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yy /à' .
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LES OBSESSIONS ET LA PSYCHASTHÉNIE
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Travaux du laboratoire de Psychologie de la Clinique à la Salpi
TROISIÈME SÉRIE
LES OBSESSIONS
ET
LA PSYCHASTHÉN
I
ÉTUDES CLINIQUES ET EXPÉRIMENTALES
SUR LES IDÉES OBSÉDANTES, LES IMPULSIONS, LES MANIES MI
LA FOLIE DU DOUTE, LES TICS, LES AGITATIONS, LES PHOB
LES DÉLIRES DU CONTACT, LES ANGOISSES, LES SENTIMENTS D*INCO
LA NEURASTHÉNIE, LES MODIFICATIONS DU SENTIMENT DU 1
LEUR PATHOGÉNIE ET LEUR TRAITEMENT
Le D« PIERRE JANET
Professeur de Psychologie au Collège de France,
Directeur du Laboratoire de Psychologie de la Clinique à la Salpêtr
PARIS
FÉLIX ALCAN, ÉDITEUR
ANCIENNE LIBRAIRIE GERMER BAILLlf:KE ET C"
108, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 108
1903
Tous droits réservén.
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1 3 I 0 e
\
A MONSIEUR LE PROFESJ
TH. RIBOT
MEMBRE DE L INSTITU'
DE RESPEC
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INTRODUCTION
Ce livre, comme mes précédents ouvrages, s'adresse aux méde-
cins et aux psychologues. Il présente une nouvelle application
de celte méthode que M. Th. Ribot a si heureusement enseignée
et qui a donné un caractère spécial à une grande partie de la
psychologie française. Cette méthode consiste à unir la médecine
mentale et la psychologie, a tirer de la psychologie tous les
éclaircissements qu'elle peut apporter pour la classification et
l'interprétation des faits que nous présente la pathologie mentale
et réciproquement à chercher dans les altérations morbides de
Tesprit, des observations et des expériences naturelles qui per-
mettent d'analyser la pensée humaine. Ce livre continue la série
des études dans lesquelles je me suis proposé d'appliquer cette
méthode aux différentes maladies mentales.
Les maladies qui font l'objet de cette nouvelle étude sont les
obsessions, les impulsions, les manies mentales, la folie du doute,
les tics, les agitations, les phobies, les délires du contact, les
angoisses, les neurasthénies, les sentiments bizarres d'étrangeté
et de dépersonnalisation souvent décrits sous le nom de névropa-
thie cérébro-cardiaque ou de maladie de Krishaber. On voit que
ces malades ont été désignés sous des noms très différents : ils
sont quelquefois réunis sous le nom de « délirants dégénérés )>,
de « neurasthéniques », de « phrénasthéniques » ; je les ai déjà
souvent désignés sous le nom de « scrupuleux » parce que le
scrupule constitue un caractère essentiel de leur pensée ou sous
le nom plus précis de « psychasthéniques » qui me paraît résumer
assez bien l'affaiblissement de leurs fonctions psychologiques.
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VIII LES OBSESSIONS ET LA PSYGIIASTHÉNIE
Tous ces malades fort divers en apparence m'ont semblé fournir
l'occasion d'une étude intéressante à la fois au point de vue mé-
dical et au point de vue psychologique.
Au point de vue médical, j'essaye de réunir ici la description
précise d'un grand nombre de symptômes qui me semblent avoir
été rarement l'objet d'une étude d'ensemble; j'essaye d'apporter
quelque précision dans l'analyse de toutes ces manies mentales,
de toutes ces phobies, de tous ces sentiments anormaux qui ont
été trop souvent décrits incomplètement et isolément et qui me
semblent devenir beaucoup plus clairs quand ils sont rapprochés
les uns des autres.
Ce rapprochement de divers symptômes permet aussi de pro-
poser une réunion de diverses maladies en une seule et de con-
struire une grande psycho-névrose sur le modèle de l'épilepsie et
de l'hystérie, la psychasthénie, h la place de ces innombrables
obsessions, manies, tics, phobies, délires du doute ou du contact,
névroses cérébro-cardiaques.
J'espère aussi par la comparaison de ces divers symptômes
réunis dans une même étude apporter quelque contribution à
l'étude du diagnostic, du pronostic et du traitement de ces affec-
tions qui jouent un rôle extrêmement important dans la patho-
logie nerveuse. Enfin l'analyse psychologique de ces divers
phénomènes permet de découvrir entre eux des caractères com-
muns dignes d'intérêt et d'arriver sinon à une théorie au moins à
une interprétation provisoire destinée surtout à réunir le plus
grand nombre possible de ces faits dans une conception générale.
Au point de vue psychologique, je crois qu'un grand nombre
de ces phénomènes nous présentent des expériences très remar-
quables qui apportent des éclaircissements sur les plus intéres-
sants problèmes. Les obsessions, les pseudo-hallucinations, les
impulsions qui les accompagnent nous donnent une foule de
renseignements sur les diverses catégories d'idées qui se dévelop-
pent dans l'esprit et sur les divers degrés de leur développement.
Les manies mentales, les tics, les phobies permettent d'aborder
l'étude d'un grand fait, beaucoup trop laissé de côté d'ordinaire,
le fait de l'agitation et de comprendre la loi de la dérivation
psychologique. Les sentiments qui accompagnent l'exercice de
nos diverses fonctions mentales sont très mal connus ; à peine
a-t-on examiné un petit nombre d'entre eux comme le sentiment
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INTRODUCTION IX
de TeSort et le sentiment de la fatigue. L'étude de nos malades
permet 4^ pénétrer bien plus avant dans l'étude d'un très grand
nombre de ces sentiments dits « sentiments intellectuels » ainsi
que dans l'étude de plusieurs sentiments sociaux très importants
pour comprendre les relations sociales.
Quelle que soit l'importance de ces analyses psychologiques
j'insiste sur un problème dont la discussion revient très souvent
dans ces pages et dont l'étude forme la partie principale de cet
ouvrage. Je veux parler de l'étude des opérations psychologi-
ques qui permettent à l'homme d'entrer en rapport avec la
réalité, d'agir sur elle et de saisir son existence avec certitude.
La fonction du réel, avec les opérations de la volonté, le senti-
ment du réel, le sentiment du présent occupe la première place
dans la hiérarchie des phénomènes psychologiques et son étude
est aussi importante pour la métaphysique que pour la psycho-
logie.
Cette étude des psychasthéniques est divisée en deux volumes,
le second que je publierai en collaboration avec M. le P*" Raymond
contiendra les observations cliniques d'un très grand nombre de
ces malades, plus de deux cents, il renfermera des descriptions,
des documents psychologiques et cliniques qui ne pouvaient
prendre place dans les études plus générales du premier volume,
il apportera en quelque sorte la justification et les preuves des in-
terprétations présentées par celui-ci.
Le premier volume renferme la plupart des études relatives aux
psychasthéniques, la première partie est descriptive et analyti-
que, la seconde est plus théorique et plus générale.
Dans la première partie, après quelques indications sur les mala-
des étudiés et sur leur attitude assez caractéristique, l'étude de leurs
obsessions sera faite d'une manière analytique en descendant des
caractères les plus apparents, jusqu'aux phénomènes plus profonds
dont les premiers semblent dépendre. C'est ainsi que j'étudierai
d'abord le contenu ou la matière de ces obsessions, c'est-à-dire
le sujet auquel s'appliquent les pensées du malade. Ainsi ce sera,
par exemple, la pensée du démon, ou l'idée du meurtre, ou celle
du suicide, qui tourmente le plus son esprit. Cet aspect, que
l'on peut appeler intellectuel de l'obsession a été, dans ces der-
niers temps, un peu négligé, depuis que l'on a remarqué très jus-
tement le rôle considérable que joue Vémotion dans cette mala-
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X LES OBSESSIONS ET LA PSYCHASTllÉNIE
die. Il ne me semble pas juste de le négliger complètement, il
occupe une grande place dans les symptômes que présente ce
groupe particulier des obsédés que je range sous le nom de scru-
puleux. Peut-être son étude nous permettra-t-elle de classer ces
diverses obsessions, de remarquer qu'il y a entre elles beaucoup
d'analogies et que le contenu de ces idées est loin d'être insigni-
fiant pour Tinterprétation de la maladie.
Ensuite, je me propose de réunir sous ce titre « les agitations
forcées » les divers troubles qui accompagnent les idées obsédan-
tes ou qui les remplacent. J'entends par là toutes ces opérations
exagérées et inutiles qui constituent les manies mentales, les tics,
les phobies ou les angoisses.
Enfin, je voudrais chercher dans l'analyse d'un état psycholo-
gique spécial, qui ne me paraît pas être précisément une émo-
tion, mais qui doit se ranger dans le grand groupe des sentiments
intellectuels y dans l'analyse de l'état d'inquiétude, le point de
départ plus profond d'où proviennent et ces idées spéciales et les
diverses agitations.
Il sera plus facile alors, dans une deuxième partie plus géné-
rale et plus synthétique, d'examiner les différentes hypothèses
qui ont été présentées pour interpréter cette curieuse altération
de l'esprit. Je rechercherai, à ce propos, ce que ces troubles, qui
sont de véritables expériences psychologiques, peuvent nous
apprendre sur le mécanisme de l'esprit et sur l'importance de tel
ou tel phénomène. Ces altérations de la pensée mettent en
lumière le rôle important de certains faits qui restent confondus
au milieu des innombrables phénomènes qui remplissent le cours
de la vie normale. C'est ainsi que nous pourrons étudier « la
fonction du réel » et les divers degrés de « la tension psycholo-
gique ». Cette même partie contiendra également les études
générales relatives au diagnostic, au pronostic, au traitement et
à la place de la psychasthénie parmi les psycho-névroses.
Ces études sur les psychasthéniques ont été faites sur un assez
grand nombre de malades ; j'ai réuni depuis quelques années 325
observations qui, malgré une grande et intéressante diversité, me
semblent assez comparables pour constituer un groupe. Une
partie de ces observations a été prise dans le service de M. Jules
Falret à la Salpêtrière ; une autre partie, la plus importante, a été
recueillie à la clinique de M. leP' Raymond, mais un grand nombre
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INTRODUCTION XI
de ces malades ont été étudiés en dehors de Thôpital. Il est inté-
ressant de remarquer déjà que cette catégorie de malades se
rencontre un peu plus souvent dans la clientèle de la ville que
dans celle de Tbôpital, car, ainsi qu'on le verra, un certain degré
de culture intellectuelle joue un rôle dans son développement.
Je n'essaierai pas de résumer ici toutes ces observations ; il
suffit d'indiquer sur leur ensemble quelques remarques géné-
rales. Sur ces 325 malades, je compte a3o femmes et 96 hommes,
la plus grande fréquence de la maladie, dans le sexe féminin, est
donc bien manifeste. La plupart de ces malades ont de 20 à
4o ans ; c'est à cette période de la vie que la maladie prend un
plus grand développement ; 6 de ces sujets sont au-dessous de
16 ans et nous permettent d'assister aux premiers symptômes du
trouble mental, tandis que 9 malades qui ont dépassé 60 ans nous
en présentent les formes ultimes.
Ne pouvant décrire avec précision tous ces malades, j'en choi-
sirai quelques-uns qui présentent les phénomènes de la façon la
plus précise et la plus intéressante et qui, d'ailleurs, ont été étu-
diés avec plus de soin pendant de longues périodes et je grou-
perai les autres cas autour de ces observations prises comme
types. Les malades sur lesquels j'insisterai le plus sont surtout
les cinq suivants : Claire (Obs. 222)*, est une jeune fille actuel-
lement âgée de 28 ans, que j'ai étudiée et traitée depuis 9 ans.
Cela prouve que la maladie ne se guérit pas aisément, puisque
cette jeune fille est encore au moins une anormale, décidée à ne
pas se marier et dont on ne peut blâmer la résolution. Elle habite
la province et vient de temps en temps passer plusieurs mois à
Paris, c'est à ces moments que je la vois régulièrement. Ces
alternatives entre les périodes de traitement et les périodes
d'interruption déterminent des alternatives intéressantes dans
l'évolution de la maladie qui nous fourniront quelques constata-
t. Il est impossible de donner ici d une façon complète toutes ces observations,
je dois me borner à indiquer d'une façon sommaire les faits présentés par chaque
malade et qui ont un intérêt pour la discussion générale. Cependant comme ces
observations présentent un certain intérôt, comme elles contiennent certains rensei-
gnements utiles, les antécédents héréditaires ou personnels, la durée et révolution de
la maladie, les résultats du traitement, etc., je compte les résumer dans le second
volume de cet ouvrage que je publierai, je 1 espère, prochainement en collaboration
avec M. le P' Rajmond. C'est pourquoi le nom conventionnel ou les lettres qui
désignent un malade seront suivis dans cet ouvrage d'un numéro d'ordre qui per-
mettra de retrouver son observation dans le second volume.
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XII LES OBSESSIONS ET L\ PSYCHASTHÉNIE
lions intéressantes. Lise (Obs. 228), pour lui conserver le nom
s lequel je Tai déjà signalée dans diverses études, est une
me deSo ans, que je suis régulièrement à peu près sans inter-
lion depuis 5 ans. Sa maladie, très grave au début, a pu être
ïndée peu à peu ; c'est une femme intelligente, instruite,
able de bien observer. Jean (Obs. 167) est un homme de 3i ans,
t la maladie mentale, mélange de scrupule et d'hypocondrie,
des plus graves, et quoique je l'observe depuis un an, je
espère de l'améliorer autant que les malades précédentes,
lia (Obs. 166), ce pseudonyme a été choisi par la malade elle-
ne, est une jeune fille de 28 ans, que j'observe également
uis plus de 6 ans et qui est particulièrement bien connue,
^qu'elle a l'habitude, rare chez les scrupuleux, de m'écrire de
^ues lettres, où elle note, avec de grands détails, beaucoup
icidentsde sa maladie. Gisèle (obs, 171) est une femme de 3o
, remarquable par son aptitude à l'analyse psychologique et
ses descriptions imagées, qu'elle consent souvent à écrire
une la précédente et qui m'ont souvent rendu service. Autant
possible, ces cinq malades seront cités de préférence, et les
res, moins étudiés, leur seront comparés.
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PREMIÈRE PARTIE
ANALYSE DES SYMPTOMES
LK8 OBSESSIONS 1. I
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CHAPITRE I
LES IDÉES OBSÉDANTES
Le premier phénomène qui se présente à l'examen chez les plus
graves de ces malades semble être un phénomène intellectuel de
Tordre le plus élevé, une idée et souvent une idée assez abstraite
et assez compliquée. Ces idées se distinguent en effet des autres
phénomènes psychologique par leur caractère abstrait et général:
ce ne sont pas des sentiments ou des opérations uniquement en
rapport avec un état présent et particulier du sujet, ce sont des
conceptions qui s'appliquent d'une manière générale à toute une
période de la vie ou à la vie tout entière. L'angoisse déterminée
par la peur d'un couteau est un sentiment particulier. La pensée
que Ton est un criminel capable de tuer à coup de couteau est une
idée générale. Dans ce premier chapitre je n'examinerai que les
idées de ce genre.
Ces idées se reproduisent dans l'esprit du malade, ainsi qu'il
l'affirme tout d'abord, malgré lui, d'une manière continuelle et
pénible. Cette permanence de l'idée n'est pas justifiée par son
importance et son utilité pratique; aussi l'absence d'utilité. par
rapport à la vie pratique distingue ces idées de celles du savant et
de l'inventeur et lui donne déjà un caractère pathologique '. Des
idées de ce genre sont désignées sous le nom d'idées obsédantes.
Dans nos précédentes études sur des malades atteints d'idées
fixes, nous avions remarqué que l'objet de ces idées, leur contenu^
n'avait pas une extrême importance. Les phénomènes les plus
importants pour déterminer la nature de l'idée et son mécanisme
étaient constitués par ce que l'on peut appeler la forme de
Vidée, c'est-à-dire les caractères psychologiques qu'elles présen-
I. Blocq el Onanof, Revue scientifique, 1890. — Këraval, L'Idée fixe. Archives
de neurologie, 1899, II, p. 6.
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LES IDÉES OBSÉDANTES
t dans leur évolution. L'idée était-elle consciente, clairement
mue comme fausse par le malade, était-elle impulsive, systéma-
ou non, etc. ? Telles étaient les questions les plus importantes,
t au contenu de Tidée, que le malade rêvât à un incendie ou à
etit chien écrasé par un tramway, cela n'avait qu'une impor-
secondaire.
contraire, les obsessions exprimées par les malades scrupu-
que nous considérons maintenant, se présentent au premier
l comme si étranges que leur contenu mérite tout d'abord
rer notre attention, car il joue un rôle important dans Tévo-
1 de la maladie.
me propose donc, dans ce chapitre, d'étudier d'abord le
riu des idées obsédantes y l'objet de la pensée qui remplit
it du malade. Puis, dans la deuxième partie de ce chapitre,
ninerai la forme psychologique que prend cette idée, c'est-
3 les caractères psychologiques qui la déterminent et qui
lent la distinguer des autres idées normales.
PREMIÈRE SECTION
LE CONTENU DBS IDÉES OBSÉDANTES
contenu d'une idée ne peut être connu que par des
ssions du malade, par son attitude et son langage. Il faut étu-
în quelques mots cette attitude des malades pour se rendre
te des difficultés de l'observation. Les pensées qui rem-
nt les obsessions peuvent être rangées ensuite dans cinq
s : les obsessions du sacrilège, les obsessions du crime, les
sions de la honte de soi, les obsessions de la honte du corps
> obsessions de maladie ; enfin, nous pourrons à la fin de
première étude chercher à dégager quelques caractères
aux qui se retrouvent toujours dans le contenu des idées
antes.
i. — L'expression des idées obsédantes.
si beaucoup plus difficile qu'on ne le croit généralement de
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L'EXPRESSION DES IDÉES OBSÉDANTES
décrire avec précision les idées qui tourmentent les obséd
malades ont en effet presque tous une attitude et une man
s'exprimer qui me paraît précisément dépendre de leur éts
tal, mais qui gêne singulièrement les recherches psycholo
Sans doute, ils sont doux, aimables, assez intelligents et i
sentent ni ces colères, ni ces entêtements, ni ces confusi<
gênent dans Texamen d'autres sujets, mais ils ont une pei
nie à parler avec précision de ce qu'ils éprouvent et ne fon
de leurs pensées que d'une manière perpétuellement incoi
obscure et embarrassée.
Le scrupuleux, au début de son mal, quand il s'aperç<
sa pensée est troublée, commence par dissimuler soigneu
son état à son entourage et pendant des années, sa famill
ignorer qu'il est atteint d'une maladie mentale. Il faut d
constances toutes spéciales pour le décider h parler. Ger
2i4 *)i par exemple, laisse échapper son secret quand, pendj
petite maladie, on veut la faire soigner par sa belle-sœur
son délire, elle se figure depuis plusieurs années avoir tué 1
de cette jeune femme. Elle trouve trop horrible d'être i
nant soignée par elle et se décide à expliquer pourquoi <
fuse ses soins. Ou bien il faut que la maladie ait été soup
à cause de quelques manifestations extérieures mal répi
en général, à cause du bavardage que font ces malades, à i
et que la famille, inquiète, les presse de questions. On entei
pendant plusleursjours répéter indéfiniment u non, non» dès
est seule. Elle refuse d'expliquer ce mot à son mari. Il fauti
père vienne la supplier pour obtenir l'aveu qu'elle résiste
mon. Bien souvent d'ailleurs on amène les malades au n
simplement parce qu'on est inquiet de leur attitude ma
qu'on ait pu obtenir une révélation précise. Cet aveu est si
tant et le plus souvent si tardif que Legrand du SauUe le
dérait comme un événement caractéristique dans l'évolutio
maladie et faisait débuter avec lui ce qu'il appelait la s
phase.
I. Le chiflre qui suit le nom d'un malade désigne le numéro que poi
observation dans le deuxième volume do cet ouvrage. Dans ce volume ]
collaboration avec M. le professeur Raymond, nous étudierons les antécé
malade, révolution qu*a eue chez lui la maladie, les traitements qui ont
oecas avoir une influence, études cliniques qui ne peuvent toutes prendre pi
ce premier volume.
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LES IDÉES OBSÉDANTES
Quand on interroge ces malades, ils prennent un air extrême-
barrassé. Ils sont hésitants, incertains eux-mêmes sur ce
►rouvent et sur ce qu^ils veulent dire. Les uns comme
)s. iSa) poussent tout le temps des éclats de rire et se
d'eux-mêmes comme s'il nV avait rien de sérieux dans
. Les autres sont tristes, honteux, prient qu'on n'insiste
[•efusent absolument de faire un récit net et précis de
adie. Je puis donner à ce propos un détail caractéris-
ai l'habitude, autant que cela est possible, de prier les
de m'écrire : la feuille de papier légendaire du neuras-
n'est pas pour me déplaire. Les descriptions sont plus
par l'écriture que par la parole et le document est sou-
ressant à conserver. J'ai recueilli ainsi des confidences
tes sur la plupart des maladies mentales, eh bien, sur
puleux, malgré toutes mes supplications, je n'ai pu obte-
ettres que de cinq malades seulement. II ne faut donc
que sur l'interrogatoire et on ne tarde pas a s'apercevoir
extrêmement difficile.
sont cependant pas les difficultés ordinaires de l'examen
es. Le persécuté refuse souvent de parler parce qu'il prend
in pour un ennemi et qu'il s'en méfie ; le scrupuleux ne
rien de semblable. Il ne se défie pas du médecin et comme
îrrons, il est au contraire tout disposé à réclamer son aide,
colique refuse de parler par honte, par humilité; le scru-
lit presque toujours fort bien que ses idées, ses accusations
ses. II se rend assez bien compte qu'il est un malade et
>as lieu d'être honteux L'hystérique ne peut pas vous par-
qu'elle ignore, parce qu'elle a oublié ; le scrupuleux ou-
peu et ce qu'il y a de plus agaçant dans son examen c'est
tend toujours savoir très bien ce qu'il aurait a dire et que
it il le dit toujours très mal. Il est hésitant, embrouillé,
te sans avancer, il n'achève jamais Tidée qu'il a commen-
avance jamais un mot sans le contredire Tinstant suivant
urs il vous avertit charitablement que tout ce qu'il a dit
isant, que ce n'est pas encore cela, qu'il aurait bien autre
lire et l'on peut recommencer l'interrogatoire toujours
lême résultat.
)bs. 1/4^), au milieu de ses éclats de rire, vous avertit:
vais, moins je comprends mes idées, comment voulez-
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L'EXPRESSION DES IDÉES OBSÉDANTES 7
VOUS que je vous les décrive? Quand je veux expliquer une idée,
elle s'enfuît, ça me fait un trou dans la tête. Je ne puis plus la
rattraper. Quand je vous parle, ça me fait l'effet de choses si pe-
tites... si petites et cependant quand je suis partie, c'est si grave. »
Lise (Obs. 223), quand on Ta interrogée pendant deux heures,
quand on a écrit tout ce qu'elle disait, termine en déclarant : a ne
l'oubliez pas, je dis presque toujours le contraire de ce que je
pense et je ne peux pas retrouver mes idées quand il s'agit d'en
parler. Je n'en dis jamais que la moitié. Ne tenez donc pas compte
de ce que j'ai dit. m F^a plus remarquable à ce point de vue, c'est
Claire (Obs. 222) qui arrive toujours très affairée, parce qu'elle a des
choses importantes a me dire, qu'elle tient à les dire et qu'elle
ne retrouvera sa tranquillité qu'après avoir tout dit. On l'encou-
rage a commencer et alors ce sont des bavardages sur la diffi-
culté qu'il y a à parler, sur le problème de savoir par quoi com-
mencer. « J'ai déjà dit tout cela, je l'ai dit cent fois, j'ai dû vous
le dire, ce qui me tourmente, c'est que je n'ai pas dit l'essentiel »
et elle pleure, et elle rit, et elle se roule sur son fauteuil ; en
supplications d'un côté, en gémissements de l'autre, on passe plu-
sieurs heures et alors la voilà au désespoir. « Je vais encore par-
tir sans vous avoir dit ce que j'avais à dire, c'est si simple, je vais
vous le dire », et la scène recommencerait encore plusieurs heures
si on avait le temps de l'écouter. 11 faut la renvoyer avec la con-
solation que la prochaine fois elle dira mieux. J'ai connu cette
malade pendant dix-huit mois avant d'avoir deviné sa principale
idée fixe.
Par exception, on rencontre des scrupuleux bavards comme
Jean (Obs. lôy) ou qui écrivent beaucoup comme Nadia (166), mais
l'espoir de les entendre parler clairement de leur maladie est
bientôt déçu. C'est un flux intarissable de paroles, de plaintes,
de gémissements, mais avec les mêmes contradictions, les mêmes
obscurités. Jean complique son langage d'une grande quantité de
néologismes dont il a peu à peu précisé le sens dans son esprit,
mais qui sont loin de rendre son langage plus clair, a Ah ! j'ai eu
ma petite mesure depuisqueje vous ai quitté ; une petite échaubouil-
laison a fait que tout repigeonnaitencore, et l'obsession mentale et le
fou-rire cérébral qui me labouraient la tête. Je ne pouvais plus ré-
sister au besoin de me crisper les organes, cric, crac, meurs donc
en te donnant des jouissances. Ce que j'ai dû soulever de poutres
en nombre répété pour résister. Vous ne vous figurez pas comme
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LES IDÉES OBSÉDANTES
produit un état fastidieux tout le long de la ligne des nerfs. »
1 continue ainsi pendant des heures sans arriver à se faire
[prendre et surtout sans arriver à se satisfaire lui-même. Il
plie qu'on l'écoute encore un quart d'heure, parce qu'il est si
ortant qu'il ait tout dit. Il consent à s'arrêter avec la pro-
se que la prochaine fois il reprendra le récit interrompu. Il
curieux de comparer h ce point de vue Claire et Jean. L'une
)eut pas arriver à dire dix mots, l'autre parle avec abondance
dant des heures entières. Le résultat est cependant exactement
lème. Ni l'un ni l'autre ne sont arrivés à une expression pré-
et satisfaisante des troubles qu'ils éprouvent.
en est de même pour ceux peu nombreux qui écrivent. Dob.
s. 86), jeune femme de qq ans, qui a toujours le sentiment de
re mal expliquée par la parole se décide à m'écrire assez sou-
L Mais toutes ses lettres, qui sont semblables au point qu'elles
lissent copiées l'une sur l'autre, ne contiennent que quelques
;riptions vagues et banales, identiques à ce que disait la ma-
I. Nadia prétend éprouver une peine extrême h parler : « il
semble, dit-elle, que cela m'étrangle » et elle adopte vite le
ème de m'écrire des lettres interminables, d'abord dix ou
ft feuilles de papier à lettres, puis, comme ce papier ne suffit
», cinq à six grandes feuilles de papier écolier. Les mots im-
tants sont répétés trois ou quatre fois, ils sont soulignés un grand
ibre de fois. Tout semble réuni pour arriver à une précision
sfaisante et cependant Nadia n'est jamais satisfaite : « que vou-
vous, mes lettres sont aussi embrouillées que mes idées. »
ans doute, il y a la un sentiment faux, une illusion du ma-
! qui est toujours mécontent de ce qu'il a faitquoiquHI semble
r fait les choses d'une manière à peu près suffisante. Nous
)ns à étudier en détail ce sentiment et nous étudierons jusqu'à
I point il est erroné et s'il ne correspond pas à une certaine
ité. Pour le moment, remarquons que ce sentiment du
ade à propos de son langage, quoique très exagéré chez
Iques-uns, est en général assez juste. Cette façon de s'exprimer
paraît assez importante, le désir de se confesser, aucune raison
euse qui s'y oppose et l'impuissance où est le malade à expri-
clairement son état, tels sont les caractères essentiels du lan-
5 des obsédés scrupuleux,
n peut observer que ce trouble de l'expression dépend chez quel-
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L'OBSESSION DU SAGRILRGE 9
ques-uns d'une émotion de tiraididé et on cherchera k le rattacher
aux autres troubles émotionnels que le malade présente en entrant
chez le médecin, en cherchant à lui dévoiler des choses intimes. Il
y a là une partie de la vérité: dans un certain nombre de cas, cette
attitude est en partie celle des timides. Mais je crois que cette
explication n'est que partielle. Beaucoup de ces malades ne sont
aucunement timides avec moi, à moins que l'on ne veuille étendre
le mot de timidité à tous les troubles delà volonté; il y a dans leur
difRculté d'expression quelque chose de plus général et de plus
important. Elle dépend d'une manière d'être de tout l'esprit, elle se
rattache à une impuissance générale de rien faire avec précision, de
rien terminer. Nous retrouverons cette impuissance avec toute son
importance à la fin de cette étude ; mais comme ce caractère est
capital, il était bon de le signaler dès le début, simplement dans
la façon dont le malade se présente et expose sa situation.
On comprend que ce caractère ne facilite pas Pétude des mala-
dies : dans ce cas, comme d'ailleurs presque toujours, il faut un
temps énorme pour éclaircir un peu ces observations psycholo-
giques, la dépense de temps est la difficulté principale de la
psychologie expérimentale.
2. — L'obsession du sacrilège.
Quelles que soient les difficultés qui empêchent de saisir
complètement la pensée de ces malades, on finit par se rendre
compte de quelques idées principales qui d'une manière plus ou
moins vague constituent le fond des obsessions.
Dans un premier groupe, il s'agit évidemment d'obsessions
religieuses, mais ce sont des idées religieuses toutes spéciales,
ayant un aspect horrible, monstrueux en dehors de toute
croyance raisonnable. Au lieu de se préoccuper des événements
de la vie commune, de la mort d'un enfant, de l'absence d'une per-
sonne aimée, ces malades songent à des crimes religieux irréali-
sables et fantastiques.
Quelques exemples feront facilement comprendre ce caractère,
j'en choisis d'abord deux particulièrement typiques autour des-
quels il sera facile de grouper les idées du même genre présentées
par les autres malades. On. (Obs. 221), un homme de 4oanS; après
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10 LES iDitEs obsiî:dantes
beaucoup de tergiversations, nous fait Taveu de ce qui le tourmente
jour et nuit. Il vient de perdre il y a deux ans son père et son
oncle pour qui il avait la plus grande artcction et la plus grande
--^-'-ation: il les pleure, cela est naturel. Va-til être obsédé par
gre de leur figure comme une hystérique pleurant son père ?
Il est obsédé par la pensée de Tàme de son oncle. Mais ce qui
Froyable, c'est que Tàme de son oncle est associée, juxtaposée
nfondue (nous savons que ces malades s'expriment très mal)
Lin objet répugnant : des excréments humains, a Cette âme
1 fond des cabinets, elle sort du derrière de M. un tel,
etc. » Il fait une foule de variantes sur ce joli thème et il
;e des cris d'horreur, se frappe la poitrine. « Peut-on con-
p abomination pareille, penser que l'âme de mon oncle
de la m... » Le cas est intéressant par sa grossièreté, une
Je ce genre présente, a mon avis, un cachet tout spécial: elle
it déjà le médecin qui ne le rencontrera guère en dehors du
î du scrupule.
Eintde préciser ce caractère voyons un autre exemple encore
typique. Claire, cette jeune fille, dont la chasteté ne peut
î pas être soupçonnée, finit après i8 mois d'examen et d'in-
^ations par m'avouer l'obsession suivante qui, au premier
I, me paraissait invraisemblable et dont j'ai dû plus tard
ater la fréquence chez les scrupuleuses. Elle prétend que
plus qu'une idée, c'est quelque chose qu'elle voit et qui lui
•ait brusquement h gauche. Acceptons pour le moment cette
îssion de la malade : « Je vois. » Nous aurons à discuter
tard s'il s'agit d'une véritable hallucination. Claire prétend
subitement devant elle un homme tout nu ou avec plus de
sion uniquement les parties sexuelles d'un homme, en train
omplir un acte : celui de souiller une hostie consacrée,
ici des années que cette jeune fille a cette image devant les
des centaines de fois par jour. De temps en temps l'image
quelques légères modifications : il y a plusieurs membres
autour de l'hostie, ou bien c'est une femme qui met l'hostie
;s parties génitales, tantôt c'est un chien qui fait ses ordures
ne hostie, tantôt l'hostie est simplement mêlée avec de la
des excréments. Pendant certaines périodes de grand
le, c'était un prêtre qui venait appliquer l'hostie sur les
;s génitales de la malade elle-même ou sur son anus. Ces
5s provoquent une angoisse horrible, bouleversent la malade;
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L'OBSESSION DU SACRILÈGE 11
lui donnent, dit-elle, à chaque fois, une espèce de crise de nerfs,
lui enlèvent toutes ses idées, toute sa volonté.
De telles pensées paraissent au premier abord bien étranges
et bien exceptionnelles. Mais si on observe ces malades on voit
d^abord qu'elles sont chez eux très fréquentes. 11 y a un siècle
Esquirol décrivait déjà des hallucinations semblables h celles de
Claire. Si nous examinons plusieurs autres malades nous allons
retrouver souvent des idées très analogues à ces deux exemples.
Ce sont toujours des pensées obsédantes relatives a des atten-
tats monstrueux contre des choses religieuses ou infiniment res-
pectables.
Lise spécule depuis des années sur ce thème : le culte reli-
gieux du démon. L'idée obsédante n'est pas chez elle aussi bru-
tale que chez les deux malades précédents, ce n'est pas une
image simple apparaissant tout à coup, c'est une méditation
longue et compliquée tournant autour de quelques idées prin-
cipales que je résume en conservant le vague de l'expression qui
caractérise cette malade. « Il y a un principe du mal comme un
principe du bien... le mal est un Dieu comme le bien... le con-
traire de Dieu, vénérer le contraire de Dieu... quelle est la puis-
sance du démon... prier le démon autant que Dieu... si on ne
croit pas au démon ne pas croire a Dieu non plus... demander
au démon des services et lui donner en échange ce qu'on aime
le plus... lui demander tout ce dont on a envie... donner au
démon l'âme de ses enfants... etc. » La dernière idée est
Tobsession capitale de cette malade qui est constamment tour-
mentée par la pensée de vouer au démon l'ame de ses enfants.
Un autre malade, Za... (Obs. 216), homme de 32 ans, rêve à
violer une vieille femme devant une église. Leb... (Obs. 217),
femme de 35 ans, se sent poussée par Satan à se masturber
toutes les fois qu'elle prépare une confession. Nous verrons
plus tard ce qu'il faut penser du phénomène lui-même, excita-
tion génitale au moment d'un effort pour accomplir un acte
religieux. Pour le moment remarquons seulement que la malade
a à ce propos une obsession « je pense tout le temps que
le diable me pousse a faire des malpropretés pour m'empêcher
de faire mon salut... ». Pour Xy... (Obs. 218J, (emme de 55 ans,
le diable intervient dans toutes ses actions, elle ne peut pas man-
ger sa soupe ou changer de chemise sans penser qu'elle fait à ce
moment un acte agréable au démon. Lod... ne peut voir un cra-
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12 LES IDÉES OBSÉDANTES
chat par terre sans penser que c'est une hostie, ne peut donner
h Knîr*> ?i «an chicu sans croire qu'elle donne le vin et l'eau de
e, ne peut boire elle-même sans croire avaler le vin
. Gef... se figure qu'elle veut « tuer le bon Dieu ».
qui est banal chez tous, c'est l'idée du blasphème,
1 des choses divines, penser au démon en faisant des
isulter Dieu au lieu de le prier..., ne savoir expri-
haine de Dieu d'une façon mauvaise et grossière, se
ntre Dieu et le maudire, dire des blasphèmes dès
B à la religion... cochon de Dieu, etc. » telles sont
que répètent un grand nombre de ces malades.
mes qui ont des obsessions d'une autre nature comme
, femme de 21 ans, mêlent la divinité et la reli-
maladie : « Je suis damnée, je lutte contre Dieu si je
mon cerveau malade, je me moque de Dieu si je
me soigner. » L'idée de sacrilège se mêle aux autres
)ar ces exemples faciles a multiplier que ces obses-
îquentes chez les scrupuleux, ont un trait commun,
toutes constituées, semble-t-il, par deux pensées asso-
d'ordre élevé, le plus souvent religieuse et en tous les
ent vénérable, aux yeux du sujet, Dieu, l'âme, les
glise, l'hostie et de l'autre une pensée basse, repu-
oble, les excréments, les organes génitaux, les paroles
ordurières. Cette association constitue une insulte
mière pensée et l'on peut dire que toutes ces obses-
constituécs par la pensée d'un sacrilège : de là le nom
j'ai déjà eu l'occasion de les désigner plusieurs fois,
^.v sacrilèges. Le premier fait que nous ayons à relever
Tupuleux c'est qu'ils sont tourmentés perpétuellement
ée du sacrilège.
3. — L'obsession du crime.
ssions singulières qui constituent une sorte de manie
;e n'existent pas seules chez ces malades. On peut
que le plus souvent elles ne se présentent que très
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L'OBSESSION DU CRIME i3
tard, lorsque révolution de la malade est déjà bien avancée.
Chez ces mêmes malades on rencontre d'autres idées un peu
différentes soit qu'elles existent encore simultanément avec les
obsessions sacrilèges, soit^qu'elles aient dominé antérieurement
et n'existent plus qu'à l'état de souvenirs ; chez d'autres sujets
moins gravement atteints on ne rencontrera pas d'idées vraiment
sacrilèges mais uniquement ces obsessions moins graves.
Ces malades sont tourmentés pendant des années par des
préoccupations toujours du même genre relatives à la religion ou
à la morale. Il nous faudra rechercher plus tard quelles sont les
raisons qui fixent ainsi l'esprit vers un même ordre de réflexions
morales, pour le moment nous nous bornons à constater et à
décrire. Ces personnes semblent s'intéresser vivement aux pro-
blèmes religieux et philosophiques, ce qui est permis à tout le
monde, mais elles le font d'une façon absorbante, pénible et tout à
fait excessive.
Lise s'interrogeait des journées et des nuits entières sur la
question du salut, elle ne s'intéressait pas précisément à son
propre salut, mais à celui de son père, plus tard au salut de
son mari, de ses enfants. Elle spécule maintenant sur le pro-
blème du bien et du mal dans le monde, sur le problème
de l'action mutuelle des âmes les unes sur les autres. Elle
en arrive à se faire une sorte de philosophie ou de religion
personnelle, mystique et enfantine, tandis qu'elle néglige com-
plètement la religion oflicielle. Une autre malade, Ger..., examine
naïvement comment il est possible que Dieu soit descendu sur la
terre pour sauver les hommes et pour la sauver en particulier
elle-même. Py... (i33), une fillette de i5 ans, est bourrelée
d'inquiétudes à propos de la fin du monde, cela l'amène à exami-
ner les théories de la création, des miracles, de l'existence de
Dieu. « Ce serait si terrible, répète-t-elle en pleurant à chaudes
larmes, si Dieu n'existait pas. » On a déjà vu que Lod... mêle des
idées religieuses à tous ses actes même les plus vulgaires, elle ne
peut passer devant*une boulangerie sans s'interroger sur le mys-
tère de l'Eucharistie et elle ne peut se déshabiller quand elle est
seule parce qu'elle est gênée par la présence continue de Dieu.
On pourrait multiplier ces exemples qui montrent suffisamn^ent la
direction religieuse et philosophique des rêveries de ces malades.
D'autres plus nombreux encore et dont l'étude est particulière-
ment intéressante s'occupent plutôt des problèmes de morale
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14 LES IDÉES OBSÉDANTES
concernant la conduite humaine. On..., le brave homme qui
Tâme de son oncle dans les cabinets, avait été auparavant
it des années tourmenté par les problèmes relatifs à Thon-
; il s'interrogeait avec angoisse sur les preuves du droit de
été, sur le devoir de restituer, etc. Nb..., un littérateur
»sant étudie malgré lui la nature de l'amour, de Tamitié, de
rite. We... (170), une jeune fille de 19 ans, a la prélen-
3 résoudre le problème de la responsabilité et veut mesurer
I quel degré elle est responsable. Un homme de 32 ans,
216), est entré à 20 ans au séminaire afin de pouvoir satisfaire
ût pour les questions théologiques, il s'absorbe dans ces
d'une façon si anormale que le supérieur le signale au
In et que celui-ci exige son renvoi du séminaire et l'invite
ger d'études. A peine sorti des spéculations religieuses, il
me poussé par un instinct choisir l'étude du droit et il
nence avec le même acharnement les discussions sur le
le mal, le crime, le délit, la punition, les droits, etc., si
Li'on a dû lui interdire ces nouvelles études comme les
entes. De pareilles études semblent bien permises et pa-
t indiquer simplement un goût, une direction particulière
ôt intéressante de l'esprit. Mais nous aurons à étudier la
que prennent de telles pensées et à voir combien leur
ppement est anormal.
' le moment remarquons seulement que ces spéculations
tent privées, désintéressées chez ces malades, elles
cnt toujours à des préoccupations personnelles relatives à
ions déterminées. Ce n'est pas d'une façon théorique qu'ils
t à des actes religieux, à des actions bonnes ou mauvaises,
sentent poussés h les accomplir. Le mal semble ne pas
en grand quand il s'agit d'actions bonnes ou indifférentes :
(217), une femme de 35 ans, est sans cesse poussée à
s prières, a aller à la messe, We... sent une impulsion qui
ne à se faire religieuse^ h entrer dans* un couvent, Dor...
npulsion plus curieuse, elle se préoccupe non pas de ses
elle mais de ceux des autres, elle est poussée à changer la
:e de son mari et en particulier à le faire confesser sans
our la moindre des choses ; elle a une grande crise d'an-
parce qu'il a fumé une cigarette avant de communier avec
qu'il ne veut pas aller se confesser tout de suite.
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L'OBSESSION DU GRIME 15
Malheureusement les impulsions sont rarement de ce genre,
Dans la grande majorité des cas ce sont des impulsions à accom-
plir des actions mauvaises, criminelles. Les obsessions du crime
se présentent ainsi sous la forme d'une tendance^ d'une impulsion
à commettre ces crimes.
Za... n'a pas seulement des obsessions sacrilèges qui le
poussent, comme il dit, h « accomplir tous les péchés théologiques »,
il a des impulsions à des crimes plus terre à terre, violer une
femme sur un banc et Tassassiner. Mb... (i36), femme de
57 ans, est poursuivie par la tentation de frapper les gens avec
un long couteau pointu a qui crève les yeux, qui entre bien ».
Ger... est poussée à couper la tète de sa petite fille, et a la
mettre dans Teau bouillante. D'ailleurs on ne peut compter les
scrupuleux qui ont des impulsions à frapper des gens et surtout
à frapper leurs enfants à coups de couteaux. Dans une conférence
que je faisais récemment à la Salpêtrière sur ces malades, j'avais
pu réunir cinq mères de famille, répétant toutes en pleurant
exactement la même chose : que quelque chose les poussait à
frapper leurs petits enfants avec un couteau pointu. On ne peut
énumérer tous ces malades, il suffit d'en citer quelques-uns. Lise,
Vod... (2o3), Wks... (197), Brk... (24), Vi..., Ger..., etc., veu-
lent aussi frapper leurs enfants. Qes... veut se jeter sur sa mère,
l'étrangler et se suicider après.
Ces obsessions impulsives qui semblent pousser les malades
à l'homicide sont parmi les plus fréquentes et les plus connues.
Schopenhauer rapportait déjà un cas d'impulsion a l'homicide
chez un malade qui avait conscience de l'absurdité d'une sem-
blable idée et s'en désolait *. Maudsley en rapporte plusieurs
exemples, Magnan, Saury en décrivent de nombreux exemples.
Dans une observation de M. Magnan, le malade veut simplement
mordre et manger la peau qu'il aura arrachée *. On peut donc
réunir dans un premier groupe toutes les obsessions-impulsions
à des actes de violence quelconque.
L'impulsion au suicide vient par ordre de fréquence après l'im-
pulsion au meurtre, nous la retrouverons chez beaucoup de nos
malades, chez Nadia par exemple qui dans une rêverie roma-.
nesque arrive à se représenter qu'elle se noie dans la mer Bal-
1. Schopcnhaucrt Le libre arbitre, Irad., p. 177.
2. MagnaD, ilrc/i. de neurologie, 1892, i, p. 321.
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LES IDÉES OBSÉDANTES
tique. Une femme de 3o ans, Kl... (211), a été pendant trois
ans obsédée par l'image d'un homme pendu dont on lui a raconté
la triste fin. Ce qui la tourmentait ce n'est pas réellement la mort
de cet individu, c'était une réflexion personnelle: « Je pourrais bien
en faire autant » et elle se sentait poussée à se pendre h ce point
qu'il lui fallait prendre des précautions pour ne pas céder à ce
désir. Elle fermait à clef son grenier et cachait la clef, car dans
son idée c'était au grenier qu'elle irait exécuter ce suicide.
Les impulsions génitales sont souvent parmi les plus remar-
quables. Za... veut, comme nous l'avons dit violer, une vieille
femme, V..., une jeune femme mariée, se sent poussée à se
mettre a la fenêtre et à (aire signe aux passants pour les inviter à
monter chez elle. Une jeune fille de 22 ans, Vob... (194), ne
veut plus rester dans Tappartement de ses parents, elle veut se
réfugier a dans une prison, ou dans un couvent, dans un endroit
quelconque où il n'y ait que des femmes », parce qu^elle est
poussée à s'approcher de ses frères et à déboutonner leur culotte.
(( Elle ne pourra jamais résister jusqu'à son mariage, déjà ses
bras font malgré elle de petits mouvements, elle sent ses mains
qui défont les boutons. » Nous aurons à rechercher s'il s*agit là
de véritables hallucinations kinesthésiques, notons seulement ici la
fprme d'image kinesthésique que prend l'obsession, analogue à la
forme visuelle qu'elle prenait dans les idées sacrilèges de Claire.
Parmi ces obsessions avec impulsions génitales il faut noter
celles de Rk..., homme de 4o ans qui depuis vingt ans se croit
atteint d'inversion sexuelle et déplore le triste penchant qui le
pousse vers des jeunes gens. Il n'a d^excitations sexuelles
qu'en pensant à des hommes, il déclame sur la poésie roman-
tique des amours masculines et en même temps il redoute le
sort d'un littérateur connu condamné pour cette conduite illégale.
Je ne discute pas ici la question des invertis sexuels, mais je suis
convaincu que trop souvent on a fait des théories sur l'inversion
sexuelle à propos de simples obsédés ayant une impulsion vers
cette action comme ils auraient une impulsion à un crime quel-
conque. Dans le cas présent, cet homme a été amoureux d'une
jeune fille à 17 ans ; par conséquent il n'a pas toujours été un
inverti sexuel ; à la suite de beaucoup d'autres obsessions il est
parvenu à l'idée de ce crime génital particulier qui constitue
maintenant son obsession principale.
Ce sont surtout les impulsions à la masturbation qui jouent un
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L'OBSESSION DU GRIME 17
grand rôle dans les tourments de ces malades. Deb... (i65),
femme de 44 ans, froide avec son mari, ne pense qu'à recommen-
cer d'anciennes masturbations, il en est de même pour Loa...
(i38), pour Leb..., etc. Cette pensée forme un des phéno-
mènes principaux de la maladie si complexe de ce pauvre Jean,
à tout instant et a tout propos, il croit avoir des tentations de
masturbation. Par exemple s'il rencontre une femme dans l'omni-
bus, s'il est forcé par les circonstances de toucher la main d'une
femme et même tout simplement s'il éprouve une émotion quel-
conque même légère, il sent plus qu'il n'entend une voix lui
disant : « Va donc, crispe-toi les organes, masturbe-toi donc,
meurs en te donnant des jouissances. » Et il sent que ses nerfs
s'agitent moitié involontairement, moitié volontairement. « Il y a
en moi une complaisance, un laisser aller pour tous ces désirs
sexuels. »
Ajoutons les impulsions à d'autres actions malhonnêtes, par
exemple, l'impulsion à voler et à mentir chez Lod... Cette impul-
sion à voler se retrouve très souvent : elle joue un rôle dans une
impulsion plus complexe et particulièrement intéressante, celle
des fugues chez Go... Ce garçon de i5 ans ne pouvait parvenir
à rester immobile dans une école, dès qu'il essayait de s'appli-
que à son travail, il sentait des agitations folles qui le pous-
sèrent dès son enfance à faire très souvent l'école buisson-
nière. Maintenant il a un désir fou de partir n'importe où, de
voyager loin de l'école, loin de son apprentissage. Cette idée lui
enlève tout bon sens et il faut qu'il y cède : il prend chez ses
parents une fois 68 francs, une autre fois 3o4 francs et il s'en va.
Son argent ne lui sert qu'à payer le chemin de fer de la façon la
plus économique, et à lui assurer une bien maigre ration. Il vit
avec lo sous par jour, et se nourrit à peine. Il ne prend aucun plai-
sir à son voyage, il voyage pour voyager, pour s'éloigner loin du
travail. Il est tout le temps mécontent d'être parti et écrit des
lettres à des amis et à des parents pour demander des conseils,
il essaye de rentrer en prenant un billet pour Paris, mais il est
forcé de descendre quelques stations avant d'arriver et de repar-
tir en sens inverse. Il rentre quand il n'a plus aucune ressource,
il arrive la tête basse, s'excusant de ses sottises et jurant qu'il ne
recommencera plus. Il a en effet un souvenir complet de toute
l'expédition et de la lutte qu'il a soutenue contre l'obsession.
C*est un cas qu'il ne faut pas confondre avec les fugues hystc-
LSS OBSESSIONS. I. — 2
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18 LES IDÉES OBSÉDANTES
riquesy mais qui rentre dans les dromomanies que décrivait
M. Régis. Il se rattache à ces obsessions impulsives qui poussent
le malade à toutes sortes d*actes criminels.
Il faut faire une place à part aux impulsions qui poussent les sujets
à boire de l'alcool ou à absorber des poisons. Dans certains cas Tim-
pulsion à boire rentre dans les cas précédents : la malade si sin-
gulière que j'ai décrite dans un ouvrage précédent était poussée
a boire du café au lait et à manger des petits pains volés. Elle
finissait par prendre vingt ou trente tasses de café au lait dans
la journée et prenait des précautions pour pouvoir en faire pen-
dant la nuit ^ Ici le breuvage absorbé n'a pas d'importance par
lui-même, c'est une impulsion à boire un breuvage défendu par
le médecin et considéré comme dangereux pour son estomac.
Le plus souvent il s'agit de boire du vin, de l'alcool, des exci-
tants sous une forme quelconque. L'obsession impulsive prend
alors le nom de dipsomanie, D..., homme de 3o ans, a depuis
l'âge de i5 ans des périodes singulières de dépression sur les-
quelles je reviendrai longuement, car leur importance pour
l'intelligence des obsessions me semble capitale. Ce n'est qu'à
22 ans que ces périodes de dépression se transforment et sont
remplacées par une idée obsédante, celle de boire. Il résiste
pendant un certain temps puis finit par céder et boit jusqu'à
l'ivresse complète. Fm... (192), qui a déjà des symptômes de
névrite alcoolique, se fait à lui-même toutes sortes de menaces :
(( Si tu bois encore ton patron va te renvoyer, tu seras paralysé
des jambes, tu souffriras atrocement, etc. » Et cependant il ne
peut résister à l'impulsion.
Toutes ces impulsions à des crimes peuvent se rencontrer chez
un même sujet qui songera à la fois à l'homicide, au suicide, au
vol ou qui réunira d'une manière vague tous les crimes. « C'est
comme si, répète Claire, je voulais me laisser aller, céder à tous
mes caprices, renoncer à toute moralité. »
L'impulsion pourra prendre une autre forme également bien
connue : elle sera négative. Les malades seront poussés à résister,
à ne pas faire une action que la religion ou la morale comman-
dent. Chez Claire, ce refus constitue un véritable délire à propos
des actes religieux; refuser de faire ses Pâques, refuser de faire la
prière, la considérer comme impossible, refuser d'aller à la messe,
I. Raymond et P. Janet, Névroses el idées fixes, 1898, II, p. 194.
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L'OBSESSION DU CRIME 19
refuser de manger, c^est là perpétuellement ce que son impul-
sion lui inspire. En réalité, il lui suffit de penser qu'une action
est bonne pour qu^elIe ait une impulsion violente à ne pas la
faire. C'est parce qu'elle croit de son devoir de me parler, de me
confier ses tourments, qu'elle est si incapable de le faire ; une
action qu'elle jugera indifférente s'effectuera beaucoup plus faci-
lement. Ce type se rencontre chez bien des malades, chez Elg...
(i6), chezTr... (ii8), qui se sentent poussées à ne pas faire leur
travail, mais il est moins fréquent que le précédent.
A côté de ces diverses impulsions, il faut placer une manifesta-
tion plus fréquente encore et plus importante de l'obsession cri-
minelle, ce sont les remords. Le malade ne se sent pas actuelle-
ment poussé à accomplir une action criminelle, mais il pense
qu'il l'a accomplie autrefois et il est bourrelé de remords.
On peut mettre, bien entendu au premier rang, les remords
précis, portant sur tel ou tel acte déterminé et parmi ceux-ci
signaler tout d'abord les remords de fautes religieuses, les déses-
poirs causés par les confessions insuffisantes ou par les commu-
nions prétendues sacrilèges. Il est inutile de citer des noms, car
tous les scrupuleux ont eu ce symptôme, presque toujours au dé-
but de leur maladie. Chez quelques-uns, ces remords constituent
un véritable accès de délire, tous ceux qui s'occupent de mala-
dies mentales ont connu ces femmes affolées pendant des mois,
parce qu'elles croient avoir fait entrer un morceau d'hostie dans
une dent creuse. Le fait est si banal, qu'il a été bien connu et bien
décrit par les romanciers : on peut relire à ce propos la jolie
description de la sœur aux scrupules dans le Musée de béguines
de Georges Rodenbach *. Le médecin aurait peut-être à relever
dans cette peinture quelques inexactitudes à propos de l'état de dé-
mence de Sœur Marie des Anges, mais les premières périodes de
la maladie sont remarquablement décrites, l'attitude de la sœur
au confessionnal et ses angoisses après l'absolution semblent avoir
été copiées sur nos malades. Ce genre de pénitentes est sans
doute bien connu par les prêtres qui, si j'en juge par mes ma-
lades, doivent être assourdis parles doléances relatives aux an-
ciennes communions.
Nous constatons ensuite des remords pour tous les crimes qui
I. Georges Rodenbach, Musée de béguines, 189^.
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20 LES IDÉES OBSÉDANTES
tout a rheure, se présentaient comme des impulsions. Il est à re-
marquer, en effet, que les malades qui se disent poussés à accom-
plir un meurtre sont souvent les mêmes qui, quelques jours après,
vont avoir des remords comme s'ils avaient réellement commis
cet acte. Ainsi, du vivant de sa belle-mère, Ger... était poussée à
la tuer ; quand cette femme fut morte, elle s'accusa d'avoir causé
sa mort. Yi... s'accuse d'avoir accompli toutes les actions aux-
quelles, comme nous l'avons vu, elle se sentait poussée. Elle a
causé la mort des gens, elle a étranglé, elle a blessé des pas-
sants, envoyé des lettres compromettantes, versé du poison,
trompé son mari, etc.
D'autres, sans avoir eu d'impulsions précises, ont perpétuelle-
ment et uniquement des remords. Rob... (119), qui tient une
caisse dans une maison de commerce, est poursuivie par l'idée
qu'elle a mal rendu la monnaie, qu'elle a volé. We... (170) se re-
proche tous les chagrins, tous les malheurs qu'elle voit arriver
autour d'elle, parce qu'elle s'accuse de les avoir autrefois prévus
et souhaités. New... (212), homme de 3o ans, invente tout un
véritable délire rétrospectif, il se reproche sa conduite indé-
cente à l'école et il invente que tous ses maîtres ont abusé de
lui, cela devient un roman assez compliqué. Kl... est poussée à
penser que son enfant n'est pas le fils de son mari, ce problème
dissimule une véritable obsession de remords, c'est une manière de
se demander si elle a trompé son mari. Dk... (2i5) a l'idée qu'il
y a quinze jours, il a pu tuer quelqu'un ; il va dans la rue frôler
les sergents de ville et se trouve sur le point de les prier de l'arrê-
ter. Xya... (25) n'a pas assez bien soigné ses enfants et les a fait
mourir. Lise, si on la croit, a fait tous' les crimes possibles: com-
munions sacrilèges, meurtres, infanticides innombrables (elle
s'accuse d'infanticide toutes les fois qu'elle a des rapports avec
son mari non suivis de conception) actes contre nature, etc. Rk...
à 3o ans se souvient qu'à l'âge de 4 ans il venait le matin dans
le lit de son père avec sa petite sœur âgée de 3 ans, il croit qu'à
ce moment il a abusé de sa petite sœur et il est effrayé à la pensée
dé cet inceste.
Za... a des remords de ce genre assez curieux parce qu'ils
s'accompagnent d'images innombrables analogues à de véritables
tableaux. Il a la manie de s'accuser de tous les meurtres dont il
entend parler. Ainsi, on lui apprend, à la campagne, qu'un vieil-
lard de 84 ans a été trouvé mort sur une route. Immédiatement,
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L'OBSESSION DU CRIME 21
il se dit que c'est lui qui Ta tué pour lui prendre son argent. En
passant près d'une maison, il a entendu ou cru entendre le bruit
d'un revolver et il apprend ensuite qu'un homme s'est tué dans
cette maison. Aussitôt il en conclut que c'est lui qui a tiré le coup
de revolver et tué cet individu. L'obsession de ce remords a duré
deux ans. v J'éprouve, dit-il, en parlant de ces remords, toutes les
émotions du voleur, de l'assassin, toutes les tortures du remords
pour ces crimes imaginaires. Je vois les suites du crime, je vois
deux agents venir me saisir au milieu des miens, je vois la pri-
son, le cabinet du juge d'instruction, la cour d'assises ; je me vois
au banc des accusés, dévisagé par mes collègues qui chuchotent
entre eux : on ne s'en serait jamais douté. Je subis les angoisses de
l'incertitude qui précèdent les verdicts du jury et je travaille à
reproduire en moi-même les impressions du condamné à mort
qu'on ligotte pour le conduire au lieu de l'exécution. * ».
Une seconde forme de l'obsession du remords, plus grave que
la pensée et qui peut correspondre à une forme très avancée de la
maladie, c'est le remords général portant sur tous les actes de la
vie presque sans exception. Claire serait une malade de ce genre,
elle ne peut « réfléchir à aucune de ses actions, quelle qu'elle soit
sans en être accablée de remords ». Nous étudierons ce cas à propos
des obsessions de honte.
Dans certains cas, en effet, le remords portant même sur un acte
déterminé s'associe avec une honte de toutes les actions. Xyb...
(209) pour une raison quelconque a renvoyé sa blanchisseuse, puis
s'est décidée à la reprendre. Elle croit avoir été injuste en la ren-
voyant, puis avoir manqué de décision en la reprenant. Il résulte
de ce remords qu'elle trouve mauvaise toute sa conduite, il ne lui
est plus possible de rien faire correctement tant qu'elle n'a pas
réparé sa conduite vis-à-vis de la blanchisseuse. Elle prend des
précautions pour être toujours liée à celle-ci, par exemple, elle
veut toujours lui devoir une petite somme d'argent afin de ne plus
pouvoir la quitter, mais jamais elle ne peut effacer le remords de
son action irréparable.
Une obsession curieuse me paraît devoir être rattachée à ce
groupe, ce sont les « remords de vocation », le malade se re-
I. Une observation intéressante que l'on peut comparer à celle-ci a été publiée
par M. Bramwell dans le Brain, 1896, 344 : « Il invente des histoires absurdes à
propos d*un empoisonnement qu'il prépare, il se représente la tragédie, Tenfant
buvant le chocolat et mourant dans une horrible agonie, etc.., »
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22 LES IDÉES OBSÉDANTES
proche d'avoir « manqué sa vocation ». J'ai déjà étudié, avec
\f lo Pr Raymond, l'observation intéressante de cette femme ob-
r le regret de « n'être pas institutrice », de « n'avoir pas
3 épousé un instituteur » ^ On observe bien plus fré-
it des femmes qui se reprochent de n'être pas entrées dans
it, de n'être pas religieuses. C'est le cas typique de Gisèle
B 3o ans (171), qui trouve que toute sa vie est manquée,
, que tous ses actes sont altérés parce qu'elle n'est pas
î. Se reprocher une faute dans le choix d'une vocation,
manière de se reprocher en général toutes les actions
ces obsessions à propos d'idées morales, à propos d'im-
lu crime et surtout à propos de remords ont certaine-
ilgré leurs différences, des traits communs. C'est ce qui
lis de les ranger sous ce titre commun : les obsessions
es.
4. — L'obsession de la bonté Se soi.
tre genre d'obsessions voisin des précédents, bien cn-
lais un peu plus simple peut-être se retrouve chez les
ux, soit isolé dans des cas relativement bénins, soit en
ice avec les obsessions du sacrilège et du crime dans les
graves. Il m'est difficile de résumer par un mot le carac-
éral qui se retrouve dans les idées de ce groupe. Il s'agit
ement de remords proprement dits, mais de mépris, de
xtement portant non seulement sur les actes, mais sur les
morales, sur la personne du sujet et plus souvent encore
îorps. Le malade a constamment l'idée que ce qu'il fait,
u'il est, que ce qui lui appartient est mauvais. Le carac-
me semble le plus général, c'est le sentiment de honte
dans certains cas la honte soit légère et qu'il s'agisse
le mécontentement. C'est pourquoi nous réunissons ces
s le nom générique : d'obsession de honte,
ue les diverses formes de cette honte se mélangent as-
lement, il me semble bon d'en distinguer deux groupes
)ses et idées fixes y II, p. i48.
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L'OBSESSION DE L\ HONTE DE SOI 23
principaux qui ont un aspect clinique assez différent. Dans le
premier groupe, la honte ou le mécontentement reste à peu près
complètement dans le domaine moral et les obsessions se rappro-
chent plus ou moins des deux classes précédentes, celui du sacri-
lège et du crime. Ce que le sujet méprise en lui-même, c'est son
esprit, sa volonté, son intelligence. Dans le deuxième groupe, la
honte porte plutôt sur le côté physique de l'individu et le sujet
est mécontent de son corps ou de ses fonctions corporelles. Ces
nouvelles obsessions nous rapprocheront davantage des idées hypo-
condriaques.
Occupons-nous d'abord du premier groupe : la honte morale.
Dans les cas les plus graves, chez les malades qui nous ont
présenté les idées sacrilèges et les grands scrupules, ce mécon-
tentement, n^est pas localisé à une action, il est absolument géné-
ral, et porte sur toute la personne. Le type de ce genre de délire
généralisé est certainement Claire. Son mécontentement au début,
comme il arrive souvent, portait sur des actes religieux, c'est-à-
dire sur ceux qu'elle voudrait le mieux faire. On verra de plus en
pins l'importance du contraste chez les scrupuleux. Elle a encore
le sentiment que les confessions, les communions ont été mal
faites. Puis ce sont les prières qu'elle trouve très insuffisantes.
Elle cherche des moyens pour y remédier : ce sont des prières in-
terminables, des confessions par écrit préparées pendant i5 jours,
puis des grimaces, des contorsions pour arriver à bien prier;
mais bientôt ces systèmes sont impuissants et ces actes religieux,
deviennent impossibles. Elle en est désespérée, elle répète que le
pouvoir de prier serait chez elle le signe de la guérison complète.
Elle pleure dès qu'on parle de religion devant elle mais elle a
préféré renoncer à toute pratique religieuse, tellement elle est con-
vaincue qu'elle les fait mal, d'une manière indigne. Elle se laisse
conduire à la messe, de temps en temps, mais ne suit rien, ne veut
faire aucune prière. Il lui faudrait de tels efforts pour en faire
une bien qu'elle préférerait mourir. Puis le mécontentement s'est
étendu à d'autres actes, à toute chose qui lui paraît avoir un
caractère moral quelconque, à tout ce qui pourrait être bien. Des
actions indifférentes au point de vue moral, ou qu'elle croit
telles, se font facilement, elle n'a pas de système pour manger
ou pour respirer et encore ne faudrait-il pas attirer son atten-
tion là-dessus, ni lui faire une recommandation médicale sur la
nourriture, car aussitôt le désir de bien faire en mangeant ren-
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24 LES IDÉES OBSÉDANTES
drait ralimentation impossible. Pour tout le reste elle est
convaincue qu'elle agit très mal, qu'elle aime mal ses parents,
soigne mal sa mère, travaille mal, etc.
Elle exprime comme toujours ces remords d'une manière très
vague, (c C'est comme si j'avais commis tous les crimes... j'ai
des remords comme si j'avais tué n'importe qui... tout le monde
a des reproches à me faire, on ne m'en fera jamais autant que je
m'en fais à moi-même, autant que j'en mérite... j'ai écouté le mal,
j'ai cherché tout ce qui me paraissait mal... je n'ai pas lutté contre
le mal... des rêves insensés, des pensées mauvaises contre la mo-
rale, contre Dieu, deux cents fois par jour... je suis dans chaque
action aussi coupable que les plus grands criminels. »
Si elle arrive à convenir, car elle n'a pas perdu tout bon sens,
que l'acte accompli est en lui-même un acte bon, qu'elle a veillé
sa mère malade et que l'on ne peut pas considérer cet acte
accompli comme répréhensible, elle entre dans des subtilités
philosophiques et distingue l'acte en lui-même et l'intention
volontaire de celui qui l'accomplit. La volonté a toujours été
mauvaise dans cette action ou plutôt il n'y a eu aucune bonne vo-
lonté, car, s'il avait fallu le faire avec bonne volonté, l'acte n'aurait
jamais pu être accompli et elle reste tout aussi mécontente d'elle-
même, quoiqu'on lui ait démontré que l'action était bonne.
Depuis qu'elle vient me voir il y a surtout une action sur
laquelle s'est localisé ce sentiment d'imperfection. C'est l'action
de me raconter sa maladie, de me mettre au courant de son his-
toire. Elle désire le faire, mais ne se figure jamais que c'est bien
fait. Ce sont des désespoirs parce qu'elle ne m'a rien dit et, pour
bien dire, il lui faudrait recommencer en ordre depuis le commen-
cement; pour me raconter ce qu'elle a éprouvé hier il lui faudrait
raconter ce qui s'est passé depuis lo ans. Elle l'a déjà fait
cent fois mais cela ne compte pas, car cela est mal fait; il faudrait
le faire mieux et elle ne peut pas y parvenir.
Non seulement elle se croit coupable de tout faire avec imper-
fection, mais elle tient à ce sentiment de culpabilité, car c'est ce
sentiment qui l'excitera k faire mieux, qui la poussera à faire des
efforts. Si on le lui enlevait elle tomberait encore plus bas. En
effet la pauvre fille a le sentiment que l'imperfection va crois-
sant. Elle use toujours d'une image pour exprimer sa maladie:
c'est une chute dans un précipice dont elle a longtemps côtoyé le
bord et dans lequel elle a fini par tomber. Elle ne me donne pas des
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L'OBSESSION DE iK HONTE DE SOI 25
nouvelles de sa santé, elle vient simplement m^annoncer qu^elle est
descendue plus ou moins vite, car elle descend toujours et elle
mourra plutôt que de remonter. Tout au plus lorsqu'elle va bien
consent-elle à m*avouer que ces mois-ci elle est descendue un peu
moins vite. L'ascension qu'il faudrait faire pour remonter lui
parait quelque chose d'horrible : c'est une montagne, une pyra-
mide à escalader et ce n'est que par des procédés très difficiles
que nous arrivons à remonter un peu de temps en temps.
Il ne s'agit pas chez elle uniquement de remords, car elle
est tout aussi mécontente de choses dont elle ne peut se croire
responsable. Il est inutile d'insister sur chaque fonction men-
tale : toutes les questions que l'on posera à Claire auront la
même réponse, qu'on lui parle de sa mémoire ou de son raison-
nement, de son imagination ou même de l'acuité de sa vue ce sera
toujours la même chose. Elle n'est pas bonne, elle n'est pas polie,
elle n'a plus d'aflection, elle n'est plus intelligente, plus active,
plus capable de sentir, elle n'est plus bonne à rien. Si on insiste
trop pour lui faire voir l'exagération, elle répond toujours par cet
argument : «Vous ne savez pas connue autrefois, j'étais cent fois
meilleure, plus douce, plus patiente, plus intelligente, etc. Je
n'ai pas seulement perdu la volonté et la conscience, mais j'ai
perdu tout ce qui faisait mon intelligence ». Poussées à ce degré ces
obsessions rappellent tout à fait le délire des mélancoliques et
c'est en effet, au moins par son contenu, un délire mélancolique.
Seulement nous verrons quand nous étudierons la forme que
prennent ces obsessions, ce qui sépare le scrupuleux du mélanco-
lique. On peut le faire prévoir ici d'un mot. C'est que le mélan-
colique est profondément convaincu de sa déchéance, tandis que
Claire est très loin de croire complètement tout ce qu'elle dit ou
pense à ce sujet.
Les autres malades présentent à un degré ordinairement moins
grave la même obsession. Voici le langage de Leg...: « Je me
figure que ce que je fais est mal, je ne sais pas toujours en quoi
cela offense la religion ou la morale, mais il me semble que je
n^aurais pas dû le faire. Tenez, je vous ai regardé en parlant et je
sens que je n'aurais pas dû vous regarder. » Ly... parle de même.
Dev... est curieux sur ce point parce que son appréciation, ce qui
est rare, est artistique plutôt que morale. C'est un musicien habile
et constamment il a l'idée « qu'il joue mal, qu'il est immoral de
jouer aujssi mal ».
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26 LES IDÉES OBSÉDANTES
Un joli cas de mécontentement systématique est celui de Re...
(i4o)y jeune fille sentimentale qui, étant fiancée, sent qu'elle
n'aime pas bien son fiancé et se tourmente à la recherche « de
' bien. » Elle en arrive à force de perfectionnements à le
T et depuis il en est ainsi de toutes ses aflections qui ne lui
>ent jamais suffisamment parfaites et qui lui semblent si
[ses que c'est comme de la haine.
itte obsession de mécontentement, de honte de soi-même, se
lent un certain nombre d'autres idées obsédantes en appa-
issez différentes mais qui ont le même caractère psycholo-
lertains délires de doute sont en rapport avec une obsession
;ontentement qui porte surtout sur les facultés intellectuelles
aladie prend alors un aspect un peu particulier qui pourrait
l'observateur. Voici par exemple une femme de 67 ans,
(i36) qui présente au premier abord un singulier délire.
iX poussée malgré elle à étudier sur toutes ses faces un pro-
de psychologie : « quelles sont les relations entre le sens du
V et les autres sens ? Dans quelle mesure peut-on dire que
et l'ouïe sont des touchers lointains ? » Quoiqu'en réalité elle
es ignorante sur ces questions, elle discute le problème
;harnement, et veut établir qu'il y a action directe du monde
îur dans le cas du toucher et action indirecte dans les autres
!Iette discussion n'est qu'une forme ultime d'une obsession
lente qui s'est développée depuis des années, peut-être depuis
ice de la malade. Elle éprouve un mécontentement de ses
si imparfaits, si grossiers. » Elle cherche le moins mauvais
s, et arrive à accorder quelque confiance au toucher immé-
direct, de là la recherche de ce caractère d'être immédiat
es autres sens.
r bien constater que ce délire du doute n'est pas ici une ma-
iistincte, rappelons seulement que cette même malade Mb...
ssi honteuse de sa volonté, de sa conduite et qu'elle se sent
le de donner des coups avec un couteau pointu « qui entre
» Le délire du doute et même la forme psychologique sin-
e qu'il prend dans ce cas me semble n'être qu'un épisode
'obsession de honte et de mécontentement tout à fait carac-
que de ces malades,
peut rapprocher de ce cas l'obsession curieuse de Rk... « qui
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L'OBSESSION DE LA HONTE DE SOI 27
est forcé de penser constamment à ridéalisme, à Tirréalité des
choses..., je suis honteux d'en être arrivé à croire que mon père
n^existe pas ». On verra fréquemment cette notion de l'irréalité
des choses à propos des sentiments qui tourmentent ces malades ;
dans les cas précédents ce sentiment a donné naissance à une
véritable idée obsédante.
Cette critique des fonctions intellectuelles qui constitue tout
un délire spécial chez Mb... se retrouve plus ou moins atténuée
chez les autres malades ; Claire va répéter : a Tout s'éteint en moi,
j*ai perdu le sentiment du réel, tout se voile. » Beaucoup de malades
accusent plus encore leur intelligence. Dob...(86) se sent envahie
par ridée a qu'elle est bête, qu'elle ne peut rien comprendre, qu'elle
va devenir folle et qu'elle va délirer en pleine rue ». Cette obsession
détermine, comme on le verra, une terreur que l'on peut jusqu'à un
certain point rapprocher de l'agoraphobie. Jean, également, est dis-
posé à rabaisser son intelligence; si l'on prenait au sérieux ses
paroles, on le croirait tout à fait idiot. Il répète sans cesse qu'il ne
peut ni lire ni écrire, qu'il ne peut rien comprendre aux phénomènes
naturels qui l'environnent. « Je suis étranger à tout. Tout ce qui
est naturel est entaché pour moi de mystère d^inaccessibilité. » Il
n'accepte pas qu'on lui demande le plus petit renseignement soit
sur ses propriétés, sur sa fortune, sur la valeur de l'argent, sur
rien de pratique, car il répète toujours que son esprit n'y peut
rien comprendre^ qu'il est étranger à la vie. Sans aller jusqu'à
ce point Lise est toujours disposée à se trouver bête. Elle sent en
elle-même comme quelque chose qui la critique et elle ne peut
accepter aucun compliment parce qu'elle les croit toujours faux.
Il est bien clair que ces obsessions des malades nous posent un
très curieux problème de psychologie. Jusqu'à quel point ont-ils
raison ou ont-ils tort ? Sont-ils tout à fait délirants quand ils
prétendent qu'ils sont devenus bêtes ?
Nous aurons à discuter longuement la question quand nous
parlerons de l'état psychologique sur lequel germent ces obses-
sions. Pour le moment, constatons que cette obsession est énor-
mément exagérée, ne fût-ce que par sa répétition. Si l'on est
réellement devenu bête et sans volonté, ce n'est pas une raison suffi-
sante pour se le reproclier toute la journée, et ceux qui sont réel-
lement bêtes ne se le reprochent pas ainsi. Il y a donc là un senti-
ment tout particulier de honte de soi-même qui est bien du même
genre que les obsessions précédentes du sacrilège et du crime.
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28 LES IDÉES OBSÉDANTES
Ces malades qui se sentent constamment poussés au crime croient
en même temps qu'ils en sont capables.
2® Les obsessions relatives à la folie : un très grand nombre
les, par exemple un homme de 46 ans, Mrc... (178),
eaS ans, Byp... (180), etc., sont épouvantés à la pen-
it fous, qu'ils ont eu ou qu'ils vont avoir des crises de
echerchent en eux tous les signes de ce qu'ils ap-
ie. (( Je vois les maisons et les gens à Tenvers, je dis
je vais me cogner la tête contre les murs, regardez
ux, vous verrez comme ils sont égarés. » Suivant leur
['évolution morale de leurs maladies, ils insistent dans
m sur tel ou tel caractère de la folie. Zb... (lyS) ré-
Lt que tout est drôle dans l'univers et que par consé-
)U.Cas.. (177) a peur d'être isolée : «il me semble que
au monde, je ne puis plus me diriger, j'ai besoin
liée comme les fous. » Léo... (173), répète que la folie
;r sa petite fille, et suivre le premier monsieur venu
»
[•étendent, comme Léo..., que cette obsession a été
par la vue d'une femme folle, mais beaucoup et
er Dob. chez qui cette obsession détermine des
es d'angoisse ne peuvent invoquer cette explication,
lie me semble se rattacher chez eux à cette honte, à
e qu'ils ont de leurs propres forces.
a mon avis placer ici des obsessions qui semblent sou-
ibarrassantcs, les obsessions de dépersonnalisation,
ques années, divers auteurs, MM. Dugas, Bernard-
ent sur le phénomène signalé autrefois par Krisha-
Taine, le sentiment et l'idée d'avoir perdu sa person-
u l'occasion de décrire déjà deux cas remarquables
mènes à propos de Ver... et de Bei... Il me semble qu'il
ler deux formes de la dépersonnalisation : l'une qui
an sentiment se produisant dans des conditions déter-
ue nous aurons h étudier plus tard à propos de tous
its d'insuffisance psychologique qui jouent un rôle
dans la pathogénie des obsessions. Mais l'autre
le véritable idée obsédante développée vraisemblable-:
asion du sentiment précédent. Le sujet a sans cesse
i >•
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LOBSESSION DE LA HONTE DE SOI 29
ridée qu'il n'est plus lui-même, que ce n'est plus lui qui marche,
qui mange, qui parle, il le répète même quand l'impression ini-
tiale de dépersonnalisation a disparu. Il a, à ce propos, une véri-
table obsession : il faudra tenir compte de cette distinction dans
Tétude de ces malades.
Il en est de même pour un trouble de la mémoire, voisin de
celui-ci, qui a aussi beaucoup attiré l'attention.
Le phénomène du « déjà-{>u » est avant tout un certain senti-
ment intellectuel qui rentre dans le même groupe que le senti-
ment de dépersonnalisation. Dans certains cas exceptionnels, le
malade peut concevoir une sorte de délire à propos de ce sentiment
et être obsédé par la pensée que tout ce qu'il voit est la répétition
du passé. Il en est ainsi évidemment dans la remarquable obser-
vation de M. Arnaud *. Le malade, à tout moment, dans quelque
état qu'il soit, ne peut fixer son attention sur aucun événement
sans avoir Tidée que cet événement s'est déjà passé exactement le
même, dans les mêmes circonstances, il y a un an. M. Arnaud
remarque très bien qu'il y a là une idée surajoutée à un senti-
ment, idée qui est devenue générale et constante, tandis que le
sentiment ne se présente probablement que d'une manière rare et
passagère.
4° Des obsessions plus curieuses et plus rares sont des obsessions
d*ençfie,FsL,.. (169), femme de 34 ans, en présente un exemple
remarquable. Cette femme, dont les antécédents héréditaires sont
très chargés et qui a déjà bien eu des troubles, a été très tourmen-
tée par une maladie grave de son mari. L'obsession qui s'est dé-
veFoppée depuis deux ans est une pensée d'envie à propos de
tout ce qu'elle voit. Elle ne peut pas rencontrer une personne quel-
conque sans lui envier immédiatement quelque chose : « celle-ci est
bien habillée, celui-là a une bonne mine, cet autre marche bien,
cette femme a un enfant, celle-ci un mari, voilà un homme qui sait
parler, en voici un qui est vigoureux, voici une dame qui est cha-
ritable, cet individu qui entre dans un magasin est honnête. ».
Cette pensée donne lieu chaque fois dans son esprit à un long dé-
veloppement, et elle souffre d'une jalousie féroce. Détail curieux,
il lui arrive d'être envieuse même des malheurs d'autrui, « ils ont
1. F.-L. Arnaud, Un cas d'illusion du déjà-vu ou de fausse mémoire. Ann. méd.
psych,, mai-juin 1896.
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30 LES IDÉES OBSÉDANTES
bien de la chance de pleurer leur père, en voici qui ont du bon-
heur d'être ainsi secoués par un grand malheur ». Quoique
ssion de l'obsession soit ici bizarre, c'est toujours la
idée de sa propre insuffisance qui joue le principal rôle.
Fa... envie Tintelligence, la force, l'activité des passants,
omme si elle répétait qu'elle est elle-même sans intelli-
sans force, sans activité, sans honnêteté. On le lui fait
sez facilement : « Pourquoi enviez-vous ces gens qui ont
malheur et qui pleurent? — Parce qu'il me semble qu'il
>on de pouvoir pleurer et que je me sens incapable d'en
itant. »
lertains sujets sont obsédés par Tidée de certaines
s: Vidée de la pudeur , Vidée de V indépendance, Voz, (122)
que la liberté est le seul, l'unique bonheur auquel on
ïirer toute sa vie. Il est toujours tourmenté par l'idée qu'il
is libre, qu'il est en captivité, qu'il faut arriver à la déli-
Cette idée prend même dans son esprit une forme symbo-
ien curieuse sur laquelle je reviendrai. Mais il est évident
te obsession dépendde la même idée de honte. Il est honteux
perdu son indépendance et il est obsédé par la pensée
iberté idéale.
me semble juste de rattacher aux obsessions de la honte
m du moins de placer à côté de celles-ci un groupe des plus
jants, celui des obsessions amoureuses. J'ai déjà décrit
es obsessions du crime, les idées obsédantes dans lesquelles
nt l'impulsion ou le remords génital. Dans ces idées la
que l'action est mauvaise, contraire h la morale joue un
is important que l'amour proprement dit, et il était juste
approcher des obsessions du suicide, du vol, etc. Mais il
obsessions où le phénomène génital, si même il existe, ne
'un rôle accessoire, tandis que l'amour moral, le besoin de
iprès d'une personne déterminée, de penser constamment
le lui subordonner toutes les actions de la vie devient l'es-
de l'obsession. Dans certains cas, cette obsession amou-
'est visiblement qu'une expression légèrement modifiée de
ion de la honte de soi, ainsi qu'on vient de le voir pour
ion de jalousie,
s suivant est, à ce propos, tout h fait typique : Byl... (181),
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L*0BSE8SI0N DE LA HONTE DE SOI 31
jeune fille de 21 ans, avait un caractère déjà anormal depuis Tâge de
10 ans. Extrèmemeut entêtée, timide et sauvage, elle refusait depuis
longtemps de sortir, de voir du monde. A Tâge de 17 ans, elle se
décide à donner de sa sauvagerie cette explication bizarre : « je
ne suis pas une jeune fille comme les autres, je suis laide, j^ai une
figure de chat, vous ne voyez donc pas comme cela est honteux
de faire sortir une jeune fille comme moi. ce Je suis un monstre,
tout le monde se retourne quand je passe, c'est pour moi un sup-
plice de me laisser voir ainsi. »
Depuis trois ans, elle conserve toujours à peu près la même
idée : « Je suis un pauvre être à part, pas intelligente, laide, in-
capable de tenir mon rang. » Dans ces conditions, elle a pensé
quelque temps au couvent, puis ne s*est pas senti une vocation
suffisante, et la voici qui conçoit Tidée d'un mariage extravagant.
Elle déclare à ses parents stupéfaits qu'étant majeure et libre
d'elle-même, elle veut épouser le garçon jardinier de la maison,
qu'elle a pénétré la nuit dans sa chambre, qu'ils sont fiancés et
que le mariage doit avoir lieu le plus tôt possible. Elle a imaginé
de changer tout k fait de situation sociale, elle veut se présenter
comme domestique et gagner sa vie avec lui. Depuis plusieurs
mois, elle refuse de se laver les mains pour être plus à son ni-
veau. Aucun raisonnement n'a prise sur cette idée évidemment
délirante, il se peut qu'elle ait fini par s'éprendre un peu de ce
garçon, mais l'amour n'est ici qu'une expression de l'obsession
plus profonde de la honte de soi.
Bien souvent le rapport entre les deux groupes d'obsessions
n'est pas si étroit. Si les malades ne peuvent plus se passer d'une
personne déterminée, s'ils se sentent seuls, s'ils croient devenir
fous par l'isolement, quand elle les abandonne, c'est qu'ils sont
ou croient être incapables de se diriger seuls et qu'ils ont un be-
soin obsédant de cette direction ou de cette excitation très spé-
ciale qui les remonte. J'ai déjà consacré une étude particulière à
ce groupe '.
Nous aurons à l'étudier encore à propos des sentiments de ces
malades, pour le moment il suffit d'ajouter quelques observations
typiques à celles que j'ai déjà rapportées. Gri... (182), femme de
28 ans, pleure son amant qui l'avait retirée d'une vie de désordre^
I. Le besoin de direction. Rev. phiL, févr. 1877, p. ii3, et Névroses et idées fixes,
I, p. 456.
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32 LES IDÉES OBSÉDANTES
L plus aucunement se conduire et Tobsession amoureuse
ornent en rapport avec le besoin de direction. Tkm..,
3g ans, a une obsession identique depuis que son
t marié, « il était tyranuique et occupait toute ma vie,
;upais de rien autre. » Chez Sim...(i85), femme deSi ans,
)ir est inimaginable, l'obsession est perpétuelle jour et
croit encore voir cet amant qui la dirigeait, s'occupe
stamment « car lui seul était capable de lui donner
1 physique et morale dont elle avait besoin. » Le cas de
I est à revoir en détail car il est curieux. Cette femme
aboulique, phobique, obsédée, avait trouvé un appui et
lion chez une autre pauvre infirme mentale qui avait
des tics de malpropreté et qui ne savait pas se diriger,
émmes se sont dirigées réciproquement comme Taveugle
ytique, elles sont parvenues à diminuer mutuellement
sse et ont vécu heureuses et raisonnables pendant des
I incident bizarre a tout perdu : une domestique renvoyée
s une plaisanterie grossière, sur Taffection passionnée de
'emmes et a fait naître en elles des scrupules sur leurs
[1 n'est pas rare de voir ces malades concevoir ainsi des
SI propos des traitements, ou de la direction, qui les
ît. C'est une des difficultés de leur thérapeutique. Ck...
) de quitter son amie, mais alors elle est obsédée par le
'avoir quittée, elle voudrait mourir plutôt que de vivre
t des troubles très graves se développent à l'occasion
^session amoureuse.
I la fin de ce groupe on peut placer un cas assez sin-
li de Qi... (i88), cette femme de 36 ans est obsédée par
lie est une petite enfant de lo à 12 ans; surtout lors-
seule, elle se laisse aller à sauter, à danser, à rire aux
i défait ses cheveux, les fait flotter sur ses épaules, les
moins en partie. Elle voudrait pouvoir s'abandonner
lent à ce rêve, d'être une enfant, « il est si malheureux
puisse pas devant le monde jouer à cache-cache, faire
s ». Cette idée n'est pas aussi étrange, aussi isolée
parait : « je voudrais, répète la malade, qu'on me
itille, j'ai peur d'être laide comme un pou, je voudrais
me bien, qu'on me caresse,, qu'on me câline, qu'on
)ut le temps qu'on m'aime, comme on aime les petits
Malgré son extravagance apparente, c'est toujours
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L'OBSESSION DE LA HONTE DU CORPS 33
comme dans les cas précédents, Tobsession amoureuse, Tobses-
sîon du besoin d'être aimé sous la forme qu'il prend fréquemment
chez les scrupuleux celle d'être aimé comme un enfant.
En examinant beaucoup de malades, on trouverait facilement
d'autres variétés d'obsessions qui au fond ne sont que des formes
particulières de la honte de soi. C'est un des groupes les plus
importants que nous ayons à signaler.
5. — L'obsession de la honte du corps.
Cette idée du mépris de soi-même, cette obsession du mécon-
tentement personnel porte bien plus souvent encore sur la per-
sonne physique, sur le corps. Les malades chez qui l'on rencontre
ce mécontentement de leur corps sont fort nombreux, ils forment
un groupe singulier dont on ne pourrait pas soupçonner l'impor-
tance avant de les avoir fréquentés. On pourrait les appeler tous
des « honteux de leur corps ». Les plus complets ont une obses-
sion relative à leur corps tout entier, à toutes ses parties et par
conséquent leur obsession générale se subdivise en une foule de
petits délires particuliers. Les autres vont moins loin dans la même
vole et leur obsession de honte ne porte pas sur tout l'organisme,
mais elle se systématise sur telle ou telle partie, telle ou telle fonc-
tion dont ils sont particulièrement honteux. J'insisterai d'abord
sur un cas remarquable qui donne une idée d'ensemble du premier
groupe, puis je choisirai quelques exemples particuliers qui
montrent la honte portant sur telle ou telle fonction.
Une observation curieuse qu'il est malheureusement impossible
de présenter complètement sans entrer dans d'innombrables dé-
tails, est celle de Nadia (i66), une jeune fille de 27 ans, que
je dirige autant que possible depuis plus de 5 ans. Cette jeune fille
m'a été adressée avec ce diagnostic un peu superficiel d'anorexie
hystérique. Ce diagnostic était simplement justifié par l'alimenta-
tion plus que bizarre que cette malade s'imposait dans sa famille
depuis des années et par les scènes épouvantables qu'elle faisait
dès qu'on s'avisait de modifier le régime. Elle se prescrivait à
elle-même deux potages par jour au bouillon léger, un jaune
d'œuf, une cuiller à bouche de vinaigre et une tasse de thé extrê-
mement fort dans laquelle il fallait mettre le jus d'un citron tout
LES OBSESSIONS. I. 3
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34 LES IDÉES OBSÉDANTES
entier, soigneusement pressé. On avait pu découvrir, ce qui n'était
pas difficile, qu'elle avait imaginé ce régime dans la crainte d'en-
graisser, et on concluait à une anorexie hystérique.
L'anorexie hystérique est déjà par elle-même une maladie fort
bizarre, qui est loin d'être complètement élucidée. Sous sa forme
typique elle n'est pas aussi fréquente qu'on le croit et les hystéri-
ques confirmées sont loin de présenter fréquemment ce phénomène
au nombre de leurs innombrables accidents. Les vomissements, les
régurgitations, les divers spasmes de l'œsophage, de l'estomac, du
diaphragme, des muscles de l'abdomen déterminent aussi des trou-
bles de l'alimentation et sont beaucoup plus fréquents que l'ano-
rexie proprement dite. En présence d'un cas de refus complet
d'aliments, il faut, si je ne me trompe, se méfier et songer que
des troubles mentaux plus ou moins graves sont peut-être plus
probables que l'hystérie proprement dite.
Quoi qu'il en soit, on admet jusqu'à présent une anorexie hysté-
rique ; pour la diagnostiquer il faut au moins retrouver un certain
nombre de symptômes caractéristiques. Bien entendu, il serait bon
de constater soit actuellement, soit dans les antécédents des phé-
nomènes nettement hystériques. Malheureusement on sait que ce
symptôme est fréquemment isolé, au moins à ses débuts. Si l'on ne
peut donc retrouver en dehors la signature de l'hystérie, il faut à
mon avis que le refus d'aliments présente deux grands caractères.
I** On doit constater la suppression complète ou à peu près
complète de la faim pendant presque tout le cours de la maladie.
Cette perte de la faim s'accompagne souvent de troubles considé-
rables dans les sensations de la bouche, soit pour le goût, soit
même pour le toucher, d'anesthésie du pharynx, de troubles des
mouvements des mâchoires et des joues, d'anesthésie de l'œso-
phage et probablement de l'estomac avec ou sans propagation de
cette anesthésie à la peau de la région épigastrique. La perte de
la faim est-elle directement en rapport avec ces diverses anes-
thésies de la bouche, de l'œsophage, de l'estomac qui l'accom-
pagnent souvent mais non toujours ? C'est un problème que j'ai
longuement discuté dans mes leçons au Collège de France sur la
Conscience du corps et de ses fonctions. Sans pouvoir entrer ici
dans cette discussion je dirai seulement que l'anesthésie de ces
organes, quand elle existe, contribue à la suppression de la faim
et que, par conséquent, elle joue un rôle dans le diagnostic de
l'anorexie hystérique.
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L'OBSESSION DE LA HONTE DU CORPS 35
2® Un second symptAme, plus curieux et beaucoup moins ana-
lysé, quoiqu'il ait déjà été signalé depuis longtemps, me parait éga-
lement important : c'est ce besoin exagéré de mouvement physique
qui accompagne Tanorexie vraie. Les malades remuent incessam-
ment, font d'énormes promenades, dansent dans des soirées, se
surmènent de mille façons et elles font autant de scènes pour
conserver leurs marches exagérées que pour refuser la nourriture.
Ce symptôme a été interprété de diverses manières. Lasègue y
voit le résultat d'un calcul. Ces personnes, dit-il, ont peur de
passer pour malades, elles craignent qu'on ne se serve de leur fai-
blesse comme d'un argument pour les forcer à manger et elles
simulent une grande activité. M. Wallet, à propos de deux obser-
vations curieuses, y voit un procédé des malades pour augmenter
leur amaigrissement ^ Elles font de l'exercice comme elles boivent
du vinaigre pour maigrir. Sans contester le rôle que de pareils
raisonnements ont pu jouer dans certains cas particuliers, je ne
puis admettre que ce grand symptôme aussi général dépende
toujours de réflexions, en somme, assez compliquées.
Dans des observations intéressantes que je discutais dans mes
cours, j'ai pu montrer que l'exagération du mouvement est quel-
quefois antérieure au refus d'aliments et précède par conséquent
tous ces raisonnements. Dans un cas très curieux, il s'agit d'une
femme de trente-cinq ans, raisonnable, qui vient elle-même
demander des soins, et qui par conséquent ne cherche pas à faire
illusion. Chez eli^ Tanorexie^ ce qui est bien rare, est à répétition
et procède par accès. A la suite d'une émotion elle se sent ex!citée,
agitée comme si elle était enlevée ainsi qu'une plume. Elle a le
besoin de gesticuler, de parler, de marcher. Elle ne rentre plus
chez elle, mais elle continue encore k manger, tout en disant
qu'elle n'en sent plus le besoin : « car elle est bien assez forte
sans cela. » Puis deux jours après elle est dégoûtée d'une alimen-
tation <r inutile » et elle commence à refuser de manger.
On approche davantage de la vérité en disant que l'anesthésie
musculaire et surtout l'anesthésie h la fatigue joue un rôle dans ce
mouvement perpétuel. Je crois qu'il faut aller plus loin et dire
que dans ce sentiment d'euphoie il y a une excitation véritable en
rapport avec des émotions d'un mécanisme particulier; si l'on
I. Wallet, deux cas d'anorexie hystérique, Nouvelle iconographie de la Salpélrihret
189a, p. 276.
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36 LES IDÉKS OBSI^DANTES
préfère le langage anatomique, il y a une véritable excitation des
centres moteurs corticaux. Cette excitation nous semble jouer un
rôle très considérable dans la perte du sentiment de la faim,
peut-être plus considérable que celui de Tanesthésie de Testomac,
car la faim, avant d'être Je sentiment de la mise enjeu des divers
réflexes de la nutrition, est un sentiment général lié à l'impres-
sion de faiblesse et d'épuisement. Quoi qu'il en soit, il ne suffit
pas qu'une jeune fille refuse de manger, ni même qu'elle ait visi-
blement la crainte d'engraisser pour qu'on puisse appeler son
état une anorexie hystérique. Il faut encore, outre les divers sym-
ptômes d'hystérie que l'on pourra constater, la diminution consi-
dérable du sentiment de la faim et l'exagération des mouvements.
En était-il ainsi chez cette malade, Nadia, à laquelle je reviens ?
Cette malade examinée avec le plus grand soin et a bien des
reprises n'a jamais présenté le plus petit signe d'hystérie. Elle n'a
aucune diminution de la sensibilité, pas plus à la région épigas-
trique que sur le reste du corps. Dans son histoire on relève des
colères épouvantables, mais que Ton qualifie bien gratuitement
d'attaques d'hystérie. Ce qui est plus important, c'est qu'elle n'a
point du tout de véritable anorexie. Elle a parfaitement conservé
le sentiment de la faim. Souvent, il est vrai, dans les derniers
temps de la maladie, la faim est masquée, parce qu'il y a des
troubles de l'estomac inévitables après des années de ce régime :
mais en général Nadia a faim, elle a même très faim. On le con-
state d'abord par ses actions: de temps en temps elle s'oublie jus-
qu'à dévorer gloutonnement tout ce qu'elle rencontre. Dans d'au-
tres cas, elle ne peut résister au besoin de manger quelque chose,
et elle prend des biscuits en cachette. Elle a des remords hor-
ribles de cette action, mais elle la recommence tout de même. On
le constate mieux encore par ses confidences bien curieuses. Elle
reconnaît qu'il lui faut un grand effort pour se priver de manger.
« Elle est une héroïne d'avoir pu résister si longtemps... Quel-
quefois je passais des heures entières à penser à la nourriture,
tellement j'avais faim : j'avalais ma salive, je mordais mon mou-
choir, je me roulais par terre, tellement j'avais envie de manger.
Je cherchais dans des livres des descriptions de repas et de grands
festins, et je tâchais pour tromper ma faim de m'imaginer que je
goûtais moi aussi à toutes ces bonnes choses. Vraiment j'étais abso-
lument affamée, et malgré quelques défaillances pour les biscuits,
je sais que j'ai eu beaucoup de courage. » Est-ce dans l'anorexie
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L'OBSESSrON DE LA HONTE DU CORPS 37
hystérique que l'on parle ainsi ? En outre, Nadia ne présente
aucunement le trouble du mouvement des hystériques. Il est in-
téressant de remarquer qu'elle a fait justement les raisonnements
dont parle Lasègue. Elle cherchait à bien travailler, à aller à pied
à ses cours pour que sa mère ne fût pas inquiète de son refus
d'aliments et pour que l'exercice la fît maigrir, mais cela lui coû-
tait un effort pénible qu'elle ne faisait que par nécessité ; le plus
souvent et surtout maintenant, elle veut rester tranquille dans sa
chambre et n'éprouve aucunement le besoin de marcher et de
dépenser ses forces. La maladie est donc diiFérente. Le refus
d'aliments n'est ici que la conséquence d'une idée, d'un délire.
Cette idée, si on la considère d'une manière superficielle, est
évidemment la crainte d'engraisser. Nadia a peur de devenir forte
comme sa mère ; elle tient à rester maigre, pale, cela seul lui
plaît, est en harmonie avec son caractère : de là une inquiétude
continuelle, elle a peur d'avoir la figure enflée, de bouffir, d'avoir
de gros muscles, de prendre un meilleur teint. Il faut éviter avec
grand soin de lui faire des compliments sur sa santé ; une mala-
dresse de son père qui, la revoyant au bout de quelques mois, lui a
dit qu'elle avait meilleure mine a déterminé une sérieuse rechute.
Il faut être préparé à répondre à ces questions qu'elle pose sans
cesse : « Je vous en prie, dites-moi le fond de votre pensée ?
Trouvez-vous que j'aie de grosses joues rondes et roses depuis que
je mange davantage? Par charité dites-le-moi et consolez-moi, je
vous en prie. M'avez-vous trouvée aussi maigre que les autres fois?
Faites-moi le plaisir de me dire que je serai toujours maigre
Tenez, j'ai été aujourd'hui dans un fiacre qui ne marchait pas, le
cheval ne pouvait pas me traîner, c'est à cause de ces côtelettes
que vous me faites manger. Je vous en supplie, rassurez-moi. »
Mais cette pensée obsédante n'est pas du tout une idée fixe
isolée et inexpliquée, comme cela arrive quelquefois chez les hys-
tériques. Elle se rattache h tout un système de pensées extrê-
mement complexe. D'abord l'embonpoint n'est pas considéré
uniquement au point de Vue de la coquetterie : il présente aux
yeux de la malade quelque chose d'immoral. Elle répète toujours:
<c Je ne tiens pas à être jolie, mais cela me ferait trop de honte si
je devenais bouffie, cela me fait horreur ; si par malheur j'en-
graissais, je n'oserais plus me faire voir à personne, pas plus
dans la maison que dans la rue, j'aurais trop de honte. » Et
remarquons que ce n'est pas l'obésité en elle-même qui lui
,^^
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38 LE8 JDÉES OBSÉDANTES
paraît honteuse. Elle aime des personnes qui sont très fortes et
trouve que cela leur va bien; c'est pour elle que ce serait immo-
ral et honteux. Ce n'est pas seulement l'embonpoint, c'est tout
ce qui se rattache à l'acte de manger qui mérite ce caractère.
Klle commença par refuser de manger en présence d'autres per-
sonnes : il fallait qu'elle mangeât seule, comme en cachette. Vrai-
ment, si on peut se permettre une telle comparaison, elle se dis-
simule pour manger, elle est gênée d'accomplir cet acte devant
quelqu'un, comme si on la priait d'uriner en public, et d'ailleurs
elle-même reconnaît que la comparaison est juste. Quand il lui
arrive de manger un peu plus, ce qu'elle fait toujours en cachette,
ce sont des protestations pour s'excuser comme si elle avait commis
une indécence. Au moment des fêtes de Noël, elle s'est permis de
goiUer à quelques boîtes de chocolat qu'elle envoyait a des amies.
Elle m'a écrit plus de dix lettres à ce sujet, avouant comme un
crime chacun de ces bonbons, cherchant à expliquer, par un senti-
ment de gourmandise ou de curiosité, un acte qu'elle regrette tant.
Elle aurait été bien honteuse si on l'avait surprise en flagrant
délit. Non seulement il ne faut pas qu'on la voie pendant qu'elle
mange, mais il ne faut pas non plus qu'on l'entende. La mastica-
tion a quelque chose de si vilain que cela la ferait rentrer sous
terre, si on pouvait entendre la sienne. Ici encore ce n'est pas la
façon de manger en général qu'elle méprise : on peut manger
devant elle, elle ne trouve à cela rien de répréhensible, au con-
traire, elle est heureuse d'offrir quelque chose aux personnes qui
viennent la voir. Mais c'est sa mastication h elle, «qui fait un bruit
spécial, ridicule et déshonorant. Je veux bien avaler, mais on ne
me forcera jamais à mâcher ».
Il ne faudrait pas croire que cette honte se limite ainsi à l'embon-
point et à l'acte de manger. Nadia a encore d'autres tourments.
Quoiqu'elle soit mince et ait des traits plutôt jolis, elle est con-
vaincue que sa figure est non seulement bouffie, mais rouge et cou-
verte de boutons. Comme je n'arrivais pas à voir ces fameux bou-
tons, elle me déclare « que je n'y connais rien et que je ne sais
pas reconnaître des boutons qui sont entre la peau et la chair ».
Quoi qu'il en soit, cela lui donne une figure abominablement laide
et bien qu'elle n'ait aucune coquetterie, une personne qui se res-
pecte ne peut pas laisser voir une figure pareille. Ou se moquerait
d'elle, ce qui la ferait horriblement soutfrir, aussi refuse-t-elle
de se laisser voir. Parallèlement au refus d'aliments s'est déve-
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L'OBSESSION DE L\ HONTE DU CORPS 39
loppé un autre délire qu'on avait trop peu remarqué, c'est la
crainte de sortir dans la rue. Ce sont des scènes horribles pour
arriver à sortir un peu, en voiture fermée. Il faut que le cocher
et la femme de chambre détournept la tête au moment où elle se
précipite dans la voiture. Elle sort plus facilement le soir, dans
les endroits déserts, où elle risque peu d'être vue. Même dans
sa chambre, si je la laissais faire, elle entretiendrait une demi-
obscurité et elle se place toujours dans le coin le plus sombre,
le dos tourné à la lumière. Si on ne l'arrêtait pas, elle ne tarderait
pas, comme une malade que j'ai connue, à vivre dans une obscu-
rité complète.
Si sa figure la gène ainsi, les autres parties de son corps sont
loin de la laisser indifiFérente. Depuis Tàge de quatre ans, prétend-
elle, elle est honteuse de sa taille, parce qu'on lui aurait dit
qu'elle était grande pour son Age. Depuis Tâge de huit ans, elle
a commencé à avoir honte de ses mains qu'elle trouve longues,
ridicules. Vers Tâge de 1 1 ans, comme elle portait des jupes
courtes, il lui semblait que tout le monde regardait ses jambes
et elle ne pouvait plus les souflFrir. Il a lui fallu mettre des jupes
longues et alors elle a eu honte de ses pieds, puis de ses hanches
trop larges, de ses bras avec de gros muscles, etc.
Bien entendu, l'arrivée de la puberté a singulièrement aggravé
tous ces sentiments bizarres. L'apparition des règles l'a rendue à
moitié folle. Quand les poils ont commencé à pousser au pubis, elle
a été convaincue qu'elle était seule au monde avec cette monstruo-
sité et jusqu'à l'âge de 20 ans elle travaillait à s'épiler « pour
faire disparaître cet ornement de sauvage ». Le développement de
la poitrine a surtout aggravé les obsessions, car les craintes rela-
tives à la pudeur s'ajoutaient aux anciennes idées sur l'obésité.
C'est à ce moment surtout qu'elle a commencé à refuser tout à fait
de manger et à ne plus vouloir se montrer. Par tous les moyens
possibles elle a cherché à dissimuler son sexe, dont elle a particu-
lièrement honte : ses corsages, ses chapeaux, ses coiffures doivent
se rapprocher du costume masculin. Elle coupe ses cheveux à
demi longs et les fait boucler et elle voudrait avoir l'aspect d'un
jeune étudiant. Il ne faudrait pas croire qu'il y a ici une inversion
sexuelle, comme on l'admet beaucoup trop vite dans des cas sem-
blables. Elle serait aussi honteuse d'être un garçon que d'être une
fille. Elle voudrait être sans aucun sexe, et même elle voudrait être
sans aucun corps, car on voit que toutes les parties du corps
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40 LES ll)lîi:i5 OBSÉDANTES
déterminent le même sentiment dont le refus d'aliments n'était
qu'une manifestation toute partielle.
Quelle est au fond l'idée dominante qui détermine ces apprécia-
tions singulières ? La pudeur joue certainement un rôle considérable
et ce sentiment est chez elle poussé tout à fait à l'extrême. Jamais
depuis la première enfance elle n'a pu se déshabiller devant ses
parents et jusqu'à Tage de vingt-sept ans elle n'avait jamais con-
senti a être auscultée par un médecin. Mais il s'y mêle une foule de
choses: un vague sentiment de culpabilité, un reproche relatif à la
gourmandise et à toutes sortes de vices possibles. Il s'y mêle sur-
tout un sentiment plus intéressant, que nous avons déjà remarqué
à propos des obsessions précédentes et qui va prendre une impor-
tance de plus en plus grande chez nos scrupuleux. « Je ne voulais,
dit-elle, ni grossir, ni grandir, ni ressembler à une femme parce
que j'aurais voulu rester toujours petite fille. » Il est visible que
ce désir de rester enfant a joué un rôle considérable, car ce
qu'elle a toujours redouté c'est de se développer, plus que d'en-
graisser à proprement parler. Mais pourquoi ce désir ? La raison
de ce souhait bizarre se résume en un mot que beaucoup de
malades vont nous répéter: « Parce que j'avais peur d'être moins
aimée. » C'est au fond cette idée qu'elle a, quand elle craint
d'être laide, d'être ridicule. « On se moquera de moi et on ne
m'aimera plus. On trouvera que je ne suis plus comme tout le
monde et on ne m'aimera plus. Si on me voyait bien en pleine
lumière on serait dégoûté et on ne m'aimerait plus. »
Ce désir d'être aimée, cette crainte inquiète de ne pas mériter
l'affection que l'on désire tellement se mêle certainement dans ce
cas aux idées de fautes possibles et aux craintes de la pudeur
pour produire cette obsession de honte du corps. Il va encore
intervenir dans l'observation suivante.
Il s'agit d'un cas beaucoup moins grave et surtout beaucoup
moins complet, dans lequel l'obsession que nous étudions ne
porte pas sur toutes les parties du corps mais, comme nous
l'avons dit au début, sur un organe et une fonction en particulier.
Wye... (i6o), jeune homme de 27 ans, a eu momentanément
quelques obsessions criminelles, il se croyait coupable en man-
geant la chair des animaux ; il a eu aussi quelques obsessions
hypocondriaques relatives à des maladies de la gorge ; mais ces
phénomènes n'ont été que très passagers. Le fait dominant
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L'OBSKSSION DE LA IlONTK DU COUPS 41
depuis une dizaine d'années c'est un mécontentement et une honte
qui porte à peu près exclusivement sur les mouvements de ses
bras et de ses jambes.
Dès Tenfance il était préoccupé de la position à donner à son
bras gauche, il redoutait la saison de Tété, parce qu'il n'avait
alors plus de raison pour tenir ses mains dans ses poches et qu'il
ne savait plus où les mettre. Peu à peu, ce sentiment a beaucoup
augmenté et il est devenu une obsession grave. « Je sens, dit-il,
que je manque de spontanéité, que mes mouvements sont gênés.
Je suis tout ankylosé. Je ne sais de quel cùté porter le bras ou la
tète. J'ai des mouvements mécaniques. On dirait Tours du Jardin
des Plantes. Aussi je suis forcé de penser tout le temps à la façon
dont mon bras se balance, dont je redresse le cou. » La moindre
des choses dans son costume peut modifier cette gêne de son
corps : un habit bien fait et un peu vieux le met h son aise, le cos-
tume de chasse qui autorise quelque débraillé des mouvements le
rend plus heureux. Au contraire un habit neuf, un costume qui
nuirait pas à la perfection augmentent cette obsession jusqu'à lui
rendre difficile toute sortie. Il a été pendant quelque temps
obsédé par le problème des fau$ cols. Cette préoccupation des
faux cols est loin d'être insignifiante. Chez deux autres malades
que je n'ai pas pu étudier avec le même soin et qui d'ailleurs se
rapprochent de celui-ci, l'obsession scrupuleuse prenait exclusi-
vement la forme de l'obsession du faux col. Chez ces malades et
chezWye... surtout, ces obsessions gênent les mouvements, les
amènent à faire des contorsions et des grimaces soit pour essayer
de rendre les mouvements normaux, soit pour dissimuler aux
autres la gêne qu'ils éprouvent. Ainsi Wye... cligne des yeux
quand il croit que ses yeux n'ont pas un mouvement naturel.
Ces contorsions donnent souvent naissance à des erreurs de
diagnostic. On en fait communément des tics : cela est juste
mais il ne faut pas oublier l'obsession qu'ils manifestent. Dans
un cas même l'erreur fut plus grave h mon avis. Un malade dont
nous avons parlé à propos des obsessions criminelles a été ren-
voyé du service militaire à Tâge de vingt et un ans avec le dia-
gnostic de chorée de Sydenham. On pourrait déjà remarquer
qu'il est singulier de diagnostiquer la chorée chez un homme
de vingt et un ans, tandis que suivant la remarque de Syden-
ham, la chorée vraie survient rarement après la puberté. Mais ici
l'erreur était encore plus grave, car les mouvements de Za.,,
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42 LES IDFlES OBSÉDANTES
(216), n'étaient que des contorsions déterminées par le sentiment
de gêne et de honte et par des efforts pour se dominer que
nous aurons à étudier plus tard chez tous les scrupuleux.
Qu'est-ce qui détermine chez ces malades et chez Wye... sur-
tout ce sentiment de gêne ? C'est encore la préoccupation qu'ils
ne sont pas comme les autres, qu'ils seront ridicules et ne seront
pas aimés. Le désir de plaire les préoccupe toute leur vie et il
s'ajoute à une sorte de sentiment de désespoir, d'incapacité d'y
arriver qui entre pour beaucoup dans la honte du corps.
Dans un groupe tout voisin nous mettrons ceux qui ont simple
ment honte de leur figure, des traits de leur visage. Tk.-.^iGi),
jeune homme de vingt-quatre ans, fils d'une mère qui s'est sui-
cidée, est surtout frappé par la maladie depuis qu'il a contracté
la syphilis. Il en est inquiet, honteux, mais cette honte se localise
et détermine uniquement le sentiment que son visage enlaidit,
que sa mâchoire est devenue trop grande, qu'il est ridicule, et
encore, comme toujours, indigne d'être aimé. Ul... (45), femme
de 33 ans, se figure « qu'elle a des convulsions dans la figure ».
Meu. . . (i63), femme de 3o ans, sent qu'elle a des convulsions dans les
yeux que ses yeux ne sont pas naturels, qu'ils regardent drôlement.
Ces malades ne veulent plus voir personne, ni entrer dans aucun
lieu public. Per... (162), femme de 38 ans, a les mêmes terreurs
parce qu'elle se figure que « son visage est poilu ». Enfin Pol...,
femme de 24 ans est horriblement tourmentée par la pensée qu'elle
a une petite cicatrice sur l'aile gauche du nez : cette obsession
est l'une des plus fréquentes *. En un mot, il n'y a pas un trait,
une légère modification du visage qui ne puisse donner lieu à une
obsession de gêne et de honte.
Quand on parle des scrupules relatifs au visage, il ne faut pas
oublier le groupe qui a été considéré comme le plus important,
celui des rtialades qui ont la honte de rougir.. Je ne parle pas ici
du sentiment angoissant qui se développe en même temps que la
rougeur, mais de l'idée obsédante de cette rougeur. Les malades
tourmentés par cette obsession sont extrêmement fréquents et,
l'année dernière, MM. Pitres et Régis ont consacré un article à
I. Cf. G. Thibiergc, Les dcrmatophobîes. Presse médicale, juîllot 1898.
3. Pitres et Régis, L'obsession de la rougeur, oreutophobie. Archives de neuro-
logie, 1897, n® i3, ol ibid. Mars 190a, p. 177.
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^OBSESSION DE lA HONTE DU CORPS 43
celte maladie sous le nom d*ereutop/tobie. Ces auteurs en ont
décrit des cas intéressants. J*en ai observé pour ma part cinq
tout à fait caractéristiques ; je n'insiste que sur les principaux :
Deb... (i65), femme de quarante-quatre ans, Toq... (97), un
docteur en médecine de vingt-sept ans, et Vol... (96), jeune
fille de vingt et un ans. Chez tous ces malades les symptômes
principaux sont à peu près les mêmes. Ils croient avoir remarqué
que leur visage, leur nez, surtout chez Vol..., rougit facile-
ment, après les repas, dans une chambre chaude, etc. Ils ont
a ce propos une pensée obsédante que leur visage est rouge, en
feu et que cela est profondément ridicule, obcène, déshonorant,
a Je ne faisais qu'y penser et souffrais le martyre, je maudissais
de n'être pas comme les autres jeunes filles, je souffrais de
me montrer, et j'aspirais d'être seule dans ma chambre ; quand
j'étais seule, je pleurais avec désespoir, à la pensée de Tisole-
ment perpétuel auquel j'étais condamnée. » Chez celle-ci d'ail-
leurs, cette ereutophobie a amené comme chez Nadia un refus
d'aliment qui a nécessité sa séquestration dans une maison
spéciale. Elle avait eu de l'admiration pour une cousine qui
était très pâle et, pour devenir anémique comme elle, elle
s'était rationnée h sa façon. Cette crainte amène aussi le refus de
sortir et trouble toute l'existence par un véritable délire.
Après avoir décrit des faits de ce genre d'une manière fort inté-
ressante, MM. Pitres et Régis font à leur propos une remarque
psychologique : Tereutophobie est liée, disent-ils, à la conges-
tion du visage, c*est-h-dire à un phénomène vaso-moteur. Cette
congestion, l'ereutose simple, a précédé la phobie, c'est-à-dire
Témotion. Ne peut-on pas voir dans ce cas une démonstration
intéressante des théories de Lange et de James sur le mécanisme
des émotions et une démonstration de celte hypothèse qui ratta-
che Témotion à un trouble vaso-moteur. Quelle que soit l'opinion
relative à la thèse de Lange et de James, que je ne discute pas
ici, mais que je suis loin d'admettre complètement, je ne puis
croire que le fait de l'ereutophobie puisse jouer de cette manière
un rôle important dans la discussion.
C'est un tort h mon avis que de rattacher l'obsession de la rou-
geur au fait de la rougeur elle-même. Quoique cela semble bizarre,
ce n'est pas parce qu'ils sont rouges que ces malades sont obsédés
par la pensée de la rougeur ou du moins cette rougeur elle-même
ne joue qu'un rôle très minime dans l'obsession. D'abord on peut
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i'* LES IDÉES OBSÉDANTES
être êreutopliobc c jaune Nudiu saus avoir jamais eu de rougeur.
Cette malade qui a le teint très mat a toujours été pâle et n'a
aucune disposition à la rougeur émotive. Elle se fait cependant de
la rougeur une obsession terrifiante. En outre l'obsession de la
rougeur ne survient pas uniquement à la suite de rougeur véri-
table. Il est trop facile de remarquer que tous les gens qui rou-
gissent ne sont pas des éreutophobes. Elle survient k la suite
d'une série de scrupules corporels qui n'étaient aucunement liés à
des phénomènes vaso-moteurs du visage.
Toq..., jeune homme de vingt-sept ans, actuellement obsédé
par la pensée qu'il a les joues rouges, a eu depuis Tàge de treize
ans jusqu'à Tâge de vingt ans une obsession toute différente. Il
était obsédé par la honte de ses moustaches et je ne crois pas que
dans les moustaches il y ait un phénomène vaso-moteur. Cette
honte elle-même se rattachait visiblement à une idée génitale.
« Je me figurais, dit-il, que j'avais une tare sexuelle parce que
mes moustaches avaient poussé trop tôt. » Plus tard il se rassura
sur ses moustaches, parce qu'à vingt ans elles devenaient plus
naturelles et son inquiétude préexistante se porta sur un autre
phénomène, la rougeur du visage qu'il avait remarquée à un exa-
men. Inversement Per... (162), qui a commencé par l'ereutophobie,
l'a remplacée maintenant par l'obsession d'être a poilue » quoique
les phénomènes vaso-moteurs du visage soient restés exactement
les mêmes. Il est donc bon à mon avis de ne pas considérer ce
symptôme isolément, mais de remarquer qu'il se rattache à un
groupe d'obsessions relatives au corps et en particulier au visage
qui font partie, comme j'essaye de le montrer, d'une grande
maladie mentale, le délire du scrupule. Quant aux phénomènes
émotifs que les auteurs précédents ont bien mis en lumière dans
l'ereutophobie, ils existent comme point de départ dans beau-
coup de ces obsessions. Nous aurons l'occasion de les étudier à
propos des angoisses.
Après les hontes relatives au visage, je signale rapidement les
obsessions relatives aux mains et surtout celles qui sont relatives
à la propreté des mains. Il est presque inutile de citer des exem-
ples, car les observations seraient innombrables. Chy... a peur
d'avoir de la graisse et surtout des petites taches de graisse sur
ses mains, elle se lave 200 fois par jour. Qei..., jeune fille de
vingt ans, croit qu'elle a touché quelque chose de sale, surtout
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L'OBSESSION DE LA HONTE DU CORPS 45
depuis qu'elle a eu une petite suppuration d'oreille. Elle en esthon-
teuse, elle craint de communiquer le virus aux autres et les idées
de crime se mêlent à la honte du corps. C'est la forme la plus
commune de la maladie.
J'aime mieux insister sur une forme particulière d'une de ces
obsessions relative a la main, parce qu'elle est moins connue et
peut donner naissance à des erreurs de diagnostic. M. Séglas a
étudié un malade nommé L. .. que j'avais vu avec lui il y a quel-
ques années *. Ce garçon d'une vingtaine d'années, type de scru-
puleux, avait eu la plupart des obsessions précédemment décrites
sur les crimes, des obsessions relatives au vol, d'autres relatives
à l'alimentation. Il se faisait même scrupule d'avaler les microbes
de l'air. Parmi les différents reproches qu'il se faisait, L... trou-
vait son écriture mauvaise. Il cherchait à la reformer par des
systèmes que nous retrouverons plus tards chez tous les autres
malades ; mais ces préoccupations et ces efforts n'avaient pas
d'autre résultat que de rendre son écriture de plus en plus
informe et impossible.il tenait sa plume de façon bizarre, l'atta-
chait avec des ficelles et ne pouvait plus parvenir à écrire quel-
ques lignes de suite. M. Séglas faisait remarquer avec raison
qu'il semblait présenter une crampe des écrivains, alors qu'il
n'avait qu'un délire de scrupule relatif à l'écriture.
J'ai eu depuis l'occasion de vérifier la justesse de cette remar-
que et je crois que dans bien des cas la prétendue crampe des
écrivains n'est qu'une manifestation de scrupules de ce genre. Il
en est ainsi, par exemple, dans l'observation de II..., dans celle
de Pô... et dans celle de Lev..., homme de trente-six ans. Pô...,
non seulement, ne peut plus écrire, mais elle ne peut plus lire ni
même voir de l'écriture, tellement cela lui fait horreur. Lev... n'a
la prétendue crampe que si on le regarde ou s'il soupçonne que
quelqu'un peut le voir. Le dernier cas que j'ai vu est curieux : il
s'agit d'un homme, X..., préoccupé de scrupules divers et depuis
quelque temps de scrupules relatifs à l'écriture. Il ne peut
essayer d'écrire sans que sa main fasse un mouvement bizarre :
l'index, au lieu d'appuyer sur la plume, se relève tout droit en
l'air, attitude singulière, car d'ordinaire les doigts se resserrent
I. Sëglas, Un cas de folie du doute, simulant la crampe des écrivains. Bull, de la
Sor. méd. des hopilauj', avril i8yo, cl Troubles du lamjafje chec les aliénés, iSyu,
p. 20I.
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LES IDÉES ORSIsHANTES
a cranîpe. On peut faire sur lui quelques petites expériences
ssantes. Quand il tient la plume sans écrire, Tindex ne se
pas ; bien mieux, si on lui dit de simuler Técriture, c'est-
de faire faire h la plume tous les mouvements de Técriture,
n la laissant à quelques millimètres au-dessus du papier
larquer réellement, les doigts n*éprouvent aucune gêne et
lade peut écrire ainsi indéfiniment. Si on Tempèche de
1er, on peut approcher le papier de la plume jusqu'à faire
er l'écriture légèrement et le malade continue à n'avoir
Q crampe : mais s'il s'aperçoit qu'il écrit réellement, im-
tement l'index se relève et la plume tombe. « J'ai, dit-il,
e une appréhension d'écrire depuis que je me suis rendu
e que j'écrivais mal. » Le scrupule simule la crampe des
ins comme tout à l'heure la chorée. Un étudiant prépare en
ment une thèse sur ce sujet que je lui ai indiqué : « Les
rts entre la crampe des écrivains et le délire du scrupule. »
>t probable que l'on pourrait facilement recueillir bien des
e même genre relatifs à la marche. M. Séglas a parlé juste-
dès baso-phobies. On pourrait montrer que quelques-unes
e elles ne sont que des scrupules relatifs à la marche. L'obser-
d'un homme de 56 ans, Fou... (yS) est sur ce point tout
concluante : les angoisses qu'il ressentait pendant la marche
g d'un fossé ont peu à peu donné naissance à des obsessions
êtes sur l'impossibilité de la marche. Dans une thèse ré-
M. Paul Delarue ^ insiste sur l'idée obsédante de Timpo-
des membres inférieurs qui se surajoute aux phobies de la
e. 11 y a un diagnostic à faire entre ces scrupules de la
e et l'abasie hystérique analogue à celui que nous venons
re à propos de l'anorexie.
ativement aux diverses fonctions viscérales, je ne fais que
1er l'observation de Rai..., que j'ai déjà publiée dans le se-
irolume des névroses, de cet individu qui se fait des scru-
sur sa digestion et sa respiration. Convaincu qu'il ne respi-
\s bien, il cherchait des systèmes pour respirer mieux, pour
les suQocations possibles. Puis ce furent des systèmes pour
îr : il lui fallait une bouteille d'eau près de lui pour hu-
aul Delaruo, itc la Staso-basophobie, Tliùse de Paris, 1901.
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L'OBSESSION DE LA HONTE DU CORPS i7
mecler la bouche avant chaque bouchée. Même en dehors des
repas, il lui fallait une goutte d'eau dans la bouche pour bien res-
pirer V
Les idées obsédantes relatives à Talinientation et même aux
diverses fonctions de la déglutation, de la digestion, etc., sont
des plus fréquentes. On en a déjà eu un exemple dans l'obser-
vation de Nadia. Mais ces idées restent presque toujours étroi-
tement associées avec des phénomènes d'angoisse et il me semble
préférable de remettre leur description plus complète au moment
où j'étudierai les phobies des fonctions dans le chapitre suivant.
L'une des fonctions digestives a le privilège de provoquer plus
que les autres des obsessions de honte. C'est l'évacuation
des gaz intestinaux. On ne se figure pas l'état de folie où peuvent
tomber certains individus par la crainte des pets. J'en ai publié
dernièrement une belle observation*. Un homme de3i ans, Ch...,
vit toujours seul, habite au sixième pour n'avoir pas de voisins
au-dessus de lui, met son lit dans la cuisine, car il n'est pas pro-
bable que d'autres personnes couchent au-dessous dans la cui-
sine, et cependant en arrive h vouloir se tuer parce que sa mère
va venir le surprendre dans sa retraite. Le pauvre diable ne peut
avoir personne près de lui ou aux environs parce qu'il craint qu'on
entende le bruit de ses gaz abdominaux et voici dix ans qu'il est
en proie à une pareille obsession. Je viens de voir une jeune fille
de 20 ans qui commence le même délire. « Elle n'est pas faite à
ce point de vue-là comme les autres, il y a dans ses parties des dé-
fectuosités, les gaz s'échappent dès qu'elle y pense, et elle est
forcée d'y penser si elle est en public. Or cet accident est mons-
trueux, mieux vaudrait mourir » ; et elle refuse de sortir, de dîner
en ville, de se marier.
J'ai observé bien des cas comparables relatifs cette fois aux
fonctions de la vessie. Une femme de 55 ans, ancienne scrupu-
leuse, ayant même eu a l'âge de 18 ans une crise d'obsession cri-
minelle pour laquelle Charcot l'avait fait isoler, Vor... (iSy) a été
troublée il y a deux ans par un eczéma du périnée et des parties
génitales. Les démangeaisons d'une part, les soins minutieux de
propreté nécessités par le traitement d'autre part, ont attiré son
attention sur ces parties et après la guérison de l'eczéma elle a été
I. Raymond et P. Janet, Névroses et Idées fixes, II, 887.
a. Id., ibid.. Il, 147.
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48 LES IDfiES OnSÉDANTES
envahie par une obsession curieuse, relative à l'acte d'uriner. Elle
avait le sentiment qu'elle urinait mal et surtout incomplètement.
Elle s'étudiait à pousser mieux, à produire le coup de piston et
cependant elle conservait la pensée qu'elle n'avait pas terminé et
qu'elle allait perdre les urines, ce qui fait qu'elle retournait im-
médiatement au cabinet, recommençait ses efforts et sortait, puis
était forcée de rentrer de nouveau, cela jusqu'à cinquante fois de
suite. 11 est singulier de voir le scrupule déterminer des troubles
de la miction.
Dans toutes les hypocondries urinaires, il ne serait pas difficile
d'en trouver de semblables: je me rappelle l'observation d'un
pauvre maître d'études qui avait renoncé à son métier, ne pou-
vait plus assister à aucun cours, entrer dans aucune réunion, car
il avait constamment la pensée de n'avoir pas pris suffisamment
ses précautions, et il était honteux de mouiller son pantalon en
public. On me permettra de rappeler à ce propos une observation
curieuse communiquée par M. le P** Guyon à mon frère le
D*" Jules Janet et résumée dans sa thèse de doctorat*. Un magis-
trat vient d'être nommé conseiller h la Cour de cassation et va
consulter M. Guyon pour lui demander s'il doit envoyer sa dé-
mission et renoncer à cette haute fonction : «J'ai visité, disait-il, les
locaux où siège la Cour de cassation et j'ai remarqué que les ca-
binets d'aisance ne sont pas assez isolés. 11 est certain que de la
salle des séances on peut m'entendre quand j'urinerai, il m'est im-
possible de rester sans uriner et il serait monstrueux de m'expo-
scr i\ ce danger d'être entendu. » Je n'ai pas l'observation com-
plète du sujet, mais il est bien probable que l'on y retrouverait
tous les autres symptômes de nos scrupuleux.
Il est évident que la fonction qui sera le plus facilement atteinte
par le scrupule c'est la fonction génitale : j'en ai déjà parlé à pro-
pos des idées criminelles. Dans certains cas l'obsession ne
portera pas précisément sur la tentation de la masturbation ou
l'idée des crimes génitaux, mais sur la honte des parties géni-
tales. L'observation de Vg... que j'ai déjà publiée est tout à fait
caractéristique *. A la suite de méditations sur l'adultère il est
obsédé par la pensée de ses propres organes ; il y ressent des dou-
1. Jules Janct, Troubles psychopathiques de la miction, 1890, i4.
3. Névroses et Idées fixes ^ II, i6a.
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:fê^f ,'i -i"" -:■ I '
L'OBSESSION DE LA HONTE DU CORPS 49
leurs étranges, il en arrive à penser constamment que ses organes
génitaux sont appendus à son corps comme un corps étranger et
ne lui appartiennent pas. Voici une autre observation toute
comparable. Wyb... (i6/i), un jeune homme de 22 ans, a com-
mencé par toutes sortes de scrupules religieux, puis il a éprouvé
des remords terribles à propos de quelques masturbations. La
peur de toucher ses parties lui fait tenir les mains derrière le dos,
dans des positions grotesques. Il est obsédé par Todeur de ses
parties et croit que tout le monde la sent, il se figure que ses or-
ganes par leur grosseur ou leur forme ont quelque chose d'extra-
ordinaire qui n'existe pas chez les autres.
A cette honte des organes génitaux, il faut naturellement rattacher
le mécontentement relatifk.leur fonction ; le scrupule est l'origine
de bien des prétendues impuissances. Qui ne connaît ces jeunes
mariés tout honteux de leur sort, qui ne peuvent arriver à accom-
plir Tacte conjugal et qui sont poursuivis à ce sujet par une
obsession de honte et de désespoir ? Nous assistions Tannée der-
nière à une scène tragi-comique bien curieuse quand un beau-
père courroucé traînait à la Salpêtrière son gendre humble et
résigné. Le beau-père demandait une attestation médicale qui lui
permît de demander le divorce. Le pauvre garçon expliquait
qu'autrefois il avait été suffisant, mais que depuis son mariage un
sentiment de honte et de gène avait tout rendu impossible. Nous
eûmes bien de la peine à faire comprendre au beau-père combien
son intervention était inutile et fâcheuse. Ces cas sont très nom-
breux : on les rattache souvent à diverses névroses, quand il n'ar-
rive pas, pour le plus grand malheur des patients, qu'on leur parle
de maladies de la moelle épinière.
Cette honte des parties génitales prend assez souvent une autre
forme. qu'il faut signaler. Deb..., femme de 44 ans, est depuis sa
jeunesse honteuse de son sexe, elle regrette d'être une femme et
se figure qu'elle serait heureuse d'être un homme. En rapport
avec cette idée, elle remarque qu'elle n'a jamais eu de plaisir com-
plet avec son mari et qu'elle serait disposée à aimer des femmes.
Nous avons déjà vu le même fait chez un homme à propos des ob-
sessions impulsives au crime génital. Ici aussi on serait trop faci-
lement porté à parler d'inversion sexuelle, je répète que je ne
crois dans ces cas à rien de semblable. Le plaisir incomplet de
Deb.. . est, comme on le verra, un caractère général des scrupuleux :
elle serait tout aussi incapable d'aller jusqu'au bout si elle avait
LES OBSr:SSIONS. I. — 4
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LES IDÉES OBSÉDANTES
des rapports avec une femme. Sa prétendue inversion sexuelle n'est
qu'un des aspects divers que peut prendre la honte du sexe.
On remarquera que cette forme du scrupule, les obsessions de
honte relativement au corps, est Tune des plus intéressantes au
point de vue clinique. Elle donne lieu à toutes sortes d'accidents :
des anorexies, des chorées, des crampes des écrivains, des asta-
sies-abasies, des incontinences d'urine, des impuissances, etc. Ces
symptômes, comme nous le verrons, sont loin d'être complets et
ne peuvent pas tromper un observateur prévenu, mais il est essen-
tiel d'être averti. A ce point de vue la maladie du scrupule peut
s'étendre à tous les organes et à toutes les fonctions, déterminer
des troubles variés qu'il est important de diagnostiquer. Elle
devient une grande névrose analogue par bien des côtés à Thys-
térie, mais qui ne doit pas cependant jamais être confondue
avec elle. La distinction est aussi importante pour le pronostic
que pour le traitement.
6. — Les obsessions hypocondriaques.
Il faut signaler, mais avec moins d'insistance, un troisième
groupe d'obsessions qui se rencontrent aussi fréquemment que les
précédentes chez les mêmes sujets. Ce sont des préoccupations
qui ont rapport à leur propre santé ou à leur propre vie, en un
mot, ce sont des préoccupations hypocondriaques. On a remarqué
bien souvent que les scrupuleux sont en même ten\ps hypocondria-
ques; je crois que d'ordinaire il faut accompagner cette remarque
de quelques restrictions. Quand il s'agit de malades jeunes, au dé-
but de leur affection, on trouve chez eux pêle-mêle des idées scru-
puleuses et des préoccupations hypocondriaques ; mais quand la
maladie s'est confirmée, quand ils sont entièrement absorbés par
quelque grande obsession criminelle ou sacrilège, ils oublient de se
préoccuper de leur santé. Lise pense tout le temps au diable, à ses
enfants voués à l'enfer et songe à peine aux troubles de son exis-
tence : il faut que le délire diminue pour qu'elle s'aperçoive de
ses souffrances physiques. Il en est de même pour Claire, qui ne
peut arriver à se préoccuper de sa santé. J'ai plus d'inquiétudes
sur l'état de sa poitrine (tuberculose au début) qu'elle n'en a elle-
même. En général le grand délire du scrupule exclut le délire
hypocondriaque.
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LES OBSESSIONS HYPOCONDRIAQUES 51
Il faut faire une exception pour Jean, qui est aussi extravagant
comme hypocondriaque que comme scrupuleux. Ce jeune homme,
3o ans, fort bien portant au demeurant, est sans cesse préoccupé
par la pensée de la mort. Il ne peut assister à des cérémonies
funèbres sans devenir malade de terreur; il ne peut voir les em-
ployés des pompes funèbres sans frémir ; il ne peut passer devant
la mairie de sa petite ville entre neuf heures du matin et cinq
heures du soir parce qu'à ce moment le bureau de déclaration
des décès est ouvert et qu'il le croirait ouvert pour l'enregistre-
ment de son propre décès. En outre, il a des préoccupations par-
ticulières pour tel ou tel de ses organes. Par exemple, il est très
préoccupé de son cœur, il en compte les battements pendant des
heures entières et il est bouleversé quand il se figure que ce bat-
tement est irrégulier : « Mon cœur fait cloc... cloc... poum,
cloc... cloc... poum, ce n'est pas naturel, il est bistourné. » Et
alors il fait des efforts qui ont, dit-il, pour résultat de replacer le
cœur. A d'autres moments, il pousse des cris d'angoisse, appelle
au secours, dit qu'il va mourir, parce que son cœur n'a plus « que
des battements internes ». Ce même malade se figure toujours
que son cerveau va être détruit par sa maladie, il s'attend à une
hémorragie cérébrale et me décrit sans cesse <( un petit point
dans le cerveau, vous savez, la fin du nerf qui remonte, c'est là
qu'est le mal, il y a un cercle enflammé tout autour où certaine-
ment quelque chose peut éclater ». Il montre à ce moment le
point de la fontanelle postérieure où les obsédés localisent sou-
vent leurs maux de tète. Jean a encore peur d'avoir une hernie et
on lui fait grand plaisir en l'examinant de temps en temps ; il
surveille son alimentation et ne boit que du lait coupé d'eau de
goudron, etc.
Mais ce qu'il présente au plus haut degré, c'est une terrible
hypocondrie génitale. Pendant plus de six ans, il a souffert d'une
prétendue maladie du gland qu'il a soignée de toutes manières. Il
avait été affolé en constatant que le prépuce ne recouvrait plus le
gland et il éprouvait des douleurs intolérables par le frottement
des vêtements. Il passait toute sa journée à recouvrir le gland
avec le prépuce, à le badigeonner d'onguents, à prendre des pré-
cautions pour éviter les contacts, et il n'arrivait pas à atténuer
les souffrances. Il résume lui-même assez bien son état mental en
disant : n mon corps me gêne et m'obsède continuellement. »
Les mêmes caractères se retrouvent à un degré nfioins grave
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52 LES IDEES OBSÉDANTES
chez Za... (216), que la moindre indispûaition met hors de lui,
tellement il est obsédé par la pensée de la mort. Bal... (i55),
femme de 3â ans, semble obsédée par une pensée singulière, celle
de son âge, celle de l'âge de son mari et en général sur la pensée de
l'âge des personnes qui Tintéressent, c'est parce qu'elle compte
les années qui les séparent encore de la mort, la pensée de la
mort est en réalité au fond de l'obsession.
A coté de la pensée de la mort, la pensée de toutes les mala-
dies possibles peut devenir une idée obsédante. On peut citer à
ce propos une jeune fille, Qei..., qui surveille ses aliments de
peur d'avaler des fragments d'aiguille, qui lave ses mains conti-
nuellement de peur de s'infecter par des contacts malpropres, qui
se mouche sans cesse sans parvenir à se délivrer « des mou-
cherons qui montent par le nez jusqu'à son cerveau ».
Nous retrouvons ici, bien entendu, les obsessions relatives aux
organes génitaux, il ne s'agit plus des mauvaises actions qu'ils
font exécuter, ni de la honte qu'ils inspirent, mais de leurs ma-
ladies. On ne peut énumérer les malades qui ont « des sensations
de brûlure, d'épuisement dans le canal... des sensations de fa-
tigue comme si on leur avait enfoncé un gros objet dans le rec-
tum... la pensée constante qu'il y a dans ces parties une lésion
irrémédiable, une syphilis incurable ». (Dea..., etc.).
Il suffit de rappeler les obsessions de la phtisie (Dua..., i47),
les obsessions de la cécité (Mv..., i5i). Wye... (160) a des inquié-
tudes pour sa langue dont le bout frotte ses dents. Gye... a une
épingle arrêtée derrière le sternum, Lobd... (Obs. 22) a « quel-
que chose dans le nez qui cherche à sortir, elle a le besoin
d'une grande hémorragie nasale ». Il ne faut pas croire qu'il
s'agit ici d'un trouble de la sensibilité du nez, c'est bien
plutôt une idée consécutive à un singulier souvenir de famille :
la malade est convaincue que sa tante atteinte d'un délire
mélancolique grave a été guérie à la suite d'un saignement de nez,
d'où le désir obsédant d'un accident semblable. Kl... (211) res-
sent une brûlure dans la cuisse « qui est due probablement au
passage d'une épingle que la malade aurait avalée ». Des obser-
vations de ce genre sont d'une grande banalité et pourraient
être facilement multipliées.
Au premier abord, ces obsessions sont bien distinctes des pré-
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LES OBSESSIONS HYPOCONDRIAQUES 53
cédentes et semblent former un groupe à part, celui des obses-
sions hypocondriaques. Je crois cependant que cette hypocondrie
n'est pas banale et qu'elle revêt chez les scrupuleux des carac-
tères intéressants qui rapprochent ces idées nouvelles des précé-
dentes. Ces malades ne redoutent pas tous les accidents pos-
sibles, mais seulement certains accidents déterminés. Ils ne
redoutent pas les accidents qui peuvent arriver subitement, qui
dépendent du monde extérieur et qui ne dépendent pas d'eux-
mêmes. Jean qui parle sans cesse de mort subite, ne redoute pas
la mort causée par un accident impossible h prévoir ou à éviter :
il n'a pas peur d'un déraillement de chemin de fer ou de la chute
d'une maison sur sa tète. Quand je lui parle de ces dangers pos-
sibles, il dit qu'il faut se résigner à ce qui est inévitable, qu'il ne
peut rien faire pour se garantir contre la chute d'une cheminée et
que par conséquent il ne s'en préoccupe pas. Que redoute-t-il
donc ? Uniquement les accidents qui seraient causés par sa propre
imprudence ou par sa propre faute. Ces congestions cérébrales,
ces faux pas du cœur, ces douleurs du gland sont toujours causés
dans son imagination par les excitations génitales auxquelles il
s'est abandonné. Ce qui se dissimule au-dessous de ces idée hypo-
condriaques, c'est une sorte de crainte du suicide.
Il en est de même chez Qei... dont la première idée a été la
crainte de jeter elle-même des aiguilles cassées dans les aliments
pour tuer ses parents et qui a maintenant la crainte de manger
des aliments où elle aurait mis des aiguilles cassées. Si elle craint
de s'infecter, c'est qu'elle a peur de ne pas avoir surveillé ses
mains qui auraient touché des objets sales. En un mot, dans
quelques-uns de ces cas, je n'ose dire dans tous, l'hypocondrie
n'est pas purement la crainte de la maladie en elle-même, c'est la
crainte de causer la maladie par une faute ou une imprudence.
Nous pouvons résumer les diverses obsessions qui viennent
d'être énumérées et dont nous avons analysé le contenu par le
tableau suivant.
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LES IDÉES OBSÉDANTES
CONTENU DES OBSESSIONS
sion du sacrilège.
I. Obsession des problèmes religieux et moraux.
' Homicide.
Suicide.
j Vol, etc.
^Grimes génitaux.
i a. Obsession du crime à forme
d*impulsion.
ion du crime. ( /Fugues.
Dipsomanie, etc.
\ Résistance à des devoirs.
{ De fautes religieuses.
3. Obsession du crime à forme i D'homicide, de vol, etc.
de remords. J De crimes génitaux.
\ De vocation manquée.
Honte des actes.
— des sentiments.
— de l'intelligence (forme de la folie du doute),
don de la honte ) Obsession de dépersonnalisatioitî^^**^ " ^ - « • -- <-^ .
— du déjà vu. /^/i^tj- M J^^^'^
— de la folie.
— de l'envie.
— amoureuse.
Honte d'engraisser, de grandir, de se développer.
et gône des mouvements du corps.
des traits du visage, do la moustache.
de rougir.
ûon de la honte j — des mains (certaines crampes des écrivains),
corps. \ — de la marche.
des fonctions de nutrition.
de la miction.
des gaz intestinaux.
\ — des fonctions génitales.
, ( Obsession de la mort, des pompes funèbres,
nons hvpocon-X . ... , . ,
< — des maladies c^énitales.
aques. / , ,,.?..
\ — des maladies de poitrine, etc.
- Caractères communs de ces obsessions.
minant le contenu des obsessions des scrupuleux, c'est-
ilement le sujet sur lequel portent ces pensées obsé-
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CARACTÈRES COMMUNS DE CES OBSESSIONS 55
daates, j'ai cru pouvoir les répartir en cinq groupes : les ob-
sessions sacrilèges, les obsessions criminelles, les obsessions de
la honte de soi, les obsessions de la honte du corps et les obses-
sions hypocondriaques. Mais il ne faudrait pas en conclure
que ces idées sont tout à fait différentes les unes des autres et
que leur réunion chez des malades du même genre peut être
attribuée au hasard. Il en est ainsi quelquefois chez les hysté-
riques dont les idées fixes très diverses ont peu de points com-
muns, surtout si Ton ne considère que leur contenu. L^une rêve à
un incendie, l'autre à la figure de son amant, la troisième est ob-
sédée par le souvenir du goût des navets qu'elle a mangés à la
pension, et la quatrième par la peur d'engraisser comme sa mère :
les sujets des méditations pathologiques n'ont pas de caractères
communs. Chez les scrupuleux au contraire, malgré une assez
grande diversité apparente, les sujets des obsessions sont ana-
logues.
On peut assez facilement les rattacher les unes aux autres. Le
sacrilège n'est qu'une exagération du crime, la honte de soi est na-
turellement voisine de la pensée du crime. Il ne faut pas croire que
les obsessions corporelles, la honte du corps par exemple, soient
isolées. Dans les descriptions d'éreutophobie on note souvent la
honte morale qui accompagne l'idée de rougir « la malade rougit
ou a l'obsession de rougir, remarque-t-on dans une observation,
quand on parle devant elle d'actes indélicats, ou si elle est
devant des hommes dont il lui semble qu'elle pourrait être la
maîtresse* ». Parmi mes malades, Ul... qui a peur des convul-
sions du visage a surtout <c peur de paraître folle ». L'hypo-
condrie, comme on vient de le voir, se rattache à la crainte de
faire des sottises, elle se rattache aussi à la honte. Gbl...,
femme de 36 ans, qui a l'obsession <( du rhumatisme dans
les mains », ne craint pas seulement la souffrance, elle est
c( humiliée à la pensée de laisser voir des mains et des pieds qui
grossissent ». Toutes ces obsessions sont donc voisines les unes
des autres et il est facile de mettre en évidence des caractères
communs.
I* Il est facile de remarquer que ces idées ne portent pas sur
I. Boucher, Erythrophobio. Congres de médecine mentale. Rouen, août 1890;
Semaine médicale^ 1890, p. 292.
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LES IDÉES OBSÉDANTES
îts du monde extérieur, mais portent toujours sur des
sujet. Une hystérique comme Ze... a vu mourir son père,
spuis deux ans une obsession terrible qui se présente
me d'une hallucination complète : c'est celle de la tête de
telle qu'elle était sur son lit de mort. Son délire consiste
contemplation d'un objet, la tête de son père, sans au-
;re préoccupation. Dans ses attaques, elle hurle : « La
pa, la voici encore, elle me regarde, oh ! comme elle est
» elle ne fait que des descriptions. En est-il de même
scrupuleux ? Beaucoup d'auteurs n'hésitent pas à l'ac-
Is considèrent ces malades sous un aspect particulier, ils
ïi toute leur attention à certaines manifestations exté'
lu délire plutôt qu'à l'état psychologique intérieur du ma-
qui les frappe surtout, c'est que ces malades refusent de
certains objets et manifestent des signes d'émotion, des
quand on veut les forcer à faire usage de ces objets. Ce
5 vue est mis en évidence par le mot même dont ces au-
servent pour désigner ces malades ; plusieurs de ceux
iens de décrire seraient appelés par eux des phobiques,
de phobie mettrait en relief chez le malade : i® l'émotion
ouve et 2^* le rapport de cette émotion avec un objet du
extérieur. Il est clair que cette remarque est en grande
iste et dans les descriptions précédentes on a déjà relevé
s cas de phobies, d'abord des phobies vulgaires : Mb...,
Wks..., Brk..., Vis..., Ger..., etc., ont la phobie des
i et surtout des couteaux pointus; c'est d'ailleurs une nia-
on banale qu'on retrouve chez toutes ces mères de famille
s par la pensée de tuer leurs enfamts ; Qei..., Kl...,
ont la phobie des aiguilles ou des épingles : ce sont là des
hobie classique. On en trouverait dans les cas précédents
utres plus curieux : Claire, cette jeune fille qui prétend
lallucination du membre viril, a la phobie des bouteilles,
la terreur des crachats par terre sur le trottoir, Jean, le
scrupuleux génital, a la phobie des voitures et surtout
iways. Dans les chapitres suivants nous étudierons spé-
it la forme sous laquelle ces obsessions se présentent et
rons alors à signaler bien d'autres cas de phobies dont
s-uns sont bien singuliers. Il est donc juste de dire avec
1rs auxquels je faisais allusion que ces malades sont par
in côté des phobiques.
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CARACTÈRES COMMUNS DE CES OBSESSIONS 57
Cependant je préfère les appeler des scrupuleux et je croîs que
ce mot met en évidence lin autre point de vue. Il attire l'attention
sur les troubles de la volonté et sur les idées que le malade se
fait de ces troubles de volonté. Je crois, en effet, que ces phobies
sont, au moins pour les cas que je considère, des phénomènes
tout à fait secondaires, qu'ils forment ces sortes d'idées fixes se-
condaires que j'ai déjà eu l'occasion d'étudier. Nous verrons en
examinant ces phobies qu'elles se développent par association
d'idées : l'objet extérieur ne fait ici que rappeler par sa forme
comme la bouteille qui fait penser au membre viril, par son usage
comme le couteau qui fait penser au meurtre, par contiguïté, par
consonance du nom, etc., l'idée principale dont le malade était
obsédé longtemps avant d'avoir eu ses phobies. Comme il vaut
mieux faire cette discussion plus complètement au moment où
j'étudierai toutes les émotions, tous les troubles variés qui s'asso-
cient avec le développement de l'idée fixe, il suffit de faire main-
tenant une remarque plus simple.
Les malades viennent de nous présenter un assez grand nombre
d'obsessions qu'ils décrivent eux-mêmes comme étant le fait prin-
cipal de leur maladie. Ce sont ces obsessions-là qu'il faut, pour
le moment, nous borner à étudier. Peut-on dire qu'elles portent
régulièrement sur un objet extérieur ainsi qu'il arrive si souvent
dans les hallucinations et les obsessions des hystériques. Si l'on
considère le groupe des obsessions criminelles qui est ici le plus
simple, il est visible que la préoccupation ne porte qu'indirecte- '
ment sur un objet, mais qu'elle porte surtout sur une action. Le
sujet est toujours poussé à commettre des crimes ou croit en avoir
commis, c'est-à-dire qu'il se sent entraîné à certaines actions ou
croit les avoir faites. L'obsession est ici d'une manière incontes-
table l'obsession d'un acte du sujet. J'ai essayé de montrer qu'il
en est de même pour les obsessions hypocondriaques ; le malade,
au moins celui dont je m'occupe, ne pense pas à des accidents phy-
siques indépendants de sa volonté, mais toujours à des fautes ou
à des imprudences qu'il peut commettre lui-même. C'est encore
une préoccupation qui a rapport à des actes.
On pourrait croire qu'il n'en est pas tout à fait de même dans
les obsessions sacrilèges où certains sujets en très petit nombre
ont sous les yeux des spectacles auxquels ils ne paraissent pas
mêlés. On... voit l'âme de son oncle dans les cabinets, Claire voit
le membre viril souillant une hostie. Remarquons d'abord que ces
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58 LES IDÉES OBSÉDANTES
de l'obsession sacrilège qui sont les plus curieuses sont les
fréquentes. Dans les autres observations, les malades
it à vouer leurs enfants au diable, à cracher sur des hosties,
ler le vin de la messe à un petit chien, à agir, en un mot.
nème dans ces deux cas, la différence est plus apparente
elle. Ce qui désespère On... c'est que c'est lui-même qui
ime de son oncle dans les cabinets : « Comment puis-je en
• à penser une chose pareille... y> devrais moins que tout
Imaginer de telles choses. » Dans le cas de Claire, je n'ose
îr, car ses aveux sur ce point délicat sont loin d'être prê-
tais il est bien probable qu^elle collabore à la profanation
sties. Elle répète toujours : « C'est horrible de me laisser
de telles choses » ; et s'il ne s'agissait que d'un pur spec-
elle n'aurait pas a se reprocher « de coupables complai-
». Enfin, il faut remarquer que de tels tableaux ne sepré-
it que chez des malades fort avancés dans leur délire. Pen-
ongtemps ces malades ont rêvé à des actions sacrilèges :
rder dans les églises les parties de Dieu, les chercher sous
je qui voile le Christ, etc. » Le tableau n'est venu plus tard
)mme un symbole qui résume des actions odieuses,
is un groupe très considérable, nous avons remarqué des
îions de honte qui ne portent pas précisément sur les
s, mais sur toute la personnalité physique et morale. Il me
e que ces obsessions ne doivent pas être séparées des prê-
tes. D'abord elles se présentent chez des malades qui ont en
! temps les autres obsessions plus caractéristiques. Claire,
résente si bien l'obsession de honte pour son esprit, pré-
en même temps un type d'obsession sacrilège. Mb..., en
î temps qu'elle est mécontente de son intelligence, a des
sions criminelles. D'autre part j'espère montrer dans
rochaine étude que ces obsessions sont surtout caractérisées
a forme qu'elles revêtent : elles s'accompagnent de doute,
îrrogation, d'hésitation, de compensation, d'expiation, de
esses, de serments, etc. Or ces formes si curieuses se retrou-
chez tous ces malades. Nadia, dont l'obsession principale est
nte du corps, fait continuellement à ce propos des serments
s pactes, comme Lise qui a des obsessions nettement sacri-
. Enfin ces diverses idées se rattachent assez bien les unes
utres. La personnalité physique et la personnalité morale se
rochent intimement dans notre esprit; si l'on est content de
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'^^^pff^:'rl ■
CARACTÈRES COMMUNS DE CES OBSESSIONS 59
8on esprit, on est content de sa figure et inversement; d'autre
part on connaît les relations étroites entre la volonté et la per-
sonnalité, si bien que la critique des actes devient vite une cri-
tique de la personne.
Je crois donc que Ton peut sans hésiter généraliser et dire que
le délire des scrupuleux porte surtout sur leurs propres actes : ce
sont des obsessions relati^^es à leur volonté et à leur personne.
2^ Il est aussi intéressant de constater que ces actions dont /
la pensée est obsédante sont des actions mauvaises. Le plus sou-
vent, quand il s*agit de sacrilèges et de crimes, ce caractère
est incontestable. Mais on peut être embarrassé quand il s'agit
d'impulsions à des actes que rien ne condamne, comme d'entrer au
couvent et de faire confesser son mari. Il faut alors élargir le sens
du mot mauvais: il ne s'agit pas uniquement d'actes condamnés
par la morale, mais d'actes condamnés par le sujet lui-même, *
d'actions qui lui sont odieuses, qui lui paraissent ridicules, en
un mot qu'il ne voudrait pas faire. Sur ce point l'affirmation de
tous les malades est des plus précises : on peut lire à ce propos
une bien intéressante étude publiée par M. Josiah Royce dans
la Psychological Beview, sur un grand auteur mystique anglais
John Bunyan, qui est en même temps un beau type du délire de
scrupule. Bunyan est « tenté » de blasphémer contre Dieu,
d'adorer le diable; comme il le remarque lui-même, le tentateurest
une sorte d'inversion de conscience insistant sur tout ce qui est le
plus opposé à ses intentions pieuses*. Désire-t-il prier Dieu, il a
des distractions, il rêve à des images bizarres, à celles d'un tau-
reau, d'un balai, et il est tenté de leur adresser ses prières.
La tentation porte toujours sur l'action le plus opposée à ce qu'il
désire faire à ce moment.
Il en est ainsi pour tous nos malades. Yi... conduit son enfant a
l'école et veut aller le rechercher, car elle est très inquiète à pro-
pos de son retour dans les rues de Paris. Elle se demande si elle
n'a pas dit à une femme suspecte d'aller le chercher. Elle aime
son mari par-dessus tout, aussi craint-elle de trahir ses secrets,
de le tromper avec le premier venu, de faire signe par la fenêtre
aux passants pour qu'ils montent. Vod..., Wks..., adorent leurs
enfants, et c'est toujours leurs enfants qu'elles pensent à tuer, à
I. Josiah Royce, The case of John Bunyan. Psychological Review^ 1894» p. i43.
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60
LES IDÉES OBSÉDANTES
faire bouillir, à donner au diable. D'après les obsessions de ces
femmes scrupuleuses, on peut toujours deviner qui elles aiment
mieux de leurs maris ou de leurs enfants. Je demande à Vod...
pourquoi elle veut toujours tuer sa petite fille et ne songe pas à
tuer son mari, et elle ne peut s'empêcher de rire en disant: « Oh,
mon mari, je ne Taime pas assez pour penser à le tuer. »
Quand il s'agit de jeunes filles, on peut deviner le degré de leur
pudeur d'après la nature de leurs obsessions : quand elles parlent
des (( parties de Dieu )), des hosties souillées, de crimes contre
nature, c'est qu'elles sont parfaitement chastes. Les autres n'ont
plus de préoccupations sur ce sujet et songent h tuer leur mère
ou à voler. « C'est bien simple, me disait Qes..., je suis poussée à
tuer ce que j'aime le mieux, je veux tuer ma mère parce que je
n'ai qu'elle ; si j'avais un mari, je voudrais le tuer ; si j'aimais un
petit chien, je voudrais tuer ce petit chien. » En un mot elles
sont toujours obsédées par la pensée qui leur fait le plus horreur.
M. Paulhan a fait une remarque analogue à propos du délire du
doute quand il a dit que les idées de ces malades sont dues à
l'exagération de V association par contraste^. Dans un travail pré-
cédent^ j'ai eu l'occasion de discuter cette théorie ; je dois au-
jourd'hui relever dans ma discussion une erreur partielle.
Sans doute j'avais raison de faire observer que les malades ana-
lysées dans cette étude, telles que Marcelle, et dans un des cha-
pitres suivants, Justine, ne justifiaient pas la remarque de
M. Paulhan. Leurs idées fixes en rapport avec des émotions anté-
rieures, développées par un mécanisme analogue à celui de la
suggestion, n'obéissaient pas à la loi du contraste et n'étaient
nullement en opposition avec les désirs actuels des sujets. Mais
ces malades formaient un groupe particulier, celui des hysté-
riques suggestibles, et j'ai eu tort de généraliser une remarque
qui s'appliquait à ce groupe particulier. Les scrupuleux que nous
étudions maintenant forment un autre groupe très distinct du
'premier et on peut dire que chez eux les obsessions forment un
contraste frappant avec leurs tendances dominantes. Reste à voir
si elles doivent leur origine à l'association par contraste. Nous
ne devons maintenant retenir qu'une seule chose, c'est que ces
obsessions portent sur des actes et des actes mauvais, c'est-à-dire
1. M. Paulhan, L'activité mentale et les éléments de l'esprit, 1889, p. 34 1-307.
2. Névroses et Idées fixes, 1898, I, Sa.
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CARACTÈRES COMMUNS DE CES OBSESSIONS 61
en opposition non avec la morale commune, mais avec les désirs
et les volontés du sujet ; le malade est obsédé par la pensée d'un
acte qu'il voudrait ne pas faire.
3** Le troisième caractère qui me frappe dans le contenu de ces
obsessions est plus difficile à exprimer, bien qu'il soit très curieux
et probablement très important dans cette maladie. Les actes dont
la pensée obsède les malades sont des actes extrêmes. Ce sont les
actes les plus sacrilèges, les plus criminels, les plus dangereux,
en un mot les plus odieux qu'il leur soit possible de concevoir.
C'est une conception qui est poussée dans un certain sens jus-
qu'aux plus extrêmes limites.
Il est visible que ces pauvres gens cherchent toujours à préciser,
à grossir le crime auquel ils pensent. On les ennuie fort quand
on conserve un air calme et indifférent pendant qu'ils énumèrent
leurs impulsions ; ils cherchent alors h ajouter des circonstances
horribles pour provoquer notre indignation^ Za..., qui est un
homme de trente ans, avoue en tremblant qu'il est poussé à
commettre le péché d'amour avec une femme. Je lui réponds
tranquillement qu'à son âge cela me paraît assez naturel. Il se
hàle d'ajouter : « Mais, Monsieur, je me représente que la chose
se passe sur un banc. — Eh bien, soit. — Mais vous oubliez,
répond-il en colère, que ce banc est devant une église. » Jean, qui
a de même des impulsions génitales, se consolerait encore s'il
était poussé à aimer de jeunes femmes qui soient jolies, mais il
a dés impulsions erotiques pour des femmes louches, laides et
très âgées. « Un jour deux jeunes filles sont venues nous voir,
l'une d'elles m'a beaucoup plu et après son départ j'étais tour-
menté par la pensée que j'étais marié avec elle. — Il n'y a pas
grand mal à cela. — Mais, Monsieur, vous ne vous figurez pas
que cela m'a donné des impulsions épouvantables : je rêvais que
j'avais des rapports avec leur mère, avec ma belle-mère ! ! ! » Au
bout de quelque temps d'ailleurs, l'impulsion se développe tou-
jours dans le même sens et il est désolé parce qu'il pense mainte-
nant à sa propre mère. Quand il s'agit de meurtre, ce sont des
crimes ce contre des petits enfants sans défense que me conseille le
diable », dit Brk... ou « l'assassinat d'un vieillard de quatre-
vingt-quatre ans », dit Za..., et ils inventent des raffinements de
cruauté et de lâcheté. Toujours ils cherchent h aller le plus loin
possible dans cette conception du crime.
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LES IDÉES OBSÉDANTES
ains d'entre eux se rendent compte de ce besoin singulier,
andais à Lise pourquoi depuis quelques années elle con-
toujours la même idée, celle de vouer ses enfants au
tandis que auparavant elle changeait assez souvent d'ob-
s. (( C'est, me dit-elle, que je ne puis pas faire mieux :
je pousse toujours mes idées à Tinfini, s'il y avait une
)lus terrible, j'y penserais. Vouer mes enfants au diable,
I plus que je puisse faire pour le moment. » Une autre
nous montre un exemple curieux de cet effort pour arriver
ême. Ger... me répète sans cesse qu'elle est poussée à
r Dieu par un péché horrible et elle ne précise jamais quel
3éché. J'insiste vivement pour savoir de quoi il s^agit et
ère des crimes avoués d'ordinaire par les scrupuleuses,
îz-vous faire cuire vos enfants ? — Non, ce n'est pas cela.
»mper votre mari avec le diable ? — Non, ce ne serait
- Voler et souiller des hosties consacrées? — Mais non,
cela. — Alors j'y renonce; dites-moi quel est ce crime.
ii un péché qui n'aurait jamais existé, que personne n'au-
core fait, auquel personne n'aurait pu encore penser ; eh
est ce péché-là que je suis poussée à faire. — Mais encore
X ce péché? — Je n'en sais rien. » Peut-on avouer plus
ent cet effort impuissant de l'imagination ?
>nt des gens qui font des efforts désespérés, qui se tor-
l'imagination pour arriver à l'abominable, bien que presque
s ils échouent dans le grotesque. Cet état d'esprit est assez
icrit par l'auteur de « A rebours » et de « Là-bas ». En écou-
s sacrilèges, on pense ù ce chanoine <( qui nourrit des souris
[ïs avec des hosties consacrées et qui s'est fait tatouer sous
Le des pieds l'image de la croix, afin de pouvoir toujpurs
T sur le Sauveur* ». Cette disposition à la recherche de
ne est évidente dans les obsessions des scrupuleux, elle me
in caractère essentiel qu'il faut constater avant de chercher,
rpréter.
ces caractères s'en ajoute un autre qui me parait découler
icédents, mais comme il porte sur l'origine des idées et que
)r8inans, Là-bas, p. 297. Dans le même ouvrage, un passage curieux sur
lion des crimes nouveaux, compliqués d'incesle, de crimes contre nature et
ge, se rapporte au môme état d'esprit (p. a58).
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CARACTÈRES COMMUNS DE CES OBSESSIONS 6J
tout ce travail est destiné à mettre cette origine en évidence, il
faut se borner à l'énoncer maintenant d'une manière hypothé-
tique. Les idées fixes que nous avons étudiées autrefois chez des hys-
tériques avaient un contenu déterminé par les circonstances exté-
rieures. Sans doute la condition essentielle de Tidée fixe était un
certain état d'esprit du sujet qui le rendait éminemment sugges-
tible; cet engourdissement, cette diminution des fonctions céré-
brales qui déterminait le rétrécissement de Tesprit et la sugges-
tibilité était le caractère essentiel de l'état mental hystérique.
Mais la nature particulière de Tidée fixe, la pensée d'un incendie
ou l'image d'un mort était la conséquence des circonstances exté-
rieures qui avaient déterminé une émotion et une suggestion à
propos d'un incendie ou à propos d'un mort*. De telles idées
déterminées par le mécanisme de la suggestion pouvaient être
appelées des idées fijces exogènes.
Eh bien, une pareille origine peut-elle être attribuée au con-
tenu des obsessions chez les scrupuleux ? C'est ce que les malades
ou leurs parents supposent bien souvent: Ls... pense que ses idées
sacrilèges sont nées à propos des conversations philosophiques
qu'aimait à faire son père. Les parents de We... restent con-
vaincus, malgré mes affirmations, que la maladie de leur fille a été
produite au couvent par l'enseignement des religieuses. J'hésite
beaucoup a accepter cette interprétation. Sans doute les circon-
stances extérieures jouent un rôle ; les* femmes qui n'ont pas
d'enfants ne songent pas à les vouer au diable. Mais ces circons-
tances banales qui consistent à avoir des enfants, à entendre de
temps en temps une conversation philosophique, à être élevé par
des religieuses suffisent-elles pour faire naître un délire pareil ?
D'autre part, si le délire venait surtout de Textérieur, comment
aurait-il des caractères communs si remarquables chez tous les
malades, pourquoi porterait-il toujours sur des actes, des actes
mauvais, des actes extrêmes, et comment serait-il étroitement en
rapport avec le caractère individuel du sujet? Le contenu des
obsessions, tout en gardant ses caractères communs, n'est pas le
même chez la mère de famille, chez l'homme adulte, ou chez la
jeune fille. Si je puis employer une expression vulgaire, il semble
que ces malades jouent au jeu des combles et à la même question
I. Voir à ce propos de nombreux, exemples de ces idées fixes accidentelles par
suggeslibilité : Névroses et Idées fixes, 1898, I, 173.
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LES IDÉES OBSÉDANTES
tous difTéremmenl, suivant leur sexe, leur uge, leurs
sociales. « Quel est pour vous le comble du crime ? —
a petite fille Teau bouillante qui est sur le feu, répond
famille habituée aux travaux du ménage ; vouer mes
liable, répond la mère d'un milieu social plus élevé. —
is quel est le comble du crime ? — Mettre l'âme de mon
les cabinets, répond l'homme reconnaissant; souiller
par l'acte sexuel », répond la jeune fille. Cette modifi-
a réponse qui garde les mêmes caractères communs,
iaptant si bien au caractère individuel, peut-elle s'ex-
Taction des circonstances extérieures sur un esprit
?
donc se demander si les idées fixes sont toujours exo-
certaines catégories d'idées fixes ne mériteraient pas
dogènes. Leur contenu ne pourrait-il pas être inventé
t lui-même, en vertu de certaines lois différentes de
suggestibilité ? Ces idées ne seraient-elles pas Vexpres-
ouble profond dans le fonctionnement cérébral que le
jent et qu'il traduit d'abord par des sentiments parti-
ensuite par des idées obsédantes qui résument et
ce sentiment? Dans le cas du délire du scrupule en
le malade n'est-il pas obsédé par des pensées particu-
ves k ses actes, parce qu'il a réellement des troubles
té et parce qu'il a une certaine conscience de ces alté-
a volonté ?
du contenu des obsessions chez les scrupuleux nous
nplement h poser ces problèmes ; il faut continuer l'é-
brme que présentent ces obsessions et de l'état psy-
sur lequel elles se développent, pour préparer un peu
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LA FORME DES OBSESSIONS
65
DEUXIEME SECTION
LA FORME DBS OBSESSIONS.
Pour établir le diagnostic d'une affection mentale il ne suffit
pas de savoir le sujet ordinaire des préoccupations des malades,
c'est-à-dire le contenu des obsessions, il faut encore étudier
de quelle manière se présentent ces préoccupations, à quelles
lois elles obéissent dans leur apparition et leur évolution, en un
mot il faut examiner la forme psychologique que revêtent ces pen-
sées obsédantes. Pour bien comprendre ce problème, considérons
certaines idées fixes des hystériques qui déterminent de grandes
fugues de plusieurs mois complètement oubliées par les malades
après leur exécution. Ces idées ne se manifestent que pendant
des somnambulismes ou dans des écritures subconscientes, elles
semblent tout à fait absentes de la conscience normale du sujet
qui les ignore. Ces idées fixes ne sont-elles pas totalement diffé-
rentes dans leur forme psychologique de celles du persécuté qui
connaît parfaitement son délire, qui est convaincu de sa réalité
et qui a systématisé toutes ses pensées et toutes ses actions autour
de la croyance à telle ou telle persécution. Cette opposition entre
des idées dissociées qui se développent isolément en dehors de
la vie consciente du sujet et ces idées complètement systématisées
qui sont au contraire devenues le centre de toutes les pensées est
d'une importance capitale pour interpréter toute la maladie. Aussi
doit-on appliquer cette recherche aux obsessions des scrupuleux
et voir quelle place elles occupent dans la pensée, le degré et la
forme de leur développement.
Pour étudier les caractères psychologiques que revêtent ces
obsessions, les lois de leur apparition et de Içur développement,
il est nécessaire de faire quelques distinctions. Les malades ne .
restent pas toujours a la même période de leur maladie; ils peu-
vent traverser des états de trouble très grand ou se rapprocher
de Tétat normal. Dans ces diverses périodes leurs obsessions ne
conservent pas toujours les mêmes caractères et une description
LES OBSfiSSlOItS. I. — 5
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LES IDÉES OBSÉDANTES
e pourrait pas impunément être appliquée h tous les accidents des
Tupuleux. Je mettrai donc de côté, pour les examiner plus com-
lètement quand j'étudierai l'évolution et les complications de la
aladie, des états aigus, des périodes de délire grave qui peuvent
alheureusement survenir au cours de la maladie. Le grand carac-
re de tels états, c'est que le malade a perdu à peu près complé-
ment le pouvoir de critiquer ses obsessions, de leur résister,
l'il s'abandonne à son délire. Ces états se rapprochent de la
élancolie anxieuse ou des diverses formes de la confusion meu-
le : ils nous font entrer dans le domaine d'autres maladies meu-
les. Je crois qu'il faut les considérer comme des accidents sur-
nant au cours d'un délire du scrupule, accidents dont il faut
scuter la possibilité et la fréquence, mais qu'ils ne constituent
is l'état normal de ces malades.
D'autre part, tantôt par l'évolution naturelle de la maladie,
ntôt sous l'influence de certains traitements, ces idées fixes peu-
nt se réduire, diminuer d'importance ou perdent leur précision.
; malade sent encore qu'il est tourmenté par quelque chose,
l'il est obsédé. Il pourrait par un léger efl'ort retrouver l'idée
li le tourmente, mais il sait qu'il faut éviter cette recherche et
n'a qu'une notion vague de cette idée qui l'obsède, c'est Vétat
gue de Lise, c'est Y état implicite de Jean. Cet état fait encore
irtie de la maladie, mais c'est un degré eflacé, estompé que l'on
; peut prendre comme objet principal de l'étude.
Dans cette description des caractères psychologiques de l'ob-
ssion du scrupuleux, je considérai donc en premier lieu le degré
oyén du développement de ces idées qui est d'ailleurs de beau-
up le plus fréquent et le plus important. On le reconnaîtra
[X caractères suivants. L'idée est assez nette et assez précise
>ur que le sujet sache très bien ce qui l'obsède, et cependant
ntelligence du malade reste assez entière pour que celui-ci
lisse critiquer l'obsession et en reconnaître au moins en partie
ibsurdité.
En effet, le caractère essentiel de ces idées maladives est si
ippant qu'il a presque toujours été bien mis en évidence dans
5 termes mêmes qui servent a les désigner. On se sert souvent
►ur décrire cette maladie de deux termes associés, c'est, dit-
i, une folie lucide^ un délire açec consciencey une obsession
nsciente.
Celte association des termes « folie et lucidité » provoquait
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LA FORME DÈS OBSESSIONS 67
autrefois Tindignation du D' Thulié ' quand il critiquait la « manie
raisonnante » du D*" Campagne ; elle est pourtant légitime et exacte.
Le premier de ces termes se comprend facilement, il désigne une
idée qui s*impose au malade et se développe dans son esprit
d'une manière automatique sans rapport ni avec les circonstances
extérieures ni avec la volonté du sujet, l^e second, le mot « cons-
cient » est, comme je l'ai déjà souvent remarqué, assez malheureux
à cause de l'ambiguïté du mot conscience, le mot dans le langage
psychologique signifie que le sujet connaît son idée, qu'il la con-
state, qu'il en a la perception personnelle ; il s'oppose aux termes
« inconscient, subconscient » qui s'appliquent à des phénomènes
ignorés du malade. Or, dans le cas présent, on veut dire que le
malade juge son idée, l'apprécie au point de vue de sa réalité, de
son rapport avec ses autres croyances. On veut donc désigner une
opération intellectuelle beaucoup plus élevée que la simple con-
science psychologique : si l'on pouvait changer l'usage il vaudrait
mieux dire qu'il s'agit d'obsession avec jugement, d'obsession
contrôlée ou critiquée par le malade.
Quoi qu'il en soit, ces deux mots appliqués aux scrupuleux
sont extrêmement justes. Le malade est obsédé, tourmenté par
une idée qui s'impose à lui sans qu'elle soit justifiée par les cir-
constances sans que le sujet la recherche lui-même. C'est une
idée envahissante comme un délire ou une suggestion et cepen-
dant le malade n'accepte pas cette idée avec la conviction d'un
persécuté ou d'un individu suggestionné. Au moins jusqu'à un
certain point il sent comme nous que son idée est absurde, il la
juge et la repousse, c'est une obsession a^ec critique.
Il résulte de cette remarque générale que ces idées peuvent être
examinées à deux points de vue: i** le point de vue positif, qui
présente leur caractère obsédant et maladif, leur puissance pour
tourmenter le malade ; 2° le point de vue négatif nous montre l'ar-
rêt de ces idées, le point auquel se termine leur puissance. Nous
retrouverons ces deux points de vue dans tous les caractères des
obsessions, dans leur pennanencey dans leur puissance inipulsis^e,
dans leur représentation hallucinatoire^ dans le degré de croyance
qui les accompagne.
1. D*" Thulié, La manie rai<ionnante du D' Campagne t 1870.
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LES IDÉES OBSÉDANTES
- La permanence et l'évocation de l'obsession.
certain nombre de caractères séparent les idées patholo-
; de nos scrupuleux des idées ou des pensées d'un homme
1, ce sont ces caractères qui les rendent obsédantes,
premier rang il faut placer la durée de ces préoccupations,
rée de ces obsessions chez les scrupuleux peut être extrè-
it longue. L'idée du démon chez Lise, l'idée sacrilège et
le chez Claire existent chez chacune au moins depuis 12 ans.
;st de même pour la plupart des obsessions que j'ai signa-
îur durée se compte toujours par années. D'ailleurs si Ton en
I. J. Falret, les obsédés de ce genre conserveraient toute leur
nême idée malgré des rémissions apparentes. On peut dire
rtaines idées se prolongent chez nous tous et qu'un savant
oursuivre un problème pendant 20 ans. Ce caractère n'est
»as absolument décisif. Cependant il a une certaine impor-
'elative. Etant donnés la nature des esprits et le sujet de
les, on doit reconnaître que d'ordinaire chez des esprits de
rc une telle idée ne devrait pas durer 10 ans. Lise est une
intelligente et instruite : il n'est pas vraisemblable que son
on soit naturellement employée pendant 10 ans à méditer
iée de donner ses enfants au diable. D'ailleurs tous ces
!S s'en étonnent eux-mùmes et ne comprennent pas pourquoi
;ent si longtemps sur le même sujet qu'ils trouvent eux-
insignifiant et grotesque. 11 y a donc déjà dans la durée un
it pathologique qui donne à l'idée un caractère pénible et
nt.
econd caractère, la fréquence des répétitions est ici plus net
. Claire prétend qu'elle a 200 fois par jour son image de
î et du membre viril. Lise est convaincue que sa préoccu-
est perpétuelle et ne l'abandonne même pas pendant la
elle-ci a en effet le sentiment que toute la nuit elle rêve au
problème et elle se réveille le matin avec le sentiment de
pas cessé d'y penser. Nous verrons par l'étude de certains
s comme Jean que même au moment où l'idée semble dis-
le la conscience elle subsiste cependant. Ce malade nous
qu'il pense à sa dame d'une manière « implicite ». Même
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LA PERMANENCE ET I/H:V0GATION DE L'OBSESSION 69
quand elle est à peu près guérie et tranquille, Gisèle sait bien que
son idée, ses remords de vocation ne sont pas loin, « cette idée
me gratte toujours, le regret de la vocation religieuse c'est le chat
qui dort, il ne faudrait pas m'amener à y penser un peu, tout ne
demande qu'à recommencer ». On voit donc que ces idées réap-
paraissent très souvent dans l'esprit, ne disparaissent même
Jamais d'une manière complète.
Ici encore on peut dire que l'attention volontaire peut main-
tenir notre esprit sur un même sujet. Cela est bien rare et il fau-
drait au moins que, par son intérêt, par l'importance que l'esprit
lui accorde, une pareille prolongation de l'attention pût se justifier.
Il est loin d'en être ainsi dans nos exemples.
Cette durée, cette permanence de l'idée ne doit cependant pas
être considérée comme un phénomène tout à fait automatique
qui se prolonge de lui-même. Le sujet prétend bien que l'idée
vient d'elle-même, qu'elle persiste quoiqu'il ne fasse rien pour la
conserver, quoiqu'il souhaite de tout son pouvoir sa disparition
En réalité il nous trompe ou il se trompe lui-même. Lise veut être
soignée et guérie, cependant elle est très agitée à la pensée qu'elle
pourrait être hypnotisable. C'est qu'elle a bien peur que pendant
le sommeil hypnotique on n'efface complètement son obsession,
elle y tient au fond et ne veut sacrifier que « ce qu'elle a d'exa-
géré ». Quand elle va réellement mieux et que l'idée a une ten-
dance à s'effacer « il faut qu'elle cherche à y repenser pour être
tranquille, je ne puis pas me décider à n'y plus penser ». En
réalité pendant que je m'efforce d'effacer ces idées elle fait « un
effort horrible pour ne pas les perdre et elle ne peut s'empêcher
d'être heureuse quand je ne réussis pas ». Dans un léger état hyp-
notique qu'on détermine sur elle et dont je reparlerai, j'essaye de
contredire ses idées fixes, de les dissocier, de les modifier. Cela
provoque des crises de résistance excessivement curieuses. Elle
s'écarte de moi avec horreur, elle se raidit en sortes de contrac-
tures, elle serre les dents pour ne pas répéter les paroles que je
lui suggère. Elle supplie qu'on ne lui enlève pas des idées ensei-
gnées par l'Eglise. Si elle obéit un peu c'est avec toutes sortes de
réserves. Elle dit bien, pour expliquer ses résistances, que c'est
le diable qui résiste et non pas elle^ mais en fait elle y tient elle-
même beaucoup. « Quand on a vécu dix ans avec une idée on ne
peut plus s'en passer. » Aussi ne cède-t-elle que très peu et pour
un moment seulement avec la plus grande crainte d'engager
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LES IDÉES OBSÉDANTES
[lir. Elle se résigne simplement à remettre son idée à plus
et se console en se disant « quand je le voudrai bien, j y
nserai ».
s mêmes entêtements et les mêmes résistances se repro-
;nt chez Claire et amènent des scènes qui sont véritablement
ques. Claire vient de me dire qu'elle est désolée de s'accuser
même d'immoralité, car elle sait au fond que ce n'est pas
Je lui réponds en abondant dans son sens, en lui disant
le est une jeune fille très estimable et que je la sais incapable
•ute malhonnêteté. La voici furieuse contre moi, disant que je
loque d'elle, que je n'en pense pas un mot, qu'elle ne tolérera
[u'on la contredise ainsi. Elle se met à pleurer et elle supplie
n ne lui enlève pas son dernier espoir. « Si je ne me croyais
Immorale, je ne ferais plus, aucun effort pour arriver à me
gcr, je serais absolument perdue. » Jamais elle ne tolère au fond
Q contredise son délire. En réalité la permanence de l'idée
pas chez les scrupuleux un fait aussi automatique que chez
lystériques; il résulte d'un effort permanent pour maintenir
întion sur une même idée; c'est une sorte de manie de la
? des idées.
îtte fréquence de l'idée est en rapport avec un autre caractère
►rtant, la facilité des reproductions. Si l'idée revient si souvent
l'esprit c'est qu'elle est évoquée par d'innombrables phéno-
ls en apparence sans grands rapports avec elle. Il est toute
catégorie de malades très nombreux qui résument leurs ma-
ts en disant qu'ils ont peur des couteaux. Cela signifie que la
d'un couteau ou d'un instrument dangereux éveille immédia-
int dans leur esprit la pensée de frapper, de tuer à coups de
eau la personne qu'ils aiment le mieux. C'est là, comme on l'a
une obsession criminelle extrêmement fréquente chez les
puleux. Il en sera ainsi pour tous les objets, pour tous les
lomènes qui peuvent être considérés comme faisant partie de
B obsédante à un titre quelconque, comme objet, comme ins-
ent du crime, comme élément de l'action vertueuse ou mau-
! à laquelle songe le malade. Qes... a horreur des escaliers, des
très parce que nous savons qu'elle pense au suicide. Vi... ne
voir un puits, ni une rivière. Bor... craint les images reli-
»es, les églises, les hosties parce qu'elle a immédiatement
dées sacrilèges. Brk... ne peut plus voir les enfants, cela
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LA PERM\NF:NCE et I;É vocation de I/OBSESSION 71
éveille l'idée de les tuer. Qd..., scrupuleuse qui se reproche de ne
pas avoir bien soigné son mari, est obsédée par la pensée qu'il va
avoir une fluxion de poitrine ; son obsession la prend quand il
tousse ou quand il touche à son mouchoir. Za... qui se sent pous-
sée à avaler des épingles ou a en jeter dans les aliments des
autres est tourmentée par son obsession quand elle doit manger
ou quand elle doit toucher à une boîte h lait. Gisèle qui a des
remords de vocation parce qu'elle n'est pas religieuse souffre de
cette idée h propos de tous ses « devoirs d'état ». Le fait de recoudre
un bouton lui fait penser qu'elle a un ménage, qu'elle est mariée,
qu'elle n'est pas religieuse. « Mon enfant est devant moi comme
un remords vivant, sa vue me fait mal. »
Le point de départ de l'association peut être moins déterminé.
Ce ne sera plus un objet qui entre comme partie intégrante dajis
l'idée, ce sera un objet qui par sa forme ou simplement par son
nom ressemble à un des objets précédents: l'association se fera
par ressemblance lointaine. Xa... (2o4) est terrifiée parce qu'une
de ses bonnes s'appelle Antoinette, ce qui fait pensera l'échafaud
et au crime. Claire ne peut plus voir de bouteilles ni d'objet
long, sans voir le membre viril qui souille l'hostie.
11 suffira même d'une association de contiguïté dans le temps
ou dans le lieu. Si l'objet a été vu à un moment où l'idée obsédait
l'esprit, par le fait de cette contiguïté dans le temps il devient
dorénavant capable de l'évoquer. « Si j'ai eu une idée en me
lavant les mains, elle reviendra toujours dès que je verrai une
cuvette. » «^e pensais à mon chien enragé en traversant la place
de la Concorde, dit Fi... (83) et depuis, cette place m'est odieuse
et je ne puis rien tolérer qui me la rappellp. » Il ne veut plus entrer
dans son cabinet de travail parce que sa femme y a pénétré en
portant une robe qui peu auparavant avait traversé la place de la
Concorde. C'est ainsi que Lod... et Lise ont pris l'horreur de
leur mobilier, parce qu'elles se trouvaient sur telle ou telle
chaise quand elles avaient telle ou telle idée. C'est pourquoi
certains de ces scrupuleux sont améliorés, il faut le savoir, sim-
plement quand on les change de milieu parce que tous les objets
du milieu habituel ont pris une influence évocatrice. C'est pour-
quoi enfin ils retombent malades en rentrant chez eux. « Je
retrouve toutes mes idées en rentrant chez moi comme un paquet
posé, dit Gisèle, chaque meuble en est un vrai nid. » Elle ne se
rappelle les lieux et Içs temps que par les obsessions qu'ellç
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72 LES IDÉES OBSÉDANTES
avait dans ces circonstances, et en évoquant telle période de sa
vie, elle retombe dans une obsession correspondante.
La facilité et la complication de ces associations d'idées peut
aller encore plus loin, et l'histoire de Jean est tout à fait instruc-
tive à cet égard. Il a des obsessions relatives à la masturbation,
mais tout lui rappelle la masturbation. Le nez, par exemple, lui
semble avoir des rapports avec les organes génitaux parce que
les odeurs sont excitantes et il ne peut plus porter un lorgnon:
« c'est comme si cela me comprimait les organes, » Il ne peut
plus se moucher de même qu'il ne peut plus uriner « car le mou-
chage ou l'urinage me font le même effet que la masturbation ».
Nous avons déjà vu que ses scrupules génitaux se sont particu-
lièrement localisés sur deux femmes de sa connaissance. Tout ce
qui peut lui rappeler l'une ou l'autre de ces deux femmes va
évoquer le délire et l'on est étonné de la subtilité de l'association.
11 ne peut plus marcher avec certaines bottines parce qu'il s'est
aperçu une fois qu'il y avait sur elles le chiffre 49- Or la dame
de ses pensées avait 49 ans quand l'obsession a commencé. 11 a
la peur du chiffre 58 parce qu'une autre dame est née en i858.
Il ne peut écrire de lettres parce que la correspondance lui fait
penser a un bureau de poste où il a vu cette personne. Il ne
peut se coucher dans son lit parce que ce lit est dirigé de ma-
nière que la tète soit dans la direction de la province où se
trouve l'une de ces dames ; il ne peut manger a table quand il
tourne le dos au quartier Montmartre où il a rencontré l'autre.
Il est effrayé par tous les noms qui commencent par un A, car
ces noms évoquent la pensée d'un de ces prénoms. Le dernier
incident peut dispenser d'énumérer toutes ces associations d'idées.
