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UNIVERSITE DE LOUVAIN
RECUEIL DE TRAVAUX
/publiés par les membres
DES CONFÉRENCES D'HISTOIRE ET DE PHILOLOGIE
48m« FASCICULE
Les Pèlerinages expiatoires
et judiciaires
dans le droit communal de la Belgique
au moyen âge ':
PAR
Etienne VAN CAUWENBERGH
Docteur en Sciences morales et historiques
Bibliothécaire de l'Université catholique de Louvain
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LOUVAIN ^6
Bureaux du Recueil
40, Rue de Namur
1922
iMpr. « Etablissements CEUTERICK », rue Vital de Coster, I^uvaûi
COMITE DE DIRECTION
MM. A. Bayot,
F. Bethune,
A. De Meyer,
G. Doutrepont,
R. Lemaire,
R. Maere,
Ch. Mœller,
E. Remy,
Ch. Terlinden,
L. Van der Essen.
Les Pèlerinages expiatoires et judiciaires
dans
le droit communal de la Belgique
au moyen âge
Opus quod inscribitur : Les pèlerinages expiatoires et judi-
ciaires dans le droit communal de la Belgique au moyen âge,
auctore St. Van Cauwenbergh, ex auctoritate Eminentissimi
et Reverendissimi Archiepiscopi Mechliniensis et legum acade-
micarum praescripto recognitum, quum fîdei aut bonis mori-
bus contrarium nihil çontinere visum fuerit, imprimi potest.
Datum Lovanii, die 30ajunii 1922.
P. LADEUZE,
Rect. Univ.
UNIVERSITÉ DE LOUVAIN
RECUEIL DE TRAVAUX
publiés par les membres
DES CONFÉRENCES D'HISTOIRE ET DE PHILOLOGIE
48n»e FASCICULE
Les Pèlerinages expiatoires
et judiciaires
dans le droit communal de la Belgique
au moyen âge
PAR
Etienne VAN GAUWENBERGH
Docteur en Sciences morales et historiques
Bibliothécaire de l'Université catholique de Louvain
LOUVAIN
Bureaux du Recueil
40, Rue de Namur
1922
Impr. « Etablissements CEUTERICK », rue Vital de Coster, Louvain
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A SON ÉMINENCH LE CARDINAL MERCIER
ARCHEVÊQUE DE MA LINES
PRÉFACE
A lire les historiens qui se sont occupés des institutions
urbaines de la Belgique au moyen âge, on pourrait croire que,
jusqu'au début des temps modernes, les échevinages communaux
ne se soient guère écartés des stipulations de la charte dans
l'exercice de la justice. A première vue, cette opinion paraît
d'autant plus fondée qu'aux XIVe-XVe siècles on ne rencontre
guère, en dehors de la principauté de Liège, ni en Flandre
ni dans le duché de Brabant, de nouvelles dispositions légales.
Toutefois, pour ces dernières provinces, l'examen des registres
aux sentences scabinales, appartenant aux XI Ve- XVe siècles
le une procédure et un système pénal particuliers et consé-
quemment l'existence d'une période intermédiaire entre l'époque
de nos premières chartes communales et celle de la rédaction des
coutumes locales, entreprise au cours du XVIe siècle.
Le pèlerinage a été de toutes les peines celle à laquelle les
juges communaux de cette époque recouraient le plus fréquem-
ment dans la répression des délits les plus divers. Dès le haut
moyen âge, la pratique des pèlerinages expiatoires avait été
introduite dans la jurisprudence ecclésiastique, en partie,
semble-t-il, sous l'in/luence des pénitentiels. Plus tard, aux
XIIIe-XIVe siècles, elle obtint un succès considérable de la part
du tribunal inquisitorial de Toulouse et, de là, se répandit dans
toute la France. De ce pays, elle passa dans nos provinces. En
effet, c'est à Tournai, ville de droit français, que se rencontrent
les premières condamnations aux pèlerinages pénitentiaires
prononcées par le tribunal séculier.
La pratique des pèlerinages expiatoires a pris rapidement,
dans nos provinces, une extension considérable. Certains auteurs
n'ont vu dans cet empressement des tribunaux communaux
qu'une simple imitation ou un epj'et de la main-mise du pouvoir
ecclésiastique sur les autorités civiles (i). A notre avis les
garanties particulières d'efficacité qu'offrait ce système pénal,
minutieusement réglé dans toutes ses applications, expliquent
(i) B. J. Bod.max, Von dey Bedefahrt, einer besondern Gerichts-
strafe dey Teutscheu im mittlem Zeitaltey, dans Beytvaege zum teut-
schen Rechte, éd. J. C. SlEBE:vKEES, 1788, t. III, p. 143-160.
VIII PREFACE
suffisamment les faveurs dont les èchevinages communaux Vont
entouré.
Si fréquente qu'ait été aux XIV'-XVe siècles l'application
des pèlerinages pénitentiaires, les historiens ne leur ont guère
prêté grande attention. S' attachant à mettre en lumière les dis-
positions légales qui se sont succédées dans nos provinces au cours
des siècles, la plupart d'entre eux ont passé sous silence la pro-
cédure et le système particuliers à cette période , qu'on ne retrouve
que dans les registres aux sentences. Quelques rares auteurs (i)
cependant ont consacré de courtes études aux pèlerinages expia-
toires. Mais, e?i général, ils n'ont pas eu l'intention de donner
un travail fouillé et systématique du sujet et ils se sont con-
tentés d'en signaler l'importance et d'en faire connaître som-
mairement la pratique. Rechercher l'origine des pèleri?iages
pénitentiaires imposés au XIVe et au XVe siècle dans les com-
munes flamandes , brabançonnes et liégeoises ; déterminer leur
caractère, décrire la procédure dont ils étaient V aboutissement
et la manière dont ils étaient exécutés, tel est l'objet de cette
étude.
En livrant ce travail à la publication , qu'il nous soit permis
de rendre hommage à la mémoire de Monsieur le chanoine
Alfred Gauchie, dont nous eûmes le bonheur de recevoir la for-
mation aux éludes d'histoire. Nous sommes particulièrement
reconnaissant à Monsieur le professeur L. Van der Essen, qui
a ?nis à notre disposition les ressources de ses connaissances de
l'histoire nationale. Messieurs les professeurs A. De Meyer et
A. Janssen ont bien voulu relire les épreuves de ce travail ;
qu'ils veuillent trouver ici l'expression de notre vive gratitude.
(i) J. G. ab UTRECHT DrESSEI,huys, De poena peregrinationis
sacrae medio aevo in Neerlandia usitata, Goes, 1851 ; Vanden Bus-
SCHE, Les pèlerinages dans notre ancien droit pénal, dans BCRH.,
4e série, t. XIV, Bruxelles, 1887; U. BERWÈRE, Les pèlerinages judi-
ciaires au moyen âge, dans la Revue bénédictine, 1890, t. VII,
p. 520 sqq. ; J. Schmitz, Suhnewallfahrten im Mittelalter.Bomx,igio;
Iv. VANDER BsSEN, De straf- en rechterlijke verzoeningsbedevaarten in
de middeneeuwen, dans Verhandelingen van de Algemeene Katholieke
Vlaamsche Hoogeschooluitbreiding. Anvers, 191 1. Voir aussi lej
ouvrages généraux de E). Poui^ET, Histoire du droit pénal dans
l'ancien duché de Brabant. dans les Mémoires couronnés... publiés par
l'Académie Royale de Belgique, t. XXXIII. Bruxelles, 1867 et Essai
sur l'histoire du droit criminel dans l'ancienne principauté de Liège,
ibidem, t. XXXVIII, 1874.
INTRODUCTION
I. LA LEGISLATION ET LA JURISPRUDENCE
CANONIQUES
EN MATIÈRE DE PÈLERINAGES EXPIATOIRES
La conversion des peuples du Nord au christianisme n'en-
traîna pas du coup la réforme de leurs mœurs : pendant des
siècles, l'Eglise eut à lutter pour ainsi dire pas à pas
anciens préjugés et les habitudes barbares. Dès les
l'évangélisation des peuples celtiques et des peupl
niques, elle dut réprimer de graves fautes, non ;
chez les fidèles, mais aussi chez ceux qu'elle ava
comme ses ministres. Soit à l'initiative propre des
soit à ia suite de décisions prises dans des con.
lois pénales furent portées contre certaines catégories uc
délinquants. Ces canons, réunis, amplifiés d'après la juris-
prudence et adaptés aux circonstances, formèrent le noyau des
Pénitentiels qui nous ont été conservés nombreux et qui révè-
lent nettement les tendances propres aux diverses contrées en
matière de discipline pénitentiaire. La nature même de ces
recueils, formés d'éléments qui se répartissent sur tout le cours
du moyen âge. rend plutôt difficile l'étude de l'évolution du
système pénal ; néanmoins il est possible de rétablir celui-ci
dans ses grandes lignes, à propos de l'une ou l'autre pénalité
particulière.
Une des peines les plus graves usitées dans l'Église était
l'exil ou le bannissement : dans une première phase de la juris-
prudence canonique, le coupable est simplement éloigné, sans
qu'on lui assigne un lieu de résidence ou même un but à
atteindre ; mais bientôt, en partie sous l'influence du culte des
saints, on impose régulièrement au délinquant de visiter, durant
le temps de son exil, des sanctuaires célèbres ; enfin, par
2 INTRODUCTION
mesure disciplinaire, semble-t-il, on spécifie quel endroit le
condamné aura à visiter.
Quelle est l'idée qui a incité le législateur ecclésiastique
à appliquer le bannissement comme peine ? Certains veulent
y reconnaître l'influence du droit romain, qui ordonne
de reléguer dans une île le coupable d'inceste (i); cette
explication, alors même qu'elle serait vraie, ne tient compte
que d'une sorte de délit ; or, comme nous le verrons plus
loin, l'exil est prononcé pour plusieurs autres fautes. Une
autre opinion, qui remonte à Raban Maur, s'appuie sur la
sentence portée par Dieu contre le premier meurtrier, pour
prétendre que c'est en souvenir de la peine de Caïn que les
homicides étaient condamnés à errer sans trouver jamais de
repos (2).
Certes cet épisode tragique rapporté aux premières pages de
la Genèse a dû agir fortement sur l'esprit des législateurs,
à une époque où le symbolisme puisait largement aux sources
de l'Écriture. Mais sans nier l'importance de ce fait, on peut se
demander s'il faut chercher si loin. Une fois la peine de mort
exclue du système pénal canonique, la communauté chrétienne
ne pouvant tolérer dans son sein la présence d'un criminel, sur-
tout s'il était évêque ou prêtre, qui constituât un défi permanent
pour la foi et les mœurs des fidèles, l'exil ou le bannissement
était, nous semble-t il, une mesure qui devait naturellement se
présenter à l'esprit du législateur, soucieux de réprimer, plus
efficacement que par la prison, les plus grands excès.
Examinons brièvement les délits pouvant donner lieu à des
(1) H. J. SchmiTz, Die Bussbûcher u. die Bussdiscïplin der Kirche,
p. 274. Mayence, 1883 : «Dièse Bestiminung des peregrinare ist offenbar
eine Ausbildung der im rômischen Rechte als gesetzliche Strafe fur
deti Incest bestimmten Déportation auf eine Insel : Incesti poenam,
quae in viro in insulam deportatio est. Wir finden also hier in der
kirchlichen Bussdisciplin abermals eine intéressante Uebereinstim-
mung und harmonische Entwicklung mit dem bûrgerlichen rômischen
Rechte ».
(2) « Parricidivun autem, quam sit detestabile crimen, in judicio
facto inter Caïn et Abel fratrem suum Dominus ostendit ipse, cum
ad Caïn parricidam ait : Maledictus eris ... In quo etiam posuit
signum, hoc est, ut tremens et gemens profugus semper viveret, nec
auderet sedes habere quietas ». Cfr Lettre de Raban Maur à Héribald,
évêque d' Aux erre, chapitre VII, dans Hartzeim, Concil. Germaniae,
t. II, p. 196. — Même texte dans les décrets du concile de Mayence,
de 847. Ibid. II, 158.
INTRODUCTION 3
sentences de bannissement de la part du pouvoir ecclésias-
tique : les Pénitentiels du moyen âge nous en fourniront les
textes (1). Il est à remarquer qu'en général la durée du bannis-
sement est proportionnée tant à la gravité de l'infraction, qu'à
la qualité du délinquant et à celle de sa victime.
En haut de l'échelle nous trouvons les méfaits commis par
les personnes sacrées : le bannissement perpétuel ou tout au
moins d'une durée de 12 ans est la peine qui frappe l'homicide
commis par un évêque ou un prêtre (2). Le clerc qui tue son
fils (3) ou simplement son prochain de propos délibéré (4) ou
par surprise (5), se voit exilé pour un temps variant de dix à six
ans. Celui qui a fait vœu de perfection et s'est rendu coupable de
meurtre par haine, est banni pour sa vie entière (6). Les péchés
de luxure commis par cette même catégorie de personnes sont
(1) Nous citons les textes des Pénitentiels d'après l'édition
F.W.H. WASSERSeiH,EBEN, Die Bussordnungen der Abandlaendisc
Kivche. Halle, 1851.
(2) « Si quis hoinicidium fecerit episcopus. . . cunctos dies v:
suae peregrinando sineat. Presbyter. . . deponatur superiori penil
tia ». Poenitentiale XXXV Capitulorum ; WasserscheEBEN,
cit., p. 506. — « Cunctos dies vitae suae peregrinando liiùa
Poenitentiale. Vallicellanum primum, c. 10; WasSERSCHEEben, Op. 1
p. 548. — « XII aunos relicto gradu suo in peregrinatione penitea
Poenit. Sangallense, c. 1; WASSERSCHEEBEN, Op. cit., p. 426.
« Seinper peregrinetur ». Poenit. Civitatense, c. LXVI. WASSERSCH
ben, Op. cit., p. 695.
(3) « Extoris existât in patria sua, donec inipleavit numerus
annorum ». Poen. Vinniai, § 12 ; Wasserschxeben, Op. cit., p. 1
m.
(4) « X aunis exul poeniteat ». Poen. Merseburgense A, c. 1; WASS
SCHEEBEN, Op. cit., p. 391 ; idem, Poen. Columbani B, c. 1 ; Wa
Op. cit., p. 355 ; idem, Poen. Parisiense, c. 3 ; WASS., Op. cit., p. 41
idem, Poen. Bobiense, c. 1 ; WASS., Op. cit., p. 407 ; idem, Poen. Vido-
bonense A, c. 1 ; WassERSCHEEBEN, Op. cit., p. 418. — «X aunis
extorem fieri oportet et agat penitentiam VII annorum in alio orbe ».
Poenit. Vinniai, § 23 ; Wasserschleben, Op. cit., p. 113.
(5) « Si autem subito occident et non odio et amici fuerunt ante,
sed instinctu diaboU per inreptionem, III aunis peniteat cum pane
et aqua per mensuram et III aliis abstiueat se a vino et a carnibus
sed non in patria sua ». Poen. Vinniai, § 24 ; WASSERSCHXEBEN, Op.
cit., p. 113.
(6) « Cum peregrinatione perenni muudo moriatur ». Poen. XXXV
Capitulorum, cl, § 3 ; Wassersciieeben, Op. cit., p. 506. Idem,
Poen. Bigotianum, IV, c. III, § 4 ; Wasskrsciilkben, Op. cit., p. 454.
INTRODUCTION
punis d'exil perpétuel ou temporaire (i) ; la violation du secret
de la confession, d'exil à perpétuité (2) ; le vol sacrilège per-
pétré par un moine, d'exil pour deux ans (3).
Quant aux délits commis par les simples laïcs, ils sont
punis de la peine de l'exil s'ils sont commis sur des proches
parents ou sur des personnes sacrées, ou s'ils revêtent un
caractère de gravité exceptionnelle. Ainsi le parricide est banni
pour cinq ans (4), pour sept ans (5), ou même à perpétuité (6).
(1) « Si quis de his gradibus fornicaverit aut sodomite. . . epis-
copus XXV annis peniteat. . . peregrinando penitentiain finiatur. Si
presbyter est, XX annis peniteat, V ex his in pane at aqua shniliter
peregrinando ». Poen. Vallicellanum secundum, c. 16 ; WASSERSCHXE-
brn, Ob. cit., p. 558. — « Clericus seinel fornicans I annutn peniteat in
pane et aqua. si genuerit filium, VII annos peniteat exul. . . ». Poen.
Cummeani, c. III § 29 ; WASSERSCHlyEBEN, Op. cit., p. 47.4. — « Si
aatem presbyter aut diaconus post taie peccatum voluerit monachus
fieri, in districto proposito exilii annuni et dimidium peniteat ».
Ibidem, c. II, § 26 ; WASSERSCHEEBEN, Op. cit., p. 471.
(2) « Si quis sacerdos palam fecerit, et secretum penitentiae usur-
paverit, . . . diebus vitae suae peregrinando finiat ». Corrector Bur-
chardi, c. 244 ; WaSSERSCHXEBEN, Op. cit., p. 103.
(3) « Monachus consecrata furatus in exilio anno et altero cum fra-
tribus peniteat ». Synodus Aquilonatis Britanniae, § 3 ; WASSERSCH-
EEBEN, Op. cit., p. 103.
(4) A noter que dans les Pénitentiels le mot parricide est pris au
sens large, c'est-à dire pour le meurtrier de personnes qui lui sont
proches par parenté charnelle ou spirituelle. Ainsi « qui patrem et
matrem, sororem aut fratrem sive filium seu compatrem aut filium
de sacro lavacro, seu proprium seniorem et alios similes videlicet
presbiterum aut suam uxorem voluntarie occiderit, XV annis peni-
teat, V, ex ipsis peregrinando eat aut in monasterio cum luctu peni-
teat ». Poenit. Vallicellanum primum, c. 13 : De Paricidiis ; WaSSER-
SCIîeeben, Op. cit., p. 549. — « Si quis vir suam uxorem sine causa
occiderit, V annis exul fiât extra terminos suae patriae ». Poenit.
Vallicellanum primum, c. XIV ; Wasserschxeben, Op. cit., p. 549.
(5) « Extra patriam VII annis exul fiât ». Poenit. M ediolanense ;
WasserscheEBEN, Op. cit., p. 712. — Les « Formulae senonenses
recentiores », n° 11, (MGH. Formulae, éd. ZEUMËR, p. 217), qu'on
rencontre dans une lettre de sauf-conduit délivrée par un évêque à un
pèlerin, supposent aussi le nombre de 7 ans d'exil pour le meurtrier
de proches parents. Idem, pour les homicides involontaires.
(6) « Si quis patrem aut matrem casu occiderit, XV annos poeni-
teat. Si quis voluntarie taie homicidium fecerit, duriter valde exul
nsque ad exitum vitae poeuiteat. Si quis casu filium suiun occiderit,
INTRODUCTION
Les coups simples portés aux parents sont punis de sept ans
d'exil (i). Le meurtrier d'un évêque doit rester éloigné de sa
patrie pendant quatorze ans (2) ;?la peine de meurtre simple est
ordinairement l'exil pour trois ou cinq ans (3). Les législateurs
n'avaient certes pas plus d'indulgence pour les fautes de luxure;
les incestueux se voient exclus a jamais de la communauté et de
leur patrie (4). Certains Pénitentiels postérieurs admettent des
adoucissements et rabaissent le temps d'exil; à douze, à dix,
même à sept ans (5).
Il est curieux de constater que pour l'adultère, la fornication
aggravée par la parenté spirituelle résultant du baptême ou de
XII annos poeniteat Si vero voluntarie, usque ad exiturn vitae exul
poeniteat ». Poenit. Pseudo-Theodori, c. VI, § 1 8, 19 ; WASSERSCBXE-
ben, Op. cit., p. 588.
(1) « Si quis inhonoraverit patrem aut rnatrem, III annos poeniteat.
Ouod si mamun levaverit aut ferita fecerit, VII annis exsul poeniten-
tiani ag.tt ». Poenit. Hubertense, c. 39 ; WASSERSCHXEBEN, Op. cit.,
p. 382. — « VII annis exul in pane et aqua poeniteat ». Polu. Mer-
s burgense B, c. 31 ; WASSERSCHXEBEN, Op. cit., p. 432.
(2) « XIV annis exul in pane et aqua poeniteat ». Poenit. Pseudo-
Theodori, c. III, § 5 ; Wasserschxeben, Op. cit., p. 569.
(3) « Ouicuinque fecerit homiciditnn, id est p;oximum suum occi-
dent, tribus annis inermis exul in pane et aqua poeniteat ». Poenit.
Columbani, c. XIII ; WASSERSCHXEBEN, Op. cit., p. 357. — « III
(annis) exsul poeniteat ». Poenit. Merseburgense A, c. 141 ; W.v
SCHXEBEN, Op. cit., p. 405. — « V annos exul poeniteat ». P
Cummeani, c. VI, § 17 ; Wasserschxeben, Op. cit., p. 479.
(4) « Oui mechator matris est, III annis (peniteat) cuni peregrina-
tione perenni ». Synodns Luci Victoriae, § 6 ; WASSERSCHXEBEN,
Op. cit., p. 104. — « Cuin peregrinatione perenni VII annos peniteat ».
Poenit. Pseudo-Theodori, § 16 ; WASSERSCHXEBEN, Op. cit., p. 186. —
Maechator matris, curn peregrinatione perenni poeniteat ». Poenit.
XXXV Capituloruni, c. VII, § 12 ; WASSERSCHXEBEN, Op. cit.,
p. 510.
(5) « Si quis fornicaverit, quod al>sit, cum matre sua aut curn
sorore sua aut cum commatre su 1 fontanea, XII annos poeniteat,
in exilio per diversa regionis agat poenitentiam ». Poenit. Mersebur-
gense C, c. 4 ; WASSERSCHXEBEN, Op. cit., p. 436. — «X annis pere-
grinus poeniteat ». Poen. Merseb. A, c. 43 ; Wasserscheeben, Op.
cit., p. 396. — « Decem annis peniteat et peregrinis incedat ». Poenit.
Civitatense, c. 26 ; WASSERSCHXEBEN, Op. cit., p. 691. — « VII annis
extra metas ipsius terrae exul fiât ». Poenit. Y allicellanum tcrtixim, en;
Wasserschxeben, Op. cit., pp. 682-683. — « Septem annos extra
metas ipsius terrae exul fiât ». Poenit. Pseudo-Gregorii, III, en;
Wasserschxeben, Op. cit., p. 540.
6 INTRODUCTION
la confirmation, le temps d'exil n'est pas stipulé (i). La plus
ancienne mention de « peregrinatio » est celle que porte,
contre les voleurs d'argent appartenant à l'église, la Collectio
canonum Hibernensis, composée vers le début du vu Ie siècle,
mais dont on fait, partiellement du moins, remonter la source
à S. Patrice (2). Enfin le parjure par crainte de la mort est
puni d'un bannissement de trois ans (3).
Jusqu'ici il n'a été question que d'exil, de bannissement
sans destination spécifiée. Comment en est-on venu à déter-
miner, comme but du voyage imposé à certains criminels,
des lieux, devenus célèbres par les reliques ou les tombeaux
des saints qu'on y vénérait ? C'est avant tout par la croyance
universelle des fidèles dans l'intercession efficace des saints
pour la rémission des péchés, Le coupable qui, malgré ses
fautes, a conservé sa foi intacte, puisqu'il se soumet humblement
à la dure sentence qui le frappe, ira tout naturellement, au cours
de ses pénibles voyages, chercher un pansement à ses plaies
physiques (4) et morales aux sanctuaires, dont la renommée
avait atteint les contrées les plus éloignées. Nous en trouvons
la preuve dans une lettre de sauf- conduit du commencement
du IXe siècle, donnée par un évêque à un coupable qui avait été
condamné, pour le meurtre d'un de ses proches, à une « peregri-
(1) « Si quis adulterium commiserit . . . certe exilio destinetur ».
Poenit .Hubertense, c. IX ; WasserscbxEBEN, Op. cit., p. 378. —
« Certe in exilio destinet ». Poenit. Merseburgense B, c. 24 ; Wasser-
SCHXEBEN, Op. cit., p. 431. — «Si quis filiam vel sororem ex sacro fonte,
vel chrismate. . . f ornicaverit . . . exilio proficiscant ». Poenit. Huber-
tense, c. 51; Wasserschi,ebEn, Op. cit., p. 384. — «Exilio proficiscant ».
Poenit. Merseburgense B, c. 10 ; WaSSERSCHEEBEN, Op. cit., p. 430.
(2) « Qui furatus fuerit pecuniam aut a sancta ecclesia aut in civi-
tate intus, ubi martyres et corpora sanctorum dormiunt ... in pere-
grinationem ejiciatur ». Die Irische Kanonensammlung, p. ioi, 1885.
Cfr J. SchmiTz, Op. cit., p. 7 ; 2e éd., p. 101. Halle, 1885.
(3) «Si... non per cupiditatem, sed mortis timoré hoc fecit (i. e.
per jura ver it), tribus annis inermis exul poenitat ». Poenit. Colum-
bani B, c. 20 ; WasserscheEBEN, Op. cit., p. 358. Idem, Poenit.
Cummeani V, § 4 ; WasserschxEBEN, Op. cit., p. 477. Idem,
Poenit. Vallicellanum secundem, c. 40 ; WASSERSCHEEBEN, Op. cit.,
p. 562. Idem, Poenit. Pseudo-Theodori, c. 9 ; § 9 ; WASSERSCHXEBEN,
Op. cit., p. 593.
(4) Voir plus loin ce que nous disons des chaînes et des entraves
que les condamnés devaient porter jusqu'à ce qu'elles se brisent.
INTRODUCTION 7
natio » de sept ans ; l'évêque adjure ceux qui s'intéresseront au
sort de l'exilé de ne pas retenir celui-ci, mais de lui laisser
prendre promptement la route des sanctuaires (i). Le texte
prouve qu'on s'attendait à ce que le banni visitât tout naturel-
lement ces lieux. Cette pratique passa dans la législation
elle-même. Un fragment concernant les reliques de Jean, abbé
de Réome, attribué à S. Grégoire de Tours (2), et un passage
du Pénitentiel du Pseudo-Théodore (3) sont les premiers
témoins de ce fait, que Mabillon constate en ces termes : « qui
homicidium perpetraverant, ferreis vinculis constricti, per loca
sancta peregrinari iubebantur » (4). Les Gesta Sanctorum Roto-
nensium, composés entre 868 et 875 (5), rapportent les pérégri-
nations qu'un criminel, condamné à visiter en général les
« loca sanctorum », fait en compagnie de ses frères. Le récit est
caractéristique parce qu'il montre comment, dans des pèleri-
nages auxquels on avait fixé comme terme des lieux saints,
survit encore l'ancienne conception du bannissement et des
errements au gré du hasard. Le condamné et ses parents se
rendent d'abord aux « limina SS. Apostolorum Pétri et Pauli »,
passent la mer et vont à Jérusalem et en Egypte, « lustrantes
monasteria et coenobia ». De là ils font route vers le tombeau
de S. Cyprien près de Carthage, et retournent à Rome. Une
deuxième fois ils visitent le tombeau du Christ et passent par
Cana et le Mont-Sinaï ; au retour ils revoient encore Rome et
parcourent les sanctuaires de Bourgogne, d'Aquitaine, de
(1) « Vos ei nullo modo teneatis, nisi tantum, quando ad vos vene-
rit, mansionem ei et focum, panera et aquam largire dignemini et
postea sine detentione liceat ei ad loca sanctorum festinare ». For-
mulae Senonenses recentiores, n° 11 ; MGH. Formulae, éd. Zeumer,
p. 217.
(2) « Ouidem fratricida, pro enormitate criminis ferreis circulis
alligatus praeceptum, habuit ut septem amiis loca sanctorum per-
agrando circuiret ». GREG. Turon., De Gloria Confessorum , (post
cap. 85) ; MGH. SS. Rerum Merov., t. I, p. 803.
(3) « Si quis, pro contentione temporalium rerum, propinquiun,
vel presbyterum, vel compatrem occiderit, oportet illmn VII annis
exulem a patria (se) ejicere, et, per diversas provincias, sanctorum
requirere loca ». Poenit. Pseudo-Theodori, c. III, § 11 ; WasserschxE-
ben, Op. cit., p. 569-570.
(4) Acta Sanctorum Ordinis S. Benedicli, t. II, p. xxx.
(5) Cfr J. SchmiTZ, Suhnewallfahrten..., p. 15.
8 INTRODUCTION
Neustrie et de Bretagne. Enfin, au tombeau de S. Marcellin, le
coupable obtient un signe que ses péchés lui sont remis (i).
Nombreux d'ailleurs sont les exemples fournis par la
littérature hagiographique du moyen âge (2).
Mais les abus ne devaient pas manquer de se produire ; tous
ces pénitents n'avaient pas au même degré la componction du
cœur et la dévotion des saints lieux ; pour beaucoup le fait
d'être éloignés de leur patrie, de leurs parents, de leurs chefs
spirituels, était une occasion de se procurer, d'une façon plus
facile que par le travail ou l'aumône, les moyens de subvenir à
leur misérable vie. Aussi voyons-nous le législateur intervenir
définitivement dans la répression des abus que ce genre de péni-
tence devait nécessairement amener avec lui. Un capitulaire
de 789 stipule que dorénavant ceux qui ont commis un crime
capital ou extraordinaire, devront se fixer dans un lieu, se mettre
au service d'un maître, travailller et remplir pour le reste les
conditions de pénitence que leur ont imposées les autorités
(1) Gesta SS. Rotonensium, III, 8, dans Mabielon, Acta Sancto-
rum O.S.B., IV, 2, p. 219.
(2) Voir Waeahfrid, Vita Galli (833-834), A. II, 33 (MGH. SS.
Rer. Merov., t. IV, p. 332); Rudolf, Vita Leobae (vers 835), c. 22 (Ib.
t. XV, p. 130); Gesta sanctorum Rotonensium III, 8 Mabildon, A. SS.
O.S.B., IV, 2, 219 seq. et plus haut ; Vita II Bertini (rxe siècle),
c. 24 (AA. SS. Septembris II, 594); Vita III Medardi (rx* siècle),
c. 14. (AA. SS. Junii II, 84); Miracula Remacli (ixe siècle), c. 3 (AA.
SS. Septembris I, 697); Acta Florentii (rxe siècle), c. 19 (AA. SS. Sep-
tembris VI, 431); Miraculae Bertae (IXe siècle), c. 1 (MGH. SS. XV,
564); Aimoin, Mirac. Germani II, 13 (Mabiixon, III, 2, 117); Adso,
Miracula Mansueti (Xe siècle), c. 18 (MGH. SS. IV, 514); LanTFRED,
Mirac. Swithuni (fin Xe siècle), c. 32 (AA. SS. Julii I, 335); Miracula
Bavonis (vers 1000), III, 5 (MGH. SS. XV, 596); Vita Waldburgae
(vers 1022), c. 4 (MGH. SS. XV, 765); PETRUS Damiani, Vita Ro-
mualdi (vers 1040), c. 28, (MGH. SS. IV, 852 seq.); Chronicon Mediani
monasterii (vers 1050), c. 19 (MGH. SS. V, 92); Otloh, Vita Wolf-
kangi (vers 1050), c. 41 (MGH. SS. IV, 542); BE^THA, Vita Adel-
heidis (vers 1056), c. 10 (MGH. SS. XV, 763); Drogo, Miracula Win-
noci, (vers 1070), c. 15 (MGH. SS. XV, 779); Libtjtn, Miracula Leonis
IX, (deuxième moitié du XIe siècle), c. 10 (AA. SS. Aprilis II, 668);
Raduefus TorTarius, Mirac. Benedicti, c. 19 (Mabieeon, IV, 2,
401); Miracula Bertini — contin. V, 55 (MGH. SS. XV, 521); De
Sancta Agatha Hildegarde, c. 4 (AA. SS. Febr. I, 721); JoanneS
GoSCEWNUS, Miracula Auguslini (vers 1100), c. 25 (Mabiixon, I,
555); Vita Meingoldi (xne siècle), c. 19 (MGH. SS. XV, 561); Vita
Appiani, c. 13. (Mabielon, III, 2, 554 seq.).
INTRODUCTION g
spirituelles (i). Le concile de Mayence, tenu en 847 sous
Raban Maur, constate les mêmes désordres de ceux qui, sous
prétexte de pénitence, s'adonnent à toutes sortes d'excès et de
vices et édite des mesures analogues (2).
Dès ce moment la pratique semble fixée de n'envoyer des
coupables en exil perpétuel ou temporaire qu'à des lieux déter-
minés. L'ancienne conception de l'exil se trouve jointe à cette
autre, plus neuve, du pèlerinage aux saints lieux, dans une sen-
tence du xr siècle, ordonnant un voyage et un séjour à
Jérusalem contre ceux qui violeraient la trêve de Dieu (3). En
1059, Pierre Damien, légat pontifical, impose aux clercs simo-
niaques de Milan des pèlerinages à Rome et à Tours (4) ; le
même saint impose comme pénitence à un certain comte Renier
le pèlerinage de Jérusalem ; on conserve de lui une lettre où il
lui rappelle l'obligation d'accomplir sa pénitence (5). Une
constitution de l'empereur Frédéric Barberousse de 1186 laisse
au choix de l'évêque d'imposer aux incendiaires un pèlerinage
au tombeau du Sauveur ou à Saint-Jacques de Compostelle, la
Jérusalem de l'Occident (6). Les annales de notre pays nous
(1) « Item ut isti mangones et cotiones, qui sine omni lege vaga-
bundi vadunt per istam terrain, non sinantur vagare et deceptiones
horainibus agere, nec isti midi cum ferro, qui dicunt se data sibi poe-
nitentia ire vagantes : melius videtur, ut si aliquid inconsuetuni
et capitale crimen conmiserint, ut in uno loco pennaneant laborantes
et servientes et poenitentiam agentes secundum quid sibi canoniee
impositum est ». Karoli Magni Capitalaria. 22 Admonitio generalis,
c. 79 ; MGH. Capit. t. I, p. 60-61.
(2) « Sed quia in moderuis temporibus parricidae profugi curruut
per diversa, et variis vitiis, atque gulae illecebris deserviunt, melius
nobis videtur, ut in uno loco manentes poenitentia districta semetip-
sos castigent, si forte a Domini bonitate indulgentiam facinoris sui
percipere mereantur. Xcn enim eis licebit ultra militiae cingulum
sumere, et nuptiis vel conjugiis copulari, quia sacri canones hoc ois
non consentiunt ». Concil. Mogunt., cap. XX, dans Hartzeim, Concilia
Germ., t. II, p. 158. - — Même texte dans mie lettre de Raban Maur à
Héribald, évêque d'Auxerre. Ibidem, t. II, p. 196.
(3) « Si quis in ipsius diebus treuvae Dei homicidium fecerit, exul
factus atque a propria patria eiectus. Jérusalem tendens longinquum
illic patiatur exilium ». Treuga Dei archidioececis Arelatensis 1037-
1041 ; MGH. Constit., t. I, p. 597.
(4) Mansi, Coll. Concil., t. XIX, c. 894.
(5) Opéra S. Pétri Dam., lib. VIII, ep. XVII, dans MlGNE, PL,
t. CXLIV, c. 455 seq.
(6) « Incendium primum abiuret ; deinde sit in arbitrio episcopi,
10 INTRODUCTION
fournissent de nombreux exemples. En 1236 une discussion
s'était élevée entre les paroisses de Nieuport et de Sainte-
Walburge à Furnes au sujet de la dîme du poisson ; deux
prêtres, qui étaient venus faire la citation de la part de Furnes,
furent tués par les citoyens de Nieuport. Vingt- cinq d'entre
ceux-ci furent condamnés à aller à l'île de Chypre et à y rester
un an. Avant leur départ, fixé à la Saint- Jean-Baptiste, ils
durent faire un certain nombre de «processions» solennelles à
diverses églises, situées dans les diocèses de Thérouanne,
de Tournai, de Cambrai et d'Arras (1).
Eude Rigaud, archevêque de Rouen (1248-1279), nous
apprend qu'un des meilleurs moyens pour lui de punir les insu-
bordinations de ses clercs, est de les envoyer en pèlerinage (2).
Un synode de Cologne de 1279 exhorte les confesseurs à imposer
ces voyages comme pénitence des péchés de luxure (3).
Nous voyons papes et évêques mettre comme condition de
réconciliation de tel ou tel prince avec l'Eglise, la participation
à la croisade prochaine et, en attendant que celle-ci soit pro-
clamée, l'exécution d'un certain nombre de pèlerinages à des
sanctuaires moins éloignés (4). Ainsi, en 1311, Clément V, pour
lever l'excommunication encourrue par Guillaume de Nogaret
dans la lutte entre Philippe-le-Bel et Boniface VIII, lui enjoint
de prendre part à la croisade prochaine et de demeurer sa vie
qualem ei penam iniungat, visitandi videlicet sepulchrum Domini
aut lknina Jacobi Apostoli ». Friderici I Constit. 1186, n° 318, c. 8 ;
MGH. Constit. I, p. 450.
(1) « Vigintiquinque de Villa Noviportus, sive scabini, sive alii,
qui inagis videbuntur culpabiles (secundum inquisitionem faciendam
a nobis per bonos viros cum uno de clericis Doininae Comitissae) ibunt
ultra mare, et ibi morabuntur per annuru, et iter accipient a proximo
festo Sti Joannis Baptistae in annuui, et nec poterunt ulterius proro-
gare ». Miraeus, Opéra dipl. t. III, p. 50. (éd. FoppENS, III, p. 80).
(2) Cfr Th. Bonnin, Journal des visites pastorales d'Eude Rigaud,
p. 164, 325 seq., 344, 425 seq., 477, 507, 579, 665. Rouen 1845-1847.
(3) HEFELE, Conciliengesch., t. VI, p. 203.
(4) Signalons en passant que L. C. GoETZ (Studien zur Geschichte
des Busssacraments, dans Zeitschrift fur Kirchengesch., 1896, t. XVI,
p. 541 seq.), prétend que l'indulgence de la croisade trouve son ori-
gine dans l'idée de satisfaire pour les grands crimes par des pèle-
rinages à Rome ou par la participation à la croisade. A. Gotteob
(Kreuzablass u. Almosenablass , dans : STUTZ, Kirchenrechtliche
Abhandlungen, fasc. 30/31. Stuttgart, 1906) s'applique à réfuter
cette opinion.
INTRODUCTION H
entière en Terre-Sainte ; en attendant le pape lui impose des
pèlerinages à faire personnellement à Notre-Dame de Vauvert,
à Notre-Dame de Rocamadour, à Notre-Dame de Puy en Velay,
à Notre-Dame deBoulogne-sur-Mer,à Notre-Dame de Chartres,
à Saint-Gilles en Provence, à Saint-Pierre de Montmajour
et à Saint-Jacques de Compostelle (i).
Ce genre de pénalité resta en honneur bien longtemps ; nous
voj'ons en effet qu'il fait encore l'objet de stipulations spéciales
dans le droit ecclésiastique de Liège au XVe siècle. L'auteur de
coups ou de blessures peu graves, infligées à l'intérieur d'une
église, ou le coupable qui a essayé de chasser un homme
hors de l'église, est condamné, sous peine subsidiaire de ban-
nissement et d'aubaineté, à faire à Saint-Jacques de Compos-
telle deux pèlerinages, dont l'un profitera à l'église en question,
l'autre à la partie lésée (2) ; plus tard on augmenta cette peine
et le coupable dut aller à Chypre (3). Dans leurs visites pério-
diques, les archidiacres de Liège appliquaient volontiers cette
peine ; citons, entre autres, l'exemple de Nicolas Bluvier, curé
de Gosselies, qui fut condamné en 1501 par l'archidiacre du
Hainaut, à faire « propter incontinentiam » un pèlerinage à
Saint-Martin de Tours et un autre au tombeau des Trois-Rois à
Cologne : il put d'ailleurs s'en racheter par une somme d'ar-
gent (4).
L'éloignement des lieux, assignés comme but de ces voyages,
était, en général, proportionné à la gravité du délit ou à la con-
dition sociale du coupable ; cependant il faut signaler ici le
caractère spécial et l'importance particulière du pèlerinage
romain (5) ; c'est à ce voyage, en effet, qu'on rattache parfois
(1) « Yolumus etiam quod intérim peregrinationes personaliter
faciat infrascriptas : videlicet visitet B. Mariae de Yallae-Yiridi, de
Rupe Amatoria, Aniciensis de Bolonia super mare, Carnotensis,
S. Aegidii, et de Montemajori Bcclesias ; ac limina B. Jacobi Cornpos-
tellani ». Baroxius-Rayxaedi, Annales Eccl., ad ami. 13 11,
n° 50 ; éd. TheixeR, t. IV, p. 495.
(2) Premier Régiment de Heinsberg (1424), n° 2. Cfr Coui. de Liège,
t. II, p. 145.
(3) Paix de Saint- Jacques (1487), XXII, 2, 3, Cfr Coût, de 1
t. II, p. 272.
(4) Visites archidiaconales du Hainaut (aux archives du séminaire
de Liège), I, f. 30 v°.
(5) Cfr J. ZETTIXGER, Die Bcrichte iiber Rompilger ans dem Fran-
kenreiche bis zum Jakre 800. [Rom. Ouartalschr. 11. Supplementhefi,
1900.)
12 INTRODUCTION
l'origine de la réservation de certains cas à la juridiction
papale (i).
Dès les premiers temps de l'Eglise, les évêques ou leurs rem-
plaçants dans l'exercice de la juridiction, prononçaient eux-
mêmes l'absolution des crimes les plus graves et appliquaient
en même temps les pénitences que leur suggéraient les livres
pénitentiels ou qu'ils jugeaient opportunes. Néanmoins il arri-
vait que, devant le caractère exceptionnel de certains délits, ils
ne savaient quelle peine imposer au coupable ; dans ces condi-
tions ils s'adressaient au siège apostolique pour lui demander
conseil ou laisser à son arbitre le prononcé du châtiment. Ainsi
S. Boniface demande à Grégoire III (731-741) à quelle peine
il doit soumettre l'homme qui a tué son père, son frère
ou sa mère (2) ; au pape Zacharie (741-752) il pose cette
question : le prêtre coupable de fornication peut-il encore
remplir ses fonctions sacerdotales ? (3) L'évêque de Milan,
Thado, prie le pape de lui faire connaître la peine à
appliquer à ceux qui auraient frappé, dépouillé ou tué un
clerc (4). De temps à autre aussi les évêques se plaisaient à
envo}rer en voyage des criminels, auxquels ils remettaient per-
sonnellement une lettre de recommandation pour le souverain
Pontife; aux termes de celle-ci, ils laissaient à l'arbitre du
pape le soin d'imposer la pénitence qu'il jugerait conforme
à la gravité du délit. Ainsi, en même temps que la faculté d'aug-
menter ou d'adoucir la peine, ils abandonnaient au pontife
romain l'octroi de l'absolution. Cette pratique se trouve déjà
énoncée dans un pénitentiel du IXe siècle : « Si quis ordinatum
hominem occiderit, vel proximum suum cognatum, discedat
(1) « Dièse Peregrinatioiif n nach Rom sind die niiclisten und mi
rnittelbaren Vorboten der allgemeinen papstlichen Reservatfallen ».
M. HAUSMANN, Geschichte des papstlichen Reseyvatfàlle, p. 34. Ratis-
bonne, 1868. Nous ne rappelons ici cett^ thèse de Hausmann, qu'on
semble abandonner de nos jours, que parce qu'elle reflète le caractère
spécifiquement différent de ce pèlerinage romain et des autres pèle-
rinages à des lieux de dévotion. A p-opos de l'influence des pèleri-
rinagessur les indulgences, voir E. Paui,us, Die Anfànge des Ablasse,
daus Zeitschrift fur katholische Théologie, 1909, t. XIII, p. 303 ssq.
(2) Epist. Gregorii Papae III ad Bonifacium. (Ivo, Decr. p. 10, c.
179. Cfr M. Tangl, Die Brie je des H. Bonifatins und Lullus. Ber-
lin, 1916).
(3) Ivo, Decr. p. io, c. 35.
(4) Ibidem, p. io, c. 20.
INTRODUCTION 13
a patria sua et a possessionibus suis, et adeat Romain ad
papam, et faciat postea, prout papa ei praescripserit » (i).
Ainsi se fixa l'habitude d'après laquelle les évêques ne
donnèrent plus eux-mêmes l'absolution de certains délits, mais
qu'ils subordonnèrent cet élément du sacrement de pénitence à
la décision du pape, tandis qu'ils vo)raient déjà un commence-
ment de satisfaction dans les difficultés du voyage à Rome (2).
Les abus ne devaient pas tarder à se produire ; des coupables,
craignant à juste titre les rigueurs d'un tribunal parfaitement
au courant des circonstances de l'infraction, et désireux de
s'y soustraire, escomptaient trouver à Rome des juges plus
cléments ; on dut bientôt mettre un frein à cette tendance dan-
gereuse pour l'autorité des juridictions locales. Le concile de
Seligenstadt, en 1023, défend de se rendre à Rome sans la per-
mission de l'évêque ou de son remplaçant (3).
Dans quelles conditions s'effectuaient ces pèlerinages expia-
toires ? Avant de se i.ettre en route, le condamné devait jurer
qu'il ne rentrerait dans sa patrie qu'après avoir accompli son
voyage (4). Souvent l'évêque lui donnait une lettre de sauf-
conduit, dans laquelle il le recommandait à la pitié des auto
rites religieuses et surtout aux abbés des monastères, qui étaient
pour le malheureux voyageur autant de jalons bienfaisants ; il
les priait de lui accorder les faveurs de l'hospitalité chrétienne,
sans pour cela le retenir sur la route vers le but qu'il se propo-
sait d'atteindre. Cette lettre ne manquait pas de mentionner le
caractère pénitentiel du voyage (5).
(i) Poenitentiale. Pseudo-Egberti, IV. 6 ; Wasserschi,EBEN, Op. cit.,
P- 333-
(2) « Réservantes hanc indulgentiam apostolicae modération! ad
apostoliea liniina emn direximus, quatenus et fatigatione itineris
hujus peccatum suum diluât ». Yves de Chartres, Ep. 160.
(3) « De illis qui Romani ituri sunt ». « Deere vit quoque sancta
Synodus, ut nullus Romain eat, nisi cum licentia sui episcopi, vel
ejus vicarii.» Concil. Seligenstadt, 1023 ; c. 16 ; MlGNE, PL, t. CXD,
c. 1061.
(4) « Jurai nt quod non revertetur donec impleverit penitentiam ».
Collectio canonum Hibernensis, XXIX, 7 ; WASSERSCHXEBEN, Die
Irische Kanonensammlung, p. 101. Halle, 1885.
(5) « Tradituriam pro itinere pergendo. . . Cognoseatis siquidem,
domini et sancti patres seu et sorores in Christo, quia inuotescimus
vobis, eo quod peregrinus iste nomeii ille, ex génère illo, ad nos
venit, et nobis innotuit atque consilium quaesivit de hoc vide-
H
INTRODUCTION
Le caractère persistant de barbarie chez les nations où ces
voyages expiatoires furent d'abord appliqués, doit avoir forte-
ment influé sur l'appareil dans lequel ces condamnés se met-
taient en route. Sur la foi d'un texte ancien, Mabillon nous
apprend que parfois, du glaive ou du poignard avec lesquels un
criminel avait tué son parent, on lui forgeait des cercles de fer,
pour lui entourer le cou, les bras et les reins (i). Plusieurs récits
hagiographiques viennent confirmer le fait (2) et nous montrent
licet facto, quod instigante adversario, peccatis facientibus, proprio
filio suo, vel fratri suo sive nepoti, nomine illo interfecit ; et nos pro
hac causa secundum consuetudinem vel canonicam institutionem
diiudicabimus, ut in lege peregrinorum ipse prefatus vir annis (sep-
tem) in peregrinatione (ambulare) deberet. Propterea cognoscatis
sanctissimi patres, has litteras, ut, quando ad sanctitatem vestram
venerit, melius ei credatis, et quod nullatenus pro alia causa ambulare
dinoscitur, nisi, sicut superius diximus, pro peccatis suis redimendis,
ut vos ei nullo modo teneatis, nisi tantum, quando ad vos venerit,
mansionem ei et focum, panem et aquatn largire dignemini, et postea
sine detentione liceat ei ad loca sanctorum festinare. Sic exinde agite
pro amore Dei et reverentia sancti Pétri. » Formulae Senonenses
recentiores, n° 11 ; MGH. Formulae, éd. ZEUMER, p. 217. — For-
mule analogue dans Formulae Salicae Lindenbrogianae, n° 17. (Ibid.
p. 278 seq.). — Formule moins étendue dans Formulae Bituricenses,
n. 13 (Ibid., p. 173).
(1) « Consuetudine antiqua partibus interioris Franciae usque
hodie mos inolevit ut quisquis propinquiorem sibi parentem gladio
jugula verit et postea poenitentia ductus, ad Pontificem crimen ad-
missi facinoris detulerit, ipso decernente Pontifice, ex ipso gladio
ferrei nexus componantur et collum peccatoris, venter atque brachia
strictim innectantur ex ipsis ferreis vinculis : sicque de propria patria
et solo patrio pellatur. Intérim quousque divina pietas eadem vincula
solvi praecipiat, primum Romae, deliinc per diversa sanctormn loca
veniam crinnnis efflagitando peregre proficisci cogitur ». ISIabie-
iyON, Praefatio ad Tom. II AA. SS. O.S.B., n° 41, d'après un
ms. ancien des miracles des SS. Florian et Florent. Cfr Martèxe,
De antiquis ecclesiae ritibus, t. I, c. VI, art. 4, n° XII ; BlNTEREU, Die
vorzùglichsten Denkwurdigkeiten der christ-katholischen Kirche ans den
ersten, mittlern und Istzten Zeiten, 3e part., p. 157-158.
(2) « Quidam vir civis Aurelianensis. . . ob fratricidium a jussu
episcopi urbis Aurelianensis ferreis nexibus ventrem brachiaque cons-
trictus, cmu per plures annos sanctorum loca visitando tantae incommo
ditatis molem sustinerit. . . ». Mirac. S. Bertini (+ 709), 1. I, c. 4 ;
Mabieeon. AA. SS. O.S.B., t. III, p. 107. — « Homo quidam
erat fratricida, qui habebat mucronern, cum quo premerat fratrem,
fixum in ferro circulo circum dextrum brachium strictius posito,
cute et carne jam super imminente. . . ». Mirac. S. Bononii (+1026),
n° 13 ; Ibid. t. VIII, p. 244.
INTRODUCTION 15
comment, à côté du but premier du pèlerinage, c'est-à-dire le
pardon des fautes par l'intercession de tel ou tel saint, s'est
glissée une autre intention, secondaire il est vrai, mais en tout
cas plus sensible : celle d'obtenir par les prières des saints la
délivrance des cruelles entraves que les misérables traînaient,
des années parfois, avec eux. La chute miraculeuse de ces liens
matériels, si l'usure n'avait déjà eu raison de leur solidité, était
pour les condamnés le signe du pardon (i). Grégoire de Tours
raconte qu'un certain prêtre de Tours, nommé Jean, avait vu au
tombeau de S. Nicet à Lyon, plusieurs de ces cercles ou chaînes
brisées, que des pénitents délivrés y avaient suspendus en
témoignage de reconnaissance (2). On comprend d'ailleurs que
Charlemagne, dans ses capitulaires, dut réagir contre les excès
des « isti nudi cum ferro » qui, parcourant les campagnes,
exploitaient les gens simples, qui s'apitoyaient sur leur sort (3).
On leur prescrivait souvent de faire le voyage nu-pieds, sans
armes et vêtus d'une tunique grossière ; ils devaient observer
le jeûne, c'est-à-dire ne se nourrir que de légumes, de pain et
d'eau tous les jours que durait leur pèlerinage, à l'exception des
dimanches et des grandes fêtes. Défense était faite à ces mal-
heureux de séjourner dans le même endroit plus longtemps
qu'un jour et une nuit, à moins qu'une maladie ou la solennité
particulière d'un saint ne les retienne ; ils restaient en outre
privés de la communion (4). Ils ne pouvaient non plus profiter
(1) « Pauperculus quidam propter homicidii reatum circulis ferreis
tam in collo quam in utroque constrictus brachio quam gravibus
quotidie suppliciis afficeretur, per fulcos, quos ferrum carnibus ejus
infiixerat, videntibus fidem fecit. Oui, cum multa sanctorum loca pro
ejusdem cruciatus remedio et admissi sceleris abolitione lustrasset,
divina tamen miseratione respectus, nexus quibus. . . striugebatur
amittere meruit. . . ». De mirac. post mortem (.ialli (+ 646) ; Mabii,-
r,ox, Op. cit., t. II, p. 253. — « Nexibus quoque ferreis quidam pro-
priis crimimbus exigentibus colligati, cum ad limen cellulae ipsius
sese prostravissent devoti, suffragantibus meritis Beati viri, vinculis
ferreis absoluti redierunt ad domum suam gaudio magno perfusi ».
Vita S. Dodonis ; AA. SS. Belgii, t. VI, p. 377. — Cfr Liber de miraculis
et translatione S. Bertae ; AA. SS. Belgii, t. VI, p. 571-572 et note (a),
P- 574-
(2) Hausmaxn, Op. cit., p. 38.
(3) Karoli magni Capitularia. 22. Admonitio generalis, c. 07, (MGH.
Capit., t. I, p. 60-61). Cfr plus haut.
(4) « In orientalibus vero, id est Germaniae Saxoniaeque parti-
bus, sicut experimento didicimus, capitalium criminum reus . . . pere-
grinationem suscipiens, nudipes laneisque indutus perambulat. pane
10 INTRODUCTION
de leur passage dans certains centres pour exercer quelque
commerce, ni même s'occuper de choses temporelles ; leur
qualité de pénitents et de pèlerins devaient les absorber tout
entiers (i).
Malgré toutes ces stipulations précises, les abus commis à
l'occasion de ces pèlerinages étaient réels, autant de la part des
clercs que de la part des laïcs puissants ou misérables. Le con-
cile de Châlons-sur-Sâone de 813 les dénonce en termes éner-
giques (2).
et aqua atque holeribus contentus, nisi tantum dominicis ceterisque
praecipuis festivis diebus, et hoc secundum inensurani sibi constitu-
tam. Quosdam etiam vidimus, quibus commorandi uno loco
nisi unius diei et noctis (spatio), interdicta erat licentia, excepta
infirmitatis causa, vel causa praecipuae festivitatis ». Poenit. Pseudo-
Theod., c. 1 ; Wasserschxeben, Op. cit., p. 568. — « Oportet illum. . .
per diversas provincias sanctorum requirere loca, absque armis et
calceamentis, et absque communione Cliristianorum, et non diutius,
quain diei et noctis unius spatio in una habitatione quiescere, nisi
causa infirmitatis vel sollempnitatis Sanctorum, ut, sicut incurrit
propter propria in culpam, e contrario poeniteat in aliéna ». Ib.
en. III, § 11 ; Wasserscheeben, Op. cit., p. 569-570.
(1) « Santus Isidorus... de illis hominibus loquens, qui poeniten-
tiam pro gravibus peccatis suscipiunt, et ad tempus a patria prohi-
bentur, dicit, quod ei non permittatur in mercatu mercaturam ullam
exercer e, neque occupari circa aliqua mmidana negotia, antequatu
impleverit id, quod confessarius ejus ei praescripserit ». Poen.
Pseudo-Egberti, I, 6; WasserSŒEEBEN, Op. cit., p. 320.
(2) « Nani et quibusdam, qui Romam Turonumve et alia quaedam
loca sub praetextu orationis inconsulte peragrant, plurimum erratur.
Sunt presbyteri et diacones et coeteri in clero constituti, qui negli-
genter viventes in eo purgari se a peccatis putant et ministerio suo
fungi debere, si praefata loca attingant. Sunt nihilominus laici, qui
putant iinpune se aut peccare aut peccasse, quia haec loca oraturi
fréquentant. Sunt quidam potentum, qui adquirendi census gratia
sub praetextu romani sive turonici itineris multa adquirunt, multos
pauperum obprimunt, et quod sola cupiditate faciunt, oratiouum sive
sanctormn locorum visitationis causa se facere videri affectant. Sunt
pauperes, qui vel ideo id faciunt, ut maiorem habeant materiam mendi-
candi. De quorum numéro sunt illi, qui circumquaque vagantes illo
se pergere mentiuntur, vel quia tantum sunt vecordes, ut putent se
sanctorum locorum sola visione a peccatis purgari, non attendentes
quod ait beatus Hieronimus : « Non Hicrosolimam vidisse, sed Hiero-
solimis bene vixisse laudandum est » . De quibus omnibus doinni
imperatoris, qualiter siut emendanda, sententia expectetur. Qui vero
peccata sua sacerdotibus, in quorurn smit parroechiis, confessi sunt
et ab his ageudae poenitentiae consilium acceperuut, si orationibus
INTRODUCTION 17
Comme nous l'avons vu plus haut, en passant en revue les
principaux délits punis d'exil ou de pèlerinage, la durée
de la peine était ordinairement proportionnée à la gravité
du crime ; souvent aussi elle répondait à la mentalité plus ou
moins sévère du législateur. Les crimes capitaux sont punis
d'exil perpétuel, tandis que des délits moindres sont frappés de
bannissement de dix, de sept, de cinq, de trois ou de deux ans ;
la durée d'un an et demi d'exil, la moindre, est stipulée par un
pénitentiel pour certains clercs qui veulent entrer dans un
monastère et s'y faire moines, après avoir accompli leur péni-
tence. Le législateur ajoute que, néanmoins, l'abbé du lieu a la
faculté de diminuer cette durée, si la soumission du pénitent
lui donne des garanties (i).
Mais le retour du pénitent dans ses foyers était encore subor-
donné à certaines conditions. Ainsi du clerc qui, à la suite d'un
homicide avait été condamné à partir en exil, on exigeait qu'il
rapportât des lettres, émanant du prêtre ou de l'évêque sous la
direction duquel il avait accompli sa pénitence. En outre, il
devait se rendre chez les parents de sa victime et s'offrir en
remplaçant de leur enfant tué, en disant : « Me voici comme
votre fils ; je ferai tout ce que vous m'ordonnerez ! » Faute de
remplir cette formalité, c'était l'exil perpétuel qui l'attendait (2).
Certes, cette disposition appartient à un pénitentiel du groupe
irlandais, qui se fait remarquer par sa plus grande sévérité, et
on aurait tort de la considérer comme une règle générale. Mais
elle doit être retenue parce qu'elle fournit un exemple frappant
insistendo, elymosinas largiendo, vitam emendando, mores compo-
nendo apostoloruin limina vel quorumlibet sanctorum invisere desi-
derant, horum est devotio modis omnibus collaudanda ». Conc. Cabil-
lonense, a. 813, n. XLV ; MGH, Concilia, t. II, p. 282-283.
(1) « . . .In districto proposito exilii amium et dimidium peniteat,
habet tamen abbas hujus rei moderandae facultatem, si obedientia
ejus placita sit Deo et abbati suo ». Poenit. Cummeani, c. II, § 26 ;
YVassbrschxebex, Op. cit., p. 471.
(2) « Si quis clericus honiicidhun fecerit et proxinium suiun occi-
dent, decem aiuiis exul poeniteat. Post nos recipiatur in patriam,
si bene egerit poenitentiam in pane et aqua, testimonio comprobatus
episcopi vel sacerdotis, cum quo poeniiuit et cui commissus fuit,
ut satisfaciat parentibus ejus, quem occidit, vicem filii reddeus et
dicens : « Ouaecumque vultis faciam vobis ». Si autem non satisfecerit
parentibus illius, niuiquam recipiatur in patriam, sed more Caïn
vagus et profugus sit super terram ». Poen. Columbani B, c. 1 ;
Wassicrschxkben, Op. cit., p. 355.
l8 INTRODUCTION
de l'ancienne conception du zoehrgelt, de la satisfaction à la
famille de la victime, entrée comme élément essentiel dans la
pratique pénitentielle de l'Eglise. De même, le consentement
ou le pardon de la partie lésée fut requis comme condition
à la réadmission du pénitent dans la communauté chrétienne(i).
Une constitution de l'empereur Frédéric Barberousse nous
apprend en outre que, dans les cas où intervenait une rémission
du bannissement, celle-ci ne pouvait sortir ses effets que si le
coupable avait fait d'abord composition avec la partie lésée, et
du consentement du juge (2).
L'Eglise n'admettait la commutation ou le rachat de la peine
d'exil que dans des cas exceptionnels. Ainsi, si le coupable,
condamné au bannissement perpétuel, était un vieillard ou un
malade, on l'enfermait en prison pour sa vie (3). Dans certains
autres cas d'incapacité, le condamné pouvait racheter chaque
année d'exil par douze sous (4). Aucune mitigation n'était faite
en faveur des femmes coupables et le législateur ne faisait,
quant à l'exécution de la sentence, aucune distinction entre
clercs et laïcs.
Le succès qu'obtinrent les pèlerinages comme pénalités dans
le droit ecclésiastique, est sans doute dû aux applications fré-
quentes qu'en fit une institution, établie surtout dans le Midi de
la France, mais dont les sentences trouvèrent un écho jusque
dans nos provinces : le tribunal de l'Inquisition cathare (5). Par-
lant des peines à imposer aux hérétiques, le synode de Narbonne
de 1243 indique qu'il faut traiter avec plus de clémence les héré-
(1) « Ouodsi per veniam parentmn redierit aut ei indulserint,
suscipiatur in cornmunionem ». Poen. Hubertense, c. 39 ; Wasser-
SCIIEEBEN, Op. cit., p. 382.
(2) « Dominus etiam imperator proscriptorum ueminem a sententia
proscriptionis absolvat, nisi de illatis damnis primo cum iniuriato
comportât et nisi consciente judice hoc faciat ». Friderici I Constit.
(1186), n° 318 ; MGH. Constit., t. I, p. 450.
(3) « Si autem senex aut eger fuerit, carceralibus tenebris reclusus
poeniteat omnibus diebus vitae suae ». Poenit. XXXV Capitulorum,
VII, § 1 ; WasserschIvEben, Op. cit., p. 508.
(4) « . . . X annis peregrinus poeniteat. . . et si peregrinare non
potest, pro uno anno det solidos XII ». Poenit. Merseburgense A,
c. 43 ; Wasserscheeben, Op. cit., p. 396.
(5) Cfr A. S. TuRBERViEUÎ, Mediaevai heresy and inquisition,
Londres, 1921.
!
INTRODUCTION 19
tiques qui auront dit la vérité sur leur propre conduite ou sur
celle des autres : au lieu de leur imposer le pèlerinage d'outre-
mer, il faut leur commander de visiter les « limina sancto-
rum » (1). Voulant appliquer au mal le remède adéquat, le
concile de Béziers de 1246 stipule encore que celui qui aura
« offensé la foi », devra être condamné à défendre cette même
foi contre ses ennemis, qu'ils fussent Sarrasins ou hérétiques (2) ;
mais ici les cas de pèlerinage outre-mer sont plutôt rares. Dans
sa jurisprudence ordinaire le tribunal de l'Inquisition reconnais-
sait surtout deux sortes de pèlerinages : les « peregrinationes
majores », c'est-à-dire Rome, Saint- Jacques de Compostelle,
Saint-Thomas de Cantorbéry, Cologne aux Trois-Rois, et vingt
«peregrinationes minores», à savoir N.-D. de Rocamadour,
N.-D. de Puy en Velay, N.-D. de Vauvert, N.-D. des Tables
près Montpellier, N.-D. de Sérignan près Béziers, Saint-Guil-
hem-le-Désert, Saint-Gilles en Provence, Saint-Pierre de Mont-
majour près Arles, Sainte-Marie-Madeleine près Saint-Maximin,
Saint-Antoine en Viennois, Saint-Martial de Limoges, Saint-
Léonard en Limousin, N.-D. de Chartres, Saint- Denis et le
tombeau de S. Louis IX, Saint-Seurin de Bordeaux, N.-D. de
Soulac en Bordelais, Sainte-Foy de Conques (Rodez), Saint-Paul
de Narbonne, Saint-Vincent de Castre et Saint-Dominique de
Bologne (3).
Ces pèlerinages étaient infligés au gré des inquisiteurs ;
ceux-ci pouvaient joindre à l'un des voyages majeurs quelques-
uns des mineurs. Celui de Saint-Jacques de Compostelle semble
avoir eu le plus de faveur (4). Mais en outre les condamnés
recevaient toujours l'ordre de visiter chaque année, à certains
jours de fête, les églises de Toulouse et quelques-unes des envi-
(1) Hefele, Conc, t. V, p. 1103.
(2) « «Ut fidein vel Ecclesiam quam taliter ofïenderunt, défendant
ad tempus pro vestro arbitrio definitum, per se vel per alios magis
idoneos, ultra mare vel citra, contra Sarracenos vel haereticos, et
fautores eorum, aut aliter fidei et ecclesiae rebellantes ». A Ltmborcii,
Historia Inquisitionis cui subfungitur Liber sententiarum inquisi-
tionis Tholosanae, t. I, p. 337. Amsterdam, 1692.
(3) BERXH. Guidonis, Practica Inquisitionis, éd. Douais, p. 37
seq. Paris, 1886.
(4) « Peregrinationes majores et minores et visitationes ecclesia-
rum Tholose . . . retenta nobis et nostris successoribus in hoc officio,
potestate augendi et minuendi aut mitigaudi, commutandi seu etiam
remitteudi predictam peuitentiam >. A Limborch, Op. cit., t. Il, p. 1 j.
— Cfr Bernh. Guidonis, Op. cit., p. 39.
20 INTRODUCTION
rons, avec l'obligation d'y assister à la messe principale et d'y
entendre le sermon (i). Signalons en passant que, par leur
caractère même, ces peines n'étaient pas appliquées aux Juifs
qui, par exemple, étaient accusés d'avoir reçu des apostats et
tombaient ainsi sous la juridiction inquisitoriale (2).
Citons à titre d'exemple l'un ou l'autre cas de condamnation.
En 1258 l'inquisiteur de Carcassonne cite un certain Raymond
Maria « qui avait avoué différents actes d'hérésie commis 20 ou
30 ans auparavant et qui pour d'autres motifs avait des titres
sérieux à l'indulgence » (3). Le coupable doit se rendre, dans un
délai de trois ans, à Rocamadour et à divers autres sanctuaires.
Le 14 juillet 132 1, Guillaume le Garric, professeur de droit
à Carcassonne, convaincu d'hérésie, est condamné à aller en
Terre-Sainte ; s'il en est légitimement empêché, il doit envoyer
un guerrier à sa place. Lui-même, en attendant le départ de
quelques gens pour l'Asie, doit quitter le royaume de France
dans les trente jours et demeurer dans un endroit fixé aussi
longtemps qu'on le lui dira ; la prison perpétuelle l'attend
s'il refuse d'obéir (4). L'histoire de Tournai nous fournit aussi
l'exemple d'un prêtre hérétique, Richard du Croquet, accusé
d'avoir eu des rapports avec des « divinateurs» ; le 17 aoûti4i7
il est condamné par l'évêque de Tournai et l'inquisiteur de
France à se rendre en pèlerinage à N.-D. de Bois-le-Duc ;
ce voyage lui fut commué plus tard en celui de N.-D. au
Sablon à Bruxelles (5). En décembre 1460, deux individus
de la même ville furent, par jugement du vicaire de l'évêché
(1) « Cum peregrinationibus semper injungunt visitationes eccle-
siarum annis singulis, quarndiu vixerint, faciendas, in quibus visita-
tionibus numquam aut rarissime dispensantur, videlicet ecclesiam
Sancti Stephani Tholose in festo Inventionis ejusdeni et ecclesiam
Sancti Saturnini Tholose in octaba Pasche annis singulis, et missam
majorera ex integro et sermonem, si fiât ibidem, audiant utrobique,
. . . item Carcasonnensem ecclesiam Sancti Nazarii in festo ejusdem;
item Albie ecclesiam cathedralem Sancte Cecilie in festo ejusdem ; item
in Appamia ecclesiam Sancti Antonini in festo ejusdem ; item in Auxi
ecclesiam Béate Marie in festo Nativitatis ejusdem. » Bernh.
Guidonis, Op. cit., p. 97. — Cfr A Limborch, Op. cit., t. I, p. 336.
(2) Bernh. Guidonis, Op. cit., p. 50.
(3) Lea, Histoire de l'Inquisition (trad. Reinach), t. I, p. 523,
Paris, 1903,
(4) A Limborch, Op. cit., t. I, p. 337 et t. II, p. 282 seq.
(5) Archives géuér. du Royamne. Cartul. de l'Ev. de Tournai, III
(man. 56), fol. 46; Cfr P. FREDERICQ, Corpuslnquis., t. II, p. 200-201.
INTRODUCTION 21
d'Arras, condamnés du chef de « vaulderie » à visiter, l'un le
sanctuaire de N.-D. k Boulogne, l'autre celui de « N.-D. d'Es-
querchin, qui sont cinq lieues près d'Arras» (i).
Les gens condamnés ainsi devaient se mettre en route dans
un délai variant entre un et quatre mois, à partir du jour où la
sentence avait été portée (2). Avant de partir ils prêtaient le
serment de s'acquitter loyalement de la pénitence qui leur était
infligée (3). Les inquisiteurs leur remettaient des lettres à mon-
trer aux autorités spirituelles du lieu qu'ils avaient à visiter,
aux Dominicains de préférence si ceux-ci y avaient un couvent,
aux patriarches de Jérusalem et d'Acre s'il s'agissait du voyage
en Terre-Sainte. A leur retour ils devaient rapporter ces certifi-
cats, munis des attestations de ces mêmes autorités, portant
qu'ils avaient bien exécuté le pèlerinage imposé (4).
Comme garantie d'exécution, on grevait les biens du con-
damné d'une certaine somme, proportionnée à l'importance du
voyage. Cette créance était recouvrable sur ses héritiers.
En effet ceux-ci pouvaient être convoqués devant le tribunal de
l'inquisiteur pour montrer les lettres testimoniales d'exécution
du voyage auquel leur parent avait été condamné, à défaut de
quoi ils étaient forcés de payer à sa place, p. e. 10 livres, somme
à concurrence de laquelle les biens du défunt étaient grevés (5).
(1) Mémoires de Jacques du Clerq, III ; P. FREDERICQ, Corp.
Inquis., t. I, p. 385-386.
(2) Bernh. Guidonis, Op. cit., p. 38, 166. — A Lmborcii, Op.
cit., t. II, p. 218.
(3) A LlMBORCH, Op. Cit., t. II, p. 2l8.
(4) Bernh. Guidonis, Op. cit., p. 38, 47. — « Ouibus auteni fuerunt
peregrinationes injunctae, teneantur dictas testimoniales litteras
ostendere in singnlis peregrinationibus ei, qui praefuerit Ecclesiae
quam visitaverunt ; et easdem litteras de peregrinatione illa peracta
vobis reportare : qui vero transfretaverint, cinn fuerint ultra mare,
ut citius poterunt praesentent se cuni vestris litteris venerabilibus
Patribus Patriarchae Hierosolymitano et Aconensi vel alii cuicunque
Episcopo, vel eorum cujuslibet locum tenenti, et reportent vobis
cum redierint de sua peregrinatione laudabiliter ibi compléta litteras
cujuslibet Episcopi transmarini ». A Limborch, Op. cit., t. I, p. 337.
Cfr ibidem t. I, p. 336 ; t. II, p. 218.
(5) Bernh. Guidonis, Op. cit., p. 55, 57. « Tenore presentium
notum fiât quod nos talis N. inquisitor tenore presentium absol-
vimus et quittamus heredes et bonorum detentores defuncti quon-
dam talis N. ab omnibus peregrinationibus et visitationibus eccle-
siarum Tholose ac eorum defectu, que olim predicto tali N. jam de-
functo fuerunt imposite et injuncte pro hiis que commiserat, dum
viveret in crimine heretice pravitatis, cum dicti heredes super predic
22 INTRODUCTION
La sévérité des juges admettait pourtant quelquefois cer-
tains adoucissements. En effet, il était permis de racheter le
pèlerinage au prix de ioo livres si on avait un motif raisonnable
de ne pas le faire, au prix de 50 livres si on était fort âgé ou
faible de complexion (1). Les pèlerinages dans Toulouse même
ou aux environs ne se rachetaient jamais ou seulement dans des
cas exceptionnels (2).
Les sommes ainsi perçues étaient affectées, selon la volonté
des inquisiteurs, à la lutte contre l'hérésie, aux besoins du tribu-
nal inquisitorial ou à des œuvres pieuses (3).
Parfois on commuait les pèlerinages en d'autres bonnes
œuvres à faire suivant l'âge ou la faiblesse de l'intéressé (4).
Il nous reste à dire un mot du costume dans lequel les condam-
nés de l'inquisition effectuaient les voyages imposés. Ce n'était
pas le costume spécifique aux pèlerins mais celui des héré-
tiques pénitents. Sur leurs vêtements, ordinairement de couleur
noire, ils devaient porter à la poitrine et au dos de grandes
croix, de couleur et de dimensions fixes ; usés ou déchirés, ces
insignes devaient être immédiatement renouvelés (5). On com-
prend aisément comment les malheureux, portant ce costume
de corrigés, devaient être en butte à la dérision et à l'hostilité
de la foule. Ainsi en 1320 un certain Arnauld Ysarn de Toulouse
vint avouer au tribunal de l'inquisition qu'il s'était vu forcé
d'arracher les croix de ses vêtements, parce qu'il ne parvenait
tis ad nostratn ordinationem et arbitrium satisfecerint in et pro
quibusdam operibus pietatis.In cujus rei testinionium...» Ibid. p. 58.
(1) Cfr Bernh. Guidokis, Op. cit., p. 55.
(2) « In quibus visitationibus nunquain aut rarissime dispensan-
tur. . .». BERNH. Guid., Op. cit., p. 97.
(3) Bernh. Guid., Op. cit.; p. 55.
(4) « Piis bonorurn virorum precibus inclinati ac moti, intuitu
pietatis, considerata nimia senectute ac debilitate corporis talis N...,
peregrinationes . . . commutavimus . . . in alia opéra pietatis ». Bernh.
Guid., Op. cit., p. 55, 56.
(5) « In omni veste sua, excepta carnisia interiori, portet perpetuo
duas cruces duplices (vel : simplices) de filtro, crocei coloris, unam
anterius ante pectus et aliam posterius inter spatulas, sine quibus
prorninentibus seu apparentibus intra domum vel extra de cetero
non incedat, quarutn quantitas sit duorum palniorum et diniidii
in longitudine brachium unum, et duorurn palmorum aliud brachium
seu transversale ; habeatque utrumque brachium trium in se latitu-
dinem digitorum ; easdemque continuo reficiat vel innovet, si rum-
pantur aut deficiant vetustate ». Bernh. Guid., Op. cit., p. 37.
INTRODUCTION 2$
pas, dans cet accoutrement, à trouver le travail et la nourriture
qui lui étaient nécessaires (i). Aussi l'inquisiteur se vit obligé
parfois de menacer d'excommunication ceux qui oseraient se
moquer de ces malheureux ou se refuseraient à avoir des rap-
ports avec eux (2).
Il va sans dire que pour garantir l'exécution de cette pénalité
spéciale des pèlerinages, comme celle de toutes les autres, le
tribunal ecclésiastique avait recours au bras séculier ; et ceci
nous amène tout naturellement à examiner l'influence réciproque
de la jurisprudence canonique sur la pratique civile.
II. L'INTRODUCTION DES PÈLERINAGES
DANS LE DROIT COMMUNAL
Comme on le verra plus tard, les tribunaux laïcs ont pro-
noncé par eux-mêmes des peines — telles que les pèlerinages
— qu'ils se devaient d'appliquer à la demande d'un tribunal
ecclésiastique et en châtiment d'un délit ressortissant à celui-
ci « ratione materiae » ou « ratione personae »; ce fait n'est
pas isolé dans l'histoire ; il n'est que la résultante de la coni-
pénétration des deux pouvoirs, tant au point de vue purement
administratif qu'au point de vue pénal, qui est une des carac-
téristiques du mo}'en âge. L'influence de la pratique canonique
devait naturellement atteindre son apogée dans les principautés
ecclésiastiques, telles que Liège; aussi c'est dans les monuments
écrits du droit liégeois que nous trouvons les premières règles
fixes pour l'application des pèlerinages comme pénalités tem-
porelles et c'est au pays de Liège que ces mêmes peines se
maintiendront, du moins nominalement, jusqu'à la fin de l'an-
cien régime.
Pour ne signaler qu'un exemple, la Paix des Clercs du 7 août
1207 (loi ecclésiastique) applique encore la peine du talion aux
coupables d'homicide et de mutilation, mais édicté des
pèlerinages pour les auteurs des blessures portées à l'intérieur
des églises de Liège. La Loi muée des bourgeois du 9 octobre
1207 (loi civile) a les mêmes prescriptions pour l'homicide et la
mutilation, mais prononce des bannissements et des amendes
pour les dernières infractions. Les Statuts de la Cité de Liège
(1) A Limborcii, Op. cit., t. II, p. 351.
(2) Bernh. Guid., Op. ci/., p. 60.
24 INTRODUCTION
de 1328 punissent encore de mort l'homicide, mais de pèleri-
nages les mutilations et les blessures peu graves. Au chapitre
suivant, où nous déterminerons le caractère général des pèleri-
nages comme pénalités, nous verrons quelle a été l'influence
de l'Eglise dans la répression des délits contre les personnes ;
qu'il suffise pour l'instant de constater que cette influence
s'exerça directement sur la réconciliation de familles, devenues
ennemies à la suite d'un homicide, ou sur la manière de punir
ce crime, si une plainte régulière était parvenue au pouvoir
civil ; elle s'exerça aussi indirectement sur le système pénal
en vigueur pour les infractions de moindre importance.
Avant le xme siècle, en effet, dans les communes, la seule
source du droit de punir réside dans les usages locaux, que se
transmettent, de génération en génération, les officiers du
seigneur ; c'est un mélange d'anciennes lois germaniques, de
capitulaires, d'édits impériaux, de droit romain, le tout soumis
à l'application plus ou moins arbitraire du justicier; nul de ses
subordonnés ne connaissait clairement, avant de commettre un
délit, la peine qui l'attendait. Le xiiF siècle voit surgir un chan-
gement radical en cette matière, notamment la fixation des
lois criminelles. Les anciennes coutumes locales sont réunies,
codifiées, corrigées, publiées, de telle sorte que tout le monde
peut connaître le châtiment infligé à tel délit déterminé. Fait
significatif : les amendes pécuniaires, qui avaient si longtemps
formé la base du système répressif, sont général ement considérées
comme insuffisantes pour les grands délits; on leur substitue des
peines corporelles (1) et spécialement le bannissement, qui, sous
l'influence de l'Eglise, tendra peu à peu à supplanter la peine
du talion. Assurément, c'est avant tout le bannissement sans
but déterminé qui est imposé comme peine par les premières
chartes pénales; mais, ici, les tribunaux de la commune, comme
jadis l'auteur des Capitulaires, devaient se rendre compte du
vice inhérent à cet exil sans destination : une fois le condamné
sorti de la commune et de la franchise, on ne s'inquiétait plus
de lui ; loin de sa patrie et de ses proches, il avait l'occasion
favorable de renouveler ses excès et il constituait pour les com-
munes étrangères un danger permanent. Le législateur et le
justicier veulent remédier à cette situation en assignant au banni
une destination fixe et en exigeant de lui une attestation authen-
(1) Cfr les Heures de Louvain, 121 1 ; Incourt, 1226 ; Diest et
Bruxelles, 1229 ; L,a Hulpe, 1230 ; Vilvorde, 1300 ; Malines, 1300.
INTRODUCTION 25
tique de l'accomplissement du voyage. Ces deux éléments, ils
les trouvent dans les pèlerinages, dont les routes étaient géné-
ralement connues, et aux sanctuaires desquels étaient attachés
des clercs pouvant donner des actes authentiques.
On le voit, ce n'est pas par simple imitation, mais pour
remédier à un besoin réel que les tribunaux de la commune
ont repris pour leur compte une pratique qu'ils trouvaient
existante depuis longtemps et réglée dans ses moindres détails
dans la jurisprudence canonique et inquisitoriale. Qu'on n'argu-
mente pas ici du fait que l'esprit « anticlérical » (i) des
premières communes s'opposait à l'application par un tribunal
communal d'une peine d'origine canonique; en effet, les
faits démontrent que le caractère profondément religieux de
nos ancêtres s'accommodait parfaitement à voir entreprendre
par un délinquant la route fatigante et dangereuse vers un
sanctuaire quelconque, en expiation de sa faute.
A quelle époque rencontre-ton les premières applications de
ce genre de pénalités dans le droit communal ? Il importe de
distinguer ici entre le droit criminel écrit et la jurisprudence
coutumière.
Les pèlerinages ont été appliqués avant tout à la suite de
contrats de paix, faits ou bien entre un seigneur offensé et cer-
tains de ses sujets ou bien entre deux famillesdevenues ennemies
par le fait d'un homicide. En vertu d'un traité de paix conclu
en 1264 entre les quatre meurtriers de Godefroid et de Jakemon
de Fleppe et leurs parents d'un côté, et Jakemon de Clermont
avec les siens de l'autre, les quatre coupables s'engagent à
passer en Terre-Sainte, à y combattre sous l'étendard des
Croisés et à ne pas revenir au pays avant d'y être autorisés
par les représentants do la famille lésée (2). On connaît l'épi-
logue des affaires Borluut, qui ensanglantèrent la commune de
(1) Il semble bien que cet « anticléricalisme » des communes ne
s'est manifesté que « dans le fait que les communes ont voulu sou-
mettre les corps religieux au droit commun, spécialement en matière
de perception de taxes et de questions de propriété ; la question de
juridiction n'est venue qu'après, comme corollaire ». L. Van der
Essen, dans la Revue d'Histoire Ecclésiastique, 1922, t. XVIII,
p. 116,
(2) Cfr BCRH, ire Série, t. IX, p. 40.
26 INTRODUCTION
Gand de 1294 à 1306 : divers coupables de part et d'autre furent
envoyés en pèlerinage en Chypre, à Rocamadour, à Saint-Gilles
en Provence (1). Lorsqu'en 1299 se termina la guerre civile
entre les Mailhars et les Yerteis à Liège, les Mailhars durent
envoyer dix personnes en Chypre (2). En 1300, Jean, duc de
Brabant, et Jean, comte de Hollande, font la paix au sujet du
meurtre du comte Floris, arrivé en 1296; le duc de Brabant
s'engage à faire tels voyages que le comte de Hollande lui en-
joindra (3). A la suite du traité de paix du mois de juin 1305, le
roi de France se réserve le droit d'envoyer en pèlerinage
3000 habitants de Bruges et du Franc, dont 1000 outre-mer et
2000 en deçà (4). La ratification de la paix d' Arques par Charles
le Bel, le 19 avril 1326, porte que parmi les habitants de Bruges
et de Courtrai 100 personnes iront à Saint-Jacques de Compos-
telle, 100 autres à Saint-Gilles en Provence et à N.-D. de
Vauvert, 100 autres enfin à N.-D. de Rocamadour (5).
