
itendreà Dieu, Se Dieu luy c&bfouoquemoû nom y& celuy db
' Mahatact,qgr eft mon amy^Et Gabriel ayant rêmoquc les fufdit*
noms3chargeaîa clef fur Tes efpaules > &:.ouurit le paradis, oui*
: trouua vne table de diamant , qui auoit fept cens m iîleiûurrtces
-deiongueur^lasgeur ^touœ enrournee de fcabelies& chaires .-■*■„. ^
d*or $£ d^axg^ntXncor dit qucles Turcs, epi viendront à ce ban-
quet, trouueront lanappe mi£cr&.des-feruictt£souuj^es de foye
£c de fil d'or. Chaque Turc aura fon fiege , ou û fer&aiEs., Et.qu«
les Cnfàiis pages fè mettront à feruir à ce baii«|ttet^donansà3iàn>
•ger dc.diuerfes.fortcs de viandes &froi&s , leur bailla* àJàoiccda
,yin 8c de l'eau des.riuiczes.de paradis.Et pour ifluc de table , eha>
. quepage apportera le poncirc ou gros citron, dont auons parie
<£y dcÛuSvMahometauiEa promis.de faireibn baoqucqaprcsj^uc Bdnfœie-
.rJDieu aura fait le ûcd. Il y a.yne fontaine en paradis (-jSMK^doju M^omet
■Feaueft plas blanche que laneige^.plusdoucequcle.mielvqtïi <UéX Twra"
xft longue &. large de (eptante miJk iousneesv, ou iî y a/ plus de
;voirres &c rafles à boire , qu'il n'y a d eftoilies. au çieL laquelle
-Dieu a donnée à Mahomet,. pou r.faire que tes Tuscspaflèui par
;dedans,& Mahomet leur prcioitecaà.boire,^ ceux qui en boi-
ront n'auront iamais plns.de foif.Et Mahomet iortira dededans^
,& ira choifk tous les bos Turcs enenfer^qui aaoyct mérité quel*
que pcineipoar leur générale rédemption, Mahometlesportera
«niàibntaine fu&k&e.Etpource qu ilziortiront. noirs &.bruiicz-
derenfcr5luy mcfmeiauera leurs, corps en- rafoûtairiC;,^: les fer*
■deuenir blancs comme neige:&: delà-il les portera au. paradis des-
autres Turcs.. Il fau t entedre que les prefeheuss de Turqu ie diet
• que Mahomet fc traBJÛnticra en. mouroû;,. &fera? que-Ies Turcs
dciucndron&comriœpukrsii&v^^ f^f^
en paradis^jl fe {écouta leans^àfin que les, fufdi&es pulces corn*. '
&eatieans>&: prennenUaibrmcdcs autres Turcs-
4©4 TfcOISIESME LIVRE DES SING.V1A.
Des mariages des Tvra:& dont vient qu'ils ont le congé défi marier À
quatre femmes, x Chapitre x.
> Ourîciourd'huy les Turcs & ceux qui enfuyucnc
\ la loy de Mahomc^nc pcuuent auoir plus de qua-
l tre femmes cfpoufècsiqui n'eft pas inftitutiô nou-
Quelle i cardes îcviuant de Mahomet il permit à
_ _ >■ ceux qui voudroyent enfuiure faloy, d'en prendre
^atte:mais*quant à luy,ayant fait vncloy pour foy mcfme, il luy
foc licite de fè marier auec autant de femmes qu'il luy plairoic en
gumtiftm* auoir. Lo trouueau liure <T Afèar qu'il fè maria auec quinze fém-
urs eftoufees mcs,fàns grand nombre des efeiaues qu'il auoit quant & quant:
dcMtkomet* & qtfû en auoit vnze tout à la fois. II rcit vue loy qui eft mainte-
nant obfcruee:c eft, qu'il y auroit cqualité entre les fcmmcSjpour
<;fttc également trai&ees entre elles , tant es veftemens , au boire,
Zc au manger^qu'au dormir:& faifànt autrement, celle qui fè (en»
Cira intetelècfe peut 'plaindre au iuge,& appcllcr fon mary en
droi&.Pour cefte raifon pour le iourdliuy la fille du grand Turc,
oudvn Bâcha n'aura aucun priuilege auec fon mary , non plus
quelafiiledupluspauuredecoutcTurquie. Parquoy les Turcs
£c peuuent defmarier pour vn ouy & nény :car fi l'vne de fès fem*
mes Ce pîain&au Cadi,& que fon mary la vucille quitter, ilz font
defmariez àes Theure mcfmc.Mahomet cftant encor viuant, feit
wie loy,que nul autre fè peut marier auec les femmes qu'il repu-
dieroicEt répudier fâ femme en ce pays là, eft quafi comme qui
donneroit congé à vnc chambrière en France. Mahomet voulut
auffi qu'après fà mort fès femmes ne fè peuuent rcmaricr,cobien
qu'il en euft neuf encor viuantes quand il mourut. Il eft eferit en
vn Hure Arabe , intitulé des bonnes couftumes de Mahomet, le
louât de Ces vertus,^ de fès forces corporelles , qu'il fc vantoit de
pca&iquer Ces vnze femmes en vnc mcfme heure l'vne après Pau-
vre. Il feic au flî vnc loy qui encor eft tcnue,quc fi vn homme a rc^
pudic fàfemmepar trois fois,qu elle ne peut retourner à luy que
ivnautreneiaitpremieremcutcogneue. Les Turcs ont ces qua-
tre chofès defèndues,c*eft à fçauoir de ne mager fâng , de la chair
de porceau,&; de ce qu'on a offert aux idoles , ôc belles qu'où n'a
point fâigaecs. Les efeiaues au temps queviuoit Mahomet, &s
OBSERVEES :*à& P. SElaft. 4Ôf
quelque temps apres,auoyent liberté, s'ils fc faifoyent Mahorae- dofis de*
tiftes : pourec que le premier qui ercut en Mahomet, fu t cfclaue,/"^ ***.
auquel iiauoit promis l'affranchir s'il vouloir croire en luy : ce wra*-
quUfcit,&: cutlrbcrté. Le liurc de la Zuna dit , en vne loy , par y,
laquelle rou t cfclauc I uif ou C hreftien qui fe faifoit Mahomcti-
fte,cftoit affranchy outre îegré de fon maiftre : mais elle neft pas
obfcmec pour l'heure prefente. Icy finirons des rifecs de Maho-
met éprendrons à parler des Turcs* N oftfc vulgaire a opinioà
que le cercueil de Mahomet eft pendu en l'air par la, vertu de la
pierre d'aimant; U toutesfois cefte fable neft pas de l'inuention
des modernes : car qui lira Pline,, trouvera les mcfmcs propos au
quatorziefinc chapitre du crentçcinqiefme Hure, ou il parle de la
pierred'aimant en cefte manière : Bodem lapide Démocrates arebi- Tiene&d*
teSlus ^AÏcxAtdnét \ ^irfmoes templum concamerare inchoauerat , vt m mMt-
eofimaUchrum eitu eferro fendere in acre *uideretuy+
£4 manière de nourrir les enfans en Turquie.
Chapitre x u
i Es Turcs ont vriç merucillcufc manière de nourrir
\ les petits enfans , mais au demeurant aifec : Car com-
1 bien qu'ils munifTent &cmrnailîottencle petic enfanc
m \ par tous endroits , toutesfois ils luy laiflent le conduit
de derrière tout à nud. Cefaifànc , ne leur conuientlauer fi fou-
uent leurs drapeaux: Car leurs berceaux font enfoncez de cuir te-
du bien roide,ou ils font vn pertuis rond , defTus lequel les fe/ïcs
du petit enfant font toufiours defTus tout à nud: Careftans adîs Berceaux de
oucouchczaudefiusdu berceau , ont vn petit pot large par le TMr¥*#-
haut , qui rcfpond droit au pertuis du berceau , à fin que quand
l'enfant kit Ces affaires, ne les refpendc finondedens ledit j>oc.
De là vient qu'il ne leur faut point tant de linges comme il ïaut
aux enfans nourris à noftrc mode,& ne font iamais fi puants , 6c pourriture
ne donnent tant de fafcheric ou difficulté à les nourrir : car fi bîe des enfms
ils commencent à croiftre, &: qu'ils commencent à aller tout par «» Turquie.
eux, fi cft-cc qu'ils ne les permettent demeurer , qu'ils ne foyent
aflis furie pertuis du Berceau, iufques à tant qu'ils puiflent tenir
leur vetre. Orlcs petits enfans cmmaillottezeftans couucrts par
defTus pifleroy et en fi peu de linge qu'on leur baillc,n'eftoit qu'ils
DDd iij
l&
T I B .K.-.& : 'X 1 V fc E £KE S -S I K G V £ A ï
Za cttnellepour les masUs.
-o, ~>
La-cmdle-fouY-ksfemelles*
y mettent ordure. Ife.
ont de petites caneL
■ les faites de buys,que
• ~ on trouse? çèl écrira
chez îesmerciers, ex»
- preffeaiét faites pour
; feruir aux petits en>
fâ^yquir.foarcretïfès r& croches parvn des bouts ^-&? ne .font
pas pi us grofifcsxjuVrï doigt^ne îôgues que fix. Le bout recraché
fèrt à mettre le membre du périt enfant. Uoti cm fait de deux ibr-
tes,l'vn pour iesmafles, & l'autre pour les femelles- Celuy. des
ma.feeften rond; dételle figure. L'autrc-q^cftpoanla femclr
'- .-"■ k$ c& lom-g-, fçaùoireft que ië-bout foit-vaidé-, pîu-s large en lan «
gueuc, corne
ia^nftrecefte
autre figure».
:Q*u ne fçau~
roit la manie»
re comme ils.
ksapphqueFj
troirueroitdjf
écuîté dd'eatendfe^ G e£, quejquandils Tes veulent faire feruiï
aux enfaps.mâûc.s yil$ leur mettent le petit bout du membre de-
dans la çanelje>& font que l'autre boutpafTe par entre lesiambçs,
&que Jç.coniûjri^dçJa canciie ré/ponde par derrière, au permis
d£ poM 6i?.quejeau.! tombeau meiÈie.pot^Lii eildeffous le bet-
- <pbau^ Idr&rôbla&le&tat Ha femelle: car ils luy appliquent l*
canellecreufc en ligueur, &.la font palier par entre les iam bes>=
à, fin que reaatombededen^Ic pot*. Cefte mode eft bien feanrç
apx T^^qui&r^toufioursaflkdeffijsdes tapis >.& tfeftojtcc-
foman:içre>îçurs-cnfans Icur&uilkroycnt par tout.. Us ne font
. ppintdebouUiev&n ont de telles nourritures que nous auons
accoutumé bailler aux petits enÊms en Europe., Les femmes ne
. kur;bailleiîU.uî^dipfefQ^3a.mamcîle>iufqucs à ce qu'ils ayenç
yçfaii'Ptt dixmpjs:>quiiCïfty»ç.feçQ«;Cornjnupeà toutes nations.
<fo teuaiy;, qui n'ont poinç aecon&umedpfajrc delà bouîliene
«angç^jdalaiâ; & pour n'aller fi loing,. le plus fouucntjes Ita-
toffsTndTmcs ne les nourriiTent que de la mammeilemiqucsàcc
aoilsaycrtr vn an paiTé^Aprcs.vn a» le?, nourc tffes Jeux mafebac
^ecc qu'elles mangent* joaisïtirtout'dcsiKnx^iiec ckp aioL-car
deiyouiljcdtfs n'ont point, de nouvelle, parquoyfcilc;kurifoHt
quelque bonne fouppe , ou de la panade. Quand les Turcs veu*
lent leuer leurs enfans , il nefon t ilnon les leuer fur le permis de . . _
l«jiriwrccau>parcaniîpak» fauçl&içr :ne : eflfuy er^ Quand ilont .- •
«les à leur mode , êcne fe feindrons, deieur faire màngerdcs oi-
gnons, qu ii mafehent premièrement a.ucc eut pain ou dckebair,.
Scaixitcs viandes, Auûî ndeur; chautfiirquoy iiles. j&cffientdQr-r
srâ.:. car il. $one aucun. .Vftge de. pînmcv La œw'ftfwnc: jC&tellc
pai! roue le.pays -de Turquie y cane de r%>hes q^crîde&paujjre^
qu'ils nc-font tant aflbttcz. de leurs enfans ^ comme Ton cû aa
pays des Latins» . .
: - Tmquic. Chapitré xri, . . . / .
[pi V. pTemiercomenoementdela conqueâc .tîe&Tur£%
\ les Arméniens, fbrcac Jcs premiers aifiaUiz-, qoa&d ris
jfomrcnt de,Scy thie : cariciÂrmcfiiésquiioiseûoyét
I Chtcttiens, fetrouuans les pks fbib]es perdirent leur
Royaume-. Maisnonobftantcclafontcoiuaonf s demeurez con-»
ftanscnlafoy Ghre&icnnc. : commeikappert queocor pour Je
iourdliuy ilssienncnt le nom paj touteTurquie.^ Car nommait
vn Arménien en ce pays là,> <It entendu &vn Ghrefticn. Si va
Arménien ferend Turc,il copert Ton appellaxion.Onies.trou-
ue liabirer par les villes Se villages itifqu.es outre. l'Arménie, 6c
en rAfamie v &: en Àdtabcac, jaKeridû _qusik Roy de Pcrfe
les fauf&e yiuœ.co -feu -pays../ AûfS iorjc ils . gens paiûblesâs ^^.:
humains , & font communément, pauurcs agriculteurs , bons ^îdiÀcnc. .
iardmiers , èc qui accouftrent bien les vignes. Les. preftresi3^ ..
dcs.Armcoiens.ipntmariexcommc.ceux; des „Greçs ,.&: çclçs >.j -
brericia mcflcjax caHce' coûsme les -Latins _> M fon* fcuefei *^^ '*""
de mcfmcs ornemens de. chappes: & chajfubles .": &l$g cctnfa- rmemm^
crent pas en grand pain comme les Grecs y mais en perâeoftiç
comxuç ki Lacias,. Tous, les a&ftans tefpo&dsnç.ajipreJ&r&eA
i:.:?h " * DDd iiîj
40$ TIERS LIVRE DES S'INGVLA.
chantant en Arménien. Ilcft permisà toutes les religions Chre~
{tiennes viuans en Turquie d auoir chacune Ton Eglifc à part.
Car les Turcs necontraignent perfonne de viurc à la mode Tur-
quoifè^ains eft permis à vn chacun viurcen ù. loy* Ccft ce qui a
toufiours maintenu le Turc en fa grandeur i Car s'il conquefte
chefllenseik quelque pays, ce luy eft afîèz cFeftrc obey : & moyennant qu'il
Tttrfâe. reçoyue lejtnbut,il nefè foucic des âmes. Parquoy fouucntau5$
suljwes. VCD pîuâcursvillages par fepay s de Thrace , les vns habitez fcu-
VattAjtœ. \cm£t <jc Bulgares^cs autres de Vallaques , les autres de Scrutes^
les autres de la Bomna,& AlbanoiSjDalmates,Sclauonicns,tou$.
tenansleur religion Chreftienne : car quand leTiirc eonqucft©
vneprouince,il fait enîcuer les payfans des villages^ lescmioye.
comme colonies pout habiter £c eukiuer les lieux entour Con-
âantinople ou ailleurs qui eftoyent deferts. Nous fommes trou-
vez, quelquefois par lariuc de Pon^erransçà Se làen telsvillage%,
qu'en va iour nous fommes veu ouyrcûxqou nxdiucrfitcz de lan-
gues Ch^cfUenncs félon diucrsvittages^Scwçntauo&saiEftéaa
Qligièux' feruicedes Chrcftiens ArmcnienSj qui viucnt par les villes de
ssirmmiens.. Turquie ^maisauons trouue qu'ils approchent plus des ceremo-
chrtfïens, nies des Latins , que auDe des au très nations Chrcftiennes . Et
trefujfesetk combien qu il dcaaeure pîuûeuts-nations. Chrétiennes en vnc
TTTie' ville ou vn village Turquois y toutesfois quand quelque Arme-
œmonit ^nicnc&tttfyzfiéy il n'y a. que- les Arméniens qui conuoyent lc-
^frmmiew. corPs CTi ccrrc -les. Grecs aofli conuoyent les leurs : Car l'vnc re-
ligion ne çonuoye pas/autre : &c ne-fe méfient en rien desaffai^
tes l'vn de lfautcc:qui cfl la cauïe pourquoy l'on voit fouuct cinq,
ou fix cimetières par les villes de Turquie , appartenans diuerfe-
mcntàpluûeurs religions: car les Turcs l'endurent facilement»
Quand le preftre des Arméniens dit l'Euangilc , les affiftans ont:
accouftume de fè baifèr àdêxtre & xfèncftrc > en fîgne defc par-
Tttmfont- . donner rvnàl'autrc» Les affiftans entendent le langage Arme-
asrUttxde nien,que lepreftre leur parle. Tout ce qui cil eferit en Arménie
jfcV^/>re»* retient quafi tout de l'antiquité, qui eft commun aucckurvul-
ère leurs, gairc. Les Turcs fbnîi moult curieux défaire endoctriner leurs.
*$*«• cnfànsen kJettre Arabique^&pour cefairc plus comodemet,uV
ont raitexprefèmet fabriquer des porches^ lieux publics pour
enuoycr leurs enfans apprendre à lire &: à efcrire,& la grammaire
Arabique. Les filles aufli y ^>nt apprifes pat les femmes : & n'y a,
;..'.."•" ûgetic
Juifs mnkfr
m Tut*
Om$ E Ifc 7E E S * M R *. ÏEl»^ $99
g petit village , ou il n'y aie de tels porches ou appenriz , ou iour-
" Bellement touslcs garfonsdu village s aflerablcnt. Il font accro^ ^cenn^
©izà plat de terre cBlifàot; qui cûvne façon de faire moult pro- &&€ utm
pre aux petits enfans. Car cftans en ecfïe forte , {ont en grand re- "
nos. Quand les ieuncs enfans difent leur leçon, ils branlcnc tout
kcorps enauant & en arrière^ croyons que ceft pour! accent,,
& pour la difEcul té du langage.
X>esJmfsh(éhametpTmr^uicm Chapitre xn*~
j, Es îuifsqui ontefte chafiez cfEfpagnc & de Porto*-
J gai , ont fi bien augmente leur ludaifmc en Turquie,,
t qu'ils ont prefquc traduiér toutes fortes de liures en
___ l leur langage Hcbraique > Se maintenant ils ont mis
iiBprcflion à Cônftantinopîc , fans aucuns poin&s. Hs y im- 1UiP i
priment au ffi en Efpagnoi , Italien % Eatin , Crée, & Memânr^Jv
mais ils n'impriment point en Turc , ne en Arabe : car il ne ^
îcurcft pas permis.. Les Iuifsqui font par Turquie, içauent or-
dinairement parler quatre ou çinqfortes de langages : dont y en
a pluficurs quien %auent parler dix ou douze. Ceux qui (ç para-
rentd*Efpagnc,d,A)lemagnc>Hongrïe y& de Bocfme^ont appris*
h langage à-leurs enfans,& les enfans on t apprins la langue de îa~
nation ou ils ont àconueriè^comme Gzcc , Efclauon,Turc , A»
ïsabev Arménien, & Italien. B y en a peu qni {cachent parler-
François : car aufli n'ont à trafiquer auccîcs François. 11 ne fut jûfitrajjp-
©ne que les Inifs nâyent efte grands traffiqueurs % & ontfeeu ^mm.,
parler pluficurs fortes de langues : chofe qui fe peut facilement
prouuecpârlcshiftoriens:^ auffique l'eferiture faincreen faite-
mention -JZzt lors que les Irnfs vindrent de toutes parts des pays „
eftranges pour cftreàJafefte de la £entecouf£e en lerufalcm, les ^^^^
Apoftres de noftrc Seigneur n eftoyenriamais partis de Galilée ,
& ne (çauoyent parier que la langue de leur pays de ludee^ ton*
tcsfoisceiourlkvnchacuadeuxfçeut parler toutes langues de~
defïbusdc ciel : & les luifs qui eftoyent preieas , encurent gran-
de merueille : car ceuxx|ui eftbycnt venuz du pays des Eatthies^
& les autres des Mediens&; Elamites vde Mcfopotamie, M de
toutes parts de ludee , les auttes de Gappadoce , de Pont > de
^Afiei,dc2fidie>Eamp,hyîie> & Egypte, & des parties de Èy--
£Ee
4©ô TIERS LIVRE DES SINGVLA,
4>fe,& autres qui eftoyen t là venus de Rome , aucc plufîcurs pro-
fèlytes,c eft a dire ceux qui de leur bon gré s'eftoyét renduz lu ifs,
Sz ceux qui cftoycntvcnuz de Crcte.&d'Arabie^yans parler les
Apoftrcs^ftanstouseitonnez, fe demandoyent les vns aux au-
tres ,Oux cy qui parlcnt,nefont ils pas Galilecns î & toutesfois
nous oyons vn chacun noltre langage, auquel nous fommes nez.
Ces parolIcsTonc eferitesés a&cs des Apoftres : par lefqueîlcs
prouuons que de toute ancienneté ils trafftquoyenc par cous les
sjmfjate ^s ja jjjou^ç. La (implicite des Turcs aefte rendue plus com-
T*1*55 no'ree pour la conuerfàtion àcs Iuifs qu'ils n eftoyent auantqu' ils
rendue corn* r ~ F _ . ^ .*■ „ . r r - \
*«,/&. les eu &nt fréquentez : comme auiïi les t rançois te (ont quelque
peu changez pour la conuerfàtion des eftrrapgers , ou pour le.
moins leur efprjrs endormis en font quelque peu plus efueillcz.
Les Iuifs quelque part qu'ils foyenr, fontcanteleux plus que nul-
le autre narson. Ils ont tellement embraffé tout le traffic de la
• ' - . marchandife de Turquie .,. que la riçheffe&reuenu du Turcçft
entre leu rs-mains.* Car ils mettent le plu s haut pris à la recepte du
reuenu des prouinecs, aftermans les gabelles , &; l'abordage des
nauires Se autres chofes de Turquie. Ceil la caufe qui les fait s'ef-
forcer d'apprendre-les îagues de ceux auec lefquels ils. trafiquer.
les marchands Iuifs ont cefte aliuce \ que quand ils viennent en
Italiens portent le turban blanc, vouians par tel %ne , qu'on les
luippor en ^ Turcs : car on y prend la fov d'vn Turc meilleure que cel-
aeenTur* lcdv.nluir. Lesiiurs voyageurs portent le turban îaune: &ies
mues. Armçniens3GrccsJvlaronitessIndiens , Cophrhes , & toutesau-
chrefiens très nations de religion Chreftienne le portent pers ou bigarré:
portent le car jcs feuls Turcs le portent blanc. Et pource qu auons Ibuuen-
twbaâhgtr ccsf0js eft£ contrainâs nous feruir des Iuifs, & les hanter , auons
re' facilement cogn eu que c'eà la nation la plus fine qui foie , & la.
plus pleine de malice. Ils ne mangeront iamais de la chair qu'vn
scifmesentre Turc,Grec,ou Frankait apprêtée: êc ne veulent rien manger de
■Us iuifs. gras,ne des Chreftiens, ne des Turcs: ne boyuent de vin que
vende le Turc ou Chreftien. Ils ont tant de dirficuitezentreux.
iS^defçimieSjquc plusieurs font d'opinion contraire les vns aux
ïmfscùgnoip autres. Il y en a qui ont des efclaues Chreftiens tant malles que
jem^La-^ femelles, quiîesfonttrauaillercndiuers ouuragesleiourdcfa-
<rm J medy,comme ai imprimerie a Conitantinople5ou a iamarenan-
dife: Où (c feruent des femmes Chreftiennes efclaues x nç faifans
OBSERVEES lAR'P. BETLON. * ^ .' 40I
autre difficulté de fe mcfler aucc elles ne plus ne moins que fi el-
les eftoyçnt Iuifues. Toutes lefquelles chofes les autres reprou-
tient com me vnebcrefie en leur loy^oulans que ft vn ïuif a ache-
té vne efclauc Chrcftienne . il ne la doit point cognoiftre, encans
qu'elle eft Chrcftienne, ne faire trauailler fon efclauc au fàmcdy,
entant qu'il luy fait la befongne, Mais les autres refpondent que
cela ne leur eft pas défendu, entant que ce font ebofes acheteesde
leur argent. Et de bonne meraoirc-vn luif médecin fils du grand
feigneureftant à Cognes, au oit deux belles ieunes Efpagnoiles
efclaues Chreftiennes , quiparloyent aufïi Italien , qu il cenoit
pourfon feruice , Sjenauoitcu desenrans i.U toutesfois ils les
vouloir retiendrez defqueiles auons ouy dire auoir ducil qu'il leur
falluft tomber es mains des Turcs. Car quand vn xurc a ainû te- somme?
nu quelque ieune efclaue, & qu'il en a eu des enfans , il la reuen d Rendus par
au plus offrant pour en auoir argent,& en acheter vne autre.DSc paratefo*:
aduient que telle femme fe trouucra auoir efté venducaumar-
ché-vingtfois , trencefois , Se les hommes au cas pareil auoir efte
venduz quarancefois , telles fois aux luifs , telles fois aux Tiircs^
Les luifs plus fcrupuleux veulent nommément qu'il leur foie
prohibé de ne vfèr aee<; les femmes étrangères : mais qu'U leur Médecins Je-
eft licite s ils ont vne cfclaue de leur loy^de s'en ferait ainfî que Turfuc-
bon leur femble. Ceux qui medeeinenc en Turquie , par Egypte,
Syrie & Anatolie,& autres villes du pays du Turc, font pour la
plus grande partie luifs i cou tesfois il y en a aufli des Turcs : &: les
Turcs font les plus içauans v& font affez bons praticiens : mais
au demeurant ils on c bien peu des autres parties requifes aim bo
médecin. Il eft facile aux luifs de fçauoir quelquechofe cn-mede-
einexar ils ont la comodité des liurcs Grecs,Arabesa&Hebrieuxy
qui ont efté tournez en leur langage vulgaire,comme Hippocra- ^^ j
tes>jStGalicn,Auiccone>Almanibr,ouRa{is.,ScrapiQn> Vautres ria0Um \
aut heurs Arabes. Les Turcs ontauflllcs Hures d>Ariftotc& de xjam-^
Platon tournez en Arabe & en Turc- Les drogueurs ou mate- sktoa.
rialiftes qui vendent ordinairement îes^ drogues par les villes Drcgueisn
de Turquie, font pour la pi ufpart hommes luifs: mais lesTurcs f^J^f^
font- plus fçauans en la cognoiftance d'icelles , &; ont plus de ^/o:irri*4
matières medecinales ,. c'eit à dire des drogues {impies en ven-
te, en leurs boutiques , que n auons en Europe r tellement qm
h meilleur Droguifte deYcniie^ quelque bien fourny qu il foir,
EEc ij
^.01 TIERS XWRE BES STN1CVÏ.A.
n'aura pas tanedcpetitcs drogueries en fà boutique, quVndro-
Z&âles °^gucur de Turquie Nous ne difons pas en quantité de poix,mais
beaucoup de cn diuerfîçe<Èc nombrc<lcs drogues fimplcs. Quand le médecin
°£ltes' a fait fa recepte, il 1 enuoye au drogu ifte pour au oir des drogues
qu'il demande (car il n'y a point de ceux que nous nommons A-
poticaires ) & là prenant les hardes en détail les paye prefente-
roent : car toutes chofes en Turquie fe font à l'argent comptant.
Auffi n'y aiipoint tantdc paperas , ne de brouillats de debtes à
<credk,ne de papiers iournaux:&: de voifin à voifin en toutes mar-
chandées detaiiices,nc fc fait nonpîus de crédit, que fi c'eftoy ent
4csplus étrangers d'Allemagne»
Vutr4ffic7& des marcherez Turquie*
Chapitre xiiii.