On lui sert à table un gâteau qu'il trouve bon, et par malheur il
en demande le nom. Sa mère lui répond : « c'est une Charlotte. »
Une terrible crise s'ensuivit : H avait avalé Charlotte, il avait
sa tête dans l'estomac, il l'avait dans le sang, et toutes les idées
erotiques étaient cpouvantablement surexcitées par cette présence
continuelle de Charlotte au dedans de lui-même.
Bientôt l'association semble se généraliser. Il ne suffit pas
que la moindre consonance vienne faire penser à l'une de ces
deux personnes. Toute femme, tout objet de la toilette féminine
et même la présence de sa pauvre mère suffit à évoquer tout
le délire. Un détail quelconque capable d'évoquer la pensée de
l'inconduite amène le même résultat. Il suffit qu'il ait entendu
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LA PERMANENCE ET L'ÉVOCATION DE L'OBSESSION 73
dire qu'un personnage politique n'a pas eu une mort exemplaire
pour qu'il ne puisse plus voir TElysée, ni la Chambre des
députés, ni rien de ce qui a rapport à la politique, si bien que la
vue d'un kiosque de journal devient le point de départ de toutes
ses méditations sur les deux femmes qui le persécutent.
Chez lui les associations d'idées ne sont pas forcément directes,
elles peuvent être tout h fait indirectes et former de véritables
cascades. Il est tourmenté parce qu'il a dans sa poche un indica-
teur des cours qui se font à Paris. Cet indicateur ne semble
pourtant rien contenir de bien critique en lui-même, mais il
contient l'indication des heures du cours de M. D... auquel
Charlotte a été assister une fois quand elle est venue h Paris il y
a 3 ans. L'incident provoqué par le gâteau qui s'appelait une
Charlotte recommence dans des circonstances plus complexes :
Jean est très tourmenté parce que : i° il a mangé du pain ;
2** que ce pain vient d'un certain boulanger ; 3** lequel boulanger
a été recommandé à sa mère par un ami ; 4" dont la femme est
morte récemment un certain jour ; 5° qui était précisément l'an-
niversaire du jour ; 6** où il a commencé h être tourmenté relati-
vement à Charlotte. Dans ces conditions, on se demande s'il
existe un objet que Jean puisse regarder sans qu'il éveille par
association son délire.
J'insiste sur ce phénomène de l'évocation de l'obsession par
l'association des idées parce qu'il joue un rôle très important
dans l'évolution de la maladie. C'est par là que la maladie s'étend
et gagne en quelque sorte comme une tache d'huile. L'obsession
qui n'était que localisée et qui ne déterminait des troubles que
sur une seule pensée semble par l'association des idées s'étendre
à toutes les autres pensées et troubler tous les actes du sujet.
Précisément à cause de leur importance il faut bien se rendre
compte de la nature de ces associations d'idées. Elles sont évi-
demment singulières et ne ressemblent pas aux associations d'idées
que nous sommes habitués à observer dans les suggestions des
hystériques par exemple. A-t-on suggéré à une hystérique qu'elle
verra un portrait sur une carte, l'hallucination du portrait appa-
raît quand elle voit cette carte déterminée reconnalssable à des
signes précis, elle n'apparaît pas sur une autre carte et surtout
elle n'apparaît pas arbitrairement à propos de n'importe quoi.
C'est justement cette précision de l'association qui rend l'expé-
V
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LES IDÉES OBSÉDANTES
possible. De nn^me la vue d'une Hamme amène l'hallucination
icendie et la crise d'hystérie d'un jeune homme, on provoque
? la crise en lui montrant une allumette enflammée, mais
la provoque pas en lui faisant voir un paquet de cigarettes
5 seringue, quoique à la rigueur, d'après ce que nous a mon-
an, le paquet de cigarettes ou la seringue puissent faire
r à l'incendie. En un mot, dans ces cas l'association des
est précise, parce qu'elle est organisée d'avance, qu'elle
irtie de la conception, du système d'images coordonnées qui
tue l'idée fixe et qui est invariable.
contraire, chez le scrupuleux, un objet quelconque semble
ir jouer le rôle d'évocateur. Quel est l'objet, quel est même
t que l'on pourrait présenter h Jean sans qu'il trouve le
i d'y rattacher son obsession erotique ? 11 semble vraiment
association ne soit qu'un prétexte, une justification que le
e se donne à lui-même après coup. Les choses se passent
e si le malade commençait par penser lui-même presque
; temps à son obsession et cherchait ensuite avec ingéniosité
'apport lointain pourrait bien exister entre son obsession
Luelle et les objets extérieurs afin de justifier sa préoccu-
i constante.
.. (4i), femme de 38 ans, grande hypocondriaque, se plaint
uer de malheur car elle rencontre tout le temps des
qui lui font penser à la maladie « une bouteille de phar-
jctée dans le bois de Boulogne, vous voyez que je n'ai pas
ince ! » Je fais prendre quelques précautions aux personnes
surveillent pour que l'on évite absolument déparier devant
e maladies, de lui montrer des malades. Elle échappe a la
ilance pour aller chercher des malades et les interroger sur
lal, puis elle pousse des cris de désespoir en se plaignant
B conversation a encore rappelé son obsession. 11 en est
nment de même pour Jean qui travaille à découvrir ces
ations d'idées bizarres dont il se plaint. 11 est très préoc-
par les femmes de chambre qui entrent chez ses parents et
ceux-ci doivent choisir une femme de chambre nouvelle,
rche avec grand soin si elle n'éveillera en lui aucune asso-
II d'idées dangereuse avant d'accorder son consentement,
uents lui proposent un jour de faire entrer une femme de
3re dans la maison et lui demandent s'il trouve a leur choix
ues inconvénients. Il examine minutieusement les noms,
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LA TENDANCE A L'ACTION, L'ABSENCE D'EXI^CUTION 75
préDoms, pays et date de naissance, figure, antécédents de cette
servante et ne trouve rien à lui reprocher : la femme de chambre
est donc admise. Jean reste très inquiet à son sujet, il examine
tous les jours tout ce qu'il apprend sur elle et cependant pen-
dant quinze jours il est forcé de convenir que rien en elle ne
rappelle Charlotte. Mais quelques jours après il accourt désespéré
nie dire .«qu'un grand malheur lui arrive, bien par hasard: il savait
depuis l'entrée de la femme de chambre qu'elle avait été domesti-
que chez une madame Pâtissier et cela ne Tavait pas troublé, mais
brutalement, comme par un coup de bâton, Pâtissier lui a rappelé
Galette, or parmi les amies de Charlotte il y a une madame Ga-
lette dont elle a souvent parlé. N'est-ce pas malheureux que ses
parents aient choisi justement une femme de chambre qui le fasse
penser à Charlotte. »
Sous cette forme l'association n'est point du tout semblable à
celle qui caractérise les suggestions des hystériques. Ce n'est pas
une association automatique résultant de liaisons d'idées ancien-
nement établies, c'est une association cherchée et construite
actuellement par le sujet. C'est une manie de V association qui est
une conséquence de la fixité, de la permanence de l'idée ou
plutôt, comme on l'a vu, de la manie relative à cette permanence.
Nous retrouvons donc déjà dans ces premiers caractères de la
permanence et de l'évocation des idées les deux tendances carac-
téristiques de l'obsession. Il y a une exagération de la perma-
nence et de l'évocation, mais cette exagération ne consiste pas
en une nécessité complète qui s'impose au sujet, il y a quelque
chose de volontaire dans ces phénomènes et c'est ce double phé-
nomène qui constitue une sorte de tic ou de manie.
2. — La tendance à l'action, l'absence d'exécution.
Le second caractère que nous présentent les obsessions c'est
l'impulsion, c'est-à-dire la tendance à l'acte. Ce caractère est évi-
demment le plus important au point de vue pratique, puisqu'il
constitue le danger social de cette maladie. Les obsessions crimi-
nelles surtout vont être fort graves si elles poussent les malades
à accomplir réellement les meurtres, le suicide, les crimes contre
nature auxquels ils révent. C'est aussi le cîircictère qui intéressé
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LES IDÉES OBSÉDANTES
e malade, car il est épouvauté k la pensée qu'il va exécu-
^rîmes et une grande partie de son mal est causée par
•reur de Texéeution.
re part, ce caractère de la tendance h Tactlon est si réel
idées que beaucoup d'auteurs ont même admis une classe
[ère parmi ces idées maladives qu'ils désignèrent par le
mpulsions, pour les distinguer des autres obsessions.
li, comme M. Arnaud, réunissent toutes ces idées sous
commun d'obsessions admettent encore parmi ces obses-
1 groupe qui serait spécialement les obsessions impul-
crois qu'il faut aller plus loin encore et reconnaître que
ion est un caractère commun à toutes ces obsessions, bien
îsente des degrés assez variables.
clair que ce caractère sera plus net dans le groupe que
île les obsessions criminelles. « Toutes mes idées, dit
nt une tendance à se transformer en actes, je vais jeter
ten par la fenêtre, je vais brûler un billet de banque,
un enfant, etc.. » « Quand je pense au chien enragé, j'ai
t envie de me jeter sur les gens et de les mordre. » « Je suis
h voler les gens, à organiser des plans pour faire voler
s personnes, h faire des sacrilèges en brisant des hosties,
les choses pas convenables la nuit, etc. » Ces mots, « je
e, j'ai envie de faire, je suis poussé à faire, » reviennent
se dans le langage de ces malades. On a souvent démontré
ut encore le vérifier en étudiant l'exécution des sugges
pnotiques que ces expressions et ces sentiments corres-
au début de l'exécution réelle, ils résultent de la sensa-
pelites contractions musculaires, de petits mouvements
icés dans une certaine direction. « Mes mains se dirigent
pot à tabac, disait Delbeuf quand il décrivait l'envie de
me cigarette. » « Mes mains commencent à serrer et à
disent tous ces impulsifs, » « mes mains s'avancent pour
nner la culotte de mon père, disait Vob. » On peut
•s constater chez beaucoup ces mouvements du corps, ces
iients de physionomie qui constituent le début de l'ac-
faudrait pas croire que dans les autres obsessions, ce ca-
impulsif soit absent. « Entre les obsessions du remords ou
'ainte d'un acte et l'obsession impulsive il n'y a pas de
ition tranchée, elles sont toutes accompagnées d'une ten-
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LA TENDANCE A L'ACTION, L'ABSENCE D'EXÉCUTION
dance à Tacte * ». « La phobie d'un acte a beaucoup de rapj
avec IHmpulsion à un acte : chez tous il y a coexistence
phobie et de propension impulsive... ^ » Aussi retrou ve-t-on
tout ce caractère impulsif: dans les impulsions sacrilèges, il
des mouvements pour cracher les hosties, pour les déchirer,
paroles pour blasphémer, des gestes pour exprimer le méj
Dans les obsessions de honte, Claire se laisse aller h crier
haut ses pensées de honte : « Ah, que je suis coupable, j*s
tête remplie de vilaines pensées, c'est terrible... » elle se r
par terre pendant des heures, elle déchire ses mouchoirs,
use ainsi une quarantaine en un mois, elle m^nge ses di
de lits, etc., elle est obsédée par la pensée qu'un prêtre lui
rhostie consacrée aux parties et elle refuse d'aller à la selle,
Nous ne considérons pas en ce moment les actes beaucoup
nombreux que font les malades pour résister à leurs obsessii
Nous constatons seulement qu'ils en font quelques-uns pour
céder.
Dans les hontes du corps, les malades sont si bien pouss
se cacher, à ne pas manger, qu'ils changent toute leur existei
restent enfermés pendant des années, et en arrivent à des é
de maigreur effrayante. Enfin, les hypocondriaques sont pou
à prendre des précautions invraisemblables et Jean se vante ;
raison d'en être arrivé à une vie d'ascète. 11 nous faudra m
revenir sur l'ascétisme fort curieux qui résulte de la maladie
scrupule. 11 est donc incontestable que, dans toutes ces ob
sions, il y a un caractère nettement impulsif. Sur ce point, d
leurs se confirme la loi générale qui veut que dans toute
prédominante, il y ait une tendance au mouvement.
Le problème important consiste à savoir jusqu'à quel p
cette tendance à l'acte est forte. Beaucoup d'auteurs et en j
ticulier Westphal, qui décrivait l'un des premiers ces idées,
appelle des impulsions irrésistibles, et beaucoup font de l'i
sistibilité un des caractères essentiels au point d'appeler
phénomènes des anancasmes {à^7r(Y.Ty. « L'impulsion, dit M. B*
1. L. Groignac, Des impuhionset en particulier des obsessions impulsives. 1
de Bordeaux, 1897-98.
2. Pitres et Régis, Rapport sur les obsessions au Congrus de médecine de hfo
1897, p. 47
3. J. Donalh (de Budapcstli). Arrhiv. /. Psychiatrie, i8yC.
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LES IDÉES OBSÉDANTES
node d'activité cérébrale qui détermine irrésistible-
lent la production d'un mouvement, d'un acte simple
î \ » Cette irrésistibilité semble se présenter dans
ins hypnotiques, dans les somnambulismes'hystéri-
sujet accomplit rigoureusement et sans hésiter les
uelles il rêve. En est-il de même dans ces obsessions
ux ?
remier groupe d'observations, le plus important, car
s deux tiers des malades, la réponse ne soulève au-
té. Ces obsédés qui, si on en croit leur langage, res-
impulsions les plus épouvantables, n'exécutent en
u tout. N'est-il pas curieux que dans tant d'observations
criminelles portant sur plus de 200 malades, recueil-
une douzaine d'années, je ne puisse noter aucun
. Je n'ai jamais vu aucun crime commis, aucun suicide
• un de ces obsédés. Ce ne peut être là un fait dû au
aut qu'il y ait dans ces obsessions une bien faible
►asser h l'acte. C'est évidemment en plaisantant que
écrit son émotion en présence d'un malade de ce
moment où je vous parle, lui disait son malade,
vif désir de vous étrangler, mais je me retiens. —
cère venant de la part d'un homme taillé en Hercule
jfléchir..., nous dit l'auteur. » Qui donc a jamais
îux de semblables discours des obsédés ? D'ailleurs
>ut de suite : « Le point intéressant de cette curieuse
c'est que cet homme n'a jamais commis un acte
e ; il est toujours resté correct et a toujours pu se
loment critique. Il était bien sur les frontières de
es disent, il est vrai, qu'ils résistent avec beaucoup
impulsion ; ils emploient toutes sortes de procédés
is curieux pour résister. Un malade célèbre se liait
i^cc un ruban pour résister h l'impulsion de l'homi-
lalades ont tous des procédés analogues que nous
ud^icr. Il suffit de remarquer maintenant que les
le doivent pas être bien terribles puisque de pareils
n, De l'impulsion, spécialemeut dans ses rapports avec le crime. Thèse
Vontières de la folie. Revue scienlijlque . , i883, I, p. 3.
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LA TENDANCE A L'AGTÏON. L'ABSENCE D'EXÉCUTION 70
simulacres suffisent pour les arrêter tous. Morel' avait déjà noté
que les impulsions au suicide n'aboutissent jamais h une termi-
naison fatale, Ladame remarque que de telles impulsions restent
presque toujours théoriques, nous voyons que cette conclusion est
exacte dans le plus grand nombre des cas.
Un deuxième groupe déjà beaucoup plus restreint contient des
malades qui exécutent réellement quelque chose, c'est-à-dire qui
font certaines actions ayant un certain rapport avec leur obses-
sion. Pr... (210), femme de 32 ans, a été très émue par la ren-
contre d'un homme dans un couloir obscur, elle reste obsédée par
la pensée que cet homme a réellement abusé d'elle, qu'elle est
enceinte et qu'elle veut se faire avorter. Ne pouvant résister da-
vantage à cette impulsion qui la désespère, elle a cédé et a
pris... une cuillerée à café d'huile de ricin. Ger... pour me
prouver qu'elle ne peut résister à l'idée de tuer son enfant,
me raconte qu'elle l'a poussée avec la main. Elle voulait a se
détruire et savait qi^'un flacon de laudanum la tuerait, aussi
elle en a pris trois gouttes. C'est bien la preuve, dit-elle^
qu'une autre fois elle prendra le flacon tout entier ». Qes...
qui veut se jeter par la fenêtre se contente de se jeter par terre
dans sa chambre. Vi... n'achète pas réellement du poison, comme
elle le rêve, mais elle entre cependant chez le pharmacien et
achète deux sous de violettes, pour prendre quelque chose. Jean
ne semble céder en aucune manière a ses innombrables impul-
sions erotiques ; mais il vous fait observer lui-même qu'il ne
ferme pas complètement la braguette de son pantalon^ c'est tout
ce qu'il peut faire comme crime génital. Les sacrilèges qui songent
à souiller les autels se bornent tout au plus à prononcer du bout
des lèvres le mot « cochon » en pensant au bon Dieu. D'ailleurs,
on pourrait considérer les paroles comme des actes incomplets
de ce genre et ces malades qui. ne tuent pas commencent un peu
h réaliser leur obsession en parlant de tuer,
A. côté de ceux-ci, d'autres semblent réaliser davantage leur
idée, mais il faut noter qu'ils prennent eux-mêmes des précautions
curieuses pour que leur action n'ait aucune conséquence et reste
insignifiante. Tel est le cas intéressant rapporté par Bail : w on
cite, dit-il, le cas d'un homme d'Etat célèbre qui a rempli dans
son pays les fonctions politiques les plus élevées et qui, lorsqu'il
I. MoreL Délire émotif , p. 4oo.
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LES IDÉES OBSÉDANTES
ville, est invariablement accompagné d'un domestique
ment chargé de rapporter à domicile les couverts d'ar-
e son maître ne manque jamais de dérober *. » Je suis dis-
roire que si ce personnage prenait réellement les couverts
rce qu'il comptait sur la présence de son domestique.
i cas du même genre : Bs... (187), un homme de 4i ans,
Tipulsion au suicide à la suite d'une obsession amoureuse,
ce par se mettre au téléphone, appelle sa mère et son
, vérifie s'ils Técoutent et leur annonce que maintenant
[ et qu'il avale du chloroforme. Naturellement on court h
lurs et on constate qu'il a réellement pris une certaine dose
oforme ; il est d'ailleurs très heureux de se laisser soigner,
îrniers cas nous permettent de comprendre comment de
1 temps, d'une manière exceptionnelle, il peut arriver des
s. L'obsédé, qui ne voulait exécuter qu'un simulacre, a
s ses précautions et, si l'acte s'exécute complètement,
t à fait contre les intentions du malade. M. Séglas* fait
es justement remarquer que l'obsédé peut se laisser
les actes extrêmes sans céder pour cela à des impul-
is en arrivent quelquefois, assez rarement à mon avis,
de, non parce qu'une obsession impulsive se réalise,
rce qu'ils sont désespérés par leur maladie et qu'ils se
) sang-froid. M. Nicoulau ^, dans un article intéressant,
une femme obsédée par l'idée et la terreur de la mort
[irrive à des tentatives de suicide pour échapper à Tan-
ausée par la crainte de la mort. En dehors de ces cas
nnels, la réalisation de l'impulsion est chez les malades
oupe tout à fait insignifiante.
semble nécessaire d'admettre un troisième groupe com-
n petit nombre de malades qui semblent exécuter com-
it ou du moins d'une manière assez grave des actes
ort avec leurs obsessions. Ce seront, pour prendre
i exemples, les honteux de leur corps qui refusent
nt de manger, les dipsomanes, les morphinomanes et
des du même genre qui s'intoxiquent réellement.
Revue scientifique, i883, I, p. 2.
s, Leçons sur les maladies mentales, i8{)5, p. 87.
ilau, Thanatophobic et suicide. Ann. mêil. psychoL, 1892, I, p. 189.
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LA TENDANCE A L*AGTION. L^AftSENGE D*EXÉGUT10\ 81
On a déjà vu le cas typique de Nadia qui, de peur de grossir,
de se développer, ne mangeait plus chaque jour qu*un peu de
bouillon, un jaune d'œuf, du thé et du vinaigre. Voici un second
cas du même genre : Red..., une jeune fille qui avait toujours été
très impressionnable et très scrupuleuse, a, vers i8 ans, une pre-
mière crise de refus d'aliments. Elle fut examinée h ce moment
par MM. Brissaud et Souques * qui publièrent une observation
dans la nouvelle Iconographie de la Salpôtrière sous ce titre Délire
de maigreur. Elle était en effet d'une maigreur squelettique,
elle guérit cependant en ce sens qu'elle consentit rapidement à
s'alimenter et reprit ses forces et son embonpoint. Mais à 20
ans le même accident reparut, plutôt plus grave ; elle recom-
mença à refuser de manger et en outre elle s'efforçait de provo-
quer les vomissements quand elle avait mangé et prit l'habitude
de vomir très facilement. La maigreur et la faiblesse redevinrent
de nouveau très inquiétantes et elle fut reconduite à la Salpê-
trière où j'ai pu étudier cette seconde crise.
Elle était dans un état d'inanition très avancé, très maigre, la
peau sèche, rugueuse, froide, la langue sèche et rouge, la respi-
ration rapide, le pouls petit et précipité ; elle avait certainement
poussé très loin le refus des aliments et les efforts de vomisse-
ment. J'hésite cependant, comme pour Nadia et pour les mêmes
raisons à faire de cette malade une anorexique hystérique. Dans
toute son histoire, avant et après cet accident, Red... n'a jamais
présenté aucun phénomène hystérique; pendant longtemps, avant
l'apparition des accidents graves, elle avait conservé le senti-
ment de la faim ; elle n'a jamais eu de besoin exagéré de mouve-
ment. D'autre part, c'était tout à fait une scrupuleuse : elle avait
commencé par se reprocher les oublis de confession, elle avait
imaginé de s'astreindre à bien des pratiques superstitieuses
et malgré ses efforts elle était sans cesse inquiète et tourmentée.
Elle était obsédée par la vue des misères, des maladies,
par l'état même de la température : « c'était sa faute s'il y
avait tant de malades, c'était sa faute s'il faisait mauvais temps et
si les pauvres gens en souffraient. » Dans ces conditions elle
avait cru voir un cercle de feu et l'avait interprété en disant qu'elle
était damnée. Elle restait obsédée par la pensée que sa damna-
I. Brissaud et Souques, Délire do maigreur. Nouvelle Iconographie de la Salpé-
trière, 1896.
LES OBSESSIONS. I. 0
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LES IDÉES OBSIÎIDANTES
lait indigne de manger. C'est ce qui avait déter-
mière crise de refus d'aliments, à i8 ans. Ce refus
l'hôpital en vertu de ce raisonnement: « ici on me
jer, je ne suis donc pas responsable si je le fais. » La
e a l'âge de 20 ans se rattachait également au scru-
laniëre très nette quoique diflerente : elle était deve-
e d'elle-même, à la suite de toutes les réflexions
elle s'imagina que sa digestion était ridicule, qu'elle
des rougeurs au visage et surtout des éructations
Ile avait d'autant plus honte de ces choses qu'elle
idre après son repas au cours d'un professeur dont
ut à fait amoureuse. C'est à ce moment qu'elle se
e a ne plus manger et à vomir pour débarrasser l'eslo-
rapidement pour montrer la fréquence du fait le cas
omme de 26 ans, As... (102), parvenu lui aussi comme
photographie* à un état de maigreur invraisemblable,
'habitude des vomissements provoqués pour des rai-
[le genre dépendant de la honte du corps et de Thy-
ans ces cas, l'impulsion semble donc se réaliser d'une
re par le refus d'aliments et l'inanition,
srvations, je voudrais rattacher un cas plus curieux
e amène aussi une malade à faire de grandes sottises,
^session amoureuse de Byl..., cette jeune fille qui
la honte d'elle-même, à force de s'imaginer qu'elle
ndigne de tenir son rang était devenue amoureuse
jardinier de la maison. Ce qui est curieux c'est que
le semble avoir suivi l'obsession : elle attend qu'elle
our avoir sa liberté, la nuit à l'aide d'une échelle
ans la chambre de ce garçon, lui fait sa déclaration,
ït lui fait promettre de la demander à ses parents.
1 elle raconte son équipée à ses parents et avec un
»rmidable s'obstine dans son projet de mariage. Ne
considérer de nouveau ce cas comme une exécution
d'une obsession scrupuleuse? Ces faits nous montrent
se des précédents que dans certains cas qui ne sont
', ces impulsions présentent une certaine force suflî-
îterminer des actes réels,
je ne crois pas que l'on puisse d'après ces seuls
me de cet ouvrage, observalion lou.
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LA TENDANCE A L'ACTION. L'ABSENCE D'EXÉCUTION «3
exemples rapprocher ces obsessions des suggestions ou des im-
pulsions hystériques qui s'exécutent automatiquement. L'exécu-
tion quoiqu'avancée n'est pas en réalité complète, ces malades ne
refusent pas tout à fait de manger, elles réduisent seulement
d'une manière énorme leur alimentation. Byl..., dans la chambre
du cocher, se borne à se laisser embrasser, mais en somme ne
lui cède pas. Une fois guérie, elle nous avoue qu'elle n'était pas
bien certaine d'aller jusqu'au bout de ce mariage et qu'elle aurait
été bien embarrassée si ses parents n'avaient pas résisté. Une
deuxième remarque nous montre que ces malades qui refusent de
manger vont en somme plus loin qu'elles ne croient aller. Ce
sont des jeunes gens très ignorants des notions d'hygiène qui ne
se rendent pas compte du danger de leur alimentation insuffi-
sante. Nadia m'assure qu'elle n'avait jamais eu l'intention de
mourir de faim et qu'elle aurait cessé si elle avait cru sa vie en
danger. Ces malades qui, nous le verrons, ne peuvent arriver à
croire ne sont pas convaincus par les affirmations de leur entou-
rage, ils se comportent un peu comme les obsédés dont nous
venons de parler qui se suicident réellement, quand ils croient
ne faire qu'un simulacre. Ajoutons qu'une fois entrés dans cette
voie ils présentent des troubles de l'estomac et peut-être des
délires par inanition qui changent le caractère de la maladie. Je
ne crois donc pas que ces cas évidemment plus embarrassants
doivent changer notre conception primitive, sur le peu de puis-
sance de ces impulsions.
Il reste encore des obscurités dans ce problème difficile : cer-
taines obsessions impulsives semblent avoir le singulier privilège
de passer à l'acte beaucoup plus régulièrement que les autres.
Je citerai par exemple la morphinomanie et la dipsomanie.
Je me demande si l'absorption du poison ne change pas les
conditions dans lesquelles se développe l'obsession. Après
les premiers verres l'état mental du scrupuleux d'ordinaire
indécis, hésitant, incapable d'aller jusqu'au bout de rien
est changé. Le fait est évident, et l'on connaît ces éreu-
tophobes qui ont besoin de se griser pour pouvoir affronter les
regards. On sait aussi que la morphine laisse dans l'organisme
des substances capables de provoquer le besoin intense du poison
primitif : il se peut que ces modifications de l'organisme entrent
pour une certaine part dans la réalisation anormale de ces impul-
sions.
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LES infiKS OHSF.DANTES
peut citer des cas dans lesquels des obsédés ont
véritables crimes, je n'en ai pas observé pour ma
[)ici une curieuse observation de M. Vallon: un indl-
depuis longtemps par Tidée de tuer une fille publi-
tirer sur une femme plusieurs coups de revolver '.
'empêcher de douter dans ces cas de l'exactitude du
me semble probable que d'autres facteurs: épilepsie,
ifTaiblissèment intellectuel, imbécilité ont dû inter-
difier le pronostic habituel des obsessions. C'est
)inion déjà défendue dans le rapport de MM. Pitres
dans la thèse de M. Le Groignac sur les im-
fois que j'aî eu l'occasion d'examiner un malade
é à ce genre d'obsessions, j'ai dû constater que ce
i obsédé typique se rattachant aux psychasthéniques
dans cet ouvrage mais qu'il s'agissait d'une autre
laie. Voici par exemple un personnage célèbre, le
., qui a été étudié par Chambard, par Luys, par bien
li a échoué pendant quelque temps à la Salpêtrière.
inombrables obsessions, il a maintenant celle des
ux ». II lui faut couper les petits frisons des femmes
ou les poils du pubis, et quand il les a dans sa
arrive à l'éjaculation. Cette impulsion est vraiment
il fait irrésistible, il devient,. comme il le dit, som-
empare réellement des « petits cheveux » malgré les
langers.
i et d'autres du même genre l'impulsion se réalise
t d'une manière irrésistible. C'est à mon avis que le
ologique n'est plus du tout le même et que la ma-
rente. Mau... a une anesthésie tactile générale, un
t du champ visuel à 3o°, il a des somnambulismes,
ivies d'amnésie, etc. Kn un mot c'est un hystérique,
ns dans le mécanisme de la suggestion et de l'idée
le. Il faut savoir que ces. maladies mentales ne sont
ées par le contenu de l'obsession mais par la forme
3 qu'elle prennent. Une hystérique peut être éroto-
été médico-psychologique, 28 avril iSgS.
gis, op. cit., 1897, p- ^i-
;, Des impulsions et en particulier des obsessions impulsives. Thhsc de
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LA TENDANCE A LA REPRÉSENTATION, L'HALLUCINATION SYMBOLIQUE 85
mane comme Jean, mais elle réalisera son impulsion d'une toute
autre manière. Je crois donc que, si on rencontre des obsessions
qui s'exécutent d'une toute autre manière que celle qui vient d'être
décrite il est bon de les rattacher à d'autres maladies: l'épilepsie
oa l'hystérie par exemple et non à l'état mental psychasthénique
que nous étudions maintenant.
En résumé, les obsessions des scrupuleux présentent une cer-
taine tendance impulsive, une certaine disposition à passer à
l'acte. Mais cette disposition loin d'être irrésistible comme on l'a
dit à tort n'est jamais complète, le malade s'effraie de son impul-
sion plus qu'il ne lui obéit. Il éprouve un singulier besoin de la
croire terrible et irrésistible ; il y a comme une vanité du crime,
comme un secret désir de se croire poussé au crime qui lui
fait effectuer tant bien que mal certains commencements d'ac-
tion. Ce n'est que par accident que ces simulacres deviennent
des réalités. Ici encore, c'est une manie de croire à l'impulsion
plus qu'une impulsion proprement dite.
3. — La tendance à la représentation, l' hallucination
symbolique.
A côté du développement des éléments moteurs et de la ten-
dance à l'action, il faut placer le développement des éléments
représentatifs et la tendance à l'hallucination. Les obsédés que
nous étudions sont-ils susceptibles d'avoir au cours de leurs ob-
sessions de véritables hallucinations ? La question a soulevé bien
des controverses. M. Jules Falret avait soutenu autrefois* qu'un
des caractères distinctifs de ces obsédés, c'est qu'ils n'arrivent
jamais à l'hallucination véritable : cette proposition trop absolue
a été vivementcontredite. Buccola, Tamburini, Séglas*, Stefani',
I . Jules Falret, Obsessions intollectuelles et émotives. Rapport au Congrhs inter-
national de médecine mentale. Paris, 1889 ; Archives de neurologie, 1889, ï'» ^7^-
a. Scglas, De Tobsossion hallucinatoire et do Thalluci nation obsédante. Ann. méd.
psychoL, 3o nov. 1891, Leçons cliniques, p. 107.
3. Slefani, Ann. méd. psychoL, 189a.
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^
LES IDfiES OBSI^DANTES
ie^, Raymond et Arnaud^ ont soutenu Texis-
Q hallucinatoire ». J'ai moi-même insisté à
out en étudiant les idées fixes de Justine sur
marquables qui accompagnaient ses obses-
z qu'il y ait deux opinions tout à fait contra-
t.
I peut s'expliquer d'abord d'une manière
ertains cas les auteurs ne parlent pas des
^connais pour ma part que les obsédées hal-
rites comme Marcelle et Justine étaient des
obable, étant données la fréquence et Tim-
es chez les hystériques qu'il doit en être de
-uns des malades hallucinés décrits par les
oposition de M. Falret resterait vraie pour
int dits du type psychasthénique.
cependant embarrassante, car au moins un
es derniers malades présentent des phéno-
Ic l'hallucination dont la nature doit être
ndriaques arrivent à se représenter certains
X comme s'ils avaient des hallucinations du
\c parle pas de leurs dysesthésies que j'étu-
propos des troubles émotionnels. Je parle
^'iscérales et tactiles qui semblent assez
trinaires. Une malade de Wernicke, citée
égis, avait la sensation d'être couverte de
entendait leur bruissement^. Une de nos
ime de 5o ans, qui a accouché à Tàge de
souffert de son ventre. Il lui prend main-
ce des crises d'accouchement », elle prétend
écision dans les reins, dans le ventre, dans
elle accouchait: « c'est au point de s'y mé-
Deux autres ont l'idée fixe d'un ver intes-
imme de 63 ans, « le ver remonte à la gorge,
iychoL, 1892.
lalions succédant à des obsessions. Archives de neurol.,
Ann. mcd. psyrhoL, 1893, II, ao/|.
vrier 189^. — Névroses et Idées fixes, 1898, I, p. 161,
cd. Wochensch., a3 juin 1893 ; Pitres et Rog^is, op. cit..
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LA TENDANCE A LA REPRÉSENTATION, L'HALLUCINATIOX SYMBOLIQUE 87
il vient lui donner un petit coup dans la bouche puis il redescend :
il est tantôt dans le dos, tantôt à Testomac. « Vous n'entendez
pas le ver grouiller, il me remonte de nouveau à la gorge et il
faut que je prenne une gorgée d'eau pour le faire redescendre ».
Bé... a un ver solitaire dans le ventre « elle sent par ses glis-
sements froids qu'il se pelotonne jusqu'à Tépigastre. C/est un
ver araignée qui a de grosses pattes velues comme une araignée ».
Comme type d'hallucinations du sens tactile on peut étudier les
fluides de Jean. Il sait toujours exactement dans quelle direction
est située par rapport à lui la dame de ses pensées. S'il marche
dans cette direction ou s'il a le visage tourné vers ce point
tout va bien : il peut h la rigueur résister. Mais ce qui est
terrible c'est quand il tourne le dos à ce point de l'espace ;
alors le fantôme est dans son dos et se permet mille extrava-
gances. Il détermine des chatouillements, des frissons, des
« fluides » et la situation est intenable. Aussi Jean se préoccupe-t-il
énormément de l'orientation de son lit, dans la chambre, de sa
chaise à table. 11 en change la position jusqu'à ce qu'il ait trouvé
une situation où il ne tourne plus le dos à ce fantôme dangereux.
Le malheur c'est qu'il y a une autre personne située dans une
autre direction qui exerce à peu près la même influence et il est
bien difficile de trouver une situation qui ne l'expose ni b l'une, ni
à l'autre.
Les hallucinations auditives sont assez rares : en voici quelques
exemples. John Bunyan, auteur mystique anglais, atteint évidem-
ment du délire du scrupule, entend un jour une voix qui lui dît :
« veux-tu laisser tes péchés et avoir le ciel ou conserver tes
péchés et avoir l'enfer » et il voit Jésus dans le ciel*. M. Lépine
cite une observation singulière d'une malade obsédée qui est
contrainte d'entendre une voix répétant toujours une série
de 25 mots. L'observation un peu abrégée me paraît cependant se
rapprocher de nos malades^. M. de Sanctis rapporte une singu-
lière obsession musicale, obsession qui peu à peu devient impul-
sive et contraint le sujet à chanter intérieurement le même air '.
Dans une observation de M. Larroussinie, des voix viennent à
l'appui de la pensée de la malade et formulent les mêmes repro-
I. Josiah Royce, The case of John Bunyan. Psychological Review, 1894, Sa.
3. Lépine, Obsession verbale et auditive. Société de médecine de Lyon, 12 juillet
1894.
3, S. de Sanctis, Obsession et impulsion musicale, PoUclinico^ III, n° 4t 1896.
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LES IDÉES OBSÉDANTES
ibsessionMJnedenos malades, Per..., obsédée par une
arps relative à des poils sur son visage, entend au tra-
ur ses voisins murmurer : « poilue, poilue ! » Jean a
s hallucinations auditives : il est obsédé par le souve-
mme de chambre en Thonneurde laquelle il eut, croit
lières éjaculations. Ce visage très laid, d'ailleurs, nous
Jean n'est obsédé que par les femmes vieilles ou très
essine de profil. Il est animé de mouvements, la bou-
ouvrir et le fantôme se met à rire. Ce rire d'abord
devenu en quelques années absolument énorme, c'est
démesuré qui lui ouvre la bouche jusqu'aux oreilles,
déterminé par les actions du pauvre Jean, car la femme
; le surveille et se moque de lui d'une manière indigne
manière qu'il se conduise. Entre-t-il dans un tramway
3 de se trouver assis auprès d'une femme, l'image de
e chambre se met à rire parce qu'il est tourmenté par
^uitte-t-il le tramway et prend-il un fiacre pour être seul,
e chambre éclate tout à fait et lui dit : « Tu dépenses
ur ne pas te trouver en tramway avec des femmes,
) Il est difficile de trouver des hallucinations plus com-
pparence ; images visuelles complexes, en mouvement,
ées d'images tactiles dans le dos et dans certains cas
uditives.
'ésentations purement visuelles sont de beaucoup les
ntes ; nous les trouvons d'abord chez les sacrilèges. Un
M. Féré* voyait apparaître le membre viril. C'est aussi
ctérise les obsessions de Claire. Elle prétend voir appa-
itement devant elle un homme tout nu ou plutôt les
:uelles d'un homme en train de souiller une hostie con-
îen d'autres tableaux de môme genre. Lod... et Lise ont
îs hosties par terre surtout lorsqu'elles apercevaient un
/e... prétend qu'elle voit dans le ciel des croix et des
armi les malades qui ont des obsessions criminelles,
des femmes obsédées par l'idée de tuer, voit devant elle,
une figure traversée au niveau des yeux par un long
î cuisine (fig. i) D'ailleurs cette hallucination du cou-
sinie, HallucinaiioDS succédant à des obsessions. Archives de neurologie,
alhologie des émolionSy p. l\i^.
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LA TENDANCE A LA REPRÉSENTATION, L'FIALLUGINATION SYMBOLIQUE 89
teau pointu est fréquente, on la retrouve chez Mb... et chez plu-
sieurs autres. Vod... se voit couper le cou à sa petite fille. « Je
me voyais la saigner, la mettre dans un cercueil et jeter la boite
dans une grande mare d*eau sale. » Fa... qui croit avoir des im-
pulsions erotiques, « voit tous les hommes dans la rue se débou-
tonner et courir après elle ». Jean voit non seulement la servante
au fou rire lui apparaître à droite mais la dame de ses pensées
Charlotte perpétuellement devant lui ou dans sa tète.
^S^.
FiG. I — Dessin fait par la malade elle-mèmo pour représenter son hallucination,
le couteau est yu d'une manière beaucoup plus nelte que les traits du visage.
Dans le groupe des honteux les hallucinations sont particuliè-
rement curieuses. Une hallucination très fréquente est celle d'un
trou, d'un précipice dans lequel ils vont tomber ou dans lequel
ils sont tombés. Claire a longtemps côtoyé un grand précipice,
maintenant elle est au fond du trou et elle voit bien qu'il lui est
impossible de remonter. Mi..., femme de 4? ans, « voit morale-
ment un trou dans lequel il lui semble qu'elle tombe ; si elle ne
parvient pas h se tirer de là elle se tuera plutôt que de rester au
fond ». On se souvient que Pascal, qui d'ailleurs avait bien des
symptômes de la maladie du scrupule, voyait h ses côtés un pré-
cipice. On a beaucoup discuté sur rhallucination de Pascal : si
elle est historique, ce qui est fort douteux, il faudrait la rappro-
cher des autres hallucinations du même genre chez des scrupu-
leux, ce serait le meilleur moyen d'en comprendre la nature.
Il faut aussi rattacher au même groupe les cas suivants qui me
paraissent particulièrement intéressants. Un jeune homme de
20 ans, Voz..., vient se plaindre d'un trouble singulier : il est dis-
trait dans ses études et dans ses plaisirs par un spectacle gênant,
il voit sans cesse devant lui un mur, et ce mur il le reconnaît bien :
c'est celui de la première cour du lycée. Il est aussi gêné dans
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LES inriES OBSEDANTES
cur il marche saus cesse étroitement environné
IX en avant et deux derrière lui. Ce sont 4 arbres
a cour du lycée. Enfin il est encore plus embar-
oit des chaînes ou des cordes qui sont tendues
enroulent autour des arbres précédents et qui lui
n\ Rp..., un homme d'une trentaine d'années,
udier avec M. le P"" Raymond, voit passer devant
2;e à une distance d'à peu près 5 mètres. Ce pér-
it presque toujours le directeur d'une grande
l'air souriant, tantôt l'attitude et le visage cour-
it. Ces cas pourraient être multipliés facilement,
éalité très nombreux.
es se présentent avec l'apparence d'hallucinations :
jnomènes psychologiques qui semblent dans la
ijet se confondre avec le phénomène de la per-
™e, quoique pour un observateur placé en dehors
lit pas d'objet réel en rapport avec cette percep-
it représenter un système d'images correspondant
paraissent avoir l'apparence de l'extériorité, et
manière irrésistible. Aussi le sujet les donne-t-il
nations. Le jeune Voz..., Claire et Rp... viennent
ecin en demandant à être guéris de leurs halluci-
se borne à une observation superficielle, on les
nent pour des hallucinés. Cependant l'existence
complètes serait un fait singulier chez les scru-
nt ces malades qui n'arrivaient pas h l'impulsion
xécution réelle de leurs idées, arrivent-ils à la
umplète qui est un phénomène du même genre. Il
nettre qu'après un examen démonstratif.
ipart de ces malades, ces prétendues hallucinations
h l'examen. « Tout objet blanc, disait Lod..., me
stie, surtout quand il est sale, me force a regarder
5, quand je regarde, je vois bien que je me suis
ait qu'un crachat par terre. » Lise reconnaît même
' s'avance dans son délire presque jusqu'au mo-
is hallucinations, mais qu'elle s'arrête en deçà.
lie ce cas à la Sociélc de psychologie. Bulletin de l'Institut p$y-
[, p. i88.
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LA TENDANCE A LA REPRÉSENTATION, LU ALI.UCINATION SYMBOLIQUE 91
« Dans mes grandes peurs du démon je sentais que j'allais com-
mencer à voir quelque chose mais à ce moment je m'arrêtais. » Il
ne faut pas se tromper au langage de We... Elle ne voit pas
dans le ciel des croix et des saintes, elle cherche si elle les voit,
ce qui n'est pas la même chose. « J'ai peur de les voir, je veux
voir si franchement je les vois. » Tout cela ne ressemble pas à de
rhallucination.
En réalité il ne reste qu'un très petit nombre de cas embarras-
sants. Mais on peut alors faire sur ces hallucinations les remarques
suivantes, i" Ces hallucinations ne sont pas complètes et sont
loin de présenter toutes les couleurs, tous les détails que l'on
verrait dans un objet réel, il en résulte qu'elles sont vagues et
manquent de netteté. Il faut insister un peu et ne pas trop
inquiéter les malades en mettant en doute leurs hallucinations
pour obtenir tous les aveux sur ce point. Xa.. qui dessinait
le couteau au travers de la figure, remarque bien que la figure est
devinée plutôt qu'elle n'est vue. « J'ai besoin, dit-elle avec
naïveté, de dessiner cette image pour me rendre bien compte de
ce qu'elle représente. » Quoique Claire semble voir les images
les plus terribles, il est facile de constater que ce spectacle
manque beaucoup de précision. Il est impossible de lui faire dire
la forme de ce prétendu membre viril, la place qu'il occupe par
rapport à l'hostie. Elle n'ajafnaissu me dire s'il il était à la droite
ou à la gauche de l'hostie et dans bien des cas, elle s'embrouille
encore davantage : c'est quelque chose qui doit être comme un
membre viril sans qu'elle sache bien ce que c'est. « En tous cas
je suis bien cpnvaincue que c'est quelque chose de sale. » Pour
une image visuelle, c'est peu net.
Le dernier jeune homme Rp.,. serait fort embarrassé pour
décrire le personnage qu'il voit, car il a trop peur pour le
regarder, il sait qu'il le voit, mais en réalité, il ne Ta jamais bien
vu. Les hallucinations de Jean malgré leur précision apparente
sont tout à fait du même genre. Ces figures^sont vagues, efiacées,
« c'est comme si je la voyais, c'est comme si elle me parlait ». Ce
sont des images sans couleur et des paroles sans bruit. Le plus
souvent ces images semblent même s'effacer encore plus. « Je ne
vois pas le fantùme de M... puisqu'elle est derrière mon dos,
mais je sais qu'elle y est. » 11 arrive à employer à ce propos un
mot qui est intéressant. « je ne vois pas tout à fait, dit-il, cela
reste implicite. » Il entend par là qu'il n'y a presque aucune
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LES IDÉES OBSÉDANTES
se, qu'il y a à peine un petit signe vague qui suffit
r. « Je n'ai rien dans l'idée qui soit précis, je ne vois
e, je n'entends pas sa voix, je ne murmure pas son
sndant je sais que je pense tout le temps à elle ».
5 pouvais guère me contenter de cette obsession per-
îuse qui n'était rien, qui ne consistait en aucun fait
ne, j'ai insisté et Jean prétend avoir fait dans certains
larque curieuse. « Charlotte a en réalité une voix très
rouler les r. Cette prononciation m'a frappé et quand
ié implicitement je sens dans la bouche, sur la langue,
•es petit roulement d'r. Cela suffit, je sais que je pense
l à Charlotte. » Dans d'autres cas il sent dans son
e si une lettre de son nom était écrite. C'est à ces
petites que se réduisent les obsessions et c'est lui
comme conclusions toutes ces prétendues hallucina-
•emarque intéressante, c'est que ces hallucinations
3nt beaucoup souffrir les malades, « plus c'est vague
, plus c'est odieux ». Le défaut de précision, disait
ig, donne un sentiment de terreur tout particulier :
; a l'étudier avec plus de soins en parlant de l'inquié-
malades.
pas une pure diminution dans 'l'intensité des images,
ut de complexité : des catégories essentielles d'images
tement défaut. Il est impossible d'ajouter les images
nt et de préciser l'hallucination. Chez les hystériques
es, on peut faire naître l'hallucination en éveillant
it du sujet les images les unes à la suite des autres,
autrefois que cette complexité croissante, ce dévelop-
omatiquc des éléments de l'idée jouaient un grand
hallucination *. Mais ici les malades n'arrivent pas à
et l'attention supprime au contraire le peu qu'ils
:oup d'auteurs et en particulier M. Séglas ont aussi
ue ces hallucinations n'avaient pas le caractère de
si important dans la perception et dans les halluci-
nplètes. Cette -remarque est juste pour un certain
malades.
ismc psychologique, 1889, p. aoi, accidents mentaux des hystériques,
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LA TENDANCE A LA REPRÉSENTATION, L'HALLÙCINAtlON SYMBOLIQUE 93
Si les hallucinations de Jean manquent de précision, elles man-
quent aussi d'extériorité, il est disposé à les localiser dans « le cer-
velet » ou bien dans le front « au sommet à droite, où elles ont
fini par déterminer comme une saillie de Tos ». Aussi reconnaît-il
lui-même la nature du phénomène « c'est, dit-il, mon fou rire
cérébral. » Claire est très embarrassée quand on veut lui faire
préciser la place extérieure de son image, elle croit que Ten-
semble est à gauche, mais elle ne sait pas bien où. « D'ailleurs,
si elle ne peut pas bien préciser l'endroit, ce n'est pas de sa faute,
Tobjet est trop loin... non pas trop loin en distance... c'est au
loin comme si c'était une autre personne qui le verrait... Cette
autre personne verrait que c'est bien un membre viril, verrait
bien sa place, moi je ne le vois pas. » Sans parler ici des troubles
de la personnalité que cette phrase révèle, nous noterons seule-
ment combien la localisation extérieure reste vague.
Cependant je n'oserai pas dire que ces hallucinations manquent
tout à fait d'extériorité, comme M. Séglas le disait a la Société
psychologique. Il y a des malades qui ont le sentiment de cette
extériorité. Voz... voit les arbres, le mur, les chaînes, en dehors
de lui : « c'est bien en dehors de moi puisque cela m'empêche d'a-
vancer, il me semble que cela me barre le chemin. wRp... soutient
que l'image de son directeur esta 5 mètres devant lui. Même pour
les malades précéden-ts Jean et Claire qui finissent par mettre
l'hallucination dans leur tête, il ne faut pas conclure trop vite.
C'est quand on les interroge, quand on les force à réfléchir qu'ils
hésitent à considérer leur image comme extérieure. Au début
quand ils parlent spontanément ils affirrpent que l'image appa-
raît « devant eux, à l'extérieur ». Pourquoi donc changent-ils d'avis
à la réflexion, c'est qu'ils sont eux-mêmes étonnes qu'une image
puisse être extérieure quand elle manque d'un caractère essentiel
des choses extérieures.
3® Le fait le plus important, en eflTety^ce n'est pas précisément
que ces images manquent d'extériorité, c'est qu'elles manquent rfe
réalité. Ce caractère très important se rattache au sentiment de la
croyance, de la certitude. Un objet nous paraît réel quand nous
mettons tous nos actes, tous nos sentiments en accord avec l'image
qu'il présente. Or, nos sujets se rendent compte que cette hallu-
cination n'est pas pour eux une réalité. Ils disent eux-mêmes que
ce sont « des sortes d'hallucinations, » « des irréalités ». Leur tour-
ment consiste précisément à douter de la réalité de ces images, à
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LES IDÉES OBSÉDANTES
jr leur existence. L'une de ces malades se demande
îlle a la vocation religieuse ; elle suppose que cette
Ile existait, se manifesterait par des signes divins,
e saintes dans le ciel. Aussi se demande-t-elle tout
le a vu des saintes dans le ciel: un moment elle vous
rinstant après elle reconnaît qu*elle serait bien fâchée
Le malade qui voit passer le directeur de TEcole est
cas; il a la manie des présages, pour se décider à
ens ou dans l'autre malgré son aboulie il veut voir
ecteur souriant ou menaçant, et il s'interroge pour
bien vu. Non seulement ce sentiment de réalité ex-
éfaut, mais il est curieux de remarquer qu'il n'appa-
Si ce phénomène ne différait de l'hallucination
par un moindre de^ré, il devrait par le progrès de
rapprocher du sentiment de la réalité. Eh bien, si
rrivaient jamais à la conviction de leurs hallucina-
ent guéris, ou du moins ils changeraient la nature
e, ce que nous n'observons pas. Ces images mêmes,
raissent vaguement extérieures avant la réflexion,
irs pour eux irréelles et douteuses.
:inations présentent encore un autre caractère impor-
elles sont symboliques : elles ne sont pas constituées
entation d'un objet intéressant en lui-même, mais
Il d'un signe qui résume une quantité d'autres pen-
2 du symbole est si importante chez les scrupuleux
pouvons l'étudier ici d'une manière incidente, il
1er ce caractère qu'elle donne à l'hallucination,
iprès ces observations que les hallucinations des
nt loin d'être identiques aux hallucinations com-
»tériques et des alcooliques. C'est la conclusion à
ennent de nombreux auteurs en particulier M. Pick *
te^. On pouvait leur appliquer le mot de pseudo-
qui a été proposé par le D*" Kandinsky à propos
i même genre ^. Un malade croit changer de natio-
rague, Ueber) die Bcziehungen zwischen Zwangsvorstellungen unci
J^rager med. Wocheiischr.t 1895.
î, Des hallucinations dites psychiques. Bulletin de la Société de nié-
Belgique, juin 1898.
sky, Observations cliniques sur les iiallucinations sensorielles,
'rvenlieilhunde, 188/4, cité iiar \V. James, Psyciiohgy U, 116.
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LA TENDANCE A LA CROYANCE ET LA CRITIQUE DE L'OBSESSION 95
nalîté et devenir sujet anglais, h ce propos il çoil apparaître un
lion qui lui met les pattes sur les épaules. [1 remarque lui-même
qu'il n'a pas été effrayé comme il l'aurait été par un lion véritable,
il comprenait bien que c'était un emblème national anglais. Nos
malades comprennent de même que ces prétendues images ne
sont que des emblèmes, des symboles pour résumer de longues
méditations et rendre en quelque sorte l'idée plastique, ils ne" les
prennent pas pour des réalités comme feraient les vrais hallu-
cinés.
Nous pouvons donc répondre d'une manière plus complète au
problème posé au début de ce paragraphe. Si nous laissons de
côté les obsédés hystériques qui ont des hallucinations incontes-
tables, les scrupuleux peuvent-ils présenter ce phénomène ? Ils
présentent sans doute une certaine apparence d'hallucination, les
pseudo-hallucinations ou les hallucinations symboliques, mais
M. Falret avait raison de faire observer qu'ils ne présentent pas
l'hallucination proprement dite.
Ici encore nous voyons une tendance vers la représentation
hallucinatoire qui n'aboutit pas complètement. Le sujet semble
pousser la représentation aussi loin que possible. Il s'entête avoir
apparaître l'image extérieure et réelle, il la cherche, mais il ne
la voit pas réellement, c'est encore une sorte de manie de l* hallu-
cination plus que l'hallucination réelle.
4. — La tendance à la croyance et la critique de
l'obsession.
Si Tobsession est loin de se réaliser complètement, si les hallu-
cinations qui l'accompagnent quelquefois sont loin d'être com-
plètes, le malade accepte-t-il au moins comme une croyance les
idées qu'il vient d'exprimer? Il est facile de constater que ce nou-
veau caractère n'est pas plus complet que les précédents. On
constate en eflet presque toujours très facilement que le malade
est le premier à mettre en doute les sacrilèges, les accusations
dont il semble si préoccupé.
Ce caractère se manifeste déjà par des traits de la conduite des
malades. On les voit venir spontanément, seuls, chez le médecin
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oc LÈS IDÉES OBSÉDANTES
et chez le médecin aliéniste ; ils demandent à être soignés à cause
de certaines idées qu'ils désignent. Ils savent donc très bien qu'ils
ont des idées fausses et ils savent quelles sont ces idées fausses ;
car jamais ils ne parleront des autres au médecin. D'autre part,
il est facile de remarquer qu'en présence des étrangers ils
savent admirablement dissimuler ces mêmes idées, ce qu'ils ne
feraient évidemment pas, s'ils les croyaient exactes. Claire qui
s'accuse de tout avec un tel désespoir, qui se roule par terre
en gémissant, se relève dès qu'elle entend sonner à la porte, ra-
juste bien vite sa toilette, se montre correcte et même gaie avec
les personnes étrangères qui viennent d'entrer pendant une de
ses crises : elle accepte même des compliments sur sa conduite.
Lise, dans son salon, ne laisserait jamais soupçonner ce qu'elle
pense : bien mieux, elle joue une sorte de comédie, car elle af-
fecte de se moquer des gens superstitieux et il parait que bien
des personnes trouvent qu'elle verse avec exagération dans le
camp des libres penseurs. Rob... s'accuse de ne pas rendre
exactement la monnaie aux clients qui se présentent à la caisse.
On lui a proposé cent fois, quand elle est dans une grande crise,
d'envoyer un employé à l'adresse du client pour vérifier le compte,
et lui offrir une réparation ; elle n'a jamais voulu accepter.
N'est-ce pas une preuve manifeste qu'elle sait bien au fond
avoir fait un compte exact ?
Les déclarations des malades sont d'ailleurs en parfait accord
avec ces observations relatives à leur conduite. Ces personnes
n'hésiteront pas à vous dire : « Je sais très bien que je n'ai fait
aucun mal, il est inutile d'interroger personne pour vérifier ».
Lod... ou Claire qui se déclarent des misérables plus coupables
que les plus grands criminels ne peuvent, si on insiste, découvrir
une faute précise à avouer, et elles finissent par se fâcher 'si
j'examine devant elles les fautes qu'une jeune fille peut commettre
en leur demandant sérieusement si elles les ont commises. « Si
une personne, disait Lise, me racontait la moitié des choses que
je viens vous dire, je la croirais complètement folle. » Un détail
fort curieux chez elle, c'est qu'elle a une sœur moins âgée qui
commence exactement le même délire. Lise, le reconnaît parfai-
tement, elle suit avec chagrin la marche de la maladie mentale
chez sa sœur : « Dieu que ma sœur est bête de penser les mêmes
sottises que moi. »
Nadia répète sans cesse nu milieu de ses plus grandes agita-
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LA TENDANCE A LA CROYANCE ET LA CRITIQUE DE L'OBSESSION 97
lions : « Je trouve ces idées ridicules, je les méprise moi-même,
je voudrais tellement être en dehors de ces petites misères qui me
tourmentent tellement, je ne pourrais donc jamais renvoyer ces
idées que je déteste, c'est mon destin qui le veut ainsi. Il est
encore bien plus triste de savoir ce que valent toutes ces belles
idées et de ne pouvoir m'en débarrasser, tout en reconnaissant
combien elles sont sottes ». Jean lui-même ne peut pas s'empê-
cher de se trouver ridicule: « l'odieux, l'absurde, le ridicule d'une
maladie comme celle-là, dit-il souvent, est inqualifiable ». « Le
second homme qui est en moi, ditRk..., ^e moque terriblement
de moi et de mes sottises. »
Après ces constatations, il faut cependant faire des réserves
qui ne sont pas toujours suffisamment faites quand on parle
de la conscience de ces obsessions. 11 ne faut pas aller jus-
qu'à dire que ces malades ne croient pas du tout à la réalité de
leurs obsessions. S'il en était ainsi, ils n'auraient aucune souf-
france, aucune maladie.
Quand sur un point particulier, on peut les amener à mieux
comprendre l'absurdité de leur idée, ils en sont pour un temps
plus ou moins long débarrassés. Par exemple, j'explique à
Lise avec beaucoup de peine que les enfants ne sont pas respon-
sables des fautes des parents, elle finit par reconnaître qu'elle a
compris et que j'ai raison; k la suite de cette démonstration,
pendant plusieurs mois, elle renonce à vouer ses enfants au diable.
Cet heureux effet d'une explication montre bien que ces ma-
lades n'avaient pas sur ce point des idées bien claires et qu'ils
accordaient une certaine croyance à leurs obsessions tout en ayant
l'air de les tourner en ridicule.
D'ailleurs, avec un peu de patience, on finit par leur faire avouer
ce sentiment. Lise reconnaît parfaitement qu'il y a dans ses
idées religieuses sur le diable un fond mystérieux dont elle ne
comprend pas bien l'absurdité ; elle comprend mal ce qu'on lui
dit sur le démon, ou ne le comprend qu'un Instant. Jean ou Claire
veulent bien déclarer eux-mêmes que leur maladie est ridicule,
mais ils n'admettent pas qu'on le leur déclare. Si on insiste sur la
négation de leurs idées, ils se tournent du côté de l'affirmative
et recommencent à nous présenter ces débuts d^actes et d'images
hallucinatoires qui ont été décrits. Il faudrait à ce propos revenir
sur tous les caractères positifs de l'obsession, car ceux-ci nous
LES OBSESSIONS. L — 7
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LES IDÉES OBSÉDANTES
ni bien que l'idée absurde a bien une certaine réalité, une
e puissance dans Tesprit des malades et par conséquent
as sans une certaine croyance.
ment se mêlent alors et se juxtaposent cette critique qui
aller jusqu'au défaut de croyance, à la négation et cette
2e à Faction, à la représentation qui forme une croyance ?
1 on peut dire que les deux phénomènes n'existent pas
nément. La croyance n'existerait que dans les périodes de
la critique dans les périodes de lucidité. Cela est vrai en
5t il y a des moments de crise que nous étudierons plus
îment ou la croyance est certainement plus grande. Mais
ois pas que la différence entre la crise et l'état de lucidité
lais tranchée comme elle l'est chez les hystériques. Ces
5 n'arrivent jamais ni a croire complètement, ni à nier
tement, leur délire. Ils restent dans un état intermédiaire
de contradictions ; ils reconnaissent que leur idée n'est
forme à l'opinion générale et qu'il ne faut pas l'exprimer
lie devant des gens « peu au courant de leur situation »,
ent bien être malades sur un point mais pas sur tous et le
iivent ils oscillent suivant les différents moments du temps,
îstent donc dans un état de doute extrêmement pénible
)us trouvons un type dans le cas de Je... Cette femme de
[i une attitude humble, inquiète et cependant agitée. «Je ne
us rien faire depuis 3 mois, je n'ai plus de goût à rien, je
pas, je ne peux plus m'habiller, c'est à cause de ce mal-
ic bonnet. J'ai volé le bonnet d'une de mes voisines... Mais
que non, je sais bien que je ne l'ai pas volé, j'en suis
de... Je crois l'avoir volé pas pour le garder, mais pour le
ins le feu... Mais il y a une grille autour du poêle et je
pas la clé pour l'ouvrir... etc.». Elle reste dans l'hésitation
e. Cet état de doute se rattache d'ailleurs très bien aux
écédemment étudiés : la croyance résulte de ce fait que
titièrement développée a atteint l'action et la perception :
croyance fait agir et fait voir. Ces deux grands caractères
'oyance étant absents il est tout naturel que le sujet n'y
ne pas.
voulu faire une maladie spéciale de ce doute sous le nom
e du doute (Legrand du Saulle), puis on en a fait une
jn' spéciale (Arnaud). Je crois que le doute n'est pas une
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DÉVELOPPEMENT INCOMPLET DE LMDÉE OBSÉDANTE 99
obsession, c'est une forme que peut prendre telle ou telle obses-
sion. Je... doute à propos du bonnet volé, comme Lise h propos
des enfants voués au diable, comme Claire a propos de son immo-
ralité, comme Jean doute de la méningite qu'il craint de s'être
donnée en lisant une colonne du journal. C'est une forme générale
que prend l'obsession avec développement incomplet chez les
scrupuleux.
Ce doute général chez tous est plus ou moins marqué chez
quelques-uns et peut prendre des formes plus particulières qui
constituent les autres formes du scrupule.
S. — Développement incomplet de Vidée obsédante.
Je viens d'étudier quatre caractères de l'obsession scrupuleuse :
la durée et la reproduction facile de l'idée, la tendance à l'action,
la tendance à la représentation hallucinatoire, la croyance, parce
que ces caractères déterminent l'importance et le rôle des idées
et indiquent le degré de leur développement.
On comprend facilement la signification de ces caractères en
étudiant les suggestions hypnotiques ou certaines idées fixes des
hystériques. Pour le montrer je rappellerai en deux mots un cas
remarquable sur lequel j'ai déjà longuement insisté '. Depuis 20 ans
Justine est obsédée par l'idée d'une maladie, celle du choléra. Il
lui suffit de penser à une maladie, de voir un hôpital, de sentir
l'odeur de l'acide phénique pour que son esprit soit envahi par
cette idée. Elle pousse alors des cris de terreur, contracture ses
jambes, vomit, perd les urines et les selles. En même temps elle
entend le glas des cloches, entend des voix crier a choléra, cho-
léra », voit des cadavres de cholériques, sent leur odeur, etc. ;
elle est convaincue qu'elle est atteinte du choléra, elle l'a môme
en réalité autant que cela est possible.
A cet exemple ancien je voudrais ajouter un fait du même
genre tout aussi caractéristique. Lee..., jeune femme de 25 ans,
déjîi gravement atteinte d'hystérie, qui a déjà eu des attaques
et de la chorée par imitation d'une danse de Saint-Guy, a décou-
vert un jour que son amant la trompait avec une jeune fille
1. Névroses et idées fixes, I, p. i5g.
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LES IDÉES OBSÉDANTES
le connaît bien. De là une jalousie féroce et Tidée fixe de la
eance : elle pense constamment à cette vengeance, s'en
isente d'avance toutes les péripéties ; elle veut tuer sa
B dans les bras de l'amant coupable et pour échapper
îonséquences elle veut se tuer elle-même. Cette idée gran-
se précise de plus en plus, si bien qu'un jour Lee... un
ver à la main, s'embusque à une fenêtre et quand elle voit
jr sa rivale dans une voiture près de son amant, elle tire
coups sur eux, s'enfuit et va se jeter dans la rivière. Ces
très réels n'eurent heureusement aucune conséquence
; : personne ne fut atteint et Lee... fut retirée de la rivière
lement évanouie. Comme on reconnut son état, on se borna
;ransporter à la Salpêtrière dans le service de M. Raymond,
le présente à tout instant l'accident suivant : à propos de la
dre chose, parce qu'elle regarde dans la cour, parce qu'elle voit
naïade causer avec un homme, parce qu'on prononce un mot
lit elle, la voici qui se trouble, cesse de parler et garde les
fixes. Elle se dirige vers une armoire et semble y prendre un
qu'elle garde dans la main droite ; elle s'approche de la
re, regarde dans la cour avec un air de fureur, tend son bras
, semble décharger un revolver en poussant un cri, puis se
\ courir en travers de la salle, elle finit par se jeter par terre
ste évanouie. En un mot elle joue de nouveau, mais cette fois
réalité extérieure, la scène du meurtre et du suicide. Des
cinations nombreuses ont simplement remplacé les percop-
absentes puisque les circonstances ont changé.
ns ces observations on peut noter entre autres faits impor-
les caractères suivants, i** Pendant une longue période, plus
» ans chez Justine, Tidée réapparaît subitement à propos de
ines associations d'idées, comme si on déclenchait un ressort
lit fonctionner un mécanisme automatique sans aucun effort
jet. 2** Le passage de l'idée a l'acte est étonnamment rapide et
let. Les mouvements, les actions en rapport avec l'idée fixe
mmédiatemcnt exécutés et d'une manière aussi complète que
ble, étant données les circonstances. 3° On constate aussi le
ge également rapide et complet de l'idée à l'hallucination qui
lit tous les sens et se présente avec le plus grand degré de com-
:é et de réalité. /|" Le sujet, au moins pendant une période dé-
née est absolument convaincu de la réalité de son idée fixe.
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DÉVELOPPEMENT INCOMPLET DE L*IDÉE OBSÉDANTE 101
J'ai essayé souvent de résumer ces caractères essentiels de
la suggestion hystérique par la notion du développement des
idées. Une idée, en effet, peut être considérée comme un en-
semble, un système d'images empruntées à divers sens *, ayant
chacune des propriétés spéciales et diversement coordonnées les
unes avec les autres. La pensée d'un bouquet de roses ou la
pensée d'un chat, de même que la pensée d'assassiner ou de
donner ses enfants au diable est toujours au fond un système de
ce genre plus ou moins compliqué. Ce qui donne aux idées des
aspects très particuliers et distincts les uns des autres, c'est le
degré de développement que peut présenter ce système. Le plus
souvent ces systèmes se reproduisent dans notre esprit d'une façon
tout h fait spéciale ou abrégée, par exemple l'image sonore ou
kinesthésique du mot fleuron du mot chat 'se reproduira seule
ou h peu près et suffira pour représenter tout le système com-
plexe dont elle n'est qu'un petit élément. L'effort de la pensée
consiste dans ce cas non à développer l'idée de fleur ou l'idée de
chat mais à adapter, à coordonner cette image rapide avec les
sensations nouvelles et actuelles de manière à constituer et à
développer jusqu'au bout d'autres systèmes d'images dont les
premiers ne sont que des éléments.
Au contraire, une idée peut se développer complètement
lorsque tout le système d'images qu'elle contient en puissance se
réalise complètement, que les diverses images apparaissent
simultanément ou à la suite les unes des autres en conservant
leur coordination. En effet, ces images sont rattachées les unes
aux autres de telle sorte que la présence de l'une d'entre
elles suffit pour évoquer les autres dans un ordre déterminé.
Chaque image entraîne avec elle les conséquences physiolo-
giques ou psychologiques qui en dépendent, les unes détermi-
nant des mouvements des muscles, les autres des mouve-
ments des organes sensoriels, les autres des modifications
vasculaires et des états d'émotion. Il est facile de constater que
toutes les idées qui parviennent à cette seconde forme de déve-
loppement complet envahissent complètement l'esprit du sujet et
sont accompagnées de conviction profonde. Au contraire les
idées qui en restent a la première forme sont vagues, n'occupent
I. Aulomalisnie psychologique, 1889, p. 2*^- Accidents mentaux des hystériques,
1893, p. a3 ; Névroses et Idées fixes, 1898, I, 163.
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LES IDÉES OBSÉDANTES
>etite partie de l'esprit et peuvent n'être accompagnées
; croyance.
it très bien par les expériences de suggestion le passage
de la première forme à la seconde quand dans Tcsprit du
lée se développe, c'est-à-dire déroule tous les cléments
ontenait implicitement grâce à l'éducation antérieure et
plus en plus à se compléter. Le sujet passe de l'idée
! à l'idée concrète qui lui paraît de plus en plus réelle et
e il accorde le plus en plus de croyance,
crivant la manière dont se présentait l'idée fixe du choléra
tine j'ai pu montrer que c'était grâce au développement
le tous les éléments contenus dans cette idée qu'elle
prendre cette puissance énorme de conviction et setrans-
en une réalité incontestable. En un mot toutes ces études
s brièvement résumées nous amènent à penser que la
m est en rapport avec le développement que les idées
t actuellement et qu'au contraire le défaut de croyance
apport avec un développement tout a fait incomplet de
es idées.
discuter complètement la question de la nature de la
ne pouvons nous pas appliquer à nos malades scru-
; résultat de ces anciennes études, ne pouvonis-nous pas
lier que leurs obsessions n'entraînent pas la convic-
:e que ce sont des idées à développement très incomplet,
tte did'érence capitale justement remarquée depuis
3s qui a donné lieu à la distinction importante entre les
es admises complètement par l'esprit du malade et les
is qui restent toujours incomplètes et qui n'entraînent pas
lion.
e que nous venons de faire ne nous montre-t-elle pas
)oint de vue l'obsession des scrupuleux ne présente pas
forme que celle des hystériques. L'apparitionde l'idée est
) moins nette : l'association des idées qui l'amène est beau-
s large et plus vague. Kllc n'est pas due au déclenchement
que d'un ressort, mais à une recherche du sujet. L'exécu-
rès loin d'être complète et les actes quand ils existent ne
l'bauchés. L'hallucination n'est qu'apparente et la repré-
i ne se complète pas assez pour prendre le caractère de
ictérieure. Nous pouvons résumer ces caractères en un
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DÉVELOPPEMENT INCOMPLET DE L*IDÉE OBSÉDANTE 103
mot. L*obsession des scrupuleux est caractérisée par un dévelop-/
pement très incomplet des éléments contenus dans Tidée et elle
diffère sur ce point de la suggestion et de l'idée fixe hystérique
où ce développement est aussi complet que possible.
Il en résulte que sur ce point Tobsession des scrupuleux se
rapproche des idées normales caractérisées elles aussi par un
développement incomplet. Sans doute nous avons observé qu'il y
a plus de durée, plus de facilité d'évocation, plus de tendance à
l'acte et à la représentation que dans lu moyenne des idées nor-
males, surtout si Ton tient compte du contenu de ces idées et du
peu d'importance qu'un homme normal leur attacherait. Le degré
de développement est donc plus grand que dans la vie normale,
on peut dire qu'il est variable suivant les cas, mais qu'il est tou-
jours intermédiaire entre le faible développement normal et le
développement complet des suggestions hystériques, sans arriver
jamais ni à l'un ni à l'autre terme. Le fait le plus anormal à ce
point de vue c'est, comme nous l'avons remarqué, la durée et la
fréquence de pareilles idées plutôt que leur grand développe-
ment.
Il n'en est pas moins vrai qu'après cet examen on ne peut
s'empêcher de constater que par leur force, leur degré de déve-
loppement, leurs éléments positifs, ces obsessions ne diffèrent
pas énormément des pensées normales et on reste étonné du
trouble qu'elles amènent dans la vie des malades. Pour compren-
dre ce trouble il faut donc examiner encore ces malades à d'autres
points de vue, chercher les autres symptômes qui accompagnent
leurs idées obsédentes et voir si ces nouveaux symptômes ne
donnent pas à l'obsession son caractère pathologique et sa raison
d'être.
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F* j^r,
CHAPITRE II
LES AGITATIONS FORCÉES
obsessions proprement dites, c'est-a-dire les idées repré-
t dans Tesprit du sujet des événements, des objets et surtout
ions d'une manière générale ne nous ont pas paru avoir un
ppement suffisant pour expliquer la maladie. Il existe évidem-
i'autres phénomènes pathologique qui s'ajoutent a Tobses-
qui déterminent son caractère pénible et maladif. Nous
[uons alors que les mômes malades sont tourmentés par un
groupe de symptômes qu'il ne faut pas confondre avec
sion proprement dite. Ils se plaignent que sans se repre-
nne idée déterminée, ils sont cependant forcés de penser
manière exagérée, que leur tête travaille malgré eux,
sont de même forcés d'accomplir des mouvements au moins
s et de remuer sans aucune nécessité, enfin qu'ils éprou-
'une manière irrésistible des émotions violentes sans que
ci soient suffisamment justifiées par les circonstances pré-
Ces opérations très diverses semblent quelquefois s'cfTcc-
propos des obsessions, mais elles existent très souvent
u'il y ait une obsession, c'est-à-dire une idée générale bien
5; elles constituent un autre groupe de symptômes plus
s que les premiers. A côté des idées obsédantes (Zwangs-
lluugen), comme disait très bien un auteur allemand,
omsen, il y a des processus obsédants (Zvvangsvorgânge) *
c cadre est beaucoup plus large,
processus obsédants ont comme caractère essentiel au
apparent de se développer d'une manière presque irrésis-
sans le consentement exprès du malade. Quoique ce carac-
oit à examiner et à discuter, on peut au début admettre
lonison (Bonn), CiQntrihulion à rcHiuJc clinique des idt'cs obsédantes. Arch.
iair, und .\'ervenliranfih., XXVII, iSy.").
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LES AGITATIONS FORCÉES 105
l'importance de celte apparence et en tenir compte dans la désigna-
tion de ce groupe de phénomènes. Je suis très embarrassé pour
adopter un terme crénéral qui désigne tous ces phénomènes de ma-
nies mentales, de rumination mentale, de tics, d'agitations motrices,
de phobies d'angoisses, et cependant je crois essentiel de les réunir
en un groupe unique. M. J. Donath, de Budapest*, se trouvant en
présence de la même difficulté, a proposé le mot « ananeasmes » de
{àvaY>dfÇa), forcer). Le mot n'est pas san§ intérêt, mais il est si
étrange et si peu usité que j'hésite à l'adopter pour titre de ce
chapitre. Les Allemands ont des expressions assez heureuses,
« Zwangsprocessus, Zwangsvorgânge » : je me borne à les
traduire en y ajoutant cependant un détail. Ces opérations forcées
ne sont pas des opérations normales, ce sont des opérations de
pensée, d'acte, d'émotion, qui sont à la fois excessives, Stériles
et d'ordre inférieur. A la fin de ce chapitre, quand nous connaî-
trons mieux ces opérations, nous verrons combien ces caractères
sont importants. Il me semble que le mot « agitation » réunit
assez bien ces divers caractères : aussi, faute de mieux, je réunirai
ce second groupe de symptômes sous ce nom w les agitations
forcées. »
Les agitations forcées peuvent être divisées en trois groupes
suivant qu'il s'agit surtout de pensées, de mouvements ou de
phénomènes émotionnels^ en remarquant que dans chaque
groupe l'agitation peut se présenter d'une manière systématitpie
ou d'une manière diffuse. On peut donc au début de cette étude
et d'une manière tout à fait sommaire classer ces agitations forcées
d'après le tableau suivant dont les titres seront justifiées ulté-
rieurement:
( Systématiques, les manies
1 , . Los .giUlions menUlos. . .s Q^^!^^^"i^ rumination
1 [ mentale.
Les agitations forcées . , ,-. " ) Systématiques, les tics.
13. Les agitations motrices. . .^ Diffuses, les crises d'agi-
] ( tation.
L, , . . , . „ < Systématiques, les phobies.
lo. Les acritations émotionnelles. J rvn* /
\ ^ f Difluses, les angoisses.
Dans une dernière section nous réunirons les caractères communs
à ces différents groupes.
I. J. Donath (Buda|>esth), Archiv. f. Psychiatrie ^ 1896.
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LES AGITATIONS FORCÉES
PREMIÈRE SECTION
LES AGITATIONS MENTALES
i remarquables de ces agitations, celles qui ont le
plus étroit avec les obsessions, sont des agitations
ies opérations d'ordre intcllecluely des réflexions, des
ns, des recherches qui se développent rapidement
des heures dans Tesprit du sujet ou s'imposent à lui
ère en apparence irrésistible. Quand ces agitations de
ont systcniatiques elles constituent les tics intellectuels
t Azam*, les stigmates psychiques, comme les appelait
simplement les manies mentales, suivant l'expression
ui me semble suffisamment claire. On peut remar-
es opérations mériteraient presque toujours le nom de
ntales du scrupule car il s'agit toujours d'opérations
Iles interminables à propos de très petites choses qui
ans l'esprit du sujet une place tout à fait dispropor-
ïc leur importance réelle.
es agitations forcées de la pensée sont diffuses, elles
5 phénomènes connus sous le nom de faite de la peu-
UismCy de rumination mentale.
- Les manies mentales de l'oscillation.
nicres et les plus typiques de ces manies, celles que le
royance caractéristique de l'obsession nous faisait pré-
es manies de l'oscillation. L'esprit n'arrive pas a une
complète, à une décision unique, mais il continue
nt à osciller entre deux termes. Cet état de doute
igné appelait un mol oreiller pour les tôtes bien faites
}evue scientifique, 1891,!, p. 618.
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LES MANIES MENTALES DE L'OSCILLATION i07
devient pour les têtes de nos malades un instrument de torture.
Si la manie porte sur des idées, des représentations, elle prend la
forme de manie du doute ou de Tinterrogation, si elle porte sur des
actes elle devient la manie de la délibération ou de Thésitation.
I. — La manie de l' interrogation.
Beaucoup de malades s'interrogent à propos des sensations
elles-mêmes : Nadia se regarde devant la glace et se demande si
elle est pâle oui ou non, si elle est aussi pâle qu'hier. Vi... en
goûtant la soupe se demande si elle a oui ou non le goût du poi-
son, ce Je doute de Tévidence, dit Za... Quand j'ai fait quelque
chose je la recommencerai vingt fois et la vingtième fois je ne
serai pas sûr de l'avoir faite et de ne pas avoir fait un crime a la
place. »
Ils s'interrogent aussi sur leurs sentiments. Fa... (169), qui a des
obsessions criminelles et des impulsions à tromper son mari, se
demande si elle trouve les autres hommes mieux que son mari
ou inversement, et Re... (i4o) cherche indéfiniment si oui ou non
elle aime son fiancé.
Naturellement les interrogations porteront bien plus souvent sur
les souvenirs. Lise a-t-cllc voué son enfant au bleu ? Il serait essen-
tiel de le savoir: certaines circonstances la poussent à croire que
oui, certaines autres h penser que non. Dès que la considération
des unes l'incline à une opinion, les autres se présentent avec plus
de force et le balancement continue pendant des heures h propos
de ces souvenirs. Bor... a-t-elle dit des blasphèmes dans l'église ?
Ce n'est ni oui, ni non: elle ne le décide jamais. Lod... a-telle oui
ou non de mauvaises pensées ? Il lui est impossible de le savoir.
« Je me crois assassin, dîtZa..., empoisonneur, le dernier des cri-
minels et je passe mes jours et mes nuits à me prouver a moi-même
que ce n'est pas possible, l'homme sensé qui est en moi répète que
c'est le comble de l'absurde, et cependant je ne suis calmé que pour
un moment et j'en arrive h ne plus savoir si oui ou non j'ai commis
ce crime. » Zo... recherche si elle a mis des épingles dans le
dos des gens et examine minutieusement tous les mouvements
qu'elle a accomplis.
We... cherche de même si elle a fait vœu d'être religieuse,
Bor..., si pendant la communion, elle a poussé son voisin du
coude. Je..., si elle a pris un timbre-poste il y a deux ans. « Je mç
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LES AGITATIONS FORCÉES
ien d*ètrc entrée dans la chambre oii était ce timbre,
me souviens pas de la position qu'ont gardée mes mains
ce qu'il i'aut retrouver. » C'est toujours l'instant essen-
t oublié et qu'il faut rechercher en gémissant,
^trouverons ces recherches plus importantes encore
res manies mentales plus complètes. Ici nous notons
l'indécision, le douteet la manie de l'oscillation entre
ions.
Les manies de l'hésitatiofiy de la délibération.
le doute porte sur des actes, il prend l'aspect d'une
, d'une délibération interminable.
i8), jeune fille de 26 ans, a présenté au début de sa mala-
l'âge de 20 ans, une manie d'oscillation très curieuse
teté. Son métier consistait à faire des fleurs en porce-
devait prendre un pétale en pâte tout préparé et lui
ec le doigt une courbure, une gaufrure élégante. Pen-
emps, elle avait fait ce travail avec succès et avec rapidité,
çut qu'elle travaillait de plus en plus lentement, puis
pouvait plus terminer aucun pétale. Au moment de
courbure à la pâte, elle pensait h une forme possible,
; autre qui serait peut-être plus élégante, elle revenait à
re forme, puis à la seconde et ainsi indéfiniment sans
I terminer un pétale.
âgé de 56 ans, doit renoncer à sa situation de notaire,
rive plus à signer un acte. Chaque signature qu'il doit
eille l'idée d'une malhonnêteté qu'il va accomplir, il
e pour savoir s'il peut passer outre et accomplir l'acte
te, s'il doit ne pas se laisser entraîner, s'il doit croire
est insignifiant, s'il doit consulter avant de signer,
le veut pas manger de peur d'engraisser et de n'être
3, d'autre part, elle a reconnu devant sa mère que l'idée
irde et elle a promis de manger. Elle a donc fait deux
;: Tune à elle-même, l'autre à sa mère : laquelle faut-il
elle mange, elle sera honteuse de n'avoir pas eu d'éner-
néritera d'engraisser réellement ; si elle ne mange pas,
les remords d'avoir manqué de parole à sa mère... et
n va se prolonger indéfiniment. « Faut-il se décider h
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LBS MANIES MENTALES DE L'OSCILLATION 109
sortir, se demande Lise de la même manière, et par là s'exposer
à donner au diable Tâme de ses enfants ou faut-il rester à la
maison et renoncer à une sortie utile. »
Jean nous présente les exemples les plus curieux de ces délibé-
rations interminables, car chez lui les deux parties de la délibé-
ration semblent être personnifiées par les deux femmes qui sont
l'objet principal de ses obsessions. Doit-il oui ou non monter
dans un tramway? S'il y monte, le voisinage des femmes va ra-
mener l'obsession de Charlotte. Cette pensée de Charlotte déter-
minera des fluides dans tous les membres, des tentations de
masturbation, des crispations des organes, etc. S'il ne monte
pas dans le tramway et s'il prend un fiacre va-t-il éviter tout
cela et être tranquille? En aucune façon : il aura l'obsession d'une
autre personne, celle de la femme de chambre Elise dont la tête
lui apparaîtra avec une expression narquoise. Cette^tête se mettra
à rire de plus en plus, semblera lui parler et se moquer de lui.
« Tu ne montes pas en tramway, tu vas payer un fiacre quarante
sous et cela parce que tu as peur des femmes, hi, hi, hi. » Comment
choisir sans tomber de Cbarybde en Scylla ?
Il en est de même pour tous les actes. S'agit-il de jouer du
piano près de sa mère, Charlotte envoie des fluides et Elise se
moque de lui : « Tu veux cesser quand ta mère est là parce qu'elle
te donne des excitations, eh bien, attend un peu, cric, crac. »
Son pantalon le gêne, Charlotte donne l'idée de le découdre à
la braguette (c pour que les organes soient plus à l'aise », mais
Élise est prise de fou rire à la pensée du pantalon décousu. Entre
les deux, Jean ne sait plus que faire. « Je ne puis pas prendre de
décisions, je vois les conséquences de part et d'autre, je suis
comme l'âne entre deux bottes de foin : que je fasse blanc, que je
fasse noir, j'aurai toujours ma petite mesure de phénomènes. »
Cette hésitation est générale chez lui et les pensées hypocon-
driaques la déterminent aussi bien que les pensées relatives aux
péchés sexuels. Ainsi il tient absolument à suivre un traitement
hydrothérapique et je lui conseille de prendre des douches.
Voici quelques-unes de ses réflexions à ce sujet: « Sans doute, la
douche a ses avantages, elle est tonique pour le système ner-
veux, mais elle est excitante, elle me donne des excitations. Après
une douche je dois sans cesse remuer les doigts et pour qu'on
ne le voie pas, je les remue derrière mon dos, comme cela... Ce
mouvement est agaçant, il est dangereux, car il pourrait m'exciter
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LES AGITATIONS FORGÉES
les org.anes... il vaudrait mieux des bains tièdes que m'a jadis
conseillé mon vieux médecin. Oui, mais le bain est aplatissant ;
il m'abrutit, m'enlève toute énergie et tout pouvoir d'application,
il pourrait me faire tomber dans la torpeur... Il est vrai que la
douche a sur ce point un grand avantage, elle est tonique et
réconfortante, je ne la prendrai pas froide, ni chaude, mais tiède,
à 28", il faudra prendre des précautions pour ne pas diriger le
jet sur la colonne vertébrale et pour remonter bien de chaque
côté... Oui, mais je l'ai déjà essayée ainsi, c'est tout de même
excitant et cela pourrait ramener les fluides et les tentations...
Ce danger est le plus grand en somme, il vaut mieux un bain
tiède, un bain alcalin, on m'a dit que c'était calmant; seulement
après les bains de ce genre il faut renoncer à toute activité et moi
qui me désole déjà de n'avoir pas de situation, pas d'occupation...
Une douche me vaudrait évidemment mieux pour me tirer de
là... » Si on ne l'interrompt pas, il continuera ainsi pendant
plusieurs heures.
On comprend combien cette hésitation va troubler Faction.
Mais nous verrons chez les scrupuleux bien d'autres troubles de
Faction, ce qui nous amènera peu à peu à rechercher si ce trouble
de l'action volontaire n'est pas le fait le plus important de la
maladie.
3. — Les manies du présage ou de V interrogation du sort.
A côté de la manie de l'interrogation, il faut placer un phéno-
mène qui me semble voisin, la manie de l'interrogation du sort
ou la manie des présages. Le malade ne pouvant arriver lui-même
à la solution de la question qu'il s'est posée ou ne pouvant tran-
cher son hésitation sur une action cherche partout des rai-
sons qui pèsent d'un côté ou de l'autre; il s'en remet h quelque
affirmation extérieure. Mais il lui faut une affirmation extérieure
qu'il ne puisse pas discuter, une affirmation mystérieuse et in-
compréhensible, aussi cherche-t-il à obtenir la décision du sort. De
même quand nous hésitons entre deux actions qui nous paraissent
égales ou du moins quand nous n'avons pas l'énergie suffisante
pour reconnaître quelle est la meilleure, nous jouons à pile ou
face.
Voici quelques exemples de cette manie fréquente et bizarre :
Vy... se tourmente pour savoir s'il croit en Dieu ou s'il n'y croit
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LES MANIES MENTALES DE L'OSCILLATION ill
pas et il se répète la phrase suivante : « Si en marchant dans la
rue je puis éviter de traverser Tombre des arbres, c'est que je
crois en Dieu, s/ je traverse Tombre, c'est que je n'y crois pas. »
On trouve On... le front fortement appuyé sur un carreau de vitre.
Voici ce qu'il pense: « Si le carreau n'est pas cassé quand j'appuie,
c'est que je ne suis pas sacrilège, s'il casse, je le suis », et de
fait, il n'appuie pas bien fort. « Si je ne casse pas ce verre que je
serre, dit Lise, c'est que je n'ai pas voué mes enfants au diable. »
« Si je marche du pied droit, dit Bor..., c'est que j'ai pensé du
mal de Dieu. » « Si je me coiffe de telle façon, dit Vi..., je ferai
casser la jambe à mon garçon. » « Si le bon Dieu m'envoie les
idées de défaire les morts dans les cimetières, c'est que ma petite
fille sera méchante... Si je vais trois dimanches de suite à la
messe sans fêtes intermédiaires, c'est que Dieu veut me sauver. »
(Ger...), etc..
Les choses se compliquent quand il est difficile de constater le
phénomène qui sert de présage, car alors le doute recommence
sur lui et cela donne lieu à toute une nouvelle interrogation. Ainsi
We... se demande si elle doit oui ou non devenir religieuse. Elle
conclut dans sa sagesse que si Dieu la veut comme religieuse, il
lui fera voir des présages dans le ciel, c'est-h-dire des croix et des
figures de saintes, et la voici le nez en l'air h regarder le ciel et h
se demander si elle y voit des croix et des images de saintes. Ce
problème devient tout un nouveau délire avec doutes, interroga-
tions, examen perpétuel du ciel, et ce qu'il y a de plus malheu-
reux, incertitude sur les souvenirs. Aujourd'hui, elle ne voit
pas de croix ni de saintes dans le ciel, mais en a-t-elle vu hier?
Il faut rechercher l'emploi des moments de la journée et la voici
saisie d'une inquiétude. Comme au fond elle ne veut pas être reli-
gieuse, elle ne veut pas avoir vu de présages et elle a la crainte
d'en avoir vu.
Cette façon de s'en remettre au destin du soin de décider pour
nous est très caractéristique et on la retrouve dans beaucoup
d'observations anciennes. Le mystique anglais Bunyan s'interroge
en marchant sur une route et se demande s'il a oui ou non sauvé
sa foi. Le tenlateur lui suggère l'idée qu'il peut le décider en vé-
rifiant si ses prières sont oui ou non capables de faire des mi-
racles. Que dans une prière, il demande à Dieu de changer les
flaques d'eau en endroits secs et les tas de boue en poussière
sèche et qu'il vérifie ensuite. Il lui vient en idée que s'il fait
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LES AGITATIONS FORGÉES
ification et qu'elle ne réussisse pas, il se croira damné,
est ainsi, je n'essayerai pas encore, je veux attendre un
le faire. » *
ousseau qui, par bien des côtés, était un malade tout à
lable h ceux que j'étudie ici, note dans ses Confessions
entait poussé à résoudre les questions insolubles par un
semblable. « La peur de renier m'agitait encore souvent;
nandais : en quel état suis-jc ? Si je mourais à l'instant
rais-je damné?... Toujours craintif, et flottant dans cette
icertitude j'avais recours, pour en sortir, aux expédients
isibles et pour lesquels je ferais volontiers enfermer un
I je lui en voyais faire autant... Je m'avisais de me faire
le de pronostic pour calmer mon inquiétude. Je me dis :
ais jeter cette pierre contre l'arbre qui est vis-à-vis de
|e le touche, signe de salut; si je le manque, signe de
n. Tout en disant ainsi, je jette ma pierre d'une main
te et avec un horrible battement de cœur, mais si heu-
it qu'elle va frapper au beau milieu de l'arbre ; ce qui
nent n'était pas difficile, car j'avais eu soin de le choisir
et fort près. Depuis lors, je n'ai plus douté de mon
Rousseau se dit rassuré sur son salut par une seule
;e heureuse, c'est qu'il n'était guère malade à ce moment,
des ne sont pas si faciles à satisfaire et Ton a vu que la
3 des présages devenait chez eux une véritable manie,
îrminable que la manie des interrogations dont elle me
river.
i Eeden^ décrit sous le nom de manie de superstition une
ite variété de manies mentales. Son malade attache une
on prophétique à des faits insignifiants : une cravate de
leur lui promet bonheur ou mi.lheur, une borne qu'il
non de sa canne décide de sa destinée. Ce n'est pas là
lie particulière et rare, comme l'auteur semble le penser :
forme assez fréquente de la manie de l'interrogation,
ïmiers phénomènes, les manies du doute, de la délibé-
3 l'interrogation, des présages se relient comme on voit
nt. Elles peuvent former un premier groupe dont le trait
Royce, The case of Bunyan. Psychohyicnl lieview, 189^, 137.
{ousseau, Les Confessions, I, liv. VI, édit. des œuv., 1889, W, p. 4^7-
edcn, Itevue de l'IiYfmQlisine, 1893, p. i3. Psychothérapie, 1894. Cf. M.
^irain, 1895, p. 335.
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LES NIAMES DE LAL DELA 113
caractéristique est roscillation de l'esprit. Il y a un balancement
entre deux idées, le oui et le non, et Tesprit n'arrive pas à se
fixer définitivement ni sur Tune ni sur Tautre. Il cherche avec effort
des raisons pour ou contre et il n'arrive pas h se satisfaire malgré
rinterrogation des présages.
2. — Les manies de l'au delà.
L'esprit toujours instable peut cependant ne pas osciller indé-
finiment entre deux termes opposés. Il lui suffît de dépasser le
terme donné, de le remplacer par quelque chose d'autre, d'aller
simplement au delà. C'est le caractère que je retrouve dans une
foule de manies dont je ne puis signaler que les principales.
I . — Les manies de la précision.
Le malade qui ne peut arriver à la certitude a besoin pour se
rassurer d'environner ses actes et ses pensées de tout ce qui peut
les préciser, les matérialiser en quelque sorte. Legrand du SauUe
le remarquait déjà : «sous l'influence d'habitudes invétérées d'ona-
nisme, dit-il, le malade eut une sorte de précision maladive,
d'attention exagérée, provenant d'un certain manque de confiance
en lui. * »
Nous retrouvons ce besoin chez beaucoup de nos malades. Jean
est tout à fait désespéré de ma façon de rédiger une ordonnance
pour les douches, il veut qu'on indique la température exacte, la
pression en chiffres, le nombre de secondes, l'endroit du dos où
doit frapper le premier jet, la ligne que le jet doit tracer sur le
corps en faisant des détours pour éviter certains points, l'endroit
du dos par lequel il faut finir, etc : il doit épouvanter son dou-
cheur. Il lui faut faire chaque chose à sa date et il aurait des
remords épouvantables s'il lisait un journal d'une date ancienne
«c'est un désordre, ce n'est pas à cette date qu'il devait être lu. »
\Vo. s'épuise à prendre des notes minutieuses sur tous les livres
qu'elle lit, à tenir un journal de tous les incidents de la journée,
à tout noter par écrit avec précision.
I. Legrand du Saullc, Folie du doute, p. 17.
hES OBSESSIONS. 1. 8 •
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LES AGITATIONS FORCÉES
'ai signalé autrefois à propos de la parole intérieure une ma-
î F... qui avait rhabitude bizarre de se répéter en dedans le
1 des objets qu'elle voyait : « c'est un pavé, c'est un arbre,
t un tas d'ordures. * » Je n'avais pas compris à ce moment la
on de ce besoin. En réalité c'était une scrupuleuse, qui crai-
It en passant près des gens de leur faire dp mal, qui retournait
rrière pour voir si elle n'avait pas cogné les chevaux, qui
terrogeait indéfiniment pour savoir si elle avait payé, etc. Cette
:)mination perpétuelle des objets était chez elle en rapport
; une manie de précision.
'autres auront la manie des i'érifications, qui diffère peu de
récédente. R... identique sur ce pointa un malade de M. Ar-
1 tate perpétuellement ses vêtements et surtout ses poches
ur vérifier si tout est bien a sa place, si elle est bien tirée h
re épingles, si elle n'a perdu aucun petit objet. » Ser... tou-
h chaque instant ses oreilles « pour voir si elle a toujours
boucles d'oreille » on verra que cette manie devient souvent
gine des tics. Il est inutile de rappeler les malades bien
lus qui vérifient indéfiniment si la porte est bien fermée, si
az est éteint, si la lettre est bien dans la boîte, etc.
la même manie de précision se rattache la manie fie la fixité
idées qui a déjà été décrite à propos de la forme des obses-
s.
faut placer dans un groupe voisin les manies de l'ordre. On
souvent débuter la maladie du scrupule chez les enfants
me chez Ser..., chez les enfants de Lise, par la manie de
r leurs robes exactement dans les mêmes plis, de ranger leurs
mcnts le soir en se couchant, de mettre de Tordre dans leurs
[>ires d'une façon tout à fait exagérée et ridicule. Plus tard la
ie devient grave, Lkb..., femme de 22 ans, ne peut plus souf-
qu'aucune personne pas même son mari entre dans sa
libre : « j'ai trop peur qu'on ne dérange mes affaires, si quel-
n dérangeait chez moi une épingle cela me rendrait affreuse-
t malade. » Vk..., femme de 58 ans, s'épuise depuis 20 ans
îttre de l'ordre dans son ménage, elle refuse de manger. et de
lormir « avant qu'elle n'ait mis tout en ordre » et elle ne
y parvenir « car elle voudrait la perfection et elle a été dé-
Névroses et Idées fixes, 1, p. 2»S.
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LES M AN! ES DE l/AU DELA 115
bordée. » Qsa... éprouve toujours le besoin de rauger « ses
aOaircs, ses papiers, c'est pour lui un besoin de simplification
perpétuel. »
Claire met de Tordre non seulement dans ses objets mais
encore dans ses idées. Il faut qu'elle pense la même chose à la
même heure, à la même place. Il faut qu'elle ne pense pas plus un
jour qu'un autre, il faut surtout qu'elle raconte les événements
dans un ordre déterminé. Personne n'obtiendra qu'elle raconte
tout de suite ce qu'elle a éprouvé hier : il lui faut reprendre les
choses par le commencement et réciter par ordre chronologique
ce qu'elle a éprouvé depuis lo ans avant d'en arriver à la journée
précédente.
Mettons à côté la manie de la symétrie dont M. Azara nous
donne un exemple : « il lui faut toujours ranger les objets la
moitié à sa droite, la moitié à sa gauche... Si elle a mis le pied sur
une pierre un peu saillante, elle se sent forcée de rechercher pour
l'autre pied une sensation analogue. Lorsqu'elle a placé une main
sur du marbre ou sur tout autre objet froid elle est contrainte de
faire subir à l'autre organe symétrique une impression ana-
logue*. »
Jean a des besoins analogues : si en levant les yeux il a remar-
qué un objet rouge à sa droite il lui faut détourner la tête et
cherche à fixer son regard sur* un objet rouge fixé a gauche.
M. Flournoy, dans son livre sur les synopsies* signale une symé-
tromanie typographique : a les noms et les mots qui ne sont pas
composés d'un nombre régulier de lettres m'ont toujours fait une
impression désagréable et causé un vrai chagrin h mes yeux. Les
titres de livres, les enseignes de magasin me donàent toujours
sous ce rapport un vrai travail : je compte les lettres, et si elles
ne sont pas en nombre pair, je coupe les mots de façon a mettre
une lettre isolée au milieu des autres; ainsi pour les mots Japon,
seule, je les écris en pensée de cette manière : Ja-p-on, se-u-le».
On a souvent remarqué l'importance du contraste et de la con^
tradiction chez ces malades, M. Raggi' rapporte l'observation
I. Azanit Les toqués. Revue scientifique, 1891, I, 618.
a. Flournoy, Les synopsies, i8g3, p. 23 1.
3. Raggi, Archivio italiano per la malaltie nervose, 1887.
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LES AGITATIONS FORCÉES
m jeune homme de 20 ans qui, par instants, ne pouvait ouvrir
bouche sans être forcé de faire les raisonnements les plus ab-
rdes et souvent même de dire tout le contraire de ce qu'il
rait voulu. M. Séglas, qui cite ce cas, ajoute plusieurs obser-
Lïons du môme genre ^ « Ce qui le peine le plus, dit son ma-
ie, c'est qu'il lui arrive par moments de se contredire lui-même
au moment où il veut exprimer une idée de dire tout le con-
ire de ce qu'il veut. » MM. Pitres et Régis ^ donnent plusieurs
amples curieux de ce phénomène. « C'est, disent-ils, la manie
isphématoire de Verga. » Dans la prière on voit « maudit » au
u de « bénit », « enfer » au lieu de « ciel », «Wilde Sau (sanglier
ivage) » au lieu de « Liebe Frau (notre Dame) » au lieu de «je
js ai au cœur» elle pense «je vous ai au cul » au lieu de « mon
eu je n'adore que vous » elle pense « j'adore ça » et elle croit
r un derrière ». On observe facilement des faits semblables :
nyan pense a adorer un balai, une ordure quand il veut prier
3u, Claire, Vy... et bien d'autres pensent h se masturber quand
es veulent préparer une confession et Qi... (11 3) se sent forcée
ppeler « cochon » les gens qu'elle respecte le plus.
Les auteurs qui rappellent de tels faits les rattachent volontiers
[uelque loi profonde de l'esprit. M. de Sanctis, dans un article
éressant, parle de l'association par contraste qu'il explique ainsi :
Jn certain exercice forcé de l'attention inhibe et éloigne l'image
^quelle il s'applique et favorise l'opposition et la victoire de l'as-
;iation par contraste '%). 11 y a beaucoup de vérité dans cette
narque que je reprendrai plus tard, mais il ne faut pas oublier
B les phénomènes de contraste présentés par les scrupuleux ne
it pas toujours des phénomènes primitifs, spontanés, ce
it des phénomènes voulus, cherchés par le malade, c'est bien
ivent une manie de précision, de comparaison, d'opposition
réme qui le pousse à chercher ce terme qui fait si bien
itraste.
Z'est aussi de la même manière que je comprendrai les asso-
lions d'idées extravagantes que présentent certains malades et
semblent jouer un rôle énorme dans la reproduction des
, Sérias, Leçons cliniques sur les maladies nerveuses et menlaleSt 1895, p. 129.
, Pitres et Régis, op. cit., p. 45.
S. de Sanclis, Venomeni <li conlraslo in psirolofjia. Rome, 1895.
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LES M.VNIES DE L'AU DELA 117
obssesîons. J'en al déjà cité beaucoup à ce propos, en voici encore
une. Jean trouve de l'obscénité dans la durée de trois quarts
d'heure ; une visite de trois quarts d'heure serait obscène parce
qu'il a appris qu'un personnage est resté trois quarts d'heure
avec une femme avant de mourir. Ce sont là à mon avis des manies
mentales d'association et non de véritables associations irréflé-
chies et ces manies d'association ne sont que des conséquences
des manies de la précision.
La manie de propreté se présente fréquemment, nous la
retrouverons dans bien des cas, en particulier à propos des pho-
bies, mais elle se rattache aussi à ce besoin de faire les choses
avec netteté, avec précision. Vk... se lave les mains indéfiniment,
sans crainte précise de souillure, simplement parce que « les
mains mal lavées, c'est du désordre ».
La micromanie mérite qu'on s'y arrête : il est évident que
beaucoup de ces malades accordent plus d'importance à ce qui
est petit qu'à ce qui est grand. Chu..., femme de 36 ans, recherche
avec anxiété les « petites miettes de graisse, les miettes de saleté»
mais ne s'occupe pas w des grandes saletés ». Bow... a peur
« des petits bruits » non des grands. « Un coup de canon ne me
fait rien, mais j'ai envie de tuer les gens qui mâchent, qui se
curent les dents, qui toussent... » M. Stadelmann de Wurzbourg*
rapporte une jolie observation d'un homme de 3o ans, préoccupé
depuis la puberté par la préoccupation de ce que deviendront
dans l'avenir divers objets insignifiants, une mouche qui vole,
une allumette éteinte, la cendre d'un cigare, les taches de bougie
tombées à terre, etc. M. Farez rapporte aussi des obsessions et
des dégoûts pour des très petits objets, bouts d'allumettes,
taches de bougie^. 11 est inutile d'insister sur l'importance que
ces malades attachent aux « petits microbes ». Dans cette préoc-
cupation de ce qui est petit entre évidemment la manie de l'atten-
tion et de la précision.
1. Stadelmann (Wurzbourg), Traitement psychique. Société d'hypnologie el de
l^ychologie, 20 mars 1900.
2. P. Farcz, Cas de phobie consciente. Société d'hypnologie et de psychologie,
30 mars 1900.
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LES AGITATIONS FOUCÉES
2. — Les manies arithmétiques.
des chiffres, V ariihmo manie ^ nous paraît mériter par
ince clinique et par sa fréquence de former un groupe
qu'elle soit en réalité une variété de la manie de pré-
îdente : le besoin de précision fait que les malades se
î passion pour les idées qui ont la réputation d*ètre
ment précises, les idées mathématiques ou plutôt les
s d'entre elles, les nombres.
d'abord chez eux une prédilection pour tout ce qui
) chiffres. Jean semble avoir une mémoire extraordinaire
[es personnes, leur date de naissance, la date de tous
mts de l'histoire contemporaine et de sa propre his-
ubliera jamais en vous racontant son histoire de vous
de sa première masturbation et la date de la dernière,
3ur où pour la première fois je l'ai forcé a uriner con-
t. On cite souvent des cas de mémoire extraordinaire
lividus qui récitent les actes de naissance et de mort de
mmes de la commune ou qui récitent l'horaire du
fer. On a tort, à mon avis, de ne considérer en eux
noire et de les décrire uniquement comme des hy-
es. Si l'on remarquait que ce sont des scrupuleux,
manie de diriger toute leur attention sur ce point et
)rennent en réalité rien cPautre, on trouverait icette
oins merveilleuse.
seconde forme les malades accordent une grande im-
îertains nombres déterminés : Lise donne sa préférence
js 2, 3, 4> 376, qui représentent telle ou telle de ses
antcs. Jean déteste les nombres 6, i4, 20, prononcés
tle, 22, date du jour où la femme de chambre l'a
l'Age de Charlotte, 53, date de sa naissance, etc.
uis longtemps signalé le besoin de compter. M. Gi-
résenlé à la société d'anatomie et de physiologie de
în 1897, uiï jeune homme de 27 ans qui depuis l'Age
)mpte toutes les lettres contenues dans les phrases
qu'il dit, qu'il écrit ou qu'il entend, sans que ce tra-
lénal soit cependant une gêne ou une fatigue pour lui * :
s, Revue scientifique, 1897, 1, 4/3.
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LES MANIES DE L'AU DELA 119
le dernier point serait à vérifier. On connaît le malade célèbre
de Legrand du SauUe qui en entrant chez le médecin lui deman-
dait la permission de compter d'abord les boutons de son gilet.
Jean n'a-t-il pas imaginé de compter le nombre de lettres qui
dans Talphabet séparent les différentes lettres d'un mot : le mot
« mère » est pour lui 7, 12, 12 ; car entre M et E il y a 7 lettres
et 12 entre R et E. Zo... se croit obligée de compter toutes les
épingles qui sont dans la maison afin de vérifier si elle» n'en met
pas dans la soupe.
Enfin dans des cas plus complexes les malades ont besoin de
compter jusqu'à des nombres déterminés : Ser... et F... exigent
que chaque question leur soit répétée trois fois avant qu'elles
daignent répondre. Mw..., jeune fille de 28 ans, compte malgré
elle le nombre de doigts avec lequel elle touche un objet : pour
rien au monde elle ne voudrait toucher un objet avec 7 doigts à
la fois, aussi pour l'éviter prend-elle la résolution de ne rien tou-
cher qu'avec une seule main. Rien n'y fait, elle a touché l'objet
complètement avec trois doigts et légèrement avec le quatrième,
cela fait 3 doigts 1/2 et elle pense forcément que si elle avait mis
les deux mains cela ferait 81/2X2 c'est-à-dire 7. Jean compte
ainsi une foule de choses, le nombre de fois qu'il avale sa salive,
les battements de son cœur; il compte par 4 et par multiples de
tu " un, deux, trois, quatre, il faut que je les compte sans quoi
j'étoufferais et je ne pouvais pas m'arrêter avant quatre ; cinq,
six, sept, vous savez qu'on ne peut pas s'arrêter à sept ; huit,
j'ai été obligé d'aller jusqu'à huit. Si l'excitation était très forte,
il faudrait encore une série de quatre. Quelquefois il faut aller
jusqu'à 32, 64»* Je remarque en passant que ce compte des batte-
ments du cœur est tout à fait imaginaire : j'ai essayé une fois de
compter moi-même son pouls pendant qu'il comptait à sa façon les
battements du cœur, nos comptes étaient absolument discordants.
Il compte ainsi toutes sortes d'actions bizarres que nohs retrouve-
rons à propos de la lutte contre les obsessions et à propos de la
manie de compensation. Un autre malade Vy... me disait naïve-
ment qu'il avait besoin de compter pour se raccrocher à quelque
chose. Je crois que ce malade a raison, l'arithmomanie n'est pas
une obsession spéciale, une idée fixe isolée, c'est une manie men-
tale, une sorte de besoin pathologique de précision qui peut
s'appliquer à toutes les obsessions, et même à des idées quel-
conques.
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m^.
120 LES AGITATrONS FORCÉES
3. — Les manies du symbole.
Je désigne par ce mot une tendance et un besoin très curieux
qui me seml)lent n'avoir pas été suflisamment remarqués : c'est le
besoin de traduire en images, en représentations sensibles les
sentiments et les idées. Ce besoin se constate d'abord dans le
langage des malades. On est frappé de l'abus qu'ils font des
métaphores pour exprimer leur état, a Je suis un pauvre petit
oiseau sans plumes... je suis au milieu d'un labyrinthe avec d'in-
nombrables couloirs obscurs, — je suis comme un sac couché par
terre et l'humanité danse dessus. » Il faudrait recopier tous leurs
discours pour mettre ce signe en évidence.
Le symbole se retrouve encore bien plus dans les images que
se représentent les scrupuleux, images qui donnent naissance aux
pseudo-hallucinations que nous avons étudiées précédemment. On
a dû être étonné du contenu singulier de ces pseudo-hallucina-
tions. D'ordinaire l'hallucination reproduit un spectacle particu-
lièrement impressionnant qui mérite de rester dans la mémoire ;
une hystérique a l'hallucination de la tête de son père sur son
lit de mort, une autre de la figure de son amant qui l'embrasse.
Ici nous avons signalé chez Voz... Thallucination du mur du lycée,
de 4 arbres qui l'entourent pendant qu'il marche, chez Rp...
rhallucination de la silhouette d'un homme qui passe. Comment
ces images banales ont-elles pu attirer assez l'attention pour se
reproduire ainsi indéfiniment? En réalité, ce ne sont pas de sim-
ples souvenirs, ce sont des images qui ont un sens, une significa-
tion et cette signification est plus importante que l'image elle-
même : en un mot ce sont des symboles.
Rp... qui voit passer devant lui à 5 mètres de distance le direc-
teur de l'école avec un visage souriant ou courroucé est un scru-
puleux qui a la manie des présages. 11 s'est dit que son entre-
prise réussirait s'il voyait passer devant lui son directeur avec le
visage souriant. Il va tout h l'heure s'interroger, nous le savons,
et se demander si le visage était souriant ou non, peu importe.
L'essentiel à remarquer maintenant c'est que cette vision imagi-
naire de la figure du directeur est devenue un symbole qui
résume les bons et mauvais présages. Voz..., ce jeune homme de
22 ans, qui a des pseudo-hallucinations si curieuses du mur, des
arbres du lycée, des chaînes qui lui barrent le chemin, éprouve
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LES MANIES DE L'AU DELA 121
au suprême degré un sentiment très fréquent chez les scrupuleux
et aussi chez les persécutés, un amour passionné, obsédant de la
liberté avec l'impression qu'elle lui est ravie. « Je sens toujours
comme une limitation qui me contraint, qui m'arrête, je suis ob-
sédé par la pensée de contrainte et de limite à mon action... »
Nous aurons à étudier la genèse de ce sentiment si curieux et si
fréquent; pour le moment remarquons comme il est bien sym-
bolisé par les images que voit le malade, le mur du collège, les
arbres de la cour entre lesquels il croit marcher sans cesse, les
cordes qui le lient. Peut-on trouver plus parfaite hallucination
symbolique ?
Chez d'autres malades nous trouverons beaucoup d'autres
exemples moins brillants : chez Jean les deux images de femme
symbolisent Tune celle de Charlotte, la tentation, l'autre, celle
de la femme de chambre qui rit, la conscience. Chez Claire nous
avons déjà insisté sur l'inlage du membre viril et de l'hostie qui
symbolisent le crime sacrilège ; chez la même malade le précipice
représente la maladie et ses progrès. Ce dernier symbole est si
naturel que d'autres personnes, en particulier Lise, me disent
éprouver aussi ce sentiment de descendre et d'avoir besoin d'un
effort pour ne pas se représenter une descente matérielle dans
un trou. Les saintes dans le ciel sont pour We... le symbole de
la vie religieuse et le visage de Tenfant est pour Gisèle le symbole
des devoirs conjugaux.
Des objets et non des images peuvent devenir des symboles.
Le faux coi est pour Vy... le symbole de la gêne et de la con-
trainte, comme le journal est pour Jean le symbole de tous les
crimes politiques et génitaux. Delà sont venues bien des terreurs de
ces objets.
Cette manie du svmbole se retrouve aussi dans certains actes
et dans certains mouvements : pivoter sur ses talons, c'est pour
Lod... le symbole de la religion « parce qu'on tourne ainsi de
côté pour saluer l'autel quand on passe devant. Fermer le poing,
c'est comme si on insultait Dieu, fermer brusquement un tiroir,
c'est envoyer Dieu promener ». Nous en verrons bien des
exemples en étudiant les tics. Remarquons seulement que la
manie de la propreté qui était déjà une conséquence des
manies de précision se rattache aussi souvent au symbole. La
sœur aux scrupules de Rodenbach époussette sans cesse sa
cornette pour faire tomber les poussières, symboles des petits
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122 LES AGITATIONS FORCÉES
péchés^ et Vk... se lave les mains avec du savon blanc toutes
les fois qu'elle a pensé à mentir.
Cette manie du symbole joue un grand rôle dans les im-
pulsions et, si on la méconnaît, on s'expose à de graves erreurs.
On a vu que ces malades ont des commencements d'actes,
pousser du doigt sa petite fille, boire un petit purgatif, ouvrir un
bouton de la braguette, j'ai déjà cité trop d'exemples pour y
revenir. D'autres n'ont que l'image kinesthésique d'un mouvement
qui commence. Plusieurs auteurs ont vu là l'explication de l'obses-
sion impulsive: les sentiments de ces représentations de mouve-
ment, de ces petits mouvements commencés donneraient au malade
l'idée qu'il est poussé à accomplir quelque chose. Il en est quel-
quefois ainsi chez les hystériques qui ont des actes automatiques
avec subconscience, mais il n'en est pas ainsi chez les scrupuleux
qui font eux-mêmes ces petites actions, comme des symboles du
crime, pour se donner à eux-mêmes l'illusion d'être poussés au
crime et pour pouvoir se faire plaindre et protéger.
Cette manie du symbole me semble jouer un très grand rôle
dans la maladie et quand nous discuterons la genèse des obses-
sions elles-mêmes, nous verrons que beaucoup ne font que sym-
boliser un trouble antérieurement ressenti. Quant à cette manie
elle-même, elle me parait se rattacher aux phénomènes précédents,
comme la manie arithmétique, elle dépend du besoin de préciser,
d'exprimer avec une netteté, d'une manière matérielle, des senti-
ments et des idées à propos desquels le malade n'arrive jamais
à la certitude.
[\. — Les manies de la recherche. — La manie du passé,
la manie de l'avenir, \:^yxry
Le travail mental me semble se compliquer quand il dépasse
les circonstances environnant l'acte présent et qu'il porte sur de
tout autres faits, en particulier sur des faits passés.
Pour répondre au problème posé par l'interrogation primitive :
« ont-ils oui ou non commis une action répréhensible ? » les ma-
lades sont amenés à se remémorer exactement les actes ancien-
nement accomplis. Par exemple, Ce... a de« soupçons sur tel ou
tel acte de la journée, il s'arrête et cherche à se rappeler exacte-
I. Rodenbach, La sœur aux scrupules, p. 86.
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LES MANIES DE L'AU DELA 123
ment les diverses actions qu'il a faîtes, les diverses phases par
lesquelles a passé chaque action. Il passe des heures à vérifier
dans sa mémoire comment il a passé d'un mouvement insignifiant
à un autre aussi futile. SI par malheur dans cette revue, il y a un
instant dont le souvenir ne lui soit pas précis, le voilà au comble
du désespoir. Qu'a-t-il pu faire dans cet instant? C'est là que se
glisse Tobsession et il fait les plus grands efforts de mémoire
pour se convaincre que pendant cette seconde, il n'a pas accompli
quelque horreur. Il en est de même pour Dk... : « à quel moment
a-t-il pu tuer cette femme ? de quelle manière s'y est-il pris ?
quel est l'instant de la journée où il n'était pas occupé à autre
chose ? » Il emploie des heures h cette recherche.
La recherche indéfinie est un des grands caractères de Lise,
car, pour son malheur, elle ne se pose ces questions que sur une
époque éloignée où la vérification minutieuse de l'emploi du temps
est horriblement difficile. Il y a un an, le vendredi soir de telle
date, s'est-elle laissée aller à vouer ses enfants au diable? Pour le
savoir, il faut rechercher, si à cette époque, elle a désiré quelque
chose assez fortement pour prier le diable de le lui accorder, si
elle a cédé à la tentation d'obtenir ce qu'elle désirait par le sacrifice
des enfants, ou si elle a su résister en disant la formule d'exor-
cismes : « Non, non, 4, 3, 2. » Voilà un petit problème qui n'est
pas facile à résoudre: il faut trouver minutieusement l'emploi de
son temps afin de constater une sorte d'alibi moral. « Ça ne dis-
parait pas une minute de mon esprit. Je sens que je recherche tout
le temps et ce sont des heures d'immobilité dans cette recherche
stupide. » Or, elle recherche ainsi toutes les promesses qu'elle a
pu faire à Dieu ou au diable, toutes les paroles qu'elle a prononcées,
tous les signes qu'elle a faits jusqu'à s'affoler complètement.
Un cas intéressant de cette manie de rechercher un souvenir est
celui de Bre... (i4i), femme de 42 ans ; elle a perdu son mari il y a
trois ans dans des conditions assez émotionnantes. Depuis ce mo-
ment, elle a le sentiment qu'elle a oublié la figure de son mari. Nous
aurons à étudier jusqu'à quel point cet oubli est réel. Pour le mo-
ment nous constatons que ce prétendu oubli est le point de départ
d'une manie de recherche. Il lui faut arriver à se représenter vi-
suellement la figure de son mari: elle se sert pour y parvenir des
portraits, des descriptions, des souvenirs de toutes sortes, elle tra-
vaille nuit et jour et ne parvient pas suffisamment à son gré à
cette représentation. Puis elle s'excite à rechercher de la même
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LES AGITATIONS FORCÉES
uvenir de sa voîx, de ses actions, etc. Elle croît avoir
î qui le concerne, avoir oublié de la même manière
es d'homme et ne plus même se souvenir d'avoir été
B s'épuise à retrouver avec précision tous ces sou-
te manie de rechercher des souvenirs que se rap-
js souvent les manies qui ont été décrites par Char-
1 ' sous le nom d' o no m a Coma nies , Dans le cas le plus
décrit par ces auteurs, le malade recherche toute la
'une petite fille dont il a lu l'histoire dans le journal ;
ise déterminé par cette manie de recherche est épou-
u'à ce que le matin il puisse retrouver dans un journal
orgette.
ît citer bien des exemples semblables: Hg... (i3o),
ins, a été conduite à la manie des recherches d'une ma-
re : elle a été très ennuyée parce que l'on a bâti un mur
tre de sa cuisine et toute la journée elle se demandait
ait derrière ce mur. La manie s'est peu à peu déplacée
l elle remarque une ressemblance quelconque à pro-
re d'un passant et il faut absolument qu'elle trouve
personne qui présente cette ressemblance avec le
... (i3i), un homme de 76 ans, est encore à cet âge
r une manie semblable. A-t-il dans la journée causé
onne peu connue, il faut absolument qu'il retrouve le
'sse de cette personne, et il passe des jours et des
rcher dans sa mémoire ces renseignements. Aussi
s aborde, nous prie-t-il d'inscrire notre nom et notre
n carnet qu'il ne quitte jamais.
à cette manie du passé qu'il faut rattacher toutes les
némoration qui peuvent prendre des formes variées.
en a décrit un cas curieux : « Un homme de
1 il voyage, regarde toujours attentivement les sites
lent sous ses yeux; lorsqu'il a parcouru une certaine
che à sç remémorer l'aspect du paysage aperçu. S'il
V arriver, il souflTre tellement qu'il refait souvent le
combler les lacunes de sa mémoire... Parfois, il
Magnan, Onomatomanic. Archives de ncurolofjie, scplembro i885.
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LES MANIES DE L'AU DELA 125
transige avec lui-même et envole un domestique vérifier certaines
particularités restées incertaines dans son esprit *. »
Dans un cas de M. Lowenfeld*, la manie du passé semble encore
plus indépendante de la recherche et de Tinterrogation. Depuis
l'âge de i3 ans, le malade se plaint « que la pensée est envahie
par des souvenirs obsédants d'une exactitude photographique... »
Il en résulte, dit Tauteur, « un effacement remarquable du moment
présent, le malade vit plus dans le passé que dans le présent ».
C'est là une remarque très importante, mais elle a rapport à des
phénomènes essentiels que nous devons étudier plus tard isolé-
ment. Chez une de nos malades, chez Cz..., femme de 33 ans, nous
retrouvons cette manie de remémoration sans recherche précise :
« Autrefois, dit-elle, je recherchais mes souvenirs pour savoir si
je devais me reprocher quelque chose, pour me rassurer sur ma
conduite, mais maintenant ce n'est plus du tout la môme chose.
Je me raconte tout le temps ce que j'ai fait il y a huit jours, il y a
quinze jours, j'en arrive à voir les choses exactement et je n'ai
aucun intérêt à les revoir, cela m'agace tout simplement, mais
cela revient malgré moi. »
A cette manie du passé on peut joindre certaines manies de
conservation des objets, certaines manies de collection. Plusieurs
malades (Nadia, Lod..., etc.), gardent précieusement des tiroirs
pleins de petits papiers sur lesquels sont écrits leurs serments, leurs
promesses ou simplement des résumés de leur vie, d'autres con-
servent des enveloppes, des lettres (Jean), des boites en carton
(U...), des chiffons (Vk...), et ne veulent pas que l'on détruise
rien. M. S. de Sanctis^ a décrit ces manies de collection, mais
son étude vise surtout des malades différents des nôtres, atteints
de paralysie générale ou de divers délires systématiques, quel-
ques-uns seulement de ses exemples se rapprochent des cas que
j'étudie ici.
Dans tous les cas précédents la manie pousse les malades à
dépasser le moment présent par la recherche et la considération
du passé.
1. F. Raymond, Journal de médecine et de chirurgie pratiques, 1899, P- ^^^•
2. Lôwenfcld (Munich) Psyc/i/o/mr/ie Wochensehrift, 10 juin 1899.
'^. s. i\c Sanclis, Collezioni>nio c iinpuisi collezionisti. lioli. délia Sorieta Lanri-
siana dajli ospedali di Honia, WII, fasc. I, 1897.
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126 LES AGITATfONS FORCÉES
La recherche peut aussi porter sur Favenir, les malades cher-
client quelles sont les conséquences lointaines de leurs actions ou
cherchent à se représenter simplement les événements futurs.
Jean appelle cela ses pressentiments, il imagine toujours tout ce
qui va arriver dans i5 jours, dans un mois et il se plonge dans
cette contemplation. Bab..., femme de 28 ans, présente une
maladie de Favenir curieuse, des imaginations obsédantes, tout à
fait analogue aux souvenirs obsédants de Lowenfeld. Devant le ber-
ceau de sa petite fille qui a 18 mois elle cherche quelle robe elle
mettra au mariage de cette enfant « et cette cérémonie de mariage
me tracasse énormément, il faut que je combine toute la céré-
monie, toutes les invitations, que je cherche commentée pourrai
payer la robe de la mariée, c'est une véritable fatigue ». Lise
dépasse toujours le moment présent se répétant ce qui arrivera
quand elle aura fini ce travail, quand elle sera vieille, quand elle
sera morte. « J'arrive toujours h la pensée de la mort parce que
c'est le dernier terme. » Nous retrouverons cette pensée à propos
des manies de Fextrôme.
5. — Les manies de V explication,
La recherche peut dépasser les faits du passé et ceux de Fave-
nir ; elle peut porter sur tous les problèmes scientifiques ou phi-
losophiques. C'est la recherche pour la recherche, sans intérêt
immédiat.
Cette forme de la manie est la plus connue, elle se trouve
décrite souvent sous le nom de folie de l'interrogation, folie mé-
taphysique, etc. C'est le Grilhelsucht, le Fragetrieb des auteurs
allemands, c'est l'une des formes de la psychasthénie qui a été
décrite en premier lieu par Griesingcr. Un de ses malades ne
pouvait entendre le mot « beau » sans se poser malgré lui une
série inextricable et indéfinie de questions sur les problèmes les
plus obstrus de l'esthétique. Le mot « être » le lançait dans la
série des discussions métaphysiques. « Je ruine ma santé, disait-
il, en pensant sans cesse h des problèmes que la raison ne pourra
jamais résoudre et qui malgré les efforts les plus énergiques de
ma volonté me fatiguent sans trêve. Le cours de ces idées est
incessant... Cette réflexion métaphysique est trop continue pour
être naturelle..., chaque fois que ces idées reviennent, je tente
de les chasser et je m'exhorte h suivre la voie naturelle de la
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LES MANIES DE L'AU DELA 127
penséo, à ne pas iirembroulller le cerveau tic choses abstraites
et insolubles et cependant je ne puis me soustraire h l'impulsion
continuelle qui martèle mon esprit. » Depuis ce travail de Grie-
singer, celte manie mentale a été décrite bien souvent. « L^obses-
sîon peut prendre la forme interrogative, disait M. Saury :
<c Pourquoi les couleurs sont-elles inégalement réparties, les arbres
verts, les pantalons rouges, le deuil en noir ? Pourquoi les hommes
ne sont-ils pas plus grands?^ » Une observation de M. Ladame
est fort remarquable: il s'agit d'une femme qui depuis l'enfance
se posait à elle-même toute espèce de questions insolubles dont
elle cherchait en vain la réponse de manière à troubler toute son
activité. Ce sont des questions relatives à la création (Schôpfungs-
fragen). « Est-ce que le monde a pu se faire tout seul ? Peut-on
diviser un objet en parties infiniment petites ? Comment l'âme
sort-elle du corps, etc. ? ' »
J'ai pu observer chez de nombreux sujets tous les degrés de
ces recherches depuis les questions les plus humbles sur le cos-
tume, jusqu'aux plus grands- problèmes métaphysiques. Elg...,
jeune femme de 19 ans, s'interroge à propos du costume que
porte la personne qu'elle regarde : « Pourquoi porte-t-on un
tablier? Pourquoi met-on une robe..? Pourquoi les messieurs
n'ont-ils pas de robes ? » et quand elle s'absorbe dans ces
questions elle ne peut ni écouter ni répondre. Un homme de 87
ans, Qs..., s'interroge sur la fabrication des objets, « comment
a-t-on pu faire une maison ? un bec de gaz?... » Il essaye
de s'arrêter en murmurant : « Allons, ne t'emballe pas, n'y
pense pas, » mais il revient à la question : « Comment peut-on
faire brûler du gaz? Comment de l'air peut-il s'enflammer et
éclairer ?.. » Rost... se borne à chercher « la définition du
violet ». Za... s'interroge sur des problèmes de morale : « Qu'est-
ce qu'une mauvaise pensée ? En ai-je eu avec ou sans mon
consentement ? Car tout est là, mais qu'est-ce que c'est qu'un
consentement ? » Za... est resté 3 ans à méditer sur le mot
a consentir » sans arriver h une solution.
Nem..., après avoir éprouvé un sentiment d'étonnement en
voyant un individu qui lui paraissait drôle, trouve tout surprenant
et s'interroge sur tout. « Comment se fait-il qu'il tonne, qu'il y
1. Saury, Folie des dégénérés, p. G3.
2. Ladame, Ann. méd. psych., 1890, H, 38'|.
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LKS AGlTATfONS FORCÉES
éclairs, qu'il y ait un soleil, qu'il fasse jour ou nuit? Si
'ait pas de rivières et pas d'eau comment est-ce qu'on ferait
oire, pour laver ? Kt si on n'avait pas d'yeux comment est-
l'on ferait pour voir ? »
., à propos de la critique des sens et de l'intelligence se
ne foule de problèmes philosophiques : non seulement,
nous Tavons vu, elle interroge sur le caractère direct ou
t de la perception sensible, mais elle cherche aussi h com-
e la nature de l'entendement, la signification de la parole
'écriture. <( Comment des petits points noirs sur le papier
t-ils contenir une pensée ? Comment les mots viennent-ils
la bouche en même temps que je pense ? Est-ce donc une
ion de la pensée? Je me perds là-dedans... Comment la
qui est un bruit peut-elle transporter la pensée qui n'est
e chose matérielle..? Ah, si je pouvais oublier tout cela?...
ent se fait-il que je comprenne une personne en dehors de
]!omment se fait-il que j'aime ma fille qui est en dehors de
t curieux de remarquer que ces spéculations ne se présen-
s uniquement chez les personnes intelligentes et cultivées,
B retrouvent presque identiques chez des femmes du peuple
ment sans éducation. Nadia, qui est une femme très ins-
et qui a beaucoup lu, s'interroge « sur la religion, sur la
ure, sur les mystères de Tàme... que deviendra mon
jue deviendra l'ame du monde ? » Cela semble assez
[. MaisHm..., femme de 21 ans, domestique à la campagne,
ée aux durs travaux d'une ferme, qui sait à peine lire et
sait pas écrire, est tourmentée après un accouchement par
mes idées. «Je ne puis pas savoir comment cela se fait qu'il
lu monde, pourquoi y a-t-il des arbres, des bétes, qu'est-
tout cela va devenir plus tard quand tout sera fini ?... »
là un besoin de spéculation, de travail mental, qui s'ef-
indépendamment des connaissances acquises et des capa-
u sujet pour discuter les problèmes qu'il se pose.
6. — Les manies des précautions,
recherches précédentes s'appliquaient surtout aux idées,
liions retrouver à propos des actions des manies du même
que l'on peut aussi considérer comme des conséquences du
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LES MANIES DE L'AU DELA 129
besoin de précision. On remarquera en premier lieu, la manie
des précautions, c'est-a-dire le besoin de faire une foule de
petites actions accessoires qui sont destinées à rendre plus facile
une action principale ou à empêcher une action que Ton redoute.
Zo..., qui a l'obsession des épingles, se détourne des boîtes au
lait, fait des détours dans la rue pour ne pas passer auprès des
marchands de comestibles, elle mange elle-même très lentement,
divise ses aliments à Tinfini, etc. Dk... se met en tête d'écrire
sur un carnet tout ce qu'il fait au cours de la journée afin de ne
rien oublier. Cha..., qui a la manie de rechercher les noms
et adresses des personnes qui lui parlent, ne vous aborde
jamais sans vous prier d'écrire tout de suite votre nom et votre
adresse sur un carnet qu'il porte constamment. Nadia prend
toutes sortes de précautions dans son alimentation, j'en ai
déjà parlé, elle se couvre le visage, ordonne à sa femme de
chambre une attitude spéciale quand elle passe devant elle,
etc. La manie des précautions se manifeste dans ses lettres
surchargées de mots soulignés et terminées toujours par la for-
mule : « veuillez, je vous prie, avoir la bonté de ne montrer cette
lettre à personne et de la brûler. » Vob... ne s'endort pas sans
coudre le bas de sa chemise en dessous de ses pieds, sans
attacher les manches de sa chemise aux draps par des épingles,
afin d'éviter pendant le sommeil les masturbations.
Jean présente bien des actions bizarres en rapport avec ses
précautions : il marche très lentement h petits pas, il prend de
grandes précautions au tournant des rues, car s'il se permettait
un mouvement un peu brusque, il y aurait un « frottement psy-
chique » de ses parties qui provoquerait la masturbation et ses
terribles conséquences. Un jour, mais une fois seulement, il a été
jusqu'à découdre son pantalon et à enlever la doublure « pour
gagner de la place » et il est resté une soirée avec son pantalon
décousu sans être plus tranquille d'ailleurs. 11 continue toujours
à tenir ses jambes très écartées quand il est assis, il arrange sa
chemise et son caleçon de manière spéciale. Il ne peut couper son
pain quand il est debout, ce qui occasionne l'idée de se crisper,
il change la place de son lit, etc., il a des artifices pour se mou-
cher « sans ébranlement », il réduit l'acte d'uriner et écarte les
mictions jusqu'à perdre les urines par regorgement, etc.
Chez Claire il faut noter que ce besoin de précautions amène
une extraordinaire et perpétuelle surveillance d'elle-même. C'est
LES OBSESSIONS. 1. g
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LES AGITATIONS FORCÉES
effort perpétuel pour être sur le qui-vive, « je ne me donne pas
minute de liberté et j'absorbe toutes mes forces dans cette
reillance de moi-même ». La nuit même, elle s'oblige à rester
faitement immobile dans une position déterminée et elle y
jsit au prix d'une courbature de tout le corps. Les membres
3euvent pas se laisser aller au repos, ils sont constamment à
li raidis. Nous retrouverons le même symptôme chez Lise, dans
grandes périodes de surveillance d'elle-même, et nous aurons
étudier encore comme une des manifestations physiques de
t d'inquiétude.
cette manie on peut rattacher la manie de la lenteur si cu-
se chez Vk... Ce n'est pas une lenteur naturelle en rapport
i l'aboulie, c'est une lenteur voulue, calculée dans tous les
s qui lui paraissent avoir quelque importance. Il lui faut une
li-heurc pour mettre son jupon et une autre demi-heure pour
icr une robe, « si je vais plus vite je ne suis pas sûre que ce
bien fait et la vue des gens pressés qui vont vite m'énerve ».
armi ces précautions que prennent les malades, la plus simple
plus banale de toutes, ce sont des précautions de propreté.
ime ils ont peur de faire avec leurs mains un acte qu'ils
lutent et comme, ainsi qu'on l'a vu, leurs craintes portent sur
etites choses, le meilleur moyen de garantir leurs mains, c'est
îs laver. Il en résulte qu'un très grand nombre de ces ma-
s ont passé par une période où ils se lavaient les mains pcr-
ellement. 11 est inutile de citer ici des noms, nous avons une
taine de malades qui se lavaient ainsi continuellement,
très se préoccupent aussi de la propreté de leurs vêtements
lassent leur temps h les brosser, « de peur qu'il ne soit
Dé dessus une miette d'hostie, » ou bien ils lavent les
blés, les essuyent sans cesse de peur de la poussière, des mi-
es, des parcelles métalliques.
uelquefois cette manie de propreté est très loin de s'allier
une propreté réelle. U... a surtout des idées hypocondriaques
a crainte du microbe de la phtisie. Elle se lave continuelle-
t les mains, mais elle a peur de toucher un objet de sa chambre
lie ne peut pas tolérer qu'une autre personne y touche. Il en
Ite que la salle n'est jamais nettoyée, que le lit n'est jamais
hé et que des ordures invraisemblables s'amoncellent en un
able fumier. Quand j'ai commencé à soigner cette personne,
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Les maNies de l'au delà m
j'ai dû lui faire couper une chevelure énorme, transformée en
matelas infect qu'il était impossible de nettoyer autrement et ce
résultat bizarre provenait d'une manie de propreté.
Bien entendu la manie de la propreté se compliquera des
doutes précédents; après s'être lavés, ils doutent qu'ils se soient
lavés et ils recommencent à se laver. Cette manie se joint à celle
des interrogations et celle des répétitions. « Le doute, dit Legrand
du Saulle, s'est mis au service du délire du contact et il se de-
mande s'il s'est bien lavé les mains *. »
7. — Les manies de la répétition et du retour en arrière.
Malgré ces efforts de précision et ces précautions les malades
sont toujours peu satisfaits de leur action. Ils veulent essayer de
faire mieux les choses, de se satisfaire eux-mêmes. Dans le cas le
plus simple et le moins délirant, ils recommencent l'acte tout
simplement, mais ils ne sont pas plus satisfaits la seconde fois
que la première et alors ils recommencent indéfiniment: nous arri-
vons aux manies de la répétition qui sont parmi les plus fré-
quentes et les plus importantes.
Une jeune fille Tr..., que nous avons déjà vu hésiter pour
donner la forme définitive à un pétale de rose en arrive à ne plus
pouvoir faire aucun mouvement sans le recommencer plusieurs
fois : elle se lève de sa chaise et ne s'en va pas, mais se rasseoit et
recommence h se lever; elle prend un verre puis le repose, le re-
prend, le repose et continue ce manège indéfiniment. Ce. . . pour s'as-
surer que la porte est bien fermée la rouvre et la ferme et cela une
dizaine de fois de suite. Ce symptôme de fermer plusieurs fois de
suite la porte ou le bec de gaz est tout à fait banal, il commence
même chez les individus à peu près sains dans toutes les périodes
d'affaiblissement et de distraction. Mais Ce... va plus loin, car il
recommence indéfiniment une addition, si bien qu'il ne peut
plus arriver à faire ses comptes. « Un homme sain d'esprit et
bien portant, disait Bail, est obligé de renoncer à la lecture car
dès qu'il a tourné une page, il croit en avoir sauté une et recom-
mence de nouveau sans pouvoir avancer^».
Dans certains cas il s'agit d'actes particuliers que les malades
I. Legrand du SauUo. Folie du doute, p. Sg.
a. Bail, Frontières de la folie. Revue scientifique, i883, 1, p. 3.
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LES AGITATIONS FORCÉES
)mmencent indéfiniment tandis qu'ils n'hésitent pas pour les
es. Vor... (137), quand elle a uriné, éprouve un méconten-
ent que j'ai déjà signalé, aussi relourne-t-elle imniédiate-
it aux cabinets, elle en ressort « sans être certaine d^avoir
;ué les dernières gouttes ». Elle retourne ainsi soixante fois aux
[nets avant de se coucher et ne s'arrête que tout à fait
isée de fatigue.
n de nos malades Rk... répète chaque phrase qu'il lit, chaque
ïse qu'il prononce ou bien il fait répéter chaque phrase que
prononce devant lui : « Mon Dieu, pense-t-il, voilà encore
phrase qui s'en va dans l'éternité et je ne l'ai pas bien com-
e ».
'autres pour ne pas recommencer indéfiniment se fixent une
te, un nombre de fois déterminé. Nous retrouvons ici cet
ur pour les chiffres, dont la précision apparente les enchante
> recommenceront l'acte quatre fois, dix fois, espérant par là être
qu'il sera bien fait. Nadia veut faire chaque action six fois
.. se borne à trois fois, Jean à quatre fois ou à un multiple de
Ire, Rien n'y fait malheureusement, car ils ne sont plus sûrs
itenant d'avoir bien compté : pour être satisfaits, il ne leur
plus recommencer l'acte mais la série des actions. Une pauvre
ne pour se tranquilliser veut réciter une dizaine de chapelet,
elle la recommence parce qu'elle croit qu'il en manque,
i fait-elle des dizaines de quatre heures du matin jusqu'à midi.
ne forme curieuse de ce besoin de recommencer, forme qui
ae lieu à bien des erreurs, c'est /e besoin du retour en arrière,
r recommencer l'action il ne faut pas s'éloigner du milieu où
doit être faite, il ne faut pas quitter trop vite les circonstances
lilieu desquelles l'acte doit avoir lieu. Ces malades désirent
; ne pas changer de place. Cette haine du changement, fon-
entale chez eux, en raison de leur aboulie est ici fortifiée par
îsir d'être à même de recommencer les pensées, les senti-
ts, les actes dans les mêmes conditions où ils ont déjà été
mplis. Ils cherchent donc, comme Claire à retourner en
îre, à reprendre la même pensée aux mêmes heures,
même endroit. Ils craignent qu'on ne les déplace malgré
et trop rapidement. Dès que Claire est à Paris elle veut
rtir à la campagne « comme il me semble, dit-elle, que
ai jamais fait ce je devais, je crois aussi que je ne suis pas à
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LES MANTES DE VMJ DELA
la place qu'il faudrait, que je devrais retourner à la pi
dente ». On comprend quel trouble terrible apportent l
en chemin de fer qui entraînent rapidement loin de la ]
cédente. Cela met cette jeune fille au désespoir, elb
revenir en arrière, a son point de départ, au moins à
précédente.
Cette Idée est très fréquente. M. Ameline signalait i
congrès de psychologie une jeune fille du service de M
qui n'aimait pas, en chemin de fer, voir les maisons
arrière à mesure que le train avançait. « L'impression (
fuit sous mes pas me laisse un vide et tout en me renda
que je dois continuer mon chemin, j'éprouve des héî
poursuivre vers mon but. Quand je suis arrivée il me s
j'ai été trop vite ; il faut que je retourne h mon point
Quand au lieu de faire un trajet à pied, je le fais €
j'éprouve le môme vide en voyant les maisons et tout
route et si je n'étais pas en voiture, il me semble qu(
rèterais* ».
On retrouve ce retour en arrière chez Fé..., chez I
croit toujours « laisser un vide derrière elle en pas
vite ». Je crois que cette manie de retourner h la môm
au même moment où a débuté l'action, joue quelquefc
dans la phobie des chemins de fer. II est facile de voir
rattache non seulement à la manie de la répétition ma
à la manie du symbole ; ce retour en arrière est une
symboliser le besoin de recommencer, le mécontenl
l'action.
8. — Les manies des procédés et les manies de la y
Souvent les malades ne se bornent pas à répéter
cherchent à le perfectionner, à le rendre plus complet,
tent des trucs, des procédés pour faire mieux l'action.
L... inventait des systèmes pour écrire. Il attachait
plume h tous les doigts de la main successivement qu'i
arrivé à ne plus écrire du tout et que sa maladie était
premier abord pour une crampe des écrivains. R
I. Ameliiic, Coiisidc'ratioiis sur la ps^cho-physiologio des obsession
pulsions dcçcnératives, Comptes rendus du IV^ Congres de psychologie, i
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LES AGITATIONS FORCÉES 13i
ité des systèmes pour écrire bien, pour tenir sa
lettre la ponctuation, pour réciter, pour aiguiser
et il en arrivait à ne plus pouvoir écrire une ligne,
1 métier ; puis il inventa des systèmes pour bien
)ut, dit-il, j'aspire à Tidéal, je creuse le sujet et je
d. » Enfin, ce qui causa son plus grand malheur,
systèmes pour déglutir et pour respirer. 11 veut
utte d'eau entre chaque respiration, il fait des gri-
ichemenls, des rots et devient aussi répugnant que
ï borne pas, comme on Ta vu, a répéter les mictions
de suite, elle cherche, elle combine des procédés
bien », elle étudie la théorie du coup de piston et
et h travers sur quelques idées vagues qu'elle a sai-
siologie de la miction chez rhomnie sans deviner
^'appliquent pas aux femmes. « N'y aurait-il pas
ement, quelque grimace à faire avec le ventre pour
^ » Je n'insiste pas sur la manie de la perfection
rbation qui est plus fréquente que l'on ne le croit.
ie de la perfection joue aussi un grand rôle dans
)les souvent désignes sous le nom d'onomatomanie.
vague désignait simplement un trouble quelconque
ots, ce pouvait être une obsession, une manie de
le manie de recherche, etc. On vient de voir Cha...
indant toute une nuit le nom et l'adresse des per-
ji ont parlé dans la journée. Dans d'autres cas, il
le manie de la perfection. Pn... (iSg), homme de
t surtout d'obsessions hypocondriaques s'est mis en
er les préoccupations sur sa santé par une phrase
[u'il doit répéter pour se tranquilliser. Il doit dire :
allons dîner, nous verrons après. » Malheureuse-
irase n'a tout son effet que si elle est bien dite. II
)as assez bien dite, il la répète, cela ne lui suffit pas.
e-tète ou la dit h voix basse, il cherche comment il
re ; il prie sa femme de l'écouter, de l'aider, de la
ni ; il imagine de descendre avec sa femme au fond
éteindre la lumière et de crier la phrase en chœur
l Pierre Janel, Névroses et Idées fixes, II, p. 385.
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LES MANIES DE LWU DELA 135
dans Tobscurité et il remonte désespéré parce qu'il n'a pas encore
trouvé « le moyen de la bien dire ». Une observation intéres-
sante de M. Séglas sur un malade qui a un mot sur le bout de la
langue et qui ne parvient pas h le bien répéter me parait se rap-
porter à des phénomènes analogues V
Le délire le plus curieux que j'aie constaté à propos de cette
manie dumieuxestceluid'unefemmedeSoans, Loa... (i38). A pro-
pos de quelques masturbations, elle a des remords et s'effraye en
pensant qu'elle n'a pas éprouvé d'une façon correcte la satisfac-
tion génitale. Elle attribue à cette satisfaction incomplète un en-
gourdissement qu'elle ressent et elle va à la recherche du bon-
heur. Son mari ne lui suffit plus, elle donne des rendez-vous à tort
et à travers ; elle ne s'y rend pas toujours, mais cependant elle essaye
quelquefois si elle aura plus de succès avec un autre, elle revient
toujours désillusionnée et désespérée. Cette femme semble avoir
un délire erotique, tandis qu'il ne s'agit que d'une manie de la
perfection chez une scrupuleuse. Ce singulier trouble doit être
fréquent puisque je le retrouve exactement semblable chez une
autre femme, Len... « Je ne me rendais pas compte de ce que
c'était que Texistence, j'étais trop naïve, il faudrait changer,
arriver k être comme les autres femmes... il me faut ma na-
ture... je n'arrive pas à éprouver ce que l'on doit, il me semble
que ce n'est jamais terminé, je continuerai indéfiniment... » Il
se peut qu'il y ait quelque chose de vrai dans ses plaintes, nous
le verrons plus tard. Mais il n'en est pas moins exact qu'elle a une
manie bizarre, celle de chercher, par tous les moyens, cette
jouissance parfaite, celle de rêver tout le temps à ce problème
comme s'il n'y avait pas d'autre but possible dans la vie.
g. — Les manies de l'extrême et de l'infini.
Toutes ces manies aboutissent h la même tendance, celle de
pousser toutes les opérations mentales à l'extrême, aussi loin
qu'il est possible d'arriver. Nous avons déjà vu cette manie se
manifester fortement dans les caractères des obsessions, il est
inutile de revenir sur le caractère extrême des sacrilèges, des im-
i. Séglas, Deux cas d'onomatom^nic. BuUelin de la Société médicale des hôpitaux,
la avril 1887.
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LFS AGITATIONS FORCf.ES
des remords, des hontes que ces malades imaginent,
ne femme de 33 ans, qui se rend compte de cette manie,
encore : « C'est ridicule, mon cerveau travaille tout le
es idées extraordinaires. . . je voudrais arriver à des choses
[ibles, à des crimes inouïs, ou bien à des fortunes, à des
ncrôyables, enfin il faudrait que ce soit extravagant. »
ussi vu cette manie se manifester à propos des recher-
e, par exemple, dans ses conceptions sur l'avenir, arrive
à penser h sa mort, à ce qui arrivera après sa mort,
»i elle regarde en arrière, « elle arrive tout de suite au
i a précédé la naissance ». Bal... ne peut sortir de la
ation (( du dernier au delà », sa manie des explications
' le commencement et la fin du monde, sur les destinées
du monde, etc.
encore ajouter quelques applications nouvelles de cette
n la retrouve dans la manie des généralisations, dans la
) l'absolu qui se manifeste souvent. « Dès que je me sens
lible, dit Claire, j'en arrive à concevoir que tout est im-
que personne au monde ne peut rien faire, que per-
est religieux, que personne ne peut guérir », Jean nous
quelques beaux exemples de cette manie de la généra-
l'infini. Une personne de sa connaissance vient de mourir
quartier à l'Est de sa petite ville, « il lui semble que ce
est désolé, vide de tout; à force d'y penser il croit que
[uartier Est est mort, qu'il ne renferme plus aucun être vi-
3ntot il en est ainsi de tout ce qui est à l'Est. Toute la
!st de la France au delà de Yincennes est vide, il n'y a
; de la terre et de l'herbe ». La manie du « tout ou rien »
mune chez ces personnes w il leur faut la perfection en
u bien ce n'est pas la peine de sortir de l'ignorance... »
:ais mieux ne pas uriner du tout nous dit Vor... que de ne
er dans la perfection ». Dans un autre cas, celui de Qs...,
le 37 ans, l'extrême prend déjà l'apparence numériques je
é de chercher à multiplier énormément les choses aux-
e pense, je cherche à imaginer sur une mer immense des
s, des milliers de bateaux, puis des milliers de milliers
lux et je m'épuise a les multiplier encore ».
a notion de Tinfini se dégage encore mieux de l'observ^ilion
, intéressante à divers points de vue. Un jeune homme de
Vil..., dans une lettre que je lui demande d'écrire me
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LES MANIES DE LAU DELA 137
décrit ainsi son obsession : a Tidée principale qui me tourmente
le plus, c'est Tidée de Téternilé : elle passe pour moi du domaine
de la raison dans celui de la sensibilité et me cause des douleurs
intolérables. Je sens letemps durerindéfiniment, l'espace s'allonger
toujours, quelque chose comme un crescendo sans arrêt, il me
semble que mon être gonfle progressivement, prend la place de
tout, se grossit d'univers et de siècles, puis une sorte d'éclate-
ment et tout disparait me laissant une douleur atroce dans la tête
et dans l'estomac. Ce travail d'esprit me poursuit et m'accable d'un
découragement profond. C'est donc vrai que l'éternité existe, je
viens de la voir, de la sentir trop évidemment pour que cela soit
une simple forme de mon esprit, mais alors que m'importe
les quelques instants de ma vie, que m'importe le bonheur, le
malheur ou le néant éternel ? C'est l'éternité qui est effrayante.
Quelque chose sans fin, c'est horrible. Toujours du bonheur, et
après ? Encore du bonheur ; et après ? Et après ? Cela est aussi
horrible que toujours souffrir ou toujours ne rien être. L'éternité
existera quand même il n'y aura rien. Les distractions les plus
vives sont impuissantes h chasser ces impressions de mon cer-
veau, tout mon corps en est comme imprégné, si j'essaye de
raisonner, je m'enfonce encore plus et je sens bien que ce sera
indéfini, interminable, ce n'est pas le résultat d'un syllogisme,
c'est le résultat d'une perception immédiate, évidente, plus évi-
dente même que la conscience de mon moi... »
Je reprendrai l'étude de ce phénomène remarquable à propos
des phénomènes de l'angoisse. Pour le moment, je remarque
seulement qu'il s'agit bien d'un scrupuleux, honteux de lui-
même, qui se croit sans personnalité, qui se reproche tout ce
qu'il pense, qui critique et analyse ses sentiments jusqu'il les
métamorphoser en leur contraire. « Ces questions me font tant
plaisir ou tant souffrir, je ne sais si c'est l'un ou l'autre, car mon
plaisir me semble à la fois être poussé trop loin et rester incomplet
et je ne sais pas si ce n'est pas une espèce de douleur. » Il a la manie
de pousser tout à l'infini, de chercher ce qu'il y a après le plaisir
qu'il éprouve, ce que serait un plaisir plus grand, encore plus
grand, etc. C'est h l'idée d'espace et de temps que cette manie
s'applique le mieux, aussi finit-il par en être obsédé. Il est rare
de trouver cette manie aussi explicite, mais en réalité elle est
contenue dans toutes les manies de l'au delà.
Toutes ces manies de Tau delà présentaient en effet comme
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LES AGITATIONS FORCÉES
ne essentiel une agitation de Tesprit incapable de s'arrêter
; pensée et qui était sans cesse forcé de la dépasser pour y
quelque chose, puis encore une autre chose sans repos et
II. Une agitation semblable conduit infailliblement a la
de Textrême et de Tinfini.
3. — Les manies de la réparation.
ré tous ces efforts et ces procédés variés qui tous semblent
our but de perfectionner Faction ou l'idée, le sujet n'arrive
tre satisfait. Aussi se livre-t-il à une autre série d'exercices
t pour but de réparer, d'effacer autant que possible les
B l'action précédente. Ce sont ces manies que je rapproche
titre de manies de la réparation.
I. — Les manies de la compensation.
iremicre est une simple compensation. Après l'action dite
euse, il faut en Aûre une autre qui semble souvent être
d'une manière arbitraire, qui dans d'autres cas est opposée
L»cédente pour la compenser.
id Bunyan avait trouvé dans la Bible un mot dont la signi-
I lui paraissait désagréable et décourageante il lui fallait
' dans les livres saints un autre mot dont la signification
ourageante pour compenser le premier'. Une observation
santé de L'adame semble se rapprocher de ce groupe :
id je marche, dit le malade, et que les mauvaises idées me
nt, je dois m'arrèter pour revenir d'un pas en arrière, pour
T la mauvaise pensée, c'est comme si je corrigeais une
dans un livre de compte ^. »
a s'est résignée îi manger pour m'obéir, mais h la condition
ndre aussitôt après le repas quelque chose qui la fasse
[• « quelque chose d'amaigrissant, puisque vos côtelettes
'ossissantes ». Autrefois, elle prenait une cuillerée de vi-
; je l'ai amenée à accepter une petite tasse d'une tisane que
iah ttoycc, TIic case of Bunyan. Psycholofjical fieview, 1894» p- i36.
dame, Ann. mcdic. psych., iSyo, 11, 38a.
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LES MANIES DE LA RÉPARATION 139
j'ai baptisée amaigrissante. Elle sait maintenant que je la trompe
et que sa tisane est faite de thé et de camomille; peu importe, elle
a besoin de la prendre encore, le symbole suffit pour faire la
compensation.
Quand les nécessités de la politesse ont contraint Jean bien
malgré lui à toucher la main d'une femme, il faut, pour compenser,
toucher bien vite la main d'un homme. Aussi quand il est seul
le soir avec sa mère et que celle-ci lui tend la main avant d'aller
se coucher, se trouve-t-il dans « une situation horrible ». Il n'ose
pas refuser sa maib, mais il passe ensuite une nuit bien pénible
puisqu'il n'a pu toucher la main d'un homme pour compenser.
Quand il est entré à l'église de la Madeleine (qui porte un nom
de femme), il faut qu'il entre au moins un instant dans une autre
église pour effacer cette impression.
Cette manie de la compensation présente bien des variétés dont
la principale est la manie suivante, l'une des plus importantes au
point de vue clinique.
2. — Les manies de V expiation.
L'expiation n'est qu'une forme de la compensation avec ces
deux caractères sinon surajoutés, au moins précisés. Le premier
acte qui est le point de départ de la manie semble au sujet hon-
teux et immoral, il s'agit surtout des malades honteux d'eux-
mêmes ou de leur corps. La deuxième action qui doit compenser
la première a un caractère désagréable, pénible, elle prend
l'apparence d'une punition.
« Il faut toujours, dit Pn..., que je fasse quelque chose pour sou-
lager ma conscience et il cherche à répéter avec perfection sa
formule : «Allons dîner, il ne faut plus penser à cela. » Hil...
(71), qui a honte d'aller à la selle, n'y va qu'en faisant des révé-
rences a pour s'excuser ». Claire qui croit avoir une hostie collée
à l'anus, et qui, par conséquent, redoute également d'aller à la
selle, ne consent à y aller qu'en s'ngenouillant dans les cabinets
quelquefois des heures entières avant et après. Zei... (i42), qui a
a envie de dire des gros mots au bon Dieu » veut faire des prières
pour expier et elle s'agenouille à chaque instant. Comme la
prière ne lui paraît pas bien dite, elle se condamne à ne pas
manger et c'est là une cause de refus d'aliments. Rn... (i46) se
condamne, pour expier ses mauvaises idées, à donner un coup
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140 LES AGITATIONS FORCÉES
de coude dans les meubles auprès desquels il passe. Ou prévoit
que ce phénomène va jouer un rôle dans les tics.
Au lieu d'expier par une action réellement exécutée au mo-
ment même, ils veulent expier en promettant de faire une action
désagréable plus tard ou en promettant de sacrifier un plaisir qu'ils
se promettaient. L... se promet à lui-même de se mettre en prison
cinq minutes pour expier ses actions indélicates et Mw... (i45)
se figure qu'un voyage agréable à bicyclette qu'elle espérait ne se
fera pas parce qu'elle ne s'habille pas assez vite. Cette promesse
d'expiation finit par se répéter pour tous les autres actes même
insignifiants. « Si je marche, si je touche ce fauteuil, si je bois
ce verre, le voyage h bicyclette ne se fera pas. »
Ce sont des faits du même genre avec un plus haut degré de
complication qui jouent le rùle principal dans la maladie de Lise.
(( Pour me punir d'avoir maudit Dieu, répète tout le temps Lise,
il faut que je me fixe une chose désagréable à faire, donner mon
âme au démon, par exemple. » Et ainsi pour tout ce qu'elle peut
se reprocher : a propos de tous les actes qui la préoccupent et
ils sont nombreux, il faut qu'elle fasse une expiation pour se ras-
surer. Si elle s'accuse de mensonge, d'impudicité, il faut expier
et par conséquent accepter un changement de séjour désagréable,
ou accepter qu'un de ses enfants meure, ou vouer son âme et
celle de ses enfants au démon, etc. Au début, il ne s'agissait que
d'expiations personnelles, elle ne voulait réparer que ses propres
fautes, mais bientôt l'idée d'expiation s'est généralisée. 11 faut
expier pour son oncle, pour un frère qui n'est pas religieux; il
faut expier pour un homme politique qui vient de mourir d'une
façon peu édifiante, il faut expier pour l'explosion d'une pou-
drière, etc. (( En un mot, dit-elle, j'ai des rages d'expier pour
tout le monde. » Le mot même « expier » finit par la fasciner, elle
le cherche dans tous les dictionnaires et apprend l'article par cœur.
Ce qui est bien étrange, c'est que je retrouve exactement la
même maladie chez la sœur de cette malade. Elle a une foule de
scrupules, s'accuse d'aimer une amie plus que sa famille, d'aimer
à jouer du piano, d'avoir pensé h l'Eucharistie devant une bou-
langerie, etc., et pour toutes ces mauvaises actions imaginaires
(( le regret ne suffit pas il faut une compensation. Il faut toujours
une petite chose pour satisfaire Dieu. » Ce sont chez elle des
tics, des simagrées, beaucoup plus simples que chez Lise. Elle
doit manger quelque temps dans une assiette vide, se déshabiller
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LES MANIES DE LA RÉPARATION 141
et se rhabiller, ouvrir une armoire, prendre un air triste toute la
matinée avec ses parents pour compenser Taprès-midi où elle
s'amusera avec une amie. C'est plus puéril, mais c'est le même
trouble psy<;hologique. Je ne crois pas que dans ce cas il s'agisse
de suggestion ou de maladie communiquée par contagion; il
s'agit d'un même trouble psychologique, profond, héréditaire qui,
en évoluant chez les deux sœurs, amène chez toutes deux les
mêmes manifestations.
Chez ces deux dernières malades, on trouve une variante de
l'expiation et delà promesse. Elles acceptent la peine sans se re-
procher rien, uniquement comme payement d'une grâce qu'elles
demandent. Dès qu'elles souhaitent quelque chose, elles pensent
qu'elles doivent expier pour voir ce souhait s'accomplir. « Je
n'aurai telle chose que je désire que si je fais un présent au démon
ou à Dieu... Si mon petit neveu malade guérit, je donnerai au
démon Tame de mes enfants, si je retrouve ce bijou perdu, je
donnerai aussi Tame de mon oncle. »
Ces malades qui ont la manie de l'expiation en arrivent h un
petit commerce avec le ciel et l'enfer qui est tout h fait curieux.
Elles sont en retard ou en avance dans le paiement de leurs
dettes, elles s'effrayent et elles se hâtent d'expier bien vite quand
elles croient avoir trop d'arriéré.
3. — Les manies des pactes.
Au lieu de considérer l'action présente et de chercher h la
compenser, au lieu de considérer l'action passée et de cher-
cher à l'expier, les malades pensent encore plus souvent h
Faction future et ils s'engagent par avance h la réparer. Ils pro-
mettent de subir quelques châtiments pénibles, tantôt s'ils font,
tantôt s'ils ne font pas une certaine action sur laquelle leur atten-
tion est attirée : ces engagements prennent la forme de serments
ou Aq pactes,
M. van Eeden, sous le nom de manie de superstition, décrit
un cas que nous avons déjà rattaché à la manie des présages ;
ce même malade a en outre la manie de faire des vœux : « si
pendant l'heure qui vient je cède a un seul de mes caprices, je
consens k avoir une apoplexie avant 24 heures*. » Dans la thèse
I. Van Eedcn, Psychothérapie, 189/4. Cf. Milne Bramwell, Brain, iSqS, p. 335.
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LES AGITATIONS I^ORCÉÊS
inteires * se trouve signalé un cas souvent cité à propos d'un
le qui a horreur du nombre i3. « Si je fais d'ici à demain un
[icte superstitieux, que toutes les étoiles du ciel soient i3,
Dieu soit i3... Si, quand le surveillant sera arrivé en se
enant a tel pupitre, ou si au premier coup de cloche je ne
pas arrivé à tel passage de mon travail, eh bien, je veux
ir et aller aussitôt a Dieu... » On a souvent reproduit ce cas
le une curiosité et cependant rien n'est aussi banal que ce
tome.
li je ne fais pas 35 signes de croix sans m'arrèter, dit
{^8)y femme de 2.5 ans, qu'il arrive malheur à toute ma
le», «si je me masturbe une seule fois, que toute ma vie
risée, dit Toq... (97)», « si je ne touche pas ce meuble avant
na mère ne rentre, ditRn..., fillette de i3 ans, je mourrai
la semaine ». « Si je fais la cuisine en regardant mon cou-
je consens a mourir demain, se dit Yks..., qui a des impul-
criminelles à tuer sa petite fille avec un couteau. » « Si je suis
m vendredi, je vais me tuer le dimanche. » (Ger...) « Si je
g décide pas a me faire religieuse, je jure que je me marierai
le premier homme qui passera » (\Ve.)...
dia est tout a fait remarquable par sa manie des serments,
jure de ne pas toucher ce meuble (c'était un de ses tics)
un grand malheur m'arrivera..., je jure de recommencer ma
e du matin 10 fois, 20 fois, 1000 fois, sinon un malheur arri-
à ceux que j'aime. » Plus tard les pactes arrivent bien
du à propos de la honte du corps et de l'obsession d'en-
5er qui s'était surajoutée, «je jure par tous les saints du
lis que je ne toucherai plus à une seule miette de pain, sinon
5 sortes de malheurs arriveront a ma famille età moi-même. »
erments se compliquent et deviennent de plus en plus ter-
\ en vertu de cette disposition a pousser les choses à l'ex-
î que nous avons déjà notée. « Je jure sur la tête de mon
de ma mère, de mon idéal (elle désigne ainsi un person-
dont elle était devenue amoureuse), je jure par tous les saints
iradis, par le Saint-Esprit, par Dieu le père que je ne man-
aujourd'hui qu'un jaune d'œuf, et si je manque à ma parole,
deviendrai jamais une grande artiste, je ne serai pas com-
.antoires, fessai descriptif sur les troubles psychopalhiques avec lucidité d'esprit.
i885. p. ia3, p. 44.
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LES MANIES t)E LA RÉPARATION Uâ
positeur, maman mourra bientôt et mon idéal aussi. » Comme
elle ne tient pas ses serments et ne peut pas arriver à les tenir,
elle en est désespérée et se torture Fimagination pour trouver
une manière de les faire plus précise et plus terrible qui ait plus
d'influence sur sa pauvre volonté. Au lieu de se borner a les dire
elle les écrit sur des papiers qu'elle porte sur son cœur ; elle va
les relire agenouillée devant le lit de sa mère sur lequelle elle a
mis une bible. Rien n'y fait et ses serments non tenus ne servent
qu'a la préoccuper davantage.
Chez ces malades le pacte semble être un moyen de réparer
l'action défectueuse ou une excitation pour leur faire accomplir
une action désirée à tort ou à raison. Mais peu à peu la manie se
développe et se reproduit à propos de toute action même insi-
gnifiante qu'ils font ou qu'ils veulent faire, l'expiation ou le pacte
n'est plus qu'un obstacle de plus à l'action, cette manie se rap-
proche alors de celle des présages et de celle de l'interrogation
du sort. « Si je touche cet objet ma mère succombera », se dit
Mw... h chaque moment. Si elle désire une chose agréable, elle se
croit forcée de jurer d'y renoncer à propos de tous les actes.
Ainsi elle prépare une promenade à bicyclette et à chaque ins-
tant elle est forcée de jurer « si je fais cette lecture, je jure que je
ne sortirai pas; si je prends mon mouchoir, je jure que je n'irai pas
à bicyclette,... il faut pourtant bien que je me mouche, ajoute-t-
elle avec tristesse ». Puis quand arrive l'instant de la promenade
elle n'ose plus sortir parce qu'elle a si souvent juré de ne pas le
faire. Ainsi le serment semble annihiler les actes futurs et
arrête également l'acte présent.
Sous cette forme la manie des serments et des pactes est extrê-
mement fréquente quoique souvent méconnue et elle joue un très
grand rôle dans ces maladies de la volonté.
4. — Les manies des conjurations.
Dans les cas plus graves, quand les malades ne sont pas seule-
ment mécontents de leurs actions mais encore qu'ils se sentent
poussés a faire des actions répréhensiblcs ils luttent contre l'im-
pulsion en lui opposant une action qu'ils croient bonne, qu'ils
croient destinée à conjurer la mauvaise tentation. Ces manies de
conjuration sont tout a fait caractéristiques des scrupuleux et ser-
vent bien souvent à faire reconnaître une maladie jusque-là cachée.
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14 i LES AGITATIONS FOHCÉES
Presque tousces malades, Bor..., Xy..., Claire, Ger...,Lise ont
été surpris faisant un geste du bras ou parlant toutes seules et
répétant pendant des heures des mots comme : «non, non,... je
ne veux pas... va-t-en... ce n'est pas vrai. » C'est parce que au
dedans d'elle-même une autre voix blasphémait et avait envie de
dire : « salaud, vache, cochon », à Tadresse du bon Dieu : la
malade protestait par Texclamation qu'on avait surprise.
Il est impossible d'énumérer toutes les formules de conju-
ration que Ton peut rencontrer; elles sont innombrables*.
Une des choses les plus intéressantes i\ relever dans ces répon-
ses, ces résistances à l'obsession, c'est que ce sont des réponses
abrégées, des signes qui n'ont de valeur que par leur signification
symbolique. M. Paulhan a justement insisté sur ce rôle des repré-
sentations symboliques dans la volonté^.
Un premier groupe est constitué par de petits mouvements, de
simples gestes, lever un doigt en Pair, remuer les doigts derrière
le dos ou dans la poche, lever les yeux au plafond, frapper un
meuble, etc. Nous reverrons ces phénomènes h propos des tics.
Le plus souvent la conjuration se fait par une phrase ou un
mot. Lise répète « chut, va-t-en » comme si elle parlait au diable,
mais en réalité elle répète cette formule pour chasser une idée
quelconque môme quand il ne s'agit pas du diable. Vob... s'écrie
« non, je ne le ferai pas, arrière Satan. » Gisèle « advienne que
pourra, pour le moment fini » et Bu... (85) répète toute la journée
la singulière formule suivante : «Maman, ratan, bibi, bitaquo, je
vais mourir. »
Dcins beaucoup de cas ces formules cabalistiques de conjuration
sont empruntées a l'arithmétique et deviennent des nombres, sans
doute à cause du caractère abstrait et précis du nombre qui le
fait aimer par les scrupuleux dont l'esprit toujours vague aspire
sans cesse à la précision. Ou bien la manie arithmétique amène
le sujet à répéter sa formule un nombre de fois déterminé. Lise
emploie des nombres qui correspondent dans sa pensée à telle
ou telle idée fixe ou qui résument une grande résistance contre
elle. Il lui arrive de répéter des journées entières, au dedans
d'elle-même « un, deux, quatre, six. » Ce qui est une résistance
1. Cf. Bcllel, Moyens de déjcrise el psychothérapie dans l'obsession. Thèse de Bor-
deaux, 1898.
2. Paulhan, Hevue phihsophiijue, i884, H» 083.
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LES MANIES DE LA RÉPARATION 445
contre les idées désignées par ces numéros. Quand elle est seule
on peut Tentendre murmurer des phrases comme celle-cî, bien
incompréhensibles pour un profane. «Le contraire de Dieu...
quatre, trois, deux, cent soixante-quinze mille. » Cela veut dire
qu'elle a pensé au culte du démon et« qu'elle a lancé la formule
de résistance. Pour rien au monde elle n'abandonnerait ces for-
mules qui la protègent contre elle-même ; pendant des essais de
sommeil hypnotique, elle répète tout le temps « quatre, trois>
deux, » ce qui ne facilite pas le traitement.
Pour lutter contre ses impulsions génitales Jean doit murmurer
la syllabe « té » qui est, paraît-il, une abréviation du mot « assez »,
mais il faut la dire un nombre de fois déterminé, quatre fois, huit,
seize, trente-deux ou soixante-quatre fois, par multiples de quatre
suivant ses manies arithmétiques, a Je sens venir une douce érec-
tion, je sens mes tentatives de laisser aller, alors je balbutie mes
syllabes de clôture : allons pas de phénomènes, té té té té, il faut
le dire par quatre, ce n'est pas suffisant: té, vous savez que je ne
peux m'arrêter a cinq, té té té, à huit je peux m'arrêter quand la
tentation n'est pas trop forte, mais il faudrait aller à seize quand
c'est grave. »"Ce ne sont pas toujours des mots que le malade répète
ainsi, souvent il compte des gestes. Quand il croit avoir une tête de
femme dans l'estomac après avoir mangé une charlotte ou un pain
suspect il lui faut faire des secousses des muscles abdominaux
quatre, huit ou seize fois « c'est le seul moyen de la faire sortir ».
Enfin j'observe chez Jean une forme plus curieuse de conjura-
tion, c'est un acte mental, un effort imaginaire. 11 se représente
que les fluides envoyés par les femmes autour de lui sont comme
autant de fils ténus qui se dirigent vers sa tête et avec des ciseaux
imaginaires il faut qu'il se représente l'acte découper ces fils. Dans
d'autres cas, il faut qu'il se représente visuellement des lignes
qui se coupent à angle aigu disposées symétriquement par quatre.
La représentation imaginaire des figures que ce malade a bien
voulu dessiner est, paraît-il, un remède souverain pour écarter
les images obscènes (figure 2). Cette manie de se représenter des
lignes dérive d'une manie précédente du même malade. Il doit
évoquer des poutres de bois qui lui semblent placées très haut
dans l'air à un kilomètre au-dessus de sa tête et par un effort
d'imagination il doit les faire descendre par terre, ou bien il évo-
que l'image d'un homme qui marche dans les airs et il doit égale-
ment, par un elTort d'imagination, le forcer a prendre pied à
LES OBSESSIONS. 1. lO
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LES AGITATIONS FORCÉES
Il paraît que celte dernière opération est fort difficile, car il
B grands efforts et des contorsions de tout le corps pour
lir à Faccomplir.
Fia. 3. — Heproduction d'un dessin du malade.
pareilles formules, de semblables actions se transforment
ment chez ces esprits faibles et ne tardent pas h devenir
ussi une manie et une impulsion. Les malades ne veulent
Jer le dernier mot et autant de fois que l'impulsion se pré-
aulant de fois il faut lui répondre. De la une préoccupation
'épouse qui devient aussi grave que l'obsession elle-même,
osait plus dormir de peur que pendant le sommeil une idée
jenlât et qu'elle n'eût pas la présence d'esprit de répondre,
ilades se tourmentent autant pour les conjurations que pour
nuisions elles-mêmes.
4. — Les agitations mentales diffuses.
diverses manies mentales semblent, au premier abord, très
euses, on peut énumérer leurs diverses variétés dans le
I ci-contre,
cun des malades se figure d'ordinaire qu'il est seul au
de son espèce et il arrive souvent à faire partager au mé-
»a conviction : de là toutes ces maladies bizarres, maladie
erstition, folie du doute, manie de la perfection, arithmo-
onomatomanie, etc., qui ne sont à mon avis que des varié-
identelles des manies scrupuleuses érigées en entités cli-
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w^^w^%
LES AGITATIONS MENTALES DIFFUSES
147
niques. C'est le même problème* que nous avons déjà rencontré à
propos des idées obsédantes et qui doit avoir ici la même solu-
tion. Aussi devons-nous rechercher les relations que ces diverses
manies ont les unes avec les autres et le fond commun d'e;ccita-
tion mentale diffuse qui se retrouve dans chacune d'elles.
I I.
Manie de l'os-
cillation.
1 . Manie de Tin terroga tion . 4>*^
2. — de rhésitation et de la délibération.
3. —
de l'interrogation du sort et manie
des présages» etc.
4. Manie de la précision. A^Oi-^^^p^ / ^*^^ ' >^'"
5. - de l'ordre. -^^^-- - x.'^Z-- ,
6. -
^A-
Manies mentales.
II. Manies de
delà.
de la symétrie
du contraste.
de l'association des idées.
de la lenteur.
10. Micromanie.
1 1 . Manie arithmétique.
7- —
8. —
9- —
13.
i3.
a.
i5.
i6.
17-
W9- —
du symbole.
de la recherche dans le passé.
de la recherche dans l'avenir.
des explications.
des précautions.
de la répétition et du retour en
arrière,
du mieux et manie des procédés,
de l'extrême et de l'inSni, etc.
jii,
Manies de la ré-
paration.
ao. Manie de la compensation.
|ai. — de l'expiation.
(23. — des serments et des pactes.
33. — des conjurations, etc.
I. — Unité clinique des manies mentales.
Quelques malades, pour des raisons qui tiennent à l'évolution
de leurs troubles et que nous étudierons plus tard, semblent affec-
tionner certaines manies particulières. Lise fait des promesses
pour expier, Nadia préfère les serments, Jean se borne aux com-
pensations; Claire cherche des procédés de perfectionnement,
Zo... prend des précautions etZei... se contente de répéter les
actes. Ces différences dans la variété de la manie habituelle donnent
même à certains malades une physionomie assez distincte. Il est
certain que Rai..., qui cherche des procédés pour manger bien,
pour respirer mieux et qui pour y parvenir crache et rote conti-
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Î8 LES AGITATIONS FORCÉES
uellement, ne ressemble pas extérieurement à Lise qui, tout
fait immobile, s*interroge silencieusement sur les promesses
u'elle a pu faire au diable. Mais cette remarque faite, il faut se
ater d'ajouter que cette différence dans Taspect extérieur des
lalades est peu profonde.
En réalité, si on suit avec soin Thistoire de ces malades, on voit
uh côté de la manie principale aujourd'hui prédominante, ils ont
ne quantité d'autres manies secondaires dont ils ne se plaignent
as et qui se rapportent à toutes les autres formes observées chez
ts autres sujets. En outre, il est très facile de constater qu'à
'autres époques de leur vie ils ont donné le premier rang à
autres manies. Jean, dont les compensations sont si remar*
uables, a en même temps la manie de la conjuration, celle des
récautions, celle des présages, etc. We... qui interroge le sort a
issi la manie des conjurations et des pactes. Claire a la manie de
répétition, celle du retour en arrière, et celle des expiations, etc.
ise à côté de ses promesses au démon a l'interrogation, l'arithmo-
anie, la conjuration, etc. Myl... (98) qui a maintenant la manie
î la précision et la micromanie a commencé, il y a trois ans, par la
anie des recherches et des procédés : Zo... actuellement tour-
entée par la manie des précautions a eu autrefois la manie de
expiation. Vor... présente maintenant les procédés urinaires, il
a dix ans elle était tourmentée par les serments. Gisèle qui fait
;tuellement des conjurations a eu les interrogations, les précau-
3ns, les pactes.
En un mot, il est bien rare qu'un malade qui vient se plaindre
une de ces manies ne connaisse pas par expérience toutes les
itres. Vient-il d'avouer un besoin de retour en arrière, on peut
ns hésitation lui demander s'il est bien rassuré h propos des
rments qu'il a faits. On peut ainsi surprendre le malade en lui
écrivant des bizarreries mentales qu'il a présentées et qu'il
oyait parfaitement inconnues. L'interrogatoire est pour ainsi
re formulé d'avance, comme celui de l'hystérique ; les ques-
)ns sont différentes, mais les réponses sont aussi bien prévues.
Enfin, certaines expériences peuvent mettre encore en évidence
tte relation qui existe au point de vue clinique entre ces diverses
unies. Si par divers traitements on arrive à supprimer ou à di-
înuer chez un malade certaine manie, on le voit plus ou moins
pidement tomber dans une autre. J'ai empêché Nadia de faire
s serments qui engagent l'avenir, elle prend l'habitude de se
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LES. AGITATIONS MENTALES DIFFUSES 149
borner à des conjurations dans le présent et elle reste tout aussi
tourmentée par cette nouvelle manie. Si je lui supprime celle-ci,
ce seront des précautions interminables précisément pour ne pas
s^exposer a faire ce que je lui ai défendu. Il en est de même plus
nettement encore chez Jean, il remplace une compensation par
une autre : il arrive, « vous ne vous figurez pas avec quel effort »,
à aller se coucher après avoir serré la main de sa mère sans cher-
cher son frère pour lui serrer la main en dernier, mais il se lave
la main droite huit fois à Teau bien froide, et quand il vient me
raconter ce haut fait il voudrait recevoir des compliments. Je
veux supprimer toute compensation, alors il y aura avant l'action
d'interminables délibérations. Il va rester une heure à la porte
d'une église sans se décider à entrer ou à s'en aller : « s'il
entre, il sait bien qu'il aura besoin de compenser ce sanctuaire
par un autre et M. Janet Ta absolument défendu ; mais s'il ne com-
pense pas, il s'expose à être poursuivi par des fluides, lequel est
préférable les reproches qu'il prévoit ou les fluides ? » Claire
remplace le retour en arrière par les recherches ou par les pactes.
II en est ainsi bien souvent au cours des ti'aitements.
Ce mélange et cette succession des diverses manies chez le
même individu nous montre déjà qu'au point de vue clinique ces
diverses manies doivent être très voisines les unes des autres et
qu'elles doivent toutes dépendre d'une même disposition mentale
qui en est chez tous le point de départ. Cette disposition est évi-
demment une agitation de l'esprit, un besoin de faire travailler la
pensée qui se montre d'une manière plus complète dans la simple
rumination mentale.
2. — La rumination mentale.
Les manies mentales précédentes nous montraient une activité
mentale dans un sens déterminé toujours le même, l'agitation de
l'esprit était systématisée. Très souvent, ces diverses manies se
combinent, se mélangent plus ou moins confusément et le caractère
de la systématisation devient moins visible. Il en résulte un phé-
nomène psychologique extrêmement curieux dont l'importance au
point de vue de l'interprétation de l'esprit ne me semble pas avoir
été encore suffisamment mise en évidence.
C'est un singulier travail de la pensée qui accumule les asso-
ciations d'idées, les questions sur les questions, les expiations,
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LES AGITATIONS FORCÉES
de manière à former un inextricable dédale. De temps
les associations d'idées ramènent comme par hasard une
ons du début et alors le malade recommence tous les
s précédents, il tourne ainsi en cercle comme Lise ; ou
asards font naître une idée tout à fait différente qui lance
sur une autre piste et ce sont « des embranchements
comme dit Lod... Le travail est plus ou moins compli-
it l'intelligence et le degré de culture du sujet, mais qu'il
cercle ou qu'il enfile des embranchements, il n'arrive
e conclusion, il ne peut jamais « tirer la barre » et
ans un travail aussi interminable qu'inutile,
lomène est souvent décrit sous le nom de fuite des idées,
idées, (( idéen flucht » ^ Legrand du SauUe le désignait
m de rumination mentale que nous conservons *. Le fait
arquable qu'il faut encore en revoir quelques exemples
ivoiren dégager les caractères psychologiques essentiels,
oe rumination de Ger..., une femme du peuple très peu
Une après-midi de jeudi, elle songe h préparer le dîner
in pot a6n de d'aller chez la fruitière acheter pour quel-
de bouillon. Elle s'arrête sur l'escalier avec la pensée
réfléchir un moment s'il n'y a rien de répréhensible à
I bouillon chez la fruitière (manie de précision) « en gé-
mais c'est aujourd'hui jeudi, il faut faire attention à ce
l'est-ce que la fruitière va penser en lui voyant acheter
►n aujourd'hui (manie de l'interrogation) ? Si elle croit
pour faire la soupe ce soir, il n'y a pas grand mal,
eut supposer que la fruitière croira autre chose (manie
sitions) ; elle croira peut-être que je veux en faire une
r demain vendredi. Si elle suppose cela elle va être scan-
;ause de moi : c'est bien ma nature de donner toujours
5 le mauvais exemple (obsession criminelle) : si j'ai fait
a à la fruitière j'ai commis un acte qui en lui-même ne
très grave mais qui est horrible par sa signification ;
fie que je me moque du bon Dieu (manie du symbole),
question revient à savoir si la fruitière peut supposer
angerai mon bouillon demain plutôt que ce soir. Corn-
Tcnburg, La volée des idées, Ideen Flucht. Congrès des aliénistes alie-
. Archives de neurologie ^ 1895, I, p. 324.
id du Saullc, 1878, cf. Culierc, les frontières de la folie ^ p. 65 ; Raymond
\nn. méd. psych., i8()2, II, p. 78.
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LES AGITATIONS MENTALES DIFFUSES \h{
ment fera-t-elle une pareille supposition ? En réfléchissant à ce qui
pourra me rester dans mon garde-manger pour la soupe de ce
soir. La dernière fois que je Tai vue, c'est-à-dire hier matin, lui
ai-je donné à penser qu'il me restait de la soupe pour jeudi soir,
quelle parole lui ai-je bien pu dire hier matin (manie des re-
cherches dans le passé et embranchement d'idées). » La voici main-
tenant qui travaille h se remémorer tout ce qu'elle a bien pu dire
à la fruitière, malheureusement le souvenir ne revient pas assez
complet et elle finit par se dire « que si la fruitière lui a fait à un
moment mauvais visage, c'est qu'elle lui a dit quelque chose d'ex-
traordinaire, mais voilà, la fruitière lui a-t-elle fait à un moment
mauvais visage, impossible de le savoir avec précision... non, dé-
cidément le mieux c'est de demander conseil au mari ; mais le
mari va répondre, c'est sàr : tu m'embêtes avec ton vendredi ;
et le seul résultat, c'est qu'elle aura fourni à son mari rocca-
sion de dire du mal du bon Dieu, la voilà bien qui scandalise tout
le monde ; quel horrible état criminel est le sien. Vraiment tout
vaudrait mieux que ce crime perpétuel et si Dieu lui accordait de
ne plus scandaliser tout le monde, elle lui promettrait bien de
faire n'importe quoi. Mais si Dieu lui demande de tuer sa petite
fille (manie des pactes), il peut le demander puisque c'est l'enfant
d'une mère coupable qui sera coupable comme elle. Vaut-il
mieux continuer à scandaliser tout le monde ou consentir à tuer
sa petite fille avec un couteau de cuisine..., etc. » Trois heures
après le début de ces belles réflexions, le mari rentre chez lui et
trouve Ger... debout sur le palier de l'escalier, son pot vide à la
main : elle n'avait pu se décider ni à aller chez la fruitière, ni à
entrer chez elle en renonçant à faire cette ^oupe.
Les ruminations paraissent un peu plus compliquées et les raison-
nements plus subtils si on prend un sujet d'un milieu social plus
élevé, mais cette différence est loin d'être aussi considérable qu'on
pourrait le supposer. Nadia sort assez émue d'une conversation
qu'elle vient d'avoir avec son père ; celui-ci a essayé de lui faire com-
prendre qu'il est juste de manger pour vivre et que c'est un devoir
pour elle. Nadia ne demanderait pas mieux que d'accepter cette
croyance u ce serait une solution, une tranquillité, mais quelque
chose s'y oppose, c'estle souvenir des innombrables serments qu'elle
a faits. Qu'arrivera-t-il si elle manque à de tels serments (manie des
pactes et des interrogations). D'autre part, si c'est mal de man-
quer à ses serments, c'est aussi très mal de refuser d'écouter les
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LES AGITATION^ FORCÉES
nations de ses parents. Elle a fait aussi des serments pour
Ire d'obéir à ses parents et de ne plus faire pleurer sa mère;
s de ces deux serments comptent le plus? On lui a dit qu'il
t pas tenir compte des serments qui sont évidemment
es, mais lesquels sont évidemment ridicules et doit-elle
)primer si elle n'a pas l'évidence qu'ils sont tels ? La di-
qu'on lui a donnée est en somme hypothétique et c'est
I décider en dernier ressort (manie de l'oscillation). Heu-
lent, elle a pris la précaution de ne rien écrire relativement
mctes, ce qui n'est pas écrit ne compte pas (manie de la
on), mais n'est-il pas possible qu'elle ait écrit sans s'en
compte : une lettre quelconque écrite à une amie peut
a signification d'un pacte (manie du symbole), comment
si ce n'est pas arrivé. Si j'arrive à' tourner la tète cinq fois de
i^ant que ma gouvernante ne se retourne, je n'aurai rien pro-
je n'y arrive pas le pacte existe (tic et manie des présages)...
ussi, mais qu'importe, ma mère n'est-elle pas morte,
tant de fois juré sur sa tête, c'est pour cela qu'elle est
si je manque de nouveau à mes serments, mon père
I et mon idéal aussi. Est-ce que je suis maudite ? etc. » La
ition continue dans ce sens pendant plusieurs heures sans
idia arrive à une solution sur la question posée au début :
erchait en somme s'il fallait accepter ou nier l'affirmation
père que son devoir était de manger pour vivre, elle est
au même point et ne sait pas davantage si elle croit ou ne
as ce qu'on lui a dit.