En général les premiers vestiges écrits de ces pèlerinages
expiatoires se trouvent à l'état de records dans les registres des
échevins (6). Ici aussi la pratique a précédé la lettre ; ce n'est
qu'au début du xive siècle, et notamment dans les Statuts de la
Cité de Liège, de 1328, que nous constatons l'entrée définitive
des pèlerinages dans les dispositions légales ou statutaires du
droit criminel liégeois ; le nombre de ces pénalités édictées
ira toujours croissant, de manière à former au XVIe siècle une
(1) Cfr J. VuYESTEKE, Utile g tôt de Gentsche Stads- en Baljuws-
reken. éd. vander haeghen & van Werveke, p. 101-102. Gand,
1906.
(2) « Et bin terapre là après, se vorent les Malhars et les Yerteis
acordeir l'un al altre, et amendont les Malhars X voies d'oultremeir,
por les mors qu'ilh avoient ochis ». Chron. de Jean d'Outremeuse,
t. V, p. 501.
(3) Van Mieris, Charterb., t. II, p. 12.
(4) D'OUDEGHERST, Ann. de FI. (Corps dipl., t. I, p. 341).
(5) GuxiodTS-van SEVEREN, Invent, des archives de la ville de
Bruges, t. I, p. 351.
(6) Cfr par exemple pour LiÉGE : Li Paweilhars (Rec. des Ane.
Coût. : Coût, du Pays de Liège, I) ; pour Gand : Zoendinc Bouc
(Arch. de Gand) ; pour Ypres : Registres aux sentences des échevins
d'Y près, Rec. des Ane. Coût, du Pays et du Comté de Flandre. Quartier
d' Ypres, éd. de PEi/SMAEKER) ; pour Anvers : Clementynboec. (Cfr
Antwerpsch Archievenblad, t. XXVI); pour LiERRE : Correctieboeck,
ins. (Archives coin.) ; pour Louvain : Registre aux sentences, 1398-1422,
ms (Archives administratives, n° 397 aux Arch. comm.).
INTRODUCTION 2J
longue série de voyages à imposer comme châtiment à
toutes sortes de délits, depuis l'homicide jusqu'à la moindre con-
travention à la police des rues.
En Flandre, au contraire, les dispositions expresses des cou-
tumes écrites à ce sujet constituent plutôt de rares exceptions ;
mais les longues listes de rachat à tarif fixe des pèlerinages nous
démontrent clairement l'importance que ce genre de peines
avait prise aux XIVe et XVe siècles. Remarquons en passant que
dans les provinces flamandes les pèlerinages furent bien plus
usités, à la suite de la « compositio », comme moyen de récon
ciliation que comme pénalités imposées par le législateur pour
telle ou telle infraction.
Dans les communes brabançonnes, réalisant en cela aussi le
type intermédiaire entre les communes flamandes et liégeoises,
on appliqua ces voyages tantôt dans les réconciliations, tantôt
à la suite d'une action criminelle régulière; c'est aussi beaucoup
plus tard, vers la fin du XIVe siècle seulement, que nous trou-
vons des dispositions expresses à ce sujet.
Certains auteurs vont plus loin : sans vouloir fixer une date
certaine à l'origine de ces usages, ils estiment que, puisque à la
fin du xme siècle on regarde cette pratique comme déjà très
ancienne, il faut la faire remonter au début du XIIIe siècle (i).
Quoi qu'il en soit, remarquons que la pratique canonique sur ce
point suffirait à expliquer comment à la fin du xme siècle, on ne
regardait déjà plus ce genre de peines comme une innovation.
(i) « Quo autem tempore hae poenae primum in usum venerint,
non possuin certo definire. Yerisimililer, jam initio saec. XIII. Oumu
hoc saeculo ad finem vergente, de ea ut de autiquo more mentionem
factam inveniamus ». J. G. V. UtrechT-DressELHUYS, Spécimen
hist. jur. de poena peregrinaiionis sacrae medio aevo in Neerlandia
usitata, p. 8. Goes, 1851.
CHAPITRK I
CARACTÈRE GÉNÉRAL DES PELERINAGES
EXPIATOIRES ET JUDICIAIRES
Le juriste ou l'historien qui étudie le droit criminel, notam-
ment au moyen âge, se rend aisément compte de la coexistence
de trois facteurs, dont chacun a été constamment en lutte avec
les deux autres, sans jamais leur être complètement sacrifié.
Aujourd'hui même la texture serrée de notre droit pénal ne
dissimule pas complètement la survivance de ces éléments, qui
sont à la base de l'histoire du droit pénal de nos ancêtres.
C'est tout d'abord l'élément subjectif de la vengeance privée,
de la satisfaction personnelle pour une injustice subie. C'est
ensuite un élément plus objectif, l'intérêt de la communauté dans
la répression du délit, l'intervention de la punition publique, à la
base de laquelle nous trouvons, lointaines et obscures sans
doute, des traces de défense, d'assurance contre des dangers
personnels et des vues d'intérêt commun. C'est enfin un
élément à la fois subjectif et objectif, et certes non moins
important et influent que les autres, le Christianisme et l'Église,
avec sa législation, faite de prescriptions spéciales et nouvelles,
mais toujours habilement adaptée au milieu où elle devait
s'exercer (i). Tandis que le pouvoir public s'attachera pendant
des siècles à étouffer la vengeance privée (2), sans jamais
y parvenir complètement, l'Eglise, fidèle à ses principes,
(1) VON ABEGG, Ueber den Einfluss der Kirche auf die Sùhne
bei dem Todtschlag dans Zeitschrift fur Rechtsgeschichte, 1868, t. VII).
(2) Poenitentiale Pseudo-Theodori (ixe piècle), c. VI, § 22 : « Si
quis clericus, pro ultione propinqui aut pro vindicta fratris, horninem
occiderit, X annis peniteat. MiM vindictarn, ego rétribuant, dicit Domi-
nus. Et iteruin : Non vosmetipsos defendentes, karissimi, sed date
locurn irae ». Wasserscheebex, Op. cit., p. 588.
PÈLERINAGES EXPIATOIRES ET JUDICIAIRES 20
poursuit implacablement toute vindicte personnelle et s'applique
en même temps à mettre un frein à la trop grande sévérité des
pénalités publiques et spécialement à la fréquence des peines
capitales. L'institution par l'Eglise des Paix et des Trêves de
Dieu, l'excommunication et le bannissement prononcés contre
ceux qui les violent, d'une part, et l'insistance qu'elle mit dans
ses efforts à amener dans sa juridiction des crimes spéciaux, en
vue d'en réglementer la répression d'une façon conforme à son
idéal d'action sur le domaine de la conscience, d'autre part, sont
des faits trop connus pour que nous éprouvions le besoin d'y
insister ici. Est-ce à dire que le pouvoir spirituel combattit
aussi le but final de la vengeance privée, de la répression
publique ? Certes non : la législation développée des divers
Pénitentiels du moyen âge prouve qu'à côté de la récon-
ciliation privée, l'Église a en vue aussi bien la réparation
matérielle de l'injustice commise envers la victime ou ses
parents, que la réparation du dommage moral, du désordre occa-
sionné par le délit à la communauté en général. Lorsque donc,
sous l'influence directe ou indirecte de l'Église, la pratique du
pèlerinage pénitentiaire sera introduite dans la législation
communale, nous retrouverons dans cette peine les diverses
conceptions de l'ancien droit germanique. Elles se manifestent
avant tout dans le fait que le pèlerinage satisfait à la fois la
partie lésée et le pouvoir public. En effet, il se présente tout
d'abord comme une modalité du wehrgelt, fixé au cours de la
composition et grâce auquel la vengeance privée ne peut plus
s'exercer ; le pèlerinage à effectuer par le coupable est censé
donner satisfaction à la partie lésée. Mais dans la façon dont ces
pèlerinages sont exécutés, ils dénotent un principe un peu
différent du wehrgelt. Celui-ci en effet est, de par son origine,
non pas une peine, mais un rachat, une compensation. L'idée
fondamentale du pèlerinage est, somme toute, la pénalité,
moyennaïrl laquelle la partie iésée se déclare satisfaite, et qui
sans cela aurait eu recours à la vengeance privée. Pourtant,
dans le droit du moyen âge, au chapitre du délit contre les
personnes, le pèlerinage a nettement le caractère d'une répara-
tion du dommage moral causé par une infraction, le dommage
matériel étant compensé par une amende pécuniaire. Plus tard,
lorsque les pèlerinages deviendront rachetables, ils auront le
double caractère de satisfaction morale et de réparation maté-
rielle. Cette idée de réparation à partie ressort bien des
nombreuses formules, telles que celles-ci : « sal der partien
30 CHAPITRE 1
beteren mit eynen weghe t'sent Jacob in Galissien » ; — « une
voie à la partie plaidante » ; — « une voie pour la partie
bleschiée » ; — « une voie pour la partie laydie » ; — « il yrat a
Rochemadou pour la partie ».
Le pèlerinage est aussi une satisfaction pour le désordre
moral, causé par le fait que tel ou tel crime trouble la paix
publique ; de cette façon il se rattache à l'ancien fredus germa-
nique, qui était payé par le coupable ou sa famille au seigneur,
censé être le gardien de la paix publique. Comme nous le
verrons plus loin, le seigneur et la commune eurent leur part
dans le profit du pèlerinage, dès qu'il fut rachetable, et même,
au pays de Liège, pour certains délits, on décréta un voyage au
profit exclusif de la commune, outre la réparation à partie et les
peines légales.
#
# #
Au point de vue chronologique, les pèlerinages se présentent
tout d'abord comme une réparation imposée au coupable
d'homicide, de blessures, d'injures vis à- vis de la partie lésée,
à la suite d'un accord survenu entre les deux familles ennemies
ou leurs représentants. Une autre fois ce sera un prince, offensé
par la rébellion de tels de ses sujets, qui estimera son honneur
rétabli, si un certain nombre d'entre les coupables entreprennent
les voyages qu'il impose. Jusqu'ici pas d'action criminelle
régulière : le tarif de la réparation est débattu librement entre
les intéressés. Le justicier n'intervenant pas aussi longtemps
qu'il n'y a pas plainte, la commune n'a aucun droit à réparation
et en fait le seigneur lui-même est frustré de son ancien droit
àe fredus. Toutefois pour obvier à certains abus, nés de l'arbi-
traire avec lequel la famille lésée traitait celle du coupable,
il arriva que les législateurs ordonnèrent à celui-ci d'offrir
réparation à la partie, en présence des échevins de la commune
ou d'apaiseurs désignés à cet effet. De là sortit peu à peu
l'action criminelle, amorcée par la plainte en règle. Dès ce
moment la commune et le seigneur, étant directement intéres-
sés, fixent la peine légale. C'est le plus souvent une amende
pécuniaire, mais fréquemment aussi le bannissement, accom-
pagné du pèlerinage ; parfois même les deux se confondent (i).
(i) « Der Zusammenhang der Bittfahrt mit der Verbannung zeigt
sich u. a. darin, dass auch sie dem Missetiiter op syn lyf auferlegt
werden kann ». R. His, Dus Stvafrecht des deutschen MittelaUers, i.
PÈLERINAGES EXPIATOIRES ET JUDICIAIRES 31
Pour les infractions autres que les délits contre les personnes,
il se fit, surtout lorsque les pèlerinages se rachetaient, que la
seule peine, c'est-à-dire la peine légale, consista en un pèleri-
nage, dont profitaient le seigneur, la commune et même plus
tard les échevins et, le cas échéant, le dénonciateur. Contrai-
rement à ce que nous constatons dans l'ancien droit germanique,
où le ivehrgelt primait le / 'reclus, le droit criminel du moyen âge
appliqué par les échevins communaux, qui ne sont en somme
que les successeurs des anciens échevins du seigneur,
cherche à fixer avant tout la part qui revient au seigneur, et
en second lieu seulement la réparation à partie, notamment
le tarif des pèlerinages. Ceux-ci ne constituaient pas une peine
accessoire, notons-le, mais ils procuraient à la partie lésée la
satisfaction qui, de tous temps, lui était due selon les principes
primordiaux du droit germanique.
Peine légale et satisfaction à partie, tels sont donc les carac-
tères généraux que revêtent les pèlerinages dans les communes
des Pays-Bas, autres que les communes liégeoises. Dans celles-
ci un élément nouveau s'introduit à titre définitif dans la légis-
lation, à partir de 1366 à Saint-Trond, de 1380 à Maestricht, de
1394 à Liège : c'est le voyage au profit de la commune, même
dans le cas de délits contre les personnes. Un crime était censé
léser deux intérêts différents, celui de la victime et celui de la
communauté à laquelle celle-ci appartenait ; le dommage moral
devait être réparé de part ©t d'autre. On le voit, l'idée de soli-
darité de la commune vis-à-vis de ses membres, cette absorp-
tion de l'individu par la communauté, devait singulièrement
favoriser les vues du magistrat voulant se créer des ressources
nouvelles. Cette réparation au profit de la commune consistait
presque exclusivement en pèlerinages et s'ajoutait à la peine
légale, lorsque le coupable n'était passible, vis-à-vis du seigneur,
que d'une amende pécuniaire ou d'une peine corporelle d'ordre
inférieur. Ajoutons qu'il y avait généralement proportion entre
le voyage à partie et le voyage au profit de la commune. Ainsi,
à Maestricht, quand on condamnait quelqu'un du chef de bles-
sures à faire, pour la partie blessée, le voyage de Saint-Jacques de
Compostelle, il était obligé de faire le voyage de Vendôme (ou
de payer la taxe correspondante) au profit de la commune ;
Teil : Die Verbrechen u. ihre Folgen im allgemeinen, p. 541, n° 5.
Leipzig, 1920. — Le même auteur fait justement remarquer (ib.) qu'à
Anvers on parle du condamné à un pèlerinage comme d'un ballink» .
32 CHAPITRE I
devait-il aller à Rocamadour pour la partie, un vo}Tage à
Saint- Josse-sur- Mer revenait à la commune (i).
Remarquons en terminant qu'à la période moderne une dis-
tinction s'établit, au point de vue de la note qu'ils infligeaient
à celui qui y était condamné, entre les pèlerinages qui devaient
être exécutés de fait et ceux qui pouvaient se racheter ; les
premiers étaient infamants, les autres n'avaient aucune con-
séquence quant à la réputation de l'intéressé ; ils étaient consi-
dérés comme des obligations civiles. Déjà les Coutumes de
Liège constatent que « un surcéant du pays condamné à pérager
quelque voyage de ses pieds, est par telle sentence infâme et
incapable de porter office ; autrement est si le voyage est réduit
en argent * (2). Cette conception est encore celle du juriste
Sohet au xvnr siècle : « Les voyages sont des peines afflictives
et infamantes, aussi bien que les exils, lorsque les personnes
sont condamnées à les pérager à pieds : mais point lorsque les
voyages sont réducibles en argent, décrétés pour amendes
pécuniaires » (3). Ces derniers mots indiquent bien, semble-t-il,
que les pèlerinages finirent par être mis sur le même pied que
les amendes en argent ; il n'y avait qu'une nuance de termino-
logie. Il en était déjà ainsi, d'ailleurs, au XVIe siècle : la Réfor-
mation de Groesbeek de 1572 indique, en effet, que les peines
pécuniaires « pourront par les juges estre décrétées ou soubs
titre de voiage ou en les taxant en argent, selon la qualité du
mésus » (4).
Ailleurs, à Alost par exemple, le pèlerinage tient lieu
d'amende pécuniaire, dans le cas ou le condamné est insol-
vable (5).
(1) Statuts de Maastricht (1380), art. XII.
(2) Coutumes de Liège, ch. 14, art. 36. Réformation de Groesbeek,
ch. 15, art. 3. — «Tels voyages réducibles en argent ne dénotent la
personne d'aucune infamie ». Rec. des échevins de Liège, 17 juillet 1597 ;
n° 279, fol. 245. Coût, de Liège, III, p. 217-218.
(3) Sohet. Institutes de droit, V, tit. 27, n° 8.
(4) Réform. de Groesbeek., ch. XV, n° 3.
(5) « Ende es dickent gesien, als de mesdadighe niet ghegoedt oft
machtich en was de beterninghe te doeue met goede, dat men hem
beterninghe dede doeue met pelgrimagen ». Origine de la Coutume
d' Alost, ch. XL, VI, 11° 12.
CHAPITRE ÎI
LES DELITS
Un observateur non averti serait tenté de croire qu'à l'instar
de notre code pénal moderne, les anciennes keures communales
flamandes et brabançonnes ou môme les statuts du pays de
Liège contiennent des dispositions bien nettement classifiées
touchant la répression des délits. Quoique ces chartes pénales
aient eu avant tout pour but de mettre fin à l'arbitraire
indéniable des justiciers et des échevins, elles laissaient
cependant à ceux-ci une assez grande latitude, proportionnée
au degré d'indépendance de la commune vis-à-vis du seigneur.
Ainsi dans la principauté de Liège, les dispositions du droit
criminel sont beaucoup plus développées que dans les autres
provinces : mais là précisément on observe ce manque de
classification. Les châtiments pour les délits les plus graves
contre les personnes s'y trouvent mentionnés pêle-mêle avec
des pénalités de simple police ou de dommage causé aux pro-
priétés.
Pour ce motif, nous avons préféré adopter la classification
moderne du droit pénal, dans l'exposé des diverses infractions
qui pouvaient donner lieu à l'application de pèlerinages comme
peines. Nous étudierons donc successivement les délits reli-
ix, les délits commis contre la chose publique, les délits
commis contre les personnes et les propriétés (i).
Il eût été intéressant de dresser une statistique des div<
sortes d'infractions punies de pèlerinages ; cependant elle
(i) Nous avons adopté les divisions que donne E. PouiAET dans
.son Histoire du droit pénal dans l'ancien duché' de Brabant (Mémoires
couronnés etc., publiés par l'Acad. Royale de Belgique. Tome XXXIII),
p. 273. Bruxelles, 1867.
34 CHAPITRE II
nous a paru une entreprise impossible, vu l'inégalité des sources
que nous avions à notre disposition. En effet, la diversité la
plus grande existe dans les textes d'après lesquels les tribu-
naux du moyen âge appliquaient les peines. Dans les com-
munes liégeoises, par exemple, où nous trouvons un code de
pénalités très développé, les échevins n'ont, en général, pas
éprouvé le besoin de garder note des jugements qu'ils pronon-
çaient ; les textes leur semblaient assez explicites pour qu'eux
ou leurs successeurs pussent, dans la suite, juger d'une façon
uniforme. Par contre, là où les ordonnances des peines
sont sobres en détails pour déterminer qu'à telle infraction
répond telle peine, c'est-à-dire, in casu, tel pèlerinage, les
records ou les registres aux corrections des échevins nous ont
laissé de nombreuses traces de voyages ordonnés. Ces registres
formaient eux-mêmes le code pénal des tribunaux de la com-
mune et c'est d'après les sentences codifiées par leurs prédéces-
seurs que les échevins prononçaient leurs jugements. Il n'est
pas rare d'en trouver des traces matérielles. Ainsi, le Registre
original des plaids d'Ypres de 1366 à 1380 (1) contient le
procès-verbal d'une condamnation, à faire le vo3Tage de Ven-
dôme, prononcée pour blessures contre certain Michel Priem;
une main plus récente y a tracé en marge ces mots : « Nota.
In d'Ypre yemen steiken » (Nota. A Ypres, blesser quelqu'un
avec arme aiguë). Le Correctieboek der stadt van Lyere, dont
nous donnons des extraits en appendice à ce travail, nous
fournit à chaque page des exemples analogues.
I. LES DÉLITS RELIGIEUX
Au moyen âge, dans les Pays-Bas comme ailleurs, ce qui
était une loi pour l'Eglise, l'était aussi pour la commune. Aussi
les magistrats communaux connaissaient des blasphèmes, de la
sorcellerie, des contraventions aux préceptes de l'Église ou aux
règlements de police des lieux saints, comme des délits de droit
commun. Même dans la répression de l'hérésie et de toutes ses
manifestations, l'activité des échevins s'est exercée d'une ma-
nière sensible ; quoique ces derniers faits appartiennent à la
période moderne, nous avons cru pouvoir nous en occuper,
(1) Cfr de Pei*SMAEKER, Reg- aux sentences des échevins d'Ypres,
p. 292. Bruxelles, 1914.
LES DELITS 35
parce qu'ils dénotent encore pleinement la mentalité des tribu-
naux scabinaux de la période précédente (i).
Par un jugement du 5 avril 1445 le magistrat de Saint-Trond
punit un blasphémateur d'un voyage à Rome et d'un voyage à
Saint-Jacques de Compostelle, avec obligation de se présenter au
pape ; des circonstances aggravantes — le coupable s'était per-
mis ces excès en semaine sainte — lui valurent cette double
peine (2). Le blasphème, en effet, était généralement amendé par
un voyage, à Chypre ou à Rocamadour (3). Les juges commu-
naux punissent de la même peine les paroles injurieuses ou peu
respectueuses vis-à-vis du dogme catholique de la présence réelle
du Christ au Saint-Sacrement (4). Les corporations commu-
nales semblaient plus indulgentes : un arbalétrier de Malines,
au XVe siècle, qui avait blasphémé en réunion de la Gilde, dut
simplement aller porter une chandelle à la Croix Brune de
Battel (près de Malines) (5).
(1) POULLET (Hist. dr. pénal, brab., p. 275) dit au sujet de l'héré-
sie, que « la connaissance n'en fut pas attribuée aux juges séculiers,
dans les Pays-Bas, que par les édits généraux du règne de Charles-
Ouint ». Les faits que nous signalerons dans la suite, prouvent que les
échevins, surtout à Anvers, ont jugé des infractions d'ordre religieux,
qui, bien que n'étant pas formellement reconnues comme faits
d'hérésie, étaient cependant des conséquences immédiates de l'esprit
de Réforme.
(2) «... Peter Tutelers alias Smeyers, overmits alsulcker blasphe-
mien ende oukerstelicker woerde vrille, aïs hij in goiden palmdaige te
onsen heren God wert spraeck, ende die selve onkerstelicke woerde
daerna in vriteen douredage weder van nuwens courirmeerde, dat hij
trecken sal vore ende by onsen heiligen vader den paus van Romen...
ende. . . doen een wech Smt Jacobs in Compostelle . . .». Nachtegael,
fo y0 vo dans STRAVEN, Inventaire analytique et chronologique des
archives de la ville de Saint-Trond, t. I, p. '3J0. Saint-Trond, 1886-1892.
(3) Gaud, 8 octobre 1515, Cm \uisit., éd. P. Prédérico,
t. IV, p. 3. — Tournai, février 1457, Corp. Inquis., t. I, p. 336. -
Saint-Trond, 19 août 1454, STRAVEN, Op. cit.; t. I, p. 405-6.
(4) Anvers, 17-20 août 1519. Correctieboek 1513-1568, fol. 15 dans
Bulletin des Archives d' Anvers- Antwerpsch Archievenblad; édition
Génard & Van den Branden, t. VU, p. 133. — Id. Corp. Inquis.,
t. IV, p. 11. — Anvers, 4 décembre 1529. Correctieboek 1513-1568,
f° 40, Antw. Arch., t. VII, pp. 178-9. Cfr. POULEET, Hist .Dr. pénal
Brab., p. 277.
(5) Cfr B. POULLET; Quelques mots à propos de la juridiction disci-
plinaire des corporations communales au X\'Q siècle en Belgique, dans
Bulletin de l'Académie Royale, 39e aimée, 2e série, t. XXXIX (1870),
p. 428.
36 CHAPITRE II
Nous n'avons pas rencontré de nombreux exemples de sorti-
lèges punis de pèlerinages. La sorcellerie, en effet, faisait l'objet
de stipulations plus sévères, depuis nos premières keures jus-
qu'aux répertoires de droit de la fin du XVe siècle (i). En 1408,
cependant, une femme, jugée coupable d'avoir jeté certains malé-
fices sur le seuil de sa voisine, fut condamnée à un voyage à
Saint-Jacques (2).
Les autorités communales avaient le souci du respect de la
foi et des pratiques religieuses. Un pèlerinage au tombeau des
Trois-Rois à Cologne échut en 1354 à une femme de Gand, qui
avait donné en lecture un livre contraire à la foi (3). En 1374
un individu de la même ville avait enterré son enfant naturel
dans la terre non bénite ; les échevins jugent que ce fait
entraîne le déshonneur de la mère et des parents de celle-ci,
et qu'il doit être amendé par un pèlerinage à N.-D. de
Vabre (4).
On n'ignore pas que les représentations des mystères au
11103^611 âge donnaient souvent lieu à des satires à l'adresse des
prêtres. Le 11 juin 1408, le magistrat de Tournai défendit aux
paroissiens de Saint-Brice, sous peine d'un voyage à Saint-
Jacques, de représenter encore des mystères du Saint-Sacre-
ment (5).
Une des dévotions les plus populaires, à la campagne surtout,
a toujours été celle à S. Antoine l'Ermite. Les paysans offraient
en son honneur des porcs, qu'ils marquaient du signe embléma-
tique du saint et qui étaient vendus au profit de son culte, établi
(1) Cfr Laenen, Heksenprocessen, Anvers ,1914.
(2) Registre n° 12655 des comptes des offic. crimin. du Brab.,
cité par PoutEET, Brab., p. 278.
(3) « Omme dat sie eenen lesbouc dede lesen, dwelck es jegheii
tgheloeve van der heelegher kerken. . . ». Zoendinc Bouc 1353-54
fol. 255, Corp. Inquis., t. II, p. 142.
(4) « Orne dat onkerstenlic ende onmoghelic werck ende daed dat
de vors. Je cob dede syn schielkersten kind dat hy hadde by Kateline
siere niclite vornomt. Ende also 't forscreven kind, dat syne was, doit
was, dat hy syn kind nam . . . , en drought wech omme te gravene in
't gewyde, dat hy niet en dede, maer drought ende dalft in 't onghe-
wyde, met scande ende scoufieringhe van Kateline vors., haren vader,
maghen ende vrieuden. . . ». Zoendinc Bouc, 1374, n° 9, CannaerT,
Bijdragen lot de kennis van het onde strafrecht in Vlaenderen; 3e éd.,
p. 381-382, Gand, 1835.
(5) Cfr Yanden Broeck, Extr. des anal, des anc. reg. des Consaux
de la ville de Tournai; dans les Me'm. Soc. hist. et litt. de Tournai,
t. VII (1861), p. 68-69. — Cfr Corp. Inq., t. II, p. 194-5.
LUS DÉLITS 37
dans l'église paroissiale. Le magistrat de Lierre condamna, en
1439, un certain Theeus de Roesele, qui avait assommé subrep-
ticement dans sa maison un porc ainsi offert ; il l'obligea à faire
un pèlerinage au sanctuaire célèbre de Saint- Antoine en \
nois (1).
Passons rapidement en revue quelques condamnations pro-
noncées par les échevins pour le « fait de religion » ou pour de
délits s'y rapportant d'une façon quelconque.
Le magistrat de Tournai condamna en 15 17, malgré la défense
de l'official, un prêtre, Jaspar Fournier, suspect d'hérésie, à
visiter le tombeau des Apôtres à Rome; un conflit de juridiction
ne tarda d'ailleurs pas à se développer à ce sujet (2).
Déjà avant les prédications de Luther, dès le 31 mars 1514,
les échevins d'Anvers condamnent trois individus au pèlerinage
romain, pour avoir mangé de la viande aux jours défendus par
l'Eglise. Celui qui leur en a fourni l'occasion, doit se rendre
à N.-D. d'Einsiedeln (3). Le magistrat d'Amsterdam agissait
d'ailleurs de la même façon en 1528 (4) et en 1537, il condamnait
encore à ce premier voyage, pour défaut d'assistance à la
messe (5). Un peintre, nommé Adrien, prévenu d'avoir assisté
à des réunions défendues et d'y avoir lu et interprété l'Ecriture,
doit, en 1524, se rendre au Saint-Sang de Wilsenack (6). Un
autre, Liévin Wedemael, qui avait troublé le sermon d'un pré-
dicateur catholique et malmené celui-ci, se voit contraint d'aller
à Rome et de ne pas en revenir sans la permission du marc-
grave; il rentra néanmoins sans avoir obtenu celle-ci; à la suite
de quoi, il est amputé d'un doigt et obligé à faire le voyage de
Chypre (7).
(1) Cfr Correctieboeck de Lierre, n° 323.
(2) Bibl. Nat. Paris, Fonds franc., ms. n° 9009, fol. 2 et v°, Corp.
Tnquis. t. II, p. 297-298.
(3) Correctieboek 1513-1518, fol. 4 v°, Antw. Avch. t. VII, p. 132.
(4) Cfr Corp. Inquis., t. V, p. 332.
(5) Cfr v. Utreciit-Drkssei.huys, Op. cit., p. 14, n° 21.
(6) « Adriaen de Schildere . . . inde heymelyeke ongeoerloefde
ileringe geweest. . . ende server gelesen ende geinterpreteert
heeft het Heylieh Evangelie ende andre heylige scriften ». 26 mars
1524. Correctieboek 1513-1568, fol. 23, An/w. Arch., t. VII, p. 131-
133, Corp. Inq., t. IV, p. 266-67.
(7) 25 janvier 1529 : « Lieven Wedemael... eenen zekeren predi-
cant in zyn sermoen gepeitmbeert. . . ende denzelven met zyiui
slippen getrokken. . .». Correctieboek 1513-1568, fol. 37 v°, Antw.
Arch., t. VII, p. 165-166. — Correctieboek, fol. 61, Antw. Arch., Ib.,
p. 392-3.
38 CHAPITRE II
Le fait d'avoir des rapports avec les anabaptistes et les luthé-
riens, de les favoriser, d'être trouvé en possession de missives
ou d'autres documents suspects d'hérésie était régulièrement
puni par les échevins d'un pèlerinage à l'île de Chypre (i). Les
libraires qui imprimaient ou vendaient des livres contraires
à l'orthodoxie ou ceux qui étaient convaincus d'avoir répandu
des écrits propageant la doctrine nouvelle, se voyaient imposer
des voyages, soit aux Trois- Rois à Cologne, soit au Saint-Sang
à Wilsenack, soit à N.-D. de Boulogne, soit à N.-D. de Paris,
soit même en Clrypre (2).
Plusieurs de ces condamnations furent portées à l'époque des
premiers placards de Charles-Quint. Ces faits sont d'autant plus
remarquables qu'ils se sont passés dans la ville d'Anvers, qui
était restée par exception ville de droit coutumier et où, par con-
séquent, la peine de mort n'était pas, comme ailleurs, l'aboutis-
sement ordinaire d'une condamnation pour fait d'hérésie ou de
contravention aux placards.
II. LES DÉLITS COMMIS CONTRE LA CHOSE PUBLIQUE
Sous ce titre nous comprenons : i° les attentats commis contre
les droits et prérogatives du seigneur suprême ou immédiat,
et contre ceux de la commune, regardée comme personne
morale ; 20 les attentats commis contre la tranquillité publique.
Il va sans dire que pour ces délits, qui étaient généralement
réprimés avec la plus grande sévérité, l'application de pèleri-
nages est la conséquence du fait qu'il ne s'agit que d'infractions
de peu d'importance en elles-mêmes, mais qui néanmoins,
(1) 1534-5. « Peeteren van Hese... conversacie gehadt inetten
herdoopers ende Lui lier ianen. . . ». Rekeningen van den Marcgr.
1534-5, Antw. Arch., t. VII, p. 367. — Correctieboek 1513-68, fol. 59,
Antw. Arch., t. VII, p. 377. — 1534-5- « Adriane van Berghen ». Ibid.,
Antw. Arch. t. VII, p. 367. — 6 septembre 1539, « Dierick Penninck ».
Correctieboek 1513-1568, fol. 73, Antw. Arch., t. VII, p. 444.
(2) 14 février 1525. « Henrick Peters, boecvercoopere ». Correc-
tieboek 1513-1568, fol. 26 v°, Antw. Arch., t. VII, p. 240. — 30 octobre
1526. « Hans van Remunde ». Corp. Inquis., t.V, p. 154. — Même date :
« Henric Heuricxse.is ende Tanueken Zwolfs . . . boexkens ende
liedeckens vercocht ende uitgedeelt ». Correctieboek 15 13-1568, fol.
30, Antw. Arch., t. VII, p. 159-160, Corp. Inq., t V, p. 155. —
3 janvier 1536. « Adriaen van Berghen, boeckprintere ». Correctie-
boek 1513-1568, fol. 59, Antw. Arch., t. VII, p. 378-379.
LES DELITS 3g
au moyen âge, avaient le caractère que nous leur attribuons
ici. Nous aurons l'occasion de constater l'usage fréquent de
cette pénalité pour les infractions commises par les officiers,
juges ou valets, dans l'exercice de leurs fonctions et pour les
infractions commises contre ces mêmes personnes, pendant
qu'elles s'acquittent de leur charge. Les entreprises des bour-
geois de nature à entraver la marche des services publics, les
contraventions aux ordonnances de simple police ou aux dispo-
sitions d'ordre commercial ou industriel, les infractions à carac-
tère de faux, enfin le jeu et la conduite qualifiée d'« inutilité» si
caractéristique au moyen âge : voilà autant d'occasions où nous
voyons les tribunaux appliquer la peine de voyage.
1. Attentats contre les droits et prérogatives die seigneur et
de la commune. — Au moyen âge il ne fallait pas un crime de
lèse-majesté pour qu'on prononce les peines mentionnées. Le
magistrat de Lierre condamne des bourgeois à des pèlerinages
à Saint- Jacques, à Rome et en Chypre, parce qu'ils s'étaient per-
mis des paroles outrageantes à l'égard du duc de Brabant (i) ;
celui d'Anvers agit d'une façon analogue (2). Un brugeois avait
eu l'audace de dire que la paix de Damme était une paix her-
nieuse « eenen ghespleten paeys » ; les échevins l'envoient pur-
ger sa peine à Rome (3).
Le refus de prendre part à l'ost commun proclamé au pays
était regardé comme une infraction gravement attentatoire aux
droits du prince ; ainsi lorsqu'en 1327 il veut une expédition
(herevaert) aux environs de Dixmude, les bourgeois d'Ypres
durent livrer chariots et chevaux ; certains d'entre eux, pour
n'avoir pas obéi, se virent contraints d'entreprendre des pèle-
rinages à Saint- Josse-sur- Mer, à Hulsterlo, à Ardembourg,
à Saint-Georges (4).
Les chartes des villes liégeoises contiennent de nombreuses
(i) 29 juin 1406. Covrectieboek, n° 20. — 14-25- Corvectieboek,
n°s I53-I54-
(2) 25 juillet 1410. a Jan Cortrosyn. . . onredclike worde opten
Heere ». Clementynboec, f° 112, Antw. Arch., t. XXVI, p. 75.
(3) Cfr GnjJODTS VAN SEVEREN, Invent, des Arch. de Bruges,
t. VI, p. 342.
(4) Cfr DESMAKEZ & De SAGHER, Comptes de la ville d'Ypres,
t. II, p. 763-764.
40 CHAPITRE II
stipulations concernant ceux qui porteraient une aide quel-
conque à un étranger, ennemi d'un bourgeois : avec leur esprit
de corps, qui, malgré tout, a survécu à beaucoup d'événements,
les communes regardaient toujours avec une certaine méfiance
un afforain entrer clans leurs murs ; celui-ci était surveillé et si
on pouvait prouver qu'il avait une rancune contre un bourgeois,
tout acte pouvant avoir l'air de le favoriser était regardé comme
une injure et une infraction à l'égard de la commune elle-même,
en étroite solidarité avec ses bourgeois.
Les Statuts de Jean d'Arckel pour Saint-Trond (1366)
ordonnent un voyage à Saint-Josse contre le bourgeois qui, par
paroles ou actes, prend la défense d'un étranger contre un autre
bourgeois (1); mais tandis qu'ici ce voyage profite à la partie
lésée, à Maestricht le coupable devait faire, au profit de la com-
mune, un second voyage, notamment à Saint-Rombaut à Ma-
lines(2). Un pèlerinage plus lointain était imposé, si le bourgeois
se livrait à des voies de fait graves vis-à-vis de son compa-
triote (3); la loi ne faisait exception que pour le bourgeois qui se-
courait son parent étranger (4). Même le seul fait de ne pas se-
courir un bourgeois qui, attaqué par un afforain, pousse le cri de
ralliement : « Bourgeois! » « Porter 1 », était passible de divers
pèlerinages (5). Celui qui, sciemment, hébergeait un étranger
se trouvant dans les mêmes conditions d'inimitié vis-à-vis d'un
autre bourgeois, encourait, dans les diverses communes du pays
de Liège, des pèlerinages soit à Rocamadour, soit à Saint-Josse,
soit à Vendôme, soit à Saint-Jacques et, en outre, un bannisse-
ment pouvant aller jusqu'à quatre ans (6). Il en était de même
(1) « Zoe wat portere, die een vrempden mati gestonde tegen eenen
portere, sceldene oft met quaden woerden dregene, die zoude ver-
boeren eenen wech Sint Joes op die zee, ter beteringhe der partyen».
Stat. Jean d'Arckel, 1366, n° 38, Straven, t. I, p. 80.
(2) Statuts de Maestricht (1380), art. 80.
(3) Ib. art. 79.
(4) Tb. art. 29.
(5) « Een porter die eenen anderen portere, hort roepen : Portere !
in anxt ende noede /an vrempde lieden, die portere, die zulcke por-
tere nyt en helpt bescudden nae zyn macht oft beste, .sonder ergelist,
sal verbueren eenen wech vSint Joes....» Keure pénale de Saint-Trond,
iji9, art. 2i, Straven, t. I, p. 198.
(6) Statuts de h> cité de Liège (1328), n° 20 ; Statuts de Jean d'Ar-
ckel, pour vSt-Trond (1366), n° 20, SïRAVEN, t. I, p. 75. — Statuts de
LES DÉLITS 41
pour celui qui en dehors de la commune se faisait tuteur d'un
étranger contre unbo pour causer dommage à celui-ci (1)
ou pour un motif quelconque faisait emprisonner son compa-
triote en dehors de la franchise (2). L'étranger lui-même, con-
vaincu d'être venu en ville avec l'intention de nuire à un bour-
geois, est condamné à une forte amende légale et, en outre, à
un voyage à Vendôme pour sa contre-partie (3). On assimilait
à ce cas celui du bourgeois qui renonçait à son droit de bour-
geoisie, dans un but hostile à quelqu'un (4).
La commune se sentait lésée dans ses droits par le fait que
des bourgeois, ayant droit à des pensions pour capitaux avancés
à la ville, quittaient celle-ci pour réclamer leurs pensions tout
en se trouvant à l'étranger, pour saisir les marchandises des
autres bourgeois, ou pour préjudiciel- à la ville elle-même ; des
ordonnances du magistrat de Saint- Trond prononcent contre
eux un voyage en Chypre et la perte de la bourgeoisie (5) ; une
peine analogue atteignait ceux qui obtenaient ou sollicitaient
des lettres contre leur franchise (6).
Les défauts dans le recours aux juridictions et surtout le
recours à une juridiction étrangère étaient amendés par les
pèlerinages les plus lointains : un voyage à Saint-Jacques pour
ceux qui assignent quelqu'un devant le juge ecclésiastique pour
des affaires passibles seulement d'une amende (7); un voyage en
Chypre ou à Saint-Jacques pour les habitants de Saint-Trond,
qui recourent au chef-de-sens à Aix-la-Chapelle, à l'encontredes
Maestvicht (1380), art. 29 ; Keare pénale de Saint-Trond (1419), art.
17, Stravex, t. I, p. 196-7 ; Paix de S. Jacques (Liège. 1487), XXVI,
30 ; Charte de Tongres de 1502, art. 26.
(1) «... om home of hoire buten der stat crot te doen ». Statuts de
tricht (1380), art. 78.
(2) Char le de Tongres de 1502, ait. 32.
(3) Coutumes de Looz, poim \
(4) Saim-Trond. 24 septembre 1436. Nachteg., f° 48 v°, Keurboek,
p. 226, ii° 3, STRAVEN, t. I, p. 316.
(5) « So wie van nu vort, van den aliène die pensien op die stadt
hebb porteren oeîit inwoenren syn, vyter stadt gheet ocht
trect, o:n syne pensien buten te versuecken, ocht onse porteren te
commerça, ocht die stadt om hare pensien wille te scadene, ... die
sal v< eenen v.ech int Cypers...». S novembre 1421. Nachte-
gael, f° 1 . .; : •;, t. I, p. 234. - 28 octobre 1437, Nachte-
gael, f° 51 v°, STRAVEN, t. I, p. 326-7.
(6) Statuts de Maestricht (1380), art. 131.
(7) Statut M sfricht (1380), art. 128.
42 CHAPITRE II
privilèges de la ville (i), ou qui vont prêter témoignage en
justice hors du pays de Liège, sans autorisation des bourg-
mestres (2).
Il était également défendu, sous peine de pèlerinage, de
porter plainte à la fois à plus d'une des deux ou trois juridictions
établies à Saint-Trond ou à Liège (3), de se plaindre aux métiers
assemblés avant d'avoir accompli cette formalité devant les
bourgmestres, jurés et conseillers (4).
En novembre 141 1, le magistrat d'Anvers sévit contre deux
individus qui s'étaient indûment mêlés des affaires de la ville, en
leur enjoignant des vo3rages à Vendôme et Saint-Josse-s/Mer (5).
Il envoie à Rome, pour y rester six ans, un certain Jean
Mathyszone qui, par des manœuvres louches, avait essayé de
provoquer une inimitié entre les villes deLouvain et d'Anvers (6).
Des paroles injurieuses à l'égard du gouvernement de la ville,
attiraient sur leur auteur des châtiments du même genre (7).
(1) 15 avril 1426 : «... so wat minschen, man oft wyf, die hoet-
vaert gemaect heeft, . . . dat tiegen die privilegien were, och daer
die privilegien mede gheachtert ocht gequest weren, die dat dede sal
vyter stadt hoeden syn, ende op eenen wech in Cypers. . .». Nachte-
gael, f° 25 v°, Straven, Op. cit., t. I, p. 263. — Id. 13 décembre 1428.
Nachtegael, f° 31 v°, Keurboek, p. 235, n° 1, Straven, Op. cit., t. I,
p. 290.
(2) 17 janvier 1508. Ordonnantieboek, p. 220, n° 1, Straven, Op.
cit., t. II, p 272-3.
(3) Saint-Trond. Statuts de Jean d'Archet (1366), n° 31, Straven,
t. I, p 77-78. — Liège : Paix de Saint-Jacques (1487), XXVI, 72.
(4) Sain-tTrond. Statuts de Jean d' Archet (1366), n° 55, STRAVEN,
Op. cit., t. I, p. 85. — Statuts de Maastricht (1380), art. 121.
(5) « Jan Sanders. . . boven den rechte van der stad van Antwer-
pen, derselver stad ghemoeyt heeft tonrechte . . . Item Gielis Stap-
paert ». Clementynboec, f° 103 v°, Antw. Archievenblad, t. XXVI,
p. 104-5.
(6) « Jan Mathyszone, onvermids dat hi dicke ende menighwerf
ghedaen heeft tiegen de heerlicheit ende tiegen der stad recht, ende
overmids dat hi ghepynt heeft tonvreden ende tonrusten te makene
de steden van Toevene ende van Atwerpen tiegen een met zinen
vercoepene ende loeteringen, soe sal hi trecken te Roeme...». Cle-
mentynboec, f° 100, Antw. Arch., t. XXVI, p. 101.
(7) « Jan van Kvere. . . overmids dat hi oiiredelike worden ghes-
proken heeft die der stad rechte van Antwerpen te na ghingen. . .
tsente Mathys te Trière ». 27 janvier 1409 (10). Clementynboec, fol.
105, Antw. Arch., t. XXVI, p. 61. — Cfr Lierre. Covrectieboeh, n° 366.
LES DELITS 43
2. Attentats contre la tranquilité publique. — Les
assemblées en armes, non convoquées par les autorités,
étaient de nature à compromettre la tranquillité de la commune.
Aussi nous voyons le duc de Brabant édicter au XIVe siècle
divers pèlerinages contre ceux qui convoqueraient des assem-
blées en armes, y assisteraient avec ou sans armes, et surtout
contreceux qui )r dégaineraient(i). Lorsqu'en 1451 les foulons de
Lierre en révolte attaquèrent avec leurs armes les bourgeois,
les échevins en condamnèrent une douzaine à des voyages
lointains en France, en Italie et en Ecosse (2).
Au milieu des dissensions, qui divisaient le pays de Liège,
à la fin du XVe siècle, le magistrat de Saint-Trond crut nécessaire
d'imposer une pénalité spéciale, celle d'un voyage àSaint-Martin
de Tours, à ceux qui lanceraient en public divers sobriquets
capables d'amener des troubles (3). La même peine était imposée
aux bourgeois, qui provoquaient des querelles en rue ou dans les
assemblées de métier ; ainsi, en 1522, une femme d'Anvers fut
condamnée, parce qu'elle avait ameuté tout son quartier devant
le couvent des Augustins, à l'intérieur duquel le magistrat
procédait à l'enquête d'hérésie contre les religieux (4).
3. Infractions commises par des officiers seigneuriaux
ou communaux dans l'exercice de leurs fonctions. — Les
officiers seigneuriaux avaient gardé, surtout au plat pays,
une liberté d'allures et un arbitraire que les communes s'appli-
(1) « Item, soe wie dat gaderinge maecte gewapent, hi moeste
varen te Sente-Joes. Item, wie te deser gaderingen quame..., item
wie ter gaderingen quame gewapent. . ., item, wie een sweert of een
mes toghe ». Charte des Paismakers (Jean III ?), VANDER Linden
Histoire de la Constitution de la ville de Louvain au moyen âge, p. 166.
Louvain, 1892.
(2) 20 mai 1451. Cfr Corvectieboek, n° 439.
(3) «... noch roepen bourgonschen, nocht Arenbergsclieu ; nocht
alsoe nyemant afdragende worde gheven oft zegghen, als Piccarts,
Brabant- Areubergsche oft desghelycken . . .». 't Residuum, f° i(>o,
n° 2, STRAVEN, Op. cit., t. II, p. 142.
(4) 13 octobre 1522. « Margriete Boonams. . . groote beruerte,
commotie ende gerucht van roepene. . . voere tcloester vanden Au-
gustynen, daer de Heeren valider Wet inné waeren. . . te Nycosien
in Cyprès ». Corvectieboek, 1513-1568, fol. 20, Antw. Arch., t. VII,
p. 126.
44 CHAPITRE II
quaient à dénoncer énergiquement aux grands justiciers,
lorsque l'occasion s'en présentait ; les pèlerinages semblent
avoir été en l'occurrence une des pénalités fréquentes en
Brabant. Ainsi, en 141 1, l'écoutête d'Hoogstraten avait molesté
des bourgeois d'Anvers ; on l'envoie à Aix-la-Chapelle (1). Le
drossart de Westerloo avait négligé de poursuivre des étrangers
qui, dans son ressort, avaient maltraité et blessé un bourgeois
de Louvain ; il est condamné en 1422 à un double voyage, à
Rome et à Saint-Jacques; il est aussi destitué. La même année, le
maïeur de Genappe avait fait emprisonner et torturer un bourgeois
de Louvain, de bonne renommée, qui avait décliné sa qualité de
« poorter » ; on le condamne à se rendre à Rome. Le maïeur et
le forestier de Meerhout sont contraints à faire route l'un vers
Saint-Jacques, l'autre vers Rocamadour, parce qu'ils avaient
amené sur un cheval, pieds et poings liés, un « Sinte-Peeters-
man » de Louvain pour une action civile (2). Divers écoutâtes
du Brabant sont condamnés à des voyages semblables, pour ne
pas avoir accordé crédit à des lettres scabinales émanées
d'Anvers (3) ou pour s'être montrés arrogants en présence des
autorités communales de cette ville (4).
Le drossart des terres d'Arckel, au pays de Malines, avait
laissé échapper un prisonnier des prisons de Contich et
d'Anvers ; les échevins de Lierre lui imposent, outre une forte
amende, un voyage à Saint-Nicolas de Bari (5).
Les échevins, bourgmestres et jurés encouraient parfois cette
peine. Lorsque, au début du XVe siècle, une lutte éclate entre
les villes de Malines et de Bruxelles, les Anversois prennent
le parti de cette dernière ville. Les Malinois barrent la
(1) 23 novembre 141 1. « Jan Scaert... scouthete te Hoegstra-
ten. . . onzedichlich tiegen de poerterie van Antwerpen ghedragen. .
t'Aken ». Clementynboec, f° 100, Antw. Arch., t. XXVI, p. 98.
(2) Cfr Comptes des officiers criminels du Brabant, cités par
Poui,r,ET, Hist. Dr. pén. Brab., p. 287-9.
(3) Anvers, 23 novembre 141 1. « Jan van Lyere, scouthet te Tuer-
nout...». Clementynboec, i° 100, Antw. Arch., t. XXVI, p. 98-99. —
Id. « Jan van Barkelair, doude, scoutet tAertselair. . . der stad
brieve niet geloift. . .». Ib. Anvers, 14 juillet 1451. «Jan van der Meere
schoutet van Bergen (op-Zoom)...». Cfr MERTENS & ToRFS, Geschie-
denis van Antwerpen, t. I, p. 520 seq ; t. III, p. 142.
(4) Anvers, 23 novembre 141 1. Clementynboec, f° 100, Antw. Arch.,
ib. p. 98.
(5) Correctieboek, n° 52.
imnni
LES DELITS 45
Senne et entravent le commerce des Anversois. Ceux-ci se
vengent : ils bannissent les deux communemaîtres et douze
échevins de Malines hors du marquisat et les condamnent à un
voyage à Rome (i).
Même de simples indélicatesses ou des indiscrétions pou-
vaient attirer des voyages aux officiers seigneuriaux ou commu-
naux. Dès 1366, une disposition des statuts de Jean d'Arckel,
reprise dans la suite par les principaux monuments du droit
liégeois, condamne à un voyage à Saint- Jacques tout échevin
ou autre juge qui achète des censives ou des créances au sujet
desquelles il y a contestation ou procès en litige devant eux,
aussi longtemps que l'affaire n'est pas complètement ter-
minée (2). Les échevins, maîtres ou jurés qui divulguent des
affaires traitées en secret, encourent des peines analogues (3).
Étaient passibles de pèlerinages, même lointains, les fores-
tiers du plal pays qui se livraient à des exactions (4), les portiers
des villes qui ne dénonçaient pas les personnes errant la nuit
sur les remparts (5), les gardes qui laissaient endommager les
fortifications (6).
Enfin, à Saint-Trond, les administrateurs des pauvres qui ne
faisaient pas examiner les malades avant d'entrer à la lépro-
(1) Cfr Mertexs & torfs. Op. cit., t. III, p. IIO-III.
(2) « Zoe eest een loye ende een moejelyck redit, dat scouteten
ende scepeuen noch eglieen vonnis ghevere van erven, noch van
scout, daer afï gedinghe ende procès voer hen aengesat ende geinten-
teert es, coopen noch geldeu en sal, noch en sulleu, dievryle ende
zoe langhe als dit gedinghe wyterlyck nyt geslicht en es...». Stat.
Jean d'Arckel, n° 44, STRAVEN, t I, p. 81. — Id. Statuts de Maestricht,
1380, art. 96. — Id. Liège. Modération de la Paix des Douze (1 ;
art. 19. — Id. Liège. Paix de Saint-Jacques (1487), t. II, p. 16.
(3) Saint-Troud. Heure pénale de 1419, art. 53, STRAVEN, t. I, p. 207.
— Id. Coutumes de Looz, 250 p.
(4) Anvers, 23 novembre [411 : « Gheert de Wilde... vorstere
ende senttere te Tuernout, mids dat hi de goede liede van der Heze
tonrechte ghescut heet echt vanden lande, ende bynnen
zynre vroente tonrechte gehouden heeft ende aldair geloifte doen
doen, soe sal hi trecken. . . tSente Eewouts in Elsaten. . .». Cl
tynboec, f° 100, Antw. Arch., t. XXVI, p. 97. Id. Lierre, 1446.
Correctieboek, n° 389.
(5) Louvain, 1407. Cfr Compte des ofjic. crim., cité par PoiTLLET,
Hist. Dr. pénal Brab., p. 2S8.
(6) Saint-Trond, 1542. 't Residuum, f° 93, v° n° 2, STRAVEN,
Op. cit., t. II, p. 426. — Id. 1487, f° 92 \"\ u° I, STRAVEN, Op. cit.,
t. II, p. 153.
46 CHAPITRE II
série (i), et les jurés des brasseurs qui témoignaient de la négli-
gence soit à remettre leurs comptes (2) soit à faire les
visites réglementaires (3).
A ce genre d'infractions, nous pouvons assimiler celles com-
mises, en leur qualité, par les doyens ou jurés des gildes mar-
chandes. Un exemple : Jean van Ysendyke, doyen de la gilde
des drapiers de Lierre, avait fait comparaître devant lui un
marchand de la banlieue pour avoir vendu des draps étrangers,
contrairement aux droits de la gilde ; le pauvre homme avait
agi par ignorance et voulut s'en servir comme excuse ; rien n'y
fit ; il fut rudement condamné. Mais le doyen avait compté
sans les échevins d'Anvers, qui, jugeant comme chef-de-sens
de ceux de Lierre, estimèrent qu'il avait gravement manqué à
son serment d'entrée en charge, en n'admettant pas l'ignorance
prévue par le règlement en cette matière; ils lui enjoignirent un
voyage à N.-D. de Bâle (4). Cette condamnation ne fut pas
un fait isolé (5).
4. Délits commis contre les officiers seigneuriaux ou les
fonctionnaires publics dans l'exercice de leurs fonctions. —
Dans l'esprit de l'époque une injure et des mauvais traite-
ments, infligés à un officier du seigneur, étaient censés s'adresser
au seigneur lui-même, et, par conséquent, réprimés avec la plus
grande sévérité : des peines corporelles graves étaient le châti-
ment des blessures, et des pèlerinages celui des injures et par-
fois des coups sans effusion de sang. En général le fait de
(1) 25 avril 1524. 't Residuum, f° 145, n° 3, STRAVEN, Op. cit.,
t. II, p. 354-5-
(2) Bruxelles, 18 juin 1450. Ordonnant, der Ambachten, fol. 42 v°.
Cfr DesMarez. L'organisation du Travail à Bruxelles au XVe siècle.
(Me'm. cour. etc. Acad. R. des Se. Lettres et Beaux-Arts de Belgique.
Coll. 8°, t. LXV, 1 fasc. Lettres), p. 176. Bruxelles, 1904.
(3) Saint-Trond, 19 déc. 1457; 26 mars 1457; 5 novembre 1515. Nach-
teg., f° 93 v°; Keurboek, p. 43-44; 't Residuum, f° 19, n° 2, vStraven,
Op. cit., t. I, p. 431 ; t. II, p. 90-91, 3II-3I3-
(4) Cfr Antw. Arch., t. XXVII, p. 31-35.
(5) Ypres, 20 novembre 1387, DE PEtSMAEKER, Op. cit., n° 983,
p. 341. — Saint-Trond Keure pénale, 1419, art. 30, Straven, t. I,
p 203. — Ib. 19 décembre 14^0. Nachtegael, f° 60 v°, SïRaven,
t. I, p. 347-8-
LES DÉLITS 47
malmener ou d'outrager les échevins, les membres du conseil de
la ville, les apaiseurs, les fonctionnaires de la commune, les
experts des industries ou du commerce local, les doyens ou
jurés dos métiers, était l'objet de fréquentes condamnations
à des pèlerinages.
Par une sentence du 27 juillet 1391, le conseil privé du comte
de Flandre condamne à faire divers pèlerinages un certain
Sohier Scaec et quatre de ses complices, pour avoir administré
des coups au procureur et au contrôleur du prince à Bruges : le
principal coupable doit se rendre à N.-D. de Naples et, un mois
après son retour de cette ville, à Saint-Jacques de Compostelle ;
les quatre autres iront respectivement à N.-D. de Riga en Fin-
lande, à Saint-Nicolas de Bari, à Saint-André en Ecosse, et à
Saint-Pierre de Rome (1). Divers individus d'Ypres subirent
des peines analogues pour des injures adressées à l'avoué de
cette ville (2).
Il est à noter qu'en général ces dispositions pénales ne visent
que les injures et les mauvais traitements infligés à des fonction-
naires seigneuriaux ou communaux dans l'exercice de leurs
fonctions ; s'il arrivait que l'un de ceux-ci prit part à une
rixe et y fut malmené, on le regardait comme un simple
bourgeois et on n'appliquait que les peines ordinaires.
Nous ne pouvons songer à rapporter ici les nombreuses con-
damnations à des pèlerinages, prononcées pour outrages par
paroles et par gestes à l'égard des écoutâtes, des baillis, des
maïeurs, de leurs remplaçants ou de leurs valets (3). Notons, en
effet, que non seulement les injures qui leur étaient adressées
(1) Cfr GlIXlODTS VAN SEVEREN, Inv. des Ar h. de Bruges, t. III,
p. 208. — Pour un fait analogue à X mur, 1405, cfr Répertoire de
Lodevoet, n° 131. {Coût, de Namur).
(2) 15 avril 1366. « . . . horribilité dist à l'advoé dele ville d'Ypre...
Chypre », de PELSMaeker, Op. cit., n° 598, p. 281-2. — 30 juin i
Ibid. u° 814, p. 307. — 1er février 1374, Ibid., n° 839, p. 813.
(3) Lierre, 9 mars 1410, Correctieboek, n° 85. — Saint-Trond.
Keure pénale, 1 \ig, art. 36, Straven, Op. cit., t. I, p. 202. — Lierre,
1444, 1468, Correct., n° 363, 405. — Liège. Statuts delà cité, 1328, art.
53. 54- — Ypres, 1378 : « de tout ce qu'ils ont mesprins vers le baillieu,
envers les escerwetters . . . » de PELSMAEKER, u° yy^, p. 2.15-6. —
Anvers, 4 octobre 1476. Antw. Arch., t. XXI, p. 12. — Liège. Paix
de Saint-Jacques (1487), XXVI, 52, 53. — Malines. Cfr Coutumes de
Matines, t. II, p. 21.
48 CHAPITRE II
personnellement (1), mais même toute attitude ou tout propos
inconvenant, tenu en leur conseil, était amendé par des pèleri-
nages d'importance diverse (2). Une injure à laquelle les éche-
vins semblent avoir été particulièrement sensibles consistait à
leur reprocher de n'avoir pas jugé selon le droit (3). Un exemple
typique, à ce sujet, est celui d'un certain Willem van de
Moirtere, d'Anvers, interprète, qui s'était permis de vilipender
l'échevin Jean van Ursel, pour avoir soi-disant voulu juger seul
un de ses pairs ; les autres échevins prirent la chose de très
haut et, le 20 mars 1457, le coupable fut condamné à venir
demander grâce au collège, toutes portes ouvertes, et à faire
le pèlerinage aux Trois Rois à Cologne et à N.-D. de Cam-
brai (4).
(1) Tournai (xne-xine siècles). Cfr de Nédonchel, Étude sur le
droit criminel en usage dans le Tournaisis au XIIe et au XIIIe siècles
(Bulletin de la Soc. hist. de Tournai, t. XXIV), [ . 119. — Saint-Trond.
Statuts de Jean d'Arckel (1366), nos 62-63-64, StravEn, t. I, p. 86. — ■
Ypres, 14 mars 1386. de Pei,SMAEker, Op. cit., n° 968, p. 338.
— Liège. « Parolles liayne. ses, vilaines et malcortoises . . . envers
personnes siègant en conseil de justice. . .». Mutation de la loi nouvelle
(1386), art. 32. — Id. Modération de la Paix des XII (1403), art. 16. —
Anvers, 1 juillet 1409. Clementynboec, f° 107, A ntw. Arch, XXVI,
p. 54. — Anvers, 25 juillet 1410 : « ouredelike worde ghesproken opten
Heere cnde opte goede liede vander Wet ». Clementynboec, f° 112,
Antw. Arch., XXVI, p. 74-75. — Ib. 23 novembre 1411. Clementyn-
boec, f° 100, Antw. Arch., XXVI, ib. p. 100. — Ib. 12 juin 1413.
Clementynboec, f° 105 v°, Antw. Arch., p. 134. — Ib octobre 1451.
Antw. Arch., t. XXVII, p. 31-35. — Saint-Trond. Keure pénale, (1419),
37, STRAVEN, t. I, p. 202. — Ib. 2 août 1434. Nachtegael, f° 44,
Stravën, I, 305-306. — ■ Malines : « Die yemandt van der wet oft
inder stadt dienst wesende, als pensi naris, secretaris oft een van den
greffiers dreyghelyck toespraecke om ocsuyn vander stadt dienste. . .».
Coût, de Malines t. II, p. 21.
(2) Saint-Trond. Statuts de Jean d'Arckel (1366), n° 80, STRAVEN,
1. 1,91. — Ib. Heure pénale, 1419. art. 48, StravEn, t. ï, p. 205. —
Maestricht. Statuts di 1380, art. 94. — Cfr Poui^ET, Hist. D. . pénal
Brab. p. 293. — Lierre, 1446. Correctieboek, n° 343. Même un tan-
neu • qui, à l'appel des causes, avait crié par laisanterie : « Ik ben
hier ! », dut aller à Vendôme. Cfr PouEEEt, loc. cit.
(3) Saint-Trond. Keure pénale de 1419. art. 36, STRAVEN, t. I, p. 202.
— Lierre, 1416. Correctieboek, n° 59. — Id. 1417 ; ib. n° 79 ; —
Anvers, 13 octobre 1522 : les échevins condamnent à un voyage en
Chypre une femme qui avait injurié le magistrat au sujet de l'affaire
des Augustins. Corp. lnquis., t. IV, p. 142.
(4) Cfr MERTENS & ToRFS, Gesch. van Antwerpen, t. III, p. 157.—
Papebrociiius, Annales Anlverpienses, t. II, p. 19.
LES DELITS
49
Des pénalités semblables attendaient ceux qui commettaient
quelque excès envers les apaiseurs de querelles (i), le clerc de
la ville (2), les valets, forestiers, portiers (3) et en général envers
ceux qui étaient chargés de veiller à la police des rues et des
marchés (4) ; enfin on faisait subir les mêmes peines aux bour-
geois qui molestaient les collecteurs d'impôts et d'amendes (5)
ou les experts préposés au contrôle soit de la fabrication de
certains produits, comme le drap, l'étain, le pain, la bière et le
vin, soit de la qualité du poisson et de la viande (6).
Les corporations communales, les gildes et les métiers
(1) Saint-Trond. Keure pénale, 1419. arl. 51, STRAVEN, I, 206. —
Tongres. Charte de 1502, art. 29. — Louvain. Charte des Paismaekers
(Jean III ?), Vander Linden, Op. cit., p. 167-8.
(2) Ypres, 25 septembre 1355, dans DE PELSMAEKER, Op. cit., n°
409, p. 258.
(3) Anvers, 7 février 1409 (1410). Clementynboec, f° 105, Antwerp.
Arch., XXVI, p. 61-62. — Ypres, 1367. DE PELSMAEKER. Op.
cit., n° 690, p. 291. — Anvers, 28 nov. 1411. Clem., f° 103-104 v°,
Antw. Arch., XXVI, pp. 107-108, 114. — Ib. 30 novembre 1411.
Clem., £° 101, Antw. Arch., XXVI, p. 112. — Saint-Trond, Keure
pénale, 1419, art. 36. Straven, I, 202. — Ypres, 5 avril 1366.
«... mesfait envers l'eschenvettere delà ville ». DE PELSMAEKER,
Op. cit., n° 596, p. 281 ; id. 1377. Cfr ib. n° 653, p. 288. — Saint-
Trond, 4 janvier 1445. Nachteg., f° 69 v°, Straven, I, 365. — Liège,
Paix de St- Jacques (1487), XVI, 42. — Tongres. Charte de 1502,
art. 31. — Saint-Trond. 1422. Kenrboek, p. 223, n° 1, Straven,
I, 240. Cfr POUEEET, Brab., p. 292.
(4) Cfr PouLEET, Hist. Dr. pénal Brab., p. 293. — Saint-Trond,
19 mars 1515. 't Residuum, f° 117 v°, n° 1, Straven, II, 302. — Id.
20 juin 1524. Ib. f° 150, Straven, II, 356. — Ypres, 4 septembre
1370, de Pelsmaeker, n° 780, p. 302. — ■ Saint-Trond, 20 août
1487. 't Residuum, f° 85, n° 3, Straven, II, 155.
(5) Cfr Poueeet, Op. cit., p. 293. — Saint-Trond. ier juin 1500.
't Residuum, f° 117, n° 1, Straven, II, 228-9.
(6) Ypres, 2 mai 1375 : injures aux « percheuars ». de PELS-
maeker, Op. cit., u° 863, p. 317. — Id. 20 décembre 1385. Idem,
Op. cit., n° 966, p. 337. — Saint-Trond. 2 avril 1520. Kenrboek, p. 9,
n° 2, Straven, II, 334-5. — Lierre, 31 mars 1416. Correctieboek,
n° 69. — Saint-Trond, 6 nov. 1525. 7 Residuum, f° 21, n09 1-2, Stra-
ven, II, 363-4. — Id. 24 décembre 1481. Kenrboek, p. 302, n° 1,
Straven, 11, 101. — Id. XVe siècle. Ordonnantieboeck, p. 100, n° 101,
Straven, I, 220. Cfr PouLEET, Hist. Dr. pénal Brab., p. 292. — Saint-
Trond, 1422. Ordonnantieboeck, p. 102, n° ni, Straven, I, 240-2. —
Anvers, 8 août 1478. Cfr Antw. Arch., t. XXI, pp. 86-7. — Lierre, juil-
let 1414. Cfr Correctieboek, n° 57, 58. — Cfr Coutumes de Looz, 32e p.
i
50 CHAPITRE II
semblent s'être inspirés de la jurisprudence échevinale pour
réprimer les injures faites à leur corps en général (i) ou les
excès commis sur leurs doyens, chefs-hommes, jurés, etc. (2).
Les registres aux ordonnances et sentences des métiers de
Gand nous montrent une procédure étendue, aboutissant fré-
quemment à des condamnations pareilles (3). Comme pour les
réunions de la commune, même les paroles ou gestes simple-
ment inconvenants étaient amendés par des voyages (4).
5. Injractions de nature à entraver la marche des services
publics. — Signalons tout d'abord que le fait pour un étranger,
auquel on défendait généralement d'entrer armé dans la ville,
de ne pas se laisser fouiller par la garde (5) et celui pour un
bourgeois de ne pas aider, la nuit, la justice à s'emparer d'un
coupable, était passible de pèlerinages (6). Celui qui essayait de
faire évader un prisonnier, soit en lui tendant une échelle (7),
soit par un autre moyen quelconque (8), celui qui hébergeait
(1) Bruxelles, XVe siècle. « Jean Claes, foulon à E)rps, déclara publi-
quement qu'il ne voulait avoir rien de commun avec la gilde de Bru-
xelles et fut condamné par cette dernière à : lier à Aix-la-Chapelle
Cfr DES Marez, Organis. du Trav., p. 150.
(2) Ypres, 4 sept. 1370. Cfr de Pei^Smaeker, n° 779, p. 301-2.
— Lierre, 1404. Correctieboek, n° 13. — Bruges. 1405. Comptes
de la vill de Bruges, 1405-1406, f° 15 v°, Gileiodts van Seve-
REN, Inv. des Arch. de Bruges, IV, 101. — Lierre, 16 sept. 1405.
Correctieboek, noa 18, 10. — Anvers, 1407. Correctieboek, p. 109 v°,
Aniw. Arch., t. XXVI, p. n. — Malines, 1.34. Cfr Pou^ET, Cor-
por. communales au XVe siècle, p. 430-431. — Saint-Trond, Ier juillet
1437. Nachtegael, f° 50, Straven, I, 320. — Bruxelles, XVe siècle.
Cfr Des Marez, Op. cit., p. 150, 151, 153, 174, 175, 383, 38^.
(3) Jugements du doyen et jurés du métier des teinturiers en bleu
(1367), des barbiers (1445), des cordonniers (1371) de Gand, repro-
duits par Cannaert, Bijdragen, p. 389, 395. — Cfr Ib. p. 100-102.
(4) Bruxelles, XVe siècle. Cfr DES Marez. Organ. du Trav., pp.
283-4. — Malines, 1437. Cfr PouiXET, Corporations commun., pp.
428-9. Cfr L. VANDER KSSEN. De straf- en rechtevlijke verzoenings-
bedevaarten, p. 13-14.
(5) Saint-Trond. Keure pénale, 141 9, art. 49, St^avkn, I, 205-
206.
(6) Saint-Trond. 13 août 1425. Nachtegael, f° 24, Straven, I,
262.
(7) Lierre, 1423. Correctieboek, n° 140.
(8) Ypres, 15 avril 1366. Cfr de Peesmaeker, Op. cit., n° 597,
p. 281. — Tongres. Charte de 1502, art. 30.
LES DÉLITS 51
un homicide non pourvu de sauf-conduit (1), un banni ou un
condamné à pèlerinage, revenu avant le temps fixé (2), tous
ceux-là s'exposaient à des peines semblables.
Lorsqu'il s'agissait de réconcilier deux familles devenues
ennemies à la suite d'un méfait d'un de leurs membres, les
échevins ou, dans les communes où ils existaient, les apaiseurs
(paismakers, paysierders) convoquaient les parties, pour faire
donner trêve : le fait de ne pas comparaître au jour fixé par ces
magistrats, celui de ne pas donner trêve sur leur réquisition (3)
ou celui de ne pas payer la composition arrêtée par eux, étaient
punissables de pèlerinage (4). Tous les bourgeois d'ailleurs
étaient obligés sous la même peine de comparaître à toute con-
vocation du bourgmestre, qu'elle fût nécessitée par l'intérêt
de la ville ou les réquisitions des parties (5). Le bourgeois qui
empêchait d'une manière quelconque l'exécution des sentences
portées par les autorités communales, s'exposait à des pénalités
de ce genre, qui furent aggravées si le coupable avait usé de
violence (6).
(1) Tongres. Charte de 1502, art. $y.
(2) Saint-Trond, Heure pénale, 1419, art. 30, Straven, I, 200.
— Matines : «... die eeneu ballinck van der stadt huysde of te lo-
geerde binnen der stadt oft vryheit, verbeurt eenen week in Cypers»,
Coût, de Matines, II, 24. — Maestricht. Nouveau privilège (1428),
art. 11. — Saint-Trond, 14 février 1502 : «. . . soe wie op eenigheweeghe
gheroepen oft ghewesen wort ende daer oevere in der stadt oft vry-
heit queme. . . ende soe wie sulcke lieden kuysde oft hoefde, oft
teten oft te drincken reyste oft gheve, ...». 't Residuum, f° 121,
Straven, II, 234.
(3) Eouvain. « Die twist oft geschil heeft teghen eenen anderen. . .
maeh. . . met consent van een van den borgemeesteren deser stadt,
metten eersten daghemente doen daeghen. . . Ende soo verre sul-
ekeu gedaechde, by den bode ghesproken synde, niet en compareert,
vervalt daardoor inde boete van eenen wech 't Sint Joos op de zee...
Ende soo verre den ghedaechde voor den borghermeester compa-
reerende, weygherde den haudt-viede te geven, soude daenm-de
ooek vervallen in den voorschreven wech van Sint Joos...». 1
de Louvain, III, 1. — Cfr Coût, de Lierre, IV, 2, 8. — Coût. d'An-
vers, in antiquis XII ; aniiquissimae, III, 10 ; compilatae, 7e p., VI, 21.
— Louvain, XIVe siècle. Chartere van den Paysmakers (Jean III ?).
dans Vander Einden, Op. cit., p. 168.
(4) Saint-Trond. 17 juillet 1424. Nachtegael, f° 21, Straven, I, 252.
(5) Coutumes de Tirlemont, I, 8.
(6) Tongres. Charte de 1502, art. 33.
52 CHAPITRE II
Les législateurs semblent avoir veillé avec un soin spécial à
la liberté des juges et à la sincérité des dépositions des témoins.
Les coutumes de Malines imposent un voyage à Saint-Martin
de Tours à celui qui menace un autre parce qu'il l'a dénoncé
à l'écoutête (i). Les monuments liégeois renferment de nom-
breuses dispositions au sujet des menaces et des injures profé-
rées à l'occasion du témoignage en justice (2) et des tentatives
de corrompre les témoins (3).
Signalons un fait curieux qui nous montre la façon dont les
autorités communales s'y prenaient parfois pour assurer la
marche des divers services administratifs. En 1434, un receveur
de Saint-ïrond veut résigner ses fonctions pour un motif, d'ail-
leurs inconnu, que les échevins n'admettent pas ; ils le forcent
à continuer ses fonctions, sous peine d'un voyage à Saint-
Jacques de Compostelle (4). Certains autres fonctionnaires, tels
les experts jurés du pain et du poisson, qui ne venaient pas
prêter serment en temps opportun, s'exposaient à des pénalités
analogues (5). L'opposition faite aux fonctionnaires pendant
l'exercice de leur charge (6), le défaut de se conformer aux
lettres échevinales lorsqu'il s'agissait d'évacuer une maison
vendue (7), étaient punis de la sorte.
(1) Coutumes de Malines, II, 22.
(2) Saint-Trond. « Zoe wy den andren dreecht, daer meu getuygscap
op vermet van wat saken het zy, oft die den andren dreecht om
getuygscap wille, die hy gedragen heeft, die sal der partyen beteren
met eenen weghe te Rutsemedou ». Statuts de Jean d'Arckel, 1366,
n° 27, dans Straven, I, 77. — Statuts de Maestricht (13S0), art. 49. —
Saint-Trond. Heure pénale, 1419, art. 13, Straven, I, 195. Cfr
PouiXET, Hist, Dr. pénal Brab. p. 294.
(3) Liège. Statuts de la cité, 1328, n° 48. — Statuts de Maestricht,
1380, art. 50. — Saint-Trond. Keure pénale, 1419, art. 12, dans Stra-
ven, I, 195.
(4) Saint-Trond, 5 juillet 1434 : « ...dat Robin Roderborch houden
en aenveerden soude die rentmeesterseap van der stadt, gelyck hyse
voer ghehouden hadde, opt verboeren een wech Sint Jacobs in Com-
postellen. . . ». Nachtegael, f° 43 v0., dans Straven, I, 305. Un fait
analogue s'y représenta le 30 déc. 1680. Cfr Straven, IV, 339.
(5) Saint-Trond, 28 juillet 1455 et 30 mai 1457. Nachtegael, f° 8y
v° et 92, Straven, I, 413-414.
(6) Liège, Statuts de la Cité (1328), art. 52. — Id. Paix de St-Jac-
ques (1487), XXVI, 51.
(7) Lierre, 10 juin 1409. Cfr Correctieboek, u° 46.
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LES DELITS
53
Les corporations d'archers et les gildes marchandes suivirent
cet exemple et appliquèrent des pèlerinages, notamment à ceux
qui ne remplissaient pas dûment leurs fonctions d'après leur
serment (i) ou même assistaient trop irrégulièrement aux réu-
nions (2); chose remarquable, à Saint-Trond, les autorités
prennent des dispositions pour empêcher l'abus des actions
inhibitoires, formulées contre la gilde des drapiers au détriment
des intérêts financiers communaux ; ainsi celui qui, par une
action de cette nature, s'opposera au payement de cens, de
fermages, de loyers d'accises ou de rentes dues à la ville,
encourra une peine de voyage à Saint-Jacques de Compos-
telle(3).
6. Infractions à caractère de faux. — Dans le droit du
moyen âge on ne remarque guère, comme dans le code pénal
moderne, le souci du législateur de classifier les délits à carac-
tère de faux : il laisse généralement au discernement des juges
l'application des peines d'après la gravité du délit : nous con-
statons que certaines de ces infractions, telles que le faux ser-
ment, la fabrication de fausses lettres échevinales et de faux
certificats de pèlerinages, l'usage de faux poinçons, poids et
mesures, étaient punis de voyages.
Ainsi, en 1371, un bourgeois de Gand, convaincu d'avoirfrappé
une femme, après avoir fait serment de son innocence, fut con-
damné à se présenter au pénitencier de Tournai pour y recevoir
l'absolution (4). Le fait de vouloir tromper les gardes ou autres
(1) Saint-Trond, 6 juin 1485 ; 13 mai 1499 ; 24 mai 1507 ; 6 juillet
1534 : Keurboek, pp. 172, n°, 21 ; 173, n° 2 : 174, n° 2, dans Straven,
n. I34-X35 i 223-2^4 ! 260 ; 409.
(2) Saint-Trond. 10 avril 1564. Maendachboek A, f° 15, STRAVEN
III, 31.
(3) Saint-Trond. 13 décembre 1423. Ordonn. p. 100, n° 102 ; Keur-
boek, p. 153, n° 3, STîaven, I, 147 et 248.
(4) Gand 1371 : « Voirt omme de redene dat Jhan van der Piet
wel ende suffisanteliken bedregen was, dat hy Callen voorseit alp
slaen, onde daerna hilt bi sinen heede, dat hy der by stont, ende
hare niet en alp slaen, ende hem selve aldus mesleede ende verzwoer
so eist da scepenen termineren ende wysen Jhan van der Piet vors.
te treckene binnen VIII daghe eerstcomende te Dornike aen den
pénitencier. . .». Zoendinc Bouc, a0 1371, f° 10, CANNAERT, Op. cit.,
p. gz.
54 CHAPITRE II
fonctionnaires de la ville ou de s'y substituer frauduleusement
entraînait des pèlerinages (i). A Saint-Trond, on punissait d'un
voyage à Rocamadour celui qui se servait de fausses lettres
pour établir qu'on avait accompli un pèlerinage imposé ou qu'on
avait payé la composition fixée par les échevins(2). En 1420,
le clerc de Herent, près de Louvain, fut envoyé à Rome pour
avoir fabriqué de fausses lettres échevinales d'après le style en
usage à Tirlemont (3).
En matière commerciale, un tanneur de Louvain qui avait
imité le poinçon de cette ville et marqué lui-même ses cuirs, fut
contraint par les échevins à se rendre à S. Croix de Lucques (4).
A Saint-Trond il était défendu, sous peine d'un voyage à Roca-
madour, de frapper une autre marque que la sienne sur des
objets fabriqués, tels que des faucilles, etc. (5) et, à Maestricht,le
refus ou le défaut de mesurer le vin d'après les mesures légales
entraînait un voyage à Saint-Josse-sur-Mer (6).
En 1440, un confrère de la gilde des arbalétriers, à bout de
ressources, avait emprunté une somme d'argent au nom de la
gilde ; le fait vint à la connaissance de ses confrères et ceux-ci,
jugeant cet acte de faux préjudiciable à l'honneur de leur cor-
poration, le condamnèrent à un pèlerinage à Wilsenack (7).
(1) Anvers, 17 février 1406 : « valsch alarm ». Cfr MerTENS &
Torfs, Op. cit., II, 359. — Ib. 28 novembre 141 1. : « hem selve bi
nachte vanghere ghemaict, zeggende dat hi den Heere toehoerde ».
Clementynboec, f° 103 v°, Antw. Arch., t. XXVI, p. 107. — Ypres,
6 mai 1394 : « Lambert Velghe, drapier... s'enforcha de faire art et
engien pour déchevoir Perchenars de la ville ». DE PEESMAEKER,
n° 1058, p. 363. — Lierre, 1446. Correctieboek, n08 381, 382, 383.
(2) Saint-Trond, Keure pénale de 1419, art. 28 :« Zoe wy bringt val-
sche brieven van wegen oft van beteringen, ende het woerde geproeft
ende bevondeu. . .». Straven, I, 200.
(3) Cfr Potjuxt, Hist. Dr. pénal Brab., p. 298.
(4) Cfr PouiAET-, Hist. Dr. pénal Brab., p. 298. — Vu l'importance
du délit, on peut dire que E. Poullet a traduit fautivement « Luke »
par « Liège », au lieu de Lucques.
(5) Saint-Trond. 4 juillet 1481. Keurboek, p. 227, n° 2 dans Straven,
IL 93-
(6) Statuts de Maestricht (1380), art. 48. — Cfr Liège. Réformation
de Groesbeeck, XVI, n° 1.
(7) Cfr PouLTET, Corpor. communales, p. 433.
LES DELITS
55
7. Infractions aux dispositions d'ordre commercial et indus-
triel. — Les communes devaient surtout leur efflorescence à la
prospérité de leur commerce et de leur industrie; les autorités
s'en rendaient parfaitement compte ; aussi ne doit on pas
s'étonner du grand nombre de dispositions qu'elles prirent
pour protéger et réglementer cette source du bien-être public.
Tout ce qui regarde en général la fabrication, l'expertise, l'achat,
la vente, l'importation, l'exportation des produits industriels et
alimentaires, de même que le cours des monnaies, fait l'objet
d'ordonnances fréquentes et précises, surtout au pays de Liège ;
en effet, les communes flamandes et brabançonnes s'y seraient,
semble-t-il, assez mal accommodées. La trangression de ces
mesures, comme de celles qui regardaient l'organisation du tra-
vail, amenait, nous le verrons, de très fréquentes condamnations
à des pèlerinages.
Laissant de côté certaines dispositions générales sur la fabri-
cation du drap de composition diverse (1), nous constatons tout
d'abord à Saint-Trond une abondance extraordinaire de pres-
criptions sur la brasserie : défense de brasser certaine bière, de
brasser en dehors de certains jours fixés ou plus de deux fois
la semaine, de brasser hors de la franchise ou de faire brasser
par un autre (2). Ce sont ensuite des instructions sur la distille-
(1) Nous devons évidemment nous borner à indiquer quelques
exemples : Saint-Trond, 28 février 1424. Nachtegael, f° 20, Straven,
I, 251. — Id. 7 septembre 1517, dans Straven, II, 321-2. — Id. 16
mai 1530. Keurboek, p. 105, n° i, Straven, II, 385-6. — Id. 18 juin
1543. Keurboek, p. 125, .straven, II, 431-2.
(2) Id. 10 janvier 1429. Nachtegael, f° 32 v°, Straven, I, 291-2.
— Id. 1 août 1435. Nachtegael f° 46 vo> Cfr vStraven, I, 312. — Id.,
16 janvier 1475. — Keurboek, p. 38, Straven, II, 40. — Id., 9 mai
1485. Nachtegael p. 47, n° 3, Straven, II, 134. — Id. 15 janvier 1487.
't Residuum, f° 90, n° 4, Straven, II, 153. — Id. 30 juin 1483. Keur-
boek, p. 227, n° 3, vStraven, II, 114-115. — Id. 1 mars 1490. Keur-
boek, p. 49, n° 2, vStraven, II, 164. -■ Id. 15 janvier 1487. 't Resi-
duum, f° 90, n° 4, Straven, II, 152-3. — Id. 1 mars 1490. Keurboek,
p. 49, n° 2, vStraven, II, 164-5. — W. 1 juillet 1493. 't Residuum,
p. 18, n° 2, Straven, II, 180-181. — Id. 29 avril 1510. 't Residuum,
f° 18 v°, n° 2, Straven, II, 278. — Id. 27 janvier 1528. 't Residuum,
fo 22 y0> 23) no x> straven, II, 374-6. - - Id. 9 novembre 1528.
't Residuum, f° 23 v°, n° 1, Straven, II, 379. — Id 8 nov. 1520.
7 Residuum, f° 23 v°, n° 2, Straven, II, 381. — Id. 19 sept. 1530.
't Residuum f° 24 v°, n° 1, STRAVEN, II, 390-391. — Id., 19 juin 1536.
56 CHAPITRE II
rie (i), sur la cuisson du pain (2), sur la teinturerie (3), la tan-
nerie (4), l'abattage du bétail (5).