E s Turcs n'entreprennent autre chofe , que ce qui eft
requisà leur rnefticr. Nous entendons des marchands
qui vendent à la vrayc&naifue façon des Turcs, ou
^^^^ des Grecs : Car les Iuifs qui furent chaûcz d'Efpagnc,
mfschtfé^fc quelques Cbrcftiens reniez, ont drefle des boutiques tant de
àzfkàgM- grofferie que de quinquailleric en Conftantinople, àla façon des
Latins y quiefteaufe qu'ils trompent 6c en abufent , comme en
Europe , ou l'on voit grand nombre de boutiques en chaque pe-
tite villette & bourgade, ou à peine y a dix ou douze fortes de
Turcs >^*chofes,encor font elles pourries & vieilles. Les Turcs font gens
longuement, qui viucnt longuement: car ils font peu délicats , viuans à tous
propos d'aulx joignons, ne bcuuans point de vin finon rare-
ment. Mais pourec qu'en temps de pefteils ne fe gardent de rie,
■ f & n'ont point peur de la prendre , ils y font fouuen t trompez.
T&p\ae Yous les tapiz coupez qu'on apporte de Turquie, fon t feulement
2£!w» &its àcçuis la ville de Cogne en Cilicie , iufqucs à Carachara vil-
mfcbame*lc de Paphlagonie. Nousauons dit que les fins chamelots font
lots. taitsdepoil de cheures à Angouri, qui eft la première ville de
Tafis 2<J>> Cappadoce : &: les tapiz font auflî faits de poil de cheures:
&**• mzis ceux qu'on fait au Caire , ne font guère beaux : car ils
T^iu çom fcuicmcnt tjffuz cn toillc bigarec , Ceux de Adena font
^* raids en feutres, fort légers U mois, à fe coucher dcûus. Les
Tares ontlcs marchez par les villes^ villages à vn certain iour
de la fèpmaine , tout ainfiqùea Europe. Les pay fans y viennent
des champs & des villages pour vendre leurs hcfongnas. Lcsvns
apportent du bois,les autres des œufs , du beurre , du fourmage,
de lafoyc,dufîlï&: ainfides autresXcs femmes Iuifucs.qui ont li-
berté d aller le vifage dcfcouucrt , font communément par les
marchez de Turquie vendans des ouuragcs faits à l'aiguille. Et
entant que laloy de Mahomet défend que les Turcs nefe trou- ^J££
uent en public à vendre ne achcter5cllcs les font vendre aux luif-' ■ m
*ics.Touccsfbis laloy neft gardée fieftroide qu'on ne trouuc bié ^
quelques Turques vendans leurs hardes par lesmarchez , ayans
vn voile deuant le vifàge,au trauers duquel peu uent bien voir,&:
quandellcs veulent parlcr,ncfont que hauccrle voilcàla maniè-
re dvne vificre de heaume. Elles vendent ordinairement feruiet-
tcSjmouclîouerSiCouurechefSjCcintmTes blanchc%fouilics d*orik
îiers,& autres tek ouuragcs déplus grande valeur,eommcpauil-'
Jons de licts,& garnitures de lias en diucrics façons que les luifs
achètent pour vendreaux étrangers. Les Turcs prennent plaint
àauoirdulmgeblancj&bicnouurc, tellement 4quilz ncplain-
dront à y faire defpece» Lô voirra védec deux petits mouchouers
ouurez vingt a%rcs, defquek nous ne prefenterionsfîx fbkaii Qu^ ^
pays de FranecLon fait diuers ouurages fui le linge en Tuf quic, fw*Z
mais le plus commun eft tel3que quandclïcs le veulent piquer , U
faut premièrement quelles désignent la toile dé peinture: la-
quelle puis foyuant entre deux filz , tellement que i'ouurage rc-
|*refèntc kpeintutc. Nous nouons point telle manière d'oaora-
ge en vïâgc ^ncla manière de le piquer* Car les femmes foy uent
i'cnttedeux des fîte auec vne aiguillefort dclice^cnfuy uat bpein-
«ure^Hes font leurs ouuragcsdc diuerfes couleurs de fcye* A pei*
ne pourtoiton croire en narpaysqtie rouurageiurlelmgecft
bien rcçeu & tenu cher en Turquie:^: qu'on y en fait gradequa*
tité.La raifoneft, que puifquc lesfemmes font ordinaircmet en-
fermées^ qu elles n ont aucun mefnage à faire , au moins quel-
les semployent à faire quelque chofo. Et elles n ayans le filer ea
grand viàgCjpaflèiit leur temps à faire oourage en lingc^
ErEe iij
4°4 tikks:. livre des ' sraGvrA.
Chofe digne de grande admiration^es Turcs^ui mangent l 'Opium, pour
fi rendre plus barda à U guerre*. Chapitre xv.
£Eg&^Q£N ne peut obfèruer chofe qui fcmble plus digne de
opium. ^ro^Sr nocer > cluc l'Opium qui eft maintenant fait en Tur-
#$\$£g^ quic , & principalement à Achara, Carachara , Spar*
Ttufcacwfc cade,Emetclin<lCy& es autres villes eirconuoiïînes de
Paphlagonie , Cappadoce, 6c Cilicic. Hz fement les champs de
Pauot blanCjComme nous faifons le bled:&: ont tel égard en le Co
mant,que chaque payfan en feme autant qu'il penfe auoir de gés
à le recueillirJEjc quand 1er Pauot a produit ies tcftesyilzles enrail*
lent de légère coupure , dont forrent quelques goûtes dclaicV,
qu^iîzlai&ntvnpeucrpoiffir. Tel payfan en cucillira dix liurcs,
l'autre £x,l autre plus ou moias , félon la diligence des gens qu'il
aura mis à le fairexar ce neft pas le tout d'auoir enfemencé beau-
coup de terre ,jnaisdauoir gens aie cueillir^ Nous.croyons que
fans ce qtie les Turcs lont en grand vfage > il feroit hors du cours
de Marchandife , comme pluiieurs autres drogues-qu'on neco-
gnoift plus. Il n'y a Turcqui n'en acheté : & n'eut il vaillant quvn
afpre , il en mettra la moiticen Opium > &; le. portera touflo-urs
auecfoy,tant en temps de paix que» guerre. Vn marchand du
' pays de Natoîie luifnous aflèuraqu'il n'y auoit année qu'on n'en
enleuaftcinquâxe Chameauxchargez , du pays de Paphlagonie,
C3ppadôcc,Galatie3& CiIicie,pourtranfportcren Pcrfe,Indie,
&ca noflreEurope,& autres pays loingtains , & auffi par taut le
pays ou le grand Turc feigneurie. Laquelle chofe euâions creu
malaifement, iînon quilnous.racomptapar le menu ce qu'on en
peut emporter de chaque village des confins de Garaehara y $$
des au tres..villes-de Paphlagoaic, Cappadoce, Arménie mineur,
GranJ^fi* & Gailogrece. ErdifoitaïUÏ^&elesPerfiensrauoyentenaoren
ge de lopin plus grand vfage que les TUf es.. Vn iour voulufmes faire expe-
w Twnjttie. periecce^de quelle quantité vn homme en pourroit vfer à la fois
fans auoir mal,& trouusfrnes vn Geniiîàire de cognoiûance, qui
auoit couftume d'en manger chaque iour,lcquel en mangea lors
en noftre prefence le pois de demie dragme. Et le iour d'après,
l'ayans trpuué près la boutique d'vn mercie^cn feifmes pefer vnc
dragme que luy hailiafmcs de rechef,.. & i aualla tput.à.vjie fois^
OBSERVEES PAR *. MLOfN. 4©?
fans que iamais nul accident luyaduint, fors qu'il cftoït comme
mhj5iff)u&qua6.yB^
dcrnc.La raifon poujrqupy ilz.en mangent, eft qu'ilz fe periuaxlér
en eftre plus vaillans,& craindre moins les perilz de la guerre , en
fbete que quan d Iç Turc aflem b le vne armée , il s'en fait fi gran de
di$.pation > qu ijz en, defgarni{Ten t tout le. pays, Hz ont vn com-
mun parlcrdc^encrçdî^pâHniiyrejVoiis. au^zm^ngé dei'Qpiû,
qui vaut autant quequî diroit à vn d'autre pays , vous cftes yure.
Vn Arménien Chrefiien chez lequel auons long temps logé, en
mangeoitfQUuept deuant nous : &rayansefprouué l'Opium, n'y
woquafinés autre, accident que de/chauffer la poitrine» &.npu s
troubler quelque peu le çerueai|,<S£ remet en dormant. Qui. vçm-^tufigrand
droit culduerlc Pauot en Europe». France» Alemagne, ou Izûïç > froid en n&
nous croyons qu'on en pourrait aufli bien faire, çommeen Aue, t°fofte»
inoyennantqu'on, prjnt la peine <fo le jceueillir^ainfi qu'il faut. Frmce-
Car leclimardç Na*c*liee;ft jhMS ^frçi4quç:ççluy;dePrance.1 1 cft
fait de mefme for^eque.lçs.autbcurs ont e{çrk.,$i nous en auons
point pardeça poflibie eft.il meflé : Caries marchands le multi-
plient auant. qu'il fojt diftnfeuç par les prouinces^&.ppur autant
qu'auons çqgneu à quVJIcspierquçs^lffôut^hoifcl aiipns bien",
voulu eferire. Le mci.Iîeôr eftforc.amçr^chaiKlau gou&yut<^iil^ion^
enflamme la bouche. Il cil de couleur iaunc ,.tirant fur le poil de ■°?lum?ar*
' Lyon , rarnaifé en vne mafTe comme vn tas de petitsgrains dedi-< *
uerfès couleurs. C.at m amaflàntledjtOpiam les grains ont efté ,
recueillis deffus les tcïkçs du Pauot , jciqiîelz amaflçz:; enferable,
s'entretiennent comme vn tourteau. L'odeur eneft iàfçheuiè Se
forte : & encore que Ion le face de complexion froide, toutesfois
il enflamme la bouche. L'Opium eft mis en tourteaux àçs Ie-pays
de Natolie,, qui n'exce^cn t ^oin^quatre onces, pju pouf Jeplus
demie liure:mais les marchands pour y gaigner Je multiplient de . ;
inoitiéjtellemcnt q;ie les mafïès qui partent^ boutiques Véni-
tiennes font qua&d'vneliurc.
,. £E? .ijii . ,.
4°& TIERS' EITRI Ï>IS &ÏNCVEA*
t>e$ fijmcsque les Turcs font à leurs amoureups: ^IhubiUement d&
fimmes Turques. Chapitre xvi,
' Ource qu'il y a grand* difficulté de voir les filles &:
^ femmes du pays âc Turquic^d'autat eft il plus di£
l fieilede parler à elles.. Parquoy quand quelque
' Turc veut faire entendre à>vnedamc, le defir qu'il
t a d cftrc fon feruitcur , il Fait tant qu'il fcnouue en
quelque lieu ou il la-voii de loîng. Les femmes de Turquie fe tié-
nent communément deflùs les maifbns, car elles font couuertcs
en teFra{fe.Dc parler àeWes.(cammc auons dit} if n cft pas aifé , 5£
auffi qu allans par la ville elles ont le vifage couuert :.mais on les.
peut bien voir deîoing. Parquoy le Turcayant appcrçeu celle*
dor>til eft/eruiteur, il baufe fa tefte , & met lajnain àla gorge , fe
pinçant la peau du goficr , en Pendant vn peu , luy dénonçant .
BZtdue ie Par ce* %nc 3°*^ c& ^ cfclaue enchainc v & luy cft fèruiteut
extrême fit* d'extrcraefcruitudciçafen ce pays là , on ne peut s'a du ou er de
mué*. plus grande extrémité, que de fe faire efcîaue enchainéde quel»
qu vn.^ Et fila dame fe tient coy , ou qu'elle baifcla.main}il en
prend bonflcefpmnce..Ceftchofe trefdiifîcile de voirie v-ifage
dvne belle Turque au defcouuctt ,& eft plus difficile crvvnîiea
qu'en autre :car leurs maris leur-oftent l'vfage des feneftres , qui '
ncfoycflten,trillis. Ceftla<:ouftume tardes mariezqu a marier.,
vieilles .ou jeunes , qu'elles foyenr totifiours enfermées. Elles ne
&rtcnr point, fîcen'eftpout alîer prier pour les morts, ou aux
baings rmaiseltes n'y vont guère qu'en compagniedautresièm-
mes^: y vont pluûcurs fais la icpmaine : & d'autant que les fem--
mcsTurqucs (somme dit Mahomet ) ne vont point en paradis^
■wTo/W auflinevoncclles point ll'Eglifc: car Mahomet ne l'a permis.
» faLlk Pource (dit-il ) qu'elles ne font çircon eifes comme leshommes*
Pluûcurs ont eu opinion qu'il y,a vn lieu es Eglifes peur les Tur-
ques : toutesfois nous ofons aiTeurer qu'il n y en a pointrcar nous-
en eftas enquis^ousceuxà qui auons parlé ont dit qu'elles n'en-
trent point es Mpfquees.Toutcsen general,tant en Turquie que
lxsT^ues en Arabie,^ pays fubie&sau xurc, porrent.des bray es larges ÔC
faits, longues comme chauffes à la marine , qui trainent iufques defilis
ks ibuliçts^ ,âUPAS trouuc .que laraifon & couftume de cefte re-
doubicute:-
OBSÏKVEES *À*. *. BILOtf* 407
«îoubîeurc ( donc Ion s'cfmcmeilleroit beaucoup fi la difions)
vient delà, dont il n'eft licite endure dauantage>non pas feule-
ment en pareilles couucrtes : car c*cft vne obferuation de trop
grande cutiofité. Et pour neaat n'a efté dit en commun proue r-
be , Diuers pays diuerfes guifes. Il n y en a aucunes qui portent
auant pied , ains l'ont toufiours tout à nud dedens les fouliers ou
botincs , àc communément portent quelques carcans ou bracc-
Jcts en tour les ïambes , au demis de la chenille des pieds , qu i leur
PortmB ivneTurcjuc i*A f[ic
Nf-
*4ot ■ T t ï R S "L I V Hï" t> ES ÎIK G V L A.
■eu ornement <lc bonnegracc. Lon n'en tronuera pas beaucoup
"au Caire*, 'qui n'ayent les bras &: cuïrTes^ouurez à la damafquwie;
v<:àreftariVcs oaings; fc forir treffcrla peati felonia poftraiéhirc,
""A: la coUlènt'ribîfc entre çn;fa 'peâtr , quïy demeure , tellement
-qu'on leurvoit des cercles fort bien marquerez fur les btas,& au-
tres'endroich du corps : mais telle manière défaire n'eft encor
"Commune anx^fémmes d' Âfie^Èqpouree quela îoy de Mahomet
ïeurderenddene Fç rrronftreren public le vïfagedefcouuert , el-
les ont toufiours vrrvoilefuxles yeux derTtrsïe front , &: auffi ont
3a gorge & les mainscachees. EM.es portent des botines de cuir
quifont hautes & ferrées paMe Salon, comme Ion voit parla
precedenre peiner ure, /.'""/.
Hthillemets Les robes des Turcs fontrlànscoIets}&: n'ont point de mâches,
des Turcs. ou bjcn e}jcs fonc fort courtes, & quafi toufiours coupées au def.
fus du coude. Les mefmçs robes des hommes contiennent aufE
auxfemmcs.Ilz vfent cc^mtmémcntde:piqueures,& principa-
lement deffus la foye:&r*auant que de piquer,ilz la rayent auec vn
fer chaud,qui luy laifTe vn ply imprimé, & qui ne s'efface iamais,
PourofierUs non plus que celu y dachameior. Hz ne mettent iamais charne-
ls <M*= lot ne foyeen befongnë,que premièrement ne luy ofient les plis,
v*1**; u quiefl chofe facile à faire : car comme le chamelot prend fon ply
BMemêti auec la chaleur^toutainii la chaleur ren peut facilemet ofter.La
desTurfas. iov<icMakomctveutque les femmes foyent fimplemctveftues:
toutesfois quand elles ^onthors , ou aux baings , ou en compa-
gnie d'vnecfpoufèc , toutes portent acouftremens de fine toile
-blanche par le deffus. Et pourec quelles ont des beaux accou (tre-
menspar dcfTous , qui font de fine foyc,elics trouffent les blancs,
à fin queceux de fine foye apparoiffent. Leurs manches font fore
cfkoicl:es,&: fiiongues qu'elle pafïènt les mains;car la loy ne veut
pas que leur mains n autre choie de leur chah: apparoiffe en pu-
- . rli bîicXes Turcs & Turques portent des chauffes fans auant pied:
tïmLpàr* car hommes & femmes fc lauent les pieds , les mains , Se les bras
teshoteufis. iufqucsau coude, & le col pareillement. Quand ilz vontàleurs
affaires ncccfTaircs,ilz portentdc feau en vn pot à bouquin pour
felaucr&ic deuarft &lcdcrrferc,gelaftilàpierre fendanr, Hz
acouftument telle façon aux cnfans,tant malles que femelles , &
le continuent toute leur vie:car Mahomet ne leur a permis fc fèr-
uir de papier au autre chofe en tel affaire, auquel on peuft eferire
îenomdçpicnpardcfrus. Leurs. prjuez font accommodez cfe
telle forte \ qu'ilz fon t vn. pertuis cftroicl: &c long encontre terre,
ouainijracro.upii.lÊux ekkcilc fç laiier auec la main. Çeit le par-
don-que MabûmeLl^tir'a doope vque (c lauans fouuet les parties
honteufes ,fe purifient de leurVpechez. De Ikeft venu qu'ils ont
des auges pleines d'eau par les carrefours des vifles,enferroces en
quelque pétïtcdoflure , là o.u les, nom mes entrent pour fç-lauer à
patt,&: les femmes à pirçmais! en' leurs' maifo'ns leurs priuczfbni
communs* . • -
Que les Turcsayent flufiems femmes efyoufees, qui viuent entr elles fins
'difcordne iahujîe auec les concuUnes ^efçL^es femelles. '
'/.':' .. '. Çbagitrc' xvii- ".'-.'' . ." "''.".
Es Turcs font naturellement moult auariefeux, & ^imâe^lâ
grandement tirans à largentiauffi leur plus grande °^™n **
richeiïe &,.traffic e^d'aiioïrdçl argent comptant. ^^sne
Iin'y.a'au.éuné "bquhçÏÏc daquçfter/&:'parc6.n{c^0W^M,flsl
_ quentpoihtde plardoyeurs:carquandilsvcndcntr;<r/ïf»r*r'
& achètent quelque chofe^Iz payent l'argent coptant.Les hom- ftk
mes ont f ceconomiç & adminiffration delà maifôn x rie laifFans. v ... ; .,:
aucun gouvernement a îçùrs feniincs. Elles^n'ontxharge de rien . -
que des enfans,&viurc en paix, qui eftehofe du tout contraire à-,
la façon de faire des Latins, dcfquclz les femmes prennent non ritf ^
feulement l'adminiftration des biens,mais aumU au&orite &" ab- »^w.
foluepuiflàncc fur tout le corps', &: fouuent TotitTes maiftreiTçs:
mais cft bien îç contraire chez les Turcs>qur font gens de mefna-
ge:car vn qui aura crois ou quatre femmes 5 efpoufecs, & fîx, fept-
ou huid 5 ou plu fleurs efclaues femelles , les tiendra toutes en &
deuotio,& les redra^enseble eafî bone panecCjqu'il n'aura crain-
te .de iaîoufie entre Ces femmes £i cfcîaues.L'â raifon eneft cuide-
te:ear cobie qu'il leur foît permis fe marier à quatre femmes à vn
coupjtoutcsfois elles font égales en puiffance:& faut entedre que
tat les femmes q les efclaues ont efteachetees à beaux deniers eo- FilUsdeTw
ptas,d autâx que la çouftume cft 3 que quand vn Tùrcra vnebcllc îui€-
£Uc à marier>ce luy eft autat d arget coptât en fa beurfe. Les Biles
apportent point d'argent de douaire i ne meubles de la maifori
EFf ijv
4IO TIERS tlÛï'-DES S I"K G'V L A.
de leur per c,ains faut que ceux qui les veulent au oir,Ies achètent
en baillant grand fommc,& les kabilîent,& lepere les liurera aux
plus ofFrans,& les ayant dclïurces,Tiefe foucira de les reuoir. Par
ainû il n y a pas fi grand lignage de parenté en Turquie , comme
en Europe. Et qu'il ne {bit v*ay,les Turcs n'ont point de furnom
qu'on puiflè aduôuer venir d'antiquité , Se par confequent n'ont
aucun tiltre de maifon ancienne , ne mefmement le grand Turc
n'en a aucun /mon dés Otonïaris: maïs les payfans n'ont point de
di&ions pour nommer leurs parens : car ( comme auons dit ) ilz
changent fouuent de femmes. Parquoy il y a peu d'amitié entre
lespcres&cnfans. Ceîuy en Turquie qui fera le fils d!vneclclâ-
F&desefcU* ue,n'àura non pfusoV vitupère que s'il eilort fils dvne des fem-
««. mes légitimes : Se n'aura pas honte d'eftre appelle fils d'efclaue-
car vne efclaue n'eft pas réputée pour aduhere.-comme auifi fi vn
Turc auoit efpoufé la fille du grand feigneur , Se qu'il fuft aufli
" . . marié auec y né des plus pauurcs filles dVn homme mechanique,
; ton tesfois faudra que la fille du mechanique foit compagne à la
fille dti grand {eighèur. L'es" femmes efcîaues feruéntà tout cela
que bon femblc au Turc : Se fi elles ont des enfans , ils tiendront
aufli bien leur nom, comme ceux de leur femmes efpoufees. Par
Femmes des^ ^^ jcurs enfans ^ portent pas grand amour au père & à la mc-
îruresnoat \ r^nyn.fccrc n*ayme non plus fa fœùr, qu'il feroit fon voifin. Les
aucmaedit. fcmmcs cncorcs quelles foyent ainfiaffemblees, s'acordent bien
cnfemblc: careftans enfermées es chambres n'ont non plus de
crcdît-Tvnc que l'autre , Se ne fc méfient de rien > finon de ce que
leur mary leur acomandc.Aufïi n eft-cepas lacouftume enTur-
Turan'ont^ qUjede dire^adame a comandé cela:ou dire, elle veut qu'il foit
mat ^>^faicain{l. Encs ne portent point de gros clauiers pendus à leur
' ^ ceinture pour acquérir le nom de bonnes mcfnagercSjains au cô-
:traïrc ne manient aucunes clefs. Elles ne cdnfoment pas vn quart
d'heure le iour en faùant tout leur méfnagcîcar ii fuffit à vn Turc
pour toutes vtenfiles de mefnage auoir vn tapis par terre pour
s'afièoincar ils n'ot vfage ne defcabelles,ne de felles>nc de bâc,ne
de tabIe,ou buffet , Se le plus fouuét n ot aucû chaflid. Ils Bot en
tout fino quelques couffins pour s"appuièr>&'qnâd le foir eft venu
ils cftedet vn lodier pour paffer la nui&cc:&îe lédemain matin ils
pliet le Iodier>& le mettét dcfs*vn ais5ou le pédet à vne perche.Et
y a peu de gens qui vfent de linceuls : car les homes Se les femmes
OBSEUVIES PAR P. SELON» 4*1
changcntlcfoir de braycs de linge blanc,faites comme chaufles à
la marinCjqu'ils portée la nui&,Ils n ont point accouftume d'em-
pefcher les cfcîaues à fourbir leurs cfcucîlcs. Auflï ne font ils pas
grand parure de vahTelîeicar il leur fufEt d auoit vn pot pour tous
potages ,& pour toutes fouppes vne cfcuelle : Se ne faut point
rinfer les voirres : car toute l'affcmblce boit à vn vaiffeau de cuir
ou de bois. Les hommes ont en grande recommandatiô de por-
ter leurs turbans fort blancs : toutesfois eux mefmcsîes îauent
aux bain gsauec leurs b rayes & chemifès,ou bien les baillent aux
efclaues descftuucs à bïanchir.Lcs Turcs nediffinentpas lavail-
lantifè ainiî come nous : car en Europe fi quelqu'vn cft toufiours
preft à fe battrc,& fçait tourner les yeux en la tefte, Se eft balafre,
iurcur,& colère, & a gaigne le point cTauoir démenti vn autre:
icel uy fera mis en pcrfpeâiue d'vn homme vaillan t,ioué homme
de bien. Mais les Turcs en temps dcpaixfe montrent modeftes, ^* j^L
SC pofent les armes en leurs maifons pour viure pacifiquemét, &jeSm
ne voit on point qu'ils portent leurs cimeterres allans par îaville:
mais quand ils vont à la guerre , lors fçauen t ils mettre couteaux
fur table quand il eft temps, 6c font apparoiftre leur vaillatifcfur
leurs ennemis : 6c n'orra Ton dire qu'ils fe foyent batusentr'eux,
Ets'iladncnoitquervncuftbatufon compagnon , pour ccîanc
fera il cftimé vaillant. Ils ont vne couftume moult icante de pu-
nir les délinquants a coups debafton; qui cft la vraye façon d'hu*
milicr les fuperbes, 6c punir ceux qu'on, ncveutpastuer:&fi
fçauent bien faire iufticc des malraideurs d'autre manière plus
violcnte,quand ils l'entreprennent.
Prouve emdente , que le Turc peut plw facilement ajfèmbler cinq cens milk
hommes en vncamp?& vne armée de deux cens galeres^qu "vn vautre
Prince cent mille. Chapitre xviiï.
> Ofons le cas que le Roy ait îcué vn camp de cent mil
payfàns pour conduire loingen guerre, ou vne armée
\ de deux cens galercs,& autanrdc nauircs. Croira l'on
» pas qu'ils endureront mieux letrauail que ne feront
autant de Gcntûshommcs? 6c qu ils ne fe mourront fitoft pour
froidjChaud, faim,ou autre accident, que ceux qui font plus dé-
licats î Sctaifànt de la vaiUantife^e sous accordera i'onpas, que
FFf iij
4Ï£ - T-IERS LÏ-VRE DSS SINGVJLA.
uTwcmet OUy > Qui croira que le grand Turc allant en guerre, pui{ïèmc~
fix cens nul ncr vne {i grande armée ? L'on dit iufques au nombre de fix cens
hommes en ^jfi ^jjj^, Phificurs s'en, efmerueillent:car oyans celle roui-
f*mç<igns* CjtlwjC9CfticqcnCjcftrc impoâible,tantpour la difficulté qui aduiec
à vne fi grande trouppe eftant en vn camp- , que mcfmement vn
Rpy.yn Empereur d'Europe , font bien empefehez de nourrir v-
ne. armée qui pafTe cinquante miL borrunes..Toutcsrois cela qu'a-
qonsdit du Turc ne fernblera fi difficile > moyennant qu'on face
cpmparaifonxic noftre manière de viure à laleur. Car la manière
qu'ils tiennent viuans en paix,enfeigncra que fi grande aficmblee
peut viure en guerre, & qu'il {bit au fli facile au Turc mener vn
camp d'vn million d'hommes, qu'à vn prince QircfUen,einqua-
te millc^Etpour le faire brief,,leur manière de viurc cft tant au-
ftereen paix, qu elle nous fernblera cftre vne vrayeguerre.. " Ce
neantmoins viuans de telle manière, eftiment ne plus ne moins,
qu anous viurc en délices : car ils y font accouftumez dés leur
ieune.aagc. .Geuxquionr accpuftumé coucher en draps , defïus
la plume dedens vnlî&, &mâger tous les jours delà foupe chau-
de^ boire du vin dédite à tous repas, perdroyent incontinent
leur courage s'ils defaccouftumoyent ce train là: éc auffi s'ils ne
veoyentleurs biens quelquesfois 1 an ,. pu. s'ils efloyeat trois ou
quatre ans-fans voit leurs parens,ou en auoir nouucules Jefàfchè?
rontd'ennuy. Mais toutes ces chofes ne font rien aux Turcs: car
la vie qu ils font en leurs maifons,cft encore plus auftcre,&eftroi-
cre que n cft celle qu'ilsfont eftans à la guerre. Le Turc ne fc&ïZ
point des eftrangers en fes guerres , &: qui plus eft ne fe fert finon
de ceux qu'il foudoye & nourriflen temps de paix : parquoy cha- ^
cun ltiyxftantdeuot^eftpaifibie&fnpportepatiemmentlestra.- "
uauxdcla guerre,encor mieux que ne fouloyent faire lés légion-
naires &: foldats Romains.. Parquoy le grand Turc au contraire
des princes Chreïliens gaigne beaucoup lors qu'il fait la guerre,
jKHircequ'il vend .lesprouifions. Vn foldat Turc ne fe faindra
point d acheter vu' cheual cinquante efeus , & neuft il que cela
vaillant : mais il fait eftat d'en auoir pour fa vic:car les Turcs ont
accoufluinéde garde* vn cheual vingt ou vingt & cinqans.Tanc
.eux quckurs cheuaux ne couchent que fur la dure.Lcs cheuaux-
ne mangent iamais ne en mangeoire , ne en râtelier , non plus en
le^s.m^fonsqualaguerrc, &nefeçpuciient iamais quefuda.