'insiste plus que sur un troisième exemple de ces rumina-
:omplexes intéressant par les circonstances dans lesquelles
roduit. Lod... est en train de jouer du piano et comme
t assez musicienne, elle commence à y prendre un certain
; ce plaisir va se développer et donner naissance à une
nce artistique qu'elle connaît pour l'avoir éprouvée autrefois
*\\e attend, mais à ce moment une foule de pensées com-
nt à surgir dans sa conscience. « Ce n'est pas un travail
fait là puisqu'elle prend du plaisir. Est-ce que Dieu permet
n puisse ainsi s'oublier dans des plaisirs (manie de la per-
i et du remords), il faut effacer ce plaisir égoïste en faisant
les petites choses pour la gloire de Dieu (manie de l'expia-
1 faut se condamner, faire une triste figure toute la journée,
lais cela va ennuyer ses parents : lequel vaut le mieux :
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LES AGITATIONS MENTALES DIFFUSES 153
ne rien faire pour Dieu ou ennuyer ses parents (manie de Tinter-
rogation)? Les idées vont encore rester en litige sans que je puisse
tirer la barre » et elle continue à méditej ainsi toute la matinée.
On pourrait multiplier indéfiniment ces exemples, il est très
facile de les imaginer en combinant de mille manières toutes les
diverses catégories des manies mentales que nous avons analysées
de manière à former des embranchements de pensées ou des
cercles d'idées tout à fait interminables.
3. — La rêverie forcée.
Dans les ruminations précédentes on peut encore retrouver la
trace de diverses manies mentales, la systématisation maladive est
incomplète mais elle existe encore en partie. Je crois qu'il faut
rapprocher de ces malades un groupe très intéressant de sujets
dont le caractère maladif n'est pas toujours bien compris.
Voici un exemple qui précisera le phénomène que je considère.
Une femme de l\[\ ans, Lib... (117), très intelligente, très raison-
nable, se plaint d'un trouble de la tête qui depuis 20 ans dérange
toute son existence, Tempèche de jouir de la vie, de travailler et
même de dormir. Ce trouble, c'est la réi^erie qui s'impose d'une
manière irrésistible « il me semble, dit-elle, que je suis forcée de
penser trop, que je suis obligé de me raconter des histoires, de
discuter avec moi-même, de me souvenir, de raisonner d'une
manière tout à fait exagérée et inutile ». Cette femme reste toujours
très calme, très tranquille, elle n'a point de tics, encore moins
d'émotions ou d'angoisses, mais a propos de tout événement ou
de toute action elle a l'esprit assailli par d'interminables rêveries.
Le plus souvent elle peut dissimuler sa rêverie et elle semble
agir, causer avec les personnes présentes ou lire un livre; mais elle
ne se donne que très peu à ces occupations, la plus grande
partie de son esprit est occupée ailleurs par la rêverie continuelle.
Dans bien des cas, dès que l'action devient difficile ou demande
plus d'attention, Lib... devient incapable de la faire. Elle ne
peut plus suivre une conversation au milieu de plusieurs per-
sonnes, elle ne peut plus comprendre une lecture difficile. Le
sommeil surtout est presque complètement supprimé et est rem-
placé par cette rêverie perpétuelle.
Je n'étudierai pas maintenant les troubles de la volonté et de
l'attention qui jouent un grand rùle dans cette observation, je ne
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LES AGITATIONS FORCÉES
: que la rêverie elle-même. Le caractère le
5 rêverie c'est qu'elle ne contient en appa-
mpt6mes pathologiques que nous venons
certainement aucune obsession, bien mieux
jnement ce que nous venons d'appeler une
ne idée obsédante ne revient régulièrement,
rocessus mental, interrogation, recherche,
le un rôle réellement prédominant. Cette
î, le plus souvent elle n'est pas désagréable
out elle n'est pas déraisonnable. Ce sont des
;morations, du passé, des imaginations de
ons, des méditations qui n'ont de patholo-
rération et leur irré^istibilité. « Ce que je
st d'être obligée de penser ainsi un million
it inutiles, quand je ferais bien mieux de
ravail ou de dormir. Ce sont des tableaux
bavardages sans fin que je ne puis arrêter
it et avec une peine extrême. »
I r^(^e/7^ /brc'ée me paraît très important, il
ucoup de nos malades. « Ce n'est pas ma
ne fais rien, il me vient des idées en sura-
ubmergée. » a II me semble, dit ligh..., qu'il
des (lots d'idées qui se succèdent avec une
e sont pas touj(»urs des idées folles, je vous
jgations absurdes. Toutes ces idées me sem-
y aurait de bons motifs pour m 'arrêter sur
is choisir, je suis obligé de passer de l'une
ma tête un remue-ménage d'idées invrai-
nt bien qu'à de certains moments <( toute sa
IS sa tête, que le reste du corps est comme
t forcée de penser énormément sans pouvoir
ire devient extraordinaire et se développe
qu'elle puisse la diriger par l'attention ».
ant des manies mentales bien nettes (manie
nanie des pactes), reconnaît très bien qu'il
été ainsi. « Pendant bien des années mes
s comme aujourd'hui toujours dans le même
que je pensais trop, que mon esprit s'em-
à coté, que je n'en finissais pas de penser
l'une seule. Depuis longtemps mes pensées
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LES AGITATIONS MENTALES DIFFUSES 155
tournaient dans le vide sans pouvoir s'accrocher à rien de pré-
cis... » Il serait très facile de retrouver cet état mental de la rêverie
forcée au début de bien des cas de maladie des obsessions. Même
chez les individus à peu près normaux, ces histoires interminables
que Ton se raconte, ces méditations faciles qui se substituent au
travail et à Tattention sont des plus fréquentes.
Ces rêveries forcées ont été, comme la rumination précédente,
décrites sous le nom de fuite des idées, de volée des idées car ce
sont des phénomènes trëtf voisins. Elles correspondent aussi, si je
ne me trompe, a ce qui h été décrit sous le nom de mentisme a sorte
d'effervescence intellectuelle particulière, dans laquelle, pour me
servir de la déGnition d'un auteur qui en était atteint lui-même,
Dumont de Monteux, nous voyons, avec un sentiment très net, des
pensées qui nous sont étrangères, que nous ne connaissons pas
comme nôtres^ et qui s'étant introduites du dehors, pullulent, se
meuvent avec la plus grande rapidité * ».
Dans l'étude des obsessions on s'est beaucoup occupé et avec
raison des angoisses diffuses, c'est-à-dire des agitations émotion-
nelles diffuses. Il me paraît nécessaire d'attirer aussi l'attention
sur ces rêveries forcées qui sont des agitations mentales diffuses.
Si nous rapprochons les rêveries forcées, et les ruminations
mentales de toutes les manies mentales qui ont été décrites pré-
cédemment, nous voyons qu'il existe chez ces malades un grand
travail mental qui se développe d'une manière anormale. Ce tra-
vail est en apparence assez considérable : il comprend la plupart
des opérations intellectuelles, associations des idées, mémoire,
imagination, jugement, raisonnement, toutes sortes d'opérations
qui s'effectuent surtout sur des images et des idées abstraites. Ce
travail n'est pas sans difficulté ni sans efforts, il est souvent fati-
gant et pénible. Malheureusement il présente un caractère évident
au premier abord, il est parfaitement inutile et stérile: qu'il soit
systématique ou diffus, il n'aboutit jamais à rien de réel ni d'utile;
c'est pourquoi il justifie le nom que nous lui avons donné d'agita-
tion mentale. Cette agitation est forcée, elle s'impose au sujet d'une
manière particulière ; mais ce caractère très important se retrouve
exactement le même dans les mouvements forcés et dans les émo-
tions forcées, il sera étudié plus utilement à la fin de ce chapitre.
I. Dumont de Monteux. d'après Séglas, Leçons cliniques sur les maladies mentales
et nerveuses, 1895, p. 69.
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LES AGITATIONS FORGÉES
DEUXIÈME SECTION
LBS AGITATIONS MOTRICES
roubles mentaux précédents s'accompagnaient
3ments, ne fût-ce que de paroles ou d'écriture,
jnts étaient en réalité peu de chose et la prin-
force se faisait dans les phénomènes de pensée.
z les mêmes malades, on observe des troubles
il une sorte d'excitation semble se dépenser en
npagnée d'une somme de pensées conscientes
5 présentent au premier abord les mêmes carac-
lés dans tous ces phénomènes forcés. Ils sepro-
en rapport ni avec les circonstances extérieures
du sujet; cependant ils ne sont pas absolument
le s'exécutent pas tout à fait sans la participa-
nce ni même de la volonté du sujet. Le malade
partie qu'ils s'accomplissent et qu'ils s'accom-
l'il veut bien les accomplir, mais il se sent
jette volonté inutile et absurde : ce sont tout a
ression d'un malade « des travaux forcés ».
>ur les pensées, ces mouvements forcés peuvent
s ou diffus; quand ils sont systématiques ils
es, et quand ils sont diffus les crises d'agi-
ions motrices systématisées. — Les tics.
phénomène est relativement récente, il était
Li vaguement avec les convulsions et les spas-
son de l'intérêt qui s'attache aujourd'hui aux
)logie pathologique, le tic a été l'objet de
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LES AGITATIONS MOTRICES SYSTÉMATISÉES. — LES TICS 157
beaucoup de travaux récents qui ont au moins précisé le pro-
blème. J'emprunterai d'abord à ces études intéressantes les élé-
ments d'une détermination du tic, c'est-à-dire les caractères
essentiels qui constituent le tic. Puis je résumerai brièvement la
description de quelques tics importants présentés par mes malades
en insistant surtout sur les caractères psychologiques de ces
phénomènes.
I . — Les caractères des tics.
Le premier caractère qui a été bien mis en évidence, c'est la
systématisation du tic, son analogie avec cet ensemble systéma-
tisé de mouvements qui constitue un acte. Trousseau comprenait
encore le tic d'une manière assez vague : il le caractérisait
a par des contractions rapides généralement limitées à un
petit nombre de muscles, habituellement aux muscles de la
face, mais pouvant afiecter d'autres muscles du cou, du tronc,
des membres * » En somme il ne parlait que de la petitesse
et de la rapidité du mouvement : quelques secousses d'épi-
lepsie partielle pourraient ainsi être confondues avec des tics.
Charcot', Gilles de la Tourette^, Guinon* ont cherché à distin-
guer et à grouper au moins quelques tics très exagérés et faciles
à reconnaître. En outre des caractères précédents, petitesse du
mouvement et sa rapidité, ils ont insisté sur sa régularité et sur sa
ressemblance avec des actes déterminés. « Les tics, disait Charcot,
reparaissent toujours les mêmes chez un même sujet, et de plus
ils reproduisent en les exagérant cependant certains mouvements
automatiques complexes d'ordre physiologique appliqués a un
but, ce sont en quelque sorte, en d'autres termes, la caricature
d'actes de gestes naturels **... »
L'auteur qui a le plus contribué à faire connaître le tic et à le
distinguer cliniquement des phénomènes convulsifs voisins est
M. Brissaud. Dans ses leçons à la Salpêtrière il est revenu à plu-
sieurs reprises sur la distinction intéressante du spasme et du tic^.
I. Trousseau, Cliniques de l'Hôlel-Dieu, 1878, \h p. 267, p. 464-
a. Charcot, Leçons du mardi, II, p. i3.
3. Gilles (Je la Tourelle, i885.
4. Guinon, 188G.
5. Charcot, Leçons du mardi, 1888-89, p. 464-
6. Brissaud, Leçons sur les maladies nerveuses, i""" série, 1895, p. 5i3.
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LES AGITATIONS FORCÉES
brusquerie, à la petîlessc, il a ajouté ce caractère déjà
lé par Charcot mais qu'il met beaucoup plus en évi-
, la systématisation. Le spasme qui résulte de TirritatioD
point de Tare réflexe siège soit dans un seul muscle,
ins le groupe des muscles innervés par un même nerf,
on observe des spasmes dans le domaine du facial, le
uloureux de la face est mal nommé, car c'est en réa-
1 spasme: on a vu de ces spasmes du facial, déterminés par
tit foyer hémorragique sur le pied de la deuxième fron-
entre du facial, par un anévrisme de l'artère cérébrale au-
; du tronc du facial, ou par des fibro-lipomes intéressant ce
Au contraire dans bien des tics on observe non seulement
sme palpébral, les mouvements de langue, les grimaces de
;he, mais des troubles respiratoires, desbruits laryngés, etc. ;
uvement complexe dépend du facial, de Thypoglosse, du
[que, il y a là une coordination qui ne peut se comprendre
ir Tintervention de Técorce cérébrale.
caractère systématique, cette relation du tic avec les actions
es se trouve confirmé dans la plupart des études ultérieures,
caractère essentiel du tic, dit M. Oddo \ est le caractère
îonnel ou mieux pseudo-intentionnel, car Tintention volon-
disparu depuis longtemps dans le tic. Il n'en est pas moins
je les mouvements des tiqueurs sont coordonnés pour Tac-
issement d'un acte toujours le même. Le tic est un mou-
t essentiellement figuré, lachoréeest constituée par un mou-
t amorphe. »
. Meige et Feindel ont encore insisté sur ce caractère en
sant jouer un grand rôle dans la classification des tics. « Les
)ivent être classés, disent-ils', non d'après les muscles qui
ienncnt dans le mouvement, mais d'après les actes dont le
la caricature. Ainsi on distinguera des tics des paupières,
lenls, clignottements analogues aux actes déterminés par un
étranger dans l'œil, par une trop vive lumière, des tics des
élévations, mouvements latéraux, analogues aux actes déter-
par la présence de corps étrangers, par des troubles de la
ticsdu nez, reniflement, battement, froncement des narines,
Oddo, Les tics. Presse médicale, iSyg, I, 189.
^igc et Feindel, Les causes provocatrices et la pathogénie des tics do la face
\u. Soc lé lé de neiiroloyie, 18 avril 1901,
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LES AGITATIONS MOTRICES SYSTÉMATISÉES. ~ LES TICS 159
correspondent aux actes suivant, aspiration justifiée par un
encombrement passager des voies nasales, dilatation des narines
pour éviter la gène ou la cuisson d'une petite plaie.
Les tics delà bouche, des^ lèvres, de la langue, les moues, les
succions, les mordillages, les pincements, les rictus, les mâchon-
nements, les déglutitions, etc. correspondent aux mouvements
pour enlever une pellicule dans les gerçures des lèvres, pour
remuer une dent qui branle, pour tàter un endroit de la bou-
che, etc.
Pour les tics de la tôte, secousses, hochements, on trouve
comme actes correspondants les déplacements, les redressements
du chapeau, les mouvements pour se débarrasser de la gène
produite par le faux col, par un vêtement, etc. ».
« Les tics respiratoires, dit aussi M. Oddo, sont des abrévia-
tions d'actes plus accentués, d'exclamations, de mots d'injures*. »
Dans les tics du cou, dans le torticolis mental, le mouvement
correspondant est un effort pour éviter la douleur d'une fluxion
dentaire, pour éviter une douleur musculaire, pour éviter un
courant d'air et protéger le cou en relevant les vêtements, pour
dissimuler une tristesse, pour regarder dans la rue, etc.
Dans les tics de l'épaule, on retrouvera le geste du colporteur
décrit par M. Grasset*, geste de charger un ballot sur son épaule,
et beaucoup de gestes professionnels du même genre. Dans des
lies du pied que j'ai décrits' on retrouvera les claudications déter-
minées par la douleur d'un cor, les retractions des orteils dans
une chaussure trop courte, etc.
En se plaçant au même point de vue M. Meige fait encore une
distinction intéressante entre les tics classiques qui consistent en
un mouvement rapide et des tics d'attitude, des tics toniques en
quelque sorte qui consistent dans la conservation d^une attitude :
celle-ci représente toujours une action mais une action perma-
nente*. Il rappelle à ce propos le cas de trismus de mâchoires que
j'avais étudié avec M. Raymond'^: un brave prêtre qui craignait
I. C. Oddo, Presse mèd., op. cit., 1899, ^^» ^9^- •
a. Grasset, Nouvelle Iconographie de la Salpélrière, 1897.
3- Raymond et P. Janet, Note sur deux tics du pied. i\onveUe Iconographie de la
Salpélrihre, 1899. p. 353.
4. H. Meige, Histoire d'un liqueur. Journal de médecine et de chirurgie pratiques ^
a5 août 1901.
5. Névroses et Idées fixes, II, p. 38 1.
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LES AGITATIONS FORCÉES
montrer indiscret et de laisser échapper le secret du confes-
{\y en était venu h ne plus pouvoir desserrer les dents et
se mettre un bouchon dans la bouche pour pouvoir faire un
n. M. Meige étudie aussi à ce propos une observation de
ir tout à fait remarquable qui pour arrêter un mouvement
n épaule prend une attitude permanente et tient son bras
au corps, appuyé sur Tépigastre.
second caractère du tic également bien mis en lumière par
part de ces auteurs c'est que le tic est un acte inopporturiy
}estif, « Le tic, disait Charcot, n'est que la caricature d'un
l'un geste naturel... le mouvement complexe du tic n'est
)surde en soi, il est absurde, illogique parce qu'il s'opère
le propos sans motif apparent *. »« Le tic, disait M. Noir
ion étude intéressante, est la reproduction habituelle mais
lestii^e d'un geste... '» et M. Gui non disait aussi: « le tic est
îuvement convulsif, habituel et conscient résultant de la
iction involontaire d'un ou de plusieurs muscles du corps et
luisant le plus souvent, mais d'une façon intempestive
lie geste réflexe ou automatique de la vie habituelle. »
outerai dans le même sens que, si le tic est un acte, il ne
as cependant oublier que c'est un acte stérile qui ne produit
[1 est évident qu'il ne produit rien d'utile, mais je crois que
3Ut même dire dans le plus grand nombre des cas qu'il
même pas capable de faire du mal. Ce qui nuit au sujet
e fait d'être un tiqueur, c'est l'ensemble des phénomènes,
oubles qui accompagnent le tic. Mais l'acte lui-même qui
tic, le mouvement de la tête, le torticolis, le clignement
Hix, la grimace de la bouche ne font pas grand mal. J'ai
une jeune fille qui avait le singulier tic de tomber brus-
ivki à genoux tous les dix pas dans la rue aussi bien que
la chambre^, et j'ai remarqué avec étonncment que dans ces
uillements brusques elle ne se fait jamais de mal aux
X. Cette inefficacité du tic est intéressante, elle est à râp-
er de rinutilité complète des manies mentales et devra
fiarcot, Leçons du mardi, 1888-89, p. /|64.
Noir, Etude sur les tirs chez les imbéciles et chez les dégénérés, 1893.
évroses et Idées fixes, 11, 893.
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LES AGITATIONS MOTRICES SYSTÉMATISÉES. - LES TICS 161
être rappelée quand nous étudierons les troubles de la volonté qui
déterminent ces agitations stériles.
Cette impuissance du tic se rattache à un autre caractère qu'il
ne faut pas oublier quand on insiste sur le rapprochement du tic
et de l'acte. Si on laisse de côté les hystériques qui ont des tics
un peu particuliers et chez qui la reproduction de Tacte peut être
plus complète, chez les psychasthéniques qui sont les vrais
tiqueurs, le tic n'est pas un acte complet.
Quand As... a la singulière habitude de se faire vomir après
chaque repas en s'introduisant deux doigts au fond de la bouche,
tout en trouvant lui-même que l'acte est inopportun, absurde et
dangereux, on ne peut pas dire qu'il a un tic. C'est une impul-
sion en rapport avec des obsessions de honte du corps et d'hy-
pocondrie. Il n'y aura tic qu'au moment où l'acte se sera peu h peu
simplifié et quand As... n'a plus que quelques spasmes, quelques
régurgitations, quelques rots après chaque repas. Il faut conserver,
je crois, dans la notion du tic l'idée ancienne de Trousseau que le
tic est un petit mouvement incomplet, d'autant plus que ce carac-
tère d'être incomplet n'est pas sans importance chez les scrupu-
leux. Leur micromanie, leur manie de la précision, du symbole, les
prédispose à rechercher ces petits mouvements incomplets. Si le
tic est ainsi un mouvement incomplet, il peut se réduire à très peu
de chose, devenir un mouvement des plus simples dans lequel la
systématisation toujours fondamentale au. début devient de moins
en moins visible. Ser... lève continuellement la main droite afin
de toucher sa boucle d'oreille et de vérifier si elle ne l'a pas
perdue. Ici le mouvement est très bien systématisé, mais peu à
peu il se réduit et elle n'a plus qu'une secousse de l'index qui se
lève brusquement. Ce petit mouvement est encore bien un tic par
ses origines et par l'état mental qui Taccompagne, mais si on le
considérait isolément il serait difficile d'y voir une systématisation
bien nette.
C'est en considérant des cas de ce genre que M. Bourdin* en
-vient à contester la systématisation du tic et à nier qu'il reproduise
des actes. Les mouvements du tic sont, à son avis, beaucoup trop
simples et trop bizarres. Cet auteur en vient jusqu'à rattacher
les tics, au moins les tics simples à une lésion fonctionnelle de
I. Bourdin, L'impulsion spécialement dans ses rapports avec le crime. Thèse de
Paris, iSg^i p. 55.
LES OBSR88I02<8 . I. — II
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LES AGITATIONS FORGÉES
elle qui se traduit par des décharges motrices. Une semblable
r serait impossible si Ton remontait à l'origine du mouve-
et si Ton remarquait que ce qui caractérise surtout le
est le trouble mental qui le détermine et qui, pendant très
emps si ce n'est toujours, continue à Taccompagner.
Brissaud avait déjà remarqué que la systématisation du tic
lisait à son étude psychologique. Dans bien des cas, dit-il,
serait impossible à diagnostiquer si Ton n'examinait que
uvement lui-même, si Ton ne tenait pas compte des antécé-
et de l'état mental qui a préparé le tic et qui Taccom-
»si la plupart des travaux récents sur les tics sont-ils en
e des études de psychologie plus ou moins avouées dans
îlles on cherche surtout à déterminer l'aspect mental de ce
mène. Parmi les contributions les plus intéressantes à cette
il faut citer le mémoire de Tokarski \ les articles de
Jddo*, Dubois de Saujon^, Meige*, Feindel, Hartenberg''.
ipart de ces travaux se placent surtout au point de vue
»eutique et devront être étudiés à propos des divers traite-
de l'état psychasthénique. Nous remarquons seulement ici
notent tous deux aspects dans le tic, le mouvement systé-
le et le phénomène mental concomitant.
effet le tic est accompagné par des phénomènes de con-
e, de volonté et de pensée. En premier lieu ce mouvement
iscient; je parle toujours ici du psychasthénique et non de
rique. Le sujet sait parfaitement qu'il ferme les yeux, qu'il
I la tête, qu'il s'agenouille. Il le sent d'autant mieux qu'il a
iment de faire lui-même le mouvement et de le faire volon-
ent. Cette intervention de la volonté personnelle du sujet
importante qu'il peut parfaitement faire son tic à tel mo-
)lutôt qu'à tel autre, qu'il peut le supprimer momentané-
karsky, Rôle des idées, des moments psychiques dans la production des tics.
lédU'file des neurologistes et aliénisies de Moscou, déc. 189a. Arch. de Neuro-
IgS, I, 34i.
do, op. cil. Presse médicaie, 1899, II, 189.
bois de Saujon, Les tics. Sociêlé de thérapeutique, 27 mars 1901.
Mcige et E. Feindel, Étal mental des liqueurs. Progrès médical, 7 septembre
rtenbcrg, Traitement d'un cas de tic sans angoisse. Revue de psychologie cH-
Ihérapeutique j jOiiiy \QT 1899, p. 17.
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LES AGITATIONS MOTRICES SYSTÉMATISÉES. — LES TICS 1Ô3
ment, le remettre à plus tard et le recommencer quand il le veut
[Guinon, J. Noir, Brissaud).
Une preuve curieuse de cette intervention de la conscience et de
la volonté ce sont les erreurs que le mals^de commet souvent dans
l'exécution de son tic. Fous... (loi), quia un torticolis mental,
tient toujours la tête inclinée à gauche; quand elle est distraite et
préoccupée au cours d*un examen de son tic, elle se trompe et
pendant une partie de la leçon lient la tète à droite.
D'autres preuves ont été empruntées surtout par M. Brissaud
à Tétude des procédés qu'emploient les malades pour arrêter
momentanément leurs tics. Dans la plupart de ces torticolis men-
taux que décrivait M. Brissaud, le malade peut lui-même arrêter
le tic par un truc quelconque, par un léger appui de ses doigts
sur la tête ou de sa tête sur un mur. Or il est impossible d'établir
ainsi une lutte entre notre main et notre tête, ou bien entre nos
deux mains. L'attitude définitive qui résulte de celte prétendue
lutte est une attitude acceptée, voulue par le sujet lui-même et
si le malade peut arrêter son tic en appuyant la main sur le men-
ton, c'est qu'en somme il veut bien arrêter son tic. Dans bien des
cas, d'ailleurs, le sujet choisit pour arrêter le tic un mouvement
qui serait absurde s'il s'agissait réellement de lutter contre lui.
Une de nos malades a un tic qui rejette la tête en arrière, elle
l'arrête en touchant le front avec l'index ', ce mouvement devrait
en réalité repousser la tête en arrière : il est simplement pour la
malade l'occasion de vouloir abaisser la tête en avant.
^ On peut aussi signaler tous les procédés qui guérissent plus ou
moins longtemps les tics. Il suffît quelquefois d'expliquer au
malade ce que c'est que son tic, comment il le fait lui-même,
comment il peut l'arrêter s'il veut bien y consentir pour que le tic
cesse pendant un temps plus ou moins long. Dans d'autres cas il
suffit que le malade croie à l'efficacité d'un remède, d'une pom-
made quelconque appliquée sur le cou ou sur le bras pour qu'il
cesse au moins pendant quelque temps son mouvement absurde.
Tous ces faits montrent donc que le tic n'est pas un mouvement
complètement automatique mais qu'il est en grande partie un acte
conscient et volontaire.
Mais pourquoi le malade ce^/-il faire cet acte absurde? Le plus
souvent on peut dire qu'il ne le sait pas du tout, il se sent forcé
I. Névroses et Idées fixes, II, p. 875.
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LES AGITATIONS FORGÉES
iloir saDs savoir pourquoi. Si on insiste, si on remonte
t à l'origine du tic on retrouve presque toujours d'une
vague des besoins de préciser, de perfectionner, de véri-
les besoins de compenser, de réparer quelque chose
songer aux manies mentales que nous venons d'étudier,
s plus intéressantes parmi les malades de M. Dubois
on) se sent forcée de se baisser par terre comme pour
' un objety elle se sent obligée à faire cet acte avec une
i spéciale, il faut que le dos de sa main touche le sol ;
manie de compter jusqu'à trois, de regarder trois fois
ou une personne, de heurter son coude droit contre sa
jusqu^à ce qu'il choque une petite érosion et alors de
m petit cri, etc.*. Nous verrons parmi nos malades bien
semblables, où une manie mentale force la volonté à
r le tic.
5st donc en résumé un ensemble de mouvements systé-
an acte reproduit régulièrement et fréquemment, mais
inière tout à fait intempestive, inutile et incomplète
; la volonté se sent forcée de l'accomplir. On retrouve
fait les caractères déjà constatés dans toutes les manies
c'est pourquoi il sera utile dans Ténumération des tics
jprocher de ces manies.
2. — Les tics de perfectionnement.
imier groupe des manies mentales nous a paru être
par des manies d'oscillation par des doutes et des dé-
s. De telles manies sont presque exclusivement men-
îs contiennent des opérations qui ^'accompagnent diffi-
de mouvements matériels.
voulait rechercher l'attitude qui accompagne ce genre
5, il faudrait considérer comme tics les immobilités, ce
t souvent assez juste. Lise s'arrête bien souvent com-
: immobile au milieu d'une action. Tantôt elle prend
une position qui puisse justifier aux yeux des specta-
immobilité, par exemple, elle tient un livre à la main,
irtout si elle ne se croit pas surveillée, elle reste immo-
unc position quelconque, debout, le pied levé pour
de SaujoH, Société de thérapeiUiquey 37 mars 1901.
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LES AGITATIONS MOTRICES SYSTÉMATISÉES - LES TICS
avancer et elle s'arrête indéfiniment. Cet arrêt demande enc(
un eflort musculaire, c'est bien un tic d'attitude. Il lui seml
qu'elle ne doit pas bouger avant d'avoir trouvé ce qu'elle ch<
chaity avant d'être sortie de son doute. Claire se force ains
rester immobile dans son lit en gardant la première positi
jusqu'au matin, et elle se réveille toute raidie.
Le second groupe des manies, les manies de Tau delà imp
quent de nombreux mouvements et bien souvent ces mouvemei
semblent au sujet être forcés par la manie sous-jacente. Qua
ces manies s'accompagnent ainsi de tics, elles sont mentaleme
moins développées et ne contiennent guère toutes les subtilil
que nous venons de décrire. Elles contiennent simplement l'id
vague ou le sentiment qu'il faut perfectionner l'acte ou le pi:
nomène primitif, y ajouter quelque chose, et que le mouveme
du tic est une adjonction urgente.
Un grand nombre de tics se rattachent h ces manies de pré
sion, de vérification qui sont parmi les plus fréquentes. Un n
lade de Brissaud secoue la tête pour mettre son chapeau bien
place. Nadia et Claire inquiètes sur leur personne ont besoin
vérifier leur état, elles détournent rapidement les yeux pour
regarder en passant dans toutes les glaces : il a fallu dans l'a
partement de Nadia couvrir toutes les glaces. Nadia, en outi
tâte perpétuellement son corps, ses jambes, sa poitrine po
vérifier rapidement si elle n'a pas engraissé.
Myl... préoccupé au début par ses maux de tête secoue
temps en temps la tête « pour savoir si elle est bien à sa place
Fok... préoccupé de l'état de son ventre le secoue par une bri
que contraction des muscles droits; Ul... fait une grimace av
ses yeux « pour sentir s'ils ne sont pas égarés » Ser..., Agée
16 ans, se touche à tout instant l'oreille et frappe trois pet
coups sur sa tête « pour être sûre que la boucle d'oreille i
bien attachée et qu'elle ne tombe pas ». Beaucoup, comme no
l'avons vu, secouent leur tête pour voir si leur col les gêne. Pei
peu ridée, la recherche déterminée qui amenait ces mouvemei
s'efface à peu près de l'esprit ou n'est plus représentée qi
peine par un bref sentiment d'inquiétude et le mouvement
fait rapidement, d'une manière incomplète et perpétuelle. Ul... 1
plus qu'un petit mouvement de rotation des yeux que l'on croir
convulsif, Myl... un petit hochement de tête.
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LES AGITATIONS FORCÉES
e la symétrie amène des tics de la marche comme
e de Azam qui saute d'une pierre sur l'autre pour
s deux pieds des sensations analogues.
in symbole devient le point de départ d'un très
) de tics, puisque, ainsi que nous l'avons vu, des
résument et expriment des idées. Lod... imagine
ion religieuse ou irreligieuse à certains actes, fer-
c'est comme si on disait : je ne crois pas en Dieu ;
ense à chaque instant qu'elle ne croit pas en Dieu
e a besoin de formuler vite cette pensée pour ne
rop dérangée dans le cours de la vie, elle se con-
ser rapidement le geste de fermer le poing. Si elle
instant l'acte de se retourner à demi dans In rue,
reste représente pour elle la pensée de la religion,
Q si en traversant une église on se retournait devant
».
) interprétation semblable bien bizarre : il se croit
butte aux tentations génitales et il considère une
tion comme l'image du plaisir sexuel. Or il a éprouvé
que plaisir en se grattant le nez : ce plaisir était
impressionnant qu'il lui rappelait une impression
tiennes masturbations : il les accomplissait, parait-il,
; le nez contre un mouchoir ayant appartenu à la
ambre. De là naturellement une association d'idées
titre le fait de se gratter le nez et la pensée des plai-
'un devient le symbole de Tautre ; mais comme le fait
le nez est beaucoup plus simple et dans son esprit
►ins dangereux que la masturbation, le symbole
)étuellement l'impulsion génitale. Ces interprétations
iont venues se mêler à une habitude malpropre, lui
l'importance et ont contribué h la fixer. Le même
s cesse besoin d'un appui moral, il symbolise ce
lant toujours son bras droit à demi levé au-dessus de
puyé sur un objet plus élevé, « c'est comme si je
ur quelqu'un de plus fort que moi à mon côté ».
entiment a joué un rôle dans la formation d'un vé-
»lis spasmodique, chez Brk..., « j'ai toujours eu be-
puyer, je voudrais avoir un soutien, un ami, je ne
nent cela a amené le besoin d'appuyer ma tête de
épaule ».
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LES AGITATIONS MOTRICES SYSTÉMATISÉES — LES TICS 167
Par la même raison que précédemment, ces mouvements ont
plus ou moins perdu leur interprétation et Lod... se retourne en
marchant, Jean se gratte le nez ou s'arrache les ongles ou lève le
bras en l'air, Brk... tient la tête de cAté à peu près perpétuelle-
ment sans trop savoir pourquoi et en apparence malgré eux.
On pourrait rattacher h ce besoin de symbole le tic intéressant
attribué par Rodenbach à la sœur aux scrupules « de temps en
temps de son mouchoir déplié elle se tapotait, elle s'époussetait,
aurait-on dit, comme pour éparpiller Tinvisible chute sur elle de
la poussière, ces molécules du silence ^ ».
La manie de la tentation y la manie de V impulsion qui joue un
grand rôle dans les obsessions criminelles a déterminé les tics
de Sau... (i3), enfant de i6 ans, elle a Tidée fixe qu'elle veut se
tuer. « On voit bien que cette idée est sérieuse, dit-elle, puisque,
malgré moi, mon bras commence tout le temps des petits mou-
vements pour me frapper, pour piquer ». Nous avons déjà vu
beaucoup d'exemples semblables à propos des obsessions du
crime.
Il faut faire une assez grande place à la manie du contraste^
qui est toute voisine de la manie de l'impulsion, M. Séglas re-
marquait déjà que les tics de langage sont souvent en contra-
diction avec l'expression normale des sentiments du moment*.
Beaucoup de psychasthéniques, au moment de faire un acte avec
attention, pensent aux opérations tout à fait opposées qui seraient
contraires à leurs désirs et qu'ils redoutent; chez beaucoup cette
pensée reste un simple phénomène conscient et ils font une
rumination sur la pensée de ces actes opposés. Mais chez quelques-
uns ces pensées amènent une action en contraste avec l'acte ini-
tial. Do..., toutes les fois qu'il s'agit de faire un mouvement dé-
licat, se sent gêné par l'idée de faire une maladresse, il croit qu'il
va jeter le verre par terre, commettre une incongruité. Son pouce,
au lieu de saisir l'objet, se plie fortement dans la paume de la
main. Peu à peu ce tic se produit presque sans réflexion et Do...
ne peut plus accomplir aucun acte délicat. Il en résulte qu'il ne
peut plus écrire à cause de ce tic : le pouce se met dans la paume
avant qu'il n'ait touché la plume. La crampe des écrivains est un
I. G. Rodenbach, Musée de béguines, p. 86.
a. Séglas, Le langage chez les aliénés, 1892, p.- 293.
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LES AGITATIONS FORCÉES
ne qui peut avoir bien des origines diverses, mais qui
luit souvent par ce mécanisme.
(ii3) présente un cas remarquable de coprolalie, cette
a eu des tics de la danse, elle se sentait forcée de tourner,
I des belles manières*, c'était un tic en rapport avec ses
ipations sur le théâtre où son (ils allait trop souvent,
ce tic fut guéri, elle commença à pousser des cris épou-
es et à nous agoniser de sottises : « cochon, chameau, tu
ch... ». Elle pouvait fort bien résister k ce tic dans la rue
îsence d'étrangers. Ces malades, nous le savons, s'ar-
toujours dans l'impulsion au moment où Tacte pourrait
• sérieux. Mais « elle était poussée a crier ces injures »
hôpital, quand elle me voyait. « Je voudrais être polie,
I, me bien tenir et je suis obligée de penser à des sottises
ne voudrais pas faire, il me semble que je suis obligée de
e. » Ce tic n'est-il pas l'expression de la manie de Timpul-
de la manie du contraste,
tics de Renée ** sont du même genre, elle a horreur des
des chiens, elle a été effrayée par un petit pâtissier idiot
riait comme un enfant, elle voudrait ne plus du tout penser
cela, elle est obligée d'y penser, de chercher toutes les cir-
nccs qui l'y font penser (manie des associations), de cher-
elle peut y penser sans danger (manie des tentations) et
\ qui crie » miâou, oua, oua, Zozo, ma nounou, petite
, putain, bordel, etc. ».
manies précédentes jouent encore un rôle dans les tics qui
t des maladies. Gauc...' est préoccupé par la pensée du ta-
craint « qu'il n'y ait quelque chose dans ses jambes » , surtout
qu'il a vu pratiquer l'examen des réflexes rotuliens. Il
le si ces réflexes ont quelque chose de bizarre, et malgré
lève ses jambes en l'air dès que Ton touche son genou, il
e avec de grandes secousses des jambes. Renée, Bor... ont
de se tenir de travers, elles ont à la fois l'idée qu'elles sont
es de coxalgie et l'idée qu'elles jouent la comédie, il y a un
ier sentiment de doute qui se surajoute au tic de la démar-
lymond et P. Janet, Névroses et Idées fixes ^ H, p. 3^1.
erre Janet, Accidents mentaux des hystériques^ p. i58.
'vroses et Idées fixes, II, p. SqS.
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LES AGITATIONS MOTRICES SYSTÉMATISÉES — LES Tl
Beaucoup de torticolis spasmodiques comme celui (
sont liés avec une inquiétude sur les courants d'air, sur
die du cou, avec un besoin de vérifier la maladie, avec
nomènes de contraste.
Voici maintenant les tics qui se rattachent à la mai
propre téy à la manie des précautions : bien des malade
eu la manie de se laver les mains conservent même apr
rison apparente le tic de frotter les mains Tune conlr
Zo... qui a eu peur d'avaler des épingles a des tics de
nement, de toux, de crachottement. Faut-il rappeler h
Jean qui écarte les jambes, qui s*arrète un instant aux
rues, qui se lève pour couper son pain, etc.
Les manies de recommencer les actes laisseront aus
résidus des petits mouvements incomplets ou des tics,
en deux ou trois fois, tâtonner en touchant les portes,
ner à demi dès qu'on fait un acte, répéter les choses deu
fois. Voici à ce propos une curieuse observation de 1^
Une malade avance dans les rues en faisant des cercles, <
faire un tour en sens inverse sur le trottoir opposé afii
un rond avant d'avancer* ». C'est un tic en rapport ave<
du retour en arrière.
La manie des procédés détermine les grognements et
de Rai... qui veut « respirer bien », les spasmes de la
L... qui « veut écrire avec perfection ». Un jeune \
24 ans Vog..., inquiet et timide est poursuivi depuis so
par le désir de « parler bien devant le monde ». Il er
bégayer et à grimacer d'une manière abominable. « Les
figure sont venus peu à peu, dit-il, comme des mouvem
faciliter le langage, pour m'aider, me soulager. » De
mouvements de la langue qui l'empêchent d'avaler se s
loppés chez Rv... femme de Sg ans de la même manière,
de la déglutition a été le point de départ d'eflbrts d'at
de. tics de toute espèce dans les mâchoires, dans la
dans le pharynx. Bien des cas de spasme de l'œsophagi
dans ce groupe.
Peut-on rattacher également h ce groupe le tic singu
jeune fille de 19 ans. Dey... (io5) qui s'arrache les che^
1. Séglas, Société médico- psychologique, janvier 1888.
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LES AGITATIONS FORCÉES
pésenter de grandes plaques sîmuluiit la pelade,
qu'elle ne peut pas travailler, pas faire attenlion,
r, se gratter : ça Texcilo et l'encourage, elle a pris
le de s'arracher tous les cheveux. »
un très grand nombre de tics qui ne sont pas pré-
»mpagnés par des ruminations analogues à celles
is observées dans les manies mentales de Tau delà,
)lent en rapport avec des besoins, des sentiments
;ux qui ont inspiré les manies de l'au delà.
3. — Les tics de défense,
es cas, le phénomène mental qui accompagne le tic
iffércnt, le malade se sent poussé à accomplir le
on pour faire mieux quelque chose, mais pour ré-
>mpenser quelque chose de fâcheux, pour se dé-
une influence nuisible.
rapporté un beau cas de ce genre. Son malade pour
de l'épaule gauche, éprouve le besoin de saisir le
irec la main droite. Bientôt la main droite présente
îlui de serrer, tirailler, tortiller de toute manière
ûtrant, et finit par déterminer des lésions. Cette
de des deux mains était pour le malade un besoin
sédant *.
: obsédant » dont parle Bechterew est plutôt un tic
îz un honteux de son corps. Le malade, très timide
X, a imaginé de sourire quand on le regarde, c'est
e conjuration. Ce sourire se représente malgré lui,
croit forcé de sourire dès que quelqu'un a les yeux
u simplement dès qu'il pense que quelqu'un peut
le MM. Pitres et Régis a des manies mentales de
)ousse cette pierre du pied deux fois et il ne t'ar-
dit-il sans cesse, a Les actes deviennent a la longue
disent les auteurs, mais pendant longtemps ils ont
ar une idée^ )).
ire d'un liqueur, Journal de médecine et de chirurgie pratiques,
levuc de psychologie, 1899, 35.
jis, op cil., 53.
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LES AGITATIONS MOTRICES SYSTÉMATISÉES — LES TICS 171
Parmi mes malades, les exemples sont trop nombreux pour
pouvoir être tous énumérés. As..., homme de 26 ans, Ad...
('49), femme de ^9 ans, Qsa., homme de 55 ans, sont inquiets de
leur estomac, ils en souffrent légèrement et se sentent gonflés.
Ils ont la honte de manger et pensent qu'il vaudrait mieux ne pas
manger, mais comme ils ne peuvent s'en abstenir tout a fait,
ils réparent le repas, les uns par des efforts de vomissements et
des vomissements réels, l'autre par des rots interminables et des
secousses du ventre. Ces tics de vomissement ont chez les psy-
chasthéniques une importance considérable. Je ne puis que les
signaler ici dans cette énumération des tics, il faudra revenir sur
leur pathogénie et leurs conséquences.
Te..., âgé de 20 ans, à la suite d'une marche avec des souliers
trop courts, conserve, un tic de recroquevillement des orteils et de
raideur de toute la jambe. Qk..., pour lutter contre la fatigue
de l'écriture doit écrire a genoux, puis dans des postures de plus
en plus bizarres.
Xy... repousse avec la main droite un objet imaginaire qui
viendrait sur elle; Zo... fait « hem, hem », pour ne plus penser
aux épingles; Myl... ébauche un signe de croix; Bé..., poursuivie
par la pensée qu'elle a dans le ventre un ver-araignée, dissipe
cette crainte en se frottant le ventre à droite, ce tic est si conti-
nuel qu'il détermine toujours l'usure de ses robes à cet en-
droit. Lae... (80), homme de 28 ans, obsédé par la pensée
de la rage, a eu d'abord des sortes de crises qui lui semblaient
en rapport avec la rage. Dans ses crises ses os craquaient, il en
est arrivé à se borner à un petit mouvement singulier, il lui suffit
de faire craquer ses articulations pour être comme débarrassé de
la pensée de la rage. Ce même malade passe ses mains sur son
pantalon parce qu'il a l'idée qu'un chien le frôle et que par ce
mouvement il écarte l'idée : ces deux mouvements finissent par
constituer de véritables tics.
On voit que chez tous ces malades le tic est comme une réduc-
tion de la manie mentale, soit que la manie mentale ait été
autrefois tout à fait complète, soit qu'elle ne fasse que débuter
et reste encore embryonnaire, soit même qu'elle n'existe pas
sous une forme intellectuelle et soit complètement remplacée par
cette agitation motrice systématisée. En général on peut dire que
la manie mentale est d'autant moins développée que le tic moteur
est plus complet. Mais ce sont des tendances analogues qui dé-
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LES AGITATIONS FORCÉES
lineiit l'un ou l'autre de ces deux phénomènes et c'est là ce que
roulu mettre en évidence en montrant que les tics pouvaient
groupés à peu près de la même manière que les manies men-
2. — Les agitations motrices diffuses.
Les crises d'agitation.
lez d'autres malades les mouvements deviennent bien plus
idérables et en mcme temps plus vagues, ils semblent consli-
de véritables crises convulsives. Je crois qu'il faut insister
;es agitations motrices diffuses analogues aux agitations mcn-
diffuses. Elles jouent un rôle considérable dans la maladie
)ivent également jouer un rôle important dans son interpré-
n.
I. — La crise des efforts.
i plus curieuse de ces crises peut recevoir le nom de crise
efforts. Le malade mécontent de lui-même, désirant mieux
, en conclut naturellement qu'il doit faire ce qui permet aux
mes normaux de se transformer, c'est-à-dire des efforts; mais
-ci, pour son malheur, tournent bien vite à la manie. Il y
un point délicat, parce que nous verrons plus tard en étu-
t les procédés thérapeutiques que certains efforts sont réelle-
t très bons pour le malade et qu'il se transforme par des
ts d'attention. Mais ces efforts utiles doivent être dirigés par
édecin et doivent avoir une nature particulière. Il est rare
le malade trouve tout seul les efforts utiles h faire et nous
arlons pas de ceux-ci, eu ce moment. Les efforts que le malade
[ine sont une série d'actions assez régulières, quoique moins
îotypées que les tics, fatigantes et pénibles, qu'il croit né-
aire d'accomplir pour donner à son acte ce caractère de certi-
et de satisfaction qui lui manque toujours.
;s malades qui font des efforts de ce genre, chez qui ces
ts tournent h la manie et constituent de véritables crises sont
e nombreux. Vy... essaye de se donner des convulsions pour
un mouvement qui soit parfait; elle éprouve le besoin de
ser comme pour aller à la selle. Tr... fait des efforts comme
soulever un fardeau, avant d'ouvrir une porte ou de faire ses
res et se contorsionne pendant des heures.
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LES AGITATIONS MOTRICES DIFFUSES. — LES CRISES D'AGITATION 173
Le. type vraiment extraordinaire de ce genre de manie c'est
Claire. Cette malade a plusieurs fois par jour des périodes de
contorsions épouvantables qui ont été prises bien souvent pour des
crises d'hystérie et qui, à mon avis, ne leur ressemblent en aucune
manière. Ce sont des contorsions volontaires ou quasi-volontaires :
quand elle sent ou se figure sentir qu'une action est mauvaise,
qu'une pensée est honteuse, qu'elle va avoir son image obédante
du membre viril et de l'hostie, elle croit qu'elle doit faire quelque
chose pour modifier l'acte ou éloigner l'image. Ce quelque chose,
c'est ce qu'elle appelle des efforts. Théoriquement, ses efforts
sont moraux ; au début, elle avait la tète dans les mains, les yeux
en Tair, le regard perdu très loin et elle se livrait à un travail de
rumination mentale. Mais peu h peu elle s'est convaincue que les
efforts moraux doivent être accompagnés d'efforts physiques cor-
respondants et elle a commencé h prendre des attitudes spéciales ;
ainsi il faut qu'elle soit assise ou couchée, en raidissant la jambe
gauche, en ayant la bouche ouverte et la tête aussi basse que
possible, les yeux fermés ou démesurément ouverts. Puis elle
prit Thabitude de faire des mouvements désordonnés des bras et
des jambes jusqu'il se mettre absolument en nage et à éprouvr des
douleurs dans tous les muscles. Elle plie le tronc et le relève en
mouvements rythmiques de salutation, elle secoue le thorax par de
grands mouvements respiratoires. Elle porte ses mains à sa
bouche, ronge ses ongles jusqu'au sang, suce et mord ses doigts :
ces dernières manies ont fini par développer d'énormes callosités
aux articulations des doigts. Quand elle ne mange pas ses mains,
elle mange ses mouchoirs et ses draps: en un hiver, elle a réduit en
charpie une cinquantaine de mouchoirs. Enfin, en se livrant à
cet exercice, elle ne cesse d'avoir à la figure d'horribles gri-
maces. Toutes ces contorsions se prolongent sans interruption
pendant plusieurs heures.
La malade se figure que ces mouvements physiques suivent des
mouvements parallèles h sa pensée : « si je vois l'idée tout au
fond de moi, il faut que je baisse la tête très bas pour la cher-
cher ; si je la vois en haut, il me semble que ma volonté s'élance
pour la saisir et que mon corps en fait autant... Il me semble que
c'est mon cœur qui pense, il faut que je cherche la pensée par
des mouvements de la poitrine et en augmentant les battements
du cœur... Ma vie est à l'ombilic, il faut que je secoue le ventre
pour la retrouver. » On voit bien ici se mêler aux efforts la manie
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LES AGITATIONS FORGÉES
nbolc et on pourrait appliquer ici les remarques de M. Ribot
inalogie de l'efTort moral et de relTorl physique : « le sen-
t de TefTort éprouvé quand nous cherchons notre route à
s une masse d'idées obscures et enchevêtrées n*est qu'une
alTaiblie du sentiment que nous avons en cherchant notre
dans une foret épaisse et sombre » *.
n entendu toutes ces contorsions violentes et toutes ces
es amènent toutes sortes de perturbations viscérales, des
les de la respiration qui est exagérée et anxieuse, des
les du cœur qui bat ii tout rompre. Mais ce qui est surtout
que à la suite de cette agitation et de ces mouvements
dinaux c'est une grande excitation génitale et les efforts
minent tout simplement par une véritable masturbation. Je
e l'extrême importance de cette substitution de Texcitation
lie aux efforts volontaires.
is retrouverons ces faits dans les prochains paragraphes où
étudierons les phénomènes émotifs de l'angoisse. Je tiens
nent h remarquer ici que cette malade a plutôt les phéno-
» extérieurs de l'angoisse que l'angoisse elle-même. Elle ne
int pas du fout de souffrir pendant cette crise d'efforls. « Les
îments de sa poitrine et de son cœur, dit-elle très juste-
sont dus à l'essouiTlement tout simplement ». [/agitation
ce cas reste motrice beaucoup plus qu'émotionnelle.
exemple bien curieux de ces crises d'efforts est celui de
[232), un homme de quarante ans. Ses crises bizarres se com-
înt de manie du symbole et d'obsessions de persécution. Ce
e diable avait, comme tous les scrupuleux, besoin de sym-
î et il avait l'horreur de la lutte. A la suite d'une querelle
lifiante avec un individu qui était son associé et son meilleur
1 garde, sinon une idée obsédante, au moins un sentiment
ant, c'est qu'il est en lutte contre cet individu, X. Il lui semble
L l'attaque, qu'il faut lui répondre, quoique ce soit bien
le, qu'il est nécessaire de se défendre. Sans avoir aucune
;ination, en sachant bien qu'il est seul, que X. n'est
résent, il se sent obligé de lutter contre lui. La lutte est
ielle : il se met debout, lance des coups de poing et des
de pied avec fureur, il se démène comme un forcené,
ibot, Les maladies de la volonté, p. 107. (Paris, F. Alcan.)
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LES AGITATIONS MOTRICES DIFFUSES — LES CRISES D'AGITATION 175
se frappe lui-même, se mord les poings et finit par tomber par
terre épuisé par de tels efforts et ruisselant de sueur. 11 ne faut
pas oublier que ce malade n'a aucun délire, il sait très bien « que
X. est son meilleur ami et que, s'il étaît là, il se garderait bien de
le toucher », mais cette lutte matérielle est le symbole d'une lutte
morale a qu'il devrait faire, s'il avait du cœur » ; elle est le
résultat d'efforts inouïs qu'il se sent obligé de faire.
Quelquefois les crises d'efforts sont plus précises, plus systé-
matisées encore et se rapprochent des tics. Je n'insisterai pas sur
ces malades, hommes ou femmes, qui font des efforts inouïs pour
arriver à la perfection dans la masturbation. Je prendrai comme
exemple une crise d'efforts qui se présente assez fréquemment et
fjuî est bien typique. Un homme de 55 ans, Qsa.., comme on l'a déjà
vu, a des digestions pénibles et souvent des vomissements plus ou
moins volontaires pour décharger l'estomac, vomissements qui se
rapprochent des tics. De temps en temps, à la suite de troubles
prémonitoires dont je parlerai plus tard, il sent que son estomac
le tourmente davantage et il s'agite de toutes manières, il a des
ruminations mentales sur la mort, sur ses parents qui ne l'aiment
pas assez ; puis il marche, ne peut plus tenir en place, puis il
essaie de boire un peu, il suce des bonbons, il commence à secouer
son estomac par des spasmes de l'abdomen. Puis il essaie de vomir,
mais il prétend s'y être pris trop tard, ne plus pouvoir vomir ou
du moins ne pas vomir assez bien. Il vomit un peu, il crache
énormément, mais il sent que ce n'est pas suflisant, qu^il serait
guéri s'il pouvait rendre une certaine gorgée de bile qui ne vient
pas. Et ce sont pendant des heures d'épouvantables efforts pour
vomir cette gorgée de bile, des contorsions de tous les membres
et de tous le corps. Parvenus à ce degré les efforts diffèrent à peine
de ceux de Claire, si ce n'est que de temps en temps il y a un
violent mouvement de vomissement. La crise peut durer une nuit
entière, elle s'arrête soit après un petit vomissement quelconque,
soit par l'épuisement du malade qui finit par s'endormir. Je
retrouve ces crises d'efforts pour vomir chez deux autres malades,
en particulier chez un enfant de 12 ans qui a fait de grandes crises
semblables toutes les fois que ses parents lui faisaient manger
autre chose que de la gelée de viande et des pruneaux, les seuls
aliments qu'il pût digérer sans crise.
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LES AGITATIONS FORCÉES
Les crises de marche et les crises de parole.
attacher à des tics ordinaires des phénomènes de
lus complexes et surtout plus prolongés que Ton
vent chez les mêmes malades dans les mêmes cir-
es malades sont troublés à propos d'un acte ou
au lieu de se livrer à des récriminations mentales, ils
)esoin plus ou moins irrésistible de marcher,
îment ne se calme que lorsqu'ils ont marché très
is se livrer à aucune violence. Nous avons vu que
manies de recherche et d'interrogation : il a ren-
rsonne qu'il a eu le malheur de regarder avec
lédiatement il se demande à qui cette personne res-
est le nom et l'adresse de cette personne qui lui
faut qu'il recherche indéfiniment ces ressemblances
es. Cette recherche, si elle n'aboutit pas tout de
sforme en une agitation qui le force h marcher de
dans sa chambre, il va tourner comme un animal
nt une nuit entière et le calme ne reviendra que
era épuisé de fatigue. Car..., une femme de 28 ans,
angoisse déterminée par l'idée de la folie en mar-
iment. Cr... (io4), homme de t\k ans, est bouleversé
î émotion et aussitôt il faut qu'il sorte de chez lui
les courses énormes.
le M. Souques se rapproche de ceux-ci : après des
omanie ou à la place de ces crises, il éprouve le
cher pendant plusieurs jours et rentre épuisé '. Il
e dans un cas de M. Magnan. Ce sujet interrompt
grands mouvements et par de grandes marches '.
î 18 ans, présente tout à fait les mêmes symptômes,
uleux, timide, mécontent de ce qu'il fait. Il se met
ravail avec l'intention de faire un- travail meilleur
, il essaye d'y mettre toute son attention. Mais cet
et l'agite, il éprouve un besoin invincible de mar-
ïalmer. Aussi sort-il de chez lui et commence-t-il à
pulsions dipsomaniaques prolongées sous forme ambulaloire. Arch.
2,11,61.
iété médico-psychol . , a8 mai i885.
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LES AGITATIONS MOTRICES DIFFUSES. - LES CRISES D'AGITATIO]
errer dans les rues de Paris, il ne recherche jaraais de camar
et satisfait sa manie seul comme un dipsomane ; il prend
jours les mêmes rues, vieilles et solitaires autant que possibi
il tourne dans le même quartier pendant cinq ou six heures
il rentre calmé et satisfait.
C'est là, si Ton veut, une variété des fugues, mais c'est
variété assez distincte. Ce n'est pas la marche en avant irra
née, inconsciente de l'épileptique vrai. Ce n'est pas la fugue
térique pendant un état second suivi d'amnésie: le malade r<
tranquillement chez lui sans réveil, sans surprise et se sou
en général assez bien de tout ce qui s'est passé. Ce n'est pai
plus tout à fait l'impulsion à la fuite, ou aux voyages que
la rencontre chez ces mêmes psychasthéniques * et que M. Ré
appelée la dromomanie. Dans ces impulsions il y a une idét
pousse le malade vers un but, il pense à aller vers un ce
endroit, a fuir le travail comme on l'a vu dans une des obs
lions rapportées dans le premier chapitre de cet ouvrage,
les crises que j'étudie ici, il n'y a pas là d'idée qui déter
la marche, d'obsession qui pousse au voyage, c'est la m:
pour la marche. C'est une opération forcée que le malade ex<
de même qu'il travaillait dans ses ruminations mentales.
Dans d'autres cas la marche est remplacée par quelque
exercice physique également exagéré et inutile. M. Tissié i
crit à ce propos des cas remarquables de manie du can(
chez déjeunes psychasthéniques qui ne peuvent résister aub
irrésistible de s'exciter et de se surmener dans les sports^.
On peut rattacher à ces crises de marche les besoins de p
ou même d'écrire qui prennent les malades dans les mêmes
constances. Fy..., (3/|) femme de 35 ans, sujet remarquable à
des points de vue, a des obsessions de honte, craint de de
folle, et a ce moment se sent agitée « soulevée comme
plume ». Il faut qu'elle aille et vienne et surtout qu'elle j
qu'elle parle indéfiniment à n'importe qui, qu'elle racont
peines « tout ce qu'il ne faudrait pas dire ». Elle bavarde
I. P. Dénommé, Les impuhions morbides à la déambuhlion au point de vue i
légat. Thèse de Lyon, 1890. Dubourdieu, La dromomanie des dégénérés. Tl
Bordeaui, 189a.
3. Tissié (Bordeaux). Un cas d'impulsion sportive ou ludomanie. Journal
decine de Bordeaux^ 26 janv. 1896, p. 35.
LES OBSESSIONS. I. — 12
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LES AGITATIONS FORCÉES
uît et ne se calme le matin qu'en écrivant une vingtaine
de son journal. Jean cède à un besoin du même genre
ient chez moi et me supplie « simplement de Tccouter
Kilager... Il ne peut rien dire de tout cela chez lui, cela
es parents trop malheureux et il faut qu'il le dise » et
ne heure et demie ou deux heures il parle, il parle sans
Lin instant, sur le fou rire de la femme de chambre
jr une pièce de deux sous qu'il a en poche et qui a
ée par une femme, ce qui met des fluides dans son
sur les timbres-poste qui font penser à la politique et
lage qui est mort^après être resté trois quarts d'heure
lame, sur un petit chien qui en le touchant a failli lui
la verge.. , etc., etc. » Il se sent soulagé « détendu »
fini. Peu lui importe ce qu'il a dit, il a simplement
paroles une agitation qui n'arrivait pas à se dépenser
3. — Les crises d'excitation,
s agitations motrices peuvent être encore plus dilTuses,
s incoordonnées.
> de quelque effort impuissant delà volonté ou de Tatt^^n-
propos d'une légère émotion, les voici qui se lèvent
oup, qui renoncent a leur travail en déclarant qu'ils en
tivement incapables ou même qui interrompent une
taie, une rumination interrogative, par exemple, et qui
a une agitation désordonnée. Nadia veut essayer de me
norceau de piano, elle s'arrête au bout de quelques
lécontente d'elle-même et recommence; même arrêt au
it, même recommencement ; puis elle s'impatiente, se
bavardage ordinaire de formules et de pactes « si je
s bien ce morceau tout entier, je veux mourir ce soir...
joue pas bien c'est h cause de moi que ma mère est
. » Maintenant l'agitation, de mentale qu'elle était de-
que ; la malade se lève, jette sa musique, et alors la voici
ient dans la pièce, renversant les meubles, jetant les
assant les vases. Au moment le plus fort de sa maladie,
beaucoup d'objets et semblait dans un état de fureur
en apparence dangereuse à approcher. En réalité elle
fait de mal à personne, et même elle ne brisait que
insignifiants ; de même que Claire dans ses crises
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LES AGITATIONS MOTRICES DIFFUSES. - LES CRISES D'AGITATION 170
d'efforts, elle restait toujours capable de s'arrêter au point qui
lui semblait nécessaire et de cesser brusquement s'il entrait
une personne à qui elle ne voulait pas se montrer dans cet état.
Ces crises d'agitation ne sont pas rares chez les scrupuleux et
peuvent se présenter sous différentes formes. Chez Tf..., homme
de 32 ans, ce sont des crises de tremblement ou « un besoin fou de
casser de la vaisselle ». Chez IIo... (99), fillette de i3 ans, ce sont
d'abord des tics divers qui se mêlent, se répètent ; elle met les
doigts dans soiï nez, ronge ses ongles, se frotte le ventre, puis
des contorsions de tout le corps, puis des cris de toute espèce
qu'elle ne peut pas retenir, dit-elle « c'est comme si j'avais le
devoir moral de me secouer, de crier ». M. Dubois de Saujon
décrit de même « un tiqueur si agité qu'on eût pu croire à une
chorée suraiguG * ». M. Pitres* décrit aussi des tics convulsifs
généralisés qui, dit-il, ont reçu différents noms, chorée électrique
de Hénoch-Bergeron, électrolepsie de Tordeus, névrose convul-
sive rhytmée de Guerlin. Plusieurs des malades précédents pour-
raient être rapprochés de ces descriptions, car ils ressemblent
k ce moment à des choréiques extrêmement agités.
D'autres, comme Lkb..., femme de 28 ans, tourmentée par une
obsession du suicide, Sy..., femme de 29 ans, qui a une obses-
sion d'homicide, Af... (89), Kn... (87), vont, viennent, sautent,
gesticulent, crient et cassent tout ; puis elles finissent par se pré-
cipiter sur leur lit, ou même par tomber à terre et se tordent
dans tous les sens comme en proie à une grande crise convulsive.
Dans quelques cas la ressemblance de ces agitations avec une
crise d'hystérie devient si grande que, à la simple inspection, le
diagnostic est impossible. Qes..., obsédée, comme on Ta vu, par
ridée de tuer sa mère, prétend résister à l'obsession en se jetant
par terre et en faisant des contorsions. Avant qu'elle n'entrât à
rhôpital, cet acte avait visiblement son cachet, on voyait bien
qu'elle ne perdait pas conscience, qu'elle se couchait elle-même
par terre et qu'elle avait des contorsions volontaires. Depuis
qu'elle a' séjourné longtemps dans une salle où il y a de vraies
hystériques et des épileptiques, elle a perfectionné son procédé
t. Dubois de Saujon, Société de thérapeutique , 37 mars 1901.
2. Pitres, Tics convulsifs généralisés. Société de médecine et de chirurgie de Bor-
deaux, 31 décenabre 1900.
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LES AGITATIONS FORCÉES
trais aujourd'hui au défi un observateur étranger de
iagnostic, en voyant simplement sa chute brusque et
sions.
î je compte reprendre à part dans un chapitre spécial
tic entre les phénomènes psychasthéniques et les troubles
s, je rappelle ici ce qui distingue une crise d'hystérie
e ces agitations motrices des psychasthéniques. Ces
B perdent jamais conscience d'une manière complète,
as d'amnésie nette après la crise, ils sont toujours ca-
nrreler leur crise à n'importe quel moment, s'ils en
?nt la nécessité ; ils n'ont pas d'automatisme véritable,
ent pas aux phénomènes, ils les font eux-mêmes ; ils
ence de faire effort pour produire tous ces mouvements
nient simplement poussés à les faire. Ces caractères
ses dans une crise d'hystérie qui serait typique. Dans
omplets le diagnostic ne peut être fait que par l'étude
)mènes antécédents et de toute l'évolution de la
js ces mouvements on retrouve facilement les caractères
des agitations. Ce sont évidemment des mouvements
t inutiles: il n'y pas lieu de démontrer que ces efforts,
lions sont inadaptés h la situation donnée et inutiles,
lient les tics. Il est bon de rappeler que ces mouvements
es, grossiers, sans délicatesse et sans précision réelle,
présentent grossièrement un acte, mais un acte exécuté
lière très incorrecte; les marches, les crises de contor-
dc» mouvements simples sans délicatesse. N'a-t-on pas
ce petit détail que le... se salit beaucoup plus dans
de marche, qu'il ne le ferait dans une promenade exé-
5 des conditions normales. On remarquera que les tics
les crises d'excitation donnent lieu à des mouvements
es: les deux épaules se lèvent en même temps, les deux
ent à la fois des coups de poing ou se tordent de la
lière. Ces mouvements symétriques fréquents chez les
retrouvent chez les sujets fatigués, comme le remar-
^ré ils indiquent une diminution de la complexité du
it, une sorte de décadence motrice'. Il est trop évident
jets sont capables dans d'autres circonstances de mou-
ien plus précis, plus adaptés et plus délicats. Nous
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LES AGITATIONS MOTRICES DIFFUSES — LES CR
retrouvons donc ici le troisième caractère déj;
ta tiens mentales, le caractère inférieur de
constituent ces agitations motrices.
Dans ces derniers phénomènes de grande
les efforts de pensée, les ruminations men
diminué quoiqu'il en subsiste encore des trac
agitation motrice a pu remplacer presque com
tions mentales précédentes. Non seulement
trice peut prendre dans les tics une forme sys
aux manies mentales, mais elle peut prendr
analogue à la rumination mentale et à la rêve
On peut donc résumer par le tableau ci-co
formes des agitations motrices.
LES AGITATIONS FORCÉES MOTRK
à forme systématisée,
les tics.
les tics
de
perfectionnement.
à forme diffuse,
les agitations.
\
les tics
de défense. )
les crises des efforts,
— de marche,
— de parole,
— d'excitation.
les immobil
les tics de v
— de p
— de s;
— d'im
— de C(
— de p
— de r
les tics de h
— de n
— de C(
I. Féré, Revue scientifique, 1890, I, 816.
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LES AGITATIONS FORCÉES
TROISIÈME SECTION
LES AGITATIONS EMOTIONNELLES
în même temps que se développent ces obsessions, ces in-
[iibrables manies mentales et ces agitations motrices que nous
ions d'énumérer se présentent chez un certain nombre de ces
mes malades des troubles émotionnels qui ont une très grande
portance. Les sujets les mettent souvent au premier plan parce
ils sont très douloureux et plusieurs parmi les auteurs qui ont
idié les obsessions sont disposés h considérer ce symptôme
nme le point de départ de tous les autres. Il est donc nécessaire
l'examiner avec quelque soin.
?.€S émotions présentent le caractère général de ces phénomè-
jpsychasthéniques, elles s'imposent au sujet sans rapport légi-
le ni avec les circonstances extérieures ni avec ses propres pen-
îs, elles sont considérées parla personne même qui les éprouve
Dme exagérées, inopportunes et absurdes. Mais le malade croit
possible de les éviter, il ne les subit pas tout à fait passivement
mme un phénomène purement physique qui le frappe, il s\
andonne avec une certaine complaisance parce qu'il croit,
rce qu'il sent qu'il ne peut pas faire autrement. Ce sont les
'actères des opérations forcées, qui se retrouvent dans des émo-
ns comme dans des calculs et des mouvements.
Ces émotions qui s'imposent ont presque toujours un caractère
sagréable, elles se rapprochent de la douleur, de la tristesse et
la peur. Tantôt cette peur est précise, systématisée, elle a des
ractères émotionnels nets et s'accompagne de perceptions et
dées assez précises : dans ce cas les agitations émotionnelles
nt systématisées et ont reçu le nom d'algies ("Ak^zç, douleur)
plus souvent Ae phobies (<ï>c6oç, peur), tantôt elles sont diSuses
is rapport avec une pensée déterminée et elles constituent les
goisses. Dans notre étude des phobies nous rechercherons
rtout les formes précises qu'elles prennent dans tel ou tel cas
terminé ; dans notre étude des angoisses nous examinerons les
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES SYSTÉMATISÉES. - LES PHOBIES 183
phénomènes généraux qui constituent ces émotions pathologiques
et qui existaient déjà plus ou moins masqués dans toutes les
phobies.
i. — Les agitations émotionnelles systématisées.
Les phobies.
Ces émotions forcées, qui prennent une forme un peu spéciale
suivant les phénomènes à propos desquels elles se développent,
paraissent être innombrables. Pendant une période chaque auteur
découvrait une phobie nouvelle et la baptisait d'un nom grec.
On inventa ainsi la misophobie, la canophobie, la nosophobie,
Tagoraphobie, Téreutophobie, la microphonophobie, la peur des
petits bruits, Tamaxophobie ou peur des voitures, la sidérodro-
mophobie, la peur des chemins de fer, la dysmorphophobie, la
peur des difformités, la triskaidecaphobie, la peur du nombre
treize, etc. Je n ai pas la prétention de les énumérer toutes ; il
sulFit d'indiquer certains groupes où les principales se rangent
facilement et qui servent à mettre en relief certains caractères
psychologiques.
I. Les classifications des phobies,
La classification de ces phobies semble fort difficile puisque
elle a été essayée bien des fois sans qu'une classification se soit
imposée. M. Freud, qui a beaucoup étudié ces névroses d'an-
goisse, admet trois classes*: i^ les phobies traumatiques, relevant
surtout de l'hystérie; 2^ les phobies communes, peurs exagérées
des choses que tout le mande craint un peu, la nuit, la solitude,
la mort, la maladie ; 3** les phobies d'occasion, agoraphobie et
autres phobies maladives. Le premier groupe ne nous intéresse pas
ici et d'ailleurs se rattache à de tout autres phénomènes;
j'avoue ne pas voir nettement la distinction des deux autres grou-
pes, les agoraphobies par exemple et les phobies de la solitude
me paraissent se rapprocher par tant d'intermédiaires que cette
distinction n'a giière d'utilité.
I. Freud, Revue neurologique, 3o janvier iSgS.
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LES AGITATIONS FORCÉES
> dans son manuel de médecine mentale^ admettait une
m simple d'après les principaux groupes d'objets qui
issance à la phobie : i^ phobie des objets (rupophobie^
bjets sales) ; 2** phobie des lieux, des éléments, des
igoraphobie, astrophobie, bacillophobie) ; 3^ phobie
ivants (zoophobie, anthropophobie, gynéphobie). Cette
m est conservée dans le rapport de MM. Pitres et
les obsessions'. Elle est évidemment commode, mais
rement extérieure et ne nous apprend rien sur les ca-
sychologiques qui séparent ces phobies les unes des
el dans sa thèse sur les phobies^ me semble avoir fait
ve intéressante en essayant de les classer, non d'après
mais d'après le trouble mental qui se produit à l'occa-
bjet. Il admet trois groupes : i** les phobies relatives à
sensoriel de la sensibilité générale, du toucher, de la
ns musculaire, de l'ouïe, du goût ou de l'odorat; 2° les
ïlatives à un trouble de la perception ou de l'imagina-
is phobies relatives à un trouble dans les idées ou les
. L'idée me semble juste, mais il me semble que l'au-
it pas une place suffisante au trouble des actes et au
5 sentiments.
pnt de combiner la classification d'après la nature des
la classification d'après les troubles psychologiques,
îrai d'admettre 4 groupes : i** les algies ou phobies
qui ont leur point de départ dans le corps même
t sont déterminées surtout par des troubles à propos
ptions simples ; 2° les phobies des objets qui ont
t de départ dans la perception des objets extérieurs
éterminées surtout par le trouble des actions ; 3® les
le situations dans lesquelles le trouble émotionnel
lélerminé par la vue d'un objet simple mais par la per-
un ensemble de circonstances qui constituent la situa-
Ile du sujet. Le trouble existe à la fois dans les actes
es sentiments; 4** les phobies des idées où une pen-
B abstraite, suffit pour amener l'émotion intense et dou-
Manuel de médecine mentale, 189a, p. 370.
il Régis, op. cil., p. 37.
Les phobies, étude sur la psychologie pathologique de la peur. Thèse de
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES SYSTÉMATLSÉES — LES PHOBIES 185
loureiise : l'attention, le jugement, la croyance, sont surtout en
cause.
2. — Les algies.
Beaucoup de psychasthéniques présentent, en apparence comme
les hystériques, sur certains points du corps, des régions dou-
loureuses où ils ne peuvent supporter aucun contact, ni aucun
mouvement. Quand on effleure ces parties, ou quand ils doivent
faire fonctionner ces organes, les malades semblent éprouver des
douleurs et des troubles tout à fait énormes et, bien entendu, tout
h fait disproportionnés avec la modification opérée; ils ont des
troubles de la circulation et de la respiration, ils sont couverts
de sueur, ils se contorsionnent, reculent avec des gestes d'épou-
vante et poussent des cris de souffrance. Ces douleurs dispro-
portionnées, ces émotions inopportunes se produisent dans deux
circonstances légèrement différentes. Tantôt elles sont à peu près
continuelles, a propos d'une partie déterminée du corps, même
quand cette partie reste immobile: cie sont les algies proprement
dites. Tantôt elles ne se développent qu'au moment où l'organe
doit entrer naturellement en fonction, ce sont les phobies des fonc-
tions. Il est évident d'ailleurs que dans bien des cas ces deux
troubles se rapprochent et se confondent.
Nous considérons d'abord le phénomène des algies, Leuret*
signalait déjà une jeune fille « qui se croit frappée gravement et
qui pousse de hauts cris quand on la touche seulement du bout du
doigt ». Legrand du Saulle rapportait l'observation d'une femme
qui avait l'obsession d'un cancer au sein et qui y souffrait constam-
ment*. Les observations de ce g^ffresde vinrent bientôt très nom-
breuses dans les ouvrages de Beard, ae Charcot, de liuchard, de ^A
Bouveret, deVerneuil. Je rappfeUeraû^ulement l'article intéressant
de M. Galippe sur les obsessions dentaires^. Cet auteur décrit toutes
les souffrances terribles qui se développent chez certaines per-
sonnes à propos de dents absolument saines, les angoisses d'une
malade « qui sent un amoindrissement de sa personnalité » parce
que l'on veut lui faire porter de fausses dents; il insiste sur les
cas de cancer imaginaires de la bouche et de la langue. A la même
I. Leuret, Fragments psychologiques sur la folie, i84o p. 86.
a. Legrand du SauUc, Folie du douter p. 28.
3. Galippe, Les obsessions dentaires. Archives de neurologie, 1891, I, p. i.
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LES AGITATIONS FORCÉES
Paul Blocq réunit justement tous les phénomènes de
js le nom de topoalgies. « Je propose, dit-il *, de dé-
le nom de topoalgie une variété importante de neu-
lonosymptomatique dans laquelle on constate seu-
douleur fixe, localisée dans une région variable, mais
)ort avec un district anatomiquemcnt ou physiologi-
limité... C'est la manifestation clinique de la per-
le image sensitive fixe, analogue dans le domaine delà
ce qu'est l'idée fixe dans le domaine de rintelligence. »
; de telles algies sur tous les points du corps. I/ob-
1er... (6i), semblable à celle recueillie par Legrand
ous montre une telle douleur siégeant en sein. Cette
5 ans, toujours très impressionnable, s'effraye h propos
îsse ; elle éprouve au cours de celle-ci une petite g(^ne
inquiète, le regarde et le tàte constamment. Elle con-
ent des livres de médecine et finit par ressentir des dou-
îniblcs et angoissantes au moindre contact de ce sein,
a l'obsession de la phtisie présente deux régions de
l'une en avant sous la clavicule, l'autre en arrière sous
I droite où elle soudre un mal bizarre, « si quelque
e ces régions, même légèrement, je me sens prête à
I étoufier w. Fik... (i58) femme de 57 ans, épouvantée
lostic absurde d'angine de poitrine conserve une ter-
le la poitrine au niveau du cœur,
qui a eu de telles souffrances pendant longtemps à
a maintenant « sous la peau du visage où doit circuler
rompu qui procure des raideurs et des tiraillements
. Diverses sensations cutanées peuvent, en efTet, de-
nt de départ de ces algies: M. Brocq signalait, sous
jcarophobie, une dysesthésie cutanée avec prurit
[| rattachait à une vésanie par idée fixe* et M. Thi-
issait sous le nom de dermatophobie des symptômes
que la peladophobie, les phobies engendrées par
lital, la syphiliphobie, l'acarophobie de Brocq*, etc.
x|, Sur un syndrome caractérise par de la lopoalgie, neurasthénie mo-
ue à forme douloureuse. Gazelle hcbd. de mèd. el de chir., mai 1891.
el idées fixes, II, p. a84.
mrnal de médecine el de chirurgie pratiques, 1890, p. 90.
!, Dermalophobies. Ivresse médicale, 9 juillet 1898.
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES SYSTÉMATISÉES — LES PHOBIES 187
Quelquefois ces douleurs sont Interprétées par les malades
qui disent éprouver toutes sortes de sensations bizarres. Une
malade de M. Ilirschberg, tout en se rendant compte de son état
et en trouvant « ses sensations ineptes » ne peut s'empêcher de
sentir des « grenouilles qui se promènent dans son dos, des lan-
gues d'animaux dégoûtants qui la lèchent, des vers, des intestins
pourris qui glissent le long de son dos *. »
Les algies de la tête forment un groupe intéressant, elles se
rattachent naturellement aux céphalées qui existent si fréquem-
ment chez tous ces malades. Mais elles ajoutent à ces céphalées
ordinaires une énorme exagération de la douleur et des troubles
émotionnels répartis dans tout l'organisme. Cl... (67), femme de
28 ans, se frotte constamment le vertex au point qu'elle a usé les
cheveux à cet endroit et que le sommet de la tête est dénudé :
son algie de la tête est presque constante. Au contraire l'algie de
la tête chez Box... (58), femme de 5o ans, se présente par crises
qui ne durent que quelques heures ou quelques jours. Elle porte
alors attaché sur la tête un énorme paquet d'ouate, destiné à
calmer la douleur et a éviter les plus légers attouchements. En
outre elle se tient constamment debout la tête appuyée en arrière
contre un mur destiné à la soutenir « sans quoi elle tomberait
avec une énorme douleur » il y a tic et torticolis mental en même
temps que algie.
J'ai déjà décrit dans le second volume des névroses* le cas de
Bi..., femme de 35 ans, qui s'est cogné le coude et qui a ressenti
brusquement la douleur classique au petit doigt par l'irritation,
du cubital, cette douleur l'a impressionnée vivement et doréna-
vant pendant des années elle ne peut ressentir un contact au petit
doigt sans éprouver une angoisse. Le cas de Van..., femme de 72
ans, est analogue : elle s'est fait il y a 18 mois une coupure au petit
doigt, et depuis ce moment elle se plaint perpétuellement de ce
doigt qui ne présente aucune lésion. « S'il fait chaud ce doigt a
une température insupportable, s'il fait froid il refroidit tout son
corps. )) Elle crie toute la nuit comme si ce petit doigt la torturait,
pendant la journée elle se cache dans un coin pour pleurer sur
I. R. Hirschberg, Névrose parcslhcsique chez une dégénérée. Revue neurologique,
3. Névroses et I fiée» fixes. II, p. 3o5.
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LES AGITATIONS FORCÉES
gi. A table elle prend un couteau et fait semblant de
uper ce petit doigt; puis elle va au travers de Tappar-
le une folle et menace de se jeter par la fenêtre pour
:ir son petit doigt. Une autre femme de 34 ans,
*e parce qu'elle a appris qu'une cousine avait de Ten-
mbes, conserve une douleur angoissante à la jambe
s veut plus marcher sans envelopper cette jambe
>uches de coton.
; que les organes génitaux vont devenir le siège
ion de pareilles douleurs angoissantes. J'ai publié
^'mond une observation remarquable à ce sujet', il
irètre qui après avoir entendu parler d'un adultère
este obsédé par la pensée des rapports génitaux. Il
nment dans l'esprit la pensée et même l'image de ces
} dans les bras Tun de l'autre. Au bout d'une année,
nplifia, mais pour devenir plus bizarre et plus gênante
pensait et ne voyait plus que les organes génitaux fémi-
ouvait voir une femme, parler à une femme, n'importe
s qu'il fut convaincu de voir ses organes génitaux sous
ts. Au bout de bien des années, il constata un nou-
iment dans la forme de la maladie, a A force de rai-
ose, j'ai commencé à penser à mes propres organes
m plus à ceux de la femme. Mais cette préoccupation
itre désagrément, elle produisit bientôt une irritation
développa une hypersensibilité du pénis et du scro-
sagréable. » Le même malade en arriva quinze ans
ut à une dernière forme. Il pense constamment que
génitaux sont appendus à son corps comme un corps
ne lui appartiennent pas ; il ne sait plus si c'est lui
ence des impressions faites sur eux. Mais il n'en res-
ins une angoisse horrible au moindre contact.
5 jouent un rôle important dans l'histoire de Jean :
les qui lui courent dans le dos quand il tourne le dos
se trouve Charlotte. II a des « plaques d'hype-
sur les régions des jambes qui dans le tramway ont
>ar la robe d'une dame. Mais surtout, il a abomina-
ifTert pendant six ans d'une maladie invraisemblable
et Idées Jixes, II, obs. ^8, p. i6a.
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES SYSTÉMATISÉES. — LES
du gland It des testicules. A la suite des masturbât
terreurs qu'elles engendrèrent il se mit à souffrir du j
tout quand celui-ci étant à découvert pouvait frottei
vêlements ou avait simplement « un frottement j
contre le robe d'une dame. Cet organe servait de poir
à des angoisses épouvantables : pour le guérir il usa <
onguents, puis il voulut le maintenir constamment c
le prépuce qui malheureusement reculait ; pour faire
le prépuce sans y toucher, ce qui eût été dangereux,
de le faire descendre par une secousse du ventre. Cet
perpétuellement répétée irrita les testicules qui devin
tour le point de départ d'angoisses et le pauvre garçc
blement malheureux.
Chez les femmes, ces algies des organes génitaux s
plus dangereuses que chez les hommes, car elles do
bien trop souvent encore aujourd'hui, à de dangerei
tions chirurgicales. Vr... (55), après avoir trompé
a de grands remords et de grandes craintes ; son
mMée a l'idée d'une maladie qu'elle a d'abord prêt
refuser de s'enfuir avec son amant, détermine cette (
parties génitales et aux ovaires : elle reste huit m*
lit sans consentira faire le moindre mouvement des ja
tronc, n faut la chloroformer pour pouvoir palper so
on se décide a une opération chirurgicale qui peri
ment de constater des organes parfaitement sains.
Il faut placer à côté de ces algies génitales les algies
et de l'urètre si fréquentes surtout chez l'homme et eau
souvent par les craintes des maladies vénériennes. Cpl
exemple, un homme de 48 ans, souffre depuis vingt
urètre, quoique d'innombrables examens qui ont été
jamais pu découvrir aucune lésion : il croit avoir des p
nales que l'on n'a jamais pu constater. « Il y a là u
laquelle toute mon énergie s'en va. )> Beaucoup d'autn
brûlures et des épuisements dans le canal. » J'ai ol
souvent, surtout chez des hommes, de terribles algies (
presque toujours accompagnées du tic de la pollal
souffrent constamment comme des damnés » et ne so
un instant qu'en urinant ou en essayant d'uriner toutes
nules. Us vont se faire sonder par tous les spécialis
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AXIONS FORCÉES
n heureux quand ils n'aiDuteni pas
i leur algie.
^prendre que les algies de Vanus
ns esprits. Lf... (92), une femme de
uis bien des années son anus a joué
tence. » De petites hémorroïdes sont
rt de ces préoccupations et de ces
inpagnent de tics comme chez Bhu . . .
spuis des années « ne consentait k
3sc » et qui depuis six mois ne veut
\ de le démontrer, par l'étude des
corps humain se divise en régions
sn régions anatomiques, ce sont des
:)nscience par l'association fonction-
:jui proviennent de ce point du corps
: certaine unité anatomique dans un
3onde ou non à cette unité psycho-
:hologique; chacune de ces régions,
îs génitales, etc. est susceptible de
une de ces algies.
des fondions corporelles,
)nt des phénomènes très voisins. Le
^gern de Mœbrus dont Zr... (60),
emple des plus nets. Son bras et
cts et ne présentent ni paralysie, ni
reur des mouvements de Tépaule et
cause des angoisses qu'elle ressent
ement. J'ai déjà décrit un fait ana-
de la jambe et de la cuisse*.
phobies du mouvement des membres
;rivains dans lesquels on note moins
au bras qu'un état émotif général,
ent, suffocation et palpitations car-
ut essayer d'écrire,
es diverses basophobies décrites par
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES SYSTÉMATISÉES. - LES PHOBIES 191
Sëglas et Biswanger*. Quelquefois elles se développent a la suite
de paralysies plus ou moins réelles, comme dans une obser-
vation de M. Grasset'; le plus souvent elles ne s'accompagnent
d'aucun trouble réel du mouvement. Fou (72), homme de 58 ans,
s'est effrayé de la marche parce que, pour se rendre à Tatelier,
il doit longer un fossé. Il n'a pas simplement la peur du fossé
ou la peur des grands espaces h traverser: non, il a peur de
marcher n'importe où, il avance à tout petits pas, en trépidant,
il recule d'un pas de temps en temps, puis il tombe ou plutôt
il s'asseoit par terre, « car la marche lui donne des sueurs froides
et il faut qu'il se repose ».
Enfin il me semble que Ton peut ranger dans le même groupe
de phobies des fonctions des membres, la singulière affection qui
a été récemment décrite par M. Haskovec de Prague sous le nom
de akathisie (a, xaOtÇd), s'asseoir)'. J'en décrirai longuement dans
le second volume de cet ouvrage un cas remarquable, celui de
RuI (39) homme de t\0 ans qui depuis une dizaine d'années ne
peut plus rester assis. Quand il est assis depuis quelques mi-
nutes, il faut qu'il se cramponne à la chaise parce qu'il se sent
soulevé en l'air, il a des palpitations, des étouffcments, des sueurs
surprenantes : son visage exprime l'angoisse d'une manière remar-
quable. A mon avis, il ne s'agit pas d'un phénomène hystérique
analogue à l'astasie-abasie, comme le pense M. Haskovec, mais
d'une agitation à la fois motrice et émotionnelle qui survient à
propos de l'acte de rester assis, parce que cette position, au moins
dans ce cas, est associée avec l'idée du travail dont ce pauvre
homme est devenu incapable. C'est un phénomène de phobie et
d'agitation qui peut se ranger dans les phobies des fonctions.
Les fonctions de nutrition donnent lieu à d'innombrables pho-
bies très importantes à cause de leurs conséquences. J'ai déjà si-
gnalé à propos de la honte du corps ces malades qui refusent de
manger parce que cette action leur parait honteuse. D'autres re-
1. Séglas, Deliove et Boulloche, Soc. mèd. des hôpitaux, 17 novembre iSgS. L.
Hallion cl J.-B. Charcol, Dysbasies d'origine nerveuse. Archives de neurol., 1895, I,
(I. 81. G. LVallet, Les aslasies-abasies, abasics amnésiques, abasies par obsession cl
par idées Oies. Semaine médicale, 12 janvier 1898.
2. J. Grasset, Basopbobie ou abasie phobique cliez un hémiplégique. Semaine
médicale, i5 août 1894, p. 366.
3. L. Haskovec (Prague). L'akalbisie, Revue neurologique, 3o novembre 1901,
p. 1107.
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LES AGITATIONS FORCÉES
langer et se condamnent presque à Tinanition parce
îtion leur est douloureuse et leur fait peur. Té... (66),
le 18 ans, sans phénomènes d'anorexie hystérique, ne
ir à manger quoiqu'elle le désire. « Quand je vois les
uand j'essaye de les porter ù ma bouche, cela se serre
ûtrine, cela me fait étouffer, cela me brûle dans le
le semble que je meurs et surtout que je perds la
groupe, l'observation de Gel... (67), femme de /|8 ans,
ingulière. Ordinairement, les malades ont peur de
repoussent plus ou moins les aliments. Celle-ci a peur
langer assez, elle a peur de refuser de manger. Vers
ans, elle a eu un premier accès sous la forme com-
fus d'aliments: après avoir sevré un enfant, elle avait
niétudes, des remords, des troubles de la digestion,
ce qu'elle avait des remords, moitié parce qu'elle
1 l'estomac, elle commença h refuser l'alimentation et
'horreur et de l'angoisse en essayant de manger. Cette
guérit, puis recommença et disparut encore. Le troi-
► qui est survenu au moment de la ménopause est tout
rse des précédents. Le malade mange parfaitement, mais
que sa maladie ne la reprenne, qu'elle soit empêchée de
' une peur et qu'ainsi elle n'arrive h mourir de faim ;
3 qu'elle mange avec angoisse par la peur d'avoir peur
phobies des plus curieuses et semblet-il pratiquement
iportantes qui se rattache aux fonctions de nutrition,
ie de la déglutition. On en trouvera plusieurs observa-
lées dans le second volume de cet ouvrage, je signale
ier l'observation de Fok... (69), femme de 4o ans; de
femme de 29 ans, de Les... (70), homme de 4o ans, chez
lénomènes sont exactement les mêmes. Ces malades qui
jui digèrent bien et qui veulent se nourrir ne peuvent
parce qu'ils ont la terreur d'avaler la nourriture. Ils
Is vont avaler de travers, qu'ils vont s'étouffer et mourir
, ils imaginent des procédés pour avaler dans la per-
ans danger. Pour cela il est nécessaire de continuer à
avalant, de respirer juste au moment où l'on avale, etc.
;onditions, il n'est pas surprenant qu'ils n'arrivent à
loindre gorgée de liquide dans la bouche leur cause
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES SYSTÉMATISÉES. — LES PHOBIES 193
d*intoIérabIes angoisses et leur amène des sueurs froides sur tout
le corps. Ils ne peuvent se nourrir qu'en absorbant un liquide
goutte à goutte et Fok... met une journée entière pour absorber
deux jaunes d'œuf délayés dans une cuillerée de jus de viande.
Ensuite on observe les phobies de la digestion. Le moindre
trouble de la digestion, la moindre pesanteur d'estomac cause
des angoisses et ces malades ont (c la mort devant les yeux »
quand il leur arrive d'avoir un peu de pyrosis. Une forme cu-
rieuse de ce trouble détermine des douleurs à la fin de la diges-
tion, surtout la nuit et réveille les malades par une crise de ter-
reur qui survient en général vers une heure du matin. Lyx...,
femme de 28 ans, se réveille à cette heure toutes les nuits : pâle,
les yeux hagards, elle se contorsionne, prétend avoir d'horribles
douleurs qui partent de l'estomac et attend sa mort prochaine.
Dans d'autres cas plus communs, l'angoisse se développe même
dans la journée à propos de toutes les digestions. Qsa... (108)
homme de 55 ans, scrupuleux typique depuis son enfance, qui a
traversé à peu près toutes les phases de la maladie, est surtout
tourmenté depuis une dizaine d'années par la phobie de la diges-
tion. A l'inverse des malades précédents qui ont la phobie de
l'alimentation ou la phobie de la déglutition, il a le désir de man-
ger et « mange tout ce que l'on veut lui donner » ; il voudrait même
continuer à manger, car ses tourments ne vont commencer qu'au
moment où il cesse de manger. A ce moment, l'estomac s'agite,
se gonfle, se tortille « la masse alimentaire remue comme dans
un sac, tous les membres sont brisés et remplis d'inquiétudes,
le moindre mouvement tire sur l'estomac comme si tous les
muscles y avaient leur point d'attache, les yeux sont retirés à
l'intérieur du cerveau, toutes les pensées sont teintées de souf-
frances, etc. » Ces troubles s'accompagnent chez ce malade de
tics, il a le tic de sucer quelque chose pendant qu'il digère, et
fait une consommation invraisemblable des boules de gomme,
enfin il présente le tic des vomissements qui a déjà été décrit. Si
on le force à retarder le vomissement, l'angoisse augmente avec
agitation motrice et agitation viscérale et peut amener dans les
cas grave une crise que j'ai décrite sous le nom de la crise des
efforts de vomissement. Les mêmes phénomènes s'observent chez
beaucoup d'autres malades, car ces phobies de la digestion sont
parmi les plus fréquentes.
La digestion intestinale cause les phobies du centre^ les sensa-
LKS OBSESSIONS. I. — l3
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LES AGITATIONS FORCÉES
d'un ver quî a des pattes d'araîgnée qui se pelotonne
glissements froids ».
Ilil..., femme de 4o ans, nous montre la phobie de la
m, « Elle va s'en aller en diarrhée, elle va perdre ses
, elle souffre tant a cette pensée qu'elle aime mieux
out de suite que d'aller a la selle. » Et il faut les sup-
is de toute la famille pour la décider à ce sacrifice. Les
driaques urinaires et génitaux sont innombrables et
toujours leurs obsessions s'accompagnent de phobie de
on, il est inutile d'y insister.
ut observer des phobies plus curieuses portant sur les
j de relation. On connaît /^s phobies du langage^ Bq...
nme de 38 ans, est soigné depuis cinq ans pour de préten-
ons du larynx': il a été dans plusieurs villes d'eau, il a subi
rtes de traitements. C'est que depuis des années la parole
; plus en plus difficile ; quand il essaye de parler, il ressent
esse générale, ses jambes flageolent, sa respiration s'arrête
rps se couvre de sueur. Aussi n'assaye-t-il jamais de parler
est debout, car il tomberait. 11 rattache tous ces troubles
lions tuberculeuses qu'il doit avoir dans la gorge. L'exa-
ilus attentif que M. Cartaz a bien voulu répéter démontre
irynx est absolument sain. Un peu de pharyngite surve-
a des années et l'inquiétude causée par son métier de
îen « qui l'expose aux poussières du charbon » ont déter-
forme de cette phobie.
;ns spéciaux sont susceptibles de présenter les mêmes
s et les mêmes dysesthésies. L'odorat devient pénible
odeur s'associe avec une des manies des scrupuleux.
), femme de ^9 ans, a peur de sentir une odeur surtout
rine gauche, carrela lui donnerait des angoisses. Wy...
lint les odeurs qui toutes rappellent l'odeur des parties
i, et Ds... (i54), femme de 21 ans. aurait des angoisses si
tait une odeur « car pour sentir il faut aspirer par
cela fait monter dans le nez des petites bêtes, des
, des punaises qui iraient jusqu'au cerveau ». Elle est
)our compenser une odeur de se moucher indéfiniment.
Iiervin, Des phobies verbales. Paris, 1895.
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES SYSTÉMATISÉES. - LES PHOBIES 195
L'ouïe est intéressée bien souvent dans toutes les phobies des
bruits. Ot... (75), homme de 53 ans, retiré des afTaires, prend en
dégoût son appartement, son quartier, se sent émotionné par le
bruit qu^on y entend et en arrive à une terrible dysesthésie de
l'ouïe. Il lui faut vivre dans une chambre matelassée pour qu'aucun
bruit ne parvienne jusqu'à lui. Chez Bow... (76) s'ajoute un détail
particulier : tous les bruits n'affectent pas douloureusement
Toreille, mais seulement les petits bruits : bruit d'un fouet dans
la rue, bruit d'une porte qui se ferme, c'est la microphonophobie.
On retrouve ici l'attention des scrupuleux pour les petites choses
que nous avons notée dans leurs manies de la précision.
L'œil donne naissance à un trouble remarquable qui semble
une maladie spéciale, c'est la photophobie ou au moins une des
variétés de la photophobie. Mv..., (loi) femme de t\i ans a assisté
un soir a un concert où jouait devant elle un musicien aveugle, elle
n'a pu s'empêcher de l'observer toute la soirée. Le lendemain, elle
prie son mari de la mener consulter un oculiste, celui-ci examine
les yeux qui ne présentaient à ce moment encore aucune douleur
et ne constate aucune altération. Cependant Mv... n'est pas ras-
surée, elle déclare cet oculiste incompétent, et va en voir un
autre, puis un troisième. Son agitation croissant, on la force à
s'expliquer et elle finit par avouer qu'elle est poursuivie par la
pensée d'être aveugle, qu'elle examine sa vue continuellement,
que la nuit elle s'éveille en sursaut pour allumer une lumière et
vérifier si elle voit clair. Chez cette malade s'est développée peu
à peu une horrible algie de la paupière et des yeux; il suffit
d'approcher le doigt des paupières pour provoquer des hurle-
ments et de terribles angoisses. Même phénomène à peu près
identique chez Mb... (i56) et chez Ria... (62) qui ont aussi peur
d'être aveugles.
Ces dysesthésies des yeux peuvent amener les malades à re-
douter la lumière et à vivre dans l'obscurité. C'est ce qui arrive
dans l'observation remarquable de Rs... (63). Cette femme, âgée
de 59 ans, a toujours eu des troubles de la volonté, elle était
inquiète, hypocondriaque, très exigeante et très autoritaire, ce
qui arrive souvent chez les abouliques, comme on le verra dans
le chapitre suivant. A l'âge de 56 ans, peu après la ménopause,
elle eut à subir une épouvantable secousse : on amena chez elle
sa fille, jeune femme mariée depuis peu, qui venait d'être hor-
riblement brûlée dans un incendie. Rs... soigna sa fille avec cou-
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LES AGITATIONS FORCÉES
trois jours sans pouvoir la sauver. La mort de cette
ne sembla pas déterminer chez elle une violente
.. s'étonnait de n'avoir pas assez de chagrin, de
►ir pleurer. Quelque temps après elle commença
de ses yeux, parlant de cataracte, de paralysie, etc.
uvait se servir de ses yeux h volonté, elle ne pouvait
and elle fixait un objet, surtout un objet éclairé, elle
s gêne, une émotion pénible qui la suffoquait. »
)rit l'habitude de tenir les yeux mi-clos puis fermés
porter comme une aveugle.
jeune femme de 26 ans, couvre constamment ses yeux
indcau et refuse de voir la lumière « car les objets
? manière odieuse et effrayante ». Cela lui donne
ngoisses à la pensée qu'elle va perdre la vue. Le
irt est plus curieux, après une opération abdomi-
ée d'ailleurs par une algie utérine, elle eut ce sen-
zarrerie, d'étrangeté dans la perception des objets
Ole si considérable chez les psychasthéniques. Elle
ue sa vue était en jeu, qu'elle voyait mal, qu'elle
la vue et présenta peu a peu les symptômes de cette
>n de Bry... 64), jeune homme de 16 ans, nous présente
photophobie un peu différentes : les phénomènes
réduits et les phénomènes organiques très aug-
feme des paupières, la congestion de la conjonctive,
it, l'hydrorrhée nasale qui lui fait mouiller cinquante
vingt-quatre heures sont des plus remarquables.
t courtes et se répètent tous les quinze ou vingts
'enfance. C'est là une forme différente de la mala-
emble se rapprocher des phénomènes épileptiques
urons h discuter au point de vue clinique dans le
3 de cet ouvrage.
algies et toutes ces phobies des fonctions présen-
tères communs, elles se développent h propos d'une
îrminée par l'excitation d'une partie du corps : la
scies, le pharynx, l'oreille, les yeux. On pourrait
e région est hyperesthésiée et qu'une maladie locale
i sensations douloureuses. C'est ce qui amène si
opérations chirurgicales en particulier sur les
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES SYSTÉMATISÉES. - LES PHOBIES 197
ovaires. Cependant un examen attentif permet de constater
que l'organe est parfaitement sain. Bien mieux les sensations
déterminées par cet organe ne sont aucunement troublées, il
n'y a pas d'anesthésie, ni même d'hyperesthésie véritable. Rs...
dont la photophobie est si remarquable qui reste depuis trois ans
saos ouvrir les yeux, qui se conduit tout à fail comme une aveugle
a été l'objet de bien des examens par plusieurs oculistes : non
seulement l'œil est absolument sain, mais la vision est complète-
ment conservée, ni l'acuité visuelle, ni le sens des couleurs, ni le
champ visuel n'ont subi la plus légère altération, elle voit
mieux que la plupart des personnes de son âge. Chose curieuse,
quand elle est ainsi l'objet d'un examen médical, elle ne bouge
pas, tient les yeux ouverts sans se plaindre de rien, elle accepte
qu'on dirige un rayon lumineux dans l'œil pour voir les réflexes,
tandis qu'elle aurait des angoisses horribles pour regarder un
objet.
On pourrait dire que la sensation intelligente est conservée
mais qu'il y a un sens spécial de la douleur qui est seul hyper-
esthésié dans ces régions. J'ai souvent essayé de mesurer la sen-
sibilité à la douleur avec une aiguille dont la pression variable
peut être exactement déterminée, j'ai fait modifier dans ce sens
Tappareil de Chéron pour mesurer la tension sanguine. J'ai
d'abord déterminé la sensibilité à la douleur de la même région
chez un individu normal, puis j'ai voulu mesurer cette même sen-
sibilité chez les malades qui prétendaient ne pas pouvoir être
touchés à cette région sans souffrir énormément. Il faut pour cela
commencer par les rassurer, leur faire croire que l'examen médi-
cal est utile, arrêter un peu leurs ruminations et leurs obsessions,
les intéresser à ce petit problème, leur apprendre à répondre exac-
tement à quel moment le contact de l'aiguille devient pour eux une
piqiWe douloureuse. Beaucoup ne laissent pas faire l'expérience :
Mv... poussait des cris quand que je voulais approcher l'instrument
de ses tempes ou de ses paupières et je n'ai pu obtenir sur elle
aucun chiffre précis. Mais d'autres se décident à permettre cet
examen : on est tout surpris de constater qu'ils arrêtent l'instru-
ment au même degré que l'homme normal et que par conséquent
ils ont conservé la même sensibilité douloureuse, ni moindre, ni
plus grande. Dans quelques cas, il y a plutôt une certaine dimi-
nution de la sensibilité. Ces dysesthésies ne sont donc pas des
troubles de la sensation de la région, ce sont des troubles géné-
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LES AGITATIONS FORCÉI
étions envahissant tout l'organ
I sensation de la région. Nouî
des autres phobies, c'est ce c
ces angoisses pour en cherch
- Les phobies des objets (Délit
;tat qui ressemble à une émo
ûen plus souvent à la suite
ne cette émotion est très red<
e crainte, une peur de Tobjet
îaractérise les phobies des obj
se développe quelquefois dès
r quel sens même quand il es
i-je folle ou ne le suis-je pas,
SauUe, faudra-t-il donc me
nés, parce que je tremble à la
toucher chez moi ? Mais à
en est de même pour ceux
straphobie) ou qui ont peur d
s avoir pris beaucoup de plaiî
pule de ce plaisir et depuis resi
>yant ou en entendant les cloc
malades, Xa..., qui a Tobse
j, la phobie des couteaux, d
a pointus ; mais en outre elle
ranche d'arbre coupée, une fl(
. Elle a des crises de phobie,
e bois de Boulogne, parce q
B allée un morceau de papier
e fasse une allusion à Tun de
obies à propos de tel ou tel m
)ropos d'une personne qui a
e ne peut plus revoir. Myl...
on rouge ou en voyant la lune,
în voyant certaines rues de Pa
I Saullc, Folie du doulCy p. a6.
o/fV héréditaire, p. 63.
ce, Psycholotjical licview, i8()4, p. i34
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES SYSTÉMATISÉES. - LES PHOBIES 199
la vîlle de Lyon où a été commis un crime et Gisèle en voyant sa
petite fille qui lui rappelle le mariage et sa vocation religieuse
manquée. Fi... (83), comme beaucoup d'autres malades, a ces
terreur en voyant un chien, ou même en voyant sa femme parce
qu'elle porte une robe qui a traîné place de la Concorde, rendez-
vous habituel, paraît-il, des chiens enragés, c'est la lyssophobie,
Thydrophobie morale de Trousseau. Jean s'effraye en voyant des
femmes dans les tramways ou en mangeant un repas servi par
une femme. Il est donc évident que la vision ou l'audition peut
être le point de départ de ces phobies.
Cependant c'est le contact qui détermine le plus souvent ces
crises de peur angoissante ; l'observation a déjà été faite par
Esquirol*. 11 décrit une femme de 34 ans qui se frotte constam-
ment les, mains « elle a peur que quelque chose de valeur ne reste
attaché à ses doigts. » Legrand du Saulle insiste surtout sur ce
rôle du toucher puisqu'il veut, bien à tort à mon avis, faire de
cette crainte une maladie spéciale ou du moins une phase spéciale
de la maladie sous le nom de « folie du contact » : a une dame, dit-il,
a d'abord peur des fautes d'orthographe, puis elle a la crainte de
toucher tout ce qui sert à écrire » *. Trélat accepte la même idée,
il décrit une personne qui se figure que tout son linge est empoi-
sonné et que le contact en serait mortel "*. M. J. Falret explique des
phobies semblables par la crainte que les objets ne soient de valeur
ou ne soient sales*. « Une malade décrite par M. Tamburini ne
peut plus toucher aucun objet de son appartement parce qu'elle
les croit a souillés par l'urine des rats^ ». Une femme, raconte
Féré", a fini par ne plus pouvoir marcher sans avoir constamment
les orifices des narines et de la bouche obturés par une bande de
tissu destinée à empêcher les parcelles d'hostie qui pouvaient
être contenues dans l'atmosphère de pénétrer dans son corps
pendant qu'elle n'était pas en état de grâce. » Bien des auteurs
I. Esquirol, Maladies mentales, il, p. 63.
3. Legrand du Saulle, Folie du doute, p. 23, 25, 27. Cf. un cas semblable, décrit
par BaiUarger, Ann. méd. psych., juillol 1866, p. 92.
3. Trélal, Folie lucide, p. 23.
4. Falret, Maladies mentales, p. 5 12. Cf. Saury, Dégénérés, p. 79, 83, 85. Col-
ler re. Folie héréditaire, p. 75, 79, 80.
5. Tamburini. Rivista sj^erimcnlalc di frcniatria. VIll, i884» p. 4.
6. Féré. Pathologie des émotions, 1892, p. 4i5 (Paris, F. Alcan) Ballet, Traité
de médecine de Charcot et Bouchard, VI, p. 1179.
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«s FORCÉES
ils désignent sous le nom de
de rupophobie, etc^
s du contact des objets chez
le citons que les plus intéres-
constamment les mains parce
niettes de graisse ». U... (79) fait
5, Mzc... (178), un homme de
aux pointus; comme son métier
il les fait tous ronds, tant pis
phobie banale de toucher aux
souvent et Sy... mange avec les
fourchette ou un couteau,
►ir tué sa belle-mère, ne peut
Is de la pauvre dame et bientôt
B espèce de vêtement. Pr... (210)
croit avoir cédé à un individu et
Q maintenant de céder à la ten-
t un purgatif. Aussi ne peut-elle
î bouteille, à aucun verre conte-
mérer les objets pour lesquels
les tramways, les lettres, les
3, sa table de travail, les rasoirs,
emme de 4^ ans, analogue sur
lint d^ivoir laissé tomber sur sa
B cache cette jupe et d'autres
ne peut plus toucher k la malle
File » et qui devient tout à fait
crupules génitaux, a la phobie
otter. Leg. .., femme de 45 ans,
s, craint surtout de faire du mal
eur lançant de la poussière, des
in, de la salive; elle n'ose plus
ette immobilité que nous aurons
le la maladie.
lent être multipliés à rinfini, le
e le plus directement la pensée
1879. Séguin, Archiv of medicin, août
. Shaw, Archiv of med., 1880- Verga,
The alienist and neurologisl. New -York,
90, I, p. 39.
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES SYSTÉMATISÉES. - LES PHOBIES 201
de I*usage des objets de leur rôle dans une action, il est tout na-
turel que chez les scrupules, les phobies portent tout particuliè-
rement sur le contact. C*est ce qui nous est bien montré par cer-
taines phobies du contact sur lesquelles j'insiste en terminant et
qu'on pourrait appeler les phobies du contact professionnel.
M. Grasset a cité la phobie du médecin, pour les instruments de
son métier, M. Bérillon* insiste sur la phobie du notaire pour son
étude, du mécanicien pour sa machine. Parmi nos malades,
Nem..., couturière, ne peut touchera ses ciseaux et Pt..., bairbier,
ne peut toucher un rasoir. Il ne faut pas dire qu'il s'agit ici de la
phobie des objets tranchants car la première ne peut pas non
plus toucher un mètre et le second a horreur de toucher la barbe
ou de toucher du savon. Lch... (78), homme de 38 ans, télégra-
phiste, à la suite d'une pleurésie grave, prend la crainte de ne
pouvoir travailler et la peur des appareils télégraphiques et même
des bureaux de poste.
Ces derniers exemples nous montrent que l'acte et surtout l'acte
professionnel doit jouer un rôle dans ces phobies. Le fait est
moins visible mais on le retrouve dans toutes les autres phobies
des objets. Dans beaucoup de cas, comme j'ai essayé de le mon-
trer ailleurs, le contact rtc7i/* c'est-à-dire le contact qui résulte
d'un mouvement, d'un acte du sujet est infiniment plus redouté
que le contact passif dans lequel l'objet est simplement approché
du sujet*. lu... « pour rien au monde ne touchera elle-même les
vêtements oii elle imagine avoir fait tomber des fragments
d'hostie » mais si je prends moi-même la robe et l'approche de
ses mains elle se résigne à subir le contact en disant : « c'est
vous qui faites l'action et qui prenez la responsabilité.. » L'objet
qui détermine l'angoisse est surtout un objet qui intervient dans
une action qu'il faudrait exécuter, c'est une notion que je signale
en passant et sur laquelle il faudra revenir, en étudiant les carac-
tères généraux et l'interprétation de ces phobies.
5. — Les phobies des situations (agoraphobie j.
Ces mêmes phobies peuvent se développer dans d'autres cir-
1. Bérillon, Phobies neurasthéniques envisagées au point de vue professionnel,
Revue de l'hypnotisme, 1896, p. 33.
a. Névroses el idées fixes, I, p. 8.
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LES AGITATIONS FORCÉES
i propos de perceptions plus complexes, qui portent
un objet déterminé mais sur un ensemble de faits
Ions du sujet, c'est-à-dire sur une situation physique
11 sujet.
remier groupe de cas il s'agit de la perception d'une
^sique : le type de ces phobies est celle qui se déve-
1 le malade se sent isolé, c'est-à-dire quand un en-
irconstances, une situation qu'il perçoit, fait naître
'ession de vide autour de lui. Déjà Leuret en i834
cas de ce genre en le rattachant à l'hypocondrie : « il
[)is six mois sans sortir; lorsqu'il sort, c'est en voiture
iccompagné d'une personne qui puisse lui porter se-
3 de besoin, pendant la promenade. Il est très rare
le de voiture et quand cela arrive, il faut que la pér-
il est accompagné se tienne tout près de lui ; il ne
pas une place ou un pont; à peine s'il traverserait une
e place il est comme au milieu d'un désert, où tout
îlui qui a besoin de toutV » Leuret fait simplement
ne « hypocondrie engendrée par le luxe et l'oisiveté »
itement son rapport avec le défaut de volonté,
ce symptôme est décrit très fréquemment comme une
le nom d'agoraphobie qui lui a été donné, je crois,
il en 1872 ^ Une des descriptions les plus complètes
Legrand du Saulle en 1877 et 1878 : cet auteur en fait
spéciale distincte de la folie du doute et du délire du
|ui me parait très inexact. « La peur des espaces, dit
Saulle, est un état névropathique très particulier,
)ar une angoisse, une impression anxieuse vive ou
îritable terreur, se produisant subitement en présence
donné... c'est une émotion comme en présence d'un
vide, d'un précipice, etc. Un malade commence par
liques dans la rue, avec faiblesse des jambes ; il s'in-
deux mois arrive à la terreur complète de marcher...
''af/incnls psychologiques sur la folie, i83^, p. 393.
Agoraphobie. Archiv fiîr Psychiatrie, III, 1873. William, Agora-
med. and Surg. Journal, 1872. Wcber, Agoraphobia. Ibid., 1872.
hobia, Archiv fur Psychiatrie, III, 187a. Porroud. Noie sur l'agora-
'dical, 1878. Decharnbre, De l'agoraphobie. Gaz. hebd. de inéd. et
Bourdin, Horreur du vide, agoraphobie. Encyclopédie des lettres, des
rts, 1878, clc.
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES SYSTÉMATISÉES. - LES PHOBIES 203
La pensée d'être abandonné dans le vide ie glace d'eflfroi et la
conviction d'une assistance quelle qu'elle soit l'apaise sans effort.
Point de peur sans ie vide, point de calme sans l'apparence d'un
semblant de protection ^ »
Voici quelques exemples de ces phobies du vide empruntés
aux observations de nos malades. Lise a peur de la solitude qui
est, en effet, plutôt mauvaise pour elle parce qu'elle favorise le
développement de ses rêveries et de sa manie des pactes.
Deb... (i65), Bor..., etc. ont peur des ponts, des grandes places,
Por..., femme de 28 ans « étouffe de terreur dans les rues où il
d'v a personne». Hnu... (87) ne peut plus marcher seule; elle a peur
de tomber, d'être paralysée, de devenir folle : « je vois le vide de
chaque côté... quand je vois des maisons cela ne me fait plus le
même effet. « Léo... (173) redoute les grandes places ou les grandes
agglomérations de monde... elle est plus tranquille quand elle est
avec un petit nombre de personnes en qui elle a confiance. L'ago-
raphobie de Se...- présente quelque intérêt, parce qu'elle
simule des vertiges ; comme le malade a eu antérieurement des
écoulements d'oreilles, on a diagnostiqué son état » vertige de
Ménièrc. En réalité, il n'a aucun des symptômes de ce vertige,
l*angoisse qu'il ressent dans la rue est identique à celle qu'il
éprouve quand il touche des cartes ou quand il pense au nombre
treize. Bu... (85), un homme de /Jo ans, après s'être d'abord fait
accompagner au dehors, ne peut plus faire un pas seul même dans
son appartement; un malade célèbre de M. Azam "* exigeait que
sa femme l'accompagnât jusqu'à la porte des cabinets d'aisance
et en lui parlant de loin, lui fit constamment comprendre qu'elle
restait près de lui; Bu... ne peut se satisfaire par cet expédient
et il exige que sa femme entre toujours avec lui.
On volt bien d'après ces exemples que ce n'est pas précisément
la grande place qui provoque la phobie, c'est Timpression de se
trouver seul sans appui physique ou moral dans un endroit qui ne
leur est pas familier. Dès que cette impression est dissipée, l'agora-
phobie disparaît. Lep... (88), femme de liQ ans, est agoraphobe de-
puis que son fils est parti au service militaire, elle se sent seule, et
alors elle redoute de sortir, ne peut traverser les places et a besoin
I. Legrand du Saulle, Agoraphobie. Cf. Magnan, Leçons, p. 179.
3. Névroses et Idées fixes. II, p. 83.
3. .Vzam, Entre la raisun cl la folie, les loques. lievue scienlifique, 1891, I, 6x5.
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LES AGITATIONS FORCÉES
i murs des petites rues » mais cette angoisse disparait
nne la main à un enfant, Oz..., femme de 3i ans, se
oins de frais, il lui suffît de porter à son bras un
pour elle un point d'appui habituel « mais il faut
rd, je sens alors que je tiens quelque chose de
il est vide je ne peux pas avancer ». Bo... se borne
avec elle un petit banc pour s'asseoir dessus s'il le
perspective la rassure. Une autre femme de 35 ans,
n de s'appuyer sur son parapluie a avec mon para-
tmporte où, sans mon parapluie je n'ai plus d'équî-
que l'épicier du coin chez qui je peux aller sans
étails se trouvent bien précisés par l'observation de
stamment besoin d'avoir un appui matériel du côté
tient toujours la main gauche fortement accrochée à
)le ou quelque objet. Si ce point d'appui lui manque
s de cours par exemple il sent un creux, un vide a
3eut devenir effroyable. Il n'a pas précisément la
ande place quelconque, mais il a des phobies terri-
est dans un quartier éloigné, loin de sa maison et
e son médecin. C'est pour la même raison que le
impagne lui fait horreur : « Les médecins de lacam-
naissent pas ces affections-là, il faudrait des heures
pour leur expliquer ma maladie et je ne pourrais pas
t horrible d'avoir le fou rire labourant les nerfs, le
I mort, le cœur excité loin de tout médecin compé-
is le parc Monceau a le privilège de déterminer la
ision parce qu'il ressemble à la campagne. Jean a
êmes phobies quand il se sent tourné vers telle ou
n, quand il est dans un chemin de fer en marche,
dans une chambre trop petite, dans une salle de
etc. Dans les lieux découverts, il a besoin de sentir
protection ; dans les lieux fermés, il faut qu'il voie
sortie facile : il ne consent jamais h avancer dans
conférences, car il faut qu'il se tienne toujours très
rte.
rai plus que l'observation de Dob... (86) sur laquelle
nir à propos de l'angoisse. Cette jeune femme de
accès d'angoisse qui la prennent dès qu'elle est
rue ; ces accès ont commencé îi J'Age de 12 ans et
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES SYSTÉMATISÉES. -
vont toujours en aggravant. Ce qu'elle redoute c'
accès de folie « qui la ferait courir comme un
causer du scandale en public ». Elle a moins pe
qu'on ne la verrait pas si elle était folle, on vo
de honte ; elle préfère les rues où il y a des b
pouvoir s'y réfugier, c'est maintenant le sentim<
protection.
A l'agoraphobie doit se rattacher une au/tre pi
endroits clos, la claustrophobie^ signalée parBea
par Raggi de Bologne et décrite par Bail en i\
Cullerre, une angoisse constriclive comparabi
pourrait ressentir en rampant à travers un pas!
plus étroit^. » On peut y rattacher bien des faits
la phobie d'être dans un théâtre, la phobie
chemin de fer que Ton ne peut pas faire arrête
voiture, l'amaxophobie («ixoÇa, voiture) si on ve
mot de Bail \
C'est ainsi que Ht... (gS) « a une peur terribh
les voitures qui sont des petites boîtes fermées, i
de chemin de fer qui passent dans des tunnels
peur d'étouffer en chemin de fer mais il craint
dans le wagon sans pouvoir sortir et il ne peut ]
voyage sans de terribles angoisses. Nae... (g^)
épouvantables quand il faut la mettre dans une
un wagon : elle veut que la porte reste ouverte c
chaque instant de s'élancer au dehors. Tantôt 1
pas assez vite, tantôt elle va trop vite, ou bien i
s'approche trop près ; elle prie qu'on la retienne
s'élance pas au dehors et quand on la retient elle
lui faire respirer de l'élher. Les scènes les plu
lieu quand elle est dans sa chambre et qu'il plei
dehors, elle regarde la rue, s'effraye de l'eau c
qu'elle ne pourra plus sortir parce qu'il y a trop
va monter au premier étage puis au quatrième où
sera noyée contre le plafond ; la respiration 1
I. Bail, Claustrophobie. Ann. mèd. psych., novembre 1879.
a. Cullerre, Les frontières de la folie, 1888, p. 61.
3. E. Doyen, Quelques considérations sur les terreurs morbides
général. Thèse de Paris, i885.
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'^^9IIH
LES AGITATIONS FORCÉES
et pâlit et finalement elle tombe évanouie. Nous revien-
sur ces évanouissements ; pour le moment nous notons
lent les formes diverses que prennent ces phobies.
malades de ce premier groupe ont besoin, comme on l'a vu,
ppui, du secours des autres hommes, ils redoutent d'être
séparés des hommes, et par ce côté on peut dire qu'il y a
ans ces phobies un sentiment social. Mais s'ils demandent
secourus par des hommes, c'est parce qu'ils redoutent
is dangers physiques, c'est la situation physique qu'ils
:ent, le vide, la hauteur, le resserrement, etc. Au contraire,
['autres cas, l'émotion angoissante est essentiellement déter-
par la perception d'une situation morale et surtout d'une
on sociale. On peut considérer comme type de ce second
e l'angoisse causée par la rougeur du visage, VéreiUophobie,
localisation particulière de la phobie a été signalée en i846
n mémoire de Casper (Berlin). Nous devons remercier'AiM.
et Régis d'avoir publié une traduction de celle observation
[{uable et difficile à se procurer*. Le malade décrit très bien
mbles de la volonté et de l'attention, le doute, la timidité,
it préparé la phobie et qui, à mon avis, jouent un grand
ans son explication.
. Piéron et Vaschide viennent obligeamment de me commu-
• une observation également assez ancienne et peu connue
me phénomène publiée par le D*" Duboux en 1874*. « Parmi
ises de la rougeur, dit cet auteur, il me semble que le grand
liste (Darwin) en a oublié une très intéressante : cette cause
igeur est la crainte de rougir. Supposez qu'un individu
se une première fois sous l'une des influences indiquées par
n (telle que la honte ou la pudeur). Le sentiment qu'il
•e en sentant sa face s'empourprer est pénible et humiliant ;
'che à refouler cette bouflTée sanguine ; ses efforts sont inu-
t vont même directement contre leur but ; la rougeur n'en
t que plus intense. Il redoute d'êlre exposé de nouveau à
nfusion pareille : le fait de l'appréhension et de la résistance
une rougeur plus intense que celle de la honte. Il sait
spcr, Biographie d'une idée fixe, traduilc par le D»" Lalanne, publiée par
très et Régis. Arch. de neurol.^ 1902, 1, p. 270.
iboux, à propos de la rougeur, Bull, de la Soc. mèd. de la Suisse Romande,
rc 187/1, p. 817.
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES SYSTÉMATISÉES. — LES PÏIOI
maintenant qu'il suffît de craindre de rougir pour rougii
pourra s'empêcher de craindre et de rougir.
Lorsqu'il se sentira exposé aux regards, particulièrement
de l'autre sexe, la crainte de rougir viendra l'assaillir et h
anticipée empourprera son visage, toute lutte est inutile
l'influence de la volonté, la face peut présenter d'abord une
légère, remplacée bientôt par la rougeur redoutée. Il
même arriver que seul, à l'abri de tout regard, l'individu ro
s'il craint, pour son cerveau par exemple, l'influence de
gestion. Cette crainte constante à chaque instant réalisée i
pour l'individu un supplice de Tantale renversé ; du nature
être le plus hardi et le plus sociable, il deviendra d'une t
et d'une sauvagerie. ridicules ; il évitera toutes les occasion
produire, il recherchera la solitude ; les devoirs de soc
quelquefois les devoirs professionnels lui deviendront hc
ment pénibles ; sa vie sera littéralement brisée par une nis
Cette sorte de néi^rose ou de psychose^ moins rare qu
pourrait le croire, est surtout fréquente chez les femmes,
les individus affectés, je connais un certain nombre de perso
éminents dans les sciences ou la politique, et entre autres a
siologiste célèbre que toute science ne préserve pas et (
timidité est proverbiale. » Cette observation intéressante î
par sa date relève déjà le caractère pathologique du phén(
le rattache aux névroses et aux psychoses sans bien indiqi
pendant l'analogie avec les autres phobies.
Westphal, en 1877, dans un mémoire sur les obsession
un cas semblable. M. Boucher (de Rouen) a publié en i{
cas intéressant* et tout h fait net de cette phobie. Les a
qui ont le plus attiré l'attention sur le phénomène et c
ont donné le nom sous lequel il est connu sont MM. Pil
Régis*. Au mot érithrophobie qui désigne la peur d'une c
rouge quelconque, ils ont substitué le mot ereuthophobie (s
rougeur de la honte). Leur travail a été l'occasion d'un<
d'études sur cette phobie particulière et sur son interpré
On en trouvera la bibliographie dans le dernier trav
1. Boucher (Rouen), Sur une forme particulière d'obsessions chez une hér
Congrès de méd. mentale de Rouen, 1890. Arch. de neurol.^ 1890, II, p. ai
2. Pitres et Régis, Obsession de la rougeur (éreulophobic). Arch. de neurol
i.p. ..
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES SYSTÉMATISÉES. — LES PHOBIES 200
des obsessions, bien des gens ont la rougeur émotive du visage
sans être des éreutophobes et il y a des éreutophobes comme
Nadia qui sont incapables de rougir réellement.
Il est facile de voir que le fait de la rougeur du visage a peu
d importance dans cette phobie, qu'il joue simplement le rôle d'un
prétexte pour justifier une angoisse dont Torigine est plus pro-
fonde. Pour le comprendre, il faut remarquer que l'obsession de
la rougeur se transforme bien souvent et que d'autres prétextes
empruntés presque toujours à l'apparence du visage succèdent à
l'éreutophobie ou la précèdent ou alternent avec elle. Ainsi que
je l'ai déjà montré dans une étude précédente*, Toq..., actuelle-
ment angoissé par la pensée qu'il a les joues rouges, a eu autrefois
des angoisses à la pensée de ses moustaches qui avaient poussé
trop tùt. Per... (162), femme de 38 ans, autrefois éreutophobe, a
maintenant la phobie des poils sur son visage. Ul... (45) a eu
autrefois de i5 à 20 ans de l'éreutophobie proprement dite,
maintenant, a 33 ans, elle n'a plus peur de rougir devant le
monde, mais elle a peur de pâlir, d'avoir des convulsions dans
la figure et surtout dans les yeux qui la rendraient laide et
ridicule au moment de demander quelque chose à une personne.
En outre, il est impossible de séparer l'éreutophobie des
angoisses provoquées par d'autres modifications de l'attitude ou
du visage dans lesquelles il n'est pas question de rougeur.
Klu..., bien qu'il parle correctement, à la peur de bégayer
quand il se trouve devant des étrangers, il ne peut se faire
inscrire à une école, il ne peut demander son chemin à un agent,
ni prendre un billet de chemin de fer^ tellement il est angoissé à
la pensée qu'il pourra non pas rougir, mais bégayer devant ces per-
sonnes. D'autres, comme Pol..., ont des angoisses à la pensée
d'une cicatrice qu'elles ont sur le nez, quand elles sentent que des
étrangers peuvent la remarquer, c'est la maladie que Morselli
a décrite sous le nom de dysmor phobie^. Tk... (i45), jeune
homme de il\ ans, a la phobie de sa mâchoire qu'il croit trop
grande. Bechterew a décrit le malade épouvanté par le sourire
obsédant qu'il a constamment sur les lèvres et je pourrais placer
en opposition le cas de Wgn..., jeune homme de 26 ans, angoissé
1. La maladie du scrupule et l'aboulie délirante, Revue philosophique, 1901, I»
p. 337 et 507.
a. Morselli, La d>*ftmorphophobie et la lapliépliobîe. Uiforma medica, 1891, n** i85.
LES OBSESSIOnS. L — i4
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LES AGITATIONS FORCÉES
paralysie de ses lèvres « incapables de jamais soa-
lent ». On a déjà vu à propos des obsessions, le cas
i) dont les angoisses sont provoquées a par la rai-
) et les mouvements mécaniques des membres, » on
érer toutes sortes de variétés de ces phobies tout
;s, à mon avis, à Téreutophobie proprement dite,
essentiel qui se retrouve en effet dans toutes ces
le sentiment d'être devant des hommes, d'être en
it à' avoir à agir en public, M. Hartenberg a raison
îreutophobie aux maladies de la timidité *. Tousces
aucune peur de rougir ou de pâlir, ou de grimacer,
ou de ne pas sourire quand ils sont seuls, et la
grimace, si elle survenait à ce moment, ne les
lit aucunement. On pourrait donc appeler ces phé-
hobies sociales ou des phobies de la société,
upe rentreront aussi les phobies du^ mariage qui
ites (Hnu... (87), De...)*. On peut y rattacher aussi
1 rapport avec certaines situations sociales. Bal...
vantée à la pensée de faire la classe devant des
(/i2), femme de 87 ans, a de singulières terreurs
avoir des domestiques : sa bonne Tintimide, elle
commander ni lui reprocher. Elle a surtout la
[îoncierge et elle a des angoisses à la pensée qu'elle
nal avec ce fonctionnaire nécessaire,
hobies, qu'elles se rattachent au type de l'agora-
laustrophobie, des phobies sociales, me paraissent
commun. Elles ne sont pas comme les précédentes
rapport avec un objet éveillant l'idée d'un acte,
déterminées par la perception d'une situation et
nts auxquels cette perception donne naissance.
C. — Les phobies des idées.
se développent souvent encore sans qu'il y ait à
iépart, ni une sensation localisée, ni la perception
nême la perception d'une situation; elles survien-
t à la suite d'une idée qui se présente d'une ma-
.es timides et la timidité, 1901, p. 201 (Paris, F. Alcan).
ées fixes, II, p. 87.
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES SYSTÉMATISÉES. — LES ï>HOBlES 21 (
nlère abstraite dans Tesprit du malade. Il suffirait de répéter ici
toutes les idées obsédantes qui ont été étudiées dans le premier
chapitre. Presque toutes ces idées s'accompagnent de phobies.
A propos des obsessions sacrilèges on remarquera la phobie du
démon, de l'enfer, du blasphème, etc. Un malade comme Ki...
(219) éprouve ces émotions angoissantes à propos de toutes pen-
sées religieuses ou philosophiques. Il faut quHl évite de penser
à Dieu ou à la religion et pendant une période il avait pris en
horreur Tidée abstraite de la causalité qui le faisait penser à la
création et à la divinité. L'idée d'infini qui déterminait chez Vil...
des ruminations si remarquables s'accompagnait souvent de phé-
nomènes d'angoisse bien caractéristiques.
Il en sera de même pour les idées criminelles. Leg... vit dans la
crainte de désirer du mal au monde ; elle a peur de penser à faire
venir des enfants difformes. On... (221) a des angoisses à propos
de l'idée de mentir, de l'idée « de suivre des femmes au théâtre »'.
Za... (216) a eu cette émotion à la pensée qu'il pourrait copier k
un examen et il Ta maintenant à la seule pensée d'un examen. Ces
malades redoutent toutes les circonstances comme les conversa-
tions ou les lectures qui pourraient faire naître ces mêmes idées.
C'est ainsi que We. . . (i 70) a peur des journaux et même a peur de
l'imprimerie parce que les journaux dans leurs faits divers éveil-
lent la pensée des crimes. Ils finissent par avoir peur des imagi-
nations les plus vagues, des pensées les plus abstraites. We... a
peur de chercher a se représenter en imagination le membre viril
et Za... a peur « de se représenter une idée quelconque parce que
ce pourrait être une idée mauvaise ».
Mêmes observations encore pour les obsessions de honte. Ceux
qui ont l'obsession de la folie, et ils sont nombreux, ont cette
émotion à propos de la pensée de la folie. « Je souffre, dit Léo...,
à la pensée que je deviens folle. Je me vois enfermée, je me sens
l'air idiote et cela nie donne une angoisse horrible. » Byp...
(180), femme de 28 ans, croit voir son frère qui est enfermé h
Sainte-Anne, venir au-devant d'elle et elle l'entend qui lui dit :
« tu seras folle comme moi. » A ces mots elle soufFre à en défail-
lir au milieu de la rue. De..., femme de 33 ans, a une idée
fixe assez compliquée qui tient à la fois de la honte de soi et de
la honte du corps. Elle ne peut concevoir sans horreur la pensée
du mariage parce qu'elle s'en croit tout à fait indigne au point de
vue moral et aussi au point de vue physique. Ce sont des senti-
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LES AGITATIONS FORGÉES
pacité pour tenir sa maison, pour remplir ses devoirs,
ies enfants et en même temps des idées de difformité
génitaux, des pensée de n'être pas comme toutes les
js connaissons tous ces faits et ce cas s'ajoute seule-
récédents mais ce qu'il faut ajouter ici, c'est que la
iançailles rend cette femme malade et que des amis
n insistant pour la marier ont déterminé une crise
t même des accidents délirants analogues à la confu-
, sur lesquels il nous faudra revenir quand nous par-
:omplications du délire du scrupule. Les regrets de
ènent chez Gisèle... (171) et chez Ri...' de grandes
s que l'une a l'idée de la vie religieuse et dès que
B au métier d'institutrice. De même, Nadia a des
land elle pense seulement à engraisser, quand elle
lement qu'on pourrait lui trouver meilleure mine,
obsessions de la honte du corps s'accompagnent en
lobies.
iffit de signaler les innombrables phobies liées aux
ndriaques. Morselli en signalait une curieuse, sous
taphéphobie, c'est-k-dire la crainte d'être enterré
., femme de 87 ans, a des angoisses à la pensée des
la fièvre typhoïde, du suicide, etc. Il est inutile de
Jean a des phobies en pensant aux méningites et aux
st que Pn... (iSg) est pris par des crises d'angoisse
nsée qu'on pourra lui prouver l'air malade, ce qui
ontraire de Nadia. Parmi les phobies plus banales il
au premier rang la phobie de l'idée de la mort.
;mme de 4o ans, est d'abord obsédée par le visage
li vient de mourir. Nous avons déjà discuté ce qu'il
le ces hallucinations. A la suite d'une petite opéra-
abcès au cou, elle reporte ses idées de mort sur
elle a des angoisses épouvantables dès qu'elle pense
même à la vie.
le remarquer que ces phobies des idées se mêlent
vec toutes les phobies précédentes : très souvent,
narque Legrand du SauUe, il suffit du souvenir d'un
ne situation pour reproduire la crise; la seule vue
Idées fixes. II, p. i48.
I Hiforma medica, i8gi, no i85.
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES DIFFUSES. — LES ANGOISSES 213
d'un dessin qui représente Tintérieur de Saint-Pierre-de-Rome le
faitchanceler sur ses jambes^ Chez beaucoup de nos malades il en
est de même : la seule pensée de la femme produit chez Jean
(c un état fastidieux» et la pensée d'aller seule à une leçon de ^des-
sin donne mal au cœur à Dob...
D'autre part dans les phobies d'objets ou de situation se mêlent
souvent des idées compliquées. Un malade de Westphall a de la
claustrophobie dans un théâtre ; mais c'est qu'il se répète des pen-
sées de ce genre : « qu'est-ce que je deviendrai si le feu éclate
dans la salle et si à ce moment-là j'ai un accès? je ne pourrai pas
me sauver*. » Jean dans toutes ses phobies fait ou a fait des rai-
sonnements semblables.
On voit qu'il y a un grand nombre d'opérations intellectuelles
qui peuvent déterminer ces phobies comme précédemment les
sensations, les perceptions, ou les sentiments.
2. — Les agitations émotionnelles diffuses.
Les angoisses.
Il suffit de répéter brièvement à propos des phobies ce que
nous avons déjà étudié à propos des manies mentales : ni au
point de vue clinique, ni au point de vue psychologique, ces diver-
ses phobies ne forment des phénomènes véritablement distincts
les uns des autres. M. J. Falret faisait déjà remarquer très juste-
ment que toutes ces peurs sont solidaires les unes des autres :
« l'agoraphobie se rencontre souvent, disait-il, chez le même indi-
vidu avec la peur d'une épée nue, la crainte de tomber d'une
fenêtre, la frayeur en voiture ou le délire dn toucher ». Bail sou-
tenait la même opinion quand il proposait d'englober tous les cas
d^agoraphobie, de claustrophobie, de topophobie sous le titre
commun de phénomènes vertigineux'. Celte conception me parait
beaucoup plus juste que celle soutenue par Legrand du Saulle et
par quelques autres auteurs qui voulaient faire de certaines de ces
phobies et en particulier de l'agoraphobie des maladies distinctes.
I. Legrand du SaulIc, Agoraphobie, p. i5, 33, 67.
a. Id., ibid., p. 8, 18.
3. Bail, Les frontières de la folie. Revue scientifique, i883, I, p. 4<
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LES AGITATIONS FORCÉES
iicilenient remarquer que les mêmes noms de miilades
propos des diverses phobies : Jean en particulier les a
près toutes, et quand on le guérit de Tune, il retombe
I. La différence entre une agoraphobie et une phobie
n'existe guère que dans des circonstances extérieures
difié l'aspect d'une même disposition psychologique
le. En effet toutes ces phobies semblent constituées
groupes de phénomènes, l'un accessoire et variable,
lamentai et immuable. Les phénomènes accessoires
nsations, les perceptions, les sentiments qui provo-
tat de trouble, qui se mêlent avec lui et lui donnent un
iculier; le phénomène essentiel qui se retrouve tou-
unc perturbation de tout l'individu physique et moral
'une manière générale sous le nom d'angoisse. De
les manies mentales nous conduisaient au phénomène
nation, les tics au phénomène de l'agitation motrice,
outes les phobies nous conduisent à l'étude de l'an-
I . — U angoisse diffuse,
îrses phobies présentent le phénomène de l'angoisse
combiné avec des sensations, des perceptions ou des
; ce phénomène peut aussi se présenter indépendam-
5 phobie déterminée. On a souvent remarqué que cer-
tes sont dans un état constant d'anxiété diffuse : « En
utes les phobies particulières, disait M. Ribot, il existe
bservations d'un état vague mais permanent d'anxiété
îur qu'on a nommé panophobie ou pantophobie ; c'est
Ton a peur de tout et de rien, où l'anxiété, au lieu
e à un objet toujours le même, flotte comme dans un
se fixe que pour un instant au hasard des circonstan-
it d'un objet h un autre'. » MoreP, Weir Mitchell
ne décrivaient déjà ces « états d'anxiété », ces étals
. Récemment M. Freud ^ a beaucoup insisté sur cet état
t ce qu'il appelle <( la névrose d'angoisse ».
très cl Régis, qui font de cet état d'anxiété diffuse le
'Psychologie des senlimenls, 1896, p. 211 (Paris, F. A.lcan).
Délire émotif, p. SqS.
d, Obsessions et phobies. Revue neurologique, 3o janvier 1895.
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES DIFFUSES. - LES ANGOISSES 215
phéDomène essentiel des phobies et des obsessions, en rappor-
tent des cas remarquables parmi lesquels je rappellerai celui-ci.
Une dame de 52 ans, nerveuse, impressionnable ressentit un
grand chagrin h la suite de la mort de sa mère, il y a 12 ans;
elle présente à ce moment une grande dépression morale sans
troubles morbides proprement dits. Trois ans après, à la suite
d^ine autre mort, celle d'une amie, elle entra dans un état d'émo-
tivité morbide diiTuse, avec « attente anxieuse ». La malade était
constamment en état de souffrance vague, en état latent d*angoissc,
qui éclatait sous forme de paroxysme à la moindre occasion. Une
voilure passait-elle pendant qu'elle marchait sur le trottoir dans
la rue, aussitôt elle tombait en crise, craignant qu'une roue ne se
détachât et ne vînt à l'écraser. Au moindre vent, une tuile allait
glisser d'un toit et lui fendre la tête. A table les aliments allaient
rélouffer. D'autres fois, à peine sortie de chez elle, l'angoisse
survenait, s'objectivant sur cette idée que quelqu^un des siens
venait peut-être de mourir tout d'un coup et elle était forcée de
revenir sur ses pas pour se rassurer. Chaque événement, chaque
incident, chaque acte de sa vie devenait ainsi matière à décharge
pour son angoisse momentanément spécialisée par le hasard i. ,
Les observations de ce genre sont parmi les plus banales, on
peut reprendre beaucoup des cas précédents et remarquer que
chez certains sujets les phobies se multiplient. L'angoisse ne se
produit pas à propos d'un seul objet, mais h propos d'un grand
nombre. On ne peut énumérer les objets qui dans certaines cir-
constances sont susceptibles de faire naître l'angoisse chez
Jean, tout ce qui se rapporte au sexe, tout ce qui se rapporte à
la poste, tout ce qui se rapporte h la politique, à la religion, à
la santé, à la mort, etc. L'angoisse finit par être presque indé-
terminée et se reproduit continuellement à propos de n'importe
quoi : elle peut être considérée comme diduse.
Il y a des cas plus nets encore où l'angoisse est presque
permanente, ou se produit par accès très répétés, sans que le
sujet attache aucune pensée h ces angoisses, sans qu'il donne
même une justification apparente d'ordre intellectuel, comme on
a vu que Jean le fait toujours. Une femme de 38 ans, Cs... (4i),
toujours émotive et impressionnable, a été très bouleversée vers
I. Pitres et Régis, Scméiologic Hps obsessions et des idées fixes, Rapport au
corujres de médecine de Moscou, 1897, p. 19.
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LES AGITATIONS FORCÉES
le relevait à peine d'un accouchement quand la
aladresse de lui dire que Tenfant ne respirait
ort; elle sentit comme un violent choc dans la
a toute changée. Cette première perturbation
s et se guérit à peu près. Il y eut une rechute
nédecin lui demanda si elle n'avait pas d*albu-
es. Depuis ce moment elle est restée pendant
ins Tétat suivant. Une dizaine de fois par jour,
i de raison, de prétexte, au moins en appa-
a s'agiter, elle remue, frappe les meubles, elle
tion haletante, le cœur bat rapidement, elle
se plaint d'être souffrante, malheureuse, d'at-
quoi, d'avoir peur de quelque chose d'inconnu.
peur précise, une raison à son désespoir ; de
e prétend bien que les personnes présentes lui
Ta impressionnée, mais elle ne sait pas pour-
pressionnée, et souvent elle n'invente aucune
e d'angoisse pure, sans éléments intellectuels,
une manière tout à fait diffuse,
ter un peu sur l'observation de Ku... (^a) parce
e cas joueront un rôle dans l'interprétation des
une femme de 87 ans, toujours faible et timide ;
été tourmentée par la crainte de blesser les
I d'un milieu sympathique sur lequel je revien-
des caractères les plus curieux de l'esprit des
[ix-huit mois un incident ridicule a changé son
té appelée comme témoin par le commissaire
Qer son opinion sur la conduite d'un de ses voi-
a suffi pour la mettre dans un état tout à fait
; plusieurs années. Cette longue maladie peut
périodes : dans la première qui a duré trois
ide agitation mentale, une rumination perpé-
laquelle nous avons déjà fait allusion ; dans la
)li une dizaine de mois, l'agitation a été surtout
de ces malades avec pseudo-crises d'hystérie
à propos de l'agitation diffuse. Enfin la maladie
ne forme : « les crises sont bien plus doulou-
lade, parce qu'elles sont devenues internes. »
»on langage qu'il y a beaucoup moins de mou-
; des membres, de cris et de gesticulations,
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES DIFFUSES. — LES ANGOISSES 217
mais que ces mouvements extérieurs sont remplacés par des mou-
vements viscéraux : spasmes du diaphragme et du ventre particu-
lièrement curieux, trémulation perpétuelle de Tabdomen qui
remplace la respiration, nausées, vomissements, diarrhées, etc.
Ces angoisses surviennent à chaque instant par crises plus ou
moins longues à propos de tous les incidents possibles, en réalité
sans rime ni raison. Il y a un état d'angoisse presque perpétuel,
a une angoisse vague qui flotte dans Tair, disait Freud, et qui ne
demande qu'à se fixer sur n'importe quoi. »
On retrouvera un grand nombre d'observations semblables
dans le second volume de cet ouvrage. Je renvoie en particulier h
celles de Gy...(/i6), de Jo... (43), de Hb... (47), Dn... (/ig). Les
angoisses de cette dernière malade sont particulièrement remar-
quables parce qu'elles se produisent une dizaine de fois pendant
le sommeil de la nuit et ne surviennent le jour que si la malade
essaye de s'endormir. Il faudra revenir sur ce fait en étudiant les
conditions pathogéniques de l'angoisse. Ces quelques observations
sont suffisantes pour montrer que l'angoisse ne prend pas tou-
jours la forme systématique des phobies, mais que très souvent
elle est vague, diffuse, sans rapport avec un phénomène intel-
lectuel déterminé. Cette forme semble si importante que certains
auteurs, comme M. Freud, ont voulu en faire une maladie spé-
ciale, distincte de l'obsession et de la neurasthénie, sous le nom
de névrose d'angoisse. C'est une interprétation clinique qu'il
faudra discuter.
2. — Troubles physiologiques de l'angoisse.
Après avoir constaté les diverses formes systématisées ou dif-
fuses que l'angoisse peut revêtir il faut maintenant considérer ce
phénomène en lui-même et voir de quels éléments il est composé
dans la plupart des cas où il se présente, il faut rechercher les
caractères généraux de l'angoisse. Ces caractères me semblent de
deux espèces : un grand nombre sont des caractères physiolo-
giques qui seront étudiés* en premier lieu, mais il me semble qu'il
y a un second groupe composé par des phénomènes psychologi-
ques et dont l'étude ne doit pas être négligée.
M. Freud énumère ainsi les principales formes que peut prendre
la crise d'angoisse, c'est-à-dire les principaux phénomènes qui la
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LES AGITATIONS FORCÉES
qui dans tel ou tel cas peuvent se développer isolé-
bles cardiaques avec palpitations, arythmie, tachy-
jusqu'aux états asystoliques les plus graves ;
blés respiratoires dyspnée: nerveuse, accès d'asthme;
)rdres de Tappareil digestif: accès de fringale ou
faim paroxystique, souvent associée à des vertiges,
que, diarrhée périodique ou chronique;
s de vertiges ou d'étourdissements, ils consistent en
écial accompagné de l'impression que le sol se dé-
» jambes s'effondrent, ils peuvent même amener des
iiissement profonds;
sthésies ;
surs nocturnes ou réveils angoissants ;
[lissements musculaires et des tremblements ;
irs profuses survenant souvent la nuit ;
énomènes vasculaires et congestifs analogues à
observe dans la forme vaso-motrice de la neuras-
îsme et des besoins impérieux d'uriner*,
phénomènes que M. Freud ajoute : l'irritabilité gé-
pacité de supporter aucune excitation sensorielle,
liète, l'obsession, se rapportent plutôt aux troubles
es.
berg ajoute quelques symptômes intéressants, des
lemcnts, le phénomène du doigt mort, des amai-
périodiques.
ulement sur les phénomènes physiologiques qui se
es le plus fréquemment chez mes malades et je
[ue les phénomènes de la crise d'angoisse en laissant
roubles généraux de la santé qui persistent en dehors
l'angoisse proprement dite.
i soumettre ces troubles à une analyse précise et
ossible prendre quelques mesures et quelques gra-
)i que j'avais pu le faire pour un certain nombre
Je Vienne, Sur la légitimité de séparer de la neurasthénie un syn-
s le nom « de névrose d*angoisse ». Neurolog. Centralbtnlt, 1895,
r liartenbcrg, La névrose d'angoisse, 1902, p. 3.
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES DIFFUSES. — LES ANGOISSES 219
de phénomènes hystériques. Je dois faire observer que de telles
études sont beaucoup plus diflieiles sur ce genre de malades
et je suis un peu étonné quand je vois bien des auteurs parler
avec tant d'assurance des modifications physiologiques des psy-
chasthéniques, comme s'ils avaient pu les observer et les mesurer
avec précision. Leurs crises d'angoisse ne se produisent pas à
heure dite, au moment le plus favorable à l'observation. Bien au
contraire, il y a dans l'état mental de ces malades des dispositions
curieuses qui empêchent les crises de se produire de cette manière.
Nous avons vu qu'ils peuvent presque toujours arrêter ou sup-
primer leurs crises quand il y a des étrangers à qui ih veulent les
cacher. Claire, qui se roule par terre dans ses crises d'eflbrts, se
relève aussitôt dès que quelqu'un entre et rajuste avec le plus grand
calme le désordre de sa toilette. Dans ces conditions consentiront-
ils a laisser venir leur crise dans le laboratoire ? En outre nous
verrons plus tard un autre caractère intéressant, c'est qu'ils sont
très facilement consolés, rassurés par la présence de la personne
qui les soigne ou simplement les étudie. « Comment voulez-vous
que j'aie des angoisses devant vous, me répète Jean, mais chez
vous, c'est le seul endroit où je sois tranquille, je voudrais être
toujours auprès de vous et je n'aurais jamais rien. » Par défini-
tion même Tagoraphobe a des terreurs dans la solitude, il ne les
aura pas dans un laboratoire, quand il est examiné par son mé-
decin. C'est pourquoi à mon grand regret je n'ai pu réunir autant
de documents précis, de graphiques que je l'aurais voulu sur ces
troubles. J'ai éprouvé, je l'avoue, une déception quand j'ai dû
constater que sur deux cents malades observés pendant des
années, j'ai eu assez rarement l'occasion favorable pour observer
moi-même dans de bonnes conditions ces grands phénomènes
émotionnels dont les malades parlent toujours mais quis'eiTacent
très rapidement dès qu'on désire les analyser.
Cependant j'ai pu faire quelques expériences en petit nombre
dont je crois devoir tenir compte dans l'analyse de ces perturba-
tions physiologiques.
Ces malades se plaignent beaucoup d'éprouver pendant l'an-
goisse des troubles du mouvement des membres. Je ne parle pas
ici des grandes agitations qui peuvent quelquefois accompagner
les angoisses. Les excitations motrices sont d'ordinaire peu com-
patibles avec l'angoisse proprement dite, quand il y a grande
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LES AGITATIONS FORCÉES
B mouvement extérieur n'est pas très considé-
ment.
^e souvent ce sont des spasmes, des secousses,
emple, des sortes de crampes qui ne vont
[itracture chez Mb..., et surtout du tremble-
îs jambes(Cum..., Bo..., Vim...*, Dob..., etc.).
iblement des jambes a même été pris dans un
nus. Quand le malade est calme il est évident
emblement épileptoïde de la jambe et que
ouble émotionnel.
ides se plaignent d'être comme paralysées de
lans les membres, <( mes jambes, dit Fie...,
nt comme de la laine, je me sens tomber par
s jambes se dérobent sous moi, dit Vim...,
iras qui m'abandonnent. Il n'y a pas moyen de
écrire ». « Je vais tomber par terre, la terre
» J'ai voulu vérifier cette faiblesse musculaire
iielque importance.
es j'ai pu examiner ces malades qui prétendent
nt l'angoisse : la paralj'sie ou même la parésie
ji doit se vérifier assez facilement. Eh bien,
ter autre chose qu'un léger degré d^aSaiblis-
du mouvement volontaire qui disparaissait
l'on encourageait le sujet. Lkb... prétend
ses pendant l'angoisse ; j'ai pris la force de
omètre de Chéron-Verdin d'abord pendant
nal, puis pendant la crise, en faisant serrer
- et en prenant la moyenne. Voici la série des
ïtat normal :
21, 21, 2/j, 19, 22, 24, 23, 23, 23, moyenne
I, 22, 24, 21, 19, 19, 21, 21, 21, moyenne
également à l'état normal :
24, 23, 23, 24, 24, 23, 24, 22, 25, moyenne
26, 23, 24, 23, 25, 25, 25, 25, 25, moyenne
•s, 11.
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES DIFFUSES. — LES ANGOISSES 221
Voici maintenant l'expérience qui a pu être faite une fois pen-
dant Tétat pathologique :
Main droite : 22, 25, 24, 22, 22, 28, 25, 23, 28, 25, moyenne
23,4 ;
Main gauche : 21, 21, 21, 20, 21, 19, 20, 21, 19, 21, moyenne
20,4.
L'expérience n'est malheureusement pas assez répétée pour
donner de conclusions bien nettes, on peut remarquer que même
h Tétat normal la force est faible, et qu'il n'y a pas de grandes
variations au cours des dix pressions consécutives, le sujet me
parait faire peu d'efforts même au début et se fatiguer peu, cela
se rattache à son aboulie générale. Mais ce qui est frappant, c'est
le peu de différence entre les séries obtenues à l'état normal
et celles qui sont obtenues pendant l'angoisse. La paralysie dont
se plaint cette malade n'est pas bien facile h apprécier objective-
ment. J'arrive au même résultat chez 3 autres malades : la diffé-
rence entre les moyennes de dix pressions faites dans l'état
normal et les moyennes de dix pressions pendant l'angoisse est
insignifiante.
Si on constate difficilement de la paralysie véritable, on observe
souvent de l'ataxie, de l'incoordination. Les mouvements sont
troublés par les secousses et les spasmes et ils manquent de pré-
cision. On constate que les actes délicats ne peuvent plus être
exécutés, Nadia cesse de pouvoir jouer du piano et Jean ne peut
plus écrire. Son écriture devient déplorable toutes les fois qu'il
est troublé, et pendant les crises d'angoisse il est incapable de
tenir une plume. En dehors des phobies de la parole qui, bien
entendu, rendent le langage impossible, dans beaucoup d'an-
goisses la parole devient saccadée, hésitante, embrouillée. Cer-
tains malades ont pendant ces crises une parole tout a fait
spéciale qui permet de reconnaître leur état.
Si nous passons aux fonctions viscérales il faut rappeler que
les angoisses d'un certain nombre de malades déterminent des
excitations génitales. Chez les uns comme chez Jean, ces excita-
tions et les érections sont en rapport avec des obsessions erotiques
et l'on peut dire que ce sont les rêveries des sujets qui ont amené
l'excitation.
Mais chez d'autres et en particulier chez Claire et chez plu-
sieurs autres l'excitation génitale se produit la première comme
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LES AGITATIONS FORCÉES
sorte de dérivation de Tangoisse ou de Tagitation motrice et
obsessions erotiques ne viennent qu'à la suite. Hb... (47)9
me de 4o ans, toujours timorée et scrupuleuse, est restée
;e sa vie très calme au point de vue génital. A la suite de la
t de son père, elle se sent seule et abandonnée, elle a des
es de désespoir. A ce moment elle a une excitation génitale,
|ue-là inconnue et ne peut résister au besoin de se mastur-
. « Après Tavoir fait elle se sent mieux, moins délaissée et
j courageuse. » On peut rattacher a cette excitation des
mes génitaux de curieuses exagérations de sécrétion. Ku
s ses angoisses « perd de Teau par le vagin comme une femme
accouche ». Il ne s'agit pas d'une sécrétion purulente qui se
ache à quelque métrite, c'est une sécrétion aqueuse réellement
considérable qui n'existe qu'au moment de ces excitations et
disparait ensuite.
es troubles gastro-intestinaux en rapport avec l'obsession et
poisse doivent être importants mais ils sont didiciles à étii-
. En effet il ne faut pas oublier que tous ces malades ont au
'ême degré l'état neurasthénique dans lesquels les troubles
estomac et de l'intestin sont fondamentaux. Presque toujours
alimentation, leur digestion gastrique, leurs fonctions intes-
les sont très défectueuses et cela d'une manière constante.
s aurons à les étudier en examinant l'état général de leur
é physique. Mais il est bien difficile de constater si quelques-
de ces troubles digestifs concordent exactement avec la crise
goisse. Chez beaucoup de malades il n'en est pas ainsi, nous
ms même à signaler chez Lise, par exemple, et chez Gisèle
sorte d'alternance entre les troubles psychiques et les
blés gastriques. Il faudrait maintenant constater des troubles
(stifs aigus au moment de l'angoisse. Legrand du Saulle
arquait déjà qu'ils sont rares et il faisait observer que les
*aphobcs ne vomissent pas, ce qui les distingue des autres
igineux.
ependant on constate quelquefois des troubles de l'alimenta-
et de la digestion qui coïncident avec l'angoisse. La plupart
malades refusent de manger pendant leurs angoisses. Ku...
'estée six semaines presque sans alimentation, et il ne s'agis-
pas ici d'un refus d'aliments dépendant d'une obsession, mais
i dégoût en rapport avec l'angoisse. D'autres ont des crises
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES DIFFUSES. - LES ANGOISSES 223
de boulimie comme Lkb... (loo) qui à ce moment. voudrait dévo-
rer, mais je ne suis pas sûr que cette boulimie dépende unique-
ment de l'état de l'estomac et ne soit pas en rapport avec un sen-
timent général de faiblesse que nous retrouverons parmi les
troubles moraux.
Parmi ceux qui continuent h manger, un grand nombre
comme Gr...,Bu..., Bx...(20o) se plaignent de nausées pénibles,
une seule malade Claire a rendu deux ou trois fois son repas au
milieu de ses contorsions. Bien entendu nous mettons à part ceux
qui ont des tics de vomissements, des crises d'efforts de vomisse-
ments, des phobies de la digestion, il faudrait tous les rappeler
ici. Ce qui est plus fréquent c'est que les malades sans tics et
sans phobies particulières se rapportant à la digestion souffrent
cependant de la digestion, se sentent l'estomac gonflé, le ventre
serré, qu'ils ont des spasmes de l'œsophage, qu'ils sentent la
boule qui monte h la gorge, qu'ils se plaignent d'avoir la bouche
sèche, pâteuse et amère. Bx... a constamment ce mauvais *goût
dans la bouche tout le temps que dure la période de phobie.
Chez quelques-uns ces troubles vont jusqu'à l'indigestion, quand
la crise survient peu de temps après un repas.
Il faut noter aussi les crises singulières de diarrhée que l'on
observe de temps en temps. Chez Xo... c'est un véritable flux
intestinal répété et extrêmement pénible. Chez Gisèle, chez I.ise
c'est un état lientérique qui s'établit quand elles sont angoissées
et les aliments sont rendus sans aucune digestion. Chez plusieurs,
chez Gs... en particulier une sécrétion aqueuse continue à flots
même quand les matières sont rendues par excitation des glandes
de rintestin. 11 y a une hydrorrhée intestinale comme une hydror-
rhée utérine et nasale.
Enfin il faut noter chez plusieurs de la pollakiurie et plus
rarement de la polyurie vraie; dans une demi-journée d'angoisse
Claire rend trois litres d'urine. Plusieurs autres m'ont indiqué le
même fait sans l'avoir mesuré.
Avec les fonctions de la circulation nous arrivons à des
troubles qui sont plus nettement en rapport avec l'angoisse.
Beaucoup de malades se plaignent de souffrir au cœur à ce mo-
ment et ils ont à ce propos comme toujours des descriptions
imagées et symboliques. « Je ressens, dit Al... (i5), quelque
chose qui me resserre et me gêne à gauche et qui monte jusqu'à
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LES AGITATIONS FORGÉES
lime un caillot qui serait dans le cœur et qui
r », « je souffre horriblement, dit Mm... (5),
parce que le cœur déborde et que ce trop-plein
id tout autour..., le cœur baigne dans Tennui
é plongé dans un vase rempli d'ennui. » On ne
nène physiologique qui se cache sous ces méta-
les comme Claire prétendent sentir qu'elles
r. Ce serait un phénomène plus facile a vérifier
s pu constater ces arrêts du cœur ni même de
sements du pouls, les malades disent toujours
en syncope, qu'ils se sentent près de s'évanouir,
s observé au cours de Tangoisse de véritables
es. Les pertes de conscience sur lesquelles nos
mt de tout autre nature.
State véritablement et cela d'accord avec le dire
nt des palpitations cardiaques « mon cœur est
..., il bat comme si Ton retirait le balancier
Brk... parle des chocs violents de son cœur et
;ur ce sujet. D'après lui son cœur a non seule-
[its précipités mais des battements énormes qui
locs douloureux sur la poitrine et que l'on doit
ce déclanchement du cœur, comme il l'appelle
['il redoute le plus au maximum de l'angoisse»
qu'il fait toutes ces opérations de rumination
ies battements en les comptant suivant sa manie
l'ai déjà fait remarquer h ce propos que ce compte
^inaire. Malgré les exagérations relatives ù ces
il est certain à l'auscultation que leur cœur bat
t très vite. Il n'est pas rare de constater loo,
minute et plus, surtout chez ceux qui s'agitent
efois comme chez Claire ces palpitations se
ine journée même après la fin de la crise d'an-
] sang dans les artères est beaucoup étudiée
îs états névropathiques : M. de Fleury croit que
de la tension au-dessus ou au-dessous de la
grand rôle dans la neurasthénie*. Je trouve
"ancls symptômes neurasthéniques, 1901, p. 69 (Paris, F. Alcan).
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES DIFFUSES. — LES ANGOISSES 225
pour ma part ces mesures de teusioa du sang assez diiliciles a
prendre chez Thomme. Je me servais au début de l^appareil de
Chéron et j'ai remarqué que, si je faisais prendre par plusieurs
personnes, puis par moi-même, la tension d'un sujet au même
moment, nous arrivions à des résultats absolument discordants et
cette contradiction m'a découragé. Depuis, je me suis servi de
l'appareil de Potain et les résultats me semblent un peu plus
précis, je ne crois cependant pas pouvoir attribuer à ces chiflres
une extrême précision.
Beaucoup de sujets me semblent conserver une tension à peu
près normale, Jean qui est si angoissé m'a présenté le plus sou-
vent i4, i5 ou 16; sur trois sujets j'ai observé des chiffres de 19
et de 20, c'est-à-dire supérieurs à la normale, ce sont des sujets
qui s'agitent; chez deux autres: Lise et Gisèle les chiffres de
9 et de II, ce sont des sujets qui semblent plutôt immobiles
dans leur angoisse. Une seule observation m'a laissé une impres-
sion assez nette: Rk... est venu me trouver un matin parce qu'il
avait été pris dans la nuit, à trois heures du matin, d'une de ses
obsessions avec manie mentale d'interrogation qui avait peu à
peu amené une angoisse. La figure était tout à fait décomposée,
cet homme de l\o ans ordinairement sanguin était blême, il avait
la peau froide, le cœur battait 60 pulsations seulement et la pres-
sion mesurée avec le sphigmomanomètre de Potain me paraissait
nettement très basse, 9 où 10 au plus. J'ai pu le remonter par
une série de procédés, que j'indiquerai plus loin, le forcer au
travail et à l'effort et je vis peu à peu son teint changer, la
figure se colorer. La pression que j'ai reprise était au moins
de 16. Dans ce cas l'angoisse a manifestement coïncidé avec les
symptômes d'affaiblissement cardiaque.
Mais j'hésiterais beaucoup à généraliser celte observation.
D'autres auteurs, en particulier MM. Vaschide et Marchand* ont
constaté une augmentation de la pression artérielle de 2 centi-
mètre et demi en moyenne. La pression normale de leur sujet était
de i8,5 et sous l'influence de l'angoisse (il s'agissait d'un éreu-
lophobe) elle s'élevait à 21 centimètres. J'ai observé moi-même
I. Vaschide et Marchand, Contribulion à l'élude de la psycho- physiologie des
émotions à propos d'un cas d'éreutophobie. Revue de Psychiatrie, juillet 1900.
Ufficio che le condizioni mentali hanno sulle oiodiGcazioni délia respirazione cl
dolla circulazione periferica. Rivista sperimentale di freniatrioj 1900.
LES OBSESSIONS. 1. — l5
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LES AGITATIONS FORGÉES
élévation dans certains cas, sans compter les cas plus nom-
K encore où la pression a été trouvée normale,
s troubles des vaso-moteurs ont été également présentés
ne essentiels. M. Ribot, avec Wundt et Mosso, croit que le
hement momentané de Tinnervation vaso-motrice cause la
eur du visage et se présente comme une compensation de
aération des battements du cœur\ MM. Pitres et Régis font
' un rôle considérable à cette dilatation des vaisseaux cutanés
ccompagne Téreutophobie. Je fais simplement remarquer ici
3es phénomènes vaso-moteurs sont très variables dans Tan-
e : si on constate la rougeur chez quelques-uns, on observe
d'autres une pâleur livide qui même me semble plus frè-
te. Il y a quelquefois des alternatives assez rapides de rou-
et de pâleur; enfin chez beaucoup la coloration des tégu-
s reste tout à fait normale.
s expériences que Ton peut faire sur Tétat des vaso-moteurs
main ne doivent pas être généralisées trop vite : il n'est pas
in que la circulation du reste du corps et surtout du cer-
présente les mêmes modifications. J'ai pu appliquer dans
cas le plétismographe de MM. Hallion et Comte pendant les
isses rendues évidemment plus modérées par Texpérience.
un cas le tracé de la circulation capillaire était identique
ui que j'avais pris pendant l'état normal. Dans l'autre le
des pulsations était fort réduit tandis qu'il était assez fort à
normal : cela indiquerait un certain degré de constriction
ilaire. MM. Yaschide et Marchand dans leurs études sur un
ophobe^ constatent deux formes du pouls radial et du pouls
laire suivant que l'émotion et l'angoisse sont faibles ou devien-
plus intenses, « à la première correspond un pouls rapide,
Lin dicrotisme accentué et un sommet pointu et à la seconde,
)uls lent, avec une pulsation rapetissante et un dicrotisme
ement atténué. Le pouls capillaire ne présente aucun dicro-
net; sous l'influence d'une émotion de la première catégo-
l est rapide et la ligne graphique devient moins ondulée.
e de rougir provoque une légère vaso-dilatation, tandis
a présence d'une personne étrangère est accompagnée d'une
constriction avec effacement considérable de la pulsation, le
ibol, Psychologie des sentiments, 477-
aschide et Marchand, op. cit., les tracés qui ne sont pas publiés dans ]*ar-
einçais se trouvent dans Fédition italienne, Biv. sper. d. freniatria, 1900.
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES DÏFKtJSES. — LES ANGOISSES 22T
Les troubles physiologiques les plus visibles et les incontes-
tables sont toujours les troubles des mouvements respiratoires.
Tous les malades qui ont des angoisses se plaignent de ne pas
respirer, d'étouffer ; Lkb... se plaint d'avoir des resserrements à
la poitrine, des gènes de la respiration; « il me semble, dit
Bt... (44), que je m'arrête de respirer ». « Je sentais que
j'étouffais,* dit sans cesse Fy..., je sentais que rien ne remuait
dans ma poitrine et il me semblait que les autres personnes ne
devaient pas respirer non plus ; alors ce devait être la fin du
monde, tout le monde mourait étouffé, * et comme mes étouffe-
ments augmentaient je me suis traînée chez la concierge pour lui
demander si elle étouffait aussi ».
Ces troubles respiratoires ne sont pas purement subjectifs ; on
peut facilement les constater. MM. Yaschide et Marchand, dans
le travail précédemment cité observent que la seule idée de rou-
gir provoque chez leur malade une accélération de la respiration
avec augmentation de l'amplitude, et que l'angoisse plus intense
amène un ralentissement avec irrégularités et fausses respira-
tions en saccades".
I. Vascbide et Marchand, op. cit., p. ao^.
a. Hartenberg, Les timides et la timidité, p. 37.
3. Vaschide et Marchand, op. cit , p. ao3.
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y^
pouls se ralentissant. Dans les deux cas, le sujet rougit et pour-
tant on constate tantôt une vaso-dilatation, il est vrai, légère,
tantôt une vaso-constriction, ce qui nous fait penser qu'il est
prématuré d'admettre l'idée de vaso-dilatation comme synonyme . ',"$
de la rougeur* ».
Des troubles de la sécrétion sudorale s'ajoutent à ces modifi-
cations vaso-motrices, beaucoup de ces malades sont couverts de
sueur. Ces sueurs sont naturelles chez Claire, car elle se livre à une
gymnastique effrénée, mais d'autres comme Al..., Dv..., UI...,
Lkb. ., etc., ont la figure et les mains couvertes de sueur quoiqu'ils
gardent l'immobilité, comme la peau se refroidit par vaso-constric-
tion en même temps que la sueur s'écoule, celle-ci parait fréquem-
ment froide'. Un malade curieux Rul..., homme de 4o ans, qui ne
peut rester immobile sur une chaise et que nous avons présenté
comme un cas d'akathisie, a le front couvert de grosses gouttes de ig
sueur si on le force à rester assis plus de quelques minutes. '-û
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES DIFFUSES. — LES ANGOISSES 229
mêmes phénomènes plus accentués; il y a 25 respirations par mi-
nute et elles sont beaucoup plus irrégulières ; la respiration
abdominale est à peu près supprimée et remplacée par une tré-
mulation désordonnée.
FiG. 'i. — Uespiraliun angoissée de Ul... quand elle essajfc de regarder quelqu'un dans les
yeux. 20 respiraUons par minule.
Dans la figure 5 la polypnée de Lkb... est tout à fait énorme,
88 respirations par minute, avec de grandes irrégularités. Un
autre type de respiration dans Tangoisse est celui que nous
FiG. 5. — Respiration aogoi»»ce de Lkb... 88 respirations par minute.
voyons, dans la figure 6 prise sur Sy... ; il n'y a pas de polypnée,
il y a au contraire diminution du nombre des respirations, lo à
peine par minute. Mais la respiration se fait par soupirs brusques,
et profonds. Chaque inspiration est une sorte de mouvement
convulsif surtout du diaphragme. Même quand la malade est un
peu calmée (figure 7) elle conserve quelque chose de cette respira-
tion brusque. Ces deux troubles principaux, la polypnée et les
spasmes inspiratoires, se combinent le plus souvent et la figure 8
prise sur Rib... (68) doit présenter le trouble le plus commun: la
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SIO LES AGITATIONS FORCÉES
S,
e
S
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES DIFFUSES. — LES ANGOISSES 231
respiration très irrégulière surtout au diaphragme est entre-
coupée de grands soupirs convulsifs.
FiG. 7. — Respiration de Sy... (]uaDd Tangoisse diminue. 18 respirations par minute.
Je n*ai pu qu'une seule fois mesurer au spiromètre de Verdin
la quantité d'air absorbé et je l'ai trouvée malgré la polypnée
très inférieure à la normale; je n'ai pu, comme je l'avais fait
pour les hystériques, faire l'analyse des gaz de la respiration. Il
est probable que l'on verrait là d'autres troubles qui s'ajouteraient
aux précédents.
FiG. 8. — Respiration angoissée de Rib... a5 respirations par minute, soupirs et polypnée,
irrégularité complète de la respiration abdominale.-
Tels sont sommairement résumés les principaux troubles phy-
siologiques que Ton observe dans les angoisses.
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ES AGITATIONS FOf
logiques de Vang
>i8se des troubles
st même probaL
es doivent être s
'observer et surt
ureuses on poui
ues, vaso-motri(
L» CCS altérations
(Ile est uniqucnie
cations organiqu
'ves à faire,
'a reprise h prop<
noment il suffit
ore et souvent b
la tète et de gra
remarquait just(
llectuelle, c'est i
iiquc' », sans ail
[ue l'angoisse n'e
cérébrale et inte
elte seconde pa
Hit même subsist*
qui peut se tro
itolie et qui n'a
qui est propre a
30up d'importanc
k^ent tous des s
s la tête et que
Rucoup sur certî]
ment d'ordre mci
?s dans ces momi
ir ma raison. » Ih
lit la tête (Dob...
tous devenir foi
lient, à la fois un<
B m'a saisie» (Fy
Jcs l'obsession. Arc/itt
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LES AGITATIONS ÉMOTIONNELLES DIFFUSES.
drôles tout d'un coup, j'ai ie sentiment fn
folle et c'est alors que j'ai peur. J'ai envie d
je deviens folle et idiote » (Sy...).
Un autre sentiment très bien noté par '
mourir «Je perds non seulement la raison
me semble que je meurs, heureusement que
ont aussi le sentiment de ne plus percevoi
« Vous ne pouvez pas comprendre le nuag
sans cesse Jean, qui vous tombe sur les yeux
ment-là. » « Ce qui me donne Tanxiélé, dit
le sentiment de ne plus comprendre où je
j'ai comme un froid et un engourdissement
Enfin ils ont le sentiment de perdre leu
comme des automates, de ne plus pouvoir
actes et c'est ce qui leur donne de telles
sottises. « Quel moment, écrit Dob..., no
plus une parcelle de vglonté, je suis comme
les flots et ma tête se perd parce que je sei
du tout maîtresse de moi. »
Ces sentiments me paraissent de la pli
dans l'angoisse, ils soulèvent un problème c
trompe, n'a encore été bien entrevu que pa
blême des troubles psychologiques qui se m
crise et qui existent peut-être perpétua
moindre chez les scrupuleux.
Il faut analyser ces altérations des fonc
avant de chercher à interpréter le mécanisi
des processus irrésistibles. Il me semble
l'étude des troubles psychologiques penda
mentale de celles des troubles psychologiqu
moins constamment chez les obsédés, les
exagérations des autres. Aussi les étudieron
sous le nom de stigmates psychologiques
dans le chapitre suivant.
Pour le moment, contentons nous de rési
les principales formes des agitations émoti
d'être étudiées.
I. Séglas, Leçons cliniques sur les maladies mentales e
p. ii8.
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ATIONS FORCÉES
RCÉBS ÉMOTIONNELLES
de la poitrine,
des seins,
de la peau,
j de la tète,
îlgies. . . / des dents, de la langue,
I des membres,
des organes génitaux,
de la vessie, de l'urètre,
de Tanus, etc.
des mouvements des bras,
de récriture,
de la marche,
I de Talimentation,
1 de la déglutition,
«phobies ) de la digestion,
fonctions. . \ de la défécation,
I de la respiration,
' de la parole,
de Todorat,
de l'ouïe,
de la vue, etc.
des objets dangereux,
des objets sales,
des objets de valeur,
des hommes ou des femmes,
des animaux,
des instruments professionnels, etc.
agoraphobie.
phobie des endroits élevés,
claustrophobie, etc.
ércutophobie,
dysmorphophobie,
phobie des poils, des traits de la
Bgure, des mouvements du
visage ou des membres.
phobies des domestiques,
— du mariage, etc.
des idées religieuses,
des idées morales,
de l'idée de mort,
de l'idée de maladie, etc.
i digestives,
[iques.. . | circulatoires,
[ respiratoires.
situations
iiysiques
situations
iociales
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UNITÉ CLINIQUE DES AGITATIONS FORCÉES
QUATRIÈME SECTION
CARACTÈRES GENERAUX DBS AGITATIONS FORCÉES
Cette longue analyse de toutes sortes d'opérations forcées
envahissent l'esprit des malades, avait pour but non seulem
de décrire leurs très nombreuses variétés mais encore d'étal
entre elles quelque ordre en les réunissant par classes, en
ramenant à quelques types principaux. Nous sommes ainsi [
venus à constater trois classes ou trois types principaux de
phénomènes :
1^* Des opérations intellectuelles que nous avons réur
sous le titre de manies mentales et de ruminations mentales;
1^ Des mouvements irrésistibles que nous avons réunis soui
nom de tics et de crises d'agitation ;
3° Des angoisses viscérales déterminées par des troubles or
niques surtout de la circulation et de la respiration.
Malgré ces distinctions il est nécessaire de rechercher les car
tcres communs appartenant à tous ces groupes.
i. — Unité clinique des agitations forcées.
En général l'enseignement clinique jusqu'à ces demie
années s'est montré disposé à séparer ces trois groupes de syr
tomes et à les considérer comme autant de maladies distinci
Le groupe des mouvements forcés constituait la maladie des
que l'on plaçait à part, les ruminations mentales formaient la/
du doute et les phénomènes émotionnels se rangeaient sous le ti
de du délire contact ou de phobies.
Les premiers auteurs qui ont décrit les obsessions, même qui
ils ne cédaient pas à la tentation d'ériger chaque manie en m;
die indépendante étaient toujours disposés h distinguer formel
ment ces divers groupes de symptômes. Griesinger, en i8
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UNITÉ CLINIQUE 1
nions analogues. M. Magnan
nom de « délire des dégénér
Les distinctions complètes
ces trois groupes de symptôn
justifiées en clinique. Un ind
qui cligne des yeux, tourne I
physionomie bien spéciale qi
troublés par un autre group
mouvements il ne nous par
le gênent beaucoup moins
loppés que ses tics. De mon
ruminations abstraites ne re
angoisses.
Il est certain par exemple
plètement Lise et Dob..., l'u
ne manifeste aucun trouble,
agitations et ses souffrances
borne à d'interminables rur
femme agitée, pleurant et cr
Heu de la rue et qui court c
elle : Taspect clinique est év
remarquer aussi un fait qui
Legrand du Saulle et que cet
des phénomènes semble jusq
de Tautre. Plus les malades
ments d'agitation et même (
agités physiquement, moins
donc juste de distinguer ces
nous avons fait en répartissar
tinctes : la prédominance de
trois variétés de la maladie.
Il est impossible d'aller pi
ruminations, les tics et les an
les malades passent très sou
nombre suivent la marche ii
vont du doute aux phobies: Ch
I . Legrand du Saulle, Folie du doi
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LES AGITATIONS FORCÉES
S crises d'agitation, ses terreurs devant les églises,
les bouteilles, Ul... a eu des scrupules, des rurai-
[)ien et le mal avant d'être une agoraphobe. On
aussi bien énumérer des malades qui ont suivi
: De... avait des phobies génitales puis elle s'est
»ger sur la façon dont elle était faite, sur l'amour^
... a eu longtemps la phobie des couteaux, des
s elle a commencé un délire d'interrogation sur la
hommes sont faits, sur la nature du monde. Un
ont commencé par avoir des tics puis ont évolué
et les phobies, Nu... (112), guérie de ses tics par
sévère, commence les manies d'interrogation ; la
) se rencontre également. Ces évolutions diverses
au point de vue du pronostic, il suffit de remar-
is existent toutes.
er en second lieu que ces divers phénomènes se
uns les autres avec la plus grande facilité, soit
lu cours de la maladie, soit artificiellement quand,
itement, on cherche à supprimer une de ces agi-
es auteurs ont remarqué que la résistance à la
amène l'angoisse. Si le malade s'efforce de ne pas
pas recommencer, de ne pas compenser, de ne pas
suffocations et des palpitations cardiaques : au
lalmesion le laisse donner libre cours à ses be-
ition. Jean a donné la main à sa mère, il a l'idée
m touchant la main d'un homme, s'il cède et s'il
la main d'un homme, il est sans doute mécon-
fait une absurdité, mais il ne souffre pas. Si ce
e soir quand il est seul avec sa mère et si par
le peut pas satisfaire sa manie, il a des angoisses
a nuit et une grande agitation motrice. Si Pn...
ia phrase : a Allons diner, etc. » il est angoissé et
mieux « l'entendre dire ses bêtises plutôt que de
îT )>. Dans bien des cas, les tics, les agitations
lasturbations mêmes viennent à la place de rumi-
n veut supprimer et inversement,
lut pas oublier les sujets comme Jean qui sem-
presque tout le temps, des tics, des ruminations et
) toute espèce. Chez les malades sérieusement
uve souvent ces divers symptômes qui évoluent
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LES CRISES D»AGITATION FORGÉE 239
côte à côte et il est facile de remarquer que dans les études pré-
cédentes les mêmes malades sont cités à propos des diverses agi-
tations forcées.
Je ne crois donc pas que, au point de vue clinique, on puisse
admettre une séparation complète entre ces divers groupes de
symptômes. Leur union est encore vérifiée par Tidentité profonde
des caractères psychologiques que Ton observe dans les uns et
dans les autres.
2. — Les crises d'agitation forcée.
Après cette longue analyse il faut essayer de dégager les
caractères psychologiques qui se retrouvent d'une manière géné-
rale dans ces ruminations, dans ces agitations motrices et dans
ces angoisses. Je ne recherche pas encore leur interprétation, je
voudrais seulement ramener à quelques faits simples cette diver-
sité énorme de manifestations dans laquelle on sent tant de con-
fusion.
i. — Les périodes de crise.
Ces singuliers phénomènes moraux ne semblent pas au premier
abord, au moins chez la plupart des malades, être continuels, ils
se présentent par crises plus ou moins fréquentes et plus ou
moins longues. C'est là un caractère essentiel qu'il faut placer
au premier rang.
Ce caractère est incontestable pour les agitations et les phobies
avec angoisses viscérales, il est bien évident que Nadia ne bouscule
pas les meubles toute la journée et que Claire ne fait pas conti-
nuellement des efforts et des contorsions ; il y a des périodes
d^agitations et des périodes de repos au moins relatif. Quand
nous avons pris le graphique de la respiration de Sy..., nous
avons mis en opposition sa. respiration pendant la période de
suffocation et sa respiration pendant la période de calme. Pour
ces deux catégories de phénomènes les crises sont donc bien
marquées.
Ce caractère peut sembler un peu moins net quand il s'agit des
ruminations mentales. Chez beaucoup de sujets les phénomènes se
prolongent d'une manière à peu près indéfinie : c'est le cas d'ail-
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LES AGITATIONS FORCÉES
s de la plupart des grands malades. Lise prétend qu'elle ne
plus jamais de la rumination qui accompagne perpétuelle-
t toutes les actions de sa vie. A côté de l'action réelle, par
aple, pendant qu'elle fait travailler ses enfants, ou même à
de la pensée réelle, pendant qu'elle cherche à lire et à com-
idre un livre, il y a toujours un énorme travail imaginaire qui
e sur des scrupules, des hésitations, des pactes, des préoccu-
Dns de la vie future, des réponses, des formules de conjuration
me 4» 3, 2, et cela ne cesse à peu près jamais. Dans les périodes
onne santé relative la rumination s'éloigne et voilà tout ; elle
ît plus lointaine «cela devient implicite, comme disait Jean».
» la malade a toujours la conscience vague que ce travail
inue à se faire dans sa tète: « même quand je vais bien, dit
lie, il y a toujours dans ma tête un petit ronchonnement. »
aie il n'en est ainsi que chez de grands malades un peu
ptionnels. Beaucoup de scrupuleux, surtout au début de la
idie n'ont que des ruminations courtes, quelquefois d'une
ine de minutes à peine. Dans la plupart des cas, chez Lod...,
la, Zei..., Zo..., par exemple, les ruminations se prolongent
e manière grave pendant une heure ou deux, puis s'apaisent
ou moins complètement. \Vo... sent très bien qu'elle a des
;s de calcul ou de perfectionnement de ses prières ; elle
même reculer une crise, la remettre à plus tard et la
endre pour la liquider.
ème chez les sujets qui semblent avoir la rumination conti-
le, il y a visiblement des exacerbations momentanées qui les
;nt à rester immobiles, la tête tombant sur leurs genoux,
des diminutions pendant lesquelles le « petit ronchonne-
t » ne les empêche pas de vaquer à peu près à leurs occu-
)ns. 11 semble que chez eux les crises se mêlent l'une avec
re, que la première n'a pas le temps de se terminer complè-
int avant que le deuxième ne commence. Les tics eux-mêmes
[)nt continuels qu'en apparence. Non seulement ils disparais-
pendant le sommeil, mais pendant de longues périodes de
Lirnée, surtout quand le sujet est seul et qu'on ne lui demande
, ils existent à peine.
1 un mot aucune de ces agitations forcées ne constitue un
permanent stable du sujet, elles se développent par crises en
ort avec certaines occasions.
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LES CRISES D'AGITATION FORCÉE
2. — Point de départ des crises.
Mais quelles sont ces occasions qui servent de point de de
à la crise : on ne saurait trop y insister, car c'est là un des pc
essentiels qu'il est nécessaire de bien constater avant de cher
à rinterpréter. Je ne cherche pas en ce moment les condil
physiques ou morales qui déterminent le début de la maladi
le début d'une période d^aggravation pendant laquelle les c
sont plus fréquentes, je cherche seulement les faits qui
l'occasion à propos de laquelle paraissent se développer les Ci
d'agitation forcée.
i^ Dans un premier groupe de cas la réponse est parfaitei
simple. Ces crises commencent toujours à l'occasion d'une a*
volontaire, 11 suffit de passer en revue tous les exemples que
cités pour voir que dans un grand nombre c'est le début
acte, c'est le désir d'accomplir un acte qui amène les a,
tions et les angoisses. La crise d'agitation de Nadia dé
quand elle essaye de me jouer un morceau de piano, les c
d'efforts de Claire se développent quand elle veut faire
prières, se mettre à table ou simplement aller aux cabinets,
un groupe de phobies, celles que j'ai appelées phobies des ob
ne sont en somme que des phobies d'actes. Je crois que la
mière désignation de ces phénomènes sous le nom de « délit
contact )) a été tout a fait fâcheuse et qu'elle a entraîné lesol
vateurs dans une voie fausse. Ce mot semble indiquer que le
tact et l'objet sont ici importants et on a imaginé autac
phobies que d'objets. L'objet n'est ici a mon avis qu'une occai
ainsi que le contact, parce que l'on n'agit pas sans toucher l
objets, mais l'essentiel c'est l'acte. La malade de Legran
Saulle qui a la phobie des objets qui servent à écrire a en ré
sa crise de phobie quand elle veut écrire. Mrc... a Tangi
quand il fabrique ou veut fabriquer des couteaux pointus, G
quand elle veut ranger des vêtements, Pr... quand elle veu
purger. Jean a des tics, ou des ruminations ou des angoisses qi
il veut voyager, envoyer une lettre, se moucher, se raser, se h
traverser une place.
