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VK5. ^
>n^f(?)
V
N
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i
LETTRES
ÉCRIX.ESDELA
MONTAGNE. •
Far j. j. rousse au.
PREMIERE partie!
A AMSTERDAM,
Chez MARC MICHEL RE Y.
M D C G L X 1 V.
-~r
■» ' I
AVERTISSEMENT.
C'est revenir tard, je le fens, fur un fujet
trop rebattu &^déja prefque oublié. Mon état,
qui ne me permet plus aucun travail fuivi,
mon averfion pour le genre polémique, ont
caufé ma lenteur à écrire & ma répugnance à
publier. Jaurois même tout à fait fupprimé
ces Lettres, ou plutôt je ne lès aurois point
écrites, s'il h*eut été queftion que de moi:
Mais ma Patrie ne m*e{t pas tellement deve-
Jîue étrangère que je puifle voir tranquille-
ment opprimer fes Citoyens, fîxrtout lorfqu*ils
n'ont compromis leurs droits qu'en défendant
nia Caufe. Je jferois le dernier des hommes
û dans une telle occafion j'écoutois un
fèntiment qui n'efl: plus ni douceur ni pa-
m
tience , mais foibleflë & lâdieté , dans celui
qu'il empêche àp remplir fon devoir.
Kien de moins^ important pour le public ,
J'en conviens» que la matière de ces Lettres»
AVE R T I S S E M E N T.
La Conflim^oo d'une petite République , le
fort d'un petit particulier, rexpofé de quelques
injuftices, Ja réfutation de quelques ibphifmes;
tout cela n*a rien en içà d'afle^ configurable
pour mériter beaucoup de ^.ef^eurs: Mais fi
mes fujets CotA petits mes objets font grands ,
& dignes de Tattentron de tout honnête hom-
me. LaiiTons Genève à fa place, & RoufTeau
>dans fa dépreflion ; mais la Religion, mais la
liberté, lajufticeî voila, qui que vous foycz^
ce qui n*efi: pas au deffous de vous.
Qu'on ne cherche pas même ici dans le fly*
le le dédomagement de Taridité de la matière.
Ceux que quelques traits heureux de ma plume
-ont fi fort irrités trouveront dequoi s'appaiier
dans ces Lettres. L'honneur de défendre un
opprimé eut enfiamé mon cœur fi j'avois par-»
lé pour un auo'e. Réduit au trifle emploi de
.me défendre moi-même , j*ai dp mé borner à
AVE R T I ÎS E M ENT.
rsdfbnner ; m'&rhauffer eut été m*avilir. J'aurai
donc trouvé grâce en ce point devant ceux
qui s'ifnagiaent ^'il- e(L efTeiKiel i la vérité
d*être dite. froidement; opinion que pourtant
j'ai peine à comprendre. Lorfgu'une vive per-
Tuafion nous anime , le moyen d'employer un
langage glacé? Quand Ârchimede tout tran&
porté çoMToit nud dans les rues de Syracde »
en avoit-il moins trouvé la vérité parce qu'il
iè paffiônnoît pour elle? Tout au contraire»
* •
cekii ^ui ^ (HWT ne pem; s'abstenir de l'adorer ;
celui qui demeure froid ne Fa pas vue.
Quoiqu'il en foit, je prie leé Leâeurs de
vouloir bien mettre à part mon beau flyle, &
d'examiner feulement fi je raifonne bien ou
mal ; car enfin , de cela fëul qu'un Auteur
s'exprime en boffs termes, je ne vois pas
commeiît îl 'peut s'enfuît^fé quç cet Auteur
ne fait ce quril dit.
T A B L E
DES
LE TTRES
Et de leur contenir. '
> o • »
^ 4
■FREMI È R E P A R t I E.
» . ; . ,
i t 4 , \
LETTRE PREMIERE. Pag. I
Etat 'de la quejiîon par rapport a T^uimr. Èi
tf//^ /?/î.& îd^ compétence des 'Trihutiaiùè civils^
' Manière injujîe dé Ta réffudre. ' "^" ' '
. - . . ' •-. • .
L É T T R E IX ' <J3
,D^ iï Religion dt Genèvç. Principes' de, la
. Jiéformatîon. V Auteur ^nzame la JifçufJÎQti
/f^j miracles.
TA B LE
ï- E T T II E m. , Pag. io($
Continuation du tntmâ Sujet. Court examen ék
quelques autres accufations..
LETTRE IV. 179
- » • •
iJ Auteur fefuppofe coupable; il compare laprth
, cédure à la Lot.
L E T T R E V. iiC
Continuation du même Sujet. 'JurîfpfuietKe tirée
des procédures faites m cas femhiables. But
de r Auteur en publiant ^ la JprofeJJîon de foi.
L E T T R E VL 311
S'il eji vrai que T Auteur attaque les Gouverne^
mens. Courte analyfe djt fon Livre. La pro*
cédure faite à Genève eft font exçmple , ^
«V été fuivîe en aucun pays.
/ /
s E d aND E PARTIE.
LE T T RE Vit Pag. i
l j • • • 1
Etat frèfent du Ooùvernement de Genève^ fixé
*
par l'Edit de la Médiation.
L E T T R E VIII. Page 61
Efprit de cet Edit, Contrepoids qfi'tl donne k la
• •• ,1 • ^. •> . ■* ^
PuiJJance arijlocratique. Entretrife du petit
Confetl d'anéantir ce contrepoids par voye de
fait. Examen des inconv^Sniens 'allégués. Syf*
téme des Edîtr fut ksttnjirifonnemtns.
L Ê T t R Ê IX. 149
Manière de raifonner de t Auteur des Lettres
écrites de fa Campagne. Son vrai but dans âet
Ecrit: Choix de ces exemples. Caractère de la
' 'Bourgeoîjîe St Genève. Treuve par tes faits.
Conchfiott,' - . . , . - .. j
FIN.
AVERTISSEMENT
DU LIBRAIRE.
3' Ai fait ce qui a dépendu de moi pout ren-
dre rédition de ces Lettres correfte ; il s'y eft
néanmoins glifé quelques fautes d^impreflion ,
que le lefteur corrigera aifément. Voyez Ver^
rata.
Catalogue des Ouvrages de Mr, J. J. RùuJJemè^
que fat imprimés fur ces Manufcrits.
Difcours fur Torigine & les fondemens de rinégalké
pannl les Hommes ,
Lettre contre les Speftacles ,
iulie, ou la nouvelle Helolfe,
*iincîpes du Droit politique.
Lettre de J. J. RouiTeau a Chriftopbe de Beaumont»
Lettres écrites de la Montagne.
ERRATA.
Première partie.
page ligne ftàae lijn.
a72 - - 3 - partout - par tout
"a73 . - 13 - les - ces
306 - - 17 - Tamour, de Tamour de
Seconde partie.
39 ^ - 9 - point • . points
90 ' " 3 - quelques - quelque
124 - - 12 -' ces - cet.
A V I s au Relieur.
II y a 4 Cartons qui fe trouvent imprimés avec la
feuille Jaar^ée wd'une étoile, le Relieur aura foiQ de
1m placer «xaâément à leur place.
y^
< « a.
* ■* , ♦
« • » • '
« «
« • % . *
» '
LETTRES
LETTRES
ic RITES DE LA
MONTAGNE.
t^ÊÊêi^mm^mtmmmm^m^m
PREMIERE LETTRE.
■
JSIoni, Monfieur, je ne vous blâme point do
ae vous être pas joint aux Répr^fentans 'pour
ibutenir ma caufe* Loin d'avoir approuvé moi*
même cette démarche ^ je m'y fuis oppôfé de
tout mon pbuvqir , & mes parens s'en font
redrés à ma foUicication. L-ôn s'efl; tu quand
il fallbit parler ; on a parlé quand il nereftott
qu'à ie taire. Je prévis FinutiliDé des répréfen^
eations , jVm preiTentis les xonféquences : Je
jugeai que leurs faites inévitables trbublerôienc
le repos piybiic , du changeroient la confHtu*
pon de l'Etat. L'événement a trop jailifîé mes
Partiel A
^'.PREMIERE
k
craintes. Vous voila réduits à rakemative qui
m'effrayoîc. La crife où vous êtâ exige une
satre délibération dont je ne fois plus Fobjet.
Sur ce qui a été fait vous demandez ce que
vous devez faire: vous confidéiez cpie TefiFet
de ces démardies , étant relatif au corps de la
JBourgeoifîe ^ ne retombem pas moins fur ceux
qôi s'en font abftenus qpe îifi ceux qui les ont
faites. Ainfi , qàeb qu'aient été d'abord les
divers avis , l'intérêt commun dok ici tout réo-
BiF. Vos droits réclamés & attaqués ne peu-
vent ^ demeurer en doute ; il faut qu'ib
loriot reconiisis.ou {uiéantis > & c'efl; leur évU
dence qui les to^t eti^peril. B dé Bdloit pas
approcher le fiambew. durant l'c^age; mais
aujourd'hui le feu e(t à la maifbn.
: Quoiqu'il ne s^agifiè plus de mes ^ltàrêts;
mon honneur nie rend toujours p^e dans cet^
ce affaire } vous le ùva p & vou me confatf
teK toutefois comme un homme neutre $ vouf
fuppofez que le préjugé ne m'aveuglera point
& que la paffioti ne me rendra point injufte!
je r.efpere aufli ; mais dans des circonftances fi
délicates , qui peut répondre de foi ? Je fens
qu'il m'eft impoflible de m'oublier dans unç
querelle dont je fuis le fujet , & qui a mes mal«
heurs pour première caufe. Que ferai-je donc^
Monûeur , pour répondre à votre confiance Se
juflifier votre eftime autant qu'il dk en .moi Y
Le voicL Dans la^ jufte défiance de moi • md^
me 9 je vous dirai moins mon avis que met
raifons : vous les pé&rez , vous comparerez , Si
voi^ choifirez. Faites plus ; défiez - vous tou«
jours j non de mes intentions ; Dieu le fait,
elles font pures; nuus de mon jugement;
IThomme le plus jufte , quand il eft ulcéré voit
rarement les choies comme elles font. Je ne
^ux /Qrement pas vous tromper, mais je puis
l 'i
r PREMIERE
me tromper ; je le pourrois en toute autre
çho(e, & cela doit arriver ici plus probable^
ment. Tenez-vous donc fuï vos gardes , &
quand je n'aurai pas dix fois raifon , ne me
l'accordez pas une.
. Voila, Monfieur^ la précaution que vous
devez prendre , & voici celle que je veux
prendre à mon tour. Je commencerai par vous
parler de moi , de .mes griefs , des durs pro-
cédés de vos Magiflrats ; quand cela .fera fait
&, que j'aurai bien foulage mon cœur ,. je m'ou*
tjierai moi-même ; je vous parierai de vous,
^e votre ficuation , c'ed-à-dire, delà Répu-
blique ; & je ne crois pas trop préfumer de
jnoi , fi j'efpere , au moyen dé cet arrange-
ment, traicer avec. équité la,:quefUon*que vous
me faites.
1 '. J'^î été outragé d'une manière d'^ant plus
•cruelle que je me flatois d'avoir bieQ no^rité de
LETTRE. 5
la Patrie. Si ma conduite eut en befoîn de gra*>
ce, je pou vois raifonnablement ,, efpérer de
Ibbtenîr. Cependant , avec un emptèflemœC'
fails exemple, fans avertîffement , fans cita-
tion 5 fans examen , on s'efl: hâté de flétrir mes
Livres ; on a fait plus ; fans égard pour mer'
malheurs pour mes m^ux pour mon état , on
a décrété ma perfonne avec la même précipi-
tation,* Ton Trie m'a pai'même éparghé les ter-
mes qu'o» ero'pteye pour ïes malfaiteurs. Ceit
Meffieiiw n!qnt pas été indulgens , ont • ilidu
moins été jnftes? Cefl ce que je veux rech'er*
cher avec vous. Ne vous effrayez pas, je
vous prie , de l'étendue que je fuis forcé de
donner à ces Lettres. Dans la multitude de
queftîons qui fe préfentent , je voudrois être
fobre en paroles: mais, Monfieur, quoi qu'on
i' •
puiffe faire,, il. en faut pour raifonner^ ' '
RaOmblom d^abord les motifs q l'ils ô](lt
A3
H PREMIERE
donnée de cette procédure , non dans le ré«
qiiîfitohe 9 non dans Tarrêc , porté dans le fe-
oret 9 &'refté dans les ténèbres (i) ; mais dans
les réponfes du G»ifeil aux Répréfentatiôns
des Citoyens & Bourgeois , ou plutôt dans les
li^etores écrites de la Campagne : ouvrage qui
Ifur (erc de manifefle , & dans iequel;^feul Hs
daignent raifo^ner avec vous,
. ,, Mes livres font, " difent-il?^^,; vnpîe;s
^ fcandaleux téméraires , pleins de l^tefphèmes
3^ & de calonmîes contre la RdigioQ; Sous
,, l'apparence des doutes TAitteur y a raflent
(i) Ma famille demanda par Requête 'communî-»
fatiioD de cet Arrêt. Voici la réponfe.
Du 2$ J^in 1762,
* „ En Confeil ordinaire , vu la préf ente - Requête ^
]^ arrêté qu'il n'y a lieu faccQrder nux Jufplians Ui
„ fins d'icelle. * '
L'Arrêt du Parlement de Paris ftit imprimé auflî-
t6t que rendu. Imaginez ce que c*eft qu'un Etat li-
bre oii l'on tient cacbés de pareils DécitU çoaore
rbonneur 1& la liberté des Citoyena!
r
LETTRE 5^
„ blë tout ce qui peut tetadre à Apper, ëbcaa-,
,, 1er & détruire les principaux fondesneos de.
9, h Religion Chrétienne révélée.
,, Ib attaquent tous les. Gouvemémens.
^ Ces livies ibnt d'autant pka dangereuaf
,> & r^)réhenfibles qu'ils font écrits en Frâo»
n ÇoiSy du flyle le plusièduâenr ^ qu'ils pa^
„ roUTent £>Qs le nom &'la qualification d'uQ
,, Citoyen de Qenève , & que , fijon rimen^
tien de r Auteur y l'i^adilé dok iervSr àa gui*
de aux pères aux mères atix précepteurs. .
,, En jugeant ces Livrea , il n'a pas été
9, poffible au Confiil de ne jetcer aucun regard
^ fk odui qui en étoit ptéfiuné l'Auteur/* :
Au iîefte, le Décret porté contre ihoi
\j n'efl:»^* continuent -ils, „ ni un jugement
^) ni une ftntence , mais an &hpte appointer
1^ ment ptx>v^okt qtii laifibte dans leur entio;
^ aet esMâpâont d( défenfts V & ^^ <^ ^
A4
9J
î>
t: P H E M I E R E
I, CMS ^prém ftrvoit de préparatoire à la pro-.
,^ cëdupe preftrkte par les Edits &! pafc FOr*.
„ donnancGL ètclèfiaflique/*
. A cela les Ré{Sléferit2»ajs , fans etttrer.d^t
fexamen de la doârifie , objcâiendit ; ^*gue
fy Je Conf^illutok jû^'fims forina}hés'|N3éHb^
fy paires : .que/Mtiîele 88 de i'Qbdqnnanca
4i ecG}éfîxfli<|ue:avoi& été. \'ioIé dws jcë ijisge-i
II
^'^sneJQtriqoe la procédure faite ta 15^2 coffire
%
^, Jeaû Morèlli'i' fcJnsfe de cet' Artîde * ca
iQontrolt da^œient Tufage, &^doniioit par
cet exemple pner jt«îîipr^ence;<îç'Qn n'au-
roic pas da méprifer i qoe cette nouvelle
,, manière de procéder étoît oiêine coitfraîj^e à
»} }« i^^glc du .Droit mturd admife che? tous
^ les peùpk^ ^ . laquelle e^ige ' que. &u) te':ibi(
,» condaoné fansavo^récéuem^u^^dans fe$
i,. défen&i ;l qrt!oji ne ptax fléoir un. ouvrage
4. finâ âécri)^.en^da£â6,ttt:i|.l!Auteu£> d^ il
#9
: L E;iT: T R E;. . p
^; pbite le notai j^u'oq iie voie pas qodks e&>
y,' ceptions & dé&nfçs il refte à un hdinme dé-
y, daré impië^y t^éiiiéraite , foandaleQx , dai^
^ iës écrits ^ "& après la feotence rendue' ^
^\âcécutée.coqtrejEes nitmtt éàrit&y juiî^uq
fy mie, cdie(}Sirë£ulte:ds.M'c(»nbq{tion d'u^
3, livre par.l^oiûin^du^ Bourreau rejaillit i^
y^ cejBorenù^fin: F Aùtéiir : d^ûù il* fuit qolon
,, n'a pu eide\resL8 oXiCwoys^} k, Um le plut
p, précicas^:>riiûiinear; qo*<^ jevpoqprait dé-,
^ truire (kjépvmloux , :foaié£at ^ âDSiOcfn^
,, inencer pat. }!entendre ; ^ue.ks.ouviBgqi
,, condanné& ^ fiiécrîs inâ^itcient du nioit^
9, autant de fupport & de tolàr^fe que divers
^ autres écries oitrcm fait .de trusBsM fatyrci
fur la Religion y ^ qui ont été répandus ^
même knprifi^és dan$ h Ville : qtfeâfin p^
y^ rapport jux JqoO^rarnemefis , il a toi^^
As
99
1%
lo P R' E M I ERE
fy été permis daù Genève de laiïbnnier libre*,
5^ mtrk fur cetcè^natiere génërile ; qu'on n' j
^ défend aucun Livre qui en traite, qu'on n'y,
^ flédic aucun Auteur pour m avoir tnuté^
^ qud qi^e fcnè fan fêatimenc; ..& que, loii^
^ d'actaqûériJeJSàttsrenirment de::]a iUpu&U^
i9 que en pmiculier^je neJaii&édiapper ao^
^) cune occalion d'en faire Féiogâ/^
. A ces objeââons il fut répliqité de là pai$
du Confeiiif ? „ [ que ce n'eft point manquera la
5, regU^M^oÎT^eiit quenulnefd^
fj l'entendre , que de condaimer un Livre a*
^ prés en avoir pris leûore & l'avoir laminé
ij fuffiramment : que l'ArucIe Sgdes Otdon*
i^ nances nr'eflf applicable qu'à un homme qui
yy dogtnatife & non à un Livre deftruâif d^
la Religion Chréciâbne : qu'il n'eft pas vrai-
que la fiétiifiore d'un ouvrage fe communir»
^ que à TAutâir ^ lequel peut n'avoir été^
n
L E >T. T R E; - «
^ qu'impilident ou maladroit : qu'à Xéffïà d^
y, ouvrages fcmàakxa tolérés ou même impri*
,, mes dans Genève.^ :il n-eft.pas laifbmiablr
9, de prétendre qu$ pour avoir diffimalé qud**
9,.qaefoi8) un Gdavernement fôic «bligé de
,, dMimuler toujoui» s qu^ d'ailleuts lei livrai
9, où l'on ne (ait ^ue tourner en ridicule h
,, Religion ne font pas à beaucoup prés auiB
y« puniflàbles. qtie ceuic où fans détour on Tob-
,, taque par le taifonnement. Qu^enfin ce que
le Confèil doit au maintien de la^ Rel^on
Cbrétienni? dans fa pureté .^ au bien public,
aux Loix y & à Thonnéur du Gouvernemeot
9, lui ayant fait porter cette fentence y ne lui
,, permet ni de la changer ni de Taffciblir.*^
Ce ne font pas là toutes les raifons objec-
tions & réponfes qui ont été alléguées de part
& d'autre, mais ce font les principales , & el«
r
les fîiffi/ènt pour établir par rapport à moi I^
99
P R E' M 1ERE
f
qoeflion de f$it: & de droit.
Cependant comme l'objet , âinfl pféfenté,
demeure encore on peu vague , je vais tacher
de le fixer avec plus de piréci^km , de peur que
Vous, n'é^ndite ma dâa^ 4 h partie de. cet
«bjet que je h*y veux pas embfaflèr.-
: : Je luis homme & j^ai^foit^es Livrés ; fai
dcmc fait; auffi des erreurs , (a)î' ftn z^pei^ok
md-mêrae énaffez grand nombre : je ne dou?
te* pas que.Jautres rfen' voyeûc beaucoup da-
»
vantage ,: '&.'qa'il rfy en ait bien plus éncbre
que hinsoi ni^d'autres ne voyons pointi Si l'oa
se dit que cela j^ Jbufcris
i ' • • ■
(2) Exceptons , fi Ton veUt , les Livres de
<}çbm(5trle'l& leurs. Aurcuïs.! Ericactf s'il nîy apoîut
d'erreurs dans les propofîtioqs mêmes». .qui noua, af-
Turera qu'il n'y en ait point" dans Tordre de déduc-
tion, dans le choix» dans la -méthode? Ëuctide dé*
montre , & parvient à fon but ; mais quel chemin
•prend - |t? combien n'jeire t^il pas dans fa Voûte ? La
fcience a, beau être infaillible ; l'homme qui la eut
tlve fe trompe fouvcnt.
\
L E T T R R ï|
Ma^ quel Auteur n'efl: pas dans le même
cas, ou s'ofe flatter de n'y pas être ? Là-def-
ftu donc , point de difpute. Si l'on me réfiite
& qu'on ait raifon , l'erreur efl: corrigée & je
me taîs. Si Ton me réfute & qu'on ait tort ,
je me tais encore j dois-je répondre du fait
d'autrui ? En tout état de caulè , après avoir
entendu les deux Parties, le public efl: juge, il
prononce» le Livre triomphe ou tombera; le
procès efl: fini
Les erreurs des Auteurs font fouvent fort
indifférentes ; mais il en efl: auffi de domagea*
blés , même contre l'intention de celui qui les
commet. On peut fe tromper au pré^dice du
pubjic comme au fien|propre ; on peut nuire
innocemment. Les comroveiies fLu* les matie*
.0
tes de jurisprudence , de morale y de Religion
tombent firéjuemmént dans ce cas. NéceflTaî*
renient un des deux d^utans fe trompe , â(
t4: P RE M 1ER E
Ferreor forces niatîei'es importais toujours âe*
vient faute ; cependant on m la punk pot
c|uand on la préfume involontaire. Un homme
ii*e(t pas coupable pour nuire eiu voulant fer*
vir , & fi Ton pourfuivolt crminellemént un
Auteur pour des fautes d'ignorance ou d'inad-
vertance » pour de maUvaifes nâximes qu'on
pounroit tirer de fes écrits trâi confâpiemmenc
mais contre fon gré , quel Ecrivain pourroit
fe mettre à Tabri des pourfuites ? II faurdoie
être infpiré du Saint Efprit pour fe &ire Au-
teur & n'avoir que des gens infpirés du Saint
Efprit pour jugea.
Si Fon ne m'impute que de pareiDes fautes ^
)e ne m'en défends pas plus que des fimples er-
reurs. Je né pds affirmer n'en avoir point
commis de telles , parce que je ne fds pas on
Ange ; mais ces fautes qu'on prétend trouver
dans mes Eaits peuvent fort bien n'y pas 6«
LETTRE.
»5
are, parce que ceux qui les y trouvent ne font
pas des Anges, non plus. Hommes & fujett
à l'enreur unfi que moi , fur quoi prétendent*
ib que leur niifon foit Farbitre de la mienne^
& que ]e îdà punif&bk pour n'avoir paspenië
comme eux?
Le public efl: donc auffi le juge de ièmbla^
Ues Suites; fon blâme en eft le feu! chitknent.
Nul ne peut fe foufbwre à ce Juge, & quant*
à-moi je n'en appelle pas. Il efl; vrai que fi le
Magifbat trouve ces fautes nuifibles il peut
défendre le Livre qui les contient ; mais je le
répeos ; il ne peut punir pour cda TAuteur
qui les a commifes; puifque ce ftroit punir un
délit qui peut être involontaire , & qu'on ner
dok punir dans le mal que la volcmtë. Ainfi ce
n'efl: point encore là ce dont il s'^t.
Mak il y a bien de la différence entre ufll
Livre qui contient des eneurs nuifibles & m
»<î P .a « M I E R E
» - • . t
Li^re pemkieioi. Des princi{>«s établis ,. 4ar
^aîne.d'ufi raifonoeiuenc iiiivi,.des cQnfëj(]uen*^
ces déduîte$ manifeflenc Tintention de FAu-
teur , & cette intention dépendant de là vo«
lonté rentre fous la jurifdiâion, des Ldix. Si
cette intention eft évidemment mauvaiiè , ce
n*eft plus erreuî: , ni faute , c'eft crime j ici
tout change» Il ne s'agit plus d'une difpute
littéraire dont le public juge félon la rmfon»
niais d'un procès criminel qui doit être* jugé
dans les Tribunaux félon toute la rigueur des
Loix ; telle eft la pofitiôn critique où m'ont
jnis dës;Magiftrats qui fe difent juftes , & des
ËcrivaÎQs zélés qui les trouvent trop démens.
Sitôt qu'on m'apprête des prifons , des bour-
reaux , des chaîpes •, quiconque m'accufe efl:
Un délateur ; il fait qu'il n'attaque pas feule«
^lent l'Auteur mais l'homme, iJ fait que ce
qu il
r. L E T T. a: E. : if
qull ^çrît peut influer fiJr mon fort (g) ; cfc
tfeft plos àma feule réputation qu^if eh veut,
^'eftà moirhorinèûr à ma liberté, à' ma yîe. •
• Cçci ^ Monfîeur , nous ramené tout d*un
coup à Vétat de la queftiqn^ dont il me p«ok
que le public s'écarte. Si 'j'ai' écrit des diofëi
téprékctûhlét on peut m'isb blâmer , on peut
fuftpr&ner le livbe. Mais pour. le ilétrir, pbui
(3) îl y a quelques ahnées qu'à la pre.inîçre.îip*
pârJQiwi 'd*uii Livre céleire'-je*Wt6bs d'en âttatjuèt
les pîinciiies , que je trouvais dangereux. J*ex^*
tois cet!é eritreprîfe quand^j appris que l'Auteur é-
toit pottffUii^i^. , A rinfl9fn;i/} jetcai mes feuilles^ aa
feu , jugeant qu'aucun devoir ne. pouvoit autorifer
la baffeffe^-d» * s'unir â 'la-'fdùlé poui' atfcîiWer M
hoornie d'boqoeur. opprimé.,, .«^uand tout fut l^cifiÂ
j'eus occafîon de dirV mon fentîment fur le mémo
fujet dan» d'autrts Ecria ;[ mais- je Hi Ht faftà Mitl«*
mer le Livre ni l'Auteur. J'ai cru devoir ajoiitcr ce
refpeâ pour fon malheur à l'eftime que j'eus *t6u«
iouis ipxuirjii perfosme. J^ Aie^p^ p^oint'gue catte
façon de flenrer me (bit particulfere ; elle eft com*
munêàtoik les' hqtitfÉt¥s gôÉs^^^Sitôt qu'une affairé
eft portée s^u criminel, ils doivent fe ^aLre, ^ raoîM,
qu'ils ne îbfent ap^Êli'és pour" tétàoîgner.
18 P E £ M t £ R £
A'i^tt^uer ^tibmieiletnent ,il fitot phis ; h F»i«
jEe^nr fiiffît pas, il£mt un déGt, un crime; il
faiiti|aé f aye écrit à 2naiivai& imaéntion an Li^*
^pn permdeox » ôc que cela foit prouvé > Don
liomme isn . Autéuf prouve qu'un autre Aoteilr
ié ttonape » mais comme un accuTaceur doit
fpenvakicre devant Je Juge raccuféé Poar être
tmseé comme un maifdtéur il faut ^qiie :je:fois
convaincu de îêtre. CdH la première ^ueftion
^'iLs'agitd'e3Çaminb*...La&ço&(|ei m&çipch
f^ftt lé délit conltaté , éft d*en fixer là nature.,
It: liep cà 9 a éûéidommif^, lé oribùnal ^ui doit
^ juger» la Loi qui jle condanne, :^ la p^'ne
^uî doit le punir. Ces deux quejftionis une fois
• •• ...
.-. ... < ->•. ..- ---•-
lâobies décideront fi j:aî été traité jaftement
• • • I
* . . • . . ■ - ' ■
ou non., .. ..,. ..„. ,, . .
aPoar favoîr fifaî^écrk desLîvrès^fernîcîétnt
il faut «n^xaiiikierkf principes ; <& :\toir ce
qu*il eh téfulteroit fi ces principes étoient'ad-
mis. Comme j'ai ttaité beaucoup deVoàdeies^
LETTRE. ip
je dois me refixaindre à celles fur leTquelIes
3Ç fuis pourfuivi , favoîr , la Religion & le
Gouvernement. Commentons par le premier
article , à l'exemple des juges «jui ne fe font
pas expliqués, fur le fécond. "
On trouve dans TËmile la profefCon de foi
d*un Prêtre Catholique, & dans l'Héloïfe celle
d'une femme dévote : Ces deux Pièces s'accor«
dent aÔèz ppur qu'on piûiTe expliquer Tune par
l'autre^ & de cet accord on peut préfumer a-
vec qadque .yraifemblance que fi l'Auteur qui
a publié .les. Livres où elles font contenues ne
les adopte pas en entier l'une & l'autre , da
moins il les favorife beaucoup. De ces deux
profeffions de foi, la première étant la plus é-
tendue ^ la. feule où l'on ait trouvé le corps
du délit y doit être examinée par préférence.