OBSERVEES" PAR P. BEL ON» 41$
•**•«• fons-caillcLa richefle des foîdats Turcs ne cofifte en terre, Les "M"**
Ticen maifons,maiscn^rgecçoptant:carsilsauoyetaçhetequel. ^ £ ^
ques terresen loir vie , ce feroit pour le grand Turc après leur m c^mt
jnoTC. Parquoy ils ne bâftinentguercs :-te queîquepart qu'ils ail- ^jy ^
lcnc , ils portent le mefme potdecuiifre dont ils fc feruoyent en dure, hyun
temps de paix, & la mcfeic efcuclîc creufe ou ils mangeoyent: er éfté.
aufH toutes leurs vtenfilcs qu ils auoyent en temps de pai£ , leur
"feruent en guerre :'te ne regrettent point leurs biens: car ils por-
tent tout quant te eux : te ne vont iamais fans leur fufii , foyent à
4eurmaifon,ouàla guerre. Leurbrcuuagen'cflquede leau, te Twa ^^
mandent communément des aulx te oignons. Que fçauroyent dehau.
ils donc airoir pire^la guerre qu en leurs maifons^ Somme qu'ils
<jnt autant dauatagè fur nous au meftierdela guerre dcftreplus
ruftiqucs&paifans, que nous auons dauantage fur eux en paix
*d eftremieuxtraictez , te plus nobles qu eux. Et pource que na-
ture leur a donné par douaire d'eftre champêtres dés leur ieune
aagc3tout ainfi félon leur couftume font ils mieux apris 4 fc %a-
Cjueir bien camper deflous les tentes te pauillons> Et pour autant turcs gm
qu'iîsont de la toiilc de cotton fort legierc te douce 5iis font lemsruftftes.
pauillons &: cordages bcaucoupplusaifezqucles*noftres de lin Grand ifd*
*ou dechanurc. Les cordes de cotton font délicates, molles te le- «g? de cotton
gicrcs , qui iamais ne feroidiuentpourauoirefté mouillées, au w ^wf*f«-
contraire de ccHesdes pauiîlons de noftrc £uropc,mal feantes te
propres , te qui s'cnt-orallentéfoct àla^pluyc -, qu'à grand peine
les peut on manier. Encor que les Turcs n ayent aucun foupçon
de guerre^ que les chafteaux foyent en pays de grande feureré,
û eft-ce qu'ils y font la garde^omme s'il y auoit guerre. Nqus les rdourlm
oyions foir te matin fonnâs les tabourins, te faifans vnc merueil- deTwrfue.
4eefe mélodie, accordans enfèmbîeauec les hauts bois. Us ont
deiïx fortesde tabourins -,- dont y en a des petits , quife pcuuent
^portera cheual,& qui ncfont enfoncez que d'vnbour. Les au-
tres font plus grands -, enfoncez par les deux bouts z mais ils
*n'v{ent pas decourts baftons à les batre comme nous faifons : te
•auffi ne les portent pédus au col, ains en les bâtant font appuyez
-contre terre, & en les bâtant frappent les deux bouts , à dextre
"-te à feneftre : Car de la main dextre ils tiennent vn bafton
-courbe comme camus en façon de billart,frappans!e£bnsdu
-tabourra à dextre , te en l'autre main fcncûre tiennent y&c
. • -- FFf iiij
414 TÏER.S LIVRE M S &INGVLÀ.
vergetcedclieequi redouble plus foiruent que la main dextre. Le
7fJ°iïrm tabourin qui eft double cfl moult facile àporter àcheuai,dontle
Autre maJ^ c^ d'erain,.& Y cn a tcmfiours YD plus petit que l'autre : 8c faut
nicresde u* <IUC *c Tabourineur foie courbé contre terre en les batant,ou bie
hourins. qu H les aie appuyez quelque part. La garde quils font la nuiâv
Ug*rde<]uent& pas faite à clochettes^comme nous faifons t mais ils s'entre-
fotlesTurcs^ parlent crians&refpondansrvn à 1 autre à haute voix -.laquelle
chofè auions auparauant obferuee k Rhodes. Les Arabes ont
appris les Turcs à Tonnerres hauts bois auccles tabourins^ qui
eft moult bonne manière tant en temps de guerre que de paix. Il
n'y a Sangiac qui ne loir tenu d*auoir des loueurs de tels hauts
bois , & auHl des tabourins, &: principalement là ou il y a cha-
fbaux à garder. Les hauts bois font courts, mais larges par bas,&:
foncvnbruiâ: moult efclatant. llsfe pcuuent facilement porter
à cheual,& accorder auec les deux efpeccs de tabouxins. Les fol-
dats Turcs portent ordinairement vnc petite coignee pendue à
la ccinture:auffi eft-cc vne couftume à tous Turcs , tat riches que
pauures,d*enauoirvne, tant en paix comme en guerre, qui leur
fert en deux- façons dyne c'eft , que tvn des codez de k coignee
ou hachette tEenche,& l'autre eofbe eft en façon de marteau .Dot
ils frappent & fichent les paux de leurs tentes en terre.' Le coflé
qui taille,cbupe le bois à.faire les piçqucs > & pour faire le feu à la
campagne.. Celle manière de hachette eftmoukiolimentfaitCj
dont en auons bien : voulu eacfcrite la manière.
jyvnepetiu hachette pxopre à tout ^ujkge-^ tant à la guerre comme en paix^
commune aux Turcs.» Chapitre X 1 X.
tEvx qu i font telles hachettes cn Turquie, prennent
| vnc niaûe de fer pefànt cnuiron vnc îiure & demie,,
j puis la percent par le milieu auec vn gros poinffon de
3.kr. L'vn des eoflez de la hachette pprte yne greffe te-
fie de marteau,& l'autre collé tranche JEt faut en la perçant qu'il*
en laiffent au tour du poinffô celle part ou 1 on fera ïe percuis qui
empoignecale mache,quafî à la manière d*vne bocflé. Les poinf-
fbns font de diuerfes façons. Lesvfcsibnt ronds, les autsesfont
quarrez. Barquoy le permis de la hache prend la forme du poinf-
&n,&L fimuiccei3&ircment qu'il eatre par dehors en cftf ccif&n r,*
OBSERVEE5. FAR F. «ELOtf, '415-
fin quclc manche entre au fïï par le dehors. Il y a pluucursbouti- J-
quc&dc Tourneurs en Conftantinopie , qui ne font autre chofe <^k*&*.
que tourner lebois apporté par mer pour faire lesmanches : car 'T' .,r
les nauircs qui retournent de la mer Maieur, viennent fouucnt Men<rrefa
chargées de bois d'Afphendannos, c cfi à dire Erablede monta- jfm ô
.gnc,dedié à-telles emmanchures:. comme aufïi du bois decœr- Tourneurs
aailier3q^i de duxté furpafïê tous autres bois. L'onvoit telle fois de bois en
nauirearriuantdupaysde Mengtelie à Conftantindpic, toute nvfû*
chargée de bois d>If,rouge& blanc; car d'autant que les Turcs
ne fefèruent point d arcs de bois, ils ne font difficulté de mettre
1 efeorce des Ifs aucc la partiedu cceur pour faire de tels iȉcbe&
nousentcndonsledchorsquiefl: blanc, ^iededensquieftroiî- ■ . « :
ge. Les tourneurs de Turquie befongnent cftansaffis, &: n'ont
point de perche pendante à tourner leur bois , mais aucc vn long
archet tenu de-la main gauche, £bnt tourner le bois*^ delà main
dextre tiennent le fer qu'ils renforcent & rafferminent auecle
pied, prenans le fer entre les deux orteils , qu'ils meinent çà & là
pourfairel*auuragc,qu,ils fe font pfppofé faire.
J>esTuycs^quhetiennmtplt^ei^scbûpsdc^ti^uitS»
Chapitre' x x.
> L y a encor bcaucoupde chofèsentre îesTurcsquifè;
* refentent grandement de fexifiqyité : à. l'expérience £ n n ^
jdcquoy voulons amener vue façon de fc brufler les rJ^ - r
j membres que les Turcs font eux mcfmes fans- le coiv-
fcil du médecin. Oefî, que quand il leur furuient quelque deSu-
xion,ou mal de tefte,ou fur autre partie du corps, ilsbruflent ice-
hiy endroid auqc de l'eimorcc , ou de drapeau. Mil fixons ans ai
gaffez que les-Grccs en- ont fait mention,; nommans telle bruflu- ?.
re,vftion Arabique : & eft fi bien continuée chez les Turcs Se A- ^W
rabes, que pluûeurs ont le front &c les temples & autres endroits- .
des membres ticatrifezt de telle brufluscs» Nous auons trosué "
telle manière de brufîure auoir moule grande verto.. Car efrâos à*
Saîonichi ville de Macédoine, en reifmes rexpcricncc fur vne ] " '
Iuifue,quc guerifmes d vn mal de tc&c,qu iluy auoit duré plus de-
ux ans, ayant pris le remède que Diofcoridc faifoit en guerU&nc ^ * "
lafdauaue: feauoir c^lây-mettant des croecs de efeeure ardanecs
GGg
■$l6 TIES.S LIVS.E Dï^ SINGVLA.
Sieâec'me cn celle foffe qu'on voit à la racine du poulcc en la ioin&urc da
"fà»gùenr bras: &futaiïczîny enanairrais. cinq pourla guérir. Les Turcs
Tmgriefmd £ont ^ica autrcnj5£ j car au mal 4e tefte ou en autre partie de leurs
^ * corps , ils prennent de la tqille de coton entortillée , à la largeur
d'vnfoudjquaûdclagroûcurd'vnenoix: ouen défaut de toillc,
prennentdc i£fmorcedeharq.uebouze ,.puis,r.cnrlamment Se la
mettent deiTus Iciîeti ou ils fentent Mouleur , & la l.aùTent bruk
- . 1er iufqucs à tant quelle s'eftainde d'elle mefme,& qu'elle ait fait
cendre.. Ils ontfigrande patience d endurer la brufiure^ue mef-
memc^tootJa-conûance^
âfidcffasLÎachai^^d'çlle mçfme fans.y rien faire. foi£rç&0*&e.
Tuks h* Il&ne mettent neri pour cpnfolidçr la -bhïfîure: finon yji peude
^ardeux à cotton pat. delïus la trace. Les xurçs entourés fortunes pronon-
toHiferils. CCDC çemot0 Ajauata^ejï^di^Dieu aidera. Parquoy eftimâs
Icutforwne^ç^çftipçcjfpntha^açdcu^ à tous périls fur mex/ut
Xcrie^autCûrjabats.:. ;. - .;-/.;.-.,. :. . . -: -' :: '-"- -- -
V es Religieux de Turquie.. Chapitre xxi.
£ S/+Trirc^î3nt quelque manière de gçnts en.afcux,no-
iriez Demis, qu'ils 'eflimcnt du tout innocents , Se
pour religieux , lefquels ils nomment dVn nom qui
^^^^^ _ approche bien près des Druides, c'eft à fçauoïr les an-
çiens,phiiofpphe;s.Grcçs.qui eûoyent colonies. des Atheniés qui
The**. fcpartirent;ÇtePhoçaîapour{c venir tenir à Marfeille, laquelle
ils édifièrent. Ces Deruis font communément tous nudstanten
hiuer comme en efté,&: ont les bras Se la poiefrinc pleine de cica-
triçeobiîques&4ctraucrs, qu ils fcfpnt aucc leurs cou ftcaux.
Mais ontç^rdçnfc coupant de faire la pîaye plus fouucntca
% . îongqu'en trauers; caries mufclcscn font moins offcncez.Ils ne
f^s*^ viuent iînon des aumofncs que les Turcs leur donnent. L'opinio
pifàr du peuple en lendroid de tels fols , neft moderne : car mefme-
" ment Platon parlant de telles gens ,:attri.buqit icçlje folie à y ne
yatiâttiL eipecç de manie ou defurcur,difant que cela.prou;ict:d vnecita-;
*mrs; .„ fîs,c'cft à dire qui faifoit les imaginations qui leur venoyent diui-
ratictnotiù nemenc cn prophétie comme aux vaticinatcurs. Ceft ce que les
fttmmie ^nt j^j parlâns de l'imagination ont attribué à quelque diuini-
'*rj*rm' t^commc aufla ont4it des^ Sybiiics, Cçftç;opinion çft ■ auffi riçv
Vmitf.
. ?. 4»-b s s ivns ; p:à s; ' &; b rto w. r 417
: 5ocrarcs,qaidifoit que les imaginations des variefnateurs vc-
jinyentdiuinement par manie ou fureur. De ce aduient que les
abufeursqui contrefont le&. rnfcnfez, ont gaigne le nom de pro-
phètes en Turquie, v &- fën* cfriincz: innocents y-& remis pour
' vrays religieux. Ils contrefont îcsfols,, &fe coupent &: entartrer
la peau à leur efeient , tant de la poictrine que par tous les bras:5£
pour ce qu'ils ne mettent vnguent dcfTus , la cicatrice demeure
- enflée , groïFe comme le petit.doigr. L'on envoirra pîuiîeurs fi
fort déchiquetez de telles lignes,, que cefkgrarid xas de les voir.
Nous ne fçauons qnellefurcur prophétique > ou cfpccc dema-
in e fait qu'ils fedecouppentain fi la peau,. &: fe brufient les tem-
ples. Quant ànous, efHmons qu'ils neifont pas fàges.U y a de tel-
le forte de gensmouit fîns'frctez,. qui amaiSàithcaucoup d'arget
pour faire le voyage de laMeque , te aller oagiit Mahomet : car
quand ils en font retournez lors fonr nouxriz entre les Turcs cô*
me petits Cadets. L'enfcignc qu'ils portent pour monftrcr qu'ils , r.
font religieux de Mahomet , eft .vne peau de brebis fur leurs ef- ^. /^.^
pâules : te ne portent autre veftement fur eux -fin on vne fexùc der^uk.
peau de mouton ou de brebis , te quelque choie deuant leurs
parties honteufes. Il y aplufieurs de tels arîe&ez en diuers lieux
de Turquie „ comme à Conâantinoplc, Damas;, te 3U^ Caire,
qu'on voit enrertez dedens dn.fourmcnt , t>udu mil,, qui font Z&jneux
tous nuds , te n'en .partent point le iour : ilsierv.eautrçotieansjdr eœfr£v -
:Coite te a autre , te tiennent des proposa entant pour rairc rtre,
.difans chofes impôuibles^outes mal à propps,tour ainû comme
^.uan:dles.enfansparkn£ksvns.aux-aucr£5»,I}s.rpnt en quelque, ..:; ..
petite maifonnette>&: tout le tout n'en bougeront \ te 'les pafi.2ns. : ; -
qui panent par labeur iettenc quelque chofe pour viurc.
I&miwierecU garder U nége&.hgUcetoutlfâ commefoxt: . .
: .7. . . lesTmcs,, ..l.-.z..: JCbjpàxez: XX-H*;.;;.- -..*:..- .
rffucSSjiX S tans l'hyuer.en Myfic te.cn Papbîagonie , oWêr- pour garder
jS il!!?! ■aaûncs cn£Ju£eurs lieux eommeils ont couftumede l* n%^
ÏÏG -I^Tg* garder. la sieige te h,..glzcc qu'ils; vendent, eu dké
•&ra^^>otir rcfraifchix les brçuuages33piiH»£Z fcbrbetsdLeur
couitume e(l de ne boire pointdc vùv.parquoy il y a quelques
.". GCg ij, :...
~4lS TfcE^* LJVJLSl DES SïNGViÀ. '. «
Turcs qui ne vivent d'autre meftier en cfté,que de faire vnc forte *
de bteuuage dotix,appellé Cherbet. Car le. vin y cft nommé Se-
s"f' rap. Il y a boutiques a cecxprcûes.Àurliy a diuerfes manières de
Sorbet. Les vus font faits de figues, les autres de prunes &c de poi-
res}lcsLautres d'abricots Scàc raifins , les autres de miel : &:. guand
les pafians, comme aufïi les liabitans des villes ont grand forf en
cfté , ils en enuoyent acheter : & le forbetiery mcflc de la neige
pour le refroidir,ou de la glace : aufïi nelloit cela,il n y auroit au-
cun plaifir à en boire : car vne décoction fai&c en efté , ne fer oit
froid au>c ^mais trouuce froide (ans cela. Il ne courte qu'vnc maille pour
UtJgL** cn boire vpe fois fur le lieu ja refroidi de la neige qu'ils y ont mef-
lé» En lefaûant ils ont double gaing: car fi bien ils ont voulu des
ixgues,des arrrtelines^es prunçs,des pefches&: autres tels frui&s,
ils ne les iettént pas pour cela: car ils les vendent à part, & la dé-
coction à part. Il y a tel Grec, ou Arménien au pays de Natolic
muets de ^ cnuoyera la charge de douze chameaux àcs frui&s de Ces ver-
N** ' giersvcndreàConltantiuopleouautresvillesliabiteesdeTurcs,
expreflèment dedic^à faire tels breauages. Nous fçauons qu'on
cn apporte depuis la ville d'Hcraclée du mont Tau rus , iufques à
Conftantinople:car les frui&s cucilliz en celle plaine aux racines
du mont , font merucilleufcment propres pour faire lefdits breu-
■ y .^ uages, La manière qu ontaccouftumé les Turcs cn coniêruant la
^T™*" neige, cft telle. Apres qu'il a bien neigea: glacé, lors quelevent
pour TM &c Bore,autremcnt nommé vent de Bifc,c eft à fçauoir celuy qui
rJcsgtrdet vientd'entreie Grec& le Septentrion (quieft le plus froid vent
h new tout qui foit) eft en ùl grande vigueur , les Turcs recueillent de la nci-
fcftl ge,cn cmpliflâns certaines maifons faites en voûte , ou bié en ter-
rafiè qu'ils auront expreffement faites à cela cn vn lieu moins mc-
ridional,comme pourroit cftre en bas lieu,dcrriere quelque haut
mur}ou à l'abri d'yne colline :&c faut fairede la neige tout ainfi
comme qui voudroit faire va mur de mauonnefie , y mettant de
laglaceparmy. Cela demeurera plus de deux années fans fe fon-
dre. Ceftc façon cft communément obfcruce par tout le pays de
Turquie. Il eft certainque cela fc pourroit auffi bien faire cn F ra-
ce;: car nousauons veu phifieurs régions en climat plus chaud
que celuy de France, onon la garde tout lcftc. Une fut ôneque
les ancics Afiatiqucs n'ayet gardé la neige pour l'cfté : &: cn outre
vouions maintenir qu elle eftoit auflien tel vfagcà Rome : qui fc
. O B S E R V EES f A tL P« B El 6 3& 419
peut prouucr par plusieurs lieux de Galien , Se mefmcmcnt en la
préface de Ton luire intitulé , La méthode de medeciner , par le- ^v?
quel ilappertquenronxempslaneigecltoitcnaufri grand vfage ^-J^
àRomejqu'elleeftmaintcnantenTurquic.C/eflaunlcedcquoy^^^^
Pline fc plaint , voyant la fnandife des Empereurs dcfbn temps, garderU
qui correfpond à ce qu'en dit Galien : Suétone au ffi le dit, ou ï\ neige.
parlede Nero. J&eKpvodigte ventris ( dit Çline^ hi niuesr^ tili gladem
■potmt,mnùrnontium meôàluputemguî<e^vertuntt Serttcttw algor<efli-
èus ïexçogiidtufquè vtatiems menfihm nix d<ûxt. T>ecûqumt ali] (Ufuxs^
*nox&*nlashyem<tnt» Auffi dit en autre paiVageiNeroni? prmeipis in-
uentuMeJldecoqucre^uam,vùr6quedemijptm innitte-refrigerarcju vo-
btbtm frhorU eontingit fmè'vitiis nms.Lz neigedont le grand Turc M*nt Hor=
-y Ce en fon ferai! , luy eftant en Con'ftanrinopie 5 eu: apportée du minium.
inontHorminiumjOudumontOlympercarils'eft perfuadé que wàgepour
celle qu'on gardées loges autour de Cocftantinopie, neft pas fi ^grand
faine que ccllc-de la montagne : & veut d'auantage quelle foit de ™c' .
Tannée precedente:& de &it les cfclaues vont fut le mont en teps *"'***
cTe(té,& dcfcen<lent grande quanrité de neige , laquelle ils laif-
iênt là pour l'année dapres , laquelle on va quérir par mer. Il y a
-deux fuftes qui fe partent toutes les fepmaines de Conûantino-
ple pour mener des paffagersen Bourfè', qui fonteonduictes par
quelques Ianiuerots:S£ efbns à la Montanee, ou dcfcencknt les
pairagcrSjcllcs font chargées de neige pour le retourdaqucllc ion
defeend de la prochaine montagne auec les eheuaux, & quâd el-
le arriueàConflantinopîe, on la porte au Scrrail : car le grand
Turcenvfc àrerrokiirfon forbct.Les Emba^deèrs de^Frar*cc3 Emldfa*
d'Efpaigne,Vcnife, Ragoufc , Florence- Chio , Tranfiluanie^ datnenTur*
Hongrie, qui font plus curieux de leur breuuage que ne font les îiue-
Turcs , ne veulent pas vfer de la neige mcflee dedens le vin ,. ains
mettent tremper le vin dedens de l'eau que la neige aura refroidi,
& parce point ilz bcuuent ftaiz tout l'efté fans auoir mis la neige
ne la glace en leur cftomach . Vn lopin de glace de la groiTcur du
poing, refroidira demie tinee d'eau tout en vn inftant,& ne cou-
itéra pas vn afprc,
G G g iij
42Q TJ2&S : I<ÎV&B. 'D.-3CS- SXNG.yï-À.-
JuAmmien de febranditlev m Turquie*
,J>affiesÀei • - .-..»•:«." ' • -' - r -^ • '■"*-• -'-'•-'- *• '- v •
r^r«. ^¥f^!^ ^s Turcs font belles reftès; as temps dé îeursPàl-
Brandilieure ^ fP§^2& ques^mais n'ont choies plus exq.nife que de {ebra-
des Turcs, ^'kj^^ç diller. ;Qy.i eft çhofc^nërueilkttCejtant iîz fç cflan-
■ WÊ ^^S^^^— ^-—^ ita^.iamaiiÀé^.e.ft- &e&.&oi\ueik:
|^^^^^ car iîz fcorandiïrcmtous feuis». Ils font vaçipoufe
haute potence,en manière jd-Vn gibet auec deux pilliers,à laquel-
. le iîz pendent deux cordes disantes çnuiron de deux. pieçUÎ'vne
de Fa u t re, at tachées à deuxanneaux de bois ^ àiï H que- ks cordes
obéi fient mieux au brandilleur. tes:4e.uic.t>Qtrts <i-es cordes d'a-
bas font attachées a vne planche faite comme y ne petite feileà-fe
fèoir,quiçft attachée par les" quatre coings , deûîis laquelle le
brandilieur-en: debout :.& en fc repliant de foy.mefm.e fe donne
'• - --' ' - tel branle fans que nul aiurçlepouiîç/qmtvaaufïi haut ou plus
" ' * jque la potenee. Il eft debout fur la planche, &/e#ent <ks àcux
mains aux cqrdcsqu'il a,àco£té de luy.La chofe eft quaii incroya-
ble, tant iîz fe lancent haut en aiiant , Se en arrière : car la potejv?
-ce a>bier> douze toifes de hauteur : & quand-lè brandilleur eâlaf.
*femtm ë'4>&c ^b^-c >1} fë afficddcffiis U^Iânchc., Iîz ont bien dau>
i enfant*. ^^ manières de bVandiilages pour lcspctits enfans > qui cri cho-
fe mouic puérile , mais fantaftique
• ,; ~ .pifiinÊiifi&ithhûY^
»'.-••'■ -\: ::•."•- •.."'.■.: I"-^^^ 'XXIIH»,; .' ' :S
^ r ^ €fc53?^3S* Eux d-entre les Turcs oui portent k Turban verq\,
dehononlle W^®t iP^f^rfgr^dACÇ^ûtanon entrejes autres:4seltii-
Aiixrlrcî. % ÈÉi^Éli^^ éçj?lus gçâde rçl igion :auiu n'eft Jtiçijçc-pp ■ Tpr-
^S^@^^ quie de porter les chauilès on habillcracns.vcrdilis
J^ on t gardé la couleur verde pour les plus nobles de
Txrmtsde ]c-r p.yS , Voulans %ni£er par cela qu'iîz font de la ligneede
Mtkmt. Mahomec.Ccux qui ont cité deux ou trois fois à kMcque/ofcnc
bien s*afFùbien-dn Tprban verd , donc ik font plus honorez des
autres. Iîz ont grande cérémonie à porter la barbe , ou à ne la
|orter pas.Çar v&vieilhomme la portera en figne de fageflk Les
eSSERVB&S PAR ** ■ BÊLÔN; 4*£
ïctmes portent des mouftaches longues , comme barbeaux : car
ilznc trouu etoyent. pasbonne icancaiw icune~ homme de por-^ Mouftaches
tçrbarbe.CertcnQKaciteef^ ^ ***
Arabes; mais iiz ont dit qu'ik poixoyenclesxhcu^xlongsycc
eue ne fondes Turcs»
■^écou^Yementide phtmes^dont des Turcs :fcpare$t - '<"■■•■
. . . Chdfàirt XXV-.- - •'■*.:. , . :
» Es pompeufes brancries & folies oiten tarions àcs Gc-
P niffaires delà Court du Turc, font cftraugcs, êc'^Tin^0J}mtati<m
i jcipalemcnt-ties. £auori£èz de fa pcrfonne.^Car ilz sa—de; Turcs.
jS couftrcntaucc desplumes d'Autruche^, £&àcs panna- %bïnt*:&
<;hes dclbifèan nommé Rhintaces,qui font en vnemafïède tre£
belles plumes de lagroffeur.dVn chapon, ÔC- procèdent toutes * - ' '-
d!yri petit corps ou. il "n'y. a^lcukmentqnc ia.pcau •-: caT ics Arabes:*
qui les vendent leur oiicntl£châir;Q^q^snicaâccnes le nom-:
mçnt Âpus , mais nous penfons que ce foit le Phcenix , comme :^w
ferons voie plusàpîain au Hure des oifeaux. Ces Turcs eftansp^aw*.
a^nfi.&ardczdepluracs,, rc^embkntpxoprcmentà^n S. Michel,
en peiniurc, Or.nc&nxilzpifâ'Ordinau-emciiraeriD&ezieû ce&c~
parure , mais feulement: quand le grand Turc .va en guerre , ou
quand iiz font en campagneen & compagnies Hz onrdes gran^-
4es^lksJ^tesde:irc{bcllespluxncs attachecs.ddrusJjcars dpau-».
lcSjCpmmeîQniiceuxqui.iouentlcs Angcsides mocalirx^n£o^
i*ope.Il faut fçauoir ^queies Geni/Iàires ont acoaftumédeicunct - .-. ■/ • ■« ■'.
