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Full text of "Les prairies d'or"

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HANDBOUND 
AT  THE 


UNIVERSITY  OF 
TORONTO  PRESS 


XI  ïï"! 


COLLECTION 


D'OUVRAGES   ORIENTAUX 


PUBLIltr-; 


PAR   LA   SOCIÉTÉ   ASIATIQUE. 


SE  VEND  A  PARIS 
CHEZ  ERNEST  LEROUX,    LIBRAIRE, 

RUE     BONAPARTE,     K°     28; 

A  LONDRES 

CHEZ  WILLIAMS  AND  NORGATE, 

1 /j  ,    HEMtIF.TTA    SrnEET    (  COVKNT  -  GAnDEN  )  ■ 

PRIX  :  7  IV.  5o  c. 


OGIÉTÉ   ASIATIQUE. 


COLLECTION  D'OUVRAGES  ORIENTAUX. 

MACOllDI. 

LES  PRAIRIES  D'OR 

TEXTE   ET   TRADUCTIOÎS 

l'A  R 

C.   RARRIER    DE    MEYNARD. 


TOME    SEPTLEME. 


PARIS. 

IMPRIMÉ  PAR  AUT0RISAT10.\   DE  M.  LE  GARDE  DES  SCEAUX 

À   L'LMPRIMERIE   NATIONALE. 


M  DCCC  LWIII. 


9~ 


;l^ 


33 


AVERTISSEMENT. 


Co  volume  commence  avec  ravéïiement  dérim'tii  de 
Mamoun,  après  la  chute  de  l'usurpateur  Ibrahim  ,  fils  de 
Mebdi,  et  se  termine  au  meurtre  de  Moutazz,  en  2  55 
de  l'hégire;  il  comprend  donc  une  période  d'environ 
un  demi-siècle. 

Le  lecteur  est  maintenant  trop  familiarisé  avec  la 
manière  de  Maçoudi,  pour  attendre  de  lui  une  narra- 
lion  méthodique  et  soutenue  des  laits  relatifs  aux  Kha- 
lifes Abbassides.  Le  règne  du  plus  illustre  d'entre  eux, 
celui  de  Mamoun,  olfre  encore  un  exemple  du  goût 
prononcé  de  notre  auteur  pour  l'anecdote  et  les  digres- 
sions. Dans  les  cent  pages  consacrées  à  cette  époque 
brillante,  à  propos  de  laquelle  on  évoque,  un  peu  am- 
bitieusement peut-être,  les  souvenirs  des  Médicis  et  de 
Louis  XIV,  si  Ton  excepte  quelques  détails  sur  les  me- 
nées politiques  des  Alides,  la  révolte  du  fils  de  Mehdi 
et  la  dernière  expédition  contre  les  Grecs,  tout  le  reste 
est  du  domaine  de  la  biographie  intime  et  de  l'histoire 
littéraire. 

Mais  (juc  d'aperçus  ingénieux,  que  de  précieuses  ré- 


II  AVERTISSEMENT. 

vélations  dans  ces  excursions  à  travers  le  champ  de  la 
fantaisie!  Avec  quelle  vérité  l'esprit  libéral  et  sceptique 
de  Mamoun  se  révèle  clans  ses  entretiens  avec  les  faux 
])rophètes  et  les  thaumaturges  éclos  au  soleil  de  la  libre 
pensée!  Trouverait-on,  par  exemple,  chez  un  autre 
chroniqueur  arabe  ,  un  récit  plus  piquant,  plus  caracté- 
ristique que  celui  de  l'entrevue  du  Khalife  avec  le  délé- 
gué des  Soufis?  Un  misérable  mendiant,  vêtu  d'un  pagne 
blanc  en  lambeaux,  se  présente  un  jour  au  palais,  à 
l'heure  où  les  théologiens,  les  philosophes  les  plus  illus- 
tres dissertent  en  présence  du  maître.  11  insiste  pour 
être  introduit  et  ivclame  le  droit  de  prendre  part  ;i  !;■. 
discussion.  Mamoun  a  leconnu  en  lui  le  représentant 
d'une  secle  à  peine  dégagée  de  ses  langes,  mais  dont 
les  doctrines,  singulier  mélange  de  communisme  social 
et  de  mysticisme  panthéistique,  exerceront,  un  jour,  une 
influence  pénétrante  sur  les  destinées  du  monde  orien- 
tal. Il  accueille  l'inconnu  avec  bonté  et  l'autorise  à  par- 
ler. Sans  hésiter,  le  souh  lui  demande  compte  de  l'au- 
torité absolue  qu'il  exerce.  Comment  faut-il  ]'apj)eler? 
Usurpation,  conquête  de  la  force,  ou,  au  contraire, 
délégation  librement  consentie  et  consacrée  par  le  suf- 
frage populaire  P  Avec  un  adversaire  autre  que  Mamoun, 
le  bourreau  seul  eût  été  chargé  de  répondre,  et  l'impru- 
dent ambassadeur  eût  expié  sur  «le  tapis  de  ciiir  des 
exécutions  »  son  crime  de  lèse-majesté  divine  et  humaine. 
Mais  le  génie  du  Khalife  a  compris  tout  le  parti  qu'il 
pouvait  tirer  de  cette  singulière  rencontre. 

Par  une  évolution  habile,  il  fait  bon  marché  de  l'hé- 
ritage paternel  et  du  serment  de  fidélité  par  lequel  la 
conmiuuauté  musulmane  en  a  consacré  la  possession 
entre  ses  mains.  «Je  sais,  dit-il,  que  le  peuple  estleseul 


AVERTISSEMENT.  ni 

maîlre  de  ses  destinées  et  qu'en  lui  seul  réside  la  souve- 
raineté véritable.  Le  pouvoir  qui  m'a  été  transmis,  je  ne 
le  retiens  que  pour  obéir  à  ime  nécessité  de  salut  pu- 
blic. Je  ne  le  retiens,  sans  mandat  il  est  vrai,  mais  aussi 
sans  usurpation,  que  pour  maintenir  l'ordre  dans  l'État 
et  assurer  l'accomplissement  des  grands  devoirs  reli- 
gieux, le  pèlerinage  et  la  guerre  sainte.  Que  la  nation 
se  mette  d'accord  sur  le  choix  d'un  chef  plus  digne  que 
moi  de  la  diriger  et  je  cesse  de  régner.  Va,  dit-il  à  son 
interlocuteur  interdit,  je  ne  veux  pas  d'autre  représen- 
tant que  toi;  fais  connaître  mes  intentions  à  ceux  qui 
l'ont  envoyé,  recueille  les  suffrages  populaires  autour 
d'un  nom  unanimement  accepté,  et  j'abdique  sur  le 
champ.  »  Le  soufi  ne  répond  pas  ,  et  que  pourrait-il  ré- 
pondre? Il  salue,  se  retire  et  court  rendre  compte  de 
son  entrevue  à  ses  compagnons,  cachés  au  fond  d'une 
mosquée.  La  déclaration  de  Mamoun  est  reconnue  sage 
et  conforme  à  la  loi  de  Dieu  [clieriai);  désarmés  pni' 
cette  réponse  simple  et  logique,  les  û])posants  se  dis- 
persent et  vont  répandre  partout  finutilité  d'une  mani- 
festation contre  le  possesseur  de  fait  du  klialifat.  Ainsi, 
peut-ôlre,  fut  étoudee  dans  son  germe  une  conspiration 
qui  eût  été  fatale  à  la  dynastie  d'Abbas. 

Signalons  encore  dans  le  même  chapitre,  parmi  les 
faits  qui  méritent  d'attirer  plus  particulièrement  l'atten- 
tion de  l'historien,  le  récit  de  la  dernière  expédition  de 
Mamoun  contre  l'empire  byzantin,  et  un(;  tradition  re- 
vêtue d'un  grand  caractère  d'authenticité  sur  la  maladie 
et  les  derniers  moments  de  ce  souverain.  Le  vif  éclat 
qu'il  jeta  sur  les  sciences  et  les  lettres  aurait  mérité, 
sans  doute,  une;  mention  particiilièie  de  la  part  d'un 
eciivain  aussi  cinienx  (|ue  iV;lait  Maçoudi  d'étudier  fin- 


IV  AVERTISSEMENT. 

fluence  de  la  civilisation  grecque  sur  le  monde  musul 
man.  Les  renseignements  qu'il  donne  dans  le  cours  de 
sa  vaste  compilation  sur  les  emprunts  faits  par  les  Ara- 
bes à  leurs  devanciers  montrent  tout  ce  qu'on  eût  été 
en  droit  d'attendre  de  son  érudition.  Son  silence  à  cet 
égard  ne  peut  donc  s'expliquer  que  par  la  résolution 
formelle  chez  lui  et  maintes  fois  répétée,  d'éviter  toute 
redite  des  faits  développés  dans  les  deux  grands  ou- 
vrages dont  le  titre  revient  sans  cesse  sous  sa  plume. 

Si  le  premier  devoir  d'un  éditeur  n'était  de  repro- 
duire jusque  dans  ses  taches  et  ses  imperfections  le  do- 
cument dont  il  entreprend  la  restauration,  j'aurais  vo- 
lontiers élagué  du  chapitre  consacré  à  Moutaçem-Billah 
deux  ou  trois  tableaux  de  genre  d'un  réalisme  révoltant. 
El-mainoar-ma  zoar,  dit  un  proverbe  arabe  que  j'invo- 
que volontiers,  «tâche  imposée  est  d'avance  excusée.» 
Si,  dans  de  telles  circonstances,  la  copie  ne  reprodin't 
que  faiblement  l'original,  personne,  je  crois,  ne  lui  re- 
prochera cette  infidélité  de  parti  pris.  Mais  même  au 
milieu  de  ces  scories,  il  y  a  des  parcelles  d'or  à  recueil- 
lir, et  le  premier  dégoût  surmonté,  on  trouve  dans  ces 
débauches  d'esprit  quelques  indications  d'une  grande 
valeur  soit  pour  la  lexicographie,  soit,  ce  qui  vaut  mieux 
encore,  pour  la  connaissance  de  la  vie  intime  aux  pre- 
miers âges  de  l'islam.  Le  même  chapitre  nous  olfre 
(failleurs,  à  titre  de  dédommagement,  d'excellentes 
données  sur  la  révolte  du  fameux  sectaire  Babek,  et  un 
historique  intéressant  de  la  fondation  de  Samarra,  ce 
siège  éphémère  de  la  domination  arabe. 

A  part  les  noms  et  les  dates  par  lesquels  il  débute, 
le  chapitre  intitulé  «  Khalifat  de  Watik-Billah  »  est 
d'un  bout  à  l'autre  un  hors-d'œuvre  où  l'humeur  no- 


AVERTISSEMENT.  v 

Iliade  de  IVIaçoudi  se  donne  libre  carrière.  La  preniièro 
moitié  de  ce  chapitre  figurerait  mieux  dans  les  galeries 
littéraires  do  Taalebi,  et  la  seconde,  curieuse  exposition 
des  principes  de  la  médecine,  revendiquerait  sa  place 
dans  l'introduction  du  traité  d'Ibn  Abi  Ossaybyab. 

Le  règne  suivant,  celui  de  Motewekkil,  est  étudié 
avec  plus  de  soin ,  au  moins  dans  ses  derniers  para- 
grapbes.  On  y  suivra  avec  intérêt  les  développements 
de  l'usurpation  des  affranchis  turcs,  les  intrigues  de 
cour  qui  enveloppent  dans  leur  réseau  ce  Khalife,  le 
plus  énergique  de  sa  race,  et  le  jettent  désarmé  devant 
les  poignards  des  esclaves  ameutés.  Parmi  les  épisodes 
liumorisliqucs  du  même  chapitre,  citons  les  mésaven- 
tures du  poëte  Bohtori  et  fétrange  complainte  de  Y  Ane 
amoureux,  où  le  génie  arabe,  qu'on  se  plaît  à  représenter 
imperturbable  dans  sa  gravité,  se  révèle  sous  un  aspect 
nouveau,  je  dirais  presque  contemporain.  Ainsi  la  pa- 
rodie avait  ses  entrées  à  la  cour,  et  le  travestissement 
inepte  de  l'amour  héroïque  et  de  la  grande  poésie  était 
comme  chez  nous,  hélas!  salué  par  des  applaudisse- 
ments enthousiastes  et  généreusement  récompensé. 

On  lira  sans  surprise  les  éloges  que  Maçoudi  accorde 
au  règne  suivant,  celui  du  parricide  Mountasir.  Ce 
prince,  durant  sa  courte  dominalion,  prodigua  ses  fa- 
veurs aux  Alides,  restaura  les  tombeaux  de  leurs  an- 
cêtres et  témoigna  hautement  de  son  respect  pour  la 
mémoire  d'Ali.  C'en  était  assez  pour  mériter  les  suf- 
frages d'un  historien  qui,  sans  appart(;nir  ouvertement 
au  parti  chiite,  ne  néglige  aucune  occasion  démontrer 
que  la  cause  de  la  sainte  famille  a  toutes  ses  sympathies. 
D'ailleurs,  cette  prédilection  s'explique  cbez  lui  et  par 
le   courant   (jui    entraînait   vers   ce    pai'ti    tout  homme 


VI  AVERTISSEMENT. 

éclairé,  el  par  des  traditions  de  famille,  notre  auteur 
étant  né,  comme  on  le  sait,  en  Afrique,  sous  une  dy- 
nastie issue  d'Ali  et  hostile  à  l'usurpation  abbasside.  On 
s'expliquera  de  la  même  manière  la  fidélité  scrupuleuse 
avec  laquelle  les  insurrections  des  Alides,  sous  le  règne 
de  Mostaïn  et  de  Moutazz,  sont  racontées  et  consti- 
tuent un  récit  soutenu  au  milieu  des  digressions  les 
plus  imprévues. 

Parmi  les  contributions  que  ce  nouveau  volume  ap- 
portera à  l'histoire  littéraire  des  Arabes,  il  est  juste  de 
signaler  une  curieuse  annotation  sur  la  prosodie  et  un 
aperçu  sur  les  mètres  nouveaux  mis  en  vogue  par 
Abou  '1- Atahyah  ;  plusieurs  extraits  des  odes  de  ce  même 
écrivain;  im  parallèle  finement  étudié  entre  Bohtori  et 
Abou  Tammam;  quelques  vers  d'Ali,  fils  de  Djehni, 
un  poëte  celui-là  dans  toute  l'acception  du  mot,  et  qui 
mériterait  une  étude  spéciale;  enfin  dilTérents  morceaux 
que  l'on  doit  considérer  comme  d'utiles  variantes  aux 
traditions  de  YAgliani. 

En  présence  d'un  nombre  aussi  considérable  de  frag- 
ments poétiques  épars  dans  le  récit  et  transcrits  par  les 
copistes  avec  une  négligence  déplorable,  c'était  un  de- 
voir pour  l'éditeur  de  remonter  aux  sources  originales, 
toutes  les  Ibis  qu  elles  lui  étaient  accessibles.  C'est  ce 
qu'il  a  été  possible  défaire  pour  quelques-uns  des  poètes 
cités ,  notamment  pour  Abou  Tammam  et  Bohtori , 
ciont  les  divans  existent  complets  ou  j)ar  fragments  à  la 
Bibliothèque  nationale.  La  comparaison  de  ces  docu- 
nieuts  avec  mes  copies  m'a  démontré  une  fois  de  plus 
que  le  manuscrit  de  Dehli  (lettre  D)  a  conservé  fidèle- 
ment la  rédaction  de  l'auteur,  et  que  Tordre  dans  le- 
quel les  vers  d'une  même  pièce  se  déroulent  est  plus 


AVERTISSEMENT.  vu 

conforme  au  texte  original  que  celui  des  autres  manus- 
crits. En  d'autres  termes,  il  est  évident  qu'il  y  eut,  dès 
une  époque  ancienne,  un  double  courant  de  rédaction 
dans  les  exemplaires  des  Prairies  d'or.  Le  premier,  que 
j'appellerai  le  courant  indien,  à  cause  de  la  provenance 
de  la  copie  D,  nous  apporte  une  reproduction  plus 
exacte  et  plus  complète  du  texte  primitif,  mais  déparée 
par  de  graves  erreurs  de  copiste  dans  le  seul  manuscrit 
qui  nous  l'ait  conservée.  L'autre  rédaction,  qu'on  pour- 
rait nommer  égyptienne,  est  représentée  par  l'édition 
imprimée  à  Boulak  (lettre  K),  par  le  manuscrit  de  Mu- 
nich (lettre  M),  et  aussi,  quoique  avec  plus  d'indépen- 
dance, par  le  manuscrit  A.  Ces  copies  ont  été  décrites 
pour  la  plupart  dans  ia  préface  du  tome  premier,  et  si 
j'en  fais  de  nouveau  mention  à  propos  des  vers  si  nom- 
breux du  présent  volume,  c'est  qu'il  importe  que  le 
lecteur  sache  quel  degré  de  confiance  elles  méritent 
dans  la  liste  des  variantes.  On  doit  ajouter  aussi  que 
Maçoudi,  selon  toute  vraisemblance,  laisait  ses  cita 
tions  de  mémoire  ou  sur  des  notes  prises  à  la  bâte;  de 
là  l'incohérence  des  heit  dans  une  même  pièce  :  la  lassi- 
tude des  copistes  a  fait  le  reste.  Toutes  les  fois  que  l'é- 
tude attentive  des  divans  originaux  et  celle  du  texte  im- 
primé de  VAcjhani  m'ont  mis  sur  les  traces  d'une  lacune, 
j'ai  pris  .'join  de  séparer  par  des  points  les  vers  qui  ne 
présentaient  aucune  liaison  entre  eux.  Pour  tous  les 
passages  où  ces  éléments  de  comparaison  m'ont  fait  dé- 
faut, je  crois  devoir  solliciter  de  nouveau  l'indulgence 
de  ceux  de  mes  lecteurs  qui  ont  eu  à  lutter  contre  de 
semblables  difficultés. 

Pourtant  je  serais  le  jouet  d'une  illusion,  si  j'espérais 
que  cet  appel  à    la  critique  impartiale,  mais  bicnveil- 


VIII  AVERTISSEMENT, 

lante,  trouvera  de  i'écho  à  Heidelberg,  où  les  )3ublica- 
tions  relatives  à  l'histoire  musulmane  sont,  depuis  quel- 
ques années,  l'objet  d'un  examen  qu'on  souhaiterait  plus 
impersonnel  et  mieux  fondé.  Dans  la  préface  de  ses 
Fragmenta  histoiicorum  arabicorum,  mon  savant  ami, 
M.  de  Goeje,  a  déjà  fait  justice  de  cette  critique  à  ou- 
trance, et  tout  en  plaidant  sa  propre  cause,  avec  autant 
d'autorité  que  de  verve,  il  a  bien  voulu  prendre  inci- 
demment ma  défense  et  démontrer  l'inanité  de  la  plupart 
des  objections  qui  m'étaient  adressées. 

Pouvait-on  s'attendre  à  un  autre  résultat?  L'historien 
allemand  des  Khalifes  n'appuie  ordinairement  ses  réfu- 
tations que  sur  des  hypothèses  fantaisistes  ou  sur  le  té- 
moignage du  Kamoiis.  Or,  personne  n'ignore  que  cet 
océan  de  mots  se  prête  à  toutes  les  explications,  et 
qu'avec  un  peu  de  dextérité  on  peut  lui  demander  la 
solution  non-seulement  d'un  vers  arabe,  mais  même 
des  énigmes  d'un  texte  assyrien  ou  d'une  inscription 
hymiarite.  Quant  au  procédé  qui  consiste  à  rétablir  un 
passage  douteux  en  y  introduisant  des  variantes  que 
nulle  copie  n'autorise,  s'il  est  d'une  simplicité  merveil- 
leuse ,  il  ne  peut  scftisfaire  le  traducteur  qui  s'est  fait 
un  devoir  de  ne  jamais  substituer  une  combinaison  ar- 
bitraire aux  leçons,  si  étranges  qu'elles  soient,  qu'il  a 
sous  les  yeux. 

Il  n'est  donc  pas  surprenant  que  du  prolixe  examen 
consacré  au  tome  VI  des  Prairies  d'or  dans  les  Heidcl- 
hcrijcr  Jahrhiicher  der  Literatar  (1872  ,  n°  2),  je  n'aie  pu 
tirer  que  trois  ou  quatre  observations  judicieuses,  les- 
quelles figurent  dans  la  liste  des  corrections.  Ce  serait 
une  tâche  fastidieuse  pour  moi  et  sans  profit  pour  Je 
lecteur  d(>  donner  ici  les  raisons  qui  ne  m'ont  pas  per- 


AVERTISSEMENT.  ix 

mis  d'en  recueillir  un  plus  grand  nombre.  Celle  lâche, 
à  vrai  dire,  ne  serait  pas  difficile  et,  s'il  fallait  absolu- 
ment produire  au  jour  les  pièces  du  procès,  je  crois 
pouvoir  compter  sur  l'iiospitalité  du  Journal  asiatique; 
mais  je  craindrais  de  me  laisser  entraîner  à  la  suite  de 
mon  adversaire  sur  le  terrain  des  arguties  et  des  per- 
sonnalités; la  réponse  adressée  à  la  spirituelle  préface 
de  M.  de  Goeje,  ne  justifie  que  trop  cette  appréhension 
de  ma  part.  Les  augures  de  Rome  ne  pouvaient,  dit-on, 
se  rencontrer  sans  rire;  faut-il  que  les  orientalistes  ne 
puissent  s'aborder  sans  se  déchirer?  Je  laisserai  donc  à 
l'aristarque  allemand  la  satisfaction  d'avoir  le  dernier 
mot,  mais  qu'il  me  permette  en  revanche  d'exprimer  un 
vœu  que  le  monde  savant  ne  peut  que  ratifier.  Son  His- 
toire des  Khalifes ,  il  faut  bien  l'avouer,  a  subi ,  comme 
toute  chose  en  ce  monde,  les  atteintes  du  temps.  De- 
puis la  publication  de  cet  ouvrage,  si  incomplet  dans 
sa  prolixité,  des  documents  d'une  haute  importance  ont 
paru,  qui  éclairent  d'un  jour  nouveau  des  événements 
jusqu'ici  négligés  ou  mal  expliqués.  Les  dates,  les  noms 
propres,  plusieurs  points  de  détail  et  même  certaines 
vues  d'ensemble  gagneraient  h  être  contrôlés  sur  les 
textes  publiés  depuis  trente  ans  et  dont  le  nombre  s'ac- 
croît tous  les  jours.  Si  le  savant  professeur  de  Heidel- 
berg  voulait  consacrer  à  ce  travail  de  rajeunissement 
l'activité  et  les  soins  minutieux  qu'il  met  à  censurer  les 
travaux  de  ceux  qui  suivent  de  loin  ses  traces,  il  con- 
tribuerait plus  utilement,  et  sans  nuire  à  sa  réputation 
littéraire,  à  la  préparation  d'une  histoire  définitive  du 
khalifat  d'Orient. 

Ce  volume,  comme  ses  devancieis,  doit   beaucoup 
aux  savanles  oliservaltons    de  MM.   Derenbourg  et  de 


X  AVERTISSEMENT. 

Slano,  aussi  bien  qu'au  zèle  du  personnel  de  Tlmpiiinerio 
Nationale.  Je  suis  heureux,  en  approchant  du  but,  de 
renouveler  ici  l'expression  de  ma  gratitude  envers  fous 
ceux  qui  m'aident  si  obligeamment  dans  l'accomplisse- 
ment de  ma  longue  entreprise. 


I 


<.jU,|  lXjo  s-^£  (^'T^'  S-^Wi 
(J^  J«*J»J  yj*^J*^'SÎl»  Cijj^^i   w^àJÎ   IvXiû  [^Xjo  ^r^  (j^  4$_5 

LIVRE  DES  PRAIRIES  D'OR 

ET  DES  MINES  DE  PIERRES  PRÉCIEUSES. 

CHAPITRE  CXrV. 


KUALIFAT   D'EI.-MAAIOUN. 


El-Mamoun  (Abd  Allah  ben  Haroun;  son  surnom  j)atro- 
iiyinique  était  Aboa  Djâfar,  ou ,  selon  crautrcs,  Abou  l-Abbas; 
sa  mère,  originaire  de  Badeguis,  se  nommait  Meradjil)  fut 
proclamé  Klialife  à  Tàge  de  vingt-huit  ans  et  deux  mois.  Il 
mourut  à  Bedidoun  (lisez  Podendouii ,  IloSsvSov)  près  de  la 
source  Ei-Kochaïrah,  de  laquelle  sort  la  rivière  connue  sous 
le  nom  de  Bedidoun  ;  on  dit  que  le  nom  grec  de  cette  source 


2  LES  PRAIRIES  D'OR. 

Jw_^j.i(Ufc£  ^*Jj5   l^x«  i^AAw   Q.-?^-Si.i£^   ^^tXi»-)    XCi^Và».   oOlw 

J-^^Jljj^^i^  yv^r^j  jUi^i)!  ^^j>Ui\  ^  *i  ^«Xjj)  i^":^i>l* 

est  Aïdareka.  Le  corps  de  Mamoim  fut  transporté  à  Tarsous 
et  enterré  dans  cette  ville,  à  gauche  de  la  Mosquée  (année 
118  de  rhégire).  Il  mourut  âgé  de  quarante-neuf  ans,  après 
un  règne  de  vingt  et  un  ans ,  sur  lesquels  il  passa  quatorze 
mois  à  combattre  son  frère  Mohammed ,  fils  de  Zobeïdah  , 
comme  nous  favons  raconté  ci-dessus  (voir  t.  VI ,  chap.  cxni)  ; 
d'autres  historiens  disent  que  cette  guerre  dura  deux  années 
et  cinq  mois.  Pendant  toute  cette  lutte,  Mamoun  fut  salué 
du  titre  de  Khalife  par  les  populations  du  Khoraçân,  et  Ton 
joignit  son  nom  aux  prières  publiques  dans  les  grandes 
villes,  à  Médine  et  à  la  Mecque,  ainsi  que  dans  les  provinces 
et  districts  des  pays  de  plaines  et  de  montagnes  que  Taher 
avait  soumis,  et  qu'il  occupait  pour  Mamoun,  tandis  que 
Mohammed  (Emin)  ne  fut  reconnu  khalife  qu'à  Bagdad 
seulement,  et  nulle  part  ailleurs. 

RÉSUMÉ  DE  SON  HISTOIRE  ET  DE  SA  VIE;  APERÇU  DES  ÉVÉNEMENTS 
DE  SON  RÈGNE. 

Mamoun  se  laissa  dominer  par  Fadl  ben  Sehl  à   un  tel 


CHAPITRE   GXIV.  ;î 

(jj_J    /«(S-ià^l     y_j»v9l-l5     Csi-j  dUS     vAt    i^ïj     vv,jil     iCXAUj    ivÀA«( 

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(Jj'^  ^>jÀi.Aji j.^iàj  ^jj.>oUI    y6_j    il5  iiXx^  (^jL  03^*iî   ^^«Xw^il 

C  I*. 

point  que,  ce  ministre  Tayant  contrarié  jusque  clans  l'ac- 
quisition d'une  esclave,  Manioun  finit  par  le  mettre  à  mort, 
ou,  comme  le  prétendent  quelques  personnes,  il  aposta  des 
gens  qui  le  tuèrent.  Son  autorité  fut  alors  pleinement  re- 
connue par  les  ministres  qui  succédèrent  à  Fadl  ;  tels  que 
Ahmed  (fds  de  Khaled),  surnommé /(^  Louche;  Amr,  fds  de 
Maràdah ,  et  Abou  Yhadah ,  qui  le  saluèrent  en  leur  qualité  de 
vizirs.  Amr,  (ils  de  Maçàdali,  étant  mort  en  217,  Mamoun 
confisqua  ses  biens,  mesure  que  désormais  il  ne  prit  à  l'é- 
gard d'aucun  autre  ministre.  Enfin  Mamoun  subit,  en  der- 
nier lieu,  l'influence  de  Fadl,  fils  de  Mcrwan  et  de  Mo- 
hammed, fils  de  Yezdad. 

Sous  son  règne,  Ali,  fils  de  Riza,  mourut  empoisonné  à 
Tous  et  fut  enterré  dans  cette  ville;  il  était  âgé  de  f|uaran(e- 
neuf  ans  et  six  mois,  mais  ce  chiffre  est  contesté. 

Mamoun  dirigea  des  atta([ues  satiriques  contre  son  oncle 
paternel  Ibrahim  (fils  rie  Mehdi),  surnommé  Ihn-Cheldah; 
le  Khalife,  qui  professail  les  doctiiiies  ch  viles,  avait  crilifjué 
en  ces  termes  Ibrabini,  (pii  élail  sunnilr  : 


4  LES  PRAIRIES  D'OR. 

xxaj  J«^I^  iïiy^'  (A^  cK^»^      (i^  (Sy^^  »*>wJLi  i*x_^ 

Xm*.Àj    ejt«Xj    ^^kJ    y'    ti)^-»<*3  JUL^   ,i    A_32^^  ^]§-**<*^i    5i>l 

,x_**_«w_j  i\_jjL-s»-j  *-_jj>_y)^       x_A_A_>.l-*sj  t5>-Àji  t^  tK*^* 

Veux-tu  avoir  le  bonheur  de  tuer  uu  MurJjite  (partisan  de  la  doctrine 
de  la  foi  sans  les  œuvres)  sur  le  coup  et  avant  l'heure  assignée  à  sa  mort? 

Répète  devant  lui  la  mention  du  nom  d'Ali ,  et  prie  pour  le  Prophète 
et  pour  les  membres  de  sa  famille. 

Ibrahim  riposta  en  ces  termes  : 

Lorsqu'un  Chyite  balbutie  dans  son  jargon,  veux-tu  avoir  le  bonheur 
de  lui  faire  rendre  l'âme? 

Prie  pour  le  Prophète  et  pour  ses  deux  compagnons  (Abou  Bekr  et 
Omar) ,  qui  furent  ses  ministres  et  qui  reposent  dans  la  tombe  auprès  de 
lui. 

Le  récit  très-curieux  des  rapports  dlbrahim  avec  Mamoun 
se  trouve  dans  l'ouvrage  intitulé  Histoire  d'Ihralu'm,  fils  de 
Mehdi. 

Abou  Dolaf  Kaçem  (fils  de  Yça),  l'Adjélite,  se  trouvant 
un  jour  chez  Mamoun  ,  ce  prince  lui  dit  :  «  Kaçem  tu  as 
décrit  en  beaux  vers  la  guerre,  le  goût  que  tu  as  pour  elle, 
et  Téloignement  que  t'inspirent  les  chanteuses.  —  Prince 
des  Croyants,  demanda-t-il,  quels  sont  ces  vers?  ■>  Mamoun 
lui  cita  le  suivant  : 


CHAPITRE  CXIV.  5 

J-^-*-*'    V>-^3    fc-i>iyJl    {JiXJ^  Oj-iA3.Ji    (^j    o^^juwJi    J^ 

J^HW^I    iJ^J)j-i    y\-A-lt    kii-:?jJ>  cyLJLiLiaLj    iL==-lsîJi    (jM^xIj 

J^ÀJaJi  ^_j^-^  flT^  ^^       l_Jû|L^lj   (j>'^^-^-»  ^'^^^ 

J^>^l   S^H^j  y_^iî   'r'^^^         ^W-^'  Si?-'.?   r»^^   (j^'   L>' 

Tirer  le  sabre  hors  du  fourreau,  fendre  les  rangs  ennemis,  faire  jaillir 
le  sang  et  abattre  les  têtes 

—  «  Que  vient-il  ensuite,  ô  Kaçem?  »  —  Le  poëte  poui'suivit 
ainsi  : 

Disparaître  dans  des  tourbillons  de  poussière,  alors  que  le  trépas  se 
montre  à  la  pointe  des  lances  vacillantes. 

Alors  que  la  mort,  hideuse  liancéc,  sm-gissanl  du  milieu  des  llammes, 
montre  ses  dents  aiguës. 

Et  s'avance  lentement  :  ses  enfants  qui  semblent  illuminés  des  feux  de 
l'aurore  (allusion  aux  armes  élincelantes  des  guerriers). 

Se  provoquent  comme  des  coqs  dont  la  voix  se  répond;  fous,  ils  se  dé- 
chaînent contre  des  fous; 

Pendant  que  la  fiancée  fatale  réclame  pour  sa  dot  les  têtes  qui  tombent 
en  foule  au  milieu  de  la  mêlée  : 

Voilà  ce  qui  me  charme  et  m'attire  plus  que  la  voix  des  chanteuses, 
plus  que  les  gais  festins  d'une  journée  rafraîchie  par  la  pluie; 

Car  je  suis  le  llls  du  glaive,  le  champion  des  combats,  je  suis  la  mort 
qui  menace,  et  le  destin  qui  s'approche. 

—  «Oui,  Sire,  ajouta  le  ])oëte,  voilà  ce.  qui  (ail  ma  joie  en 
face  de  vos  ennemis,    quand  vos  partisans  (orti(ient   mon 


6  LES  PRAIRIES  D'OR. 

cx.i-A«à^  U  (jUa«^>!  cuS^j  îili  dlj^xJ  a«x>S!_5  JsjUi ^U^i^l 

js»j*XJîî  ilapi   dLJ  CjvÀi^  /o-i         ^^L_A_ç  oj^-i'    tK_ïl).Jî  Lg-ji 

c 

courage  et  que  vous  dirigez  mon  bras.  Que  d'autres  recher- 
chent les  plaisirs  de  Torgie;  ce  qui  m'attire  moi,  c'est  la 
guerre,  c'est  la  lutte  sans  trêve.  »  Mamoun  lui  répondit  : 
«Puisque  ce  genre  de  poésies  est  le  tien,  puisque  ton  seul 
bonheur  est  la  guerre,  que  laisses-tu  donc  à  cette  belle  en- 
dormie que  tu  chantais  avec  une  ardeur  à  peine  dissimu- 
lée.^—  Dans  quel  passage  de  mes  poésies.  Sire.''  demanda 
Abou  Dolaf.  —  Dans  celui-ci  : 

O  toi  qui  doi'S  et  condamnes  mes  yeux  à  l'insomnie,  savoure  en  paix 
les  douceurs  du  sommeil; 

Dieu  sait  pourtant  combien  mon  cœur  souflVe  du  crime  que  tes  beaux 
yeux  ont  commis  ! 

—  «Prince  des  Croyants,  s'écria  Abou  Dolaf,  c'est  l'erreur 
d'une  heure  d'insomnie  et  d'accablement.  De  ces  vers,  les 
uns  expriment  une  ancienne  supplication,  les  autres  mes 
aspirations  plus  récentes.  —  Kaçem,  reprit  le  Khalife,  qu'il 
est  éloquent  l'auteur  de  ce  distique  : 


CHAPITRE  CXIV.  7 

j-J^^  j^-g-^Jl  j.i».î   ^   l^Xxr&.lj  liXj   l^^  Jv^  ^   yl3  o»j«kA^I 

Je  maudis  à  cause  de  foi  les  jours  qui  nous  séparent  :  les  nuits  n'ont 
pas  d'excuse,  qui  nous  retiennent  loin  l'un  de  l'autre. 

Lorsque  deux  amanls  ne  se  voient  qu'à  travers  la  pensée  d'une  félicité 
qui  n'est  plus,  le  souvenir  s'efface  bientôt. 

—  «  Oui,  Sire,  répondit  Abou  Dolaf,  grande  est  l'éloquence 
du  chef  de  la  famille  hachémite,  du  souverain  a])basside 
qui  a  composé  ces  vers.  »  Mamoun  lui  demanda:  «  Comment 
ta  pénétration  d'esprit  est-elle  amenée  à  conclure  que  je  suis 
l'auteur  de  ces  vers,  et  cela  sans  hésiter,  sans  concevoir  le 
moindre  doute?  —  Prince  des  Croyants,  répondit  le  poète, 
la  poésie  est  semblable  à  un  taj)is  de  laine;  quand  on  mêle  aux 
fils  ordinaires  une  laine  plus  JK'lle  el,  [)lus  fine,  sa  beauté  se 
distingue  au  milieu  du  tissu  et  brille  d'un  plus  vil"  éclat  dans 
l'ensembN'  de  l'ouvrage.  » 

Mamoun  disait  souvent  :  «  Un  roi  peut  tout  j)ardonnef, 
excepté  l'atteinte  portée  à  sa  puissance,  la  divulgation  de  ses 
secrets  et  un  outrage  lait  à  son  harem.  »  —  Il  disait  encore  : 
«On  doit  tlill'érer  autant  que  possible  de  livrer  bataille,  et, 
si  elle  devient  inévitable,  il  faut  en  donner  le  signal  à  la  fin 


8  LES  PRAIRIES  D'OR. 

jj  '^^Jl  owï-cl  JjJi-j  ^j^-«UI  y\^j      u'3^*^.^'  j«l50  (j^  x>l 

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di-Aj)  !*X-£Î>3   /o^«>^*  -^j'    •y^  (A**r>-    i«X.d>  JliJ  (jaX=w_5   ^_j^UJî 

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•pVÂS^  y*i*^KM    J^*iSÀ^    OjJI^     t}"'^^         C-Jj-AAM    ?;ljj    ^jj^^-**'*    (Jj'^^^^ 

cjkAJLÎi  iL}»^J  ^bjc*5  ioolxîî   (^5-0^  t_»Uj  |<N*i.Jl  '>^.î"5_5  2^\4^ 

(21  '«' 

de  la  journée;  »  mais  cette  maxime  est  attribuée  aussi  à 
Anouchirwân.  Voici  une  autre  parole  de  Mamoun  :  «iTous 
les  stratagèmes  sont  impuissants  à  éloigner  la  fortune  quand 
elle  arrive,  et  k  la  retenir  quand  elle  s'éloigue.  «  C'est  le 
même  souverain  qui  disait  quand  Tautorité  ne  lui  fut  plus 
contestée  :  «Quelle  grande  chose,  si  elle  n'était  néant  I 
Quelle  royauté,  si  elle  ne  devait  finir  par  la  mort!  Quelle 
félicité,  si  elle  ne  devait  être  dérue  I  Quelle  journée, 
?i  l'on  pouvait  se  fier  au  lendemain  !  »  Il  disait  encore  : 
«  L'affabilité  consiste  en  un  extérieur  aimable,  un  caractère 
qui  réchauffe  et  féconde  les  cœurs;  en  un  abord  facile,  une 
bienveillance  étendue,  une  large  distribution  d'éloges.  Cette 
qualité  est,  pour  les  gens  de  mérite,  un  don  et  une  force; 
elle  est  la  première  des  qualité  saitnables  et  le  jalon  de  la  puis- 
sance, la  plus  louable  des  habitudes  morales,  la  porte  de  la 
popularité  et  la  clef  de  la  sympathie.  »  —  «  Les  rois  des 
hommes  dans  ce  monde,  disait-il  aussi,  ce  sont  les  généreux, 
et  dans  l'autre  monde,  les  hommes  pieux.  Une  grande  for- 
tune dans  des  mains  qui  ne  savent  en  faire  usage,  c'est  un 


CHAPITRE  CXIV.  9 

yo  _j-ij  iîocJX-w  u  [.'JijjJo  yo_j-J  t^^J'     vl)-^  d^  f'y^y^ 

xJi-K-i  J^\  (jà.)t_*J  lt5^\^!  y^xlL»  ^*^s-3  <^.A>»*xI  u  Saj»; 
JLx^-  4MÎ  Jlï  Jk\  cjU5'aj  J^  ^J-*-=^J  ^5  J^^j  J-ia-^i^ 

l^jJlji)L_j    t-yir^it    i>JjI5    l-fHV^Î    9-J^^    «-.vytllj    »XA*fîl    L>jJl» 

*>^-^r-^  y^  <_,wA*»J  i  o^,<\i^  îiXJ»  ^j^  y^j  4-vs^î  J^lxJl 
5<XJj  IJsJ    ^jjî«XAaJl   (j^  l^J  J<^Jj  ç^jlx»  iij^i  (*^Jî  (-^^ 

festin  placé  au  bord  d'un  égout.  Si  l'avarice  était  un  chemin , 
je  ne  le  suivrais  pas,  une  tunique,  je  ne  m'en  revêtirais 
point.  » 

Mamoun,  assistant  à  une  célébration  de  mariage  entre 
membres  de  sa  famille,  fut  prié  par  l'assemblée  de  pro- 
noncer une  allocution  et  il  s'exprima  en  ces  termes  :  «  Gloire 
à  Dieu!  Toute  louange  revient  à  Dieu;  l'apôtre  de  Dieu  est 
son  élu;  le  meilleur  guide  est  le  livre  divin.  Le  Très-Haut  a 
dit  :  Mariez  ceux  de  vous  qui  vivent  dans  le  célibat;  unissez 
vos  serviteurs  honnêtes  à  vos  servantes  vertueuses.  S'ils  sont 
pauvres,  la  bonté  de  Dieu  les  enrichira;  car  il  embrasse  tout 
et  sait  tout  [Koran,  XXIV,  32).  Si,  ù  défaut  d'un  verset  po- 
sitif et  d'une  coutume  constamment  suivie,  le  mariage  n'a- 
vait reçu  de  Dieu  que  le  seul  avantage  d'unir  des  créatures 
étrangères  ou  amies,  l'homme  bien  insj)iré  et  habile  devrait 
y  courir,  l'homme  intelligent  et  sage  devrait  y  tendre  avec 
empressement.  Un  tel,  dont  vous  connaissez  parfaitement  la 
généalogie,  vous  demande  la  main  de  N.  votre  noble  demoi- 
selle, et  lui  apporte  une  dot  de  tant.  Exaucez  la  prière  de 


10  LES   PRAIRIES  D'OR. 

A^X^  Ij^X-*..;^  |3^i»-   ^y^y^i   IàaIoU».  SyS^j]^  IàjwI^   l_yÙÀ!iJ 

JUi  Axiîi  (jw«  U-i  bj-5i *xxi  ^À^  t5-*^^  ÀjçXft  JJij  iXi  y  1.5^ 

■^  (i)  ' 

notre  client,  consacrez  l'union  qu'il  sollicite,  et  ne  pro- 
noncez que  de  bonnes  paroles  alin  d'être  remerciés  et  ré- 
compensés. Je  termine  en  implorant  la  miséricorde  de  Dieu 
pour  moi  et  pour  vous.  ;> 

Tomamah,  fils  d'Achras ,  raconte  le  fait  suivant.  «Nous 
étions  un  jour,  dit-il,  dans  le  salon  de  Mamoun  lorsque 
Yahya,  fds  d'Aktam,  s'.y  présenta;  celui-ci  voyait  avec  peine 
le  crédit  dont  je  jouissais  auprès  du  khalife.  Nous  discutions 
un  point  de  jurisprudence  :  dans  le  cours  de  la  discussion, 
Yahya  citant  l'opinion  d'Omar  ben  Khattab,  d'Abd  Allah 
ben  Maçoud  ,  d'Ibn-Amr  et  de  Djabir,  je  lui  réponths  qu'ils 
s'étaient  tous  trompés  et  qu'ils  avaient  méconnu  les  lois  d'une 
déduction  rigoureuse.  Ému  et  scandalisé  de  ces  paroles, 
Yahya  dit  au  Khalife  :  «  Prince  des  Croyants ,  cet  homme  ose 
accuser  d'erreur  tous  les  compagnons  du  Prophète  à  la  fois. 
—  Dieu  tout-puissant,  serait-ce  vrai,  o  Tomamah?  me  de- 
manda le  Khalife. — Sire,répliquai-je,  il  ne  s'inquiète  ni  de  ce 
qu'il  soutient,  ni  de  ce  qu'il  condamne;  »  et,  me  tournant  vers 
mon  adversaire,  j'ajoulai  :  «  N'as-tu  pas  prétendu  qu'aux  yeux 


CHAPITRE  GXIV.  II 

de  Dieu  la  vérité  était  dans  la  bouche  d'un  seul  homme!'» 
Yahya  en  convint;  je  continuai:  «Ainsi,  selon  toi,  neuf 
d'entre  eu?^  seront  trompés  et  le  dixième  a  dit  vrai.  Eh  bien, 
moi,  j'ai  affirmé  que  le  dixième  s'est  trompé  et  tu  n'as  pas 
dit  le  contraire.  «  Mamoun  me  regarda  en  souriant  et  me 
dit  :  «  Abou  Mohammed  (surnom  de  Yahya)  ne  se  doutait 
pas  que  tu  lui  ferais  une  semblable  objection.  »  Yahya  me 
pressant  de  m'expliquer,  je  continuai  ainsi  :  «  JN'as-tii  pas 
avancé  qu'un  seul  était  dans  le  vrai?  —  Assurément,  dit-il. 
—  Dieu,  ajoutai-je  (que  son  nom  soit  glorifié  et  exalté!), 
peut-il  permettre  que  la  vérité  ne  soit  pas  proclamée  par  un 
des  Compagnons  de  l'apôtre .^  —  C'est  impossible.  —  Celui 
qui  le  combat  et  n'adopte  pas  son  opinion,  n'a-t-il  })as, 
selon  loi,  méconnu  la  vérité?»  Yahya  en  convint.  «Donc, 
m'écriai-je,  tu  adoptes  l'opinion  que  tu  rejetais  et  tu  affir- 
mes ce  (juc  tu  as  d'abord  repoussé  et  réprouvé.  Ma  déduc- 
tion est  plus  rigoureuse  (|ue  la  tienne  ;  en  ell'et,  j'ai  combattu 
les  autorités,  quant  à  la  forme  de  leur  assertion  ;  or,  là  où  est 
rapprobalioïKJc  Dieu,  là  est  la  vérité,  je  les  ai  donc  repoussées 
parce  qu'elles  étaient  en  désaccord  (avec  cette  approbation  de 
Dieu).  Plnsin'l»'  l'enchaînemenl  des  preuves  m'a   amené  à 


12  LES  PRAIRIES  D'OR. 

Ms.'^~*à..}t.J    JjJJ    (il    ^i^<XJI     (^itj    O^Xisi    «Xa£.    -fii-^Axlai-    Lfij 

(i)*X.j  (^jvjLo^iî  j-iy*l  y  (*'1r*^  j^***  J^J'^  fi-ir^  iJZ)^^  tj^^-^ 

Jvs-'^^L.s».  *\Mi  aK-)«~^  *j-*>*-i>  >i)i!jî  (j-«     (_,^*xJLI  jÀ*Ji  5«»>'_j^ 

4_,yJ3iiI   «oJtJ   jy-S  L>   JU*   (AjcJ^i    cKiS^-^J    v^àj.i>.    iX^Isp    diÀAA»! 


l'opinion  de  l'un  d'eux  et  j'ai  rejeté  l'opinion  de  mes  adver- 
saires, tandis  que  toi ,  tu  as  incriminé  tes  adversaires  et  quant 
au  sens  extérieur,  et  quant  au  fond,  c'est-à-dire  en  ce  f[ue 
Dieu  ajjprouve.  » 

Une  députation  étant  venue  de  Koufah  à  Bagdad  et  s'étani 
présentée  chez  Manioun,  ce  prince  lui  tourna  le  dos;  un 
vieillard  qui  était  au  nombre  des  délégués  lui  tint  alors  ce 
langage  :  «Prince  des. Croyants,  il  n'y  a  pas  de  main  plus 
digne  de  nos  baisers  que  la  votre,  parce  qu'il  n'y  en  pas  de 
plus  haut  placée  pour  le  bien,  ni  de  plus  éloignée  du  mal. 
Votre  pardon  enveloppe  tous  les  coupables.  Dieu  fasse  que 
vos  ennemis  soient  fauchés  par  votre  glaive,  chassés  par  votre 
colère,  écrasés  par  votre  puissance!  »  Le  Khalife  dit  alors 
à  son  ministre  (voir  ci-dessus,  p.  3)  :  «  Amr,  l'orateur  de 
cette  troupe  est  le  plus  éloquent  des  orateurs;  veille  à  ce  que 
leur  requête  soit  accueillie.  «  Et  en  effet  ils  reçurent  satisfac- 
tion. 

Au  rapport  de  Tomamah ,  fils  d'Achras ,  on  dénonça  un 
jour  à  Mamoun  dix  habitants  de  Basrah  comme  étant  des 
impies  qui  professaient  la  doctrine  de  Manès  et  les  deux 


CHAPITRE   CXIV.  13 

/o-g-x-*  j^-»i2--*3  ^(j.laAWj  ij  J.iw«XJ  ^**^  •^î   *^^^  J^^'  ^ 

Jb  c>-ji  l.ÀJÎ^iwî  0.^_5  c:>ol  jjA^ji  Jo  î_j,]b  /<>jî  ^ji^i  (♦SoCj.Xs 
(jbj)_j— &^   I^X^jçjyC  K_Iâ.x^   O^jlwi    (♦XJCjlAAj   <i*À^   (j>^   f*9^^    i*XiÛ 

principes  de  la  lumière  et  des  ténèbres.  Après  qu'il  se  les  fut 
fait  nommer  un  par  un  ,  il  ordonna  qu'on  les  lui  amenât.  Un 
parasite,  qui  les  aperçut  au  moment  où  on  les  réunissait,  se 
dit  :  «  Voilà  des  gens  qui  s'assemlîlent  pour  quelque  bom- 
bance; »  il  se  glissa  donc  au  milieu  d'eux  et  les  accompagna, 
sans  les  connaître,  jusqu'au  bateau  où  leurs  gardiens  de- 
vaient les  embarquer.  «Plus  de  douie,  c'est  une  partie  de 
plaisir,  »  s'écria  notre  parasite,  et  il  monta  avec  eux  à  bord 
de  l'embarcation.  Mais  bientôt  on  apporta  des  chaînes  avec 
lesquelles  on  attacha  toute  hi  troupe,  y  compris  l'intrus,  qui 
se  disait  à  lui-même  :  «  Ma  gourmandise  a  fini  par  m'en- 
ferrer!  »  Puis  s'adressant  aux  anciens  de  la  bande  :  «  Pardon , 
leur  dit-il,  (|ui  êtes  vous?  —  Dis-nous  plutôt  qui  lu  es  cl  si 
tu  comptes  parmi  nos  frères,  lui  répondirent-ils.  —  Dieu 
sail  que  je  ne  vous  connais  guère,  répliqua  l'étranger. 
Quant  à  moi,  sans  mentir,  je  suis  parasite  de  mon  métier. 
En  sortant  de  chez  moi  aujourd'hui,  je  vous  rencontrai. 
Frappé  de  votre  extérieur  agréable,  de  votre  bonne  mine, 
de  votre  apparence  confoitable.  je  me  suis  dit  :   Voici   des 


Id  LES   PRAIRIES   D'OR. 

i^J^i  \ycr  ^^-^3  ^^^  ty^  cxAii  !ijj>\lb  «JUxJj  i^ 

<Ji  I^aJS  jj_y.*.^.c  ^'^■'^  UA-Ui  ii^^X^j  '^^■^j  iJ*_^X,^  J^À*..  '-^^-i'S^i 
U  ^  ^j^*  f*'^^-^'  c3'^V!-93  /e^«>y^  (^  (Xj^î  5«XJ:>  *lj>-  i>i 

^  c^A-JLjjî^j  pL«î-s».'^i  ,j  ciJuai»-  «Xi  ;j^i  îyi?  /c^'  ^iy^^  ^ 
^iu-A_]S  J^_sfc. Jv.^-*«_j  (j^m  Ji   U^  j.5  i^^U  (j^  U)_5  «Xj»X:L 

vieillards,  des  hommes  mûrs,  des  jeunes  gens  qui  s'en  vont 
festiner;  en  conséquence,  je  me  mêlai  à  vous,  et  pris  place  à 
côté  de  l'un  de  vous  comme  si  j'étais  des  vôtres.  En  arrivant 
dans  cette  embarcation,  la  trouvant  ornée  de  coussins  et  de 
tapis  et  voyant  ces  plateaux,  ces  sacs,  ces  paniers  bien  gar- 
nis, j'ajoutai  :  «  Ils  vont  se  récréer  dans  quelque  château  et 
parc  de  plaisance  :  voici  pour  moi  une  heureuse  journée.  » 
J'étais  encore  tout  à  ma  joie,  lorsque  est  survenu  ce  gardien 
qui  vous  a  enchaînés  et  moi  avec  vous.  Cette  aventure  con- 
fond mon  esprit ,  dites-moi  enfin  ce  qui  se  passe.  »  Ces  pa- 
roles amusèrent  et  firent  sourire  les  prisonniers;  mis  en 
gaieté  et  belle  humeur,  ils  lui  dirent  :  «  Maintenant  que  tu  es 
sur  la  liste  et  que  tu  as  ta  chaîne,  apprends  que  nous  sommes 
des  Manichéens  qu'on  a  dénoncés  à  Mamoun  ;  on  nous  con- 
duit en  sa  présence;  il  nous  demandera  qui  nous  sommes, 
nous  questionnera  sur  notre  croyance  et  nous  exhortera  au 
repentir  et  à  l'abjuration  en  nous  soumettant  à  différentes 
épreuves;  il  nous  montrera,  par  exemple,  une  image  de 


CHAPITRE    CXIV.  15 

>-  fc  s. 

v^àJj^  (j^;,  Lss?  viUi  Jl  <3olr=-i  ^  '''^^JvJCJI  yû^  ^U^Us 
tyiL»Jc-cS_5  dl*w^  (^j-ff  ^.Aiw lî  ovjv.£îs^î_5  owLCi  îilî  Jo:i  *jk& 
ji_j|  c-A-5)  <_*»jlj  aj  J^iil  Jî  Aj^txJî  ^i'j.j  u  i_A*i*j=i-  <^ 

l-^j  (j*La.JÎ   -Li_j  (iA.j*X=i  ^j>^   ^iS^  :>îtXxj  <\ÀjJ>w«  (Jl  l*X^ 

I  .  f-  ^         ■(■ 

-XKLÊi:^*.»ffj_»  -^\«w,ilL>  »j-,A-à^»i  ^j5«X^  ^j_e   *il*<*Aâ  5\>,  ^>j 

Manès  en  nous  ordonnant  do  cracher  dessus  et  de  la  renier; 
il  nous  forcera  à  sacrifier  l'oiseau  de  marais  appelé  tezredj 
(nom^^ersan  du  faisan).  Quiconque  y  consentira  aura  la  vie 
sauve,  quiconque  s'y  refusera  sera  mis  à  morl.  Quand  tu 
seras  appelé  et  soumis  à  l'épreuve,  tu  diras  f|ui  tu  es  et 
quelle  est  ta  croyance,  d'après  ce  que  ton  esprit  te  suggé- 
■  rera.  Mais  ne  le  disais-tu  pas  parasite?  Or  les  parasites  ont 
une  ample  provision  de  contes  et  de  nouvelles;  abrège  donc 
notre  traversée  jusqu'à  Bagdad  par  le  récit  de  quelque  bonne 
légende,  de  quelque  histoire  amusante.  »  Une  fois  arrivés 
à  Bagdad,  les  prisonniers  furent  conduits  en  présence  de 
Mamoun;  il  les  appela  {)ar  leur  nom  et  à  lourde  rôle;  il 
demanda  à  chacun  d'eux  quelle  était  sa  secte,  et  l'inter- 
rogea sur  la  foi  musulmane;  il  les  invita  à  renier  Manès  en 
leur  montrant  son  image  avec  ordre  de  cracher  sur  elle  et  de 
ladésavouer,  etc.  A  mesure  qu'ils  refusaient  de  s'y  soumettre, 
il  les  livrait  au  bourreau.  On  arriva  enfin  au  parasite. 
Mais  comme  on   en  avait  fini  avec  les  dix  prisonniers  vi  la 


16  LES   PRAIRIES   D'OR. 

wçi-  t^«Xj  U  ^l_5  )^l\i  \à\^  Qj^  (j^y^  (j^-^Ui  JUi  -yiJi 

»»._i=-i    <JI   2«>i^!    (j-«   5j — >_~».    AaA^   (J^^3   (J^-*-*-^  *-^'^J    '^^    ^'j 

liste  étant  épuisée,  Mamoun  demanda  aux  gardes  quel  était 
cet  homme  :  «  En  vérité  nous  n'en  savons  rien ,  répondi- 
rent-ils. Nous  l'avons  trouvé  parmi  eux  et  nous  l'avons  amené. 
—  Qui  es-tu .'^  lui  dit  le  Khalife  —  Prince  des  Croyants,  je 
répudie  ma  femme  si  je  comprends  quelque  chose  à  ce  qu'ils 
disaient.  Je  ne  suis  qu'un  pauvre  parasite ,  »  et  il  lui  conta 
son  histoire  du  commencement  à  la  fin.  Le  prince  s'en 
amusa  beaucoup;  puis'  il  lui  fit  présenter  l'image  de  Manès. 
Non  content  de  la  maudire  et  de  la  renier,  le  parasite  ajouta  : 
«Donnez-la  moi,  que  je  la  décore  d'une  belle  ordure.  Par 
Dieu,  je  ne  sais  si  ce  Manès  était  juif  ou  musulman.  »  Ce- 
pendant Mamoun  allait  le  châtier  à  cause  de  son  parasitisme 
effréné  et  de  sa  témérité,  lorsque  Ibrahim,  fils  de  Mehdi, 
qui  se  tenait  debout  devant  le  monarque,  lui  dit  :  »  Sire, 
accordez-moi  la  grâce  de  cet  homme  et  je  vous  conterai  une 
singulière  aventure  de  bohème  dont  j'ai  été  le  héros  ;  » 
ensuite,  sur  l'invitation  du  Khalife,  il  poursuivit  en  ces 
termes  :  «Prince  des  Croyants,  j'étais  sorti  un  jour,  et  me 
promenais  en  désœuvré  à  travers  les  rues  de  Bagdad ,  lorsque 


ï 


CHAPITRE  CXIV.  17 

-xkJL<  IJL:^   ^1    -ilÀJ   i^3   5^:>  f^'    »«XÀ^  yî   <.-<u»*(.J»-U   /oJti 

u^b  '^  yW'^jj  (j^A-y  (j^^j  cK*J>'  -^^  (iU*x5  bis  ^^jj^'àm*^ 

I^IaS'Uj  l$l<wî  U  c:a^:9  »U:>U^  y!*XiÔ  IsLiH  J  JUi  cjjvXJî 

j'arrivai  devant  Je  pavillon  cFune  haute  maison  d'où  s'exha- 
laient un  parfum  d'aromates  et  d'épices ,  un  fumet  de  casse- 
roles, dont  je  fus  singulièrement  alléché.  Je  m'adressai  à  un 
tailleur  et  lui  demandai  à  qui  appartenait  la  maison.  —  «  A 
un  marchand  de  la  corporation  de  la  toil(>,  me  dit-il.  —  Son 
nom.^  —  Un  tel,  fils  d'un  tel.  »  Je  levai  les  yeux  sur  le  pa- 
villon ;  du  treillis  en  bois  qui  en  garnissait  la  fenêtre  ,  je  vis 
sortir  une  main  et  un  poignet  comme  je  n'en  avais  jamais  vu 
d'aussi  beaux.  Le  charme  de  cette  apparition  me  fit  oublier  le 
parfum  de  la  cuisine  et  je  demeurai  là  troublé,  éperdu.  Je 
demandai  enfin  au  tailleur  si  le  maître  du  logis  se  permetlait 
le  néhid  (vin  de  dattes).  —  «  Oui  vraiment,  me  dit-il,  et  je 
crois  même  qu'il  traite  aujourd'hui;  mais  ses  convives  sont 
des  marchands,  gens  discrets  comme  lui.  »  Nous  en  étions  là 
lorsque  deux  cavaliers  de  bonne  mine  se  montrèrent  au  bout 
de  la  rue  venant  de  nolie  ('ùlé.  — «  Voilà  ses  deux  invités,  » 
me  diL  le  tailleur.  — Quels  sont  leurs  noms  et  leurs  surnoms 
palronynnques.^  »    Tl    me    renseigna    là -dessus;    aussitôt  je 

'     VII.  2 


18  LES  PRAIRIES   IVOR. 

C^i/cXi»    L(y-A-*J    C:-\„\i*-i>    (J^S^    Cpji'^    CXJj.^    (J^*J    CJ-^*  JVA9 

*_^  iili  is^:>LÀ-lî  (j*K-X-^  (Ji  hya  ^  lÀjtXjî  U^a^jw  -l*ia)i 

poussai  ma  monture  et  me  plaçai  entre  les  deux  cavaliers  en 
disant  :  «Que  ma  vie  soit  votre  rançon!  un  tel  (que  Dieu  le 
récompense  !  )  vous  attend  avec  impatience.  »  Je  les  escortai 
jusqu'à  la  porte  ;  ils  me  précédèrent  et  j'entrai  sur  leur 
trace.  Le  maître  de  la  maison  m.'aperçut  et,  ne  doutant  pas 
que  je  ne  fusse  introduit  par  ses  amis,  il  m'accueillit  gra- 
cieusement et  me  fit  asseoira  la  place  d'honneur.  Alors ,  Sire, 
on  apporta  la  table;  elle  était  richement  servie,  et  nous 
fîmes  honneur  à  ces  plats,  dont  la  saveur  l'emportait  encore 
sur  le  fumet.  «  Voici  déjcà  le  festin  de  gagné,  me  dis-je;  reste 
le  mystère  de  ia  main  et  du  poignet.  »  La  table,  enlevée  et 
les  ablutions  terminées,  on  se  dirige  vers  le  salon  de  con- 
versation: c'était  vme  grande  et  belle  pièce,  richement  ornée. 
Mon  hôte  redouble  de  politesse  et  se  tourne  de  mon  côté  eu 
causant  ;  les  deux  convives  ne  doutent  plus  alors  que  je  ne  sois 
invité,  tandis  que  l'hôte  ne  me  traitait  de  la  sorte  que  parce 
(|u'il  nie  croyait  aiuené  par  ses  deux  amis.  Nous  avions  déjà 
vidé  (|i\elqu('s  coiipi's,  lors(pic  une  jeune  esclave  se  [)résenta 


CHAPITRE  CXIV.  19 

O^    CJ^-»^*-*   ^^^^  4^AAJ   iijjU-    UjçXc    0»->^^    L1a.!jsjiî    IjVwCS 
I^jIà^  (;j^»*i-  tl^VjJsLJ   (J-J^  C^    CJ>*^J-^' J-ft^l   l»    «^'^    0CJS3>,^3 

^sJi  4^  j!  (j^xJl  0)Jaj  cyij.i        à^y-^  o«-^  Jo2>   l^Jl  ci^^i 

gracieuse  et  souple  comme  une  branche  de  saule,  et  nous 
salua  sans  timidité.  On  lui  offrit  un  coussin  ,  on  lui  a|)porla 
un  luth  que  Ton  plaça  sur  ses  genoux,  et  elle  l'accorda  avec 
une  habileté  dont  je  fus  frappé.  Elle  se  mit  alors  à  chanter 
l'air  suivant  : 

Mon  rci^arc]  a  soupçonné  sa  présence  cl  l'rôlé  son  visage  et  ce  regard 
lancé  à  la  dérobée  y  a  laissé  une  enipieinte. 

Ma  main  l'a  aUirée  ;  elle  a  cfileuré  la  sienne,  cl  sons  le  conlact  de  ma 
main  ses  doigls  ont  frémi  amoureusement. 

Son  souvenir  a  traversé  mon  cœur  et  à  mon  tour  je  l'ai  blessée;  j'igno- 
rais fjne  d'une  pensée  pût  naître  une  blessure. 

—  «Vraiment,  Sire,  la  beauté  et  la  perfeclion  de  ce  chant 
m'avaient  troidilé  et  ému.  Elle  reprit  son  liilli  cl  chanta  : 

D'un  signe  je  lui  ai  demande  ;  Sais-lu  à  ipiel  point  je  l'ainu'.^  Et  elle 
ma  repondu  dans  ime  n-illade  :  Je  suis  fidélo  à  ton  amour. 

.l'ai  su  raclier  S(ru|)id('nsemenl  son  secret ,  et  elle  aussi  a  veillé  à  ce 
qu'il  ne  fût  pas  divulgué. 


20  LES  PRAIRIES  D'OR. 

i^^  y**.-ji_À.Jl   jXX^Î  ^  U  tj^i^J!  (j^  j*^^^       ii^i^McJ!  c:v^5.9 

(*■ — ^ — ^ — '  '^j  y-kJ^  ^  ^^}i     '    (S^"*-  *^  >  ^-^HW  (jî  ^^-^  O**^''^ 
p.i^j  j[\i\   ^^    i^Ui-ra-i    *x>jj_j  Lg.j_^X:S?  ,^_^^J!  ^jXAo   (jv-cl  t^^*^ 

^***— «  t>A»AJ>j  ^jLi.^1   wfcM»AJ^         <_^ — r^j »-»>•  \-S^  SÎk-il   ijL.A«> 

iî^jijsJij)  (_^*xJi  qÀj!  (j-*  ^/-^  x*J  l^jij  >-«*«J!  4^j«.«  I^ajIoÎ^ 
l— Jûi^_x_j  ocj^_Ai?5  c:*M\xi2jw  *-,^  iij,lr*.  l>  dl^)»*  cxjb  c:A.Xiii 
ow-otN-Ls  ^lAiuiAJi  ç*SC*«wJl.:sî  ^j^y*d.^  /<vi-J    ^^  oJb  -c.!»  (jo;'^^ 

«  Je  criai ,  j'invoquai  mon  salut  éternel  ;  mon  émotion  était 
si  vive,  que  je  n'étais  plus  maître  de  moi  et  ne  pouvais  me 
contenir.  L'esclave  continua  son  chant  : 

N'estil  pas  surprenant  que,  réunis  dans  le  même  lieu,  nous  ne  puis- 
sions ni  demeurer  seuls,  ni  parler  de  noire  amour? 

Nos  yeux  seuls  peuvent,  à  la  dérobée,  exprimer  la  passion  qui  nous 
torture,  le  feu  qui  dévore  nos  entrailles. 

Nous  n'avons  pour  nous  comprendre  que  le  frémissement  de  nos  lè- 
vres, le  mouvement  de  nos  sourcils,  nos  regards  à  demi  voilés  et  notre 
cœur,  qui  échange  un  salut. 

— -  «En  vérité.  Prince  des  Croyants,  Tkabileté  et  la  science 
de  cette  chanteuse,  le  talent  avec  lequel  elle  avait  su  expri- 
mer les  paroles  du  libretto  sans  sortir  du  thème  primitif, 
tout  cela  m'inspira  un  mouvement  de  jalousie  :  »  Jeune  fille , 
lui  dis-je,  il  te  reste  encore  à  apprendre.  »  Ces  paroles  Tirri- 
tèrenl,  elle  jeta  son  luth  et  s'écria  :  «  Depuis  quand  admettez- 
vous  dans  votre  intiinité  d'aussi  fâcheux  convives.'^  «  Je  me 
repentis  de  ce  que  j'avais  fait  en  voyant  les  dispositions  de 
l'auditoire  changer  à  mon  éoard.  «  Y  a-t-il  un  luth  ici."^  de- 


CHAPITRE  CXIV.  21 

^      ..        ^ 

Sk>._À_i  yo   (j^  Jj^  L_iù^^^_^  j»b^    dLLx-o  cjtkAaJî   i<XJÛ  ^^ot» 

iiiantlai-je.  — Oui,  Seigneur,  me  répondil-on.  »  Dès  qu'on 
me  Teut  apporté,  je  l'accordai  à  ma  guise  et  je  chantai  les 
paroles  suivantes  : 

Pourquoi  ces  demeures  restent-elles  insensibles  ;\  ma  douleur?  Sont- 
elles  sourdes?  Le  temps  les  a-t-il  renversées? 

Hélas!  Ceux  que  j'aimais  sont  partis  au  déclin  du  jour,  et  l'on  m'an- 
uonce  leur  départ.  Qu'ils  meurent  s'ils  doivent  mourir;  s'ils  vivent,  je 
vivrai! 

- —  «  Je  n'avais  pas  encore  teruMué  mon  cbant,  que  la  belle 
esclave  se  précipitait  à  mes  pieds  et,  les  tenant  embrassés, 
me  disait  :  «Seigneur,  j)ardonnez-moi,  au  nom  du < ciel.  Je 
n'avais  jamais  entendu  chanter  cet  air  avec  une  telle  perfec- 
tion. »  Son  maître  et  tous  ceux  qui  étaient  présents  se  levè- 
rent et  suivirent  son  exemple;  la  joie  venait  de  renaître,  les 
coupes  circulaient  plus  rapidement,  on  buvait  à  pleines  ra- 
sades. Je  continuai  ainsi  : 

Dis-moi ,  je  l'en  supplie,  pourrais-tu  ui'oublier,  lorsque  ton  souvenir 
nie  l'ait  répandre  des  larmes  de  sang? 


22  LES  PRAIRIES  D'OR. 

U^Jlx>  <^j^.jj*^  U  :s^iL  L4J  jij       ii4-+->->î  ^-«-j!  _>-X-:îî  ^^1  <i5 
\/»yJL«  ,,^JLxJl  J>.f^li>  ^UuS^j  ^^         .NJùAjLa  c:Ajt  c^xli    c->Uâ^  câ^^)~' 

Je  me  plains  à  Dieu  de  l'avarice  de  cette  belle  et  de  ma  prodif^alilé;  je 
lui  offre  du  miel,  et  elle  ne  me  présente  que  la  coloquinte,  aux  sucs 
amers. 

Je  me  plains  de  son  éloignement,  moi  qui  ne  veux  vivre  que  pour  lui 
prodiguer  ma  tendresse. 

Rends  à  la  vie  un  amant  dont  tu  as  brisé  le  cœur;  ne  l'abandonne  pas 
ivre,  affolé  d'amour! 

—  «  L'enthousiasme  de  mes  auditeurs  devint  si  vif  que  je 
craignis  qu'ils  ne  perdissent  la  raison  ;  je  me  tus  un  moment 
pour  leur  laisser  le  temps  de  se  remettre,  puis,  reprenant 
mon  luth  pour  la  troisième  fois,  je  chantai  : 

Ton  artiant  est  en  proie  à  des  douleurs  poignantes;  un  fleuve  de  larmes 
inonde  son  corps. 

Une  de  ses  mains  se  lève  suppliante  pour  demander  au  ciel  la  fin  de 
ses  souffrances,  l'autre  main  s'appuie  sur  son  cœur. 

Oh!  venez  voir  un  pauvre  amoureux  que  le  désespoir  fait  délirer  et 
dont  la  main  et  les  yeux  peuvent  seuls  exprimer  les  désirs! 

—  «Par  mon  salut  éternel,  s'écria  l'esclave,  voilà,  maî- 
tre, ce  qui  s'appelle  chanter.  »  Cependant  l'ivresse  commen- 


CHAPITRE  CXIV.  23 

JJX_i^  -Ui  ^j^iwl  <;5Csfc  (^  ^^  J^j  ^_j  lS'^^  y  *^^^  (J"* 
JJJU  il    t_>i^i|   I js^   (j_jSÇ.   ^jl   ^^1   bl^   c^O^A^   L,  Ji'_5   ,^îj 

/o-»Axil^  ,,Jim\^  -.IxLaJl  w«l=».  ^O^jk=*.lî  àùiix»  U  ^^  c^x*t-*J  oJlj* 
Xij\^=»-  'li,\  J)yXj  JjîjsL  J\Jo  *.j!5XaJ  (}yè  A  é^jXJ-  ^J^J»  b  JlJii 
4Mlj  JU  45^-»-  ^  (jM»*i  J>>'j  I^àS' (Jl  jiâjli  SJ^s^ij   »»Xj*.Ij, 

çait  ù  tourner  les  têtes  :  le  maître  du  logis  qui  supportait, 
mieux  que  ses  deux  convives,  l'influence  du  vin,  les  coniia 
aux  soins  de  ses  propres  domestiques  et  des  leurs,  et  les  fil 
reconduire  chez  eux.  Je  demeurai  seul  avec  lui;  après  avoir 
encore  vidé  quelques  coupes,  il  me  dit  :  «Eu  vérité.  Sei- 
gneur, je  considère  comme  perdus  les  jours  passés  sans  vous 
connaître.  Dites-moi  qui  vous  êtes,  cher  maître.  »  Ses  ins- 
tances devinrent  si  vives  que  je  fim's  par  me  nommer.  yVus- 
sitôt  il  se  leva  et  me  baisa  sur  la  tête  en  disant  :  «  J'aurais 
été  surpris,  Monseigneur,  que,  dans  un  rang  inférieur  au 
vôtre,  on  possédât  de  pareils  talents.  Ainsi  donc  la  royauté 
était  chez  moi  depuis  tantôt  et  je  l'ignorais!  »  Pressé  par  lui 
de  raconter  mon  aventure  et  le  motif  qui  m'avait  attiré,  je 
lui  fis  connaître  l'histoire  du  repas  qu'on  apprêtait  et  l'ap- 
parition de  la  main  et  du  bras  à  la  fenêtre.  Il  appela  une  de 
ses  esclaves  et  lui  dit  :  «  \  a  dire  à  une  telle  de  descendre.  » 
Il  me  fit  ainsi  amener  toutes  ses  esclaves  l'une  après  l'autre. 
Après  avoir  examiné  leurs  mains  :  «  Ce  n'est  pas  cela,  m'é- 
criai-je.  «  —  «  Vr.ii  Dieu,  me  dit  enfin  mon  hôte,  il  ne  reste 


24  LES  PRAJRIES  D'OR. 

I^ji^jî^  l^_^AiijJii  o^-ïjJl  i^Xiû  ^  «3.^'=»"  c^»^'  '*^-t-*  îj>;*^^i 

plus  que  ma  mère  et  ma  sœur,  je  vais  les  faire  conduire  en 
votre  présence,  ri  Une  telle  générosité,  une  bienveillance  si 
large  me  laissaient  tout  surpris;  je  lui  dis  alors  :  «Que  ma 
vie  soit  votre  rançon!  avant  d'appeler  la  mère,  commencez 
par  la  sœur;  c'est  peut-être  celle  que  je  cherche.  —  C'est 
vrai,  »  répondit-il,  et  il  donna  des  ordres  en  conséquence. 
Dès  que  je  vis  sa  main  et  son  poignet,  je  m'écriai  :  «  C'est 
elle,  mon  cher  hôte,  c''est  elle!  »  Sans  perdre  un  instant,  il 
ordonne  à  ses  gens  de  réunir  dix  vieillards  choisis  parmi  les 
notabilités  du  quartier.  11  se  fait  ensuite  apporter  une  somme 
de  vingt  mille  dirhems  en  deux  groups  [hadrah],  et  (s'adres- 
sant  aux  nouveaux  venus)  :  «Voici  ma  sœur  une  telle,  leur 
dit-il ,  je  vous  prends  à  témoins  que  je  la  marie  au  seigneur 
Ibrahim,  fils  de  Mehdi,  et  que  je  lui  constitue,  aux  lieu  et 
place  de  son  mari,  une  dot  de  vingt  mille  dirhems.  »  Nous 
donnâmes  l'un  et  l'autre  notre  consentement  au  mariage  : 
après  quoi  je  présentai  une  des  bourses  à  ma  jeune  femme 
et  partageai  l'autre  entre  les  témoins,  en  leur  disant  :  «  Ex- 
cusez-moi ,  c'est  tout  ce  dont  je  puis  disposer  en  ce  moment.  » 


CHAPITRE  CXIV.  25 

Sj«X>o  à-XMu^  <\^«3  ^j^  (^^|)  ^  (^5^'^^'  r^l  y.  ^'^  ^^L{^ijL,^lj 
u^cJLX  U  Jotiî  Jlii  Jj.Â^  JI   IgA^U  iijjii jMis-^  Jo  ci^ijii 

iLA-i.^  a\-jL==»-  yjLr=»ij  jJ^AlaJi  ^^I^I_5  ^=>-^ji  lilii  ^JS  ^j~* 

Ils  acceptèrent  mon  présent  et  se  retirèrent.  Mon  hôte  nie 
proposa  alors  de  faire  préparer  dans  sa  propre  maison  un 
appartement  pour  moi  et  ma  jeune  épouse.  En  vérité,  Sire, 
tant  de  i,fénérosité  et  de  bonté  me  rendait  tout  confus;  je  le 
priai  seulement  de  me  procurer  une  litière,  désirant  con- 
duire ma  femme  chez  moi.  Il  y,  consentit  avec  la  même 
complaisance,  fit  préparer  une  litière  cpii  nous  transporta 
dans  ma  demeure  et  je  vous  jure,  Sire,  qu'il  nf envoya  un 
trousseau  si  maguificpie,  qu'une  de  mes  maisons  ne  pou- 
vait en  contenir  les  sj)lendeurs.  »  —  Manioun  fui  émerveillé 
de  la  générosité  de  cet  homme;  il  donna  d'abord  la  liberté 
et  un  riclie  cadeau  au  parasite,  et  il  ordonna  ensuite  à  Ibra- 
him de  lui  présenter  son  beau-père;  celui-ci  devint  un  des 
courtisans  du  Khalife,  un  de  ses  familiers,  et  fut  admis,  avec 
les  marques  de  la  plus  flatteuse  bienveillance,  aux  réceptions 
intimes ,  comme  en  toute  autre  occasion. 

Moberred  et  Tàlab  racontent  que  Koulloiiin  el-Attabi 
faisait  antichambre  chez  Mamoun  lorsque  Vahya,  fils  d'Ak- 
lani,  vint  à  passer.  Attabi  lui  dit  :  "  Voudrie/.-vous  informer 


26  LES  PRAIRIES  D'OR. 

fj\  iJi)ljyJl»  wiL^J-^C  (jl.^JL«  \-gyi  Km  -X^'jijy  »l;sr  wiJjiii  tX-s 
tiX.AW..ji_jv-J   tiXjw«  wAik.   i*AHyi    ^^   l>)^   c:>yO    K<|i   wlaAajU^   c;.>v5Lvw 

w  p 

*-aJLIj  y_j,.^lil  ^Ai».lî  <;^vs?  cK=fc.<Xi  (^*X*mJS  *i«Xj  sl4>-  *^^ 

^I^WwAj    XAJLS^    Ajl^^     Ajî_J&.î   iy£    ^U<*J    |J.AJ>I_5         (j«j,X^U     !iy«\i 

le  Khalife  de  ma  présence?  —  Je  ne  suis  pas  huissier,  ré- 
pondit Yahya.  —  Je  le  sais,  répliqua  le  poète,  mais  vous 
êtes  homme  de  mérite  et  le  mérite  est  une  protection.  — 
Mais  vous  me  détournez  de  mon  chemin.  —  Dieu,  reprit 
Attabi,  vous  a  accordé  le  rang  et  la  fortune;  ces  deux  biens 
s'accroîtront  pour  vous  si  vous  en  êtes  reconnaissant;  ils  di- 
minueront si  vous  êtes  ingral.  Je  suis  plus  généreux  pour 
vous,  que  vous  ne  Têtes  envers  vous-même,  puisque  je  vous 
oiTre  l'occasion  d'augmenter  votre  fortune  €t  que  vous  la 
refusez.  Toute  chose,  d'ailleurs,  est  soumise  à  la  dîme; 
l'homme  puissant  s'en  acquitte  en  employant  son  crédit  en 
faveur  de  celui  qui  le  sollicite.  »  Yahya  se  décida  enfin  à  aller 
prévenir  le  Khalife;  Attabi  fut  introduit.  Ishak,  fils  d'Ibra- 
him Moçouli,  était  présent  à  l'audience.  Mamoun  invita 
le  nouveau  venu  à  s'asseoir,  il  s'informa  de  sa  santé  et  de 
ses  affaires;  celui-ci  lui  répondit  avec  un  à-propos  et  une 
élégance  qui  charmèrent  le  prince.  Mamoun  s'étanl  mis  à 
le  plaisanter,  le  vieillard  crut  que  le  prince  faisait  peu  de 
cas  de  lui   et   il   lui   dit  :  «Sire,  il  faut   caresser  avant  de 


CHAPITRE  CXIV.  27 

V^  '^  i  ^^^^-  (i^^^  J^l»  <^^  ev*^'j  OJ^'  tJ^^^  tî^'j 

^j**UJl   (j^  bt  Jla  dUv«l  Uj  c^l   (j^  J,^^   *i  J^  cX*-»'  J^A* 

traire  (locution  proverbiale;  cf.  Hariri,  p.  52  0 ;  Mcï(hini,l, 
p.  5i.)  »  Aïamoun  ne  comprit  pas  bien  l'intention  du  poète 
et  regarda  Ishak ,  lequel  lui  (it  un  signe  du  coin  de  l'œil.  Le 
prince  fit  alors  apporter  mille  dinars  et  ordonna  (ju'on  les 
déposât  devant  Altabi  ;  puis  il  reprit  la  conversation  sur  un 
ton  familier,  et  excita  Isliak  à  se  jouer  nuilicieusement  de 
son  hôte.  Ishak  se  mil  donc  à  le  contredire  sur  tous  les 
sujets  de  la  conversation,  sans  lui  laisser  jamais  le  dernier 
mot.  Altabi  en  lut  tout  surpris  et,  ne. sachant  pas  qu'il  avait 
affaire  à  Ishak,  il  demanda  au  Khalife  la  permission  d'inter- 
roger sou  interlocuteur  sur  son  nom  et  sa  fîimille.  En  ayant 
reçu  l'autorisation,  il  lui  demanda  :  "Qui  es-tu  et  com- 
ment le  nommes-lu.^ —  J'appartiens  à  la  race  humaine,  ré- 
pondit Ishak,  et  mou  noui  est  Koulhacal  (  mange  oignon). — 
Quant  à  la  race,  reprit  Koultoum,  c'est  chose  connue;  mais 
je  ne  comprends  rien  à  ton  nom.  D'ailleurs  on  ne  s'appelle 
pas  K<)ulha(-al.  —  Oh  !  que  tu  es  injuste  !  ri[)osla  Ishak,  est- 
ce  que  Koultoum  (mange  ail)  n'est  pas  un  nom?  Or  l'oignon 
vaut  mieux  (puî  l'ail.  » —  Maudit  homme,  s'écria  le  poêle,  (pu'l 
sel  dans  ses  propos!  non,  je  n'ai  jamais  vu  un  plus  agréable 
causeur.  Le  Piince  des  Croyants  veut-il  me  peimcllre  de  lui 


28  LES  PRAIRIES  D'OR. 

IfJ^Aa  j,  (^j^J^^%i,\  j.^\   (jiljçàl   iJjXsfc-  ^s>^jls   i-iolj   U   Lils^^^i 

iCijjtJL!^  cjiiiîj   iAjJtl\^  kxJi  (j.«  (jl^       wAà^  jl»:>  y^  ^^i 

^^Law^I    /v.4M>.S>^    klÀ=:l    8wA.5j     |«^AXM    ^fiJâÀj!     /vAMSk.^    ,,|.AW«JCJI^ 

ii_fiL_rf_5  ii_AMJl.:^JI  ijS^X^j  (jW'îl  ^Uj^  ^jU*ASÎ  iir»-lA<aij 
U  4^  ii-jc^iJi  RsSP^  kil  a^_j->-_j  iUiolissJl  iJ_jUa»._5  aajVJLI 

JU»  ]yt^   J>.ii 

offrir  le  cadeau  dont  j'ai  été  honoré ,  car  en  vérité  je  suis 
vaincu?  —  Non,  lui  répondit  Mamoun  ,  garde  ta  part  entière 
et  nous  allons  lui  faire  donner  pareille  somme.  »  Isliak  re- 
tourna ensuite  dans  sa  demeure,  et  il  y  garda  le  poète  le 
reste  de  la  journée. 

Cet  Attabi,  originaire  de  la  frontière  militaire  [djound)  de 
Kinnasrîn  et  d'el-Awaçim,  habitait  Rakkali  ville  du  Diar- 
Modar;  il  excellait  dans  la  science  et  la  lecture  du  Koran, 
dans  la  littérature  et  les  connaissances,  dans  l'art  épisto- 
laire  et  le  style  cadencé  ;  sa  mémoire ,  l'élégance  de  ses  ma- 
nières ,  la  pureté  de  son  élocution ,  sa  parole  éloquente ,  sa 
supériorité  dans  la  conversation,  son  talent  d'écrivain,  le 
charme  de  ses  allocutions ,  la  perfection  de  son  écriture  et 
enfin  son  heureux  naturel,  toutes  ces  qualités  le  plaçaient 
au-dessus  de  la  plupart  de  ses  contemporains.  On  cite  de  lui 
cette  sentence  :  «  L'homme  a  pour  langue  son  secrétaire,  pour 
visage  son  chambellan,  et  son  ami  intime  est  un  autre  lui- 
même.  »  Il  a  versifié  cette  même  sentence  ainsi  qu'il  suit  : 


CHAPITRE  CXIV.  29 

^^— A— c>lft    iX._J    <-^9  i<— Jb   <X        .tUkX-^-j» 

Ô)-*-J   LjfU    dUjl^  (j^^^Jûjli  ^X.^-   Ci^J^   lit   JiS    Aj|    AÀi  jS'ij 

c:aJ|^  «^^-^   ^^)  ^Sy^  c:^!^   iu>yc«  bi  <_aj\$CSI  JUi  l^«Xj   c^jl^ 
JLjLi  h—»**^  caJIj  Sr>^  l^î^  ^*>^  «-^'^  «J^-iJî  bi_5  Jj.^^ 

iUA-.^-J^    '^^j\^     éy]£i.^    \i\j  i^^JiÀ^    Ocji^    iÙ4>XÀ^    bt    ^J«XÀji 

L'homme  a  pour  langue  son  secrétaire;  pour  visage  son  chambellan  ; 
Son  ami  intime  est  un  autre  lui-même,  et  toutes  ces  choses  lui  sont 
nécessaires. 

On  lui  attribue  aussi  ces  paroles  :  «  Quand  tu  es  investi 
(l'un  gouvernement,  choisis  avec  soin  ton  secrétaire,  car 
ceux  qui  sont  éloignés  ne  jugeront  do  ta  valeur  que  par  la 
sienne.  Prends  un  chambellan  intelligent,  puisque  les  solli- 
citeurs, avant  d'arriver  à  toi,  te  jugeront  d'après  ce  qu'il 
est  lui-même;  recherche  chez  tes  conlidents  et  tes  intimes 
un  caractère  noble  et  sympathique,  car  on  mesure  le  méril(> 
d'un  homme  à  celui  de  son  entourage.  » 

Un  secrétaire,  se  targuant  de  sa  supériorité  sur  un  cour- 
tisan, disait  à  ce  dernier  :  "Je  suis  un  auxiliaire,  tu  n'es 
qu'une  ressource;  on  m'emploie  aux  afTaircs  sérieuses,  tu 
ne  sers  ([u'au\  futilités;  on  nous  recherche,  moi  pour  la  ri- 
gueur, loi  pour  le  plaisir;  moi  pour  la  guerre,  toi  pf)ur  la 
paix.»  I.e  courtisan  lui  répliqua:  »  Je  suis  lait  pour  la  la- 
veur, tu  l'es  pour  la  vengeance;  j'ai  la  considération,  lu  as 
la  servilité;  tu  restes  debout  quand  je  suis  assis;  tu  trembles 
tandis  qu'on  me  lrait(*  en  ami.  C'est  pour  me  satisfaire  ((iie 


30  LES  PRAIRIES  D'OR. 

LjCI^    «,.jb    OvJÎ^    ià^J^    "'^    (J^r*-*  «-i^î^J    «^^^    wi^    j3:sU-i«    3iAâ 

^Uam.-.-»-  jl— »-■=»-!  j_j ljùx,M_5     (^"ijXkji  ^  *<XÀ.M  ltdC*Xj  ci^-^.<>*i 

U^^  iy^y  b*X>ua5  AaJÎ    l5  ^Jj;-^  Uûpi  »j  Tr^  cjUaàaûj^ 

*^  c  *  «s 

p 

tu  travailles,  et  tes  laborieux  efforts  contribuent  à  mon  bon- 
heur. Je  suis  un  associé,  tu  n'es  qu'un  aide;  je  suis  un  égal, 
tu  es  un  subalterne,  et  si  l'on  m'a  surnommé  nediin  (courti- 
san), c'est  parce  qu'on  regrette  {nadain)  de  me  quitter.  »  — 
Mais  nous  ne  pourrions  rapporter  les  faits  intéressants  ni 
citer  les  beaux  ouvrages  d'Attabi  sans  nous  écarter  de  notre 
plan  et  nous  éloigner  du  but  vers  lequel  nous  nous  diri- 
geons; nous  n'avons  même  inséré  ici  ces  fragments  que  parce 
que  f  enchaînement  du  discours  et  les  développements  de  la 
narration  nous  y  ont  entraîné. 

Le  fait  suivant  est  raconlé  par  Djawhari,  d'après  Otbi, 
qui  le  tenait  d'Abbas  Deïri.  Un  homme  adressa  une  requête 
à  Mamoun,  dans  laquelle  il  sollicitait  une  audience  et  la  fa- 
veur d'être  entendu.  Sa  requête  ayant  été  accueillie,  il  se 
présenta  chez  le  Khalife,  le  salua,  et,  invité  par  le  prince  à 
faire  connaître  l'objet  de  sa  demande ,  il  s'exprima  ainsi  : 
«  Apprenez,  Prince  des  Croyants,  que  les  rigueurs  du  sort, 
les  caprices  et  les  calamités  de  la  destinée  se  sont  acharnés 
contre  nioi  et  m'ont  enlevé  ce  que  la  fortune  m'avait  ac- 


CH^PITUE  ex  IV.  81 

j-^r>^  ^-ii    bij  jlfco  iiAA*?^  JlÂisJj  JIaê  J^  jjÇO    ^i   ^^j 

*  E  1« 

cjoîj  U  AjLmAj^  CJ.^-*^"^'  "-^^^  if^Jtj^y»  j  i)|  Lai  !  «X^  JjLo  ^^ 

o<-.«.-^c  ltoj-«oL«  V^iXe  I^Ï^Ja^  ^xiSli  *jJl  cyw*<ai  y%-«Uî  ^i 

cordé;  il  ne  me  reste  pas  un  domaine  qui  ne  soit  ravagé, 
pas  un  canal  qui  ne  soit  ensablé,  pas  une  maison  qui  ne 
tombe  en  ruine,  un  capital  qui  ne  soit  dissipé.  Aujourd'hui 
je  n'ai  plus  ni  sou  ni  maille  (littéral,  ni  cilice  ni  bure);  j'ai 
de  lourdes  dettes,  une  nombreuse  Tainille,  des  garçons  et 
des  filles  en  bas  âge;  je  suis  vieux,  les  besoins  m'assiègent  et 
je  n'ai  plus  la  force  d'y  satisfaire  par  le  travail.  Il  faul  donc 
qu'un  regard  généreux  du  Prince  des  Croyants  tombe  sur 
moi.  »  Tandis  ((u'il  parlait,  il  ne  put  relenii-  un  vent  :  «  Sire, 
s'écria-l-il  aussitôt,  voici  encore  une  preuve  de  l'acharnc- 
ment  inouï  du  sort  contre  moi;  jamais,  je  vous  jure,  j)a- 
reille  chose  ne  m'était  arrivée  qu'en  temps  et  lieu.  »  Ma- 
moun,  s'adressant  à  ses  courtisans,  leur  déclara  (lu'il  n'avait 
jamais  vu  un  homme  d'un  cœur  plus  robuste,  plus  ferme, 
cl  d'une  àinc  plus  résolue,  el  il  lui  (il  c()m[)ler  une  avance 
de  cinquante  mille  dirhems. 

Voici  ce  (jue  raconte  Aboiri-Alahyah  :  «  Mamoun  m'ayant 
lail  appeler,  je  me  rendis  auprès  de  lui.  .le  le  trouvai  la 
léle  basse,  songeur  el  triste;  je  n'osais  m'a|)procher  de  lui 


32  LES  PRAIRIES  D'OR. 

fj\    »*>«..x_)  jLilj   A^lj    sjiji  Jlil    lilXj   f^  ^^   AaJJ  ^3»XJi   0fi 


U 


Jlij  w*^  '•^>-*-i>  S«X.-iî>  jj  Jj  (jvJL«^iî  j.A^Î  l»  Jss»']  cxXjii  iUj^L» 

clans  les  dispositions  où  je  le  voyais,  lorsqu'il  leva  la  tête  et 
me  fit  signe  de  la  main  d'approcher;  j'obéis.  Il  redevint 
pensif  pendant  un  moment;  puis  relevant  le  front,  il  me  dit  : 
«Isniâïi,  l'ennui  et  le  désir  de  la  nouveauté  sont  une  des 
dispositions  naturelles  de  l'âme;  elle  s'accoutume  à  l'isole- 
ment aussi  bien  qu'à-  la  société.  —  C'est  vrai,  Sire,  lui  ré- 
pondis-je,  et  j'ai  exprimé  ce  sentiment  dans  un  vers.  — 
Quel  ost-il?»  demanda  le  prince.  Je  repris  : 

L'âme, (juand  elle  est  dévoyée,  ne  se  plaît  qu'à  passer  d'uiM?  situation 
dans  une  autre. 

Mamoun  admira  ce  vers  et  me  dit  de  continuer;  mais  je 
lui  avouai  que  je  ne  pouvais  rien  y  ajouter.  Je  passai  le 
reste  du  jour  auprès  de  lui;  après  quoi  il  me  fit  un  présent, 
et  je  me  retirai.  » 

On  raconte  qu'une  nuit,  ce  Khalife  ordonna  à  l'un  de  ses 
eunuques  favoris  de  sortir  et  de  lui  amener  le  premier  pas- 
sant qu'il  rencontrerait  en  route,  noble  ou  manant,  quel 
qu'il    fut.  Cet  oiïicier  s'éloigna  et  revint  bientôt  avec  un 


CHAPITRE  CXIV.  ys 

jju«î  Cf"'^^  (j-  ^^y'»  t^^Jî  J-=?V^  t^yûlkJi  |ivtf>^5  ^j  j^ 

dLii  ^  -U!  j^a53  c>^^w5  j»j.JI  jj^ff  JUi  ci>ULw  ci>^XS  Ju>!î 
*i  jULi  u^]  (jL^  »_j*mjIj  (j**Xs-I  (j_j^m  >i  JUi  ylii  AJÎ 
J^  (j^  dUil  -<XJij  liyû  jJ«XS  LLo  Jsj»-!_5  J^  ^lis  «Xi  fj^\i\ 
<J^  (Sy^  ^3  IgAjUÀJ  f^  jx-a^\^  dUi  (jjvj  Ijjvi  I^jL*  «*Xs-|^ 

L^U  ii-«:î^  ^Y^^^i^  Ci^♦  ♦i^-=»-i^  J^j  l^A^  j^xjf  ^  L^^ 

homme  du  peuple.  Auprès  du  khalife  se  trouvaient  alors 
Moutaçem  son  frère,  Yahya  ben  Aktam  et  Mohammed  ben 
Amr,  surnommé  le  Grec  (Roumi);  chacun  deux  faisait  cuire 
un  plat  de  sa  façon.  Mohammed,  fds  d'Ibrahim  le  Tahéride, 
dit  au  bonhomme  :  «  Ce  sont  les  intimes  du  Prince  des 
Croyants  que  tu  vois  réunis  ici;  réponds  à  toutes  leurs  ques- 
tions. —  Où  donc  allais-tu  à  cette  heure?  lui  demanda  Ma- 
moun;  tu  avais  pourtant  encore  trois  heures  de  nuit.  »  Cet 
homme  répondit  :  «  Le  clair  de  lune  m'a  trompé,  et,  enten- 
dant le  tekhir  d'un  imam,  j'ai  cru,  à  n'en  pas  douter,  que 
c'était  l'appel  à  la  prière.  »  Mamoun  invita  le  pauvre  homme 
à  s'asseoir,  et,  quand  on  fut  parvenu  à  l'apprivoisîer,  le 
prince  continua  en  ces  termes  :  »  Chacun  de  nous  vient  d'ac- 
commoder un  mets;  on  va  t'apporter  un  échantillon  de 
chaque  plat;  tu  le  goûteras,  puis  tu  nous  en  diras  les  mérites 
et  ce  que  lu  y  trouves  de  bon.  —  Soit,  répondit-il;  appor- 
tez. »  On  lui  présenta  les  plats  sur  un  grand  plateau ,  avec 
leurs  couvercles  et  sans  rien  qui  les  distinguât;  seulement 
^'"-      .  3 


34  LES  PRAIRIES  D'OR. 

Ol-A-Iâ_j  fO^Xs».  ^1  L.j_iwUij  U^  vii.*-.^  Ij-iKà  »«Xiû  U!  JliJ^ 

j<X5  (jjîi  Ao  IX^sIs  <Jijjl**(Ji;^  iC^^j  bCi>-j-3>-  a<Xj>.55  'N?  (>* 
ils-i   ^Uls  ^^  ^llio  j*>o  ^î^  &<>sJ>  Jlsj  (^j»jJi    s;.^  (^   *X^ 

^.(.>jO    ^^U    ^,*s?Uijî     /«tOi     ^     ^■3?J«^    ^3^'^     (*^     i^Ssis-i     U 

^  Jl5^.:^^ji  ij^   V.^-»  ^w^  \^\Xs^  /o.(}»'0  ^.§Xxj_5   Ai^-AjlLaj^ 

chaque  cuisinier  avait  mis  à  son  œuvre  un  signe  particulier. 
Notre  homme  goûta  d'abord  le  plat  préparé  par  Mamoun  : 
«Bravo!»  fit-il;  et  après  en  avoir  avalé  trois  bouchées,  il 
ajouta  :  «  On  croirait  que  c'est  tout  musc;  celui  qui  a  cui- 
siné cela  ne  peut  être  qu'un  savant  cuisinier,  propre,  ingé- 
nieux et  élégant.  «  Il  passa  au  plat  de  Moutaçem  et  dit  :  «  Par 
Dieu!  on  jurerait  quMl  est  sorti  de  la  même  main  que 
l'autre  et  qu'il  a  été  accommodé  avec  autant  de  science.  » 
Puis  il  goûta  celui  de  Mohammed  ben  Amr  le  Grec  :  «Pour 
celui-ci ,  dit-il ,  c'est  l'œuvre  d'un  cuisinier  de  race,  qui  réus- 
sit tout  ce  qu'il  apprête.  »  Mais  quand  il  eut  goûté  au  plat 
du  kadi  Yahya,  fds  d'Aktam,  il  détourna  la  tête  et  s'écria  : 
«  Pouah  !  celui  qui  a  cuisiné  cela  y  a  mis  une  ordure  au  lieu 
d'oignon.  »  Chacun  de  rire  à  gorge  déployée;  notre  homme 
en  fit  autant;  il  se  mit  à  plaisanter  et  à  divertir  par  ses 
propos  l'assemblée,  qui  le  trouva  fort  amusant.  Aux  pre- 
mières lueurs  de  l'aurore,  Mamoun,  qui  avait  compris  que 
l'étranger  savait  maintenant  à  qui  il  avait  affaire,  lui  recom- 
manda de  ne  pas  divulguer  le  secret  de  l'occupation  dans 


CHAPITRE  CXIV.  35 

*^^-*-j  uK*^^  >lj^  '.^t^*'^  ^j^  (j^  a_jJL*«j  ^j>j-=^  ^^J^J 
^'^^-^-j      j*^^»^^  »Sj^^  Ç^^  iU«Xiw_5  y^Ul  iLoJs^i^  ^ 

^j^^  (jvjù*»(l>jj|  j^i  -î  JI  iLfj^  (j**-»Ji  ^'!^*  v'.^^  -^^  jW 

o»-;5'l(yji  x«ULo  JJ  -yb  foJ^  ^^  <iU^  oiAiwi  <X9  Jo 

U  c;»»Jb  jOiJj  cj«Xo  <îù^  ^^^  (jvAiajuiÀj  !i\j  ^ui  aaJ!  (j>Jaw.AÀ3 

laquelle  il  les  avait  trouvés;  il  lui  fit  donner  quatre  mille 
dirhems,  obligea  chacun  des  cuisiniers  cVy  ajouter  une  quote- 
part  proportionnée  au  rang  de  chacun  et  dit  à  cet  homme  : 
«  Gare  à  toi  si  tu  sors,  une  autre  fois,  à  pareille  heure!  »  A 
quoi  celui-ci  répondit:  «Que  Dieu  ne  nous  empêche  pas, 
vous  de  l'aire  la  cuisine,  moi  de  sortir!  «  On  s'informa  de  son 
métier,  on  prit  son  adresse  et  il  fut  dès  lors  admis  au  service 
du  Khalife  et  de  la  cour,  dont  il  devint  le  commensal. 

Abou  Abbad  le  Secrétaire,  qui  fut  un  des  familiers  de 
Mamoun ,  raconte  ce  qui  suit  :  «  Mamoun  me  disait  un  jour  : 
«Rien  ne  m  a  jamais  embarrassé  comme  la  réponse  do  trois 
personnes.  La  première  est  la  mère  de  Do«  'l-riasetcin  (Fadi 
ben  Sehl),  lorsque  j'allai  lui  exprimer  mes  regrets  de  la 
mort  de  son  fils  et  que  je  lui  dis  :  «  Ne  vous  désolez  |)as  et 
cessez  de  pleurer  la  mort  de  votre  fils;  Dieu  Ta  remplacé 
en  vous  donnant  en  moi  un  enfant  qui  vous  tiendra  lieu  de 
celui  qui  nVsl  plus;  à  la  confiance  que  vous  lui  témoi- 
gniez en  toutes  choses,  veuillez  ne  pas  substituer  de  la  ré- 
serve à  mon  égard.  »  Elle  pleura  et  me  répondit  :  «Prince 

3. 


36  LES  PRAIRIES  D'OR. 

L^^_j  (jIj  cj^-y.:>j  c:>L»t  >i  c^A.jfe'  (_^j~*  «^-3?_5  *î  OvAjii  Miv5 
_jl  AjU5\fi  (j^  «X.»-i^  ^cgu^  i5>"j^5   (jî   *i  o».Aij   *_5-SàJI  ^X*^i 

4X-^5  o»jO  ^.*lfi  Q>x*M-?  5j,x^>l  Aij.wl  J^i  jjl  iCiJliJl^j 

des  Croyants,  comment  ne  regretterais-je  pas  mon  fils, 
quand  je  lui  dois  un  autre  fils  tel  que  vous?  «  —  En  second 
lieu,  ce  fut  quand  on  m'amena  un  homme  qui  se  faisait 

passer  pour   prophète  :   «Qui  es-tu?  lui   demandai-je. 

Moïse,  fils  d'Amran.  —  Prends  garde!  continuai-je;  Moïse 
avait  des  signes  et  des  preuves  manifestes  de  sa  mission  : 
par  exemple,  le  bâton  qu'il  jeta  et  qui  dévora  les  sortilèges 
des  magiciens;  sa  main  qu'il  retira  toute  blanche  de  son 
sein  «  (cf.  Koran,  xxviii,  3i  et  32);  et  je  me  mis  à  lui 
énumérer  les  preuves  qui  furent  accordées  à  Moïse  pour 
confirmer  son  caractère  de  prophète  :  «Eh  bien,  lui  dis-je, 
si  tu  me  montres  un  seul  des  signes,  un  seul  des  miracles 
qu'il  a  accomplis,  je  serai  le  premier  à  croire  en  ta  mission; 
sinon  tu  mourras.  —  Tu  as  raison ,  me  répondit  cet  homme; 
seulement  je  n'ai  produit  les  signes  de  ma  mission  que 
lorsque  Pharaon  eut  dit  :  Je  suis  votre  seignew^  suprême  [Ko- 
ran, Lxxix,  2 4);  si  tu  veux  en  dire  autant,  je  suis  prêt  à 
te  montrer  les  miracles  que  j'ai  accomplis  devant  lui.  »  — - 
La  troisième  circonstance  est  celle-ci  :  Les  habitants  de  Kou- 


CHAPITRE  CXIV.  37 

5*K_iù     »j-A-*»(    Jfc^-Ci     j!     (0-^>Ji     '-'*-fr^^    *^'*-*W    (S*'^J^^    XAd><X» 

^^  Là^Lça:)^  b^jU»i>  IjOkj  iùùUi!  iCxMJt  ^^  Ujijliu.^  Ujbbi 
5%J  0vJL«^î   vx>ob  IJuijCUxli  \ii>Si  /j*  lÂSi-w^  iiilliîî  iiÀ-M*jl 

fah  s'étant  coi\certés  pour  se  plaindre  à  moi  de  leur  gouver- 
neur, homme  dont  la  doctrine  et  la  conduite  avaient  toute 
mon  approbation ,  je  leur  fis  répondre  ceci  :  «  Quoique  je 
sois  édifié  sur  le  compte  de  cet  agent,  j'ai  résolu  néanmoins 
de  vous  donner  audience  demain  dès  le  matin;  choisissez 
donc  un  délégué  qui  soutiendra  le  débat  en  votre  nom,  car 
je  redoute  votre  loquacité.  »  Ils  me  firent  la  réponse  sui- 
vante :  «  Le  seul  homme  qui  nous  paraisse  digne  de  discu- 
ter en  présence  du  Khalife  est  aflligé  de  surdité;  si,  cepen- 
dant, le  Khalife  veut  bien  le  lolérer,  (|u'il  nous  fasse  Thonneur 
de  nous  en  informer.  »  Je  m'engageai  à  accej)ler  patiemment 
leur  délégué,  et,  dès  le  lendemain,  la  députation  arrivait.  Je 
fis  introduire  le  sourd,  et,  quand  il  fut  devant  moi,  j'invi- 
tai les  assistants  à  s'asseoir;  puis  je  lui  demandai  quels 
étaient  ses  griefs  contre  leur  gouverneur.  «  Sire,  répondit-il, 
c'est  le  plus  détestable  agent  qu'il  y  ait  au  monde.  L'année 
011  vous  l'avez  nommé,  nous  avons  dû  vendre  nos  harties  et 
nos  meubles;  l'année  suivante,  nos  épargnes  et  nos  biens- 
fonds;  ef   la  troisième  année,  nous  voici  forcés  de  sortir  do 


38  LES  PRAIRIES  D'OR. 

jt\  ^  L^^^iSS^  A  o^kii  U&  ajtjjoj  j,^3[f  \xA:isS.  J^AJ^  bi_^X.w 
A-À— >:>  «iwuAàjjîj  ^UJÛJv.*^  XJyjçw  c:i«X^5  «-^"^^y  >^  i-^  '-^ 
L  Jb  («^JL^  t^  (♦xlastfî'  iKjiL^  ^iyil  («X.]  (Swj^Xài-i^  ^JCJijvL^ 
j^«X-iî  ,_^-^ljsJi  i«X-f^  0.«3  bî  ooJsSj  cxi*X*»o  (^À^^it  wç<5 
lÀAAâuaÀ.   Ot^5^  .Nil^âii^  >ijs^^    AaX&3   .^XjUi^  <iOs><>   c:Ai<AAixj^( 

(jw»  J.i3-.jj^  4Ï3Î  dLojjJt  *><wJ9  ^1  ûS^aJI  yji  (jv.À*Jl  &<y>jb  \j 
^<xJ{  JwA.^  g^iy.^^  A^Loji  (^  «^^X^cu^  4^^~>-  -^^^1  s<x^ 

^^)^  ^1^       («XXc  AjJvS  «XAi  <4!{  lois»  jjy^  ^  aJ»  cxXj»  UX«â 

chez  nous  et  d'implorer  ie  Prince  des  Croyants  pour  que, 
touché  de  nos  doléances,  il  nous  fasse  la  faveur  d'ordonner 
sa  destitution.  —  Tu  mens,  bâtard!  m'écriai-je;  c'est  un 
homme  dont  j'admire  la  conduite  et  la  doctrine,  dont  j'ho- 
nore la  piété  et  la  sagesse;  je  l'ai  choisi  expressément  pour 
vous,  parce  que  je  connais  vos  fréquentes  révoltes  contre 
ceux  qui  vous  gouvernent.  —  Sire,  nie  répondit  l'orateur, 
vous  dites  vrai  et  c'est  moi  qui  ai  menti;  mais  puisque  vous 
admirez  la  piété,  la  loyauté,  les  sentiments  intègres,  la  jus- 
tice ,  la  modération  de  cet  agent ,  pourquoi  nous  l'avoir  ex- 
clusivement laissé  pendant  plusieurs  années,  au  détriment 
de  tant  de  provinces  dont  Dieu  a  confié  les  intérêts  à  votre 
sollicitude,  comme  il  vous  a  confié  les  nôtres.'*  Placez-le 
donc  à  la  tête  de  ces  contrées  pour  qu'il  leur  accorde  à  leur 
tour  les  trésors  de  modération  et  de  justice  qu'il  nous  a  pro- 
digués. —  Va-t'en,  lui  dis-je,  et  que  Dieu  te  refuse  sa  pro- 
tection! Je  consens  à  éloigner  de  vous  ce  gouverneur.  « 

Au  rapport  de  Yahya,  fils  d'Aktam,  le  Khalife  Mamoun 
présidait  une  conférence»  de  jurisprudence  tous   les  mardis. 


CHAPITRE   CXIV.  39 

W^-^Â^AJ  <x.jj,*A(.ÂÀi  XfXs.  c::^^*^  (j-ij  A-fiyjLiAj  AÀi».  *ji.Xc  (jUjj 
U><X*ji3  l^i»ajt_j   »^li<o  0--wr^i    J^Ujj   <îOLx>  yy*Xj  <^ai- 

j^«sfc.*>oî  t-^Akj  ij-ffiK^  iô'^Ks-  (jiîAj  vW^  aaA*  cjUJL  oCiî. 

Quand  les  légistes  et  les  autres  savants  se  présentaient  pour 
discuter  avec  lui,  on  les  introduisait  dans  une  pièce  ornée 
de  tapis  et  on  les  invitait  à  se  débarrasser  de  leurs  bot- 
tines. Ensuite  on  servait  le  repas;  on  les  priait  d'y  prendre 
part.  Après  avoir  renouvelé  leurs  ablutions,  ils  pouvaient 
ôter  leurs  bottines  si  elles  les  gênaient,  ou  leur  kalansouah 
(bonnet)  s'il  était  trop  lourd.  Le  repas  terminé,  on  appor- 
tait les  cassolettes  d'encens;  ils  en  respiraient  les  arômes  et 
se  parfumaient.  Ils  se  rendaient  ensuite  chez  Mamoun,  «pii 
les  invitait  à  s'approcher  et  entamait  avec  eux  la  discus- 
sion la  plus  belle,  la  plus  modérée,  la  plus  dépourvue 
de  morgue  et  de  pédantismc.  Elle  se  prolongeait  jusqu'au 
coucher  du  soleil;  on  leur  servait  alors  un  second  repas,  et, 
après  s'être  rassasiés,  ils  s'éloignaient.  —  \ahya  continue 
ainsi  son  récit  :  «  Le  Khalife  était,  un  jour,  en  séance,  lors- 
que son  chambellan  Ali,  fds  de  Salili,  si;  présenta  cl  lui 
dit  :  «  Prince;  des  Croyants,  un  homme  habillé  de  vêlements 
blancs  d'un  lissa  grossier,  ([u'il  porte  retroussés,  est  au  seuil 
du  ))alais;  il  demande  à  être  admis  afin  de  prendi-e  pari  à 


40  LES   PRAIRIES  D'OR. 

pp.  P  w  

(jibî  Jlï  -^5X^1  dLXfi.^  y>«^'  J^**  Ajli^j  ^1  ii^j^  ^-tM- 

•"  p  p  p 

p 

A^-^_A_A_i  a_^i»Ji_5  «0^  iUJUJlL   -î   kilo  45-*i»;^  wd^X*  (jv-^^^m 

la  discussion.  »  Je  compris  que  c'était  quelque  souji,  et  je 
voulais  faire  signe  au  Khalife  de  ne  pas  l'admettre  ;  mais  il 
me  prévint  et  donna  Tordre  de  le  faire  entrer.  Parut  un 
homme  dont  la  robe  était  relevée  dans  la  ceinture  et  qui  te- 
nait ses  galoches  dans 'les  mains;  il  s'arrêta  sur  le  bord  du 
tapis  et  dit  :  «  Salut!  que  la  miséricorde  de  Dieu  et  ses  bé- 
nédictions soient  sur  vous  !  «  Mamoun  lui  rendit  son  salut. 
L'étranger  lui  demanda  la  permission  de  s'approcher;  il  la 
lui  accorda  et  l'invita  à  s'asseoir.  Une  fois  assis  :  «  Me  jier- 
mets-tu,  dit-il  au  prince,  de  f adresser  la  parole.*^  —  Parle, 
lui  répondit  Mamoun,  mais  de  manière  à  être  approuvé 
de  Dieu.  »  L'inconnu  continua  ainsi  :  «  Ce  trône  sur  lequel 
tu  es  assis,  le  dois-tu  à  l'accord  unanime,  au  plein  con- 
sentement des  Musulmans,  ou  bien  à  la  violence  que  tu 
as  exercée  sur  eux,  en  abusant  de  ta  force  et  de  ton  pou- 
voir? »  Mamoun  lui  répondit  :  «  Je  ne  le  dois  ni  à  leur  suf- 
frage, ni  à  l'emploi  de  la  violence.  Un  chef  qui  dirigeait  avant 
moi  les  afTaires  des  Musulmans,  et  qu'ils  supportaient  de 


CHAPITRE  ex IV.  kl 

^^  J.;>-3jy*  4>Si  -K!»-!  <,_A_Uajt;c3  cJjUaJI  xi^^  aâxaJî^  ^  r"^' 

gré  ou  de  force,  ma  transmis  à  moi  et  à  un  autre  (Emin) 
rexercice  de  cette  autorité  après  sa  mort;  il  a  fait  jurer  à 
ceux  qui  étaient  présents  de  la  reconnaître;  il  a  exigé  pour 
moi  et  pour  un  autre  avec  moi  le  serment  des  pèlerins  réu- 
nis sur  le  territoire  inviolable  de  la  Mecque,  et  ils  font 
prêté,  volontairement  ou  non.  Celui  qui  avait  été  investi 
du  pouvoir  avec  moi  a  suivi  la  route  où  il  s'était  engagé;  de- 
venu le  seul  maître,  j'ai  senti  la  nécessité  d'être  reconnu  par 
le  suffrage  unanime  et  librement  exprimé  des  Musulmans, 
dans  toute  l'étendue  de  l'empire.  Mais,  après  y  avoir  réflé- 
chi, j'ai  cru  que,  si  je  les  abandonnais  à  eux-mêmes,  l'islam 
serait  mis  en  péril,  la  foi  du  serment  disparaîtrait,  l'EJut 
serait  démembré.  J'ai  compris  que  le  désoidrc  cl  le  mal  do- 
mineraient; qu'au  sein  des  discordes  civiles,  les  lois  de  Dieu 
resteraient  sans  vigueur;  que  l'accès  de  la  Maison  sainte  serait 
int(Tdit  el  la  guerre  contre  les  infidèles  abandonnée,  mes 
sujets  n'étant   plus  réunis  sous  une  autorité  (pii    les  dirige; 


42  LES  PRAIRIES  D'OR. 

!j>>_f&Lz^^     (JV^«<^     iOoUs».     ».^iJi     t«X.^    OV^5    ^Ub     (j^    rty^iàX 

f-<>-^  (ji  (jl   a-^<XjI   (^   5.Xi^îj  <o.^\a*J  Itkjl^j  J'^tXxJ 

^-^Is  -lij  Aj\^_jj5  ^i  i^-^jj  (<^^U-s  f.!5X-M-.^i  JUi^^i/i  I  Jviû 
iw_x_j  4^-=»-   '«'*»-*J    CiT*   ^>^^^.   m5    <-*=»-*..=i   J.V.*»   (jVJ  ^   (J^^i^ 

Jlï  dU  Jiï  U  5_5Jl5  /cxj  Jiï  d-.=rj^\  c^VfJi-î  ^  !_^JUi  <>ijjj3  .xJCAiû 

enfin,  que  le  brigandage  infesterait  les  routes,  et  que  le 
faible  serait  livré  sans  défense  à  Toppresseur.  En  consé- 
quence, j'ai  pris  le  pouvoir  afin  de  protéger  le  peuple,  de 
combattre  ses  ennemis  et  d'assurer  la  sécurité  des  routes , 
et  je  conduirai  les  Musulmans  par  la  main,  jusqu'à  ce  que, 
leur  suffrage  et  leur  volonté  unanime  se  réunissant  sur  un 
chef  de  leur  choix,  je  puisse  résigner  entre  ses  mains  mon 
autorité  pour  devenir  un  simple  sujet.  Sois  donc  mon  repré- 
sentant aupiès  de  la  communauté  musulmane ,  et,  lorsqu'elle 
se  sera  mise  d'accord  sur  ce  choix,  j'abdiquerai  le  pouvoir. 
—  Salut,  répondit  l'inconnu;  que  Dieu  vous  accorde  sa  mi- 
séricortle  et  ses  bénédictions]  »  Et  il  s'éloigna.  Mamoun  char- 
gea Ali  ben  Salih  de  le  faire  suivre  pour  savoir  où  il  irait; 
le  chambellan  accomplit  sa  mission  et  revint  en  rendre 
compte  en  ces  termes  :  «Prince  des  Croyants,  j'ai  dépêché 
quekjues  émissaires  sur  les  traces  de  cet  homme:  il  s'est 
dirigé  vers  une  miosquée  où  quinze  individus  de  même  ap- 
parence et  mis  comme  lui  étaient  réunis.  «  Eh  bien,  tu  l'as 
vu:*  lui  ont-ils  demandé.  —  Oui,  répondit-il.  — Que  l'a-t-il 


CHAPITRE   ex IV.  /i3 

c 

aJoI^^  «/-aXj  (i*i>iiji  .x.«*jl  *>o  Aji^  i3i_^!  (j^  aAc  y£>  Ijf 

dit?  —  Kien  que  de  sages  paroles;  il  m'a  dit  qu'il  retenait 
entre  ses  mains  le  gouvernement  des  Musulmans  pour  assu- 
rer la  sécurité  des  routes;  pour  maintenir  le  pèlerinage  et  la 
guerre  sainte;  pour  protéger  le  faible  contre  l'oppresseur  et 
empêcher  la  violation  des  lois  divines;  mais  que,  lorsque  le 
peuple  réunirait  ses  suffrages  sur  un  chef  unanimement  élu, 
il  remettrait  le  pouvoir  à  ce  dernier  et  abdif|uerait  en  sa  fa- 
veur. —  Nous  ne  voyons  aucun  mal  à  cela.  "  ont  répondu 
ceux  qui  l'écoutaient;  puis  ils  se  sont  séparés.  —  Mamoun ,  se 
tournant  alors  vers  moi,  me  dit  :  «  Ahou  Mohammed,  nous 
avons  donné  satisfaction  à  ces  gens-là  en  employant  le  lan- 
gage le  plus  simple.  »  Je  lui  ré[)ondis  :  "  Sire,  je  rends  grâce 
à  Dieu,  qui  vous  a  inspiié  la  sagesse  et  la  droiture  dans  vos 
paroles  comme  dans  vos  actions.  » 

Yahya,  fils  d'Aktam,  exercanl  les  l'onclions  de  juge  à  Bas- 
ra!i  avant  son  étroite  liaison  avec  Mamoun,  les  liahilanls  se 
répandirent  en  accusations  contre  ce  magistral;  dans  une 
requête  adressée  au  Khalife,  ils  dénoncèrent  ses  goùls  dé- 
pravés et  la  corruplioii   f|ii(>  ses  excès  semaieni   parmi  les 


M  LES  PRAIRIES  D'OR. 

yltUJJ  iU^  i  CJ^^'  >!^^  'î?  J"*^'  y^i  *^  ^"^  ^UUmJ_j 

S^ij    S,_s».î    A.ÀJuiw    (j-«  ii_r»-_j-A-i^   »LvJi^:*.î_j 

jeunes  gens  de  ia  ville.  Mamoun  se  borna  à  répondre  qu'il 
aurait  accueilli  leur  plainte  si  elle  eût  été  dirigée  contre  les 
jugements  rendus  par  Yahya;  mais  ils  répliquèrent  en  ces 
termes  :  «Prince  des  Croyants,  sa  conduite  honteuse,  ses 
crimes  se  produisent  au  grand  jour  et  sont  de  notoriété  pu- 
blique. C'est  lui,  Sire,  qui,  dans  une  poésie  trop  célèbre, 
chante  la  beauté  des  mignons  et  les  range  en  différentes 
classes,  selon  leurs  qualités.  »  Le  prince  voulut  connaître 
cette  poésie;  on  lui  présenta  une  kaçideh  qui  justifiait  en 
partie  l'accusation  portée  contre  le  juge  et  les  bruits  qui 
couraient  sur  son  compte  à  cet  égard.  Voici  les  vers  en 
question  : 

Ils  sont  quatre  dont  le  regard  fascinateur  condamne  à  l'insomnie  les 
yeux  de  leur  amant  : 

L'un  a  les  joies  de  ce  monde  devant  lui,  hypocrite  sans  espérance 
d'une  autre  vie; 

Le  second  a  les  portes  du  monde  ouvertes,  el  derrière  lui  une  large 
part  aux  plaisirs  de  l'autre  ; 

Le  troisième,  possédant  ces  deux  biens,  réunit  le  monde  d'ici-bas  à 
l'autre  monde; 


CHAPITRE  CXIV.  45 

^  O^-^^^    <îœ:>b_j  ijy»\Xi*  (^va?  J^t-aj'lj  x3L^^i£>«xJî   tj^^ 


Le  quatrième  s'est  perdu  au  milieu  d'eux  et  n'est  plus  possesseur  ni 
de  ce  monde  ni  de  l'autre. 

Mamoun  réprouva  de  pareils  vers  et  en  fut  scandalisé  : 
«  Quoiqu'un  de  vous  les  lui  a-l-il  entendu  réciter?  leur  dit-il. 
—  Sire,  répondirent  ses  accusateurs,  il  est  notoire  parmi 
nous  qu'il  en  est  Tauteur.  »  Le  prince  les  congédia  et  révo- 
qua Vahya  de  ses  fonctions.  Cest  de  ce  juge  et  de  sa  con- 
duite à  Basrah  qu'il  est  question  dans  les  vers  suivants  d'Ibn 
Abi  Noaïm  : 

Plût  au  ciel  que  Yaliya  n'eût  pas  reçu  la  vie  de  Aklaiu  cl  ([u'il  M'eùl  ja- 
mais foulé  le  soi  d'Irak  ! 

Ce  juge,  le  plus  dépravé  que  nous  connaissions  eu  Irak,  dans  quelle 
écritoire  u'a-t-il  pas  trempé  son  halcm? 

Dans  quel  trou  n'a-l-il  |)oint  glissé  sou  serpent  venimeux? 

Les  vicissitudes  de  la  destinée  conduisirent  Yahya  chez 
Mamoun  et  en  firent  son  intime,  un  dv.  ceux  auxquels  il 
accordait  le  plus  de  privilèges.  Le  Khalife  lui  demanda  un 


ae  LES  PUAIHIES  D'OU. 

p  '^^  w 

^Ài   (j.«  la^—L-j   4j^  ^^  ^j-i_         ^^  ^b^l   i   *X_i  ^^j^_  (jbliJ 

jour  :  «Père  de  Mohammed,  quel  est  donc  l'auteur  de  ce 
vers  : 

Un  juge  qui  condamne  l'adultère  et  qui  ne  trouve  pas  un  mot  de  blâme 
contre  un  crime  plus  infâme... 