Cet examen, pour aller à fon but, rend en-
core un éda^ciflèment néoeflkire. Car remar-
B a
}^W P R E M I E R ^
^uez bien qu'ëchircii^ & diftingder ki prcv.
pondons que brouillent &' confondent mes
âccufaceurs , c'efl leur répondre. Comme îb
difj)utènr contre l'^videticc, quafldla que&'
çion eft bien pofée, ils font réfhtés. *
Je diftingue dans là Religion deux jiartîes ,
butre • la forme du culte , qui n*efl: qu'un céré-
inonial. (3es deux parties font le dogme & la
morale. Je divilè les dogmes encore en deut
parties ; favoir, ceHequî poftnt les principes
•' ...
de nos devoirs fert de bafe à là morale , Ôt
•celle qui , purement de foi , ne contient qufc
des dogmes fpéculatifs.
De cette divifion , qui me paroit exafte ,
>éfu!tê celle des fentknens fiir la Religion
• r
' 4'une part en vrais faux ou douteux^ & de.
^Fautre en bons mauvais ou indifiërëns. -^
Le jugement des premiers appartient à ïs^
' iraifon feule , & H les ThéoIogien^Ven font eâi«
parés, c'eft con^e î^fifbnneursj ç*cft çomç^t^
4 * * .
LE T T R E. M
piofeileurs de la fcîenoe par laquelle on par-
vient à la connoifTânce idu rfai & du faux en
laatiere de foi. Si Terreur .'en cecte partie e^:
nuifible , c'eft feulement à ceux qui errent , ^
jc'eft lèalement un préjù^jœ pour la vie à" ve-
nir fur laquelle les Tribunaux humains ne' peu-
vent étendre leur compétôice. Lôrlqu'ils con-
noifTent de cette matière, ce n'eft plus comme
Juges du vrai & du faux , mais comme Mi-
mfbres des Loix civiles qui règlent la formp
extérieure dii culte : il ne s*agit pas dicore ici
de cette partie ; il en fera traité ci-apràs.
Quaqt à la partie de h Religion qui regarr
de la morale , c'elt-à-dire , la jullice , le bie^
public, l'obéif&nce aux Loix natuf elles Se pOr
fitives , les vertus fociales & tous les devoir^ '
de rhomme & du Citoyen , il appartient au
Gouvernement . d'en connoître : c'efl: en ce
point j(!eul que la Religion rencrç direclement
B3
M P R E^ M I E R E
' Ibus fa jarifdiélion y & qu'il doit bannir , non
rerreur ^ dont il n'eft pas jage , mais tout fen*
ciment fiuiflble qui tsend à couper le noeud fo*
dal
Voila, Monfietffi la didinflîon que vous a-
vez à faire pour juger de cette Pièce , portée
au Tribune ^ non des Prêtres , mais des Ma-
giffarats. J'avoue qu'elle n'eft pas toute aflEr-^
mative. On y voit des obje^ions de des dou*
tes. Pofonsy ce qifi n'eftpas, que ces doutes
foient des négations^ Mais elle eH affirmative
dans fa plu; grande partie j elle eft affirmative
& démondrative fur tous les points fondanten^
taux de la Religion dvile ; elle eft tellement
décifive fur tout ce qtti tient à la Providence
étemelle, à famour dq prochain, à la juftice,
à la pa^z , au bonheur des hommes, aux Loîx
de la fociétéi à toutes les vmus, que les ob-
Jeâions les doutes mêmes y ûAt pQitf objei
^ ».
LETTRE. ij
qodqôe avaDitage, & |e défie qu'on m'y tncm-i
txe un feul point de doârine attaqué que jeiiè*
prouve être nwTùk dxa hommes ou par lui*,
même ou par Tes inévitables effets.
La Religion eft utile & nf^thc nécef&ire
aux Peuples. Cela n*eft«il pas dit fqatenu prou^
vé dans ce même Ecrit ? Loin d'attaquer les
▼lais prind^ de la Religion» l'Auteur les po»
le tes affermit de tout: fon pouvoir; ce qu'il at-'
taque, ce qu'il combat, ce qu'il doit combat*
tre, c'eft le fanatifme aveugle , la fuperftitiga
«
cmelle , le ftupîde préjugé. Mois il faut , di«
iènt-ils , lêfpeéler tout cela. Mais pourquoi 9
Fiirce que c'efl: ainû qu'on mené les Peuplei.
Oui , c'eft ainfî qu'on les mené k leur perte*
La ruperflition efl; le plus terrible lléau du gqi*
te hnniam ; elle abbratic les finales , elle per*
Skabs. les fages, elle endiaîoe les Natioos, el«
]e ûic pv tout cent maox effîroyables :. <jf¥i
B4
14 P R ^E Al I E a E
bien fait^dle ? Aucan^ fi eOe en fàic^ c*eft aux
Tyrans; elle efl: ieui: arme la plus terrible , &
cela même eft le plus* grand mal qa^eUe ait
jamais fait.
^ Ils difenc qu^en attaquant la fuperftttion je
veux détruire la Religion même: comment le
fevent-ils ? Poafqubi confondent- ils ces deux
eaufes, que je diftingue avec tant de foin?
Gomment ne voyent-ils point que cette impu-
tatiôn réfléchit contre eux dans toute ùl force,
& que la Religion n'a point d'ennemis plu&
terribles que les défenfeurs de la fupèrdicion?
SI feroit bien cruel qu'il fut fi aifé d'inculper
llntention d'un homme , quand il eil (i diffici-
le de la juftifier. Par cela .même qu'il n'eft pas
prouvé qu'elle efl mauvaife , on la doit juger
bcMinc. Autrement qui pdurroît être à l'abri*
des jiigemens arbitraires de fes ennemis? Quoi!
leur iknpie affirmation fait preuve de ce qu'ils
Li E: T T R' E; 1 ty,
tte peuvent (avoir,. & la mienne , jointe à tou-:
te iiia conduite ^ n'établit point mésf proprest
fentimens? Quel moyen me refte donc de.'kt;
faire connoître? tiebien gae je lênsdans mon
cœar je ne puis Je montrer, je Fevoue ; maii
quel efl Thomme abominable qui s'de vanter
d^y voir le mal qui n'y fut jamais? .1
Plus on feroit coupable de prêcher rirreE*.
gion , dit très bien M. d'AIembert , plus il eft:
crimind d'en* accufer ceux qui ne la prêchent
' pas en effet. Ceux qui jugent publiquement
de mon Cliriftianifme montrent feulement Ye^.
pece du leur , ôc la feule cliofe qu'ife ont prou-
vée eft qu'eux & moi n'avons pas la même
Religion. Voila précifément ce qui jes fâche:
on Jknt que le mol prétendu les aigrit moina
que le b^en même. Ce bien qu'ils font forcés
de trouver dans mes Ëcxits les dépité & lest
gêne ; réduits à le tourner en mal encore , ily
B s
y
ta PREMIERE
■
I
Tentent qa'Ss fe décôovitnt trop. . Cand>icii 3ft
feroîent pku à letur sâSc û: c^ Jbka n^j éloît
pas! « ' : • ' i
(^and onJQe xne juge pfûbt for oe que f a|
ikf mais fur âe qu'on afihre qiie j'ai voulu di*
re , quand on dieithe dui me$ imenomt |e
niai qui n'eft .pas. dani inësEcriti» qae poisrje
Ëdce? Iktlàœittent nies dtfcours par mes pen-
fies ; qu^nd j'ai dit blanc ils aflSraient que j'ai
voulu dire noir ; ils fe mettent k h flàct dtf
Dieu pour faire l'œuvre du Dîable; comment
dérober ma âte à des cdqps portés de fi haut?
Poâr prouver que F Auteur n'a point aa
Fhorrible intention qu'ils, lui prêtent je ne voit
qu'un moyen ; c'eft d'en juger fur l'Ouvrage^
Ah! qu*on en juge ainfi, j'y coniêns; mais^
cette tâche n*êit pas la mienne, & un exa*
tnen fuivî fous te point de vue feroit dé tadk
part une indignité. JNfon, MoDûeur^ il d'j9
il E T T R E, .2^
tu malbear m iléoriflûie qui poHIènt ne rédiu«
le àc^e abj6£tk>n. Je croiroîs ouçrager FAo-
teur l'Editeur le LeCleur même) par une judi-
fication d'aôciat plus honteufe qu'elle eft plus
fadle ; c'efl; dégrader la ^eaxi que montra
qu'efle fl'eft pas un crime; c'eft obicurcir Tévj^
dence que prouver qu'elle efl: la vérité. Non,
lîfez &' juges >^ous-même« Malheur à vous, fi,
durant cette leâure, votre cœur ne bénit psis
cent fois l'homme vertueuK & ferme qui ofe
inftruire ainfî les humainsi
Eh ! comment me ré(btidrois - je à juftifier
«
cet ouvrage? moi qui crois efl&cer par lui les
iàutes de ma vie entière;, moi qui mets les
maux qu'il m'attire en compenfadbn de cerne
que j'ai faits, moi qui, plein de confiance e&
père un jour dire au Juge Suprême: daigne jii«
gpc dans ta clémence un homme^ foible ; j'û
fâîc le mal fur la terre, mais jai publié cet £*
âit«
28 PU É M ï E A E
- Mon cher Monfieor , permettez à mon corar
gonflé d'exhaler de cems en cems Tes foupirs;
mais fbyeSs fur que dans me$ difcuffions je ne
'mBeraî ni déclamations ^ m . plaintes. 'Je n'y
'tnettraî pas même la vivacité de mes adverfaî*
tes ; je raifonnerai toujoars de làng • froid. Je
reviens donc.
Tâchons de prendre un milieu qui vous ïk-
tîsfafîe, & qui ne m'aviliiTe pas. Suppofons un
moment la prcrfeffion de foi du Vicaire adop-
tée en un coin du monde Chrétien , & voyons
ce qu'il en réfulteroit en bien & en mal. Ce
ne fbra ni Tattaquer ni la défendre; ce fera la
juger parfes effets.
Je vois d'abord les chofes les plus nouvelles
fans aucune apparence de nouveauté ; nul chan*
gêment dans le culte & de grands changement
dans les cœurs, des converfions fans édat , de
|a foi fans di/pute, du zèle fans fanatifme, de
,î. ^P T T R E. tjf
la Faifon fans impiété , peu, de. dogmes &
beaacQup:de vertus , la tolérance du philofo-
phe & la c)i^ké du Chrétiço*
« . Nos prçfét^tes auront deux, r^es de foî
ij\» tf^ ïm a^vWe , h j^op .& rEvangile;
la feQoode. ^rad-aittont pluf inuDuable qu'elle
ne k {oï^&iaL que fui la première , & nulle-
ment fur cmains faits 9 lc|%iels ayant befoin
d'être attefté^gr^^a^^mettent Ja Beligion fous Vvx-
•m • • ' «
torité des ,ljpmni€;s. , ; ^; ,^; . ^
:^ Toute. ht; <ftfiérence qu'jl,y.,anra. d*cipc aux
autres Ç|ir4^itf^^qu6,9eux^:i<»Qtdes gens
qui difp9tçi^t ; beaucoup f^ rÇyangile fans ie
fbucier de le pratiquer, au lieu qu&nos gei^
s*attadier(âit beaacoj4p à Jajoatiqae , & ne
..Quand les Chrétiens dfiputeurs . viendront
leur dire. Vous vous dites.Chrétiens fans T^-
tre ; car pour être. Chrétiens, il faut aoire. es
|<3 P*k -E M ï Ê k E
^éfûs - Ohrifl: , ôc vous n'y cfoyéz point ; kâ
âirétîens paifSbiea leur répcmâront : . ,5 Noué
,, ne favons p» bien (1 nous CFoy.ons en jd^
• -,
^;, fus i (Siiiflr ciËhs votre idée , parce que hous
*yi ne f encent^iis pas. Mai^nonû actions d'ob^^
-3, ferver ce ^u- îî iaoas prèffcrk - î^oïw fàmmea
» - •
3; C^rétiens-;^ cfaactins à notre iHaniere , hous
',; en gardatitla parole,' & vbuse&'-tafoyaïît eà
Vi lui. Sa c&crîté Veut que no«s foycmé tôi»
,, frères, nous la fuîvons en vous admettant
\y pour tclafy poïr fàmour de hiî hè nous ôtez
' » 'i * •
^,7paf trti'tître^ue nous honorons de toutet
'yl tios^ forcés^ & qui nous et auiS cher cp^
V>i«)W.^^- -
"' Les Chrétiens ^difputeurs înfîfteront 4àns dou*
te. En vous renommant de Jéftts 3 faudrok
inôus dire à'^el titre? Vous' fixiez, dites*
, . " •«••..•» - ^ .« ^
vous , fa îwffble , mais quéîfe iautorité' luî' don*
inez^ vous ? Reconnoiflêz • vous ]i Kéiréhtion ?
• 1/ E' T f R É. fi
^^la reoonnoiflfez-vons pas? Admettez -vom
t£\rangile en entier , ne fadmettez- vous ^'en,
partie? Sm quoi fohdez-vous ces diftinâions?
Hàifaûs Clirétiens , qui marchandent avec k
tûAvct , qui chcffîflent dans fa doftrîne ce qu^il
leur plak d'admettre & de rejettéH
A cela les antres diront paifiiâement „Met
\y frères , nons ne marchandons point ; car
^y notre foi n'eR pas uq commerce : Vous iup»
^ poÊz quHl dépend de nous d'admettre ou de
)î rejetter €omme il nous plait ; tirais cda n*eft
„ pas, i& notre taifon n*obéit point à notre
,, volonté. Nous aurions beau vouloir que ce
,1 qd nous paroit faux nous parut vrai , il
^ nous paroitroit faux malgré ncbs. Tout ce
^, qui d^nâ de neus efl de parler febn notro
• • •
yi penfêe du contre notre penfôé, & nôtre feul
i, Cîime eft de ne vouloir pat vous trompers
^ Nous recionnoiflcns Taucorité de Jéfù»#
f *
^, Chrift jt ^parce que notre intelligence jaçfuîrf»
;y, ce à i^s pcéçepces & nou;, en décbuvççf h
*.^, fabUç^ût^j ^^Içrnous f^^^q^-irconyient: aux
^, hommes; ^fuivreces;précept;e^ 9 maiff;q)i^ir
j,,. iétoît. an deflus d'eux ^d^ le^.trppverj J^Ious
admettons Ja Révélation icoinsne. émanée .de
• ««. ■
»5
3,- l'Erçrit de Diéa, faps.ç? ^vj^ir la. maître,
,^, ^&.f^,;ioiis tourniençet: pour. J?. découvrir^
^ pouryji que., nous làçhi(mS;qRe-^pieïi a^^I^
3,, -peu 410US. ançorçe : d; expliquer içopraent il
,, «*y efl; pri$,pour fe faire entendre. , iAànfi:re-
^, connoiilknt dans r£yaQsile.F<^itq3;ité divir
.,, ne, nous croyons Jéfus-CIyrift; revêtu de cet-
^ teautorité ; nous reconnoii^s une Verti)
plus qu'humaine dans^ fa conduite , ,&,unç
fageffe plus qu'humaine > dans, fes leçons.
j, Voila ce qui efl bien décjdp pour nous,
p Comment çe^ s'eft-ijfjsiit ?: Voila ce qui. ne
^ l'ed pas ; cela nous paffe. Cela ne vous paf*
.^ fe
LETTRE. If
«
^ fepas, vouk; àlabdoÉe heuifc; noos vous
y, enfélicîcoDidetoutJioaeJcœttr. Votre fai«
^, fcHi peut être (Upérkoipe à la nôtre; mais ce
,» n'eft pa^^à dire'/iu^ëlli doive noua ficvir. de
„ Loi. Nou$ coDiêotQM . ^ue vou3 iachîes
,, .tout ; ipâSîez que nousi^norioai ^ue^oe
91 ViH}$ noiv dëfostààa û ntm ^admettons
), tout r£vsu3i^ ; nciua\j3d»àto]is tons Içs
„ eoiei^emeqfi qu'a doitfié Jéâu-ChrifL LV
„ tilk^ b nécefliléde la plupart de ces.enfei^
n gnemena nous firape 4c .noua tâchons do
I, nous y ccofiomi^. Qufi;)ques-uns ne fi}qc
„ pas^'OOcte portée ; Us obt été donnés. £u^
}> doute p0ur dct effrita plu3 . intelligens qu^
D nous. Nous ne croyons point avoir atteint
), les], limi^s de la. raifcxi hootaîne , & les
„ hommes .^ui[ pénétrans ont befoin de pré»
Il cq)tçs pîus étevél. ; :
Partii L C
34 ^ R Ë; M t E H Ë
r ^, Beaocoqp de (^ofeiB dan& TEvaDgite pû£*
^ ieût notre nûioti , & même la choquent i
^j nous ne lès rèjetcons pourtant {tôs. CoiX"
^ vBÎnçurde la f<âbkfle de notre entende-
^ xhent 9 nous favons relj^âer ce que nous
^ ne pouvons concevoir , quand l'afibciatiott
I j de ce que nous concevons nous le fait ju*
;^' ger {teneur à nos lumierei. Tout ce qui
^ laiM eft néodOËdre k favoir ifour être faints
3^ dons parait clair-dam l'Evangile } qu'avons^
i^.nous befbitf d'isncendre le refie? iSur ce
jj peint nous dânéurerons ignomitt mais ex»
yj easpts d'iorrettr» ^ n<>us n'en fèrcMs pas
^, ilioans gens de bien ; cette has^Ue réftrve
9, eUe^même èft f ^prit de rSvangSe.
j^ Nous ne refpe^ns pas prédféinent cm
1^ Livre. Sacré: câbttie Livre, 'mais comme h
1, parole & k vie^de Jëfus- Chtâl. '^ Le cai^c^
ly tere de vérité de fageffe d^de .l^teté ^^hI
r
Lettre. sj
*
y^ s'y trooVe nous apphend qiie cecte hîftoire
), n'a {te été d&ncîellement altérée (4) , mm
}n il n'eft pas déMbutté pour nous qu'elle ne
,i Tait pomt été du tout; - (^ui fait fi les cha»
li &s que nous h*y ciMiprenoos pas ae ibat
9, point des Ëiutes glifSeir dans le tekte ? Qui
^ ait il des Difciples fi fort itaférieurs à leur
M maîoerdnc bien- (Ct^i^ffic & bieb raida par
M tout j? Nmt ne iëaiddiK |)b^ là-ddil»!
i> nous ne préfutnons psis èifitoe ; '^ IM)Ù6 ne
j> vdus ptbpofràà di» âMje6^ que parod
), que tHïus Fexigc& .
5, îf oas poo^oiai noss ttioËiper da&s Ilot
fi jdées^ irais vous p^i^e£ suffi vous tromper
fy dans les ^Skte$. FâWquoî he le pourries^
pW*
• ^ '
(4) Oh en feraient les fiinpies fidellcs^ fi l'on
ne poiiVoit Avoir cela que par des difculCons de
critique, ou 4)^ l'autorité . diw Eafteurs ? Dp quel
front DÎe^t-on faire dépendre la foi de tant de fden«
^ ou de tant <le fioms^ofit
C a
,3<5 PREMIERE
^) V0U3 pas étant hommes? Vous pdovez avour
jj autant; de bonne foi que nous , msàs vouf
,9 n^n (auriez avoir (bvantugé : . voiâ pouvez
,, être plus éclairés , mais vous n'êtespâsin^
9, £sLiIlibIes. Qui jugera donc entre les deux
5, partis ? feta^ce .vous ? cela tf eft pas jufte,
,^ Bien mcfinsfèrarç^aoBs^UÎ iloesxfâions fi
^ fon -de nous --nilfte». Laîfloiw/donc «ette
^ décifionau juge.conmiUQ qui nous 'entend^
»i^ p^ue nou$ibini|ies d'accord fur les re-^
^ g^s 4e nos dgfvôirsj réciproques , fupportezr
jy nous fur le refle, comnje. nous[ vous -fu^port^
5>,,tpQS,: Sayoni iii)]iisRM3 de prâ:,; fcqpns fre*
y, res 5 > uniirons«|ioua dans f amour: de. iiK)tr&
M. commun maître ^ dairs la.pradque âes verr
„ tus qu'il nous prefcrit. Voila ce qui fait le
5, vrai -Chrétien.
„ Que fi vous vdiis obftïnez à nous lèfufer
3, ce précieux titre; après «voir tout fait pol£l^
LETTRE. 37
^ vivre firatemellemcnt avec vous, nous noui '
,, confolerôiis de cette iDJuflîce , en fongeant
y, que les mots ne font pas les chofes , que les *
„ premiers difciples de Jéfîis ne prenoicnt
^ point le nom de Chrétiens , que le martir
,, Edenne ne le porta jamais ^ & que quand!
„ Paul fut converti à la foi de dhrîft, il n*y
„ avoiic encore aucuns Chrétiens (5) fur la
n
tene. "
Croyez- vous, Monfîeur, qu*une contrôver-
fe aînfi traitée fera fort animée & fort longue,
& qu'une des Parties ne fera pas bientôt rié* '
duite au filence quand Tautre ne voudra point'
dilputer.
Si nos Profëlytes font maîtres du pays oà ils
?ivent , ils établiront une forme de culte au(&
fimpleque leur croyance, & la Religion qui
* *
(5) Ce nom 4pur fbt donné quelques annéts a«.
fris à Actiocbe pour la première fois.
C3
s.
/^
\
/
38 PREMIERE
r^fultera de tout cela fera la plus utile auxi^
hommes par fa (implicite même. Dégagée de
tçm ce qu'ils mettent à la plaœ des vertus , &
iv'ayaut ni rites fuperftitietn: , ni fubtilitës dans
la do6lrine elle ira tqute entière à ibn vrai but.
^ui eft la pratique de nos devoirs. Les mots
de àèîiot & Sonlmà^xî y ibrcmt fans a(àge ; I^
i9on<^onie ^e certains fons articulé^ n'y fera;
pas la piété > il n*y aura d'impies que- les mé-
dums , ni de fideUes que les gens de biten. ^
Cette ii^Otîtution une fois &ite » tous feront
obl^és par les Lois; de s'y iommettre » parce
qu'elle n'eft: pokit fondée fur l'autorité des
hommes , qu'elle n'a rien qui ne foit dans for-*.
^ des lumières naturdles, qu'elle x^ contiens
m.
aucun article qui ne fe raf^rte au bien de \
ibciété , & qu'elle n'eft mêlée d'aucun dogn^
inutile à la morale ^ d'aucun ppipt de pfx^.
feéculation.
LETTRE, ^
Nos Frofélyteç feront-ils intolérans pour c6«
h? Au contraire , S$ feront tolëran$ par priiv
(dpe, ils le feront plus q(a'on ne peat récrè
dans aucune autre doâxiné, ^ifqu'ils admets
tcont toutes les bonnes Religions qui ne s'ad^
mettent pas entre elles , c'eft-à*(Ure , toutes cel«
les gui ayant l'eiFencîël qu'elles n^ligent , fot^
f e(&ncidl de ce qui ne f eft point. En s'atta^
é&mt , eux , à ce feul e&nciel , ils laifleroni
ks autres en fidre à leur gré racceflbire, j^ur*»
vu qu'ib ne le rejettent pas : ils les laiâferoni
expliquer ce qu'ils n'expliquent point , déddet
ce qa ils ne décident pouit. Us laiileroat k cha^.
0an fes~ rites I fes formules de foi, fa croyan*
ce : ils diront ; admettez avec nous les princi^
pes des devoirs de l'honmie & du Citoyen ; div
pefte, c^oyea tout ce qu'iS vous plsdra. Quant
9^ Reli^cttis qui font eflencieilement mauvais
fiet, qai portent l'homine à faire le mal , ik. vis^
C4
49 P A £ M I s R £
les toléreront point ; parce que cda même'eflr
*
contraire à la véritable tolérance , qm.n'a.poiiir
bat que la paix. du genre humain. Le vrai tô*
lérant ne* toléré point le crime , il ne tolère
aucun dogme qui t&aâô les hommes méchan$»
^ Maintenant fuppbfons au contraire, quenof
Profélytes foient fous la domination d'âutrui:
comme gens de pai^ ils ferc^t fournis aux Lois,
de leurs maîtres , même en matière de Rdi-
gion , à moins .que cette Rdigion ne fut eflen^
ciellement mauvaife ; car alors. , ians outrager
ceux qui la profeflènt , ilis refùferoîent de la
prôfefier. Ils leur diroient ; . puifque Die;M nous
appelle à la fervitude , nous voulons être de
bons ferviteurs , & vos fentimens nous empê*
çheroient de l'être ; nous connoifFons nos de^
voirs nous les aimons , nous rejettons ce qui
nous en détache; c'eft afin de vous être fidel-
les que nous n'adoptons pas la Loi de finiquitë..
Mais fi la Religion du pays eft bonne en cl-
L E -f T R E.
41
k-mêmei & qoe ce qu'elle a de mauvais Ibk
fedement dans des interprétations particufie-:
res, ou dans des dogmes purement ipéculatifs;
ils s'attadieront à l'HTenciel & toléreront le
refte , tant pa^ reQ)eâ pour les Loix^ que par
amour pour la paix. Quand ils feront appelles:
à dédarer expreffiâtâent leur croyance , ils le
feront , parce qu'il né £mt point mentir ; ils
diront au bdbin leur lentiment avec fermeté,
même avec force; Ss iê défeiidtont par la rai-
fon fi on les attaque. Du refte » ils ne diipu^'
teront point Contre leurs frères » & fkns s'ob«^
(Uner à /vouloir ks convaincre ; ils leur refte*
ront unis par la charité .^ îii s^EËfteront à leurst
affemblées, ils adopteront leurs formules, &
ne fe croyant pas plus infailliWes qu'eux , iU
fé foumettront à Tavjs du. plus gr^d [nombre »
ea ce qui A'intéreiTe pas leur cgnfcience ôç 0»
loor paroit pas importer au falat.
C5
/
4» PREMIERE
Voila Je bien, medifcs^vws^ voyons ié
maT. Il fera dît ^ peu de parole^. Dieu ne
fera plqs Torgane 4e la mëdiaoûsfié des faomn
môs. La Religion ne Êvirira pbs d'inffariirâ
à la tyrannie des geu d'Eglife & à la veq^n^
ce des ttiUrpatears j dtes ne fi;mra {^s qu'à
rendre les croyans bons & jufles ; ce n'eu pasi
là le compte de ceur^î fes mènent: c^eft pis^
pour eus q^e fi die ne Ib^oie à rien.
Ainfi donc ki doârine en qn^ion eft bon*
ne an genre humain ^ miauTaife à les oppreC-
feurs. IXns qudËfô dailb si(blblue la faut»iy[ ttieu
tre? JTai dit fidèlement le pour <& le contre;
comparez & choifKl^
Tout bien examiné , je crois c^è vous ccm-
viendrez de deux diofes : Tuite que ces hom-
mes que je iUpp(^e fe cônduîroient en ceci
très conféquemment à la profeffion de foi da
Vicaire; Taucre que cette conduite feroit noa
LETTRE. 4J.
Cernent iiréprochabk mais vraiment chré»
ùenne , S( qu'on' aocoit txatt de rsfbfer à ce(
bcimnes bons & piçux le nom de Qirétiens)
pui%iHls le mériteroient parfaitement par leur
çcmdiûte, â^ qu'ib feroîaiit moine 'oppo(%(*
paivleors fbndmens à beaaooiq^ -de ft^s qui le
prennent & à qui on ne le diipwte' |iai, que
pluGeurs de ces mêmes feâes ne font oppoféei;
entre elleft, Ce ne feroîent pas , Q l'on vpai^
4es Chrétiens à la mode de Saint Caitf qui étCHt
çatureBemtent perfécqteur , à^ qa| n'avoit pa$
entendu Jéfus - Cbrifl; lui-même; mai» ce Ç>
roient dies Chrétiens à la mode^ de> Saint Ja-
ques, dioifi par le maître* en perfbnne & qui
avoit reçu de fa propre bouche les^ inftruâions.
quffl nous tra^fmet. Tout ce raifonnement el^
bien (impie ^ mais il me paroit c<Hicluant.
Vous me demanderez peut-être comment
pn peut accorder cette do£bine avec ceDe
4'un homme qui dit que l'Evangile eft abfurde
'44.> PREMIERE
& pemideux i la ibdété ? En avouant fran«
ehenient que cet accord me psroit difficile , j^
TOUS demanderai à mon tour où efl: cet hom«
me qui dit que TEvangile efl; abiurde & perni*
deux ? Vos Meffieiirs .m*accu(ènt de TavcNU*
dit; & où?. Dans le ConiraSt Social au Chapî^
cre de, la Refigîon dvile. Void qui efl: fingii*
lier ! Dans ce même Livre &, dans ce même
Chapitre je penfe avoir dit précifément le con-
traire: je pei^eiavoir dit que l'Evangile efl: fu*
blime & le plus fort lien de la fociété (6). Je
ne veux pas taxer ces MelSeurs de menfbnge ;
mais avouez que deux propofitions il contraî-
fies dans le même livre & dans le même Cha*
pitre doivent faire un tout bien extravagaint.
. N'y anroit • il point ici qudque nouvelle é«
quiyoque» à la faveur de laqudle on me rendit
' (is) ContraÔ Social L. IV. Chap. 8. p. 3X0* 31 r^
jk TËdition in 8«
«.
t É t T s. Ë. 4^
(las «coupable oa pin» fou que je he-fiûs? Ce
fnot de Société préfente un fens on peu vagiie:
il y a dlans le rnoodé des focîétib de bien (fes
fertes , & il n^éft pas impoffîblé que (^ qui fert
à l'une naife à Tautre. Voyons : la méthode fit-*
vorîte de mes aggrefleurs- eft tonjours d'offrir
avec atcdes idées iddéteminées ; continuon»
pour toute réponfe à tâcher de les fixer.