Avant de livrer leurs produits à la vente, les brasseurs étaient
tenus à déclarer la boisson fabriquée (6); les boulangers aussi
devaient se soumettre, de bonne grâce, au contrôle des
experts (7).
L'achat de certaines denrées était soigneusement régle-
menté (8), et l'accaparement des grains réprimé avec rigueur (9).
't Residuum f° 26 v°, n° 4, Straven, II, 415. — Id. 13 octobre 1536.
't Residuum, f° 27, n° 1, Straven, II, 416. — Id. 3 mars 1544 (peut-
être 1514). 't Residuum, f° 18 v°, n° 1, Straven, II, 433-4. — Id.,
19 mai 1544. 't Residuum f° 28, n° 2 ; f° 29, Straven, II, 344-5. —
Id. 13 sept. 1546. 't Residuum, f° 29 v°, n° 2, Straven, II, 433 à 447.
Id. 4 oct. 1546. 7 Residuum, f° 31, n° 1, Straven, II, 447-8.
(1) Id. 26 oct. 1587. Maendachboek A, f° 81 v°, Straven,
III, 188.
(2) Id. 15 février 1451. Nachteg. f° 79 v°, Straven, I, 393-4. —
Id. 27 nov. 1542. 't Residuum f° 14 v°, n° 3 et f° 15, STRAVEN, II,
426-7.
(3) Id. 23 février 1562. Maendachboek A, f° 4. Cfr STRAVEN, III,
20.
(4) Id. 20 août 1515. Keurboek, p. 85, Straven, II, 207-8.
(5) Id. 9 juin 1455. Nachtegael, f° 87 v°, Straven, I, 412.
(6) Saint-Trond. 19 août 1448. Nachtegael, f° 76, Straven, I,
385. — Bruxelles. 8 septembre 1463. Perquementboek mette taitsen,
fol. 179, v° et 180, DES Marez, Organ. trav., pp. 278-279. — Saint-
Trond, 25 juin 1469. Keurboek, p. 39, n° 1, Straven, II. 23. — Id.,
27 mars 1480. Keurboek, p. 42, n° 1, Straven, II, 76.
(7) Saint-Trond, 13 décembre 1434. Nachtegael, f° 44 v°, Straven,
T 3°9- — Id. 1479. Keurboek, p. 18, Straven, II, 69-72.
(8) Par ex., acheter du vin dans une taverne, l'emporter sans le con-
sentement de l'hôte et ne pas payer dans les 3 jours : Saint- Josse-sur-
Mer. Statuts de Maesiricht (1380), art. 48. — Encaver de la bière des-
tinée à être débitée en société et coûtant plus cher que 4 gr. la quarte :
Saint-Martin-de-Tours. Id. 5 août 1482. Keurboek, p. 46, n° 3, Stra-
ven, II, 104-5 — Aller boire au « stadtpaenhuys » sans la présence de
l'hôte : Saint-Jacques de Comp. — Saint-Trond, 17 janv. 1508. 't Resid,
f° 130. Cfr Straven, II, 272. — Saint-Trond. 16 juillet 1515. Keurboek.
p. 55, n° 2 et p. 56, Straven, II, 305-6. — Id. 29 février 1524.
't Resid., f° 124 v°, n° 1, Straven, II, 349-400.
(9) Saint-Trond. 28 juillet 1561. Maendachboek A, 1° 7, dans STRA-
VEN, III, 17-18. — Id. 4 juin 1565. Maendachboek A, f° 17, Stra-
ven, III, 37-38. — Id. 13 août 1565. Maendachboek A, f° 19 v°,
Straven, III, 39. — Id. 15 oct. 1565. Maendachboek A, f° 20 v°,
Straven, III, 41. — Id. 9 février 1570. Maendachboek A, f° 59,
Straven, III, 108-109.
LES DELITS 57
Il en était de même de la vente (1) : les commerçants qui ex-
cédaient le prix fixé ou refusaient de vendre à ce prix (2), les
taverniers qui donnaient à boire, la nuit, après une certaine
heure, aux bourgeois ou aux soldats (3), les marchands qui
contrevenaient aux règlements des foires et des marchés (4),
s'exposaient toujours aux mêmes peines.
La protection accordée aux industries locales fit prendre des
mesures contre l'importation des produits étrangers (5), tandis que
le souci d'assurer le ravitaillement de la population et aussi de
créer des ressources pour la commune en imposant des taxes,
fit réglementer l'exportation (6). Enfin, le xvie siècle vit naitre,
par exemple à Saint-Trond, une série d'ordonnances sur le
(i) Saint-Trond. 6 février 1525. 't Resid., f° 20 v°, n° 3, Straven,
II, 361-2. — Id. 23 janvier 1531. 't Resid., f° 25, n0s 3, 26, Stra-
ven, II, 393-395- — Id. 10 janvier 1545. 't Residuum, f° 29, n° 1,
Straven, II, 438. — Id. 12 janvier et 19 octobre 1573. Maendach-
boek A, ff. 21, 43 v°, Straven, III, 75-77. — Id. 16 nov. 1573. M
dachboek A, f° 44 v°, Stravex, III, 77-80. — Id. 7 août 1595. Maen-
dachboek, A, f° 95 v°, Straven, III, zzz.
(2) Saint-Trond. 2 mars 1422. Keurboek, p. 14, n° 1, Straven
I, 236. — Id. 17 octobre 1446. Nachtegael f° 73, Straven, I, 381
— Id. 16 sept. 1465. Nachtegael, f° 108, Straven, II, 15. — Liège
Paix de St-Jacques (14S71 , XXVI, 46. — Saint-Trond. 10 sept. 1487
7 Resid. f° 12 v°, n° 3, Straven, II, 156. — Id. 3 février 1483
Keurboek, p. 47, n° 2, Straven, II, 112. . .
(3) Saint-Trond. 5 avril 1548. Keurboek, f° 183, n° 1, Straven,
III, 163. — Id. 9 décembre 1577. Macndachboek A, f° 56 v°, Straven
III, 100-102.
(4) Saint-Trond. 23 juin 1476. Keurboek, p. 52, Straven, II
45-46. — Id. 30 juillet 1481. 't Residuum f° 85, n° 1, Straven, II,
94. — 16 février 1484. Keurboek, p. 292, n° 1, STRAVEN, II, 123.
— Ib. 21 juin, 1540. 7 Residuum, f° iz^, u° 2, STRAVEN, II, 422. —
Id. 7 août 1581. Maendachboek, A, f° 68 v°, Straven, III, 142. —
Id. 30 janvier 158: A, f° 7 1 v°, Straven, III, 159-
163.
(5) Saint-Trond. z}, août 1442. Nachtegael, f° 64, Straven, I,
352. — Id. 14 juin 145O. Nachtegael, f° 89 v°, Straven, 1, 417. —
Id. 16 août 1507. 't Residuum, f° 123 v°, Straven, II. 260. - Id.
3 février 1522. Keurboek, p. 123, u° 2, STRAVEN, il. 34
Id. 18 juin 1543. Keurboek, p. 125. Straven, II, 431-432. - - Id.
29 février 1580. Maendachboek, A, 1° 63 v°, Straven, III, 124.
(6) Saint-Trond. S janvier 1487. 't Ri iditum, f° 71, STRAVEN,
II, 152. — Id. 24 janvier 1435. Nachtegael, f° 45. Straven, I,
310. — Id. 19 avril 1456. Nachtegael, f° 89, STRAVEN, I, 415-416. —
58 CHAPITRE II
cours des monnaies (i). La violation de tous ces règlements
entraînait des condamnations à des pèlerinages (2).
Mentionnons ici une ordonnance qui, bien que ne rentrant
pas dans la catégorie des précédentes, mérite l'attention parce
qu'elle montre l'opposition parfois clairement avouée du droit
d'empire et du droit communal au pays de Liège ; c'est celle
du magistrat de Saint-Trond du 17 juillet 1424. Elle décrète
un voyage en Chypre contre celui qui, après avoir loué des
biens en emphytéose, les céderait à un tiers, lequel offrirait
d'acquitter les charges qui les grèvent ; ce contrat était con-
forme au droit d'empire, mais contraire à celui de la ville (3)
L'organisation du travail dans les communes amena souvent
le magistrat à imposer des pèlerinages. Au cours du XVe siècle,
de nombreux conflits et grèves éclatèrent de la part des artisans
inférieurs de la draperie à Saint-Trond : parfois les ouvriers
refusaient de travailler au prix fixé ; parfois les drapiers ne
voulaient pas payer celui-ci ; alors se produisaient, là comme
ailleurs, des incitations à la grève ; on voyait des foulons quitter
la ville, pour quelque temps ; d'autres, qui étaient restés,
cessaient également le travail et refusaient de le reprendre.
Id. 16 novembre 1438. Chronique de Jean de Stavelot, citée par
Straven, I, 345. — Id. 3 février 1494. 't Residuum, f° 109 v°, Stra-
ven, II, 187. — Id. 11 juillet 1530. 't Residuum, f° 24 v°, Straven,
H» 387-390.
(1) Saint-Trond. 29 octobre 1565 ; 4 décembre 1570 : 16 juin 1572 ;
4 et 12 mars 1576 ; 22 août 1580 ; 6 et 20 juin 1583 ; 20 août 1548;
Voir : Maendachboek A, f° 21 ; 24 v° ; 41 v° ; 50, 50 v° ; 65 ; 70 ; 72 .
74 v° dans Straven, III, p. 42, 67, 73, 84-85, 129, 157-8, 165.
(2) Voir d'autres dispositions d'ordre commercial : Statuts de
Maestricht, 1380, art. 103. — Saint-Trond, 12 février 1481.. Keuvboek,
p. 42, n° 2, p. 43, nos 1 et 2, Straven, II, 89. — Id. 9 février
1478. Keurboek, p. 158, n° 5, STRAVEN, II, 55. — Id. 13 juillet
1478. Keurboek, p. 41, n° 3, STRAVEN, II, 61. — Anvers, 12 fé-
vrier 1496. Antw. Avch., I, 126. — Saint-Trond, Keure pénale, 1419,
art, 57. Straven, I, 208. — Id. 6 juin 1542. 7 Residuum, f° 144,
Straven, II, 355-356. — Id. 30 juillet 1571 et 28 juillet 1586. Maen-
dachboek A, ff. 37 v°, 78 v°, Straven, III, 69, 181.
(3) Saint-Trond, 17 juillet 1424. «So wie syn goede teu erve uytgeve,
ende daer boven yemant queme, die alsulke goede quiten woude,
en hem des partie maecde voer thoet, nae des ricx recht, boven der
stadt recht, die dat doet, die sal verboeren enen wech int Cypers... »
Nachtegael, f° 21, STRAVEN, I, 253.
LES DÉLITS 15g
A la suite d'événements de ce genre, la classe ouvrière fournit
de nombreux pèlerins aux sanctuaires célèbres (1).
Les métiers de la commune se conformaient à l'usage reçu en
cette matière (2).
8. Contraventions à des règlements de simple police. —
Alors que dans la plupart des communes des Pays-Bas l'ap-
plication des règlements de police était laissée à l'arbitraire
des échevins et des officiers communaux, au pays de Liège et
surtout à Saint-Trond, des dispositions précises prévoyaient clans
ses moindres détails les plus menus faits de la rue, dans ce
qu'ils pouvaient présenter de contraire à l'ordre public ; les
jeux d'enfants eux-mêmes n'étaient pas oubliés ! Les pèlerinages
constituent une pénalité générale pour toutes ces contraven-
tions ; à les examiner, on remarque immédiatement qu'ils
n'étaient en somme dans cette ville, et surtout au XVe siècle,
qu'une peine nominale sous laquelle se cachait, à titre de
rachat, une amende pécuniaire.
Nous ne pouvons donc songer à classifier, d'après leur genre,
les diverses ordonnances de police dont la transgression
amenait une peine de pèlerinage ; nous nous bornerons à en
indiquer les principales dans l'ordre chronologique où elles
furent portées.
Défense d'escalader les murs de la ville (Saint-Trond 1366,
7 octobre 1482 — Tongresï502 — Saint-Trond 29 juillet 1566) (3) ;
défense de capturer des chiens en rue (Louvain 1 juillet 1416 1
(1) Saint-Trond. 21 juin 1423. Nachtegael, f° 17, STRAVEN, I,
243-4. — Id. 5 juillet 1423. Nachtegael, f° 17 v°,STRAVEN, I, 244-4.
— Id. 30 mai 1435. Nachtegael, 47 v°, STRAVEN, I, 312. — Id.
19 août 1437. Nachtegael. f° 50 v°, STRAVEN, I, 320-321. — Liene,
143S. Correctieboek, nos 284 à 286; id. 1449. Ibid., n° 412. — Saint
Trond, 3 avril 1452. Nachtegael, f° 81 v°, STRAVEN, I, 400. — Id.
9 décembre 1454. Nachtegael, f° 86, STRAVEN, I, 407-8. — Id.
13 juin 1485. Kenrboek, p. 93, n° 2, STRAVEN, II, 135. — Id.
31 juillet 1514. Kenrboek, p. 94, n° 2, STRAVEN, II, 296-7.
(2) Saint-Trond. 19 janvier 1484. Kenrboek, p. 3, STRAVEN, II,
118-119 ; DES Marez, Organ. du trav., p. 150.
(3) Saint-Trond. Statuts Jean d'Arckel, 1366, n° 39, STRAVEN,
I, 80. — ■ Id. Kenrboek, p. 147, u° 2, Straven, II, 110. — Tongres.
Charte de 1502. art. 34. — Saint-Trond, Maendachboek A, f° 22 v°,
Stravex, III, 43-44.
(4) «. . .soe wie van nu voertaen enigen hont binnen der stadt van
Loeven vynghe met zaeken of anders, het waren honden vau binnen
6o CHAPITRE II
défense d'éteindre les chandelles dans une réunion où l'on se
bat la nuit (Saint-Trond 1419— Tongres 1502) (1); obligation de
faire garder ses porcs par le porcher commun du voisinage
(Saint-Trond 9 septembre 1426) (2) ; défense du jeu de balle à la
crosse sur le marché (fb. 14 janvier 1432) (3) ; défense de faire
la collecte pour les pauvres sans permission des seigneurs et du
magistrat (Ib. 30 août 1434) (4) ; obligation de se déclarer, si
on est pris en contravention pour circuler sans lumière, le soir,
après l'heure de la retraite (Ib. 8 juillet 1443) (5) ; défense, si
on n'est pas de la justice, de s'approcher de plus de 40 pieds des
portes ou remparts, quand un prévenu est mené à la torture
(Ib. même date) (6) ; défense de faire du feu dans une maison
sans foyer, au cas où les voisins se plaignent du danger d'incen-
die (Ib. 17 juillet 1447) (7) ; défense d'ouvrir des tavernes au
hameau « Ingelbampt» (Ib. 29 décembre 1460) (8) ; défense de
circuler avec un arc tendu ou non, après l'heure de retraite
(Ib. 16 janvier 1464) (9) ; obligation pour ceux qui possèdent
des couleuvrines de les déposer à la Chambre du Conseil (Ib.
29 mai 1465) (10) ; défense d'élever le niveau d'eau du ruisseau
au-dessus de la vanne (Ib. 28 août i486) (11) ; défense de faire
dans les rues ou d'y transporter du feu sans pot ni lanterne (Ib.
5 mars 1492) (12) ; défense aux enfants de se bousculer à l'école
der stat of die van buten in quamen, dat die verboren soude eenen
wech tôt Onser Vrouwen Charters, souder verdragen. . .». Reg., n° 88,
p. 20. Cfr SERRURE, Vaderlandsch Muséum, t. I, p. 321.
(1) «... Zoe wy eenen kerss lest oft uutblaest, met nachte in ge-
selscap, daer twist oft alloye begonde. . . ». Keuve -pénale, 1419. art.
45, Straven, I, 204. — Tongres. Charte de 1502, art. 38.
(2) Nachtegael, f° 26, Straven, I, 263-4. — Id. 12 mars 1487.
Keurboek, f° 233, n° i, Straven, II, 15;.
(3) Nachte gael, f° 38, Straven, I, 299. —
(4) Nachteg., f° 44, STRAVEN, I, 306-307.
(5) Nachteg., f° 67, Straven, I, 357-8. — Même ordonnance du
5 janvier 1484. 't Residunm, f° 92, n° i, Straven, II, 116.
(6) Nachlegael, f° 54, STRAVEN, i, 358.
(7) Nachtegael, f° 73 v°, STRAVEN, I, 383.
(8) Nachtegael, f° 99 v°, Straven, I, 447.
(9) Nachtegael, f° 106, STRAVEN, i, 480. —
(10) Nachtegael, f° 107 v°, STRAVEN, II, 6-7.
(n) '/ Residuiiin, p. 73 v°, Straven, II, 146-7.
(12) Keurboek, p. 283, n° 2, Straven, II, 176-177.
LES DÉLITS 6l
ou au marché (Ib. 28 octobre 1499; (1) ; défense de tirer à l'arc
en rue (Tongres 1502) (2) ; défense de verser des immondices
devant la maison de son voisin (Saint-Trond 28 juin 1502) (3) ;
obligation d'occuper la place indiquée au marché (Ib. 26 février
1509) (4) ; ordonnance sur la dimension et la matière des
cheminées (Ib. 4 mars 1510) (5); ordonnance sur la sonnerie
des cloches (Ib. 19 août i5io)(6); obligation pour celui qui
circule en rue le soir sans lumière, à moins qu'il ne se fasse
reconnaître, de regagner sans domicile au premier avertissement
de la garde (Ib. 7 octobre 15 10) (7) ; obligation pour les archers
et les arbalétriers de porter le casque à la procession annuelle
(Ib. 25 août 151 1) (8) ; défense de lancer des fusées (Ib.
26 février 15 15) (9) ; défense pour les hôteliers d'aller eux-
mêmes ou d'envoyer leurs gens à la rencontre des étrangers
pour les avoir à ioger (Ib. 17 novembrei5i6) (10) ; défense de
circuler avec des couleuvrines chargées (Ib. n mai 15 17) (n);
défense de tirer à la couleuvrinc dans l'enceinte des remparts,
ailleursqu'au local des couleuvriniers(Ib.29 novembre 1518(12);
défense de se présenter aux fortifications quand on n'est pas de
garde (Ib. 22 avril 1521) (13); défense aux enfants de courir ou
déjouer aux cimetières (Ib. 9 mars 1523) (14) ; ordonnance sur
le luminaire des écuries (Ib. 27 juillet 1528) (15) ; défense aux
tonneliers de briser leurs tonneaux (Ib. 15 février 1524) (16) ;
défense de pêcher au hameçon ou autre engin dans les fossés ou
(1) « dat niemand op die seole, oplen keesmerct, caetzen, werpen
oft stoeten, oft boecken en sal. . .». Keurboek, p. 276, n° i, STRAVEN,
II, 220.
(2) Charte de 1502, art. 17.
(3) Nachtegael, p. 215, n° 1, Stravex, H, 231-232.
(4) 7 Residuum, f° 100, n° 3, Stravex, II, 274.
(5) Keurboek, p. 284, n° 1, STRAVEX, II, 277.
(6) 7 Residuum, f° 127, n° i, Stravex, II, 278.
(7) 7 Residuum, f° 93, n° 1, Stravex, II, 279.
(8) Keurboek, p. 172, n° 3, Stravex, II, 281.
(9) Keurboek, p. 284, n° 2, Stravex, II, 300-301.
(10) 7 Residuum, f° 135, n° 1, STRAVEN, II, 317.
(11) Keurboek, p. 145, n° 1, Stravex, II, 321.
(12) Keurboek, p. 145, n° 2, Stravex, II, 325-6.
(13) 7 Residuum, f° 93 v", 11" 1, STRAVEN, II, 340.
(14) 7 Residuum, f° 144, STRAVEN, II, 317.
(15) 7 Residuum, f° 135, n° 2, Stravex, II, 378.
(16) Keurboek, p. 99, n° 3, Stravex, II, 379-380.
62 CHAPITRE II
étangs de la ville (lb. 13 juin 1530) (1) ; défense de laver ou
de se baigner dans ces étangs (lb. 23 juin 1533) (2); défense
de laver, de rincer le linge ou de jeter des immondices dans la
« Gote » (lb. 14 août 1559) (3); défense de déposer du bois
aux marchés de la ville (lb. 10 juin 1560) (4); ordonnance sur
la police des rues après l'heure de la retraite (lb. 14 juin 1563) (5);
défense de déposer du fumier devant les maisons (lb. 7 juillet
1567) (5) ; défense de jouer et de courir dans les églises,
cimetières, etc. (Ib. 15 avril 1576) (7).
Au XVe et surtout au XVIe siècle, la ville de Saint-Trond
eut à lutter fréquemment contre le fléau de la peste. Les
registres d'ordonnances contiennent un grand nombre de
mesures prises par les autorités pour prévenir ou enrayer le
mal, notamment sur les rapports de commerce avec des régions
contaminées si la ville est encore sauve, ou sur les précautions
à prendre vis-à-vis des personnes malades ou décédées et de
celles qui les soignent. La transgression de ces divers règlements
était passible de pèlerinages (8).
Nous pouvons rattacher aux sanctions des ordonnances de
police les peines décrétées par le magistrat de certaines com-
munes contre ceux qui endommageaient les propriétés publiques
telles que les remparts, les murs de clôture, les puits com-
(1) Keurboek, p. 212, n° 2, StravEn, II, 387.
(2) Keurboek, p. 212, n° 3, StrAVEN, II, 405-406.
(3) Maendachboek A, f° 2 v°, Straven, III, 9.
(4) Maendachboek A, f° 4, Straven, III, 12-13.
(5) Maendachboek A, f° 12, STRAVEN, III, 26-27.
(6) Maendachboek A, f° 25, STRAVEN, III, 48.
(7) Maendachboek A, f° 51, STRAVEN, III, 85-86.
(8) Ordonnances des 31 juillet 1458 ; 19 septembre 1479 ; 11 sep-
tembre 1480 ; 5 septembre 1519 ; 3 octobre 1519 ; 10 juillet 1531
15 avril 1532 ; 12 août 1532 ; 5 août 1538 ; 16 avril 1543 ; 6 avri-
I545 i I7 mai Ï540 '> 2 août 1546 ; 4 août 1567 ; 25 août 1567 ; 20 sepl
tembre 1574 ; 20 août 1576 ; 1 octobre 1576 ; 30 septembre 1577 ;
6 avril 1579 ; 3 août 1579 ; 23 décembre 1596 ; 13 janvier 1597; dans
Straven, I, 435 ; II, 67-68, 79-80, 330-331, 396, 401-404, 417-418,
429, 440-443 ; III, 49-51, 81-82, 86-88, 100-110, 112-113, 229-230.
LES DÉLITS 63
muns (i) et ceux qui accaparaient des parties du terrain public
pour y bâtir (2).
9. Inutilité. — Les communes flamandes et brabançonnes, à
l'exemple des princes, s'efforcèrent de réprimer ce que dans
le langage pittoresque on appelait l'« inutilité » (onnut-
scapen). En cette matière elles s'appu)-aient sur «quelques prin-
» cipes fixes parfaitement raisonnables : l'homme valide a le
» devoir moral et social de travailler pour pourvoir lui-même à sa
» subsistance ; l'homme incapable de travailler a le droit de
» tendre la main à son semblable, pourvu qu'il ne trouble ni la
» sécurité, ni l'ordre publics : une communauté ne doit pas se
» charger de l'entretien de personnes qui lui sont étrangères» (3).
En effet, un des plus anciens privilèges de la commune de Gand,
la Car ta Maclildis porte : « Si qui s forte in Gandavo inventus
fuerit toto oppido et universitati inutilis, ab oppido quamdiu
scabinis visum fuerit, expelletur ; quod si ad mandatum eorum
exire noluerit, tali foris facto quali scabinis visum fuerit, subja-
cebit» (4). Les gens « inutiles » faisaient, de la part du seig-
neur, l'objet d'une véritable chasse : ainsi parmi les questions
qu'on posait aux communes vérités à Courtrai, nous trouvons
(1) Saint-Trond. 20 juillet 1439. «... soe wie voerdaen man of wyfî
oudt off jonck, dar stat mueren oft vesten, oft poerteu, oft metsel-
rye breke, ofte ontwey rede, die soude verboren, also deckealstgeseliiLl,
een wech Sint-Joes . Nachtegael, f° $j, Straven, I, 342. — Voir or-
donnances analogues : Saint-Trond. 19 décembre 1440. Nachtegael,
fo 60 v°, Straven, I, 347. — Ib. 1 juin 1444. Nachtegael, f° 68,
Straven, I, 362-363. — Ib. 12 mai 1455. Nachtegael, f° 87, STRAVEN,
I, 411-412. — Ib. 14 sept. 1461. Nachtegael, f° 100, STRAVEN, I,
457. — Ib. 29 janvier 1487. 't Residuum, f° 92 v°, n° 1, STRAVEN,
II, 153. — Tongres, Charte de 1503, art. ^z, 34, 36.
(2) Saint-Trond. 3 juin 1420. «... dat allen die gheeue die der stadt
muere oft erve, te weten die XL voeten bynnen der mueren, besla-
gen oft bevreet hebben, dat se dat bynnen XV dageu ruimen ende
openen ende der stadt ghebrueckig maken sullen, sonder meer te ghe-
bruecken oft te hantplichtigen, . op eene pêne van te verboeren eenen
wech te Onser Vrouwen te Rotsemadou. . .». Ordonnantieboek, p. 328,
f° 107, Straven, I, 485. — 23 octobre 1475. Keurboek, p. 241,
n° 3, Straven, II, 41.
(3) PouLLET, Hist. droit peu. anc. duché de Brabant, p. 299.
(4) Cfr CannaERT, Op. cit., p. 115.
64 CHAPITRE II
celle-ci : « Quel est celui, qu'on juge préférable, qu'il soit hors
de la ville plutôt que dedans, en vue de conserver la paix et la
tranquillité dans la commune? » (1) Leur nombre doit avoir été
considérable au milieu du XVe siècle, car Philippe le Bon, par
une ordonnance du 14 août 1459, édicté des mesures radicales
contre les « liechgangers », c'est-à-dire ceux qui n'exercent pas
de métier honnête (2). Comme cet édit l'indique déjà, la
note d'inopportunité vis-à-vis de la commune était fort exten-
sible : elle couvrait en effet les délits les plus divers de ceux qui
en étaient qualifiés : les excès quelconques des joueurs, des
vagabonds, des gens n'exerçant pas une profession avouable et
qui tomberaient aujourd'hui sous la surveillance de la police des
mœurs, finirent par être désignés sous les noms, presque
synonymes en fait, de «onnutscape, onredelike wandelinge,
onseden, etc. » (3). Une ordonnance du magistrat de Louvain
en 1469 montre bien la conception des autorités à ce sujet (4).
Un moyen bien simple de se débarrasser de ces personnes était
de les envoyer en pèlerinage : aussi les registres criminels
de certaines de nos villes du Brabant, ont gardé presque à
chaque page des condamnations à des, voyages, infligés à ces
gens sans aveu ; ce serait faire de l'histoire anecdotique que de
les parcourir toutes (5).
(1) « Wie berucht es dat hy beter buter stede ware dan der binnen,
omme pays ende rus te te houdene in de stede ». Quest. 13. Cfr Cou-
tumes de Courtrai, I, 304.
(2) Cfr Ansei,mo, Codex Belgicus, 2e partie, p. 12.
(3) Cfr Vander, Essen. De stvaf- en rechterlijke verzoeningsbede-
vaarten, p. 16, Anvers, 191 1. — Sur l'expression « onredelike wande-
linglie », voir E. Gaiixard, Kleine verscheideiiheden, dans Versl. en
Mededeel. der Kon. VI. Akad., 1910, p. 913-914.
(4) <( Want de heere ende de stad op inorghen, omtrint der tweede
ueren nader noenen, besitten sullen een eninge up de ghene die houden
ende leven op vrouwen van lichten leven, ende hanteringe hebben
van quaden terlingen, ende botteren, ende op den ledeghengers, e-
gheen rinte hebbende, ambacht doende oft goede lieden dienende...».
Ms. n° 88, p. 180. Cfr SERRURE, Vaderlandsch Muséum, t. II, p. 57.
(5) Anvers 4 septembre 1396. « Jan de Hont, die men heet het
Hondeken, Jan Heyns, de Zeeldrayere, Hannekyn de Mandemakere,
en Moenken de Wynkoepere . . . overmids dat sy ommegeghaen heb-
ben met putiersc ;ape, met onzedelike wandelinglien ende oec huys-
soeckinghe ghehanteert. . . St-Jacob. . . ». Cfr Mertens & Torfs,
Op. cit., t. II, p. 368. — Id. 1407. «.,. Jan de Pape...onredelikenghedra-
LES DÉLITS 65
III. DÉLITS COMMIS CONTRE LES PERSONNES
ET LES PROPRIÉTÉS
Le droit du moyen âge reconnaissait, en fait de délits commis
contre les personnes, deux moyens pour les parties lésées
d'obtenir satisfaction du dommage matériel et moral. Le pre-
mier consistait à poursuivre cette satisfaction d'une manière
pacifique : deux familles ennemies choisissaient des représen-
tants pour régler en leur nom la composition à laquelle l'une
d'elles avait droit, ou soumettaient le différend à des hommes
éprouvés, chargés, dans certaines communes, de remplir cette
mission pacificatrice. L'autre moyen consistait à porter plainte
au seigneur ou à la commune, afin d'obtenir la réparation que
les autorités judiciaires estimeraient conforme au droit ; celles-
ci appliquaient souvent une peine prévue par la loi, la peine
légale, qui profitait en même temps au seigneur et à la com-
mune. Le droit liégeois, appliquait en outre, depuis la fin du
xive siècle, une peine au profit exclusif delà commune (1). Les
ghen ». Correctieboek, f° 110, Antw. Arch., t. XXVI, p. 14-15.
— « Willeken Scolleruuyle. . . onnutliken wandelt ». Corr., f° no,
Antw. Arch., id. p. 9. — « . . .teerlingen ende andere spelen.» Correclie-
oek, p. 109, Antw.Archiev.,id. p. 10. — « Onnutlikere wandeliu-
ghen. . . die de stove houdt. . . ». Ibid. — Id. 27 janvier 1409. « Jan
van Kvere. . . onredelike worden. . . ». Clementynboec, fol. 105,
Antw. Arch., id. p. 61. —Le 25 juillet 1410, cinq femmes et vingt-
quatre hommes sont envoyés à des endroits divers, « mids onnul-
scapen ende dat (ni) met voordeele van spele ende met anderen onre-
delike wandelingen omme gegaen (heeft) . . . ». Clementynboec, f° 110
v° et ni, Anlixj. Arch., t. XXVI, p. 70-73 ; Cfr Vax der ESSEX,
Op, cit., p. 17. — Id. même date, 7 autres personnes « overmits dat
dese opteu goeden Vrydach ghedobbelt hebben ende anders onnute-
telec gheleeft. . .». Cfr ib. — Id. 3 août 141 1. « mids onseden ».
Clementynboec, f° 103, Antwerpsch Arch., ib., p. 92. — Id. 28 no-
vembre 141 1 : « onsedelikere wandelingen ende dat (ni) der goede
lude rhighe bi nachte afgewronghen heeft. . . ». Clcm., f° 103 v°,
Antw. Arch., ib., p. 105-106. — Id. même date : « overmids
dat hi hem bevonden heeft van abreyscape ende van onredenliken
zakeu. . .». Clem., f° 104, Antw. Arch., ib. p. 108. — Id. même date
« Lammeken. . . die in tavenien loept. . . niits onnutten leven ende
onsediger wandelingen. . . ». Clem. f° 104, v°, Antw. Arch., ib.,
p. 110. — Id. même date : « onnutheden ». Clem. f° 104 v°,
Antw. Arch., ib. p. ni. — Pour Lierre, voir Correctieboek, passim.
(1) « Le but qu'avaient eu les législateurs et les magistrats des
villes en comminant ces voyages, soit par voie de régiment, soit par
voie de statut, est facile à comprendre. Les uns et les autres avaient
5
66 CHAPITRE II
ordonnances et les records criminels des Pays-Bas montrent
qu'on a imposé des pèlerinages dans tous ces cas ; même la
peine établie par le droit liégeois au profit de la commune
consistait uniquement en pèlerinages.
Nous parcourrons donc les différents délits commis contre les
personnes et les propriétés : infraction à la trêve, homicide,
menaces, coups et blessures, violation de domicile, dénonciation
calomnieuse, injures, rapt, adultère, vol, dommages, bris de
clôtures, etc.
i. Rupture de la trêve. — En droit, la trêve, conclue volon-
tairement ou imposée par la loi, n'était violée que si l'une des
parties, liée par elle, se livrait sur l'autre à des voies de fait.
Aussi les coupables étaient ordinairement punis plus sévère-
ment que par des voyages : ils subissaient notamment des châ-
timents corporels.
Cependant les Statuts de Maestricht de i38o (i) condamnent
le violateur de la trêve d'abord à la composition avec la
partie et le seigneur, puis, en outre, à un voyage à Saint-
Jacques de Compostelle au profit de la commune ; à Liège le
Nouveau ject de 1394 (2) prononçait dans ce cas un pèlerinage
en Chypre.
2. Homicide. — Nous citerons d'abord quelques exemples
de réparations ou de condamnations pour homicide ; nous exa-
minerons ensuite les pénalités que le droit liégeois surajoutait
au profit de la commune. Notons que les complices du coupable
encouraient souvent la même peine que lui.
Les troubles sanglants de Gand, de 1294 à 1306, eurent pour
épilogue diverses condamnations à des pèlerinages. Les héritiers
Bjrluut durent, pour le meurtre commis sur Ghiselbrecht ser
Machelinszone et les blessures infligées à deux de ses com-
voulu a93urer par des moyens énergiques le maintien de la paix de
la ville. Les uns et les autres avaient voulu remédier par une voie
indirecte, mais sûre, à l'insuffisance notoire du système pénal exis-
tant en matière de délits contres les personnes, et à la facilité avec
laquelle, selon les mœurs de l'époque, les délinquants coupables de
crimes non honteux ni vilains obtenaient grâce des peines corporelles ».
POUIXET, Essai sur l'hist. du droit crim. dans l'ancienne princip. de
Liège, p. 158.
(1) Statuts de Maestricht (1380), art. 4.
(2) Nouveau ject (1394), art. 2. — Cfr PouiXET, Essai sur l'hist.
du droit crim. dans l'anc. principauté de Liège, p. 519.
LES DÉLITS 67
pagnons, envoyer deux pèlerins en Chypre, pour y «servir»
un an ; dix complices durent également gagner cette île et y
rester jusqu'au rappel du seigneur ; pour le meurtre de Pieter
uten Boengarde ils durent fournir un pèlerin à Chypre ; un
complice dut aller lui-même à Saint-Jacques. Le parti adverse
dut, à raison du meurtre sur de Visscher et sur Jan Borluut, en-
voyer pour chacun, deux pèlerins en Chypre; huit complices
furent obligés de se rendre à Saint-Gilles en Provence (1).
En 1299, à Liège, une querelle semblable, celle des Mailhars
et des Yerteis, se terminait aussi par l'exécution des dix pèle-
rinages outremer, notamment en Chypre, imposés au premier
parti (2). Guillaume, comte de Hollande, condamne le 28 mars
13 16 un certain Gillis van Baersdorp, qui avait tué Jan van
Westerkerke, à se rendre en Chypre et à ne jamais en revenir. (3)
A la suite d'un « Zoendinc » c'est-à-dire d'une composition, pro-
noncée par les échevins de Gand, le 19 septembre 1405, un meur-
trier et ses deux frères complices sont contraints d'aller, le pre-
mier à Rome, les deux autres à Jérusalem (4). Dans d'autres
communes on était plus sévère encore : ainsi un Louvaniste
nommé Godefried, ayant tué un certain Paul Oliviers dut
s'engager à visiter les sept églises de Rome et, après son retour
dans ses foyers, à faire un nouveau pèlerinage à Saint-Pierre
de Milan (5).
Notons qu'au pays de Liège on appliquait, dès le xvie siècle,
le « statut » ou l'« ewal du pays » à l'homicide : il comportait
quatre pèlerinages, à savoir : Chypres, Saint-Jacques, Rocama-
dour et Vendôme {6).
(1) Cfr Vuylsteke, Rekeningen der stad Gent, p. 101-102.
(2) « Et bin tempre là après, se voreut les Malhars et les Yerteis
acordeir l'un al altre, et amendent les Malhars X voies d'oultremeir,
por les mors qu'il avoient ochis ». Chron. de Jean d'Outremeuse,
V, p. 561. — Cfr PouLLET, Essai hist. dr. crim. Liège, p. 146.
(3) Cfr VAX MiERiS, Charterboek, t. II, p. 17; v. Utrecht-Dres-
SELHUYS, Op. cit., p. il -12.
(4) Zoendinc Bouc, a0 1405, f° 19, CANNAERT, Op. cit., p. SJ--},^.
(5) Cfr PouLLET, Hist. dr. peu. Brab., p. 183. — Pour les cas ana-
logues voir : MERTENS & TORFS, Op. cit., II, 36 ; Antw. Arch., t. XXI,
p. 2-3 ; DE WlND, Bijzondiïh. uit de gesch. van het strafr. in de .\
landen, p. 63. Middelbourg, 1827; v. UtreCHT-Dressej.iiuys, Op. cit.,
p. 15, note 22 ; Canxaert, Op. cit., p. 86-91 ; Gilliodts van seye-
REN, Invent, des arch. de Bruges, t. VI, p. 355.
(6) « Est à scavoir, qui est traicté à payer statuts pour mortel
68 CHAPITRE II
Il faut remarquer que les peines, généralement appliquées à
l'homicide qualifié, existaient aussi pour celui qui infligeait à
un autre des blessures entraînant, même beaucoup plus tard,
la mort. Nous rencontrons ainsi un jugement conditionnel de la
part des échevins de Namur. Devant eux, un certain Thirion,
qui avait blessé son compatriote Andrion, s'engage à faire le
voyage de Saint-Jacques de Compostelle, si sa victime survit à
ses blessures ; si elle meurt, il ira en Chypre et à Rocama-
dour (i).
Si quelqu'un, en état de légitime défense, commettait un
homicide, il était forcé de faire un pèlerinage, quoique les juges
eussent reconnu son innocence (2). Au pays de Liège on lui
appliquait l'« ewal du pays » (3).
Le droit liégeois ordonnait, outre l'amende au profit du sei-
gneur et outre la réparation accordée à la partie lésée, un vo-
yage de Chypre au profit exclusif de la commune. Les statuts
donnés à la ville de Saint-Trond par le prince-évêque Jean
d'Arckel en 1366 (4) sont le premier monument écrit qui fasse
mention de cette pénalité. Nous la trouvons reproduite plus
tard dans les Statuts de Maestricht de 1380 (5), le Nouveau
Ject de Jean de Bavière pour Liège en 1394 (6), le Privilège de
Maestricht de 1413(7) et celui de Saint-Trond de 1417(8), le
faict... monte le statut : une voye de Cypre, une voye de S. Jacques,
une voye de Rouchmadou, une voye de Vendôme. . .». Coutumes de
Limboarg, n° 144.
(1) Répertoire Lodevoet, n° 112, Coutumes de Namur. — Wodon,
Le droit de vengeance dans le comté de Namur (xive-xve siècles) (An-
nales de la Fac. de Phil. et Lettres de V Univ. de Bruxelles), p. 182-183.
Bruxelles, 1890.
(2) « dat her Jan van den Crucen sal doen sinen eet dat Njts Caneel
voeren den slach gaf , et dat hy hem doe verweerde over noetwere . . .
Voert naer de informacie van scepenen, so houden scepenen den hère
Janne voers, onsculdech van de dood van Nyse voers. ende dat hys
doet ende doen sal, dat dat es aise onschuldech man te heetene en
beveelne van onsen heere van Vlaenderen ». Gand. Zoendinc Bouc,
a0 1357, f° 21, Cannaert, Op. cit., p. 178-379.
(3) «. . viagia ultramarinum. . . Compostellanum vocantur une
ewalle du pays, ad quem condemnatur et obligatur etiain is, qui vim
vi repellendo moribus nostris coedem coinrnittit contra omnia jura ! »
Bull, archéol. liégeois, t. I, p. 509.
(4) N° 82, Straven, Op. cit., t. I, p. 92.
(5) Art. 2.
(6) Art. 2. Cfr PouiXET, Ess. Dr. crim. Liège, p. 510.
(7) Art. 1. Cfr Pouxi,ET, Op. cit., p. 521.
(8) Circa finem.
LES DÉLITS 69
v Régiment de Heinsberg de 1424 (1), enfin dans les Statuts
criminels pour la ville de Huy de 1477 (2).
3. Menaces et provocations. — Les anciennes ordonnances
pénales faisaient ordinairement une distinction entre les me-
naces verbales, proférées sans intention de nuire effectivement,
et les menaces à main armée, auxquelles elles rattachaient sou-
vent la poursuite, à main armée ou non. Au point de vue de la
gravité de la peine, une distinction était établie d'après la nature
des armes employées. Les menaces acquéraient une gravité
spéciale, si elles étaient proférées au mépris de la trêve. Enfin
la provocation devant la maison d'un bourgeois était particuliè-
rement prévue dans le droit liégeois.
En 1405, un Gantois avait nuitamment escaladé l'enclos du
petit béguinage de cette ville et proféré des menaces contre des
béguines ; il est obligé de se rendre à Sainte-Marie- Madeleine
(Saint-Maximin en Provence) et d'en rapporter des lettres cer-
tifiant qu'il a fait ce voyage en expiation du délit (3). Des
condamnations analogues sont prononcées par les magistrats
d'Anvers (4), et édictées par les Coutumes du pays de Looz (5).
Les Statuts de Maestricht de 1380 prévoyaient, pour celui
qui tirait l'épée ou le couteau contre son prochain, un voyage
à Ardembourg, au profit de la ville s'il s'abstenait de le pour-
suivre (7) ; un voyage à Saint- Rombaut à Malines, pour la ville,
et un voyage à Saint-Josse pour la partie, outre des amendes,
s'il y avait poursuite (7). Un voyage en Chypre attendait celui
(1) N° 6.
(2) Ch. VI, éd. Bormans. Cfr Cercle hutois des Sciences et des
Beaux-Arts. Annales. 1879-1880, p. 226.
(3) «..dat over dmesgryp en mesdoen, dat de voers. Gheenin eerst-
waerf mesgrepen en mesdede, int gliuent dat hy over den muur clam
by nachte, eenighe jonfvrouwen van den hove scouffierlic en dreege-
lic toesprac. . . de voers. Gheenin doen sal sine pelgrimagc, ter eeren
van jonfr. Kateline voers. ende hare maghen ende vrienden, tsente
Marien Magdeleene tspelunken. . .». Zoendinc Bouc, a0 1405, f° 63,
Caxxaert, Op. cit., p. 96-98. — Voir aussi Zoendinc Bouc, a0
1425, f° 21, Canxaert, p. 99 note.
(4) Clementynboec, f° 104 v°, Antw. Arc lu evenblad, t. XXVI, p. 110.
(5) Coutumes de Looz, 29e p.
(6) Art. 16-17.
(7) Art. 15.
70
CHAPITRE II
qui tirait avec des armes de trait sur un autre, sans toutefois le
blesser (i). A Tongres, on était plus sévère encore, puisque
cette infraction y était punie de deux voyages à Saint-Jacques,
un pour le seigneur, un pour la ville, et en outre des réparations
à partie (2). Enfin la Réformation de Groesbeeck de 1527 punis-
sait de deux voyages pareils, l'un pour le seigneur, l'autre pour
la partie lésée, l'agresseur non provoqué, et celui qui, en armes,
empêchait de circuler dans les rues (3).
A Anvers, la menace effective, communément qualifiée de
« oploep », était punie d'un voyage à Rome ou à Rocama-
dour (4).
Au pays de Liège, l'attaque, la poursuite et en général toute
menace adressée à une personne avec qui on était en trêve,
étaient amendées soit, comme à Saint-Trond, par trois pèleri-
nages à S. Jacques, au profit du seigneur.de la ville et de la partie
lésée (5), soit, comme à Maestricht, par deux voyages à Roca-
madour au profit de ces deux dernières (6). Au XVIe siècle les
Coutumes d'Anvers, de Malines, de Looz et de Grimberghen,
ont des dispositions analogues, bien que déjà mitigées (7).
D'après les Statuts de la cité de Liège (1328), celui qui, de
(1) Maestricht. Privilège de 1413, art. 13 ; Nouveau Privilège de
1428, art. 2. — Liège. Ier Régiment de Heinsberg (1424), art. 9 ;
Paix de St-Jacques (1487), XXII, 14.
(2) Charte de Tongres de 1502, art. 27.
(3) Réform. de Groesb., XV, 9-11.
(4) Clementynboec, f° 75 v°, Antw. Arch., t. XXVI, p. 8. — Cfr id.
t. XXI, p. 37.
(5) « Zoe wy eenen anderen oploept binnen vrede ende slaen oft
steken zoude, waer hys mechtig, hy sal verboren drye weghen Sint
Jacops in Galissien, den eenen den heeren, den anderen der stadt ende
den derden der partyen ». Statuts de Jean d'Arckel (1366), n° 74,
Straven, Op. cit., t. I, p. 89.
(6) Statuts de Maestricht (1830). Art. 37. — Voir aussi : Saint-Trond.
Heure pénale de 1419, art. 50, STravEN, Op. cit., t. I, p. 306. — Ib.
ordonnance du 20 août 1436. Nachtegael, f° 48, STRAVEN, Op. cit.,
t. I, p. 315.
(7) Anvers. Dans les Consuetudines antiquissimae, II, 17 ; Consuet.
in antiquis, XII, on stipule un voyage à Rome plus une amende.
Ce voyage est remplacé par une somme d'argent dans les Consuet.
impressae (1582), XXI, 21 ; mais il réapparaît dans les Consuet. com-
pilatae (1592-1606), 7e, p. VI-24. — Malines. «.. die boven vreede den
anderen dreighde te smytene, die verbuert eenen wech te Romen...»
Coût, de Mal., IV, 7. — Voir aussi Coût, de Looz, 22e p. ; Landcharter
de Grimberghen (1556), n° 44.
LES DÉLITS 7I
nuit ou de jour, provoquait un bourgeois à sortir de sa maison,
était passible d'un voyage à Rocamadour (i);à Maestricht,
on lui imposait en outre un voyage à Saint-Josse, au profit de la
commune(2). Une jurisprudence plus sévère s'établit à Saint-
Trond au début du XVe siècle : le coupable de tel fait fut privé
de la main droite, et devait, au profit du bourgeois menacé, un
voyage à Saint- Jacques, qui était doublé, au profit du seigneur
et de la ville, si la provocation s'adressait, pendant la nuit, au
tenancier d'une taverne (3).
4. Coups et blessures. — Plus haut, nous avons déjà établi,
au point de vue pénal, une distinction entre les dispositions
bien déterminées du droit écrit dans la principauté de Liège
et les sentences inspirées par la jurisprudence coutumière
et arbitrale dans les communes flamandes et brabançonnes.
Cette distinction apparaît encore clairement ici. Alors que
dans ces dernières villes les seigneurs, les échevins, les apai-
seurs, intervenant comme juges ou comme pacificateurs dans
ces délits contre les personnes, prononcent des pénalités, des
pèlerinages, proportionnés à leur sens à la gravité du fait et
aux différentes circonstances qui le précédèrent ou l'accompa-
gnèrent, les monuments écrits du droit liégeois tenaient compte
des moindres détails et prévoyaient des pèlerinages différem-
ment proportionnés à la gravité des mutilations, des blessures et
des coups, à la nature des armes employées et même parfois à la
qualité du coupable par rapport à sa victime. Lorsque plus tard,
dans les cas de blessures graves, on ajouta à cette satisfaction
accordée à la victime, des pèlerinages au profit de la commune,
ceux-ci furent en rapport en même temps avec la gravité du
dommage et avec l'importance des premiers voyages.
Quelques exemples, empruntés aux registres criminels de la
(1) Statuts de la Cité, art. 32. Voir aussi : Saint-Trond. Statuts de
Jean d'Arckel (1366), n° 18, STRAVEN, Op. cit., t. I, p. 74.
(2) Statuts de Maestricht (1380), art. 24.
(3) « ^Ty met voerrade voev des anders huys compt metten dage,
end den anderen daer uut daecht viantlick, of dreygt, oft hem quade
vv-orden aanseet, die sal verbueren zyn rechte hande, ende der par-
tven beteren met eenen wege Sint Jacops ». Keure pénale de 14 19
art. î \, STRAVEN, Op. cit., t. I, p. 195. — « Ceux qui hueheront les bour-
gois... hors de leur maison en disant : « Vins fou, vins fou ! ». Stat.
crim., Huy, IX Cercle hutois. Annales 1879-1880, p. 227-228. — Voir
aussi : Liège, Paix de Si- Jacques, XXVI, 40.
72 CHAPITRE II
Flandre et du Brabant nous donneront une idée de la juris-
prudence seigneuriale et communale de ces principautés.
Le 24 novembre 13 19, le comte Louis de Nevers condamna
à des voyages à Saint-Gilles en Provence et à Saint-André en
Ecosse, un Courtraisien, nommé Wautier Maisiere : celui-ci, en
effet, « bâti et maulmena » sa femme, parce qu'elle avait reçu à
jouer dans sa maison la suite du comte(i). En 1354, les échevins
de Gand envoyèrent un certain Philips ute Meerham, qui avait
frappé un prêtre dans l'église Saint-Nicolas, à N.-D. d'Avignon
et chez le pénitencier pour se faire absoudre (2). Louis de Maie,
par un jugement du 6 janvier 1370, condamne plusieurs per-
sonnes d'Ypres, pour blessures faites à un certain Victor de Dix-
mude, à exécuter des pèlerinages divers : le principal coupable
ira à Riga et à Marseille, les autres à Naples, à Lucques, en
Ecosse, à Tours, etc.; mais la victime elle-même s'étant livrée à
des violences sur un certain Nicolas, doit aller, au profit de celui-
ci (3), à Pu)r-en-Velay et se voit en outre infliger un voyage à
Saint- Jacques de Compostelle au profit du comte (4).
Les registres criminels de plusieurs villes flamandes et braban-
çonnes, qui nous ont été conservés, rapportent d'ailleurs de nom-
breux cas de blessures et de coups, amendés par des voyages (5);
(1) Cfr MuSSETY, Inventaire des archives de Courtrai, (1 190-1792),
I, 95 Sq.
(2) Zoendinc Bouc, 1354, f° 9 v°, CANNAERT, Op. cit., p. 92-95. —
Voir aussi les Zoendinc Bouc 1353-1354, fol. 225, Corp. Inquis., t. I,
p. 142 ; Z.-B., 1360, f° 8, CannaerT, Op. cit., 379-380 ; Z.-B., 1371,
f° 10, CannaerT, Ibid., p. 91.
(3) Cfr DE PElySMAEKER, n° 308, pp. 160-163.
(4) « mids dat hy 't dede boven onsen blivene ». de Pei^SM.,
n° 308, p. 162-163.
(5) Ypres. 7 avril 1372 : « navré a grand mouvanche et destourbier»
DE Petsmaeker, n° 807, p. 306. — Anvers, 15 octobre 1395.
MERTENS ET TORES, t. II, p. 35, n° 3. — Id., 1410. Clementynboec,
fol. 43, Antw. Archievenblad, t. XXVI, p. 28. — Id. 23 novembre
141 1. « eene porteresse mishandeld in hairs vaders Imys. . . ». —
« portere ghequetst ende meshandelt. . . ». — «bi nachte en bi ontide
eene goede vrouwe ouverdient in haer selfs huys gequetst. . .». —
« overmids dat hy eenen portere van Antwerpen gheslagen heeft in
scanden ende confusen vander poerterien van Antwerpen. . . ». Cle-
mentynboec, ff. 100, 103, 104-104 v°, Antw. Arch., t. XXVI,
p. 100-101, 103-104, in. — Audenarde, 1445. « quetsuren ende smerte».
Register van Contrakten, Audenaerdsche Mengelingen éd. Van LER-
BERGHE & RONSSE, t. I, p. 247-8.
LES DELITS
73
c'était aussi la jurisprudence des corporations communales au
XVe siècle (i). Le collège des apaiseurs à Louvain devait appli-
quer un pèlerinage à N.-D. de Chartres en cas de rixe et de
coups et un àRocamadour en cas de blessure ouverte sa.ns«aflou-
lure» (2). Au reste, la législation criminelle n'était guère expli-
cite, surtout quant aux distinctions à établir entre les diverses
blessures.
Il est peut-être intéressant de noter qua Tournai, où le droit
français fiorissait comme sur son sol natal, une sentence du
connétable de France, en date du 11 mai 1386, avait stipulé que
l'auteur de blessures graves devait, comme réparation, un •
rinage à chaque personne qu'il aurait blessée; c'était une décision
éminemment pratique pour les cas de chaude mêlée (3).
La législation de la principauté de Liège était bien plus com-
pliquée au chapitre des blessures, que celle des communes
des Pays-Bas. Dès la Paix des Clercs de 1207, où il s'agissait,
entre autres choses, de réprimer les méfaits commis dans les
églises de Liège, on distinguait entre « playe ouverte — baturc
à sanc sens playe ouverte — bature sens sanc » et on appliquait
un pèlerinage à Saint-Jacques de Compsotelle, à Rocamadourou
à Vendôme (4). Les Statuts de la Cité de Liège (1328) établirent
plus explicitement l'échelle des réparations à partie et servirent
ainsi de modèle, au moins pour les grandes lignes, aux statuts
des autres villes de la principauté : distinction y était faite entre
les coups de palme, de poing, de pied, la déchirure de vête-
ment ; les coups avec effusion de sang sans blessure ouverte ;
les coups de bâton sans bris de membre mais avec blessure appa-
rente et les mêmes coups sans blessure apparente ; le bris de
(1) Malines. 29 septembre 1437 ; 19 juillet 1439. Cfr PouXLET,
Corpor. coin., p. 428-431, 433.
(2) «..soe wie van den goeden lieden twist makede ende stridechtich
worde, waere vêle ofte luttel, op andere goeden lieden ende lien sloege,
waere met hande ofte met voeten, ochte maermede dat ware, ochtc
hoe dat gesciede. . . sii moesten varen tonser Vrouwen te Charters. . .
so wie. . . ene opene wonde sloeglie, of in wat manieren dat gheviele,
sonder menken, lu moeste varen tonser Vrouwen Le Rutsemadouwe...»
Charter van den Paysemakers (Jean III ?) dans Vander Lixden,
p. 166.
(3) Cfr DE NÉDOXCiiEL, Ane. lois criminelles, p. 51.
(4) Art. 30, Raikem et Polaix, Op. cit., t. I, p. 4 1.
74 CHAPITRE II
membre sans « affoleir » ; la plaie ouverte « à lignuel » (i) ; la
mutilation entraînant la perte d'un membre et celle qui permet-
tait sa conservation (2). A cette dernière distinction la Paix de
S. Jacques (1487) ajoutait uniquement le cas de mutilation
entraînant l'affoulure notoire du membre (3). Les Statuts de
Jean d'Arckel pour Saint-Trond (1366) prévoyaient en outre les
blessures faites à dessein avec arc ou arbalète, dans la maison de
la victime ou non (4), au moyen d'une haste ou d'un poignard (5),
d'un glaive ou d'une autre arme (6). Les Statuts de Maestriclit
(1380) voyaient une circonstance aggravante dans le fait que la
blessure avait été infligée avec une pique, une dague ou un
couteau, parce qu'on pouvait plus difficilement la panser (7).
Tel est dans ses grandes lignes le s}rstème des réparations
accordées à la partie; nous avons vu plus haut qu'au XIVe siècle,
les législateurs introduisirent une peine au profit de la commune,
applicable notamment aux auteurs de coups et blessures. Malgré
son caractère transitoire, après les événements de la Mâle-
St-Martin à Liège, la Paix d} \Angleur de 1312 stipulait déjà au
profit de la commune des voyages à Rocamaclour, à Saint- Gilles
en Provence, à Saint- Jacques de Compostelle, à Saint-Nicolas de
Bari, en Chypre, contre les coupables de coups simples, de coups
« a sanc corant, » de coups à plaie ouverte, d'affoulure et le muti-
lateur tenu, qui avait encouru, d'après le droit en vigueur, la
peine du talion (8). Tandis que les Statuts de Saint-Trond de
1366 prévoyaient divers voyages pareils en cas de mutila-
tion (9), ceux de Maestricht de 1380 les appliquaient aux auteurs
(1) L'expression « blessure a lignuel » ou « a lignoule », a son cor-
respondant en flamand : à Saint-Trond, on parlait d'un coup « daer men
die wonde nyt wael afE gewiecken en can », c'est-à-dire blessure
qu'on ne parvenait pas à panser efficacement.
(2) Statuts de la Cité de Liège (1328), art. 1 à 8.
(3) Paix de St- Jacques, XXVI, 23.
(4) Statuts de Jean d'Arckel, n° 60, StravEN, Op. cit., t. I, p. 86.
(5) Id., n° 9, Straven, t. I, p. 72. La Heure pénale de 1419 coni-
minait iui double voyage à St- Jacques si le coup avait été porté avec
un poignard plutôt qu'avec une autre arme. Art. 32, Straven,
t. I, p. 201.
(6) Id., n° 8, Straven, t. I, p. 71-2.
(7) Statuts de Maestricht (1380), art. XII-XIII.
(8) Cfr Raikem & Polain, I ; PouiXET. Ess. dr. crim. Liège,
P- 5i9.
(9) Statuts de Jean d'Arckel (1366), n° 67, Strâvex, t. I, p. 87-88.
— Ces dispositions sont amplifiées dans la Keure pénale de 1419,
articles 26, 31, 41-42, Straven, t. I, p. 199-201, 203-204.
I DÉLITS
75
de toutes sortes de blessures (i) ; et le Nouveau Ject de 1394,
qui introduisit d'une façon définitive cette pénalité dans le droit
de la cité de Liège, ne les comminait que contre les coupables de
coups avec effusion de sang, à l'aide d'armes déloyales (2), et de
mutilation, d'« affoulure » et de h fraitin » (3). Ces stipulations,
conservées dans le Régiment des bastons de 1422 (4), furent
développées dans la suite jusqu'à la Paix de St-Jacques de 1487.
Les Statuts criminels de Huy (1477) restaient dans les géné-
ralités, en appliquant un voyage au profit de la commune' dans
tous les cas de blessures (5).
Notons pour terminer que les Statuts de Maestricht, comme
la charte pénale de 1479 pour Saint-Trond, se conformant en cela
au droit ecclésiastique, font un délit spécial des blessures et des
coups infligés par les enfants à leurs parents : le coupable était
tenu aux réparations ordinaires au profit de la victime et de la
commune, et, en outre, à aller à Rome se faire absoudre des
censures encourues (6).
5. Violation de domicile. — La jurisprudence communale
flamande et brabançonne ne nous offre que peu d'exemples
de pèlerinages imposés comme pénalités pour la violation
du domicile (7). C'est encore une fois la législation liégeoise qui
nous fournira des données exactes sur ce point. Anciennement
on regardait comme violation de domicile toute entreprise
hostile contre la maison d'un bourgeois, qu'on y pénétrât ou
non. Les Statuts de Maestricht de 1380 appliquent un voyage à
(1) Statuts de Maestricht (1380), art. 9 à 26.
(2) Nouveau ject, 1394, art. 2.
(3) Ib., art. 3.
(4) Rég. des bastons, art. 12.
(5) Statuts crimin. de Huy, XII, Cercle Hutois, p. 229. — Voir
pour le reste : Coût, de Looz, 7e p. ; Coût, de Limbourg, n09 143,
261 ; Records des échevins de Liège, 7 novembre 1543, n° 275, f° 68,
Raikem & Polaix, Op. cit., t. III, p. 38-39.
(6) Statuts de Maestricht (1380), art. 23. — Keure pénale de Saint-
Trond (14 19), art. 33, Straven, Op. cit., t. I, p. 201.
(7) Anvers, 23 novembre 1411 : « Dankaert Bollaert eude Zebrecht...
by nachte ende by ontyde opter liede huyse gheworpen en ghestoe-
ten hebbeti. . . tAken ». Clcmentynboec , 1" 100, Antw. Archieven-
blad, t. XXVI, p. 100.— Cfr Pouu.KT, Hist. Dr. peu. Brab., p. 319-
320.
76 CHAPITRE II
Rocamadour pour la partie lésée et un autre à Saint-Josse pour la
ville, à celui qui jette des pierres sur la maison d'un habitant (i).
Le Nouveau Ject de 1394, à Liège, punissait d'un voyage à
Saint- Jacques, pour la commune, les coupables de tumulte agres-
sif et à main armée devant le domicile d'un bourgeois (2). La vio-
lation de domicile proprement dite, c'est-à-dire le fait de pénétrer
de force dans la maison d'autrui, mais_sans blesser ses habitants,
était amendée différemment, selon qu'on avait ou non causé
du dommage pour y pénétrer (3).
Cette violation, accomplie avec préméditation, entraînait des
peines plus graves, c'est-à-dire des voyages plus lointains (4) ;
mais si le coupable, après avoir forcé l'entrée de la maison, se
livrait à des violences et des blessures vis-à-vis des habitants, il
pouvait s'estimer heureux, après avoir satisfait à sa victime, de
se voir seulement condamné à un voyage en Chypre au profit
de la commune (5).
A la violation des demeures, le droit de la cité de Liège
assimilait en quelque sorte le fait du propriétaire qui chasse de
la maison qu'il a louée à autrui, l'occupant de celle-ci ou qui em-
pêche que son locataire ne sous-loue ses appartements : un
voyage à Vendôme ou à Rocamadour l'atteignait de ce chef (6).
Notons qu'un voyage au profit de la commune venait
ordinairement s'ajouter à la réparation privée d'une violation
grave du domicile.
(1) Stat. de Maestricht (1380), art. 42.
(2) Nouveau ject (1394), art. 3. — Huy. « Quiconque ferat siège
devant maison...». Statuts criminels (1477), VIII, Cercle hutois...,
p. 227. — Charte de Tongres, 1502, art. 27.
(3) Liège. Statuts de la Cité (1328), n° 31. — Maestricht. Statuts de
1380, art. 25. — Liège. Ier Régiment de Heinsberg (1424), art. 3. —
Huy. Statuts criminels (1477), X, Cercle hutois, p. 228. — Li^ge,
Paix de St- Jacques (1487), XXVI, 39. — Ib., Réform. de Groesbecck
(1527), XV, 15. — Voire par contre : Charte de Tongres (1502), art. 19.
(4) Maestricht. Statuts de 1380, articles 11, 26. — Ib. Privilège de
1413, art. 2. — Saint-Trond. Heure pénale (1419), art. 16, Straven,
t. I, p. 196.
(5) Sàiut-Trond. Heure pénale de I4i9,art. I5,StravEN, t. I, p. 196.
— Liège. Ier Régiment de Heinsberg (1424), nos 3, 9. — Maestricht,
v. Nouveau privilège de 1428, art. 1. — Tongres. Charte de 1502,
art. 20.
(5) Liège. Statuts de la Cité (1328), art. 26. — Ib. Paix de St- Jacques
(1487), XXVI, 34.
LES DELITS 77
6. Dénonciation calomnieuse. — Les Statuts de la cité de
Liège (1328) édictent outre une forte amende un pèlerinage à
Rocamadour au profit de la partie lésée, contre l'auteur d'une
fausse accusation en justice, qu'elle ait été faite en secret ou en
public (1). Ce devait être aussi la pratique de certains de nos
échevinages brabançons : nous voyons, en effet, qu'au XVe siècle
un individu de Campenhout fut envoyé à Saint-Théobald en
Alsace parce qu'il avait accusé, sans preuve, son voisin, homme
de bonne renommée (la chose importait !) d'avoir commis un
vol sacrilège (2). On peut regarder l'application de pèleri-
nages dans ces cas de fausse accusation ou dénonciation,
comme un adoucissement de la jurisprudence, vu que, par
exemple en Brabant, on appliquait à celui qui en était l'auteur,
la peine qui aurait frappé l'accusé si le délit avait été reconnu
exact (3).
7. Injures. — Dans le droit du moyen âge, les injures
n'étaient en général punissables que lorsque, conformément à
l'étymologie du mot, elles étaient adressées à quelqu'un qui ne
les méritait pas. Cette conception se trouve parfois énoncée dans
des chartes pénales ; elle est le plus souvent sous entendue. Les
injures, par paroles ou par gestes, recevaient un caractère de
gravité spéciale, si elles étaient proférées par courroux ou mépris,
et surtout si elles étaient faites malgré la trêve intervenue entre
deux parties. Les documents liégeois s'appliquent spécialement
à établir une distinction au point de vue de la peine, d'après la
qualité de celui qui injurie par rapport à celle de l'injurié et
d'après la nature de l'injure ; les injures proférées entre femmes
furent,par une loi spéciale de 1349, rattachées à la juridiction
particulière du prévôt de la cathédrale.
Déjà la Paix d'Angleur (1312) prévoyait, outre l'amende à la
partie lésée, un pèlerinage à Vendôme au profit de la commune
contre l'auteur d'injures (4) ; les Statuts de la cité de Liège
(1328) condamnent le coupable à un voyage à Walcourt pour la
partie lésée (5) ; cette disposition est encore celle de la Paix de
St-Jacques (1487) (6).
(1) Statuts de la Cité, n° 28.
(2) Cfr. POULLET, Hist. Dr. pénal Brab., p. 321.
(3) Ib. p. 320.
(4) Cfr Coût, de Liège, I. — Cfr PouLLET. Ess. dr. crim. Liège, p. 519.
(5) Stat. de la Cité, art. 1.
(6) Paix de Si- Jacques, XXVI, 1.
78 CHAPITRE II
Mais les chartes des autres bonnes villes liégeoises, telles que
Saint-Trond et Maestricht, spécifiaient la portée des injures et
distingaient les injures capables d'atteindre quelqu'un dans son
honneur, sans s'occuper de savoir si elles étaient ou non
méritées, de celles qui étaient adressées à un homme de bonne
renommée et qu'on reconnaissait comme innocent des choses
reprochées ; aux premières correspondait un voyage à Ardem-
bourg, aux secondes un pèlerinage à Rocamadour, outre la
rétractation (i).
A Liège on punissait d'un voyage à Vendôme celui qui
crachait au visage ou à la poitrine d'un autre, pour bien marquer
son courroux ou son mépris (2) ; à Saint-Trond et à Maestricht
on était plus sévère : le coupable de tels gestes devait deux
pèlerinages, l'un à Vendôme ou à Saint-Josse pour la partie
lésée, l'autre à Ardembourg pour la ville (3).
Celui qui proférait des injures contre un autre avec qui il était
en trêve, se voyait puni, d'après le droit de Maestricht, d'un
double voyage à Rocamadour, d'après celui de HU37, d'un
double pèlerinage a l'île de Chypre (4). Nous trouvons des
dispositions analogues, quoique moins sévères, dans les coutumes
d'Anvers, de Malines et de la baronnie de Grimberghen (5).
(1) Saint-Trond : « Die den anderen quade smedelyke woirde toe-
sprict, die hem ter eeren moghen gaen, die sal der partyen beteren
met eenen weghe t'Onser Vrouwe t'Erdenborch. Ende die den ande-
ren, die van goeder f amen is, alzoe quade woirden spriekt, die hem ter
eeren moghen gaen, deenre hy vonden woert onsculdich, die sal der
partyen beteren met eenen weghe te Rutsemedou. . .». Statuts de
Jean d'Arckel (1366), art. 12, Straven, Op. cit., t. I, 72. — L,a Heure
Pénale de 14 19 maintient dans ce dernier cas le voyage à Rocamadour au
profit des seigneurs et de la ville, mais y ajoute un voyage à St-Jean
au profit de la partie injuriée. Keure. pén. (1419), art. 36, STRAVEN,
Op. cit., t. I, p. 201-202). — Même disposition aux Statuts de Maestricht
(1380), art. 19. — Les Coutumes de Looz (19e p.) décrétaient des pèle-
rinages à Ardembourg, Vendôme ou Saint- Jacques, d'après la gravité
des injures.
(2) Cfr Statuts de la Cité (1328), art. 29. — Paix de St-Jacques
(1487), XXVI, 38.
(3) Saint-Trond, Statuts de Jean d'Arckel (1366), n° 59, STRAVEN,
t.I, p. 86. — Ib. Keure pénale (1419), art. 27, Straven, 1. 1, p. 199-200.
— Maestricht. Statuts de 1380, art. 40. — Malines. Cfr Pourj,ET,
Corp. commun., p. 428.
(4) Statuts de Maestricht (1380), art. 10. — Huy. Statuts criminels
(1477), IV, Cercle hutois, pp. 225-226.
(5) Anvers. Consuet. Antiquiss., Il, 16; In antiq., XII. — Ma-
lines., Coût. IV, 7. — Grimberghen. Landcharter , n° 44.
LES DÉLITS 79
Notons qu'à Saint-Trond les injures que les bourgeois s'adres-
saient à propos de rancunes révolutionnaires du temps de Jean
de Bavière, étaient amendées, d'après une ordonnance des
seigneurs (1393), par un voyage à Saint Jacques (1). Dans cette
même ville les injures prononcées envers un bourgeois dans ou
devant la maison de celui-ci, acquéraient, d'après les lois
pénales, une gravité spéciale (2).
A Liège les additions de 1345 aux Statuts de la cité, et plus
tard la Paix de St- Jacques (1 487 ) tenaient comptede la condition
des personnes, au point de vue de la peine à prononcer en
matière d'injures. Ainsi, un homme « déshonnête » injuriant un
bourgeois « honnête » est condamné à un voyage à Vendôme ;
s'il est de condition honnête, le coupable ne paie que pour
injure simple, c'est-à-dire le voyage de Walcourt (3). Ce dernier
document portait îa restriction «sauf le droit du prévôt».
En effet, en 1349, les législateurs crurent bon, sans doute
à raison de la fréquence du délit et de l'insuffisance des remèdes,
de donner au prévôt de Liège la connaissance des injures et
même des voies de fait légères, auxquelles se livraient les
femmes de la cité. Les injures étaient punies d'un double
voyage à Walcourt, l'un au profit de la partie injuriée, l'autre
au profit du prévôt (4).
A Saint-Trond, on obligeait le diffamateur d'une femme hono-
rable de se rendre à Rocamadour pour la partie lésée (5), tandis
(1) Cfr Straven, Op. cit., t. I, p. 115.
(2) Statuts de Jean d'Arckel (1366), art. 18, Straven, Op. cit., 1. 1,
p. 74. — Keurepénale (1419), art. 14, Straven, Op. cit., t.I, p. 195-196.
(3) Paix de S. Jacques (1487), XXVI, 2-3. — Ainsi, d'après le
même texte, le fait de qualifier quelqu'un d'avorton, bâtard, sorcier,
voleur, assassin, incendiaire, entraînait un voyage à Saint- J acques,
si l'injurié était de meilleure condition que l'autre. L'homme de nais-
sance honnête qui appelait : « senglant avorton ou bastard » celui
qui de fait méritait un peu ce nom, ne devait subir que la peine ordi-
naire d'injures. Mais si lui-même, quoique légitime, mais né de père
et de mère bâtatds, disait à un autre, auquel ou ne pouvait reprocher
ce défaut : « Je suis aussi bien que tu es », il devait aller à Rocama-
dour. Cfr ib., XXVI, 5-6. Injurier une femme bien mariée, à cause de
sa conduite peu louable avant son mariage, était punissable d'un ou
de deux voyages à Rocamadour, selon que la coupable était elle-même
de bonne ou mauvaise conduite. Cfr. ib., XXVI, 8.
(4) Lettre du Prévôt, 1349, R\ikem & Poi^AlN, Coutumes de
Liège, I, 551.
(5) Statuts de Jean d'Arckel (13O6), art. 13, STRAVEN, Op. cit., t. I,
P- 73-
80 CHAPITRE II
que les Statuts de Maestricht prévoyaient en outre contre lui
un voyage à Saint-Josse-sur-Mer au profit de la commune (i).
Notons aussi qu'à Saint-Trond une peine, double de la peine
ordinaire en matière d'injures, venait frapper les enfants qui se
rendaient coupables de ces excès vis-à-vis de leurs parents (2).
Si les coutumes et ordonnances communales de la Flandre et
du Brabant ne nous ont laissé que très peu de dispositions
pénales en matière d'injures, les registres de compositions et
d'amendes de ces principautés nous ont conservé de nombreuses
traces de pèlerinages, imposés du chef de ce qu'ils appellent
dans leur langage souvent si pittoresque :«?nesseghen,mesgryp,
ontamelike ou onsierlike woirden, blameerlic ou scouffierlic
toespreke?i » (3).
Les autorités des corporations communales faisaient égale-
ment usage de ces pénalités dans la répression des injures,
même légères, des confrères entre eux ou envers la gilde. Un
drapier de Bruxelles ayant accusé un de ses confrères de
mensonge, se vit obligé de faire en son honneur un pèlerinage
à Duisbourg (4). Un arbalétrier de Malines fut envoyé à
Ardembourg, parce qu'il avait apostrophé un confrère par ces
(1) Statuts de Maestricht (1380), art. 20.
(2) « Ende van den woerden sal dat kiiit dobbel beteringlie doen,
nae belanck deenre mesdaet ». Statuts de Jean d'Arckel (1366), art. 16,
Straven, Op. cit., t. I, p. 74.
(3) Ypres 1362 : « omme messeghen. . . Sint Jacob in Galissien ».
DE PEi^SMAEKER, Op. cit., n° 220, p. 69. — Gand, 1374. « Over 'tmes-
gripende ontamelike woirden die sy mesgrepen ende seiden te mallic
ancien. . .». Zoendinc Bouc, 1374, f° 9, Cannaert, Op. cit., p. 382. —
Anvers. 23 novembre 141 1 : ;< twist tiegen eenengoeden coopman van
buten». Clementynboec, f° 100, Antw . Archiev . , t. XXVI, p. 100. — Gand,
1425,1435, 1436, 1447. Voir spécimens d'injures dans Cannaert, Op. cit.,
p. 99 en note, p. 383-384. — Ib. 1450 : « over mesgryp ende messe-
ghen dat Roelant Walaert mesgrepen ende messeit heeft up Mergr.
Dullaerts, Jan Toliiers wettelic wyf, in 't ghuend dat hy gheseit heeft
tôt Jan haren man, in vermindertheden vander zelve (ende 00c orne
geschil tusschen man en wyf te makene zoe te vermoedene es) : « Jan,
ware hu wyf min wyf, ic soude se meer castien ende smiten dan ghy
doet » te Sente Joos op de Zee ». Zoendinc Bouc, 1450, f° 9, Can-
naert, Op. cit., p. 383. — Ib. 1462. Cfr Cannaert, p. 98-99. —
Audenarde, 1445 : «onsierliken ende blameliken worden. . . ». Register
van Kontrakten, Van LERBERGHE & Ronsse, Auden. Mengel., t. I,
p. 247-248. — Lierre, XVe siècle. Correctieboek, passim.
(4) Cfr DES Marez, Organis. du travail, p. 150.
LES DÉLITS 8l
mots : «Vous n'êtes pas digne de porter notre habit de tireur» (i .
Les injures que se lançaient les membres des deux gildes
antagonistes de S.Martin et de S. Pierre, à Saint-Trond, s'ex-
piaient par un voyage à Rocamadour (2).
8. Rapt. Adultère. Débauche, notoire. — En général les pre-
mières chartes et plus tard les ordonnances pénales établissent
une distinction nette entre le rapt par violence et le rapt par
séduction. Le droit liégeois cependant admettait une certaine
confusion au point de vue de la peine à appliquer : le rapt
violent, c'est-à-dire, suivant l'expression liégeoise, le rapt à
« cry et hahay » était amendé, outre par les réparations privées,
par un voyage en Chypre au profit de la commune, d'après le
Nouveau Ject de 1394 (3) et le Régiment des basto?is de 1422 (4).
Deux ans après cette dernière ordonnance, le iCr Régiment de
Heinsberg assimilait au rapt violent celui par séduction d'une fille
impubère, en le punissant également d'un voyage outremer (5).
Une disposition des Statuts de la Cité de Liège (132S), rappelée
par la Paix de S. Jacques (1487) condamne celui qui emmène
la femme ou la fille d'autrui avec ses biens, à un voyage à
Saint-Jacques pour la partie lésée (6). Si nous rapprochons cette
disposition des textes cités plus haut, nous pouvons conclure
qu'il s'agit ici du rapt par séduction de filles pubères. LePrivilcge
de Maestricht (141 3) se conformait au droit de la cité de
Liège (7), tandis que les Statuts de Saint-Trond (1366) portaient
cette même peine au profit de la commune et fixaient la répa-
ration due à la partie lésée à un voyage à Saint-Jacques
de Compostelle (8). Dans les villes brabançonnes, telles que
(1) Cfr PouLLET, Corpor. communales, p. 428, 431-433.
(2) Ordonnance du 21 juillet 14.55. Nachtegael, f° 8y\°, Straven,
Op. cit., t. I, p. 412-413.
(3) Nouveau ject (1394), art. 2.
(4) Régiment des basions (1422), art. 11.
(5) Ier Régiment de Heinsberg (1424), art. 7.
(6) Statuts de la Cité (1328), art. 39. — Paix de St- Jacques, XXVI,
43-
(7) Privilège de Maestricht (1413), art. h.
(8) Statuts de Jean d'Arckel (1366), art. 6, STR vven*,0/>. cit., t. I, p. 71.
82 CHAPITRE II
Anvers (i) et Louvain (2), ces mêmes voyages répondaient au
rapt. Dans le droit liégeois et louvaniste, les coopérateurs au rapt
étaient punis du même voyage, celui de Chypre, imposé à
l'auteur principal ; telles sont les dispositions de la Lettre des
vingt (1324) pour Liège, des Statuts de Maestricht (1380), du
Privilège de 14 13 de la même ville et d'une ordonnance de la
duchesse Jeanne, veuve de Wenceslas (16 avril 1346) pour
Louvain (3). La jurisprudence an versoise condamnait le coopé-
rateur du rapt à un voyage à Rocamadour (4).
En matière d'adultère et de concubinage le droit des bonnes
villes du pays de Liège ne badinait pas. Les statuts de 1366
pour Saint-Trond stipulaient : celui qui « dans sa maison entre-
tient une femme à côté de son épouse légitime, sera condamné
à faire tous les ans un voyage à Rocamadour, aussi longtemps
qu'il persévère dans sa vie adultère» (5). Les Statids de
Maestricht (1380) avaient des dispositions semblables (6). En
(1) Anvers. 23 novembre 141 1 : « Giele de Bloc. . . eens ander mans
wyf wech gheleydt. . . Sint Jacobs in Galissien ». Clementynboec,
f° 102, Antw. Archievenblad, t. XXVI, p. 103. — Ib. même date :
« Gielys Boydens. . . eeuen goeden cnape zyn wyf ende zyn goed
ontleydt. . . in Cypers ». Clementynboec, f° 104, Antw. Arch.,
t. XXVI, p. 109.
(2) « Dat voertaen nyeman, soervie hy es. . . gheen wyf noeh
gheen vrouwe noch Jotiffrouwe, gedaecht noch ongedaeeht, ontscaken
en sal. Bnde soe wie daer jegen dade soe weder dat wyf, vrouwe
ocht Joffrouwe crête ocht riepe, ocht niet crête noch en riepe, dat de
ghene die dien scoet dede, ende aile de ghene die met hem waren,
in synre hulpen, daer af onser genediger vrouwe ende der stat, te
beternissen, doen souden, elc een bedevaert in Cyprès...». Ordon-
nantieboeck 0, p. 16 (16 avril 1396), SERRURE, Vaderlandsch
.Muséum, t. III, p. 25. Notons qu'aucune distinction n'y est faite
entre les diverses modalités du rapt.
(3) «... ende soe wie enich wyf. . . die alsoe. . . ontscaect worde,
binnen der stat ocht binnen der vryheit van Lceveu outfinge, ende
huysde ende haefde, dat hys syn soude opde selve bedevaert in Cy-
près ». Cfr note précédente.
(4) Anvers. 28 novembre 1411 : « Jatmeken de Wale. . . heeft
Gielys Boydens gheholpen. . . Rutsemadouw ». Cfr plus haut, note 3.
(5) " Wy een tsestsse vrouwe by zyn wyff settet in syn selfs huys,
ende die nagebueren hauden 't gemeelyck daer voer. . . die soude der
stadt ygelyck van hon eenen wech te Rutsemedou doen, te weten aile
jaer, alzoe langue als zy daerinne geprueft woerden perse vereerende ».
Statuts de Jean d'Archet (1366), art. 47, STRavex, op. cit. t. I, p. 82.
(6) Statuts de Maestricht (1380), art. 105-106.
LES DÉLITS 83
1499 une ordonnance des seigneurs et du magistrat de Saint-
Trond oblige les personnes vivant publiquement en adultère
à se séparer dans les trois jours, sous peine d'un voyage en
Chypre ; celui qui hébergeait ces personnes était condamné à un
voyage à Saint-Jacques; nul ne pouvait leur louer une maison et
si la location avait été concédée avant la date de l'ordonnance,
il devait résilier le bail dans les six semaines, le tout sous
peine d'un voyage en Chypre (1). Le 21 mars 1523, des mesures
plus sévères encore furent prises contre l'adultère : les délin-
quants notoires durent faire le voyage de Saint-Martin de Tours.
Si quinze jours après leur retour de ce lieu ils n'avaient pas
rompu leurs relations, ils se voyaient contraints d'aller à
Saint-Jacques de Compostelle ; si dans un nouveau délai de
quinze jours ils ne s'étaient pas séparés, ils étaient condamnés
au bannissement à perpétuité et, en outre, à l'amputation d'un
pied ou d'une main (2).
Certaines condamnations prononcées par le magistrat
d'Anvers nous montrent que là aussi on faisait usage des
pèlerinages dans la répression de l'adultère (3).
9. Attentats contre les propriétés : vol, maraudage, etc. —
Nous n'avons rencontré que de rares condamnations à des
pèlerinages, prononcées par les tribunaux communaux pour
motif de vol (4). Au contraire, il y a des ordonnances plus fré-
quent tendant à enrayer le maraudage et la destruction des
clôtures, qui en était souvent le prélude; l'enlèvement des
choses les plus diverses y est visé: vol de fruits, de récoltes, de
gazon, de légumes ; dommages aux champs ensemencés, aux
(1) Saint-Trond. 15 juillet 1499. 't Residuum, f° 1151a0 1, STRAVEN,
t. II, p. 224.
(2) Ib. 23 mars 1523. 7 Residuum, f° 115 v°, STRAVEN, Op. cit.,
t. II, p. 248-349.
(3) Anvers. 23 novembre 141 1 : « Lysbet Boels. . . liaren man out-
gaen. . . hem syngoet ontdraegen. . . overspele. . . ten Hoegeu Roeme»
— « Katline, Clans wyf van Cueringen, overmids dat zy in overspele
gheseten heeft met eeus wyfs mainte ende menigen onzede met hem
bedreven heeft ende onruste gemaect tusschen wettelic huweiic . . .
tsente Joes ». Clementynboec, f° 102, Antw. Archievenblad, t. XXVI
p. 102.
(4) Anvers, 1407 : « Betken van Brugghe. . . eenen goeden coop-
man uut Lombardiën tsyn af ghenomen . . . ende syn gelt dieffehc
ghestolen ». Correctieboek, f° 110, Antw. Arch., t. XXVI, p. 14-15.