£b porter vn haut diadème fur leur tefte/ate comme le chaperon
d'vne darapifclic , excepté qu il cit haut.cncruché , & kur prend
tout autour, de la te&c, Iteyfonc teaitsme longue verge :de fer ^j£^ 'ÔS*
d'Wpisd & demy ; fur Jaqttdléefc ataché sn xercie .Lecerclc a: v<w
4.e largeur en circonférence au tâ&t quc-po«rroit.cnxo«rncrlc.
pouke U le maùtre doigt /autour duquel Hz portent âcs plumes patuches &*
&c plumaite>& du milieu dccc: ccrcieibrrvn autre long panache fUmesda .
faitdeteiieA^
terre 3 ^Çrcû^aj; âersiece.lejdQ^, râ\t$uehaac à rien?.*»* fen ori-
gine commencerait fpmrncç de la % é&e.£§me qjL*ç voyant telzhô-
mes ainiî açouftrç? & deiguifc^ion. d^oiç.quc ce fon.t.Gcans, tar>
il^.fon^.cipouucntablcs. Car le cercle qui monte ti haut au def-
GG^ iiij
Ç&Z TIERS LIT M DES SItfGVLJU
fus de leur tefte , ne tient à rien qu aTacouftrement de tcfte,fans.
cftre bridé. Chaque Gcn ifêiire ouauxre Turc na pas loy de por*i
ter des plumes : car il n'y aque ceux qui ont; cfprouué leur verni
en tuant les ennemis ala guerre , qui en puiffent iuftemécporter^
p«»i% de Celuy qui parte beaucoup de plumes , demonftre par tel figne
porter des qu'il atué beaucoup de gens: &c ecluy dentr'eux qui nefe peut
i^wwav vanter dauoiç tué quelqii'vnjnà raifojinable periniûion de por-
ter des plumes. Lé foldat Turc allant en guerre^né mené aucun
varlet^fînon entant qu'il eft Con efclaue. Les GenifTaire n'en me- .
nent aucunement ; car eux mefmcs font des moindres efclaues,.
&eux meûnes portent leurs viures &- leurs armes. Vray eft que
.de cinq en^cïnq.ilz ont vn cheual à porter tout leur bagage , te
Tum-menet vne tente. Les Romains faifoyentainû* ainciennementicar on lit
$m de baga» cn ja gQcrrc de ïugurtha , que Metellus par vn edit contraignit
ge enguerre^ \^ommc de guerre de porter Tes viûres& Tes armes quant &L foy^
&.dcffendit qn'iîzneu$èntaueun~varlet.. Nous voyons, tncfmc-
menr les Geniflaircs de lacourt du Turc qui font les plus près de
farperfonne^entempsete paixeftredixàdixàvn varier: maisea
teps de guerre font cinq à cinq.Chacun peut voir par cela quelle?
Mfiendarti grande ; obeiûancc eft en cefte maifonlà. U ne faut^ point rafraU
ésTum^ càitkseftendarts.desTurcs : car pour eftendarts il ont àcs poils
de la queue d' vn Cheual > colorez de diuerfes couleurs , emman-
cliezau bout d'vnc demie pique. C'eft ctiofe odieufeen Turquie
de voir les habits decoupez/oitveloux^ktin^fbye^ ou drap. Les
Grecs, & tous les fubiects du Turceftans habillez àlcur mode>
$msfontri* ne découpent rien de leurs acouftremen s. Les Turcs s'habillent
àxmentx* & aecouftrent communément de veloux figuré de diuerfes cou*
wfo*\ leurs,eornme auiîî de fatin,& d'autres fortes de foyc Et allas par
paysportentleur fi-fllyScosc toujours vne lanterne de fer blanc,
" - & de la chandelle dedens , qui eft façon moult commune. Cha~
conportc facuei-llier pendue àfaceincture , Se aufïi vn petit fàc
de cuir pour le ici,, mais il eft compofé comme eftoit ancienne-
seïcÊHpoJZ' ment celuy des Grccs^La compofition eft faite d'aulx batus aucc
•-'■•■• lefèîjpui^defèiciié^-rcbaturdu^el ayans cm^ly leur fàchet de^
cuir^ie portentpour fàler leur viande. Ceft vne chofe qui excite
meroeilicufement i>appctit>& leur fait bone bouche,^ leur con-
forte l'cftomach après auoir bien beu de ï eau fraifehe.
• ; ■....; ,.:- y* . "- . •-' -■- - Vu-grand.
• OBSE&VÏB'S PAU P. SELON. 42$
. jj# graniexcvcke atout ceux qui aprennent étirer âcîarc par les villes
deTttrqmc Chapitre xxvi.
s N trouue îcs terrafTcs entretenues de terre molle es
1 villes de Turquie, qui ne font point îaifFces endurcir:
> car il y a Journellement gens couftumiers à tirer de *
! Tare. Hz ne tirent pas de loing , côme Ion fait des arcs
debôiSjn'auiïi leurs flefebcs ne font pas fi longues: mais tirent
de bien près. Celuy qui entretient la butte > la mouille tous les
iours,à fin que l'argiftc demeure molle : & la tiennent toufiours
fànsqu'ellc fe defetchc. Hz tirent de fixpas, & s'eâSbr cent de tou-
te leur puifianec à percer ta terrafife auec leur-oefche.il y a vn ho-
me derrière vn aix ioignant la butte > qui arrache la flefebe de la
terre chaque fois qu'on a tiré : & la ie&e à celuy qu i l'aura tirée»
Et quand vn homme aura aHèz tiré , il pendra fan arc ioignant la-
butte, & payera felor*la couftume.Lon trouue ordinakemet tel-
les buttes ou terrafifes es lieux publics par les villes > ou les Turcs
vont ordinairement s'exerciter, pu Hz tirer ôt plus de centeoups
qu*il ne leur couftera plus dvn afpre.
"De plufieurs apprejh des Turcs pour manger.
Chapitre xxvn.
t Es Turcs octdc moult bonnes "inuentions de confi-
• tures en fàulmeres , qui font de petite valeur ^qu'on
! vend par les villes de Turquic-.car ilz eonfifent les ra- Confitures e»
jnwv^wvJ cincsdeBettes^quifontgroiTcs corne les deux poings fitlmere.
dontles vnesfontblanchesouiauûaftrcs,& les aut^s font rou- *£** hL^
ges3qui font celles que pîuficurs ont eftimécûre raucs ^mais cela c °*
e£faux.Il2i.confifcntaufiides gros choux cabusy& des grojOfes^
racines de raues,&: des racines d*£nu la cam pana . Gcà meihage
àc peu de dcfpcnfe ^comme aufli eftoit anciennemcnLengtarii
-vfagcà Rome >.&c es autres villes des Romains :.& ceux qui fai- ' " ;
foyentcemefticrlàjS'appelloycntSalgamarij. Ceftvnechofede ■&&***£>
grand efpargnc ; car quatre compagnons n'en mangent pas poux
plusd va caroluscavn repas.
*■-.'■;-— :-r -.-.r.: * - Mtek
^4>4 Tï;£RS aj^RË DES SINGYLÂ.
Ceftvnevkndequinefaut point cuire:car elle cft toute pre^
$c„<$ant.amii fal.cç, Jlzpnt:awifi àcs raifinsde verkiftcpruit, qui
eft grand fouîagemenç.aux Turc? : lequel trempé dedeas du vi-
naigre & de la femence de môuftarde.eft vn moule plaifant man-
%outiqms k ger crud auec du pain. Hz ont suffi des boutiques qui ne font au-
rmredes cre chofe qu'appre&er des teftes de mouton auec des pieds pour
tcjtcsdemo» yçaàï o: &quand Hz- les paillent/çaucnt les puurir habilement,
'0/'* &.tput chaudement les mettent en-vn plat auec vn peu degrefle
& de vinaigre faulpoudrecs de'fel compofç auec des âulx,&: méf-
ié auec des efeorces de la femence de Sumac , anciennement ap-
sum4c ^ Rhu^,Qbfqn-iorum. Les Turcs npnt.point de hon.ee de
C^* j8Wg<«apflMfe>& les grands fei^neurs. mefmes y mandent or-
TtoaVtuent dWwmep_ç0. Tput aing .que îes.T.atçs fontiiFus de vachiers &
^»s *&&'<>» [jprgiers.femblabîement ilz en retiennent touteslesenfeignes,
& iiimde. çn jçu r façon de viurc : car ilz pourroyenç bien auoir moyen de
Çc çraiecer^ autre viande^outesfois ilz aiment plus à manger des.
dïpfes de lavage qui çouftcnç.pcu-, que d'employer argent en
meilleures chofes. Il y a tout vn bourg en Coftantinoplc au bouc
McktL du port du coûé de Thracc,qui ne fait autres chofes que du Mcl-
cernée. ca , du Caimac , & d'Oxygala. Le Caimac cft fait de cremrae : &
oxyrda. en fait on en diuerfes manières. C cft ce que les Grecs ont nom-
^ngdéu méancicnncnacntÀphrogala.Àuffiontgradvfagc delaRecui-
jeauât. ^e lcs Grccs noiiimCnt vuigairemec Mifca.îi ne faut point
MlJitr* s'enquérir d'auantage dont ilz font iflus5 confiderant leur ma-
nière de vhkc. .
DeUcÏYcmcifionâes Turcs. Chapitre x x vi i u
feg*^g|gg& Es Turcs font circoncis , mais ne font pas circon*
&£one$o» H.»y» cis le hutôiefme iour d'après leur nauTance à la
f*Imfi; . -gB PfJiP manicfcdesluifs , ains la huiûicfme , douziefme,
Jes Turcs, fjf KÎ^Sl ou qinnziefme année, ou plusou moins icloqu il
^gne'Âjrre ^J^^^ eft àproposX'enfancn'eftpointcirconcis qu'il ne
Mahome* fçache Dien refpondrc ÔC parlera ceux qui le circoncifent. Il faut
*&: . qu il eleuc le doigt* prochain du pouïee : car en tel %ne donne
tefmoignagc quil.confeffe eftre d auec Mahomet : lequel doigt
il rient tout droi&.II n'eft permis de le circoncire au cemple,ains
enlamaifondcfcsparens:cariincft licite à vn qui n'efteircon-
. ><fjf S*M;V E E S -V A ■ K P. ■ " B £ L O 2*.' ^SJ
cis , entrer en la mofquce ou Eglife. Beaucoup de Turcs s affem-
bîentàcellc Circo-ncifion , Se fontvn fçftinà-lcur mode:&c&
•J-cn&nc cïrconcis-cn la compagnie. Le Preftrç prcrïd des- pincec-
•ïes>& dit a l'enfant qu'il luy veut montrer cela qu'il faut couper
Je lendemain , &: amenant la peau qui furpafTe par àctfus le bouc
cta membrejdira que ce fera demain qu'on le luy coupera. Alors
s en irairnais c'eft pour le tromper .- car il fe retournera corne s'il
auoit oublié quelque ebofe)& alors luy coupera la peau auec les
pincettcs,qirii auoit défia lice Se choifie,fans que l'enfant endure
grand mal : Se ne fera autre chofe que luy mettre de l'eau falee Se
du linge par deffus,&: luy guérira la playeen-cefle forte^ Et pour
aooirefté circoncis i on ne luy changera pasfon nom queceîuy Manière &
qu'on luy auoit baillé -le iour de fît naifTance}{irion de MufFulma, circoncire!»
cxc(k à dire bon Turc circoncis. Et quand l'enfant a efté circôcis, *rf*»t.
Ion en fait telle fefte comme nous feriôs en France à des nopees.
On le meneraaux baings par grande folennité, 5£quad il retour-
ne à la maifon,lon forme des tabourinsy& luy baillelon vn turba
bîanc,quelquefois femé de fleurettes. Puis on le mené àl'Eglife
en grand triomphe. Puis chacun luy fait prefent félon la qualité.
& dignité de fon lignage > s'il cfl de plus grauc parente, arcade
grand' richeiTe > Ion îay baille or^argent Se autres dons , lefqueiz
ceux qui ont eftédu banquet Se de la fefte , luy ptefentenr. Nql
Chrefîien n'eiifaiâ: Turc par foree;mais s'il vent de ion bon gré
fe faire Turc,il eaeft beaucoup mieux eftiiné.Ceux qui font faits jj^urcsn^
Tures-par forec^come qui pour iauucr leur vieièfon t faits Turcs fÙTC'£t p0inc?
n'en feront pas tant efrimez.Si vn Chreftien eftoic Croatie auecr 'Us ebrefiemr
ques vneTurquCjla rigueur veult qu'il meure3ou bien le remède *UurUy~.
eft qu'il fe face Turc.Etû vn home Chreftie auoit tué vn Turc,il-
fauueroit fà vie en le faiiantTarc,ou en payant beaucoup d'arge£
fe rachetetomCar H n'yachofe quelcoque qui ne fe face par argec
en ce pays IL Si vne Chrétienne qui n'eit pas cic îaue, eft trou ueç
auec vn Turc , il faut qu? elle foit faite Turque. Mais on voit peu rmt fe fiï$-
àegés en ce pays là attains de crime qui mérite la mort., qui p.uiflç j?«w "orgeat
cfchapper par fe faire Turc ,.qui foit exécuté: car pluileurspout eaTurfH£.
cfchapper k mort fe font Turcs. Le SopliiquieilMahomerifle,
appelle les Turcs hérétiques , pource q les femmes des Turcs ne
font pointcircQcifeSjCome font les femmes de ion pays : auiïi en
tret elles es MofcmecSjCe q.ne*foat les femmes* de Turquie.Naos
HHh "ii
^%6 TIERS LIVRE DES SïKGYLA^
Turcs ^p^içauonsauffique les Cophlcs Chrcfticnncs du pays de Prcftrc
U%hereti* jç^n en £c^i0pie croyans en Iefus Chrift , font circoncifes ; car
lms' , eftant la loy tcilerque lçs femmes doiaent reccuoir quelque im-
rZjHLofc Pr^2î°n &c circoncifion, iîz leur coupent les parties appellcesca.
djès. Grec Hymenca,en Latin Àla? : car iîz les trouuent correfponda-
chreftienms tes au prépuce viril. Ceux qui blafphement Se difentiniuresà
.cïreoncifes. Mahomet, doiuent mourir : mais la loy les abfout , s'ilz fe veu-
&ymenca. Jcnt tendre Turcs; &: à telles gens ne faut autre ccrimonie que
-/îLs' . fe faire<:irconcire5&: hauffer le doigt tout droid; Se par tel fîgne
uaracjt. feroncxurcs } & par confequent feront deliurez de payer la ha-
raczi > fçauoir cil du tribut qu on paye au feigneur. Car ceux qui
font Iuifs ou Chrefticns , le payent:duquel les Turcs ouMuflul-
mans, ccft à dire taillez, en fontexempts.
■• - Q*tvn Zfckuepuijfe contraindre fin maiftre de luy mette a chois pour fa
■ - ■ ■ ■ rançon ou le temps de le feruir , ou l'argent qrijl en veut auoir.
Chapitre, xxix.
DesEfcUuesll^^^^Si^ vn Chreftien efclauc ou prifonnier en Turquie
1 sftant auec le maiftre qui l'aura acheté , fe vouloir
■ faire Turc , il n'aura pourtant liberté par ceia:car en-
w^_ j cant qu'il eft efclauc , il luy conuient feruir fon mai-
{trc^& faite fa befongne. Vrayeft qu'il luy pourroit bien bail-
ler quelque peu de liberté d'auantage, & luy amoindrir les an-
nées de fa féru itude s'il fefaifoit Turc. Ceft laraifonponrquoy
les efclaues ontaufïi bon temps àperfeuerer en lafoy Chrefûen-
Wùrtjm nC) que fe fzite circoncire Se eftre Turcs. La fortune àcs efclaues
dirnfcUut. cn Xurquie pourroit eftre comparée aux feruiteurs de noftre Eu-
rope ; car ilz participent de lafeîicité félon le maiftre qu'ilz fer-
uent. S'ilz font auec vn bon maiftre qui les aime bien , ils font
trai&cz comme luy mefme, Vn efclauc peut contraindre fon
maiftre de deux chofes 1 vne , ou de luy taxer fa rançon , ou bien
luy dire le temps de ion feruice : car vn efclaue allant au Ca-
dijquieft comme vniuge de la iuftice , luy pcutfâïrefa plain-
te , Se luv dire. levueil que mon maiftre me vende à vn autre
s'il ne me taille à rançon : ou bien qu'il me baille par eferit le
temps de mon feruice. Et faut en ce cas que le Câdi face iu-
ftice , & appellera fon maiftre. Lors l'efclaue luy demandera
OBSERVIEZ *AK P.JIiON» 417
combien il voudra qu'il luy baille en argent,ou combien il vou-
dra qu'il îe feruc d'années. Lors le maiftre mctiefclaue à choifïr
Jequel il aymera,micux,fc rachetée par argent,ouparferuice. Et feçcimre
iirefclaue n'a bon efprit de qu'il n'efperc gaigner fa rançon en ^rJL
brieftemps,& qu'il puiffe mieux fournira la peine quai argent, ter.
il choifira le ferukre. Alors le maiftre luy baillera dix ans>ou dou-
ZCjOU quinze aie feruir^ luy en baillera lettre. Et quant iefclauc
aura achcué le fèrui cc.de fes âix. ou.quinzcans, il luy fera librede
sten pouuoir reuenir. Mais fil cfclauc fçait meftier, lors il choiû-
ralargcnt pour fc racheter, & demandera terme à fon maiftre:lc-
quel il payera félon qu'ils onteonuenu. Nous en auonstrouué
qui Ce font rachetez en peu de temps. Les vns en deux ans, les au-
tres en fix, &:aïnfi plus ou moins. Carlil'efclaueiçait meftier,
il trauaiiîe grandement, & paye fon maiftre tous les mois ou tous
les quartiers. Mais les cfclaucs qui font tombez es makis des Py- EfcUius la
rates, qui ièruent es gaîeres,a ont iamais plus d'efperance de fc ra- pr**es.
cheter fînonbien tard : careftans auec vn Pyrate quiaafrairede
gensengalerc,il les tiét pour fon feruicc, aufquels il ofte le moyé
de pratiquer en terre. Lesefclauesqui font auec vn homme de
moindre condition,ont plusgradeipoirdcfcdeliurcr , que ceux Efthues des
qu i fon t auec vn grand feigneur : car Ton ne les peu t contraindre £rW> fi*
par la iuftice du Cadi: car il c eft vn Bacha,vn Beglccbe,ou vn Sa-£»^.
giac,ou autre iemblabie , le Cadi n'a puiflanec fur luy . Parquoy
faut qu vn efclaue cftan t en ces lieux 5 ait patience : mais auec vn
villageois,le Cadi îe contraindra de faire raifon & iu fticc. Les
Turcs ont l'huile de Sefame en tel viàgc, que ceux <Ic France ont Sufo &
Fhuilc de noix,& en Languedoc l'huile d oliue; ^d'autant qu'on sefime.
la fait auec grand iabcur,e'eft communément ouuraged'cfclauc. Bmk <k
Auflî ne la fait on qu'en hy ucr* Ils trepent la {èmenec dc]Scfàme noiX-
vingt & quatre heures en eau falee: puis la mettent en la placç,6£
la battent auec de&maiilets de bois deflus vnc fcrpillere iufqucs
à ce qu elle foit efeorchec , puis la mettent tremper de rechef en
dcreaufàlec,quifouftientreicorccàmont3 laquelle ilsiettcnt.
Puis oilent le gra|n du fond, qu'ils feic lient au four , èc le meu-
lent:&dcftors l'huile coule molle comme mouftarde: car il y a
peu d'excremens. Puis l'ayans fait bouillir lentement, ieparent îe
marc. C'eftvnc huile moult douce & friande, Se qui cil: à bon
marché. Nous veoyons que les Turcs font affis à plat de terre, ô£
HHh iij
pour mdger.
^1% TT E K S : L r V ETE D t S SI NGVLA.
tes Turcs fe defchauflez^en beuuant Se en mangeant , comme au ffi fai¥*
defihxHJfent jcs Romams le ternps parlé en leurs tricîins. Les triclins des Ro-
" mains eitoyent ce quenausnommops ma^mtenanc fales-ou lieux
àmanger, comme font les cabarets^ & qu'ilyauoit des appentis
ou table S-eleuees ,. comme nous voyons es boutiques des cou (lu-
riersfurquoyils coufent , & falloir monter làdeiïus. & ofter les
fouHers:car ils a'ausyent pas les pieds deiïbusJa. table comme e&
la couftume de maintenant: mais tout ainfî comme les Turcs3 ils
s'appuyoyent aux aureilîiers qu ils auoyerit defïb us leurs coudes;
Laquelle chofè Martial au Hure cinquiefme^abienapprouuee:
car il dLS en eefbe manière:.
. DepGrfuifoleas^dfèrtMrprotinwivgem -
lut erUciuc 06 OTQCgxmmque liber.
Pour prouuer que tricîmiu m cû, ce que les François appellent
f une falejQu lieu à manger, il furHra prendre l'authorité de Varro,
JpC 'efê: parlant âcs Poulies dvLide,ou il dit , Meleagrides nouijhmè in tviclh
d'Inde nwmgensarîummtrmemmJculma^, Et auiïi de Suétone qui enfair
mention en plus de vingt pauages,5£ entre autres parlant de Cav-
iar dit: CûnuiskttumajIiduÀperprouincu$duobustyklmiis>'vno quo/àga-
tipalleative^altero quo tegati cum iïluflrioribus prouinciar&m difeubue-
tant». Et en autre paUage eferit in ^Astgufla t Liui£ mptia* obieest :~ &t
fœminajn confidarem ètrklinio. vin cotkm in cubiculum abduEiam^c*
Faifant différence delacuiûne 6c de la chambre au triclimum3
qui eft vn lieu député pour manger. Et ailleurs : "Dium Claudia* ad-
. htbebatvmni cœnje & hberpsfuos cum.puem puellifque nobïlïbm^qui mo-
.■ * frvetc^adfalcml^orumJ^mtesvefcsrexUHr^neçtemerev'aquamtrtcli^
. . niodifafittïnifiAiftmus&cindczis, Pline auffi parlant des Elcphâ\
dicqu'ils cheminent fi doucement j.que les yoirres pleins de vin
de ceux qui boyuent es tri clins fabriquez deiTus leurs dos, nefe
rdpendent point._Et.au premier chapitre du douziefme liure
parian.c 4u Platane,iî die telles paroiies. ^iliudixemplum Caijprin-
(ipis&cJàxjfqueramorumîrdbibusfcamnxpatuU, grineaepttlaîi, cum
ipfeparsejjet-vmbr^quinàecimconuiu^rum acmmiflerij capace trkhnio^
qyam cœmm appel Unit illewidum. Ceft donc ce que prétendons
inférer,, que quandies Turcs mangent , font affis h plat.de terre,,
& font quelquefois appuyez d'orciiliejfs deiTous leurs coudes au
deilas quelque tzblc enleuee de terre 3 ou bien à terre deilus vn
tzpis ^ que cela pourroic eftre no.mmç triçjiaium. ;" car. il eft coa>
OS SERVERS $-AK *. BEION. 41j>
forme au diredcs anciens.. Ceft.chofe commune en Turquie,
<ara^auflLeftc.iE kfemps. paffëaux;Rojnains,,. defeipruir dss-
efcîaufis touque*, 4cfql»elMCP9BQr^:cfl: :rc, plu & tàfW&i^-'fapfr&s
h première inuention ea.eft venue: dvne femme , qui cft de k TurcSm
RoyneSemiramis. C'eftoicync Roy ne puiffanre en guerre, qui samrmis.
feit çhaftrer pîuficurs icuncs^garfons , qu'elle commit pour ie
.gQUuernempiùdc.fes fcmmçs :;&: depuis elle, fa poftemé.a con-
tinue te3'vfa*c , SC principalement au pays à qui elle dorrtinoit.
Quand les Turcs commencèrent à faire les Eunuques , il nous
Çjft aduis qu'ils fouloyent feulement couper les genitoires aux
petits garfons y comme au fil anciennement faifoyent les Ro-
raains qui leurlaifibyent le membre^, qui eftoit çhofeçommune
à toutes nations-; mais deuenuz grands , ceux qui eftoyent robu-
ftes ,- encore* qu'ils fufïcnt chaftrez des genitoires , toutesfois
nelaiffoycntàvferaiiec lesfemmes. Dont eftaduenu que quel-
ques Impératrices Romaines les. en ayent. mieux aimez : car ils
nauoyent pas pui/ftnec d engendrer, La chofe cil impudique,
&pouree n'en dirons d'auantage. Le grand Turc eftant aduer-
ty que les chaftrez des genitoires ne lahToy ent pourtant de don-
ncrplaiiîràfcs femmes &£ concubines, commença déformais à
faire couper totalement & membre & genitoires. Maiscefai-
fant, de dix ou douze que Ion en auâmre maintenante faire Eu-
nuques, il n'en cfchapepas ûx. Plufîeurs difenr quelaraifon cft
aduenue autrement-.. C çft qu vn iour l'Empereur voyant vn che-
nal chaftré faillir vne jument, print occaûon de leschaftrer com-
me auons die. . Les cfclaucs femelles nepeuucnt feruir aux Turcs
fin on à la maiion3 pou rce quelles n'oient aller en public Par-
quoy il cft plus feant , ' que les chaftrez feruent les femmes Gitans
en la compagnie du rnary , que fi elles eftoyent feruics par
autres femelles- qui ne peuuent aller en public comme les maf-
Ics : car communément vn homme ayant" pi uiîeurs femmes
efpoufees , & des cfclaues femelles, &: qu'il neft pas licite aux
varlets d'y fréquenter , chaque grand feigneur riche a vn cha-
ftré 3 lequel il aime grandement ., &: dont il fe fie beaucoup.
Le grand Turc méfme a fb uuent fait vnc efclaue £unu(iucf^^
chef de toute fa puiflanec , ayanc vnc groffe armée en fono- *J*™ritt
bcyïTance , ne fc défiant de ion courage , & ne pounant pen- ^
fer qu'vne fcincillc de couardife peuft fc loger en fon cœur.
HHh iiij
4$0> «B'.R'S LIVRE PIS SINSVLJU
¥n Eunuque du Roy d'Egypte nomme Ganymcdes,nc refila il
pas à Caefarxonere tqutc la-pu iflance Romaine > Nous trouuorîi
aufli -<ja*il y a eu des %.oys Eunuqucsqui ontdominc en Perfc: &C
plufieurs autres Eunuques ont efté moultgrands feigneurs, dont
lesautheursont affez amplement parlé. Et pour ne parler de fî
loing^îe Bâcha mefmc, qui eftoit lieutenant pour le grand Tur<>
par toute EgypteiSyrie,& A rabicylors quenous rufines au Caire* ;
eftoit Eunuque, auquel le grand Turc fe fîoit autant qu au plus
d&KanLms ^zx^y capitaine de fqn Empire. Les Romains toutcsfbis ne don^
^ noyent iamais tant de liberté & puiflance à leurs Eunuques ou
chafttez que les- Turcs font txôme auf&ont fait les princes d'O-
rient de toute antiquité :^ar nouslifons que plufieurs Eunuques
ont refifté aux.puiftances Romaines.Encor pour f heure prcfènte
les Eunuques en Turquie fe ciennét auuipriuezde leurs maiftres
& maiftrefIes,comme s'ils eftoyent compagnôs. Aufli leurs mai-
ftres fefl^ut d eux,& lesfbnt tenir compagnie à leurs femmes , Se
dormir quant ôc elles en leurs abfences,fàns en auoir aucun fcru~
gule y fçachans que comme ils leur ont ofté tout moyen d'vfàge,
auffi leur ont ofté tout lappetit- Àiiuîn ya veftige quelconque
de chofeaed'àutrc-, non plus que dcdcnsl& paulme delà main.