Le Chapitre dont je parle eft deftiné,^ com*'^
me on le voit par le titre » à escaminer coni^
aient les inftitudonrreligieufes^ peiîvent entrer
dans la êon&itiimn' de: l'Etat. Ainfi ce dont il
s'agit ici n'eft point de confidérer les Rieli«
^ons comme vràyes ou fauilb» ni mêAie côtn-
wc bonnes oa mauvraifes en eOes^xiêmes , maîa
de les confidérer tmiquement par liecM^ rapports
aux corps politiques , & comme paAies de la
Légîflation.
Dans cette vue, l'Auteur fait voir que to^
4<f i» R É M t le R Ê
fippropriéçK ieiçarp0rée& àl'Euc , & formant
la bafé ouda sxKiins faîTont partie da Syftêoft
}«e C^iâtàmtbé , au coutnikë i j:^ d«M
fba priocipe une Rel^ku» umTàfdte , 911 n'a
rien d'evdi^j; rfen de k)cal> rien de propnl
k-tà p2LjspkL0t qu'k tel autre» Son àif/in Aa^
teur eqé^a^QiiitC ég^enieai tw
ibw ia Ghsrité lant homcsr^.e&'véàti iever :1*
banrielje ^ fêj^rok lea^ Nadons , & réatàt
0Qf }e senr$. htimain dans uni peuple de fre«
JÊ^ : Aair^^ t^te Naîon cehù qui M crainte &,
^ le Vérkièle efpiit^de l'Evangila
Ceux dMie wi ont voulu &ifô du
••rtk«Ml|P«B«M
(7) Aft. X. 35.
• L É t ï ft Ë. i}
tahiQ une Rd^fi fiaé^iûale & Vb&toêaàtt
oâtBtne ptffdë cooftîtudve dans le fydbême <k
ia Légiflafioli ^ ont fait pair là dtex fautes,
baffîbles, Fisneà la Religion, &¥wLtxQk}*E^
tat. Us fé foht édriéi de.Fefprît de. Jéfiii*
ChrlA: dont'le iegne n^^ pas de ce monde , Se
tûêlànt aux intérêts terrefbei ceux de la Relî^
ffon y Ils ont foofflé la pûrétéxélèfte , ils ei
ont Eût Fainne dâé Tyrans & Tinffaiiitient dèl
pérfécuieurSi Bs n^ont pas Qioins Meflë \à
faines maximes de la politiqoè ^ puifqu^ao lie&
defimplifirf la madune du 6oatreniêxïient /À
l^oÂt cômpofôe, îIb M'ont donné des re0bit|
ëtrai^rs ftperfius ^ & rafibjedilânt à deok
mobiles différens , foulent cot^traires , ils onè
.... .'- »»«
cssiTéles drailletnens qu'on fêtit dans tous les
États chrâiens où Pbn a fait entrer la Rdf-
*
gio& dans W lyftême poliiîqaè.
Le paifint ChrifttaniTnie eft rînftimtion f<»
48 P H B W I Ç. R E
çiale univerfelle; maisppur fnontrer qu'il ii*c^
poiat un écaI)Mîni^c {^l^aue:^ qa'il nç
concourt poinc aux bonn^^ ^nftk^dons pâûrti*
iOEdieres, ilivHpîtôcer 1^ Sophirn^s de ceiiii
qui mêlent la-Reli^n à toat , conmie ijpie p^«
iê a^ec laquelle,^ il^ s'emparent de ^toUt, *T<3ii»
les établifiêinçns humain^ fypt fondés iur Its
I
pailipns ; ^maii^es. «^ feconferv^t par eO^^
ce.qçi <X)2):^tKat & )|étruit les paflipcff.n'eft doaç
j^as propre àfqrtifkr çes^^taUffTezijenSi Com^
inept; ce <]w4éçac(ie les ccqurs de la terre noiis
jlipnneroitTi^pIas.dlintérécpour qui s*y foît^
icommeitt ce\q^.iiqus occupe uniquement d*Uf
^ autre Fam^iiwsa^ ^avantage à
jp^Qe^ci?,
^ Les RdtgÎQiis^'i^tîonnales fof^t^^ TE*
tac comme, parties de f^ conflitution , cela ^
tnconteftable ; mais eDes font nuifiblçs au Geo*
• *• * *
1^ humain, & même à l'Etat dgn un antre
fens:
L Ê T t R E» * 4^
fens: j'ai montré comment & pourquoi.
Le Chriftianirme » au contraire » rendant les
hommes juHes modérés amis de la paix , eft
très avantageux à la fociété générale ; mais il
énerve la force du reflbrt politique » il comi-
y&qvLt les niouvemens de la machine» il rompt
i'unicé du corps moral , & ne loi étant pas air*
fez approprié il faut qu'il dégénère ou qu'il d^
meure ime pièce étrango^ & embarrailante.
Voila donc un préjudice & des inconvéniâw
des deux côtés relativement au corps poIiti*«
que. Cependant il importe que FËtat ne foie
pas (ans Religion , & cela importe par des rai-
fons graves , fur lefquelies j!ai par tout forte*
ment ii^Ulé : mais il vaudroit mieux aoicore
n'en point avoir , que d'en avoir une barbare
Sl perfécut^e t]ui, tyrannifant les Loix^ mêr^
mes , Gonuarieroit les devoirs du Citoyen. Qa
àkok que tout ce qui s'ed pftfTé dans Genève.
Farttc I. D
r'50 PREMIERE
à mon ëgarcTtfeftïaît que povk établir ce Cha-
' jiîcre en exemple , pour prouver pair ma pro-
fh-ô hîftoii^e que j^ai très bien îspfonrté.
• -Qtfe doit faire un fige L^îflateur dans cet*
' te tdternatîve ? • Dé deux chofès Tune. La pre-
-iniëf è , d^tablif tme RdîgKMi purement dvi-
lie , ^dins laquelle tenfermaht Tes dogmes fonda-
iîàûtiûk der toute bôni^ Rel%ion , tous les
dogAîiés Vnomëntiiidles'à fe focîécé, (ok uni-
Vetfélle foît ^particulière 5 îl bmétte tous Jes au-
ffefî^iiî péu^eiit importera fe foi ^ ^nâSs ùuHte-
ttiéit tiu bien terJèfhre , unique objet .de la -Lé*
'gifléibnr'icar-cbinirient.te «ïyftère cle- là TH.
Mté , pst'éxstài^h>y pinit-il tïofleburk à Ib.bon- '
ne cddO&dûtiii iiêVmi,'eii'ijëoVù>s iWnfttréâ
i^iroiit- 9s htëOlë^ ^éôyéi^ qinh^ il» ^fif ùk
^It^^Ie Wrifé'des borinei ttu«¥ës ^ ^ ^ile
f^i^ ail Hèn -dé lâifc^été -dvile 'lè>âdgtne da
fô^ une iimàtxitiôh de pàià') qui île voit que le
Chriftianifhie dogmatique oa théologiquè é(!t\
pst la* i&3tituâë'&' fcBlbunté de fès dogntef»
jtirtoiit' pair IHsBHgaitibn der les admettre-, on
diamp de bataille tda|Dàrs * ouvert ééttre- lei
hoiiMs ,'Sicéii &n qu'à- fbice d'icterpréta»
êcfàk âè-àè dëdîfidàs' otj- pinOt; privetixt dd'
ÀôâvéOià difputés ftr lés ddâdods mêmes^
ïi:mVré- eàpéSéat eft- dèlaiflêr le Clèiltia^'
trifliié tie! qtt'S eft datâ-fbit v^table éT^rit , 1î«*
bt^, dîig^ë'de £baf lidiê dé daky ùài autre-
obligation que celle de la confcience , uns aa«
tre gêne daoj ksâognm que les mœan' & leg
LouL La' Rdigioû Clèiàienne eft , par la pu«
reeé de famoiale» toajours' bonne & faine dani*
«
rStat , pourvu qu'on n'en fafle pas une partie
de fit cotifHtUtîon^ poilh^ qu'elle y fok admî-
le uniqsânent comme Région , ftntiment , '
ppînion , croyance ; maïs comme Loi poVJr
çz P R Ê M I E R E
que, le Chridianifine'dogmatîque efl: un niai>
vas itabliflement. , ,
. Telle eft, Mcmfienr , la plus forte cotifé^
qaence qu'on puiiZe ticer de ce Chapitre, où ^
bien loin de taxer le pur Evangile (8) detre
pernicieux à la fodété , je le trouve , eo quel-
qii^ Ibtte^ trop fbcîablç , ^ enibraffimc trop tout
le genre humain pour une Légjilation ^ui doit
êve e:^ufive ; infpiranc Thuroanité plutôt ^e
le .patriocifme , & tendaxxt k former des honv
mes plutôt que des Citoyens (9). Si je me fuis
(8) Lettres écrites de la Campagne p. 30.
(9)C*eft merveîite détoir. raiïbrtiment de beaux'-
fentimcDs qu'oruva nous entaiTant dans les Livres:
Il ne faut pour cela que de$ mots, & lés vertus en
pApler ne coûtent gueres; mais jelles ne s'âgeûcènt
pas tout-à-fait ainfî dans le cœur de Thomme, & il
y a loin des peintures aux réaKtés. -Le patriocîfine
& rhumanité font, par eiemple, deux vertus in-
compàtibres dans leur énergie, & furtout chez.ua
peuple, entier. Lq Légiflateur qui les voudra toutes^
deux n'obtiendra ni l'une ni l'autre : cet accord ne
• • • « «
$"M jamais vu 5. îl ne fe vçrrà jamais, çarcc qutt '
LETTRE.
53
trompé j*aî fait une erreur en politique, mais
où eft mon impiété f
La fcîence du falut & celle du Gouverne-
ment font très diflFérentes j voubîr que la prc-
imere embraffe tout efl un fanaLtifme de petit
elprit ; c*efl: penfer comme les Alchymîftes ,
iqui dans l'art de faire de For veyent auffi 1)
médecine univerfeUe , bu comme les Maho-
métans qui prétendent trouver toutes les fcîen-
ces dans TAlcoran. La doftrine de FEvangile
li'a qifun objet j c'elld'appfeller & fau ver tous
les hommes ; leur liberté , leur bien - être îcî«>
bas n*y entre pour rien, Jefus IX dit mille fois.
Mêler à cet objet 'de$ vues terreflres, c*efl: al-
térer fa fimplicîté fublime , c*efl: fouiller fa
fainteté par des intérêts humains : c'efk cela
<|ui efl vraim£;nt: ime impiété.
>«iw«ta
eft coDitraîre à la nature , & qu'on ne peut donner
dcuz objets à la même paiSon*
D3
\ PREMIERE
Ces. diftinftîoDs ibnc de tous teins éta^Uea*
On ne les a confondues gue poift moiXeuI, ^
dçmt des In(Htuti^ natiçxwalcs la R€^|ion
Chrétîenoe , j|e Téç^îlis la meilleure j{Qur 4c
genre humain.. X.'4îf tW .de TE^prît des l^oî^:
a fait plus; il a dit.gucja mufulman^ étoijt ]^
meilleure pour les contrées aHatjqueç, JQ rai;
^* .',♦« < . -' ».*.'• ^« • »** i« .•-- • «
fonnoit.en politigue,j& ipoî auflî. Dans qujd
pays a-t'on cherché quçrelle, je pe dis, pas k
l'Auteur , mais au J^îvre ^(ip) ? JPour^pi di^ç
fuis - je coupable ,,.^qu pourquoi ^iiç rétoit-îl
pas? .
Voila, Moi^Ceur, comment par des extraits
fid^es un critique équitable, parvient à con-r
Hoîtreles vrais fe«timens d*un Auteur & fe
k ^ j
•i
(lo) Il eft bon de remarquer que le Livre .de
rEfprît des Loix fut îraprimîi'pfciir h première fois
A Genève f fans que Us Scholarques y trouvalTent
rien à reprendre^ & que ce f^ç un P^^ftew: qui cor-
rigea rEdicfofl. ' •
r
\
L E T-T -R. E., ss
defTeîn dans lequel il a compofé Ton Liv^^
Qu'on examine cous les mi^ns jpar cçttè ^j^
tl^ode , je ne eraîns point le; ju^emei^î., q^f
tout bonpêçe homiAe en pourra porter. ^^
ce rfeft pas ainQ que ces ftleffiewrs s'y pre»j
qent, ils n'ont garde, il? n'y trouYeK)ie]^t^as
jcp g{x!ils cherchent. Dàn^Je-proj^çj; de misf ç^n-
.^e coupable à to.ut prix , ils çç?tf çenp. Iç ,y^aî
but de l'Oiiyrage; ils,luj c^pt^nt pQijj- but çh;^
j^e erreur chaque néglij^çpcp é(gl^^o à l'^u^
teucjj & fi par hazard illaïC^ unp^iÇiçé 4<ml;
vqqije, ils ne man^upnji p2\s ^e. Twiterpr^ter .
dans le feqs qqi rU'efl pa$ k (l?n. . Sur un ^rap^i
;Champ copvrert d'un^ HK^flbn ^^l6« i^ vpm
triant avec foin quel(jues mauv^fes plante^
pour fipcu% celui gvft Ta feifté, tfptre i^^,eçj-
D 4
• I
$6 PREMIERE
honnêtes datis le fens que je leur donnoîs. Ce
ïbnt leurs falfifications leurs fubreptions ^ leurs
«
interprétations frauduleufes qui les rendent pa-
niflâbles: Il faut les brûler dans leurs Livres ^
& les couronner dans les miens.
Combien de fois les Auteurs dîfiamés & le
*
public indigné n'ont - ils pas réclamé contre
cette manière odieufe de déchiqueter un ou-
vrage, d*en défigurer toutes les parties , d'en
Jiger fur des lambeaux enlevés ça & là au
choix d'un accufateur infidelle qui produit le
mal lui - même , en le détachant du bien qui
le corrige & l'explique , en détorquant par
tout lé vrai fens? Qu'on juge la Bruyère ou
la Rochefoucault fur des "maximes ifolées, à,
la bonne heure j encore fera - 1 - il jufle de
comparer & de compter, Mais dans un Li»
vre dç raifonnement , combien de fens divers
ne peut pais avoir la même prc^ofitîon feloa
L E T ,T R E. s?
ht manière dont T Auteur l'employé & dont il
la fait envifager? Il n*y a peut - être ps» une
de celles qu'on m'impute à laquelle au.Ueà
où j6 fai miiê la page qui précède ou celle qttî
fuit ne ferve de réponfe , & que jb rfaye prîfc
en un fens différent de celui que lui donneiic
mes accikateurs. Vous verrez avant la fin de
ces Lettres des preuves de cela qui vous fur*
prendront. -•
<
• • • •
Mais qu'il y ait des |xrop6fitions fauflea^
rëpréhenfibles ) blâmables en elles-mêmes, ce«
la fuffit-il pour rendre un Livre pernicieux?
Un bon Livre n'ed pas celui qui ne contient
rien de mauvais ou rien qu'on puiilè interpré-
ter en mal ; autrement il n'y auroic point de
bons Livres : mais on bon Livre eft celui (pi
contient plus de bonnes choies que de mauvais
ies, un bon Livre efl; celui dont l'effet total
eft ée Bieher aa bien , malgré le md qui peuc
D5
^5 p.p. E MI E RE
f
dfi:|î%!l^iW.graii^ i^ijyrafie pleip.. de vérités ufi-
M, ;.iJe feçpBSl<î3iU0^}fl^ ^Cf j^ de vprta,
g^ «iK*^^cig.;îQW:^*.te§ ifflfreyr*» tputpS; les
de fa matière , accablé des nombreufes idé^
,qiMe- lràofSïgfl%î ^fkaif.^d^ iMPgs. p^ les
if^ui eft ifelé j . paig , j tgi^gj; j§ fçilltif.qdf , . #
.çhflfes bQpi^ &::l^^$fi qui j les démçi^ef^
iOsontteiit Ig lîT* kmâe lÂW^b^^fm^ 9
ï. E T -t R «.
^
a/aa rçceuil pour, celui .de fe? j^d^, ,d'^.
yaçttcer .^ue c'id^ là Iç r^jupé (Ji? ^ vpw fen^
limaos, & de 1^ jugpr fur jm ^^ e«rajt J
pans quel d^e^t ^u^r^jt-il fw.; 4^s,Jjjad apy
tr? . %^oit- a ft çip^r; p^ ^^g^^ au|
rœqp du njd pijiijp!C)iept Je b^ , ,^^.ç<}nîpfie, .
ipioat ppçr rieq Je <^jb: le? wt^ORtioi^ j 1^ drcjj:,
tare p^ur toat ^vident,e ^ .^^ ntij^^ci j^t la fa^^
crime d'un /Ç|élérat2 y a-trjl .^ feul yvfÇi
au monde , giipl^ue vpv , <nje|^ç, Ij^ i flif e^.
que excellent qu'il puiflë êtte qui put échapCT
à cette infâme inquifitîpQ ^ |^Wy ]^9n%ip»
H n'y en a pas un» pas un ftul, non pas FE-
vangile même : car h mal gui n'y feroÎK: p^ ils
fauroient l'y mettr^ par ^urs c^tt^f j! |nfi^dj^«
les , par leurs Êmflêr iMerptrftatioâs. -
^(W/ t;(7i^j déferons^ ùktçg^tïk ^iixSxM^
6e PREMIERE
f - m
'Livre fcanâaleux j téméraire ^ impie ^ dont là mo-
rale èjl d! enrichir le riche £? de dépouiller le pau-
vre («), d^ apprendre aux enfans à renier'leur me-
re & leurs frères (A), de s* emparer fans fer upule
iu bien d* autrui (c)y de n^injlruire point les m/-
r
• > • • • • •
cbanSy de peur qu* ils ne fe corrigent £? qu'ils ne «
f oient pardonnes (d) , de haïr père , mère , fem-
me y enfans , tous fes proches Ce) ; un Livre ou
Vonfouffie par tout le feu de la difcorde (/) , ou
Ton fé vante t armer le fils contre le père {g) , les
par eus Vun contre Vautre (A) , les domejlîques
fofttre leurs maîtres (t) ; oU l'on approuve la vio*
• • • t •
"^ » 11*1 II ■■ ■ 1 1> I 1 1 II» ». Il» ■■ ■■ I ~
^ (a) Matth. XIII. 12. Luc XIX. 26. '
, Ib) Matth XIl. 4|. Marc III. 33. _
(0 Marc. XI. 2. Luc. XIX. 30.
(il) ;Marc. IV. x2.Jean*xil. 40. • '■
(0 Luc. XIV. 26.
(f) Matth. k. 34. Luc. XIL 51. 52,
{g) Matth. X. 35* L«(S; XH. ^3. .
(h) Ibid,
<0 Matth* X. 16.
L E 1* T R E. €i
latim des Loix (ib), aà fon itnpofe eti da)oir la
perfécution (t) ; eU pour pmcr les peuples au hrU
gandc^e on fait du bonheur éternel le prix de la
force & la conquête des hommes* violens (j»).
Figurez -vous une ame kfemate mûjùaat
aiofi tout FEvangîIe, formant de cette calom-
nreuie analyfe fous le nom de ProfeJjHon de foi
évangélique un Ecrit qui ferpit horreur , & les
dévots Fharifiens prônant cet Ecrit d'un air
de triomphe comme l'abrégé des leçons de
Jéfus-ChriïL Voila pourtant julqu'où peut
mener cette indigne méthode. Quiconque
aura lu mes Livres & lira les imputations
de ceux qui m'acaifent , qui me jugent , qui
me condannent , qui me pourfiiivent , ver*
ra que c'efl: ainli que tous m'ont traité.
(k) Matth. XII. 2. & feqq.
(/) Luc. XIV. 23.
(m) Matth. XI. 12.
Si f « » Sf f Ë R Ë
, ; Je cteir vous avoir' pfoiAtiS tfië céa Mal
ficirr aè s^nnc pai' jDgë felon h niUciii ; j'ai
'riia£nteiKAit'à'vûQf pt)otl^«i'qil'iIs ne m'oât pl&
jugé fel<ffi kf Ldk: inais laiâ^œbî repfén*
drè An inflanc lialeitie. A' IjiitilS crSIi;* éltàis
me yoiï-Je rAlui» i «on â^? DevoSl- )t ' â^.
pMIre fi ànl à; ftiw nisii.a^gte? ihS^
té ît gémmàteiaœr?
LETTRE. »j
SECONDE LETTRE.
t
j'ai fappofiS) MonfieUr, dans ma précédente
Lettre que j'avoîs cotiarnî* in effet' contre la
foi les erreurs dont on m'accufe, & j'ai fait
voir qut ces érreitfs n'ikam point nuifibles k
h fbdété n'étni^t pas pui^bles devant lu
jaftice humaine. Dieu s'efl; r^fçrv^ fa propre
défenTé, & le ehâtimefit des fautes gui n'of*
fenlent que lui. Ceà uafàcrifege à des honm
œs de fe faite lei vefigeufs de la divinité^
comme fi lôr pfôteâioa h}! écoit néceilàire^
Ler MigSlrâtr les Rois n'im ^99ioç(Bc autorité
fiir les anîies^ & pourVii qtf^a foît fidelle aux
Loix de la fodétë dans ce monde »' ce ii*eft
point à eux de fe: .mêler de Ci qu'on devien-
dra dans Tautre , où ils tf ont aucune inlpec-
tion. Si Ton përdôît ce principe de vue , Içs
.^4 SECONDE
Loix faites pour le bonheur du gieuré humaiâ
en feroient bientôt: le tourment , & fou^ leur
inquifition terrible , les hommes ^ jugés par
leur foi plus que par leurs œuvres , ferôietit
tous à la merci de quiconque voudroit les
* •
exprimer.
Si les Loix n*ont nulle autorité fur les fëxiti-
mens des hommes en ce qui tient uniquement
& la Rdîgion , elles n*en ont point non plus en
xette partie for les écrits où Ton manifefte ces
ientimens. Si les Auteurs de ces Ecrits font
puniflableâ , ce n'eu jamais précifément pour
avoir enfèigné rérreur, puifqpekiLoi ni fes
miniftres ne jugent pas de ce qui n*efl: préci*
fémest ^\iâë trteur, L'Auteur des Lettres* é*
ei kâi ^e fa Campagne parbit convenir' de ce
principe (n). Peut-être même en accordant ,
qœ
■>*■'. n' ■■■ — «-7
(«) A cet igafi^ dit-il page 22, ;c retrouve af*
L E T T R E. ^
ijaë ïa Politique (^ la Philofophie pourront foute*-
nir la liberté de tout écrire ^^ le poufleroit-il trop
lôb (0). Ce n'eft: pas ce que je veux exaiûî*
miner îcL
Mais voici ûomment vas Méflieurs & lui
tournent h chofe pour autorifer le jugement
rendu contre 'mes Livres &i contre moi. Ils
me jugent môînî comme Chrétien que comme
Citoyen ; ils me r^ardeiH: moins comme im«
pie envers Dieu que comnié rebdle aux Loix ;
ils voyent moins .en moi le: péché que le crî^^.
me^'à ITiéréfie que la defôbéilîancc. J'ai, fe*'
Ion eux, attaqué là Religion de TEtat j jiaî
donc encouru, la pe^le portée par la Loi contre
ceux qui Fattaquent. Voila, je crois, le fenf
/es mes maséimes dms collet dfî réptéfintuXions ; . & pa**'
ge 29, il regarde comme inconteftable que perfonnc
ne ^eut être pôurfui'ùi pur Jes idées fur ïa Religion»
' (0). Page ao. ' , . .
Partie /• ' JE
es SECONDE
de ce qu'ils ont dit d'intelligible pour jufiifier
]ms procédé. . :
Je ne voln à cela que troîi petites difficul-*
tés. La première ,. de favoîr quelle cft cette .
Eeligîon de FEtat ; la féconde, de montrer
comment je Fai attaquée; la troifîen:^, de
isroaver cette Loi félon laquelle j'ai été jugé.
• Qu'eft-ce que la Religion de FEtat? CeÛ
kl iâinte Reformatiez évangélique. Voila fans
çpntredit des mots bien fonnanai Mais qu'eft*
ce à Genève ffîjouid'huiquela KainteRéforma-
koin. évangélique? Le fauriez^vcaxs, Monlîeur,
par hazard 9 En ce cas je vous en félicite.
Quant à moi, je lignora J'a^yoisjcm ie favoir
ci'devàut; maisje.me trompois ainfi que bien
d'autres 9 plus lavans^ que moi iur^tout autre
point , Se non moins ignorant fur celuirlà. i
Quand les Réformateurs fe détachèrent cje t
TEglife Romaine ils Facaiferent. d'erreur ; êi ;;
LETTRE. €t
pour Corriger cette erreur dam fa fource, il«
donnèrent à rEcrkare un autre ièns que celui
que TEglife lui doiHioit» On leur demanda de
quelle autorité ils s'^artoient ainfi de la doo»
trine reçue ? II(S dirent que c'étoit de leut
autorité prqpre » de celle de leur fa^on« 11$
dirent quç k fois de la Bible étant intelli^
glble ât cl»k à tou» les hommes en ce qui
étoit du faittt y chacun était JH^e compétent
de la doéhrine , & pouvoit interpréter la Bb»
ble, qui en efl: la règle , félon fon eiprit par^
licalier; que tous s*accorderoient ainfi furies
chofes «ilfencidles » & que cdles fur lequel-
les ils ae pourroient s'acitorder ne Fétoieut;
point.
Voik donc Tefprit |)aiticulier établi poœ
unique interprète de FEcricure; voila l'autori-
té de l!£glife rejettée ; voila chacun mis pour
b doâdne fiais fa propre jurifdiflion» Tds
«SS SECONDE
font Jes deux points fondamentaux dé la Ré'
forme : leconnoître la Bible pour règle de
& croyance , & n'admettre d*autre interprête
dû feris de la Bible que foi. Ces deux points
ôDtoibinés forment le principe fur l^uel lés
Chrétiens Réformés fe font féparés de FEglî-
fb Romaine , & ils ne pouyoîent moins fai-
re, fans tomber en côntradiékîon ; car quelle
autorité ittterpfëtative auroient-ils pd fe féfer-
ver , après avoir rejette celle du corps de TE*
^m- -
r*'Mais, dîra-t-on, comment fur un .tel princi*
pe les Réformés oiît-ils pu fe réunir ? ' Com-
iraent voulant avoir chacun leur façon de pen-
fer ont-ils fait corps contre l'Eglife Catholi-
•que? Ils le devpiérit faire; ils fe réunïflQÎénc
•en ceci, que tous reconnoiflbient^diaêun d'eux
•comme juge compétent pour luî-mëjnè.' Ils to*
léroient & ils dévoient tolérer toutes les ioter-*
LETTRE. (^
prétatîons hors une, favoîr oeUe qui ôte la II*-
berté des interprétations. . Or cette unique in-
terprétation qu'ils réjettoient étoît celle des .
Catholiques. Ils dévoient donc profcrîre de;
cxmcert Rome feule , qui les profcrivoit égale-:
ment tous. La diverfité même de leurs façons
de penfèr fur tout le refte étoît le lien com-^
mun qui les uniflbit. Cétoîent autant de pe-
tits Etats ligués contre i^ie grande Puiflknce,^
& dont la confédération générale n*ôtoit rien à
l'indépendance de chacun. ,
Voila comment la Reformation évangclique
s'eft établie , & voila comment elle doit fe
conferver. Il efl: bien vrai que la doélrine du
plus grand nombre peut être propofée à tous ,
comme la plus probable ou la plus autoriféc.
Le Souverain peut même la rédiger en formu-
le & la prelcrire à ceux qu'il charge d'enfeî;
gner, parce qu'il fout quelque ordre qudijuç
Es .
fo SECONDE
règle dans les inflruâîons publiques, & qu'au
«
fond Ton ne gêne en ceci la liberté de peribn-»
ne, puilque nul n'eft forcé d'enfeigner malgré
lui : mais il ne s'enfuit pas de-là que les particu*
îîers foient obligés d'admettre précîfément ces '
interprétations qu'on leur donne & cette doc-r
rrîne qu'on leur enfeigne. Chacun en demeure
fëul juge pour lui-même , & ne reconnoît en
cela d'autre autorité que la fîenne propre. Les
bonnes inftruélions doivent moins fixer le
choix que nous devons faire que nous mettro
en état de bien choiGr, Tel efl: le véritable es-
prit de. la Réformation ; tel en eft le vrai fon»
dément, La raifon particulière y prononce,
en tirant la foi de la règle comnjune qu'elle é-«
tablît , favoir l'Evangile ; & il eft tellement de
reffence de la raifon d'être libre , que quand
elle voudroit s'aflervir à l'autorité, cela ne dé-
pendroit pas d'elle. Portez la moindre atteii^i^
LETTRE. 7»
»
œ à ce principe, & tout révangelirme croule
à rinftanc. Qu'on me prouve aiçourd'hui qu'elle
matière de foi je fuis obligé de me foumettre
aux décidons de quelqu'un , dès demain je me
Eus Catholique, & tout homme conféquenc &
vrai fera comnie moi»
■
Or la libre interprétation de TEcriture em«
porte non feulemejtit le droit d'en expliquer ks
pafTages , chacun félon fbn lèns particulier ^
mais celui de refier dans le doute fur ceux
qu'on trouve douteux , & celui de ne pas com<^
prendre ceux qu'on trouve incompréhenfibles.
Voila le droit de chaque iîdelle, droit fur Ie«
quel ni les Fadeurs ni les Magiftrats n'ont rîeii
à voir. Pourvu qu'on relpecle toute la Bible
& qu'on s'accorde fur les points capitaux, on
^t &ton la Réformation évangelique. Le fer^
medt des Bourgeo» de Cenéve n'emporte rien'
48 plag que Gfda.