11 y a certaines catégories d'actes qui donnent souvent i
sance à des phobies ce sont les actes professionnels. On voit
Lch...(78), télégraphiste, a peur du télégraphe, du bureai
LES OBSESSIONS. 1. — l6
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LÈS AGITATIONS FORCÉES
ire que la phobie se développe parce qu'il voit,
appareil télégraphique? Non, c'est quand il veut
létier : ce qui le prouve c'est qu'on a beau modi-
s, on ne le guérit pas. Comme le médecin avait
lie du contact » on ne lui fit plus toucher l'ap-
lique, on le fit écrire, recopier des bandes, il
es bandes ; on voulut l'employer à tenir des re-
a phobie des registres, du bureau de poste, etc.
essionnel qui est le point de départ essentiel,
pe important de phobies, que j'ai désignées sous
de phobies du corps, donne lieu a des remar-
ce sont des actes du corps, des fonctions corporel-
înt l'angoisse. Remuer un membre, remuer le petit
surtout dans beaucoup de basophobies et même
manger, déglutir comme on l'a vu chez tous les
déglutition, digérer, uriner, exercer les fonctions
la selle, etc., voilà les fonctions et les actes qui
lentiel. Quand il s'agit des dysesthésies des sens,
lirer, l'acte d'entendre, l'acte de voir qui est le
de la crise.
yme pour les tics, le sourire obsédant survient
trer dans un salon, parler a une personne peu
un mot un acte diflicile. Les tics avec coprolalie
hez Qi... que si elle doit se lever de sa chaise et
n; c'est quand elle vient à l'hôpital me demander
che qu'elle est forcée de crier « Salaud, tu me
tics deLod...,qui fait claquer les doigts, qui
.n pensant à Dieu commencent quand elle doit
no. Un grand nombre de tiqueurs ne font leurs ~
Ul... qu'au moment où ils doivent s'adresser à
[ï commencé ses tics quand elle devait « voir des
cher une place... », elle les a maintenant quand
[ans un omnibus.
la même remarque ii propos des ruminations, ce
li les provoquent le plus souvent. On vient de
a de Ger... commencer quand elle veut descendre
illon pour le diner. Jean commence à ruminer
fiter en omnibus, quand il veut s'asseoir à table,
etc.. Lise, quand elle veut écrire une lettre,
I ses enfants. Fi..., un notaire de ^8 ans, quand
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LES CRISES D'AGIÎATION FORCÉE 2ii3
il doit signer un acte, hésite et se met à ruminer. C^est le cas le
plus général et le plus simple. On ne saurait assez insister sur
son importance, car il nous fait prévoir qu'il s'agit d'une maladie
de la volonté et nous y reviendrons quand nous discuterons les
phénomènes d'aboulie si importants dans cette maladie.
Pour avoir cet effet, pour devenir ainsi le point de départ de
la crise, il faut que l'acte soit volontaire ; une action involontaire,
automatique, exécutée par distraction n'a aucunement cet effet.
Cela est bien naturel, car autrement les malades ne pourraient
jamais bouger; ils remuent cependant et ils accomplissent une
foule d'actions qui n'amènent aucun trouble moral parce qu'elles
ne les préoccupent pas. Legrand du Saulle remarquait déjà que
« si le malade est très préoccupé et s'il a l'esprit tendu il traverse
la place sans ressentir quoi que ce soit^ ». Lise se met à table et
mange avec une parfaite indifférence, elle s'habille et fait des
visites sans aucun trouble; Bu... travaille à son métier habituel
sans avoir de phobies ; Jean lui-même peut avoir l'esprit tran-
quille au milieu des actions les plus graves pour lui s'il est
distrait ; quand il va dîner en ville, il donne la main à des
dames sans faire de ruminations. Le fait essentiel c'est donc
que l'action soit volontaire, c'est-à-dire qu'elle soit nouvelle
dans une certaine mesure et que le sujet essaye de la ratta-
cher à toute sa personnalité.
Il ne faut pas oublier qu'il peut s'agir d'actions négatives
aussi bien que de positives : prendre la résolution de ne pas faire
une action, refuser définitivement quelque chose sera l'occasion
de l'angoisse et delà rumination aussi bien que l'effort pour faire
Inaction ou pour accepter la proposition. On se souvient qu'un
grand nombre des ruminations ont commencé à l'occasion de la
pensée d'un acte criminel ou désagréable que le sujet voulait
repousserl Ici encore la même remarque trouve sa place, si c'est
par distraction que le malade s'écarte d'une situation dange-
reuse, il n'y aura pas de rumination. Claire me répète qu'elle ne
peut rien faire pour soigner sa santé, que si elle veut éviter de se
mettre dans un courant d'air, elle va immédiatement discuter
indé6niment; au même moment je remarque qu'elle s'est rassise
et qu'elle refuse de sortir parce qu'elle a vu qu'il pleuvait. C'est
I. Legrand du SauUe, Agoraphobie, p. 63.
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ES AGITATIONS FORCÉES
lire sous sa forme positive ou négative qui
lénomène qui joue un rôle prépondérant
irt de ces crises, c'est V attention. En effet,
s, les ruminations, les angoisses commen-
Ires circonstances quand il s'agit simple-
as d'actes. Je remarque alors que ces idées
lient pour être comprises un certain effort
étaient proposées à Tacceptation ou à la
; pour faire attention et surtout l'effort pour
mme tout à l'heure l'effort pour agir qui
e ce singulier travail mental,
is, Ho..., est forcée de faire ses tics a quand
l'école » elle se secoue, se met les doigts
ongles, frotte son ventre, pense à ses poils
la dictée est difficile ». On peut observer
nombre d'enfants et la maîtresse d'école
à la loi. Elle est très tranquille pendant
cligne des yeux et secoue son épaule quand
a classe et surtout « quand il faut faire la
) qui demande plus d'attention. » Renée a
it lire un livre et le... est « invinciblement
iéfiniment quand il se met à sa table de
devoirs. » Le fait est banal et se vérifie
igoisses peut être désigné sous le nom de
ïs naissent à propos de l'effort d'attention
usser certaines croyances. Essayer de se
la religion, sur Dieu, sur le démon, sur
Hermine les angoisses de Lise et de bien
Qgoisses quand il essaye de faire attention
s idée philosophique quelconque,
jur des idées morales sur le devoir, le men-
tons ces malades anxieux. Mais il n'est pas
e d'idée morale capable, de rappeler leurs
. Une attention quelconque, sur une lettre,
iiine des phobies et des ruminations chez
toute application d'esprit )> qui amène des
Le fait négatif a la même valeur que le
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LES CRISES D'AGITATION FORCÉE 245
fait positif : un effort pour nier une histoire absurde suffit
pour ramener toutes les ruminations de Lise.
Enfin il faut encore ici faire la même remarque que précédem-
ment, il ne s'agit pas d'une idée, d'une croyance quelconque
agissant sur notre conduite presque à notre insu, il s'agit d'une
croyance volontaire et attentive. Cha... ne se pose pas de ques-
tions quand il enseigne la musique. Claire a beau affirmer qu'elle
ne peut croire à rien, il est évident cependant qu'elle est con-
vaincue d'une foule de choses : elle croit qu'il fait jour, que j'ha-
bite à Paris, qu'elle parle français, etc. Toutes ces croyances sont
impliquées dans le simple fait de m'écrire une lettre, mais elle
n'y fait pas attention, et ces croyances ne la troublent pas. C'est
en somme l'acte d'attention amenant Tacceptation ou la négation
qui a une influence tout naturellement analogue à celle de la
volonté.
3* Un autre phénomène peut devenir le point de départ de
certaines ruminations ou de certaines phobies, c'est l'émotion ou
du moins un certain genre d'émotion.
Legrand du Saulle * cite ce fait curieux : « dès qu'il faisait une
tentative de coït, ses pensées surgissaient aussitôt avec la plus
grande intensité et glaçaient toute disposition à la rigidité pé-
nienne. )> Cette observation intéressante est tout à fait banale : je
ne puis, on le comprend, raconter en détail les singulières con-
fessions que m'ont faites un grand nombre de ces malades à pro-
pos de leurs émotions génitales. Mais je puis relever ce fait
principal : l'émotion génitale est très souvent le point de départ
des ruminations, des tics et des angoisses. Les malades ont le
désir, ils se sentent plus ou moins excités, et à ce moment com-
mencent des agitations, des angoisses ou d'interminables rumi-
nations mentales. C'est aussi l'instant où plusieurs d'entre eux
sont saisis par un invincible besoin d'uriner ou d'aller à la-selle
ou commencent leurs tics.
Il en est de même pour la douleur physique ou morale. Lise a
une très singulière manière de ressentir les douleurs de l'accou-
chement. C'est à ce moment que son esprit est envahi au suprême
degré par les manies du serment, des pactes, par des ruminations
interminables et odieuses. Les douleurs morales ont le même
I. Legrand du Saulle, Folie du doute, 16.
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LES AGITATIONS FORGÉES
t. « La joie OU la peine^ dit Mm... ^ me font perdre Téquilibre et
font retomber dans mes rêveries ». a Les situations lugubres,
Jean, me donnent des agitations et des crises de fou-rire. »
ja colère, chez Lise, est aussi le point de départ de rumina-
is et elle redoute même à ce propos le plaisir esthétique,
[uand je jouais du piano, j'y prenais plaisir, je m'y donnais, je
imballais, cela me faisait perdre Téquilibre, me faisait retom-
dans toutes mes pensées c'est pourquoi je me suis mise à
er toujours froidement. » Il est singulier de constater que ce
ail se retrouve mot à mot dans l'observation d'une autre malade
1..., c'est au moment où l'émotion artistique va parvenir à son
nble, va déterminer une jouissance, que se déclanchent ses
urdes raisonnements. De même une petite émotion qui com-
nce détermine chez Cr... les crises d'agitation et les besoins
marcher pendant plusieurs heures. Chez un bien grand
nbre de malades comme chez Renée, Qi..., etc., on détermine
î crise de tics en fermant brusquement une porte, en déter-
lant chez eux le début d'une surprise ou d'une peur,
e crois que tout un groupe de phobies rentrent dans ce cas,
les qui sont déterminées par la perception d'une situation, par
sentiment et dont le type est l'agoraphobie. Les ponts, les
ndes places, les grandes rues font naître chez bien des per-
ines une petite émotion déterminée, en rapport avec le senti-
nt de la grandeur, de l'espace, de l'isolement et c'est cette
ite émotion qui dédanche les grands phénomènes de la rumi-
ion et de l'angoisse. J'ai vu à ce propos un cas d'agoraphobie
n curieux que l'on pourrait appeler l'agoraphobie admi-
ive. Qs... ne peut se promener au Trocadéro, « la vue de
t de maisons l'excite, il lui semble que c'est beau, grandiose,
nnant. C'est au début un sentiment agréable d'admiration,
s cela change. Je suis forcé de me demander comment pour-
3-je faire moi-même pour bâtir tant de maisons, comment les
nmes ont-ils pu amener tant de pierres ? puis mes genoux
mbient, ma poitrine se serre, mon cœur bat, j'étouffe et je me
ve pour rentrer. » D'autres phobies débutent quand le malade
en public devant des hommes, parce que alors se développe
notion de la timidité qui est suivie par l'angoisse, chez Ul...,
b..., Meu..., par exemple. Enfin dans certains cas la situation
t naturellement faire naître chez tout homme de la peur et
5t cette peur qui est suivie soit de rumination, soit d'angoisse.
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LES CRISES D'AGITATION FORCÉE 247
Il y a là tout un rôle curieux de Témotlon qui ne nous parait
guère connu et sur lequel il faudra revenir ; pour le moment
nous signalons seulement ce fait que les crises d'agitation
forcée débutent à propos des émotions, comme à propos des
actes et des attentions.
4** Enfin je signale avec plus d'hésitation et h titre de curiosité
une autre occasion de ces crises que j'ai observée plusieurs fois
d'une manière incomplète et une seule fois d'une manière tout
à fait nette. Du... (^g), femme de 3o ans, qui a toujours été
une scrupuleuse, a eu des ci^ises d'agitation et d'angoisse à propos
de plusieurs des causes précédentes, surtout a propos des actes.
Voici maintenant à quel propos ces mêmes crises se déve-
loppent. Elle se couche pour s'endormir et commence à s'as-
soupir : tant que l'assoupissement est léger, tout va bien, elle reste
tranquille dans son lit. Mais le sommeil va devenir profond ; à ce
moment elle se réveille subitement avec une énorme angoisse,
elle se sent étouffer et ne peut s'empêcher de crier. La malade
ne perd aucunement connaissance, elle voudrait ne pas crier pour
oe pas réveiller ses compagnes, mais sa résistance est inutile et
ne provoque qu'une lutte plus douloureuse.
Il faut qu'elle hurle et se contorsionne de mille manières, c'est à
la fois une crise d'angoisse et une crise d'agitation motrice comme
celles de Nadia. Au bout de cinq à dix minutes tout se calme et
la malade essaye de se rendormir, car elle en éprouve un grand
besoin ; de nouveau elle reste calme dans l'assoupissement léger
puis dès que le sommeil devient un peu plus profond la crise
recommence. 11 n'y a pas ici d'idée fixe relative au sommeil
qui explique ce réveil par un rêve comme dans l'observation de
Zy...* et il n'est pas question d'hystérie. C'est un phénomène
analogue à toutes les crises précédentes, il se développe seu-
lement dans des circonstances singulières à propos du début du
sommeil profond. Ce fait se rapproche de certaines observations
déjà signalées dans lesquelles l'agitation forcée commençait à
propos d*un début d'une fonction physiologique, à propos de la
déglutition ou de la digestion par exemple.
En résumé je constate que ces crises d'agitations forcées, qu'il
s'agisse de tics, d'excitations, de ruminations ou d'angoisses,
I. ^t'êvroses et Idées fixes, I, p. 355.
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LES AGITATIONS FORCÉES
presque toujours à propos de Tun ou de Tautre de
Lénomènes principaux, l'acte volontaire, l'attention,
flFort pour s'endormir profondément. Nous pourrons
ésigner ces phénomènes provocateurs sous le nom
es primairesy tandis que les agitations forcées qui
n suite seront considérés comme des phénomènes
ibstitution des phénomènes secondaires
aux primaires.
is les plus nets, cet acte, cette croyance, cette émo-
^tituent le phénomène primaire, loin de parvenir à
isparaissent complètement, c'est là à mon avis le fait
rumination de l'agitation et de l'angoisse. On consi-
aire ces agitations comme des phénomènes positifs
3ar la présence d'un grand nombre d'idées ou d'émo-
'ahissent l'esprit, mais il ne faut pas oublier que ces
t aussi et avant tout des phénomènes négatifs, carac-
i suppression d'un acte, d'une croyance, d'une émo-
aient dû se produire. Nous avons vu Ger... se lever
nain pour aller chercher du bouillon chez la fruitière;
s de remarquer qu'elle a eu pendant deux heures sur
belles ruminations à propos du maigre du vendredi ;
3 oublier ce fait au moins aussi important c'est que le
pas été cherché et que la soupe n'a pas été faite, 11 en
pour les croyances : un problème est posé à l'attention,
ti mentale commence qui devrait aboutir à la croyance
ie l'idée, opération qui n'est faite en réalité que si le
i l'une ou à l'autre. Quand la rumination survient
sieurs heures ou quand les angoisses surviennent, le
re, la crise terminée, dans le même état qu'auparavant
pas s'il croit ou s'il ne croît pas, eu un mot, que
l'a pas été faite.
important de constater des faits analogues à propos
ij le fait que je me borne à signaler ici se confirmera
plus en plus. L'excitation génitale est le point de
lobies ou de ruminations, mais il faut encore ajouter
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SUBSTITUTION DES PHÉNOMÈNES SECONDAIRES AUX PRIMAIRES 249
que ces phénomènes secondaires qui s*y ajoutent ne semblent
pas du tout favorables au développement de l'excitation. Bien au
contraire le plus souvent ils amènent Tarrét complet de toute
Témotion. Quand Lise a d'épouvantables ruminations au moment
des douleurs de Taccouchement, elle a sans doute des souffrances
morales, mais elle n'a plus les souffrances physiques qu'elle de-
vrait avoir. Elle ne gagne pas au change, car ses angoisses morales
sont horribles ; mais je fais remarquer que des rêveries sur la
damnation des enfants, sur l'éternité des peines de l'enfer, des
interrogations sur le problème de savoir si elle est folle, si elle
va quitter les siens pour aller demeurer toujours dans une mai-
son de fous, que tout cela est très pénible sans doute, mais
que ce n'est pas la douleur qu'une femme doit ressentir en
accouchant.
Le plaisir de jouer du piano disparaît aussi comme l'admiration
du paysage, quand des agitations surviennent a propos de ces
émotions. Une question bien plus délicate se pose à propos du
sentiment de la timidité et du sentiment de la peur. Ces senti-
ments sont très souvent le début des phénomènes forcés et plu-
sieurs de ceux-ci, en particulier certaines angoisses, leur ressem-
blent beaucoup. C'est pourquoi on a appelé ces phénomènes des
phobies et on les a souvent considérés comme le développement,
l'exagération de la peur ou de l'intimidation. Je ne crois pas que
ce soit tout à fait juste au moins dans tous les cas. Chez beaucoup
de malades la peur précise, déterminée, qu'ils auraient dans cette
circonstance s'ils se portaient bien, disparaît, elle est remplacée
par de l'agitation motrice ou de la rumination qui n'est pas de la
peur, et quand la phobie survient elle prend des caractères spé-
ciaux qui la distinguent de la peur proprement dite, a Je vois
des squelettes dans le musée, cela m'aurait donné autrefois une
vraie peur, maintenant j'ai des angoisses vagues avec le senti-
ment de devenir folle, ce n'est pas du tout la même chose. » La
peur semble avoir perdu sa précision, son rapport avec un
objet déterminé: elle est devenue plus vague et plus élémentaire.
Dans les cas les plus nets l'on observe ainsi la suppression
totale des phénomènes primaires, c'est-à-dire de l'acte, de l'at-
tention, de l'émotion qui était le point de départ de la crise. Dans
les cas moins nets ces phénomènes primaires ont simplement
diminué et présentent des altérations que nous aurons à étudier
dans le chapitre suivant.
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LES AGITATIONS FORCÉES
e ces phénomènes primaires qui, comme nous
s'accomplissent pas ou s'accomplissent d'une
satisfait pas la conscience du malade et à la place
nés se développent brusquement dans Tesprit
iatégorie d'opérations que Ton peut considérer
res. Tantôt ce sont des mouvements variés, des
des crises d'agitation, tantôt ce sont des troubles
ilpitations, des suffocations, des angoisses, tantôt
ations mentales, des ruminations,
s manies de perfectionnement on voit que le
ajouter quelque chose au premier acte, dans les
ation il veut effacer le premier acte par quelque
ans les manies d'oscillation il ne peut pas rester
)remier phénomène et il passe incessamment à
^n un mot le caractère essentiel de toutes ces ma-
occasion du premier phénomène insuffisant ou
de ce premier phénomène l'esprit place autre
is pas en rester là, disent-ils tous, il me semble
ais h ce premier point il arriverait des choses
et tous en somme obéissent à ce besoin en sub-
id travail au premier.
:;ond travail qui constitue essentiellement la rumi-
n ou l'angoisse. Au premier abord, ces phéno-
'es semblent de même nature que les primaires ;
des actes à faire, des croyances à préciser, des
intir. Cependant les phénomènes sont loin d'être
t sont pas des actes réels, c'est-à-dire des opéra-
e qui apportent un changement plus ou moins
ou moins durable dans le monde extérieur. Les
e le malade exécute sont en général insigni-
ies gesticulations, des secousses des bras, de la
)les prononcées à mi-voix : « non, non, té, té, té,
s mouvements semblent plus importants dans les
eux de Claire ou dans les agitations motrices
) Nadia. Mais ces crises ont des caractères bien
treignent leur importance. Les malades n'accom-
cte vraiment utile ou vraiment répréhensible : ils
t, menacent quelquefois leurs proches, mais en
les que nous étudions ici ne font jamais de mal à
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SUBSTITUTION DES PHÉNOMÈNES SECONDAIRES AUX PRIMAIRES 251
personne. Quand ils s'en prennent aux objets et menacent de
tout briser il y a énormément d'exagération dans leur attitude.
Ils ne cassent que des objets in signi (liants auxquels ils ne tien-
nent pas. Si un jour Nadia a renversé un encrier, je crois que
c'est tout à fait par hasard et qu'elle a été la première très dupe
de ce résultat de ses agitations ; le plus souvent ces actes absurdes
disparaissent dès qu'ils pourraient prendre quelque importance.
I^es malades s'y laissent aller, par exemple quand ils sont seuls
ou devant des personnes qui les connaissent assez pour n'avoir
plus rien à apprendre en les voyant, mais dès qu'entrent des
étrangers pour lesquels ces grimaces pourraient être révéla-
trices, ils se reprennent et tout s'arrête au moins momentanément.
Claire est remarquable à ce point de vue et ne consent « à faire
la folle » que devant sa mère, sa domestique ou son médecin.
Enfin, on a déjà vu, en étudiant les tics, que ce sont des mou-
vements simples, maladroits, souvent symétriques, comme dans
l'enfance, en un mot des mouvements d'ordre très inférieur.
Dans d'autres cas ces phénomènes semblent plus complexes
puisqu'il y a de nombreuses pensées. Ce que vaut cette pensée
est bien précisé par ce mot de rumination mentale, c'est une opé-
ration qui reste simplement mentale, intellectuelle et qui n'arrive
pas à devenir réelle sous forme de croyance ou d'action. Ce sont
des images légères, incomplètes, des mots surtout exprimant
des idées vagues qui surgissent à la place de l'action concrète
que le sujet n'exécute pas. Le sujet s'embrouille au milieu d'in-
nombrables idées abstraites qui peuvent être rattachées d'une
manière quelconque à la pensée primitive. « Il me semble, dit
Gisèle, que j'approfondis l'idée d'une action très simple que je ne
fais pas; j'en vois tous les détails même des détails très lointains
qui s'y rattachent à peine ; je me fais l'effet d'être entrée dans
l'idée, elle me tient, m'enserre de tous côtés et je ne puis plus
en sortir. C'est comme si j'avais en moi-même un second moi
détraqué qui voit tout ce que l'on peut penser à propos de la
moindre action. »
Il est trop évident qu'ils n'inventent rien dans leurs rumina-
tions : de ces heures de méditation si profonde il ne sort jamais
un fragment d'idée à peu près intéressante ; il n'en sort pas non
plus une seule croyance. Il est facile de voir que le malade ne
prend pas au sérieux toutes les sottises qu'il radote; ses menaces,
ses idées de culpabilité ou de danger restent pour lui tout à fait
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CITATIONS FORCÉES
met jamais ses actions en rapport avec
manifestent en réalité peu d*intelli-
stte rumination est enfantine et qu'elle
aucoup, au début de ces études, de la
ntre les ruminations d'une personne et
Àse est une femme instruite, qui a lu
/rages philosophiques, les comprend
^ersations montre un esprit assez large,
snt aux questions obstinées des petits
du « comment » et du « pourquoi ».
^es sont remplis par les plus basses
* raisonnements sur le diable et le bon
âges avec le ciel et avec l'enfer dignes
3 nègre. La malade sait fort bien que
I compte que c'est de beaucoup au-
ntal habituel, il en est ainsi chez tous
pensées semblent manifester un retour
la barbarie.
)che aussi du rêve dont elle a le vague,
l'incohérence. Un autre caractère du
ces ruminations c'est la déclamation.
fc déclamateur « une puce me pique, dit
)up d'épée.» De même dans ces rumi-
ragique ; il ne s'agit que de mort, de
fanticide, de pacte avec les démons. 11
entre le fait et l'expression quand on
si je fais une seule fausse note dans
l'âme de ma mère que j'irai en enfer
. » La déclamation qui est un grand
ntales domine dans le délire de persé-
se prend l'aspect d'une cruauté inouïe,
ces ruminations oii tout est grandi
ip plus que le sujet ne le pense en
t l'esprit pendant la rumination repré-
n autre «ige, des idées d'enfance, des
ancienne et inférieure ou d'un milieu
dées analogues au rêve. Ne puis-je pas
sont des idées inférieures à celles que
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CARACTÈRES APPARENTS DES AGITATIONS 253
le sujet devrait normalement avoir dans les circonstances où il se
trouve placé.
Les angoisses paraissent des phénomènes plus importants puis-
qu'elles donnent lieu a de grandes souffrances. Mais on peut remar-
quer que leur importance est plus apparente que réelle : ces grands
mouvements viscéraux, ces palpitations du cœur, ces respira-
tions rapides sont le plus souvent sans aucun danger et amènent
moins de syncopes, moins d'évanouissements, moins de maladies
sérieuses que les émotions réelles et moins bruyantes. On connaît
beaucoup de maladies produites par des émotions, mais il est
bien rare qu'on les observe après des agoraphobies ou des éreu-
tophobies.
Ces émotions pathologiques^ en effet, ne sont pas des émo-
tions précises en rapport avec une situation réelle, ce sont les
émotions les plus simples, les plus élémentaires et les plus
abstraites en quelque sorte. Les angoisses se rapprochent de la
peur qui est la plus élémentaire des émotions, qui existe tout à
fait au début de l'évolution des sentiments. Et même, comme
on Ta vu, l'angoisse n'est pas précisément de la peur, c'est une
émotion encore plus élémentaire que celle de la peur. En réalité
ce sont des convulsions viscérales très désordonnées, comme les
mouvements eux-mêmes dans les agitations motrices. On peut
donc les considérer comme des phénomènes inférieurs au-dessous
des émotions qui devraient réellement se développer à ce mo-
ment.
En un mot, aux phénomènes primaires qui ne sont pas exécutés
ou qui sont exécutés avec un certain trouble se substituent des
phénomènes secondaires qui ont comme caractère essentiel d'être
des phénomènes psychologiques exagérés sans doute, mais élé-
mentaires, inférieurs, sans rapport avec la réalité extérieure et
par conséquent tout à fait inutiles.
4. — Caractères apparents des agitations.
A côté de ces caractères essentiels de la crise se placent certains
caractères apparents qui jouent un grand rôle dans les descrip-
tions classiques des obsessions, la conservation de la conscience
pendant la crise^ Uirrésistibilité de ces agitations et la satisfaction
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4 LES AGITATIONS FORCÉES
nsécuti^e à la fin de la crise. Ces caractères qui sont compris
I général d'une façon très vague nous semblent beaucoup moins
iportnnts que ceux qui viennent d'être étudiés. Il suffit de les
^naler rapidement ici pour montrer qu'ils rentrent en réalité
ns un groupe de faits beaucoup plus vaste, celui des sentiments
rouvés par le sujet pendant les crises et qu'ils nous amènent
une nouvelle étude.
En premier lieu, le caractère insignifiant des opérations secon-
ires est jusqu'à un certain point apprécié par le sujet lui-même
li semble se rendre assez bien compte de l'inutilité et de
bsurdité de telles opérations. C'est là ce qu'on appelle la
nservalion de la conscience pendant la crise.
Faut-il entendre par là que le sujet sait comme nous que ces
[)uvements, ces efforts, ces procédés de perfectionnement, ces
cherches mentales n'ont aucun sens et que ce sont des rêves
lérils ? Evidemment non, car alors il n'aurait aucune maladie;
1 arrivait à la négation nette et définitive sur un point, il aurait
rminé ce premier acte qui est le point de départ de tout le
ste et il n'aurait pas de rumination. En réalité il n'arrive
mais à cette négation, car il nous demande toujours, comme
se le demande à lui-même : Est-ce que je suis maudit à cause
mes serments ? Est-ce que je ne dois pas chercher à faire
[eux ? Est-ce qu'il n'y a pas de danger? Ce qu'on appelle
nscience de la rumination ne doit pas être pris dans le sens
négation de la rumination.
Faut-il entendre par cette conscience de l'obsession que les
actions psychologiques restent intactes pendant celte période?
)us aurons à étudier ce problème en détail dans le chapitre
ivant, mais dès maintenant la réponse est probable. Peut-on
nsidérer comme intact l'état mental d'un sujet qui ne peut
rvenir au terme des actes volontaires, des croyances, des
lotions qu'il commence et qui remplace ces actes par des opé-
tions inutiles et absurdes? Il est bien probable que la con-
ience dans ce sens n'est pas conservée.
La conscience que le malade a de la valeur de ses phénomènes
condaires me semble consister simplement en ce fait, qu'il ne
livre pas complètement à ces opérations, qu'il n'est pas cora-
ètement envahi par l'agitation, par l'interrogation, par l'apr
âsse. L'opération lui semble incomplète et il ne se laisse pas
1er à un véritable délire. Il critique ces opérations, il en est
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CARACTÈRES APPARENTS DES AGITATIONS 255
mécontent comme il était mécontent des opérations primaires :
il applique ses manies du doute à ses ruminations elles-mêmes.
Nous retrouvons ici les mêmes sentiments d'insuffisance qui
existent partout mais qui ici rendent service au malade en Tem-
péchant de délirer complètement.
Un autre caractère présenté presque toujours en second lieu
semble avoir plus d'importance, c'est Yinésistibilité du processus
mental pathologique. Ces trois opérations secondaires : les mou-
vements, les ruminations, les angoisses sont toujours représentées
comme s'imposant au sujet d'une manière irrésistible. Zwangs-
vorstellungen disait Westphal, Zwangsprocessus disait M. Mes-
chede, diathèse d'incoercibilité psychique, disait M. Tanzi \
M. J. Donath de Buda-Pest * avait même proposé pour réunir
tous ces faits le nom bizarre d'anancasmes (ovoy^^^).
Ce caractère est pourtant moins clair qu'on ne se l'imagine.
Veut-on dire par là que ces phénomènes sont déterminés, qu'étant
données certaines circonstances physiologiques et psychologiques
qui en sont les conditions, ils ne peuvent pas ne pas se produire ?
Mais c'est là simplement l'expression de la loi générale du déter-
minisnae à laquelle sont soumis tous les phénomènes sans excep-
tion qu'ils soient pathologiques ou non. Pourquoi ne pas dire
aussi que le syllogisme, la colère, la mélancolie ou la démence
sont des zwangsprocessus ?
Veut-on dire par là que ce sont des opérations qui amènent
toujours régulièrement à leur suite l'exécution d'un acte auquel
pense le sujet ? Si l'on parle d'homicides, de suicides, de vols,
d'actes véritables, c'est-à-dire d'actions qui modifient la réalité
donnée peut-on dire que les obsédés présentent des impulsions
irrésistibles ? En aucune façon : ces malades, qui n'arrivent pas à
exécuter les choses les plus simples, exécutent encore bien moins
les actions complexes et invraisemblables dont ils ont l'idée.
Nous avons vu que les obsessions des scrupuleux n'aboutissent
jamais ni à l'exécution matérielle, ni à la croyance, ni à
l'hallucination ; en ce sens elles ne sont donc aucunement irré-
sistibles.
Veut-on dire que les opérations dont l'exécution est régulière
1. Tanzi, Archivio Ualîano per le malalie nervosCy 1891.
2. J. Donath, Archiv fUr Psychiatrie, 1896.
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PATIONS FORCÉES
érations secondaires et inférieures,
»rt6, ruminations, émotions angois-
1 peu plus juste, car ces processus
(Qet assez fréquemment et régulière-
Lie nous avons indiquées. Est-ce là
it absolue qui mérite à la rumination
qu'on n'a pas l'habitude d'appliquer
ilepsie ? En aucune façon : ces pro-
r les uns dans les autres, si je m'op-
le mon adresse en se promenant à
ellement son travail, mais il a une
n'est pas une recherche mentale,
nt eux-mêmes tout arrêter: M. Bris-
montrer que les tics peuvent être
ar la volonté. Nous l'avons déjà véri-
s phénomènes, Qi..., quia une copro-
al, cesse complètement dans les rues
*es, Claire suspend ses contorsions
rer, Wo..., plongée dans ses rumi-
î, remet la crise à plus tard parce
et qu'il y a du monde ». D'ailleurs
arrêt volontaire, difficile peut-être
on arrive à restreindre ces troubles
t, comme je l'ai remarqué dès le
ne s'exécutent pas automatiquement
iture subconsciente des hystériques.
y participe et qu'il doit même faire
es exécuter. Tout cela constitue-t-il
d'irrésistible a été appliqué à ces
irvant du dehors, mais par le malade
iplement un sentiment que le sujet
kénomènes secondaires. Les malades
\i leur liberté, leur volonté a je n'ai
suis emportée par une force étran-
>, etc. )). Ces phrases sont perpé-
Elles expriment un fait que je crois
mentale et qui joue en particulier
de persécution : la perte du senti-
iment de liberté vrai ou faux, peu
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CARACTÈRES APPARENTS DES AGITATIONS
importe, accompagne chacun de nos actes volonta
perd dans des circonstances pathologiques qu'il serai
tant de pouvoir bien déterminer.
Le sentiment de la perte de la liberté corresponc
choses : d'abord à un sentiment d'incapacité et d'im]
est dû à ce que le phénomène primaire, acte volontai
croyance, émotion supérieure que le sujet désirait,
qu'il avait même commencé ne se produit pas, n'a
terme prévu et qu'il y a une déception, puis à C(
c'est qu'à la place du phénomène espéré s'en prot
qui est inutile, absurde et dans certains cas doulou
sistibilité est donc un sentiment du malade qui n
catégorie de tous ces sentiments de mécontentement
on Ta vu, accompagnent l'arrêt des actes volontaires. ]
plus complètement nous arrivons à cet examen d(
mentales chez le scrupuleux dont nous avons déjà vu
Enfin le troisième caractère que Ton attribue d'or
phénomènes, c'est la satisfaction qu'éprouve le mala
obéi à l'impulsion qui le pousse. Cette formule qu(
toujours me semble comme les précédentes très vagi
discutable.
Le malade n'exécute presque jamais une action h'u
n'est donc point dans l'exécution finale d'une imj
éprouve du contentement. Veut-on dire par là qu'il
d'avoir accompli des tics, des ruminations, d'avoir
angoisses ? H éprouve bien un certain soulagement
quand cette crise pénible est finie, mais il n'est ni
reux d'avoir de nouveau cédé à un besoin qu'il troi
Je n'ai guère vu les malades satisfaits à la fin de le
sont fatigués et honteux d'eux-mêmes. MM. Pitr(
font la même remarque et disent qu'il s'agit plutôt
ment consécutif.
Veut-on dire qu'il y a un état de satisfaction penc
même de l'opération forcée. M. Roubinovitch cite \
malade est heureux de retourner à sa rumination*. C
I. Pitres et Régis, op. cit., 54-
3. Roabinovitch, Etat de satisfaction pendant la durée même â(
linue. Comjrhs des aliénistes français ^ La Rochelle» 1893.
LES OBSESSIONS. }
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258 LES AGITATIONS FORCÉES
plus juste, mais à la condition de faire une distinction indispen-
sable. De ces trois opérations forcées il y en a une qui est parti-
culièrement douloureuse c'est Tangoisse, tandis que l«s deux
autres sont moralement pénibles, mais ne sont pas physiquement
douloureuses. En outre cette opération pénible, Tangoisse, peut,
au moins chez certains malades, remplacer les agitations motrices
ou les ruminations, si celles-ci sont arrêtées par un effort de
volonté. Si le malade supprime ses manies, cesse de tiquer, il
aura de Tangoisse, s'il s'abandonne de nouveau à ses manies
d'expiation, à ses tics, il sera au moins débarrassé de l'angoisse.
Comme le malade a fort peu d'énergie et de courage, il aime
mieux se laisser aller à toutes ses sottises plutôt que de s'expo-
ser à des suffocations pénibles. Cette satisfaction que l'on note
chez le malade qui cède à certaines impulsions me parait être
simplement une préférence pour certains de ses phénomènes
pathologiques plutôt que pour les autres, simplement parce
qu'ils déterminent moins de douleur physique. C'est une résigna-
tion à un moindre mal plutôt qu'une satisfaction.
En un mot, ces trois caractères de la conservation de la
conscience, de l'irrésistibilité, de la satisfaction que l'on donne
toujours comme les caractères essentiels de la crise d'agitation
forcée ne sont pas des caractères psychologiques objectifs re-
connus par le médecin. Ce §ont des caractères subjectifs, c'est-
à-dire des sentiments de doute, d'absence de liberté, de résigna-
tion que le malade exprime iui-mème a propos de ses crises.
Pour comprendre ces caractères nous sommes donc amenés à
étudier les sentiments qu'éprouvent les psychasthéniques h
propos de leurs crises, leur état mental pendant la crise et en
dehors de la crise.
Si nous laissons de côté ces sentiments subjectifs pour nous
borner à résumer ici les caractères objectifs, les crises d'agitation
forcée nous paraissent essentiellement un ensemble d'opérations
psychologiques, des pensées, des actes, des émotions qui sont
inutiles et d'ordre inférieur et qui se développent d'une manière
exagérée à l'occasion d'un acte, d'une attention, d'une croyance,
d'une émotion qui n'ont pas pu s'exécuter ou qui ne sont exécutés
que d'une manière très incomplète. Pour comprendre cette alté-
ration du phénomène primaire qui est l'occasion du déclanche-
mcut des phénomènes d'agitation forcée il nous faut encore
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CARACTÈRES APPARÈNtS DES AGITATIONS
examiner Tétai des fonctions psychologiques du sujet,
volonté, de son attention. Ces études doivent se joindre l
des sentiments dont je viens de parler et nous permettn
nous faire une idée générale de ces crises.
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CHAPITRE III
STIGMATES PSYGHASTHÉNIQUES
leurs qui ont décrit des obsessions ont été
ce fait que les malades ne déliraient pas à
Ceux-ci n'arrivaient jamais à être convaincus
antes, ils luttaient contre elles et se montraient
léclarer fausses et ridicules. Devant ces décla-
teurs concluaient à la lucidité de Tesprit et à
ions psychologiques. Legrand du Saulle allait
itelligence restait parfaite et la liberté morale
crise. La conservation de la conscience, et par
Tintégrité des fonctions psychologiques aussi
tion exacte de la valeur des idées, était deve-
res classiques de la crise d'obsession, à plus
ne ne songeait à soupçonner des troubles de
ologiques dans Tintervalle des crises,
les premiers, je crois, a mis en doute cette
on de la conscience : « Est-il bien juste de
, que la conservation de la conscience soit
chez r.obsédé, avant, pendant et après les
b auteur ne croit pas que, surtout pendant
s aient « la notion complète de tous les élé-
a ce moment leur personnalité. La synthèse
! et même efiace la conscience principale. »
)endant que la crise il y avait des altérations
ns psychologiques, quoique elles ne fussent
jagées dans l'obsession elle-même,
y réfléchir, ces troubles psychologiques pen-
(ssion, et j'ajouterai même en dehors de la
t vraisemblables. Est-il possible que des pen-
• les maladies mentales et nerveuses, 1896, p. 118.
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LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES 261
sées absurdes, des manies inutiles et ridicules, des craintes
injustifiées viennent remplir un esprit pendant plusieurs heures
s'il est parfaitement sain et capable de leur résister. Cela est
tout à fait contraire à tout ce que nous savons déjà sur la sugges-
tion et sur les idées fixes des hystériques. Les phénomènes ne
sont sans doute pas absolument comparables, mais il y a une ana-
logie suflisante pour que nous supposions chez les obsédés comme
chez les hystériques une certaine insuflisance de résistance qui
permette ce développement parasitaire. Bien plus, toutes ces
manies sont au fond de mauvaises habitudes, elles ont dû naître
et grandir avant de constituer ces crises et par conséquent même
avant les crises, même dans leur intervalle, l'esprit qui a favorisé
un pareil développement ne devait pas être bien normal. En un
mot il serait très important, pour mieux comprendre les obses-
sions, de savoir sur quel terrain elles se développent et de
constater les altérations fondamentales des fonctions psycholo-
giques qui en ont probablement été le point de départ.
Ce sont ces modifications dans le fonctionnement des opéra-
tions psychologiques indépendamment de l'obsession et des opé-
rations forcées que je désigne sous le nom de stigmates psychas^
théniquesy analogues à ces (c stigmates psychiques des tiqueurs )>
dont parlait déjà Charcot quand il concevait bien la nécessité de
leur étude *.
Malheureusement Tétude de ces stigmates psychasthéniques
est encore plus diflicile h faire que celle des stigmates hysté-
riques. On sait quelle difTiculté apporte k l'étude des hystériques
leur suggestibilité ; il est toujours très difficile, surtout si l'on
veut faire des expériences, de savoir ce qui est un trouble psycho-
logique fondamental et ce qui a été ajouté par des suggestions
maladroites. Ici, les obsessions et les manies mentales des sujets
apportent des diflicultés encore plus grandes. Beaucoup de ces
malades sont disposés h croire que leurs facultés sont altérées, soit
en vertu d'obsessions de honte, soit en vertu d'obsessions hypo-
condriaques, peut-on croire à leurs appréciations d'eux-mêmes ?
Far exemple, est-il possible de se faire une idée exacte de l'état
mental de Claire en l'interrogeant sur ses propres facultés ? Elle a
rhabitude de se croire complètement idiote, de se rabaisser en
I. Charcot, Leçons du mardi, II, 16.
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STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
VOUS faire une description fantastique de ses
ime si elle voulait passer pour une démente.
ieu d'interroger les sujets on examine leur
is déterminés, on verra qu'un grand nombre
inhibés par des manies mentales et cepen-
croîre à leur suppression : si Ton rencontre
le long d'un mur et incapable de traverser
as en conclure qu'il ne sait pas marcher. Ces
ent fournir des objections perpétuelles contre
ent de décrire les stigmates des psychasthé-
toujours me répondre que tel trouble de la
volonté est produit par une idée quelconque,
tic ou une angoisse qui a arrêté l'acte au
ïrvais.
Tmates doivent exister et il y a certainement
tionnement mental qui sont antérieurs logi-
ogiquement aux idées fixes et aux manies,
t en reconnaissant ces dangers, je crois né-
;ette recherche en prenant le plus de pré-
[)'abord, sauf dans des cas assez rares, left
[uées me semblent à peu près impossibles,
ent d'attirer l'attention du sujet et de provo-
exions et ces opérations forcées que l'on
de l'observation et surtout de la comparaison
y a des troubles qui sont intéressants par
ité et qui apparaissent chez les sujets ayant
manies mentales ou des phobies absolument
nt jamais eu l'esprit dirigé sur ces troubles,
es troubles qui se développent avant la nais-
întales et des obsessions, que nous retrouvons
amplement neurasthéniques, n'ayant encore
»rcée. Enfin le raisonnement peut dans une
mer les remarques précédentes, quand il nous
iblcs psychologiques ont été chez le malade
et non la conséquence des obsessions. Mal-
je continue h croire la recherche de ces trou-
la liste que j'en donne me semble devoir
e.
lologiques ne m'ont pas semblé être de nature
I crise ou en dehors de la crise, je n'établirai
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LES STIGMATES PSYCIIASTHÉNIQUES 263
donc pas à ce point de vue de divisions, il suffit de se rappeler
que les troubles les plus exagérés se présentent pendant la crise
et quMls existent toujours chez les grands malades à un degré
plus faible pendant les intervalles des crises.
Ces troubles se présentent à Tobservateur de deux manières,
d*abord d'une manière simplement subjective sous la forme de
sentiments que ressent le sujet et qu'il exprime plus ou moins
bien, f^a conscience est un réactif plus délicat que nos appareils
et elle accuse des troubles que nous ne serons pas capables de
mettre en évidence d'une manière objective. Cependant dans les
cas les plus nets nous po^ivons constater ces troubles par la
conduite du sujet et dans des cas déterminés indépendamment
des sentiments qu'il en exprime. J'étudierai d'abord ces senti-
ments subjectifs, puis je chercherai à mettre en évidence ces
mêmes troubles sous leur aspect objectif.
EnGn je signalerai plus rapidement dans une troisième section
des troubles des fonctions physiologiques qui sont plus connus,
car ils se retrouvent plus ou moins dans toutes les névroses.
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STl
5ENT
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ngn
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SENTIMENTS D'INCOMPLÉTUDE DANS L'ACTION
autres soirs, que Taddition a été bien faite et que le
inscrit est juste. II en est ainsi bien souvent et, à premi
nous ne constatons dans ces actions rien d*anormal.
Mais le sujet n'est pas du même avis que Tobservate
en dehors et il a dans l'esprit, à propos de cet acte, un e
de phénomènes très curieux. Ce ne sont pas des idées, c'e
des pensées abstraites et générales s'appliquant à cet £
d'autres, comme il en aura dans les obsessions, ce sont
timents, c'est-à-dire un phénomène plus concret s'appl
un état déterminé et à un seul. Le sentiment pris dans
est pour la connaissance des faits internes l'analogue de
ception pour la connaissance des objets extérieurs. C
connaissance plus complexe que la simple sensation, une
sance formée par le groupement de plusieurs faits élémt
mais s'appliquant cependant à un seul fait concret.
En général l'attention des psychologues n'a pas é
samment attirée sur ces sentiments qui accompagnent le
pement de la volonté. Ils n'ont guère analysé avec soi
seul d'entre eux, le sentiment de V effort. HôflFding est.
ceux qui ont le mieux signalé l'importance d'autres sei
du même genre : dans le chapitre vu de son manuel i
sur la conscience de la volonté, sur le sentiment de la rés
Ces sentiments qui accompagnent les opérations de
sont à mon avis particulièrement importants dans la pa
mentale et serviront un jour à interpréter une foule de d
Pour le moment constatons que chez le scrupuleux I
volontaires sont l'occasion d'une foule de sentiments an
qui peuvent se résumer en un mot: le sujet sent que l'act
pas bien faite, qu'elle n'est pas faite complètement, (
manque quelque chose. Dans les premières manies de p<
ce sentiment est déjà très visible. Souvent il prend la foi
raie : l'acte n'est pas bon moralement, c'est ce que l'on >
la manie des efforts. Souvent il s'agit simplement du
vue pratique, l'acte n'est pas suffîsant pour arriver à so
ne semble pas capable de produire la satisfaction cher
là toutes les recherches du mieux, toutes les manies des p
enfin l'acte ou l'idée ou même l'émotion parait manquer
teté, ne pas avoir les caractères spécifiques qui lui appart
être trop vagues, de là le besoin d'agir lentement, de
mencer et toutes les manies de la précision.
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^'-^^
ifCHASTHÉNIQUES
l des manies de réparation, le
propos de son acte ou de son
te n'est pas seulement insufli-
ici encore ce n'est pas unique-
ral, c'est dangereux pour la vie,
[adroit, incapable d'arriver au
out ce que je fais, je ne fais que
cesse tous ces malades, ce que
i bien le droit de vivre comme
nies de réparation et tous les
ttacher à ce sentiment fonda-
; sentiment de mécontentement
î pas sur une seule idée que l'on
re, il porte sur toutes les idées
cessivement sans être satisfait
propos des crises d'agitation et
:;te semble impossible, qu'il y a
semble imparfait, qu'il y a des
s se rapprochent des peurs et
§veloppent, l'acte parait au sujet
I sentiment de mécontentement
1 une série de sentiments plus
îs sentiments n'existent pas seu-
istent souvent et dans quelques
)ropos de tous les actes que le
des symptômes primordiaux de
t que les ruminations, les an-
ne se soient développées.
de difficulté,
s sentiments il faut suivre l'acte
r la suite des sentiments engen-
personnes éprouvent d'avance
îée qu'il faudra agir, ils redou-
rêve, comme ils le disent tous,
lus rien à faire. « Je voudrais,
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SENTIMENTS DINGOMPLÉTUDE DANS L»ACTION 267
disait Fa... (169), une chose malheureusement bien diflicile, je vou-
drais pouvoir faire toutes les actions à la fois, une fois pour toutes
et ne plus avoir jamais rien à faire... ce désir d'en avoir fini me
donne quelquefois dû courage, je me hâte de finir pour qu'on ne
me parle plus de faire quelque chose. »
Cette horreur de l'action volontaire se rattache a un sentiment
exagéré de la didîcullé de l'acte, le sentiment de l'effort et sur-
tout la prévision de l'effort qui existe chez tout homme à la pen-
sée d'un acte devient ici énorme. « Pas une seule chose, répète
Jean avec désespoir, qui ne présente d'énormes didicultés, dès
qu'il s'agit de la faire. » (( Il y a là, me dit Fz. • -(Sg), des résolutions
à prendre, il faudrait répondre a une lettre, il faudrait pour cela
penser à ce que je dois écrire, avoir la conception de l'affaire.
Oh, je suis épuisé rien que de songer à tout cela, cela va faire
marcher l'orchestre dans ma tête, non il vaut mieux ne pas y
songer pour le moment. »
a Je me demande, dit Nadia, comment je puis arriver à faire
quelquefois des choses comme tout le monde. C'est tellement dif-
ficile, j'en suis tout à fait découragée d'avance. Je crois que j'ai
de la volonté au fond, si je ne fais pas ce que vous voulez, c'est
qu'il y a des difficultés épouvantables qui m'enlèvent toute mon
énergie. » Il est bon de remarquer que ces paroles ne s'appli-
quent aucunement à des actions en rapport avec les idées obsé-
dantes de la malade et que je ne lui demandais ni de manger ni
de sortir ; il s'agissait simplement de commencer une tapisserie
pour avoir une petite occupation.
Une de ces diflficultés qui arrêtent le sujet c'est qu'il se reprér
sente d'avance son insuccès. Il sent qu'il va faire les choses très
mal, d'une façon immorale et ridicule « j'ai une appréhension
pour tout ce que je dois entreprendre, il me semble que si je
commence je vais faire des horreurs », il est bon de remarquer
que ce malade Bu... est simplement un agoraphobe et qu'il ne
' s'agit pas d'actes pouvant éveiller ses phobies. « Je me connais,
dit Nadia, il suffît qu'il y ait une mauvaise action à côté de celle
que je veux faire, je ferai la mauvaise... vous voulez que je me
remette à jouer du piano, mais avec mes doigts rouilles je vais
très mal jouer, j'ennuierai toute le monde en recommençant,
je ne peux pas me décider à jouer si mal que cela, ce serait
honteux. »
Un sentiment voisin est le sentiment de Vinutilitc de l'action,
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STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
de valeur relativement aux efforts qu'elle va
aut la peine d'être commencé... à quoi cela
tant de mal pour aboutir à quoi... autant vaut
— Sentiment d'incapacité,
même sentiment nous fournira le sentiment
le sentiment d'incapacité porte sur un acte
proche un peu plus des obsessions : il en est
De..., a qui s'effraye du mariage, qui n'a rien
r rendre un homme heureux, pour élever des
Lin ménage, etc. » Mais beaucoup plus souvent
ipacité est général « je n'ai plus de goût à
force de faire quoi que ce soit » Dd... (i8).
dit Lo..., je sens que je ne pourrai rien en
et ce sera le sentiment de paralysie comme
ve le mouvement demandé « presque impos-
à (( presque impossible », il est à remarquer
rrivent jamais à une idée aussi nette que celle
bsolue.
ent de faiblesse énorme h la pensée de faire un
ils n'éprouvent pas quand ils ne songent pas à
liez Lkb..., femme de 22 ans, un phénomène
s calme sur sa chaise et ne réclame rien tant
le aucun effort ; si je l'encourage à agir, à tra-
Témit sur la difficulté de Tacte a chez une per-
i faible » et la voici qui commence une crise
éclame \\ manger tout de suite, sinon elle va
« elle va devenir folle, ou enragée, ou s'éva-
inge pas tout de suite ». On peut arrêter ce
lourriture, non en lui donnant à manger, mais
: sur l'action h accomplir. Si on lui déclare •
ble pour travailler, qu'il vaut mieux rester à
calme et ne demande plus à manger. C'est
aits de ce genre que je suis disposé à croire
sentiment de la faiblesse et surtout de la fai-
iis le sentiment de la faim. On voit ici que
)lesse et d'incapacité s'éveille à la pensée d'ac-
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SENTIMENTS D'INCOMPLÉTUDl
Ce sentiment de faiblesse, d^impuiss
jouer un rôle dans un langage bizarre
sieurs. Ils font toujours appel à une
les débarrasserait de Faction et surtc
situation donnée. « Il me semble qu
avant d*agir, j'attends qu'une fée ait n
de baguette... » (Vk...) ft Je compte s
ils vont tout préparer et je pourrai aie
si un miracle me permettait de faire [
d'un passé lourd, vous verriez que j
complexité des choses me tarabuste ; c
ciel ne m'aide pas. »
3. — Sentiment d!ii
Un des sentiments essentiels de la
de la résolution, de la décision. Ce se
ding, nous montre qu'une volition a i
distingue les possibles (le souhait et 1
solution), a L'un des caractères pari
forme la plus nette de la volonté, c'es
ou s'y aiguise en regardant l'action
propre. Avant d'exécuter réellement F
nous le percevons comme faisant partii
tons ou anticipons sur lui, nous c(
achevé ce qui, vu du dehors, n'est en
lité. Par opposition à l'action interne
la multitude des souhaits et des ima^
que de pures possibilités ^ » Il y a dor
lution un sentiment d'unité comme i
persisté, un sentiment du développen
devient plus forte qu'auparavant, un
puisque l'action est adoptée et nous
même, un certain sentiment de pla
d'une lutte et l'exaltation de la force.
Aucun de ces sentiments ne se dé^
les scrupuleux, ils n'ont jamais le s(
1. H. Hôffding. Esquisse d'une psycholoyie
L. Poitevin, 1900* p. 443.
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LES STIGMATES PSYCHASTHÉNÎQUES
)u s'ils Tont, ils le sentent faible et incomplet et ils
nent peur de le perdre. Ka..., homme de 67 ans,
•is précisément parce qu'il n'a pas de véritables
vraies obsessions, veut que ses actions soient faites
»t impatient d'en voir Texécution « parce qu'il a peur
on ne se maintienne pas, il est si rare qu'il en ait
t... (89), femme de 35 ans, n'arrivant jamais au sen-
cision, se figure qu'elle n'ose pas prendre un parti.
de Tr. .. est amusante sur ce point, elle nous
ime une image concrète du sentiment d'indécision,
fille que j'ai déjà citée a propos des manies de la
a comme profession le modelage des fleurs en por-
est laissée a son inspiration pour la forme et la
nte des pétales. Le premier signe de sa maladie
^agne moins d'argent dans sa journée, parce qu'elle
ement ses pétales de roses : en effet elle hésite tou-
leux plis, ou deux courbes à adopter et elle ne sent
utrefois que pour tel pétale donné le pli est définitif,
ien qu'ayant le pétale en main même quand il devrait
elle continue à se représenter deux ou trois formes
on plus une seule comme autrefois: ce sentiment s'ac-
ine sorte de petite douleur à la place du petit plaisir
autrefois à terminer un pétale et à le trouver joli.
le même sentiment envahit d'autres actes. Ayant un
lies elle devait employer quelque argent à s'acheter
)ilettc. « Autrefois j'aurais su choisir et le choix fait
plaisir, je sens que je n'ai pas choisi, que je continue
iter plusieurs objets à la fois et même si j'en prends
pas de plaisir. » Qei... remarque très bien elle-même
ons et les choix ne se terminent pas dans son esprit,
st fini et que cela est pénible. La même phrase se
out « pas de terminaison, dit Gisèle. Je ne peux tirer
Lod... Je ne puis me décider, ni prendre un parti,
î recommence la discussion, c'est parce que je sens
ux idées )). T^on seulement Nadia mais toutes les
sa famille ont ce sentiment d'hésiter toujours,
)eine à se décider : « j'ai beaucoup de volonté en
S^adia, mais je suis trop fatiguée pour avoir l'air
es jeunes filles ont la singulière habitude de prendre
ns contre elles-mêmes pour rendre leurs décisions
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SENTIMENTS D'INGOMPLÉTUDE DANS L'ACTION
irrévocables. Quand Tune d'entre elles avait pris ou à m
une petite décision quelconque, bien insignifiante d'aill
la couleur d'un ruban ou sur une lettre à écrire, elle (
notifier à chacune de ses sœurs ou bien l'écrire sur u
afin de ne plus pouvoir changer. Y a-t-il bien loin de cel
tude puérile aux serments et aux pactes ? Quant à Jean, c
lui la douleur d'une indécision perpétuelle: bien entendu
reculé jusqu'à ses dernières limites et h mesure qu'appro(
tant où la décision va être inévitable, ses souffrances augi
mais ce trouble est déjà chez lui tout à fait pathologique, i
une manie de l'oscillation plus qu'un des troubles des ser
Aussi ces malades désirent-ils toujours qu'une autre ]
ou même une divinité prenne les résolutions pour eux
la responsabilité de mes actes, que je ne peux pas prei
\Vo..., je demande énormément d'avis, de conseils, et
j'ai une opinion personnelle, je finis toujours par st
conseils, c'est moins pénible que de me décider d'api
même... » « Ah I si je pouvais être toujours simple ma
me dit un artiste Qsa..., obéir à quelqu'un qui me dis]
de choisir... si quelqu'un me donnait toujours le plan,
des figures, le reste irait bien, mais la décision, c'est at
Je rattacherai aussi à ce sentiment une disposition curii
représenter un changement imprévu des décisions. « Eh 1
c'est décidé, dit Jean, mais s'il arrive des circonstances
je ne sais pas d'avance lesquelles qui m'empêchent de
que je vous ai promis, il ne faudra pas m'en vouloir, vous st
que tout peut arriver. » Cette observation se trouve bi
dans un roman célèbre, a II pensait qu'à tout prendre ce
gements n'étaient que de la pure convention, sans sign
précise, et que d'ailleurs personne n'était sûr du lende
ne pouvait savoir s'il n'arriverait pas quelque événement
dinaire qui emporterait, avec la vie, l'honneur et le désh
Cette façon habituelle de raisonner bouleverse souvent
cisions en apparence les plus arrêtées \ »
4. — Sentiment de gêne dans V action.
Si le sentiment d'unité de la décision n'existe pas,
I. Tolstoï, La (guerre et la paix, I, p. 33.
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3 STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
S ce sentiment de facilité, d'entraînement qui
ement d'une seule tendance persistante : il est
intiment de gêne, de résistance dans l'action .
se préciser plus tard et les malades vont pré-
Ue ou telle manie, telle ou telle phobie, telle
s gêne pour agir, mais il est visible qu'au début
x-mêmes ce qui les gêne ou plutôt que cette
înt variable et produite par n'importe laquelle
définitivement éliminées.
let chez Byl..., jeune fille de 21 ans. Elle finit
>es tellement elle est agacée par ce sentiment
pour tout ce qu'elle veut faire. Claire, Nadia
s décrivent le même sentiment au début de
êne, la gêne que j'ai ressentie toute ma vie
un acte quelconque, quel supplice! » (Meu...)
pas vivre sans être gênée! » (Vol...) k Toute
de la gêne, jamais un acte qui se soit fait
[Vk...) « Toujours quelque chose qui entrave
(Jean) Il ne faut pas se figurer que ce senti-
ste que dans l'émotion d'intimidation, il existe
il s'agit de commencer dans son cabinet un
rature française, aussi bien que chez Brk...
mettre à coudre une robe ; chez Vol... quand
»on ménage, c'est le sentiment de la difficulté
[uand on le prépare par l'imagination, mais
on ne saurait trop insister sur l'importance
— Sentiment d'automatisme,
il y a, comme nous l'avons remarqué, un senti-
1, de personnalité, puisque l'action nous semble
lêmes; on ne sera pas surpris de voir ce senti-
ilement chez les scrupuleux, c'est ce qui pro-
t d'automatisme dont l'importance dans les
est, h mon avis, tout à fait considérable. Le
rit très bien cette impression « dans cet état
idant que j'agisse comme avant sans savoir
chose qui ne me paraît pas résider en moi me
comme avant et je ne puis pas me rendre
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SENTIMENTS D'INCOMPLÉTUDE DANS L'ACTION
compte que j'agis réellement, tout est mécanique en moi et se
inconsciemment* ».
Tous nos malades tiennent le même langage, les mots « i
chines, automates, mécaniques » reviennent constamment d
leur langage : « je ne suis qu'une machine, dit Lise, et je (
faire des efforts bien pénibles pour rester quelqu'un. » « J*î
toujours en rêve, dit Nadia, comme une somnambule. » « Je i
dans mes accès un automate, dit Dob..., je vois mes mains
mes pieds, je les sens faire des actions sans que je les veui
Pourquoi ne feraient-ils pas des sottises puisqu'ils agissent s
moi ? Quand je suis dans un chemin de fer en marche, je s
mes mains qui veulent ouvrir la portière de la même façon qu
les sens dessiner quand je travaille. » Même pensée chez Daj
«ce n'est pas moi qui agis, alors pourquoi mes mains ne pc
raient-elles pas me faire mal, me blesser puisque je sens dej
longtemps qu'elles agissent seules, pourquoi en présence d'éti
gers ne me laisserais-je pas aller à des actes de grossièreté puis
je ne me gouverne pas. » Ce sentiment joue un rôle dans te
la maladie de Claire, « elle s'exaspère de faire les choses con
une machine, elle ne peut pas s'y résigner » et elle fait
efforts comiques pour essayer d'échapper à ce sentiment. Qu
on la pousse trop à accomplir une action, que Ton bouscule
hésitation, elle a une façon d'agir assez curieuse, elle cesse bi
quement d'hésiter et fait l'action tout de suite à la condil
qu'elle soit simple. Par exemple elle se roule sur son faut
depuis une demi-heure sans parvenir à me remettre une le
qu'elle a à la main, je finis par me fâcher ; alors elle se 1
et me donne la lettre tout de suite. Mais elle reste dés<
« ce n'est pas moi qui ai fait l'action, ma main a marché U
seule... c'est mon corps, ce n'est pas ma volonté... je vous
dit de bouche et non pas de cœur... c'est ma machine qui a
cela, c'est une de mes autres personnes ». On voit combien le i
timent d*automatisme se mêle chez ces malades à toutes
manies précédemment décrites.
6. — Sentiment de domination.
Un degré de plus dans ce sentiment d'absence d'action pcrs
1. Bail, Revue scientifique, 1882, II, 43.
LES OBSESSIO:«S. I. — i8
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LES STIGMATES PSYCHA
, d^autoiiiatisnic et les malades v<
e d'extérieur qui pèse sur eux, <
n mot ils vont attribuer à des
qu'ils ne sentent plus dépendre
.., jeune fille de 19 ans, qui est t
aint ainsi : a depuis quatre mois
, il me semble que je suis obligée
[u'un me fait parler, on me sugj
pas ma faute si ma bouche marc
s que ce n'est pas moi qui agis,
eusse, dit Dob..., je suis comme
me retenir, dit Claire, c'est comn
comme si on m'enlevait ma liber
lait d'avoir des pensées déshonn^
it un acte mauvais avec ma liberl
ns bonnes, toujours poussée par
I comprend bien que dans cette ^
^oir d'autres sentiments bizarres
s dangereux va être un désir fou
liberté qu'ils croient avoir perd
ment que comme une réaction co
n, l'amour singulier de la libert(
les. On est, en ellet, surpris d'ui
inents. Ils ont besoin de direction
inscience et un maître et cepend
» ; ils s'effarouchent si on leur ci
parlent sans cesse d^une indépe
j. « Ce que je déteste le plus an
ir à quelqu'un, si je fais des pro
ent des autres, je veux sentir qu
e liberté... » Lise se plaint toujo
a quelque chose qui me gène dai
e ne suis jamais libre... c'est cel
ni. » Le plus curieux est Voz..., je
me constamment sur la liberté. «
V fou de la liberté... il faut qu'on
t a pour moi un sens précis c'est
ids de toutes mes forces. »
ulres sentiments et d'autres idé
iortir du même point de départ.
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SENTIMENTS D'INCOMPLÉTUDË DANS L'ACTION 275
qu'il est trompé, qu^il est dupé par des gens plus habiles que lui.
« Je suis constamment un garçon qu'on roule et qui s'en rend
compte... » Il aime, ou il croit aimer une jeune fille et il inter-
prète bien singulièrement son amour a c'est comme si la belle-
mère m'avait tendu un piège, je suis furieux de m'êtrc laissé
rouler, attraper».
La plupart vont avoir simplement le sentiment qu'on leur en
veut, qu'on les persécute : Voz... est persécuté par ses profes-
seurs, Rp... par ses parents qui ont dû l'opprimer dans son
enfance et qui doivent encore avoir la patte sur lui par l'inter-
inédiairc de juifs puissants. Le délire de persécution est très voi-
sin du délire du scrupule et je m'étonne qu'on les ait aussi
complètement séparés l'un de l'autre ; nous aurons à étudier ce
rapprochement.
Un sentiment fréquent c'est celui d'une domination irrésistible
et mystérieuse qui dans un très grand nombre de cas estcomparée
à Tobligation morale ou religieuse. « 11 me semble que c'est
immoral d'agir ainsi, il me semble qu'il y a quelque obligation
morale, quelque devoir sacré qui me pousse h agir ou qui m'em-
pêche d^agir», c'est là un langage bien fréquent chez des malades
qui n'ont pas encore, je le répète, d'obsession sacrilège ou d'ob-
session criminelle.
Mais souvent l'idée d'obligation mystérieuse est plus nette
encore : a Quand j'étais petit, dit Rp..., je sentais une puissance
mystérieuse qui me poussait, m'enlevait ma liberté, je croyais
alors que c'était la sainte Vierge, maintenant je sens la même
chose et je me demande s'il n'y a pas un sort contre moi. w
« Cela m'exaspère, dit Nadia, de sentir toujours quelque chose
de mystérieux qui me retient en arrière et m'empêche de
réussir dans mes ambitions... il me semble qu'il y a une fatalité
contre moi et elle ne me quittera pas tant que je vivrai... il me
semble qu'il y a une fatalité qui plane au-dessus de ma tête et
qui ne me quitte jamais... c'est mon destin qui amènera ce que je
redoute le plus et qui me fera engraisser afin que je sois encore
plus tourmentée... il y a une force qui me pousse à faire des
serments idiots, c'est le démon qui me pousse. » « J'ai sans
cesse, dit Gisèle, le sentiment d'une puissance supérieure qui
m'étreint, le sentiment que je lutte contre quelque chose de
supérieur, c'est cette puissance que j'ai appelée Dieu et que j'ai
aussi envie d'appeler le diable » et Lise parle tout le temps de
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le;
sen
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Idée
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oie
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ux
)rer
>ut
end
î li
inai
I fai
i mu
jeux
fuc 11
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SENTIMENTS D'INGOMPLÉTUDE DANS L'ACTION 277
Une variété intéressante de ce sentiment «st l'impression de
mensonge, de fausseté, de comédie que Ton retrouve si fréquem-
ment chez les psychasthéniques. Bien des tiqueurs qui ont des
torticolis psychiques ou des déviations de la taille connaissent
mieux que leur médecin la nature de leur mal : « Mon médecin
était inquiet et se demandait si je n'avais pas une coxalgie tuber-
culeuse, je n'étais pas tourmentée comme lui, car je sentais bien
que c'était une comédie, il me semblait que je jouais la co-
médie et que je ne pouvais pas faire autrement. » Cette impres-
sion se retrouve même quand les malades n'ont aucun tic et ne
trompent en réalité personne. « Ne croyez pas ce que je viens
de vous dire, dit Claire, je crois que j'ai menti, j'ai toujours
l^impression que je ne dis pas la vérité. » « Ma vie est una
comédie perpétuelle, dit Gisèle, il me semble toujours que je
joue un rôle et que je n'agis pas sincèrement. » On verra toute
l'importance de ce sentiment en le rapprochant dés sentiments
de rêve et d'irréel que nous allons retrouver à chaque instant.
Une autre variété va être le sentiment d'humililé, de honte qui se
trouve chez quelques malades. Toq... ne se croit bon a rien, il se
croit au-dessous de tous les autres, et Jean finit par se croire incapa-
ble de quoique ce soit ; il ne veut plus rien essayer, rien tenter, con-
vaincu de son infériorité. « C'est triste, d'être pour tout le monde
un objet de risée et de passer à mon âge pour un parfait imbé-
cile. » La moindre des choses exaspère ce sentiment d'infé-
riorité. En entrant dans une réunion il a déposé sa canne au
vestiaire et il s'aperçoit que plusieurs des assistants ont conservé
la leur ; de là un désespoir car il se sent moins queux et il est
plus gêné que jamais.
Le sentiment de honte se retrouve chez une foule de sujets
qui n'ont pas de véritables obsessions de honte, ils éprouvent
ce sentiment d'une manière passagère et le trouvent eux-mêmes
ridicule. A bien plus forte raison ce sentiment est-il considérable
chez tous les malades chez qui nous avons décrit les obsessions
de la honte du soi et les obsessions de la honte du corps. C'est
un des sentiments essentiels des scrupuleux, mais j'ai insisté
pour montrer qu'il se développait à la suite d'une foule de senti-
ments d'inachèvement et d'incomplétudé de l'action.
M. Mourre, dans une étude sur l'aboulie, a montré l'impor-
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SENTIMENTS D'INCOMPLÉTUDE DANS, L*ACTION 279
volontaire, plus il a chance d'éveiller tous ces sentiments d'insudi-
sance de la volonté. On comprend donc que ces actes soient
variables suivant les sujets, les uns, et ils sont nombreux, sont
surtout préoccupés d'actes religieux et le trouble s'éveille au
début dans les églises. Tout h fait au début Claire ne ressent ce
sentiment de difficulté, ces indécisions, cet automatisme qu'au
moment de faire ses prières et de se confesser. Chez d'autres
l'acte grave va être l'acte professionnel : envoyer des dépêches
ou rouler des pétales de rose en porcelaine, etc.
Mais il y a une catégorie d'actes qui ont le privilège d'être
difficiles et importants pour tout le monde et d'exiger une cer-
taine somme d'attention volontaire, ce sont les actes qui doivent
être exécutés en public devant nos semblables. Je ne vois pas
dans la timidité un phénomène spécial, ce n'est h mes yeux qu'un
cas de tous les troubles précédents. Aussi nous ne serons pas
étonnés que tous ces malades soient des timides, c'est-à-dire
qu'ils éprouvent au suprême degré les troubles précédents quand
ils doivent accomplir des actes devant des témoins. Mt..., femme
de 4i ans, est surtout gênée dans ses actes quand sa femme de
chambre est présente, c'est à ce moment qu'elle sent son action
automatique et ridicule. « Je suis gênée, dit Fiç..., quand il y a
deux personnes qui me regardent. » «Je ressens un effet étrange,
dit Ei..., femme de 4^ ans, quand il y a du monde il me semble
que jagis bêtement, que je ne suis plus libre de faire ce que je
fais, je retrouve ma liberté quand je suis seule. » On retrouve-
rait les mêmes sentiments chez Dob..., chez Jean, et surtout
chez Nadia. Celle-ci a, comme on l'a vu, un si grand besoin d'af-
fection qu'elle voudrait se montrer aimable avec tout le monde et
elle fuit plus d'attention que jamais à sa conduite quand elle est
avec des personnes à qui elle veut plaire. «Cela me gêne de dire
des choses aimables que je voudrais bien dire, je me trouve stu-
pide, je suis tout à fait dégoûtée de moi même. » Je ne discute
pas ici le rôle des phénomènes émotifs dans les phénomènes
d'intimidation, je constate seulement que les sentiments d'insuf-
fisance de l'action se montrent souvent dans les mêmes circon-
stances où cette émotion prend naissance.
9. — Sentiments de récolte.
Enfin il ne faut pas oublier que la volonté n'est pas toujours
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L'INCOiMPLÉTUDE DANS LES OPÉRATIONS INTELLECTUELLES 281
par Tétude des autres sentiments du même genre qui se présen-
tent à propos des perceptions et des émotions.
2. — Sentiments d'incomplétude dans les opérations
intellectuelles.
Les crises précédentes de rumination, d'agitation ou d'angoisse
commencent à Toccasion d'un travail intellectuel, d'une per-
ception, d'un eflTort d'attention comme à l'occasion d'un acte vo-
lontaire. On retrouve a propos de cette opération intellectuelle
les mêmes sentiments que nous avons constatés a propos des
actes volontaires.
I . — Sentiments de difficulté des opérations intellectuelles.
Ces malades prétendent d'abord que le travail de l'esprit leur
est devenu à peu près impossible, à cause des difficultés qu'il
présente et des souffrances qu'il leur cause. Tous se plaignent
d'avoir des douleurs dans la tête quand ils veulent appliquer leur
esprit ; nous avons vu d'ailleurs que l'attention est très souvent le
point de départ des agitations, des ruminations et des angoisses.
Aussi Jean a-t-il une grande terreur de l'attention, a qui va lui
donner des coups à l'estomac... », il faut des exhortations et des
précautions inouïes pour obtenir quelques instants de lecture.
[^ise également se plaint des fatigues que lui cause la lecture, des
difficultés qu'elle éprouve h faire un petit calcul. Beaucoup de
sujets comme Vob..., Ck... s'épouvantent et se mettent en colère
si on essaye de fixer leur attention ou de leur faire accepter une
occupation régulière.
Cette résistance s'explique en partie par le sentiment qu'ils ont
de Vinsuffisance de leur attention : ils sentent qu'elle ne se fixe
pas et n'arrive pas à l'unité. « Quand je tiens une conversation,
dit Jui..., je voudrais bien pouvoir penser à ce que je dis. )>
Lise sent toujours un engourdissement, un état vague, une gène
énorme de la pensée; elle n'a jamais la disposition de l'esprit tout
entier, elle sent qu'elle ne se donne jamais complètement h ce
qu'elle fait « ce que je lis, même ce que je regarde, n'est pas bien
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s PS
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I/INCOMPLÊTUDE DANS LES OPÉRATIONS INTELLECTUELLES 283
abouliques : (c Elle assure qu^elle se trouve dans la situation d'une
personne qui n'est ni morte ni vivante, qui vivrait dans un som-
meil continuel, h qui les objets apparaissent comme enveloppés
d'un nuage, à qui les personnes semblent se mouvoir comme des
ombres et les paroles venir d'un monde lointain *. »
Un malade de Krishaber expliquait ainsi d'une manière très fine
ce sentiment de perception incomplète : « Il se faisait comme une
atmosphère obscure autour de ma personne, je voyais cependant
très bien qu'il faisait grand jour. Le mot « obscur » ne rend pas
exactement ma pensée; il faudrait dire « dumpf » en allemand
qui signifie aussi bien lourd, épais, terne, éteint. Cette sensation
était non seulement visuelle, mais cutanée. L'atmosphère dumpf
m'enveloppait, je la voyais, je la sentais, c'était comme une couche,
un quelque chose mauvais conducteur qui m'isolait du monde
extérieur '. . . » Il est inutile d'ajouter d'autres exemples qui seraient
absolument semblables: j'insiste seulement pour rappeler que de
tels sentiments ne sont pas particuliers, comme le croyait Krishaber,
il une névrose spéciale, mais qu'ils se retrouvent h chaque instant
sous la forme simple « du voile, du nuage » ou sous des formes
plus spéciales chez tous les psychasthéniques.
L'une de ces formes spéciales les plus curieuses est constituée
par le sentiment àe jamais^s^u et d'étrange. Dans beaucoup d'ob-
servations, Krishaber remarque que les objets semblent étranges,
qu'ils deviennent drôles, qu'ils sont plats et qu'un homme appa-
raît à ces malades comme une image découpée et sans relief.
Le malade de Bail vit se produire un changement brusque,
étrange dans Tapparence des objets qui ne lui paraissaient plus les
mûmes ; il ne leur trouvait plus de relief, c'est-à-dire plus d'appa-
rence naturelle^. Ces expressions se trouvent répétées si souvent
par nos malades qu'il faut se borner à citer brièvement quelques
exemples. « Les choses ne me paraissent plus de la même façon
qu'autrefois. » (Lap...) u Quand je suis fatiguée, mes yeux sont
affectés du même trouble que mes oreilles, tout ce que je vois, les
dessins du mur de ma chambre me paraissent étranges comme le
son de mes paroles. » (Dob...) « Le monde est drôlement fait,
I. Billod, Ana. méd. psychol., 18 '17.
a. Knshahcr t Xévropathie eérrbrocantiaqtie, 1873.
3. Bail, Hevue scientifique, 1883, II, p. ^3.
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L'INCOMPLÉTUDE DANS LES OPÉRATIONS INTELLEC
blement qui va jouer un rôle plus iniportiinl dans
personnelle. Dd..., femme de 24 ans, après une t]
sesse a le sentiment de ne pas se réveiller bien, de
dans UD rêve, elle trouve que tout est étrange « c
dit-elle, je voyais tous les objets doubles ». Fya...
ans, a le môme sentiment pendant ses crises d'ang
passe un voile devant les yeux et il me sembh
double ». Gisèle a des doutes sur ce qu'elle voit et
elle voit double. Il est curieux de remarquer que C(
diplopie ne correspond pas à un trouble précis obj
préciable. Quand on leur demande la place de la secc
rapporta la première, en un mot, quand on veut pi
plopie, les malades ne peuvent plus répondre et sont o
qu'ils ne voient en réalité qu'un seul objet, mais
procure un sentiment de trouble comme s'ils en y
Aux troubles précédents de la perception extérie
un petit sentiment bizarre sur lequel mon attentioi
parce que trois ou quatre malades s'en sont plain
de la même manière, le sentiment de désorienta tl
particulier, dit que lorsqu'elle est très mal, elle î
peine à se conduire non seulement dans la vill*
dans son appartement, il n'y a plus de coordination
des différents objets par rapport les uns aux aut
les maisons, les portes et les fenêtres de l'apparter
*. 'avoir perdu leur place relative et la malade se trou
rientée. Ppi... me parle tout à fait de la même
qu'il est malade il ne s'oriente plus consciemmer
Il ne perd pas son chemin, car il connaît la vilK
temps, mais c'est en quelque sorte inconsciemmer
chez lui : s'il essaye avant de partir de se représen
la direction de la place de Passy par rapport au (^
il ne peut aucunement y parvenir; il se souvient c
faisait très bien cette opération avant d'être malac
tends pas que cette désorientation soit un caractt
des scrupuleux, Jean pousse au contraire a l'extrê
la direction puisqu'il y a certaines directions au
peut pas tourner le dos sans recevoir des fluides ;
malades qui ont des troubles nets de la perceptio
s'ajoute aux sentiments de nuage et d'étrange.
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LES STIGMATES PSYGCIASTHÉNIQUES
Tin, ces objets perçus vaguement, étr«nnges, dédoublés parais-
neore bien souvent se rapetisser et s*èloii^ner. Ce sentiment
gnement des objets se complique presque toujours d'un sen-
t (V isolement, puisque le sujet se sent lui-même loin des
s et séparé d'elles. « Pour beaucoup, disait Krishaber, les
; paraissent se rapetisser et s'éloigner à rinfini. Le malade
sonnait plus le son de sa voix; elle lui semble venir de très
tt se perdre dans l'espace sans pouvoir atteindre Toreille des
Dcuteurs dont les réponses sont difficilement perçues... »
sa thèse sur a le sentiment dç déjîi vu », M. Bernard Leroy
que souvent que la fausse reconnaissance est accompagnée
5 sentiment de petitesse et d'éloignement des objets*,
out s'éloigne de moi » répètent nombre de nos malades,
jets sont dans le lointain et ils deviennent petits, petits... »
e, Lise, We..., etc.). Dans quelques cas rares, il peut se
lire ici un trouble de la vision analogue aux spasmes d'ac-
iodation bien connus chez les hystériques, mais le plus
nt il n'en est rien. Ces malades qui prétendent que les
i sont loin et petits les touchent à leur place et font des
ements corrects pour les prendre dès qu'on leur demande
faire ; ils finissent par reconnaître que les objets sont restes
ables, mais qu'ils leur donnent l'impression d'être loin et
petits. M. Bernard-Leroy me semble bien décrire ce phé-
nc, quand il dit « qu'il s'agit moins d'un éloignement ma-
que d'un éloignement moral, l'illusion visuelle se trouve
a dépendance de l'impression d'éloignement, d'isolement,
te du monde' ».
> sujets ne reconnaissent plus le monde ordinaire, ils le
ît disparu, éloigné d'eux, séparé d'eux par une barrière in-
3, par le voile, le mur dont nous avons déjà parlé, et ils
sent ce sentiment d'une manière symbolique en parlant
gnement matériel et de petitesse.
sentiment peut être poussé a l'extrême : l'un des sujets de
rnard-Leroy croyait « flotter dans les espaces interplané-
et se croyait séparé de tous les univers, dans une sorte
'ment cosmique ». J'ar vu deux malades qui avaient des
ions de ce genre. Gel... répète tout le temps qu'il lui
. Bernard Leroy, I^'illiision de fausse reconiuiissimre, 1898 (Paris. F. Alcan).
Brnard- Leroy, Ih'vue philosophique ^ 1898,11, 160.
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L'INCOMPLÉTUDE DANS LES OPÉRATIONS INTELLECTUELLES 287
semble avoir quilté la terre et cire tombée dans une autre pla-
nète, elle voudrait bien revenir sur la terre où sont tous les siens.
X..., femme de 3o ans, pendant six semaines, après une fièvre
typhoïde, a eu l'impression qu'elle était « loin de la terre et loin
du système solaire ». L'Arc de Triomphe qu'elle voyait de ses
fenêtres était une copie de l'Arc de Triomphe terrestre « qu'ils
avaient faite dans une autre planète ». On voit que ces interpré-
tations délirantes auxquelles le malade croit plus ou moins viennent
compliquer le sentiment de l'étrange et de l'éloignement.
3. — Sentiment de conception imaginaire.
A un degré plus avancé, les malades n'ont plus seulement le
sentiment que leurs perceptions sont mauvaises, insulfisantes,
bizarres; mais ils ont encore le sentiment que leur opération n'est
plus du tout une perception de l'objet extérieur, mais une autre
opération, une conception plus ou moins imaginaire. Il y a tou-
jours quelque difficulté, ainsi que je l'ai indiqué souvent, à distin-
guer l'une de l'autre une perception actuelle, un souvenir ou un
rêve*. Nos malades se trompent maintenant tout a fait et ils ont à
propos d'une perception les mômes sentiments qu'à propos du
souvenir ou de l'imagination.
On a beaucoup étudie dans ces dernières années le phénomène
de la fausse reconnaissance ou du déjà vu, dans lequel le sujet a
l'impression que tous les détails de sa situation actuelle sont la
reproduction d'une situation identique déjà vécue par lui autre-
fois. Les descriptions anciennes de Wigan, i8/i4, de Jensen,
18G8, de Sander, 1878, de Angel, 1877, sont tout à fait classiques.
« C'est, disait un malade de Wigan, une impression soudaine
que la scène à laquelle nous venons d'assister à l'instant (quoique
étant donnée la nature même des circonstances elle n'ait pas été
vue antérieurement) s'est déjà trouvée sous nos yeux autrefois avec
les mêmes personnes, causant entre elles, assises exactement dans
les mêmes positions, exprimant les mêmes sentiments dans les
mêmes termes. Les poses, les expressions, les gestes, tel son de
voix, il semble que l'on se souvienne de tout et que tout cela attire
notre attention pour la seconde fois^. » On trouvera bien des des-
I. Névroses cl idées fixes. II, p. 1O8.
a. Wigan, The duality of Mind, 18 \\, p. 8^.
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L'INCOMPLÉTUDE DANS LES OPÉRATIONS INTELLECTUELLES 289
môme à des interprétations, sent tout simplement que les phéno-
mènes n'excitent pas en lui le même sentiment que des choses
présentes, qu'ils ressemblent sur ce point à des choses passées.
Il y a presque toujours une différence importante entre « le déjà-
vu » et le vrai souvenir du passé. Le passé a le caractère d'être
connu, d'être habituel, il ne nous étonne pas; au contraire, le
« déjà-vu » conserve toujours un sentiment de vague, d'étrange ;
il se rapproche toujours des sentiments précédents du voile, de
Tétrangeté dont il n'est en réalité qu'une forme particulière.
Aussi n'est-il pas surprenant que ce sentiment présente des
variétés et qu'il ne soit pas toujours interprété comme un senti-
ment de souvenir. Dans quelques cas assez rares d'ailleurs, si je
ne me trompe, le sujet sentant toujours que le fait n'est pas pré-
sent, car c'est là le fait fondamental, est disposé à le situer dans
l'avenir. « Il me semblait que ce que j'entendais était ce qui allait
être dit ou fait'. » Nadia se plaint bien souvent de ne pas être
dans le présent, de ne pas se rendre compte de ce qui existe dans le
présent. « J'ai, dit-elle, de drôles d'impressions, il me semble que
les choses n'existent pas réellement, mais que j'ai des pressenti-
ments de leur existence. Tout à l'heure j'attendais votre visite et
je me la représentais, et bien maintenant j'ai envie de dire que
c'est la même chose. Ltes-vous vraiment là ? » C'est à propos de
sentiments de ce genre que quelques auteurs ont parlé de sentiment
de pressentiment', de sentiment de « promnésie^ ». 11 est facile
de voir que ce n'est qu'une variante du sentiment précédent.
Un autre sentiment bien plus naturel se développera fréquem-
ment à la place des précédents, c'est le sentiment de V imaginaire,
de l'irréel, « L'impression du déjà vu, disait M. Paul Bourget*,
s'accompagne d'une espèce de sentiment impossible à analyser que
la réalité est un rêve. » On trouvera une foule d'exemples de ce
sentiment de l'irréel dans les observations de Krishaber. « Quand
je vois mes camarades d'hôpital, je me dis à moi-même: ce sont
les figures d'un rêve... » « Même en touchant et en voyant, le
monde m'apparaît comme une gigantesque hallucination... » Ou
retrouvera ces mêmes paroles chez le malade de Bail, dans les
I. Bernard Leroy, op. cit., p. 211.
a. A. Lalandc, Les paramnésies, Revue philosophiques, 1898, II, p. 4^5.
3. Fr. W. Myers, Proceedings of ihe society for psychical Research, i8()5. p. 3i^4.
4. Bernard Leroy, op. cit., ^. 169.
LES OBSESSIONS. I. — TQ
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2ÔÔ LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
observations de M. Dugas, de M. Bernard Leroy, etc., c'est on
des sentiments les plus fréquemment observés. A mon avis, il est
beaucoup plus fréquent, plus caractéristique et plus intéressant
pour la psychologie que le sentiment du « déjà vu » qui a été trop
souvent étudié d'une manière isolée.
Pour ma part, c'est le sentiment que j'ai le plus souvent observé
chez les psychasthénîques. Je ne puis citer que quelques expres-
sions de ce sentiment au milieu d'une foule d'autres. « Je ne vis
plus sur terre, dit Pot... dans les périodes de grave maladie,
puisque je ne vois plus rien qui existe réellement. Je ne puis pas
me mettre dans l'idée que vous et les gens qui m'entourent vous
vivez réellement, vous êtes de vraies personnes. » Cette malade
est intéressante parce que dans tous les intervalles des crises,
quand la maladie diminue, elle se félicite « de retrouver enfin des
objets réels ». D'autres, comme To... ou Mb..., n'ont ce sentiment
qu'à propos des perceptions visuelles ou auditives, a elles ont
besoin de toucher, comme saint Thomas, pour se rendre un peu
compte que l'objet existe... ». On se rappelle l'obsession « delà
véracité des sens, de la priorité du toucher, sens direct au milieu
des sens indirects... «qui s'est développée chez Mb... à ce propos.
Une expression dont les malades aiment beaucoup à se servir
pour désigner ce trouble de leurs perceptions est celle de réi^e,
quoique ce soit, bien entendu, une simple métaphore ainsi que le
remarque M. Dugas, car il n'est pas du tout certain que Ton ait
un sentiment semblable dans le véritable rêve. Tous répètent
comme Lo... : « je vis dans le rêve, dans les espaces, je ne sens
pas les choses de ce monde. » « Je vois tout au travers d'un
voile, d'un brouillard, j'entends parler comme si j'étais dans un
rêve » (Dd...). « Je ne distingue vraiment pas bien ce que j'ai
vécu et ce que j'ai rêvé » (Gisèle). Pendant de longues périodes
Nadia répète « qu'elle se sent drôle, qu'elle se sent comme dans
un rêve perpétuel. »
Les événements les plus graves ne les sortent pas toujours de
leur étal de rêve. On a commis la sottise énorme de marier Lo...
elle semble n'avoir rien compris à ce qui s'est passé, elle reste
toute surprise qu'on l'appelle Madame et ne peut parvenir à com-
prendre que tout cela n'est pas un simple rêve.
Il y a même des malades qui vont encore plus loin dans ces
sentiments d'incomplétude de la perception extérieure et qui
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L'INCOMPLÉTUDE DANS LES OPÉRATIONS INTELLECTUELLES 291
ont le sentiment d'avoir perdu tout à fait certaines perceptions.
Btu..., une femme de 56 ans, dont l'observation est tout à fait
remarquable pour Tétude de la maladie de Krishaber, répète
constamment : « Je suis enfermée dans un tombeau... quelle
horreur que l'isolement absolu ! Il n'y a personne, personne
autour de moi. Je ne vois que du noir, un noir d'encre, même
quand il y a du soleil je ne vois rien, rien que du noir. » Il est
toujours surprenant en examinant de tels malades de constater
qu'ils n'ont absolument aucun trouble de la vision, qu'ils distin-
guent tous les plus petits objets et les reconnaissent sans hési-
tation. Hot..,, jeune fille de 17 ans, arrive en se plaignant d'être
aveugle. « Est-ce que je pourrai encore voir clair, est-ce que je
pourrai guérir et voir clair? » En réalité elle lit les plus petites
lettres du tableau de Wecker à la distance de 5 mètres. — Ret...
va chez tous les médecins qui traitent les oreilles et prétend être
sourde quoique on ne constate aucune surdité objectivement. Ce
sont déjà des obsessions qui se développent à propos des sen-
timents d'incomplétude de la perception.
4. — Sentiment de disparition du temps.
A côté de ce trouble de la perception des événements dans l'es-
pace, il est juste déplacer un fait analoque à propos du temps.
Les études sur les sentiments des malades à propos du temps
pendant lequel se déroulent les phénomènes seraient à mon avis
des plus intéressantes ; elles ont été très rarement faites car elles
sont fort difficiles. On constate au premier abord les faits les plus
incohérents chez les différents malades ou chez le même sujet. Il
faut, je crois bien, séparer les appréciations qu'ils portent pendant
qu'ils sont malades, sur leur état de santé antérieur ou sur les
phénomènes de leur période de maladie.
Quand le malade songe à son état de santé antérieur à l'époque
où il était bien portant, où il avait le sentiment du réel, il me
semble disposé à le reculer énormément, dans le temps, à avoir à
ce propos un sentiment exagéré du cours du temps. Voici comment
s'exprime un malade de Krishaber : « 11 me semblait être trans-
porté extrêmement loin de ce monde et machinalement je pro-
nonçais à haute voix ces paroles : je suis bien loin, bien loin. Je
savais très bien cependant que je n'étais pas éloigné, je me souve-
nais très distinctement de ce qui m'était arrivé, mais entre le
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292 LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
moment qui avait précédé et celui qui avait suivi mon attaque, il
^ avait un intervalle immense en durée, une distance comme de la
terre au soleil... » Si on se place exactement dans la même situa-
tion et si on interroge le sujet sur le temps écoulé depuis son état
le santé jusqu'à Tétat actuel de maladie, il répond comme le
naïade de Krishaber : « Ma jeunesse heureuse est séparée de moi
3ar des siècles, dit Claire. » « Ma crise n'a commencé en réalité
|ue depuis trois jours, me dit Kl..., mais c'est une éternité, il y a
;i longtenïps que je suis étonnée de me souvenir de ce que je faisais
ivant d'être malade. » Est-ce bien là un sentiment du temps, n'est-
;e pas le même sentiment d'éloignement qui poussait le sujet à
nettre des espaces infinis entre lui et les choses réelles. Il se sépare
le sa vie réelle antérieure par des siècles, comme tout à l'heure il
éparait son corps de la terre et du système solaire.
On trouve des sentiments qui portent plus exactement sur le
emps quand on prend la précaution de ne pas sortir de la période
le maladie et même de la période pendant laquelle la maladie est
estée la même.
J'ai noté ce détail avec soin dans mon observation déjà publiée
le Bei... Cette jeune fille atteinte du sentiment de dépersonnàlîsa-
ion se plaignait qu'elle avait perdu le sens du temps, elle ne com-
prenait pas la signification des mots : hier, aujourd'hui, demain;
El journée s'écoulait sans qu^elle eût compris comment, elle
royait toujours être au même moment, a hier, aujourd'hui,
lemain me paraissent la même chose, comme un grand vide, »
lie pouvait se rendre compte de ce trouble bizarre en le compa*
ant à ce qu'elle éprouvait autrefois quand elle faisait correcte-
rient la distinction des divers moments du t«mpsV Beaucoup de
lalades soiit du même genre. Ver..., PI... (20) et par moments
ussi, Nadia : il est clair que cette dernière ne se rend pas compte
e l'éloîgnement des années, elle reste toujours exactement la
lême et quoiqu'elle ait 3o ans, elle croit être restée tout à fait
Dmme une enfant.
Lise a fait sur ce point des remarques plus nettes : elle est sur-
rise de la façon dont le temps s'écoule pendant qu'elle est malade :
Les heures passent tout à fait sans que je m'en aperçoive, je reste
ois heures à méditer et quand je me secoue j'ai le sentiment que
\ ne me suis laissée aller que cinq minutes à peine. J'ai été très
I. iKévroses et Idées fixes ^ II, p. 63.
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L'ÎNCOMPLÉTUDE DANS LES OPÉRATIONS INTELLECTUELLES 293
malade toute cette semaine et en revenant vous voir j^avais Tim-
pression de sortir de chez vous, je ne puis pas me figurer qu*il y
a huit jours d^écoulés... Pendant mes périodes de maladie, le
temps est toujours très court... s'il existe... ou plutôt je n'en sais
rien, il me semble qu'il n'y a plus de temps quand je suis très
malade... » M. Fouillée disait déjà « même chez l'homme, il y a
des cas maladifs où toute notion du temps semble disparue, où
l'être agit par vision machinale des choses dans l'espace sans
distinction du passé et du présent' ».
On explique ordinairement ces faits en disant que le sujet
s'absorbe dans le sentiment du présent. Quoiqu'il soit difTicile
d'avancer sur ce point autre chose que des hypothèses je serai
disposé à dire que mes malades perdent la notion du temps d'une
manière bien plus complète, parce qu'ils perdent le sentiment du
présent. Pendant la durée de leur crise, quand la perception ne
donne que de l'irréel ou du passé, ils n'ont point le sentiment du
présent, c'est du moins ce qu'expriment des malades comme Bei. . .
et Lise « qui sont dans un rcve et ne sentent plus le temps s'écou-
ler ».
Ces modifications du sentiment du temps prendront plus tard
une grande importance, nous ne pourrons ici que les signaler et
attirer l'attention sur elles.
5. — Sentiments d'inintelligence.
Les modifications de l'attention ne déterminent pas seulement
les sentiments précédents à propos de la perception extérieure, ils
déterminent des sentiments du même genre a propos de toutes les
opérations de l'esprit, de toutes les conceptions, de toutes les
idées. Les souvenirs et les idées ont le même caractère de vague et
d'irréel que le monde extérieur, a Ma vie passée, dit Claire, me
parait appartenir à un autre monde, qui n'est pas réel, tout cela
est si loin de moi, je ne peux pas m'expliquer bien mes idées, je
fais des efforts pour atteindre une idée claire, il faudrait pour cela
ouvrir une petite porte qui est dans ma tête, l'idée claire est
derrière cette porte mais je ne puis parvenir à l'atteindre. »
Dob... gémit indéfiniment sur la peine qu'elle a à exprimer et
I. Fouillée, Introduction à la genèse de l'idée de Temps, par Gu)au, i8()o (Paris,
F. Alcan).
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294 LES STIGMATES PSYCH ASTHÉNIQUES
à comprendre ses idées, elle désespère d'arriver à la précision.
Qi... se désole parce qu'elle ne peut plus comprendre son fils
ni se faire comprendre par lui « on dirait que depuis deux ans
notre maison se transforme en une Tour de Babel. »
Ce vague de Tidée provoque certainement divers sentiments se-
condaires que Ton a remarqués chez ces malades, d'abord le senti-
ment du mystère, l'idée qu'ils sont entourés de choses profondé-
ment incompréhensibles, ensuite le besoin de chercher, l'effort
pour se débrouiller au milieu de toutes ces choses qu'ils ne com-
prennent pas. « Les choses mystiques et mystérieuses me font du
mal et m'attirent, je sens si bien le mystérieux » (Gisèle). Chez
Gat... et chez Pot... la progression est bien visible : au début
elles ont des sentiments douloureux d'automatisme, d'irréel, d'obs-
curité et ce n'est qu'après qu'elles se mettent à interroger.
« Pourquoi ces gens qui ont l'air drôles sont-ils sur terre? Pour-
quoi vit-on puisqu'on doit mourir ? » Le goût des questions mé-
taphysiques se rattache à diverses tendances, nous en voyons ici
un exemple.
Les malades semblent se rendre compte que cette obscurité
tient à quelque chose, à une opération mentale mal faite, ils ont
constamment comme Jo... le sentiment qu'ils ont oublié quelque
chose, qu'il leur manque une opération mentale. Ver... de même
qu'il se plaint d'avoir perdu sa personne se plaint d'avoir perdu
ses idées : dans son langage sans précision psychologique il dit
sans cesse <( qu'il ne se fait pas d'idées des choses, qu'il ne peut
pas poursuivre ses idées. » Il a été à l'enterrement d'un de ses
oncles et se plaint de ne pas se faire l'idée qu'il est mort. « Que
voulez-vous, dit-il en terminant, la vie est de penser et je ne pense
pas. )>
D'autres se rendent mieux compte qu'ils ont des idées nom-
breuses mais qu'ils ne les unifient pas, ne les coordonnent pas :
(( mon attention est sans cesse éparpillée, dit Lise. )> a J'ai trop
d'idées compliquées à la fois, dit Nadia », Xyb... se rend compte
qu'elle ne met pas les choses à leur place. Elle a des doutes et
des scrupules relativement a une domestique^ a je ne suis pas
naturelle avec elle, il faudrait qu'elle ait sa place dans mon ima-
gination comme domestique, les places des idées me semblent
changées. Il faudrait que les choses soient équilibrées de nou-
veau )). Ppi... se sent toujours faible dans son travail, il ne peut
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L'INCOMPLÉTUDE DANS LES OPÉBATIONS INTELLECTUELLES 295
pas avoir de vues d'ensemble, embrasser une étude, « il me faut
indéfiniment prendre chaque petit coin de la question ».
On peut rattacher à ce sentiment d'incoordination certains be-
soins qu'éprouvent les sujets. Ils ont, disent-ils, une soif d'ap-
prendre, ils voudraient qu'on leur (it des démonstrations, qu'on leur
fit comprendre des idées générales capables de mettre de l'ordre
dans leur esprit. Ce désir se symbolise dans la pensée de Jean qui
aspire à des enseignements d'une simplicité et d'une généralité
inouïes. Il est impossible de trouver un livre qui soit de son goiH :
(c Comment peut-on lui faire lire des détails à lui qui ne sait
rien de l'ensemble ?» A 32 ans, il ne veut lire que des manuels
et des manuels très généraux; il ne peut pas lire un manuel
d'histoire de France avant d'avoir lu un manuel d'histoire uni-
verselle et avant de s'intéresser à une notion scientifique quel-
conque, le voici qui veut étudier les « leçons de choses » qu'on
donne aux petits enfants. Ces goûts correspondent à des senti-
ments bizarres relatifs a la clarté de la méthode déductive, à un
besoin ridicule de subordination et de coordination qui se rat-
tache, si je ne me trompe, à la souffrance causée par la lacune
précédente.
5. — Sentiment de doute.
Nous arrivons au sentiment le plus connu de ces malades, celui
que l'on prend bien trop souvent comme représentant de tous les
autres. Même sur ce point il y a souvent des malentendus, ainsi on
se borne à dire que ces malades ont la manie du doute, la manie
de l'interrogation. Ce n'est là qu'une des formes du doute qu'ils
peuvent présenter : à côté de ces manies de s'interroger sur un
point comme sur l'existence de Dieu, ils ont un doute perpétuel
qui est un simple sentiment portant plus ou moins sur tous les
actes de la vie. J'avais insisté sur cette distinction dans mes an-
ciennes études sur l'aboulie. MM. Raymond et Arnaud la font
également avec netteté'. C'est pourquoi après avoir décrit les
manies de recherches nous arrivons maintenant aux sentiments
du doute.
Les malades doutent au début des choses qui sont évidemment
les plus obscures et qu'ils comprennent le moins, c'est-à-dire des
I. Raymond et Arnaud, \nn. mêd. psych., 1892, lî, aoa.
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LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
eligieuses. « Quand j'ai commencé à être malade, dit
ai perdu la foi de mon enfance, je ne savais pas pour
ison je ne croyais plus et j'ai fait tout ce que j'ai pu pour
r la foi, mais inutilement. » Claire commença par sentir
M religieuse s'en allait « c'était un défaut de confiance en
clque chose qui s'éteignait en moi comme une lumière qui
it. » Son éducation, ses désirs, toutes ses idées la ratta-
la religion, aussi se désolait-elle du doute qui l'envahis-
5t curieux de remarquer que cet affaiblissement de la foi
i causé par des lectures, des discussions, ne dépend pas
snts. Sa raison, si on peut ainsi dire, n'a pas perdu la foi
e et serait incapable de formuler la moindre objection.
D vieille erreur que de se figurer la croyance toujours dé-
: par des raisons et le doute par des arguments : la foi
te malade se perd sans raison en vertu du même mé-
qui fait paraître le monde étrange et qui amène le senti-
dépersonnalisation.
I la maladie s'aggrave, le doute commence à porter sur
Bs qui d'ordinaire sont crues plus facilement. Les ma-
ndent confiance dans les personnes environnantes. Claire
plus croire ce qu'on lui dit, n*a plus de confiance dans
ye de ses parents. Lod... de même ne croit plus qu'une
rsonne, c'est sa sœur, aucune autre ne peut la rassurer
porte quoi. « Je sais bien que l'on a raison, dit Lise, je
liais je ne puis pas être convaincue... » « Je sais que ce
> me dites est vrai, me répond Gisèle, ma raison me le
te ainsi, mais mon impression persiste... impossible
invaincue dans le fond. » « Je veux vous croire, je me
ue je vous crois... mais ce n'est pas ma faute, je ne le
... il me reste quelque chose, un doute, un vague, un
is quoi... » (Claire, Fik..., etc.) A toute autorité, elles
L le désir d'une autorité plus grande, si le médecin leur
les voudraient le prêtre et si c'est le prêtre, elles lui re-
t de ne pas être archevêque ou pape « et encore si le
parlait, je ne le croirais pas, car il se pourrait qu'il m'ait
prise et que sa réponse infaillible ne s'applique pas à la
» (Claire), de même que la confiance est disparue sans
de même des raisons sont tout à fait incapables de la ra-
3i ce défaut de confiance dans les personnes s'exagère et
;omme il arrive chez Simone, que je compte étudier dans
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L'INCOMPLÊTUDE DANS LES OPÉRATIONS INTELLI
un autre ouvrage sur la psychologie des perséci
rapprochera de la persécution.
Un degré de plus et les malades vont douter
avenir ou de leur propre passé. L*absence d
sombre qui se présente comme un trou noir est i
tère de ces malades. Am... ne peut rien croire de
demain et malgré toute évidence ne sait pas où c
sera réellement sortie, si elle saura marcher dans
prend même une terreur folle de Tavenir, elle ne
y penser et n'essaye pas de se représenter rien a
tant présent. D'autres douteront du passé et
besoin de vérifier leurs souvenirs. « Est-ce bien
ceci ou cela ? »
Enfin, les malades se mettent à douter du prés
qu'ils ne sont pas sûres de ce qu'ils voient. « De]
dit un malade de Legrand du Saulle, j'avais pris Y
parler à moi-même, pour être sûr que j'étais ici o
donner des preuves. * » ce Je vois bien ceci, dit '
fond je n'en suis pas plus sûre que cela etjeretoui
dans cette chambre pour voir si l'objet y est bie
plus sûre. Vous avez beau me l'affirmer, je crois (
vous tromper. » On voit ici comment les manies
les sentiofients d'incomplétude. Ce doute de la ré
au sentiment de l'étrange, à l'étonnement que ce
comme To..., éprouvent en présence des choses
de l'irréel que nous avons déjà étudié. Tous ces
effet dépendent étroitement les uns des autres.
A ces sentiments de doute se rattachent aussi
de découragement que nous avons vus à propos (
qui peuvent se généraliser, « je crois que tout est
Claire, non seulement pour moi, mais pour tous I
sentiments de défiance, des soupçons. Ces malades
rassurés et prennent des précautions interminal
ne les trompe pas, pour qu'on ne livre pas leurs se
doute va donner naissance au besoin perpétuel d
étrangère que nous retrouverons dans leurs besoir
Tous ces sentiments relatifs aux fonctions inte
analogues à ceux qui ont été constatés à propos
I. Legrand du Saulle, Folie du doute, p. 47-
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SS STIGMATES PSYCHASTHÊNIQUES
nt des sentiments d'inachèvemenl : « Vous pon-
5, dit Lise, je n\irriverai pas à délirer complè-
[^apable de penser quelque chose complètement,
» Je puis donc leur appliquer le même nom
t et eu faire aussi des sentiments d'incomplétude.
nts d'incomplétude dans les émotions.
s crises de rumination, d'agitation ou d'angoisse
lées par des émotions : c'est la un fait important
jà insisté. Beaucoup d'auteurs en ont tiré une
rave, c'est que Fémotion détermine la crise à
ération et ils ont admis sans discussion que les
;hasthéniques étaient trop grandes, trop fortes,
ins cette discussion, je remarquerai seulement
toujours là ce que pensent les malades d'eux-
>nt de tout autres sentiments à propos de leurs
. — Sentiments d'indifférence.
té autrefois par Esquirol, s'exprimait ainsi :
!!st incomplète, les fonctions, les actes de la vie
it restés, mais dans chacun d'eux il manque
sai^oir la sensation qui leur est propre et la joie
Chacun de mes sens, chaque partie de moi-même
B séparée de moi et ne peut plus me donner
»
ouvent,en effet, très souvent un mécontentement
ipos de leurs émotions et surtout à propos des
jlent déterminer les crises d'agitations forcées:
émotion génitale ou de l'émotion de la colère,
Je l'émotion s'arrête avant de devenir complète
sforme en une autre opération mentale, les ru-
5 et les angoisses. « Je ne peux pas, dit Lise,
me émotion ou d'un sentiment, c'est là ce qui
rupules. » Cette appréciation des émotions et
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SEiNTIMENTS D'INCOMPLÉTUOE DANS LES ÉMOTIONS 299
des sentiments est très générale et comme le phénomène a son
importance, il faut en rapporter quelques exemples.
c< Il me semble, dit Pot..., que je ne reverrai plus mes enfants,
lont me laisse indifférente et froide..., je voudrais pouvoir me dé-
sespérer, crier de douleur, je sais que je devrais être malheu-
reuse, mais je n'arrive pas h Tètre..., je n*ai pas plus de plaisir
que de peine, je sais qu'un repas est bon, mais je Favale puisqu'il
le faut, sans y trouver le plaisir que j'aurais eu autrefois. Les joies
ont fui, les peines aussi, je vais a Tenterrement de mon grand-
père et je n'ai même pas une crise de chagrin... Il y a une épais-
seur énorme qui m'empêche de ressentir les impressions mo-
rales, qui m'empêche de sentir même de la peine. » On retrouve
ici a propos des émotions les mêmes expressions « du mur, de
Tépaisseur » qui servaient déjà à bien des malades pour carac-
tériser le trouble de la perception extérieure.
Nem... n'est plus la même, elle nes'occupeplus ni de son mari ni
de son enfant. «Je voudrais bien essayer de penser à ma petite fille,
mais je ne peux pas, la pensée de mon enfant me traverse à peine
l'esprit, elle passe et ne me laisse aucun sentiment » . « Il me semble,
dit Brk..., que depuis un an je n'aime plus personne. )> « Mes en-
fants me gênent, dit Xyb..., je ne suis pas pour eux ce que j'étais
avant, je n'existe plus au point de vue maternel, je voudrais bien
m'y intéresser, mais je ne veux pas. » « Autrefois j'étais peureuse,
dit Gay... et vous n'auriez pas pu me faire entrer dans cette
salle pleine de squelettes (le musée de la Salpêtrière); mainte-
nant cela ne me fait rien du tout, je ne me sens même pas
effrayée... tout m'est égal. » u Je n'aime plus les gens, dit Gisèle,
il ne me semble pas que j'aime comme les autres, comme j'aimais
avant; j'ai l'impression qu'ils m'aiment mieux que je ne les
aime. Je vis repliée sur moi-même comme une égoïste qui
pourtant se détesterait. Je ne me fâche plus de rien, je n'ai plus
peur de rien, je ne m'intéresse plus à rien, tout glisse sur moi
comme sur une toile cirée, tout est émoussé. »
Voici les remarques de Claire sur ses propres émotions : « les
émotions s'arrêtent, ne se développent pas, elles se perdent et
n'arrivent pas jusqu'à moi, une chose qui aurait dû m'effrayer
me laisse calme, je n'ai pas de la peur, j'ai trop de calme;
j'éprouve quand même les joies et les peines, mais affaiblies... Il
est très rare que je puisse rire, je souris mais je ne puis rire de
bon cœur, une joie comme une peine cela reste au loin, cela reste
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SENTIMENTS D'INCOMPLÉTUDE DANS LES ÉMOTIONS 301
et elles ne rêvent pas toutes la même chose )> aussi continue-t-elle
à éprouver la même Inquiétude pendant le sommeil que pendant
la veille.
Lise a le sentiment qu'elle dort à moitié, qu'elle reste à rumi-
ner comme pendant la veille; au réveil elle a le sentiment d'avoir
dormi d'une manière très incomplète. Qyand elle va mieux, elle
se réveille en sursaut, étonnée de dormir si profondément, d'une
manière qui contraste avec son sommeil habituellement si incom-
plet.
2. — Sentiment d'inquiétude,
A C(Hé de ce sentiment d'incomplétude il faut décrire un état
d'esprit tout à fait essentiel chez les obsédés, c'est le sentiment
d'inquiétude. « Un trait caractéristique qui réunit tous ces états en
apparence si divers, c^est l'inquiétude intellectuelle, qu'on peut
comparer h la lypémanie anxieuse qui correspond à une inquié-
tude affective^. » A mon avis tous ces malades ont presque per-
pétuellement une inquiétude à la fois intellectuelle et émotive.
u Je suis inquiet », c'est un mot que tous les malades ont per-
pétuellement h la bouche. « Inquiétudes perpétuelles, dit Brk..,,
telle est ma vie c'est l'inquiétude qui me mène à l'ahurissement. »
" J'ai toujours un esprit inquiet, tourmenté comme s'il allait
m'arriver je ne sais quel grand malheur. » (Kl...). « Ma maladie,
dit Nadia, c'est d'avoir l'esprit inquiet, je guérirais si je pouvais
avoir un peu de sécurité. » « Inquiétude, tourment constant, répète
Claire, c'est là mon grand mal. » (c En somme j'ai toujours une mou-
che qui me digonne, je suis malade d'inquiétude, nous dit très bien
Gisèle, malade de peur dans le doute, je n'ai pas de confiance en
moi, ni en Dieu, ni en rien; je n'ai pas la paix; je fais des efforts
surhumains pour avoir cette paix et mon âme est toujours emmail-
lotée dans l'inquiétude. J'ai peur pour mes sentiments, pour mes
actions, j'ai peur pour mes idées, peur de mon cerveau dont je ne
me sens plus la maîtresse, j'ai peur de lutter, peur de tout enfin
et de ne je sais quoi, et au fond je ne sais même pas si j'ai
peur. C'est une inquiétude poussée à un degré énorme comme
si on attendait toujours quelqu'un de très cher exposé peut-être
à un très grand danger, on ne sait lequel. »
Cette inquiétude ressemble en effet beaucoup à la peur et l'on
I. Bail, Revue scientifique, i88a, II, 4a-
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LES STIGMATES PSYCI
malades emploient soi
ue le phénomène soîl t
»lus précis, plus dcterm
ositives et qui éveille (
)n. I/inquiétude est bea
[) cause de cet état, ni le
r en sortir ne sont biei
liflférence chez les mala
attention, ils reconnai
r; (( il vaudrait mieux a>
ins pénible. » On observ
sont très diminuées ou
ladie sont devenus inca
[]ui se plaignait de ne
es ajoute : <c je n'ai plu
j rien... cependant je
>ur ces raisons, je croii
s scrupuleux, n'est pas
aucune autre émotion {
ide me paraît un phénoi
ieu une excitation h Ta
citation : Tinquiet sent
de son état, il ne sai
nq minutes en place. L'i
France, un état deconsc
p le sentiment que Téta
iplet. (1 y a une inquiétu
pas terminée, qu'il rest
tpas prise. Il y a une in
l'attention n'est pas fix(
le monde a un aspect é
[>tionnelle, quand on n<
r net, de souffrance nel
ne donne pas d'inqui
L»s divers états sont jus
le nom de sentiments d
ms et les émotions. L'in
uée par les sentiments
entiment de maldise et
ir.
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SENTIMENTS DINCOMPLÉTUDE DANS LES ÉMOTIONS 303
L'observation des malades démontre cette interprétation ; Fin-
quiétude a commencé chez Claire avec les premiers doutes reli-
gieux vers Tâge de i8 ans, c'est-à-dire avec les premiers senti-
ments d'incomplétude, c'est à ce moment qu'elle a eu des
inquiétudes pour sa foi, pour ses confessions, des inquiétudes
sur <c la lumière qui s'en allait ». Lobd..., femme de 35 ans, nous
dit très bien : « Quand je suis inquiète, c'est comme si je n'avais
pas terminé quelque chose, comme s'il restait à propos de tout
quelque chose de pressant à accomplir. » a J'ai un besoin de
compléter quelque chose, dit Gisèle, je cherche toujours ce que
je devrais faire, ce que je devrais surveiller, ce que je devrais
chercher, mon esprit ne me parait jamais assez occupé, assez
émotionné, il cherche toujours ce qu'il aurait à faire, à sentir
d'autre. »
Un sentiment de ce genre peut évidemment être la conséquence
de certaines idées fixes. Mais il faut remarquer qu'il existe chez
tous les malades quelles que soient leurs obsessions. Il ne me
semble pas certain que l'inquiétude soit réellement déterminée
par le motif qu'invoque le sujet pour l'expliquer. Si on retire ce
motif il en prend immédiatement un autre, les motifs changent
indéfiniment et l'inquiétude reste la même. Quand les malades
vont mieux et qu'ils n'ont plus en réalité d'obsessions précises, ils
restent inquiets pendant quelque temps et par habitude, disent-ils,
ils continuent â chercher ce qui pourrait bien les tourmenter.
«< C'est un fond d'habitude, dit Lise, qui m'empêche encore de
dormir tranquille. » Chez beaucoup de malades, ces inquiétudes
existent longtemps avant la maladie proprement dite. Mus...,
Mb..., Lise reconnaissent qu'elles ont été ainsi depuis l'enfance.
Jean était inquiet au lycée à cause des devoirs, des leçons, des
pensums; il devenait malade quand il y avait une composition de
récitation à préparer, comme aujourd'hui il est tourmenté par les
femmes, les fluides, les omnibus et les lettres à mettre à la
poste. L'inquiétude me semble donc être un sentiment fonda-
mental antérieur aux obsessions par lesquelles le malade cherche
souvent à la justifier : c'est la forme complexe que prennent plu-
sieurs de ces sentiments d'incomplétude.
3. — Le besoin d'excitation . — U ambition.
Pour sortir de cette souffrance inquiète les malades cherchent
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GMATES PSYCHASTHÉNIQUES
Q chose qui pousse plus loin leurs senti-
les excite. C'est ce besoin que nous avons
grossièrement dans le besoin de poisons
)manie, dans la morphinomanie, dans la
on génitale parfaite chez certains éroto-
>re dans « le besoin de faire des sottises
> (( le besoin fou de sensations nouvelles ».
re sous bien des formes variées, en parti-
»oins de direction et d'aflection.
t aussi une partie active, elle excite à faire
rque est vérifiée par Texistence d'un sen-
nos scrupuleux, Yamhition, Ils sont d'à-
ncieux, ils s'eflopcent de faire les choses
nent parce qu'elles leur paraissent tou-
in était un élève modèle dans sa médio-
I malade plutôt que de ne pas faire son
prenait toutes les précautions possibles
;nter un maître. Encore maintenant Vor...
îUe a une conscience ridicule : elle se forcé
re toutes les choses pénibles ; quand elle
se croit obligée de le lire jusqu'au bout
même si le livre Tennuie. Meu... travaille
e permettre aucun repos, « il me semble
cailler un moment je n'aurais plus le droit
Lvité inquiète dépasse le présent : « il faut
je pense à plus tard, que je cherche ce
, que je dépasse ce travail, que j'aille au
avenir une manie et nous Tavons justement
manie de l'au delà, mais les sujets ont ce
lades, ils l'ont toute leur vie et je crois
trait de caractère en rapport avec leur per-
ms le même sens et l'on comprend com-
e sorte d'ambition insatiable. Nadia n'est
içon dont elle joue du piano, elle veut ^Ire
Je artiste,... moi, je suis le ver de terre,
est l'étoile et je voudrais devenir plus digne
le je veux toujours devenir l'égale des plus
[{ue je sache bien que je n'ai jamais été
Même si j'avais pu réussir à être une grande
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SENTIMENTS D^INGOMPLÉTUDE DANS LA PERCEPTION PERSONNELLE 305
musicienDe je n'aurais jamais été contente, j'aurais toujours voulu
g^rimper plus haut encore... Mon ambition n'a pas de limites ».
Quelle que soit la situation à laquelle ils parviennent, les scru-
puleux en sont toujours mécontents, ils rêvent toujours mieux,
toujours autre chose. Il est bien probable que ces sentiments bi-
zarres sont quelquefois le principe d'une activité utile et qu'ils
ont inspiré des ambitions généreuses ; mais il est vrai aussi qu'ils
peuvent être plus souvent le point de départ de jalousies mala-
dives et d^une sorte de délire des grandeurs. « J'ai l'ambition de
tout, dit Fa..., cela me rend jalouse de tout, oh ! si j'étais comme
les gens qui sont dans cette voiture, comme cette belle dame,...
je voudrais arriver au comble de la fortune et de la gloire... et
je ne serais peut-être pas encore satisfaite. »
Tous ces sentiments d'incomplétude que les sujets éprouvent
à propos de leurs émotions sont bien analogues à ceux qui ont
été constatés à propos de l'action et de l'intelligence et ils mé-
ritent bien le même nom.
4. — Sentiments d'incomplétude dans la perception
personnelle.
M. Séglas, en décrivant la crise d'obsession, signalait quelques
phénomènes très intéressants qu'il considérait comme l'indica-
tion d'un trouble de la conscience pendant la crise. « L'un d'eux,
dit-il, un agoraphobe, s'exprime ainsi : au bout de quelques pas,
il me semble que je me dédouble, je perds la conscience de mon
corps qui me semble être en avant de moi... j'ai bien conscience
que je dois marcher; mais je n'ai pas conscience de ma propre
identité, que c'est bien moi qui marche. Je fais des efforts pour
me prouver que c'est bien moi et souvent il me faut interpeller
un passant, entrer dans un magasin, pour parler, pour demander
quelque chose afin de me donner une nouvelle preuve que je suis
réellement bien moi...' » Un autre malade, garçon de 12 ans,
tourmenté par des obsessions, des manies du doute et du toucher
reste un instant en arrière de son précepteur, il accourt effaré
en s'écriant qu'on l'avait abandonné en arrière, qu'il fallait
I. Séglas, Leçons cliniques sur les maladies mentales, 1895, p. i3i.
LES OBSESSIONS. 1. — 20
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SENTIMENTS D'INCOMPLÉTUDE DANS L\ PERCEPTION PERSONl
moi et maintenant non seulement je ne sais ce que je i
je ne puis me rendre compte de ce qu'on appelle Fexiî
réalité*. »
Ces cas sous leur forme typique sont si étranges qu'ils
tinué à attirer l'attention. Dans un article publié par
phUosophique^ M. Dugas propose de désigner le phénon
le nom de sentiment de dé per sonna Usation, il observ
sentiment se trouve lié avec un autre phénomène ci
« déjà vu », c'est-a-dire que le sentiment de déperson
s'associe souvent avec la fausse reconnaissance. « Souvei
atteint de fausse reconnaissance avait conscience d
autre, il se sentait rester le même en devenant deux,
une voix, dit un malade, comme celle d'une personne é
mais en même temps je la reconnaissais comme mienn
qui parlait me faisait l'effet d'un moi perdu, très ancic
dainement retrouvé^. » Cette impression le malade i
seulement à propos de sa parole, mais il l'a aussi à ]
ses mouvements, de ses actes et il en arrive à l'aliénati
personne, h la dépersonnalisation ^.
J'ai eu l'occasion de rapporter deux observations U
remarquables du même genre, celles de Bei... et celle d
Les deux malades sont identiques dans les grands traits
d'émotions ils perdent la conscience d'eux-mêmes, ils c
cependant \\ exécuter d'une façon correcte toutes les c
psychologiques, ils sentent tout, se souviennent de tout
agissent, d'une façon à peu près normale ; mais ils répi
jours : ce n'est pas moi qui sens, c'est comme si ce n'était pi
• parle, qui mange, comme si ce n'était pas moi qui souffi
si ce n'était pas moi qui dors, a Elle voyait clair, enten
sentait correctement, pouvait se mouvoir sans peine, m;
cherchait elle-même en ayant l'impression qu'elle n'
la, qu'elle avait disparu, que les choses présentes n'avaii
rapport avec sa personnalité. Depuis ce moment elle r<
jours la même chose : mais où suis-je? que suis-je de^
n'est pas moi qui mange, ce n'est pas moi qui travaille,
vois pas faire ceci ou cela, il y a quelque chose qui me r
I. Bail. Bévue scientifique, 1888, II, p. 43.
a. Du f^s. Revue philosophique, 1898, I, 5oi.
3. Id., ibid., 5o3.
4. Raymond et Pierre Janel, Névroses et Idées fixes, II, p. 6a.
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LES STIGMATES PSYGHASTIIÉNIQUES
ni M. Bernard-Leroy, qui avait déjà publié, a propos
une discussion sur laquelle je reviendrai, a présenté
de psychologie un nouveau cas remarquable, tout à
le aux précédents. Il s'agit d'une femme de 4i ans
}ée malade graduellement à la suite d'émotions vives
îs. Elle s'agite continuellement et se livre à Texécu-
rements bizarres et compliqués, elle se tâte les mains,
imène les mains sur sa tète et son cou. Elle dégrafe
orsage pour tâter sa poitrine, elle fait claquer ses
je tire les cheveux, se tire le pavillon de l'oreille...
ille ne sent plus rien ou du moins ne sent plus rien
efois et que dès lors c'est plus fort qu'elle. (C'est là
tie des manies de vérifications, des tics, des agita-
es que nous connaissons chez ces malades),
ju'elle tâte. C'est insensible tout cela, dit-elle en se
ille. Quand je me peigne je ne sens pas mes cheveux,
s quand je me lave, ni mes lèvres quand j'embrasse,
ilheureux d'être vivante et de ne pas pouvoir voir les
ils sont là. Je ne vois pas du tout comme avant, je
IS comme avant, il me semble ne pas entendre le
i pas, cela me gêne pour marcher, je. ne me rappelle
I ne sais plus rien, je n'ai plus aucune émotion... »
i ne constate aucune diminution appréciable d'aucune
elle semble avoir des souvenirs précis quand on
t elle paraît éprouver les émotions normales *.
s et Régis, en rapportant les observations de M. Séglas,
r que dans ces cas la conscience n'est point troublée
jre complète. « Si on entend le mot conscience au
! clinique en tant que perception exacte des phéno-
iiques éprouvés, il est évident que sauf de très rares
a conscience est conservée dans l'obsession ; si les
statent ce dédoublement, s'ils l'analysent si correc-
i finement, c'estqu'ils en ont conscience ^ » Ces
client seulement ici ce fait important que Tapprécia-
uelle des obsessions est conservée, que le délire de
3roy, Dépersonnalisalion. Comptes-rendus du congrhs de psychologie
légi», op. cit., p.4o.
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SENTIMENTS DINCOMPLÉTUDE DANS LA PERCEPTION PERSONNELLE 309
Tobsédé est locomplet et ne détermine ni conviction, ni impulsion
complète. Mais la conservation de Tintelligence proprement dite,
comme faculté de critique et de jugement n'empêche aucunement
Taltération d'autres phénomènes psychologiques qui entrent dans la
conscience personnelle. Si ces observations de M. Séglas et toutes
les autres semblables, car je les crois très nombreuses, ne nous
montrent pas un trouble du jugement critique mais simplement
an trouble de la conscience personnelle elles n'en sont pas
moins très importantes pour l'interprétation des obsessions elles-
mêmes.
MM. Pitres et Régis font observer ensuite que ces observa-
tions sur le sentiment de dédoublement de la personnalité ne se
rapportent à notre étude actuelle sur le groupe très homogène
des psychasthéniques, sur la maladie des obsessions. « Ces faits,
disent-ils, forment une catégorie spéciale appartenant à l'automa-
tisme psychique au moins autant qu'à l'obsession, les malades
qui se dédoublent au point de se croire en avant d'eux-mêmes ou
de se chercher ailleurs ont autre chose que de l'obsession simple,
ils éprouvent un phénomène analogue à certains effets de dualité
hystérique* ». Je ne puis pas partager cette opinion, le dédouble-
ment hystérique peut exceptionnellement donner naissance à des
expressions à peu près semblables, mais en règle générale il ne
se présente pas du tout sous cet aspect. Dans l'hystérie il y a
subconscience véritable, les phénomènes psychologiques forment
deux groupes indépendants qui s'ignorent réciproquement, mais
chacun de ces groupes conserve sa personnalité. Ici il n'y a pas de
dédoublement réel, on ne constate ni anesthésie, ni amnésie, on ne
peut mettre en évidence aucune lacune dans le groupe principal
des phénomènes, mais il y a un sentiment général qui porte sur
l'ensemble de tous ces faits et qui les représente à la conscience
comme changés, comme insuffisamment rattachés à la personna-
lité, c'est la un fait différent de l'hystérie proprement dite.
M. Bernard-Leroy en cherchant le diagnostic de ces troubles dit
« qu'il a éliminé successivement les diagnostics de folie du
doute, de syndrome des négations, de mélancolie, de confusion
mentale, d'hypocondrie, et qu'il range ces faits dans la névropa-
thie cérébro-cardiaque de Krishaber* ». Qu'il s'agisse de la
I. Pitres et Régis, op. cit., p. 4o.
a. Bernard Leroy, Comptes-rendus du congrhs de psychologie de 1900, p. 4^7.
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LES STIGMATES P
shaber, cela est incontestable, puisque cette mala-
ituée avec netteté que par cet unique symptAme de
isation. Le diagnostic véritable consiste a recher-
el des groupes morbides aujourd'hui reconnus
vrose de Krishaber. Il est également facile d^éli-
Irome des négations, la mélancolie, la confusion
je ne partage plus Topinion de Fauteur quand il
du doute, rhypocondrie et probablement aussi les
t il ne parle pas. La malade même qu*il décrit a
; a même des manies mentales de vériBcation per-
ttouchements incessants ne sont pas autre chose
I rapport avec des manies de vérification. Tous les
jemment décrits ceux de Krishaber, ceux de Bail,
glas, celui de M. Dugas ont en même temps des
anies et des obsessions. Il est intéressant de rap-
»os la suite de Inobservation de Bei, que je publiais
es 18 mois de dépersonnalisation pure pendant
iade ne se préoccupait que de la perte de son moi,
nue un peu plus tranquille sur sa personne, elle
rtie le sentiment qu'elle éprouvait ; mais elle s'est
ter des crises d'interrogation à propos des souve-
l'elle recherche ce* qu'elle a fait la veille, si elle
y a huit jours ou si elle n'y a pas été, etc. Ce sont
riscs de rumination caractéristiques de la folie du
dire de l'une des formes de l'état psychasthénique.
observations du sentiment de dépersonnalisatiou
i^ais faire allusion tout à l'heure, observations qui
>cs, portent toutes sur des obsédés. Enfin chez la
)sédés, des maniaques, des phobiques que je viens
les chapitres précédents on trouve au moins en
imcnt de dépersonnalisation. Je suis donc disposé
; sentiment de dépersonnalisation est un des symp-
t psychasthénique et qu'il y a lieu de le rapprocher
énomènes précédemment étudiés,
rouvons alors en présence d'un autre problème, de
e phénomènes s'agit-il dans ces cas de déperson-
crois que bien souvent il s'agit de véritables idées
3rtains de ces malades ont fini par concevoir une
noins générale à propos des troubles de leur per-
sont obsédés par la pensée qu'ils ont perdu leur
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SENTIMENTS DiNCOMPLÉTUDE DANS L\ PERCEPTION PERSONNELLE 311
moi, comme d'autres par la pensée qu'ils ont perdu leur mora-
lité ; c'est une obsession qui rentre dans la catégorie des obses-
sions de la honte de soi, et je Tai déjà signalée à ce propos.
Dans d'autres cas se développent h ce sujet des manies men-
tales d'interrogation et de vérification comme on vient de le voir.
Mais dans un très grand nombre de cas, je pense que, surtout au
début, quand la maladie est simple, il s'agit d'un sentiment que
le malade éprouve h propos de tous ses phénomènes de con-
science. Tous ces malades n'ont pas comme Claire la manie de
se rabaisser, comment se seraient-ils rencontrés sur une idée
vraiment aussi étrange et en dehors des pensées communes.
Cette idée se présente brusquement chez Bei..., chez Ver...,
chez PI... avant toute manie mentale qui chez Bei... ne com-
mence que 2 ans plus tard. Enfin dans une discussion très impor-
tante nous aurons à comparer ce fait avec un sentiment qui est
décidément très fréquent chez les épileptiques, et il est évident
qu'il ne s'agisse pas chez eux d'idées obsédantes. Je crois donc
que ce trouble de la personnalité est souvent une altération
psychologique primitive chez le scrupuleux et qu'il révèle une
insudisance de la perception personnelle.
Ainsi entendus les sentiments de trouble de la personnalité
sont très fréquents chez nos malades et présentent divers
degrés.
I . — Sentiment d*étrangeté du moi.
D... au début d'une crise de dipsomanie sent un trouble dans
sa personne v il me semble que je m'effondre, .que mon être tout
entier devient confus et étrange^ c'est un état intolérable et
j'éprouve le besoin de faire des folies pour en sortir ». Vof...,
femme de 38 ans, qui a été mordue par un chien, le premier jour
de ses règles, en conserve une vive impression ; elle n'est pas tout
de suite tourmentée par l'obsession du chien enragé qui ne
viendra que plus tard. Pendant plusieurs mois elle reste tour-
mentée par un sentiment qu'elle exprime de la manière suivante:
« Il me semble que je suis humiliée d'avoir été mordue, c'est
comme si cela m'avait flétrie, je ne suis pas comme j'étais aupa-
ravant, je ne suis plus la même, je suis une personne drôle, infé-
rieure, plus basse que je n'étais, »
Kl..., pendant les périodes d'abaissement qui précèdent la
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LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
talions forcées comme une aura, se sent drôle,
;omme enveloppée par quelque chose qui n'est pas
;la que je reconnais que je vais avoir une crise et
nterroger sur la naissance de mon enfant ».
sans cesse qu* (( elle n'est pas elle-même à la façon
file ne veut pas être un être à part et qu'elle fera
tation motrice) pour retrouver sa personne natu-
2. — Sentiment de dédoublement,
uble du sentiment de la personnalité déjà plus pro-
sentiment de division, de dédoublement : on le
5 communément. Moreau (de Tours) remarquait
fréquent dans les monomanies ^ Krishaber le si-
irs reprises : « Une idée des plus étranges qui s'im-
Bsprit malgré moi, dit un de ses malades, c'est de
uble, je sens un moi qui pense et un moi qui
Je me fais l'effet d'être double, je sens comme
qui se combattent, dit également un malade de
'une qui est bien mienne, qui cherche à raisonner
es, l'autre qui me serait en quelque sorte imposée
s toujours. »
un sentiment de dédoublement plus ou moins ac-
>rès chez tous mes malades et je pourrais présenter
ic d'exemples. Je signale seulement quelques va-
lénomène. « On me discute en dedans, c'est comme
moi deux personnes. » (Pr... 210) « Je renferme
le raisonnable et l'irraisonnable qui luttent constam-
tr© l'autre. » (Za... 216) « Je suis comme dédoublé,
en spectacle à moi-même. » (Nah...) « Pourquoi
ble » (Ver...) « Depuis la fin de ma grossesse, tout
nouveau et étrange et il me semblait que je deve-
» (Dd...) 18) (( C'est comme s'il y avait en moi
pense sur la vie un tas de choses auxquelles je ne
, l'autre répète : pourquoi faire toutes ces bêtises m
Tours), Psychologie morbide, iSSg. p. ao8.
a névropathie cérébro-cardiaque, observ. 6.
is cliniques sur les maladies mentales, 1896, p. ia5
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SENTIMENTS D'INCOMPLÉTUDE DANS LA PERCEPTION PERSONNELLE 313
Dob... donne de ce dédoublement une expression matérielle
qui si elle était générale nous conduirait à faire jouer un rôle à
la dualité des hémisphères. « J'éprouve un sentiment qui me fait
horreur, je marche comme dans un rcve, ma tête me semble
nettement divisée en deux parties Tune tout entière plongée dans
rinertie la plus profonde, dans une sorte de rêve, à tel point
que rœil de ce côté me semble fixe, Tautre partie reste lucide
et m'appartient seule ; c'est insupportable. »
Lise se sent toujours l'esprit dédoublé en plusieurs personnes
et elle sent toujours en elle-même plusieurs pensées qui se
déroulent simultanément et indépendamment. « Il y a toujours,
dit-elle, une partie de mon cerveau qui est libre et qui fait ce
qu'elle veut. Je ne parle jamais sans avoir une autre idée en tête.
J'ai toujours le besoin de penser à trente-six choses h la fois, une
ne me suffît pas. » Elle va jusqu'à dire que la nuit elle ne dort
jamais complètement. « Quand je dors tout ne dort pas. Il y a
un côté qui ne dort pas, qui ne sait à quoi penser et qui s'ennuie.
11 en résulte que les deux côtés de la tête se disputent. Si je
pense à maudire Dieu, une partie de l'esprit l'accepte et l'autre
pas et je ne sais plus laquelle à raison. » Quand elle va mieux
elle est tout étonnée de ne plus avoir deux idées à la fois et cela
la gêne. Cela est si vrai et si curieux, qu'elle se réveille en sur-
saut la nuit, comme nous l'avons déjà vu, sentant qu'il y a en
elle quelque chose d'anormal parce qu'elle dort tout entière.
Si Lise ne parle jamais que de deux personnes, il n'en est pas
de même de Claire. Pour elle la personne d'autrefois est absolu-
ment disparue, elle est partie, c'était la bonne. « 11 me semble
qu'elle n'existe plus en moi, qu'elle pleure à côté de moi, qu'elle
est en délire, ma vraie personne n'arrive plus à se rendre
compte des choses. Pour remplacer cette vraie personne il en est
survenu une autre, moins bonne, qui a cédé le pas à une troi-
sième, à une quatrième. Il s'est formé au moins six personnes, des
bonnes et des mauvaises qui se présentent simultanément ou suc-
cessivement, qui se manifestent par des voix, qui se traitent réci-
proquement de Judas. » Trois de ces personnes lui paraissent
assez précises, les autres sont vagues, on ne sait ce qu'elles
pensent. En général elles se disputent et ne pensent jamais
toutes la même chose. Pour accepter complètement une action
ou une idée il lui faudrait la faire accepter par les six personnes
et elle se répète cette idée autant de fois qu'il y a de personnes.
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:S PSYCFUSTHÉNIQUES
le. Elle n'arrive jamais au bout parce
intercalent, a C'est pour cela, dit-
ais acceptée complètement, il me
s personnes qui ne Tont pas com-
c dédoublement étrange existe aussi
e sommeil il y a moins de personnes,-
mais elles rêvent toutes les quatre
t le rêve est si loin et si vide qu'on
e autre dont le rêve est vague mais
proche : c'est la plus mauvaise. »
semble qu'elle remonte en suppri-
récemment formées, c'est ce qu'elle
les. » On peut les « passer physi-
ive l'état de sensibilité organique qui
j personne antérieure; mais il est bien
moralement », c'est-à-dire d'unifier
ujours plusieurs qui se disputent,
nal, quand elle descend, elle reprend
j'avais en moi deux personnes qui
is, maintenant il y en a six ou huit. »
vation très complexe on remarque
a vraie personne pleure à côté de
raconte immédiatement une foule de
si sa vraie personne en dehors d'elle,
hors (( jolie, aimable, vive, bonne,
est une figure si différente de ce que
souvent elle se voit triste : sa vraie
;me. Ces hallucinations bizarres qui
e en dehors sont fréquemment citées
dépersonnalisation. Le malade ago-
is se voyait à quelques mètre en
rnard Leroy cite une malade « qui se
h trois ou quatre mètres... en même
I d'être comme transportée en dehors
ui semblait qu'elle assistait comme
it de ses propres états de conscience
IX d'une personne étrangère*. » J'ai
isions ce que je pensais des halluci-
\u]uc, i8g8, II, p. 161.
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SENTIMENTS D'INGOMPLÉTUDE DANS LA PERCEPTION PERSONNELLE 315
nations du scrupuleux, elles sont incomplètes et manquent de
réalité. Le sujet « croit se voir pleurer en dehors, il n'en est
pas sûr ; il lui semble qu'il devrait être en dehors h pleurer
sur lui-même ». Ces images sont des symboles plus ou moins
précis, plus ou moins vivement colorés que le sujet, en vertu de
ses manies de précision et de symbole, s'efforce de concevoir
pour exprimer ce sentiment de dédoublement : le sentiment lui-
même reste le phénomène essentiel.
3. — Sentiment de dépersonnalisation complète.
Déjà dans bien des cas précédents, aux sentiments d'étrangeté
du moi, de dédoublement de la personne, se joignait un sentiment
de dépersonnalisation plus ou moins complète. Claire nous dit
très bien que sa personne actuelle est divisée, dédoublée, mais
que c'est là une personne déjà artificielle et surajoutée, la vraie
personne, celle d'autrefois, est complètement partie, elle est en
dehors, à côté, elle pleure. C'est un cas tout à fait identique à
ceux dont parlait Taine : « au début, la personne est morte, puis
elle devient autre ».
Dans des cas moins complexes on trouvera simplement la dis-
parition, la mort de la personne normale. Aux deux cas, que j'ai
déjà étudiés, ceux de Ver... et de Bei... * j'ajoute en résumé
quelques cas nouveaux. PI..., femme de 28 ans, commence la
dépersonnalisation à la suite d'une grossesse, elle sent qu'elle
n'est pas naturelle, qu'elle ne vit pas comme elle vivait autrefois,
elle cherche à se retrouver en se regardant dans la glace et elle
ne se reconnaît pas « il est bizarre qu'elle sente encore la souf-
france, puisqu'elle n'est plus rien; ses bras et ses jambes mar-
chent seuls car elle n'existe plus... Je raisonne comme tout le
monde et je vous assure que ce n'est plus moi, je sens bien que
je mange et cependant ce n'est pas moi qui mange, c'est telle-
ment drôle que je ne peux pas détourner mon esprit de cette
maladie ». Cette femme en même temps ne peut plus agir car
quelque chose la retient et la force à répéter indéfiniment le début
d'un acte. Elle répète indéfiniment des efforts qui sont des tics
et des petits mouvements convulsifs « car elle a peur de mourir
tout à fait si elle ne les fait pas ». Elle a donc à côté du senti-
I. Névroses et Idées fixes, II, p. 61 el sq.
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LES STIGMATES PSYGHASTHÉNIQUES
épersonnalisation deux manies mentales caractéris-
ie la répétition et celle des efforts,
ne de 4i ans (obsession amoureuse, besoin de di-
îssion de remords, manie de la recherche, manie
n), ne demande qu'une seule chose « c'est de
pauvre et chétive personnalité ; pourrai-je re-
is ce pauvre moi qui depuis trois ans me semble
bi il me semble que c'est moi qui souffre, tantôt
e me voir devant la glace pour savoir que je suis
nème, je suis obligée de faire des efforts pour
que je suis morte ».
me de 36 ans (phobie des orages, des épingles, de
le des expiations): « je ne sais où je suis, je ne sais
je perds l'idée de moi-même, je me trouve si drôle
ois à moitié morte et à moitié vivante, je suis tou-
î à me demander si j'existe encore. » To... (folie du
e avec manie de la recherche) se demande avec an-
est encore elle-même « ou si elle est un meuble, un
)orc que l'on saigne ». Dob..., pendant la crise
e, est effrayée par sa propre voix « ma voix a une
nge, qui me fait mal, je suis convaincue que ce n'est
>arle, je ne reconnais plus mes membres, j'ai besoin
et de me retenir, pour ne pas aller me chercher
ar il me semble que je suis restée en arrière, » on
-ci parle tout à fait comme la malade de M. Séglas.
j'ai bien souvent cité déjà les obsessions de voca-
les manies mentales, a par moment des peurs ter-
ï que tout d'un coup, dit-elle, il me semble que je ne
, que Je viens de mourir^ et cela me donne le senti-
lie. »
)pellerai l'observation de Pot... qui est très complète,
de 32 ans, toujours scrupuleuse, tombe malade après
3 grossesse, voici ce qu'elle m'écrit : « je ne com-
la vie, ni le monde, ni moi-même," j'ai perdu toute
e mon être. Il me semble que je ne vis plus que
nt, que mon âme est séparée de mon corps... J'en
emander si j'existe d'aucune manière... Je me figure
sur terre,... si j'ai une vie quelconque c'est dans un
... Je ne puis plus me mettre dans la tête que moi et
us sommes vivants... Je suis lasse d'une vie pareille
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SENTIMENTS D*1NC0MPLÉTUDE DANS lA PERCEPTION PERSONNELLE 317
qui dure indéfiniment sans que je puisse ine rendre compte de-
puis combien de temps, je ne la comprends plus. Quand ces sen-
timents me prennent j'éprouve le besoin que les miens me
caressent afin de me persuader que je suis bien auprès d'eux et
je leur reproche de ne pas me faire sentir que je ne suis pas
morte. » Tous les troubles de la perception des choses, de la
perception du moi, de la notion du temps, du besoin d'être aimé
se retrouvent dans cette observation. -
Sans chercher ici h interpréter ces sentiments de dépersonna-
lisation, je voudrais seulement* relever leurs relations avec les
phénomènes précédents. M. Dugas montrait déjà que ce sentiment
de dépersonnalisation se rapprochait du sentiment de fausse recon-
naissance du « déjà-vu », il parlait aussi très justement à ce propos
du sentiment d*apathie, d'atonie morale. Un malade de Krishaber
qu'il cite disait qu'il agit par une impulsion étrangère à lui-même,
automatiquement \ « J'agis comme un mécanisme qui fonctionne
après qu'on a retiré la clef, qui sert à le remonter. » En un mot
NI. Dugas se montrait disposé à réunir en un groupe les senti-
ments de dépersonnalisalion, de déjh-vu, d'apathie, de domina-
tion. M. Bernard Leroy veut également faire rentrer le sentiment
de dépersonnalisation dans un groupe plus vaste, celui des sen-
timents d'étrangeté. (]es sentiments d'étrangeté peuvent, dit-il,
se présenter sous quatre formes: i° le sujet a sentiment inana-
lysable que la réalité est un rêve ; 2° il a l'impression d'éloigne-
ment, de fuite du monde extérieur ; S** ce sont les propres actes
du sujet qui lui apparaissent avec cette couleur d'étrangeté, d'inat-
tendu; il traduit alors son impression en disant qu'il lui semble
que ce soient les actes d'un autre ; /i" enfin survient ce que Ton
peut appeler la forme complète de l'impression de dépersonnali-
sation lorsque le sujet se sent étranger à toutes ses perceptions,
actions, souvenirs, pris en bloc^.
Ces rapprochements sont très intéressants et à mon avis in-
dispensable, depuis longtemps je soutiens qu'il est juste de les
faire plus étendus encore ainsi que je viens de le dire à propos
des sentiments d'étrangeté de la perception et de déjà-vu. Dans
1. Dugas, Revue philosophique, 1898, I, 5o3.
2. Bernard Leroy, Sur Tillusion dite de dépersonnalisation. Revue philosophique,
1898, II, p. j58.
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LES SYMPTOMES DE RÉTRÉCISSEMENT DU CHAMP DE LA CONSCIENCE 319
DEUXIÈME SECTION
Les INSUFFISANCES PSYCHOLOGIQUES.
Si la plupart de ces sentiments pathologiques sont des phéno-
mènes primitifs et non des idées obsédantes, il faut se demander
quelle est leur signification. Correspondent-ils à des troubles
dans le fonctionnement mental que nous puissions apprécier au-
trement que par les sentiments conscients du sujet? Comme nos
procédés d'investigation soit psychologiques, soit physiologiques
sont encore très rudimentaires, ce problème est très didicile a
résoudre et il faut bien souvent nous borner à des indications
que nous donne l'observation.
i. — Les symptômes de rétrécissement du champ de
la conscience.
Quand on examine ces malades qui se plaignent d'avoir- perdu
leur personnalité, de ne plus voir les choses comme elles sont,
de ne plus pouvoir agir, ni sentir comme autrefois, la première
idée qui vient à l'esprit, c'est que l'on va facilement constater en
eux des suppressions de fonctions psychologiques connues et l'on
songe immédiatement aux troubles qui ont été souvent décrits
chez les sujets hystériques. Observe-t-on chez les scrupuleux des
disparitions de sensations, de souvenirs, de mouvements comme
chez les hystériques ?
C'est la première question que nous avons à résoudre.
I . — Les anestkésies.
L'existence d'anesthésies, en particulier, aurait ici une très
grande importance : il semble qu'elle expliquerait assez bien cer-
tains sentiments de privation, d'incomplétude que Ton rencontre
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îTIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
îs malades. Je me suis donc beaucoup préoc-
la sensibilité chez les scrupuleux, sans être
ouer à des résultats bien nets.
[)ntestable qu'on n*observe jamais chez eux
sies des hystériques. Jamais je n'ai trouvé
ces vastes régions du corps, de ces viscères
isciente parait tout a fait abolie et où on ne
ersistance d'une certaine sensation que par
liers. Jamais on n'observe ces pertes du sens
ompagnent de paralysie complète ou du syn-
(mouvement les yeux ouverts, paralysie et
mes, etc.) : ce premier point est tout à fait net
)lus grandes crises de rumination ou d'an-
ces sujets pendant la crise la plus violente
Tair, il se retournera toujours et ne main-
en Tair.
la plupart des sujets qui ne sont pas très
ni ne le sont pas depuis très longtemps, soit
3rès normal, soit pendant la crise on ne peut
ivestigation actuels constater aucune altéra-
sibilité. Comme ce point est capital, voici
s et quelques chiffres. Chez Bei... et Ver...,
soutiennent si drôlement qu'ils ont perdu
i répètent sans cesse : « ce n'est plus moi
le, qui sent, qui vit, qui dort. )> L'état de la
iculièrement étudié. « Nous étions disposés
ce propos, que ces sujets ne doivent pas
et de leurs viscères les mêmes sensations
n cherchant à constater ces troubles de la
I priori nous éprouvons un étonnement. Chez
le anesthésie : Ticsthésiomètre donne 2 à 5
palmaire des doigts, 20 millimètres à droite
face inférieure du poignet. (]es sensations
îurs, ne s'accompagnent d'aucune douleur,
nt, elles sont localisées au dos de la main,
ne précision de 2 h 3 millimètres, elles se
t comme chez l'homme normal,
mesurer au moins d'une manière grossière
du sens musculaire ou kinesthésique » qui
r ici quelque importance, nous nous sommes
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LES SYMPTOMES DE RÉTRÉCISSEMENT DU CHAMP DE LA CONSCIENCE 321
servis de la méthode des poids. Nous faisons soupeser au sujet
des petits cylindres, des cartouches de fusil, comme Tavait fait
autrefois Galton. Ces cartouches sont toutes absolument sem-
blables en apparence, mais elles sont remplies de plomb de ma-
nière à présenter des poids inégaux bien déterminés, et le sujet
doit en prenant ces cartouches, en les remuant, en les soupesant,
apprécier la différence de poids, dire laquelle des deux cartouches
qu*on lui présente est la plus lourde ou la plus légère. Afin de rendre
ces expériences comparables, il est nécessaire de choisir un poids,
toujours le même pour tous les sujets, qui serve de point de dé-
part. Nous avons adopté le poids de lo grammes et nous exprimons
les réponses du sujet et le résultat de cette petite expérience par
une fraction. Le dénominateur désigne le poids pris comme point
de départ, c'est-à-dire lo grammes, le numérateur le poids addi-
tionnel nécessaire pour que le malade accuse une différence.
En admettant cette représentation, la sensibilité musculaire pour
les poids sera chez Bei... i dixième pour la main droite et de 2
dixièmes pour la main gauche. Ce sont à peu près les chiffres
que Ton obtient chez un individu normal qui n'est pas particu-
lièrement éduqué pour ce genre de recherches.
Le sens auditif a été examiné par M. Gellé qui n'a pu constater
aucune modification. Le sens visuel n'est aucunement altéré,
Fio. 9. — Champ visuel de Bei...
Tacuitéest totale pour l'œil droit etde 9 dixièmes pour Tœil gauche,
le champ visuel esttout à faitgrand(fig. 9). Les sensibilités viscérales
sontévidemmentdiflicilesà mesurer etnousneprétendons rienaillr-
LES OBSESSIONS. l. — 'Jl
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! LES STIGMATES PSYGHASTl
3r : mais enfin cette jeune fille a faim e
mge de très bon appétit, digère parf
in d'uriner et d'aller à la selle; elle s
*me les narines, en un mot elle ne s
mme les hystériques anorexiques ave
ipendant, malgré cette conservation
nsibilités, elle continue à dire : « Je i
s, c'est rigolo, je ne sens rien, c'est
la. n
La même étude a été refaite sur Ve
m : (( Il n'y a pas un stigmate d*anesl
stingue les pointes de rîcsthésiomètr<
FiG. lo. — Champ visuel d(
:e inférieure du poignet droit ; il distin
soulTre dès qu'on le pique; le goût,
iiil rien d'altéré ; le champ visuel es
j. lo). S'agit-il de troubles de la sens
js probables encore que les précédei
le un grand rôle dans la personnalité.
^s ? Il a la faim, la soif, le besoin d'uri
[lie, dislingue les goûts comme autr
pendant pas décrire les anesthésies
nstatons aucun indice. Les supposer, <
lophiques, qui rattachent le sentimei
5 sensibilités ce serait oublier les règl
'vation clinique. »
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LES SYMPTOMES DE RÉTRÉCISSEMENT DU CHAMP DE LA CONSCIENCE 323
Depuis ces études, M. Bernard Leroy a eu roccasion de refaire
les mêmes recherches sur un cas tout à fait semblable. !I arrive
exactement au même résultat, c'est qu'on ne peut constater expé-
rimentalement aucune espèce de troubles de la sensibilité, a Je
constate d'abord, dit-il, que le malade ne présente aucune anes-
thésie tactile, aucune diminution appréciable de la sensibilité ; la
localisation des sensations se fait normalement avec précision. La
sensibilité à la douleur ne me parait pas diminuée et la sensibi-
lité thermique non plus. La vue semble également n'avoir rien
perdu de son acuité; le champ visuel est de dimensions nor-
males \ »
Si nous passons à d'autres malades qui ont des obsessions, des
manies, des angoisses variées, voici quelques chiffres que nous
avons relevés : Bu..., grand agoraphobe examiné au milieu d'une
crise, distingue les pointes de l'œsthésiomèlrc au bout des doigts
quand elles sont séparées de 2 ou 3 milliniètres ; h la face infé-
rieure du poignet droit il les distingue quand elles sont séparées
(le 35 millimètres, à la face inférieure du poignet gauche il les
distingue à 3o millimètres ; le champ visuel de chaque œil s'étend
ù 90**. Ger. .., examinée vers la (in d'une grande crise de rumi-
nation mentale, a partout une sensibilité tactile normale : l'a^s-
thésiomètre donne 3 millimètres au bout des doigts, 26 «h la face
inférieure du poignet, 3o sur l'avant-bras ; le sens musculaire
examiné par les poids donne i/io. Qei..., qui se plaint de ne
plus sentir le plaisir ni la douleur, a partout une sensibilité tactile
normale, je mesure le sens de la douleur avec l'algésimètre à
ressort (appareil de Chéron pour la mesure de la pression san-
guine transformé par l'addition d'une pointe et par une gradua-
tion différente) et je trouve 26 sur le dos de la main, ce qui est
normal. Les mêmes constatations sont faites sur Red..., Vod...,
Bor..., Lod... (œsth. au poignet 35, algésimètre sur le dos de
la main 20, champ visuel 90). Si on veut observer la sensibilité
au plus fort d'une crise d'angoisse, ce qui est difficile, comme
on Ta vu parce que la mise en observation arrête la crise, on
peut se trouver en présence de sujets qui ne veulent pas se
laisser toucher, qui prennent peur de l'instrument et on peut
avoir beaucoup de peine à obtenir une réponse. Quand on l'ob-
I. Bernard I^croy, De rillusion dite de la dc|>crsoiinalisalion. Comptes rendus du
congrès de psycholoyie de 190U, p. 482.
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LES STIGMATES PSYCIlASTHÉNIQUES
e est normale, tout au plus indîque-t-elle un peu de
>n en rapport avec Tétai de distraction du sujet.
Lit rencontrer une dilficullé spéciale quand on expérimente
Tands douteurs qui hésitent a répondre parce qu'ils ne
ais siirs de rien. J'essaye d'appliquer raesthésiomètre à
pleine crise de rumination et d'hésitation; elle prétend
nais sûre s'il y a une pointe ou deux pointes et il faut
ge une réponse, même si elle ne se sent pas certaine de
titude. La moyenne de ces expériences faites dans ces
s sur la face inférieure du poignet droit donne 4o : ce
mbie indiquer une légère diminution. Cependant étant
les innombrables chances d'erreur, j'avais admis autre-
fallait au moins 60 pour admettre une hypoesthésie hys-
iniquement intéressante ; le chiffre constaté sur Vi...,
core éloigné. Il est vraisemblable d'ailleurs que ce chif-
u élevé est en rapport avec le besoin de certitude du su-
inet a fort bien montré que le chiffre donné par Tirsthé-
est modifié considérablement par le degré d'inlerpréta-
fait le sujet de ses sensations tactiles ' et il est bien
qu'il est élevé par le besoin de précision, par le désir
isidérer commes doubles que des sensations réellement
inctes. On peut donc dire que chez la plupart de ces
3sychasthéniques les méthodes actuelles de mesure ne
>as en évidence d'anesthésie appréciable.
mettre à part un dernier groupe fort intéressant dans
peut relever assez nettement des diminutions appré-
î la sensibilité, surtout pendant les crises. MM. Buccola
ont remarqué des cas où la sensibilité était diminuée-.
»servé aussi quelques-uns.
es malades emploient d'abord des expressions que nous
abitués h rencontrer dans la bouche des anesthésiques.
t la crise, dit Bal..., mes mains me semblent être dures
»; « il me semble, dit Buq..., que j'ai la peau engourdie
ressens comme des fourmis, on dirait des bestioles qui
it sur le corps. » Mio... (186) se plaint de sentir le cou
!t. Est-il po<«sible de mesurer la sensibilité tactile d*une personne avec
le Wéber? Communication à la société de psjrchologie. Bulletin de rinsli-
Ique, mai 1901, p. i45.
Leçons cliniques sur les maladies mentales, 1895, p. 75.
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LES SYMPTOMES DE RÉTRÉCISSEMENT DU CHAMP DE SA CONSCIENCE 325
et la gorge pleins de boutons. Je n'ai pu examiner ces deux
malades qu'en dehors des crises et j'ai dû constater que malgré
leur dire la sensibilité était normale.
Chez d'autres les vérifications donnent quelques résultats, Qb...
se plaint de sentir plus confusément du côté droit, ce côté lui
parait plus engourdi et plus gros que l'autre, c'est là le langage
de quelques hystériques : j'obtiens h l'oesthésiomètre une différence
minime mais nettement appréciable : 5o sous le poignet droit et
3o à gauche.
Tr... se plaint qu'elle perd le goût, l'odorat et que toute la
face s'engourdit, je trouve la sensibilité de la face normale, mais
le goût est réellement diminué et l'odorat est presque disparu.
Il est vrai qu'il faut ici tenir, compte de cette sécheresse des
muqueuses qui existe souvent chez ces malades.
Les deux malades qui m^ont semblé le plus intéressants au
point de vue des troubles de la sensibilité soat Lise et Claire.
Lise a noté beaucoup de détails qui montrent son grand engour-
dissement. Pendant une crise de rumination elle s'est coupé la
main sans s'en apercevoir ; elle devient surtout indifférente à la
température, il lui est arrivé en s'habillant d'être absorbée par ses
idées et de rester debout une demi-heure à demi nue dans une
pièce très froide sans en être incommodée ; elle me raconte que
donnant un jour un bain à son enfant tout en se laissant aller à
rêver elle l'a brûlé et s'est elle-même brûlé les mains sans sentir
que le bain était trop chaud. Elle prétend qu'au moment où l'idée
est forte, elle voit moins et elle entend a peine.
Les expériences de vérifications sont comme toujours très dif-
6ciles et quand l'attention est attirée on ne constate plus d'aussi
grandes ane.sthésies. Le tact proprement dit mesuré à l'aesthésio-
mètre n'est que peu diminué, la vue et l'ouïe sont à peine modi-
fiés, mais j'ai été frappé de trouver une assez sérieuse diminution
du sens de la douleur. Une injection hypodermique qui est dou-
loureuse à Tétat normal devient tout à fait indifférente pendant les
périodes de rumination. Les mesures de la sensibilité doulou-
reuse avec l'algésimètre donnent des différences assez nettes pour
que l'on puisse les résumer dans un schéma. On constate pendant
les crises de rumination une hypoalgésie générale surtout carac-
téristique à droite sur la poitrine et sur l'épaule. Les chiffres
sont 5o et même 85 et io5, tandis que quand le malade va bien,
en particulier à la suite de séances dont nous parlerons, elle
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LES SYMPTOMES DE RÉTRÉCISSEMENT DU CHAMP DE LA CONSCIENCE 327
bilité, surtout de la sensibilité a la douleur. En considérant cette
figure on verra qu'elle ressemble tout à fait à celle que nous avons
déjà publiée à propos d'hystériques ayant des idées fixes génita-
les*. On sait que les sensations et les images venant de certaines
parties <lu corps ayant une fonction déterminée et, par conséquent,
ayant une certaine qualité commune, se groupent, s'associent
dans certaines émotions de manière à constituer des régions psy-
chologiques. La sensibilité des parties génitales, du pubis, des
15 15
Fie 13 — État delà sensibilité de Lise mesuré de la mdme manière pendant une période
plus normale. — Sensibilité à la douleur à peu près normale.
seins et quelquefois de Tombilic forme un système qui est lié à
toutes les émotions ou idées génitales : il est intéressant de re-
marquer que chez une scrupuleuse ayant depuis une douzaine
d'années des obsessions génitales la sensibilité de toutes ces ré-
gions est troublée comme elle Test dans l'hystérie. J*ai déjà rap-
porté l'observation d'un homme qui, après 20 ans de méditation
sur des obsessions de ce genre, en arrive aussi à une hypoesthésie
I. Névroses et Idées fixes, II, p. 43^.
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LES. STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
génitales : la différence avec Thystérie est toujours la
ensibilité est très incomplète et ne porte nettement
louleur.
i3. — - Schéma de la répartition do Tliypoestliesie chez Claire
X Localisation de la céphalalgie.
S nous n'avons rencontré de troubles de la sensibilité
que dans un petit nombre de cas et encore ces troii-
-ils presque exclusivement sur la sensibilité h la dou-
ndcnt-ils étroitement du degré de Pattention. Dans
ajoritc des cas il n'y avait aucun trouble précis des
ictiles et des sensibilités spéciales, enfin dans aucun
vous pu noter de grandes et profondes anesthésies.
e pas sur l'amnésie et sur la paralysie, car vraiment
observé chez mes malades qui rappelle même de loin
Dbserve chez les hystériques ; il n'y a guère que des
ubjcctifs. « Bei... soutient qu'elle n'a aucune mémoire,
on accident elle ne se souvient de rien. Il ne faudrait
nous*, la croire sur parole et nous figurer qu'elle pré-
! idées fixes, II, p. 65, p. 7a.
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LES SYMPTOMES DE RÉTRÉCISSEMENT DU CHAMP DE LA CONSCIENCE 329
sente des amnésie réelles et étendues, interrogez-la, si vous vou-
lez, nous vous mettons au défi de trouver un oubli réel ». « Ver...
a imaginé de dire qu'il avait perdu la mémoire et il voulait même
se faire dispenser du service militaire sous prétexte d'amnésie :
ce je ne me souviens de rien, dit-il, je ne puis pas tenir une
conversation, car je ne puis suivre aucune idée » c'est là ce qu'il
décrit mais même embarras que tout à l'heure, si vous cherchez
quelle forme d'amnésie il présente vous n'en pourrez trouver
aucune. Interrogez-le sur tout ce que vous voudrez, il vous ré-
pondra avec des détails interminables : et il continue h dire je
n*ai aucune mémoire, tandis que sa parole a montré tous les sou-
venirs possibles. »
Claire prétend aussi avoir perdu la mémoire, ne plus se sou-
venir du passé et ne pouvoir apprendre le présent. En réalité elle
raconte h peu près tout et quand j'ai essayé de lui faire apprendre
lo syllabes en les prononçant devant elle, elle y est arrivée cor-
rectement après i3 auditions. Cela ne montre pas une grande
puissance d'attention, mais cela n'est pas de l'amnésie.
Gisèle se plaint d'avoir par moment des paralysies complètes,
je ne les ai jamais constatées : cette difficulté que la malade éprouve
à marcher dans certaines circonstances se rattache h ces sortes
de crises de fatigue qui surviennent fréquemment chez ces su-
jets; ce ne sont aucunement de véritables paralysies.
2. — Les mouçements subconscients.
Un autre phénomène que l'on est tout disposé h rechercher
chez les scrupuleux c'est le mouvement involontaire et subcon-
scient dont le type idéal est l'écriture automatique des médiums.
Les malades parlent comme s'ils constataient sans cesse en eux
des phénomènes de ce genre « j'agis sans me faire d'idées de ce
que je fais, dit Ver..., mes mains s'occupent, ce n'est pas moi
qui m'occupe, » ces malades parlent certainement d'automatisme
beaucoup plus que les médiums eux-mêmes.
Mais la vérification expérimentale ne correspond pas du tout à
cette apparence, j'ai essayé sur un grand nombre de ces sujets
psychasthéniques de reproduire les expériences classiques qui
consistent h deviner le nombre qu'ils pensent par le mouvement
de leurs doigts, les expériences du pendule enregistreur, de l'écri-
ture automatique au moyen de la tablette, etc. : dans la grande
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riGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
résultats sont absolument nuls. Exception-
uelques gestes suggérés à l'état de veille
'oublie pas sa main, elle la sent remuer et
)urs l'arrêter quand elle veut et il y a beau-
dans son obéissance. Claire dit toujours
rendre compte; mais certainement cela ne
e veux le vérifier. Elle obéit un peu aux
;, elle y a quelques mouvements en appa-
i doigt, mais comme Lise elle peut toujours
3ndre : la subconscience n'est jamais cora-
î question doit être généralisée en cher-
int chez ces malades les phénomènes d'hyp-
tion.
- Le sommeil hypnotique.
étudier cette question de l'hypnotisme chez
{ue soin, car la plupart des malades récla-
suggestion hypnotique comme le remède
t ils s'y prêtaient de la meilleure foi du
désir de se laisser endormir; sur quelques-
pu prolonger les essais pendant trois et
linsi dire sans interruption,
meil hypnotique? Ici il faut faire attention
, les scrupuleux sont des individus chez
en nuances et en mesures. Si l'on cherche
le véritable et complet, un somnambulisme
îr deux choses : i° pendant l'état de som-
nt intellectuel suffisant pour que le sujet
Dins comprendre la parole et agir en confor-
n sans se réveiller; 2° un oubli complet au
le les obtient jamais chez les scrupuleux,
les plus complètes est celle de Lise. Les
es cinq ans tous les huit jours, nous verrous
î raison. Aujourd'hui encore elle n'est pas
hénomcne caractéristique l'oubli du som-
li existe un peu, les souvenirs sont confus,
l'elle ne fasse aucun effort pour les recher-
îrche, ses souvenirs se précisent et réappa-
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LES SYMPTOMES DE RÉTRÉCISSEMENT DU CHAMP DE LA CONSCIENCE 331
raissent fort bien. Et encore cet oubli léger dont elle se contente
n'a commencé à apparaître qu'à la 53* séance.
Quant à cette hypnose elle-même, elle consiste simplement en
un engourdissement dans lequel le sujet a de la peine à remuer,
à ouvrir les yeux. Cet état ressemble à ce que Lise éprouve spon-
tanément quand elle retombe dans une idée fixe, dans une rumi-
nation en pensant au démon. Mais ce qui est caractéristique, c'est
qu'elle peut triompher de cet engourdissement; si elle y tient,
elle peut faire un effort volontaire et arriver à ouvrir les yeux ;
elle peut aussi par un effort remuer et parler. Mais alors ces
mouvements, et la parole surtout, la réveillent, si bien qu'elle se
plaint d'être troublée, si je veux la faire parler pendant qu'elle
dort. Ajoutez que l'esprit reste lucide, qu'elle ne perd jamais con-
science et continue à se surveiller pendant l'hypnose.
Dans ce cas cependant il y a quelques phénomènes d'hypnose
intéressants obtenus par une prolongation extraordinaire des
essais : il y a un engourdissement notable, non seulement des
mouvements mais, ce qui est plus curieux, des idées. La malade
a de la peine à retrouver ses idées fixes et a les décrire, il y a des
choses qu'elle ne peut pas arriver h exprimer dans cet état et
qu'elle exprime bien étant réveillée, elle conserve même quelques
heures après la séance un certain engourdissement et une légère
envie de dormir. Enfin cet état est devenu chez elle assez habi-
tuel pour se reproduire sur un signe, par exemple quand je lui
mets la main sur le front.
Chez les autres malades je n'obtiens même pas ce résultat in-
complet. Lod... a à peine les paupières un peu tremblantes, rien
de plus, aucun engourdissement ni des mouvements, ni des idées,
bien entendu aucun trouble de la mémoire. ChezWe... petit dé-
but d'engourdissement après une vingtaine de séances, aucun
oubli après la séance. Chez On..., chezTr..., rien de plus. Mb...
s'endort un peu plus, mais ne présente pas d'oubli. Kl... arrive à
une somnolence très incomplète avec persistance des souvenirs.
Chez Claire, les essais sont diiliciles, elle est si longue à faire
aucun acte, qu'elle est interminable a-vant d'accepter qu'on
essaye de l'endormir; elle voudrait me parler auparavant, dire ce
qui lui charge la conscience en commençant par le commencement.
Ce récit, à supposer qu'elle puisse le faire, serait interminable,
puis elle a des craintes sur ce qu'elle dira pendant le sommeil, des
scrupules sur l'hypnose qui retardent les essais. Enfin à force de
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■^"mm
LES STIGMATES PSYGHASTHÉNIQUES
;e je suis parvenu h essayer sérieusement au moins 3o
5 qui serait largement suflisant pour hypnotiser complète-
me personne un peu prédisposée : les résultats sont insi-
ts : tête lourde, quelques tremblements des paupières, un
résolution des membres, le tout cesse dès qu'elle veut se
r, même sans mon ordre.
insuccès vraiment considérable dans Thypnotisme des
leux tient-il uniquement a la façon dont j'ai dirigé les es-
e ne puis pas le croire, quand je mets en face de ces
îs le nombre aujourd'hui très considérable d'hystériques
i pu amener à tous les degrés possibles du somnambulisme,
rait donc là un premier fait, c'est que le même auteur, en
ant de la même manière, détermine l'hypnotisme comme il
; chez les hystériques en quelques séances, très souvent en
Lile, et qu'il ne parvient h rien chez les scrupuleux même en
) cent séances comme dans le cas exceptionnel de Lise. Mais
)lus à dire, le hasard a fait que beaucoup de mes malades
ant, soit après avoir été étudiés par moi, ont passé entre les
de plusieurs de mes confrères qui ont fait les même tenta-
^uelques-uns ont essayé de se faire illusion en appelant
bisme n'importe quel engourdissement, mais toutes les
lie j'ai pu avoir des renseignements précis, j'ai constaté
un d'eux n'avait rien obtenu de plus que moi.
r ne citer qu'un exemple Jean a été longtemps soigné par
montpallier qui avec une grande confiance a fait tous ses
pour l'hypnotiser ; après des essais très nombreux
montpellier a été obligé de dire au malade a qu'il avait
t trop vagabond pour arriver au sommeil provoqué ».
marqué aussi que les auteurs qui ont une grande pra-
de l'hypnotisme, comme M. Bernheim, se montrent
» et devinent rien qu'à l'allure et au récit de ces malades
ne sont pas hypnotisabics. Dans quatre de mes observations
rnheini a habilement refusé de tenter un traitement par
otisme : je ne dis pas qu'il ait eu raison au point de vue
eutique, ces essais d'hypnotisation peuvent avoir, comme
e verrons plus tard, des résultats utiles ; mais au point de
ientifique je trouve qu'il a complètement raison en consi-
. ces malades comme rebelles au sommeil hypnotique.
recherches sur ce point, je suis heureux de le constater,
>ut à fait d'accord avec les conclusions auxquelles MM. Pitres
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LES SYMPTOMES DE RÉTRÉCISSEMENT DU CHAMP DE LA CONSCIENCE 333
et Régis sont parvenus. « D'une façon générale les obsédés pré-
sentent cette particularité curieuse que, très sensibles à l'action
de la suggestion ordinaire, au réconfort moral du médecin, ils
sont rebelles à la suggestion hypnotique qui n'a pas souvent prise
sur eux. Ils ressemblent encore en cela aux neurasthéniques qui se
trouvent momentanément soulagés et même guéris de leurs maux
par une simple visite du médecin et qui ne sont pas d^habitude
hypnotisables ^ »
Il est vrai que quelques auteurs, en très petit nombre, ont pu-
blié des observations de sommeil hypnotique déterminé chez des
agoraphobes ou des obsédés. M. Bérillon en a signalé^ plusieurs,
M. Auguste Voisin surtout en a décrit un très grand nombre au
congrès de Psychologie tenu à Munich en 1896^: « Phobies et
manies multiples, habitudes de religiosité, améliorations par la
suggestion hypnotique. — Manies et phobies multiples, craintes
de manquer à des promesses, sommeil absolu à la 2° séance, gué-
rison à la /|** séance. — Agoraphobie, claustrophobie, peur des
chemins de fer et des voitures, sommeil hypnotique en une
séance, guérison en 3 séances, etc.. » J'avoue que je suis resté
très étonné en entendant ces communications.
Ces opinions opposées ne me paraissent pouvoir s'expliquer
que de deux façons. Ou bien les auteurs, uniquement préoccupés
du point de vue thérapeutique, ne se sontpas inquiétés de préciser
le diagnostic de l'état qu'ils ont appelé sommeil hypnotique, ou
bien, ils ne se sont préoccupés que du contenu de l'obsession et
non du diagnostic de la névrose sous-jacente et ils ont eu affaire
à des idées fixes chez des hystériques. Je reste disposé à croire
que l'un des grands caractères des psychasthéniques c'est de ne
pas pouvoir présenter l'état de somnambulisme naturel ou pro-
voqué qui, au contraire, caractérise les hystériques.
l\, — La suggestion.
Pendant ces états hypnotiques tout à fait insuffisants et mal
I. Pitres et Hégîs, op. cit.., p. 100.
a. Bérillon, Société de médecine et de chirunjie pratiques, 8 juin iSqS.
.3. A. Voisin, Dritter inlernationaler Congress fâr Psychologie in Munchen, '^97»
p. 38o, et Emploi de la suggestion hypnotique dans certaines formes d'aliénation
mentale, 1897.
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IGMATES PSYC
ant essayé d<
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quand je lui
taine fixité d
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LES TROUBLES DE LA VOLONTÉ
rudîmentaire. Dans les circonstances les plus favor
y rêver, mais il n'y a pas d'illusion et jamais elle
en dehors d'elle-même. Il est également impossib
56® séance, de déterminer de Tanesthésie véritable
sentir un peu moins la piqûre, mais elle la sent to
ne laisse pas enfoncer Tépingle plus profondémen
Les mêmes résultats de la suggestion se t*etrouv
ques autres sujets avec cette diflerence que les p
suggestion sont chex eux en général beaucoup nu
quelques mouvements automatiques suggérés che
\Ve..., chez Claire et c'est tout. Les autres ma
liqueurs, phobiques quand ils sont bieh des psych
non des hystériques ne sont suggestibles en aucune
Il était intéressant de mettre en évidence par di
nombreuses suilisamment prolongées le peu d'in
mouvements subconscients, du sommeil hypnotiqu<
tions chez les psychasthéniques. Ce caractère quoiq
négatif me semble avoir une certaine importance d
tation de leur état mental.
2. — Les troubles de la volont
Si l'on ne constate pas chez les scrupuleux les t
et assez spéciaux qui caractérisent les hystériques,
en conclure que tous leurs sentiments d'incomj
erronés et qu'ils n'aient pas des troubles fondameni
à leurs propres sentiments et surtout h leurs id
troubles se trouvent surtout dans l'activité volontai
fondement troublée chez ces malades bien avant qu
leur maladie et dans beaucoup de cas, si je ne me t
l'enfance, l-a description détaillée de ces troubles
serait interminable, je l'ai déjà faite si souvent da
travaux que je crois pouvoir me borner ici a uni
rapide des principaux symptômes par ordre de
santé.
I. — L'indolence,
Presque toutes ces personnes présentent quelq
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5 . LES STIGMATES PSYCIIASTHÉNIQUES
ur première enfance un caractère bien reconnaissable : ce sont
!S mous, des indolents, des paresseux. Avec des termes variables,
5 familles et les malades eux-mêmes décrivent toujours ce même
ractère « quelle enfant molle, disait-on de Tr...,on dirait qu'il
ut la battre aussi bien pour la faire jouer que pour la faire tra-
iller. » Claire a toujours été, sans doute, une bonne enfant, elle
étend qu'elle était plus active autrefois et que maintenant les
tes sont supprimés par les idées maladives ; mais ce n'est pas
ut h fait exact, elle a toujours été paresseuse, elle a toujours eu
dégoût du travail « elle se souvient qu'étant jeune elle avait
ïjà besoin de s'exciter au travail par des menaces ou des pro-
esses qu'elle se faisait ii elle-même )>. Notons que c'est une
une (ille qui n'a jamais eu la manie du serment et que cependant
travail ne se faisait chez elle que par des excitations du même
înre.
Sera-t-on étonné d'apprendre que Jean a toujours été a 'en-
)rmi, apathique, indolent, sans énergie ». Quoique doué d'une
telligence plutôt supérieure à la moyenne il n'est jamais arrivé
rien, même dans sou collège. Cette paresse est donc fondamen-
le, bien antérieure aux manies et aux obsessions, on la retrouve
lez tous les malades, sinon pendant toute la vie comme chez
s précédents, au moins pendant toutes les périodes maladives.
2. — L* irrésolution.
Cette mollesse générale peut se décomposer en un certain
>mbre de troubles particuliers de l'action, le plus frappant est
itérieur à l'acte même, c'est une indécision perpétuelle qui
jste à mon avis en fait, bien avant que le malade n'en ait le
ntiment et qu'il n'en parle bien, avant qu'il n'ait des crises de
)ute et de délibération. Tous les auteurs qui ont parlé des
)sédés et des douteurs ont bien décrit cette indécision*. Que
exemples on pourrait citer de cette irrésolution, choisis, je
répète, tout à fait en dehors des crises d'excitation patho-
gique. Tod..., tout enfant, passait des heures interminables à
nger son tiroir parce qu'elle « ne pouvait jamais décider si
1 objet devait être a droite ou a gauche. » Bsn..., une femme
li a actuellement 5i ans, raconte en riant des incidents de sa
I. Cf. Raymond cl Arnaud, Ann. inéd. psyeh., 189a, II. 199.
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LES TROUBLES DE LA VOLONTÉ 337
jeunesse : a elle a été très malheureuse quand on a voulu la
forcer à ranger sa chambre elle-même, car elle hésitait indé-
6niment sur la place d'un bibelot. » Qei... a toujours été mal-
heureuse quand il fallait choisir une robe, un chapeau ou une
distraction. Min... ne sait jamais ce qu'il veut faire, il lui faut des
jours et des jours pour savoir s'il veut profiter d'une journée de
vacance et faire une promenade « ce que j'ai toujours aimé le
mieux, dit-il, c'est qu'un camarade décidât pour moi: son opinion
me donnait une sorte de coup de fouet » aussi ne sortait-il jamais
seul et même à 20 ans, il ne quittait pas les jupons de sa mère.
Bien entendu ces hésitations vont devenir curieuses quand les
résolutions à prendre sont plus graves ; il est intéressant de voir
que ces personnes hésitent entre des actions tout k fait opposées,
tellement distantes qu'au premier abord la comparaison même
semble impossible. Toutes ces femmespar exemple, comme Fya...,
hésitent pour se marier entre plusieurs jeunes gens, mais Renée
fait mieux, elle passe des années à hésiter entre la vie religieuse
et la vie d'actrice dans un petit théâtre. Cette dernière existence
d'ailleurs elle se la représente très bien comme une vie de dé-
sordre. Mais comme elle le dit dans son naïf langage, elle est
restée des années h se demander si « elle voulait faire la noce ou
être une sainte ». Si la décision semble être prise, elle change et
disparait pour le plus léger obstacle, ces personnes aiment les
prétextes et renoncent à ce qu'elles avaient décidé pour un
nuage, un rayon de soleil ou une migraine plus ou moins réelle.
Ce caractère est au plus haut degré chez deux de mes malades
principales : Claire, depuis son enfance, et à plus forte raison au
cours de sa maladie, ne se décide à rien d'une manière ferme, elle
change sans cesse d'occupation, laisse une chose, la reprend, la
laisse de nouveau : elle a voulu être- religieuse, puis elle y a renoncé ,
ridée revient de temps en temps puis disparait; elle ne sait pas
si elle veut ou ne veut pas se marier. Elle oscille pour tout, et
cela en dehors, je le répète, de tout délire: en voici un exemple
entre mille : elle a écrit une lettre pour me la remettre, il lui
a fallu un grand eflbrt pour l'écrire. Elle vient chez moi et cache
sa lettre ne voulant plus que je la voie, puis un quart d'heure
après elle me dit qu'elle l'a écrite et me la montre, puis elle la
remet dans sa poche, puis elle me la donne et la voici qui se
jette sur moi pour me la retirer des mains; même scène
parce qu'elle veut et ne veut pas qu'on essaye de l'hypnotiser etc.
LES 0B8E8810KS. I. — a a
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LES STIGMATES PSYCIlASTHÉNIQUES
e a toujours vécu de même, elle a eu des hésitations pour
religieuse, pour le mariage, pour presque toutes les actions,
rd'hui, quand elle sort dans la rue, elle ne sait plus de
côté elle veut aller et il lui arrive de rentrer au bout de
Lies pas plutôt que de choisir entre les diverses courses
B pourrait avoir à faire.
3. — La lenteur des actes,
ne si Faction est décidée, elle se fait très lentement et cela
qu'il n'y ait des manies ou des ruminations pour l'arrêter,
iteur de ces personnes pour se lever du lit est classique : il
aut des heures pour savoir si elles sont réveillées ou non.
enteur à faire leur toilette, à prendre leurs repas, à écrire
ttre, à faire en général une action quelconque est observée
fait dans la première jeunesse. Claire devenait exigeante
point, elle voulait qu'on lui laissât des heures pour écrire
tit mot, pour se préparer à sortir, pour se mettre à table.
le nous l'avons remarqué autrefois chez les hystériques,
e MM. Raymond et Anaud l'ont décrit chez un aboulique,
lalades fractionnent l'acte, ils emploient une première
je h chercher du papier h lettre, une seconde à prendre
nveloppe et peut-être qu'en huit jours ils arriveront à
une lettre.
4. — Les retards,
;e conduite amène une conséquence inévitable, c'est qu'ils
^ent jamais à rien en même temps que les autres personnes,
ment où il le faudrait. Lorsqu'ils sont intelligents ils gémis-
ommeKa... sur ce trait de caractère qui leur a nui dans
leur carrière, ils ne sont jamais prêts à temps pour saisir
casion quelconque, « je laisse toujours passer le moment et
rrive à rien ». Ils remettent toujours l'efiFort au dernier
nt possible : Claire ne me parlera un peu qu'à la fin de sa
]uand décidément je ne puis pas la garder plus longtemps ;
s fera quelques efforts pour se guérir qu'à la fin de son
à Paris, quand elle voit qu'il faut rentrer chez elle,
îaractère curieux qui en résulte, c'est l'absence totale de la
de l'heure. Il n'y a rien de plus terrible que d'avoir des
-vous avec des scrupuleux : un retard d'une heure ou deux,
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LES TROUBLES DE L.\ VOLONTÉ 339
quand ils n*ont pas d'idée fixe sur ce point, leur parait si peu de
chose et si insignifiant qu'ils croient en arrivant mériter des
compliments. On m'a fait remarquer que ce caractère de n'être
jamais à l'heure, qui est si net chez Xyb... (209), Vk..,, etc., est
un véritable caractère de famille, que l'on retrouve chez les
parents, les frères et les sœurs des malades.
5. — La faiblesse des efforts.
11 est bien évident que ces malades auront une grande faiblesse
morale, nous avons vu qu'ils abandonnent l'action pour le
moindre prétexte. 11 me semble qu'ils ont encore une certaine
faiblesse physique au moins dans l'effort instantané, j'ai fait beau-
coup de mesures dynamométriques, espérant, comme je l'ai dit,
trouver la preuve d'une certaine paralysie pendant les états d'an-
goisse. Comme on l'a vu dans le chapitre précédent, les expé-
riences sur ce point n'ont rien de décisif : mais elles me laissent
une autre impression. Je suis étonné de la faiblesse des chiffres
que Ton trouve comme moyenne, ainsi Bu..., homme vigoureux
de 42 ans, a comme moyenne de 10 expériences avec la main
droite, 3i. Jean, garçon bien musclé de 32 ans, a comme
moyenne de la main droite 28,5 et de la main gauche 28. Qes...,
une forte jeune femme de 26 ans, moyenne de la main droite, 22,3,
de la main gauche 20,7. Claire, moyennedela main droite 25,5, delà
main gauche 16,9. Lise moyenne de 10 pressions de la main droite,
dans une première expérience 25, /| de la main gauche, 28,9 dans
une seconde expérience moyenne de la main droite 23,4 pour la
main gauche 21,7. Ces chiffres évidemment ne signifient pas une
paralysie, mais ils sont faibles et indiquent très peu d'efforts.
Les malades cependant se figurent qu'ils font sans cesse des
efforts physiques et moraux énormes. Lise a pour le moindre
progrès un sentiment d'effort, de raidissement des membres
comme si elle accomplissait des œuvres extraordinaires, il en est
de même pour Claire.
6. — La fatigue.
Dès qu'ils ont fait le moindre effort physique ou moral les
psychasthéniques sont épuisés et ressentent un horrible senti-
ment de fatigue. « C'est un manteau de fatigue qui tombe sur
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LES STIGMATES PSYCHA^THÉNIQUES
it Lf. .., femme de 46 ans, ce sentiment s'accompagne de
aux articulations et dans les muscles, de dérobement
>es, de laisser aller de tout corps. Jean se laisse tomber
ir un lit et ne peut plus bouger.
iment on observe aussi quMls ne peuvent plus suivre une
3 leur attention ne se fixe plus du tout. Wo... fait un
ur une addition : « J*ai un sentiment de courbature hor-
L dépensé un gros effort qui a épuisé mon attention, mon
se fixe plus, tout papillote devant moi. » Jean s'épuise
lecture de quelques lignes. Il faut tenir grand compte
fatigue rapide dans le traitement.