84 CHAPITRE II
vignobles. Il est à remarquer que ces infractions, si elles étaient
commises pendant la nuit, entraînaient une peine plus grave,
c'est-à-dire un voyage plus lointain, que si elles avaient été faites
pendant le jour ; cela ressort de diverses ordonnances pénales
du magistrat de Saint- Trond (i).
Notons enfin que clans cette dernière ville, comme à Tongres,
on punissait de voyages ceux qui se livraient à la capture des
pigeons (2).
(1) Saint-Trond, 16 septembre 1448. Nachtegael, f° 76, Straven,
Op. cit., t. I, p. 386. — Ib. 29 juillet 1454. Nachteg., f° 85, Straven,
Op. cit., t.I, p. 404-405. — Ib. 21 septembre 1461. Nachteg., f° 100 v°,
Straven, t. I, p. 457-458. — Ib. 16 octobre i486 : «een yeghelyck. . .
die mitten daghe in of t op eenichs rninschen erfve. . . querne ende hem
zyn huys oft huyssen, muren, vinsteren, doeren, wyngart drueven,
stecken, cruyt, appelen, peren oft graes oft ander oeftz ; oft enich
ander dinck oft vrucht neme oft ontdrueghe aen de fortificatie oft
bouwe van der stadt, oft die boomen afî hieve die vruchten draghen. . .
verboeren sal aen die partie eenen wech Sint Jacops in Coinpostella
en der par tien dobbel scade, ende aen die heeren ende stadt oick
eenen wech Sint Jacops voerscreven. Knde soe wie dat voerscreven is
dede . . . met nachte ende ontide . . . die sal aen die partie eenen wech
Sint Jacops, ghelyck voerscreven is, verbueren ende dobbel scaede
betalen, ende aen heren ende stadt eenen wech in Cyprès ». Keur
boek, p. 204, Straven, Op. cit , t. II, p. 148. — Ib. 3 sept 1526.
't Residuum, f° 97, n° 3, Straven, Op. cit., t. II, p. 367-368. —
Voir aussi : Coutume de Looz, 52, 53, 54 points. — Gand, 1356.
Zoendinc Bouc, 1356, f° 10, CannaerT, Op. cit., p. 98.
(2) Saint-Trond, 13 mars 1497. — 6 février 1559. — 14 mars 1563.
Keurboek, p. 191, n° 2 ; Maendachboek A, f° 1, f° 11, Straven,
Op. cit., t. II, p. 217, t. III, p. 8, 25-26. — Coutumes de Looz, p. 63.
Charte de Tongres (1502).. art. 33.
CHAPITRE III
PROCEDURE GÉNÉRALE
Dans leurs tentatives de mettre fin aux guerres et à la vengeance
privées, les législateurs du moyen âge admettaient une double
procédure criminelle : l'action privée, menée par la famille de
la victime d'une infraction contre la famille du coupable,
tendant à se procurer, d'une façon pacifique et en dehors de
toute plainte aux autorités, la réparation du dommage moral et
matériel qui lui avait été infligé dans l'un de ses membres ;
l'action publique menée par la famille contre le criminel seul,
introduite par une accusation devant les autorités judiciaires et
tendant avant tout à faire prononcer contre le criminel la peine
prévue par le législateur et à le forcer à une réparation propor-
tionnée au délit. La première procédure aboutit donc à la
conclusion d'un contrat et à la réconciliation, parfois solennelle;
la seconde aboutit à une condamnation. L'étude de la législation
et de la jurisprudence criminelle de nos provinces nous apprend
que des pèlerinages à des sanctuaires célèbres étaient appliquées
dans les deux cas. Nous ne serions pas complet dans notre
exposé, si nous omettions de dire que ces mêmes pèlerinages
pouvaient faire au pays de Liège, à la fin du moyen âge, l'objet
d'une procédure spéciale qui avait tous les caractères d'une
procédure civile.
A. Pèlerinages imposés à la suite d'un contrat de paix. — Le
caractère contractuel de certains pèlerinages apparaît tout
d'abord dans les stipulations de quelques traités de paix, mettant
fin à une révolte civile ou à une guerre proprement dite :
le prince consent à admettre ses sujets révoltés à la réconcilia-
tion, à condition entre autres qu'un certain nombre d'entre eux
se rendent en pèlerinage au lieu qu'il indiquera. Ainsi une des
86 CHAPITRE III
clauses du traité d'Athis, conclu en 1305 entre le roi de France,
Philippe-le-Bel et les Flamands, à la suite de la bataille des
Monts-en-Pevèle, porte que trois mille habitants de Bruges et
du Franc doivent se rendre en pèlerinage : mille d'entre eux
iront outremer et deux mille autres visiteront divers sanctuaires
situés en deçà ; entretemps le comte Robert de Béthune mettra
au pouvoir du roi, comme garantie, les châteaux, villes et châ-
tellenies de Cassel et de Courtrai, jusqu'à ce que, entre autres
conditions, ces pèlerins se soient mis en route (1). Le Ier sep-
tembre 1316, les députés de Philippe, comte de Poitiers, régent
du royaume de France, et ceux de Robert de Béthune décidèrent
par un traité que le comte suivrait le roi de France à la croisade
« quant générauls passnige sera» ; en attendant « messire Robert
ses fiulz » irait dans l'année à Saint-Jacques de Compostelle,
à Rocamadour, à N.-D. de Vauvert, à Saint-Gilles en Provence
et à N.-D. de Puy (2).
Lorsque à la suite des troubles du mercredi (4-1 1 août 131 1),
les Gantois allèrent faire amende honorable au comte de
Flandre, en son château de Maie, le 10 octobre 13 11, ils
s'accordèrent pour dire que le comte avait plein droit d'envoyer
27 Gantois en pèlerinage aux lieux qu'il choisirait (3).
La ratification de la paix d'Arqués par Charles le Bel, le
19 avril 1326, portait que 300 habitants de Bruges et de Courtrai
iraient en pèlerinage : 100 d'entre eux devaient se rendre à
Saint- Jacques, 100 autres à Saint-Gilles en Provence et les der-
niers à N.-D. de Rocamadour (4).
Mais ces pèlerinages, que nous nommons expiatoires puis-
qu'ils sont imposés en réparation, se rencontrent surtout à la
suite d'un contrat de paix entre deux partis ou deux familles.
Ainsi quand en 1299 le terrain de La Sauvenière fut racheté
(1) Cfr Funck-Brintano, Philippe le Bel en Flandre, p. 499. Paris,
1896 ; J. lyAKNEN, Ylaandeven in het begin der XIVe eeuw en de strijd
tegen Philips den Schoone, p. 123. Anvers, 1901.
(3) Cfr MussEivY, Inventaire des archives de Courtrai, t. I, p. 86seq.
(3) « Voert es gheaccordeert dat die achtiene persone, die myn
heere van Nevers dede noumen te Ghent, ende el negheene, dat se
myn heere mach senden in pelegrinagen te sekeren daghe te porne,
waer dat se myn heere hebben wille ende te sinen wille ende te sine
ghenadicheiden te kcerne ». Vuyi,steke, Op. cit., p. 187.
(4) Giujodts van Severen, Invent. Bruges, t. I, p. 357-8. Cfr
CannaerT, Op. cit., p. 107-108.
PROCÉDURE GÉNÉRALE 87
à Liège, la guerre privée entre les Malhars et les Yerteis
devenant impossible, les deux parties se mirent d'accord :
« Et bin tempre là après, se vorent les Malhars et les Yerteis
acordeir l'un al altre, et amendent les Malhars X voies d'oultr
meir, par les mors qu'ilh avoient ochis » (i). C'est d'une façon
analogue qui se termine, le n novembre 1391, un conflit entre
les Flamands et la Hanse teutonique au sujet d'un marchand,
appartenant à cette dernière corporation, que les premiers
avaient molesté. Les Flamands s'engagent à envoyer seize
pèlerins à Rome, autant à Saint- Jacques et quatre à Jérusalem
« en l'honneur de Dieu et en réparation au marchand » (2).
Un homme avait il tué, blessé ou injurié un autre, les familles
des deux ennemis reprenaient pour leur compte et sous leur
responsabilité la cause de leur famille. Aussi longtemps
qu'aucune plainte ou demande d'intervention n'était parvenue
aux autorités de la commune, celles-ci ne pouvaient faire
procéder contre le coupable, ni même empêcher que des
représailles se produisissent ; dès lors il arrivait que le nombre
des morts et des blessés se multipliait de chaque côté.
Parfois les ennemis concluaient une trêve, dont la rupture
était sévèrement punie par la commune ; au cours de cet
armistice ou souvent après plusieurs années d'une querelle
acharnée, les deux parties admettaient en principe un accord et
choisissaient dans leur sein quelques représentants pour débattre
les conditions. Pour faciliter ces accords, on en vint bientôt
à élire de commun avis des hommes étrangers aux deux
familles et présentant des garanties particulières de probité,
tels que des échevins ou des anciens échevins, et on leur laissa
le soin de décider les réparations à faire (3).
(1) Chronique de Jean d'OuItremeuse, V, p. 561.
(2) « . . .ze willen. . . goden to ereu und denne copmanne to bete-
ringhen zenden 16 elirliehe personeu to Olden Rome unde 16 ehrliche
personen to sunte Jacobe to Compostelle, uiid 4 eriiche personen
over mer dem hilghen grave mises Heren ». KOPMANN, Die Hansi-
sche Geschichtsblàttey , p. 17-20, Leipzig ; 1S76. Hanserecesse, t. I, 4,
p. 31 ; R. Rohricht, Deutsche Pilgerreisen, p. 99.
(3) Anvers, 12 avril 1475. Les parties déclarent que « hen des
geheelic ende al gekeert ende gesubmitteert hebben in viere goede
mannen te wetene. . . als sjggers ende keersluden genomen ende geco-
ren van beyde zideu ». Ils sont « scepenen tAntwerpen op desen
tyt ». Antw. Archievenblad, t. XXI, p. 2. — Audeuarde, 24 novem-
bre 15 12 : « ten tractiete ende overghane van zekeren eerbaren
88 CHAPITRE III
Cependant d'anciennes chartes communales, telle celle de
Bruxelles (1229), avaient prévenu cette initiative : le législateur
avait compris qu'on ne pouvait abandonner à la merci de la
cupidité aveugle d'une famille offensée, un coupable que des
circonstances particulières rendaient digne de pitié ; il désigna
donc quelques citoyens notables, des « apaiseurs », auxquels les
parties eurent à exposer leurs différends (1). Mais alors que,
dans la plupart des communes, les échevins n'intervenaient pas
comme tels dans la conclusion de la paix, à Bruxelles, la keure
de 1229 ordonnait au coupable d'offrir une réparation en
présence des échevins. Si ceux-ci, d'accord avec les jurés,
jugeaient cette réparation suffisante, ils décidaient que la
victime devait accepter ; sinon, ils tarifaient d'office la répara-
tion ; faute d'exécution, la partie récalcitrante était bannie du
duché. La keure de Hérenthals attribuait comme mission à
l'écoutête de forcer la partie coupable à s'exécuter.
Malgré cette différence, la pratique presque générale dans les
communes était de faire authentiquer, d'une façon ou d'une
autre, l'acte de la conclusion de la paix ; à Gand, par exemple,
les échevins l'inscrivaient dans un livre spécial, le Zoendinc
Bouc, c'est-à-dire le livre aux réconciliations (2). Nos pères, qui
aimaient à donner à leurs contrats un caractère tangible par la
tradition d'un symbole, employèrent certaines cérémonies dans
la conclusion tant de contrats réels que de contrats d'ordre
pénal, pour bien en marquer l'obligation. Quelques ,uns de nos
registres communaux ont gardé le souvenir exact de ces céré-
monies où le coupable d'un homicide venait à genoux (voetval)
implorer le pardon de la famille de la victime et baiser sur la
bouche les représentants de celle-ci (montzoenre) (3) ; parfois
notabelen persoonen. . .». Ibid., 5 avril 15 13 : « so es by tusschens-
preken van. . . ghemaect een vriendelick appointement ». Registev
van Kontrakten, Aadenaerdsche Mengelingen, t. I, p. 250, 255.
(1) Ces « viri boni », portent les divers noms de paysmaekers,
vriendelike effeneers, zegghers, apayseurs, appay senteur s, etc. Il s'agit
ici des apaiseurs en tant qu'arbitres ; nous verrons plus loin que,
dans certaines communes, ils ont formé un véritable tribunal auquel
les échevins, pour se décharger, attribuaient en propre la connais-
sauce des querelles.
(2) VuYlySTEKE, Uitleg tôt de Gentsche Baljuwsvekeningen (1280-
1315), p. 98; Caxnaert, Op. cit., passim.
(3) Anvers. 12 avril 1475. A la suite d'un meurtre, les deux parties
se mettent d'accord pour soumettre l'affaire à « vier goede mannen »,
PROCEDURE GÉNÉRALE 89
aussi la partie lésée, en signe de pardon, jetait à terre un fétu
de paille : c'était Y effestiicatio (i).
Les registres criminels des communes nous ont gardé de
nombreux exemples de pèlerinages imposés, avec ou sans
l'intervention de l'autorité, à la suite d'un contrat de paix ;
nous en citerons quelques uns. En 1264, la paixjfut faite à Liège
entre les quatre meurtriers de Godefroi et de Jakcmon de
Fleppe et leur parenté d'une part et Jakemon de Clermont
avec son lignage de l'autre. Les quatre meurtriers prennent la
croix; ils ne reviendront de Terre Sainte que lorsque les parents
de la victime les rappelleront, selon les pouvoirs reçus des
leurs (2). Le Registre des Faidcs de Tournai nous rapporte
qu'en juillet 1273, Thierri, fils de Roger de Phalampin, qui avait
tiré l'épée contre Gossuin de Maubrai, dut, à la suite d'un
accord, se rendre à Saint-Gilles en Provence (3). Thirion de
qui « hen rypeliken hierop beraden hebbende, eendrachtelycke over-
comen zyn ende hebben daerna, opten Goeden Vrydach, tewetene
den tweelfsten dach van Aprille als men screef XIIIlc ende LXXV
jaer, na costume van scrivene des Hoofs van Camerycke, bynnen den
cloostere vauden Predickheeren gestaen binnen der voers. stad van
Antvrerpen, haer vutsprake ghepronuncieert ende vutgesproken,
aldaer ten selven dage de voers. Peter Kerstiaenszone, by ordinan-
cien van den voers. seggers sinen voetvdl dede ende voort ten halleme
ende ten monde quam aen den voers. Ectore Speelberch, als gerechte
moetsoendere van wilen Thobiase Speelberch, zynen brueder, in
presencien van YVouteren Speelberch, hueren vader met ende aen
meer anderen haerer vrienden ende magen vanderselver dooder ziden,
welke vutsprake hierna volcht ende is aldus...» Suit la condamnation
du coupable à un pèlerinage à Rome et à Kinsiedeln. .
Archievenblad, t. XXI, p. 2-3. Cfr PoULEET. Hist. dr. pén. Brab.
p. 186-187 J MERTENS & Torfs, Geschiedenis van Anlwerpen, t.
n, p. 33-
(1) Namur 2 juillet 1384. Vn certain Thirion avait blessé Andrion.
Les échevins constatent que Thirion doit faire divers pèlerinages,
puis « dient vautres lesdis témoins que le dessus d't Andrion fut pré-
sent à faire la paix, en son bon sens, mémore et entendement, bien
parlant, et si gréa et ottroya très bien la paix moyennant lesdites
amendes paiant, aveucq prist ung festu qu'il jecta par terre, quitta
et werpit tout mal amour qu'il avait audit Thirion accomplissant
ce que dit est. . .». Répertoire Lodevoet, n° 112, Wodon, Op. ci! p.
182-183.
(2) BCRH., ire séiie, t. IX, p. 40 ; Poutxkt, Ess. c'y. crini. Liège,
p. 146.
(3) DE NÉDOXCEŒX, Etude sur le dr. crim., p. 116. — Ib., p. 115-
116, 132.
90 CHAPITRE III
Namur, qui a blessé Andrion, obtient grâce de celui ci à con-
dition de faire le voyage de Saint-Jacques si sa victime survit
à ses blessures ; sinon il devra aller en Chypre et à Rocama-
dour (i). Pour meurtre de leur concito}Ten, Herman Boer, deux
Anversois, Joost van Son et Dirk van Roiden, iront visiter le
tombeau des Apôtres ; leur complice Lambert van Son ira
à Saint-Thibaut en Alsace (2). A la suite d'un « zoendinc » du
20 mai 1491, un Brugeois, convaincu de meurtre, dut faire trois
voyages consécutifs : à Rome, à Saint-Jacques et à Saint-
Nicolas de Varengéville (3). Un Louvaniste, Godefroid, qui
avait tué Paul Oliviers, dut, pour obtenir la paix, prendre l'enga-
gement d'aller à Rome, d'y visiter pendant sept jours consécu-
tifs les sept églises de la ville, de monter à genoux les degrés de
Saint-Jean de Latran et d'entendre là, à genoux, cinq messes
à la suite. Après son retour au pays natal il devra reprendre
la même route et visiter Saint- Pierre de Milan (4).
Tandis que les simples bourgeois terminaient leur différend
devant des apaiseurs, pris parmi les notables de la commune,
les nobles s'adressaient à l'arbitrage du seigneur et se voyaient
contraints à des réparations semblables. Ainsi, dans un acte
daté du 6 décembre 1307, Philippe IV, roi de France, déclare
que son frère Charles, comte de Valois, et se* enfants, filles de
Catherine, impératrice de Constantinople, d'une part, et Jean,
comte de Namur, et ses frères, d'autre part, voulant terminer
un différend au sujet de la propriété du comté de Namur, l'ont
soumis à l'arbitrage de lui, roi de France, et d'autres, sous la
réserve formulée par le comte de Namur, qu'il ne pourra perdre
son héritage, ni être contraint à faire un pèlerinage ou un autre
voyage onéreux (5). Cet acte nous intéresse puisqu'il montre
que la pratique des pèlerinages était en vigueur même pour les
gens de la plus haute condition. Marguerite, comtesse de
Flandre, voulant vider la querelle existant entre Gheldolf, sire
de la Gruthuse à Bruges, et Jehan de Molcmbeke, décide, le
(1) Namur. 2 juillet 1384. Répert. Lodev., n° 112, WODON, Op.
cit.. p. 182-183.
(2) Anvers, 1431. MERTENS & TORFS, Op. ci!., t. II, p. 36.-/6.,
12 avril 1475, Antw. Archiev., t. XXI, p. 2-3.
(3) Cfr GilJUOD'fS vax SEVEREN, Inv. des arch. de Bruges, t. VI,
P- 355-
(4) 26 mars 1493. PouixET, Hist. dr. peu. Brab., p. 183.
(5) PlOT, Inventaire des chartes des comtes de Namur, p. 96, n° 334.
PROCÉDURE GÉNÉRALE gi
24 mai 1372, que de chaque côté deux complices iront à Saint-
Ambroise de Milan et deux autres à Saint-Gilles en Provence ;
en outre Gruthuse enverra dix de ses valets en Chypre, tandis
que son ami Baudouin de Beverhout ira à Rome ; Jehan de
Molembeke fera «en l'honneur de messire Gheldolf et de ses
amis» un pèlerinage à Naples et un pèlerinage à Saint Gilles (1 ).
Guillaume de Hainaut, comte de Hollande, présida en 1413 à la
réconciliation de deux familles, devenues ennemies à la suite
d'un homicide. Le lignage du coupable dut envoyer vingt per-
sonnes à N.-D. de Lyon et à Saint-Maur-des-Fossés (2).
Enfin, nous voyons les chanoines de Liège intervenir comme
arbitres dans le différend entre les chanoines de Saint- Feuil lien
et les bourgeois de Fosses. Les Lettres del Paix, du 7 mai i3i8,
qui mirent fin au conflit stipulaient, outre la commination
de pèlerinages contre celui qui se livrerait désormais à des voies
de fait sur quelqu'un du parti adverse, que vingt bourgeois
devaient se rendre processionnellement à YValcourt en l'hon-
neur des chanoines offensés (3).
B. Pèlerinages imposés à la suite d'une action judiciaire régu-
lière.— A côté de cette poursuite pacifique d'une réparation pour
le dommage moral et matériel causé par une infraction, il exis-
tait un autre recours pour la victime ou ses parents. Dans bien
des cas, en effet, vu le point d'acuité qu'avaient atteint certaines
querelles, il était très difficile, sinon impossible, pour la partie
lésée, d'obtenir quelque satisfaction de la part du coupable : le
recours consistait dans l'action publique introduite par une
plainte de la victime, de ses représentants ou de sa famille et
du justicier lui-même. Cette action judiciaire publique différait
essentiellement de l'action privée, en ce qu'elle n'avait pas pour
but immédiat la réparation du dommage causé, mais plutôt
l'application de la peine légale ou statutaire; elle forçait le cou-
(1) GrxwoD'fS van SEVEREx, Inventaire des archives de Bruqes, t. II,
P- 359-36o.
(2) De Navorschev, t. IV, p. 353.
(3) «. . .voisent jusques à vingt personnes del dite ville de Fosses,
teiles qui aler poront et que ly dis canoues enlieront, en pèlerinage,
dedens ung mois après chu que ils serons semons de part les dix
cauones, a Xostre-Dame de Walcourt, eu nom d'amende ». Leitn
paix de Fosses (7 mai 1318), Cavtulaive de Fosses, éd. BORGl
p. 32, Namur, 1867.
92 CHAPITRE III
pable à réparation, mais laissait le plus souvent le champ libre
aux parties pour s'entendre sur les modalités d'exécution ; par-
fois cependant elle tarifait pour chaque infraction la réparation
à partie.
D'après un des grands principes juridiques des communes
médiévales, nul ne pouvait être jugé que par ses pairs; aussi,
tandis que les bourgeois réclamaient des bourgeois au banc de
justice, les nobles et les clercs ne prétendaient être jugés que
par leurs tribunaux propres. Dès lors une distinction s'impose
entre les tribunaux, dits exceptionnels, et les tribunaux ordi-
naires (i).
A. Tribunaux d}exceptio?i. A mesure que les communes nais-
saient et se développaient dans une atmosphère d'indépendance,
parfois violemment acquise, vis-à-vis du prince, celui-ci aban-
donnait aux autorités communales le soin déjuger les bourgeois
en son nom et sous le contrôle de son officier ; il se réservait
pourtant les anciennes prérogatives que le droit féodal lui con-
férait sur les seigneurs de ses domaines et les officiers de son
administration.
La compétence de ces tribunaux exceptionnels s'étendait ainsi
directement aux actions criminelles, intentées par ou contre les
nobles, aux abus de pouvoir commis par les officiers seigneu-
riaux, aux crimes commis sur les chemins royaux et enfin aux
cas réservés; cette dernière catégorie comprenait les attentats
commis contre la personne du prince, les membres de sa
famille, ses officiers ; les crimes politiques ; les délits commis
par les officiers seigneuriaux dans l'exercice de leur charge ;
les méfaits d'homicide, perpétré dans des circonstances extra-
ordinaires, et le crime d'incendie.
C'est ainsi que Guillaume Ier, comte de Namur, fit comparaître,
en 1369, pour lui demander pardon, Godefroid et Arnould de
Bertinchamps, qui, au cours d'une guerre de famille, avaient
incendié une maison à Traulée ; le comte leur accorde grâce
à condition qu'ils fassent les pèlerinages de Chypre et de
(1) Puisque dans notre étude nous nous plaçons au point de vue
du droit communal du moyen âge, nous croyons être en droit de quali-
fier d'exceptionnels, les tribunaux autres que ceux de la commune,
c'est-à-dire ceux qui retiraient quelqu'un de la juridiction ordi-
naire des autorités communales, soit en raison de la personne du
délinquant, soit en raison de la nature du délit. Cette interprétation
semble plus conforme, dans le cas actuel, au sens du mot exception
PROCÉDURE GÉNÉRALE 93
Saint Jacques de Compostelle ; leurs complices, Jean, bâtard
de Trazegnies, et Jean, bâtard de Sombreffe, feront eux aussi ce
dernier voyage (1).
Le 14. juillet 1451, Philippe le Bon condamne, en sa qualité
de duc de Brabant, Jean van der Meere, écoutéte de Bergen-
op-Zoom, pour avoir refusé de recevoir les lettres de l'amman
d'Anvers ; le coupable fera un pèlerinage à SS. Pierre et Paul
de Rome, ou le rachètera (2).
Le conseil princier, qui cumulait les attributions politiques et
judiciaires, suivait le prince dans ses diverses résidences et se
réunissait quand les circonstances l'exigaient. C'est sous cette
forme que nous trouvons la Chambre du Conseil du comte de
Namur, le Conseil du duc de Brabant, la Chambre du Conseil
et l'Audience du comte de Flandre, la Cour souveraine et
YAudietice du comte de Hainaut. Mais dans la suite, surtout
sous l'influence centralisatrice des ducs de Bourgogne, ces
institutions devinrent des collèges fermés et permanents, clans
lesquels les légistes curent une place à côté des officiers
princiers et des seigneurs : ils formèrent les Conseils de justice
provinciaux. Ainsi pour la Flandre, Philippe le Hardi avait
créé à Lille, à côté d'une chambre de finances, un conseil de
justice, qui fut transporté ensuite à Audenarde, à Gand, à
Termonde, pour rester enfin fixé à Gand. Philippe le Bon et ses
successeurs organisèrent le conseil de Brabant, alors que
Antoine de Bourgogne avait déjà posé, en 1407, les fondements
de cette institution en créant la charge de chancelier de
Brabant, ayant dans ses attributions ia garde du sceau princier.
Outre une certaine juridiction d'appel, qu'ils s'étaient arrogée
parfois vis-à-vis des tribunaux ordinaires, les conseils de justice
avaient hérité des prérogatives des anciennes chambres du
conseil et des audiences. En raison de la matière du délit, ils
(1) P10T, Inventaire des chartes des comtes de Namur, n° 1000,
p. 289-290.
(2) «...dat die voirsc. Jan van der Meere, Schoutet van Bergen,
hem tegen ons, onse hooeheit ende herlicheit, ende oie tegen onsen
voirs. Amman ende Stat van Antwerpen grotelic misgrepen heeft in
dien hy des selfs ons ammans brieven heeft geweygerd te outfangeu.
Ende dat hy daer om ter beternissen doen sal ene bedevaert tôt sinle
Peters ende Pauwels te Roemen . . . behoudelic dat hy die voirs. bede-
vairt sal mogen lossen ende afquyten ». Mf.rtens & Torfs,
Geschiedenis van Antwerpen, t. I, p. 523-524.
94 CHAPITRE III
connaissaient donc des cas réservés ou cas de seigneurie
(saeken ten vonnisse ?iiet en staende) , mentionnés plus haut ;
en raison des personnes, ils jugeaient les délits ordinaires non
seulement des seigneurs et des nobles, mais aussi des suppôts
du conseil, des procureurs, des huissiers, des avocats qui y exer-
çaient leur profession ; ils partageaient avec le prince, comme
par le passé, la connaissance des infractions commises par les
officiers seigneuriaux dans l'exercice de leurs fonctions ; ils
jugaient enfin les crimes surannés et réprimaient sommaire-
ment les excès des vagabonds.
Mentionnons enfin la création, par Charles le Téméraire, du
Grand Conseil de Malines, qui lui aussi, comme tribunal
d'appel, eut à trancher des questions de pèlerinages judiciaires.
En effet, un des premiers procès introduits devant cette cour
suprême fut celui d'un certain Joos Pietersseune, que les éche-
vins d'Ypres avaient condamné pour homicide involontaire
à faire le pèlerinage de Rocamadour. L'intéressé invoque la
note d'infamie que le peuple semblait infliger aux condamnés
à ce pèlerinage, et demande une autre peine, puisqu'il a été jugé
pour « meurdre et non pour choses vilaines et honteuses ».
Après deux ans, le Grand Conseil, sans pourtant vouloir
accorder crédit aux raisons alléguées, change le voyage de
Rocamadour en celui de Saint-Jacques de Compostelle (i).
Nous ne mentionnons pas ici les tribunaux d'exception de la
principauté de Liège ; le caractère et la marche des événements
politiques n'eurent pas pour conséquence d'y modifier profondé-
ment les institutions judiciaires : au-dessus des échevinages
locaux, qui restèrent toujours les tribunaux du seigneur dans
les communes, mais à côté desquels s'organisèrent des juridic-
tions communales proprement dites, nous voyons le Tribunal
de la Paix et le Tribunal de l'Anneau de la Paix fonctionner
avec une vigueur et une résistance que ne connurent pas les
conseils de justice des Pays-Bas.
A Liège nous trouvons encore plusieurs autres juridictions
extraordinaires, dont quelques-unes n'eurent qu'une existence
éphémère, soit parce qu'elles n'avaient été créées que pour
apaiser des querelles passagères de familles, soit parce que le
parti, qui les avait fait naître, ne sut se maintenir au pouvoir.
(i) Vanden Bussche, Les pèlerinages dans notre ancien droit pénal,
dans BCRH., 4^ série, XIV, 1 (1887), p. 47-49.
PROCEDURE GENERALE 95
En raison de l'application fréquente qu'ils firent de pèlerin;,
nous citerons le Tribunal des XXII et la juridiction du prévôt
de la cathédrale.
Reconnu par Adolphe de la Marck en 1343, le Tribunal
des XXII se composait des délégués, non de l'évèque, mais
des trois membres des états : le chapitre cathedra], la noblesse,
les communes ou bonnes villes. Il constituait une juridiction
extraordinaire, devant laquelle on pouvait citer tous les officiers
du prince-évêque, qui commettaient des actes de violence dans
l'exercice de leur charge ou se rendaient coupables d'abus de
pouvoir, de concussion, de déni de justice. Sa compétence
était mixte et consistait à forcer le coupable à réparer le
dommage causé et à infliger des peines et surtout des voyages.
Créée par la Lettre du Prévôt du iPr juillet 1349, la juridiction
du prévôt de la cathédrale s'étendait aux injures et aux rixes
entre femmes « quant plaie ouverte ou sanc n'i at». Le même
document permettait au prévôt d'appliquer sans difficulté un
pèlerinage spécial pour chaque espèce de ces infractions (1).
Nous n'avons pas à nous occuper ici du tribunal exceptionnel
qui eut le plus d'extension au moyen âge, c'est-à-dire du
tribunal ecclésiastique : l'aperçu général que nous avons donné
dans notre introduction montre que la jurisprudence canonique
qui avait faitnaitre les pèlerinages pénitentiaires, continua à les
appliquer, et cela au moyen de la procédure qui lui était propre
et qui ne manqua pas d'influencer celle des tribunaux laïcs.
Quant au tribunal du recteur de l'université de Louvain,
nous en ferons, à la lin de notre travail, l'objet d'un chapitre
spécial.
B. Tribunaux ordinaires de la commune. — Dans les com-
munes où des événements politiques avaient modifié les institu-
tions seigneuriales existantes, les juges naturels des bourgeois
étaient les échevins. Pour sauvegarder au moins une partie de
ses droits, le prince avait mis à leur tète un officier, qui com-
muniquait à leur collège l'initiative et l'exécution indispensables.
Là où le prince avait refusé d'accéder au mouvement d'indépen-
dance des bourgeois, les échevinages restèrent essentiellement
des tribunaux seigneuriaux ; peu à peu pourtant l'élément
(1) Cfr Pouixet, Essai hisl. dr. crim. Liège, passim.
96 CHAPITRE III
communal réussit à se ménager une place au banc de
justice (i).
Les échevins d'une part, les magistrats communaux de l'autre,
en vinrent bientôt à se décharger d'une partie de leurs attribu-
tions judiciaires sur d'autres corps ; ainsi, le soin de terminer
les querelles de familles fut transféré par eux au collège des
apaiseurs ; ils laissèrent aux autorités des corporations des
métiers et des serments la connaissance des infractions discipli-
naires de leurs confrères.
Nous comprenons donc sous le nom de tribunaux ordinaires
delà commune surtout quatre autorités judiciaires : les échevins,
les magistrats électifs des villes, c'est-à-dire bourgmestre et
jurés, les pacificateurs et les doyens avec les jurés des gildes et
métiers.
Qu'ils fussent sous la dépendance du seigneur, comme au
pays de Liège, qu'ils fussent une émanation de la commune,
comme en Flandre, qu'ils occupassent une position intermé-
diaire, comme en Brabant, les échevins avaient la connais-
sance de toutes les infractions (2), à part les cas réservés
(saeken ten vonnisse niet en staende), qui ressortissaient de la
juridiction seigneuriale. Notons pourtant que dans certaines
villes, comme à Louvain, les échevins déterminaient eux-
mêmes la nature de ces cas spéciaux.
A la semonce de l'officier seigneurial, ils jugeaient de leur
propre autorité ; leurs sentences étaient définitives ; en principe
on ne pouvait en appeler des décisions des échevins, qu'en
accusant formellement ceux-ci de faux jugement ou qu'en cas
de déni de justice, pro deîiegata justifia. Le seigneur pouvait
agir alors contre eux ; parfois il les traduisait devant un autre
échevinage. Ainsi, d'après la keure de ïermonde (art. 28), on
pouvait en l'occurrence citer les échevins de cette ville devant
le tribunal scabinal d'Anvers. Il en était de même des autres
villes : les grandes communes telles que Bruges, Gand, Ypres
etc., étaient appelées chefs-de-sens des communes moindres (3).
(1) Cfr B. Defacqz, Ancien Droit belgique, t. I, p. 40 ssq.
Bruxelles, 1878.
(2) «Si vero dux vel aliquis quidquam ad versus burgensem habue-
rit dicere, nifiil aliud nisi quod sententia scabinoruni dictaverit, habe-
bit ». Charte de Léau, 1213, Wnj.EMS, Cod. diplom., t. I, p. 618.
(3) Au début du XVe siècle, les ducs de Bourgogne, à la suite des
troubles, accaparèrent ce principe d'appel pour en faire la compé-
tence de l'Audience et plus tard des Conseils de Justice.
PROCÉDURE GÉNÉRALE 97
Cette position privilégiée des premières communes, qu'on
pourrait nommer métropoles par rapport aux communes affi-
liées, provenait de ce qu'elles avaient transmis leur charte à ces
dernières, pour leur servir de modèles dans l'élaboration des
statuts communaux. Même à l'époque de la rédaction des
coutumes, on peut encore aisément se rendre compte de cette
filiation. Il était donc naturel que les communes affiliées
avaient recours aux premières lorsqu'une difficulté spéciale se
présentait ou dans certaines causes plus graves (1); les premières
jugeaient ainsi par recharge (hootvonnis) (2). Les conflits
devinrent inévitables lorsque les échevinages supérieurs vou-
lurent étendre de cette façon leur juridiction aux dépens cies
autres. Nous en trouvons un exemple caractéristique dans les
registres criminels de Lierre. Les échevins de cette ville avaient
condamné un certain Willem Clemeycien, pour avoir mal-
traité l'écoutète, à des pèlerinages à Saint-André en Ecosse
et à Saint-Nicolas de Bari ; les Anversois leur contestèrent le
droit de juger cette infraction sans leur avis et il fallut que
les Lierrois réclamassent l'intervention des villes de Louvain
et de Bruxelles pour mettre les premiers à la raison (3).
Le magistrat électif ou le conseil de la commune, là où il
existait, eut aussi sa juridiction criminelle, non pas en propre,
mais généralement en participation avec les échevins. Dès le
début du xne siècle, nous voyons apparaître en Flandre des
«jurés », représentants de la bourgeoisie au sein de l'échevinage
seigneurial ; mais ils disparurent lorsque les échevins devinrent,
d'un coup, l'organe de la commune bourgeoise. Dans les
villes brabançonnes et liégeoises, aucun événement brusque
(1) Cfr A. Luchaire, Les communes françaises, p. 148 ssq.
Paris, 191 1.
(2) L/éckevin liégeois Brassinnic donne du jugement par recharge
la définition suivante : « Recharge ou apprise est une ordonnance
du juge supérieur par laquelle il commande au juge inférieur de pro-
noncer la sentence telle et selon la forme que ledit juge supérieur l'a
conçue, de sorte que juger par recharge c'est porter mie sentence par
ordre du juge supérieur, tellement et selon la forme que ledit juge
supérieur l'a conçue ». Raikem Kï I'oi.ain, Coutumes de Liège, t. 1,
p. 209.
(3) Vu l'importance de ces pièces pour le sujet qui nous occupe,
nous les avons reproduites in extenso, en appendice : Correctieboeck,
n08 85, 93, 95.
7
gS CHAPITRE III
n'étant venu modifier les institutions seigneuriales, les bourgeois
voulurent avoir des garanties au sujet de l'indépendance de la
commune urbaine ; les ducs de Brabant, dans leur intérêt, se
prêtèrent de bonne grâce à cette immixtion.
C'est au début du XIIIe siècle que les jurés apparaissent en
en Brabant (i) ; ils prennent part, à côté des échevins, à l'exer-
cice de la justice pour autant qu'il s'agit de réprimer des
actes qui atteignent de près ou de loin les intérêts de la
communauté (2) ; ils ont pour mission de conserver la paix
à l'intérieur des villes. Aussi quand, par mesure politique,
il faut prononcer des bannissements et des pèlerinages contre
ceux qui ont méfait, soit vis-à-vis de la commune comme corps,
soit contre un de ses bourgeois, ce ne sont pas les échevins
seuls, mais c'est la « grande commune », c'est-à-dire échevins,
maîtres et jurés, qui s'en chargent.
Il y a des villes où pendant une certaine période le magistrat
électif juge seul les crimes des bourgeois, tandis que les éche-
vins ont dans leurs attributions la justice civile et l'administra-
tion (3).
Au pays de Liège, les aspirations de la bourgeoisie à l'indé-
pendance communale ont trouvé leur expression, non dans la
modification radicale de l'échevinage, comme en Flandre, mais
dans l'institution des jurés. Les luttes du xive siècle entre la
commune liégeoise et le prince-évêque amenèrent celui-ci à
confier une partie de la juridiction répressive et en concurrence
avec les échevins, à des jurés spéciaux, nommés par lui-même,
au nombre de 24, dans le sein du magistrat en fonction et du
magistrat sortant; ils étaient appelés jurés des vinaves, parce que
exerçant leur juridiction dans les vinaves ou quartiers de la ville
auxquels ils appartenaient. Au XVe siècle, ce tribunal perdit son
caractère de dépendance vis-à-vis de l'évêque ; ses membres
(1) A Haelen en 1206 ; à Léau en 1213. Ils sont mentionnés à Bru-
xelles en 1229, 1234, 1264, 1270 ; à L,ouvain en 1234 (voir plus loin) ;
à Anvers, en 1232-1233 ; à Tirlemont eu 1249, 1261 ; à Herenthals
en 1303. Cfr Vander L,inden, Hist. de la constit. de la ville de Lou-
vain, p. 33.
(2) « Quod si forte evenerit quisquam oppidanus Lovaniensis
dictum reum occulte seu violenter hospitium suutn asserat iniisse,
id sub dicta paena, quandocins poterit, judici, et scabinis, et recto-
ribus communiants intimabit ». Heure de Louvain, 1234, Wiiaems,
Cod. diplom., t. I, p. 638.
(3) Cfr WAUTERS, Les libertés communales, p. 604-605.
PROCÉDURE GÉNÉRALE 99
devinrent les jurés ordinaires du conseil de la commune, et
mirent à leur tête des maîtres. La compétence des maistres et
jurés de Liège, comme celle des bourgmestres et jurés à Saint-
ïrond et à Maestricht, consistait à appliquer le statut. En effet,
contrairement au droit de Flandre où les échevins jugeaient
uniquement suivant la keure, le bourgeois du pays de Liège
pouvait poursuivre un coupable soit devant le tribunal de la loy,
c'est-à-dire devant le tribunal des échevins, jugeant d'après le
droit en vigueur dans toute la principauté, soit devant le tri-
bunal du statut, c'est à-dire celui des maîtres et jurés, qui
appliquaient les ordonnances spéciales octroyées par le souve-
rain à telle ville en particulier. Tout comme les échevins le fai-
saient pour la loy, les maîtres et les jurés avaient non seulement
le droit d'appliquer les pèlerinages minutieusement prévus dans
le statut, mais aussi celui de fixer la peine et la réparation à
partie, non prévus par le texte (i).
En vertu du principe de la division du travail et surtout dans
le but de décharger les magistrats communaux, on en vint, dès
le XIIIe siècle en Flandre et au xive siècle en Brabant (2),
à créer des juridictions subalternes (smalle wetten), dont les
membres portaient soit le nom de vinders, comme à Gand (3),
soit celui de peysmaekers, paysierders, apaiseuts, apaisenteurs
en Brabant. Que leur juridiction dérive de celle des échevins ou
de celle des jurés, ces magistrats pacificateurs avaient une com-
pétence essentiellement restreinte ; ils terminaient les petites
querelles d'injures, de coups et de blessures, veillaient au main-
tien des trêves ou présidaient simplement à la conclusion de la
paix à partie. Ils avaient le droit de prononcer toutes les peines
n'entraînant pas la mort ou la mutilation. Les documents qui
nous sont parvenus, montrent qu'ils ont usé largement des
pèlerinages comme pénalités. La charte des apaiseurs de
Louvain (4), qu'on attribue ordinairement au duc Jean III
(1) Cfr PouLLET, Essai sur l'histoire du droit criminel à
passim.
(2) Ils apparaissent à Douai en 1268 ; à Valenciennes en 1278 ;
à Bruxelles en 1343 ; à Anvers en 1357 ! à Louvain, vers le milieu
du xive siècle.
(3) « Dat aile deghene die peregrinage gheset siin, eist bi scepenen
of bi vinders of bi manscepe, dat sy. . . ». 16 novembre 1353 ;
DE Pauw, De voorgeboden der stad Gent, p. 65.
(4) Cfr Vander Linden, Op. cit., p. 164-169.
100 CHAPITRE III
(? 1312-1355) nous donne une idée exacte du rôle de ces
magistrats dans nos communes brabançonnes.
Cette institution des pacificateurs n'exclut pas l'action des
échevins, car souvent plusieurs d'entre ceux-ci font partie du
collège des apaiseurs, à côté de jurés ou d'anciens échevins ou
d'anciens jurés.
A Tournai, les apaiseurs n'existaient pas comme tels ; mais
leurs attributions étaient exercées par les prévôts et les
jurés (1).
A Liège, le Ier Régiment de Heinsberg (1424) avait remis la
juridiction pacificatrice entre les mains des commissaires de la
cité.
On comprend généralement dans les s??ialle wetten la juridic-
tion des doyens de la gilde de draperie et des jurés des
corporations, des serments, des métiers, des confréries et des
chambres de rhétorique. La juridiction des premiers s'étendait
en règle générale non seulement sur les drapiers, membres de
l'association, mais sur tous les artisans employés à l'industrie
drapière (2). Tous n'exerçaient qu'une juridiction disciplinaire
sur leurs membres ; car en matière criminelle grave, tous ceux-ci
ressortissaient du tribunal communal. Les autorités corporatives
connaissaient en général des infractions commises par les
membres contre le règlement ou contre les chefs (3), des
injures, des violences ou blessures légères infligées à un confrère
ou à un étranger, des infractions professionnelles. Il arrivaitmême
que, sur l'invitation du magistrat, elles jugeaient les infractions
commises par des étrangers contre les intérêts de la corporation ;
parfois aussi les doyens et jurés, pour des raisons spéciales,
renvoyaient les délinquants au tribunal communal (4). Avant
le XVe siècle, du moins en Brabant, les autorités de la gilde
reconnaissaient le tribunal urbain comme chef-de-sens ; mais
au XVe siècle, leurs sentences sont formellement révocables
devant la juridiction communale, moyennant une taxe de
garantie (5). Dans certaines corporations on avait pour ainsi
(1) Cfr DE NÉDONCHEt, Etude sur le droit criminel, p. 103.
(2) DES Marez, Organis. du travail à Bruxelles, p. 149.
(3) Dans certaines communes cependant, les infractions des mem-
bres vis-à-vis des autorités corporatives ressortissaient de la juri-
diction urbaine.
(4) Cfr POUU/ET, Corporations communales, p. 415-416.
(5) Cfr Des Marez, Op. cit., p. 155.
PROCÉDURE GÉNÉRALE IOI
dire copié l'organisation du tribunal de la commune ; le doyen
(hooftman) et les jurés fgeswoornen) y remplissaient les fonc-
tions occupées au banc de justice communale par l'écoutête et
les échevins (i).
C. Le « voguement de forche » dans le droit liégeois. — Outre
la poursuite pacifique d'une réparation ou l'action judiciaire
introduite par une plainte criminelle, que nous rencontrons
généralement dans le droit des Pays-Bas, il existait au pays de
Liège une action spéciale et sommaire, à laquelle l'absence
d'une plainte criminelle proprement dite enlevait le véritable
caractère de procédure pénale : c'était le«voguement de forche».
Un homme se croyait lésé dans sa personne ou ses droits : il
pouvait se présenter devant les autorités et demander qu'elles
imposent à son adversaire un pèlerinage, dont le rachat lui
profiterait. Le demandeur n'exigeait pas une peine, mais la
réparation d'un dommage. Au début, la procédure était telle-
ment sommaire, que la condamnation fut souvent portée à
l'insu du coupable.
Celui-ci en effet, n'était pas cité et il suffisait pour le con-
damner, que le demandeur affirmât sous serment la sincérité de
sa demande. Les Paweilhars aux articles de 1301 exigent
seulement de celui qui fait « vogier» quelqu'un, un versement
d'une caution de sept sous, pour le cas où le condamné parvien-
drait à faire sa « loy », c'est-à-dire à se justifier de l'accusation,
soit par serment soit avec l'aide de conjurateurs (2).
Cette procédure remonte très haut, puisque les Statuts de la
Cité de Liège de 1328 en parlent comme d'une pratique établie
de longue date. Elle fut réglée dans un sens plus favorable au
défendeur par divers textes de loi, notamment par la Loi
nouvelle de 1355, la Mutation de la loi nouvelle de 1386 et le
Ier Régiment de Heinsberg de 1424.
A partir de cette date, nul ne peut être condamné à « vogier »
s'il n'a pu préalablement se défendre ; aussi le demandeur
doit-il immédiatement après la première proclamation, faire
assigner son adversaire à son domicile ; si lui-même habite un
(1) Cfr PouiXET. Op. cit., p. 415.
(2) « Et aussi se nulz bourgois fat vogier ting aultre, il se doit obli-
ger de sept solz ; et se ly horns fait sa loy, ly bourgois est attains de
sept solz... ». Paweilhar n° 242, Raikem et Polain, Op. cit., t. I,
p. 149 et note p. 208.
102 CHAPITRE III
endroit peu accessible ou dangereux, l'assignation peut se faire
dans la localité la plus proche; en cas d'absence du pays, dûment
constatée par le curé de l'endroit, ou en cas d'emprisonnement,
la procédure reste suspendue. En tout cas on devait rapporter
aux autorités la preuve que l'assignation avait été faite orale-
ment par le « varlet de justice » ou par lettres portant le sceau
de l'official de Liège ou celui de deux maîtres de la justice.
Celui qui a été assigné de la sorte, peut non seulement se
défendre de l'accusation portée contre lui, mais en outre assigner
à son tour le demandeur, et cela sans que les autorités judiciaires
puissent reclamer une autre taxe, que le salaire du porteur. Le
Ier Régiment de Heinsberg {1424) qui reprenait cette dernière
stipulation à la Mutation de la loi nouvelle (1386) décidait en
outre que l'action du voguement de forche entre bourgeois
devait se faire devant les échevins et devant deux maîtres de
la Cité avec deux jurés.
CHAPITRE IV
PROCÉDURE PARTICULIÈRE DES TRIBUNAUX
ORDINAIRES DE LA COMMUNE.
Au chapitre précédent, nous avons groupé sous la dénomi-
nation des tribunaux ordinaires de la commune, les juridictions
des échevins, du magistrat électif, des pacificateurs et des cor-
porations. Nous pouvons nous borner à exposer ici dans ses
grandes lignes la procédure que suivait le tribunal des échevins,
principalement aux XIV-XVe siècles, dans l'application des
pèlerinages comme pénalités. En effet, les bourgmestres et les
jurés prenaient part à l'exercice de la justice à côté des échevins;
les pacificateurs n'avaient à proprement parler d'autre procédure
que la conclusion d'un contrat ou l'imposition d'une peine ;
enfin les autorités corporatives n'avaient, en matière discipli-
naire, qu'une manière de procéder calquée sur celle des échevins.
Nous étudierons d'abord la composition du tribunal de la
commune ; puis, nous passerons en revue les divers éléments
de la procédure criminelle.
Tout ce que nous dirons au sujet de l'exécution des pèleri-
nages, se rapporteundistinctement aux condamnations pronon-
cées par les quatre juridictions mentionnées.
I. COMPOSITION DU TRIBUNAL DE LA COMMUNE
i . Présidence : l'officier seigneurial. — De tout temps le
prince, dont la moindre prérogative n'était certes pas celle de
rendre justice, avait délégué à un officier le soin d'administrer
cette justice en son nom : « Quem cornes loco suo ad justitiam
tenendam instituit » Ci). Parfois, il se vit arracher par le mou-
(i) Keure de Gand, 1176, art. 28.
104 CHAPITRE IV
vement communal le droit de fournir les bancs de justice ;
même alors, il parvint à sauvegarder le principe que toute
justice vient du prince et à faire admettre que, si les juges
étaient des bourgeois, un officier leur communiquât la com-
pétence de sa part. En général, les communes ne s'opposèrent
pas à cette exigeance, quitte à mettre l'officier seigneurial à la
raison, s'il manifestait des velléités à étendre son action aux
dépens de l'indépendance communale.
Cet officier, qu'il s'appellât bailli, écoutéle, maieur ou
amman ( r), constituait donc un véritable trait d'union entre la
commune et le seigneur, et représentait, au sein de la première,
les tendances et les visées politiques du second. Il cumulait
souvent des fonctions administratives, militaires et judiciaires ;
à ce dernier titre il était officier de police et chef de justice.
Comme officier de police, il était qualifié pour recevoir les
plaintes et les dénonciations, pour rechercher les auteurs de
crimes dont aucune plainte précise ne lui était parvenue,
mais qui étaient dénoncés par la rumeur publique, pour ras-
sembler, seul ou avec les magistrats communaux, les preuves
nécessaires à la condamnation, et parfois même pour arrêter
les coupables.
Comme chef de justice, le justicier présidait le tribunal
communal, fixait les jours de séance, convoquait les éche-
vins et les autres magistrats ayant le droit de siéger à côté
de ceux ci ; il occupait la première place dans leur assemblée ;
il déclarait la séance ouverte et close, et après avoir indiqué
l'ordre à suivre dans les affaires, il menait les débats sans
pourtant y prendre part. Mais la fonction propre de l'officier
princier était l'acte de semoncer les échevins, c'est-à-dire
d'interpeller nominalement les juges pour leur faire donner
sur l'affaire citée des avis, dont l'ensemble permît d'aboutir
régulièrement à une condamnation ou à un acquittement
du prévenu. Cette semonce était nécessaire à la formation
du jugement : toute sentence, qui aurait été prononcée par
les échevins sans qu'ils y fussent invités par le justicier,
était, par le fait même, de nulle valeur. Il pouvait arriver
que, par mauvais vouloir ou par négligence, le justicier ne
semonçât point les échevins, alors qu'un jugement s'imposait;
dans ce cas, ceux-ci pouvaient exiger du prince l'arrestation,
(i) Bailliu, schouleth, meyere, amman ou amptman.
PROCÉDURE PARTICULIÈRE DES TRIBUNAUX ORDINAIRES 105
la correction ou même le remplacement do l'officier cou-
pable (i). C'est pour obvier à cet inconvénient, qu'en 1422,
les communes Brabançonnes arrachèrent à l'officier ducal le
droit exclusif de semonce et se réservèrent le droit de forcer
un sergent à prêter serment et à semoncer les échevins à
faire droit.
Enfin, au justicier appartenait aussi le droit d'exécuter la
sentence, portée par les échevins Mais ici, tout comme pour
la compétence des échevinages subalternes ou ruraux, il s'agit
de faire une distinction de rang entre les divers justiciers : un
officier criminel de rang supérieur pouvait, en effet, faire pro-
noncer par un échevinage inférieur une peine afflictive que
celui-ci n'aurait pu porter à la semonce de son propre justi-
cier. Ainsi, dans des affaires graves, l'écoutête de Lierre accu-
sait en présence de l'écoutête d'Anvers, marcgrave du pays
de Rijen, et agissait au nom de celui-ci jusqu'à l'exécution de
la sentence exclusivement ; il appartenait à ce dernier de
mettre la sentence à exécution (2). Il est à remarquer que
nombre de condamnations à des pèlerinages terminent des
procès, menés ainsi de front par l'officier criminel de l'éche-
vinage propre et par celui de l'échevinage chef-de-sens du
premier (3). Le duché de Brabant comptait, au xvc siècle
par exemple, six grands justiciers : l'amman de Bruxelles, le
maïeur de Louvain, l'écoutête d'Anvers et celui de Bois le-
Duc, le bailli du Brabant wallon et le maïeur de Tirlemont.
Dans certains cas graves, tel le flagrant délit et l'attentat
direct contre le pouvoir central, le justicier pouvait agir de
sa propre autorité, sans réclamer l'intervention des échevins.
Dans certaines communes et à une époque où la plainte cri-
minelle n'était plus absolument nécessaire à l'action judiciaire,
c'était aussi à lui qu'appartenait, ce que nous appelons la
poursuite d'office. C'est lui enfin qui, pour des raisons parti-
culières, arrêtait un procès avant la sentence, pour permettre
(1) Keure de Gand, 1296, art. S.
(2) Cfr Coût, de Lierre t. I, p. 1-3. — Cette procédure avait fait
d'ailleurs l'objet d'un accord entre les échevins des deux villes en
date du n septembre 1419. «Accord tusschen Antwerpen ende Liere
van den correctien van Liere ». Archives de la ville d'Anvers. Oudt
Registev mette berderen (1336-1439), f° 63, Antw. Archievenblad,
t. XXVII, p. 169.
(3) Cfr Correctieboeck en appendice, passim.
106 CHAPITRE IV
à l'accusé de conclure avec lui une transaction pécuniaire,
la « composition » dont nous parlerons plus tard.
Notons que dans certaines communes où deux autorités
seigneuriales se divisaient le pouvoir, chacune avait son offi-
cier : à Saint-Trond notamment l'évêque de Liège et l'abbé
de Saint-Trond avaient chacun leur écoutête.
Pour des raisons spéciales l'officier criminel pouvait se faire
remplacer par un lieutenant (ondermeiere, subvillicus, onder-
schouteth, onderbailliu) ; l'écoutête d'Anvers et de Malines
avaient chacun un amman ou remplaçant. Les justiciers avaient
à leur service des sergents (vorsters, preters, roydragers) et
un clerc ; ce dernier faisait office de notaire : son importance
grandit à mesure que la procédure écrite joua un rôle plus
considérable en matière criminelle.
2. Assesseurs : les échevins. — « Justitia per villicum et
sabinos fieri débet » (i). A la semonce de l'officier criminel,
les échevins administraient la justice de leur propre autorité,
mais au nom du prince (2). Pour certains cas, nous l'avons
vu, le représentant de la commune bourgeoise se joignait à
eux. Le rôle des échevins était de juger d'après la loy
c'est-à dire de déclarer l'applicabilité de telle disposition de la
loi au cas proposé et de prononcer la sentence ; en cela ils
étaient les véritables successeurs des urieilfinder germa-
niques (3). C'est en vertu de ce rôle que les échevins por-
taient, jusqu'à la fin de l'ancien régime, le nom de loy,
de wet ou de heure. Au pays de Liège, à côté de la
loy ou échevinage seigneurial, se trouvait le Statut ou
magistrat communal, chargé d'appliquer les statuts particuliers
des villes. Mais cette mission exigeait de la part des juges
une certaine instruction qui, certes, ne devait pas faire dé-
faut chez les échevins des grandes communes, ordinairement
(1) Charte de Liège de n 98, n° 15.
(2) « So eyst t'segghen van scepenen uten laste dat sys hebben
van ons gheduchts heeren ende princhen rade s'graven van Vlaen-
dren... ». Zoendinc Bouc de Gand, a0 1357, f° 21, CannaerT, Op. cit.,
p. 378. C'est aussi au nom du prince qu'ils condamnent les cou-
pables : « wyzen ende condemneeren u in s 'heeren wille ». Cfr Poux-
I.ET, Hist dv. pén. Bvab., p. 160.
(3) Les échevins de Dinaut jugent « secundum consuetudine fori
Dionensis ». Cfr Pirennë, Hist. de la Constitution de Dînant au
moyen âge, p. 19.
PROCÉDURE PARTICULIÈRE DES TRIBUNAUX ORDINAIRES 107
pris dans les rangs de la haute bourgeoisie. Il n'en était pas
de même pour les échevins des petites communes et pour
ceux du plat pays ; aussi la recommandation que leur adresse
le prince de juger « d'après leur cinq sens ou de leur mieux »
(op syn beste), révèle-t-elle cette ignorance, si dangereuse
pour l'équité des jugements. Le recours au chef-de-sens, dont
pouvaient user en tout temps les échevinages inférieurs et qui
leur était même imposé en certains circonstances, devait
suppléer en une certaine mesure à l'insuffisance d'instruction
chez ces magistrats.
L'échevinage, quoique collège fermé par excellence, se
composait de membres dont le nombre variait d'après les
communes : en règle générale il y avait sept échevins ; mais
certains bancs ne comprenaient que trois membres ; d'autres,
par contre, en avaient jusque dix-huit. Bruxelles, Louvain et
Lierre avaient sept échevins, tandis que Liège en avait qua-
torze, dès 1198 ; les villes liégeoises de Maestricht et de
Saint - Trond possédaient chacune un double banc de sept
échevins : l'un de l'évêque de Liège, l'autre du duc de Bra-
bant pour Maestricht, de l'abbé de Saint-Trond pour cette
ville. A partir du XIVe siècle, la commune de Gand eut
13 échevins au banc supérieur (échevins de la Keure) et
autant au banc inférieur (échevins des Parchons, schepenen
van ghedeele). Notons en passant qu'à Tournai les échevins
n'étaient pas juges ; ces fonctions étaient exercées par deux
prévôts et dix-huit jurés.
Quant au nombre de juges requis pour proclamer légitime-
ment l'assemblée de justice, les anciennes chartes étaient
généralement muettes, quoique l'une ou l'autre suppose la
présence de quatre échevins (i). Plus tard, cependant, on
admettait qu'au moins la moitié des échevins dussent
être présents. En certains endroits le nombre requis dépendait
de l'importance des affaires à traiter ou de la présence de
certains fonctionnaires supérieurs. Ainsi la Keure des Quatre
Métiers exigeait le nombre de quatre, de trois ou de deux
échevins, suivant que les causes à juger pouvaient entraîner
des amendes de vingt, de quinze ou de dix livres (2). Par
(1) « Légitime lice (a) t coram tribus, vel IV scabinis placitari »
Keure des 4 métiers, art. 31; Warnkoexig, Flandrische Staats-
und Rechtsgeschichte, t. III, p. 276.
(2) Warnkoenig, Op. cit., t. III, p. 275.
108 CHAPITRE IV
contre, à Anvers, aucune « vierschare » ne pouvait être pro-
clamée sans la présence d'un bourgmestre et de sept échevins,
ou du lieutenant du bourgmestre et de neuf échevins ( i). A Liège
la Loi nouvelle de 1355 prescrivait le nombre de huit juges pour
la cité et celui de quatre pour toutes les villes qui n'avaient
que sept échevins (2).
Les échevins étaient ordinairement choisis par le prince ou
par ses commissaires pour remplir leur fonction durant une
année. Le principe de l'inamovibilité de ces magistrats, ap-
pliqué un certain temps en Flandre, ne resta pas longtemps
en vigueur, excepté au pays de Liège où il était à la base de
l'organisation judiciaire. Chaque fois que l'influence bour-
guignonne vient dans cette principauté introduire le renou-
vellement annuel, cette dernière pratique ne se maintient que
jusqu'au jour où l'opposition a repris le dessus.
L'exercice de la juridiction échevinale était partout entourée
de garanties spéciales vis-à vis de la personne et de l'honneur
de l'officier criminel et des échevins. Toute voie de fait et
toute injure qui leur étaient infligées dans l'exercice de leur
charge, étaient punies de peines sévères et notamment de pèle-
rinages. Les échevins liégeois de leur côté, semblent avoir
été trop méticuleux et avoir abusé des peines qui étaient de ce
chef à leur disposition : la Mutation de la Loi nouvelle (1386)
dut, en effet, indiquer les conditions du « dédit a justice » et,
partant, des condamnations à pèlerinages ; elle exige que les
paroles injurieuses soient dites à 1' « allencontre » d'un juge-
ment rendu en justice à la semonce de maïeur, c'est-à-dire
devant le maïeur accompagné de deux échevins au moins, et
de plus, que le maïeur et les échevins se plaignent du fait à
l'instant même (3).
3. Endroit et moment de séance. — Les échevinages pri-
mitifs étant les tribunaux du prince, elles s'assemblaient dans
la « curia comitis » ou dans ses environs. Ainsi à Gand le
tribunal seigneurial siégeait « inter capellam sanctae Pharahil-
dis et urbem comitis » (4) et au Steen. A Liège, les échevins
restaient ceux du seigneur, et tenaient leurs assises dans une
(1) Coutumes d'Anvers dites « Antiquissimae », t. I, p. o, DE
Longé, Op. cit. 1. 1, p. 108-109.
(2) Art. 10.
(3) Cfr Mutation de la nouvelle (1386), art. 63.
(4) Heure de Gand de 1192.
PROCÉDURE PARTICULIÈRE DES TRIBUNAUX ORDINAIRES iog
maison située dans le cloître de S. Lambert, près du parvis
de la cathédrale.
La keure de Furnes (1240) défend de tenir des plaids dans
une église ou au domicile de l'un des juges (1).
A la période qui nous occupe, les magistrats communaux
exerçaient leur juridiction dans un bien qu'ils avaient choisi
librement et où ils se retiraient à l'abri de toute pression. Dans
les villes, ils siègent soit à l'entrée du Beffroi, aux Halles ou
plus tard dans les maisons communes ou hôtels de vil lie ;
parfois ils se contentent d'un endroit de fortune, tel qu'une
maison louée par la ville, une auberge etc. (2). Bien souvent
aussi, — et cet usage reflète bien l'ancienne conception de la
publicité des débats, - ils prenaient place dans un petit
enclos sous un appentis, adossé à un bâtiment public. Ainsi,
à Anvers, jusqu'à la fin du XVe siècle, ils rendaient la justice
à la rue, à côté de l'église Sainte-Walburge au Château (3).
Mais en cette ville, comme ailleurs encore, ils siégeaient dans
des endroits différents, d'après l'importance de la cause (4).
La salle qui éventuellement servait à la séance, était ordi-
nairement ornée d'un crucifix ou de tableaux allégoriques, tel
(1) « Xullus placitabit in ecclesia vel alicujus domo de eis, quae
spectant ad choram et qui de eo convictus est, emendabit comiti
très libras ». Keure citée, art. 13, WARNKOENIG, Op. cit., t. III, p. 373.
(2) A Ypres, au xine siècle, « in domo templariormn, in domo
templi ». DES Marez et DesaghïïR, Comptes de la ville a" Ypres, t. I,
p. 4 ; au XIVe s. : « sour le halle ». DE Peesmaeker, Op. cit.,
n° 325, p. 173. — A Tournai, au xnie s. : « dans la maison de paix —
en le haie ki est maison de pes ». de NÉDONCHEL, Étude sur le
dr. crim., p. 103, 119. — A Xarnur, au xive s. : « fu faite ung juge-
ment en Cabaret » ; « maison de kabaret ». Wodox, Op. cit.,
p. 133. — A Liège, les jurés siègent « en la maison de la cité »
(Paix de Saint-Jacques, 1487), « à la chaîne de la Gererdrie », « à la
maison de planches sur le marché ». — A Dinant : « dans la tour
du pont ». Pirentne, Dinant..., p. 72.
(3) Cfr AIertens & Torfs, Gesch. van Antwerpen, t. II, p. 38.
(4) « Item, dat men aile ghenachten die ter vierscharen ingheset
worden ende ghenomen, ter vierschaeren bedinghen ende einden sal.
Ende aile ghenachten die ter straten oft ter scepenhuis ingheset oft
ghenomen worden, bedinghen ende einden sal ter scepenhuis oft ter
straten ». A Anvers, a0 1292 ; Coerboeck, n° 191, de Longé. Coût.
d'Anvers, t. I, p. 70-72. — En effet, les plus anciennes coutumes
d'Anvers supposaient que les jugements, pouvant entraîner des peines
de mort ou de mutilation étaient traités à ciel ouvert, tandis que les
autres se débattaient dans le local ordinaire des échevins.
110 CHAPITRE IV
que le Jugement dernier, dont quelques-uns nous ont été
conservés (i).
Généralement, tant en Flandre qu'en Brabant, le tribu-
nal échevinal constitué s'appelle la Vierschaer. Ce nom
doit apparemment son origine au genre de sièges sur lesquels
l'assemblée prenait place : une charte de 1218 pour la ville
de Gand parle déjà des «quatuor scamna». Certains histo-
riens ont même reconnu dans ces quatre bancs les places
propres de l'officier criminel, des juges, de l'accusation et de
la défense. Quoi qu'il en soit, des monuments figurés nous ont
laissé des traces de cette disposition des sièges en quadri-
latère (2).
Certains tribunaux de campagne semblent être restés fidèles
à la tradition germanique, en rendant justice sous un arbre (3).
Il est très difficile sinon impossible d'établir, d'une façon
générale, combien de fois et à quels jours le tribunal de la
commune siégeait. En effet, la pratique a été en cela très
différente d'après les époques et les communes.
Quelques anciennes keures stipulent de ne point tenir séance
durant le mois d'août et le temps de la moisson ; ces stipula-
tions ne semblent pas avoir survécu à l'époque communale (4).
A Liège la Loi nouvelle (1355) obligeait les échevins à résider
chaque année pendant six mois dans la cité pour y faire « loy »,
à moins de dispense de l'évêque ou d'empêchement notoire (5).
Avant le XVe siècle, d'ailleurs, il n'y eut pas de jours fixe pour
les audiences, et là, comme ailleurs, les échevins s'assem-
blaient à la semonce de l'officier, après que le héraut eût pro-
clamé la séance en rue.
(1) Cfr. A. A. REYNEN, Un triptyque historique (Extrait de la Fédé-
ration Artistique), Anvers, 1887.
(2) Cfr E. GENS, Histoire de la ville d'Anvers, p. 19-21. Anvers
1861.
(3) « Ad annum usque 15 18 stetit in foro S. Nicolai (S. Nicolas-
Waes) tilia, sub qua ad summi praetoris monitu civiles controversias
scabini dirimebant de piano sub die pro siinplicitate illius aevi et
litium paucitate ». Hevxen, Commenfarius, p. 64, d'après Warn-
KOENIG, Op. cit., t. III, p. 272.
(4) « In Auguste- vel messe non licebit placitari, nisi de instanti
forefacto noviter perpetrato ». Heure de Waes, 1241, art. 10. —
« Sabato querelae exliibebuntur : futura feria sexta de iis jutifica-
bitur, et ibi semper causa repetitur in futura feria sexta ubi dimitti-
tur in praeterita. Si verum festum fuerit, eo die placitabitur quem
ad hoc scabini ponent ». Heure de Bruges, 1190, art. 18.
(5) Loi nouvelle, II, 18.
PROCÉDURE PARTICULIÈRE DES TRIBUNAUX ORDINAIRES III
A Dînant, il y avait une séance de justice par mois ; à
Bruxelles, le tribunal se réunissait tous les quinze jours (i);
à Anvers, chaque vendredi (2); à Malines, une fois (3), à
Bruges, deux fois par semaine (4); au pays du Franc le mardi
et le vendredi (5).
Les séances avaient lieu ordinairement le matin ; ils com-
mençaient en tous cas « ante nonam », c'est-à-dire avant midi,
et pouvaient se prolonger jusqu'au coucher du soleil (6).
C'était la prescription de la plupart des coutumes ; de plus,
celle de Stavelot recommandait aux échevins, en toute naïveté,
d'éviter soigneusement toute manière d'ivrognerie et de com-
potations !
II. PROCÉDURE PRÉLIMINAIRE
Il serait téméraire de vouloir entreprendre une étude d'en-
semble sur la procédure suivie dans les tribunaux des communes.
En effet, avant le XVe siècle on compte à peu près autant de
formes de procéder, identiques pour le fond, différentes dans
les détails, que de tribunaux criminels d'une certaine impor-
tance. Nous croyons pouvoir nous borner à donner quelques
idées générales sur la matière, pour autant qu'elles se rapportent
au sujet traité.
On peut réduire à deux formes les procédures suivies dans
nos cours échevinales du moyen âge : la procédure accusatoire
ou dénonciatoire, et la procédure inquisitoriale.
La première, que l'on nomma parfois ordinaire après l'appa-
rition de la seconde, était, en effet, la plus commune. Elle
pouvait revêtir la forme accusatoire au sens strict : un accusa-
(1) Keure de Bruxelle 1335. Cfr Cod. diplom., t. I, p. 805.
(2) « aile weken des vridaechs ». Coutumes « antiquissimae », I,
1. Cfr de Longé, Coût. d'Anvers, t. I, p. 100.
(3) Cfr Coût, de Malines, t. I, p. 2.
(4) Cfr 2e Keure de Bruges, 1291.
(5) Cfr Projet de coutume pour le pays du Franc.
(6) Cependant nous possédons un jugement de Louis de Xevcrs,
condamnant Wautier Maisière de Courtrai, à deux pèlerinages, parce
qu'il avait battu sa femme, pour avoir reçu à jouer la suite du comte :
« Che fudit, ordenei et pronunchiet à Courtrai... le nuit Sainte-
Katheline > (24 novembre 13 19). Cfr MUSSELY, Invent, des Arch,
de Courtrai, t. I, p. 95.
112 CHAPITRE IV
teur privé exigeait, pour un fait qu'il mettait à charge de
l'accusé, l'emprisonnement de celui-ci ; il se voyait lui-même
dans l'obligation de combattre son adversaire à armes égales
et partant de se mettre en prison comme lui. Ou bien — et c'est
ce qui se passait généralement — l'action débutait par une
citation solennelle ; dans ce cas les deux adversaires restaient
en liberté.
La procédure inquisitoriale consistait à mener contre un
prévenu une enquête écrite et à laquelle il n'avait pas assisté,
mais qui entraînait néanmoins son appréhension et pouvait
aboutir à sa condamnation ; elle avait été reprise dans certaines
communes à la jurisprudence canonique, parce que, dans l'esprit
des législateurs, elle répondait à un véritable besoin.
i° Procédure dénonciatoire : accusation privée ; plainte
criminelle et poursuite d'office ; information préliminaire. —
L'accusation privée consistait à demander l'emprisonnement
d'un homme, auquel on imputait formellement une infraction
déterminée ; elle était de sa nature même dangereuse. En effet,
dans certains cas, au moins anciennement, l'accusateur pouvait,
être provoqué en champ clos ; souvent, lui ou les siens étaient
exposés à des attentats de la part de la famille de l'accusé ;
en cas d'échec, il était toujours menacé de la même peine qu'il
voulait attirer à son adversaire. On comprend qu'un grand
nombre de crimes devaient rester impunis, parce que personne
d'entre les parents de la victime n'osait affronter les dangers
de cette procédure.
On en vint donc à appliquer une procédure usitée déjà dans
les tribunaux ecclésiastiques ; mais on lui donna un caractère
plus grand de garanties pour le prévenu, c'est-à-dire la plainte
aux autorités judiciaires avec assignation à comparaître en
public devant celle-ci.
Cette dénonciation du délit était, en règle générale, nécessaire
à la mise en marche de l'action judiciaire, surtout dans les
temps anciens : la poursuite d'office, faite par le justicier,
ne s'introduit que peu à peu dans la pratique criminelle.
Cette nécessité de la plainte ressort tant de la jurispru-
dence que de la législation anciennes. Jean d'Outremeuse
nous rapporte qu'en 1214, une querelle étant survenue entre
Eustache de Herstal et le chanoine Pire de Jauche, celui-ci fut
tué par deux bâtards des Desprez ; les autorités n'agirent pas,
parce qu'il n')' eut point de plainte : « Il n'en vit altre choese,
PROCÉDURE PARTICULIÈRE DES TRIBUNAUX ORDINAIRES 1 1 3
car nuls ne s'en plaindist ^> (i). En fait d'injures, les Statuts de
la Cité de Liège (1328) exigent aussi la dénonciation avant les
poursuites (2).
Le droit de porter plainte appartenait avant tout à la
victime ; dans certains cas, celle-ci était même seule qualifiée
pour se plaindre. (3) Ce droit revenait ensuite au plus proche
parent de la victime, à sa femme assistée pour certains cas
d'un mambour, puis aux sergents et aux valets de justice, (4)
enfin à tous, surtout lorsqu'il s'agissait d'un meurtre. Pour
certaines infractions commises contre des ordonnances de
police ou de commerce, on indiquait la priorité du droit de
dénonciation, parce que la taxe de rachat du pèlerinage pro-
noncé comme peine était divisée entre le seigneur, la com-
mune, les échevins et le dénonciateur. (5)
Dans certaines circonstances il y avait une véritable obliga-
tion de dénoncer un délit : déjà la keure de Furnes prévoit
une amende contre celui qui, par malice ou tromperie, ne
(1) Chronique de Jean d'Outremeuse, t. V, p. 109.
(2) « Oui lait dirat à l'autre et plainte en soit faite. . . ». Statuts
de la Cité (1328), art. 1. — A Saint-Trond les Statuts de Jean d'Arckel
(1366) ordonnent un pèlerinage à Rocamadour au détenteur de
biens d' autrui : « ende claechte daer aff ghedaen werde », n° 58,
Stravex, Op. cit., t. I, p. 85 : « weer 't dat gedaecht ende gheprueft
woerde » ib. n° 74, Stravex, t. I, p. 89. — « seront attains chascun
d'une voie d'Outremere... voir s'il soy desplaint et néant autrement »
Statuts criminels de Huy (1477) VIII, Cercle hutois. . (1879-80) p. 227.
(3) La Lettre du prévôt (î^q) à Liège décide qu'on punira de
pèlerinages les femmes qui médisent habituellement d'une autre ;
mais pas avant que plainte ne soit faite par l'injuriée.
(4) A Saint-Trond, le coupable de proxénétisme est punis-r
sable d'un voyage à Rocamadour si « opten stadt knapen eydt dae,
voir inbracht ». StaHUs de Jean d'Arckel (1366) n° 44, Straven, Op. cit.
t. I,p.83.
(5) Saint-Trond 15 janvier 14S7. Ordonnance sur la brasserie : les
contrevenants « soe sullen zij verbueren.... eenen wech int Cypers
ende daer voer betaleu XL grypen, heeren, stadt, scepenen ende den
inbringere, elcken dat terdeel. Ende hier van sal der bieraesysere
ende vorts aileman inbringer syn ». 't Residuum, f° 90, n° 4, STRA-
VEN, Op. Cit., t. II, p. 153. — Cette prime au dénonciateur revêt parfois
des formes assez originales. A Maastricht, les Statuts de 1380 défen-
dent, sous peine d'un voyage n Vendôme, d'avoir chez soi plus d'une
mesure de seigle ; toute autre mesure sera confisquée : le bois en sera
brûlé et le fer reviendra au dé eur. Cfr Statuts de Maestricht
(1380), art. 103.
114 CHAPITRE IV
dénonce pas, dans les quatorze jours, à deux membres du tri-
bunal, un délit passible de la peine de mort ou de mutilation, (i)
A Saint-Trond on était en outre obligé de dénoncer le blasphé-
mateur sous peine d'amende (2) et on y imposait un voyage
à Saint-Jacques de Compostelle (3) à celui qui négligeait de
dénoncer un condamné à des pèlerinages, qui était rentré
avant de les avoir accomplis.
La plainte était portée soit devant le justicier, soit devant
les échevins et les jurés. Au pays de Liège où coexistaient
diverses juridictions distinctes, nous trouvons une législation
spéciale, sanctionnée par des pèlerinages. Dans la cité de
Liège, il était loisible à chacun de porter plainte soit devant
l'officialité, soit devant les échevins, soit devant les maîtres
et les jurés ; mais il était défendu, sous peine d'un voyage à
Rocamadour, de se plaindre à plus d'une juridiction en même
temps, ou de poursuivre une plainte devant un tribunal
étranger (4). Cette faculté de porter plainte d'après la loy ou
d'après le statut permettait de choisir pour juges soit les
échevins qui appliquaient les lois en vigueur dans toute la
principauté, soit les maîtres et les jurés qui jugeaient d'après
le statut ou la coutume locale, propre à chaque bonne ville ;
elle constitue un fait primordial dans l'histoire de la procé-
dure criminelle. Notons qu'à Maestricht la plainte devait
être exposée d'abord devant les maîtres, jurés et con-
seillers; c'est à eux qu'il appartenait de juger si réellement
il valait la peine de s'occuper du délit dénoncé et de sou-
mettre celui-ci au jugement des échevins. L'omission de cette
formalité était passible d'un voyage à Rocamadour au profit de
la ville. (5) Le délai dans lequel la plainte devait se
faire variait d'après les endroits : à Liège, les plaintes
d'après la loy devaient être faites dans les quarante jours;
les autres, dans un délai beaucoup plus court; certains délits
(1) Keure de Fumes, art. 21.
(2) 28 juillet 1494.7 Residuum, f° 107, n° 1, STraven, Op. cit., t. II,
p. 189-190.
(3) 27 septembre 1479. 't Residuum, f° 79, Straven, Of?. cit., t. II,
p. 68.
(4) Cfr Paweilhars, décision n° 263 : « on ne poeut faire d'un cas
deux plaintes ». Paix de Saint-Jacques (1487), XXVI, 72.
(5) Statuts de Maestricht (1380), art. 129.
PROCÉDURE PARTICULIÈRE DES TRIBUNAUX ORDINAIRES 115
même devaient être dénoncés dans les trois jours, (i) La
plainte pouvait se faire partout, mais pour que la justice pût
agir, les Pawilhars prescrivaient qu'elle fût renouvelée « par
devant justiche en temps de justiche. » (2)
Les formalités auxquelles le plaignant et le dénonciateur de-
vaient se conformer constituaient de véritables garanties pour le
prévenu. D'après la jurisprudence liégeoise, le plaignant devait
jurer sur les saints que sa plainte était sincère, produire des té-
moins dans les trois jours, affirmer sous serment qu'il n'ac-
cuserait que le coupable et qu'il ne produirait aucun faux
témoin ; s'il se rendait coupabie d'un de ces chefs, il était
doublement amendé et déclaré aubain. La keure de Nieuport
accordait la liberté au prévenu dont l'accusateur n'avait pas
affirmé sa plainte sous serment. L'accusation devait être circon-
stanciée et fournir à la justice le plus de détails possible au
sujet du crime et du criminel. A Liège encore, la plainte
était « mise en warde » des juges par le justicier ; dès ce
moment il n'était plus loisible à son auteur d'y apporter
des changements; contrairement à ce qui se passait ailleurs,
elle était faite par écrit et une copie en était donnée à
l'accusé. Cette procédure écrite fut introduite à titre définitif,
dans le droit de Liège, par la Mutation de la loi nouvelle en
138Ô (3).
Cette procédure accusatoire, nous l'avons vu, était essentiel-
lement publique : l'accusé connaissait parfaitement le fait mis
à sa charge, le nom de son accusateur et celui de ses témoins ;
il était assigné à comparaître en leur présence à l'heure et au
jour fixés d'avance; tout ceci était encore clairement stipulé à
Maestricht. au commencement du XVe siècle. Peu à peu
cependant, cette procédure accusatoire devient plus ou moins
secrète. D'une part, le contrôle exercé par l'accusé sur l'action
des juges devait paraître à ceux-ci une charge ; d'autre part,
la présence de l'accusé était de nature à compromettre la
liberté des témoins, si nécessaire dans la déposition. C'est
probablement pour éviter ce double inconvénient qu'on finit
(1) « Chis a cui 011 arat le dit méfait fait, plaindre s'en doit dedens
trois jours ». Lettre de la Paix de Fosses (1368), Borgnet, Carlu-
laire de Fosses, p. 83.
(z) Paweilhars, décision, n° [66
(3) Elle était déjà pourtant prescrite par les Statuts de Maestricht
de 1380.
Il6 CHAPITRE IV
par ne plus communiquer à l'accusé les noms des témoins ;
à part cela, les autres actes du procès restaient publics. Enfin,
il est à peine nécessaire de l'ajouter, la procédure essentielle-
ment secrète suivie dans les tribunaux de l'Inquisition ne
doit pas avoir manqué d'influencer fortement l'esprit des
législateurs civils, désireux de réprimer efficacement les délits
qui risquaient de rester impunis.
La procédure accusatoire fut généralement observée jusqu'à
la fin du moyen âge. Cependant à côté d'elle nous voyons,
de ci de là et à un degré différent d'après les communes, la
poursuite des délits, exercée d'office par le justicier sans plainte
aucune, s'établir et se développer au point de devenir la
pratique commune au XVIe siècle (i).
Cette nouvelle procédure était cependant retardée et, en
certains endroits, enrayée par deux causes : d'abord, l'esprit
public jaloux de ménager l'indépendance communale tolérait
difficilement qu'en dehors de certains délits établis, tels que
le meurtre, l'incendie, le vagabondage, le justicier se substi-
tuât à la famille et s'emparât du rôle qui revenait à celle-ci;
ensuite l'organisation judiciaire spéciale de certaines com-
munes, celle du pays de Liège notamment, permettait à la
victime de porter plainte, selon ses préférences, soit au
tribunal de la loy, soit à celui du statut ; cette liberté
s'accordait mal avec la poursuite d'office ; aussi c'est avec la
plus grande difficulté que celle-ci parvint à s'établir à Liège.
Généralement admise au plat pays en vertu du droit de
chasse du seigneur (2), la poursuite d'office avait été introduite
très tôt dans les communes pour les crimes notoires, dont les
auteurs étaient désignés par la rumeur publique.
(1) « L,e principe de la poursuite d'office, de la répression régulière
des crimes par les officiers du prince, grandit cependant en Brabant,
comme il est inévitable en un pays où s'est formée la pépinière des
légistes brabançons, la grande uuiversité de Louvain ». Pktit-
DuTAlUJS, Documents nouveaux sur l'histoire sociale des Pays-Bas
au XVe siècle, dans les Annales de l'Est et du Nord, 190S, t. IV, p. 358.
(2) Serait-il téméraire de reconnaître dans cette institution un ves-
tige lointain du jury d'enquête carolingien dont les membres étaient
chargés avant tout de la surveillance des domaines princiers et subsi-
diairement de \\ répression des délits commis, sur ces mêmes terres ?
PROCÉDURE PARTICULIÈRE DES TRIBUNAUX ORDINAIRES 1 17
Peu à peu elle s'étendit non seulement au meurtre et au
rapt mais aussi à l'infraction à la paix publique, à la violation
du domicile, à la mutilation (i) et même aux blessures (2),
et à toutes infractions qui pouvaient d'ailleurs donner lieu à
l'application de pèlerinages. On ne pourrait esquisser de règles
générales à ce sujet, vu que cette poursuite sans plainte fut
sujette à des fluctuations d'après les endroits et les époques.