—  «C'est  Ibn  Abi'Noaïm,  répondit  Yahya,  et  voici  ses 
propres  paroles  : 

Notre  émir  est  prévaricateur  et  notre  juge  sodomite.  Oli!  les  piètres 
chefs  que  ceux  qui  nous  conduisent  ! 

Un  juge  qui  condamne  l'adultère  et  qui  ne  trouve  pas  un  mot  de  blâme 
contre  un  crime  plus  infâme! 

Je  n'espère  pas  la  fin  de  nos  maux,  tant  qu'un  fils  d'Abbas  gouvernera 
la  nation. 

Mamoun  baissa  la  tête  avec  confusion,  et,  quand  il  la  re- 
leva, ce  fut  pour  exiler  Ibn  Abi  Noaïm  dans  le  Sind. 

Lorsque  Yahya  escortait  le  Khalife  à  cheval,  il  portait,  si 
c'était  pendant  l'été,  une  ceinture  (d'or  ou  d'argent),  un 
manteau  (kaha) ,  un  sabre  orné  de  sa  dragonne  et  un  turban 
de  mousseline  {chachyèh);  pendant  l'hiver,  des  kaha  de  soie 


CHAPITRE  CXIV.  47 

J^-Ciij   dUi  jj  JIjj   -6^   ^j!S\i  Sy>-j}\   ^jU*»-   J^lxiwl   !>j^ 
jjbjÀll   tj   c^y~^  ^^î    (j-«  ^j^  U  j.J«Xj   ^3^^    (:J^' 

^    »    C    <XXXiC«    vlâÀ^    O^^  (^J\_A_^JC-«     iwiàji     (Jl-xJ^^w 

(jOL-LxJLi  _5-Aj»-    *XisI  Jy-Miî  ii|   ^  ■»,.  j  JwjJtJ   U"**^*   O^iH^ 

(:J>-=*-  r^   '^   'é^^'%.Mt  f»^-AJ        Iw s»-_j  > — ft  ^^  i^i_^_A_> 

écrue,  des  bonnets  en  martre  zibeline,  et  il  se  servait  de 
selles  ouvertes.  Il  était  si  dissolu ,  si  peu  soucieux  de  cacher 
ses  honteux  penchants  que,  chargé  par  Mamoun  de  former 
une  troupe  de  cavaliers  destinés  à  porter  les  ordres  du  Kha- 
life, il  la  composa  de  quatre  cents  adolescents  imberbes 
choisis  parmi  les  plus  beaux ,  et  se  déshonora  en  leur  com- 
pagnie. C'est  à  cette  circonstance  qu'il  est  fait  allusion  dans 
les  vers  suivants  de  Rachid ,  fils  d'Ishak  : 

0  mes  deux  amis!  contemplez  avec  admiration  le  spectacle  le  plus 
rare  qui  se  soit  offert  à  nos  regards  : 

Un  escadron  où  l'on  n'acce[)le  que  de  jolis  minois  et  de  beaux  yeux. 

Les  pages  d'Aktam  au  frais  visage,  aux  joues  i\  peine  veloutées  d'un 
léger  duvet,  y  sont  seuls  admi?. 

Chacun  y  a  l'iionncur  de  se  tenir  devant  ses  deux  maîtres,  en  raison 
de  sa  beauté  et  de  leur  laideur. 

Celui  qui  les  conduit  à  la  mêlée  est  un  juge  dont  la  iancc  rodeînitc 
porte  des  coups  terribles. 

Il  les  dirige  avec  sa  science  et  sa  prudence  dans  une  lulle  de  plaisir,  el 
non  vers  un  désastre. 


48  LES   PHAIRIES  D'OR. 

^^_jOv_x_>J^   (J>rJ!-^  JjLsC"  ^\^   A.^^  U^i    Os^   lii 

^l.«v*j    (jV(?wxaxW  <X.JiÀj^   (io<XiI  4-.vXj   Js.^  y\^j   <^{^  Ij^Ai** 

Lorsque  l'un  de  ces  braves  prend  part  à  l'action  ,  son  front  et  ses  mains 
se  courbent  vers  la  terre, 

Tandis  que ,  penché  sur  lui ,  le  Cheïkh  agite  une  flèche  qui  dépasse  ses 
genoux. 

Ceux  qu'il  a  subjugués,  il  les  laisse  gisant  par  terre  et  tous  atteints 
d'une  blessure  secrète. 

Le  même  poète  a  dit  de  lui  ailleurs  : 

Nous  espérions  que  la  justice  se  manifesterait  à  nos  yeux;  mais  la  dé- 
ception a  succédé  pour  nous  à  l'espérance. 

Le  monde  et  ses  habitants  pourraient-ils  prospérer  lorsque  le  juge  su- 
prême des  Musulmans  se  livre  au  vice  le  plus  infâme? 

Yahya,  fils  d'Aktam  (fds  d'Amr,  fils  d'Abou  Rebah) . 
était  originaire  du  Rlioracân  ;  il  naquit  dans  la  ville  de 
Merw.  Sa  famille  appartenait  à  la  tribu  de  Temim.  En  2i5 
de  l'hégire,  il  s'attira  le  ressentiment  de  Mamoun,  qui  était 
alors  en  Egypte,  et  il  partit  disgracié  pour  Tlrak.  Il  avait  re- 
cueilli la  tradition  et  étudié  la  jurisprudence  auprès  des 
docteurs  de  Basrah,  tels  que  Otman,  siirnomnié  Néby,  et 


CHAPITRE  CXIV.  ^9 

c_jLa^  *i^-o5j  *-*ji^J  i  ^^^^  â>  t^Uj^Aa-*  *i^  V^-?  ^^^^ 

^w_)    ik-^^^_X^    wji    wîXJkJO    »Xa-*jo   wa2.^   »,-yo|    A.>.n:*   ^j)    (0-i**^l 

*^-^  ^^-'^î  ^•^j  u^J^'  (j^"*>''"**'  (j-^  ^^-y^^  {^^ y*^^  (J-?  *^-^ 

d'au  1res;  il  composa  plusieurs  traités  sur  les  principes  et  les 
difTérentes  braDches  du  droit,  et  se  distingua  par  un  ou- 
vrage intitulé  l'Avertissement  [tenbih],  dans  lequel  il  réfute 
les  doctrines  de  l'école  d'Irak;  il  soutint  aussi  de  nom- 
breuses controverses  contre  A  bon  Suleïman  Ahmed,  (ils 
d'Abou  Douad,  fils  d'Ali. 

Sous  le  règne  de  Mamoun  mourut  Chafeyi  Abou  Abd 
Allah  Mohammed  (fds  d'Edris,  fils  d'Abbas,  fils  d'Olman, 
fils  de  Ghafi,  fils  de  Saïb,  fils  d'Obeid  Allah,  fils  d'Abd  Yé- 
zid,  fils  de  Hachem,  fils  de  Mottalib,  (ils  d'Abd  Menaf), 
dans  la  nuit  du  vendredi  (dernier  jour)  de  redjeb,  l'an 
20/i,  au  moment  où  le  jour  commençait  à  poindre;  il  était 
âgé  de  cinquante-quatre  ans.  La  prière  des  funérailles  fut 
récitée  par  Sery,  fils  de  Hakem,  qui  gouvernait  rEgyi)le  à 
cette  époque.  Telle  est  la  tradition  rapportée  par  Ikrimah 
(fds  de  Mohammed,  (ils  de  Bichr),  d'après  Rebî  (fils  de  Su- 
leïman) le  Muezzin;  elle  est  également  citée  par  Moham- 
med (fils  de  Sofian,  fils  de  Sâïd)  le  Muezzin,  et  par  d'autres 
vil.  à 


50  LES   PUAI  RIES   D'OR. 

(jL.fiyX.w»   ly-}   x^^y\    tyS.  l^^^^    {J^^'  *^^^**>'  (>?  (J »-*■*-*»'  Lyi^ 

j^      (j-«    i^^    K.M>i\j    <XaS._j    f^^*    ClJ^-^.?    /ô^ii»    <XAt    ^j     5j.aX« 

j.X=^    ff,Mi]j    «Xa£  t5*^^    JlitJi    t^3   *>*^^j   «XA;C   di.i«x5^   o^aJ 

»X_A-fc  /ji  tj-vUaXî  «xi^  (J-*  *j^  cJvÀ^  »Xa^  j  iOç^i  ^^_5  /Ai/l^ 
jLamI^  (jOl.g5  <_.vUall  _5iAJ3  (j-^  /o.xX4£>  ^ÀJi  Jb  «Xi^  ôU.» 

traditionnistes  d'après  le  même  Rebî,  fils  de  Suleïman.  Cha- 
feyi  fut  inhumé  en  Egypte  sur  le  territoire  des  Tombeaux 
des  Martyrs,  dans  le  cimetière  et  au  milieu  des  tombes  des 
Benou  Abd  el-Hakem.  Une  grande  colonne  en  pierre  est  pla- 
cée du  côté  de  la  tète  et  une  autre  colonne  du  côté  des 
pieds;  sur  la  plus  grande,  celle  qui  est  au-dessus  de  la  tête, 
a  été  pratiqué  un  cartouche  dans  lequel  se  lit  cette  inscrip- 
tion, gravée  sur  la  pierre  :  «  Ici  est  le  tombeau  de  Moham- 
med ben  Edris  Chafeyi,  le  confident  de  Dieu.  »  Le  fait  que 
nous  signalons  est  parfaitement  connu  en  Egypte.  Chafeyi 
se  rattachait,  à  la  fois,  à  la  famille  de  Hachem  et  à  celle 
d'Omeyyah  par  Abd  Menaf,  puisqu'il  descendait  de  Motta- 
lib ,  lequel  était  fils  d'Abd  Menaf.  Le  Prophète  disait  :  «  Nous 
et  les  enfants  de  Mottalib  nous  sommes  comme  ceci  ;  »  et  il 
montrait  ses  deux  doigts  réunis.  On  sait,  en  outre,  que  les 
Koreïchites  assiégèrent  les  Benou  Mottalib  en  même  temps 
que  les  Benou  Hacliem,  dans  le  vallon. 

La  tradition  suivante  ma  été  transmise  par  Fakir,  fils  de 
Meskin,  d'après  Mouzeni ,  dont  il  recueillit  l'enseignement; 


CHAPITRE  CXIV.  51 

^1  «X  A-g  Ll  L  ci*.s?w«o!  ^..juS^  2)^  c>AjL»  ajIj^  «Ijvi  ^5jUi.Jî 

m  ^  ^ 

Lt*^  ojyixl  <^w^  ^-s?^'  c:aAx=»-  ,^^yiûl<X>e  (_:AiUi<^  (S^  ^*^  ^5 
(jvXjUj  *jjI  iocM  ^§j  ^^UiJî  LoAJ  »^U  (^S  i^ÀA^Ji   S<X££>  jj^ 

il  me  Ta  transmise  à  Oswàn  (Syène),  ville  de  la  Haute- 
Egypte  :  «  Mouzeni  m'a  raconté  qu'il  visita  Chafeyi  le  matin 
même  de  sa  mort  et  lui  dit  :  «Père  d'Abd  Allah,  comment 
te  trouves-tu?  »  Chafeyi  lui  répondit  :  «  Comme  un  homme 
f|ui  va  quitter  ce  monde,  prendre  congé  de  ses  frères  et  boire 
le  breuvage  de  la  mort.  Je  ne  sais  si,  mon  àme  étant  destinée 
au  paradis,  je  dois  la  féliciter,  ou  si,  étant  condamnée  au 
feu  éternel,  je  dois  la  plaindre;  »  et  il  ajouta  ces  vers  : 

De|iiiis  que  mon  cœur  s'est  endurci  et  que  ma  roule  (ma  croyance)  est 
devenue  étroite ,  je  fais  de  l'espérance  l'échelon  qui  luc  conduira  vers  ton 
pardon. 

Mes  péchés  me  [)araissent  grands;  mais  lorsque  je  les  compare  à  ta  mi- 
séricorde, ô  mon  Dieu  ,  celle-ci  est  plus  grande  encore! 

L'année  de  la  mort  de  Chafeyi  (2o4  de  l'hégire)  vit  mou- 
rir aussi  Abou  Daoud  Suleïman  (fils  fie  Daoud)  Taïaliçi,  à 
l'âge  (le  soixante  et  onze  ans,  et  Hicham  ((ils  de  Moham- 
med ,  fils  de  Saïb)  Kelbi. 


52  LES   PBAIRIES   D'OR. 

Jlïj  ^j^U5   kil-^^  U&5^^  5*ïy^  "^  c:>«Xjç3  lil   iC^U^  ^Uaj^I 


i:iA.,K*M 


El-Amri  raconte  qu'un  homme  qui  se  faisait  passer  pour 
prophète  à  Basrah,  sous  le  règne  de  Mamoun,  fut  enchaîné 
et  traduit  devant  ce  prince.  Quand  il  fut  en  sa  présence, 
Mamoun  lui  dit  :  «  Tu  es  donc  prophète  et  chargé  d'une 
mission?  —  Pour  le  moment,  chargé  de  chaînes,  lui  répon- 
dit cet  homme.  —  Malheureux,  reprit  le  Khalife,  qui  t'a 
séduit?  —  Est-ce  ainsi  qu'on  parle  aux  prophètes?  répliqua 
l'autre;  en  vérité,  si  je  n'étais  garrotté,  j'ordonnerais  à  Ga- 
briel de  vous  anéantir.  —  Mais  la  prière  d'un  captif  n'est 
pas  exaucée.  —  Les  prophètes  surtout,  lorsqu'ils  sont  dans 
les  fers,  leur  vœux  ne  montent  plus  jusqu'au  ciel.  »  Mamoun 
se  mit  à  rire  et  ajouta  :  «Qui  t'a  enchaîné?  —  Celui  qui 
est  devant  toi.  »  Le  Khalife  reprit  :  «  Nous  te  ferons  délier; 
mais  tu  ordonneras  à  Gabriel  d'exécuter  ta  menace;  s'il  t'o- 
béit,  nous  croirons  en  toi  et  à  la  vérité  de  ta  mission.  »  Le 
prisonnier  s'écria  :  «  Dieu  a  eu  raison  de  dire  :  Et  qu'ils  se 
refusent  à  croire,  jusqu'à  ce  qu'ils  voient  le  châtiment  dou- 
loureux! [Koran,  x,  88.)  Et  maintenant,  si  tu  le  veux,  fais 
ce  que  tu  dis.  »  Le  prince  lui  fit  enlever  ses  liens.  Heureux 


CHAPITRE   CXIV.  53 

5tX_iû  (j>^  <Oii  <_^  (Sy-=^^  «XsfcL  <->jt«vii  ^  o^^'  ^^  i^'^''^ 

<.:a-AJj  I«X_£&  (jw«  ^^  (vjtT-^î   cjl^  Jb  tyUi<X*î>3   lilo  li^î   '^^•^■* 

de  se  sentir  libre,  cet  homme  s'écria  :  «  O  Gabriel  I  »  et  en 
haussant  la  voix  (comme  s'il  s'adressait  au  ciel)  :  «  Envoyez 
qui  vous  voudrez,  et  qu'il  n'y  ait  plus  rien  de  commun  entre 
vous  et  moi;  un  autre  possède  les  biens  de  ce  monde,  et 
moi  je  n'ai  rien!  Il  faut  être  un  sot  (littér.  un  proxénète) 
pour  se  charger  de  vos  affaires.  "  On  lui  rendit  la  liberté,  et 
il  reçut  en  outre  des  secours. 

«  J'étais  à  une  réception  chez  Mamoun ,  raconte  Tomamah , 
lils  d'Achras,  lorsqu'on  lui  amena  un  homme  qui  se  donnait 
pour  Abraham,  l'ami  de  Dieu.  —  «  Je  n'ai  jamais  entendu, 
s'écria  Mamoun,  une  pareille  insolence  à  l'adresse  de  Dieu. 
—  Sire,  lui  dis-je,  me  permeltcz-vous  de  parler  à  cet 
homme.''  —  .le  le  l'abandonne.  —  Tu  sais,  tlis-je  au  pré- 
tendu prophète,  qu'Abraham  (sur  qui  soit  le  salut!)  attesta 
sa  mission  par  des  miracles.  —  Lesquels."^  —  On  alluma 
un  grand  feu  dans  lequel  on  le  jeta  et  il  y  trouva  la  fraî- 
cheur et  le  bien-être  [Koran,  \\i.  G;)).  Nous  allons  al- 
lumer un  bûcher  et  t'y  p^écipite^;  si  le  feu  te  traite  comme 
il  a  trailé  Abraham,   nous  croirons  en  loi  et  à  les  paroles. 


54  LES  PRAIRIES   D'OR. 

&JaX»  (3^^t  css=*-i  o\»^i  xijLiûljo  U»j  Jlij  ^^vt\A£  (jjv^l)-*3  cxAi 
tj-«  <jji— *^  <^7-^^i  iC^lkiL  c:*-\e»  Jlï^  (^m^a£  (^■'ûUj  ij  j»3^Î 
aX  Î  JsjÛ  ^jw«  ^^  u  JiJ5  (^iûLj   (^^  ^Xj  ^\3   c:^Xâ  îtkiû  (j\J&L.j 

t3^^Ja.cl?     (^JvIsLa-w    til     (jj-^-^JJ    /8«i^!    ^|.;yj-S^    C>Aj»    <X5j    *,^y 

—  Demandez-moi  des  preuves  plus  faciles.  —  Eh  bien, 
repris-je,  les  preuves  fournies  par  Moïse.  —  Quelles  sont- 
elles.3  —  Il  jeta  son  bâton,  qui,  se  changeant  en  serpent, 
courut  et  dévora  les  stratagèmes  (des  magiciens,  Koran,  xx> 
2  1  et  72);  il  frappa  la  .mer  avec  ce  bâton  et  les  flots  s'écar- 
tèrent [ibid.  XXVI,  63);  enfin  sa  main  devint  toute  blanche 
sans  qu'il  en  souffrît  [ihid.  vers.  32).  —  C'est  encore  trop 
difficile,  citez-moi  quelque  chose  de  plus  commode.; — Les 
miracles  de  Jésus  .^  —  Quels  sont  ces  miracles  .3  —  Il  res- 
suscita les  morts  {ibid.  m,  43  etpassim).  »  Notre  homme  ne 
me  laissa  pas  continuer  la  série  de  ces  miracles  et  s'écria  : 
Laissez-moi  donc  tranquille  avec  les  preuves  de  Jésus,  puis- 
que j'apporte  la  grande  catastrophe  [ibid.  lxxix,  34)-  — 
Non,  répliquai-je,  il  nous  faut  absolument  des  preuves. — 
Je  n'ai  rien  de  tout  cela,  dit-il;  j'avais  pourtant  dit  à  Ga- 
briel :  Puisque  vous  m'envoyez  chez  des  démons,  donnez- 
moi  du  moins  quelque  signe  que  je  puisse  emporter,  sinon 
je  ne  bouge  pas.  Mais  l'ange  s'est  fâché  et  m'a  répondu: 
Tu  emportes  une  catastrophe  plus  terrible  que  l'heure  (du 


CHAPITRE  CXIV.  55 

iut~«^  »w*t  «xxniî^  ^^LJcllJ  ^Ua^cmJî  j^aoà^  ^  jo->*iiJ'  y|,;-»^J' 
/jjJ  »^^-^  iowtXib  (-*Jj^  UIsUJo  Qjl  _j-iûj  (-^iUo  j,!  0.^  ^^  (jjji 

t^  c>  (ijr>  <^-^  (^^**=?-  (:r?   ^^r*  C:?^  'N;^  c^  1:^"  C:r^ 

jugement);  pars  toujours,  et  vois  ce  que  ces  geos-îà  le 
répondront.  »  Mamoun  se  mit  à  rire  et  dit  :  «  Voilà  uq 
de  ces  prophètes  comme  il  en  faut  aux  heures  d'amuse- 
ment. » 

En  Tannée  198,  Mamoun  dépouilla  son  frère  Kaçem, 
fils  de  Récliid,  de  ses  droits  d'héritier  présomptif.  — 
En  199,  Abou  'i-Seraya  Sery  (fds  de  Mansour),  le  Gbeïba- 
nite,  se  révolta  en  Irak,  y  forma  un  parti  puissant  et  se 
réunit  à  Mohammed  (fds  d'Ibrahim,  fils  d'ismàïl,  fils  d'I- 
brahim, fils  d'ElFIaçan,  fils  d'El-Haçan,  fils  d'Ali ,  fils  d'A- 
bou  Talib)  surnommé /6/t  Tabalaha.  A  Médine  éclata  la  ré- 
volte de  Mohammed  (fils  de  Suleïman,  fils  de  Daoud,  iils 
d'El-Haçan,  fils  d'El-IIaçan  ,  fils  d'Ali).  A  Basrah,  Ali  (fils  de 
Mohammed,  fils  de  Djàfar,  Ids  de  Mohammed,  iîlsd'Ali,  fils 
d'El-Haçan,  fils  d'Ali)  et  Zeid  ((ils  de  Mouça,  Iils  de  Djàfar, 
fils  de  Mohammed,  fils  d'Ali ,  (ils  d'El-Huçein,  fils  d'Ali), 
s'insurgèrent  et  se  rendirent  niaîlies  de  cotte  ville.  Après  la 
mort  d'ibn  Tabalaba,  (|iii  i;ut  lieu  en  celle  même  aiinét;, 
Abou 'l-Seraya,  qui  s'était  fait  le  promoteur  de  sa  cause,  pro- 


56  LES  PRAIRIES  D'OR. 

<A»  (J-^  (J^-'^'^  {:}■■>  è^  ^  *N)  (-r^  '^■^  i:y^  '^^  i:y^  **^ 

<^  y^  (:J--^   (:r?  t^  (J^   '^'^    (J^J-**^   (:y^  ^^J^  tï^  f^J^^ 

jU^\  i^VxS'  i^  c:>bL,*xJl  J_^î  i  cy^Uil  î   dUi  L^5i  *XS3 

clama  à  sa  place  Mohammed  (lils  c!«.^  Mohammed,  fils  de 
Yahia,  fils  de  Zeïd,  fils  d'Ali,  fils  d'El-Hureïn,  fils  d'Ali). 
Enfin  dans  la  même  année  199,  le  Yémen  fut  soulevé  par 
Ibrahim  (fils  de  Mouça,  fils  de  Djàfar,  fils  de  Mohammed, 
fils  d'Ali,  fils  d'El-Haçàn,  fils  d'Ali).  En  200  de  l'hégire, 
sous  le  règne  de  Mamoun,  la  Mecque  et  le  territoire  du 
Hédjaz  s'insurgèrent  sous  les  ordres  de  Mohammed  (fils  de 
Djâfar,  fils  de  Mohammed,  fils  d'Ali,  fils  d'El-Huçeïn,  fils 
d'Ali) ,  qui  se  proclama  imajn.  Les  Sebtieh,  qui  sont  une  ra- 
mification des  Chiites ,  embrassèrent  sa  cause  et  reconnurent 
son  titre  d'imam  ;  mais  ils  se  séparèrent  en  plusieurs  partis , 
les  uns  tenant  à  leurs  croyances  avec  un  zèle  exagéré,  les 
autres ,  plus  modérés ,  suivant  la  doctrine  des  Imamites.  C'est 
ce  que  nous  avons  expliqué  dans  nos  Discours  sur  les  prin- 
cipes des  religions,  et  dans  nos  Annales  historiques,  ouvrage 
qui  traite  des  peuples  anciens,  des  races  éteintes  et  des 
royaumes  qui  ont  disparu  ;  voir  la  trentième  section  de  ce 
livre  consacré  à  l'hisfoin»  des  Abbassides  (4  des  manifestations 


CHAPITRE  CXIV.  57 

^^.«wJ}  A*»*ij  (Ji  Ici)  UloUJo  ^1  cjU  l^  yW^Î  ^5  k^.v=«-L(fi? 

A_À— «Is    t)J-^.    *X-A_«^     y_j-^l!tîj    yUwî^jST     ^J^Ui     <ji     U,X5    J.^ 

(j^  (jl^  U_5  Aj'liy   ÀaÀa5  ^^   UajI  Jsj|^    dUUift  (jyJ«X»   L-j   ».À*> 

des  Alides  sous  leur  règne.  On  prétend  que  ce  même  Mo- 
hammed, fils  de  Djàfar,  commença,  au  début  de  sa  mani- 
l'estation ,  par  embrasser  la  cause  de  Mohammed  (  lils  d'I- 
brahim j  Ibn  Tabataba,  que  soutenait  Abou  '1-Seraya;  après 
la  mort  d'Ibn  Tabataba,  Mohammed  se  porta  prétendant  et 
et  prit  le  titre  de  Prince  des  Croyants.  Aucun  des  descen- 
danls  du  Prophète  (jui  se  levèrent  pour  la  revendication 
du  droit,  avant  ou  apiès  lui,  ne  ])orla  ce  tilre,  excepté  le  sus- 
dit Mohammed,  lils  de  Djàfar;  sa  beauté,  le  charme  de  sa 
personne  et  ses  (pialités  accomplies  lui  valurent  le  surnom 
de  dihadjeh  (brocart).  Les  événements  ([ui  se  passèrent  alors 
à  la  Mecque  et  dans  le  pays  environnant  le  conduisirent 
chez  Mamoun,  qui  se  trouvait  à  Mervv,  dans  le  Khora- 
çan;  ce  prince  lui  accorda  l'amnistie  et  l'emmena  avec  lui. 
Quand  ils  arrivèrent  à  Djordjàn,  Mohammed  mourut  et  fut 
enterré  dans  celte  ville.  Nous  avons  donné  les  détails  de  sa 
mort,  son  histoire  v.l  celle  de  plusieurs  autres  Alides  avec 
le  récit  de  leur  mort  en  difterentes  contrées,  dans   notre 


58  LES   PRAIRIES   D'OR. 

(J-^  ci^  lj~^  (^  (j-i  (j-^**-"^  (jJ   (j-.***  "-»  i4AJ«Xilj  l*iiji   ^j^^Uii 

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livre  intitulé  Jardins  des  intelligences  ou  Histoire  de  la  fa- 
mille d'Ahou  Talib. 

Une  autre  manifestation  eutlieuà  Mécline,sousle  règne  de 
Mamoun,  celle  d'El-Huçeïn  (fils  d'El-Haçan,  fils  d'Ali,  fils 
d'Ali,  fils  d'El-Huçeïn ,  fils  d'Ali) ,  connu  sous  le  nom  d'Ibn  el- 
Aftas.  On  croit  qu'il  travailla  d'abord  à  la  cause  d'Ibn  Taba- 
taba ,  mais ,  après  la  mort  de  ce  dernier,  il  fit  valoir  ses  propres 
droits  et  son  titre  cVimam.  Il  surprit  la  Mecque  et  se  présenta 
devant  les  pèlerins  qui  étaient  à  Mina  sous  !a  conduite  de 
Daoud  (fils  d'Yça,  fils  de  Mouça)  le  Hachémite;  Daoud 
ayant  pris  la  fuite,  les  pèlerins  se  dirigèrent  vers  Arafah  et 
s'arrêtèrent  à  Mouzdelifah,  n'ayant  plus  de  chef  issu  de  la 
maison  d'Abbas.  Ibn  el-Aftas  arriva  au  Mawkaf  (station 
d'Arafah)  pendant  la  nuit,  et  ensuite  à  Mouzdelifah.  Comme 
les  pèlerins  n'avaient  plus  d'imam,  il  célébra  la  prière  avec 
eux,  se  rendit  ensuite  à  Mina,  y  accomplit  la  cérémonie 
du  sacrifice,  puis  il  entra  à  la  Mecque  et  dépouilla  la  Kaabah 
de  toutes  ses  tentures ,  à  l'exception  des  voiles  blancs  de  fa- 
brication égyptienne. 


CHAPITRE  CXIV.  59 

4^    <ÎUX,»0^    aKjUJ    J.-^,^     (jJ    q*»-^    AJ     ^jli    ^^^1^1    L>|wA>Jl     3U 

AXs^-IajùwI^  -*-lÀjiii  ^1^  (j-«  <îO«^  ^1^  ^^^   ^Xilài.   j,i    /vj   <x^ 

^j-j  j-i_fc.r=-  Q.J  t^_5-«  (jj  (i^  Jl  pi)U^^j-»«(L>^  cl)Lïs.]|  j,!  ^JJ\ 
l^ii  (jvj'UjJj,  iLi-5U-  |i*:>J^  yl<*  A^'i  A^x-»»j  C»-^**^^ 

XjLj*X-C  ^^   Uàpi   f^*}.'*   (jjJ   (^   (^J-**^  >^^    (J^^'    ti^   <-^^^ 

En  Tannée  200  de  l'hégire,  Hamniad  surnommé  Kund- 
gouch  (l'oreille  dure)  s'empara  d'Abou  '1-Seraya  le  Haché- 
mite  et  l'envoya  à  Haçan,  fils  de  Sehl,  qui  le  mit  à  mort 
et  le  fit  pendre  au  gibet,  sur  le  pont  de  Bagdad;  nous 
avons  raconté  dans  les  Annales  hisloriques  les  faits  con- 
cernant Abou  '1-Seraya,  sa  révolte,  ses  guerres,  comment  il 
tua  Abdous  (fils  de  Mohammed,  fils  d'Abou  Khaled)  avec 
plusieurs  généraux  d'origine  persane,  et  comment  il  anéan- 
tit leur  armée. 

En  la  même  année,  Mamoun  députa  Ridja,  fils  d'Abou 
Dahhak  et  l'eunur[ue  Yarir  auprès  d'Ali  (fils  de  Mouça,  fils 
de  Djâfar,  fils  de  Mohammed,  fils  d'Ali,  fils  d'ElIIureïn, 
fils  d'Ali),  surnommé  Rida,  pour  le  conduire  aiipiès  de  lui; 
ils  escortèrent  lîida  en  lui  témoignant  le  plus  giand  resj)ect. 

Mamoun  ordonna,  à  la  même  époque,  de  faire  le  recen- 
sement des  descendants  d'Abbas,  hommes  et  femmes,  en- 
fants et  vieillards;  leur  nombre  s'éleva  ii  trente-trois  mille 
âmes.  Rida  (Abou  'l-Hacan  Ali,  fils  de  Mou(ja)  rejoignil  Ma 


60  LES   PRAIRIES  D'OR. 

^^.j».!  ^^  J^Aiiil  )J^j».î  AaÏj  tj  *X^  ki  t^Us  j,'  (jJ  t^  «>J'_j 
c^^—^^  «X«<_AJi  iu^^  >i  ^^  UsjJÎ  i^y-^  (jJ  i^  (j>^  w*i)u 
.^iJLLjl  (j-«  ^^  (jj  t*»-^^  *Àiî  ^*)j^  J^ijJOl^  j»^jb*>Jî  (Je  Xî>*<i 

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moun  dans  la  vilie  de  Merw,  où  ce  prince  lui  fit  le  meilleur 
accueil;  ayant  réuni  les  chefs  principaux,  il  leur  déclara 
qu'après  avoir  passé  eu  revue  les  descendants  d'Abbas,  fds 
d'Abd  Mottalib  et  ceux  d'Ali,  fils  d'Abou  Talib,  il  n'avait 
pas  trouvé  parmi  ses  contemporains  un  homme  plus  dis- 
tingué et  plus  digne  du  pouvoir  que  Ali  (fils  de  Mouça) 
Rida;  en  conséquence  il  le  fit  reconnaître  comme  son  hé- 
ritier et  fil  graver  son  nom  sur  la  monnaie  d'or  et  d'argent. 
Il  donna  sa  propre  fille  Oumm  el-Fadl  à  Mohammed ,  fils 
de  Rida;  il  interdit  le  noir  sur  les  vêtements  et  les  drapeaux 
et  le  remplaça  par  la  couleur  verte,  là  et  partout  ailleurs. 
Quand  ces  nouvelles  parvinrent  en  Irak,  les  descendants 
d'Abbas  en  furent  vivement  émus,  parce  qu'ils  se  virent 
ainsi  exclus  du  pouvoir.  Le  pèlerinage  fat  conduit,  cette 
année  là,  d'ordre  de  Mamoun,  par  Ibrahim  (fils  de  Mouça, 
fils  de  Djâfar) ,  frère  de  Rida.  Tout  ce  qu'il  y  avait  d'Abbas- 
sides    à   iiagdad,  d'accord    avec    leurs  anVancliis  et    leurs 


CHAPITRE  CXIV.  61 

C  £ 

(Jl     ^j_j_-«Llt  jLawj    <î0dX3    Jjiij     kil-Ji    (j_y^Ul     Al, [A  .y  A„4t,l3    ljjî^*ll 
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jjLj  1^  aJ^I  -jO  <_««-wtî  jj*.^yaj  UàJi  ^gtvj-^  m-:*  «^  0^"^*^  (J^J*'^ 
j^  (jj\ — X_ju»_j  cly^X-S  X-L,**»  jj  liLJij  L»fc-fu*-«  /^D  iJGI  ijsxij  iJOLo 
iLÀ.^  (j.  xw.  y-^y  ci>^.j  ^1  _j-d_5  ^jj-<li5  aaXc  (J-*»^  L.À-*  wi*» 

créatures,  prononcèrent  la  déchéance  de  Mamoun  et  prê- 
tèrent serment  à  Ibrahim,  fils  de  Mehdi  surnommé  Ibii 
Chiklah,  qu'ils  élurent  Khalife  le  jeudi  5  de  moharrem  202 
ou,  selon  d'autres,  2o3  de  Thégire. 

En  202 ,  Don  '1-Riaseteïn  Fadl,  fils  de  Sehl ,  fut  surpris  et 
assassiné  dans  son  bain ,  à  Serakhs ,  ville  du  Khoraçân ,  (;t  dans 
rhôtel  même  de  Mamoun,  pendant  que  ce  prince  se  ren- 
dait en  Irak.  Mamoun  parut  très  affecté  de  cet  événement; 
il  fil  périr  les  meurtriers,  puis  il  continua  sa  route.  Ali 
Rida,  fils  de  Mouca,  mourut  à  Tous,  d'une  indigestion  do 
raisin  ;  on  prétend  que  ce  fruit  était  empoisonné  (Safcr  20v3)  ; 
Mamoun  récita  la  prière  des  funérailles.  Uida  mourut  âgé  de 
cinquante-trois  ans,  ou,  d'après  une  autre  version,  de  qua- 
rante-neuf ans  et  si\  mois;  il  était  né  à  Médine  en  v53  de 
l'hégire.  Mamoun  lui  avait  donné  en  mariage  sa  fille  Oumni- 
Mabib.  de  sorte  (jue,  des  deux  sœurs,  l'une  avait  épousé  Mo- 


02  I^ES  PRAIRIES  D'OR. 

(^5U^  ^j5  iiiAw  iî»X*j  y^Ui  J_>ii-i  y^j  :>iJ^  Jji5  <>i*Ai£. 
j,J>^3  (^jv^  ^^i_j  àl^**Ji  tii  :>^s  ^^jr*-.^  fi^  HjMi^  AawIJj 

^^^  y\<  V^x*_j  U^j  yUl^i^  *L^lj  Oi;.^'  ^^  ^^^^^ 
4,_^  i^  ^'^'  u'*^^^  v^^5  -i  (j^^^  ^^  *^J^^  >^^ 

hammed.  fils  de  Rida,  et  l'autre  le  père  de  ce  jeune  homme, 
c'est-à-dire  Ali  Rida. 

La  domination  d'Ibrahim,  fils  de  Mehdi,  fut  pour  Ragdad 
une  ère  de  révolutions.  Des  gens  perdus  de  vices,  prenant 
le  nom  de  volontaires,  -se  révoltèrent  à  la  tête  de  la  lie  du 
peuple  et  de  la  valetaille.  Lorsque  Mamoun  arriva  dans  le 
voisinage  de  la  capitale,  Ibrahim,  fils  de  Mehdi,  présida 
encore  à  la  prière  le  jour  des  Sacrifices,  et  disparut  le  len- 
demain de  cette  fête  (2o3  de  l'hégire)  ;  le  peuple  proclama 
alors  sa  déchéance.  En  2o4,  Mamoun  fit  son  entrée  à  Bag- 
dad, étant  encore  vêtu  de  vert;  mais  il  quitta  cette  couleur 
et  revint  au  noir  lorsque  Taher,  fils  d'El-Huçeïn,  venant  de 
Rakkah,  le  rejoignit  à  Ragdad.  — Même  année,  famine  en 
Orient;  peste  dans  le  Khoraçân  et  d'autres  pays.  Babek 
le  Khorrémite  se  révolte  dans  la  contrée  de  Reddeïn  avec 
les  disciples  de  Djavidân,  fils  de  Chehrek;  nous  avons 
mentionné  déjà  cette  contrée  de  Reddeïn,  patrie  de  Rabek, 
qui  fiiit  partie  de  l' Azerbaïdjan,  de  l'Errân  et  du  Reïlakàn, 


CHAPITRE  CXIV.  63 

t^-A->  bjji>  <XÀ£  c-jIajî!  t*x^  (j^  o»^^  l^  yUXo^  ulP'j 

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<\x^j  âiw^i  jo  ij  ^^j\J«;jU»^  ^•A'^  iiÀ>t»)  J^^l  ^■^j  (j>-«  c:^.AÀi"  «xXaJ 
:>J«XÀ*j  J.j^Jl>  o^^)*l!  cjjjJI  à,  ^iyjuA  (j-«^L=-  a <Xi^î  ybîj-«i 

clans  un  des  chapitres  précédents ,  celui  où  nous  décrivons 
le  Caucase,  le  Bab  el-Abwab,  et  le  fleuve  Araxe,  qui  passe 
sous  Beddeïn  (voir  t.  II,  p.  76 ). 

Mamoun  mit  ses  émissaires  à  la  recherche  d'Ibrahim,  fds 
de  Mehdi ,  dans  la  ville  de  Bagdad ,  où  il  le  savait  caché ,  et 
s'empara  de  sa  personne,  dans  la  nuit  du  dimanche  1  3  rebî  I 
de  l'an  207.  Caché  sous  des  vêtements  de  femme  et  escorté 
de  deux  suivantes,  Ibrahim  fut  arrêté  par  un  nègre  de  la 
police  dans  la  rue  nommée  Derb  laouil  (Rue  longue).  Con- 
duit devant  le  Khalife,  qui  rapostroj)ha  avec  ironie,  il  lui 
adressa  ces  paroles  :  «Prince  des  Croyants,  la  peine  du  ta- 
lion donne  le  droit  d'exercer  les  représailles,  mais  le  pardon 
est  plus  voisin  de  la  piété  [Koran,  11,  2  38).  L'homme, 
jouet  de  la  fortune  et  plein  d'une  confiance  aveugle  dans 
les  moyens  de  révolte  qui  s'oflrent  à  lui,  se  livre  tout  entier 
aux  vicissitudes  de  la  destinée.  Dieu  vous  a  mis  au-dessus 
de  tout  ce  qui  est  généreux,  comme  il  a  placé  tout  ciiminel 
au-dessous  de  moi;  si  vous  me  punissez,   vous  serez  juste; 


m  LES  PRAIRIES  D'OR. 

jjjkVJoÎ  (^y>^  ijù^jio  (^  *AA^  c;aJ\s  ^Ji  iwîÀxLI  cyvAAai  -1*^1X1 

si  vous  me  pardonnez,  vous  serez  grand.  —  Oui,  cest  le 
pardon  que  je  choisis!  «  s'écria  Mamoun ,  puis  il  prononça  le 
iekbir  et  se  prosterna  pour  prier. 

Il  voulut  néanmoins  qu'on  laissât  sur  la  poitrine  d'Ibra- 
bim  le  grand  fichu  de  femme  dont  il  s'était  couvert,  pour 
que  chacun  pût  voir  dans  quel  accoutrement  il  avait  été 
arrêté;  il  ordonna  aussi  qu'on  exposât  publiquement  le  pri- 
sonnier dans  la  salle  des  gardes;  puis  il  le  confia  à  la  surveil- 
lance d'Ahmed,  fils  d'Abou  Khaled;  enfin,  après  quelques 
jours  de  détention ,  il  lui  rendit  ses  bonnes  grâces. 

Ibrahim  l'en  remercia  dans  une  poésie  dont  voici  un 
fragment  : 

Celui  (  Dieu)  qui  fait  le  partage  des  vertus  les  a  recueillies  des  flancs 
d'Adam  pour  en  orner  le  septième  imam  (Mamoun,  septième  Khalife). 

Celui  qui  réunira  les  hommes  a  réuni  lous  les  cœurs  autour  de  toi  ;  pos- 
séder ton  amitié,  c'est  rassembler  tous  les  biens. 

Tu  prodigues  des  vertus  que  le  cœur  le  plus  généreux  pourrait  à  peine 
conlenir  ; 

Et  tu  absous  un  coupable  que  nul  autre  n'aurait  absous  ,  et  pour  lecjuel 
aucune  voix  n'intercédait. 


CHAPITRE  CXFV.  65 

-^^^  uIj>^  <s^^*^  <^'  tX^'*»'  (i^  (j"**^  «■^■^^  xs?*>.Mis?  dLLolj 

*Lffwlj   ?W-^  -^^LçvuL   c.\ij   l^AJ  J.*^^  ^ij^^   ay»-_^I_j   cjllîiij 

■»SLa-3Ij*Xj»  ^^  *>^^?î^  iotS^Î  i  U  ^lyui  U-jsJo  J.r>-jJl  Jv 
J^Ji-A-i  ^»>J  c-v»aj  j^JJl  Jw^5jJ!  J!  (5'>^-fV»   ^'^  «ijjcw^ 

Au  mois  de  chàJsan  209,  Mamoun  descendit  à  Fem  es- 
silh  (canal  au-dessus  de  Warit),  pour  (épouser  Khadidjah 
(fille  d'El-Haçan  ben  Sehl)  surnommée  Bouran.  A  cette  oc- 
casion, Haran  se  signala  par  des  largesses  telles  qu'aucun 
roi  n'en  avait  jamais  fait  avant  ou  depuis  la  prédication 
de  l'islam.  En  effet,  il  distribua  aux  membres  de  la  famille 
hachémite,  aux  généraux,  secrétaires  et  autres  personnages 
marquants,  des  avelines  de  musc  renfermant  nn  billet  où 
se  trouvaient  inscrits  des  noms  de  terres  ou  d'esclaves,  la 
désignation  de  chevaux,  etc.  Chacun  ouvrait  l'aveline  qui 
lui  était  échue  en  partage,  prenait  connaissance  du  billet  et 
y  trouvait  un  lot  plus  ou  moins  riche,  selon  que  le  sort 
l'avait  plus  ou  moins  favorisé;  il  se  présentait  alors  à  l'agent 
préposé  à  la  distribution  et  réclamait  telle  ferme  située  dans 
tel  canton  dépendant  de  Ici  district,  ou  l'esclave  une  telle, 
avec  tel  surnom,  ou  bien  un  cheval  désigné  de  telle  et  telle 
façon.  Outre  cela,  on  jeta  au  peuple  des  pièces  d'or  et  d'ar- 
gent, des  vessies   de  musc   et  des  œufs  d'ambre  gris.  On 


VII. 


è6  LES   PRAIRIES   D'OR. 

/jjjlsm   ^5^-=*-   8<XÀ4  A^\JL«  ^\j\  }i:>^Xs>'  /j^  &*«  (jt^  (j_»  ».jLm^ 

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(i  tK-^-i  Lrf  o^iâX^Î   l^  cxié^jj  ^UlaïH  c:aaàJoÎ_5  «^a,^?!; 

pourvut,  pendant  toute  la  durée  de  leur  séjour,  non  seu- 
lement aux  dépenses  de  Manioun ,  de  ses  généraux ,  de  sa  suite 
et  des  troupes  qui  raccompagnaient,  mais  aussi  à  l'entre- 
tien des  moukres,  des  matelots,  des  portefaix,  des  valets  et 
goujats,  mercenaires  ou  autres,  qui  marchaient  à  la  suite 
de  l'armée.  Pas  un  soldat  n'eut  à  acheter  sa  nourriture  ni  le 
("ourrage  de  ses  bêtes.  Pendant  qu'il  se  disposait  à  remonter 
le  Tigre  pour  rentrer  dans  sa  capitale,  Mamoun  dit  à  Haçan  : 
«  Père  de  Mohammed ,  as-tu  quelque  demande  à  m'adresser? 
— Sire,  répondit  celui-ci ,  je  vous  prie  de  me  conserver  dans 
votre  cœur  la  place  que  j'y  occupe,  car,  si  je  la  garde,  c'est  h 
vous  seul  que  je  le  devrai;  «  le  Khalife  lui  accorda  le  revenu 
du  Fars  et  de  la  Susiane  ])endant  une  année.  Les  poètes 
prodiguèrent  leurs  vers  et  les  orateurs  leur  éloquence  en 
l'honneur  de  ces  noces.  Parmi  ces  poésies  de  circonstance, 
une  des  plus  ingénieuses  est  ce  disti(pio  d'Ibn  Hazim  Bahili  : 


CHAPITRF   CXIV.  67 

Que  Dieu  bénisse  cette  union  en  faveur  de  Haçan  et  de  Bonran. 
FïIb  de  Haroun  ,  tu  triomphes,  et  de  la  fiH^de  quel  liomme! 

Mamoun,  lorsqu'on  lui  rapporta  ces  paroles,  s'écria  :  «Je 
ne  sais  si  je  dois  les  prendre  en  lionne  ou  en  mauvaise 
part.  » 

Ibrahim,  fils  de  Mehdi ,  se  présenta,  un  jour  chez  ce  Kha- 
life, quekjnes  temps  après  être  tombé  entre  ses  mains; 
Mamoun  lui  dit  en  désignant  Moutaçcm  son  frère  et  Abbas 
son  fils  :  «  Voici  ceux  qui  me  conseillaient  de  te  faire 
mourir.  »  Ibrahim  répondit  :  «  C'est  ainsi  (ju'ils  devaient 
parler  à  un  souverain,  mais  sacrifiez  vos  craintes  à  vos  es- 
pérances; «  et  il  ajouta  ces  vers  : 

Tu  m'ns  rendu  mes  biens  sans  te  montrer  avare  envers  moi,  cl  avant  de 
me  les  rendre,  lu  as  épargné  ma  vie; 

Tu  l'as  épargnée  sans  exiger  de  compensation,  et  lu  n>e  l'as  rendue 
deux  fois,  puisque  tu  m'as  sauvé  de  la  mort  et  de  la  misère. 

Ton  âme  généreuse  m'a  facilité  l'exense  de  mes  fautes,  cl  lu  ne  m'as 
adressé  ni  un  blâme  ni  un  reprorlie. 


68  LES  PRAIRIES  D'OR. 

jl^     ^    5w^l     (j^    ^J^  Iw^     ^^.^  j\xJm\^    (jIm^éS»- jUàkl     çf)JÎ>yJ^^ 

l^XA^JJT  j^  UajI    *>>j>  ^4f^  ff^}\&  0<***   C5^ji    *XaAÎÎ   ^   2>w«kà».^    l.^ 

cjI-aJIj  cj^^^jtiî  -J^"^^^  JJi^s.^  jj^:iX.iîj  c^um^  J^l-lt 

Ton  indulgence,  plaidan^  ma  cause  devant  toi-même,  m'a  servi  de  té- 
moin sincère  et  exempt  de  tout  soupçon. 

Les  traits  intéressants  de  la  vie  d'Ibrahim,  ses  poésies 
fetnarquables ,  ses  aventures  lorsqu'il  se  cachait  à  Sov\'aïkat 
Galib  (un  des  quartiers)  de  Bagdad,  ses  pérégrinations  pen- 
dant la  nuit  où  il  fut  arrêté,  tous  ces  détails  se  trouvent 
dans  nos  ouvrages  déjà  cités,  dont  le  présent  volume  n'est 
que  le  complément  et  l'index.  Youçoufben  Ibrahim  le  se- 
crétaire, ami  d'Ibrahim,  fils  de  Mehdi ,  est  l'auteur  de  plu- 
sieurs ouvrages,  entre  autres  d'un  livre  intitulé  Récits  de  mé- 
decins et  de  rois,  concernant  les  aliments,  les  boissons,  les 
vêtements,  etc.,  d'un  recueil  d'anecdotes  connu  sous  le  titre 
de  Livre  d' Ibrahim ,  fils  de  Mehdi,  et  d'autres  ouvrages. 

Un  des  incidents  les  plus  curieux  tirés  de  l'Histoire  d'Ibra- 
him, lorsqu'il  errait  incognito  dans  Bagdad ,  est  son  aventure 
avec  le  barbier.  Mamoun,  ([uand  il  entra  dans  cette  ville, 
mit  des  émissaires  à  la  poursuite  d'Ibrahim,  comme  nous 


CHAPITRE  CXIV.  G9 

i^i.  A-ià-.V  j..A.<wa  .-w.  ^3   osAj  Ji  ca\ji»<Xj  x>l)  ^3^  ^xJ  jUi 

^ykà^^    C5V^-?   *^    V^'    t3-^^'j    (S'-^J"'  (*^  ^iA.AiâJ   «XA:>-    »jj«»M.«j 

^^♦-i j  j-x-=»-  (J-*  ^^^  K^^'^  ^  "^  ^-^^  J^-!?'  ^^*-<J  J^'  ^^ 
<i  Jl*5  cil-iâ-j  ^jry»-A_Jj  *julaj  ïj-^r^  \-^)^  JsjtXs- j»Xii^ 

l'avons  déjà  raconté  dans  ce  même  chapitre,  et  promit  une 
riche  récompense  à  qui  indiquerait  sa  retraite.  Laissons 
parler  Ibrahim.  «  Je  sortis,  un  jour  d'été,  à  l'heure  de  midi, 
sans  savoir  où  j'allais;  je  m'engageai  dans  une  ruelle  sans 
issue  et  remarquai  un  noir  qui  se  tenait  devant  la  porte 
d'une  maison.  J'allai  droit  à  lui  et  lui  demandai  s'il  pouvait 
nie  loger  dans  un  coin  de  sa  demeure  pour  un  moment.  Il 
y  consentit  et  me  fit  entrer;  la  salle  était  garnie  de  nattes 
et  de  coussins  en  ciu'r,  tout  cela  élégant  et  propre.  Puis  il 
me  laissa  seul,  ferma  la  porte  sur  moi  et  s'éloigna.  Un 
soupçon  me  traversa  l'esprit;  cet  homme  savait  que  ma  vie 
était  mise  à  prix  et  il  était  allé  me  dénoncer.  Pendant  que  je 
me  livrais  à  ces  tristes  j)ensées,  il  rentra  escorté  d'un  por- 
teur chargé  d'une  ample  provision  de  pain  cl  de  viande,  cfun 
chaudron  neuf  avec  ses  accessoires,  d'une  jarre  et  de  po- 
terie, le  tout  reluisant  de  propreté.  «  (Jue  ma  vie  soit  votre 
rançon  !  me  dit-il ,  je  suis  chirurgien  el  je  sais  la  répugnance 


70  LES   PRAIRIES   D'OR. 

J!   »*>s->j«X-»i;  iC>-ls»-   j,  c:a.j^^  (^«^J  **^  J*^  ^  ^  d).JV*io 

^  OUxJâ-J  *^5ii  jC?  ^blj   -\jJa]|  i  AK*i  JjL«  Jxiâ  dUi 

^î  ^^LAjt>  <i  yilïî  viUi  «x*j  <J  ^\s  ^s  »«>sî  -^^-^  ^-i  tr*^ 

JUL»  ^IwiJl    Q**»-!   jî  '^  c:*ièy  v.^"*^  oiAii  ^\»  ifM^  Jij 

que  vous  inspire  ma  profession,  disposez  donc  de  ces  objets; 
ma  main  n'y  a  pas  touché.»  La  faim  me  pressait,  je  me 
levai  et  me  préparai  un  ragoût  tel  que  je  ne  me  souviens 
pas  d'en  avoir  mangé  d'aussi  bon.  «Comment  en  usez^vous 
à  l'ésrard  du  néhid?  me  'demanda-t-il.  —  Je  ne  le  déteste 
pas,  >>  répondis-je.  Observant  la  même  réserve  que  pour  les 
aliments,  il  me  présenta  des  objets  d'une  grande  propreté, 
auxquels  sa  main  n'avait  jamais  touché.  Il  me  dit  alors  : 
«Puisse  ma  vie  être  la  rançon  de  la  vôtre!  Voulez-vous  me 
permettre  de  m'asseoir  près  de  vous,  et  de  boire  à  votre 
santé  le  néhid  que  j'apporterai?»  J'y  consentis.  Après  avoir 
vidé  trois  coupes,  il  ouvrit  une  armoire  et  en  tira  un  luth. 
«  Seigneur,  me  dit-il,  il  ne  sied  pas  à  un  homme  de  ma  con- 
dition de  vous  prier  de  chanter,  mais  votre  bienveillance  m'y 
donne  f[uek(ues  droits  :  si  vous  daignez  y  consentir,  ce  sera 
beaucouj)  d'honneur  pour  votre  esclave.  — Comment  sais-tu 
que  je  suis  bon  chanteur?  »  lui  demandai-je.  Il  reprit  d'un 
air  étonné  :«  Diou   tnut-puissani  !   Votn»   répulalion  est  trop 


CHAPITRE  CXIV.  71 

(il  c 

^ -iLilî  cyUb  (.i^Xi  kii^Ài.  ,\s».^Ajl  U  <\AÀ*j  U  Jss&jI  (^Js^.a« 
I^Vi^î  (^J  ^1^1  -O^i-i  bi  Jlï  l-^rAJyU  >iU  ^J  (j^  u:>i^^A^^i5 
A_j   <.::*-.*M^)j  AJwJUi  cl>»-*  d  ^^-^  wlXJ-i»  J-*^'  j^  ^y^  ^^ 

._A_^I  U  JLa.*  JUj  4M|  pUi  (jl  *x^  b«XÀ*  iiU^  dUjjiPo 

grande  pour  que  je  ne  la  connaisse  point;  vous  êtes  Ibrahim, 
fiis  de  Mehdi,  et  une  récompense  de  cent  mille  dirhems  est 
promise  par  Mamoun  à  qui  vous  dénoncera.  »  A  ces  mots  je 
pris  le  luth  et  j'allais  commencer  lorstpi'il  ajouta  :  «  Seigneur, 
voucUiez-vous  chanter  d'abord  le  morceau  que  je  choisirai?  » 
Sur  mou  consentement,  il  ht  choix  de  trois  airs  tlans  lesquels 
je  n'avais  pas  de  rival.  Je  lui  dis  alors:  «  Que  lu  méconnaisses, 
je  le  veux  bien,  mais  ces  airs  où  as-tu  appris  à  les  connaître? 
—  J'ai  été,  merépontht-il,  au  service  d'Ishak,  hls  d'Ibrahim 
Moçouli,  et  je  l'ai  bien  souvent  oui  parler  des  grands  ar- 
tistes et  des  morceaux  dans  lescjuels  ils  excellaient;  mais  qui 
m'eût  dit  que  je  vous  entendrais  vous-même  cl  dans  ma 
propre  demeure?  »  Je  chantai  et  demeurai  en  sa  compagnie, 
lavi  (le  son  caractère  avenant.  La  nuit  venui",  j(î  pris  congé 
(le  lui;  j'avais  eniporti'î  avec  moi  une  bourse  pleine  d'écus 
d'or,  je  la  lui  olliis  pour  subvenir  à  ses  dépenses  en  lui  pio- 
mellanl  (pi'il  l'eeevrnil  n\\  jotir  une  lécotiqjeiise  plus  grande, 
«Chose  étrange,  me  dit  il,  c'est  moi  (pii  voidais  vous  offrir 


72  LES  PRAiniES  D'OR. 

p 

<^t  «Xaa£^  <9u^I  0-j  :>\jj  ^io^  «i  |*«X.i^  2(^1  (j^  i^^Xw  (^v^ 

(j_j   4Ml    «Xa£^   AAJuJl  j^i^l    »X.j^   ^  ^W^J   j*^'^!^^  (J?J 

tout  ce  que  je  possède  en  vous  conjurant  de  me  faire  l'honneur 
d'accepter,  mais  le  respect  seul  m'a  retenu.  «  Il  refusa  donc 
de  rien  recevoir  de  moi  ;  puis  il  sortit  avec  moi  et  me  mit 
sur  le  chemin  de  l'endroit  où  je  voulais  aller;  alors  il  s'éloigna 
et  je  ne  l'ai  jamais  revu.*» 

En  2o6  de  l'hégire,  sous  le  règne  de  Mamoun,  mourut 
Yézid  (fils  de  Haroun,  fils  de  Zadan),  originaire  de  Waçit,  à 
l'âge  de  quatre-vingt-neuf  ans.  Il  naquit  en  117,  et  fiit  un 
7>im/j/a  des  Benou  Soleïm;  son  père  avait  servi  dans  les  cui- 
sines de  Ziad  ben  Abihi  (voir  t.  V,  p.  20),  d'Obcïd  Allah, 
fils  de  Ziad,  de  Moçab,  fils  de  Zobeïr ,  et  de  Haddjadj ,  fils  de 
Youçouf.  Ce  Yézid  passe  pour  un  des  plus  grands  et  des 
plus  éminents  parmi  les  traditionnistes;  il  mourut  dans  la  ville 
de  Waçit  en  Irak.  Dans  la  même  année  moururent  Djerir 
(fils  de  Khozaïmah,  fils  de  Hazim);  —  Cheïbah  (fils  de 
Sawar)  de  Médine;  —  le  jurisconsulte  Haddjadj  (fils  de  Mo- 
hariiinod),  surnommé  le  borgne;  —  Abd  Allah  de  Médine 
(fils  de  Nali),  surnommé  Vorpvrc,  mmvla  îles  Beiiou  Makh 


CHAPITRE  CXIV.  73 

^X»litîi  Jjjb   Aaj^  <îWu*o  AAXffj^^tj  yl^ 
v_ÀX4c>  <Xjji^  j^lxlij  j.xmJ|  <.;.«.^.Us  ^j  /rfvil^JI  ^^J  i},yA  tXïîj 

i$«>wj«XiM  «'^aa^  ^aJUj  iitX».!^  jmjLo  \'*S^  ^^Ub  l^tXck.! 

fi^^  (O-^rJ  -^^-^  i^y^  iytiai  «Xii  -p^ipû  UjIaa*p  Ut  ià\ii^^^^ 

zoum;  — Wehb,  (fils  de  Djerir);  —  Mouemmel  ((ils  d'Is- 
maïl);  —  Rouh  (fils  cribadah); — El-Heïlhem  (fils  d'Adi), 
dont  la  gchiôalogie  est  douteuse,  ce  qui  a  fait  dire  à  un  poëte  : 

Si  tu  places  un  Aàï  dans  la  famille  des  Benou  Touai ,  écris  dans  la  liste 
généalogique  le  àxà  avant  Xaîn.  (c'est-à-dire  au  lieu  de  AH'i  nonnne-lo  ilùii, 
imposteur). 

En  209  mourut  Wakidi  (Mohammed,  fils  d'Amr,  fils  de 
Wakid),  mcnola  de  la  lamille  de  liachem,  auteur  de  livres 
de  biograj)hie  et  d'ex pécfi lions  militaires;  son  autorité 
comme  traditîonniste  est  laible.  Ibn  Abi  'l-Azfiar  lacontc  le 
fait  suivant  d'ajHès  Abou  Sehler-Razi,  ([ui  le  tenait  des  per- 
sonnes auxquelles  Wakidi  lui-même  l'avait  raconté  en  ces 
termes  :  «J'avais  deux  amis,  dont  l'un  était  (h^  la  famille 
de  IJachem,  et  nous  ne  formions,  |)our  ainsi  tlire,  qu'ime 
seule  âme.  Aux  aj)proches  de  la  fête  (du  Jiaïratn) ,  je  me 
trouvais  dans  une  gêne  extrême;  ma  lemme  me  dit:  «  S'il  ne 
s'agissait  (pu;  de  nous,  nous  pomiions  su()|)oiler  la  misère 
cl    les   privations,    mais    nos    païuns    cnlaiits!  Ils   me  loiil 


lli  LES   PRAIRIES   D'OR. 

^  ^iJj.A(aj  *t5vi»~j   c:AAj:s»-t  ^Ai  à^j^J   V^"^'   CJ-*  <J^=^  8<Xiû  ^^ 

L»   ,JwA_^   »^*ik_>    wifci/î    ^^«XAiajl    IJJi    c>ùC3    ^^w^   (oW*   >"*J^I 

,b{   liiJtXj    ul   Iàaa3   ^A'^£   ^^Liisxj  ^j  4^^  M  c:AÀAMk.^v^.uil 

^.itX-ol  ci  jUi  Aaa>j^  (j<w-ft^i  ^«^_5  ^>iil4Jl  ^»X.^  3**'^ 
dLiî  JUi  ^^^>  4^^jjLiI  ^o:i^*»  kil^JJ  o».^s-j  l^  AaX*3  l5 

pitié  et  me  déchirent  le  cœur;  ils  verront  les  enfants  du  voi- 
sinage parés  et  habillés  de  neuf  pour  leur  fête,  tandis  qu  ils 
conserveront,  eux,  leurs  misérables  guenilles.  Ne  pourrais- 
tu,  par  un  expédient  quelconque,  trouver  de  quoi  les  ha- 
biller?» J'écrivis  à  mon  ami  le  hachémite,  et  le  priai  de 
me  venir  en  aide  pour  l'éventualité  qui  se  présentait.  11 
m'adressa  aussitôt  une  bourse  cachetée,  en  m'informant 
qu'elle  contenait  mille  dirhems.  J'avais  à  peine  eu  le 
temps  de  me  reconnaître,  lorsque  je  reçus  de  mon  autre 
ami  une  lettre  renfermant  les  mêmes  doléances  que  celles 
f(ue  je  venais  d'adresser  à  mon  compagnon  hachémite.  Je 
lui  envoyai  la  bourse  telle  qu'elle  ui'était  j)arvenue,  et  je 
nie  i-endis  à  la  mosquée  où  je  passai  la  nuit,  n'osant  plus 
H)e présenter  devant  ma  femme.  Celle-ci,  cependant,  lorsque 
je  rentrai,  approuva  ma  conduite  et  ne  me  fît  pas  le  moin- 
dre reproche.  Nous  en  étions  là,  quand  l'ami  hachémite 
entra  portant  avec  lui  la  bourse  toujours  dans  le  même  état 
et  me  dit  :  «  Avoue-moi  franchement  l'usage  que  lu  as  fait 
de  ce  que  je  t'ai  envoyé,  »  J(>    lui    racontai  la  chose   telle 


CHAPITRE  CXIV.  75 

AjU   dUi  Jji  «yij  Ur=-^|   yi   *Sjo  Ujvo   l^  li-^KSi  v»àJ^( 

j-*lj  yfe'  U  *i  c:^_*.^^-ij  jUJo  ^j^Ui  Ji^ii  ^_j  ,^:> 

qu'elle  s'était  passée,  et  il  reprit  en  ces  termes  :  «  Au  moment 
où  ton  message  m'est  parvenu^,  je  ne  possédais  au  monde 
que  la  somme  que  je  t'ai  fait  remettre;  j'écrivis  donc  à 
notre  ami  commun  pour  le  prier  de  me  venir  en  aide  et  il 
m'envoya  ma  propre  bourse  encore  scellée  de  mon  anneau.  » 
Nous  fîmes  alors  trois  parts  et  nous  les  partageâmes  entre 
nous  trois,  après  avoir,  au  préalable,  mis  de  côté  une 
somme  de  cent  dirhems  pour  ma  femme.  Cependant  le  i)ruit 
de  cette  aventure  était  parvenu  jusqu'à  Mamoun;  il  me  fit 
appeler  et  je  dus  la  lui  raconter  de  vive  voi.v.  11  nous  ac- 
corda une  récompense  de  sept  mille  dinars,  c'est-à<lire  deux 
mille  dinars  pour  chacun  de  nous  et  mille  pour  ma  femme.  » 
Wakidi  mourut  âgé  de  soixante  et  dix-sej)l  ans. 

En  cette  même  année  209,  Yahya  (fds  d'El-Huçeïn,  lils 
de  Zeid,  fils  d'Ali,  fils  d'El-Ilureïn)  mourut  à  iîagdad,  et 
Mamoun  récita  la  prière  des  funérailles.  Nous  a\ons  raconté 
son  histoire  dans  nos  ouvrages  précédents. 

Azhar  surnommé  Saniinan.  (riiarcliand  de  beurnî)  mourut 
aussi  ct'tle  année.  11  l'ut  fanii  tlWbou  Djàl'ar  Mansour,  sous 
le  règne  des  Omeyyades;  ils  voyagèrent  cl  recueillirent  en- 


76  LES  PRAIRIES  D'OR. 

^jrtPbjljj   AÀJL»  j|_j-kAm    fjé^   cio^rl  llt«v-_5   Ijsa:?^  I^Uv   «X»   bl^ 

ii*j;L  *i^l9  t:y^  b^  ^\ yA'^S  f^ji  U  Jb  )t>w,£  viU  '^:><X:s2^ 

semble  la  lradilion;Mansourlui  témoignait  beaucoup  d'alTec- 
tion,  et  il  passa  de  longues  années  dans  son  intimité.  Quand 
Mansour  devint  Khalife ,  Samman  vint  de  Basrah  à  la  cour  ;  le 
prince  lui  demanda  des  nouvelles  de  sa  femme  et  de  ses  fdles , 
qu'il  connaissait  par  leurs  noms,  le  reçut  avec  [distinction 
et  lui  accorda  une  gratification  de  quatre  mille  dirhems  en 
lui  recommandant  toutefois  de  ne  plus  se  présenter  en  sollici- 
teur. Quelque  temps  après,  Samman  reparut.  «  Ne  t'ai-je  pas 
recommandé ,  lui  dit  le  Khalife ,  de  ne  pas  venir  auprès  de  moi 
pour  solliciter?  »  — Je  ne  viens,  répondit  celui-ci,  que  pour 
vous  saluer  et  renouer  connaissance.  —  Je  m'en  tiens  à  ce 
que  je  t'ai  dit,  »  répliqua  Mansour.  Et  en  lui  faisant  compter 
quatre  mille  dirhems,  il  ajouta  :  «Ne  reviens  plus  ni  pour 
saluer  ni  pour  quémander.  »  Une  année  plus  tard,  Samman 
se  présenta  de  nouveau  chez  le  prince  et  lui  dit  :  «  Je  ne 
viens  pour  l'une  ni  pour  l'autre  des  raisons  que  vous  m'avez 
interdites;  mais,  ayant  appris  que  le  Prince  des  Croyants 
était  malade,  j'ai  voulu  savoir  de  ses  nouvelles.  —  Je  crois 
bien,  lépliqua  Mansour,  que  c'est  l'appât  d'un  présent  qui 


CHAPITRE   CXIV.  77 

*J  /j._Xj>^  Kjis^^j^  <xJ>Uj  iJiAXi  ""i.!  iiÀAu  c^Aia^  l^i  J^i  cjiJI 

5:ïwJ    ^     iX-)    4X5Î    JL«    y^    (Jlxj    AMÎ    -<^Lçv<!     (j^    |<VuÎ    XX»    a.xÀa9 

t'attire;  »  et  il  lui  donna  une  pareille  somme  de  quatre  mille 
dirhems.  Une  autre  année  s'écoula;  la  femme  et  les  fdles 
de  Sammam  lui  répétaient  :  «  Le  Prince  est  ton  ami ,  retourne 
chez  lui.  —  Malheureuses,  répliquait  celui-ci,  que  lui  dirai-je 
donc?  Je  lui  ai  déjà  avoué  que  j'étais  venu  pour  solliciter 
sa  générosité,  pour  le  saluer,  pour  le  visiter  quand  il  élail 
malade,  que  lui  dire,  quelle  raison  alléguer  maintenani?» 
Mais  elles  ne  voulurent  pas  en  démordre;  le  pauvre  Cheïkh 
se  rendit  derechef  chez  Mansour  et  lui  tint  ce  discours  :  «  Je 
ne  viens  ni  vous  solliciter,  ni  vous  saluer,  ni  savoir  de  vos 
nouvelles,  mais  uniquement  recueillir  de  votre  bouche  un 
certain  hadis  émanant  du  Prophète,  que  nous  avons  ensem 
hle  entendu  enseigner  en  fel  lieu  par  tel  docteur;  il  renferme 
un  de  ces  noms  de  Dieu  qui  font  accueillir  et  exaucer  la 
prière  de  celui  qui  le  prononce.  —  Ne  le  recherche  pas,  s'é- 
cria Mans()ur,j'eii  ai  lait  l'épreuve,  il  est  inc^lïicace;  depuis  ([uo 
tu  m'assièges  de  tes  visites,  je  m'en  sers  pour  demander  l\ 
Dieu  de  ue  pas  te  ramener  chez  moi,  <'t  poiirlant  fu  reviens 
toujours  avec  les  élernels  mois  :  saluer,  prendre  des  iwiivelles. 


78  LES  PRAIRIES  D'OR. 

'»y^.  dlxi  i^Afii  ♦>«^  *i  Jlïj  (i^i>  Ci-^î  A*j;l;  aL(o^3  r^ij  ^i 

^j  <_>U£>Jl  «X-*£  ^vJ  «Xj^  (J.J  rfN^'^î  Ai«wi^  4-*Alail  «Xa£  q.jÎ 

/y-J     «X_^    iUC.^    cK-j^5  J^*^*^'^     (J*<U*J5     J.Î     ^i     -.Uiil     |«î%i^jî 

w&lfiJî  J^ib  aXjuî  (jv.;*-  qj-*UÎ  tK^j  -!^A«iil 

visiter.  «  Ce  disant,  il  lui  fit  encore  donner  quatre  mille  dir- 
heriis  et  ajouta:  «  Tu  as  mis  tous  mes  expédients  en  défaut; 
reviens  désormais  quand  bon  te  semblera.  » 

En  209,  Mamoun  se  rendit  en  grand  cortège  à  la  prison, 
durant  la  nuit,  pour  faire  mourir  Ibn  Aïchah;  ce  person- 
nage, issu  d'Abbas,  fils  d'Abd  el-Mottalib,  se  nommait  Ibra- 
him (fils  de  Mohammed,  fils  d'Abd  el-Wehhab,  fils  de  l'i- 
mam Ibrahim,  lequel  était  frère  de  Saffah  et  de  Mànsour). 
En  même  temps  que  lui  périrent  Mohammed ,  fils  d'Ibrahim 
V Africain^  et  d'autres  complices;  Ibn  Aïchah  est  le  premier 
descendant  d'Abbas  qui  ait  été  exposé  au  gibet  depuis  la 
venue  de  l'islam.  En  ordonnant  son  suppfice,  Mamoun  pro- 
nonça cette  sentence  du  poète  : 

Le  feu  se  cache  dans  les  veines  de  la  pierre,  mais  sous  le  choc  du  fer 
il  jaillit  et  s'allume. 

11  y  avait  à  Bagdad  un  rejeton  d'Abbas  (fils  d'Ali,  fils 
d'Abou  Talib),  homme  riche  et  opulent,  apnt  du  crédit  et 
de  l'autorité,  distingué  par  son  esprit  et  son  éloquence;  il 


CHAPITRE  CXIV.  79 

ààj<XjC  (^^^*Jt  (jj^=^  (>J  O*^"'*^'  J'^J  iii5\j^  (*^^  iixX^^  y£^ 

i- 

(j_»  jo— <^Jj-s*-  tr«^  iLÀ->«X-il  J^iûi)  (j\^  U  J.-s»j  jy_ft  aMI  J^.i 
jL_A_j  ^-cfc.    S»..jLam-j  J>j    ^j    A_a-«  wil.Jis   T^y^   fJi***^   (H^JttXi 

^^ïVjîi  ^  ^^j\jL>>^il  wA^i  yil,  Jiî  iLiKjl^  (jji  jo:i  l^i  tJ^-^' 
yè  L^-p  ^^,^1  ii!  cLl-Ul  iji  *U*X.Ji  i  ^\  aMI  Jt-  ^  Jli 

se  nommait  Ahhas  (  fiis  d'Ei-Haçan  Alewi).  Moutarem,  qui  ne 
pouvait  le  souffrir  à  cause  cFun  dilTérend  survenu  entre  eux, 
lit  pc'nétror  dans  le  cœur  de  Mamoun  la  convicùon  que  cet 
homme  le  détestait,  lui  et  son  gouvernement ,  et  qu'il  en 
voulait  à  sa  vie.  Or,  durant  cette  même  nuit,  Abbas  ren- 
contra le  Khalile  sur  le  pont  (qui  réunit  les  deux  quartiers 
de  Bagdad).  —  «  Eh  bien,  lui  dit  le  prince,  ce  que  tu  at- 
tendais (la  révolle)  est  enhn  arrivé!  —  Prince  des  Croyants, 
répondit  Ahbas,  que  Dieu  me  préserve  d'une  telle  pensée! 
Au  contraire,  je  répétais  cette  parole  du  livre  divin  :  Quelle 
raison  avaient  les  habitants  de  Médine  et  les  Arabes  no- 
mades d'alentour  ])our  se  séparer  de  TApotre  et  pour  pré- 
férer leur  existence  à  la  sienne?  {Koran,  ix,  i2i).»(xHte 
réponse  fit  un  excellent  efTel  sur  le  Khalife,  qui  permit  à 
son  interlocuteur  de  l'accompagner  juscju'à  la  prison.  Après 
l'exécution  d'Ibn  Aïchah,  Abbas  demanda  au  prince  la  per- 
mission de  lui  adresser  (juehfues  paroles,  cl,  après  l'avoir 
obtenue,  il  s'exprima  ainsi  :  «  Je  vous  conjure  par  le  nom  de 
Dieu  d'épargner  le  sang  humain;  im  roi,  s'il  s'accoutume  à 


80  LES  PRAIRIES  D'OR. 

tii.Àj«  «i^MÎ    i<X.f&  c:a,k.«vw  _^J  Jii  *Xra-î   ^^  ^^j  ^^   l^À£^A*aj 

(j^  :>î;l  Uj  Î4X_j5  <>i**jlp  ^jl  ^Uii.1  (^  Uaj!  *>^5j  /^:>  otJl 

c 

iLÎU  (j^  5_^^  (jj^^î   t^•  (jAj^  ^j!^  tel;  t^H  U^-?  »)-»aJl> 

A_A_J    |fc«~X.j    iii    f^^J    •^J    i— À;Vj-û    ^uXff   JtwMO    q5o    ^j    W-^-Î* 

le  vci'scr,  ne  peut  plus  s'en  assouvir  et  n'épargne  aucun  de 
ses  sujets.  «  A  quoi  Mamoun  répondit  :  «  Si  lu  m'avais  tenu 
ce  langage  avant  que  je  fusse  monté  à  cheval,  je  serais  resté 
et  le  sang  n'aurait  pas  coulé.  »  Et  il  lui  fit  donner  trois  cent 
mille  dirhems.  —  NouS  avons  raconté,  dans  les  Annales  his- 
toriques, l'histoire  d'Ibn  Aïchah,  du  complot  qu'il  ourdit 
contre  Mamoun  et  des  autres  faits  qui  le  concernent. 

En  211,  Aboa  Obeïdah  Mâmer,  fils  de  Motanna,  qui  pro- 
fessait les  doctrines  des  Kharédjiles,  mourut  à  Basrali  pres- 
que centenaire;  personne  n'assista  à  ses  funérailles  et  il  fal- 
lut louer  des  porteurs  pour  transporter  le  cercueil,  car,  de 
son  vivant,  personne,  parmi  les  grands  ou  le  peuple ,  ne  pou- 
vait le  saluer  sans  être  critiqué.  Il  a  laissé  de  beaux  ouvra- 
ges sur  les  Journées  des  Arabes  et  sur  d'autres  sujets.  On  lui 
doit  aussi  le  livre  intitulé  Les  blâmes,  où  il  donne  les  généa- 
logies des  Arabes,  en  démontre  les  altérations,  et  formule 
contre  eux  plusieurs  accusations  que  la  sagesse  politique  et 
les  convenances  ne  permettent  pas  de  mentionner.  Le  poêle 


CHAIMTRK   CXIV.  81 

^^  «X-A-À-^-J^  ^^w<-À-JSJ  j^  jj*,wL^J  iJ^X-A-f-C  ^i  *l>  U^i 
_^_j5    y^pSÎ     (j:S-Ul    Joti    IJs^    Jbj     d)Ji    J\j)     icj;L-N«.Ji     dlju 

^g^  iiÀ*J)   &Ck£>  ^j       ^  ^^  «^^   \x»  (jK  yij   a_^£^  U-'^^ 

Abou  Nowas  (Haçan,  fils  de  Hani)  11c  lui  épargnait  pas  les 
traits  satiriques;  ainsi  Abou  Obeïdah  avait  coutume  de  s'as- 
seoir contre  un  pilier  de  la  mosquée  de  Basrah;  le  poëte, 
profitant  de  son  absence,  écrivit  sur  ce  pilier  le  distique 
suivant ,  oi^i  le  savant  n'est  pas  ménagé  : 

Que  Dieu  bénisso  Lot  et  tons  ses  sectateurs!  Allons,  Abou  Obeïdah, 
prononce  le  mot  amen; 

Car,  selon  moi,  depuis  que  la  bnrbe  a  poussé,  lu  es  leur  digne  rejeton, 
et  te  voilà  plus  que  nonagénaire. 

En  venant  prendre  sa  place  contre  \v.  pilier  oii  il  s'ados- 
sait, Abou  Obeïdah  aperçut  l'inscription  et  s'écria  :  «  C'est 
l'œuvre  de  cet  effronté,  de  ce  débauché  qui  a  nom  Abou 
Nowas.  Qu'on  cfiiice  ces  lignes,  i)icn  qu'elles  renferni(>nl  une 
bénédiction  en  l'honneur  d'un  prophète  !  »  • 

En  la  même  année  :n  1  mourut  le  poëte  Abou  '1-Atahyah 
(Ismàïl,  (ils  de  Karem),  qui  menait  depuis  longtemps  une 
vie  austère  et  avait  revêtu  le  froc  de  bure.  Nous  avons  ra- 
conté jirécédemmenl  rpiciques  épisodes  cniiciix  de  ses  raj)- 

Ml.  (1 


82  LES    PRAIRIES   D'OR. 

Sij^  (J-»  iUiûbjtli  ^1  JUi  ^i^ji'i  :>îjj  Wl  (jbji'î  ^^  -^x^  tr« 

ports  avec  le  Khalife  Réchid  (cf.  t.  VI,  p.  333);  ajoutons-y 
cette  anecdote.  Réchid  ordonna ,  un  jour,  qu  on  lui  amenât  le 
poëte  avec  défense  de  lui  parler  en  route  et  de  lui  dire 
pourquoi  on  le  faisait  venir.  Cependant  un  de  ses  compa- 
gnons parvint,  pendant  le  trajet,  à  tracer  sur  le  sable  ces 
mots  :  «On  ne  t'appelle  que  pour  te  faire  mourir;  »  Abou 
l-Atahyah  improvisa  ces  vers  : 

Il  se  peut  que  tes  craintes  s'évanouissent  et  que  tes  vœux  se  réalisent 
bientôt; 

Peut-être  que  ce  qui  te  semblait  aisé  ne  le  sera  pas  et  que  les  diffî- 
cuUés  que  tu  redoutais  s'aplaniront. 

Il  accompagnait  Réchid  dans  un  de  ses  pèlerinages;  le 
Khalife  mit  pied  à  terre  et  marcha  quelque  temps,  puis,  se 
sentant  fatigué,  il  proposa  au  poëte  de  se  reposer  à  lombre 
d'une  borne  milliaire.  Après  s'être  assis,  il  se  tourna  vers 
Abou  '1-Atahyah  et  lui  demanda  quelques  vers  propres  à  ex- 
citer sa  piété;  celui-ci  improvisa  les  suivants  : 


CHAPITKK   CXIV.  •     83 

i  «jLaJTî  î<x_^  (J-.  v_xLu  Uy»  IjcL  wiJJi  (jw^  U.»i>vS  tiU^kS^ 

^^A^  L<.Jk-«   c:^.xxa»-  U   !*Xjt         ^lî  c;*._=»-j._X_t*iU  c^«<  (S^J^^ 

J'admets  que  !a  fortune  te  sourie,  la  mort  ne  doit -elle  pas,  un  jour, 
te  surprendre? 

O  toi  qui  recherclies  les  biens  de  ce  monde,  néglige-les  pour  l'occuper 
de  les  vrais  intérêts. 

Que  ferais-tu  de  ces  biens  passagers,  puisque  romi)re  d'iuic  colonne 
te  suHit? 

Les  faits  intéressants  de  la  vie  d'Abou  '1-Atahyah  et  bon 
nombre  de  ses  vers  sont  cités  dans  nos  ouvrages  précédents; 
on  y  trouvera  un  choix  de  ses  poésies  tiré  du  divan  oii  elles 
sont  classées  par  ordre  de  rimes;  nous  en  avons  donné  aussi 
des  fragments  dans  ce  livre,  en  racontant  l'histoire  des 
Khalifes  Abbassides  (cf.  t.  VI,  loc.  laud.  et  p.  2/10;  t.  Il, 
p.  327);  voici  encore  une  belle  pensée  du  mêm(!  poète: 

Ahmed,  ignorant  ce  que  j'éprouve,  médisait  :  «Ton  amour  pour  Olbah 
est-il  sincère?» 

Et  je  lui  ai  répondu  en  soupirant  :  «Oui ,  je  l'aime  d'un  amour  qui  s'est 
infdlré  goutte  à  goutte  dans  mes  veines.» 

Je  voudrais  que  la  mort  mît  un  terme  à  mes  fonrments,  car,  tant  quo 
je  vivrai ,  je  serai  le  jouet  de  cette  cruelle. 

(i. 


84  LES   PRAiUlES   D'UP,. 

(>■«  (j*^^  tâ^' **y  t^«  *-^'^    ^  ^  (fi-^-j.  wr?  c^-?'  jb'  ^ 

2^^5  iU<wM.^UMJLi  S)lx^l^  iUj^i  A^ily»  (j^3 


Mais,  je  le  sens,  je  ne  puis  vivre  longtemps;  quand  on  souffre  comme 
moi  des  angoisses  de  l'amour,  on  ne  survit  pas  à  ses  souffrances. 

Que  tes  soins  le  comptent  dans  l'autre  vie  et  dis  :  «  Dieu  prenne  en  pitié 
notre  ami  que  l'amour  a  tué!  « 

Je  veux  être  son  esclave,  diissé-je  (le  ciel  en  soit  loué!)  ne  jamais  être 
son  affranchi. 

Citons  encore  parmi  ses  plus  belles  poésies  le  passage 
suivant  : 

Otbah,  que  se  passe-t-il  entre  nous?  Ah,  puissé-je  ne  t'avoir  jamais 
vue! 

Je  suis  ton  bien ,  accable-moi ,  à  ton  gré ,  de  ton  dédain ,  de  tes  rigueurs. 

Je  passe  mes  nuits  dans  l'insomnie,  les  yeus  fixés  sur  la  voûte  étoiléc. 

Etendu  sur  un  lit  de  charbons  ardents  et  enveloppé  du  haçek aux  pointes 
aiguës. 

Et  cet  autre  fragment  remarquable  par  la  singularité  de 
la  rime  et  la  beauté  de  la  poésie  : 

Amis ,  je  souffre  d'un  mal  qui  vous  est  étranger,  car  l'homme  est  exempt 
des  souffrances  d'aulrui. 


CHAPITRE  CXIV.  85 

_^î  l^îj  «XAà*  4^  i^Ji  cj-       J^>-*  cM>'j  j'y^^  UJ^  V 

'..•^■«kowJCjfc i  Uj  LjJCas»-  il   t5*^^^^         CJ\     fîV il  li    '»— ^5j  ^--(^-— ^^-jÏ 

L'amour  me  brûle  comme  le  cbarbon  du  yadu  (espèce  de  taniarix); 
mais  malgré  ses  ardeurs,  sa  flamme  ç«t  douce  au  ctrur  qu'elle  ronsuuie. 

L'amour  a  épuisé  mon  corps,  mes  os  ,  ma  vigueur,  et  dans  ce  corps  dé- 
cbarné  il  ne  reste  que  le  souffle. 

Il  n'est  pas  une  beauté  qui  ne  fût  ficrc  d'inspirer  une  passion  aussi 
sincère. 

Celle  que  j'aime  est  loin  de  mes  yeux,  et  sans  elle  il  n'y  a  pour  moi  ni 
doux  propos,  ni  plaisirs. 

Je  refuse  à  mes  amis,  à  mes  frères,  ce  qui  me  reste  de  tendresse  pour 
le  lui  donner,  et  clic  en  a  même  le  superflu  (le  poète  joue  sur  le  mot  afr 
qui  signifie  aussi  pardon).  • 

Voici  un  autre  fragment,  généralement  admiré  : 

Plaignez  mon  cœur  des  dédains  dont  il  est  l'objet;  quelle  faute  croyez- 
vous  qu'on  puisse  lui  reprocbcr? 

Grand  Dieu!  qTiclIc  injustice  est  la  sienne  depuis  qtie  je  l'aime,  et 
combien  sa  conduite  est  coupalile! 

Je  suis  venu  lavoir,  mais  elle  n'a  pas  rempli  ses  promesses  quand  jetais 
près  d'elle,  cl  n'en  a  tenu  aucun  compte. 

Dieu  sait  combien  de  dettes  elle  avait  coniracli'cs  envers  moi,  qu  elle 
n'a  point  payées  à  récliéaiuc. 


86  LES   PRAIRIES   D'OU. 

Â^    ^CmsJS     ^yX*M     .^^    (J-*^     C-T^iajl 


Elle  ne  m'a  accordé  une  promesse  de  bonheur  que  pour  me  reprendre 
lout  ce  qu'elle  m'avait  donné. 

Quel  bien,  quel  avantage  peut-on  espérer  d'une  coquette  qui  renverse 
le  lait  qu'elle  vient  de  traire  (-locution  proverbiale)? 

Dieu  jugera  entre  moi  et  celte  beauté  injuste,  puisqu'elle  me  refuse  le 
bonheur  que  je  sollicite  d'elle. 

Que  lui  importent  les  messages  qu'elle  m'adresse,  les  lettres  qu'elle 
m'écrit? 

Quand  je  brûle  de  la  voir,  Otbah  s'y  refuse  et  demeure  insensible  à 
mes  désirs. 

Aboù  1-Atahyah  rachetait  sa  laideur  par  la  grâce  de  ses 
manières,  la  douceur  de  son  éloculion  et  la  vivacité  de  ses 
sentiments.  Une  de  ses  plus  charmantes  jwésies  est  celle-ci  : 

Que  d'autres  ignorent  la  saveur  de  l'amour,  je  la  connais,  moi,  de 
science  certaine. 

J'ai  donné  honnêtement  ma  tendresse  et  je  vois  qu'on  m'en  fait  un  crime. 

Otbah ,  tu  n'as  laissé  à  mon  corps  ni  sa  chair  ni  ses  os. 

Otbah,  ne  crois  pas  que  je  m'aveugle  sur  ta  conduite  à  mon  égard, 
mais  c'est  l'amour  qui  m'aveugle. 


CHAPITRE  CXIV.  87 

t-^î^^o  -JLx.Ak(_j  ^_)àJ^lci   iij'iAj  ^j.iûj  «Xj<xi!  dUi  ^j-«  /jojvJ^ii  iS 

Que  celui  qui  ignore  mes  souffrances  en  lise  les  traces  sui-  mon  visage. 

Quelques-unes  clo  ses  poésies  sortent  des  mètres  ordi- 
naires; tels  sont  ces  vers  : 

Le  Kadi  n'a  de  soucis  que  pour  un  vers  ])rovoqiianl ,  et,  si  on  le  blâme  , 
il  répond  : 

Le  monde  n'est  peuplé  que  de  pécheurs.  Telle  est  Ve.rcusc  du  Kadi, 
mais  retournez  le  mot  (en  changeant  les  points  diacritiques,  on  a  (fudr  au 
lieu  de  azr,  ruse  au  lieu  d'excuse). 

Le  mètre  est  de  quatre  /iVou/i  (huit  longues  à  chaque  hé- 
mistiche). D'a[)rès  cfuelques  personnes,  les  Arabes  du  désert 
n'ont  jamais  employé  ce  mètre,  et  il  n'est  cité  ni  par  Khalil 
ni  par  d'aulres  prosodistes.  Certains  poètes  cependant  ont 
ajouté  au  système  métrique  adojité  pai-  Khalil  ])('n  Ahmed; 
le  méclid,  par  exem])le,  qui  se  compose  chc/.  ccl  aulcur  de 
trois  genres  et  d(!si\  espèc(>s,  a  reçu  plus  lard  un  (piatrième 
genre  composé  de  deux  espèces.  ]>a  première  csijèce  de  ce 
quatrième  genre,  (|ui  est  de  création  plus  moderne,  se  rc 
trouve  dans  le  vers  suivant  : 


88  LES   PRAIRIES   DOR. 

f»\ — ^  2s  L- |._x_-fli       -l_Â_j  ii  ^-*»x.J  L» 

(jlVjJt  jUi^l  UoIxj    ^  ojSb)  (j^  IL«Jv*jj  xiUo^  (^  IJUjI   <X5  l^ 

Pourquoi  mes  yeux  privés  de  sommeil  répandent -ils  un  déluge  de 
)armes?(-->^  —  ,_v_-v  ||  _v — ,_aj^_t^). 

Et  la  deuxième  espèce  du  même  genre  dans  ce  vers  : 

Famille  de  Bekr,  ne  faiblissez  pas,  car  ce  n'est  pas  le  moment  de  la 
faiblesse  ( _■"--, ^-v^ —  ||  _^ — ,^^  —  ). 

Ces  additions  au  système  métrique  et  d'autres  du  même 
genre  traitées  par  différents  auteurs  ont  déjà  été  i'oJjjet  d'une 
mention  particulière  dans  nos  Annales  historiques.  Le  secré- 
taire Abou  U-Abbas  Abd  Allah  (fds  de  Mohammed)  en-Nachi , 
originaire  d'Anbar,  a  composé  contre  Khalil  ben  Ahmed  un 
livre  sur  la  prosodie,  où  il  traite  de  diverses  questions  dans 
lesquelles  Khalil,  sortant  du  système  (primitif)  des  Arabes 
pour  suivre  ses  vues  personnelles  et  les  arguments  nécessaires 
à  sa  discussion,  est  arrivé  à  un  résultat  qui  prouve  contre 
lui-même  et  détruit  ses  propres  assertions.  Le  même  Nachi  a 
laissé  uu   grand    nombre  de   beaux  vers,    entre   autres  un 


CHAPITRE  CXIV.  89 

S*X— ^i_5  iîOi_A_ib  cjykj  (Ji^\  \X3j\  ^J^  a<X_>.|j  ïtS,x*ni  l^À^ 
J^îj  tj^ljm^  Jc^vJî^  fi^j"^]  J<jb]  lg,Ai  j5\Xj  i<j^Jua.M  -XAJ^ 

poëme  d'une  seule  pièce  en  quatre  mille  vers  terminés  par 
une  seule  et  même  rime  en  Jia,  dans  lequel  il  passe  en  revue  les 
systèmes  philosophiques  et  religieux ,  les  sectes  et  les  croyan- 
ces diverses;  on  a  de  cv.  même  écrivain  plusieurs  poésies  et 
de  vastes  compositions  relatives  à  dilTérentes  sciences.  Un 
des  morceaux  les  plus  réussis  de  ses  poésies  est  celui-ci, 
qu'il  c()m[)Osa  lors  de  son  dé|)art  d'Irak  jiour  l'KgypIe  ;  il  mou- 
rut dans  cette  dernière  contrée  en  298  de  riiégire,  comme 
nous  ravons  dit  ailleurs  : 

0  demeures  de  nos  amis,  Irouvcrez-vous  une  voix  pcin-  cahnnr  liudcui' 
dévoranle  d'un  absent? 

Elles  ne  lY-poiiderit  pas;  mais  dans  leur  silence  quel  ensei^nemcnl  pro- 
fond pour  ceux  rpii  les  iiiterroi;('nl  ! 

Ce  désert  horrible  l'ut  jadis  animé  et  riant,  celte  solitude  morne  fut  le 
séjour  de  ceux  que  nons  aimons. 

Longtemps  nous  y  avons  goûté  les  plus  cliarmaiils  plaisirs  ;  nos  récits 
unissaient  une  veillée  h  l'autre; 

Nous  vidions  gaiemcnl  la  ronpe  nialinale,  aux  sons  de  la  Unie  it  des 
cithares. 


90  LES   PRAIRIES   D'OR. 

p  . 

CA__jj,_j  (j^_^Lii  (_^^u^  t^^L)  ^^xjU^  iJwii.5:  ^i'i  iiÀ.*«  (î^ 
J,  .«^îtX^JL  w^î  aK>î  (jw«  j_^«xJî  <_aaa»J1  li  {j*iUJi  pj^'j^  wilii 

Ali  milieu  des  roses,  des  narcisses,  de  la  lavande,  de  la  violelle,  de 
l'iris,  du  buphtlialmum, 

Du  parthénium  el  de  loiites  sortes  de  plantes,  dont  les  blanches  el  sé- 
duisantes fleurs  se  mariaient  à  la  fleur  rouge  du  grenadier. 

Puis,  dans  une  heure  d'insouciance  et  d'illusion,  la  destinée  a  détruit 
notre  félicité  parfaite  ; 

Elle  nous  a  séparés  après  notre  longue  intimité  et  a  dispersé  nos  de- 
meures, autrefois  si  voisines. 

En  2  12  de  Thégire,  Mamoun  fit  proclamer  par  le  héraut, 
que  serait  considéré  comme  anathème  et  exclu  de  la'  com- 
munauté musulmane  quiconque  accompagnerait  de  quel- 
que formule  pieuse  le  nom  de  Moâwiah ,  ou  placerait  ce 
prince  au-dessus  des  compagnons  du  Prophète;  quiconque 
déclarerait  que  certaines  parties  (seulement)  du  Koran  sont 
créées ,  etc.  On  n'est  pas  d'accord  sur  les  motifs  qui  lui  ins- 
pirèrent cette  mesure  à  l'égaixl  de  Moâwiah.  Selon  une  des  ver- 
sions qui  ont  couru  sur  ce  sujet,  elle  eut  pour  origine  une  tra- 
dition qu'un  des  courtisans  admis  aux  veillées  cita  au  Khalife  , 
sur  l'autorité  de  Moutrif  (fils  rie  Mogaïrah ,  fds  de  Chôbah) 


CHAPITRE  CXIV.  91 

^^cJI      cjIjuLsj^I  c_>Ia5o  5'^ydi  ^jLo  j,jl^  ^JJ  j^jl  jA=^ 

Jv_**_-«lj  aVaJ  cijii  *Lis-  il  ifJùe  (j;\j  Itf  ^r-^-^^  aKxs  j!5  *>s!_5 
*(^>iJ    A_j!  o»~À.jLlij  A-ftU»»  ^j^JaJCjls  l^x,*  AJs?!^-»  ■«'^-iiJ«^5   (j-^ 

le  Takéfito,  tradition  qui  est  rapportée  par  Zobeïi-,  fils  de 
Bekkar  dans  son  livre  intitulé  El-Mouwajfakyal ,  parce  qu'il 
l'a  dédié  à  son  fils  MouwalTak.  Voici  les  paroles  de  Zobeïr  : 
«D'après  ce  que  m'a  transmis  Medaini,  Moutrif  (fils  de  Mo- 
gaïrah,  fils  de  Gliùbah)  racontait  le  fait  suivant  :  J'accompa- 
gnais Mogaïrah ,  mon  père,  délégué  auprès  de  Moâwiah  ;  mon 
père  se  rendait  chez  ce  prince,  conversait  avec  lui  et,  à  son 
retour,  il  me  parlait  de  lui,  de  son  esprit  et  citait  avec  com- 
plaisance ce  qu'il  avait  vu.  Mais,  un  soir,  il  revint  et  refusa 
de  souper.  Frappé  de  sa  tristesse,  et  croyant  qu'elle  était  mo- 
tivée par  ({uelque  accident  survenu  parmi  nousou  dans  noire 
gouvernemeni ,  j'attendis  un  peu,  puis  je  me  décidai  à  lui 
en  demander  l'explication  :  «Mon  enfant,  me  répondit-il, 
je  sors  de  chez  l'homme  le  plus  scélérat  du  monde.  — 
Comment  cela.^ —  Profitant  de  ce  que  nous  étions  seuls, 
j'ai  dit  à  Moâwiali  :  l'rincc  des  Cro\anls,  |)uis(jiie  vous  êtes 
maintenant  noire  chef,  p()iir(|iioi  ne  |)as  manifester  voire 
juslice  et  élendre  vos  hicnfails?  Puisque  vous  êtes  âgé,  pour- 
quoi ne  pas  jeter  vos  regards  sni-  vos  frères  de  Hachem  el 


92  LES   PRAIlilES   D'OU. 

J«X_*_9  jrfs-J  _j-i»-l    iil.X^  c:jlAiÛ  c:>Liû  J  JUi  Xsli^   *(^   t»J^' 

Jyb  y!  ^î   «,5i  dlA^  dU^  (j\  !Jsx  u  ^l_j,i  Joti  U  J^»^ 

(^_À— i«   v*i»«£  ».dÇwj   ^X^JCrï-lj  j^*X*  fcài.1    li^X*  /oo  ).Xj  _^)  iJoLJ 

A.-J  j-5  Joiî  Jyb  y^  i'î  sySi  di.A^i  dlXtû  jt  îtX-c  u  ^î^ 

A_A_A»*_J    ^}s'À^    (^    <X.^J     (iY^    x^    t>^?°5    ki*A*    /jL<v£    bfc^l    kiLL» 

*Xi^Awl  c:.>!wo  (jiw-^  (♦ç.J  J^  i  lî^  T r*^-  f*^"^  ^^'  y'j  ^  tT-** 
il  aMÎj)  dU  J  ii  î*x_£ft  ^  Jjij  J^  j^li  ^i  J_^j  Jtx4^  ^j5 
wol  yi  (iî  viUi  Aa«j  j.A=i  i «Xjû  «V*  II  y_j"*Uî  yî^  Uii  lÀi:> 

resserrer  avec  eux  les  liens  du  sang,  car  assurément  vous 
n'avez  plus  rien  à  craindre  de  cette  famille.  —  Doucement, 
doucement,  mVt-il  répondu;  Thomme  de  la  tribu  de  Teïm 
(Abou  Bekr)  est  devenu  roi,  sa  justice  et  ses  actes  sont 
connus;  il  n'en  est  pas  moins  mort  et  sa  gloire  avec  lui;  on 
dit  rlfcou  Bekr,  et  c'est  tout.  Son  successeur,  l'homme  de  la 
tribu  de  Adi,  a  fait  du  zèle  et  s'est  épuisé  en  efforts  pendant 
dix  ans;  par  Dieu,  lui  aussi  est  mort,  sa  gloire  est  niorte 
avec  lui  et  il  ne  reste  que  son  nom  d'Omar.  Otman  notre 
frère  lui  a  succédé;  certes  il  n'eut  pas  de  rivaux,  ni  par  sa 
noblesse,  ni  par  la  grandeur  de  ses  actes;  mais  il  est  mort, 
et  avec  lui  le  souvenir  de  sa  gloire  et  de  ses  grandes  actions. 
En  vain  on  crie  cinq  fois  par  jour  en  l'honneur  du  Haché- 
mité  :  «  J'atteste  que  Mohammed  est  l'apôtre  de  Dieu  !  »  que 
reste- t-il  de  tout  cela,  bâtard?  la  tombe,  rien  que  la  tombe.  » 
Ce  serait  donc  après  avoir  entendu  celte  tradition  que  Ma- 
moun  aurait  fait  la  proclamation  dont  il  est  question  ci- 
dessus.  Des  dépêches  furent  rédigées  pour  tout  l'empire 
vouant  h  l'exécralion  le  nom  de  Moâwiah  dans  les  prières 


CHAPITRE   CXIV.  93 

HXm  (j\,*a-ui  (J'^'^^  i>i<X*Aj  t-».^^*ii)i  j,L>  ,s^i  ^J^  ù}  1^^ 

publiques  (du  vendredi)  ;  mais  cet  ordre  provoqua  le  mécon- 
tentement et  Tindignation  de  tous;  déjà  la  populace  com- 
mençait à  s'agiter,  et  Mamoun,  cédant  au  conseil  qu'on  lui 
donnait  d'abandonner  cette  entreprise,  dut  renoncer  aux 
projets  qu'il  méditait. 

Sous  son  règne  mourut  Abou  Arem  Nebil,  dont  le  nom 
est  Dahliak  (fils  de  Makhled,  fds  de  Sinan  Clieibani),  en 
2  12  de  l'hégire.  —  Même  année,  mort  de  Mohammed  (fds 
de  Yourouf)  Farabi.  —  Kn  2 15  .  sous  le  même  ivgne,  mou- 
rurent :  Ilawdaii  (fds  do  Khalilali,  fds  d'Ahd  Allah,  (ils 
d'Abou  Bikrah) ,  surnommé  yl6ou  'l-Achhab;  décédé  à  Bagdad . 
à  l'âge  de  soixante  et  dix  ans,  il  fut  enterré  près  la  Porte 
de  Baradàn,  dans  le  (piartier  oriental  de  cette  ville;  -  Mo- 
hammed (fds  d'Abd  Allah,  fds  de  Moteniia,  fils  d'Abd 
Allah,  fds  d'Anas,  (ils  de  Malek  Ansari);  -  Ishak  (fils  de 
Tabbà),  moil  à  Adanali  sur  la  frontière  syrienne;  —  Moâ- 
wiah  (lils  (rAiiii    ,  smiionuué  Ahon  Anir;         Kabicah  f  fils 


94  LES   PHAIHIES   D'OR. 

^Ijf  AjLw  ^_5       1^aA£  <_»««K*j  /j6   Jsj_j  (j*.^iXxfi  '"jr'V*  tA-JCi^   *-»â-« 

p 

*l_À_j  jj  ç.  -^  y 6  «xï^  CAr'  u^    UL>^^'  'j^  ij^'*-^^^  éyjit,£. 

d'Okbah),  surnommé  Ahou  Amir,  de  la  famille  d'Amir  ben 
Sâsâah. 

En  217,  Mamoun  se  rend  en  Egypte  et  y  fait  mourir 
Abdous,  qui  régnait  despotiquement  sur  cette  contrée.  En 
218,  il  conduit  une  expédition  dans  le  pays  des  Grecs.  Il 
avait  entrepris  la  reconstruction  de  Tovvanah  [Tvdva,  au- 
jourd'hui Kilissèhirar) ,  ville  grecque  à  l'entrée  du  défdé,  sur 
la  route  de  Tarsous.  Il  proposa  une  capitulation  à  toutes 
les  places  fortes  des  Grecs  en  les  invitant  à  embrasser  l'isla- 
misme, et  leur  laissa  le  choix  entre  la  religion  nouvelle,  la 
capitation  ou  le  sabre  ;  le  christianisme  fut  abaissé  et  un 
très-grand  nombre  de  Grecs  se  soumirent  à  la  capitation. 

Le  Kadi  Abou  Mohammed  Abd  Allah  (his  d'Ahmed,  fds 
de  Zeïd),  originaire  de  Damas,  nous  a  raconté  ce  qui  suit, 
dans  cette  même  ville.  Lorsque  Mamoun  (que  Dieu  ait  son 
àme!) ,  poursuivant  son  expédition ,  vint  camper  sur  le  Bedi- 
doun  (Podendon),  un  ambassadeur  du  roi  de  Byzance  lui 
apporta  \c  message   suivant:  «Le  roi  vous  propose  ou  de 


CHVPITRK   ex IV.  /    95 

rembourser  tous  les  frais  cfe  guerre  depuis  que  vous  avez 
quitté  votre  pays  jusqu'à  votre  arrivée  daus  cette  contrée, 
ou  de  restituer,  sans  rançon  ni  payement  d'aucune  sorte , 
les  prisonniers  qui  se  trouvent  internés  en  pays  grec;  ou 
bien  de  réparer  et  de  remettre  en  bon  état  les  pays  musul- 
mans ravagés  par  les  chrétiens,  à  la  condition  que  vous  met- 
trez fin  à  la  guerre.  »  Mainoun  se  leva,  entra  dans  sa  tente, 
fit  une  prière  de  deux  rakâl,  et,  après  avoir  consulté  la  volonté 
de  Dieu ,  il  revint  et  répondit  à  l'envoyé  :  «  Dis  à  ton  maître 
de  ma  part  :  Relativement  à  ton  olTre  de  payei-  les  frais  de  la 
guerre, je  me  suis  ra])pelé  les  paroles  que  Dieu,  en  son  saint 
livre,  place  dans  la  bouche  de  Bilkis  :  «Je  leur  enverrai 
des  présents ,  et  j'attendrai  la  réponse  de  mes  envoyés.  » 
Lorsque  l'envoyé  de  la  reine  se  présenta  chez  Salomon, 
celui-ci  lui  dit  :  «  Vous  voulez  donc  augmenter  mes  trésors  .^ 
Ce  que  Dieu  m'a  doimé  vaut  mieux  que  les  biens  qu'il  vous 
a  accordés;  mais  vous,  vous  mettez  votre  bonheur  dans  vos 
richesses.  »  [Koran,  xxvii,  35-30).  A  ta  proposition  de  ra- 
patrier toul  prisonnier  (niisulman  interné  chez  lesCirecs,  je 


96  LES   PRAIRIES   D'OR. 

JOj  (^_Jfc»*i*^  ùJo  Jo  j.^xi>  JjI   A.}y&  Ulj   «J-W.I   aMÎ   dlj  !^ 
aljv^^l^  »I»X_:^Î_5  oJU*  Ld^t  Jl=-  i  «yie  c:^^  aî^L 

fii-X\    x-*JL-«5  (;j^-«-îl  t^  v-ÀijJ  (j_j>ai^  (j^  aKa«^  ^f^y'  (S''*' 

iy*hÉL    iyiSj    3UAi>^lî    *rV!^^    *-«è>lAJj    OjU-O^    H-***^    ^i"     ^-^^^ 

réponds  :  Tu  n'as  en  ton  pouvoir  que  deux  sortes  de  pri- 
sonniers :  les  uns  ont  corajjattu  pour  Dieu  et  pour  leur  salut , 
et  ils  ont  atteint  leur  but;  les  autres,  pour  les  biens  de  ce 
monde ,  et  ils  ne  méritent  pas'  que  Dieu  brise  leurs  fers. 
Quant  à  ton  offre  de  réparer  les  dégâts  commis  par  les  Grecs 
sur  le  territoire  musulman,  sache  que,  quand  bien  môme 
j'aurais  arraché  la  dernière  pierre  de  la  dernière  de  tes  for- 
teresses, je  n'aurais  pas  encore  assez  vengé  la  pauvre  femme 
qui ,  trébuchant  sous  le  poids  de  ses  chaînes ,  s'écriait  :  «  O 
Mohammed ,  Mohammed  !  »  Retourne  chez  ton  maître  :  entre 
moi  et  lui  il  n'y  a  plus  que  le  sabre.  Page,  qu'on  sonne  le 
départ!  »  Et  continuant  sa  marche,  il  ne  s'en  détourna  plus 
avant  d'avoir  pris  quatorze  places  fortes.  C'est  alors  qu'il 
revint  sur  ses  pas  et  campa  sur  la  rivière  Bedidoun,  plus 
connue  sous  le  nom  de  Kochamih,  comme  nous  l'avons  dit 
dans  les  pages  précédentes  (cf.  ci -dessus,  p.  1);  il  s'y  ar- 
rêta en  al  tendant  le  retour  des  envoyés  qu'il  avait  laissés 
dans  les  places  fortes,   et  il  campa  sur   les  bords  et  à  la 


CHAPITRE   CXIV.  97 

source  même  de  cette  rivière.  Captivé  par  cette  eau  fraîche, 
pure  et  limpide ,  par  la  beauté  et  la  riante  végétation  du  pays 
il  fit  couj^er  et  étendre  au-dessus  de  la  source  de  longues 
poutres,  sur  lesquelles  on  construisit  une  sorte  de  portique 
en  planches  et  en  feuillage,  et  il  s'établit  sous  cet  abri  rus- 
tique au-dessous  duquel  coulait  la  source.  On  y  jeta  une 
belle  pièce  d'argent,  et  on  put  en  lire  la  légende  au  fond  de 
la  rivière  tant  l'eau  était  limpide;  cette  eau  était  si  fraîche, 
que  personne  ne  pouvait  s'y  baigner.  Sur  ces  entrefaites  ap- 
parut un  poisson  long  d'une  brasse  et  brillant  comme  un 
lingot  d'argenl.  Une  prime  fut  promise  à  qui  le  rapporte- 
rait; un  fcrrach  (valet  de  pied)  se  liàtatle  descendre,  attrapa 
le  poisson  et  remonta  sur  la  berge;  mais,  comme  il  s'appro- 
chait de  la  rive  ou  de  la  cabane  dans  laquelle  Manioun  était 
assis,  le  poisson  s'agita,  glissa  à  tiaxcrs  ses  inains  et  retomba 
comme  une  pierre  au  fond  de  l.i  sourc*-.  LVau  rejaillit  sur  la 
poitrine,  le  cou  et  les  épaules  du  Kiialifc  cl  mouilla  ses  vête- 
ments. Le/i'/vv/t/t  leflesccndil,  rallrapa  le  poissou  et  le  plaça 
tout  frétilla  ni  dans  une   serviette  devint  le  KlialiCe.  Au  nio- 


98  LES   PUAIIUES  D'OU. 

>wJ!  .oj^i  y^^  i^y*-  yi^AÀ)!   c:j^>^iji^  jJJij   ç^j-kàXî   Jl  Jy>- 
jLjC_^i   Lij  IgJU  s>■^^  JjUj  (jJ-£  *^*  j.-£û  U  AK*-i  iXSj  lyÀ^ 

^j_jj  j.^JiJu9  sjLiL^^   »|jo  (j-^-Ç  t)-*^  *j~*^  tr*  ^î^^'  (^^ 

ment  où  il  ordonnait  de  ie  faire  frire ,  Mamoun  fut  pris 
d'un  frisson  subit  et  ne  put  bouger  de  place;  on  eut  beau 
l'envelopper  de  couvertures  et  de  pelisses ,  il  tremblait  comme 
la  feuille  et  criait  :  J'ai  'froid  !  j'ai  froid  !  On  l'emporta  dans 
sa  tente,  on  le  couvrit  de  vêtements,  on  alluma  un  grand 
feu ,  mais  il  continuait  à  se  plaindre  du  froid.  Quand  le 
poisson  fut  apprêté,  on  le  lui  apporta,  mais  il  n'y  goûta 
pas  et  ne  put  y  toucher  tant  sa  souffrance  était  grande. 
Son  état  empirant,  Moutaçem  (son  frère)  interrogea  alors 
Bakhtiechou  et  Ibn  Masaweïh  sur  la  situation  du  malade, 
qui  était  déjà  à  l'agonie;  il  leur  demanda  ce  que  la  science 
en  concluait  et  si  elle  pouvait  encore  lui  rendre  la  santé.  Ibn 
Masaweïh  prit  une  des  mains  du  malade ,  Bakhtiechou  l'autre , 
et  ils  lui  tâtèrent  le  pouls  en  même  temps  :  ses  pulsations 
irrégulières  annonçaient  une  fin  prochaine.  Leurs  mains  se 
collaientà  sa  peau  par  l'effet  d'une  sueur  qui  sortait  de  tout 
son  corps  et  coulait  comme  un  sirop  ou  la  bave  d'une  vi- 


CHAPITUE   CXIV.  '^        99 

ijo   iji;— «-J   ^-J)-Miw*j    l<yj^ji  c-cdjjjJij  j!!5^^^lj  *UÀil»  )j»XÀ^ 

<5o:j^A*  [^'kî  ^ijj^!  dUi  ^  Uy^l—j  dUiXj  xs^iAxli  ^^.As^L* 
j-Aris^U  (^*îl_j  {Aij^Ii  i^ru,!  ^^  |O^L*i  p_5yi  ^j^  ^J*.b!  jlA.àii.L 

père.  Moulaçem,  instruit  de  cette  circonstance,  en  demanda 
l'explication  aux  deux  médecins;  ils  ne  purent  la  lui  donner, 
parce  qu'ils  ne  Favaient  trouvée  dans  aucun  de  leurs  livres, 
mais  ils  déclarèrent  qu'elle  annonçait  une  prompte  décompo- 
sition de  l'organisme.  En  ce  moment,  Mamoun  reprit  con- 
naissance et  sortit  de  sa  torpeur;  il  ouvrit  les  yeux,  fil  appeler 
des  gens  du  pays  et  les  interrogea  sur  le  nom  de  la  source 
et  de  la  localité.  Des  prisonniers  et  des  guides  auxquels  on 
<lemanda  ce  ({ue  signifiait  le  nom  de  cette  rivière,  qui  est 
Kochaïrali,  le  traduisirent  par  «  Etends  tes  pieds  »  (c'est-k-dire: 
Meurs).  Le  moribond  s'émut  de  cette  réponse  et  en  connut 
de  tristes  pressenlinionls:  il  voulut  ensuite  comiaitre  le  nom 
aiahedu  pays:  on  lui  répondit  qu'il  s'ap[)elait  y»V//i7.-rt/i  (plage, 
terrain  mou).  Or  l'horoscope  tiré  au  moment  de  la  naissance 
de  Mamoun  annonçait  qu'il  mourrait  dans  une  localité  de 
ce  nom;  voilà  pourquoi  ce  prince  évita  toujours  de  résider 
dans  la  ville  de  Rakkali ,  craignant  d'y  trouver  la  mort.  Quand 

7- 


100  LES  PRAIRIES  D'OR. 

U^  aaï  yû  Lf  A^:5A.i.  J-*^  A3_ji»-  ^ULiii  y^j^Ul  jM2s>~\^ 

SjL^aJIj   yi;Hs4^J   (O-^  (A^  Ô^-iiU  ^J-^^  J^^   dl.ii^    c^X» 

il  entendit  la  réponse  que  lui  firent  ces  Grecs,  il  ne  douta 
plus  que  ce  ne  fût  le  lieu  même  prédit  par  son  horoscope. 
—  D'après  une  autre  version,  c'est  le  mot  Bedidoun,  qui  si- 
gnifierait «  Étends  tes  pietls.  >«  Dieu  sait  mieux  la  vérité. 

Il  fit  appeler  ses  médecins,  espérant  qu'ils  le  guériraient; 
mais,  se  sentant  plus  mal,  il  demanda  qu'on  le  portât  hors 
de  sa  tente,  afin  de  promener  ses  regards  sur  son  camp,  et 
d'examiner  encore  une  fois  ses  soldats  et  son  royaume. 
C'était  pendant  la  nuit.  Quand  sa  vue  plongea  sur  ces  tentes, 
sur  ces  longues  fdes  de  troupes,  sur  ces  lumières  qui  bril- 
laient au  loin;  il  s'écria  :  «  Ô  toi  dont  le  règne  ne  finira  pas, 
prends  en  pitié  celui  dont  le  règne  va  finir!  »  On  le  rapporta 
sur  son  lit.  Moutaçem ,  voyant  que  son  état  s'aggravait ,  chargea 
quelqu'un  de  réciter  à  son  oreille  la  profession  de  foi  mu- 
sulmane; comme  cet  homme  élevait  la  voix  pour  que  Ma- 
moun  répétât  ses  paroles,  Ibn  Masaweïh  lui  dit  :  "Ne  crie 
donc  pas,  car  en  vérité  il  ne  saurait  maiiilciiani  distinguer 


CHAPITRE  ex IV.  101 

ajiXa?  ^j^Ja^JI  Jjla?  tKsJÎ^  laj»  aNJL«  w  ^  U  ^Ljj-^i^  w*5il^ 

^LjC    A_À_ax    ^-r'^^J    CJ-*   •— W-*-?     *^^    &wii>£   cb^Kil    (j^rtjk^il    j,fcj) 

<xX_*_5T   (j^Xiwî^j  i<À*w.i»- jU^lj  i^UfcJljsîj  ».A^j  ^l*«*sw  ,Ui^| 

^j-c  jj.ji  (^>^\s  Uaaj  (jw«  ^^^^  l^  LJoj.*i*v»  (^  ^•^^5  «^J» 

entre  son  Dieu  et  Manès.  »  Le  moribond  otiviit  ies  yeux;  ils 
étaient  démesurément  grands  et  brillaient  d'un  éclat  extra- 
ordinaire; ses  mains  eberchèrent  à  saisir  le  médecin;  il  fit 
un  eiïbrt  pour  lui  parlei'  et  ne  put  y  réussir;  ses  yeux  se 
tournèrent  vers  le  ciel  et  se  remplirent  de  larmes;  enfin  ,  sa 
langue  se  déliant,  il  prononça  ces  mots  :  «  O  toi  (jui  ne  meurs 
pas,  prends  en  pitié  celui  qui  va  mourir!"  et  il  expira 
aussitôt  (jeudi,  treizième  jour  avant  la  fin  de  redjeb  218). 
Son  corj)s  lut  transj)orté  à  Tarsous  et  inbunK-  dans  cette 
ville, conmie  nous  Favonsditau  commencementducbapitre. 
Les  beaux  traits  de  l'histoire  et  de  la  biographie  de  \Ia- 
nioun,  ses  conlerences,  ses  poésies  remarcpiables,  ses  belles 
(|ualités  se  trouvant  rapportés  en  détail  dans  nos  ouvrages 
précédents,  nous  n'avons  pas  à  y  revenir  ici.  C'est  à  lui  cjue 
se  rapportent  les  vers  suivants  d'Vbou  8àïd  Makii/.ounii  : 

F,st-cc  que  tu  ,13  vu  Ifs  astres  protéger  Maiiioiiii  et  sa  royaul(^  si  solide- 
ment étahlie? 


102  LES   PRAIRIES  D'OR. 

(;jv-*  ^^  (j^^  »'^^  -^i*  ^-^^  tS«>Ji  fr>^î   i  /o-t«aX*y  ^.»rii 

(j-i    0»-A-JLj    *^-sJ    iy*i*S.    c1>5\jLI    ^j<^.^h>^    i»^  jJ*^    yjjsjjsjjj 

Non,  i)s  l'ont  abandonné  entre  les  deux  places  de  Tarsous,  comme 
ils  avaient  abandonné  son  père  à  Tous  (Mechhed,  sépulture  de  Réchid). 

Mamoun  répétait  fréquemment  ces  vers  : 

Quand  les  disgrâces  delà  fortune  s'acbarnent  contre  l'homme,  le  jour 
vient  où  elles  le  renversent. 

Elles  peuvent  le  manquer  une  fois,  mais  elles  ne  tardent  pas  à  réparer 
leur  faute  ; 

Et  tandis  qu'il  se  détourne  pour  éviter  leur  atteinte,  elles  le  prévien- 
nent et  l'accablent  avant  qu'il  ait  pu  s'y  soustraire. 

CHAPITRE  CXV. 

KIIALIFAT     DE      MODTAÇEM. 

11  fut  proclamé  le  jour  même  où  Mamoun  mourait  près 
de  la  rivière  Bedidoun,  c'esl-à-dire  le  jeudi,  treizième  jour 
avant  la  fin  de  redjeb  218;  son  nom  était  Mohammed  (fds 
de  Haroun  er-Réchid)  et  son  surnom  Ahoa  Ishak.  Un  dissen- 
timent, dont  le  trône  était  l'objet,  s'éleva  d'abord  entre  lui 
et  Abbas,  fils  de  Mamoun;  mais  son  compétiteur  finit  par 


(JIAIMTUE   G XV.  lOa 

CA_3^it   jiJi  i  ^^-«^^  Qr»  o*'^-^*^'   C:3^^^  **^  U^J  OJ^'   3.  ■ 

o^-À-j  «:>jU  L^J  Jl-«L_>  A_x»lj  ^j^^.;!:^  iiÀAM  ^^"5^^  (jLc 
<j-«  j!->*o  i»J5  cj^-^^^  iwiiw*  f'***^  x*.wi  ^_j«>  «J^i  (J>^j  fc^AA»; 
iLÀ-u(  c:5^J«J;lJ  <— a-a»»  ^i  ^^  (j%JoU^  ^jjyitS-^  ^<^  x^  ^^Ij 

Sj-JL^^  j.^^]  ^Lff^   (J>rÂ*M   y  Le  XCiS^i».   c:^Kj  j4^t    «j-i**j 

sXxc  ^jj  kX^î-  Jj^  ^j  ^^iJtli  :>\^^  j,i  (^  *>^.^l  i^^s-  <-r^^ 
A.»-Jb   i   yl(j    J^il    J_5   yi    Jl    c>i'5^^ij   /«MOAxiî    pM   i    JiXi 

lui  prêter  serment.  Moutaçem,  à  son  avènement,  était  âgé 
de  trente-huit  ans  et  deux  mois;  sa  mère  se  nommait  Mari- 
dah,  fdic  de  Chébib.  Quelques-uns  placent  son  avènement 
au  trône  en  l'année  219.  Il  mourut  à  Sorra-men-râ,  en  227, 
âgé  de  quarante-six  ans  et  dix  mois,  après  un  règne  de  huit 
années  et'huit  mois.  Son  tombeau  est  dans  le  djausak  (pa- 
lais ou  pavillon)  de  cetlo  même  ville. 

IIÉSUMÉ   DE  SON   UiSTOHlE  I:T    DE  SA    VIE  ;    APEllÇU   DES    ÉVÉNEMENTS 
DE  CETTE    ÉPOQUE. 

Moulaçem,  malgré  Tinfluence  que  Ahmed  ((ils  dWhou 
Douad),  le  juge ,  exerçait  sur  son  esprit,  conserva  son  vizir 
Mohammed  (Hls  d'Abd  el-Mélik)  Zcvj«ï  jusqu'à  la  fin  de 
son  règne.  Ce  Mohanmied  remplit  ses  fonctions  de  ministre, 
non-seulement  sous  le  règne  de  Moutaçem,  mais  encore 
sous  son  successeur  le  Khalife  W'alik,  cl  jusqu'à  lavcne- 
nu'iit  (!<•  Mulcwckkil,   l((|ucl ,  satislaisanl   an  rcss«'nlinicMf 


104  LES  PRAIRIES  D  OR. 

(j^a-=»;^^j    -e-jt^-S-îî   (jiwV«jj  Jî_j-*^l  j-aJOij   ^lys- _j5j^  W'i^-^^ 

qu'il  avait  conçu  contre  lui,  le  fit  mourir.  Nous  toucherons 
quelques  mots  de  ce  meurtre,  plus  loin,  au  chapitre  de 
Motewekkil ,  sans  préjudice  du  résumé  que  nous  avons 
donné  déjà  dans  l'Histoire  Moyenne. 