K^4
7» SECONDE
• Or je vois déjà vos Dofteurs triompher fîir
œs points t:api(aux , & prétendre (|ue je m'en
écarte. Doucement, Meflîeurs, de grâce; ce .
rfeft pas encore de . moi qu'il s'agit , c'eft de
vous. Sachons d'abord quels font , iëlon vous ,
ces points capitaux , lâchons quel . droit vous
avez de me contraindre à les voir où je ne
les vois pas, &.où peut-être vous ne les vo-
yez pas vous - mêmes. N'oubliez point , s*il
vous plait, que me donner vos déciSons pour
loîx, c'eft vous écarter de la fainte Réforma^
tion évangélique , c'eft en ébranler les vrais
fondemens; c'eft vous qui par la Loi mériter
{Muiition.
. Soit que l'on cônûdere l'état politique de
votre République lorfque la Réfo^^lation fut
ioftituée^Toic que Ton pefc les termes de vos
©ncîens Edit^.par^rjippQrt à la Religion qu'ils
prefcrivent , on voit que la JléfonuatMWi eQ;
Li E T T R E. 73.
par tout mife en oppolition avec TEglife Ror
nâîne , & que les Lois n'csit pour objet que
d'abjurer les principfjs & le culte de celle - ci ,
deftruâdfs de la liberté dans tous les lens.
\ Dans cette pofitîon particulière l'Etat n'c-
^ûftoît , pour aînfî dire , que par la réparation
des deu^ Eglifes , & la République écoit ané-
antie fi le Papifme reprenoit le deflus. Ainfi la
Loi qui fixoit le culte évangélique n'y confî-
dèroit que Tabolition du culte Romain. C'efl;
ce qu'atteflent les inventives , même indécen-
tes , qu'on voit contre celui-ci dans vos pre-
inicres Ordonnances, & qu'on a fagement re*
tranchées dans la fuite, quand le même danger
tf exifloit plus : C'eft: ce qu'attefte auflî le fer-
ment du Confiftoire , lequel confifte unique-
xnent à empêcher toutes idolâtries j bJafphèmes^
dijjolutions , S autres chofis contrevenantes à
rUmneifr ^e Dieu ^ à la Réformation de, /'£-
E5
\
\
74 SECONDE
vangile. Tels font les termes de rOrdonfiance
p&niée en is6t. Dans la revue de la mêitie
Ordonnance en 1576 on itiit à la tête du fer^
ment, de veUler fur tous fcandàks (p); ce qui
montre que dans la première formule du fer-
ment on n'avoit pour objet que la féparation
de TEglife Romaine ; dans la fuite on pourvut
encore à la police : cela e(t; naturel quand utl
' établiflement commence à prendre de la con«
fiflance: Mais onfin dans Tune & dans Tautre
leçon, ni dans aucun ferment de Magifbats^
de Bourgeois, de Miniflres , il n*efl: queftioû
ni d'erreur ni d'héréfie. Loin que ce fut là
Fobjet de la Réformation ni des Loix, c'eût
été fe mettre en contradîélion avec foi-même,
Ainfî vos Edits n'ont fixé fous ce mot de Rê^
formation que les points controverfcs avec TE*
glile Romaine.
> ■ I I
(f) Ordon. Ecclef.. Tit, UI. Art. LXXV.
LETTRE.
75
Je fais que votre hifloîre & celle en génë-
tal de la Réforme efl: pleine de faits qui mon-
trent une inquifîtioQ très févere , & que, de
perfécutés les Réformateurs devinrent bientôt
$
petfécuteors : mais ce contraflie , fî choqoânt
dans toute Thiftoire du Oiriftianifme , ne proa-
vé autre choie dans la vôtre que Finconfô-
quenœ des hommes & Tempire des paflions
fur la raifon. A force de difputer contre le
Qergé Catholique, le Clergé Proteftant prît
Fefprit dilputeur & pointilleux. Il vouloit tout
décider , tout régler , prononcer fur tout :
chacun propofoit nK)defl:ement fon fèntîment
pour Loi fuprême à tous les autres ; ce n'étoît
pas le moyen de vivre en paix. Calvin , fans
doute, étoit un grand homme; mais enfin c'é-
toit un homme , & qui pis efl , un Théolo-
gien : il avoit d^ailleurs tout Torgueil du géj;u«
qui fent là fupérîorité, [& qui s'indigne qu'on
7<J SECONDE
h lui dilpute : la plupart de fea collegaes é-
toîent dans le même cas ; tous en cela d'autant
plus coupables qu'ils, étoîent plus mconfé-
qiens.
Auffi quelle prîfe n'ont^ls pas donnée en. ce
point aux Catholiques, & quelle pitié n'eft- ce
pas de voir dans leurs défenfes ces fàvans
hommes, ces efprits éclairés qui raifonnoienc
fi bien fur tout autre article, déraifgnner fi fo-
tement fur celui-là ? Ces contradiélîons ne
prouvoient cependant autre chofe , finon qu'ils
fuivoient bien plus leurs paffions que leurs prin-
cipes. Leur dure orthodoxie é toit elle-même u-
ne héréfie* Cétoit bien là l'efprit des Réforma-
teurs, mais ce n'étoit pas celui de la Réfor»
matîon.
La Religion Protdlahte efl tolérante par
principe, elle efl; tolérante effenciellement, el-
le l'efl: autant qu'il ed poilible de l'êtne, puiC;
y<
L E T T R Ë. ^f
•que le feul dogme qu'eDe ne tolère pas eft
celui de Kntolérance. Voila fînfurœontable
barrière qui nous fépare des Catholiques A
qui réunit les autres communions tntre elles ;
chacune regarde bien les autres comme étant
dans l'areur; mais nulle ne regarde ou ne
doit regarder cette erreur conune un obfl>
cle au falttt (9).
Les Refermés de no!s jours, du moins les
filiniftres 9 ne connoîQent du n'aiment pliis
%
kur Religion. S'ils l'avoient connue & aimée,
à la publication de mon Livre ils' auroiénc
poufle de concert un cri de joye , ils fe ft-
\
I
(î) De toutes les Seftes du Chriftianifine la Lu^
thérienne me paroît la plus inconféq^ente. Elle .a
xéuni comme à plaifîr contre elle feule toutes les
objeftions qu'elles fe font Tune i l'autre. Elle eft
en particulier intolérante comme TEglife Romaine;
mais le grand argument de celle-ci lui manque:
elle eft intolérante fans favoir pourquoi.
^ s /E C O N D E
• ->».
roiem teus unis avec moi qui n atcaquois que
leurs adverfaires; mais i]$ aim^t mieux abaii-
domier leur propre caufe que de (butenir la
mienne: avec leur ton riOblement a.rroganty
«vec leur rage de chicanne & d'intolérancee, ils
.ne favent plus ce qu'ils croyent ni ce qu'ils vea-
Jenc joi oe ^qu'ils difenti Je ne les vois plus que
comme de mauvais valets des^ Prêtres, quil^
Jêrvent moins par amour pour eux que par hai«
. ne contre moi. (r) Quand ils auront bien difpv-
té, bien chamaillé , bien ergoté , bien prononcé ;
tçxit au fort de leur petit triomphe, le Clergé
^Rom^, qui maintenant rit & les laifîè fair»^
viendra les chafTer armé d'arguxnens ad homi'
Hem fans réplique, & les battant de leurs pro^
libres armes, il leur dira: cela va hîen; maisfi^
(r) Il eft affez fuperfiu , Je crois , d'avertir que
j'excepte ici mon Pafteur , & ceux qui , fur ^e
point, p en fent comme lui»
li E T T R E^ 7(|
fréjent ôtez-^vms delà^ méthms intrus que vout
êtes ; vous riceoez travaillé que pour htms. Je re-;
viens à nK>il fujet.
jL'EgUfe de Genève n'a dooc & ne doit z^
imt coimne RâKmnée aacuneprofeffion de foi
pîéciie 9 ardcidée , & commune à tous fei
membres. Si Ton vouloic en aroir une, en
cda même on blef&roit la liberté évangelique^
m renonceroit an principe de la Réformatîon i
on violeroit la Loi de TEtat, Toutes les &
glifes Proteftantes qui ont drefTé des formules
le profeflion de foi , tous les Synodes qui
ont déterminé des points de doéfaine, n'onc
Touh que preicrire aiix Pafteurs celle qu'ils
dévoient enfeigner , & cda étcût bon & con«
venable* Mais û ces Eglifes & ces Synodes
ont prétendu £aîre plus par ces formules , ôc
{xrefcrire aux fidelles ce qu'ils dévoient croire 3
alors p^ de telles décifioos ces âlTembiéçs
fcy SECONDE
i
rfont prouvé autre chofe, fî non. qu'elles îgho-
roient leur J)ropfe' Religion.
L'Eglife de Genève paroiflbît depuis long-'
tems'ï'écarter mDÎns que les àutares du vérita-
ble efprit du Chriftianifme , & (feft fur mte
crompeufe. apparence que f honorai (es Paf-
teurs d'éloges dont je les croyois' dignes ; car *
«ion intemiôirn'étôitlaflhrémèntipas d*^abirfbr>
Ifcï.phblic. Mais qui peut, voir aujourd'hui 'ces?
H^^émes JViiniffires , jaxiîs Hcoulans & devenu»
tout à coup' fi rigides , chicaner fiir l'orthodo-
xie d'un Laïque & laiffer la feuï-dans unetfî
fcaridaleufe incertitude ? On leur ' demande fr
Jèfus-Chrift: eft Dieu, ils n'ofent répondre: aa
leur demande quels myfleres ils admettent , ils
n'ofent répondre. Sur quoi donc répondront-
ils , & quels feront les articles fondamentaux ^
difFérens dès . miens , fur lefquels ils veulent
qu'on fe décide, fi ceux ''là n'y font pas com-
pris? Un
L E T T R Ê; Zi
' Un Thîlofophe jette . fur eux un coup d'œîl
rapide; il les pénètre, il les vqît Ariens, Socî*
tiiens; il le dit, & penfe leur faire honneur:
mais il ne voit pas qu'il expofe leur intérêt
temporel ; la feule chofe qui généralement dé*
cide ici • bas de la foi des hommes.
AùBx iàt allarmés, effrayés, ils s'aiTemblenC^'
ils difcutenc , ils s'agitent , ils ne favent à quel
faint & vouer ; & après force confultations
(s) , délibérations , conférences , le tout aboa--
tit à un amphigouri où Ton ne dit ni oui ni
non , & auquel il efl: aufli. peu poiTible de rien
comprendre qu'aux deux plaidoyés de Rabe-»
Jais (f). La do6brine orthodoxe n'eft-elle paâ
(i) Quand on ejl bien décidé fur ce qu'on croit
diibit à ce fujet un Journalifte , une profejfion de foi
doit être biemôt faite.
(t) Il y auroit peut-être eu quelque embarras
i s'expUquer plus clairement fans être obligés de fe
jetraâer fur certaines chofes.
Partiel F
8t SE C O N DE
l^iea c!aire , & ne la voila-t-il pas en de f&rei
SPBÛÙS ?
: Cendant parce qu'un d'entre eux comi»-
lant force plai&nceries fcholafHques ai^ bé«
xùgnes qu'élégantes, pour juger mon Chriflia-
> •
nifme nç craint pas d'abjurer le , fieq ; tout
f^harmés du favoir de leur confrère, & furtout
)de fa logique, ils avouent fon doâe ouvrage ,
&, l'en remercient par une députation. Ce
iont, en vérité,' de fîngulieres gens que Mes-
iieuîs vos Miniffares ! on ne fait ni ce qu'ils
croyent ni ce qu'ils ne croyent pas; on ne /ait
f as même ce qu'ils font fembl^c de croire :
leur feule manière d'établk leur foi efl: d'atta*^
quer celle des autres; ils font comme les Jé«
iîiitës qui , dit-on , forçoient tout le monde à
k
figner la conHicution fans vouloir la ilgner eux*
jnêmes. Au lieu de s'expljquer fur la doflxinQ
qu'on leur impute ils penfent donner le cfaao^
LETTRE. tî
*ge aux autres Eglîfes en cherchant querelle
à leur propre défenfeur ; ils veulent prouver
par leur ingratitude qu'ils n'avoient pas befoin
de mes Ibins^ & croyent fe montrer ailêz Or^
thodoxes en fe montrant perfécuteurs.
De tout ceci je conduds qu^il n'efl: pas tàfS
de dire en quoi confifte à Genève aujourd'hui^
la fainte Râbrmation. Tout ee qu'on peut
avancer de certain fur cet artide efl:, qu'eOé
doit conGfter prihdpalement à rejetter le^
points conteftés à l'Eglife Romaine par ki
premiers Réformateurs , & furtout par CdMn^
Ccft-là Telprit de votre inftitutîon; c'eft par
là que vous êtes un peuple fibre , & c'efl par
ce côté feul que la Religicm fait chez vont
p^e de la Loi de l'Etat.
De cette première queftion je paiFe à la
féconde y âc je dis; dans un Livre où la vérité
TxitSké la neceflité de la Rdigion en géqéral.
^4 SECONDE
^{t établie avec la plus grande force, -oq, far»
donner aucune exclufion («) , F Auteur préfère
la Religion Chrétienne à tout autre culte , & la
JRéformation évangélique à toute autre fefte,
comment fe peut -il que cette même Réfor-
ination foit attaquée ? Cela paroit difficile à
concevoir. Voyons cependant.
: J'ai prouvé ci-devant en général'& je proii-
verai plus en détail ci-après qu'il n'eft pas vrai
que le ChriClianifme foit attaqué dans mon Li-
yre. Or lorfque les principes communs ne font
pas attaqués on ne peut attaquer en particulier
aucune feâe que de deux manières ; fa voir y
indireâen^nt en fbutenant les dogmes didinc-
tifs de fes adverfaires, ou direâement en ac^
taquant les fiens.
<
(u) J'exhorte tout Icfteur équitable à relire &
pefcf dans KEtnilè -ce -qui fuit iiirmédiatement la*
Brofcflîon de foi cju Vicaire, & où je reprends la
parole.
L E T T R E; ès'
Mais comment auroîs-je foutenu les dogmer
dîftinftîfs des Catholiques , puîfqu'au contraire'
ce font lesfeiris quej'aye attaqués, & puîfquè*
c'cft' cette attaque même quî.afoulevé contre
iHoi le parti Catholique , fans lequel il eft fiir
que les Proteftans n'auroient rien dit ? Voila /
je Tavoue , une des chofes les plus étranges^l
dont on ait jamais ouï parler , mais elle n*en
eft pas moins vraie. Je fuis corifefleor de la .
... •
foi proteftante à Paris , &• c'efl: pour cela que
je le fuis encore à Genève.
Et comment aurois-je attaqué les dogmes
diftinOiifs des Proteftans , puifqu'au contraire ce '
font ceux que j'ai fout en us avec le plus de for-
ce 5 puiique je n'ai ceffé d'infîfter fur l'autorité
de la raifon en matière de foi , fur la libre in- 1
terprétation des Ecritures , fur la tolérance é-
vangélique , & fur Tobéiflance aux Loix , me*
we en matière de culte; tous dogmes diftinc— •
k6- SECONDE
f
dfs & radicaux de FEglife Réforme , &
lâns lefquels , loin d'être folidement établie y eh
le ne pourroit pas même exiger. .
, II y a plus: voyez: quelle force la forme mê-
me de FOuvrage ajoute aux argumens en fa-
veur des Réformés. Ceft un Prêtre Catholî-
que qui parle , & ce Prêtre n'efl: ni un impie
ni un libertin': C'efl: un homme croyant Se
pieux, plein de candeur , de droiture, & mal-
gré fes difficultés fes objedlions fes doutes ,
nourrifTant au fond à^e fon cœur le plus vrai
refpefl: pour le culte qu'il profefle.; un homme
qui , dans les épanchemens les plus intimes dé-
clare qu'appelle dans ce culte au fervice de
TEglife il y remplit avec toute l'exaôîtude
poilîble les foins qui lui font prefcrits , que fa
confcience lui reprocheroit d*y manquer vo
lo;itairement dans la moindre chofe , que dans
le.xpyflere qui choque le plus fa railbn^ il &:,
Vv
X E T T R E. tr
fecueine aa momeat de la confécradûii pour
la ^ire avec toutes les dHpafidons qu'exigent
FEglife & la grandeur du facrement, qu'il pro*
nonce avec refpeâ les mots facramentaox ^
qa'il donne à leur effet toute la foi qui dépend
de lui, & que, quoi qu'il en foie de ce myr*
tare inconcevable , il ne craint pas qu'au jour
du jugement il foit puni pour l'avoir jamais
profané dans fon cœur (x). . rt
Voila comment parle & penfe cet homitnQ
vénérable , vraiment bon , fage , vraiment
Chrétien, & le Catholique le plus fincere qui
peut-être ait jamais &ôSté.
Ecoutez toutefois ce que dit ce vertueux»
Prêtre à un jeune homme Proteftant qui s'é«
toit fait Catholique^ auquel il donne dés con^^
fi^, ,y Retournez dans votre Patrie » reprect
(«) Emile T. m. p. 185 & x8<J. j
F4
99
99
99
«8 S E :C O N D E
',, nez la Religion de vos pères, fuivez-Ia dam
.„ la fîncérité de votre. cœur & ne la quittez
.„ plus; elle eft très-fimple & très-iainte; je
la crois de toutes. les Religions iqui ù>m fbr
la terre celle dont la morale eft la plus
pure , & donc la raîfon fe . contente k
^ mieux (y). '^
D ajoute un moment après. „ Quand vous
„ voudrez écouter votre confcience,, mille ob^
,, .ftacles vainis diÇpatoîtront à fe vok. . Vous
„ feôtirez que daps fincertitude où nous fon>
,, mes , c*eft une inexculàble préemption de
„ profeffer une aufre Religion que celle o£|;
„ Ton eft né, & une faiiffeté de ne pas pratî-
,, quer firicérement celle qu'on profeflè. Sî
,, Ton s'égare , oii s*ôte une grande excufe au
p trihupal du Souverain Juge. Ne pai^onne-.
(y) ibid, p. 19^.
LE T T R- IX 8p
;, ra-t-îl pas plutôt Terreur où Te» fat nourri,
„ que celle qu'on ofa choifir ibi-mème? (2) ".
Quelques pages auparavant il avoit dît;.
9, Si j'asrois des Frocefhms à mon voifinage,
,, ou dans nui Paroiflè, je ne les djftinguçrois^
9> point de mes FaroiiSens en ce qu^ tient à
^ la charité Chiétienne ; je les portei^ôis tour
i
5, également à s'ëntte - aimer ; à fe regarder
,^ ' coDome ' fr^ÊB y , à Tefpeéler tontes * les Reli-
,, gîons &.à vivj^e en paix> chacun dsms la^
,) fiemiew Je p$tife que ibllkicer ^dqu'un der
,^ quktet ceBejOÙiÂl ell oé^ic'efttle foUiciterj
^j de mal faire &.par conféq^ent fair^ mal foi« :
,, même. En attendant de plus; grandes lumie*;
^^r&&^ gardons Fordre public, dans tout pays:
,, refpeélons les Loix, ne troublons point 1er
9> adte qu'elles preTerivent, ne jponxms poioc:
■•»w«*w*^ip*"""<'"i"*— *i»*"
($^ Ibid. p. J95. .*. ^ .,...:.,;
f'
9« S E c o N d: e
^ les Qtoyetà & la defobéiflàhce : car nous
,; ne (avons point certainement fi c'efl: wx
^ bien pour eux de quitter leurs opinions
j, pour d'antres, & nous fkvcHis certainement
^ qne^c'eft un msU de^ defobélr ans Loix. ^^
Voila, ]Vl<^&nr, cothménc parle un Prê-
tre Catholique dans un Ecrit où Ton lo'accui^.
d'avoir attaqué I6 culte dôs Réformés, Se, o\^
îi n'en efl: pas dit autre choTe^ Ce qu'on auroit
pu me reprocher, peâ^êQre>v^^îl^^I^ P^^^
tialité outrée en leitf faveur. ÂTiun défont de
convenance, en fa^&ntp»Ier un Prêtre Ga<
tholique comme jamais Prêtre Csithol^ue n'a
parlé. Ainfi j%i fm en toute chofe préciië*
ment le contraire de ce qu'on m'accufe d'à- .
voir fait. On dtooit que vos Magiflrats iè.
font conduits p» gageure: quand ils anroient,>
*
parié de juger contre l'évidence ils^ n'auroienc
pu mieux réuflir. ;
LETTRE." çt
I >
Mais ce Livre condenc des objeâioos , des
^tifficcdtés, des doutes ! Et pourquoi non, je"
vous prie? Où eft le crime à on Proteftant de
propofer fes doutes fur ce qu*il trouve dou*
teux , & fes objeâions for ce qu'il en trouve
fufceptible? Si ce qui vous paroit ckdr me pa«
roit obfcur, fi ce que vous jugez démoptré ne
me femble pas Têtie , de quel droit prétendez*
vous fqumettre ma raiibn à Ja vôtre, & me
donner votre autorité pour Loi, comme fi vous
prétendiez à Tin&inibiUté du Pape ? N'eft-il
pas plaifant qu'il faille raifbnner en Catholique
pour m'accufer d'attaquer les Ftotellans ?
Mais ces objeâions & ces doutes tombent -
fur les points fondamentaux de la foi ? Sous
. Tapparence de ces doutes on a raflëmblé tout
ce qui peut tendre à fapper , étomler & dé» '
traire les principaux fondemens de la Religion '
Chrétienne ? Voila qui change la thefe, & fi^
02 s E G O *N D E
V
cela eft vrai , je puis itre coupable ; mais aullT
c'ed un menfonge, & un menTonge bien im^
prude^nc de k part de gens cfui né fàvent pas^
eux-mêmes en quoi confident les principes fon-
damentaux de leur Chrillianifme. Pour moi , je*
fais très bien en quoi confident les principes
fondamentaux .du mi^ , & je l'ai dit. Piefque .
toute la profefliûn de foi de la Julie ed affir^
mative , toute .la première partie de celle du
Vicaire eft affirmative, la moitié de la fècon*
de partie ed encore affirmative , une partie da
dbapitre de la Religion civile efl: affirmative,
la Lettre à M. l'Archevêque de Paris eft af-
firmative. Voila , Mefiieurs , mes articles fcm«
damentaux : voyons les vôtres,
.Ils font adroits» ces Meir^eurs; ils établif.
fent la méthode de difcufiion la plus nouvelle
& la plus commode pour des perfécuteurs. Ils
laiiFent avec art tous les principçs de la doc«
LETTRE. 93
«
trîne incertains & vagues. Mais un Auteur z*
l'îl le malheur de leur déplaire , ils vont fure-
tant dans fes Livres quelles peuvent être fes
opinions. Quand ils croyent les avoir bien
conftatées, ils prennent les contraires de ces
mêmes opinions & en font autant d'articles
de foi. Enfuîte ils crient à Timpie au blafphê-
me, parce que T Auteur rfa pas d'avance ad*
mis dans fes Livres les prétendus articles de
foi qu'ils ont bâtis après coup pour le tour-^
menten
Comment les fui^re dans ces multitudes de
points fiir lelquels ils m'ont attaqué? comment
rafTembler tous leurs libelles, comment les
lire ? Qui peut aller trier tous ces lambeaux
toutes ces guenilles chez les frippiers de Ge«
i\ève ou dans le fumier du Mercure de Neuf-,
châtel? Je me perds je m'embourbe au milieu
de tant de bêtifes. Tirons de ce fatras un feuL
\
n
^
S-E. C O N D Ë
^tide pour ièrvk d'exemple , leur article le
jfhs triomphant , xrelui pour lequel leurs pre-
dkans {*) fe font mi^ en campagne & donc
ils ont fait le plus^ de bruit : les miracles.
Jentre dans un long examen. Pardonnez*
m'en l'ennui, je vous fupplie. Je i^ veux di&
çuter ce point fi terrible que ^our vous épar*
gner. ceux fin: lef^^s ils ont moins infiilé.
, Ils difent donc » J. J. Roufleau n'eft pas
^ Qirétien quoiqu'il iè donne pour tel; car
,, nous, qui c^tainement le (bmmes, ne pen--
y fons pas comme lui. J. J. RouiFeau ne croit
gp point à la Révélation , quoiqu'il difè y croi*
9 re: en voici la preuve.
,, Dieu ne révèle pas fa volonté immédia*
(*) Je n'auroîs point employé ce terme que je
trouvoîs déprifant, fi l'exemple du Confeil de Ge*
nève, qui s*en fervoît en écrivant au Cardinal de,
Fleury, ne m*eût appris que mon fcrupule école
niai fondé* -^
LETTRE. »
^) temait à tous les hommes. Il leur parle par
,, fes Envoyés , & ces Envoyés ont pour
,, preuve de leur miflion les miracles. Donc
,, quiconque rejette les miracles rejette les
,, Envoyés de Dieu, & qui rejette les En«
,, voyés de Dieu rejette la Révélation. Or
9) Jean Jaques Roufleau rejette les miracles. ^^
Accordons d*abord & le principe & le fait
comme s'ils étoietlt vrais : nous y reviendrons
dans la fuite. Cela fuppofé, le raifonnement
précédent n'a qu'un défaut : c'efl: qu'il fait dî-
reâement contre ceux qui s'en fervent. H eft
très bon pour les Catholiques, mais très mau-
vais pour les Proteflans. Il faut prouver 4
mon toîir.
Vous trouverez que je me répète fouvent,'
mais qu'importe ? Lorfqu'une même propofr
ïîon m'eft néceffaîre à des argumens tout dif-
férens , dois - je éviter de la reprendre ? Cette
L y
^ S-rE C O.N D E
*^
t
I
-fiffeâation ferait puérile» Ce n'eft pas de va:-
^iété 4ju'il s*agit , c'eft de vérité , de raifonne^
4nens juftes & concTuans. Faflêz le refte , &
ne fongez qu'à celguv, , •
<^uand les premiers Réformateurs commen-
•cerent à fe faire enteijdfiij^rEgUre univerfelle
^toit en paix j tous les Hêntimen^ étoient una«
^imcs ; il n'y avoit pas un dogme efFenciel
débattu parmi les Chrétiens.-
Dans cet état tranquille , tout à coup deux
ou trois hommes élèvent leur voix , & crient
dans toute l'Europe : Chrétiens , prenez garde
à vous ; on vous trompe ,. on vous égare , on
vous mené dans le chemin de Tenfer : le Pape
efl rAntechrifl; le fuppôt de Satan, fon Egli-
fe efl: l'école du menfonge. Vous êtes perdus
fi vous ne nous écoutez.
r
A ces premières clameurs l'Europe étonnée
xella quelques momens en iilence> attendant
ce
Lettre». jf
tst qu'il en arrîveroir. Enfin le Clergé revenu
de (a première {urprife & voyant* que ces
nouveaux venus fe faifoient des Sénateurs,
comme s*en fait toujours tout homme qui dog-
matife , comprit qu'il falbit s^expliquet avec
eux. Il commença par leur demander à qui ils
en avoîent avec tout ce vacarme? Ceux-ci ré-»
r
pondent fièrement qu*ils font les apdtres de la
vérité, appelles à réformer TEglife & à rame-
ner les fidelles de la voye de perdition où les
conduifoîent les Prêtres»
Mais 9 leurrépliqua-t-on^ qui vous adonné
cette belle commiffion , de venir troubler la
paix de FEglife & la tranquillité publique?
Notre confaence, ditent-ils, la raifon, la lu-
mière intérieure, la voix de Dieu à laquelle
naos ne pouvons réfifbr ùm crime : c'eft lui
gui nous appelle à ce faint minifterei & npus
fuivons notre vocation.
. . <■ • . . • . ■•
Partie J. G
\
^8 SECONDÉ
Vous êtes donc Envoyés de Dieu, repri-
rent les Catholiques. En ce Cas , nous conve-
nons que vous devez prêcher réformer inflrui-*
re, & qu'on doit vous écouter* Maïs pour
obtenir ce droit commencez par nous moth
trer vos lettres de créance, Prophétîfèz , gué-
riflez , illunûnez , faîtes des miracles , déployez
les preuves de votre mîffion. *
La réplique des Réformateurs eft belle, &
vaut bien la peine d*être tranfcrîtte. '" -
5, Oui, nous fommes les Envoyés de Dieu:
5, maïs notre miflîon n'efl point extrabfdînaî-
5, re : die eft dans Fimpulfion d'une confcîen^
„ ce droite , dans les lumières d'un entende*
„ ment faîn. Nous ne vous apportons point
j, une Révélation nouvelle ; nous nous bor*
nons à celle qui vous a été donnée, & que
vous n'entendez pTûs. Nous venons à vous ,
91 non pas avec des prodiges qui peuvent être
55
55
y »
L Ë T t îi Ê. pd
^) trompeurs & .dont tant de fauOTes doflrlnes
^1 fe font étayées, mais avec les lignes de la
), vérité & de la mfoa qui ne trompent
,^ point; avec ce Livre faint que vous défi*
^, gurez*& que nous vous expliquons. Nos mi-
), rades font des argumens invincibles, nos
„ prophéties font des démonflrations : nous
,9 vous prédifons que fi vous n'écoutez la voix
I) de Chrift qui vous parle par nos. bouches^
9, vous ferez punis comme des ferviteurs infi*
)) délies à qui Ton dit la volonté de leurs^naî*
^ très, & qui ne veulent pas Taccomplir. **
^ Il n'étoic pas naturel que les Catholique*
convinfiènt de l'évidence de cetta nouvelle
doârine , & c'ék aufli ce que la plupart d'en«
tre eux fe gardèrent bien dé faire. Or on voit
91e la difpute étant réduite à ce point ne pour-
voit ptas finir , & que chacun devoit fe don**
Acr gain de caufe. ; les Proteftans foutenaos
G 2
aoo S E C O N 'D E
t toujours que leurs interprétations & Icur^
preuves, étoient fi claires qu'il falloit être de
mauvaife foi pour s^y refufer ; & les Catholî^
ques, de leur côté, trouvant que les petits ar-
gumens de quelques particuliers ^ qui même
n'étoient pas fans réplique , ne dévoient pas
l'emporter fur Fautorité de toute TEglife qui
de tout tems avoit autrement décidp qu'eu:^
ies points débattus.