Remarquons seulement qu'elle s'exerça toujours lorqu'une
victime, par peur de représailles, n'osait se plaindre en justice
ou quand, après avoir formulés a plainte, l'accusateur renon-
çait à poursuivre lui même l'action judiciaire : alors l'autorité
publique reprenait la place du plaignant (3).
Cette poursuite d'office était ordinairement exercée par
l'officier criminel, parfois par un membre du magistrat com-
munal (4) ; à Liège, elle était menée concurremment par le
grand-maïeur et par les juges statutaires, vu qu'elle tendait
généralement à faire appliquer outre la peine légale la peine
statutaire, c'est-à-dire des voyages.
En cas de flagrant délit, ni la procédure accusatoire, ni la
poursuite d'office ne venaient proprement en ligne de compte,
puisque le coupable devait être arrêté sur le champ et livré
aux autorités.
Avant de commencer l'action judiciaire proprement dite,
le justicier était tenu à prendre une information prélimi-
naire, du moins lorsque le coupable n'avait pas été saisi
en flagrant délit ou lorsqu'un accusateur privé n'avait pas
consenti à se mettre en prison, tout comme celui qu'il avait
fait appréhender. Le justicier devait donc s'assurer de la réa-
(i) Cfr Statuts de la Cité de Liège (i328),art. 8 : « soit que la partie
blesciée se plainde ou non ».
(2) Cfr Nouveau privilège de Maestricht (1428), art. 1-2.
(3) Cfr Paix de S. Jacques de Liège (1487), XXII, 8. — S'il arri-
vait en fait de violation de domicile qu'il n'y avait pas plainte
ou que le plaignant n'ose poursuivre sa plainte, le coupable doit
néanmoins payer le voyage d'outremer fixé. — Maestricht, Statuts de
1380, art. 2 : « ende der clegher en wille niet vortvarcu so mach der
hère vortvaren mitter claight ».
(4) A Bruges, le bourgmestre de la commune (buytenburgemees-
ter) était spécialement chargé de poursuivre d'office les coupables
de rapt de jeunes filles. Cfr Keuve de 1304 ,art. 69.
Il8 CHAPITRE IV
lité du fait ou de l'importance de la rumeur publique à ce
sujet ; il examinait si, à défaut de dénonciation, le délit était
assez grave pour justifier de sa part une poursuite d'office.
Cette information préliminaire pouvait revêtir la forme d'une
véritable enquête avec descente sur les lieux, visite des bles-
sés et interrogatoire des témoins (i). Mais dans ce cas, comme
garantie des libertés communales, il devait se faire assister
d'échevins ou de membres du magistrat électif. En effet,
d'après la keure de Bruges de 1281 (art. 1), l'écoutête devait
être assisté de deux échevins pendant qu'il procédait à l'examen
d'un blessé et à la réception des témoignages concernant le
coupable. En cas de mort à la suite de blessures, la 3e Keure
de Gand de 1296 (art. 31) prescrivait que le bailli et sept
échevins devaient examiner le cadavre pour déterminer la
nature de la blessure ; si le blessé survit, il est obligé de
dénoncer, dans les neuf jours, le coupable, le lieu du fait et la
nature de l'arme dont il a été frappé ; il doit se faire examiner
dans les trois jours par le bailli et trois échevins ; s'il n'est
pas en état de parler, ses parents sont autorisés à donner ces
indications.
A Maestricht. un vo)^age à Saint- Jacques atteignait l'auteur
d'une plaie ouverte ; celle-ci devait être constatée par quatre
ou deux jurés avec chirurgien ; si dans leur rapport présenté
sous serment au conseil les jurés ne jugent pas la blessure si
grave, le coupable ne doit faire que le voyage de Rocama-
dour (2). A Saint-Trond, les injures adressées à une femme
(1) « Betaelen de kosten die de geswoorne . . . met huerlieden
kiiape gedaen ende verteert hadden tôt Waelhern int examineeren
van de getuygen ». Poui^ET, Corpor. commun., p. 416.
(2) Maestricht. «■ So wie den anderen laem sleit of stieckt, of an-
ders in eniger wys leemt, dat der scepen wyst voer leemde... ».
Statuts de Maestricht, 1380, art. 9. — « Die den anderen -\vondt, stieckt
of sleit mit metse of mit swerde of mit anderen wopen, de sal der
par tien mit eynen weghe tsent Jacob in Glialissien beteren, also vêle
dar toe ghedaen, alst gheclaight is, dat vier of twe gesworen mitten
ertsitter solen ghaen totten gequetsden om te besien die quetsinghe
ende wonden, omme te weten oft open wonden is, dar eyn weegh tsent
Jacob toegehoere; ende dat solen die geswornen over dragen inden
raet op bonnen eydt. . . ». Ib., art. 9. — Tournai. Sentence du conné-
table de France, 11 mai 1386 : « Et se péril de mort et d'afîolure est
mis avant par raport de mires sermentez à la dite ville, au regard
et veue d'un des prévôtz et de deux jurez de la dite ville, qui, après
ledit péril raporté conjurront par foy et serment ledit blécié ».
DE NÉDONCHEL, Ane. lois crim., p. 50.
PROCÉDURE PARTICULIERE DES TRIBUNAUX ORDINAIRES 119
furent punies différemment suivant leur degré d'injustice. Une
enquête y fut établie pour rechercher si l'injuriée était réelle-
ment honorable ou si sa conduite ne rendait pas ces paroles
complètement justifiées (i).
20 Procédure secrète ou inquisitoriale ; franches vérités et
traques de polices. — Il était souvent difficile de découvrir le
coupable avec les seuls moyens de l'accusation, de la dénon-
ciation ou de la sommation. Eu égard au grand nombre de
crimes qui restaient ainsi impunis, on dut recourir à des
moyens extraordinaires qui, tout en étant dangereux pour les
libertés populaires, avaient du moins l'avantage d'être plus
efficaces pour la répression de certains délits.
Le justicier procédait par voie d'enquête lorsque la dénon-
ciation faisait défaut, soit parce que la victime ne connaissait
pas son adversaire, soit parce qu'elle le craignait à cause de la
grande inégalité de condition.
Introduite an concile de Latran de 121 6 et appliquée peu
à peu dans les cours séculières, cette procédure inquisitoriale
s'inspirait des principes suivants. Il existe un crime dont on
ne connaît pas l'auteur. Pour rechercher celui-ci, on ne trouve
ni accusateur, ni dénonciateur ou du moins celui-ci affirme
sincèrement ne pas le connaître, ni même des soupçons légers.
Il faut donc recourir à un moyen extraordinaire, à savoir à la
procédure écrite : on recueille des témoignages spontanés au
cours desquelles l'officier ne peut désigner personne comme
étant le coupable. C'est seulement quand l'enquête aboutit,
qu'il y a réellement un accusé ; celui-ci n'apprend l'existence
de la procédure que par le décret de prise de corps dont il est
l'objet ; il a le droit de se défendre ou au besoin de se faire
aider de « parliers » ou avocats. S'il n'établit pas suffisamment
son innocence de cette façon, on lui arrache l'aveu au moyen
de la torture.
Les bourgmestres et les jurés assistaient aux enquêtes con-
cernant les bourgeois ; c'était une marque de liberté dont on
jouissait dans la cité de Liège. Cette intervention constituait
la franchise.
En somme, il semble permis de dire qu'on recourut à la
procédure inquisitoriale comme à un moyen extraordinaire,
(1) Saint-Trond. Statuts de 1366, art. 13, STRAVEN, Op. cit., t. I,
P- 73-
120 CHAPITRE IV
seul capable en l'occurrence de faire découvrir le coupable.
A côté de cette procédure accusatoire et inquisitoriale
menée pour un crime particulier, nous trouvons aussi, presque
généralement établies dans les communes, des enquêtes géné-
rales et périodiques, connues sous le nom de communes , coies
ou franches vérités (gemeyne, slille ou vrije waarheden). Elles
étaient menées par le justicier, aidé des magistrats communaux,
dans le double but de découvrir soit les délits en général, soit
quelques délits en particulier et de poursuivre ceux dont il
avait reçu la révélation.
Telles que nous les trouvons généralement établies au
moyen âge et même à l'époque moderne, ces enquêtes
générales sont dues à l'influence de la pratique ecclésiastique
sur les anciens placita légitima de l'époque franque. Dès le
haut moyen âge, en effet, l'évêque avait coutume de réunir
les fidèles dans leur église et, après avoir désigné quelques-
uns des plus honorables d'entre eux, il leur faisait jurer de
dénoncer les crimes et les abus qui relevaient de sa compé-
tence (i). La personne dénoncée devait se purger de l'accusa-
tion par le serment avec conjurateurs ou par le jugement de
Dieu. A côté de ces assemblées, nous voyons le comte tenir
trois fois par an, pour toutes sortes d'affaires, des réunions
générales ; des accusations privées y surgissaient quelquefois,
au sujet desquelles un procès s'établissait avec le système de
preuves habituelles aux Germains. L'enquête, qui formait le
fond de la pratique ecclésiastique, pénétra dans la procédure
des placita et y remplaça le système de l'accusation privée.
Le jour et le lieu ayant été fixés et annoncés le dimanche
précédent à l'église paroissiale, tous les hommes d'un certain
âge, ordinairement de 16 à 60 ans, étaient obligé de se réunir
devant l'officier seigneurial et un certain nombre d'échevins,
dans le but d'être questionnés au sujet des crimes et des infrac-
tions dont ils avaient connaissance. Un des objets principaux
de ces enquêtes était généralement de rechercher les gens
taxés d'inutiles (2) ; la peine qu'on imposait à ceux-ci con-
sistait ordinairement, nous le savons, en bannissements ou en
(1) Pour l'origine de cette institution voir, par exemple, A. M.
KoENiGER, Die Sendgerichte in Deutschland, Tome I. Munich, 1907
et Revue d'hist. ecclés., 1908, t. IX, p. 103-104.
(2) Les coutumes de Courtrai nous ont conservé ainsi deux séries
de questions, l'une pour la ville, l'autre pour le plat pays, que l'on
PROCEDURE PARTICULIÈRE DES TRIBUNAUX l [RES 121
pèlerinages. Les magistrats recueillaient secrètement les déposi-
tions et en dressaient par écrit procès-verbal qui servait alors de
dénonciation ; l'accusé était cité pour s'entendre exposer les
faits mis à sa charge et au sujet desquels il pouvait d'ailleurs
se défendre avec les moyens ordinaires.
Les « coies vérités » de Flandre et de Brabant avaient déjà,
aux XIIe et XIIIe siècles, le caractère d'une institution de police,
qui s'accentua de plus en plus dans la suite ; au pays de
Liège d'ailleurs nous trouvons, dès le début du xve siècle,
leur correspondant dans les traques de police qui se faisaient
régulièrement pour rechercher et punir les « huriers », « gens
de mâle famé». Pour sauvegarder les droits des bourgeois on
y avait admis qu'au tribunal les maîtres et jurés siégeraient
en nombre égal à côté des échevins.
Les franches vérités étaient par leur nature odieuses aux
bourgeois ; aussi il n'est pas rare de voir des groupes de
villages s'en racheter au moyen d'une somme d'argent versée
au seigneur (i). Les échevins de Gand exprimaient bien
le sentiment du peuple, lorsqu'en repoussant les prétentions
de Gui de Dampierre ils déclaraient : « La coie vérité est
encontre Dieu, encontre le droit commun, encontre les usages
de la ville ; elle est de nature à perdre la commune et elle met
en péril nos personnes et nos biens » (2).
III. ARRESTATION ET EMPRISONNEMENT PRÉVENTIFS
« La prison est mise sus pour garder, non pour punir »,
disait Josse de Damhoudere. En effet, s'assurer de la personne
du délinquant, de peur qu'il n'échappe à une peine afflictive
ou à une amende légale, telle est bien la conception du
moyen âge touchant l'arrestation et l'emprisonnement pré-
ventifs.
posait dans ces franches vérités. « Dit zyn de vraghene die men
jaerliex gliecostnmeert es te vraghene van den duerghinghe waer
rede » « Yraghen van der duerghinghe waerhede buten voor myns
gheduchten heeren mannen. . . ». Coutumes de Flandre; Quartier de
Gand, t. XII Ville de Courtrai, éd. V. IjmburG-Stirum.
(1) Cfr WARN] Op. cit., t. III. p. 349.
(2) Cfr LAMEERE, Les « connu ■ do mnd
(Discours de rentrée), La Belgi^' ire, p. 1521 seq. Bruxelles,
122 CHAPITRE IV
On conçoit qu'en cas de flagrant délit, surtout s'il s'agissait
d'un crime grave, le coupable fut arrêté sur-le-champ ; tout le
monde pouvait l'arrêter, quitte à le remettre dans les
vingt-quatre heures aux mains de la justice. Dans certains cas
l'obligation existait de secourir la justice dans l'arrestation.
A Saint-Trond, le bourgeois qui, la nuit, n'aidait pas les valets
de justice à s'emparer d'un coupable était passible d'un voyage
à Rocamadour (i) A Liège, chacun pouvait arrêter le malfai-
teur non seulement au moment même où il perpétrait son
crime, mais aussi dans sa fuite. Dans toute cette principauté
les homicides se trouvant dans la chasse du seigneur pou-
vaient toujours être arrêtés.
Le droit d'asile cependant continuait, comme de tout temps,
à protéger les coupables qui s'étaient réfugiés dans des endroits
sacrés. Le droit liégeois avait excepté de ce privilège les
meurtriers publics, les dévastateurs des champs (deftofiulatores
agrorum) et ceux qui après avoir quitté le lieu d'asile pour
commettre un second crime s'y étaient réfugiés de nouveau.
En l'occurrence, le justicier séculier demandait à l'évêque
l'autorisation de saisir le criminel.
En dehors des cas mentionnés plus haut, l'arrestation ne
pouvait être opérée avant qu'une information signée eût été
présentée par l'officier criminel aux échevins et que ceux-ci
eussent donné un décret de prise de corps. Cette précaution
était déjà contenue en terme dans la charte liégeoise de 1198
(n° 14) : « Nullus civis débet capi vel teneri sine judicio
scabinorum ». La charte de Gand de 1296 (nos 12) n'expri-
mait pas autre chose.
Lorsque le coupable avait été arrêté et que son crime n'en-
traînait pas de peine afflictive, il pouvait être mis en liberté
provisoire, à condition de verser une caution ou d'être réputé
solvable jusqu'à concurrence de l'amende présumée.
L'emprisonnement préventif ne pouvait se prolonger : le
justicier était forcé d'interroger le prisonnier, de commencer
l'action dans les trois jours, ensuite de s'occuper de
son cas d'audience à audience. Si la procédure n'avait pas
commencé au temps prescrit, le prévenu avait selon plusieurs
coutumes vingt-quatre heures de liberté, ce qui souvent lui
permettait de gagner le large.
(1) Ordonnance des seigneurs et de la ville, du 13 août 1425. Nach-
tegael, n° 24, Straven, Op. cit., t. I, p. 262.
PROCÉDURE PARTICULIÈRE DES TRIBUNAUX ORDINAIRES 123
Il était défendu de transporter des coupables arrêtés en
dehors du territoire de la commune. On sait avec quelle ardeur
les Brabançons tenaient au privilège que leur avait accordé la
Joyeuse-Entrée de Wenceslas, en vertu duquel aucun indi-
vidu arrêté en Brabant ne pouvait être transporté en dehors
du duché. Au reste l'extradition faisait l'objet de traités réci-
proques entre princes ou villes ; elle était généralement
demandée par écrit ou par un envoyé spécial.
IV. CITATION, COMPARUTION OU CONTUMACE
Lorsqu'un accusé n'avait pas été arrêté préventivement ou
qu'il avait été remis en liberté provisoire, il devait être l'objet
d'une citation si l'action était intentée contre lui aussi bien
par un accusateur privé que par l'officier criminel sur dénon-
ciation ou d'office.
La citation devait être faite à la personne elle-même ou du
moins dans sa maison ; si le prévenu habitait en dehors de la
juridiction, elle se donnait dans l'église de son domicile, où
l'on avait coutume d'annoncer les séances ; s'il n'avait pas de
domicile fixe, l'assignation était faite au local de la vier-
schaer. D'après l'ancien droit liégeois, elle ne pouvait
s'adresser à une personne à cheval (i).
Qui était chargé de faire la citation ? Il importe de faire une
distinction : d'après les documents les plus anciens, lors-
qu'il s'agissait d'un délit punissable d'une simple amende,
l'assignation était faite par l'officier criminel ou par son
lieutenant; si le crime était capital, un certain nombre d'éche-
vins ou de magistrats électifs devaient accompagner le
justicier chargé de cette formalité. Plus tard nous voyons les
accusés généralement cités par les sergents de justice ;
d'après le statut échevinal de Gand de 1228 (art. 4), le
plaignant peut lui-même se charger de la citation ; il la fera
cependant en compagnie de- l'amman et d'un échevin.
La façon dont le coupable était cité avait son importance
à la séance de justice. En effet, avant la mise en ingénient
l'officier criminel devait affirmer sous serment que l'assigna-
tion avait été dûment faite et dans cette déclaration il devait
se faire assister de deux témoins également assermentés ; tout
(1) Le cri du perron était une forme de citation. On s'en servait
pour faire savoir qu'un crime était commis et pour inviter le coupable
à se faire connaître et à se présenter au jour fixé.
124 CHAPITRE IV
défaut sur ce point empêchait l'action de se poursuivre.
Le prévenu devait comparaître en personne et ne pouvait
se faire remplacer par un procureur. Toutefois, comme d'après
les anciennes keures flamandes l'accusé avait à répondre
devant un pair, si celui-ci était de condition inférieure à celle
de son adversaire, il devait se faire assister d'un homme du
même rang social que ce dernier.
Quoique sévères sur l'obéissance à comparaître au jour fixé,
les anciennes ordonnances laissaient un temps assez long entre
la citation et la comparution. Le prévenu avait souvent quinze
jours pour comparaître et on devait lui renouveler jusqu'à trois
et même, en certains endroits, jusqu'à quatre fois la citation
avant de pouvoir le considérer comme étant en défaut.
Un assigné pouvait se faire excuser par un « exoniateur »,
affirmant son mandat sous serment. Comme excuses valables
on admettait généraiement la maladie, l'emprisonnement, le
voyage en dehors du pays, des dispositions de climat trop
défavorables, telles que la tempête pour les insulaires. Si le
prévenu comparaît ainsi, les délais passés, il peut se purger
des peines prononcées en cas de contumace, en affirmant sous
serment qu'il a été empêché de comparaître pour tel ou tel
motif.
La condamnation par contumace n'entraînait pas de forma-
lités spéciales : le tribunal se bornait à constater l'insuccès des
citations dûment faites et répétées, et déterminait les peines à
appliquer au délinquant ; celles-ci n'étaient jamais afflictives :
s'il s'agissait d'un crime capital, le non-comparant était banni,
et déclaré hors la loi, ses biens saisis, proportionnellement à
la grandeur du délit ; à Liège il était « forjugé » de son hon-
neur ; mais si la citation avait porté sur un délit moins grave,
on prononçait seulement des amendes pécuniaires ; en cas
d'absence, le délinquant était condamné comme convictus du
délit pour lequel il avait été assigné. On ne pouvait jamais
condamner comme contumace celui qui aurait voulu compa-
raître, mais auquel on aurait refusé un sauf conduit qui le
mettait à l'abri d'une arrestation.
Non seulement on devait citer le prévenu mais aussi le
plaignant et les témoins de l'un et l'autre (i). L'accusateur
(r) « Ad diem placiti nullus débet eitari, nisi scabini et conquerentes,
et eorurn adversarii et testes qui depone'.e debent ». Keure de Waes
(1241), art. 10. — La Keure des Qviatre Métiers (1242), art. 30, recom-
mande de donner, s'il le faut, un sauf conduit aux témoins.
PROCÉDURE PARTICULIÈRE DES rRIBUNAUX ORDINAIRES 125
qui ne comparaissait pas au jour fixé perdait ses droits et
pouvait être condamne à une amende pécuniaire. Les autorités
communales se réservaient le droit de faire comparaître en
tout temps les bourgeois, soit pour les besoins de la ville,
soit à la demande de parties plaidantes ; ces citations obli-
geaient sous peine d'amendes ou de pèlerinages (i).
V. PROCÉDURE DE SÉANCE
Le jour auquel les parties et les échevins avaient été cités,
l'officier criminel déclarait la séance ouverte, appelait l'affaire
au rôle et attirait l'attention des juges sur les débats qui
allaient s'ouvrir. La parole était donnée aux parties ou à leurs
avocats pour demander ou pour fournir des preuves de leurs
affirmations. Après ce genre de plaidoyers, d'ordinaire assez
courts, les assesseurs étaient souvent à même de se faire une
idée claire des faits exposés. Dès lors le justicier semonçait les
échevins de rendre une sentence définitive ; ceux-ci pouvaient
néanmoins différer leur jugement pour des motifs plausibles,
dont le principal était le besoin de recourir au chef-de-sens.
En principe leur sentence était sans appel ; le seul moyen de
l'attaquer était d'accuser les juges de faux jugement. Néan-
moins, nous l'avons vu, sous l'effort de la centralisation bour-
guignonne, les conseils de justice étaient parvenus à s'em-
parer dans une certaine mesure des prérogatives dont
jouissaient les cours échevinales chefs-de-sens vis-à-vis des
échevi nages subalternes.
Nous n'entrerons pas dans la description minutieuse des
séances des tribunaux communaux, dont plusieurs documents
nous ont d'ailleurs conservé les détails (2). Nous nous bor-
nerons à examiner les éléments de cette procédure essentiel-
lement orale et publique, à savoir : les preuves, la défense,
la composition qui pouvait couper court aux débats, et le
jugement.
(1) « Item een borgemeester heeft macht eencn yegelycken van
den voorschreveu iugeseteneu, tzy oui orboire van der stadt oft te
versuecke van partye, te ontbiedene, op de correctie die welcke
correctie is eenen wech naar Sint-Joos, oft XXVI stuyvers ende
XVI groot daervore ». Coutumes de Tirlemont, I, 8.
(2) Cfr Wab .. Op. ci/., t. III, document CLXYI1I, p. 62
et t. II, p. 274 ; YViu : ■•is, Belgisch Muséum, t. I, p. 44 ; RaepSAET,
Œuvres, t. V, p. 184 (Texte aux archives provinciales de Gand).
126 CHAPITRE IV
i° Les preuves. — Selon une distinction admise (i), nous
classons parmi les preuves directes : l'évidence du cas, l'aveu
de l'accusé, les témoignages, le serment de l'accusateur et
certaines présomptions ; parmi les modes de justification :
principalement le serment de l'accusé seul ou avec conjura-
teurs, et la « purge criminelle ». A côté décela nous trou-
vons parfois la preuve extraordinaire ou torture.
En cas de culpabilité évidente établie par la surprise, du
coupable en flagrant délit, le procès ne comportait pas de
nombreuses formalités. Les juges prononcent immédiatement
la peine, après y avoir été semonces par le justicier. Il en
était de même lorsque le délinquant avouait son crime. Cet
aveu de l'accusé restait, en fin de compte, la condition
sine qua non d'une condamnation ; comme il n'y avait pas
à proprement parler d'interrogatoire de l'accusé, toute la
procédure tendait à obtenir l'aveu de celui-ci. Aussi dans les
affaires obscures et dans celles où l'on ne parvenait pas à
obtenir l'aveu, on eut recours dans la suite aux moyens extra-
ordinaires, c'est-à-dire à la « question » (scherper exami-
natie).
A l'époque qui nous occupe, la preuve testimoniale, avec
laquelle se confond en quelque sorte la preuve par conjura-
teurs que nous étudierons tantôt, avait remplacé presque
complètement, en droit au moins, les anciennes preuves, telle
que le duel judiciaire, le feu, l'eau bouillante, etc. Cepen-
dant, malgré les prohibitions formulées au concile de Latran
en 1 2 1 5 , cette substitution ne se fit pas brusquement ;
elle est due plutôt à ce mouvement de réaction, à ces aspira-
tions plus intenses vers la liberté auxquelles nous devons nos
privilèges communaux. Aucune de nos anciennes chartes, en
effet, n'y attache encore de l'importance ; au contraire, le
statut de certaines communes liégeoises condamne à des pèle-
rinages les bourgeois qui par leurs agissements seraient la
cause d'un combat judiciaire (2).
Lorsque la Paix de Saint-Jacques (1487) de Liège insiste
(1) C'est celle que suit Bdm. Poui^ET, Hist. du dr. pénal dans
l'anc. duché de Brabant, p. 209 seq.
(2) I^es Statuts de Maestvicht, 1380 (art. 94), prévoient dans ce cas
un voyage à Saint- J acques de Compostelle outre une amende pécu-
niaire.
PROCÉDURE PARTICULIÈRE DES TRIBUNAUX ORDINAIRES , 2J
sur la nécessité de la preuve afin de pouvoir condamner
quelqu'un à un voyage outremer, c'est bien la preuve testi-
moniale qu'elle désigne en ordre principal : « adviseement de
fait porveu... et prové soit suffissament après aultruy,... voir
le fait bien prové et jugié » (i).
C'est à l'accusation, qu'elle soit privée ou publique, à pro-
duire en premier lieu les témoins qui sont, par ordre d'impor-
tance, d'abord les échevins ou les coremanni (2) , ensuite les
gens ordinaires qui devaient pourtant présenter certaines garan-
ties personnelles. Tantôt il est question de viri hereditali, viri
boni, boni viri ex génère suo, tantôt on exige simplement d'eux
qu'ils soient « croyables » ; (4) parfois, en cas d'adultère, ce
sont les voisins qui ont qualité pour venir témoigner. (3)
Pour quelques infractions de moindre importance, le té-
moignage d'un seul pouvait servir de base à une condam-
nation ; (5) néanmoins la règle communément admise exige
au moins deux témoins pour établir une preuve suffisante; ils
devaient comparaître en personne (6) (la Charte de Gand de
1296 (art. 119) admet cependant les dépositions écrites) et
après avoir prêté serment déposer « de visu et auditu » en
présence du prévenu, qui pouvait faire des remarques ou des
rectifications au sujet de leur déposition (7). Ils témoignaient
séparément, chacun à son tour, excepté au cas où le coupable
avait été pris en flagrant délit; alors les plaintes servant en
même temps de déposition se faisaient ensemble, par tourbe.
Le faux témoignage était très sévèrement puni ; les anciennes
(1) Paix de Saint- Jacques, XXII, 13.
(2) Cfr Keure de Punies, 10-13.
(3) « . . .ist geprueft mit twee getughen die geloiflic syn ... Statuts
de Maestricht, 1380, art. 48.
(4) « Wy een tsestsse vrouwe by syn wyf settet in syn selfs huvs...
ende het woirdet met den naghebueren claerlick vertuycht . . . die
soude der stadt ygelyck van hou eenen wech te Rutsemedou doen...».
Statuts de Jean d 'Archet (1366), pour Saint-Trond, art. 47, Sïravkn
Op. cit., t. I, p. 82.
(5) «... die boomen aft liieve die vruchteu draghen, eude daer afï
vertuecht worde met eenen ghetueghe daer op gheleyd vander par-
tien oft van heren ende stadt, verboeren sal aen die partie eenen
wechSint Jacops. . . » Saint-Trond, 16 octobre i486. 7 Residuum,
f° 97, Stravrx, Op. cit. t. II, q. 148.
(6) « ... met blyckenden aenschyn ». Costumen van Antwerpen « an-
tiquissimae », I, 8.
(7) Cfr Keure de Gand, art. 56.
128 CHAPITRE IV
keures condamnaient leurs auteurs à être mis à la merci du
seigneur ou à être marqués à la clé rouge ; quelquefois cette
peine fut remplacée par un pèlerinage soit à Rome, soit à Saint-
Jacques, soit à Vendôme (i). D'autre part, le législateur prenait
des mesures sévères pour garantir la sécurité personnelle et la
liberté des témoins; des voyages d'importance diverse attei-
gnent ceux qui menacent les autres à l'occasion d'un témoignage
rendu ou à rendre ; mais les peines sont plus lourdes au cas où
un prévenu aurait salarié quelqu'un pour aller témoigner dans
l'un ou l'autre sens. (2)
Le justicier recevait le serment des témoins mais ne pou-
vait pas intervenir à leur interrogatoire ; la charte de Malines
de 1301 lui refusait même très explicitement d'assister aux
dépositions. (3)
On peut mettre au rang des dépositions de témoins toute
preuve matérielle du délit commis et les rapports faits sous
serment par les médecins ou en général par les personnes y
ayant qualité, au sujet des blessures.
Dans certains cas il était permis de procéder sur des pré-
somptions de culpabilité, notamment lorsque la rumeur publi-
que désignait le prévenu comme réellement coupable du délit
commis. (4)
En droit, l'accusateur n'est pas admis à déposer comme
témoin ; cependant on accorde généralement une grande valeur
à sa déclaration, faite sous serment; comme nous le verrons
plus loin, cette dernière formalité avait une importance spé-
ciale, car pour se disculper de l'accusation, le prévenu devait
se faire assister de coujurateurs.
Si l'accusé n'avouait pas son crime et si les preuves n'étaient
pas concluantes contre lui, il pouvait se justifier en affirmant
(1) Lierre 1446. Cfr Correctieboeck, n0B 381, 382, 383.
(2) Cfr Statuts de Liège (1328), art. 48 ; de Maestricht (1380), art.
49-50 ; Keure pénale de Saint-Trond (1419), art. 13, Strayen, Op.
cit. t. I, 195 ; PoUEEET, Hist. dr. pén. Brab., p. 294.
(3) Charte de Jean II, duc de Brabant et de Jean Berthout, sei-
gneur de Malines. 13 décembre 1301. Cfr Van DorEN, Inventaire des
archives de la ville de Malines, t. I, p. 15.
(4) La Keure pénale de Saint Trond (1419) condamne à un voyage
à Chypre le coupable de violation de domicile préméditée, si le fait
est prouvé. Cependant « oft hier aff gheen waerheyt en es, zoe zal
men in desen gaen, nae der meesten famen en de aldermeest den
rechte »., art 15, Straven, Op. cit., t. I, :
PROCÉDURE PARTICULIÈRE DES TRIBUNAUX ORDINAIR1 ', I ! ,
son innocence sur la foi du serment; en maintes occasions il
était tenu pour innocent notamment, lorsque son accusateur
n'avait pas voulu formuler sa plainte dans la même forme ;
cependant la plupart du temps, et surtout si l'accusateur avait
prêté serment, on exigeait du prévenu qu'il fournît dans un
délai assez rapproché un certain nombre de « conjurateurs »,
qui affirmassent sous serment son honorabilité et sa crédibilité.
Comme pour les témoins à charge, on requérait qu'ils fussent
des gens honorables (viri boni, goede lieden) (i). Au pays de
Liège, cette justification portait le nom de « loy di septenne »,
parce que le prévenu était supposé être accompagné de six
conjurateurs ; en Flandre elle semble constituer un progrès
immédiat sur les anciennes épreuves par le feu. (2)
Un mode de justification plus récent et appliqué seulement
en certains endroits était la « purge criminelle». Un homme se
(1) Saint-Trond, iG oct. i486 : « Ende dat een yegelyck man ende
wyff, die van alsulcken poenten ende saickenals voerscreven is betegen
ende beclaecht worcle van enigher partien of van heren ende stadt
sonder eedt daer op te doene, die sal daer afï syn onsckont doen met
zyne eeniger liant, binnen den derden dage nae dat hem in der manie-
ren voersvreven ghecondieht zyn sal, oft verboeren... eenen wech
Sint Jacops... ». « Een yegelyck... die van alsulcker saiekeu
ende poenten als voerscreven is, betegen wprde van eniger partien
ende met honnen eede daerop ghedaen ten heiligen beclaecht,...
sal daer aff syn onschout doen ten heyligen zyn derdemeer, (c'est-à-
dire avec deux conjurateurs) binnen den derden dage... oft verboe-
ren... ». 7 Residuum, f° 97, Stravex, Op. cit., t. II, p. 148.
(2) La comparaison de la première et de la seconde keure de
Poperinghe montre clairement ce progrès. La première keure de
1208, confirmant le privilège de :_ 11 47, de l'abbé de S. Bertin,
(art. 8), porte : « Si quis aUcui homicidium imposuerit, et ille super
quem impositum fuerit, in curia ausus fuerit compavere, si cora eum
liberaverit, liber erit. Sin autem, judicium ignitum subibit, quod si
inciderit, subire débet sententiam capitulem, si vero non inciderit,
liber erit ». Cet article est remplacé dans la seconde keure de
par celui-ci : « Si alicui impositum fuerit homicidium et ille a
fuerit comparere in jure, si quiuque de choremannis eum lito .
rint, liber erit, si vero quinque illum cognoverint illius homicicUi
esse reum, subire débet sententiam a. 'Juod si novem
remanni onmes sub sacramento suo dixcrint, se nescire, utrum
sit vel non, et homicidium nihiloniinus fuerit manifestum, purgabit
se accusatus suo et aliorum octo legitimorum hominum juraiiK 1
si omnes bene juraverint liberabitur ; si vero aliquis eorum maie
juraverit, .eeusatus eapite puni
9
130 CHAPITRE IV
voyait accusé d'un crime par la rumeur publique sans qu'une
action judiciaire fût intentée contre lui ? Pour rétablir son
honneur, il provoquait une instruction à sa charge et, à cet
effet, se constituait prisonnier; ce mode de justification n'était
admis en principe que si l'intéressé était à même de fournir des
preuves peu équivoques de son innocence.
Nous n'avons pas trouvé d'exemples de prévenus qui furent
condamnés à des pèlerinages, après avoir été préalablement
soumis à la « question », c'est-à-dire à la torture. On explique
cette lacune par le fait que, d'une part, les textes de lois ou
de statuts communaux sont très sobres au chapitre de la tor-
ture et que, d'autre part, les registres criminels et les comptes
communaux qui nous sont parvenus, appartiennent précisé-
ment aux communes où l'emploi de cette procédure extraor-
dinaire restait, à cette époque du moins, dans des limites
relativement restreintes.
Ce sont les auteurs de droit criminel du XVIe siècle, tels que
Josse de Damhoudere pour la Flandre et le Brabant, et André
Perneda pour le pays de Liège, qui nous donnent une idée
exacte de ce mode de preuve. Remarquons cependant qu'à
leur époque, il avait acquis un développement beaucoup plus
considérable ; ça et là pourtant ils nous parlent d' « usages
anciens ».
La torture n'est pas une peine ; elle est un mo)Ten extra-
ordinaire et violent auquel le justicier avait recours quand les
faits mis à la charge de l'accusé n'étaient pas suffisamment
prouvés ; dans ce cas, en effet, on arrachait à celui-ci l'aveu
de son crime. Le tribunal de 1 Inquisition, qui usait volontiers
de la « question » et semble avoir fortement influencé les tri-
bunaux civils dans cette pratique, y voyait en plus un moyen
de convertir les hérétiques.
En principe, pour les cas de culpabilité insuffisamment
prouvée, on admettait la nécessité de l'aveu libre de l'accusé
pour pouvoir lui infliger une peine corporelle grave. De là
deux conséquences : d'une part, l'aveu du crime fait par l'ac-
cusé sous la pression des souffrances devait être renouvelé
dans un nouvel interrogatoire et, d'autre part, on ne mettait
à la question que ceux qui étaient accusés de crimes capitaux.
Telle semble avoir été la pratique ancienne, notamment
PROCÉDURE PARTICULIÈRE DES TRIBUNAUX ORDINAIR] 131
au XIVe siècle ; plus tard, cependant, les cas de torture devin-
rent plus fréquents ; elle fut généralement appliquée chaque
fois qu'il s'agissait d'un fait grave. C'est au xvie siècle qu'elle
fut la plus répandue. D'autre part, à la même époque, une
certaine réglementation s'était introduite quant à son usage.
Tout d'abord il était défendu de soumettre quelqu'un à la
question, s'il n'existait pas contre lui des indices ou des pré-
somptions graves de culpabilité, jugées telles par le tribunal ;
de plus, on devait permettre à l'accusé de se défendre des
signes, capables d'amener la torture. Celle-ci ne pouvait
jamais être réitérée à moins que des indices nouveaux ne
fussent survenus ou qu'on ne voulut arracher à l'accusé le nom
de ses complices.
Enfin la question ne pouvait être appliquée à un prévenu
qu'après une information et une décision formelle de la part
des échevins; exceptionnellement le justicier seul était capable
de la faire employer ; dans de nombreux cas les magistrats
électifs avaient le droit d'y assister pour sauvegarder les
intérêts de la communauté.
Tels étaient les principes admis en droit touchant la torture.
L'examen des faits prouve malheureusement qu'il est peu de
points relatifs à la justice criminelle, où l'on s'écarta tant du
droit que dans l'emploi de la torture.
20 La défense. — Le prévenu pouvait se défendre des accu-
sations et des preuves portées contre lui, et, généralement, on
lui laissait quelques jours pour préparer sa défense ; libre à lui
de se fier en cela à ses propres moyens ou de demander au
tribunal la faculté de se faire assister d'un parlier (prolocutor \
emparleur}voirspreker)} qu'il choisissait d'ailleurs lui-même (i);
il pouvait même en demander un second, mais en laissant le
choix de celui-ci au tribunal lui-même. Le prévenu et son
défenseur ne pouvaient parler sans la permission de l'officier
criminel. Cette permission était aussi nécessaire au plaignant
et à son avocat (2).
(1) « Si quis advoeatum postulaverit, eligat quem velit ». Keure
de Diest (1229).
(2) « Homo citatus débet petere prolocutorem, vel pro se loqui si
velit, accepta prius licentia a ballivo, ita quod si aliquis non accepta
prins licentia loqueretnr, prolocutor vel abus vel ipsam vierscaruiam
perturbaret, quibbet pro se daret ballivo XII denarios, similiter
fiât de actore boc est de conquerente ». Keure d'Eccloo (1
132 CHAPITRE IV
3° La composition. — D'après le droit germanique, nous
l'avons vu, les crimes contre les personnes pouvaient se rache-
ter au moyen d'une somme d'argent, le wehrgeli, payé à la
victime ou à sa famille, et le fredus, dû au seigneur, pour
trouble causé à la paix publique. A cette dernière conception
se rattache intimement l'habitude de la composition crimi-
nelle ; celle-ci consistait à verser une certaine somme entre
les mains de l'officier seigneurial, moyennant laquelle les
poursuites étaient arrêtées ou les effets de la condamnation
annulés, pourvu toutefois que la partie lésée fût satisfaite.
Comme cet accord survenait ordinairement avant la sentence
des échevins, nous avons placé ces notions ici, avant celles
concernant le jugement.
Cette composition constituait une source de revenus consi-
dérable ; aussi les officiers criminels en faisaient- ils large-
ment usage à une époque où l'administration de la justice
au nom du seigneur était devenue une véritable affaire fiscale.
Pour tous les délits qui ne présentaient pas un caractère
de gravité spéciale, et du moment que la partie lésée était
satisfaite, le justicier cherchait à retirer un avantage matériel de
l'arrangement plutôt qu'à faire prononcer contre le prévenu
une peine dont personne n'aurait profité. C'était le cas pour
les pèlerinages : au lieu de laisser condamner le coupable à
faire un voyage, le justicier lui permettait de faire son appoin-
tement.
Certains comptes d'officiers criminels nous ont gardé les
traces des préoccupations matérielles de ceux-ci : ici c'est un
maïeur qui déclare : « J'étais inquiet, que si un pèlerinage était
imposé à l'accusé, celui-ci l'aurait exécuté (sans le racheter) ;
je lui laissais donc faire son appointement » (i) ; tel autre
trouve que le duc de Brabant n'a pas grand avantage à voir
des gens partir en pèlerinage ou quitter le duché et il conclut
dans le même sens (2).
(1) « Ende die meyer oec anest hadde dat lii den wech, op hem
gewoimen met den redite, dat lii dan den wech gegaen soude hebben,
ende liet hem syne pointinge maken. . . ». Comptes des officiers crimi-
nels, cités par Poui.ivE'f, Hist. dr. pév. Brab., p. 129. (Maïeurs de
Lubbeek).
(2) « De meyer aensaeh dat... onsen genede heer van Brabane
metten bedevairden niet geholpen en ware, ende tgelt daer vort
beter genomen ware dan weghen ofte Brabant daer vore gelaen ....
liet hem syne pointinge maken ». Poui^ET, Op. cit., p. 130, note 1.
PROCÉDURE PARTICULIÈRH DES TRIBUNAUX ORDINAIRES 133
Mais il importe de noter que cette composition avec le
seigneur peut consister elle-même en un pèlerinage qui, dès
lors, semble rachetable de sa nature (i).
4. Le jugement. — Lorsque l'accusation et la défense avaient
produit leurs arguments, le justicier semonçait les juges pour
prononcer la sentence. Souvent les échevins y donnaient
suite sur le champ ; ils avaient pourtant le droit de tenir la
cause en délibéré, soit pour réfléchir par eux-mêmes, soit pour
recourir au chef-de-sens, si l'insuffisance de leurs connaissances
juridiques ou la nature de l'affaire le nécessitait. A cet effet,
on leur accordait un délai pouvant se prolonger jusqu'à trois
ou quatre quinzaines (2) ; ce terme passé ils pouvaient, selon
d'anciennes keures, être enfermés à la maison échevinale jus-
qu'à ce qu'ils eussent porté une sentence; il arrivait aussi que
leur refus était considéré comme un déni de justice et alors
ils se voyaient atteints d'amende ou même de destitution.
Un des échevins préparait communément le texte de la
sentence à prononcer et s'efforçait d'obtenir l'accord de ses
collègues ; ensuite on votait et le jugement était prononcé à la
majorité de? voix (3). Dans la pratique ancienne, cette sen-
tence ne mentionnait pas les motifs qui l'avaient inspirée ;
plus tard cependant, surtout lorsque les jugements furent
consignés par écrit, les motifs y étaient clairement énoncés à
côté de la peine infligée (4).
(r) Namur 23 juin 1405. « Pierot le porteur, uug jour passé, avoit
bleschié et navré Authomie Donneur, le proeureur, duquelle méfiait
ledit Pierotte s'estoit accordé audit Franckart, mayeur, pour le droit
de monseigneur le conte, a une voye de S. Jacques en Galisce ».
Répertoire Lodevoet, n° 131 .
(2) « Scabiui a judice commontti ad très qumdcuas sententias
suas profèrent, si quatuor vel plures interfuerint ; quod si non potue-
riut ad quartam quindenam sub juramento ipsoruiu judicabunt ;
si vero ad quartam quindenam non dixeriut, singuli solvent qua-
draginta solido;; ». Keure de Diest (1229), Cod. dipl., t. I, p, 631.
(3) Namur, .4 mai 1388. Un certain Pierlot avait injurié un des
élus du gouvernement de l'hôpital : « a la semonce du maire et a
l'cusingment des dis eschevius, tous d'une siette et accord, fu di et
jugie que ledit Pierlot payerait a l'honneur dudit Ghiselin. et en • n
nom une voye à Nostre Damme de Roehemadeur . . . ». Répertoire
Lodevoet, u° 125.
(4) Anvers 23 novembre 1411 : Jau Matthyszone, overmids dat
hi dicke ende menichwerf ghedaen heeft tiegen de heerlieheit ende
tiegeu des stad recht... soc sal hi trecken te Roeme ». Clementyn-
qoec, f° 100, Antw. Archievenblad, t. XXVI, p. iox.
134 CHAPITRE IV
Le jugement était prononcé ordinairement en public et
en présence de l'accusé ; toutefois il n'est pas rare de ren-
contrer des cas où les échevins chargent les sergents ou valets
d'aller notifier à l'intéressé la sentence prononcée contre lui
et de leur rapporter l'assurance que cette notification avait été
dûment faite ( i ) .
On peut se poser la question sur quelles bases s'appuyaient
les juges pour appliquer tel pèlerinage à l'expiation de tel
délit ? Nous avons vu précédemment que la forme la plus
ancienne de la réparation est sa fixation de commun accord
entre les parties adverses ; il en résulte que l'importance du
pèlerinage a été, le plus souvent, débattue entre le coupable
et sa victime, accompagnés tous deux de leur famille. Lorsque
des différends furent soumis à des apaisenrs désignés d'office,
ou lorsque les délits furent portés devant le tribunal des éche-
vins, le coupable devait exécuter le voyage moyennant lequel
la partie adverse se déclarait satisfaite ou que l'autorité judiciaire
jugeait proportionné à l'importance de l'infraction. Toutefois,
il se fît que pour donner plus d'uniformité et plus d'équité à la
jurisprudence communale, les législateurs de certains endroits
dressèrent un véritable tarif des diverses réparations à effectuer
par le coupable; les statuts locaux des communes liégeoises (2)
et ceux de certaines autres villes nous en fournissent la preuve ;
ailleurs, les échevins se mirent à recorder les sentences pro-
noncées en vue de créer une jurisprudence uniforme ; ailleurs
encore, on continua l'ancien système, c'est-à-dire on laissa à
(1) Cfr page précédente, note 3 : «... et que on le f eist savoir audit
Pierlot que ainsi estoit jugié. Ce fait, l'on envoya devers lui deux
sergans qui raportèrent incontinent li avoir fait en sa maison à Ande-
wieu, parlant à sa femme, qui avait respondu que ledit Pierlot n'y
estoit point, mais lui feroit le messaige incontinent qu'il seroit retour-
né : qui fut mis en warde. Et depuis lesdis sergans raportèrent li
avoir dit à sa personne ». Rép. Lodevoet, n° 125.
(2) Les statuts de Liège, Maestricht, Saint-Trond, Tongres, Huy
comprennent ainsi un tarif exact des pèlerinages à imposer comme
peines tant au profit de la partie lésée, qu'au profit de la commune ;
certains vont même jusqu'à établir une certaine proportion. Les
Statuts de Maestricht (1380) stipulent que si en cas de blessure un
voyage à S. Jacques est accordé au profit de la partie lésée, un voyage
à Vendôme revient à la commune ; si la partie n'obtient qu'un
voyage à Rocamadour, la commune a droit à un voyage à S. Josse.
(Art. XII).
PROCÉDURE PARTICULIÈRE DES TRIBUNAUX ORDINAIRES 135
l'appréciation des juges de fixer l'importance des pèlerinages à
imposer.
Lorsqu'on se rend compte de ces différences de législation
et de jurisprudence d'après les endroits et les époques, on
constate qu'il est impossible de déterminer, même d'une
façon approximative, les pèlerinages qu'on avait coutume d'im-
poser pour les différents délits. Il va de soi que les délits les
plus graves étaient punis par les pèlerinages les plus lointains,
comme de Constantinople, de Chypre, d'Italie, d'Espagne et
de Danemark ; mais même dans ces cas là, il n'est pas rare de
constater que, dans une même ville et à une même époque,
le même délit fut puni par des voyages d'importance diverse
et que, vice-versa, de crimes de gravité différente furent
amendés par des pèlerinages identiques. Il y a dans toute
cette jurisprudence un élément de justification qui nous
échappe et que les circonstances aggravantes ou atténuantes
de l'infraction ne semblent pas expliquer à elles seules.
En formulant leur jugement, les échevins tenaient généra-
lement compte des circonstances aggravantes pour imposer en
l'occurrence des formalités supplémentaires.
Les juges séculiers, en effet, reconnaissaient la portée des
censures canoniques que les délinquants encouraient par leur
crime. Un gantois qui avait frappé un prêtre dans l'église
Saint-Nicolas dut se rendre à N.-D. d'Avignon et s'y faire
absoudre par le grand pénitencier (i). Les statuts communaux
de Maestricht (1380) et de Saint-Trond (14 19) enjoignent
aux enfants qui maltraitent leurs parents, outre des peines
doubles prévues pour tels méfaits, d'aller à Rome demander
l'absolution aux autorités compétentes (2) ; des mesures ana-
logues sont prises contre les blasphémateurs (3). Enfin les
(1) Gand 18 avril 1354. « Voirt wyaen scepenen Philips voer-
noemcl sync pelgrimage te doene tonser vrouwe Tavengoen ende dat
hi daer te biechten gha, totten ghenen die hem penitencie gheven,
ende injongeren mach van desen feete, ende liera der af absolveren ».
Zoendinc Bouc, a0 1354, f° 9 v°, CannaERT, Op. cit., p. 93-
(2) Statuts de Maestricht (1380), art. 23. — Heure pénale de
Saint-Trond (1410), art. ^^, : « Mesdoet dut kint den vader oft moeder,
stekende, slaende, stottende oft werpende, dat sal dobbel beteringe
doen. . . ende sal dair nae porren binnen XL dagen. . . totten pona
van Rhoraen, ende van hem oft synen penitenclher goede brieve
ende ziegele bringen van absolucien. . . ». STRAVEN.Op.fiï., 1. 1, p. 201.
(3) Saint-Trond 5 avril 1445 : « ...Peter Tutelers... overmids alsulc-
ker blaspkemien ende onkerstelicker woerde wille, als hy in goiden
136 CHAPITRE IV
registres criminels de Gand nous ont gardé l'exemple d'un
coupable qui, ayant fait un faux serment au cours d'une affaire
intentée contre lui, fut condamné à faire le voyage de Tournai
pour y recevoir la pénitence canonique. (1)
En ce qui concerne les circonstances aggravantes de temps,
on applique une peine différente suivant que les délits ont été
commis le jour ou la nuit; ainsi, d'après une ordonnance du
magistrat de Saint-Trond de i486, un voyage à Saint- Jacques
de Compostelle ou un voyage à Chypre est ordonné au profit
du seigneur et de la ville, pour dommage quelconque porté
aux propriétés d'autrui, le premier, pour dommage causé
pendant le jour, le second, pour dommage causé la nuit (2).
Les pèlerinages, nous l'avons vu au début de cette étude,
pouvaient être imposés à titre de peine légale ou statutaire,
de réparation à la partie lésée, ou de pénalité surajoutée au
profit de la commune par certains statuts locaux. Comme une
infraction était censée léser divers intérêts, il arrive qu'autant
de voyages sont édictés qu'il y a d'intérêts lésés (3). Néan-
palmdagen te onsen hère God wert spraeck, ende die selve onkerste-
like woerde daerna in witten donredage weder van nuwens confir-
tneerde, dat hy trecken sal vore ende by onsen heiligen vader den
paus van Romen. .. ». Nachtegael, f° 70 v°, Straven, Op. cit., t. I,
p. 370.— Tournai. Février 1457. Cfr Corpus Inquisitonis, t. I, p. 336.
(1) Gand 18 avril 1354 : « omme de redene dat Jhan van der Piet
. . . hem selve aldus mesleede en verzwoer, so eist dat scepenen ter-
înineren ende wysen Jhan va der Piet vors. te treckene. . . te Dor-
nike aen den pénitencier. . . ». Zoendinc Bouc, a0 1354, f° 9 v°,
CannaerT, Op. cit., p. 92.
(2) Saint-Trond, 16 octobre i486, 't Residuum, f° 92, Straven,
Op. cit., t. II, p. 148.
(3) La Charte de Tongres de 1502 (art. 30) condamne celui qui
aide un prisonnier à s'évader, à un voyage à Saint-Jacques au profit
du seigneur, à un même voyage au profit de la ville et à autant de
tels voyages qu'il y a de juges présents. — Tournai. Sentence du con-
nétable de France (11 mai 1386) «et avec ce, quant péril de mort ou de
méhaing est mis avant par conjuration comme dit est, le délinquant
oultre et avec l'amende pécnnielle par avant déclarée est tenue de
faire un pèlerinage pour chascune personne qu'il a navrée. . . ». DE
Nédonchei,, Anciennes lois crim., p. 51. — Le 2 août 1434, les éche-
vins de Saint-Trond comdamnent pour injures contre le magistrat,
PROCÉDURE PARTICULIÈRE DES TRIBUNAUX ORDINAIRES Itf
moins à côté d'un pèlerinage imposé pour l'un des motifs
mentionnés, les juges prononcent le plus souvent, en ordre
principal ou accessoire, d'autre peines en raison des autres
intérêts lésés. Ainsi nous constatons qu'un condamné à te]
pèlerinage au profit de la partie lésée, doit payer une amende
pécuniaire au seigneur et en outre subir un bannissement dont
la durée est proportionnée à la gravité du délit.
N'oublions pas qu'en fait de réparation à la victime, le
pèlerinage n'étant souvent censé réparer que le dommage moral
causé à celle-ci (i), une satisfaction lui est accordée pour le
dommage matériel porté tant à sa personne qu'à ses biens. (2)
Willem van Wailhoven à 16 voyages en Chypre et 16 voyagea à Saint -
Jacques, c'est-à-dire à autant de voyages que le magistrat comptait
de membres. Cfr Stravkx, Op. cit., t. I, p. 306. Il va de soi que seul
le rachat rendait possible l'exécution de telles sentences.
(1) Ceux qui se rendaient coupables d'injures aux magistrats, se
voyaient ordinairement contraints à une double réparation morale,
c'est-à-dire « à pryer merchi au seigneur et a le loy et en après de faire
une pèlerinage ». Ypres, xive siècle. Cfr de PEIvSMAEKER, Op. cit.,
n° 968, p. 338 et passim.
(2) Anvers 23 novembre 1411. « Goesem van der Lucht, overmids
dat hi eenen portere van Antwerpen gheslagen heeft in scandeu ende
confusen vander porterien van Antwerpen, soe sal hi trecken. . .
tonser Vrouwen te Weertsborch. . . ende occ den man beteren syn
smerte ». Clementynbocc , f° 100, Antw. Archievenblad, t. XXVI,
p. 100-101. — Id. même date : « Gheert de Wilde. . . de goede liede
van der Heze tonrechte ghescut... tsente Eewouts in Elsateu. . .
niet weder. . . comen hi en hebbe den liede weder ghegeven de XXXII
cronen die hi hen tonrechte afghenomen heeft ende den Heere oec
alsoe ». Clementynboec, i° 100, Antw. Arch., t. XXVI, p. 97. — Saint-
Trond 16 octobre i486 : «... die sal aen die partie eenen wech Suit
Jacops... verbueren ende dobbel scaede bctaelen ». 7 Residuuni, f° 97,
STRAVEN, Op. ci!., t. II, p. 148.
CHAPITRE V
LES LIEUX DE PELERINAGE
D'après les registres aux sentences pénales qui existent
encore dans les archives de plusieurs de nos villes, les tribu-
naux des communes ont imposé aux délinquants des pèleri-
nages à entreprendre dans les régions les plus diverses de
l'Europe et même de l'Asie.
Nous groupons ici par contrées les noms de lieux auxquels
des coupables étaient envoyés en pèlerinage, en faisant suivre
chacun d'eux du nom de la commune où ces voyages étaient
appliqués (i).
PAYS-BAS :
N.-D. à Aardenburg [i].
N.-D. à Anvers.
N.-D. à Aerschot
N.-D. à AxoST.
N.-D. à AeSEMBERGH [2].
Sainte-Croix à Assche [3].
Bruynekruys à BaTTEE.
S. Daniel à BEirvei.de [4].
N.-D. à BoiS-EE-Duc [5].
S. Antoine à BorstbekE [
Gand, Audenarde, Alost,
Saùit-Trond, Maestricht,
Lierre, Looz, Matines,
Louvain.
Lierre.
Audenarde, Lierre.
Matines.
Gand, Alost, Lierre, Matines.
Gand, Alost.
Matines.
Gand, Alost, Ter inonde.
Bruxelles, Malines Lierre, Vil-
vorde, Louvain.
Gand, Alost.
(1) Les chiffres, marqués en regard de beaucoup de noms de lieux,
permettent d'identifier la plupart des endroits de pèlerinages mention-
nés dans les listes de rachat (Voir annexes C) ; mais la nomenclature
donnée ici est incomplète, parce que certains noms qui se rencontrent
dans ces derniers documents, n'ont pu être identifiés.
LES LILUX DE PÈLERINAGE
139
S. Anne à BoTTELAERE [7].
S. Sang à Boxtkl.
N.-D. du Sablon à BRUXELLES.
N.-D. de Cambron [8].
S. Wandrille près Coolscamp [9].
DrEST.
N.-D. du Cerisier à Edelaere.
Saiute-Croix à EECKEREN (Anvers [10].
S. Adalbert à'EGMOND (Hollande) [11].
N.-D. au Mur à ErEmbodegem [12].
S. Sauveur à Gand [13].
N.-D. à GoTTHEM [14].
S. Adrien à GrammonT.
N.-D. à Hal [15].
S. Sacrement à Herkënrode [16].
N.-D. à HULSTERLOO [17].
N.-D. à Lebbeke [18].
S. Hubert à LiEGE.
S. Lambert à Liège [19].
S. Servais à Maestricht [20].
S. Rombaut à MalineS [21].
N.-D. d'Hanswyck à Malines.
Mons.
Nieuporï.
S. Hermès à Renaix.
N.-D. à RuYSSELEDE [22].
SainT-Ghislaln (Hainaut) .
S. JORIS TEN DlSTEL [23].
S. Laurent à Selzaete [24]
S. Pierre à Thourout [25].
N.-D. à Ttrlemont.
Tournai [26].
S. Martin à t'TRECUT.
N.-D. à Verviers [27].
Walcourt.
S. Pierre eu WarnoySE [28].
Ypres.
Alost.
Lierre.
Tournai.
Alost.
Termonde.
Malines.
Audenarde.
Alost.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost.
Malines.
Gand, Alost, Lierre, Malines,
Louvain.
Gand, Alost.
Gand, Alost, Audenarde, Ter-
monde.
Alost.
Lierre.
Gand Alost, Audenarde.
Gand, Alost, Audenarde, Ter-
monde, Lierre, Valencien-
ues, Dinant, Malines, Lou-
vain .
Maestricht, Lùnbourg, Liège.
Lierre.
lierre, Malines.
Malines.
Tournai.
Gand, Alost.
Lierre.
Gand, Audenarde.
Gand, Alost.
Gand, Alost.
Bruxelles .
Gand, Alost, Termonde.
Lierre.
Gand, Alost.
Liège.
Alost.
Malines.
FRANCE
S. Wulfran à Abbeyille [29].
S. Adolphe en ArdenneS.
Aiguës-Mortes [30].
N.-D. à Alet [31].
Gand, Alost, Terni
Anvers.
Gand, Alost, Termonde.
Audenarde.
140
CHAPITRE V
Chef de S. Jean à Amiens [32] .
Menton de S. Jean à Amiens [33].
S. Maurille à Angers [34].
Saintes-Marie-de-la-Mer près AreES
[35].
S. Chandelle d'ARRAS [36].
S. Lazare à Avaeton [37].
N.-D. des Doms à Avignon [38].
B. Pierre de Luxembourg à Avignon.
Chartreuse de BassevittE près
Clamecy [39].
N.-D. à BESANÇON [40].
S. Michel à Bordeaux [41].
N.-D. à Boulogne [42].
S. Fiacre en Brie [43].
S. Julien en Brioude [44]
S. Géry près Cambrai [45].
N.-D. à Cambrai [46].
N.-D. à Chareepont (Noyons) [47].
N.-D. à Chartres [48].
S. Arnou près CeERMONT [49].
Chef de S.Bernard à Ctairvaux [50].
N.-D. de CtÉRY près Orléans [51].
S. Martin de Cures (Loire) [52].
S. Privât à Decise [53].
S. Bénigne à Dijon [54].
N.-D. du Finistère [55].
N.-D. de FoNTENETEE [56].
Heutes-Saint-Josse [57].
N.-D. de ta Charité s /Loire [58].
N.-D. de Liesse (Laon) [59].
N.-D. de la Treille à LiTTE [60].
S. Léonard en Limousin [61].
S. Paul à LoRMES [62].
N.-D. à Lyon.
S. Julien au Mans [63].
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
Audenarde.
Gand, Alost, Audenarde,
Termonde.
Gand, Termonde, Alost.
Gand, Alost, Termonde,
Anvers.
Audenarde.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde,
Louvain, Ypres, Cour tr ai,
Tournai.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Audenarde, Alost,
Termonde.
Gand, Alost.
Gand, Anvers, Lierre, Bru-
xelles, Malines.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Audenarde, Alost,
Termonde, Anvers, Lierre,
Louvain.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Termonde, Alost.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Anvers, Lierre.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Audenarde,
Termonde, Meldert, Maes-
tricht, Louvain, Anvers,
Saint-Trond, Malines, Bru-
xelles, Tournai, Looz, Tir-
lemont, Lierre.
Gand, Alost, Termonde.
Alost.
Gand, Alost, Audenarde,
Termonde.
Gand, Alost, Lierre, Anvers.
Gand, Termonde, Alost.
Lierre.
Gand, Alost, Termonde.
LES LIEUX DE PÈLERTN VGE
I4l
S. Louis à MARSEILLE (64].
S. Victor à MARSEILLE [65].
S. Arnou à Metz [66].
Mont-SainT-Michel [67] .
N.-D. de Montenoison (Ne vers) [68].
N.-D. de Mussi près Châtillou [69].
Mussi-i/Évêque s /Seine [70].
S. Antoine près Nevers [71].
Sainte-Croix à NEVERS [72].
S. Cyr à Nevers [73].
S. Louis de Noyon [74],
S. Florent à Orange [75].
N.-D. à OreÉans.
Sainte-Croix à Orléans [76].
S. Loup près OreÉans [77].
N.-D. à Paris [78J.
S. Geneviève à Paris [79].
S. Maur-des-Fossés (Paris) [80].
S. Riquier en Ponthieu [81].
S. Gauthier à Pontoise [82].
N.-D. des Protjilles en Nivernais
[83].
S. Gilles en Provence [84].
S. Ayou à Provins [85].
N.-D. de PUY-EX-AUVERGNE [86],
N.-D. à REIMS [87].
S. Nicaise à Reims [88],
N.-D. à Rocamadour [89].
vS. Jean à la Chartreuse de Romans [90] .
N.-D. du Haut (Ronchamp) (Haute
Saône) .
S. Catherine à Rouen [91].
S. Fsprit à Rue (Somme) [92].
S. BENOîT-sur-Loire [93].
Gand, Alost, Termonde.
Ypres, Audeuarde.
Gand, Alost.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Audenarde, Termonde,
Alost.
Gand, Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
Alost.
Gand, Termonde.
Gand, Alost, Audenarde, Ter-
monde.
Audenarde.
Anvers.
Gand, Alost.
Gand.
Anvers, Lierre, Malines, Ixm-
vain.
Gand, Alost.
Gand, Alost, Audenarde, Ter-
monde, Dinant.
Gand, Alost.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde, Au-
denarde, Liège, Ypres,
Conrtrai, Bruges, Tournai,
Louvain.
Gand, Alost.
Gand, Alost, Audenarde, Ter-
monde. Anvers.
Audenarde.
Gand, Alost, Termonde.
Saint - Trond , M aestricht ,
Ypres, Gand, Alost, Ter-
monde, Audeuarde, Di-
nant, Tongres, Tournai,
Anvers, Yilvorde, Bruxel-
les, Looz, Limbourg, Liège,
Lierre, Louvain, Yalen-
ciennes, Courtrai.
Gand, Alost, Termonde.
Lierre.
Gand, Alost, Termonde, Tour-
nai.
Gand, Alost, Termonde.
Gand.
142
CHAPITRE V
S. Claude en Bourgogne.
S. Gun.HEM-i^E-DESERT (Montpellier)
[94L
S. Jean d'Angéi,y [95].
S. Marie Madeleine à S. Maximin
[96].
S. Momelin près S. Omer [97]-
S. Quentin.
S1 Marie Madeleine à S. Baume [98].
S. Eutrope à Saintes [99].
N.-D. à Soissons [100].
N.-D. à Strasbourg [101].
S. Servin à TouTOUSE [102].
S. Martin à Tours [103].
N.-D. à VabrE [104].
Vaeenciennes.
S. NlCOTAS-DU-POBT [105].
N.-D. de VauvERT [106].
Vendôme [107].
S. Nicolas à Verzenay (Reims) [108].
S. Marie Madeleine à VEZEEAY [109].
S. Père près VEZELAY [iio].
S. Maurice à Vienne [ni].
S. Antoine en Viennois [112].
Valenciennes.
Gand, Alost, Audenarde,
Tennonde.
Gand, Alost.
Gand, Alost, Audenarde,
Tennonde Anvers, lierre.
Gand, Alost, Termonde.
Louvain.
Gand, Audenarde.
Gand, Alost, Audenarde,
Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde,
Anvers, Lierre, Diest.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Audenarde, Alost,
Termonde, Saint-Trond,
Liège, Malines, Anvers,
Ypres, Lierre, Valen-
ciennes, Louvain.
Gand, Alost, Termonde.
Malines.
Gand, Alost, Audenarde, Ter-
monde, Anvers, Limbourg,
Tournai, Valenciennes.
Gand, Alost, Audenarde, Ter-
monde, Bruges, Courtrai.
Gand, Alost, Audenarde,
Termonde, Ypres, Saint-
Trond, Liège, Louvain,
Looz, Anvers, Maestricht,
Limbourg, Lierre, Ton-
gres, Dinant.
Alost, Gand, Termonde.
Gand, Termonde, Alost.
Gand, Termonde Alost.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Audenarde,
Lierre, Anvers, Valen-
ciennes.
ALLEMAGNE
N.-D. à Aix-ia-ChapEIXE [113]-
S. Werner à Bacharach [114],
S. Albert à BrESI<au [114].
Gand, Alost, Audenarde, Ter-
monde, Anvers, Bruxelles,
Vilvorde, Lierre, Louvain.
Gand, Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
LES LIEUX DE PÈLERIN \Gk
M3
N.-D. à Coblence [n6l.
XI raille Vierges à Cologne.
Trois Rois à COLOGNE [117],
CORNELIMTJNSTER [i 1 8] .
DUISBOURG.
N.-D. à Francfort [119].
N.-D. à Greifswald.
S. Catherine à GraefraTii [120].
Heysterbach [121].
N.-D. à Lubeck [122].
S. Martin à MAYENCE [123].
N.-D. à Mayence [124].
Munster (Westph.) [125].
S. Quirin à Neuss [126].
N.-D. à Ratisbonne [127].
S. Materne à Roderkirchen [128],
N.-D. à ASSCHAFFENBURG.
N.-D. à Spire [129].
N.-D. à Stamelen (Rhin) [130].
Sainte-Croix à Strumberg [131].
S. Thiébaut à Tann [132].
S. Mathias à Trêves [133].
S. Josse à Walperberg (Cologne) [134].
S. Sang à Wilsnack [135].
N.-D. à WURZBOURG.
Gand, Termonde, Alost, Vil-
vorde.
Lierre.
Gand, Alost, Audenarde, Ter-
monde, Louvain, Anvers,
Lierre, Looz, Bruxelles,
Vilvorde, Malines.
Gand, Alost.
Bruxelles.
Gand, Alost, Termond.
Anvers.
Alost, Gand, Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost.Terrnonde.Vpres.
Alost, Termonde, Gand.
Alost.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
Anvers.
Gand, Alost.
Gand, Alost, Termonde.
( '.and, Alost, Audenarde, Ter-
monde, Anvers.
Gand, Alost, Louvain, Lierre,
Anvers, Limbourg.
Gand, Alost, Audenarde,
Termonde, Lierre, Anvers,
Limbourg, Bruxelles, Lou-
vain.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Audenarde,
Lierre, Anvers, Bruges,
Malines, Grimberghen,
Yalenciennes, Vilvorde.
Anvers.
ANGLETERRE, ECOSSE, IRLANDE :
S. Jean à BeverlEy [136].
S. Thoma9 à Cantorbery [137].
S. Gilles à Douvres [138].
S. Thomas à Hereford [139].
S. Patrick en Irlande.
S. Catherine à Lincoln [140].
N.-D. à Lincoln [141].
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde, Au-
denarde, Louvain, Anvers,
Tournai, Lierre.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
Anvers.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
144
CHAPITRE V
S. Pierre à LouTH [142].
N.-D. à Oxford.
S. Pierre à Peterborough [143].
S. Andrews (Ecosse) [144].
S. Edmtjnd's Bury [145].
N.-D. à Sausbury [145].
N.-D. à Wadsingham [147].
S. Nicolas à Yarmouth [148].
S. Pierre à York [149].
Gand.
Anvers.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Audenarde, Ter-
monde, Ypres, Lierre,
Bruges, Anvers, Courtrai.
Gand, Alost, Tournai.
Gand, Alost, Audenarde, Ter-
monde.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
Alost, Termonde.
ITALIE
S. François au Mont Atverne.
S. François à Assise [150].
S. Nicolas à Bari [160].
S. Barthélémy à Bénévent [161].
S. Petronio à Botogne.
Ferrare.
S. Erasme à Gaete,
S. Lament à GÊNES, [162].
Sainte Croix à Lucoues.
S. Martin à Lucques [163].
S. Pierre à Mlcan.
N.-D. à Miean.
S. Ambroise à Mttan [164].
S. Michel à Montegargano [165],
N.-D. à Napi.es [166].
N.-D. à PrETRA Santa [167].
N.-D. à PrE di Grotta (Naples) [168].
N.-D. à Pise [169].
SS. Pierre et Paul à Rome [170].
Anveri .
Gand, Alost, Termonde, An-
vers, Audenarde.
Gand, Audenarde, Alost, Ter-
monde, Anvers, Lierre,
Ypres, Bruges, Liège,
Saint-Trond, Limbourg,
Bruxelles, Valenciennes.
Gand, Alost, Termonde.
Anvers.
Diest.
Anvers.
Gand, Alost.
Lierre, Anvers, Louvain,
Ypres.
Gand, Alost, Audenarde, Ter-
monde.
Louvain.
Lierre, Anvers, Malines, Lou-
vain.
Gand, Alost, Audenarde, Ter-
monde, Anvers, Lierre,
Saint-Trond.
Gand, Alost, Termonde.
Bruges, Ypres, Valenciennes.
Gand, Alost, Audenarde,
Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Audenarde,
Termonde.
Gand, Audenarde, Termonde,
Alost, Lierre, Louvain,
Bruges, Ypres, Bruxelles,
Anvers, Saint-Trond, Va-
lenciennes, Diest, Malines.
LES LIEUX DE PLLEKI
145
S. André à SALERNE [171].
S. Christine en Toscane [172].
S. Laurent à Venise [173].
S. Marc à Venise [174].
Gand, Alost, Termonde.
G and, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
1 '..uni, Alost, Termonde, Lierre,
Anvers, Valenciennes.
ESPAGNE
S. Sauveur en Asturee [175].
N.-D. à Barcelone.
S. Jacques à CoMrosTELLE [176].
S. Guillaume en Galice [177].
S. Marthe à Ortigueira ([178].
N.-D. à Ronce vaux (Navarre)
[179].
Gand, Alost, Audenar de, Ter-
monde, Anvers, Tournai.
Lierre.
Gand, Alost, Audenar de, Ter-
monde, Tongres, Saint-
Trond.Maestricht, Anvers,
Lierre, Malines, Looz, Lou-
vain, Valenciennes, Liège,
Limbourg, Vilvorde, Grim-
berghen, Ypres, Bruges,
Tournai, Namur, Diest,
Huy, BruxeUes, Dinant.
Gand, Alost.
Gand, Alost.
Gand, Alost, Termonde.
SUISSE
N.-D. à BALE [180].
N.-D. à Constance.
N.-D. à Einsiedeln [181].
N.-D. à Lausanne.
N.-D. à Lucernk J82].
Gand, Alost, Termonde, Lier-
re, Bruxelles.
Louvain.
Gand, Alost, Audenarde,
Lierre, Anvers.
Lierre.
Gand, Alost, Anvers.
EUROPE CENTRALE :
S. Wenceslas à PRAGUE [183 Gand, Alost, Termonde.
S. Etienne à VIENNE .184]. Gand, Alost.
S. Pierre à Warasdlx (Hongrie) [185]. Gand, Alost, Termonde.
EUROPE SEPTENTRIONALE
S. Catherine à Arnaw (Koenigsberg)
[187] Gand.
S. Adalbert près Dantzig 186]. Gand, Alost.
N . - D . à J udekirch (Koenigsberg ) ; 1 88] , Gand, Alost .
10
146
N.-D. à Riga [189].
CHAPITRE V
Gand, Alost, Termonde,
Bruges, Ypres.
S. Olaf à Trondhjem (Norvège) [190]. Gand, Anvers.
ORIENT
Chypre [191]
S. Anastasie à ConsTantinopte [192].
S. Sophie à Constantinopi,E [193].
S. Antoine à l'hôpital de Rhodes [194].
S. Catherine au Mont Sinaï [195].
N.-D. à Sardenay (Damas) [196].
San-Thomé (Indes) [197].
Gand, Alost, Terrnonde, Lou-
vain, Saint- Trond, Liège,
Anvers, Ypres, Maestricht,
Malines, Limbourg, Huy,
Lierre, Diest, Tongres.
Gand, Alost.
Gand, Alost.
Termonde, Bruxelles, Valen-
ciennes.
Gand.
Gand, Alost, Termonde.
Gand, Alost, Termonde.
CHAPITkR VI
EXÉCUTION DU JUGEMENT.
De nos jours, certains pèlerinages nous paraîtront facilement
des peines arbitraires et trop sévères, nullement proportionnées
aux délits pour lesquels ils furent imposées. Cependant pour
excuser les législateurs et les juges, on leur tiendra compte de
la rudesse des mœurs de leur époque et, pour beaucoup
d'entre eux, de leur ignorance de la géographie. De plus, il
faut remarquer que ces pèlerinages expiatoires et judiciaires
furent rachetables dès l'époque même où ils firent leur appari-
tion dans la jurisprudence. Ainsi, aux termes d'une paix
conclue à la suite d'un meurtre commis à Tournai en 1276,
le coupable pouvait se racheter d'un voyage à Saint- Gilles
au prix de trente sous tournois (1); ainsi encore plusieurs
listes, tarifant le rachat, nous sont conservées des XIVe et
XVe siècles ; telle une liste d'Audenarde, qui porte la mention
de l'année 1-388.
Dans quelles conditions les pèlerinages étaient-ils rache-
tables ? Nous pouvons donner à celte question une réponse
générale iquant aussi bien aus paix privées qu'aux
condamnations prévues par le législateur ou appliquées d'après
la jurisprudence : les pèlerinages étaient rachetables toutes les
fois que le condamné n'était pas obligé, par déclaration
formelle, d'exécuter par lui-même le voyage imposé (2); cette
! valait non seulement pour le ra
nous le verrons au chapitre consacré à ce sujet, pour le cas
(1) Tournai 1276 : et XXX s. de tournois pour le voige de Saint
Gilles ». Registres aux j 'aides, DE NÉDONCHKL, Étude sur le droit
criminel, p. 132.
(2) « lu propren persoene met syn sellefs live ». Zoendinc Bouc
de Gand, CÂnnaeRT, Op. cii . p note.
148 CHAPITRE VI
où le condamné désirait se faire remplacer dans l'accomplis-
sement du pèlerinage ou en obtenir la rémission.
Néanmoins il existait aussi des paix particulières et des lois
locales qui contenaient des stipulations précises quant au
rachat. D'après la teneur de certains accords privés, il appar-
tenait au procureur de la partie lésée (montzoerne) d'opter
entre l'exécution du pèlerinage ou son rachat en argent; à cet
effet il pouvait prendre l'avis de sa famille; mais il était tenu
à faire connaître son choix au condamné un mois avant le terme
fixé pour l'échéance du voyage (1) D'autres fois on jugea
préférable d'imposer simplement le rachat, et à cette décision
on s'arrêta régulièrement lorsque la victime décédée laissait
un enfant en bas âge. (2)
La plupart des statuts communaux laissaient la liberté quant
au rachat; d'aucuns cependant ou l'excluaient, ou l'imposaient,
ou le subordonnaient à certaines conditions.
Ainsi, à Maestricht, celui qui était condamné pour homi-
cide à la satisfaction à partie et, en outre, à un pèlerinage en
Chypre au profit de la ville, était tenu à exécuter celui-ci en
personne (3), bien que le but de ce voyage fût d'en faire pro-
(1) Gand. 19 septembre 1405 : « Item sal de vors. L,auwereinse
van Brabant doen sine pelgrimagie tsente Pieters et te sente Pauwels
ten groten Roeme. . . ende die purren tusschen nu en onser vrouwen
daghe lichtinesse naestcomende, ofte binnen den selven terrain, over
de vors. pelgrimagie te betaelne ende overlegghene de some van
XXXVI lib. par. d'welc de vors. montzoenre kiesen sal. Dies moet de
montzoenre Lauwereinse vorsc. eene maent van den vors. lichtinesse
claerlic laten weten, weder hy kiest dat de vorsc. Lauwereins dese
pelgrimagie ghaen sal oft ghelt overlegghen sal ten vors. lichtmesse » .
Zoendinc Bouc.i^o^, f° 19, CannaerT, Op. cit., p. 373. — Tournai
1276 : « Gillart doit pour le meurtre de Clais Barisiel à Jehan Bari-
siaus LV lib. tourn. et XXX s. de tournois pour le voige de Saint
Gilles, se Jehans Barisiaus le voilt prendre par le consel de s m linage
si moilt aime les XXX s. que le voie ». Registres aux f aides, DE
NÉDONCïïEL, Étude sur le droit criminel, p. 132.
(2) Namur 141 2. « Et furent lesdis voiages aiusy mis et taxés en
rachat d'argent pour ce que ledit mort avait ung entrant deseagiet...».
Répertoire Lodevoet, u° yy.
(3) Statuts de Maestricht, 1380, art. 2 : « te porren selve mitteu
lyve ». — Iyouvaiu, 16 avril 1396 : « dat de ghene die dien scoet
(in casu : un rapt) dede ... te betemessen doen souden elc een bede-
vaert in Cyprès. . . sonder enich gelt daervoer te gheven ». Ordonnantie-
boeck A, p. 16, SERRURE, Vaderlandsch Muséum, t. II, p. 25 sq. — Huy
1477 '• <( unS voyage d'Outremere en l'ille de Cypre envers la dite bonne
ville, sans rachat, et sans rapel ». Statuts criminels, art. VI, Cercle
hutois... (1879-1880), p. 226.
EXÉCUTION DU JUGEMENT I49
fiter pécuniairement la ville (i). Quant aux voyages accordés
comme réparation à la partie lésée, les statuts locaux étaient
généralement unanimes à les reconnaître comme rachetables;
mais ils déterminaient les droits respectifs des parties à ce sujet.
Ainsi libertéétait laissée au condamné d'entreprendre le voyage
à son choix (2) et la partie lésée ne pouvait en exiger le rachat ;
au contraire, celle-ci dut donner son consentement pour que le
premier pût se dispenser de l'exécution, en payant la somme
correspondante au voyage (3). Quelquefois une restriction fut
faite en faveur du coupable. Ainsi, à Alost, l'ancien droit permet-
tait au condamné pour rixe d* rabattre de la somme, à payer
pour rachat de pèlerinage, celle à laquelle il était tenu à titre
d'indemnité pour blessures portées à un innocent (4). D'après
la jurisprudence en vigueur à Liège au XVIe siècle, lorsqu'un
(1) Maestricht. Privilège de 1413, art. 9 : « ende wege dienien der
stat toe set sahnen aenden paymeesteren valider stat af mogen leg-
gen met gelde ». Art. 9.
(2) Aussi il n'est pas rare de rencontrer, dans les registres scabi-
uaux ou corporatifs, la mention de « Klegit viam », en marge du texte
de condamnations de cette espèce : « Kerstyaen van Assche omdat
hi twe werf boveu verbot te werk gegaeu ys, ghetaxeert op eeneu
wech te Coeleu oft IIII s. gr. daervore. . .». Bruxelles, xve siècle, DES
MARKZ, Organisation du Travail, p. 150.
(3) « Knde die wege die deu partien toegeset selen werden, seleu
die partien liebben of tgelt dairaf. » Privilège de Maestricht de [143,
art. 9. C'est à tort, senïble-t-il, que Craiiay {Coutume Je Maestricht,
p. LXl-iwXn) conclut : Cette partie (lésée) avait aussi le droit d'exigé 1
une réparation en argent, si elle le préférait, et, à cet effet, elle pouvait
consentir au rachat du voyage ». Certes, elle pouvait consentir
mais pas exiger. Rapprochons de cela, par exemple, les dispositions
des Statuts criminels de Huy (1.177) : « et toutes voies polra ou pol-
ront les faituels payer l'amende des parties de piet, en Ville de Chypre,
s'il leur plaist », art. II, Cet ' ... 1879-1880, p. 226. — Liège
16 août 1543 : « La partie au proffit de la quelle telle voie seroit adju-
gée peut sa contrepartie constraindre par loy le faire paier de ses pieds
ou autrement la prendre en argent, si sadite contrepartie la voulait
ainsy paier ». Records di Écfa vins de Liège, n° 275, fol. 94 v°, Coût.
de Liège, t. III, p. 37-38.
(4) « Zo es t'Aelst gheuzeert ende over redits van ouds ghecostu-
meert : dat zo wauneer yemende ,<;hc\vyst wart eenegheraude pel-
grimaigen te gaiie in baten van den ghonen, die ghelt gheven moet
van quetsuren, zo zal deu wille van zulcken ghelde of pelgrimaigeu
af te slane staen in den ghonen, die ghelt van quetsuren gheven moet »
Boek met den Haire, p. ci.xv, WaknkoENIG, Op. cit., t. III, Docurn.
p. 126.
X50 CHAPITRE VI
coupable était condamné à plusieurs voyages pour des méfaits
commis envers la même personne, celle-ci pouvait exiger
qu'un voyage seulement fut exécuté à pied, (i)
Parfois le rachat était d'obligation légale ; le prévôt de la
cathédrale de Liège, qui était compétent en matière d'injures
et de rixes entre femmes, prononçait souvent un voyage à
exécuter à son profit et un autre au profit de la partie offensée ;
or, le premier voyage devait toujours être racheté en argent
par la femme coupable. (2)
Le pèlerinage à exécuter ou à racheter dans un certain
temps était somme toute une pénalité assez aléatoire ; aussi
ne devons-nous pas nous étonner que les juges communaux
exigent de la part des condamnés des garanties d'exécution.
N'était-ce pas en partie pour s'assurer l'exécution des pèleri-
nages, auxquels étaient condamnés trois mille habitants de
Bruges et du Franc, que le comte de Flandre dût, en 1305,
livrer à Philippele Bel les châteaux, villes et châtelleries de
Cassel et de Courtrai ? (3)
Déjà en 1275, un Tournaisien, Jean de Beaurepaire, con-
damné à un pèlerinage à Saint-Jacques de Compostelle pour
outrages faits en présence du conseil de la ville, fut obligé à
chercher sept personnes qui se porteraient garantes de l'exé-
cution du voyage (4). Mais la forme habituelle de la garantie,
celle qui résulte de la jurisprudence ordinaire des XIVe et XVe
siècles, consistait à verser une somme d'argent entre les mains
des magistrats (5). En cas de doute sur la solvabilité du con-
(1) Records des Éch. de Liège, 7 novembre 1543, n° 275, fol. 68 v°,
Coût, de Liège, t. III, p. 38-39.
(2) « et le voie que liais prévos ara pour lui tailliie, la persone
qui le devra, pora et devrat rachateir a dit prévôt ou ses successeurs
parmi une certaine summe d'argent ». Lettre du Prévôt (1349), Rai-
KEM et PoLAlN, Coût, de Liège, t. I, p. 551.
(3) D'OuDEGHERST, Annales de Flandre, t. I, p. 341.