Moutaçem  favorisa  l'agriculture:  «  Cet  art,  disait-il,  ren- 
lerme  de  nombreux  avantages  :  en  premier  lieu,  c'est  l'a- 
griculture qui  féconde  la  terre,  mère  nourricière  du  genre 
humain;  c'est  elle  qui  permet  le  prélèvement  du  kharadj 
(impôt  foncier);  elle  développe  la  richesse  publique;  elle 
nourrit  les  animaux  domestiques,  abaisse  le  prix  des  den- 
rées, augmente  les  sources  du  commerce  et  accroît  le  bien- 
être.  »  Aussi  disait-il  à  son  vizir  Mohammed  ben  Abd  el-Mélik  : 
«Quand  tu  trouveras  une  terre  qui,  pour  une  dépense  de 
dix  dirhems ,  me  donnera  au  bout  d'un  an  un  rendement 
de  onze  dirhems,  il  est  inutile  que  tu  prennes  mes  ordres  à 
cet  égard.  »  Ce  prince  était  doué  d'une  vigueur,  d'une  force 
corporelle  peu  comimunes,  et  d'une  grande  énergie  morale. 
Voici  ce  que  raconte  Ahmed  (fils  d'Abou  Douad),  qui  fut 
un  de  ses  favoris  :  «  A  l'époque  où  Moutaçem  cessa  de  raé- 


CHAPITRE   CXV.  105 

«^Jv.itf'!  (j*/jJ5  iXl  '.^'3  wsAOjJU  S^L^I^  dl.«w.Jt  j^il  ^i*^ 
oi-la-A_j  ijy^\  jjSS  i  ^jfe'^  l^jLk^j^  liûiiî  ji-^j"  ^^-^^î  *i 
^^Liîlifc.  Ljuîi  ^^aXc  ci^^ji  iii   [«^j^^i  jUai   jj^*i^ ^^jLXjj  sijs^ 

nager  sa  santé  et  ses  forces,  je  me  présentai  un  jour  chez 
lui  et  le  trouvai  avec  (son  médecin)  Ibn  Masaweïli;  le  kha- 
life sortit  un  moment,  après  m'avoir  recommandé  de  ne 
pas  m'éloigner  jusqu'à  son  retour.  ••  Mon  cher,  dis-je  à 
Yahya  ibn  Masavveïh ,  il  me  semble  que  le  Prince  (.les  Croyants 
a  les  traits  altérés;  ses  forces  baissent,  sa  vivacité  diminue. 
Comment  le  trouves-tu  toi-ménie?  —  Certes,  répliqua  le 
médecin,  le  prince  est  solide  comme  une  barre  de  fer,  mais 
il  a  dans  les  mains  une  hache  dont  il  Irappe  sans  cesse  cette 
barre,  —  Comment  cela?  lui  demandai-jc  —  il  reprit  : 
«  .Vuparavanl  il  ne  mangeait  du  poisson  qu'on  l'assaisonnant 
d'une  sauce  faite  de  vinaigre,  de  carvi,  de  cumin,  de  rue, 
de  céleri,  de  moutarde  et  de  noix;  or,  en  faisant  usage  de 
cette  sauce,  il  évitait  les  inconvénients  de  la  chair  de  poisson 
et  les  dangers  auxquels  elle  expose  le  système  nerveux.  S'il 
se  faisait  servir  des  léles  (de  mouton  on  de  btruf),  il  les 
arrosait  aussi  de  sauces  qui  rendaient  cette  nourriture  inof- 
feusivc;  el  plus  légèie;  euliii,  en  loule  circouslance,  il  se 
ménagf'ail   au\   repas  cl  1110  (onsuil.iil   IV/'cpieinuit'iil.    Mais 


10()  LES  PRAIRIES  D'OR. 


L,  siX_A_j3  cuAiii  AA3  0.^  U  j^jh*.j  vA-*«*]i  ^^jLAà.  A.Aa.Axil^  Je 
[àAs.  ^fS-  if^"!^  (j^  cjj  l-fc^  o^i»-  i  ^■A^  t4)-^^'  ^j  *^' 

J-A^  ^ji   (^.A-i:  i  J.i-i  U  *>ot>   5*ki£>  Jlïj  dLs^RJ  -!^l  oj.*3i 

aujourd'hui,  dès  que  je  lui  défends  quelque  mets,  il  me 
désobéit  et  dit  :  J'en  mangerai  au  nez  et  à  la  barbe  d'Ibn 
Masaweïli!  Que  puis-je  faire  à  cela?  r.  Le  narrateur  ajoute  : 
«  Moutaçem,  caché  derrière  le  rideau,  nous  écoutait.  —  Je 
répondis  au  médecin  :  «  Eli  bien,  Abou  Yahya,  il  faut  lui 
faire  violence.  —  Que  ma  vie  soit  la  rançon  de  la  tienne, 
reprit  celui-ci,  je  ne  peux  le  contredire  et  je  n'ose  lui  tenir 
tête.  »  Il  achevait  à  peine  de  parler  que  le  Khalife  se  présen- 
tait devant  nous  et  me  disait  :  «  De  quoi  parlais-tu  avec  Ibn 
Masaweïh?  —  Prince  des  Croyants,  je  discutais  avec  lui  sur 
l'altération  de  votre  visage  et  sur  votre  peu  d'appétit,  ce 
(jui  me  mine  et  me  fait  dépérir. —  Et  que  t'a-t-il  répondu? 
—  11  s'est  plaint  de  ce  qu'après  avoir  accepté  ses  conseils  et 
suivi  ses  prescriptions  dans  votre  régime,  vous  lui  désobéis- 
sez maintenant.  —  Qu'as-tu  répondu  à  cela?  me  demanda 
le  Khalife.  »  J'essayai  de  détourner  la  conversation,  mais 
il  ajouta  en  riant  :  «  Bien,  mais  est-ce  après  ou  avant  qu'd 
m'aura  fait  violence?»  Une  sueur  froide   me  parcourui   le 


CIIAPITKE    CXV.  107 

^!^  )**.  il  Jw^t   iuw^A>^  Aaà  (:::<o<xJI  «-.ys^  ijya.\\  «^a^  ^I^^ 

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13*-^^  y^  ^l)  <J  ^v^!  l-*-â-j'5  *-*-*'^  *x.^^-À-4^  m-^  ci^  JLJ»-» 

corps;  je  compris  qu'il  avait  surpris  notre  entretien;  mais 
il  remarqua  mon  trouble  et  me  dit  :  «  Ahmed,  que  Dieu  te 
pardonne  I  Tu  as  pris  gaiement  ce  que  je  croyais  que  fu 
n'apprendrais  qu'avec  tristesse  ;  mais  je  ne  trouve  dans  tes 
paroles  qu'une  sorte  de  franchise  et  de  lamiliarité.  » 

Moutaçem  admettait  dans  son  intimité  Ali  (fils  de  Djo- 
neid)  Eskafi,  homme  étrange  dans  son  extérieur,  étrange 
dans  ses  discours,  et  doué  de  ce  sans-gêne  qui  est  particu 
lier  aux  habitants  du  Savvad.  Un  jour,  le  Khalife  dit  à  Mo- 
hammed ((ils  de  Hammad)  :  «  Va  demain  chez  Ibn  ei-Djo- 
neïd  et  dis-lui  qu'il  se  prépare  à  voyager  à  coté  de  moi  dans 
ma  litière.  »  Mohammed  se  rendit  cho/.  celui-ci,  lui  lit  con- 
naître les  ordres  du  Prince  et  l'invita  à  se  conformer  aux 
conditions  exigées  de  celui  qui  a  l'honneur  (récpiilibrcr  la 
litière  d'un  khalife.  "Quelles  <;onditions.^  deinaiula  Ibn  el- 
Djoneïd.  Dois-je  me  procurer  une  autre  léte,  acheter  un(! 
fausse  barbe,  ajouter  à  ma  taille?  .h;  suis  tout  prêt,  cl  phis 
qu'il  ne  faut.  —  Comment,  lui  dit  son  interlocuteur,  tu  ne 
connais  |)as  encore   les  conditions  recpiises  pour  accouipa- 


108  LES  PRAIRIES   D'OR. 

JLJLj  *.,<— xJilfc*^  *LiXiïi  ^^]j^  loy-w  U  «x«j  (^j ->>■'■)  i-x**J 
Iaj:>!  yl(5  :>VV  (ji^  ^  J^  t^j*^^^  "^^  (^  ^J  «^^^^  (^  (^2 
<:iA_j<x_J.L>  cLà-jc-^^I  ^j3i\.*Jlî  ]oj.*i  v^  f*^^  u'^  ^^*-:?^ 

-b  yij  f^AJ  jt  2^  'J*-*^*,  *^^-*«  ''i?*^^  W^  J*XJU  45JÎ  ^lo^i 
^jl^  AS-iÇjff  J-*^  •^    w^l>  JU  IxA^T  Ub  ^,1  L«y-iiJ   *a5Ïj  yû 

gner  les  Khalifes  et  voyager  de  pair  avec  eux?  —  Quelles 
sont-elles?  reprit  Ali,  dis-moi  ce  que  tu  en  sais.  »  Ibn  Ham- 
mad,  homme  poli,  élégant  et  chargé  d'ailleurs  des  fonctions 
de  chambellan,  lui  répondit  en  ces  termes  :  «  Voici  quelles 
sont  ces  règles  :  il  faut  s'abstenir  de  pat  1er,  de  converser  et 
de  manger;  on  ne  doit  ni  cracher,  ni  tousser,  ni  éructer, 
ni  se  moucher;  il  faut  précéder  le  maître  en  montant  et  le 
laisser  descendre  le  premier,  de  peur  que  la  litière  ne 
penche.  Le  compagnon  de  voyage  qui  néglige  ces  règles  ne 
vaut  pas  mieux  que  le  lest  de  plomb  dont  on  se  sert  pour 
équilibrer  le  palanquin.  Il  ne  doit  pas  s'abandonner  au  som- 
meil, même  si  son  maître  dort;  il  faut  au  contraire  qu'il  se 
tienne  éveillé  et  observe  les  égards  dus  à  son  compagnon 
et  les  exigences  de  la  place  qu'il  occupe  à  côté  de  lui,  car 
s'ils  dormaient  en  même  temps  et  que  la  litière  vînt  à  pen- 
cher soudain  d'un  côté,  lu  n'ignores  pas  l'accident  qui  pour- 
rail  on  résulter.»  Ali  (fds  de  Djoneïd)  le  regardait  attenti- 
vemcnl;  ennuyé  des  explications  el  du  cérémonial  déroulés 


CHAPITHE  CXV.  109 

vii-^àj  Jlj  Lv  *.xaJCxJè  JLjj   ^^•^  (jJÎ  T^t'J^  0^-^^^^^3  «i^'j 

iojjj-ii^  j*^  tiT^j^'  J^^4^  ^-^-^  •^y*'j)  yi  Jli  J^*ÀJ-  5Aj 
i^xS'jotjLj  ^j  ^^j  ii  JUi  (Jl^i  ^_jJciwj  ^Ui.Ji  ,j«L*..=>- 

uaIj^j  '■^^S.  cy^w»»»j  *L«uiIÎ  <3^lî?-  ^jli  wîiA^tji  (jî  c^/cAAàj  yi« 

par  le  chambellan,  il  rinterrompit  et,  se  servant  de  lexcla- 
mation  favorite  des  gens  du  Sawad,  il  s  écria  :  «  Ah  harrha, 
va  dire  à  ton  maître  que  pour  voyager  avec  lui,  il  faut  être 
un  bâtard  et  un  cornardi  »  Ibn  Hammad  alla  rapporter 
ces  paroles  au  Khalife.  Celui-ci  se  mit  à  rire,  lit  appeler 
Ibn  el-Djoneid,  et  lui  dit  :  «  Eh  quoi!  Ali,  je  l'envoie  cher- 
cher pour  voyager  à  mes  cotés,  et  tu  refuses?  »  Ali  répon- 
dit :  «  C'est  que  votre  envoyé  est  un  sot,  un  crétin,  qui  est 
venu  me  faire  des  propositions  pareilles  à  celles  de  Djessas 
de  Chach  ou  de  khalaweïh  le  mime  :  ne  crache  pas,  ne  fais 
pas  ceci,  fais  cela.  »  Et  il  se  mit  à  gesticuler,  à  faire  claquer 
SCS  doigts  (littéral,  ses  lettres  sad,  c'est-à-dire  le  médius  et  le 
pouce  superposés  et  figurant  cette  lettre) ,  à  remuer  leS  mains 
en  ajoutant  :  «Ne  tousse  pas,  n'éternue  pas!  »  Non,  tout 
cela  ne  me  va  pas  et  je  n'en  peu\  mais;  si  vous  voulez  que 
je  voyage  ii  vos  côtés,  il^faut  me  permettre  vents  et  pets  de 
toute  sorte,  et  vous  en  permettre  tout  autant  à  l'occasion, 
sinon  nous  \w  ferons  pas  alV.iirc  cnscnihle.  "  \jh  dessus.  Mou 
larcin  éclala  de  rire  t'ii  Irépignaiil  d'aise;  après  avoir  donne 


110  LES    PUAIKIES    D'Oi;. 

AAaAxlt^   L'^rS^  *iWW>  0^=?"  ti  (j5  (fc*^î  y*J  4^^  W»*  t^^  ^ 

libre  cours  à  son  hilarité,  il  lui  dit  :  «  Soit,  accompagne-moi 
à  ces  conditions.  —  Bien  volontiers,  >>  répondit  l'autre.  Et  il 
se  plaça  côte  à  côte  avec  le  Khalife  dans  un  palanquin  chargé 
sur  le  dos  d'un  mulet.  Au  bout  d'une  heure  de  route,  et 
tandis  qu'ils  traversaient  la  plaine  :  «Prince  des  Croyants, 
dit  Ali,  voilà  la  chose  qui  se  prépare;  qu'en  dites-vous?  — 
A  ton  aise,  et  quand  tu  voudras,  répondit  le  prince.  — 
Veuillez  faire  appeler  Ibn  Hammad.  »  Le  khalife  donna  des 
ordres  en  conséquence.  «Viens  ici,  dit  Ali,  j'ai  un  secret 
à  te  confier.  »  Ibn  Hammad  s'approcha,  Ali  ne  se  retint 
plus  et  lui  tendant  sa  manche  :  «  Je  sens  quelque  chose  qui 
se  promène  là-dedans,  vois  donc  ce  que  c'est.  >>  Le  cham- 
bellan y  fourra  sa  tête,  et  suffoqué  par  une  puanteur"  into- 
lérable, il  répondit  :  «  Je  ne  vois  rien,  mais  je  ne  savais  pas 
qu'il  y  eût  des  latrines  dans  le  fond  de  ta  tunique.  "  Cepen- 
dant Moutaçem,  se  bouchant  le  nez  avec  sa  manche,  riait 
à  gorge  déployée;  Ali,  continuant  ses  bordées  sans  désem- 
parer, dit  alors  à  Ibn  Hammad  :  «  Tu  m'as  recommandé  de 
ne  pas  tousser,  cracher,  ni  me  moucher,  je  me  suis  gardé 


ciiAprmE  cxv.  m 

lilJi  jjL5  (j^-j*.  AJ^.o  (Wj_j  «o-AfiAxii  JUi  (_$^-:i.i  *Xj)Ij  j_j*XJiJi 
JUi  »i_^i  cjJôjb^  U^   iCA^Î  ovu*oî    jUjj   (iJr,I   ^  J   U  '^ 

ilî     CiV_j!    U    CvJI    IfjXi    ÀyJ>S    ^\    »Xjji    j^jJl    -USTl    tXlUifc    *i 

Xi  -«^^i  S' TiS  Jlï  ^^JSjC-  iJ  ^  JLj  *J»  /o-AaùJtJLl  dLa^j  ^j*yJbî 
^j„ij_5       iL^U  ^^   (j^  (Ajl^  lX^-SJ  (3"^j   f*^--^^   '-^^   ^■iSÎ^   J«A£iî 

de  le  Taire;  mais,  à  mon  tour,  je  vais  c.  .  .  .  sur  toi.  »  El 
s' adressant  à  Moutacem  qui,  suffoqué  par  ces  miasmes  in- 
cessants, sortait  la  tête  hors  de  la  litière  :  ^f  La  marmite  est 
cuite  à  point,  lui  dit-il,  et  je  vais  me  satisfaire.  »  Moutacem 
ne  pouvant  plus  y  tenir,  se  mit  à  crier  :  <■  Page,  qu'on  me 
descende  sur-le-champ,  ou  je  meurs!  » 

Le  même  Ali,  fds  d'El-Djoneïd  Eskafi  se  présenta  un  jour 
chez  Moutacem;  après  lavoir  plaisanté  et  avoir  badiné  a\ec 
lui  pendant  un  moment,  le  Khalife  lui  dit  :  «  Eh  bien,  Ali, 
pourquoi  ne  le  voit-on  plus?  Mon  cher,  tu  négliges  tes  amis, 
et  tu  oublies  les  devoirs  de  l'amitié.  »  Ali  lui  répondit:  «Ce 
que  je  voulais  vous  dire,  c'est  vous  qui  me  le  dites;  vous 
êtes  donc  le  diable  en  personne.^  »  Moutacem  se  mit  à  rire 
et  lui  demanda  :  «  Pf)Mrf[uoi  ne  viens-tu  plus  chez  moi?  — 
Hélas,  répliqua  Ali,  (pie  de  fois  je  suis  venu  sans  pouvoir 
vous  joindre!  Vous  êtes  maintenant  un  grand  personnage, 
on  vous  croirait  de  la  (aniillc  des  Marcrnmah  (c'est  une  fa- 
mille domiciliée  dans  le  Sawad,  dont  l'orgueil  est  devenu 
proverbial  chez  les  gens  de  ce  pays).  —  Voilà  Sindan  le 


112  LES   PRAiniES   D'OR. 

^^iu^filj  ^  wkiij».  lil  (ji«XÀ^  U  *i  Jlsj  iij«X^  «*^'*J  ^Uvi)  (_^ 

c^A-XJC.-*)   «X.Ï   bi)i    0I   cM^   ^i^!?'J    buwwjl    kiiÀAJj    C^'^^    Ci^X*r>- 

Turc ,  »  lui  dit  le  Khalife  en  désignant  un  page  qui  agitait 
un  chasse-mouche  au-dessus  de  sa  tête;  et,  s'adressant  à  ce 
])age:  «  Lorsque  Ali  se  présentera,  lui  dit-il ,  tu  me  le  feras 
savoir;  s'il  te  confie  un  billet,  tu  me  le  feras  parvenir;  s'il 
te  charge  d'un  message,  tu  m'en  instruiras.  —  Oui,  sire,  » 
répondit  le  page.  Ali  s'éloigna.  Quelques  jours  après,  il 
revint  et  demanda  Sindan;  on  lui  répondit  :  "  Il  dort,  »  et  il 
se  relira.  11  revint  à  la  charge ,  on  lui  dit  :  «  Sindan  est  dans 
le  harem,  tu  ne  peux  le  voir.  »  Il  revint  encore;  cette  fois 
on  lui  dit  que  le  page  était  auprès  du  Khalife.  Ali  parvint 
cependant  à  pénétrer  chez  Moutaçeni  par  une  autre  issue  ; 
le  Prince  lui  adressa  quelques  plaisanteries  et  réprimandes 
amicales,  et  lui  dit  ensuite  :  «  As-tu  une  requête  à  me  pré- 
senter?—  Sire,  répondit  Ali,  si  vous  voyez  Sindan,  saluez- 
h'  de  ma  part.  —  Qu'y  a-l-il  donc?  demanda  le  Khalife  en 
riant.  —  Il  y  a  que  vous  avez  placé  entre  vous  et  moi  un 
homme  plus  dilFicih;  à  voir  que  vous-même;  or  je  suis  im- 
patient d(>  le  rencontrer  (ît  je  vous  prie  de  lui  transmettre 
mes  salulalions.  ..  Moutacem  céda  a  son  hilarité;  il  aboucha 


CHAPITHE   GXV.  113 

^  (jo'-j  Sj~<i^  aLcIj»^  j  ^^>-^  vXiî^  \Aj\j  yîtXÀ^  (jv.j_j  <wj 

5vX_££.  ^l_j'>_^_S-  Js..«^j  diOvj  oJ*=-  ^-ii-!S  JUi  cjJaJl  (j^ 
^l;y-Li  vilUi  ^)  Jlji  t.x^   (^j^  J->'    t>-«  a^Î   e;<XJi   dixJo^j 

(ensuite  Ali  avec  Sindan  pour  la  seconde  fois,  et  recommanda 
à  ce  dernier  la  plus  grande  déférence  à  son  égard;  aussi  Ali 
eut-il  désormais  ses  libres  entrées  chez  le  Khalife. 

Moutaçem  passait  une  fois  par  le  quartier  occidental  de 
Sorra-men-rà;  il  pleuvailetil  avait  plu  peudantla  nuit  [)ré- 
cédenle;  le  Prince  s'était  écarté  de  sou  escorte,  lorsqu'il 
aperçut  un  âne  qui  venait  de  glisser  (sur  le  sol  détrempé) 
et  avait  laissé  tomber  sa  charge  de  broussailles,  cVst-à-dire 
de  ces  broussailles  épineuses  dont  on  se  sert  en  Irak  pour 
allumer  les  fours.  Son  maître,  un  pauvre  vieillard  débile, 
.se  tenait  auprès,  altendaul  ([u'uu  passant  Taidàf  à  redressei- 
le  baudet;  iVIoularem  s'arrêta  et  lui  demanda  ce  qui  lui 
était  arrivé.  —  «Pardon,  répondit  cet  homme,  c'est  mon 
àne  (|ui  vient  de  laisser  tombei-  sa  charge,  et  j'attends  c|ue 
quelqu'un  m'aide  à  la  relever.  »  Moutaçem  mit  [)ied  à  terre 
et  il  se  disposait  à  tirer  l'âne  de  l'ornière ,  quanrl  le  vieillard 
ajouta  :  «  Puissé-je  être  voire  rançon!  est-ce  pour  ce  baudel 
que  vous  allez  salir  vos  vêlements  el  souiller  les  parfums 
qui  s'en  exhalent  ? —  Que  t'importe?  «  lépondit  le  Prince.  Kl. 
\  I  I  ■  .s 


114  LES   PHAIRIKS   D'OR. 

^uiJî  c:*.4-S9  (jv.iaiî  cj-*  X=s'j.i^\^  a^Xis-ij  *Kaj  jU.iI  J.^5>.|j 
^^^'  h^^^.    J^x«i.Jl    c^yi  Oo_j    ^^*  w*.j^Aj_5   iSjJi    JàÀj  J^=?'_5 

AjiL?jJ>   *j  j^J   i.^-<*«4.i    v^-^^'    'V  j^'-^?^   (£•=*•   ^*-*  (j'^   («^^•^ 

descendant,  il  souleva  Tanimal  d'une  seule  main  et  le  tira 
de  Tornière  boueuse.  Le  vieillard  était  stupéfait  et  regardait 
avec  admiration  le  prince,  qui  venait  d'en  finir  avec  l'àne. 
Ensuile  Moutacem,  se  serrant  la  taille  avec  les  rênes  de  son 
cheval ,  se  baissa  vers  la  charge  de  broussailles  qui  étaient 
liées  en  deux  bottes,  les  souleva  et  les  replaça  sur  le  dos  de 
l'animal;  puis  il  se  dirigea  vers  un  étang,  s'y  lava  les  mains 
et  se  remit  en  selle.  Le  vieillard  sawadien  le  remercia  et 
ajouta  ces  mots  en  langue  nabatéenne  :  Che.qoiil  (jarini  tahoii- 
taka ,  ce  qui  signifie  :  «  Puissé-jc  être  ta  rançon,  o  jeune 
homme!»  Les  cavaliers  de  l'escorte  venaient  d'arriver;  le 
Khalife  dit  alors  à  un  de  ses  gardes:  «Donne  quatre  mille 
dirhems  à  ce  Gheïkh,  et  accompagne-le  jusqu'à  ce  qu'il  ait 
dépassé  les  postes  de  vedettes  et  qu'il  ait  regagné  son  vil- 
lage. » 

En  2  19  de  l'hégire  moururent  :  Abou  Noaïm  Fadl  (fils  de 
Dokeïn),  mawla  de  la  famille  de  Talhah  ben  Obeïd  Allah, 
décédé  à   Koufab  ;  —  Bichr  (fils  df>  (ivatl  Merissi:  —  Abri 


CHAPITRE   CXV.  115 

C:^--  t^  CJ-^  (J>-«*-^  (^  I^  (^?  ^^  (:^' J~**^  C:^'  t5*^  (^^ 
J,  iÎJs_jLA.j  (j-Ji^  ^^  t^i  tj-«  U^^"^  Lf*^  tiUi_j  t-JUs  j,l 
^jk_*io^  >**^   CJ"^   'S*'^  5*X.i&-   x^  (J^*>^^  ^^*"*^   ô.J^^  «r^*^ 

J^_5^^j«^t   iUjLç^   (JïÂ*«    %am>    (jj\   ♦Xjt'j  Uô^J)   t5«»<_j-«  (jJ  '^ 

(jii    Là-JLo^    U    »*-«i    (j^   bpi    Wij    Aa^    A><3X)fcli    Jl    iCij«Xil 

Allai)  (fils  do  Ritlja)  Goudani.  —  Môme  année,  Moularem 
condamno  Ahmed  ben  Hanbal  à  trente-huit  coups  de  Fouet, 
pour  le  contraindre  à  considérer  le  koran  comme  créé.  — 
Même  année,  mort  de  Moliammed  (  fils  d'Ali ,  fils  de  Monra, 
fils  de  Djùl'ar,  fds  de  Mohammetl ,  fils  d'Ali ,  fils  d'El-Hureïn  , 
fils  d'Ali,  fils  d'Ahou  Talib),  le  5  de  dou'l-hiddjeh  219.  Il 
lut  enterré  ;i  ]ia<j;dad ,  quarti(M-  occidental,  dans  h'  cimetière 
fies  Koreïchites,  auprès  de  son  aïeul  Mouca,  fils  de  Djàfar, 
après  que  Watik  eut  récite  la  prière  d(>s  funéiailles;  il 
moiMul  àfréde  vingt-cinq  ans,  et  il  n'avait  (pie  sept  ans  e( 
huit  mois  à  la  mort  de  son  père  Ali  (fils  de  Mouca)  Rida; 
mais  il  y  a  d'autres  opinions  à  cet  égard.  On  a  prétendu 
aussi  qu'il  fui  empoisonué  par  Ouinm  el-EadI,  fille  de  Ma- 
moun,  lorsqu'elle  le  conduisit  de  Médine  ii  la  cour  de  Monta- 
cem.  Nous  ne  donnons  ici  ces  détails  que  parce  que  les  Ima- 
mifes  ne  s'accordeni  pas  sur  l'âge  qu'il  avait  au  momeni  d»-  la 
mort  de  son  père;  nous  avons  réuni  d'ailleurs  les  difïérente.s 
versions  qui  ont  couis  sur  ce  point  |)armi  les  Cliyiles,  connus 


•S. 


ll(,  LES  PRAIRIES  D'OR. 

t^-M^kJ  ^^  ci^i»  ^.^J  v.^s-o_5.'î  »^\-\^^  &  ^j^^^  'Xiûyi^  »:>Ux!i 
/jj|»5^  <_>i)j^»-  ^ii.iUi^  *i  c:AJl^i  l-»«.J5  yUiliaJij  jj/*.i»i^^_5  ^y» 

*-j|  J_j.jij  J.*!*  (jji  j<vuIjl!i  yj  tXj^  j,  ^j>*-'  *^j  <^b  cj^  i^^ 

sous  le  nom  de  Katyiles,  dans  notre  traité  intitulé  :  Livre  de 
In  démonstration,  touchant  le  nom  des  imams. 

Durant  la  même  année  2ig  de  Thégii-e,  Moutacem  me- 
naça la  vie  de  Mohammed  (fds  de  Kaçem,  (ils  d'Vli,  fds 
d^Omar,  fils  d'Ali,  fils  d'El-Huçein,  fils  dVVli,  fils  d^Abou 
Talib.  Que  Dieu  leur  fasse  miséricorde!) ,  qui  vivait  pieuse- 
ment à  Koufah  et  se  signalait  par  une  austérité  et  une  gra- 
vité de  mœurs  au-dessus  de  tout  éloge.  Sentant  ses  jours 
menacés,  Mohammed  s'enfuit  dans  le  Khoraçân,  dout  il 
parcourut  plusieurs  districts,  tels  que  Merw,  Serakhs,  Ta- 
lekàn  et  Nira;  il  y  lit  la  guerre,  y  éprouva  différentes  aven- 
tures et  vit  sa  qualité  d'imam  reconnue  par  de  nombreux 
prosélytes.  Enfin,  livré  à  Moutacem  par  Abd  Allah,  fils  de 
Tahor,  il  fut  emprisonné  dans  un  donjon  construit  au  mi- 
lieu d'un  jardin  de Sorramen-râ.  Ici  les  versions  diffèrent  sur 
le  compl(^  de  Mohammed ,  fils  de  Kaçem  :  selon  les  uns,  il  se- 
rait mori  empoisonné;  selon  les  autres,  quelques-uns  de  ses 
part  isans ,  venus  de  Talekàn  ,  réussirent  à  pénétrer  dans  ce  jar- 
din, on  ils  se  firenl  employer  aux  plantations  et  à  la  culture. 


CHAIMTHE   CXV.  117 

l*x.y_>  Sjy  la  iri  J^j  jXxs»-  ^j^  iS*'^  i  ^Àii_^Ji  Jj,ï  ^J^  y^^ 

S'etant  munis  crccliellos  de  cordes  et  de  feutres  labricjués  à  Ta- 
lekàn  et  ayant  percé  le  donjon,  ils  délivrèrent  le  prisonnier 
et  s'enfuirent  avec  lui.  On  ignore  jusqu'à  ce  jour  ce  qu'il  est 
devenu;  il  a  encore  aujourd'hui,  en  332  de  Fliégire,  de 
nombreux  adhérents  parmi  les  Zeïdites,  qui  |)rélendenl 
pour  la  plupart  (ju'il  n'est  pas  mort,  mais  qu'il  vit  nourri 
|)ar  Dieu,  qu'il  ap|)araitia  un  jour  et  remplacera  ici-bas  le 
règne  de  l'iniquité  par  celui  de  la  justice;  en  un  mot,  ils  le 
considèrent  comme  le  niehdi de  la  communauté  musulmane. 
Le  plus  grand  nondire  de  ces  sectaires  habitent  dans  le  dis- 
trict de  koufali,  tians  les  montagnes  du  Tabarislàn  et  du 
Deïlem,  et  dans  plusieurs  districts  du  Khoracàn;  leur 
croyance  relativement  à  ce  Mohammed  ressend)le  ;i  celle  des 
hérétiques  Keicanites  touchant  Mohammed,  lils  de  la  Hané 
fitc  et  à  la  croyance  des  Wakililes  lonchanl  Mouea,  fils  de 
Djàfar;  ces  derniers  sont  distingués  des  autres  sectes  chyites 
par  l'epithèti!  de  Mainloiurh.  Dans  notre  livre  intitulé  Dis- 
cours iur  [es  principes  des  relifjions ,  nous  avons  exposé  leurs 


ILS  LES   PRAIRIES   D'OR. 

A,Aa.A*!L\  yl^j     âUiijLw  t_>U.ij  ^j.jil.\  UjU.j  i  ^j"^^}  u'^^ 

-0-g-À.»  ^J  X-s\.>lî  <!^i_^^  <^*>^rîî  i:S-*  (^^^J"^^  dj\j~'j^\  J^  V^ 
A_A_A^^    ^A^iûiXil   (^Jolxii^   ^Uj«xJÎ    ç)_5-iî   /o-i'"***'*'^ ^  CJ^yî   iC^j^l 

-!5X_*(*_j|  iLjLj  Js.,jf  j»i_jiJ<J'   <S^^  (ili^^î  c>J6_5  a,^u«a>  ^^ 

doctrines;  en  outre,  celles  des  sectaires  exaltés  nommés 
Spiritualistes,  les  opinions  des  Mahoinmedites  et  d'autres  par- 
tisans de  l'erreur  qui  croient  à  la  transmigration  des  âmes 
dans  le  corps  d'animaux  et. d'autres  corps  sont  mentionnées 
dans  notre  livre  Du  secret  de  la  vie. 

Moutaçem  recherchait  avec  empressement  les  (esclaves) 
Turcs  et  les  faisait  acheter  par  ses  affranchis;  il  réunit  ainsi 
un(î  troupe  de  quatre  mille  esclaves,  qu'il  habilla  d'étoffes  de 
brocart,  de  ceintures  et  d'ornements  dorés,  en  les  distin- 
guant par  le  costume  du  reste  de  son  armée.  Il  affecta  à  son 
service  un  coips  composé  de  soldats  originaires  des  deux 
f/au/ d'Egypte,  du  Haufàn  Yémen  et  de  celui  de  kaïs,  et 
l(\s  appela  les  Maçjrébins;  il  équipa  aussi  des  hommes  venus 
du  Khoraçàn,  et  en  particulier  de  Ferganah  et  d'Achrou- 
snah.  Ces  Turcs  i'ormèrent  bientôt  une  armée  nombreuse; 
ils  molestaient  la  population  (h'  Bagdad,  et  lançaient  leurs 
chevaux  au  galop  au  milieu  des  maichés,  au  grand  préju- 
dice des  inlii-nu's  <'l   des    cMlanis.    Les  habilaiih  en    tirèreni 


CHAPITKK  CXV.  •     119 

aU^il!  A>oJvA»  kXÀ£  s^Ujii  «oi^AiixAj  \^yj  W^  il  J>v*j  J.^1  yl^à 

^j*L;^l>  j^il.jL>  )j~*a.i  JUiÛ  <;^Ai  iOe=-i  CJ-.  5J^i^l  J^JaUJL» 
w^^  Ji  iil  yl<l*-Jl   (j-«  c>..Xi.-_5  -^>.-Ji  iiÀj*X^  f^s.  i_5.XjUjl_j 

plus  d'une  lois  vengeance  et  tuèrent  plus  d'un  cavalier  qui 
avait  renversé  une  lemme,  un  vieillard,  un  enfant  ou  un 
aveugle.  Moutacem  prit  alors  la  résolution  de  s'éloigner  de 
sa  ca])itale  pour  s'établir  dans  une  vaste  plaine.  11  campa 
d'abord  à  llaradàn,  à  quatre  parasanges  de  Bagdad;  mais  ne 
trouvant  ce  pays  ni  assez  salubre,  ni  assez  vaste,  il  pour- 
suivit ses  pérégrinations  en  explorant  les  diiVérentes  locali- 
tés situées  sur  les  bords  du  Tigre  et  au.\  alentours.  Il  arriva 
ainsi  dans  un  pays  nommé  Kaloul ,  dont  le  climat  lui  con- 
vint; il  y  avait  là  un  village  habité  par  des  Djarniaces  (  tribu 
persane  qui  s'établit  près  de  Moçoul  dans  les  premières  an- 
nées de  l'islamisme)  et  par  des  iNabaléens,  sur  les  bords  du 
canal  de  Katoul,  (pii  est  un  des  dérivés  du  Tigre;  il  y  bàtil 
un  cliàtcau,  et  bientôt  les  habitants  de  Ikigtlad,  répondant 
k  son  appel,  éuiigrèrent  en  masse  auprès  de  lui,  et  lais- 
sèrent la  capitale  presque  déserte.  Ces!  cette  circonstance 
que  rappelait  un  poète  nomade  dans  une  [)ièce  où,  repro- 
chant à  Moutacem  sa  rléserlinn  ,  il  disait  : 


120  LES   PRAIRIES   D'OR. 

^ijllaAii  ^jijUiî!  iS<XxjLj  oCSj.j        ^lJL«\J.Jl  (jv.j  J_j,lsUJl  yS^l.^  U 

ji^ArîI   j  yl^  (j-«  tjâ;«j  Jj.Aj    -i^^^    <J^       *^-«^^   'j^^J 

biiy^  ^1    f-À-o  J-««b   0-^i         bbùiiw*  JjioUJL   yi  LàJ  l_^Jli 

*■  >"  ku  *  p  ^_ 

i»_JLJL->    ^r-=»-   iJOS-i  ^Là-ajI  j «Xjt-jj    *^jJLU   A^»â.A*il   (^i>lj  ^.45 
(Jj^jtj  JLiJ   «_Ai>_^JLi   /<u,|   Q^j..j«X.]i   J-.iI>i  (jÀxj  Jl**i  t5^^"^ 

O  loi  qui  habiles  Katoul  au  milieu  des  Djarmaces ,  tu  u'as  laissé  à  Bag- 
dad que   d'orgueilleux  patrices. 

Cependant  les  troupes  qui  avaient  suivi  le  Khalife  sout- 
iraient cruellement  de  la  froide  température  de  ce  pays;  le 
sol  en  était  dur  et  peu  propice  aux  travaux  de  construction  ; 
un  des  soldats  de  sa  suite  a  dit  à  ce  px'opos  : 

On  nous  annonce  que  Katoul  sera  notre  campement  d'hiver;  mais 
nous  comptons  sur  l'intervention  de  Dieu,  noire  maître. 

Les  hommes  tbrmenl  entre  eux  maints  projets  ;  mais  chaque  jour  Dieu 
suscite  quelque  événement  nouveau. 

Découragés  par  les  inconvénients  de  cette  localité  et  par  la 
difficulté  d'y  bâtir,  Moutaçem  s'en  éloigna,  et,  continuant  son 
exploration,  arriva  dans  le  pays  de  Samarra.  Il  y  avait  en 
cet  endroit  un  vieux  couvent  chrétien;  le  Khalife  demanda  à 
fun  des  moines  qui  l'habitaient  comment  se  nommait  ce 
lieu.  «'  Samarrah,  répondit  celui  ci.  —  Et  que  signifie  ce 
nom?  reprit  le  Khalife.  —  Nous  le  trouvons,  dit  le  moine, 
dans  nos  anciens  livres  et  dans  les  traditions  du  passé  comme 


CHAPITRE  CXV.  121 

jLaj^l  iJOçi  jjl*«J  >«-»vi^  i^Uiiâ  (jS  <o.*^A*ii  >I^iÀi  ô^-»«^  ^■friv'j' 
Jc\j  Liû^i^^  c_>UaX^I_5  liûL^AwU  iL^^<.:^P  jjoji^  >-».jJ3  •^5_^-'û_5 

-pT^-^i^jbJ  silJi  ^ji  ^J  ^-ij^^  iJiUî!  ^^  »:>L?>5l  c^^Akjj 

lifl-A  j  Ijuc»^^  iK>ai  -^IjuJ  ^>bji_5  jUji  o^l   ^^jl^  (fr^*^^   («-â-*"* 

signiliaiit  la  ville  de  Sein,  liis  de  Noé.  —  Quel  est  ce  pays 
et  de  quelle  province  dépend-il?  —  11  lait  partie  du  Tabar- 
hào  et  en  est  une  dépendance.  »  Moutarem  examina  la  con- 
trée :  de  vastes  plaines  se  déroulaient  sous  ses  yeux,  Tair  y 
était  saluhre  cl  le  sol  fertile.  I''ra|)pé  de  ces  avantages  et  de 
la  douceur  du  elinial,  il  s'y  arrêta  pendant  trois  jours,  (pi'il 
passa  à  lâchasse;  il  rernarcpia  ([ue  son  appétit  ('-lait  plus  \  il 
et  qu'il  mangeait  plus  que  de  coutume,  ce  (pi'il  ne  man([ua 
pas  d'attribuer  à  l'influence  (\y\  climat  et  a  la  salubrité  du 
pays.  11  s'y  plut;  alois,  faisant  venir  les  gens  du  couvent, 
il  acheta  leur  territoire  au  prix  de  quatre  mille  dinars;  il 
flt  choix  tl'un  emplacement  pour  y  construire  son  château, 
et  en  jeta  les  foiulalions.  (l'est  le  (piartier  de  Soira  inen-rà, 
conim  sous  le  nom  de  Weziryeh;  de  lîi  le  surnom  de  Weziri 
donné  à  nue  (pialité  de  figue  su[)érieure  au\  autres  par  sa 
douceur,  la  finesse  de  sa  pulpe  et  la  petitesse  de  sa  graine; 
ni  les  ligues  de  Syiie.  ni  celles  d'Krradjàn  et  de  Houlwàn 
ne  peu\enl  être  compai'ees  à  cette  ligue.  I/édilice  commen- 


122  LES    PUAIRIES   D'OH. 

jLiâÈ^i^j  jj«Hj^j^J)  ç-i_j.-ji  qUaJI  ^jLwi  (j^  I^aJ^  JJij_j  jUâ^ilt 

^X  oj>;-*iï  (^^_jX^  Ji^-iit  ij^  ^jU^i^  ;|^i  ^U^l  jkii^ 

^j^y^,4.-X—il>      0«»..*-L)      ,*-*il»-4l      /C»-^.-K-J)      (J>-»     iwÀ^lvÂJ)      (J-»_5      )v-,«LtW 

c:a_12.aàJiLm«I_^  i^jL«»xJi  cj>«.A^^  jftAâiu!^^  >^«xJi  c:j<Xaav_j  ^IaàajI 
oi_A_*o   jii    /ji    ^j*,lÀJi    x-<l*>*j'^    \^yJkS-^    iiXr=»i    (j^   Ci>vr>"_5    Suit 

çail  à  s  élever;  il  fit  venir  des  maçons,  des  ouvriers  et  arti- 
sans de  tout  pays,  et  se  procura  des  semis  et  des  plantations 
de  toute  provenance.  Il  distribua  aux  Turcs  des  lois  de  ter- 
lains  distincts,  et  leur  tlonna  pour  voisins  les  soldats  origi- 
naires de  Ferganali,  d'Achrousnali  et  du  Khoraçàn,  en 
tenant  compte  du  voisinage  respectif  de  leur  contrée  natale. 
Achinas  le  Turc  et  ses  compagnons  reçurent  en  fief  le  ter- 
ritoire nommé  Kerkh-Saniaira;  (juelques-uns  des  Ferganieos 
lurent  établis  dans  le  quartier  nommé  Omari  el  Djisr  (le 
Pont).  On  traça  le  plan  de  la  ville;  on  délimita  les  liefs,  les 
({uartiers  et  les  rues;  chaque  métier,  chaque  branche  de 
commerce  eut  son  marché  distinct.  Chacun  se  mit  à  bâtir  sa 
maison;  de  tous  cotés  s'élevèrent  des  conslruclions,  des  hô- 
tels et  des  châteaux  solidement  bâtis;  le  pays  se  couvrit  de 
planlalions  et  de  eanauv  dérivés  du  Tigre  et  d'autres  cours 
d'eau.  Les  populations,  a|)prenant  ([u'une  ca[>iliile  nou\elli' 
s'élexail,  y  accoururent  eu  Ibule,  apportant  avec  elles  les 
niarcliiindisL's  de  tout  genre  cl   les  appro\  isionnenicnls  ini 


-CHAPITRE   C.W.  123 

j.**jI;  JiX^Ji    ^-|Ji^^  (jUfcjs-^l   A.^Xçvij   (5Jy-'5  ^-wfcji_5  (j;;«.A«Jl 

j_(0i      tXJÙ*»)!»  (J>AjL»^      /yJyMik£^     ^^*X.rs-)      iiÀiAW     U^J  i>     L<?V3     ^W  l* 

i^X-xii  dXki  ^  l^yiS-  i^yJiS^  yi]5i\.AAJlj  ub"^''  •^^•î^  c^3^  *^'^ 

l..<--*A^  jjii^A.S'V  /o^-^'^Axii  *aJS  _;-**i*i  (j*<U-5î  c^-*^^  âiJ^yî  J***^ 
(^^-s*-  âi^Xj  ^^  *^JiJ  t>!?^^  (_:A.AAajî^  i^j^j,s-  c:.»^A.j_j  (j>à.iiJl 
^j-«   ^_j*X_aJ1j    OjVxil    J-Aj&.lj    xÀA^ij)    ^^l^_;   J^i^   <X*^   (J«aÂj| 

menst's  qui  sont  nécessaires  à  la  vie  de  l'homme  el  des  ani- 
maux. La  vie  devint  abondante  et  facile;  enfin,  <,nàce  aux 
bienfaits  d'un  gouvernement  équitable  pour  tous,  la  prospé- 
rité et  le  bien-être  se  répandirent  dans  tout  le  pays.  Le  Kha- 
life Moutaçera  commença  les.  tra\au\  dont  nous  venons  de 
parler  en  221  de  fhégire. 

La  puissance  de  lîabek  le  Khonémite  s'était  accrue  dans 
les  provinces  (fHrràn  et  de  Beïlakàn  ;  ses  troupes,  formées 
de  la  plèbe  du  pays,  s'étaient  ré[)andues  dans  toutes  les 
contrées  voisines,  où  elles  avaient  cou[)é  el  mis  en  fuite 
l'armée  légulière  (du  khalifal),  massacré  les  chels  et  semé 
partout  le  caniage.  VIoutaçem  lit  marcher  contre  le  rebelle 
une  nouvelle  armée  sous  les  ordres  d'Alchîn.  Après  une 
série  de  combats  acharnés,  Babek  se  trouva  bhxpié  dans  son 
propre  ]Jays;  alVaibli  par  la  défection  de  ses  trou[)es  et  par 
la  mort  de  ses  plus  braves  partisans,  il  s(î  retrancha,  au 
cœur  de  rErràn,dans  la  montaf^ne  nommé  Bcddein,  qui  était 
son  pays  natal,  el  qui,  maintenant  encore  en  WS'i  de  Ihe- 
i;iie,  a  conservé  le  nom  de  fuiys  de  liahek.  Lorsqu'il  connut 


\2k  LE8   PRAIRIES   D'OR. 

^^  cK-ft-^  J^  (^■»-      Sj^  dr*  <^-*^  f^r^^  ^^^  '^!>^'  i^ 

^  *X5^  ÀA*  ^i,-i  ^  viLl»  _5.ii  Jlïjj^L»  «^.Aiwlj  (^wyOji)|  loU^u* 
Jl  Ô^-^JS?  ^^  iixAÀli  JU4^  c^«AJ  (j.A<a^j_j  ^SAJiJl  (jôXAJ  *-oJC*j 

sa  situation  et  qu  il  vit  l'étendue  de  son  désastre,  le  rebelle 
quitta  sa  retraite  et  s'enfuit  secrètement ,  n'emmenant  avec  lui 
que  son  frère,  son  harem,  ses  enfants  et  quelques  officiers 
de  sa  suite,  cachés  sous  des  déguisements  de  voyageurs,  de 
marchands  et  de  conducteurs  de  caravane.  Arrivés  sur  le 
territoire  d'Arménie,  dans  les  États  de  Sehl,  fds  de  Sanpat, 
un  des  patrices  arméniens,  ils  s'arrêtèrent  sur  les  bords 
d'une  rivière.  Près  de  là  un  berger  faisait  paître  son  trou- 
peau; ils  lui  achetèrent  un  mouton  et  voulurent  se  procurer 
(juelques  provisions  à  prix  d'argent.  Cet  homme  s'y  refusa, 
et,  sans  perdre»  un  instant,  il  courut  chez  Sehl  l'Arménien  et 
l'instruisit  de  ce  qui  se  passait  en  affirmant  que  l'inconnu 
élait  certainement  Babek.iOr,  lorsque  le  rebelle^  prenant  la 
fuite,  était  sorti  de  la  montagne  où  il  se  cachait,  Afchîn  crai- 
gnit qu'il  ne  se  fortiliàt  dans  quelque  forteresse  au  milieu 
de  ces  montagnes  inaccessibles,  ou  bien  que,  réunissant  les 
populations  de  ces  contrées,  il  ne  formât  une  nouvelle 
lioupe,   cl  (pic,  rassemblant  les  débris  de  son  armée,  il  ne 


CHAPITI'.K   CXV.  125 

iiijlkJi  ^3^(5  vi/^'  *Xi».l;  »^l  o^«  ^(^  U  (Ji  ;c=-^3  SjXv** 

dUiL   xAs  -fc^«*»'3    'î^À-*    bi_5  J^rs-^AJ    dloL   Axj   (^tXj!   ^^^^'    <j  ' 

«X_5j  A-jj^v-A— -a-j  s_^_otj  kii-jl*  *i  JUi  &*»  J^y  i.Kfr**'  *XxJii 
*LjLi  j_5-«  j^U  viLLîL<oî  xJl  «j:»  *xi  U^  aaj  ^jû  Le  ^xijjc* 

reconquît  son  ancienne  puissance;  c'est  pourquoi  il  fil  gar- 
der toutes  les  routes,  noua  des  intelligences  avec  les  patrices 
qui  gouvernaient  les  places  fortes  et  les  principales  localités 
de  l'Arménie,  de  TAzerbaïdjàn ,  de  TErràn  et  du  Beïlakàn, 
et  se  les  attacha  par  des  promesses^  Dès  que  Sehl  reçut  les 
révélations  du  berger,  il  monta  à  cheval  avec  ([uehpies  offi- 
ciers el  une  faible  escorte.  Arrivé  dans  le  lieu  où  se  troii- 
\ail  Baix'k,  il  mit  pied  à  terre,  s'approcha  de  lui,  le  salua 
du  litre  de  roi  <'l  lui  dit  :  «Sire,  venez  dans  le  rhàteau  qui 
vous  appartient  et  où  se  trouveni  vos  partisans;  Dieu  vous 
olTre  en  ce  lieu  un  abri  contre  vos  ennemis.  »  Babek  le  sui- 
vit; lorscju'il  iirrivu^dans  ce  château,  le  prince  arménien  le 
fit  ass(;oir  sur  son  trône,  le  combla  d'honneurs  et  lui  olVril 
sa  [)r()[)re  demeure,  à  lui  (;t  à  ceux  ([ui  racc()m|)aj^naienl. 
On  servit  le;  repas;  comme  iiehl  prenait  place  à  ses  côtés, 
Bahek,  avec  sa  rudesse  et  son  orgueil  ordinaires,  et  ne  com- 
prenant ni  sa  situation,  ni  la  gravité  des  circonstances,  dit  à 
son  hôte  :  "  Ksl-ce  que  tes  pareils  mangent  à  côté  de  moi?» 
Sehl  se  leva  et  répondit  :  «  Siii",  je  suis  en  faute,  el  personne 


19()  LES    PHAIUIES   D'Oi;. 

^jw.  (^.-=-\   <—'<-^^i  ■AJ^.W  l^^-ji  «^llûi^l  Jl*_j  -l«kii  ^^s■  J^Y"" 

^_^    tpL»     (j-e    aK-À-^    CX.Jrf*~A.J    ^^CjjiÀ^    CX-JD     i)     StXAJC    l^■«^■>- ' 

^  JLji_j  À  ssÀjfX^  A-^A^fi  i>iLi>-^  (j-«  (S^\  ii*j;lj  -î^^i  rp-**" 
^i_*_xi_j  (^jv~*i..i^i  <JI   <so  jjîj  ,\*^  ^j^^  i-i*-Jw  )^j-^*»<.JCi       S:>u»^j 

aK^j    \J!<^S-    S^^^  S^f*^    iJJVÀ-^  (Jv.Àw.i^i     J;*^    IsUaaw   yJ    lA-T-**' 

n'a  plus  que  vous  le  droit  de  se  plaindre  de  son  esclave, 
car  mon  rang  ne  m'autorise  pas  à  m'asseoir  à  la  table  des 
rois.»  Ensuite,  faisant  venir  un  forgeron,  «Sire,  dit-il  à 
Babek,  veuillez  étendre  les  pieds.  »  Et  il  l'attacha  avec  de 
lourdes  chaînes  de  fer.  «Sehl,  s'écria  le  prisonnier,  c'était 
donc  une  trahison  P  —  Fils  de  prostituée,  répliqua  l'Arnic- 
nien,  tu  n'es  bon  qu'à  garder  les  vaches  et  les  moutons; 
quel  droit  avais-tu  de  gouverner  un  royaume,  de  faire  des 
lois  et  de  commander  une  armée  ?  »  11  fit  enchaîner  tous  les 
prisonniers  et  dépêcha  sur-le-champ  un  message  à  Afchîn 
pour  l'instruire  de  ces  nouvelles  et  de  la  capture  de  son 
ennemi.  Au  reçu  fie  la  dépêche,  Afchîn  l'envoya  chercher 
par  une  troupe  de  quatre  mille  hommes  sous  les  ordres  d'un 
de  ses  lieutenants  nommé  Bouinadeh.  Dès  qu'on  se  fut  emparé 
de  Babek  et  de  ses  compagnons,  on  les  conduisit  à  Afchîn; 
Sehl,  (ils  de  Sanpat,  les  accompagnait.  Afchin  accueillit  ce 
dernier  avec  une  grande  considération;  il  lui  donna  une 
robe  friionneur,    une   couronne   et   uii   chevnl,    ([u'il    mena 


CHAPrrr.K  cxv.  127 

j^LàJI  "^  ^Ji  x^i\  JwAs^  Lt^  -solîu  <iwii  *-^a5^  *~»Ai;*i,! 

^Ui^iii  (Jl   w^xii^i   t^JÙiS'^ j^j^l\  \^j^ls\^  ^r^^   fi-^JJ-f:*^'^ 
J^^UJL  0«i^«ii  J^>1'^  <J>i^   X]^«xJi   Jl>;3  X»:^  C^vAj   J^L 

J^i.^  *Xï  tesi^is.  ^yj  yl(5  y^^Oè  vXÀ^i!  ti)j^U  o^xj  alJs-tû! 
iCjùiis?'  iijb  ^o»-oj  y^ii  ^^^  ti^ji_5  j.:r^S_j  j»-^-:^'^!  ^Wrî'^w 

lui-nrif^'me  par  la  bride  ;  en  outre,  il  Tcxempla  de  riiupôl  ton 
cier.  On  enAoyaaii  khalife  des  pigeons  porteurs  de  lettres  de 
victoire.  La  nouvelle  lui  accueillie  par  une  explosion  d'ac- 
tions de  î^ràces;  la  joie.  Ta llégresse  éclatèrent  partout;  dvs 
dépêches  firent  connaître  dans  toutes  les  villes  la  ca|)lure 
du  rebelle  (pii  a\ail  détruit  les  armées  du  souverain.  Enfin 
Afchîn,  suivi  de  tontes  ses  troupes,  arriva  à  Sorra-men  rà 
avec  son  prisonnier  (223  de  l'hégire)  ;  il  fut  reçu  parHaroun, 
fils  de  Moutaçeni,  par  les  princes  du  sang  cl  les  grands  du 
royaume  et  cam|)a  dans  Katoul,  à  cinq  parasanges  de  la 
capitale  Sainarra  (autre  nom  de  Sorra-men-ià  .  On  lui  en- 
voya un  éléphant  gris,  (pi'un  roi  de  rinde  avait  iilVeit  autre- 
fois à  Mamoun.  (!et  animal ,  d'une  faille  colossale,  était  vêtu 
de  l)rocarl  vert  et  ronge  et  de  din'ereules  (''lollés  de  soie  de 
couleurs  variées;  un(!  chauK'lie  hacirienne,  de  liaiiie  (aille  ci 
aussi  richement  parée,  lacconipaguait.  Al(lnn  reçut  aussi 
imv.  (lourraoli  (  robe  ('chancrée  pai' (le\anl'  de  brocart  rouge 
brochée  fl'or,   dont  le  [)lasli()u   était    brodé  de   piei  leries  et 


128  LIvS   PHAIIU  KS  D'OIV 

..  .  ^ 

c^-Xji-i»-^  j^^iw^i   oj_i».l  (jwJî^  aKaA^  iifiljj-^jt   <iJoL  (j^*a31î 

JyjiJi  AjJi  -*Xï_5  liû^^  ''vs^!  (j*|;  t^^  kiW^  iy^j  t^  »_^.»**àX«Jî 

<_!>-*&»    fi^j^yj    /^*àj!Aj    \S*-j.Xi    Iw^ji     /y-^JÎ     ^i3ij_jlj    i^*Xs^    &Ài 

c:*L>I^J53   'XjcVil^    ^^V-»Ji_5  Jls=-yî_5  J^i^  ^   (jj^  Jl-wail   *i 

de  joyaux;  une  seconde  robe  d'une  valeur  moindre;  un  bon- 
net haut  de  forme,  semblable  au  burnous,  avec  des  franges 
multicolores  et  enrichi  de  toutes  sortes  de  perles  et  de  pierres 
précieuses.  On  revêtit  Babek  de  la  plus  riche  des  deux  robes; 
l'autre  fut  donnée  à  son  frère;  on  couvrit  la  tête  de  Babek 
d'un  bonnet  [kalansoiiah] ,  et  un  autre  tout  semblable  fut  placé 
sur  la  tête  de  son  frère.  On  fit  avancer,  en  même  temps  que 
la  chamelle  destinée  à  celui-ci,  l'éléphant  qui  devait  porter 
Babek;  il  ne  put  dissimuler  son  étonnement  et  demanda  ce 
que  c'était  que  ce  monstre  gigantesque.  Il  adniira  la  beauté 
de  la  dourraah  et  dit  :  «  C'est  une  marque  de  la  munificence 
d'un  grand  et  puissant  monarque  envers  un  prisonnier  dé- 
chu de  son  pouvoir,  trahi  par  le  destin,  abandonné  delà 
fortune  ,  foulé  aux  pieds  par  l'adversité  et  dont  la  prospérité 
a  élé  suivie  d'une  grande  disgrâce.  »  L'armée  fut  mise  sur 
deux  nies,  cavalerie  et  infanterie,  avec  armes  et  armures, 
drapeaux  cl  bannières  déployés,  s'étendanf  sur  une  seule 
ligne  lion  inlerrompue  de  Kaloid  à  Samarra.  Babek,  suivi 


CHAPITRE  CXV.  131 

iLJLj.X^  Jî   AMi   Jyifi    »_^i^i   J.^^  l^-^Js-o^  aXx»  (_a^3j   viLL» 

(ji^     vilol»    iiA*i*iS?  O^    Ajlili     »*>^   (Jî  j^-^,-ii-«    AXa9J)-*j    IJ^Um 

oUkii  *.»ûAJ»ii  LT-^  «S  p^   UxiJsj  U  l£^^l   (j^  (jl^j  *>=^^^ 

'"'yû^  AAkil  cj^  iiiXj  |^*-i  Jlii  t^^^lî  (jj  p!>-*r^' 

çàn  et  promenée  dans  les  villes  et  les  districts  de  cette  con- 
trée, aux  yeux  des  populations  encore  impressionnées  par 
les  succès  rapides  de  Babek ,  par  sa  puissance,  le  nombre  de 
ses  armées,  et  qui  le  croyaient  prêt  à  détruire  la  royauté,  à 
renverser  et  révolutionner  la  nation  tout  entière.  Abd  Allab, 
son  frère,  fut  conduit  à  Bagdad,  dont  le  gouverneur  Ishak. 
fds  (Tlbraliim,  lui  infligea  le  su])plice  c[ue  RabeL  avait  subi 
àSorra-nicn-rà.  I.e  cadavre  de  Babek  resta  attaché  à  un  long 
ffibet  construit  an  milieu  des  dernières  maisons  de  Sor- 
ra-men-rà;  remplacement  conserve  encore  aujounrhui  le 
nom  de  (Mhel  de  Bahek,  quoique  la  ville  ell(>-niénie  soit 
presque  déserte  et  abandonnée  arluellemenl,  à  l'exception 
(fun  seid  quartier,  qui  a  conservé  (|uel(iues  liabilanls.  Après 
Icxécution  de  Babek  et  de  son  frère,  à  la  suite  des  .événe- 
ments que  nous  venons  de  laeonler,  les  orateurs  célébrèrenl 
(U'tle  victoire  en  |)résence  cle  Monlaeeni,  et  les  poètes  la  chan- 
tèrent à  Tenvi,  Ce  jour-là,  Ibrahim,  lils  de  Medhi,  récila, 
en  guise  de  hhothah ,  les  \eis  (|ni  suivi-nl  : 

y- 


132  LES   PRAIRIES   D'OR. 

îj_^_.« — iw^  '_^— ^-^  -^^^ 'î  *^^^  (j>.^.i^î  ^^y=ri 

i^_jj._ia-4   >^j-J  «^i^        ^ — ^  * — ?  <1^  -X-A-L» 

jj_j,_A_^  ltx_L=-  iJLuJi ii  <^vX — Ji  d)^_j_.^  Jli> 

1^ K «a_j  l*X_=i-  *]  v_> A-AM-JI   ^j^->è'  i^'^-i»-    ^J 

Prince,  des  Croyants ,  redisons  sans  cesse  :  Louange  à  Dieu  ! 

Ta  victoire  est  accomplie,  qui»  Dieu  ne  cesse  pas  de  combattre  pour 
toi; 

Et  nuisses-tn  toujours  trouver  en  lui  un  auxiliaire  contre  tes  ennemis! 

Reçois  les  félicitations  de  Dieu  pour  ce  triomphe  éclatant, 

Un  triomphe  tel  que  les  hommes  ne  peuvent  rien  lui  comparer. 

Qu'El-Afchîn,  le  serviteur  de  Dieu,  ait  pour  sa  récompense  bonheur 
et  prospérité, 

Car   Babek  lui  a  dû   une  journée   funeste    (allusion  à   Koraii,  i.xxvi , 

.o). 

Cet  alTranchi  dont  tu  as  toujours  éprouvé  la  force  et  la  constance  , 
Son  sabre  a  enfin  inondé  de  sans,^  un  visasse  que  le  bonlieur  illuminait; 
Et  le  coup  (pril  a  frappé  attache   au  iront  d'Arclûii  une  auréole  éter- 
nelle. 

Alchîn  nvut  une  couronne  cfor  enrichie  de  pierres  pré- 
cieuses et  un  diadème  dont  tous  les  joyaux,  étaient  des  rubis 
et  des  cuici;iu(les  enchâssés  dans  l'or;  il  fut  décoré  aussi  de 


CHAPITRE  CXV.  133 

aXaJ  ^  (jl<'  U^  Jl$l!î_5  Jl4:L  ou^y  c^l<rj  JU4j  ^L^aJI  j 
J^  /»-«-^'^-*  cj^  ',r*^^^  u*.LaJI  ^J^'_^  ^j^,;-*»*  (>*  ^  oU>^f 

^j*._j^\iJîj(j>s»-U;_^Jî  ji> -l       Jl-:^JI  oi^ii  fc^i>.l^l 

yl;»-^  tii^X^  Ax^^  »j5Lw^  jj  p^yi  dix*  Js^Uçy)  ^JJ  J^iyj 

deux  wichah  (ceintures  ou  colliers  de  perles  et  de  pierreries). 
Son  fils  Haçan  obtint  de  Moutarem  la  main  d'Outroudjah, 
fille  d'Achinas  :  sa  fiancée  fut  conduite  chez  lui  en  grand  cor- 
tège; l'éclat  et  la  magnificence  de  cette  fête  nuptiale  dépas- 
sèrent toute  limite.  Celte  jeune  fille  était  célèbre  par  sa 
beauté  et  ses  perfections;  le  soir  même  de  ses  noces,  tandis 
que  les  grands  personnages  et  beaucoup  de  gens  de  condi- 
tion inférieure  prenaient  part  aux  réjouissances,  le  Khalife 
chanta  la  beauté  et  les  grâces  des  époux,  et  célébra  leur 
union  dans  les  vers  que  voici  : 

L'épouse  est  conduite  ciiez  son  époux;  tille  <lc,  priuee,  elle  va  retrou- 
ver un  prince. 

Lequel  des  deux,  je  le  voudrais  savoir,  Icniporle  |)ar  son  rani;  et  sa 
ikubicssc? 

Est-ce  celui  qui  porte  à  son  cùlé  un  sabre  élinci-laul  de  pierreries,  ou 
celle  qui  est  parée  d'une  reiulnrr  nia^nirKjne  et  de  pla(|ues  d'or  ((|ui 
brillent  comme  le  soleil)? 

Dans  cette  lut'nie  année  '2'i.î,  le  roi  ^icc  l'Iiéophile,  fils 
de  Michel,   se  inelhini  a  la    l<Me  de  son   armée,  ;i  I.Hiuelle  se 


Vdli  LES  PRAIRIES  D'OU. 

(Ji-s-  fs^^\  iÔ^.k^  (j^  (^J3^^  Q^  (^-^i  ^UAaJijj-s^JL 

li  (j*.l_»Ji   ^=L9  ii.AJaXo  iiÀj<X^  ^^jLil_j  ^^yw^  j.AAwi^  j-AJSAaJi 
/Y_j   pOu-iûj^t  ,_^-.=».:>_j  jLiXJi^  «X.i&-l.*»JLî   tj  I^'IxJUmI^  jl^a^ili 

U    L-iT,— A-À    vJ  j>0    ^^_^    ïù^AH'i    â<X<Moi^    ^OMkâAxli    (^   ^«XgXt 

t^A^XÀj  ^JvJL  IgJliloI  JL»  U       c:aA;cjj  l^^L>î  (_^  JUï-yl  <--%^ 

A„.t-x-'J  *y^^^  ^^•«^■AJ   cjj-*»  ii^lji  aaÀ£  !*,iL»  8j^i  ^^^  ^AaJC*ii 

joignirent  les  rois  des  Borcljàn ,  des  Bulgares ,  des  Slaves  et 
d'autres  nations  voisines,  vint  assiéger  la  ville  de  Zibatra 
(Sozopétra) ,  sur  les  frontières  des  Khazares ,  la  prit  d'assaut , 
tua  la  population  ou  la  réduisit  en  esclavage,  et  attaqua 
ensuite  la  ville  de  Malatyalî  (Mélitène).  La  terreur  se  ré- 
pandit partout,  les  mosquées  et  les  maisons  retentirent  de 
cris  de  détresse.  C'est  alors  qu'Ibrahim,  fils  de  Medhi,  se 
présentant  devant  le  Khalife  Moutaçem,  lui  récita  une 
longue  poésie,  dans  laquelle  il  décrivait  ces  désastres,  et 
l'appelait  au  secours  de  ses  sujets  et  à  la  guerre  sainte.  En 
voici  un  passage  : 

O  Dieu  jaloux,  tu  as  vu  tout  cela,  vcuge  donc  ces  l'emmes  et  punis 
les  forfaits  dont  elles  sont  victimes  : 

Il  se  peut  (jue  les  hommes  aient  trouvé  dans  la  mort  le  châtiment  de 
leurs  fautes, mais  ([ue  dire  de  leurs  pauvres  enfants ,  qui  périssent  égorgés? 

Ibrahim  est  le  piemier  qtii  ail  employé,  en  poésie,  l'ex- 
pression à  Dieu  jaloux.  Moutaçem  se  mit  aussitôt  en  cam- 
pagne  <"!    |)arlit  vétii    d'une  dourraah   en   laine  j)lanche  ci 


CHAPITRE  GXV.  >  135 

^aXa,M  (^Àj'iii  rf.j-}  di-Ji^  *Xr=»-i  3.^^  jj  vXw*X3  sivjiJÎ  iiv«L«.xj 
C^AJuuaj^  (j-Jik)U»j   ^^yJitA^  iiy^^'  iiÀ-ui  (j^  (i^^l  t5^^^  CJ-*  ^"'^■^•^^ 

^Jy-^    M^    ji     i^V-J      »_jLw      ^j-«     iC£_pai!_J  ^l.-tMXj|      CJjl**3     (J\-*^^il 

^^^    rO^yJ^    /jJ    <^4^    2>^-^AJ^    (X^-aJ!    (j*.lÀAil    AX.«<Xi(^  ^^  JvX==-^ 

j-jUw  (^  (j*,1_à_jÎ  ^ifc-i^  i±><Xi»  <rO**  (J^  CiJ^''*^'''^'  -^^^J 
éyJLS  (jjJa.A aA.j  ^j  i<X*J|  jAiUji   ^ywaa?  /jXj  ^j  »_jj)^«XjI 

coilVé  du  lurban  militaire;  il  vint  camper  sur  la  rive  occiden- 
tale du  Tigre,  le  lundi,  2  du  mois  djemadi  premier,  2  23  de 
l'hégire.  Les  enseignes  furent  déployées  sur  le  pont  (de  Bag- 
dad), et  la  levée  en  masse,  avec  ordre  de  rejoindre  le  Khalife, 
fut  proclamée  dans  les  grandes  villes.  De  tous  les  points  de 
fempire  musulman  accoururent  les  troupes  régulières  et  les 
volontaires.  L'avant-garde  fut  donnée  à  Achinas  le  Turc, 
suivi  de  Mohammed,  hls  d'Ibrahim;  l'aile  droite,  à  Itakh  le 
Turc;  l'aile  gauche,  à  Djàlar  (fils  de  Dinar)  khayyat  ;  l'ar- 
rière-garde,  à  Boga  l'ainé,  suivi  de  Dinar,  fds  d'Alxl  Allah, 
et  le  centre  àOdjaïf.  Le  Khalife,  passant  parla  frontière 
syrienne,  entra  parla  passe  de  Selamah;  Afclun,  par  la 
passe  d'El-Iladét,  et  le  reste  de  l'armée,  par  les  autres  pas- 
sages. Le  chilï're  de  celte  armée  était  immense,  et  il  n'a  pu 
ètie  évalué  avec  certitude;  les  opinions  varient  en  plus  ou 
en  moins:  le  calcul  le  plus  élevé  la  porte  à  cinq  cent  mille 
li<»niiii('s,  le  cidcid  !<•   plus  l'aiMc  à   (l<'ii\   ccnl  unllf.   Le  loi 


]-M\  LES   PRAIRIES    D'OR. 

«w^o-À-X-il  (j-«  J^=rj  ^^-^3  ajI^pî  »3.>^5  ^XJj^Uaj  ^i'ji  J^_j 

(J^jiÀii^    dlLo  ^   Jli^j    ti^   C:J?r-=^   r»^-^^^   dUi    j,    r»j;r'^i    >^'^-o    <>>■=>- i 
^^   --W— '3   *>-^-*-^   Dp,A.â.i>.   jo-A^Asii    -tfLi^   l^ÀXJ  V^^AàAJ   (^  ^J.AJ» 

s- 


de  Byzance  atlaqua  Afchîn ,  mais  il  tïit  repoussé  et  mis  en 
fuite  ;  il  perdit  la  plupart  de  ses  patrices  et  ses  principaux 
officiers,  et  ne  dut  !a  vie  qu'à  la  prolection  d'un  néo-chré- 
tien ,  nommé  Noçaïr,  aidé  de  quelques-uns  de  ses  compa- 
gnons. D'ailleurs  Afchîn  négligea  Tocca^iion  qui  s'offrit  à  lui, 
ce  jour-là,  de  prendre  son  ennemi  fugitif  :  «C'est  un  roi, 
dit-il,  et  les  rois  se  doivent  sauvegarder  mutuellement.» 
Moutaçem  s'empara  de  plusieurs  places  fortes,  puis  il  assié- 
gea Ammouryah  (Amoriuni) ,  dont  Dieu  lui  ouvrit  les  portes. 
Un  palrice  noiinné  Lawi  (Léon)  vint  lui-même  lui  livrer 
cette  place;  Bâtis  (  Aetius),  patrice  qui  commandait  en  chef, 
fut  lail  prisonnier,  et  trente  mille  hommes  furent  égorgés. 
Moutarem  livra  la  ville  au  pillage  et  à  l'incendie  pendani 
les  quatre  jours  qu'il  y  demeura;  il  voulut  ensuite  marcher 
sur  Gonstantinople,  en  occuper  le  canal  (Dardanelles)  et 
aviser  aux  moyens  de  prendre  cette  capitale  par  terre  vt  par 
mer;  mais  une  nouvelle  menaçante  le  força  fie  renoncer  a 
ee  projet  :  Ahhas,  lils  de  Manioun,  venait  d'être  salué  Kha- 


CHAPITRE    CXV.  K>7 

XwtîJc^j   (j-^AX^^   LT-^^-J    *7-^**"*  'i  fi-*^^^^^  S-S"^  p^y    AA^vis 

^  ^^j^.^_£5  j|jv.o  ^JJ  ^JJ[>  (^o^j^'  cKi-^'  (jv^j^^  (:jir^*^ 

^J.**iI  C>olj  jLjlli     J-«    *i    C>jl^    Sj^AjiS^  l-J^y:-^     Ù<XJ    (jU^aJs 

js^.^i  Jl  jL?)UI  ya>y  y^t-  (jj^  »x4î-  v.^  ^iy^  (j^^^  tJ^^ 

iJ^Lv    Ji     S'^3    Sj^\s    CJ^    A^jb^    tj-**^    »;ilo  j.A*^  j>«j    i 

lile  par  un  certain  parti ,  et  il  entretenait  une  correspon- 
dance avec  les  Grecs.  Moutaçem  se  hâta  de  revenir  sur  ses 
pas  et  fit  emprisonner  Al)has  et  ses  partisans.  Le  fds  de  Ma- 
mouju  mourut  pendant  celte  même  année. 
^"^n  2-i5  de  rhégire,  le  Maziar  ll)n  Karen  ((ils  de  Bendar 
llormus?),  clieCde  la  contrée  montagneuse  du  Tabarislàn, 
lut  conduit  à  Samaira.  Ce  ciiel",  que  Matnoun  avait  cond)lé 
de  laveurs,  se  révolta  sous  le  règne  de  Moulacem;  liei-  dn 
non)l)re  de  ses  troupes  et  de  leur  Ibrce,  il  refusa  d'obéir 
au  Khalife,  qui  lui  avait  écrit  de  se  rendre  à  sa  cour.  Mou- 
lacem chargea  donc  Abd  Allah  (fils  de  Taher)  de  le  coni 
batlre,  et  Abd  Allah  lit  marcher  contre  lui  son  oncle  pa- 
lernel  Hacan  (fils  de  Huceïn,  lils  de  Moçab).  Ce  général, 
parlant  de  Nicapour,  pénétra  juscpfà  Sariali,  ville  du  Taba 
rislàn,  après  avoir  livré  plusieurs  batailles  au  Maziar;  enliii, 
ayant  été  informé  pai-  ses  espions  (pie  Mohammed,  lils  ilc 
Karen  (tel  était  le  nom  du  Maziar),  ••lail  allé  à  la  chasse 
;i\ec  peu  (!<•  itiniidr  ,   il  le  suipiil,  falL-Kpi;!  hai(lim«'iil  cl  \r 


138  LES  PRAIRIES  D'OR. 

^i  *XXJ  CyU»  (Jjis^  I3»,*«*.U  jLmUÎ  CJwilili  J|*jI»*«  ^  JWi;?  ''i  4.^1^ 
wvL^iî  ^  C-Jj.IwaJL!  ^  -N^^Jiî  -JiJ  ^^-A-$    J«A*ÎI    ijAwî    i_j*wii|     ^jl 

tXj»^  L^Y^slAi^ra-j  c:A.3iJs>Ai   c^jU   jCaAà    (JS  jl>j^  i<j<M!/>s^  c:a.jU_j 

lit  prisonnier.  Le  Maziar,  quand  il  fut  amené  à  Samarra, 
dédara  qu'il  avait  été  poussé  à  la  révolte  et  à  la  rébellion 
par  Afchîn,  dans  l'intérêt  de  leur  religion  commune  et  de 
la  croyance  qui  les  attachait  Tun  et  l'autre  ayx  doctrines  du 
dualisme  et  du  magisme.  Afchîn  avait  été  arrêté  un  jour 
avant  l'arrivée  du  Maziar,  sur  la  dénonciation  de  son  secré- 
taire, un  certain  Sapour.  Le  Maziar  mourut  sous  le  fouet 
après  avoir  été  promené  par  la  ville ,  et  son  cadavre  fut  pendu 
à  côté  de  celui  de  J3abek.  Moutarem,  auquel  le  Maziar  promit 
des  trésors  s'il  consentait  à  le  laisser  vivre ,  les  refusa  et  dit 
ce  vers  en  forme  de  sentence  : 

Les  lions,  Iiôles  des  fourrés  épais,  vciilcnl ,  an  jour  du  combat,  leur 
eiiiieuii  mémo  et  non  pas  ses  dépouilles. 

Le  gibet  du  Maziar  s'était  peu  à  peu  incliné  du  colé  du 
gibet  de  Babek,  de  sorte  que  les  deux  corps  s'étaient  rap- 
prochés; en  outre,  le  cadavre  de  Bâtis  (Aelius),  patricc 
d'Ainoriiiin,   accroché  an  même  cniirnif,  s'inclina  veis  les 


CHAPITRE  c:XV.  KiO 

deux  autres  cadavres,  par  suite  d'une  déviation  de  la  po- 
tence; cette  circonstance  inspira  les  vers  que  voici  à  Abou 
Tanimam  (Habib,  fils  d'Aws)  : 

Les  angoisses  de  mon  cœur  onl  cessé  lorstiue.  Bal)ck  est  devenu  le  voi- 
sin du  Maziar 

Et  son  second  dans  le  vide;  mais  il  n'eût  pas  été  i(!  second  «([uand  ils 
furent  deux  dans  la  caverne.»  (Allusion  à  la  fuite  du  Propll^te  et  d'Abou 
Bekr.  Kuran ,  ix,  /|0.) 

On  dirait  qu'ils  se  penclient  ensemble  |iotu-  recueillir  uu  secret  de  la 
bouciic  do  Bâtis  (Aetius). 

Afcbîn  mourut  dans  sa  prison  ,  après  avoir  été  confronté 
avec  le  Maziar,  qui  déposa  contre  lui;  son  cadavre  fut  en- 
suite pendu  à  fiab  el-Amnich  (Porte  du  peuple);  des  idoles 
qui,  dit-on,  lui  avaient  été  envoyées  furent  jetées  devant 
le  cadavre,  puis  on  y  mil  le  (eu  i^l  lous  ces  vestiges  périrent 
en  même  temps  dans  les  llammes. 

Kn  -i-ii)  (!«'  riiégire  nu>uriit  \I)()U  Dolaf  ( Kacim,  lils  dTca) 
Adjeli,  U' srïd  (Ir  sa  famille,  le  cliefdr  la  lril>ii  de  Adjel  et 


140  LES    PRAIRIES    D'OR. 

5^1aj^  '«^^  l^l-vii  yi^  ^wsAjj  (jw«  L^xi_j  J^  ^jw«  \jjjijit,£. 

^^l«^JÎ  J^xss-i))  ^^L«Liû^'        JL^-Js  (^  ^)w_j  Uji-j 

,_^wAS^    (ji    <ji    À-jLxJa.]!    C^ Js.)U3    l^jls    0.xis   v_J».3i    u5    yi  ^^ii^ 

!^A_Jé^  sLj  ^_5   -^U^jI   -»^j        iiÀjJaj   ^a>mU  /eJûÀj^  î_j_Jw 

(l  autres  branches  nées  de  Rebyâh,  poète  distingué,  guerrier 
dévoué  au\  siens,  funeste  à  ses  ennemis;  il  disait  de  lui- 
même  : 

Au  jour  du  combat,  monté  sur  un  cheval  généreux,  on  nie  voit  inspi- 
rant l'épouvante  au\  montagnes  immobiles  (c'est-k-dire  aux  chefs  les  plus 
vaillants), 

Et  au  jour  du  plaisir,  agitant  une  coupe  de  vin,  tandis  qu'une  branche 
de  myrte  ombrage  ma  léte. 

On  raconte  qu'il  asséna  un  coup  de  lance  si  vigoureux 
à  un  cavalier,  que  le  fer,  traversant  le  corps  de  celui-ci,  alla 
percer  un  autre  cavalier  placé  derrière  le  premier  et  les  tua 
tous  les  deux.  Bekr,  fds  de  Naltab,  dit  à  ce  sujet  dans  une 
de  ses  poésies  : 

On  disait,  lorsqu'au  milieu  de  la  mêlée  il  transpersa  deux  cavaliers 
d'un  seul  coup  sans  paraître  fatigue  : 

«  N'en  soyez  pas  surpris;  si  sa  lance  était  lonniic  d'un  mille,  elle  perce- 
rail  les  cavaliers  sur  tout  son  parcours.  » 

Yça,    (ils  d'Abou  DnlaC,    laconle   que   son   Irère  Dolal , 


CHAPITRE   CVV.  141 

(j^^     A_À_^     T.  ,0  J  j      w^Jlis     J,)     |vJ    ^^     ^ja-»-iLÀ-J     M"^      v_jUi    y-j\ 

*X-&-l  llv-^   O^^*^  ^  L>'   Ui"^   f~V^^   'j-O^^*"    *^'   dJ^"  -^^ 

j._^ib  Lto  Aj  oolUi  l^iljU»-  ool^   ^4^^  oo«Jj   ^j5    dULtl 

celui-là  même  qui  valut  à  leur  père  le  surnom  d'Ahou  Dolaf, 
haïssait  et  méprisait  Ali,  fils  crAbou  Talib,  ainsi  que  ses 
partisans,  qu'il  traitait  crignorants.  Ce  même  Dolaf ,  étant 
un  jour  dans  le  salon  de  son  père  et  en  l'absence  de  celui- 
ei,  tint  le  propos  suivant  :  «  Ces  Chyiles  prétendent  que  poui 
haïr  Ali  il  laut  être  un  bâtard;  or  vous  savez  si  l'Kmir  (il 
parlait  de  son  propre  père)  estjaloux  et  s'il  soufTre  la  moindre 
médisance  sur  le  compte  de  son  harem  ;  eh  bien,  je  déclare 
que  j'exècre  Ali.  »  Ycj\  poursuit  ainsi  son  récit  :  «  Au  même 
instant  (notre  père)  Abou  Dolaf  se  montra  et  nous  nous  le- 
vâmes devant  lui.  —  >.  J'ai  entendu,  nous  dit-il,  les  paroles 
(le  Dolaf,  la  tradition  (dont  il  se  raillait)  ne  peut  être  dé- 
mentie, et  son  autorité  ne  souffre  aucune  contradiction.  Je 
jure  que  cet  enfant  est  le  fruit  d'une  union  illégitime  et  im- 
[)ure.  A|)prenez  ([ue  ma  s(Eur  m'envoya,  pendani  que  j'étais 
malaile,  une  esclave  poui  hupielle  j'avais  de  l'inclination; 
je  ne  ()us  réprimei-  mes  désirs,  (|uoi(pi'elle  fut  en  élal  de 
menstruation,  el  je  la  leudis  mère  de  cel  enfant.  Plus  tard, 
ma  suiii  me  (il  clou  de  celle  escfne,  lorsque  sa  grossesse  de- 


Ik2  LES    PUAiniES   D'OK. 

i^-2  yj  «X_^  ^t-j  cIy«X_s»-  Lv  y-^^  "J^jUj  <X-jb_j  vA-a-X^  «JL^i 
Ijîi   ^^i».ils  <s.*^  t—*.^  ^A^ilt   ««^rs-i   JUi  ^î   cij^  *>oïJ   jbt 

Jj.jij    IaÎoIî   v^)^>    t_A.Ai    o<.^i>    /O.^Â;C*JLfe'  JUi    AjuCaSj    (JVJ    iJUwij  . 
•«^5   j6   ^i*-lj   «^^iî   yl^-î         Là.Sjo   LàJO»   lii    IXj  j^Ai 

vint  apparente.  »  L'inimitié,  la  haine  fanatique  cpie  les  pré- 
férences d'Abou  Dolaf  pour  le  chiisnie  et  son  penchant  pour 
Ali  avaient  inspirées  à  Dolaf,  devinrent  si  véhémentes,  qu'il 
alla  jusqu'à  maudire  la  mémoire  de  son  père.  Ce  fait  est 
affirmé  par  Mohammed  (fils  d'Ali),  originaire  du  Kouhis- 
tàn,  qui  rapporte  en  ces  termes  le  propre  récit  de  Dolaf: 
<>  Quand  mon  père  mourut,  je  rêvai  qu'un  inconnu  se  pré- 
sentait devant  moi  et  me  disait  :  l'Emir  t'appelle.  Je  le  suivis  ; 
il  m'introduisit  dans  une  maison  déserte  et  d'un  aspect  dé- 
solé, il  me  fit  gravir  plusieurs  marches  ;  puis  il  me  conduisit 
dans  une  chambre  haute  dont  les  murailles  portaient  des 
traces  de  feu  et  dont  le  sol  était  jonché  de  cendres  :  un 
homme  entièrement  nu  s'y  tenait  accroupi,  la  tête  appuyée 
sur  ses  genoux.  —  «Dolaf?  fit-il  comme  pour  me  demander 
mon  nom.  —  Dolaf,  »  répondis-je.  Il  continua  ainsi  : 

Si,  une  fois  morts,  nous  élions  oubliés,  la  mort  serait  le  rrpos  pour 
tout  c(;  qui  a  vécu; 

Mais  à  la  mort  succèdo  le  jugement,  et  nous  avons  à  répondre  de  toutes 
nos  œuvres. 


CHAPITRE   C\V.  Ili6 

4<jjkiajJl  ^LiûUJi  (^»ijj—«  (jj  J5^  (*4À^  eAj»X=l  t_>l^p|  iiAXff._5 

/j_j  >»l-<w.— tt)  kXjJfcji  fcji_5  3>»  i!^  (j>^  U^  ii*Xji.Aj  J,lil  wiwj 
•   j^iU^i  jLo   (jj  (<V^>^  C5^^^  V^P'    "^■'^  C:?^  '^^  -^^Jf^j 

Et  il  ajouta:  «  M'as-tu  compris;'  —  Oui,  répondis-je,  et 
je  m'éveillai.  » 

Sous  le  khalifat  de  Moutaçem,  en  22/1  de  l'hégire,  mou- 
rurent plusieurs  tradilionnistes  et  célèbres  rapporteurs  de 
hadis  :  Amr  (  fils  de  Merzouk  Baliili),  originaire  de  Basrah; 

—  Âbou'lNôman  Hazim  (fils  de  Mohammed,  fils  de  Fadl) 
Sadousi;  —  Ahou  Eyyoub  Suleïman  (fils  de  Harb)  Wa- 
chadji,  originaire  de  Basrah,  et  tle  la  tribu  d'Azd;  —  Sàïd 
(fils  d'El-Hakem,  fils  d'Abou  Miriam) ,  de  Basrah  ;  —  Ahmed 
(fils  d'Abd  Allah)  Goudani;  —  Suleïman  Chadekouni  et 
Ali  de  Médinc.  —  En  927  de  riiégire  :  r)iclir  cl-IIafi  (qui 
va  pieds  nus) ,  décédé  à  Bagdad  ;  il  était  originaire  de  Merw  ; 

—  Abou'l-Wélid  Hirham  (fils  d'Abd  el-Mélik)  Tayalesi ,  dé- 
cédé à  Basrah,  âgé  de  quatre  vingt-treize  ans;  —  Abd  Allah 
(fils  d'Abd  el-Wehhab)  Djomahi  :  —  Ibrahim  (fils  de  Yas- 
sar)  Bcmadi.  On  place  aussi  à  celte  date  la  mort  de  Mo- 
hanmied  (fils  de  Kelir)  Abdi,  mais  la  vérité  est  (pi'il  mou- 
rut en  2  2  3. 


lUli  LES   PUAIHIES   D'OR. 

jjo  (_^ift,_x_*w.-i)  Jiï       rv>.JCjlv_5   0ijj.Àfc».,£5  c:.'!^l>  RXam  c:A.jb   <\jIjj 

(^_ji_jji_j   ^j\-jf  0.jl  ^iù_5   aOAaJ    ^j-«  /^XcL*J   J^i»  Jj^î   JJS^ 

jV.X-S>^\     -6«<kûAXJÏ3  «-^Uj    (j'-jt^     (^-V     iUoldf    y.£    C1>U^    (J*(Ia«jÎ 

^Ai    »<J*iy.Sa~     (j.«    ^jb     U_J     AJ;ji5   ^*    d     Sj.-«i     (J-*    (JO     L«j     ^Um.»- 

^Xxj  AÀA>  y(^  U_5  liiJi  j.A^3  j.Aa^_5  j*l*iJi  y^  »;U,**fcJi  J,  iii!^=i. 

Le  Khalife  Moutaçem  mourut  dans  son  château  nommé 
Khakani,  sur  le  Tio;re,  le  jeudi  i8  rébî  premier,  227 
de  l'hégire,  et,  dit-on  ,  dans  la  deuxième  heure  de  la  nuit  ; 
il  était  âgé  de  quarante-huit  ans,  ou,  selon  d'autres,  de 
quarante-six  ans,  comme  nous  l'avons  indiqué  au  début  de 
ce  chapitre.  Il  naquit  à  Khould  (résidence  royale),  à  Bagdad, 
l'année  ibo,  dans  le  huitième  mois  de  l'année;  il  fut  le 
huitième  Khalife  (abbaside),  le  huitième  descendant  d'Ab- 
has,  et  laissa  en  mourant  huit  fils  et  huit  fdles. 

Le  règne  intéressant  de  Moutaçem ,  la  part  ([u'il  prit  à 
la  conquête  d'Amorium,  les  combats  qu'il  livra  avant  d'être 
nommé  Khalife,  à  l'époque  de  ses  missions  en  Syrie,  eh 
Egypte,  etc.,  la  suite  de  son  histoire  après  son  avènement, 
les  belles  actions  et  les  traits  de  vertu  de  ce  prince  racontés 
par  Ahmed  (fds  d'Abou  Douad)  le  .Tuge,  et  par  Yakoub 
(fils  d'ïshak)    Kendi  dans  dinéienis  passages  de  son  traité 


CHAPITHE  C.WI.  U5 

cjIjcJÎÎ  tj^_^  i  b^JSi  Uj  ia-^jillj  ^jUj^Ji  jL.viwi  UajIxS' 

CXJ6   4^«>Ji    j*^Jui    li    ^iii^   fjN>J^)yi  C5^^**-*    '^^'^i)    <^^    ^\    <ÎOo5_5 

<..:aAà.  ^Ov_(U  iiyJitJS-  ^li^U  ^j<»>jç«.à>.  d.^  ^^^  ^AâAxii  ii'tij  '\^3 
^^ji  .^-^3  J~^-?~^3   (:JV^^J  (^■!iJ'**'^3  t^****  ^"^  J^^i   î^"f  CJ^ 

intitulé  Roules  des  mérites,  tous  ces  détails,  en  un  mot,  se 
li'ouvent  dans  nos  Annales  historiques  et  dans  notre  Histoire 
Moyenne, 

Ce  que  nous  avons  raconté  ici  n'est  (ju'un  aperçu,  un 
index  de  nos  ouvrages  précédents,  tlestiné  à  réveiller  l'at- 
tention sur  des  événements  déjà  anciens  et  doni  le  souvenir 
s'elTace.  En  Dieu  est  notre  appui  1 

CHAPITRE  CXVI. 

KIIAI.IFAT    DR    VVATIK-BILLAM . 

Haroun  (lils  de  MolianinK'd,  lils  de  Haroun)  VVatik-Billali 
était  surnommé /l/;oa  Djûjar;  si\m.v\v,  une  esclave  grecque, 
se  nommait  Karalis.  Il  fut  salué  Khalife  le jour  même  de  la 
mort  de  Moutaçem,  le  jeudi  i8  réhî  premier,  227  de  l'hégire; 
il  était  âgé  alors  de  tnîntf.'et  un  ans  et  neuf  mois.  Il  mouiut 
à  Samarra,  à  l'âge  de  Irente-sepl  ans  et  six  uiois,  après  un 
vu.  10 


\liÙ  LES   PRAIRIES   D'OR. 

^jvij  o»»(*i  ^Ixj^^i  j«^j  iî,^j  ^ol  J^ïj  £«^j.*«wc  <Jo;!^j  j.^1 
/;jiji'5\j_j  ^j_jl  (j)j!_j-''>_5  (J^*j^3  (^y^'^'^i  (:JV>àS'I  i^À^w  *^  (_gi  ^j^ 

y.^    -X-S'J     -^-A-ji     ''^Ajj-is    i^-i^vKJlt     j     vil-^^j     *^^^    ÎJsJuiU    AavO 

.Xjuft  (w^  -y^^  ^\^:i  jt  (jjj  «X:?-!  -JuXfi  t-Ui'jj  JkXjJb  JyiJi 

règne  de  cinq  ans,  neuf  mois  et  treize  jours.  Selon  cFautres 
historiens,  il  mourut  le  mercredi  2k  dou '1-hiddjeh  232,  à 
l'âge  de  trente-quatre  ans;  son  vizir  était  Mohammed  (fds 
d'Abd  el-Mélik),  comme  nous  Tavons  déjà  dit  dans  le  cha- 
pitre consacré  àMoutarem;  d'ailleurs  les  chroniques  pré- 
sentent de  notables  différences  en  plus  ou  en  moins,  relati- 
vement à  rage  et  au  règne  des  Khalifes. 

APERÇU    DE  SON  HISTOIRK   ET    DE     SA    VIE;     PRINCIPAUX    ÉVÉNEMENTS 
HE   SON    RÈGNE. 

Watik  était  grand  mangeur  et  grand  buveur,  large  dans 
ses  bienfaits,  plein  de  bienveillance  pour  sa  famille  et  de 
sollicitude  pour  ses  sujets.  Il  suivait,  en  matière  de  foi,  les 
doctrines  de  son  père  et  de  son  oncle  relativement  au  libre 
arl)itre  (cf.  t.  VI,  p.  21).  Entièrement  dominé  par  Ahmed 
(fils  d'Abou  Douad)  et  par  Mohammed  (fils  d'Abd  el-Mélik) 
Zeyvat.  il  no  signait  aucun  décrel  sans  les  consulfei",  et  ne 


CHAPITRE  CXVI.  1^7 

t.;jcA.XJ   AjL«jX-»«*xii  ^-S^»-   (fc*-*AA»(i    (jî  cj>)l;  J,[;--ci    (^■fcAJ    ^-*-* 
S***ji3   dL^^  ^J^i  c:-*.Xi^li  ^j  (jw«  Jiï  c:AJi   (^  cJ.L)-^^   '^ 

trouvait  rien  à  redire  à  leurs  décisions;  en  un  mot,  il  les 
investit  de  toute  l'autorité  et  leur  abandonna  le  «i^ouverne- 
menl. 

Le  fait  suivant  est  raconté  par  Abou  Tammam  (Habib, 
bis  d'Aws)  le  Tayile,  surnommé  Djaçirni  parce  qu'il  était  né 
à  Djarini,  village  aux  environs  de  Damas,  entre  la  province 
du  Jourdain  et  celle  de  Damas.  Cette  localité,  connue  sous 
le  nom  de  Khawlàn  et  de  Djarim,  est  située  à  quelques 
milles  de  Djabyab  et  du  territoire  de  Nawa,  nommé  «  Pâtu- 
rages de  Job.»  Je  me  rendais  à  Samarra,  raconte  Abou 
Tammam,  dans  les  premiers  jours  du  règne  de  Walik;  aux 
abords  de  cette  ville,  je  rencontrai  un  Arabe  du  tb'sert,  j  eus 
ridée  de  l'interroger  sur  Tannée  du  Khalife  et  je  lui  deman- 
dai :  «  Arabe,  (pielle  est  la  tribu?  —  Les  Henou  Amir,  ré- 
p(Mulil-il.  —  Que  sais-tu  de  l'armée  du  Prince  des  Croyants? 
—  Celui  (pii  connaît  le  monde  le  subjugue.  •>  (Sur  le  double 
sens  de  ce  proverbe,  voii-  Mcïdani,  t.  Il,  p.  /jy,  éd.  houlak.) 
Je  poursuivis  :  «  Quelle  es!  Ion  opinion  sni  le  Prince  des 
Croyants?  —  Il  met  sa  conliance  en  Dieu  et  Dieu  lui  suffît: 

lU. 


us  LES   PRAIRIES   D'OR. 

*X_4^  i  J^j'*-*  ^-i  '■ii*-^*    fclX^iiJÎ    *AXifc  j^ifc._j  <_Xj«XJi   ^ykJ_5  «_»*i.jfi 

t_A— X_5  (_^Xl^  ^_j  (jLj  »-SÎ  ^Ai  (<».j  3  My^  f\?^  j^  o  *i  ^tA» 

J-S-;  JljJ  y'j>^  (^  J^^jtlt   ^i  J^Aj  U  «^i    "  ^_j,>î  IV^j  -yiJî 


il  a  vaincu  la  révolte  et  brisé  ses  ennemis;  juste  envers  ses 
sujets,  il  hait  ceux  qui  font  le  mal.  —  Que  penses-lu  d'Ah- 
med, fils  d'Abou  Douad?  —  Un  roc  qu'on  n'ose  gravir,  une 
montagne  inaccessible.  C'est  en  vain  qu'on  aiguise  les  poi- 
gnards, qu'on  tend  lacs  et  filets  sur  sa  route;  lorsqu'on  le 
croit  perdu ,  il  s'élance  avec  l'impétuosité  du  loup  ou  .se 
glisse  furtivement  comme  le  lézard.  —  Que  dis-tu  de  Mo- 
hammed (fils  d'Abd  el-Mélik)  Zeyyat?  —  Sa  méchanceté 
enveloppe  le  voisin,  comme  sa  rigueur  atteint  l'absent; 
chaque  jour  tombe  une  de  ses  victimes,  c{ue  ni  la  dent  ni 
la  griffe  n'ont  déchirée.  —  Et  Amr,  fils  de  Feredj  "^  —  Un 
gros  homme,  vorace  et  qui  aime  la  vue  du  sang;  on  le 
place  en  guise  de  bouclier  dans  la  mêlée.  —  Quelle  opi- 
nion as-tu  de  Fadl ,  fils  de  Merwan  ?  —  Celui-là  est  un  dé- 
terré; il  ne  compte  plus  parmi  les  vivants,  et  il  est  muet 
comme  la  tombe.  —  Et  Abou  '1-Wézir,  qu'en  dis-tu .''  —  On 
le  prendrait  pour  le  fameux  bélier  des  Zendiks.  Voyez-vous, 
si  le  Khalife  l'oublie,  il   mène   vie  joyeuse  et  planturouso; 


CHAPITRE  CXVl.  149 

»j-.d>  iiij  ^3;^  f^y^^  siA^Â  a\4I  lii  ^ji  (^  ^i  ou«?_^'  ^Jl 

Jli  ^^iwi  |i\-i^>~)i  à  Jyij  U  0V.X3  jciuo  iiSji  |^;«Xi  /fi'-fi^  ii^t 

AJijj!  tKs-j  kiUi  Jli  ^L?^  (jj  j^Vfi^i   ^  Jyij  U  c:A.Xi  »j*XA<a.ji- 

s'il  le  pousse  en  avant,  il  trouve  la  pluie  féconde  et  les  gras 
pâturages.  — Quelle  opinion  as-tu  d'Ahmed ,  fils  deKharib? 
—  Pour  celui-là,  il  mange  comme  un  glouton  et  digère 
comme  un  malade  (c'est-à-dire  il  reçoit  beaucoup  et  donne 
peu).—  Et  son  frère  Iln-ahim?  —  Etres  inanimés,  cadavres 
sans  vie,  ils  ne  savent  pas  quand  ils  ressusciteront.  «  {Koran, 
XVI,  21,  22.)  —  Que  dis-tu  d'Ahmed,  fils  d'Ibrahim?  — 
Que  Dieu  le  récompense!  Quel  homme  bon  et  palienl!  il 
s'est  fait  de  la  patience  un  juanteau  el  de  la  générosité  un 
vêtement  intérieur.»  Je  bii  demandai  son  avis  touchant 
Suleïman,  fils  de  Wehb.  —  «C'est  riiorninc  (bi  gouverne- 
ment et  la  parure  du  Divan  ,  ->  répondit  l'Aral)e.  Je  pour- 
suivis :  "Que  penses-tu  de  son  fjère  Haçan?  —  C'était  nn 
rameau  verdoyant  planté  dans  le  sol  de  la  générosité;  (piand 
il  vs'est  couvert  de  feuillage,  ils  l'ont  coupé.  —  Quelle  0()i- 
nion  as-tu  d'Ibrahim,  fils  de  Ribah?  —  (^est  un  homme 
fpie  sa  générosité  ;i  encbaîné  et  que  sa  bienfaisance  a  trahi, 
mais  ses  prières  ne  le  hiduinnl  pas,  son  Dieu  ne  le  Irom 
pera   pas  cl    !<•   Klialilr,   son    inailre,  ne    sera  point    injuste 


150  LES  PUAIRIES  D'OR. 

I[m  S\»  ^i  cO^  JLkJ!   dXl^f  S^ y^\  i  j^  J5lï  bt  o^)-i 

envers  lui.  —  Que  dis-tu  de  Nidjah,  fils  de  Saiamah?  — 
Que  Dieu  le  récompense  !  Gomme  il  sait  poursuivre  Tobjet 
de  sa  haine  et  atteindre  sa  vengeance!  C'est  une  flamme  qui 
brille.  La  familiarité  que  lui  témoigne  le  Khalife  a  tari  les 
bienfaits  et  déchaîné  les  vengeances.  —  Arabe,  lui  dis -je 
alors,  où  est  ta  demeure. >>  je  veux  aller  te  voir.  »  11  reprit  : 
«Que  Dieu  te  pardonne!  de  demeure,  je  n'en  ai  pas,  je 
m'enveloppe  de  ma  tunique,  le  jour,  et  de  mon  manteaii, 
la  nuit;  partout  où  le  sommeil  me  surprend,  je  dors.  — 
As-tu  à  te  louer  de  ces  troupes?  —  Je  ne  m'abaisse  pas  jus- 
qu'à solliciter  leur  générosité,  je  ne  remercie  pas  ceux  qui 
me  donnent,  je  ne  blâme  point  ceux  qui  me  repoussent.  N'as- 
tu  pas  entendu  le  poète  de  Tayi  lorsqu'il  disait  : 

Je  ne  Tais  pas  do  différence  (et  rien  ne  vaut  la  franchise  )  si  tu  souilles 
mon  honn(!ur  ou  si  lu  verses  mou  sang. 

—  «C'est  moi  qui  ai  dit  cela,  ni'écriai-je.  —  Quoi,  tu 
serais  le  |)oéte  tayite?  —  Oui,  vraiment.  —  Qu(>  ton  père 
soil  au  nombre  des  élus  !  re[)rit-il  ;  alors  tu  es  aussi  raiileiu' 
de  ce  \ers  ; 


CHAPITUE  GXVI.  151 

^\<  ^jlî  pl:::^  ji  ^^^-^  ^^-^ii  jj.iI  î*x^    »»x*j  xkxs.  ^\^ 

i^j-ASJ     »>Ob    ji^^^î    i*>^    J!     »|>^^    -^À^    C^*^^'   y^    p^^:"' 

'^A.r*U   X«y   ^U>-^    Jjo  Ji    JJi    »iii    U^^    Aii_>^i    (>a*J 

Les  bienfaits  de  ta  main,  (et  peu  m'importe)  ([u'elie  soit  généreuse  ou 
avare,  ne  me  consoleraient  pas  de  l'injure  que  lu  fais  à  mou  honneur. 

—  «  Cest  moi,  répondis-je.  —  Eh  bien,  répliqua  TArabe, 
lu  es  le  plus  grand  poète  de  Ion  siècle.  »  Je  le  ramenai  avec 
moi  chez  Ibn  Al)i  Douad,  auquel  je  racontai  cette  aventure; 
ce  ministre  le  présenta  à  Watik  qui,  non  content  de  grati- 
fier cet  homme  de  mille  dinars,  lui  ht  donner  aussi,  par 
ses  secrétaires  et  ses  olliciers,  une  somme  ([ui  l'enrichit  lui 
(ît  ses  héritiers.  »  L'ancîcdotc  [)récédente  provient  d'Abou 
Tamniam.  Si  elle  est  aulh('nli(|ue,  et  je  ne  la  crois  pas 
telle,  elle  l'ait  honneur  au  talent  descriplil"  de  TArahe  ;  si 
elle  a  été  rabri(|uée  par  Abou  Tamrnam  et  attribuée  par  lui 
a  ce  nomade,  le  style  n'en  est  (|ue  médioereinenl  réussi  et 
Ton  pouvait  attendre  mieux  de  son  laleul. 

AbouTammam  mourut  à  Moeoul,  en  ir^S  de  Thégire;  il 
eut  quelques  écarts  de  conduite  et  un  certain  déréglenteni 
de  jnœurs  qui  ramenèrent  à  négliger  ses  devoirs  religieux, 
plutôt   par  Idinlinagc  (pir   |);ir  incrédulité.  —    Abd  Allah 


152  LES   PIUIRIES   D'OR. 

t^l  ^^-^5  !^J_^  l^lxo  t5i>^À*  j«ljjlî  (j«;lAj  bij  -UjC^jijI  til  jLtf> 
^^  <XJCx>l*9  AÀ^  jj  t^^aj'l   U  ^^  >„*ii|  i^iy^ss-^  t::>l»,ÀA3.Jî   c:>lïtl 

y._C    J^Afcs.ji^    iLSL*i>Jî     Vluli^iaJl     »*X^    X<i^)j    fe!^*«.Jî    ÀÀJtX^O 

(1),.     •• 

(fils  de  Saad) ,  le  Secrétaire,  et  Ibn  Abi  '1-Azhar  ont  reçu,  du 
grammairien  Mohammed  (fils  de  Yézid)  Moberred,  le  fait 
suivant  raconté  par  Haçan  (fils  de  Ridja).  «  Abou  Tammam 
vint  me  trouver  pendant  mon  séjour  en  Perse  et  demeura 
longtemps  chez  moi.  Il  me  revint  de  différents  côtés  qu'il 
ne  faisait  pas  la  prière;  je  chargeai  donc  quelqu'un  de  l'ob- 
server et  de  le  surveiller  aux  heures  canoniques,  et  je 
trouvai  que  cette  information  était  exacte.  Comme  je  cen- 
surais sévèrement  sa  conduite,  il  me  répondit  :  «Crois-tu 
qu'après  être  accouru  de  Bagdad  jusque  chez  toi ,  après 
avoir  supporté  les  fatigues  de  cette  longue  route,  je  néglige- 
rais quelques  génuflexions  faciles,  si  je  croyais  qu'une  ré- 
compense est  réservée  à  qui  les  accomplit  et  une  peine  à 
qui  les  néglige?»  Je  songeai  à  le  tuer,  ajoute  le  narrateur 
et  je  ne  renonçai  à  ce  projet  que  dans  la  crainte  ([u'on  ne 
rallril)uât  à  un  autre  mobile.  »  Moberred  fait  à  ce  propos 
les  réilcxions  suivantes  :  «  C'(>s1  pourtant  le  inême  poëte  f|ui 
a  (lit  : 


CHAPITRE  C\VI.  153 

o^a^  "ij-^  i  C^  a.'  i  u*^'^  cK**^'  ^*^^  (:^^^  '^j'*  '*^^ 

(J^l]  MjJàV)   jUi!    ^JÙ>*Njj    SjU^  «r^^Jj   ''U*»*^»-   *À&  ^^-v? 
!^    <!Uà  Jlî   t^^I    Jjlii    fi-\f^    (^^  Ail:rj"»^i»-J(  0^-^'  (iT?^ 

De  tous  les  hommes  ,  le  plus  astreint  au  payement  de  sa  dette  est  celui 
qui  doit  à  Dieu. 

«  Quelle  différence  entre  celte  parole  et  le  lait  cité  plus 
haut!  Abou  Tammain  a  donné  naissance  à  deux  partis  dia- 
métralement opposés  :  Tun,  celui  de  ses  lanatiques,  lui 
accorde  plus  rpril  ne  lui  est  di'i,  lexalte  au-dessus  de  son 
mérite,  et  estime  sa  poésie  supérieure  à  toute  autre.  Le 
parti  opposé  dédaigne  et  repousse  ce  poëte,  lui  dénie  tout 
mérite,  critique  ce  qu'il  y  a  de  meilleur  chez  lui  et  bafoue 
les  beaux  endroits  ])ar  où  il  excelle  et  se  dislingue.  » 

Abd  Allah  (fds  d'El-Haçan,  fils  de  Saad)  a  recueilli  de 
Moberred  le  récit  suivant.  Moberred  se  trouvait  dans  le 
salon  du  Kadi  Abou  Ishak  Ismàïl  (lils  (rishak)  avec  plusieurs 
personnages  dont  il  cite  les  noms,  et  entre  autres  llareti, 
contre  lequel  Ali  (filsdeDjehm)  le  Syrien  a  composé  ce 
vers  : 

C'osl  toujours  jiour  aiiiKinccr  mir  calnslroplir  (|ii  un  vdil  ap|>;irailr< 
ll.ircii  ou  une  conii'lc  , 


15a  LES   PHAIl\iE8   D'OU. 

fj]j  L^_/_j  (;^*««-=»-5  AAj'lx^  -lljf  jii  <KAjI  ^j\Â  ^J\^  &jjt^^ 

j._x_^  ^j^  iij._s>-î   a>X,A£>-j  Rxjy.lô  fj\xA)^  iiÀAjaJ  cylr=»-L..sJ^Avl 

vers  cfune  pièce  très-connue.  La  conversation  étant  venue  à 
tomber  sur  Abou  Tammani  et  ses  poésies,  Hareti  cita  une 
plainte  en  vers  fort  remarquable  de  ce  poëte;  mais  Moberred 
n'osa  pas  le  prier  de  la  redire  ou  de  la  lui  dicter,  par  res- 
pect pour  le  Kadi.  Il)n  Saad  (Abd  Allah)  poursuit  ainsi  sa 
narration  :  «  J'appris  à  Moberred  que  je  savais  ces  mêmes 
vers  par  cœur,  et  les  lui  récitai  ;  il  les  loua  fort  et  me  les  fit 
répéter  jusqu'à  ce  qu'ils  fussent  gravés  dans  sa  mémoire.  Ce 
sont  les  suivants  : 

Que  ma  vie  soit  ta  rançon!  Abd  Allah  mon  esclave  blâme  à  la  Ibis  ceux 
([ui  sont  près  de  lui  et  ceux  qui  s'éloignent. 

Il  est  entouré  de  nobles  jeunes  gens  qui  s'acquittent  des  devoirs  de  la 
sincérité  et  de  i'ainitié; 

Je  les  invoque  contre  toi,  et  je  suis  de  ceux,  qu'une  prolection  géné- 
reuse sauvegarde  de  la  pauvreté,  etc. 

«  Je  demandai  à  Moberred  (ajoute  Ibn  Saad)  quel  était  le 
meilleur  poêle  d'Abou  Tammam  ou  de  Bolitori.  —  Voici  sa 
réponse  :  «  Abou  Tammam  se  dislingue  par  des  in\  en  lions 
giiicieiises  cl  des  pensées  délicates;  là  on  il  esl  e\rell<Mil,  il 


CHAPITRE  ex  Vf.        •  155 

^jaJjLx-j   ^î   X<-A^i   U_5   o«-^ii^ii   <— *••*-^■J'    •^^■'«^Jj  j:>lÀJi    oywJi 
LjcI_5   J>^r»-ij   -ILaj  i   \^xjss\i   RaXa.^]^  âJJ^Jl  ^  -isï'j.j^Ji 

o«.iaJiAvl^  *ljf  j,î  »jui  aaX^  cjLi  (jl  t]i  <î4jw«  JyiJlv|*X;û  jl^^Xi 

a_jU»  iLJ»l-j»JI  (j^  w.aJcS_j  iC»ol=a.  <xa-m»JI  (^  ^Sy^i  ^  iJ^-^v 

l'emporte  sur  Bohtori  et  sur  tous  ceux  ([ui  l'ont  ])récédé 
parmi  les  modernes.  Mais  la  poésie  de  Bohtori  est  d'un  ton 
plus  soutenu  et  plus  égal;  ce  poète  comjwsait  une  karideh 
tout  entière  sans  laisser  la  moindre  prise  au  blâme  ni  aux  sé- 
vérités de  la  critique,  tandis  qu'AI)ou  Tammam,  après  avoir 
trouvé  un  vers  d'une  beauté  rare,  le  fait  suivre  d'un  vers 
assez  faible.  Je  ne  saurais  mieux  le  comparer  qu'au  pion 
geur  qui  retire  du  fond  de  la  mer  perles  et  fucus  et  les  étale 
sur  la  même;  ligut;.  Si  Abou  Tammam  n'était  accusé,  comnu' 
beaucoup  d'autres  poètes,  d'aiiuiM'  ses  pioduclions  en  avare, 
il  faïubail  éhniinerde  ses  jxx'sies,  ([uchpic  nombreuses  ([ue 
soient  leurs  beautés,  tout  ce  ([ui  cJKxpu'  le  goùl,  el  il  reste- 
rail  le  plus  grand  parmi  les  poètes  ses  émules.»  (ielle  ap- 
préciai ion  (poursuit  Ibn  Saad)  m'engagera  à  lire  les  teuxres 
d'Almu  Tannuam  sous  la  diiccliou  «le  Moberred;  apiès  avoir 
suj)j)rimé  les  passages  laiilils  et  loiil  ce  (pii  clail  re[)réhcn- 
sible,en  ne  laissanl  (pie  le  hou,  je  Irouvai  (pie  les  dislicpu's 
réj)utés  classi(pies  el  cih's  non  seulemeni  par  les  gens  lellrés, 
mais  même  pai    le  peuple,   sCicNaiciil  ii  (•••ni  cincpianle;  je 


156  LES  PRAIRIES  DOR. 

rtfN_A_Wi  JLjtiî  (jÀJïAj   (iLJi         (i2-=*^  fV^^-^  o».Iajb».l  ^A 

ne  sache  pas  un  poëte  du  paganisme  ou  de  l'islam  dont  on 
cite  un  pareil  nombre  de  vers.  Moberred  ajoutait  que  Boh- 
tori  avait  mis  le  sceau  à  la  grande  poésie ,  et  il  me  récita  ces 
deux  vers  qui ,  disait-il ,  s'ils  étaient  insérés  dans  les  œuvres 
de  Zoheïr,  passeraient  pour  lui  appartenir  : 

La  sottise  d'un  ignorant,  si  excessive  qu'elle  soit,  n'agit  pas  contre  toi 
avec  plus  d'eflicacité  que  la  prudence  du  sage, 

Lequel,  si  tu  as  irrité  un  bienfaiteur  généreux,  t'attribue  quelque 
action  blâmable, 

Ibn  Saad  ajoute  :  «  Au  nombre  des  vers  de  Bohtori  cités 
dans  cet  entretien,  que  Mohanmied  ben  Yézid  (Moberred) 
plaçait  au-dessus  de  ceux  des  poètes  ses  émules,  sont  les 
suivants  à  l'adresse  des  deux  fds  de  Sâèd  ben  Makhled  : 

Quand  tu  vois  les  indices  de  la  générosité  (littéralement  les  nuages) 
des  deux  fils  de  Sâèd,  des  signes  analogues  tannoncenl  celle  des  deux 
filsdeJVIakblcd; 

(>omnic  ces  deux  étoiles  (de  la  petite  Ourse)  que  l'œil  observe  sans  dis- 
liti;,ni('r  si  l'une  s'élève  au-dessus  de  l'autre. 


CHAIMTIU-:   CWI.  1^7 

(I)    ,  .. 

j\  la  et  (^JJi  ovsiûfitj  «J^^       5L^^  J^S-««4  i^^l^  «-^^JJ 

Et  ceux-ci  : 

Qui  transmettra  au  Khalife  mes  remercîmcnls  de  la  pari  de  celui  ([u'il 
comble  de  faveurs  et  de  bienfaits? 

Sa  générosité  m'a  rendu  généreux,  et  j'in(li(|ue  à  mon  tour  la  roule  de 
la  munificence,  comme  il  me  l'a  indiquée. 

Ses  mains  ont  enrichi  les  miennes,  sa  bonté  m'a  déimuillé  de  mon 
avarice,  et  en  me  faisant  riche,  il  m'appauvrit; 

Car,  confiant  en- son  noble  cœur,  j'escompte  ses  bienfaits  et  j'ai  déjà 
donné  ce  qu'il  me  donne. 

Et  cet  autre  passage  : 

J'aurais  préféré,  quand  tu  m'as  rencontré,  (lu'nn  glaive  bnllàl  sur 
ma  tète  plutôt  que  des  cheveux  blancs. 

Ainsi'  ([uc  ces  vers  : 

Humble  par  ta  modestie  et  grand  p.ir  Ion  meril''  ,  il  le  sied  de  des- 
cendre et  de  monter, 

Comme  le  soleil  qui ,  en  s'élevanl ,  s'éloigne ,  tandis  (pie  ses  rayons  Inmi 
tieii\  se  rapprochent. 


158  LES    PRAIRIES    D'OR. 

L>_j.Aiî.^   uA-A.<w*)3    ^^J   ^    ^AJ^J  >VxJî_j    dijlA^   ^^   Ci^"*   <^^^ 

Et  ceux-ci  en  rhonneur  de  Fath  (lils  de  Khakan  ]  qui 
avait  attaqué  et  tué  un  lion  : 

Tu  lèves  ton  sabre  sur  lui,  el  ta  résolution  ne  flccliit  pas;  ton  i)ras 
ne  tremble  pas;  la  pointe  du  sabre  ne  s'émousse  point. 

Le  lion  refuse  !e  combat  parce  que  tu  déjoues  sa  férocité  ;  il  résiste 
parce  qu'il  ne  sait  comment  t'éviter. 

Et  lorsque  ton  bras  s'unit  h  ta  majesté  pour  le  frapper,  rien  ne  s'offre 
plus  au\  coups  de  ton  sabre  (  r'est-àdirc  que  le  lion  est  déjà  anéanti). 

Et  celui-ci  : 

Les  caprices  de  la  fortune  ont  ruiné  mon  commerce  à  ce  point  que  j'ai 
mis  ma  jeunesse  en  gage  |)our  mes  vieux  jours. 

Cet  autre  passage  adressé  à  Mountaçir  : 

l'Jn  vérité  Ali  tient  à  vous  de  plus  près;  et  sa  main  vous  parait  plus 
pure  que  celle  d'Ômar; 

A  cbacun  son  mérite;  mais,  au  jour  du  marché,  les  chevaux  qui  ont  des 
taches  blan(  hes  aux  pieds  valent  moins  que  ceux  dont  le  front  est  marqué 
de  blanc. 


cil  vprrnK  cxvi.  159 

Ce  vers  : 

Les  chanteuses  me  reprochent  d'oirc  vioiix;  à  qui  (levrai-jc  (k^  jmiir  ilr 
ma  vieillesse? 

Après  lequel,  rap|H'lant  la  ruj)lure  de  la  paix  dans  sa 
propre  tribu  ,  il  coiilinue  en  ces  termes  : 

Aux  jours  de  conrorflc,  ils  liominaienl  ces  désastres  et  ces  périls. 

Mais  fermer  une  |)laie  (|ue  la  j^angrènc  rou^'C,  c'est,  pour  le  médecin, 
faire  preuve  de  iié<;liï;ence. 

La  flèche  fpii  s'(5<;are  atteint  pins  farilemenl  l'arclH  r  (pu-  colle  (pii  \,i 
droit  au  hut. 

Kniin  les  vers  (pie  voici  : 

Ce  n'est  pas  Fath,  lils  de  Khakan,  (pu  reliise  ms  hienl'ails,  mais  les 
destins  les  accordent  ou  les  suppriment  ;\  leur  gré. 

Sa  bonté  est  im  nuage  bienfaisant  qui  a  passé  sur  moi  sans  m'alleindre; 
sa  munificence  est  une  mer  immense  qui  s'est  éloignée  de  moi. 

(lonmie  la  lune,  il  éclaire  le  monde  de  l'orient  à  l'occident .  mais  le 
lieu  où  se  pose  mon  pied  vsl  noir  et  lénéhreux. 


160  LES    PRAIRIES   D'OR. 

Jyb  (jj^  JjiAj  U  l^_^  >i  c^Aii  iaS  U-Ci  (j-*->-=?  ^  ''^^^ 

(I)   .   •■ 


Puis-je  accuser  sa  générosité  lorsqu'elle,  s'étend  sur  le  genre  humain? 
Et  qui  ne  serait  blâmable  d'accuser  la  pluie  ? 

Voici  ce  que  rapporte  Mohammed,  fils  d'Abou  '1-Azhar  : 
"Malgré  sa  science  distinguée,  son  esprit  cultivé  et  ses  ta- 
lents, Ibrahim,  fils  de  Moudebbir  avait  une  opinion  défavo- 
rable d'Abou  Tammam  et  jurait  que  ce  poëte  n'avait  pas  le 
moindre  mérite.  Je  lui  demandai  un  jour  ce  qu'il  pensait  de 
l'auteur  de  ces  vers  : 

La  vieillesse  a  tracé  ses  sillons  dans  les  boucles  de  ma  chevelure  et 
ouvert  par  lu  à  la  mort  un  chemin  spacieux  jusqu'à  mon  âme. 

Voilà  mes  hôles  qui  disparaissent,  mes  parents  qui  m'évitent,  j'ins- 
pire du  dégoi'it  à  mes  amis  intimes;  et  l'étoffe  (de  ma  vie)  est  couverte 
de  pièces. 

La  vieillesse  peut  briller  d'un  certain  éclat  extérieur,  mais  elle  est  la 
nuit  et  le  dépérissement  du  cœur. 

Et  pourtant,  bon  gré,  mal  gré,  nous  espérons  toujours  ;  un  nez  mu- 
tilé fait  encore  partie  du  visage  (proverbe  dans  le  sens  de  :  Il  faut  se 
contenter  de  ce  qu'on  a). 

El  de  ceux-ci  : 


CHAPITRE  CXVI.  161 

L*-A-Li  oJIj    cyiji   u  iilj         ^l_^   (.::a-_â3    c:>^I   U  til^ 


Si  lu  cherches  à  atteindre  le  but  en  évitant  Amr,  il  t'abusf  jusqu'à  ce 
que  tu  n'aies  plus  d'issue; 

Et  tu  es  comme  un  sabre  ([ui  rencontre  un  obstacle,  le  brise,  puis 
fléchit  et  tombe  brisé  en  morceaux. 

Que  dis-tu  de  l'auteur  de  ce  vers  : 

C'est  une  gloire  supérieure  à  celle  des  plus  grands,  mais  la  véritable 
gloire  est  dans  une  action  généreuse. 

Et  de  celui-ci  : 

Tandis  f[ue  les  autres  recherchent  la  puissance  sans  les  bienfaits,  lu 
mets  ta  gloire  à  faire  le  bien. 

Et  du  vers  suivant  : 

Tu  répands  sur  moi  les  dignités  et  les  richesses.  Je  ne  me  suis  jamais 
présenté  ii  toi  que  pour  solliciter  on  pour  donner, 

Et  je  deviens  à  ton  gré  ou  la  corde  (qui  sert  à  j)niser  l'eau),  ou  le  puils 
(qui  l'absorbe). 

Qui  esl  aussi  rauteiif  de  ces  \eis  : 

VII.  I  1 


162  LES   PRAIRIES  D'OR. 

ji^j — Ji  liJj'i;  <i^  *- — * — *;      iS^'-^-i  «^W  dkjUs  t^tXAJ 

Us  redoutent  ton  attaque,  car  elle  est  pour  eux  comme  la  mort  qui  ar- 
rive d'un  pas  rapide  et  assuré  : 

Craignant  ta  vengeance,  leur  marche  est  un  glissement  furtif,  leur 
appel  un  signe,  leurs  paroles  un  murmure. 

Grâce  à  toi,  nos  journées  sont  à  l'abri  du  danger  (littér.  fourbies 
comme  la  pointe  d'un  sabre)  et  nos  nuits  aussi  sûres  que  l'aurore. 

Tes  hôtes  invitent  d'autres  hôtes  et  ceux  cpie  tu  héberges  offrent  aussi 
l'hospitalité. 

Et  du  vers  que  voici  : 

Si  tu  descends  dans  une  plaine  qui  a  su  te  plaire,  nous  n'irons  pas 
camper  sur  les  hauteurs. 