Tel eft Fétat où la querelle eft reftéfc. Oa
n'a ceffé de difjputer fur la force des preuves :
difpute qui n'aura jamais delBn, tant que les
liommes n'auront pas tous la même tête.
Mais ce . n'étoît pas de cela qu'il s*agiflbît
pour les Catholiques. Ils prirent le change ^ &
fi, fans s'amuler à diîcanner les preuves de
leurs adverfaires , ils s'en fuflent tenus à leur
difputer le droit de prouver , ils lés auraient
cmbarrafFés, ce me femble.
L E T T RE. 101
„ Premièrement", leur auroientils dit, „ vq-
,, tre manière de raifonner ri'efl: qu'une petî-
„ tion de principe ; car fi la force de vos
„ preuves eft le figne de votre miffion , il
„ s'enfuit pour ceux qu'elles ne convainquent
„ pas que votre miffion eft fauilè , & qu'aiolî
„ nous pouvons légitimement, tous tant que
5, nous fommes , vous punir comme héréti-
,, ques , comme faux Apôtres , comme per-
„ turbateurs de l'Egiife & du Genre humaiq.
. „ Vous ne prêchez pas , dites- vous , des
5, Doctrines, nouvelles: & que faîtes -Vous
„ donc en nous prêchant vos nouvelles expli-
„ cations? Donn2r un nouveau ïens aux pa-
„ rôles de l'Ecriture n'eft-ce pas établir une
„ nouvelle do6lrine? N'eft-ce pas faire parier
,5 Dieu tout autrement qu'il n'a fait? Ce ne
99 font pas les foos mais les fens des mots qui
99 font révélés : changer ces fens reconnus Se
G 3
('
yo2 SECONDE
„ fixés par FEglife, c*efl: changer la Révélation,
,,^oyez , de plus, combien vous êtes in-'
^, juftes! Vous convenez qu'il faut des mîra-
„ des pour autorifçr . une miffion divine , &
„' cependant vous , fîmples particuliers de vo-
„ tre propre aveu , vous venez nous parler a-
jj, vec empire & comme les Envoyés de Dieu
„ {ad). Vous réclamez l'autorité d'interpréter
„ FEçrîture à votre fantaifie , & vous préten-»
,31 dez nous ôter la même liberté. Vous voua
(aa) Farel déclara en propres termes à Genève
Rêvant le Confeil épifcopal qu'il étoît Envoyé dej
Dieu : ce qui fit dire à l'un des membres du Con-
feil ces paroles de Cdïphe : // a blafpbémé : qu'eftH
tefoin d'autre Umoignage 1 Jl a mérité la mort. Dan»
la doélrine des miracles il en falloic un pourpré-
pondre à cela. Cependant Jéfus n'en fit point en
cette occafion , ni Farel non plus. Froment déclara
de même au Magiftrac qui lui défendoit de prêcher,
|tt'î/ imUit mieux obéir à Dieu qu'aux hommes y Sc
continua de prêcher malgré la défclife; conduits
Qui certainement ne pouvoic s'autorifçr que pay un
Qî4^:ç çxprès de Dieii,
99
9»
LETTRE. 103
^ arrogez à vous feuls un droit que vous refu-
,, fez & à chacun de nous & à nous tous qui
„ compofons l'Eglife, Quel titre avez -vous
„ donc pour foumettre ainQ nos jugemens
communs à votre e(prit particulier ? Quelle
infupportable fuffifànce de prétendre avoir
„ toujours raifon , & raifon feuls contre tout
„ le monde ^ fans .vouloir laifler dans leur
„ fentiment ceux qui ne font pas du vô-
I, tre , & qui penfent avoir raifon auf-
„ fi (*) 1 Les diflinftions dont vous noiis pa-
„ yez feroient tout au plus tolérables fi vous
„ difîez Amplement votre avis , & que vous '
„ en reftaffiez-là ; mais point. Vous nous faî-
I . — -" — — -- -' „>^_^^_^_^__^^.^^»^_^_„_^^_^^^^^ — .
(♦) Quel homme, par exemple, fut jamais plus
tranchant plus impérieux, plus décifif, plus divine-
ment infaillible à fon gré que Calvin , pour qui la
moindre oppoCtion la moindre objedlîon qu'on ofoît
lui faire étoit toujours une œuvre de fatan , un cri»
me digne du feu ? Ce ïi'eft pas au feul Servet qu*il
en a coûté la vie pour avoir ofé penfer autrement
<jiie lui. r .
1
J04 SECONDE
„ tes une guerre ouverte ; vous foufflez le feo
„ de toutes parts. Réfifter à vos leçons c*eft
„ erre . rebelle , idolâtre , digne de rdifer.
,, V h:s voulez abfolument convertir , convaîn*
„ cre, contraindre même, ^ Vous dogmatifez,
„ vous prêchez , vous cenfurez , vous anathé-
„ matîfez, vous excommuniez, vous puniflez^
vous mettez à mort : vous exercez Tautorité
des Prophètes , & vous ne vous donnez que
„ pour des particuliers. Quoi ! vous Nova-
„ teurs , fiir votre lèule opinion , foutenus de
„ quelques centaines d'hommes vous brûlez
„ vos adverfaires; & nous, avec quinze Sié-
„ clés d'antiquité & la voix de cent millions
„ d'hommes , nous aurons tort de vous brû-
„ 1er ? Non , ceflèz de parler d'agir en Apô-
„ très, ou montrez vos titres, ou quand nous
i, ferons les plus forts vous ferez très -judo?
^1 roçQt traités en împofteurs. ^l -
0>
LETTRE. 105
A ce difcours, voyez -vous, Monlîeur, ce
que nos Réformateurs aoroîent eu de folide à
répondre? Pour moi je ne le vois pas. Je pen«
fe qu'ils auroient été réduits à fe .taire ou k
f^re des miracles. Trifle reflburce pour des
amis de la vérité !
Je conduds de -là qu'établir la néceffité des
nurades en preuve de la miffion des Envoyés
de Dieu qui prêchent une doéhrine nouvelle,
cefl; renverfer la Réformation de fond -en -
comble ; c'eft faire pour me combattre ce
qu'on m'accufe fauflement d'avoir fsdt.
Je n'ai pas tout dit , Monfieur, fur ce cha-
pitre; mais ce qui me relie à dire ne peut &
couper , Ôc ne fera qu'une trop longue Lettres
D efl tems d'achever ceQe-ci.
Qs
106 TROISIEME
LE T T RE TROISIEME.
0
J £ reprens , Monfieur , cette queflion des mi*
racles que j'ai entrepris de difcuter avec vous,
& après avoir prouvé qu'e't^blir leur néceffité
c'étoît détruire le Proteftantifine, je vais cher-
cher à prâênt quel eft leur ufage pour prou-
ver la Révélation.
Les hommes ayant des têtes fi diverfement
crganifées ne {àuroient être aiFeétés tous éga«
lement des mêmes argumens, furtout en ma*
tîeres de foi. Ce qui* paroit évident à l'un ne
paroit pas même probable à Tautre j Tun par
fon tout d'eJprit rfefl: frappé que d*un genre
de preuves , l'autre ne l'efl: que d'un genre tout
dîflFérent. Tous peuvent bien quelquefois con*
venir des mêmes chofes, maïs il eft très-rare
qu'ils ea conviennent par les mêmes raifons:
LETTRE. 107
ce qui> pour le dire en pailâhc^ montre corn*
bien la difpute en dle-même eO; peu fenfée:
autant vaudroic vouloir forcer autrui de voir '
par nos yeux.
lK>rs donc que Dieu donne aux hommes oœ
Kévéladon que tous font obligés de croire» il
faut qu'il rétablilTe fur des preuves bonnes
pour cous , & qui par conféquent foient auffi
diverfes que les manières de voir de ceux
qui doivent les adopter.
Sur ce raifonnement » qui me paroit jufte ^
fimple, on a trouvé que Dieu avoit donné à
la nûflion de fes Envoyés divers caractères
gui rendoient cette mifllon reconnoiflkbie à
tous les hommes, petits & grands , lages âc
fots , favans & ignorons* Celui d'entre eux
qui a le cerveau afTez flexible pour s'affeâer
à la fois de tous ces caraâe^res eft heiu'eux
ians doute ^; mais celui qui n'efl: frappé quft
io8 T R O" I S I E M E
de quelqiies-uns tfeft pas a plaindre, pourvu
qu'il en foit frappé fuffilàmmenc pour être
* perfuadé»
Le premier , le plus important , le plus cer-
tain de ces caraéteres fe tire de la nature de
ladoârine; c'efl;- à-dire, de Ton utilité, de fa
beauté (i), de fa^fainteté, de fa vérité, de
fa profondeur, & de toutes les ^lutres qualités
qui peuvent annoncer aux hommes les indruc-
(i) Je ne fais pourquoi Ton veut attribuer au
progrès de la philofophie la belle morale de nos
Livres. Cette morale, tirée de TEvangile, étoit
Chrétienne avant d*être philorophique. Les Chré-
tiens Tenfeignent fans la pratiquer , je l*avoue ;
mais que font de plus les philofophes , fi ce n'eft
de fe donner à eux-mêmes beaucoup de louanges ,
qui n*ctant répétées par perfonne autre, oc prou-
vent pas grand chofe , à mon avis ?
Les préceptes de Platon font fouvent très-fubli^
mes, mais combien n'erre-t il pas quelque fois , &
Jufqu'oii ne vont^ pas fes erreurs ? Quant à Cice-
ron , peut^on croire que fans Platon ce Rhéteur euç
trouvé fes offices ? L'Evangile feul eft quant à la
loprale, toujours fur, toujours vrai, toujours um-;
que» & coujouxs femblable à lul-mâme.
dons de la fuprême fagefle, & les préceptes
delà fuprême bonjé. Ce caraftere eft, corn,
tne j'ai dit, .le plus flir, le plus infaillible, il
porte en lui-même une preuve qui difpenle de
toute autre j mats il eft le moins facile fk conf-
tater: il exige, pour être fenti, de l'étude de
la réâcydotï dei connoiiTances , des dlfcuilions
qui ne conviennent qu'aux hommes fages qui
font înftruîts & qui favent raifonner.
Le fécond cara^ere eft dans celai des hom*
mes choifis de t>ku pour anncwicer fa parole ;
leur fainteté , leur véracité , leur juftîce , leurs
mœurs pures & fans tache , leurs vertus înac-
ceflibles aux paffions humaines font, avec les
qualités de l'entendement, la râîfbn l'elpritte
favoir la prudence, autant d'indices relpefta-
•bles, dont Ja réunion, quand rien ne s'y dé»
ment , forme une preuve complette en leur
Êveur, & dit qu'ils font plus que des hom^
ito T tl 0 î S 1 Ê M Ë
pies. Ceci efl: te fjgoe qiii frappe pat prëfër^fr
jçe les^eos bofis ^ droits qui voyent la vériU
par tout OÙ: ils voyient la juCkicet & n'encea^
) ctenc la voix de Dieu que dans* la bouche de
Ja vertu. Ce çaraôere a ft çjçrtitudc encore,
mais il tfeflr pa$ impoffible qu'il, trompe , & ce
n*eft pas un prodjgç qu*ua . impofteur abule les
gens de bkii» ni qu'un homme de bien s'a-
bufe lui-mêaie » entraîné par Fardeûr d'un fainc
Mk qu'il pceochm. pour de. IjWpiration*
Le troifikme caraftere des Envoyés de-
Dieu . . eft ane én^âpàtion de là JPuiflknce di«
V
vine , qui peut interrompre .& changer le
cours de la nature à la volonté de ceux qui
reçoivent cette émanation. Ce caraâere dt
SoM contredit le plus brillant des trois , le plus
irappant, le plus prompt à fauter aux yeuKj
^relui qui fe marquant par un efiet fubit & fen»
jQble^ femble exiger le moins d'examen & de
\
LETTRE; «tl
difcuffion :« par- là ce caraâere eft aufll celui
qui faifîc fpécialemeût Je peqple , iotapable de
raifonneniens fuivis , d'obfervatioos lenoes (Se
fûtes j & en toqte çhofe efdave de fes feni:
mais c'eft ce qui rend ce même caraétere é*
qaivoque, comme il fera prouvé diaprés; Se
en effèc, pourvu ^'il frappe ceux auxquels il
eft dediné qu^ùnporte qu'il foit apparent lou
rédf Ceft une di(lîn£Uon qu'ils font hors d'^«
tatde faire: ce qui montre qu'il n'y a de ligne
vrafan^t certain que celui qui iè tire de la
doârine, & qu'il n'y a par confêquent que
les bon^ raifonneurs qui puifient avoir une f<A
f<àkk &fàTGi mais^la bonté divine fe prête
«QX foiblefles du vulgaire & veut bien lu!
donner des pf&u^s qui faflîent pour lui.
Jelifarrêce id fans rechercher fî ce dénom-
brement peut alter plus loin: c'cft une difcur.
(ion inutile khnàttt: car ilêA clair que quand ^
m TROISIEME
tous^^ ces fignes fe trouvent réunis c^en ed: a(^
fcL pour perluader tous les hommes , les fages
les bons & le peuple* Tous, excepté les
foux, incapables de raîfon, & les méchaas
qui ne veulent être com^incus de rien»
Ces cairaâeres font des preuves.de Tauto-
rité de ceux en qui ils léfident;^ ce font les
jaifons fur lefquelles on efl obligé dé leâ croi-
re. Quand tout cela eft fait la vérité de leur
miffion ed établie ; Ds peuvent alors agir avec
droit & puifBmce en qualité d'Envoyés de
Dieu. Les preuves font les moyens , la foi
due à la doârine eft la fin. Pourvu qu'on ad*
«ette la doârine c'eft la chofe la plos Vaine
de difputer fur le nombre & le choix d^
preuves , & fî une feule me perfuade, vou*
loir m*en faire adopter d'autres efl un loin
perdu. Il feroit du moins bien ridicule de fba«
tenir qu'un homme ne aoit pas ce qu'il die
croire.
\
ti E t t R È
"S
feroite, parce qu'il ne le crdit pas prédfénieM
par le3 mêmes nufbtis qœ nous difons avoir
de le ctoire auilL
Voila» ce me femUë, des principies dair»
& incoQtefbbles : venons à rappKcadon. Je
m^ déclare Chrétien ; tnes perfécutenn difens
que je ne le fuis pas. Us prouvent que je im
fiiis pas Chrétien parce que je rejette la Ré^
véiation , & ils prouvent que je rejette la Ré-^
véiation parce que je ne crois pas aux mî«
iades.
Msûs pour que cette conféquence fut jufte^^
û {iaudroit de deux cbofes Tune : ou que le<
miracles fuflent Tunique pireuve de la Révé«
hcioni od qile je rejettaffe également les aiï*
très preuves qui Fatteltent. Or il n'eft pas
ttai que les miracles foîent rùnîque preuve
de la Révélation^ & il n'dl pas vrai que je
tejette les autres preuves ; puifqu'au cbntrakiqf
Psrtiê l H
n4 * TR O I s I Ê M'E
on les trouve 'établies dans l'ouvrage tdêtû»
OÙ Ton m'accufe de détruire h Révélation (2)»
Voila précifçment à quoi nous en fomnics.
Ces Meifieurs, déterminés à me faire malgré
ftioi rejetter la Révélation , comptent pour
rien que je l'admette fur les preuves qui me
convainquent 9 fi je ne Tadmets encore fur cel^
les qui ne me convainquent pas ^ & parce
que je ne le puis ils difent que je la rejette.
Peut-on rien concevoir de plus inj'ufte & de
plus extravagant?
r Et voyez de grâce fi j'en dis trop ; lorf-
qu ils me font un crime de ne pas admettre
» I Éi * I I II.*! É. m>
' (2) Il Importe de remarquer que le Vicaire pou-
voit trouver beaucoup d'objeftions comme Catho-
lique, qui font liullcs pour un.Proteftaîit, Ainfi le
fcepticifme dans lequel il rcile ne prouve en auca*
ne façon le mien , furtout après la déclaration très
«xpréfle que j'îd laite 4 la fin de! ce même Ecrit.
Pn voit clairement dans mes principes que pJu-
*Ceufs des objeftions 'qii'il'coniient portent à faux.
L Ê T T R Ê. us
taâe preuve que non feulement jéfuis n'a pas
donnée 5 mais qu'il a refufée exprefTément^
Il ne s'anonça pas d'abord par des miracles
mais par la prédication. Â douze anis il di&
«
putoit déjà dans le Temple avec les Doc«
teurs^ tantôt les iticerrogeant & tantôt la
furprenant par la fageife de fes réponfes. Ce
Fut là le commencetpent de fes fonfliohs ^
comme il le déclara lui-même à fa mete & &
Jofeph (3). Dans le pays avant qu'il fit aucun
miracle il fe mit à prêcher aux peuples le Ro^
yaume des Cieux (4) » & il àvoit déjà raflenl-
blé pIuGeurs diiciples lans s'être autorifé prèi
d'eux d'aucun ilgne ^ puifqu'il efl: dit que ce
fiit à Cana qu'il fit le premier (5).
Quand il fit enfuite des miracles , c'étoit le
(3) Luô. Jtl. 45. 47. 49.
(4) Matth. IV. 17.
(J) Jcin IL II, Je ne puis penser que perfoA-
Ha
ti6 TROISIEME
plus fbuvent dans des occafions pardculîere»
/
dont le choix n'annonçoic pas un témoignage
public, & dont le but étaîc fî peu de manifef-
Jler fa puiiTanee, qu*0D ne lui en a jamais de-
mandé pour cette fin qu'il fte les ait refufés.
Voyez là- deflus toute Thiftoire de fk vie; é-
coutez furtout fk pro]pre déclaration: elle eft
ij décifive que vous n*y trouverez rîen à ré-
pliquer.
Sa carrière étok déjà fort avancée y quand
ks Dofteurs , le voyant faire tout de bon le
•Prophète au milieu d*eus, s'avi&rent de lui
demander un figne. A cela qu'auroit dû ré-
pondre Jéfiîs, fcloai vos Meffieurs? „ Voiis
,, demandez un figne, vous en avez eu cent
•„ Croyez- voui que je fois venu m'annoncer à
• — III I .
ne veuille mettre au nombre des lignes publics de
fa million la tentation dix diable & le jeûne de quv
jfODte jours.
LETTRE. tir
,, voi^s pour le Meflle lâns commencer par
^ rendre témoignage de moi 5 comme fi jV
,, vois voulu vous forcer à me méconnoître :
,, & vous faire errer malgré vous? Non , Ca«
,y na , le Centenier, le Lépreux , les aveu^
„ gles, les paralytiques, la multiplication des^
,, pains, toute la Galilée, toute la Judée dé-
„ pofent pour moi. Voila mes fignes ; pour^
„ quoi feignez- vous de ne les pas voir?"
Au lieu de cette réponfe , que Jélîis ne fit *
point, voici, Monfieur, celle qu^il fit»
. ha Nation méchante & adultère demande un
M^^t f? il ne lui en fera point donné. Aîl-
leurs il ajoute. // ne lui fera point donné d^m^:
trejigne que celui de Jonas le Prophète. Et leur^
tQurnam le dos , il 1 V» alla (6),
Voyez d'abord comment , blâmant cette
- - - I .
(fi) Marc. VIII. 12. Matth. XVI. 4. Pour abréger'
j'ai fondu enfemble ces deux pafTages , mais j'af
eoQfcrvé h diftinaion eflencielle à la queftion«
H3
n^ TROISIEME
«
manie des fignes miraculeux , il traite eenii .
qui les demandent? Et cela ne lui arrive p^s^.
une fois feulement mais pjuiieurs (7). Dana
lô fyftéine de vos Meiïieurs cette demande ë-
teit très légitime : pourquoi donc infuher cea^ -
. qoi la faifoient ?
-.Voyez enlîiite à qi^î nous devons ajouter foi
par préférence ; d'eux, qui foutiennent que.
c'cil rejetter la Révélation Chrétienne que de
nelpas admettre le$ xmrades de Jéfus pour ka
fignes qui l'établiflent, ou de Jéfus lui^mênié,, .
qui déclare qu'il n'a point de figne à donner^
"ilfs demandercMit ce que c'eft donc, que le
figne de Jonas le Prophète? Je leur répondrai
que c'eft fa prédication aux Ninivîtes , préd*?
fément le même figne qtfenployoît Jéfus s^ec-
~arr, — ■■■'■' . ' ■ > ■ ■■' "1
t
^^.Coaferez les paf&ges fuivans, Mattb. XIL-Sp^
41. Marc. VIII. 1.2, Luc. XL 29^ Jcfia IL iS» I5f-.
JY- 4a.,.V. 34. 3(5.39. .
t
LETTRE.' 11^
lés Juîfe, coîmne il Tcxplique lui-même (8);
On ne peut donner au fécond paflàge qu^un
fens qui iê rapporte au^ premier , autrement
Jéfus fe fcroît contredît. Or dans le premier
paffage où Ton demande un miracle en figne,^
Jéfus dit pofitîvemcnf qu*il n'en fera doiïné
aucun, ' Donc le fens du fecond paffage rfin-*
diqae aucun" fîgne miraculeux. *
Un • troifiefne paffage ,îniîfteFont-ik, explî-f
que ce fîgnè par là réfurreftîon de Jdfos (9);
Je le nie ; il l'explique tout aiî plus" par fa^
moTt. Or la mort d'un homme 'n'efl: pas ui>
miracle; te n'en eft pas même un qu'aprésr
* ^
avoir refté trois jours dans la terre dn corp^
en fok retiré. Dans ce paffage il tf eft pastîii;
un mot de la réfurreOSon. D'ailleurs queP
genre de preuve feroît - ce de Vautorifer durant
(a) M4tth..XH. 41. LttcXI. 30. 32"
(9) Maith. XII. 40.
H4
i^
|Sg T R O I !B I E M Ç
fz vie far oq flgne qui n'aura lieu qu'après fii
ipprt ? Cq feroit yoi^loir ne trofiver que d^
i|îp-édule^ ; ce feroit cacher la çbaqdelle fQu$
Iç boifTeai): Cominç cefte conduite feroit iut
4
jufte, cette interprétatioq feroit wpîc
Pe plus, Fargqment invincible revient enn
çpre. Le fens di| çroifieme paflage ne do^t pas
attaquer le pren^er , & le preniier affirme
^'il ne fera point doqné 4e figqe, poiqt da
tpqt, aucun. Enfin, quoiqu'il en puifie être,
il refte toujours prouvé par le téqioignage do
Jéfus même 9 que, s'il a fait des miracles dii«
i^nt fa vie , il q'en a pqint fait ep Ijg;ne de
la miflion.
Tputes les fois que 1^^ Juifi^ ont înfîfle fqi;
ce genre de preuves j^ il les a tpujqurs reqvç^
yés ayeç mépris , faps daigner j|amais les Czst
»
çisfaire. Il n'appiouvoit pas même qu'on prit
CEI ce fcn3 fes oeuvres de charité. Si vous n^
L ET T R E. i»i
j^oyez des pro£ges & éks niîrachs\^ vous m
croyez, point ; difoic-il à celui qqî le priok de
guérir ion fils ( lo). Parle-t-^cm fur ce toiH
là qaaqd on veut donner des prodiges en
preuve^? ;
Co^ka n'élpit-il pas étonnant que, s'il
$a eiic tant .donni^ de teHes, on continuât iko$
cefTe à loi en demander? Quel miracle fifis-tti^
lui diibient les Juifii , afin qui FayanS vu mus
trêyons à Ht.?, Moyfe donn^^ ia fn^m(!^ÂW^ k
Mfert à nos fer^si mais tri ^ qjnelk^qsfmefm'^,
tu (ay? Ceù, k peu près, dans lefens de vof
MeBiedrs, ât laiflànt à part la Majeft^ royale,
«pmme fi quelqu'un venoit dire k Frédéric,
On te £t un grand Capitaine ; (^ paurqwn denc f
Qu*as^tu fait qui te montre teI2 Gujiave Vûùh
9ttft à l^pfifi à Dazen^ Charles à Frétât k
(lo) Jean IV. 48.
{tk) Jcaa VI. 30. 31. & fuiv. •i
H 5
î«4 T'ÎRX) I S ï ITM^E
Narva ; 'fids ekvfoé th^ fnimménsf Qàéftéf
tnitùite^ as -tu fimpùrtée^ qu^^lacê^ aï- tupi^
ft^ quellâ maf0hè-^s-m fyfP6j}^$lle Campagne^
fa ô^m'^ ^lkrfi?^T^^é^ (fB^'^dféU pmrtés^^ m
le fumi de Grand? L'impudence d*bÊ pareil
âîfcoairs.efb etle côncevitbley^âs' d-ouvdhôk-'on
tenir? < •.\V:*)v. '**''• -'• • '-'- ■".*:'■ . .'. ^ '■
Cepênâmçvfàns faire. {mute 4 cèiisc^^ qui hA
en teiK)iâl^^^a^^f€lllbIàbtev fânsMé^^ accoixier
aucun mÉïicfe'î \^faâ8 les'écfiSef au moins C»
igfettx^ qrfa-àt^itnfeiîtst,- jéfuè'^ efi ilponfe^ hUf
queftîon , fé cômente à*z\\égoti(ep fwr le psua
âa Ciel: zûfR,- loin gué Ùl rëponfé lui dmmâsr
âé nouveaux. Êifcipkff, elle lui ê» ôla pkti
fifeurs de ceu* quir4v<«^kj & goi,' fan^doate-i
penfoîent comme vosc Théobgieni' ta défer*»
tîôn fut tëÏÏFquH dit aux douze ; Et vous , ne
%ioukZ'Vous pas wijji vous en alUr? D ne pa^
L E T ^T R H Kj
lofr pas qu'il eac fort à cœar <i6- eenferve^
eeox qu*il ne poaToic reieâir qûâ par deà
jniiacles/ »
Les Juifs demstndc^ént un figne du Ciel
Dans leur fyftSme» Ssavoiftirnâbii. Lefigoe
qui devok conftat^ la venue^ dû Meflie ne
poQVpk pour emt être trop évident » trop dé^
dGf , trop au defiu» de tout (bupçon , ni avo»
tn^ de témoins occulaiiesj eomme le témoî«
gt^ge immédiat de Dieu vàiit toujouri mieux
< »
^ celo) dea ké^ntees, îi étcnt phxs fftr d'ëfl
ctoiipeau figne même, qu^aux gens qui difoient
ravoir vu., & pbbr cet èSbt le Cid étoil
préfâable à la terre,,
Lea Juifs avbient done ridfon d^ leur
vua^ ^ree qu'ils voûloient un'Mëffie appa-»
tdan âc tout miraculeuï. Mais Jéfus die apréc
le JRrc^ête que le ''Royaume ^des-CSefox ne
vient *|io^ avee-appittence^ que çdm qpi
Ï24 T R O I s i E M E
V
]*annonçe ne débat point , net crie points qu'on
n*entend point fa voix dans les mes. Tout ce*
la ne refpire pas Toftentation des miracles;
auffi n'étoit-elle pas 1$ but qu'il fe propofoit
dans les fkns. U ii'y Q^ttQic ni Tappareil ni
Faudiendcité néceflàir$i.( %potB: conftater de
yraîs fignès» parce qu'il ne les donnoit point
pour tels. Au contraire il recommandoic ' le
fecret aux malades qu'il guérifloit , aux boi«
teux qu'il £ûfoit mardie^^ ^j; poiTédés 91'il
délivroit du Démon. L'on eut dit qu'il crai*
gnoit que fa vertu miraçuleurQ ne fut coamie;
on m'avouera que c'était .une étrange .mamere
d'en faire la preuve dé fk miilioQ.
Mais tout cela s'explique de foi-ménie > û-
tôt que l'on conçoit que le^ Juifs allpient çbeiv
cfaaitt cette preuve où Jéfi^s ne vouloâ; pas
qu'elle fut. Celui qui. me rejette a^ difei(.ii»
%t4ile juge^ Ajoutoit-il, ks n^açlfs fue j'aé
LETTRE. i2|
faits le condanneront? Non, mais; la parok
que fai portée le condannera* ha, preuve efl
donc dans la parole & non pas dans les miU
racles.
On voit d^s FEvangile que ceux de Jéfus
écoient tous utiles : mm ils étoient fans éclat
(ans apprêt fans pompe , ils étoient fimples
comme fês difcours, comme fa vie^ comme
toute fa conduite. Le plus apparent le plus
palpable qu*il ait fait efl: fans^ contredit celui
de la multiplication des cinq pains & des deux
poiffons qui nounirent cinq mille hommes.