(4) DE Nédonchei,, Etude sur le droit criminel, p. 119.
(5) Gand 16 novembre 1353 : « Dat aile deghene die peregrinage
gheset si in . . . dat sy hare peregrimagen doen . . . op den zelven zeker
ende borchtocht die sy daer af ghedaen hebben ». DE Pauw, De voor-
geboden der stad Cent, p. 65. — Ypres xrve siècle : « en lequele pais
fu pourtraitiet que li dis Jehan iroit à Saint Jacque en Galisse, sous
EXÉCUTION DU JUGEMENT 151
damné, ceux-ci exigèrent de lui la livraison de meubles, enlevés
quelquefois de force de son domicile, ou le bannissaient
jusqu'au moment où la somme totale fût versée (i). De plus,
la garantie et le rachat furent, peu à peu, confondus et, d s
le XVe siècle, on lit payer immédiatement le taux correspon-
dant au pèlerinage racheté, quitte à restituer au condamné la
somme versée contre la délivrance du certificat, attestant
l'accomplissement du voyage (2); cette assimilation, là où
elle se rencontre, semble surtout due au fait que les voyages
y étaient presque toujours rachetés.
Dans des cas plutôt rares, la privation du droit de bourgeoisie
était considérée comme garantie. (3)
Nous avons vu dans quelles conditions les juges imposaient
l'exécution des pèlerinages ou leur rachat. Dans les paragraphes
suivants, il reste à déterminer la manière dont les pèlerinages
devaient être exécutés ou leur rachat opéré, les circonstances
dans lesquelles une commutation, une substitution ou le droit
de grâce pouvaient intervenir, enfin les sanctions dont
l'autorité disposait contre ceux qui cherchaient à se soustraire
à leur peine
lequel voiage fu mis dedens quant il deverait mouvoir, dont Jehan
donna pièges ». DE Pfxsmaeker, Op. cit., n° 325, p. 173. — Xamur
XVe siècle : « Chacun desdis VIII faiteurs, par vertu de la dite sen-
tence faite de la dite paix, s'en dévoient suffisamment obligier à
l'usage et coustume du pais et donner bonne fin et seureté par devant
maïeur et eschevins de Xamur. . . ». Répertoire Lodevoet 1440, u° yy.
(1) Saint-Troud 17 mars 1438 : ... ende dair voir salmeu panden
halen te sinen huys, . . . ende oft der ghene die dit dede niet pendich
en were, die soude der stat derven, also lange ende tôt aender tyt
dat hy betaeld hedde. . .». Nachtegael, f° 53, STRAVEN, Op. cit., t. I,
P- 33o-
(2) S lint-Troiid 1 août 1435: «ceu wech hintjacopsin Compostelle,
te porren metter sonnen oft daervoer gepandt te syne, heren ende
stadt halff en halff ». Nachtegael, f° 46 v°, STRAVEN, Op. cit., t. I.
p. 312. — Ib. 25 juin 1436 : « dieu soude men panden voer eeu wech
in Cypers ». Nachtegael, f° 48, STRAVEN, Op. cit., t. I, p. 315.
(3) Saint-Trond. j < septembre 1436 : «die oui viantsecaps wille. . .
syn portschap opgheve, verboert . . . eeneu wech in Cypers ende dit'
portscap nemmer meer weder vercrigen, hy en hebbe die beva<.-n
voirscreven gedaen. . . . Nachtegael, £° 48 v°, STRAVEN, Op. cit.,
t. I, p. 316.
152 CHAPITRE II
I. MODE D'EXÉCUTION DES PÈLERINAGES
a) Temps fixé. — L'arrêt de condamnation au pèlerinage
fixait généralement le délai dans lequel le coupable devait
se mettre en route ou avait à payer la somme fixée pour le
rachat, (i) Ainsi, dans les cas les plus graves, aucun délai
n'était accordé : on enjoignait au condamné de quitter la ville
et sa banlieue le jour même de la condamnation, avant le
coucher du soleil, le territoire seigneurial, dans les trois
jours. (2) On lui indiquait en même temps la durée du bannis-
sement, éventuellement prononcé contre lui. (3)
Le plus souvent pourtant on fixait un délai plus long, soit
à partir du jour même de l'accord, s'il s'agissait de paix
à partie ou du jugement échevinal en cas de procès régulier,
soit à partir d'un commandement que donnerait ultérieurement
au condamné soit l'autorité communale, soit la partie lésée
ou le procureur de cette dernière.
D'après l'époque où la sentence est prononcée, c'est tantôt
avant la Chandeleur, la mi-mars, Pâques, Pâques-Closes,
tantôt avant la Pentecôte, la S. Bavon, la Toussaint que le
condamné doit se mettre en route. (4) La plupart du temps
(1) Maestrieht. Privilège de 1424 : « die ghene, dair die wege of
bevarden op geset selen syn, die wege selen moeten doen ende porren
bennen den dage ende den tide, die daer toe geset selen werden...»,
art. 9.
(2) Ypres 15 avril 1366 : « a vnider la ville dedans le nuit et le pays
de Flandres dedens tercli jour. . .». de Peesmaeker, n° 598, p. 281-
282. — Anvers 17 février 1406 : « . . .pelgrimagie te Roeme ende
derwart porren bi sonne schine uter stad ende bewisinghen ».
Clementynboec, £° jj v°. — Ib. 25 juillet 1410 : « ... ende dairwart
porren by sonnescine vuter stad ende bynnen derden dage vuten
Marcgrafscepe . ... Clem., f° 110 v°, Antw. Archievenblad, t. XXVI,
p. 8, 70. — Saim-Trond. Statuts de Jean d'Arckel (1366), art. 80. —
Id. Keure pénale de 1419, art. 118, StravEn, Op. cit., 1. 1, p. 91, 205. —
Id. Ordonnance du 19 janvier 1448, Straven, Op. cit., t. II, 119. —
Malines : « moet binnen sonneschyne de stadt ende vryheit ruymen . . . » .
Coût, de Malines, IV, 7. — Lierre, XVe siècle, Correctieboek, passirn.
(3) Anvers 25 juillet 1410 : « Adaem de Zyghere. . . mids ounut-
scapen. . . tSente Eewouts in Elsaten. . . vute bliven X jair...»
Clementynboec, f° 110 v°, Antw. Archievenblad, t. XXVI, p. 70.
(4) Ypres 1370 : « porren van alfmaerte eerstcommende » « por-
ren bin alfmaerte » « au rny marchs prochain ». de Peesmaeker,
n08 308, 968, p. 161, 338. — Gand 19 septembre 1405 : « die pur-
EXÉCUTION DU JUGEMENT l5j
on accorde des délais variant de huit jours à six mois (i) ; en
certains endroits, comme à Liège, ces délais sont proportionnés
à l'importance du pèlerinage : le voyage de Saint- Jacques doit
être entrepris dans les six mois, celui de Rocamadour dans les
trois mois, celui de Vendôme dans les trente jours. (2) Pour
l'homicide, le droit liégeois ordonnait de faire le voyage de
Chypre au profit de la commune, dans les quarante jours
suivant l'accord conclu avec la famille de la victime. (3)
Il arrivait fréquemment que le tribunal subordonnait l'exé-
cution des voyages à un ordre subséquent de sa part : celui-ci
était signifié à l'intéressé, soit d'une façon générale par le
« cry du perron » (4), soit en particulier par une assignation
personnelle, faite au nom de l'officier criminel par un valet ou
sergent de justice, ou comme à Liège par un valet et un des
maîtres de la cité. (5) A Maastricht, on devait commander les
voyages chaque fois que les parties en faveur desquelles la
sentence avait été rendue, en requéraient les autorités (6).
ren tusschen nu en onser vrauwen daghe lichtmesse îiaestconiende ».
Ib. 14 août 1374 : « tussche nu en sente Batnesse eerstcoinende ».
Cfr Cannaert, Op. cit., p. 373, 376.
(1) Gand 1360 : << binnen VIII daghen naer dat dit seggeu gheseit
sal syn ». Zoendinc Bouc, 1360, f° 8, CannaERT, 0 . cit. p. 380. —
Tournai 11 mai 1386 : « quinze jours après ce que condamné
Cfr DE Nédonchei,, Anciennes lois criminelles, p. 51. —Liège, Paix
de S. Jacques (1487), II, 16. Coutumes de Looz, 7e pou
Corpor. corn., p. 426. — Sanit-Trond : « porren binnen XXX daj
Statuts de Jean d'Arckel (1366), art. 54, STRAVEN, Op. cit., t. I,p. §5.
— Id. Liège Mutation de la loi nouvelle (1386), art. 32. — Brabant
XVe siècle : « sette hem die stad een bedevairt te porren binnen
XL dagen ». PouiXE'f, Hist. dr. peu. Brab., p. 260, note 2.
(2) Liège, Paix des Clercs (1287), art. 30. — Nouveau jecl (1394).
— Régiment des brisions (1422).
(3) Saint-Trond. Statuts de 1394,11° 82. — Liège, Nouveau ject (1394),
art. 2.
(4) Louvaiu 1386 : «derwert porren ende trecken bnyten den lande
van Brabant, binnen den derden daghe, die bedevarde, op
deu Moer, te Loeveu, geboden selen worden , Vader-
landsch Muséum, t. II, p. 25 seq. — Charte de Tongres (1502), art. 21.
(5) Liège. Paix de S. Jacques (14S7), XXII. Lesquels voi ;
se polront comandeir et yestre coinandeis par unj
tice et ung des maistres conjunctement, ou par ly ung de eux 31
faulte, deffense ou refus astoit trové en l'autre
Statuts de Maestricht (1380), art. 60. — Mais là, comme ail-
leurs, le droit de la partie se bornait à demander l'exécution. Eu effet
154 CHAPITRE VI
Les condamnés devaient ainsi s'exécuter dans le délai que
les statuts ou le jugement avaient fixé et qui commençait
à courir le jour du commandement, c'est-à-dire dans les
quarante, trente, quinze jours, etc. (i).
Quant aux paix à partie, le coupable devait se rendre en
voyage dans le laps de temps que la partie adverse ou ses
représentants lui avaient indiqué (2).
Mais il arrive que, vu la gravité du délit, son auteur est
condamné à faire deux ou plusieurs pèlerinages ; dans ce cas
il est forcé de revenir dans ses foyers après chacun d'eux et
de se remettre en route dans un délai fixé d'avance, sensi-
blement plus long que le premier, c'est-à-dire de un à deux
mois.
Lorsque deux pèlerinages étaient imposés, l'un au profit de
la commune ou du seigneur, l'autre au profit de la partie
lésée, celui-là devait être accompli avant celui-ci, d'après le
droit en vigueur à Liège et à Huy (3), tandis qu'à Maestricht
un habitant de Tihange, qui frappa un homme lui devant un voyage
à S. Josse, fut, en 1312, condamné par les échevins de Liège, parce
qu'il « avoit pais brisyé et qu'il estoit attahit de son honneur ».
Pawilhar 186, Raikëm et Polain, Coût, de Liège, t. I, p. 130 et 195-
196.
(1) Liège. Statuts de la Cité (1328), n° 1. — Ier Régiment de Heins-
berg, nos 2, 9, 7. — Gand 1360 : « ende purren te al sulken daghe
aise scepen van Ghend pelgrimagien ghebiedeu sulleu te doene ».
Zoendinc Bouc 1360, f° 8 r°, CannaerT, Op. cit., 379-380. — Ypres 1367 :
« mouvoir dedens XV jours après ce qu'il sera semons d'eschevins ».
DE Pet^smaeker, n° 690, p. 291. — « A la semonse et volonté de
Monseigneur Arnoud de Marke adprésent souvrain bailliu d'Ypre.
— à la semonse des eschevins d'Ypre ». Ib. passim. — Statuts de
Maestricht 1380, art. 10 : « te porren bynnen XL dagheu, na dat
home dat gheroepen ende gheboden sal worden ».
(2) Gand 1405 : « die purren binnen XIIII nachten naer datte
hem de voersc... vermaneu sal oft doen vermanen ». Zoendinc Bouc,
a0 1405, f° 63 v°, Cannaërt, Op . Cit. , p. 96-98. — Anvers 12 avril 1475 :
« eenen wech tôt onser viouwen te Nyzeele ter vermauisseu van den
voers. viere kcersluden ende zegghers ». Antw. Archicvenblad, t. XXI,
p. 3- — Audenarde 24 novembre 15 12 : « te purnene binnen XL
daghen naer dat hy dies vermaend zal werden van den moudsoendre
zynen vadre, zynen vrienden ende magheu ». Registey van Kontrak-
ten, Audcnacrdsche mengelingen, t. I, p. 252.
(3) Liège. Ier Régiment de Heinsbcrg (1424), 3, 7, 9. — Ib. Paix
de S. Jacques, XXII, 2, 4 etc. — Huy. Statuts criminels (1477), IV,
Cercle hutois... (1879-1880), p. 225-226.
EXÉCUTION DU JUGEMENT 155
et à Ypres, la réparation à partie primait le droit du seigneur
ou celui de la commune (1). A Namur comme au Limbourg,
c'est la longueur du voyage qui détermine la priorité : le
voyage d'outremer, en effet, doit être accompli avant tous les
autres, quitte à donner des garanties suffisantes pour l'exécu-
tion de ceux-ci (2).
Les législateurs liégeois avaient en outre prévu le cas où
un délinquant, s'étant déjà vu imposer plusieurs pèlerinages,
serait peut-être tenté de se livrer à de nouveaux excès, per-
suadé du fait qu'il n'aurait pas l'occasion d'accomplir toutes
les peines portées contre lui.
En effet, d'après le droit en vigueur dans cette ville, ceux
qui, devant déjà faire quatre voyages, commirent une nouvelle
infraction, furent obligés d'accomplir ces pèlerinages succes-
sivement, c'est-à-dire « de trente jours à autres » sans nouvel
ordre ni ajournement (3).
Dans de nombreux endroits, les pèlerins se mettaient en
route collectivement, à date fixe, ordinairement deux fois par
an, au premier mars et au premier septembre, parfois aux
derniers jours de ces mois. C'est donc à ce départ, appelé
« moutte » (motus) que les juges enjoignaient aux condamnés
l'accomplissement de leur peine (4).
Des motifs graves, comme le cas d'une guerre dans le pays
de destination, pouvaient décider le prince, d'accord avec les
échevins du lieu, d'ajourner les voyages d'une « moutte » à
l'autre (5) : ce qui s'appelait « recrier », mettre en « respit »
(1) Statuts de Maastricht, 1380, art. 10. — Ypres 6 janvier 1370.
DE PEDSMAEKER, n° 308, p. 1 62 -163.
(2) Namur. Répertoire Lodevoet, n° 58, Wodon, Le droit de ven-
geance, p. 188. — Coutumes de Limbourg, n° 146 : « et doit-on tous-
jours commencer à payer la plus longue voye premier ».
(3) Liège. Nouveau ject (1304), art. 4.
(4) Liège. Paix de S. Jacques (1487), XXVI, 1 : voiaige à mo
à la prochaine moutte du pays qui adoneques eskieri
tûmes de Limbourg, art. 140 : « et sont le.1- moutes de i partir
le dernier jour de mars et le dernier jour de septembre, dedans le
soleil couchant ».
(5) La Coût < limitait à ce sujet le droit seigneu-
rial : « Item, est à que V seigneur ne peut recrier les v
si ce n'estoit p rres du pays, que le seigneur auroil
de ses gens, et ce se doit faire par l'enseignement des eschevius de
Limbourg ; aussi ne peut le seigneur recrier les voye_ de contredit ».
n° 142.
156 CHAPITRE VI
les voyages. Cet ajournement était ordinairement proclamé
au perron (1) ; la partie au profit de laquelle un voyage a été
prononcé, n'a pas le droit d'exiger son exécution au cas où le
seigneur a « recrié » ; le condamné peut ainsi « demander sur
le recry » (2). Ajoutons que les voyages outremer n'étaient
pas compris dans cette mesure qui, à certaines époques, fut
fréquemment appliquée surtout pour les voyages à parties (3).
C'est aussi en raison de motifs sérieux que les juges com-
munaux accordent à des particuliers un prolongement de délai.
Ainsi en cas de maladie, c'est dans les quarante jours qui
suivent sa guérison que le condamné doit se mettre en
route (4) Dans des circonstances spéciales, celui-ci est auto-
risé à faire valoir les difficultés nombreuses que présen-
terait son départ à la date fixée, et il n'est pas rare que
(1) Namur. Cri du perron du 22 août 141 1 : « Oiiés, oiiés que on
vous fait assavoir de par nostre très redobteit seingneur monseingneur
le conte de Namur, le souverain bailli et lez hommez dele dicte contei,
le inayeur et eskevins de Namur, que tous voyaiges sont mis en
respit jusquez à la meute de marche prochain, excepteis voyaiges
d'outremeir. Ce cri fait au perron, le semedy XXIIe jour d'aoust,
l'an XI ». Registve aux transports de la cour de Namur, 1399-1412,
fol. 165 v°; Répertoire Lodevoet,\\° 80, note 1, BorgneT et Bormans,
Cartulaire de Namur, t. II, p. 291.
(2) Namur. Répertoire Ledevoet, n° 290.
(3) Namur : « Le 28 mars 1442, pardevant le mayeur et à sa
semonce, fut jugé que mous, le due, de sa haulteur et seigneurie avait
la puissance de faire rester (?) et mettre tous voyages eu respit d'une
meute à l'autre, excepté voyage d'outremer. Et li ruesme jour les
voyages délie meute de mars fureut mis eu respit jusques à l'autre
meute de la St-Gilles prochain venant ». Reg. aux transports, 1441 à
1445, fol. 123, Borgneï et Bormans, Op. cit., t. II, p. 291. — Même
ajournement le 1 septembre 1474 et le 1 septembre 1489; a partir de
cette dernière date les voyages fureut régulièrement recriés jusqu'en
1493. BorgneT et Bormans, Op. cit., t. III, p. 185-186.
(4) Namur 141 3. Un certain Bodechon de Bourges devait un
voyage de S. Jacqueâ à un homme de Bouvignes ; mais la maute
arrivée, il est gravement malade et reçoit les derniers sacrements.
Son fils comparaît devant les echevins, avec des témoins et notam-
ment avec le prêtre qui a assisté son père, pour demander que celui-
ci « ne fuist point atains par loy de son honneur ad cause de voiage
défally ». Les echevins accordent un délai de 40 jours après gué-
rison. Répertoire Lodevoet, 1440, n° 80. — Voir décisions analogues
n08 52, 254.
EXÉCUTION DU JUGEMENT 157
les échevins en soient émus et consentent à fermer les yeux
pour un temps (i).
D'ailleurs, les autorités communales n'étaient pas sévères
pour exiger le départ au jour même de la « moutte ». Les
échevins de Xamur constatent, en effet, que beaucoup de
pèlerins ne se mettent en route que le dernier jour du mois
de mars, alors que strictement ils auraient dû partir le premier
jour du même mois (2).
b) Formalités du départ. — Les perspectives d'un voyage
lointain avec ces dangers et l'incertitude du retour causaient
au condamné, on le comprend sans peine, des appréhensions,
auxquelles venaient se joindre souvent celles de sa femme et
de ses enfants. Pour assurer au moins l'avenir de ceux-ci, au
cas où il ne reviendrait pas, le pèlerin se hâte de faire son
testament (3).
Avant de se mettre en route, le condamné était obligé de
prendre solennellement congé des autorités communales, qui
lui avaient imposé sa peine. Au pays de Liège, il devait se
(1) Ypres 21 septembre 1362. Pauwel van Dixmude avait été
condamné pour injures « omnie messeghen , à un voyage à S. Jacques
avant la S. Bavon (ier octobre). Mais le 21 septembre Pauwels
cam voor Sinte Baves daghe vor scepenen, ende toghede dat bi
ziecheiden ende bi oorloghen in den lande upwart, ende dat lu ne
gheen gheselscep vinden moclite, ende hetware up den winter, hi ne
zoude niet moghen behouden syns lyfs, doende <l<i pelrinage ende bat
omme verlanc tote halfvastene. Scepenen dochte de excusanche
zo redenleic dat zy zeiden hem haet oghen te lukene tote halfvasten
in den selveu staet. Fait l'an 1.X1I au jour S. Matheus . DE IV.i s-
maeker, Op. cit., n° 220, p. 69.
(2) Xamur XVe siècle. « Item est assavoir que combien que plu-
sieurs gens vuellent diere que le mois de mars at viciions qui sont
hors dele meulte dez voyagez, on voit souvent prendre congiet de
faire lez voyagez le dairain jour dudit mois de mars». Répertoire Lode-
voet, 1440, u° 123.
(3) Audenarde 1398 : « Wel es te wetene dat Zegher Craye, iilius
Willems, ter tyt als hi trac in pelgrimagen te Sont Jacops wert.maecte
een ordonanche by consente van den Voeghden, in al der manieren
dat hier naer volgheu sal, bi also dat Zegher vois, storve op den wech.
Ghedaen. . . int jaer XIII IIII ' ende XYIII . Dagboek van Opper-
vooghden dans Andenaerdsche mengelingen,t.I,'p. 123. — Brabanti.400:
« A0 M°CCCC° mensis Julii. . . Johannes. . . properans se pergere
ad Cypriam ad emendationem . . . fecit suum testamentum in hune
moduin...». Acte de 1400 cité par PouiXET, llist. dr. peu. Brab.,
p. 260, n° 2.
I58 CHAPITRE VI
présenter soit au tribunal du statut, c'est-à-dire devant deux
jurés au moins, soit au tribunal de la loy, c'est-à-dire
devant un certain nombre d'échevins, selon que c'était devant
une de ces deux juridictions que son procès s'était déroulé (1).
Il y devait affirmer, sur la foi du serment, qu'il exécuterait
loyalement le voyage en question, en respectant toutes les
formalités indiquées, en particulier qu'il rapporterait un certi-
ficat authentique du pèlerinage accompli. (2)
Tous les congés, accordés de la sorte par les autorités
communales, furent inscrits dans une registre. (3)
Mais la cérémonie la plus originale, celle qui reflétait le
mieux le caractère ancien du pèlerinage, était la tradition faite
par le justicier au condamné des insignes du pèlerin, à savoir
de l'écharpe (sfcerpe, esterpe, esquerpe) et, du bourdon. Si les
échevins ou les apaiseurs n'intervenaient que comme arbitres,
ils imposaient parfois au condamné d'aller prendre ses insignes
dans une église (4); certains même voulaient que ce fût en
l'église du lieu où le crime avait été commis. Ainsi, lorsqu'en
1405, les échevins de Gand condamnent un certain Lauwe-
reinse van Brabant à pèleriner à Rome pour le meurtre
commis par lui sur Goessin Bollaert ; ils lui enjoignent d'aller
prendre les insignes du pèlerin en l'église Saint-Martin à
Courtrai, vu que le crime avait été perpétré en cette ville. (5)
(1) Liège. Statuts de la Cité (1328), art. 63. Paix de S. Jacques
(1487), XXVI, 59. — Statuts de Maestricht (1380), art. 60. — Huy.
Statuts criminels (1477), IV.
(2) Huy 1477 : « . . .prendront congiet por jurer solennelement
sur sains en mains des maistres et conseil, d'el e payer bonement
et leaulement et d'en raporter bonne et suffisante lettres ausdis mais-
tres es conseil ». Statuts criminels IV, Cercle hutois... (1879-1880),
p. 226.
(3) Maestricht. Statuts de 1380. « Honnen or lof ende den daigh
dat sy or lof nemen, in der meister bueck doen scriven ende voer non
sweren ten heiligen dat sy sie weghe wetlic ende wale doen solen ende
guede brieve van getuisscap van danne brengen solen ». art. 60.
(4) Gand 1439 : « Ende dan zal de ghuene die deze plegrimage doen
zal, nemen palstere ende scerpe te Gramene in de kerke ». Zoen-
dinc Bouc. A0 1439, f° 9, CannaerT, Op. cit., p. 373.
(5) Gand 19 septembre 1405 : « Ende eist dat de vors. Eauwereins
de vorn. pelgrimage ghaen moet, so sal hi moeten nemen palster
ende scerpe in sente Martins kercke te Curtrike, mits dat t'fayt te
Curtrike gheviel ». Zoendinc Bouc, A0 1405, f° 10, CannaerT, Op.
cit., p. 273.
EXECUTION DU JUGEMENT 159
Les échevins avaient le souci de la sécurité de leurs con-
citoyens, même de ceux qui avaient eu le malheur de commet-
tre une faute grave; ils munissaient donc le voyageur coupable
d'une lettre de sauf-conduit, par laquelle ils priaient les auto-
rités des lieux par lesquels il passerait de le laisser aller,
de lui permettre de travailler pour se procurer les ressources
nécessaires à la continuation de son voyage et, de lui faire
même l'aumône s'il était dans le besoin, (i)
Dans des cas exceptionnels, la commune accordait un subside
pécuniaire aux pèlerins; lorsqu'en 1309 soixante habitants de
Bruges furent envoyés à Avignon, par ordre du roi de France,
chacun d'eux reçut, de la part de la ville, une paie de soixante
sols (2). Plus tard des marchands de la même cité eurent un
différend avec la Hanse Teutonique, à la suite duquel, en
1393, le bourgmestre, Jaune van Dornike, et dix de ses con-
citoyens durent se mettre en route; le premier, pour faire le
voyage à Jérusalem, reçut un subside de cent cinquante
(1) Namur 12 mars 1450. Lettre de sauf conduit donné par l'éche-
vinage de Namur : « A tous ceulx qui ces présentes lettres verront,
raayeur et eschevins de la ville de Namur, salut et dilection. — Comme
il loist et appartiengne de en tous cas notiffyer vérité, et il soit ainsy
que de ce faire ayons esté requis : savoir faisons et certifions par ces-
dites présentes, que Jacquemien de Lonnoy, le corduannier.demou-
rant en ceste dite ville de Namur, Pirart Votrion et Henrion Pennioc-
que, demourans en la franchise d'icelle ville, nous ont affermé tous
trois par leurs serimens, jurans solennellement comme il appartient,
qu'ils ont voulenté d'aller présentement à Saint- Jacque en Galice,
especialment pour eulx acquittier de voyages a culx enjoins et qu'ilz
sont tenus de faire comme peregriens dudit Saint Jacque. Si prions
très affectuesement à tous ceulx ausquelx ces dites présentes seraient
monstrées, qui les dessusdits compaignons et perigriens, qui sont de
bonne et honneste conversacion, vuellent laissier aller, passer, séjour-
ner se mestier est, et rapasser seurement et paisiblement , parmi leurs
deniers payans, sans les molester ne empeschier, ne souffrir molester ne
en corps ne en biens, eu manière aucune; ainsi les vuellent, pour l'amour
et en contemplacion de nous, aidier et conforter toutes et quautesfois
besoiug leur sera, et qu'ilz de par nous le requerront, lui tesmoin de
ce nous avons mis à ces dites présentes uostre seel de secret, duquel
nous usons en ce cas comme du scel servent aux causes. — Données
le XIIe jour de mars, l'an mil IIIIC XLIX, selon le stille de l'eveschié
de Liège ». Transports de Namur, 1 437-1438, fol. 184. — Arch. coin,
de Namur, Bormans, Cartulaire de Namur, t. III, p. 57-58.
(2) Comptes de la ville de Bruges, f° >,j v°, GnjJODTS VAN Skvepin,
Inventaire des archives de Bruges, t. I, p. 292.
l60 CHAPITRE ÎV
couronnes françaises ; cinq autres, devant aller à Rome,
eurent chacun trois livres gros, de même que les cinq derniers,
auxquels on avait assigné comme but le sanctuaiie de Saint-
Jacques en Compostelle. (i)
c) Manière de faire route. — Dans les villes où les départs
collectifs des pèlerins n'étaient pas dans les habitudes, le con-
damné devait, dans le temps fixé, se mettre en route tout
seul ; on défendait à n'importe qui, armé ou non, de lui
donner un pas de conduite. Si le pèlerin avait des raisons de
craindre des représailles de la part de ses adversaires, il
pouvait en informer les autorités communales qui, le cas
échéant, lui donnaient une escorte. (2)
On prescrivait régulièrement au voyageur de faire la route
au jour le jour (3). Les règlements des hospices, tel celui de
l'hospice Saint- Julien à Bruges, se font l'écho de cette dispo-
sition en n'accordant l'hospitalité aux pèlerins que pour une
nuit (4). On défendait d'ailleurs au coupable de se rapprocher
du territoire communal ou seigneurial, avant d'avoir accom-
pli son voyage. (5)
(1) Giiaiodts van Severen, Op. cit., t. III, p. 256.
(2) Anvers, vers 1407 : « Het is gheoerdeneert bi den Heere ende
bi der Wet dat wanneer eeneghe personen ute gheseit zyu in pele-
grimagien oft anders, dat niemen met hemlieden ute ghaen sal ende
ghaderinghe maken omrne hemlieden te gheleidene, ghewapent oft
ongliewapent, ende wie hieraf de contrarie dade dat ware op I jaer
ute gheseit te zine, maer waer hem yement beduchtende van partien
oft anders quamen aen den Heer ende aen de Wet, men zoude hem
goedt gheleide doen doen, etc...». Clementynboec, f° 113 v°, Antw.
Archievenblad, t. XXVI, p. 25.
(3) Liège. « Quiconque prendera congié, pour faire voiaige scelon
la fourme de ces status, il debvera fair son voiage de jour en jour,
et ne polra raprepier la cité, après ce que partit siéra, sains avoir fait
sondit voiaige. . .». Paix de S. Jacques (1487), XXVI, 58.
(4) Règlement du 1 juin 1401. GmwODTS van SEVEREN, Inv. des
arch. de Bruges, t. III, p. 440.
(5) Saint-Trond : « ... ende en sal nyt moghen geneeken der stadt,
daer men 't weet, op een myle nae...». Statuts de 1366, art. 65,
Straven, Op, cit. t. I, p. 87. — Maestricht : « ende hen mach der
stat niet nare comeu dan op twe milen na, na den dat hi orlof geno-
men heet. ..». Statuts de 1380, art. 61. — Gand 1374 : « een peel-
grimage . . . ten hoeghen Roeme . . . ende moet bliven ligghende naer
den tyt van Sente B aînesse vorn. binnen XL, milen naer de païen van
Vlaendren. . . ». Zoendinc Bouc, a0 1374, f° 21, CannaerT, Op. cit.,
P- 376.
EXÉCUTION DU JUGEMENT l6l
Les registres criminels ne nous ont en général pas gardé de
stipulations précises quant à la route que devaient suivre les
pèlerins pour atteindre leur but (i). Souvent on mentionne
expressément qu'ils peuvent choisir la voie de terre ou la voie
de mer, selon leurs convenances. Ordinairement ils étaient
tenus de « pérager » leur voyage « de piet » (2); cependant
les grands personnages se servaient de chevaux. (3)
Lorsque le pèlerinage n'était pas lointain, on forçait le
condamné à marcher la tête et les pieds nus et à ne se nourrir
que de pain et d'eau. (4)
Vu les difficultés multiples et continuelles des voyages à
cette époque, on comprend facilement que les pèlerinages
constituaient pour tous les condamnés une lourde charge.
Mais on comprend aussi que celle-ci était différemment por-
tée d'après les classes sociales auxquelles les coupables appar-
tenaient. Ainsi les riches et surtout les marchands, lorqu'on ne
leur avait pas permis le rachat, ne laissaient pas passer l'occa-
sion, que leur offrait en cours de route la visite de villes
importantes, de se créer ou d'entretenir des relations qui
pouvaient leur être utiles au retour. Il semble même que le
commerce exercé de cette sorte par des pèlerins ait pris une
certaine importance, puisqu'à un marchand yprois on défen-
dit, en 1476, de profiter de son voyage d'aller vers Saint-
Jacques, pour exercer son commerce. (5)
(1) Voir pourtant ce que Van dkn Bussche, Op. cit., p. 48 et 62
seq. dit au sujet de la route que suivaient les pèlerins deRocamadour.
(2) Herenthals 29 septembre 1514 : « eenen wech tôt S. Jacops
te Compostelle in Galissen te voete. . . reysende te water ofte te lande
tzyuder belief te . . . « . Geloeftenboeck. Archives de l'État à Anvers.
(3) Robert de Cassel qui, eu 132T, avait dû, d'après les condii
imposées par la France, faire divers pèlerinages, lègue, par un codicille
de son testament : « IV libvres de gros à li hoir Jehan Hellin, pour
cause d'un cheval que je och de li ou tems que jv alai A Saint-Jac
ques ». Vax den Bussche, Op. ci:'., p.
(4) Les confrères de la corporation malinoise des arbalétriers,
condamnés à un pèlerinage à la Coix Brune à Battel, près d<
devaient l'exécuter tête et pieds nus. PouiXET, C< 1 , p. 420.
— Herenthals 1 avril 151g : « eenen wech ende bevaert tôt l
Iviever Vrouwe tôt Halle ende llalsenberghen, wullen ende bervoets,
te borne ende ten broode ». Geloeftenboeck. Cfr supra note 2.
(5) VAKDEN BuSSrim, Op. ci!., p. 47.
Il
IÔ2 CHAPITRE VI
Au contraire, les artisans, les pauvres et les misérables, qui
formaient le grand contingent des pèlerins habituels, pouvaient
s'estimer heureux si l'aumône de personnes ou d'institutions
charitables, jointe au produit de leur travail manuel, leur
permettait d'atteindre le but de leur voyage et de rentrer
sans grand dommage dans leurs foyers. Il n'est pas rare de
voir les autorités communales accorder des aumônes à des
pèlerins de passage ; mais, faut-il l'ajouter ? cet acte de
générosité était parfois inspiré par le souci de débarrasser la
commune d'un élément indésirable (i). Alors que des mesures
sévères sont prises presque partout au XVe siècle contre les
mendiants, les ordonnances permettent des adoucissements en
faveur des pèlerins (2). Les métiers communaux, si jaloux de
leurs prérogatives, prennent des mesures de protection contre
le travail des étrangers, mais, à leur tour, permettent aux
compagnons pèlerins (wandelgesellen ou pelgri?ns) d'exercer
librement leur profession, sans fournir de preuves au sujet de
leur apprentissage, et cela pour qu'ils puissent gagner quel-
qu'argent pour la continuation de leur voyage (3).
d) Formalités de séjour. — Lorsque dans le texte de sa
condamnation il n'était rien stipulé de spécial à ce sujet, le
(1) Damme 1446 : « Ghegheven Jacop van de Pollepele peilgreyn
van Sente Gheleyne in almoessene ende dat hy de stcde rumen
zoude. . .». Comptes de Damme, 1446, f° 17 v°, n° 10. — Bruges 1446 :
« Ghegeven Pietreu van Dersdorf van Luceuborch te hulpeu van
ziner peilgrinage te Jherusalem. . .». Comptes de 1446, f° 39 v°, n° 16,
Gn,MODTS VAN SEVEREN, Op. cit., t. V, p. 491 et note.
(2) Ypres 4 septembre 1461. Ordonnance du conseil de Flandre
sur la mendicité, portant diverses dispositions et pénalités, dont sont
exceptés les pèlerins qui passent par le pays en suivant leur droit
chemin. Toutefois ils ne pourront pas séjourner plus longtemps qu'une
nuit dans une paroisse et deux nuits et mi jour dans une ville. Un
pèlerin est-il arrêté, il peut se justifier en affirmant sous serment ne
pas avoir connaissance de la présente ordonnance. Le mendiant qui
feint de se rendre en pèlerinage sera condamné aux galères, s'il est
valide, à un mois de prison au pain et à l'eau, s'il ne l'est pas. Si des
pèlerins se présentent devant un hospice où les pauvres voyageurs
ont l'habitude d'être logés, ou si, y étant admis, ils s'y conduisent
d'une manière indécente, les directeurs des hospices feront rapport
au magistrat de la localité, qui punira les coupables selon les lois eu
vigueur. DlEGERiCK, Inventaire des chartes et documents... d'Y près,
t. vu, p. 157-158.
(3) Des Marez, Organisation du travail, p. 121.
EXÉCUTION DU JUGEMENT 163
pèlerin pouvait se contenter de toucher barre au lieu indiqué,
quitte à y rester le temps nécessaire pour l'obtention du certifi-
cat à rapporter. Mais quand le coupable de délits graves, comme
d'homicide et de blasphème, était condamné à des voyages
lointains, tels celui de Chypre ou de Saint-Jacques, on lui impo-
sait souvent un à trois ans de résidence (1). Au pays de Liège,
ce séjour, appliqué aux voyages d'outremer pour homicide,
s'appelait le «stuid». La Paix de S. Jacques de 1487 en
détermine ainsi la signification : « La résidence et stuid de
unne an entier se doit entendre que on doit demorer residem-
ment en 1 ysle de Cipre, en la cité de Nicosie, ou en autre
bonne ville oudit ysle, ou plus long en autre lieu, comen-
chant au promier jour que on prent sa résidence en bonnez
villes, et fînant au debout de l'an ad ce meisme jour inclus,
sains retourneir plus encha avant, son stuid passé ; et dont il
debvera raporteir lettrez certifficatoers à son retour, sains y
comprendre le terme du voiage en allant ne en retournant... »
(xxn, 10). Remarquons que, d'après les Statuts de Maestricht
(1380), l'homicide doit résider deux ans en Chypre, alors que
ce même voyage est indiqué indistinctement pour diverses
infractions à un an de « stuid » par le Régiment de Heinsberg
(1424) et la Paix de S. Jacques (1487).
Que cette résidence lui ait été imposée ou non, le condamné
était obligé d'y accomplir des formalités et des actes de
dévotion.
Comme nous l'avons déjà dit précédemment pour les délits
entrainant des censures ecclésiastiques, le condamné était
obligé de se présenter à Rome, à Avignon ou même à Tournai,
devant le Souverain Pontife ou le pénitencier, afin d'en recevoir
l'absolution, ce dont il devait rapporter une attestation authenti-
quée (2).
(1) Ypres 15 avril 1366 : « . . .traire eu Cypera et y demourer un
an. . . ». DE Pelsmakkkr, n° 598, p. 281-2S2. — Anvers 12 juin [413
« Goeden de Knoddere van onnutscape ende onredeliker wande-
lingen. . . 1 pelgrhnagie in Cypers te Nycosien, ende III jair daii
ini lant wonen. . .». Clementynboec, fol. 105 v°, Antw. Arcfa
t. XXVI, p. 134. — Gand 8 octobre r.515 : « Onnne... quade horryble
ende uutgesochte heede. . . in blasphemie van God almachtich. . .
te gaene wonene ende vulcomeliek te residerene binuen der stede
van St-Jacops in Compostellen, eeu jaer lanc gheduerende. . .
vanden crisme, 1512-1523, I t, Of>. cit., p. 53-54 Corp. In-
quis., t. 1, p. 512.
(2) Gand 18 avril 1354 : « ... te treckene... te Dornike... aen
164 CHAPITRE VI
De même, dans tous les autres cas, le pèlerin devait aller
trouver une autorité quelconque qui consentît à lui délivrer le
certificat de son pèlerinage accompli, sans lequel il ne pouvait
retourner dans sa patrie. Nous verrons plus loin le contenu de
ces lettres ; contentons-nous de signaler ici que ce ne sont pas
seulement les autorités religieuses du sanctuaire visité qui
délivrent ces attestations, mais aussi des magistrats communaux
et des notaires. Nous possédons, en effet, des certificats délivrés
à des pèlerins par ces différentes autorités. Qu'on en juge par les
noms des signataires : le roi de Jérusalem (1), l'évèque de
Tortose et Famagouste en Chypre (2), le grand-maître ou le
prieur de Rhodes (3), le grand pénitencier de S. Pierre de
Rome (4), les trésoriers de la basilique de Saint-Jacques en
Compostelle (5), le chapitre de N.-D. à Paris, le curé de Wils-
nack, un chanoine de Bois-le-Duc, un vicaire de Hal, les éche-
vins de Cambrai ou un notaire d'Aix-la-Chapelle (6).
Aux pèlerins coupables d'homicide on prescrivait parfois
tout un cérémonial à observer à Rome. Le condamné devait
d'abord se rendre à la Confession des apôtres et puis, en chemise
et pieds nus, visiter sept jours consécutivement les sept grandes
églises de la ville, monter à genoux les degrés de Saint-Jean de
Latran et, chaque jour, y entendre à genoux cinq messes (7).
den pénitencier, omme absolucie te ontfane van dese zake, ende
daer af bringhene goede lettren van den pénitencier, ende scepenen,
daer inede kenlic makende, dat lai van dese zake absolucie ontfaen
heeft ». Zoendinc Bouc, a0 1354 f° 9 v°, CannaerT, Op. cit., p. 92.
— Ib. même date : « pelgrimage te doene tonser vrouwe Tavengoen
ende dat hi daer te biechten gha totten ghenen die hem penitencie
gheven ende injongeren mach van deesen feete, ende hem deraf absol-
veren » Zoendinc Bouc, ib., CANNAERT, Op. cit., p. 93. — Saint-Trond,
Heure pénale de 1419, art. 33 : « totten pous van Rhomen ende van
hem oft zynen p •nitenchier goede brieve ende ziegele bringeu van
absolucien... ». Straven, Op. cit., t. I, p. 201.
(1) Namur : « Jehan, par la grâce de Dieu, roy de Jh.erufaJ.em,
de Cyprès et d'Krmenie. . . 15 août 1434». Répertoire Lodevoet,n° 87.
(2) Namur. « Baldoinus m.d. Antheradensis et Famagustamis epis-
copus. . . 3oaoûti3i6». Chartrier de Namur. Archiv. gén. du Royaume
Borgnet, Cartulaire de Namur, t. I, p. 55.
(3) DESMAREZ, Organisation du travail, p. 151.
(4) Gand 1354 : « Paulus de Screfano prior Sti Pétri de Roma.
Dm. pp. penitenciarius . . .». CannaerT, Op. cit., p. 94, note.
(5) Gand 1354 : « Cardinales (?) et thesaurarii ecclesiae S. Jacobi
de Compostella. . .». CannaerT, Op. cit., p. 94 note.
(6) Correctieboeck de Lierre. Voir Annexe B.
(7) Louvaiu 26 mars 1493. Acte cité par Poui^ET, Hist. Dr. pén.
EXÉCUTION DU JUGEMENT 165
e) Conditions de retour. — La condamnation à un pèle-
rinage, nous l'avons vu, était ordinairement accompagnée de
l'une ou l'autre peine accessoire, telle que le bannissement
pour un temps déterminé, une amende à payer au seigneur
ou à la commune, la réparation du dommage matériel
causé (1). Le condamné qui était resté en défaut sur la
moindre de ces conditions ne pouvait en aucun cas rentrer
dans sa patrie sans encourir des sanctions sévères, que nous
étudierons plus loin. Ici nous examinons simplement les condi-
tions préalables au retour. Non seulement il devait rapporter
des lettres authentiques, attestant l'accomplissement de son
voyage, mais bien souvent il avait besoin de l'autorisation
formelle du seigneur ou de la commune avant de pouvoir se
montrer dans la ville (2). Il se voyait donc forcé d'envoyer quel-
qu'un en avant, pour montrer ses certificats et pour demander
en même temps la permission de rentrer ; celle-ci lui fut quel-
quefois refusée (3) ; il arrivait même que le bannissement, pro-
noncé contre lui, fut prolongé de dix ans (4).
Bvab., p. 183. — Herenthals t avril 1519 : « eenen wech tôt Sinte
Peeters ende Pauwels tôt Romen, ende cruypen aldaer op de trappen
tôt Sinte Jans te Latcranen ende besoecken oeck aldaer de seven
kercken». Gcloeftenboeck (1507-14540). Archives de l'État à Anvers.
(1) Anvers 25 juillet 14 10 : « soe sal hi vute bliven X jair...».
Chmcntynboec, f° no v°, Antw . Arch . , t. XXVI, p. 70. — Ib. 23 nov.
i ; 1 1 : « ende niet weder int Marcgraefscap coinça hi en hebbe den
luden weder ghegheven de XXXII croneu die hi lien tonrechte afghe-
nomen heeft ende den Heere oec alsoe ». Clementynboec, f° 100,
Avchicvenblad, t. XXVI, p. <)j.
(2) Ypres 6 janvier 1370 :«. . .binneu eenen jare daernaer bin Ylaen-
dre niet te comene, en ware bi onseu wille ». «... ten ware bi orlove
ende wille van ous ». DE PEi£MAEKER, n° 308, p. 162-163. —
Anvers 28 novembre 141 1 : « ... soc sal hi drie jare ute bliven ende
nochtan tslleren ghemoede moeten hebben ». « ... zy en hebben
goede brieve van haren pelgrimagien ghesonden ende zy en hebben
deti Hère ende partien ghebetett ende ghesoent ». Clementynboec,
f° 104 v°, Antw. Arch., t. XXVI, p. ni.
(3) Anvers 1526-1527 : « Dicta Anna Swolfs preseutavit litteras
peregrinationis dominis den XXYIom dach Junii anno XXYII ende
hebben deselve geconsenteert inné te comene. » « hittere peregriu'-
tionis dicti Henrici Heuricxsens fuerimt prae.sentate dominis mar-
chioni et magistratui XXI mensis novembris anno XXVI0 sed non
habet facultatem neque consensum domini et oppidi intrandi .
Corpus Inquisitionis, t. V, p. 155.
(4) Anvers 25 juillet 1410 : «. . . ende nadat hi brieve gesonden .0
hebben sal hi 10 jair vute bliven ... ». Clementynboec, f° 112,
werpsch Archievenblad, t. XXVI, p. 75.
l66 CHAPITRE VI
f) Formalités de retour. — Avant de réadmettre le con-
damné dans la commune, les autorités voulaient avoir de
sérieuses garanties au sujet de l'accomplissement de la peine
imposée ; elles exigeaient qu'il vînt présenter le certificat
de voyage et faire le serment de l'authenticité de cet acte
comme de l'observation complète des points stipulés dans sa
condamnation. Si le voyage avait été prononcé en faveur
d'une partie lésée, le tribunal convoquait en même temps
celle-ci pour lui déclarer que le condamné ayant satisfait à
ses obligations, la paix était rétablie entre eux. Si la partie
adverse ne comparaissait pas, les juges proclamaient néan-
moins le condamné « en paix dele voye » (i).
Ce certificat, dont nous donnons quelques spécimens en
annexe, a été demandé de tout temps (2) ; il devait affir-
mer que le condamné, désigné par son nom, son prénom
et son lieu d'origine, avait réellement fait le voyage lui-
même, c'est-à-dire sans se faire remplacer, et qu'il l'avait
exécuté à titre de peine et non pour un autre motif (3). Cette
dernière clause se justifiait par le fait que, sans cela les con-
(1) Namur 6 mai 1393. Répertoire Lodevoet, n° 118.
(2) Tournai xme siècle. Cfr de Nédonchei,, Etude sur le droit
criminel, p. 117. — Fosses 1318 : « rapporterat de chu bonnes lettres
de dit lieu, de tesmoinage, ensi que usé et costumé est de faire ».
Lettre del paix de Fosses. 7 mai 1318, BoRGNE'f, Cartulaire de Fosses,
p. 33-34. — Liège. Statuts de la Cité (1328), art 59. — Nouveau ject
(1394), art. 17. — Régiment des basions (1422), artt. 12, 13. — Ier Régi-
ment de Heinsberg (1424), artt. 3, 6, 7 etc. — Ypres 15 avril 1366 :
« traire en Cyprès... et d'ent reporter bonnes lettrez ». de PEivS-
MAEKER, n° 598, p. 281-282. — Gand 18 mai 1371 : « bringhen daeraf
goede suffisante lettren ». — Ordonnante en en Wysdommen der deke-
nen van de neringheii der stede van Gendt (1357-1583), CannaERT,
Op. cit., p. 394. — Bruges 24 mai 1372 : «bonnes lettres et suffisantes».
GnjjODTS van Severex, Op. cit., t. II, p. 361. — Anvers 17 février
1407 : « ende aise lii daeraf goede brieve ghesonden heeft. . .». Cle-
mentynboec, fol. 75 v°, Antiv. Arch., t. XXVI, p. 8. — Audenarde 1445 :
« ende van danen bringhen goede lettren. . .». Register van Kontrak-
ten, Audenaerdsche Mengelingen, t. II, p. 247-248.
(3) Gand xrve siècle : « En van danen bringhen goede lettren,
dat hi sine pelgrimage sal hebben ghedaen int occusoen van desen
ende negheen andre. — Sal kenlic maken met warachteghe vraye
lettren aise dair behoiren sal, dat hi dese pelgrimage in propren per-
soene ghedaen heeft, ende niemene anders vor hem. — in propren
persoene met syu sellefs live sonder fraude ende malengieu, sal ghe-
EXÉCUTION' DU JUGEMENT 167
damnés, se faisant passer aux lieux assignés pour des pèlerins
par dévotion, en profitaient pour jouir de toutes sortes
d'avantages matériels.
Des mesures très sévères étaient prises contre celui qui
osait se servir de fausses lettres pour attester l'accomplis-
sement d'un pèlerinage imposé. D'après le droit liégeois, il
était puni de l'aubaineté et de la privation de son droit de
bourgeoisie (i) ; la Paix de S. Jacques (1487) ajoutait que si
le faussaire se faisait prendre dans le territoire de Liège, il
subirait la peine capitale, à moins que le seigneur et la partie
lésée ne lui aient accordé « mercy » (2). La charte pénale
saintronnaire (1419) établissait une double pénalité dans le
cas précité : le coupable doit payer la taxe, s'il est solvable ;
s'il ne l'est pas, il sera arrêté et emprisonné ou même banni
jusqu'au moment ou la taxe sera versée ; il devra en outre
faire ou payer un voyage à Rocamadour, dont profiteront par
moitié les seigneurs et la ville (3).
S'il arrivait que d'une façon ou d'une autre le condamné
perdît ses lettres, il pouvait les remplacer par l'affirmation faite
sous serment par deux personnes dignes de foi, qui témoigne-
raient l'avoir vu au lieu indiqué, ou bien par tout autre moyen
que les échevins jugeraient suffisant (4).
daen hebben ». Zoendinc Bouc, passini, Canwaert, Op. cit., p. 8i,
note. — Ypres 6 janvier 1370. DE Pklsmakkkk, n° 308, p. 163. —
Àlalines XVe siècle. PouiXET, Corporations communales, p. 426. — Lierre
XVe siècle. Correctieboeck, passini,. — Anvers XVe siècle : « ende (Lier-
ai goed bethoon bringhen dat hy omme dior saken wille ende 0111
anders negheene aldaer geweest heeft». Antw. Arcli., t. XXI, p. 12-13.
(1) Liège 1328 : « Ouiconques aporterat fauses lettres de voiages
et proveit soit, il serat albains et pryveis de sa bourgesie a tous jours
mais ». Statuts de la Cité, art. 59. - M lestricht 1380 : We <>mmer-
meir bringht vaisselle brieve van weghen ende beteringhen, ende
id werde geprueft, dee sal abain syu en syure portscap berouft ten
ewighen daghen ». Statuts de Maestricht, art. 58.
(2) «Quiconque apportera faulses lettres de voiages et prové soit,
il siéra albain et privé de sa bourgeoisie à tous jours mais ; et si de
là en awant il rentrait dedeus la dite cité, franchise et banlieu»
pris fuist, il rechepvroit paine capitale, se dont le merchy du segneur
et de partie n'y survient ; et se recheus est a merchy, debverat pour
l'albensté purgier à la cité dix florins de rins d'amende, et néatitmoina
debveroit de novial racquérir sa bourgeoisie se ravoir le vouloit ».
Paix de S. Jacques (1487), XXVI, 54.
(3) Saint-Trond. Keure pénale (1419) art. 28, STRAVEN.O/». cit., t. I,
p. 200.
(4) Huy 1477 : « touttesfois, s'il advenait par aulcune fortune
168 CHAPITRE VI
Outre la présentation de ces lettres, le condamné devait
faire le serment qu'il avait accompli le pèlerinage comme
pénalité et que le certificat rapporté était authentique (i). Ce
serment, fait entre les mains du magistrat communal, répondait
à un véritable droit de la partie lésée (2).
Les échevins recordaient dans un registre, souvent à la
suite de la condamnation elle-même, que le coupable avait
présenté ses lettres, en y ajoutant la date (3). Il n'est pas rare
de rencontrer, entre les feuilles de ces registres criminels, le
certificat rapporté du voyage, ayant le plus souvent la forme
d'une petite bande de parchemin avec sceau (4).
qu'il perdisse ou perdissent leurs lettres, ils soy porront passer parmy
avoir le serirnent faisant par tesmongnage de deux personnes dignes
de foy qui les poront avoir veu en l'île de Cypre ou a suffisance ».
Statuts criminels VI, Cercle hutois . . . (1879-1880), p. 227.
(1) Gand 1360 : « ende aise hy danen wedercomen sal syn, zoe sal
hy hand ten helegen leggen ende zweeren dat hy selve de voers. pel-
grimage, omme tvors. mesgrip ende mesdaen ghedaen heeft, ende
ome gheen andre, binnen VIII daghen naer dat hy comen sal syn ».
Zoendinc Bouc, a0 1360, f° 8 v°.CannaERT, Op. cit., p. 300. — Lierre
15 mars 1435 : « ende de stad sal oie sinen eet mogen nemen dat hy
selve metten live desen wech gedaen heeft om dese saken wille ende
om gheen ander ». Correctieboeck, n° 235. — Huy 1477 : « et encor
jurer, pour eskiewer fraude et abus, avec ce, à leur retour en ceste
dite ville avoir payet ledit voyage eu bonne foid, sans malengien
ensievant l'usage et costume de tele chose ». Statuts criminels, IV,
Cercle hutois... 1879-1880, p. 226. — Matines XVe siècle. Pou^ET,
Corporations . communales, p. 426.
(2) Gand XVe siècle : « Dat Thoms den eet hebben sal, up dat hys
begherd, van Ghiselbrecht en Osten sinen broedere, dat ele sine pel-
grimage ter steden dair soe hem gheset es, in propren persoene met
syns sellefs live, sonder fraude ende malengien, sal ghedaen hebben ».
Zoendinc Bouc, CannaerT, Op. cit., p. 81, note.
(3) Gand 28 octobre 1354. « Deze lettren waren ghetoecht voer
scepenen int scependom ser Everdeys Gruters, int jaer LIIII den
XXVIII dach in Oktober. Ende Sanders Conte hilt hem ghepaeyt
en gaf syn andworde up aire heleghen avond, by also dat hy staet
onverlet omme Willems eet te hebben Van de Putte van deser pel-
grimagen ». Zoendinc Bouc, 1354, f° 2, CannaerT, Op. cit., p. 94, note.
— Anvers 16 janvier 1407(8) : « Den brief vander plegrimage was ghe-
toent XVI dage Januarii anno septimo ». Clemcntynboec, fol. 109 v°,
Antw. Arch., t. XXVI,p. 10. — Bruxelles 1432 : « Item jan de Slockere
heeft sinen wech ghedaen ende dat wel betoent alsoet behoerde,
int jaer XXXII, op ten iersten dach van september ». Witcorrectie-
boeck 1430-1453, fol. 18 v°, DES Marez. Organ, du trav., p. 172. —
PouiXET, Hist. Dr. pén. Brab., p. 260, note 4.
(4) Correctieboeck de Lierre. Voir Annexe B.
EXÉCUTION' DU JUGEMENT 169
II. LE RACHAT
Lorsque dans le texte de la condamnation, les juges ne men-
tionnaient pas expressément que le coupable devait accomplir
son pèlerinage de sa propre personne, le condamné pouvait s'en
libérer en payant à la partie ou à l'autorité au profit desquelles
le voyage avait été imposé la somme d'argent fixée dans cette
même sentence ou stipulée dans les listes de rachat.
Dans ce rachat d'une peine nous retrouvons, une fois de plus,
l'ancienne conception germanique du profit matériel qui vient
compenser le sang versé ou l'ordre troublé. Le fait lui-même
que, dans le droit du moyen âge, les pèlerinages furent rachc-
tables, pour ainsi dire, dès l'époque même de leur apparition,
peut être attribué à une double cause.
C'est tout d'abord cet esprit de fiscalité, qui a envahi si tôt la
hiérarchie des fonctionnaires seigneuriaux, et le souci corres-
pondant des communes de tirer des ressources financières d'une
situation dont sans cela nul n'aurait profité. S'il s'agissait
de délits contre les personnes, il était naturel que dans la plu-
part des cas, les parties lésées fussent portées à préférer une
réparation matérielle plus étendue à celle qui leur était offerte
à côté du pèlerinage imposé au coupable. N'avons-nous pas vu
les échevins de Namur forcer un meurtrier à racheter les
voyages imposés, parce que la victime avait un enfant en bas
âge?(i).
D'autre part, ce ne furent pas toujours que des gens peu
recommandables qu'on envoya en pèlerinage, surtout au début ;
des querelles de partis, nous l'avons dit, se terminaient bien
souvent par l'envoi en masse de citoyens vers des lieux éloignés ;
la commune se voyait ainsi privée, pour un temps plus ou moins
long, d'éléments utiles ou même nécessaires à sa prospérité
matérielle. Cette difficulté fut résolue d'une façon différente.
A Dordrecht, par exemple, où les dernières années du XIVe siècle
avaient vu les luttes des Hoeksche et des Kabeljaauwsch
terminer de cette façon, le magistrat communal décida qu'on ne
pourrait plus envoyer en pèlerinage que les coupables de forfaits
(1) Namur 1412 : « et furent lesdis voiages ainsy mis et taxés en
rachat d'argent de ce que le dit mort avait ung enffant desagiel
Répertoire Lodevoet, n° 77.
170 CHAPITRE VI
graves spécifiés dans le décret (1). A Liège, au contraire, la
Paix des XII (1335), mettant fin à la querelle des Awans et des
Waroux, décide qu'on construira une église pour remplacer les
pèlerinages qui auraient dû être exécutés de part et d'autre,
mais qui auraient compromis la défense de la cité en cas de
guerre (2).
Dans l'évaluation du rachat, on peut considérer un double
élément : l'importance du crime qui devait être réprimé et
l'éloignement du pèlerinage imposé. Il y avait donc pour les
juges communaux ou les arbitres une double manière de fixer
le taux du rachat. La première permettait de fixer avec plus
de précision la réparation à faire par le coupable, et de la pro-
portionner à la gravité du délit, aux circonstances atténuantes
ou aggravantes et aux exigences de la partie lésée : l'importance
du pèlerinage répondait très imparfaitement, nous l'avons vu, à
la gravité du crime. D'autre part, le même voyage étant imposé
comme pénalité à divers crimes, il pouvait sembler injuste de le
(1) Dordrecht 7 décembre 1400 : « In der eersten, so sullen aile
die ban of glielaten wezen wtghenomen dese naghescreven punten
die van den ban uiet bevreedt en zullen wezen als moort, moort-
brant dieft zeeroof vrouwencraft, vrouwen of joncfrouwen tontu-
oeren teghens haren dancke openbaer poytierschap qnade terninge
ende roof mer aile dat der tafel toebehoort, sal in ziiner machte bliven
na den ouden haercomen ende aile dingen sonder arghelist. . . Voort
ware iemant die eenighe zaken misdede of misseide dat zoude men
correngeren na goetdencken der goeder luden van den gherecht die
bi tiden vesen sullen sonder eenighen ban ofte bedevaert. .». van Mie-
RIS, Charterboek, t. III, p. 370.
(2) Liège 16 mai 1335 : « eonsidérans aussi que s'il convenait
par casconne mort, mal et meffeit avenut entres elles en commun
ou en singulier faire espéciale amende corporeil, solonc l'usaige del
pays, ilh convenroit, par escovoir solont tant de mais qui avenus
sont si grant quantiteit de chevaliers, d'escuwiers et d'altres person-
nes des linages, parties aidans, aherdans et confortans deseur dis de
pays deseur escript et de ses marchissans, aleir oultre mère et en
altres divers et lointains lieus et voiages de chi siècle, por anieudise
que li pays del évesqueit desseurdit seroit si vuidié de gens d'armes
qu'ilh eu porait de légier venir a désolation, et avecque chu, qui
moult est a redobteir, tant de ches pellerins porient morir en leur.-
voiages... nos statuons... à faire et fondeir en le rédemption des
voiages, pellérinages et amendes qu'ilh convenroit faire, avecque les
compensations ,une engliese en une honorable et suffisant lieu...».
Paix des XII.
EXÉCUTION DU JUGEMENT 17 T
tarifer différemment, puisque les divers coupables subissaient
en somme le même sort s'ils exécutaient personnellement le
pèlerinage. Il se fit donc, au début surtout, que dans certaines
communes, on n'usa que de quelques pèlerinages mais qu'on
les tarifa de façon différente d'après les délits ; tandis que dans
d'autres on multiplia à loisir la variété des pèlerinages pour
punir toutes sortes de délits, mais qu'on maintint dès lors pour
chacun d'eux une taxe invariable.
Au pays de Liège, en effet, on ne connaît pas, pendant le
moyen âge, plus de dix pèlerinages différents ; mais le taux de
rachat diffère d'après les époques, les villes et même les cas
particuliers. A Liège le voyage de Rocamadour se rachetait
tantôt par i écu vieux, tantôt par 4 gros tourn. vieux (1), tantôt
par 5 livres (2), tantôt par 7 1/2 florins (3), enfin par 5 florins
d'or (4). A Hu}* le voyage de Saint- Jacques de Compostelle se
payait 40 griffons, s'il était prononcé au profit de la partie et
15 griffons, s'il profitait à la commune (5). A Saint-Trond on
pouvait se libérer du même voyage en payant d'après la gravité
du délit 20 réaux, 15 griffons, 8 ou 6 florins du Rhin.
Ce n'est qu'en 1527 que la Réformation de Groesbeeck (6)
établit une taxe uniforme pour toute la principauté.
En Flandre, au contraire, nous trouvons des listes de pèleri-
nages très étendues : celle de Furnes portait 2j noms ; celle
d'Audenarde 47 ; celle d'Ypres (de 1470) 61 ; celle de Ter-
monde 134; celle de Gand 177; enfin celle d'Alost mentionne
1S1 lieux de pèlerinages (7). Plus les juges avaient de choix,
mieux ils pouvaient proportionner l'importance du pèlerinage
à la gravité du délit et maintenir une taxe uniforme pour chacun
de ces voyages.
Lorsqu'on compare entre elles aussi bien les listes de rachat
de ces villes flamandes que celles des communes brabançonnes
et liégeoises, on remarque également cette manière différente
de taxer le même voyage. Il ne faudrait pourtant pas en
(1) Liège. Paix de S. Denis, 13S2, Coût, de Liège, t. II, p. 55.
(2) Régiment de Bavière, 1416, art. 2.
(3) Paix de S. Jacques, XXVI, 9.
(4) Coutumes de Liège, XIV, 37.
(5) Statuts criminels, (1477), passim.
(6) Réformation de Groesbeeck (1527 . XV, 2.
(7) Nous publions en appendice de ce travail (annexe C), les
principales listes de rachat des voyages.
I72 CHAPITRE VI
conclure que cette inégalité trouve sa cause dans l'ignorance de
la géographie. En effet, cette inégalité existait pour les amendes
en général : ainsi, un coup de poing était puni d'une amende
de 10 sous à Diest, de 27 sous à Lierre, de 50 sous à Sant-
hoven (1).
Le rachat d'un pèlerinage ne s'opérait pas toujours au moyen
d'argent : l'esprit utilitariste de nos communes devait trouver
plus pratique d'obliger le condamné à se procurer lui-même
certains objets matériels nécessaires à la commune ou à la
corporation. A Lierre, par exemple, où le début du XVe siècle
voit la ville s'entourer de fortifications, nombreux sont les
condamnés qui à peuvent cette époque satisfaire à leurs obliga-
tions en faisant construire une demie verge de murs pour le
voyage à S. Martin de Tours ou de Vendôme, ou bien une ou
deux verges pour celui de Rocamadour, ou bien encore huit
verges pour celui de S. Nicolas de Bari (2). D'autre part un
teinturier, qui avait injurié les jurés de son métier, doit aller à
Bois-le-Duc ou donner trois livres de cire pour éclairer les
séances du métier (3). Bien plus, à Audenarde on pouvait se
dispenser d'un pèlerinage à Notre-Dame -au- Cerisier (située non
loin de la ville) en donnant en réunion du métier trois pintes de
bière (4).
La taxe de rachat devait être payée entre les mains de ceux
en faveur desquels le vo}Tage avait été imposé, et cela généra-
lement dans le même délai accordé pour l'exécution du voyage,
sous peine de devoir faire le voyage à pied (5). A ceux qui ne
présentaient pas des garanties suffisantes de solvabilité, on
prenait des garanties mobilières : on allait parfois jusqu'à empri-
sonner le condamné, du moins s'il était étranger, jusqu'à ce
qu'il eût payé intégralement la taxe (6).
(1) Coutumes de Diest, VI; 4. Coutumes de Liège, II, 23; Coutumes
de Santhoven, Statuts. . . n° 25.
(2) Lierre, 20 août 1409 ; 15 juin 1419 ; 31 mars 14 16 ; 15 novembre
1407 ; 18 août 1408, Correctieboeck, nos 47, 69, 44.
(3) 22 octobre 1421. Correctieboeck, n° 118.
(4) Audenaerdsche Mengelingen, t. I, p. 132.
(5) Liège. Paix de S. Jacques, XXVI, 13. « dedcns le premier
moutte qui escmiera après ledit jugement incorru ; et se rius n'en
faisoit, que dont il debvera paier ledit voiage de piet se eu merchy
de partie ne demeurt ».
(6) Saint -Trond 141 9 : « En de weer 't dat liem een foryn werde
besocht te zyne, die zoude verbueren éenen wech Sint Jacops oft
XX riale daer voir. . . ende gevangen bliven tôt dat hy betaelt heeft. »
Heure pénale, art. 49, StravEn, Op. cit., t. I, p. 205-206.
EXÉCUTION DU JUGEMENT 173
Le droit liégeois stipulait en termes formels que le délinquant
qui voulait racheter son voyage, devait déposer l'argent au
change indiqué par les échevins (i). Le produit de rachat était
versé, selon les termes du jugement, au seigneur, à la commune,
aux échevins, etc. ; il arriva même qu'il dût être divisé entre
ces diverses personnes et que le dénonciateur de l'infraction eût
sa part avec les échevins du tiers de la somme, dont le seigneur
et la commune s'attribuaient les deux autres tiers (2).
Mais d'autres fois on affecte le produit de ce rachat à des
travaux de la ville, à la construction ou à l'ornementation
d'églises ou à des œuvres charitables (3), tout comme les
amendes qui accompagnent le plus souvent dans la condamna-
tion, l'exécution ou le rachat des pèlerinages.
III. SUBSTITUTION — COMMUTATION — DROIT DE
GRACE ET RÉMISSION
Le principe de la substitution ou du remplacement existait
déjà au XIIIe siècle, puisqu'à cette époque on imposait souvent
aux coupables d'homicide l'obligation d'envoyer un chevalier
(1) Liège 1487 : « Item de tous voiages qui euschieiont chi-après...
la partie qui liera condanrpnée, polra mettre l'argent du voiage à la
cambge ordonnée de part les esquevins. . .». Paix de S. Jacques,
XXVI, 13. — Ib. 18 juin 1553 : < TJng Ewal du pays est estimé et
monte en argent la somme de 56 florins 5 aidans, telle mounoie qui
est courante au lieu où le mezus dont icéluy procède et peut êtrt
jugié, est commis et perpétré ». Records des échevins de Liège d ins
Coût, de Liège, t. III, p. 22.
(2) Saint- Trond 8 janvier 1487: «op verboernisse sgoets ende eenen
wech Sint Jacop , oft acht rinsgulden daer voer, hère 11, stadt, scepen
ende inbringere elcken terdedeel. . . ». 't Residuum, f° 71, STRAVEN,
Op. ci/., t. II, p. 152.
(3) Maestricht. Privilège de 1413 : « ende dat gelt van (1er stat
wegen comende, salmen keren aender stat graven, mueren ende
tinge of anders inder stat orber ende profyt », art. 9.— Saint Trond
21 juin 1423 : « enen wech te Sinte Jacops in Galissien, t- legghen
aen Stapelporte och acn die muere. . . ». Nachtegael, f° 17, STRAVEN
Op. cit., t. I, p. 244. — Lierre 26 septembre 141 7. Correctieboeck,
n° 79. — Bruges 24 mai 1372. Le sire de la Gruthuse doit envoyer
10 valets à Chypre ou payer 200 livres tourn. à diviser entre les
diverses églises et couvents de Bruges. — Gileiodts van Severen,
Inventait t dt s archives d ; II, p. 360.
174 CHAPITRE VI
combattre en Terre-Sainte (i). Ainsi à la suite d'une décision
qui termina un différend entre les sires de la Gruthuse et de
Molenbeke, Marguerite de Flandre prononça, le 24 mai 1372,
que le premier eût à envoyer dix valets en l'île de Chypre (2).
Dans le droit communal, la règle énoncée à propos du rachat
des pèlerinages valait également pour le remplacement : le con-
damné pouvait envoyer une autre personne en pèlerinage,
quand il n'en était pas autrement stipulé dans une paix parti-
culière ou dans un jugement échevinal. Mais parfois il était dit
que l'amendé devait aller de « ses cor propre » c'est-à-dire per-
sonnellement (3), et le certificat à rapporter devait mentionner
qu'il avait été lui-même aux lieux indiqués (4). Certaines
dispositions plus précises étaient prises au cas ou la femme
voudrait se faire remplacer pour l'exécution du voyage ; en effet
le droit liégeois stipulait qu^une femme mariée condamnée
avant son mariage à un pèlerinage pourrait le faire payer ou
exécuter par son mari, si celui-ci le voulait bien ; mais elle ne
pouvait se faire remplacer par une autre personne (5).
Dans certains cas il y avait une véritable obligation à rem-
placer le coupable dans l'accomplissement du pèlerinage. Ainsi
les parents sont obligés d'exécuter ou de payer les pèlerinages
qu'auraient encourus leurs enfants en bas âge (6) : ce fut natu-
(1) HlS, Dus Strafrecht des deutschen Mittelalters, t. I, p. 334,
note 3.
(2) GmjODTS van SEVEREN, Inv. des Arch. de Bruges, t. II, p. 300.
(3) Tournai xnie siècle, de Nédonchei,, Étude sur le droit crimi-
nel, p. 117.
(4) Gand XIVe et XVe siècles : « Sal kenlic maken met warachteghe
vraye lettren aise dair behoiren sal, dat hi dese pelgrimage in pro-
pren per^oene ghedaen eeft, ende niemene anders vor hem ». Zoen-
dinc Bouc, Cannaert, Op. cit., p. 81, note. — Liège. D'après une ordon-
nance d'Engelbert de la Marck de 1358, en matière d'injures, lors-
qu'tme femme peu honnête a injurié une femme honnête, et est de
ce chef condamnée à un voyage, elle ne pourra le faire exécuter par
autrui.
(5) Liège. Paix de S. Jacques (1487), XXVI, 9.
(6) Saint Trond 20 juillet 1439 : « Soe wie. . . dar stat mueren oft
vesten. . . breke oft ontwey rede, die soude verboren. . . een wech
Sint Joes. Ende ocht der luder kender, die dat deden, soe jonck weren
dat sy den beteringhe niet en consten doen, soe souden vader ende
moeder chrre jonger kender in dese beteringe gehouden syn te
doene ». Nachtegael, f° $j, STRAVEN, Op. cit., t. I, p. 342. — Ibid.
21 juillet 1455 ; 2T novembre 1485; 5 marr 1492, Straven, Op. cit.,
t. I, p. 413 ; t. II, p. 142 ; t. II, p. 176-177.
EXÉCUTION DU JUGEMENT 175
Tellement l'usage trop fréquent de pèlerinages, comme à Saint-
Trond, qui nécessita de telles mesures.
D'autre part deux exemples nous montrent la jurisprudence
adoptée au cas où le condamné venait à mourir et celui où la
victime d'un homicide était redevable d'un pèlerinage imposé
ou volontairement promis. Le 29 septembre 15 14, les échevins
de Hérenthals interviennent dans la paix à partie conclue à la
suite du meutre de Ulryck van Colen par Henric van Cappel-
broeck et Àert Boentuyns. Une messe sera dite pour le défunt,
et en outre un des deux meurtiers ira en personne à Saint-
Jacques de Compostelle : le premier est désigné pour faire le
le voyage mais, s'il veut, il peut payer l'amende ; dans ce cas
le second est tenu à voyager. Toutefois si l'un des deux venait
à mourir en chemin, l'autre devra faire le pèlerinage imposé ou
demander aux arbitres la famille de le racheter au taux indiqué
par eux (1).
Quelques années plus tard un certain Jan van Wechele
tua Nicolas van Boekele ; or celui-ci avait promis de faire un
pèlerinage de dévotion à Saint-Corneille à Aix-la-Chapelle, aux
Trois-Rois à Cologne et à Sainte-Anne à Duren; les arbitres
enjoignent au meurtrier d'accomplir lui-même les voyages pro-
jetés par sa victime et d'en rapporter les certificats (2).
(1) Hérenthals 29 septembre 1514 : « Zoeniuge van den dootslage die
Henric van Cappelbroeck ende Aert Boenstuyns geloett te doen doene
een dertichste daert hem believen zall, over de ziele van den dooden.
Item zullen die voers. misdoeiulers in laeiïeni. se vander zielen des
voor^ . dooden gacn cenen wech lot St. Jacops, te Compostelle in
Galissen te voete enich van beyde, in persoene, zonder iemant anders
dat voer hem te mogen doen of gaen. Ende dien voers wech tôt St.
Jacops voers. zall ds voers. Henrick van Cappelbroeck moeten gaen"
Ofte believet hem, hy mach die voer.-. zoenpenningen restitueren of
opleggen den voers. Aerden Boentuyns ende als dan zall dit- voers.
Aert dien wech ende bedevaert moeten dien iuder vuegen voers.,
behoudelyck oft (he voers. Henrick van Cappelbroeck achterl
ende storve, het ware in orloge of dergelyck, dat dan die voers.
Aert die voers. bevaert zal moeten doeu oft doen doene, reysende te
water ofte te lande, tzynder beliefte, oft zall die moegen doen afne-
men van den genen die daer thoe authoriteyt hebben willen.
Ende oft die voers. Henrick die voers. bevaert aenvaerdt
hy die moeten porren voer Sinxen naest comende, ende oft Aert
voers. die moet doen, zoe zall hy daertoe moeten porren biniien
eenen jaere nu naest comende... ». Geîoefteboeck, 1507-1540. Ma aux
Archives de l'État à Anvers.
(2) Heremhals 6 avrii 1530 : Zoeniuge van den dootslage die
Joatmes van Wechele gedaeii hadde aen Xicolaus van Boekele...
I76 CHAPITRE VI
On comprend aisément que cette substitution d'une autre
personne dans l'exécution ou le pa3^ement d'un pèlerinage dû
par un déliquant devait amener des discussions compliquées.
Nous nous contenterons de signaler un procès de ce genre mené
en 1386 devant les échevins d'Ypres, agissant comme chefs-de-
sens de Thérouanne. A la suite d'un différend entre deux
parties, un individu fut condamné à faire des voyages : en son
absence, le père du condamné vient déclarer devant les échevins
qu'il exécutera tout et qu'on ne peut rien demander à son fils.
Le jour d'échéance se passe et les parties lésées viennent se
plaindre de ce que ni les amendes, ni les voyages ne sont payés;
le bailli fait proclamer le plaid à l'église le dimanche suivant ;
le plaid ouvert, le bailli demande qu'on applique des amendes
pour défaut de payement, mais le père demande et obtient quel-
ques jours pour se conseiller. A la séance suivante, il déclare
que les conditions de la paix ont été remplies et qu'en tout cas,
s'il avait fait sa propre dette de celle son fils (ce qui n'était pas,
prétendait-il) c'était affaire civile ; s'il y avait défaut, il fallait
« claim et semonse ».
Les échevins de Thérouanne déclarent « qu'ils n'en étaient
point saige » et demandent l'avis de leurs collègues d'Ypres ;
ceux-ci jugent que si, au début, on avait fixé une amende pour
la non-exécution du pèlerinage, le père sera quitte en payant
cette amende aux parties ; s'il n'y avait pas d'amende prévue,
il devra payer au seigneur 60 lb. par. et à chaque échevin 10 lb.
par. et néanmoins exécuter les divers pèlerinages (1).
Pour certaines raisons sérieuses, telles que l'insécurité des
routes ou l'état de guerre régnant au pays où le pèlerinage doit
être fait, les autorités consentent parfois à imposer au délinquant
un ou plusieurs autres voyages au lieu du premier.
Ainsi Robert le Roux, sire de Morialmé, voulant réparer ses
torts envers Guillaume II, comte de Namur et sire de Béthune,
Item want de voirs. wylen Mcolaus bimieii zyn levenden tyde
geconcipieert hadde, omme te versueckene den heyligen martelaere
St-Cornelius binnen Aeken, die heylige drie coningen tôt Coolen ende
die heylige moeder Synte Anna tôt Dueren, aldus is oie vuytgespro-
ken by den selven arbiter dat de voirs. perpétrant dese voirs. drie
dooden te ontlasten ende sal oie daeraf binnen jaers wettige docutnen-
ten ende quittancien brengen...». Geloefteboeck, 1507-1540; Ms aux
Archives de l'État à Anvers.
(1) DE PEESMAEKER, Op. cit., n° 194, p. 53-55.
EXECUTION DU JUGEMENT 177
lui promet, le 27 novembre 1402, de partir pour Jérusalem,
dans les quatre mois, après qu'il en aura été requis par le
souverain bailli du comté ; si l'hostilité des Sarrasins ou d'autres
obstacles l'empêchaient d'atteindre le but de son voyage, on
déclare qu'il satisfera en allant jusqu'à l'île de Chypre et en
faisant ensuite un second voyage à Saint-Jacques de Compos-
telle ,1). Autre exemple : un Anversois, Peter Tack, avait été
condamné pour menaces à un voyage à Rocamadour ; il quitte
la ville, mais son frère comparaît devant les échevins pour
remontrer que le pèlerinage est dangereux (onveylkh) ; le
magistrat consent à ce que le e 1 idamné aille plutôt à Einsiedeln
dans les trois jours, après qu'il en aura été semonce ; mais si à
ce moment les circonstances sont telles que le pèlerinage de
Rocamadour ne présente plus de dangers, celui-ci devra être
accompli (2).
Lorsqu'un voyage avait été -prononcé comme réparation à la
partie lésée, celle-ci pouvait toujours dispenser le coupable de
le faire, c'est-à-dire lui remettre sa peine, lorsque du moins un
autre intérêt que le sien n'était pas en jeu (3). Mais, comme
nous avons eu l'occasion de le signaler, une même infraction
lésait fréquemment les intérêt.-; du seigneur, de la commune et
de la partie. Ceux-ci avaient donc dans une certaine mesure un
droit égal à la réparation, de sorte que l'un ne pouvait pas
remettre une peine sans frustrer l'autre.
Il en était ainsi tout d'abord pour le droit de grâce ; alors
même que le seigneur était disposé à accorder la grâce à un
coupable de crime contre les personnes, le droit de la partie
lésée restait entier. Les lettres de rémission, si fréquemment
(1) PlOT, Inventaire des Chartes des Comtes de Nantur, u° 1303,
P- 385-
(2) Anvers 21 octobre 1477. Antw. Archievenblad, t. XXI, p. 37.
— Voir aussi le procès de Joos Pietersseune devant le Grand conseil
de Malines en 1476, dans Vandkx Bi 1 il., p. 47 ssq.
(3) Ypre9. « Pelgrimaigen of beteringhen ghewyst by paisierers oft
atbiters partien aengaende m gheu de selve partien verlaten deen
der> anderen 0. Cahier primitif de la Cou/. d'Ypres, LXXXI, 2. —
Audenarde 5 avril [513 : een pelgrimaige tôt Onser L,iever Vrauwen
ter Veuisters terre, ten vermanene van den selven Gillis, wel verstaen-
de indien de voi n. Philips van nu voortan gracelic jeghen den
selven Gillis leeft, zo zullen dat selve pelgrimaige de bovenghenoe
middeleers rnoghen verbidden ». Register eau Kontrakten, Aude,
sche Mengelingen, t. I, p. i^y^y.
178 CHAPITRE VI
envoyées en Flandre et en Brabant, en fournissent des preuves
nombreuses (1). Par contre si la partie lésée renonçait à ses
droits sur un pèlerinage, le seigneur pouvait toujours garder les
siens. Quant aux pèlerinages édictés par la commune pour
garantir la paix intérieure, le prince ne pouvait non plus exercer
pour ceux-ci son droit de grâce sans l'assentiment préalable et
formel des magistrats communaux.
Dans les communes liégeoises où les voyages édictés par les
statuts locaux formaient la peine statutaire, distincte de la peine
ordinaire, c'est-à-dire de celle de la loi commune de la principauté,
le droit de grâce du prince-évêque ne pouvait s'exercer alors
même que la partie lésée se déclarait satisfaite ; en effet, le
coupable restait toujours soumis à la peine statutaire, et notam-
ment pour l'homicide à un voyage d'outremer avec un an de
stuid (2). Cette peine statutaire, comme d'ailleurs toutes les
peines établies au profit de la commune, étaient sans rémission
d'après les termes exprès de ces statuts communaux. Cette
mesure radicale s'explique par le fait que ces voyages étaient
essentiellement rachetables, par conséquent considérées comme
peines pécuniaires, pour lesquelles aucun droit de grâce ne
s'exerçait (3).
En dehors de ces cas, lorsqu'il s'agissait de la peine légale,
les échevins accordaient parfois la rémission du voyage à un
condamné qui s'était distingué par des services rendus à la
commune (4). Dans certaines communes pourtant, comme
(1) PETIT- DuTaittis, Documents nouveaux sur l'histoire sociale des
Pays-Bas au XVe siècle (Lettres de Rémission de Pliilippe-le-Bon) ,
dans Annales de l'Est et du Nord, t. IV, p. 358.
(2) Coutwnes de Liège, t. II. Préface, p. vin. — Cfr Pouvrex,
Recueil des édits. . ., t. I, p. 54, u° 10.
(3) Statuts de Maestricht (1380) : « ende des weeghs in Cyper en
sal niemant niogich syn » art. 2. Ib. Privilège de 14 13 : « ende desen
weeh ende deire twe jair in Cypers te woenen en suelen wi noeli onse
stat niement quytsclielderj of den mesdedegen des yet te verlatm in
eniger maniereii » art. 13. — Piège. Statuts de la Cité (1328), art. 66,
67. — Ier Régiment de Heinsberg (1424), art. 3, 6. — Paix de S. Jacques
(1487), XXII, 9, 13 ; XXVI, 62, 63, 67.
(4) Anvers 23 novembre 141 1 : « Clene, overmids onredelikere
wandelingen, soe sal hi treeken 1 pelgrirnagie ten Heyligen Cruys te
Puyck... en dit selve soude Peter van Boedegem, zagere, Hermans
zone, gehadt hebben en hadde hi hem uiet soe vromelic gheproeft
in den brant ». Clementynboec.î0 100, Anlw. Arch., t. XXVI, p. 102.
EXÉCUTION DU JUGEMENT 179
à Ypres, on excluait de toute rémission ceux qui s'étaient
rendus coupables de voies do fait ou d'injures vis-à-vis des
échevins ou des fonctionnaires communaux (i).