«  li  semblait,  ajoute  Ibn  Abi  '1-Azhar,  que  j'avais  attisé  la 
colère  cl'Ibn  el-Moudebbir  contre  Abou  Tammam ,  car  il  se 
répandit  en  invectives  et  en  malédictions  contre  ce  poëte. 
«Puisque  vous  agissez  ainsi,  lui  dis-je,  écoutez  le  récit  que 
m'a  fait  un  certain  Abou  Amr  (fds  d'El-Haçan) ,  le  rhapsode. 
Son  père  l'avait  envoyé  chez  Abou  Abdallah  ibn  el-Arabi 
pour  étudier  sous  sa  direction  le  divan  des  Hodeïliles.  «  On 


CHAPITRE  CXVl.  ir)3 

S^  *jJi  \4A*«Ji  ^  -lit  j^  *;>^j^  Aj'tKAjU 

aMojÇ  ^JyjùUxl  U  *Xxj  (j~*         aK.-o^   (j-«   (_^»«i   tM^*-  *^**^ 
aNJst  ^   Jvjs^i   ^    ^^jLff  ii        Akg-js?    îJtXAX*  (^tX^ii  <:■) 

vint  à  parler  des  poënies  du  mètre  redje: ,  raconte  Abou 
Amr,  et  je  récitai  à  Ibn  cl-Arabi  une  de  ces  pièces  composée 
par  Abou  Tamnian»,  sans  toutefois  lui  en  nomn)er  Fauteur; 
c'est  la  suivante  : 

Plus  d'un  censeur  auciuol  jp  reproche  sa  crilif|U('  rrcnl ,  dans  sa  sottise, 
que  je  suis  un  ignorant. 

L'iiomme  n'est  jamais  mieux  trompé  que  par  lui  niOiiie.  Qui  donc  sera 
un  jour  entièrement  ton  frère  ? 

Je  suis  revêtu  d'une  ctofle  neuve,  laisse-moi  l'user Koi  par  sa 

fierté  et  son  rang  illustre, 

Homme  du  peuple  par  sou  langage  et  sa  ronduilc.  Je  lui  ai  prodigue 
mes  louanges,  comptant  sur  ses  largesses. 

Mais  il  a  tranché  le  fil  de  l'espérance  qui  nm  ratlnrhnil  à  lui.  après 
m'avoir  captivé  par  ses  vaines  promesses. 

Puis  il  est  venu  s'excuser  de  son  erreur,  le  cou  lendu  vers  des  éloges 
dont  il  ne  peut  plus  se  passer. 

Sérieux  ou  folâtre,  il  me  regarde  de  l'aii-  d'un  prisDuniei-  caijtifdans  les 
anneaux  de  sa  chaîne  ; 

Et  (Uiaud  je  vais  lui  adresser  des  reproches,  il  s'elouue  (pi<-  sou  avarice 
excite  ma  surprise 


16^  LES  PRAIRIES  D'OR. 

^i   ^  i  j^_5   ^3j.iwj   ^;5j:i^  JU3  j.l::ë  jiJ  \^i\   ^^>>^»  c;Jo»r=- 
jj^^i    ^U.   ii^:^  Jlï  ^Ol    ^Uà^  t^  (jv^^iî  J.A.*!    (^it  <^_5;    ^Xï^ 

Objet  unique,  toi  qui  te  distingues  par  ta  justice,  je  t'ai  donné  la  ri- 
chesse (en  te  louant),  ne  la  dédaigne  pas. 

A  quoi  bon  le  fourreau  sans  la  iame,  et  la  louange  lorqu'elle  ne  va  pas 
à  celui  qui  en  est  digne? 

«  Ibn  el-Arabi  ordonna  à  son  fils  d'écrire  ces  vers  sur  la 
couverture  d'un  de  ses  livres.  —  Que  ma  vie  soit  la  rançon 
de  la  vôtre  !  lui-dis-je,  ils  sont  d'Abou  Tanimam.  —  Déchire- 
les  1  »  dit-il  à  son  fils,  et  la  copie  fut  mise  en  morceaux.  »  Tout 
savant  qu'était  Ibn  el-Moudebbir,  sa  conduite  fut  réprélien- 
sible  en  cette  occasion,  car  on  ne  doit  jamais  dénigrer  le 
mérite  en  quelque  lieu  qu'il  se  trouve,  chez  un  ennemi  ou 
chez  un  ami,  et  il  faut  accepter  un  service  aussi  bien  des 
petits  que  des  grands.  La  tradition  a  conservé  les  paroles 
suivantes  du  Prince  des  Croyants  Ali  :  «  La  science  est  la 
brebis  égarée  du  vrai  croyant  ;  reprends  ta  brebis  ,  même 
chez  les  infidèles.  »  On  attribue  la  sentence  cfue  voici  à  Bu- 
zurdjmihr,  fils  de  Bakhlckan,  l'un  dos  principaux  sages  de 
la  Perse,  dont  nous  avons  parlé  précédemment  en  racontant 
l'histoire  de  la  dynastie  de  Sassan,  rois  de  la  seconde  époque 


CHAPITRE  CXVI.  165 

\.^X^^   L.'xXJi^   IwJUjiJ   (iJ*^^»-    <J^   ^J-lr^'    <J^   t:y*X.ii-i    U  J.Ai 

L-j—J  ^bjj  (^cJi  jU^i^l  »4X-tf>  JJl«  cjU  (j^j     ^A*Jll  JvAa 

xAj  tXi  Iw^jlï  (ji  iij^jc«5  J.Aà3^  i^j^  ^  (j-«  <X  |fc^*r>j  0^'^'^î 

^^_j-^i  Jlï  Aj|  (j*\.xfc  ^jjI  ^^  ^^^j,  ^j»3  «jUaj^î^j  iUij.*»  (^ 

(cl',  t.  II,  p.  206).  «J'ai  recueilli,  disait-il,  ce  c[u'il  y  a  de 
meilleur  partout  où  je  Tai  trouvé,  même  chez  le  chien,  le 
chat,  le  porc  et  le  corbeau. — Qu'avez-vous  pris  au  chien  ?  lui 
demanda-ton.  —  Sa  fidélité  et  la  vigilance  avec  laquelle  il 
défend  son  uiailre.  —  Qu'avez-vous  pris  au  corbeau?  —  Son 
extrême  prudence.  — Et  au  porc?  —  L'empressement  avec 
lequel  il  pourvoit  à  ses  besoins.  —  Et  au  chai?  —  Sa  voix 
caressante  et  ses  cajoleries  quand  il  veut  oblenir  quelque 
chose.  » 

On  ne  jx'ul  donc  crili([uer  des  vers  comun^  ceux-ci,  qui 
charment  le  cœur,  émeuvent  fàme,  llallenl  l'oreille  et  en- 
flamment l'imagination  ,  des  vers  dont  l'auteur,  de  l'aveu 
de  tout  homme  bien  doué,  im|)aitial  cl  inslruil,  a  allcinl  les 
limites  du  beau  et  le  dernier  terme  tle  la  perléclion;  on 
ne  peut,  dis-je,  les  critiquer,  à  moins  d'être  plein  de  soi- 
même  et  de  faire  lorl  à  son  propre  savoir  et  à  son  goùl. 
Ibn  Abbas,  ainsi  que  la  tradition  nous  l'enseigne,  disait  de 
la  passion  :  «C'est  une  divinité  fpi'on  adore  ;  "  el  il  appuyait 


166  LES   PRAIRIES   D'OR. 

i^jJl  cjIxj  <XA.tfw^  (j^  (j^UJi  ij_5  iv^l^:sl  cjIaJS  (^**o  IjUb 
v_5Lj   k-jl   v_JlÀ,o   «Xï_5   AjIj^    <>k}u  j.^1s  fj*X)j\  j^m  Xkà  <_*.i?*j) 

j,ljjf  ji   (^j-£  (.-à.^3  U  ;^  J^-^aJi  JiX;:^!^  aa^^^X^^  ^coj.)»^ 
i^UrfiiJi  j»i£>^=:-    Uùj.AAi    «Xï  (*-t'''^   '^'   oLasj^I    ^^y^?- 

cette  sentence  svir  ce  passage  du  livre  de  Dieu  :  «  Vois-tu 
celui  qui  a  fait  un  dieu  de  ses  passions?  «  [Koran,  xlv,  22.) 
Abou  Tammam  a  produit  de  belles  poésies ,  des  pensées  dé- 
licates, et  il  a  fait  preuve  d'une  imagination  merveilleuse. 
Un  bon  juge  en  matière  de'vers,  auquel  on  demandait  son 
avis  sur  cet  auteur,  disait  :  «  Il  semble  qu'il  ait  recueilli 
tout  ce  qu'il  y  a  de  poésie  dans  le  monde,  et  qu'il  en  ait 
choisi  la  quintessence.  »  Abou  Tammam  est  fauteur  d'un 
livre  intitulé  Hamaçah,  que  quelques  personnes  dans  le  pu- 
blic nomment  Kitab  el-Khahyah.  Cet  ouvrage,  qui  est  un  re- 
cueil de  poésies  de  différents  auteurs ,  parut  après  sa  mort. 
Abou  Bekr  Souli  a  consacré  un  livre  spécial  à  l'histoire  d'Abou 
Tammam,  à  ses  poésies,  à  ses  connaissances  diverses  et  à 
ses  croyances,  et  il  recherche  dans  les  œuvres  du  poëte  les 
preuves  de  fexactitude  du  portrait  qu'il  a  tracé  de  lui;  c'est 
ainsi  qu'il  cite  ce  vers,  où  il  est  dit  au  sujet  du  vin  : 

(^uc  de   mal   on   poiiriail   en    diro,  si   les  lioninirs  ne  Ir  iioniniaieiit 
rosseuco  (le  loulc  chose! 


CHAPITRE  CXVl.  167 

\,_7^_A_jt_rtw  ^  g Fifi •-'.■;   (jVii   <-^>!*^         «î^-^-»  (j — ^^-Isi    ^-i-UJoi   Si) 

U.A^i  c-^J!  JvXx.  UaJiJ       '. Il  jLJa_Jl  pllt  L_.i 

lowià  loJJl  j^«X-<>  Ai  t-ys^aj       Lii^— j  i)  L'L*^  di.À^  b«X_iLj 

La  mort  cVAbou  Tammain  fut  pleurée  par  les  poètes  et 
par  tous  ses  confrères  en  littérature;  citons  ce  passage  d'El- 
Haçan  (fils  de  Wehb)  le  Secrétaire,  poêle  élégant  qui  a 
réussi  aussi  bien  en  prose  qu'en  vers  : 

Les  nuages  qui  arrosent  ce  précieux  tombeau  à  Moroul  gémissent  dou- 
loureusement; 

Quand  ils  passent  au-dessus  de  (  eUe  tombe,  ils  répandent  à  larges 
ondées  leur  pluie  bienfaisante. 

L'éclair  en  soufflette  les  parois  et  la  foudre  les  déchire  (en  signe  de 
deuil); 

Car  la  terre  de  ce  monument  recouvre  un  llahih  (ami,  nom  d'/Ujoii 
Tammam)  ([ui  me  donnait  le  nom  d'ami; 

Homme  de  cœur,  poêle,  esprit  pénétrant  et  cultive,  jugement  solide, 
lumineux  et  fin  ; 

Dès  qu'on  le  voyait,  sa  grâce  cl  s.i  lionlc  laissaient  une  im|iri's.si()n 
lieureusc. 

Abou  Tammam  li'  Tayito,  la  mort  nous  a  plonges  dans  une  slu|ieur 
profonde , 

Car  nous  avons  perdu  en  loi  nu  iiiailrr  (|nc  nonv  nr  saurions  icnqila- 
ccr  dans  le  monde  entier. 


168  LES  PRAIRIES  D'OR. 

L-A-jjJlji  <^.«i**ÀJi^    i!^j|  j-^^-t^nô         IjLaJÎ  (^»XjÎ  UJ;  ^■^]  Ok-À-S» 

^y*  V*"^  -^W:?-   (j^«-«^  ,jl-M*si- jU^I  0-w*^j 
^^j_^^Ji  :>^03  il^yî   dUXc        yj-^  ia^-À-J  JUAju  osjI 

(j^tSJi  ;^L*_j_5  jL»*xJî   ^lo        oj-SjJl  J-A-la->    -j->  J^  jjl 

Tu  étais  pour  nous  comme  un  frère  qui  nous  témoignait  une  amitié 
sincère,  une  tendresse  de  parent. 

Depuis  que  tu  n'es  plus,  les  nuits  de  tes  amis  présents  ou  éloignés  sont 
pleines  d'amertume. 

La  fortune  se  présente  à  nous  sous  son  aspect  le  plus  laid;  elle  nous 
montre  un  visage  chagrin ,  sombre  et  ridé. 

Il  est  juste  que  tu  sois  mort  doucement  (en  odeur  de  sainteté) ,  comme 
il  est  juste  que  la  vie  pour  nous  n'ait  plus  de  douceur. 

Les  poésies  crEl-Haçan  se  distinguent  par  leur  élégance 
et  parleur  inspiration  élevée;  en  voici  un  autre  fragment  : 

Dans  l'excès  de  ta  douleur,  tes  paupières  ne  veulent  plus  goûter  le 
repos  ,  ni  les  douceurs  du  sommeil. 

Tes  yeux  n'ont  plus  droit  au  sommeil ,  depuis  que  ton  cœur  est  ravi 
et  retenu  comme  otage. 

Tes  flancs  recèlent  un  mal  mystérieux,  une  douleur  qui,  je  le  jure  , 
est  invisible  et  cachée. 

Mais  dois-tu  chaque  jour  prolonger  ta  visite  à  ces  doucir  que  tu  salues 
tout  bas,  à  ces  traces  de  campement  qui  font  couler  tes  larmes? 

Interrogeant  cette  demeure  sin*  ceux  qui  riialiilaient  et  pleurant  ceux 
qui  sont  partis? 


CHAPITRE  CXVI.  169 

cj-^  ^  u^j  '"'^^-^-^  ^^^      ^jL*iI  ^,_^£  i  <^  jsi  <^>^^ 

(^ji^  iC-^-u,  i  JJij  JJiÀil  J-^'^  ci^jJsiL  t_>l-£i=î  iiAÀ^  (jw« 
»X^Î   (^jiî^jJl  «K>ii  (JV^^^  C:J>J^^^  t5*^-=*-^  <*>'*^  kj_^       C:J^^*>»^J 

On  dirait  que  tu  n'as  jamais  vu,  durant  les  jours  qui  ne  sont  plus  ,  un 
amant  victime  de  sa  passion. 

Tu  as  été  trompé  par  les  temps  heureux  où  la  jeunesse  se  parait  de 
branches  verdoyantes; 

Puis  elle  s'est  éloignée  de  toi  comme  une  ombre,  elle  a  fui  comme  si 
elle  n'avait  jamais  existé. 

La  vieillesse,  en  lui  succédant,  a  jeté  sur  la  tôle  un  voile  dont  la  blan- 
cheur égale  celle  du  coton. 

Tu  blesses  le  regard  des  belles  jeunes  filles  qui  le  trompent  sans  res- 
pect pour  ta  fidélité; 

Klles  s'éloignent  de  loi  quand  lu  les  appelles,  de  loi  qui  les  charmais 
autrefois. 

Mais  tu  n'as  pas  d'cxeuse,  car  tu  es  un  honune  iulrlliijent  cl  tu  sais 
ce  qui  peut  le  sauver. 

Sous  le  règne  de  Walik,  en  2.'5o  de  ri»c\ii[ire,  niouiul  Ali 
(fils  deDjàd),  maiw/a  des  Benou  Makl)zouiii,  \\\n  des  prin- 
cipaux Iraditionnisles  et  rajjporleurs  de  hadis.  —  En  i23i, 
Walik  fil  mourir  VInncd  (fds  de  Nasr)  khozàyr,  lors  de 
répreuve  j)ublique  sur  la  ii.ilurc  du  Koraii. 


170  LES   PRAIRIES    !)'0R. 

\-À-Mi  j.kxa}  l^lj  -^Aj  y^_5  ^C«<XÀJt   r'^j-J  ^p-»  eJ-J^^^-J'   (j«>-^'^ 

A_iUxll   éjy^f^S   'i^\Ji  ^  AA*  ii^y-A^Î^  -l*k>î  »5.-|.AïJî  »4>^ 
c:>l_A_J  Je  (jii*Aà  J.AÀJ|    (jw«  ^j_jjlAi^  U  U^   ,3.ji_5.JI   /o.-gJ  jUi 

Il  y  avait  à  la  cour  de  ce  Khalife  et  parmi  ses  courtisans 
un  jeune  homme  qui  se  tenait  debout  à  cause  de  sa  jeunesse, 
n'étant  pas  encore  autorisé  à  s'asseoir  dans  les  rangs  dés 
personnes  plus  âgées;  mais  comme  il  était  spirituel,  on  lui 
permettait  de  prendre  part  à  la  conversation  avec  les  autres 
convives,  et  de  citer  tout  ce'  qu'il  savait,  tout  ce  que  sa  mé- 
moire lui  fournissait  de  proverbes  célèbres,  de  vers  rares, 
de  nouvelles  instructives  et  de  réparties  improvisées.  Watik , 
dont  l'appétit  et  la  gourmandise  sont  choses  connues  et  no- 
toires, demandait  un  jour  à  ses  convives  quelles  friandises 
ils  préféraient  pour  s'exciter  à  boire.  L'un  d'entre  eux  cita 
la  canne  à  sucre;  l'autre,  la  grenade;  un  troisième,  la 
pomme;  un  autre,  la  canne  à  sucre  arrosée  d'eau  de  rose; 
un  autre,  rejetant  tout  cela  au  nom  de  la  science,  préférait 
du  sel  ébouillanté;  celui-là  choisissait  la  saumure  afin  d'avoir 
le  gosier  sec,  comme  le  font  les  buveurs  de  nébid,  et  pour 
mie'ux  suj)|)orter  la  force  du  vin  et  l'amertume  des  excitants 
à  la  boisson.  —  "  Vous  n'y  êtes  pas,  répondit  le  Khalife;  et 
loi,  joiinc  liommc,  rpu'l  est  ton  avis?  —  Je  préfère,  le  bis- 


CHAPITRE  CXVI  171 

9- f—i^  (^^y^^    i>i_^  >iJj«Xj  ,^l^  kX<w*w«  ^lÂX*i.i».  Je  <5\^  l> 

^^''^'  cS**^-*  U"^  t^  (:J"^  *^-î^  rÀ*^'  iJ^  (j'  Jyir>5  <i^Av^A>  J^l 
(il   i-«»x3    Ail    JUj_5   <_>bdii    iJs_tf>  ^j^  A.AnXxLî   iC3;i^^âte   jt    »ljc«*Xâ 

xJCwtfi^^  Aj^\  Aaa)-w  ^U-wiii  aX^I^  îjllaAJÎ  liKjXJi  i<\js=-U^ 
(jv3'!5\j  iiÀAw  tj^       t-vLi^Ji  ,.iû*xii  («^is-j  c:>lj^l  (J^>^'  Is»^  (jli 

cuf/  moçcyyar  (nom  d'une  pâtisserie  à  la  mode)  ,  «  répliqua 
celui-ci.  Celle  réponse  s'accordail  pariailement  avec  le  sen- 
timent du  prince  et  touchait  juste  sa  préférence  secrète  : 
«C'est  bien,  c'est  parfait ,  s'écria-t-il,  que  Dieu  t'accorde  ses 
bénédictions!"  Et  le  jeune  homme  fut  autorisé,  pour  la 
première  lois ,  à  s'asseoir  parmi  les  courtisans. 

On  croit  quWbou  Djàfar  Mohammed  (lils  d'Ali,  fils  de 
Mouça ,  surnommé  Rida,  que  Dieu  les  agrée!  )  mourut  sous  le 
règne  de  Watik;  nous  avons  dit,  dans  le  chapitre  consacré 
à  Moulaçem,  quel  était  son  âge  quand  il  mourut  (voir  ci- 
dessus,  p.  ii5).  On  cite  ce  fragment  d'une  lettre  adressée 
par  lui  à  Watik  :  «Prince  des  Cioyanls,  l'homme,  même 
le  plus  favorisé  de  la  destinée,  ne  peut  ohleuir  quchjue 
jouissance  qu'entre  deux  alllictions.  Quicoiupic  ai)aiidonne 
un  à-comple  immédiat  pour  atlendrc  des  échéances  loin- 
taines se  voil  enlever  par  la  lorlune  l'occasion  favorable, 
car  la  loi  du  destin  esl  le  malheui-,  et  la  règle  de  la  foi 
lune,  le  vol.  " 

Kl)    Tannée    ylh)    de   riic'^iic,  sons  je    kiiiiiifil  de  \\,ilik. 


172  LES  PRAIRIES  D'OR. 

^^àla-^Aii  A^stfjjt^  \mj.ks.^         f^L^^"'  iJ^^j  j"*^^  (j-*  *^^*?ls 

Abou  1-Abbas  Abd  Allah  (fils  de  Taher,  fils  d'El-Huçeïo) 
mourut  pendant  le  mois  de  rébî  premier.  Voici  un  passage 
d'une  pièce  de  vers  relative  à  ce  personnage  lorsqu'il  gou- 
vernait l'Egypte  : 

On  dit  que  l'Egypte  est  bien  loin  :  non  elle  n'est  pas  éloignée,  si  le  fils 
de  Taher  y  réside. 

Plus  loin  de  nous  que  l'Egypte  sont  ceux  dont  la  personne  est  ici  et 
dont  la  bonté  est  toujours  absente. 

Cœurs  morts  à  la  bienveillance ,  celui  qui  les  visite  dans  sa  détresse 
pourrait  aussi  bien  visiter  les  hôtes  du  tombeau. 

Autant  Watik  aimait  la  libre  recherche  et  honorait  ceux 
qui  s'y  adonnaient,  autant  il  haïssait  la  routine  et  ses  par- 
tisans; il  suivait  d'un  œil  curieux  le  développement  de  la 
science  et  les  doctrines  tant  des  philosophes  que  des  doc- 
teurs orthodoxes,  parmi  les  anciens  et  les  modernes.  Un 
jour  que  plusieurs  philosophes  et  médecins  étaient  réunis  à 
sa  cour  et  discutaient  en  sa  présence  sur  différentes  questions 
physiques  cl  inélapbvsiques,   le  Khalife  leur  parla   en  ces 


CHAPITKE  CXVl.  173 

^]y-^\  -S-s^lo^  fclIwiJi  iLijJLA  Jîjil   RaSjS  ^\   jl  k..:^*Ac»-i 
^£  -I  JJixJ!  J^^I^L  JjJo   pi  ii^-Jij  o-^^^  p^  LT^^   ^^^ 

^jy^^l  jJÇ*î    L    ^>.^   J^li   JlJii    l^-i-iji    j*^X:S^Î    lioÛ    .ij-.À=i- 

termes  :  «  Je  voudrais  savoir  comment  on  acquiert  la  connais- 
sance de  la  médecine  et  des  principes  d'où  cette  science  est 
tirée?  Est-ce  le  témoignage  des  sens?  Ou  bien  l'analogie  et 
la  coutume?  Est-elle  perçue  a  priori  par  rintellig(>nce,  ou, 
au  contraire,  celte  science  et  sa  méthode  reposent-elles  sur 
l'enseignement  oral,  ainsi  cpie  le  prétendent  pinsieurs  doc- 
teurs orthodoxes?  »  Ibn  Bakhtiechou,  Ibn  Masaweïh  et  Mi- 
khaïl (son  fds)  se  trouvaient  à  cette  réunion;  on  cite  aussi 
parmi  les  assistants  lloneïn,  fds  d'ishak,  et  Salamawedi. 
L'un  d'eux  répondit  ainsi  au  Khalife  :  «  Prince  des  Croyants, 
plusieurs  médecins,  surtout  parmi  les  anciens,  ont  pré- 
tendu (jue  la  seule  route  qui  conduit  à  la  connaissance  de 
la  médecine  est  l'expérience;  la  médecine  est  délinie  par 
eux  une  science  due  à  l'observation  réitérée  des  sens  sur  un 
objet  sensible  et  unique,  étudié  dans  ses  dilVén'nles  ma- 
nières d'être.  Grâce  à  cet  examen  ,  l:i  dernière  de  ses  ma- 
nières d'être  se  révèle  comme  la  première  aux  sens  qui 
l'observent,  et  celui  (fui  retient  la  série  de  ces  ol)S(!rvalions 


174  LES   PRAIRIES  D'OR. 

c:>;l-^3_d  ioj.i^]i   ^«w.JiÀj'  l^^!^    (-»-jg°j  o»-^  lgj_j  ci>U»Xx«j 

^_A_i  (jw«  j-*-J  wyJi^  t5^L)^  f5w-JJ_5  \)]i-^  3'  iixiiL«  â<XiûUt.il 
(^j^.  (ji  _^-*3  yL*^jii!  »l^j  -Ujs  JJX  kiUi>_5  ioiioUJi  j*»,ÀÀi! 

est  dit  expérimenté  (ou  empirique).  Cette  école  ramène 
l'expérience  à  quatre  principes  qui  en  forment  les  prémisses 
et  rinlroduction,  qui  lui  donnent  le  caractère  d'étude  scien- 
tifique, la  partagent  en  différentes  sections  et  en  sont  comme 
les  parties  intégrantes.  Le  premier  de  ces  principes  est  ap- 
pelé naturel,  parce  qu'il  embrasse  les  phénomènes  naturels 
qui  se  produisent  dans  l'état  de  santé  ou  de  maladie,  comme 
le  saignement  de  nez,  la  transpiration,  la  diarrhée,  lé  vo- 
missement et  les  conséquences  bonnes  ou  mauvaises  qu'ils 
révèlent  à  l'observateur.  Le  second  principe  est  dit  acciden- 
te], parce  qu'il  consiste  dans  l'étude  des  accidents  fortuits 
qui  se  présentent  dans  tout  être  créé;  par  exemple,  l'hé- 
moriagie  plus  ou  moins  abondante  qui  se  détermine  chez 
l'homme  à  la  suite  d'une  blessure  ou  d'une  chute,  l'eau 
froide  ou  toute  autre  boisson  absorbée  par  un  sujet  sain  ou 
malade,  et  les  résultats  salutaires  ou  nuisibles  qui  se  mani- 
festent ensuite.  Le  troisième  principe  est  nommé  rationnel, 
parce  qu'il  dérive  de  ïàme  raisonnante  ;  par  exemple  le  mé- 
decin rêve  qu'il  soigne  une  maladie  déjà  observée  et  qui  se 


CHAPITRE  CXVl.  175 

^j^  3i\Aij\^  dXJij    *-r-.*-*o   (jç^  ti'   C'^;^    tr*   «>^-=*-î^l   -«^t^»>Jt 

déduit  de  symptômes  partaitemenl  connus,  et  qu'il  guérit 
cette  maladie;  ensuite  le  médecin  évoque  ce  souvenir,  le 
médite,  le  retourne  dans  son  esprit,  et  soumet  à  la  réflexion 
l'opération  spontanée  de  son  intelligence.  Il  expérimente 
alois  le  traitement  tel  qu'il  l'a  vu  en  songe  :  ou  le  résultat 
est  conforme  à  sa  vision,  ou  il  y  est  contraire,  et,  dans  ce 
second  cas,  il  renouvelle  le  traitement  jusqu'à  entière  réus- 
site. En  dernier  lieu,  le  principe  dil  de  Iranslation,  lequel 
est  de  trois  espèces,  à  savoir  :  l'applicalion  d'un  seul  et 
même  Irailement  d'une  maladie  à  une  ;nilrc  maladie  ana- 
logue, par  exemple  de  l'anthrax  peslilenlici  à  la  lumeur 
i)énigne  \unnmci'  nemleli  (  formicatif))  ;  ou  hien  la  Iranslalion 
du  traitement  d'un  memhic  à  un  autre  nicmhic  similaire, 
comme  du  bras  à  la  cuisse;  ou  bien  <>iilin  le  passage  d'un 
remède  à  m\  autre  n-nu-de  analogue,  connue  cebn"  du  sirop 
de  coing  au  siioj)  de  néllier  sauvage  (ou  a/erole)  dans  le 
relâchement  des  voies  intestinales.  Or  tout  cela,  d'après  les 
médecins  |)recilés,  est  fondé  sur  re\|)ei  ience.  —  Mais  il  v 


176  LES  PRAIRIES  D'OR. 

j..^\  (.jA-J_j-AJ  ^  ^^=«"  ^^  (J??À^^i^A^5  y  (*"(f*'*  t^/^^  AÀjlia 
J<>OUo  yîj  UjJ^  ioU  i)  y\S'  iî  l^  iùwlil  y^UI  J^Asiiî 

*LAiî^iiî  sujL/bJ^  iCj^ji^j  yLi-ui^i^  ciyiil*!!^  uylïjiitj  y^3^' 

P^^vïJîj    ^^.i»-   *(^  J^  (^   Aj  J  4XJU»o  ^iûUi  *té>*».J    5  js.^   O'^HV^J^ 

a,  Sire ,  une  autre  Ecole  qui  soutient  que,  pour  faire  de  la 
médecine  une  science  pratique  et  facile,  il  faut  ramener  les 
faits  pathologiques  et  les  organes  oii  ils  prennent  naissance 
aux  principes  qui  les  comprennent  et  les  réunissent  tous, 
puisque  leurs  différentes  manifestations  n'ont  pas  de  limites. 
Cette  Ecole  déduit  le  mode  de  traitement  de  la  nature  elle- 
même  et  de  la  maladie  prise  sur  le  fait  et  dans  son  état 
actuel ,  sans  tenir  compte  ni  des  causes  génératrices  qui 
n'existent  plus,  ni  des  considérations  de  temps,  de  mœurs  et 
d'âge  ;  enfin  sans  étudier  la  nature  et  les  limites  de  chaque 
organe  ,  sans  observer  ni  recueillir  l'ensemble  des  faits  que 
présente  chaque  maladie  constatée  ou  non.  Ils  appuient 
leur  système  sur  le  raisonnement  suivant  :  C'est  un  axiome 
évident  et  incontestable  que  deux  principes  contraires  ne 
peuvent  coexister  et  qu'ils  s'excluent  mutuellement.  «N'en 
est-il  pas  de  cela,  disent-ils  ,  comme,  d'une  chose  extérieure 
d'où  l'on  peut  déduire  l'existence  d'une  autre  chose  in- 
terne et  cachée?  Or  la  chose  extérieure,  quoif|ue  supposant 


CHAPITRE   CXVl.  177 

j   >  4  4,^kJi  v^^^^  u.^*/*^  p>>  (^^  ^r^j  ^"(j^UU^ 

iùyû^i  »Sjjtj)^  L>^'^  iC^sN.il  i  ;jÎJv^5  iKij.x^  ^if^Jf  W^'^ 
^JU^•5(l3  iù^i)!^  iUxloil^j  c:,liUJS3  ^U^ij  Jl5^t_5l43^iwt^ 
OuLxJ?   (ji>iS^  (j^   *X^l*i.J!   i  ow*j  l_j.Jl«j)  ;jojJl!  (^_j.i  i^iyji^j 

l'existence  (d'une  chose  cachée),  contredit  cependant  les 
déductions  qu'on  en  tire  et,  par  conséquent,  infirme  la  certi- 
tude de  la  conclusion.  »  Telle  est,  Prince  des  Croyants,  l'opi- 
nion de  plusieurs  habiles  médecins  dans  l'ancienne  école 
grecque,  tels  que  jNamounius,  Sasalius  (ThessalusdeTralles?) 
et  d'autres  médecins  connus  sous  le  nom  de  méthodiques.  « 
Watik  demanda  ensuite  à  tous  les  docteurs  réunis  quel 
était  le  système  qui  avait  prévalu  dans  la  majorité.  Ils  ré- 
pondirent: «  C'est  l'analogie  (ou  méthode  comparative),  »  el , 
à  la  demande  du  Prince,  ils  ajoutèrent  d'un  commun  ac- 
cord les  explications  suivantes  :  «D'après  l'opinion  de  cette 
école,  la  méthode  et  la  règle  des  études  médicales  ont  pour 
point  de  départ  certaines  connaissances  qui  en  forment  les 
préliminaires,  par  exemple,  la  notion  de  l'idiosyncrasie  des 
corps,  celle  des  membres  et  de  leurs  fonctions,  celle  des 
corps  dans  l'état  de  santé  et  de  maladie;  la  connaissance  des 
variations  climatériqnes;  celle  des  faits  et  gestes  et  de  la  pro- 
fession du  malade,  ses  babiludes,  son  alimentation,  sa  bois- 


178  LES  PRAIRIES  D'OR. 

\i^JJ-tf>^  1>,*jUJo  i  ioUx^  sJUa^J  JJ*k5j  ^ooULj  <joj(^^  i 

iLAjl*i*jiÀJi  (jbt^^ij  ^.amUx^Î^  Js.^^  y-.  ^^-^  ^  ^î^jÀÀUvî^ 

l^^'^ji=?'\>,  ^-^^^^   0*^5  i  «^^>^'  ^^^^^  ^*-  :>U*>^i 
tjU*wiJl  iLs^u-yû  Uî  ii^i  lâÀi^  y_^j  (jî  t^=>\j.jl5  J^xJ»J 

(jbî^^wo^!  5-5^-^  ij-Jû^^îj  oHr^^  z^^  ^Ij'  '^'  '■^  *^* 

vUa«^5_5  S^UÎI  cyli3^(^^  uH)^^3  i:ybUJ^j  iij  j^*^l_5  ^jl^Kj^î^ 

son  et  son  âge  ;  enfin  la  connaissance  des  forces  de  la  maladie. 
«Il  est  établi  par  l'observation,  disent  ces  médecins,  que  les 
différences  de  forme  et  de  tempérament  qui  existent  chez 
ranimai  se  présentent  également  dans  ses  organes.  Les 
corps  des  animaux  varient  entre  eux  en  raison  de  l'atmos- 
phère ambiante,  du  mouvement  ou  du  repos,  des  aliments 
et  des  boissons  qu'ils  absorbent,  du  sommeil  ou  de  l'état 
de  veille,  des  matières  qu'ils  expulsent  ou  qu'ils  retiennent, 
enfin  en  raison  des  accidents  moraux ,  comme  le  chagrin , 
la  crainte,  la  colère  et  l'inquiétude.  La  médecine  ,  en  gou- 
vernant les  corps ,  a  pour  but  de  leur  conserver  la  santé 
dont  ils  jouissent  ou  de  la  rendre  à  ceux  qui  l'ont  perdue  ; 
or  la  conservation  de  la  santé  suppose  la  connaissance  des 
causes  qui  peuvent  concourir  à  ce  résultat.  C'est  donc  un 
devoir  pour  le  médecin  qui  entreprend  une  cure  non -seule- 
ment déposséder  ces  premières  connaissances  positives,  mais, 
en  outre ,  d'examiner  la  nature  des  maladies  et  celle  des  corps , 
l'alimentation ,  les  habitudes,  les  circonstances  de  temps,  en 
un  mol ,  l'ensemble  des  causes  qui  doivent  le  guider.  »  Ces 


CHAPITRE  ex VI.  179 

U  ^^  -o-4J>LjLjI  t^  iL>ji>^lj  iL>«X-ft^î  tj-*^^jÇO  i  ivÀ^LkJi 

gîj,yi^  U^^l  c^K'îii  ^1>>^l*  J^.Xa^^I  iiAJuS'i  ^^>Jî 
(-jlil^-iJl  ^î  ^i  (*"1''^  t^/=^'  -xAjUs»  c^^j  ^-^  J^  tj***^^'^ 

doctrines.  Prince  des  Croyants,  sont  celles  d'Hippocrate,  de 
Galien  et  de  beaucoup  de  médecins  anciens  et  modernes. 
Ces  médecins  ne  s'accordent  pas,  il  est  vrai,  sur  un  grand 
nombre  d'aliments  et  de  remèdes,  tout  en  étant  d'accord 
sur  les  principes  que  nous  venons  d'établir.  Ces  divergences 
d'opinion  résultent  de  leurs  procédés  différents  de  déduc- 
tion. Ainsi  les  uns  croient  qu'on  arrive  à  connaître  la  nature 
des  remèdes  et  des  aliments  en  se  guidant  d'après  leur  sa- 
veur, leur  odeur,  leur  couleur,  leurs  vertus ,  l'action  et 
l'influence  qu'ils  exercent  sur  le  corps;  ils  soutiennent  donc 
que  la  seule  méthode  de  déduction  qui  méiite  confiance 
consiste  dans  l'analyse  des  substances,  puisque  les  couleurs, 
les  saveurs  et  le  reste  sont  soumis  aux  quatre  éléments,  selon 
qu'ils  exercent  sur  elles  une  impression  de  chaleur,  de  froid, 
de  sécheresse,  etc.  Un  autre  système,  au  contraire,  prétend 
que  le  témoignage  le  plus  sûr,  le  jugement  le  |)lus  solide 
que  l'on  puisse  établir  sur  la  nature  des  remèdes  ou  des  ali- 
ments,  consisti;  tlans  la  connaissance  de  Icui-  action  sur  le 


180  LES  PRAIRIES  D'OR. 

y\>_x_À_ji  (jl_À-A«i)l^  yLÀ.A«iil  if^^  ^\  (jLmo^I  (j^  *^î«XxJi 
J._Â_^!sJÎ  (^j:^!  «i^^-i*i  iOù*.  i^^!/!  ^ys.î  ij  Lg.A^  Ûm»  y>J''^> 
^î^  (^j^.^5  (j-«  <X-a-l_j  tK  i  ii*Jjî  '^^•i  (J-*^  ^^-^  lK*^  ^4»-* 
dUij  ^Syi^S    (^JvxjbjjJl    (j^   -«^tALi/î    l.<r,A.«u«.J   CJÎ^is^î    »i<X:S: 

Kl  *= 

corps,  abstraction  faite  de  leur  saveur,  de  leur  odeur,  etc.; 
et  qu'en  dehors  de  cette  observation  des  influences  et  eflets, 
il  ne  peut  y  avoir  ni  solution  ni  jugement  infaillibles  sur  la 
nature  d'un  remède  soit  simple,  soit  composé.» 

Watik  s'adressant  alors  à  Honeïn,  parmi  tous  les  docteurs 
réunis,  lui  demanda  quel  était  le  premier  instrument  de  la 
nutrition  chez  l'homme  ;  Honeïn  répondit  en  ces  termes  : 
«  Le  premier  instrument  de  la  nutrition  est  la  bouche,  et  les 
dents  qu'elle  renferme.  Celles-ci  sont  au  nombre  de  trente- 
deux  :  seize  dans  la  mâchoire  supérieure  et  seize  dans  la 
mâchoire  inférieure.  Dans  chaque  mâchoire  se  trouvent 
quatre  dents  larges  et  pointues  que  les  médecins  grecs  ont 
nommées  incisives,  parce  qu'elles  servent  à  couper  les  ali- 
ments mous  comme  ils  pourraient  être  coupés  par  le  cou- 
teau :  c'est  ce  que  nous  nommons  tenaja  wa  rohayal  (doubles 
et  quadruples).  A  côté  de  celles-ci,  dans  chacune  des  deux 
mâchoires  ,  se  placent  deux  dents  aiguës  à  leur  extrémité  et 


CHAPITRE  CXVI.  181 

Ak_3    ^^iJI    ^^!    i    l«^«    yl^U    ;J*-i^-à"5(I    Ulj    *Xi^!j    J^l    >i 

Jvjs-Î^  JCÎ  ^\^  Ug  xi\i  (jvxAâiiii  yvwjjali  5A.iw  J^Asi  iijXS 
J^L-L»  JoL»»(^l  ^^i  i  ^_|*!^^iJI  yl^  Uj  iOtj;i  J_yoî  l^yÀx) 
J^  ^jl^  IjCj  *jli  (jvjuoSiiî  (jv.*vj«iàJi  5Xà.  (j^X»«ciÎ  IgiÀ^  «X»-!^ 
^_J*<l^>yî  J_^l  y,JL5"<Ji  ^v-^^5  Uï^  *J^'  J,?^5  \.<y^  «Xi>.l^ 

larges  à  leur  base  :  ce  sont  les  canines  [cnial],  qui  servent 
à  couper  les  aliments  durs.  A  côté  des  deux  canines  se 
trouvent,  dans  chaque  mâchoire,  cinq  autres  dents  larges 
et  massives  :  ce  sont  les  adras,  que  les  Grecs  ont  nommées 
molaires,  parce  qu'elles  servent  k  moudre  les  aliments.  Tan- 
dis que  les  incisives  et  les  canines  n'ont  qu'une  seule  racine, 
les  molaires  de  la  mâchoire  supérieure  ont  trois  racines,  à 
l'exception  des  deux  molaires  du  fond,  qui  en  ont  ordinaire- 
ment quatre;  quant  aux  molaires  de  la  mâchoire  inférieure, 
elles  ont  chacune  deux  racines,  mais  les  deux  molaires  du 
fond  en  ont  ordinairement  trois.  Le  nombre  plus  grand 
des  racines  appartenant  aux  molaires  est  nécessité  par  le 
travail  plus  pénible  que  font  ces  dents,  et  les  molaires  supé- 
rieures sont  pourvues  de  plus  de  racines  |)air(î  qu'elles  sont 
comme  suspendues  à  la  \()ûle  du  |)alais.  » 

Watik  félicita  ce  mé'decin  de  la  description  (pi'il   venait 


182  LES  PRAIRIES  D'OR. 

cyiiîj  J<_<-«m   pijJsJl^    .«=^)«X*Jî    (j%j   ^3^i   ^Aij5*Xj  c:*^lx/9 

iU^Ji  caliJjl  j^^  iû-*^  cjUawI  (J-À.S»-  Jis  ^ÎM(-^  *^-**i5  <_>l*Aw^l 

J^U.Jt  JiijUJij  yl^Uij  ^Lj^lj  V^>^  4^^i  ^^^ 

de  lui  donner  de  l'appareil  dentaire;  après  quoi  il  l'invila  à 
composer  pour  son  propre  usage  un  traité  dans  lequel  il 
réunirait  les  notions  médicales  les  plus  nécessaires;  c'est  à 
cette  occasion  que  Honeïn  rédigea  pour  le  Khalife  un  ou- 
vrage en  trois  parties  contenant  divers  renseignements  sur  les 
aliments ,  sur  les  purgatifs  et  sur  les  organes  du  corps  hu- 
main. D'autres  rapportent  que  Watik  fit  à  Honeïn  différentes 
questions  dans  cette  conférence  et  dans  d'autres  réunions 
semblables,  et  que  ce  savant,  après  y  avoir  répondu  ,  réunit 
toutes  ses  explications  dans  un  traité  qu'il  intitula  Livre  des 
questions  naturelles,  ouvrage  où  il  touche  à  différentes  sciences. 
Au  nombre  des  questions  adressées  par  Watik  à  ce  docteur 
(d'après  une  autre  version,  un  courtisan  était  chargé  d'in- 
terroger Honeïn  en  présence  du  Khalife,  lequel  écoutait 
avec  admiration  les  questions  et  les  réponses)  se  trouvait 
celle-ci  :  «Combien  y  a-t-il  de  causes  qui  déterminent  les 
changements  atmosphériques?  —  Il  y  en  a  cincj,  répondit 
lloiicïn,   à    savoir  les  saisons,  le  lever  et    le   coucher   des 


CHAPITRE  ex VI.  183 

^^^    Alo.gi   c-ol^  U^  iuoliw^   ajy^  ùsjij\  -«^îj-^i    (j\^  (j^-^wJi 

^^  (^jv-À-j*.  Jlï  ^l^^l  il«x-ftl  xaJuS^  (J.S.  j^Aifc.U  J.jl-wJI  Jb 

iiw*»jlj  S:>jUj  JUwJi   ï^  Ulsji^<xJlj  LjmaJi^j  c->y»4i.j  <3l<\iJl 

étoiles,  les  vents,  les  (conditions  respectives  des)  pays  et 
les  amas  d'eau. —  Combien  y  a-t-il  de  saisons?  continua  le 
questionneur. — Quatre  :  le  printemps,  Tété,  l'automne  et 
l'hiver.  La  température  du  printemps  est  un  mélange  bien 
équilibré  de  chaleur  et  d'humidité;  l'été  est  chaud  et  sec; 
l'automne,  IVoid  et  sec  ;  l'hiver,  froid  et  humide. —  Comment 
les  étoiles  peuvent-elles  exercer  une  influence  sur  les  varia- 
lions  atmosphériques?»  Iloneïn  répondit  :  «Lorsque  le  so- 
leil se  rapproche  des  étoiles  ou  celles-ci  du  soh'il,  le  temps 
devient  plus  chaud  et  la  chaleur  est  d'autant  plus  intense 
([ue  l'étoile  est  plus  grande;  au  contraire,  lorscpie  le  soleil 
s'éloigne  d'elles  ou  (ju'elles  s'éloignent  de  cet  astre,  la  tempé- 
rature devient  plus  froide.  —  Combien  compte-ton  de  vents? 
—  Le  vent  du  nord  ,  le  vent  du  sud,  le  veiil  d'est  el  le  vent 
d'ouest.  L'action  du  vent  du  nord  est  froide  et  sèclie;  celle  du 
vent  du  sud  est  chaude  et  humide;  celle  des  vents  d'est  et 
d'ouest  tempérée ,  avec  celte  difTérence  que  le  vent  d'est  tend 
plutôt  à   la  chaleur  et  à  la   sécheresse,  le  vent  d'ouest  au 


184  LES   PRAIRIES  D'OR. 

ikx3j\  5Î_jj^i!j  (j^^'  ^y  ^i^  ^h-^^i S^'^^s  *^^4^  *;^^ 

/y_a^i    t-J^-À-ii    X-A-Ja-l-ÀJ    c_>^x5i^    /j^^JÎ_5  JW\iJi_j    Vj"^  •     (^ 

\-g„sljLjjl  (j^  L^AsUi^Jj  l4^Uj^î  <_.v-»*».^  yitX^A.])  o^-sx-i^ 

-■Ij^Ji    /j_£    SjJCaw^  Aji)   !ij.j    *^^î    «xX*Jl    dUi   Jotrs»    V^"*  • 

froid  et  à  l'humidité.  —  Comment  classe-t-on  les  pays?  — 
En  quatre  groupes,  en  raison  :  i°  des  quatre  points  cardi- 
naux; 2°  de  l'altitude  ou  de  la  dépression  ;  3°  du  voisinage 
des  mers  ou  des  montagnes;  lx°  de  la  nature  du  sol.  Les 
quatre  points  cardinaux  sont  le  Sud,  le  Nord,  l'Orient  et  le 
Couchant.  La  chaleur  domine  dans  le  Sud  et  le  froid  dans 
le  Nortl;  le  climat  de  FOrient  et  du  Couchant  est  modéré. 
Les  pays  diffèrent  entre  eux  par  l'altitude  ou  la  dépression, 
ce  qui  veut  dire  que,  s'ils  sont  plus  élevés,  ils  sont  plus 
froids,  et  plus  chauds,  s'ils  sont  plus  déprimés.  Quant  à  la 
différence  étahlie  par  le  voisinage  des  montagnes,  en  voici 
la  loi  :  Tout  pays  dominé  au  sud  par  une  montagne  est 
plus  froid,  parce  qu'il  est  séparé  du  vent  du  sud  et  exposé 
seulement  au  vent  du  nord;  si,  au  contraire,  la  montagne 
est  située  au  nord,  la  température  de  ce  pays  est  plus  élevée.  » 
Le  questionneur  poursuivit  ainsi  :  «  Je  voudrais  savoir  quelles 


CHAPITRE  CXVI.  185 

iixAAlo  (_,*-**^^  (_>ji^i».l  oi-AJ  yl*^AM  y£  j»»*i^lj  JoL*it 
kXXjJ!    viUi  c:^*s=-     '   X)y^^  '^t'^'  t-:*jfe'  (jS   Jb  ^r•*i^5   *^ 

Jb  c-*J3ji_5    i^i    <îuAxs-   I^àaIs  owI^  y\^   (:J''^'j   uÂ-iwI    tXAxll 

*j-^-=*-  vj^^Lv  j*j.AJi  (iUi  jl^ij  ^^^!^  (C^aXc  ftaJij  (^J'i^jJi 

sont  les  différences  que  le  voisinage  de  la  mer  établit  entre  les 
pays.  —  Si  la  mer  baigne  une  contrée  au  sud,  répqndit  le 
savant,  la  température  est  chaude  et  humide;  si  la  mer  est 
au  nord,  le  climat  est  plutôt  froid.  —  Quelles  sont  les  diffé- 
rences qui  proviennent  de  la  nature  du  sol.^  —  Si  le  sol  est 
rocheux,  Tair  est  froid  et  léger;  si  le  sol  est  pierreux,  fair 
est  léger  et  chaud  ;  si  le  sol  est  argileux,  le  froid  et  l'humidité 
dominent.  —  Quelle  est  l'influence  des  amas  d'eau  sur  l'at- 
mosphère.' —  Le  voisinage  des  eaux  stagnantes,  des  corps 
ou  des  végétaux  en  décomposition ,  et  de  tout  ce  qui  est 
susceptible  de  se  putréfier,  corrompt  l'atmosphère  environ- 
nante. »  Gel  échange  de  questions  et  de  réponses  se  poursui- 
vit ainsi  longtemps,  jusqu'à  ce  que  le  Khalife,  dont  l'atten- 
tion se  lassait,  y  mît  un  terme.  11  fil  un  présent  à  tous  les 
savants  qui  s'étaient  trouvés  à  cette  conférence,  après  quoi 
il  invita  chacun  d'eux  à  citer  de  souvenir  quelques  sentences 
sur  le  renoncement  à  ce  monde  où  loul  passe  et  s'anéautil, 


I8G  LES  PRAIRIES   D'OR. 

yl  JULJ  *X_à_^Jî  *LV=»-    (jii*^i  AJi  J^jÇS  «Xij  j^U>-_^i 

el  ils  racontèrent  l'un  après  Tautre  tout  ce  qu'ils  savaient 
de  faits  de  ce  genre  tirés  de  1^  vie  des  anciens  philosophes 
et  des  sages  de  la  Grèce,  comme  Socrate  et  Diogène.  Watik 
leur  dit  ensuite  :  «  Vous  avez  développé  ce  sujet  et  vous 
l'avez  orné  du  charme  de  votre  éloquence,  je  désire  main- 
tenant que  l'un  d'entre  vous  me  cite  la  plus  belle  sentence 
qui  fut  prononcée  par  les  sages  qui  entouraient  le  cercueil 
d'or  massif  où  Alexandre  venait  d'être  déposé  (cf.  t.  II, 
p.  261).  »Un  des  docteurs  répondit  ainsi  au  Khalife:  «  Toutes 
leurs  paroles  sont  dignes  d'admiration,  mais  la  plus  belle 
sentence  prononcée  parmi  les  sages  convoqués  à  cette  céré- 
monie fut  celle  de  Diogène,  sentence  que  d'autres  attri- 
buent à  un  sage  de  l'Inde  ;  la  voici  :  «  Alexandre  était  hier 
moins  silencieux  qu'aujourd'hui;  mais  aujourd'hui  il  nous 
instruit  mieux  qu'hier.  »  —  Abou  'l-Atahyah  a  fait  passer 
ra|>horismo  de  ce  philosophe  dans  les  vers  suivants  ; 


CHAPITRE  ex VI.  187 

lX-->.   JOLx)  Iaff_ji  j.^J!  c^i^        c:)Lla_£  <j  ^W=*  i  c;^\(j 

Jyb  _j.i>_j  5;^3  y^  pli  ^' 

»J^ii-ft  t5«xJi  XnmwU:  j  iu;r».l4i  (:r*  t^y^  u^  ^-?  cl'!*Xj»-^i 

La  vue  de  ta  tombe  eu  ce  lieu  suffit  pour  m'accabler  de  douleur  lorsque 
je  secoue  mes  mains  pleines  de  la  terre  de  ta  fosse. 

Vivant  tu  me  jjrodiguais  de  sages  conseils,  mais  lu  m'instruis  mieux 
encore  aujourd'hui  que  pendant  ta  vie. 

Walik  répandit  des  larmes  abondantes  et  sanglota  avec 
force,  et  tous  les  assistants  mêlèrent  leurs  larmes  aux  siennes. 
Puis  il  se  leva  brusquement  cl  dit  : 

Dans  les  vicissitudes  capricieuses  de  la  destinée  il  y  a  des  chutes  et  des 
effondrements. 

L'homme  était  au  faite  de  sa  fortune,  et  le  voilii  (pii  tombe  et  demeure 
immobile  au  fond  de  l'abîme. 

Les  jouissances  humaines  sont  éphémères,  la  vie  de  l'homnic  n'esl 
qu'un  vêlement  d'emprunt. 

Le  récit  intéressant  des  événements  qui  se  produisirent 
sous  le  règne  de  Walik,  l'exposé  des  discussions  auxquelles 
se  livrèrent  les  jiirisconsullcs  et  les  théologiens  qu'il  réunis- 
sait en  ronlereiire  puin- disserter  sur  les  |)rin(ipes  et  les  co- 
rollaires d<'s  sciences  (jui  sont  du  domaine  de  la  raison  et  de 


188  LES  PRAIRIES  D'OR. 

Lj\j  j,  Liûilj._>l  4-^=5-3^  <;^J»JL  (j*.W*^^  (S^  U^  si\ÀXÂ  ^5Xh=>..< 
*X_^Î  j„s;v^Jî  |»^j  (j«UJlj  Jlaa»  (^j'j^i  J>J^'_j  jJi\Ài\  iCiliX-i». 
JUi  ^3jI_j.^  AAAkifc  i  U.X3  ÏLAàJiJl  ^^lï  ij^j  il/i  jt  yjî 

^Ajiliî    /».£   dJis    4^^ls   t_>W'    iJvJÛ   ti    SjlAii.l    (jw« 

la  tradition ,  tous  ces  détails  sont  l'apportés  dans  nos  ouvrages 
d'une  date  plus  ancienne.  Plus  loin,  dans  le  chapitre  con- 
sacré au  khalifat  de  Kalier-Billali  (fds  de  Moutaded-Billah), 
nous  rapporterons  encore  quelques  traits  du  caractère  des 
souverains  abbassides,  pour  éclaircir  un  fait  que  nous  au- 
rons à  mentionner  dans  riiistoire  de  ce  Khalife. 

Watik  étant  tombé  malade,  ce  fut  Ahmed  (fils  d'Abou 
Douad),  le  chef  des  kadis,  qui  récita  la  prière  publique,  le 
jour  de  la  fête  des  Sacrifices  (lo"  jour  de  don  '1-hiddjeh); 
ce  magistrat  mêla  à  son  oraison  [khoutbah)  des  vœux  pour 
le  prince  et  prononça  ces  paroles  :  «  O  mon  Dieu,  sauvez-le 
de  répreuve  que  vous  lui  avez  infligée  !  »  Quant  à  la  date  de 
la  mort  de  Watik,  nous  en  avons  parlé  au  début  de  ce  cha- 
pitre, il  est  donc  inutile  d'y  revenir  (voir  ci-dessus,  p.  i/|5). 


CHAPITRE  CXVII.  189 

«Olil  «>«-«j  w^i-c   5!-^L4«J|  c-jLoI 

À  ciUi^  4X!i  ^>  J^ydî  ilj:>  ji  ^^i  ^  jUJi  p^i  i  yl< 
^L»   (^L_\_jj  (^jvJCjL»^   ^^jO'^'jj   (^A^j)    iXA.*w   <si^    ^^i   (j^  (;Jîr*^ 

c.L:âi  L_^  J^-Ji-J  *-*-^^V^  '^3  f*^   ^"^^^  "^^  J->*^^  j~â"«*î 
(j^jijjlj  ^«^^  ^^À"*»»  Jl^^-w  (j^  U.^^^   ci>5\jj  i^Lxj^^i   *K^  uK**_j 

CHAPITRE  CXVII. 

KHAMFAT  DE    MOTEWKKKir,  -  Ar.ALI.AH. 

Djàfar  (fils  de  Mohammed,  fils  do  Haroiin)  fui  ensuite 
proclamé;  il  avail  craboid  reeu  le  surnom  de  Mountasir- 
Billah,  mais  dès  le  lendemain  de  son  avènement,  Ibn  Abi 
Douad  lui  donna  celui  de  Molewekkil-Alallali.  Ceci  se  pas- 
sait le  jour  même  ou  mourait  le  Khalife  Walik  son  frère, 
cest-à-dirc  le  mercredi  2/|  du  mois  de  don  M-liiddjeh,  232 
de  rhégire.  Le  surnom  patronymique  de  Motcwekkil  était 
Ahou  l-Fadl;  il  avait  vinj^t-sept  ans  et  (|uelques  niois  (|uaud 
il  fut  proclamé;  il  fut  assassiné  à  l'âge  de  quarante  et  un  ans, 
après  avoir  régné  quatorze  ans,  neuf  mois  et  neuf  jours  (le 
mercredi  3  du  mois  chawal  2 '17).  Sa  nièic.  esclave  originaire 
du  Khàrezm,  se  nonunail  Cliudjà. 


190  LES  PRAIRIES  D'OR. 

Jyti^  fcjJa-olj  aJ^*Àj  ISsUviii    AÀjff  jj  îyi^u^  A-w*aÎ   (j*,UJ|  J^^3 

oj_ji_j  L_>Ljv-A.Ji  »iLA.j  (j^  ioUJi  5<x^  Jî  l^À^  (j«UJl  ^^t>o) 


IlESUMÉ    DE    SON    HISTOiaF,    ET  DE  SA    VIE;   EVENEMENTS    PRINCIPAUX 
DE  SON  RÈGNE. 

A  peine  en  possession  du  pouvoir,  Motewekkil  abolit  le 
libre  examen,  les  discussions  philosophiques  et  tout  ce  qui 
avait  passionné  les  esprits  sous  Moutacem,  Watik  et  Ma- 
moun.  Il  rétablit  Torthodoxie  et  la  soumission  à  la  coutume 
religieuse,  et  exigea  des  chefs  de  Técoie  tradition niste  qu'ils 
enseignassent  la  tradition,  ainsi  que  les  dogmes  et  les  pra- 
tiques consacrés  par  la  suniiah.  Il  adopta  l'usage  des  vêtements 
d'un  drap  particulier  qu'il  préférait  à  toute  autre  étoffe,  et 
cette  mode,  suivie  par  les  gens  de  sa  maison,  se  répandit 
ensuite  parmi  le  peuple  :  chacun  voulant  imiter  le  souverain, 
les  étoffes  de  drap  atteignirent  des  prix  élevés,  et  l'on  en  per- 
fectionna la  fabrication  pour  répondre  à  la  vogue  et  satisfaire 
aux  goùls  du  prince  et  des  sujets.  On  trouve  encore  de  nos 
jours  f[uelques-unes  de  ces  étoffes;  elles  sont  connues  sous 


CHAl'ITUE  CXVII.  191 

J^-A-li   ^X>  ^^  j4XxJî^    (j-*^lt  (j-xUl  J^cwj   viUil   iUliCcwl 

i  j— g_Ii  (j*Lx_*Jî    ^  J^UXi».    Qf^   <^.À^>M^    y-tf   Js„s»-Î    (jX>   ^_j 
^LiJÙAvî   JsJ»  U  JJij^_5   Jo^Lalîj,  J>frîl^    cUxuJt   A*J^ 

<x_yLft  (j*UJl  (_/A^Î  Si'j^  tlyJi  j^^  (^  g'^À^Î  U^;)  Vt^^ 

le  nom  de  motewekkUi ;  c'est  une  espèce  de  tissu  de  drap 
Tort  beau ,  bien  fabriqué  et  d'un  excellent  teint. 

Le  règne  de  Motewekkil  fut  un  des  plus  heureux  et  des 
plus  prospères,  par  Tordre  qui  régna  dans  fompire,  par  le 
maintien  de  la  sécurité  et  de  la  justice.  Ce  khalife  ne  peut 
être  cité  pour  sa  générosité  et  sa  munificence,  mais  il  ne  doit 
pas  être  non  plus  taxé  de  parcimonie  ni  d'avarice.  Aucun 
des  khalifes  abbassides  ses  prédécesseurs  n'avait  admis  dans 
son  palais  les  jeux,  les  frivolités,  le  goût  des  boulTonneries 
et  de  tous  les  plaisirs  qu'on  proscrit  ordinairement;  Mote- 
wekkil fut  le  premier  qui  les  adopta,  et  les  distractions  de 
ce  genre  qu'il  inventa  se  propagèrent  ensuite  chex  la  plupart 
de  ses  courtisans  et  dans  le  public.  I^ersonne  parmi  ses  vizirs 
et  ses  principaux  secrétaires  et  olTiciers  ne  se  signala  par  sa 
générosité  et  la  noblesse  de  son  caractère,  et  ne  sut  s'élever 
au-dessus  de  ces  habitudes  de  dissipation  cl  de  frixolilé.  Son 
alTranclii  Fath  ben  khakan  le  turc,  celui  de  ses  favoris  qui 
prit  le  [)lus  d'enqjire  mii   lui  <>!  qu'il  admit  le  [)lus  souvent 


192  LES   PHAIRIES  D'OR. 

^jl  dUi^   iis_5;iJÎ3   (jv^^l^  (^^-s-^  Oj5^«iS  ^^^   ^^yj-x?.   (J«^-iJî 

dans  son  intimité,  ne  sut  jamais,  malgré  ie  crédit  dont  il 
jouissait  auprès  du  Khalife,  se  faire  aimer  par  ses  bienfaits  ni 
se  faire  craindre  par  ses  rigueurs.  Ce  fut  pourtant  un  homme 
instruit  et  un  littérateur  distingué;  il  a  laissé  sur  différentes 
parties  de  la  littérature  et  de  la  morale  un  livre  intitulé  le 
Verger  [Boustan]. 

.  Motewekkil  se  fit  construire,  pendant  son  règne,  un  palais 
d'une  forme  inconnue  jusqu'alors  et  qui  a  reçu  le  nom  d'£/- 
Hiri,  «  des  deux  ailes  et  des  portiques.  »  L'idée  lui  en  fut 
suggérée  par  un  de  ses  courtisans  qui,  dans  une  causerie  du 
soir,  lui  raconta  qu'un  roi  de  Hirah,  de  la  famille  de  Nôman 
et  de  la  tribu  des  Benou  Nasr,  passionné  pour  la  guerre  et 
voulant  que  le  souvenir  en  fût  toujours  présent  à  son  esprit, 
avait  fait  bâtir  dans  Hirah ,  sa  capitale ,  un  édifice  rappelant 
une  armée  rangée  en  ordre  de  bataille.  La  partie  supérieure 
du  palais,  destinée  au  logement  du  roi,  figurait  le  centre  de 
l'armée,  les  deux  ailes  représentant  la  droite  et  la  gauche 
de  l'armée  étaient  réservées  à  ses  principaux  courtisans;  le 
pavillon  de  droite  renfermait  le  vestiaire  royal ,  et  le  pavillon 


CHAPITRE  CXVII.  193 

IJsJÛ  ^^.(vw^  ijl^yi  (^  Aj^^iil  çjlj.jiJtj  (j%^Jii3  j^X-tAJI  SJUiii 
5^.^S-^  Jl  liLoi  (:jv.^i^  t5;»^^  t-^J^il  l*X^  Jl  yUjuJ! 
»  js.-^  Ji  j-w^JiL^I^  aKxÀj  ULè\j|   dJJi>  ii  J^ydi   tj*U)i   ^-Sj'^ 

i>:RAAJl  &^l  >j5s 

gwuai  ^^5\^  J^j  \^à         »j.^l\   iwiAj  J^  AXAj  L» 

de  gauche  tout  ce  qui  servait  à  ses  festins;  la  partie  élevée  du 
palais  commandait  le  centre  et  les  deux  ailes,  et  les  trois 
portes  du  palais  y  conduisaient.  Tel  est  l'édifice  qui  porte 
encore  aujourd'hui  le  nom  des  deux  ailes  et  celui  iVel-hiri 
en  souvenir  de  la  ville  de  Flirah  :  le  peuple  se  fit  construire 
des  habitations  sendilahles,  en  se  conformant  au  style  du 
palais  de  Motewekkil ,  édifice  qui  est  resté  célèbre  jusqu'à 
nos  jours. 

Ce  Khalifi;  lit  reconnaître  ses  trois  fils  comme  héritiers 
présomptifs,  ;i  savoir  Mohammed  Mountasir-Billah ,  Abou 
Abd  Allah  Moulazz-Iiillah  et  Moustaïn-BiUah  (Mouayyad). 
Le  poêle  Ibn  el-Mndebbir  a  rappelé  cette  circonstance  dans 
les  vers  suivants  : 

Cette  f'Icction,  semblable  à  {'dlcction  snns  l'nrhrr,  est  uiio  somrr  dr 
bénédictions  ponr  le  genre  humain; 

Elle  a  été  établie  par  Djàrar  (Motewekkil)  m  faveur  dr  ses  trois  fils 
illustres. 

Ali,  (ils  (le  Djehm,  a  dit  sur  le  même  sujet 

vu.  i^i 


njii  LES  PUAIRIES  D'OB. 

jj  (ja,1.àJÎ   ç-jl-vjj    -^j'^j-AJi  »o_5Uj  t^  kii.Jij.Ai  J.AÏ  *Xi_5  iiÀA« 

U    ».A.:jT5  ^î^xiî   (jâAJsi»  j.-r,*ilj   iJOCi!îX,i.>  *Xjo   «::j1j^35    tiU^S    ^Xas 

â»_>i-.^U«»»  (j^jf;  «^J<X=^  (j-t  'j_5.Àj  ^.g.AA£  c_>^Aiîi4)^  0.jji>lAaAj 

Dis  au  Klialiie  Djàfar  :  Prince  généreux,  fils  des  Khalifes  et  des  imams, 
guide  de  la  voie  sainte. 

Voulant  forlifler  la  religion  du  Prophète,  tu  as  investi  Mohammed  de 
fautorité  future  sur  les  musulmans; 

Puis  tu  as  donné  Moutazz  pour  successeur  à  Mohammed,  et  tn  as 
désigné  en  troisième  lieu  le  noble  Mouayyad. 

Motewekkil-Alallah  fut  promu  au  khalifat  un  siècle  après 
rélection  cVAbou'l-Abbas  SafTah  et  deux  siècles  après  la  mort 
d'Abou  '1-Abbas,  fils  d'Abd  el-Mottalib;  mais  les  opinions  ne 
s'accordent  pas  sur  ce  point,  et  il  faut  tenir  compte  tle  la 
divergence  des  Chroniques,  de  l'évaluation  différente  des 
années  de  leur  règne,  et  du  nombre  de  mois  et  de  jours  que 
les  historiens  y  ajoutent  ou  en  retranchent.  —  Motewekkil, 
peu  de  mois  après  son  avènement,  disgracia  Mohanimed, 
fils  d'Abd  eî-Mélik  Zeyyat,  confisqua  ses  richesses  et  tout  ce 
qu  il  possédait  et  investit  de  ses  fonctions  Abou  1-Wézir.  Ibn 
Zeyyat  avait  inventé,  pour  torturer  les  coupables  et  ceux  qui 
avaient  mérité  sa  colère,  un   grand  cylindre  de  fer,  garni 


CHAPITRE  CXVll.  195 

f»_^  Ji  *y-i>  (j^  cXJ^J  ^•^j'^        J^^    ^-(f-^'  '^-î'jj  (îy^>^  '^ 

-jl^    l_i^     *--S-îî     ^Ui^)î     J.A2.J'    kj     [«^J)     ki^'i     li     J^-^î     J^i'lÀW.JJ 

)«X_A-^  5l_eLi  VjiA^j  IajI^  (J^  ^^  (J^*^5  "^^  y'  ti^  j^-*-^' 

de  clous,  dont  la  pointe,  acérée  comme  des  aiguilles  d'embal- 
leur, se  dressait  dans  l'intérieur.  Ce  fut  dans  ce  même  instru- 
ment de  supplice,  où  il  torturait  ses  victimes  sous  le  règne  de 
Moutaçem  et  de  Watik,  qu'il  fut  placé  lui-même  par  ordre 
de  Motewekkil,  Il  pria  son  ga;rdien  de  lui  faire  obtenir  de 
l'encre  et  une  fcuiilie  de  pa])ier  afin  d'écrire  quelques  lignes, 
et,  le  Khalife  ayant  fait  droit  à  sa  demande,  il  écrivit  les  vers 
que  voici  : 

Telle  est  la  roule  qu'il  l'aul  suivre;  cuU'C  la  veille  et  le  lendemain  il 
semble  qu'on  soit  le  jouet  d'un  rêve. 

Cesse  de  gémir  et  prends  patience,  car  les  vicissitudes  de  la  destinée 
frappent  une  l'aniille  après  l'autre. 

Ce  jour-lk  Motewekkil  était  occupé  et  il  ne  recul  j)as  le 
billol ,  mais  il  en  prit  connaissance  dès  le  lendemain  et  or- 
donna (|u'on  ]nît  ie  jjrisonnier  en  liberté.  On  ne  trouva  plus 
qu'un  cadavre.  Son  incarcération  dans  ce  cylindre  avait 
duré  (piaranle  jours.  Ibn  Zeyyat  élait  un  rédacteur  habile 
et  im  poêle  dislingué;  on  cite  de  lui  ces  vers,  dans  lesquels  il 

i3. 


196  LKS    PKAir.IES   D'OU. 

<- 

<XxJi4^J.Ai^j\^*XiUd).ï*Xj         L^ij  jj».-^iii   l-v^>   dU*k5' 

jsXàJI  a^LS  J.iL«  \^_5.j  eA.aAA^       *. — jl^_»  (^1  j-o-^^-Jw  c^-^^ 

4MI*  <o.*aA«îè  -j^-j-j^  i  *iy»  y^Ài  ij-«^  i*Ks-  J.JJ.L j.*-:»;  ij 

excitait  Mamoun  contre  Il)rahim  (fils  de  Mehdi),  son  oncle, 
qui  venait  do  se  révolter  : 

Me  vois-lii  pas  qu'une  cliose'eu  enfanlc  une  autre,  roninic  l'élineeUc 
qui  jaillit  du  briquet  (et  allume  l'incendie)? 

C'est  ce  que  nous  enseigne  l'expérience  de  la  vie,  et  le  souvenir  du 
passé  pouvait  le  rcvélci-  l'avenir. 

J'ai  toujours  pensé  qu'Ibrahim,  dans  la  situation  où  il  se  trouvait,  sus- 
citerait une  catastroplic  funeste  comme  sa  vie. 

Qu'on  rappelle  au  l^rince  des  Croyants  les  occupations  et  la  conduite 
de  cet  homme,  dans  les  circonstances  gaies  ou  sérieuses  : 

Lorsqu'il  ébranlait  les  piliers  de  la  chaire  sous  le  poids  de  son  corps, 
c'était  pour  chanter  les  charmes  de  Leïla,  de  Meyah  ou  de  Ilind. 

Cette  poésie  est  fort  longue.  Voici  un  fragment  d'une  élégie 
funèbre  qti'il  composa  en  l'honneur  de  Moutaçem-Billah  ; 

Le  sabre  du  Prophète  semblait,  dans  sa  douleur,  répandre  un  lorrenl 
de  larmes; 

liC  baudrier,  la  tunique  (du  Prophète)  étaient  encore  imprégnés  de 
ce  parfum  de  vertu  ([ui  s'exhalait  de  sa  personne. 


CHAPITRE   CXVJI.  I'J7 

oc-^.=»-ij  '^■^-^  •^J*:'  cs^-'^i  •^y^^       <s^^  '—^i  t^"^'  (3~=*-  tj-«^  "J^»' 

Oi-waJL«  OU^  f^J^Iàii  Oua3!  ^^5        l^U  cdJ^  jfeJ^i  J^iûi  v^  ^^ 

jU_i^ij  J^ll^  *lUji_5  Sjl-siw!  ^>:  kAMjj^i  <_^U5ii  i  W^i 

ii-j)  Jo^li'  i  y^^^  (^  -«^^À^'  C:J>':'J  *'*"^  '^^  i^*;Ui  J^aJï 

Je  l'atteste  (  et  ce  ([ue  je  dis  est  si  vrai  ([uc  je  suis  prêt  ù  le  rt^péter  sous 
la  foi  du  scrmeut): 

Jamais  un  maître  aussi  sévère  n'avait  fait  tien)l)lerles  méchants,  jamais 
uu  roi  plus  juste  n'avait  protégé  les  opprimés. 

Ou  trouvera  sou  hisloire  et  des  extraits  de  ses  poésies  les 
plus  remar((ual)l("s  daus  uolre  Livre  Moyeu.  —  Abou  1- 
Wézir  n'exerça  ([ue  peu  de  temps  les  ronctions  de  ministre; 
l(î  Khalife  lui  donna  pour  successeur  Mohammed  (fils  de 
Fadl),  orij,Mnaire  de  DJardjaraïa,  mais  il  révocpia  bientôt 
celui-ci  et  le  rem[)iaea  |)ar  Obeid  Allah  (lils  de  ^ahya),  eu 
233  de  riiégire,  lecpiel  resta  eu  loiietions  justpi;!  ce  (pi'il 
lut  assassin(''.  Nous  avons  raconté  daus  le  Livre  Moyeu  les 
faits  (pu"  l(;  eoueerueut,  ses  rapporis  familiers  a\t'e  xMote- 
wckkil  et  riiisloiie  dv  Fatli,  lils  de  Kliakau. 

Voici  ce  (pH>  raconte  Mohammed  (lilsde  Vezid  )  Vloberred  : 
«  iMon  nom  avant  éli-  pronoucf'- de\aut  Molewekkil  ;i  l.i  suite 
d'une  discussion  eiilic  ce  |)riuce  et  Falli.  lils  de  Kiwikan, 
relativement  au  sens  (rnn  verset  du  Koran  (pu  pr(''sentait 
des  variantes  (keri),  le  Khalife  adressa  un   message  à  Mo- 


198  LES  PRAIIUES  D'OR. 

a.^.JLa^   ti)«Xjtij  U  c:AAAi  lj[il  b:>   »Xi  (j%.jl^j|    ^j^  fj^X:^  bî 
Jfciij  u!*jîj  AjwxJie  ^t*j^  AJoU>-  ».>»«*.^  &"ir^  (^^  ciOijj 

*X_A_Mi     (jâ-A-JVJ     j3j._*t>..XJ  jl  *>S.<w*.4*    ,_}.«Sfc.Ui    3^j_A_^^    y) 

o«wr».t  Ji  ^^_j,4i5_j,C(ii  cx-wJ  (jî       lt-^_Aw  jiij3  Jl-i».  ^_A-x-e>! 

hammed  (fils  de  Rarem,  fils  de  Mohammed,  fils  de  Suleï- 
man)  le  Hacliémite,  son  gouverneur  à  Basrah;  celui-ci  me 
fit  conduire  à  la  cour  du  Khalife  avec  les  plus  grands  égards. 
Comme  je  traversais  le  Canton  de  Nômanyeh  entre  Waçit  el 
Bagdad,  on  m'apprit  quon  avait  établi  dans  le  couvent  de 
Saint-Héraclius  un  hôpital  de  fous  :  j'étais  tout  près  de  cet 
endroit,  j'éprouvai  le  désir  de  le  visiter  et  j'y  entrai  suivi 
d'un  jeune  homme  aussi  distingué  par  sa  piété  que  par  son 
instruction.  Un  fou  s'étant  approché  de  moi,  je  lui  deman- 
dai :  «Pourquoi  résides-tu  parmi  ces  gens-là  et  pourquoi  te 
tiens-tu  à  l'écart .3»  Il  baissa  les  yeux,  et  haussant  le  ton  de 
sa  voix,  il  prononça  ces  vers  : 

Si  l'on  décrit  mon  extérieur,  mon  corps  est  clédiarné;  si  l'on  scrute 
mes  sentiments,  mon  cœur  est  pur. 

Co  qui  redouble  ma  tristesse  et  ajoute  à  ma  soulTrancc,  c'est  <|ue  je  ne 
puis  me  plaindre  à  personne  de  mon  amour. 

Dans  les  ardeurs  du  désespoir,  j'appuie  ma  main  sur  mon  cœur  et  je 
me  replie  sur  moi-même. 


CllAPimE  CXVll.  199 

Jfcjb  Ui.jlj  jij  d[^ji   ^  c:A.À.-M*5*i  t:^S 

«X-SlJ!_5  p_^-<y-îi  ^^S^-ff5   CJ?'?        >>JLx.x^   c:^_^l   ;jl   ^jy^i»-  l» 

Jj-V.  ^-*J^  j'^j  "^y   l>"  ^3   ^J-^   '^   c>.À*»*.r»-!   c>.)*i 
<X_i=-î    U   <L^\  ;t-JkJaJCAwl    ^J  i^ i   iS '^    ^ — *— ^   '^^ 

Ilclas  !  quel  amour!  lli'las,  mon  pauvre  cœur!  Si  je  ne  meurs  pas  de- 
main, je  mourrai  le  jour  suivant. 

Mon  cœur,  sous  l'élrcinte  du  souvenir,  est  comme  une  proie  dans  les 
crilTes  du  lion. 

Je  le  complimentai  cl  le  [)riai  de  continuer,  ce  (lu'il  fit  en 
ces  termes  : 

Que  la  séparation  csl  mortelle  pour  l'âme,  que  le  départ  d'une  amie 
est  douloureux  an  cœur! 

Ma  vie  touclie  à  son  terme  par  rc\ccs  de  la  sonllVauce  (|ui  ac(ai)le  mon 
âme  et  mon  corps; 

Qu'il  csl  triste  de  mourir  ainsi  prisonnier  et  sous  les  coups  répéli-s  de 
la  douleur  et  des  soucis! 

Cîiaquc  jour  mes  yeux  répandent  dos  larmes  sur  une  partie  de  moi- 
même  (pie  la  mort  a  envaiiie. 

—  «C'est  très-bien,  mecriai-je,  (|iic  Dieu  le  récompense 
et  que  ta  bouche  ne  reste  pas  muette!  Continue.  »  Il  ajouta 
CCS  vers  :' 

Dieu  .sait  que,  niali,'ré  ma  donlenr,  je  suis  inrapahie  de  dixul-jner  ce 
que  j'éprouve. 


200  LES  PUAIKIES  D'OU. 

<x_X_j  Ijû^ls»-  (^jÀ.\^  «XAj       Lg-Àj»..À^.:i  Q**_Aj  <j  yLw.Aj 

,X_^->    L^ÀAJt)    f^yt^l^  jJ^MS  L^X-i-A-J    ^J*VkAj     À^TvÀii     (O^J 

J'ai  deux  cœurs,  l'un  est  enfermé  ici,  l'aulrc  est  clans  une  autre 
contrée; 

Mais  je  ne  trouve  pour  celui  qui  est  ici  ni  secours  dans  la  patieucc,  ni 
soulagement  dans  la  résignation, 

Et  je  crois  que  mon  cœur  absent  est,  comme  mon  cœur  présent,  con- 
damné aux  soufifrances  que  j'endure. 

—  «  En  vérité,  lui  dis-je,  cest  parfait!  »  et  je  le  priai  de 
poursuivre.  —  Je  vois ,  me  répondit-il ,  qu'à  peine  ai-je  achevé 
un  morceau  tu  m'en  demandes  un  autre;  ce  désir  est  chez 
toi  l'effet  d'une  grande  curiosité  littéraire,  ou  d'une  sépa- 
ration douloureuse.  A  ton  tour  à  me  réciter  quelques  vers.  » 
Sur  mon  invitation,  le  jeune  homme  qui  m'accompagnait 
lui  récita  ceux-ci  : 

Reproches,  séparation,  adieux,  départ;  quels  ycu\  après  tout  cela  ne 
fondraient  pas  en  larmes  ? 

Dieu  sait  que,  si  je  me  résigne,  ce  n'est  pas  ù  leur  absence,  et  que,  si 
je  retiens  mes  pleurs,  ce  n'est  pas  que  j'en  sois  avare. 

Non,  je  le  jure  par  les  tourments  auxquels  je  suis  condamné,  depuis 
qu'elles  s(>  sont  éloignées,  mon  ctrur  ne  désire  (ju'elles. 


CIIAPITl'.l-:  CWII.  201 

J  <f  w  ^ 

J<>Â  JJi  l<A^j  I4JU  J^^        >U>  ooiU»_^  c5>*^^i-^J^  •^ 

JUi  cjI^  oii   5 *X-iJlji  yi-i  II! 

IjAj*-^  U  l^^  ^'O^^   <~^jS y\         Ut^  fi-^^^   <->^J  fi^  \^:^j.j 
Joill  t^jJU  cyjLw^  cJxUvI  11         ^^Ai  j.Ai  i^,^  -5.JI   ^U  U 

Je  voudrais  que,  les  sept  mers  veuanl  à  mou  aide,  mon  corps  tout  en- 
tier se  transformât  eu  un  déluge  de  iarmes. 

Je  voudrais  que  dans  tout  mon  corps,  en  guise  de  membres,  il  n'y  eût 
eu  que  des  yeux,  le  jour  de  la  séparation. 

Séparation  maudite!  une  montagne  qui  la  riMicontrerait  ne  larderait  pas 
à  s'écrouler. 

Le  départ,  réloignenicnt,  les  espions,  les  ciianicaux  (cliargés  pour  le 
voyage),  indices  sinistres  derrière  lesquels  se  montre  le  trépas. 

—  «  (7('sl  bien,  s'rciia  le  fou  ,  je  nie  souviens  de  (juclques 
vers  sut-  le  sujet  que  lu  xieiisde  uie  fiiire  eiileiidic.  \  eii\-lu 
(|iie  j(!  te  les  rceile?"  .le  le  piiai  de  les  diic  el  il  coiitimia 
ainsi  : 

Ils  sont  partis  cl  les  rideaux  (du  palanquin)  se  sont  rclcrrncs  sur  eux. 
Ali!  si  j'avais  été  le  maître  un  seul  jour,  ce  départ  n'aurait  pas  eu  lieu. 

Rii'u  ne  m'alarmait  aujourd'hui,  si  ce  n'est  leur  éloignenienl  lors<iue 
les  cliamcaux  ,  se  redressant,  emportèrent  ces  eiières  idoles. 

O  guide  de  la  caravane,  arréle-toi  alin  que  je  leur  adresse  nu's  adieux, 
arrête  un  instant;  dans  ces  adieux,  il  y  a  pour  moi  la  mort. 

Fidèle  à  mon  serment,  je  n'ai  pas  brisé  le  pacte  de  mon  amour.  Que  je 
voudrais  savoir  ce  qu'ils  sont  devenus  rlcpiiis  luii'  absrnn-  si  longue! 


202  LES   PRAIRIES  D'OU. 

J»_<ww._^   (;;^-=*-  o»-s*-v-j  l~i  '^JH?-'*  laÂ-wfci  c:»^^)  iji^M*.a  Î^U»  y) 
j_^  4.A.Xifci>lj  ^£\J  f^yt^-Mà  (^:>j^^  AAÀi:>_5  -i^'^-c  *-^-^»  (:?^^ 

5«X.*i^.j  ttXJCjU  ^sl^Ji   (<;^js^Ji   J^xlî   ^»>s>  (J^Jj  '-^■S^-lj 

j^»„S3L>  ,\_A_Avi  (^-w*ii_5       ik.\M*,^.  i i^.*tL^_  y"****^ 


Moberred  poursuit  ainsi  son  récit  :  «Le  jeune  homme  qui 
était  avec  moi  s  écria  :  «Ils  sont  morts!  —  Hélas!  hélas! 
gémit  le  fou,  s'ils  sont  morts,  moi  aussi  je  veux  mourir!  « 
et  il  tomba  expirant.  Avant  de  m'éloigner,  je  fis  laver  et  en- 
sevelir le  corps,  je  récitai  la  prière  des  funérailles  et  le  fis 
inhumer.  En  arrivant  à  Sorra-men-rà,  je  fus  introduit  chez 
Molewekkil;  quoique  sous  Tinfluence  de  la  boisson,  ce 
prince  m'adressa  quelques-unes  des  questions  pour  lesquelles 
il  m'avait  fait  venir  et  je  lui  rendis  réponse.  Ensuite  le  poëte 
Eohtori,  qui  se  tenait  debout  devant  le  Khalife,  commença 
à  réciter  un  poëme  en  fhonneur  de  Motewekkil  ;  or  Abou'l- 
Anbas  Saïmari  (poëte burlesque)  était  dans  lauditoire.  Voici 
le  début  de  la  poésie  tle  Bohtori  : 

De  quelicbouchc  tu  souris,  de  quel  regard  (sévère)  tu  rends  tesjugc- 
niciils  ! 

Tabciuitc  brille  de  sou  propre  éclat,  et  rien  ue  rcssenil)lc  plus  i\  ta 
beauté  que  ta  uiuuiUceure. 

Dis  au  Rlialifc  Djâlar  cl-MotPwekkil,  lits  de  Moutaecm. 


CM  A  PI  T  ni:  CXVIi.  203 

'     ''  y 

/0'«XxAa5  ti  aOUsjjl^  AMij  ^KJC»  »i^  _j.^b  (^jv^i^^i  ^A>oi  L,  jUi 
»j   yi   il_j„]  l_j_-<^  »X.*ioi.J  u^AÀ*Ji  _jj|    J^^-i^li  5:>j..J  j.^l3   »«XJÏ> 

Au  roi  bien-aimé,  fils  du  roi  (51u  de  Dieu,  au  bicnl'aiteur,  fds  du  ven- 


deur 


Quant  à  les  sujets,  leurbonlicur  est  inviolable,  sous  l'égide  de  ta  justice; 

Mais  toi  qui  as  relevé rédilicodo  la  gloire  (jui  était  renversé  et  en  ruines, 

Conserve-toi  |)oiu-  la  religion  de  Mobamnicd,  car  sou  salut  dépend  du 
lieu. 

Après  l'aveuglement  nous  avons  trouvé,  grâce  à  toi,  la  huuière  (de  la 
religion),  et  la  ricbcsse  après  le  dénûmcnt. 

Quand  il  eut  dit  ce  detuiicr  vers,  li>  poclc  marclia  à  re- 
culons comme  pour  se  letiier,  mais  Abou  '1-Anbas,  se  le- 
vant vivement  de  sa  |)lae(;,  dit  au  Khalife  :  «  l'riiice  des 
Croyants,  ordonnez  (iifon  le  ramène,  car  en  vérité  j'ai  trouvé 
la  |)arodie  de  son  poème.  »  Sur  un  sij^ne  du  prince,  le  poète 
revint  sur  ses  pas,  et  Abou  'l-Anbas  se  mit  à  débiter  les  vers 
suivants  que  nous  eussions  passés  sous  silence  si  ce  n'était 
tronquer  Tanecdote  : 

Dans  (|uolle  lange  cs-tu  embourbé?  De  ([uclle  main  jiourras-tu  manger? 
.1»^  «ondannir  à  l'ignoniinir  la  lêle  d'Aboii  Ybadeli  cl  Roblori,  etc. 


20^  LES  PRAIRIES  D'OR. 

^_^   t^*XJi    ^^^j^Jl    (^^Xav    L    ^JÎ    JlJLs    j^i    oiJI    «j.Ài.S- 
ij^,_^_5i  j^j.Xj^it    (Jl    W<Xj^  Jb   llAjli»-   iJijjkaXi  »j>j.X.il    J-çvwl^j 

-0_Jt_j    Jlï    l^AJÎ;    <;^]|    L»X^îi    d    »J-X^    (j-«    (J^j'  U_5    AjIî^^    k^J^"^ 

Et  il  ajouta  d'autres  vers  pleins  d'invectives  du  même 
genre.  Motewekkii  fut  pris  d'un  tel  accès  de  rire,  qu'il  tomba 
en  arrière  en  trépignant  du  pied  gauche,  puis  il  gratifia  le 
bouffon  d'un  don  de  dix  mille  dirhems.  Fath  (fds  de  kha- 
kan] ,  lui  dit  alors  :  «  Et  Bolitori;  après  avoir  été  satyrisé  et 
abreuvé  d'injures,  faut-il  qu'il  s'en  aille  les  mains  vides?» 
Le  Khalife  lui  fit  donner  dix  mille  dirhems.  «  Et  ce  Basrien. 
(Moberred),  ajouta  le  courtisan,  que  nous  avons  fait  venir 
de  son  pays,  n'aura-t-il  pas  une  récompense  égale  à  la  leur.^ 
—  Qu'on  lui  donne  dix  mille  dirhems,  »  ordonna  le  prince. 
Nous  nous  retirâmes  ainsi  sous  les  auspices  de  cette  bouffon- 
nerie, sans  que  Bohtori  tirât  aucun  avantage  particulier  de 
son  application,  de  ses  travaux  et  de  son  talent.  A  la  suite  de 
cette  scène,  Motewekkii  dit  à  Abou  '1-Anbas:  «  l\aconte-moi 
l'histoire  de  ton  âne  et  sa  mort,  et  dis-moi  les  vers  qu'il  te 
récita  en  songe.  — Volontiers,  Sire,  réj)ondit  lebouffttu.  Ce 
baudet  était  plus  sensé  que  tous  les  kadis  (Misend)le  :  jamais 
d'emportement,  jamais  d(î  laux  pas.  Survint  une  maladie 
subilf>  qui  me  l'ridcvii;  je  le  \  is  en   rév(>  <■!  lui  (lis  :  "O  mon 


CIIAPITI'.E   ex  Vil.  205 

*^jl_À_J)    (^v-J    Wyi    AXjivJ    ^-T-À.^    C>Lv«    -jOvÀi    ^^    aXs    ^Xtlî    Ajj 

l»X_S^  i  j^S'^j  aJ^J  ji/*KAAaJ|  ij':^»  (^  c:*jii5  (^«xJi  -^aJI 
l-g-jJÙifcXi  4^wA5    «>/»l^o   cy«Xifc.l;   Lj^JolwJ   *Liu<*j>.    /jli'i    1^   c:>w» 

àne,  esl-c(^  que  Ion  eau  n'était  pas  toujours  fraîche  et  ton 
orge  soigneusement  mondé?  Est-ce  que  je  ne  te  prodiguais 
pas  tous  mes  soins.  Pourquoi  cette  mort  subite?  Que  t'est-il 
arrivé?  —  Voici,  me  dit-il  :  le  jour  où  vous  vous  arrêtâtes 
chez  le  mercier  un  tel,  tandis  que  vous  causiez  de  la  pluie  et 
du  beau  temps,  uneânesse  splcndide  vint  à  passer  :  je  la  vis, 
mon  cœur  s'en  é|)iit;  je  l'aimai  d'un  amour  si  violent,  que 
je  succombai  à  ma  tristesse,  à  mon  désespoir.  —  l-lli  bien, 
mon  âne,  n'as-tu  pas  fait  quelques  vers  à  ce  propos?  —  Si 
fait,  répondit-il,  les  xoici  : 

Mon  cœur  sV.sl  ('pris  d'une  ànt'sso 
A  In  porte  tl'iui  broranlenr. 
l'îsciavc  (le  sa  f^cntillcssc 
Et  (le  son  sourire  cncliantonr, 
De  son  minois  plein  de  finesse. 
De  son  leint  frais  eomtne  une  (lenr, 
•l'en  .^uis  niorl.  d'eùl  élé  faiMesse 
De  vivre  dans  le  désiionnenr. 


20()  MvS   PHAIRIES   D'OR. 

<_>>JaJ  ^A^:il    «_^:^^    (J-»   Î<X£Ù    Jb   ^|jjui.ji    {^    (Sj^^    l?    C:*^** 
jl.,*»jsi  ».;»Aisj   ftyifi    cliji    i_^Ajij.  ^i    (jvÀxiS   (jv-g.A4i   >-*ij   jOjJCAil 

à\.-^  aMI   «X-\.&  ^j5   c:y«X5».^       <Xj\.*l>^   (j*K.AÀ;sJi   ^\   a,«jXj  ,5 

—  «  Je  demandai  à  mon  âne  ce  que  voulait  dire  le  terme 
chaharani.]}  me  répondit  :  «  Ce  mot  s'applique  au\  pins  beaux 
d'entre  les  ânes.  »  Motewekkil  que  ce  récit  avait  égayé,  or- 
donna à  ses  musiciens  et  chanteurs  de  mettre  en  musique, 
pour  ce  jour-là,  la  chanson  de  Tàne;  jamais  on  ne  le  vit 
manifester  une  gaieté  plus  Vive,  ni  une  joie  plus  expansive. 
Quant  à  Abou  '1-Anbas,  il  fut  comblé  d'honneurs  et  de  pré- 
sents. 

Abou  Abd  Allah  Mohanmied  (fils  d'Orfah],  le  grammai- 
rien ,  a  recueilli  le  récit  suivant  de  Mohammed  (fils  de  Yézid) 
Moberred  :  «Le  Khalife  Motewekkil  dit,  un  jour,  à  Abou  '1- 
Haçan  Ali  (fils  de  Mohammed,  fils  d'Ali,  fils  de  Mouça,  fils 
de  bjâfar,  iils  de  Mohammed,  fils  d'Ali,  fils  d'Abou  Talib)  : 
«  Quels  propos  les  fils  de  ton  père  tiennent-ils  contre  Abbas, 
fils  d'Abd  el-Mottalib?  »  Ali  répondit  :  «  Prince  des  Croyants, 
comment  la  postérité  de  mon  père  pourrait -elle  parler 
mal  d'un  homme,  aux  fils  duquel  Dieu  a  ordonné  que  ses 
créatures  fussent  soumises,  tandis  qu'il  a  ordonné  aux  fils 
d'Abbas  de  lui  obéir?»  Cette  réponse  lui  valut  cent  mille 
dirhems;   néaninoins    sa    pensée   véritable    étail    rcl!e-ci: 


GllAPrmE   ex VII.  207 

Js  ^i   k£.[]^  y.*«Ji.  _jjl   :>iji   IjÇi^  ^j::>   v_àIÎ   AjIjC   *1   v^'li   AaÀj 

^i^^^.i  AXxa^  (j-«   l.iûwsi-_j  lj«J^^_5   1S^!)-V.A«   if^yx^o   il   (j'    ^  cK^i^ 

<\£.j*X^   AxAi»    ^^^^^    (i«Xx^    5tXj:»-ft    C:^AJ    jj    '^'^•>VJ'*    2jl^    (i    (j-^ 

p  ^^ 

0^=-    ^S    tK^ii    (Ji    J-^_f    ^■i)^   -^^^i    Lt»  (^   Js.i.-l;   <XajEj.]1j) 

«  Un  homme  qui  a  |)rescnt  à  ses  lils  d'obéir  à  Dieu;  »  seule- 
ment il  eut  recours  à  une  expression  détournée  [taarid). 
Ce  même  Abou  '1-Haçnn  Ali  avait  été  calonmié  au])rès  du 
Khalile  :  on  raccusait  de  cacher  dans  sa  demeure  des  armes, 
des  livres  et  d'autres  indices  du  chiisuK^;  une  troupe  de 
Turcs  et  d'agents  apostés  par  oidre  du  prince  envahirent  sa 
maison  à  l'improviste.  On  trouva  Ali  seul  dans  une  chambre 
oii  il  se  Icnait  enfermé;  il  était  vêtu  d'ime  simple  lobe  de 
bure,  le  sol  de  sa  chambre,  entièrement  dépourvu  de  lapis, 
élail  formé  de  sable  et  de  cailloux;  il  avait  la  télé  couverte 
d'une  mclhafah  (sorte  de  capuchon)  de  laine,  se  recueillait 
en  Dieu  et  psalmodiait  des  versets  du  Koran  sur  les  re- 
compenses et  les  chàliments.  On  s'empara  de  lui  dans 
raccontrenient  où  il  se  trouvait  et  on  le  mena  chez  Mole- 
wekkil,  au  nn'lifu  de  la  nuit.  Le  Khalile,  quand  le  prison- 
nier panil  dcNiuil  lui,  était  occupé  à  boiic  cl  Icnait  une 
coupe  à  la  main;  en  le  voyant  entrer,  il  l'accueillit  avec  con- 
sidération cl  le  (il  asseoir  à  ses  côtés.  /Vpprenant  cpic  rien  de 
susj)eel    ii'a\ait    eh-    lr()n\e  dans    sa    maison    et    qu'aucune 


208  LES   PRAIRIES   D'()l\. 

j,  ^  Jv.Jî  (j«l^_ii  J^JC-ll  *l^Ui  \^  ^^^  J^*^  iiil-=»-  .^3  Axi 
xm  (JJi.s.\s  laï  (^^^  L^^  ^làw  U  (jvLo^i)  ^A^l  L>  jUi  »«X^ 

JJl^Jij    jU^^l    tJ^-k^J   ^^3^   (J-«  A^jÏÀ^    CXJW   ^Ji    »_j.>j.ji     (jji 

J^XXJij  :>3<>Jl  \.^aX5.  S^j-s-j-^^  '^^'•'        *.^J*t*v  ^^^  ^i^^iJi  ^suil; 
\^\  J^i  j^iJi  J_^]3  J^j  \^^)^\i       S^?j-^  U^  |^^:>  i^Jé'i  ^.lUs  *>^3 

charge  ne  s'élevait  contre  lui ,  il  lui  tendit  la  coupe  qu'il  te- 
nait à  la  main:  a  Prince  des  Croyants,  s'écria  Ali,  jamais 
cette  boisson  ne  s'est  mêlée  à'ma  chair  ni  à  mon  sang  ;  veuillez 
donc  m'excuser.  »  Le  Khalife  n'insista  point,  mais  il  lui  de- 
manda de  dire  quelques  vers  ;  Ali  récita  ceux  qui  suivent  : 

Ils  habitaient  les  cimes  des  montagnes,  protégés  par  des  cohortes  nom- 
breuses; mais  à  quoi  leur  ont  servi  leurs  retraites  inaccessibles  ? 

Après  quelques  jours  de  puissance,  ils  sont  descendus  de  leurs  for- 
teresses pour  être  couchés  dans  la  fosse;  quelle  triste  chute  ! 

Une  fois  dans  le  tombeau,  ce  cri  s'est  fait  entendre:  Où  sont  les  trônes, 
les  couronnes,  les  vêtements  somptueux? 

Que  sont  devenus  ces  visages  rayonnants  de  bonheur,  devant  lesquels 
les  rideaux  et  les  voiles  s'abaissaient  ? 

Kt  à  ces  questions  la  tombe  a  répondu  pour  eux  :  Ces  visages,  les  vers 
se  les  disputent. 

Ceux  qui  étaient  assis  à  la  table  du  plaisir,  après  en  avoir  épuisé  les 
jouissances,  servent  eux-mêmes  de  pâture  aux  vers. 

Ils  avaient  bâti  pour  leur  défense  de  solides  édifices;  châteaux  et  famille, 
ils  ont  tout  quitté  et  sont  partis. 


CHAPITRE  CXVIl.  209 

^S  iOuÀ;»-  jt   t^,».;*- La3_5    (J-**^   (iT*   *^^  i^ia~^   ^^5^UJi    ii^l-yw 
^1  _jk£û_5  ^    (jvloU_5  (jvj!^Vj  cy^XJ;  -XÀ^  j5  ^i_5  J^^U  <xi5\j!». 

«-.wS^-j^j  jlSoiJl  ^JàxÀJ^  ,j«î^^j  j>juJt^  f<^«-=»  -^^^  *■•*•*«  ''^jl^ 

Les  trésors  qu'ils  amassaient  Pl  quils  cachaient  depuis  longtemps,  ils 
les  ont  laissés  à  leurs  ennemis  et  se  sont  éloignés. 

Leurs  demeures  sont  vides  et  désolées,  et  ceux  qui  les  liabilaieni  ont 
été  portés  au  sépulcie. 

Mobeired  ajoulo  :  «  Tous  les  témoins  de  celle  scène  s'api- 
toyaient sur  le  sort  d'Ali,  persuadés  qu'une  sentence  terriJile 
allait  l'atteindre;  mais  il  n'en  fut  rien.  Motevvekkil  répandit 
des  larmes  si  abondantes,  que  sa  barbe  en  fut  toute  mouillée, 
et  fous  les  assistants  pleurèrent  avec  lui.  Puis  il  fit  dispa- 
raître l'appareil  du  festin  et  demanda  à  Ali  :  «  Abou'I-Hacan, 
as-tu  des  dettes?  — Oui,  répondit-il,  je  dois  quatre  mille 
dinars.  »  Molewckkil  ordonna  qu'on  rcmîl  à  Ali  cette  somme 
fl  ([u'on  le  reconduisit  ensuite  à  son  lot^is  a\('c  toutes  sortes 
d'égards. 

Vloliamnied  (fils  de  Samaâh)  le  jtifije,  (liscij)le  de  Moliam- 
nied  ben  el-Haean  ((llied)ani)  et  d'Abou  lianiiab,  mourut 
sous  le  rè'^ne  de  Motewekkil,  en  r.iiiMee  î.'iS;  (pioique  cen- 
tenaire, il  ('lait  vififoureuv  de  corps  et  d'esprit  ;  il  jouissait  de 
toutes  ses  facullés,  dellorait  des  vier-;j;es,  donq)lait  des  ehe- 
v^i.  l/l 


210  LES    PHAIHIKS   D'OR. 

Ly-jLS^.^^  ^-^  ^^Uà-t  c:^U^ 
^,^- C   ■>.    :^  1 — *i>V_=-l  i  ^j'j-^ 

j     .» — «« — j'i   (^^   ^  >'  1^ '•^^— «^— =?•   iS"—*^ 
-j_c  «-jl»^j);j  AJuLÎi   i  (jl*«fc--»-  cjUxÂ^aj"   iLcLfw  ^^   »X.«-^3 

vaux  difficiles  et  ombrageux  et  ne  se  refusait  rien.  \  oici  ce 
que  rapporte  son  fils  Samaàh  :  «  Mon  père  Mohammed  ben 
Samaàli  m'a  dit  avoir  trouvé,  du  vivant  de  Sawar,  fils  d\\bd 
Allah,  juge  sousMansour,  une  pièce  de  sa  main  renfermant 
ces  vers  que,  selon  mon  père,  il  avait  lui-même  composés 
ou  que  du  moins  il  affectionnait  : 

J'ai  dépouillé  mes  os  de  leur  chair  et  je  les  laisse  nus  et  fragiles  dans 
leur  mince  enveloppe. 

Jen  ai  épuisé  la  moelle  et  les  voilà  comme  des  fioles  de  verre  à  travers 
lesquelles  siiBe  le  vent. 

Si  ta  main  me  soulevait  et  écartait  mes  vêtements,  tu  verrais  la  maigreur 
de  mon  corps;  mais  je  le  dérobe  aux  regards. 

Ce  Mohammed  ben  Samaàh  a  laissé  de  bons  ouvrages 
.sur  le  droit,  ainsi  que  des  traditions  recueillies  de  Cheïbani 
et  d'autres  savants  :  de  ce  nombre  est  le  Traité  des  (questions 
rares,  d'après  Cheïbani,  manuscrit  composé  de  mille  folios. 


CIIAPITHK   CXV 

jL_à_^  ^^   x.:<j  U  ^^  (JvUI_.   ^juw!î(  i  j-j^iij_5  iOoJl^y  JW-^ 

^^jv-i^i)i  J<_iw:5j  ^i-À^i  ^i^^'  J^  ^^  f»^!   viiJi  J^  (j*^*' 

X.t<^X->    ^     A.i£jjtli    (^tXj    (j;\j    siioL»    v-Xâj    li   Ajt    :s  i  iXjtj    5 Lfci».  ( 

de  son  frère,  que  portait  la  chamelle  baclrienne,  savanrait 
entre  les  deux  rangées  de  troupes  au  pas  cadencé  de  son 
éléphant  ;  il  regardait  à  droite  et  à  gauche,  observait  ces  sol- 
dats et  cet  appareil  militaiiv  et  manifestait  ses  regrets  et 
son  désespoir  de  n  avoir  pu  répandre  leur  sang;  mais  la  vue 
de  ces  forces  immenses  ne  lui  causa  aucune  surprise.  Ce 
fut  le  jeudi,  deu\ie?iie  jour  de  safer  22.3,  que  ce  spectacle 
d'une  magnificence  inouïe  fut  donné  au  peuple.  Moutarem 
reçut  Afchîii  avec  considération  et  lui  accorda  une  place 
d'honneur;  Bahek  fut  conduit  et  promené  devant  lui  :  <■  Es- 
tu  bien,  Babek.^»  lui  demanda  le  Khalife;  pas  de  réponse. 
Il  répéta  plusieurs  fois  sa  question;  le  prisonnier  continuait 
a  se  taire  ;  Afchîn  se  pencha  vers  lui  et  lui  dit  :  ■  Malheureux, 
le  Prince  des  Crovants  t'adresse  la  parole  et  tu  gardes  le  si- 
lence! »  Il  répondit  enlin  :  «  Oui ,  je  suis  Babek.  »  Moutaçeui  se 
pix)slerna  et  pria  ;  puis  il  lui  fit  couper  le^  mains  et  les  pieds. 
Voici  ce  que  j'ai  trouvé  dans  les  .\nnales  de  Bagdad. 
Lorsque  Bal>ek  Itii    tut   anuiu'.  Moulaceui   demeura  silen- 


130  LES   PRAIRIES   D'OR. 

^A-A.^j   »_5:>J^=?-  Jiï  ^^î  '>^fi  -î^j^S  (^îjj       (j-^^  ^'^  r^' 

i  x.\aj^\   ij  9-y-ff^.  y^i  'M'^^?^  e^AS^  »jl*w^  ^Ji  JJi^  ^*>3 
k*  ^Xi  iC^làs  Ji_5-«i   ^  <-^^^.  j-fi'^^  -!5X,Xj  kXj  (j6  ^■&_5  <x^i 

À-Awi)  j,:S?  w«i    A.J  ^*À9   &jÎ*XxJ  i}^^^    (J^^''   «r^*^'    CJ-*  li-À-M*' 

v..jUbi    yL*wi^i-     J!     dUi     iXxj     j-^^    J-"^^    (^    c^A.2.Ài     ^>X.*«Ji 

cieux  pendant  un  moment;  il  lui  demanda  ensuite  s'il  était 
Babek.  «Oui,  réponditcelui-ci,  je  suis  votre  esclave  et  votre 
serviteur.  >-  Le  vrai  nom  de  Babek  était  Ilaçan,  et  celui  de 
son  frère,  Abd  Allah.  Le  Khalife  ayant  ordonné  de  le  mettre 
à  nu,  les  valets  lui  enlevèrent  les  vêtements  magnifiques  qui 
le  couvraient;  on  lui  coupa  la  main  droite  et  l'on  souffleta 
son  visage  avec  cette  main;  on  (It  de  même  avec  la  main 
gauche,  et,  en  troisième  lieu ,  on  lui  coupa  les  pieds.  Le  sup- 
plicié se  tordait  sur  le  tapis  de  cuir  des  exécutions  dans  une 
mare  de  sang;  il  pariait  avec  volubilité  et  offrait  spontané- 
ment de  grandes  richesses.  Comme  on  ne  l'écoutait  pas,  il 
se  frappait  le  visage  avec  ses  deux  moignons.  Moutaçem  or- 
donna au  bourreau  d'enfoncer  son  sabre  entre  deux  côtes 
au-dessous  du  cœur,  atin  de  prolonger  le  supplice ,  ce  qui 
fut  fait.  Enfin  il  donna  l'ordre  de  trancher  la  tète;  les 
membres  furent  réunis  au  tronçon  du  corps  et  attachés  au 
gibet;  quant  à  la  tétc ,  portée  d'abord  à  Bagdad  et  exposée  sur 
le  pont  d(>  cette  ville,  elle  fut  ensuite  envoyé  dans  le  Khora- 


CHAPITRE  CXVn.  211 

IjI;c5jj  ^j  y.>4!^Jî  cj^^^-^  *^^'y  'r^^^  >^j-^^^  ^^^  ^j; 

X^Sj    Jui>    l(^l.M*3    (J*<Ia£_5    j_^Js.LwJi  jlA2.=fcL  ^.«'^î    J^[i  jS'i)     AAJ 

Uax-j   «Xi^  AJtj  (j*UxJî  a!  JlJii  JjCJiJl»  AaXc  ^:>\  J^.»-!  l<yjJl 

—  En  la  même  aimée  233  mourut  Yahya ,  fils  de  Màyin ,  et  en 
2  35,  moururent  Abou  Bekr,  fils  cFAbou  Cheïbah  et  (Obeïd 
Allah  ben  Omar)  Rawariri,  tous  deux  traditionnistes  ('mi- 
nents.  CVsf  aussi  en  235  que  mourut  Ishak  (fils  d'Ibrahim, 
fils  de  Morâb)  ;  il  f^ouverua  la  ville  de  Bagdad  et  fut  remplacé 
dans  ses  fonctions  par  son  fils.  Nous  avons,  dans  les  Annales 
historiques,  cité  quelques  traits  intéressants  de  sa  vie.  De  ce 
nombre  est  le  curieux  épisode  suivant  qui  se  passa  pendant 
rpril  f^ouvernail  Haj^dad  et  dont  le  récit  a  été  recueilli  de  sa 
bouche,  par  Moura  (fils  de  8alih,  fils  de  Cheikh,  fils  d'O- 
meirah)  el-Açedi.  Le  Prophète  lui  apparut  en  songe  et  lui 
dit  :  «  Henfis  la  liberté  au  meurtrier.  »  Ishak  fut  saisi  d'une 
grande  frayeur;  il  examina  les  rapports  qu'on  venait  de  lui 
adresser  fies  prisons  et,  n'y  trouvant  aucune  mention  d'un 
meurtrier  quelconque,  il  fit  appeler  Sindi  et  Abbas  et  leur 
demanfl.i  si   r[iie|qiif'  indivirlii   ne   leur  axait   pas  été  amené 


t>J2  LES   PKAIHIES   D'OR. 

i- 

^^JC.AtX»0    (j)     S^    Jlï    c.l.A_J5AI)    ^j«^    iX.J    U»    (_^ijS    AaXc    4_K^i)    l^i 

tj^  iJtX-s^  y-Si  ^  ^-ii^^ij,  5^^.isr  s^A_^  i*>Jôls  J>.AJi]^]oi 

Oi-A-X-iS^  ool^j_j,^  -cw^'*\.i=>-  j*j^l  i«X^  iS  (j'^  ^-^^  M^^  J^ 
/\-jjLj:si.  ci».laA«jj'  l^i  Jl..»^  '^^y>.  ^j^==-  W*^3  il*w>xM  /o*gjJi 
l.^AAifcil_j  J^'^i^i   i^i   CJ-»  ^^■^JÎ   c^^Iaï  xiw».A£>  c:A.ài^^^..o   lî^xil 

sous  rinculpation  d'assassinat.  «Oui,  répondit  Abbas,  et 
nous  en  avons  dressé  procès-verbal.  «  Ishak  recommença  ses 
recherches  et  trouva  cette  pièce  qui  s'était  glissée  au  milieu 
de  nombreux  dossiers  :  il  ;y  était  question  d'un  homme 
accusé  de  meurtre  par  différents  témoins  et  qui  avait  avoué 
son  crime.  Le  gouverneur  le  manda  en  sa  présence  et  le 
voyant  en  proie  à  une  grande  terreur,  il  lui  promit  la  liberté 
s'il  faisait  des  aveux  sincères;  cet  homme  lui  révéla  les  faits 
suivants.  De  concert  avec  quelques  complices,  ils  commet- 
taient des  méfaits  de  tout  genre  et  violaient  toutes  les  pres- 
criptions de  la  loi;  ils  se  réunissaient  dans  une  maison  de 
la  ville  d'Abou  Djâfar  Mansour  (yipux  Bagdad,  sur  la  rive 
droite  du  Tigre),  qui  était  le  théâtre  ordinaire  de  leurs  tur- 
pitudes. Un  certain  jour,  une  vieille  femme  qui  pourvoyait 
h  leurs  débauches,  y  amena  une  jeune  fdle  remarquablement 
belle;  cette  enfant  poussait  des  cris  déchirants  en  traversant 
la  maison.  «  Je  (juittai  mes  compagnons  (ajoutait  le  prison- 
nier) ,  <>|,  courant  à  elle,  je  la  fis  entrer  dans  une  chambre; 
après  avoir  calmé  son  effroi,  je  voulus  connaîlie  sou  his- 


CHAPITRE  ex  VII.  213 

Jl  c:a^_^  l^^^Ui^  c>„M^i  cMv^î  Jli^i  ji'^^j.Iii.r^lj  ^^  (^f 
^fr-j^^  «-^-^-î^  W-^"Î5  ^Jj'^ljj   W^-C  lAij-o  tjijî   l^^  »iU>lsw 

Li  4X5Î   JjJww  Jyij-  l^^U^^**-*  J^^î    (J-*  l-|^Ar=-^lj  l.^-«*.Ài   ^^ 

toirc:  «Mon  Dieu,  s'écria-t-elle,  mon  Dieu,  protégez-moi  : 
cette  vieille  m'a  trompée  en  me  disant  (pi'elle  avait  clans  son 
armoire  une  boîte  d'une  beauté  incomparable;  elle  a  si  bien 
llatlé  ma  curiosité ,  que  je  l'ai  suivie  sans  méfiance  et  c'est 
ainsi  qu'elle  m'a  entraînée  chez  vous.  Mon  aïeul  est  l'Apôtre 
de  Dieu,  Fatimali  est  ma  mère  et  Haçan  ben  Ali  mon 
père.  Que  leur  mémoire  soit  ma  sauve- garde  !  »  Décidé  à 
sauver  cette  jeune  fille,  je  retournai  auprès  de  mes  amis 
et  les  informai  de  ce  ((ui  se  passait;  mais  on  eût  dit  que 
mes  paroles  les  excitaient  davantage,  car  ils  me  répondirent  : 
«  C'est  après  avoir  assouvi  tes  désirs  que  lu  cherches  à  l'éloi- 
gner de  nous!  »  Ils  se  précipitèrent  vers  la  pauvre  fille;  je 
me  plaçai  devant  elle  pour  la  défendre  et  la  querelle  s'en- 
\cnima  à  ce  point,  que  je  reçus  des  blessures.  .Te  me  jelai 
sur  le  plus  acharné  au  moment  où  il  s'élançait  sur  elle  avec 
une  fureur  bestiale,  et  je  le  tuai.  Puis,  icdoublani  d'ellbrts 
pour  la  défendre,  je  finis  |)ar  la  lir<'i-  saine  el  sauve  de  leurs 
mains;  une  fois  échappée  au  p<Til  qui  la  menaçait,  je  la  fis 
sortir  de  la  demeure  el  je  surpris  ses  paroles:  «Que  l)i<'U  le 


2\ti  LES   PHAIKIES   D'OH, 

ji    »4>Jjj   :>î_^i    jl    yo    tX^I    J^  kd^i^j    iJ\,Ai2AJ!   -eUiï   <J_5_5   ^î_j 

protège  comme  tu  m  as  protégée;  qu'il  soit  pour  toi  ce  que 
tu  as  été  pour  moi-même!»  Cepeudant  les  voisins  attirés 
par  les  cris  étaient  accourus.  En  me  voyant  un  couteau  à  la 
main  près  d'un  homme  baignant  dans  son  sang,  ils  m'arrê- 
tèrent et  me  livrèrent  en  cet  état  à  la  justice.  »  Ishakdit  alois 
au  prisonnier  :  «  Je  veux  reconnaître  la  protection  que  tu 
as  accordée  à  cette  femme,  je  te  pardonne,  pour  l'amour  de 
Dieu  et  de  son  Apôtre.  —  Et  moi,  répondit  cet  homme,  j(; 
jure  par  ceux  en  laveur  de  qui  vous  me  j)ardonnez,  que  je 
ne  retomberai  plus  dans  le  crime  et  que  j'éviterai  toute  ac- 
tion blâmable  jusqu'à  ce  que  je  me  préseule  au  tribunal  de 
Dieu.  »  Ishak  lui  ht  part  ensuite  de  son  rêve  en  ajoutant  que 
Dieu  ne  laissait  pas  une  telle  action  sans  récompense,  et  il 
lui  olFrit,  en  conséquence,  une  somme  considérable;  mais 
cet  homme  ne  voulut  rien  accepter. 

En  207,  Motewekkil  rendit  ses  bonnes  grâces  à  Abou 
Mohammed  Yahya  (Dis  d'Akteni)  le  kadi,  qu'il  rappela  à 
Sorra-mcn-rà ,  pour  l'investir  des  fonctions  de  Grand-Juge. 
H  disgracia  Ahmed  ben  Abi  Douad,  et  son  fils  Abou  '1-Walid 


CHAPITRE  CXVII.  215 

*Xjr   *X^_pi    j,l    »»XJ^    »lj_5  *X.Xj    :>iji   ji    ^  J^:;-!    4>îi    *Xa«: 

:>i_5^  j,i  (j^l  -^^   i*X^  JUi  ii^:>  jî   /^jÎ  -l^fi.  iL«!iVA«wj  v*aj 

Mohammed ,  qui  occupait  celte  place  ;  il  confisqua  sur  la  for- 
lune  de  ce  dernier  une  somme  de  cent  vingt  mille  dinars  et 
des  bijoux  pour  une  valeur  de  quaranle  mille  dinars,  puis 
il  Texila  à  Bagdad.  Abou  Abd  Allah  Ahmed  (fils  d'Abou 
Douad)  avait  été  frappé  de  paralysie  ({uarante-sepl  jours 
après  la  mortde  son  ennemi  Ibn  Zeyyat  (en  2^3  de  Phégire)  ; 
il  mourut  en  2/io,  vingt  jours  après  la  mort  de  son  propre 
(ils  Abou  1  Wélid  (Moliammed  ben  Ahmed). 

Ahmed  (lils  (TAbou  Douad)  fut,  comme  on  le  sait,  un  de 
ces  hommes  privilégiés  dont  Dieu  se  sert  pour  répandre  ses 
bienfaits,  un  de  ceux  devant  <pii  il  aplanit  la  roule  du  salul 
et  à  qui  il  inspire  l'amour  du  bien  et  la  pratique  des  bonnes 
œuvres.  On  lacoiilc  cpic  le  klialife  Moulacem  avait  réuni 
quelques  courtisans  ;i  Djaurak  (palais  |)rès  de  Bagdad)  pour 
boire  le  \in  du  malin  et  leur  axait  ordonné  i]v  pr(''parer  cha- 
cun un  plat  de  sa  fa(;on  ,  lorscpTil  apcrrut  Sallamali,  l<'  page 
d'ibn  \l)!  Douad  :..  \oici,  (lil-il,  I.'  pai;c  (Tlhu  \l)i  Douad 
qui  vient  s'eucpiérir  de  ce  (pie  uous  faisons;  dans  un  moment 
son  maître  va  se  présenter;  il  me  |)aileia  d'un  iel  de  la  la- 


216  LES  PRAIRIES  D'OR. 

f. 

^À_A«  ^js-  (^J  ^_^^  Jiï  iJ  ^jib  ;^  i^li  ciyi  ^j;j_;o  ^.àaS^ 

JljJUt.^   »Xj^  l3<X-i  .«^iJyû  (:r*  *K.s-i_j  tK  g^^  *>^i  '^^  *>^-î^ 

mille  de  Hachem,  cFun  tel  de  Koreich,  et  d'un  Ansar,  et 
d'un  Arabe,  de  sorte  qu'avec  ses  requêtes  il  troublera  nos 
projets  de  plaisir.  Je  vous  prends  à  témoins  que  je  n'accueil- 
lerai pas  une  seule  de  ses  demandes  aujourd'hui.  »  Il  venait 
à  peine  de  prononcer  ces  paroles  lorsque  (le  chambellan) 
Itakh  annonça  Abou  Abd  Allah,  «  Que  vousdisais-je?  »  ajouta 
le  prince  en  s'adressant  à  ses  convives;  et  comme  ceux-ci 
l'engageaient  à  ne  pas  recevoir  le  kadi,  Moutacen»  répondit: 
«Malheureux  que  vous  êtes!  une  fièvre  d'un  an  me  serait 
chose  plus  facile!  »  Le  kadi  entra  et  salua;  à  peine  avait-il 
pris  sa  place  et  commencé  à  parler  que  le  visage  du  Khalife 
se  déridait  et  que  la  joie  se  répandait  dans  tout  son  être. 
«  Père  d' Abd  Allah,  dit-il  ensuite  au  nouveau  venu,  chacun 
de  ceux  qui  sont  ici  vient  d'appréler  un  plat  de  sa  façon  et 
nous  te  prenons  pour  juge  en  cette  affaire.  — Qu'on  me  serve 
ces  mets,  répondit  le  kadi,  afin  que  je  puisse  y  goûter  et  pro- 
noncer en  connaissance  de  cause.  »  On  apporta  les  plats  el 
on  les  posa  devant  lui.  Il  se  mit  à  manger  copieusement  ilu 
premier  qui  lui  fut  présenté.  «Voilà  qui  est  injuste,  lui  (ht 


CHAPIÏUE  CXVIl.  217 

Ut  Jii  ^-  J'oi  U^  yu  J'it  ^U  Jl-j  ^-ȉ;jdl  >i  ^Aiii  j^xJi^i 

Ulj  l-^-^^j  i-ïi^  l.^.li-j:i-5l  lil  l^i^U^  :>l^i  *xji3  h^ 
*XJi_i  »»X_££>  Ulj  l-6-^5y  JIJOliL  l^isrUo  I^aXL  »XJii  S <X^ 
j^*>ocl5  \.Juio^  iS'^^  ^ir^J-^  ^J^3  1r*^  '^^^^  *"(r'^'^  <J^  (J*^^"^^ 
^i  WA  î_p^l  iC  -.^iiJi  ^  J^t  <kj  ^-^^-^^Î  ^.j  }-^  i^\k*£L>  l^X 

Moularem.  —  El  pourquoi,  Sire? — Il  me  semble  qu'après 
avoir  mangé  de  ce  plat  avec  tant  de  plaisir,  lu  le  pronon- 
ceras en  faveur  de  celui  qui  l'a  préparé.  —  Prince  des 
Croyants,  i-épliqua  Ihn  ;\.bi  Douad,  je  m'engage  à  fiiire  hon- 
neur aux  autres  plats  tout  autant  ([u'à  celui-ci.  —  Soit,  dit  le 
Khalife  en  souriant,  cela  te  regarde.  »  Le  kadi  tintsa  promesse 
et  se  prononça  ensuite  en  ces  ternies  ?  «Le  mérite  de  celui 
qui  a  accommodé  ce  mets,  c'est  qu'il  y  a  prodigué  le  poivre 
en  ménageant  le  cumin;  le  mérite  de  cet  autre,  c'est  qu'il  y 
a  prodigué  le  vinaigre  et  ménagé  Thuile.  Ce  qui  rend  cet 
autre  plat  excellent,  c'est  que  les  épices  y  sont  mélangés 
en  égale  proportion;  quant  à  celui-ci,  l'auteur  a  fait  preuve 
de  goût  en  y  mettant  moins  d'eau  ([ue  de  honillon;"  el  il 
signala  ainsi  \o  mérilc  de  clia((ii('  ragoût  a\('c  des  doges 
(jui  cliannaicnl  celui  (pii  l'avait  prépare.  Puis  il  se  mit  a 
table  avec  les  convivcîs,  et  mangea  de  la  meilleure  grâce 
et  du  meilleur  appélit,  eu  rappelant  les  prouesses  des 
grands   mangeuis    des    premieis    A^;es    de    lislam,   comme 


218  LES  PRAIRIES  D'OR. 

J._A_^  »j_.sû:>  ii.J^i  0.£  Aj'Xjt'  ij^^  ^Jd5  «Xas  /vj  -.L<rJ^» 
4^L^-=ï.  ^ï^-^'j  JlXHÎ   /cjU-^j   ijl^aAil   ^ij^^ij  ;^Ji        «j-«*^-« 

Moâwiah,  lils  crAbou  Sofian;  Obeïd  Allah,  fils  de  Ziad; 
Haddjadj ,  fds  de  Youcouf,  et  Suleiman,  fds  d'Abd  el-Molik, 
ou  bien  celles  des  plus  fameux  gourmands  de  l'époque, 
comme  Meïçarah  le  marchand  de  dattes,  Dawrak  le  bou- 
cher, Hatem  le  mesureur  de  grains  et  Ishak  le  baigneur. 
Quand  la  table  fut  enlevée,  le  Khalife  lui  demanda  :  «Père 
d'Abd  Allah,  as-tu  quelque  requête  à  m'adresser.^  —  Oui 
Sire,  répondit  le  juge.  —  Parle,  car  nos  convives  sont  im- 
patients de  se  divertir.  —  Eh  bien,  Prince  des  Croyants, 
un  membre  de  votre  famille  a  été  disgracié  de  la  fortune; 
il  se  trouve  dans  une  situation  pénible  et  il  vit  misérable- 
ment. —  Qui  est-il  ?  »  demanda  Moutaçem.  Le  kadi  nomma 
Suleiman  (fds  d'Abd  Allah)  Naufeii.  —  «  Estime  ce  qu'il  lui 
faut.  —  Cinquante  mille  dirhems.  — ■  Je  les  lui  donne.  — 
J'ai  une  autre  requête,  reprit  le  juge.  —  Quelle  est-elle.'' 
—  Veuillez  rendre  à  Ibrahim,  fds  de  Moutamer,  ses  biens 
domaniaux.  —  J'y  consens,  répondit  le  prince.  —  Voici  une 
troisième   flemancie.  —  -  Accordé,  »   répliqua  VIoutarem;  (!<• 


ciiAPrrni-:  ex  vu.  219 

AJUki-  i  JU»  (^^Aiaji.  ^b  (^Cs-  \^i^  *=,^  (j-s^  2>ij.j  ^  ii>U- 
J.Xa£;  cjU>   w^-eii<   J^-^AJ»  ^y^  '^i  4r^  dJ??-^-*^' J-^'   ^ 

Jj^JOj   A?;-J^    f^^:?^    ^'^.  (J^j^-  t^*^'    ^^'-5  ''^  ^*A>^i^ 

sort«>  que  le  kadi  ne  s'éloigna  pas  avant  d'avoir  exposé  treize 
affaires  pour  lesquelles  il  n  essuya  pas  un  seul  refus.  Il  se 
leva  alors  et  prononça  Tallocution  suivante  :  «  Prince  des 
Croyants,  ({ue  Dieu  vous  accorde  de  longues  années,  car 
votre  evistence  doinie  à  vos  sujets  d(>s  canq)agnes  fertiles, 
une  vie  heureuse  et  des  richesses  fécondes!  Puissiez-vous 
jouir  d'une  félicité  parfaite,  être  coud)lé  des  faveurs  de  Dieu 
et  préservé  de  loul  malheur,  de  loule  disgrâce  I-  Quand  d 
se  fut  éloigné,  Moufacem  ajouta  :  "  Kn  vérilé,  on  est  fier  de 
connaître  un  homme  lel  que  lui  et  heureux  de  le  fréquenler; 
il  l'emporte  sur  milh;  de  ses  égaux.  Avez  vous  remarqué 
comme  il  s'est  présenté,  comme  il  a  sahu'  et  pi  is  la  parole:' 
Avec  quel  art  il  a  su  goûter  et  louer  les  mets  et  s'étendre  dans 
l'entretien,  enfin  (pielle  gaieté  il  a  n'pandiie  sur  notre  re- 
pas? IVjur  repousser  une  demandi'  \niaiil  de  lui  il  laudrait 
être  un  homme  vil  et  de  hasse  origine.  Vrai  Dieu,  s'il  m'eût 
demandé  séance  tenante  la  valeur  dedix  millionsdedirhems, 
je  n'aurais  su  les  lui   refuser,  parce  que  j,e  suis  convaincu 


220  LES  PRAIRIES  D'OR. 

J^A_ïi_5  *,.ji;X£  *>otAi  i^y^^.  \^>^^  -^^  <^  *^-*  ù>y*^  t**^ 

qu'en  retour  de  ce  don  il  m'aurait  acquis  de  la  gloire  en  ce 
monde  et  une  récompense  dans  la  vie  future.  »  —  Voici 
quelques  vers  du  Tayite  (Abou  Tammam)  en  Thonneur 
d'Ahmed,  fils  d'Abou  Douad  : 

Les  perfidies  de  tous  les  âges  sont  effacées  par  les  nobles  actions  d'Ah- 
med ,  fils  d'Abou  Douad. 