Les Eunuques demeurent à. garder les femmes & concubines de
leurs maiftres durant: le temps de la guerrc,& les feruir de ce qu'il
Creâk dss leu*fânt.X*eftlaraifon pourquoy leurs maiftres leur îaiûentle-
Ettnt^uesjn.. $&$ fou uent la chargede toute la maifon^ hes Chrcftiens aufli
Turquie^ peuvent bien tenirdçsefclaucstant mafles que femelles, qu'ils
achètent a leurs deniers, comme au fE font les luifs : mais les
Chreftiens ne les luifs, ncpeuuent tenir vn Turc efclaue. Vn
luif peu t bien tenir vn Chrcftien tant homme que femme, com-
natunlUtœi mc âu& vn Chrefticn peu t. tenir vn luif. Mais les luifs font tan t:
haine contre cocfederezrentr'enx & pleins, de fineflè , qu'ils ne lauXcnt iamais
h iùfi.. vn de leur nation efc|aue : car s'il cft prins fur merou fur terrc,ea
guerre ou en paix^ils fonttelle diligence de lcrecouurer, qu'il n'y.
demeurera pour argent. Toutesrois les Turcs les ont en trefgran-
de haine,3£ ne Ics/ouffrent pas volontiers en paix, qu'ils ne leurs
duent des iniures>& principalement fur les grands chemins .
OBSERVEES, PAR. *. ïEtON. 4^
. IXes freftres de Turquie , & des fâences dey 7mc*.
Chapitre xxx.
\ E s preftres des Turcs ne font gueres differens des nefrafe.
J gens laiz : Se ne leur eft necefiàirc auoir tant effaidic : Turcs.
imais leurfurfit feulement s'ils fçauent lire l' Alcoran,
<l &. interpréter felcm la lettre eferite en langue Tur-
quoife. Ils font mariez.& habillez comme les autres ,» ayans rien
de diffèrent > Se font quelque meftier pour viure comme font les
autres hommes* Les vns vendent, ou font.cordonniers ^cour-
riers, Se autres arts mechaniques. Pîuûcurs gaigaent îcurvka
eferire des Hures i car il n'y a point d'imprefïïon en Turquie pour
imprimer en TurcLeur papier eut lifie Se frotte à forcent quil
dédient clair luyfânt& poly comme vocfmail. Les -mircsàno- IaTum
fke émulation ont fait tcleflfortquils font maintenant conubi
ùQnwkmx
me cuiujuwv" ~«« - — - — ■■-- s, — - - " " " 7 tanwoneux
teuxdesfeiencesd'Aftronomie, Poefîc^ Philofophic t Se non de infinie
feulement les hommes y prenent plaiûr , ains ne plaignentla def- leurs enfants
©eneequris font, tant aux enfans malles qu'aufli aux femelles, xftïences.
Mais lcscfcolles des garfonsfont feparces des filles ,qui vont aux Bfiolesdes.
femmes y& les garions aux hommes. Us ontauflfi bien la manie- 7mci*
ïe de faire carmes- ou vers proportionnez, de fyllabes r comme
nous auons : Se font quatrains , dizains , Se fizains , obfcrucz des
fyllabes dix , onze , ou plus ou moins , en forte que qui orroit le
€hantd'vnTurc,diroitpropreimenteûre d'Àlman». Quand les mTmcs**
Turcs fe marient* ilsachetentlcurs femmes àpurs deniers com- chetent leur*
gtans. De douaire en ce pays là-il n'eft point de nouuelle iSe faut fim»^
que le mary paye les accouftremens dont elle fera veftue , Se fi a-
prcs,îeurs mariage leurs meurs ne peuucnt conuenir l'v.n à-f autre
ôuquellefoitftcrile, lemaryiraau iugeaquieAle Cadi: Se la-
prendra congé de îalaifler : car commeils s cftoyent pris fans iu-
remens ,.tout ainfi fe laiflentils fans autres eerimonies.Si vn-rurc
eft mort, les maâes lenfeuelincnt : fi ceft vne femelle y les fem- _^ _
mes. Le corps eft premièrement laué , puis après eft reueftu de s^&gUs"
beaux linges blancs , après porte hors la ville auec grandes cerc- ^
monics. Nul n'eft enterre dedens les temples. -Leurs prophètes ^m
qu'ils appellent Druydes , vont deuant le corps portans des cier-
ges.; Jes preftres fuyuencle corps en chantant , iniques àrtanr:
Ili
Enterrement'
t4|2. TIERS LIVRE "DES "SINGVIAv
qu'ils foyent paruenuz au lieu de fà fèpulture.Ils ont manière en»
tr'eux de vifitcrles fepultures , &: prier pour les morts* Les fem-
mes y viennent à trouppesà certains tours députez , & ont les
heures afïignees. Les hommes femblablement : mais chacun à
part foy,& en diuers temps,
, Quelesprefîmdes Turcs feruent horloges enTurqtàe >crians les heures
-"-,',': Àhmtevoixdeâeffuslesclochersàes&gUfts.
Chapitre xxxi.
< L n'y a point d'orîoges en Turquie , mais en ce de~
' faut les préfères montent au faifie des clochers deflus
: les tourelles fort hautes : car chaque Eglïfe appcîlee
! Mofquee a vne ou deux tourcllcs,vne à chaque coite,
au moins fi ce font Eglifes de fondation RoyaleXar il ne leur ell
m Turcs fè heite de faire Mofq«ee.a plus d*vnerourellc, excepté les grands
font oyrJe feigneors. Quand lespreftres font fur iafommité, ils crient d'v-
bimloing. ne voix efcîatante comme vn ohlicux qui a perdu foncorbillon:
qui nous fâifoit fouuenir despaftourcîles qui chantent es landes
du Mainccntour -Noël : car les Turcs chantent en fauect. Leur
■■ voix fepeuîdaitemcntouyrd'vn grand quart de lieue, & .quel-
quesfoisde demie :&. feroit impouibleà vn homme qui n'auroic .
> auparauatouy tel cry,croireque la voix dvn homme puiueeftre
entendue de fi loing. Ils fontquelqucsfois deux ou trois à chan-
ter. Lespreftres mettent leurs doigts es aureilles , & fe prennent
à crier fi haut qu'ils fonten tendus de toute la ville : Ôc difent .cel-
te parollcs en langage Arabe, LaUlah Illcllah Mehemmetlr-
red lui Allah. Ils font tel cry cinq fois le iour, vne heure auanc
iour,à iour ouuert , àmidy,à trois heures , & ànuicl: clofe. Tou-
tes lefqueiîes heures ont vn nom particulier en leur langage. Les
Titres fi M. Turcs fe donnent afllgnation àtclles heures pour traffiquer en*
»a dftgna* fêmble, ou pour fe trouucr quelque part. Les Turcs entrent cô-
tiondes munéruent es Mofquccs à midy : mais auant qu'ils entrent leans,
*****-'■ " il faut que chacun felaue les main s, les pieds, & les parties hon-
teuses deuant_& derrière^ à la fin qu'ils jettent trois fois de 1 eau
fur leur tefte. Et faut qu'ils entrent les pieds defehauflez, biffons
fes fouiiers à la porte. Et sliis fe trouuoyent par les champs
quU n'y ait point d'eau, Mahometa concédé aux Turcs, de
ÔBSE-RVEES PAK Ei BELON. * 4$
prenne de la, terre , & d'en pafler par defTus Icu^ccflc „ mains , &£
fouliers.
Continuation du chemin U dehtijfe comme aufîi des mœurs:
des Turcs. Chapitré. xxxii.
\ Y as fèiourné tout Phyucrcn Turquie^ venu le prin-
temps. : nous propofafmes continuer nofttc chemin le Turcs ne
Avcts Conftantinopîc. Ceft vne reiglc générale que >0»*2*^
„_._„!3 les Turcsallans par pays ne font iamais trotter leurs ^*
cheuaux/i ce n'eft par contrain&e : car quand la necefïké les for-
ce , & principalement à la guerre ,. ils nefpargncnt ne leurs che-
ùaux } ne leurs eorps:auu> ne font point de repues fax chemin en
allant par pays 5n cftoit en efté qu'ils cheminaient foir& matin,
euitans la chaleur exceffiue du foleil. Maiseftansà chcual , vont Twanefo*
mangeant le long du chemin^ font boire leurs cheuatix le long ^iat Jr
du< chemin a toutes eaux. C'eâ de là qu'ils ont en grande recom- ^f*
mendatioa faire venir les fontaines fur les grands chemins paT-
fàns. Or puis qu'ils ne s'arreftent point pour dimer, &s vont le pas
tout lelong dti-iour^l elt.ncccffairc qu'ils facent prouiiîon de vi-
ures le iour précèdent pour le lendemain ,.& d'autant plus qu'ils
ne font pas délicats ^anflife contentent ilsaucc desoignons3auec
du pain,5^ quelques rai(ins>,&: autres fruich fees.. Ceft vne cho-
ie commune aux tu restant grands feigneurs que petirs compa-
gnons >.dcinanger des oignons cruds. Les grands ieigneurs de
Turquie y font tellement accouftu mez , quils ne font point de
repas qu'ils n'y, en mangent : au fli eft ce , ce qui les maintient en
iànté. Laraifon eft digne d'vn homme fpeculatif: car eux qui
n'ont pas beaucoup à. defpendre ^ ne laiûent pourtant à nourrir
beaucoup d'efclaues. Vn homme & deux efclaues , & troische-
nauxjoe defpendcnt chaque iour en tout Tvn portant l'autre plus
de&cafpres^ii valet fîx Carolus. NefedeuroitFon donc beau-
coup efmerueillcr qu'ils ne font plus fbuuent malades de ne bo:r^ Bonnecot^-
quedere|u>& en change? fi fouucnt; Mais noùsdirons quilsoDc/^ aux ^
celle theriache par accident , quiieur eil vtiîe en deux fortesd'v- Turcs 4^^
ne eft , quc.les aulx & oignos , qui ne leur couftent guerejes pre- Ier ^°^"
feruèt de toutes xiuuaces deseâuxilautre qu' ils leurprouoquét \^nm>cr4 -
-'...»",, .. . . . ' LU- &
4J4 TIÏRSLîyRE D£'S "SUTCViA.
£âiue& appétit à manger force pain CccJ Si ceux quiont legofict
enflé fi gros en Lombardic & Sauoye de la maladie qu'ils nom-
^, ment le Gos , qui n'a encor point trouué de nom Latin , &: que
oupfes. ^^ appelions des louppes , auoyent aufli accouftumé manger
des oignon^ou aulx cruds en leurs repas,il eft certain qu'ils ne fc-
xoyent tourmcntczde cefte maladielà commenous les voyons:
car elle ne leur prouient que du feul vfage des raauuaifcs eaux,
dont les Turcs font preferuez par îTfage <f en] manger ordinaire-
ment. Nous pouuions venir àCôftantinoplepardeux chemins,
Mmt0 .^rvneftpar dcfTuslemontOlympc, qui eft le plus court : l'autre
'pe* eft entourner le mont, mais ecftuy eft le plus long. Et pour autae
que les neiges eftoyent fondues, nous prifmesnoftre chemin pat
îa fbmmité des montagnes dePhrygie, qui {bntplus hautes que
fàfiUgùmt jc monc Senis. Nous partans de la prouince de Paphlagonîe, en-
<s*IUgrcu. tTafmcs en iâ région «ommmcc Galîogrcce, ou nous trouuafmes
Cute'- vne grande ville qui auoit anciennement nom Contieum,main-
ST** tenant^ft appcUceCutc Tant le chemin qui entourne le monc
rheodo/u que l'autre qui paffe par la fommité,eft en Gaîatic ou Galiogrecc.
cangrorum Carfortantdc Paphlagonîe, l'on entre en Galatie. La ville de
soit. Paphlagonie la plus renommée eft celle qu'on nomme Totia,
^onime* ^ji s*a0pclk>k anciennement Thcodofia Gangrorum. Quand
ma..
l'on eft entré en Gaîatie, fi l'on prend le chemin de main gauche,
^g™""" ]»on vienc a vne viHc anciennement nommée Cute. Mais fi Ion
€CS' prend le chemin à dextre,i'on pafFcparBoli, qui anciennement
auoitnomÀbonimenia, Tousleshabitansdu pays de Natolic
parloyent anciennement Grec? car mefmcment toutes les ruines
que nousauons veues par les villes de Cilicie , Lycie , Paphîago-
niCjCappadoce^amphyliCjBithynic, & Phrigie, auoyent touf-
iours quelques epigrames Grecs; car l'on voitles lettres Greques
aux (èpolchres &aux édifices. Et pour autant qu'allant le fufdic-
chemin l'on rencotre deux goulfcs,i'vn de la Mptancc , èc l'autre
deNicomedie,ilfautprédrevn grand deftour,&: venir pafter le
fleuue Sangari appelle àcs ancies Sagaris , qui fe va rendre au pot
Euxin : & y a vn trcfbcau port de pierre : &: de la entourner le lac
mcomedic. ^uc j>ôn yoic bien à clair de Nicomedie: ôc de Nicomcdie l'on va
Smlm: toufiours fuyuat la mer du Propotide du long de la cofte du goul-
^§£* fede Nicomedie^uquel auos défia parlé cy deflus. No9 trouuôs
des atitheurs qui ont appelle Cute en Latin Cutia, mais Pline la
-O-BSXTLVEES *A* P. BEIO.H. ^ 4ft
îioxnmatdcfonnô anctc l'appelle Contieû.Curc a efté&cft en-
cor viUefortfameufe.EllcafonChafteauencorcn^ vu
petit tertre i&r a de bonnes murailles.LeChaftcau . eft cfi pédant»
qui prend iufques bien près de la ville. Communément Jfvn des
Bellcrbeis de la Natolic a couftume de fe tenir à Cute-.car elle eft
maintenant la principale ville de cefte prouince là.Mais ancien-
nement ceftoitvne autre nommée Gordinus* Il n'y apas long Gordmus,
temps quelc fite aifnédu Roy dePerfe , qui auoît nom Ifmael,
vint courir & gafter le pays du Turc iufqucs en Galatie , n ayant
en toute fà compagnie que de quatre à cinq mille homes moule
vaillans aux armes:ilapprocha iufques à Cute:& ayant là trouué
vn Bâcha, nommé Coraguc , qui eftoitviceroy^ui s'efforça de
luvfaircrefiftcnceauecdcuxfbispiusde gens que n'auoit ledid
fils du Roy de Perfe , tellement que s'eftant mis en la campagne» Maille d»
îuy liuralc combat le fils du Roy ayât batu {es gens Se tuéledid ^°> ***fi
Bacha,lc fett empaler^ couper le membre viril,Sdc luy mettre ^ k
sntreles dens&ie laiflerlà.Puisa3iegealeChafteau5îequdilne ^* ^
fccut prendre : car yn Bâcha Eunuque chaftré venoit à grandes ^
iournecs au fecours auec gtoffe armée, qui le contraignit de s'en
tetourner.
Qne toutes tes femmes qui vïuent en Turqtde 5 de quelque loy quelles
foyent^fefont ordinairement abatre le poil des parties honteufes >0farh
<vmu d'vn dépilatoire }&*non f as au r^foir.
Chapitre xxxiil.
On trouue de toutes fortes de viitresà acheter au
► marché de Cute^ain, vin , chair : car il y a <ks Ar-
méniens, des Iuirs,& des Grecs. Nous trouuafmcs
> vnechofe en ceft endrodel: qui nous fembla plus
§p§^| ûngulierc que nulle autre qu'euâions au parauant
veueen tout noftrc voyage. Ceft la fôurce d*vn minerai qu'ilz
nomment Rufma, dont nous deûnons fut toutes chôfesauoirj^/â*.
l'intelligence, ïîa telle vertu que s'ileft redigé'cnpouldre, puis
deftrempéaucede Peau, il faitvnvngucnt dont les Turcs îbnt
tomber le poil (ans douleur ou £ns foupçondc faite mal quei-
conqueXe dépilatoire Rufma eft en fi grand vfage , que toute la ^^^
Turquie s'en ferc communément : & n'y a ecluy en tout le pays
ïli iij
jçfi T I- E K5 'L I V R E D Ê S &XT5 GlV X A.
rertiida oa domine îc Turc, qui ne le fçache nommer , &: qu'il a telle ver-
^mt4. tu.Maisauffi faut il entendre quelesTurcs.& Turques ont cou-
{tome de ne porter point de poil en aucune partie du. corps , ex-
cepté tes cheucux^: la bàrbe,&: eft chofe odicufe.d'en auoir.Ç'eft
delà que ce métal eft en û grande recommandation, que le Turc
(ainilquelcsl-uifsnous ont dit) en prend tous les ans dixhuid
mille ducats degabelle, que luypayeceluy qui en a pris l'arren-
tcmenùCeft vne chofe fort rvouuellc:, cp'vn mecal de fi petite
confequence , vaille tant à fon icigneur. Nul des anciens nemo-
dernes , au moins qu'ayons peu fçauoir , n'en a encor fait aucune
mention. Celuy qui entendra bien fon vfage , cftimeraquafi au-
tant fà veine, qu'il feroitvric pure mine d'argent, Ceft que le
commûpeuple a fi bien accouftumé d'en vfer, qtui ne s'en pour-
toit maintenant parler ; qu i cft caufe que fon pris s'augmente de
iour en iour. Nous dirons premièrement quelle chofe eft Ruf-
ma. Ceft vne drogue qui. re&rmble à de l'excrément ou merde
de fer, finonqu!elle eft plus légère, noire comme quelque cho-
fe bruffecjaii fil eft ce v ne mine tirée de terre, & légèrement bruf-
ke. Toutes femmes.de Turquie qui en ont affaire , en vfent aux
baings.Car ieunes & vieilles , mariées au à marier au mpjnsii el-
Qceptefour ]es onr £n p0j] ^ dc quelque nation ou loy quelles foyent , Tur-
^*fLeU que53Greques,Armeiiienties,liiifues ySc Ghteftiennes >en vfent
M/**» ras p0ur fq faire abàcre le poil. Qui n eft pas fans. raifon :-car quaiu à
celles qui ay ment mieux, le faire tumber au pfilothre ou depiia-
toirequWrafoir; îc trouuent àceft. cffcàk moult à propos. Plu-
fieurs habitans d'Europe ont eifayé faire des dépilatoires auec de
la chaux. Se de L'orpiment , .mais ont.trouué. l'expérience mal à.
propos , pource qu'iîz n'ont bien entendu lviage.. Il faut necef-
Tffahe des ^Tcmcm que ce! a fefa ce entrant au baing ou aux eftuues. Par-
jewmes. ^ voulonsmaintenant en feigne tla..manicre comme ils vfent
dece Rufma.-Âpres qu'ilzi'ont bacu en poudre bien fubtile,met-
tent la moitié autant .de chaux viue, que de Rufma , qu'ilz d'e-
ilrempent en quelque vaiiTeau auec de l'eau : &. quand les fem- .
mes entrent es biings, lors oignent les parties qu'elles veulent
eftrcfans poil. , bifians la fufdicle ccmpolidondefias, autant de
temps cornmeil fautàcuire vn œuf: puis aptes efprouuent file-
poil veult tomber. Car quand la fueur commencera à percer la.
■ peauâbrslcppil commence» àne tenir p!us,parJa.racJoe;ic.da
ïuy tncfmc tombera çn le lauant feulement d'eau chaude, moyen* "
n ant qu'on ftmalle de la.main.Ce Pfilothre eft.fi tempère qu'iluc
cui&ptfinty&laiffeia'^^ de. poil»
qui autrement abatu.au rafoir, eft mai gracieux & rude:cçla fair,
il fcmble qu o face vne ieune d'vne vieille. Les femmes fclc font
dédiées pour elles, voulansauoir le cuir tendu 5c poli, qui autre-
ment abatu fembleroitcftrerude 5c ride : Mais leshommcs,e£i-
maas telles chofès féminines leur eftre mal feantes , n en veulent
point vfer : car ilz le veulent exprciTcmcnt abatre au rafoir. Voila
la raifon pourquoy telle manière de drogue eilen vn commun
v fage,,. tant entre les pi us.pauures > qu'entre les plus~riçhes d'E-
gypte., Arabie, Syrie, & de Turquie. . Il a défia pafîe iufquesen
Grèce ,.& cft demeuré là : car il 'n'a encor point dvfagc entre les
gens de la religion Latine.
; Qve les femmesde Turquie font belks par fmgukrhé>& nettescomme
perles, h Chapitre xxxn i%*
\ L n'y a femme de quelque laboureur ou -ruftique en Belles femme
Afie„ qui n'ait le ceintfc frais comme rofe, la chair de- *» Turquie.
rlicate., & blanche . comme lai& , &. lecuir fi -bien ten-
( du , 5c vne peau fi polie , qtfil femblc toucher à vn fin
veloux. Et entre autres inuentions quelles ont à ce faire ,(çauéc
compofer vne manière d vnguent auec terre grafiè , que mainte-
nant les Grecs nomment Pilo : de laquelle parlerons çy après.
Ceftc terre cft la mefmequi eftoit anciennement en fèmblable
vfage , nomme par les Latins Ttrrx Chu. Diofcoride dit ccsTerr^chU
mots touchant fa vertu : Extmdit faiem , & emgat atquejplen-
didâm reddit : colorera mfacie &■ toto corpore comwendat s in bdne'ts pro *
nitro detero-euOn la trouue auifi en plufieurs lieux de Phrygic , 5C
de Turquie., & mefroement auons veu fa veine près de Lampfa- umpfamm.
cumàl'oppoiitedeGalipoîi. Et pource que l'vfage en eft grand3 GaûpolL
il n'y a mercier qui n'en vende en fa boutique. Quand elles de-
ftrempent cefte terre , elle fe conuertit en forme dvngucnt , du-
quel entrans.au baing, fe frottent foigneufement tout îecorPs^^^
5c le vifage,ôdauent les cheueux.Tl feroit irnpoffible de chercher ^J^J^
chofes mieux à propos pour la fanté des Turcs 5c Turques , qui^-8flS[
I.Ji . ... : ^*
45$ TISSCS LI-VLB DES SINGVIA.
lesTiirjutt boyuentde l'eau Se mangent chofes crues , que l'vfage fréquent
ont ksebe* cjpilz&ntàçs baings,qui;cft chofcarTcz approuueepar les anciés
ueuxmn >. j^orna|nsu:ar.j(2olumcllc dit: J2*MXz'f^'<»» ciawfitrftCTw JL«u:A»Kir rxc€^-
(àuon* quimus.Jj2ich.ok qui plus meut les femmes d'Aile d'auoir de cefte
terre rcc5 mandée àfe laucr,ô£non de fauon , ceft que leurs che-
ueuxdé la partie de derrière font tein&s en iaune5auecde la pou-
dred'Alc&rma* qui ne pourroit bien receuoirla couleur , û elles,
vfbyent de fàuon. Et qui plus eft,Ics cheueux défia tein&s en iau~
ne, fe toumeroyeat noirs ou rouges,fi elles y mettoyent du fauô:
qar le fau on qu i de fa nature eft acre , pou r eftrc fait auec de la fa-
$urë--del'huiley& de laxhaux , les rendrait d'autrccouleur : mais
degrerïans leurs teftes de lafu&ite terre ven font -beaucoup plus
propresà receuoir la teinture. Car les cheueuxde défais k front
fpnt coupczrcn feneftres^ein&s en couleur noire, qui leur pen-
dent iufques defFus les ioues,&: à la moitié du front , comme on?.
fait auxperits enrans d'Europe , & cenxde la partie de derrière
font treifez Zc liez de fine foye pendans derrière le dos. Et dou-
tant que lateinturc de ceux_.de defTuslefront eft plus noire,d'au-
tant ont elles , félon la couftume y meilleure grâce;, mais ce non
fans raifon : .car tout ainfi que Ion peut accroiftre la beauté dvn
viiàge par bîànchcur,tout ainfi eftans blanches, le vifege eft ren-
du plus plairant.d'.cûre.^.mbré.decheueux noirs. Auicennc tef-
moigne que cefte terre de toute antiquité a eu lieu en Arabie Se
en Egypte Se Syrie pour laucr les cheueux tau fltil la nomme Terra
TertA ca*iU-c*P*tt°**nh ** l'appelle au Si terre à-manger, difant que les femmes
lm*m* greffes prennent fbuuent appétit d'en manger en ce pays là.Elîes
ont auffîjes fourcils peih&s de mefine teinture noire, comme les
cheueux de deuant : êc d'autant que la coulcuren eft plus noire,,
^«^^dautantplusefttrouuélevifagcbeaq. Telle façon de faire n'efi
f^/*f= pâS fcuiemcnt obferuee es vilîes,mais généralement par tous vil-.
TnthÉs* tegcs<& Turquânçar ilzontles baingsen tous lieux. Ccn'eft pas
terexcëZce. merueille fi les femmes d'Afie ont fi beau tcin& : car elles ne font,
point touchées de la Lune,ne du Soleil.*&: ne fortét des maifons,
fjnon qtiandelles fe vont laucr aux baings, pu vont aiicemeticrc
prier pour les jnorts. Elles vont aux? baings.deuxou trois foisla.;
fepmaine^ou elles font quatre ou cinq heures àfe farder, &mi-
gnotter, Se toutesfois il neleurcoufte qu'vn afprcàfaire tout ce?
<p auonsdlt Jolies y vont en grandes compagnies , ou les homes
; " * aefa.
ÔBSEUrEJES- ?Àl P* BÏLOÎÎ. 43^
nefctrouuent point: car elles ont leurs baings à part r & fi elles
vont quelquefois es baings des hommes , ce fera en quelque iour
député en la fepmaine : car il y a àcs endroi&s ouïes femmes ont
le baing pour fe lauer après Midy , d'autant que le matin eft pour
les hommes. Il y a auflr des baings en certains cndroi&s , ouïes
femmes vont feulement le Icudy après Midy : donc par erreur
ainfi que voulions entrer en vn baing comme es autres iours , ne
fçachans point tel vfage , trouuans la porte ouuerte comme de
couftume, eftans entrez aedens,trouuafmes vne grande compa-
gnie de femmes Turques, quisappreftoyent pour aller it lauer:
mais fi n euffios bien {çeu le gaigner de viftefiè,nouseiri6s en pé-
ril de mourir : car la loy de Mahomet eft fi rigojrcafè en ces cas
là, qu'vn homme n'auroit moyen de fe fauuer , finon en contre-
faîfant du fol : car ( comme auons dit ) les Turcs penfent que les
fols participent de quelque faindeté pour leur innocence. Tout
ainfi comme il n'y auoit anciennement aucun édifice à Rome
qui monftraft plus grande magnificence que les baings Se les
temples , aufli ne voit on rien de beau par les vilies de Conftanti-
nopie,&: autres lieux de Turquîe,que les Mofquees Se les baings.