6. — Le désordre des actes.
actère semblera curieux chez ces personnes qui ont la
la précision et de l'ordre, il est cependant incontes-
i sait qu'il n'y a pas de chambre plus sale que celle
FiG. i4.
Time qui a la manie de la propreté: U..., qui a la
;s microbes, était arrivée à faire de sa chambre un véri
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LES TROUBLES DE LA VOLONTÉ
table fumier. De même il n'y a rien de plus dés<
chambre et la table d'une personne atteinte (J
Tordre : ces personnes rangent avec une précau
deux ou trois objets et n'arrivent pas à mettre de
reste. Ce caractère du désordre dans les actes se
quefois dans Técriture : ce fragment d'une let
malades qu'il m'a autorisé à reproduire (fig. i4)
caractéristique. Son écriture est aussi embrouill
ses pensées et il est aussi incapable de la rendr
mettre un peu de suite dans sa conduite. On |
aussi a ce sujet que son écriture devient de plus
donnée et illisible quand on avance vers la fin
cause de la fatigue rapide.
Il faut rapprocher de ce désordre une maladi
vements qui me paraît très intéressante. Beaucoi
des ne peuvent toucher aucun objet sans le cass
vent apprendre aucun travail à cause de leur inhal
J'ai voulu faire faire à Jean quelques petit travaux
à coudre des livres, à coller des papiers : on r
comme il déchire et salit sans aboutir à rien. C
caractère n'est pas constant et n'existe que dans
maladie. Simone, qui veut coller une constructic
désole d'être devenue si sale et si maladroite, tu
jeune elle faisait ce petit travail avec une pn
leuse.
7. — U inachèvement.
Dans le même ordre d'idées quand on considèi
qui manifestent un léger trouble de la volonté ant
nies et aux obsessions, il faut insister sur un détail
par la famille elle-même. Ces personnes comme
fois des actions mais ne les achèvent jamais : ches
tère existe à son insu d'une façon tout à fait curi
la moindre idée fixe sur ce point, il ne sait m
femme a constamment observé ce trait de sa conc
assis à un travail ou qu'il commence à ratisser u
jardin pour se distraire, il n'achève jamais ce qu'
il en est dégoûté un peu avant la fin. Il fait de mè
et n'achève jamais ce qu'il a mis dans son assiel
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LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
particulière qui lui fait prendre en dégoût les
les approchent de leur fin.
se retrouve chez tous les autres malades et con-
istabilité caractéristique. Cet inachèvement des
d au doute et à Toscillation des idées, comme Ta
fois Debs dans son a tableau de Tactivîté volon-
quable pour Tépoque * : « les velléités sont dans
itaire ce que dans Pintelligence sont les conjec-
s douteux auxquels Tesprit n'attache qu'un corn-
ihésion et qu'il abandonne sans effort un instant
e qu'il y a tous les degrés^^Bb croyance, il y a
I et la résolution parfaite qui^fl^cve un nombre
ns différemment énergiques. »
8. — L'absence de résistance.
vent comme preuve de la force de volonté conservée
leur résistance hTimpulsion. (( Il n'est pas absolu-
'e comme on le croit généralement que la volonté
s soit très amoindrie. Beaucoup sont susceptibles
'euves d'uneénergie peu commune etc'est très réelle-
battent leur idée fixe...*.» Je ne suis pas certain que
\ résistance h l'impulsion soit une preuve d'éner-
ne. Ils ont des manies de se dire, de se croire, de
)roie à des tentations et ils ont des manies de lut-
ent contre une impulsion qu'ils inventent. Ce qui
ive d'énergie ce serait de cesser ce combat gro-
nser à autre chose et c'est ce qu'ils ne peuvent pas
l'avons souvent remarqué la faiblesse n'existe pas
la volonté active, mais aussi dans la volonté qui se
p passivement. Ces malades qui ne font rien eux-
:apables de résister à ceux qui veulent faire quel-
le savent ni lutter, ni se défendre contre ceux qui
et les tourmentent. J'ai été très frappé de ce trait
ans l'enfance de tous les malades. Ils sont très
eau de l'activité volontaire pour servir à la science de l'êdacationj
B, op. cit., p. 36.
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LES TROUBLES DE LA VOLONTÉ 343
malheureux dans les internats, ils deviennent les victimes, les
soufTre-douleurs de tous leurs camarades. Dk... (21 5) a toujours été
tourmenté au collège. Jean surtout a eu sur ce point une jeunesse
déplorable : à 12 ou 1 3 ans il était la victime de tous les élèves
du lycée. Il n'était pas de farce qu'on essayât de lui faire, on lui
faisait supporter la conséquence de toutes les fautes de ses ca-
marades et on tournait constamment en ridicule ses qualités
mêmes, son honnêteté et sa bonté: « Je savais bien, dit-il, que
j'aurais dil me défendre, je savais bien que j'étais même plus
fort que beaucoup de ceux qui me tourmentaient le plus, mais je
ne pouvais supporter la pensée de me battre, au moment de me
défendre, je devenais tremblant, paralysé, j'ai toujours été un
pauvre être sans défense. » On dira certainement ici que l'émo-
tion paralysait la volonté, nous verrons plus tard ce qu'il faut
penser de cette théorie. Pour le moment constatons simplement
le fait c'est qu'ils s'émotionnent au lieu de se défendre, et qu'en
fait ils ne se défendent pas.
Une des conséquences singulières de cette absence de lutte,
c'est que, pour avoir la paix, ils obéissent à tout le monde. Quand
on parle de ces malades, on dit toujours qu'ils se laissent
conduire, qu'on leur fait faire et dire tout ce qu'on veut et
qu'ils obéissent au premier venu. Bei...,* Claire cèdent au dernier
qui leur parle et on peut les amener à se déjuger à peu de
moments d'intervalle. On en tire comme conclusion que ce sont
des individus très suggestibles. Cette conclusion serait en con-
tradiction avec les expériences que je viens de relater à propos
de l'hypnotisme et de la suggestion, aussi je ne la crois pas
vraie. Leur obéissance n'est pas du tout de la suggestion, comme
celle des hystériques.
Une hystérique suggestionnée adopte l'acte, se laisse envahir
par la pensée qui est semée en elle, et la pousse à l'extrême, elle
croit avoir décidé elle-même l'action et, pour peu qu'on insiste,
elle invente même les motifs de sa résolution, en un mot elle se
croit libre et se donne tout entière à l'acte. Le scupuleux ne fait
qu'obéir, il le fait à contre-cœur en se sentant humilié, en rai-
sonnant fort bien et en trouvant stupide l'acte qu'il n'adopte pas,
il ne pousse pas cet acte à l'extrême, il n'en fait que le moins
possible sans y mettre de croyance, d'enthousiasme, ni de senti-
I. Névroses et Idées fixes, II, p. 63.
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LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
té. Pourquoi le fait-il alors? Pour deux raisons, d'a-
u'il faudrait lutter pour résister à ceux qui com-
insuite parce qu'il faudrait prendre la résolution de
;hose : deux choses qu'il ne peut pas faire. C'est
L obéissance n'est pas du tout la même que celle de
jgestionné.
9. — Le misonéisme.
ères précédents étaient en somme assez légers, nous
s caractères de plus en plus graves qui se présentent
ladie avance et qui d'ordinaire accompagnent alors
t des obsessions, quoique à mon avis ils n^en dépen-
ésent les actes étaient mal faits, avec hésitation, len-
e, mais ils finissaient par être faits tout de même.
!nant certains actes qui se suppriment, c'est-à-dire
ions que le sujet ne parvient pas à faire et cela au
lavoir pourquoi. Nous voyons d'abord disparaître des
elles, toutes celles qui demandent une adaptation à
nces nouvelles. J'ai tant insisté autrefois sur ce fait,
Je de l'aboulie qu'il suffit de le rappeler. « Tout ce
lau me fait peur )), dit Nadia en ne se rendant pas
le donne la définition du misonéisme. Tous ces scru-
des individus routiniers qui recommenceront indé-
I ennui et tristesse la même existence monotone et
pables d'aucun eflFort pour la changer,
re précédent il faut naturellement rattacher l'impos-
rrompre les habitudes une fois acquises, ces personnes
e énorme à s'accoutumer k une situation nouvelle,
ux que l'on observe ces individus curieux qui « ne
s'habituer k leur femme » quand ils se marient
une fois habitués après un grand nombre d'années
plus s'en passer. C'est parmi eux que l'on trouve
manies » dans le sens vulgaire du mot avant qu'il n'y
blés manies mentales : se coucher de la même raa-
la même place à table, la même plume et le même
d, etc. « Ce qui change mes habitudes me boule-
rs, dit Lise. » Nous verrons, en étudiant l'évolution
e, comment les grands changements, changement
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LES TROUBLES DE LA VOLONTÉ
d'appartement comme changement de situation
changement du mariage provoquent les graves
lo. — Les aboulies sociales^ la tin
Après les actes nouveaux il y a une catégor
très fréquemment supprimés, ce sont les actes
doivent être accomplis devant quelques persoi
leur conception impliquent la représentation d
nos semblables.
Cette impuissance à agir devant les homi
sociale me paraît constituer Tessentiel de la t
auteurs ont déjà insisté sur ces troubles de la ^
tion dans la timidité; « La timidité, dit M. D
mouvements volontaires, paralyse la volonté,
souvent les mouvements ordonnés en respectai
instinctifs et ressemble à l'aboulie... * ,» ce cette
qu'on nomme la timidité, disait aussi M.Lapie
dans son étude intéressante sur les timides
sur l'aspect émotif que prend le phénomène
mais il note bien cependant cette suppressi
appelle une abstention. « Eviter les occasic
trer, voila le soin du timide ; comme ces oc
en contacts sociaux il en résulte une tends
l'isolement... il y a chez lui une inhibition qui
tanément la volonté, qui retient le mot su
empêche aussi bien le timide de refuser que d'à
pêche même d'exprimer les sentiments de rec(
tendresse ^. »
Cette inhibition ou mieux cette disparition d
en présence des hommes, car nous aurons à voi
inhibition, joue un rôle énorme chez presque
psychasthéniques. Il en est bien peu qui à un
existence et quelquefois pendant toute leur vie
impuissants par la timidité.
Voici un bel exemple de cette timidité : « ind
I. Dugas, La Timidité, Revue philosophique, 1896, II, p.
a. P. Lapie, Logique de la volonté, 1902, p. 39^. (Paris, "
3. Hartenberg, Les timides et la timidité, p. 89. (Paris, F.
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LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
Dres de ma famille, dît une malade, il a été très restreint le
re des personnes avec qui je n'ai pas été gênée. Devant la
rtj'étais absolument paralysée, une simple addition je ne pou-
lasla faire devant quelqu'un. J'étais obligée d'être fausse pour
uer cette impuissance, de chercherdes prétextes, de casser mon
n, d'aller chercher un canif, je faisais mon addition au dehors,
lérobéc. J'avais le sentiment que si j'accusais cette impuis-
ce serait fini, que je serais perdue, que je n'arriverais plus
{ )).
pas pouvoir jouer du piano devant des témoins, ne plus
>ir travailler si on vous regarde, ne plus pouvoir même
1er dans un salon et surtout ne plus pouvoir parler devant
u'un, avoir la voix rauque, aiguë ou rester aphone, ne plus
er une seule pensée à exprimer quand on savait si bien au-
ant ce qu'il fallait dire, c'est le sort commun de toutes ces
unes, c'est l'histoire banale qu'ils racontent tous, (c Quand
IX jouer un morceau de piano devant quelqu'un, dit Nadia,
;me devant vous que je connais beaucoup, il me semble
action est difficile, qu'il y a des gênes à l'action et, si je
surmonter, c'est un effort extraordinaire, j'ai chaud à la
|e me sens perdue et je voudrais que la terre s'ouvre pour
floutir. » Cat..., un homme de 3o ans, se sauve dès qu'il
d quelqu'un entrer, il a de la peine a faire sa classe devant
èves (( je ne ferais réellement bien ma classe que si je la
i tout seul sans élèves et surtout sans directeur ». « Je vou-
vous parler, disent Dob... ou Claire, et je ne peux pas, cela
te dans ma gorge, je suis une heure pour demander quelque
d'insignifiant. Je ne vous parle réellement bien que si je
eule, si vous n'êtes pas là. » Lev... fait bien ses comptes
le sous-sol du magasin, mais ne peut plus écrire un chiffre,
est pris par la crampe des écrivains, quand il est mis au
er devant le public. Tous répètent comme Simone : (c Je
parfaite; je ferais tout si je pouvais être tout à fait seule,
e une sauvage dans une île déserte ; la société est faite
empêcher les gens d'agir, j'ai de la volonté pour tout, mais
i cette volonté que si je suis seule. »
admet d'ordinaire que ces troubles de la timidité sont des
►mènes émotionnels. Qu'il y ait des troubles émotionnels,
igoisses chez les timides, j'en suis convaincu ; il y a aussi
eux de l'agitation motrice, des tics et même de la ru-
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LES TROUBLES DE LA VOLONTÉ 3i7
mination mentale, dont on ne parle pas assez. Mais il ne faut pas
oublier qu'il y a chez ^ux de l'impuissance volontaire. M. Har-
tenberg, qui explique tout par Témotion, le remarque lui-même
à propos d'Amiel « le manque de foi simple, Tindécision par
dé6ance de moi, remettent presque toujours tout en question
dans ce qui ne concerne que ma vie personnelle. J'ai peur de
la vie objective et recule devant toute surprise, demande ou
promesse qui me réalise; j'ai la terreur de l'action et ne me
sens à l'aise que dans la vie impersonnelle, désintéressée, subjec-
tive de la pensée. Pourquoi cela? Par timidité^ », et M. Harten-
berg ajoute « veut-il dire par là qu'au moment d'accomplir un
acte, il est arrêté brusquement par une émotion poignante qui le
paralyse ? Non, ce qu'il désigne par timidité, c'est la peur ins-
tinctive d'agir, c'est aussi la peur de prendre une détermination
avec les conséquences utiles ou fâcheuses qu'elle comporte. C'est
sa maladie de la volonté en somme qu'il appelle timidité* ».
Pourquoi hésite-t-on à appliquer cette remarque si juste aux
autres cas de timidité? On est frappé de ce fait que les timides
incapables de faire une action en public, la font dans la perfection,
quand ils sont seuls. Nadia joue du piano dans la perfection
quand elle se croit seule, et Cat... ferait très bien sa classe s*il n'y
avait pas d'élèves, on en conclut qu'ils ne sont pas impuissants à
faire l'acte et qu'il faut faire appel à un trouble extérieur à l'acte
lui-même pour expliquer sa disparition dans la société.
11 y a là un malentendu, l'acte de faire une classe imaginaire
sans élèves et Tacte de faire une classe réelle devant des élèves
en chair et en os ne sont pas le même acte. Le second est
bien plus complexe que le premier, il renferme outre l'énoncé
des mêmes idées, des perceptions, des attentions complexes à des
objets mouvants et variables, des adaptations innombrables à des
situations nouvelles et inattendues, qui transforment complète-
ment l'action. Pourquoi un individu aboulique peut-il faire le
premier acte et ne peut- il pas faire le second? Je réponds sim-
plement, parce que le second est bien plus difficile que le premier,
il en est ainsi dans tous les actes sociaux, car il n'y a rien de
plus complexe pour des hommes que les relations avec les hommes.
Que des émotions, des agitations motrices, des crampes des écri-
1. kmiel. Journal intime, II, 193.
2. Hartenbcrg, Les timides et la timidité, p. 106.
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v-^f
LES STIGMATES PSYCIIASTHÉNIQUES
îs viennent s'ajouter, ou mieux se substituer à cet
s'accomplit pas, c'est un grand phénomène secon-
1 faudra tenir compte, mais le fait essentiel c'est
l'accomplir l'acte complexe et en particulier l'acte
le l'on vérifie par l'examen des diverses formes de
. La timidité fait le grand malheur de ces personnes,
sentiment qui les pousse à désirer l'affection, à se
à confier leurs tourments et elles n'arrivent pas à
nontrer aimables, à pouvoir même parler. Nadia
îesse : « je crois que je ne serais pas devenue si
j'avais eu le courage de confier mes tourments h
lais malgré moi j'ai toujours été très renfermée. »
des « renfermés » qui sentent beaucoup, mais qui
i à exprimer et surtout qui n'arrivent pas à exprimer
semblables parce que l'expression est un acte et
lOciale un acte complexe et que les actes complexes
mt impossibles.
e encore une contradiction, ces personnes sont pour-
î besoin d'aimer et d'être aimées, ils ne songent qu'à
mis, d'autre part ils méritent l'affection : extrême-
Bs, ayant une peur terrible de froisser quelqu'un,
le résistance et disposés à céder sur tous les ppints,
-ils pas obtenir très facilement les amitiés qjiïls
' Eh bien en réalité -ils sont sans amis, ce sont des
rencontrent de sympathie nulle part et qui sonf-
nent de leur isolement. Comment comprendre cette
? C'est que pour se faire des amis il faut agir, par-
5 h propos. Pour attirer l'attention des gens et se
idrc d'eux, il faut saisir le moment où ils doivent vous
et faire à ce moment ce qui le peut mieux nous faire
s scrupuleux sont incapables de saisir une occasion,
Rousseau, ils trouvent dans l'escalier le mot qu'il
au salon. Ont-ils l'idée, ils ne se décident pas à
s'ils s'y décident comme ce pauvre Jean, ils veulent
ous seuls quand il n'y a personne, mais ne peuvent
ïs qu'il y a quelqu'un. Pour que quelqu'un s'inté-
faut qu'il les devine, qu'il fasse tous les efforts
re à l'aise, pour leur faciliter l'expression. Alors ils
it à lui avec passion et prendront des affections folles
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LES TROUBLES DE LA VOLO;
dont nous aurons à parler. Un tel bonheur
et presque toujours ils le paient très cher. T
timidité et de leurs relations sociales dépei
aboulie fondamendale ; la diminution ou la
sociaux qui se manifestent dans la timidité e
essentiels de Taboulie du psychasthénique.
12. — Les aboulies professio
Après les aboulies sociales, les aboulies
profession se présentent très souvent. Nous
phobies professionnelles, presque toujours
par un <c dégoût énorme du métier qui seml
tout autre, ridicule, honteux... » (An...
M. Bramwell citent un prêtre qui ne peut me
decin qui ne peut faire une ordonnance \ Je tn
toutes les professions, chez Tecclésiastique,
tuteur, le violoniste à Torchestre, le marée!
C'est que le métier est encore Tensemble ai
sidérables des hommes qui agissent peu.
commence à se faire sentir.
Il est intéressant de remarquer qu'une d
qui ont été décrites, celle du notaire de Bille
fessionnelle, ce sont les actes de son étude
plus signer? ce n'est que plus tard que Tabo
actes.
i3. — L'aboulie et l'inhibii
Nous arrivons aux troubles les plus gravei
plus souvent dans une circonstance bien c
de ces crises de « phénomènes forcés » d
ces agitations motrices ou de ces angoii
étudiées dans le chapitre précédent.
D'ordinaire on ne considère ces crises qu'à
au point de vue du développement anormal
la crise les phénomènes secondaires : peu:
émotions. Si l'on veut bien y faire attention
I. Bramwell, On imperalivc ideas. Brain, iSgS, p. 3
a. Billod, Maladies de la volonté, p. 177.
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} LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
I autre phénomène négatif, celui-là, mais encore plus impor-
nt que le premier. C'est Tarrêt, la suppression complète de
icte volontaire que les sujets étaient en train d'accomplir quand
crise a commencé.
On a vu en effet que très souvent ces crises commençaient à
opos d'action. Ger... descendait chercher du bouillon, Nadia
ulait me jouer un morceau de piano, Jean voulait mettre une
ttre à la poste. Or non seulement ces sujets se sont mis à
lirer, à avoir des mouvements incohérents et des peurs
lis encore l'acte commencé s'est arrêté et n'a pas été accompli.
On divise souvent les obsessions en deux groupes distingués
r M. Régis et acceptés par M. Séglas. D'un côté on place les
sessions impulsives dans lesquelles le sujet est poussé à
complir malgré lui des actes inutiles ou absurdes : briser tout,
re d'interminables réflexions ou se laisser aller à des émotions,
î l'autre on admet les obsessions inhibitrices qui arrêtent une
tion, suppriment un phénomène en train de s'accomplir. Cette
»tinction peut être utile dans la pratique : chez quelques malades
ihibition peut être plus remarquée et chez d'autres l'impulsion
l'acte pathologique peut être considérée comme plus pénible et
se en premier lieu. Mais ce ne sont là que des différences de
int de vue. A mon avis ces crises présentent simultanément
ihibition ou même l'arrêt et l'impulsion.
II y a un phénomène de supprimé et un autre qui prend un
veloppement énorme à sa place. Voici un exemple qui montrera
jn, je crois, combien cette distinction entre l'obsession inhi-
ion et l'obsession impulsion est en réalité peu de chose et
pend d'un accident dans l'appréciation des malades. Le hasard
ait que j'aie eu deux malades ayant exactement le même acci-
nt, mais qui par suite du milieu où elles sont placées le dési-
aient chacune d'une manière différente. Ces deux malades,
b... (209) et Vk..., sont toutes deux incapables de tenir leur
nage ; un acte en particulier est devenu impossible et pro-
jue de grandes crises de rumination, c'est l'acte qui consiste
)ayer les dépenses faites par la bonne : ni Tune ni l'autre ne
it se décider à régler ces comptes. Quand elles commencent
faire ce calcul, les hésitations surviennent, les doutes sur
Idition, les recherches, les craintes de voler la bonne, les
poisses, etc., et la crise de rumination ou d'angoisse dure
isieurs heures. Ce dernier fait constitue, si l'on veut, un
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LES TROUBLES DE LA VOLONTÉ 351
gros phénomène impulsif, mais ce qu'il ne faut pas oublier c'est
qu'il y a à côté un autre phénomène qui consiste en ce que la
bonne n'a pas été payée, phénomène que Ton peut appeler une
inhibition. L'une de ces malades est seule chez elle avec des enfants
trop jeunes pour tenir le ménage à sa place, ce qui fait que l'on
remarque principalement le phénomène négatif. La malade et sa
famille se plaignent surtout d'une impuissance, d'un empêchement
que Xyb... ressent pour payer sa bonne et on fait de cette ma-
ladie une obsession inhibitrice. Vk..., au contraire, est entourée
de jeunes filles assez âgées pour avoir pris complètement la direc-
tion du ménage à la place de leur mère, on se résigne donc h ce
que celle-ci ne paye pas la bonne ; mais ce qui paraît important,
c'est qu'elle souffre de ses ruminations et l'on vient dire que Vk...
a des impulsions à compter, à s'interroger, h parler toute seule.
En un mot, la maladie apparaît plutôt chez Tune sous son aspect
inhibitoire, chez l'autre sous son aspect impulsif, quoiqu'elle
soit au fond exactement la même dans les deux cas.
Ce fait de l'arrêt plus ou moins complet de certains actes ou
même de tous les actes est l'un des phénomènes les plus essen-
tiels de l'état mental de l'obsédé. On a beau dire qu'il a conservé
la conscience intacte, il y a toujours une lacune considérable,
c'est qu'il est absolument incapable d'accomplir un certain acte h
propos duquel a commencé la crise. Pendant sa crise d'agitation
Nadia est incapable de jouer son morceau de piano ou de sortir de
sa chambre, ou de tourner son visage a la lumière, ou de manger
son déjeuner, etc. L'acte supprimé varie suivant l'action que le
sujet était en train d'accomplir au moment où la crise a com-
mencé, mais il y en a toujours un de supprimé. Il en est de
même pour Lise : « Dès que celte phrase est formée dans mon
esprit, dit-elle, si je fais cette action, je donne mes enfants au
diable, je n'y suis plus, ma volonté est arrêtée... » Jean veut
commencer à uriner quand surgit dans son esprit la pensée
qu'il n'est pas loin d'une administration de pompes funèbres et
qu'il a failli avoir affaire à ces tristes maisons à cause de ses
masturbations, il a une grande crise de ruminations et de
phobies, mais en même temps c'est fini : il ne peut plus ouvrir
son pantalon et il ne peut plus uriner. Claire est ainsi arrêtée
dans ses prières, dans ses repas, dans ses promenades, dans
l'acte même d'aller aux cabinets, etc. « Il me prend des gênes
pour agir, tantôt pour une action, tantôt pour une autre. »
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[ÎMATES PSYCHASTHÉNIQUES
! disait M. Sautarel, dans une thèse sur
que le sujet essaye vainement de transfor-
icte, que sa volonté n'est plus suffisante
tème moteur; les efforts qu'il tente à cet
1 augmenter son trouble et son angoisse'»,
troubles de la maladie, quand il se pré-
alades, il s'associe avec les autres troubles
Disse, et c'est un problème important de
dérer comme la conséquence de ces agi-
egarder comme un trouble primitif. Pour
ente de signaler sa fréquence et son im-
>ubles de la volonté que présentent ces
es fatigues insurmontables,
îtendre et supprimer un nombre d'actes
is déterminer en même temps ces crises
n phénomène très curieux et encore assez
;nt souvent ces malades. Ce sont des crises
ruées d'un sentiment de fatigue tout à fait
ent de fatigue constant il y a chez eux de
gue. Ces crises surviennent chez Fz... à la
èle à la suite de grand travail pour une
1 la suite des efforts d'attention, chez la
adia, Lise, Brk... (24) à la suite des efforts
triompher de leurs idées obsédantes : c'est
>n est exposé à déterminer dans le traite-
iC sujet se sent tout à fait épuisé : « c'est,
fatigue, a croire qu'on va tomber évanoui,
)ar terre. » « C'est une fatigue à m'en
, il y a un tel poids sur mes membres
• mon estomac que je deviens incapable
B&t que dans ces cas les malades devien-
n faire, ils restent couchés ou se traî-
pendant des heures et des jours. Nadia,
l'élude des obsessions et en particulier de l'inhibition
^897, p. 98.
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LES TROUBLES DE LA VOLONTÉ 353
Gisèle ne bougent presque plus pendant plusieurs jours et
sentent leurs sens engourdis « toutes les sensations dans du
coton (Gisèle) ».
Les autres Lise, Brk..., se traînent péniblement et n^ont même
plus la force de penser à leurs obsessions, elles ne pensent à rien.
C'est même pour Brk... une sorte de bonheur que cette absence
d'idées a après tant d'agitation de Fesprit il y a un grand bien-être
à ne penser à rien ». le... non seulement ne pense à rien mais il
trouve du plaisir à ne pas faire le plus petit mouvement. « Si dans
son lit une position fausse ou le contact d'un objet lui est pénible
il aime mieux supporter cette gêne indéfiniment plutôt que de faire
le moindre mouvement pour l'écarter. »
En général ces crises qui sont en rapport avec un effort pré-
cédent et une fatigue durent peu et le malade ne tarde pas à re-
prendre plus d'activité et en même temps malheureusement il
retrouve son agitation physique et morale.
i5. — Les inerties.
Enfin au dernier terme, l'aboulie s'étend encore, les malades
n'attendent pas que l'acte soit rendu impossible par une inhibi-
tion, une crise ou une fatigue, ils se souviennent de la difficulté
qu'ils ont éprouvée pour agir, ils l'exagèrent par l'imagination et
en arrivent à ne plus rien faire du tout. On remarque bien vite
que tous ces malades ne savent plus rien faire, restent des jour-
nées entières sans aucune occupation : (( je n'ai plus de goût à
rien..., je tiens les objets en main sans rien faire..., je ne puis
plus avoir aucune occupation... » (Ce... (i24), Cht..., Mio... (208),
Vob... (194).
Ceux qui avaient un travail finissent par le cesser, Sy... ne
peut plus coudre, ni même s'occuper à lire. Ver... cesse absolu-
ment de travailler et n'accepte plus aucune occupation. Cat...
qui était instituteur désire rester au lit sans rien faire; si on le
force à se lever il reste assis sans bouger. Ce désir de rester
couché se retrouve très souvent, il caractérise Chy..., Za... (216),
Xyb... (209), etc. Presque tous restent immobiles des heures
entières et passent leur vie assis dans un coin.
Plus la maladie se prolonge, plus elle s'aggrave et plus on voit
augmenter cette inertie caractéristique, si bien qu'à la fin les
grands malades ne peuvent plus quitter leur chambre, ne peu-
LliS OBSESSIONS. L 33
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LES STIGMATES PSYCIIASTHÊNÎQUES
t plus recevoir personne et achèvent leur vie dans l*isolement
'immobilité.
ia volonté active s'est montrée troublée dès le début de la vie:
QOtait d'abord l'indolence, l'irrésolution, la lenteur, les retards,
aiblesse des efforts, le désordre, la maladresse, rinachèvement,
iéfaut de résistance, puis on a vu certains actes disparaître,
t)ord les actes nouveaux, les changements de conduite, puis
actes sociaux dans la timidité, les actes professionnels, des
3s quelconques qui sont gênés, puis annulés et supprimés. Les
îts ont des crises d'épuisement, puis enfin une inertie géné-
5 et constante. Cet ensemble de troubles de la volonté forme
stigmate essentiel de l'état psychasthénique et il est essentiel
n tenir compte pour chercher les rapports qu'il présente avec
autres accidents.
3.— Troubles de l'intelligence.
jCS troubles de l'intelligence proprement dite sont beaucoup
îns évidents, beaucoup plus difficiles à constater que ceux de
tivité volontaire. C'est un point qui avait déjà frappé les pre-
irs observateurs quand ils appelaient cette maladie une folie
c conscience, avec conservation du jugement et de la critique,
n de paraître inintelligents les scrupuleux semblent très sou-
t avoir une intelligence supérieure, être capables de tout dans
[omaine de l'esprit pourvu qu'on ne leur demande pas d'ac-
1. C'est ce que Amiel note déjà très bien sur Jiri-mème :
mer, rêver, sentir, apprendre, comprendre, je puis toul pourvu
on me dispense de vouloir, c'est ma pente, mon instinct, mon
aut, mon péché. J'ai une sorte d'horreur primitive pour l'am-
on, pour la lutte, pour la haine, pour tout ce qui disperse l'âme
la faisant dépendre des choses et des buts extérieurs. ' »•
développement intellectuel n'est pas toujours de pure appa-
ce : j'ai souvent été frappé de la supériorité intellectuelle véri-
le d'un grand nombre de ces malades.
In lisant les pages précédentes on a dû remarquer parmi les
ibreuses paroles des sujets que j'ai citées une foule d'expres-
Amiel, Journal intime, I, p. i68.
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TROUBLES DE L'INTELLIGENCE 355
slons pittoresques, de comparaisons ingénieuses, de métaphores
heureusement venues. Leur conversation en est émaillée, il y en
a avec qui on voudrait tout écrire et tout conserver : Gisèle en
particulier a un langage extraordinaire et vraiment tout à fait
séduisant. Sous ce brillant des mots, il y a beaucoup d'observa-
tions Bnes et justes : les scrupuleux sont très souvent de remar-
quables psychologues. Gisèle fait l'analyse de Tamour aussi bien
qu'au pays du tendre, Jean est célèbre pour son appréciation
des caractères et des personnes, il dissèque étonnamment les
motifs de conduite et il n'est bête que quand il parle de sa ma-
ladie.
On trouve chez eux toutes sortes de talents et de connaissances,
ils sont souvent très artistes: Claire dessine très bien, beaucoup
sont des musiciennes hors ligne comme Nadia. On trouve parmi
eux des littérateurs délicats, on serait surpris de voir parmi les
malades que j'ai cités quelques écrivains connus. Rk.. ., traduit des
textes grecs en vers élégants et fait ainsi toute une anthologie de
poètes grecs. Les idées qu'ils arrivent à concevoir sont souvent
surprenantes pour leur milieu : on a vu les réflexions de Vil... sur
rinGni du bonheur et du malheur, les analyses de Mb... sur la per-
ception. Une malade de l'hôpital absolument ignorante de toute
étude de psychologie m'exprimait le résultat de ses réflexions sur
les lois des associations des idées, une pauvre femme de la cam-
pagne atteinte du doute des perceptions en arrivait à découvrir
avec étonnement l'homologie des membres chez les poissons, les
oiseaux, les mammifères, l'homme. Le cas le plus frappant de cette
supériorité intellectuelle est celui de Nadia. Cette jeune fille parle
et écrit couramment cinq langues : l'anglais, le français, l'alle-
mand, l'italien, le russe. J'ai eu l'occasion de la mettre en rela-
tion avec une jeune fille russe qui m'a assuré qu'elle parlait le
russe tout à fait correctement, comme les autres langues. Elle lit
énormément, et connaît à fond la littérature de ces cinq langues
dont elle peut parler avec une mémoire surprenante. Elle est
surtout très artiste ; non seulement elle a une virtuosité remar-
quable sur le piano et sur le violon mais elle compose de la mu-
sique avec une connaissance très suffisante de l'harmonie, ce que
j'ai pu faire vérifier en donnant h lire de ses morceaux à des
personnes compétentes. Elle à un goût très pur dans toutes les
choses d'art, et peut inventer, dessiner et exécuter toutes sortes
de décorations. Ce serait certainement au point de vue du goût
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LES STIGMATES PSYGHASTHÉNIQUES
périeure. Des réflexions de ce genre pourraient être
rents degrés bien entendu pour la plupart de ces
>rès les avoir beaucoup fréquentés j*ai Timpression
ipe est supérieur à la moyenne intellectuelle des
L pris au hasard.
il est évident que leur intelligence n'est pas com-
loit y avoir des lacunes pour permettre le dévelop-
is les troubles qu'il présentent. Il faut les recher-
nantles facultés qui semblent pouvoir être troublées.
I. — Les amnésies,
que je viens de dire, il est évident que les troubles
)nt peu parmi les phénomènes intellectuels abstraits;
lents, les jugements, la généralisation sont tout à
urtout quand ces opérations s'exécutent d'une ma-
taire sans que les malades aient à fixer leur atten-
ement.
e semble bien souvent être plutôt exagérée, Wo...
le dans les souvenirs, elle peut, probablement par
ngue habitude de cet exercice, se remémorer toutes
qu'elle a éprouvées d'un moment à un autre, tous
loncés pendant une visite. Lise conserve indéfini-
enir de tous les plus petits incidents de sa vie, elle
ne pas savoir oublier; la mémoire de Jean, on l'a
;he à l'invraisemblable. Ces souvenirs sont si nets
) de ces malades, comme le disait Lowerfeld, vivent
passé que dans le présent.
caractère général de la mémoire des psychasthé-
Hirs auteurs ont constaté des altérations des souve-
rtaincs circonstances particulières. M. Séglas re-
Tévocation des souvenirs est quelquefois pleine
\ surtout quand il s'agit de retrouver le souvenir
jCs malades croient également avoir une très mau-
e et s'en plaignent bien souvent. Dans les cas de
iation, ils soutiennent avoir perdu leurs souvenirs
sensations. Bien souvent les crises d'interrogation
par l'incapacité où sont les sujets de retrouver un
ons cliniques sur les maladies mentales, p. 187.
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TROUBLES DE L'INTELLIGENCE
souvenir. Bre... (i4i) en est un exemple remarquable
qu'elle a perdu son mari, elle est tourmentée par le
d'avoir oublié sa physionomie, les traits de son visage,
peut évoquer dans son imagination cette image qu'elle cl
Aussi passe-t-elle ses journées à rechercher la figure de s
les photographies lui semblent insuffisantes, elle ne les r
pas suflfisamment, il faut qu'elle cherche mieux ; à force
cher, elle sent qu'elle oublie de plus en plus tout ce qui a
à la figure du mari. Ainsi elle peut évoquer, dans son imaj
des fleurs, des monuments, l'Arc de Triomphe, des fij
femmes, mais non des figures d'hommes, et surtout pas d(
d'hommes portant des moustaches. Elle oublie la voix <
ses paroles, son métier et même son mariage. Cette mal
semble au cas célèbre présenté par Charcot comme une
la représentation visuelle, elle a la conception logique q
mari avait des yeux noirs, un grand nez et une moustache
mais elle ne peut pas se le représenter devant les yeux
probable que le malade de Charcot, qui pouvait » défini
et non se la représenter », était un scrupuleux du même i
Que faut-il penser de ces amnésies au moins apparei
Séglas remarque justement qu'elles sont paroxystiques,
sentent par crise avec une impulsion violente à chercher,
ne retrouve pas dans d'autres amnésies \
Même dans ces moments de crise ces amnésies sont-e
jours réelles et profondes? On remarque facilement, surt
les cas de dépersonnalisations, que les sujets n'ont pas
ment ces oublis. Dès qu'ils veulent bien se laisser aller, i
tent tout ce qu'on leur demande. Il n'est pas nécessaire d
des souvenirs subconscients comme chez les hystériques
que l'évocation ne soit pas volontaire. Ce qu'ils font mal
c'est l'évocation volontaire, ils ont comme des crampes de
tion sur un point et ne peuvent la mouvoir pour passer
cation de faits voisins : dès qu'ils 'ne se surveillent plus i
ment facilement tous les souvenirs. ^
Cette persistance des souvenirs se retrouve, à mon avis,
toujours et je ne suis pas tout à fait d'accord avec M
quand il admet un certain degré d'amnésie des périodes <
Cette amnésie serait importante car elle rapprocherait C(
I. Séglas, Troubles du langage chez les aliénés, p. loo.
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-iflr^
»8 LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
u somnambulisme : elle ne me parait pas bien nette. La plupart
e mes sujets m*ont raconté leurs crises de rumination et d*an-
oisse avec un luxe inouï de détails. Jean pourrait raconter
ombien de fois son cœur a fait « ploc ploc » et combien ce il a
û soulever de poutres en nombre répété », il n*a pas du tout
'amnésie et je crois qu'il en est ainsi de presque tous les
utres. Les malentendus sur ce point dépendent, je crois, de
eux choses. D'abord il ne faut pas que le malade fasse trop
'efiTorts volontaires pour retrouver le souvenir de la crise, il faut
ttendre que le récit lui vienne à Tesprit spontanément, ensuite
1 faut éviter de rechercher ce récit trop tôt après la crise elle-
lême.
Ces malades se rappellent d'autant mieux une chose qu'elle est
lus ancienne, ils m*ont semblé avoir souvent un certain degré de
mémoire retardante^ ». Cela s'accorde d'ailleurs avec la re-
larque précédente, on sait que l'évocation volontaire des sou-
enirs est d'autant plus difficile que le souvenir est plus récem-
lent acquis, d'autant plus facile qu'il est plus ancien : il est tout
laturel qu'avec une puissance d'attention et d'évocation volontaire
aible la mémoire soit retardante.
Je crois cependant que l'on peut dans certains cas constater
près les crises certains oublis quand on interroge les malades
ion sur leurs propres idées et leurs propres sentiments, mais sur
es événements qui ont eu lieu en dehors d'eux pendant cette
fériode. Claire sait bien qu'elle est restée a genoux aux cabinets
arce qu'il lui semblait qu'elle avait une hostie collée à l'anus et
[u'ellc faisait des efforts pour « passer cette idée » ; elle sait
omment l'idée s'est déroulée, les mouvements qu'elle a faits. Mais
I est visible qu'elle ne sait pas si c'est sa mère ou sa bonne qui
st venue la chercher et l'a forcée k cesser ses contorsions. D'au-
res malades, Gb... ou Sy..., qui ont été malades toute la journée,
le savent plus où elles ont été, si elles ont mangé ou non, si on
eur a parlé. Il y a là un certain degré d'amnésie continue pour
es événements extérieurs en rapport évidemment avec un état de
[istraction.
D'ailleurs, d'une manière générale, les troubles de la mémoire
3s plus nets que présentent les psychasthéniques se rattachent
u type de Vamnésie continue. Le malade semble évidemment
I. Cf. A'éurows tfi Idées fixes, I, p. lôa.
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TROUBLES DE L'INTELLIGENCE 359
distrait, il répèle souvent la même chorse, il radote, il oublie qu'il
vient de nous raconter tout cela et quand on le lui fait remarquer
il prétend qu'il n'a pas fait ces questions et qu'on ne lui a pas
répondu. « Il m'est impossible de retenir un root, disait déjà un
malade de Baillarger, après avoir lu et relu une lettre, rien ne
me reste, à mesure que je lis, j'oublie. 11 en est de même en écri-
vant, j'oublie ce que je viens d'écrire*. » Chez quelques malades
que j'ai déjà décrits dans mon étude précédente sur « l'amnésie
continue », en particulier dans le cas de Sch... (observation IV)*,
qui se rattache tout à fait à notre groupe des psychasthéniques,
on trouve une amnésie des événements récents qui se développe
d'une manière continue à mesure que la vie se déroule : « Elle ne
peut faire aucune course, aucune commission, car aussitôt dans la
rue elle perd et le souvenir des adresses et le souvenir même de
ce qu'elle doit faire. Ou bien, au contraire, elle fait les choses
plusieurs fois, tout étonnée par exemple de trouver son lit déjà
fait ou surprise de constater que sa soupe n'est pas mangeable car
elle l'a salée dix fois. Ce n'est qu'en raisonnant sur ses occupa-
tions habituelles qu^elle peut supposer assez vaguement ce
qu'elle a fait hier ou ce matin. Cet oubli n'est pas continuellement
aussi profond et aussi rapide, il augmente aux anniversaires de
la catastrophe, il diminue dans l'intervalle. » Les autres observa-
tions de cette étude sur l'amnésie continue avaient surtout rapport
à des hystériques chez lesquelles d'ailleurs le symptôme est bien
plus accentué. Mais il serait facile d'ajouter ici bien des cas aussi
nets chez des psychasthéniques. On retrouve l'amnésie continue
chez des tiqueurs comme Myl... ou As... ou Lrm..., chez des
phobiques comme Ku... ou Dob... « qui ne sait plus à quoi elle
a employé ses journées », chez des obsédés comme Bei..., « inca-
pable de se rappeler au bout de deux minutes ce qu'elle vient
de faire », chez Claire « qui oublie tout au fur et à mesure ».
Malgré la banalité de ce symptôme que l'on retrouvera chez
presque tous les malades, je crois cependant qu'il ne faut pas
s'attendre à le trouver parfaitement net chez les psychasthéniques
comme chez quelques hystériques ou comme dans la psychose
polynévritique de Korsakof. Très souvent les souvenirs réappa-
raissent plus ou moins complets au bout d'un certain temps quand
I. Baillarger, Rechfrches sur les maladies mentales, 1890, I, p. 568.
a. Névroses et Idées fixes, I, p. ii5.
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5 STIGMATES PSYCHAÎTHÉNIQUES
e plus à les évoquer volontairement. 11 y a
^tardante et troubles de l'attention dans la fixa-
des souvenirs.
2. — Arrêt de l'instruction.
manifestent d'ailleurs de bien des manières,
videmment pas profité de l'instruction qu'ils
uraieut fait des individus normaux. Lo... (2i3),
cours possibles, ne sait en réalité pas grand'-
retard sur les jeunes femmes de son Age placées
mditions. Le fait est encore plus manifeste chez
ates les classes du lycée, il a été aidé et dirigé
e, je persiste.^ le croire intelligent d'après son
dyses psychologiques et morales. Cependant il
iblement à des examens élémentaires, il n'a pu
du droit et en somme il ne sait presque plus
I essayé de lui apprendre. J'ai déjà signalé le
qui le pousse à demander des idées générales,
correspond a quelque chose de juste. Il a une
linaire des dates, des faits bruts, mais il n'a
I générale. La maladie de Red... a commencé
ans, ses progrès se sont arrêtés à ce moment
tifiques qu'elle suivait parfaitement auparavant
p difficiles pour elle.
lanifestent surtout dans les exercices qui deman-
m et de la composition. On pourrait croire que
qui veulent toujours compter et qui recherchent
cision vont avoir des dispositions pour les ma-
serait une grande erreur : ils ont tous horreur
s proprement dites et sont incapables de coni-
•e raisonnement géométrique ou de résoudre un
'ai essayé bien souvent de faire devant eux un
ce genre, aucun ne m'a même laissé aller jus-
évident qu'ils n'y comprenaient rien. Un exer-
art n'arrivent pas à faire davantage, c'est une
écrit sur un sujet quelconque. Ils redoutent
descriptifs où il est question d'objets réels; ils
iées, surtout les idées abstraites. Gisèle remarque
l mieux les idées que les choses concrètes.
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TROUBLES HE L'INTELLIGENCE
Wye... veut bien s'occuper de psychologie mais non de pi
logie, c'est là un fait important sur lequel nous revienc
Mais ils ne peuvent mettre leurs idées en ordre, ils veulent
voir en parler d'abondance, à tort et à travers; ils ne peuvei
coordonner une composition écrite. C'est une des raisons
lesquelles ils ont tant de peine à vous écrire et quelquefois i
parler.
Nous retrouvons ici un caractère curieux que nous avoi
gnalé dès le début de celte étude en décrivant l'attitude de
lades. Leur embarras, leur difficulté pour exprimer leurs tr(
ne dépendent pas seulement de leurs idées, de leurs senti
de gène, mais aussi de l'impuissance de leur esprit à coord
et à exprimer.
3. — Inintelligence des perceptions.
n n'est pas facile de mettre en évidence par une expé
rapide cette incapacité intellectuelle. Presque toujours les m
sont encore capables de fixer l'esprit pendant un moment
on les excite : ils ne se comportent pas comme certaines hysté
qui lisent tout haut quelques lignes, qui les récitent même
comprennent absolument rien à ce qu'elles ont lu. 11 est
saire de les faire lire plus longtemps des morceaux un pe
sérieux, il est bon surtout de les laisser lire seuls quelques ir
et de les interroger ensuite sur ce qu'ils ont lu. J'ai fait s<
cette expérience chez Tr..., chez Lo... et chez Claire et j'a
vent constaté que ces sujets avaient très mal compris leur le
Elles me priaient toujours de les laisser recommencer et
plusieurs fois de suite le même morceau. Ce n'était pas
fait une manie de répétition et un sentiment faux de mécoi
ment : l'intelligence du morceau était réellement très i
santé.
On peut quelquefois constater plus encore et voir qi
malades n'ont pas seulement des obsessions conscientes, (
on les appelle, dont ils reconnaissent bien la fausseté. I
des idées fausses sur leur situation et sur les personnes
environnent. Ils ne se rendent pas compte de l'opinion
inspirent, ils croient que leur situation n'est pas grave dî
cas les plus désespérés, ils continuent à croire possibl
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LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
de choses impraticables. Lo... s'est mariée, a quitté ses
ts, a habité deux mois avec son mari sans prendre cette situa-
u sérieux et sans la comprendre; elle quitte subitement son
»t retourne chez ses parents ; le mari demande le divorce,
ien de tout cela n'interrompt ses rêves, cette jeune femme
5 en souriant qu'elle est toute surprise de s'entendre appeler
ne, qu'elle ne se rend pas compte d'avoir réellement été
e. Il est certain que cette pauvre femme ne sent point du
a gravité de sa situation. Xyb... a renvoyé une domestique
îlle l'a reprise quelque temps après. En dehors de ses hési-
s et de ses obsessions elle se fait sur cet acte une apprécia-
Dut a fait fausse. Elle croit devoir h cette domestique des
itions extraordinaires, elle croit que les « rapports ordinaires
îtreà domestique n'existent plus entre elles deux, cette bonne
us sa place dans mon imagination comme domestique, elle
it liée vis-à-vis de sa bonne par quelque chose, etc. ». J'in-
»ur ce point, les malades n'ont pas seulement des obsessions
ientes, ils ont des idées inexactes qui peuvent facilement
ir des idées délirantes.
défaut de l'intelligence ne se manifeste pas d'ordinairedans
iple conversation, on n'observe un trouble dans les percep-
auditives que dans deux cas, d\ibord quand les malades
u milieu d'une crise de rumination ou d'angoisse très forte,
nt ils ne comprennent plus rien à ce qu'on leur dit, mais ce
le ne dure en général que peu de temps. On l'observe aussi
1 ils essayent d'écouter pendant assez longtemps une con-
ce ou un sermon. Claire se désolait au début parce qu'elle
uvait plus comprendre les sermons, elle accusait ses senti-
» religieux; en réalité elle ne pouvait suivre la parole du pré
^ur que pendant peu de temps. Jean met beaucoup de zèle
Te des conférences littéraires mais il n'en profite guère, car
peut écouter le professeur plus de quelques minutes, son
s'en va et pense à autre chose.
4. — Troubles de l'attention,
» altérations dans le résultat du travail mental révèlent des
les assez graves de l'attention. C'est en effet un fait d'ob-
tion vulgaire que l'état de distraction perpétuelle des obsédés.
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TROUBLES DE LINTELLIGENCE 363
Baillarger notait déjà « la lésion de l'attention dans la monoma-
nie*». Buccola et Tamburini ont insisté sur l'exagération de
l'attention spontanée et Tafiaiblissement de l'attention volon-
taire.
On peut dire que c'est là le trouble principal qui consiste non
dans une suppression des facultés intellectuelles mais dans une
difficulté de fixer l'attention. Ils ont toujours l'esprit distrait
par quelque préoccupation vague et ne se donnent jamais entière-
ment à l'objet qu'on leur propose. 11 résulte de celte division de
l'esprit qu'il ne donne que peu de force pour l'opération prin-
cipale. Ils ont de la peine à effectuer les opérations mentales dès
qu'elles devieiuient un peu difficiles, ils comprennent mal, n'ont
pas de vues d'ensemble, s'embrouillent extrêmement vite dès que
l'objet d*étude est un peu compliqué : Xyb... avouequ'elle perd la
tête dès qu'elle a plusieurs opérations à faire à la fois. S'il entre
quelqu'un pendant qu'on lui parle elle ne comprend plus. Elle vou-
drait comme d'ailleurs tous les autres être dans le plus grand calme
pour lire une phrase ou répondre à une question. « Dès que je
reçois une visite, dit Lib... (117) je ne puis plus fixer mon atten-
tion même sur une simple broderie, j'ai la tête pleine de choses,
il faut que je sois absolument seule pour me fixer un peu sur
quelque chose. » « 11 m'est devenu bien difficile d'être présente,
dit \Vo..., à chaque instant les gens me secouent et me disent :
à quoi penses-tu ? Je sens surtout cette diiEcultc quand j'essaye
de jouer de la musique à quatre mains, je ne puis pourtant pas
dire à la personne qui joue avec moi: je n'y suis pas, attends-
moi. Il me faut un effort énorme pour continuer à peu près et
ne pas partir sur quelque recherche. »
Même quand l'attention se fixe un peu elle a toujours un autre
défaut, c'est son extrême brièveté. 11 ne faut pas maintenir long-
temps la même opération, le malade cesse vite de s'y intéresser :
Jean ne peut suivre une étude que quelques minutes, même sans
qu'il ait de manies à ce sujet il se met au bout de trois ou quatre
minutes à vous faire répéter et ne comprend plus, il en est de
même chez Mm... qui ne peut pas prolonger une conversation
plus d'un quart d'heure. Claire change sans cesse d'occupation,
elle laisse une chose et la recommence, elle s'agace de ne pas
I. Baillarger, De la lésion de Tattention dans la monomanie. Ann. méd. psych.,
i846. 11, 168.
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364 LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
pouvoir fixer Tattention et tombe dans ses manies. Lise se plaint
de ne plus pouvoir aller jusqu'au bout d'une addition. Chez
FiG. i5. — Courbe des temps de réaction à dos excitations tactiles oftez Bci. — Les exci-
tations tactiles ont lieu sur le dos de la main gauche, les mouvements sont faits par la
main gauche. — Durée de Texpérience: i5 minutes.
Simone le fait devient grossier : je réussis h Tarracher à ses idées
fixes en l'intéressant à l'analyse botanique d'une fleur : tout va
FiG. i6. — Courbe des temps de réaction simple à des excitations tactiles chez Bel. — Ln
excitations tactiles ont lieu sur le dos de la main droite. — L'expérience a une durée de
3o minutes. — En A, première partie du graphique pendant les ta premières minatw;
en B, dernière partie pendant les la dernières minutes.
très bien au début en écoutant avec attention elle devient aimable,
elle demande ce qu'elle ne comprend pas et ne manifeste plus de
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TROUBLES DE L'INTELLIGENCE
3G5
délire. Ces belles dispositions ne durent pas plus de quatre ou
cinq minutes; puis je vois bien que sa figure change, elle se bute
et ne comprend plus, elle se frotte le front comme si elle y souf-
FiG. 17. — Courbe des temps de
réaction simple à dos excita-
tions auditives chez Bei...
FiG. 18. — Courbe des temps de
réaction simple à des excita-
tions visuelles chez Bei...
frait, si je continue elle va se fâcher et tomber dans une crise
d'agitation délirante.
Fia. 19. — Courbe des temps de réaction simple à des excitations tactiles chez Qes...
On observe le fait inverse quand il s'agit d'une association
d'idées qui revient mécaniquement. Le sujet y revient sans cesse,
il ne peut plus parler d'autre chose. « Je remarquais, dit Trélat,
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%7^fff^
LES STIGMATES PSYGHASTHÉMQLES
)rsque ses idées étaient portées sur un sujet, il ne pensait qu'à
t ne parlait plus d*autre chose \ »
irais vivement désiré rendre manifeste cette brièveté de l'ai-
m par des mesures et des graphiques et vérifier Tobservalion
Buccola sur l'augmentation des temps de réaction. Les dif-
^s sont très grandes : les grands malades ne se prêtent pas
Kpériences, les autres sont momentanément modifiés par le
sitif même, enfin les procédés de mesure de l'attention sont
e insuilisants. J'ai cependant essayé d'obtenir chez quelques
[es le graphique des temps de réaction suivant une méthode
été discutée dans un ouvrage précédent^. Les graphiques
itlenlion par la courbe des temps de réaction, pris chez
, ne sont pas très caractéristiques. Quand il s'agit de temps
iclion simple à des excitations tactiles faites sur le dos de
lin gauche ou de la main droite, la courbe est à peine au-
s de la normale, et elle s'élève fort peu sous rinfluence de
gue, comme on le voit dans les figures i5 et 16 empruntées
•e livre sur les névroses^ et qui représentent une expérience
juart d'heure de durée. Dans les figures 17 et 18 qui repré-
nt des temps de réaction à des excitations auditives et à
xcitations visuelles on note une élévation notablement plus
e des courbes qui nous montre mieux la diminution de
ition.
deux courbes (figures 19 et 20) obtenues par les mêmes
dés sur Qes... sont intéressantes : la courbe des réactions à
xcitations tactiles et celle des réactions a des excitations
les sont toutes deux beaucoup trop élevées. Cette élévation
1 peu moins grande dans la figure 21 qui montre la courbe
éactions de Oei... îi des excitations visuelles. J'ai déjà fait
quer toutes les critiques dont est passible ce mode de me-
de l'attention. Ces recherches n'ajoutent que peu à nos
nations précédentes sur la faiblesse de l'attention, elles ne
[ue les confirmer.
réiat, Folie lucide, p. 57.
évroses et Idées Ji.rcs, 1, chapitre a, La mesure de Tatlenlion et le graphique
ips de réaction, p. 69.
évroses et Idées fixes, II, p. 69.
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g
S
o
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368 LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
Fio. ai. — Courbe des tempe de réaction simple à des excitations Yi&uelles chez Gei...
5. — Jtéiferie.
De cette disparition de Tattention il résulte que leurs pensées
ressemblent beaucoup plus à un état de rêve, k une rêverie per-
pétuelle. Chaque fait provoque des associations d'idées qui vont
absolument à la dérive sans que le malade puisse les diriger.
(( Mes idées, dit Lise, ne sont jamais nettes au fond, je suis inca-
pable de m'y débrouiller. Elles viennent subitement, occupent
Tesprit une demi-journée et puis s'en vont. J'ai une paralysie
dans la tête qui m'empêche de les secouer, n We... (170) rêve
toute la journée, elle remarque elle-même que ses idées se pré-
sentent la nuit en rêve de la même façon que dans la journée.
Il n'y a pas pour elle une grande différence entre la veille et
le sommeil.
Chez Claire la rêverie est très bien décrite. « Je rêve toujours
tant de choses que je n^en sais même pas la moitié. » Ce ne
sont pas toujours des idées ayant rapport à son délire, ce
sont des choses qu'elle a vues, qui viennent, elle ne sait d'où,
qui se mêlent confusément et elle ne peut fixer une de ses idées
sans qu'il en vienne une foule d'autres tout autour, ce Quand je
regarde en arrière je ne sais pas comment j'ai vécu, je trouve des
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TROUBLES DE L'INTELLIGENCE 36»
rêverîes sans fin sur tout. Toutes mes pensées se tournent en
rêve ; quand on me parle, quand on me touche, on me fait sursau-
ter comme si je n'y étais plus, comme si j'étais toujours dans un
autre monde. »
Gisèle a remarqué qu'elle n'est jamais entièrement à ce qu'çUe
fait parce qu'il y a toujours trois vies en elle : la vie extérieure en
rapport avec les choses du dehors, c'est la moins développée, la
vie intérieure des réflexions, la plus intéressante et la plus déve-
loppée et une troisième vie dont elle se rend mal compte et
qu'elle sent au fond d'elle-même comme si quelque chose rêvait
en elle encore plus profondément. Ces divisions de la pensée
qui se produisent quand diminue l'efTort de l'attention justi-
fieraient ce mot bien juste de M. Espinas « une conscience
alTaiblie c'est une conscience dispersée ». On ne sera plus étonné
de la rêverie de Lib... que j'ai décrite comme un accident une
agitation mentale diffuse : ce n'est que l'exagération d'un stigmate
que nous retrouvons sous une forme atténuée chez tous les autres
malades.
Dans ces conditions il semble bien difficile que ces esprits
puissent arriver à une conclusion nette sur un fait ou sur un
raisonnement. Krafft-Ebing, disait justement que ce qui frappe
immédiatement c'est l'impossibilité d'amener ces malades à une
conclusion*. Ce sentiment de doute que nous avons constaté dans
les sentiments d'incomplétude est l'expression dans la conscience
de ce travail insuffisant de l'attention. <( C'est, disait M. Ribot,
un état d'hésitation constante pour les motifs les plus vains avec
impuissance d'arriver à un résultat définitif*. »
6. — Eclipses mentales.
Je voudrais signaler à propos de ces troubles de l'attention un
phénomène très curieux dont on verra bientôt toute l'importance.
Simone vient se plaindre d'éprouver souvent un singulier arrêt
de la pensée. Tout d'un coup elle s'arrête au milieu d'une con-
versation et reste un petit moment sans parler puis elle se
retrouve, quelquefois elle continue sa conversation comme si rien
n'était arrivé et ses parents sont seuls à avoir remarqué la petite
I. Krafll-Ebing, Psychiatrie, traduct. 1897, p. 544.
a. Ribot, Le$ Maladies de la volonté, p. 69 (Paris, F. Alcan).
LES OBSESSIONS, I. 34
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LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
uvent elle reste un peu troublée et a besoin de
pour savoir oii elle en était. Ce fait me parait
ieux que chez cette jeune (ilie il a précédé de
; comme annoncé l'arrivée de grandes obsessions
s qui ont pris pendant longtemps un assez grand
Le même fait se présente chez Gisèle, grande
vaut son expression « elle perd ses idées», mais
i*elle prétend, que c'est là un phénomène fré-
mille et que ses frères ont aussi Thabitude de
en temps leurs idées.
de l'attention peut donc aller chez quelques-uns
)ses de la pensée comme la diminution de la
/inertie complète.
bles des émotions et des sentiments.
notions et des sentiments de ces malades serait,
ièrement fructueuse, parce qu'elle expliquerait
)s faits, mais on trouve toujours la même diffi-
3S qui se présentent et qui sont incontestables
tats des idées absurdes du malade, sont-ils créés
[ sont-ils antérieurs à ce délire et forment-ils le
a maladie? Bien souvent leé malades eux-mêmes
uble de leurs émotions à une sorte de retenue
presque volontaire, c'est ce que font souvent les
i en moi, disait AmieP, une raideur secrète à
ne émotion vraie, à dire ce qui peut plaire, à
moment présent, sotte retenue que j'ai toujours
agrin... mon cœur n'ose jamais parler sérieuse-
oujours avec le moment qui passe et j'ai l'émo-
:. 11 répugne à ma nature réfractaire de recoii-
é de rheure où je suis, un instinct ironique
ma timidité me fait toujours glisser légèrement
sns sous prétexte d'autre chose et d'un autre
ir de l'entraînement et la défiance de moi-même
usque dans l'attendrissement. » Cet arrêt des
ilime, I, p. i5i.
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TROUBLES DES ÉMOTIONS ET DES SENTIMENTS 371
sentiments est-il vraiment une retenue par crainte de l'entraî-
nement, ou bien au contraire «cette prétendue retenue n'est-elle
pas inventée pour l'expliquer ?
Le même problème se pose à propos des idées de scrupule qui
semblent être la raison de cet arrêt des émotions. Lod... se plaint
d'une chose qui l'énervé au plus haut point, c'est qu'elle ne peut
plus s'amuser, se réjouir, prendre du plaisir de bon cœur à quelque
chose. Quand l'excitation agréable arrive et que le plaisir va surve-
nir, elle est arrêtée, ne peut plus se livrer au sentiment quel qu'il
soit, il faut qu'elle pense à autre chose et ses idées ordinaires,
ses problèmes surgissent : il faut qu'elle les résolve d'abord, avant
de continuer la jouissance. Un chapeau lui plait-il, aussitôt surgit
l'idée que c'est une satisfaction égoïste. Veut-elle passer outre,
elle a des remords comme si « elle avait l'idée d'envoyer la reli-
gion promener ». Écoute-t-elle une comédie au théâtre, il lui
faut « remettre droites ses idées sur Dieu )> avant de s'intéresser
à la pièce. Elle ne peut prendre plaisir à la musique qu'elle joue, il
faudrait d'abord se débarrasser de l'idée qu'elle pense mal de Dieu.
Elle a une amie qu'elle aime beaucoup et ne peut se laisser aller
au plaisir de l'affection, au simple plaisir de l'embrasser, car il lui
vient l'idée qu'elle aurait bien pu l'embrasser sur les lèvres et que
ce serait contraire à la pudeur.
En écoutant ce langage, on est porté à penser qu'elle est sur-
tout délirante, que c'est elle qui se supprime ses plaisirs à
cause des scrupules qui la persécutent, et on est tenté de lui dire :
<c Ne pensez plus au bon Dieu et à la morale et vous vous amuserez. >
La question est plus délicate, car cet arrêt du plaisir se re-
trouve chez beaucoup de malades qui n'ont pas précisément des
obsessions ni des phobies a ce sujet et dont les émotions s'arrê-
tent cependant de la même manière sans qu'il y ait une idée
déterminée ni une angoisse pouvant servir de prétexte à cet arrêt.
Chez beaucoup des idées surgissent et pullulent après cet arrêt
mais sans avoir aucun rapport avec l'émotion antécédente, chez
d'autres l'arrêt de l'émotion n'est suivi d'aucun trouble particu-
lier. Il semble donc qu'il existe chez ces malades un trouble fon-
damental des émotions et des sentiments indépendant des autres
phénomènes que nous venons d'étudier.
D'autre part, on voit se développer chez beaucoup de ces ma-
lades un grand nombre de sentiments spéciaux que l'on ne ren-
contre pas au moins au même degré chez les individus normaux.
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LES STIGMATES PSYCIIASTHÉNIQUES
Iques-uiis ces besoins ou ces amours bizarres sont ac-
js par des phénomènes intellectuels, des obsessions du
ire, mais chez beaucoup il n*en est pas ainsi et les sen-
normaux se développent en dehors des réflexions du
que à son insu. Ces sentiments sont voisins des senti-
ncomplétude qui viennent d'être étudiés, mais ils ne
dentiques à ces phénomènes : ce sont plutôt des alté-
s sentiments naturels qui existent chez tous les hommes,
rques nous conduisent à étudier dans les paragraphes
îcs modifications primitives des émotions et des sen-
I. — Indifférence,
mettre en première ligne comme modification primitive
Scation très importante et inattendue des émotions. On
rs disposé à croire que ces malades sont des émotifs et
ire qu'ils ressentent au suprême degré toutes les émotions
sentiments. Il y a peut-être dans cette opinion quelque
)n considère les émotions-chocs qui bouleversent rapi-
fquilibre de la pensée ; mais cette opinion est certaine-
exagérée si on étudie les émotions-sentiments qui doi-
olonger un certain temps et qui consistent dans la
3 de tendances plus ou moins développées.
t, il est essentiel de constater que la plupart des mala-
aignent d'être devenus tout à fait indifférents. AI...,
27 ans, devenue malade après un mariage absurde
idividu à demi aliéné et perverti sexuel, et après un
mdaleux de plus de deux ans de durée remarque très
ngement qui s'est fait dans son caractère. Au commen-
e ses aventures elle était excitée, en colère, très
I son mariage, de son procès, en un mot de ses mal-
;lle ressentait vivement. Très souvent elle se laissait à
de désespoir, elle pleurait et se lamentait. Maintenant
ange, elle ne pleure plus, ne se désole plus, est deve-
rente à tout, elle pense à son mari sans que cela lui
« je n'ai pas de désir, dit-elle, pas de regrets, pas
, rien n'est mauvais, rien ne me gène, rien ne me con-
\ ne me fait plaisir. » Nadia se plaint de ne pouvoir
)nnée et de ne pouvoir pleurer sa mère. Kl... et Wks...,
autrefois très vives et très colères sont devenues cal-
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TROUBLES DES ÉMOTIONS ET DES SENTIMENTS 373
tues et n'ont plus leurs accès d'irritation. Vil... est indifférente
à la réalité et ne s'intéresse qu'à des rêves. Ce qui est surtout
atteint par Tindifférence ce sont les sentiments affectueux pour
la famille et pour les amis et cette froideur contraste avec l'amour
qu'ils ont d'un autre c6té pour ceux qu'ils ont choisis comme
directeurs de conscience.
D'après les confidences de quelques malades on peut faire des
remarques sur une émotion qui d'ordinaire est intense, l'émotion
génitale. Il est curieux de remarquer que des personnes autrefois
très excitables sur ce point sont devenues presque entièrement
froides et ressentent un véritable engourdissement génital, cette
remarque a été faite sur une douzaine de sujets. Chez quelques-
uns cet engourdissement détermine même une recherche exagé-
rée et bizarre de l'excitation sexuelle qui peut se transformer en
tin véritable délire, comme on le voit dans les observations de
Loa... et de Len... Plusieurs se laissent aller à la masturbation,
avec une sorte de frénésie pour w arriver jusqu'au bout » de l'émo-
tion, ce qu'ils sont devenus incapables de faire.
Chez beaucoup de malades, hommes ou femmes, cet arrêt de
i'émotion génitale n'est accompagné d'aucune de ces manies ni
d'aucune autre obsession. Leurs troubles intellectuels ou leurs
phobies portent sur de tout autres questions ; ils n'ont aucune
disposition à se reprocher l'acte génital accompli dans des con-
-ditions normales et légitimes, ils n'ont aucune envie de le trans-
former ou de le perfectionner. Ils constatent seulement qu'ils
éprouvaient autrefois une émotion violente qui grandissait jusqu'à
un maximum, puis s'arrêtait brusquement en laissant un senti-
ment de satisfaction et d'apaisement et que maintenant les choses
sontchangées,quecetteémotion commence, qu'ellesedéveloppeim-
parfaitement, etqu'elle n'arrive jamais au maximum suivi d'apaise-
ment. Bien mieux, quelques-uns n'avaient fait aucune attention à ce
fait et sont tout surpris quand on le leur fait remarquer. Il y a donc,
à côté du sentiment d'incomplétude génitale que nous avons
signalé et qui pouvait être plus ou moins juste, un engourdisse-
ment réel qui ne semble pas dépendre de l'appréciation du sujet.
Il ne faudrait pas en conclure que tous ces sentiments soient com-
plètement disparus et que nous soyons en présence de cette anesthé*
«ie morale que l'on observe chez quelques hystériques. Les ma-
lades ont l'émotion ou du moins ils commencent à l'avoir,
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LES STIGMATES PSYGHASTHÉNIQUES
motions commencées s'arrêtent rapidement, cessent de
per ou se transforment en ruminations ou en angoisses.
se rend compte que son sentiment n'est pas complet,
ini et d'autre part il redoute ces transformations péni-
vient à redouter lui-même ces sentiments insuffisants,
saye de les mener plus loin, donnent naissance à des
oureuses et il finit par ajouter une restriction volontaire
qui survenait d'abord naturellement. Depuis qu'il a des
On... craint les colères, les émotions, il a peur de l'exci-
lelle, peur de la surprise, « peur de se laisser emballer
[ue ce soit ». Il se rend évidemment plus indifférent
serait spontanément.
le fait me parait extrêmement important je rapporte
ce point l'observation de Lise qui confirme toutes les
précédentes. Cette personne semble être inacces-
ute émotion. « Il y a longtemps qu'elle a renoncé
plaisir à quelque chose et elle ne songe même pas à
re. » L'indifférence est notée non par la malade, mais
Ue qui la constate et me raconte ces détails. Lise n'a
intime, pas de désirs, pas de caprices, pas de craintes
nême quand les enfants sont malades, pas d'impatience
un mari tout h fait insupportable : elle est admirable de
s raison. Si on la savait raisonnable, on pourrait admirer
mais comme nous savons le désordre de sou esprit, on
mander si cette sagesse n'est pas un symptôme patho-
m cherche l'origine de cette indifférence, on est dis-
'emier aborda la croire volontaire. On remarque qu'elle
iffectueuse, qu'elle a encore quelquefois une grande déli-
sentiments ; elle prétend qu'elle est capable de se mettre
îomme une autre personne et de ressentir la douleur et
on. Mais tout cela n'existe plus qu'en puissance et ne se
plus jamais ; car il lui semble qu'elle s'arrête elle-même :
notions se développaient jusqu'à un certain point, dit-
dées, mes terribles idées sur le diable, les enfants voués,
raient et me domineraient d'une manière irrésistible. Si je
aller à l'excitation ou à la colère une minute, je ne suis
esse de mes idées, elles surgissent avec force et vont
dngtemps ». Il en résulte qu'elle a une peur affreuse de
aller à une émotion, elle se surveille continuellement, ne
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TROUBLES DES ÉMOTIONS ET DES SENTIMENTS 375
se laisse jamais aller à un état émotif complet; même au milieu
des scènes violentes auxquelles elle assiste elle conserve son sang-
froidy il y a toujours une partie d'elle-même, qui n y prend pas
de part. Elle a également peur de se laisser aller à une émotion
en assistant au théâtre ou en écoutant de la musique ; en un mot
elle travaille à maintenir en elle un état d'indifférence, si bien
qu^elle se figure que c'est elle-même qui arrête les émotions.
Je crois que sa volonté et sa prudence contribuent un peu à dimi-
nuer les phénomènes : maisd'aprèsson aveu et d'après l'observation
des autres malades, ses émotions s'arrêteraient toutes seules à un
degré peut-être un peu supérieur et se transformeraient contre sa
volonté en ruminations et en angoisses. Celles-ci sont évidemment
des phénomènes d'une autre nature que les émotions de joie, d'affec-
tion, de plaisir artistique qui avaient commencé à se développer.
On peut noter à ce propos un petit détail assez démonstratif. Lise
a supporté pendant dix ans sans se fâcher et sans se plaindre les
bizarreries de caractère de son mari. Quand elle commence à se
guérir, elle ne peut plus conserver le même calme. Quoiqu'elle
désire encore arrêter les émotions et surtout les manifestations
des émotions elle n'y parvient plus et malgré sa volonté elle s'ir-
rite et elle souffre de ce mariage. C'était donc bien son état ma-
ladif qui l'empêchait d'en souffrir.
Ces observations sont tout à fait concordantes, elles sont fa-
ciles à vérifier et montrent que ces malades ont beaucoup moins
de sentiments et d'émotions normales qu'on n'est disposé à le
croire.
2. — Sentiments mélancoliques.
Les sentiments qui subsistent avec une certaine acuité sont
des sentiments de tristesse analogues à ceux que l'on rencontre
chez les mélancoliques. La suppression de toute émotion vive
jointe h la dépression de toute activité donnent naissance à un
sentiment perpétuel d'ennui, M. Tissié remarque fort bien le rôle
du sentiment de l'ennui dans toutes les fatigues. « Le sentiment
de l'ennui domine toutes les psychoses et on le retrouve toujours
à un moment donné de l'entraînement intensif chez tous les su-
jets les plus gais et les mieux équilibrés *... » Il n'est pas surpre-
I. Tvn\é. Revue scientifique^ 1896, II, p. 64a.
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LES STIGMATES PSYCHASTHÊNIQUES
on retrouve ce sentiment chez tous nos psychasthéni-
tuellement fatigués.
k..., Dd..., etc., tous d'ailleurs répètent qu'ils ne peu-
re leur part des joies de la vie pas plus que de ses
d^ailleurs et qu'ils s'ennuient incurablemcnt. Lise. . . pré-
) était ainsi dès sa première enfance, qu'elle ne s'amu-
;omplètement et qu'elle n'a jamais pu se laisser aller à un
une émotion quelconque à cause d'un fond d'ennui
pas de véritables douleurs mais ils ont une tristesse
onsiste plutôt dans l'absence de toute joie que dans un
ent de chagrin, c'est une nuance de l'ennui. Qsa...
ujours morose : « il n'aime pas à voir des gens gais
Tent, il sent qu'il pourrait être capable de gaité si sa
le séparait pas de toutes choses ». Claire se plaint de
Ile-même continuellement : « je ne m'aime pas moi-
rée que je me déteste..., je m'ennuie et m'attriste de
-même ».
ean, Nadia gémissent sur cette existence terne à la-
ont condamnés « j'ai toujours été très triste même
)ments les plus heureux de ma vie, c'est une existence
\e ne puis même pas prendre un plaisir pur dans la
le j'aime tanl ; je mêle de la tristesse à tout, j'ai un
eilleusement organisé pour être malheureux. »
lent de tristesse donne sa nuance à toutes les percep-
outes les idées. Claire étend cet ennui et cette tris-
l'univers « il me semble que tout le monde doit être
et tous les endroits qui me plaisaient autrefois me
ristes comme si tout ce monde qui est si peu réel
rs sur le point de mourir, de s'écrouler ». Jean exa-
i comme toujours ces dispositions mélancoliques : à
prises il est envahi à propos de certaines personnes
ns endroits par « le sentiment de la fin du monde ».
Liitte un endroit où il s'est plu, quand il apprend la
parent qui habitait telle région, quand il a dans un
) émotion triste, déprimante, il est envahi par un senti-
stesse profonde, par un sentiment de mort qui s'ap-
uement à cet endroit. Nous avons déjà vu de ces sen-
mourir dans les angoisses morales, mais ce qu'il y a
ier dans cette observation de Jean c'est que le senti-
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TROUBLES DES ÉMOTIONS ET DES SENTIMENTS
ment s'associe avec la pensée d'une région « dans ce {
est mort, c'est la fin du monde pour ce pays ». Bientôt
de généralisation va s'emparer du sentiment et toute
aux alentours, tout l'Ouest de la France va être mort. Il
de voir le lien de tels sentiments avec les délires mélanc
chez nos malades, ils restent à l'état de sentiments vaguei
transformer en une idée nette ici surtout en une idée ac(
crue par le sujet.
3. — Emotivité.
On rencontre cependant des malades qui paraissent
porter autrement et d'après lesquels s'est formée cette
commune que les obsédés sont extrêmement émotifs.
Ce sont d'abord les timides, presque tous nos scrupu
été des timides, or « pour être timide, dit M. Harter
faut d'abord être enclin à éprouver une certaine émoti
certaines circonstances... c'est une réaction émotive sp
aveugle, irrésistible qui survient par le seul fait de se \
en public, comme le vertige se produit a la vue d'un préc
Ce sont ensuite les tiqueurs « qui sont tous des
atteints d'une affectivité désordonnée' ». Puis tous les pi
dont la maladie consiste dans une tendance irrésistib
émotions disproportionnées.
Aussi n'estil pas surprenant que beaucoup de nos ma
plaignent de leur émotivité excessive : par exemple Vr..
remarquent que chez eux la moindre impression prend (
portions énormes, une surprise, une parole adressée 1
ment, la vue d'un accident dans la rue leur donne des c\
la tête, des palpitations de cœur, des suffocations, des res;
en soupir pendant plus de lo minutes, « la moindre des
riétés dit Za..., devient pour moi au bout de quelqu
la cause de tremblements nerveux, de secousses dans
membres et de crises de larmes tout à fait absurdes ».
met à fondre en larmes pour la moindre des choses. Ces (
exagérées se présentent surtout quand il s'agit de se moi
faire un acte en public: quand Ul... est devant quelqu'u
sent serrée à la gorge, elle sent un gros poids qui lui
I. Harlenberg, Les timides et la timidité, p. 5, p. i66.
a. Mcige el Feindeï, Progrès médical, 7 sept. 1901.
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LES STIGMATES PSYCHAST
le, elle suffoqua, elle sent com
^s muscles de la face et des ye
, on la trouverait répétée par des
ce là de Témotion complète et ce
lent? Dans un sens oui, c^est une
n réalité plus ou moins complète
«paraît, et ne semble-t-il pas q
à tout propos c'est être un ém(
e semble cependant qu'il y a bien d
eémotivité. Cette émotion présenti
X qui mérite d'attirer Tattentio
»spective )>, comme disait Amiel.
arfaitement calmes devant Tévéne
r, ils se comportent comme s'ils
Les réflexes cardiaques et vaso
s de Lange et de James, devraient
l'événement, antérieurement à toi
ne se produisent pas du tout. (
lé : au bout de quelques heures
in travail s'est fait dans le cerveai
;t les malades ont des palpitations
les comme s'ils étaient violemmen
inssa réalité présente, a semblé pas
nme qui s'est blessé en cherchan
incompréhensible chez une jeune 1
la journée ; mais elle est malade
observation dans une foule de c
ean, chez Gisèle, Dob..., Kl..., <
ante me paraît très intéressant, i
action retardante qui caractérise
ire retardante sur laquelle je vie
certains malades, un événement n
inomène psychologique en appar<
st passé depuis un certain temps,
autre caractère de cette émoti
[u'elle reste une émotion vague, in
-dire la plus basse des émotioi
^e à l'événement qui la détermine
malades eux-mêmes remarque»
ère bizarre, c'est qu'elle est toujo
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TROUBLES DES ÉMOTIONS ET
aussi bien à propos des événements q
la peur, qu'à propos de ceux qui devra
ou de ceux qui devraient faire naître c
fier très bien avec Ul... qui a les mém<
tien» de convulsions de la face et des
qu'elle attend ou en entrant dans un
goisse de Cs... semblent être en rap]
condriaque et débuter quand on parle
quand elle voit une fiole de pharmac
exactement semblables, quand elle re
rue ou quand elle reçoit une page de «
garçon qui a quatre ans. Lae... expi
émotion d'une manière bizarre. Il a et
un chien enragé à Tâge de i5 ans ; de
lement une angoisse toute spéciale
« Témotion du chien enragé », elle
spéciaux, tournoiement dans le veni
gauche et besoin de regarder, de tout
ff si un chien ne la lèche pas », pour é(
ne peut plus avoir aucune autre émoti
fort, je ne peux plus être amoureux, si
me donne uniquement mon émotion d
moi je détourne la tète pour voir si ur
jambe ou ne me lèche pas le pouce ».
Un détail curieux, c'est que ces cri
présenter chez des sujets comme chez'
de nous répéter et de nous montrer qi
d'émotion. Ils ont des crises qu'on ap
semblent vaguement à de la peur et i
plus susceptibles d'éprouver la peur ; ili
qui ressemblent assez vaguement du r
de la colère et ils se plaignent de ne j
se fâcher : c'est que ces crises ne sont
de peur ou de colère et qu'elles se suh
maies au moment ou leur développemen
on remarque que ces malades ont d<
pas dire qu'ils sont plus susceptibles
d'avoir des émotions normales et comp
disposés sous l'influence du moindre c
ses d'agitation motrice ou d'angoisse.
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LES STIGMATES PSYCHAS
4. — Emotions su
*our être complet dans ce chapitre
sentiments et les émotions qui se j
!c, je dois indiquer une émotion 1
i difficile d'expliquer complètcmei
essaire de revenir plus tard après a\
iérales sur la psychologie de ces
étions sur une dizaine de personnes
iblables pour qu'elles ne me paru:
identels.
)n a vu que d'ordinaire et pendant
ces malades sont déprimés, tristes,
es, h l'attention, à l'émotion normal
ilques-uns d'entre eux se produit ui
les soulève au-dessus de leur niv<
ir un moment des émotions de boi
nts d'activité surhumaine, d'intellij
Lanteirës, dans sa thèse* sur les tro
idité signalait déjà un peu vaguei
ouvent tout d'un coup « une sort
sme nerveux avec de voluptueux fri
/oici quelques exemples de ce fait
nt les maisons du haut du Trocadi
sme, il a des sentiments d'admirati
xr un instant toutes ses misères :
p beau, trop grandiose, que je suis
me; sur le moment cela me cause u
épuise, me fait trembler les jamb<
s tomber évanoui, incapable de si
?y..., en se promenant dans la camj
* le grand air a tout me parait déli
s éclater de bonheur, jamais je n'a\
)se comme un rêve, le temps marche
pis. Je me sens meilleure et il me se
chants comme dans les autres pays.
. Lanteirés, E5sai descriptif sur les troubles p
ise, i885, p. 44.
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TROUBLES DES ÉMOTIONS ET DES SENTIMENTS 381
pathiques et il me semble que je suis à Tâge d'or. Les expressions
me viennent plus facilement, moi qui ne peux pas ouvrir la bou-
che quand il y a une personne, je parlerais devant une assemblée ».
Nadia aussi a éprouvé par instants, mais incomplètement, ces sen-
timents au moment de son amour insensé pour un grand musicien.
Nah..., homme de 21 ans, sent par moment « une stupéfaction
sacrée qui cause un bonheur infini ». Gv..., homme de 26 ans«
« se sent enlevé au-dessus de sa condition, il croit marcher sur
une autre terre où Ton est meilleur et plus fort ». L'un des
plus curieux sur ce point c'est Jean qui a baptisé ce phénomène
d'un nom que je conserve en partie : « les sensations sublimes
et solennelles. » De temps en temps, mais rarement, il est pris de
cette sensation quand il rêve à une occupation intelligente et élevée
qui lui plairait, mais qui est en contradiction complète avec son
caractère ; par exemple quand il rêve qu'il est député à la Chambre
et que devant les tribunes bien pleines il prononce un grand dis-
cours politique. Il ressent alors un petit frisson par tout le corps
mais qui n'a rien des fluides pénibles, il sent le cœur calme et
ralenti, ses muscles sont à la fois forts et comme détendus, au
lieu de sa marche humble à petits pas, la tète baissée, il se redresse
et marche à grand pas d'un air important, il a de l'excitation intel-
lectuelle, il comprend bien les choses et ressent la soif de s'in-
struire, enfin et surtoutil a un sentiment de bonheur qu'il n'éprouve
jamais. « Ce sont des impressions divines qui me prouvent
l'existence de l'âme dans le corps, »
Ces émotions sublimes durent peu d'ordinaire, elles sont presque
toujours chèrement payées par les malades. Gs... tombe bien vite
dans une rumination pénible sur le nombre infini des maisons, et
recommence les questions : « Comment a-t-on pu les construire ?
comment a-t-on pu les compter ?» Il a de nouveau un horrible
sentiment de dépression. Fy... (34) termine son idylle à la cam-
pagne par une petite crise avec perte de conscience et émission
d'urine dont nous aurons ii discuter la nature et le pauvre Jean
retombe piteusement de la tribune; l'excitation s'est propagée aux
organes génitaux, a ramené la pensée de la masturbation et toutes
les angoisses plus grandes qu'auparavant.
Je trouve ces émotions excessivement curieuses : elles forment
un contraste avec le sentiment ordinaire de chute qui carac-
térise le scrupuleux. En outre, elles établissent une liaison très
intéressante avec d'autres malades dont je ne m'occupe pas
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LES STIGMATES PI
jue j'espère pouvoir et
non sans quelque ét(
ues ne sont pas des 1
lent, mais qu'ils se rat
a. En les étudiant il fi
'ises de rumination, c
c ; il est intéressant d
ins en germe des cris
5. — Le besoi
du trouble fondamenta
;omplétudeet probable
scrupuleux des sentim
tendances spéciales qi
idividus normaux, Tun
m,
i eu l'occasion d'insist<
exagérations patholog
blés morbides ce senti
personnes et contribu
]ui arrive au plus h^
e côté ici ceux qui o
il désespoir parce qu'il
éprends des maladetfqi
es autres manies et je
our ainsi dire à leur ii
lisir à obéir, à recev<
ent avoir, les décisio
nt ils se mettent sous
i une fois effectuée il
ontrôler ou de discute
e, les jugements qu'i
r montre, ils ne veule
nne.
tère est décrit par toi
\ a le besoin d'être ras
aux heures les plus in
du SauUe, Folie du doute, p
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s ÉMOTIONS ET DES SENTIMENTS ;
3o ans qui se fait diriger par un petit garçon de 8 ansa il ne m'
Faut pas d^avantage, dit-elle, pour que j'évite une crise' ». Ba
larger remarque chez les douteurs « ce besoin énorme d'affirn
tien étrangère' ». « Ils ne peuvent agir que sous l'impulsion d
autres, disaient MM. Raymond et Arnaud de leurs malades'
Aux cas nombreux que j'ai déjà décrits*, je n'ajoute que quelqu
exemples.
Ps..., jeune fille de 23 ans, s'abandonne ainsi entre les mai
d'une religieuse qu'elle a choisie et la force de tout décider da
sa vie. Bu... (85) appelle sa femme tout le temps et ne lève p
le petit doigt sans lui en demander la permission. Dua... (i3!
femme de 37 ans, ne peut plus faire un pas sans l'ordre de s
médecin, elle éprouve le besoin de tout lui raconter, de I
faire des confessions entières sous des prétextes quelconque
Elle demande conseil sur tout même à propos des choses 1
moins médicales et obéit minutieusement. Mbo... obéit à
sœur et Yi... est dirigée par son enfant qui a 10 ans à peic
Kl... se conduit exactement de même: sans me connaître, el
se confie complètement et se met à ne plus penser que p
moi. Lise se rend bien compte qu'elle a ce besoin d'une faç<
ridicule, elle a essayé à plusieurs reprises de le satisfaire avec d
amies, avec des prêtres et elle doit résister pour ne pas trop s
laisser aller. Malgré elle elle se sent inquiète lorsqu'elle est lo
de moi « sentir que je suis libre pendant plusieurs mois, c\
comme quelque chose de terrible ; je vais être très mal au coi
mencement, puis j'irai mieux à la fin par la pensée que le terc
de ma liberté approche ». Claire a tout à fait le même caractèr
elle est heureuse quand elle est comprise, c'est-à-dire quai
quelqu'un se rend compte de ses pensées, de ses besoins, et déci(
pour elle. Au bout de quelques visites à peine elle s'accrocl
désespérément à moi, ne veut plus me quitter, et prétend qu'el
ne pourra plus vivre si je ne lui dicte pas « mot à mot tout (
qu'elledoit faire et penser dans la journée. » Za...,Rk..., m'éci
vent à chaque instant des lettres suppliantes pour me demand
<c de répondre immédiatement ce qu'ils doivent croire. » Xo... d<
I. Legrand du Saulle, ibid,, p. 38.
a. Baillargcr, Œuvres, I, p. 218. Cf. Gullerre, Fronlihre de la folie, p. 70.
3. Raymond elArDaud, Ann. méd. psych., 189a, II, 199.
4. L'influence somnambulicpe elle besoin de direction. Revue philosophique, 189
Ii p. 1 13 el Névroses et Idées fixes, I, p. 428.
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LES STIGMATES PSYCIIASTHÉNIQUES
ilttant des ordres et des affirmations par écrit et
le sur la perspective de venir me voir. »
lalades n'ont pas à leur disposition un directeur
[ui leur convienne, il n'est pas d'efforts qu'ils ne
trouver un. « Je me suis mise volontairement, dit
e dépendance morale, j'ai cherché à substituer
•e à celle qui me hante, une volonté a la mienne^
it qu'il me faut à tout prix obéir. » Elle a cherché
in prêtre. Mais elle a été bien vite effrayée en
sentiment de dépendance se compliquait de senti-
[uand ils ont perdu cette direction si nécessaire, ces
t dans le plus complet désordre. Gri... (82). jeune
s, a eu depuis Tàge de i5 ans toutes espèces de
lonté, des crises d'agitation, des phobies, etc. ; elle
• un amant qui lui impose une tenue correcte, qui
lil régulier et une attention suffisante. Sous cette
ilade oublie tous ses troubles et se porte parfai*
cinq ans. Depuis que cet amant l'a quittée elle
le plus complet désordre, elle est tourmentée
ions et surtout, bien entendu, par un amour
ce directeur perdu. L'observation de Ck...,
ée, est des plus amusante. Cette pauvre femme
es avoir eu toutes les obsessions et les pho-
é vers Tàge de 3o ans une autre pauvre femme
des manies de propreté qui amenaient pratique-
e saleté. Ces deux infirmes de la volonté se sont
nues et reformées mutuellement, elles ont formé
i un couple admirable, parfaitement raisonnable,
s et le paralytique. Une aventure lamentable les
domestique renvoyée à tenu, paraît-il, un propos
ettre en doute la moralité de l'affection mutuelle
is dames. Celles-ci sont alors troublées par un
ir amitié et croient devoir se séparer. On verra
itement, que l'obsédé prend ainsi des scrupules
ilui qui le traite et le dirige et que ces scrupules
érieux de rechute. Dans le cas présent les deux
nencèrent un véritable délire avec obsession de
bsessions de crime, de remords, d'hypocondrie
'aie réussi à les réunir de nouveau.
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DES ÉMOTIONS ET DES SENTIMENTS 385
Rd étudiant des cas de ce genre j'ai montré que le sentiment
tlêpend principalement du besoin de faire faire par un autre Tacte
<le volonté devenu difficile. (( Le malade, disais-je à ce propos ^ n'a
•en réalité aucune résolution, aucune idée dans une circonstance
-donnée, il faut que le directeur fasse lui-même la synthèse que
«on sujet ne peut pas faire et lui impose la résolution toute faite.
C'est là très souvent ce que les douleurs viennent demander à
ieur médecin, quand ils lui racontent leur vie et leurs incertitudes.
<c Faut-il me fâcher avec cette personne qui m'a regardé de tra-
vers?— Faut-il faire mon ménage? — Faut-il me marier? —
Faut-il acheter une robe? — Faut-il recevoir mon amant? etc. »
Ce sont entre mille les questions que m'ont posées les malades,
•questions que l'on ne peut déclarer insignifiantes quand on les
voit déterminer de telles souffrances et de tels délires. Peu leur
importe la réponse ; pourvu qu'elle soit nette et décisive, ils sont
immédiatement soulagés... On comprend maintenant le rôle du
directeur et comment il doit en réalité vouloir pour les ma-
lades. »
6. — Le besoin d'excitation.
Le besoin de direction ne se présente pas toujours sous cette
forme simple que je viens de rappeler. Dans bien des cas, il est
évident que les sujets savent ce qu'ils ont à faire et ne deman-
dent pas d'indications h ce sujet. Ce qu'ils demandent, c'est
simplement une excitation capable d'enrichir la résolution d'un
cortège d'émotions qui lui manquent afin qu'elle ait la force de se
réaliser. « Dans des cas plus simples, disais-je autrefois à ce
propos, le directeur va simplement fortifier la résolution que le
malade avait déjà à peu près formulée. Il la fortifie en l'enrichis-
sant, en y ajoutant par le fait même des circonstances dans les-
quelles il se trouve placé, des détails et des émotions qui lui
faisaient défaut. Le confessionnal, la consultation, le titre sacer-
dotal ou médical, et surtout la fameuse ordonnance médicale dont
tant de railleries n'ont pu entamer la formidable autorité, rendent
déjà de grands services. Mais il faut souvent que le directeur
ajoute plus encore, qu'il use de la menace, de l'ironie, de la caresse,
de la prière, qu'il s'adresse à tous les sentiments qu'il sait exister
encore dans le cœur du sujet et qu'il les réveille l'un après l'autre
I. Névroses et Idées fixes t I, p. 470.
LES OBS£S8IO?(S. I. a5
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LES STIGMATES PSYCIIASTHÉNIQUES
cer à faire cortège à Tidëe chancelante. — Vous raan-
i engagements qui maintenant sont publics, vous serez
c yeux de Monsieur un tel, vous affligerez une per-
ous aimez, etc. — Que de fois j'ai dû faire jo«er tous
( de la rhétorique, pour obtenir qu'un malade boive
['eau ou change de chemise, comme s'il s'agissait
s résolutions les plus graves ^ »
ides que j'ai cités dans le travail précédent, on peut
sn ajouter beaucoup d'autres, je rappelle seulement
le réclame pas seulement un directeur, mais « quel-
excite, qui la remonte, il doit me secouer pour me faire
je sais bien devoir faire. » Le pauvre Bu... a besoin
le lui donne des claques sur le derrière, a cela m'ha-
i voir traité comme un petit enfant et cela me donne
îrgie... ».
ucoup, le rôle de l'excitation est encore plus cunsidé-
s'agit plus seulement d'une excitation particulière qui
n conseil, afin de pousser à l'exécution d'une action,
xcitation quelconque capable de pousser le sujet jus-
notion. Ces malades éprouvent très difficilement les
mplètes et comme on le verra, ils sont beaucoup mieux
rrivent h les éprouver. Aussi cherchent-ils tous les
isibles pour se procurer ces émotions et éprouvent-ils
tressant souvent presque irrésistible de retrouver la
îtte excitation. De là l'origine du goût pour l'alcool,
phine, pour toutes sortes de poisons. De là ce besoin
bien caractéristique de « faire des sottises, des excen-
nporte quoi d'étrange qui nous sorte de notre engour-
jouvent que la cause de l'excitation émotionnante est
ne déterminée qui arrive à exciter physiquement et
ces engourdis. Il en résulte une passion particulière
personne qui se rapproche des amours précédents
besoin de direction mais qui se développe par un më-
peu différent. Ainsi la passion folle, obsédante de Sim...-
in amant ne s'explique guère par le besoin de direc-
; amant ne la dirige en aucune manière, mais elle s'ex-
bien par la diflérence que la malade remarque entre
H Idées fixes, I, p. 470.
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ES ÉMOTIONS ET DES SENTIMENTS 387
VIon mari ne fait pas travailler ma tète suf-
fisamment, il ne sait rien, ne m'apprend rien, ne m'étonne pas.
J'ai besoin qu'on me donne de nouvelles idées, de nouvelles im-
pressions, d'autres émotions. Il ne sait pas me faire souffrir un
peu et je ne peux pr.s aimer quelqu'un qui ne sait pas me faire
souffrir, car j'en ai besoin de temps en temps... L'autre m'étonne
par sa froideur, par sa cruauté, par son absence de tout senti-
ment... Un peu de remords, de crainte, rendait enfin la chose plus
pimentée qu'avec le mari et c'est là ce qui me faisait du bien. »
La passion également maladive de Nadia pour le musicien X...
serait inexplicable si l'on n'y cherchait que le besoin de direction,
puisque X... ne lui a jamais parlé et ne pouvait aucunement diri-
ger son esprit. Mais voici un fragment de lettre qui explique très
bien cette passion : « Les concerts de X... ont été pour moi une
révélation, ils m'ont tellement enthousiasmée que je ne me suis
jamais remise de cette émotion : je ne puis pas expliquer l'effet
que cela m'a fait. Quand je suis sortie de la salle après le premier
de ces concerts, mes jambes et tout mon corps tremblaient telle-
ment que je ne pouvais plus marcher et j'ai passé la nuit à pleu-
rer... Mais je ne souffrais pas; bien au contraire il me semblait
que je sortais d'un rêve qui remplissait ma vie auparavant, que
je voyais mieux les choses comme elles sont, que j'étais dans un
véritable ciel de bonheur (Eu un mot, elle éprouve à ces concerts
un de ces sentiments d'excitation que Jean appelait un sentiment
sublime, elle se trouve relevée au-dessus de son apathie ordi-
naire). Mon seul espoir pendant des années a été de l'entendre
de nouveau et d'éprouver les mêmes sentiments. Je crois, en effet»
comme on me l'a tant reproché, que j'ai eu une passion pour lui,
mais ma passion n'est pas le même genre de passion que celle des
autres personnes, de cela je suis sûre. Il me semblait avoir sur
moi une influence surnaturelle et pouvoir seul me tirer de mon
rêve perpétuel. » Je trouve cette lettre très intéressante pour ex-
pliquer certains amours platoniques souvent signalées chez les
obsédés, il s'agit ici d'une excitation artistique que la malade
aspire à retrouver.
L'excitation peut ne pas être produite par une personne réelle
et avoir cependant le même résultat. « J'ai très souvent le besoin,
dit Gisèle d'aller voir la statue de Notre-Dame des Victoires, on
dirait que c'est chez moi une manie, c'est que cette statue a une
impression spéciale de force, cela me regrimpe de la regarder. »
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388 LES STIGMATES PSYCHASTHÊNIQUES
Je signale à sa place avec ces quelques exemples ce singulier
besoin d'excitation, nous aurons à le discuter de nouveau à propos
des interprétations de la maladie et de ses traitements.
7. — Le besoin d'aimer.
De pareils sentiments deviennent facilement voisins de Tamour.
Quelques malades y échappent, ils se contentent d'une direction
froide ou d'un amour paternel, mais on comprend bien que beau-
coup de ces personnes vont transformer ces sentiments en senti-
ments amoureux, bien entendu en comprenant l'amour dune
certaine manière. Gisèle le sent si bien qu'elle médite perpétuel-
lement sur l'amour, elle devine très bien les différentes espèces
d'amour: « l'amour qui donne, c'est celui qui dirige, qui protège
et l'amour qui se donne, c'est le besoin de s'incarner en un au-
tre, de se donner, de s'abandonner, de consolider une impres-
sion de faiblesse qui cherche une force, c'est un sacrifice de sa
personne pour vivre en quelque chose de supérieur». Or elle
avoue très bien qu'elle a le second amour et non le premier, car,
suivant une jolie expression qu'elle affectionne, elle a toujours eu
« le besoin de se blottir».
On constate chez elle au suprême degré ce besoin immodéré
de confession qui lui fait sans nécessité livrer sa vie entière. A
plusieurs reprises elle a essayé de se mettre sous la dirjection mo-
rale et sous la dépendance de quelqu'un, le mari comme toujours
lui a semblé insuffisant pour ce rAle: « il ne me comprend pas ».
Son rêve « de rencontrer une volonté droite et ferme dont on peut
jouir sans mal » a semblé un moment satisfait, quand elle a été
dirigée par un prêtre; malheureusement elle mêlait bien vite à sa
docilité d'autres sentiments et il a fallu cesser. C'est le malheur
de ces femmes qui cherchent une direction morale et qui trouvent
qu'elle se confond trop vite avec l'amour physique. J'ai déjà cité
bien des cas de ces personnes qui évidemment ne s'abandonnent
que pour obtenir un maître. L'histoire de Sim... est encore typi-
que sur ce point, elle aimait tant à se sentir sous sa dépendance,
elle avait tellement besoin d'un maître capable de l'exciter qu'elle
a tout fait pour lui plaire, sans même qu'il exigeât beaucoup, tout
simplement parce qu'elle espérait le retenir davantage.
Il est curieux de remarquer que ces malades sont quelquefois
très supérieurs intellectuellement aux maîtres qu'elles se don-
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OTIONS ET DES SE
nent^elles sentent bien que c'est un imbécile
si doux d'obéir qu'elles ne veulent pas prend
Nous retrouvons ce même besoin de directio
New..., chez Bs..., chez Lod... qui a ainsi
pour une jeune fille, il a existé chez Nadia,
passion pour un grand musicien qui était d(
dieu, qui représentait pour elle tout ce qu'il
noble, de grand sur cette terre, elle faisait t
elle consentait même à manger. Elle aurait t(
voir le suivre, pour l'avoir à elle toute seul
a la vie n'est rien pour moi si je n'ai pas qu
aimer, à écouter, il me semble que celui que
bon rocher auquel je suis attachée au milieu
pête » .
Rk... avoue en gémissant ((qu'à4o ans
parfait ami, qui dirige et qui console, <
plus que tout, un frère cadet qui ait plus de t^
a été longtemps un amoureux de collège \ il
pour plusieurs de ses camarades dont il voi
très bien-aimés », encore a l'âge de 4o ans, i
et à rencontrer l'amour. Toujours il est préc
a plu, s'il est aimé; il ne veut travailler, fain
arriver à aimer.
Ce besoin d'aimer me parait complexe, d'i
comme on l'a bien vu, au besoin de directio
tient au besoin d'excitation. L'objet aimé d
sortir de leur milieu morne, les relever pa
Mais il doit aussi être une cause d'excitatioi
qu'il réclame. Ces malades ont un besoin imr
parce qu'il leur faut la pensée d'un but qui <
leur émotion.
8. — Besoin d*élve aimé
Il me semble cependant que toutes l
malades ne s'expliquent pas uniquement pai
ter h autrui une direction ou une excitation.
I. Sur les amours de collège, \o\x Marro, Puberté , Ir
qui tient grand compte du côté physique de ces amours
assez sur les besoins moraux que je signale ici.
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LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
ntense d'être aîmée par son concierge, quand elle
terreur à une brouille possible avec ses voisins ou à
ndu avec sa bonne, il ne me semble pas qu'elle
ime les précédentes demander une direction ou une
son concierge, à ses voisins ou à sa bonne. Beaucoup
ides comme Kl..., Bal..., Voz..., Qsa..., parlent sans
îur besoin « de manières affables autour d'eux, d'un
pathique, » ils ont des inquiétudes mortelles à la pensée
raient bien être indifférents ou antipathiques à quel-
mnes de leur entourage et alors ils prennent des
i inouïes a pour ne faire de la peine à personne, pour
claire à quelqu'un, pour se faire pardonner ce qu'ils
oir de déplaisant. » Wye... se demande avec angoisse
jon effet sur les personnes du salon, si tout le monde
limable, il serait au désespoir d'avoir, je ne dis pas
Iqu'un, mais d'avoir déplu à quelqu'un. « Un visage
me met au supplice et m'enlève toutes mes forces. »
2) avoue « qu'il n'a jamais pu supporter la pensée que
était fâché contre lui, il voudrait être convaincu de la
de tous, vivre dans une atmosphère de sympathie. »
ment n'est évidemment pas identique au précédent,
s ne demandent rien aux personnes qui les envi-
mais je crois qu'ils craignent quelque chose. Ils
me hostilité, une lutte qui exigerait de leur part des
)ans ce besoin de sympathie universelle, me disait très
, un jeune homme de 22 ans, il y a tout simplement la
ir à se battre, n'est-ce pas horrible de sentir qu'on est
ence avec quelqu'un. »
ment se manifeste souvent dans les rapports des maîtres
>mestiques. Un très grand nombre de ces malades ont
Lude de ne jamais parler eux-mêmes à leurs domesti-
... prend toujours sa femme comme intermédiaire pour
)der la moindre des choses. C'est évidemment la peur
rer des résistances, d'avoir à commander, à lutter qui
dans ces cas.
:endu cette crainte de la lutte peut se mêler avec tous
ents précédents et constituer certains « besoins d'être
LIS ou moins complexe. Voici l'expression touchante
s sentiments : « Mon rêve, dit Qi... femme de 35 ans,
e une jeune fille phtisique, htre poitrinaire, que ce
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TROUBLES DES ÉMOTIONS ET Dl
serait charmant! On donne aux poitrina
on les gâte, on n'exige rien d'eux ave
voudrais tant être aimée ainsi, et surto
le temps, qu'on me le fasse sentir, qu
c'est bien vrai. »
g. — La crainte de l'a
Un autre aspect de ces mêmes sentin
l'isolement. J'ajoute seulement quelque
j'ai déjà signalés dans un autre travail. D
maladie : « mes souffrances viennent d'i
du cœur... tous les actes deviennent fac
de soi et impossibles quand on est seul.
Pou... est si malheureuse quand elle i
manger et ne mange qu'en société. On
une série de ces femmes : Lkb..., Fy...
gémissent de leur isolement, a Leur mai
il est sombre, il ne cause pas assez, il r
le craignais un peu, cela vaudrait plutôt
tant pas vivre seule. » ce Quand je suis s
dans le vague, il me semble que je n'î
devient drôle et j'ai peur de tout et de
Ce que ces personnes redoutent qua
seules c'est de se trouver sans direction
protection.
lo. — Le retour à l'en
Un degré de plus et ces sentiments s
ner au caractère un aspect bien singuli*
une sorte de comédie, ils se font petits,
Tignorance complète et aiment à passer
C'est qu'ils veulent être dirigés encore
autres, c'est qu'ils désirent aussi une
amène à tous les actes, à tous les ph
voies. Ils veulent que non seulement o
à faire, mais qu'on les amuse, qu'on les
jouer aussi bien que travailler; en un r
traite comme des petits enfants et ils
traitement.
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LES STIGMATES PSYCHASTIIÉNIQUES
I ao ans, ne quitte pas les jupons de sa mère et « il veut
gronde comme son bébé. » Ger..., à 35 ans, réclame
ion d'enfants, c'est là qu'elle serait le mieux ». Gisèle,
aime « à faire Tenfant avec les gens, c'est un pli qu'elle
i facilement». Gr..., femme de4oans, avoue elle-même
besoin de se croire h Tage de i6 ans, qu'il lui faut
;es parents auprès d'elle comme auprès d'une petite
. C..., femme de 25 ans, voudrait que l'on s'occupât
tamment comme d'un petit enfant, il ne lui semble pas
grandi. On a déjà vu ce caractère chez Nadia à propos
e du corps, si elle a peur de se développer, de voir sa
'ossir, ce n'est pas, comme on le croirait, par pudeur,
le a peur de paraître plus âgée, de ne plus être traitée
petite fille, de ne plus être aimée comme une enfant;
8 ait trente ans, elle ne peut croire qu'elle ait plus de
on obtient tout d'elle en la traitant en petit enfant. Au
le même besoin qui existe chez Jean, il veut non seule-
n le dirige, mais il veut qu'on lui dicte tout « il lui
'il serait si heureux s'il était comme un petit enfant
îoux d'une grande personne ».
.^ation la plus remarquable est celle de Qi...(i88), femme
qui est poursuivie par le désir de sauter à la corde, de
i cheveux courts, de les laisser flotter dans le dos el
l'être appelée « Nénette ». Évidemment il y a là une
mais elle s'est développée sur le caractère précé-
>n aime un enfant pour ses espiègleries, dit-elle sans
ir son bon petit cœur, pour ses gentillesses, et que
de-t-on en retour, de vous aimer, rien de plus. C'est
est bon, mais je ne puis pas dire cela à mon mari, il
«prendrait pas. Tenez, je voudrais tant être encore
)ir un père ou une mère qui me tiendrait sur ses ge-
caresserait les cheveux... mais, non, je suis Madanb,
imille, il faut tenir son intérieur, être sérieuse, réflé-
î seule, oh quelle vie ! »
II. — L'amour de l'honnêteté,
s sentiments dérivent de ceux-ci. Je n'insiste pas dans
sur les sentiments mystiques, car je compte reprendre
dans un travail sur les extatiques. On comprend que
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TROUBLES DES ÉMOTIONS ET DES SENTIMENTS 313
ce besoin de direction et d'excitation par ce qui est étrange, mys-
térieux conduise aux sentiments religieux amène à s'abandonner
amoureusement à la divinité. On retrouve souvent le germe de
pareils sentiments chez des scrupuleux bien loin de l'état exta-
tique, nous avons vu Gisèle chercher de l'énergie dans la contem-
plation d'une statue de la Vierge. Bal..., Fy... se plaisent dans
la pensée de la mort et de l'autre vie ce où le bon Dieu recueille
les petites âmes ». Ces sentiments, en se développant, donnent
à la maladie un caractère un peu spécial.
Dans ce travail je signale surtout les sentiments d'honnêteté
parce qu'ils ont un rapport plus étroit avec les obsessions crimi-
nelles qui sont l'objet de cette étude. On est frappé de constater
chez les individus de ce groupe des sentiments moraux extraordi-
nairement développés. Ils tiennent énormément à être très sin-
cères, Rk..., Nadia ont l'horreur du mensonge et protestent avec
indignation dès qu'on peut les soupçonner d'une petite fausseté.
11 est évident que Nadia ne comprend pas les complaisances so-
ciales qui obligent souvent h farder la vérité : elle s'en indigne
outre mesure. On est frappé de l'honnêteté de Toq..., de Brk...
a Je n'ai pas de mérite à être honnête, dit celle-ci, si quelque
chose dans ma conduite déplaisait h ma conscience scrupuleuse
je serais trop malheureuse, la vie me serait trop pénible. » Kl...,
Bal... ont pour un rien le sentiment de la justice violée. Voz... ne
peut pas se résigner h être reçu à un examen,' tandis qu'un autre
de ses camarades est refusé, parce que cela" ne lui semble pas ab-
solument juste. Sur ce point l'état d'esprit des scrupuleux justifie
leur nom.
Que faut-il penser de ces beaux sentiments de justice ? Ne
pourrait-on pas songer que la justice est surtout utile aux faibles
et que Thonnêteté est surtout nécessaire à ceux qui ne veulent
avoir d'affaires avec personne? N'est-ce pas trop rabaisser ces
beaux sentiments que de remarquer leur rapport étroit avec le
besoin d'être protégé et la crainte de la lutte ?
12. — Le besoin d'autorité.
Un sentiment plus curieux qui semble au premier abord en
contradiction avec les précédents c'est le besoin excessif d'auto-
rité et de commandement. Ce sentiment et cette tendance carac-
térise ce qu'on appelle « des autoritaires ». Il nous semble avoir
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LES STIGMATES PSYGHASTHÉNIQUES
ès peu analysé et être en général très mal compris par les
lologues.
nstatons d'abord qu'il existe très fréquemment chez les
idus névropathes, plus ou moins obsédés et qui ont
sèment toutes sortes de troubles de l'attention et de la vo-
. Nadia dans sa famille était devenue tout à fait intolérable :
is son enfance elle se vantait de n'obéir à personne et de
obéir tout le monde. « Personne au monde ne réussira à
de l'influence sur moi, je suis née avec un caractère très do-
teur. » Depuis la mort de sa mère qui la dirigeait encore un
elle tourmentait affreusement son père et ses sœurs, elle
ait d'eux une obéissance de tous les instants à ses caprices
lies; elle avait évidemment une tendance h leur imposer la
5 vie absurde qu'elle avait adoptée pour elle-même. Elle ne
ettait pas h ses sœurs de recevoir une visite, de s'habiller
sortir : un peu plus elle leur aurait imposé le même régime
ntaire qu'elle avait choisi. Quand on lui résistait quelque
elle accusait tout le monde d'injustice, de cruauté envers
ît se livrait à des scènes de violence. Gisèle et Sim... ont la
9 prétention singulière, c'est de dominer absolument leur
de lui faire faire tout ce qu'elles veulent, de régler toute
ison conformément à leurs caprices : elles sont convaincue^,
a tort cependant, que le mari n'a aucune volonté, aucune
rie et qu'il est parfaitement incapable de leur résister. D'ail-
elles montrent dans l'organisation de la maison une activité
*antc, courant partout, s'occupant de tout, dictant à chacun
étions, son attitude, jusqu'à ses idées. « Elle ne peut pas
Br, me disait le mari de l'une d'elles, chez moi, chez ses
its, chez aucune des personnes qui l'approchent un mot, un
qu'elle n'ait pas dicté. » Je retrouve Ip même caractère
Fy... (34) et chez beaucoup d'autres. J'ai été étonné de le
>ntrer sinon chez les malades elles-mêmes au moins chez
arents, chez la mère surtout des malades à un tel point que
hié disposé h dire : « nière autoritaire, fille scrupuleuse ».
ère de Ku..., de Zo..., de Sim... elle-même, semblent avoir
sme égoïsme implacable qui commande jusqu'aux plus petits
Is et qui en même temps inspire une ardeur infatigable à
uper de ces petits détails qu'on exige,
ailleurs ces autoritaires formeront deux groupes dont la dis-
ion offre ici peu d'intérêt : l'autoritaire violent qui veut
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TROUBLES DES ÉMOTIONS ET DES SENTIMENTS 395
imposer ses pensées et ses caprices par la force et l'autoritaire
<loux qui exige en gémissant au nom du respect, de Taffection
qu'on lui doit, qui déclare à chaque instant qu'on le fait mourir
•de chagrin si on montre la moindre indépendance.
Ce caractère a beaucoup attiré mon attention, et au début il me
paraissait fort inexplicable, en contradiction avec ce que je
savais de la volonté faible de ces malades, avec ces innombrables
besoins de direction, besoins d'être aimé qui caractérisaient les
mêmes scrupuleux. Le plus étrange, en effet, c'est que ces deux
besoins en apparence contradictoires coïncident très souvent
chez la même personne. Chez Sim... et chez Gisèle on voit cette
folie de commander, mais en même temps on observe un besoin
également fou d'être aimé par tout le monde, et un désespoir
quand les personnes tourmentées par elles ne manifestent pas
en retour une grande affection. La mère de Sim... battait ses
enfants si elles avaient eu quelque indépendance dans un minus-;
cule détail et l'instant suivant se mettait à pleurer parce que ses
enfants ne paraissaient pas l'aimer suffisamment.
Bien mieux, ces mêmes malades nous ont déjà présenté la
folie de Tobéissance. Nadia quand elle m'eut connu quelque
temps me fit un jour un compliment qui m'a beaucoup flatté :
« Vous êtes une personne encore plus entêtée que moi, je n'au-
rais pas cru que cela fût possible. » Elle est enchantée de l'avoir
trouvée cette personne, non seulement elle lui obéit mais elle
veut lui obéir encore plus comme un petit enfant, tandis qu'elle
reste extrêmement exigeante vis-à-vis de son père et de ses sœurs.
Sim... se donne à un amant pour avoir un maître et elle est
enchantée de son incroyable dureté. Nous avons vu Gisèle
chercher un maître en se confiant à un prêtre. On trouvera simul-
tanément chez ces personnes un autoritarisme effréné pour une
partie de leur famille et une soumission ridicule vis-à-vis d'un
fils ou d'un étranger.
Ces caractères nous montrent qu'il ne s'agit pas là d'une véri-
table puissance de la volonté. Les grands volontaires sont des
chefs, et ne sont pas des autoritaires : tout le monde en a senti
la différence. Ils commandent les grandes choses, en inspirant
une direction générale à la conduite et surtout en commandant
d'une façon avantageuse pour leurs subordonnés; les autoritaires
commandent dans les petites choses plus que dans les grandes.
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STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
direction générale et laissent trop voir que le
ujours pour objet leur propre intérêt et non
commandement ne parait être exactement la
de leur obéissance : la difficulté de leur adap-
1. Ce sont des gens d'activité mentale faible^
nouveau d'adaptation, d'organisation est pe-
int éprouvent au suprême degré le besoin
ordonnée. Ils veulent que les autres fassent
moins leur facilitent la tâche. Au lieu de se
eu ambiant comme fait l'être qui s'adapte, ils
leu ambiant se modèle sur eux, pour qu'ils
er. Nous avons vu que le milieu le plus embar-
ipuleux, c'est le milieu social ; les variations
usent ses timidités et toutes ses crises d'an-
leu social qu'il veut modeler sur lui-même et
rfaite conformité avec ses propres manières
;s exagérés qui feront comprendre ma pensée,
on bureau et essaye de fixep son attention
voici qui entre dans une crise de fureur parce
iomestique qui balaye une pièce à côté. Le
strait, et évoque dans son esprit des images
que sa lecture et en raison de sa faiblesse
e de lire. Il veut édicter que dans la maison
lire en même temps que lui. Vk... ne peut
iver les mains, parce que de sa chambre elle
5 qui fait couler de l'eau sur l'évier: « que
tte eau ? Quelque chose de sale assurément,
idées d'eau de vaisselle, de graillon et vous
cela m'empêche de prendre l'idée que mes
. Je voudrais, si cela était possible, que touk
z la maison du haut en bas fasse des choses
herche à me laver les mains. » Ces deux cas
p, car ils me semblent expliquer le mécanisme
Zes faibles d'esprit ne peuvent pas faire une
le chose, jouir d'une chose, si les autres
même temps quelque autre, en croient quelque
mmes ont une autre jouissance. De là ce besoin
ité ; de là aussi ce mélange étrange du besoin
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LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
TROISIÈME SECTION
LES INSUFFISANCES PHYSiOLOGIQUBS
le psychasthéniqiies préoccupés de leurs obsessions^
ies mentales ou de leurs phobies ne se plaignent que
i psychologiques et Tobservateur pourrait être dis-
ier abord à croire simplement a une maladie de
Eiins malades, au moins pendant un certain temps,
te illusion. Rk... est un homme de 4o ans, grand,
frais, sans troubles physiologiques apparents, il n'a
3ules et des manies de recherche qui suflisent à le
s c'est là une exception très rare et peut-être plus
3 réelle ; le plus souvent un examen attentif révélera
troubles physiologiques qui font de Tétat psychas-
5 maladie de tout l'organisme.
lit trop insister sur ce point essentiel : les obsédés
rdage, par la description interminable de leurs pen-
inaires détournent le médecin de l'examen organique
jamais être négligé. Leur aspect physique est pres-
caractéristique i ils sont très souvent amaigris,
et ont les traits tirés, leur peau sèche a un mauvais
angue est saburrale, leur haleine est mauvaise et
urs cet aspect physique se modifie complètement en
qu'ils retrouvent le calme de l'esprit. En un mol,
t l'interprétation que l'on donne de leur état men-
pas oublier qu'ils sont surtout et avant tout des
- Troubles des fonctions nerveuses.
tous les troubles précédemment étudiés, obsessions,
isufGsances psychologiques étaient en rapport avec
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TROUBLES DES FONCTIONS NERVEUSES 399
des troubles, des foDctions cérébrales, mais ils constituaient sur-
tout des troubles psychologiques. Il faut placer à côté des
troubles des fonctions physiologiques du système nerveux, trou-
bles encore peu connus mais qui serviront sans doute plus tard
pour interpréter les précédents.
I. — Céphalalgies et rachialgies.
Un premier fait, des plus importants, nous montre que ces
troubles de l'esprit sont en rapport avec un fonctionnement anor-
mal, une altération pathologique du cerveau. Ce sont les douleurs
que la plupart des malades ressentent dans la tête.
Ces douleurs sont toujours situées par eux dans la tête, mais là
s^iirréte leur accord : il y a une diversité surprenante dans la des-
cription des formes ou des modalités de celte douleur et dans le
siège qu'ils lui attribuent. Il est bien probable que dans ces des-
criptions imagées il y a beaucoup de choses insignifiantes. On
s'en rendra compte plus tard, quand on saura la véritable raison
de ces douleurs, nous en sommes encore à la période empirique
des anciens médecins qui notaient avec précision les caractères du
pouls capricant et du pouls duriuscule, nous sommes obligés de
recueillir telles quelles les expressions des malades.
Si nous nous occupons en premier lieu de la forme, des modalités
de la douleur nous avons d'abord ceux qui ont peu d'imagination
et qui disent simplement qu'ils ont mal à la tète, qu'ils ressentent
une gène, une douleur plus ou moins grave dans la tête. Nous au-
rons ensuite ceux qui parlent d'engourdissement « j'ai la cervelle
paralysée» (Bsn... lo). « J'ai la tête engourdie » (Claire) « il y a
un coin de ma tète qui est engourdi et qui a envie de dormir »
(Vod... 2o3), a j'éprouve une sorte de torpeur (Dob... 86) ».
Un certain nombre de malades se plaignent de phénomènes de
mouvement dans la tète « il y a comme des corps étrangers qui
courent sous la peau du crâne, et a l'intérieur des effets bizarres,
des contractions, des torsions, des écartements qui poussés à
un certain point sont tout à fait angoissants » (Gisèle). Jean sent
« comme s'il avait des objets qui tournent dans le cerveau sans
qu'il puisse les arrêter, des roues, des poulies, des ailes de mou-
lin ; il ne voit rien, il n'entend rien, il sent qu'il y a une petite
poulie qui tdlirne ».
D'autres sensations peuvent être comparées à des démangeai*
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LES STIGMATES PSYCliASTHÉNIQUES
me semble, dit Mt... (12), que Ton m'arrache des mu-
le sommet de la tète ou bien je sens comme des four-
tête. » Ck... sent des tiraillements au-dessus du crâne
i un fil invisible le coulissait )).
ivons aux malades très nombreux qui traduisent leurs
s par des sensations sonores et qui ont des bruits, des
ts dans la tête (Lap..., Qb... i4), des crépitements
observation la plus intéressante à ce point de vuese-
e Fr... (69) à laquelle je renvoie : il a toujours des
i la tête tantôt très forts quand il a subi une fatigue
î, siHlets de chemin de fer, coups de pistolet, cloches,
uand il est reposé des bruits plus faibles, une cas-
, le train qui passe, Teau bouillante, le chant de la
puis 4 ans ces bruits n^ont jamais cessé. Il ne faut
Ire ces bruits avec les bourdonnements ou les sifBe-
résultent des véritables maladies de Toreille et surtout
ise de l'oreille moyenne, car ces personnes n'ont aucun
d'une lésion de l'oreille. J'ai tenu à faire examiner avec
le dernier malade Fz... par M. Gellé qui m'a assuré
e était intacte. D'ailleurs ces bruits ne sont pas situés
reilles mais dans la tète, c'est encore, si je ne me
e interprétation analogue aux précédentes des mêmes
s cérébraux.
e aussi les impressions de froid (Gisèle) qui dure pen-
ures ou celles plus fréquentes de chaleur anormale,
ssèche le cerveau en le chaufiant (Dob...). »
> impressions plus fréquentes encore il faut noter celle
ir : <( c'est une barre pesante sur la tête, un bandeau,
me de plomb, une meurtrissure par un poids, une
de (Gisèle, Dob..., etc.), une brique lourde en travers
Lag..., Qb...). » C'est, en un mot, le casque classique
:héniques.
intéressante des expressions, celle qu'on retrouve à
hez la moitié des malades, seule ou surajoutée aux
elle de vide. « Ma tète est vidée» (Al... i5, Day...,
. « Ma tète est vide, dit Ver..., c'est comme si je
de tête ou plutôt rien dans la tète. » Lise prétend
besoin de combler ce vide avec ses idées » et Claire
le « la tète est vide et en même temps remplie par
pesant, ce sont les mauvaises idées qui forment ce
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TROUBLES DES FONCTIONS NERVEUSES 401
caillou au milieu du vide », on remarque l'analogie entre ces
deux malades.
Après la forme de cette douleur ce qui est très intéressant
à relever c'est sa localisation. Remarquons d'abord qu^elle est
très rarement latérale ; je n'ai remarqué qu'un petit nombre de
malades prétendant souffrir plus d'un côté que de l'autre : Vod...
(2o3), Claire, Lise, disent quelquefois qu'elles souffrent, qu'elles
sont engourdies, qu'elles ont des brûlures surtout a droite. Gisèle
sent un liquide qu'on injecte à droite, Fz.., a plus de bruits à
droite, la tète semble à Lise grossir à droite. Deux de ces mala-
des : Claire et Lise, avaient déjà certains troubles légers de la
sensation cutanée situés également à droite, on ne peut donc pas
faire intervenir ici le croisement des hémisphères.
Quelquefois la douleur est générale dans toute la tête, souvent
elle est plutôt superficielle Lise, remarque que ce n^est pas très
profond, il lui semble que cela descend à mesure qu'elle est plus
malade. Mais la plupart des localisations dans l'immense majorité
des cas se font sur la ligne médiane.
Nous avons d'abord un premier groupe de malades qui situent
cette douleur sur le front, le malade de Bail disait déjà qu'il avait
une gêne sur le front, entre les -yeux, au haut du nez. Fie... a une
compressionau milieu du front, Brk. . . (24)» Vod. . . ont un poidsentre
les yeux sur la racine du nez, comme un frein que l'on serre.
Car... (176) une brûlure au front, au-dessus des sourcils, elle
croit aussi à une prédominance h droite.
Une localisation déjà beaucoup plus fréquente c'est celle du
vertex, la douleur est analogue au fameux clou des hystériques.
Lobd... (22) se demande si sa mère ne lui a pas donné des coups à
cet endroit quand elle était petite, elle a remarqué elle-même
que c'était la place de la fontanelle des petits enfants. Vod...,
Claire ont « la tête tout écalée à cet endroit », Lise y sent comme
une grosseur, etc. On pourrait évidemment citer à propos de la
douleur du vertex un bon tiers des malades.
Nous arrivons à la localisation de beaucoup la plus fréquente :
la localisation occipitale. Tantôt elle est vague, a je souffre en
arrière de la tête » (Brk. . .), « j'ai une calotte de plomb en arrière »
(Vi...) « c'est le derrière de la tête ma région mauvaise où il y a
une griffe, un poids et où se font entendre tous mes bruits » (Fr. . .).
Ml..., Jean, Cs..., Gisèle localisent leurs phénomènes bi/arres
LES OBSESSIONS. I. — a6
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LES STIGMATES PSVCIlASTHÉNIQUES
à rocciput. Tantôt la localisation occipitale présente
; de précision ; beaucoup de malades comme Gisèle,
Rai... désignent avec le doigt un point situé sur la ligne
[uelques centimètres au-dessus de la bosse occipitale
arait correspondre au point lambda des anatomistes,
rencontre des sutures occipito-pariétales. Fy... pré-
[ju'elle a eu longtemps comme des petits boutons h ce
... prétend que ce point se creuse sous les coups de
elle y ressent perpétuellement. Cette localisation me
les scrupuleux encore plus fréquente que les prccé-
crois qu'elle existe dans près de la moitié des cas.
ut guère avoir la prétention d'expliquer actuellement
le de ces douleurs bizarres, il n'est pas vraisemblable
des apprécient directement par des sensations l'état
tance cérébrale, ils ne l'apprécient qu'indirectement
iencc de leurs opérations mentales, ce qui fait naître
timents anormaux que nous avons décrits. Je ne crois
puisse expliquer la sensation de vide par la perte
i sensations produites normalement par le cerveau
ur Ver... qui présentait cette impression au suprême
li pu constater aucun trouble des sensations que pro-
aire la tête : il n'y a aucune anesthésie des téguments
Il ne semble pas non plus avoir des troubles des sen-
ids de la tête. Le malade sent très bien un poids que
sa tête, il discerne les yeux fermés les inclinaisons
lunique à sa tête. Autant que l'on peut le dire il me
i, qu'il a conservé une certaine sensibilité interne :
e le placer pendant quelque temps la tête en bas, il
tout le monde l'afflux du sang, la chaleur et la pesan-
e. Pour vérifier davantage la sensibilité de la surface
audrait lui ouvrir la tête, mais ces observations sufli-
e l'on puisse considérer comme tout à fait hypothé-
prétation qui attribue dans ces cas ce sentiment de
lesthésie cérébrale spéciale : il ne faut pas résoudre
s par des anesthésies invérifiables et imaginaires.
, LI. . . (226), me suggérait sa propre explication qui m'a
;antc : » quand nous disons que la tête est vide ce n'est
; sentions quelque chose de particulier en dedans,
is sentons d'une manière douloureuse les enveloppes
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TROUBLES DES FONCTIONS NERVEUSES 403
do cerveau, le crâne et la peau, cette sensation anormale du crâne
attire Tattention sur la périphérie et nous fait remarquer le vide
en dedans. Quand je ne sens plus mon crâne, je n'ai plus Tidée de
vide. » L*explication de ce malade vaut au moins autant que la
plupart de celles qui ont été proposées.
Il semble aujourd'hui probable que la sensibilité intracrâ-
nienne n'existe que dans les méninges, dans le périoste et dans
les os du crâne; il en résulte que la plupart des maux de tête
sont dus à des modifications qui atteignent les méninges et
en particulier, comme les belles études de M. Sicard viennent
de le montrer, a des modifications dans la tension du liquide
céphalo-rachidien. Il faut donc supposer que, soit en raison de trou-
bles sécrétoires ou de troubles vaso-moteurs, le liquide céphalo-
rachidien est en quantité exagérée ou insuffisante ; cette suppo-
sition n'a rien d'absurde si on songe à tous les troubles
sécrétoires et vaso-moteurs que nous allons observer da côté de la
peau, des muqueuses et surtout de l'estomac. Pourquoi les petites
glandes récemment découvertes et qui sécrètent le liquide céphalo-"
rachidien ne seraient-elles pas également troublées ?
Cette modification de la tension du liquide céphalo-rachidien
est aussi probablement en rapport avec des troubles circulatoires.
Angel, en i884, rapportait les vertiges de la neurasthénie à des
congestions d'origine vaso-motrice^ et il démontrait la surdis-
tension du sang dans le cerveau, par l'étude d'un trouble vaso-
moteur observé à la périphérie sur lequel nous reviendrons à
propos de la circulation. L'afTaiblissement du tonus artériel amè-
nerait des dilatations fréquentes des vaisseaux cérébraux. Cela
expliquait comment l'écoulement des règles, le sommeil qui déter-
mine l'anémie peuvent amener souvent la diminution de ces maux
de tête, le repos agit dans le même sens en produisant une déri-
vation et en relevant le tonus artériel. Le travail cérébral augmente
la céphalée en déterminant un accroissement de la congestion.
M. Auguste Voisin^, puis plus récemment M. Lubetzki^, ont
I. Aogel, Ex perîmen telle zur Pathologie und Thérapie der cerebralen Neuras-
Ihenia. Arch. f. Psych.y Berlin. i884, XV. p. 6i8.
a. A. Voisin, Étude sur la température des parois du crâne. Congrhs international
dt médecine mentale. Paris, 1878. Leçons cliniques sur les maladies mentales, i883,
p. 109.
3. Lubetzki, Recherches cliniques et expérimentales sur la cause de la céphalée neu
rasthénique. Thèse Paris, 1899.
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.ES STIGMATES PSYCHASTIIÉNIQUES
er ces actions par des études de thermoméirie
mploi d'un thermomètre de surface très sensible,
établir les points suivants : i® que la tempéra-
[1 crâne chez les neurasthéniques à céphalée est
i élevée que celle que Ton observe chez les indi-
tSy cette élévation pouvait atteindre plus de a de-
les neurasthéniques sans céphalée, Télévation de
'est pas bien appréciable ; 3** Qu'en général le
ique chez le même individu une température
ù siège le maximum de la céphalée. 4® Que
^e diminue, la température diminue égalementV
ces mesures sont très discutables, M. François
jà observer il y a quelques années qu'il fallait
n énorme de la température cérébrale pour
bors du crâne une modification appréciable au
ons encore isolées étaient confirmées, elles jus-
nterprétation générale que les céphalées sont
ications de la pression du liquide céphalo-ra-
nes dépendantes de troubles sécrétoires et cir-
halées resteraient sans doute une conséquence de
fonctionnel des centres nerveux, mais une
indirecte et non une sensation immédiate de cet
es variées que le malade attribue à ses douleurs
? sommes pas capables de les expliquer, complè-
Qt dépendre du degré de ces modifications de la
brale et d'une foule de sensations concomitantes,
usculaires de tous les muscles qui s'insèrent sur
îrminent des douleurs siégeant dans leurs ten-
de la vue ou des muscles moteurs de l'œil, des
et en outre des sentiments variés d'incomplé-
, d'isolement, viennent se joindre dans Tesprit
tion principale de douleur et déterminent ces
la céphalée qu'il aime à exprimer par des mé-
nboles.
sation j'ai déjà eu l'occasion d'exprimer quelle
1899, P- 33-
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TROUBLES DES FONCTIONS NERVEUSES 40r.
était mon opinion à ce sujet ^ je ne puis pas croire que Thomme
ait conscience de la place de ses diverses circonvolutions et qu'il
ressente une douleur à la place de la circonvolution qui Fonc-
tionne le moins bien. Il s'agit là d'une localisation beaucoup moins
importante : le malade sent une douleur vague qui a son point de
départ principal dans les méninges et il la localise vaguement à
Tendroit du crâne qui est le plus en rapport avec elles et qui a
conservé la plus grande sensibilité. J'ai eu l'occasion de refaire sur
Ll... (226) qui avait un beau crâne chauve, une expérience que
j'ai déjà décrite qui consiste à rechercher centimètre par centi-
mètre, la sensibilité de la peau du crâne à la douleur. En em-
ployant mon algésimètre à ressort, j'ai constaté que le crâne est
en général peu sensible, il faut que l'instrument marque de 25
à 3o pour que le malade reconnaisse une piqûre. Or, il y a deux
régions assez petites qui tranchent très nettement sur l'ensemble
par leur sensibilité ; c'est justement le vertex et le point lambda
où l'aiguille ne marque plus que 10 ou i5. Ces deux régions sont
celles des fontanelles : est-il impossible que l'absence de tissu
osseux pendant plusieurs années de l'enfance, le petit mouvement
que les fontanelles ont pendant la respiration de l'enfant, la suture
longtemps incomplète et la présence du périoste conservent à ces
endroits cette sensibilité exagérée. Ce serait en raison de cette
sensibilité que le malade localiserait à ce point une douleur res-
sentie d'une manière vague.
Bien entendu il faut tenir compte d'une foule de circonstances
accessoires qui, en attirant l'attention, dé-
terminent la localisation à un point plutôt /^""H ~^\
qu'à un autre. E..., garçon de i5 ans (tics et /
manies mentales), a une cicatrice au sommet I
du front, à gauche, résultat d'une petite blés- ^
sure déterminée par une chute dans la pre- ^
mière enfance; la ligure 22 représente un \
schéma dont je me suis souvent servi pour \
noter la place attribuée par les malades à
leurs céphalées, la croix indique reudroit .J^^ord, U^ïh^hlgiV
de cette petite cicatrice, légère d'ailleurs et
non adhérente à l'os. Le malade a pris l'habitude de localiser à
ce point anormal tous ses maux de tête. La sécheresse des narines,
1. Névroses et Idées fixes. II, p. 118, 3 19, 45a.
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STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
*atioD, des crampes du muscle frontal ou du
des muscles de la nuque déterminent chez
1 localisation en avant et en arrière.
'ébrales il faut joindre les douleurs dans les
, la rachialgie. Ce symptôme ne me semblait
ntérèt, mais j'ai été étonné de voir que quel-
naient une certaine importance pour diagnos-
ie de ce qu'ils appelaient la névrose d'an-
rd cette question de diagnostic, pour le mo-
;ulenient que la rachialgie est fréquente chez
►bservés, quelle que soit la forme de leurs trou-
». Wo..., qui a des manies de la recherche et
ièges ou criminelles la présente comme Dob,
[es angoisses, comme Es... qui a des tics. La
;tre un peu moins fréquente que la cépha-
iste dans un nombre de cas assez considé-
ne puisse pas, a mon avis, faire de ce symp-
distinctif des neurasthéniques sans troubles
larque justement que la rachialgie est sou-
3 des fatigues ou des spasmes des muscles
1 convaincu, mais je ne crois pas impossible
ène des troubles circulatoires de la moelle et
e la pression intrarachidiennes ne puissent
e dans la céphalalgie.
1. — Troubles du sommeil.
iommeil est si grande dans les névroses, son
)nté et l'attention est si probable qu'il faut
apide sur les^ modifications du sommeil chez
groupe, le sommeil semble peu troublé, au con-
plutcH de grands dormeurs. Lo... (2i3) depuis
tôt trop. A 20 ans il lui faut encore I2 heu-
|our et encore il lui arrive de se rendormir
ose d'angoisse t igoa (Paris, F. Alcan).
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TROUBLES DES FONCTIONS NEIWEUSES 407
dans la journée. Ce cas est assez fréquent et un bon nombre de
ces malades ont un sommeil lourd et prolongé. Dans ces cas il
faut noter que le sommeil n'est pas troublé par les idées qui
tourmentent la veille. Comme on Ta remarqué souvent, les rê-
ves du sommeil profond ne reproduisent pas les émotions de la
journée.
Chez quelques sujets ce sommeil lourd devient par moments
tout à fait excessif et pathologique : il arrive assez souvent que
Bu... (85) dorme 24 heures de suite; une fois il est resté endormi
deux jours et une nuit. Lo... a des sommeils malgré elle au mi-
lieu de la journée, il en est de même chez Vod... Chez Je... ces
sommeils exagérés surviennent par périodes : pendant une quin-
zaine de jours elle va être engourdie, elle va être prise à chaque
instant par des sommeils qui se prolongent plusieurs heures.
Pendant cette période elle n'a plus d'obsessions et n'est plus
tourmentée par ses interrogations et ses recherches continuelles.
Je crois que ces sommeils exagérés doivent être rapprochés de
ces périodes de fatigues énormes que nous avons étudiées à
propos des troubles de l'activité, ce sont des phénomènes du
même genre.
Dans un autre groupe de malades peut-être plus nombreux que
le premier, le sommeil est troublé : il est devenu plus léger, il reste
incomplet et il est traversé par des rêves pénibles. Claire est tour-
mentée la nuit comme le jour quoique h un degré un peu moins
fort. Il lui semble qu'elle ne dort pas tout entière « il y a toujours
deux ou trois de mes personnes qui ne dorment pas, cependant
j'ai moins de personnes pendant le sommeil, il y en a quelques-
unes qui dorment un peu. Ces personnes ont des rêves et des rê-
ves qui ne sont pas les mêmes : je sens qu'il y en a plusieurs qui
rêvent à d'autres choses». Ces rêves de Claire sont presque tous
d'un genre bienconnu, elle poursuit quelque chose qu'elle ne par-
vient jamais à atteindre, elle se perd dans d'interminables cou-
loirs, elle ouvre des milliers de portes et elle a le sentiment
qu'elle n'arrivera jamais au bout. Ce rêve « du labyrinthe » me
parait la continuation sous une forme plus imagée des recherches,
des efforts interminables et infructueux que cette personne fait
continuellement pendant la veille, c'est le même état d'esprit qui
continue dans les deux états h l'inverse de ce qui se passait
dans les sommeils profonds.
Beaucoup d'autres malades Bei..., Tr..., etc., se plaignent de
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LES STIGMATES PSYGH
uvoir pas dormir complètemei
rult et le matin elle a le senti
e est restée au début du somme
er le sommeil qu'elle ne peut
t quelconque)). Elle dort plut^
le et qu'elle s'est épuisée toute
Quand elle est en voie d'amél
;ement de son sommeil : « J'éi
îre bizarre en continuant me
ive de me réveiller en sursa
Ile de dormir tranquille ; cela i
. )> En un mot il y a un change
eux, et ce changement la troul
st souvent juste de faire intei
leil des phénomènes physiolog
ont paru jouer un rôle dans I
moteurs, des phénomènes de c<
cpliquer par Angel, par Lubet:
ï Fleury rattache l'insomnie à
sanguine : le sommeil normal e:
k 12 centimètres de mercure m(
; chiffre on observerait des i
issous des insomnies par hypol
^ a quelque vérité dans ces ren
ver, comme je l'ai montré autr
[>mène mixte, il ne dépend pas
ologiques extracérébraux pour
céphalo-rachidienne, mais encc
;s qui ont lieu dans l'intimité di
est un acte, il demande une ce
au moment opportun et pour
nauvaises habitudes, les tics, le
dans le sommeil : on a déjà v
laquelle des agitations et des a
ri du début du sommeil comme
bien des points l'insomnie de
le de leur aboulie.
)c Fleury, Les grands symptômes neurasthè
Uigmates mentaux des hystériques^ 189a,
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TROUBLES DES FONCTIONS
3. — Les modifications
A tous les troubles nerveux déjà signi
modiBcations des réflexes. II faut ren
tions sont rares et peu nettes : Tétat pi
demment plus sur les fonctions super
et trouble peu les fonctions élémentai
dant chez une dizaine de personnes je
des membres inférieurs sont exagérés
qu'il s'agisse uniquement d'une cxagé
volontaire et en rapport avec Tagitati
crois que Ton observe quelquefois chc
véritable exagération des réflexes de
semble accompagner Tengourdisseme
leurs ajouter que je n'ai observé nette
ni le phénomène de Babinskî, même
qui ont des phobies de la marche, dei
ou des crises de fatigue portant surt
rieurs. C'est là une remarque impoi
diagnostic souvent très diflicile de ce
quelquefois des maladies de la moelle
J'insiste surtout sur une dilatation
que Ton constate chez Claire, chez <
autres; il* n'y a pas suppression con
paresse et diminution du réflexe lumir
nue quand les malades sont un peu m
pour suivre leur amélioration.
2. — Troubles des tonctii
Les troubles des fonctions de la nut
nets, plus indépendants de Tétat mer
général de ceux-ci est presque toujoui
grès, ont un mauvais teint et changent
façon très rapide et très fréquente, Jeî
d'un coup des aspects extrêmement mi
sous le coup d'une grave maladie.
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LES STIGMATES PSYCHASTIIÊNIQUES
I. — Troubles gastriques.
ble physiologique principal qui existe chez la grande
le ces personnes est constitué par les troubles de la
stomacale. On peut dire que neuf fois sur dix on a
Bs sujets qui digèrent mal, une exception extraordinaire
ie Jean qui semble avoir un assez bon estomac : tous
presque sans exception ont des troubles gastriques,
t nombre de ces malades présentent une exagération
it et un besoin perpétuel de nourriture. M. J. Roux,
étude intéressante sur la faim, rapporte robservalion
te d'une femme atteinte après un accouchement d'une
nuellc *. Elle se sent perpétuellement en état de défail-
le reprend un peu d'énergie qu'après avoir absorbé un
ourriture. J'ai observé plusieurs sujets de ce genre :
jne fille de 25 ans, obsédée, phobique, et surtout
, demande constamment à manger et, si on la laisse
)re toute la journée. « Elle a besoin de revivre et pour
nanger continuellement... elle est comme morte de
le devrait manger continuellement sans s'arrêter et si
ait pas toujours empêchée de manger, sa maladie serait
depuis longtemps. » J'ai déjà signalé le cas de Lkb...
réclame à manger dès qu'on veut obtenir d'elle le plus
rt. Pi... a dans sa poche un morceau de pain et une
e jambon et il « les mange sur l'escalier avant d'entrer
ju'un afin de se donner quelque assurance ». Ce sont là
amènes analogues aux besoins d'excitation par l'alcool
rphine en rapport avec des sentiments de faiblesse
et mentale. On le remarque très bien dans l'observa-
kb... qui oublie sa boulimie quand on la laisse inerte,
lans ses rêveries et qui ne réclame à manger qu'au
ù la difficulté d'un effort lui rappelle son sentiment de
agérations de l'appétit sont donc tout à fait acciden-
1 général, la grande majorité des psychasthéniques
rt peu. Ces malades n'ont aucun appétit et ils sont
routés de toute alimentation.
X, La faim. Elude psycho-physiologique^ 1^97» P- 28.
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TROUBLES DES FONCTIONS DIGESTIVES
Les douleurs commencent presque toujours dès qu
ont mangé, Brk..., Nadia, Za..., Mrc..., etc., comme
frir aussitôt et se plaignent de crampes et de bri)
ques-uns (Claire, Qs...)ont des vomissements, mais c
n'est pas très fréquent. Ce qui est constant, c'est c
est gonflé et pesant ; les malades étouffent, o
leraents, sont forcés de se desserrer. A Texamer
souvent du gonflement épigastrique et on constat(
bruit de clapotement déterminé par toute secousse,
fait entendre plus ou moins bas suivant que Testoma
moins distendu, très souvent il descend jusqu^à
quelquefois bien au-dessous. La digestion est lente,
se prolongent jusqu'au repas suivant et les malades
ment que le premier repas n'est pas digéré quand ilî
second. Ils ont des brûlures, du pyrosis, ils ont la I
raie, ils sentent un goût infect dans la bouche et
d'atroces migraines ne tardent pas à suivre ces mau
tions (Bal..., Claire, Gisèle, etc.).
Ce tableau peut présenter quelques variétés, Lise d
de la description générale en ce que le plus souvent
rien pendant la digestion et ne se plaint de rien ;
disposé à croire qu'elle est beaucoup trop absorbée
pour se rendre compte de ce qu'elle éprouve. Elle
façon mécanique, très rapidement sans savoir ce (
elle a l'estomac énormément clapotant, elle a souv
gestions suivies de vomissements ou des diarrhée
ment après le repas dans lesquelles elle rend les alin
intacts. Cependant elle ne souflVe pas de l'estomac
seulement de ressentir une fatigue énorme pendai
digestive.
Chez Gisèle également il y a lieu de remarquer qt
cularités du trouble gastrique. Elle digère toujours
avec du gonflement et même de la gène du cœur par
mais par périodes elle commence de grands troubles gi
spéciaux. Le début en est assez brusque : elle sent \
de la gorge, des brûlures dans l'œsophage et dans
langue devient blanche brusquement et va rester ss
dant une assez longue période, la digestion est pc
supprimée, les aliments sont rendus dans une diar
immédiatement après avoir été absorbés. Comme la
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ES STIGMATES PSYCHASTIIÉNIQUES
Jus qu'elle, Gisèle sent dans sa tète le contre
>le8 digestifs. Dès qu'elle a mangé elle éprouve
eur à Tocciput et cette douleur est telle qu'elle
se ralimentation. Il en résulte que pendant ces
s de Testomac, durant quelquefois plusieurs
emble avoir une autre obsession, au lieu d'être
es remords de vocation, elle a l'idée fixe de
nts ou d'absorber des quantités minimes de
i se présente ici est un des phénomènes les plus
sentent les troubles de l'estomac chez les psychas-
ne vingtaine de malades, avec beaucoup derégu-
l'alternance entre les troubles psychiques et les
3s : il est évideqt que Gisèle est moins scrupu-
dée par ses remords de vocation quand elle est
ac. Il en est de même de Lise, quand elle est très
ige bien et ne parle pas de son estomac ; quand
meilleur, elle se plaint de fortes crampes d'esté-
îs, de paralysie abdominale. Il en est de même
Bal..., et chez un très grand nombre d'autres
ces singulières alternances entre les troubles
roubles gastriques j'avais d'abord supposé que
ue était à peu près permanent et que pendant
trouble mental les malades cessaient de s'en
e de l'excès de leurs préoccupations morales.
me semble maintenant insuffisante au moins
cts. Pendant la période de douleur gastrique,
ées immédiatement après le repas et elle ne les
période d'obsession ; dans la première période
is qu'elle engraisse dans la seconde. Il est pro-
[lance doit être plus profonde : les choses se
le trouble nerveux portait tantôt sur les centres
chiques, tantôt sur les centres viscéraux,
irident que ces troubles gastriques ont leur point
in trouble nerveux. Je ne puis reprendre ici
laladie spéciale de l'estomac neurasthénique qui
lalysée dans bien des ouvrages*. La plupart de
a neurasthénie ; Levillaio, Neurasthénie, p. 9^ ; Heim, Di^s-
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TROUBLES DES FONCTIO
ces troubles se rattachent à trois phéi
une paralysie motrice de l'estomac q
se laisse distendre par les aliments, I
constate le défaut de sécrétion des gl
du liquide sécrété en acide chlorï
plupart des analyses de suc gastriqu
conditions montrent un état d'hypoc
ments mal digérés, stagnants dans W
fermentations anormales, donnent r
des produits toxiques qui modifient
un retentissement sur le système ner
dans les migraines.
Dans quelques cas rares il s*agit
gastrique, suivant le mot de M. Roi
crétion d'acide chlorhydrique. Ces
cette maladie peut indirectement a
central et déterminer des troubles
tenir compte dans le traitement. M
exception dans la psychasthénie vrai
crétions gastriques qui se présentent
mentation sont un feu de paille, comm
fondamental reste le plus souvent ui
toire. Ces troubles gastriques des p{
comme cela peut arriver quelquefois
ment en rapport avec une idée. M. I
exagérer quand il dit que toute dyspi
de la suggestion. Beaucoup de ces
fixe relative à leur digestion. Ce n'(
faiblesse des fonctions cérébrales, t
Testomac.
En étudiant les circonstances qui
divers sens, on verra comment une
simplement morale, transforme la
adynamie gastriques est en rapport a
les fonctions nerveuses.
pepsie des neurasthéniques. Thèse, Paris, 1898 ;
Thèse, Paris, 1898. ; A. Mathieu, La nenraslh
l'estomac, 1900 ; De Fleury, op. cit., 1901, p.
I . Dubois (do Berne), Troubles gastro-intesl
cine, 10 juillet 1900.
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LES STIGMATES PS
3. — Troublsi
modifications abdominale
e toujours ces troubles gi
de la flacciclité de l'abdon
On note chez Lise, chez
I, la mollesse de la paroi q
sment viscéral, le ventre er
serve que les deux muscler
tre d'une manière tout à fa
cidentellement au pinceme
iC Havre).
on constate le prolapsus,
et dans quelques cas des
:)ttant (néphrophtose), le f
(spléroptose), etc. Les autr
;esse du côlon, le boudin
colique transverse, le ba
troubles de la digestion in
•difications de la statique ab
jui succèdent quelquefois
lans rimmense majorité de
îlles glaireuses, de temps c
esséchées et quelquefois d'i
148), sont des types rem
le délire du scrupule et la
lière malade les filaments
ans la formation de Tobs
ée ».
)lus remarquable exemple
lur soigner cette malade il
e sa constipation. Il s'agit
3 verrons en parlant des c(
. Guéniot, 1879. Gléiiard. i885
du ventre, entéroptosiqiies et dilatt
s médecine, 1887.
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TROUBLES DES FONCTIONS DIGESTIVES
415
rétentions prolongées des matières fécales qui déterminent les états
les plus dangereux et dans lesquels il faut pratiquer un véritable
curettage de la fosse rectale. Ces rétentions produisent des phé-
nomènes d^auto-infection plus ou moins graves chez les divers
malades ; chez Nadia ils ont été accompagnés par des états de
confusion mentale pendant trois mois et même par de la névrite
périphérique, mais chez tous les autres sujets ils amènent au
moins une aggravation de Tétat menlal.
De tels troubles ne sont pas uniquement mécaniques, suivant
la théorie de M. Glénard, ni uniquement chimiques, suivant la
théorie de M. Bouchard, ils sont évidemment en rapport avec
la dépression nerveuse qui se manifestait déjà par tant d'autres
signes. M. Brocchi (de Plombières)* signalait deux observations
d'entérocolite muco-membraneuse, survenues à la suite d'émo-
tion. Nous aurons à discuter bien des faits semblables.
3. — Troubles de la nutrition.
Ces troubles de la digestion retentissent sur la nutrition géné-
rale. Sauf des cas assez rares d'obésité, les malades sont maigres.
Jean, pendant des années, présentait une maigreur effrayante ;
malgré une alimentation plus que suffisante et une digestion
presque toujours passable, il reste étonnamment maigre et garde
un teint plutôt mauvais. Lise, toujours très maigre, maigrit encore
cl*une façon remarquable, quand elle traverse une mauvaise période
mentale. Elle a passé de 54 kilogrammes à 46 en 3 mois, sous
rinfluence de crises répétées de ruminations sur le démon. Quand
on réussit à calmer son esprit, elle reprend rapidement du poids
et augmente de près de 5oo grammes par semaine. lo..., dans une
crise d'hypocondrie qui a duré lo mois, a eu tous les troubles
digestifs précédents et a perdu 20 kilogrammes.
Gisèle pour sa taille excessive (i'°,82), a un poids très petit de
57 kilogrammes. Pendant certaines périodes elle maigrit encore
plus, s'épuise et semble dans un état désespéré. Comme chez la
malade précédente le poids augmente rapidement dès que l'esprit
se calme. J'ai suivi ainsi une vingtaine de malades en prenant leur
I. A. Brocchi (de Plombières), A propos de la palhogénio de l'entéro-colite
muco-membraneuse. Presse médicale, 28 août lyoï.
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TROUBLES DES FONCTIONS DIGESTIVES 417
tation de l'acide urique et de Tacide phosphorique. Je constate cette
augmentation de i'indican et du skatol, de ces produits en rap-
port avec les fermentations intestinales, qui a déjà été signalée par
M. de Fleury*, mais je ne suis pas frappé comme lui par l'augmen-
tation du chlorure de sodium chez ceux qui ont des troubles gas-
triques. Je constate le plus souvent pour les 24 heures io^%20
(Lise), 9*^5o (Lise), i3^,65o (Bal...), ii grammes (Dob...), ce
sont des chiffres normaux, la moyenne étant de lo à 12^.
Ce qui a été particulièrement Tobjet de mes études c'est l'aci-
dité urinaire. Frappé de l'importance des travaux de M. Joulie
sur ce point, j'avais essayé de les vérifier en examinant à ce point
de vue les urines des névropathes. Je dois tous mes remerciements
à M. Lacroix, interne en pharmacie de la Salpêtrière qui, avec
une très grande complaisance, a bien voulu faire pour moi un
nombre considérable de ces analyses suivant la méthode de
M. Joulie.
Je laisse ici de côté les analyses très nombreuses faites sur des
hystériques et je ne donne que les résultats obtenus sur des psy-
chasthéniques. L'analyse est faite sur la i'" urine du matin avec
la solution de sucrate de chaux dont le titre est vérifié très fré-
quemment. Le chiffre d'acidité obtenu et calculé en SO^HO est
rapporté à l'excès de densité de l'urine examinée à l'eau, la densité
étant ramenée à celle du liquide à i5^.Je note aussi la quantité d'a-
cide phosphorique par litre et le rapport de cette quantité à l'ex-
cédent de densité calculée de la même manière. La plupart de ces
malades ont été soumis au traitement proposé par M. Joulie, par
l'acide phosphorique. Je donnerai plus loin à propos du traite-
ment et les analyses des urines modifiées par cette médication. Je
n'indique ici que les analyses des urines antérieurement à tout
traitement.
Pour apprécier ces chiffres il faut se souvenir des chiffres don-
nés par M. Joulie comme normaux.
Densité corrigée à i5° 10170,8
Acidité totale en SO^HO 0,8^9
Acide phosphorique en PhO* a,o83
Rapport de Tacidité à l'excédent de densité. ... 4t 55
Rapport de l'acide phosphorique à Texcédent de densité . 1 1 > 1 7
1. De Fieury, op. cit., 178.
a. Yvon. Analyse des urines ^ 1901, p. i63.
LES OBSESSIO?IS. I. 37
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TROUBLES DES FONCTIONS DIGESTIVES
Analyse des urines faites par M. TERRI AL, môme m
NOMS
DBI MALADE*
et n**
des anal jr MB
Kl.
S..
Jean.
DENSITÉ
coaaiacx a i5'
I Ol5,6
I 019,5
I o33,3
I 026,8
ACIDITÉ
TOTALE
en SOaHO
0,039
0,503
0,477
0,379
ACIDE
phouphoriqvb
en
PhOs
I
,i57
I
,393
5
,838
3
.366
RAPPOU
DE l'aCID
i l'cxc^dc
de dcnsi
3.77
a, 56
i,4o
Vie. .
Nadia .
Analyses faites par M. TVON, môme méthode.
I o33,3
I 016
1,17
0,98
5,37
1,71
3,5o
6,1
On remarque dans ces analyses quelques caractèi
intéressants par leur fréquence. La densité n'offre r
quable, elle est douze fois au-dessous de la normale
dessus, ce caractère varie suivant le régime desboiss
important de régler chez ces dyspeptiques.
Mais ce qui est frappant, c'est la faiblesse di
Tacidité à l'excès de densité, il n'est que 3 fois su
normale et il est 3i fois inférieur. Si l'on s'en rappo
lyses, les psychasthéniques comme la plupart des né
raient des hypoacides.
Le rapport de l'acide phosphorique à l'excès de dei
au-dessus de la normale eti3 fois au-dessous.
On peut tenir compte de ces remarques, particul
indications relatives à Thyponcidité très fréquente
vue du traitement. Malheureusement cette méthc
chimique et le choix exclusif de l'urine du matin son
encore très discutés et l'on ne peut considérer ces r
tout ceux relatifs à l'acidité, comme définitifs. D'au
comme M. Vigoureux, ont le plus souvent trouvé 1
neurasthéniques hyperacides.
11 faut donc se borner à enregistrer ces analyses d'
des documents d'attente sans en tirer encore des conc
raies sur l'état de la nutrition de ces malades.
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LES STIGMATES PSYCHASTHÉMQUES
2. — Les modifications de la circulation.
Je u'insisterai pas sur la respiration : dans les crises d*angois-
6 se présentent des troubles mécaniques que j'ai déjà indiqués
\ étudiant quelques graphiques. Mais en dehors de ces crises
respiration semble à peu près normale.
On peut simplement remarquer qu'elle est en général faible,
!U profonde et un peu rapide. Les autres troubles de la respi-
tion, les toux, les bruits laryngés, se rattachent aux tics et aux
[goisses et ont déjà été décrits dans les chapitres précédents*. Je
ai pas eu l'occasion d'analyser les gaz de la respiration chez
s malades comme chez les hystériques ; il est probable que
»n observerait chez plusieurs une diminution de l'acide carbo-
que en rapport avec le ralentissement de l'activité nutritive.
Les troubles les plus frappants de la circulation se produisent
isi au moment des angoisses où nous avons noté les palpita-
is, les modifications de la tension sanguine, les troubles vaso-
>teurs. II est intéressant de se demander si quelques-uns de ces
>ubles ne persistent pas en dehors des périodes d'angoisse.
Le nombre des pulsations m'a semblé presque toujours normal
du moins ne présenter que des variations insigni&antes, en
pport avec les émotions du moment.
I. — Les modifications de la tension sanguine.
Plusieurs auteurs, AngeP en Allemagne, Webber^ en Amérique,
t admis un affaiblissement du tonus artériel dans l'état neuras-
unique. M. Chéron en France, et M. de Fleury, ont donné
e très grande importance à ce symptôme. M. de Fleury
met un petit nombre de neurasthéniques avec hypertension du
uls, et rattache leur maladie à des auto intoxications et une
ande majorité de neurasthéniques avec hypotension artérielle*.
. Cf. Goulampis, Les troubles respiratoires dans la neurasthénie. Thèse, Paris, iSgli.
!. Angel, Experim. zur Pathologie und Thérapie der cerebralen neurasthénie.
hivfûrPsych. Berlin, i884, XV, p. 6i8.
. Webber, Boston med. Journal, 3 mai i888.
. De Fleury, Les grands symptômes neurasthéniques, 1901, p. 43, 67.
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MODIFICATIONS DE LA CIRCULATION
Cette baisse de la pression artérielle résulterait de la faibli
de propulsion du cœur et de la faiblesse du tonus des parois
artères, elle déterminerait un appauvrissement du sang en héi
globine, une diminution apparente du nombre des globules
augmentation de la partie liquide du sang, tandis que d
l'hypertension, il y aurait chasse d'eau dans les tissus périp
riques par resserrement de l'arbre artériel et augmentation ap
rente du nombre des hématies. Ces observations sont intéi
santés et probablement justes dans bien des cas.
Je suis tout disposé à admettre qu'il y a une hypotension a:
rielle fréquente en rapport avec la faiblesse musculaire, les ptc
viscérales diverses et la dépression mentale. Je fais seulement
server que la vérification précise expérimentale du fait n'est
toujours facile.
J'ai pris beaucoup de mesures de la tension artérielle ave(
sphigmomètre de Chéron et j'ai été amené comme je l'ai dit à pro
des angoisses à considérer ces chiffres comme douteux et inu
sables. Depuis je me suis servi du sphigmo-manomètre de Poti
il me semble d'un emploi plus aisé et m'a donné des résultats ]
concordants. Cependant je ne puis m'empêcher de rester éto
de la précision des chiifres donnés par quelques auteurs, quan^
mon avis, la mesure clinique de la pression du sang chez l'hon
est encore bien imparfaite et sujette à beaucoup d'erreurs.
Quoi qu'il en soit, voici les chiffres qui m'ont paru les j
certains chez quelques-uns des malades précédents :
Lpx, en dehors des crises de scrupule. 12.
Ul., en dehors des crises d'angoisses . i4-
Ul. — autre mesure i3.
Meu. — 10.
Lise. — i5.
Kl. — i5.
— — autre mesure. . . i5.
— — _ . . ,4.
Pot. — i5.
Chx. — 18.
— — autre mesure . . 17.
Lais. — i4.
Claire. — 12.
— — 12.
— — i3.
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MODIFICATIONS DE LA CIRCULATION 423
prétexte. Je note chez Claire une disposition curieuse aux œdèmes
qui se produisent le plus souvent aux paupières, aux lèvres et
quelquefois à la vulve. Chez quelques malades ces œdèmes se re-
produisent d'une manière expérimentale, il suffit d'exercer une
pression sur la peau pour les voir apparaître. C'est le phénomène
de la peau dermographique que j'ai observé cinq fois chez des
obsédés ou des phobiques et en particulier d'une manière remar-
quable chezDn... (Ag), chez Qi... (i88), qui a cette curieuse obses-
sion de vouloir être une enfant, il y a constamment des poussées
d'urticaire. Chez cette dernière malade Qi..., quand elle porte un
paquet sous le bras, quand un objet dur appuie sur une partie de la
peau, il apparaît rapidement à cet endroit une plaque d'œdème dur,
blanchâtre. Si elle coud, il y a de l'œdème au bout des doigts, si
elle se frotte les paupières celles-ci restent enflées toute une jour-
née, son bras reste enflé, si elle s'appuie sur le rebord d'une fenêtre,
les cuisses enflent si elle restent quelque temps assise, etc. J'in-
siste sur ces troubles vaso-moteurs, car ils ont joué un rôle dans la
théorie émotionnelle des obsessions. Mais il ne faudrait pas croire
que tous les psychasthéniques présentent ces réactions anormales.
Beaucoup n'ont aucune trace de dermographisme et leurs vais-
seaux semblent réagir aux diverses excitations de la façon la plus
normale.
On peut rapprocher des phénomènes précédents certaines ma-
ladies de la peau dans lesquelles les troubles nerveux jouent cer-
tainement un rôle; j'ai été frappé de la fréquence de l'eczéma
chez ces malades; je le retrouve dans une vingtaine de cas, l'ec-
zéma de la face est particulièrement tenace chez Lise L'eczéma
périnéal a été le point de départ de la manie urinaire de Yor...
(i37).
Enfin il faut signaler les troubles sécrétoires, la séche-
resse de la peau est un phénomène banal qui s'aggrave pendant
les mauvaises périodes de la maladie mentale. La sécheresse
du nez, l'absence des larmes s'observent fréquemment. Beau-
coup d'agoraphobes, comme R..., se plaignent a que leur nez
est sec, comme durci en dedans » soit d'un seul côté, soit des
deux.
Par opposition il y a des crises de sécrétions exagérées, dans
la photophobie de Bry..., il y a œdème des paupières, larmoie-
ment invraisemblable u à tremper quarante mouchoirs » en
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LES STIGMATES PSY
née. Après la crise on not
s, sur le nez et sur la bouc
[nbreux psychasthéniques
si bien étudiées récemmer
le\ Chez Mrc..., femme d
couler comme une fontai
ly... (26), jeune fille de
endemain d'une émotion c
e se réveille avec le sentir
ux comme au début d'un
I est un peu épaisse et muqi
tères de Thydrorrhée : c'es
en voulu recueillir pour n
ulait du nez pendant un t
'es de 3o centimètres cub
lu en faire l'analyse que vo
on neutre.
1res 9 grammes 3 par litre
phosphorique (phosphates
sulfates,
n (chorure et phosphate)
potassium, ni chaux, ni r
d'albumine.
cholestérinc.
în somme le liquide de l'oe
les troubles œdémateux ]
le cet ouvrage à propos <
dierons les interprétations
I est à peu près impossibl
ette jeune fille par un éi
I et qu'il s'agit probablei
glandes qui tapissent les <
serve un cas d'hydrorrh^
mme chez une femme qui
la pluie intestinale» de ]
ces phénomènes.
ittier, La rhinorrhée exclusiveme
let 1900 et sq.
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TROUBLES DES FONCTIONS GÉNITALES 425
3. — Les troubles des fonctions génitales.
J*ai déjà parlé du trouble des fonctions sexuelles à propos des
émotions, car le trouble est plutôt moral que physique. La sensi-
bilité est émoussée, l'émotion semble incomplète, inachevée, et
Texcitation, surtout chez la femme, se prolonge indéfiniment
sans aboutir. Cet acte incomplet est suivi de fatigue, de regret,
de mécontentement. Quelquefois il y a, chez la femme surtout, un
besoin intense de parvenir à cette sensation qui semble fuir et
une manie de la perfection en cette matière tout à fait singulière.
Mais a côté de ces troubles moraux se placent quelques
troubles physiques. L'érection insuffisante, Téjaculation pré-
maturée, rinsuffisance de la sécrétion, se constatent très fré-
quemment ^
J'ai cherché à réunir quelques renseignements sur les fonctions
menstruelles chez ces femmes scrupuleuses et je n'ai pu arriver à
des conclusions bien nettes car les troubles sont très variables.
Presque toujours l'établissement des règles est tardif et ne se fait
qu'à i5 ou 17 ans ; comme on verra en étudiant l'évolution de la
maladie, cet établissement tardif de la puberté est pour beaucoup
la date du début des accidents mentaux. J'ai observé un fait
curieux et assez rare chez Gr..., âgée de 3o ans, c'est que cette
femme n'a jamais été réglée, je viens de refaire la même observa-
tion sur une autre malade. Mw... (i45), âgée de 28 ans, a eu vers
Tâge de i5 à 17 ans des saignements de nez périodiques pendant
quelques mois ; depuis Tâge de 20 ans elle a des malaises et des
fatigues qui surviennent tous les mois, mais elle n'a jamais eu
ses règles. C'est une scrupuleuse typique avec manie des ser-
ments, etc. Le plus curieux c'est qu'elle a deux sœurs qui sont
semblables en ce qu'elles n'ont pas non plus été jamais réglées,
mais qui sont simplement des nerveuses sans avoir la même
maladie mentale.
Chez beaucoup d'autres nous notons des retards, des irrégula-
rités, des pertes blanches et quelquefois des hémorragies. Très
souvent on observe la suppression des règles pendant une période
1. De Fleury, op. cit. y ao5.
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LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
/ Sentiment de difficulté,
— d'insuffisance,
— d'instabilité,
— de perception incomplète, de nuage,
— d'étrange, de jamais ^'u,
— de dédoublement,
,,. 1,. 1 I 1 — de desorientation,
s d incompletude dans IcsJ .,. ,
.,,,,„ ( — d isolement,
>ns mt^Uectuelles. . . .^ . . . . ,,,.
— de faussa reconnaissance, de déjà vu,
— de pressentiment,
— de l'irréel, de l'imaginaire,
— du rêve,
— de disparition du temps,
— d'inintelligence, d'obscurité,
— de doute.
Sentiment d'indifférence,
s d'incomplétude dans les^ ennui,
l — d'inquiétude,
— du besoin d'excitation,
— de l'ambition.
i Sentiment d'étrangeté du moi,
— de dédoublement,
— de dépersonnalisation,
\^ — de mort.
essaye de retrouver et .d'exprimer ce qu'il y a de commun
is les sentiments on arrive d'abord à cette notion deTina-
3nt, de l'incomplet que les malades expriment de mille
L propos de tous ces sentiments divers « le pire de tout, dit
stque je n'arrive au bout, au fond de rien, c'est une sorte
ge dès que je dois arriver au bout de quelque chose ».
ésigné ce fait remarquable par le mot, sentiment d'incom-
Les psychasthéniques sont caractérisés par un sentiment
moins général, plus ou moins profond, plus ou moins
ent d'incomplétude psychologique.
t dès lors très important de se rendre compte de la valeur,
ortance de ce sentiment. Une première question se posait:
ment d'incomplétude est-il faux ou est-il juste ? Est-ce une
sse, une obsession, une manie mentale, ou correspond-il à
ictères réels des opérations psychologiques elles-mêmes?
lème parait très simple, il est en réalité extrêmement diffi-
s malades intelligents, comme Lise, se le sont posé à eux-
et ne sont pas parvenus à répondre d'une manière nette.
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L'INCOMPLÈTUDE MORALE 429
Évidemment il y a de nombreux cas où ce sentiment est devenu
exagéré et ridicule. Quand Vor... retourne cinquante fois de suite
aux cabinets parce qu'elle a le sentiment d'avoir uriné insuffisam-
ment, il est clair que c'est absurde. Un acte comme celui-là nous
semble consister simplement à vider la vessie et ne demande rien
de plus, or elle l'a vidée suffisamment puisque la première fois
elle a uriné un demi-litre, par conséquent nous pensons qu'elle
délire en sentant que l'acte d'uriner est incomplet.
Dans d^autres cas, il est clair aussi que si l'acte est imparfait,
c'est le malade qui l'a rendu tel, précisément en le perfection-
nant. Certainement Rai... respire d'une manière mauvaise, en
crachant et en rotant de tous les côtés ; une pareille respiration
est très défectueuse. Mais elle est devenue irrégulière à cause
des procédés employés par le malade et ces procédés ne sont
survenus que parce que le malade la jugeait déjà imparfaite. Il est
donc probable que cette respiration n'était pas mauvaise au début,
en tous cas elle l'était beaucoup moins qu'aujourd'hui.
Mais ces cas exagérés ne résolvent pas le problème. De ce que
le malade se trompe évidemment maintenant, il ne s'ensuit pas
qu'il ait toujours eu tort. Ne se pourrait-il pas qu'il ait généralisé
à tort et à travers, qu'il ait appliqué à un acte insignifiant un sen-
timent déterminé par une imperfection psychologique réelle ?
J'avoue que, malgré la difficulté, c'est vers cette opinion que je
tendrais et pour moi le problème des scrupuleux consiste à trou-
ver quelle est cette imperfection psychologique qui, comme une
épine, les tourmente perpétuellement, qui détermine leurs exagé-
rations et leurs divagations. Ce qui m'incline vers cette opinion,
c'est que j'ai retrouvé des sentiments d'incomplétude chez beau-
coup de sujets qui n'avaient pas d'obsessions d humilité ou
d'auto-accusation, qui constataient ces sentiments d'une façon
très modérée sans y attacher d'importance, sans les transformer
en manies ou eu obsessions.
La seconde raison de cette opinion, c'est que l'on peut observer
chez ces malades un certain nombre de troubles psychologiques
réels et indépendants de leur propre appréciation. Tous les
auteurs ont constaté chez les obsédés et les phobiques des arrêts
ou des retards dans le développement des diverses facultés et
surtout un développement inégal, un manque d'harmonie et d'é-
quilibre entre ces facultés. « Ces individus, disait M. Séglas,
sont moralement des êtres partiels, incomplets, déséquilibrés, ils
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^w^-
LA PERTE DE LA FONCTION DU RJ
/ L'indifférence,
les sentiments mélanc
l'émotivilé,
les émotions sublimes
le besoin de direction
Les troubles des émotions et des! {q besoin d'excitation,
sentiments ] le besoin d'aimer,
I le besoin d'être aimé,
la crainte de l'isolemc
le retour à l'enfance,
l'amour exagéré de l'I
le besoin d'autorité.
Tous ces troubles ont une certaine importa
considérable suivant les cas, ils semblent bie
obsessions et des manies.
Il en résulte que Ton peut déjà présenter
tére général qui résume une partie considér
psychasthéniques. Les malades ont le sentime
mentale est incomplète et d'autre part cette a
effet un certain nombre de lacunes qui jusqu
justifient ce sentiment d'incomplétudc.
2. — La perte de la fonction d
En nous plaçant à une autre point de vue
dans tous ces troubles psychologiques un autre
si curieux et si important qu'il est essentiel de
Parmi les sentiments les plus remarquables q
à propos des actions, à propos des perceptio
rieurs et à propos de la perception de lui-m(
groupe composé par les sentiments de drôle, d
vu, de rêve, que Ton peut je crois ramener à
mun.
Quand le sujet répète qu'il ne peut pas parvc
que cet acte est devenu impossible, on peut
sent plus que cet acte existe ou peut exister qi
timent de la réalité de cet acte. Quand d'autres
agissent en rêve comme des somnambules, qu'il
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432 LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
c*est encore la réalité de Tacte par opposition au simulacre de
l'acte dans les songes et les comédies qu'ils sont devenus inca-
pables d'apprécier.
Dans la perception extérieure et intérieure, le fait est si curieux
que je désire en donner un exemple de plus à ajouter à tous les
précédents. Une vieille femme de 58 ans, Gou..., admise à la Sal-
pétrière vient d'être envoyée à l'infirmerie parce que depuis deux
mois elle est atteinte d'un délire extraordinaire. Elle ne veut plus
faire aucun travail ni s'occuper à quoi que ce soit, elle reste cons-
tamment sur sa chaise a gémir et à se lamenter : « Il est inutile
de rien faire, répète-t-elle, puisque tout est mort... on m'a mise
dans un tombeau où il n'y a rien, où je suis absolument seule dans
une affreuse obscurité... Tout est noir autour de moi, d'un noir
d'encre... tout est vide, il n'existe plus personne, aucun être
vivant ne m'entoure, c'estcommesi j'étais morte moi aussi, etc.. »
Comme toujours l'examen habituel des sens et de la conduite
nous cause le même étonnement, on ne peut constater aucun
trouble même le plus léger d'aucune sensibilité, la malade voit
très bien les objets et les couleurs et se conduit très.correctement.
Au moment même où elle déclare que tout est noir et que tout
est mort, elle va très bien demander sa tisane à la surveillante.
Les principaux sentiments observés dans ce cas comme dans
les précédents sont le sentiment d'absence de relief, d'obscurité,
de noir, de drôle, d'étrange, de dégoûtant, de jamais vu, de faux,
de simulé, de rêve, d'éloignement, d'isolement, de mort. Quel
est le sentiment auquel se rattachent tous les autres, on a dit que
c'était le sentiment de nouveau et d'étrangeté. Je crois plutôt que
c'est le sentiment de non réel, le sentiment d'absence de réalité.
C'est le sentiment d'absence de réalité psychologique dans les
êtres extérieurs qui leur fait dire que les animaux et que les
personnes placés devant eux sont des morts. C'est le même senti-
ment relatif à la disparition de la réalité ordinaire qui se trouve
dans les sentiments de rêve, de simulé, de jamais vu et d'étrange.
En un mot les malades continuent a avoir la sensation et la per-
ception du monde extérieur, mais ils ont perdu le sentiment de
réalité qui ordinairement est inséparable de ces perceptions.
Il en est de même pour la perception personnelle : quand les
malades sentent qu'ils ont perdu leur moi, qu'ils sont à moitié
vivants, qu'ils sont morts, qu'ils ne vivent plus que matériel-
lementy que leur âme est séparée de leur corps, qu'ils sont
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LA PERTE DE LA FONCTION DU RÉEL 433
étraDges, drôles, comme s'ils avaient une vie dans un autre monde,
c'est encore, à mon avis, qu'ils se sentent irréels. Ils ont con-
servé toutes les fonctions psychologiques, mais ils ont perdu le
sentiment que nous avons toujours, à tort ou à raison, c'est d'être
réels, de faire partie de la réalité du monde.
Ce phénomène très remarquable de la perte du réel n'existe-t-
il que dans les sentiments subjectifs des malades ? Ne peut-on pas
retrouver dans l'observation extérieure de leurs actions et des
manifestations de leur pensée, des preuves qu'il y a dans leur
esprit un trouble particulier ? Ce trouble porterait sur les fonctions
psychologiques dans leur rapport avec la réalité donnée, sur une
fonction spéciale que l'on pourrait appeler la fonction du réel.
Il me semble, en effet, nécessaire pour résumer les observations
précédentes de distinguer une opération, ou si Ton préfère une
partie des opérations psychologiques que les descriptions clas-
siques ne mettent pas à part, mais que la maladie semble avoir
analysée. Une opération mentale, un souvenir, une attention ou un
raisonnement semblent rester de même nature quel que soit leur
objet, que celui-ci soit constitué par des représentations tout à
fait imaginaires ou que son objet soit formé par des événements
tout à fait réels, appartenant au monde dans lequel nous sommes
plongés. L'association des idées, dit-on souvent, est la même dans
le rêve et dans l'expérience de la vie. Cette affirmation toujours
acceptée est-elle bien juste ? L'observation de nos malades pré-
sente, en effet, un fait singulier ; c'est que leurs opérations men-
tales ne sont point troublées quand il s'agit seulement de l'ima-
ginaire et qu'elles ne présentent du désordre qu'au moment où
il s'agit de les appliquer à la réalité.
Tous les troubles du raisonnement, de l'attention, de l'appré-
ciation des situations n'existent pas dans les ruminations ni dans
les rêveries, le malade construit dans son imagination de^ petites
histoires très cohérentes et très logiques : c'est quand il s'agit de
la réalité qu'il n'est plus capable de faire attention ni «de com-
prendre. Plusieurs de ces malades ont quelque talent littéraire
ou musical ; quand ils inventent des histoires ou des morceaux de
musique, leur esprit fonctionne parfaitement bien, ils n'ont ni
hésitation ni doute. L'hésitation va venir si Tœuvre d'imagination
doit se transformer en œuvre réelle et être donnée au libraire ou
au commerçant. « Je vis dans les espaces, dit Lo..., et j'y vis très
LES OB8ESSIO?!S. 1. — a8
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LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQLES
e ne peux pas jouir des choses de ce monde, je ne
•éel et ma vie est imaginaire et factice... ff « S'il ne
e de mon goût je saurais très bien terminer mes feuilles
Tr..., mais quand il s'agit de donner une feuille de
)e pour qu'elle soit vendue, j'hésite indéfiniment. )>
que les fonctions sont correctes dans le domaine de
, elles restent parfaites quand il s'agit de l'avenir et
y a chez quelques sujets des expériences curieuses
ce caractère en évidence. Wo... a d'épouvantables
rupule a propos des comptes du ménage et surtout des
ïs fournisseurs, il semble que son attention soit fati-
'elle fait une addition de quelques chiffres et qu'elle
lus arriver h la certitude. Si on la prie de faire une
' des chiffres imaginaires sans rapports avec sa vie
vail se fait très facilement, aussi longtemps qu'on le
tigue et sans hésitation. Bien plus, la malade a remnr-
me qu^un de ses comptes de ménage peut être fait
té à la condition qu'il soit ancien, qu'il ait rapport
du trimestre précédent. Elle prend spontanément
e laisser les comptes attendre pour les vérifier, « plus
IX plus ils se calculent aisément ». Il est visible que
mme l'imaginaire, est un élément de facilité, c'est le
*ésent qui troublent l'action.
ous les troubles que nous avons constatés se ramènent
et au réel, les émotions sont vagues sans adaptation
constances présentes et réelles. « Le présent me fait
ntrus, disait un malade de M. Dugas ' ». « Il y a pour
formation de la réalité, dit Gisèle, et je ne peux pas
' au monde tel qu'il est, ni m'émotionner pour ce qui
au [pndy dit Lise, tous mes tourments viennent de
une mauvaise appréciation de la réalité ».
L)les les plus accentués se rencontrent dans l'acte
lans la perception attentive des objets présents, dans
>n de la personnalité réelle parce que ce sont les
es plus étroitement en rapport avec l'appréhension de
réel. Leur indécision, leur défaut de certitude, leur
actéristique ne sont que d'autres aspects du même
fondamental.
evue philosophique, iS^it II, p. 4o.
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LA PERTE DE L\ FONCTION DU RÉEL 435
Les malades agissent bien à une condition, c'est que leur action
soit insignifiante y c'est ce qui fait que leurs agitations, leurs im-
pulsions sont si peu dangereuses: ils peuvent se promener, bavar-
der, gémir devant des intimes, mais dès que Faction devient
importante et par conséquent réelle, ils cessent de pouvoir agir,
ils abandonnent peu à peu le métier, la lutte contre les autres,
les relations sociales, etc. Quelques-uns rattachent ce défaut
d'action réelle à la timidité. « Moi, dont tout l'être, dit Amiel,
pensée et cœur a soif de s'absorber dans la réalité, dans le prochain,
dans la nature et en Dieu, moi que la solitude dévore et détruit,
je m'enferme dans la solitude et j'ai l'air de ne me plaire qu'avec
moi-même. La fierté et la pudeur de l'ume, la timidité du cœur
m'ont fait violenter tous mes instincts, intervertir absolument toute
ma vie^ » Il faudrait discuter si, comme le pense Amiel, cet éloi-
goement du réel dépend de la timidité ou si ce n'est pas, comme
je le crois, la timidité qui résulte de cette incapacité d'affronter
le réel. Mais pour le moment je constate seulement combien cet
éloignement de la réalité existe au fond de tous les troubles notés
chez les scrupuleux. D'autres malades ne donnent pas l'interpré-
tation d'Amiel, « ce n'est pas l'action elle-même qui m'est difficile,
dit Claire, c'est de prendre l'action réelle, de faire l'action pour
le monde réel, c'est là ce qui me fait prendre pour une timide ».
Jean, depuis l'enfance, a une existence spéciale : ne faisant ni
du bien, ni du mal, parfaitement insignifiant à tous les points de
vue, ne se préoccupant en rien du monde donné, il vit, comme
disaient déjà ses maîtres au collège, « étranger aux choses, étranger
à tout ». Il n'a jamais pu s'intéresser a quoi que ce soit de la réalité,
il n'a acquis aucune habileté manuelle a il ne sait que faire de ses
dix doigts ». C'est en vain qu'on a voulu lui apprendre à jouer de
la musique, à dessiner, à relier des livres, à travailler un peu la
terre à la campagne, il n'a rien pu comprendre à ces divers travaux
pratiques. Et, en effet, quand on cherche h comprendre cet étrange
garçon, on reconnaît que c'est la pratique de la vie qui lui manque
d'une manière invraisemblable. Quoiqu'il ait toujours été dans
laisance, il ne connaît aucunement la valeur de l'argent, de la
fortune; il a vécu dans un pays agricole et il ignore tout de
l'agriculture. Ce garçon de 3o ans, très intelligent, je le répète,
est au désespoir quand il lui faut trouver son dîner dans les
1. Amiel, Journal intime, h 169. Harl. 369.
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436 LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES
rues de Paris. Choisir un restaurant, y entrer, commander son
dîner lui parait une opération inouïe : il ne s'agit pas là de timi-
dité ou d^obsession, c*est l'acte pratique dont il n'a pas la moindre
notion. Il en est de même h des degrés différents pour tous nos
sujets. Il faut interroger sur ce point, non les malades, mais leur
famille et j'ai entendu bien des gémissements venant des mères,
des maris ou des femmes des malades. On répète toujours que le
malade n'a jamais été pratique, qu'il dépensait l'argent à tort et à
travers, qu'il ne se rendait pas compte de sa fortune, de sa situa-
tion réelle, qu'il ne savait rien organiser, rien réussir. L'entourage
des malades insiste aussi sur cette absence d'habileté manuelle
qui est souvent chez eux un signe de leur défaut de sens pratique.
Les malades gardent plus d'activité pour les choses qui sont plus
éloignées de la réalité matérielle, ils sont plus facilement psycho-
logues, Jean, qui ne voit rien des choses matérielles, fait des re-
marques morales sur les gens et ces remarques sont souvent fines.
Ils aiment la littérature comme Gisèle et tournent au bas bleu, ils
aiment surtout la philosophie comme Qsa...et deviennent de
terribles métaphysiciens : quand on a vu beaucoup de scrupuleux,
on en arrive à se demander avec tristesse si la spéculation philo-
sophique n'est pas une maladie de l'esprit humain. Ces quelques
remarques et ces quelques études dont quelques malades sont
encore capables ne font que confirmer le caractère général de
leur esprit qui est toujours l'éloignement de la réalité concrète.
Une conséquence très remarquable et un peu inattendue de
cet éloîgnement du réel, c'est l'ascétisme. Jean ne s'intéresse à
rien, n'admire rien, n'aime rien ; il n'a qu'une préoccupation en de-
hors de ses obsessions c'est de faire le moins d'efforts possible
dans la vie. Comme ces efforts amènent des délibérations, des
scrupules interminables, il ne tient pas assez à la réalité pour
braver ces accidents: aussi en arrive-t-il,peu a peu, à se passer de
tout, à renoncer à tout. Il a une vie d'une régularité, d'une sobriété,
d'une simplicité invraisemblable pour la situation où il se trouve:
« il n'y a pas de mérite à cela, me répond-il quand je lui en fais la
remarque, les choses auxquelles vous tenez ne m'intéressent pas
et ne me causent aucun plaisir ; je suis séparé de votre vie par
un fossé ». C'est à cet ascétisme qu'arrivent tous les scrupuleux:
Nadia malgré ses qualités brillantes s'est peu à peu retirée du
monde, elle vit depuis cinq ans dans un petit appartement d'où
elle ne sort presque jamais. En dehors de son médecin et de
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DE LA FONCTION DU RÉEL
quelques personnes de sa famille qu'elle reçoit de t
temps, elle ne voit absolument personne et vit aussi rc
monde que si elle était dans un couvent. Tous en arrivent j
à peu à simplifier leur vie, non seulement par le progr
maladie, par suite des manies et des phobies, mais par
sont au fond désintéressés de la vie réelle.