Non feulement fes difciples avoient vu le mi-
racle, mais il avoit pour ainii dire paiFé par
leurs mains; & cependant ils n'y penfoient
pas , ils ne s'en doutoient piefque pas. Con«
cevez-vous qu'on puiiTe donner pour lignes
notoires au Genre humain dans tous les fié-
des des faits auxquels les. témoins les phuf
ta« T. R 0 t S t Ë M Ê
imoiédiâts font à peine attention (5)t
Et tant s'en faat que Pobjec réel des miti^
clés de JéSks fat d'établir la fpi , qu'au com
traire il commençoit par exiger la foi avant
que de faire le miracler Rien tt'eft fi fréquent
dans rEvangîle, Ceft précifément pour cela^
c^eft parce qd*un Prophète n'^ft fans honneur
que dans fon pays > qu'il fit dans le fîen très
peu de iniradôs (r) ; il efl: dit même qu'il n*efl
pût faire, à caufe de leur incrédulité (d).
Comment? c'étoit à caufe de leur incrédulité
xfjLil en faîloit faire pour lés convaincre, fi fês
-miracles avoient eu cet objet; mais ils ne Ta*
voient pas. Cétoient fîmplement des aâes dd
(p) Mire. VI. $2- Il eft d(t que c'étoît â caufe
«ue leur cœur étoit ftupide; mais, qui s*oferoît van«
ter d*avoir ^in'ccBur plus intelligent dans les chofes
(àintes que les , ^fciples choiûs par JéfttS4
(0 Matth/xiIL S8*
id) Marc VL $♦
LETTRE: ttf
bonté, de diarité,.de bien&îlànce, qu'il fiu«
foit en fiiveur de Tes amis, & de ceux qui cro"
ydenc en lui ; & c'étoit dans de paieili aéles
que confiftoîent les œuvres de miféricorde ^
vraiment dignes d'être fiennes , qu'il difoio
rendre témoignage de lui (e)^ Ces œuvres mar«
quoienc le pouvoir de bien faire plutôt que la
volonté d'étonner, c'étoientdesverttts(/) plus
que des miracles. Et comment la fQprême fa*
gdlë eut-elle employé des moyens fî contraires
àMa fin qu'elle fe propofoit ? Comment n'euc«
elle pas prévu que les miracles dont elle appu-^
yoit l'autorité de Tes Envoyés produiroient un
eiFet tout oppofé , qu'ils feroient fufpeâer ki
vérité de l'hiftoire tant fur les miracles que for
ia miflion , & que parmi tant de folides preu^
(e) Jean. X. 25. ^2. 38.
(/) C'cft le mot employé dans rEcriturc ; not
traduéleurs le rendent par celui de mûacles.
•^
«r TROISIEME
•f
M «4 a
Tes, cdle-là ne fefoicque rendre plus
&r toutes les autres les gens éclairés & vrais?
Oui je le foutiendrai toujours , Tappui qu'on
veut donner à la croyance en efl le plus grand
obftacle : ôtez les miracles de FEvangile &
toute la terre e(t aux pieds de Jéfus-Chrifl: {£)4
Vous voyez , Monfieur , qu'il efl attefté par
FEcriture même que dans la MilSon de JéiUs^
Chrîfl; les miracles ne font point un fîgne telle»
Bsrât néceflàire à la foi qu'où n'en puifTe avoir
fims les admettre. Accordons que d'autres paf^
ûges préfentent on fens contraire à ceux-ô^
s (£) Paul préchant aux Athéniens fut écouté fort
pâifiblement jufqu'à ce qu'il leur parlât d'un honN
me refrufcité. Alors les uns fe mirent à rire; les
Éûtres lui dirent: Célâjuffii, nous iniéndrdris le rejli
mu MUft fois. Je ne fais pas bien ce que penfeat
au fond de leurs jcœurs ces bons Chrétiens à la
mode ; mais slis croyent à Jéfus ^ar fes tniracfes »
ifidl j*7 crois malgré Tes miracles , & j'ai dans^ Vci*
prit que 8la fot vaut niei|a çue iâ'ktfr.
LETTRE. i£<|
ceux - ci rédfn'ogaemeiic préfentent on fmi
contraire aux autses, & aldC3 je d^oifls^ u@mc
de mon droit , celui de ces fens qui me paroîc
le plus laifonnable âc le plus clair. Sifavois
l'or^udl^de vouloir tout ex^quer> je poutroit
en vrai Tliéolpgien tordre & tirer chaque
paffi^ à moa fens ; mais la bonne fcÀ ne ine
permet point ces interprétations Sophîftiques;
fttffifamment autorifi^ dans mon iêntimâit (b)
(b) Ce fentîment ne m'eft point tellement parti-
calier quUI ne foît aaflî celui dé pluiieurs Théolo-
giens dont l'orthodoxie eft mieux établie que celte
du Clergé de Genève. Voici ce que m'écrîvoît la*
delTus un de ces Meffieurs le 28 Février 1764.
„ Quoîqû'en dife la cohue des modernes apolo*
\j gifles du ChiilUanifrae, je fuis perfuadé qu'il n'y
„ a pas un mot dans les ' Livres facrés d'où l'on
^, puiflb légitimement' conclurre que les miraclej|
yf aient été deftînés it fervir de preuve po^r Ie$
,y hommes de' tous les tems & 4e tous les lieux.
,9 Bien loin dé -là , ce n'é;:oit pas i mon avis le
„ principal objet pour ceux qui en furent les té*
„ moins oculaires. Lorfque les Juifs demandoien^
„ des miracles i Saint Paul » pou/ (oute jréponfp
Partie L I
n9
TROISIEME
pair cç<[ae je comprendi, je re^e jen paix fUr
$e ^e je œ GOiopréods pas, & que ceox.qut
me rexptic|UeDt nie font encore taokm com«
pt&aàt9^ L'autonité que je donne à 1 Evangile
|e^ ne la donne poinc aux interpiétatic|ns des
homHies» & jft n'enteods pas pitas les foumet^
tre à la nûenoe qtte me foomectre à la leur*
.Ji*B
Il leur'pirèchoit Jéfus cmcîfië^ A coup fur fi
Ôrotiu9, le» Auteurs de la fociété de Boyle^
Vernes, Vernet &c. euflent été à la place de cet
Apôcre, ils n'aaroient rien eu de plus prefTé que
d*en¥oyer chercher des tréteaux pour fatisfairc
à une demande qui quadre fi bien avec leurs
ptindpes. Ces gens -là croyent faire merveilles
avec leurs ramas d'argumens; m^is un jour on
doutera j'efpere, s'ils n'ont pas été compilés par
une fociété d'incrédules, fans qu'il faille être
J^s^^douin pour cek.<<
, Qu'on ne penfe pjas , ^u refte que l'Auteur dç
cette Lettre ibit mon . partifan ; ttnt.s'eQ faut: il
eft un de mes adyerfajses* Il trouve feulement que
les autres ne fayent ce qu'ils difent. Il foupçonne
pcttt-âtre pis : car la fol de ceux qui croyent fut
les miracles, ffra toujours très fufpeâs aux ge&s
éclaixj£$.
If
99
91
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99
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h E T T HE. 131
La régie eft cooimime, & dske ep ce qui
importe ; la raifon qui l'explique eft: paniC^*
re, & diacuti a la fienne qui ne fait autorité,
que pour lui Se laifler mener par aotrqi fur
cette madère c'efl: fubftituâr rexplxjsitioà 'an
texte, c'efl: iè foomettré aiâc hpmmes & non
pas à Dieu.
Je reprends môQ hafomiement, & après âh
voir établi que les mkaelcs se. font pgs un fi-
gue héeeflaire à la foi» je vais montrer m
confirmation de x!ela que ks miracles ne font
pas un figne inÊuHible & dont les homm^
puifient jttgor.
Un miracle eft, dans un fait particulier,^
un aâe immédiat de la pdlTance divine» un
diangement fenfible dans Tordre de la nature,
une exception réeSe & vifible à fes Loix^
Voila ridée dont il ne faut pas s^écarter .fi
fon veut s'^wttpdre en raifonnant far cette
V
la,
I31Î TROISIEME
matière. Cette idèa offre deux qaëftîoos à ré*
foudre.
La première : Dieu peût-îl faire des mira-
X
des? Ceft^à-dlre, peutâl déroger aux Loix
^a'il a établies? Cette qûeftioû férieuièment
itraitée feroic impie Ci elle n'étoît abfurdej ce
feroît faire trop d'honneur à celui qui la réfbu-
-droît négativement que de le punir; i} fuflSroit
-de l'enfermer. Mais auflî quel hoxmne a ja^
'mais nié que Dieu put faire des miracles? Il
falloit être Hébreu pour demander fi Dieu
.pouvoit dr^ffer^des tables dans là défert.
Seconde queftion : ' Dieu veut * il faire des
jniracles ? C'efl: autre chofe. Cette queftion en
elle-même & abftraéHon ' faite de toute autre
.confidératîon eft parfaitement indijBFérente ; êl-
\t n'interéÏÏe en rien la gloire : dé Dieu dont
nous ne pouvons fonder les, deffeins. Je dirai
plus ; s'il pouvoit y avoir quelquis :}diff^encfe
L ET T R E. 135
ciuant à h foi dans la manière d y répondre ,
les plus grande» idées que nous puiflions avoir,
de la fagefle & de la majefté divine feroient
pour Ja âégitive, il n'y a que Torgucil humain
qui foit oMte. Voila jufqu'où la raifon^ peut
aller. Celte queftion , du refie^ efl: par&nent
oi&ufè, <Se pour la réfoudre.il &udroit lire dans,
les décrets étemels i car . comme on verra
tout à rtoiië, die efl inqpoSiblë à dédder par*
les^faita^/Gardcms nous ^Qticd'o&r plorter uir
ràl curieux:, fur ces myftefps; 7Rctad0ns.ce refe
peâ à Teflence infinie de neirien pron<Mice&
d*dl^: nous n'en coimoifions quC' rimmeaScé#
Cepaidant quand un mortel vient bardîr;
ment nous,ài£imer qu'il;' a vu im^ miracle» -il
crandie net câlte grande qudlion ; jugez (i
Ton doit reiiapoiré iîir fa parole! Ilsferoienc
mille que je ne les en croiroîs pas.
. Je Jai0è \ paitJe groifia: fophifme d'emplo*»
I 3
» r
1^4 T R O I S I E M E
yer la preave mora|e à cohftater des Faic^ mh
(orellement impoffibles , pais qu'alors le prin^
dpe même de la crédibilité fondé i!ir la pôf-
fibilité naturelle ëft en défaut. Si les horn*
mes veulent bien en pareil qas admettre cecto
preuve dans des choies de piire (pécidatîon ,
un dans des faits dont la véritéme: les «toadie
guera,' afFurom^^noiis (|u'ils fefoi^t pieu diffi^
cilQs s'il s'agiiS)it jptour eux du mc^indt^e intérêt
t^npord. Suppofons qu'on mort' Vint rede*
ifiiander (bs lâens k^&s hériâarsiaffiitnant qû'i)
eft. t^ifafdté ^^-fèquérant d'acte adinis à I4
preuve (1),i ««jy^-vous qu*il y Jût lïn feul tri-
buzial fui* la terré où cda lui fat;'aât^dé?Mai&
encore un coup'ïi'tfntamCtns pas ici ce débat:
laliiS>ns aax f^ts isoute la c^ptitûde qu^^m Uxat
■ ■ I I I ; j 11
y
(i) Prçnez biôn garde que dans ma ' fuppofîdoa
«îeft une réftutéâlon xéïlUlAt.&^iUI^ {^as-oaç f%Qf«
f<S IQQK ^u'il s'agî( de couljater^.
LETTRE.
i^iS
jj[ùe le fens peuc attester de ce que la raifoii
jpeut conclurre.
Paî(qa*un miracle dt une exception auji
Loixde la'nature, pour en juga- il faut con^
nottre oes Loix ^ & pour en juger fûrement il
faut les connoître toutes: car une feule qu'on
ne connoietoit pas pourroit en certains cas in*
connus aux fpeâateurs changer Tefiet de cel^
les qu'on connoîtroic Ainû celui qui prononce!
qu'un tel ou tel aâe eÙiuÀ miracle déclare qu'H
connoit tobte^ les Loix de h nature & qu'il
iâit que œt a£te en elt une exception.
Mais quel eH de niortél qui connoît ioUi
tes les Loix de la nature? Newton ne k van-»
toit pas dé les connoître. Un homme (âge té^
inoiil d'un fait idouï pebt àtteftér qu'il a vu ce
(ait & l'on peut le croire ; mais ni cet hommdf
jfâge ni nul autre homme fage fur la terre n'âf-
&iii^a jamais que ce fait, quelqete étennarif
l4
•'' \
I3<5 TROISIEME
qu'il puîfle êtte , foitr un miracle ; car com-
ment peut - il le favoîr ?
Tout ce qu'on peut dire de celui qui fe
vante de faire des tniracks cft qu'il fait des
chofes fort extraordinaires; mais qui eft-ce
qui nie qu'il fe falle des chofes fort extraor-
dinaires ? J'en aï vu , moi , de ces chofes
/ là, & même j'en ait fait (*).
m ■■ I III < ■ , !■ -i ■ I .■..,■■. i..iy II ,1 .
(k) J*ai vu à Venife en 1743 une manière de
forts aflez nouvelle, & plus étrange que ceux de
Prenefte. Celui qui ies vouloit confulter entroit
dans une chambre, & y reftoit feul s*il le defiroit.
Là d'un Livre plein de feuillets blan6 il en tiroh
4 un i fon choix ; puis tenant cette feuille il deman-
<}oit, non â voix haute, mais mentalement ce qu'il
vouloit favoir. Enfulte il plioit £à fcuillff blan»
che , l'enveloppoit, la çachetoit, la.plaçoît dans
un Livre ainfi cachetée : enfin après avoir récité
' certaines formules fort baroques fans pje/dre fon
Livre de vue, il en alloit tirer le papier, recon-
nottte le cachet, l'ouvrir, & il troûvoit ùl répcmfe
' écrite.
Le magicien qui faifoît ces forts étoît le premier
• Secrétaire de TAmbailàdeur de Fran<îe^& il s*app^
loit J. J. Rou fléau.
L E: T T R :E. 137
li'écude de la nature y fait faite tous les
jours d^e nô^vçfies découvertes : ' nadoÛrie b>
TMÔDQ fe pecTeâiome tous les jours. \ h^ CSiy»
mie coneafe :9 des ctatifmutations, des préci»
pitaûonsydcsdéoûiwdoiiSy des.eipIaGom, des
pho^hoies, des j>yr^9ph0i^y dfi$ tig^mbletncns
de ten'e^ 4iiï4)te i^oixes moveill^s à-faire Gr
gner mille fois le pei^le qui les verroi(. Uhui^
le de Gayac & rdprîç.de mit 9» font pas dea
liqqeursfort jw«sj(Ug|le3;pies:«Qr0t^]ei^ vouf
verres ce qD^iljml^Meiia; vtmi%'2^ pas fai-
re (^txe40s^f^\ dans une dmmbte^ car vous
«
poomfiz bien.metcreJe £w à b oiaifou .(/)• Si
les'Préires de:)B^i.a«oîem; m M.\R(Hidle aa
J ; p, ^4^-
}6 me çontcntois d'être fpErcier pdtce que. j'étois.
modcfte ; mais fî j*avoîs eu Tambîtion d'être Pro-
phète, qui m'^ut* empêché de le develiîr?
(i) Il y a des précautions à prcnde pour réuiïïr
dans cette opération": Ton me dirpenfeni biw, Je
pcfrfie, d*ca piCÊfefCilfi le Réc^pé..
15
t3« T^R O I S J E M E.
toîlîeu d'eux leur bochér ôut pris feu de luî-
méme & £^ eut été pm ipobr dupe.
VoùgyeÊdttL (je Ttisni dim de Teàu , vcâla
de r^nord ; '^rOQt veifez de ïeau^âns de fetii,
voila un corps dur* - Un l^ftd^tie du Ccàlege
de Harcoutt va^en Gaif|fo;d^^'âu pè^;^i
recoutibiàreK le |ioavoir de cdùiqi^m^x^ye^
je vak cbâvêf tfe' de 1 eâu-^tg .pi^e f par de$
fiociyetis timm du moin^lliîc^r it fait'xb
k gbcei vbîla' les Nègres préc^ à Tadorer. :
-'■ )^êik 4er Ffopbêtes ààRA^tit d^kend» it
:TmÊ'A/mk kPféu dû CS»t; tti^id'lioi lesenfoita
en foqt'auàGAC avec ^pëliciiibi-ceau^dé' ver-
«i. J<]ifoé'fie anéteir lè-Solè^^ uti'Jf^iëiff cl'àU
manacrva le £ttre édipfêr; le prodige efl; eiio
corè plus feriîbîe. Le càtinet dé M. l'AtÂé
NoHec cft ui^iaboratoire de magk, les récréi*
tiens niâthématîques font un recueil de mîra^
des ; que dis -je? les foiits mèniè ài foiarn^ i
î. E T T Rv E.
iS9
ferom» les BAodaéi n'y font pu ncèi; le finfl
Fïyfan de/NoathoUande qui fgl im vingt fojt
dumer & diwd^ a^ i!an coaceau a de-
^cjpdi fubjngfier tout te Pwple , «lèiM à Farki
qiîe peofia -Vous qaH e^ fiât an Syrie ?
Ce& un ï^e%ele bien fing^^ qt^ft'^» foi*
TCto de Buris ; ï n^y « a pa» oiie 4iù f on M
«
voye les cbdlas les pkis ÀonnaiHes, fins ^
je poblic d^ugnepi^ae y âte aittatâon { caM
on fù Bceé&tmké aux choies < étonnantes, ôi
même à ceBés qn^on ne peut €oneev>6ki On y
wok au moment que j'écris ceci deux machinet
pemdves %«Féés, dont l'oné màrcke ou s'aN
i^ esaâemént à k vokHM^é 4e o^i qui ftk
marier ou arrêter Tautre. J'y ai vu une tite
debcHsquipàrloit, & dont on ne parlditpas
fanr que de ce&e d^AH^ert- lé ^rând. J^ai ni
même ime ehofe plus furprenante} €^éik>it foiv
Ce têtes d'hommes, de favaos j d'AcsidéniidMtf
?
.140 T ROI SI E M E
^uî couroient aux miracles dei cônvuKions , ^
qui m reveooient tout émtavjéMn. : i
Avec le. canon, Toptiquiè» T^ant, le baror
laetre ^quàs prçdiges ne fak^on pas diçi-ks
ignotans? Les Eurc^éen^ avec leurs arts (mt
tbùjous^pafle^poar des Dieux pariai les Barba-
ces. Si dsms le feia^même dt» Atts,
ces, des collèges, des Acadénues; fi 4a08 le
•m
aûlieu deTEurc^^ en Fiance, en Angleteiro^*
m b<»nme fut vénale fiéde deçiier, armé de
(ous les jnûraclcts de râeârieité; que. nos pby&:
«icQs openent $^urd'hm, feutc^n brâl^.cQi^
me un fbrcier , l'eut • on fiiivî comme ^ Pr<v
]^$tç ? Il elt a ^^ préfumer ..qu'on eut fait Tun au
llsotre : il çfl: certain qu'cm aurait eu tort. .
^: Je i^e ûîs û^l'art de gu^îr eft trouvé nis'H
lè/ttouvera jamais: Ce qo/eje fajis.c'eO: qu^i}
ïCm l^s hors de la nature» H efl tout aullî na*
tmà. qu'un, houipe guériife qu*il refl; qu'il tom^
LETTRE. 141
be malade; il peat tout auffi bien guérir
ment que mourir fubitement. Tout ce qu'on
pourra ^e de certaines guérifoùs» c'efl: qu'dlef
Ibnt iûrprenantes, mais non pas qu'elles font:
impoffibks ; commentprouverez-vous donc que
ce font des miracles? Il y a pourtant» je ï^
voue, des chofb qui m'étonneroient fort fi Jen
étoîs le témrâi: ce ne (eroit pas tant de voir
marcber un boiteux qu'un homme qui a'avoil:
point de jambe, ni de voir un pazaly tique mou-
voir ion bras qif un homme qui n'en a ^'u&
reprendre les deux. Cela me frapperoit encore
plus , je l'avoue y que de voir refliifcicer un
mon; car enfin un mort peut u'être pas more
(m). Voyez le Livre de M. Bruhîer.
j(tn) Lazare étoit déjà dans h terre ? Seroit-il Ip
premier homme qu'on auroic enterré vivant ? Il y
étoit depuis quatre jours ? Qaî les~ ^ comptés ? Cç
n'eft pas Jéfus qui étoit abfent II puait déjà? Qu'eu
favez-votts? Sa fœur le dits voila toute la preuve^
/
ut T.'lR O I S r Ë: M Ë
Ab i^êdËg, quelque frappât que pdt ia^ p^
j-oltre un pareîi T^âacle, je ne iroudrois poitf
iriea aa iiKStyte Àt être xsmxètk ; car ^e îais^ je
<ce qofii en poorsoîc arriver? ilcr Ika de me
fencte tsédxHm , j'^aurcm grand peor qu'tt n6
me fMitqufiffoa r nuii ce n'eft {Mis tte imt
Qft ^âstt «Éi^OidQvtt ie&cKS'de teflôfeicât
^kiriidyés; on s déjà dierehë («ftiideixffi^d-
ter itt {»e&4u« ; qo» fsîir 11 dtt« d^aiwrea georéi
de moft^ on h^ psavienâm pof^ jr^encke ]a vie
L-effroi le dégoût en etit feît dire acttaât â toute
autre femme, quand même cela n'eut pa$ été vrai,
gft^j mfaXt que Vup^Hler, {f iV/ort.* Prtirex fearde
de mal raifonner. Il s'agifibic de lUmpoiffifoHité phy*
lique; elle n'y eft, plus, Jéfus faifoit bien plus de
façons dans d'autres cas qui n'étoient pas plus diffi^^
cîles : voyez la note <}ui fuit. ?oui^qubi cette diffé-
rence,, il tout étolt également lûiraculeux ? Cad
]peut être une exagération, & ce' n'eft pas la plui
forte que faint Jean ait faite] j'en attelle le deroict
Vcirfèt'do fou Evangile.
L. ET T R % t43
I
à des corps ^â'on m avok cm privés» On tm
favoit jadis ce que c'étoic qoé d'abattre la ca«
taraâe ; c'eft un jeq maintenant pour nos cbi«
rur^^. Qui &it S'il tfy a pas quelque fecrec
trouvable pour la fake tomber tout d*un coi^ ?
Qm iàk fi le po£fefièur d*un pareil fecret nt
pâli pas faire aviec fiffipUcité » ce qa!un fpeéla*
tcor ignotaot va {H^endre pour un mÎFacle, ôf
ce qu'un AMeur {ffévâm peut donmo: pour
cel r*)? Toi^ cela n'eft pat vraîfeRiblable»
(*) On voit quelquefois dans le détails des faits
rapportés une gradation qui ne convient point à
une opération furnaturelle. On pféftme àJéfUs nn
aveugle. Au lieu de le guérir à Tinfiant, il l'em-
mené hors de la bourgade. Là il oint Tes yeux de
falive, il pofe fes mains fur lui; après quoi il lut
demande s'il voit quelque chofe. L'aveugle ré-
pond qu'il voit marcher des hommes qui lui parois
fent comme des arbres : Sur. quoi , jugeant que la
première opération n'ed^pas fufiîfante, Jéfus la re*
commence, & enfin l'homme guérit»
Une autre fois , au lieu d'eitiployet de la falif f
pure y il la délaye avec de. la terre*
14+ TROISIEME
foie: Mais nous n'avons point de preuve qae
cela fott impoffible, & c*efl: de l'impoffibilic^
phyfique qu-il s'agit ici Sans cela» Dieu dé*
ployant à nos yeux fa puilTance ti'aùroic p«
nous donner que des iignes vraifemblables , de
fitnples probabilités; & il arriveroit de-là que
l'aucoritë des miracles n'étant fondée que fin:
l'ignorance de œùz pour qui ils auroient été
faits, ce qui f^roit ininiculeuz pour un fiéde
ou pour un peuple ne lé feroit plus pour d'au*
très; delbrteque la preuve univerfelle étant
ea
mm
Or je le demande , à quoi bon tout cela pour
yn miracle? La nature difpute-t-elle avec Ton maî-
tre? A-t-il befoin d*eiFort, d*obftination , pour fc
faire» obéir? A-t-il befoin de falive, de terre, dla-
grédiens ? A-t-il même befoin de parler , & nç
fuflGit-il pas qu'il veuille? Ou bien ofera-t-on dire
que Jéfus, fur de fon fait, ne laifle pas d'ufer d'ua
.petit manège de charlatan, comme pour fe faire va-
Joir davantage, & amufer les fpeftateurs? Dai^ le
fyflême de vos Me{fieurS| jil faut pourtant Tua oit
l'autre. ChoiSS&z. '^
LETTRE. 145
en d^ut, le fjrftêmè établi fur dUe fêrok dé>
cruîL Non , donnez-moi des miracles qui de«
meurent tels quoi qu'il arrive , dans tous les
tems & dans tous les lieux. Si plufîeurï de
>ceux qui font rapportés dans la Bible paroiflênt
être dans ce cas, d'autres auffi paroifTent n'y
pas être. Répond-moi» dpnc, Théologien , pré*'
toids^tu que je paiTe le tout en bloc, ou fi ta
me permets le triage? Quand tu m'auras dé*
cidé ce point, nous yàrons après.
Remarquez bien , Monfieur , qu'en fuppo-
fimt tout au i^us quelque amplification dans les
drcondances, je n'établis aucun doute fur 1«
fond de tous les faits. Cefi ce que j'ai déjà
dit, & qu'il n'efl: pas fuperflude redire. Jélîis,
édairé de refprit de Dieu , avoit des lumières
fi iupérieures à celles de fes difciples, qu'il
n'efl: pas étonnant qu'il ait opéré des multitu-
des de chofea extraordÎQÛres o^ rigoûnuice
Fartie I. K
I , - , I
\ 1
\
I
Ï4S T R O I S i Ë M Ë
des Ipéftàteurs a vu le prodige qaî n*y étoît
pas. * A quel point , èh vertu de ces lumières
pouvôît-îl agir par dés voyes naturelles , ihccn-
hùes à eux & à nous (o) ? Voila ce que hous
ne favbns point & ce que nous ne |)ouvons
làvoîr. Lés fpeélateuft dès chofes riiervdHëu-
fes forif naturellement pôttés à les décrire av^ec
ëxagémiôn. La-defflis'on peut de três^botttie-
fôî s'abùfer loi - iriêîrie -en abùlaht lés autres:
pour peu qu'on fait (bit au defTûs de nos îumie*
»> » ,' ^ •
ïes noua le fuppofons au deflbs'de lâ'raifbn,
H-^t «ni' . - !:■■■"' '" ' ' ' ' ' ' ■ ■ Il I !■■ . ' ■ . 1 1 i.j.
^^ (ôj Nos "hommes de/Dieu Veulent a, tovite .fprce
que i'aye fait de Je fus un Impofteur. Ils s^échauflFent
^ôltr rëpondre à cette -feidigne accufattoh,- kflti
qu^oi) p.eofe quç je l'ai faite.; ils la fupp.ofeD.t avec
un air de^ certitude; ils y infîflènt, ils y reviennent
"^Teftoeufement. Alj'iî'ces; dpQX Ch retiens ^po»-
. voient m'ariacher à la fin quelque bîafphÊme, .c]uc\
*'trîdm5:>he ! quel contentement , truelle édification
.pour leurs charitables, âmes ! Avec iquelle feinte
joye ils apporteroicnt les tîTons allumés au feu de
-kur sièk, pour eiubraÉir'in<5à bûcher 1'. : '; ' "'
L Ê T 1!^ R U 14^
i& rdptît . v-oit enfin :du prodige où le cœut
.nous fait àéùxtx fortemefic d'en voir.
Les miracles font, comme f ai dit , leâ prâu«
ves des iimples, pour qui les Loix de la nature
forment un cercle très étroit autour d'euxi.
Mais la fphere s*ctend à liiefure que les hom*
mes s'indfuiient & qa*ils ientent combien il
leur refte encore à favoir. Le .jgrand Phyficien
voitiî loin lès bornes de wtte fphere qu*il ne
fmiroit difeorner un mitacle au-delà. Cela ne
Je peut eft un. mot qui fort rarement de la bou*
che des iages} ils difent plus fréquemment,
je ne fafs» J .
Que devons*nQus donc pénfer de tant de
tnirades rapportés par des Auteurs , véridî-
ques ^ je n'en doute pas , mais d'une H crade
ignorance , ^ fi pleins d'ardeur pour la gloi-
re de kur maître? Faut^il rejetter tous ces
faits ? Non* .faut-il tous les admettre ? Je Tî-
K a •
V
Ï48 T R O I S I E M :E
gnore (p). Nous devons les refpeftèr faos
prononcer fur leur nature» doffîons-nous êcie
: ': (P)J1 y en a dans TEvanglle qu'il n'efl pas mê-
me poffible de prendre au pied de la Lettre fans
renoncer au bon fens. Tels font', par exemple,
ceux des pofl$dés» On reconnoit le Diable à fon
teuvre, & les vrais poffédés font les méchans; la
' raifon n'en reconnolcra jamais d'autres. ' Mais paf*
fons: voici plus. .