Siccneftoitlagrandc commodité que les Turcs Se Turques ont
àcs baings à fe nettoyer le corps, ce feroit grande pitié tant ils fe-
royent pou ilîeux Se fales : mais au contraire par tel bénéfice , ilz
font les plus nettes gens du monde. Auflï leurs baings font grads
palais , Se ne coufte que la valeur d'vn caroîus pour chaque fois,,
car en toutes les contrées du monde il y a vn certain taux, ioincV
que les baings ont efté entous pays Se de toute ancienneté en re-
commandation enuers les hommes.Et comme tefmoigne Iuuc-
nai Se Horace, le taux eftoit de payer à Rome vn talent , comme
feroit maintenant en Frace de payer deux fouîs.Loanefe chauf-
fe point au fortir de Ieans,non plus en entrant qu'en fortanr, auf
fin eft on fubicdàpaycrcotrets&: bourrées-, car entrant leâns^^.^.
pour aller felaucr,lontrouuc vne grande voûte ronde,au milieu rurfuez.
de laquelle il y a communément vne bellcvfontaine d'eau froide^
©u Ion fe dcfpouitlc fur lappentis^ cnuclopc Ion toutes fes har-
des dedens fa robe. Alors l'homme des baings baille deux grands
linges de toile peintc,dont l'vnc fert à mettre deuat fcy, Se l'autre
à fe couurir le dos Se la teftc.Dc là ion entre dedens le baing , on
ion trouuepluûeurs fontaines d'eau chaude^ quand Ion fe veut
KKk
,440 TI-ERS LIVRE DIS SINGVLA.
Iauer,rlnefaut qu'ouurirvnecaneîle. Et alors les efclauesvicfr»"
nent laucr les hommes , & les frottent, & eftriilent , & àcouftrêr»
Il fcroitlongàracomptcrlc miftereparle menu-.maisdifans fuc-
TV^aiw^-cindcmcc, voila qu'ilz font^Or eft chofe trop deshoacfte de dcC-
da-Uings. couurir les parties honteufes Ieans : parquoy chacun eft fort bic
^ntourné de fon linge* Les variées du baing font mettreà dent,
■celuy qu'ils traictai t v ôc là le poignafïènt iuy dcbaillans & em-
•poignanslcs mufcles du col, deselpauies , du dos , des bras5, des
cuiftes. Puis après lcmettansàlarenuerfe,font tout ainfïdela
poi&rinc , îe frottans de tous coilez» A la parjfin iîz iuy rafent la
teftc:car d'autre partie cela ne fait pasî'efclauc: mais on baillera
bien vn rafoir3 & alors ceîuy qui fc îaue , ira en yn petit lieu , qui
cft au cofté du baing.- & là Iuy rnefmes s'abbatra le poij des par-
ties honteufes. Ayant fait tout cela,il fort & va fur fon appentis.
Alors le maiftre du baing Iuy rebaille deux autres linges nets,
Cecs.Sc là s eflaye honneftement , & fe reueft , Se payant vn afpre,
eft quitte. Voila la manière de faire de tout le pays de Turquie,
qui eft moult dhTcmblable à la façon de France , ou Ion a acou-
ftumé de fê coucher en vn lia: au partir des cftuucs. C eft à bon
droid que nous nommons les noflres eftuucs , au regard des au-
Efiumde £res qu'auons nommez baings. Àufll peut on bien fçauoir que
France. coûtes autres nations d'Europe n'en vient pas comme ion fait en
France : car nous voyons mefmement en toutes les villes de l'I-
taîie,qu on ne fc couche point en vn liât au fortir des cftuues , no
plus qu en toutes villes du pays de Bohême , Alemagne &: Hon-
Bdmi^A* grie. Apres les baings de Turquie, ne trouuons point de nation
^w. qui approche mieux de la manière des baings anciens , que ceux
des Almans : car ilz fe laucntprefque auffi fouucnt comme Ion
faites Turquie : & mefmement la couftume eft 5 que comme
quand nous donnons argent à quelque chambrière, difons pour
£es cpingïes,eux difent donner pour fon baing.Nous auons trou-
né eftrange,qu'allans au baing au pays des Suiffes, les femmes
chaftes entrent au ec les hommes tant eftrangers que voiûns. Soie
que chacun porte fon linge, couurant fès parties honteufes , tou-
tesfois voyans les femmes nues leans^pouree que la couftume du
pays en eft tellc,ilz ne le crouuêx mauuais , & n y font point d'a&c
deshonefte.
SU;
OBSERVEES PAR P. BEEOK» 441
ta recepte dont les femmes fi teignent les cheveux & lesjourcils en noir,
& les hommes vieux la barbe. Chapitre xxxv.
. Amaniere de compofèr la mixture, dont IcsTur- ErainyufU
ques& Greques vient en fe teignant les fourciîs, \^es yfium.
eft faite diuedèracnt. Nousauons aprins la plus Feretro»£ifi'
commtine, Se de laquelle les femmes fçauent \âf>*g»a-
^ag^pçjBsar^ recepce.- Elles prennent vne petite- îame derain cSciijhe.
bruflee , quorvappelle xs viluni , Se en vulgaire Iralien , feretro 0m2bAClttt'
J'Efpagnar, pefant enuiron- vne dragme ou deux : Se la frottent
légèrement deffus vne pelle de fêr , êe en la froifïans la mettent
en poudre : en après prennent vne bonne galle d'Htria nommée
Omphacicis^qu elles mettent defTus la poudre. Puis prennent va
fer chaud, non pas tout rouge, &: pefent deffus lagalie,qui le fond
àla« chaleur : puis Farroufent de trois ou quatre gouttes d'eau.
Puis réchauffent leus fer de rechef, Se pefent fur la galle iufques
à tant qu'elle foktoute fondue Se meâeeauecladicie poudre d*e-
rain bruflé. Alors la mixtion qui en vient fex&cn manière d'ancre
médiocrement cfpoiâcvde laquelle lesiemmesen prennent auee
4f.n petit bois fait en façon de pinccau,-& s'en ftottent les fourciîs
.elles mefmes,. en fe regardant dedens vn miroir,.^ lalaifiènt fei-
cher. Et continuans cinq on fix fois en ceâc forée *fc rendent les
fourciîs plus noirs que n'cftlc poil d'vne taulpe. A la fin elles ef-
facent le noir qui eft attaché à la peau des fourciîs , fefrottans
auee vn linge mouillé. Plufieurs Pérores femmes Se Biles Gre-
ques fe font abatre le poii des fourciîs aucc'du Rufma.Puis fe tei-
gnét le vifàgc au deiTus de iaxacine des fourciîs auecladictc mix-
tion,faifans la peinture courbée en arc,à fin qu-il femblc que les
fourciîs foyent eûcuez en croùTant» Gela eft beau à voir de loing.^
mais qui approche les yeux de près les-regardant arxenriucment,
le trouue laid.Combien que ce neft pas ebofe moderne:car l'vfa-
geenaefté de toute ancienneté comme ferons plus aplani voir.
cn.ca fiiy uant chapitre...
K.KLk. ij
442, TIERS LIVRE DES SINGVLA.
"Louange dvnebeauté excellente félon la mode des Grecs .
Chapitre xxxvi.
Lùtutjgede ^^^S® Vand les Grecs vculét louer vnc beauté par cxcel-
heauttlU W^^^^^ *cnce > &s haulfentîa main , Se la ciment à cofté,
Grenue. ! |ll||§i|/| môftrans le poulec Se le premier doigt, ioin&s cn-
^^^^^^ femblcpar les extremitez, fermez en rond , en ai-
<P^^&âpl Tant que l'œil deceîuy dont ilz parlent , cft aufli
grand.C'eft vn prouerbe ancien moult célébré par les eferits des
Grecs iuges delà beauté féminine, qui furnommerét les femmes
ïhayùfb* d'excellente beauté en vn feul mot Platyophthaimos , qui vaut
thdmoh autantàdirequelargesyciix.Maisc'eftàcaufe àcs fourciis efle-
Grmàyeux ucz qU j font auoir bonne graccaux femmes qui ont le vifage lar-
fînttrouueX,gc.En cas pareil quand i!z veulent louer la beauté d'vn homme
beaux en £Qn rokuftCji|z m0nftrcnt le mefme cercle qu'auos di& des fem-
Qm** mcs:& pour adioufter violence à leur parler , ilz diroyent volon-
tiers qu'il a les yeux auffi grands que ceux d'vn bœuf. Si Ion vou-
loir obferuer les fiâmes Se antiques medales Se peintures des an-
ciens Grecs , Ion y trouucra les yeux d'exceffiuc grandeur , au re-
gard de ceux des medales Latines,&; les cheueux longs.Les fem-
mes des Turcs ne font pas grand exercice:car elles ne fortét gue-
rcs hors du logis, finon quand elles vont fur les terraffes des mai-
fons,ou elles demeurent tout le iour, Se chantent à leur mode en
compagnie de leurs voifînes.Les Greques principalement en Pe-
ijherté des rc de Conftantinople , ont plus de liberté qu'es autres villes fub-
femmesde ic&es au TurCj car elles vont par la ville aucc vnc grande parure,
pere- Se principalement fi leurs maris font quelque peu riches , feront
Parures des can£ £xc^cc$ & aornees de parures , qu'elles aurôt les doigts char-
femmes Gre* ^ ^ bagues quafiiuiques dcfiusle bout des ongles^ ont touf-
^m' iours mille petis fatras pendus au coi auec plufieurs chaînes tant
faufesquevrayes,& feront ceindesde quatre ou cinq cein&u-
res,les vnes de fine foy e , les autres d'or , les autres entournecs de
pierreries tant bonnes quemauuaifes. Elles font richement vc-
ftucs de foyc, tellement quelles portent toute leur rïchcfTe for el-
les pour la monftrer. Mais on ne ks voit en tels habits que les
iours de feftes , quafi en mefme équipage que celuy du iour de
leurs nopcesj&diroitonàlcsvoir aller par la ville que ce font
çfpoufees.
&es chofes difficiles & croire ^ue les bafteîeurs de Turquie font en
publk, 'Chapitre xxxvn.
t E s Turcs ont des loueurs de pafTcpafIe,& bafteîeurs, ^^ ^
\ tout ainû* que nous auons en Europe. Ceux qui font T„ ^
> celles chofes , fontapprins de ieunefïè : Se ncfont ia-
[ mais autre meftier duran t leur vie^ lis font des chofes
qui feroyent difficiles à croire qui ne les auroit veucs : comme cft
de rompre vn pillon de fer à coups de poing, tellement quvn ho-
me donnant quelque centeine de coupsen vue mefmc heure , le
rompt prefêntement. Nous auons veu vn homme portant vn
trefgrandchcuron tout droicr. deffus vnc efpaulc : Se fans le tou-
cher Je faifoit fauter fur l'autre, & inceffamment remuer fans le
touchcr,le faifant fauter çà Se là. Ces bafteîeurs s accompagnent
en fèmblc vne bendc de demie douzaine,& vont par les pays fuy-
uans les villes & villages, ou ils fçauent qu'ils trouuent les ges a£» „. ,
fembîez es marchez ,&. là font mille fïngeries en public, comme r^L^Jft
marcher les pieds nuds deffus des cimeterres trcnchants,rompre traLj,
& départir des pieds de bœuferuds aux dents fanscoufteau , Se
puis après prendre les os0Se en les frappant dcfïus leurs ïambes les
rompre en pièces. Si ne l'euffions veu faire,à peine 1 euffiôs creu:
mais ne pouuons croire qu'il n'y ait de la tromperie: car après
.qu'ils ont décharné les os des pieds de boeuf, ilsfe donnent défi
grands coups des os fur leurs bras Se iambes,quc nous cfmcruciî-
lonsqucle feu n'en fort, &nc cefTcnt de frapper iufquesàtant
qu'ils ayent rompu lefdits os de bœuf, Se ainfi en rompent demie
douzaine les vns après les autres. Si telles chofes n euffent efté
faites en la prefènee de grands perfbnnagcsdenoftrc nation , Se
qui font encor viuans , à peine l'euffions voulu eferire : mais n ca
auons fait difficulté fçachansque n'aurions faute de tcfmoings.
Si n euffions veu quelques autres bafteîeurs de foible corpulen-
ce,faifans auffi ceftemefme choie, euffions attribué cela à la ver-
tu d'vn homme fort par fînguîarité, plus robufte que nul autre,
comme eftoycntlcs Athlètes du temps pafTé,dont Hippocrates
& Galicn ont tant parlé. Mais voyans que plufîcurs font le fèm- f^f* ^
blable, ne nous fommes peu perfuader qu'il n'y ait de FarFe&crle. W**"*
Ces bafteîeurs fe parquent en quelque place., ou ilyaaflèmblce
KKk iij
^44 TXEB..S .LJVJLE- I>IS S.INGVLA.
de beaucoup de m onde èïi quelque marché : &ce pendant que
les vns font des bafteleries , las autres demandent de l'argens aux
• /afliftansquiles regardent. Iln.ç.leutdonnequine veult , mais ils
AesTims 'importunent tant que les vns leur en donnent. Us demandent
pour l'amour de Dicii : car ce neft point, de honte entf eux de-
mander pour L'amour de Dieu..
BelïluiiïedeTtirqwes Chapitre xxxviii^
A manière de îui&et des anciens veft encore en
vfage chez les Turcs , telle qu'elle eftoit ancien'ne-
meten Grecc,&: à Rome. Cë.fU'vn des plus beaux,
paffeceraps qu'on pu i{fe voir en ce.pays là. Car les
hommes qiiiluiâ£t,fon.t tous nuds» excepté qiuls
ont les hauts de chauffes de fart cuir Hfïe & huilé» & poli de peur
qu'ils n jayent prinfe l'vn a l'autre. Et fi d'aduenture quelque ieu-
ne homme-fc trouue prefent quand ils luiâ:ent( car pluiieurs ges
syaffemblentpourles regarder) qui ait le bruit deftrerobufte
& fort,&:aitenuiede sefprouuer cotrevn autre, alors quelqu'vn
l'inuitera en luyfaifant honneur^ s'il fc met en campagne., les
bafteleurs luy bailleront des-brayes ou hauts de chauffes de cuin
& là fe defpouilletoatjes deux fur le champ. Ceux qui font en-
tour eux-^ofriroat de leur ayder aies defpouillcr , & leur tien-
dront vne rabc.au quelque linge haufé pendant qu'ils defpouil-
îentîeurs veftemens. Quand ils font prefts,ils fe mettent en pla-
ce : & poupee qu'ils font nuds , & queleurs chaujffes leur.fpnLbié
fèrreerfur les cuiurcs)qui prennent iufques.au bas des genoux , 8c
font bien ferrées au deCus du gras de la iarabc , ils n'ont point de
prinfe,&; par ce poinâ font lôg temps à* entremettre, bas. Ils ont
grand difficulté à trouuer prinfe en lui&ant:car leurs bras & tout
j>imc*héùlc corPs &nc gliffintt-- La luide càbcilc, & faut pour auoir la vi-
imtrcah* âoiresqus lvn mette 1 autre fur4e dos, à quoy faire y a grand' pei-
treà k îm ne, Si bien l'vn cft tombé fur le codé ou à genoux , & que le com>
Be des pagnon foit encor debout , toutefois il n'aura pas vaincu pour
Tm^ ceiz : câr il e# licite à cefte iui&e de prendre prinfe par tout & par
les ïambes auû>,& quand ils feioignent,ilss!engcredônent le clin-
- quet,& s'ils fepcuucpt tenir par le poignet , ils s'entrebâillent h
Um&* Ils feront quelquefois % voçl heuîeJVn & l'aucre^as fe
O B-S^ÎLY 1 1 S * A*. *, ^ B ÏX ôtt* ^J4J
pouuoir -mettre -for le dos: & n!cniiuyroiuamais à ceux qui les
regardcnt,tantlaiui&ccflpki{ante& dauteufe, & là ou l'on lu-
ge plus diuerfcment , tamoft dVn , tantpfl: d'autre* Et û lVncft
vaincu,ii ne fera moinsdcfplaifànt que ccluy qui aurait perdu ic
pris à refcrime. Us oignent quelque fois le corps aucc de l'huile:
Se alors il fait encor plus beau voir lalui&e: car leur prinièeneft
plus difficile. Ils ont leur rufèà cela , ne plus ne-moins qu'ont les
Bretons a la roanire de faire.
Que les Turcs vont hardiment fur U corde.
Chapitre xlcxix.
jArchcrenlairdcfTuslacorden'eftpasde rinuention Dacetm fir
l des hommes de maintenant: car nous voyons lesef- kcordes.
|critsdcs anciens en faire mention enplufrcurs lieux: SchosnoUtes
*mais il n'y a nation viuante qui fçache mieux aller fur Fmam^-
la corde que font les Turcs: car ils l'apprennent dés leur enfance,
&:auâi le continuent durant leur vie. On les nommoit ancien-
nement Schœnobates ou Funambulû lis s'aflcmblentvne gran-
de bande de Turcs , iufqucs au nombre de hui& ou dix qui por-
tent leur cordage , & autre bagage quant & eux. Vn chcual fer*
uira afTcz à toute la troupe : car ailans par pays ils nefont pas gra-
des iournees : & quand ils font arriuez en quelque village 3 lors
fè mettent en quelque lieu ipacieux ou ils defployent leur baga-
ge^ dreflènt deux hautes pouftres fichées en terre, ou ils tendét
deux cordes , dont l'vnc eft moult haute deflus l'autre. Celle qui
cft tendue Iàheut , n'eft pas pour faire kurs icux : car ils demeu-
rent à la pîushaCe,, ou ils font quelquefois demie douzaine a la
fois : & dit oit on à ks voir que ce font Efcureaux , tant ils font
duicb à voltiger fur lacordcXa corde qui cfi tendue la plus hau-
te, cftièuîement pour ceux qui y vont aucompas par deïTus. Ils
font leurs ieux en public : car aufli font leurs cordes tendues en la
campagne. Mais quand quelques vns d entreux font defeenduz
de la corde, ils vont demandansau peuple qui les a regardez: &
font tant importunsàdemander, qu'il y a bien à faire à les cfcon-
duire. Il fèroit quaû incroyable à pîufîeurs û ne fpecîions par le
men u ce qu'ils font. Si les villageois de noftre Europe en auoyct
feulement veu la quatriefme partie* nous nedoutons que la plus
- " KKk iiij
$4$ TÏ^KS LI Y B. 1 BIS SI KG V LA. ^
grand* part d'iccux ne crcuft que ce fuft enchantement. fyfais ils
font cela par vf^ge^aptins deicuneffe , comme ceux qui font les
fcubrefauts : car les Turcs n'en font point.: Us fe. pendent par vn
longtorfcç de cheueux qui eft defius leur tefte , comme ceux dV-
turcs **tlx nefemmc.Tous les Turcs ont généralement la tefte rafee , exce-
tefieufa^ ptéfiirlefommet, ou ils laifïènt leurs cheueux,, à fin que Maho-
met trouue prinfe quad ils les leucra de terre le iour du iugemet»
Celagift en leur volonté de les auoir courts ou longs. Les Turcs
fcrafènt la tefte Fvn à l'autre, du mefme coufteau duquel ils cou-
pent leur viande î car ils le fçauent fi bien aguifèr qu'ils le font
couper comme vn safbir. Toutesfois il y a àcs barbiers en Tur-
quie^ qui vfent des rafoirs qui font differens feion les pays : Car
ceux de Syrie Se d'Egypte font efpois Se pciànts,& bien trenchas:
defquels le manche n eft pas courbe, ayans comme vne tefte au.
bout : & pour ce que l'acier eft damafquin , ils ont trcfborurcn-
chanta
&es Chiem de Turquie > &deh chajje des Turcs*
Chapitre x L.
Chapitre
ékiem it ¥yfâfâ§& E s chiens que lcsTurcs nourriftenten Turqui>,n'ont
targuie. S ^^^ quelques maiftres particuliers. Toutesfois les maftins .
§ j5£*2jdes villages ne laiflent pas d'eftre nourriz fans entrer
¥? M^zStê ésroaifons : car il y a toufiour s des tapiz par terre par
la place. Etpour les nourrir ils ont quelques pierres creufes au
cofté de la muraiikide leurs maifons,ou ils portent le demeurant
àcs potages Se du pain Se ofïèments , à fin que les chiens le man-
gent quand ils y viendront. Chaque chien fait la garde, Se de-
meure ou-il a accouftutnc d'eftre nourri: & mefmement H engar-
de les autres chiensdfy venir. Et chaflè celle cfpece deioups {au-
uages qu'ils appellent Àdils,qui font û communs par Turquie: Se
métiers de ^es engarde d entrer es villages. Les Leuriers de Turquie ne font
rmrmis. pas ^ grands comme les noftres .>, mais font de la hauteur de ceux
que nous appelions metifs : Se ontainfi la queuëveîue, les aureil-
les pendantes comme les leuriers de Crète: Se les tiennent atta-
chezen laifïc» comme nous faifons les noftrcs. Auffi ont des Es-
pagnols pour chercher la Perdrix. Ils fçauent voler à rEfpcruietj
& aFÀutour^au Saerc^&; an Faucon. Mais quandiis rccJamen c
leus
ôbsextïss ; pai. r- FEroîC. 447
. Jeor oMcau>ils leur crient feulement , houb houb : qûï eft la voix
donnée pout les appeiîet à. leur mode» Les fauconniers Turcs
notent feursoifeâuxfurlamaiDdextre,& quelqnesfbisiesnour- F^oimtm
riû^ntauec desxruis de P^uMe^duarcis^en faute dechairfraifebe.,
Ceuxqu i habitent eu pays de chaffe ne îaifïènt perdre i'oceafîon
de prendre les beftes douces , n'ayans foing de noires : car (corne
auons dit) ils ne man^cnr lacbairde Porc»Mais sjI aduenoit que
les chienseu&ntfu&qucouîeCkanglc quelque befte ronfle, ô£
qui n'a largement feigne ,ccuxqui font fcmpulcux n en mange-
ront point : car (comme auons par cy deuant dit } il leur en; de£-
fendu de manger fang^nc befte quirfairefté feignee: Toutcsfois
ilsneîaiu^rontdcrairepco'fttdelcufvcnaifûni car ilsla vendent
aux Chrcftiens jfcacha&s que les luifs ont auiE cda defTenda
comme eux.
les noms desphntestYWuêesmchemmam^icjfakmmt
Olympe, Chapitre X L i.
Stans partis de Contienm > ayans fuiuy le chemin par
! deifuslamontagne^our venir àCoBfta»tinoplc5,ar^
* riuafmcsen vnvMlagccntre les valleesdu contenu du
i mont Olympe: car la montagne eltdc moult grand
cftendue. Nous trouuious grand* quantité de- la plante de Tra-
gacantha , de laquelle les habkans cueillent la gumme que nous-
mettons en vfage. Le fen demain partifmes k iour ouuert contk
nuans à la mon tagnc,qui nous duraient le iour^Sc neiêimics que
k rrauerfer. Bilans paruenus au faifbynoustrouuaimesencores
grand^ quantité de neige : car la grande froideur qui eitià haut
Stuceen la moyenne région de Lair^nesadoucift jamais Ceft la
f aifon pourquoy ûfàic touûours grand froid fur la ioœmicé'-des
hautes montagnes», Se nés en defcouurcnt iamais , & quelanei-
ge ne fe fond point l'eft,é~ Nous en auons l'exemple des monta*
gnes d'Ethyopie y ou tout le mode qui habite es plamesve&bru£*
le de lexçcfEuc chaleur du Soleil r&toutesfois Tàeophrafte par-
lant de laMirrhe, Encens %Sz Caflfia, tefmoigne que les monta*
gnes y font couuertes de neige : comme auiE eft le mont Liban,
en Syrien IciT^oatdelaSphachie^Ida^ Dideusen Crète rcec
Beaaxmoins.Ic«mde£ûi;rje maluaifieyeft cueiilv es plaines voi^
' LLi
Jdttuua*'
\2j4S -ÏIETCS J/IYStE DES -SINGV.LA.
: fines. Ce n'eft donc merueilles û nous voyons quelquesfois grc£
■ ler.cn cftélors qu'il fait grand chaud en rerre. Nous trouuions
-desSauiniér&Giuuagcs, . tels:q?ueccBX :que:nous auons. cultiviez
^xïbresdu -cn noz'iardins, qui font fifreijucnrscn cb mont^-qu'oa- ne voir
mmtQlym* verdoyer les cou ftaux d'autre arbre plus fréquent. Les Sapins y
jfc. xcoiflent en excciEuc hauteur, qui y portentpeu de refîne. Il y a
cqueLquesaibres d'E-feulus r &£.Oftria>. queics François nom ment
:Àa Haifoey& auojesièm blablœ. Les Piasiau uagés ao m ruez Pb-
-cesejfonrmoiikfrequens en quelques eèdrafets des fore{h;côm-
-nieau{E vneefpece de CheuicdifccntaunoftrCjlequel croyons
*que les anciens n'ayent cogacu: câril aies glands non plus.gros
Hellébore :*pepetitcsfebues. L'HeIkboré nbif ypcoduklihxemcnt la Heur
Jonjfant de<iou%cy& y croi&cn grand: quantité., Geiik le premier lieu ouïe
*ouge, veimies porter la fleur rouge. Nous trouuafmes vne manière de
sedon. plante nommée Ledon, beaucoup plus grande que celle de Gre-
F- s. 1 ce : te *iu*; .cfl:.3)ffecer«c.cac^e€c* AulU trouuafmes quelques
figne i autres arbres ^plantes , desquelles n'aimns. nom antique à les
* ' exprimer , que remettons en autre temps à deferirc. Nous con-
"îinuafmes.Iesforc&sdePignets&deSapins, &: vinftnès ce foir
caucher en. vb autre village entre les môtagnes. Nous obfcruios
expteffcmcatfiYoirrionsdcsMelcfcs, que les Latins nomment
Lariçes.: mais nous n'en auons trouuc par tout ce mont, non
plus que par Aûc&: Grèce. Et pour autant qu'il n'en croift point
en Grèce ne Aûe,lcs autheurs Grecs anciens, neaufu Theephra-
ite&Dioicoiide&LGalicnnen ont point parié,en tant que telle
plante Jcureilojt incQgncuc,comme auflî à rous.Nous n'ignoras
pas que Diofcoridc &c Galien nayent -parlé quelque peu de fa
gumme: maislapîanteleuraeitéincogncue. Etnouseimerueil-
Ions de Pline , qui en parlant de Thuya ,. a penfi qu!Homere ea
cuÛJtait mention: mais l'erreur vicnt.qu au. lieu ou il deuoit metr
"trePicea?il a entendu, du Larix.. Icy ferons voir Ieportraict de
Larix,remettans aie fpecifier par le menu auec les arbres conife-
tcs. Le lendemain nous defcendifmes toute la- montagne , ou
n.'obferuafme5 finon quelque diftincb efpece dcPicea y dont les
cônes ou pommettes nc.ibnt gucres.pîus gt&fe qtieîe bout du
. . petit doigt. Nous.troutjafmes dcisiefmc iarbriueau que les ha-
5?f* *' bôtans dei'Abrutsea Italie appellent en vulgaireSpinaCerifola.
Eftaas ja defeendus hors du moar» j)ousar.riuafmes.en vne gran-
OrfSÊR'VEES 'SA*-'''*.' - BËLOM.- 44^
cfe-ptanqjre ,vnie comme k^mer, oula terre eftmoukgraflc-, en
laquelle on feme du riz : caroatreeeque pluneurs rpifleaux de£-
^endent detouscoftez cfes m^^a^es}quilVroufc^>^&fODC
-, - < ;.- . . ' - :. - - "« - • "-•'- ..,,:•;;_: - jis facilement: conduits
£7 aif port-rai cï de l& Mehje ou Larix^
& retenuz par cfclufès,
& vuidez quad on veur.
-Ce n'eftûdc mctncûlczfi
les Turcs ont fe. Riz en
.grand vfage : car ils. le
fçauent mieux apprefter
qne nous. Bc qui voudra
faire comme cux,lc mèt-
re cuire dedens du bouil-
lon, &: le face îonguemec
bouillir fans le remuer :.
car g le remue en, bouil-
ianc gafte tour, comme
ont accouftumé faire les : -~
Françoys„quid'vneonce . . v :
enfonc vne grande plai-
ne poteeunais %\z façcri
'3,. des,- Turcs ih en iaudroic
bien vne iiurc entière^
Cefte campagne deiUz
nous dur£dcmyiaur, À ^c-t
Yi£fhé de laquelle nous
patTafmes par vnc bou-
che entre vallées, ou en-
corcs rétro uuafmes de
l'arbriiTeau de^Spina ce>-
rifoîa, &de.ia plante &-
phedra, chargé deieme-
ccsrouges, coinmccftlc
Androiaccs , qui citoic z?oc&*
d'excefSue hauteur : du- Sm^x '&#
quel lanature eft comme celle de Snùlax leuis, qui croiir aumot ~tàà»jz&:r
Athos:car s'il trouue vn arbre encore ieuneail luy àédracôpagme
en croiilàntiLelkmentquciî larhrc.s'ekuaic iuiques.au ciel, aujîi
LL1 ij '
Sdpinsdc
ÎEmui.
trufi.