Je voudrais rattacher encore à cet éloignement
les troubles que nous avons notés précédemment sur le
temps. Bain dit que « pour comprendre la conduite de 1
il faut toujours tenir grand compte de la puissance ab
du présent* ». Cette remarque n'est pas exacte pour nos
car le présent n'est pas absorbant pour eux. Il me sembh
qu'ils ne mettent pas la même différence que nous entre le
et le passé.
Ils accordent une importance disproportionnée au pj
l'avenir et surtout au passé. Lôwenfeld, comme on l'a vi
lait un malade absorbé par le passé^, mais nons avons
que ce caractère à des degrés divers est absolument j
« Ils ne vivent pas dans le présent, répètent toujours le
ches ; ils sont toujours en train de se raconter à eux-n
d'arranger dans leur imagination quelques faits anciens
sont convaincus, comme disait Xyb. . . , que le présent ne pei
effacer le passé. » C'est a cause de ce peu d'intérêt accorde
sent que les scrupuleux n'ont aucune notion de Theure
sont toujours en retard. C'est également pour cela qu'ils o
gulier sentiment que nous décrivaient Ver... et Bei... ces
atteints de dépersonnalisation, le sentiment de ne plusdi
hier, aujourd'hui et demain. Aujourd'hui se distingue pc
par un coeflicient plus élevé de réalité et d'action c'e
qu'ils sont éloignés du réel qu'ils n'ont plus le sens du pr
Enfin une dernière remarque doit être ajoutée aux obsc
précédentes, c'est qu'on retrouve un trouble analogue mè
les phénomènes pathologique des psychasthéniques, dai
hallucinations et dans leurs impulsions. Comme j'ai essa
démontrer, ils n'ont que des pseudo-hàllucinations qui
les caractères de l'hallucination excepté le sentiment de
1. Bain, Les émotions et la volonté, p. 5oi (Paris, F. Alcan).
2. I^ôwenfeld. Psychiatrische Wochensehrift, lo juin 1899.
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LES STIGMATES PSYCHASTHÉNÎQUES
des impulsions qui ont tous les caractères de la coer-
le sauf le pouvoir de déterminer des actions réelles,
rque est intéressante, car elle me paraît ici échapper
Q que jusqu'à présent nous faisions constamment. Si
s, les sentiments, les actions de ces malades sont in-
loin de la réalité, disions-nous, c'est peut-être parce
ne idée fixe d'imperfection qui les arrête. Eh bien, ces
se doutent pas que l'hallucination serait à notre point
hénomène parfait. Ils ne se rendent même pas compte
res d'une vraie hallucination et quand ils nous décri-
[lallucinations si imparfaites, ils ne peuvent y mettre
lilité.
de même aucune idée sur le résultat des pratiques
ne. Ils désirent plutôt le sommeil qu'ils croient utile
;uérison. Cependant les expériences hypnotiques long-
rieusement continuées m'ont montré que tant que les
sont très malades ils ne sont ni hypnotisables, ni sug-
Pous ces phénomènes d'impulsion, de suggestion et
tion consistent surtout à donner au sujet l'illusion de
est curieux de voir que les scrupuleux les ont perdus
précédents. Non seulement ils n'ont plus l'appréhen-
réalité véritable, mais ils n'arrivent pas non plus à
î la réalité. Ce fait suUirait à prouver, s'il en était
I le trouble ne consiste pas dans une action insulTisante
î sur le sujet, mais dans une insuffisance des opérations
ui conduisent soit à la perception de la réalité, soit à
î cette perception.
rait donc réunir un assez^'grand nombre de leurs Irou-
^logiques en supposant contrairement h l'opinon com-
la réalité présente exige une complexité spéciale de
psychologique et qu'il y ait par conséquent une fonc-
le que l'on pourrait appeler la fonction du réel. C'est
clans V appréhension du réel par la perception et par
i résume les troubles présentés par nos malades en
leur manies et de leurs obsessions.
des troubles physiologiques est plus simple et il est
de les résumer. On a observé des douleurs dans la
ation probablement avec une insuffisance de régulari-
la pression intracéphalique et avec des troubles vaso-
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440 LES STIGMATES PS
bien probable que si nos malades
faiblesse de pensée, ils ne s'en
et ne se plaindraient de ne pas
tout est lointain, que tout est n
s^appliquer à presque tous les s
stigmates psychasthéniques appai
de nature transitoire, comme un<
D'ailleurs l'observation est sui
sans entrer dans l'étude de l'évoli
consacrerai un chapitre spécial,
chez tous les malades sans exce|
l'état psychasthénique se sont prc
seulement que dans les cas grav
très longtemps.
Dans certains cas particulièrer
très précises et peuvent ne durei
cas on peut bien noter l'apparitioi
leur disparition. Les auteurs qui <
M. Magnan, ont bien remarqué le
fusion qui précède souvent de plu
ment dite*. M. Séglas est l'un
chez les obsédés l'apparition de ce
comme une forme atténuée de la
dant deux ou trois jours une exag
neurasthéniques... Les malades
mêmes, ne se trouvent plus con
très défectueuse, difficile h fixer
est paresseuse et infidèle, la vol(
motrice et Taboulie se traduit pai
Chez beaucoup de nos malades
de psychasthénie qui préparent
choses se passent ainsi chez Got.
tout comme exemple l'observatii
autrefois de longues périodes i
actuellement les périodes sont
quelques jours et elles cessent <
trouble survient en général qu
1. Magnan, La dipsomanie, p. 98.
2. Séglas» op. cil. p. 70.
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LES PÉRIODES PSYCHASTIÎÉNIQUES 441
règles, il a été préparé par diverses émotions dont nous étu-
dierons rimportance, il s'annonce presque toujours par une
modification du sommeil, la malade dort moins bien et d'une
manière bizarre. Il lui semble qu'elle dort trop profondément
et en même temps qu'elle ne se repose pas. Ceux qui ont étudié
le sommeil des épileptiques sont habitués à cette description.
En même temps Kl... sent que son sommeil est douloureux,
qu'elle a tout en dormant une douleur qui se forme au-dessus
de la tète ; c'est ce qu'elle appelle « avoir la fièvre dans la
tète ». Quand elle se réveille le matin en se souvenant qu'elle
a eu pendant le sommeil la fièvre dans la tète elle est cer-
taine qu'elle va encore être malade. En effet, elle se sent dans
cette première journée mal à son aise, elle est fatiguée, elle
souffre de la tète, elle n'a aucun appétit ; les digestions sont
longues, pénibles, accompagnées de pesanteur et de gonflement
de la région épigastriquc, la langue est devenue immédiatement
tout à fait saburrale, et la constipation est opiniâtre. On voit que
du moins chez cette malade ce sont les symptômes physiques
qui semblent apparaître les premiers.
La nuit suivante est encore plus mauvaise et la « fièvre de tète »
plus forte. Quand la malade se réveille elle est moralement trou-
blée : (( Je sens que je n'y suis plus, j^ai tout a fait perdu ma
volonté, on peut faire de moi ce que l'on veut, puisque je suis de-
venue une machine... je ne peux plus lire ni comprendre... les
gens me paraissent drôles et j'ai envie de me fâcher contre eux
parce qu'ils ont de drôles de tètes... je deviens étrange, incom-
préhensible a moi-même et je m'interroge sur une foule de
choses. » Voici donc que surviennent nos symptômes psychasthé-
niques qui forment très nettement chez cette personne une
période maladive. Quand ces symptômes ont duré en s'aggravant,
la moindre occasion, un effort pour retrouver la volonté absente,
un effort d'attention, ou une petite émotion va déterminer le
début d'autres phénomènes que nous connaissons bien ; la malade
va avoir une crise de rumination mentale et s'interroger indéfini-
ment sur la naissance de son enfant, n La petite tache qu'il porte
au derrière est-elle la preuve qu'il soit de son mari, peut-on
concevoir des enfants sans avoir eu d'amants, etc. » Ou bien si
la malade veut se débarrasser de ces questions obsédantes, elle va
avoir Jde l'agitation motrice et entrer dans de véritables crises
d'excitation. Si la période se prolonge les idées obsédantes
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CHAPITRE PREMIER
THÉORIES PATHOGÉNIQUI
LES MODIFICATIONS DE LA TENSION PS
Dans l'ignorance où nous sommes des Ton
système nerveux et des causes qui détei
tion ou la diminution des opérations cérébral
géniques des troubles de l'esprit ne peuvei
classifications aussi naturelles que possible d
vés. Elles doivent se borner h déterminer q
symptômes que Ton considère comme pri
essaye de rattacher tous les autres et quels i
symptômes que l'on considère comme sec(
met sous la dépendance des premiers. Comn
ici essentiellement des phénomènes psycho]
ont pour but de rechercher quels sont, à i
mènes psychologiques dominateurs et quels
psychologiques secondaires.
A côté de ces théories qui classent les sy
rapport aux autres, il faut placer d'autres iY
qui cherchent les rapports entre cette mal
les autres maladies mentales ou même physi
des classifications qui établissent les rapp
avec les autres. Il ne faut pas confondre
théories : la théorie de Westphal qui rati
tomes à l'obsession intellectuelle est une t
du premier genre, la théorie de M. Mî
tous ces phénomènes sans exception com
dégénérescence mentale est une théorie
genre ; il ne faudrait pas non plus oppos
l'une à l'autre, elles peuvent être vraies
répondent ii deux questions diileientes. N
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ÈORIES INTELLECTUELLES
emier lieu, Fauteur observ
; jamais, dlt-il, Tobsessioi]
;ar les malades ne Tasslm
j. .es aliénés systématiques,
reste toujours étrangère au moi des malades. L'auteu
suite un second caractère qu'il croit fondamental, c'est
sion n'est jamais sous la dépendance d'un état émotifou
c'est qu'elle est un trouble originel de l'idée. Quand
apparaît pour la première fols le malade peut être dans
tranquillité parfaite, d'indifférence, sans trace d'émotio
d'angoisse n'apparaissent que plus tard et sont touj
daires : jamais on ne trouve l'angoisse primaire comm
très psychoses, la mélancolie ou l'hypocondrie. Si on
tater l'angoisse en même temps que l'obsession c'est
coïncidence.
Cette opinion de Westphal qui considère les obsess
de simples troubles intellectuels semble prévaloir da
vaux de Meynert, 1877, de Buccola, 1880, de Tambi
de Morselli, i885, de Hack-Tuke, 1894 ^ Nous re
même affirmation dans l'ouvrage de MM. Magnan etL<
« Les phénomènes de l'émotion ne sont que des réac
daires... si le sympathique intervient il le fait second
non primitivement, il obéit à la situation mentale au
commander... L'onomatomanie, la folie du doute, U
toucher, l'écholalie sont sans aucun doute des trouble
tionnement de Técorce. Enfin, rappelons que les
émotionnels ont une intensité très variable, qu'ils s
réduits à peu de chose et que dans certains cas ils disp
Même conception également dans le travail de Mickl<
sont les troubles de l'idée qui prévalent toujours. « L'i
tive est le grand facteur, les troubles émotifs peuvent
dérés comme secondaires et sont dus au conflit entre
volonté *. »
1. VVe«tphal. Berliner klinische Wochenschrijl, 1872, p. 890. U
steUuntfen, 1877.
2. Meyuert, Aborlive Vemickheit. Psych. Centralbl., 1877. Buccol
freniatria, i88o. Tamburini, Sulla pazzia del Dubbio. Hev. sper. di fi
selli, M annale di semeiolica, i885. Hack-Tuke, Brain, 1894.
3. Magnan et Lograin, Les déijênérés (Bibl. Cbarcot-Debove), 18
4. J- Mickle, Mental Besetments or Obsessions. Mental Science, oc
Pitres et Régis, op. cit., p. 8.
LBS OB8E8SIO:«S. I.
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T'-v^
THÉORIES PATHOr.ÉNlQUES
laDS la dernière édition du traité de psychiatrie de
ingy Témotion de Tobsédé est considérée comme secon-
mme la réaction de la représentation obsédante sur la
ve du malade. Tout au plus Tauteur convient-il qu'il y
constituer une variété où Témotion joue un assez grand
st d'ailleurs à cette conclusion que parvenaient également
li, Luys, J. Falret.
— Discussion des théories intellectuelles.
opinion cependant ne semble pas en faveur aujourd'hui,
rtement battue en brèche dans le mémoire de MM. Pitres
pi résumait l'état actuel de la question, et je suis disposé
r l'opinion de ces auteurs. Je remarquerai d'abord que
>rie dite intellectuelle de l'obsession est excessivement
le nous apprend absolument rien sur la nature de ce
itellectuel ni sur son mécanisme : elle affirme simple-
les troubles intellectuels sont les premiers de tous. 11
pourtant s'entendre sur ce que l'on désigne par ces
)ubles intellectuels » qui peuvent avoir ici trois signifi-
° ils peuvent désigner l'obsession proprement dite, cette
renue qui s'impose au malade et lui fait penser : qu'il a
issassiné une vieille femme devant une église ; 2" ils
ésigner les manies mentales, ces mauvaises habitudes de
ae opération psychologique parfaitement inutile comme
venir, de chercher, de compter, de jurer; 3° on peut
par troubles intellectuels les sentiments d'étrangeté,
gence, les troubles de l'attention, de la perception per-
etc. Les partisans de théories intellectuelles sont bien
ous dire avec précision lequel de ces trois sens ils
le certain que les auteurs ne parlent pas du troisième
)nt ils semblent ne pas soupçonner l'importance ou dont
le maladie à part, quand ils sont forcés de les constater
1 arrive dans la névrose cérébro-cardiaque de Krisha-
mfondent les deux premiers groupes, mais ils accordent
Ebing, Traité de psychiatrie^ Irad. Laurent, 1897, p. 545.
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DISCUSSION DES THÉORIES INTELLECTUELLES 451
évidemmeDt plus d'importance au premier et en somme les théo-
ries intellectuelles semblent être des théories qui, d'une manière
il est vrai fort vague, admettent la priorité de Tidée obsédante.
Pouvons-nous partager cette opinion ?
Les arguments présentés par Westphal et par les auteurs
iotellectunlistes se bornent à nous montrer qu'il y a des obses-
sions sans angoisses et sans troubles émotionnels préalables. La
remarque est très juste, mais elle se borne à contredire les théo-
ries émotionnelles, elle ne donne pas de preuve directe de la
priorité de l'idée obsédante. D'autre part on peut objecter bien
des arguments contre cette priorité.
L'observation clinique permet déjà de faire des réserves : ces
idées obsédantes, nettes, déterminées données par le malade
comme une interprétation de son mal ne sont pas aussi communes
qu'on le croit. Si on veut bien ne pas isoler arbitrairement les
malades qui ont des véritables obsessions, si l'on réunit en un
ensemble, comme j'ai essayé de le faire, tous ceux qui par la
grande majorité des symptômes psychologiques et par l'évo-
lution de leur maladie sont réellement du même genre, on verra
que beaucoup de ces sujets ont simplement des tics, des agi-
tations mentales, des angoisses, des sentiments variés d'in-
complétude et n'ont pas d'idées obsédantes proprement dites.
Dob... a des grandes angoisses qui se produisent dans des cir-
constances particulières, ce qui fait qu'on peut les nommer des
agoraphobies, des peurs de l'espace ; maisc'est nous qui donnons
ce nom et cette explication. La malade répète toujours qu'elle n'a
aucune idée absurde à propos des grandes places ou des rues, elle
se défend d'avoir des idées de honte ou de pudeur exagérée, elle
dit qu'une crise la prend dans la rue sans qu'elle sache pourquoi *.
En somme elle a des crises d'angoisse physiologique et n'a pas
d'idée obsédante antérieure à ces crises. Mw... est tourmentée par
la manie des serments, c'est déjà plus intellectuel, mais il n'y a
pas là d'idée déterminée, elle ne fait pas ces serments par prin-
cipe en vertu d'une théorie de la vie qu'elle se soit faite. Elle ne
sait pas pourquoi elle les fait, elle ne les rattache à rien, c'est une
habitude, un tic de l'esprit, ce n'est pas une idée ayant un objet
déterminé et représentant quelque chose.
I. Même remarque sur un agoraphobe dans un article do M. Van Eeden, d'Am-
sterdam, Les ot)8ession8. Revue de T hypnotisme y 1892, p. 5.
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EXPOSÉ DES THÉORIES ÉMOTIONNELLES 453
3. — Exposé des théories émotionnelles.
Dès Torigine de ces études, une autre interprétation s'est oppo-
sée aux interprétations intellectuelles que nous venons de résu-
mer. L'une des premières descriptions des obsessions a été don-
née par Morel eu 1866 sous le nom de délire émotif, ce qui indique
bien le point de vue auquel cet auteur se plaçait. Quand West-
phal soutint à la Société médico-psychologique de Berlin la thèse
intellectuelle en 1877, il fut vivement combattu par Jastrowicz
et par Sander*. Berger, de Breslau, fut plus aflTirmatif encore
puisqu'il rangeait sans hésitation les obsessions parmi les né-
vroses émotionnelles '.
Cette conception de la nature émotive des obsessions qui était
en somme celle de Morel est reprise parLegrand du SauUe : « Le
délire émotif, dit-il, n'est que la résultante de toutes les impres-
sionnabilités anxieuses possibles, tandis que la peur des espaces
se limite à une angoisse pénible, terrifiante en face du vide ou
dans des conditions absolument spéciales^. » Legrand du Saulle,
comme on va le faire plus tard, distingue déjà très bien les émo-
tions diffuses et les émotions systématisées. Cette doctrine va se
retrouver sans grandes modifications chez Brosius, Wille, 1881,
Wernicke, Krafft-Ebing. Les mêmes idées semblent se préciser
un peu avec Friedenreich, 1887 S Hans Kaan, Schuele; ces au-
teurs examinent de préférence un phénomène spécial, la crise
d'angoisse, ils considèrent cette crise d'angoisse comme le symp-
tôme principal de l'état psychasthénique et comme le point de
départ de l'obsession. M. Féré, 1892**, admet que les idées fixes
ont leur origine dans Témotivité morbide, pour M. Dallemagne^
l'émotion est toujours le fait primitif, et M. Séglas dit de même que
Tobsession repose toujours sur un fond d'émotivité pathologique'.
I. Archiv. far Psych., Vlïl, 1878, p. 78^, 760.
a. Berger, Archiv. fur Psych., VI. 1876. p. 217 ; VU, 1878, p. 6i6.
3. Legrand du Saulle, Agoraphobie, p. 46.
4. Friedenreich, \eurologisch. Centralblalt, 1887.
5. Ch. Féré, Pathologie des émotions, 1892. p. 453 (Paris, F. Alcan).
6. Dallemagne, Dégénérés et déséquilibrés, 1895, p. 573.
7. Séglas, Leçons cliniques, 1896, p. 81.
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^JfT^^
THÉORIES PATHOGÉMQUES
ite un mot de plus qui me parait avoir une cer-
: il place les obsessions parmi les anomalies de
la volonté chez les dégénérés ^ Je ne parle pas
t du mot « dégénérés » dont à mon avis on a
busé dans cette question; je remarque seulement
; se borne pas comme les auteurs précédents à
on mais qu'il indique au moins comme problème
a volonté.
Vienne, précise d'abord la notion de Tangoisse,
précision une dizaine de formes caractérisées par
ènes physiologiques prédominants, il nous suffit
itres de ces variétés, car il est facile de voir que
i elles ont -été décrites quand nous avons examiné
physiologiques de Tattaque d'angoisse : i® Attaque
doangine de poitrine). 2" Attaque respiratoire
se, faux asthme). 3^ Attaque de sueurs profuses,
Bs. ii° Attaque de secousses et de tremblements
). 5® Attaque de boulimie (ce dernier phénomène
nous à propos des troubles psychologiques : chez
ont présenté de la boulimie, celle-ci était en
s sentiments de faiblesse, de fatigue, d'aboulie
îristiques). 6" Attaque de diarrhée ou de polyurie.
-motrices. 8° Attaques de paresthésies. 9® Atta-
nocturnes avec réveils angoissants. 10° Attaques
r cette description précise, Freud et Hecker ont
rang le phénomène de Tangoisse, ils en ont fait
incte sous le nom de névrose d'angoisse (Angsl-
VI. Freud a été plus loin et a voulu donner une
n avis très hypothétique de ces angoisses en les
urs à des troubles de la sensibilité et des fonc-
nous aurons à revenir sur ce point en étudiant
maladie,
ivaux sur le rôle de Témotivité morbide dans le
•bsessions sont résumés, coordonnés et complétés
de MM. Pitres et Régis, qui a été présenté au
îdecine de Moscou en 1897 comme rapport sur
escence mentale, in Traité de médecine de Charcot, Bouchard,
ogisch. Ceniralhl.y janvier 1895. Hecker, AUg. Zeitschr. /.
p. 1167. Freud, Revue neurologique t 3o janvier 1895.
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EXPOSÉ DES THÉORIES ÉMOTIONNELLES 4Jo
l'état actuel du problème intéressant de Tobsession \ Ce rapport
constitue aujourd'hui la meilleure expression de l'ancienne thèse
de Morel sur l'origine émotionnelle des obsessions.
Voyons donc comment ces auteurs interprètent ce problème.
Après quelques réflexions générales sur la priorité de la vie affec-
tive par rapport a la vie intellectuelle empruntées à Schopen-
hauer et à M. Ribot, les auteurs admettent comme un fait dé-
montré la théorie de Témotion de Lange et de James, « l'émo-
tion, disent-ils, n'est que la conscience des variations neuro-vas-
culaires ». Ainsi entendue, l'émotivité, c'est-à-dire l'aptitude à
produire et h ressentir les variations physiologiques diverses
et surtout les variations neuro-vasculaires est variable suivant
les individus, « il y en a qui sont doués h cet égard d'une
susceptibilité particulière, ce' sont les émotifs », cette émotivité
devient excessive, suivant les remarques de M. Féré quand ces
phénomènes physiologiques dépassent l'intensité normale, se
prolongent outre mesure, se produisent sans cause déterminante
suffisante. Dans un premier groupe de cas cette émotivité est
diffuse et produit une sorte de panophobie, « les sujets sont dans
un état permanent de tension émotive qui éclate brusquement
par paroxysmes comme une c^écharge de fluide émotionnel. Un^
idée, une émotion, une sensation quelconque suffisent, le moment
venu, pour provoquer la décharge qui peut même se produire
dans le sommeil sous la forme de chocs anxieux (emotional dis-
charges de Weir Mitchell) de réveils brusques avec angoisses
respiratoires (réveils angoissants de Mac Farlane) * ». Ces ma-
lades vivent dans un état d'appréhension continuelle, ils ont peur
d'avoir peur, c'est l'attente anxieuse de Freud; <t il semble qu'il
y ait toujours de l'angoisse à l'état libre toujours prête à se mani-
fester, la forme pouvant varier suivant les circonstances' ».
Dans un second groupe de cas, cette émotivité vague et diffuse
se précise, se systématise : l'attaque d'angoisse se produit dans
des circonstances déterminées. Tantôt il s'agit de phobies cons-
titutionnelles en quelque sorte héréditaires : certaines personnes
ont des peurs anxieuses à propos du velours, de certains fruits, du
I . Pitres et Régis, Séméiologie des obsessions, XII^ Congrès de médecine. Moscou,
1897.
3. Pitres et Régis, op. cit., x6.
3. Id., ibid., p. 17.
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THÉORIES PATHOGÉNIQUES
lau, des hauteurs, des orages, d'un animal, etc.,
s cas, il s'agit de phobies acquises, « traumati-
Intre trente et cinquante ans ces malades qui
me émotivité diffuse, après une période d'affai-
fatigues, subissent un choc moral, a c'est très
un parent ou d'un ami, un accident grave, une
de chemin de fer, la morsure d'un animal, le
a malade atteint d'une maladie contagieuse, une
5 attaque, une syncope, un fort vertige, la vue
énenient émouvant, d'un sinistre, d'un assassi-
ne, en un mot tout ce qui peut produire un
f considérable... » à partir de ce moment appa-
rapport avec la cause originelle. M. Ribot a
;rit cette transformation : « La crainte maladive
at de la transformation occasionnelle d'un état
en une forme précise. La panophobie serait un
;, une période d'indifférenciation. Le hasard,
lui donne une orientation et la fixe (peur d'une
probes, de la rage, etc.). C'est le passage de
s a l'état intellectualisé, c'est-à-dire concentré
le idée fixe : travail analogue à celui du délire
j la suspicion, d'abord vague, s'attache h un
che plus*. »
ivons au troisième degré de la maladie, l'état
intellectuel et il est accompagné d'une idée
moidéique. Pour MM. Pitres et Régis, l'obses-
que la forme aggravée ou intellectualisée de la
phobie systématisée et l'obsession, il n'y a pas,
n qu'on le croit généralement... que faut-il, en
phobie systématisée tourne à l'obsession ? 11
[ue cette phobie, au lieu de se manifester par
sses intermittentes, avec calme complet dans
nipe plus ou moins, dans l'interparoxysme, l'es-
qui arrive dans la majorité des cas. Et c'est
pente toute naturelle, la monophobie tend peu
)idéisme et qu'on a si souvent affaire dans la
3 phobies systématisées pures, mais à des cas
; pseudo-phobies. Revue de f 'hypnotisme y 1894» p. 353.
ychofogie des sentiments, 1896, p. a i4 (Paris, F. Alcan).
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DISCUSSION DES THEORIES ÉMOTIONNELLES 409
MM. Pitres et Régis remarquaient que les idées obsédantes
peuvent changer mais que Tétat émotif accompagnant reste beau-
coup plus stable, cela prouve simplement, répond M. Haskovec,
que le domaine de Tintelligence est plus riche et plus varié que
celui de Témotivité, mais cela ne nous montre pas laquelle des
deux joue le rôle essentiel dans le phénomène pathologique. Ces
auteurs disent encore que Témotion ne peut être secondaire,
qu'elle ne peut être considérée comme une simple réaction déter-
minée par ridée, parce que, s'il en était ainsi, Témotion devrait
toujours être en raison de Tintensité de Tidée, ce que Ton n'ob-
serve pas. La conclusion est précipitée, le degré d*émotivité n'est
pas le même chez tous les individus, Témotion dépend de bien
d'autres raisons qui peuvent Tempècher de correspondre exacte-
ment à rintensité de Tidée fixe quoique elle vienne à sa suite.
Enfin, ce qui est plus grave, MM. Pitres et Régis ont tort de
tout ramener à Témotion et surtout à une seule et unique émotion,
à cette angoisse spéciale qu'on observe souvent il est vrai chez
quelques-uns de ces malades. D'abord ce n'est pas toujours cette
émotion-là qui fait le fond de l'obsession, M. Haskovec rapporte
l'observation intéressante d'un étudiant obsédé par des idées
gaies accompagnées d'un sentiment de joie. Je dois avouer que
celte observation me laisse des doutes : s'agit-il bien d'un malade
du même genre, c'est chez les hystériques par le mécanisme de la
suggestion plutôt que chezlespsychasthéniquesque l'on observe ces
joies obsédantes, j'en ai rapporté un exemple avec M. Raymond' ;
peut-être aussi s'agit-il de ces sentiments d'élévation sublime, de
ces enthousiasmes que présentent, comme nous l'avons vu, les
sujets psychasthéniques, mais qui ne sont pas de la même nature
que les obsessions et les angoisses.
Ce qui est plus important à considérer ce sont les malades qui
tout en étant des obsédés ne présentent pas de troubles émo-
tionnels. Il y a bien des cas de ce genre cités par Westphal,
Meschede, Griesinger et M. Haskovec y ajoute d'autres exemples
où les lésions intellectuelles semblent tout à fait primaires.
c( MM. Pitres et Régis vont trop loin quand ils disent : sup-
primez par la pensée, l'angoisse, l'anxiété qui s'y trouve et vous
XIII* Congrès internat, de méd. à Paris en 1900. Comptes rendus de la section de
Psychiatrie, p. lai.
1. Raymond et P. Janel, Névroses et Idées fixes, 11, p. 353.
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PATHOGÊNIQUES
1 des malades sont obsédés jusqu'à
Is ne restent que trop indifférents à
présenté des critiques contre cette
les anciennes théories émotionnelles,
[ans une étude expérimentale sur un
lonstaté un certain nombre de modi-
t avec Tangoisse. Ces modifications
vagues et assez banales, comme nous
m étudiant les symptômes de Tan-
ment observer que ces modifications
Je déterminer les troubles mentaux.
3nscience du trouble intellectuel et
la réapparition de son obsession
ertain temps après les graphiques
ions circulatoires et respiratoires,
[land concluent-ils ainsi : « L'idéa-
issociation qui, à son tour, suggère
été et d'angoisse et les phénomènes
ement la source de ces changements
faut encore ajouter que l'obsession
loin d'être liée avec une coloration
)mène qui prédomine est bien un
el, un état pour ainsi dire intel-
Jme phénomène de l'éreutophobie,
oduit les objections de MM. Vaschide
; remarque déjà faite par M. Régnier
oduit pas d'angoisse si l'intelligence
mment développée pour avoir souci
es remarques à cet égard* ». Après
;s cas le trouble vasculaire peut pré-
gtemps ou suivre le trouble moral,
igeur comme telle qui provoque cette
3n tant qu'elle est une infirmité, en
du public sur celui qui y est sujet »
d'ère ulophobie. Revue de Psychiatrie, juillet
ie de Bordeaux, 1896, p. Sa.
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DISCUSSION DES TU
et il se montre disposé à ratt
dans mon étude publiée par la /
aux maladies des scrupules, à
Enfin, dans une étude prés<
neurologistes de Limoges en 19^
l'interprétation émotionnelle d<
périphérique qui les rattache ex<
cérales et vaso-motrices essenti
théorie, dit-il, attache à Pexpre
périphériques une importance
émotive est loin d'être toujours
la conscience, il y a dans Venu
à faire aux idées, à la brusqu
existence, ce que Ton appelle
tincte mais fait partie intégra
théorie n'explique qu'une pari
l'accès émotif. Cet accès émoi
doute, mais passager. L'état (
des crises ne peut être expliqu
que et passager. L'anxiété de
intellectuelle, il y a un grand n
dans lesquelles ne se retrouve p
nique ni d'un trouble vaso-mot(
Ces critiques m'ont intéressé
je l'ai dit, à admettre dans se
présentée au congrès de Mos<
en observant les malades des
émotionnelle qui consiste à (
par l'angoisse et par l'émotioi
qu'elle a rendus, devoir être pro
trop générale et en même tem;
Cette théorie est nécessairen
ses auteurs, mais à cause des
la nature des émotions. Est-il u
l'émotion en général et que celui
1. Claparède (Genève), L'obsession d
Suisse romande, avril 190a, p. 3a3.
a. F.-L. Arnaud (de Vanves), Sur li
logie, 190a, I, p. 267.
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IIÉORIES PATHOGÉNIQUES
ents ne sont pas du tout de la même nature,
session à des émotions analogues à la sur-
à des émotions analogues à Tamour, à la
•éalité des théories absolument différentes,
si on persiste à prendre le mot « émotion »
?nt vague, si on désigne par ce mot tous les
es sentiments, de la volonté, de la conscience
scussion n'est possible et du moment que
théorie purement intellectuelle on se ral-
théories émotionnelles. Mais cela revient à
toute explication.
Pitres et Régis ont voulu préciser la con-
en rappelant la théorie célèbre et déjà
le James et en aflirmant très brièvement que
icience des variations neuro-vasculaires' ».
is complet le rôle des modifications cardia-
;estives et nous dirons que Témotion est alors
iscience de certaines modifications viscérales
ilquefois les phénomènes de conscience.
facile de discuter la théorie de rémotion
imes et de démontrer qu'il y a dans rémotion
>e de spécial, de psychologique, au moins de
;t qui détermine les réactions respiratoires
Lir l'étude présente cette discussion générale
a peu d'importance. L'angoisse, l'émotion
t, comme la conscience en retour de ces
eut-elle précéder, déterminer et par con-
; les phénomènes observés chez les psychas-
suffisamment précise pour caractériser cette
er des autres, c'est là toute la question que
îr.
e la théorie émotionnelle me parait rester
vague et ne pas caractériser le phénomène
définir. Si l'émotion ne consiste que dans
ir, les respirations irrégulières, les bouffées
e retrouver exactement la même dans les
t dans les obsessions pathologiques. Un
^nte des palpitations, de la rougeur, de la po-
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DISCUSSION DES THÉORIES ÉMOTIONNELLES 463
lypnée, un homme qui a peur a également des palpitations, de Tir-
régularité respiratoire, des troubles vaso-moteurs; faut-il conclure
que la colère normale, la peur normale sont identiques à Tangoissc
d'une crise d'obsession ? Cette assimilation me parait absolument
fausse, Tangoisse du psychasthénique, j'ai essayé de le montrer,
est un état pathologique tout spécial, ce serait une grosse erreur
que de la confondre avec une émotion normale. Les malades sont
les premiers à nous avertir « qu'ils n'éprouvent pas une peur
naturelle, que leur angoisse, toujours la même, supprime et rem-
place la peur naturelle ». Comment pourra-t-on dans cette inter-
prétation rendre compte de cette différence psychologique consi-
dérable entre l'émotion normale et l'obsession ?
On ne peut répondre qu'en alléguant une différence de quantité
dans ces phénomènes viscéraux dont le contre-coup détermine
dans la conscience les émotions et les angoisses. C'est leur exagé-
ration qui leur donne leur caractère pathologique et qui distingue
l'obsession de la colère ou de la peur. Est-ce là une distinction
suffisante ? N'y a-t-il pas des grandes colères, des élans d'enthou-
siasme, des grandes terreurs qui s'accompagnent de grandes
raodiBcations viscérales et qui cependant restent des colères, des
enthousiasmes, des peurs, sans se transformer en phobies et en
obsessions ?
Mais admettons cependant que cela soit vrai et que l'on puisse
distinguer l'angoisse psychasthénique de l'émotion normale
uniquement par la différence dans le degré d'intensité des réac-
tions viscérales. N'y at-il pas infiniment d'autres états patholo-
giques qui s'accompagnent de grandes modifications viscérales du
même genre sans être identiques îi des crises d'obsession ? Des
phtisiques, des cardiaques présentent des modifications respira-
toires et circulatoires du même genre et bien plus graves sans avoir
aucunement le même désespoir, les mêmes obsessions : ils suffo-
quent, ils asphyxient réellement et ils continuent à s'intéresser à
ce qu'on leur dit, à suivre même une conversation, ils disent bien
qu'ils souffrent, mais ils ne se lamentent pas ainsi, ils sont loin
d'avoir le même trouble mental. Dans d'autres maladies nerveuses
on constate souvent des palpitations, des polypnées, des troubles
vaso-moteurs et les malades restent calmes: Ar..., par exemple,
un homme hystérique, a une polypnée de 88 respirations par
minute et il attend tranquillement sur sa chaise qu'on l'examine,
il dit en souriant qu'il est gêné ponr respirer, mais il ne sent pas
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DISCUSSION DES THÉOBIES ÉMOTIONNELLES 405
son domaine et ne plus pouvoir trouver les phénomènes propre-
ment cérébraux qui caractérisent et distinguent les maladies les
unes des autres.
Si cette théorie émotionnelle se montre ainsi trop gêné-
raie et trop vague, par un autre côté elle me parait beau-
coup trop restreinte et je crois qu'elle laisse de côté bien des
phénomènes essentiels de la maladie. Pour que cette théorie soit
admissible, il faudrait pouvoir démontrer que les réactions viscé-
rales exagérées, considérées comme essentielles, se retrouvent
comme point de départ dans tous les symptômes caractérisques
de Tétat psychasthénique et les accompagnent tous. En est-il
réellement ainsi ? Pour répondre à cette question il suffît de
passer en revue les symptômes énumérés dans les trois chapitres
précédents.
Si Ton considère les obsessions proprement dites, il est cer-
tain que quelques-unes se sont développées à la suite de ces agi-
tations viscérales sous forme systématique ou diffuse. Les idées
obsédantes de Jean sur les crimes génitaux ont été précédées
d'algies du gland qui étaient des phénomènes d'angoisse systé-
matique. On pourrait citer bien des exemples de ce genre, cela
est incontestable. Mais en est-il ainsi dans tous les cas ? C'est ce
qui me paraît insoutenable. Beaucoup d'obsessions non seulement
sont actuellement des phénomènes intellectuels, mais se sont dé-
veloppés à la suite de troubles intellectuels et non à la suite de
troubles émotionnels. Les obsessions métaphysiques de Lise sur
le dualisme, sur la puissance du diable opposée k celle de Dieu,
sont la conséquence, le développement d'agitations mentales anté-
rieures et non d'agitations viscérales. Ce sont les manies de la
recherche, de l'expiation, du pacte, d'interminables ruminations
mentales qui ont précédé pendant des années les obsessions
actuelles ; jamais cette malade n'a été une phobique ou une
angoissée, mais elle a toujours été une rêveuse. On pourrait
citer bien des exemples de ce genre : des obsessions de folie ont
pris naissance à la suite de manies mentales ou des sentiments
d'insuffisance intellectuelle ; des obsessions amoureuses se sont
développées à la suite des perturbations des sentiments, du besoin
de direction, du besoin d'être aimé et du sentiment de l'aboulie,
des obsessions d'indignité et de honte de soi ont été le déve-
loppement naturel des sentiments d'incomplétude intellectuelle,
LES OBSESSIONS. 1. — 3o
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i^HJ\j\J<3>JM\Ji^ V/\
^^ .liÉO
l'angoisse quelle ne connaissait pi
pour arrêter sa rêverie perpétuell
en disant que a cela lui fait mal
rêter. » II. y a ainsi toute une catég
curieuse^ MM. Pitres et Régis ser
sont les ruminations mentales. Di
de répétition, de retour en arriè
etc., il n^y a pas une idée propren
conçue comme explication il n'y
systématique ou diffuse, il y a
avec des caractères particuliers qi
malade.
Observons Lise, quand elle n
enfants voués au diable, sur le ci
lument immobile, elle ne pense
par une immobilité de plus en p
s'incline de plus en plus jusqu'à 1
la trouble pas elle va rester de
à ce moment elle respire avec le pi
tout à fait régulièrement, son visa
maie et les troubles vaso-moteurs r
Cependant pendant cette période
le sentiment de perdre la tête, d(
me semble que je dégringole dans
je perds quelque chose de mon «xi
angoisse morale qui n'est pas d
déterminée par le sentiment en i
Ce même phénomène peut s'obsc
de rumination : quand Ger... est c
demandant si elle scandalisera 1
tranquille physiquement et physi
que moralement. Il suffit de parc
que j'ai données de toutes les (
pour voir que presque toujours C(
pendante de l'angoisse physique
antagonisme avec elle.
En dehors de ces phénomènes <
toute une grande catégorie de faits
me semble pas tenir assez compte
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THÉORIES PATHOGÉNIQUES
les, les troubles de perception, les troubles de la vo-
Libles de Tattention. Je sais bien que Ton pourra essayer
ces troubles à Témotion en disant que celle-ci a une in-
•itrice. Mais c'est déjà compliquer la théorie de Témo-
'on Tavait présentée, la théorie de Témotion simple
es réactions viscérales, c'est déjà introduire dans Té-
Qodifications cérébrales d'une tout autre nature. Mais
it-il bien suffisant ? Comment se fait-il que l'émotion
années ne trouble aucunement l'action ou l'attention
et qu'à partir d'un certain moment elle les rende
'effectuer ces mêmes opérations. Il faudrait au moins
quoi consiste l'augmentation d'émotivilé et de quoi
on sera donc forcé de remonter au delà de l'émo-
des cas où cette action inhibitrice de l'émotion
à fait incompréhensible. Nous avons cité des jeunes
suite d'une petite émotion se sentent étonnés d'eux-
3e reconnaissent plus, disent qu'ils sont changés,
rdu leur personne ou bien que le monde est tout
u'il n'a plus de réalité. Est-ce là un effet ordinaire
simple conscience en retour des réactions viscérales,
de la respiration et de la circulation ? En outre les
nguliers de ces sujets se prolongent et durent des
mt lesquelles ils vont répéter qu'ils n'ont plus de moi
ide est un rêve ? Cela est-il d'accord avec la concep-
tion qui est par essence une modification brusque de
?
t, est-il bien certain qu'il y ait réellement un trouble
réactions viscérales violentes au point de départ de
ïuflîsances ? Je crains qu'il n'y ait ici une erreur de
leureusement bien commune en psychiatrie. On croit
e exige la présence d'un certain phénomène et on
phénomène existe sans chercher autrement à vérifier
. Si la théorie exige qu'une hystérique ait une anes-
ile, on affirme qu'elle l'a : « car, sans cela, dit-on, on
rait pas les altérations de sa cœnesthésie ». En réalité
sie viscérale est très dillicile à vérifier et si quel-
ne la peine de faire le travail, il verra souvent qu'elle
Je suis étonné de voir que dans certains travaux
)n on parle sans cesse d'énormes réactions viscé-
bles cardiaques, respiratoires, intestinaux. J'ai déjà
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^ RÉSUMÉ HISTORIQUE DES THÉORIES PS^
appellations, nous désignerons toutes ces
qui leur convient bien, nous les appell
psrfrchasthéniques \ » Depuis j'ai souvent
de forme hystérique aux obsessions de fo
les tics de forme hystérique aux tics de foï
C'est pourquoi je conserve ici ce mot pou
qui prennent pour point de départ les p
tiques de cet aOaiblissement spécial de 1
thénie.
1. — Résumé historique des tbéc
niques..
Des théories de ce genre ont déjà été inc
prises, mais, il est juste de le remarquer,
vement vague. Plusieurs auteurs choisissa
ce groupe, le plus souvent les troubles de
tacher tous les autres accidents de la mal;
Bencdict considérait la peur des espaces
vertige et se demandait s'il n'y avait pas lie
trouble oculaire. Cordes, cité par Legra
l'agoraphobie un symptôme d'épuisemeni
moteur avec perturbation du sens musci
Saulle lui-même en fait « une paralysie fo
tique de certaines modiGcations survenue
traux moteurs et capables de faire naître ei
de peur\ » Hack-Tuke disait formellement
saire de supposer une prédominance dans
d'admettre que les plus hautes fonctions
blies, les chevaux sont bons, mais le coche
cité par Hack-Tuke, fait entendre d'une ma
s'agit là d'un phénomène de régression
veau », il n'y a pas seulement une loi d'évc
I. Accidents mentaux des hystériques, 1894. p. agS.
a. Névroses et Idées Jixes, il. p. lag et i45 ; p. 35a
3. liOprand du Saulle, Agoraphobie, p. 55.
\. 1(1.. ibid., p. (»3.
5. llack-Tuke, Journal 0/ mental Science, Julj i885
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ORIES PATHOGÉNIQUES
le loi inverse de disvolution qui est im-
re ces désordres mentaux V Pour expli-
Ebing ne fait pas seulement appel à une
l'émotivité mais à une augmentation de
1 et à une diminution » de l'énergie de la
erveau antérieur) qui sont très abaissés
. Levillain se demandait si les phobies
t en une indécision de la volonté^.
anciens sur l'idée fixe en 1889, en 1891,
;oup pour montrer dans Tétat aboulique
\ obsessions. MM. Raymond et Arnaud,
cas de délire du doute et du toucher,
crises pour montrer que le phénomène
ie considérable, qu'en dehors de leurs
» sont dans l'impossibilité de se fixer,
*titude perpétuelle. Ils adoptent l'opinion
lint de départ du délire, il y a un trouble
général des facultés et dans l'état des
ormes de la folie du doute, Tune qui dé-
e et qu'il explique ainsi par la théorie
[ dépend « de l'aboulie, c'est-à-dire en
)tivité ».. C'est là une explication inverse
se rapproche des théories psychasthé-
;bcse intéressante sur les rapports de la
ilancolie résume ainsi la pàthogénie psy-
ons : « C'est la volonté, expression pre-
par suite expression de la personnalité
ons les plus apparentes et les plus im-
itai des déprimés. Les troubles affectifs,
irrivent eux-mêmes qu'en seconde ligne
1 rapport avec l'aboulie *. »
nnant un grand rôle à l'émotivité admet
p. 19a.
irad., 1897, P- ^^^•
i53.
. méd. psych., 189a, II, p. 69, 220.
►ns, 189a, p. ^60. (Paris, F. Alcan).
lélancolie dépressive. Thèse, Paris, 189^, p. 78.
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}\]E DES THÉORIES PSYCHASTHÉNIQUES 473
que certaines agoraphobies ne sont que « des obsessions abou-
liques pures* », et réclame une place, comme on Ta vu, pour les
troubles de la perception personnelle.
M. Dallemagne admet « un état de déséquilibre de la systémati-
sation psychique^ ». J'ai déjà rappelé l'opinion de M. Ballet qui
rattache les obsessions non seulement aux troubles de l'émotion
mais aussi à ceux de la volonté. M. Roubinovitch dit de même
que ce qui est lésé chez l'obsédé, c'est la sphère émotive et la
volonté*. Je rappellerai aussi un article de M. F. del Greco qui
rattache ces états psychopathiques a la désagrégation psycholo-
gique et h la décadence de la volonté*.
Tout récemment, M. Arnaud insistait de nouveau sur les trou-
bles moteurs volontaires, sur le défaut d'impulsion et d'arrêt,
sur l'hésitation, l'incertitude et concluait « que l'état antérieur
est une lésion de la volonté. A des degrés divers les obsédés
sont tous des hésitants, des perplexes, des abouliques, incapables
d'eflTorts soutenus, ils ne finissent rien, ils n^aboutissent pas qu'il
s'agisse d'idées ou de mouvements" ».
Une des expressions les plus précises de ces théories se trouve
peut-être dans un article récent de M. Edw. B. Angell ; cet auteur
considère les obsessions comme résultant des troubles sous-ja-
cents des fonctions psychologiques, a Les idées impératives dé-
pendent d'un état de faiblesse mentale, d'une absence de céré-
bration, d'un instabilité de la synthèse mentale... le recul du
champ de conscience est peut-être le caractère le plus général.
Le sujet trouve que la vie actuelle n'est pas réelle, le rêve remplace
la réalité*. »
On voit qu'un grand nombre d'auteurs tendent à supposer,
en dessous de l'émotivité et de l'angoisse un trouble plus profond
de l'activité mentale qu'il faut essayer de déterminer en résumant
les nombreuses observations précédentes.
1. Séglas, Leçons sur les maladies menlaleSt 1895, p. i3i.
2. Dallemagne, Dégénérés et déséquilibrés, 1896.
3. Roubinovitch, Bulletin médical, aa juillet 1896.
4. F. del Greco. Idée fisse e disgregazione psicologica. Annali di nevrologia, anno
XVllI, fasc. 3, 1900.
5. Arnaud, Archives de neurologie, 190a, I, p. a 68.
6. Edw. B. Angell, Imporalive ideas in the sane. Journal of nervous and mental
disease, août 1900.
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LA HIÉRARCHIE DES PHÉNOMÈNES PSYCHOLO(
chais ni aux théories intellectualistes, ni aux théori
mais je cherchais à décrire un phénomène plu
ridée ou le sentiment tels qu'on les observe d'une
ficielle.
Je voudrais faire un travail du même genre à pr
dés et chercher si les stigmates psychasthéniques
en évidence un phénomène psychologique simp
jouer un rôle important et d'expliquer par ses
troubles de la volonté et de l'émotion.
Cette section sera consacrée a la description de
fondamental que l'on peut considérer comme le réî
stigmates psychasthéniques ; la section suivante
ment en prenant pour point de départ ce phé
modifications, on peut se représenter la format
troubles des obsédés.
Dans un chapitre précédent nous avons consta
ment et la disparition de certaines opérations
chez les obsédés ; d'autre part nous avions vu qu
rations étaient bien conservées et présentaient p
loppement exagéré ; en étudiant cette différence
lement conduit à supposer que toutes les opérât
ne présentent pas les mêmes degrés de facilité
d*un affaiblissement des fonctions cérébrales elle
sent pas simultanément mais successivement et p
en raison de ces degrés inégaux de facilité. En un
tions mentales semblent se disposer en une h
laquelle les degrés supérieurs sont compliqués, di
dre et inaccessibles pour nos malades, tandis que 1
rieurs sont aisés et sont restés a leur disposition,
Sans doute nous avons toujours eu vaguement
de ce genre à propos des travaux de l'esprit : nou
recherche scientifique, l'exécution ou l'appréciât
d'art, l'effort p'our atteindre la perfection morale i
tions supérieures ; nous savions que pour un enfa
faire une division est plus difficile que d'appren
que pour un idiot il est plus difficile de parler q
Mais cette recherche des degrés de difficulté n'éi
point de vue de l'art ou de l'instruction et pour u
d'opérations seulement, elle n'était pas faite d'une
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L\ HIÉRARCHIE DES PHÉNOMÈNES PSYCHOLOGIQUES
chasthéniques, va nous permettre de compléter ces recherc
sur la hiérarchie des phénomènes psychologiques.
Si nous faisons cet examen d*après les longues observati
précédentes, il nous faudra placer au premier degré con
l'opération mentale la plus difficile, puisque c'est elle qui dis
raît le plus vite et le plus souvent, la fonction du réel, d
fonction qu'on a peu Thabilude de distinguer des autres et i
nous avons fait connaître en résumant les insufiisances p
chologiques consiste dans l'appréhension de la réalité s
toutes ses formes. Elle constitue « celte attention à la vie f
sente » doqt parle M. Bergson dans un livre de métaphysi(
qui semble souvent prévoir ces observations psychologique
Voilà ce qui semble Topération mentale la plus parfaite et ci
que tous les obsédés perdent dès le début de leur maladie.
La première forme de cette fonction du réel, c'est Faction
nous permet d'agir sur les objets extérieurs et de métan
phoscr la réalité. Cette action volontaire présente clle-mc
différents degrés de difliculté. Au point de vue de son
jet, il semble qu'elle devient plus difTicile quand elle est sociî
quand elle doit s'exercer non seulement sur le milieu physiq
mais encore sur le milieu social dans lequel nous sommes pi
Elle est aussi difficile quand elle est professionnelle, c'esl
dire quand il s'agit des actes d'un métier pratique, qui doit rc
lenient aboutir à construire des choses précises, qui doit sa
faire une clientèle exigeante, qui doit réellement nous fa
gagner notre vie. L'action intéressée, c'est-a-dire l'action la p
réelle pour nous et pour les autres, semble celle qui exige le p
d'efforts et celle qui disparait la première.
Au point de vue de sa forme, l'action est d'autant plus difhc
comme je l'ai montré autrefois, qu'elle est plus nouvelle et qu'c
demande davantage une nouvelle adaptation à des circonstances i
ont changée « Rien ne me rend malheureuse et malade, dit Voz
comme la nécessité d'avoir a prendre une décision nouvelle
L'action est aussi difficile quand elle doit avoir à nos yeux le
ractère de liberté et de personnalité, c'est-à-dire quand la s
I. Bergson, Miiticre et mémoire, 1896, (Paris, F. Alcan) p. 190.
3. Névroses et idées fixes, I. p. la.
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THÉORIES PATHOGÉNIQUES
lentale qui la détermine doit se trouver en accord avec la
de nos tendances principales nettement coordonnées, en
quand Faction doit être coordonnée non seulement avec
nées du monde extérieur mais encore avec Tensemble de
ersonnalité. A un degré un peu inférieur nous trouvons de
culte dans Tachèvement, la terminaison complète d'une
commencée, dans la rapidité, la précision, Ténergie, la ré-
î aux influences étrangères, qui doivent se trouver dans
es actions volontaires.
I, nous avons vu que bien souvent le fait de s^endormir
irement était un acte et un acte difficile. Nous sommes
s à placer cet acte du sommeil et celui du réveil à une
e hauteur dans cette hiérarchie immédiatement après les
olontaires accompagnés du sentiment de personnalité et de
ui nous détermine à placer au premier rang dans cette
hie l'action volontaire qui modifie réellement le monde
c*est que nous avons vu cette action constamment trou-
ez bien des malades et des le début. L^indolence, la pa-
*irrésolution, la lenteur des actes, les retards, la faiblesse
)rts, le désordre, lu maladresse, Tinachèvemcnt, Tabsence
stance, le misonéisme, la continuation indéfinie caracté-
lien les psychasthéniques. La timidité excessive, Taboulie
ionnelle, les inhibitions, les arrêts, les fatigues insurmon-
les inerties complètes surviennent à un bien plus grand
;hez ceux qui ont des obsessions ou qui vont en avoir et
itent surtout dans la période qui précède les crises d'agi-
orcée et que nous avons comparée à une aura.
\ la même fonction du réel mais peut-être à un degré ud
érieur à celui de l'action volontaire nous trouvons Tatten-
li nous permet de percevoir les choses réelles. Son degré
élevé toujours au point de vue de nos malades et par
uent le plus fragile, c'est l'opération qui nous donne la
du réel, c'est-à-dire qui détermine la certitude et la
:;e. Saisir une perception ou une idée avec le sentiment
îst bien le réel, c'est-à-dire coordonner autour de cette
tion toutes nos tendances, toutes nos activités, c'est
I parfaite de l'attention,
ancienne conception philosophique, qui remonte à Spi-
à Hume, qui a été admise par Spencer et par Taine, c'est
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LA IIIÊRARCHIE DES PHÉNOMÈNES PSYCHOLOGIQUES 479
que la croyance accompagne toujours Tidée, que le doute résulte
uniquement de la lutte entre plusieurs représentations également
claires. Cette conception a été combattue par bien des philosophes
qui lui opposaient la pensée de Descartes sur le rôle de la volonté
dans Fadirmation et dans Terreur. M. Brochard, dans sa thèse
sur l'erreur, dans ses articles sur la croyance et la volonté, estTun
de ceux qui ont le mieux montré cette distinction nécessaire
entre la croyance et la pensée proprement dite, « autre
chose est, dit-il très bien, la nécessité de penser ou de lier des
idées, autre chose la nécessité de croire, c'est-à-dire de poser
comme vraies absolument les synthèses que Tesprit ne peut
pas rompre ; à la rigueur on peut comprendre une vérité géo-
métrique et ne pas y croire *. » M. Gayte dans son livre sur la
croyance décrit ainsi le sceptique : « C'est une intelligence tou-
jours en mouvement qui demande a la pensée elle-même une
décision qu'elle ne saurait lui donner. Il ne s'attache à aucune
théorie parce qu'il ne sait pas vouloir, il délibère toujours
parce qu'il est incapable d'arrêter sa pensée par un acte,
il ne la domine pas, il se laisse dominer par elle''. » Parmi les
travaux plus récents dans le même sens, je signale ceux de M. W.
Jérusalem', ceux de M. A. -J. Balfour^ qui insistent « sur les causes
non rationnelles de la croyance » et le livre de M. W. James '^.
Ces théories philosophiques semblent être le résumé de
l'observation de nos malades. Certainement, dirons-nous avec
M. Brochard, on peut penser et ne pas croire, puisque nous voyons
tant de sujets qui perçoivent très bien, qui raisonnent admirable-
ment et qui ne peuvent pas arriver à croire. Il faut se rendre bien
compte de ce fait que la croyance est un degré d'activité céré-
brale au dessus de la simple intelligence. Dans la hiérarchie que
nous établissons, la croyance fait partie des fonctions du réel et
occupe un rang élevé a côté des opérations volontaires.
En dessous de cette opération de croyance à l'existence réelle
des objets, l'attention trouve encore des difficultés moins graves
peut-être dans la perception d'objets nouveaux, dans la com-
plexité du spectacle offert à nos sens, dans la clarté qu'il faut
U
I. Brochard, Croyance et volonté. Revue philosophique, i884, II. p. i5.
^ a. Gajle, La croyance, i884. p- io4.
i 3. W. Jérusalem, Psychological Review, 1895, p. ao5.
J Ix. A.-J. Balfour, The foundation of belief. New-York, iSgS, p. 2i4.
i 5. W. James, The will to believe, 1897.
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10 THEORIES' PATHOGÉNIQUES
li donner, dans la perception Intelligente de la lecture, de Taudi-
on, simplement dans la perception intelligente d'une situation
onnée. L'orientation, c'est-à-dire la disposition des perceptions
ar rapport à notre corps et à nos mouvements possibles, est
[icore une opération proche de la croyance et de l'action qui
i rapproche des fonctions du réel.
La mémoire ne présente réellement des difficultés et ne se rat-
iche aux fonctions du réel que dans une partie de ses opérations,
a fixation du souvenir des événements présents de manière
u'il puisse être utilisé plus tard, l'évocation des souvenirs ré-
?nts encore intimement liés à la réalité présente, enfin l'évocation
récise des souvenirs passés dans la mesure exacte où ils doivent
mer un rôle dans la perception actuelle, telles sont les opéra-
ons supérieures de la mémoire. « Fonder des souvenirs, disait
éjà très bien Debs, créer par un seul effort d'attention une pré-
isposition, ou ce qui est synonyme, une habitude nouvelle est
coup sûr une des plus utiles prérogatives de la volonté' ».
Ce qui caractérise l'homme d'action, disait M. Bergson,
est la promptitude avec laquelle il appelle au secours d'une
tuation donnée tous les souvenirs qui s'y rapportent, mais c'est
issi la barrière infranchissable que rencontrent chez lui en se
résentant au seuil de la conscience les souvenirs inutiles ou in-
ifférents*. »
La fonction du réel se retrouve aussi dans la conscience de dos
ats intérieurs et dans la perception de notre propre personne.
faut savoir nous percevoir nous-mêmes comme nous sommes
1 réalité ; nous retrouvons ici la difficulté principale qui est la
îrception avec certitude, avec le sentiment de la réalité. Nous eu
ouvons aussi une autre qui prend ici plus d'importance, c'est la
^rception de notre unité, le sentiment que l'esprit est réelle-
ent parvenu a une synthèse mentale unique.
Il est presque inutile de rappeler les troubles si fréquents de
ittention et de la perception chez les psychasthéniques qui nous
>ligent à mettre ainsi ces opérations dans le premier groupe, le
)ute des perceptions, l'inintelligence de la lecture, de Taudi-
[)n, rinstabilité de l'attention, les éclipses mentales, la mémoire
I. Debs, Tableau de Vaclwité volontaire pour servir à la science de l'éducation,
m, p. i53.
j. Bergson, Matière et mémoire^ 1896, p. 166.
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L\ HIÉRARCHIE DES PHÉNOMÈNES PSYCHOLOGIQUES 481
retardante, l'amnésie continue, les troubles de la perception per-
sonnelle, etc.
A ces opérations de la volonté et de l'attention il faut rattacher
certains phénomènes qui tiennent à Témotion. Celle-ci est en
général, comme nous le verrons, une opération mentale très facile
et très différente par conséquent des opérations de ce premier
groupe, mais elle prend de la difficulté quand il s'agit d'une émo-
tion précise, bien adaptée à la réalité donnée, surtout quand il
s'agit d'émotions heureuses. Savoir jouir complètement du pré-
sent, de ce qu'il y a de beau et de bon dans le présent, c'est une
opération mentale qui semble très difficile et digne d'être rap-
prochée sur ce point de l'action et de l'attention au réel, on la voit
disparaître bien souvent dans l'indifférence et dans l'ennui que
présentent presque toujours ces malades.
Le dernier terme de cette fonction du réel, celui qui résume pro-
bablement tous les précédents serait une opération mentale malheu-
reusement très peu connue : la constitution du temps, la formation
dans l'esprit du moment présent. Le temps n'est pas donné à l'es-
prit toutfait;il sufliraitpour le démontrer d'étudier les illusionsdes
enfants et des malades sur le temps. Lemomentprésent des mathé-
maticiens, ce point inaccessible n'a rien à voir avec Ie« notions
dont nous parlons ici. Le présent même qu'étudie la psychomé-
trie, cette pulsation de un dixième de seconde, n'est pas non
plus ce que nous apprécions comme présent. Le présent réel
pour nous, c'est un acte ou un état d'une certaine complexité
que nous embrassons dans un seul état de conscience, malgré
cette complexité et malgré sa durée réelle qui peut être plus ou
moins longue. Pour les gens distraits, indifférents à la réalité,
ce présent s'allonge et reste vague, pour des esprits actifs qui
sont toujours à la minute, ce présent se resserre et devient pré-
cis. Il y a une faculté mentale que l'on pourrait, en forgeant le
mot, appeler la présentification et qui consiste à rendre présent
un état d'esprit et un groupe de phénomène^. 11 ne serait pas dif-
ficile de montrer que cette opération se confond en réalité avec
les précédentes, c'est l'action, c'est l'attention, c'est la perception
exacte de la situation donnée avec le sentiment de sa réalité qui
produit la présentification ; il n'est pas non plus difficile de com-
prendre que cette opération n'est qu'un aspect de la fonction du
réel et qu'elle présente par conséquent les mêmes difficultés et
les mêmes troubles.
LES OBSESSIONS. I. — 3l
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482 THÉORIES PATHOGÉNIQUES
Au-dessous de ce premier degré, le plus parfait et le plus diffi-
cile se place le groupe des opérations que j'appellerai désintéres-
sées: ce sont les mêmes opérations psychologiques simplement dé-
pouillées de ce qui faisait leur perfection, c'est-à-dire de Faculté
du sentiment réel. Ce sont des actions sans adaptation exacte aux
faits nouveaux, sans coordination de toutes les tendances de Tin-
dividu, des perceptions vagues sans certitude, et sans jouissance
du présent. C'est ce que Ton désigne souvent comme des actions
et des perceptions avec distraction, c'est une vie en apparence
identique à la vie complète mais avec indifférence à la réalité.
Nous avons déjà noté bien des fois que la distraction rendait faci-
les à nos malades des opérations qu'ils ne pouvaient plus accom-
plir avec pleine conscience. Voici des exemples nouveaux de
cette remarque importante.
J'ai eu l'occasion de remarquer bien des fois un trait de carac-
tère assez étrange chez beaucoup de scrupuleuses. Ces malades
qui sont tout à fait incapables de se conduire elles-mêmes, qui
hésitent indéfiniment à propos de la moindre action quand il
s'agit de leur intérêt où de leur devoir personnel, deviennent
sensées, perspicaces et décidées, quand il s'agit de donner des
conseils à quelque autre personne. Je ne puis m'expliquer cette
différence qu'en remarquant combien la conduite d'autrui est à
nos yeux plus indifférente, plus simple, moins réelle que notre
propre conduite. On a vu que Wo... fait indéfiniment et fort bien
des aditions sur des chiffres imaginaires, elle m'offre même
d'additionner mes propres comptes, mais elle ne peut plus
fixer son attention dès qu'il s'agit des comptes de son propre
, manège.
Quand les malades seront fortement distraits de l'action quils
accomplissent, ils arrivent de même à cette indifférence qui rend
l'action plus facile. Bei..., quia perdu son moi quand elle cherche
à agir ou à sentir avec conscience, avec attention, a n'a plus aucun
trouble pendant l'état de distraction. Quand la malade est entraî-
née par une préoccupation, ne pense pas à elle-même, tout va par-
faitement bien et elle est parfaitement normale. Le trouble revient
quand elle essaye de faire attention, de penser à elle-même, de
se rendre compte de ce qu'elle éprouve * ».
Lod..., Claire agissent normalement quand elles sont distraites
I. Névroses et idées fixes ^ II, p. 65.
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LA HIÉRARCHIE DES PHÉNOMÈNES PSYCHOLOGIQUES 483
et ne se préoccupent pas de ce qu'elles font. « Pour que mon
travail marche bien, dit Gisèle, il faut que je n'y sois pas, que je
le fasse sans le vouloir et presque sans le savoir. » Nadia finit
par préférer les périodes où elle est dans un état de rêve, c'est
à ce moment qu'elle fait le plus facilement les choses qui étaient
difficiles auparavant. Elle aimait à fumer non pour trouver dans le
tabac une excitation, mais parce que cela l'étourdissait et qu'elle
pouvait alors agir h peu près comme tout le monde sans trop
savoir ce qu'elle faisait, « et si dans cet état de rêve il m'arrive de
me réveiller un peu et de penser que c'est la réalité, alors je me
sens tout de suite paralysée et agitée et je ne peux plus rien
faire ».
L'action plus ou moins vague avec distraction et peu de senti-
ment du réel forme donc un second degré moins difficile que le pre-
mier. 11 ne faudrait pas croire que ce groupe soit constitué unique-
ment par ce que j'appelais autrefois les actions automatiques. Ces f
actes tels qu'on les observe sous leur formé parfaite chez les hys-
tériques sont des actes inconscients ou subconscients ignorés par
le sujet qui les accomplit. Les actes que je place ici sont con-
scients, mais ils sont accompagnés d'une conscience moindre,
qui n'a pas la précision, la concentration de la conscience qui
accompagne les actions du premier degré. Sans doute, ce groupe
des actions désintéressées contient les phénomènes automatiques
comme une de ses variétés les plus intéressantes, mais il s'étend
au delà, car il contient bien des formes et bien des degrés.
Entre la fonction du réel et les actions tout à fait subconscien- ,'
tes, il y a mille degrés, mille nuances d^actions plus ou moins
désintéressées. La connaissance de ces nuances est essentielle
pour comprendre comment un sujet peut exécuter un acte et ne
peut pas en exécuter un autre qui nous paraît tout voisin, com-
ment de légères modifications de la distraction ou de l'attention
facilitent un acte ou le rendent impossible.
L'opinion p'opulaire plaçait à un niveau élevé dans la hiérar-
chie les opérations mentales proprement dites, les opérations qui
portent sur des idées et non sur des objets réels, mais les mora-
listes ont eu déjà bien souvent le sentiment que cette opinion
était erronée. « Vous êtes à la fleur de Tage, disait un romancier
très psychologue, vous appréciez au delà de tout l'intelligence
humaine ; le piquant de l'esprit et la déduction abstraite de la rai-
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'^'Tim
484 THÉORIES PATHOGÉNIQUES
son vous séduisent... quelle erreur est la vôtre*. » « Par l'action
nous sommes des anges, disait déjà Hamiet, par la pensée nous
ne sommes que des hommes. »
Nos observations sur les psychasthéniques confirment grande-
ment et précisent ces anciennes remarques. On remarque tout de
suite qu'ils se fixent plus facilement sur des idées que sur des
objets, qu'ils suivent assez facilement une pièce de théâtre ou ud
roman, tandis qu'ils regardent difficilement un musée. Mais il
s'agit encore ici d'observation : la différence s'accentue quand il
s'agit de purs raisonnements intérieurs. Il nous faut pour le com-
prendre lutter contre un vieux préjugé d'enfance, c'est que l'abs-
trait nous paraît plus difficile que le concret. Si nous avons bien
remarqué commentées malades raisonnent à perte de vue, com-
ment ils accumulent les divisions, les distinctions et les hypothèses
nous comprendrons que le raisonnement est une opération infé-
rieure. Je me place toujours au point de vue de nos malades et je
dis que chez eux le raisonnement, même compliqué, est une
opération mentale bien plus aisée que l'action réelle.
On retrouve la même facilité si l'on considère les opérations
représentatives qui portent sur les images, la mémoire et l'ima-
gination. La mémoire présentait des difficultés qui lui donnaient
une place au premier rang quand il s'agissait de la fixation et de
l'évocation des souvenirs d'une manière volontaire et utile. Mais
la mémoire perd tout à fait ces caractères de la fonction du réel
quand elle est simplement représentative et qu'elle se borne à
évoquer le tableau du passé sans engager ce passé d'une manière
effective dans l'action présente. Les malades abouliques et sans
attention présente, incapables d'évoquer volontairement un sou-
venir utile ont une mémoire inouïe dans leurs ruminations ab-
surdes. Ce sont des pages entières de leur vie passée que Jean
ou Lise peuvent réciter mot à mot; le passé devient chez ces ma-
lades obsédant et semble obnubiler le présent (Lowenfeld), c'est
que le présent offre à leur esprit infiniment plus de difficultés que le
passé. On observe d'ailleurs ce même développement exagrré de
la mémoire chez l'imbécile, chez le sauvage, chez l'enfant et cette
faculté de représentation désintéressée semble diminuer avec
l'âge adulte et avec le développement intellectuel.
Cette représentation des images devient encore plus facile quand
I. Dostoiewski, Crime et châtiment, II, p. 78.
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LA HIÉRARCHIE DES PHÉNOMÈNES PSYCHOLOGIQUES 485
celles-ci ne sont même plus soumises aux règles rigoureuses de
la mémoire et qu'il suffit de les laisser aller à la dérive suivant
les hasards de Tassociation des idées. On sait la place qu'occupe
la rêverie dans la maladie que nous étudions, le développement
énorme qu'elle peut prendre. Eilfin, le dernier degré de facilité
est obtenu quand les rêveries cessent même d'être originales et
se répètent les unes les autres avec monotonie.
Cette facilité plus grande des raisonnements abstraits et de la
représentation des images rend compte d'un caractère souvent
observé et qui ne me parait pas toujours avoir été bien compris.
Non seulement ces individus se vantent d'être « des penseurs,
des analystes » mais ils montrent un goiU prononcé et quelque-
fois un certain talent pour Tobservation psychologique intérieure,
pour l'auto-observation*. Cette aptitude à l'introspection psycho-
logique me parait simplement une conséquence de la faiblesse
de leur esprit. Entendons-nous : l'observation psychologique
bien faite et surtout l'observation psychologique objective est
extrêmement difficile. A toutes les difficultés dé l'observation
réelle du monde physique se joignent les di^cirltés des phéno-
mènes sociaux, de l'appréhension d'une conscience étrangère à
la nôtre. Mais l'introspection qui consiste h se regarder penser
est d'un tout autre ordre. Cousin et Jouffroy avaient déjà remar-
qué autrefois qu'elle ne peut s'exercer pendant l'acte même ou
au moment de l'émotion elle-même, que par conséquent elle
s'exerce surtout sur des images et des souvenirs. Ajoutons que
cette introspection peut s'exercer avec autant d'intérêt sur n'im-
porte quelle image et n'importe quel souvenir et qu'elle ne
demande aucune précision à l'esprit. 11 en résulte qu'elle se rap-
proche de la rumination et de la rêverie. Il suffira que certaines
curiosités déterminées par les sentiments d'incomplétude incli-
nent le sujet vers cette introspection pour qu'il s'y plonge avec
délices à cause de son extrême facilité.
Je crois que l'on peut placer au-dessous de ce troisième degré
une opération mentale encore plus basse, c'est le développement
de l'émotion, quand cette émotion n'est pas exactement en rap-
1. N. Vaschide cl CL Vurpas, Délire par introspection mentale, Nouvelle Icono-
graphie de la Salpétrihre, 1901, p. 288. Contribution à la psychologie de la genèse
des hallucinations psycho-motrices, Archives de neurologie, 1903, p.. 474-
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LA HIÉRARCHIE DES PHÉNOMÈNES PSYCHOLOGIQUES
verses : elles agissaient sur le réel, le transformaient, U
connaître avec plus ou moins de vérité, peu nous irapoi
moins donnaient au sujet l'impression, le sentiment c
lité. Ce caractère a diminué dans les opérations désii
qui restaient encore présentes, mais avec moins de
vif du réel; il s'est fortement réduit dans le troisième {
ne se trouve plus que le sentiment du passé, de Taveni
l'imaginaire ; il a disparu dans les derniers groupes.
Ce caractère essentiel des laits de l'esprit, qui consi
sur In réalité ou à la faire connaître même en apparei
donner le sentiment, au moins à lui correspondre, sui
pression de Spencer, pourrait être désigné sous le
coefficient de réalité d*un fait psychologique. On peut £
ciser ce que j'entends par cette hiérarchie des phénomi
chologiques : si on considère l'ordre de fréquence et d
avec laquelle se perdent les fonctions psychologigues
malades, on constate c\\x elles disparaissent d'autant plu
leur coefficient de réalité est plus éle{>é et qu elles persisi
tant plus longtemps que leur coefficient de réalité est
J'en conclus que ces opérations forment une série de di
de complexité décroissantes suivant que leur relation aç
lité au point de sfue de Vactiouy de la connaissance, en u
la correspondance va en diminuant et c'est à cette disp(
série que je donne le nom de hiérarchie psychologique.
Provisoirement, et simplement à titre de résumé, on
blir le tableau hiérarchique de cette manière :
Hiérarchie des phénomènes psychologiques.
l Taclion elHcace sur la réalité
raction |
/ l'action nouvelle avec sentiment
I. La fonction ) ( la perception avec sentiment de
du réel. \ \ la certitude, la croyance.
/ Taltentiondans < la perception d'objets nouveaux
f I la perception de l avec sentime
y la [>ersonne | avec sentime
\ la présentification, la perception et la jouissance
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L\ TENSION PSYCHOLOGIQUE 489
elle ne peut être admise sans interprétation. En effet, un fait
fondamental domine la psychologie du douteur, c'est qu'il n'a
pas d'anesthésies véritables. Ces sujets qui doutent de la réalité,
qui doutent de ce qu'ils sentent ou de ce qu'ils voient sentent et
voient cependant aussi bien que l'homme qui ne doute pas. Leurs
sensations ne sont pas diminuées quantitativement, on ne le sent
que d'une manière insignifiante, incapable d'expliquer leur doute.
En réalité, ils ont une sensibilité forte dans le sens ordinaire du
mot, puisqu'ils sentent fort bien les excitations les plus minimes ;
ils ont une vision puissante puisqu'ils lisent très bien les plus
petites lettres du tableau et malgré cette force, cette acuité de
leurs sens, ils n'ont pas le sentiment du réel.
Une seconde hypothèse serait bien simple et bien séduisante,
elle consisterait à rattacher cette différence entre le réel et l'ima-
ginaire à l'intervention du mouvement. Ce qui semble le plus
difficile dans le premier groupe, c'est l'action et l'attention^
or dans l'une et l'autre interviennent les fonctions motrices.
Ne pourrait-on pas supposer que dans cette maladie il y a
un engourdissement des centres moteurs corticaux avec conser-
vations de l'activité des centres sensoriels ? Cela n'expliquerait-il
pas cette difficulté de l'action et cette facilité de l'imagination.
Une conception à peu près semblable à celle-ci forme l'idée
fondamentale du livre de M. Bergson auquel je faisais allusion
dans un passage précédent : « L'actualité de notre perception,
dit-il, consiste dans son activité, dans les mouvements qui la
prolongent et non dans sa plus grande intensité, le passé n'est
qu'idée, le présent est idéo-moteur* C'est justement parce
que j'aurai rendu un souvenir actif qu'il sera devenu actuel, c'est-
à-dire sensation capable de provoquer des mouvements' Le
sentiment concret que nous avons de la réalité présente consiste-
rait donc dans la conscience que nous prenons des mouvements
effectifs par lesquels notre organisme répond naturellement aux
excitations, de sorte que là où ces relations se détendent ou se
gâtent entre sensations et mouvements, le sens du réel s'affaiblit
et disparait' ».
I. Bergson, Matière et mémoire , 1896, p. 62.
3. Id., ibid., p. 166.
3. Id., ibid., p. 193.
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THÉORIES PATUOGÉNIQUES
de la lettre, cette conception diffère moins qu'on
I précédente. Au lieu de faire dépendre la fonction
insité des sensations, elle la fait dépendre de Tin-
œmentsqui ne sont connus que par des sensations,
ns doute une part de vérité, mais ne peut être ad-
ction, car il ne me semble pas juste de dire que le
lui-même, en tant que mouvement de notre corps,
le sens du réel et à constituer le groupe des
rcliologiques supérieurs.
n h cette conception est semblable à la précé-
î que les douleurs ont conservé les sensations, ils
; réflexes, les mouvements et la sensation précise
mts.
;hez eux des mouvements qui se présentent comme
entaires et faciles. Les tics, les agitations motri-
onner lieu h des mouvements considérables el
FjCS phénomènes d'émotion nécessitent aussi la
mouvements et s'accompagnent souvent d'une
ne : cependant malgré ces mouvements les mala-
ins le doute, loin du réel. On ne peut donc
tout mouvement soit difficile, que ce qui dé-
ion d'un phénomène dans la hiérarchie ce soit
j mouvement. Il ne faut pas croire qu'un phéno-
jique soit élevé, demande un plus grand travail
tuvement physique qui le manifeste au dehors est
3lus violent. Un mouvement violent peut, au point
occupe, correspondre à un phénomène psycholo-
il hiérarchiquement très élémentaire.
I théorie précédente fera un progrès si au mot
comme d'ailleurs M. Bergson le fait souvent, un
« action », c'est-à-dire si Ton remplace le raouve-
\r un système bien coordonné de mouvements,
re chose, disait M. Bergson, entre le passé et le
différence de degré. Mon présent est ce qui
qui vit pour moi, ce qui me provoque à l'action
ivent h l'action utile et bien adaptée) au lieu que
essentiellement impuissant ^ » Mais cela n'est pas
, car ces sujets exécutent des actions bien réglées
il., p. i48.
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LA TENSION PSYCHOLOGIQUE 491
en rapport avec les ol)jels qu'on leur montre et ils se plaignent
« qu'ils ne font pas eux-mêmes Taction, que Taction n'est pas
réelle». L'automatisme bien réglé se montre dans les tics et ne
leur donne pas aux malades le sens du réel.
Une autre hypothèse plus intéressante consisterait h appliquer
ici mes anciennes études sur l'activité de synthèse par opposition
à l'activité automatique. I.a synthèse mentale est une opération
qui réunit en un composé unique et nouveau les éléments fournis
h chaque moment de la vie par les sens et par la mémoire. La
construction de ce système nouveau semble être l'opération par-
ticulièrement difficile, celle qui disparait la première. Je crois qu'il
y a encore ici une partie de la vérité. Dans la fonction du
réel entre pour beaucoup des adaptations à la réalité changeante et
par conséquent des systématisations toujours nouvelles : certaine-
ment une des raisons de l'élévation de la volonté et de l'atten-
tion dans notre hiérarchie, tient au rôle qu'y jouent les opérations
de synthèse mentale perpétuellement nouvelles, et inversement
la position inférieure de la rêverie et de l'émotion tient à ce
fait qu'une partie considérable de ces opérations est purement
automatique. D'ailleurs on constate aisément chez les malades qui
ont perdu le sens du réel, l'aboulie, l'aprosexie, le misonéisme,
l'inintelligence des situations nouvelles, tous les caractères qui
indiquentla diminution des synthèses mentales, du pouvoir d'adap-
tation et de coordination.
Cependant j'ai quelque hésitation a considérer cette distinction
comme suffisante dans ce cas. D'une part il ne me semble pas
qu'il y ait une proportionnalité complète entre le développement
de l'aboulie et la perte du sens réel. Ces malades agissent encore
à peu près correctement et ils répètent qu'ils agissent comme
dans un rêve. D'autre part il n'est pas exact de dire que le trou-
ble existe uniquement dans les phénomènes de synthèse mentale
elque les phénomènesautomatiquessont restés intacts. Enefiet,ilne
fautpasoublierquenousavonsconstatélesmèmesdifficultés non seu-
lement dans les fonctions du réel, mais encore dans les opérations
qui se bornent à imiter ces fonctions. La suggestion et l'halluci-
nation se présentent chez ces malades comme aussi difficiles que
l'action réelle ou la perception de la réalité. Or dans l'hallucina-
tion, il y a une très petite part de synthèse mentale mais beau-
coup d'automatisme. Si elle est très difficile c'est que d'autres
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492 THÉORIES PATIIOGÉNIQUES
difficultés doivent s'ajouter à celles que présente la synthèse
mentale.
L'étude de ces derniers faits, Tétude des hallucinations et sur-
tout des hallucinations suggérées pourra peut-être nous indiquer
un caractère nouveau qui joue un rôle important dans le senti-
ment de la réalité. Les hallucinations en effet s'accompagnent de
ce sentiment à un haut degré et, dans l'expérimentation au moyen
de la suggestion hypnotique, nous pouvons noter à quel moment
il survient. « La perception réelle ou l'hallucination d'un chien,
disais-je autrefois *, est un ensemble d'images visuelles, tactiles,
auditives même, très variées. Pour passer de l'idée d'un chien h
rimage hallucinatoire d'un chien, il faut non pas renforcer, mais
compléter l'image. Ce serait être bien maladroit, en face d'un
sujet qui voit difficilement les hallucinations que de répéter
même en criant très fort : « tu vois un chien, tu vois un chien » :
on n'arriverait à rien. Il faut préciser et compléter l'image : « Tu
vois ses oreilles, tu vois sa queue, tu vois ses longs poils de cou-
leur jaune, tu entends qu'il aboie. » Ou bien, si Ton a affaire à un
sujet qui en soit capable, il faut lui laisser le temps de dévelop-
per lui-même son image. Si, dans une conversation rapide, je dis
a Léonie qu'il y a des moutons dans la prairie au bord de la
rivière, etc., j'éveille par chaque mot une image incomplète et
vague qui ne sera pas une hallucination. Mais si après avoir dit:
« il y a un mouton devant toi, » je m'arrête brusquement et ne lui
parle plus ; son idée se développe peu à peu, elle cherche à se
représenter des détails nouveaux, à sentir la toison, à entendre le
cri et elle finit par dire : « C'est un vrai mouton. » C'est-à-dire
un mouton complet et non plus une image de mouton. La com-
plexité de l'image, comme le montrait M. Souriau, a donné nais-
sance à son objectivité^ ». Depuis cette époque, j'ai eu l'occasion
à plusieurs reprises d'insister sur ce rôle de la complexité et du
développement de l'image dans la suggestion et dans l'hallucina-
tion*, et je considère encore comme bien vraisemblable que c'est
au nombre et à la richesse des images évoquées à propos d'une
I. Automatisme psychologique, 1889. p. 181.
3. Souriau. Sensation et perception. Revue philosophique, i883, II, 75,
3. Accidents mentaux des hystériques, 1894» p. a3. Névroses et idées fixes, I
p. 216. II ; p. i3i, etc.
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LA TENSION PSYCHOLOGIQUE 493
même idée qu'est dû le caractère de réalité apparente des hallucina-
tions hystériques.
Si nous considérons au contraire ces psychasthéniques qui
n'arrivent point au sentiment du réel ni dans leurs pseudo-hallu-
cinations ni même dans leurs perceptions, nous voyons quHIsont
toujours la pensée occupée par des phénomènes plus simples,
moins riches. Ils ont des souvenirs et surtout des souvenirs loin-
tains, mais de tels souvenirs sont simplifiés, décolorés, ils ne sont
pas aussi complexes que le spectacle d'un événement réel. Ils ont
surtout des raisonnements abstraits, des bavardages, dans lesquels
la pensée se fait au moyen de substituts qui remplacent, par une
image simple, un groupe de phénomènes. Quelquefois ils consta-
tent eux-mêmes cette simplification de leur pensée, cette
diminution de la richesse des perceptions. Jean me répète
sans cesse « qu'il ne saisit pas la réalité avec la force nor-
male ». J'insiste en lui demandant ce qu'il entend par là, com-
ment il se rend compte de ce prétendu changement, puisque je ne
puis découvrir en lui aucune sensation insuffisante : « Voici, me
dit-il, ce que je crois avoir remarqué : dans la vision normale,
dans la vision que j'avais autrefois, un objet était composé d'une
foule de détails : si vous voulez, il y avait dans cette surface de
l'objet au moins trois mille petits points différents que je voyais
tous à la fois, maintenant il me semble qu'il n'y en a plus que
quinze cents. »
Cet ensemble de remarques nous montre que dans la consti-
tution des phénomènes de notre premier groupe, dans notre
fonction du réel, il faut faire jouer un rôle à la complexité et
à la richesse des phénomènes psychologiques. Dans l'hallucination
comme dans la perception du réel et dans l'action, le contenu de
la conscience à propos de chaque objet est non seulement syn-
thétisé mais il est riche ; le nombre de sensations et des images
données simultanément est considérable. Au contraire, dans les
groupes inférieurs, dans le raisonnement et même dans la rêve-
rie, la pensée est abstraite, elle se fait au moyen de substituts et
elle est en réalité assez pauvre de phénomènes rentrant simulta-
nément dans la synthèse mentale.
Plusieurs auteurs semblent avoir senti l'importance qu'a dans
le fonctionnement de l'esprit le nombre des phénomènes psycho-
logiques simultanés. M. Espinas, à propos du sommeil chez les
hystériques, a parlé de l'importance des sensations volumineuses
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49i THÉORIES PATHOGÉNIQUES
qui mettent dans la conscience un grand nombre de phénomènes
simultanés\ M. Stout, à propos de la croyance, remarque a que
la force de cohésion entre deux idées A et B n'est pas seule-
ment dans les idées elles-mêmes mais dans la masse des éléments
conscients et subconscients qui les soutiennent^.
M. Manouvrier, dans un article intéressant sur la volonté,
exprime des idées du même genre : « quand les cellules céré-
brales sont le siège d'une nutrition très active, quand leur com-
position moléculaire est telle que la quantité d'énergie mise en
liberté par leur désintégration est à son maximum... alors les
sensations sont vives et nombreuses ; il y a des délibérations
larges et vives parce que de nombreux groupes cellulaires asso-
ciés sont mis en jeu et fortement excités : les délibérations sont
largement conscientes parce que l'excitation se propage jusqu'aux
groupes les plus nouvellement formés et parce que la désinté-
gration moléculaire d'où résulte la conscience est très active : la
délibération est brève, parce que cette activité même entraine la
cohésion rapide de plusieurs désirs ou volontés naissantes d'où
résulte cette désintégration moléculaire prépondérante qui cons-
titue la volonté. Enfin, cette volonté est sûrement, rapidement et
énergiquement suivie d'exécution parce que le courant nerveux
énergiquement commencé par cette désintégration centrale par-
ticipe lui-même de la vigueur générale que l'on peut appeler
neurosthénie (oôivs;). Dans l'état opposé ou neurasthénique
(a, ŒÔiv3ç), la volonté au contraire est affaiblie comme tous les
états de conscience qui la précèdent. Les sensations sont faibles,
les images éveillées dans le processus associatif sont excitées fai-
blement en petit nombre et successivement. Les premières éveil-
lées sont déjà éteintes au moment où l'excitation parvient au
groupe voisin, de sorte que les coordinations sont pauvres et pré-
caires ; la délibération est étroite et molle par suite de l'exi-
guïté qualificative et numérique des motifs cnis en jeu ; les désirs
sont sans énergie. Il peut arriver qu'aucun d'eux n'acquière une
intensité suffisante pour constituer la volonté. En ce cas, c'est
l'aboulie Ce qui me parait avoir une très grande portée
psychologique, ajoute M. Manouvrier avec beaucoup de profon-
1. M. Espinas, Du sommeil provoqué chez les hyslé niques t Essai d'explication de ses
causes et de ses effets. Bordeaux, iSS'i, p. i5.
2. Sloul. Mind, July-ocl. 1891.
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Google*
LA TENSION PSYCHOLOGIQUE 495
deur, c'est l'opposition entre la neurosthénie et la neurasthénie
ou, sî l'on veut, entre la cérébrosthénie et la cérébr asthénie,
quant aux elTets produits par ces deux états sur Tintensité ou
même sur la forme du fonctionnement mental* ».
C'est la même notion de la richesse des processus mentaux
que je retrouve comme élément essentiel des véritables halluci-
nations et qui me semble jouer un grand rôle dans toutes les
opérations de la fonction du réel. Cette notion a l'avantage de
contenir ce qui était intéressant dans les hypothèses précédentes
relatives à l'importance des sensations et surtout des sensations
de mouvement, celles-ci sont évidemment contenues dans ce que
j'appelle la richesse du contenu de la pensée.
Pourrait-on aller plus loin et chercher si nous pouvons décou-
vrir d'autres caractères psychologiques auxquelles soient liés
cette concentration et cette richesse des phénomènes. Je suis
disposé à imaginer que la rapidité des phénomènes psycholo-
giques ou plutôt des éléments de ces. phénomènes doit intervenir
ici. Il est visible, je l'ai montré bien souvent, que les douteurs
sont des lents et il n'est pas impossible de supposer qu'il y a chez
eux un ralentissement de ces oscillations, de ces vibrations qui
constituent peut-être les éléments de la conscience. Mais il est
trop évident que ce sont là des hypothèses actuellement invéri-
fiables que nous ne pouvons ajouter sans démonstration aux faits
acquis.
En un mot, il me semble que deux phénomènes essentiels ca-
ractérisent les premiers degrés de cette hiérarchie: i® l'unifica-
tion, la concentration, surtout importante lorsqu'elle est nouvelle
et qu'elle constitue la synthèse mentale ; 2** le nombre, la masse
des phénomènes psychologiques qui doivent faire partie de cette
synthèse. La réunion de ces deux phénomènes, une synthèse
nouvelle, une forte concentration et des faits de conscience très
nombreux constitue un caractère qui doit être essentiel en psy-
chologie et que l'on peut appeler par convention la tension psy-
chologie.
Maudsiey a déjà parlé des divers degrés de tension que pouvait
prendre l'énergie cérébrale '. Spencer exprime des idées du
I. Manouvrier, La volonté. Hevae de l'hypnotisme, 189^, p. aag, a3a.
a. Maudsiey, Physiologie de V esprit ^ p. 3oo el suiv.
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496 THÉORIES PATHOGÉNIQUES
même genre « sur les diverses tensions ou pressions du système
nerveux, et sur le rôle qu'elles doivent jouer dans la conscience * ».
HolTding a déjà insisté sur cette tension, cette concentration
qu'il considère comme essentielle dans la volition. u A Texpan-
sion de la recherche des motifs doit succéder une concentration.
Il s'agit de clore tout le débat conscient, de concentrer l'énergie
sur un seul point qui puisse servir de point de départ pour la
réalisation du but qu'on s'est proposé*.» M. Bergson a exprimé
beaucoup d'idées philosophiques dans le même sens quand il
dit que « l'action doit concentrer de plus en plus un grand nombre
d'images dans un moment du temps de plus en plus court \ « Les
divers souvenirs évoqués, dit-il encore, répondent à divers degrés
de tension de la mémoire ici plus rapprochée de l'image pure
(du rêve), la plus disposée à la réplique immédiate, c'est-à-dire
à l'action*. »
Voici donc un ensemble de recherches qui convergent vers
cette idée qu'il y a des degrés de tension psychologique et qu'à
ces divers degrés correspondent non seulement des modifications
d'intensité mais des modifications très intéressantes de qualité ou
de nature dans ces phénomènes. J'ai essayé de les préciser en
réunissant ces notions relatives à la tension psychologique avec les
faits mis en évidence dans le tableau de la hiérarchie. Le degré de
la tension psychologique y ou télés^ation du niveau mental se mani-
feste par le degré qu occupe dans la hiérarchie les phénomènes les
plus élevés auxquels le sujet peut parvenir. La fonction du réel
avec Faction, la perception de la réalité, la certitude exigeant
le plus haut degré de tension, ce sont des phénomènes de haute
tension; la rêverie, l'agitation motrice, l'émotion exigeant des
tensions bien inférieures, on peut les considérer comme des phé-
nomènes de basse tension correspondants à un niveau mental
inférieur.
Bien entendu il est facile de traduire ces hypothèses psycholo-
giques en hypothèses physiologiques : comme je l'ai dit souvent,
en dehors des expériences de physiologie et des recherches his-
tologiques proprement dites, les interprétations physiologiques
ne sont que des traductions des notions psychologiques en un
I. S|>encer, Principes de psychologie, î, p. 635 el su iv. (Paris, F. Alcan).
a. lloffding. Manuel de psycholoyie, chap. vu.
3. Bergson, Op. cit., p. a3i.
4. Id. Ibid. p. i85.
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ABAISSEMENT DE LA TENSION PSYCHOLOGIQUE
autre langage. Il est bien vraisemblable que cette tension ps
logique correspond à une certaine tension physiologique et
sique qui existe dans le système nerveux central. On connaît
des forces physiques présentant des degrés de tension du i
genre et déterminant des phénomènes différents suivant
degré de tension. Quand il s'agit du courant électrique or
très bien que certains phénomènes ne sont possibles que
à une certaine tension du courant. Une lampe donnée ne s
mera que si le courant a ii5 volts ; cela ne veut pas dire <
courant de go volts soit un courant nul. Ce courant inférieur
être capable de produire d'autres phénomènes, de port(
rouge un fil de platine, de faire marcher un moteur, etc. ;
il ne peut pas allumer la lampe précédente. La chaleur pre
des degrés de tension différents suivant la température à lac
elle s'élève : à 33o° elle détermine la fusion du plomb, à
celle du platine. II doit se passer quelque chose d'absolu
semblable au point de vue des courants nerveux.
Malheureusement nous ne savons guère aujourd'hui de
dépend cette tension du cerveau. S'agit-il d'une certaine v
de vibrations encore inconnues ? Y a-t-il un organe spécial cl
des phénomènes de haute tension, tandis que d'autres régio
bornent à l'exécution des phénomènes de basse tension ? E
tout le cerveau qui change de tension suivant les cas?
provient la régulation de cette tension ? il faut sur tou
points avouer notre ignorance. Tout ce que nous pouvons
dure, c'est que les modifications de la tension du cerveau
avoir une importance psychologique énorme s'il est vrai
comme nous avons été amenés à le supposer dans cette prei
hypothèse, des catégories de phénomènes psychologiques
lument différents correspondent à différentes tensioi^s.
2. — Abaissement de la tension psychologique
Si l'on a bien conçu la notion de la tension psychologiqu
doit s'apercevoir immédiatement que cette tension est trè
riable non seulement chez les différents êtres mais encor
cours de la vie d'un même être. Si je ne me trompe, la cor
sance de ces variations de la tension psychologique, de ces os
LES OBSESSIONS. I. — 32
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» i98 THÉORIES PATUOGÉNIQUES
I
I lions du nweau mental jouera plus tard un rôle de premier ordre
I dans Tinterprétation des modifications du caractère, de Tévolu-
I tion de Tesprit, des modifications produites par Témotion.
I II suffit de rappeler ici quelques exemples bien connus de cette
I oscillation pour pouvoir appliquer cette notion à notre pro-
I blême. En premier lieu, il est probable que ces variations de
tension psychologique jouent un grand rôle dans les modifica-
tions mentales produites par Tâge. La puissance d'adaptation au
réel, très petite dans l'enfance, s'accroît dans la jeunesse et baisse
dans la vieillesse : on connaît Taboulie, la distraction, Tamnésie
continue des vieillards.
En second lieu, on peut signaler les modifications psycholo-
giques que Ton observe pendant le sommeil. Dans mes cours de
1901 sur « le sommeil et les états hypnoïdes », j'ai constam-
ment développé cette idée que la veille et le sommeil nous pré-
sentaient un des plus beaux exemples des grandes oscillations du
niveau mental. On retrouve dans le rêve tous les troubles carac-
téristiques de l'abaissement de la tension psychologique. L'abou-
lie, la lenteur, l'entêtement, l'absence d'adaptation caractérisent
l'action des rêveurs, comme la distraction, le rétrécissement du
champ de la conscience, l'absence de comparaison et de critique
caractérisent leur attention. Il y a dans le rêve de l'amnésie conti-
nue qui empêche la fixation et la persistance des souvenirs, il y
a aussi, chose curieuse, de l'amnésie rétrograde ou de la mé-
moire retardante, car le rêve ne porte pas sur les événements de
la journée mais sur les faits déjà reculés dans le passé. On re-
marque facilement dans le rêve de l'automatisme, delà répétition
indéfinie, de la déclamation, des illusions dans l'appréciation du
temps, le sentiment de drôle, le déjà-vu, le doute, le dédouble-
ment, etc. La notion de l'abaissement de la tension psycholo-
gique, comprise avec précision, est un des meilleurs résumés
que l'on puisse donner de l'état de l'esprit pendiint le rêve.
On peut donc, après ces remarques, appliquer notre hypothèse
de la hiérarchie des phénomènes psychologiques ou des divers
degrés de la tension psychologique à l'interprétation des états
psychasthéniques. Pour y parvenir voici de quelle manière on
pourrait se représenter le trouble fondamental de la maladie.
A partir d'un certain moment sous des. influences diverses que
j'étudierai plus tard survient chez ces individus un abaissement
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ABAISSKMENT DE LA TENSION PSYCHOLOGIQUE 49Ô
de la tension psychologique et nerveuse telle que nous l'avons
comprise. Chez les uns cet abaissement une fois commencé va
rester définitif pendant plus ou moins longtemps, chez les autres
il disparaîtra rapidement pour réapparaître bientôt ; il faut aussi
remarquer que suivant les sujets rabaissement de la tension sera
plus ou moins profond. Ce sont des variétés que Ton peut négliger
pour le moment, l'essentiel, c'est que cet abaissement existe chez
tous au début des périodes de la maladie qu'elle soit courte ou
longue, profonde ou légère. Cela veut dire d'après les études pré-
cédentes que certains phénomènes supérieurs fonction du réel,
action volontaire avec adaptation nouvelle avec sentiment de
liberté et de personnalité, perception de la réalité, croyance,
certitude, douleur et jouissance du présent, notion exacte du
présent vont devenir impossibles, tandis, que les autres groupes
d'opérations, action et perception désintéressée ou avec distrac-
tion, et à plus forte raison, raisonnement, rêverie et émotion
mal coordonnée vont rester parfaitement faciles. Il suffit de se
reporter à tout ce que nous avons dit sur l'insuffisance psychor
logique pour constater que c'est bien ainsi que les choses se
passent.
On a vu en effet que ces personnes ne sont pas simplement
des émotifs mais que ce sont des malades dont toute la vitalité
et toute la nutrition semble altérée, leur amaigrissement carac-
téristique ne me paraît pas convenir à un caractère simplement
émotif. Il y a là un abaissement de la vitalité qui est bien
d'accord avec cet abaissement de la tension nerveuse que nous
supposons. Plusieurs auteurs ont ainsi insisté avec juste raison
sur ce caractère maladif que d'ordinaire on néglige trop*.
Il est inutile de reproduire tous les faits que nous avons cités
à propos de ces insuffisances psychologiques et qui démontrent
bien l'abaissement de la tension psychologique. Je rappelle seu-
lement certains cas caractéristiques où les malades débutent par
un abaissement tout à fait visible. Nous avons vu des cas comme
celui de Ver... et de Bei... où-brusquemen't sans obsession, sans
crises d'angoisse proprement dite les malades perdent la réalité
de leur personne ne peuvent plus atteindre à la perception per-
sonnelle attentive et réelle, mais continuent à avoir toutes les
I. Van. Eedeii, Les obsessions. Revue de l'hypnotisme, 1892, p. 11. Haskovec, op.
cit., 124.
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600 THÉORIES PAT
opérations correctes du moment <
tion et qu'ils n'essayeut pas de les
impossible. Ces mêmes sujets ne
de la maladie qu'un an ou deux a]
parvenir à la réalité dans la perce
que de Taboulie, de Tindécision,
chèvement des actes, ils devîennei
rendent plus bien compte de ce qu
« il y a quelque chose de travers
toure et dont je ne peux plus me c
n'ont plus leur effet complet su
devenue faible, écrit Mm..., et ne
vail... je deviens d'une distractioi
tends ce qui se passe autour de i
absorbé, je ne puis me débarrass
langueur indéBnissable. »
« A 17 ans je suis devenue peu i
me rendais plus compte de ce que
du piano je me demandais si j'étai
que le piano n'existait pas. )) « Ce
moi, ditLag...,je ne peux plus
plus, je ne peux plus être sur terr
dans les nuages. » « II me semble
s'est cassé dans ma tête, je ne sui
plus posée a un moment du temps
C'est un état crépusculaire où le
que dans le présent. AI... débute
ne comprend plus ce qu'elle lit et
nements récents. <c II me semble
mesure comme si le présent n'ex
rends plus compte de la façon dont
Celle qui exprime le mieux a
mentales au début c'est Claire,
cette jeune fille vers Tâge de 18
dissement, d'incapacité qui a d'al
supérieures et qui s'est étendue pe
moi, dit-elle, c'était comme une lun
lentement, mais de plus en plus. J
pourquoi, un manque d'espoir, de
je sentais cela jour et nuit. J'ai en
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ABAISSEMENT DE LA TENSION PSYCHOLOGIQUE
qui s'en allait, mais je n'ai jamais pu trouver exaetemen
me manquait : je disais que je n'avais plus de foi comnr
tenant je dis que je n'ai plus de cœur... J'éprouvais une c
pour tout ce que je faisais auparavant... Il y avait comme
qui s'étendait sur moi, qui m'empêchait de voir, d'agir
avant, qui m'empêchait, par exemple, de me repentir c<
ma foi s'en allait. C'est plus tard que j'ai senti mes autr<
ments diminuer, j'ai moins senti les affections, les je
peines, il me semblait que j'étais comme endurcie...
semblait qu'on m'enlevait ma liberté, quand j'agissais c
pas moi comme autrefois; mes idées se succédaient et je
vais plus les arrêter... ». Puis sont survenus chez cette
tous les troubles de l'insuffisance psychologique. Je tû
lement à faire remarquer que cet état n'était aucuneme
elle au début le résultat d'une obsession, celles-ci ne
développées chez Claire que plusieurs années après.
Même chez les malades avancés qui ont toutes les ob
possibles, il y a des moments où l'état d'abaissement se ]
seul sans angoisse et sans idée. C'est ce que Jean appelle
implicite « un état vague qui revient tout d'un coup, ii
sable et affreux, c'est comme une couche qui surplom
Tesprit, qui l'empêche de s'élever à rien ; c'est perpétue
muable sans que je sache aucunement pourquoi, sans que j<
véritablement et sans que j'aie aucune idée », c'est l'état \
Gisèle : « Je souffre comme si j'avais un obsession qui m'e
d'agir et de penser, mais vraiment je ne sais pas laquell
crois qu'il n'y en a pas. »
Il y a donc là un phénomène primitif et essentiel qui
dans la disparition de certaines opérations psychologique
rieures d'après notre hiérarchie avec conservation des infé
On peut donc résumer cet état en disant qu'il y a un abai
de la tension psychologique. Si cet abaissement est rapid
peu de durée nous dirons que c'est une chute de la te)
nous pourrons désigner cette crise sous le nom de crise
cholepsle. M. Meschede (Kônigsberg) a déjà employé (
sens analogue, mais non identique, le mot de « phénomèn
noleptiquesS). «Le mot de phrénolepsie est formé, dit 1
1. Meschede (Kônigsberg) sur rÉcholalie et la Phrénolepsie. Allg,
Psychiatrie. LUI, f. 4. 1897.
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Ô02 THÉORIF.S PATHOGÉNIQL'EvS
par analogie avec catalepsie, épilepsie, narcolepsie et exprime bien
rirrésistibilité du phénomène qui se passe dans le domaine de
ridéation.» Tout en conservant en partie le mot qui me semble
heureux et le sens que lui donne Tauteur, je crois, par les études
précédentes, avoir donné plus de précision à la notion de la
psycholepsie. Si rabaissement est durable il constitue cet état
psychologique inférieur permanent que j'ai désigné sous le nom
de psychasthénie.
3. — Rapport des crises de psycholepsie avec les accès
épileptiques.
Puisque le fait de rabaissement de la tension psychologique,
la crise de psycholepsie est pour moi le fait principal de la maladie,
l'origine de tous les autres, il faut insister sur lui en montrant
son rapport avec des phénomènes pathologiques bien connus et
du même genre.
Le plus intéressant problème^ à examiner à ce propos est celui
des rapports qui existent entre ces crises de psycholepsie et les
accès d'épilepsie proprement dite. En effet, l'accès épileptique
avec sa perte totale de conscience, avec ses vertiges et ses actions
complètement automatiques est bien certainement le type le plus
complet d'abaissement mental et d'oscillation du niveau mental: si
les crises de psycholepsie méritent leur nom, il me semble difli-
cile qu'elles n'aient pas quelque rapport avec les 'accès épilep-
tiques.
Griesinger et après lui Berger signalaient des relations possibles
entre l'épilepsie et la maladie des obsessions, mais plus tard ce
problème sembla bien oublié et la plupart des auteurs, remarque
M. Haskovec*, se refusèrent h voir ces relations. Cependant,
d'après une citation de Legrand du Saulle *, je crois que Westphal
se demande s'il n'y a pas lieu de rapprocher l'agoraphobie de l'é-
pilepsie. Dans le même passage, pour montrer l'intérêt qu'il prend
à la question, Legrand du Saulle cite une observation d'un épi-
1. Haskovec, op. cit., p. ia5.
2. Legrand du Saulle, Agoraphobie, p. 60.
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LES CRISES DE PSYCHOLEPSIE ET LES ACCÈS ÉPILEPTIQUES 503
leptique agoraphobe. Cependant, en général, il est exact que
cette relation a été le plus souvent complètement niée par les
observateurs, qui sont beaucoup plus frappés des grandes diffé-
rences apparentes que des ressemblances.
C'est ce qui est très net dans cette discussion de M. Mickle dont
MM. Pitres et Régis adoptent complètement les conclusions. « I/é-
mergence soudaine du fin fond de la conscience des éléments de
Tobsession, peut rappeler Tattaque d*épilepsie, cependant ce n'est
pas là de Tépilepsie vraie; ce n'est pas non plus de Tépilepsie lar-
vée... ces états d'obtusion secondaire, de tourbillon mental diffé-
rent absolument de Tabsencc primaire, du voile momentané de
rimperception des états nuageux de Tépilepsie ; des obsessions chez
les épileptiques n'existent jamais au moment précis où Tesprit est
sous le coup d'une attaque. . . En résumé, dans Tobsession, il y a con •
servationentièreoupresqueentièrede la conscience, d'ordinaire par-
faite, souvenirde l'attaque, anxiété et angoisse concomitante, inquié-
tude du malade sur son état mental, dégoût de la vie, fréquemment
stigmates physiques de neurasthénie cérébrale. Dans l'épilepsie,
il y a explosion soudaine de l'attaque, inconscience, état de trouble
ou grande obscurité mentale pendant l'explosion, perte plus ou
moins complète du souvenir de l'attaque, souvent ressemblance
absolue des détails entre plusieurs attaques consécutives... »
MM. Pitres et Régis insistent en plus sur la lutte mentale qui
caractérise l'obsession au lieu de la soudaineté irrésistible de
l'épilepsie, ils opposent comme exemple la dromomanie de l'ob-
sédé a l'automatisme ambulatoire de Tépileptique*.
Sans contester l'intérêt de ces remarques je crois que nos
études précédentes nous permettent de ne pas les considérer
comme absolument définitives. Ces auteurs insistent beaucoup
sur celte observation que Tobtusion est secondaire chez l'obsédé,
qu'elle est consécutive a l'obsession elle-même ; mais c'est un
point qui me paraît très contestable. Il y a chez les psychasthé-
niques tout un ensemble d'insuffisances psychologiques qui sont
quelquefois très graves et qui loin de dépendre de l'obsession
en sont au contraire le point de départ. Il est faux de dire que
les sentiments de dépersonnalisation, d'automatisme, de voile,
de nuage, de défaut d'émotion, soient la suite d^une obsession, à
laquelle songerait tout le temps le malade ; on les observe fré-
i. Pitres et Régis, op. cU.^ p. 96.
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LES CRISES DE PSYCHOLEPSIE ET LES ACCÈS ÈPILEPTtQUES 505
quelques heures, quelques jours, des mois, des années et consti-
tuer alors une sorte d'état second... cet état est souvent difficile
à distinguer de Tétat somnambulique. Lorsqu'il dure un certain
temps il peut être conscient, c'est une sorte d'élat second épilep-
tiqne dans lequel l'individu a conscience de ce qu'il fait, s'en
souvient mais agit tout autrement qu'à l'état normal*. » Il est
facile de voir que cet état crépusculaire peut se rapprocher de
notre état psychasthénique.
Aussi n'est-il pas surprenant que M. Haskovec au dernier
Congrès de médecine ait repris l'ancienne opinion de Griesinger
et montré par une observation remarquable que l'on rencontre par-
fois chez des épileptiques des phénomènes identiques à ceux que
présentent les obsédés. « Un homme de 36 ans, J. R..., atteint de-
puis longtemps de mal comitial classique se trouvant un jour au
théâtre sent les premiers signes d'un accès semblables à ceux qu'il
a depuis longtemps. Il résiste de toutes ses forces et arrive à arrêter
l'accès. Celui-ci ne se produisit pas, mais le malade entra dans un
état psychique étrange. Il me semblait, dit-il, que je rêvais ; je
voyais tout, j'entendais tout, mais tout cela me semblait étrange ;
il me semblait que ces perceptions n'arrivaient pas directement à
moi que je n'avais pas des impressions réelles mais que ce n'était
que des reproductions de choses automatiques. » L'observation de
M. Haskovec ne parut pas très démonstrative parce qu'elle portait
en réalité uniquement sur le sentiment d'étrangeté, de déperson-
nalisation dont on était disposé à faire une maladie indépendante
sous le nom de névrose de Krishaber. Mais pour nous qui avons
beaucoup insisté pour montrer que ce sentiment est banal chez les
obsédés, qu'il est à la racine de leurs obsessions, le fait prend une
plus grande importance. Pour terminer cette incomplète revue
historique des auteurs qui ont étudié ces relations de la psychas-
thénie avec l'obsession, nous rappellerons seulement que depuis
plus de quatre ans dans les leçons cliniques de la SalpêtrièreM. le
P' Raymond et moi-même avons signalé à maintes reprises à
propos d'un grand nombre d'observations cliniques analogues à
celle de M. Haskovec l'importance de ce rapprochement ^. Nous
pouvons maintenant passer à l'examen clinique des faits.
i*. Haskovec, op. cil., p. ia5.
3. Raymond, Leçons cliniques sur les maladies du système nerveux, 5* série, 1901,
p. ii5.
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•>06 THÉORIES PATIIOGKîStQUES
Une première remarque qui a une certaine importance c'est la
coïncidence assez fréquente de l'épilepsie vulgaire avec la maladie
des obsessions. Parmi les malades que j'ai cités dans ce travail il
y en a 12 qui sont de véritables épileptiques, ayant des grands
accès classiques et des vertiges. Ce nombre a déjà quelque inté-
rêt, quand on songe que, si je ne me trompe, la coïncidence de
r hystérie avec la maladie du doute bien nette est infiniment plus
rare. Les idées fixes existent bien entendu très souvent dans
rhystérie, mais elles prennent de tout autres caractères. L'idée
fixe hystérique qui se développe au cours d'un somnambulisme
sous forme d'actes et d'hallucinations ne ressemble pas do tout
à mon avis à l'obsession qui détermine des ruminations intermi-
nables et des angoisses sans jamais se développer complètement
dans la crise de psychasthénie.
Cette simultanéité de Tépilepsie et de la maladie du scrupule
est-elle une simple coïncidence fortuite ou ces deux symptômes
ont-ils des relations entre eux ? Si nous considérons les phéno-
mènes rangés sous le titre d'insuffisances psychologiques et de
sentiments d'incomplétude que présentent constamment les obsé-
dés nous verrons que des troubles de la perception extérieure ou
personnelle tout à fait identiques sont souvent sous la dépen-
dance immédiate d'accidents épileptiques. Qes... a des obsessions
conscientes avec impulsion à tuer sa mère ou des remords obsé-
dants de l'avoir tuée, elle se figure qu'elle fera du mal à tout
le monde, elle veut vivre enfermée dans un hôpital parce que les
fenêtres sont grillées et qu'elle sera empêchée de commettre des
crimes. En même temps elle a des accès épileptiques complets
et des vertiges. Ceux-ci sont tout à fait caractéristiques : sou-
daineté, pâleur de la face, obnubilation intellectuelle. Souvent
dans ces états vertigineux quand ils se prolongent un peu et
qu'ils ne sont pas assez complets pour supprimer tout souvenir
consécutif elle éprouve des sentiments bizarres, elle voit les objets
les plus habituels avec une sorte d'étonnement, elle les trouve
étranges, inattendus comme des objets qu'elle n'aurait jamais
vus et qui appartiendraient à un monde imaginaire. Chez cette
malade qui est à la fois obsédée et épileptique, les sentiments
d'étrangeté dans la perception extérieure apparaissent d'une façon
tout à fait nette au cours d'un vertige qui a tous les caractères
d'un vertige épileptique.
Une autre malade me paraît fort remarquable, elle reproduit
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LES CRISES DE PSYCHOLEPSIE ET LES ACCÈS ÉPILEPTIQUES 507
exactement l'observation de M. Haskovec. Is... (28), jeune fille de
22 ans, a des accès épileptiques francs depuis la puberté, elle en
a deux ou trois par mois. Il y a quelque temps à la suite d'un
accès avorté dont elle a seulement senti les débuts, elle est entrée
dans l'état suivant : elle voit tout et entend tout comme à l'ordi-
naire mais elle s'est mise à douter de tout. Elle ne sait plus si ce
qu'elle voit existe ou n'existe pas ; en regardant sa mère elle se
met à dire : « Je voudrais bien que cette dame soit ma mère, mais
je ne peux pas arriver à le croire, je ne peux même pas me mettre
dans la tète que cette dame soit vivante. » Elle doute aussi d'elle-
même: «elle a peut-être perdu sa personne, elle n'en est pas
sure... » Elle ne croit plus rien de ce qu'on lui dit, elle ne fait
plus aucun travail et ne peut plus fixer l'attention. Cet état se
prolonge pendant quatre jours, puis il semble disparaître en
partie. Le cinquième, la malade se sent un peu mieux, h peu
près normale, sauf qu'elle ne peut pas travailler. Is... revient h
la réalité et elle éprouve à ce moment des sentiments de joie
infinie, des envies de rire, un enthousiasme analogue à celui que
j'ai décrit à propos des « sentiments sublimes » de Jean. Mais
le sixième jour tout recommence, elle se sent de nouveau rêver
et doute de tout. Cette fois cet état anormal l'impatiente, elle
se sent mal h l'aise, étouffe, se sent angoissée ; elle fait des efforts
impuissants pour arriver à la réalité et commence des manies
d'interrogations. Si l'état s'était prolongé davantage, elle serait
parvenue à la maladie complète de l'interrogation et de l'angoisse.
Mais le septième jour un grand accès épileptique est venu
simplifier la situation : après l'accès elle s'est retrouvée dans
l'état normal. Dans toute la vie de la malade cet état bizarre ne
s'est reproduit que trois fois et le sujet est resté en somme une
épileptique à grands accès.
Une autre malade Hot... (27), jeune fille de i5 ans, a des accès
épileptiques et des vertiges depuis Tàge de 8 ans 1/2. Souvent
ses accès sont avortés : elle frotte son estomac, cligne des yeux,
balbutie quelques mots, pâlit et c'est tout, de tels phénomènes
sont bien connus chez les comitiaux. Depuis quelque temps à la
suite de ces accès avortés elle change d'attitude. Elle reste im-
mobile sur sa chaise en refusant tout travail et toute occupa-
tion : « maman, dit-elle tout doucement, je ne demande pas mieux
que de travailler, mais je ne vois pas clair, je ne peux pas tra-
vailler sans voir clair... Est-ce que je resterai aveugle?» Elle est
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L
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LES CRISES DE PSYCIIOLEPSIE ET LES ACCÈS ÉPILEPTIQUES ô09
La malade se plaint maintenant beaucoup plus de ce qu'elle
appelle des crises d'idées noires, c'est un état d'inquiétude et
d'angoisse qui s'empare d'elle surtout le soir. Il lui semble que
son cœur se serre et que chez elle tout est mort, il lui semble que
ses viscères disparaissent, n'existent plus : ce sentiment l'effraye
beaucoup, elle croit qu'elle va devenir folle et ne peut plus tolé-
rer de rester seule chez elle. D'après son opinion cette angoisse
vient uniquement des tourments qu'elle a endurés et du départ
d'un amant, mais en réalité cette tristesse prend un caractère
spécial à cause de Tépilepsie antérieure. Si on en doutait, il suf-
firait d'examiner la façon dont s'est terminée une de ses angoisses
pour en être convaincu. Dans un de ses désespoirs elle est sortie
de chez elle et elle ne sait pas où elle a été : en réalité elle est
tombée dans la rue en proie à un accès épileptique ainsi que
le prouvent la plaie qu'elle a encore au front et sa langue mordue.
Une autre malade, Fy... (34), femme de 35 ans est épileptique
depuis l'enfance, morsure de la langue, perte d'urine, etc.; depuis
que ses crises s'écartent, surtout depuis l'influence du traitement
bromure, elle a a des crises d'inquiétude, des peurs d'être seule,
il lui faudrait un maître à qui se dévouer, elle a peur de voir le
monde comme il est... Tout est si étrange que cela l'angoisse
Le temps est drôle, c'est peut-être la fin du monde et elle étouffe
au point d'appeler sans cesse au secours. » C'est comme on voit
la forme de Bechterew : épilepsie d'abord et angoisse ensuite,
dans le dernier cas avec troubles de perception.
Il y a aussi la forme inverse et à ce propos l'observation sui-
vante est remarquable. Gny... (32), homme de 52 ans, mécanicien
de chemin de fer, d'un esprit intelligent et délicat a toujours eu
une volonté faible. Depuis Tage de 12 ans, il a des préoccupations
et des scrupules qui ont pris bientôt la forme interrogative, il
lui vient en tête des idées singulières qu'il a de la peine à expri-
mer et qu'il comprend mal lui-même : « pourquoi les hommes
vivent-ils ? Comment les hommes sont-ils faits ? Pourquoi les
hommes doivent-ils mourir ? » Ces idées l'ont déjà beaucoup tour-
menté. Au même moment où il se posait ces questions, il a déjà
éprouvé depuis longtemps des états émotifs tout à fait spéciaux,
il avait des tremblements, des secousses, des sensations de froid
dans les jambes, des troubles de respiration et des palpitations
de cœur. En un mot depuis sa jeunesse il a des angoisses en
même temps que des idées obsédantes et des interrogations scru-
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TI1É(
» dernières années, les angoisses ont beaucoup
me il arrive souvent dans ce cas, les manies
lué. Cependant il restait uniquement un psy-
sur et angoissé, personne n'aurait songé à faire
"î. Mais voici que depuis deux ans les choses en
nblé changer de caractère. Le malade dans ses
erd conscience de plus en plus : à trois reprises
rre de tout son long, il a perdu conscience et
deux minutes « qu'un petit grelottement dans
revenu a lui très hébété et engourdi et il a été
l profond et irrésistible qui a duré plusieurs
e ces accès il a mouillé son pantalon. Ce cas
[irquable pour nous montrer la transformation
ns, des angoisses en accès épileptiques.
dans l'observation de Gy... (46), femme de
ngoisse qui ont commencé à la pension après
sentiment de vertige et de bourdonnement de
lent dans une de ces crises elle a marché droit
voir ce qu'elle faisait, puis elle est tombée
et en bavant, l'accès a été typique. C'est assez
l'angoisse psychasthénique peut se transformer
même manière que l'épilepsie en angoisse.
lernier phénomène dont les rapports avec Tépi-
ement intéressants, c'est la rumination nieu-
I intellectuelle elle-même. Tous ceux qui ont
[ues ont bien noté leurs crises psychiques. Quel-
crises sont tout à fait identiques à des rumina-
îques. M. Cullcrre décrit chez les épileptiques
, les impulsions ii compter, à combiner d'une
5 nombres quelconques et plus particulièrement
portant sur les divisions du temps, les secondes,
ures, les jours, les mois, les années, les siècles'.
[)ut à ce propos une observation très intéres-
i^al qui a rapport, il est vrai, à la migraine
on sait les relations avec l'épilepsie. 11 s'agit
a une migraine ophtalmique avec hémianopsie
lant à gauche : en même temps que le trouble
, médic. psychoL, 1890, 1, p. 26.
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LES CRISES DE PSYGHOLEPSIE ET LES ACCÈS ÉPILEPTIQUES 51!
visuel elle ressent une excitation intellectuelle bizarre, une pro-
fusion d'idées avec afflux obsédant et gênant de toutes les concep-
tions qui s'y rattachent, elle se sent forcée d'examiner chacune
de ces idées, de les soupeser et de répondre par « oui » ou par
« non » sur tous leurs caractères. Détail bizarre de l'observation
que nous ne sommes pas capables aujourd'hui d'interpréter quand
l'hémianopsie est inverse et plus accentuée à droite il n'y a rien
de mentaP. J'observe également en ce moment une malade qui
a des crises de migraine ophtalmique avec scotome scintillant à
gauche et qui est une scrupuleuse obsédée, mais je n'ai pas trouvé
de rapport étroit entre les crises de migraine et les crises de
scrupule.
Dans un article intéressant sur l'action inhibitoire de la volonté
dans les attaques d'épilepsie M. Tissié ^ décrit un épileptique
dont la crise est précédée par « une mauvaise idée «. C'est une
idée banale qui traverse son esprit, grossit peu à peu, devient fixe
et chasse toutes les autres pensées, le malade qui connaît cette
mauvaise idée lutte contre elle dès qu'elle apparaît en tâchant de
grossir d'autres idées. Cette observation est intéressante à bien
des points de vue. Un des caractères distinctifs que l'on donne
souvent : c'est que l'obsédé lutte contre son idée, on voit ici que
l'épileptique peut lutter également ; cette observation nous montre
aussi la rumination au début de la crise d'épilepsie.
C'est ce que nous vérifierons dans l'observation de Jet... (36),
homme de 25 ans, accès épileptiques depuis Tâge de 7 ans. a Cela
débute, dit-il, quand je pense h une idée, cette idée m'entortille et
je ne comprends plus rien. » Lesaccèsde Sie..., homme de 17 ans,
commencent par la pensée de chercher quelque chose, tout le
temps il rêve qu'il cherche une clé qu'il a perdue, il s'absorbe
dans cette recherche, il ne reprend conscience qu'après une demi-
heure de sommeil et se réveille la langue mordue. Get... tombe
quand elle cherche à approfondir quelque chose, Lug..., Pax...
(28), présentent des phénomènes semblables. On en trouverait
beaucoup d'autres exemples dans les observations que j'avais re-
cueillies pour la leçon de M. Raymond^ sur les équivalents psy-
chiques de l'épilepsie.
1. Kéraval, Idées fixes. Archiv. de neurologie, 1899, II, p. 83o.
2. Tissié, Congres des aliénisles et neurologistes français, iS^b,ei Revue de l'hypno-
tisme, 1896, p. 129.
3. F. Raymond, Leçons sur les maladies du systhme nerveux, 1901, V, p. 107.
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LES CRISES DE PSYGHOLEPSIE ET LES ACCÈS ÉPILEPTIQUES 513
rappellerai Tobservation remarquable de Vil..., que j*ai déjà sou-
venl signalée. Elle a rapport à ce jeune homme qui présentait
de si singulières obsessions sur Tinfini du temps et de Tespace.
On a déjà vu dans Tétude des ruminations comment Tesprit de
ce jeune homme s'égarait à la poursuite de Tinfini en toutes
choses, comment il avait des méditations forcées sur Tinfini du
temps et de l'espace, sur Tinfini du bonheur ou sur Tinfini du
malheur. Il m'avait décrit ses ruminations dans une lettre où il
montrait une pleine conscience de leur absurdité, d'après cette
description, je l'avais considéré éomme un obsédé se rattachant à la
folie du doute et du scrupule et je l'avais prié de venir chez moi
m'expliquer ce qu'il ressentait. Quand il vint me voir il me demanda
de ne pas insister devant lui sur ces idées d'infini « car cela me cause,
disait-il, un mal étrange ». Croyant provoquer tout au plus l'an-
goisse du scrupuleux, j'insistai sur les espaces qui s'ajoutent indé-
finiment aux autres espaces. Le malade se plaignit de ressentir
« des impressions de perdre la tète, de descendre » que nous
connaissons bien ; puis brusquement il se renversa en arrière et
pâlit, les globes oculaires se convulsèrent, il y eut des secousses
rapides dans tous les membres. Quelques instants après, il reprit
connaissance, mais il y avait une grande tache d'urine sur le
parquet au-dessous de lui. Le malade n'eut aucun souvenir de ce
qui lui était arrivé et reprit sa conversation avec une certaine
hébétude et de l'amnésie rétrograde. 11 était évident qu'il venait
d'avoir un accès épileptique, qui avait été le terme de l'angoisse
déterminée par la rumination sur l'infini. Depuis j'ai eu l'occa-
sion d'observer un certain nombre de faits exactement du même
genre.
Tous ces faits qu'il serait facile de multiplier me semblent
démontrer que la distinction complète établie par M. Mikie,
par MM. Pitres et Régis entre l'état psychasthénique et le mal
comitial est un peu exagérée. Je n'ai pas la pensée de les identi-
fier, je dis seulement qu'il y a dans ces deux maladies quelque
chose de commun, que leurs phénomènes sont voisins et peuvent
aisément se transformer les uns dans les autres. Cet élément
commun me paraît être l'abaissement, la chute de la tension psy-
chologique. Dans l'épilepsie vraie cette chute est énorme, il y a sup-
pression complète de la conscience, toutes les forces qui devaient
être employées à produire cette conscience amènent la décharge,
se dépensent en convulsions de tout le corps ; dans l'état psy-
LES OBSESSIONS. L — 33
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MlÉORIES PATHOGÉNIQUES
t est bien moins grande, mais il y a tout de
conscience qui détermine les sentiments
, leurs doutes et leurs angoisses.
\8 du niveau mental. — Influences
terminent l'abaissement
léories psychasthcniques qui considèrent les
ûsse, de rumination comme des crises de
s explique par un abaissement du niveau
r davantage qu'il existe chez les malades des
sprit ou d'une manière plus générale des
u mental et que ces oscillations sont en rap-
phénomènes observés dans les crises et sans
faut rechercher dans quelles circonstances se
idie des psychasthéniques, quelles sont les
jelleselle prend naissance, ou dans lesquelles
ndes augmentations quand elle existe déjà
ne s*agit pas ici d'une étude clinique sur
idie, étude que nous tenterons dans le cha-
une recherche psychologique sur les condi-
pement.
— Influence des maladies,
roupe de circonstances causales sur lesquelles
[iccord et qu'il suiTit de signaler ici. Ce sont
ces qui déterminent un aflaiblissement de
ladies infectieuses, la fièvre typhoïde surtout
e mes observations, Tinfluenza, la tubercu-
)uches, les accouchements, les suites de
it chez Kl..., Car..., Xa..., Vod..., Cht...
té l'occasion du début de la maladie ou de
jrès une période d'amélioration. En général
prit se manifeste après l'accouchement, après
lériode de fatigue et de convalescence, 11 se
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INFLUENCES QUI DÉTERMINENT L'ABAISSEMENT DU NIVEAU MENTAL 515
manifeste beaucoup plus rarement pendant la grossesse et pen-
dant les fièvres.
Toutes les circonstances qui déterminent d'ordinaire un
engourdissement physique sont mauvaises pour ces malades. La
période de la digestion leur est fatale. Wye... remarque qu'il a
toujours perdu sa confiance à 2 heures et qu'il la reprend à
5 heures. La matinée pendant laquelle persiste un peu l'engour-
dissement de sommeil ramène toutes les manies et toutes les
obsessions. Il n'y a rien que Dob... redoute autant qu'un demi-
sommeil. « Ce serait la cause de terribles angoisses, je n'ose
pas me laisser aller à l'assoupissement en voiture, en chemin de
fer; dès que mon intelligence ne serait plus bien en éveil je
serais reprise d'angoisses. »
2. — Influence de la fatigue.
Il en est de même pour les surmenages physiques ou moraux
qui semblent avoir déterminé des accidents chez Er... (i74)>
Ce..., Nadia, Mm..., etc. Legrand du Saulle avait déjà insisté sur
le rôle des troubles dyspeptiques, du travail intellectuel exagéré,
d'une vie dissolue V M. Tissié décrit très bien les phénomènes
d'abaissement psychologique qui suivent chez les jeunes gens la
fatigue exagérée : a Un exercice gymnastique trop violent, trop
prolongé, trop attentif, une marche à pied trop longue^ comme
un devoir d'arithmétique, l'audition d'une musique trop bruyante
produisent des actes impulsifs, des besoins de marcher, des
éructations, des expressions ordurières, du mutisme, de la bru-
talité, de l'entêtement, des miaulements, des répétitions de mots,
de l'inconscience morale^. » MM. Pitres et Régis insistent
beaucoup sur cette influence de la fatigue, et nous aurons à
reprendre cette question en traitant de l'évolution de la maladie.
Cette influence de la fatigue physique et morale est très inté-
ressante, il y a des malades chez qui on peut déterminer par la
fatigue des rechutes nettes d'une manière presque expérimentale.
Les obsessions de Za... deviennent plus violentes à la moindre
fatigue. Claire revient d'une ville d'eau où elle a passé l'été avec une
1. Legrand du SauUo, Agoraphobie, p. 56.
2. Tissié, Hevue scientifique, 1890. II, p. 643.
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INFLUENCES QUI DÉTERMINENT RABAISSEMENT DU NIVEAU MENTAL 517
3. — Influence des émotions.
Le problème le plus intéressant nous est posé par le rôle
pathogénique que jouent les émotions et surtout certaines émo-
tions. Dans les cas les plus connus que nous aurons à étudier plus
tard Témotion semble déterminer la nature de l'obsession, mais
ce ne sont pas, à mon avis, les cas les plus fréquents ni les plus
intéressants.
Il Y a des cas très nombreux où Tén^otion qui semble le début
de la maladie n'a aucun rapport avec les phobies ou les obses-
sions qui vont suivre. Lf..., comme on vient de le voir, est devenue
malade parce qu'elle a ramassé son neveu tombé mourant d'un
échafaudage. L'émotion était assez intense pour amener un trou-
ble et le sujet semblait antérieurement bien portant, mais ce qui
m'étonne c'est que la maladie consécutive est simplement l'ago-
raphobie qui semble avoir un rapport bien lointain avec la mort
du neveu. Cat..., instituteur, change de poste sur sa demande :
ce changement, la vue d'une école nouvelle l'impressionne ; il
est atteint d'une obsession criminelle et il est poursuivi par le
remords du meurtre d*un enfant. Chu... a des contrariétés de
famille et se dispute avec une belle-sœur, la voici qui prend la
phobie de la saleté et qui éprouve le besoin de se laver les mains
dix fois de suite. J'ai peine à voir dans ces obsessions ou ces ma-
nies, et on en pourrait citer cent du même genre, la reproduc-
tion de Témotion primitive.
Dans quelques cas Forigine de l'obsession se comprend assez
bien ; mais on voit que son contenu ne dépend en aucune façon de
l'émotion qui a cependant déterminé la maladie. L'obsession est
la reproduction d'un événement ou d'une idée très antérieure qui
au moment de son apparition n'avait déterminé aucun trouble
mais qui devient pathologique à l'occasion de l'émotion nouvelle.
Les faits de ce genre m'ont toujours intéressé : j'en ai décrit de
remarquables à propos des hystériques. En voici un que je rap-
pelle parce qu'il est typique. Un homme âgé de 29 ans, mécani-
cien de locomotive, est blessé grièvement dans un tamponnement,
il a une plaie grave au ventre qui n'est guérie qu'au bout de
six mois. Cependant il ne conserve aucun accident névropathique,
il ne reste pas impressionnable et il reprend son service sans
aucune difficulté. Onze ans après, à Tâge de l\o ans, il a une
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518 THÉORIES PATHOGÉNIQUÊS
grave émotion : il se réveille le matin près du cadavre de sa
femme morte subitement pendant la nuit. Eh bien à la suite de
ce bouleversement il commence des crises d'hystérie, dans
lesquelles il voit une locomotive se précipiter sur lui, dans
laquelle il a du météorisme abdominal avec une énorme hyperes-
thésie de son ancienne cicatrice indolente pendant onze ans.
On observe des faits tout à fait semblables chez les psychas-
théniques. Fé. . . , femme de ig ans, a éprouvé une vive contrariété :
la fille de son mari, qu'elle avait élevée comme son enfant, s'est
fait enlever par un amant, et n'a plus voulu rentrer chez ses pa-
rents. Fé... éprouve de Fennui à ce sujet, mais ne devient aucu-
nement obsédée et reprend régulièrement le cours de sa vie.
8 mois après elle doit subir une opération chirurgicale grave,
rhystérectomie totale. Cette opération lui a causé de grandes
angoisses et de grandes fatigues. Â la suite de cette opération
la voici obsédée par la pensée de la fugue de sa belle-fille :
« Cette fille s'en est allée de ma maison, tout le monde le sait,
c'est honteux pour moi. C'est moi qui suis coupable... etc. » et
la voici qui a des angoisses à la pensée de rentrer chez elle.
Lep..., femme de Sg ans, perd un fils de i8 ans, elle paraît
s'en consoler, et reste parfaitement raisonnable. lo mois après
elte fait une chute de voiture et en est très émotionnée. Elle
reste troublée, se plaint de ne plus voir les choses de la même
façon et se tourmente à propos de la mort de son fils : te si
j'avais cherché un autre médecin, si je l'avais envoyé à la cam-
pagne, il vivrait encore, c'est moi qui suis coupable, je devrais
me tuer, etc. » Jui..., homme de 38 ans, a été léché par un
chien dans la rue quand il avait Tâge de 25 ans, il en a été
ennuyé car il était déjà peureux, mais il a bien compris que ce
n'était rien. A 3o ans il se marie et cet événement lui détermine
bien des émotions; c'est à ce moment et à ce moment seulement
qu'il s'inquiète sérieusement à propos de ce chien qui l'a léché
il y a cinq ans et qu'il est pris d'une phobie de la rage. Il guérit an
bout de quelques mois. A 33 ans il perd un enfant et ce chagrin
ramène de nouveau la phobie de la rage, depuis il a eu nombre de
crises de cette même phobie toujours à propos d'émotions quel-
conques n'ayant aucun rapport avec le chien. « C'est désolant, je
ne puis avoir la plus petite émotion, même pas le dépit de rater
un omnibus, sans que cela me donne l'idée du chien enragé. »
J'avoue que dans ces cas j'ai de la peine à comprendre comment
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INFLUENCES QUI DÉTERMINENT L'ABAISSEMENT DU NIVEAU MENTAL 519
OU peut rattacher directement la phobie à rémotion, et à com-
prendre le rôle de Féraotion.
Enfin un dernier groupe me semble plus embari^assant encore,
c*est le groupe des cas très nombreux où Témotion détermine un
trouble qui n*est pas du tout Tobsession ou la phobie mais qui
est simplement une insuffisance psychologique. Dans le cas le
plus simple et qui se rapproche le plus des précédents, Témotion
crée simplement Témotivité. Des personnes qui n'étaient pas im-
pressionnables ou qui Tétaient modérément sont transformés
après un accident qui les a révolutionnés. Dorénavant elles éprou-
vent des émotions violentes pour la moindre des choses, elles ont
des perturbations physiologique remarquables avec troubles
cardiaques et respiratoires, avec de grandes angoisses pour des
faits insignifiants qui les auraient certainement laissées froides
auparavant. Morel, Freud, Pitres et Régis ont très bien décrit
des cas de ce genre sous le nom d'anxiété diffuse ou de pano-
phobie, « chaque événement, chaque incident de la vie devenait
ainsi matière à décharge pour son angoisse momentanément
spécialisée par le hasard *. »
J'ai observé un grand nombre de cas de ce genre que j'ai déjà
cités et que je rappelle brièvement. Cs... (4i) a accouché à Tâge
de 3i ans, elle se porte bien et se remet de sa fatigue quand trois
jours après l'accouchement la garde effrayée d'une grimace de
Tenfant laisse échapper une exclamation des plus sottes « oh.
Madame, s'écric-telle, le bébé a des convulsions, je crois qu'il va
mourir ». L'enfant n'avait absolument rien, mais la mère reste bou-
leversée, se plaignant de beaucoup souffrir dans la tête et dans les
épaules, gémissant et pleurant sans pouvoir s'arrêter. Depuis son
caractère est complètement changé : elle était autrefois vive,
mais suffisamment calme pour avoir dirigé une maison de com-
merce avec succès, pour avoir surmonté bien des difficultés.
Maintenant elle a à propos de tous les faits les plus insignifiants
des émotions épouvantables qui lui fout perdre la tète. Si un de
ses enfants tousse, si elle-même se mouche, si elle voit une
bouteille de pharmacie, si elle lit dans le journal le nom d'une
maladie, la voici affolée, souffrant d'horribles angoisses errant au
hasard dans la maison pour chercher quelqu'un qui la rassure. Il
1. Pitres cl Régis» op. cit., p. 19, 79.
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INFLUENCES QUI DETERMINENT L'ABAISSEMENT DU NIVEAU MENTAL 521
sances psychologiques, je remarque seulement ici qu'il a été le
résultat de violentes émotions.
L'émotion peut faire naître de même tous les phénomènes de
raboulie;je ne parle pas d'une aboulie immédiatement en rapport
avec les phénomènes émotifs et que l'on pourrait rattacher à l'in-
hibition ; mais d'une aboulie qui persiste sans que l'émotion se
renouvelle. AI... dans l'observation précédente est énormément
aboulique en même temps que tout à fait incapable d'émotion.
Cas..., femme de 52 ans qui a vu son fils tomber a l'eau, se sent
la tète gênée, ne peut plus faire aucune action ni suivre aucune
idée, en même temps elle a cessé « d'être impressionnable, elle
ne sent plus les joies, ni les peines, elle est indifférente atout ».
Enfin c'est l'émotion qui est la source principale de ces états d'in-
quiétude, de doute et de tous ces 3entiments d'insuilisance dont j'ai
déjà rapporté tantd'exemples. C'està la suite d'un chagrin d'amour
que Tr... devient aboulique et commence à ressentir les doutes
et les hésitations qui la caractérisent ; c'est à la suite d'une con-
fession que Claire se sent inquiète qu'elle sent « l'espoir et la
confiance s'en aller comme une lumière qui s'éloigne ». Nem...
est frappé par Taspect effrayant d'un mendiant qui s'adresse à
elle, elle reste impressionnée et depuis elle ne retrouve plus la
perception normale, elle trouve à tous les objets et surtout aux
personnes un aspect drôle, étrange. To... est bouleversée par une
déclaration obscène que lui fait un petit employé et depuis elle
doute de toutes les choses présentes, qui lui semblent avoir
perdu leur réalité.
Le sentiment de dépersonnalisation si remarquable de Ver...
et de Bei... a commencé chez tous les deux brusquement à la suite
d'une émotion. Ver... a été menacé par son patron qui tenait à la
main un instrument de fer et Bei... a lu dans un journal une his-
toire d'amour amenant des malheurs, des suicides et qui lui
semblait identique à ses propres aventures. Quand chez ces
deux malades le sentiment pathologique diminue c'est une nou-
velle émotion qui le fait réapparaître. « Ça m'a fait un effet dans
la tête et après ça me fait comme si ce n'était pas moi *. » On
pourrait facilement accumuler des exemples de tous les senti-
ments d'insuffisance psychologique ayant une seipblable origine.
Ces faits se rattachent encore moins que les précédents à l'expli-
I. Névroses et Idées fixes , 1898, II, p. 62.
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INFLUENCES QUI DÉTERMINENT L'ABAISSEMENT DU NIVEAU MENTAL 523
s'exercer tout d'un coup sur un groupe de souvenirs déjà consti-
tué, déjà rattaché à la personnalité. Le plus souvent ces souvenirs
dissociés par l'émotion seront simplement les plus récents et
Tamnésie déterminée par l'émotion prendra la forme bien connue
de l'amnésie rétrograde*. » « On constate des faits semblables
à propos des traitements par suggestion et par direction morale,
une éftiotion supprime tout le travail de restauration qui a été
accompli pendant la séance, fait réapparaître les anesthésies,
les paralysies, les idées fixes. Le travail du directeur pendant les
séances précédentes a été un travail de synthèse : il a organisé
des résolutions, des croyances, des émotions, il a aidé le sujet à
rattacher à sa personnalité des sensations et des images. Bien
plus, il a échafaudé tout ce système de pensées autour d'un centre
spécial qui est le plus souvent son nom et l'image de sa personne.
Le sujet a emporté dans son esprit et dans son cerveau une syn-
thèse nouvelle, passablement artificielle et très fragile, sur laquelle
l'émotion a facilement exercé sa puissance désorganisatrice^. »
Cette description convenait surtout aux hystériques, elle doit
être élargie pour pouvoir s'appliquer à nos malades pyschasthéni-
ques. Un des phénomènes de l'émotion, dirons-nous maintenant,
c'est de s'accompagner d'un abaissement marqué du niveau men-
tal, en entendant le niveau et la hiérarchie mentale dans le sens
oii nous l'avons précédemment défini. Elle ne produit pas seule-
ment la perte de la synthèse et la réduction à l'automatisme qui
est si visible chez l'hystérique, elle supprime graduellement sui-
vant sa force les phénomènes supérieurs et abaisse la tension au
seul niveau des phénomènes dits inférieurs.
C'est pourquoi dans cette hypothèse tous les faits précédents
me paraissent s'expliquer facilement. Dans l'émotion nous
voyons disparaître la synthèse mentale, l'attention, la volonté,
l'acquisition des souvenirs nouveaux ; en même temps nous
voyons diminuer ou disparaître toutes les fonctions du réel, le
sentiment et le plaisir du réel, la confiance, la certitude. A la
place nous voyons subsister les mouvements automatiques, les rumi-
nations et surtout les manifestations viscérales élémentaires que
l'on considère beaucoup trop comme la cause de Témotion et qui
n'en sont qu'une conséquence.
I. Névroses et Idées fixes, 1898, I, p. i/i4-
a. /<f., 1, p. 475.
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INFLUENCES QUI DÉTERMINENT L'ÉLÉVATION DU NIVEAU MENT
I . — Les ascensions du nweau mental.
Les malades présentent en effet assez souvent des amélioi
remarquables non seulement au moment de la guérison
encore au cours de la maladie. II est rare que la guérison s
d*une manière continue et graduelle ; presque toujours soi
fluence du traitement, ou sous Tinfluence de diverses ci
tances, les malades changent brusquement, se transformen
dant quelques heures ou quelques jours, puis retombent
leur état habituel. Ce sont ces périodes que j'ai déjà eu Toc
d'appeler des instants clairs^.
Ces périodes, par exemple, sont très nettes chez Lise, el
très intéressant de remarquer ce qui les caractérise. La r
est a ce moment en partie débarrassée de ses obsession
n'arrive jamais à s'en débarrasser complètement. Les idé<
constituaient sa rumination lui semblent s'éloigner, quoi<
les sente toujours tout près d'elle et prêtes à réapparaîl
premier appel, mais en somme l'esprit est beaucoup plus
et cesse les serments, les pactes, les discussions perpétuell
le remplissaient précédemment. En même temps je ren
chez la malade tout un ensemble d'autres changements.
Lise a sur elle-même des sentiments différents : elle s
moins partagée, moins divisée a enfin, dit-elle, je suis plus u
plus moi-même » comme elle se rend mieux compte d'elle-i
elle apprécie mieux ses sensations, elle n'a plus cet engoui
ment, cette diminution de la sensation de la douleur que
avions observée sur elle et elle se plaint maintenant d'une sen
de fatigue « à laquelle elle ne faisait pas attention aupara>
Cette sensibilité ou plutôt cette faculté de donner plus d'att
aux sensations et aux perceptions présentes existe aussi au
et la malade paraît changer de caractère. Elle devient pli
oeplible, plus impressionnable et supporte moins facilemei
foule d'ennuis de sa situation, qu'elle ne remarquai! mên
auparavant. L'activité également a augmenté, ses parent
étonnés de la trouver plus en train, plus vivante, moins ter
en effet la voici qui peut travailler, s'occuper de l'éducation
enfants, lire et s'intéresser à sa lecture, etc. Enfin je note <
1. Revue philosophique, 1891, et Névroses el Idées fixes y 1898, I, p. 49-
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52G THÉORIES PATHOGÉNIQUES
sommeil est devenu plus profond et plus calme, quelquefois elle
se réveille en sursaut étonnée de ne plus dormir à sa façon ordi-
naire et de se laisser aller au sommeil profond sans rien ruminer.
Le sommeil hypnotique même et la suggestion semblent avoir
augmenté d'une façon sensible.
Les mêmes observations peuvent être faites sur Claire. Il y a
des moments où elle n*est plus au fond de son précipice et ne se
croit plus une personne aussi indigne. «Je reconnais, m'écrit-elle,
que depuis trois mois j'ai été moins tourmentée, que vous avez
secoué mon engourdissement et que je suis remontée. » Elle ne nie
plus le bien qu'elle peut faire, elle a un sentiment a d'être meilleure,
de revenir dans la bonne route, de traverser un mur qui la gênait. »
La confiance en Dieu et la foi dans la religion reviennent. Il est
très intéressant de remarquer à ce propos que la croyance revient
Bans que le sujet ait rien lu, rien entendu de nouveau sur la reli-
gion. De même que la foi est partie sans qu'il y ait eu de discus-
sion, de même elle revient sans qu'il y ait eu de démonstration,
tellement les raisons proprement intellectuelles sont pour peu de
chose dans ces croyances.
Claire signale en même temps d'autres changements : les idées
sont moins vagues, plus précises, moins compliquées, les souvenirs
sont plus nets, « j'ai été vraiment mieux, dit-elle, extérieure-
ment comme au dedans, j'étais plus gaie, plus active, c'est que
j'avais passé plusieurs personnes, j'avais traversé une mauvaise
personne qui me faisait peur, j'avais beaucoup moins de person-
nes en moi, mes idées s'enchaînaient mieux, j'avais presque l'unité
de l'esprit. Je me suis intéressée davantage à ce qui se passait
autour de moi, tout me paraissait plus réel et plus facile, oui
j'étais tout près de la réalité et aussi de la religion, il me sem-
blait que j'étais plus près des choses, je les reconnaissais mieux
quoique je ne les avais pas vues depuis longtemps, mon sommeil
même était plus réel et mes rêves plus nets, car j'en avais moins
à la fois )>.
Ces deux exemples sudisent car les autres seraient analogues
pour nous montrer que dans ces instants clairs tous les symptô-
mes se modifient dans le même sens. Les obsessions s'éloignent,
les ruminations et les phobies diminuent, mais en même temps,
les sentiments d'incomplétude disparaissent et l'on assiste à une
restauration des phénomènes psychologiques supérieurs, de la
volonté, de Tuttention, des fonctions du réel. La transformation
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INFLUENCES QUI DÉTERMINENT LÉLÉV/VTION DU NIVEAU MENTAL r.27
atteint même les fonctions physiologiques, les digestions sont
meilleures; « quand j'ai de l'excitation cérébrale, dit Gisèle,
quand je sens du plaisir et de Tunité dans mon esprit, je digère
bien, il me faut une petite fièvre d'enthousiasme pour m'aider à
digérer, » bien mieux des malades qui ont d'ordinaire beaucoup
de pertes blanches, voient se tarir ces sécrétions vaginales pen-
dant les périodes d'ascension morale. En un mot la plupart des
symptômes neurasthéniques qui ont été énumérés, se modiBent
favorablement en même temps que l'esprit lui-même.
Il en résulte que ces ascensions nous posent un problème
comme les abaissements. De ces différents phénomènes qui se
modifient ensemble, lequel faut-il considérer comme primitif?
Quel est le phénomène qui se restaure le premier et qui par sa
restauration amène la modification constatée dans tous les autres ?
Pour le savoir il faut chercher quelles sont les conditions qui
déterminent ces améliorations même passagères et sur quel phé-
nomène elles ont agi primitivement.
Je ne crois guère que cette modification commence par les
obsessions proprement dites. Il semble bien difficile d'agir direc-
tement sur ces idées qui obsèdent les malades. Une des choses
qui surprend le plus, quand on examine des obsédés, c'est l'im-
puissance du raisonnement. On veut tout d'abord démontrer au
malade l'absurdité de l'idée qui le tourmente et on essaye de le
convaincre qu'il est inutile de s'en préoccuper. Claire prétend
en gémissant qu'elle serait guérie si elle croyait à l'existence de
Dieu et Lise promet de retrouver la tranquillité si elle sait que
le diable n'existe pas : on se laisse entraîner à éprouver la force
des arguments philosophiques. Hélas leur résultat est bien mé-
diocre ; les malades font semblant d'écouter, ils discutent quel-
quefois et avec finesse, mais on peut continuer la conversation
pendant des heures sans modifier en rien leur état d'esprit.
Quand on les voit s'améliorer, la logique n'y a été pour rien ;
Claire retrouve la foi en Dieu sans avoir trouvé aucun argument
nouveau et Lise renonce à se préoccuper du démon sans avoir
mieux compris les arguments contre le dualisme. Leur améliora-
tion a son origine dans un phénomène plus profond que les idées
de la raison.
Quelquefois surtout au début ces améliorations surviennent
sans raison bien apparente. Claire, au début de sa maladie, vers
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INFLUENCES QVl DÉTERMINENT L'ÉLÉVATION DU NIVEAU MËNTaL b^
ces malades, Mb... s'en est bien trouvée pendant plusieurs mois,
Qsa... continue sa digestion tranquillement et arrête sa crise des
efforts de vomissements après une piqûre d'un centigramme de
morphine. Bien entendu ces malades finissent par ajouter la
morphinomanie à leurs autres misères. Quelques-uns se bornent
à une excitation moins dangereuse, celle de Talimentation. Ppi...,
agoraphobe et timide, a toujours dans sa poche un fort morceau
de pain et de jambon, dont Tingestion faite à propos lui donnera
l'assurance nécessaire.
D'autres procédés physiques seront également utiles, Bei...,
Wye... retrouvent leur personnalité pour un moment quand elles
prennent une douche froide. « De l'eau bien froide sur la tête,
dit Jean, et pour un moment l'on saisit le monde extérieur un
peu plus fortement ». Il en est ainsi chez beaucoup de malades
pour un temps malheureusement court. Pour quelques-uns il
suffit « d'une belle matinée ou d'un beau temps » pour dis;3iper
les gênes et les obsessions a que le soleil me rie et me voilà
honnête homme ». On verra dans l'étude de l'évolution l'influence
remarquable de certains états comme la grossesse et la fièvre :
ce sont toujours des excitations qui déterminent ces instants clairs.
3. — Influence du changement.
Si nous passons maintenant au point de vue moral, nous de-
vons signaler le bon effet des changements : Claire va mieux
quand elle rentre chez elle après une absence. « J'ai été mieux
en arrivant, plus heureuse, plus gaie, et moins tourmentée,
comme la dernière fois, je voyais les choses plus nettement, tout
me semblait plus facile, moins compliqué. Je me suis moins aper-
çue de l'engourdissement que j'ai d'ordinaire ; il était un peu
passé, j'ai été certainement plus active, plus énergique. Je le suis
encore, mais cela diminue et il m'arrîve de nouveau de rêver, je
n'ai été bien que quelques jours. Ce qui m'ennuie c'est que j'ai
de nouveau des images (ses pseudo hallucinations sacrilèges).
Elles s'étaient calmées au commencement, à mon retour ; elles
reviennent maintenant davantage... » « Lise fait les mêmes re-
marques; je suis mieux pendant quelques jours quand je retourne
à la campagne, quand je change de séjour, cela me fait remonter
de voir un endroit ou des personnes que je n'ai pas vus depuis
longtemps. » On peut répéter cette observation sur Vi... et sur
LES OBSESSIONS. l. — 34
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^30 THÉORIES PATHOGÉNIQUES
la plupart des malades : « il me faut, dit Gisèle, Tinédit, le sor-
tant de Tordinaire pour respirer un peu. »
Indépendamment du changement certains milieux sont plus
favorables aux malades. Je croyais à une opinion individuelle peu
justifiée, quand Jean me répétait qu'il avait besoin de vivre
à Paris et qu'il était beaucoup plus malade et malheureux eu
province et surtout à la campagne. Cette opinion me parais-
sait bizarre dans la bouche d'un individu phobique qui a peur des
femmes, peur de la foule, peur des voitures. Mais j'ai remarqué
que la même affirmation m'a été faite d'une manière tout à fait
indépendante par Za..., par On..., par Lise et par plusieurs autres
et j'observe qu'ils ont raison. Paris leur donne, il est vrai, plus
d'occasion de phobies et, si leur maladie n'était que de l'émoti-
vité, ils devraient le fuir. Mais Paris leur donne en même temps
des occupations, des distractions, en un mot des excitations.
« Cela me fouette, me fait vivre, me fait marcher plus vite. » Et
comme leur émotivité est, si je ne me trompe, la conséquence de
leur engourdissement, ils sont, quoique ce soit paradoxal, moins
émotifs b Paris. Jean a plus peur des femmes dans sa campa-
gne isolée que sur les boulevards.
4. — Influence du mouvement et de l'effort.
En dehors des circonstances extérieures il y a évidemment des
actions, des modifications morales du sujet qui ont une influence
favorable, par exemple le mouvement, l'agitation physique e?t
plutôt une bonne chose. Lise remarque très bien que le mouve-
ment diminue ses idées et que l'immobilité est dangereuse. Il est
vrai que le mouvement lui devient de plus en plus pénible, quand
les idées l'envahissent et que dans les crises graves de rumina-
tion elle va être réduite à une immobilité complète ; mais elle
peut arrêter une crise si elle se lève, si elle sort assez à temps.
Aussi ne faut-il pas dire que les crises d'efforts de Claire soient
complètement maladives ; actuellement ces agitations sont deve-
nues tout à fait absurdes et sont le résultat d'une manie, mais
au début la malade sentait une amélioration après ces séances
de contorsions « je me voyais mieux, je me rendais mieux compte
de mon engourdissement, c'était bon signe ». Après des séances
véritablement convulsives qu'on peut exciter chez elle, en diri-
geant ses efforts elle est comme transformée, elle sort et elle
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INFLUENCES QUI DÉTERMINENT L*ÉLÉVATION DU NIVEAU MENTAL ^3t
agit le reste de la journée sans hésitation. Lise dit souvent qu'elle
a besoin d'une crise de nerfs et certaines observations me font
croire qu'elle a en partie raison.
II en résulte certains genres de traitement bizarre que les ma-
lades réclament eux-mêmes. Quand j'avais essayé d'hypnotiser
Lise, je lui avais suggéré, pour vérifler son état, des contractures.
J'ai remarqué bien souvent que les contractures présentées par
elle n'avaient rien de réel et ne ressemblaient pas aux contrac-
tures hystériques provoquées dans les mêmes conditions : le sujet
restait toujours maître de défaire ses contractures quand il le
voulait et en somme il ne maintenait la position du bras ou de la
jambe que par bonne volonté, par désir d'obéir et de faire réus-
sir un traitement. J'étais donc disposé à considérer ces contrac-
tures comme insignifiantes, je fus surpris de voir que la malade
les réclamait et disait s'en trouver fort bien, il lui fallait des con-
tractures de plus en plus fortes, de plus en plus générales. En
somme, comme je suis convaincu qu'il n'y avait là presque rien
de suggestif, c'était elle qui par des efforts volontaires, inouïs, se
raidissait tout le corps dans des positions bizarres. Elle était
couverte de sueur et visiblement fatiguée de maintenir ainsi des
attitudes pénibles : après de pareils travaux qui n'avaient pour-
tant aucun rapport à ses scrupules, elle se sentait beaucoup
mieux, l'esprit plus unifié, elle avait une meilleure notion de sa
personnalité et avait la tête beaucoup moins encombrée. Elle
conserve le sentiment que ses spasmes ne vont jamais jusqu'au
bout ce qui est vrai d'ailleurs, mais que l'effort pour les former
relève et transforme son esprit. On peut répéter l'observation
sur Claire, et on obtient les mêmes résultats.
5. — Influence de V attention.
On peut faire les mêmes remarques à propos de l'attention qui
demande des efforts du même genre : Gisèle dit très bien
qu'elle a besoin de s'intéresser à quelque chose qui excite sa cu-
riosité par le mystère et qu'elle va bien mieux quand elle fait
des efforts d'attention. Une idée pénible qui la force à penser
modifie non seulement ses scrupules mais aussi son estomac et
Taide à digérer. Pot... me disait aussi que si une chose attire suffi-
samment son attention elle reprend le sentiment de la réalité
comme autrefois et Claire parvient à se retrouver par l'attention.
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ti32 THÉORIES PATHOGÉNFQUES
Elle fixe fortement son esprit sur une idée ou un sentiment et se
fatigue la tête pour retrouver cette idée ou ce sentiment tels qu'ils
étaient autrefois. Elle essaye de me parler, d'arriver à le faire
avec précision, elle travaille à prier en se donnant tout entière
à ce qu'elle faisait. « Je rassemble toutes mes forces pour trouver
un passage dans mon esprit, pour arriver à un instant clair,
pour saisir une idée et quand je suis arrivée à dire quelques mots
en les pensant moi-même comme autrefois, je retrouve Tespoir,
la confiance et je sais très bien que tous mes reproches sont ridi-
cules. Seulement cette attention est de plus en plus difficile, j*ai
eu besoin de faire en môme temps des efforts physiques et j'ai
fini par répéter mes contorsions pendant des heures sans tra-
vailler réellement, alors elles ne servent à rien. »
Ce travail pour éclaircir les idées existe chez Lise et quelque-
fois il n'est pas mauvais, il ne se confond pas avec une manie de
recherche ou une rumination stérile ; elle a travaillé pendant
quatre jours pour éclaircir une idée et elle a eu ensuite l'esprit
beaucoup plus clair. On retrouve ces efforts chez Nadia, quand
on l'a forcée à faire une visite à son père, quand elle a réussi à
écouter la conversation, à se surveiller: elle reste ensuite infini-
ment mieux. On les retrouve aussi de la même manière chez
Tr... et Vy. .., etc.
Bien entendu j'ai cherché à tirer parti de ce fait au point de
vue thérapeutique et au point de vue expérimental, j'ai essayé de
forcer ces malades a fixer leur attention sur divers points. Ce
n'est pas facile, car nous avons déjà remarqué la difficulté, la mo-
bilité de leur attention. Lise ne comprend rien aux raisonnements
philosophiques sur les sujets qui touchent à sou idée fixe, mais
on peut fixer son attention sur d'autres points. Une difficulté cu-
rieuse que l'on rencontre chez elle, c'est qu'elle est très habituée
à suivre plusieurs idées à la fois et à ne donner qu'une petite
partie de son attention; quand on réussit à la fixer tout entière
pendant quelque temps elle est transformée. « C'est un manque
de vie, que j'ai dans la tête et quand je suis parvenue à la secouer
un peu je n'ai plus ce besoin bizarre de m'analyser, de me sur-
veiller. » Nadia, Lkb..., etc., m'ont présenté les mêmes heureux
résultats de ces fixations de l'attention. Chose plus curieuse, Ver...
etBei..., qui ont toujours perdu leur personnalité, la retrouvent
quand je les force à faire une extrême attention aux sensations
qu'ils éprouvent. Ver... est tout étonné de constater que ses mains
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INFLUENCES QUI DÉTERMINENT L'ÉLÉVATION DU NIVEAU MENTAL 533
sont bien ses propres mains. « Je suis changé pour quelques
heures en vous quittant et puis cela retombe. »
Cette remarque soulève une difficulté assez grave : dans un
chapitre précédent nous avons constaté que beaucoup de ces
malades présentaient le maximum de leurs troubles au moment
de l'attention et qu'ils semblaient beaucoup mieux pendant les
états de distraction. M. Bernard Leroy a remarqué l'opposition
de ces deux faits et m'a déjà reproché cette contradiction *, je ré-
pondrai d'abord que la contradiction appartient aux malades et
non à moi et que je me borne h constater des faits que notre
ignorance fait paraître contradictoires. Je crois ensuite que ces
faits peuvent se comprendre.
Dans le premier cas, il y a chez ces malades insuffisance d'at-
tention, les phénomènes psychologiques supérieurs s'accom-
plissent insuffisamment, il en résulte que le trouble se produit
surtout quand ils essayent d'exercer ces fonctions qui sont in-
suffisantes et que le trouble n'apparaît pas quand ils se bornent
aux fonctions inférieures qui ne sont pas lésées.
Dans le second cas, on pousse le sujet à rétablir momentané-
ment son attention, à augmenter sa tension mentale. Si on y
réussit, il est tout naturel que l'on ne retrouve plus les mêmes
troubles apportés par une attention défaillante. En un mot, il n'y
a pas de contradiction parce que dans le premier cas on étudiait
l'attention malade, et que dans le second on examine l'attention
momentanément guérie.
Quoi qu'il en soit il résulte des faits précédents que les malades
n'arrivent à un état meilleur, ne sont débarrassés de leurs senti-
ments anormaux et de leurs obsessions qu'en se maintenant par
des efforts de volonté et d'attention quelquefois très considé-
rables. <c Je suis bien, dit Gisèle, dans l'excitation et je suis mal
dans la détente et il faut que je m'excite tout le temps. Il faut
que je cherche des travaux difficiles pour me tenir en haleine,
que je sois dans un effort perpétuel. » On devine la consé-
quence, c'est qu'une guérison pareille est horriblement fatigante
et que les malades vous répètent : « rien n'est si pénible que de se
maintenir ainsi perpétuellement tendu. » Claire dit qu'elle par-
1. Bernard Leroy, L'illusion de dépersonnalisation. Comptes rendus du /!'• Con-
grès de Psychologie de 1900.
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INFLUENCES QUI DÉTERMINENT L'ÉLÉVATION DU MVEAU MENTAL 53o
6. — Influence de V émotion.
Nous arrivons à une autre cause de ces oscillations ascendantes,
bien intéressante et qui soulève de curieux problèmes, ce sont les
sentiments et les émotions.
Il est d'observation banale que Témotion peut relever le niveau
mental et j'ai été frappé par cette curieuse observation psycholo-
gique finement décrite par le romancier anglais Rudyard Ki-
pling'. Son héros Kim, après une grande fatigue, «sentit sans
pouvoir l'exprimer par des mots que son âme ne s'engrenait
plus à ce qui l'entourait, roue sans rapport avec aucun méca-
nisme... )). Après quelques émotions heureuses « il se mit h pleu-
rer et il sentit avec un déclenchement presque imperceptible les
roues de son être remboîtées de nouveau sur le monde extérieur.
Les choses qui un instant auparavant traversaient le globe de ses
yeux sans rien signifier reprirent leurs proportions conve-
nables. Les routes étaient faites pour y marcher, les maisons pour
y vivre, le bétail pour être mené, le sol pour être cultivé et les
hommes et les femmes pour leur parler. Ils étaient tous réels, sur
leurs pieds, parfaitement intelligibles, argile de son argile, ni
plus, ni moins ».
On constate d'abord sans trop d'étonnement que certaines
émotions particulières qui sont connues comme agréables et
excitantes, que l'on appelait déjà sthéniques sans bien com-
prendre pourquoi, puissent produire ce bon effet et aug-
menter momentanément la tension insuffisante, (c Les émotions
excitantes, riistige, sont des émotions qui font entrer dans la
conscience un quantum de représentation réelle plus grand
qu'elle n'en peut ordinairement contenir' ». Il suffit quelquefois
a Qsa... d'entendre de la musique et surtout de la musique
militaire pour qu'il ressente un frisson dans tout son corps et
puisse digérer sans phobie. Le plaisir d'avoir acheté un cheval
le fait digérer parfaitement et sans la moindre émotion un fort
déjeuner. Jean a été invité à un dîner où il devait se rendre en
habit. Inutile de dire avec quelles protestationsv il a recueilli
cette proposition, quelles terreurs l'ont envahi et en présence de
I. Rudyard Kipling, Kim, 1901, ch. XV.
a. Ribol. La Psycholofjie allemande contemporaine, p.
a3.
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530 THÉORIES PA'
quelles indécisions, de quelles s
un peu par curiosité, je me suis
Tascendant possible j'ai exigé q
premier pas franchi, tout se p
Jean redoutait tellement furent
bien obligé de constater qu'il c
autre. Le résultat de cette émo
incroyable : Jean fut transformé
il oublia Charlotte, la femme c
les fluides, etc. Il en fut ainsi d:
chaque fois que Ton parvenait i
succès.
Lo... a présenté une résurrect
d'une émotion heureuse qui a
lamentables. Cette jeune fille,
années, aboulique et étrangère à
vivement recherchée par un jeun
recherchée, la joie des fiançailles
extraordinaire. Le caractère de\
naissable : gaie, active, pratique
pour la première fois et descei
stupéfaite de son enthousiasme
entreprenait une vie nouvelle. L
après quelques jours de mariag
sion, dégoût de la vie, incertil
personnalité, aboulie et ruminati
et quelques semaines après une
Une émotion en particulier ser
manière remarquable, c'est Véirn
facilement insister sur ce point
évident par toutes les confident
d'excitations quand il réussit es
amélioration manifeste. Quand
excitation complète elles retrou
mentale. Dans tous les cas de ce
a augmenté la tension mentale
qu'elle était sthénique, cela n'
beaucoup se déclarent satisfaits.
Les choses sont loin de se pn
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INFLUENCES QUI DÉTERMINENT LÉLÉVATION DU NIVEAU MENTAL 537
des cas, j'ai pu observer que le même effet absolument heureux
était déterminé par des émotions quelconques et même par des
émotions tristes considérées d'ordinaire comme dépressives.
Voici une observation qui a toute la valeur d'une expérience.
Claire vint un jour me voir dans un état lamentable : elle se
sentait divisée en une foule de personnes, elle se sentait auto-
mate et cependant mauvaise, elle était envahie par toutes les
obsessions scrupuleuses et par toutes les hallucinations sacrilèges
et obscènes. Je ne parvins pas à fixer son attention, par aucun
moyen je ne pus la faire remonter. Le même jour, je fus obligé
d'aller voir sa mère qui l'avait accompagnée à Paris et qui était
malade depuis plusieurs jours d'une affection grippale. Je me
suis trouvé en présence d'une femme âgée, depuis longtemps
emphysémateuse au plus haut degré, ayant un cœur irrégulier et
qui était atteinte de broncho-pneumonie. Je ne pus m'empêcher
de dire à sa fille que j'étais inquiet et qu'il fallait prévenir sa
famille d'une maladie très sérieuse. Claire fut très impressionnée
de cette nouvelle a laquelle elle ne s'attendait pas. Mais cette
secousse eut un effet inattendu celui de la transformer complète-
ment. Il ne fut plus question du membre viril et des hosties, les
ruminations et les angoisses disparurent comme par enchante-
ment; devant cette émotion réelle l'esprit retrouva son unité et
la volonté son énergie. Ce fut évidemment peu durable, mais
pendant plusieurs jours la restauration de l'esprit fut complète
sous l'influence d'une émotion grave et évidemment pénible.
J'ai recueilli bien des exemples de ce fait sur la même malade.
Au moment de la mort de éon père elle a eu urne véritable guéri-
son pendant trois mois, a J'avais des chagrins réels, mais les cha-
grins réels sont beaucoup moins pénibles que les reproches ima-
ginaires de ma conscience, j'étais plus énergique, j'avais plus de
volonté, ce qui m'a étonnée c'est que jamais je n'ai si bien dormi,
calme, sans rêves, sans cauchemars. » Frappé de ces faits, je lui
ai demandé de s'observer sur ce point et voici ce qu'elle m'a
écrit : « Depuis que je suis malade, les émotions me font revenir ;
au commencement elles me faisaient revenir tout à fait ou presque
tout à fait; quand elles étaient fortes, je me réveillais comme
d'un rêve, je me trouvais absurde et j'espérais de nouveau... Je
sentais que je m'engourdissais, que j'avais besoin d'émotion, le
calme me faisait peur, je cherchais les peines, les joies, les peurs
pour me retrouver heureuse, je faisais des efforts pour que ces
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THÉORIES PATHOGÉNIQUES
sent complètes et claires. Une foîs l'idée d'un mariage
;ait m'a fait remonter tout d'un coup, une autre fois
cheval emballé m'a fait revenir à la réalité l'espace
heures, mais le souvenir m'en est resté longtemps, il
b et me dirigeait comme une lumière qui m'indiquait
suivre... Plus j'ai été, moins j'ai senti les vraies
I sait qu'elle distingue ainsi les émotions réelles en
la réalité des angoisses pathologiques), je trouvais
s plus de cœur, que j'étais endurcie, que je n'aimais
avant. Aussi j'ai faim d'émotions, même de souf-
ire maintenant quand une émotion arrive à me secouer
remonter mieux que tous les raisonnements. » H est
mfirmer ces remarques : la première visite qu'elle
re à son retour, une menace prise au sérieux, une
te que je lui fais ont des résultats remarquables. Si je
faire pleurer, ses obsessions s'effacent pendant une
jours.
xactement les mêmes observations sur Lise. Quand
ifants malades, ou des ennuis sérieux, elle est mieux
ûeurs jours ; sans la connaître, elle parle exactement
re et réclame des ennuis pour la faire revenir. Il est
e temps en temps de lui faire une scène et surtout de
»érieusement de l'enfermer comme aliénée, «Décidé-
le, il n'y a que la peur qui me fait marcher. »
lus de scrupules quand son mari est très malade. Ges...
our plusieurs jours parson entrée à l'hôpital. Bji...,
l'idée d'épouser son jardinier, pour s'abaisser car
indigne de tout, est momentanément guérie quand
î <c l'émotion m'a remontée et rendue plus hardie ».
isformé par des reproches et même par des peurs,
la joie de ses petits succès, et Tr... s'améliore quand
ne scène violente. Enfin ce qui semble extraordi-
scrupuleuse obsédée par les prières et par les
fait nauTrage au cours d'une excursion maritime,
ent elle n'a pas été troublée par cet accident très
e navire s'étant échoué à la côte pendant la nuit,
est montrée très courageuse et elle s'est très bien
lement pendant tout le mois suivant,
s citer beaucoup d'autres exemples, le fait me parait
t établi : les émotions, même les émotions les plus
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W^Wf^Sr
INFLUENCES QUI DÉTERMINENT L'ÉLÉVATION DU NIVEAU MENTAL 539
pénibles, peuvent déterminer chez ces malades des oscillations
ascendantes du niveau mental avec augmentation de la tension
psychologique, retour des phénomènes supérieurs et disparition
des états obsédants.
Ce fait est très remarquable parce qu*il se trouve en contra-
diction complète avec un autre fait capital sur lequel est même
fondée la théorie émotionnelle c'est que les émotions sont le point
de départ de la maladie. L'émotion, avons-nous constaté cent fois,
a déterminé la chute de la tension et donné naissance aux senti-
ments pathologiques et aux obsessions. Je constate cette contra-
diction, je la regrette car je la trouve plus grave que la contradic-
tion précédente à propos de l'attention, mais je ne crois pas
devoir chercher à la dissimuler. La terreur exagérée de la contra-
diction est la marque d'un esprit de système, elle n'a pas de rai-
son d'être dans de semblables études : il est bien entendu que nos
hypothèses sont tout h fait provisoires et qu'elles ne donnent
qu'une synthèse approximative de ces phénomènes encore si
mal connus. Tout ce que nous pouvons leur demander c'est de
mettre un peu d'ordre dans la classification de phénomènes trop
nombreux et trop confus, il ne faut pas être surpris outre mesure
si elles laissent subsister çà et là quelque incohérence et quelque
contradiction.
Cette difficulté nous montre que l'émotion est un phénomène in-
finiment plus complexe qu'on ne le suppose et dont les éléments
ne se présentent pas toujours de la même façon quand les circon-
stances varient. Il y a évidemment dans l'émotion deux groupes de
phénomènes : i° des phénomènes inférieurs, évocation d'images,
réactions viscérales variées, 2° il doit y avoir aussi dans l'émotion
des phénomènes supérieurs, spécialisation de l'émotion, adapta-
tion exacte de l'émotion à la situation réelle et actuelle. Les émo-
tions sont plus basses si la première catégorie de phénomènes y
prédominent, plus élevées dans le cas contraire. Si les émotions
sont très inférieures, elles provoquent une dérivation considéra-
ble et un épuisement à la suite duquel la tension nerveuse peut
rester insuffisante. Si au contraire les émotions sont surtout ca-
ractérisées par leurs phénomènes supérieurs, si elles surviennent
à un moment favorable quand l'esprit n'a besoin que d'une exci-
tation pour s'élever à une tension supérieure, on peut s'expliquer
que l'effet d'une émotion soit exactement inverse du précédent.
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:\rifm
TIlÉOlllES PAÏUOGÉNIQUES
uelques observations relatives à Wo..., celte malade
mental est relevé par un naufrage, qui peuvent non
p problème mais mettre sur la voie de certaines recher-
. J'ai observé que cette malade, si courageuse en face
je, succombe devant de très petites émotions. Elle avait
jiano et Tattendait avec impatience : en traversant Taotl-
11e est surprise de voir la porte d'entrée de Tappartenient
Inerte et de voir apporter son piano. C'est là une émo-
elle semble une émotion légère et plutôt une émotion
thénique. Cependant, cette émotion bouleverse complète-
>rit de la malade : Wo... n'éprouve pas la joie qu'elle
h éprouver, elle est horriblement agitée. Il lui semble
pense pas librement, qu'elle est dominée, qu'elle est
faire des vœux, des pactes. L'agitation continue, amène
5 de manie mentale ; Wo... s'interroge, recherche
îment les pensées qu'elle a eues en voyant entrer le
Lir savoir si à ce moment elle a fait des vœux et des
le devient tout à fait malade pendant quinze jours,
ui est singulier : une femme qui supporte très bien
d'un naufrage au milieu de la nuit, tombe malade
n lui apporte un piano qu'elle <lésirait! Sans prétendre
les faits, voici les quelques remarques que j'ai pu faire
. Quand le danger est grave soit pour le sujet lui-
r exemple dans le naufrage de Wo...,soit pour une
aimée, par exemple dans la maladie de la mère de
y a un violent effort, déterminé par les tendances
lei effort amène l'adaptation, l'émotion correcte sans
ni mental. Quand la situation est insignifiante, il n y a
fort et l'émotion prend le caractère inférieur et dange-
e première remarque nous ramène aux études précéden-
ifluence de l'effort et de l'attention.
Te remarque importante m'est suggérée par certaines
[ue je retrouve chez Lise et surtout chez Wo... Ces
edoutent surtout l'émotion rapide et brusque, elles
t que l'émotion mette un certain temps à se
r pour qu'elles aient le temps de s'y adapter. « Je
tis été malade, répète Wo..., si j'avais vu ou entrevu par
la voiture qui apportait le piano, si j'avais pu prévoir
ait, si j'avais eu quelques instants pour me préparer au
le voir arriver... C'est ce que je fais toujours avant toute
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INFLUENCES QUI DÉTERMINENT L'ÉLÉVATION DU NIVEAU MENTAL 541
émotion, quand je suis un peu prévenue, je me prépare à tel ou
tel sentiment, je me dis : il faut être calme, ne pas m'embrouiller,
ne pas faire de vœu, penser uniquement à ceci ou à cela... Dans
le naufrage j'ai été réveillée par mon mari qui m'a prévenue qu*il
se passait quelque chose. J'ai eu le temps de me dire que c'était
grave, qu'il ne fallait pas perdre la tète, et quand je suis montée
sur le ponty j'étais préparée et c'était moi la plus courageuse. »
Tout cela est d'une analyse bien intéressante : Ces malades, nous
le savons, sont des esprits lents, il leur faut du temps pour la
décision, pour l'attention, pour l'émotion réelle, surtout quand
l'événement n'est pas très grave et très excitant par les tendances
qu'il réveille. 11 en résulte qu'ils adaptent beaucoup moins bien
leurs émotions aux événements insignifiants et qu'il leur faut alors
un certain temps de préparation entre le signal et l'émotion elle-
même. Quand ce temps ne leur est pas laissé, l'émotion se produit
d'une manière incomplète avec prédominance des phénomènes
inférieurs et elle amène à sa suite une dépression.
Telles sont les quelques remarques encore très incomplètes
que l'on pourrait faire pour expliquer l'action si différente de
l'émotion qui est, suivant les circonstances, tantôt déprimante,
tantôt excitante.
Quoi qu'il en soit de ces explications qui sont peu importantes
et qui montrent simplement la complexité des émotions et notre
ignorance, les malades connaissent bien cet effet de l'émotion et
il en résulte chez eux une recherche de l'émotion excitante qui
est un trait de leur caractère : « Que voulez-vous, dit Gisèle, je
suis toujours ardente à rechercher ce qui m'enthousiasme ; j'en
ai tant besoin, j'éprouve les impressions d'un cœur qui a faim,
d'un cerveau qui a faim, c'est un besoin intense de sensations,
d'émotions extraordinaires et si je me laisse aller à ce sentiment
(un amour bizarre) cela me fait l'impression du grignoter un peu
pour ne pas mourir de faim. » J'ai rencontré des jeunes femmes très
curieuses sur ce point: Plo... est d'ordinaire assez calme, puissous
l'influence d'une fatigue quelconque, elle ressent un horribleabaisse-
ment avec dégoût de la vie, impuissance, état de rêve, etc. « Elle
devine que pour sortir de cet état il lui faut une excitation émotive.
Alors malgré elle sa tète imagine les aventures les plus baroques,
les expéditions les plus aventureuses et les plus contraires à la pu-
deur commune et elle a des tentations inouïes de s'y lancer à corps
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^■^^
INFLUENCES QUI DÉTERMINENT L'ÉLÉVATION DU NIVEAU
vemeats très variés du biveau mental. Certains malad
très facilement dans les deux sens, comme Gisèle qi
a parce qu^elle a regardé la figure de son mari» et qui a es
parce qu'elle a regardé la statue de Notre-Dame des
D'autres restent abaissés pendant de longues période
d'une forte dépression et remontent lentement ; il en
grandes variétés que nous aurons à étudier à propos de
On voit d'après ce résumé trop bref l'importance di
lations du niveau mental suivant que la tension psycl
nerveuse descend ou monte. Les oscillations, que j'avî
notées chez les hystériques, caractérisées par l'augn
la diminution de leur sensibilité, de leur mémoire,
lonté, la disparition ou le retour de leur suggestibilit
contractures, de leurs paralysies n'étaient qu'un cas
d'une loi beaucoup plus générale relative aux variation
sion cérébrale et les psychasthéniques nous ont app
connaître la hiérarchie de ces phénomènes, l'ordre i
parition et de leur réapparition.
En même temps l'étude de ces oscillations si imp
semble apporter une confirmation aux hypothèses ps
ques. Il me semble bien difficile de rattacher tous ces f
tivité quand on voit l'émotion produire tant d'effet
N'est-il pas vraisemblable que ces oscillations par les
qu'elles déterminent, par les dérivations qu'elles
jouent un rôle capital dans une maladie surtout caract
doute, l'oscillation et Tinstabilité.
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o4i THÉORIES PATHOGÉNIQUES
TROISIÈME SECTION
Interprétation des symptômes
Après avoir cherché h comprendre cette notion a mon avis féconde,
de la hiérarchie des phénomènes psychologiques, des ifariations de
la tension psychologique sous diverses influences déprimantes ou
excitantes, il faut maintenant chercher à appliquer ces idées aux
symptômes de la maladie que nous avons décrits dans la pre-
mière partie de cet ouvrage. Pour interpréter ces symptômes, je
me préoccuperai d*abord de leurs caractères généreux tels qu ils
ont été résumés à la fin de chaque chapitre. Puis j'étudierai à
part, comme un dernier problème, la spécialisation de ces symp-
tômes leur application particulière à tel ou tel fait. Ainsi, je me
propose de rechercher d'abord d'une manière générale pourquoi
les sujets ont des sentiments d'étrangeté et des manies de re-
cherche et ensuite pourquoi ils appliquent ces sentiments et ces
manies à un objet ou à un acte déterminé.
i. — Interprétation des sentiments d'incomplétude.
Le premier phénomène que nous ayons à considérer est consti-
tué par les sentiments bizarres, que nous avons appelés sentiments
d'incomplétude, ils sont extrêmement variés et nombreux et por-
tent sur toutes les fonctions de l'esprit, ils se rattachent évidem-
ment aux insuffisances réelles qui résultent de ce fait que l'esprit
ne peut plus parvenir aux opérations du premier degré.
La difliculté qui est ici plus psychologique que clinique con-
siste à savoir comment le sujet arrive ii se rendre compte de
cette insuflisance et à la traduire par des sentiments. Il n'est pas
probable qu'il y ait un fait de conscience, un sentiment directe-
ment en rapport avec le degré de la force nerveuse; du moins
jusqu'à présent les sentiments qu'on a voulu rattacher à l'émission
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INTERPRÉTATION DES SENTIMENTS D'INCOMPLÉTUDE 545
de la force nerveuse, h Teffort intérieur n^ont pas été démontrés.
Mats je ne crois pa$ cependant qu'il faille tout de suite adopter la
thèse de M. James et dire que nous ne sentons que le résultat physi-
que de nos efforts, Tinfluence qu'ils ont sur nos muscles et sur
nos viscères. Nous sentons aussi les résultats psychologiques de
la tension nerveuse, l'unité et la complexité de nos états men-
taux, l'impression de réalité, de personnalité présente, d'unité,
de liberté, etc. Nous remarquons bien vite que ces idées et ces
sentiments cessent de se présenter dans les circonstances où d'or-
dinaire ils survenaient. C'est exactement ce que font nos ma-
lades. Quand Jean vient nous dire : u il me semble que je ne
saisis pas, que je ne m'assimile pas les choses avec la force nor-
male, » je crois qu'il fait simplement une observation psychologi-
que juste. Ces observations qu'ils font eux-mêmes sur le fonc-
tionnement de leur esprit sont facilitées par la disposition que
nous leur avons reconnue à Tintrospection psychologique.
Il y a ainsi trois grands phénomènes qui jouent un rôle dans
la formation des sentiments d'incomplétude : i^ La diminution de
la synthèse mentale et par conséquent la diminution de la systé-
matisation, de l'unité des éléments réunis dans le champ de la
conscience. 2^ La réduction de la complexité mentale, du nombre
des éléments, sensations, images, mouvements, émotions qui
remplissent d'ordinaire la conscience et qui nous donnent le
sentiment de la réalité et du présent. 3® Le souvenir de la manière
dont fonctionnait autrefois notre pensée, de son unité, de sa
richesse, les comparaisons entre cet état passé et l'état pré-
sent et les interprétations inévitables qui se mêlent à ces
comparaisons.
i" Un certain nombre de sentiments d'incomplétude sont plus
immédiatement en rapport avec le premier phénomène, la dimi-
nution de la synthèse mentale. Ce sont par exemple les sentiments
d'incapacité intellectuelle, d'obscurité, d'incoordination, de con-
fusion, et en même temps les sentiments de la difficulté de l'acte
volontaire, de la difficulté, de l'attention, de la distraction, de
l'instabilité.
Bien des sentiments de vague, de mystère qui vont donner
naissance à des tendances mystiques ou orienter le délire dans un
sens particulier dépendent de cette difficulté qu'éprouve le sujet
à unifier ses pensées, même quand leur nombre est réduit. Le
sentiment de dédoublement, de multiplicité, qu'il s'applique aux
LEH OliSE8SIO?(8. I. 35
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5 i6 THÉORIES PATHOGÉNIQUES
choses ou quUl s*applique à Tesprit, prend aussi son point de départ
dans la même faiblesse de systématisation.
Je serais disposé à croire que le sentiment si important d'auto-
matisme, d'absence de liberté, de domination se rattache aux
précédents. Notre sentiment de liberté est surtout un sentiment
d'unité. L'accord s'est fait entre toutes les tendances de notre
être, entre les motifs imposés du dehors et les inspirations de
notre caractère tout entier. Faction qui se fait résume en un seul
système tous nos phénomènes psychologiques. C'est pourquoi on
ne constate jamais de plus bedux sentiments de liberté que ceux
des individus suggestionnés dont le champ de conscience est
réduit sans doute, mais très unifié et rempli complètement par
le développement d'une seule tendance.
Chez les psychasthéniques il n'en est pas ainsi : ils agissent
ou ils parlent, pressés par les nécessités de la vie sans que Tunité
ait été faite dans leur esprit, quand il y a encore dans leur
conscience des tendances, des habitudes, des caractères en oppo-
sition avec l'acte qui s'accomplit. Ils ne parviennent pas à ratta-
cher davantage leur acte k toute leur personne. C'est ce qui se
traduit par le sentiment d'automatisme, de domination, c'est-à-
dire d'action non volontaire, non personnelle, c'est ce qui donne
naissance à ce sentiment de révolte perpétuelle, au sentiment
qu'ils ne peuvent jamais accepter une situation donnée, c'est-à-dire
mettre d'accord tout leur caractère, toutes leurs tendances avec
la perception de cette situation.