Jéfiis demande â un grouppe de Démons com-
.jnent il s'appelle. Quoi l Les Démons ont des
noms ? Les Anges ont des noms ? Les purs Ef-
.pries on des noms 9 Sans doute pour s*eQtre ap-
peller. entre eux^ ou pour entendre quand Dieu
'les appelle? Mais qui leur a donné ces noms? En
quçlle langue ci^ font les mots? QueUes font les
bouches qui prononcent ces mots, les oreilles que
leurs fons frappent ? Ce nom ceft Légion , car ils
^ font plufieurs , ce qu'apparammenç Jéfus ne favoit
pas. Ces Anges, ces Intelligences fublimes dans le
. mal comme dans le })ien , ces Etres Céleftes qui ont
pu fe révolter contre Dieu, qui ofent combattre
fes Décrets éternels / fe logent en tas dans le corps
•d'un homme: forcés d'abandonner ce malheureux,
ils demandent de fe jetter dans un troupeau de co-
chons, ils l'obtiennent; ces cochon* fe précipitent
dans la mer ; & ce font là les augiiltcs preuves de
la million du Rédempteur du gpnre humain , les
LETTRE. 149
<ent fois décrétés. Car enfin Tautoricé des loix
ne peut s'étendre jufqu'à nous forcer de mal
laifoimer ; & c'eft pourtant ce qu'il faut faire
pour trouver nécelTairement un miracle où k
raifon ne peut voir qu*un fait étonnant.
Quand il leroit vrai que les Catholiques ont
un moyen fur pwr eux de faire cette diftinc-
tion 9 que s*enfuivroit-iI pour nous ? Dans leur
V
fyflême^ lorfque TEglîfe une fois reconnue a
décidé qi'un tel fait eft un miracle, il eft un
miracle ; car l'Eglifë ne peut fe tromper. Mais
ce n'efi: pas aux Catholiques que j'ai à faire
ici, c'eft aux Réformés. Ceux-ci ont très bien
réfuté quelques parties de la profelfîon de foi
preuves qui doivent l'atteftcr à tous les peuples do
tous les âges^ & dont nul ne fauroic douter , fous
peme de dannation ! Juile Dieu ! La tête tourne ;
on ne fait où I*on eft. Ce font donc 1.^^ Meilleurs,
lés fondemens de votre foi ? La mienne en a de
plus fûrs, ce me fetnble.
K3
ISO TROISIEME
du Vicaire qui , n'étant écrite que contre r&
glife Romaine , ne pouvoit ni ne devoit rien
prouver contre eux. Les Catholique pourront
de même réfuter aifément ces Lettres , parce
que je n'ai point à faire ici aux Catholiques , de,
que nos principes ne font pas les leurs. Quand
il Vagit de montrer que je ne prouve pas ce^
que je n'ai pas vonhi prouver, c'eft là que mes
%irôtfme& triomphent.
De tout ce que je viens d'expofa^ je coiv-
duds que les faits les plus atceflés , quand mê^
xne on les admettront dans toutes Ums circon^i
ftances , ne prouyeroient rien y & qu'on peut
même y foupjonner de' l'exagération dans leS;
circonftances , fans inculper la bonne foi de
ceux qui les ont rapportés. Lés Bécouvertes
continuelles qui fe font dans les loix de la na-'
ture, celles qui probablement fe feront enco^
tç^ çeBes ^ui relieront taujours à feirc;; la
LETTRE. 151
t ,
progrès pafles préfens. & fatums de' l'indullrip
hutnamç. ; les dlverfcs bornçs que don^j^nt k^
peuplçs^.à Tordre des ppffibles félon ^u'i^fi ^^^\
plus Qu moins éclairés j tout noua prouYe que
nous ne pouvons connoître ces bçtrn^. Ç^R^.^
dantilfaut qu'un miracle pour être yjairaent
tel Jes pafle., Sqic àpjfp (^]\\ y îût d^ ,.içîra-
cks, foiç qu'^1 n'y çn.ait pa^ ^ ^ eft icnpoffiblp
au fiiçe 4? s'affurer q^i^ gwfl^jue fait que çp
puiflp Qtre px eft un.
Iq4épendainipent des preuves de c^tte. îm-
pQÛibiUt^ gue jq viens d'établir , j'en vojs. w^^e
autç^ non moin§ forte d^w? la fuppofitiQ^ me-
me: car^ ajccordops qu'il-^ ait ^e vrai? fnir^^-
cles; de ^^ïçjI nous ferviroi^^ls s'il y ^ ^^fli-^
faux roir4ffJ^ defqqels il efl iippoffible 4e Jçs
». • * " <
difcp|:.Bp:? ££• faites. JjSpp.^tteqtion que îe ij'ap-
pelle gaf icj f^ nj|raçlç. iTOrpiracl^ qui n'^
pas réel„ .m^ uq aâe biea jéellemeRf fuma-
K4
ï
ïsa, TROISIEME
turel fait pour foutenîr une fauiTé doftrîne.
Comme le mot de miracle en ce fens peut blet
^ fer les. oreilles pieufes , employons un autre
mot & donnons - lui le nom de prejiîge : mais
Touvenons - nous qu'il eft împoffible aux fens
humains de dilcerner un preftige d'un miracle.
La même autorké qui attefte les miracles
attefle auffi les prefb'ges, & cette autorité
jfrouve encore que l'apparence des preftiges
ne diffère en rien de celle des miracles. Com-
ment donc diitinguer les uns des autres , &
que peut prouver le miracle , fi celui qui le voit
ne peut difcemer par aucune marque afFurée
'& tirée de la chofe même fi c'cfl: l'œuvre de
Dieu ou fi cf eft Toauvre du Démon ? Il faudroît
un fect)nd miracle pour certifier le premier.
Quand Aaron jetta fa verge devant Pharaon
& qu'elle fiit changée en ferpent, les inagî-
dens jetterent auffi leurs verges ôc elles furent
L E T T R E. 153
changées en ferpens. Soit que ce diongement
fut réel des deux côtés, comme il eft dit dans
FEcriture, foît qu*il n'y eut de réel que le mi-
racle d'Aaron & que le pieftige des magiciens
ne fut qu'apparent » comme le difent quelques
Théologiens^ il n'in^rte; cette apparence é-
toit exaâement la même ; TExode n'y remar-
que aucune différence, & s'il y en eut eu, les
magiciens fe feroient gardés de s^expofer au
parallèle» ou s'ils Tavoient' fait Us auroient été
confondus.
Or les homtnes né peuvent juger des mira*
des que par leurslchs, & fi la fenfation eft la
même , la différence réelle qu'ils ne peuvent
appercevoîr n'eft rien pour eux, Ainfî le fi-
gne» comme figne , ne prouve pas plus d'un
côté que de l'autre, & le Prophète en ced n'a
pas plus d'avantage que le Magicien. Si c'eft
encore là de mon beau ftile, convenez qu^
^S^ T R O I S 1 E M E
en faut* itfi.. bi^a. pl(i$ beaq? polir le réfuter^
Il eft ytai <^'k feiipei^ cVAaP^on dévora Ie&
.fe3îpœ&..4?$. Msgiçîens/.Mais, forcé d'adtoet?-
rOrc une i(»9 1^ Magî(Ç , Pbai^aop put fort bien
n'en conclure autr^ chofe., ^npn qu'A^on é-
toic piuys habile ga'ieux d»ns .(:ç(: art j c'efl; ainii
-^iie Simoji ravi dés. çhftfe? que feifoit Piûli^
ipe,: .wuittt :a$rHe»r jfes Apôcreï; ie feçi« d'e;>
. .D'aiHçurs Firféfîorfeé ^$ iftfcgicîens éfj^^t
due à la préfence d*Aaron. Mais Aaron abfeaç,.
^Ut faîi&nt 1q mêmes Hg^^^j ^yoienç droit de
^pr^çqcjre à 1^ même^ autorité. Le figne en lui-
mêîpe ne.prouypît'donc TÎen; -
.' Quand, MoyCe changea. Tpau. en iang, le^
,M3giciens changèrent Teau ei^ Cwig ; <5[ii^d
.Mçyfe produifit-des grenouilles, k(r Magici,ei)5
'produifirent des grenouilles. .Us échpuerent ii
f^ troiiieme. p^aye; mfis teppns-nous aux d^eus:
Im /B tr T R; E.
*5S
premières éaax Dieu même avait 6àt Ik pKm
ve da .pouvoir Dim (f)» I^â» JSipgiasîit £^
3«ntauffi acte i»reiiv6-]à. - .
Quant à la troifieme pbjié. qx'îh nepo^feitt
imker, oq ne Toit patce <pi birçnàmû'di&
ficile, au point de marquer qtie ItAiigtéQ'ûin
it^-là. Pour^not c«u quî^poratt frcxibire
m animal ne piiteitt-& produiib uo iidèâe>
& comment, aç^s avoir fak é» sttnoiiîttes^
ne purent'ils fake des poûxF Sil eft vrai qu'il
nyait dans ces chofesrlà que Je premier pys
qoi coûte, c^étoit affiirémeiu; s'anéttr en bea«
Le même Mû^fe , inftniit par toutes ces ei>
périences, orcicmne que fi un faux JPœphêtt^
vient annoncer d'autres Dieux ,^.c'efl:;i^« dire,
lae &uflë doâân&v & que xac Im^fys^bètei
(}) Exode vu. f7*
I
iS6 TROISIEME
autoiiie fon àisvipar des prédi£â(»is' ou des
prodiges qui réufliiTent , it ne faut point Té-
coacer mais le mettre à mort. On peut donc
employer de vrais figues en faveur d'une fauf-
(e do6farine; un figne en lui-même ne prou-
ve donc rien.^
La m^e do6farine des finies par des preftî-
ges eft établie en mille endraits de rScriture.
Ken plus ; après avoir déclaré qu'il ne fera
point de figues^. Jéius annonce de faus: Chrifts
qui eq feront ; il dit qu'î/r feront de grands
figne s ) des tmacles capables de fidmre les élus
mêmes j s'il était pojjible (r). Ne ieroit^on pas
tenté fur ce langage de. prendre les fîgnes
^our des preuves de fs^uffeté?
. Quoi ! iDîeu, maître du choix de i&s pren-
ves qoand^ il vâit {larler auxhommei, choiik
(r) Matth. XXIV. 24. ]^rc. XUI. 22.
L E T T K >E. 157
par préférence CÊifles qui fappioiênt des con«
noifiàiKres qu'à fait qu'ils n'ôno pas! II prend
pour les inftruire k même voye qu'il fait que
prendra le Démon pour les tromper ! Cette
marche feroit^elle donc cdle de la divinité? Se
pourroit-il que Dieu & le Diable fuiviflent la
même routet Voila ce que jt ne puis conce*
voir. . •
Nos Théolo^ens, m^Heurs raifonneurj
nuds de moins bonne foi qae les anciens » font
fort embai^raffés de cette magie : ils vou*
droienc bien pouvoir tout à fait s'en délivrer,
mais ils n'ôfâit; ils fentent que la nier feroit
juer trop. Ces gens toujours G décififs chan«
gent ici de langage; ils ne la nient ni de l'ad^
mutent; ils prennent le parti de tergîverih-,
de chercher des '&ux - fu^ans , à chaque pas
ils s'arrêtent; ils ne favœt fur quel pied
danfer. >
. Je cfoi9^ IVfenfieûr^^ vitùs a^fràr fait fentk
bix gît ta tttffiC(i]0éw\ Four qiiûg^ rfiâo «ne tnaUque
àfeiclarti4j:Jarvaièi-mife oÉsWemme.
: Sî/Tonaieids {Kfêftîges ^ an ne peut proti*
ver les iniftidbç^ f)>ir<se.(qiie tesuns & les au*
tte3 fonc.;fooaé5:fur'la':ni&ifô «itsotîtd
. EcfU'iOiiîadiii^&rlçsiprefl^ê^ àviecles mim^
des , on n'a point de règle fûre précife jSc
cfoke (f^Qtir à^iSfyffir ksmlt'do^Altref : ^dnfi
te ^ïnimcles-,tie,[p»«iviait weiî. - :. /.
< Je iàîs : bi^n: ^que nos g^ns>^îân& ;preâes tû^
,xi&m^t à bt domine:, m^isrâsoitblieiit bocb*
noBerrt ^efi- la do£hriâeitfb;âi8filîé^ Je mita*
cle efl &fjcirâii)' & qae fi^^lkjne.ireft pas^
4Ue Bt peut rien iprouvën :
rJVlt prenez ^pâs ici le cbat^^ jtf voas fiip*
q^:, & de ce, qne^/je n'ai pas. regardé les œi-
iBadesiCommeiefodèls an Cfariffiomime, in'lal-
lez pas conclure que j'ai rejette les mitaclca.
1. Ê T T R E. TS9
N<^, MonHdurV'je xfe iès ai lejetcésm ne
les lejecte; fi ftti dit dés itûfi;»» pour tù dou-
ter, je n'ai poîiit difliiàdé les laiibdB d-y ctqî*
re ; il y ia isi^-^:ati4e (i^ffiérénce ètttre nier
une €k6fe'i& qèjdfwsïffinner, Mtœia rejet-
ter À ne pas l'âdinettre , & fai fi peii décidé
ce pc»nt, ^'je défie qu'on trouve \m feul
encbott dans tous nies* écrits où je iôisi^alfir-
matdf cbndre les niiracles.
Eh ! comment l'aifrois-je été ittaf^é mes pro*
près doàtës, pntfque partout où je ftns^fedit à
moi, le plus décidé ^je-Joi^dBrmb^^riéi'encD]?^
Vtfjfz quelles «jffiimâtiens peut £ià:e un hon^
me qoi piarle ain&dès fa Fïéface (x). '* , .
^ :A Tégaîd de ce qu'on appelleta la^panje
Il fyftématique, qm^n'«f1: 'aifcre dkcfy ^ que
n la marche de la oàcnre, c'efi: là\:e Cfii dé-
(i) Préfacé d^Emîk. p. iv.
i6o TROISIEME
„ routera le pbs les leâeurs} c'eft aullî par là
jj qu'on m^attaqu^a uns doute , & peut-être
yy n'aura*t-on pas tort« On croira moins lire un
,, Traité d'éducation que les rêveries d-uo vi-
,, fionnaire fur l'éducation. Qu'y faire ? Ce n'eft
,, pas fur Içs idées d'autrui que j'écris , c'eft
,, fur les miennesL Je ne vois point comme
•,, les, autres hommes ; il y a bngtems qu'on
y, me l'a reproché. Mais dépend -il de moi
,) de me donner d'autres yeux, & de m'aâFec-
,9 ter d'autres idées? Nonf ildépend de moi de
.,^ ne point abonder da&s mon fèns , de ne point
^, crcnre être feul plus fage que tout le mon-
,9 de; il dépend de moi, nOn de changer de
), fentiment, msds de me défier du mien: Voi-
^j la tout ce que je puis faire, & ce que je
,, fais* <^ae fî je prends quelquefois le ton af-
^, firmatif 9 ce n'efl: point pour en impoiêr au
,, leâeur^ c'eft pour lui parler comme je pen*
fe.
LETTRE. 'i<Si
)) Te. Poitfquoî propbiërois-jè par fom^ de
«
yy doute ce donc quant à moi je ne -tlouce
,, point t Je dis exaâement ce qui ft pafle
5) dans mon efprit.
V „ En ezpofant avec liberté mon fèntîtoent,
„ Jentends fi peu qu'il fySe autorité ^ que /y
5, jcws toi^urs mes nûfpns^ afin q^'on les pe-
j) fe & qu'on me juge. Mais qaoi<pie je ne
,, veuille pdnt m'obftsiçr. & défendre mes î-
9) 4ées> je ne me crois pas moins obligé de les
,» propofer- ; car. ks msut^naes > fur kfqudles je
„ fuis d*ttn avis contraire à celui des autres ne
i9 foQt pc^t indifférentes,. Ck font de celles
«
9^ dont/ la vérité ou h fauflêté importe à con*
„ noitre^ &9)i font le bonheur ou le mal-.
s
Un Agaàot.^ ne„jbtc,lui<m&De s'Un'^
point dans retreur , qui . craint qae toat> ce
^a'il'dit nefyk un tifiii «^ . rêveries, qoi t jQtt
Partit L h
ïiSl T R Ô TS't Ê M E
, pWi^ht cHkHgét-dè'lêntiinÉiis', ft dëfie do
îîëft'ÎJqlM-rtâ prend point te ton aflfenatif poiap
^e'€2>i^i<». m^S'fk^ttppàilèr confiée II' pa^e,
qui, ne voulianc point fair&'aqtorilé, die tou?
j}ht^ Ces kaÇôm àfiS qu'on lè juge , & ^ me-
tS&sv #t A\it?ei»c^':f iile iàdCt kH ^^cef d«
%if (Ll^ ;piVi»Ù&^il^i^oncér^ ââ6: dindts.?
^eëtt'H â'o^^^eé dS^^s-, dt'ifSf cetc&dir
'<^ratibti<pi<ëS^iitâi^|]ë^ttiêt'^:^ BÔ riloMbiC
'ëii^éfterii^Wib'oMUiâite' i<''d^âi«l9«I ki hw
\Bëésf rè'fSroit'%^éëâl^ Jdè H»j(iftkie.-<iClè ne
-^i pèiliPnié!»'4âéé éfdeP^' ciéffends^' «^^rag
perfonne. Si ron"n'W%fo^Ô\<|ult!'tWiii'lir
^fés i'-^j'àfeto© ■déîkfeânfehti'gàril^Jte^fill^eî
i^ ùif ^iâ&^ld;-?De|MHlS:<rk:«htiM^
'«'» '.
1 ■•
I
^^'on^ ùi ma taifois- je faute ;d'iiggce^cirs?;
Mài& qoàncftoû me: poiirûiit^' qoand oatme dé«I
crête , quand on me déshonore pouf avoir die
ceqiie jenTai pas dît > il faWt bien pouc îne
déCendse iQÔutrcir que je. nû M pas dit. Ce
ibtic ma ennemis qui âuîlgrë moi me remet*
tent lâ'plittfl^ à^Iii maini - Eh S qolls melaift
fenr^^yç|)C«y'4& ^;^ 'kjâk«d> I4 'public ; j'ea
Ged f&r6di^ id$ liépcdifô'iîi ^^^js^Ugn rétt9r4
five que j'ai prévenue , de vouloir fair-^ moiit
iHêpie J6-i«ëfâénm0ur étr b^imnt 1tf$ opiaibns
de tout mon (lecle ; car '^ïiiËnÀ'ii moins fair d<|
bavadB''fçpf'u»P^eil'.Icui^é^^À:^ n'eU^pas
afl(irëmeH('^'M«erk!Û fb« «iË''Ffb^hê£e--^^d9
dé éoâHaS^itf iia^ôir de dBê^nknï-fôtôilieBt' en
«
chofeg-importantcs -&- atîtes7 mais -ai-je dît ua
mot y ai-je fait un pas ponir fô iiire adapta: à
\
Z(54 T K.O I S I E M E
d'autres ; quelqu'un a-t*il vu dans ma conduite
rà^ à'vLVL homme qui cherchok à fe &ure des
feûateuts? . ^
^.En tranfcrîtant rEcfît partîailîer qui fait
tàAt d'impréyus zélateurs delà foi, j*avertis en*
core le lefletir qii'irdQÎt fe défier de mes juge-
Hieûs, que e'eft à'^ui dé voir srîl peut tirer de
oet? Ecrit qudqaesriiéâKtioiâ utiles, que je ne
lui prbpofe ni le .&9(}ment d^autrui ni le mien
JxMit r^Ie , [quç ,Je 4e lui préfeute à exami-
ner (f^- ' » ' ''^^.
Et lorfqtie je f i^|!i$nds b parofe l^oîd ce que
fajoUt^ eûGorç'r^rk fin. - - ....ji) ? •..
:: . j, Paî tçinfcrît cet Ecfît, noftjÇçprte une
1^': régie des fentîm$nft'qu'Qp d&jifofgivre en ma-
,vtiff€ii% Rdigîçnj-^i comm^ W .eK^DpIe
^^^deja^raigni^^ dçnt on p&^tmÇoofi^t avec
. ) • . • • '
r
LETTRE. i6s>
„ fbn élere pour ne point s^écarter de ît mé
„ thode que j*ai tâché d'établir. , Tant qu'on
,9 ne donne rien à l'autorité des hommes ni
), aux préjugés des pays où l'on ttt, né, les
5, feules.lumieres* de la raifon ne peuvent dans
„ rin(titution de la Nature nous mener plu^
„ loin que la Religion naturelle , & c'eft à
„ quoi je me borne avec mon Emile. S'il en
r
5, doit avoir une autre, je n'ai plus en cela le
„ droit d'être fon guide; c'eft à lui feul de
„ k dioîGr. Ou) "
».
Quel dk après cela l'homme affez impudent
pour lu'ofer taxer d'avoir nié les miracles qui
ne font pas même niés dan^ cet Ecrit ? Je
n'^ ai pas parlé ailleurs (x).
(v) Ibid. T. IIL p. 204.
(x) J'en ai parlé depuis' dans ma lettre à M.
de Beaumont : mais outre qu'on n*a rien dit fur
cette lettre , ce n'eft pas fur ce qu'elle contient
qu'on peut fonder les procédures faites avant qu'el-
le ait paru.
L3
i66
T R -0 I S r E M-X
Quoi ! parce que l'Auteur d'un Ecrit publie
par un , autre y intràduit un raifonneur qu'il
défaprouye (y) , & qiri dans une difputc f-ejet^
te les miracles 9 il s'enfuit delà que non feule^
ment l'Auteur de ^ Ecrit mais l^fediteur re-
jette auffi les miracles? Quel tiffu detémérî*
tés ! Qu'on fe jpermette de telles .préfomptions
dans la chaleur d'une querelle littéraire , cela
eft très blâmable & trop commun ; mais les
prendre pour des preuves dans les Tribunaux !
Voila une jurifpmdence à faire trembler l'hom-
me le plus jufte & le plus ferme qui a le mal-
heur de vivre fous de pareils magîftrats.
L'Auteur de k,profeffion de foi fait des ob-
jeftions tant fur Tutilîté que fur la réalité des
miracles , mais ces objeftions ne font point des
négations. Voici là deflus ce qu'il dit de plus
. ., '. i , —
' (y) Emile, T. HI. p, isu •
/
LETTRE. iàf
» • • •
Jbft. „ Ceft rôrdre înajtérable de 'la nature quî
,y montre le mieux l'Etre fuprême. S*il arrivbit
I, beaucoup d'exceptions , je ne fauroîs plus
,, qu'en penfer , & pour moi je crois trop en
^^ Dieu pour croire à tant de miracles fi pèû
V dignes de ^ui; *^ *. *
Qr je vous' prie ^ qu'eft •<:e que cela dît >
(^une trop grande multitude de mirâcks Uà
rendroît fujpeâà à TAuteur. ' Qu^t^'admec
pomt imiîftinéteÀient toute finte 'cfe nuràdes^^
& que fa foi en Dien Ibi fait rejétter tout
, . • ♦ .
ceux qui ne font pà!s dignes «dé Dieb, Quoi
donc? Celui qui n^dmet pa» toui-lâ mira^
» •
des rejette-t-fl tops les miracks, & faut-fl
croire à tous ceux de la Légende, pour croira
fafcenfîôn de Chrift ?
Pour comble. Lom que les doutés coiitefiiii
^bns cette féconde partie de la profeffion' d4
(oi puiflent être pris, pour des n^ationt^^ kjk
h 4
■ Ml|«4tl«»'. III
x58 T R O S I E ;M.E
ip^gatîons y au coadaire , qa'elle peut cottte^
DÎT 9 ne doivent être prifes que pour des don-
tes. Cefl: la déclaration de T Auteur , en la
3 iîir les fentimens yi'il va <:oin-
làattre. ,^Ne àmnez • dît -il , à mes dtfcmrs que
T autorité de la mfon. Jlignùre Ji je fuis dans
terreur. ^ Il efi'djjSvik ^ quand m difcute de ne
p{fs prendre que^rfois le ton affirmatif; tnaif
JbwoeneZ'^voxs qu^i t mît s: mes aMrmatims ne
font querdes raifims de douter Cz\ Feut-on par«
: QuaQt à moi, -je vois des faits attelles dan^
jfi$ £ûim £gritwe& ; ceb faffit poop: atréter
(fur ce point mon jugement* iS'ils étoientâl-
«Içurs^ îçr ^j^^Ç^^?^ ÇÇ^^fj^^^ ^ j^ J^ ôteroi^
le nom de miracles ; « mais' parce qu'ils, fooc
^dans rScricure je ne les ; rejette point. .Je ne
* 4 • A
'*■ If .^ ♦ I * ' ' "JI 8J H ■ ■> ■ P'
(«) Eoûïc T. Iil..p. J31. ^
LETTRE. 169
les admets pas, non plus, parce que ma rai&n
s'y refufe, & que ma décifion fur cet article
n'intéreiTe point mon falut. Nul Chrétien judî-
deux ne peut croire que tout Toit infpiré dans
la Bible, jufqu'aux mots & aux erreurs.^ Ce
qu'on doit croire infpiré eft tout ce qui tient
à nos devoirs; car pourquoi Dieu auroit-il
inipiré Iç refte ? Or la db6b:ine des miracles
n'y tient nullement; c'efl: ce que je viens de
prouver. Ainfi le fentiment qu'on peut avoir
en cela n'a nul trait au refpeâ qu'on doit aux
V
Livres facrés*
D'ailleurs, il efl: impoflible aux hommes de
s'afîurer que quelque fait que ce puiiTe être eft
un miracle {ad) ; c'efl encore ce que j'^i prou-
(a«) Si ces Meffieurs difent que cela efl: décidé
dans rEcrîture, & que je dois reconnoitre pour mi-
racle ce qu'elle me donne pour tel ; je réponds que
c'efl; ce <iui efl: en qucftion , & j'ajoute que ce rai-
fonaemeut de leur part efl: un cercle vicieux. Cor
L5
^iTo T R O I S I Ë ÎSI R
^vé. Donc-en aiâméttaht {(H»s^lès «'^foits comemis
^ans la ïible, on peut réjetter les* miracles
fans impiété ^ & même,fras'inê(m(ëquence. Je
n*ai pas. été jafques là.
Voila comment vos Moeurs tirent des
miracles , qui ne font pas certains , qui ne^font
-pas néceffaires, qui ne. prouvant rien, & ^ue
^ je n'ai pas rejettes , la preuve évîdeme -que je
^ renverfe te fondcmens du Qiriftîanîfmé , . &
que je ne fuis pas Chrétien.
L'ennui vous empêdieroit de me feivre u
V.
j'entrois dans le même détail fur les -autr^ ac-
♦ < • , é~ .
cufations qu'ils entaflènt, pour tâcher de cou-
vrir par 4e nombre rinjuftîce de ch:icune en
particulier. Ils m'accufent par ..exemple ^de re-
jetter la prière. Voyez le Livre, & vous trou-
■ K |i ■ I"" - ipi I p ■ ■ k .. ...^
puifqu'ils veulent que le mîracîe ferve de preuve â
la Révélation, ils ne doivent pas employer Tauco-
rïté* de la Révélation pour conftater le miracle.
L E T T «R '^^.-
verez une .prière dans Tendroic même dont il
s'agit. L'homme pieux qui parle (bb) ne croit
pas, il eft vrai,, qu'il foit abfolument néceflàî-
re de demander à Dieu telle] ou telle chofe en
particulier Çcc). Il ne delaprouve point qu'on
^ <
■■' ' ■ ■ ■ ... i.i , , ,., , ■ ..
(pli) Un Miftîftre'de G6nè\re,'dîffîdieafntrément
en Chrifliîanirme dans les jugenrens qu*U porte da
mien, affirme que j'ai dit, moi J. J, Roufleau, que
je ne priols^ûs Dieu : Il raOfbre-^n-'tb^t autant .de
termes, cinq ou fîx fois de fuita, & toujours en me
fiômmant. Je veux porter /efpéa à TEglife, mais
oferbis-je lui.Kl^^nder oii'>*aî ditc«Ia?> 11 eft per«
mis â tout barbouilleur de papier de déraifonner &
bavarder tant qii^bveut; mais il n^èftpas permis i
un bon Chrétien d*être un calomniateur public.
(ce) Quani vous prierez dit Jéfus, priez ainfi.
Quand on pticavcc des paroles , c'eft bien fait de
préférer celles-là; mais je ne vois point ici Tordre
de prier avec des paroles. Une autre prière cft pré-
férable ; c'eft" d'être diXpofé à toet ce qwe Dieu veut.
Me ^oicif SfigneUr^, p9ur faire $a vehnlé. De toutes
les formules, TOraifon dominicale eft, fans con-
(redît, la plus parfofte; mais ce qui eft. plus parfait;
encore eft l'entière téfîgnation aux volontés de Dîeu«
Non p^int -ce que Je veux , mais ce que iu veux, Qik^,
dis-je ? C*eft rOraifon dominicale elle même« EUfi
17» T R O I S I E RIE
le fyffe ; quant à moi, dit-il , je ne le fais pas ,
perfuadé que Dieu eft un bon père qui lait
mieux que Tes enfans ce qui leur convient.
Mais ne peut-on lui rendre aucun autre culte
auflî digne de lui? Les hommages d'un cœur
plein de zele, les adorations, les louanges, la
contemplation de fa grandeur, Taveu de no-
tre néant, la réfignation à & volonté, la fou^
mîflion à fes loix , une vie pure & fainte,
tout cela ne vaut-il pas bien des vœux intéref-
fés & mercenaires ? Près d'un Dieu jolie la
meilleure manière de demander eft: de mériter
d'obtenir. Les Anges qui le louent autour de
eft toute entière dans ces paroles ; Que ta volonti
fiît faite. Toute autre prière eft fuperflue & ne fait
que contrarier x:eUe-li. Que celui qui penfe ainfî
fe trompe, cela peut être. Mais celui qui publi-
quement Taccufe à caufe de cela de détruire la mo-
rale Chrétienne & de n'être pas Chrétien, eft-il un
fort bon Chrétien lui-même?
:u ir. T ;t r z.