Je  n'ai  jamais  voyagé  dans  le  inonde  sans  devoir  à  sa  générosité  ma 
monture  et  mes  provisions  de  route; 

Ma  pensée  et  mes  espérances  demeurent  stables  auprès  de  toi,  alors 
même  que  ma  caravane  erre  à  travers  les  pays. 

La  tradition  a  conservé  l'anecdote  suivante  racontée  par 
Fath,  fils  de  Khakan  :  «Je  me  trouvais,  dit-il,  auprès  de 
Motewekkil  un  jour  où  ,  ayant  l'intention  de  boire  le  vin  du 
matin  dans  (son  château  de)  Djàfari ,  il  avait  envoyé  quérir 
ses  courtisans  et  ses  chanteurs.  Nous  nous  promenions  et  ^ 
s'appuy.inl  sur  moi,  le  Khalife  prêtait  l'oreille  à  mes  dis- 
cours; nous  arrivâmes  ainsi  sur  une  ("minence  d'où  nous 
pouvions  voir  lecaniil.  Le  prince  se  fit  npporter  nn  (aiilenil 


CHAPII  UK  i:XVll.  221 

y.X.>    fi.À-    ^J-«    r^\j),^M    l-T-AJ    j^i^J    */*^-^  ^"^i    ^J^^r!    (J^r^     ^^^_5 

^J^iJJiJi  i^j:>Uj  UJ\.=^  (^  ^-(p?  t^  V""^^^'-^  t^-^h^  U  ^^'  Ui 
J^xl!  i_j^t=-3  Uj.^^  ^  /«•■4-^>*J  <-^>!^'^  fi-^  J-«  1^  iiA^^ll 

JwLX_J^-«i    ««^Jl^i     ,^J.•    ^j..i    1^3    *Xji^i!    (_>.XAi'^_J    j.lxkJi    J-AÏi^ 

et  s'assit;  tandis  ([lul  causait  avec  moi,  il  apt^rçut  une  em- 
barcation attachée  tout  près  de  la  berge  du  canal;  un  ma- 
telot faisait  cuire  "dans  une  grande  marmite  placée  devant 
lui  un  sikbadj  de  bœuf  (vinaigrette  de  viande  hachée  et 
assaisonnée  de  miel),  dont  Todeur  se  répandait  au  loin. 
«Falh,  me  dit  le  Khalife,  cela  sent  le  sikhadj ;  par  Dieu, 
sens-tu, mon  cher,  quel  délicieux  fumet?  Qu'on  me  l'apporte 
tel  quel  I  »  Les  valets  de  pied  s'empressant  coururent  enlever 
la  marmite  des  mains  du  matelot;  ce  que  voyant,  les  mari- 
niers (le  rembarcalioM  faillirent  mourir  de  saisissement  et 
(le  peur.  La  marmite  aj)portée  au  Khalife  toute  bouillante 
H  telle  (pi'on  l'avait  prise  fut  placée  devant  nous.  Enchanté 
du  parliuM  et  de  la  couleur  appétissante  du  ragoût,  Mote- 
wckkil  (lcni;ui(l;i  une  ruiclic  de  |)aiM,  eu  cassa  un  morceau 
(pi'il  me  donna,  eu  prit  un  autre  morceau  pour  lui  et  nous 
mangeâmes  l'un  et  l'autre  trois  bouchées  de  ragoût  ;  après 
nous,  les  couilisans  et  les  chanlcurs  viiuviil  en  prendre 
chacun  une  boucht'e;  ou  apporta  ensuite  le  dejenner  et  les 
tables  iuren!  servies.  Le  repas  termine,  Vloleuekkil  lit  videv 


222  LES    PUAI  RIES   D'OR. 

jj^   LÀ-J^!    U    (J-Jf    !«>wii    (0— g-î    cK-ij    ^A/.À*^*3i    tjUsPi^    L^*>sJ 

^UXaM      (j^     /y^M*=>.i      C:A.XI     u     -.l^ii    jjsi  jji      liî     Jj.ij      t»      ^)-AAJ 

■C.AW.  A-X-wi    ^J^   l~t»-»   3JsJ^    O^*.-'    «-^i>'^AJ   Jo^ii    (^À-«j,4l  j-A^^ 

et  laver  la  marmite  en  sa  présence  et  ordonna  qu'on  la  rem- 
plît de  dirhems;  on  y  versa  tout  le  contenu  d'un  group; 
mais  comme  il  restait  encore  dans  le  sac  environ  deux  mille 
dirhems,  le  prince  dit  au  valet  qui  se  trouvait  devant  lui  : 
"Tu  vas  prendre  ce  vase,  tu  le  porteras  aux  mariniers  et 
tu  leur  diras  :  Voici  le  prix  de  ce  que  nous  avons  consommé 
de  votre  ragoût.  Puis  tu  donneras  à  celui  qui  Ta  préparé 
Vexcédant  de  cette  somme  pour  le  récompenser  de  son  excel- 
lente cuisine.»  Fath  ajoute  que  le  Khalife  disait  souvent, 
lorsqu'on  lui  rappelait  le  plat  du  matelot  :  «  Je  n'ai  jamais 
mangé  rien  de  meilleur  que  le  sikbadj  assaisonné,  ce  jour- 
là,  par  les  mariniers.  » 

Le  jurisconsulte  Abou  '1-KaçemDjàfar  (fils  de  Mohammed, 
(ils  de  Hamdan)  Moçouli,  qui  était  originaire  de  Haditat  el- 
Moroul,  m'a  transmis,  dans  la  ville  de  Djoheïnah,  le  récit 
suivant  fait  à  Abou  '1-Haran  Salihi  par  Djahiz.  «  On  m'avait- 
recommandé  au  Khalife  Motewekkil ,  raconte  Djahiz,  pour 
diriger  rédiicalif>n  d'un  de  ses  fils;  mais  quand  ce  prince  me 


CIlAPirUK  CW  11.  22.) 

iù\k£.  ^j.4  t^-^s^ys^^  i^syjio^  r)^  ô^'  *^*i.*j  (2,y^^  (St^^~^^ 

t-jUii^  U~^^  b^i   ^^''^îJi.ÂJ         c_jLx_C^   iC_x_A_i3_ï  -j j  vX 

vit,  il  trouva  mon  j)]iysique  déplaisant  et,  me  faisant  donner 
dix  mille  dirhems,  il  me  congédia.  En  sortant  de  chez  lui, 
je  rencontrai  Mohammed  hen  Ibrahim  (gouverneur  de  la 
Perse),  qui  était  sur  le  point  de  se  rendre  à  Bagdad;  il  me 
proposa  de  l'accompagner  et  de  descendre  le  Tigre  dans  son 
embarcation.  J'y  pris  j)lace  à  côté  de  lui;  quand  nous  arri- 
vâmes à  l'embouchure  du  canal  de  Katoid,  après  avoir  quitté 
Sainarra,  Mohammed  fit  dresser  une  tente  fermée  par  des 
rideaux  et  appela  ses  chanteuses.  Une  joueuse  de  lulh  com- 
mença sur  les  paroles  que  voici  : 

Chaque  jour,  une  rupture,  des  reproclics  !  Le  lemps  s'c'couio  ri  notri' 
colère  ne  s'apaise  point; 

Qui  me  (lira  si  ce  malheur  ne  frappe  cjuc  moi  seni  au  nionJc  on  s'il  est 
<<>mmun  à  tout  ce  qui  aime  ? 

Elle  s'arrêta,  et  sur  l'ordre  du  |)iin(('  une  guilarislc  cliaula 
l'air  suivant  : 

Pitié  pour  (le  p.nivrcs  amants   (pic  je   vois  ahainlonnés  c!(!  tous. 
Avec  quelle  cruanlé  on  les  repousse,  on  les  <''loi<jnc,  ou  les  sépare,  el 
ils  seraient  patients  ! 


224  LES   PRAIRIES   D'OR. 

fi 

i4j«>wo  »»Xaj3  JU.iI  il  l^AiùUiaj  -Xi  *X4^  jj*.|^  <^^  Mi-iî   Jî 

La  joueuse  de  lulli  reprit  :  «  Que  doivent-ils  faire  aiors  ?  » 
La  guitariste  répondit  :  «  Voilà  ce  qu'ils  font  ;  »  et  de  sa  main 
elle  déchira  le  rideau ,  nous  apparut  brillante  comme  le 
demi-disque  de  la  lune  et  se  précipita  dans  le  fleuve.  Au 
chevet  de  Mohammed  se  tenait  un  jeune  page,  qui  pouvait 
rivaliser  de  beauté  avec  elle;  en  voyant  cet  acte  de  désespoir, 
il  jeta  le  chasse-mouche  qu'il  avait  à  la  main,  courut  à  l'en- 
droit d'où  elle  était  tombée  et  la  voyant  passer  entre  deux 
eaux,  il  s'écria  : 

C'est  toi ,  après  le  destin  ,  qui  mo  jettes  dans  le  gouflVe;  peux-lu  encore 
le  comprendre  ? 

Et  il  se  précipita  dans  le  fleuve  sur  ses  traces.  Les  mate- 
lots ayant  viré  de  bord,  on  aperçut  les  deux  amants  qui  se 
tenaient  entrelacés;  puis  ils  disparurent.  Cette  scène  avait 
assombri  et  gravement  impressionné  Mohammed;  il  me  dit 
alors  :  «  Amr,  raconte-moi  une  histoire  qui  puisse  me  con- 
soler de  la  perte  de  ces  deux  serviteurs,  sinon  je  t'envoie  les 
rejoindre.  »  Voici,  ajoute  Djahiz,  b^  récit  que  je  lui  fis.  «  On 


CHAPITRE  CXVFf.  225 

AaXc   CX.^£:j    ^llaiî  ^-«y^.   OsJli    jiUî    <Xa£    ^jo    Jswjjyj    (ji    ^^J 

(J.^ls<^^^-«oi-^*>)l  «Xio^ÀJ  jlj         JJ^XJcJi    l*X>iû  (ja«j  5A^  /oJslîI 

raconte  que  Yézid,  fils  d'Abd  el-Mélik,  présidant,  un  jour, 
Taudience  de  justice,  trouva  parmi  les  pièces  qui  lui  fu- 
rent présentées  une  requête  ainsi  conçue  :  «  Plaise  au  Prince 
des  Croyants  (que  Dieu  le  glorifie!)  faire  venir  en  ma  pré- 
sence son  esclave  une  telle,  pour  qu'elle  me  chaule  trois 
airs.  »  Yézid  courroucé  ordonna  qu'on  lui  apportât  la  tête  du 
coupable;  mais  il  envoya  un  second  messager  sur  les  traces 
du  premier  avec  Tordre  d'amener  fauteur  de  la  requête. 
Quand  cet  homme  lut  en  sa  présence,  le  prince  lui  de- 
manda ce  qui  avait  pu  lui  inspirer  une  action  aussi  hardie. 
"C'est,  répondil-il,  ma  croyance  en  votre  bonté,  ma  con- 
fiance en  votre  pardon.  »  Le  Khalife  le  fit  asseoir  et  lorsque 
tous  les  Omeyyades,  jusqu'au  dernier  d'entre  eux,  se  furent 
éloignés,  il  fit  venir  l'esclave  avec  sou  luili  à  la  ruaiu.  l,e 
jctuie  homme  lui  demanda  cet  air: 

Doucement,  Falimali,  modère  ta  roqnctteric  clédaignense,  cl,  si  (ii  as 
juré  de  me  quitter,  du  inoius  sois  douce  envers  moi. 

VU.  1 3 


22()  LES   PRAIRIES  D'OR. 

AW.ÀÀJ   ^y    «XjJ^J   iUi  (_^^    (_^  iXxA^i   c^S^    <;^r^    ^?j.-i   pfvXAwî 
NJi_5  J^.i£.i   >i  ^j\^yl  Ak^î   <Ji  W  Î^AXkiL'  U.Xa^  i_5J^i^  yl^s 


L'esclave  chanta;  ensuite  le  jeune  homme,  avec  lautori- 
sation  de  Yézid ,  réclama  cet  autre  air  : 

L'éclair  brille  dans  la  direction  du  Nedjd  et  je  lui  dis  :■  Eclair,  je  n'ai 
j)lus  le  temps  de  t'observcr. 

Un  autre  que  toi  m'occupe ,  un  ennemi  altéré  de  vengeance  et  de  haine, 
dont  la  main  lient  une  lame  nue,  acérée  comme  la  pointe  d'une  lance. 

Elle  le  chanta  aussi.  «  Parle,  dit  le  prince  au  jeune  homme. 
—  Ordonnez  qu'on  m'apporte  une  amphore  de  vin,  »  répon- 
dit-il. On  la  lui  apporta;  à  peine  l'eut-il  vidée  qu'il  se  leva 
brusquement,  grimpa  au  faîte  dn  dôme  sous  lequel  le  Prince 
était  assis,  se  précipita  la  tête  la  première  et  expira.  Yézid 
s'écria  alors  :  «  Nous  appartenons  à  Dieu  et  nous  retournons 
vers  lui.  Voyez  le  sot,  l'insensé,  qui  croyait  qu'après  lui  avoir 
montré  une  de  mes  esclaves  je  la  garderais  en  ma  possession  ! 
Pages,  faites  sortir  cette  fille  et  conduisez-la  dans  sa  famille, 
si  elle  en  a  ;  sinon  vendez-la.et  distribuez  l'argent  eu  aumônes , 
à  l'iutention  du  mort.  »  On  l'emmena  aussitôt;  en  traversant 
la  cour  (lu  ])alais,  (>lle  vit  une  fosse  qu'on  avait  creusée  au 


CHAPITRE  CXVU.  227 

cyj_-«  !5X»_j  ^J.Uw>^  ^j.^À.   il         I*)sXd»  cA^Xs  l^JÙI*£    c:>U  (j^ 

I  jsjû  c:>p*Xi  lis».  14»  Jlï      dLUi  «Xxft  /j.j  «X^  (>*  I  tXji  jj^n-aJ^ 

<X.A^  ^  «X-i^  yi  (^jJail  <Xa:^  y.^  *X:$î  J_j,^  jjfe^  -iliH 

milieu  du  palais  de  Yézid  pour  recevoir  les  eaux  de  pluie; 
elle  échappa  aux  mains  de  ses  gardiens  et  prononçant  ce 
vers  : 

Ceux  qui  meurent  d'amour  doivent  mourii-  ainsi  ;  l'amour  ne  vaut  rien 
sans  la  mort. 

Elle  s'y  précipita  la  tète  en  avant  et  mourut.  Ce  récit 
(ajoute  Djahiz)  consola  Mohammed,  cl  je  reçus  de  lui  une 
belle  gratification.  »  D'autres  cependant  font  figurer  dans 
cette  aventure  Suleïrnan,  fils  d'Abd  el-Mélik,  au  lieu  de 
Yézid,  fils  d'Abd  el-Mélik. 

Djahiz  poursuit  ainsi  :  «  Lorsf|ue  j'eus  transmis  ce  récit  à 
Abou  Abd  Allai)  Mohammed  (fils  de  Djàfar)  Anbari  dans  la 
ville  de  Basrab  ,  il  me  dit  :  «  Je  veux  à  mon  tour  le  raconter 
un  fait  analogue  à  celui  que  tu  viens  de  tue  rcxc-lcr.  Je  le 
dois  à  reunuque  Faïk,  qui  était  mawla  de  Moliainuied  (fils 
d'Homeïd)  Toussi.  Ce  dernier  était  assis,  un  jour,  avec 
quelques  intimes  et  il  écoutait  une  esclave  qui,  séparée  de 
l'assemblée  par  un  rideau,  chantait  ces  vers  : 


22«  LES   PRAIRIES   D'OR. 

j-À-^i  \ — i  ^^ij  (_^  dU^        ^ji  U  ^^i  »Xi  j,^  ij^  ^S 
»*>o  /j.£  ^vXJiJL»  ^^ji  \jJiM*.ù  ^«XS  5*>^Aj  -!5Xi.  *X4^  (j*<[;  (^_j 

&..*<wLi.^    y^  Js^   <_>ij.*i.]l   tX^î-  jtlJi*  ^<yÀ^  5*>vsfct   ij«X:^  i^i 

Belle  qui  habites  ce  château,  lorsque  tu  te  lèves  brillante  comme  la 
lune,  je  soulTre  parce  qu'un  autre  que  moi  te  possède; 

Mais  si  Dieu  lui-même  a  voulu  que  tu  me  fasses  éprouver  cette  dou- 
leur, que  puis-je  faire  ? 

Derrière  Mohammed,  un  jeune  page,  une  coupe  à  la  main, 
lui  servait  à  boire;  il  la  jeta  à  terre,  courut  k  la  fenêtre  et 
se  précipita  dans  le  Tigre  en  s'écriant  :  «  Voilà  ce  que  tu  dois 
faire!»  Aussitôt  la  chanteuse  déchira  le  rideau  et  se  jeta 
clans  le  fleuve  sur  ses  traces;  toutes  les  recherches  faites  par 
les  serviteurs  pour  retrouver  les  deux  victimes  furent  inu- 
.tiles  et  Mohammed,  interrompant  la  fête,  se  relira. 

En  2  33  de  Thégire,  Motewekkil,  irrité  contre  Omar  ben 
Feredj ,  originaire  de  Rokkhedj,  écrivain  d'un  talent  supé- 
rieur, confisqua  ses  biens  et  ses  bijoux,  ce  qui  représentait 
environ  cent  vingt  mille  dinars.  Les  biens  de  son  frère  furent 
également  confisqués  jusqu'à  concurrence  de  près  de  cent 
cinquante  mille  dinars.  (Ce  dernier  qui  se  nommait)  Moham- 
med obtint  ensuite  sa  grâce  et  la  restitution  de  ses  domaines 


CHAPITRK   ex  VII.  229 

<!0LC  i^^J  (O-J'  0^-«  *-?•=?-  *-»w-«JÎj  i<XXMS  (J}^\  \jUu  \j^s  ^^^ 
c_)U  4gC  r*.  L^j  j.lii|_j  i50v_x_j  Jî  j*X-s»-î_5  ici-Jlï  AA^ft  ks^^ 
^\    <îoJl    c;.^    ^^i    »J3_;is    ^yd\    JI    '''ylvXjj^il    ^o^i^ 

J.AÀJ».   yj   Jv.5-!   »lj_j  c:*.j\(5  (_5ij.x*«Jll  Jlï     jÀJÎj  ^-6^  jiji   y^^ 

y  -^  Mj   t_;k_jjj.^  ^j   dUi^   -^\^ii  aàj*XjC  J^ii   iiJ5\J^  tj 

w.*— jl— =^  jj  tjj,_j>-  t_>LA-?  (>-*^3  (^5v^l^^  C:J^•*r'J'J  t5<^^-=»-'  ^«w 

(j-«   ^5~Ls».   ^jjjU^    »J»<Xs»-i j  jJ^Uo    (J.J    *>s~^    *^^r^   cj"**^    «-^i/**^' 

moyennant  une  somme  de  vingt  et  un  millions  de  dirhems. 
Le  Khalife  le  disgracia  une  seconde  fois  cl  le  condamna  à 
être soufileté  tous  les  jours;  d'après  le  calcul  qui  en  fut  fait, 
le  malheureux  reçut  six  raille  soufllels;  il  fut,  en  outre,  re- 
vêtu d'une  robe  de  bure.  Après  une  réconciliation  ])assagère, 
il  encourut  pour  la  troisième  fois  le  courroux  du  prince  et 
fut  exilé  à  Bagdad,  où  il  résida  jusqu'à  sa  moit. 

Le  chef  des  môheds  offrit,  un  jour,  au  Khalife  une  fiole 
d'huile  parfumée  en  y  ajoutant  ce  message  :  «  Un  présent, 
oflert  par  un  inférieur  à  un  supérieur,  paraît  d'autant  plus 
beau  et  plus  brillant,  qu'il  est  plus  léger  cl  plus  mince; 
mais  un  piésent  qu'un  supérieur  fait  à  un  iuféiieur  gagne 
par  sa  grande  valeur  en  importance  et  eu  utilité.  » 

Ahmed  ben  llanbal  mourut,  sous  le  règne  de  Motcwekkil, 
dans  la  ville  de  liaj^dad  (mois  de  rebî  II,  j/ii  de  l'hégire)  et 
fut  enterré  à  Bab-IIarb  (voir  ci-après,  p.  23i),  dans  le  quar- 
tier occidental  (le  la  ville;  Mohammed,  (ils de Taher,  récita  l;i 
prière  des  fulu'•r^ill<^s;  jamais  aux  ol)sè(|u<'s  d'un  juriscon- 


230  LES  PRAIRIES  D'OR. 

ù\M3j\^    fjt^SMlj   /O-^^AA^    (Sy^  J-^^*^  (••^  ''^^■'    ''^^W    ^J^^    JukjfJi 
^i-A-J^-*    iixjj^AwJI    fc^.w>-lAS>    y»£    *lrï»    15    «XAiiîL    î <X£Ûj    (^l^Avi^Ji 

wiJij  (Oi-dr^*  j»«XJ»^j  ^^Jjl..»Ia,.c  (j^  j^Nlâ*  (jl^   iiUi  <j  ^^X.-ii«Ji 

J^_A«)._Jî   cuj.-^  «X.À-&   l^il^^IaS  ^AÀs»-  /jjI   cy|k^  «XÀ£  Ci*»^]ii 

suite  on  n'avait  vu  un  pareil  concours  de  monde.  Les  propos 
les  plus  divers  et  les  plus  contradictoires  circulaient  parmi 
la  foule;  on  raconte,  par  exemple,  qu'un  des  assistants  se 
mit  à  crier  :  «  Maudissez  celui  qui  persiste  dans  l'erreur  !  » 
parole  qui  est  en  contradiction  avec  ce  que  la  tradition  rap-  . 
porte  à  cet  égard  du  fondateur  de  la  loi  sainte.  Au  contraire, 
un  des  premiers  et  des  plus  considérables  personnages,  qui 
accompagnait  le  convoi  et  qui  prenait  rang  après  l'imam  du 
cortège ,  prononça  ce  vers  d'une  voix  retentissante  : 

La  mort  de  Mohammed  avait  couvert  le  monde  de  ténèbres;  le  monde 
s'est  obscurci  après  la  mort  d'ibn  Haiibal. 

Il  entendait  par  là  que  le  monde  s'était  déjà  obscurci 
après  la  mort  de  Mohammed,  et  que  le  trépas  d'Ibn  Hanbal 
avait  répandu  sur  la  terre  des  ténèbres  aussi  épaisses  qu'après 
la  mort  du  Prophète. 

Cette  même  année  fut  signalée  par  des  chutes  d'étoiles 
comme  on  n'avait  rien  vu  de  pareil  ;  ce  phénomène  eut  lieu 


CHAPITRE  CXVll.  231 

ii>^j  iv^-w  (^j^  »0v.xJi3i  ^i>  jj  kiUi^  iL9j,yl!   i3-J^po  (j-«  ijI^^' 
CAjl^  J^-*i*"  (^j5  W^j  »-'^  (1^'  A.À^i  jj_5     xj\Ji'>\3^  f^jsi*s.% 

j..<i;K-AJlî  ^jj  jÀx.=>-  »l«_5  c>~il<3  JJvaJ!  J.i^i  s^.\s.  ^^^  ca^^Jî^j 

dans  la  nuil  du  jeudi  6  de  djemadi  II;  mais  il  sVsl  reproduit 
aussi  effrayant  en  Tannée  323,  dans  la  nuit  où  les  Kamiales 
attaquèrent  les  pcMerins  (rirak  sur  la  route  de  koufali  au 
mois  de  dou  M-kàdch;  (cf.  Ibu  d-Aihir,  VIII,  p.  232).  — 
L'année  de  la  mort  d'Ibn  Ilanbal  fut  aussi  celle  où  mourut 
Mohammed  (fils  dWbd  Allah,  fils  de  Mohammed)  Eskali , 
personnage  célèbre  parmi  les  philosophes  et  Tum  des  ])iinei 
pauxdela  sectedcsMoutazAîlites.  —  Va\  23'i,  mori  cieDjàfar, 
fds  de  Mobachir,  qui  se  distingua  par  sa  prohité  el  sa  piété 
parmi  les  docteurs  de  liagdad.  —  Eu  236,  mort  de  Djàfar, 
lils  de  Ilarl),  de  la  tribu  de  Hamdan  et  \\\\\  des  ehels  de  l\ali- 
lan;cV'stà  s(jn  père  (|ue  le  (piartier  de  liai)  llaib,  dans  la 
partie  occidentale  de  Hagdad,  doit  son  nom.  Djàl'ai-  lui  le 
doyen  des  théologiens  de  cette  ville. 

Vu  rapport  d'AbouMIfaran  Khayyal ,  ce  fui  en   227  de 
rhégire  (pu-  mourut  Ahou  M  llodeïl  '^Moiiammed,  lils  d'I^I- 


232  LES  PRAIRIES   D'OR. 

0jj.xi^ffj  *A^  iCi^  AjUj  (-iAj\^^}.j4>\^r  0j  <Xj^  J.jjs-g.3!  bl  yl 
<_$«X_j>-i  <\-*— w  [«j-S  JUi  5*>Oj^  tj  AjU^Î  ^jvÀj  -0^"  (^jvIjL»^ 

Hocleïl,  surnommé  AllaJ)\  mais  ses  disciples  ne  s'accordent 
pas  sur  la  date  de  sa  naissance,  qu'ils  placent  les  uns  en  i3 1, 
les  autres  en  i3/i  de  l'hégire.  Cet  Abou  '1-Hodeïl  s'était  ren- 
contré un  jour  avec  Hicham  (fils  d'El-Hakem)  de  Koufah, 
surnommé iïar/ar,  lequel  était  le  chef  des  anthropomorphites 
et  de  ceux  des  hérétiques  qui  professaient  la  même  doctrine; 
Abou  '1-Hodeïl,  au  contraire,  rejetait  la  ihèse  de  l'anthropo- 
morphisme et  de  l'assimilation  et  soutenait  une  opinion 
opposée  à  celle  de  Hicham  relativement  à  ïuniié  (de  Dieu) 
et  à  V imamat.  Hicham  fit  donc  à  son  adversaire  robjection 
suivante  :  «  Puisque  tu  soutiens  que  le  mouvement  est  vi- 
sible, pourquoi  ne  prétends-tu  pas  aussi  qu'il  est  tangible  ?» 
Abou  '1-Hodeïl  répondit  :  «  Parce  que  le  mouvement ,  n'étant 
pas  un  corps,  ne  peut  être  touché,  cette  propriété  apparte- 
nant seulement  aux  corps.  —  Eh  bien ,  répartit  Hicham , 
ajoute  donc  qu'il  ne  peut  être  visible,  puisque  la  vue  ne 
peut  tomber  que  sur  les  corps.  »  Mais  Abou  '1-HodeïI  reprit 
l'offensive  en  ces  termes  :  «  D'où  tires-tu  ta  proposition  que 


CHAPITRE  CXVH.  233 

^j  \.M*JU<.j  l^b  (J^*i  (j^  ^  Lfc^  Lg,**#jijlj  iijçUJl   (jIa^^Î^ 
-M^  iCJiltf   c.A.**Ai  iCS^il  ^I  JoiX^Jî  Ll  L  o»JS3  l^  J.jIj  civj! 


rattribiit  n'est  pas  l'èlre  et  n'est  pas  différent  de  Tètre?  — 
Hichain  répliqua  :  «  De  ce  qu'il  est  impossible  que  l'action 
({ue  j'accomplis  soit  moi,  et  qu'il  est  impossible  qu'elle  soit 
autre  chose  que  moi.  Car  je  n'admets  la  diversité  que  pour 
les  corps  et  les  substances  qui  existent  par  eux-mêmes;  or, 
comme  mon  action  n'a  pas  d'existence  propre  et  comme  elle 
ne  peut  être  moi,  il  s'ensuit  qu'elle  n'est  ni  moi,  ni  différente 
de  moi.  Mais  voici  une  autre  preuve  que  je  lire  de  les  pro- 
pres paroles  :  Abou  '1-ITodeïl,  lu  souliens  ([ue  le  mouvement 
n'est  ni  tangible  ni  visible  parce  que,  selon  loi,  il  est  im- 
possible qu'il  tombe  sous  les  sens  du  toucher  et  de  la  vue.  Je 
dis  à  mon  tour  :  l'ail ribiil  n'est  pas  moi  cl  iTcsl  pas  différent 
de  moi,  et  rarf^uniciit  par  lequel  je  soutiens  cet  axiome  est 
le  tien  même  lorscpie  Ui  deinonires  (pie  le  mouvenienl  n'est 
susceptible  ni  d'être  louché  ni  d'èlrc  vu.»  Abou  'lllodcïl 
coupa  court  à  la  conlroverse  sans  rien  r(''poiidre. 

Mort  d'Abou  Mouea  Ferra,  un  des  cheikhs  orthodoxes  et 
des  plus  farauds   lhéol()jj;icns  de  TMcole  de   U;it;(la(l,  en   -iiiO 


23i  LES   PRAIRIES   D'OR. 

^j.»  uÀAaw  >-<r>J  Ià^j  «Xi»  —uiij^ij  r»-  -AhJi  ^^  IàaJO  (_j><  v_âAaw 
iJ3^_A_x_lî  iiS— <*  tj^  ^jIj_5j  'Xjvxc  0-j  3^5j.Ai>.  cjUMÎ  I«X^ 
<XJs«   ^jLwj    (vyv—njjîj  (*~iV)'   ''^■*'**'   '■i^Jo    Aj'lij  /j)_5  Wa*  *<X.*i)_j 

L^lWo  ji    (^J    ^  c^  i*3^A»*;j    ^1    Qj^    QOJ    iUU^I    yU   J^aJî    JÎ 

de  l'hégire.  —  Waril  ben  Ata,  surnommé  Ahoa  liodaïfah, 
mort  en  l'année  i3i  de  l'hégire,  fut  le  chef  el  le  fondateur 
de  la  secte  moutazélite  et  let  premier  qui  établit  la  doctrine 
de  Vétai  mixte,  ce  qui  signifie  que  le  Musulman  en  état  de 
péché  n'est  ni  croyant  ni  infidèle.  11  désigna  ses  sectateurs. 
par  le  nom  de  nioutaz élites ,  du  mot  itizal  (se  séparer).  Les 
détails  que  nous  avons  donnés  précédemment,  au  chapitre 
des  Omeyyades,  sur  les  cinq  principes  soutenus  par  l'école 
moutazélite  nous  dispensent  d'y  revenir  ici  (voir,  t.  VI,  p.  20 
et  suiv.);  nous  les  avons  également  développés  et  élucidés 
dans  nos  premiers  ouvrages. 

Nous  avons  parlé  déjà  dans  ce  livre  d'Amr,  fils  d'Obeid, 
chef  et  directeur  de  cette  secte,  et  nous  avons  dit  qu'il 
mourut  en  ilxiv  de  fliégire  (t.  VI,  p.  208  et  suiv.).  Amr  se 
trouva  un  jour  dans  une  réunion  avec  Hicham,  fils  d'El- 
Hakem;  or  Hicham  professait  fopinion  que  la  qualité  d^imain 
a  été  textuellement  donnée  par  Dieu  el  par  le  Prophète  à  Ali , 
lils  d'Abou  Talib,  et  après  lui  à  sa  postérité  j)ui«',  c'esl-à-dirc 


CHAPITRE  CXVII.  235 

(jv*w.ii^   ^JJ^t^^  ^j^^Ual!    5«XJ_5    (j~»  Sj.Aa^   (J^  (j~*  (^^   Ktàj 

^ji  j^^  (j^j'   -Li..^  Jb  \j>j[Ai3.xj  LjjtilÀ^  (^j  )jy^^  ij_^^^ 

à  ses  fils,  Haçan,  IIuçoïii  et  leurs  hériliors;  tandis  que  Amr 
considérait  rimamat  comme  une  délégation  émanant  de  la 
communauté  musulmane  à  toutes  les  époques.  Dans  cette 
conférence,  Hicham  fit  à  son  adversaire  la  question  suivante  : 
nPour(|uoi  Dieu  t'a-t-il  donné  deux  yeux?  —  C'est,  répon- 
dit Amr,  afin  que  je  contemple  ses  œuvres,  les  cieux,  la 
terre,  sa  création  tout  entière,  et  que  j  ariiv<î  par  lu  à  la 
connaissance  du  créateur.  — Pourquoi  t'a-t-il  donné  le  sens 
de  l'ouïe  ?  —  Pour  que  j'entende  ce  qu'il  a  |)ermis  et  ce  qu'il 
a  défendu,  ses  ordres  et  ses  ])roliil)ili<)ns.  —  Pourcpioi  une 
lauffue.^  —  C'est  afin  fpic  j'exprime  ma  pensée  et  f|U(' j'ins- 
truise ceux  ((u'il  est  de  mon  devoir  d'initier  à  la  loi  de  Dieu. 
—  Pourquoi,  continua  Ilicliam,  Dieu  a-t-il  créé  eu  loi  nnv. 
inlcllij,M'iic(î  ?  »  —  Amr  répondit  :  «C'est  pour  (pi'elle  soit  le 
centre  où  les  sens  aboutissent  et  (ju'elle  fasse  un  choix  entre 
ce  (pi'ils  aj)porient  de  bon  et  de  mauvais.  —  Dieu,  reprit 
Hicham,  pouvait-il  te  doter  de  tous  les  sens,  et  ne  pas  créer 
en  toi  une  intelligence  vers  lacpielle  ils  se  dirigent?  —  Non, 


2:i0  LES   PRAIRIES   D'OU. 

j^-JL-clj  aKjcl>  U  t^  l^J  e*-£lJl  ^iû  ij^^  fc^XXÎi  ^^Ais?  iil 

j^v«*.A£  _jijt   »j.ji   aliyXja.  j^*Xj!    î«Xiûj   (J}j*Ji   (ij^  Jij-^  '^y.  ]>•* 

eJUUAxaj"  aÎ^  (jOoLwj  (jvjojtj  Jt-*-*»*  iOkAw  XX^JL»  o«*,xi!    jtAs^ii 

dit  Amr.  —  Et  pourquoi?  —  Parce  que  c'est  l'intelligence 
qui  dirige  les  sens  à  son  profit;  Dieu  n'ayant  pas  donné  aux 
sens  une  impulsion  propre,  il  ne  pouvait  se  dispenser  de 
leur  créer  un  moteur  qui  les  dirigeât  vers  la  fin  pour  la-, 
quelle  ils  existent,  et  ce  moteur  ne  pouvait  être  que  l'intel- 
ligence qui  les  met  en  mouvement  et  distingue  pour  eux  ce 
qui  est  bon  de  ce  qui  est  nuisible.  —  Eh  bien,  s'écria  Hi- 
cham,  rimam  est  pour  les  hommes  ce  que  l'intelligence  est 
pour  les  sens,  et  de  même  que  les  sens  ne  peuvent  aboutir 
ailleurs  qu'à  l'intelligence,  de  même  les  hommes  doivent 
avoir  recours  à  un  imam  qui  leur  est  indispensable.  »  Amr 
ne  put  opposer  à  ce  raisonnement  aucune  objection  plau- 
sible. La  discussion  qiu  précède  est  rapportée  par  Abou  Yra 
Mohammed  (fils  de  Haroun)  lelihraire,  originaire  de  Bagdad, 
dans  son  livre  intitulé  Conférences.  Abou  Yra  mourut  à 
Bagdad  dans  le  quartier  de  la  ville  occidentale  nommé  Bani- 
lah ,  en  a^y  de  l'hégire;  il  laissa  plusieurs  ouvrages  remar- 


CHAPlTIiK   ex VII.  237 

J^rsJij  /^Tj^îj  JvXiij  w^liai  J^!^  ^b}Vxl\  <_,L,|  »ls^  yU>J5 

j*,La_*JI  qj  i^vû^ji  »-:>U      ^r>jJ      c:Ajk>viI  L_>l^°i^  pll^xiîî 

quables,  entre  autres  le  Livre  des  Discours,  qui  traite  de 
l'imamat  et  d'autres  sujets  de  controverse. 

Abou  '1-Hureïn  Ahmed  (fds  de  Yahya,  fils  d'ishak)  Ra- 
wendi  mourut  dans  la  ville  de  Rahbat-Malik  ben  Tawk,  ou 
selon  d'autres,  à  Bagdad,  en  2^5,  à  l'âge  de  quarante  ans 
environ.  11  a  écrit  cent  quatorze  ouvrages.  On  trouve  dans 
nos  Annales  historiques  la  date  de  la  mort  des  auteurs  de 
discours,  des  chefs  de  sectes,  des  savants  versés  dans  la 
controverse,  dans  l'étude  des  systèmes  et  des  religions,  leur 
histoire,  leurs  discussions  et  les  différences  de  leurs  doc- 
trines; ces  mêmes  détails  sont  reproduits  dans  notre  Livre 
Moyen  juscju'à  l'année  332.  Nous  nous  bornons  ici  à  citer 
(|uel({U('s  noms  et  à  donner  une  courte  notice  de  ces  person- 
nages, des  jurisconsidtes  et  des  trarlitionnisfes. 

Kn  la  même  année  (lisez  en  2/i3)  mourut  le  secrétaire 
Ibrahim  (lils  d'Abbas)  Souli,  écrivain  élocpienl  et  poète  dis- 
tingué; on  ne  connaît  pas  de  hntihs  paiini  les  anciens  et  les 


238  Ll^^    PRAIRIES   D'OR. 

modernes  quiTaient  surpassé  en  poésie.  Dans  sa  jeunesse,  il 
vécut  du  produit  de  ses  vers  et  visita  plusieurs  rois  et  émirs 
dont  il  fit  le  panégyrique  pour  en  obtenir  un  salaire. 

Un  \aiib  rapporte  d'après  Ishak  ben  Ibrahim ,  frère  de  Zeid 
ben  Ibrahim ,  l'anecdote  que  voici.  Ishak  était  gouverneur  de 
Saïmarah  et  de  Sirawân  lorsque  Souli  passa  dans  cette  con- 
trée; il  se  rendait  dans  le  Khoraçân,  où  Mamoun  venait  de 
proclamer  Ali  (fils  de  Mouça)  Rida,  héritier  présomptif  du 
trône  ;  Souli  avait  composé  un  poëme  dans  lequel  il  chantait 
la  suprématie  de  la  postérité  d'Ali  et  proclamait  les  droits 
de  cette  famille  au  khalifat  supérieurs  à  ceux  des  autres 
dynasties.  Ishak  poursuit  ainsi  sa  narration  :  «  Je  louai 
beaucoup  ce  poëme  et  je  priai  l'auteur  de  m'en  laisser  une 
copie,  ce  qu'il  fit;  en  retour,  je  lui  donnai  mille  dirhems  et 
une  monture  pour  son  voyage.  Plus  tard  ,  les  vicissitudes  de 
la  fortune  placèrent  Souli  à  la  tête  de  la  direction  des  do- 
maines, en  remplacement  de  Mouça,  filsd'Abd  el-Mélik,  dont 
j'étais  un  des  principaux  agents.  Voulant  faire  une  enquête 
sur  la  gestion  de  Mouça,  Souli  me  retira  mon  emploi;  il  fit 


CHAPJTUI-;  CWIf.  23'.) 

^„t^xo  ij'  y-*'J    (S^y-^-^  jj*"'—^  L_5ykA»<)    v_«.À(iOvj(  (j)  w^^  iJ°J 

c>_*>,wjuj  JUi  ^As  (_-*.Àl:i  c_jij»ji)î   (j^  c^L»  ^^  Ci5^-f>'''   ÇuiSi 

^^_=^i   »<xij,  (jlj  ^U*]î   ^j^  J^Aiiii   wJlia    ji   yJ  t^  yi   /<sii; 

ensuite  rédiger  un  rapport  où  certaines  charges  pesaient  sur 
moi.  .le  les  discutai  en  sa  jirésence  et  lui  j)résentai  des  preuves 
irrécusables;  mais  il  ne  les  admit  point  et  n'eut  pas  plus 
égard  au  jugement  que  les  .secrétaires  exprimèrent  en  ma  fa- 
veur; il  m'adressa  même,  dans  le  cours  de  la  discussion,  les 
paroles  le»  plus  injurieu.ses.  Enfin  ayant  exigé  le  serment  des 
liotihs  au  sujet  d'un  rlia|)ilre  dudit  rapport,  comme  je  le  pro- 
nonçais il  mon  tour,  il  m(;  dit:  "  Le  serment  d'I'ltat  ne  peut  te 
lif  I  pMis(|ue  lu  es  hérétique  (chiite).  »  Je  lui  demandai  aussitôt 
MM  cmI relien  particulier,  et  quand  il  me  l'eut  accorde- je  lui 
p;nlai  en  ces  termes  :  «Je  ne  puis  supporter  une  accusation 
<pii  met  ma  vie  en  danger,  car  si  vous  écrivez  à  Motewekkil 
dans  des  termes  identirpies  à  ceux  dont  vous  venez  de  vous 
servir,  j(.' suis  perdu.  J'acce|)te  tout  le  reste,  mais  non  l'accu- 
sation d'hérésie.  Le  véritable  héréti([ue  est  celui  qui  soutient 
qu'.Mi,  lilsd'Abou'I'alil) ,  esl  supi-rienrà  Abbas  et  cpie  la  pos- 
lérili-  d'Ali  a  pbis  de  droits  au  khalilat  (pie  celle  d'yVbhas. — 
De  (pii  \eM\  Im  parlei  ? — De  vous-même,  et  je  possède  celte 


•i^o  LES  PiumiES  irou. 

^;i  CA.\i  J=-^  ^^«xi!  jJCJtXJi  j.Aiisi-t  Jli  xsJ  »«Xj  i  ki^w  45^»- 
^j  J^jJôÂj  ii^   »^^i_jll    5Js_tf>  ^J5;.i*^j  t^<^J  c^  iSj-=?'  ^   ''t^J 

J_j..«jtl\  J<.^3i  o^J  ''^^^^  c^-àSTa-  U.  »il.3i)  (^  J  uàX^  c_>L*£.^ 

^_i  (-:a-J!jj  *X.ï^  o*-i^j|^  AÀiw  i  A*AJ>^_^*>Jî  *j^uiis»-l^ 
«-jlxwi  vj  l^^  wA*-^  c^  WjÎ  «^*  outrer  *x.5  A-«y^  ^»  jjUm.:>- 
c:a>aJ^  IjûHàjÎ    iiA^ajtil   c:j*Xi  Ijf'^»*^       -îo»!^  (jw«  sUaj^vJÎ^ 

déclaration  écrite  de  votre  main;»  je  iui  rappelai  alors  le 
poëme  en  question.  Dès  que  j'eus  prononcé  ces  paroles,  il 
se  troubla  et  ajouta  :  «  Donne-moi  mon  manuscrit,  — ■  Dou- 
cement, répliquai-je,  vous  ne  l'aurez,  je  le  jure,  que  si 
vous  vous  engagez,  par  de  sérieuses  garanties,  à  ne  me  pour-  . 
suivre  pour  aucun  des  faits  de  mon  administration ,  à  dé- 
chirer ce  rapport  et  à  n'examiner  aucun  de  mes  comptes.  » 
Il  prononça  un  serment  de  nature  à  nie  rassurer  et  déchira 
l'état  rédigé  par  son  ordre  :  en  retour,  je  lui  rendis  sa  copie, 
qu'il  cacha  dans  ses  bottines;  puis  je  me  retirai  et  ne  fus 
plus  inquiété  par  aucune  poursuite.  » 

On  a  réuni  en  volume  la  correspondance  d'Ibrahim,  lils 
d'Abbas  (Souli) ,  et  des  extraits  de  ses  discours  remarquables 
ont  été  recueillis;  nous  en  avons  cité  plusieurs  dans  notre 
Livre  Moyen.  Parmi  les  plus  beaux,  bien  que  tous  soient 
d'une  exquise  perfection ,  nous  choisissons  le  passage  sui- 
vant. «La  révolte  nourrit  d'abord  ses  enfants,  elle  les" al- 
laite du   lait   de  ses  mamelles,  déroule  ses  espérances  de- 


CHAPITHE  CXVII.  241 

^^L_:^  c:^^^.j^    WvM  o^'jiAjM    -liai  yî_5  ^^J  (5^*^^  ij-jl-tJ^li 

Ax:^   <:5^^*-  *«>^^  J-*-lj  iLLtf>^^_5  ^Jcii^j  ii*X=fc.\  AJC^^î^sX^I  ^1 

£-'5»  ï  — ^  <         X  cJ       -«=  '~-  •^ 

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vaut  leur  convoitise  et  leur  inspire  le  goût  de  ses  dangers. 
Puis,  quand  ils  grandissent  libres  et  tranquilles  et  qu'ils  se 
laissent  dresser  sans  crainte,  quand  après  Tallaitement  coiu- 
mencc  le  sevrage,  elle  leur  verse  son  poison,  fail  jaillir  do 
son  sein  du  sang  au  lieu  de  lait,  et  subtituc  le  fiel  à  leurs 
aliments.  Elle  les  précipite  de  leur  asile  sûr  dans  la  captivité, 
et  du  bonheur  dans  les  regrets,  à  travers  la  mort,  la  prison, 
la  licence  et  le  crinu'.  Il  est  rare  que  celui  ([ui  se  jette  avi- 
dement dans  le  brasier  de  la  discorde  et  qui  s'abandonne 
à  ses  erreurs  ne  soit  pas  terrassé  et  étranglé  par  elle,  lorsque 
la  vérité  déjoue  ses  stratagèmes  :  la  discorde  lait  de  lui  une 
terre  aride  dans  ce  monde,  et  Faliment  des  flammes  dans 
la  vie  future,  un  témoignage  de  la  vérité  et  un  argument 
contre  Terreur.  — «  Ce  sera  leur  récompense  en  ce  monde, 
mais  le  châtiment  futur  sera  plus  terrible  (  A.  oran,  v,  37).  Ton 
Dieu  nV'st  pas  un  tyran  pour  ceux  qui  le  servent  [ihid.  xi.i, 
/jG).  » —  iSouli  est  l'auteur  de  belles  poésies;  voici  des  passa- 
ges tirés  de  celles  où,  de  l'aveu  d'un  grand  nond)re  de  litté- 
rateurs, il  n'a  été  surpassé  par  aucun  de  ses  contemporains: 
vu.  iG 


'2^12  LES   PRAIRIES    D'OR. 


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"1^  •■ 


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Nous  possédons  des  chameaux  aux  bosses  énormes;  le  désert  est  trop 
étroit  pour  eux;  leurs  pieds  et  leur  dos  scintillent  (comme  l'éclair). 

Avant  de  verser  notre  sang,  il  faut  les  atteindre;  avant  de  répandre  le 
leur,  il  faut  nous  combattre. 

La  mort  attend  ceux  qui  convoitent  notre  territoire  et  nos  foyers;  mais , 
au  jour  du  malheur,  l'accès  en  est  ouvert  à  tous. 

Et  ces  vers  : 

Mais  quant  au  généreux  Abou  Hicham ,  il  est  fidèle  à  sa  parole  et  pro- 
tégé contre  la  médisance. 

Invisible  tant  que  tu  peux  te  passer  de  lui ,  il  se  montre  à  toi  dès  que  le 
danger  te  menace. 

Et  ceux-ci  : 

Que  Dieu ,  lorsqu'il  rétribue  chacun  selon  ses  oeuvres,  récompense  celui 
qui  est  pour  toi  un  frère  illustre  et  généreux  î 

Quand  je  l'ai  averti  de  son  erreur,  il  semblait  que  je  venais  le  réveiller 
à  l'aurore  du  jour. 

Et  les  suivants  : 


CHAPITHE  ex  VII.  2^3 

s- 

à^:>  u^j — ''  t^b      ^ — ^  «3^;  (j — f^^ 

ybkX_=i,  ^  La  gS   ^j.^         uUI   <Xifc  (J  tl-^ijJ 
yi^ i^^i    cj-   ^^i         l^'ui   ciJ^-^^l    l_i 

Que  m'importent  les  rigueurs  du  sort? je  ne  songe  qu'à  celles  (jui  me 
viennent  de  mes  amis. 

Je  ne  songe  qu"i\  ceux  qui  m'accablent  lorsqu'ils  me  voient  accablé 
par  le  destin. 

Ceux  que  je  me  réservais  (pour  le  mallieur)  et  (jui  se  font  les  auxi- 
liaires du  malbeur. 

P^ii  vain  l'on  me  conseille  de  cherclier  une  sauvegarde  ronire  les 
grandes  disgrâces , 

Je  n'ai  besoin  d'être  protc-gé  que  contre  mes  propres  frères. 

Une  pensée  ([ue  les  friands  rer.iinnt  hicii  de  retenir  est 
celle-ci  : 

La  fortune,  en  le  favorisant,  le  rend  jilus  sage  et  mieux  instruit  de  ses 
caprices, 

Kt  il  semble  qu'au  moment  où  elle  le  comble  de  ses  fa\eurs,  «Ile  lui 
fait  entendre  la  menace  de  ses  sévérités. 

\()ici  lin  aiilic  passage  forl  ioniai(|ual)l(',  on  il  s'ricvc  au- 
dessus  de  tous  ses  rivaux  : 

Heureux  et  bénis  soient  les  jours  du  passé  :  ils  m'ont  coulé  des  larmes 
et  pourtant  je  les  pleure  aujourd'hui. 

it). 


2lik  LES   PRAIRIES  D'OR. 

^[jL—À—J^i    «4^ î  ^IS  (j^  sU 5^o<*5T  UloJb»-  jAla.**o  oiaS" 

Il  en  sera  certainement  de  même  du  présent,  dont  nous  nous  plaignons 
maintenant,  et  que  nous  regretterons,  lorsqu'il  sera  loin  de  nous. 

Et  celui-ci  : 

L'homme  le  plus  digne  de  participer  à  tes  joies  est  celui  qui  a  partagé 
tes  tristesses; 

Quand  de  généreux  voyageurs  se  reposent  dans  la  plaine,  ils  songent  à 
ceux  qui  les  accompagnaient  dans  les  stations  difficiles. 

Comme  les  vers  suivants  : 

Ne  m'accuse  pas  :  car  tu  cherches  la  richesse  et  je  n'aspire  qu'aux  actions 
généreuses. 

Pourrait-on  garder  les  biens  qu'on  a  amassés ,  quand  on  a  goûté  le  plai- 
sir de  donner? 

Et  les  suivants  : 

C'est  un  lion  féroce  quand  on  l'attaque,  un  pbre  bienfaisant  quand  il 
possède  le  pouvoir.  ' 

Sa  richesse  se  révèle  aux  confins  de  la  terre ,  sa  pauvreté  est  ignorée  de 
ses  plus  proches  voisins. 


CHAPITRE   ex VII.  2/15 

owLx-j  ^  <--*~>>*  ij'j  J*^"S?         ^  J..\^  (jl_5  tK«Aj  y^  j\i  (jS 

t-»*>^-j«-il  là_ÀJ5l  J^--^Ji  4^1  (^--*ii ytAiJi  aNIj  !*ktf>  JUj 
ilj  iLij  j  <îi_A_^  4)"^'  Uy^  oot«w  U  j^LâjJî  JovAjiJi  x^A«*iî 

Ibrahim,  fils  d'Abbas  (Souli)  disait  :  «  Il  en  est  des  cour- 
tisans comme  des  voyageurs  qui  gravissent  une  montagne 
et  font  une  chute  :  plus  ils  se  sont  élevés,  plus  leur  mort  est 
'Certaine.  »  Il  revendiquait  comme  son  oncle  maternel  le 
poëtc  Abbas,  fds  d'Abner.  —  Voici  ce  que  raconte  AI)oa  'I- 
Abbas  Ahmed  (  (ils  de  Djàfar,  fils  de  Ilamilan)  lejuge,  d'après 
Suleïman  (fds  de  Hacan,  fils  de  Maklded)  d'après  Haçan  son 
père  :  «  Ibrahim,  (ils  tl'Abbas,  après  avoir  récité  les  vers  sui- 
vants d' Abbas,  lils  d'Abnel"  : 

Il  promet  et  ne  fient  pas-,  on  le  sollicite  et  il  reiuse;  on  le  blâme  et  il 
ne  s'amende  point; 

il  se  plaît  à  me  repousser,  et  pourlani,  s'il  in'inlerdisail  l'caii  fraîche, 
je  n'en  boirais  plus, 

ajoutait:  «  Kn  vérité  la  pensée  ([ui  a  iiispiié  ces  vers  est 
belle,  Texpression  en  est  douce  et  cliarme  l'oieille,  on  en 
trouverait  peu  d'aussi  beaux.  Je  ne  sache  |)as  (|uant  à  moi 
de  paroles  plus  élégantes  dans  leur  sid)tilité,  plus  aisées  dans 


2^6  LES   PRAIRIES   D'OR. 

ij.wLa.XJ)     **.Îw    ^jwo    /v*wii£i\..»v)     Irfo    «kX^vw    (j-«    /wMOJw)    ^jj    tii'^j/O 
S  tXi.   C»i^    U    ^^Xj'   lilAxJ    IvJUrS»  *'AAA^  JjJs  tJ-«  AÏji*ï  IsCw    (j^  L> 


leur  di{IJculté,crun  ton  plus  éloquent  el  plus  juste  que  celles- 
ci.  »  A  quoi  Haçan  répondit  :  «Ton  langage,  je  le  jure,  est 
plus  beau  que  celui  du  poète.  »  —  Parmi  les  vers  les  plus 
estimés  dus  à  Abbas,  fils  d'Alinef ,  on  cite  ceux-ci  : 

Supporle  d'un  ami  les  fautes  ics  plus  graves,  et,  si  tu  souffres  de  ses 
injustices,  dis  :  Moi  seul  je  suis  injuste 

Heureux  qui  peut  s'assoupir  la  nuit  pendant  une  heure  et  goûter  quel- 
que repos:  le  sommeil  est  si  doux  ! 

Ainsi  que  ces  vers  : 

Détourne  volonlairement  ton  cœur  loin  d'elle,  6  Abbas,  sinon  tu 
mourras  du  mal  d'amour. 

Hélas  !  demeurâl-elle  dans  ([uelque  contrée  au  delà  du  Honm,  je  n'au- 
rais pas  d'autre  séjour  que  le  sien. 

Ô  toi  qui,  dans  ton  amoureuse  ardeur,  te  plains  des  longueurs  de  l'ab- 
sence, patience!  tu  retrouveras  peut-être  demain  l'objet  de  ton  amour. 

Va  les  suivants  : 


CHAPITRE   CXVII.  247 

A-xj^  :>1^  ^  _jjûj  <\j^  J*)"*  ^'^  o*'*'^^^  ^yj.i>-  U->«A:i  vîy=?- 

Jj.aj  LmJI^  Li)to 


Je  suis  plus  sobre  de  visites  lorsque  je  vois  ses  dédains  ou  les  sym- 
ptômes qui  les  annoncent. 

fl  ne  nous  repousse  pas,  mais  l'ennui  ([uc  lui  inspire  notre  amitié  le 
tient  à  l'écart. 

Je  tiens  (l'Abou  Khalifah  Fadi  (fils  de  Iloubab)  Djoinalii, 
d'après  Riachi,  l'anecdote  qui  suit.  Plusieurs  habitants  de 
Basrali  racontent  qu'étant  partis  de  leur  pays  pour  Caire  le 
pèlerina<j(',  ils  rencontrèrent  en  route  un  jeune  homme  qui, 
debout  sur  le  bord  du  chemin ,  leur  criait  :  «  Passants,  y  a-t-il 
parmi  vous  quekjue  habitant  de  liasrah?»  Nous  nous  diri- 
geâmes vers  lui  (racontent  ces  pèlerins)  pour  savoir  ce  qu'il 
voulait.  «Mon  maître  est  à  l'agonie,  nous  dilil,  et  il  désire 
vous  confier  ses  volontés  dernières.  «  Nous  le  suivîmes;  à 
quelque  distance  de  la  roule,  un  homme  gisait  étendu  sous 
un  arbie;  il  ne  pouvait  parler.  Nous  nous  assîmes  autour  de 
lui;  il  s'aperçut  de  notre  présence  et  leva  les  yeux  sur  nous, 
mais  avec  peine,  tant  sa  faiblesse  était  grande.  Puis  il  mur- 
mura ces  vers  : 


248  LES   PRAiniES   D'OR. 

<Xî/*J  ^■*^**^   t}>*>j  ^A^JV'^  45^j|  j*^Ài  i^*J  t^*>5  a*u^Jî  ^^î 

<îU3:>  (j^  U^  LfcN*  xAs.  «XaoJî  UaJjJ^  sUàS^  »UA,*«^  ^^^Cj». 
.  .  *^ 

liëlas!  lin  étranger  éloigné  de  sa  patrie  pleure  isolé  sur  sa  triste  des- 
tinée ; 

Plus  ses  larmes  coulent  aboncbntes,  pins  la  doulein-  augmente  dans 
son  corps. 

Il  lomba  ensuite  clans  un  long  évanouissement;  tandis  que 
nous  demeurions  assis  autour  de  lui,  un  oiseau  vint  se  per- 
cher au  sommet  de  l'arbre  et  commença  à  chanter.  Le  mou- 
rant rouviit  les  yeux,  écouta  le  chant  de  l'oiseau  et  pro- 
nonça ces  vers  : 

La  souffrance  de  mon  cœur  redouble  au  chant  de  cet  oiseau  qui  se  la- 
mente, dans  le  feuillage  ; 

Sa  douleur  est  la  mienne  et  chacun  de  nous  pleure  un  ami  sincère. 

11  poussa  alors  un  grand  soupir  et  rendit  l'àme;  nous  ne 
quittâmes  pas  le  corps  avant  de  l'avoir  lavé  et  enseveli,  et 
d'avoir  récité  la  prière  des  funérailles.  Quand  nous  l'eûmes 
enterré,  nous  demandâmes  au  jeune  homme  le  nom  de  son 
maître;  il  nous  répondit:  «  Abbas,  fils  d'Ahnef.  "  Le  récit 


CHAPITRE  ex VII.  249 

^  J^_>lJIÎ  ^_j  (j^Ajlv_5  (^jvJ'^S^  (^AÀj'i  A.ÀAW  ^_5       (jvxjU^ 

<XjS^  ^£^;a-jj  8v^i  (j.*  /jO  L«5  S)>>^à*-  t^  Wj'  *^^  (^^jl^J 
(jV*J^5j  **«*j'  iCÀ.w  liy  diii^j jjiAJi  ^:^  *'^J>J"^.?  oLj"       ^    ciUS 

(_Js.JC_f-V.Jji    t}-*-i»>.    «XJOvJij  Cl^U^iiJS?    CJjl»*iî      Jt-O^iL?    /«(~A3)^«J)_5 

qui  précède  m'a  été  transmis  (aussi  )  par  Abou  Ishak  Zudjadji , 
le  grammairien,  d'après  Abou  U-Abbas  Moberred,  d'après 
Mazeni,  ol  ce  dernier  déclare  qu'il  l'avait  reçu,  tel  (jue  nous 
l'avons  cité,  de  plusieurs  habitants  de  Basrab. 

Abou  Tawr  Ibrahim  (fdsde  Kbaled)  Kelbi  mourut  en  2/io. 
—  En  l'année  23'i,  ou,  selon  une  autre  version,  en  289, 
Motewekkil  exila  le  poète  Ali,  fils  de  Djehni,  dans  le  Kho- 
rarân.  Nous  avons  pailé  (ailleuis)  de  ce  personnage;  nous 
avons  raconté  qu'à  soti  retour  en  Irak,  lorsqu'il  s'approchait 
de  la  iVontière  (en  2/19  de  l'hégire),  se  trouvant  dans  le  voi- 
sinage d'Alep,  dans  une  localité  nommée  Kliachchal ,  qui  dé- 
pend de  Kinnasrîn  et  d'El-Awaçim,  il  lut  altaqué  par  une 
troupe  de  cavaliers  de  la  tribu  de  Kelb,  qui  le  mirent  à  mort. 
Dans  son  agonie,  il  prononça  les  vers  ([ue  voici  : 

Est-ce  qu'une  nuit  noiivclh;  s'iijoiite  à  la  nuit,  <iu  l'auiorc  a-tclle  dis- 
paru comme  un  torrent  (jui  s'écoule  ? 


250  LES  PRAIRIES  D'OR 

j.x<i*Jî    (_^  KiXXJi^  l-itjjbid^  ^^j,À*»*JCJî'  Sjl^lil^  t-Jllo  jiî   Qj  "^ 
î*X_^  (j-^  Oi— ^— w  '*-^J  l.À-fl'Xj»  *Xi_j   -»!5mJÎ    wVj.^  ibUj^l   (-)tX£ 

wsUJi    ^_j.Xx3î  J.ÀAS-    ^^J    *X^   ^    ^^  J^*^  t-*.jl*    (jO   t^Jj     0jl 

K_li_^  lj<X_À_£i  ,i^v_^lî         Sk>~À-j  Lois  La-*  ii-«u«^ 

f»X. 1^    aX Jo,is\     tKj  ^àJÎ  J_jj>  J.A^  A„g.JCi*As3 

^ffi  l-À_Jj  ^JLi  J^A-J         U j  *X j' ^^  O.AAAW  U  1  i>  I 

Je  pense  à  ceux  qui  habitent  près  du  Dodjeïl.  Mais  hélas  que  je  suis 
loin  du  Dodjeïl  ! 

Ce  même  Ali  (fils  de  Djehm)  Sami,  malgré  son  aversion 
pour  le  Prince  des  Croyants  Ali,  fils  d'Abou  Taiib,  et  quoi- 
qu'il fît  profession  de  sunnisme,  était  doué  d'un  vrai  tempé- 
rament de  poète,  plein  de  verve,  de  douceur  de  slyle,  et 
d'abondance.  Nous  avons  parlé,  dans  un  autre  chapitre,  des 
attaques  dont  sa  généalogie  fut  l'objet,  et  des  critiques  à 
l'adresse  de  la  postérité  de  Samah  (fils  de  Lowayi,  lils  de 
Galib).  Tels  sont  les  vers  suivants  qui  ont  pour  auteur  le 
poète  Ali  (fils  de  Mohammed,  fils  de  Djâfar)  Alewi  : 

Samah  fut  un  des  noires,  mais  quant  h  ses  fils  leur  descendance  est 
obscure  à  nos  yeux. 

Et  quand  ils  nous  apportent  des  listes  2;énéalogiqups  pareilles  au  rêve 
d'un  dormeur, 

Je  leur  réponds  avec  ces  mots  du  Prophète,  dont  toutes  les  paroles  sont 
empreintes  de  sagesse  : 

«Lorsqu'on  t'interroge  cl  que  lu  ne  sais  connnent  répondre,  dis  :  Dieu 
seul  sait  tout.  « 


CHAPITRE  CXVir.  251 

oIjLo   *>w/iit    j^i    M.\J>    ^J    (^ =*-    <i5    O — *->-^    '•^^    à^  J~'\-^ 


Si  nous  citons  ici  ce  fragment,  que  nous  avions  di;jà  donné 
dans  un  autre  passage  (cf.  t.  II,  chap.  xxiii),  c'est  que  nous 
avons  cru  devoir  faire  mention  d'Ali,  fds  de  Djehm  dans  le 
chapitre  relatif  à  Motevvekkil ,  et  que,  parlant  de  ses  vers, 
nous  devions  mentionner  également  la  réponse  que  Alewi 
leur  adressa.  Voici  maintenant  en  quels  termes  Ali,  (ils  de 
Djehm,  répondit  à  son  adversaire  Ali  (fils de  Mohammed,  fils 
de  Djàfar)  Alewi  : 

Tu  ne  m'as  jamais  fait  goûter  la  saveur  de  l'iinparlialiti^  et  lu  m'as, 
au  contraire,  traité  avec  la  plus  violente  injustice. 

Tu  as  abandonne  sciemment  la  foi  jurée  et  lu  as  dépassé  toute  mesure. 

Mais  (|uanl  à  moi,  depuis  que  j'ai  reconnu  les  droits  de  la  famille  de 
Hachem  ,  fils  d'Abd  Mcnaf, 

Je  ne  sais  plus  assouvir  n)a  colère  a  l'aidi-  de  rimes  ni  en  simple 
prose. 

Une  àmc  conmie  la  niiennt^  repousse  toute  bassesse,  et  les  hommes 
d'une  naissance  illustre  (les  cliéril's)  ne.se  l'ont  pas  la  guerre. 


252  LES   PRAIRIES  D'OR. 

<Lij^S  l^Aj  ^  yî  J^k-^aj  ^         ïs^y-j<J^  L_dijL^5   ijUJî^j 

La  poésie  qu'il  composa  en  prison  est  bien  connue;  elle 
est  pleine  d'une  inspiration  qui  n'a  pas  été  surpassée;  tels 
sont  les  vers  : 

On  me  repi'oche  d'êtj-e  piisonnier,  je  réponds  :  La  captivité  ne  nie 
fait  aucun  tort;  une  lame  finement  trempée  n'est-elle  pas  mise  au 
fourreau  ? 

Ne  sais-tu  pas  que  le  lion  reste  fièrement  dans  son  antre,  tandis  que 
le  vil  troupeau  des  carnassiers  erre  en  liberté? 

Si  le  soleil  ne  se  dérobait  à  tes  regards,  l'arkad  (deux  étoiles  de  la 
petite  Ourse)  ne  t'éclairerail  pas  de  ses  rayons; 

Et- le  feu,  enseveli  dans  les  veines  de  la  pierre,  ne  brillerait  point,  si 
le  briquet  ne  l'eu  faisait  jaillir. 

La  prison,  si  le  crime  cl  la  honte  ne  t'y  ont  pas  conduit,  est  la  plus 
douce  des  demeures  et  la  plus  aimable; 

Elle  donne  une  nouvelle  noblesse  à  rbonimc  généreux;  il  y  reçoit  des 
visites  qu'il  ne  i-end  pas;  on  ie  sert  avec  empressement; 

Et  le  moindre  avantage  de  la  captivité  est  de  t'épargner  la  honte  d'être 
éronduit  j)ar  des  esclaves. 

Lfne  autre  pensée  non  moins  belle  est  celle-ci  : 


CHAPITRE   CXVU.  253 

JLiLj  A_À_^  ^-^-s.L?  d^-^l^      *3-*'j  (Sy^^  (J^^  ^  cl^-*^^ 

-^j^"^— «  L-<_*_^ij    o»Jj-j^  -^XJà    c.Loul    ^w-C  cii^M^r». 

Ô  mes  deux  amis,  que  de  douceur  dans  l'amour  cl  aussi  que  d'amer- 
tume! j'ai  appris  à  connaître  ce  qu'il  a  de  doux  et  d'amer. 

Par  l'amitié  qui  nous  unit,  dites-moi  s'il  y  a  quelque  chose  de  plus 
touchant  qu'une  plainte,  de  plus  cruel  qu'une  séparation, 

De  plus  éloquent  dans  l'expression  de  ses  sentiments  secrets  que  les 
yeux  d'un  amant,  surtout  s'ils  sont  baif^nés  de  larmes? 

Voici  un  autre  passage  choisi  dans  ses  poésies: 

Elle  relève  son  voile  loin  de  moi,  la  cruelle,  et  s'éloigne  en  lépaiulanl 
des  pleurs. 

Le  plus  coiqiable  de  ses  mensonges  c'est  de,  nier  la  ruplure  d'un  ser- 
ment qu'elle  a  violé  ,  et  (juel  est  le  serment  ([ui  n'est  pas  violé  ? 

Kllc  feint  l'ignorance  en  regardant  mon  front  et  me  dit  :  «Sont-ce  des 
ilicvcux  blancs  ondes  réseaux  de  perles?» 

Ma  douleur  n'est  pas  de  ces  douleuis  f|ui  admellenl  la  coiisolalion  (>l 
la  résignation  ; 

Car  l'événcmenl  qui  a  blanchi  mes  clieveux  eu  uue  seule  uiiil  est  une 
chose  grave. 

Il  n'va  en  moi,  même  si  je  dois  être  sacrifié',  (prime  soumission  pieuse 
et  un  cœur  pur. 


254  LES   PRAIRIES   D'OR. 

J.AàÀAJI  J.>pt  ^y^à^î  J^5_5        i^^-A-:?:  J^^4j-y^]  aaSUj 

j|«X_A_*iit    AJ«X_J  l^A-Ji  O;         La-XS^    t^^a-isi  ^L*wJS  (JojIî 


Citons  aussi  ce  passage  excellent  : 

Mon  âme  supporte  le  fardeau  que  tu  lui  imposes;  la  destinée  a  des 
alternatives  de  violence  et  de  douceur. 

La  patience,  quand  elle  ne  se  dément  pas,  a  de  bons  résultats,  et  l,i 
bonté  est  la  plus  noble  des  qualités  humaines. 

Ce  n'est  pas  une  honte  pour  l'homme  de  perdre  sa  fortune,  la  seule 
honte  pour  lui  e.st  de  perdre  sa  force  d'âme. 

La  richesse,  si  tu  la  laisses  à  tes  héritiers,  n'est  que  déception,  elle  est 
un  bien  réel  si  tu  la  dépenses  généreusement. 

Et  ces  vers,  non  moins  remarquables,  d'une  poésie  clans 
laquelle  il  se  disculpait  auprès  de  Motcwekkil  : 

La  honte  de  la  demande  et  celle  de  l'excuse  créent  une  siluation  diffi- 
cile pour  de  nobles  cœurs. 

Et  ce  n'est  pas  un  jeu  poiu-  l'homme  ([ue  de  suivre  cette  voie,  mais 
ainsi  l'ont  voulu  les  destinées. 

Ucnds  la  faveur  à  un  soUiciteiu-  qui  s'humilie,  h  un  coupable  qui  avoue 
sa  faute  et  qui  subit  la  honte  de  l'excuse. 

Si  tu  lui  pardonnes  généreusement,  tu  seras  le  plus  grand  |.armi  ceux 
^ui  ont  absous  de  grands  coupables; 


CHAPITRE   CXVII.  255 

Si  tu  le  cliâlies.tu  romiais  mieux  que  personne  (la  loi  do)  Dieu,  et 
venant  de  toi,  le.  cliâliment  n'est  plus  une  honte. 

On  admire  aussi  les  vers  suivants  qu'il  composa  loisqu'on 
l'enchaînait  : 

Je  lui  dis  lorsqu'elle  répandait  des  torrents  de  larmes  et  que  son  rœur 
fut  embrasf^  par  les  feux  de  l'amour  : 

Ne  t'afflige  pas  à  la  vue  de  ces  chaînes,  pour  des  hommes  généreux  les 
chaînes  sont  une  parure  (littéralement  des  amicaux  qu'on  porte  à  la 
cheville). 

La  supériorité  de  son  style  était  telle  que  peu  de  personnes 
purent  échapper  à  ses  traits.  —  Ce  même  poëte  s'(''tant 
aliéné  l'amitié  de  Mohammed,  fds  d'Abd  Aiiali ,  eul  recours 
à  l'intervention  de  Waeif  le  Turc,  qui  réussit  à  les  réconcilier; 
mais  Warif,  l\  son  tour,  s'étant  fiiclié  contre  lui,  le  po<'le  em- 
ploya, pour  le  fléchir,  Mohamme<l,  lils  d'Abd  Allaii,  auquel 
il  écrivit  : 

Loiiatif^es  et  actionsdc  grâcesà  Dieu,  qui  tient  nos  cœurs  en  tic  ses  mains! 
L'I'ïmir  a  été  mon  intercesseur  auprès  d(?  celui  qui  rintcrri'-dait  en  ma 
faveur. 


256  LES   PRAIRIES  D'OR. 

8w_$i  Là_^4X..]s  U  1-giÀ^  bjjci-î  »^*Lui  Ju^i_j  5)ibjVA*ii  2y^ 

_À_»  iijils».  ^j^i>  1-i-A.Jj        (^:>Lfii)l  (^   A^^\  y6  ^3 


Ali,  fils  de  Djehm,  a  laissé  des  poésies  d'une  rare  beauté 
et  des  sentences  qui  sont  devenues  populaires;  nous  en 
avons  cité  quelques-unes  et  nous  nous  bornerons  à  ce  choix. 
Plusieurs  poètes  le  chantèrent  quand  il  eut  été  tué,  entre 
autres  Abou  Saèd,  dans  les  vers  que  voici  : 

Répands  des  larmes,  fuis  le  sommeil  et  prends  garde  que  le  trésor  de 
ta  douleur  ne  s'égare. 

Dis  :  Celui  qui  était  le  refuge  des  fils  de  Lowayi  gît  inanimé  en  Syrie. 

Je  vous  plains,  enfants  de  Djelim  ben  Bedr,  le  malheur  qui  vous  frappe 
est  terrible; 

Et  le  trépas  lui-même,  .s'il  connaissait  voire  disgrâce,  pleurerait  amè- 
rement. 

La  terre  recouvre  celui  qui  protégea  les  veuves  et  les  orphelins,  celui 
qui  faisait  régner  un  printemps  perpétuel. 

Un  brave  qui  perçait  de  flèches  ses  ennemis,  un  lion  qui  détournait  les 
coups  du  malheur. 

En  2/1 3  de  Thégii^e,  Motewekkil  partit  de  Damas  pour  se 
rendre  à  Sorra-nien-râ;  entre  son  dépari  de  cette  dernière 


CHAPITRE  CXVll.  257 

y^m  wAflJb   0^-*J_j  iilsyijî  jjijî^  i\jo*xii  (^  L>^y^.  ^^--i*-«><XJ 

ville  et  son  retour,  il  s'écoula  trois  mois  et  sept  jours;  ce 
départ  inspira  à  Yézid  Mohallebi  une  longue  poésie  dont 
nous  ne  citerons  que  ce  passage  : 

Jp  crois  que  la  Syrie  va  se  réjouir  de  la  douleur  de  l'Irak  depuis  que 
l'Imam  a  résolu  de  s'en  éloigner  ; 

Car  si  tu  quittes  (ô  prince)  l'Irak  et  ses  habitants,  r'est  que  la  plus 
belle  femme  vieillit  par  le  divorce. 

Lorsque  leKhalifearrivaà  Damas,  il  ne  voulut  pas  habiter 
la  ville  même,  à  cause  de  l'atmosphère  lourde  et  des  vapeurs 
malsaines  que  le  voisinage  du  Gawtah  et  de  ses  eaux  répan- 
daient sur  Damas.  En  conséquence,  il  établit  sa  résidence 
dans  ie  Châteaa  de  Mamoun  entre  Dareïa  et  Damas  à  une 
heure  de  cette  dernière  ville;  ce  château,  silué  sur  uik^  hau- 
teur d'où  Ton  domine  la  ville  et  la  plus  grande  partie  du 
Gawtah,  a  conservé  jusqu'à  la  présente  année  332  de  l'hé- 
gire le  nom  de  Kasr  plMamoiin. 

Sàid  ben  Nakis  raconte  le  l'ait  suivant  :  ■<  Je  me  tenais,  dit- 
il,  devant  !VIote\vekkil,daDS  sa  tente,  près  de  Damas,  lorsque 
vu.  17 


258  LES  PRAIRIES  D'Oil. 

aH]   <X.^a^  w«li  S4>xjij   ^^iJI   (jli  l«X^j   w«  (j%JL«j.iî   wA^Î   U  Jlï 

l'armée  se  réunit  tumultueusement  et  réclama  sa  solde  avec 
des  cris  séditieux;  bientôt  les  sabres  sortirent  du  fourreau 
et  les  ilèches  commencèrent  à  voler.  Je  m'avançai  pour 
les  voir  passer  au-dessus  de  la  tente,  lorsque,  le  Khalife 
m'appelant  :  «  Abou  Sâid,  me  dit-il,  va  chercher  Ridja 
Hadari.  »  J'obéis;  le  prince  lui  demanda  :  «Ridja,  connais- 
tu  la  cause  de  cette  manifestation,  et  que  penses-tu  qu'il  y 
ait  à  faire .»^  —  Prince  des  Croyants,  répondit  celui-ci,  voilà 
bien  ce  que  je  redoutais  pour  vous  dans  ce  voyage,  aussi  vous 
âi-je  donné  les  conseils  que  vous  savez  pour  que  vous  le  diffé- 
riez. »  Le  Khalife,  se  penchant  de  son  côté,  reprit  :  «  Laisse- 
là  le  passé  et  communique-moi  maintenant  ce  que  la  pru- 
dence te  suggère.  —  Sire,  faites  distribuer  la  solde.  —  Voici 
ce  qu'ils  réclament,  reprit  le  prince,  mais  le  but  de  leur  ré- 
volte je  l'ignoro  toujours.  —  l^rince  des  Croyants,  donnez 
d'abord  cet  ordre,  puis  nous  aviserons.  »  Motewekkil ordonna 
à  Obeïd  Allah,  fils  de  Yahya,  de  payer  les  troupes;  Une  fois 
l'argent  aj)poité  et  la  distribution  conmiencée,  Ridja  rêve- 


CHAPITRl-:  ex  Vif.  259 

J-aJo-Jî  ^j-*^-:»  '^f^p,\  j..j^\  L  yi^î^-«  JUi  ^U-j  J<iw:i 

Ja_«-ll  ^jl  4^w-»-  \y^==^ji  i4-sia.£^i|  tjJjù]  J^i   dUs  J^;iÀ3 
j— ft— *'   J^"-*J  (j5  ^J^   ^   (jî   ^•^-:Si  (jV>*^  f^^'   J^^5   «-^^^ 

liant  chez  le  Khalile  lui  dit  :  «  Maintenant,  Sire,  faites  battre 
le  tambour  et  annoncer  le  départ  pour  l'Irak,  vos  soldats  ne 
voudront  même  pas  de  l'argent  qui  leur  est  dû.  »  En  effet, 
le  prince  ayant  donné  ses  ordres  en  consé{|ucnce,les  hommes 
laissant  là  leur  paye,  se  mirent  en  route  avec  un  tel  em- 
pressement, que  les  payeurs  s  attachaient  à  eux  pour  leur 
donner  leur  argent  et  ne  |)ouvaient  le  leur  faire  accepter.  » 
8âïd  continue  en  ces  termes:  «  Les  Turcs  avaient  songé  à 
tuer  Motevvekkil  pendant  son  st-jour  à  Damas;  mais,  la  vigi- 
lance de  Boga  l'aîné  dt\jouant  leurs  projets,  ils  travaillèreni 
d'abord  à  l'éloigner  du  Khalife.  A  cet  elfet,  ilsjelèrenl  dans 
la  tente  de  Motevvekkil  des  billets  poitant  que  Uoga  Iramail 
la  mort  du  Prince  des  Croyants,  et  que  le  signal  convenu 
était  celui-ci  :  Hoga  devait,  un  certain  jour,  se  nictire  a  la 
tête  de  ses  troupes,  cavalerie  et  infanterie,  et  cerner  toutes 
les  issues  du  canij»;  puis,  prenant  avec  lui  (pici(|iics  pages 
d'origine  étrangri-e,  ils  iraient  surprendre  le  prince  et  acccun- 
plir  leur  crime.  Viotewekkil  lui  ces  billets  et  fut  épouvanté 
des  révélations  (pi'ils  renlerniaifnt.  Prolondément  ému  des 


260  LES  PUAllUES  D'OR. 

4^     J.J^3      W^^M     J^Xi»-      *X.i      Ç.lï).jî      4-AiXj      (_5<>Ji      (ji      (JVÀ-^Jiil   ^A^l 

(J-»    oij-is^S     Jî    ^-y^-A-S»    li    tX'*'=i    V!5^    CJ-*    *^    »Uw    «^i-AXJ    cxij 

fi 

menées  de  Boga,  il  s'en  plaignit  à  Fath  (fils  de  Khakan), 
lui  révéla  le  complot  que  Boga  avait  osé  ourdir  et  prit 
conseil  de  Fath.  «  Prince  des  Croyants,  lui  répondit  ce  con- 
fident, celui  qui  a  écrit  la  dénonciation  a  fourni  les  preuves 
du  complot  et  désigné  expressément  le  moment  où  il  doit 
éclater;  c'est  lorsque  Boga,  montant  à  cheval  à  la  tête  de 
ses  troupes,  se  dirigera  aux  extrémités  du  camp  et  en  fermera 
les  issues;  c'est  alors  que  la  vérité  se  fera  jour.  Je  vous  con- 
seille donc  de  garder  le  silence  jusque-là,  si  le  signal  en 
question  se  réalise,  nous  aviserons  à  ce  qu'il  faudra  faire; 
si,  au  contraire,  la  dénonciation  est  mensongère,  nous  en 
rendrons  grâces  à  Dieu.  »  Cependant  les  lettres  continuaient 
à  se  répandre  sous  Ibrme  d'avertissement  et  ceux  qui  \ek 
écrivaient  se  disaient  obligés  par  le  serment  qu'ils  avaient 
prêté  au  Khalife  de  lui  être  dévoués  en  toute' sincérité.  Quand 
ils  surent  que  le  Khalife  était  instruit  des  faits  qu'ils  lui 
avaient  révélés  el  que  leur  dénonciation  était  solidement 
établie  dans  son  esprit,  ils  écrivirent  el  jetèrent  dans  la  tente 
de  Boga  des  billets  portant  les  indications  suivantes  :  <i  Un 


CHAPITRE  GXVII.  261 

o»j_5  Ifco  iUxXil  aakLj».  jj  «x>5_^jJi^  <5»-*ii  i*^4J  ^^^  ^r^ 

t- 
«XjJil     oJI^  1^3    dUi    J^S    _*^l    (jw«   AjlXê   ^^    (jl<  U    ^   Ur- 

certain  nombre  de  pages  et  de  Turcs  ont  résolu  d'assassiner 
le  Khalife  dans  son  camp;  ils  ont  préparé  leur  plan  d'un 
commun  accord  et  sont  convenus  d'assaillir  le  ])riuce  en  ve- 
nant par  telle  et  telle  direction.  Au  nom  de  Dieu,  soyez  sur 
vos  gardes  dans  l'intérêt  du  Prince  des  Croyants  et  veillez 
sur  lui  pendant  telle  nuit  dans  les  directions  iudirpiées; 
garde/.-les  vous-même  avec  des  hommes  sûrs.  C'est  un  con- 
seil que  vous  donnent  des  amis  sincères.  "  Plusieurs  billets 
se  succédèrent  ainsi,  rédigés  en  ce  sens  et  recommandanlde 
veillera  la  sécurité  du  Khalife.  Boga  en  prit  connaissance, 
et,  voyant  ({u'ils  se  renouvelaient  sans  inteiruplion,  il  com- 
mença à  craindre;  ([iw.  c(;s  indicaliuiis  ne  lussent  vraies, 
quand  il  les  rapprocha  de  ce  (pii  s'était  passé  précédemment. 
Aussi  la  nuit  indiquée  étant  arrivée,  il  réunit  ses  troupes 
les  fit  monter  à  cheval  en  tenue  de  guerre  et  les  conduisit 
sur  les  points  désignés,  qu'il  occupa  et  garda  en  coupant 
toute  connnunicalion  avec  Molewekkil.  Ce  prince  lut  informé 
de  ces  dispositions;  convaincu  que  r.o  (pi'on  lui  avait  écrit 


262  LES  PKA1HIE8  D'Oil. 

OJ^  tJ-*  '^■'^   (J^  ^   ^^'^-^^ïp^J   ^A^ail   Î4Xi^  iil<X^ïi   (ji  o^-jÎjj 

Liy    Jb  *X_A._=i    C:*.!jf    ^i     <JÎ     di.)i     (t     ^A:il    li€V-*-«    «>*'=»-I_5    <P 

était  la  vérité,  il  s'attendit  à  être  assailli  et  égorgé;  il  passa 
la  nuit  entière  sans  manger  ni  boire,  et  demeura  ainsi  jus- 
qu'au matin,  gardé  par  Boga,  mais  convaincu,  tout  au 
contraire,  que  celui-ci  en  voulait  à  sa  vie.  Dominé  par 
ses  soupçons  et  effrayé  des  projets  qu'il  lui  prêtait,  il  lui  dit, 
quand  il  se  disposait  à  quitter  Damas  :  «Boga,  je  ne  suis 
pas  satisfait  du  poste  cjue  tu  occupes  auprès  de  moi;  je 
te  donne  donc  le  gouvernement  de  ce  pays  en  te  confir- 
mant la  jouissance  de  tout  ce  que  tu  as  déjà  en  pensions, 
revenus  fonciers,  cadeaux,  subsides  et  autres  apanages.  — 
Sire,  répondit  Boga,  je  suis  votre  esclave,  j'obéirai  à  vos 
ordres,  commandez  selon  votre  bon  plaisir,  d  Le  Khalife  le 
laissa  donc  en  Syrie  et  s'éloigna;  de  la  sorte  les  affranchis 
(Turcs)  purent  préparer  leurs  pièges  à  son  insu,  et  ni  leKha- 
Hfe  ni  Boga  ne  furent  instruits  de  leurs  Tnachinalions,  jus- 
qu'à l'heure  où  elles  eiiient  un  dénouement. 

Sâid,  fils  de  Nakis,  poursuit  ainsi  son  récit  :  «Boga  le 
jeune,  ayant  résolu  la  mort  de  Motewckkil,  fit  venir  Baguir 
le  Turc.  Cri  homme,  qu'il  s'était  attaché  et  dont  il  s'était 


CHAPITRE  CXVII.  2fi3 

AjVjwI   ,^^i.=.-   oXi  U  J  JJii  yû  v.jIaS'I^-  ocii   Jls  ^aj   dUÀi 

^J<w,U  J^ji-:>  1^3  JJj>  jj^  aXJI  jJjuî  *)sJ>  Jlij  "^  jl-*àj  i  *X-si' 

assuré  le  dévouement  en  faisant  briller  devant  ses  yeux  les 
plus  magnifiques  récompenses,  était  d'une  audace  extrême 
et  prêt  k  affronter  tous  les  dangers.  «  Baguir,  lui  dilBoga,  tu 
connais  ma  sympathie  p(»ur  toi,  tu  sais  que  je  t'ai  placé  au 
premier  rang  en  te  préférant  aux  autres  et  que  je  t'ai  comblé 
de  faveurs;  je  suis  donc  en  droit  d'allendre  de  toi  une  obéis- 
sance aveugle  et  ui\  dévouement  absolu.  J'ai  un  ordre  à  te  don- 
ner; mais  dis-moi  d'abord  si  ton  cœur  sera  disposé  à  m'obéir. 

—  Vous  savez  ce  que  \aut  ce  cœur,  réjmndil  Tollicier,  faites- 
moi  connaître  vos  désirs  afin  que  je  les  exécute.  —  Boga 
reprit  :  «  Mon  fils  Fiiris  met  le  désordre  dans  mon  gouver- 
nement, il  a  juré  ma  i)erte  et  veut  répandre  mon  sang,  j'en 
ai  la  preuve  certaine.  —  Eh  bien,  cpiel  esl  votre  dessein?  — 
Le  voici  :  Paris  viendra  demain  clie/.  moi;  cotnenons  du 
signal  suivant  :  je  déposerai  mon  bonnet  a  I(M  le;  silùt  ([ue 
tu  verras  ce  geste,  donne-lui  la  ninii.  —  (.'esl  bien,  répli- 
qua le  'j'urc,  mais  je  crains  (pie  vos  inlenlions  ne  changtînt 
ou  que  vous  ne  conceviez  plus  tard  de  la  haine  contre  moi. 

—  Je  prends  Dieu  à  témoin  (pu;  tu  n'as  rien  à  craindre ,  »  ré- 


264  LES  PRAIKJES  D'OR. 

^   A.^-.!    Ij\    ^-«-J    tfb"^    '-!>"    t^^    CJjUiJÎ     »_XJ>_5./0    ^^33    V.«1j    yAÔ^»- 

jUi-i)  ^^j  ^jo<Xj  Aji  t^*XÀii  ^  «Xi  oU^aj  3!  Jtj  aKjwI 
Là_a_à_A_jj  UXiJij  yl  ^^  J^  AJI^  *«^  cMj  *^*  Uil^  ^Ij 
.î^lj  I*K-iù  J^i!  Jlï  A_j  J^-^^J  yl  «X^"  liU  Jlïjij^ilL  .^yUj_5 

pondit  Bof^a.  Le  lendemain,  à  l'arrivée  de  Paris,  Baguir 
était  là  prêt  à  frapper  et  épiant  du  regard  le  moment  où  son 
maître  poserait  son  bonnet  à  terre;  mais  voyant  qu'il  n'en 
faisait  rien,  et  attribuant  cela  à  un  oubli,  il  lui  fit  signe  de 
l'œil  de  donner  le  signal;  Boga  lui  répondit  par  un  refus: 
le  signal  ne  fut  donc  pas  donné.  Faris  s'étant  éloigné,  Boga 
dit  à  son  émissaire  :  «  J'ai  réfléchi  ;  le  coupal)le  est  bien  jeune, 
il  est  mon  fils  et  j'ai  voulu  fépargner  pour  cette  (ois.  »  — 
Baguir  répondit  :  «  J'ai  entendu  et  j'obéis  ;  vous  êtes  le  maître, 
ce  que  vous  avez  décidé  et  résolu  à  son  égard  est  assurément 
le  meilleur  parti.  »  Boga  continua  ainsi  :  «  Il  s'agit  maintenant 
d'une  chose  plus  grave,  plus  importante;  dis-moi  quelle  part 
tu  veux  y  prendre.  —  Faites-moi  connaître  vos  désirs  et  ils 
seront  accomplis.  —  11  s'agit  de  mon  frère  Waçif,  reprit 
Boga;  il  est  avéré  pour  moi  qu'il  complote  contre  moi  et  mes 
amis;  que,  fatigué  du  rang  que  nous  occupons,  il  espère 
nous  tuer,  nous  anéantir  et  rester  seul  maître  du  pouvoir. 
—  Qu'ordonnez-vous  à  son  égard  ."^  —  Voici  ce  que  tu  feras  : 
mon  frère  viendra  demain  chez  moi;  quand  tu  me  verras 


CHAPITRE  CXVII.  265 

^^»  ^j_5-^-J    t>«^^-îi   (J-^î   (jj-*  J>ji   (ji   A-«>Xxîlî  )<Xp  l^i    WLA2J 

(j-»^-A.ji  iCi>-U».  c::j^-kia&-  iXj^^L  U  JUj  Aj  lft:s  a-j  **>s>*X^ 
<_^  Aj|   ^»XÀfr  ^   *X3j->nJCm   itXiû  JUi  aSooI   ^5v-s».  c^^^i  U 

descendre  du  moçalla  (estrade  couverte  d'un  tapis  où  se  lait 
la  prière)  où  il  aura  pris  place  à  côté  de  moi,  ce  sera  Je 
signal,  tu  te  jetteras  sui'  lui  l'épée  à  la  main  et  tu  le  tueras. 
—  C'est  bien,  »  répondit  le  Turc.  En  effet,  lorsque  Waçif" 
se  présenta  chez  son  frère,  Baguir  était  là  tout  prêt  à  agir; 
mais  il  attendit  vainement  le  signe  convenu,  jusqu'au  mo- 
ment où  Waçif  se  leva  et  partit.  «  Baguir,  lui  dit  alors  Roga, 
j'ai  léfléclii  (pi'il  élait  mon  frère,  qu'une  alliance  et  des  ser- 
ments nous  liaient  l'un  à  l'autre;  jr.  n'ai  donc  pas  osé  accom- 
plir ce  que  j'avais  médité.  »  Boga  récompensa  son  serviteur 
en  cadeaux  et  en  argenl  cl  laissa  passer  un  temps  assez 
long  sans  lui  parler  de  rien;  puis  il  le  rappela  et  lui  tlit  : 
«Il  se  présente  aujourd'hui,  ô  Baguir,  une  affaire  plus  sé- 
rieuse encore  que  celle  dont  je  t'ai  <'nlrelenu  précédemment. 
Ton  cœur  est-il  résolu  ?  —  Mon  cœur,  répondit  le  Turc,  est 
tel  que  vous  le  désirez;  parlez  et  j'obéis.  -  Boga  reprit  ainsi  : 
«J'ai  la  preuve  certaine  (|ue  Mountasir  (fils  d(;  Mot(;wekkil  1 
prépare  un  complot  contre  moi  et  contie  d'autres  per- 
sonnes :  il  veut  notre  mortel  je  veux  lu  sienne.  Te  sens-tu 


266  LES  PRAIRIES  D'OR. 

t_>^l^   0.jiii  JoJtj  Jb  UifS^  Jbj  «^(^  <îcJL-<i  *4;y^  '^  1  *X^  Jlj5^ 

j^jeX)   ^  J_^ij  ^.-(^   Aa).*  i^v-J   uK^-s^   AkXil    <^jwr».   AaÀ£  Jo».i!_5 
«.AaXAJL)    l'.g^Aû    L^'*^3     J^»i>ii)    (•)    Ç-^^    '^^^■J^'   (jJV^J^J    CJ??*^'^ 

disposé  à  m'y  aider  ?  »  Baguir  resta  longtemps  la  tête  pen- 
chée, plongé  dans  ses  réflexions,  et  s'écria  enfin  :  «  Cela  ne 
servirait  à  rien  !  —  Et  pourquoi  ?  demanda  son  maître.  — 
Tuer  le  fils  et  laisser  vivre  le  père,  reprit-il,  votre  entreprise 
demeurerait  inachevée,  car  le  père  vengerait  son  fils  en  vous 
laisant  tous  périr. — Eh  hien ,  quel  est  ton  avis  ? — Commen- 
çons par  le  père;  lui  mort,  i'aff'aire  du  fils  sera  plus  aisée.  — 
Mais,  malheureux,  un  tel  projet  est-il  possible,  est-il  réali- 
sable ?  —  Assurément,  répondit  Baguir,  et  je  m'en  charge; 
je  ne  sortirai  de  chez  le  Khalife  qu'après  l'avoir  tué;  »  puis, 
foutes  les  fois  que  son  maître  taisait  mine  d'hésiter,  Baguir 
répétait  :  «  Nous  n'avons  pas  autre  chose  à  faire,  »  et  il  ajoutait 
ces  paroles  :  «  Entrez  chez  le  Khalife  derrière  r{)oi ,  ou  je  le 
tuerai,  ou  je  n'y  réussirai  point;  dans  ce  cas,  tuez-moi  et 
plaçant  votre  sabre  sur  mon  corps,  dites  :  Cet  houune  avait 
voulu  égorger  son  maître  !  »  Boga  comprit  dès  lors  qu'il  était 
décidé  et  lui  confia  le  soin  de  préparer  le  meurtre  de  Mo- 
tewekkil. 

En  2/17  de  l'hégire  mouiul  Chudjâ,  ruère  de  ce  Khalife, 


CHAPITRE  CXVIi.  267 

^'^'aI  wi)vJi_5  J^JiJI  (jo  oAiw  cyULu  ci>:i^JLÎ  ^Ixjjill  aXJ  j.4^5 

(j^ifc    (*^-^  cM^^   CJ^"^"'*^J    cJ^*^  3    (V"^    <XÀ,»w   ji_j-w    (j-«    (jfcXi- 
c:^«X^       ^xaJi  je.Àj   5<Xj^  U^   (i5>-'*'^'j  ('^•^•**'  ^■*-**i  j|^'<*'   (j-* 

cj*X_i.A-9  A_tLA_x.jî_5  k_jL^*<#Ji  w»..^kij  (j««yî'   (JS   ^^LxxaIii  cK%x1I 

et  la  prière  des  funérailles  lut  récitée  par  Mouutasir  (mois 
de  rébî  ii,  2à'j).  Motewekkil  péril  assassiné  six  mois  après 
la  mort  de  sa  mère,  dans  la  troisième  heure  de  la  nuit  du 
3cha\val,  2/17,  ou  selon  d'autres,  du  f\  de  ce  mois.  Il  était  né 
à  Feni-essilh  (canal  situé  au-dessus  de  Waçit).  —  Voici  ce 
que  raconte  Bohtori  :  «Un  soii-  (pic  nous  ('(ions  réunis  chez 
Motewekkil  a\ec  quelques  courtisans,  et  (pie  nous  nous  en- 
tretenions cl»;  sabres,  un  des  assistants  parla  en  ces  lernies  : 
«  l'iince  des  Croyants,  j'ai  été  inlormé  qu'il  se  trouve  chez  un 
habitant  de  Jîasrah  un  sabie  île  l'Inde  (pn'  est  iiu()iMj)aral)le 
et  tel  f[u'on  n'a  jamais  rien  vu  d'aussi  beau.  »  Le  Khalife  fit 
écrire  au  ^'ouverneur  de  Basrah  d'iKhrlcr  celte  amie  à  (piel- 
que  j)n\  fjue  ce  fut;  des  dé|)éches  rurent  e\pc(li(''cs  pai-  la 
poste  d  hJal  et  biciitùl  ariiva  la  it'poiisc  du  L,^(>uvcrneur  por- 
tant ([uc  if  sabre  en  cpicslioii  ;i\ail  él(''  vendu  ;i  un  habitant 
du  Yéinen.  Motewekkil  voulut  ([u'on  envoyât  des  aj,'^ents  poni 
rechercher  et  accpu  rir  celte  arni*-  précieuse;  des  ordres  en  ce 


268  LES  PRAIRIES  D'OR. 

J._iwi.   il    tK^J^it    *Xa£   (j-*^.  ^JV^   té/^'^^^'    ^^   dl.JJv    t-UMi 

v_À-iHW*-'l    l^^-iû   ^    J-^'*'    ISjiS^^^   AJ<X^J    ^^Jo   U^X^  J   4-Ulsl 
y^A  L.   fJ.]\  JUi   i^yJi  j-tL»  J^l  '^a»-  f.^1   |<vX«*^  ^  JliJ 

Â_AjJ!  ^'>^  (Xj-^S  ''*>j  ^-*«>^  (j^-*-*^^' j"^-*î  û^t'î  ^i  ^"^^ 

sens  lurent  expédiés.  Nous  étions  chez  le  Khalife  (ajoute  Boh- 
tori)  quand  Obeid  Allah,  fils  de  Yahya,  apporta  le  sabre,  en 
annonçant  qu'il  avait  été  cédé,  par  le  Yéménite  qui  le  possé 
dait,  pour  la  somme  de  dix  mille  dihrems.  Motewekkil  fut 
enchanté  de  cette  trouvaille  et  remercia  Dieu  d'avoir  ainsi 
secondé  ses  désirs;  puis  il  tira  la  lame  du  fourreau  et  en 
admira  la  beauté.  Quand  chacun  de  nous  eut  achevé  de  dire 
ce  qui  lui  parut  convenable,  le  prince  plaça  le  sabre  sous 
son  coussin.  Le  lendemain,  il  dit  à  Fath  :  «Trouve-moi  un 
page  d'une  force  et  d'un  courage  éprouvés;  je  veux  lui  con- 
fier cette  arme  pour  qu'il  se  tienne  debout  derrière  moi  et 
ne  me  quitte  pas  un  instant  du  jour,  tant  que  je  serai  en 
séance.  «  Il  parlait  encore  lorsque  Baguir  le  Turc  s'avança; 
"Prince  des  Croyants,  dit  Fath,  voici  Baguir  le  Turc;  on 
m'a  fait  l'éloge  de  son  courage  et  de  son  intrépidité:  c'est 
rhomnie  (pii  convient  au  khalife.  «Alors  Motev.tkkil  l'appela 
lui  remit  le  sabre  et  lui  donna  ses  ordres,  en  commençant 
par  lui  accorder  de  nouvelles  dignités  et  par  doubler  sa  pen- 


CHAPITRE  CXVH.  269 

U^j-Jîi^î  bjSliXj  Uiî  dUij  Iaj^  Igjsi  J:o  ^Jl  aXaX!!  i 

_J_Aj     clLîi     4J     ijpy^     UX)C^     *J^^7j4^     (J-«     Cy^m      i^^KKM*3     O^.jfe' 

CjI^L»   ^i^.S»^  jJlfi.^  *X.,:^»0  /iXA*)!    Jî   *4.^^  «-5>*"  (*^    *-^    'j-S^;? 

yt  (^»À.  vb^'   (il  jU?  (j^  ^jlj  aXI!  *Xx&  bî  Ijfi  Jbs^  ii^M.\j^ 

sion. —  J'ailirme,  continue  Bohlori,  que  le  sabre  en  ques- 
tion ne  sortit  jamais  du  fourreau  depuis  le  momeni  où  il 
fut  confié  à  Baguir  jusqu'à  la  nuit  où  cet  homme  s'en  servit 
pour  accomplir  son  crime.  » 

Bohtori  ajoute  :  «  J'ai  été  témoin  d'une  action  qui  m'étonna 
chez  Molevvckkil,  la  nuit  même  de  sa  mort.  L'entretien  rou- 
lait sur  l'orgueil  et  sur  les  habitudes  pleines  de  superlie  des 
souverains,  nous  venions  d'approfondir  ce  sujet  et  le  prince 
avait  témoigné  l'horreur  ([ue  lui  inspirait  ce  défaut,  lorsqu'il 
se  touilla  vers  la  Meccjuo  et  se  prosterna,  le  Irdul  dans  la 
poussière,  en  s'humiliant  devant  Dieu;  puis  il  prit  une  poi- 
gnée de  terre,  la  répandit  sur  sa  barbe  et  sur  sa  lèle  en 
disant  :  «  Je  ne  suis  que  le  serviteurde  Dieu;  il  est  juste (jue 
celui  qui  doit  devenir  poussière  s'humilie  et  répudie  l'or- 
gueil. »  Je  fus  tristement  impressionné,  ajoulf!  Mohtori,  et 
je  désapprouvai  tacitement  .Motewekkil  d'avoir  répandu  de 
la  terre  sur  sa  t^te  et  sa  barbe.  Il  se  {\{  ensuite  servir  à  boire 
et,  quand  le  vin  commença  à  troubler  sii  raison,  ses  rh.ui- 


270  LES  PRAIRIES  D'OR. 

^<X_iw  ^j-«  -:sLi».  Jw>_ii  Sii  »ii.Ji  i  b'i  A-Ajli  »<X_ô  ocUj 

1^a**a)ùc1  l^  LJ^.^=='^^  l.jJCÀ***.;SV»u(l^  (\j\-*xi^Ai!  ^^.A^i/  iixAsi  5*XjÛ 
y-^\  y-à^  CsjJa.^^  lai  lQ.)>.A^ji   ^  ^\y^   iK&\Jù>   i<xi  îiU  Jl> 

t^  tj^  "  O vJa-iî  «Xi*.^  ^^^*'**'  U.>^  ^^^  ôj«Xj^  c:>«>Jw<aJC3 
iij«Xi>-  i^*^^  oviol'j  aaXs  ^„ijdi   Joj  tKydl  *4^-^  ^^   ^■'■^ 

teurs  lai  firent  entendre  un  morceau  qu'il  loua  fort.  Il  se 
tourna  vers  Fath  en  disant  :  «  De  tous  ceux  qui  ont  entendu 
cet  air  chanté  par  Moukharik  il  ne  reste  plus  que  toi  et  moi,  » 
et  il  fondit  en  larmes.  Ces  paroles  m'attristèrent  (continue 
Bohtori)  et  je  me  dis  :  "  Second  présage  funeste  !»  —  En  ce 
moment  un  des  serviteurs  de  Kabihah  entra  portant,  envcr 
loppé  dans  une  serviette,  un  vêtement  d'honneur  que  cette 
favorite  offrait  au  Khalife  :  «  Prince  des  Croyants ,  dit-il ,  Ka- 
bihah vous  fait  dire  :  Voici  un  vêtement  de  gala  que  j'ai  com- 
mandé pour  le  Khalife;  il  m'a  paru  beau  et  je  le  lui  adresse 
pour  qu'il  le  revête.  »  Le  paquet  contenait  une  cloiuraah 
rouge  (cf.  ci-dessus,  p.  127)  d'une  beauté  incomparable  et  un 
mitraf  (robe  de  chambre  de  forme  carrée  et  de  couleurs 
variées)  en  soie  écrue  rouge,  aussi  fine  que  le  brocart  fa- 
briqué à  Dabek.  Le  prince  revêtit  la  robe  d'honneur  et 
s'enveloppa  du  mitraf.  J'épiais  quant  à  moi  (dit  Bohtori), 
l'occasion  de  quelque  compliment  improvisé  qui  m'aurait 
valu  le  don  de  ce  vêtement,  lorsque  Motewekkil ,  faisant  un 
mouvement,  tira  brusqueuîenl  le  mitraf  dont  il  s'était  enve- 


CHAPITRE  GXVIl.  271 

-Jwiïl  A-coù^  yi  »)J^  *XJLfi  JoUr  \ii  ^î  x>!:>lt  (j^  ^jl^^ 
ff>j  dJi^iiî  (j^jjij  «y-i**  i^xjo^j^[f  JojÎ  il  Jv^^l  (j^  c^Ul^ 

loppé  et  le  décliira  (Vun  bout  à  l'autre.  Alors  il  le  prit,  le 
roula  et  le  remettant  au  valet  de  Kabihah  qui  lui  avait  ap- 
porté ce  présent,  il  lui  dit:  «  Va  et  dis  à  ta  maîtresse  qu'elle 
conserve  ce  manteau  pour  m'en  faire  un  linceul  a{)rès  ma 
mort.  »  I3ohtori  continue  :  «  Je  m'écriai  en  moi-même  :  «  N'ous 
appartenons  à  Dieu  et  c'est  vers  Dieu  que  nous  retournons; 
en  vérité  les  temps  sont  accomplis!  »  Cependant  le  Khalife 
s'était  l'ortement  enivré:  l'usage  était  ([ue  les  valets  qui  se 
tenaient  à  son  chevet  le  replaçassent  sur  son  séant  lorsque 
son  corps  s'inclinciil  sous  l'influence  de  l'ivresse.  En  ce  nio- 
nienl,  il  était  à  peu  piès  trois  heures  de  nuil,  |)arut  Maguir 
aceonq).igné  de  dix  Turcs;  leur  visage  était  voilé  et  les  sabres 
qu'ils  tenaient  dans  leurs  mains  éliucelaienl  à  la  lueur  des 
flarnbeauv.  Ils  se  pi('(i[)ilèrenl  sur  nous  et  allèrent  droit  au 
Klialilé.  liaguirel  un  aulr(!Tur(ayaulesralade  le  trône,  Falh 
leur  cria:  «Misérables,  c'est  votre  maître  1  »  Cejjcndant  les 
pages,  les  couriisans  et  les  convives  s'claieul  enfuis  en  loule 


272  LES  PRAIRIES  D'OH. 

Jb  ^^jl^_5  ^^jjljC  yl£>^  ^^\  j.\S-  (j^X^I  i  *Xa-î  ^j  ^h 
^*kJî  ^^jLJU^li»  jSXf  Aj^  tXi^  tKy^lt  ii^'O  c:a^.v*-»a.3  (_g;^^J:.£:oi 
-0.J  *.jwo\.iw  <JI  »«XJii  ^^^^i  -J^-SJ^s»-  t^  ''^•^V'îi  ***^  (Xj^i'  y^ 
^>^jcjlx  ^À^î  J'-^'^  '^^•^  tK^  J.*i9^-«Mj"5^i  ^-SJ^^  i^  s'-*'-' 

A_À_ia-J    <i     <50«.X!    y\^  (^«^^    0U**ilj     «-^A^    Js.5».!;^    ^-i^^    ^À^ 

Kt**ji*.3  r  r-^  (^■■'  ^•***  T-^^^  ^-?  ^***"'  '^-î'*'  ^  5*Xj>-I  ooÎj  U 

^js^jtï  y^  cKiSÏ^  ^■i^^  IajJsj  l^j  j.»U  ^AaA.\^  iii!5^i.  t^AA^i 

hâte;  Fath,  demearc  seul  dans  la  salle,  luttait  contre  les 
assassins  et  les  repoussait.  J'entendis  (ajoute  Bohtori)  les  cris 
poussés  par  Motewekkil  lorsque  Baguir  le  frappa  avec  Je 
sabre  (]ue  ce  prince  lui  avait  confié  :  un  premier  coup  porté 
du  côté  droit  lui  traversa  le  flanc,  un  autre  coup  du  côté 
gauche  lui  fit  une  blessure  pareille.  Fath  défendait  encore 
son  maître,  lorsque  fun  des  meurtriers  lui  plongea  son  sabre 
dans  l'abdomen;  la  lame  ressortit  par  le  dos  :  Fath  ne  cher- 
cha ni  à  s'éloigner  ni  à  se  dérober  à  leurs  coups.  Je  n'ai  ja- 
mais vu  un  homme  d'un  cœur  aussi  ferme  et  aussi  magna- 
nime :  il  se  jeta  sur  le  corps  du  Khalife  et  ils  expirèrent 
ensemble.  Les  deux  cadavres,  roulés  dans  le  tapis  sur  lequel 
ils  avaient  élé  frappés,  furent  poussés  dans  un  coin,  où  ils 
demeurèrent  cette  nuit-là  et  la  plus  grande  partie  du  jour 
suivant.  Enfin  lorsque  Mountasir  fut  reconnu  Khalife,  il 
donna  l'ordre  qu'on  les  enterrât  ensemble.  «  D'après  une 
autre  version,  Kabihah  les  aurait  ensevelis  dans  le  manteau 
même  qui  avait  été  déchiré  par  le  Khalife  Motewekkil. 


CHAPITRE  CXVn.  273 

(j\AjU  j.  *<a  'jLx\\   ^j£.  ^^ij.^\^  (j^*-=»"   (j^^   ^^"*^^-?  J^>1?"^^   U"*^ 

v^ij  JU^^L-  <xoJ^A>i  :^i  ià\j.j^\  ij^  ijvswi  J^^t  osjïx»  ^ 

la— w-ji/l  cjUiTi  i  J.Ji>  i  JwAJj  U  ^xjjr  (^  UajI  «XJjj  r*Xi^U 

Boga  le  jeune  étail  mécontent  de  Motevvekkil;  Mountasir 
clierchait  à  se  concilier  la  sympathie  des  Turcs;  il  avait  au- 
près do  lui  Outamich,  (ancien)  page  de  Watik.et  c'est  pour 
cela  qucMole\vckkil  haïssait  son  fils  Mountasir,  car  Outamich 
travaillait  à  gagner  les  cœurs  des  Turcs  en  faveur  de  son 
maître.  D'autre  |)arl,  le  vizir  Obeïd  Allah  ben  Khakan  et 
Talh  ben  Khakan  s'claient  ('•ioigni'S  de  .Mountasir  et  pen- 
chaient pour  Moulazz  (antre  fils  du  Khalife)  ;  ils  cherchaient 
donc  à  aigrir  le  cœur  de  Motevvekkil  contre  Mountasir.  Ce 
dernier,  au  conlraiie,  attirait  dans  son  j)arli  tous  les  Turcs 
(|ui  étaient  éloignés  du  service  de  Molewckkil  ;  il  gagna  ainsi 
l'afTection  des  Turcs  et  d'un  grand  nondjre  de  soldats  de 
Ferganah  et  d'Achrousneh,  jus([u'au  jour  où  s'accomplit 
révéncmenl  que  nous  venons  de  raconter.  Il  y  a  j)lusi(>urs 
autres  récits  du  meurtre  de  Mottcwekkil;  nous  avons  donné 
la  préférence  à  celui  (|u'on  vient  de  lire  j)arce  qu'il  est  le 
mieux  écrit  et  le  plus  clair;  (punit  aux  auli'<'s  versions  de 
cet  événement ,  comme  elles  se  IrouvenI  dans  notre  Livre 
vu.  18 


274  LlvS  PUAiniKS  DO  H. 

S)jv.*K  «Xjùilj  (^^m_5  ^UkXàJÎ   »-*£îrs-ij  r»_5"*-''    «^Ji   iS  /e«-^.^Lj 

HùsmJ]^   s')Ç*à.j[j  *Kl*i*j|   l^ÀA»  c:A.3^â   *Xjj^<X,^  W'^*   U^J't?  ^^ 
(J«w_5-aJI  L^^rv_*.3   «Jl  jijijiji   l-r,XAAj  A.J  j^_jiAAJv  pCi-*Àj5^   «^liw.^L» 

Moyen,  nous  n'avons  pas  à  les  reproduire  dans  le  présent 
ouvrage. 

Jamais  Motewokkil  ne  se  montra  plus  gai  que  le  jour  où 
il  fut  assassiné;  il  se  réveilla  dispos,  joyeux,  plein  de  gaieté; 
il  crut  sentir  un  certain  mouvement  de  sang  et  se  fit  saigner 
ce  même  jour.  Il  réunit  ensuite  ses  familiers  et  ses  musiciens 
et  s'abandonna  à  sa  joie,  à  sa  bonne  humeur.  Mais  cette 
gaieté  se  changea  en  tristesse,  à  cette  joie  succéda  le  deuil. 
Et  qui  peut  se  laisser  séduire  par  ce  monde,  se  fier  à  lui, 
sans  redouter  ses  trahisons  et  ses  catastrophes,  si  ce  n'est 
l'homme  ignorant  et  frivole.*^  Le  monde  est  un  séjour  dont 
la  félicité  est  de  courte  durée,  dont  les  joies  ne  sont  jamais 
parfaites;  une  calamité  y  est  toujours  à  craindre;  ses  plaisirs 
sont  mélangés  d'amertume,  ses  douceurs  de  violences,  ses 
félicités  d'infortunes.  Toute  chose  y  est  condamnée  à  périr; 
à  côté  du  plaisir  est  la  tristesse,  à  côté  de  la  joie,  le  deuil; 
à  ce  qu'on  aime  succède  ce  qu'on  abhorre,  à  la  santé  la  ma- 
ladie, à  la  vie  le  trépas,  à  la  joie  la  douleur,  aux  plaisirs  les 
peines.   FjCs  nobles  y  sont  abaissés,  les  j)iiissanls  humiliés. 


CHAPITRE  CXVIT.  275 

LJyX~>*^^  l^^Loffj    LJ^j..^   [u^iS-%    (JV^^  [^j'è^    J--^^^   l^yjjS- 

|<>j2Ij^j^Ji  yûj  iSh>  Jjjyj  ^3  oyc  y  (^JJi   ^il  VI  J.AO  V^ 

L^  ^jSk-A^I  iUiûljjj  l^jjLij^  1^^-*»..^»-  tj  tKj^l  r»lr»i  <-i*-j\^ 
Jb  IX  i>'^  V  sXj^  pli  l^Ài:  ji^l«;3  l^J  jllxJ!^  ^^^iJi  Jv^3 
(J«l-=»-J3     J^^^t      l^j^\     ^J^    (^yMhS^\     JPyXX\     Ai^Vs».     CJkji^    M>^AilK> 

les  riches  spoliés,  les  grands  dépouillés  de  leur  grandeur. 
Il  n'y  a  dV'Iernel  que  le  Dieu  vivant,  celui  qui  ne  mourra 
point  et  dont  la  royauté  ne  cessera  jamais,  l'Etre  glorieux  el 
sage. 

Le  poète  iiohlori  l'ait  allusion  à  la  perfidie  de  Mounlasir 
et  à  l'attenlat  qu'il  commit  contre  son  père,  dans  le  passag<' 
suivani  (Tune  karideh  : 

L'héritier  du  pacte  avait  donc  dissimulé  sa  perfidie?  (lliosc  l'iiauf^e 
que  celui  qui  est  investi  de  ce  pacte  soit  le  premier  à  le  trahir! 

Puisse  le  survivant  ne  pas  jouir  lonj^tcmps  de  rhéntap;c  de  celui  (jui 
n'est  plus ,  piiissciil  les  chaires  imiMiIrnaiies  rejeter  Ips  vmi\  donl  il  est 
l'ohjet  ! 

Le  règne  de  Molewekkil,  |)ar  sa  prospérité,  sou  éclat,  par 
la  tran([iiillité  dont  jouin'ut  ses  sujets,  les  actions  de  grâce 
et  les  reinercimenls  (pi(!  les  grands  el  les  petits  lui  oirrirent, 
lut  certainement  une  peiiode  lieiiicusc'  et  sans  mélange 
d'inlortune;  et  comme  Ta  dil  un  contemporain  de  ce  prince  : 
«  Le  Klialiial   de  Mdievvekkil  (''laii   plus  heaii  encore  cpie  la 

..s. 


276  LES   PRAIRIES  D'OR. 

(jà.jtj   (S-^l^  ]^.â>  «Xii^î   *XJs^    t_>UAJi    -U^  c^Â  jUI^^*«Ji 


'"  ■-    -.y 


otJî  o«--'î  ^1^  ijj^yxSs  t^^À*4  t>-^^4j  Ji^W^  t^  (3^^ 

*Lk-*-Jl  jj;:>j  ii^^i'UJI^  .Xilj  à^yW  ï^^^ ^  !  J^  jP,:> 

sécurité  des  routes,  que  Taisance  de  la  vie,  que  les  espé- 
rances de  l'amour  et  les  jours  de  la  jeunesse.  »  Un  poëte  a 
exprimé  la  même  pensée  dans  les  termes  suivants  : 

Ta  société  est  pour  nous  plus  enviable  que  la  facilité  de  la  vie  et  la  sé- 
curité des  routes, 

Plus  enviable  que  les  nuits  d'amour  suivies  des  douces  journées  de  la 
lielle  jeunesse. 

On  prétend  que  dans  aucun  siècle  et  à  aucune  époque  il 
ne  fut  dépensé  autant  que  pendant  le  règne  de  ce  Khalife. 
Ses  deux  châteaux  le  Harouni  et  le  DjausctJt  Djâfari  lui  coii- 
tèrent,  dit-on,  plus  de  cent  millions  de  dirhems  :  il  faut 
joindre  à  cela  ce  que  lui  coûtaient  ses  affranchis,  ses  soldats, 
ses  pages  [chakirjeh  du  mot  persan  chaguird},  qu'il  comblait 
de  présents,  et  qui  touchaient,  tous  les  mois,  des  sommes 
énormes  à  titre  de  gratification  et  de  donation.  Il  possé- 
dait, dit-on,  quatre  mille  concubines,  qui  toutes  partagèrent 
sa  couche  nuptiale;  à  sa  mort  le  trésor  renfermait  quatre 
millions  de  dinars  et  sej)!  millions  de  dirhems.  Quiconque 


CHAPITRE  GXVIl.  277 

à'j  J^^  wiil  cji^i   iwtxui^  jUji  ujJl  cj^l  à.xjj\  Ji_jM*^t  ^_j'^J 

tyj  <X^  »]j  i> •  *jL»  (j>^  wii»  <_«jçAâJ  AajI  ,_K.o«j  *-*ir»y  Osjt-w» 
5 <>^ÀCj  Jjjjj-A j   -J.J  i   aMI   ^^  J^^j^l  y*»^  cjj-k-osfc  Jls  (j_j£  jl 

P  «M 

A^S  dLJi  JouL»  j-aljLc  a^j^  *-*^S3?^  Uvl^  (jV»«-=^  t^-*^  y^ 

se  distingua  dans  sa  profession,  qu'elle  fut  sérieuse  ou  fri- 
vole, eut  part  à  ses  faveurs,  s'enrichit  sous  ce  règne  et 
reçut  de  ce  prince  des  sommes  considérables. 