IV. SANCTIONS.
Lorsqu'ils imposaient des pèlerinages à titre de pénalité, les
législateurs et les juges voulaient en assurer l'exécution par le
condamné ; dans ce but, ils décrétaient des peines subsidiaires
contre ceux qui n'observaient pas tous les points stipulés dans
la condamnation.
Ces pénalités subsidiaires atteignaient aussi bien le condamné
qui ne se mettait pas en route ou ne payait pas la taxe de rachat
dans le délai indiqué par le juge ou qui revenait dans la com-
mune sans avoir accompli son voyage, c'est-à-dire sans en rap-
porter un certificat authentique, que celui qui rentrait dans la
commune ou s'en rapprochait avant l'expiration du délai prescrit;
en un mot, elles frappaient celui qui n'avait pas rempli toutes les
conditions de retour, dont nous avons parlé précédemment.
S'il s'agissait de voyages imposés comme réparation à la partie
lésée, celle-ci devait se plaindre du non-accomplissement dans
un certain délai, sans quoi elle perdait ses droits (2). Au con-
traire le délinquant restait-il en défaut d'exécuter le pèlerinage,
auquel il avait été condamné à litre de peine légale ou statutaire,
les autorités agissaient immédiatement en vertu du premier
jugement et sans aucune autre forme de procès (3).
(1) Ypres : « Peilgrirnaigen oft beteringhen ghewyst oui tmesgryp
ghedaen jeghens scepenen ofte die ghestelt zyn in officien by scepe-
nen ne moghen niet verlateu zyn ». Cahier primitif de la coutume
d'Y près, L,XXXI, 2.
(2) Nainur XVe siècle : « Item, à cause de voyages deffalis, se aucun
estoit defallans de paie* aucun voyage duquel il servit obligié9 et il
n'en fuist point allez en sou voyagé au jour que aller en deveroit,
celui a cui il le deveroit le porreit faire adiouruer pour monstrer
l'accomplissement dudit voyage, touteffois qu'il lui plairoit, mais
qu'il n'eust tant attendu que on eust paiet les voiages une fois depuis
que ledit voyage dont vorroit ressuir fuist escheuz, car ou cas ou tel
resievant arroit tant attendu, dont n'en porroit-il de là en avant
plus avant resuir, eu quelque cas qu'il en puist le partie avoir ataint .
Répertoire Lodevoet, 1440, n° 18. Cfr ib., n° 197.
(3) Malines XVIe siècle : « Die.. . by vonuisse van scepenen go
demneert wort in eenige wegen te d oene, indien hy biiuien dei
l3o CHAPITRE VI
Le caractère de ces peines subsidiaires était très différent
d'après les endroits, mais surtout d'après la gravité du délit
pour lequel le coupable avait été condamné : ce sont tantôt des
peines corporelles, tantôt des peines de contrainte, tantôt de
simples amendes pécuniaires.
L'application des pèlerinages marquait, nous l'avons vu, dans
la jurisprudence communale des xive et XVe siècles, un
adoucissement dans le système de pénalités mis en usage par
les anciennes keures. On ne pourrait pourtant pas en inférer que
les peines corporelles, telles que la décapitation et la mutilation,
ne furent plus emplovées que dans la répression des crimes les
plus graves ; au contraire, elles continuèrent à subsister, mais
sous un autre forme, c'est-à-dire comme peine subsidiaire pour
le non-accomplissement des voyages imposés. Envisagés sous ce
jour, les pèlerinages nous apparaissent, non comme des peines
définitives, mais comme de simples moyens laissés au choix du
condamné pour échapper à une peine corporelle grave ; si celui-
ci néglige d'emplo}rer ce moyen, l'ancienne peine rentre en
vigueur dans toute sa sévérité (i).
Parmi ces peines subsidiaires nous trouvons tout d'abord pour
les crimes les plus graves, la peine de mort (2), l'amputation de
oft vryheit coempt ende gevangen wort eer hy de weghen gedaen
heeft oft zynen afcoope daeraf ghemaeckt, die wort, sonder andere
vonnisse, van zynen let oft leden gheexecnteert achtervolgende zyne
correctie oft vonnisse...». Coût, de Matines, t II, p 25.
(1) Anvers 7 novembre 1407 : « overmids dat eenige persoene
inder reysen, doen de stad lest vnte was, raed hadden ende hielden
in contrarien den Heere en der stad, ende sonder den Heere of der
stad te kennen te gheven, dairaen dat zy verboert hebben haer lyf
ende haer goet, vore welke persoene de stad van Antwerpen ghena-
dichlec mynen Heere van Brabant ghebeden heeft, die zyn gracie
ende ghenade dair toc ghekeert heeft met alsulker beternissen te vol-
stane als hier na volgt. In den yersten, Jan van Borsbeke sal. . .
doen een pelgrimagie ten hoeghen Roeme. . . Op syn hood ». Clemen-
tynboec, fol 98 v°, Aniw. Archievenblad, t. XXVI, p. 18.
(2) Anvers 7 novembre 1407 : « Op syn hood ». Clementynboec,
fol. 98 ssq., Antw. Arch., t. XXVI, p. 18 ssq. Maestricht. Statuts de
1380, art. 2. — Gand. 8 octobre 1515 : « ende dit up u hooft ». Corp.
Inquis., t. I, p. 512.
EXÉCUTION DU JUGEMENT iNi
la main droite (i), d'un pied (2), d'un doigt (3), des premières
phalanges (4), de l'une ou des deux oreilles (5), d'un oeil (6) ;
d'autres fois c'est la perforation de la mâchoire inférieur' |
pour les femmes on avait fréquemment recours à la peim
l'enfouissement (8). Dans certaines commune-, on laisse le choix
(1) Anvers 17 février 1406 (7) : « Adriaen Tene, mids. . . oploep...
te Roeme... op zyn eene hand ». Clementynboec, fol. 75 y, A
Arch. t. XXVI, p. 8. — Ib., 23 novembre 1411 : « op svn 1
liant, rechte ». Ib. t. XXVI, p. 98-99. — Liège. . ment de II
berg (1424) : « justichiés de diestre poing », n° 7. - - Maestricht.
Nouveau Privilège de 142S, art. 2. — Coutumes de Loo~, y" p. : « op
syn hand aff te slaen daer voer ».
(2) Charte de Tongres (1502), art. 21 : « verbneren cenon voet ».
(3) Anvers. 27 janvier 1409 (1410) : « Jau van Evere. . . onrede-
like worden. . . die der stad rechte van Antwerpen te 11a ghingen. . .
te Tryere. . . op zyueu dunie...». Clementynboec, fol. 105, Antw.
Arch. t. XXVI, p. 61. — Ib. , 23 novembre 1411 : op haren vorsten
viager », ib. p. 100 et passhn.
(4) Anvers 30 janvier 1409 (1410) : « Item Xeelken ende quade
Peerken. . . tsente Mathys te Trière... op hair vorste let ». Clemen-
tynboec, f° 105, Antw. Arc!:., t. XXVI, p. 61. — Ib.,23 novembre 1 n 1
« op zyn vorste let van zunen duime ». ib. p. 98. — Grimberghen.
Lande iiartcr, n° 44. — Malines Coutumes, II, 2;, : van zvnen let oft
leden geexecuteert », ib. II, 11, IV, 7.
(5) Anvers 23 novembre 1411 : « Katline, Ci. ris wyf van Cu<
gen. . . in overspele geseten. . . tsente Joes. . . op hare r oei
Clementynboec, f° 102 v°; Antw. Arch., t.XXVT, p. 102. — Ib. même
date : « Item, Heyle Xys, van Diest. . . mids dat een gheselle bi
haren toedoene doot ghesteken is ende mids onnutheden wille...te
Roeme. . . op de peyne van beide haren oeren ». Clementynboec, i°
104, Antw. Arch., t. XXVI, p. 109-110 cl
(6) Anvers 28 novembre 1411 : « Voûter Osle, overmits onnut-
scapen ende vêle onseden... Roeme... op de correctie van synre
eenre ogen ». Clementynboec, f° 104, Antw. Arch., t. XXVI, p. 107.
(7) Saint Trond 19 août 1454 : « Jacob Busket. . . tôt onsen Lieveu
Hère onbehoerlike woerde van blapheniien . . . eenen wech te St-
Peters te Romen..; ende ocht des also als voirscreven is nie4
dede, noch métier zonnen niet en po Le daer over inder 9tad
vere, off were in der stad queme, soe sal tnen hem een gheluyende
yser doer syn kinuebacke, ter eenre zyden in ende ter audre zyden
\\t steken ». Nachtegael, f° 85 v°, STRAVEN, Op. cit., t. I, p. 400.
i | Anvers Mai 1407 : « Betken van Brugge... eenen goeden
tnan vut [^ombarien tsyn af ghenomeu... ende syn gelt dieffe-
lic ghestolen. . . tOnser Vrouwen ter Veynstersterre. . . op ten put
waer sy de contrarie dede...». Clementynboec, f° 110 Ant
t. XXVI, p. 15.
l82 CHAPITRE VI
du châtiment subsidiaire aux autorités qui constateront le défaut
d'accomplissement du voyage (i).
A côté de ces peines corporelles, les tribunaux de la commune
prévoyaient aussi la rupture de la paix (2), la privation du droit
de bourgeoisie (3), et pour des délits moins graves un nouveau
pèlerinage (4) ou une amende pécuniaire (5), contre les délin-
quants qui n'observaient pas strictement les clauses du jugement
porté contre eux. Mais une des peines les plus fréquemment
usitées en ce cas était le bannissement; quoiqu'appliqué un peu
partout, il fut spécialement l'objet d'une législation minutieuse
et très développée au pays de Liège, vers la fin du moyen âge.
Certes les anciennes peines afflictives comme la mort, la sec-
tion du poing, le forjugement et l'aubaineté étaient toujours
restées en vigueur pour les coupables de crimes graves qui
avaient été condamnés à faire leur voyage de pied (6) ; mais
pour les autres délits, on établit un tarif de bannissement, cor-
respondant sensiblement à la gravité du premier délit et à
l'importance du voyage non accompli. Ainsi le délinquant
qui ne faisait pas route pour Walcourt dans les trente jours,
était atteint d'un bannissement d'un an; pour Vendôme, de
deux ans; pour Tours ou Rocamadour, de trois ou quatre ans;
pour Saint-Jacques de Compostelle, de cinq ans; pour Saiut-
(1) Anvers 28 novembre 141 1 : « op de peyne vander stad privi-
legien. . . op de correctie vanden stad ». Clementynboec, f° 103 v°,
Antw. Arch., t. XXVI, p. 105, 107.
(2) Anvers 7 février 1409 (1410) : « Gheert Meeus, mids. . . oploep. . .
ende ghedreygt met overdade boveu een seggen . . . tOnser Vrouwen
te Charters. . . Wair hi de contrarie dade van eenigen poynten by
hem, by zinen kindren of by yemende van zinen weghen, dat ware
of zoenbrake ende op vredebrake ». Clementynboec, f° 104 v°, Antw.
Arch., t. XXVI, p. 63-64.
(3) Saint-Trond 8 novembre 1421 : « op zyn poortscap ». vStraven,
Op. cit., t. I, p. 234. — Maestrieht. Nouveau privilège de 1428, art. n.
(4) Saint-Trond 27 septembre 1479. Straven, Op. cit., t. II, p. 68.
(5) Gand 16 novembre 1353 : « up den ïelven zeker ende borehtocht
die sy daer af ghedaen hebben ». de Pauw, De Voorgeboden der Stad
Gent, p. 65. — Ypres 25 septembre 1355 : « qu'il aurait fourfait et
seroit tenus envers le dit Jehans de C lb. par., à convertir au dit de
la loy de la Ville d'Ypre ». DE PëLSMaekëR, Op. cit., n° 409, p. 238.
(6) Statuts de la Cite de Liège (1328). — Statuts de 1366 à S. Troud.
— Statuts de Maestrieht (1380), passim. — Ier Régiment de Heinsberg,
art. 3, 6, 7, 9. — Paix de S. Jacques, XXII, y, 13, etc. pour Liège.
EXÉCUTION DU JUGEMENT 183
Nicolas de Bari, de vingt ans (i). Dans certains cas le coupable
était banni à perpétuité (2).
La juridiction du prévôt de la cathédrale de Liège étant essen-
tiellement canonique, le non-accomplissement d'un voyage
imposé pour méfaits entre femmes entraînait pour celles-ci l'ex-
communication, à laquelle répondait immédiatement le bannis-
sement de la part des maîtres et des jurés (3).
Nous avons constaté plus haut que les voyages au profit de la
commune, introduits à titre définitif dans la législation liégeoise
en 1394, étaient essentiellement rachetables; la préoccupation
fiscale, qui en l'occurrence avait inspiré le législateur, l'empê-
chait dès lors de comminer contre les délinquants qui n'acquit-
taient pas cette taxe, une peine de bannissement dont la com-
mune aurait été la première à souffrir (4). Il préféra donc con-
traindre le coupable à payer une amende pécuniaire, en le
mettant en prison.
Ainsi le coupable d'homicide, qui a été condamné à une répa-
ration au seigneur et à la partie lésée, et, en outre, à un pèleri-
nage en Chypre au profit de la commune et ne le commence ou
ne le paye pas dans les quarante jours qui suivent sa réconcilia-
tion, ou rentre dans la franchise de la ville avant d'avoir accom-
pli ou racheté le voyage, ce coupable est emprisonné et mis au
pain et à l'eau jusqu'au moment où il aura pavé cinquante réaux
pour le voyage en question (5); telles étaient les dispositions des
Statuts de Saint-Trond de 1366. A Liège, le Nouveau Ject de
1394 édictait dans le même cas outre une amende de quatre
florins l'emprisonnement au pain et à l'eau pendant six mois,
après quoi le délinquant est quitte devant le statut communal ;
(1) Statuts de la Cité de Liège (1328), art. 1-8, 20, modifies par la
Paix de S. Jacques (1487, XXVI, art. 15 à 23.
(2) Sairjt-Trond. Statuts de Jean d'Arckel (1366), n° 49, STRAVEN,
Op. cit., t. I, p. 83.
(3) Liège. Lettre du Prévôt (1349).
(4) La Paix de S. Denis (1382), décidait déjà que le coupable qui
ne paye pas la taxe de rachat dans les 30 jours fixés, est redevable d'un
voyage à Saint- Jacques, sans pourtant être att tint de son honneur »,
ce qui était le cas s'il n'obéissait pas au second commandement.
(5) Saint-Trond : « Ende weer 't dat die mesdedige bynnen der stadt
vryheit queme yer hy deese bevart gedaen hedde, die sal ghehauden
ende gevangen gesat werden, ten borne ende le broede, totter tyt
dat hy die stadt voer dien wech betaclt heeft vyftich riale ». Si
de Jean d'Arckel (1366), art. 82, STRAVEN, Op. cit., t. I, p. 92.
184 CHAPITRE VI
s'il s'agit d'un voyage à Saint- Jacques pour « mutilation, affou-
lure, fraitin ou tumulte agressif» le coupable s'en tire avec la
même amende et un emprisonnement de trois mois (1).
La prison était un moyen de contrainte efficace par lui-même ;
mais qu'arrivait-il quand le délinquant banni pour ne pas avoir
accompli son pèlerinage revenait avant le terme de son bannis-
sement ? A Liège, au moins pour ce qui concerne les délits
commis dans les églises, le condamné en défaut d'accomplir un
voyage en Chypre était banni pour cinq ans ; s'il revenait avant
il encourait l'aubaineté a cent ans et un jour (2); ailleurs, com-
me à Ypres, il subissait la peine de mort (3).
Ici encore l'esprit de fiscalité, signalé plus haut, fait son appa-
rition : la peine corporelle infligée comme sanction pour la non-
exécution des pèlerinages, est bien souvent rachetable elle-
même ; ainsi, à Saint-Trond l'amputation de la main se rachète
par cinquante réaux (4.) ; à Tongres, celle du pied, par seize
florins (5). Mais ailleurs on stipule expressément que la peine
corporelle subsidiaire ne peut se racheter à prix d'argent et que
le coupable reste toujours obligé à exécuter son voyage (6).
Ces sanctions n'atteignaient pas seulement les condamnés
eux-mêmes, mais aussi tous ceux qui sciemment hébergeaient,
nourissaient ou simplement négligeaient de dénoncer les cou-
pables qui rentraient dans leur patrie avant d'avoir purgé leur
(1) Liège. Nouveau ject (1394), artt. 2-3. Ces dispositions furent modi-
fiées dans la suite par le Régiment des bastons (1422), art. 11-12, et le
Ier Régiment de Heinsberg (1424), n° 31.
(2) Liège. 1er Régiment de Heinsberg (1424), n° 2. — Paix de
S. Jacques (1487), XXII, 2-3.
(3) Ypres 15 avril 1366 : « sour estre bannis III ans hors le pays
de Flandres, sour se tieste ». de Peesmaeker, Op. ci!., n° 598, p. 281.
(4) Saint Trond 5 mars 1492 : «... eenen wech int Cypers. . . ende
oft sy daer en boven in stadt oft vrieheyt quemen op lion rechte haut
oft vyftich rinsguldend aervoer. . . ». Keurboek, p. 283, n° 2, Sîra-
VEN, Op. cit., t, II, p, 177.
(5) Tongres. Charte de 1502, art. 21 : « ... verbueren eenen voet...
ende dien moegen sy eomponeren aan heer ende stadt met sesthien
Rinsgulden ende daertre betaelen die breuken daer voor sy gebannen
waeren ».
(6) Coutumes de Melines, II, 25 : « ... indien hy binnen der stadt
oft vryheit ccempt. . . die wort, sonder andere vonnisse, van zynen
let oft leden gheexecviteert, aclitoivolghende zyne correctie oft von-
nisse, ende en mach niet ghestaen metten gelde daertoe staende. Ende
daetboven veder ghebannen ende gliecorrigeert met ghelyck peyne...».
EXÉCUTION DU JUGEMENT 185
peine ; parfois les autorités promettaient une prime à ceux qui
livreraient ces condamnés (i).
Il faut croire que les délinquants, condamnés à faire des
pèlerinages, observaient en général assez bien les stipulations
du jugement porté contre eux, puisque dans les registres crimi-
nels nous ne rencontrons que rarement des traces d'application
d'une peine subsidiaire.
Nous citons à titre d'exemple le « jugement sur un homme
ayant failly de voyage h faire, que l'on coppa le hatriau ( 2 ) entre
11 pons de Herbatte », jugement prononcé par les échevins de
Namur en 1405.
Un certain Pierot le porteur avait blessé grièvement Anthoin-
ne Donneur le procureur. Le coupable, habitant de la Neufville,
territoire de Namur ayant une administration propre, fait accord
avec son maïeur pour un voyage à Saint-Jacques de Compostelie
à accomplir à jour fixe. Toutefois ayant pris congé, le délin-
quant n'entreprend pas son pèlerinage, mais se réfugie à
Jambes, s'y croyant en sûreté. Le maïeur de Namur, comme
voué du comte, fait arrêter Pierot à Jambes, tandis que les
échevins de la Neufville requièrent leurs collègues de Jambes
de leur livrer le coupable. Mais celui-ci, assisté d'un avocat,
prétend se trouver « en terre de refuige, bien séparée, frans et
ville de loy », à quoi les échevins de Namur répondent qu'il n'y
pas de refuge pour un malfaiteur dans tout le comté; ceux de
Jambes allèguent que le cas ne leur est pas encore arrivé, mais ils
finissent néanmoins par livrer le prévenu au maïeur de Namur.
Il comparaît « en cabaret à Namur, en plain siège des échevins »
et est condamné à avoir la tête coupée : son exécution eut lieu
à l'entrée de Herbat (3).
(1) Voir ce qui a été dit plus haut de la dénonciation, au chapitre
de la procédure. — Anvers 23 novembre 141 1 : « Ende wiene bynnen
dien X jare bynnen den Marcgrafscape ghevangen conste ende den
Heere gebringen, dien soude den Heere gheven t p. oudere grote
Clcaientvnboec, f° 100, Antw. nblad, t. X\M, p. 101.
(2) Hatriau = cou.
(3) Répertoire Lodevoet, n° 131, Cfr WODON, Op. cit., p.i 89. Voir
aussi deux cas à Anvers : 3 mai 1536. Correctieboek 1513-1568, f" 6i,
Antwerpsch Archievenblad, t. VII, p. 302- 39 ;. ^7. Ib. Vendredi-
Saint 4 avril 1540. NS et TOKFS, Geschiedenis van .hit:,;,
t. IV, p. 158-159 ; 5Ï5-51?-
CHAPITRE VJI
LES CONDAMNATIONS A DES PÈLERINAGES,
PRONONCÉES PAR LE TRIBUNAL DU RECTEUR DE
L'UNIVERSITÉ DE LOUVAIN AU NV* SIÈCLE.
Quoique dans cette étude nous nous soyons placé au point
de vue du droit communal de nos provinces, l'intérêt spécial que
présente l'histoire de l'Université de Louvain nous a paru un
motif suffisant pour jeter un coup d'œii sur la juridiction crimi-
nelle du tribunal universitaire et sur l'application que celui-ci
fit de pèlerinages dans la répression des délits commis par ses
suppôts.
Nous examinerons brièvement la composition de ce tribu-
nal et l'étendue de sa juridiction ; nous déterminerons ensuite
la procédure qui y était en usage ; enfin nous citerons quelques
exemples de condamnations.
I. LE TRIBUNAL
Dans la bulle de fondation de l'Université, datée du 5 décem-
bre 1425, le pape Martin V stipule que le duc de Brabant, le
chapitre de Saint-Pierre et le magistrat de Louvain devront
céder au recteur leur juridiction entière, au civil comme au
criminel, sur tous les suppôts de l'Université, et cela dans
l'année suivant l'expédition de la bulle, sous peine de nullité de
celle-ci (1).
(1) « ... Rector uuivcrsitatis studij huiusmodi pro tempore exis-
tons super omnia mcmbra universitatis eiusdem et illorurn servitores
tam in civilibus quam in criminalibus et alijs quibuslibet causis, nago-
cijs et excessibus, sine impedimentis quibusuiî, jurisdictionem, eoher-
tionem et eraendationem dictis duci, preposito decano, scolastico,
capitulo burgimagistris, scabinis et communitati communiter vel
LE TRIBUNAL DE L'UNIVERSITÉ DE LOUVAIN 1R7
Le magistrat de Louvain fit cette cession par acte du 6 sep-
tembre 1426 (1); le chapitre de Saint- Pierre en lit autant le
6 octobre suivant (2); le 7 novembre enfin , le duc Jean IV
renonça à sa juridiction (3).
Les choses ne marchèrent pas aussi facilement avec l'évêché
de Liège; il fallut que l'Université et la ville de Louvain protes-
tent avec vigueur contre les difficultés que, dès la première
heure évèque et archidiacres avaient suscitées au sujet de
l'exemption, surtout en matière bénéficiale, d'après les exigences
de la bulle de fondation (4). Un accord conclu en date du
12 novembre 1428 mit provisoirement fin aux conflits
En vertu du document pontifical, la juridiction appartenait
en propre au recteur, qui agissait dès lors comme chef de
justice (6); aussi, dans l'exercice de ses fonctions, il était entouré
de garanties spéciales quant à sa personne et à son honneur (7 ).
Il se faisait assister de cinq conseillers officiels ou assesseurs,
qui étaient choisis, un pour chaque faculté, le jour même de
l'élection rectorale (8>, d'abord trimestriellement puis semes-
triellement. Comme nous le verrons dans la suite, on pouvait
diuisim in eodem opido quomodolibet compétentes exercere valeat,
eoncedere, et jurisdictionera, cohertionein ac eorrectionem huius-
modi a se penitus abdicare et in Rectorem ipsum plenarie transfen
REUSENS, Documents relatifs à l'histoire de l'Université de
t. I, p. 7. Louvain, 1893.
(1) Actes de l'Université de Louvain, Tome I, éd. Reusexs, p. 3.
Bruxelles, 1903.
(2) Ibidem, p. 5.
(3) Ibidem, p. 7.
(4) 18 septembre 1427, ibidem, p. 13-20.
(5) Ibidem, p. 20.
(6) « Item statuimus quod rector . . . debeat exercere jurisdictionem
et judicium tenere ». Statuts de l'Université de Louvain antérieurs à
l'année 1459, publiés par A. Vax Hove, dans Bull. Corn. R. d'Hist.,
tome 76, Bruxelles, 1907, p. 610. C'est d'après ce texte que les réfé-
rences seront citées dans la suite.
(7) « Item quod si contingat rectorem propter aliquam sententiam
vel alium actum quemeu nque gesserit aut fecerit nomine suiofficii et
de conaensu universitatis, aliquam injuriam realem vcl verl
molestiam, controversiam aeu qualecumque incommodum pati,
antur singuli de uuiversitate commmiiter et divisim rectorem vindi-
care, defendere ac indempnem rel< . P- 614-615.
(8) « Tenebitur tamen rector in judicio suo capere unum as»
rem de qualibet facultate, si commode ficri potest ». Statuts, u° 6,
p. 610-611 ; Actes, t. I, p. 29.
188 CHAPITRE VII
en appeler des sentences du recteur, sous la réserve de certaines
conditions, devant un tribunal composé de cinq juges, quinque
Judices appellationum, qui pratiquement étaient élus de la
même façon que les assesseurs (i).
A l'instar des autres juridictions, le tribunal de l'Université
avait son officier criminel, le promoteur. Son rôle ne se bornait
pas à agir contre les délinquants, c'est à-dire à les accuser devant
le tribunal, mais aussi à rechercher les délits (2) ; il veillait à ce
que l'ordre et la sécurité régnassent parmi les membres de l'Uni-
versité. A lui incombait aussi la charge d'intenter des poursuites
contre les délinquants qui quittaient l'Université par crainte
d'être punis de leurs fautes (3-.
Mais, tandis que le promoteur avait dans sa compétence les
infractions à la loi commune ou aux statuts universitaires, tout
refus d'exécuter les sentences rectorales ou toute atteinte directe
aux privilèges du Studium générale étaient réprimés par l'ini-
tiative d'un personnage spécial : le conservateur des privilèges ''4).
A côté de ces juges, l'Université avait aussi son notaire qui
consignait par écrit les jugements portés par eux (5), et un
bedeau qui était chargé de citer les prévenus (6).
(1) D'après les Statuts (n° 10, p. 612) le recteur devait, lorsqu'on en
appelait de son jugement, convoquer le conseil de l'Université, qui,
pour chaque cas élisait les juges d'appel. En pratique cependant,
ceux-ci étaient choisis en même temps que le recteur et ses assesseurs.
Statuts, p. 612-613, n°te 3 ; Actes, t. I, p. 29 ; REUSENS, Documents,
t. I, p. 361.
(2) A son entrée en fonctions, il fesait entre autres le serment sui-
vant : <( Nulles excessus vel delicta occultabo, ymmo illos diligenter
inquiram et prosequar ». Statuts, p. 624.
(3) « Conclusit universitas quod quicumque . . . propter delicta
quecumque per eos commissa aut timoré correctionis habende diseur -
rerit aut ab universitate recesserit, qiiod promotor universitatis talem
citari facere et contra eum procedere teneatur. . .». Séance du 6 fé-
vrier i486. Voir Actes manuscrits de l'Université, t. III, fol. 138 v°
(Archives génér. du Royaume). Cfr Statuts, p. 660.
(4) « Si pars . . . non optemperaverit, poterit rector subsidium petere
a conservatore privilegiorum universitatis ». Statuts, p. 12. Au sujet
de son rôle voir A. Van HovE, Etude sur les conflits de juridiction dans
le diocèse de Liège à l'époque d'Erard de la Marck, p. 63, note. Louvaiu,
1900.
(5) « Item quod in tenendo judicium rectoris debeat adesse nota-
rius universitatis, qui omnia décréta, jussa, mandata ac diffiuitivas
sententias seu interlocutorias rectoris prothocollet, ne a partibn. nova
di9cordia super hiis oriatnr ». Statuts, p. 61 t.
(6) « Item quod citandus coram rectore debeat per bedellum univer-
sitatL citari ». Statuts, p. 611.
LE TRIBUNAL DE L'UNIVF.RSITL DE LOUVAIN 1S9
D'après la bulle de fondation et les actes de renonciation de
la part des autorités compétentes, la juridiction du recteur
s'étendait à tous les suppôts de l'Université, notamment à ses
docteurs, professeurs, étudiants, membres et à leurs servi-
teurs (1). En réalité, le recteur était le juge naturel de tous les
membres, professeurs, officiers et employés de l'Aima Mater,
de ses docteurs, licenciés et bacheliers, qui n'exerçaient pas un
métier manuel, des élèves inscrits, des religieux appartenant
aux couvents incorporés, des libraires et plus tard des typogra-
phes de L'Université. Le 9 septembre 1427, Martin V concéda
à tous ses membres le privilège de non evocando en vertu
duquel ils ne pouvaient êtres cites devant aucune juridiction
étrangère, s'ils consentaient à faire porter le litige devant le
tribunal du conservateur; cet acte provoqua d'ailleurs l'opposi-
tion de la cour épiscopale de Liège (2).
La juridiction rectorale comprenait en principe la connais-
sance et la répression de toutes les causes civiles et criminelles! 3 );
cependant après l'appel interjeté contre les privilèges de l'Uni-
versité par l'évêque de Liège et en vertu de l'accord survenu
enfin le 12 novembre 1428 entre celui-ci et les autorités univer-
sitaire et communale de Louvain, il fut stipulé que les crimes
les plus graves commis par les ecclésiastiques, tels que le con-
cubinage des clercs ayant reçu les ordres majeurs, l'homicide,
la mutilation et la blessure grave, seraient jugés par les juges
naturels des délinquants, c'est-à-dire par les ordinaires ou les
supérieurs d'ordre (4). Il se nble qu'un accord analogue ait été
(1) « . . .doctorum, magistrorum, scolarium, membrorum atque
.seruitorum eorumdem, siue clerici sine la3rci fuerint ». Bulle de fon-
dation, § Rursus, REUSKNS, Documents, t. I, p. 9.
(2) REUSENS, Documents, t. I. p. y/. Pour tout ce qui regarde le
privilège de non evocando, voir A. Vax HOVE, Etude sur les conflits. . .
p. 63-64, note.
(3) « . . . omnium et singulorum causarum et negociorum cognicio
atque decisio. . . et etiara de quibuscumque eriminibus et excessibus
correctio et punitio ac omnimoda super illis jurisdictio. . .». Bulle de
fondation, § Rursus, REUSENS, Documents, t. I, p. 9.
(4) «...quod ordinarii et prelati, prout ad illos de jure vel consue-
tudine spectat, de gravibus et enormibus excea^ibus cognoscant et
illos corrigant, ut puta vulneribus tentatis, mutilationibus membro-
rum, homicidiis, et notoriis presbiteronnn et aliorum in su-ris ordi-
nibus constitutorum focariatibu9, et aliis similibus vel majoribua cri-
minibus». Actes, t. I, p. 21 ; A. Van Hove, Etude sur les conflits. . .,
p. 63, note.
190 CHAPITRE VII
conclu entre l'Université et le duc de Brabant, en vue de
dissiper les difficultés que celui-ci mettait à renoncer à sa
juridiction d'après les exigences de Martin V; rien ne prouve
pourtant que l'Université aurait observé les clauses de cet
accord (i). Pratiquement, dans les cas les plus graves, le recteur
prononçait la peine d'exclusion contre le délinquant qui, par le
fait même, tombait sous la juridiction ordinaire du duc (2).
II. LA PROCÉDURE
Un membre ou un suppôt de l'Université avait-il commis
quelque excès, aussitôt le promoteur se procurait les éléments
d'une information aussi complète que possible au sujet du délit
ou au sujet de la rumeur qui l'entourait (3). D'après les plus
anciens statuts que nous possédons, cette information était
nécessaire mais aussi suffisante pour la mise en marche de
l'action judiciaire ; le promoteur poursuivait donc d'office les
délinquants. Mais une addition postérieure stipule qu'en dehors
des cas d'une atteinte quelconque à la juridiction, aux statuts et
aux privilèges de l'Université, le promoteur ne pouvait agir
que sur plainte de la partie lésée ou du consentement exprès du
conseil (4). Ces formalités remplies, il devait requérir le recteur
de réunir les juges (5) ; pratiquement pourtant, les séances du
conseil ayant lieu deux fois la semaine, le mardi et le vendredi,
habituellement au réfectoire du couvent des Augustins, c'était
dans ces réunions fixes que se traitaient le plus souvent les
affaires judiciaires (6).
(1) REUSENS, Documents, t. I, p. 28-29.
(2) « Si aliquis ut prius aliquem premissorum (quod absit) inter-
fecerit aut mutilaverit, talis sit 9imiliter privatus ». Statuts, p. 637.
(3) Serinent du promoteur : « . . .nullam causant contra aliquem
incipiam uisi de excessu vel delicto aut saltem de fama fuero plene
informatua ». Statuts, p. 624.
(4) « Sit ejus (promettons) officium prosequi contra quoscumque
jurisdictionem universitatis, statuta aut ejus privilégia quoquo modo
turbantea, quandocuique hoc aibi constiterit. In aliis autem causis
non se ingeret nisi parte petente et de pleno et expres9o universitatis
consensu ». Statuts, p. 645, et ibicleyn note 2.
(5) « Item rectorem requirere quando expediena est, ut super hoc
congregationem universitatis faciat ». Statuts, p. 625.
(6) « . . .rector bis in ebdomada, videlicet in die martis et veneris,
si juridici fuerint, in loco ad hoc deputato et hora competenti, debeat
exercere jurisdictionem et judi< ium tenere ». Statuts, p. 610.
LE TRIBUNAL DE l/UNIVERSITÉ DE LOUVAIN igl
Le promoteur chargeait en même temps le bedeau de citer
personnellement le délinquant à comparaître à jour et heure
fixes; si celui-ci restait en défaut et que le bedeau affirmait
l'avoir cité en due forme, le prévenu était regardé comme
contumace et on lui appliquait de ce chef une amende pécuni-
aire, qui allait croissante après la seconde et la troisième
citation ; si cette dernière restait infructueuse, on agissait
contre lui d'après les principes qu'on jugeait les plus conforma
au droit en vigueur. Notons pourtant que le prévenu pouvait se
faire représenter par quelqu'un d'autre (i).
Mis en présence de ses juges, le coupable était nominalement
accusé par le promoteur des faits mis à sa charge d'après le
résultat de l'information (2). Quant au procès, il ne comportait
pas de nombreuses formalités et les statuts eux-mêmes re<
mandaient de ne point tirer les affaires en longueur, mais de les
terminer au plus tôt (3). L'accusation et la défense produisaient
leurs preuves, et c'est d'après leur valeur que le recteur pronon-
çait «pro posse et nosse» la peine qu'il jugeait conforme aux
statuts (4), non pourtant sans avoir pris au préalable l'avis de
(1) « ...ne judieium reetoris fiât delusorium, quod si eitatus légi-
time et personaliter apprehensus ad comparendutn coram rectore,
super qua citatione facta stabitur relacione bedeUi, non comparuerit
per se vel per aliumin judicio reetoris in hora < itationis, talis censebitur
contumax, pro qua contumacia ille contumax incurrat penam unius
grossi antiqui aut quatuor placcarum pro eodem. Quod si adhuc et
secundo eitatus aninio pertiuaci voluerit comparere, incurrat penam
duormn grossonun aut octo placcarum. Et si tercio eitatus sit et non
compareat, penam unius lloreni Renensis incurrat, et tune nichilo-
minus contra eum procedetur prout ordo juris dictaverit ». Statuts,
p. 611-612.
(2) « Item (officiiun promotoris erit) accusare eos nominatim quos
noverit facere vel fecisse contra statuta et 1 universitatis
ac mandata reetoris». Statuts, p. 625.
(3) A sou entrée en fonction le promoteur promettait en effet :
'( ...neque causant initam dimittam vel indebite protraham nisi de
mandato domini reetoris et universitatis ». Statuts, p. 624.
(4) « In quo judicio débet procedi de simplici et piano ,sine strepitu
et longo processu judiciali, ita quod omnis causa coram eo agitanda
terminetur quanto citius rector poterit. Teneatur autem rector juxta
allegata et probata, attentas privilegiis et statutis universitatis, juste
et eque pro posse et nosse judicare Statuts, p. 610. Cette dernière
recommandation se rapproche singulièrement tic celles que les chartes
communales adressaient aux échevins, leur prescrivant de ju. •
d'après leurs cinq sens ou au moins de faire de leur mieux. (Voir ce 4111
a été dit plus haut des échevins).
10,2 CHAPITRE VII
ses assesseurs. Se conformant au principe de l'ancien droit
germanique, qu'un délit contre les personnes était censé léser
deux intérêts différents, celui de la victime et celui de la
communauté à laquelle celle-ci appartient, le tribunal universi-
taire exigeait du délinquant une double réparation, à la partie
lésée et à l'Université elle-même, si la victime était un de ses
suppôts ou un concitoyen (i).
Parmi les peines proprement dites, la plus rigoureuse était
certes l'exclusion de l'Université, c'est-à-dire la privation des
privilèges concédés à ses membres et à ses suppôts, qui remet-
tait par le fait même le coupable aux mains des juridictions
ordinaires. Au rang des peines moindres nous trouvons les
pèlerinages et surtout les amendes, qui étaient de loin les plus
courantes ; comme celles-ci constituaient une source de revenus
assez considérable pour l'époque, il est naturel que les statuts
déterminent exactement quelle part revient dans chaque cas
aux divers membres et fonctionnaires du tribunal universi-
taire (2). Les pèlerinages eux-mêmes étaient, comme nous le
verrons plus loin, ordinairement rachetables ou quand les juges
voulaient exclure ce rachat, ils faisaient preuve d'une clémence
assez grande, puisqu'ils soumettaient l'exécution à un nouvel
ordre de leur part ; cet ordre souvent n'était pas donné.
Lorsqu'il s'agissait d'une affaire entraînant une amende
supérieure à trois griffons, le condamné pouvait interjeter appel
de la sentence rectorale, mais en observant certaines formalités.
Il devait, en effet, consigner son appel par écrit et dans un délai
de trois jours suivant sa condamnation en délivrer une copie au
recteur en présence du conseil ; il était en outre obligé de
verser un florin du Rhin en faveur des juges d'appel. Mais alors
que dans les cours ecclésiastiques le juge, dont la sentence avait
été fiappée d'appel, renvoyait l'affaire au tribunal de seconde
instance par des lettres appelées apostoli, le recteur était
uniquement tenu à réunir, dans trois autres jours, les cinq
juges d'appel. Ceux-ci examinent le cas d'appel et sont obligés
de porter une sentence définitive dans un nouveau délai de dix
(1) « Si magister aut scolaris aut quicumqiie de gremio universitatis
existais aliquem de ejusdem gremio ant civem vel opidamvm vulne-
raverit, aut violenciam circa domuin eorumdem, aut iusultus fecerit,
talis primo et aute omuia satisfaciet leso et universitati ad arbitrium
universitatis ». Statuts, p. 637.
(2) Statuts, § de pénis, p. 641 et 646.
LE TRIBUNAL DE L* UNIVERSITÉ DE LOU\
jours; sous peine d'exclusion et d'une forte amende, il n'esl
permis à personne d'en appel de ce dernier jugement. Au
reste tout appel qui est déclare abusif par les juges compét
vaut à son auteur une amende d'un florin du Rhin (i).
Au cas où le condamné n'exécutait pas la sentence portée
contre lui, les statuts mettaient à la disposition du recteur des
sanctions d'importance diverse. C'était tout d'abord une amende
pécuniaire; ultérieurement le recteur réclamait l'intervention
du conservateur des privilèges, qui expédiait au condamne des
lettres comminatoires, lui enjoignant d'obéir au jugement du
recteur dans un délai fixe, sous peine d'excommunication.
Si même ces lettres, dont on ne pouvait d'ailleurs pas interjeter
appel, restaient sans effet, le recteur pouvait, avec le consente-
ment du conseil, demander aide au maïeur de Louvain. Celui-ci
envo)Tait alors deux sergents accompagner le bedeau au domi-
cile du réfractaire pour prendre des garanties mobilières ou
même si les circonstances l'exigeaient, pour l'arrêter et l'empri-
sonner jusqu'à ce qu'il eût donné itisfaction (2).
(1) « Item quod in causis trium griiïonum aut infra, nulli li
appellare a rectore, sub pena unius fioreni Renensis et privatioue. In
causis autem majoris sxunme, poterit gravatus infra triduum ad uui-
versitatem, in scriptis, in presencia rectoris appellare ac copiam appella-
tionis rectori tradere. Cui appe tor teneatur pro apo
respondere quod super hoc fatiel mena uuiversitatis, quaui
congregationem rector infra triduum a die appellationis teneatur
facere, in qua congregatione universitas det députâtes ad causani appel-
lationis examinaudam et infra decem dies a die deputationi.; finien-
dam. A qua sententia deputatonun non poterit aliquateaus appellari
sub pena privationis et decem coronarurn rectori et universitati appli-
candarum ». Statuts, p. 612-613 et ib., p. 612, notes 2-3.
(2) « Item quod rector in exequendo suas sententias ac suuin
cium, débet mandare sub certa pena pecuniaria parti victe, ut pa
mandatis suis. . . Et si pars illa non obtemperavit, poterit rector sub-
sidimn petere a conservatore privuegiorurn universitatis, ejus oiïïcium
iinplorando ut litteras monitorias emittat contra partem inobedientem
quatinus infra certum tempus pareat sententie vel alteri decreto recto-
ris, sub pena excommunicationis. A quibus litteris subsidialibus non
liceat alicui suppositorum nostrorum appelare sub pena perjurii.
Poterit eciam rector si universitati videatur expediens pelure subsi-
dium a villico opidi, ut ipse rectori nuncios suos prestet, qui un
bedello imiversitatis nomine rectoris inobedientem piguoribus c
vel persona propria inobedientis incar< • | >rout expedieucius
fuerit, ad parendum mandatis rectoris compell . Statuts, p. 614.
194 CHAPITRE VII
III. LES PÈLERINAGES
Pour donner une idée de la manière dont le tribunal rectoral
appliquait des pénalités de pèlerinages, dans le premier quart
de siècle de son existence, nous citerons les exemples que nous
fournissent la partie des Actes et procès-verbaux des séances
tenues par le conseil de l'Université de Louvain qui a été
publiée jusqu'à ce jour (i).
Le premier exemple que nous rencontrons est celui de Jean
de Naeldwyc, licencié es arts, qui avait été condamné — les
Actes ne mentionnent pas le motif — à un pèlerinage aux Trois-
Rois à Cologne; à la séance du 2$ octobre 1433, il demande de
pouvoir remettre son voyage jusqu'à Pâques; mais deux asses-
seurs du recteur s'y opposent; il renouvelle sa supplique le
13 février suivant et obtient le délai demandé; un mois après il
prie l'Université de le dispenser ou au moins de lui accorder une
nouvelle prolongation; cette dernière faveur lui est concédée.
Il semble que Naeldwyc ne tenait pas à exécuter son pèlerinage,
puisque en mai de la même année il demande au conseil de
vouloir déterminer la taxe de rachat de son voyage ; aucune
réponse n'étant donnée, le promoteur propose en son nom de
payer trois florins du Rhin, ce qui est enfin accepté (2).
En 1437, un maître es arts, Jean Kerreman avait maltraité,
jusqu'à l'effusion du sang, le bedeau des facultés de droit, nom-
mé Mathias; l'affaire fut portée devant le conseil, qui décida
de lui infliger une punition exemplaire « quod ceteris cedat in
exemplum ». Le 9 août 1437, on le condamna à faire dans un
mois un pèlerinage au Saint-Sang à Wilsnack, quitte à payer
à l'Université dix florins du Rhin. Alléguant des raisons d'em-
pêchement sérieux il demanda et obtint un délai de deux
mois (3).
On le voit, les relations entre les divers fonctionnaires du
studium générale n'étaient pas toujours ^empreintes de cour-
(1) Actes et procès-verbaux des séances tenues par le conseil de
l'Université de Louvain, Tome I, (31 mai 1432 — 21 septembre 1443),
éd. E. REUSENS, Bruxelles, 1903 ; Tome II, (26 mai 1445-17 avril
1455), éd. A. Van Hove, Bruxelles, 1919.
(2) Séances des 23 octobre 1433, 13 février, 19 mars, 26 et 28 mai
1434. Actes, t. I, p. 109, 123, 124, 146, 147.
(3) Séances des 31 mai et 9 août 1437. Actes, t. I, p. 298 et 308.
LE TRIBUNAL DE L'UNIVERSITÉ DE LOUVAIN 195
toisie. En 1448, c'était un messager « ctirsor » de l'Université,
Jean de Palude, qui attaqua le notaire Adrien Zay; de l'avis du
conseil, le recteur prive le coupable de tous ses honneurs et
privilèges ; trois ans plus tard un receveur du duc de Brabant se
fait l'interprète du condamné pour implorer sa réadmission.
Après avoir instruit l'affaire, les juges y consentent à condition
qu'il vienne leur demander pardon à genoux, qu'il fasse célébrer
pour le repos de l'âme d'Adrien Zay, décédé entretemps, une
trentaine de messes en l'église des Dominicains, à l'autel le plus
proche de la sépulture du défuut, et qu'enfin il entreprenne un
pèlerinage à Rome, lorsqu'on le lui dira (1).
Un des cas les plus mémorables est certes celui de Jean van-
der Elst alias Voghel, serviteur du maïeur de Louvain, Nicolas
de Saint-Géry, qui, en 1448, s'était livré à toutes sortes d'injures
et de voies de fait à l'égard de suppôts de l'Université. A la
demande de son maître, Voghel obtient grâce du conseil, à
condition qu'il vienne prier merci à genoux et qu'il fasse un
pèlerinage à Milan dès qu'il en sera requis. Mais bientôt il se
livre à de nouveau excès en injuriant le promoteur et un étu-
diant, Gauthier van Goidsenhoven; on examine l'affaire et on
décide de contraindre l'individu à exécuter le voyage à Milan,
auquel il avait été condamné antérieurement. Mais au moment
où le recteur, Gerlac Bont, lui donne cet ordre, Voghel refuse
et l'injurie de la pire façon, disant entre autres : « Si vous
voulez que je fasse ce voyage vous devrez me lier sur une char-
rette et me transporter ainsi à Milan, sans cela je n'irai pas» !
Au sortir de la réunion, il attend le recteur à la rue et lui crie
en public : « Eh bien 1 la charrette est-elle prête? » Il aurait
aussi, lui reproche-t-on, manifesté son intention d'administrer
une correction exemplaire aux plus grands dignitaires de l'uni-
versité tels que le recteur et le promoteur. Cette fois la mesure
est comble, le coupable est arrêté et emprisonné par les ser-
gents de la ville et excommunié par le conservateur des privi-
lèges. De plus, on demande au Conseil ducal de vouloir indiquer
une correction efficace ; la réponse, adressée au maïeur et au
conseil de la ville et signée do 1 evêque de Cambrai et du Sire
de Croy, conseillait de livrer le coupable au service des galères
princières à Anvers ; mais des amis de Voghel parviennent à élu-
(1) Séances des 17 juin 1448, 21 décembre 1451 et 6 mai 1452.
Actes, t. II, p. I2i, 219, 230.
196 CHAPITRE VII
der ce projet. L'Université décide de conférer avec les délégués
de la ville et avec le maïeur et de profiter de l'occasion pour
entourer dans l'avenir de garanties sérieuses la personne et
l'honneur de ses dignitaires et de ses suppôts. Quant à Voghel
lui-même, voici ce qui fut arrêté : avant de quitter la prison il
dut jurer ne plus jamais offenser en paroles ou en actes quel-
qu'un de l'Université; s'il venait à violer ce serment par des
actes, ne fût-ce qu'en versant une goutte de sang, il subirait la
peine capitale ; si l'injure se bornait à des violences légères ou
à des paroles, il se trouverait devant l'alternative ou de finir ses
jours en prison ou de partir du duché de Brabant, au son de la
cloche, en exil perpétuel. En outre il dut accomplir, le jour des
Rameaux, 6 avril 1440, une série de cérémonies des plus humi-
liantes et aller implorer le pardon du recteur, à l'entrée du cou-
vent des Augustins et celui du conservateur, devant son abba}-e
de Saint-Gertrude; ce dernier le releva de l'excommunication.
Après une dernière protestation de repentir et de fidélité envers
le conseil de l'Université, réuni dans sa chapelle particulière en
l'église Saint-Pierre, le condamné dut se mettre en route pour
Milan; la ville lui imposa en outre un bannissement de deux
ans au delà des Alpes; les autorités académiques, mues de pitié,
firent des efforts inutiles pour réduire cette peine à un an.
Cependant, à la séance du 15 octobre 1450, trois louvanistes,
Jacques Gruter, Gaspar Absoloens et le receveur du duc de
Brabant à Louvain, Félix de Hont, viennent supplier le conseil
de faire grâce à Voghel de la demie année de bannissement qui
lui restait, attendu que la peste règne en Italie et eu égard aux
bonnes dispositions qu'il a montrées dans l'accomplissement de
sa pénitence ; ils assurent d'ailleurs qu'il exécutera la peine
qu'on voudra bien lui indiquer. Après quelques pourparlers, on
décide de faire comparaître l'intéressé et de lui indiquer alors
ce qu'il aurait à faire.
Tout portait à croire, semble-t-il, qu'après une pénitence
aussi salutaire, Voghel s'était amendé ; il n'en était rien. Le
procès-verbal de la séance du 29 mai 1451 nous a gardé l'écho de
paroles menaçantes qu'il aurait encore proférées à l'endroit des
autorités académiques ; nous ne connaissons malheureusement
pas la suite de l'affaire, si ce n'est que le conseil ordonna une
enquête (1).
(ij Sur le cas Voghel voir les séances des 18 juillet, 20 et 31 août
1448, 21 février, 13, 18 et 21 mars, 6 avril 1449, 15 octobre 1450,
LE TRIBUNAL DE L'UNIVERSITÉ DE LOUVAIN 197
Entretemps un autre serviteur du maïeurde Louvain, nomm
Jean Boen, qui lui aussi avait attaqué Gauthier van Goidsenho
yen, fut condamné à faire un pèlerinage à N.-D. de I
(Somme), lorsque l'Université l'en requerrait; et de fait il fu!
sommé d'exécuter son voyage à l'occasion d'excès commis ch< /
le curé de Roosbeek (j).
Un exemple caractéristique de la rigueur avec laqu
l'Université défendait ses privilèges, nous est fourni par le cas
du sénéchal de Hoogstraeten, Jean de Bevershi arem-
ment pour empêcher d'exécuter contre un de ses subordonnés
les ordres du conservateur des privilèges, cet officier avait fait
emprisonner pendant dix jours le messager de l'Université, qui
s'était présenté dans sa contrée. Le 16 mars 1451, l'Université
condamne Beversluys à venir lui demander pardon à Louvain,
à accomplir la même formalité à Hoogstraeten, devant les
échevins, le promoteur et le pléban et à faire placer dans l'église
de ce lieu un vitrail représentant S. Pierre avec l'écusson de
l'Aima Mater et S'" Catherine avec son propre écu de sénéchal.
En outre il devra entreprendre un pèlerinage à Rome, dès qu'il
y sera requis. Deux ans après il supplie l'Université de lui faire
grâce de ce voyage ; ceci ne lui est pas accordé, mais on se
borne à lui assurer que l'exécution de ce voyage ne sera exigé
de lui qu'à une nouvelle faute de sa part (2 ).
Diverses autres condamnations à des pèlerinages furent
portées par le tribunal universitaire, mais les renseignements
que nous fournissent les Actes ne suffisent pas à nous en donner
une idée exacte. Ces documents sont en effet d'importance
très inégale ; parfois ils constituent de simples records, servant
à rappeler les détails nécessaires à l'instruction d'une affaire et
ne mentionnant pas les faits, qui à ce moment étaient connus
de tous, mais nous échappent maintenant ; parfois pourtant, et
c'est le cas pour Voghel, des procès-verbaux détaillés sont
dressés à part et annexés aux Actes.
29 mai 1451. Actes, t. II, p. 126, 129-130, 139, 143-146, 183-184, 201.
Voir surtout le procès-verbal de la punition, reproduit dans
t. II, p. 146-149. — Cfr L. Vander Essen, De straf-en rechterlijke
zoeningsbedevaarten. . ., p. 30-32.
(1) vSéancesdes3i mai H49et23 août 1451. Actes, t. II, p. 154 et
(2) Voir séances des 16 mars 1451, 20 mars, 6 mai et 11 décembre
1452, 13 janvier 1453. Actes, t, II, p. 194-195, 224, 226, 229,256, 260-
261. Voir REUSENS, Documents, t. I, p. 514.
198 CHAPITRE VII
En conclusion, il semble que les pèlerinages imposés par le
tribunal du recteur de l'Université de Louvain aient un carac-
tère bien net. L'honneur de l'Université a-t-il été lésé par une
atteinte directe à ses privilèges ou un attentat contre la personne
d'un de ses membres, le tribunal exige une réparation éclatante
en imposant au coupable un vo3''age lointain, quitte à ne pas en
presser l'exécution ou à en permettre le rachat ; le fait seul de
la condamnation devait déjà lui paraître suffisant, et c'est en
cela que ces pèlerinages se différencient de ceux qui furent
prononcés dans les autres tribunaux.
ANNEXES
Sous la lettre A nous publions tout d'abord des extraits du
Correctieboeck vander stadt van Lyere , manuscrit d'écriture
cursive du XVe siècle, composé de cent et neuf feuillets de papier
(0.30x0.22 m.), dont plusieurs blancs, qui se trouve aux
archives communales de Lierre (i).Il contient des sentences pro-
noncées par les échevins de Lierre entre les années 1401 et 1484
et comprenant presque toutes des condamnations à des pèleri-
nages. A la suite de ce registre on a relié un certain nombre
d'étroites bandes de parchemin ou de papier, qui constituent
des certificats délivrés aux pèlerins par les autorités des lieux
visités ; nous les reproduisons pour la plupart, parmi les autres
attestations de voyages accomplis, sous la rubrique B.
Enfin sous la lettre C, on trouvera les principales listes indi-
quant le tarif de rachat des divers pèlerinages, notamment celles
d'Audenarde, de Gand, d'Alost, de Termonde et de Louvain ;
celles d'Audenarde et de Louvain seules sont datées ; les autres
appartiennent au XIVe ou au XVe siècle.
Il a paru préférable de transcrire intégralement ces listes
d'après le texte des recueils indiqués, sans y rien changer, par
ce qu'il n'est pas possible d'indiquer la part qui revient a la
corruption du langage, à l'orthographe défectueuse du scribe et
à la transcription fautive de l'éditeur. Pour permettre l'identifi-
cation des noms de lieux, on a placé entre parenthèses à côté
de ceux-ci des numéros renvoyant à la liste systématique du
chapitre V de ce travail ; les noms qui n'ont pu être indentifiés,
sont imprimés en caractères italiques.
(1) J. B. STOckmans en a donné une analyse très défectueuse
dans le Bulletin de l'Académie royale d'Archéologie de Belgique, Anvers,
1906.
[1]
ANNEXE A
Extraits du
CORRECTIE BOECK VANDER STADT VAN LYERE INÏ JAER XIIIIc BEN.
Onse lieve genadige vrouwe van brabant, overmid9 alrehande
felsen meren ende zaken die zy van vêle liden ende dicwile gehoirt
heeft ende haer dagelycx geseeght worden aise van alrehande onse-
den fortsen ende qnaden ende sassemer voeren die nu in hare stad
van lyere beide bi dage ende sunderlinge bi nachte van sommigen
lieden bedreven ende gehanteert worden, dat zy niet langher ghedoe-
gen en wille daar om heeft zy haren drossate minen heren Janne
van Immersele met haren brieven geseindt in hare stadt van Lyere
om dese onsede te verhueden bi rade van hem ende vanden Scouthet,
vanden Scepenen ende den rade, ende den geswoirnen vanden
ambachten van hare stad gemeinlic, niet wt eenigen versueken of
aenbrengen van hare stad rade van lyere of van yemanne anders
van haere stad, maer wt haer selven, ende bi haren gocden edelen
rade, want zy haer stad van Lyere, ende haer goede liede aldaer zere
mint ende liefheeft ende zere begheert ende grote meyninghe daer
in heeft, dat haer voirs. stad ende haer goede liede aldaer in rasten
in goeden vreden ende in neringen bliven moghen, also zy tôt her
toe geweest hebben. Ende waer onss. lieven genadigen vrouwen
begeerte ende meynmge es, dat men die misdadige ende overgangers
dese zaken hanterende corrigeren also men te Bruessel end in haren
anderen steden bi rade van hare, ende van haren steden doet, so
siin somige personen hier na genoemt haer correctie ende beter-
nisse, bi rade van den drossate vanden Scouthet vanden Scepenen
ende rade der gemeynde stad hier gheset na haer misdaet, die men
wale ter waerheyt weet ende wale bevonden siin van onseden ende
van sassamen ende oneersamen wandelingen, die zii inde stad van
lyere beide bi nachte ende bi dage, beide in tavernen ende elwter
dicwile ende menichwerven bedreven hebben.
Item inden yersten Wouter ende Willem vandenberghe gebrueders
die selen gaen of trecken voir dese mesdaet onss genadigen vrouwen
van brabant ende hare stad van lyere teren ende te beternissen,
dats verstane Wouter voirs. in Sypers ende Willem siin brueder te
S. Claeus ten oestene baren voirt meer als zii dese pelgrimagie gedaen
selen hebben selve metten live, ende daer af goede brieve bracht heb-
ben also daer toebchoirt so selen zii daeren boven noch beteren den
heren ende sinen moet daer af hebben ende si selen de stad daer
boven noch doen maken ende dat wel verborghen elc van hen beiden
twe roeden muers eer si nemmenneer weder binnen den païen van
brabant comen selen op haer hoot waer men se binnen den païen
van brabant eer voude.
ANN'RXE A 201
Item so sal Jan van voshole om donsede ende om de misdael die [2]
hi oie inde voirs. stad bedreven heeft trecken te beternissen ende
teren ons9. genadige vrouwen ende hare stad voirss. te S. Jacops in
Galissien, ende daer boven mime vrouwen beteren ende der stad
roede muers maken ende niet weder in brabant comen hi eu b
dit ghedaen, ende den muer doen maken op siin lioet in aider ma
nieren aise voeren vanden kinderen vanden berghe vercleert 1
Item so sal hernie van trieht voir donsede ende <!<• misdaet, «lie [3]
hi inde stad van lyere bedreven heeft trecken in sypers ons
dig • r vrouwen van brabant ende der stad van lyere
svonen ende als hi dese pelgrhnagie gedaen heeft ende daer
twe jaer gewoent heeft, ende daer af goede brieve bracht heeft
daer toebehoin iy daeren boven noch beteren den her<
siuen moet hebben ende hi sal der stad daer boven noch doc:1
ende dat wel verborghen ,twe roed» hi nemmenneer
wedei den païen van brabant comen sal op siin hoet v
men eer binnen den païen voiras, vonde.
Item Jan Dregghe, overmids donsede, die hi oie inde voirs. stad [4]
bedreven heeft, sal hi trecken te groten rome, endeu den hère d
boven beteren, ende een roede muers der stad doen maken in aider
manieren ende op de payue gelyc aise vanden anderen voirscreven es.
item hernie ende Jan mathys kinderen vauder Ryt, ovremids [5]
haer sassem wandelinghe ende den onsede die zy inde stad van lyere
bedreven hebben, so selen zy trecken ons dige vrouwen van
brabant ende hare stad voirs. teren te S. Jacops in Galissien, ende
als zy dese pelgrhnagie gedaen selen hebben s> ten lyve, ende
daer af goede (brieven) bracht hebben also da< tioirt, s 1 selen
zyt daeren boven noch bete(reu) den hère ende sinen moet heb
ende si selen der stad daer boven noch doen maken, ende dat wel
verborghen ele van heu een roede muers eer sy nemmermeer weder
binnen de païen van brabant comen selen moghen, op haer I
waer mense binnen den païen voirs. eer vonde.
Item si sal Bertel vander perre Overmids sinre quaden sassemer [6]
waudeliugen ende onsede die hi binnen lyere bedreven heeft so sal
hi trecken onssc genadige vrou 1
stad teren, tonss. vrouwen b de daer eu boven den
hère I stad een roede ne ivel ver-
borghen ende niet weder indeu païen van brabanl comen dit 1
ien, op siin hoet in aider manieren als.' voir-
si 11 en es.
Item Claeus de Smet sal trecken te I
brenghen ende oven den hère beter<
muers maken ende d'.' wel verborgheri &
brabant comen sal, op de payne ende m aider manieren als»
anderen voirss. es.
202 ANNEXE A
Item so selen dese voirscreven personen aile gader te sonneschine
van desen daghe trecken buten den païen van brabant, ende daer
binnen niet weder comen elc en hebbe vooldaen daer hi op gescreven
staet, ende so wie of so wat mensche, die inder stad of inden byvanc
geseten es, enich vanden voirscreven personen nadesen voirss. dach
huysde of hoefde si en hadden voldaen gelyc voirscreven es, die souds
siin op die selve pelgrimagie ende op den heren te beteren, ende op
den nuer te makene, der stad daer die persoen die hi huysde op geset
es, ende des en sal niement om iemens beden wille verdrach hebben
Dativm et actuin anno XIIII' primo XXIa die mensis februarii.
[13] De Covrectie van henricke den hacker.
Dit es de beternisse die de marcgrave ende de scouthet ende de
scepenen ende die geswoirnen ende die guide vander stad van lyere
ghemeynlic ende eendrachtichlec henricke den backer anegeseecht
hebben ende aensegghen te doene ende onder hen eendrachtichleke
overdraghen siin dat hi doen sal sonder enich verdrach of verlaet
om der misdaet wille di hi jeghen den hère jeghen de stad ende
jeghen de gulden misdaen heeft, aen henricke den valkeuer die ouder-
man inde gulden te lyere es, overmids dat hi em stac ende quedste
om tsrechs wille om dat hi een vonnisse gewyst haddemet sine mede-
gesellen, dies hem de deken maende, dat desen henricke den backer
niet mede en ginc.
Inden yersten so sal dese henric de backer voirss. den hère beteren
van siinre heerlicheyt, ende voirt so sal hi der stad beteren. Ende
daer boven sal hi der stad teren ende te beternisseu doen ende trecken
enen wech te sente claeus ten oestenenbaren ende daer af goede
brieve bezeghelt brenghen dat hi selve die pelgrimagie gedaen heeft,
om dese selve zaken wille, ende niement anders voir hem. ender daer
af sal hi oie enen eet doen aise hi weder comt op dats de stad be-
gheert, ende desen wech sal hi porren tusschen dit ende sint lauwe-
reyns misse mids zomer of hi mach voir desen wech der stad doen
maken vier roeden muers tusschen dit ende s. laureys misse voirss.
ende voirt sal hyt der gulden beteren na hare gulden renht, ende dit
sal hi al voldoen ende volvueren, of goeden borghe daer ai setten
dat te voldoene ende te volvuerene, ende dese henric en sal nirnmer-
meer binnen de stad of byvanghe van lyere comen hi en hebbe dit
al vodaen, of hi en hebbe wel verborcht inde manieren aise voirseit es,
ende waer hi binnen de stad of binnen den byvange voirss. quame
hi en hadde voldaen of wel verborcht aise voirss. es, so soude hi hiereu
boven dat noch voirt beteren den hère ende der stad tôt haren seg-
ghene. Datum anno XIIIIC IIII des anderendaechs na s. thomaes
dach.
fl 81 ^e C°rrectie van bastiin godeveyts.
Item geloefde bastiin godeverts de stad teren ende te beternissen
enen wech te doen tons, vrouwen tsarters ende dien te porren tus-
schen dit ende paesschen naest comende of een halve roede muers
te doen makene voir alsulke sasseme woirde als hi ten geswoirnen van
siuen ambachte gesproken hadde. Kude der af siin borghe willem
ANNEXE A 203
van vorspoel Jan aerts ende Jan aliter de. princier, die dit geloeftheb-
ben te volvuerene, wair bastiin voiras, daer af in gebreke vonden
worde. Datiun et actum anno XI1I10 ende vive X\'II dagen in
tember.
van Jaune van drunen.
Item Jan van drunen heeft geloeft der stad teren ende te beter- [19]
nissen te doene cnen wech te rutsemadouwe, tusachen dit ende
pinxteren naest comende, of een roede mueis der stad daer voren
te doen maken, voir alsulke sassem woirde ala ni ten gulden v
gesproken heeft. Ende hier af es borge willem dries die dit geloefl
heeft te voldoene, wair Jan ingebreke vonden worde, voirt heeft Jan
gelooft dies niemende ondanc noch wanconst te wetene noeh niemende
daer om te moedene, noch scepeneu noch deken noch oudennana
noch niemende auders. Datum ut supra a0 XIIII0 Y XYII aepterober.
De correctie van Claeuse de remuer.
"YVant de scepenen van Antwerpen den scepenen van lyere voir 20
een hoetvonnisse gegheven ende gheleert hebben van Claeuse den
verwer aise vanden woerden, die hi te minen hère van lymborch v
gesproken heeft, aise dat hem de marcgrave ende de scouthet van
lyere ende die scepenen van lyere correctie voir die misdaet setteu
souden, so hebben si hem eendarchtichleke daer voren geset minen
hère van lymborch voira, ter eren, enen wech te S. Jacops in Galissien
te doene ende te treckene, ende dien te porrenc tuaschen diten de
sente bavendaghe nu naest comende ende dien wech dan te porrene
ende te doene ende nemmermeer weder in brabant dan te comene
hi en hebbe dien wech gedaen op siin hoet waer hi dat niet en dade
te wat steden of onder wat heren men dan in brabant vonde, ende
hier af sal hi goede brieven van dair brengen bezeghelt, dat hi dien
wech selve metten hve gedaen heeft, ende niemeut voir hem ende
om dese saken wille ende om egheen ander. Datum et proclamatum
anno XIIII0 ende VT op aider apostelen dach divisio.
. . .Item Jan de "\Yolf sal trecken te rutaemadouwe, of II roeden [44]
muers doen maken, ende hi sal den hère geven XX cronen ende zy
selen hier af betalen tuaachen dit ende belokeue paesschen. Ende
desen wech selen si doen ende porren tusschen dit ende siuxene, of
den voirss. muer dair en binnen doen maken ende dair af goeden
zekeren zetten, ende waer henric loep ende Jan de AVolf haer ona-
cout ten heyleghen doen dorven. dat zy te loven niet geweeat en heb-
ben in contrarien der stad noch den eet gedaen en hebben in contrarie
der atad daer met selen zy qui te siin.
De Correctie van Janne den Coel
Dit es de correctie ende die beterniase die Janne den Coelner den [461
verwer gheset es te doene bi den scouthet scepenen ende biden ge-
swoirnen valider stad van lyere gemeinlic ende eendrachtichlec,
overmids dat hi goed daer hi wt gewounen was niet voirgedragene
aenveerde daer ander liede toe beleyt waren metten scouthet ende
met scepenen ende heu gelevert waert, ende dair metten rechte cracht
204 ANNEXE A
ende ghewont af gedaea was ende dat hi dair in bleef wonende ende
dat niet rumen en woude, ende oie om dat hi van ghenen scepenen
brieven en hielt, ende de liede hier om ende hieren boven dreighede.
Inden yerste so es desen Janne geset te betemissen dat hi enen wech
den heren ender der stad ter en hier voer doen sal te S. Jacop: in
GaJissien, ende wt de stad ende wt den byvange van lyere trecken
sal tusschen nu en morgen avont met der sonnen ende niet weder
inde stad noch inden byvanc comen en sal hi en hebbe dien wech
gedaen, ende daer af goede brieve bracht dat hi dien wech in dese
manieren gedaen heeft op siin hoet te verliesen waer hi eer daer bin-
nen quame hi en hadde dit voldaen gelyc voirss. es. Datum anno
XIIII'' ende IX X'1 die junii.
De Correctie van Wouteren vanden Assche.
[47] Dit es de correctie van wouteren vanden assche, die hem geset
es biden Scouthet bide scepenen ende bide geswoirnen gemeinlic
vander stad van lyere. Overmids den onsede die hi gedaen heeft
aen die clusenerse te brueder Jannekens. Inden yersten so sal dese
Wouter geven den hère hieraf te beternisseu voir die mesdaet die hi
dair ane mesdaen heeft X mottoenen nu talderheyligenmlsse naest
comende, ende der stad ter en enen wech doen te S. Mertens te tours
in toereyne of een halve roede muers daer vore doen maken ende den
wech porren tusschen dit ende bamisse naest comende, ende kiest
hi den muer tusschen dit ende groet vastelavont, ende voirt heeft
dese Wouter geloeft op siin hoet dies nieiuent wanconst te wetene,
noch dair om te misdoene, of te doen mesdoene in eeniger manieren.
Ende hieraf es borghe andries boods. Datum anno XIIIIC ende IX
XX' ' die augusti.
De Correctie van gielen top ende van Jaune Aerts.
[57] Inden yersten overmids da.t giel top den coermeesters qualic toe-
gesproken heeft ende hem overloepen met sassemen dreyeheliken
woorden, om der stad recht wille, ende om de coreu ende ordiuantie,
die de hère ende de stad gemaect hadden op audereu tiden oie des
gelike auderen coenngesters oie gedaen heeft. Ende voirt om dat
hi h. Janne dries ende h. Jaune de kammer tanderen tiden dreyehe-
hke met sasseme woorden overlopen heeft, om dat h. Jan dries recht
beghert hadde van sinen erfchise, dair af giel top h. Janne de kammer
opzeggende was dat sihi raet was, ende oie omdat hi meester Jan
noyts maerte met ontemelheiden overlopen hadde, ende meester
Jans clederen die op tsheren strate lagen wech geworpen ende te
meester Janne weert ende siinre maerten fellec ende dreyehelec
woorde gesproken heeft, so sal de voirss. giel top daer vore doen der
stad teren ende te betemissen enen wech te S. Jacops in Galissien,
ende daer toc noch eenen wech tons, vrouwen te Vendom. Te porren
tusschen dit ende S.baven dach naest comende, ende daer toe nimmer-
mermeer weder bynnen de stad of binneu den byvange weder comen
si en hebben tsheren goeden moet, ende die mesdaet gebetert jegen
den heren. Op siin hoet. Ende desen wech van S. Jacops in Galissien
heeft hem de hère ende de stad quytgescouden ter beden ende beger-
ten van h. Aerde van Ymerseele ende vande stad van Antwerpen.
ANNEXE A 205
Item Jan Aerts de vleeschouwer. Overmids dat hi oie den coerme 58
tera qualic toegesproken heeft ende met dreycheliken woirden hen
overloepen te meer tideu dan eens. Su sal de voirs. Jan Ae
vore doen de stad teren eneu wcch tous, vrouwen te Vyndom, ende
niet weder binnen lyere comen hi en hebbe tsheren goeden
vande mesdaet die hi daer aen mesdaen heeft op siin hoet, ende van
desen selen zy beide goede brieve brengen moeten, d il zy d<
vert selve gedaeu hebben. Ende hier toe sal de voir;;, giel top de
meesters ende meester Janne noyts enden den voirs. priesters 1
oie meester Jan noyts maerte versekeren op siin lyf ende goet, 1
sal oie geloven voir den hère ende voir de stad op siin lyf ende gi
dat hi hen noch nyemanne van haten wegen om dese zaken wille
nemmermeer mesdoen en sal noch wangonst le hen weert dragen of
hen doen mesdoen bi hem of bi yemanne ander 1 van sinen v egen.
Ende des gelyx voie sal de voirs. Jan Aerts doen ende versekeren
den voirs. coermeesters. Datnm anno XI III ende XIITI in Julio.
Inden yersten Jan van Vsendyke ende h. van Heffene, om woorde [59]
wille die si spraken op de scepenen ende op de geswoirne, die hen
dochte dat hen te na ghinghen ende die zy in haren lachter trocken.
Also de rollen inhouden ende de gescriften die d\i'r op gemaect siin,
so waren deselve Jan ende henric daer af te redite gestelt inde vier-
scare te lyere ende worden daer af gewyst ter correctien vanden
hère ende vande stad, gelyc de gescriften ende rollen daer op
maect vut vercleren, welc vonnis Jan ende henric voirs. ten hode
beriepen tantwerpen ende aldair waren zy oie gewyst breukach
jegen den hère ende ter correctien ende daer na doen zy beyden die
correctie ende breuke gegroet te hebben, doen groettedestadvanAnt
werpen dieu brueke ende die correctie doen zy hen besproken hadden
metten scepenen van lyere, ende deden die bescrivene in een rolle
of cedule, ende wysden wt met enen vonnissen inde vierscaren tant-
werpen dat de scepenen van lyere wysen souden te I3 ère inde viei - 1
Janne ende henric voirs te alsulke breukeu ende correctien aise die
cedule in hadde (dwelc also geschiede V maii anno XVI0). Ci-
te weten dat Jan van Ysendyke geveu soude den hère IX cronen
XLgroten inyus heren munie van brabanl over eike crone gerekent
binnen jaers telkens XVII weken een derdendeel.
Item dat hi der stad doen soude I pelgrimagie tons, vrouwen te
bazele ende porren tusschen dit ende sente bavendach maesteomende.
Jan voirscreven dede siin brieve van desen weghe thoenen den scepe
nen XVI' aug. anno M° III1 XVI".
Overmids alrehande onredeliker woorden ende on di< 69
eenige personen inde stad geseten inné mesgrepen hebben
coermeesters vande stad die inden name vanden hère ende vande
stad geset siin, ende die de hère ende de stad sculdich siin t
woorden ende dat aen hen te trecken ende te doen verrichten,
hebben de heren ende de stad correctien daer af geordineerl ende
geset op de gheue dair hen de clachten af comen siin gelyc hier na
volght, graselic nochtan genoech na dat die zaken gelegen siin.
206 ANNEXE A
Inden yersten Jan joea de backer, overmids dat hi den coermeer-
ter9 met hoghen moede ende met onweerden de pande wt den handan
trac die zy tsinen huys haelden voir den coere dair zy hem af geeoert
hadden, dair hi den hère ende der stad zere cleyne ende tecort inné
gedaen heeft. vSosal de selve Jan Joes dair voer te beternissen gheven
den hère XX mottoenen tusschen dit ende belokene sinxenen, ende
der stad teren doen enen wech te Rutsemadon oie te porren tus;-chen
dit ende belokene sinxenen, of II roede muers der stad dair voer doen
maken dairse de stad hem bewiisen sal. Ende achter den derden
dach naden dach van heden, en sal de selve Jan Joes binnen de stad
noch binnen den byvange van lyere niet moghen comen hi en hebbe
tyerst den heren van de voirss. gelde ende de stad vanden voirs.
weghe verborcht. Op een let van syne haut te verliesen.
De correctie van Diercke van weert.
(■79-1 Item overmids dat dieric van weert met hoghen moede ten scepe-
nen weert gesproken hadde boven vonisse, zeggende dat hem de
seepenen groot ongelyc daden, ende meer woorde, so was hem, want
hi genade begeerde, dair af te correctie geset genadichlike op de
scepenecamer biden scouthet ende den seepenen ende geswoirnen,
dat hi dair voer gheven soude den hère III blaeu cronen eens, ende
der stad enen wech doen te sente ledenaers in laemoegen of III blaeu
cronen daer voer gheven, ende dat verborgen beide te betalene
tusschen dit ende kersmisse. Actuni aimo XIIII1' ende XVII, XXVI
septembres. Ende de scouthet ende seepenen ordineerden dit gelt
te gevene S. Jacops capelle in aelmoesene.
De correctie van Willem Clenmeycien.
[85] Dit is de correctie die geordineert geset ende overdragen es bi ousen
hère heer Wouteren vanderUst als maregrave, biden scouthet, biden
Seepenen ende geswoirnen vander stad van lyere geineynlic op Wil-
lem Clenmeycien. Overmids dat hi hem rebel ende wederspaunig ge-
maect heeft jegen tsheren dienaren ende dat hi den Scouthet onge-
raettelic mishaudelt heeft, zeer genedichlec noch tan genoech na dat
die zake groet ende zwaer es.
Inden yersten es overdraghen dat de voirsi. willem sal comen
op den stadliuys oirboir den maregrave, Scouthet, Seepenen ende
geswoirnen ende voir den gemeynen raet vander stad, ende sal dair
hen allen openbaer bloots hoots siin hande te gader oetmoedelic
vergheffenisse bidden Boudene van buten den Scouthet van lyere,
van alsulke misdaet ende mishandelingen aise hi aender selve Scou-
thet gedaen heeft, ende daer toe sal hi den selve scouthet van lyere
daer boven doen teren een pelgrimagie te S. Andries in scollant of
siuen goeden moet daer af hebben (desen wech scout hen de voirss.
Scouthet quite op den selven dach).
Item sal de selve Willem noch voir voirs. misdaet ende mis ryp
ende voir de confusie die den hère ende der stad daer in gesciet es,
doen enen wech of een pelgrimagie den heren ende der stad teren
te S. Claeus ten oestenbaren, ende porren binnen den derden daghe
naest comende ende dan bi sonneschine sonder enieh verdrach, ende
ANNEXE A
->7
niet weder conien inde stad noch inden byvanc van lyere, hï en he1
dese pelgrimage selvc metten live gedaen ende goede breive dei
dacr af weder bracht. Ende daer toc sal hi sweren ten heylichen .il.
hi weder eomen es, dat hi die pelgrimage selve metten live gedaen
heeft om dese saken wille, ende ora egheen andcr. Oi< >.] hi
daerenteynde inder voirss. stad noch inden byvanc niet weder comen,
hi en hebbe tierst tsinen gegeven goeden moet vanden voirss
handelingen op siin een hant te verboerne, waer hi eer binnen
stad of binnen den byvange quaine, hi en hebbe dese voirss. pelgri-
magie gedaen ende den hère vernuecht als voirscreven es.
(Dese correctie was den voires. willem gelé en opden stadhuys
in presentien vanden maregrave vanden scouthet ende vanden sud
rade gemeynlic ende allen anderen chet horen wouden voir op de
cainer. Anno XIIIE ende XVIII opden IX" dach van meerte.)
Het es te weten dat de stad van Antwerpen van de>se correctien [93]
der stad van lyere wat stoots maecte doende. e correctie geordineert
was biden n aregrave Scouthet scepenen ende geswoirnen, e.-r die
gepubliceert was. Ende dede sagghen de stad van Antwerpen, in
enen voUen rade vanden niewen scepenen ende vanden ouden, den
Scepenen van Lyere die doen ter tyt aldaer waren comen om een
hootvomiiî., dat de stad van Antwerpen meynde (want zy een hoov-
stad waren vander maregrafseape) dar de stad van lyere noch gheen
smaelstede noch vryheide binnen den maregrafseape correctie hebben
en soude, het en waer dat zy hen met enen hootvonnisse tantwerpen
gegeven worele ende gewyst, ende deden versuecken aende stad van
lyere, dat zy hen niet onderwyndeu en wouden eenige correctie ovei
den voirss. Willem Clenmeycien te doene maer hadden zy daer af
eenich gebrec of hadde de voirss. Willeken onsedich geweest, dat
zy dat aen hen brachten, zy souden daer iime also versien also dat
behoren soude, diess versuecks ende dier nuwicheit want zy dies
gehke nye te voren gahoort en hadden. Ende antwoorden daer op
dat dat versuec ende . . . seyden oie dat zy meynden den maregraven
hareu scouthet also te versuecken ende tonderwysen dat hi dair niet
bi staen en soude, ende waer also dat hi daer bi stonde, dat zy hem
nemmermeer voir scouthet en souden willen houden noch kemien.
Den Scepenen van lyere die aldaer waren verwonderde zere dies
versuecks ende dier nuwicheyt want zy dies gelike nye te voren
gesien noch gehoort eu hadden. ende antwoirdden daer op seggeude
dat dat versueck zere siin soude contrarie den rechten ende privile-
gien dei stad van lyere ende oie haren goeden ouden usagen ende
heerbringen die zy van den ouden tiden hier af geuseert ende beer-
bracht hadden. Baden vriendelic de stad van Angwerpen onder meer
audere woorde ende spraeken die daer doen genoech verhaelt ende
verhandelt waren, dat zy de stad van Lyere wouden laten in haren
gouden ouden redite ende privilegien want dat zy dat met hare
oude privilegien bewyîen woude dat dat contrarie waer haren oud_-n
rechten. Ende versochten dat oie aen hen voirt op alsulcke trouwe
hulde vriendscap ende verbonde als tusschen hen stonde. Dwelc
niet wederstaende de stad van Antwerpen hen weder dede antwoir-
208 ANNEXE A
den dat zy des niet eii meynde te doene noch dat lien niet en stonde
te doene, ende versochten dat noch als voreu ende seiden lien dat
zyt achterruggs vueren wouden met meer woorden. Ende deden
daerna den maregrave haren scout het seggen dat lii bi die voirss.
correctie niet en stonde te lyere of dade hyt zy en souden hem nim-
mer meer over scouthet kennen also de selve maregrave der stad
overscreef ende liet weten, wt den welken de noot dacr toe dwonc
dei ftad van lyere dar zy dat onrecht thoonen ende clagen moeste
den goeden steden, ende sonden daer om aen de steden van loeven
ende van bruessel ende deden hen dat openen biddende zeer vrien-
delic, dat zy de stad van lyere wouden helpen houden haer rechte
privilegien ende costumen ende heerbringen ende versochten aeii
hen dat oie op trouwe rninne ende vriendscap ende op alsulke ver-
bonde als tusschen lien ende de stad van lyere stont, ende oie dat
zy der stad van Autwerpen spreken wouden ende hen also onder-
wysen dat zy de stad van lyere lieten ongemoeyt in hare goede oude
rechte ende heerbringen. Dwelc zy geerne deden ende spraken also
metter stad van Autwerpen dat sy in t voirss. stuc also gevuechlic
viel ende dat tantwerpen overdragen was bider stad van Antwerpen
ende den scepenen van lyere, dat men dese correctie doen soude
gelyc die overdragen was te lyere biden maregrave ende scouthet
ende scepenen, op den stadhuys ende sonder ter poyen die wt te
roepen. Ende aldus behoudeiic de stad van lyere haren goeden ouden
rechte costumen ende heerbringen in aile saken. Ende des gelyx
oie der stad van Antwerpen haren goeden ouden rechteu costumen
ende heerbringen.
Vande correctien die geordineert es bi rainen heren den marc-
grave ende biden scouthet scepenen ende geswoirne van lyere op
Willeke Clemeycien, daer of de stad van lyere vervolght heeft de stad
van Antwerpen, mids gebreke dat zy hadde aenden maregrave voirss.
om dat hi der niet bi en quam (om executie daer af te doene alsoet
behoirde en de geordineert was daer wat geseds was) dair wat gescils
om geweest heeft tusschen de stad van Antwerpen ende de stad
van lyere. So hebben de scepenen ende geswoirnen daer op geraemt,
om gevueghs wille ende omme minne ende vrienscap te behouden
met de stad van Antwerpen, den voirss. ^Villem Clennieycicu op den
stadhuys sal de eu comen voir den maregrave ende den scouthet ende
der stad rade ende lesen hem aldus op de scepencamer siin correctie
gelyc als die op hem geset ende geordineert es ende bevelen hem die
aldus te doene op de payne daer op geordineert, sonder dat ter p. yen
openbaer wt te roepen. Ende sal de stad van lyere laten gescien op
dese tyt ter liefden vander stad van Antwerpen in deen side, ende
der stad van lyere in dander side in aile saken hare goeden rechteu
costumen ende heerbringen.