2® Si le défaut de synthèse complète joue ainsi un rôle consi-
dérable, je crois que le défaut de complexité, de richesse mentale
a une importance encore plus grande, car il intervient particuliè-
rement dans la perte du sentiment du réel et dans le sentiment
de l'étrange, ces deux phénomènes fondamentaux. M. Bergson qui
fondait, comme on l'a vu, le sens du réel sur « la conscience d'un
accompagnement moteur bien réglé » interprète naturellement le
sentiment de l'irréel et de l'étrange par la perte de cette associa-
tion entre la sensation et le mouvement, a Qu'on lise, dit-il, les
descriptions données par certains fous de leur maladie naissante,
on verra qu'ils éprouvent souvent un sentiment d'étrangeté ou,
comme ils disent, de « non-réalité » comme si les choses perçues
perdaient pour eux de leur relief et de leur solidité. Si nos ana-
lyses sont exactes, le sentiment concret que nous avons de la
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INTERPRÉTATION DES SENTIMENTS DINGOMPLÉTUDE 547
réalité présente consisterait en effet dans la conscience que nous
prenons des mouvements effectifs par lesquels notre organisme»
répond naturellement aux excitations ; de sorte que là où ces
relations se détendent ou se gâtent entre sensations et mouve-
ments, le sens du réel s'affaiblit ou disparait ^ »
11 y a là une grande part de vérité, les sujets qui ont le senti-
ment de l'irréel ont peu d'activité, ils ont peu de disposition à se
servir de l'objet qu'on leur montre. Mais leur sentiment dépend-
il uniquement de cette réduction du mouvement ? Remarquons
d'abord que chez eux l'association entre l'objet perçu et le mou-
vement n'est pas complètement rompue. Tout en disant que l'objet
est irréel, ils savent encore s'en servir et reconnaissent très bien
son usage : je n'ai pas vu le sentiment de l'irréel associé avec
une véritable cécité psychique ni avec une véritable apraxie.
D'autre part, les malades atteints de cécité verbale, ou même de
cécité psychique, qui ont tout à fait perdu la notion des mouve-
ments de la parole en rapport avec le mot écrit ou des mou-
vements de la main en rapport avec la vue de l'objet, sont
loin d'avoir toujours en même temps le sentiment de l'irréalité
de l'objet. Le défaut de mouvement n'est qu'un élément dans
le sentiment de Tirréel.
M. W. James semble disposé à dire que le défaut de réalité
dépend d'une absence d'émotion, d'une indifférence en présence
de l'objet perçu '. Cela est encore en partie exact, car l'indiffé-
rence de ces sujets est incontestable, mais l'apathie peut être
complète, chez quelques hystériques par exemple sans que ce
sentiment prenne naissance et d'autre part des émotions inférieu-
res comme l'angoisse peuvent accompagner la perception de
certains objets sans les rendre plus réels.
M. Dugas a raison également de faire intervenir la diminution
de la synthèse mentale, Texagération de l'automatisme^. Mais ce
n'est pas suffisant, car il est trop évident que l'irréel n'est pas la
conséquence de tous les états automatiques, même les plus
complets.
Il faut réunir toutes ces explications et dire que le sentiment
du réel et du présent accompagne un certain degré élevé d'acti*
1. Bergson, Malihre et mémoire , 1986, p. 191.
2. W. James, The will lo believe, 1897, p. 3a2.
3. Dugas, Revue philosophique, 1898, I, 5o6.
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", V
548 THÉORIES PATHOGÉNIQUES
vite cérébrale dans lequel les sensations, les images, les mouve-
ments, les émotions sont nombreux, complexes et riches. Cette
richesse mentale est toute relative et il est probable qu'un imbécile
s'est contenté toute sa vie d'une pensée peu complexe et peu riche
qui lui suffit pour reconnaître le présent et le réel. Mais quand
l'esprit a été accoutumé à un certain maximum de conscience, il
a appelé réel ce maximum et il ne reconnaît plus le réel et le
présent quand il ne peut plus atteindre le même maximum.
Les phénomènes auxquels il parvient alor^ n'ont pas d'analogue
exact dans une expérience passée : ils réunissent des caractères
contradictoires, ils paraissent être extérieurs et ils ne semblent
pas être réels, ils ressemblent à des images de la mémoire et
cependant ils n'ont pas le caractère habituel, connu, familier
des souvenirs, ils présentent le dédoublement qui existe dans le
jeu et dans l'œuvre d'art et cependant ils ne sont pas accompa-
gnés par le sentiment de liberté qui d'ordinaire caractérise le
jeu et l'imagination artistique, comme l'avait bien remarqué
Schiller \ Ces caractères plus ou moins bien analysés par le
malade font qu'au sentiment de l'irréel s'ajoute le sentiment de
VétrangCy que l'on trouve presque toujours associé avec lui.
Il est bien probable que le sentiment du c( déjà vu » n'est
qu'un sentiment du même genre. M. Dugas suppose que le sujet,
<c sentant que les impressions lui échappent, les rattache à lui par
un lien imaginaire; n'ayant plus de perceptions il croit avoir des
souvenirs'». Le même auteur dit ailleurs très bien «c'est un recul
dans le passé à cause de la perte des caractères du présent, cela
parait fuir et devenir passé ^ ». Dans mes cours sur la mémoire j'ai
essayé de montrer que tout état complexe implique une partie
d'activité automatique et une partie d'activité de synthèse, une
action de ce que j'appelle ici la fonction du réel et du présent.
Suivant que dans notre conscience l'un ou l'autre de ces deux
phénomènes nous paraît prédominer, l'état est classé par notre
esprit parmi les faits passés ou parmi les faits présents. S'il y a
abaissement de la tension psychologique, diminution de l'activité de
synthèse, de la concentration et de la complexité présentes, avec
conservation, et, comme on le verra, développement de l'automa-
I. K. Groos, Les jeux des animaux, traduct., 19Ô2, p. 338. (Paris, F. Alcan).
a. Dugas» Hevue philosophique y 1898» II, 4a4-
3. Id., ihid., 1898, I, 5oi-5o7.
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INTERPRÉTATION DES SENTIMENTS DUNCOMPLÉTUDE 549
tisme, Tétat paraîtra évidemment passé. Quant à le reconnaître, à
le localiser à une ou à plusieurs époques plus ou moins reculées
du passé, ce sont des détails dus à l'interprétation du sujet.
Ces mêmes sentiments d'irréel, d'étrangeté, ces sentiments
que le phénomène est par un certain côté un phénomène de
souvenir sans en avoir cependant tous les caractères troublent
toutes les opérations de Tesprit, ils déterminent la gêne, Tinquié-
tude, ils rendent Faction et l'attention encore plus incomplètes
qu'elles n'étaient, la perception encore plus insuffisante ; ils se
compliquent par des sentiments perpétuels de doute, d'obscurité^
de rêve, de découragement, d'indécision.
Si ces sentiments sont éveillés a propos de la perception exté-
rieure, le sujet les exprimera à sa façon suivant sa puissance d'ob-
servation intime et suivant son éducation psychologique et il
dira que tout est « drôle, étrange, nouveau pour lui, qu'il est
tombé dans un autre monde, qu'il est loin des choses, qu'elles
sont devenues petites, qu'il est dans le vide, » etc.
Si ces sentiments s'éveillent à propos de la perception per-
sonnelle, les malades répéteront comme Pr... qu'ils se sentent
étranges, drôles; c'est la remarque la plus simple que l'on puisse
faire sur un état semblable. D'autres trouvent qu'ils sont faux,
qu'ils jouent la comédie (Claire, Gisèle). Cela correspond assez
bien à la perte de la fonction du réel qui est l'essentiel.
Le troisième fait qui joue un grand rôle, sinon dans la consti-
tution au moins dans l'expression des sentiments d*incompIétude^
c'est le souvenir de l'état d'esprit antérieur à la maladie ou de
l'état d'esprit qui réapparaît de temps en temps dans les instants
clairs dus aux oscillations ascendantes de la tension nerveuse.
Les malades font involontairement une comparaison perpétuelle
entre leur état présent et leur état antérieur.
C'est pourquoi beaucoup se disent changés, soutiennent qu'ils
sont devenus une autre personne, (Xyb..., Pot..., To...); il me
semble qu'ils n'ont pas entièrement tort, car il est certain qu'ils
ne sont plus ce qu'ils étaient. Enfin, un très grand nombre em-
ploient les mots : « descendre, décadence, » ou parlent de préci-
pice : c( j'ai le sentiment de ma décadence, dit Jean, je sens
qu'elle n'est pas de naissance, mais acquise, j'avais une certaine
vivacité d'esprit, tout cela a baissé. Ce que je voudrais la
pleine possession de moi-même, de la mesure avec laquelle je
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THÉORIES PATHOGÉNIQUES
i ne puis plus supporter ce voile, ce nuage, tout ce que
rez qui me sépare de la réalité. »
*é de plus et les malades vont avoir le sentiment qu'ils
leur personne, ou du moins leur personne ancienne,
3nt plus eux-mêmes. Le sentiment de dépersonnalisation
jtre chose qu'une sorte de perception interne du trouble
ction du réel. C'est une forme du sentiment d*étran-
;omplet, d'irréel appliqué à la personne au lieu d'être
lux choses. Le malade constate qu'il n'agit plus que
ière automatique, qu'il répète le passé et ne s*adapte
ésent, il sait vaguement qu'être c'est agir, et que ne plus
mcentrer ses pensées, ses désirs dans une action pré-
t ne plus être une personne. Ces remarques se tradui-
sentiment de non-existence personnelle, de disparition
onnalité ancienne.
as en arrive également à dire que a le processus de la
alisation c'est l'apathie, la dissolution de l'attention,
\ liberté de l'activité automatique ' ». Le fait fonda-
st l'abaissement de la tension psychologique ainsi que
lie.
est bien clair que toutes sortes d'autres phénomènes
mêler avec ces sentiments fondamentaux. De Tagita-
3 manies que nous allons interpréter dans le paragra-
t s'ajoutent au sentiment d'incomplétude pour former
le. Dans des phénomènes complexes comme diverses
ns le besoin d'être aimé, d'être dirigé, dans l'ambition
n'est que l'inquiétude jamais satisfaite du présent,
sticisme qui est le défaut d'appréhension du réel joint
aine agitation de l'esprit et au besoin de se repaître
'es, l'influence de mille conditions et même Tinter-
des troubles par le sujet lui-même devient de plus en
dérabie.
V^of..., après avoir été mordue par un chien, vient nous
jis humiliée d'avoir été mordue, c'est comme si cette
n'avait //é^/r/e, je ne suis plus comme les autres, je suis
nteuse après cette morsure », il y a un sentiment très
très complexe. La vérité c'est qu'après la morsure, il Y
sèment de la tension psychologique et diminution des
Revue philosophique , 1898, I, 5o4.
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INTERPRÉTATION DES AGITATIONS FO
fonctions du réel. La malade s'est sentie ck
Pourquoi complîque-t-elle cette première impr<
morales de honte, de flétrissure, d'humiliati
évidemment de la manière dont elle sent cet al
ignorance relativement à la faiblesse mentale
son éducation religieuse et morale, de ses \ài
le vice de la paresse, sur la honte de Tiner
d'intelligence du sujet joue ici un grand rôle
la forme de ces sentiments.
Il faut, en effet, une certaine intelligence p
lacunes du fonctionnement mental ; nous avof
cette remarque, c'est que les scrupuleux son
gcnts. Il y a h cela plusieurs raisons : en voi
avec le problème actuel, un individu d'esprit
de mémoire et peu de comparaison, ne remarqi
que son esprit a perdu la fonction du réel,
volonté libre ou moins d*unité.
Il y aura chez lui simple abaissement mental
sera plus remarquée par les autres que par
avons recueilli de très nombreuses observatic
ques indifférents h leur état. Au contraire un esp
pare son état actuel avec son état passé et reman
Mais il les remarquera dans tel ou tel sens su
son éducation ou ses besoins : celui qui est pré
parce qu'il doit gagner sa vie, se faire une carri
son indécision volontaire, sa faiblesse et il parle
domination, celui qui agit peu mais qui s'intéi
aux spectacles, va remarquer davantage les ti
ception et dira qu'il trouve tout étrange. Le c
va jouer aussi un grand rôle et déterminera cl
ments de colère et de révolte et chez l'autre de
quiétude et de honte. Déjà dans la formation d<
y a'de l'interprétation qui commence et quidir
lade dans un sens déterminé.
2. — Interprétation des agitation
En remontant la série des phénomènes ps
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552 THÉORIES PATHOGÉNIQUES
nous avons analysés nous nous trouvons maintenant en présence
de ce grand groupe des agitations forcées qui contient les agita-
tions motrices de diverses espèces, les crises d'angoisse et les
ruminations mentales. C'est une partie essentielle de la maladie :
pouvons-nous chercher à la rattacher à nos théories psychas-
théniques ?
I . — Les caractères des agitations forcées.
En étudiant les crises d'agitation plus ou moins irrésistible
nous sommes parvenus aux conclusions suivantes que je me borne
h rappeler, la démonstration en ayant été donnée dans le troi-
sième chapitre.
Dans un grand nombre de cas, les crises commencent toujours
a l'occasion d'une action volontaire. C'est le début d'un acte ou
le désir d'accomplir un acte qui amène des agitations et des
angoisses. Tout un groupe de phobies, celles qui ont été dési-
gnées d'une façon assez défectueuse sous le nom de phobies du
contact ne sont en somme que des phobies d'actes ; beaucoup de
dysesthésies également ne sont que des phobies déterminées par
les fonctions, les actes du corps. Nous avions également remar-
qué que ces accidents ont seulement pour point de départ des
actions volontaires que le sujet voulait accomplir avec attentioo.
Les agitations, les angoisses, les ruminations, comme nous
l'avons vu, commencent aussi dans d'autres circonstances, à pro-
pos des idées quand le sujet essayait de les examiner avec
attention et d'arriver à leur égard à une solution nette, affirmative
ou négative : en un mot quand il se proposait un problème de
croyance ou de certitude.
Enfin nous avions remarqué avec intérêt comme un phénomène
foi^t curieux que la recherche ou le désir d'une émotion nette, en
rapport avec la situation présente, était bien souvent le début
d'une crise.
Une deuxième remarque nous avait montré que ces phénomènes
initiaux commencés par le sujet : action volontaire, attention,
croyance, émotion réelle, n'aboutissaient pas. Dans les cas les
plus simples, ces phénomènes n'existaient en aucune manière.
L'acte ne se faisait pas, le sujet ne parvenait ni à la croyance, nia
la négation, l'émotion restait indistincte et ne parvenait ni à cette
acuité de douleur, ni à cette fleur de plaisir qui achève l'acte.
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INTERPRÉTATION DES AGITATIONS FORCÉES 55Ï
DaDS d'autres cas moins nets, les phénomènes semblaient se pro-
duire au moins pour un témoin extérieur, mais ils ne satisfai-
saient pas Fesprit du sujet, ils lui semblaient insuffisants, impar-
faits, incomplets de toute manière.
Ces sentiments d'incomplétude nous sont maintenant connus,
nous savons qu'ils correspondent à quelque chose de vrai. Le
phénomène n'a pas été terminé, il n'a ni la complexité, ni l'unité,,
ni l'adaptation au réel qu'il devrait avoir. Nous voyons mainte-
nant au début des crises une manifestation remarquable de cette
disparition des fonctions psychologiques supérieures qui, à notre
avis, caractérise la maladie tout entière.
Troisième remarque : à l'occasion de ces phénomènes supérieurs
qui ne s'accomplissent pas ou qui s'accomplissent d'une manière
insuffisante se développe brusquement dans l'esprit une tout
autre catégorie d'opérations : tantôt ce sont des mouvements
variés, des tics, des efforts, des crises d'agitation ; tantôt ce sont
des troubles viscéraux, des palpitations, des suffocations, des
angoisses; tantôt il s'agit d'opérations intellectuelles intermi-
nables et extrêmement variées que nous avons résumées sous le
nom de rumination mentale. Toutes ces opérations qui se substi-
tuaient ainsi aux premières nous ont paru des opérations sans
portée, incoordonnées, vagues et puériles, dignes d'un âge anté-
rieur et quelquefois même d'une époque historique antérieure,
en un mot, des phénomènes d'un ordre plus élémentaire.
En ajoutant a cette observation sur le peu de valeur des opé-
rations secondaires les études que nous venons de faire sur la
hiérarchie des phénomènes psychologiques, nous remarquons
facilement que toutes ces opérations occupent un des rangs infé-
rieurs du tableau : les ruminations mentales rentrent toutes dans
ce groupe des opérations qui portent sur des images ou sur des
abstractions, il n'occupe que le troisième rang bien au-dessous
de la fonction du réel ou même des opérations désintéressées,
les angoisses et les tics rentrent dans les quatrièmes et cin-
quièmes groupes, ceux des émotions et des mouvements inadap-
tés au présent.
En appliquant les notions auxquelles nous sommes parvenus
par l'étude des hypothèses précédentes, on peut donc dire en
résumé que dans ces crises le sujet a baissé de plusieurs degrés,
et qu'un groupe de phénomènes inférieurs s'est substitué aux
phénomènes supérieurs qui ne pouvaient plus s'accomplir.
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INTERPRÉTATION DES AGITATIONS FORCÉES 555
déterminée par la suppression du phénomène supérieur est dou-
loureuse et qu^ils cherchent tout naturellement même par des
efforts et des agitations prolongées à se débarrasser d'une souf-
france.
On pourrait aussi appliquer à cette souffrance une remarque
intéressante et juste faite par M. Dumas, c'est que, dans certains
caSy la douleur est excitante ^ Le mélancolique simplement
déprimé, sans souffrance morale, présente dans tous ses phéno-
mènes physiologiques et psychologiques un abaissement considé-
rable ; le mélancolique en apparence plus malade, qui souffre et
qui délire se montre beaucoup moins déprimé. Il y a chez le
second une excitation déterminée par la souffrance elle-même.
Dans ce cas voici comment on pourrait se représenter les choses :
le scrupuleux, étant avant tout un psychasthénique qui ne peut
s'élever à la fonction du réel, a de temps en temps à propos
d'actes volontaires ou de croyances des insuffisances psycholo-
giques. Celles-ci déterminent des sentiments d'incomplétude et
une douleur qui est- excitante, qui amène dans l'esprit ou dans
les viscères tout ce travail considérable de la rumination ou de
l'angoisse.
Ces explications ne me paraissent pas suffisantes pour tous les
cas; il ne me semble pas que l'insuffisance du premier phénomène
soit toujours sentie assez douloureusement pour déterminer soit
d^une manière presque volontaire soit d'une manière automatique
toute l'agitation consécutive.
11 faut compléter notre première hypothèse sur Tinsuffisancede
tension et la suppression des phénomènes supérieurs par une
notion qui s'y rattache tout naturellement, celle de la dérivation.
Quand une force primitivement destinée à être dépensée pour la
production d'un certain phénomène reste inutilisée parce que ce
phénomène est devenu impossible, il se produit des dérivations
c'est-à-dire que cette force se dépense en produisant d'autres
phénomènes non prévus et inutiles.
Des allusions à des opérations de ce genre ont déjà souvent
été faites par les psychologues. Cabanis considérait déjà <c la
sensibilité comme une espèce de fluide, si elle ne peut s'écouler
d'un côté, disait-il, elle s'écoule d'un autre... Les travaux et les
I. G. Dumas, La tristesse et la joie, 1900, p. 27, 95, 357. (Paris, F'. Alcan).
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556 THÉORIES PATHOGÉNIQUES
exercices du corps font une diversion et la réflexion ne peut pas
naître ^ ».
Spencer explique de cette façon les expressions de la physio-
nomie qui se produisent au cours de certaines émotions. L'exci-
tation incomplètement utilisée dans la production des phéno-
mènes de conscience se dépense en déterminant la contraction
de petits muscles peu résistants^. Le rire est le résultat d'ane
dérivation de la force nerveuse vers les muscles les plus faibles
qui se meuvent le plus habituellement. Cette dérivation a lieu
parce que Témotion commencée se trouve en contradiction avec
la situation donnée et qu'elle ne peut pas continuer à se déve-
lopper. Il y a un surplus d'excitation qui doit s'écouler; la dé-
charge se produit par le canal qu'elle trouve ouvert et produit
le rire. L'irrascibilité, dit encore Spencer, se produit par suite
d'une inactivité relative des éléments supérieurs, la décharge se
fait d'une manière soudaine par des plexus inférieurs qui ajustent
la conduite aux impressions pénibles'.
Du mont explique d'une manière analogue les caractères de la
déception : « Quand nous attendons un événement, dit-il, un
ensemble d'idées et de tendances sont en éveil, la déception
supprime brusquement leur emploi, les forces inemployées se
dépensent en luttes et en tristesses*. » Je crois que l'on pourrait
compléter la remarque très juste de Dumont par une étude ana-
logue sur les phénomènes de l'attente. Pendant l'attente tout un
ensemble de forces est mis en mouvement, est préparé, elles
trouveront leur emploi quand le signal sera donné par l'événe-
ment, mais en l'attendant elles restent sans emploi. On observe
alors toutes sortes de phénomènes d'agitation motrice ou mentale
et même d'excitation viscérale qui cessent dès que l'attente est
terminée. Voici un fait que j'ai observé bien souvent et que l'on
peut facilement vérifier. Des jeunes gens sont réunis pour un
concours et attendent que l'on dicte le sujet de la composition.
L'attente du sujet du travail les tient dans une agitation extrême:
ils ne peuvent tenir en place, ils ont une foule de pensées, de
craintes, d'angoisses, ils ont des besoins fréquents d'uriner par
I. Cabanis, Rapports de physiqire et de morale IV, p. 3i.
a. H. Spencer, Essais sur le rire. Cf. Th. Ribot, La psychologie anglaise contem-
poraine, p. 3o3. (Paris, F. Alcan).
3. H. Spencer, Principes de psychologie, l, p. aôa. (Paris, F. Alcan).
^. Dumont, Théorie scientifique de la sensibilité^ 1877, p. i48. (Paris, F. Alcan).
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INTERPRÉTATION DES AGITATIONS FORCÉES 557
contraction de la vessie et même des crises de diarrhée. Le sujet
dicté, tout se calme ; car, le barrage étant levé, les forces prépa-
rées se dépensent librement dans le travail attendu. Les dériva-
tions sont ici très nettes et très démonstratives.
M. Ribot se rattache à ces idées quand il dit <c que des lois gé-
nérales président à la répartition de Tactivité nerveuse dans les
différents points du système nerveux comme des lois mécaniques
gouvernent la circulation du sang dans le système vasculaire^ ».
Dans son étude sur la puberté, M. Marro donne plusieurs
exemples de dérivations de ce genre a les premières manifesta-
tions de la douleur annoncent que la réaction psychique est en
défaut, à la réaction dans la vie de relation se substitue la réac-
tion organique seule, qui, par la suite, pourra se résoudre en
simples actions physiques ou chimiques*».
Mantegazza en décrivant des sujets en proie au désespoir qui
se mordent, s'arrachent les cheveux, se frappent la tête contre les
murs, suppose que l'individu s'impose volontairement ces souf-
frances pour substituer à la douleur morale une douleur artifi-
cielle qui serve de dérivatif. Une jeune fille décrite par M. Tis-
sié avait remarqué qu'une vive douleur physique lui était néces-
saire « pour dépenser le trop-plein de la force nerveuse», elle s'était
brûlé deux fois la poitrine avec un fer rouge et elle avait entretenu
les plaies en cachette : « par la douleur violente, disait-elle, elle
arrivait à faire diffuser la trop grande puissance nerveuse^». En
un mot cette notion de la dérivation est assez commune dans les
études psychologiques : quand on voit une femme sans enfants
soigner avec dévouement un chien ou un perroquet on est tout
disposé à dire qu'il s'agit là d'une dérivation de l'amour maternel.
Je suis disposé à croire que l'on devrait faire un plus grand
usage de cette notion très juste et très importante.
Plusieurs auteurs ont essayé d'appliquer cette notion de la
dérivation à la pathologie mentale. M. H. Jackson fait observer
que dans la psychiatrie on se préoccupe d'ordinaire des phéno-
mènes négatifs, c'est-à-dire des opérations supprimées par la
maladie, mais que l'on ne tient pas assez compte des phénomènes
1. Th. Ribot, Les maladies de la volonté^ p. 19. (Paris, F. Alcan).
2. Marro, La puberté, p. ^18.
3. Mantegazza, Physiologie de la douleur, p. 219, cf. G. Dumas, La tristesse cl
la joie, p. 339.
4. TiBsié, Revue scientifique, 1896, II, p. 645.
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INTERPRÉTATION DES AGITATIONS FORCÉES 55»
tension, des images automatiquement associées, des idées
abstraites, des raisonnements, etc.
Ce qu'il est le plus important de bien comprendre, c'est
Forigine de la dérivation. Je ne puis admettre que Torigine de la
force qui va dériver provienne uniquement de l'excitation géni-
tale inassouvie. Cela arrive sans doute dans certains cas et j'ai
montré des malades qui ont des crises de rumination parce
qu'elles sont incapables de parvenir à l'émotion génitale complète.
Mais nous avons observé le même fait après des émotions artis-
tiques, des émotions de chagrin, de peur, etc., qui ne parvenaient
pas non plus à leur terme, nous l'avons vu également après des
efforts d'attention ou de croyance, après des tentatives d'actes,
surtout quand ces efforts et ces tentatives n'aboutissaient pas. En
un mot, la dérivation peut se produire toutes les fois qu'un phé-
nomène supérieur de haute tension a commencé à se produire, et
qu'il est arrêté dans son développement par cet abaissement du
niveau mental qui rend impossibles les phénomènes de haute
tension.
Cette conception permet de résoudre la difficulté qui nous avait
arrêtés dans l'interprétation des crises d'agitation forcée. Com-
ment se fait-il, demandions-nous, qu'au phénomène initial sup-
primé, qui semblait un phénomène unique et assez petit, se
substitue une quantité énorme d'autres phénomènes secondaires
qui se prolongent pendant longtemps ?
Je crois que l'on pourrait répondre par un développement de
notre hypothèse relative à la hiérarchie psychologique et aux de-
grés de tension des phénomènes. Quand un phénomène psycho-
logique est très supérieur à un autre, la tension qu'il exige pour
se produire pourrait être suffisante, si on l'employait autrement,
pour produire cent fois le phénomène inférieur. Un courant électri-
que de iio Volts est nécessaire pour allumer une lampe électrique
et il produit ainsi une lumière qui ne nous paraît avoir rien d'ex-
cessif. Mais si on appliquait le même courant k des sonnettes, il en
ferait marcher des quantités et produirait un vacarme. Si on lui
faisait traverser des fils métalliques résistants, il les ferait rougir
et pourrait déterminer un incendie. Une quantité donnée d'énergie
calorique doit être portée à 1800^, c'est-à-dire à un degré élevé de
tension pour fondre une quantité minime de platine, si cette
même quantité d'énergie n'arrive qu'à la tension de 4oo^, elle ne
pourra plus fondre un milligramme de platine, mais elle pourra
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^60 THÉOHIES P/
facilement fondre des kilogramn
nés à admettre de même que lu tension psychologique inemployée
pour les phénomènes supérieurs qu'elle ne peut plus produire se
•dépense en phénomènes inférieurs, et qu'elle donne alors nais-
sance à une véritable explosion de phénomènes infiniment oom-
i)reux et puissants, mais toujours inférieurs dans la hiérarchie.
Eh bien, c'est cette conception de la dérivation ainsi entendue
<[ue nous devons appliquer à l'interprétation des crises d'agita-
tion motrice, d'angoisse ou de rumination mentale. L'examen de
•<[uelques faits nouveaux nous montrera que cette interprétation
résume d'une manière commode un certain nombre de caractères
•de ces crises.
3. — La dérwation dans les agitations et les angoisses.
On a déjà vu bien des exemples de la façon dont les efforts
d'attention amenaient des agitations motrices et des tics. La timi-
dité, par exemple, c'est-à-dire l'aboulie sociale, l'impuissance
pour accomplir complètement les actes les plus complexes qui
sont les actes sociaux, ne détermine pas uniquement des phé-
nomènes émotionnels, mais elle donne aussi naissance à des
décharges motrices. X... a la figure parfaitement calme quand
il est seul et il parle correctement ; s'il vient me voir et s'il veut
me demander quelque chose, il a une agitation invraisemblable
de tout le corps et particulièrement de la figure et il bégaye
horriblement. La dérivation est chez lui motrice et il ne ressent
pas d'angoisse, c'est en se plaçant à ce point de vue que M. Scholz
a pu ranger la timidité dans Tordre des émotions impulsives \
On trouvera des faits de ce genre dans tous les tics, dans toutes
les agitations motrices qui surviennent, comme on l'a vu, à la
suite d'un effort de volonté ou d'attention. Une preuve intéres-
sante du rôle que joue la dérivation dans ces phénomènes secon-
daires, c'est leur disparition quand on supprime Teffort pour ac-
<;omplir le phénomène primaire. Ho... a des tics quand elle va à
l'école et fait attention ou essaye de faire attention à la leçon ;
elle a beaucoup moins de tics les jours de vacances. Claire avait
des crises d'agitation énorme avant chaque repas parce qu'elle
essayait de faire une prière avec attention et avec foi. Elle est
I. Scholz, Revue de rhypnotisme, 189a, p. 7.
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INTERPRÉTATION DES AGITATIONS FORCÉES 561
prise de découragement en voyant : « que la lumière s^éloigne de
plus en plus et que décidément elle ne peut plus prendre la pen-
sée de prier ». Elle renonce à cette prière avant le repas, et elle
n^a plus de crises d'agitation à ce moment.
Il vaut mieux insister sur la formation de Tangoisse qui a pris
dans ces études une grande importance. L*angoisse comprend^
comme on Ta vu, deux catégories de phénomènes, des sentiments
intellectuels qui tous se rattachent au groupe des sentiments
d'incomplétude, sentiment de décadence, de chute, de folie, de
mort. Ces sentiments sont en rapport avec rabaissement vrai du
niveau mental, c'est le sentiment de la psycholepsie elle-même.
Ils accompagnent l'incapacité où est réellement le sujet d'accom-
plir les phénomènes supérieurs de haute tension. En réalité Tan-
goissé n'a pas fait les actes ni les efforts d'attention, il n'a pas
éprouvé les émotions que commandaient les circonstances, il en
était incapable et c^est cette incapacité, en rapport avec tout un
abaissement de l'esprit qu'il sent d'une façon aigué.
En deuxième lieu l'angoisse contient des sensations de troubles
organiques, ceux-ci nous apparaissent comme le résultat d'une
décharge intéressant les appareils des fonctions organiques. Cette
décharge est en rapport avec une fuite du courant inutilisé par les
phénomènes supérieurs.
Des fuites de ce genre sont nombreuses : un exemple bien
frappant nous est donné par l'excitation génitale et la mastur-
bation. Chez Fy..., chez Claire et chez plusieurs autres, l'effort
pour vouloir et pour penser amène une masturbation. C'est un
tort, a mon avis, que d'accuser le sujet et de dire « la mastur-
bation est venue empêcher son travail ». C'est là renverser les
termes : en réalité c'est parce que le travail ne pouvait pas se
faire que la masturbation se produit comme une décharge de
l'excitation inutilement accumulée. Chez Rk..., le phénomène
est bien plus saisissant encore car il n'y a aucun mouvement que
l'on puisse accuser d'être volontaire. Il essaye d'appliquer son
esprit à un problème de mathématique, il lui semble qu'il va
comprendre, mais il ne réussit pas et il fait un plus grand effort
d'attention. A ce moment une érection se produit sans aucun con-
sentement de sa part, suivie d'une éjaculation : c'est ici une déri-
vation viscérale absolument pure.
La décharge peut se faire sur d'autres organes d'une manière
LES OB8E88IO?(8. I. 36
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THÉO
On a vu plu
e coït d'une
'a des émotion
leur mésaventui'c . i« v^c uui m umucuiic u «ivuir ue»
rmaux avec ma femme, me dit un homme de 3o ans,
u moment où le désir grandit, il me prend un violent
iner. Je ne puis y résister et naturellement tout est
^en... commence à être excitée, mais tout d*un coup
ssoin irrésistible d'aller à la selle au moment où elle
Je Témotion complète. Ici encore c'est renverser les
d'expliquer l'arrêt du coït par l'excitation vésicale ou
l'impuissance à terminer une émotion forte et précise
el, cette impuissance caractérisait déjà toute la con-
ilade, les dérivations sont l'accessoire.
décharge se fait sur la poitrine, sur le diaphragme,
, elle produit l'angoisse vulgaire. On peut en trouver
;s intéressants en considérant encore une fois le fait
ible de la timidité. Il y a à mon avis un malentendu
prétation des phénomènes de la timidité. On note
s, comme le remarque très bien M. Hartenberg,
rmation de la conduite : le timide prend des atti-
ses, il devient bourru, hautain, agressif même*, les
eux-mêmes sont arrêtés, métamorphosés. « J'ai, dit
kirtseff, des pudeurs qu'on ne s'expliquera peut-être
voudrais pas qu'on me surprît aimant, admirant
ose, enfin j'ai honte d'être surprise manifestant
it sincère, je ne puis m'expliquer cela. » On attribue
s arrêts, ces métamorphoses à l'émotion d'intimi-
les considère comme des résultats des palpitations,
nents, etc. Pourquoi ne pas admettre que ces phé-
irrèt psychique sont tout naturels au moment où le
devient infiniment plus diflicile h cause de la pré-
émoins. Avoir une émotion sincère devant dix per-
in acte différent, bien plus difficile que celui d'avoir
otion quand on est seul. U est plus complexe, demande
•ande puissance de synthèse, une plus haute tension
ue. Il suffit d'admettre que l'individu, pour une raison
[uelconque, est déjà un psychasthénique, et on com-
rp, LfS timides el la timidité, p. 89,
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INTERPRÉTATION DES AGITATIONS FORCÉES
prendra cfu'il ne puisse pas parvenir à cet acte, à cette é
supérieure. C'est alors que les diverses angoisses intervie
comme de simples phénomènes de dérivation.
Enfin nous retrouverons ce mécanisme de Tangoisse d
accidents déterminés par Teffort d'attention. M. Santé de I
sous ce titre : <c un trouble spécial de l'attention chez un dégé
fait la remarque suivante : ce Loin de rendre la perceptio
distincte, l'attention rendait la perception obscure, confuse
le chaos dans l'esprit du sujet et amenait une grande angoi
Cette observation sur l'effort d'attention qui amène l'ar
peut se répéter presque expérimentalement sur une diza
nos malades. Mais chez tous, on observera les deux faits sui
I* L'angoisse ne se développe que si l'attention est impu
et n'arrive à constituer aucune idée ni aucune croyance; 2
aidant, en encourageant le sujet on le pousse h dépasser ce
si on réussit à fixer son attention, à la rendre capable de
voir le réel, l'angoisse disparait : elle n'était qu'une déri
en rapport avec l'insuffisance des phénomènes supérieurs.
Les émotions ont un effet analogue : Dob... parle exact
comme Lise, sauf qu'il s'agit chez elle d'excitations viscéri
non de travail mental inférieur : « c'est toujours à propos
petite émotion, dit-elle, que l'angoisse devient énorme. Cette
émotion devrait être le plaisir d'une rencontre, une surpris
frayeur même. Mais non, mon émotion ne se développe pa
tout de suite j'étouffe, mon cœur bat, mes jambes flageolle
sens ma tête s'égarer et je suis prise par cette terreur de d
folle, qui est toujours suspendue au-dessus de moi comm
épée de Damoclès. » On répéterait les mêmes observations
Ul..., chez qui tout effort et toute émotion se transforma
angoisse et chez beaucoup d'autres dont nous avons cil
exemples.
J'ai insisté sur cette interprétation de l'angoisse et j'ai
de nouveaux exemples de ces transformations des phénoi
psychologiques supérieurs en angoisses h tous ceux que j'avai
cités, car je considère cette question comme très intéressai
psychiatrie. On fait jouer un rôle considérable h Vémotwité
on ne parait pas se rendre bien compte de ce qu'est l'émo
I. Santé de Sanctis, BoUetino délia Soc. lanciana degli Ospedali di Ronn
1897, p. a.
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561 THÉORIES PATHOGÉNIQUES
Il ne faut pas se borner à en faire une exagération de l'émotion
normale. Car il en résulterait que les émotifs ont une supério-
rité sur les individus bien équilibrés, qu^ils sont capables de plus
de finesse et de délicatesse dans les sentiments. Or cela n'est pas
exact, rindividu considéré au point de vue pathologique comme
un émotif n'a pas une sensibilité morale plus délicate, il a au
contraire des émotions inférieures et plus grossières. Ce qui le
caractérise, c'est qu'il est un faible, un insuflisant, non seule-
ment au point de vue de la volonté et de l'attention mais sou-
vent même au point de vue de la sensibilité morale, de l'émotion
elle-même. L'émotivité n'est chez lui qu'une disposition à rem-
placer les phénomènes supérieurs par de grossières excitations
viscérales.
4. — La dérwation dans la rumination mentale.
Les mêmes observations peuvent être faites ii propos de la
rumination mentale qui n'est qu'une dérivation vers des phéno-
mènes mentaux d'ordre inférieur. L'essentiel de la rumination
mentale, c'est ce développement de pensées sans valeur réelle,
sans rapport à l'action, sans certitude, en relation avec le passé,
l'avenir ou l'imaginaire et non avec le présent. Ces pensées, étran-
gères à notre personne, a notre présent, à notre action, semblent
n'avoir aucune liberté, être imposées du dehors. Elles ont donc
tous les caractères des phénomènes inférieurs de basse tension.
Cette agitation mentale qui remplace « l'attention à la vie »
me paraît d'une grande importance : son étude permettra de
comprendre bien des phénomènes qui excitent h tort l'admiration.
On a beaucoup parlé récemment de la prétendue excitation men-
tale des mourants ^ de leur vue panoramique dupasse et on en a
cherché bien des explications. Sans pouvoir insister ici sur ce
point, je signale en passant cette hypothèse simple : cette pré-
tendue excitation ne survient-elle pas au moment où par le choc,
par l'asphyxie, la conscience est très abaissée, au moment où les
î^fTorts réels pour se sauver sont impuissants et supprimés et ne
3ourrait-elle pas être un fait analogue au mentisme, à la rumina-
;ion, c'est-à-dire une dérivation de l'activité mentale dont la ten-
sion est abaissée vers des phénomènes très inférieurs ?
I. Egger. Revue phihsophlgue, i896. I, p. a8.
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INTERPRÉTATION DES AGITATIONS FORCÉES Ô65
C'est surtout dans l'étude de no« malades que l'agitation men-
die se présente comme une simple dérivation. Nous le const^^
tons encore chez les timides: pourquoi donc M. Hartenberg* n'ad-
met-il pas de timidité intellectuelle? « Il faut, dit-il, qu'il y ait
toujours dans la timidité une émotion objective organique. » Ce
n'est point mon avis : Tessentiel de la timidité, ce n'est pas la forme
•de la réaction consécutive h la suppression de l'acte, c'est l'aboulie
sociale, c'est-à-dire la suppression ou la réduction de l'acte quand
il doit être accompli devant des hommes, et il y a des timides à
dérivation intellectuelle. « Je veux être bonne, dit Nadia, je veux
être aiçfiable, être polie, et je ne peux pas. Je pense toujours
aux conséquences, c'est ce qui me paralyse : il me prend des
envies de rêver, de me plaindre vaguement du destin toujours
iîontre moi; je me mets a rechercher si j'ai été polie la dernière
fois avec cette personne. Et en rêvant à tout cela, je reste aujour-
d'hui devant elle sans rien dire, glacée, paralysée et très impolie. »
La même personne joue très bien du piano quand elle est seule,
mais elle ne peut jouer devant quelqu'un « parce que son esprit
€st distrait de la musique par le souvenir d'une foule de ser-
ments et de promesses ». Mw... ne peut pas monter a bicyclette
s'il y a quelqu'un d'étranger avec elle « parce qu'elle est obligée
de faire des serments à chaque arbre, à chaque poteau télégra-
phique qu'elle traverse ». On retrouve dans ces paroles la même
interprétation fausse déjà signalée ; c'est l'acte réel qui n'est pas
accompli, dans sa plénitude et c'est la rumination qui vient ensuite
comme dérivation.
Il en est de même si on examine les efforts d'attention. Jean est
au travail et essaye de s'intéresser à ce qu'il lit, il fait effort, il se
tend pour ainsi dire, il est probable que la tension de son sys-
tème nerveux augmente, il va comprendre et apprendre quelque
chose, c'est à ce moment qu'il se produit une fuite et que les
•évocations psychiques, le fou rire cérébral, les conjurations con-
tre le mauvais sort se déchaînent d'une manière irrésistible.
« C'est drôle, dit Red..., depuis quelque temps je ne peux
plus faire attention et mes idées n'ont aucune suite. Je ne suis
tranquille que si je ne cherche pas à faire attention. A l'église
j'essaye de prier avec attention et conGance, et voici que ma foi
s'ébranle. Je me demande s'il est vrai que Dieu voit tout ce que
I. Harlcnberg, Les timides et la timidité, p. i8i.
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INTERPRÉTATION DES AGITATIONS FORGÉES 567
il n'y a pas de rumination. Vk«.. ne peut agir que lentement^ si
on veut la presser, elle n'agit pas et tombe dans les ruminations,
si elle peut agir lentement, elle fera Tacte et ne rêvera pas du
tout. On a déjà vu que Wo... tombe dans les manies mentales si
Témotion est subite et par conséquent incomplète et qu'elle n'y
tombe pas si elle a le temps de préparer et par conséquent « de
réussir son émotion ».
Enfin, on est souvent frappé de la facilité avec laquelle un de
ces phénomènes secondaires se transforme en un autre, tandis
qu'il est impossible de les supprimer tous à la fois tant que le
sujet reste psychasthénique. Si on empêche le sujet de ruminer
ou s'il essaye lui-même de ne plus s'interroger, il tombe dans
l'angoisse comme s'il y avait là une excitation qui devait se
dépenser d'une manière ou d'une autre. Claire remarque elle-
même qu'elle a « un besoin fou de se tourmenter par une manie
quelconque, je me demande quel tourment je pourrai bien
prendre, je suis trop gênée quand je reste tranquille ». Red...
avait des angoisses et des vomissements, et c'est quand ces phé-
nomènes ont été supprimés qu'elle a pris ses manies de ru-
mination mentale. L'observation la plus remarquable à ce propos
à laquelle je renvoie est celle de Ku... A la suite d'une émotion
elle tombe dans l'état psychasthénique avec aboulie, troubles
de la perception du réel, apathie, etc. Pendant une première
période de plusieurs mois, elle est tourmentée par des inter-
rogations et son esprit travaille tout le temps, puis survient
une seconde période de plus d'un an sans rumination men-
tale, mais avec des contorsions continuelles et des crises
d'agitation que Ton prend bien à tort pour des crises d'hystérie.
Enfin elle passe à une troisième forme de la maladie quand elle
n'a plus de crises convulsives, mais des troubles cardiaques, res-
piratoires, digestifs, une trémulation continuelle du diaphragme
et d'horribles angoisses. N'est-ce pas la même maladie qui a
amené la dérivation sous les trois formes ?
Je crois donc que l'on peut considérer ces crises d'agitations
forcées non seulement comme une sorte de réaction du sujet
contré la douleur produite par l'insuffisance psychologique du
début, mais comme une dérivation dans laquelle se dépensent les
forces qui n*ont pu être employées par la volonté, l'attention ou
l'émotion initiale.
Ces crises sont donc vraiment caractérisées par l'abaissement.
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568 THÉORIES PATHOGÉNIQUES
(a chute de la iention psychologique qui constitue leur début.
Non seulement cette chute de tension détermine !a lacune ini-
tiale si importante, mais elle amène encore tout le développe-
ment irrésistible consécutif; elles méritent bien le nom de crises
de psycho/epsie.
3. — Interprétation des troubles systématisés.
Quelle que soit l'importance qu'on accorde à ces grands phéno-
mènes généraux qui remplissent les crises de psycholepsie, les
sentiments d'iucomplétude, et les agitations forcées, il est évi-
dent que l'interprétation de ces faits nous laisse assez loin de
l'obsédé et du phobique, tel qu'il se présente le plus couramment
quand la maladie est avancée.
Les phénomènes précédents ont le grand caractère d'être
vagues et diffus, ce sont des affaiblissements de toute la pensée,
une faiblesse générale de la volonté et des sentiments, des mou-
vements exagérés et désordonnés, des rêveries continues et in-
nombrables, des émotions de tout l'organisme. Or, en pratique
un très grand nombre de sujets protestent quand on interprète
ainsi leur maladie « ils ne sont pas, disent-ils, incapables de
toute volonté, ils savent agir dans beaucoup de cas et actuelle-
ment encore ils exercent une profession et dirigent leur ménage,
ils n'ont pas dans leurs crises des agitations physiques ou morales
diffuses. C'est une certaine action qui leur est devenue impos-
sible, un certain mouvement qui se transforme en tic, une cer-
taine opération mentale qui les tourmente par sa répétition, un
certain objet qui provoque leurs angoisses et rien que lui. » En un
mot à la forme diffuse de la maladie se surajoute la forme précise
et systématique. Bien des auteurs sentent parfaitement que la
forme systématisée sort de la forme diffuse. MM. Pitres et
Régis ont beaucoup insisté sur ce point, mais la plupart se
bornent à constater la transformation et cherchent guère à ex-
pliquer.
Dans cette systématisattion de la maladie il y a deux aspects
et deux formes différentes à considérer. Ce qui se précise
d'abord c'est le phénomène primaire, point de départ de la crise
de psycholepsie. Ce ne sont plus tous les actes, mais uû acte
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INTERPRÉTATION DES TROUBLES SYSTÉMATISÉS 569
déterminé, qui est insuffisant et amène la dérivation ; c'est une
certaine attention, une certaine croyance, un sentiment parti-
culier qui s'arrêtent plutôt que les autres. Nous désignerons ce
fait sous le nom de spécialisation des insuffisances psycholoffiques.
Ensuite quand la dérivation commence elle prend une forme
déterminée, une manie mentale particulière se substitue à la ru-
mination générale, un tic à l'agitation motrice, une phobie à l'an-
goisse diffuse, c'est ce que nous ^^^tWevous la systématisation de
la dérivation,
1. — La spécialisation des insuffisances psychologiques.
Etudions d'abord le premier fait : comment se fait-il quand la
volonté, l'attention, la sensibilité baissent d^une manière géné-
rale, qu'un certain acte soit le seul à manifester cet abaisse-
ment? Je répondrai d'une manière générale que c'est tout
simplement parce que cet acte est par nature ou qu'il est devenu
par accident le plus difficile de la vie du malade.
Pour le comprendre, il faut se souvenir d'une notion générale
aussi importante que celle de la hiérarchie des phénomènes, c'est
que toutes les actions ne présentent pas toujours la même diffi-
culté et n'exigent pas toutes pour être suffisantes le même degré
de tension. L'homme n'a pas besoin de dépenser toujours son
maximum d'effort, il n'est pas nécessaire qu'il atteigne perpé-
tuellement les termes les plus élevés de la hiérarchie mentale,
même quand il est capable de le faire. Ce que nous avons dit
de l'acte proprement volontaire, de la décision, de la croyance,
du sentiment profond adapté au réel est vrai de certains actes
parfaits et non pas de tous. Nous agissons très souvent sans avoir
besoin de prendre à chaque instant des résolutions volontaires,
des décisions nouvelles qui transforment notre vie ; nous pensons
sans avoir besoin de choisir à chaque instant entre des croyances
et des négations. 11 en est ainsi même pour la perception du réel :
il ne faudrait pas croire que ce travail considérable, tel qu'il a été
décrit, s'effectue à chaque instant dès que nous ouvrons les yeux.
Il se fait de temps en temps et il nous laisse un souvenir suffi-
sant pour que l'impression de réalité subsiste malgré une per-
ception réduite à des traits essentiels. On l'a dit bien souvent,
nous percevons par symbole : un signe, une image nous suffisent
pour reconnaître une personne et il nous suffit de savoir vague-
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INTERPRÉTATION DES TROUBLES SYSTÉMATISÉS 571
des comme Nadia, Cui..., ne peuvent plus mangera table, mais man-
gent en cachette. On a été très surpris de voir Vr. . ., cette femme cou-
chée sur son lit depuis un an à cause d'une prétendue douleur à
Tutérus, se lever en cachette et marcher dans sa chambre quand elle
croyait qu'on ne la voyait pas. Ces faits font toujours accuser les
malades de simulation, ils me paraissent pourtant bien simples :
jouer à Torchestre, manger avec les autres, c'est surmonter une
foule de gênes, c'est négliger les sentiments qu'inspirent les
regards braqués sur nous, c'est reconnaître nettement et réelle-
ment que l'on s'est trompé en refusant de jouer ou de manger
depuis six mois. Se lever de son lit et marcher devant des
témoins, c'est avouer ouvertement que l'on n'a aucune maladie, que
l'on peut prendre une décision demandée depuis longtemps, c'est
en fait se résoudre à prendre cette décision. Au contraire, pour
jouer seul, manger et marcher en cachette, on peut beaucoup plus
rester dans l'indécision, on se dit à soi-même quecesquelques bou-
chées et ces quelques pas ne signifient pas grand'chose, on les
accomplit avec beaucoup moins d'attention en leur donnant beau-
coup moins d'importance, c'est-à-dire beaucoup moins de réa-
lité; c'est pourquoi quand la tension psychologique est abaissée
on peut encore faire l'acte seul ou en cachette et on ne peut plus
le faire devant des témoins.
Parmi nos différentes actions, celles qui sont aussi très diffici-
les sont celles qui impliquent l'isolement, l'abandon loin de nos
protecteurs naturels et surtout celles qui impliquent la lutte
contre nos semblables. Faire une action au milieu d'intimes, de
parents et d'amis que l'on sait tout disposés à la sympathie et à
rindulgence, en qui on est certain de trouver, le cas échéant, un
point d'appui est infiniment plus facile que de faire le même acte
au milieu d'indifférents et à plus forte raison au milieu de con-
currents hostiles. La surveillance de nous-mêmes, la complexité
de l'acte, le degré de tension est absolument différent. Or, il y a
à ce propos une distinction tout à fait inévitable dans la vie des
hommes, c'est Topposition de la vie en famille, chez soi, dans
l'appartement clos dont on connaît tous les coins et de la vie au
dehors, en public dans la rue. Un individu très bien portant,
dont la force psychologique dépasse de beaucoup la tension exi-
gée par les actes difficiles ne s'aperçoit pas de cette différence :
marcher dans sa chambre, fumer une cigarette dans sa chambre,
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^72 THÉOR
OU bien marcher dans la ru
lument équivalent; il ne sent même pas qu'il y a un peu plus d'at-
tention, de perception d'objets nouveaux, de surveillance de soi-
même dans le deuxième acte que dans le premier. Mais nos débi-
les vont le sentir tout de suite : Wya... ne peut plus fumer quand
il est dans la rue, quoiqu'il n'ait pas d'obsession h ce sujet, cela
le gêne tout simplement. ï.a rue est en effet, depuis l'origine de
l'humanité, le lieu, le symbole de l'isolement et de la lutte,
c'est la vie publique opposée à la vie privée. Serons-nous surpris
alors de voir que les actes, les attentions, les sentiments dans la
rue vont être le point de départ de beaucoup de grandes crises de
psycholepsîe.
Les uns vont être frappés par le sentiment de l'isolemenl:
c'est ce qui fait qu'ils veulent dans la rue un soutien quelconque,
qu'ils suivent un passant pour traverser les places, qu'il leur faut
avec eux un enfant, un chien ou simplement un parapluie. Les
autres vont avoir le sentiment de la lutte : c'est dans la rue qu'on
les regarde, qu'on les surveille, qu'on les critique et ils consenti-
ront à marcher la nuit et non le jour. D'autres encore auront le
sentiment des dangers de la rue, c'est dans la rue qu'on est
exposé à toutes sortes d'accidents qui n'arrivent pas chez soi:
W..., Lf... (92) par exemple, ont peur des voitures, des gens qui
tombent du haut d'une échelle, des sergents de ville qui arrê-
tent si on fait des sottises, etc. Quand on observe le début des
agoraphobies, on voit très bien cette spécialisation progressive
des insuffisances. Dob... (86) est une enfant timide, qui avait
horreur de parler à quelqu'un: au début c'était une timidité
générale, une aboulie sociale. Son premier accès est survenu a
l'âge de onze ans quand sa mère l'a envoyée faire une commis-
sion dans une boutique: elle croyait s'y trouver seule avec la
patronne, elle y a rencontré une autre cliente, de là « cette émo-
tion qui lui a desséché le cerveau, » le sentiment d'abaissement,
d'étrangeté, d'angoisse morale, etc. Plus tard l'accident est sur-
venu, quand elle croisait dans la rue une personne un peu connue;
et enfin il survient simplement par la rue elle-même. C'est l'abou-
lie sociale qui est le point de départ de ces différentes formes
d'agoraphobie.
Si nous continuons cette étude, nous rencontrons \Mt^ ^^'^
extrêmement difficile à tous les points de vue, c^^^^t le
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INTERPRÉTATION DES TROUBLES SYSTÉMATISÉS
mariage et les actes génitaux. Tout se mêle ici pour fa
phénomène une des actions les plus complexes : nouveaut<
toujours très grande de la personne qu'on épouse, compl
visages et des caractères d'une famille nouvelle, gravité de T
ses conséquences, préoccupation de l'avenir, etc. , etc. Les p
lesplus normales éprouventàce moment des sentiments d
de tension. Est-il surprenant que nos abouliques mani
ce moment d'une manière remarquable leur faiblesse. Oi
énumérer tous les cas où les crises de folie du doute, d'î
d'agitation commencent avant ou après le mariage. On c
malade qui se demande si sa fiancée est jolie, si elle n'a pa
figure un trait dur auquel il ne pourra pas s'habituer,
fille qui a la manie de s'interroger pour savoir si elle ai
son fiancé, ceux qui ont des terreurs en songeant aux
de la famille, qui se croient incapables de les remplir,
craignent de n'avoir aucune ressource, les jeunes ger
jeunes filles qui examinent leurs organes génitaux^ qui le
insuflisants, les impuissants, les femmes à vaginisme, et
toute une légion de psychasthéniques qui spécialisent le
fisance à l'acte du mariage.
On ne sera pas surpris si je rapproche l'acte gé
actes sociaux. Il exige pour être normal la présent
autre personne, d'une personne différente, il fait nj
gènes et des timidités, il est fortement émotionnant, il
gereux par ses conséquences, il est représenté comme i
c'estassezpour qu'il devienne extrêmement complexe, etq
a ce moment une forte tension vers le réel. Cette tension e
plus marquée dans l'orgasme vénérien, l'une des pi
émotions du présent.
Il en résulte que les troubles de l'acte génital v
innombrables chez ces abouliques : la masturbation solit
peut-être qu'une première forme des aboulies sociah
puissance à l'acte génital normal, la chasteté excess
âge avancé chez des individus qui semblent se condv
maternent est déjà quelquefois un signe de psych
M. Guyon signalait le début tardif des rapports génit;
tous les rateurs. Nous ne serons pas surpris de voir se dé
toutes sortes de phobies et d'algies par rapport aux
sexuels associées avec un acte qui est si souvent incom]
hyperesthésies du gland chez Jean, la terreur des odei
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ES I
e des femmes, etc., tout ce groupe de
nt de départ. Si l'acte s'accomplit tant
is jusqu'à son terme psychologique, le
ns toutes les manies de perfection par
lent tant de femmes et qui amènent
;ution contre le mari. Il y a dans tous
très naturelle de la psychasthénie.
utre groupe nous allons retrouver les
['actions toutes différentes, des actions
prenant bien entendu les attentions et
irofession. Il y a encore à ce point de
opinion commune des gens bien por-
sion est la partie banale, habituelle,
lonté se dépense bien plus en dehors ;
les cas exceptionnels. L'homme du
ixièmes de sa force dans sa profession.
e fait plus aucune espèce d'effort et il
ir comment il n'apprend plus rien,
il répète les mêmes plaisanteriesl>anales
fient h un véritable automatisme, dès
exigé par son métier. C'est dans
'il est actif, attentif, qu'il a des émotions
concurrents, qu'il s'adapte au présent,
s affaiblissements de l'esprit c'estracte
difficile pour la plupart des hommes et
premier. Nous avons vu bien desabou-
par dérivation des phobies profession-
et peur des ciseaux chez Nem... coutu-
peur du rasoir chez Pt..., barbier,
du télégraphe chez Lch..., employé
ns le métier que nous avons vu les
e sorte professionnelles, l'aboulie du
cillation chez Tr... qui fabrique des
acité de tenir des comptes et la manie
î de l'argent chez Rob..., caissière;
ment des tics comme dérivation de
Le plus important de tous est la
, homme de 44 ans, « est dégoûté de
•ait être riche pour ne rien faire. » Si,
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INTERPRÉTATION DES TROUBLES SYSTÉMATISÉS 575
par-dessus le marché, il a un ennui au bureau, il ne peut plus du
tout écrire. An..., femme de 35 ans, n'a plus le courage de se
mettre à ses copies, « ce travail lui parait ridicule et honteux »: c'est
l'insuffisance et le sentiment d'incomplètude. Elle s'aperçoit
qu'elle ne peut plus tenir sa plume et qu'elle a des crampes dans
la main : c'est la dérivation sous forme motrice. Ajoutons chez
Lov... des phénomènes de timidité car il peut écrire quand il est
seul et non quand il est à la caisse, devant le public et nous ver-
rons comment la profession est dans bien cas la raison d'être
de cette spécialisation des insuffisances, simplement parce que
c'est elle qui demande le plus de tension psychologique vers la
réalité.
Aux phénomènesdu groupe précédent que l'on peut d'ailleurs faci-
lement augmenter, il faut joindre des actes, des attentions et des
sentiments tout à fait différents. Leur difficulté n'est pas natu-
relle, elle ne résulte pas d'une complexité fondamentale des cho-
ses ; mais leur difficulté est en quelque sorte artificielle, elle résulte
du sujet lui-même et de la façon dont il veut que cet acte soit opéré.
Nous pouvons, en effet, comme je l'ai dit, accomplir les actions de
diverses manières, soit d'une façon élémentaire sous la forme des
actions désintéressées et par conséquent avec peu de tension,
soit en faisant un effort pour les mener à la perfection psycho-
hogique à la fonction du réel, et par suite avec une haute tension.
Une opération qui esttrès facile, accomplie de la première manière
peut devenir extrêmement difficile, si nous voulons absolument
la faire de la seconde. Un enfant récite ses prières sans aucune^'
difficulté, il se peut même qu'en raison de l'éducation, il y joigne
un certain sentiment religieux sans le chercher d'ailleurs ;
mais se représente-t-on combien cette prière deviendrait difficile
s'il voulait l'accomplir avec un sentiment de foi complète, une
conviction à la fois raisonnée et sentimentale de l'existence de
Dieu, de sa providence, etc. Ce serait toute une philosophie,
toute une religion, qu'il faudrait condenser dans son esprit en
quelques instants.
S'il en est ainsi, on comprend que la spécialisation de l'insuffi-
sance psychologique pourra se faire d'une manière en quelque
sorte artificielle, si pour une raison quelconque le sujet faible est
amené à vouloir transformer un certain acte qui se faisait facile-
ment d'une manière élémentaire et à vouloir le faire avec
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THÉORIES PATHOGÉNIQUES
maximum de perfection psychologique. Cela va arriver,
ind le sujet va être convaincu de l'importance exceptionnelle
cet acte. Comment se fait-il que les trois quarts de nos ma-
es aient débuté par une crise de scrupule religieux au moment
la première communion ? Qu'il y ait à ce moment un affaiblis-
lent de l'organisme par la puberté, c'est possible ; mais
irquoi l'aboulie ne se manifeste-telle si souvent que par Tim-
ssance à accomplir les actes religieux ? Pourquoi ces enfants
tinuent-ils à pouvoir travailler, lire, apprendre, d'une manière
BU près convenable, quand ils prétendent ne plus être capa-
s de suivre la messe ou de dire une prière ? C'est qu'en
lité ils ont toujours très peu d'attention, que, s'ils vou-
nt bien le remarquer, ils n'arrivent ni à la conviction, ni au
timent du réel dans aucune opération. Mais cela leur est in-
erent, ils ne remarquent même pas que leur perception est
iblée, parcequ'ils se contentent du souvenir des anciens senti-
its de réalité qu'ils avaient eus autrefois ; Ils ne cherchent le
timent actuel de confiance, de foi, de réalité que dans les
is religieux, parce que toute leur éducation à ce moment-là,
a conduits à n'accorder d'importance qu'à ces actes. Il en
ilte qu'ils cherchent au moment de la prière et à ce moment
lement une tension psychologique qu'ils ne peuvent pas avoir.
1 va en être ainsi toutes les fois que pour une raison quelconque
tention du sujet sera attirée vers un certain acte, et qu'il cher-
ra dans cet acte une perfection psychologique qu'il ne cherche
dans les autres. Wo..., après avoir eu des scrupules à propos
s les prières, présente des crises de psycholepsie à propos des
iptes de ménage. Ces comptes sont d'ailleurs la terreur
bien des femmes (Kl..., Xyb..., etc.). Cest parce que « elle
it de son devoir de faire au moins cela de sérieux dans son
lage, qu'elle craint par sa distraction maladive de faire du
aux pauvres fournisseurs)), c'est à cause de cette attention,
îlle a des crises de quarante-huit heures parce qu'elle a peur
oir volé deux sous au Bon Marché. Elle n'arrive pas à la certi-
3 dans les additions qui ont rapport à son ménage, pas plus
îUe n'arrivait à la conviction dans les prières,
fne foule de mères de famille ont des phobies et des doutes
tifs à leurs enfants. Elles peuvent tout faire sauf de les soi-
r correctement, c'est à ce moment qu'elles se sentent
iflisantes et qu'elles ont des dérivations. C'est que pour une
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INTERPRÉTATION DES TROUBLES SYSTÉMATISÉS 577
jeune mère l'acte de soigner un petit enfant ne se présente pas
comme une opération simple, elle y joint toutes sortes de pré-
occupations imaginaires, de rêves d'avenir, de dangers possibles,
de responsabilités, etc. L'acte n'est pas simplement le fait de
baigner un enfant, c'est un acte qui devient complexe comme
tes actes sociaux par toutes les idées accessoires qu'il faut coor-
donner avec lui. Il en résulte qu'il devient extrêmement diflS-
cile, le plus difficile au milieu de la vie simple de ces femmes,
et c'est lui seul qui manifeste la faiblesse. Cette insuffisance
spécialisée amène comme dérivation des troubles émotionnels et
l'on dira trop souvent que l'acte est difficile parce que ces fem-
mes s'émotionnent. C'est le renversement des termes : pourquoi
s'émotionnent-elles ainsi sans raison toujours à propos du même
acte, s'il n'y avait pas une impuissance fondamentale pour un
acte devenu difficile qui détermine cette dérivation ?
On comprend que toutes sortes de circonstances puissent ainsi
attirer l'attention sur certaines parties du corps, sur certaines
fonctions du corps ou sur certaines opérations mentales. Chez un
psychasthénique avec diminution générale de toutes les fonctions,
une douleur quelconque va attirer l'attention sur un organe ou
sur une fonction. Immédiatement cette fonction deviendra plus
difficile, cessera de pouvoir se faire et ainsi se précisera à ce
moment cette angoisse qui était flottante. Un peu de pyrosis
sera le point de départ des algies de l'estomac, une douleur
intestinale des algies du ventre, des phobies delà défécation. Les
hémorroïdes jouent un rôle capital dans les algies de l'anus. La
pharyngite chronique fait naître la phobie du langage chez Bq...:
une broncho-pneumonie donne les phobies de la respiration, une
migraine les algies de la tête, le fait d'avaler de travers ou simple-
ment de voir avaler de travers va amener peu h peu les phobies de
déglutition. Combien de tics de la bouche sont dus uniquement à
une mauvaise dentition, et combien de phobies vésicales et
urétrales sont en rapport avec une malheureuse blennorrhagie.
Des circonstances ^térieures peuvent jouer le même rôle,
Mv... a la phobie d'être aveugle parce qu'elle a vu jouer un musi-
cien aveugle, Ot... prend la terreur des petits bruits parce qu'il a
entendu sa belle-mère croquer des dragées.
11 ne faut pas oublier que ces malades par le fait de leur insuf-
fisance ont déjà un état mental spécial, et qu'ils ont, comme on le
LES OBSESSIONS. I. — 37
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578 THÉORIES PATHOGÉNIQUES
verra, des manies mentales qui ne sont que la systématisation de
Tagitation de leur esprit. Ces manies mentales les poussent à
donner une attention excessive à certaines choses et vont con-
tribuer à leur tour à spécialiser les actes, les croyances et les
sentiments qui sont le point de départ des crises. On ne peut
guère expliquer autrement le fait si général de la micromanie.
Chez un grand nombre de ces malades ce ne sont pas les grandes
choses et les graves actions qui déterminent des crises, ce sont
les petits objets, les actes insignifiants, les petites taches de
graisse, les bouts d'allumettes, les petits mots passés dans une
prière, les petites distractions à table. Cette spécialisation de l'in-
suffisance à propos des petites choses me paraît tenir à deux
raisons. C'est d'abord que les circonstances graves sont chez eux
excitantes et relèvent leur niveau mental, tandis que les petites
les laissent dans la dépression. C'est aussi que leur manie delà
précision les pousse à attacher de l'importance à toutes ces petites
actions, à chercher a leur propos une perfection et une certitude
qu'ils sont incapables d'atteindre. C'est pour la même raison que
les chiffres exercent une attraction sur eux, ils espèrent y trou-
ver une certitude qu'ils n'ont pas ailleurs, et leurs efforts à ce
propos n'amènent que des crises nouvelles. Il ne faut pas oublier
leur manie d'association sur laquelle j'ai tant insisté, ils cher-
chent perpétuellement les phénomènes qui peuvent se rattacher
à leur préoccupation et ainsi ils rendent de nouveau ces nouveaux
phénomènes plus difficiles.
Toutes ces études nous montrent donc que l'aboulie, le défaut de
de croyance, la fatigue de l'attention, ne sont générales qu'en
théorie ; en pratique elles se manifestent davantage pour les opé-
rations qui sont naturellement ou artificiellement les plus diffici-
les. Il en résulte que les insuffisances psychologiques se spéciali-
sent à ces phénomènes et amènent uniquement à la suite de ces
actions déterminées tous les accidents qui ont été considérés
comme des dérivations.
2. — La systématisation de la déris^ation.
Le principe de la dérivation nous a expliqué d'une manière gé-
nérale comment les diverses agitations de l'esprit et du corps,
les excitations viscérales qui forment les angoisses n'étaient que
des dépenses, des dérivations d'une force inemployée à cause de
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INTERPUÉTATIOX DES TROUBLES SYSTÉMATISÉS 579
la suppression des phénomènes supérieurs. Cela ne suffit pas
pour rendre compte des formes toutes particulières que pren-
nent dans chaque cas déterminé ces dérivations.
Quelquefois ces dérivations restent vagues et diffuses, on a vu
la fuite des pensées, le mentisme qui correspond à l'excitation
diffuse de la pensée, l'agitation motrice indéterminée et Tan*
goisse diffuse, mais le plus souvent des manies mentales, des
tics, des phobies spéciales remplacent ces agitations diffuses.
L'opération qui joue le rôle de dérivation reste inférieure, mais
elle prend une apparence systématique toujours la même, c'est
ce que j'appellerai la systématisation de la dérivation.
Cette systématisation me paraît se former assez facilement par
la simple évolution de la maladie, elle résulte de trois principes
généraux qui déterminent la nature des phénomènes du psycha-
sthénique.
La première raison de cette systématisation me paraît être
simplement la prédisposition individuelle : chacun de ces sujets
réagit à la maladie d'une manière particulière suivant sa nature
et son éducation. Ainsi il m'a semblé que l'on rencontrait plus
d'angoisses et de phobies chez les malades de Thôpital ayant peu
d'éducation intellectuelle et que l'on rencontrait plus de manies
mentales chez les malades de la ville habitués aux exercices de
l'esprit. De même on rencontre plus de tics chez les sujets jeunes
que chez les sujets âgés.
Le second principe est le principe de l'habitude. Bail disait
autrefois*: « La folie du doute est essentiellement caractérisée
par une sorte de prurit cérébral, que rien ne peut satisfaire, la
répétition des mêmes actes, des mêmes questions et des mêmes
pensées tient h un phénomène organique qui ramène sans cesse
les mêmes impressions. » Cette réflexion est très juste et nous
aurons à l'utiliser encore en parlant des obsessions. L'état pé-
nible déterminé par l'insufHsance psychologique est toujours le
même, et chaque fois qu'il se représente il dispose le sujet à re-
commencer exactement les mêmes pensées. Cela est d'autant plus
vrai que. le psychasthénique, dans cet état, est plus que jamais
un individu sans volonté, incapable de modifier son état mental
et d'échapper à la tyrannie des impressions qui ramènent les
mêmes idées. Précisément parce qu'il est toujours très disposé à
I. Bail, Revue seienlifique, 1883, II, p. 46.
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580 THÉORIES PATHOGÉNIQUES
céder à Thabitude ; il y obéit plus que jamais dans les dérivations
et quand il a commencé une fois une crise d'une manière il y a
bien des chances pour qu'il fasse toutes les autres sur le même
modèle.
Le troisième principe sera celui de la meilleure adaptation
possible : il est nécessaire de l'expliquer davantage. Le point de
départ de la crise est une action insuffisante et cette adaptation
incomplète s'accompagne de sentiments d'incomplétude extrême-
ment pénibles. Il y a là un état d'inquiétude très douloureux,
qui pousse le sujet à chercher par tous les moyens possibles à
en sortir. Cette douleur ne nous a pas paru être suffisante pour
déterminer à elle toute seule toute la dérivation ; mais TagitatioD
mentale et physique existant réellement, cette douleur que res-
sent le sujet doit jouer un rôle pour la diriger en tel ou tel
sens. Le sujet est mal à son aise et en même temps son esprit est
agité, se remplit de pensées de toutes espèces. Dans quel sens
vont se diriger ses pensées ? Les pensées vont être orientées vers
la considération de ce malaise et vers la recherche des moyens
pour en sortir ; les agitations vont être dans la mesure du possible,
un effort pour parvenir à l'adaptation complète. Elles n'arrivent
pas au résultat à cause de l'insuffisance mais elles vont être
aussi près que possible de cette adaptation.
Il en résulte que sauf dans les cas de grande confusion, les dé-
rivations vont toujours avoir un certain rapport avec le phéno-
mène primaire qui n'a pas pu être achevé. Si le point de départ
est un acte insuffisant, il y aura dans la dérivation des efforts
intellectuels et physiques en rapport avec l'acte. S'il s'agit d'une
idée sur laquelle la certitude a été impossible il y aura un travail
en rapport avec la recherche de la certitude, c'est là ce qui donne
naissance à des tics et à des manies particulières.
Le premier de ces principes semble déterminer d'une manière
générale la disposition aux grandes catégories de réaction. Il est
bien difficile d'expliquer autrement que par des dispositions indi-
viduelles la manière dont un homme réagit à l'inquiétude, soit
par des agitations physiques, soit par des angoisses viscérales,
soit par des ruminations mentales. Nous retrouverons davantage
l'application des deux autres principes dans les formes particu-
lières que prennent chacune des réactions.
Les angoisses présentent peu de systématisation, les différences
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INTERPRÉTATION DES TROUBLES SYSTÉMATISÉS 581
qu'elles présentent tiennent plutôt à la différence des objets qui
servent de point de départ à la crise, différence que nous avons
étudiée sous le nom de spécialisation de l'insuffisance. Ainsi, les
algies forment un groupe de phénomènes assez distinct, leur ca-
ractère distinctifn^est pas dû hune modification deTangoisse fon-
damentale, mais à l'association de cette angoisse avec les sensa-
tions provenant d'une partie déterminée du corps. Il en résulte
que les algies sont ou peuvent être plus continues que les autres
phobies puisque leur cause est toujours présente. On peut dire
aussi que cette intervention d'une partie du corps détermine
quelque modi6cation du phénomène : les angoisses liées avec des
sensations cutanées comme dans les diverses dermatophobies
contiennent plutôt du prurit, celles qui sont liées avec les sen-
sations fournies par la poitrine ou par le cœur donnent une place
plus importante aux étouffements, celles qui sont en rapport avec
les organes sexuels renferment souvent des sensations spéciales
d'excitation, comme on l'a vu, dans la maladie de Jean. La systé-
matisation ici se rapproche beaucoup de la spécialisation.
Dans les diverses phobies intervient aussi beaucoup la pensée
de l'acte qui sert de point de départ. Quelquefois il y a au début
un sentiment particulier d'incomplétude qui donne à l'angoisse
une nuance spéciale, les agoraphobes ont souvent avec leurs an-
goisses le sentiment d'être isolés, d*être absolument seuls au
monde, d'être en dehors de l'univers (Cas...). D'autres sentiments
d'humiliation (Vof...), de crainte, de colère, peuvent modifier
l'angoisse fondamentale. Je remarque en effet que chez quelques
personnes comme Cos. .. (177), femme de txk ans et Vod..., proba-
blement à cause d'un caractère irritable antérieur, l'angoisse donne
au sujet l'impression qu'il est en colère. Ce fait est loin d'être in-
signifiant à cause des obsessions que le sujet ne va pas tarder à en
tirer.
Enfin dans certains cas, le malade prétend éprouver une émo-
tion tout à fait spéciale. Nous avons vu la description singulière de
ce que Lae... appelle a l'émotion du chien enragé », émotion qui
vient remplacer tous les sentiments en rapport avec la réalité.
L'analyse de cette émotion du chien enragé nous montre cepen-
dant les mêmes troubles de la respiration et du cœur a une cris-
pation des nerfs, un petit tournoiement du ventre et le sentiment
qu'un chien lèche le bout des doigts». Il n'y a guère en réalité
que cette dernière sensation qui soit bien spéciale. C'est une
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INTERPRÉTATION DE L*IDÉE OBSÉDANTE 583
il arrive très souvent que les premières crises établissent d'une
manière à peu près définitive la forme des manies et que plus tard
les crises nouvelles, même déterminées dans d'autres conditions,
conservent sous Tinfluence de Thabitude la forme des premières.
Les tics sont des dérivations motrices systématisées, ce sont
de petits mouvements qui reproduisent en les réduisant certains
actes. La raison principale de cette systématisation me parait être
dans les manies mentales précédentes qui accompagnent toujours
au moins en germe le développement des tics. Le premier groupe,
le plus simple, est celui des efforts, ce sont des crises de grande
agitation qui ne sont que légèrement systématisées par une idée
directrice, celle de faire un effort. On voit là ce travail pour par-
venir à l'adaptation sur lequel j'ai insisté. Nous trouvons ensuite
les tics de perfectionnement qui sont tous inspirés par les manies
de précision, comme on le voit dans les tics de setâter, de se tou-
cher le corps, de remuer les yeux pour savoir s'ils sont égarés
(Ul...), de secouer la tête pour savoir si on y a du mal.
D'autres sont en rapport avec la manie du Symbole « fermer le
poing c'est comme si je disais : je ne crois pas en Dieu » (Lod...),
« se gratter le nez, c'est comme si on se laissait aller au plaisir
génital » (Jean). Un très grand nombre de tics sont en rapport
avec la manie des procédés comme les éructations de Rai., qui
veut ainsi mieux respirer.
Nous avons vu ensuite les tics de défense, les mouvements pour
repousser, le petit « hem, hem », pour cracher une épingle de la
gorge, l'écartement des jambes de Jean pour lutter contre la
masturbation, les manies de compensation et de réparation y
jouent un grand rôle.
On pourra facilement appliquer ces quelques principes à la
description des nombreuses manies et des tics que nous avons
cités. On verra toujours comment l'effort du sujet, pour échapper
aux sentiments d'incomplétude, se combine avec la situation don-
née pour former cette systématisation.
4. — L'interprétation de Vidée obsédante.
Pour terminer l'étude de ces théories pathogéniques, il ne
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bU THÉORIES PATHOGÉNIQUES
nous reste plus qu'un dernier problème, c'est celui de l'idée
même qui est obsédante, du contenu de l'obsession proprement
dite. Ce n'est plus une opération mentale qui se répète, une agi-
tation motrice ou viscérale, c'est une idée bien déterminée, repré-
sentant dans Tesprit du sujet un objet ou un fait déterminé.
Comment les malades en arrivent-ils a concevoir cette idée dé-
terminée et comment prend-elle dans leur esprit les caractères qui
en font une obsession psychasthénique.
I. — L'origine endogène du contenu des idées obsédantes.
Les théories intellectuelles et émotionnelles étaient disposées à
rattacher le contenu de ces idées obsédantes h une action du
monde extérieur sur le sujet, à les considérer comme exogènes.
Il me semble que ces obsessioixs ne présentent pas une diversité
&u(Gsante pour que Ton puisse les rapporter aux événements exté-
rieurs qui ont pu de bien des manières émotionner les sujets.
Au fond toutes ces idées se ramènent h un petit nombre d'ob-
sessions fondamentales que j'ai essayé d'énumérer au début sous
ces titres: obsessions de sacrilège, de crime, de honte de soi, de
honte du corps, de maladie. Ces obsessions fondamentales con-
tiennent toutes des pensées relatives à la personne, aux actes,
aux idées, au corps, plutôt que la représentation d'objets et d'évé-
nements extérieurs. 11 n'en est pas du tout de même chez les in-
dividus qui, comme les hystériques, ont des idées obsédantes
venant du dehors, en rapport avec des suggestions ou des causes
émotionnantes. Là ce sont les objets et les événements qui pré-
dominent, obsession de l'incendie, de l'amant, de la figure du
père ou de la mère, du rat dans la cuisine, du voleur, etc. Il y a
là une différence dans le contenu qui me paraît fort appréciable.
Les obsessions des psychasthéniques ont aussi dans leur con-
tenu certains caractères généraux fort remarquables : ce sont des
pensées de critique, des appréciations mauvaises sur les actes et
les idées, et en outre des pensées extrêmes. Le crime auquel
l'obsédé pense est toujours le crime extrême pour lui, étant
donnés son sexe, son âge, sa condition. Cela n'existe guère dans
les idées suggérées par les spectacles extérieurs et cela ne s ex-
plique pas par le hasard des circonstances émotionnelles.
Je suis donc disposé à croire que les obsessions psychasthéniques
sortent bien plus qu'on ne le croit du fond même du sujet, qu^
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INTERPRÉTATION DE L'IDÉE OBSÉDANTE 58i>
l*on peut les considérer comme endogènes, par opposition aux
idées exogènes qui sont déterminées par le mécanisme de la sug-
gestion. Cette conception est déjà indiquée par les auteurs qui
font sortir Tobsession intellectuelle de la phobie, mais je pense
qu'il faut aller plus loin et admettre que les obsessions,, comme
les phobies elles-mêmes, prennent leurs points de départ dans des
phénomènes pathologiques plus profonds qui sont surtout les sen-
timents d'incomplétude et les insuffisances psychologiques.
2. — L'influence des sentiments d'incomplétude sur le contenu
des idées obsédantes.
L'obsession est le résultat d'un travail intellectuel qui s'opère
pendant les crises de psycholepsie et qui remplit surtout les ru-
minations mentales. Le besoin de précision, d'explication, de
symbole, conduit les malades à interpréter eux-mêmes leur propre
état mental et à découvrir une explication, une véritable théorie
de leur transformation. L'idée obsédante est une interprétation
des troubles psychologiques élémentaires, interprétation faite
suivant les lois des manies mentales.
Les troubles des psychasthéniques qui peuvent engendrer des
obsessions sont, à mon avis, très nombreux et ne se limitent
point aux seuls troubles émotifs. Dès le début, l'abaissement de
la tension psychologique, en diminuant l'action et la perception
du réel, favorise la méditation ; il donne aux malades une ten-
dance à préférer l'idéal au réeL à aimer le mystérieux, le vague,
à se tourner vers les choses mystiques.
LHnsuffisance a-t-elle donné naissance à des dérivations men-
tales, chacune de ces manies qui constituent la rumination, est
une grande source d'idées. Les manies d'interrogation perpé-
tuelle amènent à concevoir l'idée de mystère, de tromperie :
Hg... (119) après avoir pendant des mois été tourmentée par
des interrogations ; « qu'y a-t-il derrière ce mur, d'où le mari
vient-il, à qui a-t-il parlé ? » devient obsédée par l'idée que le mari
lui cache quelque chose et qu'il la trompe.
La manie du symbole qui n'est qu'une manie de précision exa-
gérée est l'origine d'un très grand nombre de ces pensées. Les
idées sacrilèges sont évidemment dans ce cas : Claire est avant
tout une psychasthénique, avec sentiment d'incomplétude, toutes
nos études sur ses oscillations l'ont bien démontré. Elle a d'abord,
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INTERPRÉTATION DE L'IDÉE OBSÉDANTE 587
tentement de la conduite. II est trop évident que les sentiments
d*humilité, de honte sont le point de départ des obsessions de la
honte de soi et de la honte de corps.
Les idées criminelles ont la même origine. Dob..., dans un
wagon de chemin de fer, se sent si peu maîtresse de sa volonté
qu'elle se demande si sa main ne va pas malgré elle ouvrir la
portière. De là à penser que Ton est capable de commettre un
crime il n'y a qu'un pas. Bien souvent les malades qui prétendent
être poussés à Thoraicide ou au suicide expriment simplement
par là le sentiment qu'ils ont de leur faiblesse de volonté. Bien
entendu la manie du contraste joue un rôle et les crimes inventés
sont ceux qui sont les plus dangereux dans la situation du malade;
la caissière a des impulsions à voler, le musicien « à faire exprès
des fausses notes à l'orchestre de l'Opéra ».
Très souvent le malade se rend compte que ce crime n'est pas
présent et par les manies de remémoration, de recherches dans le
passé, il les transforme en remords. Il cherche avec une ardeur
incroyable où et comment il a bien pu tuer quelqu'un, il y a
quinze jours, ou bien il invente tout un délire rétrospectif dans
lequel ses maîtres auraient abusé de lui à l'école primaire.
Rk... va plus loin encore et il cherche si à Tâge de quatre ans,
quand il venait avec sa petite sœur de un au moins âgée dans le
lit de son père, il n'a pas attenté à la pudeur de celle-ci.
Déjà dans ces cas l'obsession s'éloigne un peu du sentiment
initial, mais ce n'est qu'une apparence. Quand Kl... est obsédé
par la pensée que son enfant n'est pas de son mari, il est évi-
dent qu'elle dissimule un remords génital, c'est comme si elle se
. demandait si elle a trompé son mari, et cette question qu'elle ne
précise pas dans son esprit résulte du sentiment qu'elle a de ne
plus être maîtresse de sa volonté.
Les sentiments d'incomplétude intellectuelle qui sont si nom-
breux et si intéressants deviennent le point de départ d'une foule
d'obsessions qui semblent tout à fait incompréhensibles si on ne se
reporte pas à ce début ; je n'en signalerai que quelques exemples.
Hm... (i35), femme de 21 ans, qui vient d'accoucher il y a trois
mois, est obsédée par la pensée que son enfant est un monstre;
quand elle le voit, elle constate qu'il est normal, mais, dès qu'elle
le quitte des yeux, elle pense qu'il présente les difformités les plus
extraordinaires. Fatiguée par la grossesse, elle a eu des troubles
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INTERPRÉTATION DE L IDÉE OBSÉDANTE 580
extérieure joint au sentiment de dépersonnalisation va faire naître
l'obsession si remarquable de Btu../« Je suis morte, je suis
enterrée dans un tombeau tout noir, d'un noir d'encre. »
D'autres formes particulières des sentiments d'incomplétude
vont simplement se transformer en idée, en obsession correspon-
dante. Le sentiment de dépersonnalisation, passager, variable, in-
complet, va faire naître une idée nette, abstraite, « que la personna-
lité est toujours perdue, que le moi est supprimé ou transformé ».
Le sentiment passager de « déjà-vu » va donner dans le cas de
M. Arnaud l'obsession précise et perpétuelle « du déjà-vu il y
a un an ». « La continuité de l'illusion, dit très bien M. Ar-
naud, n'est qu'apparente, elle est le résultat d'une sorte d'entraî-
nement, d'une habitude ayant déterminé un faux pli de l'esprit,
un véritable délire V »
Enfin une des observations les plus fréquentes, tout-à-fait ba-
nale chez ces malades, c'est l'obsession de la folie. Plusieurs au-
teurs disent que cette obsession « est une forme objectivée
de l'angoisse ». Je ne comprends pas pourquoi des états d'an-
goisse doivent s'objectiver sous forme d'idée de folie : les car-
diaques qui ont de l'angoisse sont-ils donc obligés de se croire
fous? S'ils n'avaient que l'angoisse pure et simple, les psychasthé-
niques n'arriveraient pas non plus à cette idée de folie. Elle est
pour moi l'expression de sentiments plus profonds : « si je dis que
je deviens folle, dit Dep..., femme de 28 ans, c'est que je sens
mon esprit vague, engourdi, drôle... ». « Si j'ai peur de devenir
folle, dit Zb..., femme de 82 ans, c'est parce qu'il me semble que
je ne suis pas maîtresse de mes actions, que je suis dans un cau-
chemar et parce que dans les cauchemars on fait des crimes et
des folies ». « C^est parce que je me sens comme une machine
que je me dis fou ». (Lois...).
Bien des obsessions ne sont ainsi que l'expression plus logique
et plus générale des sentiments d'incomplétude.
3. — L'influence des insuffisances psychologiques sur le contenu
des idées obsédantes.
Les insuflfisances des sentiments, les apathies, les émotivités et
surtout les sentiments anormaux qui se développent à ce propos,
I. F.-L. Arnaud, Ann. médico-psych , mai-juin 1896.
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INTERPRÉTATION DE L*IDËE OBSÉDANTE 591
crainte de la lutte, sa crainte de tous les dangers possibles Ta
conduit à ne plus pouvoir sortir au dehors sans angoisses. Il
ne veut pas avouer cette faiblesse ni aux autres, ni à lui-même
et il cherche à s'explique sa crainte de la rue par la préoccupation
d'un danger réel. Dix ans après le début évident de l'agora-
phobie, il trouve l'explication, c'est que dans son enfance, trente
ans auparavant, il a été mordu par un chien enragé et qu'une
nouvelle morsure lui donnerait infailliblement la rage. Ya-t-on
soutenir que cette obsession du chien enragé qui s'exprime à
^o ans est eu rapport avec l'émotion de cette morsure subie à
Tâge de lo ans ? Cette obsession est simplement une interpré-
tation rétrospective de son trouble fondamental de la volonté, et
des sentiments.
Le besoin de domination chez les autoritaires se rattache
comme on l'a vu à leur aboulie, il cause bien des obsessions.
La microphonophobie de Bow... n'est pas une hyperesthésie
de l'ouïe, c'est une obsession en rapport avec Pidée que les autres
personnes le dérangent dans son travail et ses pensées. Ce senti-
ment des autoritaires joue un rôle capital dans le délire de per-
sécution peut-être plus que dans le délire du scrupule.
Il suffit de rappeler toutes les obsessions amoureuses en rap-
port avec le besoin d'être dirigé, le besoin d'aimer, le besoin
d'être aimé. Je ne puis insister ici que sur quelques formes parti-
culières. Qi... est amusante avec son obsession d'être petit enfant,
de laisser flotter ses cheveux dans le dos et son désir fou d'être
appelée « Nénette ». Cr..., femme de 33 ans, est poursuivie par
l'obsession qu'elle veut avoir un enfant, elle court les hôpitaux
pour demander la fécondation artificielle, et regarde sous toutes
les portes pour trouver un enfant abandonné a adopter a c'est
parce que son amant l'épousera si elle a un enfant. C'est aussi
parce que cet enfant lui fera un soutien si elle est seule». Lour...,
femme de 44 ans, a des obsessions de jalousie qui ne sont pas
identiques à celles de Fa... que je viens de citer. « Depuis que je
me sens faible il me semble que mon mari ne s'occupe pas assez
de moi, qu'il me laisse isolée, qu'il ne me console pas, il me
semble que je n'arrive plus à le comprendre, à le croire, et j'en
viens à penser qu'il n'est plus comme il devrait être. »
On pourrait énumérer bien d'autres obsessions et montrer
qu'elles sont des interprétations plus ou moins compliquées por-
tant sur les insuffisances et sur les sentiments qui en dérivent.
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■V -^^
THÉOniES PATIIOGÉMQUES
L'influence des événements extérieurs sur le contenu
de l'obsession,
u'il en soit, Tobservation nous montre que les événements
s ont, eux aussi, une action et qu'ils déterminent assez
e contenu de l'obsession surtout quand ils sont Toccasion
)lente émotion. La maladie de Lf... commence quand
lassé son neveu tombé mort d'un échafaudage, celle de
arce qu^elle tenait sa belle-mère pendant un évanouis-
t que celle-ci est morte dans ses bras; celle de Cas...,
'elle a vu son fils tomber à l'eau. Cette dernière malade
s guérie a eu, dix ans après, une rechute parce qu'elle a
rusquement que sa mère était devenue folle et avait été
. \Ve... a commencé très jeune cette maladie quand on
embrasser son grand-père qui venait de mourir. Je note
des grandes périodes de maladie, chez Lise une scène
lari, chez Voz... un examen, chezLo... le mariage, chez
lorsure par un chien, chez Mnd... (179) la vue d'une folle,
.. la vue d'un morphinomane, chez Alx... un vertige
LU café, etc.
it remarquer que certaines émotions semblent jouer un
Dudérant. Ce sont d'abord les émotions religieuses, sur-
9 de la première communion et plus tard des confessions,
ussi les émotions génitales qui ont joué un grand rôle
.,chezKi..., chez Jean, c'est de cette remarque qu'est
ion de Freud, soutenue par Tamburini* que les obses-
Lvaient toujours d'un trouble des sentiments sexuels,
s déjà eu l'occasion de remarquer l'exagération de cette
l'en est pas moins évident que les événements extérieurs
ninent de l'émotion ont une action certaine sur le déve-
t de la maladie des obsessions.
tte action est extrêmement complexe : On a vu dans les
r les oscillations du niveau mental que les événements
le provoquer de fortes émotions peuvent déjà agir en
nt un abaissement de la tension psychologique et quel-
une manière inverse en déterminant une élévation. Il
rini. Obsessions sexuelles et obsessions du suicide» autosadisme, Congrh
de Bruxelles, 1897.
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INTERPRÉTATION DE L'IDÉE OBSÉDANTE 593
faut constater aussi que si le sujet est déjà abaissé par quelqu'une
des causes précédentes, Tévénement émotionnant peut encore
jouer un autre rôle, il peut déterminer le contenu de l'obsession,
la nature de Tidée qui va devenir obsédante.
Cela ne peut arriver à mon avis que si le sujet était antérieure-
ment préparé par tous les troubles précédents. L'idée fournie par
l'événement ne devient obsession que si elle est d'accord avec un
état antérieur dont le sujet avait le sentiment depuis quelque
temps. Cette idée qui est remarquée par le sujet devient l'expres-
sion qu'il cherchait de son état. Claire avait depuis longtemps ses
sentiments d'abaissement, de mécontentement, quand elle s'aper-
çut qu'elle avait une excitation génitale à l'église et que ses
regards se portaient avec des curiosités malsaines vers la statue du
Christ. Cela lui parut répugnant, odieux et cette idée la frappa
que c'était peut-être là le crime contre nature qui lui causait tant
de remords inexpliqués. Dur... (54) passe une soirée à la fenêtre
attendant son mari qu'elle soupçonne de la tromper. Cette attente
la rend furieuse, elle remarque qu'elle se refroidit et qu'elle se
rend malade à cause du mari. Cette idée la frappe comme le ré-
sumé et le symbole de longues inquiétudes antérieures et elle
commence à ce moment une obsession singulière qui consiste à
répéter que son mari l'a rendue phtisique. Cette idée ne Ta
frappée que parce qu'elle était inquiète, qu'elle se sentait fati-
guée, qu'elle avait le besoin d'une direction morale perpétuelle
et qu'elle se croyait abandonnée si son mari ne s'occupait pas
sans cesse d'elle.
VI... a grand tort de rapporter son éreutophobie à une con-
sultation médicale où le médecin aurait parlé d'eczéma du nez ;
la rougeur du nez n'est qu'un prétexte qu'elle a adopté avec en-
thousiasme pour résumer son aboulie et sa timidité. Toq... rem-
place successivement sa honte des moustaches par sa honte des
joues rouges, Nadia sa honte des mollets sous sa jupe courte, par
sa honte des pieds, des mains, de la poitrine, de la figure, etc.
L'événement ne détermine que la nuance particulière de l'ex-
pression.
Ce besoin d'une préparation antérieure explique un petit détail
assez curieux de la genèse des obsessions, j'avais remarqué ce
petit fait depuis longtemps et j'ai été heureux d'apprendre que
M. Arnaud l'avait remarqué de son côté ; cela montre qu'il a
quelque généralité. Dans leur récit, il est rare que les sujets rap-
LES OBSESSIONS. 1. — 38
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INTERPRÉTATION DE L'IDÉE OBSÉDANTE 595
faite à un médecin. Celui-ci lui aurait déclaré brutalement qu*il
était phtisique: «cela m'a frappé, dit le malade d'une manière
indigne, je passe les jours et les nuits sans repos à attendre la
mort, je ne vois que des enterrements et des morts, rien ne peut
me distraire et je suis incapable de faire le moindre travail. )> Si
Mgi... a dit vrai, mais je me défie un peu sur ce point des dires
des malades, une seule émotion a déterminé à la fois le trouble
et l'interprétation. Mais ce n'est pas la forme la plus commune,
car l'obsession est en général une interprétation, une expres-
sion, un symbole qui résume dans Fespritdu malade des troubles
déjà anciens portant sur les fonctions psychologiques supérieures
et déterminant depuis longtemps des ruminations et des phobies.
Enfin le contenu des obsessions présente certains caractères qui
ont été mis en évidence dans les chapitres précédents. Ces carac-
tères me semblent faciles à comprendre si on considère l'obsession
comme l'expression d'un état pathologique antérieur, car ils ne
sont pas autre chose que les caractères de cet état lui-même. Ainsi
les obsessions portent le plus souvent sur les actes du sujet, elles
portent sur des actes mauvais que le sujet voudrait ne pas faire :
elles constituent surtout un délire d'auto-accusation. Cette direc-
tion générale des obsessions se rattache simplement à leur point de
départ. Elles se sont développées dans l'esprit du sujet comme des
interprétations d'un état d'impuissance dans lequel aucune pen-
sée ne pouvait être poussée à son terme, dans lequel le trouble
portait surtout sur les actions et les croyances ; il est tout naturel
que ces interprétations même puériles soient en rapport avec
les sentiments d'incomplétude du malade et expriment surtout la
critique des actes et des croyances. En un mot je trouve que les
obsessions du malade sont en partie justifiées malgré leur appa-
rence allégorique et symbolique.
Si nous passons à d'autres caractères de l'obsession nous avons
remarqué qu'elle portait sur des actes extrêmes et que le sujet
poussait toujours jusqu'au dernier terme possible son idée de
crime ou de sacrilège. C'est encore la conséquence de plusieurs
caractères qui se trouvent déjà dans la rumination ; la généralisa-
tion désordonnée, le passage à l'infini ont déjà été remarqués
dans ces méditations qui restent abstraites et sans aucune des
limites qu'impose la perception de la réalité.
L'étude du contenu des obsessions me semble donc vérifier
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THÉORIES PATHOGÉNÏQUES
e înterprétatioD précédente des états psychasthéniques et
e hypothèse qui met au premier rang les troubles de la volonté
s TattentioD ou du moins les troubles de cette fonction du réel
nous a paru la plus élevée des fonctions cérébrales.
5. — L'interprétation de la forme de l'obsession,
nous reste à montrer que cette interprétation, ou plutôt cette
ésentation d'ensemble des faits, rend encore assez bien compte
s forme que prennent les obsessions proprement dites dans
rit du malade. J'ai insisté au début de cette étude pour mon-
que les obsessions des psychasthéniques avaient toujours des
itères spéciaux très différents, en particulier, de ceux que pré-
;nt les idées fixes des hystériques. Ces caractères se trouvent-
istifiés par une conception qui cherche le point de départ de
ession dans Tétat mental sous-jacent, dans rabaissement de
nsion psychologique et la disparition des phénomènes consi-
s comme supérieurs, ceux de la fonction du réel ?
premier caractère des obsessions c'est d'être obsédantes^
-à-dire de se prolonger pendant un temps extrêmement long
l'esprit du sujet, de réapparaître perpétuellement et absolu-
; à tout propos. Peut-on mieux expliquer ce caractère qu'en
îdérant les obsessions comme les expressions d'un état mental
-jacent qui est perpétuel. Si l'idée de crime, de honte de
lême, de folie, de maladie, n'est au fond qu'une manière de
dire que l'esprit est abaissé, qu'aucun phénomène ne va à son
e, qu'il y a un sentiment d'incomplétude, ces idées dureront
naturellement autant que l'insuffisance elle-même. Or, cette
fisance peut se prolonger pendant vingt ou trente ans en res-
toujours exactement la même. Il n'est donc pas très surprenant
le sujet ayant adopté une fois pour toutes une manière de
rimer ne change pas cette manière et conserve la même idée
iniment. Ainsi que Bail le disait très bien * : « la répétition des
es questions et des mêmes pensées tient à un phénomène
lique qui ramène sans cesse les mêmes impressions. C'est
que dans un rêve, nous nous débattons péniblement dans
ituation dont nous ne pouvons sortir, parce que la répétition
santé des mêmes impressions physiques reproduit la même
(ail, Revue scientifique, i88a, II, p. 46.
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INTERPRÉTATION DE L'IDÉE OBSÉDANTE 697
•série d'idées. Ce n'est qu'au réveil que nous sommes délivrées de
<3ette obsession. » Le réveil, ce serait pour le malade la dispari-
tion de son abaissement mental. Si cela arrive, s'il y a une ascen-
sion de la tension, nous avons vu que l'obsession disparaît tout
de suite : cela prouve bien qu'elle était liée avec le sentiment de
la diminution de cette même tensjon.
Nous avons remarqué que l'association des idées jouait un rôle
bizarre dans l'obsession et qu'il y avait plutôt une sorte de manie
•d'association qui pousse le sujet à unir son obsession avec tous les
autres phénomènes psychologiques qu'il éprouve. Ce caractère
-se rattache très simplement à la manie de la précision et à l'in-
quiétude. Le malade, qui a beaucoup souffert du sentiment d'in-
complétude éprouvé à propos d'un certain acte, reste inquiet et il
éprouve le besoin de vérifier toutes les autres actions, toutes les
-croyances, tous les sentiments pour voir si à leur tour ils ne vont
pas lui faire défaut. Bien entendu, comme nous le savons, cet
«ffort d'attention va simplement rendre difficiles des actions qui
se faisaient assez bien d'une manière désintéressée : celles-ci
vont de nouveau être insuffisantes, elles vont comme les précé-
dentes donner naissance au même sentiment d'incomplétude et le
sujet sera amené tout naturellement à traduire encore une fois ce
sentiment par la même obsession. Il vous dira donc que son ob-
session s'associe avec des actions et des idées de plus en plus
nombreuses et vous aurez l'impression qu'il cherche lui-même à
produire cette association. En réalité, il cherche simplement a
éprouver ses actions et ses croyances et en les éprouvant il met
et) évidence la même insuffisance et retrouve partout la même ob-
session. C'est ainsi que le malade inquiet a une tendance h
étendre perpétuellement son obsession comme une tache d'huile
Jusqu'à ce que toute sa vie en soit envahie.
Les obsessions sont impulsives, mais cette impulsion, comme
nous l'avons vu, consiste en une sorte de manie de la tentation
et de l'impulsion. On dirait que le malade cherche à vérifier à
chaque instant s'il est réellement bien poussé au crime ou à la
folie : il y a là encore un résultat de l'inquiétude fondamentale.
L'obsession, l'idée d'être poussé au crime ou l'idée d'être fou,
est une sorte d'explication que le malade aime à se donner à lui-
même des troubles pénibles qu'il éprouve. Cette idée lui plaît en
quelque sorte, parce qu'elle éclaircit un peu une situation inex-
tricable et parce qu'elle justifie les soins^ les protections, les
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REPRÉSENTATION ANATOMIQUE DES THÉORIES 599
leur terme qui est Tacte et Thallucination. Pour moi Tobsession
exprimant une maladie générale de l'esprit participe naturelle-
ment au caractère de cette maladie. Or le caractère essentiel de
toute la maladie, c'est qu'elle supprime le dernier terme des
opérations psychologiques, qu'elle rend impossible tout ce qui
dépend de la fonction du réel. Le malade qui d'une manière gé-
nérale est incapable d'agir et de croire n'arrive pas plus à agir
et à croire dans son obsession.
Enfin ces obsessions sont avant tout des obsessions conscientes,
des folies lucides, c'est-h-dire que le sujet garde le pouvoir de les
critiquer et de rire de lui-même. Cela revient à dire tout simple-
ment que ces obsessions restent incomplètes et n'arrivent pas
jusqu'à la certitude. Mais la maladie est justement une folie du
doute qui supprime partout les croyances, il est donc tout naturel
qu'elle les supprime aussi dans l'obsession qui la résume. Nous
avons vu que les obsessions des psychasthéniques, par opposition
aux idées fixes des hystériques, sont des systèmes d'images avec
développement incomplet. Ce caractère qui résume les précé-
dents résume aussi la maladie qui est, comme on l'a vu, une im-
puissance a compléter les phénomènes psychologiques. Tous les
caractères de l'obsession ne sont en somme que les caractères de
l'état psychasthénique, il est donc tout naturel d'admettre qu'elle
en dérive.
5. — La représentation anatomique des théories.
Beaucoup d'auteurs ont essayé de donner à leurs explications
de la maladie des obsessions une couleur anatomique, il faut au
moins signaler les tentatives qui ont été faites dans ce sens.
Je n'insiste pas sur les troubles de Testomac et des divers vis-
cères qui ont déjà été signalés, il est admis à peu près généra-
lement que ces troubles sont secondaires. Mais il ne faut pas ou-
blier que ces troubles donnent naissance à des auto-intoxications
qui ont la plus grande influence sur le développement de la ma-
ladie. La lésion principale est peut-être une susceptibilité spéciale
des cellules cérébrales pour toutes les intoxications. .Comme le
système nerveux altéré n'excite plus suffisamment les fonctions
gastro-intestinales, il en résulte de nouvelles fermentations et de
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THÉORIES PATHOGÉNIQUES
ions. Ce cercle vicieux joue un rôle consldé-
est pas moins vrai que le trouble gastrique ne
ul pour déterminer toute la maladie si le sys-
sain.
quels on a attribué le plus grand rôle sont en-
circulatoires. J*ai déjà signalé les travaux de
le Lubetzki sur le rôle de la congestion et des
iirs dans les céphalalgies et dans les douleurs
î. M. de Fleury explique les angoisses « par un
Tarbre circulatoire s'accompagnant probable-
3tivité fonctionnelle du cœur. La crosse de
sque entièrement élastique et dénué de fibres
uve prise entre deux forces contraires qui len-
! violemment, le lacis nerveux dont elle est en-
raillé et souffre de cette douleur rétrosternale
nent essentiel de Tangoisse* ». J'ai déjà si-
et auteur fait jouer à l'hypertension et surtout
érielle.
ui a le plus insisté sur l'origine circulatoire de
t M. Auguste Voisin. Déjfi dans ses leçons cli-
lit disposé à rattacher beaucoup de maladies
e cérébrale*. Plus tard il chercha à montrer
délire du doute avec la sthénie et l'asthénie
Jteur présentait des tracés sphigmographiques
action de certains médicaments comme la ca-
le sur ces troubles vasculaires.
tiennent une part de vérité" car les troubles
videmment fréquents. Mais il est peu probable
ifs : tous les auteurs sont naturellement ame-
trouble d'un centre circulatoire ou vaso-mo-
uent à se rapprocher des théories nerveuses.
il faut distinguer d'abord celles qui veulent
e à des organes nerveux en dehors du ceneau
)rel et Legrand du Saulle parlaient déjà d'une
symptômes neurasthéniques, 1901, p. 98 (Paris, F. Alcan)
cliniques sur les maladies mentales, 1876.
du doute, SCS relations pathogéniques avec la sthcnie et
mon médicale, 28 mars 1895.
ê
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REPRÉSENTATION ANATOMIQUE DES THÉORIES 601
névrose du système nerveux ganglionnaire viscéral *. M. Féré remar-
<}uait le grand rôle du sympathique au moins « comme organe
périphérique des émotions ». M. Ilartenberg a essayé d'aller plus
loin : dans une communication présentée au dernier congrès de psy-
chologie et dans son travail sur la névrose d'angoisse il concevait
les obsessions et surtout les phobies comme une névrose du sym-^
pathique. Ces auteurs, j'en suis certain, reconnaissent eux-mêmes
combien tout cela est aujourd'hui hypothétique. Quel est le rôle
exact du sympathique dans l'émotion ? Les maladies connues des
franglions cœliaques déterminent-elles des troubles analogues à la
folie du doute et aux manies du serment ? N'est-il pas aujourd'hui
bien plus vraisemblable que les centres corticaux du cerveau
jouent un rôle considérable dans les émotions et dans les obses-
:sions ?
M. Dallemagne semble disposé à rattacher ces maladies à des
troubles émotionnels et ceux-ci à des altérations « des centres ner-
veux inférieurs... qui servent comme de transition entre les
fonctions médullaires automatiques et inconscientes et les fonc-
tions corticales conscientes et d'apparence spontanée^ ». Il
semble peu probable que les angoisses des psychasthéniques
-soient assez élémentaires pour être rattachées uniquement à des
lésions bulbaires. Celles-ci n'ont guère déterminé des troubles
comparables à ceux des scrupuleux et tous ces auteurs n'hésite-
ront pas à ajouter aux troubles des organes qu'ils signalent le
rôle prépondérant des troubles du cerveau.
Les théories cérébrales de la psychasthénie sont très peu nom-
breuseSy elles se ramènent à quelques types très simples.
Quelques auteurs font allusion à des centres spéciaux, par
exemple aux centres corticaux de la rougeur de Bechterew et
Misslawski. Peut-on, après toutes les observations sur la honte
du corps, rattacher Téreutophobie à une maladie spéciale d'un
centre déterminé, celui de la rougeur du visage. Si ce centre
existe, son trouble me parait singulièrement secondaire à des
altérations bien plus générales.
Le plus souvent on explique la maladie par l'excitation indé-
pendante et isolée des divers centres corticaux. C'est déjà ce que
disait Spencer non sans quelque naïveté : « une fonction cérébrale
Legrand du Sanlle, Arjoraphobie^ p. ^
Dallemagne. Dégénérés el déséquilibrés, 1896, p. 673.
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REPRÉSENTATION ANATOMIQUE DES THÉORIES 603
telle sphère déterminée. S*agit-il de la sphère cœnesthésique on
aura les obsessions émotionnelles ; s'agit-il de la sphère sensi-
tivo-sensorielle, on aura les obsessions hallucinatoires ; s'agit-il
de la sphère motrice, on aura les obsessions impulsives ; s'agit-il
de la sphère psychique, on aura les obsessions intellectuelles \ »
Ce langage en apparence anatomique ajoute-t-il quelque chose
aux descriptions et aux classifications cliniques des obsessions ?
J*avoue que je n'en suis pas convaincu. Je ne vois pas bien quel
avantage on trouve h exprimer les conclusions psychologique»
dérivées d'une observation qui n'est encore et qui ne peut être
que psychologique en un autre langage bien plus hypothétique.
Pourquoi mêler le problème de la nature des centres corticaux,
de leur rôle dana la pensée avec l'interprétation des obsessions ?
Sait-on bien s'il y a un centre spécial pour chaque idée, et chaque
fonction psychologique? Sait-on s'ils ne collaborent pas tous dans
chaque pensée ? Que de problèmes on ajoute inutilement à celui
que l'on étudiait.
Pour moi, je ne puis croire qu'il soit possible d'expliquer
aucune des obsessions ou des impulsions que j'ai décrites dans
cet ouvrage par l'irritation localisée d'un centre cortical, à moins
que l'on ne transforme complètement le sens que les physiolo-
gistes donnent à ce mot, centre cortical^ et que l'on n'entre com-
plètement dans le domaine de la fantaisie. Pour prendre un
exemple parmi les plus simples, l'éreutophobie ne peut aucune-
ment être présentée comme une maladie du centre de la rougeur
du visage. Imaginez le trouble vaso-moteur de la face le plus
énorme, se produisant par suite d'une lésion centrale comme
une épilepsie Jacksonienne, ce ne sera aucunement de l'éreuto-
phobie. L'obsession de la rougeur est une pensée qui vient dans
l'esprit du sujet pour expliquer au moyen d'un trouble plus ou
moins réel de la face, d'innombrables sentiments de gêne, de
difficulté, d'arrêt, de honte, qui surviennent en lui depuis long-
temps à propos des actes sociaux.
Ce qui serait peut-être le plus troublé chez l'éreutophobe ce
serait le centre des mouvements puisqu'il y a une aboulie au point
de départ. Mais il ne peut s'agir du centre des mouvements quel-
I. Vallon et Marie, Contribution à l'étude de quelques obsessions. Xlh Congrès
de médecine de Moscou, 1897.
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REPRÉSENTATION ANATOMIQUE DES THÉORIES 605
les lampes sont très nombreuses et très artistement disposées; s'il
éclaire mal, si les lampes s'échauflent, s'il se produit des dériva-
tions c'est que le courant fourni par le secteur n'a pas le voltage
suffisant. Je me hâte d'ajouter d'ailleurs que l'on ignore complè-
tement à quoi tient cette baisse de courant du cerveau, s'il y a
un organe spécial qui produit cette tension et qui la règle, si
cet organe est dans l'écorce cérébrale, dans le cervelet ou en
dehors. Ce n'est là qu'une représentation vague qui est bien loin
d'atteindre la précision que Ton peut, je crois, donner à des
interprétations purement psychologiques.
Il est évident que c'est là bien peu de choses, mais c'est tout
ce que l'on peut dire avec quelque vraisemblance. S'il « faut
toujours penser anatomiquement », il faut se résigner à ne pas
penser du tout quand il s'agit de psychiatrie. N'est-il pas plus
raisonnable et plus utile même de constater les faits de la ma-
nière dont ils se présentent actuellement à l'observation et de les
exprimer dans le langage qui leur convient. Ces études psycho-
logiques, en analysant les phénomènes, en les réduisant à leurs
éléments essentiels, préparent les voies à une interprétation
anatomique, interprétation qui n'est pas encore possible à notre
époque.
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L^HÉRÉDITÉ 607
i. —L'hérédité.
Il est d'observation ancienne que Thérédité joue un rôle consi-
dérable dans la maladie des obsessions. Legrand du Saulle plaçait
déjà l'hérédité en premier lieu parmi les causes prédisposantes :
« La folie du doute va de préférence recruter ses victimes parmi
les descendants des névropathes, ces surnuméraires obligés de
Faliénation'.» Tous les observateurs ont reproduit la même re-
marque. M. Saury' reproduisant l'enseignement de M. Magnan^,
appelle « cette maladie » la folie héréditaire et écrit en parlant des
obsédés : « qui dit folie dit hérédité, c'est le principe qu'il faut
admettre en thèse générale. »
MM. Pitres et Régis établissent à ce sujet le tableau suivant
très démonstratif. Ils constatent dans les 4/5 des cas des ascen-
dants directs ou collatéraux qui sont des obsédés, des aliénés,
des alcooliques ou des névrosés. Sur loo observations d'obsédés
ayant dans leur ascendance des tares névropathiques, ils observent
les proportions suivantes :
f paiemelle 5
/ similaire.. .< maternelle a'i
( collatérale lo
Hérédité < l aliénés, épileptiques ou hystériques. i5
ipère ou mère.] alcooliques lt^
{ violents, originaux i^
jl j, i aliénés, épileptiques, hystériques, al-
*( cooliques, etc i8
Je n'ai recueilli quelques renseignements suffisamment précîs
sur les maladies des parents que dans 170 cas. Voici les résul-
tats de ces observations en ramenant la proportion à 100 cas:
Parents sans maladie connue 8
Tuberculeux, syphilitiques lu
Arthritiques, goutte, etc 7
Hérédité ) Alcoolisme i5
dans 100 cas. ] Névropathiques 17
/.,.,.. l chez les parents i4
f Ahénation î 1 , *^ „ », r
( chez les collatéraux i(>
\ Psychaslhénie similaire a8
1. Legrand du SauIIe, Folie du doute, p. 61.
2. Saury, Les dégénérés , étude sur la folie héréditaire, 1886.
3. Magnan, Héréditaires dégénérés. Archives de neurol., 189a, I, 3o5.
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L'HÉRÉDITÉ GOÔ
Ce quî parait le pluscurieux c'estquedans/ly cas, c'est-à-dire 28
pour 100, je trouve à un degré plus ou moins accentué ce que I*on
peut appeler une hérédité similaire ; dans I3 de cescas l'hérédité est
absolument semblable et la maladie se répète quelquefois dans
tous ses détails. Le père de Mb... avait une manie d'interrogation,
de vérification qui ressemble tout à fait aux interrogations que
fait maintenant sa fille parvenue au même âge sur la valeur des
différents sens. L'obsession du suicide que j'observe actuellement
chez Er... existe aussi chez sa sœur, elle a existé chez la mère et
chez la grand'mère de ces deux jeunes filles. Dans le cas de Sol...
la mère et le fils présentent en même temps la même obsession
qui les pousse à penser constamment avec terreur à la mort su-
bite. Dans les autres cas les parents ont d'autres obsessions,
d'autres manies bien caractérisées. La mère de Dob... avait des
obsessions de jalousie, et Dob... est une agoraphobe. Bow^...
nous présente la microphonophobie, son fils a la phobie du bé-
gaiement. La grand'mère de Gisèle avait des craintes de dépen-
ser de l'argent, de le voler et de l'amour fou pour les bêtes. La
tille de cette malade, à 6 ans, présente des manies d'ordre et des
remords obsédants, elle sent déjà « qu'elle n'est pas comme les
autres petites filles qui savent 'avoir des idées gaies ». Trousseau
avait déjà remarqué qu'il y a des familles chez qui les tics sont
héréditaires, il y en a de même chez qui les phobies et les scru-
pules se transmettent de génération en génération comme les traits
du visage. Lise et sa plus jeune sœur, qui ressemblent à leur
père, ont des scrupules comme lui; son frère, qui ressemble
physiquement à la mère, échappe à la maladie.
Dans beaucoup d'observations, où j'ai compté les parents comme
sains ou bien comme ne présentant que de l'arthritisme, on trouve
cependant chez eux des troubles psychologiques extrêmement inté-
ressants. Ce sont des gens bizarres, des agités ou bien des mous
et des inertes ne pouvant se décider à rien, ou bien des violents,
des entêtés incapables de se diriger ou de se contraindre. La mère
de Mm... reste absorbée dans ses idées : elle a toujours été une
rêveuse ne pouvant jamais se décider à agir mais elle n'a jamais
souffert de l'obsession, sa fille a le même caractère rêveur mais
elle souffre de ses idées. Le père de Chv... est un inquiet, sans
énergie qui s'est tourmenté toute sa vie sans motif, sa fille est
une hypocondriaque et une phobique. La mère de Lep..., le
LES OBSESSIONS. I. — Sq
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LES STIGMATES PHYSIQUES DE DÉGÉNÉRESCENCE 6ll
sent pas toujours à Tobsession proprement dite, mais que plu-
sieurs de leurs membres dévient dans d'autres directions vers
Tépilepsie, l'hystérie ou d'autres psychoses.
2. — Les Stigmates physiques de dégénérescence.
Cette influence de l'hérédité a conduit h rechercher chez les
obsédés des marques physiques dWganisation incomplète ou
défectueuse, les stigmates physiques de la dégénérescence.
Morel signalait déjà ce problème ; Legrand du Saulle y insiste
dans son étude clinique sur l'état mental de Sandon, 1878'.
Il signale les malformations du crâne, l'aplatissement de la ré-
gion postérieure de la tête, le défaut d'harmonie du front et de
la tête, l'asymétrie, le strabisme, le nystagmus, la grandeur de
la bouche, l'épaisseur de la lèvre inférieure, l'irrégularité dentaire,
la décadence rapide et précoce de la dentition, l'asymétrie et
l'étroitesse de la voûte du palais, l'asymétrie, l'implantation vi-
cieuse, la forme anormale, du pavillon de Toreille, l'arrêt de
développement des organes génitaux, etc.
M. Magnan et toute son école ont beaucoup insisté sur l'im-
portance de ces stigmates physiques dont ils se servent pour
ranger ces malades parmi les dégénérés *. Parmi les travaux ré-
cents on peut signaler ceux de Binder sur l'oreille de Morel ',
ceux de Metzger sur les signes delà dégénérescence*, cet auteur
remarque justement qu'il ne faut accorder de l'importance qu'au
concours de plusieurs de ces signes associés chez le même indi-
vidu, de M. Ladame^, de M. Iscovesco'etc.
I. Legrand du Saulle, Signes physiques des folies raisonnantes, élude clinique sur
l'état mental de Sandon, 1878.
a. Magnan, Journal des conseils médicaux, a6 novembre 1889. Leçons faites à
Sainte- Anne, recueillies par Legrain. Legrain, Du délire chez les dégénérés, i885.
Magnan, Des signes physiques, intellectuels et moraux de la folie héréditaire,
Ann. méd psych., janvier 1886, p. 90. Discussion. Ann. méd. psych., i886, p. 270,
437, ^à^. Archives de neurologie, 1893, II, 3o8.
3. Binder, L'oreille de Morel. Arch. f. Psych., XX, 3, 1890.
4. Melxger, Étude des signes de la dégénérescence. Allg. Zeitschr. f. Psych.,
XLV, 5, 1890.
5. Ladamc. Uevue de l'hypnotisme, 1891, p. 137.
6. Iscovesco, Trois cas d'impulsion chez des dégénérés. Ann. méd.^psych , 1898,
II, 6a.
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CI2 L'ÉVOLUTION
MM. Pitres et Régis ont cependant fait à ce propos une remar-
que très juste, c'est que ces tares physiques sont loin d'accom-
pagner toujours et régulièrement les troubles moraux des phobies
et des obsessions. « La plupart des obsédés ont le crâne bien con-
formé, les dents bien implantées, les organes génitaux normale-
ment développés, ils ne présentent même pas plus souvent que
les sujets réputés sains les petits stigmates auxquels on était
porté naguère à attacher une importance fort exagérée. » Ces
auteurs dans une enquête sur 5o sujets ont examiné 1 état de
la voûte palatine, la forme des oreilles, Texistence ou Tabsence
du tremblement des mains et ils n'ont pas obtenu des résultats
différant sensiblement de ceux qu'on obtient d'ordinaire chez des
sujets normaux.
Je n'ai pas fait la même enquête aussi systématiquement ; je
constate de temps en temps quelques-uns de ces signes qu'on
est convenu d'appeler stigmates physiques de dégénérescence, j'ai
noté deux cas de bec-de-lièvre, douze cas d'asymétrie faciale très
nette, en particulier chez Jean, une trentaine de fois la voûte pala-
tine ogivale, quelques implantations des dents très irrégulières,
en particulier chez Lo... et chez Ver..., l'oreille de Morel, l'asy-
métrie du visage et du corps, des plaques de vitiligo sur la peau
chez Vk..., le gigantisme chez Gisèle, femme de i°,86 et le
nanisme chez Far..., homme de i,™38, l'asymétrie remarquable
de la couleur de l'iris dans les deux yeux chez Fa..., l'arrêt de
développement des seins et des organes génitaux chez Mw... qui
n'est pas encore réglée à 3o ans, etc.
Cependant, il faut observer que ces déformations sont loin
d'être la règle, il ne faut pas oublier que l'on rencontre des
scrupuleux qui sont de très beaux hommes, d'une conformation
irréprochable comme Rk... Je suis disposé à conclure comme
MM. Pitres et Régis que ces malformations sont très loin d'avoir
chez les obsédés la même fréquence et la même importance que
chez les idiots et même chez les épileptiques.
Ce que l'on observe plus souvent ce sont ces troubles fonction-
nels qui se manifestent dès l'enfance et qui indiquent une résis-
tance défectueuse du système nerveux. Dans douze cas parmi les
antécédents personnels j'ai noté des convulsions infantiles. Le
fait a une petit importance : on sait que ces convulsions sont
très rares dans les antécédents des hystériques et qu'elles sont
au contraire très fréquentes dans les antécédents des épilepti-
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LE SEXE ET L'AGE 613
ques, or, comme on Ta vu, je suis leaté de rapprocher nos psy-
chasthéniques des épileptiques. Dans 7 cas, j'ai noté l'inconti-
nence nocturne infantile, se prolongeant jusqu'à 10, 12 et i5 ans,
dans trois cas du bégaiement. Dans un de ces cas assez curieux,
le bégaiement a guéri vers Tâge de 2a ans, au moment où a
commencé l'évolution des troubles mentaux.
Si les stigmates physiques de la dégénérescence ne sont pas
toujours évidents, il y a cependant une faiblesse du système ner-
veux qui se manifeste par ces troubles fonctionnels et qui sera
encore plus évidente quand nous considérerons le caractère moral
antérieur à la maladie proprement dite.
3. — Le sexe et l'âge.
En outre de l'hérédité, le sexe semble jouer un certain rôle
comme condition prédisposante. En faisant la statistique des
observations maintenant assez nombreuses que j'ai recueillies et
qui s'élèvent au nombre de 325, je constate qu'il y a parmi ces
malades 96 hommes et 280 femmes. La difiérence est considéra-
ble puisque le nombre des femmes, 71 pour 100, est plus de trois
fois celui des hommes, 29 pour 100. Quelques remarques peuvent
peut-être diminuer cette différence, les hommes ont moins que les
femmes le temps de venir se plaindre d'une maladie semblable de
Tesprit, ils s'occupent moins des détails de leur pensée. Mais cela
même confirme qu'ils sont moins susceptibles de devenir des scru-
puleux. On peut admettre en résumé qu'il y a un quart d'hommes
pour trois quarts de femmes : c'est une remarque qui a déjà été
faite à propos de l'hystérie et en général à propos des névroses.
Elle s'accorde avec cette opinion générale peu galante mais
assez vraie: c'est que la femme est en général d'un niveau mental
inférieur à celui de Thomme, en entendant toujours la hiérarchie
mentale dans le sens que j'ai indiqué, qu'elle a plutôt les fonc-
tions inférieures de la rêverie et de Témotivité et qu'elle a moins
les fonctions supérieures qui agissent sur le réel, le perçoivent
et le modifient.
Il est plus difficile de déterminer l'influence de l'âge : on peut
commencer par dresser un tableau indiquant l'âge qu'avaient les
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LE SEXE ET L*AGE 615
Mais il est certain aussi que dans l^enfance et Textréme jeunesse
les cas que Ton présente au médecin sont fort rares, de même à
partir de 5o ans on note dans les deux tableaux une décroissance
très rapide. Les cas d'obsession dans Tenfance ou dans la vieil-
lesse sont toujours signalés comme des raretés cliniques ^ La pé-
riode la plus favorable au développement de cette maladie semble
être entre 20 et 5o ans, c'est-à-dire dans Tage adulte. Enfin par
une coïncidence qui ne peut pas être fortuite, les deux tableaux
nous montrent le maximum au même âge entre 26 et 3o ans,
il semble bien que ce soit là la période la plus active de la ma-
ladie si on veut bien admettre que la gravité de la maladie est en
rapport avec l'activité que mettent les malades à rechercher les
soins du médecin.
Une statistique qui serait beaucoup plus intéressante nous don-
nerait non plus l'âge où les malades se présentent chez le méde-
cin, mais l'âge où la maladie a débuté ; malheureusement cette
statistique est presque impossible à établir. La maladie des obses-
sions procède souvent par rechutes successives séparées par des
périodes d'amélioration relative. Les malades sont trop portés à
donner comme le début de leur maladie la date du début de
leur dernière rechute grave et laissent de côté la date du début
véritable quelquefois très éloignée. Par exemple Vor..., femme
de 58 ans, vous dira volontiers que sa maladie actuelle, le scrupule
urinaire, a commencé il y a deux ans ; ce n'est qu'incidemment
qu'elle raconte avoir été soignée par Charcot à Tàge de 18 ans,
pour une crainte bizarre de dire des mensonges en confes-
sion. Elle est toute surprise quand on lui fait reconnaître que
c'est toujours la même maladie. On commet ainsi, en prenant
la date d'une rechute pour la date du début, de grossières
erreurs.
Mais une deuxième difficulté est plus grave encore ; qu'est-ce
qu'on appelle le début véritable d'une maladie semblable ? Est-ce
le début de l'obsession proprement dite? Mais il peut y avoir
auparavant des crises de rumination, de phobie, de tics qui
sont, comme on l'a vu, la préparation de l'obsession; admettra-
1. H. Berger, Obsession et impulsion chez un enfant de 10 ans. Arch. f. Psy-
chiatrie, XVllI, 3, i8go. J. Séglas, Neurasthénie tardive avec idées obsédantes et
folie du doulc chez un homme de 56 ans. Société médica-psych., a5 mai 1891.
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LE SEXE ET L'AGE
617
De 5
TOTAL
TOTAL
AGE HOMMES
FBMMES
POUR 186
POUR 100
5 à lo ans. ... 3
4
7
3.7
II à i5 ans.
6
33-
29
i5,5
i6 à ao ans.
i3
33
46
2^,3
31 à a5 ans.
8
30
38
l5.3
36 à 3o ans.
5
33
38
ao,4
3i à 35 ans.
9
3
II
5,9
36 à ^0 ans.
3
8
11
5.9
f^l à /|5 ans.
0
6
6
3.3
46 à 5o ans.
3
4
6
3.3
5i à 55 ans.
0
0
0
0
56 à 60 ans.
0
3
3
1.07
61 à 65 ans.
i
l
3
1,07
5o
i36
186
100
Ici les deux tableaux ne sont plus aussi concordants que tout
à Theure, ils montrent bien tous les deux le nombre considéra-
ble des débuts dans la jeunesse, nombre qui va en diminuant à
mesure que Tage avance. Mais dans le tableau de MM. Pitres et
Régis le maximum se trouve entre 11 et i5 ans, tandis que dans
le mien le maximun se trouve un peu plus tard entre 16 et
30. Les auteurs précédents concluent leur étude en disant : « plus
de la moitié des cas commence dans Tenfance avant la fin de la
quinzième année, plus des trois quarts avant la trentième ^ » Mon
tableau ne me permet pas d'avoir tout a faitla même formule et je
dirai : à peu près la moitié des cas commencent avant la fin de la
vingtième année et plus des trois quarts avant la trentième.
Cette remarque sur Tage du début le plus fréquent, n'est pas
sans intérêt. Tous les auteurs sont d'accord pour admettre l'énorme
influence de la puberté. Legrand du SauUe disait que chez des
prédisposés par l'hérédité Tâge de la puberté ne va pas sans ora-
ges et sans périls. M. J. Falret ajoutait qu'à la puberté, il se fait
comme une bifurcation, les uns sont frappés d'un arrêt de déve-
loppement et se dirigent vers la débilité intellectuelle, les au-
tres vers les phobies raisonnantes. « J'ai été frappé de ce fait,
écrivait Baillarger*, que presque toujours la maladie du doute
avait débuté à l'époque de la puberté. » M. Marro insiste beau-
coup sur ces dangers de la puberté : l'activité de la croissance.
I. Pitre» et Régis, op. cit., p. 70.
3. Baillarger, Folie du doute. Archives cliniques des maladies mentales et nerveuses.
Paris. 1861.
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LES CONDITIONS PHYSIQUES DÉTERMINANTES 61
il est évident que certaines causes déterminantes jouent un rôl
dans l'éclosion de la maladie. Tous les auteurs ont noté Fimpoi
tance des fatigues, des excès, des traumatismes, des maladies in
fectieusesy de la puerpéralité, etc.^
On a rattaché des cas d'une manière nette à des maladies d*es
tomac', à des lésions cardiaques ', à Tinfluenza^, etc. MM. Pitre
et Régis ont fait une statistique de 4o cas où les causes physique
sem'blent avoir eu une grande influence. Ces cas se décomposer
ainsi ^
5.
Opérations chirurgicales a
Maladies vénériennes et cutanées 8
Surmenage 5
Maladies infectueuses la
Accidents nerveux 6
Grossesses a
Ménopause 5
Dans mes observations j*ai noté que les obsessions sembler
avoir commencé immédiatement ou quelque temps après les ph<
nomènes suivants et que par conséquent ceux-ci peuvent avo
eu quelque influence sur elles.
Congestion par la chaleur i cas.
Refroidissement de la tète i
Surmenage physique 3
Blessures accidentelles 4
Contusions à la tète i
Opérations chirurgicales 5
Eczéma et maladies cutanées 3
Uréthrite /|
Métrite a
Syphilis a
Troubles gastriques lo
Choléra i
Bronchite a
Influenza 4
Pleurésies et pneumonies 3
Tuberculose a
I. Baillargcr, Recherches sur les maladies mentales, 1890, p. a6a. Séglas, Maladi
mentales, p. 69, etc.
a. Devay. État délirant par auto-intoxication. Journal méd.ct de chir. prat., 187
p. 497-
3. Roubinovitch, Phobie dans un cas d'insuffisance mitrale. Société méd.-psych
37 mai 1875.
4. Pailhas, Obsessions nerveuses au cours d'une atteinte d'influenza. Ann. méà
psych., 1893, II, 4a6.
5. Pitres et Régis, op. cit., p. 74.
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LES CONDITIONS PHYSIQUES DÉTERMINANTES 621
L'accouchement, surtout lorsque, comme chez F'ok..., il se
complique d'accidents infectieux, ebt fréquemment le point de
départ d'accidents mentaux graves, quoique la prédisposition ne
fût que légère auparavant.
Un problème bien plus intéressant et plus délicat se pose
quand on considère Tinfluence de Tonanisme et des divers trou-
bles des fonctions sexuelles. Un grand nombre d'auteurs ont
attiré l'attention sur l'influence considérable que les fonctions
génitales exercent sur les fonctions mentales. Tous les anciens
auteurs et en particulier Legrand du Saulle avaient déjà signalé
l'influence de l'onanisme. Une belle observation de délire du
scrupule qui se trouve rapportée dans le livre curieux de Zim-
mermann « la Solitude » est rattachée par l'auteur (c à cette habi-
tude déplorable' ». Cette influence délétère était donc communé-
ment admise mais d'une manière un peu vague.
M. Freud, de Vienne, a essayé de montrer que les névroses et
en particulier l'hystérie et la névrose d'angoisse avaient pour ori-
gine exclusive des troubles des fonctions génitales^. « L'hystérie
aurait pour origine un souvenir inconscient relatif à la vie sexuelle
et remontant à la première enfance, la neurasthénie serait due au
surmenage génital par masturbation excessive et pollutions ré-
pétées et la névrose d'angoisse proviendrait de la satisfaction in-
complète du besoin sexuel'. » L'origine de la maladie qui nous
occupe et qui est, comme on l'a vu, bien voisine de la névrose
d'angoisse de Freud serait bien simple : « Son étiologie spécifique
est l'accumulation de la tension génésique, provoquée par l'absti-
nence ou l'irritation génésique fruste (formule générale pour indi-
quer l'elTet du coït réservé, de l'impuissance relative du mari, des
excitations des fiancés, de l'abstinence forcée, etc.) ». Plusieurs
auteurs ont publié des statistiques curieuses pour montrer le bien
fondé de cette interprétation : les plus importantes sont celles de
I. Zimmcrmann, La solitude, p. i54> même opinion dans lo livre de M. Dagonct,
Maladies mentales, 189^, p. 43/|.
a. Freud (de Vienne), Die sexualiUt in der Œtiologic der neurosen. Wiener
kl in. Hundschau, 1899, a, 4f 5, 7.
3. Les théories de M. Freud sur ce point sont clairement résumées dans le petit his-
torique de la névrose d'angoisse de M. Ilartcnbcrg, p. i4.
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^'^^^^^1
622 L'ÉVOLUTION
M. GatteP, de M. Tournier', de M. TschJsch^ de M. Kish*, de
M. Féré', etc.
Cette proposition parait au premier abord singulière, mais une
observation désintéressée montre qu'elle contient certainement
une part de vérité. Si on peut avoir des renseignements, des
aveux sur la vie sexuelle des malades, on voit qu'elle est presque
toujours troublée et qu'elle est bien troublée en effet dans le
sens qu'indique Freud. Ces personnes ont des désirs, souvent
même trop fréquents, ils essayent de les satisfaire, mais n'y par-
viennent que très incomplètement. Les uns le constatent avec
résignation, les autres s'en irritent et font des efforts désespérés
et ridicules pour retrouver ce Paradis perdu. Chez ceux-ci et à
un moindre degré, mais d'une manière également certaine, des
troubles remarquables, ruminations, agitations, angoisses accom-
pagnent ces excitations sexuelles incomplètes. On peut remarquer,
comme le dit très bien M. Tournier, que le même trouble existe
dans l'amour moral comme dans l'amour physique « cette névrose
se réalise, dit-il, chez le jeune homme par besoin sentimental non
satisfait, par aspiration vers l'amour du cœur... » Nous avons dé-
crit longuement ces besoins du cœur chez les psychasthéniqoes.
J'admets donc le fait signalé de M. Freud, mais je crois qu'il
faut l'interpréter. M. Freud considère le trouble sexuel, la satis-
faction insuffisante comme un fait primitif résultant des circons-
tances extérieures ou de la conduite volontaire du malade, et il
admet que c'est cette insuffisance accidentelle des excitations gé-
nitales qui détermine de toutes pièces la névrose considérée
comme postérieure. Divers auteurs, en particulier M. Lowenfeld,
de Munich*, et M. Hartenberg, ont fait des objections très justes.
« La marche de l'affection, dit ce dernier auteur, avec ses amé-
liorations et ses rechutes, ne concorde nullement avec les diverses
phases de la vie sexuelle^. » Cela me semble incontestable: même
I . Gallcl, Ueber die Schueller Ursache dcr Neurasthénie und Angslneurose.
a. Tournier, Essai de classification étîologique des névroses. Archives d'anthro-
pologie criminelle. Lyon, i5 janvier igoo.
3. Tschiscli, Comptes rendus du V7« Conyrhs de la Société des médecins russes de
Kiew, 1896.
4. Kish, Névrose cardiaque d'origine sexuelle chez la femme, 1897. Cf. Hartenberg,
loc. cit., p. 38.
5. Gh. Féré, L'instinct sexuel t 1899 (Paris, F. Alcan).
6. Lôwenfcld (Munich). Munch. med. Wochenschrijt, n** i3, iSgS.
7. Hartenberg, Névrose d'angoisse, 1901, p. 27.
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LES CONDITIONS PHYSIQUES DÉTERMINANTES 623
si je me borne à considérer les malades qui présentent unique-
ment de Tangoisse, pour ne pas sortir du groupe étudié par M.
Freud, je ne vois pas que les circonstances extérieures aient tou-
jours déterminé chez eux cette insuffisance du coït au moment de
leurs rechutes. Bien loin de là, j*ai eu des aveux significatifs, me
démontrant qu*ils avaient à leur disposition les moyens d^une sa-
tisfaction largement suffisante.
Si j'admets les faits signalés par M. Freud et M. Tournier, je
suis disposé h les interpréter d'une tout autre façon. Même dans
la masturbation, même dans le coït réservé, et à plus forte raison
dans le coït normal, ces personnes pourraient trouver une satis-
faction suffisante si elles étaient normales. Mais elles ne le sont
pas et ces insuffisances de Fémotion sexuelle ne sont qu'une ma-
nifestation, un cas particulier de leurs insuffisances psychologi-
ques. C'est parce qu'elles deviennent de plus en plus incapables de
pousser un phénomène psychologique jusqu'à son terme qu'elles
s'arrêtent à moitié chemin dans cette émotion comme dans les
autres.
Il se pourrait même que, du moins dans certains cas, l'ona-
nisme lui-même, avec son isolement, ses restrictions, soit en rap-
port avec les premières manifestations de la maladie. « Il ne faut
pas oublier, comme Lasègue aimait à le rappeler, que l'onanisme
est souvent le symptôme d'un état morbide, d'une névrose céré-
brale. Souvent la folie n'est pas consécutive à l'onanisme, mais il
existait un état cérébral qui a engendré l'onanisme*. » Il n'en est
pas moins vrai que dans quelques cas les pratiques signalées par
M. Freud peuvent favoriser cet arrêt des émotions, développer
l'habitude des phénomènes d'incomplétude et par conséquent être
fort nuisibles.
En un mot, je ne crois pas qu'il y ait lieu de faire jouer dans
cette maladie un rôle spécial aux phénomènes sexuels. Il suffit
d'admettre avec M. Marro, MM. Pitres et Régis, M. Haskovec,
que tous les troubles de la sphère génitale, puberté, âge critique,
menstruation, lactation, onanisme, ont une influence déprimante
dans cette maladie comme d'ailleurs dans toutes les névroses *.
L'épuisement déterminé par ces troubles génitaux s'ajoute sim-
1. Lasègue, Études médicales, II, p. 347-
2. Marro, La puberté, p. Sa. Pitres et Hégis, op. cit., p. 3i. Haskovec, op. cit.,
p. 126.
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LES CONDITIONS MORALES DÉTERMINANTES 625
lentement dans le même sens pendant les mois ou les années qui
ont précédé la maladie.
Ce caractère est facilement reconnaissable, il est constitué par
des phénomènes analogues à ceux que j'ai décrits à propos des
insuffisances psychologiques et des crises de dérivation. On y re-
trouvera d'abord, mais a un degré plus faible, toutes les formes
de Taboulie. Ce sont des individus qui ont peu ou point de réso-
lution et d'activité volontaire. Ce qui leur répugne surtout, c'est
faction sociale et ils sont avant tout des timides, incapables
d'agir et de parler devant les autres hommes. Ils ont un caractère
renfermé, car ils ne peuvent développer leurs pensées et leurs
sentiments, ils ne peuvent les amener à Pétat de précision suscep-
tible d'expression quand il y a des témoins. Même quand ils sont
seuls ils n'aiment pas agir et ils agissent mal ; souvent ils ont en
horreur les exercices physiques et surtout ceux où il faut con-
struire quelque chose. Ils ont toujours été d'une maladresse éton-
nante et ils ne savent rien faire de leurs mains.
Ils sont indécis, ils n'aiment point à prendre des décisions, ils
redoutent horriblement les responsabilités. Aussi ont-ils pris
l'habitude de ne jamais agir personnellement, ils se laissent con-
duire par tout le monde et même s'ils se rendent compte, car ils
sont fort intelligents, qu'ils sont mal conduits, ils ne font aucun
effort pour échapper à la direction et pour se diriger seuls. C'est
qu'il y a une chose encore plus pénible pour eux que la décision
personnelle, c'est la lutte. Ils ont horreur de lutter contre qui
que ce soit et c'est pour cela qu'ils ont la réputation d'avoir un
caractère doux. Jamais leur intérêt compromis ne leur paraît
assez considérable pour les décider à entamer une lutte si péni-
ble. Ils aiment infiniment mieux sacrifier ce qu'ils voient bien
être leur intérêt et faire ce qu'on leur demande.
Ce sacrifice d'ailleurs ne leur est pas très pénible, car ils sont
très indifférents à leur propre intérêt, surtout s'il est un peu éloi-
gné. Ils sont tout à fait incapables d'être pratiques et cela leur
donne un aspect désintéressé. Ce peu de souci de leur intérêt per-
sonnel, joint à leur horreur de la lutte, les rend extrêmement
honnêtes. Ils ne songent à léser personne et ils souhaitent ar-
demment que les autres aient autant de respect pour leurs pro-
pres droits. Comme ils ont le mépris du terre à terre de la prati-
que, ils conçoivent un monde parfaitement honnête et idéal. En
effet ils aiment et comprennent mieux les idées. Bien qu'ils
LES OBSESSIONS. I. — ^O
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LES CONDITIONS MORALES DÉTERMINANTES 627
Ta VU, par plusieurs générations évoluant dans le même sens
s'ajoute très souvent une éducation déplorable qui tend h déve-
lopper les tares de ces esprits. Cette éducation est due à ce fait
que les parents, sans avoir été malades à proprement parler et
par conséquent sans avoir ressenti les inconvénients graves de cet
abaissement de la tension mentale, ont eux-mêmes un caractère
absolument semblable. Ils semblent faire tous leurs efforts pour
enlever à leurs enfants les occasions d'agir, ils prennent pour eux
toutes les décisions, ils les empêchent d'affronter aucun danger,
d^entreprendre aucune lutte, ils ne leur donnent que des leçons
de prudence et d'abstension. Témoin ce pauvre Jean qu'une bonne
accompagne au lycée alors qu'il avait déjà i8 ans, de peur qu'il
ne se refroidisse ou qu'il ne se batte avec ses camarades (!!) et qui
devient la risée de tout le collège.
A l'influence des parents s'ajoute l'éducation absurde des jeu-
nes Français qu'on laisse pendant d'interminables heures d'étude
rêver derrière leurs dictionnaires et à qui on interdit tout mouve-
ment et tout exercice pratique. Je suis frappé de voir combien
cette éducation des jeunes gens et même des jeunes filles en
France développe chez eux le tempérament aboulique et comme
elle prépare des scrupuleux. Je me suis posé à ce propos une
question que je ne peux pas résoudre : dans les pays où l'édu-
cation est tonte différente, dans l'Angleterre en particulier, est-ce
que cette maladie des obsessions est aussi répandue qu'en
France ? C'est un problème qu'il serait intéressant de résoudre
par quelques statistiques.
Après ces conditions générales du caractère antérieur et de
l'éducation, quelles sont les circonstances morales qui jouent un
rôle dans l'éclosion de la maladie ?
3. — Les problèmes de la i>ie.
Je signalerai d'abord les problèmes posés par la vie. Quelles
que soient les précautions des parents pour épargner à leurs en-
fants toute difficulté à résoudre, quelle que soit la prudence du
sujet pour n'engager de lutte avec personne et pour ne se mêler
de rien, il est impossible d'éviter qu'il ne se présente jamais une
décision à prendre, un problème h résoudre. Très souvent, dans
une douzaine de mes observations, par exemple, l'accident sur-
vient à propos du mariage. Tout a été si bien préparé que le
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L'ÉVOLUTION
sque fait tout seul, mais cependant il arrive un
débile doit enfin faire quelque chose lui-même,
mcer le « oui » sacramentel. Il faut se décider,
n ou (c non » on consent à ce mariage : le sujet
îeut-être pour la première fois de sa vie qu*il
lure et que cela a quelque importance,
il s'aperçoit de cette nécessité est plus ou moins
e sont les plus sages, sentent la difficulté avant
i autres, toujours heureux de retarder une dé-
disent « oui » aux fiançailles sans réfléchir et
limplement, suivant leur habitude, pour ne pas
pas engager de lutte : ils se réservent pour plus
de la décision leur apparaît au moment du ma-
tendent plus tard encore, et se laissent marier
^ils font, puis se posent la question au moment
ou même plus tard encore, après quelques mois
Is se' demandent, si oui ou non, ils acceptent ce
l'il en soit, de ces différentes époques, une fois
la situation est toujours la même. Le malade par
nent de sa tension psychologique est incapable
Bcision. Ses efforts aboutissent seulement à des
lérivation, ruminations interminables, folie du
etc.. J'ai cité déjà trop d'exemples de ces
se demandent si elles aiment ou si elles dé-
îés, de ces hommes qui ne savent pas s'ils pour-
leurs femmes pour y revenir ici. M. Savage a
ns de ces « troubles de l'esprit déterminés à
cailles ». Il admet que « ce qui produit le trou-
itration des sentiments et des émotions vers les
roduction, c'est l'accumulation des désirs et des
t d'assouvissement* ». Si j'admets l'importance
admettre l'explication : l'incapacité de prendre
3résence d'une situation nouvelle et grave me
mportantc qu'un inassouvissement génital très
illeurs le même trouble, comme je l'ai dit, sur-
le mariage et d'ailleurs il existe dans des actes
oubles d'esprit développés à Toccasion des fiançailles. Journal
irc 1888, trad. de V. Parant, Encéphale, 1888.
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LES CONDITIONS MORALES DÉTERMINANTES 629
Beaucoup d*autres circonstances déterminent le début du mal
par un mécanisme analogue à celui que nous venons de voir dans
le mariage, par exemple, les changements de situation. Un pro-
fesseur de renseignement secondaire se trouve sur le point d*étre
chargé d'un cours dans l'enseignement supérieur, un instituteur
primaire va être changé de classe et va enseigner dans des condi-
tions légèrement différentes : cela suiBt par déterminer des
crises terribles de doute et d^angoisse. On a l'habitude de dési-
gner ces phénomènes comme des émotions et de dire que dans
ces cas la maladie a une origine émotionnelle. L'émotion me paraît
ici secondaire, la question essentielle est de savoir pourquoi un
changement de classe est émotionnel : il ne Test que parce qu'il
pose au sujet un problème, qu'il le force à prendre une décision,
à faire effort pour une adaptation nouvelle. Des faits de ce genre
se présentent assez souvent au début de la folie du doute.
Voici les changements qui, chez mes malades, ont joué le plus
souvent un rôle. Le fait de se retirer des affaires détermine la
maladie dans deux cas, la nécessité de choisir une carrière inter-
vient dans quatre cas, le problème de la vocation religieuse,
entrer ou non au couvent, dans huit cas, le changement de
résidence dans trois cas, le changement de fortune dans deux,
un héritage embarrassé et des procès dans trois, l'introduction
de domestiques nouveaux dans la maison ou le départ de do-
mestiques anciens dans cinq. Peut-être peut-on rattacher au
même groupe les embarras moraux causés par un enseignement
nouveau et les troubles apportés dans les anciennes croyances
par des lectures nouvelles : c'est ainsi que dans deux cas la
classe de philosophie a été pour des jeunes gens le point de
départ des obsessions.
Un fait qui a une très grande importance au point de vue pa-
thologique, c'est la première communion qui pourrait être rangée
à la fois dans ce groupe et dans les suivants. Cet événement impose
un effort d'attention qui rend l'acte diflicile, il pose des problè-
mes relatifs a la croyance, enfin il émotionne, c'est ainsi qu'il est
si souvent le point de départ de la première crise d'angoisse on
de scrupule.
Dans un groupe voisin nous placerons les circonstances qui
imposent au psychasthénique un effort, une lutte qu'il a toujours
évités. Une plaisanterie obscène dans un cas, un reproche sérieux
dans trois cas, la nécessité de cacher l'inconduite du mari dans
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FORMES DE LA PSYCHASTHÉNIE CONSTITUTIONNELLE ET ACQUISE 631
la mort d'un chien bien-aimé ou le départ d'un chat dans 6 cas,
des surprises ou des mauvaises nouvelles dans 12 cas, des con-
tacts répugnants dans 4 cas, des blessures accidentelles avec un
rasoir et des émotions en touchant ces rasoirs ou des couteaux
dans 4 cas.
Faut-il ajouter l'histoire singulière de Mb... qui allant, un soir,
au spectacle, voit jouer le Courrier de Lyon, drame dans lequel
un individu est assassiné sur la scène avec un grand couteau et
qui rentre avec la crainte d'assassiner et la phobie des couteaux?
A la suite de cet incident qui paraît insignifiant, la phobie a duré
3o ans. M. Daguillon cite un malade qui a eu des impulsions ho-
micides après la lecture du livre de Zola, la Bète humaine ^
Dans deux cas il me semble qu'il faut faire une part à la con-
tagion de l'exemple ; la fatigue, l'émotion causées par les soins à
donner à une femme phobique ont déterminé chez des personnes
de leur famille, également prédisposées bien entendu, des trou-
bles du même genre. On peut rappeler à ce propos les observa-
tions si curieuses de M. Féré sur des chiens qui deviennent ma-
lades et ont des peurs angoissantes quand il s'agit de traverser
la rue parce qu'ils sont restés longtemps auprès d'une maîtresse
ajforaphobe*.
Il faut observer que les émotions pénibles longtemps prolon-
gées agisseïit souvent plus que les émotions brusques. Une sorte
de jalousie que Jean conservait malgré lui pendant des années
contre une personne adoptée par ses parents semblent avoir été la
raison d'être de ses obsessions à propos de Charlotte.
Toutes ces diverses influences morales s'ajoutent aux causes
physiques et surtout à la prédisposition créée par le caractère et
par l'hérédité pour constituer peu à peu une maladie mentale aussi
complexe.
6. — Les deux formes de la psycbastbénie
constitutionnelle et acquise.
Si l'on jette un coup d'œil d'ensemble sur les diverses remar-
I. Daguillon, Ann. méd. psych., juin 1894.
a. Féré, Folie communiquée de Thommeaux animaux, agoraphobie chez le chien.
Société de biologie, 1897.
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FORMES DE LA PSYCHASTHÉNÏE CONSTITUTIONNELLE ET ACQUISE 6;;a
d'observer que ces deux classes sont loin d'avoir une importance
égale et que la seconde se réduit à un très petit nombre de cas.
Tout ce que l'on peut admettre c'est que les cas sont le plus sou-
vent intermédiaires entre ces deux extrêmes, le malade consti-
tutionnel et le malade tout à fait accidentel, et, comme on va le
voir, ils seront d'autant plus graves ou d'autant plus curables qu'ils
se rapprocheront plus de l'un ou de l'autre.
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LES FORMES DU DÉBUT 635
tnier coup. Un certain nombre de malades, une vingtaine, pré-
tendent avoir ressenti cette douleur de la tète en général à
l'occiput et être entrés tout de suite dans un état grave.
Dans des cas de ce genre on se trouve immédiatement en pré-
sence de symptômes complets tels que nous les avons décrits, il
n'y a pas de remarques particulières à faire sur le début. Mais à
mon avis ces formes sont exceptionnelles et elles deviendront de
plus en plus rares, à mesure que l'on fera d'une manière plus sé-
rieuse l'analyse du caractère antérieur des malades. Presque tou-
jours il y a un état psychologique anormal qui se développe
depuis très longtemps aVantque n'apparaissent sous une influence
provocatrice ces états aigus. Ce sont ces signes précurseurs qu'il
faut rechercher.
Ce sont d'abord à un degré plus ou moins accusé tous les symp-
tômes de neurasthénie ; les fatigues excessives, les engourdisse-
ments des membres, qui paraissent quelquefois grossir « depuis
longtemps, dit Qb..., il y avait un côté du corps qui me sem-
blait devenir plus gros que l'autre », indiquant déjà la dimi-
nution de la tension nerveuse. Toutes les sensations anormales
dans la tète : les bruits, les vertiges, le sentiment de perdre con-
naissance, les craquements, le vide, les étourdissements, les
vapeurs, les serrements comme dans un étau, etc., sont des
phénomènes du même genre.
Il faut même tenir compte des symptômes physiques, la fai-
blesse, les tremblements, les troubles de la digestion, l'amaigris-
sement. Dans huit de mes observations, la maladie a débuté dans
l'enfance par des faiblesses et des amaigrissements que l'on a à
tort rattachés à de simples anémies. En un mot je crois qu'il faut
se défier du diagnostic banal de neurasthénie, si la maladie se
borne souvent à un affaiblissement nerveux organique, il faut
quelquefois redouter des troubles mentaux plus graves qui com-
mencent très souvent sous le couvert de ces symptômes neuras-
théniques.
I. — Sentiments pathologiques.
Les symptômes moraux sont évidemment plus importants
encore : les sentiments d'être « comme endormi » (Dd...) et
tous les sentiments d'insuffisance psychologique se dévelop-
pent souvent des années avant l'éclosion apparente de la maladie.
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LES FORMES DU DÉBUT 637
qu^aucun homme ne voulût d'elle. La maladie commence aussî
de très bonne heure par des inquiétudes sous forme de remords.
A 12 ans Leg... s'inquiète beaucoup, par crainte d'avoir dit du
mal des gens et Py... par crainte de n'avoir pas été assez res-
pectueuse avec le curé.
A côté de l'inquiétude, il faut placer parmi les formes du début
beaucoup d'autres sentiments, l'ennui perpétuel, symptôme de
l'aboulie et prélude des névroses, qu'on observe à un si haut de-
gré chez Dk..., Zo..., Ku..., Van..., etc. Un état de tristesse
permanente avec manie de rechercher les pensées qui entretien-
nent cette tristesse se manifeste chez Vor..., chez Vk..., chez Na-
dia dès sa jeunesse, comme chez Mt... à 4o ans après l'opération
qui a été le point de départ des troubles nerveux. On note chez
d'autres également au début un état hypocondriaque avec dou-
leurs vagues disséminées de tous côtés Cs..., Mor..., Her...,Ml...,
Mae...
Une timidité bizarre, excessive, qui rend ces personnes tout à
fuit paralysés, se développe de plus en plus au début de la ma-
ladie. Cette timidité, comme on l'a vu, s'accompagne d'idées
d'humilité, a je ne suis pas comme les autres, je suis laide, j'ai
une tête de chat, je suis un monstre, tout le monde se retourne
quand je passe». (Byl...).
Ces mêmes personnes timides, honteuses d'elles-mêmes, ont
très souvent des amours tout à fait excessifs qui ne sont nulle-
ment en rapport avec le développement des passions normales.
Ce sont des attachements invraisemblables pour un maître, pour
un camarade. Il faut avoir présents à l'esprit les caractères des
besoins d'aimer et d'être aimé propres aux scrupuleux pour re-
connaître ce signe en général assez précoce.
Par suite de cette tristesse, de cette timidité et de leur mala-
dresse déjà signalée, ces malades ne peuvent plus frayer avec le
monde, ils perdent ou quittent leurs amis et on les voit s'isoler
de plus en plus. Ser..., jeune fille de i6 ans, enfant jusque-là in-
telligente, cesse de bien travailler et ne fait plus aucun progrès,
elle cesse de jouer avec les autres enfants de l'école, elle déclare
qu'elle les trouve sales et s'isole de plus en plus : peu de temps
après, commencent des actions en rapport avec la folie du doute.
En même temps que ces malades s'isolent, ils prennent ce carac-
tère renfermé que nous avons déjà étudié chez les scrupuleux,
ils ne veulent plus et bientôt ne peuvent plus exprimer ce qu'ils
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LES FORMES DU DÉBUT 639
L'entêtement sera d'autant plus caractéristique qu*il portera
sur une action plus particulière, quand les malades, par exemple,
refusent de manger (Nadia), de toucher un certain vêtement (Vy...,
Ger...), de toucher à de l'argent (Lkb..., Rob..., etc.). Depuis deux
ans malgré toutes les objurgations Xyb... refuse de rendre à sa
bonne une petite somme de 2g francs qu'elle lui doit. Il sera éga-
lement plus net si le malade avoue que Tentêtement est en rapport
avec certaines idées, certains serments. Mais nous retombons
alors dans la maladie tout à fait constituée.
L'agitation chez plusieurs malades remplace l'inertie : pas plus
que les précédents, les malades agités n'arrivent à exécuter
quelque chose, mais ils ont de longues périodes où ils remuent,
où ils crient, pendant lesquelles ils ne peuvent dormir. Les uns
s'agitent sans trop savoir pourquoi et on les croit atteints de
chorée (Za...) on de crises d'hystérie (Bai..., Mb..., Vod...).
Le plus souvent cette agitation accompagne une crise de doute
une rumination interminable (To..., Cha...).
3. — Les tics.
Une des formes de début les plus remarquables et les plus
souvent méconnues, ce sont les tics. Je compte au moins i5 de
mes malades qui ont débuté par une période de tics et qui en-
suite ont suivi toute l'évolution de la psychasthénie avec les sen-
timents d'insuffisance, les obsessions et les phobies variées.
Je rappelle ici quelques exemples de cette évolution qui est
importante et mal connue. Gisèle, à l'âge de lo ans, a eu des
secousses de la tète « comme si elle disait oui » cela a duré plus
de deux ans ; puis ce tic a diminué, quand elle a eu des périodes
d'inertie semblables à des sommeils, mais remplies par des rêve-
ries. A quinze ans les tics et les sommeils sont entièrement dis-
parus, parce que la malade s'interroge pour savoir si elle n'a
pas la vocation religieuse ; le délire du doute avec les grandes
crises de rumination qui durent encore h 3o ans est constitué.
Nu... a eu des tics, secousses de l'épaule droite et grimaces
depuis l'âge de 9 ans, jusqu'à Tâge de 20 ans. En cherchant à
guérir ce tic, elle se demande si elle ne fait pas des grimaces
exprès, si elle n'est pas coupable à ce propos, etc. Le tic diminue
puis disparait, quand les crises d'obsessions sont complètes. Les
observations de Mau..., de Fok..., de Fie..., de VI..., de Bab...,
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L'ÉVOLUTION
Vy... sont absolument semblables : les tics semblent avoir
écédé les obsessions.
Cependant dans les cas les plus fréquents, Tobsession se déve-
)pe en même temps que le tic. Ser..., âgée de i6 ans, a un
qui consiste à secouer un peu la tête et à frapper son oreille
5C sa main gauche, très rapidement, trois fois de suite; ce
est en rapport avec une manie de vérification. Elle est forcée
vérifier si sa boucle d'oreille ne tombe pas. On lui a retiré
\ boucles d'oreilles, mais le besoin de vérifier et le tic persiste,
lilleurs tout un délire de propreté se développe chez cette ma-
ie avec manie de brosser ses vêtements, de se laver les mains,
;. Il est intéressant de remarquer que la mère de cette malade,
î est encore une scrupuleuse, a eu fort longtemps des tics dans
jeunesse ; elle ne se souvient plus si les tics ont précédé ses
sessions ou les ont accompagnées comme chez sa fille. Bé...,
nme de 4^ ans, a le tic de se frotter sa robe à droite, si bien
e toutes ses robes sont usées à cet endroit. C'est une obsédée
i a des angoisses h la pensée qu'elle a dans le ventre un « ver
lignée ». Rn..., fillette de i3 ans, a le tic de frapper du coude
^it sur la table, sur les meubles ou contre les murs elle a en
ime temps la manie des présages et la manie des compensa-
ns « si je ne frappe pas du coude ou si je ne compte pas les
Iles,.., je mourrai, cela portera malheur k mes parents ».
ri..., garçon de i3 ans, a toutes sortes de tics, tous en rapport
ic des idées obsédantes, il secoue la tète « c'était au début
ur voir si elle lui faisait mal, s'il y avait encore un grelot de-
as». Il lève les épaules « pour voir si mon col me gêne.» Il
vre les paupières démesurément « potfr voir s'il voit clair»,
!. En même temps ce pauvre garçon a la manie de répéter cer-
ns mots trois fois et de douter de tous ses actes ; il a la phobie
diable, du salon rouge et de la lune. Quelles que soient les
isions que l'on se fait aujourd'hui sur la guérison facile de la
Rendue maladie des tics, je crains bien qu'il ne commence
e triste carrière d'obsédé. On retrouve chez lui dès le début
te « association des troubles musculaires et des troubles psy-
ques » que signalait récemment M. Joffroy*. Déjà Tétude
rchologique des tics nous avait amenés à les rattacher aux phé-
. A. Joffroy. Association des troubles musculaires et des troubles psycliiques,
ue neurologique, i5 avril 1902, p. 389.
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LES PRINCIPALES VARIÉTÉS CLINIQUES 641
nomènes de dérivation qui résultent de rabaissement de la volonté
exactement comme les autres manies mentales, Tétude de l'évo-
lution de la maladie nous amène au même résultat, il faudra en
tenir compte dans le diagnostic.
Aux tics doivent se rattacher les diverses manies mentales qui
sont le plus communes dans les débuts, les manies de propreté,
la manie de se laver les mains et certaines manies de conjuration
qui se traduisent par des gestes ou des paroles prononcées à demi
voix. Dans une dizaine d'observations les parents se sont avisés
de la maladie en entendant le sujet répéter tout bas certaines pa-
roles toujours les mêmes: « non, non, ...je ne veux pas, ...un, deux,
trois», ce sont des formules de conjuration dont on a vu l'impor-
tance.
Tous ces phénomènes caractérisent les débuts delà maladie; il
était important de les connaître et de noter leur fréquence.
2. — Les principales variétés cliniques.
L'état psychasthénique une fois constitué se prolonge pendant
un temps en général fort long, mais il présente des aspects assez
différents suivant la variété qui se développe plus particulière-
ment.
Sur ce point la psychasthénie ressemble à l'hystérie qui est au.
fond toujours la même maladie, quoique l'aspect d'une malade qui
a des crises de temps en temps ne soit pas le même que celui
d'une hémiplégique ou d'une anorexique. C'est pourquoi on a
souvent essayé d'établir des classifications pour distinguer les di-
verses formes de troubles psychasthéniques.
Ces classifications sont difficiles parce que nous sommes loin
de connaître bien le mécanisme et les relations mutuelles de ces
divers accidents. Certains auteurs compliquent inutilement ces
classifications en mélangeant avec les états psychasthéniques d'au-
tres maladies où l'on rencontre aussi des idées fixes à mon avis
d'une tout autre nature. M. Freud admet trois classes :
i^ Les obsessions intenses, images d'événements (hystérie trau-
matique) ;
2^ Les obsessions vraies, idées et états émotifs associés ;
3® Les phobies.
LES 0B8ESSI0:<S. I. ^I
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L'ÉVOLUTION
er groupe ayant manifestement rapport à Thystérie où
es ont de tout autres lois, il ne reste qu'une division
*ties : obsessions et phobies qui est un peu sommaire
d pas à la multiplicité des cas.
exactement de même pour la classification de M. Has-
idmet 4 groupes' :
)ce proprement dite (Griesinger, Westphal, phréno-
eschede] lésions intellectuelles primaires ;
passagers de phobie curable, qui se rattachent à la
e ;
(ions et phobies symptomatiques de la neurasthénie,
3, du Basedow, des intoxications, etc. ;
>mes des psychoses. Dans cette classification un peu
^y a que les deux premiers groupes qui se rapporteDt
es et ils ne nous donnent que la même division en ob-
)hobies.
îfications les plus répandues sont plus précises : elles
nserver un souvenir vague des anciennes facultés de
Imettent que l'obsession prend trois formes suivant
9 sur rintelligence, la sensibilité ou la volonté. En
imburini admet trois groupes :
)bsédantes intellectuelles (interrogations, doutes, cal-
u doute, folie métaphysique, folie du calcul) ;
accompagnées d'un sentiment de peur, peur d'être
r de sortir ;
mpulsives*.
eden reproduit exactement la même division : i** les
obsédantes, 2° les émotions obsédantes, 3* les împul-
intes, 4** les idées obsédantes proprement dites, ob-
ellectuelles des Français, Grûbelsucht de Berger et
La distinction entre les groupes i et 4 n'est pas indi-
neltement, je crois qu'elle correspond à ce que j'ai
sion et phénomènes de rumination intellectuelle, je la
t utile.
fondait d'abord sa classification sur les lésions de la
la volonté est lésée dans sa force d'arrêt (obsessions
op. cit., p. i3i.
i, Riv. sper. d. frenialria, anno VIII, 4» i884.
i. Revue de l'hypnotisme, 1892, p. 7.
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LES PRINCIPALES VARIÉTÉS CLINIQUES 6i3
impulsives), 2* la volonté est lésée dans sa force d'action (ob-
session d'indécision, folie du doute, obsession-crainte, agora-
phobie). Le point de départ est juste car les lésions de la volonté
jouent ici un rôle considérable, mais la volonté me parait presque
toujours lésée a la fois dans sa force d'arrêt et dans sa force d'ac-
tion, dans la folie du doute : il y a arrêt de l'action que le malade
ne fait pas et en même temps il y a exagération de la rumination.
Pourquoi séparer cet arrêt de l'aboulie mise dans le premier
groupe? Il en est de même pour l'agoraphobie et il me semble dif-
ficile de ranger un cas dans le premier ou dans le second groupe.
M. Séglas adopte cette classification sans la discuter*, il de-
mande seulement d'ajouter une catégorie spéciale pour les obses-
sions qui ont trait à des phénomènes de sensibilité (glossodynie,
obsession dentaire de Calippe, algies centrales des neurasthé-
niques, topoalgies de Blocq, etc. Ce groupe des algies, dont
parle M. Séglas est en eBet très intéressant, mais je ne vois pas
de raison suffisante pour le séparer complètement du groupe des
phobies avec lequel il a tant d'analogies.
Plus tard M. Régis reprenant cette question avec M. Pitres
laisse de côté le point de vue des lésions de la volonté auquel il
s'était placé d'abord et ne se préoccupe plus que des troubles de
l'émotion ; il distingue trois formes :
i" L'état obsédant à anxiété diffuse ou panophobique ;
2^ L'état obsédant à anxiété systématisée ou monophobique ;
3^ L'état obsédant à idée anxieuse ou monoidéique^.
Il y a dans cette classification un réel progrès en particulier
sur les classifications en phobies et obsessions ; MM. Pitres et
Régis montrent bien qu'il y a un état primitif et vague qui sert
de point de départ à la maladie et qu'il faut distinguer des ob-
sessions constituées, en outre ils mettent bien k la fin de la clas-
sification, l'obsession proprement dite qui est le résultat d'une
interprétation et de toute une évolution maladive. Je regrette
seulement que le premier état soit caractérisé uniquement par de
l'émotion quand il contient les troubles très variées de l'abaisse-
ment psychologique, je regrette aussi que le second groupe ne
contienne que les phobies, ce qui laisse de côté les tics, les agi-
I. Séglas, Leçons sur les maladies mentales, p. 6o. Conférence faite à la Saipi-
trière. Journal de médecine et de chirurgie pratiques, a5 février 1894.
a. Pitres et Régis, op. cit., p. i3.
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LA MARCHE DE LA MALADIE 645
d'un cas individuel qui passe successivement par ces trois degrés.
Voici comment Claire résume elle-même sa propre maladie : <( au
commencement j*ai simplement souffert bien cruellement du man-
que de confiance et de ne plus pouvoir croire. Ensuite j'ai eu
comme une fuite des idées, il me venait des pensées, des ques-
tions, de véritables calculs que je faisais malgré moi, que je ne
pouvais pas plus empêcher que mes tics. Enfin j*ai été bien plus
malheureuse quand il y a eu des hallucinations (le membre viril
et Thostie) qui m'ont montré combien j'étais tombée bas et quand
j'ai senti que je ne pourrais jamais remonter. » Traduisons ce lan-
gage de la malade : elle a d'abord le trouble des fonctions du réel,
c'est-à-dire des phénomènes d'abaissement et d'insufSsance, puis
elle a des tics et des manies mentales, phénomènes de dérivation,
enfin elle a de pseudo-hallucinations qui ne sont que des expres-
sions de l'obsession intellectuelle qui s'est formée peu à peu.
On pourrait montrer bien des cas où les choses ont évolué de
la même manière. Il ne faut pas oublier que quelquefois l'évolu-
tion se fait plus ou moins vite et que certains sujets traversent
rapidement les premiers degrés, tandis que d'autres restent indé-
finiment au premier ou au second.
Des variétés moins importantes sont constituées par le mélange
de divers groupes de caractères, par exemple les angoisses et les
obsessions, les tics et les manies mentales, les sentiments d'in-
complétude et les obsessions. Enfin il faut tenir compte aussi,
pour bien préciser la situation d'un malade, de sa disposition plus
ou moins grande à la variabilité. M. Meige a remarqué qu'il y a
des tics qui méritent le nom de variables par opposition à ceux
qui sont fixés ^ Il en est absolument de même pour les phobies,
les manies mentales, les obsessions. La forme variable se rap-
proche de la forme diffuse, de l'agitation motrice, de Tangoisse,
de la rumination. Elle est en général moins grave que la forme
systématique devenue stable et indique en général une évolution
moins avai^cée de la maladie.
3. — La marche de la maladie.
La psychasthénie constitue une maladie essentiellement lon-
I. \feige. Histoire d*un liqueur. Journal de méd. et de chir. prat., 26 aoiil 1901.
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LA MARCHE DE LA MALADIE 647
familiale, qui se manifeste par un caractère spécial et qui, sous Tin-
fluence des traumatismes physiques et moraux, présente seulement
des exacerbations plus ou moins graves. A ce point de vue tous
les auteurs sont d^accord pour distinguer trois formes principales,
la forme intermittente , la forme rémittente et la forme continue.
La forme continue a été surtout signalée par M. Roubinovitch,
en I8g3^ Sans doute beaucoup de malades présentent Tétat psy-
chasthénique d^une manière à peu près continue, pendant des
années, Claire, Lise, Nadia, Jean sont dans cet état depuis dix
ou vingt ans. On peut dire que pendant cette longue période
aucun de ces malades n*a été complètement guéri, c'est-à-dire
n'est entièrement revenu à son niveau normal d'attention, de
volonté, de fonction du réel.
Mais cependant il est impossible de dire que leur état est
resté complètement le même. Les malades eux-mêmes n'ont pas
cette impression : Claire ne dit pas qu'elle est tout le temps
descendue, elle a eu comme les autres des périodes plus élevées
et d'autres plus basses. Jamais Tidée obsédante n'est complètement
disparue, mais elle est quelquefois devenue « implicite, latente »,
les ruminations et les phobies étant presque arrêtées. La forme
dite continue ne mérite donc pas entièrement ce nom dès qu'on
suit les sujet pendant un temps assez long. Il ne reste en somme
que deux variétés principales, la variété intermittente et la variété
rémittente ; dans la première, le sujet revient par intervalles
assez longs à un état tout à fait normal ou presque normal, dans
la seconde, le sujet s'améliore un peu de temps en temps mais ne
revient pas aussi complètement à la santé que dans la variété
précédente. Ces différences peuvent bien se comprendre si on se
reporte à nos études sur les modifications du niveau mental.
Ces modifications sont des oscillations de la tension, oscillations
plus grandes qu'à l'état normal et qui maintiennent le niveau trop
bas. Tantôt ces oscillations sont grandes et font remonter le niveau
presque jusqu'en haut, c'est la forme rémittente, tantôt les oscil-
lations sont petites et laissent constamment le niveau très infé-
rieur, c'est la forme simplement rémittente. C'est à ce point de
vue en considérant la rapidité ou la grandeur des oscillations que
nous comprendrons ces variétés de l'évolution.
I. Roubinovilch, Obsessions ot iiiiinilsions à forme continue. /T^' Congrès des
(iliénisies f raturais de l.a fiorhelle, i8()3.
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LA MARCHE DE LA MALADIE 649
Les individus normaux sentent légèrement cette excitation, les
malades dont le niveau mental est d'ordinaire au-dessous de
la normale profitent de cette ascension et se sentent plus près de
Tétat normal. Il y a cependant des exceptions surtout chez les
malades qui dorment très bien et qui se reposent bien la nuit.
Qsa... est beaucoup mieux le matin que l'après-midi : cette forme
reste cependant exceptionnelle.
A côté de ces oscillations il en faut signaler de plus lentes qui
occupent l'intervalle d'un ou de plusieurs mois, Cos comme
beaucoup de femmes d'ailleurs, a une rechute de son obsession au
moment des règles, puis l'obsession disparaît dans les journées
qui suivent leur apparition. C'est là la règle générale et il faut
s'attendre à des aggravations ou des rechutes à l'époque des
menstrues, probablement à cause des modifications de la tension
vaso-motrice et de la fatigue de ces périodes. Cependant, quel-
ques femmes (9 observations) font exception à cette loi, elles se
trouvent plutôt améliorées au moment des règles. 11 est probable
qu'il faut rattacher cette anomalie aux excitations génitales dont
j'ai déjà signalé l'effet heureux.
Des périodes d'amélioration très remarquable qui très sou-
vent interrompent le cours de la maladiesontà signaler pendant les
grossesses. J'ai observé le fait plus de 3o fois; je le vérifie
encore en ce moment chez Bab... et Léo... qui arrivées au qua-
trième mois de la grossesse, se trouvent transformées et oublient
leur obsession de la folie. Ce fait très remarquable existe dans
l'hystérie comme dans la psychasthénie : il tient, je crois, h cette
exaltation de la vitalité qui caractérise la grossesse. La circula-
tion, la respiration, la nutrition sont exaltées, il n'est pas éton-
nant qu'une maladie mentale, qui est en rapport avec la dépres-
sion de la tension psychologique, en soit favorablement influencée.
Bien entendu, il y a quelques cas, surtout quand la grossesse est
pénible, où la fatigue déterminée par cet état l'emporte sur l'ex-
citation et aggrave la maladie : mais c'est là plutôt une exception.
En général, en présence d'une femme psychasthénique enceinte,
on peut pronostiquer que son état mental sera très fortement
amélioré pendant toute la durée de la grossesse, puis qu'il y
aura probablement une rechute sérieuse peu de temps après
l'accouchement.
Dans quelques cas, certaines oscillations m'ont semblé être en
rapport avec les saisons Hb..., Claire, Bal... ont des rechutes
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LA MARCHE DE LA MALADIE 651
blaitétre à peu près complète. Mais au bout de quelques mois ou
de quelques années, à Toccasion d'une cause déprimante plus ou
moins sérieuse, il y a un nouvel abaissement : tantôt Tobses-
sion reprend avec la même forme que précédemment, tantôt la
nouvelle occasion a fait naître une phobie ou une rumination dif-
férente. Souvent ce second accès est plus grave que le premier
et se prolonge pendant deux ou trois ans, puis une nouvelle guéri-
son plus ou moins réelle est péniblement obtenue. Un troisième
accès survient plus ou moins tard, en général avec une gravité
croissante. Il y fi des malades qui ont ainsi 5 ou lo accès plus ou
moins espacés, d'autres n'en ont qu'un plus petit nombre.
On trouvera des exemples de ces différentes formes dans les
observations suivantes, En..., homme de 43 ans, a eu des scru-
pules de première communion à 12 ans, une phobie du choléra
à 18 ans, une obsession amoureuse à 23 ans, une obsession homi-
cide contre ses beaux-parents à 3i ans, la phobie du chien enragé
à 36 ans et actuellement depuis l'âge de 4o ans, il rumine constam-
ment à propos du testament que sa mère a fait contre lui. X...,
femme de 4o ans, a été obsédée à l'âge de i5 ans à propos d'un
chien enragé qui a été tué et enterré dans le jardin. Elle s'est
guérie de l'obsession, mais voici la quinzième fois qu'elle est
reprise de la même phobie, qui chaque fois a été en s'accroissant
et qui est devenu maintenant un véritable délire du contact. Au
contraire, ces autres malades n'ont eu qu'un petit nombre d'accès:
Cas... présente le premier accident sérieux à 3o ans en voyant
son fils tomber à l'eau, obsession de mort, d^homicide, refus de
manger pendant 18 mois; la rechute n'a eu lieu au moins d'une
manière visible qu'à 5i ans à la nouvelle que sa mère est devenue
folle : elle tombe alors dans la phobie banale de la folie. Vor...
a eu un délire de scrupule à 18 ans, avec manie de l'interrogation
pour chercher si elle avait dit ou fait quelque chose de défendu ;
elle ne présente une rechute à 45 ans seulement quand elle a
sa curieuse manie de perfection urinaire. Mio... (186), femme de
37 ans, a eu une première crise qui a duré 6 mois quand elle
avait vingt ans à propos d'un locataire de la maison où elle était
concierge, qui a déménagé sans la prévenir, elle a eu une deuxième
crise à 27 ans, a propos de son chat qui est mort et maintenant
elle est entrée dans une troisième crise de remords effrayants
à 37 ans, parce qu'elle s'est laissée convaincre et a abandonné
une de ses chattes.
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LA MARCHE DE LA MALADIE 653.
et les pactes avec le diable; à vingt-six ans, elle rumine sur les
religions dualistes et sur la puissance du démon. Depuis cinq ans
la lutte contre la maladie a simplement enrayé le mouvement
ascensionnel et ramené pendant de longues périodes les obses-
sions «à Tétat implicite».
Jean était probablement depuis renfance un insuffisant psycho-
logique : il prend des habitudes de masturbation à i^ ans, ces
habitudes provoquent à Tâge de i5 ans une grande terreur avec
chute du niveau mental, qui depuis ce moment jusqu'à l'âge de
32 ans ne s'est jamais relevé. Il a passé par une série d'obsessions
étranges dont nous avons souvent parlé, il a eu pendant 5 ans des
algies et des phobies relatives au pénis et au gland, il n'a jamais
eu en somme que de légères rémissions.
Gisèle est malade depuis Tâge de 12 ans; mais, quoiqu'elle n'ait
pas d'intermittence vraie, elle présente une variété curieuse,
c'est ralternance du délire de scrupule et des troubles de l'es-
tomac. Pendant la période gastrique, si l'on peut ainsi dire, elle
n'est plus guère obsédée si ce n'est par la pensée qu'elle ne veut
pas manger; quant à son scrupule sur la vocation religieuse il est
presque disparu, « il n'est plus que dans un petit coin de sa tète. »
Il est vrai que l'obsession de vocation va réapparaître après l'a-
mélioration de l'état gastrique.
Nadia est curieuse par l'immutabilité de s6n obsession; cette
honte du corps, cette crainte d'engraisser a pris différentes for-
mes ; elle était enfantine à 6 ans avec la crainte de la gourmandise^
elle se complique à 16 ans de sentiment de pudeur et plus tard
de peur de se montrer, mais en somme jusqu'à 3o ans elle n'a
jamais disparu. D'ailleurs, dans ces formes chroniques, l'obses-
sion peut persévérer bien plus longtemps, Leg... a commencé la
maladie à 12 ans par la peur de faire du mal et à 45 ans elle
reste encore immobile sur sa chaise « de peur de vous empoison-
ner par les poussières ou par sa salive ». Xa...,à 69 ans, con-
ser\'e encore sa crainte de l'homicide qui a commencé à 22 ans.
C'est là la véritable forme grave de la psychasthénie vers laquelle
tendent les formes intermittentes.
Toutes les causes qui agissent sur les oscillations de niveau^
toutes les conditions qui font monter ou descendre la tension,,
les fatigues, les efforts, les émotions déterminent des variations,
des rémissions ou des rechutes dans ces états, qui, pour être à
peu près continus, n'en restent pas moins éminemment instables.
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L\ MARCHE DE LA MALADIE 655
OÙ les souffrances du malade le forcent à parler, à rechercher une
direction plus précise. Je n'oserai pas dire que ce momentcommence
une seconde période mais il est certainement très important et
presque toujours il est le point de départ d'une recrudescence du
mal. Le malade faisait des efforts pour cacher ce qu'il éprouvait,
la cessation de ces efforts lui est nuisible. On pourrait même di-
viser en deux degrés ce changement indiqué par Legrand du
Saulle ; il y a un premier moment où le malade révèle son mal
à une personne déterminée, à un parent, à un prêtre ou à un mé-
decin, mais où il continue à le cacher aux autres, et un second
moment beaucoup plus tardif où il éprouve le besoin de raconter
ses tourments atout le monde : ce deuxième moment est le signe
d'une aggravation beaucoup plus considérable.
Une autre loi avait été signalée par M. Séglas « dans bon nom-
bre de cas, disait-il, les malades débutent par une phase d'an-
goisse vague ». M. Dallemagne ajoutait que lorsqu'ils guérissent,
ils reviennent également à cette phase d'angoisse diffuse. Cette
remarque me parait devenir plus juste si on remplace le mot
angoisse par le terme d'insuffisance psychologique ; elle corres-
pond h cette évolution que j'ai signalée au début chez certains
malades dont l'évolution est lente : ils présentent une phase
d'insuffisance psychologique avant les ruminations et les phobies
et quand ils guérissent, ils terminent également par une période
psychasthénique analogue à celle du début.
Nous avons déjà signalé la remarque de MM. Pitres et Régis,
sur l'intellectualisation progressive de ces troubles, cela revient à
dire que le malade interprète peu à peu ce qu'il ressent et que les
véritables obsessions intellectuelles sont tardives, mais cette ob-
servation ne s'applique qu'aux formes modérées de la maladie,
nos grands malades étaient déjà parvenus à l'obsession du scru-
pule vers 12 ou i3 ans.
Une loi signalée par MM. Raymond et Arnaud est encore
très importante, c'est la généralisation progressive de la ma-
ladie. « Un nombre d'idées toujours plus grand entre succes-
sivement dans la sphère du doute, l'incertitude et l'hésitation
deviennent la caractéristique de toutes les réactions intellec-
tuelles ^ » Cette loi est très vraie et très importante au début :
l'insuffisance psychologique, le trouble de la fonction du réel,
I. Raymond et Arnaud. Ann. méd, psjch., 1893, IT, p. aog.
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LES COMPLICATIONS 657
recommence et au lieu d'être une obsédée amoureuse elle devient
une dipsomane. L'excitation erotique a le même résultat, c'est
pourquoi des scrupuleuses comme Loa... et Len... sont conduites
à la rechercher et deviennent des érotomanes.
Ces diverses lois commencent à nous faire connaître les pha-
ses de cette évolution dont une grande partie reste encore in-
connue.
4. — Les complications.
La maladie des obsessions psychasthéniques présente des trou-
bles physiques et des troubles moraux mais ceux-ci semblent res-
ter compatibles avec la conservation de la raison puisque la ma-
lade garde le pouvoir de critiquer ses idées fausses et ceux-là
semblent ne pas compromettre la vie, puisque les troubles neu-
rasthéniques n'amènent pas directement la mort.
Les complications de la maladie sont les troubles qui s'y sura-
joutent de manière à compromettre la vie et la raison.
I. — Les accidents physiques.
J'insisterai peu sur les complications purement organiques, ce
qui serait entrer incidemment dans l'étude de tous les ralentisse-
ments de nutrition. J'ai signalé chemin faisant, les troubles diges-
tifs, les troubles circulatoires, les maladies cutanées comme l'ec-
zéma, le rhumatisme chronique déformant qui coexistent souvent
avec l'état psychasthénique et qui peuvent dans certains cas pren-
dre un grave développement. Ces troubles de nutrition peuvent
comme toujours favoriser toutes les infections et j'ai malheureu-
sement constaté une dizaine de fois la tuberculose pulmonaire qui
venait se greffer sur ces affaiblissements. Il faut insister un peu
plus sur \x\i accident bizarre qui est plus directement en rapport
avec l'engourdissement des fonctions.
La rétention des matières fécales, puis la stercorhémie et les
accidents toxiques dus à cette rétention sont assez fréquents et
il faut être prévenu de leur extrême gravité. A la suite d'une
mauvaise nouvelle Nadia a présenté un engourdissement de ce
genre, avec rétention prolongée des matières fécales. Les urines
LES OBSESSIONS. I. — 4^
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LES COMPLICATIONS 659
cerveaux capables de présenter ce premier trouble n'en au-
raient-il pas d'autres plus considérables ? Pourquoi rabaissement
de la tension qui fait perdre à nos malades les fonctions supé-
rieures du réel ne pourrait-il pas s'aggraver et troubler des fonc-
tions plus élémentaires. Je suis, au contraire, pour ma part assez
surpris de ce petit nombre d'aliénés, il faut que le trouble psy-
chasthénique soit en général bien léger pour qu'il n'aboutisse pas
plus vite et plus souvent à des délires.
Les formes d'aliénation dans lesquelles versent les obsédés sont
d'ordinaire rattachées à la mélancolie anxieuse^ vers laquelle se
dirigent ceux qui ont des symptômes surtout émotionnels, des
phobies et aux états paranoiaques, aux délires systématisés, par-
ticulièrement au délire de persécution vers lequel se dirigeraient,
selon les auteurs précédents, ceux qui ont des obsessions intellec-
tuelles.
J'ai observé 5 cas de mélancolie anxieuse survenant chez des
obsédés, dont trois ont guéri, au moins approximativement, dans
un cas, après 5 mois d'asile, dans l'autre après lo mois. Une des
malades, Brk..., a eu trois rechutes de cette mélancolie. Inver-
sement quand on étudie les mélancoliques délirants on constate
très souvent qu'ils ont eu avant leur dernier accès un état prévé-
sanique souvent très long dans lequel ils ont présenté des symp-
tômes de la maladie des obsessions. Dans la thèse de M. Bois-
sier sur la mélancolie et la neurasthénie, je remarque le
malade de l'observation I qui a été longtemps aboulique, scru-
puleux, méticuleux avant ses accès de mélancolie avec stupeur, le
malade de l'observation VIII qui est analogue, le malade de l'ob-
servation XII, agoraphobe et claustrophobe avant ses accès de
mélancolie*.
Les délires systématiques ont été plus fréquents dans mes obser-
vations, j'ai eu 12 malades qui sont devenus des persécutés. Mais
je dois dire que le délire de persécution me semble devoir soulever
bien des problèmes psychologiques et qu'il me paraît se rappro-
cher singulièrement des obsessions des scrupuleux. Il y a dans ce
délire systématique un certain nombre de symptômes dont il se-
rait nécessaire de faire l'analyse psychologique, pour voir leurs
1. Cf. Kraffl-Ebing, P^yc/i/a/ne, 1897, p. 546.
2. Fr. Boissier. Essai sur la neurasthénie et la mélancolie dépressive considérées dans
leurs rapports réciproques. Thèse 1894, p. a3 et sq.