Mohammed,  fils  d'Abou  Avvn,  raconte  le  trait  suivant  : 
«  Je  me  trouvais  à  la  cour  de  Motewekkil-Alallah  un  jour  de 
neïrouz  (rquinoxe  du  printemps,  nouvel  an  des  Persans); 
parmi  les  personnages  présents  était  Mohammed  (filsd'Abd 
Allali,  fils  d(î  Taher),  et  le  poète  Hueeïn  (fils  de  Dahhak), 
surnommé  le  débauché  {kliali),  se  tenait  devant  le  prince. 
Motewekkil  Ht  signe  à  un  jeune  esclave  doué  d'une  physio- 
nomie charmante  de  verser  une  coupe  de  vin  au  j)ol'I('  et  de 
lui  souhaiter  une  heureuse  année  en  lui  ollianl  en  juéme 
teni[)s  une  rose  d'uinhre  (jris;  après  (pioi  Motewekkil,  se 
tournant  vers  h;  poëte,  lui  demanda  quelques  vcts  de  cir- 
constance; lluçeïn  improvisa  ceux-ci  : 

Beau  comme  une  perle  brilIatUc,  il  m'a  salué  en  me  doimanl  uni'  rosi- 
ambrée;  il  marcliail  velu  d'une  tunique  couleur  de  rose. 

Les  œillades  (|u'il  mêlait  à  chacun  de  ses  salnls  l'i  raient  nailre  l'amour 
dans  le  cœur  d'un  sa^e. 


278  LES   PUAUUES   D'OU. 

jL.f.Jjljv^    <X-jU   CJ».aj   J^   J?.*J   ^I^  c>-i-^i*-i    J^j-xii   Jlii 
^jî    i)  ^J^j    ^^\ijSlj    ç.j.^\i   t-j\.r>!    <XJiJ_j    4Mi    ^J<S.   ^JJ    .Xj^ 

,L.À_>:>  Ot-Jl  c:x^J  J^  J=^-«J  ^^•^  ^-^^  J^aXI  Jli»  *xUxJî_5 

Je  voudrais  que  sa  main  nie  versât  la  douce  liqueur  qui  me  rappelle 
des  serments  maintenant  oubliés. 

Bénis  soicr.t  ces  temps  fortunés  où  chaque  hein-e  de  mes  nuits  ni'ap- 
porlail  une  promesse  d'amour! 

Motewc'kkil  le  complimenta  et  lui  fit  donner  cent  dinars 
pour  chaque  distique.  iMohammed,  fils  d'Abd  Allah,  dit 
alors  au  Khalife  :  «  Cet  homme  a  répondu  avec  empresse- 
ment à  votre  ordre,  il  a  récité  des  vers  qui  nous  ont  émus; 
en  vérité,  s'il  n'était  défendu  qu'une  main  se  montrât  plus 
généreuse  que  celle  du  Khalife,  je  ferais  au  poëte  un  magni- 
fique  cadeau,  dussé-je  y  consacrer  ma  fortune  entière  (litté- 
ralement: mes  biens  récents  et  ceux  que  j'ai  reçus  par  héri- 
tage). »  A  la  suite  de  cette  observation ,  Motewekkil  fit  donner 
au  poëte  Huçeïn  mille  dinars  par  distique. 

On  raconte  que  Mohammed,  fils  de  Bail,  ayant  été  conduit 
en  présence  de  Motewekkil,  et  l'appareil  de  son  supplice,  le 
tapis  de  cuir  et  le  sabre,  étant  préparé,  le  Khalife  lui  de- 
manda :  «Mohammed,  qui  t'a  excité  à  la  révolte?  —  La 
misère.  Sire,  répondit-il.  Mais  vous  êtes  l'ombre  de  Dieu 
placée^  entre  le  Créateur  et  la  créature;  j'ai,  sur  ce  que  vous 


CHAPITUE  CXVJI.  279 

Jv»iij|  ^^Ij  jXà^  J^>^  <J  y^       *^  (i)yts  Jsj^£  ^i  J*Uiij 

(1)    ,  •• 

allez  ordonner,  deux  opinions,  et  la  première  qui  s'est  pré- 
sentée à  mon  esprit  est  aussi  la  plus  digne  de  vous,  c'est 
la  pensée  que  vous  pardonnerez  à  votre  esclave,  »  et  il  ajouta 
ces  vers  : 

Les  liotnmos  vcuient  d'un  commun  accord  que  vous  versiez  mon  sang 
aujourd'liui,  ô  ^'uidc  de  la  voie  du  salut,  mais  le  pardon  est  plus  digne 
d'un  noble  cœur. 

(Jne  suis-jo,si  ce  n'est  une  nalure  criminelle;  mais  votre  clémence  est 
embellie  pai-  l'éclat  de  la  lumière  propliéliquc. 

Mon  crime  placé  à  côté  de  votre  pardon  semble  diminuer;  accordez- 
moi  votre  pardon  :  il  est  noble  de  l'aire  le  bien. 

Vous  êtes  le  meilleur  de  ceux  qui  s'empressent  ii  la  gloire,  et  il  n'est 
pas  douteux  que  de  ces  deux  résolutions  vous  prendrez  la  nu-illeure. 

—  -  Oui,  je  prendrai  la  meilleure,  s'écria  Motewekkil.je 
l'accorde  la  \ie,  lu  |)eu\  rentier  dans  la  dcnieure.  —  Prince 
des  Croyants,  répondit  Ihn  liait,  Dieu  sait  bien  oii  il  place 
son  apostolat.  » 

I.e  meurirc  de  Motcvvckkil  lui  déj)l()i('- par  les  |)()ëles  con- 
tenij)orains;  de  ce  nombre  csl  Ali,  lils  de  Djeiun.  Voici  un 
fraiïment  de  sa  karideh  : 


280  LES   PRAIUIES   D'OU. 

^jfcia  5<XAAiaS   ^j^  4^^V^    *Xj^  /yj   "^^ï!  Jj^J  "^^J 
tX.*^  LàJiJIj  IjUjUIÎ  a.a.jI  !i^Jû        ii_je_=s-ljî>  cj>rJ»Jîj   ^^^^■^^  cjA> 

*|vX^ji    O^'*?    J^*:?    *^J 

Ce  sont  les  esclaves  du  Khalife  qui  l'ont  tué,  carie  plus  grand  malheur 
des  princes  est  d'avoir  des  esclaves. 

Fils  de  Hachcm,  ai-mez-vous  de  patience,  il  n'est  pas  d'infortune  qui 
ne  finisse  par  s'user  avec  le  temps. 

Yézicl  (fils  de  Mohammed)  Mohallebi  a  pleuré  ce  Khalife 
dans  les  vers  suivants  tirés  d'une  longue  haç.ideh: 

11  dormait  quand  la  mort  l'a  frappé;  que  n'est-elle  venue  à  lui  au  mi- 
lieu des  lances  brisées  (  c'est-à-dire  sur  le  champ  de  bataille)  ? 

L'être  le  plus  vil  du  monde  a  levé  son  glaive  sur  toi  (ô  prince),  <jui 
n'avais  de  supérieur  que  le  Dieu  unique  et  éternel. 

Ce  Khalife  avait  obtenu  ce  que  jamais  personne  n'a  obtenu,  et  jamais 
la  réunion  d'un  corps  et  d'une  âme  n'a  formé  un  être  qui  puisse  lui  être 
comparé. 

Un  autre  poëte  a  dit  aussi  : 

La  mort  s'est  glissée  chez  lui  la  nuit  lorsque,  ses  favoris  s'étant  éloi- 
gnés ,  il  dormait. 

La  mort  lui  a  dit  :  Lève-toi,  et  il  s'est  levé.  Que  de  rois  ont  été  appelés 
ainsi  pour  mourir,  et  ont  répondu  à  son  appel  ! 


CHAPITRE  CXVn.  281 

Voici  enfin  un  passage  de  Hureïn  (fils  de  Dalibak)  sur- 
nommé le  déhanché  : 

Les  nuits  (c'est-à-dire  la  fortune)  n'ont  jamais  favorisé  personne,  sans 
lui  nuire  après  l'avoir  comblé  de  faveurs. 

N'as-tu  pas  vu  les  disgrâces  du  sort  accabler  le  (Khalife)  hachcmitc  et 
Fath  ,  fils  de  Khakan  ? 

Ali,  fils  de  Djehni ,  raconte  le  fait  suivant  :  «  Le  Prince  des 
Croyants,  DjàAir  Motewekkil-Alallah,  quand  il  fut  élevé  à  la 
dignité  de  Khalife,  reçut  des  cadeaux  proportionnés  au  rang 
de  ceux  qui  les  lui  olfraient.  Dans  le  cadeau  d'Ibn  Taher 
figuraient  deux  cents  esclaves  des  deux  sexes  et  parmi  eux 
une  jeune  fille  nommée  Mahbouhcli.  (faimée).  Son  premier 
maître,  un  habitant  de Taïf,  avait  soigné  son  éducation,  cul- 
tivé son  intelligence  et  l'avait  enrichie  des  connaissances  les 
plus  variées.  Elle  faisait  des  vers  qu'elle  chantait  en  s'accom- 
pagnant  sur  le  luth,  et  léussissail,  en  un  mol,  dans  tout  ce 
qui  distingue;  les  gens  de  jnérile;  aussi  lïit-elle  bien  accueillie 
de  Motewekkil  ;  il  lui  donna  une  place  imporlanlc  dans  son 


282  LES   PHAHUES   D'OR. 

La-aw  .^-x.à  J^Jii  aàa>  ^..w*;*.!  ooK  U  jjuirs-  Uù^Xi».  j  liLtMlL 

(2)    ....    .     I 


CXAX3 


cœur  el  lui  accorda  toutes  ses  préférences.  —  «  J'entrai  un 
jour  chez  le  Khalife  (ajoute  Ali)  pour  m'asseoir  au  festin; 
quand  j'eus  pris  place,  le  prince  se  leva  et  pénétra  dans  une 
des  pièces  réservées ,  puis  il  revint  en  riant  et  me  dit  :  «  Mon 
cher  Ali,  en  entrant  (dans  le  harem)  j'ai  rencontré  une 
esclave  qui  avait  tracé  sur  sa  joue,  en  lettres  de  musc,  le 
nom  Djctfar;  je  n'ai  rien  vu  d'aussi  charmant.  Trouve  quel- 
ques vers  sur  ce  sujet.  »  —  Moi  seul,  Seigneur,  lui  deman- 
daije ,  ou  MahbouJjeh  avec  moi  ?  —  Non ,  toi  et  Mahboubeh.  » 
Cette  jeune  fille,  se  faisant  apporter  une  écritoire  et  du  papier, 
prit  les  devants  sur  moi  et  composa  des  vers  qu'elle  récita; 
elle  saisit  ensuite  son  luth  et  chanta  à  demi-voix.  Après 
avoir  préludé  sur  son  instrument  jusqu'à  ce  qu'elle  eût 
donné  un  corps  à  sa  mélodie,  elle  sourit  pendant  un  ins- 
tant, puis,  a^Jant  pris  les  ordres  du  Khahfe,  elle  chanta  ces 
vers  : 

l'Jlle  a  Iracé  sur  ses  joues  avec  du  musc  le  mot  Djàjar;  je  donuerais  ma 
vie  poiu  reudroit  eliarmnul  où  le  musc  a  laisse  son  eiiipreiule. 


CIJAlMTIii-:  ex  Vif.  283 

l^j^lj  ÏKjyA^  <^jKx*b\s-  ji  oc^  "^  L  tiiAj_5  <i  JIaj  <\^:>Uj^ 

Si  t'ilc  a  gravé  sur  sa  jonc  des  lettres  parluniécs ,  elle  a  grave  dans  mon 
cœur  de  longues  lignes  d'amour. 

Voyez  cette  esclave  qui  soumet  à  ses  lois  son  propre  maître,  en  secret 
comme  en  public. 

Voyez  ces  yeux  qui  ont  contemple  un  homme  tel  que  Djàfar  ;  ([iie  Dieu 
répande  sur  Djâlar  la  pluie  de  ses  bienfaits  ! 

Ali  poursuit  ainsi  son  récit  :  «Cependant  mon  imagina- 
tion flollait  incohérente  et  il  me  semblait  c[ne  je  \w.  trouverais 
pas  le  premier  mot  d'un  vers.  —  «  Eh  bien,  Ali,  me  demanda 
le  prince,  où  en  es-lu  de  ce  que  je  t'ai  commandé?  —  Par- 
don, Seigneur,  répondis-je,  je  confesse  que  ma  verve  est 
absente.  »  — Depuis  lors  et  jusqu'à  sa  mort,  Motewekkil  ne 
cessa  de  me  lancer  ce  souvenir  à  la  téle<^l  d'i-n  j)nMulre  lo.xte 
pour  me  railler.  » 

«J'entrais  une  autre  l'ois  chez  lui,  raconle  le  même  Ali, 
pour  m'asscoir  ii  sa  table,  lorscpi'il  m(!  dit  :  «  Mon  cher  Ali, 
tu  sais  que  je  ukî  suis  fViché  avec  Mahboubeh  ?  je  Tai  con- 
signée dans  son  apparicnient  en  délendani  ;i  ma  suite  de 
cominnni(|n('r  avec  clic,  <■!  je  ne  \('u\  plus  lui  |)arl(M-.  «  — 


284  LES  PRAIRIES  D'OR. 

«Xvolvt   0«.Aj  C-sjl^  JoIav    l^J  JUj    ^W  t-^^JC»  l^JCj^l^o   J\Jj    jl 

^^r»-  <îui.A-j!  Ci*.-?.*  lliLr».  p»ljii  ^  Uj.IâÀj  4^>-  ^^J^  /frj>  <i 
l_^_jl^ -p^^viXj  *>-K,.Aj5  ):>^^  (3-*-^  (^  '-^^  l^jj_j.x2.ji^  ç^j^  UjjJJ 

Seigneur,  réponclis-je ,  si  vous  êtes  irrité  contre  elle  aujour- 
d'hui, faites  la  paix  demain.  Que  Dieu  pi'olonge  la  félicité 
du  Khalife  et  lui  accorde  de  nombreuses  années  !  »  Le  prince 
demeura  rêveur  pendant  quelque  temps,  puis  il  congédia 
ses  convives  et  fitenlever  le  vin  qui  était  servi.  Le  lendemain , 
dès  que  je  me  présentai,  il  me  dit  :  «  Eh  bien,  Ali,  j'ai  rêvé 
cette  nuit  que  je  me  réconciliais  avec  Mahboubeh.  »  Une 
jeune  esclave  nommée  Chaiir,  qui  se  tenait  devant  le  prince, 
lui  dit  alors  :  «  Je  viens  d'entendre  sortir  de  sa  chambre  des 
paroles  dont  je  n'ai  pas 'saisi  le  sens.  »  —  Viens,  me  dit  le 
Khalife,  nous  allons  voir  ce  que  c'est;  »  et  il  se  mit  en  route 
nu-pieds.  Je  le  suivis;  aux  abords  de  la  chambre,  nous  en- 
tendîmes Mahboubeh  préluder  sur  son  luth  et  fredonner 
à  demi-voix  comme  si  elle  composait  un  air;  puis  élevanl 
la  voix,  elle  chanta  : 

Je  parcours  ce  palais  cl  n'y  trouve  personne  qui  écoule  mes  plaintes  et 
nie  réponde. 


CHAPITRE  CXVII.  285 

»X_2fc.!     (^w-5»-     Cjjs— A-il    (^    Lw_JtX.ji»>     Ç^JrJfj     J^^-*^î     J»^^     t-^AJ 

^j    /w_À_iwo   /y-LjJ>lî    c:>lji.JiJL   w*i_5   »jUù«*ii    jXa^jj^I;  iL<i>lÀ^ 

l  a  .K  \-g  Jlilj  J^JI  (j^  'iyAs>-  io^/cs:  t^ÀAiij  Jilil^  (J.il 

Jb    4^i~-fr    O»— *— o^    L^J    JLïJ    ik-^Sj^A     'S^yi£i.jti   <.,jj^M»X:à^    (J^^-^-^ 

Ai-je  donc  romniis  un  acte  de  révolte  que  le  repentir  ne  pourra  jamais 
racheter  !• 

Qui  implorera  en  ma  faveur  un  roi  cpii  m'a  visitée  en  songe  cl  m'a  par- 
donné? 

Puis  le  jour,  eu  revenant,  m'a  rendu  les  dédains  de  ce  maître  et  l'a 
séparé  de  moi. 

Motowf'kkil  baflit  des  mains  joyeusemonl  et  je  l'imitai  : 
il  entra  aussitôt  chez  sa  favorite.  Celle-ci  lui  baisa  les  pieds 
et  se  roula  le  front  dans  la  poussière  jusqu'à  ce  que  le  Kha- 
life la  relevât;  puis  nous  revînmes  sur  nos  pas  et  Mald)oid)eli 
en  tiers  avec  nous.  » 

«  Après  le  meurtre  du  Khalife,  ajoute  Ali,  fds  de  Djelim, 
Mahhoidieh  fut,  avec  d'autres  esclaves  de  la  cour,  dévolue  à 
la  maison  de  Bof|[a  l'aîné.  Un  jour  que  j'entrai  chez  ce  der- 
nier en  ma  qualité  de  conmiensal,  il  fil  écarter  le  rideau 
(du  harem)  et,  sur  son  ordre,  ses  esclaves  s'avancèrent  bril- 
lantes d'ornements  et  de  parures;  seule  Mahboubeh  se 
montra  sans  bijoux  ni  vêtements  de  prix  et  vêtue  de  blanc 
(en  si<^Mi('  de  deuil);  elle  s'assit    rêveuse  el   la   tête  baissée. 


286  LES  PRAIRIES  D'OR. 


ii  ^K'  ,^j^  J^ 


_W  <*1         <kb^  ^'w^ 


l^açifrinïiUâ  chanter;  elle  s'en  excnsa.  Celui-ci  Fexigea,  el 
fit  apporter  on  Inth,  qnon  posa  sur  les  genoux  de  Tesdave. 
Se  vovant  dans  la  nécessité  d'obéir,  elle  garda  le  lath  sur 
ses  genoux  et  s'en  accompagna  pour  le  morceau  suivant, 
qu'elle  improvisa  : 

CamaaaAi»  lie  poairaii-elle  me^ure,si  jene  rencontre  plasD^âlâr. 
Ce  roi  qoe  j'ai  ni  ioafflé  f(e  poussière  et  de  san^? 
Qoieonqne  sooflrait  dmqinêtnde  ci  de  maladie  a  retrouTé  la  &anlé , 
Esceplé  Xlabboiibdi,  qui,  si  elle  savait  que  ta  mort  s'acbi^e. 
L'achèterait  de  tout  ce  qn  elle  possède,  pour  être  portée  an  lombean. 

Waçif,  irrité  de  ce  souvenir,  envoya  l'esclave  en  prison; 
elle  y  fut  enfermée  et  depuis  on  n'a  plus  entendu  parler 
d'elle.  • 

Sous  le  r^ne  de  Motevrekldl  moururent  plusieurs  savants, 
historiens  et  tradilionnistes .  tels  soni  :  \li  (fils  de  Djàfar] 


CHAPITRK  ex  Vil.  287 

'^-i-^J^  J\J»3  ^^Jsil  ^t  l^xi  cjU  ,^1  AÂmJI  jj  5J.^"  *^3 
^  cîb   cT*  /e*-^-^  (:J>-*-*  (jJ   c^y-*r  U**  ^^  iS^^   Xi-«Ji    ^ 

fcV-Mj    ^^*>m»  j.^^1^    A»».*»(    ^  .«.N.Wj    Uxk^    Q^(    CJ-*   /*^     *Xj^ 

<^t»x-LI  J^  ^JJ  t^  ^^^--^  j^î  iUj  ^^K'  iiJ-JI  5»Kia  ^  ^,i 

Modini,  mort  à  Saniarra,  le  lundi  27  do  don  'l-liiddjoh, 
•i3/4  do  riiogiro,  àgô  de  soixante-<iouzc  ans  ot  quelques  mois; 
oependant  la  date  de  sa  mort  est  contestée,  et  nous  avons 
dit  précédemment  en  quelle  année  on  place  cet  événonunt. 

—  Mémo  annéo,  morl  dWhou  'r-Robî,  fils  do  Zalirani.  — 
On  no  s'accorde  pas  non  plus  sur  la  date  i\c  la  mort  do  Vahva, 
(ils  de  Màyin;  les  uns  adoptent  celle  que  nous  avons  donnée 
dans  un  autix^  passage  i]o  oe  livre  (voir  ci-dossus.  p.  211);  les 
autres,  ot  c'est  le  plus  grand  nondiro.  s(>  décident  pour 
Tannée  2  33;  Yahya  dont  le  surnom  paironymique  est /l 60a 
Zaharia ,  étail  un  tnawla  dos  Bonou-Marrah;  il  mourut  à 
Modino,  âgé  de  soixante-quinze  ans  ot  quelques  mois.  On 
croit  qu'en  la  mémo  année  (233  de  Thégire)  mourut  Tiiis- 
lorion  Ahou  "1-Haçan  Ali  (fds  de  Mohammed)  Medaïni; 
daulros  placent  sa  mort  en  228,  sous  le  règne  do  Watik. 

—  I.u  o.Mlo  année  2  28mouruiYnt  Mouseddod  hon  Musorhod, 


288  LES  PRAIRIES  D'OR. 

i  y!  t)— i^-^  «X-ij  oi-*«j.j  j,5  t-^jfcUo  (^«X/JJÎ  ^^UJî  «XaJjJI 

dont  le  vrai  nom  est  yl6d  el-Mélik,  fils  d'Abc!  el-Aziz;  —  le 
jurisconsulte  El-Himmani;  — Ibn  Aïchah,  dont  le  nom  est 
Abd  Allah  (fds  de  Mohammed,  fils  de  Hafs)  et  le  surnom 
patronymique  Alou  Aid  er-Rahman  ;  i\  appartenait  à  la  tribu 
de  Teïm-Koreïcb.  —  Sous  le  règne  de  Motewekkil  mou- 
rurent en  2  36  :  Hodbah,  fils  de  Khaled;  —  Cheïban,  fils 
de  Ferrokh,  originaire  d'Obollah;  —  Ibrahim  (fils  de  Mo- 
hammed) Chafeyi.  — En  287  :  Abbas  (fils  de  Wélid)  Nersi, 
mort  à  Basrah;  —  Abd  Allah  (fils  d'Ahmed)  Nersi;  — 
Obeïd  Allah  (fils  de  Moâd)  Anbari.  ~  En  2  38  :  Ishak  (fils 
d'Ibrahim)  plus  connu  sous  le  nom  d'Ibii  Rahaweïh;  —  le 
juge  Bîchr  (fils  de  Wélid)  Kendi,  disciple  d'z\bou  Yourouf. 
—  Selon  quelques-uns,  Abbas  (fils  de  Wélid)  Nersi  ne  serait 
mort  qu'en  cette  année  238.  —  En  269  :  Otinan  (fils  d'Abou 
Cheïbah)  le  Koufien,  mort  à  Koufah;  —  Sait  (fils  de  Ma- 
roud)  Djahdari.  — En  2/io  :  Cliebab  (fils de  Khalifeh)  Ous- 


CHAPITRE  ex  VU.  289 

c;^U  l.g_*j^   ty=^^    iL>_jl«>o   ^yj   4WI    tXA£^    5^1   :>yXM*^    /wjÎ 

♦>^-S^  (jJ  i^y^^  j^  0-j  ^ij'^'  (J'^  '^MtJ>,'*S-^  ^*n.».-S'  ^jJovaXi 
bjJi   ^j-*-^  yUNfcifc- jwj-wj  jUiwî   jo^xli^   (_^ijj«*«#Jli   Jb        di»^il 

(jU).Ji  jUi^!  UjoU-j  jj  ^Uàjiilj  p.  — iJ!  ^^  W^^.ff  Uaj'1  »^j 

fouri;  —  Ahd  el  Wahid  (fils  cfAttab).  —  En  2d3  :  Hicham 
(filsd'Ammar)  de  Damas;  —  Hamid  (fils  de  Maçoud)  Nadji; 
—  Abd  Allah  (fils  de  Moàvviah)  Djomahi;  —  le  kadi  Yahya, 
fils  d'Aktam,  décédé  à  Rabadah;  — Mohammed,  fils  d'Abd 
el-Mélik,  fils  d'Abou  'I-Gha\varib.  —  En  2/16  :  Mohammed 
(fils  de  Monstafa),  originaire  d'Emèse; —  Anbaçah  (fils 
d'Ishak,  filsdeChamir)  et  Mouça  (filsd'A])d  ol-Mélik). 

L'histoire  du  régne  et  de  la  vie  de  Motewekkil  renferme 
d'autres  faits  remarquables  que  nous  avons  rapportés  en 
détail  dans  nos  deux  ouvrages  les  Annales  historiques  et  le 
Livre  Moyen. 


"J 


290  LES  PRAIRIES  D'OR. 

[yA'9  Jo:s  <^i  ^A^i  ^i.^^^^  »jj.«a;:m^Àj»r5-  ^j:»  .x^î-  ^^j^ 
«.ju-^  iLjL^  Jîj_-i  cj-  (J^^-^  ^'^^  Ax^j^i  AJ  ^^  J^l 
L^  JUo  *xJ^  -i  A-«lji  ^.Àjï.>  j,L  ^So^  (j^Ajt^j  C:?:?*^)^^ 

rf^.g-i;l  ioC^w  -îUà^Xi^  <.::>»-j\(j  (jOoUj  (J>*?j'-5  (J^  *•*"**'  '^^-' 
CHAPITRE  CXVIII. 

KHALIFAT  DE  MOUNTASIR-BILLAH. 

Mohammed  (fils  de  Djâfar)  el-Mountasir  fut  proclamé 
Khalife  dès  la  première  heure  du  jour,  après  la  nuit  où  Mote- 
wekkil  fut  assassiné  (nuit  du  mercredi  3  du  mois  chawal, 
2/17  de  l'hégire).  — Son  surnom  patronymique  était  Ahou 
Djâfar;  sa  mère ,  une  esclave  grecque ,  se  nommait  Hahcliyeh. 
11  avait  alors  vingt-cinq  ans;  la  prestation  du  serment  eut 
lieu  dans  le  château  nommé  Djâfari,  construit  par  Moté- 
wekkil.  Mountasir  mourut  fan  -làS,  après  un  règne  de  six 
mois. 

BÉSDMÉ  DK    SON    HISTOIRE    ET   DE   SA    VIE;    PRINCIPAUX   EVENEMENTS 
DE  SON  RÈGNE. 

Le  lieu  où  Molewekkil  fut  assassiné  était  celui  où  Chu- 


CHAPITRE  CXVIII.  291 

^  .»."^L>    *XjV*x^^    j_^.>A^^     <XÀ.«m.X|^  iw.^V^,M^^i.U(    IsUnfcAJ    jCwj»JL« 

(jv— f  y-P  liî^  ii-iij-wjljLîL  5*i_^JLJl  /y^jw!  civÀ-S^  i(A^UJL 
iLjUJjî  v::>i^jJLi  jJaAj  ajI^  ^b   <!U»«!;  tj-^j   tilX*  Sj^as-   jL^ail 

*j)j— *=»  <i)^^ÀJi  3  is^*-''  fi^  d>^  ^y"^ ^y^  '■^[;  (0-'j-^-<*' 

weïli  avait  tué  son  père  Kesra  Perwiz;  on  le  nommait  Ma- 
khoareh.  Mountasir  résida  encore  sept  jours  dans  ce  palais 
après  la  mort  de  son  père,  puis  il  s'en  éloigna  après  avoir 
ordonné  de  le  détruire. 

La  tradition  a  conservé  le  récit  suivant  raconté  par  Abou  '1- 
Abbas  Mohammed,  fils  de  Sehl,  «J'étais  secrétaire  sous  les 
ordres  d'Atfab,  fils  d'Attab,  au  bureau  des  troupes  dites  Cha- 
kirieh,  pendant  le  règne  de  Mountasir.  Je  montai  dans  une  des 
salles  de  l'étage  supérieur;  je  la  trouvai  garnie  d'un  tapis  de 
pied  fabriqué  à  Sousendjird ,  d'une  estrade  en  forme  de  trône, 
d'un  mousalla  (j)elit  tapis  de  prière)  et  de  coussins  rouges  et 
bleus.  Le  grand  tapis  était  bordé  de  cases  renfermant  des  fi- 
gures d'hommes  et  une  inscriptioiî  en  persan,  langue  que  je 
lisais  couramment.  Or,  à  la  droite  du  inousallu.jc  remarquai 
une  figure  de  roi,  le  front  ceint  d'une  couronne  et  daiisTalti- 
hulc  de  quehpi'un  qui  parle;  j'y  lus  l'inscription  que  voici: 
'  Ceci  est  riniage  de  Chirvveïh,  meurtrier  de  son  père  le  roi 
Perwiz;  il  régna  six  mr)is.  >  Je  vis  ensuite  différents  portraits 

'9- 


292  LES  PRAIRIES  D'OR. 

<X.A^  (jo  «^«'■'^[^■î'  (j^  «^/j~>  ^jy*^  t_>_j^iXv9  V^AÂi;  (J^*ail  j\.M*^_  ^J£^ 

iiJiMi    dlX^    liUil    t>^Aff    0.J    «>^r!>^^    lj":>    ♦^^^J'^'     ^■"^    (jj5   JsjIj    dUi^ 

t^jsr"  jii;.ÀJ  yi  0^13^5  iJNjft  j.;^i   OtAA?y  os-Ui)  i^AjUJî  j!jJl 

/v_j    *X_^-J    ^_J-»0    AA^^    CS*^^    Is^^WfcAJi     i  Jvi&    i)|    ^JVÀ^^^IÎ  ^j,/w«î 

de  rois  et,  en  dernier  lieu,  une  figure  placée  à  gauche  du 
mousalla  et  surmontée  de  la  légende  suivante  :  «  Portrait  de 
Yézid,  fds  de  Wélid,  lils  d'Abd  el-Méiik,  meurtrier  de  son 
cousin  Wélid,  fds  de  Yézid,  fds  d'Abd  el-Mélik;  il  régna 
six  mois.  «  Je  m'élonnai  de  cette  circonstance  ainsi  que  du 
hasard  qui  avait  réuni  ces  images  à  droite  et  à  gauche  de  la 
place  occupée  par  Mountasir,  et  je  me  dis  :  «  Je  ne  pense  pas 
que  ce  règne  dure  plus  de  six  mois;  «  en  effet,  mon  pressen- 
timent se  réalisa.  En  sortant  de  cette  pièce,  je  me  rendis  chez 
Waçif  et  Boga,  qui  occupaient  le  deuxième  corps  de  logis,  et 
je  dis  à  Waçif:  «Le  tapissier  n'a  donc  pas  trouvé  autre 
chose  à  mettre  sous  les  pieds  du  Khalife  que  le  tapis  où  sont 
représentés  Yézid ,  fds  de  Wélid ,  meurtrier  de  son  cousin ,  et 
Chirweïh,  meurtrier  de  son  père  Perwiz, lesquels  ne  survé- 
curent que  six  mois  à  leur  crime  .^  »  Waçif  s'émut  de  mes  pa- 
roles et  fit  venir  Eyyoub,  fils  de  Suleïman  le  chrétien,  au- 
quel était  confiée  la  garde  des  tapis.  Quand  cet  homme  fut 
en  sa  présence,  Waçif  lui  dit  :  «N'aurais-tu  ))as  trouvé  à 


CHAPITUE  ex  VI  If.  29a 

(^»«À-*fc_iî    >-is-^^   c:^^   f*>^'   i*XJÛ   li   U^^;?  ^   '^■^   >*J   V— *-^'*»^ 

^  A   4   jHHi*J   y'    C>.^LÀi».i^    <^j»3        ^j.iajj   aV***j   i'   ^   JUà 

*Xxj  ^j^  Uo  Ub^  uJ«-is^^   iya^.    (^ys»-\  -b  lfc»i  jUJL  <xij.j»-l_5 

étendre  aujourd'hui  sous  les  pas  du  Khalife  un  tapis  autre 
que  celui  qui  était  sous  les  pieds  de  Motewekkil,  la  nuit  de 
\ événement ,  tapis  qui  représente  un  roi  de  Perse  et  d'autres 
personnages  et  qui  porte  des  traces  de  sang?  »  — ■  Le  tapissier 
répondit  :  «  C'est  le  Prince  des  Croyants  lui-même  qui  m'a 
parlé  de  ce  lapis  et  m'a  demandé  ce  qu'il  était  devenu.  Je 
lui  ai  répondu  qu'il  avait  de  vilaines  taches  et  que  mon  in- 
tention était  de  ne  plus  l'employer,  depuis  la  nuit  de  l'évé- 
netnenl.  —  «  Pourtjuoi  ne  le  fais-tu  pas  laver  et  parfumer?  » 
a  répliqué  le  Khalife.  —  Je  craignais,  répondis-je,  ([ue  ce 
ne  fût  une  révélation  pour  ceux  qui  verraient  sur  ce  tapis 
les  traces  de  \ accident.  —  «  11  est  assez  connu  sans  cela  » ,  m'a 
répondu  le  princt;,  en  laisant  allusion  au  ineurlre  de  son 
[)ère  par  les  Turcs.  En  conséquence,  nous  avons  parfumé  le 
tapis  et  l'avons  placé  sous  ses  pieds.  »  Warif  et  lioga  (irent 
alors  à  cet  homme  la  recommandation  suivante  :  «  Dès  que 
le  Prince  des  Croyants  sortira  de  rapi)arlement ,  enlève  le 
lapis  et  jctic-lc  au  feu;  •  el  en  elfet,  sitôt  après  le  départ  du 
Klialife,  il  lui  hrûlé  sous  les  yeux  de  Wacif  et  de  lioga,  — 


294  LES  PRAIRIES  D'OR. 

di.]i  0.jtj  oJji*  jSiiJi  IsIm^aJî  kiXii  ^JiJ^\  jmîxjX]  J  Jlij  -U 

Cependant  quelques  jours  plus  tard  (ajoute  Eyyoub) ,  Moun- 
tasir  réclama  de  nouveau  le  tapis  en  question.  —  «  Où  trouver 
ce  tapis  maintenant,  lui  dis-je?  —  Qu'est-il  donc  devenu?» 
fit  le  prince.  Je  lui  répondis  que  j'avais  dû  le  brûler,  par 
ordre  de  Waçif  et  de  Boga.  Il  garda  le  silence  et  ne  m'en 
reparla  plus,  sa  vie  durant,  » 

Vers  le  même  temps  Mountasir,  se  livrant  au  plaisir,  fit 
appeler  le  joueur  de  luth  Bunan,  fils  d'El-Harit,  virtuose 
distingué  qui  avait  encouru  son  ressentiment.  Quand  il  fut 
chez  le  Khalife,  Bunan  chanta  les  vers  suivants  : 

J'ai  vécu  longtemps  dans  l'attente  de  l'imam  Mohammed,  et  je  né 
croyais  pas  que  mon  attente  serait  si  longue. 

J'étais  à  la  fois  loin  de  lui  et  son  voisin,  chose  étrange!  j'étais  près  de 
lui  par  ma  demeure  et  loin  de  sa  personne. 

En  te  voyant  (ô  Khalife)  vêtu  du  manteau  rayé  du  Prophète,  il  me 
semblait  dans  ces  vêtements  et  sous  ce  turban  voir  briller  l'astre  des 
nuits. 

Je  souhaiterais  que  le  jour  de  la  fête  pût  revenir,  car  c'est  une  fête 
pour  moi  de  contempler  ton  visage. 


CHAPITRE  CXVIIF.  295 

p  ^  w 

Ces  vers  furent  récités  en  effet  le  lendemain  de  la  fêle  du 
Sacrifice,  et  Mountasir  avait,  à  cette  occasion,  dirigé  la 
prière  publique.  On  chanta  aussi,  pendant  la  même  jour- 
née, les  vers  suivants  composés  par  Mountasir  : 

Tu  m'es  apparue  en  rêve,  moins  avare  (d'amour)  et  plus  docile  que  tu 
ne  t'es  en  r(''alité. 

Que  le  ma(in  ne  peut-il  s'éloigner  et  ne  plus  se  montrer!  Que  la  nuit 
ne  peut-elle  se  prolonger  pendant  mille  ans  ! 

Si  le  sommeil  pouvait  se  vendre,  certes  lu  en  aurais  renchéri  le  cours 
parmi  les  hommes. 

Ces  autres  vers  qui  sont  également  de  sa  composition  fu- 
rent chantés  en  sa  présence  : 

Je  t'ai  vue  dans  mon  sommeil  :  il  me  semhlait  que  je  buvais  sur  tes 
lèvres  un  baiser  suave. 

Ta  main  était  dans  la  mienne  et  nous  rc]iosions  eiisctnhii;  siu'  la  même 
couche. 

Au  moment  où  j(;  m'éveillai,  ma  uiain  droite  pressait  tes  mains,  et  ta 
main  pressait  les  miemies; 

J'ai  passé  ma  joiu-née  entière  h  chercher  le  soinuu'il  pour  te  voir  dans 
mes  rêves,  et  le  sommeil  n'est  pas  venu. 


296  LES  PRAIRIES  D'OR. 


(1) 


\^JI 


^wJ    iS-^Xs-  j-^jyA\  ySXjlt^S    i«Xib    ^^^  ^Jj    ^^ij.*^l    Jb 

/yj!  (j^^-j^ib  Itf  Uj^  ^^à^  j^|^3  4>5b  j*kxàjS  «^^bi»  «^  ij*^«^5 

Ce  Khalife,  après  avoir  exilé  Obeïd  Allah  (fils  de  Yahya, 
fils  de  Khakan) ,  prit  pour  vizir  Ahmed ,  fils  d'El-Khaçib  ;  mais 
il  ne  larda  pas  à  s'en  repentir.  Ahmed  était  monté  à  cheval, 
un  jour,  avec  son  escorte,  lorsqu'un  solliciteur  lui  tendit 
un  placet  pour  lui  demander  justice;  le  vizir  tira  son  pied 
de  rétrier  et  porta  un  coup  si  violent  dans  la  poitrine  de  cet 
.homme,  qu'il  le  tua.  Un  pareil  acte  de  brutalité  s'ébruita 
parmi  le  peuple ,  et  un  poëte  de  l'époque  dit  à  ce  propos  : 

Dis  au  Khalife  :  «  Cousin  du  Pi-ophète ,  mets  une  entrave  à  ton  vizir  puis- 
qu'il rue; 

«Attache-ic  pour  l'empêcher  de  ruer;  puis,  si  tu  veux  des  richesses, 
tu  en  trouveras  chez  ton  vizir.  » 

Si  ce  poëte  eût  été  contemporain  du  vizir  Hamid,  fils 
d'Abbas,  lorsqu'il  remplissait  les  fonctions  de  ministre  auprès 
de  Mouktadir-Billah,  il  eût  été  témoin  d'actes  de  violence 
analogues  à  ceux  d'Ibn  el-Khaçib.  C'est  ainsi  que  ce  vizir 
se  jeta,  un  jour,  sur  quelqu'un  qui  lui  adressait  la  parole, 


CHAPITHE  CXVIII.  297 

(:J^-^"^lJ   C:J>-^'^-^"5  AÀ^_j^j  <i;:Aj>pî  |<Xiû  jî  iU^I  ^^  (J\jS^^ 

lui  retourna  ses  vêlements  sur  les  épaules  et  le  frappa  rude- 
ment à  la  gorge. 

Un  autre  jour,  Oumm-Mouça,  de  la  famille  de  Hachem  et 
intendante  du  palais,  ou  une  autre  femme  du  même  rang, 
s'étant  présentée  chez  lui  pour  une  réclamation  d'argent  en 
vertu  d'un  message  de  Mouktadir,  le  vizir  lui  adressa  dans 
sa  réponse  cette  parole  injurieuse  :  «  Pète  et  ramasse,  compte 
et  ne  te  trompe  pas.  »  Celte  feinme  resta  interdite;  elle  coupa 
court  à  Tafiaire  qui  l'avait  amenée  et  courut  d'un  Irail 
chez  Moukladir  cl  chez  la  sultane  pour  les  informer  de  ce 
qui  lui  arrivait;  mais  le  Khalife  (c'était  justement  un  jour 
de  concert  et  de  fête)  ordonna  à  ses  esclaves  musiciennes 
de  prendre  celle  invective  pour  ihème  de  la  chanson  du  jour. 
On  trouvera  des  détails  sur  Hamid,  ainsi  (|ue  sur  d'autres 
vizirs  des  Ahhassides  et  sur  les  Kaiihs  des  Onieyyades  jus- 
qu'à la  présente  année  WSi  de  l'hégire,  dans  noire  Histoire 
moyenne. 

Je  liens  d'Abou  '1  Ahhas  Ahmed  (fils  de  Mohammed,  fils 
deMoura,  fils  de  Ferai)  le  récil  suivant:  -.  Alniicd,  lilsd'KI- 


298  LES   PRAIRIES  D'OR. 

c1)4KJI_5  i  «;.-«i  <3vjj  b^A.*  (*5CJL5!!J  cj*XJ  O^ïjjj^jJi   (ji  JUi 

«X_^5   ^^.^-jI^  ^-M-^   ^X)  '-^"b  *^*  tj'  '^  -?  b^jitj^  X^Xjli  (J-ff^ 

LÀwo«x.i  iXS^jljJLîj  ^AJj  çj^  «ri;-^  ^Sj*^'  «^x^j  ^Ij^^JU 

L  JUi  J^ifcii    UxX*  J-i».^  cs-s"  ç.l^-yî  Ià^aawÎ  U  -IxiaJî 


Khaçib,  voyait  de  mauvais  œil  mon  père  (Mohammed), 
qui  était  un  de  ses  agents.  Quelqu'un  qui  était  attaché  au 
service  intérieur  du  palais  vint  m'avertir  que  le  ministre 
avait  envoyé  un  étranger  dans  le  lieu  de  notre  juridiction, 
en  lui  recommandant  de  sévir  contre  mon  père  et  de  lui 
extorquer  une  somme  considérable,  dont  il  me  donna  le 
chiffre.  Un  Katib  de  nos  amis  était  en  ce  moment  auprès 
de  moi;  je  m'assis  et  m'empressai  d'écrire  ces  nouvelles 
à  mon  père,  sans  plus  m'occuper  de  mon  ami.  Celui-ci 
s'accouda  sur  les  coussins  et  s'assoupit;  mais  il  se  réveilla 
bientôt  en  grand  émoi  et  îne  dit  :  «  Je  viens  d'avoir  un  rêve 
étrange;  il  me  semblait  qu'Ahmed,  fils  d'El-Khaçib, debout 
ici  devant  moi,  m'adressait  ces  mots  :  «  Le  Khalife  Mountasir 
mourra  dans  trois  jours.  »  Abou  '1  Abbas  poursuit  ainsi  sa 
narration  :  «  Je  fis  observer  à  mon  ami  que  le  Khahle  était 
alors  dans  l'hippodrome,  occupé  au  jeu  du  mail;  que  ces 
sortes  de  songes  provenaient  de  la  pituite  et  de  la  bile,  et 
enfin  que  nous  sortions  de  table.  Mais  nous  parlions  encore 
lorsque  quelqu'un  entra  et  nous  dit  :  «  J'ai  rencontré  le  vizir 


GHAPITIΠ CXVIU.  299 

(^-^  AJLaS^  i^lj,-o-Jl   Xi^kHi   ^iûiUJl   i    ^b^   -U.il  ,J.ji^<XJ 

^L*tJ^  yi»jkjtj'  (i  JUj  jbî  Uj)  iLs»-_^U)l  -Uii  ^  4:^1^  CJ^t 
^t-«   iiiilS^   v^i    «Xij         'lSJ<y>M   i^^JhA^    12a^    jj^Jùuiî    *XS  jJÛ    i^lî 

dans  les  appartements  intérieurs  [àar  el-khaçeh]\  son  vi- 
sage n'était  guère  souriant,  j'ai  voulu  en  savoir  la  cause  et 
voici  ce  qui  m'a  été  dit  :  Le  Khalife  Mountasir  est  sorti  tout 
en  nage  de  l'arène  du  mail,  il  est  allé  au  bain,  puis  il  s'est 
endormi  dans  lebadhcndj  (belvédère  garni  de  ventilateurs); 
le  froid  l'a  saisi,  et  il  a  été  pris  d'une  fièvre  int|uiétante. 
Ahmed,  fils  d'El-Khaçib  est  accouru  chez  lui  et  lui  a  dit: 
«  Comment,  Seigneur,  vous  le  savant,  vous  le  sage  du  siècle, 
vous  descendez  de  cheval,  épuisé  de  fatigue,  vous  entrez  au 
bain ,  et  vous  allez  encore  tout  en  sueur  dormir  dans  le  bad- 
hendj  !  r,  —  Eh  bien,  a  répliqué  Mountasir,  crois-tu  donc 
que  j'en  mourrai?  La  nuit  dernière,  quelqu'un  m'est  apparu 
pendant  mon  sommeil  et  m'a  annoncé  que  je  vivrai  vingt- 
cinq  ans.  J'ai  pris  ces  paroles  comme  une  promesse  de  lon- 
gévité et  j'en  ai  conclu  (jue  telle  sera  la  durée  de  mon  règne.  » 
—  Trois  jours  après  il  était  mort,  ajoute  Abou  M-Abbas,  et 
après  constatation  de  son  âge,  on  trouva  qu'il  venait  d'ac- 
complir ses  vingt-cinq  ans.  » 

Quelques  historiens  rap|)ortonl  que  ce  prince  fut  atteint 


300  LES  PPxAIRIES  D'OR. 

Jl_A_J  jjAwâviL  j.^a»JÎ  â^As  %.^  »^U^  J_5^l  J"^^  ^^•**'  t^*  (J!-'*^ 
(jv.Jt.JCwM*JLi    «X^    (vJ    <X^i    «î^^   (^"^J  ^j-âk-^î   JA^    (J-*   y^-=*- 

»|>^  ci5  J>A*^J^  &  '^•^■ii^S  Sr*"^  «i)S;J^Î  (J^A=î-  (>!?^*J'  4^ 
^  J^-A— si  »X_Jjj  w-'-ji-AoJ!  \xi  (Jl  Uj~5^^J3  (j*.^jAM^laj  iiijLaJl 

d'un  refroidissement  le  jeudi  cinquième  jour  avant  la  fin  de 
rébî  I  et  qu'il  mourut  à  l'heure  de  la  prière  de  Yasr,  le  5  de 
rébill.  La  prière  des  funérailles  fut  dite  par  Ahmed  (fils  de 
Mohammed]  Moustaïn.  Le  Khalife  Mountasir  est  le  premier 
souverain  abbasside  dont  le  tombeau  ne  fut  pas  tenu  caché; 
Habchyeh  sa  mère  sollicita  et  obtint  la  permission  de  lui 
élever  publiquement  un  tombeau  à  Samarra. 

D'après  une  autre  version ,  il  aurait  été  saigné  avec  une 
lancette  empoisonnée  par  le  médecin  Taïfouri.  Le  Khalife 
méditait  alors  de  disperser  les  troupes  turques  et  il  avait 
envoyé  Waçif  à  la  tête  d'une  armée  considérable  contre  les 
Grecs  à  Tarsous.  Un  jour,  voyant  Boga  le  jeune  qui  venait  au 
château  entouré  d'une  nombreuse  escorte  de  Turcs,  il  se 
tourna  vers  Fadl ,  fils  de  Mamoun ,  en  disant  :  «  Que  Dieu 
me  fasse  mourir,  si  je  ne  les  tue  pas  et  si  je  ne  disperse  pas 
leurs  cohortes,  en  expiation  du  meurtre  qu'ils  ont  commis 
sur  Motewekkil-Alallah  !  »  C'est  alors  que  les  Turcs,  effrayés 
de  ces  mesures  et  des  projets  qu'il   méditait  contre  eux, 


CHAPITRE  ÇXVIH.  301 

*w«l_^  :sljlj  ij\j.s>-  -fcj  c:>!i>  i/«Mi  «Xij  iCojjU!  <î(JL«  ijJv>j 
dl._Ji>  <X-x-j  »>-^j^  i^yJL^       S\:>  ioUrXj>°  p>jJi  ^^  »î  7:1^ 

^j_j  (jL«ryA..u>  /J.J   viLUi   Jy^c  /wC  lx3<xJ(   j;i   /wl  *ji  «Xij 

>  .iwn   V ,  K  U  ^  u:;^«X^  cx^^Sa^I   L^  Jl;  çj)j.4mo  UxAJiAw  ^«xJl 

cherchèrent  l'occasion  de  le  perdre.  Un  jour,  il  se  plaii^nit 
d'une  chaleur  de  sang  et  se  lit  poser  des  ventouses  humides  ; 
après  qu'on  lui  eut  tiré  trois  cents  onces  de  sang,  il  prit 
une  certaine  ])oisson  et  sentit  aussitôt  ses  forces  s'en  aller. 
On  ajoute  que  la  lancette  dont  se  servit  le  médecin  était  em- 
poisonnée. 

Ibn  Abi  'l-Dunia  a  transmis  le  récit  suivant  d'un  rêve  fait 
par  Abd  el-Mélik  (fils  de  Suleïraan ,  fils  d'Abou  Djàfar).  «  J'ai 
vu  en  songe  Motewekkil  et  Fath,  fils  de  Khakân,  au  milieu 
des  flammes;  Alohammed  Mountasir  survint  et  demanda  à 
être  admis  auprès  d'eux ,  mais  on  ne  le  lui  permit  point.  Mote- 
wekkil, se  tournant  ensuite  de  mon  côté,  me  dit  :  «  Abd  el- 
Mélik,  répète  à  Mohammed  ces  paroles  :  Tu  boiras  à  la  même 
coupe  où  tu  nous  as  fait  boire.  —  Le  lendemain  malin ,  je 
me  rendis  chez  Mountasir  et  le  trouvai  atteint  de  la  fièvre; 
je  le  visitai  assidûment ,  et  au  terme  de  sa  maladieje  l'entendis 
murmurer  ces  paroles  :  «J'ai  abrège  leur  vie  et  la  mienn«' 
sera  abrégée.  »  —  Il  mourut  en  effet  de  celte  maladie.  - 


302  LES   PRAIRIES  D'OR. 

oUaJ^I    »;.A-5^   ijtiXi^^)   -;\<jf  -îU-Jj  «X-à-L»  ^jl^j  IjUÀt  U>i.| 


J4XA*  ,>wj  *^>_5   Cj-«  «t^^   y^^   ^J-'î    ^b'^   '^Aàji  _y^_S    X*«Xiûj 

Mountasir  était  un  prince  cVune  large  tolérance,  d'un 
esprit  solide ,  très-bienfaisant  et  recherchant  toujours  le  bien  ; 
il  était  généreux,  poli  et  modéré  dans  ses  plaisirs.  Il  s'atta- 
chait à  faire  le  bien,  à  répandre  la  justice  et  à  se  rendre  d'un 
commerce  si  agréable,  que  jamais  un  autre  Khalife  ne  pût 
lui  être  comparé.  Mais,  au  contraire,  son  vizir  Ahmed,  fds 
d'El-Khaçib,  était  dénué  de  bonnes  qualités,  d'une  méchan- 
ceté insigne  et  d'une  profonde  ignorance.  Avant  ce  règne,  la 
famille  d'Abou  Talib  avait  été  cruellement  persécutée  et 
continuellement  menacée' dans  son  existence;  on  lui  inter- 
disait l'accès  du  tombeau  de  Huçeïn  et  le  territoire  de  Gareï 
(où  se  trouve  le  tombeau  d'Ali)  à  Koufah;  tout  le  parti  chiite 
en  était  également  exclus,  en  vertu  d'un  décret  rendu  par 
Motewekkil  en  l'année  236.  Ce  prince  avait,  à  la  même 
époque,  chargé  un  certain  Zeïridj  de  détruire  le  tombeau 
d'El-Iluçeïn,  fds  d'Ali  (que  Dieu  les  agrée!),  de  le  raser  au 
niveau  du  sol  et  d'en  enlever  tout  vestige,  enlin  de  punir  les 
pèlerins  (pi'il  trouverait  en  ce  lieu.  Cet  homme  promit  une 


CHAPITRE  CXVIIl.  303 

-*>v— ai  4XJuvçi  (jv^Mfcil  w«  Jlcî  f»*^^^  »L:St*^^  T^ri^^  J_jUa* 
Ji   bySi    Lv  ^^_^_J^i)l  JjJ  ^_5  ^_)-^^  ^_j   i^j  y\  Kk»  \^jj  Li 

ïjjJl  &j\jj  *x-»-l  jÀ-c  i)  y!_j  (^W-à-i  (j^  e^^l  d)j3^  t^lL 

viJ^-J^  ^Uo  ji  jT  oiïjî  cP^'^  (:r-*-^^  CJ:^*-^  '^^^  ci' 
(^^-x^S-Ji  JyM   viUi>   jj^   (*-t^*  tS^'^^  i^^J  /e-(>>^'*iJ  ^jbJlxxJî 

récompense  à  qui  porterait  le  premier  la  main  sur  le  monu- 
ment; mais  chacun,  craignant  le  châtiment  (de  Dieu),  s'y 
refusait.  Zeiridj,  prenant  une  pioche,  commença  à  démolir 
le  faîte  du  tombeau  de  Hurein;  les  maçons  se  mirent  alors 
à  l'œuvre;  ils  creusèrent  jusqu'à  la  Ibsse  et  arrivèrent  à  la 
niche  où  était  le  cercueil,  mais  ils  n'y  trouvèrent  lien,  pas 
même  quelques  vestiges  d'ossements. 

Les  choses  restèrent  en  cet  état  jus([u'à  l'avènement  de 
Mountasir.  Ce  prince  rendit  la  sécurité  à  tous;  il  abolit  tout 
d'abord  les  persécutions  et  les  mesures  d'in([uisilion  dont 
les  Alides  étaient  l'objet;  chacun  put  visiter  librement  la 
tombe  de  Huçeïn  et  celle  des  autres  descendants  d'Abou 
Talib.  Il  rendit  le  don)alne  de  Fedek  au.v  enfants  de  Haran 
et  de  Iluçein;  il  ordonna  maiidevée  des  ibndalions  pieuses 
appartenant  à  la  postérité  d'Abou  Talib,  et  défendit  que 
leurs  partisans  fussent  in([uiétés  et  persécutés.  C'est  à  celle 
circonstance  que  se  rapporlcnl  les  vers  suivants  de  Boh- 
tori  : 


304  LES  PRAIRIES  D'OR. 

Certainement  Ali  fut  meilleur  à  vos  yeux  et  plus  généreux  que  ne  le 
fut  Omar; 

A  chacun  son  mérite;  mais  quand  les  paris  (de  la  course)  sont  ouverts, 
les  chevaux  aux  pieds  marqués  de  blanc  valent  moins  que  les  chevaux 
qui  ont  des  taches  blanches  au  front. 

Un  autre  poëte,  Yézid  (fils  de  Mohammed}  Mohallebi, 
attaché  au  parti  de  la  famille  d'Abou  Talib,  rappelant  les 
épreuves  subies  par  les  Chiites  avant  cette  époque  et  Texci- 
talion  de  la  plèbe  contre  eux,  s'exprime  en  ces  termes  : 

Tu  as  relevé  les  descendants  d'Abou  Talib  de  la  honte  qu'ils  subissaient 
de  siècle  en  siècle; 

Tu  as  rétabli  la  concorde  dans  la  famille  de  Hacliem ,  et ,  à  l'Iiostilité  qui 
les  divisait ,  tu  as  vu  succéder  la  fraternité. 

Tu  as  rendu  le  calme  à  leurs  nuits,  et,  grâce  à  tes  bienfaits,  ils  ont 
oublié  leurs  ressentiments  et  leurs  liaines. 

Si  leurs  ancêtres  avaient  su  combien  tu  les  honorais,  aucun  des  leurs 
ne  l'aurait  emporté  sur  toi  dans  leur  balance. 

En    'i/|8,  Mounlasir-Billah  décréla   la  déchéance  de  .ses 


CHVPIÏHE   CXVIII.  305 

1^-5^  X-X  (JvwLà-JI  <_^  iL)«.jwi.J^  cjjv.~^5^  «^j^iî  (A-i^i  »<x-!,£ 

*^j>  <j  <_-».^Xj_5  c:^>\AaJl_j  jji_j.jiL   (j*Uji  xs^jj  ^î_^!    W^*   ijjj^J 

(l«Hix  frères  Moutazz  et  Ihrahini ,  qui  dcvaicnl  lui  snccéfler. 
MoU'Wokkil-Alallah  leur  avait  assuiV'  la  succession  au  trône 
par  une  série  de  décrets  el  de  conditions  stipulées  à  cet  efTet; 
il  avait  donné  à  chacun  de  ses  trois  fils,  à  titre  d'apanage, 
unt;  portion  de  ses  Etats,  et  réglé  sa  succession  dans  Tordre 
suivant:  Moliammed  Mountasir;  après  celui-ci,  Moutazz,  et 
après  Moutazz,  Ibrahim  Mouayyad.  C'est  dans  cet  ordre 
([u'il  les  fit  reconnaître  sous  la  foi  du  serment;  après  quoi 
il  distribua  de  grandes  richesses  et  combla  h;  peuple  de 
cadeaux  et  de  présents.  Orateurs  et  poètes,  tous  célébrèrenl 
cette  proclamation;  parmi  les  pièces  les  plus  remarquables, 
citons  ces  vers,  tirés  d'une  longue  kacideh,  dont  rauteni-  est 
Mervvan,  fils  d'Abou  l-Djunoub: 

Ils  sont  trois  rois:  iNIolianinird ,  n.'imbc.'iii  du  s.iliil  ,i\ec  l«'(|ii('l  Dini 
(lirii^r  (|iii  il  lui  plaît  ; 

AI)oii  Abd  Ail.ili .  i|iii  le  ics';('im1)Ic  par  sa  pnic  ri  i|iii  iIoiimc  conimcln 
sais  doiiiKT, 


300  LES   PBAiniF-S  D'OU. 

jv_5:_j_3L^  *x_>_£|PL".ij,  '^-3       ii^AAs:  ^J»\^.\i  f^^jj^  J<m2À}\  ^b>^ 

._^U.>S  i^-Xxj  «XJijtj  dlXiL       llx.Lî  cLx.:>  MÀAil^U  L, 
Jyij  4X^xJî  ^J^j-J  iiS:^l  »*>J_5  tj-«  b;^^  (^i  J^^^ii  i<x^  â>^ 

»x_4^  /j^  »._À_x-£>-  iX.ji-w ^jU3_5      Ia=^3î ^«aJIj (^<>^.jî 0.>5 «Xa»; <xjij 

L'excellent  Ibrahim,  le  prolccteur  du  pciiplo,  riiommc pur,  fidèle  dans 
ses  menaces  et  ses  promesses. 

Le  premier  est  la  Inmière,  le  deuxième  le  salut,  Ictroisiènie  la  justice, 
et  tous  les  trois  sont  dirigés  par  Dieu  [mcinli). 

Et  ces  vers  non  moins  parlaits  adressés  par  le  même  poëte 
à  Motewekkil  : 

Dixième  Khalife,  puisses-tu  jouir  longtemps  de  la  royauté  et  eu  assurer 
la  transmission  jusqu'au  dixième  de  tes  successeurs! 

Ue  sorte  que  tu  marcheras  à  leur  tête  et  qu'ils  ressembleront  à  ces 
astres  étiucelants  qui  font  cortège  à  la  lune  brillanir. 

Lorsque  MoleY\ekkil  eut  ainsi  régie  sa  succession  enlrc 
SCS  trois  fils,  un  poêle  connu  sous  le  surnom  de  Sclami  dû 
dans  une  ])ièce  de  vers  : 

L'élu  de  Dieu,  l'oiseau  du  boidienr,  Djàlar,  fils  de  Moliamnied,  ou 
instituant  ses  successeurs,  a  consolidé  l'édifice  de  la  religion; 

H  l'a  fortifié  eu  désignant  Mouiitasir-Biilali,  et  assuré  sa  solidité  on 
iionunanl  ensuite  Miiuta/.z  et  Mouayyad. 


CHAPITRE   CXVm.  307 

J_^— A_jrw    (Jw^-aJ^    (J-- <_J    'j-^^  >**^    AjCAjA-I   ^•À-*    45-»^   ^^\s 

J.. j  »Xo  w>jifc.  a_5«XJij  i/  (j*.U^         »uJLx.>    iuulil  tXxj  tX.4k2^À 

l-fk-M*  5y-u(U  c_>_jj.^  ^  juiji  s.^  *i  c>JtSo  c^V^^'  W****  (*"(r^'^ 

Au  nombre  des  poètes  qui  ont  parlé  de  cet  événement 
avec  la  même  élégance  de  pensée  et  de  style,  il  faut  citer 
Kdris,  (ils  d'Ahou  Hafsali,  dans  le  passage  c[ue  voici  : 

La  royauté  no  s'éioiiîiiora  jamais  de  Djàfar,  celte  lumière  du  salul,  ni 
de  ses  fds. 

Lorsque  le  Klialife  Djàfar  aura  termine  sa  carrière,  las  de  régner,  sans 
(|ue  ses  sujets  soient  ias  d'obéir, 

Moliamtned  (Mouiitasir)  sera  son  digne  successeur  et  puisse  le  peiiiilc 
le  conserver  loiii^lemps  ! 

XKnis  prolonge  avec  ton  règne  (ô  Motcwckkil)  l'attente  de  Moliamnied; 
cela  vaut  iniriix  pour  nous  et  pour  lui  cpi'unc  succession  prochaine. 

Durant  la  domination  deMountasir,  le  Yémen,  le  pays  de 
liawa/idj  et  Moroul  furent  agités  par  les  menées  d'Ahou '1- 
(Jiinioud  Charihi,  qui,  adoj)tant  la  formule  :  «  1!  n'y  acfaulre 
maître  que  Dieu»  (cf.  t.  1\',  p.  485),  forlilia  son  j)arti  en 
appelant  à  lui  tous  les  kharédjites  du  Diar-Rebyàh  et  du 
pays  des  Kurdes.  Mountasir  lui  op[)osa  luie  armée  com- 
mandée par  Sima  le  Turc;  après  plusieurs  batailles,  Sima 


308  LES   PKAIIUEN   1)01'». 

jA..ia.»   Ov^xJl    i^Js.  jvi^ij  _5.i«^lj    AjJfi   ilsi  j.AAXÀil   ^j    jt3 

^,_*i^  ^^iUI  dLUi^       ^-*^iJ:-Ui  pUili  !^^ 

s'empara  du  rebelle  el  le  livra  à  Mountasir,  qui  lui  par- 
donna, lui  fil  prêter  serment  et  le  mit  en  liberté.  Au  rapport 
de  son  vizir  Ahmed,  fils  d'El-Kbaçib  (fils  de  Dabbak  Djor- 
djani),  c'est  après  avoir  fait  grâce  à  Charibi  que  le  khalife 
prononça  ces  paroles  :  «  Il  est  plus  doux  de  pardonner  que 
d'assouvir  sa  haine,  et  la  vengeance  est  ce  qu'il  y  a  de  plus 
odieux  chez  celui  qui  commande.  « 

x\bou  Bekr,  fils  d'El-Haran,  fils  de  Doreïd,  m'a  raconle 
qu'un  Katih  entendit  en  songe  les  paroles  suivantes,  dans  la 
nuit  qui  précéda  la  matinée  où  Mountasir  fut  proclamé 
Khalife  : 

Voici  Wmam  Mountasir,  le  onzième  souverain. 

Sa  volonté,  lorsqu'il  donne  un  ordre,  est  comme  le  glaive  ([ui  tranche 
tout  ce  qu'il  rencontre; 

Son  regard,  lorsqu'il  le  dirige  sur  quelqu'un,  est  comme  la  fortune  qui 
icpand  le  bonheur  et  l'infortune. 

Ce  prince  se  montra  juste  envers  ses  sujets  et  sut  gagner 


cil  \IMII\K    CXVlll  iOO 

jX-<Jl     Js>J*>^*w    Jty^JtjO    lii^    Ui_jJ     3*^1^     «>^aJ    0»J|N.J    •y^     'Xa-'J    ^Xj 

J^i  Jjl   ^  \jbAjJii^   (J*j».l  CXÀJj  (Ji^LAMsl  *;_5^^   -Ji**-^   *-r''*->**-> 

V-i  )^ÀA>  J[jl  J  JUi  wUaJI  Jjt^j  (5^=*^  ijl-^5jiJ|  (j>AAi 

le  coHir  (les  grands  el  des  petits,  malgré  la  crainte  que  sa  sé- 
vérité leur  inspirait. 

Aboii  '1-Haran  Ahmed  (lils  d'Ali,  fds  de  Yahya),  plus 
connu  sous  le  nom  d'/è/i  cl-Ncdim  ((ils  du  courtisan),  m'a 
transmis  le  récit  suivant ,  ([ui  lui  avait  été  raconté  par  (son 
j)ère)  Ali,  lils  de  Yahya,  l'astrologue  :  «Je  n'ai  jamais  vu, 
disait  Ali,  un  homme  comparable  à  Mountasir  et  qui  sùl 
être  généreux  avec  moins  de  morgue  et  d'embarras.  Un 
jour,  il  remar([ua  (iiie  j'étais  triste  et  plongé  dans  mes  ré- 
flexions :  en  ellet,  il  y  avait  à  côté  de  mon  domaine  une  pro- 
priété dont  je  désirais  faire  l'acquisition;  j'avais,  à  iorre 
d'habileté,  décidé  celui  (|ui  la  possédait  à  n)e  la  vendre, 
malheureusement  je  n'avais  pas  à  celte  époque  la  somme 
nécessaire  à  cet  achat,  (^'esl  dans  de  lelles  dispositions  d'esprit 
(|n<'  j(;  me  présenlai  chez  Mouulasir;  frappé  d(>  mon  air 
;il)allu  el  de  mes  préoccupations,  il  me  dit  :  «.le  le  trouve, 
bien  soucieux,  que  l'esl-il  donc  arri\é?»  J'auiais  ilésiré  lui 
caclicrcettc  histoire  el  lui  laisser  ignorei' mon  a\enture,  mais 
il  nif  picss.i  (le  parler  cl  je  dus  lui   raconter  sans  di-guise- 


310  LES  PRAIRIES  D'OR. 

iw-A-ft  Ci», Ai  ^-*-«  i^<y^AS.  çX»  JliJ  ji^i  <_Àii  (j^i^^i  cxXjii 

J-xSl^   l^Stj--N«*.^   -Uxil    ^jAiÙ   /e.^î    yôî    Ijf   A^î;   t^   ^j^  *i\.i^ 

vJLjyi  -iiLiJi  JyJsl  (ji  J5  -t^UTi  ^5Uaj^  e^JsjlL  ^xÀi.j 
^j_^_ÎU  <J  j»^\ju»v  «îOi   (XJcLuwwO   iXÀff  c:^*Xï  Ci^.À.J    4>v^j  dLj^À^ 

AxX*    J>XJ     <XJC«5     UaJ!  jLo    (^X*^5^A^I    ^i>l~»-    (jî    JUi    (J-A>^ 

ment  raffaire  de  la  propriété.  «  Combien  vaut-elle  ?  me  de- 
manda le  prince.  —  Trente  mille  dirhems,  répondis-je.  — 
Et  sur  cette  somme  combien  as-tu  par  devers  toi  ?  —  Dix 
mille  dirhems.  »  Il  coupa  court  à  Tentretien  sans  me  répondre 
et  parut  ne  plus  s'occuper  de  moi.  Il  se  fit  ensuite  apporter 
un  encrier  et  une  feuille  de  papier,  apposa  son  sceau  au  bas 
d'un  décret  dont  j'ignorais  la  teneur,  et,  faisant  signe  à  un 
serviteur  qui  se  tenait  derrière  lui,  il  lui  donna  un  ordre 
{[u  il  me  fut  impossible  d'entendre.  Le  page  partit  en  loule 
hâte,  et  le  Khalife  chercha  à  me  distraire  en  faisant  lui- 
même  les  frais  de  la  conversation,  jusrpi'au  retour  de  son 
émissaire.  Quand  celui-ci  fut  en  sa  présence,  Mountasir  se 
leva  et  me  dit:  «  Ali,  rentre,  si  tu  veux,  chez  toi.  »  .l'avais 
estimé,  quand  le  prince  m'interrogea,  qu'il  me  donnerait  ou 
la  somme  entière  ou  la  moitié,  aussi  me  relirai-je  consterné. 
Quand  j'arrivai  devant  ma  demeure,  mon  intendant  vint  au- 
devant  de  moi  et  me  dit  :  «  Un  valet  du  Prince  des  Croyants 
est  venu  tantôt  avec  une  mule  chargée  de  deux  gronps  d'ar- 
gent, il  m'a  remis  cette  sojume  et  m'en  a  demandé  reçu.  -> 


(:iiAprn\K  cxviii.  .ui 

/y-«vJi  -JOyji^-i  ^xAAilj|  4^i»-lA»  (Ji  (^vJj_5  i^  i-^^^-s»-^^  J  *^A=*- 
^^"  ^LaJI  ^^  l^  :>\,.<--Cii)lj  l.^^X.»««Jo  ^^^_J.A^  c>J^v^jj 

A.^_5  AjLsi=i  (^j^  iLtl;r  ''^-«iUj  >J;U5  pl>l  i^^oXÀi,!  ^^  Ji* 

Je  lie  inc  j)()sswlais  plus  île  joie,  conlinue  Ali,  el  je  lenlrui 
chez  moi  refusant  de  croire  aux  paroles  de  mon  inleucianl 
jusqu'à  00  (ju'il  m'oùL  montré  les  tieux  j^roups.  Après  avoir 
reiuoroié  Dieu  de  la  laveur  ([u'il  \OJjait  de  m'aooorcler,  je  lis 
appeler  sur-le-champ  le  propriétaire  du  domaine  ou  (pies- 
lion,  je  le  payai  intéi^ralemenl  et  consacrai  ma  journée  aux 
Ibrmalilés  de  la  j)ris(;  de  possession  et  tles  témoignages  recjuis 
pour  la  vente.  Le  lendemain  matin,  je  me  présonlai  cluv. 
Moimlasir,  mais  il  ne  me  dit  pas  un  mot  ([ui  eût  Irait  au 
domaine  et  il  me  lit  jamais  la  moindre  question  à  cel  égard 
juscprà  ce  que  la  mort  nous  séparât  pour  toujours.  » 

FadI,  (ils  d'Abou  Talier,  ra|)|)orle  ce  ([ui  suit,  dans  sou 
livre  intitulé  Ilisloire  des  Auteurs,  d'après  le  récit  d'Abou 
Otman  Sàkl,  lils  de  Mohammed  le  jeune,  mawla  du  Mudile. 
'I  iMounlasii',  pcndanl  la  dui'eo  do  son  règne,  admellail  dans 
son  iiilimilé  (pielcpu's  ((mu  lisans  el  onlre  aulios  iialili  (lils 
de  Moliamnioil) ,  siniiommc  llaiiii.  lu  jour,  on  causait  de 
r.iinnui  ol   des  aii.K'lieninils  du  cn-ur;   Mouiilasii    dcni  inda 


312  LES    PUAilUl'S    î)'Oi;. 

E 

i_:A„£4XAa.j  «Xjjj  -cl/oiaii  «XÀ^  (J,w.ààJ!  -'iai^  (^3"/r^'  '^■^'  *X࣠ (^I  Ji 

wjfc.^  JLîj  ti^lSj  J^jXiaJ!  Aa-Xj!  (j-«  J_^ii  U  o^Jc>  lxl_5  <jî^>wJi 
(jl-x-ll}  ^-i-A-A-j  r'ijv-^^  '-r'y^^  S_5«X£  *^^  Jo  ^^^IxJi  i^S^M*^ 
cjj.xJl_5  X.^>s»^  j.5«XJIj  aK.£ïVj  «XxaJÎ_5  aIjj  JtXxJîj  «î^j»^  iji?"-  ' 
jî<X.Ji  f»^*wj3  *^  Vj'^'?  :s\ïj.iî_5  5*5A.j  v^«-clAjaj  J»^)^!^  a^^-j-j 

à  rua  des  assistants  quelle  était  la  perte  qui  afTectait  Tâme  le 
plus  douloureusement.  «  Cest,  répondit-il,  la  j)erte  d'un  ami 
auquel  on  s'est  idenlifié,  c'est  la  mort  d'une  personne  avec 
laquelle  on  est  intimement  lié.  »  —  Un  autre  courtisan  ré- 
pondit en  ces  termes  :  «  Rien  n'égale  en  violence  le  trouble 
d'esprit  de  celui  qui  aime,  et  la  douleur  d'une  àme  sevrée 
de  l'objet  de  sa  passion.  Les  reproches  des  censeurs  déchirent 
les  cœurs  où  règne  l'amour  et  s'attachent  aux  oreilles  des 
amants  comme  des  anneaux;  les  tourments  de  l'amour  sont 
comme  un  feu  ardent  qui  les  consunie;  leurs  souffrances 
secrètes  font  jaillir  de  leurs  yeux  des  laimes  aussi  abon- 
dantes que  l'eau  versée  par  la  roue  hydraulique.  Ceux-là 
seulement  peuvent  coujprench'e  ce  que  je  dis,  qui  ont  pleuré 
en  écoutant  une  chanson  ou  en  contemplant  les  ruines  (du 
séjour  de  l'amie).»  — «Pauvre  amoureux,  repi'it  un  troi- 
sième, il  n'a  partout  que  des  ennemis  :  le  souflle  du  Vent 
i'émeul,le  scintillement  de  l'éclair  le  piive  de  sommeil;  les 
reproches  l'attristent;  l'absence  le  mine;  le  souvenir  est  pour 
lui  une  souffrance  et  l'approche  de  l'objel  aimé,  uneexcila- 
lion;  la  nuit  redouble  ses  tourments;  le  sommeil   lui!  loin 


ciiAPirivi::  i.wiii.  :iio 

^^**ifci  vXiij,  p|_)^  s!  jviû  ii_5  *i^i  jv.A^  ^;s?  L;  <XxaJI_5  t-jJUL 

de  ses  paupières;  la  vue  de  la  maison  abandonnée  le  con- 
sume; Taspect  des  ruines  fait  couler  ses  larmes.  C'est  en  vain 
que  les  amants  cherchent  tour  à  tour  dans  l'absence  et  dans 
le  retour  un  remède  à  leurs  maux:  ce  remède  est  ineflicace 
et  il  n'y  a  pas  d'adoucissement  à  leur  souffrance;  c'est  ce 
qu'expriment  avec  éloquence  les  vers  que  voici  : 

On  pi(?lciij  ((uiiu  amant  se  lasse  s'il  est  prcs  de  l'objet  de  son  amour, 
cl  que  l'absence  le  guérit  de  sa  passion. 

J'ai  expérimenté  tous  les  rcmëdes  sans  v  trouver  ma  guérison  :  seule- 
ment il  vaut  mieux  être  près  du  séjour  de  son  amie  que  d'en  être  éloigné. 

Chacun  donna  son  avis  et  la  conversation  roida  lonc;- 
temps  sur  ce  sujet.  Mountasir  demanda  enfin  à  Salih  ((ils  de 
Molianiined)  flariri  s'il  avait  jamais  été  amoureux.  «Oui, 
Sire,  n'-pondil-il,  et  il  y  a  encore  trace  de  cet  amour  dans 
mon  (-(fiir.  —  \']l  (|uel  était  l'ohjet  de  Ion  amour?"  .Salil» 
conlinna  en  ces  ternies  :  ■■  .riiabilais  rxissalali,  sous  le  rèy;iie 
de  Moiilarcm.  Kaniali,  une  des  esclaves-mères  a|)partenaul  à 
U((  liid  ,  ,i\;iii  iiiK  ji'iini!  esclave  <|ui  élait  chargée  de  sescom 


314  LES  PRAiniES   D'OU. 

^♦i'  ^j-\^^^  J;   ti^A«Jl?  (^jî^i^  '^•^^  ov.^.^  <S-^^J  '■^^  ^Ir^^y 

^jl     vA^^Î    Iv-jÎ    <^t^    jUi    iC^Î    Ci^jfe'  (jî    l^J^AAwI   ^1     iJtia^    Ci*.3l^ 

»X:rijj.-waXÀii  U*Xà  Jls  ii>UI  J^^îj  AiUJî  ^la^l  J>.Ji  Jî  j 

missions,  s'occupait  de  ses  intérêts  et  voyait  les  individus  aux- 
quels sa  maîtresse,  alors  intendante  du  palais,  pouvait  avoir 
allairc.  Celte  jeune  fille  passait  souvent  près  de  moi,  je  la 
saluais  respectneuseuient  et  la  regardais  avec  attention;  plus 
lard  je  lui  écrivis,  mais  elle  chassa  mon  messager  avec  des 
menaces  à  mon  adresse.  Je  m'asseyais  sur  sa  roule  pour  lui 
parler;  mais,  lorsquelle  m'a[)ercevait,  elle  riait  de  moi  et 
faisait  signe  à  ses  compagnes  de  se  jouer  de  moi  et  de  me 
railler.  J'ai  enfin  cessé  de  la  voir,  mais  il  y  a  encore  au  fond 
de  mon  cœur  une  llainme  qui  ne  s'éteinlpas,  une  soil  que 
lien  n'apaise,  un  mal  qui  se  renouvelle  sans  cesse,  — Veux- 
lu  que  je  fasse  venir  la  iielle.^  lui  demanda  le  Khalife;  si 
elle  esLlil)re,jcle  la  lais  épouser;  je  l'achèle  si  elle  estescla\e. 
—  Prince,  répondit  Salih,  je  n'ai  pas  de  plus  vif  désir,  de 
besoin  plus  ardent.  »  Mounlasir  faisant  appeler  Ahmed,  fils 
de  Kliarih,  lui  prescrivit  d'expédier  un  page  exclusivcmenl 
cliargé  de  celle  alfaire  avec  une  lettre  très-pressanle  poui 
Ibrahim,  fils  d'Ishak,  et  pour  l'eunuque  tîalih,  administra 


c.HAPiTrj::  cxviu.  .'nr^ 

U^w«L;ij    L^yjuA.^   2(w'À.À^         l  .lA  }fi-   oVJj    l*n.<gj.^  !3>-^    vAil^li 

leur  (lu  harem  royal  à  liagdad.  Le  messager  se  mil  en  roule. 
L'esclave  avait  été  affranchie  par  sa  maîtresse  Kainah,  cl 
elle  avait  passé  de  la  classe  des  jeunes  esclaves  dans  celle 
(les  femmes  majeures.  On  la  conduisit  de\ant  Mounlasir, 
(|ui  la  regarda  attentivement;  il  vit  une  i'emme  déjà  vieille, 
courbée  v.l  flétrie  par  les  années,  mais  ayant  conservé  quel- 
(|ues  restes  de  son  ancieime  beauté  :  «  Veu\-tu  (|ue  je  te 
marie?»  lui  dit-il.  —  Prince,  répondit-elle,  je  nv.  suis  que 
volie  servante,  \olre  allranchie,  faites  ce  qu'il  vous  plaira.  » 
Mounlasir  ap[)ela  Salili,  l'unit  à  son  ancienne  maîtresse  et 
lui  louinil  une  dol;  ensuite,  voulant  se  divertir,  il  ordonna 
qu'on  lui  ap()orlàt  des  noix  recouvertes  d'une  feuille  de 
|)l<)inl)  et  des  amandes  enduites  tie  safran  et  il  les  répandit  (en 
guise  d(!  pièces  d'or]  sur  les  deux  époux..  Celte  femme  vécul 
longl(Mn|)s  avec  son  mari,  mais  celui-ci  liiiil  par  s'en  lasser 
et  il  s'en  sépara,  (l'esl  à  ce  mariage  «(ue  se  r;q)porlenl  les 
\ers  suivants  de   Vàkoub  'l'ammar  : 

QiiL'  Dieu  .iccoidc  ii  Ahoii   l-J*'a<ll  ( Salili    une  \ic  cxciiiiilf  de  (khiIjIi  ! 


:il(>  LES   PRAllUES   D'Or,. 

(VJ iy—'S^     ^  \ 'À il  .  L^-.Aw\_,£    »_A.Aâ.J  I     /jjj 


Qu'il  l'admelte  au  nombre  des  saints  ,  car  c'est  un  homme  tlonl  i'amoui 
est  aussi  ardent  que  sincère  ! 

Il  fut  amoureux,  mais  en  vile  du  mariage,  et  n aspira  qu'à  le  conclure. 

Epris  qu'il  était  d'une  belle  dont  les  cheveux  étaient  teints  de  henné 
mélangé  de  noix  de  galle  ; 

[-U  plus  belle  des  créatures   de  Dieu  sous  son  diadème  incrusté  de 
picrrcric^. 

Il  eut  le  don  de  la  patience  à  son  égard,  il  sut  attendre  et  épier  l'oc- 
casion. 

Cette  vieille  a  inspiré  une  Toile  passion  à  ce  vieillard  accroupi  sur  ses 
îaîons; 

ils  ont  mué  tous  les  deux  au  temps  de  Noé,  le  constructeur  de  l'arche. 

Quelle  félicilé  il  eût  goûtée,  n'étaient  les  amandes  et  les  noix  plom- 
bées ! 
.  Que  ne  s'est-il  plutôt  esquivé  en  lui  laissant  sa  dot  ? 

Car  .\bou  '1-Djautlau  (coguomen jocosimi  «verctri»)  se  conlraclc  et  se 
ride  aiqjrés  (r(,'lle. 

\l)Ou  Oinuii)  Sait!  (lils  tic  Mohaïunictl  ic  jctiiic)  racontr 
et!  (jui    suit:    «  Mounlasir,   jx'iidant  (Jii'il  fiait   ati   })oiivoir, 


ciiAPiTUi':  cwiii.  :u7 

^   <\À,*fcv^  ^;'!^  c:*,ôj.c  (^^\.jàvii   (jiaXAi   ovjl^  ^W"   ij'^JUw.'»^ 

(^JL*»i_j  Aaï  t5^'i  *X^  c^/^  U  AxJl  c:*.j^ij  aaJI  4^>-Q^3  l^ 
C^J-^'^  'l^j   j^_5   <Vjl4   yl<X   Aj^i^lî  4^j~s^3   (S^'^-^   (^y^ 

m'envoya  en  Egypte  avec  une  mission  pour  le  sultan  de  ce 
pays.  J'y  devins  amoureux  d'une  jeune  fille  qu'un  marchand 
d'esclaves  avait  exposée  en  vente;  elle  était  admirablement 
faite,  d'un  extérieur  charmant,  et  ses  qualités,  ses  perfec- 
tions lui  donnaient  une  grande  valeur.  J'en  offris  un  bon 
prix,  mais  son  maître  refusa  de  la  vendre  moins  de  mille 
dinars,  somme  que  je  n'avais  pas  alors  à  ma  disposition. 
Forcé  de  partir,  j'emportai  son  souvenir  dans  mon  cœur;  un 
amour  sérieux  prit  racine  en  moi,  et  je  regrettai  d'avoir  laissé 
écha|)pcr  l'occasion  d'acheter  celte  esclave.  A  mon  retour, 
api'ès  l'accomplissement  de  ma  mission  et  le  compte  que 
j'en  rendis  au  khalife,  il  approuva  la  façon  dont  je  l'avais 
remplie  et  m'interrogea  sur  ma  situation  et  mes  besoins.  Je 
lui  parlai  de  la  jeune  iille  et  lui  révélai  l'amour  qu'elle 
m'avait  inspiré,  mais  il  me  tourna  les  talons.  Plus  il  se  mon- 
trait sévère  à  mon  égard,  plus  mou  cœur  était  sous  le 
charme,  et  plus  ma  patience  s'aiVaiblissail;  je  cherchai  l'oubli 
auprès  d\'iulr(\s  femmes,  mais  je  ne  lis  (pralimenler  mon 
amour,  sans  li()u\cr  aii(tin<;  cuiisuliliou.  (Icpciidaiii  Moun- 


318  LES   PRAIRIES  D'OU. 

,_^_^l_^  (Jî  4-aJ:A->  y*  «_,,^.Aa.isL  /jj  *X.^i  v>«5  «Xi  y\^  »AAaJt 
<JI    l^^îiij  l^xà  3^*>s,;tà  l^À^  J-«w_5   I^aJÎ  jJâÀ*  &<y.j>.S-  c^jLas^} 

lasîr,  toutes  les  fois  que  je  me  présentais  devant  lui  ou  que 
j'allais  le  quitter,  se  ])laisait  à  me  parler  de  cette  jeune  fille 
et  à  exciter  ma  passion  pour  elle;  vainement  j'employais 
en  ma  faveur  ses  courtisans,  ses  intimes,  celles  de  ses  es- 
claves qu'il  avait  rendues  mères  et  qu'il  affectionnait  le  plus, 
et  jusqu'à  son  aïeide  Oiimm  el-Khalifeh,  afin  d'obtenir  qu'il 
achetât  pour  moi  celle  que  j'aimais,  il  ne  m'accordait  au- 
cune réponse  favorable  et  me  faisait  honte  de  mon  peu  de 
résignation.  Mais  il  avait  ordonné  à  son  vizir  Ahmed,  fils 
'd'El-Khaçib ,  d'écrire  au  gouverneur  d'Egypte  afin  qu'il 
achetât  cette  esclave  et  qu'il  la  lui  envoyât;  tout  cela  à  mon 
insu.  Ses  ordres  furent  suivis.  Lorsqu'elle  fut  en  sa  présence, 
qu'il  l'eut  vue  et  entendue,  il  me  trouva  excusable  de 
l'aimer,  et  il  la  confia  à  la  surintendante  de  ses  esclaves 
pour  qu'elle  perfectionnât  son  éducation.  Un  beau  jour,  il 
me  fit  asseoir  dans  son  salon  et  ordonna  qu'on  amenât  l'es- 
clave jus([u'au  îideaii.  Dès  ([ne  j'entendis  son  chant  je  com- 
])vis  que  c'était  ell(\  Je  n'aurais  pas  voulu  montrer  que  je 
l'avais  reconnue,  mais  j'étais  à  bout  de  lorres  eljf  iiahisnies 


CH AiMTnr:  cxviii.  :ii<) 

j^\^  L-r._Àwo  A.A.x-.«w  jj!  A.A^il  <— v-\.j  l»^-^  L^^v^  rr^^  '-' 
Ji  oi— i:-:îl  ,_^Jl4-^  *'>«'•«  A-*fcÀJ  cXjUJI^  cja-aJS^  I4JU  c>-«»«^.t 

secrètes  émotions.  —  «Sàkl,  ([iras-tu  donc?»  nie  dcniunda 
le  Khalife.  —  Rien,  Sire,  -•  répondis-je.  11  fit  choix;  iTim  air 
que  je  hii  avais  dit  avoir  cnlcnthi  clianter  par  colle  esciav»' 
avec  le  plus  vit"  plaisir;  elle  le  chaula.  «  Connais-lu  ce  mor- 
ceau? »  me  demanda-l-il.  —  Vraimcnl  oui,  Prince,  et  j'espé- 
rais obtenir  celle  qui  le  chante,  mais,  aujourd'hui,  c'en  est 
lait  de  mes  es])érances;  je  ressemble  à  un  homnu;  ((ui  se 
serait  tué  de  ses  propres  mains  et  (jui  aurait  volonlaire- 
nicnt  appelé  la  morl  sur  sa  tèle.  »  —  Non.  Sàid,  répondit 
le  Klialilé,  c'est  pour  toi  seul  que  j'ai  acheté  cette  jeune 
Idlc,  et  Dieu  m'est  témoin  que  je  n'ai  vu  son  visage  (|u'une 
Ibis,  lorsrpie  j'allai  la  visiter  au  moment  oii  elle  se  reposait 
des  fatigues  du  voyage  et  des  ennuis  d'un  changement  de 
séjour.  Maintenant  elle  est  à  toi.  «  Je  remerciai  le  jirince 
aulaul  ([uc  je  pus  hî  faire  et  l'assistance  joignit  ses  renier- 
cîmi'uls  au\  miens;  puis  il  donna  ses  ordres  et  la  jeune 
esclave  lut  ])arér  et  conduite  dans  ma  demeure,  .h»  revins 
ainsi  à   la   \  ic    après    a\oii    failli    mourir  de  désespoir;   cllr 


:520  LES   PUAIRIES  D'Ol^. 

(j^  '^)  JXifc!  tXij  ^3  L^À.-»  ^2-i  (^^-XÀs  sX».î  ^_5  ^i^.j|  j^ 

cy'vî^-*  tji   Ajjîlji.â  J)_jJS   tji    dLJi   ii5^<  JsM   \^Mf.s   A.«>A(Î  j."^  *Xj 

i^^s-   liUi   v.A>.â    iXjfej'U  ijiJl^i   ij^l^aJ   tiljS   «>..^â!àj   lùjc   8  Js,^!» 

devint  mon  épouse  préférée  et  les  enfants  qu'elle  me  donna 
furent  les  plus  aimés  de  mes  enfants,  » 

Parmi  les  anecdotes  piquantes  dont  les  héros  sont  de 
joyeux  personnages  et  des  libertins,  en  voici  une  qui  a  été 
transmise  à  Abou  '1-Fadl,  fils  d'Abou  Taher,  par  Ahmed,  fds 
d'El-îIarit  Djezzar,  d'après  le  l'écit  d'Abou  'l-Haran  Medaïni 
et  d'Abou  Ali  Hirmazi.  Il  y  avait  à  la  Mecque  un  libertin 
qui  réunissait  chez  lui  des  hommes  et  des  femmes  dans 
un  but  des  plus  suspects  :  c'était  un  chérif  de  la  famille 
Koreïchilc,  mais  on  ne  cite  pas  son  nom.  Sur  la  plainte  des 
habitants  de  la  Mecque,  le  gouverneur  l'exila  à  Arafat.  Cet 
homme  y  établit  sa  demeure,  puis  il  revint  secrètement  en 
ville,  y  retrouva  ses  compagnons  de  débauche  de  l'un  et  de 
l'autre  sexe  et  leur  demanda  pourquoi  ils  se  tenaient  éloignés 
de  lui.  — «  Comment  te  voir,  lui  dirent-ils,  puisque  tu  ha- 
biles Arafat?  —  Une  course  d'àne  de  deux  dirhems,  répli- 
(pia-t-il,  et  vous  trouverez  chez  moi  la  sécurité  et  le  repos, 
la  retraite  et  le  plaisir.  »  Ceux-ci  convinrent  qu'il  disait  vrai 
et  retournèrent  chez  lui;  leurs  \isites  y  furent  si  fréquentes 


CHAPITH!:  ex  VI  II.  321 

eAjU=i  (jvj  ^^^3   ^A5  s>mmÀj  Ajàfi/Î  j.x«iJLî   Jl  c:^AA9  AMi 

(Ji  l_.<^À_A.<^jj  0._)j\smj^  f-*^  a«Xsfc.lj  «s^j^^  ^-^^JS:»  Jî^ 

«Xj  ^3  Jb  loUuuJi  (JîjJij  l^  S^ijl^  *^^  î<Xiî>   0«.ju  U  JUi 

t-^_^i  Jb  AMI  ^tN-c  l,  jLj  :^  JLj^y,^^^!  amî  ^.^i  j.   Ai  (^ 

que  plusieurs  enfants  et  esclaves  clo  la  Mecque  devinrent 
les  victimes  de  leurs  désordres.  Nouvelle  plainte  adressée  au 
j^ouverneur;  ce  dernier  se  fit  amener  le  coupable:  «Ennemi 
de  Dieu,  lui  dit-il,  je  t'aviiis  chassé  de  la  ville  sainte,  et  tu 
es  allé  au  Monument  vénérable  (c'est-à-dire  près  de  Mouzde- 
lifah;  cf.  Komn,  ii,  19/i)  pour  y  commettre  des  désordres 
et  des  infamies  de  toute  sorte  !  — Emir  que  Dieu  favorise! 
répondit  Taccusé,  on  me  calomnie,  on  me  jalouse.  »  A  cela 
les  Mecquoi»  répondirent  :  «  Entre  nous  et  lui  une  seule 
preuve  sullira  :  réunissez  les  ânes  des  loueurs  et  lâchez-les 
du  côté  d'Arafat  ;  s'ils  ne  vont  pas  droit  au  logis  de  cet  homme, 
()ar  riiabiludc  (jue  les  libertins  et  les  débauchés  leur  ont 
fait  prendre  tle  s'y  arrêter,  vous  lui  donnerez  raison.  — 
C'est,  en  elfet,  un  indice  sullisani ,  »  dit  le  gouverneur,  et,  sur 
.son  ortin',  les  ânes  lurent  rassemblée  et  mis  en  liberté.  Ils 
.s'arrêtèrent  devant  la  demeure  en  question.  Le  gouverneur 
en  fut  informé  par  ses  agcnis,  il  s'écria  (pi'il  n'était  pas 
besoin  (rautre  preuve  et  lit  (h'shabiller  le  coupable;  celui-ci. 
;i  la  vue  du  bouireaii  aiincdc  son  loticl,  dil  au  i^ouvcrneur: 


322  LES  PRAIRIES  D'OR. 

CyLA.J>-«J     CdU:>U^3     ^^^jU^Î_j     yl^w^r*.  jU,ii^î     ^L>  jJkrOXÀ^^j 

^  dJJs5^  àj..Sij^Jî  ^JlJrî_5  A.x.Jl£  JL^iiij  iu^Ul  *^i)î 

jjo^xJCj  ^  ^4À^  cjLaJS  jS   &\X^Aâ  U  Là.J>  il  la-A«5^î   <_>LxJJÎ 

u.Emir  que  Dieu  favorise,  il  faut  donc  absolument  que  je 
sois  fouetté?  —  Il  le  faut,  ennemi  de  Dieu.  —  Eli  bien, 
frappez,  répliqua  le  coupable,  les  coups  de  fouet  ne  me 
seront  pas  plus  douloureux  que  i(>s  sarcasmes  que  vont  nous 
lancer  les  habitants  de  flrak.  Les  Mecquois,  dironl-ils,  ac- 
ceptent en  justice  le  témoignage  des  ânes,  eux  qui  nous  re- 
prochent de  nous  contenter  d'un  seul  témoin  et  de  déférer 
le  serment  au  demandeur.  »  —  Tu  ne  seras  pas  fouetté  au- 
jourd'hui, »  répondit  le  gouverneur  en  riant;  puis  il  lui  ren- 
dit la  liberté  et  cessa  de  l'inquiéter. 

Les  faits  intéressants  de  la  vie  de  Mountasir,  ses  poésies, 
ses  anecdotes  amusantes,  ses  réunions  intimes,  les  lettres  et 
correspondances  qui  émanèrent  de  lui  avant  son  avènement 
au  trône,  tout  cela,  ou  du  moins  tout  ce  que  nous  avons 
jugé  digne  d'intérêt  et  que  nous  n'avons  pas  cité  ici,  est  rap- 
porté en  détail  dans  nos  Annales  historiques,  ouvrage  qui 
traite  des  peuples  anciens,  des  races  éteintes  et  des  royaumes 
qui  ont  disparu.  Il  en  est  de  même  de  notre  Hisioire  moyenne, 
car  ce  que  nous  insérons  dans  un  de  nos  livres  nous  ne  le 
faisons  point  passer  dans  un  autre.  S'il  en  étail  aulremonl. 


cil APITKE  CXIX.  32.H 

À^.^.Ai2.j  L)Lx5   c_>Uwt   ij\_i6  (j^  Li-ftl^   O^jtj   ij)%^A«^   )js.>.U 

t 

cjliiil  kJJ^^  jLvi^il!  *xJI_^i  y^  ^*»*.)  U»  fcj,v»*o»-  ^^  oiAÀAJixJl 

il  n'y  aurait  aucune  dilTéronce  entre  eux  et  le  tout  ne  for- 
merait qu'un  seul  et  même  ouvrage.  Une  lois  le  préseni 
livre  teroiiné,  nous  en  rédigerons  un  autre  qui  renfermera 
lOLilcs  sortes  de  sujets,  sans  nous  astreindre  à  un  plan  ré- 
gulier, ni  à  un  ordre  méthodique  de  rédaction;  nous  y  réu- 
nirons, au  gré  de  notre  fantaisie,  des  récits  intéressants,  des 
nu'Ianges  littéraires  et  des  renseignements  \ariés;  ce  livre 
sera,  s'il  plaît  à  Dieu,  la  suile  de  nos  j)remiers  écrits  et  \o 
complément  de  nos  travaux  antérieurs. 

CHAPITRE  CXIX. 

KIIAI.IFAT   DE   MOSTA  I  N-IU  I.LA  II. 

Ahmed  (hls  de  Mohammed,  fils  de  Moiitarem)  Moslaïii 
hillah  fui  proclamé  le  jour  iiu"'me  (le  la  moi  I  de  Mounlasir, 
cY'st-à-dire  le  dimanche  5  tic  rt'-hi  II.   ■>'iS  de  Thégire.  Son 


354  LES  PU  AI  ni  KS  D'OU. 

^ii  A_s!^\„J=L  h~Mi^  ^,.A«,.x.j  !t.X.i.^j  ij;^'^  ^-6^  'J^'*^.  M'S'^-^  ^-^^ 

CJ.'^^X.S  J<.^..'i»    y.^^^]    -N^jlx^    (^Àah   cl'^^S    AX*^Ai».    cxj&^^   ^JC*ii 

•   )6,_X_ia.     Cl'iLXj    -pl.X.JjiJS     -fcj     AjIî^     O.JC^     J-^-^^     A*<«*«0_5    (^vÀaw 

surnom  patronymique  était  Abou'I-Ahhas;  sa  mère,  esclave 
d'origine  slave,  se  nommait  Mo{iA:/mr?A-.  Il  prononça  sa  propre 
déchéance  et  abandonna  le  khalifal  à  INIoutazz  après  avoir 
régné  trois  ans  et  huit  mois  ou,  selon  d'autres,  trois  ans  et 
neuf  mois;  il  fut  assassine  le  mercredi  3  du  mois  chawal , 
202  de  l'hégire,  à  l'âge  de  trente-cinq  ans. 

RÉSUiré  DE    SON    HISTOIRE    ET    DE    SA   VIE;   PÎIIXCIPAUX    ÉVÉNEMENTS 
DE   SON   l'.ÈGNE. 

Mostaïn-Billali  prit  pour  vizir  xAbou  Mouça  Outamich, 
mais  le  véritable  ministre,  celui  qui  en  exerça  réellement  les 
fonctions,  fut  un  secrétaire  d'Outamich  nommé  Chiidjd,  (ils 
de  Kaçem;  après  le  meurtre  d'Outamich  et  de  son  secrétaire, 
le  poste  de  vizir  fut  occupi'  par  Ahmed  (fils  de  Salih,  fils  de 
Cliirzad).  Lorsque  le  meurtre  de  Baguir  le  Turc,  par  ordre 
do  \Yaçif  et  de  lioga,  souleva  les  affranchis  (turcs),  Wacil 


cil  Al'lTilK  CXIX.  .V2:, 

et  i)o<,'a  sairuiiciit  à  Haydacl  ciiimenniil  avec  eux  le  Klialile 
Moslaïn,  auquel  ils  fixèrenl  pour  résidence  riiùtel  de  Mo- 
hainined,  nisd'AIx!  Allah,  iils  de  Talicr  (moharrem  261  de 
riicj,nie).  AJostaiii  lui  dépouillé  de  son  aulorilé  pai-  Boi^a  cl 
VVarir,  ([ui  régnaient  en  maîtres  absolus;  puis  Bagdad  fut 
assiégée,  comme  nous  l'avons  raconté  dans  le  Livre  Moyen, 
Les  vers  suivants  composés  à  rell<>  é|)o<|uc  se  rap|)orlenl  à 
Mostaïn  : 

l.f  Rliiililc,  eiirermr  dans  mie  cage  eiilrc  Wiiçifel  lioi^a, 

liépèli;  les  mois  «m'il^  lui  iippreiiiieiit ,  coinine  ii;  l'erall  un  |ieiTO(|iiel. 

Mostaïn  avait  exilé  en  Crète  (l'ancien  ministre)  Alnninl, 
Iils  crid-Kliaril),  en  2/1»  de  l'hégire;  plus  lard  il  exila  Oheïd 
Allah  (Iils  de  Yahya,  Pds  d(>  khakan)  à  lîarkah;  il  prit  alors 
pom  vizir  Yra  ,  Iils  de  Farrokhaiichaii ,  et  j)lara  Sàïd,  (ils  de 
Uon)eïd,à  la  h-lc  <lii  hiircaii  des  dépêches  (secrélaireric 
d'I'llai).  Sàïd  avail  01  iif  ■,;!  iMcinoiic  des  l'ails  les   plus  inic 


■yn\  LES  PRAIIUES   D'01\. 

cl)*X-s»-   iiî   Lx-X-tf  |fcw*.]S   (jyw   li   U^.xaX-0  jlx^^l    ^^  i>l:^M»j* 


*ij,i_j) 


J_ji_ji  wi5tXji_j  ^^AJCÀ^  (j;iiAxJi^         ii_A_J»._,«   La-jiXjÎj  ^^-«-r? 


AMi 


ressants  de  l'histoire  et  des  meilleures  poésies;  versé  dans 
toutes  les  connaissances,  il  rajDportait  d'utiles  traditions  et  ses 
(nitretiens  étaient  instruclifs.  Il  a  composé  un  grand  nombre 
de  beaux  vers;  nous  choisissons  parmi  les  plus  admirés  les 
fragments  que  voici  : 

Je  l'effrayais  par  la  menace  d'une  malédiction,  (juand  je  craignais  de 
le  trouver  en  faute; 

Mais  depuis  qu'il  persévère  dans  l'injustice,  j'ai  cessé  de  maudire  le 
coupable. 

Et  ces  vers  : 

O  ma  maîtresse,  pourquoi  faut-il  queje  te  trouve  si  avare,  et  que  celui 
(jui  le  demande  davantage  demeure  condamné  à  \\\\  refus? 

Tu  ressembles  au  monde  d'ici-bas  dont  on  blâme  sans  cesse  les  ca- 
prices :  nous  le  poursuivons  de  nos  reproches  et  nous  sonmies  ses  esclaves. 

El  ceux-ci  : 

Dieu  le  sait,  les  biens  de  ce  monde  s'éloignent,  la  vie  s'écoule  cl  les 
levolutions  de  la  destinée  se  succèdent. 


CHAPITRE  C.\l\.  327 

£  w 

«-xjyi  U  iisi  Uj*xJî  /j^  (J-*^         tô*^-^'  ^^  c;aJ[»j"  LçJ*>Jl  '^-(,rÂiJ_5 
Ji   t^Ji>    tjl?^^l    UûJvà^   ^^         aKaj^/jvs».  fc^iXJlji.X:^'!  ^\^ 


Certes  l'absence,  même  si  elle  excite  tes  regrets,  inspire  à  mon  cœur 
plus  {l'effroi  que  la  mort. 

Je  jouissais  tle  ce  monde  et  de  ses  plaisirs,  tandis  que  le  désespoir 
ruinait  les  espérances  de  mes  ennemis. 

\ 
El  les  vers  suivants  : 

Mon  amour  pour  elle  n'est  point  né  d'un  regard ,  suivi  d'im  si^^no  d'in- 
telligence et  de  la  vue  do  ses  charmes; 

Mais  la  fortune  s'est  éloignée;  peut-on  se  consoler  de  la  perte  de  la 
fortune? 

Ainsi  (|ue  celui-ci  : 

Ses  larmes,  lorsqu'elle  les  laisse  couler  sur  son  frais  visage,  sont  des 
perles  (jui  se  déroulent. 

Mais,  maigre  le  talent  littéraire  que  nous  admirons  chez 
lui,  Sàïd  était  hostile  à  la  famille  crAli;  il  |)rofessait  le  suu- 
nisjnc,  partageait  les  préjugés  de  cette  secte  et  manifes- 
lail  niivnicnieiil   son  éloignenient  à  Tégard  du  Prince  des 


328  LES  PRAIRIES  D'OR. 

;\__A i».î    çi\ ^   ij   àK Ji   Jj. — M^j  tS^^ — -    ^   ^ 

^i A A     /* Ji     (_^    J  y-'À-Mh.^     ^^<XJ^J)     <5wjl 

^jâ_*-j  J^jJL»   *~J^-9^    (J*',j-=?^'^^   *UjI    (j-«  <Xa^   ^j    *Xaxh*.  ^jO_5 

<x.«\*<li  tUjiLK!  ^jy^'  «ï^'A^  (j — — ^^  *Xx*A«i  4^!  c-\-wJ^  u^i..i^ 

CroyaiitSvAli,  fils  cl' A  bon  Talib  et  de  sa  sainte  postérité;  c'est 
ce  qui  fit  dire  à  un  poète  : 

Nous  ne  connaissons  pas  d'homme  comparable  à  Sâïd ,  iils  de  Homeïd  : 
Pourquoi  fait-il  à  l'apôtre  de  Dieu  l'affront  d'injurier  son  frère?  (Ali, 
cf.  t.  IV,  p.  /15G.) 

C'est  que  le  Manichéen  tient  toujours  à  la  religion  de  son  père. 

En  efTet,  Sâïd  était  d'une  famille  qui  professait  le  magisme. 
Voilà  pourquoi  un  autre" poëte,  Abou  AliBassir,  a  dit  de  lui  : 

Honte  à  celui  qui  revendique  la  supériorité  sur  nous  et  sur  les  autres 
hommes  ! 

Notre  frère,  mais  je  n'entends  pas  parler  de  Sâïd,  lils  de  Homeïd, 
porte  un  nom  qui  sert  de  date  aux  dépêches. 

Il  s'était  établi  entre  Sâïd,  fds  de  Homeïd,  Abou  Ali 
Bassir  et  Abou  '1-Aïna  un  échange  d'épigrammes,  un  com- 
merce de  lettres  et  de  plaisanteries  familières,  dont  nous 
avons  parlé  dans  l'Histoire  Moyenne.  Cet  Abou  Ali  Bassir 


CMAPlTr\E  ex IX.  ^20 

j^oi  (j^^  Sj-A-i  Ao  jjl»  iJ  <^iX.Ji  j5L*J!  J.Ail_5  j:>UJî  OwvaJL. 

fut  un  des  hommes  les  mieux  doués  de  son  temps  :  il  no  ces- 
sait de  publier  des  vers  d'une  beauté  rare  et  des  sentences 
proverbiales  où  il  n'avait  pas  de  rivaux.  Ibn  Mayyadah,  dont 
le  goût  était  mauvais,  le  considérait  comme  meilleur  |)Ocle 
que  Djérir  et  le  plaçait  au-dessus  de  ses  contemporains. 
La  vérité  est  que  Abou  Ali  dépassa  tous  les  écrivains  de  sa 
S[)hère  à  celte  épo({ue ,  mais  qu'il  resta  au-dessous  de  Bohtori  ; 
parmi  ses  vers  les  plus  connus  sont  les  suivants,  à  l'adi'esse 
de  Moalla,  fils  d'Eyyoub  : 

Par  la  vie  de  mon  pbre,  Moalla  ne  siiiirail  passer  pour  généreux,  si  la 
générosité  existait  encore  en  ce  monde-, 

Mais  ([uand  le  sol  est  stérile,  quand  les  pâturages  se  dessèchent,  les 
troupeaux  broutent  l'Iierbe  sèche  et  menue. 

On  admire  aussi  ces  Vers  du  même  poëte  : 

Tandis  que  les  adepte»  de  la  science  n'en  possèdent  qui;  1 1'  (jui  se  per- 
pétue dans  les  livres , 

.le  les  dépasse  par  mon  application  et  mon  zèle,  ayant  |)()ur  écritoire 
mon  oreille,  et  |)oni-  cahier  de  notes  mon  cieur. 


330  LES  PRAIRIES  D'OR. 

î;> — ==-  (j— J»  l-A_«_:>  .y^        (J^'=*V  ^^■^  ialacs-5  i^^Xxà 
Sj\ — ^■^^  ^-^ — •^^ — '*.-*>*,-) ^       ')y-^l  ^■ê-?  l-À_iiL.t^i 

iLi^JiLj  (J>ajIv_5   (^«JjÎ^   yljf  iiÀAw   ^^_J   AÀAw.ii    StXiù   J,  ^^is^ 

On  loue  également  les  vers  suivants  composés  au  moment 
où  il  accomplissait  le  pèlerinage  : 

Nous  nous  dirigions  vers  la  Mecque,  à  la  fois  pour  le  pèlerinage  et  la 
visite  (  omrah)  ; 

Mais  à  la  vue  de  Hirah,  le  guide  de  mon  chameau  se  montra  iiésitant  : 
«Dépose  ici  mon  bagage,  lui  dis-je,  sans  te  préoccuper  de  ceux  qui 
poursuivent  leur  roule; 

Car  nous  trouverons  dans  celte  ville  le  repos,  un  jardin,  une  taverne, 
Et  de  jeunesyiïoni  (pages)  qui  serrent  leur  taille  au-dessous  du  coude 
avec  une  ceinture  de  chrétien. 

Vois-tu  d'ici  l'incendie  que  je  vais  allumer  dans  cette  forêt  de  ro- 
seaux? (c'est-à-dire  dans  les  cœurs  de  ces  beaulés  h  la  taille  élancée).  » 

C'est  pendant  cette  même  année  2/(8  qu'éclata  dans  la 
ville  de  Koufah  la  manifestation  d'Abou  '1-Haçan  Yaliya 
(fils  d'Omar,  fils  de  Yahya,  fils  dEl-Hureïn ,  fils  d'Abd  Allah, 
lils  d'Ismàïl,  fils  d'Abd  Allah,  fils  de  Djâfar  Tayyar,  fils 
d'Abou  Talib).Sa  mère  se  nommait  Faiimah  (fille  d'El-Hu- 
çein,  fils  d'Abd  Allah,  fils  d'Ismàïl,   fils  d'Abd  Allah,  fils 


CHAPITUE  C\1X.  .S3l 

w.v_X_x2_i  iiJs-x.^  (Jl  <\-»wîj  tl^^^  iJ»J^**  CJH^^j  CrJ^'***^  iv^tki 

Aj  ^yj  J  jvi  »;_j^  ^jl^_5  O^j'i'i^  J<^x5l  ^ibi_5  (j^UJi  Jî_^l 
J>i^i>^  JUj^î  (j^  *)^5  <Xy^'  (J-*  ^^  iiÀ^^  AXJti  *^*^^ 
Jwiwij    jS^-ÀJIj   AJJà^  ^i^^^  ^^j  4Mi    *>sj.&  ^    »X4^   (J!    ^J*.lÀJi 

jt   J)    ^    LtjLMfcJ  *Xj«il    cxijjl    dUi    ij    CJyXj    ^So   ^^   -ebi    ^S'^\.S" 

de  Djàfar  Tayyar,  (ils  d'Abou  Talib).  .Selon  quek|ues-uns, 
la  manifeslation  de  Yahyaeul  lieu  en  2  5o;  il  périt  et  sa  tête 
fut  portée  à  Bagdad  et  mise  au  gibet.  Sa  mort  impressionna 
le  peuple,  qui  avait  voué  ses  sympathies  secrètes  au  préten- 
dant; cai-  Yahya  montra  dès  le  début  de  son  entreprise  une 
grande  répugnance  à  répandre  le  sang,  un  grand  respect 
pour  la  propriété  d'autrui,  et  il  donna  des  preuves  de  sa 
justice  et  de  sa  modération.  Il  fut  poussé  à  la  révolte  par 
le  ressentiment  d'un  affront  dont  il  fut  la  victime  et  par 
rinjustice  et  les  violences  dont  il  eut  à  souffrir  de  In  part 
(le  Molewekkil  et  de  ses  Turcs. 

On  se  porta  en  foule  chez  Mohammed  (fils  dWbd  Allah, 
lils  de  Taher)  pour  le  féliciter  de  la  victoire  qu'il  ven;iit  de 
remporter  (sur  Vahya);  au  nombre  des  courtisans  se  trouvait 
Abou  Hachem  Djâfari  (Daoud,  fds  de  Kaçem,  fils  d'ishak, 
(ils  (I'AIhI  Allah,  (lis  de  Djàfar,  fils  d'Abou  Talib)  qui  n'élail 
séparé  de  Djàliir  l'ayyar  (pic  par  dois  géïK'ralions;  per- 
sonne, ni  dans  l;i  j.iniillc  d  \i)()n    lidib,  ni  dans  la  maison 


352  LES  PHAIHIES  I)  0I\. 

5^.^U«.-«    SwAi^    AXlUiJi     c-**aXÀ^    (j!;^i^.r:a.    ç^Ami    J^Xj\     ^.=^    ^S.1) 

4^àJî  jT^Uiw\  <i  ^jUiiJi  ^^î*x*-  cjUS'^  aàXaw  tj^  js.it>U: 

_5.]  J.r>j  JOCJij  U^aJ   JjijJS^ii!   ^'n^jîyùl]^  ^^J  JUà  AsJt^AS 
j..^\  (j-jïJC-»(*ll  ^j\:^  «Xj>_j  (^jvjuJi  ^Uo  4^j  L.  J^iij  _jiù^  »;i:> 

de  Hachcni  el  de  Korcïch  ne  jjossédait  une  généalogie  aussi 
pure  que  celle  de  Djàfari.  C'était  un  homme  pieux,  grave, 
de  mœurs  austères,  instruit,  d'un  jugement  solide,  et  d'une 
Grande  lectilude  de  sentiments  et  de  conduite;  son  tomlieau 
est  bien  connu.  Nous  avons  rapporté  son  histoire,  ainsi  c[ue 
les  traditions  qu'il  recueillit  de  son  père  et  de  ceux  de  ses 
ancêtres  qu'il  connut,  dans  notre  hvre  intitulé  Jardins  des 
intelligences  ou  histoire  de  la  famille  du  Prophète.  Djàfari, 
s'adressant  donc  au  petit-fils  de  Taher,  lui  dit:  «Prince,  le 
meurtre  de  cet  homme  pour  lequel  on  vous  adresse  des  léli- 
citalions  eut  été  pour  le  Prophète,  s'il  vivait  encore,  un 
deuil  de  famille.  »  Mohammed  ne  répondit  pas  un  mot  et 
Djàfari  s'éloigna  en  prononçant  les  deux  vers  «  Fils  de  Ta- 
her, etc.  »  En  effet,  Mostaïn  a\ait  ordonné  qu'on  exposât  la 
tète  de  Yahya;  mais  le  petit-fils  de  Taher,  en  présence  des 
dispositions  hostiles  qu'd  remarqua  tiaus  le  peuple,  doiuui 
l'ordre  de  la  détacher  tlu  gibet;  c'est  à  ce  sujet  ([ue  Abou 
Hachem  Djàfari  prononça  les  deux  vers  en  question  :- 

Filsdc  Talicr,  (juocellr  noiiniUiresoil  malsaine  pour  vous,  car  Incliaii 
c!u  Pi'oplu.'lo  PSi  un  alinicul  liiucslc  ! 


ciiAi'iTUK  c\ix.  :i;i; 

:_:SS_^     't'î'^'     i    '^^^    J_J-**^     CrW'^^   ■         r—<^-^^    ^y-J    (JVJ    (:5>-^    S._^_:2i^t 

La  vengeance,  lorsque  c'est  Dieu  ([ui  l'exerce,  uc  peut  manquer  d'al- 
Icindro  son  ])nl. 

Un  grand  nombre  de  poésies  furent  composées  à  l'occa- 
sioD  de  la  mort  d'Abou  'l-Huçeïn  (Yahya,  fds  d'Omar);  on 
les  trouvera,  ainsi  que  les  circonstances  de  sa  mort,  dans 
notre  Mistoirc  moyenne.  Parmi  ces  élégies,  nous  citerons  \c 
iragmcnt  suivant  d'une  longue  pièce  dont  l'auteur  est  le  poêle 
Ahmed,  fils  d'Abou  Tah(>r  : 

Saluons  l'islam  pour  la  dei'nièrc  fois,  car  il  va  disparaître  en  niénu' 
temps  (|ne  la  famille  du  Prophète;  adressonsdni  nos  adieux. 

l'jn  les  perdant ,  nous  avons  perdu  la  grandeur  et  la  gloire;  le  trône  des 
actions  généreuses  va  s'écrouler. 

Le  .sommeil  et  le  doux  repos  peuvent-ils  clore  noire  paupière,  lors([nc 
le  fils  de  l'Apôtre  repose  sous  la  terre  !> 

La  religion  et  la  foi  musulmane  ont  abandonné  la  demeure  du  Pro- 
phète Mohammed;  ce  n'est  plus  qu'une  demeure  déserte. 

Au  milieu  de  lacpielle  les  enfants  du  Prophète  élu  de  Dieu  ont  clé  égoi- 
gés  et  les  membres  de  sa  famille  dispersés  pour  jamais. 

Voyez  coninu!  Di"'.!  a  marip:é  du  sceau  de  sou  élection  l'âme  des  rcjc 
Ions  de  son  apnire  :  la  mort  les  précède  et  ils  se  succèdent  ;i  sa  suite. 


33/1  LES  PH AIRIES  l)'0!\ 

i.jLc^»!  j..3j.JL>  <>^A^j  Q..I  j-«.-*,J_5        »0^-À.£  ii.fiU^Jl  tj^^^  l>-=^'^ 
i-ij—ii   ^^Ov-j^   &a,_.î>._-o   ^jà.jLis?^         J^-JVJ  J»--X_JLj«    t_>jA.A^.^  s-^X^a^i 

Fils  de  Taher,  la  honte  est  innée  en  vous  et  vos  perfidies  se  monlrent 
avec  ou  sans  voile. 

Vos  "laives  n'ont  pas  de  tranchant  contre  les  Turcs,  ils  ne  déchirent 
que  les  héritiers  d'Ahmed  (le  Prophète). 

Chaque  jour  vmis  vous  abreuvez  de  leur  sang,  mais  la  soif  de  cette 
iroupe  ne  peut  être  assouvie. 

Vos  lances  se  dressent  contre  les  descendants  d'Abou  Talib,  mais  les 
lances  des  Turcs  vous  donneront  la  mort. 

Vous  mettez  au  pillage  la  demeure  des  fils  de  Mohammed,  mais  vos 
maisons  seront  la  proie  des  Turcs  et  de  la  soldatesque. 

Croyez-vous  donc  que  Dieu  défendra  vos  droits  lorsque  vous  violez  les 
droits  de  son  Prophète? 

Chafiue  matin  ces  hommes  implorent  la  miséricorde  de  Dieu,  niais  il 
ne  pardonne  pas  à  ceux  qu'il  poursuit  de  ses  vengeances. 

Des  cadavres  pendront  au  gibet,  le  mein-trier  sera  tué,  l'homme  puis- 
sant, humilié,  et  celui  qui  s'éR-ve  abaissé. 

\ahya  était  sincèrement  religieux,  plein  de  douceur  et  de 
bonté  pour  les  petits,  généreux  envers  les  grands,  et  très- 
allaché  à  sa  famille,  do>tl  les  intérêts  passaient  toujours  avant 
les  siens.  Il  avait  pris  à  sa  charge  les   lemnies  issues  de  la 


CHAPiTr.K  ex IX.  3;i) 

<X-x-N_£  mV»"^   *^-**fîS_5  (-.oj-Ji^l    8lii_j   Ua^-J   ^'Î^^   (j*-Ia>Î    (j.vyij 

J— j»_£  <!<_A_A_c  js_„j^ — J   Ijt.» .5^  w_ — ^j   (^_;3yJî^    c:^.jç^jio   ^^aijjy 
^_A_vi  ^^jv_w_ii^i  \y-i\3  (*j— ;?        l^xJc^  <^L.<wJi  Iaji***j  ^  O^aS 

famille  cfAbou  Talih  et  ii  consacrait  tous  ses  soins  à  leur 
témoigner  sa  bienfaisance  et  la  tendresse  qu'il  avait  j)our 
elles.  Jamais  un  faux  pas,  jamais  une  action  blâmable  ne 
furent  signalés  chez  cet  homme.  Sa  mort  excita  une  douleur 
immense;  ses  proches  parents,  aussi  bien  rpie  les  étrangers, 
le  pleur«;rent;  les  petits  comme  les  grands  ressentirent  une 
égale  tristesse;  de  loin  comme  de  près  le  meurtre  de  cet 
homme  vertueux  provoqua  les  mêmes  regrets.  Parmi  ceux 
qui  (lé[)lor('renl  ci'tle  perte  douloureuse  est  un  j)oëte  de  ses 
contemporains  (|ui  s'exprime  en  ces  termes  : 

Yahya  n'cisl  plus-,  les  rlicvaux  eux-mêmes  sont  on  proie  à  I.t  doiilcnr; 
lu  sabre  à  la  lame  polie  If  pleure; 

De  rorieiil  ii  roccident  l'Irak  le  pleure;  le  lare  el  la  révélation  le  pleu- 
rent. 

Lcmoçalla,  la  maison  sainle,  l'angle  ycménile,  le  hidjr  (munpii  ferme 
la  Kaaha  au  nord-ouest)  sont  tout  entiers  à  leur  aflliclion. 

(-onuncnl  les  cicu\  ne  sont-ils  pas  tonibi-s  sur  nos  têtes  le  jour  où  re- 
lenlil  re  cri  :  Alxm  'l-lluçrïn  est  lue  ? 

Les  filles  du  l'roplu^lf  5e  lamenlenl  arui'i-emenl  ;  éperdues  de  douleur, 
t'iles  rcpandcul  des  loncn(s  dr  larnu's; 


'^m  LES  PRAIRIES  D  OR. 

^^-V^— î?"  y-r.'y-^  jtiÏA^  8  Js._A_i        5  \ «X_ — j  ii — ^Oj"" —      tJ — ^ — ^.? 

Ji._A_^_::=.    /fS—w^^-Ji    «î^—g-S-^    ^w  j_g^V_£i)î    o_j~A..,w    Â^^_j   «i^ivxiaJ» 

J^^)._J|  (^gi^i  (*3~J_5  CiJV-w^-^-ii    ■    t^  i> — ^'^ — ' — ^  j- — ^*^>>— *  aK._>;_3 
Jji-X-j  (!j~'=*'_j  Ji->ft.— 0  (.^i>   L»         *— -j^-^-A-fi  l_à_j)j  ^yif)   sl^xaj 

Leurs  cris  funèbres  annoncent  la  perte  de  celte  lune  briîlanle,  perte 
ilouloureuse,  profonde,  immense. 

Un  fer  ennemi  a  déchiré  son  visage,  ce  vi/age  noble  cl  charmant,  pour 
lequel  j'aurais  donné  la  vie  de  mon  père. 

Yahya  a  laissé  dans  mon  cœur  des  regfcts  dévorants  et  ces  regrets  se- 
ront funestes  à  ma  vie. 

Le  meurtre  de  Yahya  rappelle  celui  <rAii  et  de  Huçeïn  et  le  jour  fu- 
neste cil  mourut  le  Prophète. 

Que  les  bénédictions  de  Dieu  demeurent  sur  eux  tous,  lanl  qu'un 
affligé  répandra  des  larmes,  tant  qu'une  mère  pleurera  son  enfant  ! 