Bkhynix.
Siège des
Empereurs
des Turcs.
Jtfye'ccU
Roland.
4JO TIERS LIVRE DIS SINGVLÀ.
1 ferai Ephedra. A l'exemple dequoy nous auos veu des platanes,
qui ne font gueres moindres en hauteur-que les plus hauts fàpins
idu.moDi £mus, quiauoyencconduid i'Ephedra iufques à la
ibmmitc: maislcSmibxlcuïs a quelque chofe d'auantage que
I'Ephedra, ccft qu'il a vertu de s entortiller : maisceftuy cy de-
meure feulement aiïaùTé ouiMètrouue fans clauicuîcs : & s'il
trouue vnpcrit arjbri{feau,il demeure petit, & ne croift non plus
que s'îltrouuevne muraille. Nouslauonsau parauantjanotéen
Élclauonie , entre Caftel nouo &: Ragoufe veche.
De U ville. Je Bource > ancimement nommée Prufa , qui efloit le
, fiege des Empereurs des Turcs. Chapitre xlii.
O vsf tcnionsjc chemin droid pour aller à la ville
deBourcc , qui s'appeiloit anciennement Prufa:
oueftoitJe ficgedcs Roys de Bithynie. Pline dit
qu'elle fut édifice d'Annibal : Jnttts in Bithynia Pr«-
_ ^ _ fit ( dit-il ) ab^tnnibale [uh Olympo condtta. Nous la
vcifmcsde bien ioing ,11 tuée aux racines du mont Olympe, ou
iiousarriuafmes de bonne heure, &reftafracs long temps auant
partir, CetHvnc des villes de tout le monde de la plusmerueil-
Jcufe foliation :xar .comme ellceft creuê,elle s'eft cfpandùc parla
montagne :auûln y a il pointde muraille. Elleeft déplus gran-
de eftedue que Lyonrcar elle cft ièparceendiuers lieux par les ra-
«cinesde la motagnc.Elîe a fes vallées qui la fepat ér ,faifàns fes par-
. tiesdiûates Ivne de l'autre. Quad les Empereurs des Turcs des-
cendirent à leur nouuel aduenement de leur pays , cftas paruenus
en Phrygic, &: ne pouuans marcher plus outrc,ils s arrêtèrent en
Bource,ou ils conftitucrent leur fiege Impérial. Mais depuis cent
ans,ayanspcuàpcupafieen Europe, après qu'ils eurent gaigné
-Com4antinopLc,ils laûTerent Bource , & vindrenc tenir leur fiege
Impérial à Conftantinoplc. Etencordeprefent Bource cft aufîi
riche &auifi peuplée que Conftâtinople ,& ofons dire d'auâxagc
qu'elle eft plus riche&: mieux peuplée. La grand cfpee de Rolad
pendencor.pour l'iicure prefente à la porte du chafteau de Bour-
ce.Lcs Turcs la garder chere corne quelque reliquaire:car ils pe-
fent que Roland cftoir Turc, au moins s'il peut citre vray ce que
le vulgaire en penfe. La ridieû^dcBûurceprouicntdclaibyc:
OBSERVEES *ÀR F. BEION. 4JÏ
car il oc paflè année que mille chameaux vcnans de Syrie Se
d'autre pays de leuant apportans lafoyccn Bourcc ny foyenc
deicbargez : &: y font accouftrecs>fiîees,tiiTues,& mifes en dkicrs
ouuragcs Se diu erfès teinctures,en diuerfès façons: car Ics^ Turcs
portent leurs habits de velours figuré de diuerfès couleurs,
comme aufli font entremeflez d'or Se d'argent^ proprement
façonnez.
Que les ouurages des Turcs 5 font fort bien faits : & que les habillement
font bien cou jus. Chapitre xliii»
i Es Turcs quelques habillemensqu ilz facent , ou de Omfimim
drap ,de foye , chamelot ,- ou Moncayar : ilz les cou- de Turquie.
fent de fine foye, & font cou fture qui dure plus que ^^^
le drap.Nous ofons dire que les habilicmens qui font Mmc*j?ar.
coûlusen Turquie ne font nullement coufus que de fil de foyc
qui principalemet cft filé à Bourcc. Les coufturiers de Turquie,
fi Ion fait comparaison de leurs ouuragesàccux qui font cou&s
en Europe , coufent toutes befongnes mieux Se plus elegammér,
que ne font ceux du pays des Latins : tellement qu'on diroit que
iouuraged'Europeneftqucrauaudagc au pris duleuncarquel-
que chofcqueccfoit,cft fi proprement reprins qu'on n'en voie
point les couftures , & quelque ouuragc quïlz facent, cft fi bien
fait qu'on n'en fçauroit que redire.
Ve$filtiers& cordonniers deTurquic. Cbdçitrt XLXZIX.
Es cordonniers 8c feîîicrs coufcnt fi proprement en
cuit,qtvil eâ impoflibb de faire mieux.Uz n'ont point C£T™™*?
lVfagedefoye de pourceau , ne de poix pour grefler %^^'
leurligneul : mais ont de la cire, Se Ce fèrucnt de lon^Turamem
gues aiguilles délices :Se après qu ilz ont broché de l'alcfnc^lz
coufent de leurs aiguilles qui font vn peu courbées : communé-
ment aufiTcoufçnt tons ouurages de cuirauec de la foye. Les
foulicrs des Turcs font généralement ferrez deuant Se derrière, soulimdes
tant aux grands feigneurs qu'aux payfans de village. L'Empereur Turcifarre\
des Turcs mefme, comme auffi les Bachaz les portent ferrez, ne
faiiànsdiftincliondelachauffare feerce des payfans, à celle àcs.
LL1 iij
45"^ TTER.3- LIVRE DES SINGVI'A.
grands .feigneurs , comme auffi font ceux des femmes , illies , 52
So^iersneje petits enfans,. .Mais fàur entendre, qu-vn foulier rompu en Tur*
^f^^uie ne'fe rabilîc.iamaift, non plus .qu'vrae Telle de. chenal ..ïlauffi
*L>. ' ** .n'y voit Ion âuamsTauetiers.ToutesTorccs d'ornemens &.pam-i-
res de cheuaux,.& toute autre matière de cuir eft coufucài'aigiiil-
lçauc.çfil de foyc. flnev&: commeauons dict des cordonniers 3 il
faut premièrement piquer de l'alefnc : car leurs aiguilles longues .
&: délices n'ont point de poin&e^
Des Maréchaux de TuY^uiti. Chapitre xlv...
MdrecfawcL' b&*^g&^. N Turquie les .Maréchaux, quelque part qu'iîz
Japsjouffleh 5m V^&0fà fo yen tn'vfent point de lbufHets,&: n'ontque : faire
e&zmfuc. 4Ry &fc^SS de charbon; car ilz n'ont point de forges. Leurs
^.^^^^& fers ne pefènt pas la moitié tat que faitvn de Genx
^^t^lS^' d'Eu ropc,& ne faut non plus de matière à en faire
deuxen Turquie qu'il en faut à faire vn-aillenrslllz achètent les
fers à douzaines iaeibàuchçz& non peFcez,commeaulîlfohiIes
doux à cheuahles vns {ont plus grandsjes autres plus péris, mais
puis après faut les aiTortir.; car eflan s acçrç»pis CQ-nieepufturiers,
ilzles façonnent denti5renclui»çà;coups de marteau^ & les per-
cent aucc vn'poiniTondebonacier>&. les croient auec vn autre
poinflbn-quarréo fait en potence pour tenir meilleure prinfe : le-
quel eftanc bien acéré par le bout ,croift le pertuis du fer autant;
Lesdoux dés qu'ilz veulent. Ilz ne cramponnent pas Tes fers de leurs cheuaux :
vwecktux. carilzneiesfontiaaVais voltigera remues : Se au (il que les clou x
dont ilz attachent les fers,ont latefre longue & groupe à ia "façon
dVn cœur de pigeon: &:pource qu'ilz vont touiiours le pas, vn
eheual fera vo derny an fans fe déferrer. C'eft . vne mode moult
louable* que denios auoirâdioufleejors qu'auos parlé de ce qui
Tarùtf des 'les rend auan ragez en leurs guerres- Quand -ilz -parent le pied du
piedsdeschs= Cheaaî,ilzne le vuident pas creux en boutant d'vn boutoucs
aaux. appuyé à la .çuifïè ^ comme nous faifons , &.ne voûtent point le
. pied en deden-s > mais en tirans ilz applacirTeat le pied aueç vn fer
j^.'ij^iargç-comme h main 3 ayant fen trenchant retourné y-ers le ma-
'"" che.Les Turcs faifâns voltiger leurs Cheuaux, ne leurs donnent
point decourfès à remifes. Parquoy n'ont que faire de cram—
genoer. les &xs dejeu.r Ck.cP.aux > comme au.flî, .toutes leurs.
, .* O S S EU. V E"E.'S •-* A*3t' P. "B E'ITOH. 45$
■brides n'ont qû'vn moult peciemors. Leseftrilics des Chenaux tfr&eiZes
/ont dentelées comme les -noftres , mais elles n'ont aucun c*KtMUX*€i
,. _ - Ti.r:s.
ananchcj- ■-."«"-'* - - :.../..
Z>es-botichers de Turquie , &des pierres qui fontes fiels iesfoeufs.
Chapitre, xlvi.
.^ L n'y a boucliers qui foyenc plus habilles à apprefter^™^^
P les chairs fraifehes, que ceux de Turquie. Tous en ^
É quelque lieu qu ilz foyent^oncacoultumé-de regarder
j, au fiel quand ilz ont cuentre quelque bœuf,pour voir
s'il y a point ide pierre dcdensida.utaht que fbuuentcsroisiîs'y
engcndrehmcpkrrc que les. Arabes ont appelle de 110m propre
Haraezi. Auicenne autheur Arabe adefcrit fa vertu par le menu. H*r*cQ
Lesluifs l'ont en grande cftime Se honneur plus que les Turcsï
cair lcs,Turcs eftansplus Ûins que- lesluifs -, n'en ont f>as fi grand
arîaire^ Lès Iuifs fontcommuncmentmal colorer, & t£>urmen- .
tcz de la iaunific, Se ont cefteparticuliere nature qu'ilz font mor^
nés & melanchoîiqucSj non feulement: en Turqu iesmais en Àle-
magne, Italie, Bocfœe,&: France :•& quelque. parrqujlzfoyent,
iiz font lents-, & penûfs. Ceux qui fontea Turquie ne trouuenj^^^/0^
plus fingulier remède poux leur makdie que â'vfcjéch pierr^ ^ji"
de Haraezi. Nous auons bien voulu toucher ce poirre , à fin que
chacun qui liracecy , admonelte les bouchers du pays , de faire
çherchcresfielzdcs bœufspoucy trouuer^ditepjerre. Ileiibié
vray qu onifcn «rouue pas en cous ûdz> mais entxc vnc dizaine *
quelqu'un s'en rrouuera qui en aura vne ou deux , quelquefois
trois. Quand ilz efeorchent vn mouton ou cheure , ik font fort
foudains à la fàignerjâufSs abliiennent ilz de tout vfage defang.
Puisenîuy oitacJa.peau,la relcruct fans laie&dre>à fin de s'en fer-
uirpour ouldrei porter quelque liqueur^ Quand l&v. être eu; ou~
iiertjilz coupent le petit boyau ioinctàîapanccau defibuzdela
caiUcttc,&: de là choifirTent eduy qui eft côioinctau gras boyau>
Scies afTemblentenfembleparles deux boutsicclafair, tirent les
laenîis boyaux, dû ventre > n'y jaùfàns aucune greiTe;puistespen~
dencà vncrochet , pQurfairç ce que dirons après, Hz vendent là u c^eû.
chair àia liurc , commeauûî font ilz toutes autres choies .* & la ^^^ u
fçauent fi bien compartir, que, chaque, partie participe des os. rmrc
i--;..r ' " lu îîîj — " *
^4 XIMS IITRE DES STN.GY.ÏiA.
Si quelque Turc a vn boeuf ou mouton à vendre > il ne le vendra
pas à vn.boûcher , mais il le mènera luy mefmc en la boutique
pour le faire tuer aux bouchers y îefquelzil contentera de, leurs
peines ; & vendra fa chair luy mefme, &: en reccura l'argent en la
vendant.Toutésfois celle manière de faire n eft pas toujours ob~
feruce* Car les bouchers achètent au fïi le beftial par les villages
& parles marchez pour les vendre en détail à leur profKt* dedens.
leurs boutiques* *
&es cordes d'arcs & detuis de Turf de* th&çkrt xlvil
{Terift^r^^^C^i Efoir bien tardvn homme portant vnc hotte viendra
' par les boutiques des bouchets,.& prendra les trippes
qu'on luy a gardées le iour : & les porte à ceux .-qui en?
font de toutesfortes de cordes. Hz feauent fmguîie-
rement bien faire celles des arcs. Àufli y enaiî grand vfage :. car
C&dedeiMt leurs arez font encordez de cordes de trippes.Quant eft aux cor-
des de Lutj.ilz en font de roures fortes.& bien fines , & des chan-
terelles qui montent bien aum haut que les nofbres : maiseîles ne
font pas fi argentines , d'autant qu'elles {ont cordées de trois cor-
delîes , toutesfois onfes peut fairelèruiràvn Lut de Venifc 5ea
défaut d'autres. Lon trouue de telles chanterelles de toutes for-»
tes & couleurs, rouges, perfcs,verdes , iaunes , blanches : & n'y a
mercier qui n'en vende en fa boutique , comme aum- des autres,
fortes de corde? de Luc qu'on trou ue par to u te Tu rquie. El les y
Quart fer* {ont pJu-sffequentes qu'en Europe, dont pouuo-ns bien donner
us deiMtsm ]â râjfon t c eft,que les Turcs ont de quatre fortes de guiternes &
T#rfwe. Lncs^dcfquelz pluficurs fçauentfonner ou des vns ou desautres,.
ee quciï'auicnt pas en France^'en Italie -.car peu de gens des vil-
lages le entremeflent de iouer du Lut , ou deGukerne. Mais en
Turquie pl^ueursen fanent {bnner à leur mode»
l)esl^t^^ielemsMCQràmi:urc^me^ Chapitre, xlviii^
Vi voudrok cfclarcir quelque chofe de la mufique:
des inârumcns anciens , auroit meilleur argument
de l'expérience de ceux qu'on voit en Grèce &Tur^
quie>quc de ce que aous en txouuons par eferic . Les.
Turcs,
Tursv&ntauflide fiuftes, qui font quafî fairesàîa manière des ?&*«&■
fiuftes cT Alemans , & ont fix troux cous d'vne rengee. Mais elles Turf*1'-
ont plus de deux coudées de long : L embouchure en eft moule
difficile', différente à toutes autres fortes de ftuftes d'Europc.Car
elles font perfees tout outre , lefquelles il faut emboucher par le:
grand pertuis denhaucParquoy ceux qui en fonnent ont le plus
ibuuent couftumede chanter en lesembouehanc.Nous n y auos
pas troue é grade harmonicDefia au5s dit qu'iîz fçauet bie iouer
de hauts bois,de tabourin,de finghi, de Guiterne , de Violes , ou
' rebecSjdeHeptacalamosrencor voulons adioufter qu'ilz ont di- „_ r
uerfes manières de Luts , dont les plus gros ont huid cordes r Se ^
font fort lourds , Se ont le manche médiocrement long , tout zut$d&
droiet^ou y a pluficurs touches. L'accord n eft rien approchant tupcs.
i accord du noftre : car les cordes qui fèruentàcegros Luc , ne
fan t pas au rang âcs noftrcs* L'autre forte de Lut cft de moyenne
grandeur , Se plus commune que n eft le fufdit : Se eft femhlable
à vne Guiterne , mais plus harmonieux , Se beaucoup plus diffi-
cile à fonner : Se n'a que fept cordes non plus que noftre Guiter-
ne.Mais l'accord en cft différer, Se eft moult propre àcfonner des
branfles à la mode Turquoifc & à la Gregcoife. 11 cft plus en vfa-
ge entre les gens de marine , Se principalcmetceux que les Grecs
nomment Palameriti, comme de la Moree y Eubee , Se illes de la pa^merm-f
mer Egée, que de ceux qui font refidens en terre ferme de Nato- <^eme a*
Me. Il n y a point de couches comme à la Guiterne --.mais Fayans *
accordé Se mis des touches >nous en fommes {èruis pour Guiccr-
ne. Elle aauffi vne chanterelle derrière dcûusla groifc corde du
. bourdon >qni monte à-l'octaue de la chanterelle dedeuant. Et
pour la faire fonnerfi haut^ilz la îaiûent courte, ayant facheuil-
le bien bas au cofté du manche. La tierce forte eft plus petite que
les deux précédentes , dont le manche a plusieurs touches qui eft ^ Gé-
bien de cfeux coudées de long^& en tour n'àque troisxordcs , Se ^^
gour en peindre la figure,il faut ic imaginer voir vne cuillier ayac
le manche quarré Se bien long. Et pour autant qu elle n'eft pas
fore difficile àfonner,& n cft pas de haut pris,comaumémér clia*
cunenioue. Mais ceftàracierauecvnephimecomcàlaCitara^
comme auffi eft de la grande. Mais celle de la marine,qui n'aau-
curies touches , fe forme tanten raclant Se en pinçant , comme le.
.3fi6 TIESlS IltRI DES S1NGVXA.
Lut & Gmtenie. Elle cftiaite dVne pièce de bois qui ne fend ia-
mais , qui eft celle efpece de Sauinierdont auons parlé eftans far
3e mot Taurus. La moytié de fa table eft de Ton bois mefme, mais
1e refte eft de la peau d*vn poiffon , -qui a efte diuerfèment nom-
mé: car nous crouuons qu'il a efté nomme anciennement 5 Se
Syenapifckpzv Ariftote Hyena pifeis >& SiIurus.Mais pour l'heure prefente
sîlums. lesGrecs l'appellent Glagnion. Lecheualetdu fufdit Lut cftaf-
cUgnion. fiS deflùsîa peau «hipoiflon, qui tient les cordes hauceescom-
2^iW^aJ'Cmeàvn¥iol<!>n.Lonentrouuedernadrez ,qui conftentplnsde
Giwragede £x<jucaîts: & fc-trouucgcns de marine qui ne plaignent point les
IrinnieUe acheter à tel pris. Les Turcs paftent toute autre nation à faire de
bel outirageen marqueterie, tant en marbre &r en voirre, comme
en bois. Lon trouue des petites cadettes pour les orfeures, qui
coufteront vingt ducats la pièce. Les vitres dn Caire &• au fîî de
Conftantinoplefontmarquetees^ie diuerfes couleurs devoirre,
àfuciïlagcs-& ouurage Damafquin. Mais ilz font premièrement
îechampdepla-ftrcdeirusvn moulle, puis y attachent levoirre:
mais telle manière eft paffee des Arabes aux Turcs.
Que les Turcs font bons joueurs lefchexj & du grand vfcge qu'ils ont de
la rumme deTmguanta. Chapitre xlix.
Turquie.
'Turcs hons
loueurs cCej=
] Es Turcs font bons loueurs d*efchez,& y prennent
grand piailla Hz feront quelquefois vn iour entier
fans ceftèr de iouer:parquoy portent touflours leurs
_^ cfchez quelque part qu'iîz aillent > auec eux: mais
ont lëuieœenc vn linge peina: pour tablier à iouer defliis. Lon y
trouue des cfchez d'iuoire de relief ou les perfonnages font en-
taillez au naturel, & nous fcmble qu'ilz n'en ont aucun qu'ilz
recognoiffent pour celuy que nous nommons Reine. Mais en
conftituent vn autre d'autre nom en fon lieu. C eft vn ieu qui
leureft bien duid : car eftans accropis , panent les iours entiers
Gumme en pareflè far>s rien faire. Eftans de feiour en la ville de Bource,
Trxgacmt. auons apperçeu que i'vfagedc la gumme qu'on appelle Traga-
cant , eft tellement en vfage , qu'on y en confomme plus de qua-
trerailleliures par an /pour donner luftreàlafoyc, Lespayfans
de Natolieaduerr-is du gaing,Ia vôt amaffans par les pays de Mv-
fic>Phrygic>Gallogccce>& Paphlagonic :6c rapportent vedre en
OB'SERTERS ?AH P; BEtON^ 457
B'ourcc,donr ilz reçoiuent incontmenc leur-argent coptat.Cèux
qui ont efcric qu'on l'apportoit de. Crète à Venifc 5fQnt grande-
mec trôpez Jlz ont encot vne autre drogue en cornun vfage, que
les anciens n'ont point.cogneue. Oeft vneforte degalle,quiviéc
deffus les Terebinthes, dont suons parlé au premier I|ure:qui cft
fort comode pour kteinturedck foye,qu'j*lzveuîent colorer di-
uerfemenrjlzen diflipent tous les ans plus àcdx mille Hures. El-
les font creufes dedes^groffes corne petites galles Romaîncs,pK>-
uenas de 1 excreffence des fueilles des Terebinthes maûcs, cueil- °f fe Tc*
lies au printeps:S<: qui neles cueilliroit lots, elles croHhoyent 15-
o-ues d'vn demy pied,en£brmc d Vne corne. Ilz parlent troiskn-
crues-en Bource^qui font quafi cômunes aux babitans. L'vne Es-
pagnole pour les Iuifs,i,autreGreque,& l'autre Turque,qiri err k
plus cornune. Il y aauffi quelques familles Arabes , &; Arménie-
nés , & Italiennes. La feigneuriede Vcnife &: Cbio y entretient
des hommes pour les adueruû^mens-da trafic de leuftnarchan-
dife. On peut aller de Bburce aConftantinopîe par mer ou par
terre. Le chemin de terre eft long de cinq à fix iournees:mais par
eau on n'y met que deux ou. trois iours. EtdekvilledeBourceà
k mer du Propontide n'y a que demie iournee- Lon va. pafler en
vn village au riuage du Goîphe ou Sine de-k Montanee-, &raa- sme&m*
eiennement nommé le Sine de Nicopolîs.Lc vilkgc-eft nomme SùfoiiS-
k Mon tance, moult difeommode pour les vaiffeaux rear il n'y a D€HXruae%
point de port.Patquoy auflkoft qu ilz y fonr arriuez,il faut les ti- *mramenm
xer à fec,dc peur de k toutmetc des vens.. Les habitans de k Mo - u w
tanee parlent Grec,5dfont bons vignerons.!! y a-v-n monaftere de
Caîoieres. Le grand feigneury tiens ordinairementdenx fuites,,
voguees par des efckucs gcnifïàires, qui ne railler iamais à partir
auxioursde Mecredy,iî la tepefte ne les retarde.L'vne de k Mo-
tance pour aller, l'autre de CÔftantinoplc pour y venir,^ mener
ceux qui veulent aller Se venir de Source àConûantincple. Es.
quand ilz partent de k Montanee^b emmènent k fu ûe chargee.
dc neigc,qui y eft apportée du prochain mont, du tenant de ïO-
îy mpe.Ii y a eheuaux de voichirc tout expees qui k y-apportent, .
tellement qu'ilzk chargent de neige en deux ioursXcs habitans,.
des nuages de hHellefpont & du Propontide , tant deçà comme
delà, font quafi tous pefchcurs, qui parlent Grec». Vn païiàn du
village de k Montanee emportait des herbes enfarnaifon , &£
MM.m î'y
CïWâJiU.
&m£fwes*
Cambraj,
Informelle.
4?£ TIERS UTILS DES SIKGVXaI
encre autresauoit de celle que les anciens ont nomme Caucaîis.
Il nous la nommoit<3afcalitra:de laquelle ne trouuans le por-»
trai&és herbiers modernes, & Fay ans cirée au naturel , Fanons
'ctjpir ^ v bien voulu mettre en ce
Pôrtratct de l herbe nommée Caticalts* i. Tî i
lieu. Hz la mangent crue
en fàladc , corne auffi les
Xampfanes. A laparfin
eftans de retour à Con-
ftantinople,lors quemô-
fîeur d'Aramotauoit fuy-
ui le grand feigneur au
voyage de Perfè,trouua£-
mes vn gentil-homme de
Bourges vifTambaûadeur
nommé laques de Cam-
bray , lieutenant pour le
Roy,lequel n'vfa de moin
ire courtoiiîe ea noftrc
endroit -qu'au oit défia
fait mondit fleur d'Ara-
m5t, ioinct que pîufieurs
de ceux que monfieur de
Fumet auoit menez auec
Iuy, eftoyent demeurez à
Conftantinople:car ou-
tre les gentil-homes dont
auons parlé, il auoit auffi
mené vn homme bie let-
tré nommé maiftre lu fie
Tencîîe.que le feu Roy François reftaurateur des lettres, y auoit
cnuoyé , pour recouurer des anciens liures Grecs.
Vu jardinage': & promptes expériences du fçauoïr des Turcs: &des
fleurettes qu'ils ayment en bouquets. Chapitre L.
Lnyagcnsquiiêdele&ent de porter de belles fleu-
; rettes^nequilesprifent plus que font les Turcs : car
1 quandiîz trouuenr quelque belle girofflee , ou autre
\ élégante fleurette , encorcs qu'elle foit fans odeur,
OBSERVEES t&K V. BELOK. 45^
acantmoins elle ne perdra point {on prjs. Nous aymons les bou-
quets de pluficurs fleurs &: petites hérbettes ©doriferentes me£
ieescnfemblc,: mais les Turcs ne fc foucient que de laveue, de
ne veulent porter qu'vne fleur à la fois:& encor qu'ils en peuffent
auoir de plusieurs fortes , toutesfois fuyuanr le commun vfage,ils
çn portent pîufieurs feule à feule dedens le rcplyde leurs turbas,
Les artifans ont communément pîufieurs fleurs de diuedès cou-
leurs deuant eux,dcdens quelque vaifleau plein d'eau , pour les
tenir fraifchemént en leur beauté. Parquoy les Turcs ont les iar- Tum yom
dinages en aufli grande recommédation que nous, &fontgraâ° Urdimtn.
diligence de recoirurer des arbres étrangers , & furtout qui por- .
tent belles fleurs, & n'y pleignet largcnt. Il y a des arbres en leurs
iardins que les Grecs nomment en leur langage vulgaire Kro- *ta»A-
madâj ou Croraadia , qui font de la hauteur dVn Amandier»
Les Turcs le nomment Cromadia ,* du nom de da&icr : car
leur frui&eft bon à manger. Lcurfueiilceft corne celle de l'An- arbres n*
drachne. Les belles fleurs y font tenues rares,à l'exemple dequoy fen&Unt
nous auons veuvn petit arbrifleau qui porte les fueillcs de Lier- miSme.
re, quieft verden tous temps,&: fait fà fleur prefqucd'vne coudée
de long,decouîeur violette , entournant le ramcau,gros comme
vne queue de Regnard : dont cft venu que les Turcs le nommas
en leur langage , T'appellent queue de Regnard. Les Lils rouges xils rûugts.
y font fi communs,qu'il n y a ceîuy qui n'en ait des plantes en fon
iardin. Tels Lils rouges font différents à ceux que nousauons
par deçàjdefqucîs la fleur reflèmblcaux Lils bîancscmais lafucil-
le des Lils Turquois efl faite comme de la cane nommée Elegia,
& a fa racine comme celle du chiendent , finon qu elle eft beau-
coup plus grotte. Parquoy pluficurs cftrangcrs qui viennent à
Gonftantinople fur nauires de dtuers pays apportent les racines
des plantes qui font belle fleur , & ainfî les vont vendans par les
marchez , & de toutes chofesqu ils apportent font argent. Quad
auons dit en autre lieu, que les Grecs ne fè foncier des herbes qui
ne font bonnes à manger,n'y auons comprins les Turcs , qui ont
maintenant vaincu les Grccs,cn donnant nom vulgaire aux her-
bes:car il n'y a herbette en Turquie,pourucu que fà fleur ait quel-
que beauté , à qui les Turcs n'ayent donné quelque nom en leur
langage. Et entreautre ifs font grande eftime du Saifrâ fauuage, „ *• r
non pour ion odeur iculcmct , mais pourec qu elle recrée la veue "^
MMm iij
4&> TIE.R.S LIVREE DES S-ÏN&YJïA*.