De correctie van Rombaut van bosbeke.
[1181 Overmids dat de selve Rombaut van bosbeke den geswoirnen van
sinen ambachte vanden verwers qualic toegesproken heeft ende met
sassemen woirden overgaen ende overlopen die oie zere dreycheiik
luidden om des anibachts wille, te meer steden dan tôt eenre, dat
[95]
ANNJ'XK A
209
de aelve geswornen don acouthet ende sœpenen gethoent hebben,
d< oi <• i comen i
scepenen met eenige van sinen vrienden genade biddende ende siin
hoot in haren schoot te leggcne geloven aie wat coi hem
fette die vaste ende geatade te houden dair borghe voir blevenwou er
van lunsbeke Jana soen ende wouter van lunabeke woutera aoen
ende Jan vander molen, so es wt ordinancien vanden acouthet, ende
scepenen voir.-;, de voira. Rombaut comen, voir den scouthet ende
jcepenen, ende heeft inden yesten aldaer gelooft, geaekert ende aender
heylighen gesworen den voira, geswornen noch oie nyemanne anders
des ondanc te weten of daer om te miadoene of te doen miadoen in
eenige rnanieren, ende es voirt geordineert dat hi sine gesworne ver-
gheffenisse vanden voir s. woirdcn bidden s al, ende dat hi daer toe
sal gheven den hère te beternissen IIII arnanische gulden ende II II
arnamsche gulden der kerke te haren werke, ende voirt den am-
bachte teren doen een pelgrimage ten bossche, of III pond waa daer
voer gheven den ambachte om dat was voirt te bekeren dairt heu
geheft. Knde van de: en sal hi betalen of vernuegen den hère v?n
den voirs. IIII gulden tusschen dit ende kerstmisse, ende der kerken
tusschen dit ende ouser vrouwen lichtmisse, ende den ambachte sal
hi oie voldoeu tusschen dit ende kersrniîse naesteomen. Actum XXII
octobria anno XI.
Van Janne van lynter.
Item Jan van lynter diemen heet van belle overmids dat hy op ri 49
anderen tiden Clémente de la meir die hier gevangen ait vutgehol-
pen woude hebben ende dair toe hem anachs een leeder bracht hadde,
dair hy vanden selve clémente ghelt ende miede af nam dwelc grote-
lic was in contrarie vanden hère ende vander stad soe ia geordineert
biden maregrave peteren vander beverpluya scouthet scepenen ende
rade gemeynlic, dat de selve Jan van lynter dair voer geven sal den
hère te beternissen XII vrauxe cronen, dair voer den hère ende
stad teren doen een pelgrimagie te sinte Jacopa in Galiaaien, ende
porreu bi soimescliine vut de stad ende vut den byvange van liere,
ende dair niet weder incomen, hy eu hebbe den hère vernuecht van-
den voir?, ghelde ende de voirs. pelgrimagie selve metten live gedaen
ende goede brieve dair af weder bracht, op aiin hoot waer hy eer weder
binnen quame. Vutgeroepen ter poyen biden maregrave, scout-
het, scepenen ende rade gemeynhc XI1 maii anno XXII II0 (Deae
Jan dede siin brieve van dese pelgrimagien thoenen XXV Januarii
anno XXVI<»).
De correctie van danele van heffene van gheerde van meerhout ende
van meer anderen.
Om snnderlinge zaken ende misgripe, dair hen inné miagrepen 153]
hebben ende grotclic verauymt hier in de atad, Daneel van heffene
henrix soen van heffene, ende gheert van meerhout, grotelic in con-
trarien achterdele ende mindernissen wesende der heerlicheit ona
geneden heren van brabant ende aiine atad van liere, ende om
hande reden die den hère der stad van node daer toe brengeti ende
I*
210 ANNEXE A
berueren, mids der welken hen niet in steet dat ongecorrigeert te
laten. Te dien eynde dat des niet meer en gevalle, ende datter ande-
ren exempel aen nemen moghen.so es overdraghen biden heren ende
bide stad te weten inden yersten dat Daneel van heffene voirscrevcn
den hère en der stad teren ende te beternissen sal doen een pelgrinia-
gie te sinte peters te Roeme, ende porren bi sonschine buten stad
ende buten bivange van liere ende dair niet weder binnen eomen
hy en hebbe de voirs. pelgrimagie selve metten live gedaen ende
goede brieve de stad dair af weder overgeseindt, ende na dat die
brieve vander selve pelgrimagien hier voer den Raet vande stad ghe-
toegt ende gevisenteert zullen siin, soe sal hy daerentenden vyf
jair lanc buten stad ende buten byvange bliven moeten op siin
een handt te verboereu, waer hy eer dair weder binnen quame, ende
daerentenden sal hy oie sinen eedt moeten doen, boven den voirs.
brief, aise hy hier inde stad comt ende hère oft de stad des begeren
dat hy die pelgrimagie selve metten live ghedaen heeft, omme dier
saken wille ende om egheene endere. Actum XXV oct. anno XXV0
(Daneel dese siin brieve thoonde dat hy te Roome geweest hadde
XXIX J decembris anno XXXII0 ende den brief bleef aen de stad).
[154] Item Gheert van meerhout voirscreven sal doen een pelgrimagie
den hère ende der stad teren tons, vrouwen te nycossyen in Sypers
ende porren by sonschine buten stad ende buten byvange van
lyere, ende dair niet weder binnen comen bi en hebbe de pelgrimagie
selve metten live gedaen ende goede breive de stad daer af over-
geseindt, ende nadat zyne brieve van dese pelgrimagien hier gethoent
sullen siin hier vore de stad, soe sal hy daerentenden X jair lanc
buten stad ende buten byvange van lyere bliven moeten, op siin hoot
te verliesene, waer hy eer daer binnen weder quame. Ende dairen-
teynden soe sal hy oie sinen eet moeten doen, dat hy die pelgrimagie
selve metten live gedaen heeft, opt dats de hère ende de stad beghereti.
Actum ut supra.
[284] Item henné meys de volder ende henné de busscher ende zegher
inde tessche volders om dat sy wtganc gemaect hebben op andere
tyden contrarie den hère ende de stad ende der gemeynde neeringe
ende en wouden niet werken op haren redeliken gesetten loen, so selen
dese III persone ele i pelgrimagie doen te weten de voirs. henné
meys te S. Servaes te Maestricht ende de voirs. henné de busscher
tons, vrouwen ten bossche ende de voirs. segher inde tessche te VS.
Mertens tôt Utrecht ende porren by sonneschine ende niet eer hier
inde stad weder comen werken van haren ambachte, sy en hebben
gegeven te beternissen ele van hen twe Peters den enen den hère
ende den anderen der stad ; henné de busscher sette hier i gui. scilt
ter stad behoef i peter dair af te nemen. XVI december anno XXX
VIII.
[285] Item henné plattyn geheten sloeve, pruystken ende henné de
bruwer aile volders, omdat sy oie heur ambacht hebben laten staen
ende en wouden niet werken om haren loen die wyle dat dander wt
waren dair by dat de poirters scade ende gebrec leden. So es geordi-
neert ende overdragen dat sy den hère ende der stad teren selen doen
ANNEXE A 211
elc een pelgrimage te weten, de voira, lienne plattyn te maeatricht
ende de voira, pruyatken ten boaache eude de voira, henné de bruwer
te S. Mertena te Utrecht eude porren by zonneschine wt de atad eude
wt den bj'vange, ende niet eer weder dair binnen comen ay en hebben
gegeven den hère ende de atad elc II pétera te bekeerne dair de hère
ende de atad die overdraghen ende ordineeren aelen bekeert te wor-
den.
Eude dc9e correctie van deaeu voldera is oie zere hoeaachelic gedaen [2861
op deae tyt ende en aiin oie aile niet daer inné genoemt die dea mede
alao wel verdient hebben ala deae, die den hère eude der atad nu niet
wel af voir en ataen, maer eeat data rneer gevalt de atad meyndl
andera metten hère dair op te versuene na heur ouda brieve ende rech-
ten aie ay dair af heeft eude dat also grotelic te doen corrigerai datter
anderen exempel aeu neuien aelen.
Item ao aieu der nog meer hier inde atad ende inden byvanc die [287[
heu niiagrepen jegen den hère ende jegen de stad, die men nu achter-
laet te corrigeren om abeaten wille. Ende ao wie hem dair inné bea-
met weet dat hy come binne XI III nachten aenden hère ende aende
9tad ende doe af ende betere aiin miadaet, oft comen 9al hem openbaer
aiin correctie doen hier inde atad oft dairt gehoreu aal, want de hère
ende de atad informacien genoech daer af hebben.
Theeus de Roesele, omdat hy een varken doot geslagen heeft byn- [323]
nen sinen huyse dat sente Anthonis toebehoerde eude seule Authonis
teyken hadde, dair af de hère ende de stad wel geinfonneert syn, so
sal hy porren binnen sonschine ende doen eene pelgrimage tsente
Anthonis in Viannoys, ende na dat hy goede brieve dair aff sal hebben
ghetoent sal hy drie jaer wten stad eude uten byvange van liere
bliven moeten ende daerenteyndeu nyct weder inné comen hy en
hebbe ierst tsheren ende der stat goeden moet op syn vorste let. (pie-
sentavit litteram peregrinationis VIII juuii anno XIJ).
Item Jan vander voort, om miagryp dair iuue hy hem miagrepeu [363]
heeft jegen taheren diener, dien hy met sasaemen ende zere wonder-
liken woerden opgelopen eude gesproken heeft om dat hy tsheren
heerlichiet verwaren moeate eude panden halen, voer syn schout
(tôt der achulden behoef), ao aal hy porren by aouneachyne buten
atad ende buten byvange van lier ende dien i pelgrimagie tons, vrou-
wen te melanen of den hère daer vore te geven X giddena pétera, of
aiuen goeden moet hebben, ende goede brieve van den wege oîï hy dien
doet te seynden, ende irat en voer al, aal hy bidden verghefîeniss
Jaune Reyna die hy ala hère opgelopen heeft ende dair na den ge-
awornen van den Ambachte, daer om dat de panden gehaeli waren,
ende voort geloven in handen vanden hère, ten heyligen, dat hy
nyemande van hen om deae saken wille, toecomeude, oploop noch
wangonat weten en aal. . . ende dit wiert gewyat met i vonniaae inde
vierachere preaentibua Zanthoven, Jan Opphem, Jo. Pétera, h.
Yaendike, A. Lare, et alii acab., VII11 maii a0 XUIII.
Item lyaken van Aerachot om deswille, dat ay alrehande quade [366]
woirde gesproken heeft op tregiment vande stad ende om des Rechta
21-2 ANNEXE A
\ville, so sal de selve lysken porren bi sonneachyne ute stad ende
uten byvange van lyere, ende doen i pelgrimagie ten heiligen bloede
te boxtel, ende nyet weder mogen comen, zy en hebbe tyerst gegeven
den hère i gulden Rider ende der stad i Rider op heur vorste let.
[381] Item theeii^ken perre heyn perres soen om de selve saken wille
oie om des wille dat hy ten heiligen heeft geswornenen de by sinen
ede genomen voer den hère ende voer de stad dat hy van dese onsede
noch van ghenen anderen onsede en heeft geweten op dien nacht
yet bedreven wesende van yemende ; so sal hy porren ende doen
i pelgrimagie tsente Peters te rome ende niet weder inde stad noch
in den byvang comen hy en hebbe yerst gegeven den hère III ryders
ende de stad III ryders op syn vorste let.
[382] Item Neelken de schoenmaker, des meesterssen dochters man, om
der selve saken wille sal hy porren wt der stadt ende wt den byvange
van liere ende doen i pelgrimagie tSent Jacops in Galissien ende
goede brieven dair af overbrengen ende niet weder incomen hy en
hebbe yerst gegeven den hère III ryders ende de stad III ryders op
syn vorste let.
(Dese Neelken presentavit litteras peregrinationum coram scabi-
nis et sculteto XIa Julii anno 1,11°. Sed non satisfecit adhuc de sex
ryders) .
[383] Lauken van hoeven de kleermaker die te bouwen schollemons
nayt, om der selve saken wille want hy daer by ende mede es ge-
weest so sal hy porren by sonneschyne wt der stad ende wt den
byvange van lier ende doen i pelgrimagie tonser vrouwen te vin-
dome ende goede brieven daer af over brengen. Ende niet weder in
de stad ende in den byvang comen hy en hebbe yerst gegeven den
hère III ryders ende de stad III ryders op syn vorste let.
[389] Item Willem pape de vorster om dies wille dat hy boven de gebo-
den die hier by den hère ende by der stad wt geboden siin geweest
lieden heeft gesonden gehadt aen de poorten van liere om de goede
lieden aldus te verwachten die hier ter rnerct wilden comen ende stalle -
gelt van hen te nemen dwelke nechtans verboden was also te doene.
Knde oie om des wille dat hy saken aengenomen heeft te doene de
heerlichteit aengaende, die hem niet aen en gingen maer heeft die
verswegen ende aen den hère niet bracht ende oie saken wille die
hy aenbracht heeft diemen also niet en heeft bevonden ende oie om
meer ander saken wille die hy gehanteert heeft daer hy hem groete-
lic in misgrepen heeft daer de hère ende de stad wel geinformeert
af siin, so sal hy porren ende doen een pelgrimagie tons, vrouwen
tarschot ende niet weder in comen hy en hebbe yerst gegeven den
hère VI ryders ende der stad VI ryders, op siin vorste let.
[393] Item J an van leemputte om dies wille dat hy den hère in presentie
van den scepenen vremdelic antwoorde doen hy van den liere ge-
dreycht was, so sal hy porren by sonneschyne en doen i pelgrimagie
ten heylegen bloede le boxtel ende goede biïeve daer af over bren-
gen. (Satisfecit de peregrinaeione) .
ANNEXE A
2l3
Van alaulken miagripe aise dair Jan van den boegaerde hem inné 405
meagrepeii heeft aen den acouthet van liere, Dyrick Starken mel
zere onredeliken ende afdragende woerden oie mede aengaende •
deels der stad ende ayn noot in horen achoet dair af gele<
ende groten oetmoet aen hen gesocht, dwelc de hère ende de
aengeaien, goerdineert ende overdragen bebben eendrechteUc dat de
voers. Jan vanden boegaerde inden iersten sal bidden den
Dyrick Starken, ende oie den heren valider stad gemeynlic, dat sy
hem oin godswille dese misdaet ende mesgryp willen vergh
want hyt onwetende ende nyet mechtich aynre veratenteniaae
gedaen, ende voort dat hy hem selve aal verloven ende zweren lvflic
ten heyligen dat hy Dyrick vStarken den hère, noch oie nyerni
die byden hère geweeat heeft in gevolge ende geveerde noch oie nye-
niende inder .stad regimente of dienste aynde om egheenerha
saken wille die ghesciet mogen weseu en sal miadoen in woerden
noch in werken, noch oie omme dese saken wille in eenighe ongon-
3 ten hebben noch oie by yemandc anders doen of la ten miadoen in
eenige manieren, ende voort 90 sal de coirs. Jan vandenboegaerde
te beternissen van dese mi9daet doen i pelgrimagie tsente Pétera te
Romen ende ponen tusschen dit ende groet vastelavont naisteo-
mende oft dairvoer geven, den hère ende de 9tad twintich gulden
peters ende die betalen also dra hy den wech van pelgrimagie voira,
nyet aennemen en wilt tnsschen dit ende sente Baven dach naest-
comende deen helft, ende dander helft te kersmisse daer naestvol-
gende ende daer af goeden borge setten den hère ende der stad ter-
stont als hy gecoren sal hebben, of hy den wech nyet doen en wille.
Ende voort so sal hy geven voer dese meadaet noch twintig gulden
peters half den hère ende half der stad, deen helft tnsschen dit ende
by inné de IIII paeschdagen naesteomenden, ende dander helft
taent Jansmisae daer na naestvolgende, sonder eenich langer ver-
treck, ende dair of oie goeden borge setten den hère ende der stad
als voren op dobbele correctie. Testibus etc. Actum VU1 februarii
anno XIIII XLVIII».
Item willem vriend om geliken saken wille die hy in desen wtgange
bedreveu heeft die nochtans een geswoirne vanden ambachte es
geweest ende was die aculdich es in shien ambachte aile onruati
verhuedene. So sal hi doen een pelgrimagie ten helegen bloede te
"Wilzenaken ende die porren tusschen dit ende paeschdach nu naeat-
comende oie onbegrepen. Ende dair toe so sal hy nu den hère geven
van sinen gereedsten goede X peter9 op sihi een haut.
Dese correctie wert gedaen by heren Jaune valider bruggeii Scou- -
thet ende maregrave slants van Ryen XX maii anno Ld°.
Item hennen vandenhoute volder, om deswille dat hy by na
ende ontide gewapenderhant ende met opsette is comeu i
van liere tôt poirtera huysen (grote geweldicheyt aldaer hanfc
ende meer audere onredelike saken die hy inde stad van hère gehan-
214 ANNEXE A
teert heeft dair de hère ende de atad wel ai geinformeert syn. So aal
hy porren by sonneachine vten stat ende vteti byvange van liere
ende doen i pelgrimagie taenter claes ten Oeatenbaren of sease Rydera
daer voer tegeven, hal den hère ende half der 9tad ende nyet weder
inde stat of byvange van liere mogen comen hy en hebbe tyerst de
vora. pelgrimage gedaen ende goede brieven dair af overbracht of
de voira, sesae Rydera dair voer gegeven. Op aiin een hant.
ANNEXE B
CERTIFICATS DE PÈLERINAGES ACCOMPLIS
30 août 1316. — Cerfificat de Beaudouin, e'vêque de Tortose et Fama-
gouste en Chypre.
Baldoinus, nriseratione divina, Antheradensis et Famagustanus
episcopus, universis Christi fidelibus présentes litteras inspecturis,
salutem et sinceram in Domino caritatem. Universitati vestre notum
faeimus per présentes, qnod Nicholaus de Namurco, clericus, filins
quondam Johannis de Namurco, Leodiensis diocesis, tcnebatur
regnum Cypri visitare et ibidem moram trahere per spacimn duorum
annorum, ratione pacis et emende ac pro remedio et salute anime
Philippi dicti Goudenwin, canouici sancti Albani de Namurco, ejus-
dem dyocesis, prout nobis predictus Nicholaus pcrsonalitcr declaravit
Qui dictus Nicholaus stetit atque moram traxit in regno Cypri per
spacimn duorum annorum continuorum et amplius, prout nobis
testimonio fide digno satis constitit manifestum. Volens igitur 1 1
triare, se uostro conspectui represcntans, nobis hmmliter suplicavit
ut nos sibi nostras testimoniales litteras de sua mora facta in regno
Cypri per spacimn duorum annorum continuorum et amplius, conce-
deremus intuiti pietatis. Quas quidem litteras cidem predicto Nicho-
lai, in premissorum testimoniiun, concessimus, sigilli uostri cerei
pendentis munimine robora,tas. Datum Nicossie, in prefato regno
Cypri, in domo nostra, trigesima die mensis augusti, anuo Nativi-
tatis Domini Nostri Jesu Christi millezimo trecentezimo sexto docimo.
(Original sur parchemin. Chartrier de Namur ; Arch. génér. du
Royaume, Cartulaire de Namur, éd. BoRGNET, t. I, u° 55, p. 177-178)
II
13 septembre 1354. — Certificat des autorités de l'église de Saint- Jacques
en Compostelle.
Universis in Xto fidelibus présentes litteras inspecturis, Cardi-
nales et thesauravii ecclesiae St. Jacobi apostoli de compost
salutem in domino, quae est omnium aeterna salus. Noveritis Gnyl-
lehnum van de Putte pegriu. latorem pntm causa peregrinationis
faciende in honorem scabinis de Gand. Ecclesie St. Jacobi apli de
2l6 ANNEXE B
Gallicia limina visitasse et ibi peregrinationein suam bene et perfecte
pegisse, in cujus rei testimonium pntes litteras sibi dedim. sigilli
altaris St. Jacobi in dorsso sigillatas. Datum Compostelle XÏÎI
die mensis septembris, anno Dni M. CCC quinquagesimo qrto.
(Gand, Zoendinc Bouc, 1354, f° 2, Cannaert, Op. cit., p. 94, note).
III
29 septembre 1354. — Certificat du Grand Pénitencier de Saint-Pierre
de Rome.
Paulus de Screfano prior Sti Pétri de Roma Dm. pp. penitencia-
rius, discretis viris scabinis ville Gand. Salutem in Dno. Noveritis
quod Wasselinus de puteo pntiuni visitavit limina apostolorum
Pétri et Pauli personaliter pro Eustacio de Riems quem instiguante
diabolo interfecit. Datum Romae apud S. Petrum V kalend. octob.
pontificatus dm. Innocentii pape sexti anno sed.
Item noveritis quod f rater Johamies des Torfman sacerdos condu-
xit latorem praedictum.
(Gand. Zoendinc Bouc, 1354, f° 2, Cannaert, Op. cit., p. 94 note).
IV
16 juillet 1406. — Certificat du Chapitre de Saint-Martin de Tours .
Universis praesentes litteras inspecturis seu audituris. Decanus
thesamarius totumque Capitulum ecclesie Beatissimi martini turo-
nensis ad Romanam ecclesiam nullo mediatore pertinentes salutem
in domino. Notum facimus quod ad nostram personaliter accedens
ecclesiam Johannes Daple ville de lira Cameracencis Diocesis Sacro-
sanctmn sepulcrum et limina gloriossissimi Ciiristi confessoris Bea-
tissimi Martini patroni nostri peregre visitavit prout sibi conimenda-
tum fuerat per non nullos judices suos competenti ministerio prout
nobis asseruit per proprium juramentum pro penitencia sive emanda
sibi imposita racione injivriarium verbalium per ipsum in et contra
opus suuni. . . illatarum et perpetratarum. Asserens idem peregrinus
per suum juramentum hoc nomine quo premittitur vocari pro se et
non pro alio homine visitationem seu peregrinationem fecisse et hoc
omnibus et siugulis quorum interest certificamur per présentes hoc
sigillo cvun quo variis occasionibus utimur sigillatas. Datum Turo-
nibus die XVI" mensis Julii Anno domini miUesimo CCCCmo sexto.
Paumier propria manu.
(Original ; écriture posée ; sur parchemin ; sceau enlevé ; aux
Archives communales de Lierre, annexé au Correctieboeck).
V
22 août 1417. — Certificat du Chapelain de Notre-Dame au Sablon à
Bruxelles.
Noverint universi me Egidium Coils, presb37terum deservientem
capelle béate Marie in Bruxellis super Sabulum, vidisse ac locutum
ANNEXE B 217
fuisse et holocaustmn ibidem solvisse et limites béate Virginia 1
dicti visitasse Richardum du Croquet de Tornaco client»
hoc ob reverenciam venerabilis et nobilis domini domini dicte ville.
In signiun veritatis, etc.
(Arch. génér. du Royaume ; Cartulaire d
III man. 56, fol. 46 v°, Corpus inqitisit. II, 203).
VI
Janvier 1432. — Certificat, du curé de l'église Saint-Thibaut à Tann.
Ego Jacobus Husman incuratus seu plebanus ecclesiae Saint i
Theobaldi in oppido Tannis Basiliensis dyocesis, Xotum facio uni-
cuique et singulis, Ouot sub armo domiui M0 CCCC0 XXXII0 feria
tertia ante Kathedram Sancti pétri apostoli discretus Gamesta de
lyr visitavit limina sanctissimi patris uostri Theobaldi ratioue emende.
Et votum suum fideliter et dévote complevit. lu cujus rei testimonium
Ego Jacobus praescriptus sigilliun meum proprium huic carte a tergo
est impressum. Datiuu anno et die ut supra.
(Original ; écriture cursive ; sur papier ; sceau plaqué ; aux Archives
Communales de Lierre ; annexé au Correctieboeck).
VII
29 juin 1434. — Certificat du conservateur des reliques de Saint-Si i
à Maestricht.
Ego Godefridus Opstaels presby ter ... ac sacrarum reliquiarum
custos aecclesiae sancti servatii Trajectensis, Leodiensis dyocesis,
notum facio per présentes quod ... ut asserint Odardus . . . persoua-
liter visitaret lirnina beati Servatii ob emendam et penitentiam
indictam per burgimagistrum opidi Dionantensis, quod omnibus
quorum interest certifico per sigilliun antedicte custudie présent ibus
impressum. Datum amio domini rqillesinao quadringentesimo trede-
cinio (?) quarto, die vero penultima mensis junii.
(Original ; écriture cursive ; sur papier ; sceau plaqué à droite.
Pirexne, Histoire de la commune de Dînant, p. 75, not<
VIII
15 août 1434. — Certificat de Jean, roi de Jérusalem, donné à Nycosie
en Chypre.
Jehan, par la grâce de Dieu, roy de Jhérusalem, de Cyprès et d
ménie, à tous ceulx qui ces présentes lettres verront, salut. Savoir
faisons que uug nommé Gerart de Rostimont, de la ville d<
au diocèse de Liège, a donné entendre qu'il a eu certain débat et
noise aveucq ung nommé Jehan Daufz, de ladite ville de Liège, et
l'a féru et navré tellement que mort s'en est ensuy. Tour laquelle
2l8 ANNEXE B
mort il a faite paix aux parens et amis dudit mort, moyennant que
par la seignorie de la dite ville de Namur il a esté condempné de
venir et soy présenter en nostred.it royame de Cyprès, nous requérant
humblement nos lettres de certifficacions, lesquelx bénignement
lui avons ottroy et certiffions qu'il a esté en Cyprès, eu propre per-
sonne, etc. Tesmoins de ce, nous avons fait mettre notre séel à ces
présentes ; donné en nostre cité de Cypre de Nicossie, le XVe jour
d'aoust, lan mil IIIIC XXXIIII.
Ainsi signé : du Bois.
(Copie, Répertoire Lodevoet, nos 52, 254. Cfr Wodon, Le droit de
vengeance dans le comté de Namur, p. 188).
IX
23 septembre 1440. — Certificat signé du notaire Symons à Aix-la-
Chapelle.
Ich Johannes van Namen wert inden grunen schilt zu Ayclien
bekenne, ende ghtzuge overmitz dese cedule, dat Art Lyetkens
bringer deser cedule alhier gheweest haet ende onser lieven vrouwen
kirchen visentert haet. Int jair onsheren duseut vierhondert ende
XL jairen, XXIII daege in September.
Jo. Symons notarius.
(Original ; écriture cursive ; sans sceau ; sur papier ; aux Archives
communales de Lierre, annexé au Correctieboeck) .
8 avril 1441. » — Certificat du Chapitre de la Collégiale Saint- Jean à
Bois-le-Duc.
Universis et singulis praesentibus visuris et audituris Wilhelmus
voet presbyter Canonicus et commissarius ad infrascripta per vene-
rabiles viros dominos Decanum et capitulum ecclesie collegiate Scti
Johannis evangeliste Buscoducensis leodiensis diocesis Salutem cum
noticia veritatis. Noveritis quod Anno nativitatis domini millesimo
quadringentesimo quadragesimo primo mensis aprilis die octava. . .
van Morseken commorans in opido de liere in Braban. Cameracensis
diocesis peregre visitavit hmina ecclesia praedicte ac ymaginem
gloriose virginis dei genitricis in eadem . . . suis debitis et consuetis
et hoc per iniuncionem justicie secularis opidi predicti. . . Datum sub
sigillo Curie ecclesie predicte. Anno et die prescriptis.
(Original ; écriture cursive ; sceau de cire endommagé ; sur papier ;
aux Archives communales de Lierre, annexé au Correctieboeck).
ANNEXE B 2IQ
XI
13 septembre 1443. — Certificat des autorités . Milan.
M CCCC° XLIII die XIII mensis septembris
Indictione septima.
Universis et singulis présentes litteras inspecturis, Noturn facio
et manifestum, Ego Augustus de Scanziis officialis bulletanun Civi-
tatis milanensis, quod Johauiies de Valveck, se die isto presentavit
coram me ad officium meviiu bullarum eivitatis milanensis sitam
super curia Arenghi pênes ecclesiam maiorem dicte eivitatis construc-
tam sub vocabulo Béate Virginis Marie. Et hoc pro satisfacione cu-
iusdam emende iniuncte eo quia minatus fuit quendam henrich de mol
cura verbis iniuriosis. In cuius rei testinionium présentes fieri jussi, et
sigillo consueto dicti officii sigillari feci.
Ego Baldesar de Capellis notarius dicti officii, et jussu
dicti domini officialis scripsi et sigillavi.
(Original ; écriture cursive ; sceau plaqué ; sur papier ; aux Archives
communales de Lierre, annexé au Correctieboeck).
XII
Pâques 1444. — Certificat du curé de Wilsnack.
Ad Universorum Ego Otto tzikerus Curatus in Wilsnak deduco
noticiam per présentes quod sub anno domini millesimo CCCC X
LIIII0 in die pasche fuit hic diligens Clamensyen de mandato et
instancia consulatus et communitatis eivitatis dicte lira qui fecit
fidehter suam peregrinationem, eadem protestor sacramenti sub
sigillo presentibus subimposito.
(Original ; écriture cursive ; sceau plaqué ; aux Archives commu-
nales de Lierre ; annexé au Correctieboeck).
XIII
1 septembre 1446. — Certificat des conservateurs des reliques des Trois
Rois à Cologne.
Nos custodes Corporum beatorum trium Regum in Colonia. Xotum
facimus unicuique et singulis quorum interest quod coram aobis
compai-uit in maiori ecclesia Wàlterus de Weyenberch asseren
facere emendam domicello Johanni de leer ex causa qua pro
beatos très Regos beatos très Reges (sic) dévote peregre visitavil
In cuius rei testimonium eidem praesentem litteram contulimua
sigillo nostro et hoc consueto modo sigillatam. Anno domini M" CCCC
XL VI prima die septembris.
(Original ; écriture cursive ; sceau enlevé ; sur parchemin ; aux
Archives ciornmunales de Leirre ; annexé au Correctieboeck).
220 ANNEXE B
XIV
21 août 1454. — Certificat du Chapitre de Notre-Dame de Paris.
Universis présentes litteras inspecturis. Capitulum venerabilis
ecclesie parisiensis ad Romanam ecclesiam mûlomedio pertinens,
absente decano, Salutem in Domino. Universitati vestre tenore pre-
sencium certificamur quod Gumrnanis perke clericus parrochialis
ecclesie de lire diocesis Cameracencis hic missus ex parte dicte ville
de lire pro nonnnllis causis ipsum ad hoc monentibus visitavit lhnina
ecclesie nostre béate marie parisiensis et ibidem peregre et personahter
accessit pro iniuncta sibi penitentia. In Cuius Rei testimoniuxn sigil-
lum nostrum quo in talibus utimur praesentibus Utteris duximus
apponendum. Datum et actum Anno doniini M0 CCCC0 LIIII0 die
XXIa mensis Augusti.
G. Dermery.
(Original ; écriture cursive ; sceau enlevé ; sur parchemin ; aux
Archives communales de Lierre; annexé au Correctieboeck) .
XV
27 mai 1462. — Certificat des échevins de Cambrai.
A Très honnoirables et sages les Scoutette et Bschevins de le ville
de liere, et à tous aultres aqui ou auxquelz ces nos présentes lettres
venront Eschevins de la Cite de Cambray salut et dillection. Nous
vous certifiions, que ce jour duy datte de ces présentes Wautrequin
Van Stripe su restoit en ceste dite cite, lequel ala viseter et faire
son pelerinaige en leglise nostre dame de Cambray, comme tenu y
estoit ainsi quil disait pour aucune ofîence par lui faite alencontre
de Clais Van de Waure. Par le tesmoignage de ces présentes, auxquelles
avons fait mettre et appendre nostre seignet, qui furent faites et
données en ladite Cite le XXVIIe Jour du mois de inay lan mille
quatre cens soixante et deux.
Par nous messires Pierre de
Wingles et Jehan de layens.
J. fanon n.
(Original ; écriture cursive ; sceau de cire ; sur parchemin ; aux
Archives communales de Lierre ; annexé au Correctieboeck).
XVI
24 septembre 1479. — Certificat du vicaire et du trésorier de l'église de
Notre-Dame de H al.
Nos Johannes moys presbyter vicccuratus ecclesie parochialis de
liai Cameracensis dyocesis et Joannes cleys thezaurarius fabrice
ANNEXE B 221
eiusdem ecclesie. Attestamur et certificamur peï présentes Mychae-
lem Douwc peregre visitasse kmina gloriossisime Virginia mai
coteras reliquias in eadem ecclesïa \d rationem emende seu penifc
sibi ut asseruit per venerabiles dominos legislati
iniuncte, occasione aliquorum excessuum per ipsum commissorum.
Datum in hal sub sigillé prefate ecclesie. Anno Domini
L,XXIX° die vero XXIIII1 tnensis septembris.
(Original ; écriture cursive ; sceau plaqué ; sur papier ; aux Archives
communales de Lierre ; annexé au Correctiebo, ,
ANNEXE C
i. Tarif d'Audenarde de 1338 (1).
Dit zyn de pilegrimagen .
Te Sente Niclaus ten Baren, op XX lib. par. [160].
Te Sente Peters ende te Sente Pauwels, te groeten Roeme, op XII
lib. par. [170].
Te Sente Jacops in Galissien, op XII lib. par. [176].
Te Sente Salvatoirs in de Stuerie, op X lib. par. [175].
Te Sente Pieters te Meorke, op VIII lib. par.
Te Sente Francoys t' Assise, op X lib. par. [150].
Te onzer Vrauwen te Pise, op XII lib. par. [169].
Te Sente Martins te Lnke, op XII lib. pas. (163].
Te Sente Andries in Scotland, op VIII lib pat. (144].
Te Onser Vrauwen te Salisbry, in Inghelant, op VI lib. par. [146].
Te Sente Ambrisis te Melanen, op XII lib. par. [164].
Te Onser Vrauwen te Pietersente, op XII lib par. [167].
Te Onser Vrauwen te Rochemadour, op VIII lib par. [89].
Ten Sente Gillis in Provenche, op VIII lib. par. [84).
Te Sente Niclaus in Warangeville, op IIII lib. par. [105].
Te Sente Mathys te Trieren, op III lib. par. [133].
Ten Drie Conningghen te Ceulne, op XL schel. par. [117].
Te Onser Vrauwen t'Aken, op XXX schel par. [113].
Te Sente Joes, op XXX schel. par. [57].
Te Sente Martins te Tours, op IIII lib. par. (103].
Te Onser Vrauwen te Charters, op III lib. par. [48].
Te Vendôme t'Ons Heeren Crunen, op III lib. par. [107].
Te Sente Moors bi Parys, op XL, schel. par. [80].
T'Onser Vrauwen te Mussi, op IIII lib. par. [69].
Te Sente Willems in Déserte, op VII lib. par. [94].
Te Sente Eutropen in Poitou, op VI lib. par. [99].
Te Onser Vrauwen te Godsbure, op VI lib. par.
Te Onser Vrauwen te Vannard, op VIII lib. par. [106].
Ten II Marien up de Zee, op IX lib. par. [35].
Te Sente Floreus te Orniggheu, op VIII lib. par. [75].
Te Sente Maxhnyns, op IX lib. par. [96].
Te Sents Marien Magdaleenen ter Balme, op IX lib. par. [98].
Te Sente Victors te Mersielgen, op IX lib. par. [65].
(1) Van LERBERGHE et RONSSE, Audenaerdsche mengelingen,
Audenarde, t. I (1845), p. 130.
ANNEXE C
223
Ten Cruce van Scroembergh, op V liv. par. [131].
Te Sente Thomaes van Cantelberghe, in Ingheïant, op VI lib pat
[137]-
T'Onser Vranwen t'Ulsterloe, op XII lib. par. [17].
T'Onser Vranwen ten Traillen, in Rissele, op XII 3chel. par [60].
Ter Kerken te Atraeht, op XX schel. par. [36].
Te Sente Loys te Noyoen, op XXX schel. par. [74].
T'onser Vranwen te Riemen, op XL schel. par. [87].
T'onser Vrauwen t'Ardenborch, op XII sejhel. par 1
Te Sente Juliens ten Briden, op V liv. par. [44].
T'Onser Vranwen ten Putte, op VI lib. par. [86].
Te Sente Joeris in de Distelen, op X schel. par. [23].
Te Onser Vrauwen te Aleeste, in de Ricordane, op VIII lib. par [31].
Te Sente Lambrechts te Ludeke, op XXX schel. par. [19].
Te Sente Servaes te Maestricht, op XXIIII schel. par. [20].
2. Tarif de Gand (i).
Dit zyn de Peelgrimagien
L.
T'Seleghes Kerst bi Ghendt [13]
T'ons vrauwe te Valueert [106]
Te Sente Jacops in Galissien [176]
Te Groten Rome [170]
Te Rutsemadoen [89]
Te Sente Juliens ten Bryden | |
Te Vendôme [107]
Te Sente Simoens, bi Parys (80]
Te Sente Martins, te Tours [103]
Te Sente Katherine te Roen, in Normaudieu [9]
Te Sente Joes [57]
Te Sente Loys, te Noyoen 7 1
Te Cyssoen [100]
Te Domike [26]
Ter Traillien, te Ricele [60]
Te Sente Niclaeus, in Warangeville
T'onser Vrauwen t'Aken [113]
Te Coelne, ten III Coninghen [117]
Te Trier en [133]
T'onser Vrauwen, te Puns in Averne [86]
Te vSente Marie Magdeleenen, bi Verdelay ^109]
Ten Boenen t'onser Vrauwen [42]
Te t-'ente Eutropien in Putau 99]
T'onser Vrauwe te 't vSaerter [48]
Te Sente Arnouds 49
Te Sente Wouters ter Pontoyseu "82]
0
0
1 2
6
0
0
12
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0
I 2
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0
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0
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0
5
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0
4
O
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0
20
0
4
[O
0
0
5°
0
0
5°
0
0
40
0
(1) Extrait du Witten Bouc, f° 10, aux archives de la ville de Gand'
Sans date. CaNNAERT, Bijdragen p. $ji seq.
224 ANNEXE C
Te Sente Sophy, in Constantinoble [193] T.
Te Sente Salvateurs in de Storie [175]
T'ons. Vrauwen, te Rontcevael [179]
Te Aviugoen [38]
Te Sente Aldeberts Theglrmonde in Holland [11]
Te Bordiaus, te Sente Michiels daer de roede es
daer God de helle rnede brac [41]
T'ons. vrauwe te Mnssi, bi Chastillon [69]
Te Mussi l'Evesque [70]
Te Sente Jans, 't Amiens [32]
Te Sente Michiels in 't water 't Atrecht [67]
T'ons. Vranwe te Karlepont, bi Noyoen [47]
Te Sente Lodewycs te Marsaillen [64]
Te Sente Niclaeus ten Oestenvaeren in Poelien
[160]
Te Sente Michiels te Mongaergne [165]
Te Sente Bertelmeeus te Bonevente [161]
Te Sente Andries in Salerne [171]
T'onser Vrauwe ter Pedegronte bi Napels [168]
Te Sente Marcs te Venegen [174]
Te Sente Cyre te Nevers [73]
T'ons. Vranwe te Montoyse up VII milen
Nevers [68]
Te Sente Pieters benede Verzelay [no]
Te Sent Lazarus Tavalon, in begin van Boer-
goenge, up III mile Verzelay [37]
Te Sente Anthonis, bute Nevers [71]
Ter Kersen t' Atrecht [36]
Te Sente Gillis in Proventsen [84]
Te Sente Benedictus te Linden loe [93]
Te Sente Priveers te Dizize [53]
T'ons. Vrauwe te Sarclet up 3 milen Nevers [58]
T'ons. Vrauwe te Proyen, up 3 milen Douci
in Nevers [83]
T'ons. Vrauwe te Confort up 3 milen mers le
conte, in Nevers
Te Sente Cléments in 't geberchte up 9 milen Lyoens,
sur Rone.
Te sente Jans Kinne te Avhnos XVII milen
boven Parys [33]
Te Sente Nichasis, te Riemen [88]
Ten heleghen bloede te Wilsenaken [135]
Te Sente Juliens le Man L,X milen boven
Parys [63]
Te Sente Maurisses te Angiers [34]
Te Sente Martins te Caudres, up de Lore [52]
Te Sente Bénignes, te Dygioen in Bour-
goinge [54]
Te Sente Bernfïerds hoefde, te Cleervaus [50]
6
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gr
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4
10
0
3
0
0
4
10
0
3
10
0
ANNEXE C
225
Te Sente Jans te Winans ten t' Saerther-
rouse in 't lant van Savoye [90] i,.
Te Basseville, ten t' Saertheronse bi Cle-
mecy [39]
T'ons. Vraitwe te Aussoere
Te Sente Pauwela te Lonnen [62]
T'ons. Vranwe te Sallebry [146]
Te Sente Maes te Cantelberghe [137]
T'ons. Vranwe te Rnuslede [22]
Te Sente Leuws bute Orliens [77]
Te Sente Andries in Scotlant [144]
Te Sente Fransoys Tassise [150]
Te Sente Mesine
Te Sente Ambrosis te Milanen [164]
Te Sente Pieter [167]
T'ons. Vrauwe te Pise [169]
Te Sente Martins te Luke [163]
T'ons. Vrauwe te Walsinghe [147]
T'ons. Vrauwe en 't Sente Katheline te Lin-
cole [140]
Te Sente Pieter te Lort [142]
Te Sente Ernondsberghe [145]
Te Sente Pieter s te Pieter sborch [143]
Te Douvere te St-Gillis [138]
Te Sente Niclaeus Terremude [148]
T'ons. Vrauwe Lincole [141]
Te Sente Jans te Beverlay [136]
Te Sente Thonxaes van Erfoerde [139]
Te Sente Niclaeus in Arrestaen
Te Cypp. [191]
Te Mussi [69]
Te Sente Lauweriens te Venegen [173]
Te Sente Caryns, up VI milen ghufke aise naer
Coelne [126]
Te Eysterbach up VI mile Coelne [121]
Te Sente Joes te Walpenbghe up 2 mile
Coelne [134]
Te Sente Ayouls te Provyn in Sampaengen [85]
T'ons. Vrauwen te Jeuden, eeue mile in gheen-
side Conincsberghe [188]
Te Sente Kateliue Laernaen II mile in gheen-
side Conincsberghe [187]
T'ons. Vrauwen te Stamen up 1 mile Colne up
de Ryn [130]
Te Sente Eerbouds ieghe Colne over up den Ryn
Te Sente Matemen ter Roederkerken, up eeue
alf mile Coelne up den Ryn daer men den
eersten wyn dry net [128]
Te Sente Driaex up IIII milen Coelne in
't graefseep van den Berg/ie
5
7
7
7
4
5
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5
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6
18
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40
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13
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5
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gr.
o
o
50 8
55 °
42 o
o o
42 0
42 o
40
50 o
15
226 ANNEXE C
Te Sente Werners te Bachernach [114] h.
T'ons Vrauwe te Lubeke [122]
Te Sente Niclaeus in Vierloset bi Reimen [108]
Te Sent Esperis te Rue, up de zee boven
Sent Joes, V mile [92]
T'ons. Vrauwe te Vranlevoerde [119]
Tons. Vrauwe te Godsbuer
Ten Berghe ter noet Gods, up II milen Aken
T'ons. Vrauwe te Cleri boven Orliens [51]
Te Sente Servaes te Maestricht [20]
T'ons. Vrauwe te Convalensen boven Colne
X inilen [116]
Te Sente Daniels up Bervelt [4]
T'ons. Vrauwe te Ghottem [14]
T'ons. Vrauwe te Cusselyn bi Lubeke
Te Sente Aelbrechts bute Dasike [186]
Ten heleghe cruce te Stroemberghe [131]
T'ons. Vrauwe te Strasborch [101]
T'ons. Vrauwe te Basele XIII milen boven
Colne Strasbourch [180]
Te Sente Marien Magdeleenen ter Spelunken [96]
T'ons. Vrauwe te Ouelge ville te Fonteneels
in Normandien bi Roen, up V milen naer [56]
Te Sente Ofïeraens t'Abbeville in Ponthieu [29]
Te Sente Ventselaers in Praghen, up VI weken
varen en keeren [183]
T'ons. Vrauwe te Reghensborch up de Denawe [127] 6
Te Sente Aelbrechts te Bresselau in Polane up
de Odere de rivière [115] 800
T'ons. Vrauwe te Righe XVIII dachvaerde
henen X dachvaerde boven der Oderen [189] 10 o o
Te Sente Morissin te Viaene [m] 3 ° °
Te Sente Martins te Menche [123] 3 10 o
Te Sente Katheline te Grevenroden V mile
boen Coelne [120] o 45 °
Ten Domme te Monstre up Westvalen II dach-
vaerden boven Coelne [125]
Te vSente Martens t'Orteghem [178]
Te Sente Anastasien in Constantinopele [192]
Te Sente Katheline te Mont Synay [195]
T'ons. Vrauwe te Bessenson [40]
T'ons. Vrauwe te Hulsterloe [17]
Te Sente Momillens up thoe tusschen St-Oe-
maers en Watine [97] o 15
T'ons. Vrauwe te Vabre in de Wostiue, te
S. Willems in 't hertsche bisscopdom van
Toulouze eiide in het bisscopdom van Vabre
up III dachvaerde Rutsemadoe, Canoenke
régulière, ende men draghet daer houtine
scoeu al 't land dore [104, 94] 10 o
3
0
0
6
0
0
0
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0
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[O
0
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6
0
gr-
4
0
0
0
5
0
ANNEXIi C
227
Te Sente Thomas in Yndien in 't Keysericke
Meze up III da< ' . 197] L,.
Te Sente Pieters te Warendin in Qngerien JS5]
Te Eggremort, boven Avingoen [30]
Te Sent Servins te Tholouse [102]
T'ons. Vrauwe tu Serdenay bi Damas [196]
Te Sente Hubrechts te Bottelsteine XVIII mi-
le n boven Coelne, te Westvale
Te Sente Stevins up te Dunouwe in Weenden
lant daer Theuca leghet [184]
T'ons. vrauwe te Miren ten Rodenbergbe [12]
Ten helighe cruce t'Orliens [76]
T'onser Vrauwe te Cameraen [46]
Ten heleghen cruce t'Assche [3]
T'ons. Vrauwe te Halle (15]
Te Sente Lamberechts te Ludeke [19]
T'ons. Vrauwe te Berbieres [27]
Te Sente Cornelis Tynden [118]
Te Sente Michiels ten Netelen
Te Sente Rekiers in Pontiu [81]
Te Sente Eeuwouts in Elzaten [132]
Te Sente Cristeneu in Toschanen [172]
T'ons. Vrauwe ter Veinstersterre [55]
Te Sente Willeins in Galissien [177]
Te Sente Ledenaerts in Lymoge [61]
Te Sente Pieters te Thoroud [25]
Te Sente Anthonis te Bursbeke [6]
Te Sente Lauwereyns te Zelzaten [24]
Te Sente Genovefa te Parys [79]
Te Sente Olfs te Dronte in Xoortweghen T90]
Te Sente Arnouts te Mets in Loreine [66]
T'onser Vrauwe ten roeden leeuwe
Te Sente Jans in Angelyn [95]
Te Sente Fiacles in Bruye [43]
Te Sente Antonys in Vyanoys Lii2]
Te Heleghe sacramente t'Herkenrode [16]
T'ons. Vrauwe te Lucerne [182]
T'ons. Vrauwe te Spire up de ryn [129]
Te S. Lauwereins in Geneven [162]
Te S. Gerys te Camerike up den Ber^'
16
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i)
7
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0
0
0
!5
3. Tarif d'At^OST (1) .
Dit zyn de Pelgrimaigen die men te stellene pleecht in heerlik^r
beternessen. Ende e.st te wetene dat elckeii seellinc parisis es III !
ende elc pond III pond.
Te Sent Joos op de zee [57]
(1) \Va:<<.v i;a ,, Fia k- IU-
supplém., p. 121.
228 ANNEXE C
T'onser Vrauwen t'Aken [113]
Ten Boeneii t'onser vrouwen [42]
Ter Keerssen t'Atrecht [36]
Te Sente Michiels int water t'Atrecht [67]
Ten Berghe ter nood goods, up II milen naer Ah en
Te Sente Cornelis t'Indien boven Aken [118]. Ei,c xx s. p.
Te Sente Loys te Noyon [74]
Te Soysson [100]
Te vSente Jans t' Amiens [32]
T'onser vrouwen te Charlepont bi Noyon [47]
Te Sente Ofîeraens t'Abbevile in Ponthieu [29]. Ei.c xxx S.
T'onser vrouwen te Lyensen, staet bi Taon up den berch, omtrent
VI milen van Soisson [59] xxxn s.
T' sente Moors bi Parys [80]
Te Sente Ratelinen te Rouan in Normandyen [91]
Te Ceulne ten III Coninghen [117]
T'zentz Wouters te Ponthoise [82]
T'sente Adelbertz t'Egruonde in Holland [11]
T'sente Nichasis te Ryemen [88]
T'sente Thomaes te Cantelberghe [137]
Te Douvre t'sente Gillis [138]
T'sente Everbouts jeghen Ceulne
T'sente Messine
T'sente Materne up den Ryn [128]
T'sente Niclaus in Biersoler bi Riemen [108]
T'sente Genovefen te Parys [79]
Te Sente Fiacre in Bryen [43] Etc XI, S.
Te Doornicke t'onser vrouwen [26]
T'onser vrauwe ter traille te Ryssele [60]
T'sente Pieters te Thorout [25]
T'sente Pieters te Warnoyse in den Bosch tôt Hulst [28]. Etcx 3.
T'onser vrouwen te Convalensen, XIII milen boven Ceulne [116]
Te Eysterbach up VI milen naer Ceulne [121]. EL,c tv s.
Te Sente Daneels upt Beervelt [4], 11 S.
T'onser vrouwen te Gothem [14], iv s.
T'sente Katelinen te Grevenroden V milen boven Ceulne [120], XL,v s.
T'onser vrouwen te Ruuslede [22]
T'onser Vrouwen te Hulsterloo [17]
T'onser Vrouwen te Miren ten Roodenberghe [12]
T'sent Anthonis te Borstbeke [6], Etc. v s.
T'sent Annen te Bodelvuere [7]
T'sente Pieters in Warnoyse [28], Etc. VI s.
Te Sent Servaes te Maestricht [20], xvn s.
T'onser vrouwen te Eerdehbach [1], IX s.
T'sente Momillens up Cha tusschen St-Omaers ende watene [97]
T'onser Vrouwen le Cambron [8]
T'sente Lambrechts te Ludeke [19]
T'sente Michiels ten Netelen
T'sente Goorix te Cainerike up den berch [45], iv.c. xv 8.
Ten heyleghen cruce t'Assche [3], vu s.
ANNEXE C
2.2g
T'onser Vrouwen te Halle [15], vin s.
T'sente Rikiers en Pontliieu [81], xxvnr s.
T'sevtt Huuchs in Europen, vi den,
Te Sente Laureyns in Elsaten [24], ni s.
Teii hevleghen sacramenten t'Erkeuroden [16], i:i,c. xn .
T'onser ■ ischeyden
T'onser Vrouwen te Lebbeke [18]
T'onser Vrouwen te Halseriberghe [2], EEC. v
T'sheylichs Kerst bi Ghend 13], xn de
Ten lieyleghen Cruce te Hakeren bi Andwerpen [10], 1: r" . vin
T'onsen Vrouwen te Halle [15], ELC vin s.
Te Sent Joos te Wapenberghe up II milen naer Coli
T'onser Vrouwen te Starnen up 1 mile naer Colene Tijo], i
T'sente Speris te Rue up de zee boven Sente Joos
T'onser liever vrouwen te Berbieres [27], ELC xxiv s.
T'onser vrouwen te Charters [48]
Te Sente Aruouds [49]
Te Sente Janskinne te Ainons XVII milen boven Parys
Te Sente Caryns up VI milen naer Gulcke (126)
T'sente Ayeulx te Provyn in Champaignen [85]
T'sente Driaex up II II milen Colene
T'onser vrouwen te Quelgeville [56], ELC e s.
T'sente Hubrechts te Bottelsteine
T'onser vrouwen te Valveert [106]
T'onser vrouwen t' Avignon [38]
Te Bourdeaulx te Sente Michiels [41]
T'sente Lodewycx te Maersaelgen [64]
T'sente Gillis in Provenchen [84]
T'onser vrouwen te Lincole [141]
T'sente Thomaes van Erforde [139]
T'onser vrouwen te Lubeke [122]
T'onser vrouwen te Cutselm bi Lubeke
T'sente Marien Alagdalenen ter Spelonckeu [96]
T'onser vrouwen te Reghensbomch up de Donauwe [127]
T'onser vrouwen te Luterne [182], eec x\- t,.
Te Sente Martins te Tours [103]
Te Sente Niclaus in Warangeville [105], ELC ni L. x -,
Te Sent Jacobs in Galissien [176]
Ten grooten Roome [170]
T'onser vrouwen ter Jeude [188], EEC xn e.
Te Sente Eewouts in Elsaten [132]
Te Sente Ledenaerts in Limogen [61]
Te Rutsemadou t'onser Vrouwen [89]
T'onser vrouwen te Puus [86]
T'onser vrouwen te Salbry [146]
T'sente Ambrosys te Melan [164]
T'onser vrouwen ende Sente Catelinen te Lincole [140- 141]
T'sente Pieters te Jorc [149]
T'senter Claus Therrnude [148]
T'sent Jans te Beverlay [136]
230 ANNEXE C
T'onser vrouwen te Bazele XIIII milen boven Straesborch [180]
EIvC v i,.
T'onser vrouwen. te Nysele, staet boven Basele, omtrent een dach-
vaert boven Tsurc [181], vi i,.
T'Sente Juliens ten Bryden [44]
T'vSente Marien Magdaleenen te Verdelay [109]
T'Sente Croete Nevers [72]
T'onser vrouwen te Montenoysen [68]
T'Sente Pieters beneden Verselay [no]
Te Sente Lasarus t'Amelon [37]
T'Sent Anthonis buten Nevers [71]
T'onser vrouwen te Sareteit up III milen naer Nevers [58]
T'onser vrouwen te Confort up II milen naer Nevers
T'Sent Basseville ten Chartroisen [39]
T'onser vrouwen te Walsinghen [147]
Te Emondsberghe [145]
T'Sente Pieters te Pitsenborch [143]
T'onser vrouwen te Vrancforde [119]
T'onser vrouwen te Godsbuer
T'onser vrouwen te Straesborch [101]
T'onser vrouwen te Besanchon [40]
T'Sent Jans in Anglyn [95]. ei,c iv 1,.
T'onser vrouwen te Mussy bi Chastellion [69]
T'onser vrouwen te Proyen [83]
T'Sent Juliens te Mans [63]
T'Sente Bernaerts hoofde te Clervaux [50]
T'onser vrouwen t' Aufoire
T'Sente Morissis te Vyane [ni]
T'Sente Martins te Candres up de Loire [52]
Te Vendomme t'ons heeren tranen [107]
T'Sente Mathys te Trieren [133]
T'Sente Martins ende t'onser vrouwen te Mens [123-124]
T'Sent Anthonis in Vyennois [112]
T'Sente Pouwels te Londen [62]
T'onser vrouwen te Clery boven Orlyens [51]
Ten heyleghen Cruce t'Orlyens [76]
Ten Pomme te Monstre in Westvalen [125]
T'onser vrouwen te Spiers up den Ryn [129]. Ei<C ni 1,. x s.
Te Sent Arnouts te Mets in Loreine [66]
T'Sent Eutropen in Poitou [99]
T'Sente Privetz te Disize [53]
T'Sente Cléments inf gheberghte up IX milen Lyons sur Rone
T'Snte Morissis t'Angiers [34]
T'Sente Bénignes te Dygon [54]
T'Sent Jans te Romans ten Chartroysen in Savoy en [90]. EiyC iv r,. x s.
Te Sente Laureyns in Geneven [162]
T'Bggernoort boven Avignon [30]
T'onser vrouwen te Ronsseval [179]
T'Sente Ventsulan in Praghen [183]
T'Sente Martins te Luuke [163]
ANNEXE C
'
T'onser vrouwen te Pyze [169]
Te Petresaincte [167]
Ten heyleghen cruce te Stooberghe .11 1,.
Te Sente Kerstinen 111 Toscanen [172]. vu r,. x S.
T'onser vrouwen ten Rooden Leeuwe
T'Sente Adelbrechta in Bresselau in Polanen [115]
T'Sente Francoys t'Assize [150]
T'Sente Marix te Venegen [174]. Ei,c vin 1,.
Te Sente Salvatoirs in Suryen [175]
T'Sente Aelbrechts buten Danseke [186]. 1 r, ix l.
T'Sente Servins te Thoulousen [102]
T'onser vronwen te Vakre in de Woestine [104]
T'Sente Willems int eertsbisdom van Thoulouse ende int bisdom
van Vake up III dachvaerden naer Rutsmadou, Canonicke regu-
lieren, ende men draecht daer houtene scoen^
T'Sente Martens t'Ortegeere [178]
T'Sent Andries in Scotland [144]. Elc x l.
T'onser vrouwen te Righe X dachvaerden boven de rivière van der
Odere [189]. sa: 1,.
Ten heyleghen bloede te Wilsenaken [135]. vi 1,.
Te Sente Stevens up de Donauwe [184]
T'Sente Xillerns in Gallissien [177]
T'onser vrouwen te Finisterre [55]
T'onser vrouwen ter Pedegronten bi Xapels [168]. Kr,c xm l.
T'Sente Lauwereyns te Veneghen [173]. elc xim h.
T'Sente Pieters te Warendin in Hongheryen "185]
T'Sente Michiels te Montegargan tusscnen Senter Niclaus ende
Xapels [165]
T'Sente Bartelnieeux te Bonne vente [161]
T'Sent Andries in Saleerue [171] EI.C. xv h.
T' Senter Niclaus in Avvestaen
T'Sentre Niclaus ten Oustenbaren [160]. kix xvm h.
T'onser vrouwen te Sardonay bi Diaraas [196]. m L.
Te Cypers [191]. mi h.
T'Sente Anastasyen in Constantinoble [192]
T'Sente Sophyen in Constantinoble [193]. Ei,c vx 1..
Te Sente Thomaes in Indien int Keyserike van Meese up III dach-
vaerden naer Cathay [197]. xvi 1,.
(.îhelyc hier voren int eapitle van den beternesseu van quetsuren
ende injurien ghenouch ghenoopt es, zo es t'Aelst gheuzeerl ende
over recht van ouds ghecostumeert : dat zo wanneer yemende
wyst wart eenegherande pelgrimaigen te gane in baten van den
ghonen, die ghelt gheven moet van quetsuren, zo zal den wille van
zulcken ghelde of pelgrimaigen af te staen in den ghonen. d 1
van quetsiuen gheven moet.
232
ANNEXE C
4. Tarif de Termonde (i)
Dit siin de pelgrinagien valider stede van Denremonde :
TsheUchs Kersts by Ghendt [13] XII d. par.
Tsente Daniels up Beerrenvelt [4] II S.
Tonser Vrauwen t'Hulsterloe [17] V S.
Tsente Wandelghys by Coolscamp [9] VI s-
Te Dornike [26] X S.
Te Traillen te Ryssele [60] »
Tsente Mommelins up de Ha tussclien Sente Oenieers
ende Wastine [97] xv s-
Tsente Servaes te Maestricht [20] XVII S.
Te Sente Joos [57] xx s-
Tonser Vrouwen te Aken [113] »
Tonser Vrouwen te Boenen [42] »
Ter Keerssen tAetrecht [36] »
Tsente Machiels int water tAetrecht [67] »
Ten berghe ter Noot Gods up twee milen Aken »
Tsente Offeraens t Abbeville en Ponthieu [29] »
T 'sente Bspreits en Rue up de zee V milen boven sent
Joos [92] XXIIII S.
Tsente Loys te Noyon [74] XXX S.
Te Sissoen t sente Jans hoot t Amiens [100, 32] »
Tonser vrouwen te Carlepont by Noyon [47] ^ »
Tsente Zimoers by Parys [80] XL S.
Tsente Katelinen te Roen in Normandien [91] »
Te Coolne te III. Coninghen [117] »
Tsente Wouters ter Pontoysen [82] »
Tsente Adelbeerts Igmonde in Hollant [11] XL S.
Tsente Thomaes te Cantelberghe [137] »
Tsente Nichasys te Riemen [88] »
Tsente Meesine "
Te Douvere t sent Gillys [138] »
Tsente Materne ter Rooder Kerken up 1 1/2 mile »
Coolne, daer men den eersten wyn drinct [128] »
Tsente Niclaeus in Viersolet by Riemen [108] »
Tsente Fiakels in Brye [43] »
Tonser Vrouwen te Scammon up een mlie Coolne [130] XLI S.
Tsente Yoos te Walpenberghe up II milen Coolne [134] XLII S.
Tsente Katelinen te Grevenroden V milen boven Coolne
[120] XLV S-
Tonser Vrouwen Tsaerters [48] L S.
Tsente Arnouts [49] »
Tsente Jans Kinne Taminos XVII milen boven Paris [33] »
Tsente Karins up VI milen Guulke aise naer Coolne [126] »
(1) Annales du Cercle archéologique de Termonde, 1863, p. 81.
ANNEXE C 233
T sente Drayex up II II milen Coolne \4 s.
Te Eysterbach up VI milen Coolne [121] »
Tonser Vrouwen te Coveleins int gheele VII Lib. p. [116]
Tonser Vrouwen te Quelgheville te Fonteneels in Noor-
mandien up V milen Roen [56] »
Te Vendomme [107] III Lib.
Te Trieren [133] »
Tonser Vrouwen te Mussi bi Cancellon [69] »
Tseinte Mertyns te Cauders up de Lore [52]
Tseinte Pauwels te Lonnen [62] »
Te Mussi [69] III Lib.
Tseute Warnaerts te Bachernach [114] »
Tonser Vrouwen te Cleri boven Orliens [51] »
Ten Domine te Monstre up Westvalen twee deahvaerde
boven Coolne [125] »
Tsente Mertyns te Tours [103] III L. X S.
Tsente Niclaeus in War ange ville [105] »
Te Mussi l'Evesque [70] »
Tonser Vrouwen ter Preyen up III milen Dousi in Nevers
[83]
Tsente Juleins te Mans XLII milen boven Parys [63] »
Tsente Bernaerts hoofde te Clervaux [50] »
Tonser Vrouwen te Ausoere »
Tsente Morissis te Vianen [m] »
Tseinte Martyns te Mense [123] »
Tsente Julens ten Briden [44] IIII Lib.
Tsente Marien Magdaleenen in Vierdolay [109] »
Tsente Tyre te Nevers [73] »
Tonser Vrouwen te Montenoysen up VII milen Nevers [68]
Tsente Lazarus tAnazom int beghin van Bourgoignen
up III milen Versalay [37] »
Tseinte Pieters beneden Versalay [no] »
Tsente Anthonys but en Nevers [71]
Tonser Vrouwen te Saratet sur Lore [58] »
Tonser Vrouwen te Confort *
Te Basseville ten Tsartroysen by Clemencus [39]
Tsente Emonts berghe [145]
Tsente Pieters te Pietersboch [143]
Tonser Vrouwen te Walsingenlien [147]
Tonser Vrouwen te Vranckevoerde [119]
Tonser Vrouwen te Godsbuer HII Lib.
Tonser Vrouwen te Straesborch [101]
Tonser Vrouwen te Bessanson [40]
Tsente Eutropen in Petau [99] H11 T*- ^ ^
Tsente Privets te Dizise [53]
Tsente Clemens up IX milen Lyons sur
Tsente Maurissis te Angiers [34]
Tsente Bénignes te Digon in Bourgoingen [54]
Tsente Jans te Romane ten Sartroysen int laut van
Savoye [90]
234 ANNEXE C
Te Rutsemadoen [89] V Lib.
Tonser Vrouwen te Puts [86] »
Tonser Vrouwen te Salsbry [146] »
Tsente Ambrosys te Melanen [164] »
Tonser vrouwen te Lincola [141] »
Tsente Pieters te Ioorc [149] »
Tsente Niclaeus Terremude [14S] »
Tsent Jans te Beverlay [136] »
Tonser Vrouwen te Bazele XIIII milen boveu Straes-
boch [180] »
Tonser Vrouwen te Valveert [106] VI Lib.
Te Avengoen [38] »
Te Bordeaus tsente Machiels daer de roede es daer God
de Helle met brac [41] »
Tsente Lodewycx te Maersaelgen [64] »
Te Pieters sente [167] »
Tonser Vrouwen te Lincole [141] »
Tsente Thomaes te Erforde [139] »
Tonser Vrouwen te Lubeke [122] »
Tsente Marien Magdaleenen ter Spelunken [96] »
Tonser Vrouwen te Regiensborch op de Dunouwe [127] VI Lib.
Tsente Gillys in Provenchen [84] »
Tonser Vrouwen te Ronce vaîe [179] VII L.
Tonser Vrouwen te Pyse [169] »
Tsente Martyns te Luke [163] »
Tsente Ventselau in Praghen up VI weken varen ende
keeren [183] »
tEggremont boven Avengon [30] »
Tsente Salvatours in de Storie [175] IX L.
Tsente Andries in Scollant [144] X L.
Tonser Vrouwen te Vabre in de Woestine [106] »
Tseiute Willems int Eertbischopdom van Tholousen
ende int bisschopdom van Vabre, up III dachvaerde
Rutesernadoem daer woenen canonicke Régulière
ende men draecht daer houtinen schoen al djaer
dore [94] »
Tseinte Severins te Tholousen [102] »
Tsente Jacops in Galissien [176] XII L.
Ten grooten Rome [170] »
Tonser Vrouwen te Pedegronte by Napels [168] XIII L.
Tsente Lauwereins van Venegen [173] »
Tsente Andries in Saleerne [171] XV L.
Tsente Pieters in Warandyn in Hongherien [185] »
Tsente Niclaeus ten Oestenbaren [160] XVIII L.
Tsente Niclaeus in Arestaen »
Tonser Vrouwen te Sardonay by Damas [196] XXXVI L.
Te Famagons in Cypren [191] XL VIII L.
Tsente Thomaes in Indien int Kejrseryke van Meze
up III dachvaerde Cathay [197] LX L.
Tsente Antonys te Roodes int spetael der Templiers [194] LX L.
ANNEXE C
235
Tsente Michiels te Montegargaen [1.65] XV l.
Tsente Bertehneus te Bomievent [161] VI] I..
Tsente Erbouts ieghen Coolne over den Ryn
Ten heleghen Cruce te Stroemberghe [131]
Tonser Vrouwen te Rige XVIII dachvaerde hover ende
X dachvaerde boven der Oderen [189] XI I..
Tsente Marcs te Venegen [174] VIII !..
Tsente Fransoys t Assyse [150]
Tsente Aelbrechts te Bresselaeu in Pollanen op de Odere
de rivière [115] »
Tsente Cristinen in Tuskanen [172] »
5. Tarif de Louvain de 1484 (1).
« Dese ordinancie ende eendrechticheit es gemaect ende 1
dragen bi den Meyere ende metten Raede van der Stat ende metten
goeden lieden van buten Raets, omme ghemeynen orber ende pro-
fyte vander stat, ende omme ras Le ende vrede onder de goede liede
vander stat te hebben ende te vneden, XXI dage in October, int
jaer XIIIP LXXXIIII.
Inden yersten ,dat aile de ghene die van nu voertaen mesgripen
ende mesdoen jeghen de stat ocht jeghen der stat recht, in worden
oft in wercken, in wat manière dat ware, die selen onsen ghenedegen
Heere ende der Stat dat beeteren met alsulke beedeverden aise de
Stat daer op zetten 9al, ocht gheven voer elke beedevert alsulke
somme gelt aise daer op ghesedt es, half onsen genedigen Heere
ende half der Stat, ende daer af sal de coese altoes staan inde stat
vander bedevert of vanden gelde dwelc sy kyesen sal, ende altoes die
bedeverden te ponen binnen den yersten XI dagen. Ende soe wie
binnen de XI dagen niet en porde sine bedeverde te doene, die soude
syn op enen core van eenen liber ouder groete, half onsen genedegen
Hers ende half der Stat, nochta.11 soe soude hi syn bedevert moeten
porren, des naesten daeghs nae deu voorscreven Xlsten dach, op de
selve core.
Item, een bedevert in Cyprès L Peters.
Een bedevert in Cypre ende jaer ende dach daer in te
bliven [191] C id.
Een bedevert te Sente Jacobs in Galissien [176] XX id.
Een bedevert te Ritchemadouwe [89] X id.
Een bedevert te Charters [48] V id.
Een bedevert te Vyndomme [107] VI id.
Een bedevert te Cantelberghe [137] ^ * j^.
Een bedevert te Sent Joes [57] HI jd.
Een bedevert te Bonen [42] m *<*.
Een bedevert te Coelne [117]
Een bedevert t'Onser Vrouwen, te Parys [78] HH [d.
Een bedevert t'Aken [113] * \°-
Een bedevert te gt-Mertens, in Tours, in Ihc eyne [103] VI id.
Een bedevert ten Bossche [5] * 1(*-
(1) C. P. Serrure, Vaderlandsch Muséum, t. II, p. 326, Gand, 1858.
236 ANNEXE C
Iten, een bedevert te Trière [133] III id.
Item, soe wie een mes toghe op yemande binnen den
sinen, hi soude onsen genedigen Heere
en der Stat, te beternesse, doen een bede-
vert t'onser Vrouwen te Ritchemadouwe [89]
Item een bedevert te St-Theenwouts, in Elzeten, VI peters [132]
Item, so wie enen anderen sochte, in evelen moede, binnen den
sinen, omme hem te evelen of te quetsen, zonder quetsen oclite op
syn huys stiete ochte sloeghe of op yemands huys daer yemand inge-
gaen ware, omme hem te bescudde, bi dage, hi soude onsen genede-
digen Heere ende der Stat te beeternisse doen eene bedevert te
St-Jacobs, in Galissien. Ende soe wie des gelycx dade, bi nachte,
hi soude onsen genedegen Heere ende der Stat een bedevert doen
in Cyprès. En soe wie aldus mesdade jegen de Stat ende jegeu enege
pertie te gader, die soude dat beeteren ons ende genedegen Heere
ende der Stat aise vorscreven es, ende der pertien nae goetduncken
der peysmakers, ende behoudelec altoes in desen saken onsen gene-
degen Heere ende der Stat hoeren coeren ende horen rechte ».
OUVRAGES CITÉS
Acta Sanctorum (AA. SS.) quotquot in orbe coluntur Anvers
sqq.
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— Coutumes du Franc de Bruges, éd. L. GnjJODTS VAN SEVEREN,
Bruxelles, 1874-1880.
— Coutumes de la ville de Courtrai, éd. V. Ijmiu'RG-Stirum, Bru-
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— Coutumes du Pays de Liège, éd. J. J. R.ukkm, h. POI^AIN, L.
Crahay et ST. Bormans, Bruxelles, 1870-1884.
— Coutumes de Lierre, éd. G. DE LONGÉ, Bruxelles, 1875.
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Bruxelles, 1874.
— Coutumes de la ville de Maestricht, éd. L. CRAHAY, Brnx
— Coutumes de la ville de Malines, éd. G. DE I. »NGÉ, Brus
— Coutumes de Namur et de Philippeville, éd. J. GRAN1
Bruxelles, 1869- 1874.
240
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J. F. WlEEEMS, Codex diplomaticus (Brabantsche Yeesten), Bruxelles,
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L. Wodon, Le droit de vengeance dans le comte de Namur, Bruxelles
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J. ZETTINGER, Die Berichle ùber Rompilger ans dem Frankenreicht
bis zum Jahre 800, dans Roemische Quartalschrift, t. II, jyoo.
TABLE DES MATIÈRES
Préface vii-viii
Introduction
I. La législation et la jurisprudence canoniques en ma-
tière de pèlerinages expiatoires 1-23
II. L'introduction des pèlerinages dans le droit communal 23-27
Chapitre I. — caractère général des pèlerinages
EXPIATOIRES ET JUDICIAIRES 28-32
Chapitre IL — les délits.
I. Les délits religieux 34-38
II. Les délits commis contre la chose publique.
i. Attentats contre les droits et prérogatives du
seigneur et de la commune. — 2. Attentats
contre la tranquillité publique. — 3. Infrac-
tions commises par des officiers seigneuriaux
ou communaux dans l'exercice de leurs fonc-
tions. — 4. Délits commis contre les officiers
seigneuriaux ou les fonctionnaires publics dans
l'exercice de leurs fonctions. — 5. Infractions
de nature à entraver la marche des services pu-
blics. — 6. Infractions à caractère de faux. —
7. Infractions aux dispositions d'ordre commer-
cial et industriel. — 8. Contraventions à des
règlements de simple police. — 9. « Inutilité » 38-64
III. Les délits commis contre les personnes et les propriétés.
1. Rupture de la trêve. — 2. Homicide. —
3. Menaces et provocations. — 4. Coups et
blessures. — 5. Violation de domicile. — 6. Dé-
nonciation calomnieuse. — 7. Injures. —
8. Rapt. Adultère. Débauche notoire. — 9. Dé-
lits contre les propriétés : vol, maraudage, etc. 65-84
Chapitre III. — procédure générale.
I. Pèlerinages imposés à la suite d'un contrat de paix . 85-91
II. Pèlerinages imposés à la suite d'une action judi-
ciaire régulière.
TABLE DES MATIÈRES 243
a. Tribunaux d'exception. — b. Tribunaux
ordinaires de la commune. — c. Le « vogue-
ment de forche » dans le droit liégeois ... [02
Chapitre IV. — procédure particulière des tri-
bunaux DE LA COMMUNE.
I. Composition du tribunal de la commune.
1. Présidence : l'officier seigneurial. — 2. As-
sesseurs : les échevins. — 3. Endroit et moment
de séance io3-iii
II. Procédure préliminaire
1. Procédure dénonciatoire : accusation pri-
vée ; plainte criminelle et poursuite d'office ;
information préliminaire. — 2. Procédure
secrète ou inquisitoriale ; franches vérités et
traques de police H3-I2I
III. Arrestation et emprisonnement préventifs .... 121-123
IV. Citation, comparution ou contumace 123-125
V. Procédure de séance.
1. Les preuves. — 2. La défense. — La com-
position. — 4. Le jugement I25-i3j
Chapitre V. — les lieux de pèlerinage.
Pays-Bas. — France. — Allemagne. — Angle-
terre, Ecosse, Irlande. — ■ Italie. — Espagne.
— Suisse. — Europe centrale. — Europe sep-
tentrionale. — Orient I.38-146
Chapitre VI. — exécution du jugement.
I. Mnd*_dj!_vér.uti.nn dts pè.UvirLOPRS .
a. Temps fixé. — b. Formalités du départ.
— c. Manière de faire route. — d. Formalités
de séjour. — e. Conditions de retour. — f. For-
malités au retour i52-i68
IL Le rachat 169-173
III. Substitution. Commutation. Droit de grâce et rémis-
sion 173-179
IV. Sanctions ï7Q-i85
Chapitre VII. — les condamnations a des pèleri-
nages prononcées par le tribunal du rec-
teur de l'université de Louvain AU XV* SIÈCLE.
I. Le tribunal 186-190
IL La procédure 190-193
244 TABLE DES MATIÈRES
III. Les pèlerinages 194-198
Annexes.
Annexe A. Extraits du « Correctie Boeck van der
stadt van Lyere intjaer XI IIIe een » .... 200-214
Annexe B. Certificats de pèlerinages accomplis. . 21S-221
Annexe C. Tarifs de rachat 222-236
Ouvrages cités 237-241
Table des matières. 242-244
Imp. « Etablis.F. Ceuterick », 60, rue Vital Decosler, Louvain.
UNIVERSITÉ DE LOUVAIN
RECUEIL DE TRAVAUX
publiés par les membres
DES CONFÉRENCES D'HISTOIRE ET DE PHILOLOGIE
FaSC.
i. A. CAUCHIE, Mission aux archives vaticanes (Epuisé).
2. A. CAUCHIE, La querelle des investitures dans les diocèses de
Liège et de Cambrai. Première parti a : Les réformes grégoriennes
et les agitations réactionnaires (1075-1092). Prix : fr. 3,50.
3 . A. DE RIDDEïL Les Droits de Charles-Quint au duché de Bour-
gogne. Un chapitre de l'histoire diplomatique au xvi* siècle.
Prix : fr. 2,50.
4. A. CAUCHIE, La querelle des investitures dans les diocèses de
Liège et de Cambrai. Deuxième partie : Le schisme (1092-1107).
Prix : fr. 3,50.
5. C. LECOUTERE, L'Archontat athénien (histoire et organisa-
tionï, d'après la TTOAITEIA A6HNAIQN. Prix : fr. 2,50.
6. H. VAN HOUTTE, Les Kerels de Flandre. Contribution à l'étude
des oiigines ethniques de la Flandre. Prix : fr. 1,50.
7. H. VAN HOUTTE, Essai sur la civilisation flamande au com-
mencement du xne siècle, d'après Galbert de Bruges. Prix :
fr. 2,50.
S. J. LAENEN, Le ministère de Botta-Adorno dans les Pays-Bas
autrichiens pendant le règne de Marie-Thérèse (1749- 1755).
Prix : fr. 5.00.
9. C. LECLERE, Les avoués de Saint-Trond. Prix : fr. 2,50.
10. J. WARICHEZ, Les origines de l'Église de Tournai (Epuisé).
1 r . C. LIÉGEOIS, Gilles de Chin : l'histoire et la légende. Prix : fr.4,00
12. A. BAYOT, Le roman de Gillion de Trazegnies. Prix : fr. 4,00.
13. C. TERLINDEN, Le pape Clément IX et la guerre de Candie,
d'après les archives secrètes du Saint-Siège. Prix : fr. 5,00.
14. E. DE JONGHE, Les clausules métriques dans saint Cyprien.
Prix : fr. 3,50.
15 . R. LEMAÏRE, Les origines du style gothique en Brabant. T. I.
L'architecture romane. Prix : 10.00 fr.
16. H. VAN DE WEERD, Étude historique sur les trois légions ro-
maines du Bas-Danube (Ve Macedonica, XIe Claudia, Ie Italie?),
suivie d'un aperçu général sur l'armée romaine de la province
de Mésie Inférieure sous le Haut-Empire. Prix : 7.50. fr.
17. L. VAN DER ESSEN, Étude critique et littéraire sur les Vitae
des saints mérovingiens de l'ancienne Belgique. Prix : fr. 7,50.
18. DOM CHR. BAUR, O. S. B., Saint Jean Chrysostome et ses
œuvres dans l'histoire littéraire. Prix : fr. 5,00.
19. C.-F.-X, SMITS, De kathedraal van 's Hertogenbosch. Pux :
fr. 10,00.
20. J.B. GOETSTOUWERS, S. J., Les métiers de Namur. Prix :
fr. 4,50.
21. E. de MOREAU, S. J., L'abbaye de Villers-en-Brabant, au xii»
et au xnie siècle. Prix : fr. 5.00.
22. E. PALANDRI, O. F. M., Les négociations politiques et reli-
gieuses entre la Toscane et la France (1544-' 58°)- 1>rix : "_6/5°-
23. TH. SIMAR, Étude sur Erycius Puteanus (1564^1646). Prix :
24. J-' WARICHEZ et D. VAN BLEYENBERGHE L'abbaye de
Lobbes depuis les origines jusqu'en 1200. Prix : tr S.OO.
25. F.J. ZWIERLEIN, Religion in New Xetherland. A history ot
26.
the devclopment of te religions conditions in the province of
New Netherland (i 623-1664). Prix : fr. 7,50.
F. GOCXSSENS, Étude sur les Etats du Lirhbourg et des pays
d'Outre-Meuse pendant le premier tiers du xvni'e si'cle. Prix :
fr. 5., 00.
27. P. DEL-\NNOY, La juridiction ecclésiastique en matière béné-
ficiak* sous l'ancien régime en Prance. T. 1.1,3. juridiction conten-
tieuse. Prix : fr. 5,00.
28. FR. CALLAEY, O. M. Cap., L'idéalisme fianciscain spirituel au
XIVe siècle. Etude sui libertin de Casale. Prix : fr. 5,00
29. DOM C. MOHLBERG, O. S. B., Radulph de Rivo, der letzte
Vertreter der altroemischen liturgie. T. T. Piix : Maiks 5,00.
30. E. DE BACKER, vSacrainentum. Le mot et l'idée représentée
Çai lui dans les œuvres de Tertullien. Prix : fr. S. 00.
II. SIMAR, Christophe de Longueil humaniste (1488-1522).
Prix : fr. 4,00.
32. H. DPkl'kLE, S. J., Les répétitions d'images chez Euripide.
Prix : fr. ^,50. M
33. J. FLAMIQN, Les actes apocryphes de l'apôtre André. Prix :
fi. 6,00.
34. J. LAHvRRlERE, Etude sut Jean Duvergier de Hauranne,
abbé de Saint-Cyran (1581-1643). Piix : fr. 5,00.
35. J.-B. POUKENS, S. J., Syntaxe des inscriptions latines d'Afri-
que. Prix : fr. 2,00.
36. J.-B. HERMAN, vS. J., La pédagogie des Jésuites au xvre siècle.
Ses sources, ses caractéristiques. Prix : fr. 6,00.
37. H. BIKEL, Studie ûber die Wirtschaftsverhaltnisse des Klos-
ters vSt-Gallen von der Grundung bis Ende des xm. Jahrhunderts.
Prix : fr. 5,00.
38. R. LECHAT, S. J., Les réfugiés anglais dans les Pays-Bas espa-
gnols durant le règne d'Elisabeth (1 558-1603). Prix : fr. 5,00.
39. P. GUILDAY, The english catholic refugees on the Continent
(1 558-1 795). The english catholic collèges and convents in the
catholic Low Countries. Prix : Sh. 16,00.
40. MÉLANGES D'HISTOIRE offerts à Charles Moeller par l'Asso-
ciation des anciens membres du Séminaire historique. T. I. Anti-
quité et moyen âge. Prix : fr. 10.00.
41 . MÉLANGES D'HISTOIRE offerts à Charles Moeller par l'Asso-
ciation des anciens membres du Séminaire historique. T. II.
Époque moderne et contemporaine. Prix : fr. 10.00.
42. DOM C. MOHLBERG, O. S. B., Raduph da Rivo, der letzte
Vertreter der altroemischen liturgie. T. IL Prix : Marks 5,00.
43. J. MISSON, S. J., Recherches sur le Paganisme de Libanios.
Prix : fr. 5,00.
44. H. LAMY, L'abbaye de Tongerloo depuis sa fondation jusqu'en
1263. Prix : fr. 5,00.
45. J. H. LAMOTT, History of the Aichidiocese of Cincinnati (1821-
192 1). Prix : Dol. 4,00.
46. V. FACCHINETTI, O. F. M., San Francesco d'Assisi nella storia,
nella leggenda, nell' arte. Prix : fr. 60.00. ;• ï
47. C. LEURS, Les origines du style gothique en Brabant. Première
partie : L'architecture romane. T. II : L'architecture dans
i'ancien duché. Prix : fr. 25.00
48. E. VAN CAUWENBERGH, Les pèlerinages expiatoires et judi-
ciaires dans le droit communal de la Belgique au moyen âge.
Prix : fr. 12.00.
Prières d'adresser les demandes à M. LÉopoij) Demin, Biblio-
thécaire du Séminaire historique, 40, rue de Namur, Louvain (Bel-
gique).
403
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