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LES COMPLICATIONS 661
gieuse qui est un rétrécissement volontaire ou involontaire de la
conscience est une sorte de remède aux troubles de cette insuffi-
sance, je ne fais que signaler le problème que j'espère reprendre
d'une façon plus complète dans Tétude des extatiques.
Une autre maladie mentale me parait à signaler au cours des
obsessions, c'est la confusion mentale ou la stupeur telle que Ta-
vait décrite récemment M. Chaslin. On vient de voir l'indication
rapide d'une maladie grave qu'a traversée Nadia, à la suite d'une
nouvelle désagréable pour elle. Au cours de cette maladie, elle est
tombée dans un état de tristesse et d'inertie beaucoup plus grand
qu'à l'ordinaire, elle restait des heures entières immobile sur sa
chaise, les yeux vagues, disant qu'elle n'était plus préoccupée
par ses idées et qu'elle ne pensait à rien. La faiblesse aug-
mentant, elle dût s'aliter et elle resta trois mois à peu près
sans conscience pouvant h peine répondre et d'une manière peu
correcte à quelques questions très simples.
J'étais disposé à croire que dans ce cas le rétention des matiè-
res fécales, la stercorhémie avait joué le rôle principal pour pro-
voquer la confusion mentale. Il n'en est pas de même dans le cas
suivant: Eu..., jeune fille de 27 ans, est une obsédée scrupuleuse
depuis Tâge de 10 ans, scrupules de confession, impulsion au sui-
cide, etc. Elle a appris l'année dernière la mort de sa mère et
s'est mise en tête à ce propos l'idée obsédante qu'elle l'avait tuée ;
de là des regrets, des remords, des idées de suicide, des pseudo-
hallucinations, elle croyait entendre la foule qui la huait, le diable
qui lui parlait et elle murmurait : «va-t-en, Satan». Cependant
elle conservait encore sa lucidité. Trois mois après, elle refuse
de manger et ne paraît plus comprendre, elle cesse de répondre
aux questions et on l'amène dans un état de stupeur complet. Je
n'en puis tirer aucune explication et il est visible qu'elle ne com-
prend plus.
Elle demande seulement «où suis-je, qui êtes-vous?» et ne
comprend pas les réponses ; elle est d'ailleurs docile comme un
enfant et se laisse maintenir au lit, mais elle refuse de manger
et elle gâte. J'ai dû la nourrir à la sonde pendant 2 mois; préoc-
cupé par le souvenir du cas précédent, j'ai constamment surveillé
les selles qui sont toujours restées suffisantes. La malade s'est ré-
tablie graduellement : elle est revenue à la conscience comme
font souvent les confus avec le souvenir net des scrupules anté-
rieurs mais sans aucune notion de la période de stupeur.
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LES TERMINAISONS 663
si l'on songe que les scrupules, les remords interminables decon-
fession, les hontes du corps si fréquents chez les jeunes gens peu-
vent aboutir à la confusion des hébéphréniques dont le pronostic
est si sombre on ne sera plus disposé à considérer ces troubles de
l'esprit comme peu dangereux et comme si éloignés de la folie
proprement dite.
Enfin parmi les terminaisons fatales de la maladie, il ne faut
pas oublier de signaler la terminaison par le suicide dont M.
Séglas a signalé la fréquence. Je n'ai pas eu l'occasion d'en rele-
ver des exemples, et je crois le fait assez rare à cause de Tabou-
lie de ces malades. Mais II existe cependant et doit être redouté,
parmi les accidents possibles de cette maladie.
5. — Les terminaisons.
En dehors de ces complications, étrangères en réalité à la ma-
ladie proprement dite, il est intéressant de rechercher comment
se termine la maladie psychasthénique quand elle garde jusqu'au
bout ses traits caractéristiques et ne se transforme pas en une autre
psychose.
Les premiers observateurs ont été frappés de ce fait que les
obsédés n'arrivent pas au délire complet et que la maladie n'aboutit
pas à une démence. C'était l'opinion soutenue dans le rapport de
M. J. Falret en 1889. C'était également la thèse soutenue dans le
livre de MM. Magnan et Legrain : « C'est un fait remarquable,
disent-ils, jamais dans ces cas on n'observe la moindre modifica-
tion du syndrome qui reste toujours semblable h lui-même. Il
n'évolue pas, il ne se transforme pas, jamais il ne devient l'origine
d'un délire proprement dit, comme on l'écrit quelquefois en
confondant l'idée obsédante avec l'obsession pure ; jamais il ne se
termine par la démence*. »
D'autre part, quelques auteurs remarquent justement que les
troubles vont en augmentant, rendant l'existence de plus en plus
anormale; MM. Marie etVigouroux proposaient de considérer cet
état terminal « comme une démence spéciale* ».
I. Magnan et Legrain, 1896. p. i65. Cf. Séglas, Maladies mentales, p. 87.
a. Marie et Vigoiiroux. Congrès des aliénistes el neurologistes français. Angers,
août 1808.
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LES TERMINAISONS 665
peu, elle reçoit quelques visites assez rares, elle semble intelli-
gente et cependant voici cinq ans qu'elle n'a pas quitté la chaise
longue et qu'elle passe ses jours et ses nuits à avaler lentement,
goutte à goutte, un peu dejauned'œuf. Nadia, à trente, ans est ar-
rivée à se séquestrer dans un petit appartement qu'il est devenu
impossible de lui faire quitter, elle ne reçoitjamais qu'une ou deux
personnes et rarement, elle n*a plus aucune relation avec le monde,
mais elle a encore quelque activité puisqu'elle se livre avec grand
succès à quelques petits travaux artistiques. Au contraire, Leg...
à 45 ans est devenue complètement immobile, elle reste toute la'
journée sur une chaise, ne faisant absolument plus rien et n'osant
même pas remuer ou parler de peur d'envoyer des microbes et
du poison sur les personnes présentes. Xa... à 65 ans ne veut
même plus s'asseoir, elle reste debout ou accroupie au milieu de
sa chambre, son dernier fauteuil ayant été contaminé par une per-
sonne qui s'est assise dessus. Elle ne voit plus personne et il faut
deux gardes pour arriver h lui faire accomplir les actes nécessaires
à la conservation d'une aussi pauvre existence. Sans doute ces
malades parlent encore raisonnablement : la dernière est même
capable, depuis que je suis parvenu à la faire asseoir, de soute-
nir une conversation et de rire d'elle-même.
Un type tout à fait remarquable a ce point de vue est Fik...
(i58). Cette femme, âgée de 60 ans, parfaitement bien portante,
sans aucune infirmité, intelligente et riche, qui pourrait mener
une vie tout à fait raisonnable et agréable en est arrivée à une
existence absurde qui la met au désespoir. Elle ne peut plus
accomplir aucune espèce d'action, elle ne peut recevoir personne,
ni aller voir personne. Fille peut à peine sortir dans les rues, elle
ne peut s'occuper ni de toilette, ni de religion, ni d'un travail
quelconque, ni d'une lecture, ni de quoi que ce soit. Elle peut ii
peine se nourrir d'une manière raisonnable et encore faut-il
qu'elle mange après les autres, qu'elle soit seule à table. Elle
peut difficilement dormir et même se coucher et souvent elle
passées heures étendue sur un fauteuil. Toute action, ou plutôt
tout commencement d'une action car elle n'en fait aucune, déter-
mine des ruminations, des phobies, des angoisses interminables.
Mais tout cela ne serait rien si cette pauvre femme n'avait un
caractère épouvantable, d'une susceptibilité, d'une intolérance,
d'un autoritarisme inouïs. De même que toute action lui parait
possible quand il ne s'agit pas de l'action présente, toute per-
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LES TERMINAISONS 667
pas fatales. MM. Pitres et Régis ^ ont fait une observation très
remarquable à propos des tables statistiques qu'ils avaient dressées
sur l'Age de leurs malades et cette remarque peut se répéter exac-
tement sur les miennes. Il est certain, soit pour ces auteurs, soit
pour moi, que plus des 3/4 de nos malades en traitement sont
jeunes, au-dessous de 3o ans et que le nombre des malades en
traitement diminue très rapidement à mesure que nous considé-
rons des âges plus avancés. Comment expliquer le fait ?
On peut dire d'abord que quelques-uns des malades jeunes
meurent; mais les morts sont rares chez les obsédés. Quelques-uns
doivent se dégoûter des traitements, leur nombre ne doit pas être
grand, quand on voit combien ces malades aiment à être dirigés. Il
ne reste qu'une explication possible, c'est que les scrupuleux sont
en réalité de moins en moins nombreux h mesure que Tàge s'avance
et qu'un très grand nombre, plus de la moitié, a du guérir
avant d'arriver à 4o ans. Cette notion que nous apprend le rai-
sonnement est confirmée par l'observation. On voit un grand
nombre de malades s'améliorer vers la fin de la jeunesse. II en
est de cette maladie exactement comme de l'hystérie qui se déve-
loppe très fréquemment, chez les femmessurtout, à Tàge de la pu-
berté physique ou morale et qui diminue ou disparaît quand cette
double évolution est bien terminée, c'est-à-dire de 25 à 3o ans,
car il s'agit de sujets dont le développement est lent et dont
l'évolution est en retard. Bail disait déjà que les malades atteints
à l'époque de la puberté ont des chances de guérison, parce que
l'évolution progressive de l'organisme peut les débarrasser de
cette faiblesse. Legrand du Saulle, Kraflt-Ebing parlent aussi de
ces guérisons, j'en ai observé un très grand nombre.
Quand les idées fixes diminuent, les malades repassent en
sens inverse à travers la série des phénomènes qui se sont déve-
loppés au début. Ils oublient les obsessions proprement dites
mais conservent d'abord des manies, des tics, des phobies, puis
quand ils les perdent, ils restent simplement abouliques, enfin
dans les cas les plus heureux l'aboulie tend à disparaître au moins
jusqu'à l'époque des rechutes; les observations de Bor..., de
Toq..., etc., sont démonstratives à ce point de vue. D'autres ma-
lades qui ont dépassé ce terme tardif de révolution de la puberté
guérissent encore aux approches de la maturité. C'est évidem-
I. Pitres et Régis, op. cit., p. 83.
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LES TERMINAISONS 669
moins difTicile, l'organisme est construit et doit tout simplement
s'entretenir, la carrière, la famille, les croyances sont organisées :
la dépense mentale devient infiniment moindre. Sans doute nos
obsédés ne deviendront pas des hommes éminents, ils n'auront
pas de forces à dépenser pour un travail supplémentaire, mais ils
auront une force suffisante pour la perception ordinaire et pour
des actions devenues en grande partie automatiques. Ces percep-
tions et ces actions deviendront alors plus réelles, ne donneront
plus naissance au sentiment d'incomplétude, les dérivations et les
obsessions qui résultaient de cette faiblesse de tension disparaî-
tront graduellement. La guérison au moins partielle est donc une
terminaison que Ton peut espérer dans un bon nombre de cas,
et le traitement doit tendre h aider les bons effets du progrès de
l'âge.
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LE DIAGNOSTIC ET LE TRAITEMENT 671
de la miction, etc., on peut souvent être très embarrassé et quel-
quefois ce n'est que l'évolution qui donnera une connaissance plus
nette du malade et permettra d'arriver à une opinion précise. Ce
problème du diagnostic me parait différent suivant le groupe des
symptômes prédominants que présente le malade. Nous avons
admis trois groupes de symptômes, les insuffisances psycholo-
giques, les phénomènes de dérivation ou les crises de psycholepsie
et les obsessions proprement dites qui se surajoutent aux phéno-
mènes précédents.
Quand les malades ne présentent que le premier groupe de
symptômes, qu'ils sont surtout abouliques, aprosexiques, qu'ils
ont des troubles de l'émotivité, du sommeil, le diagnostic avec la
neurasthénie semble le plus difficile à faire. Je ne suis pas con-
vaincu qu'il soit important de chercher à l'établir. La neuras-
thénie est une maladie encore très vaguement déterminée, elle
contient probablement un grand nombre de troubles qui sont
simplement des débuts d'autres névroses ou d'autres psychoses.
Tant que la maladie n'est pas caractérisée, il n'y a pas grand
inconvénient à se servir de ce terme vague de neurasthénie
qui est accepté volontiers par les malades. Il suffit de ne pas
oublier que la neurasthénie peut, en évoluant, donner naissance
à des états psychasthéniques plus ou moins graves.
Mais peut-on prévoir quelles sont les neurasthénies dangereuses
à ce point de vue ou peut-on reconnaître le moment où elles se
transforment et méritent de prendre un autre nom ?Bien entendu,
les neurasthéniques dont l'hérédité est chargée, dont la maladie
a débuté plus insidieusement pour des causes physiques ou morales
minimes sont les plus prédisposés à cette évolution. Il faut aussi
tenir compte de la prédominance des symptômes psychiques sur
les symptômes physiques. Enfin, à propos des symptômes
psychiques on peut faire la remarque suivante. Certains malades
sont très abouliques, ne peuvent plus faire attention et présentent
de Tamnésie continue, mais ils le constatent sans s'en inquiéter,
ils ont très peu ces sentiments d'incomplétude qui caractérisent
les psychasthéniques ; chez ceux-là les troubles de l'obsession sont
peu à redouter. Au contraire, si un malade ayant les symp-
tômes de neurasthénie surtout morale se plaint ensuite de ne
plus se reconnaître lui-même, de trouver le monde étrange, de
se sentir comme dédoublé, de constater lui-même le caractère
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DIAGNOSTIC ET TRAITEMENT 673
fois dans udc grande hésitation. Le malade, homme de 45 ans,
très intelligent, d'une haute situation, venait consulter de lui-
même, ce qui indiquait la conscience des troubles, il se plaignait
de diminution de la volonté, de l'attention et de la mémoire, de
sentiments d'automatisme et d'un état permanent d'inquiétude.
Kn même temps j'apprenais par la famille que le malade avait eu à
l'âge de 3o ans une grande crise d'idées obsédantes de jalousie et
de persécution. D'autre part Tâge déjà avancé, l'intégrité intel-
lectuelle et la haute puissance de volonté pendant la plus grande
partie de la vie, un peu de tremblement de la langue et des lèvres,
un peu d'inégalité pupillaire et une vérole antérieure me firent
hésiter et me conduisirent h avertir la famille d'un diagnostic de
paralysie générale. Mon diagnostic fut contesté dans une con-
sultation ; malheureusement l'avenir me donna raison et deux
ans après le malade mourut dans un accès épileptoïde. On se
trouvera rarement dans un embarras semblable: les signes phy-
siques de la paralysie générale, le développement de la démence qui
descend plus profondément que le trouble psychasthénique per-
mettront en général d'arriver facilement au diagnostic.
Sinousconsidéronslesecondgroupedesymptômes, les agitations
motrices, les phobies et les ruminations mentales, les deux premiers
phénomènes surtout donneront naissance h des problèmes de dia-
gnostic. Le premier de ces problèmes consiste à bien reconnaître le
caractère névropathique des phénomènes et h ne pas les rattacher
aux affections organiques qu'ils simulent. Les phobies détermi-
nent des troubles de l'alimentation, de la déglutition, de la défé-
cation, de la miction, de la marche, de l'écriture et surtout des
fonctions génitales. Il est essentiel de ne pas faire de tous ces
troubles des lésions du pharynx, de l'estomac, de l'intestin ou de
la moelle épinière. Cela est surtout important ici car un faux dia-
gnostic confirme le malade dans ses appréhensions et aggrave la
maladie mentale. On se souvient de ce qui arrive aux jeunes
mariés que l'émotion rend insuffisants et à qui on parle de maladie
de la moelle épinière. Il suffit en général de rechercher avec beau-
coup de précision les symptômes de la maladie organique simulée
et de les rechercher en silence sans expliquer au malade ce que
l'on vérifie. Sans doute la suggestibilité du malade n'est pas aussi
redoutable que celle des hystériques, mais le désir d'être pris
pour un malade sérieux, la crainte de s'entendre appeler « hypo-
LES OB8ES8IOK9. I. — ^3
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DIAGNOSTIC ET TRAITEMENT 675
à propos des refus de mouvement, des refus d*aUments, à propos
des tics, etc. Théoriquement le diagnostic devrait être fait très
facilement grâce à la recherche des stigmates : une hystérique
avec hémianesthésie nette et rétrécissement du champ visuel ne
ressemble pas à une scrupuleuse qui n*a que des troubles de
Tattention ; mais d'une part nous avons vu que les scrupuleuses
dans les états graves comme Claire et Lise peuvent présenter
des diminutions de la sensibilité et d'autre part j'en arrive à
croire que nous avons exagéré, sinon la fréquence, au moins la
généralité de Tanesthésie complète chez l'hystérique. Dans ce
diagnostic souvent délicat on sera guidé par les antécédents, il y
a certains faits nettement hystériques : les contractures, les vraies
paralysies, les somnambulismes typiques suivis d'amnésie qui
n'existent pas chez les psychasthéniques ; on pourra se
servir de quelques expériences, l'hypnotisme vrai, la suggestion,
les actes subconscients n'existent pas davantage chez ces malades.
Le véritable diagnostic doit se faire par l'examen de la forme
psychologique que prennent les troubles principaux. L'hystérie
est caractérisée par la suppression complète de certains faits et par
l'exagération de certains autres. Tandis que des sensations, des
souvenirs, des images motrices sont complètement disparus de la
conscience personnelle, ce qui constitue des anesthésies, des
amnésies, des paralysies, etc., les phénomènes psychologiques
conservés vont jusqu'à leur terme extrême : on constate des
Impulsions à des actes qui s'exécutent complètement au moins
pendant certaines crises, des hallucinations complètes, avec illu-
sion de la réalité, des convictions irrésistibles. C'est là ce qui
constitue chez l'hystérique le rétrécissement du champ de la con-
science. Les psychasthéniques au lieu de ce rétrécissement du
champ de la conscience présentent un abaissement de la conscience
dans sa totalité. Ils ne présentent aucune des lacunes complètes
de l'hystérique, ni ancsthésie, ni amnésie, ni paralysie, ni sub-
conscience, ni suggestion qui résulte de ce rétrécissement ; ils ne
présentent pas non plus de ces conservations complètes ou même
de ces exagérations de certains phénomènes conservés et isolés
des autres. Enfin cet abaissement général qui n'est pas compensé
par un rétrécissement du champ de la conscience leur donne des
sentiments d'incomplétude bien plus accentués qu'ils ne sont
d'ordinaire dans l'hystérie. Tandis que l'hystérique a tous les
sentiments extrêmes, vous aime ou vous déteste avec une égale
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DIAGNOSTIC ET TRAITEMENT 677
eo un même groupe le délire de persécution et « les idées for-
cées » des obsédés. Ici encore le diagnostic théorique est fort
simple, il consiste à constater Texistence de ces signes qui sont
adoptés par tous les auteurs d'une manière classique pour établir
la différence entre Fidée fixe et l'obsession. « L'idée fixe, disait
M. Roubinovitch, est une conception délirante, inconsciente, do*
minant toute la personnalité psychique ; l'obsession est une idée
inutile ou nuisible, reconnue fausse qui occupe l'esprit du malade
contre sa volonté. L'idée fixe est permanente, l'obsession procède
par paroxysme ; chez le premier malade c'est le jugement, la
faculté d'association des idées qui est lésée, c'est chez le second
la sphère émotive, la volonté ^ » Il en est ainsi sans doute dans
les cas typiques et un per^cuté au terme de son délire manifeste
une conviction absolue, en exprimant des idées de persécution et
de grandeur, il accomplit des actes en rapport avec ses idées, il
entend des voix hallucinatoires et il ne ressemble aucunement à un
obsédé qui s'interroge indéfiniment sur son scrupule et qui n'a
que des pseudo-hallucinations.
Cependant je crois qu'il y a lieu d'être très embarrassé si l'on
considère les malades à leur début. M. Marandon de Montiel,
MM. Vigouroux et Decasse ont montré comment les idées déli-
rantes des persécutés se rattachaient également chez eux à des
troubles antérieurs de l'émotivité et de la cœnesthésie *. J'ai été
tout surpris d'observer chez les persécutés un grand nombre des
caractères de nos psychasthéniques : on constate dans le dévelop-
pement de leur maladie la même influence de toutes les causes
débilitantes, des maladies infectieuses, des émotions, les mêmes
oscillations du niveau mental, les mêmes troubles de l'insufli-
sance psychologique, l'aboulie, l'aprosexie, le besoin de direc-
tion et surtout les sentiments d'automatisme. « Ce n'est plus moi
qui lis, on lit h ma place, répètent-ils souvent ». On retrouve
également chez les persécutés systématiques les sentiments
de dédoublement, d'étrangeté du corps, d'étrangeté du monde
extérieur. Inversement on peut retrouver chez l'obsédé le plus
typique le même contenu des idées que dans le délire systémati-
que : les idées obsédantes mystiques sont, comme on l'a vu, fré-
I. Roubinovitch. Bulletin méd., aa juillet 1896. Cf. Kéraval, L'idée fixe. Archives
de neurologie, 1899, 11, a^.
a. Marandon de Monliel, De la genèse des conceptions délirantes et des halluci-
nations dan» le délire systématise. Gazelle des hôpitaux, 5 juin 190U.
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DIAGNOSTIC ET TRAITEMENT 67»
même temps interprétation délirante que tous ces biens lui ont été
ravis par des anarchistes dont son mari est le roi, par des initiés
qui lui lancent des poudres pour paralyser sa volonté. Elle
semble croire ce qu'elle affirme puisqu'elle a commis une foule
d'excentricités, qui l'ont fait enfermer; mais cependant elle ne
peut jamais parler des initiés ou des poudres sans se tordre de
rire exactement comme Lise quand elle parle du démon.
En un mot, je crois qu'il y a une série de gros problèmes
psychologiques à résoudre dans l'étude du persécuté : il faudrait
expliquer sa manie d'objectiver, de chercher toujours l'explica-
tion en dehors de lui tandis que le scrupuleux cherche le plus
souvent cette explication en lui-même, il faudrait examiner le
degré de sa conviction qui, si je ne me trompe, n'est pas toujours
absolue et varie énormément suivant les oscillations du niveau
mental. II faudrait étudier ses fameuses hallucinations de Touïe
et expliquer pourquoi il n'est halluciné que de l'ouïe, ce sens du
langage, ce sens social qui se trouble plus facilement que les
autres chez les individus qui ont précisément dePaboulie sociale.
Si l'on faisait ces études on verrait, je crois, qu'il y a au début
infiniment de phénomènes communs entre les psychasthéniques
et les paranoiaques et l'on pourrait indiquer avec précision le
point ou s'effectue la séparation, ce qui aujourd'hui ne peut être
fait que d'une manière assez vague.
Quoi qu'il en soit le problème consiste actuellement à distinguer
les états psychasthéniques qui ont une tendance h évoluer vers les
délires systématiques et ceux qui sont destinés à se borner aux
obsessions. La tendance antérieure du caractère, l'autophilie, l'or-
gueil, la susceptibilité, le caractère autoritaire montrent une dispo-
sition à objectiver les troubles psychologiques, à rendre les autres
responsables de tous les phénomènes de l'insuffisance psycholo-
gique. En outre on trouve chez ces malades une tendance à sys-
tématiser, moins de disposition au doute quand il s'agit de l'in-
terprétation délirante: ces caractères doivent faire craindre que
l'état psychasthénique n'évolue vers cette variété particulièrement
dangereuse qui est le délire systématique de persécution. Les
caractères inverses, la douceur, l'humilité, la tendance à l'analyse
subjective, font plutôt prévoir les obsessions du doute et du scru-
pule. C'est toujours l'analyse psychologique des divers symptô-
mes qui permet de donner quelque précision au diagnostic.
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LE PRONOSTIC 681
la famille il*y a déjà des obsédés, il est bon de bien connaître
l'évolution de la maladie chez eux, car cette évolution se répète
souvent absolument semblable. Il faut aussi tenir grand compte
dans la recherche de l'hérédité des névroses et surtout, à mon
avis, de Tépilepsie.
A côté des aliénés et des névropathes proprement dits, il est très
important de s'enquérir de Texistence dans la famille de ce que Ton
appellecommunément des bizarres. M. Magnan a justement remar-
qué que ces individus bizarres, originaux, excentriques, ayant des
tics, des manies, un caractère difficile, autoritaire à Texcès, sont
précisémentceuxqui laissent le plus souventà leurs descendants les
* tares psychasthéniques. Cela se comprend facilement si Ton songe
que ces bizarreries sont déjà des marques de Tinsuffisance de
l'adaptation sociale, de l'insuffisance des fonctions du réel, et de
l'aboulie. Parmi ces bizarreries, j'insiste sur ce genre de carac-
tère que l'on voit se transmettre pendant plusieurs générations
en se perfectionnant à chacune et qui consiste dans une prudence
allant jusqu'à la poltronnerie, dans une indécision de la volonté,
un défaut de résistance, une gravité allant jusqu'à la tristesse. On
constate en même temps une grande délicatesse des sentiments et
une tendance à préférer la vie idéale à la vie réelle. Ce caractère
qui ne laisse pas d'être élevé et sympathique à ses débuts ne tarde
pas à aboutir dans les générations suivantes à l'aboulie, à l'inquié-
tude permanente et donne enfin naissance à des doutcurs, des
scrupuleux, des obsédés. Il est bon de s'informer de ces carac-
tères surtout chez celui des parents auquel le malade ressemble
le plus. Plus ce caractère se sera développé dans plusieurs géné-
rations, plus il sera difficile de remonter ce courant et plus le
pronostic sera sérieux.
Après l'hérédité, Tâge du début a une grande importance, je
parle du début réel et non du début apparent, de l'époque d'ap-
parition des phénomènes d'insuffisance psychologique et des sen-
timents d'incomplétude. Plus ce début est précoce, plus il a
une signification grave, les phénomènes qui apparaissent de
bonne heure dans le développement sont ceux qui sont le plus
fortement héréditaires qui font le plus partie de la constitution. Il
faut donc se défier de ces enfants qui sont déjà des sages, des
prudents, des réfléchis à cinq ou six ans, ce caractère devient
vite dangereux quand ils sont des lents, des hésitants, des repen-
tants. On apprend vite, quand on interroge bien le malade, qu'à
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LE PRONOSTIC 68i
obsessions qui montrent que le malade entre dans la période des
interprétations délirantes, quoique son délire conserve les carac-
tères de rhésitation et du doute qui sont les troubles fondamen-
taux de la maladie.
Quand le malade est parvenu au dernier degré et que la maladie
est tout à fait chronique il faut pour établir le pronostic tenir compte
de l'activité que conserve encore le sujet, du nombre de relations
que Ton peut lui garder, des travaux que Ton peut lui faire exécuter :
risolement et Tinertie complète étant le terme le plus triste des
états psychasthéniques.
Je ne fais que signaler Fimportance du point de vue médico-
légal bien discuté dans un grand nombre d*études ^ En général
ces obsessions ne déterminent pas d'actions véritables, mais une
exécution plus ou moins incomplète peut survenir à Tinsu du
malade et au cours de ses manies de tentation et de demi-exécution.
L'impulsion peut être plus grave et le pronostic bien plus réservé
quand à l'état psychasthénique proprement dit se joignent
Tépilepsie, la débilité mentale, l'alcoolisme ou d'autres intoxi-
cations.
En dehors des crimes proprement dits, des actes absurdes comme
des promesses de mariage, des fugues, des conduites inconve-
nantes peuvent être en rapport avec les obsessions de honte ou
les besoins d'excitation. Non seulement il faut songer à mettre
quelquefois le malade hors d'état de nuire aux autres, mais il
faut aussi dans certains cas, le défendre contre lui-même.
I. En particulier dans les travaux suivants : Renaudin, Observations médico-
légales sur la monomanie. Ann. méd. psych., i85/|, p. a36. Delasiauve, Des pseudo-
monomanies et de leur importance légale. Ann. méd. psych., 1859. Motet. Société de
médecine légale de Paris, i3 février 1890. P. Dénommé, Des impulsions morbides
au point de vue médico-légal. Thhse, Lyon, 1890. Bérillon, Les phobies neurasthé-
niques au point de vue du service militaire. Revue de l'hypnotisme, 189^* p* a^i*
G. Carrier (de Ljon), Contribution à l'étude des obsessions et des impulsions
l'homicide et au suicide chez les dégénérés au point de vue médico-légal, 1899.
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LA PROPHYLAXIE 685
condition interdisant le mariage, mais on peut en tenir compte
dans la mesure du possible par la remarque suivante. M. Talbot,
dans un article récent sur la dégénérescence et le mariage*, insiste
sur le danger des unions consanguines qui accentuent les carac-
tères familiaux. H fait remarquer à ce propos que ce danger
n'existe pas seulement dans les unions entre membres d'une même
famille ; Il observe que dans les mêmes professions, dans les mêmes
milieux se développent les mêmes tares, les mêmes dégénérations
à un degré peut-être plus élevé que dans les mêmes familles et
que ces tares rendent également dangereuse Tunlon de ces
familles; entre elles. J'ai été frappé de cette remarque en voyant
le délire du scrupule se développer dans des familles universitaires,
dans des familles de magistrats, où le père et la mère appartien-
nent au même milieu depuis plusieurs générations. Quand cette
tare ps)^chasthénlque commence à se développer, Il serait bon
non seulement d'éviter les unions consanguines, mais encore
d'éviter les unions dans le même milieu moral et de croiser non
seulement les races, mais aussi les situations et les éducations
professionnelles. Malheureusement ces précautions sont bien diffi-
ciles à prendre, par une sorte de fatalité nos futurs psychasthénl-
ques sont souvent séduisants surtout pour des esprits du même
ordre. Leur douceur, leurhonnêteté exagérée par l'absence de com-
bativité, la subtilité de leurs sentiments et de leurs Idées, les ren-
dent souvent sympathiques et Ils se recherchent entre eux. J'ai
souvent été étonné de l'adresse extraordinaire que déployait un
scrupuleux pour découvrir une femme aussi atteinte que lui :
faudra-t-ll s'étonner ensuite si les enfants sont des obsédés. Il est
inutile d'Insister beaucoup sur ces précautions que l'on devrait
prendre pour relever l'énergie de la race et éviter la chute de la
tension jusqu'à l'insuffisance ; le médecin sera bien rarement
consulté sur ce premier point de prophylaxie.
Le second point de la prophylaxie doit être Thyglène et l'édu-
cation d'un enfant pour lequel on a des raisons de supposer une
prédisposition. Ce conseil sera demandé plus souvent que le pré-
cédent par les parents qui sont eux-mêmes atteints de troubles
psychasthénlques et qui s'effrayent en apercevant les premiers
signes de la maladie chez leurs tout jeunes enfants.
I. D"" Talbot, Dégénérescence et mariage. The alienist and neurohgUt, janvier
1899.
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LA PROPHYLAXIE 687
Enfin il faut chercher dans ces exercices et ces actions un au-
tre caractère, le caractère social. De très bonne heure ces enfants
prédisposés doivent être habitués à la société et à la société de per-
sonnes qu'ils ne connaissent pas. Cette habitude ne s'acquiert
pas si Tenfant est toujours accompagné par ses parents ou par sa
bonne. Rien ne rend un enfant timide comme la présence de ses pa-
rents, parce que en leur présence il ne sent pas la nécessité de
faire un effort, de tendre son activité mentale et qu'il se laisse
aller à cette aboulie qui est la source de Témotivité. On est tout
surpris devoir que le même enfant cesse d'être timide, quand il
est laissé seul dans la même société. Le fait d'être abandonné à lui-
même suffit pour qu'il se tende et que son esprit fonctionne h un
niveausuperieur.il n'est pas nécessaire que la société où il se trouve
ait toujours de la sympathie pour lui comme il le désire : il est bon
qu'il trouve devant lui des résistances, des jalousies, des compé-
titions, en un mot des luttes. Tout à l'opposé de ce pauvre père
de famille qui jusqu'à la fin de la classe de philosophie faisait
accompagner et rechercher par une domestique son fils aux classes
du lycée « pour qu'il ne pût jamais se battre avec ses camarades»
je crois qu'il est extrêmement important de forcer notre jeune
psychasthénique à se battre. S'il réussit à le faire et si par hasard
il triomphe, ce qui est fort possible, il en sera transformé et le
souci de son avenir vaut bien le danger de quelques horions.
L'éducation intellectuelle ne vient qu'en second lieu chez ces
personnes : elles ne sont que trop disposées au développement de
l'intelligence pure. Il faut éviter l'enseignement abstrait de pure
mémoire, qui n'est que trop répandu en France. Dans l'état
psychasthénique l'esprit semble être développé en étendue et non
en profondeur, il y a comme une dispersion de la pensée. C'est
là une indication dont on doit tenir compte, le grand nombre
des études diverses, faites d'une manière superficielle est pour
ces jeunes gens d'autant plus dangereux qu'ils réussissent facile-
ment à acquérir ainsi quelques notions en apparence brillantes.
Il faut, que l'intelligence soit dirigée avant tout vers l'observation
et vers l'obsession physique plus que vers l'observation morale. Il
faut se méfier surtout de l'observation subjective dans laquelle ces
individus sont passés maîtres. Cette disposition à l'introspection
chez les scrupuleux dépend en partie de leur inquiétude et en grande
partie de ce fait que les images et les associations d'images sont
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LE TRAITEMENT PHYSIQUE 689
"(les phobies et des angoisses continuelles que sa famille se décide
il ramener au médecin. Quelle doit être alors la conduite de
•celui-ci, quelles sont les médications ou les traitements physiques
ou moraux qui peuvent avoir une certaine influence et préparer la
"terminaison de cette crise ?
Il est important que le médecin fasse vite son diagnostic, car il
•doit prendre vis-à-vis de ces malades une attitude particulière
<ti toute hésitation serait des plus fâcheuses. Toutes les descrip-
tions précédentes permettent de reconnaître vite la maladie dont
il s'agit, d'autant plus que ces malades présentent une remar-
•ciuable uniformité et que Ton retrouvera vite les formes et même
les expressions que Ton connaît comme caractéristiques.
Le malade arrive avec une disposition d'esprit toute particu-
lière dont il faut se défier. Sans en être bien certain, car il
doute de tout, il est disposé à croire qu'il n'est pas un malade ou
du moins qu'il n'a pas une maladie ordinaire. Il sent bien que son
«tat n'est pas naturel, mais il croit que c'est un état extraordi-
naire, unique au monde, que personne n'a jamais vu et que les
médecins, en particulier, ignorent complètement. Comme il ne
-veut faire aucun effort, comme il sait qu'il n'a fait aucun effort
pour se guérir, il aime à penser que cette maladie exceptionnelle
«st absolument incurable et qu'il n'y a rien h faire. Il le dit en
•entrant : « c'est sa famille qui l'a forcé à venir voir un médecin,
mais il sait très bien que c'est inutile et que son état est tout à
fait en dehors de la médecine. »
Si le médecin hésite sur son cas et semble surpris par la bizar-
rerie des symptômes que le malade d'ailleurs exagère à plaisir, le
sujet se confirme dans son opinion et en profite pour se laisser
aller encore davantage. Il faut que le médecin puisse montrer
rapidement une grande assurance et lui donner l'impression que
•sa maladie est parfaitement connue, qu'elle est des plus banales,
•et que le traitement curatif est tout à fait stéréotypé.
Pour y parvenir le médecin doit deviner les symptômes au lieu
•de s'en étonner. Dès qne le malade a un peu expliqué son état,
on voit facilement dans quelle catégorie il se range, s'il a plus
de ruminations ou plus de phobies, dans quel sens sont ses obses-
sions principales. Il suffit alors de lui énumérer les manies de
précision, d'oscillation ou de réparation , de lui parler des serments,
des pactes, des formules de conjuration, des angoisses physiques
ou morales, etc. Il est bien rare que l'on ne tombe pas juste sur
LES OBSESSIONS. I. 44
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LE TRAITEMENT PHYSIQUE 691
quand le trouble est plus gastrique qu'intestinal je n'hésite pas à
faire de même au moins pendant une ou deux semaines, mais en
général j'hésite à imposer un régime aussi sévère.
Le régime lacté intégral est débilitant, ce qui est ici très mau-
vais, car cela favorise les sentiments d^incomplétude, il n'est pas
toujours très bien toléré par Testomac des malades, a Le lait, dit
M.. Lépine, ne convient pas aux estomacs dilatés, il ne stimule
pas le système nerveux et ne donne pas la sensation de force. La
vie, a dit un vieux maître, ne se soutient que par les excitants. Si
cette proposition est vraie, le lait ne suffirait pas h entretenir, la
vie^ » J'ajoute que le régime lacté est surtout contre-indiqué
quand il y a un certain degré d'entérite.
Il suffit de se borner d'ordinaire à supprimer complètement le
vin et l'alcool, les sauces, les graisses, les viandes faisandées, les
conserves, à réduire assez fortement la proportion des viandes
dans l'alimentation, à se rapprocher en un mot du régime végé-
tarien. Le lait, les œufs, les farines de toute espèce et surtout
les farines de céréales en abondance, les légumes verts, les fruits
cuits avec un peu de viande grillée à un repas seulement me
paraît un régime suffisant et extrêmement utile dans les cas
moyens. Dans les cas graves d'atonie gastrique, je me suis bien
trouvé en laissant les malades au régime exclusif du lait, des œufs
et des bouillies de farines comme des enfants en sevrage, mais
il s'agit alors du traitement de la dyspepsie hyposthénique dont
je n'ai pas à m'occuper spécialement ici. Ces régimes végétariens
ou presque végétariens en réduisant les toxines qui impression-
nent le système nerveux déterminent souvent chez les neurasthé-
niques et même chez les psychasthéniques des améliorations sur-
prenantes. Les aliments doivent être pris en quantité suffisante,
a des intervalles bien réglés et en général assez longs, car il est
essentiel de laisser l'estomac se reposer ; il faut interdire à cer-
tains malades atteints de boulimie de manger dans l'intervalle
des repas. Mais il sera bon pour certains estomacs atones et di-
latés de faire boire très peu aux repas et de faire boire deux tasses
de thé très léger plusieurs heures après le repas, de manière à ne
pas diluer le suc gastrique pendant la digestion, mais a donner
cependant au malade la quantité d'eau indispensable. Dans l'ana-
lyse des urines qu'a conseillée M. Joulie, il y a une indication
1. Lépine, Semaine médicale, 19 février 1903.
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DIAGNOSTIC» ET TRAITEMENT
3t de surveiller la densité des urines du matin. La
me doit être de 1018, chez beaucoup de neurasthé-
it bien supérieure. II faut alors, en augmentant la
oissons prises en dehors des repas, si cela est né-
mener h la normale. Ces conseils relatifs au régime
s neurasthéniques se retrouvent chez tous ceux qui
malades, ils semblent assez bien justifiés par Tex-
is de l'intestin sont troublées comme celles de Tes-
aut se préoccuper d'un état de constipation très
es grave qu'ils présentent presque toujours. Les
testinales doivent être obtenues par tous les moyens
ne saurait trop insister sur les avantages des grands
naux avec de l'eau légèrement salée 10 pour 1000,
profondément avec une grande sonde. Dans des cas
suis servi avec avantage des grands lavements
ïs avec la sonde, gardés le plus longtemps possible
lavement d'eau de têtes de camomille. Dans un
apporté il a fallu pratiquer un véritable curettage
ctale.
> moins sérieux il suffit d'user régulièrement des
is en les variant de temps en temps à cause de
e. Tous les dix ou quinze jours une petite purge
1 semblé utile. Dans plusieurs cas j'ai employé avec
mel ou les sels de karisbad qui sont avantageux
îtions du foie sont engourdies. On est souvent sur-
ioration remarquable que l'on constate même dans
lentales après une purge de ce genre.
entation il faut régler le sommeil et le repos. Les
ormir constamment et resteraient au lit toute la
res s'agitent sans cesse, ne veulent pas se coucher
Luit à marcher dans leur chambre. Ils sont tous des
it le plus grand besoin de repos. Le traitement de
, très pratiqué en Amérique, condamne tous les
ss à un repos absolu au lit, en ne leur donnant des
le par des massages et des mobilisations passives des
Oejerine et M. Nattier, dans le travail que j'ai cité,
noins i5 heures de repos au lit par jour. Il se peut
lent, dont je n'ai pas beaucoup l'expérience, soit
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LE TRAITEMENT PHYSIQUE em
Utile dans quelques cas de neurasthénie simple, j'avoue que je le
redoute beaucoup chez les psychasthéniques qui ont des troubles
mentaux. Plusieurs de ces derniers m'ont raconté qu'ils avaient
subi auparavant, et quelques-uns à plusieurs reprises, le traite-
ment dit de Weir-Mitchell sans en retirer aucun avantage. Dans
trois cas j'ai vu les malades, après avoir subi un traitement de
ce genre, tomber dans l'inertie et dans la malpropreté. Ces ma-
lades ont déjà beaucoup de tendance à l'aboulie, à l'immobilité
et à la rêverie. Il ne faudrait, à mon avis, les laisser au lit
qu'avec une grande surveillance et en évitant l'inaction absolue.
Il me semble préférable, tout en laissant au malade beaucoup
de repos, de régler la durée du séjour au lit d'une façon qui se
rapproche de la normale, afin de ne pas déterminer des habitudes
fâcheuses, plus tard difficiles à rompre. Ce qui est essentiel, c'est
d'exiger le coucher et le lever à des heures Gxes et de maintenir
une grande régularité.
Il faut encore surveiller toute l'hygiène du malade, le retirer
s'il y a lieu d'un milieu malsain, le faire vivre une partie dé la
journée au grand air, supprimer, s'il ne l'a pas déjà fait de lui-
même, tout travail qui serait trop fatigant ou malsain.
Il faut traiter avec soin toute maladie locale ou générale qui
coïnciderait avec l'état psychasthénique et qui Tentretiendrait.
Les infections utérines, les suppurations locales jouent en parti-
culier un grand rôle et doivent être autant que possible suppri-
mées. Il ne faut cependant pas se laisser entraîner à faire jouer
un trop grand rôle à des troubles locaux et rattacher toute la ma-
ladie à un déplacement utérin ou à une chute du rein. Il faut
beaucoup se méfier des opérations que ces malades supportent
très mal et qui sont souvent le point de départ de rechutes. De
même des traitements excessifs et fatigants comme ceux de cer-
taines villes d'eaux ont eu pour les malades que j'ai suivis des ré-
sultats déplorables. Il faut donc se borner aux traitements néces«
saires et les plus simples.
2. — La médication sédative.
Le traitement médicamenteux n'a pas chez ces malades une
grande importance, il me semble cependant exagéré de le sup-
primer tout à fait.
Je n'insiste pas sur les médicaments en rapport avec tel ou tel
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LE TRAITEMENT PHYSIQUE 695
est détestable ; pratiquement il est bien difficile de ne jamais y re-
courir. On ne peut guère nier que de petites doses de ces médi-
caments n'aient souvent rendu des services. Le trional, le sul-
fonal, le chloral, le bromidia ne sont que trop connus par les
malades, il faut surtout en surveiller et en réduire l'emploi le
plus possible.
Dans quelques cas assez rares j'ai eu recours à l'opium, quel-
ques centigrammes d'extrait thébaïque me semblent tout in-
diqués pour les malades angoissés qui ont un grand état de
souffrance, malheureusement l'effet constipant de l'opium est à
redouter chez des malades dont la constipation est déjà opi-
niâtre. Quant h la morphine elle demande une étude toute spé-
ciale et me parait jouer aussi bien un rôle d'excitant du système
nerveux qu'un rôle de calmant.
3. — La médication tonique.
Il ne faut pas oublier que cette excitation apparente du sujet
est toute secondaire et qu'elle est la manifestation d'un épuise-
ment réel, d'une insuffisance du système nerveux central qui ne
peut plus atteindre la tension normale. L'essentiel serait évidem-
ment de relever la force du système nerveux, c'est le problème
général des états neurasthéniques, il n'est pas dans ce cas plus
facile à résoudre que dans les autres. Sans doute les précautions
d'hygiène que j'ai mises au premier rang ont sur ce point une
influence incontestable. Une alimentation convenable que le ma-
lade puisse digérer, la suppression des toxines que produisaient
les alcools, les viandes fermentées insuffisamment digérées, etc.,
sont pour beaucoup dans le relèvement du système nerveux.
Malheureusement ces précautions sont loin de suffire toujours,
d'ailleurs la mauvaise digestion dépend elle-même de cette insuf-
fisance du système nerveux et l'on tourne dans un cercle vicieux.
Il faut donc recourir à tous les toniques nervins, à tous les re-
constituants et dans notre ignorance il faut souvent les varier.
Les phosphates occupent une grande place parmi les toniques
nervins. La vogue a été longtemps aux glycéro phosphates, j'en ai
fait prendre à tous ces malades des quantités énormes et comme un
très grande nombre sont guéris on peut supposer que ce médi-
cament a eu une influence favorable. Aujourd'hui la mode se
tourne davantage vers une autre forme la lécithine, qui m'a
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LE TRAITEMENT PHYSIQUE . 697
et ont cédé après un traîtement de quelques mois. Je n'ai pas
revu ce malade et ne sais s'il a récidivé. Cette observation qui
m*a frappé montre donc que dans certains cas, assez rares peut-
être, des troubles analogues à ceux du myxœdènie fruste peuvent
jouer un rôle dans la psychasthénie. Il faudrait donc dans des cas
semblables songer à la thyroïdine et dans d^autres peut-être
voisins à Tovarine.
Un traitement auquel j'ai eu très souvent recours ce sont les
injections sous-cutanées d'une solution saline concentrée : la so-
lution de Chéron. Ces injections qui relèvent la pression vas-
culaire et déterminent une excitation vitale de tout l'organisme
ont eu souvent des effets fort utiles.
Je ne cite que pour mémoire les grandes injections du sérum
de Hayem que j'ai faites chez Nadia h la dose de 5oo grammes
pendant la période de confusion mentale et de stercorhémie. Ces
injections ont certainement contribué a sauver la malade et leur
action est bien connue. J'ai eu souvent recours également aux in-
jections de strychnine (de i à 5 centigrammes) qui ne m'ont pas
paru avoir des effets plus nets, que les solutions précédentes
moins dangereuses.
Un très grave problème se pose a propos de ces traitements par
toniques nervins, c'est celui des injections de morphine : On sait
que M. A. Voisin avait fait de la morphine la base de sa théra-
peutique des maladies mentales, il en avait obtenu quelquefois
des résultats remarquables. Certains faits d'observation m'ont
montré depuis longtemps que cette thérapeutique reposait sur des
observations en partie exactes. J'ai vu des hystériques anesthési-
ques qui perdaient tous leurs stigmates après des injections de
morphine ; je connais des obsédés qui ont recouru à la morphine
et qui ont été guéris au moins momentanément. Ces phénomènes
se comprennent : la morphine n'agit pas uniquement comme un
anesthésique, de même que l'alcool elle détermine une excitation
du système nerveux qui peut augmenter sa tension et supprimer
momentanément les résultats de son insuffisance. Cependant j'ai
longtemps reculé devant l'emploi de cette méthode à cause des
dangers de la morphinomanie chez des malades si disposés à
contracter un besoin pathologique et une impulsion. Je restais
convaincu que chez la plupart des psychasthéniques, les dangers
de ce médicament dépassaient ses avantages.
L'observation de certains faits me rend maintenant un peu
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LE TILUTEMENT MORAL 699
Régis craignent les douches froides qui surexcitent ces malades,
ils préfèrent les douches tièdes, les bains, les affusions. Ils ont
parfaitement raison s*il ne s'agit que de calmer une surexcitation
trop grande. C'est en me plaçant au même point de vue que je
réclamais Tusage du bromure. Dans beaucoup de cas Thydrothé-
rapie froide doit être supprimée surtout au début du traitement
«t remplacée par les douches tièdes ou les bains.
Cependant, si les malades sont déjà un peu calmés, s'il s'agit
de personnes jeunes, vigoureuses, si le traitement a lieu en été
dans de bonnes conditions, je ne crois pas qu'il faille renoncer
aux effet toniques de la douche froide. Legrand du Saulle soute-
nait autrefois avoir vu des rémissions absolues après un traitement
hydrothérapique, bien souvent à la Salpêtrière j'ai vu de jeunes
malades terminer une crise et s'améliorer visiblement après ce
traitement.
M. Marro dans une étude sur a la prophylaxie des émotions
qui amènent la dégénération », explique d'une manière intéres-
sante les bons effets de l'hydrothérapie froide. « Par ces applica-
tions froides graduelles nous tentons d'éveiller le réflexe vaso-
dilatateur cutané qui succède à la première constriction vaso-
capillaire cutanée et qui contraste avec les réactions désordonnées
vaso-paralytiques ou vaso-dilatatrices viscérales dans lesquelles
se résoud l'action morbifique du froid lorsqu'il devance la force
de résistance de l'organisme. L'éducation de ce réflexe nous
donne un premier avantage contre les impressions peureuses
dans lesquelles la contraction du système vasculaire périphérique
est un des premiers phénomènes. L'hydrothérapie froide consti-
tue une véritable hygiène contre les causes déprimantes soit phy-
siques, soit morales *. »
Le rôle heureux de Télectrisation statique a été souvent signalé,
les effets toniques des courants avec alternances très rapides sont
encore a Tétude.
2. — Le traitement moral.
Malgré l'importance de la thérapeutique physique, il est incon-
I. A. Marro. Congrès de psychologie de 1900. Comptes rendus, 1901, p. 087.
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LE TR.\1TEMENT MORAL TOI
tians ces cas conseillera la famille de maintenir les fiançailles? Le
problème est souvent extrêmement délicat. Sans doute 'quand la
maladie n'est pas grave, quand Tinsuffisance de la volonté n'a pas
des racines profondes dans Thérédité, on peut, en encourageant
et en aidant le malade, lui faire franchir Tobstacle. Mais faut-il
toujours pousser le malade h accomplir des actes compliqués dont
il est forcément incapable ? M. Savage remarquait déjà qu'en exi-
geant le mariage dans ces cas on s'expose a un double risque ce celui
de l'impuissance génitale et celui d'une violente antipathie contre
laquelle plus tard rien ne pourra réagir... des mariages forcés de
ce genre aboutissent à des séparations, à des délires lypémaniques
avec internement* ». Je ne vois guère quel intérêt nous pousserait
à courir ces risques. Est-ce donc un si beau mariage que celui
d'un psychopathe qui va procréer une race de dégénérés? La
situation matrimoniale avec toutes ses difficultés, l'éducation d*en-
fants probablement malades sont-elles faites pour le guérir ? II est
déjà insuffisant pour sa vie de célibataire, est-il raisonnable de lui
en imposer une plus compliquée? Dans des cas semblables il est
souvent indispensable de faire rompre le mariage de la manière
la plus complète, la plus décisive possible. J'ai eu plusieurs fois
à prendre une décision de ce genre et je ne m'en suis pas re-
penti. Le malade, malgré sa déception, s'en trouve fort bien et il
guérit de cette crise de rumination, tandis qu'il aurait déliré si on
l'avait maintenu dans une situation trop complexe pour lui.
Il y a de même bien des situations morales compliquées que l'on
peut aisément simplifier dans l'intérêt du malade. Bien souvent
la vie de famille dans laquelle il se trouve placé est mauvaise pour
lui ; le père ou la mère sont déjà des psychasthéniques avec leurs
obsessions, leurs manies, leur caractère extrêmement autoritaire.
Tout cela crée un milieu pénible où il faut lutter sans cesse, avoir
de l'habileté pour éviter les scènes et les délires. Notre malade
même faible pourra être suffisant ailleurs tandis qu'il s'énerve et
succombe ici. Très souvent la première ordonnance du médecin doit
être que la fille ne peut pas vivre avec la mère.
Il y a de même des professions qui font naître des difficultés
morales particulières, tel individu n'est pas capable de supporter
la profession juridique ou la profession médicale ou la direction
1. G. Savage, Troubles d'esprit à propos des fiançailles. Journal of mental Science,
octobre 1888. Encéphale 1888.
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LE TRAITEMEXT MORAL Tt^
doit avoir un rôle remarquable dans une maladie où les idées
prédominantes semblent au premier abord Tessentiel.
Aussi dès le début des études sur la thérapeutique suggestive
a-t-on essayé cette méthode chez les obsédés et a-t-on soutenu
qu'elle était la plus logique et la plus heureuse. Je ne puis que
rappeler quelques-unes de ces opinions : M. Ladame conclut son
excellent article historique sur les obsessions en indiquant la
suggestion hypnotique comme le principal mode de traitement,
dans une autre étude il montre qu'il a appliqué heureusement
ce traitement aux buveurs et aux dipsomanes K M. Tissié cite
« un cas d'obsession intellectuelle et émotive guéri par la sug-
gestion *. M. Bérillon a communiqué en i8g3 à la société de mé-
decine et de chirurgie pratiques a un cas d'agoraphobie chez un
dégénéré traité avec succès par la suggestion ». M. Mavroukakis
communique un fait semblable à la société d'hynologie. M. Goro-
diche décrit un cas de claustrophobie chez une femme de 38 ans
guéri par la suggestion ^ M. Milne Bramwell cite quelques cas de
phobies guéris par l'hypnotisme^. La conclusion de la thèse de
L. Faure sur les obsessions est que la « psychothérapie hypnoti-
que est le seul mode de traitement applicable avec lequel on
puisse obtenir des résultats sérieux et durables * ». Le dernier
travail de Bechterew répète encore à propos des obsessions et des
illusions importunes que la suggestion est le seul traitement
efficace*. On pourrait trouver dans la littérature beaucoup
d'autres déclarations du même genre.
Cette opinion soulève cependant une assez grave difficulté, qui
est fort bien indiquée par MM. Pitres et Régis, c'est que les
obsédés véritables, les tiqueurs, les douteurs, les phobiques, ne
sont pas hypnotisables. a Depuis de longues années, disent ces
auteurs, nous avons fait à cet égard de nombreux essais, et nous
pouvons dire qu'en dehors des cas d'obsessions se rattachant à un
I. Ladame» Berne de V hypnotisme, 1890, II, 385, et Ibid., 1888, p. lag.
3. Tissié. Semaine médicale, 1899, p. 297. »
3. Gorodiche. Revue de l'hypnotisme, 1894, p. 53.
fi. Milne BramwelL Revue de l'hypnotisme, 1897, p. 49-
5. L. Faure. Thèse de Paris, 1898.
6. Bechterew, Des obsessions et des illusions importunes. Obozrèniè Psychiatryi,
février 1899. Cf. J. Douath, de Buda -Pesth. -4 rcAiw. /. Psyc/w'afritf, 1896. A. Voisin.
Emploi de la suggestion hypnotique dans certaines formes d'aliénation mentale.
Congrès de psychologie de Munich, 1896. Stadelman (de Wurxburg), Société d'hypno-
logie, ao mars 1900, etc.
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TRAITEMENT MORAL 705
vrai que beaucoup d^obsédés ont été sérieusement améliorés par
lies pratiques analogues k celles de l'hypnotisme. J'ai observé le
fait plusieurs fois d'une manière tout à fait convaincante. Claire
4iprès ces essais d'hypnose reste plusieurs heures « la tête vide
lie mauvaises pensées » ce qui est très remarquable pour elle.
Xyb..., Bhu... (54), se trouvent mieux pendant quelque temps.
Lkb...,U... Jean restent dans un état de calme qui dure plusieurs
jours. On observe le même fait chez Pn... Bs... On... et chez
plusieurs autres. Cette influence se prolonge chez Dob... pen-
dant une dizaine de jours et cette malade qui depuis une
vingtaine d'années est incapable de faire quelques pas seule en
dehors de son appartement fait seule des excursions de plusieurs
kilomètres quand elle a été suggestionnée. La crise d'obsessions
sacrilèges de We..., a été complètement arrêtée par des séances
de ce prétendu hypnotisme : les croix qu'elle croyait voir et
qu'elle cherchait à voir dans le ciel s'effaçaient quand elle pensait
à ce que je lui avais dit et elles ont fini par disparaître. La
honte du corps chez Wye... a été supprimée depuis plus d'un
an. A la suite d'un traitement par les essais de sommeil hyp-
notique, les scrupules urinaires de Vor... ont complètement
disparu et n'ont pas recommencé depuis deux ans. Zo... est
débarrassé de sa phobie des épingles et ce sont certainement des
séances d'hypnotisme qui ont permis d'avoir quelque action sur
i'esprit de cette jeune fille. Gisèle conserve certainement son
aboulie, ses dispositions aux rêveries idéales, quoiqu'elle ait fait
de grands progrès comme activité réelle, mais elle a perdu sous
l'influence de cette suggestion « son idée principale » c'est-à-dire
ses remords de vocation et elle peut de nouveau vivre avec son
mari et son enfant. Le cas le plus intéressant est celui de Lise, car
cette malade a été hypnotisée régulièrement depuis cinq ans.
J'ai montré ailleurs qu'elle n'est jamais arrivée à un état hypno-
tique complet avec amnésie. Mais cette hypnose incomplète suffit
pour produire un grand eflet sur ses interminables ruminations.
Il y a pendant ce sommeil une sorte de lutte de la malade contre
ses idées : au début elle ne tolérait pas que je lui en parle, elle
s'écartait de moi avec horreur si je faisais la moindre allusion au
diable, elle faisait des gestes de résistance désespéré. Puis elle
se calma, consentit à écouter pendant cet état la contradiction
et sembla mieux comprendre. Sous cette influence les idées dimi-
nuèrent, « elles restaient vagues, plus loin de son esprit, comme
LES OB8B88IOr(8. I. ^0
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TRAITEMENT MORAL 707
Malheureusement elle se termine, il arrive des circonstances qui
séparent Fy... ou Tkm... de leurs amants, Bs... de sa maîtresse.
On se souvient de Taventure arrivée ii Ck... : une domestique
renvoyée a fait courir dans la petite ville un bruit injurieux sur
les relations de ces deux vieilles (îlles trop inséparables, et il a fallu
se séparer. D'autre part le dirigé s'inquiète de celte direction
qu'il a rendu de plus en plus étroite, il se fait des scrupules si^r
les sentiments qui en ont été la conséquence et il se figure qu'il
peut échapper à) la tutelle. Enfin c*est le directeur qui se fatigue
du métier qu'il a accepté au début sans le connaître : la fatigue
survient d'autant plus vite qu'il vit plus près du malade et qu'il est
incessamment soumis, comme disait M. J. Falret, au supplice de la
question. En un mot la crise existe soit parce que le malade n'a
pas trouvé de directeur, soit parce qu'il l'a perdu.
Il faut alors, pour suivre cette méthode naturelle de guérison,
offrir au psychasthénique une direction en quelque sorte profes-
sionnelle et transformer en un métier accepté en connaissance de
cause la direction donnée d'abord au hasard par des amateurs si
on peut ainsi dire. Cette profession singulière a d'abord et tout
naturellement été exercée par les prêtres des différentes reli-
gions. Les prêtres ont connu la maladie du scrupule bien avant les
médecins et la confession régulière semble avoir été inventée par
un aliéniste de génie qui voulait traiter des obsédés. Grâce à
l'obligeance de M. Piéron qui a bien voulu faire cette recherche
pour moi, j'ai recueilli un grand nombre de passages des lettres
de Bossuet et de Fénelon qui se rapportent directement à notre
étude et qui montrent avec quelle fermeté ils dirigeaient leurs
malades. « Je vous assure, ma fille, écrit Bossuet à M"*^ Albert
de Luynes, que votre confession est très bonne et très suffisante,
une autre plus générale serait inutile et dangereuse à votre état.
Vous ne devez pas avoir égard à ces dispositions où vous croyez
avoir rétracté toutes vos résolutions précédentes. Toutes les fois
que cela vous arrivera, il n'y a qu'à rejeter cette pensée comme
une tentation et d'aller toujours votre train. Je vous défends d'avoir
de l'inquiétude de vos confessions passées, ni à la vie, ni à la mort,
ni de les recommencer en tout ou en partie, à qui que ce soit,
fussiez-vous à l'agonie. Ce ne serait qu'un embarras d'esprit qui
ne ferait qu'apporter du trouble et de l'obstacle à des actes plus
importants et plus essentiels qui sont l'abandon, l'amour de Dieu
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en sa
our
ipuleuses comme la votre '. »
PéDeloD sont remplies également de conseils « con-
nraciné dans votre cœur depuis votre enfance et
:derniersexcès depuis tantd'années'... «Vousdevez
licatesse scrupuleuse contre vos scrupules mêmes,
us prétexte de rechercher les plus légères fautes
linsi'... Les consciences scrupuleuses ont besoin
au delà de leurs bornes comme les chevaux rétifs
Mus vous hésiterez dans vos scrupules, plus vous
crètement ; il faut les gouverner pour les guérir,
lincrez, plus vous serez en paix*... Je crois que
is confesser un de ces jours-ci, mais à la condi-
ornerez votre confession à dire les fautes qui se
sans peine et qu*après les avoir dites simplement
que vous en aurez alors vous n'y penserez plus "*...
it subtil pour vous tourmenter vous-même est
e le fruit défendu. Le scrupule ferme a Dieu la
œur*... »
Dbable que nombre de prêtres remplissent encore
; je dois dire que quelques ecclésiastiques aux-
(Toyé des malades avec quelques recommandations
t compris le rôle que je leur demandais de jouer,
aussi que bien des prêtres montrent dans leurs
es malades une ignorance et une indélicatesse
\ et sont assez sots pour raconter des niaiseries
les pauvres esprits tourmentés par des obsessions
un caractère de notre temps que cette œuvre de
) revienne quelquefois au médecin qui est mainte-
tes de Bossuetj en la vol. in-8, édil. Garnier, t. VIIl, p. ^22.
nce de Bossuct avec cette pénitente roule sur la même question,
iquiéludes et les scrupules ; les lettres répètent sans cesse les
nme il convient avec ces malades, cf. p. 3^9, 878, 43a, 4a7.
56i, 570, 57a, 573, etc.
esj éd. in- 4, i84i. T. IV, Lettres spirituelles, p. 337.
es, p. a58.
)n trouvera beaucoup de passages du même genre dans les
. 337, 3a8, 335, 338, 348, 356,357, 358, 366, 379. 393, etc.
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TRAITEMENT MORAL 709
nant souvent chargé de ce rôle de direction morale quand le
malade ne trouve pas assez de soutien autour de lui.
Le médecin peut assez facilement réussir dans ce rôle : il a au-
près du malade une grande autorité, il peut le menacer, lui par-
ler des conséquences cqpnues de sa maladie, de l'isolement qui
la termine ou de l'internement que le sujet redoute, il peut lui
faire espérer un traitement, et l'ordonnance médicale a encore du
prestige. Enfin le médecin ne vit pas d'ordinaire auprès du ma-
lade et ne peut pas être harcelé de questions continuellement^
aussi son autorité et son influence se conservent-elles plus long
temps.
Pour diriger ainsi ces personnes, le médecin doit d'abord leur
faire sentir qu'il s'intéresse à elles et qu'il les connaît. Il faut les
faire parler sur les détails curieux de leur maladie, analyser ces-
détails devant eux en devinant ce qu'ils n'ont pas dit, leur mon-
trer doucement que leur interprétation, qui constitue leur obses-
sion, n'est pas juste, etc. Puis quand on voit qu'ils sont intéres-
sés, qu'ils sont heureux de trouver une personne capable de les
comprendre et de les plaindre sans se moquer d'eux, il faut leur
commander avec beaucoup de netteté et sans l'ombre d'une hési-
tation et il ne faut jamais revenir sur un commandement, fût-il
absurde. J'ai vu un médecin, avec d'excellentes intentions, provo-
quer une grande crise chez Jean parce qu'il hésitait entre deux
villes d'eau où il voulait l'envoyer et qu'il avait fini par laisser le
choix au malade.
(( Dans la thérapeutique de beaucoup d'états psychopathiques
disait déjà Legrand du Saulle, l'absolutisme autoritaire est une
nécessité que le succès couronne fréquemment et qui ne peut
nuire à personne \ Le malade se prête d'ailleurs très bien à
cette direction autoritaire, il désire être dominé et cherche lui-
même à grandir l'influence que l'on prend sur lui, « je cherche
toujours, me disait Gisèle à auréoler un- peu celui qui me parle
pour le mieux écouter ». Dans ces conditions, il n'est pas très
difficile de réussir au moins pendant quelque temps à devenir le
directeur de l'esprit du sujet. Ce n'est pas la guérison sans doute,
c'est plutôt l'utilisation d'un symptôme. Mais c'est un procédé pal-
liatif qui est souvent fort remarquable.
I. Legrand du SîkuWej. Agoraphobie, p. 73.
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DIAGNOSTIC ET TRAITEMENT
calmer les malades par ces commandements et
u*oii leur impose, il y a une certaine difficulté
iurmonter et en même temps un procédé quMI
re. N'oublions pas que le psychasthénique a
agissante et la croyance mais qu*il est loin
tèlligence proprement dite. Quand il vient nous
lie circonstance donnée il ne sait que faire, ni
faut pas le prendre complètement au mot. En
est intelligent, il sait fort bien quelle est l'ac-
^férable, quelle est la croyance qui serait la plus
le toujours cette préférence intellectuelle; mais
>as faire c'est réaliser cette préférence, « croire
jir son acte » comme me disait très bien Qsa...
ne faut pas faire à ces malades un commandc-
ou leur imposer une affirmation quelconque. Si
nent tombe en opposition avec le désir secret
3ontradiction ajoute «h ses troubles au lieu de les
)ute on peut souvent l'imposer tout de même à
ît je crois même qu'il ne faut pas dans ce cas
i. On perd son autorité quand on modifie ainsi
its et on donne au malade l'exemple pernicieux
fais il est évident qu'il vaut mieux éviter cette
nd elle n'est pas nécessaire, a Je ne veux pas,
js, être traité comme un enfant à qui on impose
tiens pas du tout à ce qu'on me contredise, je
5 à agir mon acte, qu'on me pousse dans le sens
. Cela est très juste et à moins de nécessité, le
)nner au malade l'acte ou la croyance que celui-
u intellectuellement comme préférable,
indation parait fort simple en théorie, elle est
ipplication très difficile, car le malade se garde
quer quel est l'acte ou la croyance qu'il préfère.
i au médecin pour que celui-ci commande de le
jà choisir cet acte efTectivement, ce serait déjà en
( agir cet acte w et notre psychasthénique est pres-
pable de pousser jusque-là la fonction du réel,
chez son directeur non seulement en montrant
a volonté, mais en simulant une indécisionn
n'est pas dans son esprit. Plus il aura caché son
>lus il sera heureux de le voir confirmé, plus il
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TRAITEMENT MORAL 711
sera entratné à agir et à croire par une affirmation qu'il croira
spontanée. Il en résulte que non seulement, le médecin, avant de
commander, doit rechercher ce qui est juste dans le cas donné,
mais qu'il doit encore deviner ce que pense son malade et déci-
der en conséquence. Sauf dans des cas particuliers où le sujet
très malade n'a aucune idée relative à l'action, le directeur doit se
borner à préciser l'idée de l'acte, à en déduire les moyens d'exé-
cution, à en diriger la réalisation. Il doit faire en un mot ce que
le malade ne peut pas faire, effectuer le passage de l'intelligible
au réel. C'est alors surtout que son autorité sera acceptée avec
reconnaissance et qu'elle rendra le calme au malade en supprimant
les dérivations.
Sans doute, dira-t-on, ce procédé ne peut pas réussir toujours,
et l'influence d'un médecin doit finir par s'user. Cette remarque
est très juste, mais qu'importe? J'ai déjà vu une influence de ce
genre se conserver pendant des années, pendant cinq, six et neuf
ans dans certains cas et si l'on procure le calme au malade pen*
dant tout ce temps, ce n'est pas insignifiant. Quand l'influence sera
usée, le malade trouvera un autre directeur de conscience et arri-
vera ainsi à traverser les périodes dangereuses de sa vie. Il est
vrai que cette direction force le malade à revenir régulièrement
à l'hôpital : une infirmité permanente exige un traitement per-
manent. Nous ne sommes pas surpris de voir des malades qui ont
besoin d'être sondés ou d'être pansés tous les jours pendant
des années; il en est de même pour l'esprit et il vaut mieux se
faire gronder et commander tous les quinze jours que de perdre
la raison*.
4. — Le relèsfement de la tension psfchofogique, la rééducation
de V émotion.
Les obsessions des psychasthéniques ne sont pas comme les
idées fixes des hystériques des systèmes isolés qui se développent
automatiquement en dehors du reste de la conscience, ce sont des
symboles, des expressions résumées auxquelles le malade s'at-
tache d'une manière permanente parce qu'elles expriment un état
I . J*ai déjà décrit les caractères et les conséquences de cette direction permanente
dans un travail précédent: Névroses et idées fixes, ï, chapitre \II, le besoin de direc-
tion, p. 4a3.
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7i2 DIAGNOSTIC ET TRAITEMENT
permanent. Il en résulte que le traitement ne peut pa» se borner
à attaquer Tidée elle-même qui a au fond peu d'importance et
que le sujet remplacera facilement par une autre analogue, c'est
Tétat sous-jacent qu'il faudrait pouvoir modifier. Si on y parve-
nait, le sujet n*ayant plus rien à exprimer renoncerait de lui-
même à son obsession, le traitement précédent ne se bornait
pas à nier Tobsession, il donnait au malade sur tous les points
un décision et une croyance ce qui supprimait en partie Tincom-
plétude et la dérivation. Le succès n'était que partiel parce que
le malade sentait bien que la décision ne venait pas entièrement
de lui-même et qu'en définitive il n'apprenait pas à parvenir lui-
même à cette décision.
Pour aller plus loin dans le traitement, pour attaquer le mal »
la racine il faudrait apprendre au malade à retrouver cette fonctioD
du réel qu'il a perdue. Le véritable traitement serait une réédu-
cation de la fonction du réel. Or, la perte de cette fonction est
en rapport avec un abaissement de la tension psychologique , ce
qu'il faudrait donc en définitive ce serait relever la tension du
système nerveux central et par conséquent la tension psycholo-
gique. Nous ne savons pas encore relever directement cette ten-
sion ; mais, en étudiant les oscillations du niveau mental, nous
avons vu un certain nombre de conditions qui agissent sur elle
d'une manière favorable. Le traitement doit s'efforcer de tirer
parti de cette observation et de chercher à reproduire artifi-
ciellement ces conditions excitantes.
Une des plus intéressantes de ces conditions est l'émotion, non
l'émotion vague et élémentaire qui à son dernier terme constitue
l'angoisse de la phobie, mais Témotion plus précise en rapport avec
les circonstances et bien appréciée consciemment par le sujet.
Parvenir à déterminer des émotions de ce genre chez les psychas-
théhiques, c'est un des plus remarquables moyens de traitement.
Déjà la première visite chez le médecin, Texamen fait d'une manière
qui étonne le sujet en lui montrant que sa maladie est bien con-
nue, la démonstration qu'on lui a faite que son état est une ma-
ladie et non un état diabolique ou un remords moral et que cette
maladie est en général curable, tout cela a déterminé une émo-
tion heureuse et a fait remonter le niveau mental. C'est pourquoi
presque toujours le malade est amélioré pendant les jours qui
suivent la première visite chez un médecin nouveau.
Dans les succès obtenus par les séances d'hypnotisme, il est
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TRAITEMENT MORAL l\:i
bien proba'ble qu'une grande part doit être attribuée à la même
cause, rémotion. Le sujet désire l'hypnotisme et il en a peur : il
se figure qu'il va se passer des choses extravagantes. Il lui faut du
temps et des préparatifs pour qu'il se décide k affronter une opéra-
tion aussi grave. Si le médecin par ses commandements et par ses
encouragements est arrivé à le décider, c'est comme s'il l'avait
amené à faire une action très difficile et le sujet a en plus Témotion
de la difficulté vaincue. Il est content de lui pour s'être décidé h
commencer un traitement aussi sérieux, de là une oscillation en
hauteur qu'il est inutile de rattachera la suggestion hypnotique et
qui s'explique très facilement par reff*et excitant de l'émotion.
Puisque nous connaissons ce mécanisme, il faut en tirer le
maximum d'effet. Quand nous voulons hypnotiser une hystérique,
nous prenons toutes les précautions possibles pour lui présenter
l'hypnose comme très insignifiante, car nous ne désirons pas l'ef-
fet émotif et nous redoutons une crise convulsive. Avec le psy-
chasthénique il ne faut pas trop prendre ces précautions ; le
malade ne verra que trop tcU combien l'hypnotisme est chez lui
insignifiant, il faut au contraire lui montrer ce traitement comme
important et préparer son émotion.
Quand on connaît cette valeur de l'émotion, il faut chercher à
la produire de toutes manières même en dehors de ces séances
d'hypnotisme. Malheureusement il n'y a guère pour cela de pro-
cédés techniques à indiquer et le succès dépend beaucoup de
l'habileté individuelle. Il faut deviner le point qui est encore
resté sensible chez le malade et agir sur ce point pour détermi-
ner des émotions réelles. Chez les uns il faut se servir de l'affec-
tion, de la sympathie, chez les autres de la honte ou de la
crainte. Lise a caché sa maladie à une partie de sa famille, on
obtient beaucoup en lui faisant entrevoir que sa maladie mentale
va être connue de tous, en lui faisant peur de l'asile de fous :
« c'est désolant, dit-elle, quand elle se sent transformée par ces
menaces, je n'agis que par la peur ». Claire est sensible à l'affec-
tion, il faut la traiter avec douceur, lui montrer qu'elle n'est pas
aussi isolée qu'elle le croit ; si on parvient à la faire pleurer, elle
est guérie au moins pour quinze jours. Erasme Darwin réclamait
pour les malades tourmentés par une obsession amoureuse « l'é-
motion du saut de Leucade* »; ce serait peut-être un peu excessif,
I. Érasme Darwin, Zoonomie, IV, p. 92.
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714 DIAGNOSTIC ET TRAITEMENT
mais il faut leur recommander tout ce qui les excite et détermine
chez eux une émotion.
On peut s'étonner que le médecin réussisse par son attitude, par
sa parole, à déterminer des émotions intenses, tandis que les
événements réels qui devraient avoir bien plus d'influence sur le
malade le laissent indifférent. On peut demander surtout com-
ment cette émotion déterminée artificiellement peut être utile au
malade, tandis qu'il souffre d'ordinaire d'une émotivité excessive
qui rend les autres émotions dangereuses. C'est la différence de
l'art et de la réalité, fart est capable de déterminer des émotions
plus fortes que la réalité elle-même et surtout des émotions
mieux adaptées et plus élevées. Voici une observation qui m'a
beaucoup frappé et qui me parait fort instructive. Af..., jeune
homme de 28 ans, déjà neurasthénique et engourdi, indifférent à
tout si ce n'est à ses préoccupations hypocondriaques, s'est
trouvé mêlé h une triste aventure. Il est entré le premier dans la
chambre d'un voisin qui, à la suite d'un délire^ venait de se
pendre. Af... connaissait le désir de suicide de ce voisin et sa
triste situation, il s'attendait à ce suicide comme les autres per-
sonnes de la maison, aussi resta-t-il très indifférent. Il coupa la
corde, étendit le cadavre sur le plancher et sortit très calme,
sans aucune émotion. Toute la journée suivante, il continua à gé-
mir sur son propre sort et sur ses maladies imaginaires sans se
préoccuper une seule fois du triste spectacle qu'il avait vu le
matin. Le lendemain, il lut dans le Petit Journal le récit de ce
suicide : le journaliste avait décrit la chambre en désordre, la
corde fatale, la figure convulsée du malheureux et son récit était
très dramatique. Af... fut stupéfait en lisant cet article : a Com-
ment c'était lîi la scène à laquelle il avait assisté la veille le pre-
mier de tous, il ne se doutait pas que ce fût si affreux. » Cette
lecture Timpressionna d'une manière très vive, lui enleva sa tor-
peur, le rendit plus actif et lui fit oublier pendant plus de deux
mois son hypocondrie. Ce petit exemple montre d'une manière
saisissante comment les psychasthéniques ont besoin qu'on les aide
pour parvenir a l'émotion précise et comment il est possible de
les aider dans ce sens.
Le médecin ne se borne pas à exciter l'émotion, il la dirige
et la développe ; il en surveille les manifestations pour arrêter et
empêcher les dérivations. C'est une véritable rééducation de
l'émotion qui cherche h substituer aux ruminations, aux agita-
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TRAITEMENT MORAL 7K»
tions, aux angoisses élémentaires des émotions hiérarchiquement
supérieures. Le malade doit se prêter à ce travail et, quoique cela
semble singulier, faire des efforts pour arriver à des émotions
précises.
5. — La direction des efforts ^ la rééducation de l'attention.
Je viens de dire que le malade doit faire effort. Il ne faut pas
se 6gurer, en effet, comme on le croit trop souvent et comme les
sujets sont les premiers à le croire, que la volonté personnelle
du malade soit sans action sur ces phénomènes dont on a très
mal compris à mon avis la prétendue irrésistibilité. Les obsé-
dés ont beaucoup plus d^action sur leur maladie que n'en ont
les hystériques précisément parce qu'il y a chez eux beau-
coup moins d'automatisme. En étudiant les oscillations du niveau
mental nous avons vu cette influence considérable des efforts de
la volonté et de l'attention, il faut encore faire servir cette in-
fluence au traitement.
Dans des cas particulièrement heureux et rares, il suffit de
faire comprendre au malade quelle est au fond sa maladie et com-
ment il peut en sortir. La guérison de Wy..., jeune homme de
ao ans, après une simple indication de ce genre, m'a causé une
réelle surprise. Ce jeune homme est venu me raconter ses mi-
sères : depuis plus de cinq ans il était accablé par des scrupules
génitaux insensés. Tourmenté par la pensée des organes génitaux,
il croyait les voir chez les hommes et chez les femmes, il s'ima-
ginait assister a des scènes lubriques même dans sa famille et il
prenait en horreur son père et sa mère. Effrayé par ses propres
organes, il leur trouvait une grosseur, une odeur toute particu-
lière que tout le monde devait remarquer ; il avait pris peu à
peu une foule de tics qui primitivement avaient pour but de
dissimuler ses parties et qui amenaient des contorsions perpé-
tuelles du tronc et des jambes. Je lui expliquais ce que je
pensais de cette maladie, son point de départ dans le défaut
d'énergie de Tattention et de la volonté, la perte du contact avec
le réel, la rêverie et la rumination, l'inquiétude et le méconten-
tement, puis une interprétation quelconque qui donnait un pré-
texte aux ruminations et auxangoisses. Après avoir réfléchi, il finit
par me dire : « Il y a longtemps que je me doutais de tout cela,
mais j'ai fini par écarter cette idée, d'abord parce qu'on m'a répété
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716 DIAGNOSTIC ET TRAITEMENT
que j'étais neurasthénique et puisque parce que cette Idée m'au-
rait imposé des efforts pénibles. » En raison de sa situation, ce
garçon ne pouvait suivre un traitement régulier et je ne l'ai revu
qu'un an après. « En vous quittant, me dit-il, j'ai voulu guérir et
je me suis mis au travail : cela a été dur, mais j'ai réussi et depuis
plus de six mois je ne pense plus du tout à mes bêtises ». Il se
peut qu'il y ait plus tard des rechutes, c'est même probable ; mais
cette guérison d'une longue crise par les efiorts du malade seul
et livré à lui-même est bien remarquable.
Le plus souvent, il nous faut diriger et exciter perpétuelle-
ment l'effort du malade, dans quel sens doit-on le diriger ?
D'abord, je ne crois pas que l'on doive pousser le sujet à lutter
directement contre son idée fixe, il n'arriverait qu'à des rumina-
tions semblables à celles qu'il fait depuis longtemps. 11 faut
redouter énormément les efforts faux^ les crises d'efforts qui ne
sont que de l'agitation physique et morale stérile, qui ne sont que
des dérivations, et non de la véritable tension mentale. Il faut
amener le sujet à faire des efforts physiques ou moraux quel-
conques en dehors du sujet ordinaire de leurs méditations, en ne
se proposant qu'un seul but qui est de se rapprocher du réel au-
tant que possible.
L'effort pour un exercice physique est excellent, j'ai déjà si-
gnalé quatre malades guéris pendant plusieurs années par les
exercices militaires aussi bien que par la discipline du régiment.
Le jardinage, la bicyclette chez Bow..., les travaux du ménage
chez Al..., la gymnastique chez beaucoup ont eu d'excellents
effets ; voici plus de dix ans que j'ai eu l'occasion de guérir des
tics physiques aussi bien que des tics moraux en forçant le ma-
lade soit à maintenir l'immobilité, soit à faire des mouvements
précis, des actes physiques énergiques ou délicats avec attention
et avec effort. Il se peut comme le dit M. Lagrange, que la gym-
nastique permette à ces malades d'éliminer leurs toxines *, il est
possible qu'elle contribue à l'augmentation du tonus muscu-
laire, élément important de la cœnesthésie comme le remarque
M. Hartcnberg*. Mais à ces influences physiques s'ajoute une
influence morale énorme, qui joue un rôle infiniment plus consi-
I. Lagrange, Les mouvements méthodiques et la mécanothérapie^ 1899, p. 4i^
(Paris, F. Alcan).
a. llarlenberg. Les timides et la Timidité, p. 233 (Paris F. Alcan).
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TRAITEMENT MORAL 717
dérable et qui est en rapport avec Texerciee de Fattention, avec
le sentiment de l'énergie morale dépensée utilement, avec le sen-
timent du danger surmonté. M. C. Th.Ewart dans un article
curieux avait déjà remarqué « les bons effets du vélocipède dans
Taliénation mentale^ ». Mais il ne parle que de la distraction
que cet exercice procure. Quand j'ai remarqué à mon tour les
bons effets de l'exercice de la bicyclette chez les obsédés, chez les
liqueurs ou les angoissés, j'ai noté que ce bon effet se manifeste
surtout au début, quand ils commencent cet exercice et nV sont
pas encore trop habitués ; je crois que cet exercice vaut surtout
par l'effort d'attention qu'il exige, par la difficulté qu'il faut
vaincre et par la satisfaction d'avoir traversé un petit danger qu'il
procure à ces timorés.
En dehors des efforts physiques proprement dits, il faut exci-
ter tous les efforts moraux, en premier lieu il faut essayer de res-
taurer graduellement le travail et surtout le travail professionnel.
M. Marro a écrit quelques pages remarquables sur l'influence du
travail et surtout du travail rémunéré chez les neurasthéniques
dégénérés *. Arriver à leur faire gagner quelque chose par leur
travail personnel, c'est souvent déterminer chez eux une excita-
tion extraordinaire de la volonté. On ne se figure pas ce que Ton
peut obtenir de Jean, en lui faisant faire, pour une revue, un
petit compte rendu payé quelques sous : il est si heureux de
gagner quelque chose qu'il en oublie la méningite et le diabète.
Un autre effort essentiel doit être dirigé vers les actions so-
ciales, si importantes chez les abouliques. Il faut arriver à faire
parler les malades renfermés, les habituer à exprimer leurs pen-
sées et surtout à démêler leurs sentiments confus pour en faire
part à d'autres personnes. Plusieurs auteurs ont justement noté
Tamélioration que présentent les malades quand ils réussissent à
se faire comprendre: M. A. de Jong^, M. Tuczek* remarquent
combien l'aveu précis est pour les obsédés un soulagement,
M. Claparède^ est étonné de voir que sa malade éreutophobe guérit
I. C.-Th. Ewart, Le vélocipède dans raliénation mentale. Journal oj mental
Science y juillet 1890.
3. Marro, La puberté, p. 4o3.
3. AriedcJong. Comptes rendus du Congrès de médecine de Moscou^ 1887, IV, p. gO.
^. Tuczek. Berlin. KUn. Woschenschrift, 1869, p. 119.
5. Claparèdc, Archives de psychologie de la Suisse Romande, 1902, p. 33o.
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DIAGNOS
a raconté son h
îS auand on est m nvc « ics icmc ucmci iicLtciuciii.. Il
e cette même parole ne ferait aacun bien à Jean qui
•urs indéfiniment, tandis qu'il est amélioré par un
avail. Il faut toujours demander au malade ce qui n'est
i un phénomène de dérivation, ce qui lui est difficile^
erminer un effort qui remonte la tension morale,
t d'attention joue dans cette maladie un rôle essentiel^
I lui que Ton doit surtout diriger les efforts du malade.
. Angell le remarque bien quand il dit que <( le traite-
itre avant tout dirigé* de manière à développer le pou-
:ention * ». Voici bien des années que j'insiste sur cette
i de l'attention chez les hystériques et chez les psy-
les.
choisir toute espèce de travaux intellectuels suivant
ituation sociale des malades, en cherchant toujours à
m travail qui intéresse au moins un peu et qui offre
liflficulté pour qu^il ne soit pas fait d'une manière au-
II ne suffît pas de faire lire le journal d'une manière
crois nécessaire au moins dans ces cas graves de faire
ans cesse cette lecture et de faire interroger le ma-
t de peu d'instants sur ce qu'il vient de lire, pour le
vre et à comprendre ce qu'il lit. En général, dans des
renre, il ne faut pas prolonger les premiers efforts
au delà de quelques minutes. Kl... dirigeait son
ir la musique et si elle parvenait à surmonter Téner-
e la musique lui causait d'abord, c'est-à-dire si elle
supprimer la dérivation qui se produisait au début des
ention, elle se trouvait ensuite beaucoup mieux. Nadia
enne pour faire des efforts sur son piano s'intéressa
t à la broderie et retrouva souvent le calme d'une fa-
en apprenant à faire des travaux difficiles à l'aiguille,
t la peinture ont été la grande ressource de Claire et
tude des langues étrangères ont rendu de grands ser-
vie, à Lise, à Bow..., a Pot..., etc. Ces travaux ne
sent en général d'une manière à peu près correcte que
s peu de temps, puis il faut que le médecin parle de
sujet, le gronde, l'encourage, fixe lui-même Tatten-
Angell. Journal of nervous and mental disease, août 1900.
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TRAITEMENT MORAL 719
tioD sur les mouvements, sur les sensations, sur le souvenir des
choses qui viennent d^ètre étudiées, maintienne le sujet en ha-
leine et le remonte : l'expression devient ici tout à fait juste.
Si la maladie est légère, le sujet prend l'habitude d'être ainsi
remonté, de se maintenir à un niveau plus élevé ; rabaissement
mental disparait et avec lui les agitations et les obsessions. Si
la maladie est constitutionnelle, si elle est grave, le sujet se fa-
tigue de cet effort perpétuel, il ne peut plus le faire sans
retomber dans ses tics et ses ruminations, nous avons vu com-
ment Lise est fatiguée d'aller bien, comment elle éprouve des
besoins de rechute : « cela me fatigue trop de lire, sans avoir une
autre idée en tête, je ne puis plus continuer ». Ces sujets ont
toujours besoin d'être remontés par des excitations diverses, des
émotionà variées et le rôle du médecin se rapproche de celui du
directeur de conscience qui se borne à donner les solutions, à
suppléer à la volonté insuffisante. Autant que possible, il ne faut
pas se contenter de ce rôle, il faut, en répondant aux questions,
en dissipant les inquiétudes, essayer chaque fois d*exciter l'acti-
vité du malade, de la rapprocher du réel. De cette façon, on le
maintient à un niveau moyen beaucoup plus élevé que celui qu'il
aurait spontanément, et on enraye le développement de la ma-
ladie dans sa tendance la plus funeste, celle qui entraine vers
l'inertie et l'isolement.
Je crois que c'est à cette forme de traitement que se rappor-
tent, quelquefois même à l'insu des auteurs, la plupart des pro-
cédés thérapeutiques qui ont eu quelque succès. Nous avons vu
que la séance d'hypnotisme agissait au début chez l'obsédé par
l'émotion qu'elle détermine ; elle agit ensuite et plus encore par
l'effort et l'attention qu'elle demande. On exige du sujet qu'il
reste immobile, les yeux fermés en cherchant le sommeil : le su-
jet, qui ne s'endort pas du tout automatiquement comme l'hys-
térique, fait tout cela par obéissance, parce qu'il croit au traite-
ment, c'est pour lui un gros effort. On lui demande ensuite, sous
prétexte de suggestion, des mouvements, des attitudes plus ou
moins prolongées, et il essaye de les réaliser : l'attention et l'ef-
fort sont d'autant plus grands qu'il se figure faire des mouvement
d'un caractère extraordinaire, qu'il surveille ses muscles plus que
jamais. Lise, comme je l'ai dit, se trouvait fort améliorée par des
contractures suggérées : en réalité ces prétendues contractures
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DIAGN
grands efFoi-ts <
t son corps. « ( ^ , , j, ^
ggérez des tremblements ou des contractures, je ne puis
; mes idées (ruminations sur le sacrilège), elles cessent
irmenter, tandis que pendant mes mouvements ordi-
s continuent toujours ». Bien entendu, ses idées cessaient
elle se donnait tout entière à un effort gymnastique
i la mettait en sueur, parce qu'elle s'élevait assez aux phé-
upérieurs pour qu'il n'y eût plus de dérivations. On sug-
au sujet des hallucinations, des rêves et, comme ceux-ci
pent pas tout seuls, il faut encore un eOort intense d'ima-
, surtout d'attention qui amène la même tension et relève
le l'esprit. Lise et Claire sont transformées par les efforts
ntpour avoir Thallucination d'une rose, c'est-à-dire tout
it pour se la représenter d'une manière nette et réelle,
dant cette prétendue hypnose, on dirige l'attention sur
et l'on force le sujet à les comprendre beaucoup plus
qu'à l'ordinaire. En un mot, je crois que le mécanisme
entpar l'hypnose dans ces cas de psychashénie n'est pas
e que l'excitation de l'attention, la direction et la réé-
e la volonté : il en est peut-être quelquefois de même
térie mais plus rarement, car ici d'autres mécanismes
a celui-là.
> auteurs proposent un traitement qui, au premier
une un peu. M. Tissiénous dit qu'il guérit des obses-
s phobies par la gymnastique suédoise *. M. Thulié pro-
justement de discipliner les jeunes dégénérés en les
à la gymnastique d'ensemble^. M. Pitres et M. Tîssié
, un malade psychasthénique avec des tics et des toux
ues guéri par la gymnastique médicale respiratoire ^
entendu que la gymnastique n'agit pas ici directement
ectement par les influences que je viens d'indiquer,
rétation des effets thérapeutiques a semblé quelquefois
Traitement de quelques phobies par la gymnastique suédoise. Congres
H neurologistes. Bordeaux, août 1895.
lié, Le dressage des jeunes dégénérés ou orthophrénopédie, 1900 (Paris.
Clinique de gymnastique médicale psychodynamique, 1899. A. Pitres, Tics
éralisés (chorée électrique de Bergeron-Hénoch, Elecirolepsie de Tor-
>sc convulsive rythmée de Guerlin), traités et guéris par la gymnastique
Société de médecine et de chirui'gie de Bordeaux, ai décembre 1900.
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TRAITEMENT MORAL 721
Ma
plus délicate à propos de certaines tentalives très intéressantes de
guérisons des tics. Trousseau proposait pour guérir les tics « une
gymnastique ordonnée des muscles affectés de convulsions ». Char-
cot^ parle « d*une gymnastique rationnelle ». M. Letulle réclame
une gymnastique spéciale en remarquantd'ailleurs « qu'il faut main-
tenir le moral, soutenir le courage et les efforts du patient* ».
M. Brissaud dans un grand nombre de travaux', M. Bom- '^
paire S M. Popoff\ M. P. Montaigne* MM. H. Meige et E. Fein-
del ^ ont préconisé un traitement en apparence plus précis par
(( la rééducation de Timmobilité et les mouvements antagonistes ».
Plusieurs de ces auteurs semblent croire que ce traitement gym-
nastique agit directement sur le tic qu'il s'agit essentiellement
d'un traitement des muscles ou de la fonction nerveuse pro-
prement motrice.
M. Dubois (de Saujon] a poursuivi depuis 1896 avec le plus
grand soin le traitement de quelques tiqueurs. Il dresse ces malades
à rester absolument immobiles pendant un temps déterminé", il
obtient des guérisons remarquables et remarque que les phobies
s'améliorent en même temps que les tics. M. Dubois ne cherche
pas les mouvements antagonistes, il ne cherche que l'effort d'at-
tention vers « l'image du repos, de l'immobilité absolue, mais de
rimmobilité consentie, çoulue ». Comme l'auteur le remarque
aimablement, cette interprétation se rattache à la conception que
nous soutenons depuis longtemps de l'importance des exercices
de l'attention chez les névropathes. A mon avis, ces traitements des
tics, qu'il s'agisse de la gymnastique générale, d'un exercice des
mouvements antagonistes, de la rééducation de l'immobilité,
I. Gharcot, Leçons du mardi, 1888 89, p. 469.
a. Letulle, article « tics » du Dictionnaire de Jaccoud.
3. Bnssaud, Tics et spasmes cloniques de la face. Leçons à la Salpétrière, 8 dt?-
cembre 1893. Journal de médecine et de chirurgie pratiques, a5 janvier 1894. —
Contre le traitement chirurgical du torticolis mental. Hevue neurologique, 3o jan-
vier 1897.
4. Bompaire, Le torticolis mental. Thèse, Paris, 1894.
5. Popofl*. Le torticolis psychique. Revue neurologique, 1900, p. 29a.
6. P. Montaigne, Étude sur le torticolis mental et son traitement. Thèse, Paris,
1900.
7. E. Feindel, Le torticolis et son traitement. Nouvelle Iconographie de la Salpé-
trihre, 1897, n" 6. H. Meige et E. Feindel, Traitement des tics. Presse médicale,
16 mars 1901. Gazette des hôpitaux, 11 juin 1901. Journal de médecine et de
chirurgie pratiques, a5 août 1901.
8. Dubois (de Saujon). Société de thérapeutique, 27 mars 1901.
LES OBSESSIONS. I. 46
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TRAITEMENT MORAL 723
M. Bernheim appelait très bien entraînement suggestif actif, dy-
namogénie psychique* ; ils ne sont que diverses formes de cette
thérapeutique que je décris depuis une dizaine d'années comme la
reconstitution graduelle des fonctions de synthèse mentale. Je
crois Tavoir encore précisée dans ce livre par les études sur le
rétablissement de la tension psychologique suffisante. Ajoutée aux
traitements physiques et moraux précédents, combinée avec
une direction morale qui supprime les complications et qui facilite
la tâche du malade, cette excitation mentale par Témotion, les
efforts de volonté et Tattention est la meilleure thérapeutique que
nous puissions actuellement diriger contre la maladie des obses-
sions. Elle a sans doute de gros inconvénients : elle est lente et
peut durer des années, elle est plutôt une éducation qu'un traite-
ment médical, elle est peu précise et laisse énormément à l'initia-
tive du médecin, elle exige de celui-ci beaucoup de temps et un
effort énorme d'énergie que ne peuvent s'imaginer ceux qui n'ont
pas essayé de l'appliquer eux-mêmes. Mais elle est la seule théra-
peutique qui puisse aujourd'hui modifier d'une façon heureuse
quelques-uns de ces esprits insuffisamment adaptés à la vie prati-
que. Il faut espérer que plus tard des traitements plus efficaces
pourront agir directement sur la tension nerveuse insuffisante dont
nous ne savons encore aucunement ni le mécanisme, ni les con-
ditions.
j. Bernheim, Bévue de médecine j 1898.
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PSY
le I
léni
>Ius
le*.
ive <
lanl
le I
^1, '
le A .. r ,
nbreuses et 11 faut aussi signaler des travaux
e Griesinger, de Westphall, de Cordes, de
grand du Salle, puis M. Ritti dans un article
cyclopédique', résument les travaux de ces divers
înt la période contemporaine dans laquelle ce
connu et dans laquelle les recherches seront
le rinterprétation. J'ai déjà étudié les diverses
présentées, la théorie intellectuelle, la théorie
théorie psychasthénique ou la théorie de Tabais-
>ion psychologique. Ce que je désire étudier
es auteurs, ce ne sont plus les interprétations
pathogéniques, ce sont les interprétations
;e qu'ils attribuent à ces troubles dans la patho-
ce point de vue il me semble que ces études
phases différentes ou plutôt que les patholo-
successivement deux problèmes un peu diffé-
. />.svr/ï., 1890, II, 390. Revue de Vhypnot., 1891, p. I^.
i838, 11. p. 63; I, p. 36i.
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L*UNITÉ DU SYNDROME 725
rents. Dans une première période on envisage d'abord le pro-
blème de Tunité du syndrome, puis dans une seconde le pro-
blème de sa nature au point de vue médical.
i. — L'unité du syndrome.
Dans la première période les observations recueillies isolément
semblent des curiosités extrêmement variées. Les observateurs*
sont surtout frappés par les énormes différences que présentent
^u premier abord un obsédé qui a des remords, un douteur qui
s'interroge sur la raison d'être du monde, un impulsif homicide,
un agoraphobe ou un éreutophobe. C'est la période de la multi-
plicité, et chaque auteur découvre sa manie ou sa phobie : il y
«n a bientôt un nombre invraisemblable et le besoin de mettre
quelque unité dans ces interminables description se fait sentir.
Les premières tentatives d'unification sont assez incoordonnées :
on établit le groupe des monomanies pour tous les symptômes intel-
lectuels, tantôt on les réunit avec les délires systématisés comme
Marcé, 1862, qui confond le délire du toucher avec le délire de
persécution, tantôt comme Delasiauve, i85g, on distingue ces
<( pseudo- monomanies » des folies systématisées. On essaye,
•comme Parchappe, i85i, de réunir quelques-unes des phobies
avec le groupe vague des hypocondries. Morel, en 1861, forme
un groupe avec tous les émotifs. Berger, Griesinger, Falret,
Legrand du Saulle cherchent à constituer un groupe en réu-
nissant la folie du doute avec le délire du toucher, il en fait
« une aliénation partielle avec crainte du contact des objets
extérieurs »; la même opinion est adoptée par Falret. Cette ten-
tative était particulièrement intéressante, car elle réunissait les
symptômes intellectuels de l'obsession et les symptômes émo-
tionnels de la phobie, et cherchait même avec une singulière
exagération à établir la succession régulière des phénomènes.
Plus tard MM. Ritli, Kraflft-Ebing, Wille, Mendel se rattachent
à la même opinion. Cependant cette unité était loin d'être admise
par tous les auteurs et loin d'être complète : bien des impulsions,
des manies et surtout les tics restaient en dehors. L'unification
-était d'autant plus difficile que l'on ne voyait pas le lien qui rat-
tachait tous ces symptômes les uns aux autres.
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INTERPRÉTATION PATHOLOGIQUE DU SYNDROME 727
mènes et de voir la manière dont ils dérivent souvent les uns des
autres.
J'ai donc essayé de continuer et de préciser cette œuvre de
groupement qui peu à peu a réuni en un syndrome ces troubles si
divers et au premier abord si disparates.
2. — Interprétation pathologique du syndrome.
Dans les périodes plus récentes se pose un autre problème,
celui de l'interprétation qu'il faut donner à ce groupe ainsi
constitué, de la place qu'il faut lui attribuer dans la pathologie.
Sur ce point les opinions ont été des plus diverses. « La folie du
doute est ainsi, dit M. Ladame, chez les auteurs contemporains,
tantôt le symptôme des affections mentales et nerveuses les plus
variées, tantôt un épisode psychopathique de la dégénérescence
héréditaire, tantôt une forme spéciale de psychose, tantôt enfin
un simple trouble psychique élémentaire qui relève de la patho-
logie générale de l'aliénation : le doute n'est pas seulement chez
les malades, il a passé dans la science* ».
Les opinions ne me semblent pas être si nombreuses si on les
rapproche les unes des autres et si on les interprète d'après les
études précédentes. Un premier groupe d'auteurs hésitent un peu
à considérer ces symptômes psychasthéniques comme véritablement
pathologiques. Bail quand il décrit la zone frontière qui s'étend
entre la raison et la folie *, Azam, quand il parle des tics intel-
lectuels, des stigmates psychiques^ remarquent que ce sont là
souvent des bizarreries de caractères compatibles avec la raison.
Scholz, cité par M. Ladame*, ne parle des obsessions qu'à propos
des troubles élémentaires de l'intelligence et dit qu^on les rencon-
tre même chez les hommes sains d'esprit. M. G. Savage* remarque
que ce sont là des prédispositions héréditaires très fréquentes chez
tout le monde. M. Gélineau qui en 1894 décrivait certaines formes
de phobies maladives revient à plusieurs reprises sur ce qu'il
1. Ladame. Conyrhs de Berlin, 1890. Revue de Vhypnot.y 1891, p. i3i.
a. Bail. Hevue scientifique, i883, 1, p. i.
3. Azam. Revue scientifique, 1891, I, p. 618.
4. Ladame, op cil,, 1891, p. i3o.
5. G. -H. Savage, On imperalive ideas. Brain, 1896, p. 3aa.
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DE LA PSYGHASTHÉME PARMI LES PSYCHO-NÉVROSES
lobies essentielles ^ Ce sont des craintes bizarres
certains objets, par certains animaux ou par une situa-
ire sur un lieu élevé ; ce sont des phénomènes
rhent du vertige ordinaire, qui existent souvent dès
[ifance, qui peuvent quelquefois être héréditaires et
lez des sujets ne présentant aucune autre tare. Ilack
nquête qu'il a commencée dans le Brain, « tient à
ef la parfaite innocuité d'un grand nombre d'idées
ipératifs chez des gens très sensés, par exemple
^oirpas bien éteint le bec de gaz, le besoin de frap-
avec sa canne, le soin de marcher en évitant les
dallage, la tendance à compter un certain nombre
d'accomplir l'acte le plus simple* ». Si on poussait
I tendance indiquée dans quelques-uns de ces tra-
; disposé h considérer les obsessions, les tics et les
le des originalités individuelles qui n'auraient rien
Je.
»ion analogue a eu lieu il y a quelques années à
'pnotisme, quelques auteurs voulaient bien en faire
i exceptionnel, une particularité individuelle anor-
1 un phénomène pathologique. C'est là une querelle
laladie ne peut que reproduire en les déformant des
ui ont leur origine dans l'état normal, on retrou-
s l'état normal les vestiges de tous les phénomènes
.Pour juger de la nature d'un symptôme il faut con-
îgré et ses conséquences au point de vue de la vie
; de la vie sociale. S'il y a à peu près chez tous les
labitudes, des manies bizarres résultat de souvenirs
a ne supprime pas le caractère dangereux des véri-
tions ou des véritables phobies, puisque celles-ci
insî qu'on l'a vu, à supprimer toute activité de l'in-
etrancher complètement de la vie sociale.
me opinion, plus importante, ne veut pas non plus
ome psychasthénique une véritable maladie, c'est-
ble accidentel surajouté en quelque sorte à la vie
ils le considèrent comme un trouble ou comme
'Vue de l'hypnotisme, 1897. p. 5i et 1899, p. 79.
Brain, 189^. p. i84-
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INTERPRÉTATION PATHOLOGIQUE DU SYNDROME 729
la manifestation d'un trouble apporté par l'individu dès sa
naissance et faisant partie de sa constitution en raison de ses
antécédents héréditaires. Schùle en fait une folie héréditaire
-simple dans le groupe des psychoses dégénératives, Krafft Ebing
rattache aussi la folie du doute aux psychoses dégénératives,
Tamburini en fait la forme la plus élémentaire de la dégéné-
rescence mentale, Magnan surtout et tous les aliénistes qui se
rattachent à son école font de ces phénomènes un symptôme épi-
sodique de la folie héréditaire des dégénérés*.
11 y a dans cet enseignement quelque chose de très juste c'est de
montrer l'importance de l'hérédité dans les conditions étiologiques
de ces troubles; en outre l'enseignement de M. Magnan a beaucoup
contribué h réunir tous ces symptômes en un seul tout et h faire
cesser la création des innombrables manies et phobies distinctes.
Mais il me semble que l'on prépare des confusions si on consi-
dère la psychasthénie comme une simple dégénérescence mentale.
En effet si on prend le mot dégénérescence dans son sens vague
comme signifiant une diminution, un moindre fonctionnement
d'un organe, cette opinion est évidemment juste mais elle est si
vague qu'elle ne permet aucune distinction et peut s'appliquer à
tous les troubles possibles. MM. Magnan et Legrain ont défini
ainsi la dégénérescence « c'est l'état pathologique de l'être qui
comparativement à ses générateurs les plus immédiats est consti-
tutionnellement amoindri dans sa résistance psycho-physique et
ne réalise qu'incomplètement les conditions de la lutte héré-
ditaire pour la vie ». M. Magri la définissait ainsi: « est dégé-
néré tout organisme qui est incapable par lui-même, par défaut
organique et psychique, d'affirmer sa propre individualité et qui
mène une vie parasitaire, improductive et nuisible à la société^ ».
De cette façon, le psychasthéniquequi pour nous présente une moin-
dre faculté d'adaptation à la réalité est évidemment un dégénéré.
Mais la paralysie générale aussi est une régression de l'activité
cérébrale, la confusion mentale, l'idiotie de même empêche l'in-
dividu de s'adapter à la réalité et on ne peut pourtant pas con-
fondre tous les troubles cérébraux à cause de ce caractère
commun.
I. Magnan, Leçon sur la folie héréditaire. Ann. méd. psych , novembre i88(î,
p. 454. Cf. Saury, Syndromes êpisodiques des dégénérés, 1886.
3. Fr. Magri, La degencrazione consîderala nella sue causa. Pise, 1891.
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INTERPRÉTATION PATHOLOGIQUE DU SYNDROME 731
mêmes circonstances fâcheuses mais plus graves, plus prolongées
produiront le même effet sur des individus qui apportaient peu de
prédispositions congénitales.
Ces caractères sont ceux qui appartiennent à toutes les mala-
dies dans lesquelles les prédispositions héréditaires jouent un
rôle. Puisque Ton considère Thystérie, Tépilepsie, le délire des
persécutions comme des maladies, il me semble juste de dire de
même que la psychasthénie n^est pas uniquement une bizarrerie du
caractère ou une dégénérescence, mais que c'est une maladie
dont il reste à déterminer le caractère.
Tout en faisant de la psychasthénie une maladie, beaucoup
d'auteurs hésitent à en faire une maladie spéciale et distincte des
autres, ils essayent de rattacher ces symptômes a d'autres groupes
pathologiques. Voici une opinion exprimée autrefois par Bigot
et qui est encore reproduite souvent d'une manière plus ou moins
explicite : « la folie raisonnante, disait-il, n'est ni un genre,
ni une espèce , mais une variété de la période transitoire
de la raison au délire qui se trouve dans tous les genres et
dans toutes les espèces d'aliénation mentale et qui même ne mé-
rite ce nom de variété que lorsque le caractère équivoque se fait
remarquer par une trop longue durée, qui laisse au second plan
la période d'évidence du délire..., c'est une sorte de phase incer-
taine mêlée inégalement de délire et de raison*. » Certainement
beaucoup de maladies mentales ont une période prodromique,
dans laquelle il y a de la confusion, de la tristesse, des rêveries et
même des idées Irrésistibles dont le malade ne se sent pas le
maître. Mais si on veut bien faire l'analyse psychologique de ces
prodromes, on n'y verra pas les caractères de rinsuflfisance men-
tale de l'obsédé, de cette insuffisance si particulière qui ne porte
que sur les fonctions du réel et qui laisse intactes les opérations
intellectuelles proprement dites. Dans les prodromes des
maladies mentales, il y a plutôt de la confusion mentale
ce qui est tout autre chose. En outre, on trouvera dans ces pro*
dromes les caractères propres à la maladie mentale qui commence :
la démence spéciale de la paralysie générale, la douleur morale
de la mélancolie n'appartiennent pas à la symptomatologle des
I. V. Bigot, Des périodes raisonnantes de Taliénation mentale. Hevue scientifique,
1877, ^» P- '3/|3.
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DE LA PSYCHASTHÉME PARMI DES PSYCHONÉVROSES
ifîn des prodromes ne peuvent pas durer dix ans et
ensemble des symptômes de nos malades se mainte-
^me sens pendant dix et vingt ans.
rai donc pas non plus des opinions comme celle de
rattache les obsessions à la mélancolie ^ perplexe.
)cuvent aboutir à la mélancolie anxieuse, mais c*est
cation de leur maladie et Ton voit bien qu*ils chan-
caractère: ils n'ont plus de véritables ruminations,
ogent plus véritablement, ils souffrent et gémissent
ation vague qui a supprimé les caractères spéciaux
Ducoup plus embarrassé en présence des opinions
lelle de M. Arndt, de M. Morselli qui appellent cette
anoia rudimentaire ». On peut dire, en effet, que les
>nt très voisines des délires systématisés en parti-
ra de persécution : j'ai déjà fait remarquer ce voi-
3 est pas moins vrai que l'évolution d'un délire de
vec la conviction allant jusqu'aux actes, la systéma-
ante, les hallucinations auditives est loin d'être la
le de la maladie des obsessions. Il est probable, quand
mieux le délire de persécution, qu'on lui trouvera
logue à celui de la psychasthénie, avec une certaine
)sychologique qui lui donne une autre évolution et
iriété distincte.
les maladies dont la psychasthénie se rapproche le
des névroses dans lesquelles nous observons les
ômes d'épuisement nerveux et un état mental ana-
disait déjà que le délire émotif est plutôt une
ne psychose, Meynert* admettait que cette mala-
t au complexus de l'hystérie et de l'hypocondrie.
remarquait que « Tétiologie et la pathogénie
et des idées fixes étaient les mêmes que celles de
mpe de lésions fonctionnelles du système nerveux
[gnons sous le nom de névroses' ». Mais il est admis
ue les névroses sont en majeure partie le résultat
eber Zwangsvorslellungen. Wien. kUn. Wochenschrift, 3 mai 1888.
•p. cit. y p. 137.
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INTERPRÉTATION PATHOLOGIQUE DU SYNDROME 73a
de troubles fonctionnels de Técorce cérébrale, troubles se mani-
festant par des perturbations psycho-physiologiques, on ne peut
donc pas les opposer trop complètement comme on le faisait
autrefois aux psychoses. Aussi peut-on dire justement avec
MM. Pitres et Régis que la psychastbénie se rattache aux états
mixtes, que c'est une psycho-névrose.
Pour préciser maintenant sa place parmi les psycho-névroses,
il faut voir ce qui la rapproche ou la distingue des formes
voisines. Je ne reprendrai pas ici la comparaison des névroses
au point de vue du diagnostic qui a déjà été faite dans un chapi-
tre précédent, j'insiste seulement sur les conceptions générales
que Ton peut se faire de ces diverses névroses et sur les relations
que présentent entre elles ces diverses conceptions générales.
J'ai déjà montré les rapports étroits de la psychastbénie avec
Fépilepsie. Je crois que dans les deux maladies il y a des oscilla-
tions considérables du niveau mental et que des abaissements ou
des chutes de la tension psychologique ou nerveuse entendue
comme il a été dit jouent dans les accidents de ces deux névroses
lerôle principal. Mais dans Tépilepsie, autant que nous pouvons le
savair, cette chute est considérable et momentanée. Elle va jus-
qu'à la perte complète de conscience pendant un temps assez
court, ensuite la tension se relève non pas sans doute d'une
manière complète, mais d'une manière suffisante pour que le
sujet se sente à peu près normal et ne se plaigne pas d'ordinaire
de ces sentiments d'incomplétude qui sont si caractéristiques du
psychasthénique. Les phénomènes de dérivation se retrouvent, je
crois, dans les convulsions de l'accès: ils sont violents et d'ordre
très élémentaire, c'est-à-dire que la dérivation ne se fait pas sous
forme de ruminations mentales, phénomène conscient et relati-
vement supérieur, ni sous forme d'états émotifs conscients, ni
sous forme de ces mouvements encore à demi intelligents qui
sont les tics, mais sous la forme des mouvements les plus élémen-
taires. Dès que ces caractères de l'accès épileptique diminuent,
dès que la chute de tension est moins grande, mais se prolonge
plus longtemps, quand les dérivations sont moins élémentaires,
on voit apparaître des délires épileptiques qui se rapprochent
beaucoup des phénomènes psychasthéniques. Quelques-uns d'en-
tre eux déterminent des sentiments d'incomplétude, des doutes
sur la réalité de la personne et du monde extérieur tout à fajt
identiques à ce qui existe chez les obsédés. Sans voir dans cette
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INTERPRÉTATION PATHOLOGIQUE DU SYNDROME 735
rhallucination complète et il suffit d'une suggestion pour que
celte hallucination surgisse, il arrive très facilement à la convic-
tion extrême. D'autre part, l'hystérique pousse aussi à l'extrême
les phénomènes négatifs et il présente dans son esprit de vérita-
bles lacunes : il a des anesthésies, des amnésies, des paralysies,
des subconsciences véritables. Sans doute ces lacunes ne portent
d'ordinaire que sur la conscience personnelle, mais cette con-
science même présente des lacunes qui n'existent pas chez l'ob-
sédé.
A quoi tiennent ces différences remarquables, à un fait capitî^
que présente l'hystérique et qui n'existe pas chez le psychasthéni-
que, au rétrécissement du champ de la conscience. L'hystérique
restreint son activité mentale, se concentre en quelque sorte sur
quelques phénomènes, il en résulte que les phénomènes conser-
vés ne sont pas abaissés, incomplets, mais qu'ils sont plutôt trop
développés et que les phénomènes négligés s'effacent de plus en
plus et disparaissent de la conscience personnelle. Ce qui carac-
térise l'hystérie c'est ce rétrécissement, cette localisation sur
certains points de la force subsistante. La faiblesse mentale se
manifeste dans cette maladie comme faiblesse de synthèse, tandis
que dans la psychasthénie elle se manifeste par un abaissement
général de tension et par la simple diminution des fonctions
supérieures ou fonctions du réel à peu près sur tous les points.
Si l'on peut ainsi dire la réduction de la conscience semble se
faire géométriquement chez le premier, en réduisant le nombre
des fonctions conservées, dynamiquement chez le second en
réduisant la force, .la perfection de tous les phénomènes. Sans
doute il y a quelques cas de transition : le plus curieux me
semble constitué par l'état d'esprit de certains extatiques, mais
en général cette différence entre les deux psycho-névroses est
très nette.
Beaucoup d'auteurs rapprochaient les obsessions, la folie du
doute, les phobies, de la neurasthénie (Westphal, Krapelin,
Krafft-Ebing, Morselli,Ventra, Bouveret, Levillain, Féré, Mathieu,
etc.) Récemment les auteurs, qui ont essayé de constituer comme
maladie distincte la névrose d'angoisse, ont voulu la séparer de
la neurasthénie et même l'y opposer. Les conceptions de M. Freud*
I. S. Freud (de Vienne), Sur la légitimité de séparer de la neurasthénie un syn-
drome défini sous le nom de névrose d'angoisse. ,\euroî. Centralblaltt 1896, p. 2.
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736 LA PLAGE DE LA PSYCHASTfiÉNIE PARMI LES PSYCHO-NÉVROSES
sur ce point ont été très bien résumées et discutées dans le
travail de M. Hartenberg sur la névrose d'angoisse ^
Le premier groupe d'arguments de ces derniers auteurs ne me
semble pas très intéressant: dans la névrose d'angoisse, disent-ils^
un certain nombre de symptômes essentiels de la neurasthénie font
toujours défaut, tels sont :1a rachialgie, l'obnubilation psychique,
l'asthénie neuro-musculaire, la dyspepsie et l'insomnie chronique.
C'est là, si je ne me trompe une constatation clinique inexacte : les
phobiques et les douteurs sont si préoccupés de leurs angoisses
et de leurs obsessions qu'ils attachent moins d'importance à des
troubles constants chez eux, mais en apparence secondaires. La
rachialgie est très fréquente chez eux, depuis que j'ai vu ces dis-
cussions, je l'ai recherchée et retrouvée dans une douzaine de cas ;
l'obnubilation intellectuelle avec aprosexie, amnésie continue,
troubles de perception, diminution des fonctions du réel est un
symptôme essentiel des psychasthéniques comme des neurasthé-
niquesTTa^farbtesse, la fatigue, la dyspepsie, l'insomnie ont été lon-
guement décrites chez eux. Il ne me semble, en un mot que les
angoissés ont bien tous les symptômes des neurasthéniques et à
ce premier point de vue la distinction ne me parait pas légitime.
Une deuxième remarque est plus intéressante, c'est que la
neurasthénie est surtout dépressive, tandis que dans la névrose
d'angoisse, il y a une surexcitation, une tension pénible et des
décharges paroxystiques surtout viscérales. On voulait en con-
clure que la neurasthénie serait l'épuisement nerveux du système
cérébro-spinal, tandis que la névrose d'angoisse serait plus
particulièrement l'épuisement nerveux du sympathique et peut-
être du vague*. J'avoue que je ne suis pas aussi frappé par ces
différences: beaucoup de neurasthéniques ont, à un degré faible,
une agitation, un sentiment d'inquiétude, une attente angoissante.
L'agitation du psychasthénique n'est à mon avis qu'un phénomène
secondaire, une dérivation qui résulte justement de l'impuissance
primitive et qui ne s'y oppose pas. M. Hartenberg, d'ailleurs,
n'exagère pas cette opposition, il se rapproche de l'opinion de
Bouveret, de Hecker, de Kaen qui voient « dans ces deux mala-
dies deux manifestations diversement localisées d'un même épui-
sement nerveux ».
I. Hartenberg, La névrose d'angoisse^ iQOi. p. 67.
a. Hartenberg, La névrose d'angoisse, 68.
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INTERPRÉTATION PATHOLOGIQUE DU SYNDROME 737
AjoutoDS qu'il s'agit de deux manifestations de degré et de
gravité différentes. La neurasthénie, comme disaient M. Deje-
rine et M. Mœbius, est « la forme initiale d^où dérivent les
autres névroses comme d'une source ». « La folie du doute,
dit encore M. Kowalewsky *, peut être considérée comme une
deuxième période de la neurasthénie. » Dans la neurasthénie
Tépuisement du système nerveux central est encore léger et
porte surtout sur les centres des viscères ; il augmente, il
s^étend à tout le cerveau, il devient plus conscient, et détermine
plus de phénomènes de dérivation dans la psychasthénie.
Ces comparaisons nous permettent de résumer la conception
de la maladie des obsessions telle qu'elle résulte de ces études
cliniques et psychologiques. Les obsessions proprement dites qui
en sont le caractère le plus apparent ne sont que le dernier terme
d'une série de troubles plus profonds. La psychasthénie est une
psycho-névrose très voisine de la neurasthénie et peut-être de
certaines formes de paranoias, elle se place entre l'épilepsie et
l'hystérie. Toutes ces psycho-névroses sont caractérisées par une
insuffisance du fonctionnement cérébral qu'il est encore aujourd'hui
impossible de rattacher à des lésions anatomiques ou à des trou-
bles physiologiques autres qu'un état vague d'engourdissement
ou d'intoxication. Cette diminution d'activité est en rapport avec
l'hérédité, avec toutes les maladies infectieuses, les fatigues et
les émotions qui jouent un grand rôle dans ces oscillations du
niveau mental. Cet épuisement qui a des caractères physiologi-
ques et psychologiques généraux semblables dans toutes les psy-
chonévroses se manifeste en outre par des troubles mentaux plus
spéciaux qui les distinguent les unes des autres. Dans la psychas-
thénie la chute de la tension mentale est beaucoup moins brus-
que, moins profonde et plus prolongée que dans les accès épilep-
tiques ; elle n'amène point le rétrécissement du champ de la
conscience, la localisation sur certains points comme dans
l'hystérie; elle semble dans celte psycho-névrose rester géné-
rale et déterminer dans toutes les opérations de l'esprit une
simple diminution de la perfection et de la puissance d'adaptation
à la réalité. Les fonctions les plus troublées sont les fonctions qui
I. P.-J. Kowalewsky. The Journal of mental Science, octobre 1887.
LES OBSESSIONS. 1. — ^7
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INDEX DES AUTEURS CITÉS
Ameline, i33.
Amiel, 3oi, 3^7, 354» 370, 378, 435.
Andkiami, 633.
Angel, 287, 4o3, 4o8, 4ao, ^32, 600.
Angell (Edw. B.), 473, 718.
Arie de Yong (La Haye), 452, 717.
Arnaud (Vanves), 29. 76, 86, 98, ii4,
i5o, 232, 288, 295, 336, 338, 383,
46i, 472, 473, 589, 593, 655.
Arndt, 732.
AsCHAFFBNBURG, l5o.
AzAM, 106, ii5, 166, 2o3, 722, 727.
Babinski, 409.
Baillarger, 359, 363, 383, 617, 619,
724.
Bain (A.). 437-
Balfour (A.-J.), 479.
Ball, 78, 79, 80, i3i, 2o5, 2i3, 272,
273, 283, 289, 3oi, 3o6, 307, 3io,
579, 596, 597. 664, 667, 727.
Ballet, 191, 454, 473.
Baseduw, 642.
Baskirtseff (Marie de), 562.
Beard, i85, 2o5.
Bechterew, 170, 209, 5o8, 509, 528,
601, 703.
Bellst, i44:
Bénédict, 471.
Berger (de Breslau), 453, 5o2, 6i5,
642, 725.
Bergeron, 179, 720.
Bergson (H.), 477, 48o, 489, 490, 496,
546, 547.
Bérillon, 201, 232, 349, 683, 703.
Bernard Leroy, 28, 286, 288, 289,
290. 3o8, 309, 3i4, 317, 323, 533,
566.
r Bernheim, 332, 723.
Bigot, 73 i.
Billod, 282, 283, 349.
Binder, 611.
Binet(A.). 324.
Biswanger, 191.
Blaise, 602.
Blocq, 3, 186, 643.
BoissiER (Fr.), 472, 659.
BOMPAIRE, 721.
BOSSUET, 707, 708.
Bouchard, 4i5.
Boucher, 55, 207.
BouLLocHE, 191.
Bourdin, 77, 78, 161, 202, 602.
BOURGET, 289.
BOUVERET, l85, 4l2, 422, 735, 736.
Bra.mwell (Milne), 21, 112, i4i, 349,
703.
Briquet, 464-
Brissaud, 81, 157, 162, i63, i65, 256,
721.
Bkocchi (de Plombières), 4i5.
Bbochard (V.), 479.
Bkocq, 186.
Brosius, 453.
BuccoLA, 85, 324, 363, 366, 449.
Cabanis, 555.
Campagne, 67.
Carrier, 683.
Cartaz, iq4.
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740
INDEX DES AUTEURS CITÉS
Gasper, ao6.
Gatsaràs, 86.
Gazalis, 684.
/Chambard, 84.
Gharcot (J.-B.), igi.
Gharcot (J.-M.), 47, ia4, 157, i58,
160. i85. 261, 357, 6i5. X2I.
Ghaslim, 661.
Ghastsuet, aoo.
Gbervin, 194.
Glarapède (de Genève), ao8, 46o, 46i,
717-
GOMTE» 3a6.
G00MB8 Knapp (Philip), 602.
GoRDBs, aoa, 471, 724.
GOULAMPIS, 420.
G0C8IN (V.), 485.
GOUTARET, 4l4-
GVLLERRE, l50, 198, 206, 236, 5lO.
Dagouet, 621.
Daguillon, b3i.
Dallemagne, 453, 473, 601. 655.
Dana, 200.
j/ Darwin (Gh.), ao6.
Darwin (Erasme), 713.
Dbbove, 191.
Debs, 34a, 48o.
Dechambrs, aoa.
Decasse, 677. y
Déjbrins, 690, 692, 737.
Delarue (Paul), 46.
Delabiauve, 448, 683, 734, 7a5.
Delbœup, 76.
Dkl Greco (F.). 473.
Dénommé, 177, 683.
Descartbs, 479.
Devay, 619.
DoNATH (de Buda-Pesth), 77, io5. a55,
703.
DoSTOIEWSKI, 484, 5 16.
Doyen, ao5.
Dubois (de Berne), 4i3.
Dubois (de Saujon), 16a, i64, 179,
a36, 721.
DuBouRDiEu, 177.
Duboux, 206.
DuGAs, a8, a84, 290, 3oo, 307, 3io,
317, 345, 434, 547, 548, 55o, 566.
Dumas (G.). 555.
DUMONT, 556.
DuMONT (de Monteux), i55.
DUMONTPALLIER, 33a.
DupHAT, a8a.
Eeden (Van), iia, i4i, 45 1, 499,64a,
654.
Eggbr (V.). 564.
ËMMINGHAUS, 658.
Ë8PINA8, 369, 493, 494-
EsQui^OL, II, 199, 398, 7a4, 73
EwART(G.-Th.), 717.
Falret (Jules). X. 68, 85, 86. 95, 199.
3i3, 45o, 472, 617, 653. 663, 707,
734, 725.
Farez, 117.
Faure (L.), 703.
Feindbl, i58, 162. 377, 731.
FéNBLON, 707. 708.
FÉRÉ, ^, 180. 181. 199. 300. 453,
455, 47a, 5o4. 601. 6o4. 610, 6aî,
63i, 633, 735.
Fleury (De), 334. 4o6. 4o8. 4i3. 417,
430. 435, 600, 6o4.
Flournoy (de Genève), 11 5.
Fouillée, 393.
Franck (François), 4o4.
Francottb. 94.
Freud, i83. 3i4, 317, 218. 454, 455,
456. 519, 558, 592. 621. 622. 6a3,
64 1, 656, 735.
Friedenreich, 453.
Friedmann, 658.
Galippe, i85, 643.
Gall, 6o4.
Galton, 321.
Gattel. 622.
Gayte, 479.
Gelineau, 456, 727, 728.
GeLLÉ, 321.
Gibert (du Havre), 4i4.
Gilles de la Tourette, 157,
Ginestoux, 118.
Glénard, 4x4, 4i5.
Gorodiche, 7o3.
Grasset, 106, 159, 191, aoi.
Griesinger, 126. 127, 235, 448, 469,
5o2, 642, 734. 735,
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INDEX DES AUTEURS CITÉS
741
Groos (K ), 276, 546.
GuérviOT, 4i4*
GuERLiif, 179, 720.
GuiNON (G.), 167, 160, i63.
GCYAU, 293.
GUTON, 48, 572.
Hack TuKE, 449. 471, 558, 6o4, 728.
Hàlliok, 191» 226.
Hammond, 200.
Hanot, 668.
Hartenberg, 162, 210, 218, 227, 345,
347, 377, ^57, 562, 565, 601, 621,
622, 716, 722, 736.
Haskovec, 191, 458, 459, 499» 5o2,
5o5, 507. 5o8. 623, 642, 782.
Uecker, 454, 736.
Heim, 4i2.
Hénoch, 179, 720.
HiRSGHBERG, 187.
HôFFDING, 92, 265, 269, 496.
Huchard, l85.
HUGRES, 662.
Hume, 478.
huysmans, 62.
Iscovesco, 611.
Jackson (H.), 557, 6o4.
James (WiU.), 43. 94, 378, 455, 462,
479, 545. 547-
Janet (Jules), 48.
Jastrowicz, 453.
Jensen, 287.
Jérusalem (W.), 479.
JoFFROY, 64o, 698.
JOUFFROT, 485, 698.
JOULIE, 417» 696.
Kaak (Hans). 453, 736.
Ka.'idensky, 94.
KéRAVAL, 3, 5io, 5ii, 677.
Kipling (Rudjard), 535.
K18H, 622.
K0R6AKOF, 359.
kowalewsky, 737.
/ Krœpelin, 658, 735.
Krafft-Ebing, 236, 369, 45o, 453,
472, 658, 664, 667, 725, 729, 735.
Kribhaber, 28, 283, 286, 289, 291,
292, 3o6, 309, 3io, 3i2, 317, 5o5,
726.
Lacroix, 4i7> 4i8, 424.
Ladame, 79, 127, i38, 236, 448, 611,
703, 724, 727.
Lagrange, 716.
Lalande (A.), 289, 566.
Lalanne, 206.
•^ange. 43, 378, 455, 462.
Lanteir^s, i42, 38o.
Lapie (P.), 276, 345.
Larboussinie, 86, 87, 88.
Lasegue, 35,1^24, 623.
Laycock, 471, 6o4.
Legrain, 449, 611, 663, 729.
Legrand du Saulle, 5, 98, ii3, 119,
i3i, i5o, i85, 186, 198, 199, 202,
2o3, 212, 2i3. 236, 237, 243, 245,
260. 297. 382, 383, 453, 471, 5o2,
5i5, 600, 607, 611, 617, 621, 652,
654, 655. 664, 667. 709. 722. 724,
725.
Legroignac. 77. 84-
Lépine, 87, 691.
Letulle, 721.
LsuRET. i85, 202.
Levillain, 4ia» 472. 735.
LôwBNFELD (de Munich), i25. 126, 253,
437, 622.
LuBETZKi. 4o3, 4o4, 4o8, 432, 600.
LuYS, 84, 45o.
Mac Farlane, 2i4, 455.
Magalhaes (José de), 457.
Magnan, i5, 124, i33, 176, 2o3, 237,
44o, 445, 449, 607, 611, 663, 681,
726, 729.
Magri, 729.
Manouvrier, 494, 495.
Mantegazza, 557.
Maramdon de Montiel, 677.
Marge, 724, 725.
MARCHArtD, 225, 226, 227, 46o.
Marie (A.), 6oa. 6o3. 663. 666.
Marinesco, 5o4-
Marrkl, 184.
Marro, 389, 524. 542. 557. 617, 618,
623, 686, 699. 717.
Martinet (A.), 696.
Mathieu. 4i3» 735.
Maudslet, i5, 495.
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INDEX DES AUTEURS CITÉS
Sérieux (P.), 5o4.
ShAW, 200.
Sholz, 737.
SOUPAULT, 4l3.
Souques, 81, 176.
SouKiAu, liga.
Spencer (Herbert), 478, /I87, 495, 496,
556, 601.
Spinoza, 478.
Stadelmann (de Wûrzbourg), 117, 708.
Stefani, 85.
Stout, 494.
Sydeniiam, 4i*
Taine. a8, 3o6, 3i5, 478.
Talbot, 685.
Tamburini, 85, 199, 363, 449i 45o,
59a, 642, 739.
Tanzi, 255.
Thibierge, 4a» 186, ao8.
TiioMSEN (de Bonn), io4.
TnoMso.N, 65o.
Thulié, 67, 720.
T1S81É, 177, 875, 5ii, 5i5, 557, 708,
730.
Tokarskt, 163.
Tolstoï, 371.
ToRDBus, 179, 730.
tournier, 623, 633.
Trastour, 4i4-
Trélat, 199. 365, 366, 734.
Trousseau, 157, 161, 199, 609, 731.
TscHiscH, 633.
TuczBCK, 658, 717.
Valentin, 733.
Vallon, 84, 603, 6o3.
Vaschide, 306, 335, 336, 337,
485.
Ventra, 633, 735.
VeRDIN, 330, 338, 381.
VeRCA, 116, 300.
Verneuil, i85.
ViGouRoux, 419» 663, 666, 677.
Voisin (A.), 333, 4o3, 600, 697.
VuRPAS, 485.
Wallet, 35.
Wéber, 303. 734.
Webber, 4ao.
Wecker, 391.
Weir Mitchell, 3i4, 455, 693, 69
Wernicke, 86, 453, 658.
WeSTPHAL, 77, 303, 307, 3l3,
445. 448, 449. 45i. 453, 459, I
643, 703, 734, 735.
WlGAN, 387.
Wille, 386, 453, 658, 735.
William, 303,
Wright (E.), 558.
WUNDT, 236.
YVON, 419.
ZiMMERMANN, 631.
Zola, 63 i.
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'S^l^f!
INDEX ANALYTIQUE DES MATIÈRES
Abaissement de la tension psychologi-
que, 497, 499» 5oo; et dériva-
tion, 559.
Abasib hystérique, 46.
Aboulie sociale, 345, 347 *» — profes-
sionnelle, 349 ; — et inhibition, 349 >
— au début de la maladie, 638.
Absolu. Manie de T — , i36.
Abstrait. Raisonnement — , sa place
dans la hiérarchie psjchologipue, 485.
AcAROPHOBiE, 186.
Acquis. La maladie constitutionnelle et
la maladie — 63 1.
Action. Obsession deT — , 57, de 1* —
mauvaise, 59, de V — extrême, 61 ;
tendance à T — dans l'obsession, 75 ;
troubles de V — dans les phobies, 201,
au début des crises d'agitation, a4i ;
sentiment d'incomplétude de ï — ,
a65, de l'inutilité de V — , 267, de
mécontentement de T — , 276 ; peur
de r — , 266 ; lenteur des — , 338 ;
fractionnement des — , 338 ; retards
de r — , 338 ; désordre des — , 34o ;
inachèvement des — , 34 1 ; difficulté
des actions — nouvelles, 344 ; la place
de r — dans la hiérarchie psycholo-
gique, 477 î — désintéressée, 482 ; —
automatique, 483 ; rôle de V — dans
la tension psychologique, 490 ; diffi-
culté de r — sociale, 570 ; difficulté de
r — dans la rue, 571 ; difficulté de
r — du mariage, des — génitales,
573 ; suppression de toute — 666.
AsTBESioMÈTRE, difficulté de son emploi
chez les douleurs, 324-
Age. Influence de l'âge sur la maladie,
6i3, 683; ~ du début, 6i5.
Agitation forcée, io4 ; tableau des —
forcées, io5 ; — mentale, 106, i46,
467; — motrice, i56, 172 ; — émo-
tionnelle, 182, 2i3 ; caractères de V
— , i55, 180, 235, 552 ; crises d' — ,
172, 239 ; succession des différentes
formes de V —, 216; unité clinique
des — 236 ; les phénomènes secon-
daires de r — , 25o, 466 ; la place
des — dans la hiérarchie psychologi-
que, 486 ; interprétation des — , 55i ;
— et dérivation, 56o, 567.
Agoraphobie, 27, 202 ; interprétation
des — 571.
Aimer. Besoin d' — 388 ; besoin d'être
—, 32. 40-42, 389.
Akathisie, 191.
AkINESIA ALGER a, I9O.
Alcoolisme. Impulsion dans 1' — , 84.
ALGÉsiMi:TRE à ressort, 4o5.
Algie, 182, i85; — avec hypocondrie,
52 ; — de la tète, 187 ; des organes
génitaux, 188; de la vessie, 189 ; de
l'anus, 190 ; sensibilité dans les — ,
196.
Aliénation. Danger de T — , 658.
Alimentation. Honte de 1* —, 38, pho-
bie de r — , 192 ; — des malades, 690.
Alternance des troubles do la digestion
et des troubles cérébraux, 4ia-
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INDEX ANALYTIQUE DES MATIÈRES
PHOBIE, ao5.
ON. Senti ment d' — , 3o3, 3o4.
F chez les psycbasthéniqiies, 3a8,
— continue, 358, — dans la
cdela recherche, ia3.
de la liberté, 276; — de Thon-
p, 392 ; — de la justice, SqS ; —
llôge, 389 ; obsession d' — , 3o,
•SIE, 325.
SE des urines, ^17.
kSMF, 77, io5.
iiQUK. Représentation — des
•ies, 599-605.
lÊKiK chez les psychaslhcniques,
320, 323, 32/5 ; — à la fatigue
les anorexiques, 35.
SE, 3, ^^t 47. 182 ; — dans 1rs
s, 198 ; — dans les phobies du
ict, 199; — dans les agorapho-
20^ ; — diffuse, 21/I ; diverses
es de r — , 217; tableau des —
troubles physiologiques de V — ,
expériences sur V — , 2I9 : agi-
is dans 1* — , 466 ; paralysies dans
, 219 ; excitation génitale dans
, 221 ; troubles digestifs dans 1'
222 ; diarrhées dans 1' —, 223 ;
kiurie dans 1* — , 2 23 ; troubles
circulation dans V — , 223, 22/1,
troubles des sécrétions dans 1* — ,
; troubles de la respiration dans
, 227 ; — physique et morale,
, troubles psychologiques dans 1'
32 ; timidité cl — , 3^6 ; — et
ge épileptiquc, 509 ; inlerpréta-
de r — , 56i ; — par dérivation,
562 ; systématisation des — 58o.
KiE, 33. 34, exagération des mou-
;nts dans 1* — , 35.
i.. Étal d' — diffuse, 2i4 ; —
taie. 232.
lÉTiQiK. Manie — , 118.
de rinstruction, 36o ; — des
mcnls et des émotions, 3oo, 370
iQLKR. Remords — , 25.
«ION. Image de 1' — , 25 ; — du
lu mental, 3i4, 525-527; — par
les substances excitantes, 5a8; — par
le changement, 529 ; — par Teffort,
53o ; — par Tattention, 53 1.
Ascétisme. Disposition à V — , 436.
AssociATio.N. Invocation des obsessions
par I* —, 71 ; manie de r — , 75, 117;
généralisation de 1* — , 72.
Attac^ue hystérique et agitation. 179.
Attente. Dérivation dans V — 556.
Attention. Troubles de 1* — , 344*362,
363 ; dédoublement de 1' — , 369 ;
graphiques de T — , 364 l la place de
r — dans la hiérarchie psychologique,
478 ; rôle de 1* — dans la psychasthé-
nie, 532 ; excitation par V — , 53i ;
dérivation dans les efforts d* — , 563,
565 ; rôle de 1' — dans la systémati-
sation des troubles, 575, 677 ; réédu-
cation de r — , 715.
Attitude des malades, 6 ; tics d* — , i65.
Al' DELA. Manies de V — , ii3
Auditif. Sens — . 32 1.
Aura dans les périodes psychasthéniques,
44o, 443.
Automatisme. Sentiment d' — 272, la
place des actions — dans la hiérarchie
psychologique, 483.
Autoritaire. Caractère — , 195, 393;
— et volontaire, 395 — dans le trai-
tement. 709.
Avenir. Manie de 1* —, 126.
Basuphorie, 190.
Besoin de direction, 3i, 38a, 384; —
d'aimer, 388 ; — d'être aimé, 32,
389 ; — d'autorité, 393.
Boulimie cl sentiment de faiblesse, a68.
Bruits dans la tète, 4oo ; peur dos —,
195.
Caracière des scrupuleux, 6a5; héré-
dité de ce — , 610; influence du -
antérieur, 624 ; influence du — sur le
pronostic, 682.
Cardiaque. Troubles — dans l'an-
goisse, 223.
Cécité Sentiment de — , 291.
Céphalalgie, 187, 399; forme des — ,
399, 4o4 ; localisation des — , 4oi,
4o5.
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INDEX ANALYTIQUE DES MATIÈRES
747
GcPHALO-KACuiDiEN. RAle du liquîdc —
dans les céphalalgies, 4o3.
Cérébrax. Théorie — de la psychasthë-
nie, 6oi-6o5.
Gérébrosthénib etcérébrasthénie, 49^.
GiioRÉB et tics, ^i; — dans la crise
d'excitation, 179.
Chute de la tension psychologique, 5oi ;
— produite par Téinotion, 5a 2 ; —
amène les dérivations, 569.
Cicatrices. Honte des — du visage, /^a.
Circulation. Troubles de la — , ^aa ;
— — dans l'angoisse, aa6 ; théorie
circulatoire de la ps^rchaslhénie, 600.
Classification des phobies, i83 ; —
des algies, 1 86 ; — des variétés de la
psychaslhénie, 643.
Claustrophobie, ao5.
Collection. Manie de la — , ia5.
Comédie. Sentiment déjouer la — , 377.
Compensation. Manie de la — , i38.
Complications de la maladie, 667.
Confiance. Perle de la — , a96. .
Confusion mentale, 66, 658, 661, —
avec excitation, 66a ; — avec démence
précoce, 66a ; diagnostic de la — , 67a.
Conjuration. Manie des — , i43 ; for-
mules de — , i45.
Conscience du corps et de ses fonctions,
34 ; — dans l'obsession, 66, 97, —
dans les tics, i6a ; — dans les agita-
tions, a 54 ; troubles de la — person-
nelle, 3o8 ; rétrécissement du champ
de la — , 3 1 9 ; — dans les crises de
psycholepsie et dans les accès épilepti-
ques, 5o4.
Constipation, 4i4; — avec rétention,
657 ; traitement, 69a.
Constitutionnel. Maladie — et maladie
acquise, 63 1.
Contenu dos idées obsédantes, 3, 4 > 54 ;
interprétation de ee contenu, 596.
Contraste dans l'obsession, a3, 60 ;
dans les tics, 167 ; manie du — , ii5.
Cortical. Théorie — de l'obsession,
60a.
Crainte de la lutte, a43, 390 ; — de
l'isolement, 391.
Crampe des écrivains, 45, 190, ■
et manie de la perfection, i33; inter-
prétation do la , 574.
Crépusculaire. Etat — dans l'épilcpsie
et dans la psychasthénie, 5o5-5o7.
Crime. Obsession du — , la. i5.
Crise de psycholepsio, 5oi ; — d'agita-
tion, 17a, 178, — des efforts, 17a,
les — de marche et de parole, 176 ;
les périodes de. — , a39 ; point de dé-
part des — , a4i ; Faction au début des
— , a4i ; l'attention au début des — ,
344; l'émotion au début des — , a45;
les — de fatigue insurmontable, 35a.
Critique de l'obsession, 67, 96-98.
Croyance à l'obsession, 95-97 ; troubles
de la — , a 45; place de la — dans la
hiérarchie psychologique, 479.
Début de la maladie, 5, 61 5, — de l'ex-
pression des idées, 5 ; les formes du
-, 634.
Déclamation dans le rêve et dans la
rumination, a5a.
Découragement. Sentiment de — , 397.
Dédoublement. Sentiment de — dans
la perception, a84 ; dans la personna-
lité, 309, 3ia ; — de l'attention, 369;
— chez les psychasthéniques et chez
les hystériques, 309.
Défécation. Troubles de la — , 4i4;
phobie delà — , 194.
Dégénérescence. Stigmates de ~ , 61 1 ;
maladie de — , 63 1, 739.
Déglutition. Phobie de la — , 19a.
Déja-vu. Obsession de — , 39 ; senti-
ment de — , 387, 3i7 ; interprétation
de ce sentiment, 548.
Délibération. Manie de — , 109.
Délire mélancolique, a5, 66, 659, 67a,
— des (lancés, a6, 6a8, 700, — du
doute, a6, — de maigreur, 81 ; —
de persécution, 659, 677, 679, acci-
dents de — , 66.
Dkmence, 663 ; — spéciale, 666.
Dépersonnalisation. Obsession de — ,
a8, 3io, 3ii, sentiment de — , 3o5,
3i5; — à la suite d'émotions, 5a i;
Interprétation de la — , 549-
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748
INDEX ANALYTIQUE DES MATIÈRES
Dérivation. Théorie de la — psycholo-
gique, 554 ; — dans le rire, 555 ; —
dans l'attente, 555 ; — dans la dou-
leur, 556 ; — dans Tangoisse, 558, 56 1 ,
56a ; — causée par rabaissement psy-
chologique, 559 ; — dans les émotions,
563 ; — dans l'attention, 56a ; —
dans la rumination mentale, 564.
Dermatophobie, 186.
Désintéressé. Opérations — , leur place
dans la hiérarchie psychologique, 48a,
fréquence des opérations — , 569.
Désordre. Le — des actes. 34o.
Désorientation. Sentiment de — , a85.
Développement des idées, ici ; — in-
complet, io3.
Diable. Le culte du — , 11 ; sentiment
de l'action du — , 375.
Diagnostic de la sitieirgic psychasthé-
nique et de l'anorexie hystérique, 36,
— de la psychasthénic, 670 ; — de
la neurasthénie, 671 ; — de la confu-
sion, 67a ; — do la mélancolie, 67a ;
— de la paralysie générale, 67a ; —
de la maladie des tics, 674 ; — de
l'hystérie, 674-676 ; — des délires
systématisés, 676, 677.
Diarrhées dans l'angoisse, 3a3.
Dieu. Le blasphème contre — , ii ; sen-
timent de l'action de — , 375.
Difficulté. Sentiment de — , a8i.
Digestion. Phobie de la — , igS ; trou-
bles de la — dans l'angoisse, aaa ;
troubles permanents de la —, 4 10,
4i4. alternance des troubles de la —
et des troubles cérébraux, 4i2 ; abais-
sement du niveau mental par la — ,
5x5.
Dipsomanie, 18, 80.
Direction. Besoin de — , 3i, 38a ; —
mutuelle, 384 *. traitement par la — ,
706, 707, 715.
Distraction. Action avec — ,48a.
Domination. Sentiment de — , 373, 375.
Douleur. Sensibilité à la — dans les
algies, 197 ; diminution de la — chez
les psychasthcniques, 3a5, douleurs de
la tête, 399-405 ; — déterminée par
les insu£Eisances, 554 ; excitation par
la -, 555.
Doute, 36, — de l'hallucination, gS ;
— de l'obsession, 96-98 ; sentiment
de —, 395, 397.
Dromomamie, 18, 177.
Durée de l'obsession, 68.
Dysestuésie viscérale, 86 ; — tactile,
87.
Dysmorphophobie, 309.
Eclipses mentales, 369.
Ecriture. Honte de l' — , 45 ; désordre
de r — , 34o.
Education, 636; prophylaxie par l' —,
686.
Effort imaginaire, i45 ; la crise des —,
173 ; — de vomissement, 175 ; senti-
ment d' — , 365 ; sentiment de l'inuti-
lité des — , 378 ; faiblesse des — , SSg;
excitation par 1' — , 53o ; — intellec-
tuel, 533 ; dérivation dans les —
d'attention, 563, 565, 567 ; direction
des — , 715.
Eloignement. Sentiment d* — dans la
perception, a86.
Emotion, agitation émotionnelle, 183;
trouble de l' — au début des crises,
a 45 ; — d'admiration au début des
crises, 346 ; sentiment d'incomplélude
dans les — , 398; sentiment d'arrêt
des — , 3oo; difficulté <le rexpression
des — , 348 ; troubles des — ,370; ar-
rêt des — , 370 ; — retardante, 378,
54 1 ; — sublimes, 38o ; troubles viscé-
raux dans r — , 469 ; — slhénique,
535 ; besoin de préparation dans 1* — ,
54 1 ; influence de l' — sur l'anorexie,
35 ; influence de l' — sur le niveau men-
tal, 195, 517; sur l'insuffisance psycho-
logique, 5 19 ; sur l'obsession, 46o,
465,5 18, 594, 63o ; influence des petites
et des graves — , 578 ; la double émo-
tion à l'origine des obsessions, 593 ;
théorie de Lange-James sur l' — , 43 ;
r — phénomène mental, 533 ; disso-
ciation par r — , 533 ; r — et l'ac-
tion du froid, 534 ; excitation par l'
— , 536, 537, 543 ; théories émotion-
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INDEX ANALYTIQUE DES MATIÈRES
749
nelles. 453. 455.458,46i, 462 ; V —
présente, sa place dans la hiérarchie,
48i, 485 ; complexité de V — , 589;
dérivation dans V — , 56 1, 563 ;
rééducation de V — , 711.
Emotivité, 877, 379, 455 ; son rapport
avec rémotion, 468, 5ao ; dérivation
dans r —, 563, 564.
ENDOctNE. Origine — des obsessions,
64. 584.
Enfant. Obsession d*étre — , 82, 4o ;
retour àl' — , 891.
Ennui. Sentiment d* — , 800, 875.
Entêtement. Crises d* — au début de
la maladie, 638.
Enthousiasme. Sentiment d' — , 246,
880.
Envie. Obsession de 1* — , 29.
Epilspsie. Impulsions dans r — , 84 ; —
et photophobie, 196; — et psycho-
lepsic, 5o2-5i4 ; — et obsession, 5o6,
5ii, 5i2; — et angoisse, 5o8; — et
rumination, 5 10 ; — et psychasthé-
nie, 788.
Estomac. Troubles de T —, 4i2.
Ereutophobie, 48, 206, caractère social
de r — , 208.
Etiologie de la maladie, 606 ; influence
des conditions physiques, 619 ; in-
fluence des conditions morales, 624 ;
influence de l'éducation, 626 ; in-
fluence des problèmes de la vie, 627,
628.
Etonrement, 127.
Etrange. Sentiment de V — dans la
photophobie, 196; dans la per-
ception, 288 ; dans la conscience, 811;
interprétation, 546.
Euphorie dans Tanorexie, 85.
Evolution de la maladie, 66, 606, 684 ;
les variétés de l' — , 64 1» 645, 646,
648, 652.
Excitation. Crises d' — , 178; besoin
d* — , 3o3, 385 ; diverses excitations,
528, 529, 58o, 58i, 584, 585, 542,
555.
Exécution partielle de l'impulsion, 79,
80, 82, 88.
Exogène. Théorie — des obsessions,
68.
Expiation. Manie d' — , 189.
Explication. Manie d* — , 126.
Expression des idées obsédantes, 4> 5 ;
difficulté de V —, 848 ; début de 1' —
des idées obsédantes, 684.
Extatique. Sentiments sublimes des — ,
882 ; étaU —, 660.
Extrême. L'action — dans l'obsession,
61 ; manie de 1' — , i85.
Eczéma, 428.
Faiblesse des efibrts, 889 ; sentiment
de —, 268.
Faim. Perle de la — , 84 ; exagération
de la —, 268.
Fanatisme et autoritarisme, 897.
Fatigue. Anesthésie à la — dans l'ano-
rexie, 35 ; la — des psychasthéniques,
889, 852 ; influence de la — , 5i5.
Fiancés. Délire des — , 26, 628, 700.
Fièvre. Influence de la — , 65o.
Fixité. Manie de la — des idées, ii4.
Folie. Obsession de la — , 28 ; — de
l'interrogation, 126, — métaphysique,
126 ; — du doute et tics, 286.
Fonction du réel, 43 1, 488; sa place
dans la hiérarchie, 477.
Fontanelles. Localisation de la cépha-
lalgie aux — , 4o2.
Forcé. Caractère — des agitations, io4 ;
action — dans les tics, i64.
Forme dos obsessions, 3, 65, 596 ; —
aiguë, 646; chronique, 647; chroni-
que, 647 ; intermittente, 648 ; rémit-
tente, 652.
Fugues, 17 ; — et crises de marche,
177.
Gêne des mouvements, 4i ; sentiment
de — , 271.
Généralisation de l'association, 72 ;
manie de la — , 186 ; — de la mala-
die, 655, 656.
Génital. Impulsion — , 16 ; hypocon-
drie — , 5i, 52 ; manies — , 1 85 ; ex-
citation — dans l'angoisse, 221 ; en-
gourdissement, 878, 425 ; difficulté
des actes — , 578 ; influence des trou-
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VA)
INDEX ANALYTIQUE DES MATIÈRES
blés —, 6a 3; excitation parTémotioD
Graphiques de l'attention, 36^, 365;
de la respiration, aa8.
Gkossessr. Influence de la — , 6/19.
GuÉRisuN naturelle par l'âge. 666, 667.
Habitude. DifHculté de l'acquisition de
r — , S^i'i ; influence de V — sur la
systématisation, 579.
Hallucination hystérique, 56, 73, 86 ;
— psychasthénique, 10, 85 ; — viscé-
rales, 86 ; — auditives, 87 ; — vi-
suelles, 88 ; — du précipice, 89 ; —
symboliques, 89, 9/1, lao ; — incom-
plètes, 90, 91, 9a, 94 ; — de la per-
sonne vue au dehors, 3i4 ; — sans
réalité, 438 ; la tension psychologique
dans r — , 49a-
Hébéphuéme, 66a.
Hérédité, 607, 610, 680.
Hésitation. Manie de 1' — , 108, 337.
Hiérarchie des phénomènes psychologi-
ques, 180, 487, 474-
Honnêteté. Amour de V — , 39a.
Honte. Obsession de — , aa, a3 ; — du
corps, 33-4o, 43, 44, 45, 46 ; senti-
ment de — , a77.
Hydrorrhée dans la photophobie, 196;
— intestinale, aa3, 4^4 ; — vaginale,
424.
Hydrothérapie, 539.
Hygiène du psychasthénique, 690.
H vPERMNÉsiE apparente, 118.
Hypnotique. Sommeil — chez les psy-
chasthéniques, 33o, 33 1, 33a ; traite-
ment par le sommeil — , 7o3-7o5.
Hypocondrie urinaire, 48 ; — génitale,
5o-5a.
Hystérique. Anorexie —, 34 ; idées
(lies — , 65, 99 ; impulsions — , 84 ;
— hallucinations, 86, 9a ; somnam-
H)ulisme — , 100 ; attaques — , 179;
dédoublement — , 309 ; diagnostic de
la psychaslhénie et de V — , 674,734.
Idéalisme. Obsession de 1' — , 37.
Idée. Fuite des — , i55 ; phobie des — ,
a 10 ; recherche des — générales, 395.
Imaginaire. Sentiment de V — , 387-389.
Imbécillité. Impulsions dans 1* — , 84-
lM.MOBiLiTé, comme tic d'altitude, i64.
Imperfection. Sentiment d' — , 34.
Impulsion criminelles, i5 ; — néga-
tives, 18 ; — dans Tidée obsédante,
75 ; — dans les phobies, les hontes,
77 ; — irrésistibles, 77 ; résistance à
r — , 78 ; exécution de 1* — , 79. 84;
manie de 1' — , 85 ; symbole de V —,
133 ; r — dans les tics, 167; inter-
prétation del' — psychasthénique, 598.
Inachèvement des actes, 34 1 ; sentiment
d' —, 398.
Incapacité. Sentiment d* — , a68.
Incomplétude de Faction, 163 ; senti-
ment d* — , 364, 380 ; dans
rémotion, 398 ; dans le sommeil,
3oo ; et inquiétude. 3o3 ;
dans la perception personnelle, 3o5 ;
tableau des sentiments d' — , 437; in-
fluence des sentiments d* — sur les
obsessions, 585 ; interprétation de ces
sentiments, 544, 545.
Incoordination dans Tangoisse, 331 ;
sentiment d' — , 394.
Indécision. Sentiment d* — , 369.
Indépendance. Obsession d* — , 3o.
Indifférence. Sentiment d* — , 398 ;
eut d' -— , 373, 374.
Indolence, 335.
Inertie complète, 353, 664.
Infectieux. Influence dei maladies — ,
5i4.
I.NFÉRiEUR. Caraclère — des phénomènes
de l'agitation, a5i ; des émo-
tions dans Tangoisse, 353 ; senti-
raentd' — , 3ii.
Infini. Manie deT — , i36; rumination
sur r — et épilepsie, 5i3.
Inhibition des actes, 345 ; aboulie et — .
349.
Inquiétude. Sentiment d' — , 3oi ; —
et peur, 3oi ; — et incomplétude,
3o3 ; — antérieure à Téreutophobie,
44.
Insomnie, 4o8.
Instabilité. Sentiment d' — , 38a ; —
de l'attention, 363.
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INDEX ANALYTIQUE DES MATIÈRES
751
Insuffisance psychologique, 819, ^3o ;
— p8}xhologique, 898 ; — déterminée
par l'émotion, 621 ; douleur détermi-
née par r — , 554 ; influence des —
sur Tobsession, 689.
Intelligence. Développement de V —
chez les scrupuleux, 35 ^ ; sentiment
d'incomplétude de 1* — , 281, 298,
36 1 ; la place de 1* — dans la hiérar-
chie psychologique, 484 ; rôle de V —
dans Tobsession, 55 1 ; théories intel-
lectuelles de Tobsession, 45o.
Internement des psychasthéniques, 702.
Interrogation, besoin d' — , 294 ; ma-
nie de r — , 107 ; du sort, iio.
Intestinal, troubles — , 4i4.
Intimidation. Sentiment d* — , 278.
Introspection psychologique chez les
psychasthéniques, 485.
Inversion sexuelle, 16, 49. 590.
Isolement. Crainte de 1' — , 891 ; rôle
de r — dan? l'agoraphobie, 592.
Irréel. Sentiment de V — , 27, 289 ;
dans rhallucinalion, 98.
Irrésistible. Impulsion — , 77 ; carac-
tère — des agitations, 255 ; sentiment
de domination — , 275.
Isolement. — Sentiment de 1' — , 208,
28G ; crainte de 1' —, 891 ; rôle de
r — dans l'agoraphobie, 208, 592 ;
— terminal du malade, 664.
Jalousie. Obsession de — , 590.
Jamais vu. Sentiment de — , 288.
Jeu. Excitation par le — , 542,
Justice. Amour de la — , 898.
KiNESTHKsiQUE. Sens — , 821.
Langage. Phobie du — , 194.
Légal. Pronostic médico , 688.
Lenteur. Manie de la — , 180 ; — des
actes, 888.
Liberté. Amour de la — , 274 ; senti-
ment de perte de la — , 278, 275.
Lutte. Crise de — , 174*, crainte de la
— , 848, 890.
Maladresse des mouvements, 84 1> 486.
Manie mentale, 106 ; de la fixité des
idées, 70, ii4 ; de l'association, 75 ;
des vomissements, 82 ; de l'impulsion,
85 ; du symbole, 94, lao ; de l'hallu-
cination, 95; del'au delà, 118 ; delà
précision, ii3 ; des vérifications, ii4 ;
de Tordre, ii4 : de la symétrie, ii5;
du contraste, ii5 ; de la contradic-
tion, 116; de Passociation des idées,
117 ; des petites choses, 117 ; de l'a-
rithmétique, 118, 119 ; de la recher-
che, 122 ; du passé, 122 ; de Tavenir,
126 ; de l'explication, de l'interroga-
tion, 126; des précautions, 128; de
la lenteur, 180 ; de la propreté, i3o ;
de la répétition, 181 ; du retour en
arrière, 182 ; des procédés, i38 ; delà
perfection, i84 ; de l'extrême et de
l'infini, 61, i35 ; des généralisations,
186; de l'absolu, 186 ; de la répara-
tion, 188 ; de la compensation, 188 ;
de Texpiation, 189; des pactes, i4i ;
de la superstition, i4i ; des serments,
i4i ; des conjurations, i48 ; tableau
des — mentales, i47 ; unité clinique
des — , i47 ; rôle des — dans les tics,
i65 : systématisation des — mentales,
582.
Marche. Troubles de la — , 46 ; impul-
sion à la — , 176.
Mariage. Difliculté du — 578 ; in-
fluence du — sur le développement de
la maladie, 628 ; précautions à pro-
pos du — , 684t 700.
Masse. La — des phénomènes dans la
tension psychologique, 494-
Masturbation. Impulsion à la — , 17,
48 ; son rapport avec les aboulies so-
ciales, 578 ; influence de la — sur le
début de la maladie, 621-628.
Mécontentement. Sentiment de — , 22,
26, 276.
Médication sédative, 698 ; bromurée,
694 ; tonique, 695.
Mélancolie. Délire — ,25 ; — anxieuse,
66, 659 ; sentiments — , 875 ; dia-
gnostic de la — , 672.
Mémoire. Exagération de la — , 858 ;
— retardante, 858 ; place des diverses
formes de la — dans la hiérarchie,
48o, 488,
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752
INDEX ANALYTIQUE DES MATIÈRES
MfeiNSOMGE. Sentiment de — , 277.
Mentisme, 100, i55.
Métaphysique. Manie, ia6, ia8.
MicROMAifiE, 117, 195.
Miction. Scrupule de la — , 48.
MiSONÉISME, 344*
Morphine. Manie de la —, 80 ; influence
de la — , 5a9 ; traitement par la — ,
697-
Mort. Obsession de la — , 52 ; senti-
ment de la — , 3 16, 377.
Mouvement. Exagération du — , 35 ;
honte des — , 4i ; caractère inférieur
des — dans les tics, 181 ; troubles des
— dans l'angoisse, aao, aai ; mala-
dresse des — , 34 1 ; — subconscients,
a 29 ; rôle des — dans la tension psy-
chologique, 489 ; excitation par le — ,
53i.
Musculaire. Sensibilité — , 3a i ; sa
mesure, 3a i.
Mystérieux. Sentiment du — , a75,a94-
Néologismes, 7.
Neurasthénie du début, 635 ; psychas-
thénie et — , 736.
Névropathie cérébro-cardiaque, 309 ;
et épilepsie, 5o5.
Niveau mental défini par les degrés de
la tension psychologique, 496 ; oscilla-
tion du , 498 ; inlluences qui dé-
terminent rabaissement du — — ,
5i4 ; l'ascension du , 525.
Nouveau. La place de l'action — dans
la hiérarchie, 477 î difficulté des actes
-. 344.
Nutrition. Troubles de la — , 4i5, 657.
Obéissance, 343.
Obligation. Sentiment d* — sacrée,
275.
Obsession du sacrilège, 9 ; du crime,
12 ; de la honte de soi, aa ; de la fo-
lie, a8, 589 ; de dépersonnalisation,
28 ; d'envie, 29 ; d'indépendance, 3o ;
d'amour, 3o, 591 ; d'être un enfant, 32 ;
de la honte du corps, 33 ; des mou-
vements, t^l ; du faux col, 4i ; des
yeux, 4i î de l'impotence des jambes,
46 ; viscérales, 46 ; urinaires, 47 ;
génitales, 48-52 ; de l'impuissance,
49 ; de la mort, 52 ; des maladies,
52 ; tableau du contenu de T — , 54 ;
r — porte sur les actes, 67, 58 ; —
d'origine endogène, 64. 584 ; forme
des — , 65 ; — conscientes. 66, 67 ;
permanence et évolution del* — , 68 ;
croyance kl' — , 95, 97 ; développe-
ment incomplet de 1* — , io3 ; V — et
la suggestion, 452 ; — et émotion,
465, 5 18 ; — et épilepsie, 5 11, 5i2 ;
interprétation del* — , 583, 589 ; in-
fluence des événements extérieurs sur
r — , 592, 593 ; la double émotion à
l'origine des — ^ 593 ; interprétation
de la forme des — , 595, Sgô.
Odorat. Phobie de l' — , 194.
ŒokMES, 433.
Œil. Gène des — , 4i ; obsession des
-, 4i.
Onomatomanie, 124» i34.
Ordre. Manie de 1' — , ii4.
Oscillation. Manie de 1' — , 106; —
de la volonté, 337 * — de la tension
psychologique, 498 ; — avec abaisse-
ment du niveau mental, 5i4 ; — avec
élévation, 524 ; — parle changement,
529 ; — par l'effort, 53o ; — par l'é-
motion, 536 ; — de la maladie, 648-
653 ; — entre le délire du scrupule
et le délire de persécution, 678.
Ouïe. Phobie de 1' — , 195.
Pactes. Manie des —, i4i.
Palpitations dans l'angoisse, 224-
Paralysie chez les psychasthéniques,
328 ; diagnostic de la paralysie géné-
rale, 672.
Paresse, 336.
Parole, intérieure, ii4; impulsion à la
-, 177-
Passé. Manie du — , i25; sentiment
du —, 288.
Perception. Trouble des — dans les
phobies des situations, 20a ; troubles
de la — personnelle, 3o5 ; inintelli-
gence des — , 36 1.
PaRFECTioN. Manie de la — , i34, i35.
Période de la maladie, 65 ; — psychas-
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INDEX ANALYTIQUE DES MATIÈRES
753
théniques, 439*443 ; — de rémission,
65i, 65a ; — critiques, 654-
PfiRsécuTioif . Sentiment de — , 276 ;
— dans la crise de lutte, 174 ; idées
de — , 590 ; délire de — , 659. 677,
679-
Personmel. Sentiment d 'incomplétude
— , 3o5 ; d*étrangeté — , 3i i ; d'infé-
riorité — , 3ii ; de dédoublement — ,
3i3 ; hallucination — , 3i4 ; senti-
ment de perte de la personne, 3i5.
Petitesse. Sentiment de — dans la per-
ception, a 86.
Peur et inquiétude, 3oi ; — de la
lutte, 343.
Phobie d'engraisser, 37 ; baso — , 46 ;
— des pets, 47 ; — dans les obsessions,
56; — des chemins de fer, i33, 182,
i83 ; classification des — , i83 ; —
des fonctions du corps, 47» 190 ; —
des mouvements des membres, 190 ;
— de l'alimentation, delà déglutition,
192 ; — de la digestion. 198 ; — du
ventre, 193 ; — de la défécation, 194 ;
— du langage, 194 ; — de Todorat,
194 ; — de l'ouïe, 195 ; photo —,
195 ; — des objets, 198 ; — du con-
tact, 199 ; miso — , rupo — , 200 ; —
professionnelle, 201 ; — des situations
physiques, 201 ; agora — , 202 ;
claustro — , 2o5 ; érento —, 42, ao6 ;
—- des situations sociales, ao6 ; —
sociale, 210 ; — du mariage, 210 ; —
des idées, 210 ; — de la folie, 211 ;
— de la mort, 212; interprétation des
— professionnelles, 574 ; localisation
des — , 569-577.
Phrénolepsie. Crises de — , 5oi«
Physiologique. Insuffisance — , 398.
PoLLAKIUltlE, 223.
POLYP.^ÉE, 229.
POLYURIE, 223.
Pratique. Défaut de — , 436.
Précautio:«s. Manie des — , 128 ; —
dans les tics, 169.
Précipice. Image du — , 25, 121.
Précision. Manie de — , 11 3.
PRéPARAiiON dans l'émotion, 54i.
LES OBSESSIONS.
Présage. Manie des — , iio.
Présent. EfTacement du — , 125 ; sen-
timent du — , 288, 48 1 ; présentifica-
tion, 48 1 ; troubles dans les fonctions
du — , 434, 437.
Pressentiment, 289.
Pression artérielle dans l'angoisse, 225.
Procédé. Manie des — , i33.
Procbssigrammes. Graphiques de l'at-
tention, 366.
Professionnel. Phobies — , 201 ; abou-
lies — ♦ 349 ; l'action — , 477 ; sa
difficulté, 574.
Pkomnésie, 289.
Pronostic, 680.
Prophylaxie, 684.
Propreté Manie de — , 117, i3o, 169.
Psychasthénique. Diverses désigna-
tions des — , viii ; difficulté de l'élude
des — , 261 ; impulsions — , 84 ; stig-
mates — , 260 ; troubles de la con-
science des — , 309 ; périodes — ,439-
442 ; abaissement des — , 5o2 ; — et
épilepsio, 5i3, 733 ; — constitution-
nelle et — acquise, 63 1 ; variétés cli-
niques des — , 64 1 ; marche de la
maladie — , 645 ; — et hystérie, 675,
734 ; — et neurasthénie, 736 ; — et
délire de persécution, 678 ; les dan-
gers de la — , 680 ; unité de la — ,
7a5 ; interprétation pathologique de
la — , 727 ; définition de la — , 737.
PsYCHOi.EPSiE. Crises de — , 5oi ; — et
épilepsie, 5o2-5i4-
Psychologique. Régions — du corps
humain, 190, 327 ; hiérarchie — ,
474 ; phénomènes — élémentaires,
474.
Psycho-névrose. Place de la psychas-
thénie parmi les — , 732.
Puberté. Honte de la — , 39 ; influence
de la — , 617 ; — morale, 618.
Pudeur. Exagération de la — , 4o.
Pupilles. Dilatation des — , 409»
Rachialgie, 4o6.
Raisonnement, sa place dans la hiérar-
chie, 485.
Recherche. Manie de — , I23.
1. - 48
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754
INDEX ANALYTIQUE DES MATIÈRES
Reconnaissance. Sentiment de fausse
-, 38-.
Ri^:ÉDucATiON. de l'émotion ,711 ; — de
l'attention, 716.
Rékl. Le sentiment du — , 98, ago,
433, 435 ; la fonction du — , ix, 43 1 ;
place de la fonction du — dans la hié-
rarchie, 477 ; coefficient de — , 487 ;
perte de la fonction du — , 43 a, 438,
569 ; interprétation de la perte de la
fonction du — , 546. ,
Ri^.FLEXES. Modification des —, 409.
Refus d*alimcnts, 33-43.
Régime alimentaire, 690.
Rf^GiONS psychologiques, 190, 337.
Règles. Modifications des — , 426, 4^6 ;
influence des — , G'ig.
Religieuse. Idées — , i3 ; émotions — ,
629.
Remémoration. Manie de —, I34-
Rémission de la maladie, 652.
Remords. Obsession de — , 19, 31.
Réparation. Manie de — , i38 ; -- dans
les tics, 170.
Répétition. Manie de — , i3i.
Repos. Traitement par le — , 693.
Représentation imaginaire, 31 ; sa
place dans la hiérarchie, 484.
Respiration dans l'angoisse, 337.
Responsabilité, i4 ; crainte des —,
371.
Retardant. Action — , 338 ; mémoiro
— , 358 ; émotion — , 378.
Retour on arrière, Manie du , i33 ;
— à l'enfance, 391.
Rétrécissement du champ de la con-
science, 319.
Rêverie forcée, i53 ; disposition à la
—, 368.
Rêve et rumination, 303 ; sentiment de
—, 389, 390.
Révolte. Sentiment de — , 379.
Rhinorrhék, 434.
Rire. La dérivation dans le — , 550.
Rumination mentale, 106, 149, 467 ;
— — et épilepsie, 5 10 ; dérivation
dans la , 564.
Sache. Sentiment d'obligation — , 375.
Sacrilège. Obsession du — , 9-12 ; sen-
timent de — . 300.
Satisfaction. Sentiment de — dans les
crises, 357.
Scrupuleux. Caractère — , 5, 57.
Sécrétion. Troubles dos — , 237, 4^3.
Sensibilité. Troubles de la — , 320,
333 ; régions de —, 837 ; — du crâne.
4o5.
Sentlment de mécontentement, 8, 376;
d'imperfection, 3^1 ; d'euphorie dans
l'anorexie, 35 ; de pudeur, 4o ; de sa-
crilège, 300 ; d'isolement. 2o3 ; de
mort, de folie dans l'angoisse, 333 ;
do perte de la liberté, 333 ; d^irrésis-
tibilité, 356 ; de satisfaction dans la
crise d'agitation, 357 ; d'incomplé-
tude, 364, 280, 3i3 ; deTeffort, 3(35;
de la difficulté, 366 ; de l'inutilité de
l'action, 367, 378 ; d'incapacité, 368 ;
d'indécision, 369 ; de gène dans l'ac-
tion, 371 ; d'automatisme, 373 ; de
domination, I3i, 373*, d'être trompé,
375 ; de persécution, 276 ; d'obUga-
tion sacrée, 375 ; do mensonge, de
comédie, 377 ; de honte, 377 ; d'inti-
midation, 378 ; de révolte, 379 ; de
difficulté do l'attention, 381 ; d'insta-
bilité, 38a ; de perception incomplète,
383 ; d'étrangoté, 388 ; de jamais-\ii,
383 ; de dédoublement, 384 ; de déso-
rientation, 385 ; de petitesse, d'éloi-
gnemont, 386 ; de l'imaginaire, 387 ;
de déjà->'u, de fausse reconnaissance,
387, 3i7 ; du passé et du présent,
388 ; de pressentiment, 389 ; de rcve,
389, 390 ; de cécité, 394 ; de dispari-
tion .du temps, 391 ; d'inintelligence,
393 ; du mystérieux, 394 ; de doute.
395, 397 ; de découragement, 397 ;
d'inachèvement, 398 ; d'indifférence,
398 ; d'ennui, 3oo ; d'incomplétude
du sommeil, 3oo ; d'inquiétude, 3oi ;
du besoin d'excitation, 3a3 ; d'ambi-
tion, 3o4 ; de dépersonnalisation, 3o5,
3ii, 3i5, 317; d'étrangeté du moi,
3ii ; de dédoublement du moi, 3i3;
de mort, 3x6 ; arrêt des — , 870 ; —
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INDEX ANALYTIQUE DES MATIÈRES
755
mélancoliques, 875 ; — d*ennui, 875 ;
de la fin du monde, 877 ; d'enlhou-
siasmc, 38o ; do vide dans la tête, 4oo ;
— du réel, 433 ; interprétation des —
d'incomplctudo, 5^4, 5/» 5 ; des —
d'étrange, 547 * ^° ^*^j^ ^"» ^^^ » *^®'
— de dépersonnalisation, 5^9 ; in-
fluence des — d'incomplétude sur les
obsessions, 585 ; — pathologiques au
début de la maladie, 635.
Serment. Manie du — , i^i.
Sexe. Honte du —, 89; influence du
— sur la psychaslhénie, 61 3.
Signification. Obsession de — , 588.
Simplification de la vie, 700.
Social. Troubles de» sentiments — dans
réreutophobie, 208 ; phobie des situa-
tions — , a 10 : trouble de Taclion —
au début de l'agitation, a^s ; les abou-
lies — , 3'|5, 347 ; l'action — dans la
hiérarchie psychologique, 477 ; diffi-
culté de Taclion — , 570 ; facilité de
l'action faite seule, 571 ; éducation —,
687.
Sommeil. Troubles du — au début des
crises, a '17, 4o6, 407, 4o8 ; rôle de la
volonté dans le — , 4o8, 478 ; senti-
ment d'incomplétude du — , 247.
Somnambulisme hjstérique, 100.
SouRiKE obsédant, 209. •
Spécialisation des insuffisances, 569.
SPHIGMOMANOMkTRE, 4ai-
Stigmates psjcbasthéniques, a6o ; —
hj^stériques, 819, 3ao ; — physiques
de dégénérescence, 611.
Stratification des idées, 656.
Stupei'r, 658, 661.
Subconscient. Mouvement — , 839.
Sublime. Émotion — , 38o.
Substitution d'une manie mentale à
une autre, 149; des agitations, 238;
des phénomènes secondaires aux pri-
maires, 248 ; des obsessions, 656.
Suggestion, rôle dans l'obsession, 63,
452 ; — hypnotique, 76, 102, 333,
334 ; obéissance et — , 343 ; traite-
mont par la — , 702.
Suicide. Impulsion au —, i5.
Superstition. Manie des —, 112, 'i4i'
Surveillance de soi-môme, 129, i3o.
Symbolique. Hallucination —, 94, 109,
lao ; manie — , lao ; lutte — , 175 :
— dans la perception, 569 ; influence
de la manie — sur les obsessions, 585.
Symétrie. Manie de la — , ii5.
Synthèse mentale dans la tension psy-
chologique, 491*
Systématisation de la dérivation, 568,
571, 578 ; délires — , 659, 676.
Tableau des obsessions, 54 ; — des ma-
nies mentales, i ^7 ; — des agitations
motrices, 181 ; — des agitations émo-
iionneUes, a34 ; — des sentiments
d'incomplétude, 4^7 i — des insuffi-
sances psychologiques, 43o ; de la hié-
rarchie psychologique, 487.
Taphéphobie, 21a.
TfeMPs. Sentiment de disparition du — ,
291.
Tendance à l'action dans l'obsession, 75.
Tension sanguine, 4ao ; — psycholo-
gique, 445, 448, 494 ; oscillations de
la , 497, 498, 569. 668 ; relève-
ment thérapeutique de la — , 711.
Terminaisons, 663, 669.
Théories des obsessions, 445 ; — in-
tellectuelle, 448, 45o ; — émotion-
nelle, 453, 458 ; — psychasthénique,
470 ; — des senlimei^ls d'incomplé-
tude, 544 ; — des agitations forcées,
552, 567 ; — de la dérivation psycho-
logique, 554 ; — de l'angoisse, 56 1 ;
— des crises de psycholepsie, 567 ; —
des troubles systématisés, 568 ; — des
agoraphobies, 571 ; des obsessions,
598 ; — anatomiques, 599-602 ; — de
l'unité du syndrome, 725 ; — de la
dégénérescence, 728.
Tics et chorce, 4i ; caractères des — ,
131, 157, 16 i ; les — des divers or-
ganes, i58; les — d'attitude, 159;
classification des —, i64 ; — de per-
fectionnement, i64 ; — de défense,
170 ; — la dérivation dans les — ,
56o ; la systématisation des —, 583 ;
les — au début de la psychasthénie.
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TABLE DES CHAPITRES
Page».
INTRODUCTION VU
PREMIÈRE PARTIE. — ANALYSE DES SYIVIPTOMES. i
CHAPITRE I. — LES IDÉES OBSÉDANTES. ... 3
PREMIÈRE SECTION. — LE CONTENU DES IDÉES OBSÉDANTES. . 4
1. V Expression des idées obsédantes 4
2. L'Obsession du sacrilège 9
3. L'Obsession du crime la
4. L'Obsession de la honte de soi a a
5. V Obsession de la honte du corps 33
6. Les Obsessions hypocondriaques 5o
7. Les caractères communs de ces obsessions 54
DEUXIÈME SECTION. LA FORME DES OBSESSIONS. ... 65
I. La permanence et l'évocation de V Obsession 68
a. La tendance à l'action^ l'absence d'exécution 75
3. La tendance à la représentation^ V hallucination symbolique. . . 85
4. La tendance à la croyance et le critique de l'Obsession gS
5. Le développement incomplet de l'idée obsédante 99
CHAPITRE H. — LES AGlTATIOxNS FORCÉES.. . . io4
PREMIÈRE SECTION. LES AGITATIONS MENTALES. . . Io6
i. Les manies mentales de l'oscillation 106
I. La manie de rinlerrogalion 107
a. Les manies de riiésitalion, de la délibération. ....... 108
3. Les manies du présage Ou do Pinterrogation du sort 110
a. Les manies de l'au delà ii3
I. Les manies de la précision ii3
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TABLE DES CHAPITRES 759
2. Les crises d'agitation forcée 289
I. Les périodes de crise aSg
a. Le point de départ des crises 24 1
3. La substitution des phénomènes secondaires aux primaires, . . 348
4. Les caractères apparents des agitations 253
CHAPITRE m. - LES STIGMATES PSYCHASTHÉNIQUES.. 260
PREMIÈRE SECTION. LES SENTIMENTS d'iXCOMPLIÇtUDE. . . 264
1. Les sentiments d*incomplétude dans l'action 2C4
I. Le sentiment de difliculté 266
— d^incapacité 268
— d'indécision 269
— de gène dans Faction 271
— d^automalisme 272
— de domination 273
— de mécontentement 276
— d'intimidation 278
9. — de révolte 279
2. Les sentiments d'incomplétude dans les opérations intellectuelles. 281
1. Le sentiment de difficulté des opérations intellectuelles 281
2. — de perception incomplète 282
3. — de conception imaginaire 287
4. — de disparition du temps 291
5. — d'inintelligence 298
6. — de doute 296
3. Les sentiments d'incomplétude dans les émotions 298
i. Le sentiment d'indifférence 298
2. — d'inquiétude 3oi
3. Le besoin d'excitation, l'ambition 3o3
4. Les sentiments d'incomplétude dans la perception personnelle.. . 3o5
1. Le sentiment d'étrangeté du moi 3ii
2. — de dédoublement 3 12
3. — do dépersonnalisa lion complète 3i5
DEUXIÈME SECTION. — LES INSUFFISANCES PSYCHOLOGIQUES.. . 3x9
I. Les symptômes de rétrécissement du champ de la conscience. . . 319
1. Les anesthésies 819
2. Les mouvements subconscients • 829
3. Le sommeil hypnotique 33o
4. La suggestion 333
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TABLE DES CHAPITRES
ubles de la volonté 335
'indolence 335
'irrésolutioiT 336
B lenteur des actes 338
es retards 338
B faiblesse des efforts 339
» fatigue - . 339
B désordre des actes 3^0
'inachèvement 3^i
absence de résistance 343
c misonéisme 344
îs aboulies sociales, la timidité 345
îs aboulies professionnelles 349
aboulie et l'inhibition 349
ÎS fatigues insurmontables 353
is inerties 353
ibles de l'intelligence 354
(S amnésies 355
arrêt de l'instruction 36o
inintelligence des perceptions 36i
IS troubles de l'attention 36a
rêverie 363
s éclipses mentales 369
ibles des émotions et des sentiments 370
indifférence 372
s sentiments mélancoliques 375
L'moiivité 377
s émotions sublimes 38o
besoin de direction 383
besoin d'excitation 385
besoin d'aimer 388
besoin d'être aimé 389
crainte de l'isolement 391
retour à l'enfance 391
imour de l'honnêteté 393
besoin d'autorité 393
HOISIÈME SECTION. — LES I?(SUFFISA7tCES PHYSIOLOGIQUES. . . 398
ibles des fonctions nerveuses 398
B céphalalgies et les rachialgies 399
i troubles du sommeil 4o6
i modifications des réflexes 409
blés des fonctions digestives 409
\ troubles gastriques 4io
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TABLE DES CHAPITRES 7t$l
a. Les troubles intestinaux 4iA
3. Les troubles de la nutrition tiib
4. Les troubles urinaires 4 16
3. Les modifications de la circulation 4ao
I. Les modifications de la tension sanguine 4ao
a. Les troubles vaso-moteurs et sécrétoires ^aa
4. Les troubles des fonctions génitales 435
QUATRIÀMB SBCTION. — LES CARACTtRES GÉNÉRAUX DE L*ÉTAT P8Y-
CBASTHéNIQUB 4a 7
I. L'incomplétude morale.*. 4^7
a. La perte de la fonction du réel 43 1
3. Les périodes psyckasthéniques 439
DEUXIÈME PARTIE^ — ÉTUDES GÉNÉRALES SUR
L'ABAISSEMENT DE LA TENSION PSYCHOLOGIQUE. 443
CHAPITRE I. — LES THÉORIES PATHOGÉNIQUES.
LES MODIFICATIONS DE LA TENSION PSYCHOLOGIQUE. 445
PREMliRS SECTION. — THÉORIES INTELLECTUELLES ET THÉORIES
ÉMOTIONNELLES 44^
I. L'exposé des théories intellectuelles 448
a. La discussion des théories intellectuelles 45o
3. L'exposé des théories émotionnelles 453
4. La discussion des théories émotionnelles 458
DEUXIÈME SECTION. LE PRINCIPE DE LA THÉORIE PSTCHASTHÉKIQUE. 470
I. Le résumé historique des théories psychasthéniques 471
a. La hiérarchie des phénomènes psychologiques 474
3. La tension psychologique 488
4. L'abaissement de la tension psychologique 497
5. Le rapport des crises de psycholepsie avec les accès épilepiiques. 5oa
6. L'oscillation du niveau mental. — Les influences qui déterminent
l'abaissement 5i4
I. L'influence des maladies 5i4
a. L'influence de la fatigue 5i5
3. L'influence des émotions 517
LES OBSESSIONS. I. 49
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I. .
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Qotion 535
lOîc. — l'interprétation des symptômes. . 544
mtiments d'incomplétude 544
gUa lions forcées 55 1
agitations forcées 55a
dérivation psychologique. . . .... 554
5 les agitations et les angoisses 56o
\ la rumination mentale. . . 564
oubles systématisés 568
les insuffisances psychologiques 569
de la dérivation 57$
dée obsédante 583
D du contenu des idées obsédantes 584
Dtiments d'incomplétude sur le contenu des idées
585
uffisances psychologiques sur le contenu des idées
589
nements extérieurs sur le contenu de Tobsession. 59a
) la forme de l'obsession 596
tomique des théories 599
PITRE n. - L'ÉVOLUTION 606
tCTIOK. LES CONDITIONS ÊTIOLOGIQUES. . 6o6
607
es de dégénérescence 611
6i3
les déterminantes. . 618
s déterminantes 6a4
6a4
6a6
la vie 637
nels 63o
psychasthénie constitutionnelle et acquise. 63 1
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TABLE DES CHAPITRES 763
DEUXIÈME SECTION. l'ÉVOLUTIOPÏ DE LA MALADIE. . . 634
I. Les formes du début 634
I. Les sentiments pathologiques 635
a. Les aboulies 638
3. Les tics ...... 639
a. Les principales variétés cliniques 64i
3. La marche de la maladie 645
I. La forme aiguë 646
a. La forme chronique 646
3. La forme intermittente 648
4. La forme rémittente 65a
5. Les périodes critiques 654
4. Les complications 657
I. Les accidents phj^siques 657
a. L*aliénation 658
5. Les terminaisons 663
I . L'inertie et Tisolement 664
3. La guérison relative 666
CHAPITRE ni. - LE DIAGNOSTIC ET LE TRAITEMENT. . 670
PREMIÈRE SECTION. — LE DIAGNOSTIC 67O
DEUXIÈME SECTION. LE PRONOSTIC. ... 680
TROISIÈME SECTION. LA THÉRAPEUTIQUE 684
1. La prophylaxie 684
a. Le traitement physique 688
I. L'alimentation et rhygiène 690
a. La médication sédative. . '. 693
3. La médication tonique ... 695
4. Le traitement par les agents physiques 698
a. Le traitement moral 699
I. La simplification de la vie 700
a. Le traitement par la suggestion 70a
3. La direction morale* la réponse à la question 706
4. Le relèvement de la tension psychologique, la rééducation de Té-
motion 711
5. La direction des efforts, la rééducation de l'attention 715
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