Au  nombre  de  ceux  qui  chantèrent  cette  mort,  il  faut 
citer  lepoëte  Ali  (fils  de  Mohammed,  fils  de  Djàfar  Alewi), 
surnommé  Himmani  parce  que,  domicilié  dans  le  quartier 
des  Bcnou-Himman  à  Koufah ,  il  fut  rattaché  à  cette  famille; 
voici  ses  vers  : 

Ô  rejetons  des  ancêtres  pieux  et  de  la  race  riche  en  vertus, 

A  la  suite  de  ces  journées  (combats)  il  n'y  a  plus  parmi  nous  que  des 

cadavres  et  des  blessés. 

Que  la  terre  soit  couverte  de  confusion!  conibieu  de  beaux  visages  n  a- 

1-olle  pas  enfouis  dans  sou  sein  ! 


CHAPITRE   CXIX.  337 

^. — ji_il  <^ — \JkJ^  sK j|  U   wii ^j j  (j^  »! 

c^-Ai—X-j  i*^A_^  ii^_J  ^6  U»^       ^^^il  waaj)  (_a31s»-  Iaa<*^  p-y*^ 

J-\*çwl  _jjjwl  j,i6j  I*Xj6  t^^XxJl  j.À*=»  (^j   Js.^^  ^  "^  yl<  «Xi^ 


Ilélas  !  la  journée  qui  t'a  ravi  l'existence  (ô  Yaliya)  a  laissé  dans  mon 
cœur  ulcéré  une  blessure  prol'onde. 

Il  l'a  chanté  aussi  dans  les  vers  suivants  : 

La  tombe  où  il  repose  exhale  une  odeur  de  nuise,  et  sans  les  cendres 
i(u'elle  renferme  elle  ne  serait  pas  imprégnée  de  ce  parfum. 

De  braves  et  illustres  guerriers  sont  tombés  avant  lui  el  un  pareil 
trépas  était  assigné  à  l'excellent  Yabya. 

Comme  dans  les  vers  ([ue  voici  : 

Moi  et  ma  famille  mous  appartenons  à  voire  race  comme  la  mosquée 
de  KLaîf  appartient  au  territoire  de  Kbaïf  (vallée  de  Mina). 

Tous  ceux  de  notre  sang  ([ue  le  sabre  a  renversés  ont  laissé  après  eux 
une  tradition  plus/)^;i(f(ra;i/e  que  le  sabre. 

Ce  mente  Ali  ((ils  de  Mohammed,  fils  de  Djàfar  Alewi) 
était  IVère  par  sa  mère  (risniàïl  Alewi.  Lorsque  Haran,  fils 
d'Ismàïl,  lequel  commandait  Farmée  qui  attaqua  Yahya,  fds 
d'Omar,  arriva  dans  la  ville  de  Koufah,  Ali  (fds  de  Mohani- 


338  LES  PRAIRIES  D'OR. 

J^y.^L*Ï5  AJj-MLi  *^AJij  jUil  «X^  (^  "^  (jl^j  (jvA^l^Ji 
jj  (j^  (^  J^  (:r^  ÀijJjL  <Xj>-Î  (^  ^^^  -c-^^'w»Jj  ^o-I^J^^ 
J^_ju.Jt_çu(i    /j^   (j-.Mi*..=i   »<XX)bLï   ciA^jJi    vilii    ^   A^jJijCj  t-Jlis 

)ljt^  «XàmJ|_5  jJilàJL?  l^ii>_j  ^^^'^  ^^4-*  '■^U-'^  tj'  cyijî  Jlib 
-L*«*_:^   cK_sfc   ^-À-^HW  ^«fyb  ^'   ^^ '^ ^'    u'    ^  j ^iî 


med)  Himmani  s'abstint  de  saluer  le  vainqueur  et  ne  se 
rendit  pas  chez  lui.  Cependant,  pas  un  seul  des  Hachémites 
appartenant  à  la  postérité  d'Ali,  fils  d'Abou  Talib,  ne  s'était 
dispensé  de  celte  formalité.  Or  Ali  Himmani  était  leur  chef 
[nakîb]  àKoufah,  le  poète,  le  précepteur,  Toratevir  accrédité 
de  cette  famille,  et  aucun  de  ses  membres,  parmi  ceux  qui 
habitaient  Koufah  à  cette  époque,  n'avait  le  pas  sur  lui. 
Aussi  son  absence  fut-elle  remarquée  par  Haçan,  fils  d'Is- 
màïl;  il  demanda  où  était  Ali,  se  le  fit  amener  sous  bonm' 
escorte  et  lui  reprocha  "de  s'être  tenu  à  l'écart.  La  réponse 
d'Ali  fut  celle  d'un  homme  dégoûté  de  vivre  et  qui  court 
au-devant  de  la  mort  :  «Ainsi,  lui  dit-il,  tu  veux  que  je  le 
félicite  de  ta  victoii'e  et  que  je  célèbre  ton  triomphe  !  »  Il  lui 
récita  alors  des  vers  tels  qu'un  homme  qui  a  fait  le  sacrifice 
de  sa  vie  peut  seul  i^n  prononcer  de  pareils;  les  voici  : 

Tu  as  (égorgé  le  plus  illustre  tle  ceux  qui  dirigeaient  les  pas  d'une  mon- 
ture ,  et  Je  viendrais  te  flatter  dans  mon  langage! 

.le  déplore  qu'en  me  préseutant  devant  toi  il  y  ait  entre  nous  autre 
chose  ([ue  la  pointe  d'un  sabre; 


CHAPITRE  CXIX.  339 

-l^^i   <^   o^^ j   s- tt^\^ i         cxAfljygJiL»*!  iii   ■T^*A'  3^  (jW^ 

Mais  l'oiseau,  lorsque  ses  grandes  plumes  sont  brisées,  bat  encore  de 
l'aile  le  sommet  des  collines. 

—  «Il  va  du  sang  versé  dans  ta  famille,  lui  répondit 
Haçan  ben  Ismàïl,  je  ne  veux  donc  pas  te  reprocher  ce 
langage;»  puis  il  lui  donna  une  robe  d'honneur  et  le  fil 
reconduire  chez  lui. 

Abou  Ahmed  MouafTak-Billah  ayant  jeté  en  prison  ce 
même  Ali,  fils  de  Mohammed  Alewi ,  qu'on  lui  avait  dénonce 
comme  préparant  une  manifestation  hostile,  Ali  lui  adressa 
de  sa  prison  les  vers  que  voici  : 

Ton  aïeul  Abd  Allab  (fils  d'Abbas)  fut  le  meilleur  des  [>èrcs  |)our  les 
riciix  enfants  d'Ali,  l'excellent  Huçcïn  et  Haçaii. 

Les  doigts  d'une  main  sont  tous  privés  de  forre  lorsque  l'anlre  main 
est  languissante  et  faible. 

I.e  poète,  (juand  ces  vers  parvinrent  à  leur  adresse,  fut 
autorisé  à  fournir  caution  et  put  retourner  librement  ii  Kou- 
fali.  On  a  de  lui  plusieurs  poésies  et  pièces  élégiaques  en 
riioiincnr  (flsmàïl,  son  frère,  et  d'autres  de  ses  parents,  ainsi 


3/iO  LES  PRAIRIES  D'OR. 

j^b  <x.i^  (jU^^i  ^lAi»>i  UjIaS^jJ  lji^5i>  ij^  jjfjS' ^  UajI 

^j  ;bi)i  UJ^\J^s^  j\j).Ja^^)  j^\y.A>  t_>U5'iJ3  (^jv^JliaJl^lAii^l 
v^_i^A_JI   i)«X_t  ljc_5  (jo  l-ï         ^A^gj  (j**-^^  c:*^  /J.AJ  ^<w«»xî 

que  des  vers  contre  la  vieillesse;  nous  en  avons  cité  un  grand 
nombre  dans  la  partie  des  Annales  historiques  où  nous  fai- 
sons l'histoire  des  descendants  d'Abou  Talib ,  et  dans  un 
autre  livre  intitulé  :  Beautés  des  faits  historiques  et  curiosités 
des  souvenirs,  ou  Histoire  du  Prophète. 

Dans  une  des  élégies  dédiées  à  la  mémoire  d'Abou  '1- 
Huçeïn  Yahya ,  fds  d'Omar,  où  le  poète  Ali ,  fils  de  Moham- 
med, s'est  montré  supérieur,  et  dans  laquelle  il  met  sa  fa- 
mille au-dessus  des  autres  Koreïchites,  on  remarque  le 
passage  qui  suit  : 

Sur  ma  foi,  si  la  famille  de  Koreïch  se  réjouit  de  sa  mort,  certes  il  ne 
se  tenait  pas  à  l'écart  à  l'heure  de  la  lutte. 

S'il  est  mort  en  face  des  lances  ennemies,  c'est  qu'il  était  d'une  race 
qui  rougirait  de  mourir  au  sein  des  plaisirs. 

Trêve  aux  insuites  !  Les  survivants  de  la  race  d'Ali  savent  se  conformer 
aux  devoirs  que  leur  ont  légués  leurs  devanciers. 

N'en  déplaise  à  votre  vanité,  ils  ont  en  avec  vous  de  nombreuses  séances 
(  luttes)  entre  Safa  et  Moarraf; 

Et  ils  ont  reçu  d'Adam  et  de  Mohammed,  pour  le  transmettre  aux 
hommes  et  aux  génies,  l'héritage  des  sainis  préceptes  cl  du  livre  de 
Dieu. 


CIIAPITUE   CXIX.  3^1 

(_^^Jl  ij  IaûjI  Jyu»  <^Ai^ 

^»x_A_]l   ajl^>^_j  -«^UvwJi  ^^1       ij  ^3- — k — A — jj — i  \ — >\^ 

i 

Il  le  célèbre  aussi  clans  une  poésie  dirigée  contre  la  vieil- 
lesse; en  voici  un  fragment  : 

Quand  la  jeunesse  brillait  en  lui,  sa  noire  clievcliiie  iloltait  sur  sou 
cou  d'une  blancheur  éblouissante  ; 

Il  ressemblait  h  l'astre  des  nuits,  l(fl'squ'il  est  ceint  de  son  cercle 
argenté  dans  les  régions  du  ciel. 

()  fils  de  celui  (Ali)  dont  les  mérites  sont  l'cmpyrée  de  la  gloire  et  la 
parure  de  la  grandeur. 

Héritier  d'une  famille  qui  jiaraît  dans  le  monde  connne  les  nuages 
avant-coureurs  de  la  pluie  ! 

Les  destinées  redoutent  leur  puissance  et  ils  sont  comme  uu(>  puis- 
sance qui  régit  les  deslins. 

La  mort  frappe  mais  n'égalise  pas ,  et  tu  posséderas  loujoins  la  gloiie  et 
les  signes  de  la  vraie  noblesse. 

Fragment  d'une  de  ses  belles  élégies  a  la  mémoire  de 
son  frère  : 

C'était  l(!  fils  de  ma  mère,  la  moitié  <l(i  l'àmc  (pii  niiimi-  mon  coips;  la 
fortune,  eu  me  l'enlevant,  m'a  di-chiré  h;  co'ur  jus(|u  aux  entrailles. 

Je  n'ai  plus  aujourd'hui  d'autre  consolation  (|uc  la  douleur  (jui  con- 
sume mes  mend)r<'s , 


342  LES  PRAIRIES  D'OR. 

Que  le  désespoir  secret  qui  remplit  mes  yeux  de  larmes ,  que  les  vers 
d'une  élégie  qui  vivra  éternellement. 

Tu  le  vois,  au  sein  de  la  nuit,  je  murmure  ton  nom  en  pleurant;  tan- 
dis que  l'homme  exempt  de  soucis  se  livre  au  sommeil,  je  ne  dors  pas  et 
ne  puis  dormir. 

Pourrais-je  te  remplacer,  ô  lumière  de  ma  vie,  main  droite  que  le  fer 
a  détachée  de  mon  bras  ? 

Pourrais-je  te  remplacer  pour  conjurer  le  péril,  toi  qui  accueillais 
les  plaintes  de  chacun  et  ne  te  plaignais  jamais? 

J'ai  éprouvé  bien  des  douleurs ,  mais  ta  mort  est  le  coup  le  plus  dou- 
loureux porté  à  tous  les  cœurs  et  une  blessure  mortelle  pour  le  mien. 

Que  le  trépas  après  l'avoir  îrappé  n'épargne  personne,  que  la  mort 
frappe  ([ui  elle  veut. 

Puisqu'il  n'est  plus,  les  temps  sont  accomplis  et  le  signal  de  la  sépa- 
ration et  du  malheur  retentit  aux  oreilles  de  la  vie. 

Ali,  fils  de  Mohammed  Alewi,  mourut  en  260,  sous  le 
règne  de  Moulamid. 

En  200,  sous  le  khalifat  de  Moustaïn,  le  Tabaristcàn  se 
révolta  en  faveur  d'El-Haçan ,  lils  de  Zeid  (filsde  Mohammed, 
fils  dlsmâïl,  (ils  d'EI-Haran.,  fds  deZeïd,  fils  d'EI-Haçan,  fils 


CM  A  PI  TUE  ex  IX.  343 

(j-J  f*-*')   liiwlj»   <X_>{_)   Axjlj_5   S  >>vj  jj  kijjUai  (jvjC.j'k«_5  ,^jvju-*w^ 

«Xj^  Ji  y^  t5^y  J'  cj'j-^*N?  *^.j  (^  ^-^^  -^j)  {^  i^y^^ 

^1    Jî  j-jLui    wJt-â-    (^    W^î     *>s-Ï5    wJlo    J,!    0.J   i^    QJ    /j**»-^ 

d'El-Haçan,  fils  d'Ali,  (ils  d'Abou  Talib).  Ce  prôtendant  s'em- 
para du  Tabaristàn  ainsi  que  du  Djordjàn  après  une  longue 
guerre  et  des  combats  acharnés;  il  conserva  ces  provinces 
jusqu'à  sa  mort,  arrivée  en  270.  Son  frère  Mohammed,  fils 
de  Zeïd ,  lui  succéda  el  se  maintint  au  pouvoir  juscpi'à  ce 
qu'il  fût  attaqué  par  Râlé,  fils  de  Hortomah;  il  pénétra  alors 
(en  277 J  dans  le  Deïlcni  et  fil  la  conquête  de  ce  pays;  plus 
tard,  Rafé  reconnut  son  autorité,  devint  un  de  ses  partisans, 
se  soumit  à  sa  cause  et  obéit  à  ses  lois.  Ilaçan  ben  Zeïd  et 
son  frère  Mohainnird  ix-n  /eïd  avaient  revendiijué  les  droits 
de  la  famille  du  Prophète  dans  la  personne  de  Rida.  Otle 
même  cause  fut  défendue  après  eux  dans  le  Tabaristàn  par 
Ihu^an  (fils  d'yVli  el-Ilarain"),  surnommé  Otrniuh  (le  sourd), 
par  ses  lilsel  par  le  missionnaire  [(\i.\\)  llaran,  lilsdeKaçem, 
qu'Asfar  liia  dans  le  Tabaristàn  :  ce  llaçan  appartenait  à  la 
r.iniille  de  lia»  an,  lils  (TMi.  fils  d'Abou  Talib.  Nous  avons. 


344  LES  PRAIRIES  D'OR. 

^^51»  (^  ^\.i^\  î  jofc  Ji?  5AJU  y,5i>  >.^.  U^U  (j^  tjsi 

<\_*w._A_^    tS    Ci>Li    j^iûUo    /j-J    4Mi     «X.A.S    /j..^     «X^    (Ji  jj,A***.AJ 

/»_j  ^1^  /v_j  j^vA_^^   ^j  «X.^|  t^J-^V   3«X*j  j^îài     j^u«*aÂj 

UcJjJI    cil     Icij    (-aJUo    J,i     ^^J    ^    ^    (^M*,sl    yj  "^    ^J    0"**^=' 

dans  les  Annales  historiques,  donné  l'histoire  de  tous  les 
descendants  d'Abou  Talib,  aussi  bien  ceux  du  Tabaristân 
que  ceux  qui  se  révoltèrent  en  Orient,  en  Occident  et  dans 
les  différents  pays  du  monde,  jusqu'à  la  présente  année  332 
de  l'hégire;  mais  ici  nous  nous  bornons  à  un  simple  aperçu 
des  faits  qui  ne  sauraient  être  passés  sous  silence,  afin  que 
le  souvenir  de  cette  famille  ne  fasse  point  défaut  à  notre 
livre. 

En  cette  même  année  2  5o  de  l'hégire ,  Mohammed ,  fils  de 
Djâfar  (fils  d'El-Haçan)  ,■  se  révolta  dans  la  ville  de  Rey  en 
faveur  d'El-Haran ,  fils  de  Zeïd,  le  chef  du  Tabaristân  ;  il  eut 
pour  adversaires ,  dans  cette  ville ,  les  Khoraçâniens  appar- 
tenant au  parti  des  noirs  (musawadah.  Cf.  t.  V,  p.  yd)-  Fait 
prisonnier,  il  fut  conduit  àNisapour  et  livré  à  Mohammed, 
fils  d'Abd  Allah,  fils  deTalier;  il  mourut  dans  la  prison  de 
cette  ville.  —  Après  lui,  un  autre  prétendant  se  leva  dans 
la  ville  de  Rey  :  ce  fut  Ahmed,  fils  d'Yça  (fils  d'Ali,  fils 
d'El-Haçan,  fils  d'Ali,  fils  d'El-Huçeïn,  fils  d'Ali,  fils  d'Abou 
Talib),  lequel  revendiqua  les  droits  de  la  famille  du  Pro- 


CHAPITRE  GXIX.  345 

X_i_«M_J!    8*N^   ^j        t^_j.^«Jî    l^Xsfc^*   -^îAm^wJ!    iCÀj«X^  JîjLw^ 

yj  0  ***-s  yù_j  J^i  ^jj^yi}  j^  (jvZoU^  CJ^-•*^  ^^  ^^J 
(:J-^  t^  (:^'   CJ^»**^  (jjJ   I^   (^   ^'    *>^A£  (jj    >y^   ^JJ  J.A*vwî 

^    CJ:?    '.^^   -Vj^   wJU:?    jl    ^jJ  ^   (J.J    (;JV«*^    (^  t^    qjÎ 

«Xas  qj  «X^'  <J^>!   r_r'**^  uA'-Uo   j,i   (jj  IJ^  Qj  (^•***^  (^   '^î 

phète  en  faveur  de  Rida.  Il  combattit  Mohammed  (fiis  d'Ali), 
fils  de  Taher,  qui  était  gouverneur  de  Rey,  le  chassa  de  cette 
ville  et  le  força  à  se  réfugier  à  Ragdad  ;  Rey  fut  alors  occupée 
par  le  descendant  d'Ali, 

Durant  la  même  année  2  5o,  Kazwîn  fut  soulevée  par 
Kerki  (dont  le  nom  est  Haçan,  fils  d'Ismàïl ,  fils  de  Moham- 
med, fils  d'Abd  Allah,  fils  d'Ali,  fils  d'Kl-Hureïn,  fils  d'Ali, 
fils  d'Ahou  Talib),  qui  était  un  des  descendants  de  (Ismâïl 
surnommé)  Arkat;  mais,  d'après  une  autre  version,  la  gé- 
néalogie do  Kerki  est  celle-ci  :  Haran,  fils  d'Ahmed  (fils  de 
Mohammed,  fils  d'Ismàïl,  fils  de  Mohammed,  fils  d'Abd 
Allah,  fils  d'Ali,  fils  d'El-Huçcin,  fils  d'Ali,  fils  d'Abou  Ta- 
lib). Combattu  par  Mouça,  fils  de  Roga,  ce  prétendant  se 
rendit  dans  leDeïlcm,  puis  il  se  réfugia  auprès  d'El-IIaçau, 
fils  de  Zeïd  ïlaçani ,  et  mourut  avant  celui-ci  (c'est-à-dire  avant 
l'année  270). 

A  Koufah  eut  lieu  la  manifestation  d'El-IIuçoïn,  fils  do 
Mohammed  (fils  de  Ilamzah,  fils  d'Abd  Allah,  fils  d'El-Fla- 
çan,  fils  d'Ali,  (ils  d'Ahou  Talib).  Mohammed  (fils  d'Abd 


346  LES  PRAIRIES  D'OB. 

^LikX-jU  ^iJjLifc.  /wjI  XjuA^  1^^a>  iliXxj  çj^ j.Ji\]o  /wj  4M! 
(Vjv,_x_j)lj  jt-Mfc-j  i\_Â_.«(  <j»  ^^J«Lj\./»5  (j7ywb»«^_5  (^J\r»-l  i^Aw 
(jl^  <x_À_^  vjLA<aJ  Uûj-s»-ls  *i  ^^J«r^^^î  (^  f*y^^  ii.à^wî_5  aj.>uaAJ5_5 

i^^j-^.   aK.a.^0  j_^<XJ)   (jAm»-<X-J)   uÀifcV   (ii-« 

Allah,  fils  de  Taher)  lui  opposa  une  armée  sous  les  ordres 
d'Ibn  Khakan.  Le  prétendant  fut  défait  et  obligé  de  se  cacher, 
par  suite  de  l'abandon  et  de  la  désertion  de  ses  partisans; 
ceci  se  passait  en  25i  de  Thégire. 

Dès  l'année  2/19,  Mostaïn  avait  donné  en  fief  à  son  fils 
Abbas  la  Mecque,  Médine,  Basrah  et  Koufah  :  son  intention 
était  aussi  de  le  faire  reconnaître  en  qualité  d'héritier  pré- 
somptif, mais  il  ajourna-ce  projet  à  cause  de  l'extrême  jeu- 
nesse de  cet  enfant.  A  cette  occasion ,  Yra,  fils  de  Farrokhân- 
chah  ayant  invité  le  poëte  Abou  '1-Bassir  à  composer  des  vers 
où  il  conseillerait  au  Khalife  défaire  proclamer  son  fils, 
Abou  '1-Bassir  composa  une  longue  kaçideh  dont  voici  quel- 
ques vers  : 

Dieu  l'a  confié  la  t^arde  de  sa  religion  cl  le  soin  de  préserver  son 
])cuplc  tlu  senlier  i^lissanl  où  d'aulres  ont  péri  ; 

Investis  ton  fils  Abbas  de  la  succession,  car  il  en  est  digne,  et  ordoune 
que  des  lettres  répandent  ce  pacte  parmi  tes  sujets. 


CHAPITRE  CXIX.  3^7 

J^xJ»  ,^jl[»  jJ^Wd  ^  *>^   -ibi    CiOO    li^î   y*.U*l!  ^jÎ   Jlj> 

iLÀ-*«  ^  dLJi^  (J^V  t5.^-'^^  j>^^  cKs»  Uol-iojJo!  i)_5  AÀ-« 
«Xjî^j   w^_5  ci>»X_^l  aXaJ   5*X>^  c:a»L5  tXÀJ^j   (jvXjU_5   {^,j**^ 

ij^Uxii  II  L  Jt-  iiAjUJi  iiXA>5î  i  ^ir  Uo  JJi  (j^  J^lj  l^^j 

Si  les  années  lui  font  défaut,  sa  raison  est  mûre  et  le  place  au  rang  des 
vieillards  que  Dieu  dirige  vers  le  bien  : 

Avant  lui,  Jean  n'était  qu'un  enfant  quand  ilretjutle  don  de  la  science, 
et  Jésus  prêchait  dans  son  berceau.  (Cf.  Koran,  \ix,  i3  ,  et  m,  4i.) 

AboLi  'l-AbJ)as  le  Mecquois  fait  le  rccit  suivant  :  «  .rélais  un 
des  convives  assidus  de  Aloliammed,  pelit-fils  de  Taher,  dans 
la  ville  de  Rey,  avant  son  expédition  contre  la  famille  d'Abou 
Ta! ib-,  jamais  je  ne  le  vis  plus  heureux  et  plus  gai  c[ue  pen- 
dant les  jours  qui  précédèrent  la  révolte  du  descendant  d'Ali 
à  Rey;  c'était  en  l'année  25o.  Je  causais  une  nuit  avec  lui; 
le  bonheur  régnait  dans  sa  demeure  et  le  rideau  venait  d'être 
tiré  (c'e.st-à-dire  le  concert  allait  commencer).  «  Je  crois  que 
je  mangerais  volontiers,  me  dit  le  prince;  que  prendrais- 
jebien? —  Une  poitrine  de  francolin  ou  un  morceau  d'a- 
gneau froid,  •  ré|)ondis-je.  Le  prince  se  fit  apporter  par  un 
page  une  miche  de  pain,  du  vinaigre  et  du  sel,  et  se  mit  à 
manger.  La  nuit  suivante  il  me  dit  :  «  Aboii  l-Vhhas,  je  crois 


348  LES  PRAIRIES  D'OR. 

y_^Xj|  o»A5  J-'A^^j  *1.*i*àJÎ^  (-^ydaJlj  t_>LwJiJi_5  -UlaJl  J  i_>,^ 
(j*-l^  cx_X_i  lj\j..*m}\  c-aaIsÎ  u  Jbs  »_5.4*i  t?"*^^  (»-*^^  ^J"  •  <J^ 
V^'jyAs^  L^^   l^jlÀt  R^iyjiA  iijjl^^  iùïj^l  jli^i'c:*..^*  t^Aiail 

que  j'ai  faim;  que  me  conseilles-tu  de  manger?  —  Ce  que 
vous  mangiez  hier,  lui  dis-je.  —  Tu  ne  distingues  pas  la 
nuance  qu'il  y  a  entre  mes  deux  questions,  reprit-il;  hier  je 
te  disais  :  Je  crois  que  je  mangerais  volontiers",  mais  je  te  dis 
à  présent  :  Je  crois  que  j'ai  faim,  ce  qui  est  bien  différent.  » 
Il  se  fit  servir  à  souper,  puis  il  m'invita  à  décrire  les  plaisirs 
de  la  table,  les  parfums,  les  femmes  et  les  chevaux.  «En 
prose,  ou  en  vers?  lui  demandai-je.  —  En  prose,»  fit  le 
prince.  Je  commençai  ainsi  :  «  Le  meilleur  des  repas  est  un 
mets  que  l'appétit' assaisonne.  —  Quelle  est  la  meilleure 
boisson?  demanda-t-il.  —  Une  coupe  pleine  d'un  breuvage 
qui  désaltère  et  que  l'on  offre  ensuite  à  un  convive  chéri. 

—  Quel  est  le  plus  agréable  concert?  —  Le  létracorde  (le 
luth,  oud,  qui  n'avait  à  cette  époque  que  quatre  cordes)  et 
une  jeune  musicienne  assise  dont  le  chant  est  mélodieux  et 
la  voix  émouvante.  —  Quel  est  le  parfum  le  plus  suave  ?  — 
L'haleine  d'une  amie  tendrement  aimée  et  la  présence  d'un 
fils  qu'on  élève.  — Quelle  est  la  plus  séduisante  des  femmes  ? 

—  Celle  dont  on  s'éloigne  à  regret  et  vers  laquelle  on  re- 


CHAPITRE   CXIX.  349 

\j  ocjL**.»-!  ^[i  ^;^  ,_^Ài^  !il_5  ^^j^  J^JJ^  îi|  j^js.Jt  (^fii^i 
jtjj'i__*_ji  La_jU  ^^v— o  «jù  (j~jij  CAAi  jUji  iijU  Ala*î  jUio 
iolil_j  bySs  U^  ^JLiî  ^vk^l  -^V.i  L,  ^lÀJi  iCjU»  vil*>*Àj  cjij  tXij! 

vient  avec  empressement.  —  Et  parmi  les  chevaux,  quel  est 
le  plus  vif?  —  Le  cheval  qui  a  les  coins  de  la  bouche  larges 
et  la  prunelle  d'un  noir  foncé;  celui  qui  s'échappe  quand 
il  est  poursuivi  et  qui  atteint  quand  il  poursuit.  —  C'est 
bien  parlé,  »  me  dit  Ibn  Taher,  et,  s'adressant  à  un  page  : 
•I  Bichr,  ajouta-t-il,  donne-lui  cent  dinars. —  Comment  ai-je 
mérité  deux  cents  dinars.^  demandai  je.  —  Ah!  répliqua 
le  prince,  ainsi  tu  ajoutes  de  toi-même  cent  dinars?  Page, 
qu'on  lui  donne  d'abord  cent  dinars  comme  nous  l'avons 
ordonné,  et  cent  autres  dinars  pour  le  récompenser  de  la 
bonne  opinion  qu'il  a  de  notre  générosité.  »  Et  je  pris  congé 
d'Ibn  Taher  emportant  celte  somme;  une  semaine  seule- 
ment s'écoula  entre  cet  entretien  et  son  départ  de  Rey.  » 

Le  Khalife  Moslaïn  connaissait  à  fond  l'histoire  et  les 
journées  célèbres;  tout  ce  ([ui  se  rattachait  au  passé  excitait 
sa  curiosité.  Voici  une  an('cdol<'  racontée  par  Mohammed 
(fds  d'EI-flaran) ,  (ils  de  Doreid,  d'a()rès  le  récit  que  lui  en 
avait  fait  Abnu  'l-lîeïda,  maîo/a  de  Djàfar  Tayyar  et  couleur 
agréable.  «  Nous  étions  venus  de  Médine  en  dépulation  à  la 
cour  de  Moslaïn,  qui  habitait  Saman;i  ;  [);irmi  nous  se  trou- 


350  LES  PRAIRIES  D'OI\. 

/v_fi  j.Jl*5    il^-J'    l)^9    "Î^JSJ^     UA.«o^     a3  y^^Mi    (j^    '^^     *^^^     U^lj 

^  c  , . 

L^l-A-Ài>i^  iLx^^  i^^  <X.1I  ^5^«Xj  S<X)uI^  u^^^  c-TpL»  (XM«jb 
»Jvc  iuwj  -ili.^  bbi  Jjv^i  JJ5  i  ^j\<  Lto  JUîi!>)|j  J|^ji))  IàJ 

<J    vï^^    *^j— *-«   CXjb    AAJ^Âis-    (^   OsA^^    yl-Aw^Jj    (i))^ji)l    (;^ 

^.«-JiLjlj    /<\JuiJl   tK^Î_5   ^^l»5j   'rL>'^^  jW=*-5    é>   i^i-«*J^   y5    *>^i> 

valent  plusieurs  descendants  d'Abou  Talib  et  des  petits-fils 
(ïAnsars.  Nous  attendîmes  notre  audience  pendant  un  mois 
environ;  enfin  nous  fûmes  admis  et  chacun  de  nous  put 
prendre  la  parole  et  s'exprimer  librement.  Mostaïn  se  montra 
aimable  et  familier  à  notre  égard  ;  il  se  mit  à  parler  de  Mé- 
dine,  de  la  Mecque  et  de  leur  histoire;  or  personne  n'en 
savait  autant  que  moi  sur  ce  chapitre.  Je  demandai  donc  au 
Khalife  la  permission  de  prendre  la  parole,  et,  après  Tavoir 
obtenue,  je  m'entretins  avec  lui  du  sujet  qui  l'intéressait. 
Le  courant  de  la  conversation  nous  entraîna  à  traiter  de  diffé- 
rents sujets  d'histoire,  et,  quand  nous  prîmes  congé  de  lui ,  le 
prince  nous  fit  donner  de  l'argent  et  des  cadeaux  pour  notre 
bienvenue.  A  l'entrée  de  la  nuit,  un  de  ses  officiers,  suivi  de 
quelques  soldats  turcs  et  de  cavaliers,  se  présenta  chez  nous; 
on  me  fit  monter  sur  un  cheval  conduit  en  laisse  qu'on  avait 
amené  à  cet  effet  et  je  fus  introduit  chez  Mostaïn.  Je  le 
trouvai  assis  dans  le  Djausak  (château  de  plaisance  à  Sa- 
marra)  ;  il  me  reçut  avec  bonté,  me  fit  signe  d'approcher,  el , 
après  m'avoir  adressé  quelques  paroles  affectueuses,  il  mit 


CHAPITRE  CXiX.  351 

l»|j)-i*-  (^j  *^^-*  t*^^'  ^M*j  a)^jûI  J«-îji-lî  j-«iJiJ!  L^l  ^1 
f,ljy_r».  y_j  *J|^  r*VS«^  i>-^         (♦SCst'^  y^iX^i  t^S^Ji  I^jI  ^1 

la  conversation  sur  riiistoirc  et  ies  journées  des  Arabes  et  sur 
ceux  crentre  eux  qui  moururent  du  mal  d'amour.  C'est  ainsi 
que  nous  arrivâmes  à  parler  des  Benou  Odrah  et  des  amants 
célèbres  de  celte  tribu;  il  me  demanda  ce  que  je  savais  re- 
lativement à  Orwah,  fds  de  Hizam  et  à  ses  aventures  avec 
Afrà.  «Prince  des  Croyants,  répondis-je,  Orwah,  fils  de 
Hizam,  après  avoir  quitté  Afrà,  lille  de  Ykal,  succomba  à 
ses  regrets  et  mourut  d'amour  pour  elle.  Une  troupe  de 
cavaliers  vint  à  passer,  le  reconnut  et,  en  arrivant  au  cam- 
pement d'Alrà,  un  des  cavaliers  chanta  d'une  voix  lugubre  : 

Demeures  dont  les  liabilanls  vivent  dansliiidifférence,  ]c  vous  aiiiionco 
la  mort  d'Orwaii  l)eii  Hizam. 

Afrà  entendit  ce  chant,  elle  se  montra  sur  une;  hauteur 
au-dessus  (le  la  caravane  el  s'écria  : 

Cavaliers  (|ui  pressez  le  pas  de  vos  montures,  mallietir!  Ivst-eilc  vraie 
la  iiotivcllr  de  la  mort  d'Orwnli  I)oii  Hizam  ? 

Un  d«'s  vfiyagcms  répniidif  : 


352  LES  PRAIRIES  D'OR. 

«^J  oJUi 

»»._aJ»  JI  caJu«jIî  ld>^)ylj  iCs-lc».  p\.-»iw  Jvjj^  j^  ci^!>'^  '-^^ 

iilj  l|-AJt  î^jiL  Syww  Uo  l.YJ>-*='  ^5  fv^b  ^  ^^^*  oJlSls 

Oui ,  nous  l'avons  laissé  dans  une  contrée  lointaine  où  il  habitait  tour 
à  tour  la  vaste  plaine  et  les  collines. 

Elle  reprit  : 

Si  vos  paroles  sont  vraies,  sachez  que  celui  dont  vous  annoncez  la  mort 
était  l'astre  qui  éclairait  les  ténèbres. 

Que  nul  jeune  homme,  après  toi ,  ne  goûte  les  plaisirs  de  l'amour  !  Que 
les  absents  ne  reviennent  plus  en  sécurité  dans  leur  patrie! 

Puisse  la  femme  ne  jamais  donner  la  vie  à  un  homme  aussi  noble  que 
l'était  Orwah!  Puisse-t-elle  être  désormais  privée  des  joies  de  la  ma- 
ternité! 

Et  vous,  je  souhaite  que  vous  n'arriviez  jamais  au  but  de  votre  voyage 
et  que  les  aliments  n'aient  plus  pour  vous  de  saveur  ! 

Elle  les  interrogea  sur  le  lieu  où  Orwah  était  enterré;  ils  le 
lui  indiquèrent  et  elle  se  dirigea  de  ce  côté.  Arrivée  près  du 
tombeau,  elle  voulut  descendre  sous  prétexte  de  satisfaire  un 
besoin;  on  l'aida  à  descendre;  elle  courut  au  tombeau  et  s'y 
prosterna.  Bientôt  elle  poussa  un  cri  aigu  qui  effraya  ses 
compagnons;  ils  s'empressèrent  autour  d'elle  et  la  trouvèrent 


CHAPITRE  CXIX.  358 

étendue  morte  sur  la  pierre  de  la  tombe;  ils  l'enterrèrent 
alors  à  côté  de  son  amant.  »  Mostaïn  me  demanda  si  je  pou- 
vais ajouter  d'autres  détails  au  récit  que  je  venais  de  lui 
("aire.  «Certainement,  Prince,  répondis-je.  Voici  une  tradi- 
tion que  je  tiens  de  Malek  (fils  de  Sabbah)  Adawi,  à  qui 
Heïtem  (fils  de  Adi,  fils  de  Hicham,  fils  d'Orwali)  Favait 
transmise  d'après  Orwah,  son  père.  «Otman,  fils  d'Airan , 
nv'ayant  charj^^é  de  distribuer  des  aumônes  parmi  les  Benou 
Odrah,  dans  le  pays  habité  par  une  de  leurs  sous-tribus  nom- 
mée les  Benou  Minhadah ,  je  rcniaicjuai  une  tente  neuve 
plantée  un  peu  à  Técart  du  cam[)ement,  je  nTy  diri*^eai  : 
un  jeune  homme  y  dormait  à  l'ombre,  et  à  côté  de  lui  une 
\ieille  femme  était  assise  dans  l'ouverlure  de  la  tente.  Le 
jeune  homme  m'aperçut  et  nuirnmra  d'une  voix  faible  : 

J'ai  ofi'erl  une;  réconipense  ;\  Vitrraf  (sorcier  et  médecin)  du  Yi-maiiiidi 
el  à  celui  de  iNcdjràn,  |V)ur  ([u'ils  me  reiideni  la  sauté; 

Ils  m'ont  promis  f^uérisoti  romnlète;  puis  ils  se  soni  éloiirnés  eu  toute 
hâte  avec  les  amis  venus  pour  me  visiter. 

VII.  23 


35^  LES  PRAIRIES  D'OR. 

^_i  i)î  J^A-iv^  -^tiJb  *JUJI  l«X3  (^Ibî  U  j^^l  \-^î  owÀJii 
^jbls  o«JliJ_j  -s^-^-s*-^  »i  ^y^J>J>  «^Ji  (!^^  ^5j  bl^  c:*.Jl*  c:>U 
b\^  j^j«XjJi   (•!>*"   tJ^  *-5/*  ^^  ^'^■*  '^  '^^  kM^S  û>j3 

Ils  n'ont  cependant  négligé  aucun  des  sortiiéges  de  leur  art,  il  n'y  a 
pas  de  breuvage  dont  ils  ne  m'aient  abreuvé. 

«C'est  à  Dieu  de  te  guérir,  m'otit-ils  dit;  nos  mains  sont  impuissantes 
à  soulager  ton  cœur  du  poids  qui  l'accable.» 

La  douleur  qui  me  consume  pour  Afrà  est  comme  un  fer  de  lance  qui 
déchire  ma  poitrine  et  mes  entrailles,    ' 

Mon  Afrà  est  ce  que  j'ai  de  plus  cher  ici-bas,  et  elle  me  tient  lieu  de 
toute  autre  chose  en  ce  monde. 

J'aime  la  promesse  de  la  résurrection  puisqu'on  m'assure  que,  ce  jour- 
là,  je  retrouverai  Afrâ. 

Maudites  soient  de  Dieu  ces  bouches  indiscrètes  qui  vont  disant  :  Une 
telle  est  la  maîtresse  d'un  tel  ! 

Il  poussa  un  faible  gémissement;  j'examinai  sa  face,  il 
était  mort.  «Bonne  femme,  dis-je  à  la  vieille,  je  crois  que 
celui  qui  dormait  à  Tombre  de  ta  tente  vient  de  mourir.  — 
Vrai  Dieu,  je  le  crois  moi  aussi,  »  dit-elle,  et,  après  avoir 
regardé  son  visage,  elle  s'écria  :  «  Par  le  maître  de  laKaabah, 
il  n'est  plus!  »  Je  lui  demandai  le  nom  de  ce  malheureux  : 
«  Orwali  ben  Hi/.am  des  Renou  Odrah,  répondit-elle,  et  je 
suis  sa  mère.  Je  te  jure  que,  depuis  un  an  ,  je  ne  l'avais  pas 


CHAPITRE   CXIX.  355 

#  î  ». 

entendu  proférer  une  plainte;  ce  matin  seulement  je  l'ai  sur- 
pris disant  ces  vers  : 

Si  jamais  les  mères  doivent  pleurer,  c'est  aiijonnriuii;  car  je  vois  la 
main  de  la  mort  prête  ;\  me  saisir. 

Qu'elles  me  laissent  entendre  leur  chanl  fnntbre,  car  je  ne  l'entendrai 
plus  lorsque,  couche  sur  les  éjiaules  de  mes  amis,  je  serai  porté  an  tom- 
beau. 

—  «  Je  ne  voulus  pas  in  éloigner  avant  d'avoir  assisté  aux 
lotions  funéraires,  à  l'ensevelissenient,  aux  dernières  prières 
et  à  rinluiniation.  —  <>  Dans  quel  but?  nie  demanda  Otman. 
• — Afin,  répondis-jc,  de  parliciper  aux  mérites  (de  son  mar- 
tyre). »  Le  Khalife,  ajoute  Abou  'l-Beida,  fit  un  cadeau  à 
mes  compa^^nons,  et  me  gratifia  d'une  récompense  supé- 
rieure à  celle  des  autres.  » 

Les  aventures  et  les  poésies  des  anciens  martyrs  de  l'amour 
sont  im  sujet  des  plus  intéressants.  Voici  un  récit  de  ce 
genre  (jue  je  dois  à  .Vbou  Khalifali  Kadl  (lilsde  Houbab) 
Djomalii  le/nr/f;  il  le  tenait  de  Mohammed  HUsdeSallam) 


356  LES  PRAIRIES  D'OR. 

Jlrï-j    Aj^I    îii^  j.*a5"  gui    5_jji   iiU  y^À:^l    «^Ui>!   i)|    *(^i 

^p  ,  '^'  *  I 

^<^^ï  (j^  aî^î  câ^t"*  t^*^^  -p^ii^-ô  Jj!  aM!j  (j\s  g^*«J'  J^^ 
L.*ko!  SjS'Uftwol^  »v^!  Uij  U^i  aKjJu  i  j-^^^'  '-^^  ^  ^^^ 

*.jl.>jj:  c^AJiXifc  iili  tKls  As»  aàjIc  iili  »|__yj  ti*-^-^  *i  ^^ 

Djomahi,  à  qui  Abou '1-Hayyadj  (fils  de  Sabik)  surnommé 
Nedjdi  et  Takef.  l'avait  raconté  en  ces  termes  :  «  J'étais  allé 
chez  les  Benou  Amir,  uniquement  pour  y  rencontrer  Meçlj- 
noun.  Je  trouvai  là  son  père ,  un  vieillard ,  et  ses  frères,  hommes 
dans  la  force  de  l'âge;  on  voyait  que  le  bien-être  et  l'aisance 
régnaient  dans  cette  famille.  Je  leur  parlai  de  Medjnouu; 
ils  pleurèrent  et  son  père  me  répondit  :  «  En  vérité,  c'était  de 
mes  enfants  celui  que  je  préférais  ;  il  tomba  amoureux  d'une 
femme  de  sa  tribu  qui  certes  n'aurait  pu  prétendre  à  un  tel 
parti;  cependant,  lorsque  la  passion  qu'ils  éprouvaient  l'un 
pour  l'autre  s'ébruita,  son  père  refusa  de  la  donner  en 
mariage  à  mon  fds  et  lui  choisit  un  autre  époux.  Nous  avons 
alors  enchaîné  Medjnoun;  il  se  mordait  la  langue  et  les  lèvres 
avec  une  telle  fureur  que  nous  craignîmes  qu'il  ne  se  les  cou- 
pât; nous  lui  rendîmes  donc  la  liberté.  Il  s'est  enfui  dans 
ces  plaines  désertes;  chaque  jour  on  lui  porte  son  repas  que 
l'on  place  en  évidence  :  quand  il  le  voit ,  il  s'approche  et 
mange;  lorsque  ses  vêlements  sont  usés,  on  lui  en  apporte 
d'autres,  et  on  les  place  à  portée  de  sa  vue.  "  Je  les  priai  de 


CHAPITRE   CXIX.  357 

Jsovj'  cj»jLj  /jI  Juii  Aaàc  ^^tXo  ^1  iXjJuii^  Si^^.»v  *X.^1j  j*>-jI» 
^1  Jli  A-Ac  ^JtXJ  K^i   »^rî_;'   <->.Ai  Aj   yJoùyl  I-a-*"  J^  *^-»   (j^ 

lii-A^wj   /jl    ciJ<Xi»Jù>^   ii)i«>v^Aj   Xib  UwJLX**»-^  \m  (j^\i  *^|) 

me  conduire  près  de  lui;  ils  m'indiquèrent  un  jeune  liomme 
de  la  tribu.  «Il  a  toujours  été  son  ami,  me  dirent-ils,  et 
Medjnoun  ne  se  familiarise  qu'avec  lui  seul.  »  J'allai  trouver 
ce  jeune  liomme  et  le  priai  de  me  servir  de  guide.  «  Si  vous 
voulez  ses  vers,  me  répondit-il,  je  les  possède  tous  jusqu'à 
ceuxqu'il  fit  hier;  demain  j'irai  le  trouver,  et,  s'il  en  a  impro- 
visé d'autres,  je  vous  les  apporterai.  »  Comme  je  le  priais  de 
vouloir  bien  m'y  conduire,  il  reprit;  «Dès  qu'il  vous  verra 
il  prendra  la  fuite  et  je  crains  (|u'il  ne  m'évite  désormais,  et 
que  ses  vers  ne  soient  perdus  pour  moi.  >■  Mais  j'insistai  avec 
tant  d'opiniâtreté  qu'il  ajouta  :  »  Eh  bien  ,  allez  à  sa  recherche 
dans  ces  solitudes;  (|uand  vous  l'apercevrez,  approchez-vous 
doucement  de  lui;  il  cherchera  à  vous  intimider  <'i  lér.i 
mine  de  vous  lancer  ce  qu'il  auia  à  la  main;  asseyez-vous 
sans  faire  attention  à  lui,  mais  ohserxez-Ie  à  la  dérobée  et, 
lorsque  vous  le  trouverez  plus  calme,  tâchez  de  lui  recitei" 
quelque  passage  de  Kaïs,  fils  de  Doreïh;  c'est  un  poêle  cfu'il 
alVectionne.  »  Je  me  mis  en  route  le  jour  même  (continue 
Ahou  'lliayyadjl  et  dans  l'après-midi  je  trouvai  Medjnoun; 


358  LES   PRAIRIES  D'OR. 

L^  é^]^  ZjLi  ijàjjJiJ^j^  ».M  cji^jtXi  IfJalaik.  ^ukaoaL  hjs?! 

v.àI>  \J^ ^j!^^  iLsX^nt  ijJuSxÀ  'i^À^  y^f^  <^<M*.\s»-  (Jjis^  c:aAaj»13 
cX^^  AaJ!  Ci»  JLâÀi  iXxAAsU  ciAiA*j  i.K*^5j  (jV^AM  cS*^  ^  «-^^  ^"^ 

aJLv*  ju-x-viil   aM!^  bl  Jli  io^"  If-A^i)  <->.JIaw  (^ws»-  4>Î|_j   t^Ixi  Jtj 

assis  sur  un  monticule,  il  traçait  des  lignes  sur  le  sable  avec 
ses  doigts;  je  m'approchai  sans  hésitation,  mais  il  s'enfuit 
comme  un  animal  sauvage  à  la  vue  de  l'homme.  Il  ramassa 
une  des  pierres  qui  étaient  à  côté  de  lui;  je  continuai  ce- 
pendant à  m'avancer,  je  m'assis  près  de  lui  et  demeurai  tran- 
quille quelques  instants,  tant  qu'il  parut  vouloir  m'éviter. 
Quand  il  vit  que  je  restais  assis,  il  se  calma  et  se  rapprocha 
en  jouant  avec  ses  doigts.  Alors  je  le  regardai  et  lui  dis  : 
»  Qu'ils  sont  beaux  ceis  vers  de  Kaïs  ben  Doreïh  : 

Je  répandrai  toutes  les  larmes  de  mes  yeux,  tant  est  grande  l'épou- 
vante que  m'inspirent  le  passé  et  le  présent. 

Demain,  me  dit-on,  ou  la  luiit  d'après,  partira  une  amie  qui  ne  s'était 
jamais  éloignée,  mais  dont  le  départ  est  résolu. 

Je  n'aurais  jamais  pensé  que  mes  propres  mains  me  donneraient  la 
mort  ;  ce  qui  doit  arriver  arrive.  » 

Le  fou  pleura  à  chaudes  larmes  et  me  dit  :  «  Vrai  Dieu  ! 
j'ai  été,  moi,  meilleur  poète  dans  ces  vers  : 


CHAPITRE  CXIX.  Sb'J 

^Ij   ^-Mfc-j-i   c-A_X.'s  jj«fcJÎ   L^  Akxi  JJLo  ,yjti^  (j^^iJlj   (J-Jt» 

^Vjià   \iXJk.A^^   i^*HW  c^*^'   (jw         wy-^^  IjnL^i    iXjj  j»k'à   «ii-j  /jlj 

Mon  cœur  n'aimera  jamais  que  la  belle  Amirite,  dont  le  surnom  est 
Oamm-Amr,  bien  qu'elle  ne  soit  pas  la  mère  d'Amr. 

Ma  main,  en  la  touchant,  semblait  humide  de  rosée  et  prête  à  se  cou- 
ronner de  feuilles  verdissantes. 

J'admire  l'acliarnement  de  la  destinée  h  nous  désunir,  et  elle  ne  s'apai- 
sera qu'après  nous  avoir  séparés. 

Amour,  redouble  mes  tortures  chaque  nuit,  et  toi ,  ô  consolation  de  mes 
jours,  je  t'attends  le  jour  de  la  résurrection,» 

Après  cela  il  s'échappa  et  je  partis.  Je  revins  le  lende- 
main, et,  Tayant  rencontré,  la  même  scène  que  celle  de  la 
veille  se  j>assa  entre  nous;  dès  qu'il  se  fut  radouci,  je  lui  dis  : 
«Quels  beaux  vers,  vraiment,  que  ceux  de  Kaïs!  —  Les- 
(juels?  ût-il,  »  Je  repris  : 

Reconnaissez  en  moi  un  homme  qui  est  reconnaissant  de  vos  bontés  et 
qui  excuse  vos  rigucuis. 

Si  la  tribu  a  décidé  que  nous  serions  séparés,  du  moins  entrt;  toi  et 
moi  les  relations  sont  reslét's  pures. 

Medjnoun  pleuia  et  me  dit  :  "  Jejuie  ([ue  j'ai  été  supé- 
rieur à  Kaïs  dans  les  vers  suivants  . 


360  LE8   PUAmiES    U'OR. 

J?L»i/i  J-^-^  /o-A-oail  J.^   tîyb         ^aaaaw  U  ii\  45WÏ»-  ^^uUJiî^ 

j^«XJi  î_^^:s-_^s   A^j^A^U  c>Jt>».3  AiiUoî  ki  eUUJl   f»_j*^t 
^y%-^  *iU>.  4^  -IxiaJi   yl    J^^Juifclj  ff^J^  A^UilJ  <>^^«Xj  y\^ 

(j^  «X-Jjj   iLÂ.^  (^jvJt^wwjJl   j^  OtXi  «Xjjj    <3^JÎ  jiAAMÎ  Ikj   o\s^ 

Tu  m'as  attiré  vers  toi  et,  quand  tu  as  captivé  mon  cœur  par  des  paroles 
qui  forceraient  les   chamois  à  descendre  dans   les  plaines  rocailleuses. 

Tu  m'as  abandonné  incapable  de  me  défendre,  et  tu  as  laissé  dans  mes 
Hancs  le  mal  qui  les  consume.  » 

En  ce  inoment  une  gazelle  passa  devant  nous  et  il  s'élança 
à  sa  poursuite;  quant  à  moi,  je  m'éloignai.  Je  revins  le  troi- 
sième jour  et  ne  le  rencontrai  point;  je  courus  en  informer 
sa  famille.  On  dépécha  Thomme  qui  avait  coutume  de  lui 
porter  sa  nourriture;  il  .revint  en  disant  que  les  mets  étaient 
restés  intacts.  Je  me  mis  alors  en  route  avec  ses  frères;  nous 
passâmes  une  journée  et  une  nuit  entières  à  sa  poursuite,  et 
nous  le  retrouvâmes ,  le  lendemain  matin ,  étendu  mort  dans 
le  lit  rocailleux  d'un  torrent.  Ses  frères  le  transportèrent 
■chez  eux  et  je  retournai  dans  mon  pays.  » 

En  2  48  de  l'hégire  mourut  le  Turc  Boga  l'aîné,  âgé  déplus 
de  quatre-vingt-dix  ans  ;  personne  n'avait  pris  part  à  autant  de 
batailles  que  lui,  et  cependant  il  ne  fut  jamais  blessé.  Il  in- 
vestit son  fdsMouça  de  toutes  les  dignités  qu'il  avait  rerues 


CHAPITKK  CXfX.  301 

L.^,JL«  ^^.^^  <9UwjLio  U5wwUj^  ^ILsjul    (-'ji^  <>>,(}.Aj   ^e>AâjCj(Ii 

xjtxjj  /oJt^  4^^5  c^^  >i  <-^b  J^-»  «^'-^  vi  J<xjo  «xjJvJI. 

lui-môme,  réunit  autour  de  lui  ses  partisans  et  lui  conféra 
son  commandement.  Boga  était  d'une  origine  infime  parmi 
les  Turcs  :  d'abord  simple  page  de  Moutacem,  il  assista  aux 
grandes  batailles  de  l'époque,  y  paya  de  sa  personne  et  en 
sortit  toujours  sain  et  sauf.  Il  disait  souvent  que  la  destinée 
est  une  cuirasse;  il  ne  portait  jamais  d'armure  d'aucune  sorte, 
et,  quand  on  le  blâmait  de  son  insouciance,  il  racontait  le  fait 
suivant  :  «  J'ai  rêvé  que  le  Prophète  se  montrait  devant  moi 
entouré  de  plusieurs  de  ses  Compagnons  et  me  disait:  Boga, 
tu  as  été  bon  pour  un  homme  de  mon  peuple  et  les  vœux 
qu'il  a  formés  pour  toi  ont  été  exaucés  dans  le  ciel.  —  Apôtre 
de  Dieu,  demandai-jo,  quel  est  donc  cet  homme?  — -  Celui 
que  tu  as  délivré  des  bétes  féroces.  —  Apolre  de  Dieu,  con- 
linuai-je,  prie  ton  Seigneur  afin  qu'il  prolonge  mes  jours.  » 
Le  Prophète  leva  les  mains  au  ciel  et  pria  ainsi  :  «  xMon  Dieu, 
j)rolonge  son  existence  et  recule  sa  dernière  heure  1  — 
Apôtre  de  Dieu,  repris-jc,  je  demaud**  (piatre-vingt-quin/.(; 
ans.  •    Aluis   (|U('l(ju'un   (|ui    se    tcnail    dt-vaiil  le  l^ropbèlc 


362  LES   PRAIRIES  D'OR. 

^yi\   bi^  f^y>  (j^  oJâiAJCAMlj  t-Jlb  jî   (j^  *^  \>\  Jlï  ooî   (j^ 

J.a)ÎI    ij    /e^A^    «^■^^/-=^   ii£«XAJ    ^^j    <XS   J.=r-j.J    A,A^i^y    t^î    ^j^ 

J^A_ft  J>.J  J^._j  ij5  ^_5  di.A*  :^!  ci^^j  U  jl  kxj  kiUl  A..|^A!i 

ajouta  :  «  Et  qu'il  soit  préservé  de  tout  malheur  1  >-  Je  deman- 
dai à  cet  homme  qui  il  était;  il  me  répondit  :  «Je  suis  Ali, 
lils  d'Abou  Taiib,»  et  je  me  réveillai  en  murmurant  les 
mots  :  Ali ,  fils  d'Abou  Talib.  »  —  Boga  se  montra  toujours 
bienveillant  et  généreux  à  Tégard  des  Alides;  quand  on 
lui  demandait  quel  était  celui  qu'il  avait  préservé  des  bêtes 
féroces,  voici  ce  qu'il  racontait  :  «  On  conduisit  devant  Mou- 
taçem  un  homme  qu'on  accusait  d'hérésie;  à  la  suite  d'une 
délibération  secrète  qui  eut  lieu  pendant  la  nuit,  le  Khalife 
m'ordonna  de  livrer  le  prévenu  aux  bêtes  féroces.  J'emme- 
nai le  prisonnier  et,  indigné  de  sa  conduite,  j'allais  le  préci- 
piter dans  la  fosse  lorsque  je  l'entendis  prononcer  ces  pa- 
roles :  >'  Tu  sais,  ô  mon  Dieu,  que  tu  as  été  le  seul  mobile 
de  mes  paroles  et  de  ma  conduite  et  que  j'ai  voulu  te  plaire 
par  mon  obéissance  et  en  soutenant  la  vérité  que  tes  enne- 
mis avaient  méconnue.  M'abandonneras -tu  aujourd'hui?» 
A  ces  mots,  ajoutait  Boga,  je  commençai  à  trembler,  je  me 
sentis  ému  et  la  crainte  envahit  mon  cœur;  j'arrachai  cet 
homme  du  bord  de  la  fosse  aux  lions  où  j'allais  le  précipiter. 


CHAPITRE  GXIX.  363 

Ju»    AaaaJI    oAj    <9^Ai5   JUi    jo>^tâAAl!   Ouol^    I4A3    <«Jwuiik.U   (jy^ 

^^   ^_j\ji)  tSJjj  «J*^^^  J^^?;)  ^  >^^v^  '^'3  V^^^'  o«.j^^ 

je  le  conduisis  dans  la  partie  la  plus  retirée  de  mon  appar- 
tement et  je  Ty  cachai.  Je  retournai  alors  chez  Moutaçem. 
«  Eh  bien  ?  me  demanda  le  prince.  —  C'est  fait,  je  Tai  jeté, 
répondis-je.  —  Et  que  disait-il  "^  —  Je  suis  étranger,  repris-je  ; 
il  parlait  arabe,  et  je  ne  sais  ce  qu'il  disait;  c'était  d'ailleurs 
un  homme  rude  et  grossier.  »  A  la  pointe  du  jour,  je  dis 
à  mon  protégé  :  «Los  portes  sont  ouvertes,  je  vais  te  faire 
sortir  avec  les  hommes  de  garde  ;  tu  vois  que  je  me  sacrifie  pour 
toi  et  que  je  te  sauve  au  péril  de  ma  vie  :  aie  bien  soin  de 
ne  pas  te  montrer  tant  que  Mou  taçom  vivra.  >«  II  me  le  promit  ; 
je  voulus  connaître  son  aventure  et  il  me  donna  l'explication 
suivante  :  «  Un  des  agents  (\\\  prince  s'est  précipité  sur  notre 
pays,  commellant  toutes  sortes  d'excès  et  de  crimes  et  étouf- 
fant la  vérité  pour  faiix;  triompher  l'erreur.  Sa  conduite  me- 
naçait de  corrompre  la  pureté  de  la  Loi  et  de  renverser  le 
dogn)e  monothéiste;  ne  trouvant  |)as  d'auxiliaire  contre  cet 
homme,  je  l'ai  assailli  pendant  la  nuit  et  je  l'ai  tué,  car  son 
crime  était  de  ceux  que  la  Loi  punit  de  mort.  » 

Lorsque  Mostaïn  se  fut  réfuL'ié  à  Bagdad  en  compagnie  de 


36/1  LES   PRAIRIES   D'OR. 

jLoi  L-iil  UjUj  (jj[>=^  0^*^J  t-^iAAiaJiJî^  .ijjJi  rO"^'^^  ti^^5 
Le   I^JHS-=T-l9  l^jJOili-^  !^«Xj^   (6~lC"^*   *-^"''   ^   ^^    CJ-*  ■''(5'^ 

Boga  et  de  Wacif,  les  Turcs,  les  Ferganiens  et  les  affran- 
chis, se  révoltant  dans  Samarra,  tombèrent  d'accord  d'en- 
voyer une  députation  au  Khalife  pour  le  prier  de  revenir  dans 
sa  capitale.  En  conséquence,  quelques-uns  des  principaux 
affranchis  se  rendirent  à  Bagdad,  emportant  avec  eux  le 
manteau  rayé  et  le  bâton  du  Prophète,  plusieurs  objets  pré- 
cieux du  trésor  royal  et  une  somme  de  deux  cent  mille  di- 
nars. Ils  supplièrent  Mostaïn  de  retourner  dans  la  capitale  de 
son  royaume;  ils, se  reconnurent  coupables,  firent  l'aveu  de 
leurs  fautes  et  s'engagèrent  pour  eux  et  pour  leurs  collègues 
à  ne  plus  retomber  dans  les  torts  qu'il  leur  reprochait.  Mais, 
malgré  leur  attitude  humble  et  soumise,  ils  reçurent  une 
réponse  peu  satisfaisante.  De  retour  à  Sorra-men-râ,  ils  ins- 
truisirent leurs  compagnons  de  l'accueil  qui  leur  avait  été 
fait  et  leur  apprirent  qu'ils  n'avaient  plus  à  espérer  le  retour 
du  Khalife.  iVIostaïn,  lorsqu'il  se  réfugia  à  Bagdad,  avait 
emprisonné  Moutazz  et  Moueyyed  au  lieu  de  les  emmener 
avec   lui;  mais,  au    contraire,    se  méfiant  de  Mohammed, 


CHAPITRE  ex IX.  365 

^lj.-i».i  (^  (i5_5-i^    t^^        StT-^  «-^^^^  »^  '^^^  ^^^  <rV^  ''^^ 

y6_j  (^^u(^^  ï^ykj  (jjwxi)  *<iôjiil  (j^  S^^J^jli  i)«Xxvj  Aj>..oUj 

:>^^_-u<i  (j_j*X_X_C  2<J  ^XJiff^  *>^-J^i5  'i^^i^'  c^  (î*^^-?  (J*UJi  4^ 
Jt   AWLjyXxli   AJUiS?  IJJUL»»  i  (^j^\  oJLfJÎj   l^^bijj   tj^-o^ii 

fils  de  Watik,  il  l'avait  forcé  de  l'accompagner  à  Bagdad; 
ce  même  Mohammed  réussit  plus  lard  à  lui  échapj)er  à  la 
faveur  de  la  guerre. 

Les  affranchis  convinrent  alors  do  tirer  Moutazz  de  sa 
prison,  de  le  proclamer  Khalife  en  lui  jurant  fidélité  et 
obéissance,  et  de  combattre  ensuite  Mostaïn  et  ses  partisans 
retranchés  dans  Bagdad.  Ils  firent  sortir  Moutazz  et  son  frère 
Moueyyeddu  lieu  nommé  Louhuet  el-Djauçak,  où  ils  étaient 
retenus  en  captivité,  et  prélèrcnl  serment  à  Moulazz  le  mer- 
credi 11  moharrem  25 1  de  l'hégire.  Le  jour  suivant,  le 
nouveau  Khalife  se  rendit  en  grand  cortège  dans  le  da?-  el- 
ammali  (salle  des  audiences  publiques),  où  il  reçut  le  s(m-- 
ment  du  peuple;  il  revêtit  son  frère  Moueyyed  d'une  robe 
d'honneur  et  lui  passa  autour  du  cou  un  collier  (de  j)erles) 
noir  et  un  collier  blanc,  le  premier  comme  héritier  pré- 
somptif, le  second  comme  gouverneur  des  deux  villes  saintes. 
Après  celte  cérémonie,  on  envoya  de  Samarra  à  toutes  les 
grandes  villes  de  l'empire  des  lettres  annonçant  la  nomina- 
tion de  Moulai-/.  Billali;  elles  furent  écrites  au  nom  d(î  Djà- 


366  LES  PRAIRIES   D'OR. 

tjliSS»!   0jkj  i)j<oUj   /c-ftÂAj   c:>j.r>-   (-Jjs^  J^l   yl^i  ^-^^^  J>Ài 

ivlUfc.^  t5^-->  j^*i5  ^^"^^  c:a.3I^  (e>6-^J  V,)^  o»»*.*iô  l^  iU^M^il 
x-A_iw  (^  ^^-*^^^   d^  Jl^3  ''*-*Jî    ^=r-J  j'^J^iî  4-o\^  dUi  ^iùUs 

^^Aj  U  wxoU  <_AjLAaJiJI^  ii:»^Aii  aaXc^  iCôîljcII  ^/Ul^Uâ-  Hy^a.'» 

far  (fiis  de  Mohammed)  le  secrétaire.  Moutazz  désigna  en- 
suite son  frère  Abou  Ahmed  (MouafFak)  et  quelques  mawlas 
pour  aller  combattre  Mostaïn  sous  les  murs  de  Bagdad,  lis 
partirent  et  la  guerre  éclata  dans  la  ville  entre  les  partis  de 
Moutazz  et  de  Mostaïn;  Mohammed,  fils  de  Watik,  parvint 
à  se  réfugier  auprès  du  nouveau  Khalife.  La  lutte  persistant 
avec  acharnement  entre  les  deux  armées  (  1 5  saler  2  5 1  de  l'hé- 
gire) ,  la  cause  de  Moutazz  se  fortifia  tandis  que  la  situation  de 
Mostaïn  s'affaiblit  de  jour  en  jour;  les  ravages  de  la  guerre 
s'étendirent  partout.  C'est  alors  que  Mohammed  (fils  d'Abd 
Allah,  fils  de  Taher)  entra  en  corresjjondance  avec  Moutazz, 
se  rapprocha  de  ce  prince  et  inclina  vers  la  paix  au  prix  de 
la  déchéance  de  Mostaïn.  Mais  la  populace  de  Bagdad,  quand 
elle  fut  instruite  de  ces  projets,  se  souleva  avec  indignation 
et  se  réunit  autour  du  Khalife  pour  le  protéger.  Le  petit-fils 
de  Taher  força  Mostaïn  de  monter  sur  la  terrasse  de  son 
château;  le  peuple,  le  voyant  paraître  avec  le  manteau  rayé 
etlobâlon  (insignes du  khahfat)  l'acclama;  Mostaïn  démentit 


CHAPITRE  ex  IX.  367 

*-Y-:>JS>l    AJJ.SW    U^    »^j^    aL^^I^    yU^i    ^    yl    4^    (;5%JCu*m 

les  bruits  relatifs  à  sa  déchéance  et  exprima  sa  reconnais- 
sance envers  le  petil-fils  de  Taher.  Ce  dernier  eut  ensuite 
une  entrevue  avec  Abou  Ahmed  MoualTak  à  Chemmasyah 
(faubourg  de  Bagdad);  ils  convinrent  de  déposer  le  Khalife 
aux  conditions  suivantes  :  on  lui  accorderait  Vaw.an  pour  lui, 
pour  son  harem  et  ses  enfants  et  pour  leurs  propriétés  parti- 
culièies;  il  habiterait  la  Mecque  avec  les  personnes  de  sa  fa- 
mille qu'il  voudrait  emmener,  et  la  ville  de  Waçit  en  Irak 
lui  servirait  de  résidence  jusqu'au  moment  où  il  se  rendrait 
dans  la  ville  sainte.  Moutazz  s'engagea  par  écrit  et  déclara 
que,  s'il  violait  une  seule  de  ses  promesses,  il  serait  ana- 
thème  aux  yeux  de  Dieu  et  de  son  Prophète  et  que  ses  sujets 
seraient  relevés  du  serment  d'obéissance  à  son  égard;  il  serait 
trop  long  d'énijujérer  ces  didérentes  clauses.  Néanmoins 
Moutazz  ne;  tint  pas  ses  engagements  et  il  travailla  plus  lard 
à  rompre  la  foi  jurée.  Mostaïn  |)rononra  sa  j)ropre  déchéance 
le  jeudi  3  moharrem  35'i  de  l'hégire;  une  aimée  entière  s'é- 
lail  écoul(''e  depuis  son  anivéeà  liagdad  juscpi'ii  ce  moment: 


368  LES  PRAIRIES  D'OR. 

dUi_5   cS^^iJi   tJ^^^  (j-J   *>^-*-5   ^   1X5  ♦>^j  laAw!^  <il^»>vja-l 
/wft  j-jftUs  /vj  aMÎ    *X_«.-£  /jj   i^^  yè'  ^Xs.^  ya^  ^J^'^^  tl-^i 

^.j  '^  «  '^  Aj^juiié  ijajt-i  J_^.j  viiJi  i^  ^L j._A_*_lt  Jt 

son  règne,  depuis  iejour  où  il  fut  investi  de  rautorité,  comme 
nous  Tavons  raconté  ci-dessus,  jusqu à  sa  chute,  avait  duré 
trois  ans,  huit  mois  et  vingt-huit  jours;  mais  il  faut  tenir 
compte  des  ditTérentes  opinions  à  cet  égard  dont  nous  avons 
déjà  parlé.  On  le  conduisit  d'abord  dans  la  maison  de  Haçan, 
fds  de  Wehb,  à  Bagdad ,  et  on  le  réunit  à  son  harem  et  à  ses 
enfants  ;  il  fut  ensuite  emmené  à  Waçit  sous  la  garde  d'Ahmed 
ben  Touloun  le  Turc,  qui  n'était  pas  encore  gouverneur  de 
l'Egypte.  On  sut  bientôt. dans  le  public  que  Mohammed  (fds 
d'Abd  Allah,  fds  de  Taher)  s'était  montré  incapable  de  dé- 
fendre le  Khalife  Mostain ,  lorsque  celui-ci  lui  avait  demandé 
asile,  et  qu'il  l'avait  trahi  pour  se  ranger  du  parti  de  Mou- 
tazz-Billah;  c'est  ce  qui  fit  dire  à  un  poète  du  temps,  qui 
habitait  Bagdad  : 

Les  Turcs  rôdent  autour  de  nous  depuis  une  année  révolue,  et  l'iiyèiie 
(c'est-à-dire  le  petit-fils  de  Taher)  n'est  pas  sortie  de  son  antre. 

Elle  s'y  est  blottie  dans  l'abjection  et  le  mépris,  et  lorsqu'elle  s  est 
montrée,  c'est  pour  étaler  les  hontes  de  ses  perfidies. 


CHAPITRE  GXIX.  369 

^3J  S^i-i?  J>"^^'  *^-^  t^  rj^Lu»  (Ji  i>l«xjo  4j-«  t3-»^î  «>s-^l 
u»»-jc3^  -:>Liïi  dIiûL<i  <!0(^3  i\â5Ajïi  ».d^:sr^  o»-*->*Ji_5  t^AÀJilij 

Les  droits  de  Mostain  n'ont  pas  été  respectés  et  les  destins  ont  conspiré 
contre  lui; 

Ils  ont  accumulé  la  honte,  la  lâcheté  et  la  bassesse  et  imprimé  une 
tache  ineffaçable  sur  la  famille  de  Talier. 

Après  la  déchéance  de  Mostain,  comme  nous  venons  de 
le  raconter,  Abou  Ahmed  Moua(T;ik  se  rendit  de  Baq-dad  à 
Samarra;  Moutazz  hii  conféra  une  robe  d'honneur,  une  cou- 
ronne et  deux  ivichah  (voir  ci-dessus .  p.  1 33)  ;  il  distribua  aussi 
des  robes  d'honneur  aux  généraux  de  sa  suite.  Obcid  Allah 
((ils  d'Abd  Allah,  fils  de  Taher),  frère  de  Mohammed  (fils 
d'Abd  Allah),  apporta  au  nouveau  Khalife  le  m;mleau  rayé 
et  le  bâton  du  Prophèli;,  avec  l'épéc  et  les  joyaux  de  la  cou- 
ronne; Teunuquc  Chahek  raccompagnait  et  Mohammed 
(petit-fils  de  Taher)  avait  écrit  à  Moutazz  en  faveur  de  ce 
serviteur  dans  les  termes  suivants  :  «  Celui  qui  vous  apporte 
l'héritage  de  l'a  pot  rc  de  Dieu  incrilc  bien  que  vous  ne  violiez 
pas  la  protection  (pii  lui  est  dm*.  » 

Lorsque  Moslaïu  lui  renvcM'sé  du  trône,  son  \i/.ir  était 
Ahmed,  (ils  de  Salih,  lils  de  (ihir/ad. 

vu.  i/l 


370  LES   PRAIRIES  D'OR. 

AK-JC-Ji-i   \J!L-«\-.*g  (j^  Vl?"^  *^j  «Xaxaw  <x-AÀXi  ii.*«!j  ^j^  aK^ 
^^JaJi  (^  iJlxto  .joCaîs-  ^4^3  aMI>  jyAxii  (ji  aK^j  A^rj^s*-!^ 

Au  mois  de  ramadan  de  la  mêmie  année  202,  Moutazz- 
Billah  chargea  son  chambellan  Sâïd,  fils  de  Salih,  d'aller  à 
la  rencontre  de  Mostaïn,  qui  venait  de  quitter  Waçit  sous 
bonne  escorte.  Sâïd  le  joignit  aux  abords  de  Samarra;  il  le 
tua  et  envoya  sa  tête  à  Moutazz;  le  cadavre  resta  étendu  sur 
la  route  jusqu'à  ce  que  des  gens  du  peuple  se  chargeassent 
du  soin  de  Tinhumer.  —  Mostaïn-Billah  mourut  le  mer- 
credi 6  chawal  262,  âgé  de  trente-cinq  ans,  selon  ce  que 
nous  avons  dit  au  début  de  ce  chapitre. 

Voici  ce  que  raconte  l'eunuque  Chahck.  «  J'étais  le  com- 
pagnon de  voyage  de  Mostaïn,  lorsque  Moutazz  le  fit  venir 
à  Samarra,  et  nous  étions  assis  dans  la  môme  litière.  En  arri- 
vant à  Katoul ,  une  troupe  nombreuse  se  présenta  devant 
nous.  «Chahek,  me  dit  le  prince,  vois  qui  commande  ce 
corps;  si  c'est  Sàïd  le  chambellan,  je  suis  perdu.  »  Je  recon- 
nus cet  officier  et  je  répondis  au  prince  :  «  En  vérité  c'est 
lui.  «  Mostaïn  s'écria  :  «  Nous  appartenons  à  Dieu  et  nous  re- 


CHAPITRE  GX1\.  371 

^^,,»^'j"  isj-ANfcJL    «XJtiJb   tXx>-    ^^JL-«   «Xa;»a«    tjyi  ^-U»    <^-S>  w^^J 

^i  Liû^i»  UUii  bi  ^yo  ^A^  v^^'  ''^^  «i  Lsij^i  U  b^i 
^j*L*'l  jL<Là».l  (j-«  L>yCw  ciJvXj  ^  «aXS!  «x.^  blj  ^'(^•«Y-9  ^■^  cjyfi 

tournons  vers  lui;  c'en  est  fait  de  nui  vie!»  et  il  pleura. 
Sàïd,  en  l'abordant,  lui  cingla  le  visage  à  coups  de  fouet, 
puis  il  le  fit  coucher  par  terre,  s'assit  sur  sa  poitrine,  lui 
trancha  la  tête,  et  la  porta  au  Khalife  comme  nous  l'avons 
déjà  dit.  La  puissance  de  Moutazz  fut  dès  lors  établie  et  son 
autorité  reconnue  de  tous. 

Les  faits  de  l'histoire  de  Mostain  que  nous  ne  citons  pas 
dans  ce  livre  ni  dans  le  présent  chapitre  se  trouvent  dans  les 
Annales  historiques  et  dans  l'Histoire  moyenne.  Nous  ne 
donnons  les  détails  qu'on  lit  ici  (jue  pour  qu'on  ne  suppose 
pas  que  nous  les  avons  négligés  ou  ignorés;  car,  grâce  à  Dieu, 
il  n'y  a  pas  de  fails  historiques,  ni  de  détails  biographiques 
et  d'événements  importants  ([ui  ne  soient  consignés  dans  nos 
dilTérenls  ouvrages.  «  Au-dessus  de  foute  science  est  placé 
relui  qui  sait  tout.'  iKoran,  xii,  yO}.  Dieu  seconde  les 
bonnes  entreprises. 


:^72  .     LES  PRAIRIES  D'OR. 

^j^  Lx-X_i^  (^j^  l_j*^A^^  (•>»  'i^^j  i^M^ÀXi  (:5:r*i^U  J^ 
iî*X_x-^  J^ifcî^  iLj^L-i*Jî^  til>^'j  ^'i^^^  ''^W  ^-«'^^  ^  t^ 

fj*^^  ii_À_^  V*~^  cj-*  (:J^*^  cij^AJ  (jvAi^l  -5.J  ^.M**j  ^i:*ii 
e^-jï^  *\j)}  aji/^  A-wnàJ  J^-=^  {j^   *^^^  c:>U^  (^jvJùUj  (jï->*^j 

CHAPITRE  CXX. 

KHALIFAT  DE   MOUTAZZ-BILLAH. 

Moutazz-Billah  fut  ensuite  proclamé  Khalife.  Son  nom  est 
Zobeïr,  fils  de  Djâfar-Motewekkil  ;  il  eut  pour  mère  une 
esclave  nommée  Kabihah  et  porta  le  surnom  patronymique 
cVAhou  Abd  Allah.  Il  était  âgé  de  dix-huit  ans  lorsqu'il  fut 
proclamé  à  la  suite  de  l'abdication  de  Mostain,  le  jeudi  2  de 
moharrem,  ou  selon  d'autres  le  3  de  ce  mois,  262  de  l'hé- 
gire, comme  nous  l'avons  dit  ci-dessus  (p.  32/1).  Après  qu'il 
eut  reçu  le  serment  des  généraux,  des  juawlas,  des  merce- 
naires {chakiryeh  du  persan  tchakir)  et  du  peuple  de  Bagdad, 
on  récita  la  khotbah  en  son  honneur  dans  la  mosquée  cathé- 
drale des  deux  quartiers  de  Bagdad.  H  abdiqua  le  lundi,  trois 
jours  avant  la  fin  de  redjeb  de  l'année  2  55  et  mourut  six  jours 
après  sa  déchéance;  il  avait  régné  quatre  ans  et  six  mois;  on 


CHAPITUE  CX\.  37o 

^j  5^«.*i.-ftj  fcjjt  aÎj  i>-ij  J-^"^^  iLx.A~^\»^  (:J>-*^  cl>5Lj'  p^A^wfcJi 

^  À— A_«tV 

w 
i-  .. 

^   JUL*  o»-i^lî  Lûjjci  »S  -xXioj_5  cy^îLSij  *\^j.xxi.Jl   JJi  ^j 

l'enterra  à  Samarra.  La  durée  totale  de  son  règne,  depuis 
qu'il  fut  élu  à  Samarra ,  avant  la  chute  de  Mostain ,  jusqu'au 
jour  où  il  abdiqua,  est  de  quatre  années,  six  mois  et  quel- 
ques jours,  et  seulement  de  trois  ans  et  sept  mois,  si  on  la 
calcule,  du  moment  de  son  élection  à  Bagdad.  11  mourut  à 
Fàge  de  vingt-quatre  ans. 

KÉSUMÉ  DK    SON    IIISTOIRK    ET   DE    Sy\   VIE;   PRINCIPAUX    EVENEMENTS 
DE  SON  UÎiGNE. 

Lorsque  Mostaïn-Billah  lut  détrôné  et  conduit  à  Waçil, 
après  qu'il  eut  prononcé  sa  propre  déchéance  en  se  déclarant 
incapabhîde  régner  en  présence  delà  rébellion  et  qu'il  eut 
délié  ses  sujets  du  serment  de  fidélité,  les  poêles  chantèrent 
à  profusion  cet  événement  et  prodiguèrent  à  l'envi  leurs  vers 
au  sujet  du  Khniifc  déchu.  Bohloii  composa  à  cette  occa- 
sion une  longue  haçideh  dont  voici  un  j)assage  : 


374  LES  PRAIRIES  D'OR. 

ljtA-\.ii-  *L4-JI_5  iCi!iViI  tNjtj        *X^  ^  *X^!  iiJuAiJ.  liXè^ 


.U 


Le  faible  poussin  (a  été  conduit)  à  Waçit  :  des  serres  ne  pouvaient 
pousser  dans  la  chair  d'un  poulet. 

Voici  également  un  fragment  de  kaçideh  d'un  poëte  sur- 
nommé Kiiiani  : 

Je  te  vois  accablé  par  la  douleur  de  la  séparation  depuis  que  l'imam 
a  été  expulsé  et  détrôné. 

Le  Khalife  Ahmed,  fds  de  Mohammed,  est  dépouillé  du  Khalifat  et  de 
la  puissance; 

Lorsque  la  fortune  brillante  lui  souriait,  il  était  comme  une  pluie 
printanière  pour  ceux  qui  sollicitaient  ses  bienfaits  ; 

Mais  la  destinée  l'a  précipité  du  faîte  des  grandeurs  et  l'a  relégué  à 
Waçit,  où  il  n'entendra  plus  parler  de  retour. 

Neuf  mois  et  un  jour  s'écoulèrent  entre  la  déchéance  et 
le  meurtre  de  Mostaïn.  —  Parmi  les  savants  et  les  tradi- 
tionnistes-  qui  moururent  sous  son  règne ,  on  cite  :  Abou 
Hachem  Mohammed  (fds  de  Zeïd)  Refâyi;  — Eyyoub  (fds 
de  Mohammed)  le  libraire  ;  —  Abou  Koreïb  Mohammed  (fds 
d'El-Ala)   Hamaclani,  mort  à  Koufah;  —  Ahmed   (fils  de 


CHAPITRE   CXX.  375 

/>_)  *x_:^j  ^*is^^>Jî  ^lih.  ^j  -Li^^y  e*jiXiI  t_>U^t  ^•^•fi 

0..J   »Xj^i  ^^Us  _jjt^   (Sy^^    (:^^-'**-*  (jJ   *^^3   jljr*'  ^r*-^**^ 

Salib)  Misri;  —  Abou'l-Welid  Sery,  originaire  de  Damas; 
—  Yça  (fils de  Hammad)  Zogbah  Misri,  décédé  en  Egypte  : 
son  surnom  eslAhouMouça;  —  Abou  Djàfar(fils  de  Sawar), 
originaire  de  Koufah,  tous  morts  en  2^8.  —  Sous  le  même 
règne,  celui  de  Mostaïn,  en  2àg-,  moururent  :  Flaçan  (fils 
de  Sabbah)  Bezzaz,  célèbre  traditionniste;  —  Hicham  (fils 
de  Khaled),  de  Damas;  — Mohammed  (fils  deSuleïman) 
Djohenni,  décédé  à  Massissah;  —  liaran  (lilsdc  Mohammed, 
fils  de  ïalout); —  Abou  Ilafs  Saïrafi  (le  changeur),  décédé 
à  Samarra;  —  Mohammed  (fils  de  Zonbour)  le  Mecquois, 
mort  à  la  .Mec([U(';  —  Suleïman  (fils  d'Abou  Taybah);  — 
Moura  (fils  d'Abcl  er-Rahman),  originaire  de  Barkah. — 
En  Tannée;  2r)o,  sous  le  règne  de  Mostaïn  :  Ibrahim  (fils  de 
Moliammecl)  Temimi,  jugi;  à  Basrah;  —  Mahnioud  (fils 
de  Kliaddach)  ;  —  Abou  Moslem  Ahmed  (fils  d'Abou 
(Ihoaïb)  de  llarràn;  —  llarit  ((ils  de  MeskJn  )  Misri;  — 
Abou  Taher  Ahmed  (fils  d'Aujr,  fils  deSerh),  et  plusieurs 


376  LES  PRAIRIES  D'OR. 

^  Jj|î    yw.   /i^^   <ic   Là-aJÎ    <X.]9   0.jjjlii)î    iy*.A3j   (j-j*X:S^.]5 
^  iLjLc^LS}    (^jvj^^Sj  (^XàS'Î  ».mj  ^^  îtXiù  IajCï^  JÎ  >jU^=Lii 

(^j\_jt_jjlj  sijJiUCwl  «XaawJÎ  m^  Ajj.A:aj  ii3j.X4Î  tiofe^  ^A.s.U 
&XA.0I  S   (jaÀJî  kiUi  ^^_5j   «X^î   X«wî  AAÀ^  (jïï^J  ^^Àji  v^l 

^  ,\_ij  »i_5i>j  ^jU)-iîi  /o-j«xs  i  (jï^J*-*  *^^^  »^~i4((^^i  tj^  tyj.m 

autres  professeurs  ou  rapporteurs  de  traditions  que  nous  ne 
citons  pas  ici.  On  en  trouvera  la  liste  complète  depuis 
répoque  des  Compagnons  du  Prophète  jusqu'à  la  présente 
année  332,  dans  Tannée  sixième  de  notre  ouvrage  intitulé: 
le  Livre  moyen;  la  nomenclature  rapide  que  nous  donnons 
ici  a  pour  but  d'ajouter  à  ce  livre  des  renseignements  indis- 
pensables et  de  répondre  ainsi  aux  exigences  du  lecteur. 

Le  Khalife  Mostaïn,  en  2/18,  fit  tirer  du. trésor  royal  un 
chaton  de  bague  formé  d'un  rubis  rouge,  qu'on  nommait 
djeheli.  Ce  bijou  était  conservé  avec  soin  dans  le  trésor  des 
rois.  Réchid  l'avait  acheté  au  prix  de  quarante  mille  dinars; 
il  y  fit  inscrire  son  nom  Ahmed  et  le  porta  à  son  doigt.  Cela  , 
donna  lieu  à  toutes  sortes  de  propos;  on  racontait  que  cette 
bague  avait  passé  d'un  roi  à  un  autre  chez  les  Chosroès  de 
Perse,  et  qu'elle  avait  été  gravée  à  une  époque  fort  ancienne; 
on  ajoutait  que  tout  roi  qui  avait  fait  graver  son  nom  sur 
cette  bague  était  mort  assassiné;  que,  dès  qu'un  roi  mou- 
rait, son  successeur  s'empressait  de  faire  effacer  la  gravure 


CHAPITRE  CXX.  377 

X^[i  y*/L-^*^    c::>U   îii    liLAii   fj^j  ^5^^  y^lo  ^1    JXo  A*iJùj 

lJ5^-Aiî    A-AJ   ^UaA*  .y  <-:-vSJ   i   f-^^  ^■^^   ^Uxiiî   ^Ua^sj    J-vWL 

y\^  4>0_5    ^J*;^iî    J^U    xsj!y^j5l    ^    ^jUyi  jUi^i    UjIJcS' J, 

de  ce  bijou;  enfin,  que  les  souverains,  à  quelques  rares 
exceptions  près,  le  portaient  sans  y  graver  leur  nom.  Ce 
rubis  brillait  la  nuit  comme  un  flambeau  :  placé  dans  une 
chambre  où  il  n'y  avait  pas  de  lumière,  il  réclairail  de  ses 
feux;  enfin  ou  remarquait  dans  cette  pierre  des  figures  qui 
brillaient  dans  l'obscurité.  Nous  avons,  au  surplus,  donné  la 
longue  et  curieuse  description  du  bijou  en  question  dans 
nos  Annales  historiques,  en  parlant  des  sceaux  des  rois  de 
Perse.  Cette  même  bague  a  été  vue  encore  sous  le  règne  de 
Mouktadir,  mais  on  ne  sait  ce  qu'elle  est  devenue  depuis. 

Plusieurs  poêles  célébrèrent  Moutazz  lorsqu'il  s'empara 
définitivement  du  pouvoir  et  cjue  sa  royauté  fui  consolidée  pai- 
l'abdication  de  Mostaïn  ;  parmi  ces  poésies  decirconstance,  qui 
sont  nonibreusos,  on  cite  le  passage  suivant  d'une  longue 
haridch  dont  rautciii-  est  Meiwan,  (ils  d'Ahou  'l-Djiinoith  : 

La  |)ui5sancp  est  reiulue  à  Moiilaz/. ,  cl  Mostaïn  est  renUé  clans  sa  véii- 
tnblc  coiulilion  : 


378  LES  PRAIRIES  D'OR. 

LfitX-:^    iL>MJû    0-M    JJ    Aj|^  *i    (j^aJ    kilUi  (ji   kxj  ^1^  *Xi 

j<^jC^05     <SJÎ    J^i    «Xïj    iJ!^Lw    J^\     ij^    J^=^J     Jj-*;?     ki^i-^     (j_5 

otAïI  c_>y>  (jwUi  ^^  ^y*^3       <xJ^  /j.j!  «x^î  RxfXû.  IjAjci 
^.xjuAiiJ!  A.>yA.Aw  aa»  LiL<Ui^       iSiXwitJL^  LiLU^  -f^^-*^"^  ^y^^i 

y^iS  J^jLj  a.a-Lc  A-^Ji!  ^^LjL»!^  aaJî  j»^iii  c.^s-^j  Jjcxii  j^^ 

w^A2.Aj1   '^ 

A-jL^aJ  ij  ÔLjb    dl.^5  itXi.         Aj'L*   v-A-s»"  f.^^i'î   w»i    <-'^ 

>  ■  -^  V      >   ■         I  -^  • 

A-jL-a-^I^    A-jb   «X.x^  !^A>^)         HjLjL^-Ia—*    ^'^  t^JLXwMwo 

H  savait  bien  que  le  trône  était  ta  propriété  et  non  la  sienne;  mais  son 
ambition  l'avait  égaré. 

Tels  sont  aussi  les  vers  suivants  d'un  poëte  de  Samarra, 
que  d'autres  attribuent  à  Bohtori  : 

Que  Dieu  rétribue  selon  leurs  œuvres  celle  cohorte  de  Turcs  dont  le 
glaive  Iriomplie  des  vicissitudes  de  leur  temps! 

Ils  ont  égorgé  le  Khalife  Ahmed,  fils  de  Mohammed,  et  revêtu  le 
peuple  du  vêtement  de  la  terreur-, 

Grâce  à  leurs  révoltes,  l'empire  est  démembré  et  notre  imam  (Khalife) 
ressemble  à  un  étranger  qu'ils  hébergent. 

Le  rétablissement  du  pouvoir  aux  mains  de  Moutazz  et 
Tunanimité  avec  laquelle  il  fut  proclamé  ont  inspiré  les  vers 
qui  suivent  à  Abou  Ali  Bassir  : 

L'islam  e^t  revenu  aux  jours  heureux  de  son  origine  et  le  trône  s'est 
raffermi  sur  sa  base. 

Il  a  repris  sa  stabilité ,  il  a  retrouve  la  sécurité  et  les  joies  du  retour, 
après  la  séparation  et  l'exil. 

J'en  remercie  îe  Dieu  unique  et  j'implore  son  pardon  pour  celui  dont 
les  mérites  se  sont  effacés. 


CHAPITRE  CXX.  379 

C^JlSj         hjSjyX»    ^y*i4j,A    AJ6    i^ÀA.O_5    ^     1\*0    /<U,L    -^  J^     (-aJCKÎ 

(^  j«-»-*-=-  (^  (^3^  (^  ;;;^  (^  *x^  ^^  ^  (j^^  aj  «Ij^ 

jl  çjL-i  vS  ^'  (ic  vXj-J^Î  (jj  *X-ç-!  aaXc  Jl^j  IjLjJsj.-^ 

Moutazz  eut  pour  vizirs  d'abord  Djàfar,  fils  de  Mohammed , 
el  ensuite  plusieurs  autres  personnages;  mais  les  décrets 
poitaient  le  nom  de  Salib,  fils  de  Waçif,  comme  si  celui-ci 
avait  eu  le  titre  OiTiciel  de  vizir. 

Abou  'l-IIaçan  Ali  (fils  de  Mohammed,  fils  d'Ali,  fils  de 
Mouça,  fils  de  Djàfar,  lils  de  Mohammed)  mourut  sous  le 
règne  de  Moutazz-Billab,  le  lundi  quatrième  jour  avant 
la  fin  de  djemadi  II,  2  5/i,  âgé  de  quarante  ou  de  quarante- 
deux  ans,  ou  plus  âgé  selon  une  autre  opinion.  A  ses  funé- 
railles on  entendit  une  jeune  fille  s'écrier  :  «  Que  le  lundi  nous 
a  été  funeste  autrefois  et  aujourd'bui  !  »  (Le  Prophète  était 
mort  un  lundi).  Ahmed,  un  des  fils  de  Motewekkil-Alallah, 
récita  les  prières  funéraires  dans  le  quartier  d'Abou  Ahmed 
et  dans  la  maison  que  le  défunt  habitait  à  Samarra  et  où  il 
fut  inhumé. 

V^oici  ce  que  m'a  raconté  Ihn  el-Azhar,  d'après  Kaçem, 
filsd'Abbad,  d'après  Yahya,  fils  de  Martamali,  qui  s'expri- 
mait  dans  h's  termes    suivants  :  «Le    Khcdife    Molewekkil 


380  LES   PRAIRIES   D'OR. 

L^-^ , {&!  ^  W'^''  cy^Ac?  L^i  \k£  iJtXj  ^^^uJ^juts»  /o  lO*'^ 
^.J^Xs»'\^   a.w.à5samÎ  c:A.Àx:i  aNXo  c>jt.«v*<  U  Isi^^  ^^??>^  li-^» 

A->LjI:>  t^«»-ji  <XJi&  vX-ij  Ja^  -Nt^j  <-a^  iî  -JixJUo  (j**.<w.J|^ 
c:>*Li=-   <;^.>-   iCiAjL^   >y|   dUi   <Xj»j   /Jo  ki  Axi  ^^^  cxx^i 

(j^  ov^.^  jî   c:a_$j„jj   Ci*-jij  U  c:^^!    kilo!   kfti   bî  Jlï^  ti' 

m'avait  envoyé  à  Médine  avec  ordre  de  lui  amener  Ali  (fils 
de  Mohammed,  fils  d'Ali,  fils  de  Moura,  fils  de  Djàfar), 
pour  répondre  à  certaines  accusations  dont  il  était  l'objet. 
Mon  arrivée  chez  Ali  provoqua  dans  sa  famille  un  tumulte 
et  des  clameurs  tels  que  je  n'avais  rien  entendu  de  pareil;  je 
m'empressai  de  calmer  leurs  aj)préhensions  en  jurant  que 
je  n'avais  pas  reçu  d'ordres  rigoureux  contre  Ali,  puis  je 
fouillai  la  maison  qu'il  habitait  et  n'y  trouvai  qu'un  Koran, 
des  (recueils  de)  prières  et  d'autres  choses  de  ce  genre;  après 
quoi  j'emmenai  le  prisonnier,  je  lui  offris  mies  services  et  lui 
témoignai  les  plus  grands  égards.  Un  certain  jour  (pendant 
le  trajet),  le  soleil  venait  de  se  lever  dans  un  ciel  sans 
nuages  ;  cependant  Ali  monta  à  cheval  couvert  d'un  manteau , 
et  après  avoir  noué  la  queue  de  sa  monture,  ce  qui  excita 
ma  surprise.  Mais  peu  d'instants  après  survint  un  gros 
nuage  qui  «  dénoua  l'orifice  de  son  outre  »  et  nous  inonda 
d'une  pluie  torrentielle.  Ali  se  tourna  vers  moi  et  me  dit  : 
»  Je  sais  que  tu  ne  comprends  rien  à  ce  que  tu  m'as  vu  faire 
et  que  tu  m'attribues  une  science  supérieure  à  la  tienne  ; 


CHAPITRE  CXX.  381 

c:*J»Liû  cx^s^l  Lfcojiai!  Igxift  ^  ^^-f-  C5^'  rW^^  ci^i  l»lî 
L-^_i  dUjo  <_:a,a^Ia;3  jJaiî  ii-^î^  W^-*  '-'^»<>*ij  v^ÀÀis'  ii  -<?^ 
u'*^  ^v^l^l  /ivl^^^l  /yj   ^l^U  c:»! Jo  f*}A»iMji   iCÀjJw«  c>^<XJ» 

p  w 

^.»«.x_j  ii  à^^jt-ii  J^-rs-^l  ÎJsJû  jj«l^  tj-.  o^-loÀ^  0.ju'  '^I^j  Jljii 
c^Sj  U  tK^il  c>.iJLt^  Wy^>*  vj-«  '^^*-s^^  <sy^^  Wi"  «r^^il 

tes  suppositions  sont  mal  fondées;  seulement,  comme  j'ai  été 
élevé  au  désert,  je  connais  les  vents  qui  précèdent  la  pluie. 
Ce  matin  justement  souiïlail  un  de  ces  vents  qui  ne  trompent 
jamais;  j'ai  senti  Todeur  de  la  pluie  et  j'ai  pris  mes  précau- 
tions en  conséquence.  »  Dès  notre  arrivée  à  Bagdad,  ma 
[)remière  visite  fut  pour  Ishak,  fils  d'Ibrahim,  de  la  famille 
de  Taher,  gouverneur  do  cette  ville.  Ce  prince  lue  parla  en 
ces  termes  :  «Père  de  Yahya,  cet  homme  (Ali)  est  fds  de 
l'apôtre  de  Dieu.  Tu  connais  Motewekkil;  sache  bien  que,  si 
lu  l'excites  à  tuer  Ion  prisonnier,  tu  te  feras  un  ennemi  du 
Prophète  lui-même.  »  Je  répondis  à  cela  que  je  n'avais  rien 
vu  dans  la  conduite  d'Ali  qui  ne  fût  digne  d'éloges.  Je  me 
lendis  ensuite  à  Samarra  et  j'allai  tout  d'abord  chez  Warif 
le  Turc,  car  j'étais  un  de  ses  amis.  «  Vrai  Dieu,  me  dit  celui- 
ci,  s'il  tombe  un  seul  cheveu  de  la  tète  d'Ali,  nul  autre  que 
moi  nen  demandera  satisfaction.  »  Fraj)pé  du  langage  de 
CCS  deux  [XTsonnages,  je  fis  pari  à  Molcwckkil  de  mes  in- 
luiniaiioiis  cl  des  éloges  (pie  j'axais  rcfiieillis  sur  le  coniple 


382  LES   PRAIRIES  D'OR. 

l^giÀ^  ^^.jUj  CA.j\^  ^j!    XcXc  jj  5«Xjlit  i^y-^  (^J  "tSC  (jjJ  «i^-^  (jjji 
U  i»^  o»— AJi-i  ^.^JLm*-j  tivo'X.jS?   viLjtX^fc-l  !5Xil   viXjlra-  v^^j 

(^.«*il   j,i    <^'JsJ».  S\s  (Jr^^  QJ  t^  jî  <;^'iXj>.  Jlï  !^  (^jÎ 

Jj,*v;    Jiï    JljJ    /O.^^^    t^Us    jî     (^J  "^    jj     (^Ù^S^-    J^    t^    (^5 

d'Ali;  aussi  il  lui  accorda  une  belle  gratification  et  lui  té- 
moigna toutes  sortes  de  bontés  et  d'égards.  » 

Mohammed,  fils  de  Feredj ,  me  racontait  ce  qui  suit,  dans 
le  quartier  de  la  ville  de  Djordjân  nommé  Bir  Ahi  Yuan  : 
«  J'ai  recueilli  de  la  bouche  d'Abou  Diâmah  le  récit  que 
voici.  —  J'étais  allé,  raconte  ce  dernier,  visiter  Ali  (fils  de 
Mohammed ,  fils  d'Ali ,  fils  de  Mouça)  lorsqu'il  fut  atteint  de  la 
maladie  qui  l'emporta  pendant  cette  même  année.  Gomme 
je  me  disposais  à  m'éloîgner,  Ah  me  dit  :  «  Abou  Diâmah, 
il  faut  que  je  m'acquitte  envers  toi;  veux-tu  que  je  te  confie 
une  tradition  que  tu  entendras  avec  satisfaction  .^  —  Fils  de 
l'Apôtre  de  Dieu,  répondis-je,  rien  ne  saurait  in'être  plus  né- 
cessaire. »  Ali  reprit  :  «  Mohammed,  mon  père,  a  reçu  d'Ali 
son  père ,  Ali ,  de  Mouça  son  père ,  celui-ci ,  de  Djâfar  son  père , 
Djàfar,  de  Mohammed  son  père ,  Mohammed ,  de  Ali  son  père, 
Ali ,  de  Huçeïn  son  père,  et  Huç.eïn,  de  son  père  Ali  (fils  d'Abon 
Talib)  la  tradition  suivante  que  Ali  lui  transmit  en  ces  termes  : 
«Le  Prophète  me  dit  un  jour:  Écris,  ô  Ali.  — Que  dois-je 


CHAPITRE  CXX.  38,^ 

civ_j«X_i  jw*»*->.i   L^l  4>Ji_j  (^^ii  l«»  ^^i  '^.^^  (^^   y  «-^J'i'S 

jà^ii  ïjjLix^  ioi«X^i  <-aÀjj  k^  «-«y  *X4^  0.J  ^  wAi».  b^Ji 
■^î    yî^    c-«._Jl_!o   J,i    (^  ""^^^    y.—)    ^jv. .»»,  -4    iCÀjl    \-§ji    ^j^   AA£il 

écrire?»  lui  clemandai-je.  Le  Prophète  continua  :«  Ecris.  Au 
nom  du  Dieu  clément  et  miséricordieux  !  La  foi  est  un  dé- 
pôt confié  au  cœur  de  riiomme  et  qu'il  confirme  par  les 
œuvres;  Vislamest  ce  que  sa  langue  exprime  et  ce  qui  rend 
le  mariage  légitime.  »  Je  dis  alors  à  Ali  (ajoute  Abou  Dià- 
mah)  :  «  Fils  du  Prophète,  je  ne  sais  en  vérité  ce  que  je  dois 
le  plus  iidmirer  de  cette  tradition  ou  des  autorités  (jui  Tout 
transmise.  —  Elle  est  consignée,  ié|)li(pia  Ali,  sur  une  feuille 
écrite  de  la  main  d'Ali,  fUs  cfAhou  ïalib,  sous  la  dictée  du 
Prophète,  et  nous  nous  la  transmettons  comme  un  héritage 
de  père  en  (ils.  »  Nous  avons  raconte''  rontrcvuc  d'Ali,  fds  de 
Mohammed,  avec  la  fausse  j)rophétesse  Zeïneh  en  présence 
de  Motewekkil;  nous  avons  dit  qu'il  descendit  dans  la  fosse 
aux  lions,  que  ces  animaux  se  couchèrent  ;i  ses  pieds,  et  fjue 
Zeïneh  renonça  alors  à  se  faiie  passer  j)our  une  fille  de  lïu- 
rein  (fils  d'Ali,  filsd'Ahou  Talih}  à  laquelle  Dieu  aurait  per- 
mis de  vivre  jusqu'à  celte  époque,  etc.;  ces  détails  se  trou- 
vent dans  nos  Annales  histori(|ues.  D'après  une  aulre  ver- 
sion, Ali  heu  VJithaniined  serait  mori  cnqjoisorujé. 


384  LES  PRAIRIES  D'OR. 

LJi>^\  'ijSj-s-^  r•.^-^'J  ^^  <j-*  u^  ^.j.*i*XL«^^3i^  u^j.«i»& 

Sôus  le  khalifat  de  Moutazz  mourut  Mohammed  (fds 
d'Abd  Allah),  fils  de  Taher,  le  i5  de  doul-kàdeh  2  53  de 
l'hégire,  treize  jours  après  le  meurtre  de  Waçif  et  pendant 
une  éclipse  de  lune.  Son  caractère  libéral  et  généreux,  son 
instruction  variée,  sa  mémoire  richement  ornée,  la  distinc- 
tion de  ses  manières,  son  éloquence,  sa  supériorité  dans 
la  conversation  le  placèrent  au-dessus  de  tous  ses  rivaux 
à  cette  époque.  C'est  à  lui  que  s'appliquent  les  vers  sui- 
vants d'une  kaçideh  composée  par  Huçein  (fils  d'Ali,  fils  de 
Taher)  : 

La  lune  et  l'Emir  se  sont  éclipsés  en  même  temps;  mais  la  lune  brille 
de  nouveau  et  l'Émir  est  resté  clans  les  ténèbres. 

Elle  a  retrouvé  sa  lumière  pour  se  montrer  à  nos  yeux,  tandis  que  la 
lumière  de  l'Envr  est  à  jamais  éteinte. 

Ô  vous  deux,  astres  éclipsés  dans  cette  sinistre  nuit  du  lundi,  puisse 
votre  influence  bienfaisante  vous  l'amener  ici  ! 

Prince  sans  rival  il  avait,  dans  sa  sévérité,  le  tranchant  du  glaive  et 
l'ardeur  du  foyer  d'où  jaillit  la  flamme. 


CHAPITRE  CXX.  385 

(j-«  t^?-^    »X_ï^   ^iLjj_/9  (j^  xX**jL:s2   ,^^  ^-^-^  (j'^'^J   i_^^j   <i^ 

(j*i^»»*^_Jti    jU   Jb    viUi    (j-«j    JtJ  Ci>^i    lii    AAj^Ji    (*:^-w  c:*.AAr».î 

Au  rapport  crAhou  'l-Abbas  Moberred,  ce  même  Moham- 
med (fds  d'Abd  Allah),  fils  de  Taher,  se  trouvant  un  jour 
de  bonne  humeur  et  disposé  à  réunir  ses  amis,  dit  à  Ibn 
Talout,  qui  était  son  vizir,  son  pkis  cher  compagnon  et  ce- 
hii  qu'il  recevait  le  plus  volontiers  dans  l'intimité  :  «Il  faut 
absolument  que  tu  me  trouves  aujourd'hui  un  troisième 
convive  dont  la  société  embellira  notre  fête  et  charmera  notre 
réunion  j)rivée;  quel  serait,  selon  toi,  ce  convive?  Surtout 
épargne-moi  la  présence  d'un  homme  d'un  caractère  dlIFi- 
cile,  d'une  origine  infime  et  dont  la  pauvreté  se  révèle  par 
de  basses  adulations.  "  Après  quelques  moments  de  réflexion , 
Ibn  Talout  répondit  :  «  Prince,  je  songe  à  quelqu'un  dont  la 
société  ne  sera  pas  un  fardeau  pour  nous,  à  un  homme 
exempt  de  l'indiscrétion  des  convives  et  de  l'importunité  des 
compagnons  intimes,  lequel  se  présentera  d'un  pas  léger,  si 
vous  rappelez,  et  disparaîtra  sui  un  ordre  de  vous.  —  Quel 
est-il.^  demanda  l'Kmir.  — Mani ,  surnommé  Mowaswis  (({ui 
mainiott(î  entre  ses  dents).  — Tu  as,  pardicu,  raison,  n'-- 
plicjua  l(;  prince;  (pic  Ton  donne   Tordre  aii\  chefs    (de  po- 


386  LES  PHAIKIE.S  D'OK. 

A_aa_JLa^Î  yî   (j^  ^j-*vij  U^  ^  A-xJ)  »_5^à;-J  -XaAIo  ^      ^^i 

vi)^^  u'^  ^^  à^  l?  p^^^--^'  ^^^^  '^^  JUi^,jy«^i  W:?!  ^^* 
<^x^  V^^-J  *^*^  j1>^'j  '^a'^  V*^^  <Xj«X^  {^y*^^  <i^  «J^*» 

p 

lice)  des  vingt-huit  ([uartiers  de  le  rechercher  et  qu'on  me 
ramène  sur-le-champ.  »  Quelques  moments  plus  tard,  le 
chef  de  Kerkh  dépistait  cet  homme  et  le  conduisait  au  pa- 
lais. Là  on  s'empara  de  Mani,  on  rogna  sa  barbe  et  sa  cheve- 
lure, on  le  fit  nettoyer  et  baigner,  on  le  revêtit  d'un  costume 
propre  et  il  fut  inti'oduit  alors  chez  Mohammed.  Il  le  salua; 
le  prince  lui  rendit  son  salut  et  lui  dit:  «Eh  bien,  Mani, 
n!avais-tu  donc  pas  le  temps  de  venir  nous  visiter  sans  te 
faire  désirer  et  sans  attendre  que  notre  cœur  fût  impatient 
de  te  voir? —  Mon  impatience  était  grande,  répliqua  Mani, 
et  mon  affection  toujours  prête;  mais  la  coui^se  est  longue, 
les  chambellans  sont  revêches  et  les  portiers  sont  bourrus; 
si  l'accès  de  votre  palais  eût  été  facile,  rien  ne  se  serait  opposé 
à  ma  visite.  »  Le  prince  répondit  :  «  Tu  en  as  sollicité  l'accès 
en  termes  convenables,  je  veux  que  tu  sois  reçu  de  même; 
que  désormais  on  laisse  entrer  Mani  dès  qu'il  se  présentera, 
à  toute  heure  du  jour  ou  de  la  nuit.  »  Ensuite,  sur  l'invita- 
tion de  son  hôte,  Mani  s'assit,  (il  honneur  au  re|)as  que  le 
prince  fit  servir  et,  après  s'être  lavé  les  mains,  il  prit  part  à 


CHAPITRE  CXX.  387 

(2)  >" 

l'entretien.  Mohammed  ayant  désiré  entendre  Mouniçah,  qui 
était  une  esclave  (musicienne  élève)  de  la  fille  de  Mehdi, 
on  la  fit  venir,  et  le  premier  morceau  qu'elle  chanta  fut 
celui-ci  : 

Je  n'ai  pas  oublié  les  larmes  que,  dans  l'excès  de  ma  douleur,  j'ai  ré- 
pandues sur  CCS  compagnons  chéris,  le  matin  de  leur  départ; 

Je  n'ai  pas  oublié  ces  mots  que  je  prononçai  lorsque  la  caravane  s'éloi- 
i^iiait  à  la  laveur  de  la  nuit  :  «  Vierges  du  Nedjd ,  puisse  cette  entrevue  ne 
pas  être  la  dernière  !  » 

«  A  merveille  !  sV'cria  Mani,  mais  je  le  jure  par  le  prince, 
tu  aurais  pu  ajouter  : 

Je  suis  |)aili  dissimulant  ma  tristesse,  et  mes  larmes  s'amassaient  sur 
mes  paujiiéres,  où  je  m'i'florçais  de  les  retenir. 

Non,  l'Emir,  avec  toute  sa  puissance,  ne  saurait  me  protéger  contre 
l'ennemie  cruelle  qui  s'acbarne  à  m'éloigner  cl  à  me  repousser.» 

L'esclave  s'empressa  de  chanter  ces  nouvelles  paroles;  le 
prince  demanda  alors  à  Mani  si  par  hasard  il  riait  amoureux. 
("oMc  (picslion  le  rendit  confus  et,  d'autre  part,  Ibn  Talout 
lui  faisant  signe  de  ne  faire  aucune  n'-v/'lation  fpii  pi'il  le 
discréditer  aux  veux  du  prince,  il  se  borna  .1  r/'pnndre  :  «  1-e 


388  LES  PRAIRIES   D'OR. 

U:5X_^\      ^\^jJ\     *>V-^i-S    U^*L*  ^jjf,    ^jL^    l^Vdl     \y^j  y} 

Jî  :i\_*_X_ji_j   »X^îj  •PLi-s.-i))   (jvj   AjU-kail   <XJ)J  fc-OLi!   yl<J 

plaisir,  Témotion  que  je  dissimulais  en  moi-même,  se  sont 
manifestés.  Mais  est-ce  qu'un  pauvre  vieillard  peut  être 
amoureux?»  Le  petit-fils  de  Taher  ayant  fredonné  à  Mou- 
niçah  l'air  suivant  : 

Us  i'ont  enfermée  au  passage  de  la  brise ,  parce  que  j'avais  chargé  le 
vent  de  lui  porter  mon  salut. 

S'ils  se  contentaient  de  la  retenir  prisonnière,  ce  serait  peu  de  chose, 
mais  ils  vont  jusqu'à  lui  défendre  de  parler  quand  souffle  la  brise. 

Mouniçah  exécuta  ce  chant.  Mohammed  en  fut  charmé;  il 
se  fit  apporter  une  mesure  (ritl)  de  nébid  et,  pendant  qu'il 
buvait,  Mani  s'écria  :  «  Pourquoi  l'auteur  de  ces  vers  n'a-t-il 
pas  ajouté  : 

Je  soupirai  en  disant  à  mon  image  (  souvenir)  :  Si  tu  visites  mystérieu- 
sement la  sienne, 

Donne-lui  un  salut  particulier  de  ma  part-,  mais  je  crains  que,  pour 
mon  malheur,  on  lui  interdise  jusqu'au  sommeil. 

«Il  aurait  de  la  sorte  fait  pénétrer  plus  profondément 
dans  les  entrailles  les  flammes  de  la  passion:  il  aurait  ré- 


CHAPITRE  CXX.  389 

A^^\^  *.^llâj  o«->y5b  (^'»«*^*-  ^  *^'  J^jj  (j-«  ^♦XasJI  0\am\ 
y-A  ^^^3  jU  L  c-w_>w*.r»-!  iXj^  JUi  x^Ur  i^W^  à^  (S-'^ 

/W<X^    C^A^k^  AJ   l<yJ    *Ia*jI^   ^jji)î   ^XAAJU   LjY.il.£.lj    \j**Jy« 

Jl  i_>»_i_^^  iS'^"-^ ^'  ''y^j  ^j-^  à^  J^  *^^  xÀ^^^U 

panclu  plus  abondamment  sur  le  cœur  altéré  la  rosée  vivi- 
fiante de  l'amour;  il  aurait  ainsi  embelli  sa  composition 
poétique  et  porté  sa  pensée  jusqu'aux  limites  où  elle  pou- 
vait atteindre.  »  Le  prince  complimenta  Mani  et  voulut  que 
la  musicienne  ajoutât  ces  deux  vers  aux  deux  premiers  et 
qu'elle  les  mît  en  musique.  Après  cela,  l'esclave  continua 
par  le  distique  suivant  : 

O  mes  deux  amis,  encore  un  moment;  ne  vous  éloignez  pas,  demeurez 
auprès  de  celui  qui  aime. 

Nous  no  pouvons  passer  devant  la  demeure  de  Zeïneb,  sans  que  nos 
larmes  ne  révèlent  le  secret  que  nous  cherchions  à  cacher. 

Cet  air  charma  Mohammed.  «  N'était  la  crainte  de  me 
rendre  importun,  ajouta  Mani,  je  joindrais  à  ces  deux  vers 
deux  autres  vers  qu'une  àme  délicate  ne  saurait  entendre 
sans  les  aj)prouver.  »  Lr  prince  lui  répondit  :  «  Mani,  le  désir 
(jue  j'éprouve  de  connaître  tes  charmantes  inspirations  doit 
te  [)rémunir  contre  tonte  appréhension;  parle  donc  libre- 
ment. «  Mani  continua  ainsi  : 


390  LES   PRAIRIES   D'OR. 

A-AWk-v.^  *AAaJi  Ly-^i  ovjV        *^-«^-S  cj»JL>kJai   cy_^*aj  Ci^»^P 

Cette  gazelle,  brillante  comme  le  croissant  de  la  lune,  une  seule  de  ses 
œillades  briserait  un  rocher  (un  cœur  de  pierre); 

Et  quand  elle  sourit,  on  croirait  voir  briller  l'éclair  ou  un  collier  de 
perles. 

«  Très-bien ,  reprit  l'Émir,  et  maintenant,  Mani ,  complète 
la  poésie  que  voici  : 

Les  plaisirs  ne  sont  doux  qu'avec  celle  qui  leur  donne  toute  leur  dou- 
ceur, avec  Manouçah  (i'amie  intime,  allusion  au  nom  àe  Moiiniçali], 

Dont  la  voix  mélodieuse  fait  couler  des  larmes  que  la  lésignation  rete- 
nait captives. 

Mani  continua  ainsi  : 

Et  comment  se  résigner  loin  d'une  belle  à  la  taille  flexible,  qu'on  ne 
peut,  sans  être  injuste,  comparer  au  paon  ? 

C'est  lui  faire  injure  que  de  dire  d'elle  qu'elle  est  un  saule  planté  dans 
les  jardins  célestes. 

C'est  une  injustice  que  de  lui  donner  pour  égale  la  perle  qui  se  cache 
au  sein  des  mers. 


CHAPllKE  CXX.  391 

JlJJ^Uj    4;_J(J.-u.    iAj;Iî_j    vilÀi!    J^aXc    v^ki^j    J^i    iiJ*KcL*J 
^    \aa^    Jotîî    vJsjJi:   _XkSj  ^Jy>   Os^Jî   jU   l^ 

J^ A-Ioljiit  ^p4(ui-j  oo)lî        ^_i.ia_x.AJ  v^Jt  <j  (j*^-*^ 

Et  comme  il  s'arrêtait,  Mohammed  l'invita  à  continuer 
sa  description  poétique;  Mani  lui  répondit  parce  seul  vers: 

Elle  est  au-dessus  de  tout  élof^e,  et  la  pensée  ne  peut  trouver  dans  le 
langage  des  expressions  qui  soient  dignes  d'elles. 

Lorsque  l'Émir  eut  complimenté  le  poëte,  Mouni(;ah  lui 
adressa  les  paroles  suivantes  :  «  Tu  mérites  nos  remercî- 
ments,  ô  Mani  ;  que  la  destinée  te  favorise  !  que  ton  ami  soit 
plein  de  bonté  pour  toi  !  que  la  joie  t'accompagne  et  que  le 
malheur  s'éloigne  de  toil  Je  prie  Dieu  de  nous  conserver 
cette  félicité  en  nous  conservant  celui  à  ([ui  nous  devons 
d'être  réunis  I  »  A  ces  paroles  :  «  Que  ton  ami  soit  ()lein  de 
bonté  pour  toil  »  Mani  répondit  par  les  veis  (pie  voici  : 

Non,  je  n'ai  pas  d'ami  qui  puisse  wv  témoigner  sa  boute;  mon  âme  u 
rejeté  les  plaisirs  frivoles. 

Je  suis  altaclic  par  la  reconnaissance  à  celui  qui  est  Uii-nuMni-  ntlaché 
A  la  gloire  par  des  liens  solides. 

Je  dois  mou  lionlicur  aux  bienl'ails  d'un  iionnne  d.ins  U'(|ucl  le  bien 
s'est  incarné. 


392  LES  PRAIRIES  D'OR. 

(1) 


Sy*'?.  y^^  l>^^*  f»^'^*'^'^  «^_j.JU3  f^\  AjJi   U^lî 


»_^5\Xi  cjiiJi  iijjJûj>  tjAitf><Xjf  jJûUiJi  0^  (jvjt)l_^  i)j  jJàm 


Ibn  Talout  lui  fit  signe  qu'il  était  temps  de  partir;  le  poëte 
se  leva  et  prononça  ces  vers  : 

C'est  un  roi  dont  les  rivaux  sont  rares,  et  qui  est  orné  de  la  spiendeur 
de  la  noblesse  et  de  la  vertu, 

Un  fils  de  Taher  environné  d'un  cortège  nombreux ,  et  dont  les  bienfaits 
se  répandent  parmi  les  bommes. 

O  Abou '1-Abbas,  conserve  précieusement  un  talent  dont  le  temps 
émousse  le  tranchant. 

L'Émir  lui  répondit  en  ces  termes  :  «Tu  mérites  d'être 
récompensé  pour  des  remercîments  qui  ont  précédé  chez 
toi  tout  acte  de  générosité  de  ma  part;  »  et  se  tournant  vers 
Ibn  Talout,  il  ajouta  :  «  Ni  l'obscurité  de  la  naissance,  ni  des 
dehors  humbles,  ni  l'indifférence  pour  tous  les  avantages 
extérieurs  ne  peuvent  faire  disparaître  chez  l'homme  l'es- 
sence du  talent  dont  il  est  doué.  Salih ,  fils  d'Abd  el-Koddous , 
ne  s'est  pas  trompé  lorsqu'il  a  dit  : 

N'admire  pas  celui  qui  protège  ses  vêtements  contre  le  contact  de  la 
poussière  ,  mais  qui  souille  son  honneur. 


CHAPITRE  CXX.  393 

J»,*>fcX^   »>-AOyS.^     CjUjiui    i^y*-^i>  A_X_jljJ    ^-iJijJiJCj!    '>— ^•^» 

JJi>    l^^d   «XÀ£   S^>U;ji^    dUJt    vJoJf   Oti⣠

>^'  (jl  ^^      iy  ^si-  Aj»^  *xU  lj^:s:  ^K^î-  Jj^  1^  JU 

if^-MtJCi  %^-^.  {J^.  *>o^î  «^_^i3^  i^!_j  v-^  ^J  *Kç-i  Lî_J  *>>5^î 
^^  <X,j-iil^  V^-^?"'  u'  ci'  ^'*^^*  C:J^*J;'   V;-*^*  ^X-^it  ioi^j  (j-* 

^l^j  jj^A^il  -^  yK  l^  *-M*xsi-  (j-«  'Xj^î  sL)-^'  t^  (*^1; 

Souvent  un  homme  réduit  à  la  pauvreté  et  vêtu  d'habits  sordides  a  su 
conserver  son  honneur  pur  et  sans  tache,  d 

Ibn  Talout  ajoute  (ju'il  ne  vit  jamais  un  homme  doué  de 
plus  d'esprit  d'à-propos  que  Mani,  lorscjue  au  vœu  d'une  es- 
clave :  «  Puisse  ton  ami  être  plein  de  bonté  pour  toi  !  »  il  ré- 
pondit par  rimprovisation  : 

Non  ,  je  n'ai  point  d'ami  qui  puisse  me  témoigner  sa  bonté  ;  mon  âme  a 
rejeté  les  plaisirs  frivoles,  elc. 

Moberred  nous  apprenti ,  en  outre ,  que  Mohammed  fit  une 
pension  à  Mani  jusqu'au  dernier  jour  de  sa  vie. 

Moutazz  fut  informé  que  Moueyyed  conspirait  contre  lui 
et  qu'il  avait  attiré  plusieurs  inawlas  turcs  (hms  sou  parti;  en 
conséquence,  il  le  fit  emprisonner,  lui  et  Abou  Ahmed 
(Mouaffak),  son  frère  de  père  et  de  mère;  pressé  d'abdiquiîr 
ses  droits  à  la  succession  royale,  Moueyyed  y  renonça  par 
sernient  après  avoir  reçu  quarante  coups  de  bâton.  Mais 
bicnlùt  aj)rès,  Moutazz  apprit  (|ue  quelques  Turcs  s'étaient 


394  LES   PRAIRIES   D'OR. 

(jWkAfifc    ^^yà^    HyJ^    CjL»    (^S>-    Sli^O    ù'^^^  j^^^    O^-^    ij    ^^^' 

p 

pl^S'iJi  ^j^  l^j  J.J  U^  ^^ij  (j^Ja-  >]_^à.:>  (^j  yiso  *x:rî  jj 

<X jiJ  vXxiî  ^■^^  ^^   ''i^'*^   (J'?    J.AX.çwi    4-*-^J   ^_5~!    (JV**»-*^^ 

concertés  pour  tirer  Moueyyed  de  sa  prison  :  le  jeudi ,  hui- 
tième jour  avant  la  fin  de  recljeb  262  ,  le  cadavre  de  ce  prince 
élait  porté  hors  de  son  cachot;  les  kadis  et  docteurs  de  la  loi 
appelés  à  constater  le  décès  ne  trouvèrent  sur  le  corps  au- 
cune trace  (de  violence).  On  raconte  que  Moueyyed  fut 
enveloppé  dans  une  pelisse  de  zibeline  dont  on  serra  les 
bouts  jusqu'à  ce  qu'il  expirât.  Quant  à  Abou  Ahmed,  sa  cap- 
tivité devint  plus  rigoureuse;  depuis  son  arrivée  à  Sorra- 
men-râ,où  il  avait  été  reçu  avec  tant  de  marques  d'honneur, 
jusqu'au  jour  de  son  incarcération ,  il  s'était  écoulé  une  durée 
de  six  mois  et  trois  jours.  11  fut  ensuite  exilé  à  Basrah 
(1 3' jour  avant  la  fin  de  ramadan),  cinquante  jours  après 
le  meurtre  de  Moueyyed.  Ismâïl.  fils  de  Kabihah  et  frère  de 
Moutazz  par  son  père  et  sa  mère,  fut  alors  nommé  héritier 
présomptif  à  la  place  de  Moueyyed.  Les  généraux  turcs 
se  réunirent  ensuite  chez  le  Khalife  et  lui  demandèrent  la 
grâce  de  Waçif  et  de  Boga,  ce  qu'il  leur  accorda. 