Se aufîîqu clic eftiQHmcntentaflèe,quafi comme artificielle , &
que (es fueillesfcmbîentcftre liées auec la fleur. Les Turcsont
des merueilleufes expériences de plùficurs chofes ,, comme pot>r
faire dormir foudaineraent. Voudroic on chofe plus fîngulierq
que de crouuer drogue pour faire incontinant dormir que'qu'va
qui.nepeutrepofer ; Ils vôt chez vndroguifte (car ils n'onr point
ckApoiicaires) auquel demandent pour demie afpre de la femece
Tâtouh. deTatouIa. Puisla baillent a cJuy qume peut dormir. Tatoula,
n'eft autre chofe que ce q,uc les Arabes appellent Nxïx merci r. Se
Nxxmete» jcs Qrecs Solanurikfomniferum; de laquelle nous en tronûafmes
defauuageenlapîainedcIericho3presla fontaine d'Heîifée.Io-
secepte a niusefcriuantde l'Empereur Seleirn, did qu'il auoit quelques
fair&rejîouir fois accouftume manger dvne femenee qui rend les gês ioy.eux3t
Se ofte la mémoire des ebofesqui rendent les hommes penhfs-&*
molefiezdes chofes hautaines,&: que quelques heuresapres que
on en a.mangé , l'on ne demande" qu a fe refiouyr , Se ne permet
qu'on fc foucie de penfer quelque chofè 5,qui rende l'èfpnr tour-,
mérité.. Mais il nefçait (dit-il) qu'elle femence peut eftre, finon
Nepmthes. qu'il luy eûraduis que c'efl Nepenthes. Mais nous auons veu,
qu'ils vfent de la femence d'vne herbe qui eft vulgairement ven-,
SUrmda. due par les marchez de Turquie , nommée Harmala ^efpcee de.
Rue fauuagc, dont auons défia parlé au fécond liurc.i.delaquel-
lc les champs Coût tous pleins Se les hayes par toute Turquie, dot
n'en auons point. en noz. pays. En cherchant leurs plantes , nous
fommesfouuent.trouuezàvoirlesiardins : mais onc n'en veif-
mes vn. plus magniiique que ccluy.de laièigneurie de^V^nifeà.
Daniel Bar.* Padouëydontmcnfeigneur Daniel Barbares, Patriarche à"à~,
laruf. quilec, homme de grande en treprinfe3& excellent en {çauoii^cn,
jardin de zc^l i5aiîtheur. Le fécond d âpres}en noflre France à S.Mor près
T^°j^\ de paris. Les arbres qui portent les Afaroîes ,&: autres qui por-
Mor* £S' tendes Brognoks, font communs es -iardins de Conftandno-
^drôles. PJe-QBaî)t aox autres manières d'arbres frui&icrs, corne Aman-
' ' diers5PeichersJPommiers>&: cels'communSjdefia auôs fait enté--
dre par .cy devant qu'ils font moukfoigneux de les cultiucr^
O^BSlEïtVïES ÏAR P. SElOK^ 4'6ï
%es noms de quelques animaux, & plantes cueillies au nuage au Vont , &
autres trouuees aumarchéde Cwjîantinople : & des efloilles qui nuifent
au befiial en Turquie. Chapitre u.
L y a vn temps en l'année que les Tares n ofent laifier Efioilles fù
leursbrebis aux champs la nuiçfc paiflàns au defeou- **a* les
uert. La raifon c^ainfi qu'ils afTcurent, qu ily adeux^*-
wwaofcr_J efioilles, lefqudies fçauent nommer par nom propre,
qu'an appercoit la nuid au moisde ïuillet & Aouft , & venat&ir
leur zénith vcrtical/i les brebis haucét la cefte & en ont la lueur,
elles en~meurent,mais en ce temps là fi on les met la nuid au cou-
vert ne meurent pas. Ils afferment auoïr trouué par expérience
i«fallible,eftre chofe vraye : & pour les engarder de tel accident,
font contrainâsdeies mettre la nuid à couuert durant le moisr
de ïuillet & Aouft.TeîIesehofes n auiennent pas par tout le pays
du Turc , mais feu lement en au cutis end roids en la contrée de
Thrace.Et qu'il ne foit vrayjiîs ne mettent iamais leurs brebis ea
ted finonen ce temps là : car mefinement ne les y mettent pasea
hyuer. Plufieurs autres nations n^ay ans telles obferuations, fou£
frans grandes pertes pour la mortalité de leur bçftial , & ne Ççz-
chans pourquoy cela leur aduien 1 5 ont penfé que cela fe face pat
quelques cnforceîements : ce qu'à n offre aduis Virgile a auiïî en-
tendu en fes Eglogues. Cela nousfut premièrement dit à Con- .
ôantinoplc. Car comme plufieurs entreprennent de faire les
fournitures à vn certain pris 3 ceux qui fourmuent les bouchers vijeiwt
s en plcigncnr. Chofe que depuis auonsveuë par expérience: car Turc.
nous &: vn Vipcrier Turc , cheminans le long des riuages de la.
mer de Pont,cn diuerfes faifons > veifmcs les trouppeaux des bre-
bis à couuert ; & entcndifmes des pafteurs qu en autre temps de
rannee,demeurentauferain. Les paftoureaux nefçauoyentpas
la raifon fufdidc : toutesfois difoyent bien , que qui les laineroit gerles &
la nuid dehors^lles fe mourroyent. Àyans cueilly les plates que arim fit
trouuionscnchemin,nouslcsefcriuionsfurie champ , comme nujfmtm
s'enfuit. Ciftus & l'Hypociftis qui cftoit deffus faracine, y croif- n™ge **
fent fréquents. Au Ci trouuafmes trois fortes de Gcnets.du Che-
urefueil, Aphace. La plante d'Androfemon y eft plus fréquente,
naiûant fauuage5quen nulle autre contréc:nous difonscelle qles
M* M m iiij
4^i » TIERS ^XVK.W I>ES SINCVL4,.
Italiens appellent Ceciiiane. Toutes les fortes" de Plantain s'y
Oaltane. crouuent. £/h.erbe de LinâriajLampfanajMolàinejMilîe fueille;
odorifercnte,Lagochimeni , Condrille , Mauues communes S£
chryfintc*. doubles>Praûrmav&: Marru bium, Chryiàntemon y cgx i eft herbe
mo& bonneà manger,ChamomiHe,petis Cèdres des deux efpeces, pc-
tisGeneunerSjArboufîerSjPktanes^CoudrierSjHieblcSjSureau.
AufEtrouuafmeslacompa&ion des, oflemens d'vn Dauphin ai*
xiuage^eneor tous conioin&s l'vri àl'auirc. Smilax afpera, Cor*
ruda,Trifoliuni mentantes, Cauealis, Fenoil iauuage j Terebin-
the^Nerion, Pruniers fauuages,Àigremoine, Teucrium, Andro-
fkceSjÀrmoracheSjYrtieSj AfpaîathuSjAgourupes , Aron , deux
fortes de Pâquerettes, vne efpccc de Coiifduldc , ayant la racine
fonde ,que les habitans du pays nomment Sterouli, Fimpineîle^
Gaîiopfis,Calaminthc ou Caîament ,.Origanum Heracleoticû^
Queue de cheuaîJBuphthalmuSjParelles/Hellebore noir , deux:
efpeces de Fou gère, Pau otfauu âge , trois fortes de Hyacinthes,
deux efpeces de Conize/çauoir dk tierce & première, Satyrions3î
¥ioles,Bruyerc,Ferule ,qui portoit lois fes œufs bons à manger^
oeufs dé Hyflbpe fâuuage, Meu, Confouîde quia les fleurs iaunes , Con-
kherbs <U fouide qui aies fleurs blanciics,Houbelon, Afclepias,Cynoglo£
r u &im>àn Souci fauuage, Ormeaux , Chamsedrys , Hermoda&cs,
C°m2s Chardon benail^Sidemtis^zeille, Cbcfne, Lorier,?aritoire^
fimnùttn^ Cichorce,R.o{cs(âuuagcsaCoiiuoluuls>Stachis>AfpcrgQla , Au-
be efpine,arbre deStyrax,Laurcolc,Orcanette,Lycop{is,Alater-
nus, /ralietrum , petit Iris , trois efpeces de Tithymales , le Mafle,
Myrfînires>&: Heliofcopius. Noustî^uuamiesdel'OrnitogaJo,.
sorhut ttor? Poup tenoir,^ eeîuy qu'appelions du xremble, €hafraigncrs>.
?? *^? AulneSjSumach j Pouliot, Sorbustorminaîis, que les François,
<w* nomment va Aliiler,! arbre dequoy on fait les lardoueres , Ana-
bau\ycrbcne,Penfteteon,de deux fortes, d'Erable». Le Viperier
que menionSjneantmoiasqiul fuâ xurc^toutesfois fçauoit bien-,
exprimer les ferpents que trouua{mes,dc nom Grée moderne: 8c
2>nimés. tout ainû comme eftions partis pour aller trouuer des vipères 6c
Jimko^ autres ferpenrs^auifi en trouuafmes nous quelques vns. Et entre;
autres furent ceax que les anciens nommèrent Driini, qu'ils nom-
ment maintenant en vulgaire Dendrogailladc di&ion qui fç re-
fent de fon antique appellation. Nous n'en auons point cogna
d^u.tre qui deuienne glus grand & gros que ceituy cy ,.."& qui fif-
rie plus.
$4..
OBSERVEES PAR *. BELONV 46$
■fie plus fort. Telles fois en auons prins vn û gros , que Fayans mis
envnfac, pefoittantqu'vn payfan ne le peut porter deux liciies
,. fur Ton dos {ans fe repofer. ta peau remplie de foin eftoit auûî
grofTc comme vnc groffe iambe d'homme" charnu. Dételles
pcauXjCommc auflî des autres cfpeces de ferpcnts.)oifcaux>beftes
terreftres, plan tes entières /emences d'herbes ûnguliercs , & plu-
sieurs chofes de mer,auions remply vne grand caiflê , & mifcfur
vne houîquc Gencuoife nommée la Delphina , appartenant au Delfom'.
feigneur Viualdi : dont vn nommé François Bmfquet eftoit ca-
pitaine qui deuoit venir defeharger en Angleterre, mais fut prife
des Corfaires & menée en Àrgers,& ainû* fufmesfruftrez de cela.
Or s'il y a fi grande affinité entre les fèrpents en vie^qu a peine les
peut ondifeerner, ne fe faut donc efmerueiïler fî les portrai&s
qu'on en fait, ou il n*y a que du noir Su blanc , s'cntrereflèmblent
de biéprcs.Toutesfois ceftecy eftla naifue peindure de Briinus.
Nous trotiuafmes aurÏÏ îe-fbrpcnt qui a vne callofité en maniè-
re de bofTette deiîus le front,lequeî5 à noftreaduîs v effc ccluyquc^jk
les anciens ont entendu pour Àfpis. Car comme auons dit , 1er
Françoys trou uans vneV ipere au fauuage^difentauoit trouué vn
Aipis. Mais il nous fembla trop rare*, carja en auons trouué en-
Italie , au pays de l' Abru ts. Et comme le Ceraitc a deux petites
NN-n
•4^4 TIERS LIVRE DES SINGVLA.
eminétes callofîtez furies yeux en manière de petites cornettes,
ccfttvy yavncfeulc bofîette, &eftdcîa couleur de J'Amphifbe-
^Amphkbe* M*' Défia auons amplement parlé de la Ccraftc au fécond liure,
m^ maintenant nous a fcmblé bon la reprefenteren portraid, n'en
faifans autre difeours plus long, attendu que parlerons ample-
ment de tous ferpents en aucre endroid.
Au Hl crouuafmcs des Saîmandres que nous nommons Sours,
sdmmâres. piuumcS) & Mirtils : qui font quafi communes en tous lieux.
Muuînei Aufïi tronuions des Phalangions. Retournans le long des orces
i£rtik ' ^c *a nier , arriuans a celle bouche en l'endroid du Bofphore,cei-
olfilmrd: le part ou commence le deftroid du Propontidc, cftans mon-
Turftic. tcz defïbs la plus haute montagnetre voiline, rrouuafmes vn Oi-
feleur qui prenoit àçs Efperurers pafTagers , d'vnc manière qu V
uons bien voulu efcrïrc. Et pour au tant que c'eitoit vers Je corn-
mencement de May, lors que tous oyfcauxfont empefehez à
leurs nids, il nousfèmbloic rare voir tant de Milans & Efpcr-
uiers, venir de h part de deu ers îccoftédextredeia mermaieur.
Ejfermmde L'oifeleur les prenoit aucc grade indultrie, $: n'enfaiiîoit pasvn,
$&$age. & enprenoitpiusdVnc douzainechaque heure. Il cfloit cache
derrière vn buifTon,& auoitfair vne aire vnie & quarrec au deuac
quiauoit enuiron deux pas en diamctrc,diilâtedeux ou trois pas
dubuiiïbn: & auoit fiché fix baftons au tour de l'aire, trois de
O B S E RTE ES PAR P, BELÔNr 46$
chaque cofté , qui eftoyent de la groiFcur du pouce , Se de la hau-
teur d'vn homme : à la fbmmité dcfquelz y auoit en chacun vue -
coche entailleedu cofté delà place : Se auoic vn rets fort dciié de
fil verd,qui eftoit attaché aux coches des baftons,tcndu à la hau-
teur d'vn homme, Se au milieu de la place il auoit mis vn piquet
de la hauteur d'yn coude, au faifte duquel eftoit attaché vnc
cordelete qui refpondpit à l'homme derrière le buiflbn. À la-
quelle il auoit lié plusieurs petits oifèaux qui paiftbyent le grain
en iairejefquelz l'Oifeleurfaifoit voleter lors qu'il aduifoitl'e£-
peruier venant du çofté'delarncr maieur. Mais TOifelcur adui-
îànt rEfpcruicf de fort Ioing , faifbit voler {es oifeaux par la pla-
cc^'Efperuier ayant fi bône veue qu'il les voit d'vnc demie lieue,,
prenoit Ton vol à adlesdefpîoyees, Se venoit fi roidementfrâppet
dedens le filé s pcnfànt prendre les pecits oifeaux^qu il demeuroic
encré jeans , enfcucly dedcnsîeretz. Alors TOifeleur le prenoiî*
Se luy fichoit les ailles iufques au ply dedens vn lmge qui eftoit là
tout preft, exprefle ment coufu, &lioitlc bas desselles auec les
cuiflcs Se la queue audit Efperuier, Se layant cillé, le laiftbit conr
tre terre : car il ne le pouuoit remuer , ne debatre. Nous nefçau-
rionsquepcnïèr de quelle part venoyent tant d'Efperuiers ; car
eftans làarrcftez deux heures, il en print plus de trente , tellcmét
qu'en vn iour vn homme feulct en prencit bien près d'vne cen-
taine.Les Milans Se Efperuiefs venoyent à!a file* qu'on aduifak
d'au (II loing que la veue Ce pouuoit eftendre,. Ceux qui vendent Beri^ ~%
les herbes au marché de Conftannnopîe,cn ont de pluiieursfor- -^doumar-
tes}dont n'auons cognoiftanec n'vfàge,&: principalcmcrau prin- ebédeCon*
tcps,entre lefquelles vendent ïes LampfaneSjqq'ilz appeliét aufli/*»**0^
en vulgaire LapfanarMais quand elles ont pafîe çn dmc^Se corn- sAàe^-
mencent à fleurir, lors ilz les appellent Vrouues,& en les man-"*'^
géant crues,ont faueur de R ifort : mais fi on les fait boullir , elles .
deuiennentameres. Hz cultiuent tellement rAche,qu'ilz la font
deuenir douce,&, la mangent crue à tous repas, Se nomment Se-
lmo:mais le Perfil eft nommé Macedonico. Hz vendent auifi les:,
Afpargesde Smilaxa(peraxqjti'iîz nomment Smïlachia. Ces AL—
parges font bons en faîades , comme aufll ceux de l'herbe du-
&au noftre Damejqu'ilz nom met vulgairement Eaabegîi mcls-
na,d'vn mot corrompu fignifiant vigne noire.Maisà -An cône, ilz
ies appellent Tamarou^LcsTurcs-dennent les marchez parles -.^^
NNa ii """"^
466 TIERS LIVRE DES SINCVLA.
villes de Turquie par chacun iour de lafepmainc : car à ce que
tellcpîacç tient le marché en Conftantinople au Lundy , l'autre
piaeele Mardy,& en Perc au Ieudy,& ainfi des autres. Et s'il y a
rien de rare , ils ie monftrcnt ce iour là. Parquoy eftans de retour
en Conftantinople , & nous trouuans fouuentcsfois à voir leurs
marchez^anons trouuc pluficurs fiogularitez apportées d effran-
ges pays,& principalcmententrc les drogues de certains Theria*
cleurs,qui donnent ordre de recouurcr tout ce qu'ils peuucnt de
nouueau , à fin que les monftrans en public , ils facent amas de
beaucoup de perfbnnes , aufquels ils vendent quelque chofede
Deux &«ï leur art. Les vns font monftre des ferpents en public: mais nous
de U nature n'en dirons autre chofe en ce lieu: car nous en auons cCcvit toutes
des ferpents, chofes par le menu, au deux liuresou auons baillé le portraid
auec leurs d'vn chacun. Les autres vendent des vnguents & racines tant
™fijor* . feulement^ de la mort aux verms, &fouuentefoispafrcntd'E-
gypteen Conftantinople : car nous en auons recogneu à Confia-
tinoplcqu auions ja auparauant veu au Caire}& dont auons peu
recouurir certains portràids des poi fions du Nil , que ferons ap-
parpiftre en autre œuure,au liurc des poifTons. Et pource que ra-
nimai dont auons defîa cy deuant parlé,qu on nomme vn Tatou»
efttrouuécntrc leurs mains, lequel toutesfois cft apporté de la
Guinée, & de la terre neufue,dont les anciens n'en ont point par-
léjneantmoins nous a femblé bon d'en bailler le portraicl.
Txtoii.
OBSEJtVEES PAR. P. BEXOK. 4^7
Lu pcm&ure du Tatou.
Ce qui fait qu'on voit ceftebefte ja commune en pîuficurs ca-
binets , $c eftre portée en fi loingtain pays , eft , que nature la ar-
mée de dure efcoTce Se larges efcaillcs à k manière dvn corcelet>
&aufîi qu'on peut aifèment ofter fa chair de leans fans rien per-
dre de fa naifuc figure.Ia Pauons dit cfpece de HerhTon du brelIL
Car elle fe retire en fesefcailles comme vn Herifion en fes efpi-
nes. Elle n excède point la grandeur d*vn moyen Pourcclcc : auiîî
eft elle cfpece de Pourceau , ayant ïambes , pieds , &c mufeau de
mcfmc : car on la deûa veu viureen France3& fe nourrir de grain
& de frui&s.Les François cognoifTent vnc autre befte , nommée
vn Tartaret ou Tartarinjde laquelle ugriificacion auos bien vou~
lu faire mention en ce lieu?à fin que l'affinité des di&ions ne tro -
pent,confondantle Tatou atxeleTartaret.Quantànous, nous TjltùMm
prenons le Maimon pour le Tartaret , qui eft ecluy donr Ariffco- Tartaret.'
te a fait mention,qu il nomme Simia porcaria^ dont auons par
cy deuanc parlé en faifant mention des baftelerics du Caire : car stmuporu*
les autres nations qui le nomment vn Maimon, font coutainfi r^jmon
comme les François en autres contrées qui le nomment vn Ma- Mdifù^ '
got.Nousn'en auons point baille la peinture,ncfait defeription: *
. -, NNn iij
4-68 TIERS LIVRE DES &I N G. QBS, PAR F. BELON.
cm nous prétendons le mettre en autre endroï&auec plus ample
difeours 5 attendu qu'encoc y a difficulté en cefte appellation
Françoife, d'autant qu'il y a quelques vns qui défendent que le
Magot ou Maimon n^ft pas mefme chofè que le Tartarct.
0r maintenant quepretendoris finir noftre obferuation , auos
bien voulu faire entendre au lc&ëur , qu'il ne doit trouuer mau-
uais fiauons quelquesfois baillé le portrait d'vn animal & plan-
teront n'eft faite grande mention : pource que fi enflions deferic
toutes chofès en ce liure, ainfi que les auons nommccs,nous euf-
iîons perdu l'occafion de les deferire ailleurs en particuIicr.Tou-
tefois ou loccafion s eft adonnée, auon s eftendu norlre parler fur
quelques vnes plus ou moinSjfèlon l'opportunité du temps.Mars
à fin que les autres nations participent en quelque forte denoz
diicours,noiispretendonsles mettre quelquefois en autre langa-
ge,non toutesfois en mefme ordre &: femblablcs propos quauos
tenu cy dedens* Ce pendant , fi le le&eur trouue que çeft œuure
lu y ait profitc,rendc grâces à monfêigneur le Cardinal de Tour-
Eon, noftre trefiiberal Mecenas& maiftre5qui a fourny auxfraix
de la defpence de noz voyages:& après à noftre libéral jmagnani-
me,&r trefiage Roy,qui de fa çourtoifie. & bonté vnous aociroyé
que foyons du.nombrc de fesefeoliers : comme.aufEfait monfei*
gneur François QJiuiçr^ Chancelier de France^
FI N.
il nefthomme parlant de diuerfès cBojès , qui puijje Ci bien dire 3 que tes
feEleurs Teuere$,enuicux\ & de mauvais vouloir ^ne trouueni à redire & ca-
htmnier+M,aU nous prions ceux qui de bon %ele accepteront noftre labcmy
qu'ils [apportent les. fautes s'ils en trouvent aucunes.
De rimprimcriedc Léon Caucllat le 2,4. Feurkr y 15É
pour Hierofme dejk£araef& la veufue
Guillaume Cauellar.
VIRTVTÎS ET GLORIA,
C O M E S I N V 1 D I A.
m C §1
: pour fàxacrueiHe, lequel â'àyantfiu* ne reflux , de-
xanec, car eftant enuiroané' déterre, eft ferme de tou-
ides riuicres qui entrer dedïs par diuers coftcz.Et l'eau
rt hors par i'Helleipont, iàas «mais remoater , fepa-
PORTRAICT DÉ L'ISLE DE LEKÎiSÏOS, DV MONT ATH
4cùrciigioad:cs Grecs, & de plufieurs autres lieux de Grcce& l'Afîc, retirez
Obfcruations des fîngularicez des pays effranges. Par P,
Voycydcflbubzlespon
TcrtcfermcenAfic. , . fouins,defquc
Icy eft le firge d'vn Bâcha au Château de Cuce.
CHEF DES . CERÎMONIES
tel , fiiy uànt la defeription des
du Mans.
; Dauphins. Ce font ceux que les François mangent en grandes délices: mais ils les nomment Mar.
ins perfonne n'a encor mis les vrais portrai&s es autres chartes auant ceux cy.
Zéros iTttotnoii
lcarie,}ï4xi:,et tou-
ia4UttreslJlti'â:U>
des <f Sporade* j sot
bn'oitees partie de
Ttir» , p^rus de
Créa tributaires au
grundjcttrnettr.
Maintes choies ne
t-oie* ont rendu II-
lic de Lcmnos me
moiiblc mus entre
autres le labnnthc
de pcdaius.&aufn
les forges de Vulcan
qu'on me y iuoir e-
ite. La terre feellec
continue encor mai
tenant,* ait en que
les Vénitiens der-
niers feigneurs en
l'ifie, atunr que 1«
Turcs y falLat Ici
xnaiftrcs)meircnt tel
le inftitution ce !a
tuer feulement vng
fcul jour de l'an , le
vj lourdAouft.car
à la vente les Tares
cftans venez cnGre>
ce , n ot né roué àes
cenrcooiesaccoUfta
fce'cs.comraç a l'cxé*
pie des autres Pro-
uinces eA de payer
neuf ducats pour en
trerau fairxft frpul-
chre de nofire fe'g-
nCLrenlcruiàlcsn.
Nous aucric expre
portraict ccf*c cïiaf -
tepourdanreïpîai-
firaux actdcfiris* a-
rs-iteurs du bter" pa-
bhcpour leur faire
\orrlaiitt3non: àe£
villesdontGaliefla:
faift reennon par?âc
deiorSoyagce'nl"!
&e de Léhos, «ofieu
uiefmcîiurccTcsiîm
pics, la ou Û parle,
les différences; ék$
terres , âuqtrcl îïetf
erouuos tefrnotgna-
ge que de fon temps
Troye eiioit aen»-
raeeAlexanà-je.il S,
aufll fafâ raer-ticr»
dcTnaflbs&ckPhi
iippi cj chacû poarr»
voir jcy. C eito.rle
traieûdudroictcnc
mm paflànt des Ro-
mains allans d E&ro~
Je en Aiic fit met.
Ceux qd vont par
terre pa&ra Ga-hpô-
* alongent lear che-
min : mfais par me?
Ion coftoïc Hfle âr
Samotrace , Lénos,
TaiTos, Inïbrcà, Te
Eedos& Meteïauât
dejerre fernfo No"
auôs fait autres du-
cour« à part petrr
l'explication de tou-
tes fes cnotfês qui
n'ont peu trouaer
place en" ceft cil-
droit, là où eôacun
qui cri voudra fça-
uoir da'ult'age, pou»
r,a aVîoîr recours , aa
hure de mes fingu-
laritez & obfeiu*-
La déclaration des noms imprimez en ce portrait, eft amplement deferipte au premier Iiureies Ol
, mont Athos, au premier fueillet au lime des portrai&s des Oyfcaux,incontincnt après l'Epiftr edu Ik
aux Grecs, comme diriez Rome aux Latins: car il cft habité en tous lieux par les Caloieres Grecsqui £
de noftre temps d'eferire qu'il y a âuffi des religieufes: mais tant s'en faut qu'il y en ait , que mefoemei
cun village de gcntsLaiz. -
4*>— AllC yit mer.
Ceux <jui vont par
terre paSèr à* Galitxs
li aiongent Icar cîic-
niin : niais par mer1
loa coftoie Hâe d<-
Samotrace ,Léj>os;
Taflbs, Inïbros, Te-
fledos& Metcïauât
cu'arriucr au* ports
de terre ferrrfè. No*
auos fait autres du-
part potfr
1'exphcaaon de tou-
tes Ces chertés- quï
n'ont peu rrouûer
place etf ceft es-
droit , Il où Cûacun
<}ui en voudra fça-
uoir dauârage, pour
laauoîr recours, an
hure de mes £n^u-
iaritez & obtciux-
>bfèruations , & de toute Flflc de Lemnos. A uffi voirez les difeours appartenants à ce
ure. Il cft mémorable pourcequcc'eft le chef des cérémonies de Grèce, eftanten ce
fe tiennent es monaftercs renfermez de muraille. Ceft ignorance qui a efmeu aucuns
:nt de quatre ou cinq mil hommes qui viuent là, tous font Caloieres, fans y auoir au-