Pendant  cette  même  année,  Zorafah,  ancien  majordome 
(ou  chambellan)  de  Motewekkil,  mourut  en  Egypte. 


CIIAPITKE   CXX.  395 

A_À_-«    (j— **''    y^   v_X-w^_>   /wj   «Xh,^   Sk-:^!    AjIîj   4X*j   ^^àXsS. 
tXjvXUw   •X^r»'  ^UiAamj    <\amJ!    S«>^  ^   (jM UJi   JIàà  «XjUw  /WwmJO 

/o-4^aÀJoo  jJC*iî  ji^li  lg.À^  Î^J>,«^  ju<2.^  (jl  jl^lj  JjUil    tX^r^^j 

Ismàïl  (fils  de  Yourouf)  TAlewide,  qui  s'était  emparé  de 
la  Mecque,  mourut  cette  année-là  (lisez  en  2  5i)  et  fut  rem- 
placé par  son  frère  Mohammed  (fils  de  Youçouf),  qui  était 
son  aîné  de  vingt  ans.  Cet  événement  causa  de  grandes 
souifrances  parmi  les  populations  (du  Hédjaz).  Moutazz 
ayant  envoyé  dans  cette  province  Ahou  '1-Sadj,  originaire 
d'Achrousnah ,  Mohammed,  fils  de  Yourouf,  prit  la  fuite,  et 
cette  insurrection  coula  la  vie  à  beaucoup  (riiabilants.  — 
Même  année  (en  200,  d'après  Ibn  el-Athir j ,  Ilaran  (fils  de 
Zeïd)  el-Hnceïni  attafjue  Suleïman  (fils  d'Abd  Allah,  fils 
de  Taher)  et  le  chasse  du  Tabarislàn.  —  Même  année  (lisez 
en  203  de  Thégire),  Yça  (fils  du  Cheikh)  le  Cheïbanite  se 
rend  d'Egypte  à  Samarra,  apportant  des  sommes  considé- 
rables et  ayant  avec  lui  soixante-seize  descendants  de  la  fa- 
mille d'Abou  Talib  qui  appartenaient  à  la  postérité  d'Ali,  de 
Djâfar  et  d'Okaïl;  ces  Alides  avaient  fui  devant  les  discordes 
et  les  troubles  qui  désolaient  le  jlédjaz  et  s'étaient  réfugiés 
en  Egypte;  ils  furent  conduits  de  là  à  la  cour  de  Moutazz. 
Ce  prince   leur  fit  donner  c.iulion  cf  les  l.iissa  libres  après 


390  LES   PRAIRIES   D'OR. 

u>-yoJ  vjlvoiiij  i^À^LxJi  (^y»  IJUil^  T/^  *-^'  "-^^  XâaJî  »«Xiû 

(^-JM-J^^     fc-J^Î     ii_\-*«    ij^  V.>_A-Oj    ^^y^   ^..^XK^O^    Qj    ^^ 

it-«L*«*.j  A*«tj  wvkâ.j_5  Jodii  I^^Iaw  y*t*>:f.  iojUii  (ja*j  ^  jSy 
c-wJka-À-i  -!5X-*Ji   iiÀJ*K^  ci^   (j*l^l  ^<Xs»-l^^'^XAaJl  Uj  ^i*' 

avoir  fait  une  enquête  sur  leur  compte;  quant  à  Yça  le  Cheï- 
banite,  il  fut  nommé  gouverneur  de  la  Palestine. 

En  cette  même  année  2  53  de  l'hégire,  Safwan  Okaïli, 
chef  duDiar-Modar,  meurt  dans  les  plaisons  de  Samarra.  — 
Même  année,  les  troupes  des  Ferganiens  et  des  Turcs  habi- 
tant Kerkh-Samarra  niassacrent  Waçif  le  Turc;Boga  réussit 
à  leur  échapper.  —  La  puissance  de  Moçawir  Chari  s'accroît. 
—  Salih,  fils  de  Waçif,  est  promu  aux  fonctions  \de  son 
père.  '  "\ 

En  254,  Boga  sort  de  Samarra  pour  se  rendre  da.ns  le 
district  de  Moçoul;  les  mawlas  pillent  son  hôtel;  les  troupes 
sous  les  ordres  de  Boga  se  dispersent;  Boga  descend  dans 
une  barque  à  la  faveur  d'un  déguisement;  quelques  soldats 
magréhins  l'attaquent  au  pont  de  Samarra  et  le  tuent.  Sa  tête 
(il  s'agit  ici  de  Boga  le  jeune)  est  exposée  d'abord  sur  le 
gibet  de  Samarra,  puis  elle  est  envoyée  à  Bagdad  et  attachée 
au  gibet  sur  le  pont  de  cette  ville. — Moutazz  n'avait  jamais 
dormi  d'un  sommeil  tranquille,  du  vivant  de  Boga,  et  il  ne 


CHAPITRE  CXX.  397 

U  a^^5  yj.*  (j^  Ji_^A»i)î  ^-^-ft-s  oÀAÀJ_5  jJCjd!  (^  (iJr^iil 

(j,(,iw-^  X-X-jM  i-^=^j  ij-»  (^Jij  ^"^  dlJi^  *.^,x5^L>  X\ii  'jjIa3 
Ail«!   ^^  <Xj_jJ^_jj^   <îu^«Xj   Xi^it^Jij  I^X*rs-j   (JvXjUj  (^J^J*MJÇ-^ 

^  4^ ..,.-*.  Lt^  JULi  cj^  f'^^ii  aK-aj»  u3-^"  u' j^'j  "^^  tiJî^iiî 

se  séparait  de  ses  armes,  ni  le  jour  ni  la  nuit,  tant  était 
grande  la  terreur  que  lui  inspirait  cet  homme.  «  Je  ne  cesse- 
rai pas  d'agir  ainsi,  disait-il,  jusqu'à  ce  que  Boga  ait  ma  tète 
ou  que  j'aie  la  sienne;  »  il  disait  aussi  :  «  Je  crains  toujours 
que  Boga  ne  me  tombe  du  ciel  ou  qu'il  ne  sorte  de  terre  devant 
moi.  »  En  elTet,  le  plan  de  Boga  était  de  descendre  le  Tigre 
secrètement,  d'arriver  à  Samarra  pendant  la  nuit  et  de  dé- 
tourner les  Turcs  du  parti  de  Moutazz  en  semant  l'or  parmi 
eux;  mais  il  finit  comme  nous  venons  de  le  raconter. 

Cependant  lorsque  les  Turcs  virent  que  le  Khalife  osait 
attenter  à  la  vie  de  leurs  chefs,  qu'il  mettait  tous  les  strata- 
gèmes en  œuvre  pour  les  détruire,  enfin  qu'il  favorisait  les 
Magrébins  et  les  Ferganiens  à  leur  détriment,  ils  se  portèrent 
en  masse  au  palais  (26  du  mois  de  redjeb  255  de  l'hégire). 
Là  ils  rappelèrent  à  Moutazz  ses  torts  envers  eux  et  lui  re- 
prochèrent brutalement  sa  conduite,  puis  ils  lui  demandèrent 
de  l'argent.  Cette  insurrection  avait  été  organisée  par  Salih, 
fils  de  Warif,  assisté  dos  généraux  turcs.  Moutazz  tint  bon  cl 


398  LES  PRAIRIES  D'OR. 

Ji  J<i».i_j    i3^J^^^    S  ^^i^^   sUJOCi   Ij-oU.   <JI    aKJ_5   pj,j   i   Aj 

^ji  ^^"l_j-Ji  (^j  *X4^  j,i^  «jJ_j^  ^U}  aKjûÎ  ^^  Hyi-*^.  yi^ 
«__CWk_J5  jjjtlî  4^^  CP"^*   ^^*^'   tV-S*:?  ^5    viUil  y?.j-^  ^  «X**î> 

déclara  qu'il  n'avait  pas  d'argent;  devenu  leur  prisonnier, 
il  envoya  aussitôt  chercher  à  Bagdad  Mohammed  (fds  de 
Watik),  surnommé  Mou/ifacZi,  qu'il  avait  exilé  et  emprisonné 
dans  cette  ville.  En  un  jour  et  une  nuit,  Mouhtadi  arriva  à 
Samarra;  les  princes  allèrent  à  sa  rencontre  et  il  s'installa 
dans  le  Djausak  (voyez  ci-dessus,  p.  io3].  Moutazz  se  déclara 
prêt  à  abdiquer,  à  la  condition  d'avoir  la  vie  sauveet  d'obtenir 
des  immunités  en  faveur  de  son  harem,  de  ses  enfants  et 
de  ses  biens.  Mohammed,  fils  de  Watik,  refusa  de  s'asseoir 
sur  le  trône  et  d'accepter  le  serment  de  ses  sujets  avant 
d'avoir  vu  Moutazz  et  d'avoir  entendu  ses  propres  déclara- 
tions; on  lui  amena  ce  prince  vêtu  d'une  chemise  sale  et 
coiffé  d'un  mouchoir  (en  guise  de  turban).  Le  fils  de  Watik 
courut  à  sa  rencontre,  le  serra  dans  ses  bras  et  le  fit  asseoir 
sur  le  trône  à  côté  de  lui.  «  Mon  frère,  lui  dit-il,  qu'est-ce  donc 
que  ce  pouvoir? —  Une  chose  au-dessus  de  mes  forces ,  répon- 
dit Moutazz,  que  je  ne  puis  soutenir  plus  longtemps  et  pour 
laquelle  je  ne  suis  pas  fait."  Comme  Mouhtadi  l'engageait 


CHAPITRE  CXX.  399 

J    À_=-l_>-    :>ij^Xxil  JUi   Jî^-iii    ^.j^    Ajyj^    JUI  ^>*aj^    S^i 

o»>À.-M*.j». li  XaJ^j  c:>JLj  l;  aKXSjj  \JCxil   >t.Ai».  jj  pLxÀiJl   «^la 
Ai   5J>>.AA2.j   ^j.«^*2.xîi   i<Xi5  J.iù!   (jÂ;iJ  J_j.i   dUi   f^À 

S-Jw—w   Ot^^   ^_^iwJÎ    v_à3)    A_ — iL_jb»    (*_jjjL*<*Ji    ^LÀ-J)    iJ^jL^ 

à  accepter  ses  bons  olFices  et  lui  proposait  d'intervenir  clans 
ses  démêlés  avec  les  Turcs  :  «  Non,  répliqua  Moutazz,  je  ne 
désire  plus  le  pouvoir,  et  les  Turcs  ne  consentiraient  pas  à 
me  le  laisser.  —  Alors,  reprit  Mouhtadi,  je  suis  relevé  du 
serment  que  je  t'ai  prêté  ?  —  Tu  en  es  pleinement  relevé,  » 
répondit  Moutazz.  Dès  que  cette  déclaration ,  qui  le  dégageait 
de  son  serment  lui  prononcée,  Moulitadi  se  détourna;  le 
Khalife  déchu  fut  emmené  hors  de  sa  présence  et  reconduit 
dans  sa  prison;  il  y  périt  assassiné  six  jours  après  avoir 
abdiqué;  c'est  ce  que  nous  avons  dit  déjà  au  commencement 
de  ce  chapitre. 

Les  poètes  chantèrent  à  l'envi  l'abdication  et  le  meurtre 
de  ce  prince  et  composèrent  sur  ce  sujet  de  belles  élégies. 
De  ce  nombre  est  le  fragment  suivant  d'une  knçideh  due  à  un 
poète  de  cette  époque  : 

N'('j)argiie/.  pas  vos  larmes,  o  mes  yeux,  rt^paiule/.les  ahoiidanles  sur 
la  plus  noble  victime  que  le  malheur  ait  renversée. 

Son  ami  le  pins  dévoué,  le  plus  tendre  l'a  tralii,  et  les  mains  de  la  mori 
l'ont  frappé  à  l'iniproviste. 


400  LES  PRAIRIES  D'OR. 

- .    '-=?   -^   Jl_.<._Là_^  »Lji_)>-XJ  j         <X.aJI    ii-^o   i^k)^^   c5^*^  (J° 

y 

5t_A_la_-<>_j     R. ol_^     (J>-J    ^    ^  l-AJîj^-oi)!     c^JU     ^i)j.Xl\     ■<^M3\ 

y  yj 

IjtfVji    -Ui)l    ^^-^i  î_^lï  (J>*«-  \s^^^  5'*'^   t^cJjU  OJS^W»OÎ 

Les  Turcs,  avides  de  vengeance,  l'ont  surpris  et  renversé  du  trône; 
que  n'ai-je  pu  donner  ma  vie  pour  ce  prince  déchu  ! 

Ils  l'ont  massacré  de  leurs  mains  injustes  et  brutales,  ce  roi  dont  ils 
connaissaient  la  générosité  el  la  patience. 

Sa  beauté  faisait  pâlir  l'éclat  de  la  pleine  lune,  et  cependant  on  ne 
voyait  en  lui  que  des  marques  d'humilité. 

Il  semblait  que  le  soleil  s'humiliait  et  refusait  de  briller  lorsqu'il  le 
voyait  au  lever  de  l'aurore. 

Ils  (les  partisans  de  Khalife)  ne  redoutaient  pas  l'armée  et  ne  crai- 
gnaient pas  le  glaive  :  hélas!  il  est  mort  ce  pauvre  monarque  détrôné! 

Voici  les  Turcs  maîtres  du  pouvoir  el  le  monde  n'est  peuplé  que  de 
leurs  esclaves. 

Mais  tu  verras  un  jour  le  Dieu  qui  commande  à  tout  les  châtier  par 
une  mort  terrible. 

Un  autre  poëte  s'exprime  ainsi  clans  une  longue  kaçideh  : 

Un  torrent  de  larmes  jaillit  de  ma  paupière  lorsque  retentit  ce  cri  : 
L'imam  est  égorgé  ! 

Ils  l'ont  tué  injustement,  avec  violence  el  félonie  quand  ils  ont  conduit 
vers  lui  la  mort  libératrice. 


CIIAPITKK  CXX.  ZiOl 

LjS^-il   J^^.>L*i*.j    ^    lij-AAw  j, ^*X>J    y^JiXj   0_fc^    lii^Jl    I^jI 

L.S|V._aJj    i)Lx-i  r<\A^   ÙkX^  j. ^^\   is-^-ils  v_jL.«-w*J5  î_5 kXjOUv l* 

l— £_5-A_A_^  Cx^b  »î^_Avlj  »       5A.«1  ^jl^  U  *^Xft  (^wnii  v.>-g.J 
(j-«  y\^  o»-_ £& JJî  aaA^  cj^jS^J!  j-^l=>^  AÀAÀi».  Jj;|  jjcxii  (ji^ 

Que  Dieu  lasse  rayonner  son  visage,  que  Dieu  répande  ses  bénéclictions 
sur  son  âme  (qu'il  le  place  parmi  les  bienheureux)  ! 

l'jt  vous,  Turcs,  le  destin  vous  attend  avec  des  armes  dont  la  blessure 
est  incurable. 

Préparez-vous  enfin  aux  coups  de  son  glaive,  car  vous  avez  commis  des 
forfaits  odieux. 

Citons  encore  ce  fragment  d'une  longue  pièce  due  à  un 
autre  poëte  : 

Ma  paupière  a  répandu  des  flots  de  larmes  à  la  vue  de  ce  maître  des 
hommes  déchu  de  sou  pouvoir. 

Je  déplore  son  infortune  !  Qu'il  était  grand  et  généreux  comme  sujet 
(  de  Dieu  )  et  comme  monarque  ! 

Ils  l'ont  chargé  d'une  faute  qu'il  n'avait  pas  commise,  et  il  est  tondié 
assassiné  au  milieu  d'eux. 

J-es  fils  do  son  oncle,  l'oncle  de  son  père  ont  mouiré  leur  bassesse  cl 
rcnélé  leur  lâcheté, 

Clc  n'est  pas  ainsi  (pi'un  royaume  pro.spèrc,  ce  n'est  pas  ainsi  (pi'ou  peut 
vaincre  l'ennemi  infiili'ie  el  denienrer  uni. 

Moula/./,  (iil   \i'  piTiiiicr  parmi  1rs  Klialilcs  (pii  se  montra 

VII.  •'•> 


402  LES  PRAIRIES  D'OR. 

il_^î_j   (^..lal-À-Xij  ii-Aà-A-Jl   4jw«  iLi-A.ÀilI  *JsAj.|j  ;j;^a5^  iCï^î 

^V_«0    /yJ    iX^XAW  ^^H^xi!   ^<^aJÎ    «-  ^aim   (^^A*;)  ^x*>    qJ   (S^'f^J 

à  cheval  avec  des  ornements  d'or;  les  princes  abbassides  ses 
prédécesseurs  et  plusieurs  souverains  de  la  maison  d'Omey- 
yah  n'avaient  employé,  quand  ils  paraissaient  en  public, 
que  de  légers  ornements  d'argent  pour  les  ceintures,  les 
ceinturons  d'épée,  les  selles  et  les  brides.  Mais  lorsque  Mou- 
tazz  eut  adopté  cette  mode  d'ornements  en  or,  ses  sujets  suivi- 
rent son  exemple.  C'est  ainsi  que  son  prédécesseur  Mostaïn 
avait  introduit  l'usage,  inconnu  jusqu'alors,  des  manches 
larges,  et  leur  avait  donné  une  ampleur  d'environ  trois  em- 
pans; ce  fut  ce  même  Khalife  qui  diminua  la  hauteur  des 
bonnets  [kalansouah) ,  qui  auparavant  étaient  longs  comme 
les  calottes  (ou  capuchons)  des  kadis. 

En  255  de  l'hégire,  Ali  (fds  de  Zeïd)  et  Yca  (fils  de 
Djâfar)  Alewi  se  révoltèrent  à  Koufah;  par  ordre  de  Mou- 
tazz,  Sâïd  (fils  de  Salih),  connu  sous  le  litre  de  chambellan 
(hadjib) ,  marcha  contre  les  deux  descendants  d'Abou  Talib 
avec  une  armée  nombreuse,  et  les  mit  en  fuite,  grâce  à  la 
défection  de  leurs  partisans. 

Nous  avons  raconté  ci  dessus  (p.  395)   la  mort  d'IsnieVd 


CHAPITRE  GXX,  /|03 

^^s.  4M!  ^Aij  k-^Kio  jl  (^J  t^  (jJ  (^r**^  (;^  Q**=^  (jJ  ^' 
^^  *X4r  _jj£>j  ajIî^  *x*j  *jsj».Ij^I  ^j^  ^jli'  Uj  ^3-A^l^  *^-(r4^ 
aaA^  XtAia^   l^AAi  tj^jii  /jj»..^S'îi^   <\«oL<>JÎ   <J!jIa«  j^UaJ!  ^I 

(J— ?     iS^y-"^    (J-J    ^'     *X_A_C    0..J     ^^_Jn-l    0.^1     kiiJi     «XXJ    X;L»J\.Jt5 

(fils  de  Youçouf,  fils  d'Ibrahim,  fils  d'Abd  Allah,  fils  de 
Moura,  fils  d'Abd  Allah,  fils  d'El-Haçan,  fils  d'El-Haçan,  fils 
d'Ali ,  fils  d'Abou  Talib,  que  Dieu  les  ait  en  sa  sainte  grâce  !  ) . 
ainsi  que  les  maux  et  la  détresse  que  sa  domination  déchaîna 
sur  les  habitants  de  Médine  et  du  Hodjaz;  nous  avons  ajouté 
que,  après  la  mort  d'Ismâïl,  son  frèri;  Mohammed  (fils  de 
V'ouçouf)  eut  à  combattre  Abou'l-Sadj.  Oi)ligé  de  fuir  devant 
ce  général,  il  pénétra  dans  le  Yémamah  et  le  Bahreïn  el 
s'empara  de  ces  contrées;  il  y  laissa  une  postérité  qui  y 
réside  encore  aujourd'hui  sous  le  nom  de  Henou  'l-Okhaïdar. 
Un  peu  plus  tard,  un  autre  prétendant  s'insurgea  dans  la 
province  de  Médine  :  c'était  un  fils  de  Mouca  (fils'd'Abd 
Allah,  lils  de  Mouça,  fils  d'EI-Hacan,  fils  d'EI-liacan,  fils 
d'Ali,  fils  d'Abou  Talib). 

Nous  avons,  d'ailleurs,  raconté  dans  les  Annales  hislori- 
([iies  les  événements  relatil's  aux  divers  prétendants  de  la  fa- 
tnille  d'Abou  Talib,  et  cité  ceux  d'entre  eux  qui  moururent 
en  fxison  ,  pai-  le  poison  ou  p,ird\iuires  genres  ck' mort.  Tels 


•  ti. 


kOti  LES  PRAIRIES  D'OR. 

^^J  Jv--I    (^j    'X^^^        j€v*^^i    (J^^J-<   (:>J    >^^^    *V^    ^^-^   j^^ 

AK.:r  t-JUo  <3J  QJ  1^  (^  (j:r-*^  qJ  1^  t^  •^î'j  (:j^  (^v*^>^ 

A.Jv_j|    i<JM   y\^    c:>U   (^i-i*-    (j*^•^-=^    iij.*^*.l\    CJ-*  «T*^*'^^    J^«A« 

j-^  Jysïj  (j>*A-JLl  -l»5  i  kiUi^  i>Js.  jJ^  v^^  ^^  ^  t^ 

Akxi  t^JlL  jî  (^j  ;;^  (^^  ^^M*.  ^^J  fjM^  ^  M]  jsj^  (^1 

furent  parmi  eux:  Abcl  Allah  (fils  de  Mohammed,  fds 
d'Ali,  fils  d'Abou  Talib),  surnommé  Abou  Hachem,  qui  reçut 
un  breuvage  empoisonné  de  la  main  d'Abd  el-Mélik ,  fils  de 
Merwan.  —  Mohammed  (fils  d'Ahmed,  fils  de  Yça,  fils  de 
Zeïd,  fils  d'Ali,  fils  d'El-Huçein ,  fils  d'Ali,  fils  d'Abou  Tahb) , 
qui,  après  avoir  été  enlevé  de  Basrah  par  Sâïd  le  cham- 
bellan, mourut  en  prison  (à  Samarra);  Ali  son  fils,  qui  se 
trouvait  avec  lui,  fut  mis  en  liberté  après  la  mort  de  son 
père,  sous  le  règne  de  Mostaïn;  mais  il  y  a  différentes  ver- 
sions à  cet  égard.  —  Djâfar  (fils  dlsmàïl,  fils  de  Mouça, 
fils  de  Djâfar),  tué  par  Ibn  el-Agleb  dans  le  Magreb.  — 
Haçan  (fils  de  Youçoaf,  fils  d'Ibrahim,  fils  de  Mouça,  fils 
d'Abd  Allah,  fils  d'El-Haçan,  fils  d'el-Haçan,  fils  d'AU',  fils 
d'Abou  Talib),  mis  à  mort  par  Abbas  à  la  Mecque.  — 
Ali  (fils  de  Mouça,  fils  d'Ismàïl,  fils  de  Mouça,  fils  de  Djâ- 
far, fils  de  Mohammed) ,  emmené  prisonnier  de  la  ville 
de  Rey,  sous  le  règne  de  Moutazz,  et  mort  en  prison.  — 
Mouça  (fils  d'Abd  Allah,  fils  de  Mouça,  fils  d'El-Haçan,  fils 


CHAPITRE  CXX.  405 

iijLgj  j   *XJi^ij    iji«-w*ÀJi   (j^  ij^j  i^l\Xs  j,l   (j-:'  c^  (i)-^   {:y**=^ 

_5-io   CA.*a.L^^  dUUiû  i^U  \^à  5<Xj  ,^Jw«  ,^_yo  tXi^i'  J^y-*^^ 

jy-X-X^Jy  "^ r^'  '-r""'^^-^^  jy^r^  (iT-*  *^J^  Cir*  ??^  ^J  Sva^^JU 
LÀ-ft-jU-J    ij   l^Jo^-w^x^  (_^   UajÎ   *>o   bjJi   Uj.^^  yl,w.i».  jUiwi 

d'Ali,  lils  d'Abou  Talilj),  que  Sàïd  le  chambellan  emmena 
de  Médine  prisonnier;  ce  Mouça  avait  un  grand  renom  de 
piété  et  d'austérité.  Son  fds,  nommé  iifZ/7'5,  raccompagnail. 
Lorsqu'ils  arrivèrent,  sous  la  conduite  de  Sàïd,  dans  le  dis- 
trict de  Zobalab,  sur  la  route  (des  pèlerins)  de  l'Irak,  les 
Benou-Fezarah  et  d'autres  tribus  arabes  se  réunirent  dans 
le  but  de  délivrer  Moura.  Celui-ci  lut  empoisonné  par  Sàïd 
et  mourut  en  cet  endroit;  mais  les  Benou-Fezarah  réussirent 
à  délivrer  Edris,  son  fils. 

Sous  le  khalifat  de  Moulazz,  en  202  de  l'hégire,  les  pre- 
miers symptômes  de  discorde  entre  les  Bellalites  et  les  Saa- 
diles  éclatèrent  à  Basrah;  la  révolte  du  chef  des  Zeiidj  fut  la 
conséquence  de  ces  troubles. 

Les  autres  faits  intéressants  du  règne  de  Moutazz  sont 
rapportés  avec  tous  leurs  développements  dans  nos  Annales 
hisloricpies  et  notre  Histoire  moyenne.  —  Le  secours  vient 
de  Dieu  ! 


VARIAÎSTES  ET  NOTES. 


p.  d  (i).  D'après  la  signification  ordinaire  de  la  préposition  li,  il  semble 
([u'on  devrait  traduire  «Livre  de  nouvelles,  par  Ibrahim,  fils  de  Melidi;» 
cependant  cette  traduction  serait  inexacte  car,  plus  loin,  p.  08,  Maçoudi 
donne  le  titre  exact  de  l'ouvrage  en  question.  Il  s'agit  d'un  recueil  d'anec- 
dotes rédigé,  d'après  les  récits  et  peut-être  sous  la  dictée  d'Ibrahim,  par 
un  de  ses  amis;  il  n'en  est  pas  fait  mention  dans  la  liste  des  ouvrages  que 
le  Fihrist  (p.  1 1 5  )  attribue  au  fils  de  Melidi. 

P.  5  (i).  Au  premier  vers  ,  au  lieu  de  J..^  Jf ,  A  ,  M,K  portent  JJiU  I , 
et  ces  trois  copies  omettent  la  deuxième  moitié  du  deuxième  vers  et  hi  pre- 
mière moitié  du  troisième.  Elles  donnent  ainsi  le  deuxième  hémistiche  du 
cinquième  vers  :  Ji«Jl  {J<j  L^ImJI  yj-^^,  à  l'exception  de  K,  qui  porte 
JJliJf  comme  la  copie  D.  Au  lieu  de  j,\S>Jl  ^t  elles  lisent  |DUiîl  CJ^ 
et  A  seulement  j^li-aJl,  pour  ^L.gl!.On  trouve  les  mêmes  vers  cités 
par  Moberred,  qui  les  donne  comme  l'œuvre  d'Ishak  bcn  Khaicf;  cf.  Kamil, 
édition  Wright,  chap.  xxxii ,  p.  235. 

P.  8  (i).  D  Jy^Ji-li  c-^fjj  et,  après  le  mot  çj^L>,  la  même  copie 
ajoute  :  JCHI  i_>^^^  *  ^^  <_>  O^j .  passage  qui  est  omis  par  les  trois 
autres  copies. 

Ibid.  (2).  A,  M,  K  pLvùûft  et,  même  ligne,  <u^  *iuj  !^. 

P.  g  (  1  ).  M,  K  passent  Ç^-^y^  d  remplacent  c_jk;y>  W^'  <_>f>*  .  dont 
la  signification  n'est  donnée,  que  je  sache,  par  aucun  dictionnaire.  A  écrit 
l^I  <_>lyiî>,  ce  qui  est  encore  plus  inintelligible. 

P.  10(1).  D  porte  une  leçon  moins  e.xactc  :  «  Abd  Allaii  ben  iVbbas  et 
Djabir.  n 

P.  12  (1).  A,  M.  K  ^  ^  e>r!_7^'  "^-^  J  y^f  J-y  <^'^'  '*' 

locution  chinent  comme  Joseph  est,  en  eflVl ,  devenue  proverbiah' ,  mais  la 


408  VARIANTES  ET  NOTES. 

rédaction  de  D  semble  pins  simple  et  plus  conforme  au  ton  général  de 
la  pln-ase. 

P.  i5  (i).  D  donne  senl  une  leçon  claire;  M  et  A  portent '--^t\>Jf,  et 
dans  A  on  lit  j^scxH,  sans  doute  pour  j^Is^  «francplin;»  if  convient 
d'ajouter,  en  faveur  de  cette  dernière  leçon,  que  dans  le  Monarrah  (p.  lio) 
j:fNt>.J'  est  donné  comme  l'altération  arabe  du  persan  «scN-J,  et  traduit 
par  dounadj ,  «  francolin.  »  J'ai  préfère  suivre  l'explication  fournie  par 
l'excellent  dictionnaire  Bonrlian-i-i]âlî. 

P.  20  (1).  Ici  et  plus  bas,  p.  22,  A,  M,  K  remplacent  L«J^-«v  par 
—  vA*«  ;  je  ne  comprends  pas  le  sens  de  cette  exclamation. 

P.  2(3  (1).  L'emploi  du  même  sullixe  pour  désigner  différentes  per- 
sonnes, qui  est  d'un  usage  constant  en  arabe,  jetterait  quelque  doute 
sur  ce  passage,  mais  le  texte  de  YA(jkaiii  ne  laisse  subsist-er  aucune  incer- 
titude h  cet  égard.  Cf.  édit.  de  Boulak ,  t.  Xll,  p.  3. 

P.  28  (1).  A,  M  lisent:  «De  la  ville  de  Maarali  dans  le  Diar-Modar.  » 
M  et  K,  supprimant  le  point  diacritique  dans  ^.<L.o ,  placent  Rakkali  en 
Egypte.  On  sait  que  l'édition  publiée  à  Boulak  ,  et  qui  est  désignée  ici  par 
la  lettre  K ,  l'ourmille  d'inexactitudes  du  même  genre. 

P.  29  (1).  /Ij  M,  L)  lisent  f./)0~2,  au  lieu  de  L^i;  d'après  cela  il  fau- 
drait traduire  :  «je  suis  fait  pour  servir,  etc.  »  mais  la  leçon  que  j'ai  adoptée 
d'après  A'  a  le  mérite  de  conserver  l'antithèse  qui  domine  dans  tout  le  dis- 
cours. Le  calembour  étymologique ,  donné  quelques  lignes  plus  loin  comme 
explication  du  terme  nedim,  «  courtisan ,  »  a  été  repris  et  développé  par  plu- 
sieurs lexicographes  arabes. 

P.  3o  (1).  A,  M,  K  nomment  le  même  personnage  ù;Lc  ,  AyjucIi,  et 
lui  donnent  pour  surnom  ethnique,  K  et  M,  Zeïdi,  A,  Zobcïdi. 

P.  82  (1).  Les  trois  copies  lisent  jLtf  «la  richesse;  »  mais  la  lecture  de 
D  cadre  mieux  avec  la  pensée  exprimée  par  le  Khalife,  et  avec  le  vers  qui 
en  est  le  développement.  Dans  le  même  vers,  les  trois  copies  portent 
ii  J2./0  au  lieu  de  ^5  ^,^2^. 

P.  39(1).  L'expression  ^JZsisdi^]  î^'jf.  répétée  deux  lignes  plus  bas 
avec  la  variante  *_c,làJ13  <x.sJ^.  indique  une  double  source  de  traditions 
résumée  un  peu  confusément  par  Maçoudi.  Tous  les  exemplaires  repro- 
duisent la  même  leçon,  qui  fait  évidemment  double  emploi. 


VARIANTES  ET  NOTES.  m) 

P.  /(3  (i).  D  seul  continue  le  récit  personnel  en  employant  l'expression 
^  ;  les  trois  autres  copies  l'interrompent  en  disant  >^5y^  ^Jx.  J^U  et, 
par  suite  de  cette  différence  de   rédaction,  elles  remplacent  plus   loin 

o-lai  pur  Jlai. 

P.  -U  (i).  D  u^  dJi  ^XS  h  jJ^  ^^  ^  <wU  \jX»1p]  «Est- 
ce  qu'ils  le  blâment  relativement  à  sa  science?  C'est  une  accusation  qui 
ne  peut  l'atteindre.  » 

Ibid.  (2).  Au  troisième  vers,  M,  K  portent  \2^^a'Lo  pour  cV;^^xLo.  La 
traduction  du  quatrain  n'est  pas  et  ne  pouvait  pas  être  littérale.  La  pensée 
doublement  obscène  du  poète,  et  qui  porte  principalement  sur  les  mots 
LJ3  et  ïyà^i,  détournés  de  leur  acception  liabitucllc,  ne  saurait  être 
indiquée  que  par  des  équivalents,  si  toutefois  le  sens  général  est  bien 
rendu,  ce  que  je  n'oserais  aiïirmcr. 

P.  49  (1).  Pour  Dcn  Abd  Yézid,  A  lit  Mâbed,  etc.  et  D  :  Ben  Obcïd 
ben  Zeïd.  La  leçon  adoptée  dans  le  texte  est  confirmée  par  Ibn  Klial- 
lican,  texte,  p.  626,  et  parle  ?>iudjoum.,  p.  087. 

P.  5o  (1).  A,  M,  Kjj^  «près  de,  dans  la  direction  de.»  On  n'a  pas 
hésité  à  conserver  la  leçon  de  D;  aujourd'hui  encore,  dans  le  dialecte 
d'Alger,  haiima,  pluriel  heuwem,  désigne  le  quartier  d'une  ville.  Ciierbon- 
neau,  Dicl. français-arabe ,  p.  'ifiy. 

P.  5i  (1).  A  l'exception  de  D,  toutes  les  copies  lisent  tissiii  et  le  Ibnt 
mourir  à  l'âge  de  quatre-vingt-onze  ans  ;  mais  la  copie  D  est  un  guide 
plus  sûr  dans  les  indications  de  noms  et  de  dates. 

P.  55  (1).  Les  mots  ben  Ibralnm  ne  se  trouvent  pas  dans  les  copies  A, 
M,  K,  et  ne  se  lisent  que  dans  D,  où  les  renseignements  concernant 
la  famille  d'Ali  sont  ordinairement  plus  complets.  La  même  généalogie 
se  trouve  dans  le  Nndjonm,  p.  3/i5. 

P.  Sg  (i).  Nom  méconnaissable  dans  M;  dans  A  et  X  on  lit  „^(>/.^ 
La  lecture  de  D  a  pour  elle  l'autorité  du  Nudjouni,  p.  3/17  en  note,  d'Ibn 
el-Athir,  t.  VI,  p.  2  16 .  et  dn  fragment  d'Ibn  MicJikweih ,  publié  récem- 
ment par  M.  de  Coejc,  p.  4 23.  l)  seul  donne  Jaly  ,  landis  que  les  autres 
copies  portent  ^gU,  lecture  ÎTiadmissiblc. 

P.  G2  (1).  A  cl  l\  <l^y>ij^.  ,  1/  ^„aJ«^  ■  non  pondue  en  /).  (;'csl  la 
forme  pluiiclh'  chi  tiiol    À..<ij|\  "  |)0|nila(c ,  lie  du  pcuph'.  ..  Voir  l'cxplica- 


a  10  VARIANTES  ET  NOTES. 

lion  de  ce  vocable  clans  le  Kamoiis,  avec  la   tradition  qui  en  précise  le 


P.  62.  (2).  A  qÎju^U^;  D  (jfjJ^i^i.  Le  nom  de  la  ville  de  Bedd  se 
trouve,  comme  ici,  sons  la  forme  du  duel,  dans  le  Dictionnaire  géogra- 
phique de  Yakout;  A  et  M  lisent  partout  jj.joV:-'!- 

P.  6/1  (  1  ).  Au  deuxième  vers ,  pour  (AÀc^ ,  D  <U-^£.,  et  au  lieu  de  ^j^  , 
A,  M,  K  (jv^k.  Le  même  morceau,  plus  complet  d'après  les  variantes 
de  YAcjliani,  se  trouve  dans  notre  mémoire  sur  Ibrahim,  fils  de  Mehdi, 
Journ.  asiat.  mars-avril  1869,  p.  aSg. 

P.  67  (1).  D  commence  le  deuxième  vers  par  tAx^  c:JJ-^3  .  'e  troisième 
par  Uj»  Jl^L  'IJî  ;  au  quatrième  (_>Àaj  ii  au  lieu  de  JjwAJ"  ^^,  et 
an  vers  suivant  ^JiXA./o  y^. 

P.  71  (1).  La  huitième  forme  de  ^S  signifie  souvent,  dans  YAcjhani, 
fredonner  un  air  de  manière  à  le  graver  dans  la  mémoire  des  chan- 
teuses. On  pourrait  donc  traduire  ici  plus  exactement  :  «Voulez -vous 
chanter  le  morceau  que  je  vais  vous  indiquer  d'abord  en  chantant  moi- 


Ibi(J.  (2).  A,  M,  K  écrivent  à  tort  «Ibrahim,  fils  d'Ishak,»  ce  qui  est 
un  anachronisme.  D  est  d'accord  avec  le  texte  de  YAghuiù.  Cf.  le  mémoire 
cité  p.  267,  note. 

P.  73  (1).  Met  K  (j_jtoJf. 

P.  80  (1).  Il  est  possible  qu'il  y  ait  ici  une  altération  dans  le  texte, 
et  qu'il  doive  être  rétabli  conformément  à  la  leçon  plus  sûre  du  Fihnst, 
p.  53:  5^^  ^^  (J-Jyi.«^^  ^■^.  o^.  l  •^'■>^-  On  lit  dans  le  même 
ouvrage  que  le  Livre  des  hldmes  était  dirigé  contre  le  Prophète.  Ibn  Khal- 
lican,  dans  la  notice  spéciale,  confirme  ce  qui  est  dit  dans  le  Fi/i-rwf  de 
l'humeur  agressive  d'Abou  Obeïdah. 

P.  82  (1).  Le  premier  vers  ne  se  lit  que  dans  la  copie  D,  les  deux 
vers  suivants  se  trouvent  dans  Y A()haiii ,  Ul ,  p.  167,  mais  le  récit  qui  les 
accompagne  diffère  complètement  de  celui  de  Maçoudi.  D  ajoute  un  qua- 
trième vers  que  les  autres  copies  ont  omis  : 

ijcc.  y^j\  dur  j^c^i\  cAs::s^\  is' 

P.  85  (1).  Au  premier  vers,  D  ,^\J|  Je,  A  brise  le  mètre  en  écri- 


VARIANTES   ET   NOTES         '  'ilî 

viinl  l^«^».  Dans  le  troisième  vers,  A,  M,  K  lisent  "A^.  ^^g    <r|  [^ , 
et  /)  termine  le  même  veis  par  ^;;>j».À.X^ I . 

P.  87  (i).  A,  M,  K  .^s.]  ^j./o.  Le  vers  suivant  est  autrement  rédigé 
.n  />  ■  _  ' 

Les  trois  autres  copies  écrivent  !  j>.it>  au   lieu  de  13,  ce  (pii   ne  permet 
plus  de  scander  le  vers. 

P.  88  (1).  Le  passage  compris  entre  cAj ^  fj  jusqu'à  owij"  ^c  est 
omis  par  A,  M  et  K,  lacune  qui  rend  inintelligible  une  phrase  déjà  obs- 
cure. Dans  la  ligne  suivante,  le  terme  U;^'  a  été  traduit  d'après  le  sens 
spécial  que  lui  donnent  les  scolastiqucs.  Voir  Prolécjomhics  d'Jbn  Klialdom , 
traduction  de  M.  de  Slane,  III,    1/16  et  note. 

P.  90  (1).  Le  mot  AjN_à_;^  est  abrégé  ici  par  licence  poétique;  A  le 
donne  sous  .sa  forme  ordinaire,  contrairement  au  mètre  qui  est  une  va- 
riété du  l;hafif:  1)  le  remplace  pai-    -j^'i^  «anémone.» 

P.  91  (1).  A,  M,  K  t^LA_iJjiLj  ^^^\  _jUi^JI  J.  D'après  le 
Fihrist  (p.  1 1 1),  cet  ouvrage  aurait  été  rédigé  sous  forme  de  dictionnaire. 
Je  suis  porté  à  croire  qu'il  fut  dédié  non  au  fils  de  l'auteur,  puisque  nul 
témoignage  ne  vient  établir  qu'il  eut  un  fils  de  ce  nom,  mais  au  prince 
Abou  Ahmed  Monaffak,  Itère  du  Ivhalilé  VIouta/.z.  Si  cette  conjecture 
était  admise,  il  faudrait  alors,  au  lieu  de 


^. 


oyfl,  etc. 


jTï^^r'    O-!'  y^'   '"^    L)'J-*^ 


P.  9d  (1).  Telle  est  la  leçon  de  A  et  A.'  confornu-  à  celle  de  Yakout; 
les  deux  autres  copies  l'ont  rendue  méconnaissable.  Beladori  écrit  plus 
exactement  (j^jotsi-  Cf.  Liber  cxpuçjnalionum,  p.  ■.\()i ,  ci  Kilab  cl-Oyoïm , 
p.  377.  Mirkhond,  t.  III,  p.  196,  éd.  Bombay,  a  adopté  la  même  forme. 
C'est  certainement  le  cours  d'eau  qui  est  nommé  ïloSavTÔs  par  Michel 
Altaliotc,  éd.  Bonn,  i853,  p.  121.  Cf.  Cedrenus,  éd.  Bone,  1889,  t.  II, 
p.  217.  Plus  loin,  p.  99,  Maçoudi,  en  appliquant  au  mot  Kocliaïrali  la 
prétendue  étymologie  donnée  en  présence  de  Manioun  (de  'aôêa  et  de 
TE/W),  nous  apporte  luie  nouvelle  preuve  de  son  ignorance  de  la  langue 
grecque. 

I'.    100  (1).    ]/  Lîl/wl2>.v  (>j;  /'  C^IaI-wv;  \oii-  la  unie  précédente. 

P.  101  (1).  /)  lermuic  ainsi  le  deuxième  vers  ;  ^^^M   *S!^  ^  J; 


lii'l  VARIANTES  ET  NOTES. 

'1  ,  u^jUÎ-  Ce  distique  est  souvent  cité  jxir  les  historiens;  on  en  trou- 
vera notamment  les  variantes  dans  Kkab  cl-Oyouii,  p.  2>']8;  Fakhri , 
p.  26/j;  Kazwini,  Athar,  p.  i/i6,  et  dans  le  Dictionnaire  de  Yakout,  s. 
V.  Tart^ous. 

P.  io3  (i).  Trois  copies,  A,  K  et  /),  font  suivre  a,^Ϋ  d'un  autre  mot 
illisible  :  K  iL^p,.L»,\ ,  A  et  D  <U2»LvwI.  Abou  '1-Féda  nous  apprend  que  la 
mère  de  Moutaçem  était  originaire  de  la  Sogdiane:  ce  serait  donc  dans 
les  localités  de  cette  contrée  qu'il  faudrait  chercher  la  lecture  de  l'eth- 
nique défiguré  par  les  copistes.  Au  lieu  de  Mar'uLih,  K  donne  lautive- 
ment  Mariah.  Cf.  à  l'appui  de  notre  lecture  Tâlebi,  Lalaif,  p.  86;  Nu- 
djouin,  p.  38o;  Ibn  Kotaïbah,  p.  199. 

P.  106  (i).  D  passe  cilsiA.-o|  et  écrit,  d'accord  avec  A,  AaÀaC.  M.  de 
Slane,  que  j'ai  consulté  sur  ce  passage,  n'hésite  pas  à  y  trouver  une  cx- 
prcssiou  injurieuse  et  obscène;  ^j^  serait  employé  ici  dans  le  sens  de 
^j5;  on  en  trouverait  l'équivalent  dans  les  bas-fonds  de  notre  langue, 
mais  le  lecteur  voudra  bien  me  dispenser  de  cette  recherche. 

P.  111  (1).   Lecture  douteuse;  A,  M,  K  ï.jÀ^  yo . 

vP.  ii4  (ij.  Les  leçons  de  cette  phrase  araméenne  ont  été,  comme 
on  devait  s'y  attendre,  fort  maltraitées  par  les  copistes.  D  écrit  AJlauI 
IsiJy^  Ij  bsi  ,  K  Ui  Ij^Ij  (J^9  (Ja-w  I  ,  et  /l  Là_9  L^L)  .  -'V  {.A>y3  Jl«.u,  ] 
Ls^^lj.  M.  J.  Halévy ,  qui  a  bien  voulu,  à  ma  demande,  entreprendre  la 
restitution  du  texte,  pense  que  D  fournit  les  meilleures  leçons,  c'est-à-dire 
le  premier  et  le  troisième  mot,  K  et  M  le  mot  du  milieu;  en  conséquence 
il  l'établit  la  phrase  araméenne  de  la  façon  suivante  :  NDriinn  ^P"l^  ^'p'Ç 
ou  "^jrnnn,  littéralement  :  «Prends  mon  corps  sous  toi,  h  la  place  du 
tien,»  ce  qui  serait  f équivalent  de  la  formule  arabe  si  connue  cibojij. 
Quant  à  la  forme  XD .  pour  "It  ,  elle  serait  particulière  au  dialecte  man- 
déen  ou  sabéen.  ( Hoffmann ,  Granim.  sjr.  p.  160.)  Néanmoins  cette  in- 
terprétation, si  ingénieuse  qu'elle  soit,  ne  rend  pas  compte  de  l'arabe 
<_)lii  u  ,  et  il  y  aurait  lieu  de  la  soumettre  à  im  nouvel  examen. 

P.  1  iS  (1).  Telle  est  la  leçon  de  D  et  M.  La  copie  A  porte  L)Ji^\. 
et  K  iUttÀsjf. 

P.  119  (1).  A,  M,  K  lisent  fautivement  /jlifjl;  /)  seul  donne  l;i 
bonne  leçon,  comme  le  prouve  le  passage  correspondant  du  traité  de  Ya 
koubi.p.  3o,  où  le  même  nom  est  écrit  ijl^yJ-  Telle  c-^l  aussi  forliio- 
grnplie  adoptée  par  Yakoiii  ;  seulement  ce  géographe  se  liotnpe  eu  disant 


VARIANTES  ET   NOTES.  'il3 

Arpl  parasanges.  Ibn  Khordadbeli  s'accorde  avec  notre  auteur  pour  placer 
lîaradàn  à  quatre  parasanges  de  Bagdad.  Voir  Livre  des  routes ,  p.  :>.  i/i. 

P.  120  (i).  A.  M,  K  jLJJLj  «de  (la  fraîcheur)  des  nuits.»  L'exacti- 
tude de  D  est  attestée  par  le  témoignage  de  Yakoubi  (('tùZ.  p.  3i)  ,qui  s'ex- 
prime en  ces  termes  :  Ijo^  o>«-=  l^  ^LulL- 

P.  1  2  1  (1).  A,  M,  K  i^^[ii>yS>.  L'éditeur  de  Yakoubi  (p.  29)  trouvant 
ce  nom  sans  points  diacrili(|iies,  a  proposé  la  lecture  /jU)y\i?,  nui  ne 
peut  se  justifier. 

Ibid.  [2).  Passage  donné  seidement  par  D,  qui  ajoute  o^LuJl  «va^o  ^ 
^~,  etc.  li  ne  m'a  pas  été  possible,  à  cause  de  ia  lacune  que  présentent 
les  autres  copies,  de  restituer  ce  nom.  Les  localités  nommées  par  D  Er- 
radjân  et  Iloidwdii  sont  absolument  méconnaissables  dans  les  trois  copies. 

P.  123  (1).  Lacune  dans  les  trois  copies;  D,  qui  seul  est  complet, 
écrit  «vaac  au  lieu  de  o  JCc.  Le  nom  adopté  ici  se  justifie  par  les  rensei- 
gnements que  nous  donnent  les  Chroniques  arabes  sur  la  composition 
des  troupes  qui  avaient  embrassé  la  cause  de  Babek. 

P.  124  (1).  D  ajoute  j/*(>_i_c  <v^i.  (_^Aisfc»  «et  il  laissa  son  troupeau 
parmi  eux ,  »  addition  peu  admissible. 

P.  12G  (1).   Nom  douteux.  A  l'écrit  «.ilsi^j;  K  jooUjj;  M  S^Ujj. 

P.  128  (1).  L'explication  de  ce  mot  ne  se  trouve,  à  ma  connaissance, 
dans  aucun  dictionnaire;  peut-être  serait-ii  mieux  rendu  par  band<:s  on 
ramages,  car    o^Ijlw  signifie  les  stries  d'une  lame  damasquinée. 

P.  i3o  (1).  A,  M,  K  ^jwil;  les  historiens  arabes  ne  donnent  pris  le 
nom  musulman  du  fameux  sectaire  Babek.  Mirkiiond,  (pii  traduit  litté- 
ralement tout  le  passage  des  Prairies  d'or  qui  s'y  rapporte,  omet  égale- 
ment le  nom  en  cpiestiou. 

P.  i3i  (i).  Premier  vers.  A,  M,  K  Zi\  (j^/,\  L  ;  deuxième  vers,  les 
mêmes  copies  finissent  l'hémistiche  par  ts_j;.  j^^sjJi;  quatrième  vers, 
A»f  C^Lst)  dans  les  trois  copies,  contrairement  au  mèlre.  Luire  le  cin- 
quième et  le  sixième;  vers,  /)  seul  ajoute  celui-ci  : 

U<>AO    ^J    S.s,^  Lit  UÀaj   i_)y3    ^y^ 


!i\li  VARIANTES  ET  NOTES. 

Dans  l'avaat-clernipr  vers,  pour  ^y^,  l^  'i'    &(>-~3.   Wj^^i»,  A  'r- e.M>, 
rt  deux  copies  terminent  le  même  vers  par  f^Ajij. 

P.  i33  (i).  Pour  ^_^i>y[\,  A,  M,  K  «^sbj^f.  Le  poêle  emploie  dans 
le  dernier  vers  le  masculin,  conformément  à  une  licence  autorisée  en 
poésie,  et  afin  de  ne  pas  choquer  les  bienséances;  d'après  cela,  le  premier 
hémistirlie  s'applique  au  mari  et  le  deuxième  à  l'épouse.  En  ce  qui  con- 
cerne le  mot  wichuli,  il  importe  de  remarquer  que  ce  nom  signifie  tantôt 
un  double  collier  porté  par  les  personnages  de  haut  rang,  tantôt  une  cein- 
ture lâche  qui  pend  en  forme  d'écharpe  le  long  des  hanches;  dans  ce  der- 
nier sens  il  s'applique  ordinairement  à  une  femme.  C'est  ce  qui  ressort 
clairement  d'un  fragment  du  commentaire  de  Wakédi ,  cité  par  M.  Dozy 
dans  son  lyictlonnaire  des  noms  de  vêtemenls ,  p.  /129. 

P.  i3/i  (1).  A,  M,  K  s^ImJJ]  ciUifc  ^iujli.  Cf.  Joiini.  asiat.  1869, 
mars-avril,  p.  277,  où  j'ai  traduit  avec  moins  d'exactitude  amI  Zy^  Ij 
par  «  colère  de  Dieu.  « 

P.  i35  (1).  D  (jjyjl;  M  et  K  C>r>.0^-  Les  passages  en  question  étaicnl 
connus  sous  le  nom  collectif  de  Dcrb  el-Hadès;  au  dire  de  quelques  géo- 
graphes arabes,  les  Musulmans,  après  y  avoir  été  défaits  sous  les  premiers 
Khalifes  Omeyyades ,  lui  avaient  donné  par  antiphrase  ce  nom ,  qui  signifie 
M  Défilé  du  salut.  »  Voir  cependant  une  autre  version  dans  Bcladori ,  Lilwr 
expugnadonum,  p.  189. 

P.  i36  (i).   K  ^JsLa;  D  ^JsU  ,  et  plus  loin  (ti^isU. 

P.  i37  (1).  A,  M,  K  (j^y^  ;ftVo  iji  O)^  l>^  (variantes  dans  A  et 
M  q;U  et  QsvLo);  D  qLU'  j.j  et  moins  lisiblement  ÎcNaJ  qJ.  Les 
huit  lignes  qui  suivent  ne  sont  données  que  par  D.  Il  n'est  pas  inutile 
de  rappeler  que  le  nom  persan,  ou  plutôt  parsi,  est  Vcndad;  on  trouve 
dans  les  Annales  du  Tabaristan  la  mention  d'un  certain  Vcndad-Hormuzd  , 
qui  se  révolta  sous  le  règne  de  Mehdi.  Cf.  Spiegel ,  Nuchrichien  ùber  Ta- 
heristan,  dans  le  Journal  de  la  Société  orientale  allemande,  t.  IV,  p.'  68. 
M.  Spiegel  assimile  le  nom  Vendad  à  la  forme  pehlevi  riN"!j*.  Vendùl : 
les  historiens  musulmans  auront  transcrit  ce  nom  sous  inie  forme  aussi 
gravement  altérée  que  celle  de  î\itas  pour  Pontos,  etc. 

P.  iSg  (1).  D,au  premier  hémistiche,  l.gJUk  "So-  Au  lieu  'd'Aliou 
Tammam,  les  trois  autres  copies  écrivent  à  Inrl  àU^il  ^jI- 

P.  1/12  (1).  A,  l\l ,  K  j,L.u^AitjJ!;  /->  j:,Lm<^6iJl;  le  nom  est  rélahh 
<rapi'<'s  le  \ndiniiin. 


VARIAMES  ET   NOTES.  Ulh 

1'.  i/,3  (,).   .1  j^Lv^ll;  .1/et  K  J,!^*J|. 

Und.  (2).  Forme  douleusc  :  M  (j.UJf;  />  (J.U.JI.  Je  n'ai  trouvé 
aucune  mention  de  ce  personnage  chez  les  biographes  spéciaux. 

P.  1  '47  (i).  -1/  et  A'  \yj  ;  A  [yo.  La  lecture  de  Z)  est  conforme  a  l'ortlio- 
graphe  de  Yakout. 

P.  as  (1).   Leçon  moins  claire  en  D  ;  jub^  ^  (jiJ^cic;L 

Ihid.  (i!).  Au  lieu  de  J^jJi ,  /i ,  il/,  R'  LcjJl;  d'aprës  cette  variante,  le 
sens  serait  :  «On  le  place  comme  un  bouclier  aux  reproches,  »  c'esl-à-diro 
«C'est  le  but  ou  la  cible  des  reproches,  des  malédictions.» 

P.  1/19  (1).  .1/,  K  ç-y>\--,  l).  au  lieu  de  ^cu ,  écrit    a^. 

Ibid.  (2).  A,  M,  K  J^f^l  (^.  Pt.  an  lien  de  JLcli  ^\ ,  les  mêmes 
copies  donnent  Aji\s  ^r\ . 

Ibid.  (3).  D  ajoute  Ai  a^Jc  (J^K-  Ic"  commencent  de  notables  dif- 
férences et  plusieurs  lacunes  dans  les  deux  copies  K  et  M,  mais  elles  sont 
pour  la  plupart  dues  à  la  négligence  des  copistes.  A  place  cette  phrase 
cinq  lignes  plus  loin,  après  *.,jLkj  ^. 

P.  i5i  (1).  L'édition  imprimée  à  Boulak  et  la  copie  V donnent  ici  une 
variante  du  même  récit  qui  est,  à  mon  .sens,  une  interpolation;  je  crois 
devoir  néanmoins  le  transcrire  d'après  K  : 

t> 7^  -i  tX  (J  J — :■: — -U^        c'^-A_L^  LîwlV-'I  j^j  Jy  I 

1,0  reste  cntiune  dans  noire  Icxle. 

I'.    i.î'>  (1).    La  i>ll>liiiliir(|n(' nationaii'  pi>ssr,|c  inu' (Mipic  assez  nioderni 


416  VARIANTES  ET  NOTES. 

du  Divan  d'Abou  Tammam  (suppl.  arabe,  n°  2292);  cilc  provient  de  la 
collection  de  notre  maître  regretté,  Caussin  de  Perceval.  Le  vers  cité  ici 
fait  partie  d'une  pièce  que  le  poète  composa  au  retour  du  pèlerinage,  et 
qu'il  dédia  à  Abou  Saïd  ;  il  est  donné  sous  cette  forme  incorrecte  (f°  89  r°)  : 

l ^^1 C.     A»l_J     fj^'jy^^l     ^ JO>iî     CSf^      (j\   yS^l^yl     ^^î^ 

p.  i53  (1).  Leçon  de  D;  les  trois  autres  exemplaires  portent  ,.j~j1 
(^\i}<a^.  La  véritable  leçon  paraît  être  «  Abd  Allab,  fils  de  Huçeïii,  fils  de 
Saad.  »  C'était  lui  rapsode  originaire  de  la  ville  de  Kotrobbol ,  et  qui 
fournit  de  nombreux  documents  à  Isfahâni.  Voir  Agliani,  t.  XVIII,  p.  169 
et  passim. 

P.  ibli  (1).  A,  M,  K,  au  lieu  de  c-sAaJ.  lisent  (_>JiiiJ' ,  ce  qui  rend 
levers  faux.  Au  deuxième  vers,  D,  pour  ïji\iy.^,  donne  i5\L?)  ^t,  au 
suivant,  remplace  3su\  par  ji^aiuî.  contrairement  à  la  mesure.  Cette 
pièce  manque  dans  le  Divan  cité  plus  haut,  p.  iSa. 

P.  iS'j  (1).  Le  manuscrit  de  la  Bibliothèque  nationale  n"  i483,  suppl. 
arabe,  renferme  quelques  parties  du  Divan  de  Bohtori,  mais  il  est  rempli 
de  lacunes;  les  pièces  n'y  sont  pas  rangées  selon  l'ordi'e  alphabétique, 
l'écriture  en  est  négligée  et  ses  leçons  n'inspirent  qu'une  confiance  mé- 
diocre. Je  donne  pourtant  ici  et  plus  loin  quelques-unes  de  ses  variantes. 
Premier  vers ,  pour  o  ./> ,  D  J^3  ^j^ ,  Dlv.  Jjl:)  ^.  Deuxième  vers , 
rime ,  K  et  Div.  3ÎvJ  •  Troisième  vers ,  pour  e>^  >  Div.  c:j^.«  •  Quatrième 
vers,  pour  ^iJLilj,  K  (jJL^Ij  .  A  et  Div.  (_^ii.L). 

P.  i58  (1).  Au  deuxième  vers,  au  lieu  de  •♦^o.  Div.  porte  f>o^\^  et 
supprime  l  sans  respect  pour  la  mesiu-e.  Je  confesse  mes  doutes  sur  le 
sens  du  dernier  vers  :  au  lieu  de  ^sJ\ ,  D  lit  (JlS^i  et  Div.  GîU^';  en 
outre,  Div.  donne  ce  vers  après  le  premier,  et  le  fait  précéder  des  deux 
autres  vers  omis  dans  les  copies  de  Maçoudi. 

Ihid.  (2).  Au  lieu  de  ^jjblyjl ,  Dïit  ^]yj>,  A  et  M  ^J^\yJ\.  Le 
distique  entier  est  omis  dans  le  Divan. 

P.  iSg.  (1).  Premier  vers  donné  seulement  par  D.  Le  troisième  vers 
est  particulièrement  défiguré  dans  les  copies,  et  d'une  obscurité  que  je 
n'espère  pas  avoir  dissipée.  Le  premier  hémistiche  de  ce  vers  est,  dans  D, 
après /w-5e/ini.-^L.£.  (_>cl  00 cN*J ' ;  ^^ (_^ l  (>J I <>..«) I;'4  ^js>.\  O^oJmJ] 
et  le  reste  non  ponctué.  Pas  de  traces  de  cette  pièce  dans  le  Divan. 

P.   ifio   (1).    Au   lieu  (le  ij^y^\  Jr;^«  '   l^'^'-   ^'f'''   (JtN-^il  (j^-?^-^-   '^" 


VARIANTES  ET  NOTES.  il7 

deuxième  vers,  pour    i-^.  D  JlsÇ;  Div.    àjC.  Au  troisième  vers,  pour 
^L,  Af  «jLj  ,  .1  et  Div.  «^Li  et,  à  la  rime,  Div.  «À-»!  «noir  foncé.» 

P.  i6o.  (2).  Au  lieu  de  ^I0>.J  ,  D'v.  ^loo'  et,  à  la  rime.  Ic'Jl*.  Pour 
ixjy^,  A,  M,  K  i^iy:o. 

P.  iGi  (i).  Premier  vers,  A,  M,  K  AJO^c  s^vJI;  à  la  rime,  Div.  vlxt. 
Quatrième  vers,  M,  K  <^LajiJI. 


P.  162  (1).  A  et  3/ lisent  «AbouOmar,  fils  d'Abou'l-Huceïn  Toussi;i 
variantes  erronées  en  K. 


P.  i63  (1).  Pièce  adressée  à  Salih  ben  Abd  Allah  le  koreïchite,  Divan, 
fol.  i58  r".  De  tous  les  fragments  cités  par  Maçoudi,  celui-ci  est  certaine- 
ment le  plus  incohérent,  soit  qu'il  ait  fait  ses  citations  de  mémoire  et  à  la 
légère,  soit  que  les  copistes  aient  retranché,  de  leur  propre  autorité,  plu- 
sieurs passages  d'un  morceau  qui  leur  paraissait  trop  long.  Ainsi ,  à  partir 
du  deuxième  hémistiche  du  deuxième  vers,  commence  dans  le  Divan 
une  suite  de  sept  beît  omis  dans  notre  texte ,  et  les  autres  hémisticlies  se 
présentent  dans  un  ordre  différent.  Les  lacunes  sont  indiquées  par  des 
points  dans  la  traduction  ;  quant  aux  variantes ,  elles  ont  relativement  peu 
d'importance  et,  comme  pour  les  fragments  qui  précèdent,  D  se  rap- 
proche mieux  du  Divan  que  les  trois  autres  copies.  —  Premier  vers ,  A , 
M,  K  «vJJa:  j>-o.  Troisième  vers.  A,  M  «iXo».  Sixième  vers,  A  et  Div. 
tvâ;  A,  M,  K  ^^ÔlsU.»'.  Septième  vers,  au  lieu  de  [Tj^Csu*,  les  trois 
copies  Ljjjjt^,  et,  pour  o^j^i.  les  mêmes  o^dl,  déplus,  lacune  d'un 
hémistiche.  Neuvième  vers,  JUI  «U/^uk.^!  dans  A,  M;  K.  Dernier  vers, 
les  mêmes  «A-aj  Lo  cl  ^Jo   L  ,  ce  qui  est  une  faute  de  quantité. 

P.   166  (1).    A  ^i!;  M  .u^AAill;  illisihl.-  e„  /). 

P.  167  (1).  D  y»iij|,  au  lieu  de  c^^yM  des  trois  copies  et  d'Ibu  Khal- 
lican,  qui  cite  les  trois  premiers  vers.  Deuxième  vers,  /)  répète  ydisf  ; 
A  et  M  qJUI'I.  Troisième  vers,  M  [j^t^  ^^  ^jC^>-  o«JiJi-i^-  Septième 
vers,  au  lieu  de  Lj|,  A,  M,  K  '3I.*  et,  au  vers  snivaiil ,  {.'iXc  au  lieu 
l^  j  .  Dixième  vers,  an  lieu  de  t_j»oVK  />  i_jySZ>:    M  ij^jSZ;  A  cJv5^- 

P.    169  (1).    Il  y  a  ici  une  faute  (le  qiiaulilé  dans  1rs  copies,  la  douxiènio 
syllabe  étant   nécessaimni^nl  hmtjnr  dans  Ir  mèlre   iiinlrharil) ;  peut-être 
VII.  -7 


!i\8  VARIANTES  ET  NOTES. 

tlevrait-on  lire  /ib^"  ïLi^tSà  .  M  et  K  ajoutent,  après  le  troisième  beït, 
un  distique  qui  n'a  aucune  liaison  avec  la  pièce,  le  voici  : 

(^.J^jJ!     (>».J^    |»y^    (J*_3^  p.\^J\     ijy3^    p-^f    csf- 

P.  171  (1).  L'éditeur  de  A' arrange  ici  le  texte  à  sa  gui.se:  Jls   ,  yiso* 

<_>L.<:iJI  is\^  (J^  cJ'tÇj  imW  <-jîtN<  cs3?.J  jA^.  Au  lieu  de^>o, 

j'ai  suivi  la  leçon  de  D,  qui  m'a  paru  plus  appropriée  au  texte;  voir,  sur 

le  mot  ^A^  et  sur  /jljjC2:J^,  les  observations  d'Abdallatif.  Au  lieu  de 

yf^^,  D  porte  y^.€W-«. 

P.  lyb  (1).  A,  M,  K  aaIiaj.  Le  mot  ^^yji  n'est  donné  que  par  M 
et  K. 

Ihid.  (  2  ).  Lacune  d'une  ligne  dans  les  trois  copies  entre  les  deux  mots 
x-f^^Ji^i ,  ce  qui  rend  la  phrase  inintelligible.  L'éditeur  de  K  avoue  son 
embarras  dans  une  note  marginale,  et  constate  une  omission  dans  le 
texte,  mais  s'il  ne  elierclie  pas  à  la  réparer  en  consultant  d'autres  co- 
pies, il  faut  lui  savoir  gré  de  ne  pas  avoir  façonné  le  texte  à  son  caprice, 
suivant  le  procédé  trop  fréquent  des  érudits  musulmans. 

P.  176  (1).'  D  dit  simplement  (jl_j  t_>.sbi>-J5  S-'^^Jr!  •  ^  [t— ^-*y3 
(jL,  etc. 

P.  177  (1).  Le  premier  nom  est  écrit  4«^/oLo  par  A,  M,  K,  et  le  se- 
cond j>*^2kUL^  par  A  et  M.  D  ne  donne  que  le  premier.  M.  le  D'  San- 
guinetti,  Journ.  asiat.  i85/i,  p.  243,  traduit  les  Ashab  hicl  par  métho- 
diques, et  cite,  parmi  les  chefs  de  cette  doctrine,  Thessalus  deTralles, 
qui  est  peut-être  le  Sasalius.de  notre  texte.  Au  lieu  de  ^Asi.  A  et  A' 
portent  J>A.il ,  M  J^Aril. 

P.  180  (1).   A'  lit  iù^js'  ,  «pierreuse:»  le  même  mot  est  illisible  en  A. 

P.  196  ()).  D  termine  le  deuxième  vers  par  (>^jj|  J^aS  ^^jj'ai  suivi 
le  texte  des  trois  copies  conforme  à  la  leçon  de  YAcjhanij  t.  XX,  p.  /17. 
Troisième  vers,  K  <k.^[SC.3  ,  au  lieu  de  *jliCo,  et,  dans  le  vers  suivant, 
au  lieu  de  a.«IjÎ,  D  ajL^I,  YAfihani  Ajl^f.  Ce  moi-ceau  n'a  pas  moins 
de  quarante-trois  voi's  dans  le  Livre  des  chansons. 

P.    197  (1).    Les  trois  copies   ikuIcuI  ^lrs.^i' ;  D  passe   le  paragraphe 


VAUIAMES  ET  NOTES.  U\d 

♦Milicr.  J'ai  suivi  la  leçon  donnée  par  Fakhri;  en  outre  le  géographe 
Yakout  donne,  s.  v.  U l>>v> .  quelques  renseignements  sur  le  même 
personnage. 

P.  199  (i).  K  finit  le  fragment  par  jusc'.  Voir  les  variantes  dans  le 
Dictionnaire  de  Yakout,  s.  v.  (Us.:ï»  yJ.i. 

P.  201  (1).  Troisième  vers,  D  (j^\  L>;  M  ^j^aJf  j>L«.  Dernier  vers, 
deuxième  liémisticlie,  1)  jj^^^j  ,  et,  pour  l.AJ«3,  A,  M,  K  Lgjk^ 

llnd.  (2).  L'ordre  des  vers  n'est  pas  le  même  dans  D  et  les  trois  co- 
pies; j'ai  adopté  celui  de  Yakout,  t.  II,  p.  70-7.  Au  troisième  vers,  A  et 
K' écrivent  UijaiJ  ^J^^^■ 

P.  202  (1).  M  et  K  attribuent  ces  vers  au  poète  Abou'l-Alahyah ,  ce 
qui  est  une  erreur  chronologique  assez  grave.  Cf.  Y'akout,  s.  v.  fyCV-o.  A 
lit  (jv^^^iJl ,  et,  dans  fédition  du  Fihrisi ,  on  trouve  ^^^^ ,  lecture  éga- 
lement erronée.  VAgkani,  t.  XyiII ,  p.  -yS,  donne  jusqu'à  trois  versions 
du  même  récit  et  cite  les  quatre  premiers  vers.  Au  cinquième  vers,  D 
porte  (Jyi>2i  (^liLoI. 

P.  2o3  (1).  Premier  vers.  A,  M,  K  JiAj'  et,  à  la  rime,  ^Ja,ij". 
Deuxième  vers,  D  Jyêi-  (j  ist\AA>c  3I,  leçon  que  le  mètre  fait  rejeter; 
A  ^y]l  ^   b'^L.^  3I.  Cf.  A(jham,loc.  laud.  p.   i-y/i. 

P.  2o5  (1).  Le  seul  mot  douteux  est  celui  qui  termine  le  deuxième 
vers;  /)  l'écrit  qI^À^Î  ,  A  et  M  j,l  JU.iJf.  La  vérilahie  forme,  hien  que 
les  dictionnaires  ne  la  donnent  pas,  me  paraît  être  j,Liu.iJf,  puisque 
l"i'pillièt(!  Jix.i;  se  donne  au  poil  fauve  de  l'alezan.  La  scène  grotesque 
où  Saimari  joue  le  principal  rôle  eut,  paraît-il,  un  certain  retentisse- 
ment; le  grave  auteur  du  FUuist  lui-même  lui  consacre  quelques  lignes, 
p.  25 1.  Le  bouifon  du  khalife  fut,  s'il  faut  en  croire  le  même  ouvrage, 
un  astronome  distingué,  et  la  liste  de  ses  œuvres  présente  le  plus  étrange 
assemblage  de  travaux  .sérieux  et  d'opuBCules  obscènes.  J'ai  cherché  à 
alténner  la  niaiserie  de  la  Chanson  Je  iâne  en  la  traduisant  eu  vers,  et  en 
m'ellbrrant  de  conserver  le  mètre  arabe  et  l'uniformité  de  la  rime,  mais 
je  suis  le  premier  à  reconnaître  que  le  rigorisuu:  de  notre  langue  rend 
presqm;  toujours  infrnctunises  de  pareilles  tentatives. 

P.  2ot)  (1).  Fausse  leçon  dans  toutes  les  copies.  Il  s'agit  du  célèbre 
grammairien  IXiflawaïli  ,<]nu\  le  nom  vi'ritahh"  esl  Abou  Abd  Allah  Ibrahim 
bi'u  Mohaninicd  hcn  ()l^■,l||;  il  lui,  .ri  ilVcl ,  nii  de,s  nombreux  élèves  de 


li20  VARIANTES  ET  NOTES. 

Mobened.  Voir  sa  notice  dans  Ibn  Kliallican,  trad.  I,p.  2f),  et  FihrisI , 
p.  81. 

P.  207  (1).  i4  et  D  ♦<')*>*3  ,  mais  la  deuxième  forme  est  plus  exacte; 
l'expression  taaricl,  ou  indication  détournée,  est  employée  dans  la  rhéto- 
rique musulmane  pour  désigner  une  espèce  particulière  de  métonymie. 
Cf.  Jonrn.  asiat.  décembre  i8/i5,  p.  46 1. 

P.  209  (1).  Toutes  les  copies  passant  (^ou  ,  il  faudrait  traduire  «en 
2  3o;))  mais  c'est  une  méprise  évidente  de  fauteur,  puisqu'il  ajoute  plus 
loin,  p.  21 1  :  «En  la  même  année  233,  etc.»  Voir  d'ailleurs  les  notices 
données  par  le  Nudjoum  et  le  Karnil. 

P.  210  (1).  Deux  copies,  K,  M  ajoutent  im  vers  qui  n'est  nullement 
en  situation  : 

P.  2  1 1  (1).  L'éditeur  de  K,  oubliant  que  Maçoudi  emploie  fréquem- 
ment ^JiC  ^6  dans  le  sens  de  gouverner,  s'exprime  ainsi  dans  une  note 
marginale  :  «  La  leçon  iva  Jsana  ala  Bagdad  se  trouve  dans  toutes  nos 
copies;  il  y  a  sans  doute  ici  une  lacune  et  il  faut  ajouter  un  mot  comme 
chortah,  c'est-à-dire  il  était  chef  de  la  police  de  Bagdad.  Cette  hypo- 
thèse est  d'ailleurs  justifiée  par  ce  qui  suit:  «et  il  fut  remplacé  dans  ses 
fonctions,  etc.»  Que  le  lecteur  fasse  cette  correction.»  Historiquement 
du  moins,  la  remarque  de  notre  confrère  Mohammed  Sabbagh  est  exacte. 
Cf.  Ibn  el-Athir,  t.  VII,  p.  35. 

Ibid.  (2).   Nom  douteux:  K  et  M   ^-^     v_);  D  3,i_«,^f  au  lieu  de 

p.  216  (1).  Au  lieu  de  linhli,  K  porte  oLo\if[,  «les  serviteurs»;  A 
^Lo.Ji'î;  illisible  en  M. 

P.     218     (1).      M    et     K     ï:>y^;     A      TS.y^. 

Ibid.  (2).  K  ivaill;  O  écrit  «Haroun,  fils  d'El-Moutazz.  »  C'est  peut- 
être  la  bonne  leçon,  mais,  quoi  qu'il  en  soit,  il  ne  s'agit  pas  ici  du  fa- 
meux prince  à  la  fois  poète  et  musicien ,  connu  sous  le  surnom  d'Ibn 
el-Moutazz  ,  car  son  nom  était  Abd  Allah. 

P.  220  (1).  Les  trois  copies  écrivent  à  tort  /juji.  D,  que  nous  avons 
suivi,  s'accorde  avec  Ibn  kliallican,  texte,  p.  33,  où  se  trouvent  les  deux 
premiers  vers.  D     s  «  .U  J  [  £vû/o. 


VAlllA.NTES  ET  NOTES.  i2l 

P.  2  22  (i).  Leçon  uii  peu  différente  dans  A ,  M ,  K  :  j>.o  J.-û3  L«« 

Ibid.  (2).  /l,  ilf.  If  lisent  «Ei-Kaçem,  fils  de  Djâfar,  etc.»  D  «Abou  'I- 

Kaçem  Djàfar ,  fils  de  Djâdan.  »  Le  nom  est  rétabli  ici  d'après  Ibn 

Khallican,  texte,  p.  694.  A  la  ligne  suivante,  au  lieu  de  Salihi,  D  porte 
^U-aJt ,  les  trois  copies  ^^L«i^[.  Dans  le  traité  intitulé  Homonjma,  etc. 
publié  par  M.  de  Jong,  p.  85,  il  est  question  d'un  certain  Abou '1  Haçan 
Salilii,  de  la  secte  des  Zeïdites. 

P.  224  (1).  A  et  M  [^_$LiJy£,  (joj\  ojl;  ^  (JoJf  Ljf.,  etc.  La  pre- 
mière leçon  se  lit  aussi  dans  Ibn  Khallican,  mais  la  copie  autographe 
porte  ^^5\X5yC  comme  D.  Cf.  trad.  t.  II,  p.  4  10.  M.  de  Slane  traduit: 
«'Tis  thou  who  drownest  me  after  meeting  with  thy  fate;  »  prenant  LâJUl 
dans  le  sens  de  trépas.  Ma  traduction  s'accorde  peut-être  mieux  avec  les 
préjugés  fatalistes  des  musulmans. 

P.  22G  (1).  Deuxième  vers,  pour  ^y^^,  K  et  M  Jil^;  A  JjJ^.  Ibn 
Khallican  ne  le  donne  pas. 

P.  227  (1).  A  ,  M  K,  ."^jL  et,  à  la  ligne  suivante:  «Mohammed,  fils 
d'Ahmed  Toussi.»  Il  s'agirait,  dans  ce  cas,  de  l'Émir  ainsi  nommé  qui 
périt,  en  2i4  de  l'hégire,  dans  l'expédition  contre  Babek. 

P.  228  (i).  M  et  A  (^^W\  ■,  altérations  plus  graves  en  A'.  La  copie 
/)  seule  respecte  l'orlhograplie  de  ces  noms,  mais  elle  présente  plusieurs 
lacunes  dans  la  suite  du  récit.  Cf.  Ibn  el-Atliir,  VII,  p.  2G. 

P.  229  (1).  M.  ô^Jil;  A  omet  le  nom;  K  jo^t,  leçon  inadmissible; 
Moueyyed,  prince  du  sang  et  liéiitier  présomptif  du  Khalifat,  ne  pou- 
vait tenir  le  langage  Iiumbie  que  lui  prête  l'auteur  de  cette  tradition.  La 
secte  des  Parsis,  dont  le  Moubedân  était  le  clief  religieux  ,  vivait  obscu- 
rément en  Perse,  protégée  par  la  tolérance  de  la  coutume  nuisiilmane. 

P.  2.3 1  (1).  Ici  se  place  un  paragraphe  ([u'on  doit  considérer  comme 
interpolé  :  ^js._aJvL  /p?"   *>->«  (-'1  ^M'i  '^-r>-^^)  -S'      O^  <J'*^  Cli*^* 

Je  n'ai  trouvé  uulhî  j)art  1111  mot  de  l'cuscigiictneMt  sur  ci;  personnage. 

P.  233  (j).  l)  .il^l;  passage  douteux  dans  tous  les  exemplaires.  A 
la  ligne  suivante,  A  et  M  iL^OM\. 


422  VARIANTES  ET  NOTES. 

P.  335  (i).  La  réponse  d'Amr,  c'est-à-dire  ia  ligne  entière,  n'est 
donnée  que  par  D. 

P.  2  36  (i).  J'ai  cru  devoir  ajouter  les  mots  ii{Ai>  jLs  en  supposant 
une  lacune  dans  les  copies.  Sans  cette  addition  le  rôle  des  deux  adver- 
saires serait  interverti. 

P.  237  (1).  D'après  la  rédaction  de  nos  copies,  l^^à  s'appliquant  à 
l'année  citée  dans  le  paragraphe  précédent,  Souli  serait  mort  en  2^0  ,  ce 
qui  est  inexact.  Cf.  Ibn  Khallican,  trad.  t.  I,p.  24.  D'ailleurs  ces  dates 
sont  données  avec  une  certaine  négligence  par  les  copistes  de  Maçoudi , 
c'est  ainsi  que,  plus  haut,  la  date  de  la  mort  de  Rawendi  est  placée  en 
2o5,  tandis  qu'il  faut  lire  2 A 5,  etc. 

P.  2^0  (1).  Voici  les  variantes  principales  de  ce  morceau,  rédigé  en  un 
style  si  goûté  des  Orientaux  et  pour  nous  si  obscur.  Pour  ^y^Ijj  ,  A,  M 
eisLiA;  pour  Jf^aJÎ,  M,   D  tSX-oli  D  (J^isâ  ^^^jSi  ;  -1/  i^'y^9  ;  pour 

p.  24i  (1).  Au  lieu  de  lOjJwj,  A  ^t^A^J;  l'Aghani,  t.  IX,  p.  3o, 
répète  ^L./LwJ>'.  Dernier  hémistiche  dans  A,  M,  K  : 

p.  242  (i).  Le  deuxième   vers  n'est  donné  que  par  D;  on  le  trouve 

fi  * 
aussi  dans  YAghani  [ihid.  p.  25)  avec  la  variante  (J^j,  au  lieu  de  i^c,. 

Ibid.  (2).  Lacune  de  sept  lignes  en  j1/ et  K.  La  copie  A  place  ce  dis- 
tique après  les  vers  rimes  en  q  . 

j>  > 

Ihid.  (3).  Au  lieu  de  (jLïJI  ,  K  eijlÂxi;  le  deuxième  vers  est  omis 

dans  YAgliani  [ibid.  p.  34);  il  est  cependant  indispensable  au  sens. 

P.  243  (1).  Deuxième  vers,  au  lieu  de  l^cVÀJ,  D  UjjjOo'i  M  UotVJ  ; 
^1  bJtV.J. 

P.  244  (0-  M  et  .4,  au  premier  vers,  (_$sj"[,  d'après  quoi  il  faudrait 
traduire:  «Ta  pensée  est  de  m' enrichir.  »  Au  deuxième  vers,  les  mêmes 
copies  altèrent  la  mesure  eu  écrivant  «-Ua.^'.  Sur  l'abréviation  9^12.^^^  , 
voir  le  Commentaire  de  Hariri,   1"  édit.  p.  80. 

P.  24G  (1).  h'AgiLaiiiji.  VIII,  p.  23,  cite  le  même  distique,  mais  le 
second  vers  y  est  plus  conforme  h  la  pensée  du  poète. 


VARIANTES  ET  NOTES.  'v23 

P.  2/i7  (i).  Ce  mot  doit  être  lu  <uv.X  avec  le  sens  qui  lui  est  cJoaué 
par  le  Koran,  III,  12.  Voir  les  observations  Je  M.  de  Jong  dans  son 
édition  du  Lalaîf,  p.  xi,  et  celles  de  M.  de  Gocjc,  Fra<jni.  Iiistor.  arabic. 
t.  Il,  p.  3.  Ibn  Khallican,  en  copiant  textuellement  notre  récit,  p.  348, 
a  rejeté  cette  même  expression  comme  inutile  ou  peu  claire. 

P.  249  (1).  A,  M,  K  à  tort  i}Jj£  ^o  xv^vj!.  La  copie  D  ajoute  seule 
cet  alinéa:  «En  242,  mort  d'El-Haçan,  iils  d'Ali,  Kerabissi.  »  Tout  cela, 
nom,  prénom,  date,  est  erroné.  Cf.  Ibn  Khallican,  texte,  p.  2i4;  Ibn 
ei-Atliir,  VII,  p.  5g. 

îbid.  (  2  ).  .1,  .)/,  K  (__3LijÇ;  le  Dictionnaire  de  Yakout  ne  cite  ni  l'un 
ni  l'autre  de  ces  noms. 

P.  201  (1).  Les  copies  donnent  ici  le  fragment  suivant,  que  je  crois 
être  une  interpolation  duc  à  quelque  Chiite  fervent.  On  ne  le  trouve  pas 
cité  dans  le  chapitre  de  l'origine  des  Perses,  et  le  renvoi  indiqué  par 
l'auteur  ne  peut  se  rapporter  qu'aux  vers  précédents.  Au  surplus,  la  ré- 
daction du  paragraphe  est  confuse  et  dénote  une  certaine  précipitation. 
Voici  le  morceau  supprimé;  je  le  copie  dans  l'édition  de  LJoulac  :  J^Sj 


Ibid.  [  2).  Au  dernier  vers.  A,  M  fjoJiju  ^.  En  employant  le  terme 
ChériJ,  le  poète  fait  probablement  allusion  à  l'origine  de  son  adversaire , 
([ui  descendait  de  la  famille  du  Prophète. 

P.  203  (1).   A,  M,  K  ajoutent  ce  vers  après  le  troisième: 

A  et  M  le  terminent  par  a^jAif.  Au  vers  suivant,   ^  ^      u*.^ ,  K  ^ 

p.    255  (1).   D,  au  premier  h('mistich(' 

P.  270  (1).  Les  copistes,  ii  rexceplion  de  celui  de  />,  ne  comprenani 
pas  que  la  sultane  était  nommée  Kabihah ,  par  antiphrase  et  à  cause  de 


i2i  VARIANTES  ET  NOTES. 

sa  grande  beauté,  ont  changé  son  nom  en  celui  de  A-^yO-  A  l'appui  de 
cette  explication ,  voir  le  Lataïf  de  Tàlebi.  Ibn  el-Athir  s'exprime  en  ces 
termes  : 

Kunùl  et-tevarikh,  VII,  i35.  Ce  que  Mirkhond  (éd.  de  Bombay,  t.  III, 
p.  2o3)  traduit  par  l'hémistiche  suivant: 

P.  270.  (2).  Le  même  historien  persan  rend  le  mot  milraf,  dont  il  est 
parlé  ici ,  par  tchâdir-i-cheb ,  «  manteau  de  nuit.  »  Ce  terme  n'est  pas  ex- 
pliqué dans  le  Dictionnaire  de  M.  Dozy. 

P.  276  (1).  Pour  1*3 y«,  A  ei  M  ^isy»;  en  marge  de  D,  ce  mot  est 
remplacé  par  [J\$  o  d'une  main  étrangère. 

Ibid.  (  2  ).  D  dit  seulement  «quatre  cents  concubines.  » 

P.  277  (i).  Au  lieu  de  ^^\J^<  A,  M,  K  ^^\J  et,  au  troisième 
vers,  A>Jw«AJ    S_w|.  Voir  les  variantes  dans  AgJiani,  t.  VI,  p.  i83. 

P.  278  [\).  A,  M,  K  a.  tort  o>;N3Ltl  ^>J|.  Il  n'y  a  aucune  raison  pour 
adopter  le  diminutif  Boaït,  comme  l'a  fait  l'éditeur  d'Ibn  el-Athir,  ibid. 
p.  32.  Cf.  au  contraire  les  Généalogies  d'Ibn  Doreïd,  p.  1/17. 

P.  279  (1).  D  supprimant  une  ligne,  les  vers,  d'après  cette  copie, 
auraient  pour  auteur  le  même  poète  Ibn  Baît.  Cf.  Ibn  el-Athir,  ibid.  p.  64. 

P.  282  (1).  D'après-D,  Kabihah  elle-même  se  présente  devant  le  Kha- 
life :  JL^Ji  o»^.^^-  On  a  vu  plus  haut,  p.  270,  que  c'était  celle  de  ses 
esclaves-mères  que  Motewekkil  préférait. 

Ibid.  (  2  ).  Au  troisième  vers ,  miislahiltat  a ,  d'après  le  Kamous ,  le  sens 
de  pluie  abondante  et  continuelle.  D  écrit  c;jIJ2A.uki|  «semblables  à 
de  longues  tresses  de  cheveux.  » 

P.  287  (1).  A  seul  donne  la  forme  régulière;  D  écrit  (j^'ofcSil .  Cf.  la 
notice  du  Nudjoum,  et,  en  premier  lieu,  Navvawi,  Biograph.  Dictionary, 
p.  443. 


Ibid 


id.  (2).   K  j_5yfcj,JÎ;  D  (_$v*îJf>  mais,   en  marge  de  cette  copie 


VARIANTES  ET  NOTES.  'i25 

un  lecteur  a  corrigé  en  ajoutant  en  persan  :  «  son  vrai  nom  est  Suleïman . 
fils  de  Daoud.  » 

P.  287.  (3).  li  est  impossible  de  ne  pas  voir  ici  une  erreur  de  rédaction 
dont  Maçoudi  s'est  rendu  coupable,  car,  dans  le  passage  cité  auquel  il 
renvoie  (ci-dessus,  p.  2  1  i),  il  indique  précisément  la  même  date.  Ajou- 
tons que  les  historiens  sont  unanimes  à  placer  la  mort  d'Ibn  Main  en 
2  33,  et  que  le  désaccord  porte  seulement  sur  les  mois  de  ladite  année. 
Voir  cette  discussion  dans  la  notice  spéciale  d'Ibn  Kliallican. 

P.  288  (1).  K  et  M  portent  «Solian  ben  Feredj  El-Ili.  Cf.  Yakout,  s. 
V.    J.I. 

Ibid.  (2).  A  et  K  (Çuj\;  M  (ji'jf;  D  non  ponctué;  mais  l'ortlio- 
graphe  est  indiquée  avec  précision  dans  le  Nudjoum,  p.  720.  Cf.  Ibu  el- 
Athir,  VII,  p.  44.  Le  deuxième  docteur,  surnommé  Xersi,  est  nommé 
par  ces  deux  auteurs  «  Abd  el-Ala ,  fils  de  Hammad.  » 

Ibid.{Z).  A  (_)Ub  ;  D  <_)Lw;  K  et  i¥  cjU».  Cf.  Ibn  Khallican,  texte, 
p.  201.  On  voit,  par  cette  note  et  celles  qui  précèdent,  avec  quelle  né- 
gligence les  copistes  donnent  les  listes  généalogiques, recueillies  avec  tant 
de  soin  par  Maçoudi. 

P.  289  (1).  A,  M,  K  ne  font  pas  mention  du  Livre  moyen,  et  termi- 
nent le  chapitre  par  la  formule  ordinaire  ^jLfJjXj]  ami  ,j»j. 

P.  291  (1).  A,  M  is\«2kUl.  C'est  à  tort  que,  dans  l'édition  du  }fod- 
jeni  de  Yakout,  M.  Wustcnfeld  a  imprimé  ëj^Ul;  Ibn  el-Athir,  VII, 
p.  68,  a  conservé  la  bonne  leçon.  D'après  le  Dictionnaire  persan  Borlian- 
i-kâti,  ce  terme  désigne  une  taverne,  une  maison  de  jeu  et  de  débauche. 

Ibid.  (2).  Un  boiu-g  voisin  de  Bagdad  était  ainsi  nommé.   K   porte 

P.  293  (i).  Trois  copies  lisent  jl  \.  U  V,  du  verbe  tawa,  i<|)lier;i)  mais 
la  suite  prouve  que  telle  n'était  pas  l'intention  du  Kiialife,.  Au  contraire, 
le  sens  de  parfumer  à  l'aide  d'aromates  est  indiqué  j)ar  le  kainous  à  la 
11°  et  à  la  IV  forme  de  laru. 

P.  294  (»)•  ^^  c^  '^^  O  ^'  L'/l(//ia/ii,  I.  \i[I,  p.  i7('),  le  nomme 
Bunan  ben  Amronn,  Mjy-^- 

Ibid.  (2).  Le  quatrième  vers  est  supprimé  par  A,  M,  A;  cependant 
il  résume  tout  l'esprit  de  la  pièce  et  ne  peut  avoir  été  omis  par  Maçoudi- 


426  VARIANTES  ET  NOTES. 

P.  296  (i).   D  dit  simplement  <uaa3  ,  «et  il  le  renversa.» 

P.  297  (1).  Les  deux  premiers  mots  de  cette  indëcente  'invective  pa- 
raissent être  une  sorte  de  locution  proverbiale.  L'auteur  ajoute  qu'elle 
fut  mise  en  musique  et,  à  la  rigueur,  on  pourrait  y  reconnaître  le  mètre 
remel;  cependant  aucune  copie  ne  la  place  en  vedette,  comme  c'est 
l'usage  pour  les  citations  de  vers,  et  nous  savons  en  outre,  par  le  témoi- 
gnage de  YAgliani,  qu'une  phrase  en  prose  servait  quelquefois  de  thème 
aux  musiciens. 

P.  3oo  (1).  A,  M,  K  (js  jiÀ-<a.Jf.  L'exactitude  de  la  leçon  de  D  est 
attestée  par  la  notice  du  Fihrist,  p.  298. 

P.  3oi  (1).  M,  K,  D  ajoutent  ««^t  J  q!<U. 

P.  3o2  (1).  D  3/*^'î  ^  (J'j^^i-  ^^  forme  régulière  serait  ^JsÀjf. 
«les  deux  colonnes  ou  phares.»  Yakout,  s,  v.  C'est  une  ruine  aux  envi- 
rons de  Koufali ,  près  de  laquelle  était  le  tombeau  d'Ali. 

Il)id.  (2).  Nom  donné  par  A  et  illisible  dans  les  autres  exemplaires.' 

P.  3o6  (1).  D  i^O-i^^^,  au  dernier  hémistiche,  au  lieu  de  (>..^L. 
Toutes  les  copies  terminent  par  Oo^li  c\*J ,  ce  qui  renvei'se  l'ordre  de 
succession  indique  par  l'auteur,  p.  3o5 ,  et  conforme  au  témoignage  des 
principaux  historiens. 

P.  3o7  (1).  Dans  A,  M,  K  la  pièce  n'a  que  deux  heït,  par  la  suppres- 
sion du  deuxième  hémistiche  du  deuxième  vers,  et  celle  de  l'hémistiche 

suivant.  Au  lieu  de  K^^,  D  porte     «UJI. 

Ibid.  (2).  Leçon  de  D;  fes  trois  autres  copies  donnent  ^»Ljf.  La 
révolte  de  ce  Kharédjite  paraît  avoir  échappé  à  l'attention  des  priiici- 
paux  chroniqueurs  arabes. 

P.  3i5  (1).  K  porte  \\^  et  ensuite  Is^t;  leçons  peu  lisibles  dans 
les  copies;  cependant  A  porte  nettement  k^.  Il  résulte  d'un  passage  du 
Voyage  au  Ouaddj,  traduit  jiar  M.  PeiTon,  p.  5 80,  qu'on  appelle  Jer/i, 
en  Egypte,  une  espèce  d'amande  qui  s'ouvre  en  deux  sous  le  plus  léger 
effort  des  doigts.  Cf.  Edrisj,  éd.  Dozy  et  de  Goeje,  p.  309. 

Ili'ul.  (  2).  Après  le  quatrième  vers,  A,  M,  K  ajoutent  cekii-ci  : 


VARIA>JTES  ET   i\0TE8.  ^27 

A  écrit  L&J.XC,  et  plus  loin    y'vs^JI;  enfin, au  dcrnici-  vers,  au  lieu  de 

/j|3^-4f  »-Ji.  r>  c_>U^  jj|-  Quant  à  rinccrtitude  des  copies  signalée 
dans  la  note  précédente  sur  les  mots  djauz  cXjcrk,  elle  se  reproduit  dans 
les  vers. 

P.  3i9  (i).  A,  M,  K  lisent  Jj^Axif  «j^a-i,  leçon  dont  je  ne  com- 
prends pas  le  sens;  du  reste,  les  mêmes  copies  sont  incertaines  dans  le 
paragraphe  entier. 

P.  326  (1).  La  copie  D,  qui  est  le  meilleur  de  mes  manuscrits  pour 
les  fragments  de  vers  cités,  ayant  omis  le  paragraphe  entier,  je  n'ai  eu, 
pour  ces  vers  et  les  suivants,  que  le  secours  de  l'édition  imprimée  et 
des  copies  A  et  M.  Le  sens  du  dernier  hémistiche  est  particuiièrcmcat 
incertain,  et  je  ne  garantis  pas  l'exactitude  de  ma  traduction. 

P.  327  f  I  ).  On  pourrait  traduire  aussi  «  Ses  larmes,  etc.  sont  des  perles 
sur  des  perles  ;  »  c'est-à-dire  sur  des  joues  belles  et  pures  comme  des 
perles.  Je  doute  cependant  que  les  poètes  arabes  comparent  à  la  perle 
le  visage  de  leur  maîtresse,  tout  au  moins  n'en  ai-je  jamais  rencontré 
d'exemples  dans  les  Divans. 

P.  332  (1).  Lacune  de  deux  lignes  dans  A,  M  et  A'.  Quoique  les  le- 
çons de  D  ne  soient  pas  non  plus  exemptes  d'omissions  dans  ce  para- 
graphe ,  elles  sont  cependant  d'accord ,  pour  le  sens  général ,  avec  les  pas- 
sages correspondants  chez  Ibn  cl-Alhir,  p.  S[\ ,  et  ]hn  Michkwcïh ,  p.  J70. 

P.  333  (i).  Au  lieu  de  yi^^c,  les  trois  copies  lisent  /j^^v^  ^  c^^  ^"i 
affaiblit  sensiblement  la  justesse  de  la  métaphore.  D  rédige  ainsi  le 
sixième  vers  : 

A  et  M  terminent  le  onzième  vers  par  jtJy .  «L  dans  K  le  dernier  vers 
commence  par  (_)yli.»  <_>dii~^. 

P.  33.)  (1).  A,  M  et  D  ajoutent  ici  :  Lfçi^  <o^i>^  J^  ^^^]  ^\y\ 

P.  330  (1).   A,  M,  K  donnent  ainsi  le  beit  : 
JaIjJ!   'J\':>  iuJl^  ^yJ  ^^      J_A_i_£.  o>-^  cx'^t  o^4^y 
mais  Ibii  cl-Alliii',  qui  cile  li>   mêmes  vers,  s'accoide  avec  la  ((ipic  /», 


;i28  VARIANTES  ET  NOTES. 

d'après  laquelle  ils  sont  donnés  ici.  A  l'avant-dernier  vers,  les  trois  co- 
pies et  Ibn  el-Athir  écrivent  JywJl  (jijt,  leçon  qui  n'est  pas  inadmis- 
sible si  le  verbe  est  lu  à  la  voix  passive. 

P.  336.  (2).  Au  premier  vers,  A  et  M ^^Jf^;  R'  ^iJl-  Au  vers  suivant, 
les  trois  mêmes  copies  remplacent  «Ljof  par  ïf^.f. 

P.  337  (1).  Au  premier  vers,  D  seul  lit  ,_^-yJf  o-^S^,  les  trois  autreg 
copies  remplacent,  au  vers  suivant,  la  leçon  «CU.«.«  par  aX^«. 

Ibid.  (2).  A,  M,  D  portent  AU  au  lieu  de  Ismaïl.  Dans  le  fragment 
d'Ibn  Miclikweïh,  p.  568,  on  lit  que  ce  cbef  se  nommait  Huçeïn,  fils 
d'Ismaïl,  fds  d'Ibrahim;  généalogie  confirmée  par  Ibn  el-Athir,  t.  VII, 
p.  83. 

P.  338  (i).  La  lecture  du  troisième  vers  est  très-incertaine;  voici 
comment  il  est  donné  par  A  ,  M,  K  : 

La  principale  difficulté  porte  sur  (_jtNJ  .  ^ue  M  écrit  ,Wt>J  ;  ^  citXJ- 
ce  qui  est  plus  près  de  la  vérité,  puisque  ^^^  signifie  battre  des  ailes 
sans  voler,  tandis  que  {__j.  a  le  sens  de  déployer  les  ailes  pour  prendre 
l'essor.  Dans  une  note  marginale  l'éditeur  égyptien  fait  observer,  pour 
le  mot  0-X3.A*'  »  que  cette  forme  quadrilitère  est  autorisée  par  le  Kamous. 
tandis  que  Djawhari  ne  le  donne  que  comme  verbe  trililère. 

P.  34  1  (i).  Deuxième  vers.  A,  M,  K  •jlaX^',  et,  dans  l'hémistiche 
.suivant,  uJou  pour  KnIju.  Cinquième  vers,  D,  pour  |^»oJ> ,  écrit 
^^^1;  au  vers  suivant,  ^J^J  ^. 

P.  3^2  (1).  Les  copies /l  et- il/,  outre  plusieurs  mots  omis ,  lisent  en  206, 
l'édition  imprimée  n'a  pas  corrigé  cette  erreur  de  date. 

P.  343  (1).  D  et  M  ^[mJ\;  a  ^sLiJi;  K  sUxjf,  ingénieuse  correc- 
tion de  l'éditeur  égyptien ,  par  où  l'on  peut  apprécier  la  valeur  des  érudits 
musulmans  en  matière  de  restauration  des  textes  historiques.  Il  se  peut, 
d'ailleurs  que  Maçoudi  lui-même  ait  mal  écrit  le  nom  ;  il  s'agit  d'un  chef 
de  Deïlem,  nommé  par  Ibn  el-Athir  Asfar,  fils  de  Ciiirweïh,  t.  VIII, 
p.  i38;  même  leçon  dans  Abou  '1-féda. 

P.  345  (1).  Je  pense  qu'il  faut  ajouter  ici  Ben  AU,  comme  le  fait  Ibn 
el-Athir,  t.  VII,  p.  88. 


VARIAMES   ET    NOTES.  ^2'.) 

P.  3/j5.  (2).  D  porte  siniplenicnt  «oJ*  ^  passant  le  reste.  A  ,  M,  K 
donnent  jj^,.^!;  mais,  dans  une  note  marginale,  IVditeur  de  A'  ajoute 
qu'iuie  autre  copie  porte  ia-w.^f  «Jy^  ^j> ,  ce  qui  ne  rend  pas  la  phrase 
plus  intelligible.  La  lecture  que  je  propose  est  autorisée  par  les  princi- 
paux historiens.  Le  texte  du  Kaniil  et-lcvurikh  publié  par  AL  Tornberg 
renferme,  p.  iio  et  suiv.  de  graves  erreurs  dans  les  noms  propres;  il 
est  vrai  (pie  la  bonne  leçon  se  trouve  souvent  dans  les  variantes  de  l'édi- 
tion. 

P.  353  (1).  A  et  M  ïouJ^;  D  ^vy»^. 

Ibid.  (2).  Au  lieu  de  ^j\y^>  ^>  ^i ^  A.'  qÎo^',  et  YAghani,  t.  XX, 
p.  i54.  où  les  mêmes  vers  sont  cites  avec  des  variantes  importantes, 
écrit  (jl^;  mais  notre  lecture  n'est  pas  douteuse.  On  sait  que  dans 
l'Arabie  méridionale,  et,  en  particulier,  à  Nedjràn  se  trouvait  une  école 
de  médecins  chrétiens  que  le  peuple  considérait  conmie  d'iiabiles  sor- 
ciers. Voir  le  Modjeni  de  Yakout,  s.  v.  et  Prairies  d'or,  III,  290.  A  ter- 
mine ainsi  Le  vers  sixième  ^fj^d!  ,f<»v»J'  (Jù-i^-  Les  deux  derniers 
vers  ne  sont  peut-être  qu'une  interpolation ,  ils  ne  se  trouvent  dans  au- 
cune des  versions  de  YA(jliani.  M.  le  D"^  Perron  a  traduit  librement  toute 
l'anecdote  dans  son  Essai  sur  les  femmes  arabes ,  etc.  p.  197  et  suiv. 

P.  358  (1).  D,  au  premier  vers,  jjjlXjj^j.  Au  lieu  de  ^^-^■. 
VAghani  lit  ciLiX!,  «que  tes  mains  me  donneraient  la  mort,  «  leçon  plus 
naturelle;  le  suicide  n'est  qu'une  exception  très-rare  dans  les  mœurs 
arabes.  Voir  une  autre  relation  de  la  même  anecdote  dans  la  vie  de  Kaïs 
ben  Zoraïli,  Aghani,  t.  VIII,  |).  1  i/i. 

P.  363  (1).  Seule  la  copie  M  ajoute  sans  raison  Uo  tyAt]  ^a  (jLO 

P.  365  (1).  A  l'exception  de  D,  les  copies  portent  c_)v^  J'-^'j  J^^' 
mais  l'évasion  du  prince  eut  lieu  sans  éclat  ni  cortégi". 

P.  372  (1).  Ici  encore  les  copistes,  sauf  celui  de  /),  ont  changé  ce 
nom  en  la  forme  À.^yj.  Voir  la  note  de  la  page  270. 

P.    373    (1).     A'    -.UkoJ!  t-^La.;    ni    (lcii\iirnc    liéniisliclie ,    /)    .seul 

P.  37'!  fi).  Confusion  dans  phisifiirs  de  res  noms.  An  lieu  de  M>nii 
Uarbriii  i\uf  doiniriil    les  copies,   iinr    ncilf    marginale    (!<■    /)    porte    qu'il 


Zi30  VARIANTES  ET  NOTES. 

faut  lire  Abou  Hicham,  ce  qui  est  conforme  au  Nudjoum,  t.  II,  p.  763. 
A  la  ligne  suivante,  au  lieu  de  (j'Uji  une  correction  en  marge  de  D 
donne  (j'jy '.  lecture  identique  à  celle  du  Nadjoam,  t.  III,  p.  249.  Le 
nom  suivant  Abou  Koreïb  est  faussement  écrit  Ahou  Behr  par  trois 
copies. 

P.  375  (1).  Note  marginale  de  D:  «Le  vrai  nom  d'Abou  Moslem  est 
El-FIaçan,  fils  d'AJimed.  »  Le  surnom  du  jurisconsulte  cité  à  la  ligne 
précédente  est,  d'après  le  Nudjoum,  Taïmi  au  lieu  de  Tamimi. 

P.  076  (.1).  K  (^AXj;  sans  points  diacritiques  dans  A  et  M. 

P.  38o  (1).  A,  M,  K  ajoutent  le  mot  -«-jLj,  «pendant  que  je  dor- 
mais ;  »  cette  addition  s'accorde  difficilement  avec  la  suite  o«>>^  1  «"te- 

P.  382  (1).  A  et  K  (jL^  jjL^o;  M  Xm£.  (jÎjaj. 

P.  384  (i)-  Trois  copies  nomment  ce  poète  El-llaçan,  au  lieu  de  El- 
Hiiçeïn.  D  termine  le  premier  vers  par  yj^  ;  M  et  A  par  o<^.  Les  dic- 
tionnaires donnent  seulement  à  la  VHP  forme  de  ce  verbe  le  sens  de 
rentrer  dans  la  nuit;  il  faut  l'appliquer  aussi  à  la  première  forme.  Au 
troisième  vers ,  A ,  M,  K  écrivent  *XJ  (J  contrairement  à  la  mesure  du 
mètre  khafif. 

P.  386  (1).  A,  M,  K  ;tjL]I.  Je  me  suis  décidé  à  traduire  ainsi,  d'après 
le  témoignage  suivant  de  Tabari  :  «  Chacune  des  deux  moitiés  de  Bagdad , 
c'est-à-dire  la  rive  orientale  et  la  rive  occidentale  du  Tigre,  étaient  di- 
visées en  quatre  roa//a ,  placés  sous  la  juridiction  de  salieb  rouh'a,  délé- 
gués du  gouverneur,  et  qui  avaient  sous  leiu's  ordres  les  prévôts  de  ces 
([uartiers.  »  UAghaiiii  t.  XX.  p.  85,  en  racontant  la  même  aventure,  dit 
simplement  le  chef  de  la  police,  saheb  chortah. 

P.  387  (1).   D  i^ûAJ  ;  nom  omis  en  M;  Aghani,     u/^Lo. 

Ibid.  (2).  Les  copies,  sauf  D,  ajoutent  ici  o>-'^5  ,  attribuant  ainsi  les 
vers  suivants  à  l'esclave,  tandis  que  YAjhani,  d'accord  avec  D,  les  met 
dans  la  bouche  de  Mani  ;  d'ailleurs ,  si  l'on  adoptait  cette  addition  des  co- 
pies, les  mots  «elle  se  mit  à  chanter,»  qui  viennent  après  le  distique, 
n'auraient  plus  de  sens.  Au  deuxième  vers,  pour  t'ysu ,  les  trois  copies 
jwrtent  iy>sj;  Atjhani  *J(>«j. 

P.  388  (1).  Au  premier  vers,  /(  t>.4vjiÀX5  ;  au  troisième,  au  lieu  de 
iXJji,  A  et  M  (jodj ,  D  cNJtUl- 


VARIANTES  ET  NOTES.  ^31 

P.  391  (1).  Dciixièmo  vers,   D  i^AJ  Jj^yt.  A,  M,  K  linissent   le 
Iroisiènic  par  J^l.-«  tVs^u. 

P.  392  (1).  Après  le  dcuxicmc  vers,  les  copies  ajoutent  celui-ci,  ([ui 
ne  paraît  pas  être  à  sa  vraie  place  : 

A  ^^^Loj;  M  d.s3Lrj. 

P.  4o2  (il.   M,  Ben    Yé:id.   Dans  Ibn  cl-Alliir  on  lit,  t.  VU,  p.    iA8. 
ZeïJ  bcn  Ali,  mais,  pins  loin,  p.  iGb,  la  bonne  Icron  est  rétablie. 


SUPPLEMENT  AUX  CORRECTIONS 

DU  TOME  VI. 


P.  69,1.  3  ,  la  traduction  du  deuxième  vers  serait  peut-être  plus  exacte 
en  étant  modifiée  ainsi  :  «Ou  semblable  à  la  jeune  fille  que  sa  famille 
considère  comme  chaste,  tandis  qu'elle  est  déjà  dans  son  neuvième  mois 

(de  grossesse).  « 

P.  i83,  1.  2,  ou /ieu  rfc  fourreau ,  Usez  ceinturon. 

P.  ail,  avant-dernière  ligne,  Usez  O  vent,  pourrais-tu  m'imiter? 

P.  292 ,  1.  !i ,  au  Ueu  de  sans  y  revenir,  Usez  sans  y  être  attiré  par  un 
rendez-vous. 

P.  35/i ,  dernière  ligne,  au  Ueu  de  l'un  de  l'autre.  Usez  des  autres 
hommes. 

P.  407,  1.  6  du  texte,  au  Ueu  de  o-kc.  Usez  J~^  ,  el  effacez  le  même 
mot  JU^  de  la  ligne  suivante. 

P.  466,  1.  3,  au  Ueu  de  attends  le  départ  (la  mort),  il  vaut  mieux  tra- 
duire «  Attends  la  miséricorde  de  Dieu ,  etc.  »  tel  est  le  sens  donné  au  mot 
r^„^  dans  Koran,  XII,  87. 

P.  48/4,  1.  i5,  au  Ueu  de  croyant  lire  son  souvenir,  etc.  Usez  croyant 
voir  son  visage  éclairer  la  nuit. 


COKHECTIONS   DU    TOMK    V 


p.  17,  I.  7,  lui  lieu  de  {J^,^ji> ,  lisez  (jf^^'JLl . 

P.  20  ,1.1,  Usez    wojij. 

P.  35,  I.  9,  Usez  J-^j. 

P.  77,  I.  3,  (Ni  lieu  de  Saniniani,  lisez  Saïuiiiaii. 

P.  87,  I.  7,  lisez  i^^ly 

P.  I  18,  I.  2,  lisez  Moliaminpdites. 

P.  202  ,  I.  /|  ,  au  lieu  de  0^^,  lisez  j>9.. 

P.  2  1  6 ,  I .  '1 ,  lisez  «o  [A^^■4■  ■ 

P.  220,  I.  7,  au  lieu  de  ^y.^\ ,  lisez  ^^a..^)]- 

P.  287,  1.  G,  uu  lieu  de  IsblA/e,  lise:  L^U^o. 

P.  2Ô9,  I.  f),  ai;  lieu  de  ^_àA^,  lisez  ^_ÀJv^. 

P.  266,  1.   I,  ou  lieu  de  (_^/Jb  ,  lise:  ^^^S^3. 

P.  3i/|  ,  1.  10,  lisez  ltV.^j-0. 

P.  38r),  I.  3,  au  lieu  de  ^^^^Jkx.  ,  Usez  ^>Àc. 

P.  3t)7,  I.   '(  ,  ((//  /(('//  de  v-oy^  .  /'•'''■  (l-â-vS. 


■jb 


TABLE 
DES   PRINCIPALES   MATIÈRES 

CONTENUES  DANS  LE  TOME  VII. 


Puges. 

Avertissement i 

Chapitre  CXIV.   Khaliflit  d'El-Mainoun i 

Ses  noms  et  surnoms  ,  p.  i .  —  Son  âge ,  durée  de  son  règne , 
sa  mort,  p.  2. —  Ses  différents  ministres,  p.  3.  —  Ses 
rapports  avec  Ibraliim ,  fils  de  Melidi ,  p.  !\ .  —  Vers  d'Abou 
Dolaf  et  de  Mamoun,  p.  5.  — Maximes  du  Khalife  et 
fragment  de  ses  allocutions,  p.  7.  — Discussion  entre 
Tomamali  et  Yaliya,  lils  d'Aktam,  p.  10.  —  Un  parasite 
fourvoyé  parmi  les  Manichéens,  p.  12.  —  Une  aventure 
déjeunasse  d'Ibrahim,  fils  deMehdi,  p.  i6.  — Plaisan- 
terie du  nnisicien  Ishak  sur  le  surnom  d'Attabi,  p.  2  0.  — 
Parallèle  du  secrétaire  et  du  courtisan,  p.  29.  — Vers 
d'Abou  'l-Atahyah,  p.  3i.  — Un  souper  chez  Mamoun, 
p.  32.  — Embarras  de  ce  prince  dans  trois  circonstances, 
p.  35.  —  Son  entrevue  avec  les  délégués  soufis,  p.  38. 
—  Dépravation  du  kadi  Yahya,  fils  d'Aktam,  p.  l\Z.  — 
Mort  de  Chafeyi,  détails  biographiques,  p  49.  —  Eaux 
prophètes  conduits  devant  Mamoun,  p.  52.  —  Révoltes 
des  Alides,  p.  55.  —  Ibn  Tabataba,  p.  07.  —  Mort  de 
Fadl,  fils  de  Sehl,  et  de  fimain  liida,  p.  61.  —  Révolte 
et  capture  d'Ibrahim,  lils  de  Mehdi,p.  62.  —  Les  noces 
de  Bouran ,  p.  05.  —  Autres  traits  de  la  vie  d'Ibrahim ,  fils 
de  Mehdi,  p.  68.  —  Nécrologe,  p.  72.  —  Pauvreté  et 
désintéressement  de  Wakidi,  p.  73.  —  .Sainman  et  le 
Kiialil'i;  Mansour,  p.  75.  —  Abbas  Alcwi,  p.  79.  —  Mort 
d'Abou  Obeidah,  p.  80.  — Mort  d'Abou  'l-Atahyah,  frag- 
ments de  ses  poésies ,  p.  8 1 .  —  Observations  sur  la  pro- 
sodie arabe,  p.  87.     -   Causes  de  l'aversion  de  Mamoiui 


i36  TABLE  DES   MATIERES. 

Pages. 

pour  Moâwiah,  p.  90.  —  Nécrologe,  p.  gS.  —  Dernière 
expédition  deMamoun,  p.  9''i.  —  Détails  sur  sa  piort, 
p.  96. 

Chapitre  CXV.   Klialifat  de  Moulaçem 102 

Son  avènement;  ses  surnoms;  dates  principales,  p.  102.  — 
Maximes  de  Moutaçem,  p.  10/i.  — Mésaventure  du  mé- 
decin Ibn  Masaweïh,  p.  io5.  —  Plaisanteries  d'Ali,  fils 
de  Djoneid,  p.  107.  —  Le  vieux  nabatéen,  p.  n3.  — 
Nécrologe;  supplice  d'Ibn  Hanbal,  p.  1 1  4.  —  Révoltes 
des  Alides,  p.  116.  —  Fondation  de  la  nouvelle  capitale 
Saniarra,  p.  119.  —  Capture  de  Babek,  p.  i2  3.  —  Son 
supplice,  p.  129.  —  Expédition  contre  l'empereur  Théo- 
phile, p.  i33. —  Révolte  et  mort  deMaziar,.p.  137. — 
Mort  d'Abou  Dolaf;  son  dévouement  à  la  cause  d'Ali, 
p.  139.  —  Nécrologe,  p.  i43.  —  Mort  du  Khalife, 
p.  i44. 

Chapitre  CXVI.   Rhahfat  de  Watik-Billah 1  /j5 

Ses  noms  et  surnoms;  dates  principales,  p.  i\o.  — Faitre- 
vue  d'un  Arabe  nomade  avec  Abou  Tammam,  p.  1/17.  — 
Détails  biographiques  sur  ce  poète,  p.  i5i.  —  Parallèle 
entre  Abou  Tammam  et  Bohtori,  p.  i55.  —  Poésie  élé- 
giaque  d'El-Haçan ,  fils  deWehb,  p.  167.  —  Nécrologe, 
p,  169.  —  Discussion  sur  les  principes  de  la  médecine, 
p.  172.  —  Explication  de  l'appareil  dentaire  par  le  mé- 
decin Honeïn,  p.  180.  —  Causes  des  variations  atmos- 
phériques, p.  182.  —  Aphorismes  sur  la  mort  d'Alexandre, 
p.  i86. 

Chapitre  CXVII.  Khahfat  de  Motewekkil-Alallah 189 

Ses  noms  et  surnoms;  dates  principales,  p.  189.  —  Sa  con- 
duite politique ,  p.  1 90.  —  Ses  goûts  frivoles ,  p.  191.  — 
Il  règle  la  succession  au  trône,  p.  193.  —  Supplice  d'Ibn 
Zeyyat,  p.  igii-  —  Le  fou  du  couvent  de  Saint-Héraclius, 
p.  197.  —  Le  poète  Bohtori,  p.  202.  —  Ballade  de  l'âne 
amoureux,  p.  200.  —  Piété  d'un  descendant  d'Ali, 
p.  206.  —  Mort  d'Ibn  Samaah  et  nécrologe,  p.  209.  — 
Aventure  d'une  jeune  fille  de  la  famille  d'Ali,  p.  21 1.  ^ — 
Disgrâce  du  kadi  Ahmed,  fils  d'Abou  Douad,  p.  2i4.  — 


TABLE  DES  MATIERES.  ^37 

Pages. 

Eloge  de  ce  personnage,  p.  21 5.  —  Le  ragoût  du  ma- 
telot, p.  220.  —  Désespoirs  d'amour,  p.  222. —  Disgrâce 
d'Omar  ben  Feredj ,  p.  228.  — Funérailles  d'Ibn  Hanbal , 
p.  229.  —  Controverse  entre  Allaf  et  Hicliam.lils  d'El- 
Ilakem ,  p.  232.  —  Entre  ce  dernier  et  Amr  ben  Obcid, 
clief  des  Moutazélites ,  p.  2  34.  —  Mort  de  Rawendi. 
p.  23-7.  —  Anecdote  sm*  le  poëte  Souli,  p.  2  38.  — 
Extraits  de  sa  prose  et  de  ses  vers,  p.  2  4o.  —  Derniers 
moments  d'Abbas,  fils  d'Almef,  p.  2/jY. — Le  poëte  Ali, 
fils  de  Djehm,  p.  249.  —  Fragments  de  ses  poésies, 
p.  202.  —  Séjour  de  Motewekkil  à  Damas,  p.  267.  — 
Ses  troupes  se  révoltent,  p.  258.  —  Les  Turcs  le  sépa- 
rent de  Boga  l'aîné,  p.  209.  —  Conjuration  contre  le 
Khalife,  p.  262.  —  Il  est  assassiné  par  Baguir,  p.  2G7. 

—  Détails  sur  cet  événement,  p.  269.  —  Intrigues  des 
Turcs,  p.  273.  —  Réflexions  sur  le  meurtre  du  Khalife, 
p.  274.  — Sa  prodigalité,  p.  276.  —  Anecdotes,  p.  277. 

—  Elégies  sur  sa  mort,  p.  279.  —  Dévouement  de  son 
esclave  Mahboubeh ,  p.  281. — Nécrologe,  p.  286. 

Chapitre  CXVIII.   Khalifat  de  Mountasir-Biilali 290 

Son  nom;  dates  principales,  p.  290.  —  Le  lapis  du  meurtre, 
p.  291.  —  Poésies  composées  par  le  khalife,  p.  295.  — 
Brutalité  du  vizir  Ahmed,  fils  d'El-khaçib,  p.  296.  — 
Causes  de  la  mort  de  Mountasir,  p.  297.  —  Autres  ver- 
sions sur  cet  événement,  p.  3oo.  —  Profanation  du  tom- 
beau d'Ali,  p.  3o2.  —  Mountasir  fut  favorable  aux  Alides, 
p.  3o3.  —  Comment  il  régla  .sa  succession,  p.  3o4.  — 
Anecdote  sur  .sa  générosité,  p.  309.  —  Le  poète  Hariri, 
p.  3 1  I .  —  Aventure  d'Abou  Otnian  Sâïd ,  p.  3 1  G.  —  Bon 
mot  d'un  liabitant  de  la  Mec(|ue,  p.  3to. 

Chapitre  CXIX.   Khalird  de  Moslaïn-Billah 323 

Ses  noms  et  surnoms;  dates  principales,  p.  324-  —  Ses 
ministres,  ihid.  —  Sâ'id,  fils  de  Ilomeïd,  p.  32.").  —  Le 
poëte  Abou  "1-Bassir,  p.  328.  —  Révolte  de  Yahya,  lils 
d'Omar,  p.  33o.  —  Elégies  sur  .sa  mori ,  p.  333.  —  Le 
poëte  Ali  Iliininani,  p.  337.  —  Révolte  des  Alides  dans 
le  i'abarist.îii ,  p.  342.  —  Dans  la  ville  de  Rey.  p.  344. 

—  A  Razvvin,  p.  345.  —  A  Koufah,  ihid.  —  Moslaïn 
régie  sa  succession  en  favcin-  d'Abbas,  son  (ils,  p.  340. 


Pi 


Ù38  TABLE   DES  MATIERES. 

—  Anecdotes  relatives  au  petit-fils  de  Talier,  p.  347.  — 
Les  Martyrs  de  l'amour,  Orwah  et  Afrâ,  p.  35i.  — Medj- 
noun,  p.  356.  —  Mort  de  Boga  l'aîné,  p.  36o.  —  Sa 
bienveillance  envers  les  Alides,  p.  362.  —  Mostaïn  se 
réfugie  à  Bagdad,  p.  363.  —  Les  affranchis  turcs  se  dé- 
clarent pour  Moutazz,  p.  365. —  Défection  d'IbnTaher, 
p.  367.  —  Abdication  dé  Mostaïn,  ibiJ.  —  Moutazz  est 
salué  Khalife,  p.  369.  —  Il  fait  assassiner  Mostaïn, 
p.  370. 

Chapitre  CXX.  Khalifat  de  Moutazz-Billah 872 

Ses  noms  et  surnoms;  dates  principales,  p.  372.  — Poésies 
sur  fabdication  de  Mostaïn,  p.  373.  —  Nécrologe,  p.  374. 

—  La  bague  merveilleuse,  p.  376.  — Vers  en  fhonneur 
de  Moutazz,  p.  377.  —  Mort  d'un  descendant  d'Ali, 
p.  379.  — Déférence  de  Motewekkil  à  fégardde  ce  per- 
sonnage, ibid.  —  Tradition  conservée  dans  la  famille 
d'Ali,  p,  382.  —  Mort  de  Mohammed,  petit-fils  de 
Taher,  p.  384.  —  Son  entretien  avec  un  certain  Marn, 
p.  385.  —  La  musicienne  Mouniçah,  p.  387.  — Complot 
et  meurtre  de  Moueyyed,  p.  393.  —  Révolte  des  Alides, 
j).  396.  —  Sédition  des  Maulas  à  Bagdad;  meurtre  de 
Boga  le  jeune,  p.  396.  — Moutazz  est  assiégé  par  les 
Turcs  dans  son  palais,  p.  397.  —  Il  abdique  en  faveur 
de  Mouhtadi,  p.  399.  —  Elégies  composées  à  l'occasion 
de  cet  événement,   ibid.  — Luxe  de  Moutazz,  p.  4o2. 

—  Révolte  des  descendants  d'Ali ,  ibid.  —  Comment  pé- 
rirent plusieurs  de  ces  prétendants,  p.  4o4.  —  Premiers 
symptômes  de  la  sédition  du  chef  des  Zendj  ,  p.  4o5. 

Variantes  et  notes 467 

Supplément  aux  corrections  du  tome  VI I1S2 

Corrections  du  tome  Vil Zj33 


FIN  DU  TOME  SEPTIEME. 


^ 


SIIMDmG  £  APR  Z  9  1968 


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