«73
Con Trône leprient^ils? Qu'aurôient-ilf à lui
demander ?,Gb mot d^ prière eÀ iouvent em«
ployé dans TEçriturè pour bmmage^ adoration^
& qui fak le |dus eft quite du mom Pour
moi 3 je né rejette aocune des; manières d'ho- ;
nôrer Dieu ; j'sû toujours aj^ouvé qu'on fer
joignît à FE^ffiqui le prie; je le^fàîs; le*
Prêtre Sàvoyara.le'feifôît iuwnême (dd). L'E- :
ait fi i videmtnent. attaijué eQ; plein de tout
cela. ISTimporûs: je rejette^ 'dit*on 9 lafirierej'
je fuis ! un Ippk à btûler^ r ; JMfe xèiia . jugé, «c
Us difent encolle : que j!accu(& Ja mordie :
Chrétienne de rendre tous lios. deroirS' im-:
praticables en les. outrant. La: morale .Cht^^r
dcnueyeû! ceBe 4* f Evàngife; je n*en recoïi^r
hois point; ^atot ^ & c'eft? en^cce: fen^ auffi.^
que r^editendinioaMiSulateui^ i|>uiiqoe c'éft des.
>«
{ii) £mi}e. g^rgif^p. iS^,
. j: j ' ■"
\
qu'il, concludr^ ^aelquâs^ lignes; aptâ^/^gaè.c'cft;
pla^r6o0»/&'3n(œb:eii;ino6 mai^rai&t fo( plofti
iQârqu^ey puifqv^ daaa l^'^P^^^i^ ^eiHCanJji-
vxè ojI ceci i^ra^o;te[ ilufJeft^sIihâmeîi^^
filil^. qui('j!%eriixnddupatfôi?denfi^^ /; * 1 /{
9ûSm)ikvfiSrsL^:iOXir4bair]pithLamirl2qg^ ce
M:^iiiepocrBi6i&rte rendrô : ^iigvëabib aax:hbm^
>,'j»Ëd. .JaomlifiScoiinaDlidâacacîtorBitër^tfi^^
^r^s'i^sr fonDqpeiP tébtés JâfeviMSEsf ilflio^at:<fl:
■*i*fcii^fcaj»a.A.jftg iii nrrr^fcty
(jse) Letcreg écrites ^^i^ jÇadJjjpa^&iûiX ^wS }
\
Xi - BTv T 1 T H. JE .♦' "^75
,; .voirs v^. ChiiSiaiiîGnè les rendJioçratica^
„ blés ârv&îofc: £ fionre dfincerdim aux fem-.
,^ rsÊSB Is'.chaiit %di(nfe & tou&ks ^o^mens
„' éi monde, iiJffirsndmaui&desvgrondeai'
^/ ftiP,^upp60Qdb]ês^dânsr.kbi9^^
&niLaierte dkntf i&'4adanfe'^oàjâfb«ce qu'il
les affetvî&àuoJQ tiiilfassûlévaSrs;?: Tout âd codi*
traire ily'd!b,pulléîdesî'd6iyôi»'d narhr^maiii
ïrnlyc^'pQScdidâiattnyc^de œdi desi^emnidiL
Qonc uns ai tqnr de me. faice'^dkê ideLrEvangtt*
k^ que je n'ai dit que des Janfenî^es, des
Mcthodiftes, & d-'autres- dévots d'aujourd'hui,
qui font do CJirïftèitiifine une ICtlMe^n auffi
terrible & dépl^ifaafte, {ff) qu'ell^^ft ^^griéabk
^j_ijlL ■ li I I ~ ~1 — ..-J--^ -f>. ■ ■- ^J_I_.^ ■ .._^^â ■■ ■ ■ - ^ ^ ^
(Jf).L6s pèértiièîS Ueformc^é «ïtinh'érent i^abçiri
dûfjs'cet êxtès'âvèc'ûné'dureté^qtft fîc'blfc'd^^ hy^
pocrftes, S lès premiers Janfeniftes île riïanq&eifent
pas/dtc/les imitér^'^eh cela. Un' prédicacèu'ï de Gé-
néré', "appelle Étettri *de''la ijjirre , feutenoit ca
iy6 T.R O I S I E M E\
& douce Tous la viérîcable loi:de Jéfus-Cfariil
»
- Je nevoudrois pas prendre le ton du Fere
Bemiyer ^ que je n'aime guère , & que je
trouve même de très mauvais goût; mais je
ne puis m'empêcher de dite qa-une des dioles
qui me charment dans le caraftere de J^us,
n*eft pas feulement la douceur, des moeua» Is
fimplidcé, .niais la fadfité'la gtace & même
fék^atice: H ne fuyoit ni les plaifîrs ni les
jfêtes , il alloit aux noces , il voyoit lesièm-
iioes, il jouoit avec les enfans» il aimoit les
• par-
• #
t^i^^^mmiammmmmamÊmmm^i
chaire qlie c^étott pécher que d'aller à la noce plus
joyeufement que Jéfus - Chrift n'étoit allé à U
mort. Un curé Janfenifte roatenoîc de même que
les feftins des noces étoîenc une Jnvehcion du Dia-
ble. Quelqu'un lui objecta li-deflus que Jéfus-Cbrift
y avoîc .pourtant aiCfté, & qu'il avoit même daî-
^é y faire .fon premier miracle pour prolonger la
jgaité du feftin. Le Curé , un peu embarraffé , ré-
pon(^it en grondant : O n*ejl jox cg fiilfi^ dtmiiux.
&
LETTRE. 177
parfums, il mangeoic chez les financiçrs. Ses
difciples ne jeunoienc point j fon • auftérîté
fi'étoic point facheufe. . Il étoît à la fois indul«
gèi^.& jade , doux aux foibles & terrible aux
ft^çtiaos. Sa fnorale avoit quelque choie d'at-
trayant; de careflant'^ de tendre; il avoit le
çœùtfeo/lUe, il était faosmne de bonne ibcié*
té. Quand il n'eut pas été le plus fage des
mortels, il en eut étielç plus aimable.
Certains pafTages de Saint Paul outils ou
mal entendus ont fait bien des fanatiques , &
^ ces fanatiques ont^fouvent 4éfiguré & desho-
noté le Chriftianirme. Si Ton s'en fut tenu k
fefprit du Maître , cela ne feroit pas arrivé.
Qu'on m'accuie de n'être pas toujours de l'avis
de Saint Paul , on peut me réduire à prouver
que j'ai quelquefois raifon de n'en pas être*
Mais il ne s'enfuivra jamais de -là que ce foie
par dérifion que je trouve l'Evangile, divio»
Pmk I. M
178 T R O I S I E ME
Voila pourtant comment raifomient mes per^
. Pardon, MonGeur; je vous excède av^ est
longs dâails ; je le fens & je les termine; je
tùm ai d^ que trop dit poar ma défede, âc;
je m'ennaye moi*même de répondre toujoiffs
par des raifbns à des accostions ûas raifaa
Lettre. 179
QUATRIEME LETTRE.
J
È VOUS ai fsit voir , Monfieur , que les îm*
»
putadon^ tirées de mes Livre! en preuve que
j'attaquais h Religion écat^ié par les hix é«
toienc fauiTes. Ceft , cependant > fur ces impu^
laûatis qilê j*^ été jugé coupable , & traité
cèmtne té.- Suppdfons maintenant que je !e
fuife en çffçt, ôc vopns en œtétat la pont;
tion qiiî m'étoît due.
Ainfi que la vertu le vice a fes degrés»
Pour être coupable d*un <rime on ne Teft
pas de tous. La' jultîce confiée i, mefurer ex^
aâement la peine à la faotp , & Pexôéme jufl
tice eOe-méme eft une injure , lorfqu'eBe n'a
fini égard aux oonfidératibns raîibnnables qui
tbivent senrpéter la rigueur dfe la loi
Le délit fuppofé réel, il nous refb à chef»
M 2
• •
i8o Q U A T k I E M E
cher quelle efl: ià nature & quelle procédure
eft prefcritte en pareil cas par vos loix.
Si j'ai violé mon ferment de Bourgeois,
copime on. m'en accufe, j'ai commis un crinie
d/Ëtat-) & la cofîndflànce: de ce cria^ ap-
I^r|ient 4îre^€nient au Coafeil ; .cela jeft in-
contefbye,:; : . ;j .:,;". . »
l : Mais;, fi , tout;, .moja crime coûfllle en^ erreuï
fur la ^Q^fiDi?, cette erreur.futrçUeinême unç^
impiété; ç'^ autre chofe. ^ Selon. vos Editsil
appartient à un autre Tribimal^d'en' connoîcre
en pr(a;nier*;reflr(yt. ^ ; .
' Et qu5a?d même mon aime.feroît un crime
d'^tat,,fi.ppiir Je décider tel iljatjt.pféalîible-
î^ept.,4iB^,.^4ci§pn fur ^ .àpQ^^ , ce n'eft
V. 1
jw^sa» Çqçfeil d^.la^doôperj Çjçft bien à lui
de^punir le crime., mais npupas^de le. copfta-*
ter. Cela eft- fiopuel par vos %^ , W^^^
jQous verrons .çi - après. : ., ,: •
L É T T R E.;. i8i
Jl s*agit d*abora 'de favôiî* lî j-aî' Violé mort
ferment de Bourgeois, c^ell-à'dire, le ferment
qtfont prêté mes ancêtres^ quand ils ont été
admis à la Bourgeolfie : car pour moi , n'ayant
pas habité la Ville & n'ayant fait aucune fonc-
tion de Citoyen , je n'en ai point pr^té le fer-
Rient; mais pafîbns.
Dans la formule de ce ferment, il n'y^a que
deux articles qui puifferit regarder mon délit:
On promet par le premier, de -vivre félon h
déformation du$t. EvaAgile; &'par le dernier,
de ne faire ne fouffrïr aucunes pratiques machin
nations on entreprifes contre la Réformation du
St. Evangile. -
Or loin d-enfreîndre le premier article , je m'y
fuis conformé avec une fidélité & même une
hardiefle qui ont peu 'd'exemples, proféflant
hautement -ma Religion chez les Catholiques ,
quoique j'euilë autrefois vécu dans la leur ; &
M 3
1
m Q^ A T R I E M E
l'on ne peut alléguer c^ écart de mon enfance
comme une iofraâion au ferment, furtout de-
puis ma réunion authentique à votre Eglife en
1754. & mon rétablifTement dans mes droits
de Bourgeoifie , notoire à tout Genève , &
dont j'ai d ailleurs des preuves pofitives.
On ne fauroit dire , non plus , que f aye en^
Jreint ce premiar artide par les Livres condan-
ses ; puiique je n*ai point ceflTé dé m'y déda*
rer Protdlant. D'ailleurs , autre chofe eft la
conduite, autre chofe font le^ Ecrits. Vivre
félon la Réformaticm c'efl: profeiTer la Réfor-
mation , quoiqu'on fe puiiTe écarter par erreur
deia doélrine dans de blâmables Ecrits, ou
commettre d'autres péchés qui offenfent Dieu „
mais qui par le feul fait lie retranchent pas le
délinquant de FEglifè* Cette^dilHnâion , quand
on pourroit la dilputer en général y, efl: ici dan&
le ferment même i puifqu on y fépare en deux
LETTRE. 183
irddes ce qui n'en pourroîc faire qu'un , fî la
profeflion de la Religion étoit incompatible ii*
vec toute entreprife contre la Religion. On y
jure par le premier de vivre félon la Réforma-
tion , & Ton y jure par le dernier de ne rien
entreprendre contre la Réformatjpn. Ces deux
artides font très diflin£ls & même fôparés piur
beaucoup d'autres. Dans le fens du Légiflateur
ces deux chofes font done féparables. Donc
quand j'aurois violé ce dernier article y il ne
s'enfuît pas que j'aye violé le premier.
Mais ai* je violé ce dernier article?
Voici comment FÂuteur des Lettres écrî*
tes de la Can^agne établit l'affirmative » pa*
ge 30.
,) Le ferment des Bourgeois leur impofe Fo*
5, bUgation de ne faire ne fouffrir être faites
,, aucunes pratiques machinations ou entreprifes
„ cotitre la Sainte Réformation Evangiïique. U
M4
i84 QUATRIEME
,, fenabte que c*eft un pra (a) pratiquer & ina-
.„ chiner contre elle que de chercher à prou-
,, ver dans deux Livres fi. féduiian^ que le pur
„ Evangile eft abfurde en lui-même & pemi-
,, cieux à la fociété. Le Confeil étoît donc
,, obligé de jetter un regard fur celui que tant
,, à^ préfomptions fi véhémentes acçafoieat
„ de cette entreprife,"
. Voyez d'abord que ces Meffieurs font agré-
ables! Il leur lemble entrevoir de loin un peu
de pratique & de machination. Sur ce petit
femblant éloigné d\me petite manœuvre, ils
jettent un regard far celui qu'ils en préfunaent
l'Auteur; & ce regard efl; un décret de prife
de corps.
(a) Cet un peu^ fi plaifant & fi différent du ton
grave fit décent du relie des Lettres , ayant été
retrancha dans la féconde édition , je na'abftien»
d'aller en quiîte de la griffe à qui ce petit bout,
' bon, d'or eiile, lirais d'ongle appartient.
' L E .T T R E. 185
n eft vrai que ïe même 'Auteur s*égaye à
prouver enfiiite que c'éft par pure bonté pour
moi. qu'ils m'ont décrété. Le Confeil^ dit-îl,
pùuvoif ajourner perfonnellement M. RouJJeau , il
pmmx TaJJigner pour être ouï , il pouvoit le dé-
«
çréter De ces trois partis le dernier et oit îji-
comparablement le plus doux ce ffitoît au
fond qu'un avertiffement de ne pas revenir , s'il
ne vouloit pas s*expofer à une procédure , ou s'il
voubit s'y . expofer de bien préparer /es défen-
Âinfi plaiiàntoit, dit &antome, ^exécuteur
de IMortuné Dom Carlos Infant d'Ëfpagne.
Comme le Prince crioit & vouloit fe débattre ^
Paix^ Monfeigneurj lui dilbit^il enTetranglant,
tout ce qu'on en fait n'eji que pour votrt bien^
Mais quelles font donc ces pratiques & ipa*
(*) Page 31.
M 5
IM QUATRIEME
chinadons dont on m'acciîfe?' Pratiquer ; û
j'entends ma langue, c'éftfe ménager des'in<r
teîligences fecrettes j machiner , c^eft faire de
fourdes menées y c*eÀ: faire ce que certaines
gens font contre le Chiiftîanîfme & contre
moi. Maïs je ne conçois rien de moins fecret,
rien de moins caché dans le monde , que de
publid* un Livre & d*y -mettre fbn nom.
Quand j'ai dit mon fentiment fur quelque ma-
tière que ce fut , je Fai dît hautement , à la fa-
ce du public , je me fuis nommé y & puis je
Au*s demeuré, tranquille dans ma retraite : on
me perfuadera difficilement que cela reflembie
à des pratiques &, machinations.
Pour bien entendre refprit du ferment & le
fens des termes ^ il faut fe tranfporter au tems
où la formule en fut d!<eflrée & où il s*agifîbît
eflencidlement pour l'Etat de ne pas retomber
fous le double joug qu'on venoic de fecouer.^
LETTRE.
187
Tous ks jours pn découvrok quelque nouvel»
k crame en faveur de la mdfon de Savoye ou
des Evêques , fous préteste de Religion. Voila '
for quoi tcnnbent dairement les mots de pra-'
ûq/ies & de macbÎHations y qui^ depuis que la
langue Françoife exiile n'ont Airement jamais
été employés pour les ientimens génàraux
qu'un homme publie dans on Livre où il ie
nomme -, fans projet fans objet ans vue parti*
culiere^ & fans trait à aticun Gouvernement.
Cette àccu&tion paroit fi peu férieufe k F Au«
teurmême qui Toiè faire, qu'il me reconnoit
fiâelk aux devoirs du CHtyyen (c). Qr comment
poonrois-je l'être , fi j'avais enfreint mon fer-
ment de Bourgeois ?
H n'efl donc pas vrai que f aye enfreint ce
ferment. J'ajoute que quand cela feroit vrai »
(f) Pi«c 8.
tn
QiU A T R I £ M E
■rien ne feroit plus inouï danfr Genève en cho-
ies àe cette éfpecê, que la procédure faite con-
; trè moi. Il n*y *a peut - être pas de Bourgeois
qui n'enfreigne ce ferment en quelque article
.(d)y{ms qu'on s'avife pour cela de lui cher-
cher . querelle , & bien moins de le décréter.
: On ne peut pas:ïEre , non plus ^que j'attaque
la morale /dans on , ^Livre où j étab& Àe -tout
mon pouvoir la préféretice du bien général fur
le bien particulier» & pu je rapporte hos de-
voirs envers les hommes à nos dévoi/s enver;
Dieu ; feul principe fur lequel la morale puifFe
être fondée , pour être réelle & paîTer l'appa-
rence. On ne peut pas dire que ce Livre tende
en aucune forte à troubler le culte établi tii
Tordre public , pûîfqu'au' contraire J'y infifte fur
(rf) Par exemple, de ne point fortir de la Ville
pour aller habiter ailleurs fans peraiiffion. Qui eft-
ce qui demande cette permiillon ?
;. !t JE T T R fi. 189
le refpef): >; qo^on doû. aius iopœs établies , ; fur
robéiflàncecaux loix en tonte cfaoiè, njiême en
matière de Religioa , & pui^ue c'efl de cette
obéîfpMfÇg, «^itte , gu>n Prêtre de Gçnève
m'a k plp^ ja^gpeqiept repris. ,- .
• *
, Cp (]Qi^ fi terrible & dont on fait tant dç
bruit re.:i:é.4ui|: donc , en, l'admettant pour
répi , à .guel(^ erreur fur la foi qi^ , fi elle
D'ed .avantagâilè à la.^ibciét^ , l^i efl: du
moins très indifférente ; le plus grand irai qu)
en r^ltç é(ant la toléfs^ce .pour les ienDimçns
d'autrui. par. conféquent kpaû dans r£tati&
dans le monde fur les matières de Relîgîoiu;
' . ...
Mais, je vous demandç., à vous, JVIonfieur^
. qui connoiflêz votre Gpuverpement 6c vos
loix, ^à qvii. il appartient de juger, & furtouç
en premiei:e ii^flan^ce ^^ à^% erreurs fur la foi que
peut commettre un paiijcieulier ? Efl: • ce au
Coûfeil r efl^ce.au Confifloire? Voila Iç nçein4
I • »
de la queflioOt
ipd qV A t R î È M Ë
U falloic d'abord réduire le délit à fon efpe*
te. A prient qu'elle eft connue ^ il faut com«
para* la procédure à la Loi,
' Vos Edits ne fixent pas la peifie due à celui
qui erre en matière dé foi & <Juî publie fon
ttreau Mais par PArticle 88 dé l^Ordonnance
ècetéfiaftique) tu Chapitre du Coinfitoire , Ib
ïeglent rOrdre de k procédure cbntïè celui
qui dogmâtife. Cet Anacle eft couché en ces
teftncî." "' '^^ • '^ • — ' " ' '■"'.' '
^il y a quelqi^ûn qUÎ dt^àatijicààtre la dèc^
nîrie reçue j qi/{I'jhii Jfpéilé pou? cùftférér aveâ
hn: sHlfe r0ige^ qu'on le fupforte Juns fiandak
. •* .■ . .
nt diffame: %^ît eft opmâtre\ qu*on Tàdmonefie
far quelques fois pour ejjayer à k réduire. Si on
voii enfin qdïïjoii befoin de plus grande févéri*
iéj qu'on lui interdtfè la Sainte Céne<^ & qu'on
en axjtrlîjje le Magiftrat afin d*y pourvoir.
^ On voit par là; Iq. Que la première inqui-
L È 1* T R E. ipj
fition de cette eipece de délit appartient au
CoDâftoiie.
20. Qoe le Légfflaceur n'entend point qu'un
td délit (bit îrrémifiible ^ fi celui qui Fa com*
mis fe Tepent'& fe rangâ.
3^ Qu'il prefcrit les voyes qu'on doit fuîvre
jHxir ramener le coupable à fon devoir.
4^ Que ces voyes font pleine» de doucœf
d'égards de commifération ; tdies qu^I con*
vknt à dei Chrétiens d'en ufer , à rexempici
de leur makre , dans les (kutes qui ne troublent
point la fociété civile & n'intérefient que la
Refigioa
5«. Qu'enfin la tiemîere & pltls^ grande peî*
ne qu'il prefcrit eft tirée de la nature du délit,
comme cela devrait toujours être, en privant
le coupable de là Sainte Cène & de là coni«
m
munion de l'Eglife, qdH a offenfée, & qu'ij
reut continuer d'offenfer.
19» Q. U A T R I .E M E
Aprè|:tout cela le Confiftpirele ^énonpe au
Magiftrat qui doit alors y pourvoir;, parte ^e
la Loi ne foufirant dans i'Etat qu'une feule
Religion , celiH qui s pbftiî^ à voufoir en pfô-t
fefler & enfeigner une aiitre^, doit ètt^ tp^
■»
tranché de l'Etat. ^ ' : -'^ ■
On voit ^application - de toqt^s les Jjaf ses
de. cette I>oi dans la^fonne.de procédure- i^i-
vie en- 1563 contre Jean MprelJî.. ' : : . ; ;
Jean MprelU habitant 4e Genève av0itr|»|
& publié un * Livre dans^ lequel il attaquoif k
oîfcipline^^ eccléfiaftique &; gui fat cenfurg 'm
Synode d'Orléans. L'Auteur , fe plaignaiji
. Ijeaucoup de cette ceniure '& ayant été^^ pour
ce même Livre appelle au Confiftoire de Ge-
aève ^ n'y voulut point coipparoitre & s'en-
fait j puis étant revenu avec la permiffion. du
^agiftrat .pourfe réconcilier avec les Minif-
tres il ne tint compte -de-leui parler ni de fe
rendre
LETTRE. 195
tencte au ConQfloîre , julqu'à ce qu'y étant
cité de nouveau il comparut enfin ,. ,& après
de longues difputes, ayant refufé toute efpe-
ce de fatisfaâion 3 il fut déféré & cité au
Confeil, où, au lieu de comparoitre , il fit
préfept^r par fa femme une excufe par écrit,
& j'enfuît derechef de la Ville. .
Il fut donc enfin ^ôcé^é contre lui , c^efl*
à-dire^, çQPt/K^ fon Livre , &. comme la fen^
tence rendue en cette occafîon efl: impor*
tante, ''même quant aux termes , & peu con-
nue , je vais vous la tranfcrire ici toute tn^^
tiere; elle peut avoir fon utifité.
„ (1) Nous Sindiques Joges dès caufes cri-
^ mineUes de cette Cité , ayans entendu le
)) rapport du vénérable Confîfloire de cet-f
> •
•
(0 Extrait des procédures faites & tenues conâ»'
tre Jean Morellî. Imprimé à Genève chez 'François
Perria,-ïs63,pagc 10.
Fartîe I. N '
194 QUATRIEME
^, ce Eglife , des procédures tenues envers
j^ Jean Morelli habitaqt de cette Cité : d'au-
3^ tant que maintenant pour la féconde fois
^y il a abandonné cette Cité y & au lieu de
jy comparoltre devant nous & nôtre Cçafeil,
^ quand il y écoit renvoyé , s'ed montré des-
yy obéiilknt: à ces caufes & autres jufles à ce
), nous mouvantes, feans pour Tribunal au
5^ lieu de nos Ancêtres , félon nos anciennes
fy coutumes, après bonne participation de
^y Confeil avec nos Citoyens , ayans Dieu &
^^.fes Saintes écritures devant nos yeux & in-
,, voqué fon Saint nom pour faire; drok juge*
3^ ment; difans. Au nom du Fere du Fils &
i, du Saint Elprit, Amen. Par cette nôtre déf-
fy finîtive fentence, laquelle doJiBtons ici par
„ écrit , avons avifé par meure délibéntion
^y de pro:éder plus outre, comme en cas de
» contumace dudit Morelli: furtout âfln'dV
L E :T T It E» apf
^, verdr .tôt» . ceux qu'il appartiendra ^ de fe
^ donnée garde du Livre y afin de n'y êtr^
,, point abufés« £fl:antvdonc duement infoi^?
„ mez des réff eries & erreurs lefquels y font
^ contenus ) & furtout que le die Livre tend
,y à faire fchifmes & troubles dans l'Eglifè
^, d'une {açon féditieufe: l'avons condanné &
„ condannons coihme un Livre nuifible &
„ pernideuK , & pour doiinei' exemple, or«'
fy donné & ordonnons, que Fun d'iceux (oie
„ prëfentemenc bruflé. Défendons à tous lA^
,, hmrts d'-en tepirini expbfer'en vente: &i
„ tous Otoyem Bourgeois & Habitans de
yy cette yUle de quek|ue qualité qu'ils foietxt^
yy d'en acheter ni avoir pour y. lire : commaiK
^ dans à tous ceux qui en- auroiênt de nous
„ 1er apporcér , & ceux qui faurdent où il y et^
,; a,de le Abus révéler danfr vi&gc quatre heu-*
9^ resj foiis peine d'être ^rigoureufemenc punis;^
N z
\
%^ Q U A T R I E M E
5»
y'
£(; à vous noffare Lieutenant comtciandons
^>.^uç'fadezmettr.e noftre.préfentefentcnce à
,> due & entière exécntion,"
■♦,- Prononcée^ exécutée le Jeudi feizième jour
', . . de. Septembre mil cinq cenf faixante trois.
,5 AinQ figné P.rChenelat/'
.'j Vous trouverez, Mdnfiéur, des obfèrvatîons
de plus dun genre à faire en tems & lieu fur
ce£Ce, pièce. Quant à préfent ne pehièns pas
notre objet de vlie. Voila :comment'il fut pro-
cëdé: au jugement : de MbrdK ," dont le: Livre
ttc.'ïut brâJénqu!âx.la fin du procès i, fins qu'il
iât parle de Botârreau ni de flétriiTurey & dont
I^ perfonne ne fut jamais àéoxhég^i, ^i^uojqu'iL
fojD opiniâtre '&, cont^max. : [-. 7,j'.:!. .-. / .
: Au lieu dé cdar^: chacun feilrconjimenÉ le
Gonfeil a procédé, contre môî , danft J'inflant.
que rOuvrage a paru, & (aiis qu'iiait même,
été lait mention dB^^Confiftoare. ^^l^cevoir le
\
: LETTRE. :ij>7
Livre par la pofte, le lire , rexammer , le dé-
férer. Je brûler, me décréter, tout cela fut
l'affaire de huit ou dix jours : on ne fkuroit
imaginer une procédure plus expéditive.
Je me iuppoiè ici dans le cas de la loi,
dans le feul cas où je puiilë être puniflable;
Car autrement de quel droit puniroit-on des
fautes qui n attaquent perfonne & fur lefquel-
les les Loix n'ont rien prononcé?
UEdit a-t-il donc été obfcrvé dans cette af-
&ire ? Vous autres Gens de bon fens yous
imagineriez en l'examinant qu'il a été viol^
comme à plaifir dans toutes {c$ parties. „ Le
„ Sn Roufleau " , difent les Répréfentans ,
,, n'a point été appelle au Confiftoire , mais le
^j magnifique Confeil a d'abord procédé con-
5, tre lui; iïdevoit ètie fupporté fans fcandale,
„ mais fes Ecrits ont été traités par un juge-
„ ment public, comme téméraires^ impifs^
N3
\
i^ QUATRIÈME
jy fcandaleux ; il devoît être fupporté fans dif
^y famé ; mais il a été flétri de la manière la
,, plas diffamante , fes deux Livres ayant été
,, lacérés & brûlés par la main du Booireau.
5, L'Edît n'a dont pas été obfervé " con-
tinuent - ils , yy tant à Tégard de la jurilciiâon
„ qui appartient au Confîftoire , que relative-
3, ment au Sr. RouflTeau , qui devoit être ap-
,, pelle , fupporté fans fcandale ni diffame,
yy admonefté par quelques fois, & qui ne pou-
yy voit êti^e jugé qu*en cas, d'opiniâtreté ob-
ftinée."
Voila, fans doute, qui vous paroit plus dair
que le jour , & à moi auflî. Hébîen non :
vous allez voir comment ces gens qui ftvent
montrer le Soleil à minuit favcnt le cacher à
midi.
X'adrefle ordinaire aux fophîfles eft d*cn-
tàfTer force argumens pour en couvrir la foi«
9>
LETTRE. igg
t
bleffe. Pour éviter des répétitions & gagner
du tems , divifons c&a^. des Lettres écrites de
la Campagne ; bornons nous aux plus eiTen-
ciels, laiiTons ceux que j*ai ci-devant réfutés,
& pour ne point altérer les autres rapportoirs
les dans les termes de l'Auteur.
Cefi (T après nos Loix^ dit-il , que je dois ex^
mimer ce qui s'ejl fait à V égard de M RouJJeatu
Fort bien ; voyons.
Le premier article du ferment des Bourgeois les
Mge à vivre félon la Réformatton du Saint E"
vangile. Or , je le demande , eji-ce vivre félon
t Evangile , que d'écrire contrç P Evangile ?
Premier fophifme. Pour voir daîrem^t lî
c'eft là mon cas , lemeçtez dans la mineure de
cet argument le mot Réformation que l'Auteur
en ôte , & qui eft néceffaire pout que fon rai*
fonnemcnt (bit concluant.
Second fophifme. Il ne s'agit pas dans ce(
N4
V 200 QUATRIEME
article du fennent d'écrire félon la Réforna- -
• tîon , mais de vivre felott là Réformation. Ces
. deux chofes , comme on Fa vu ci - devant fqnt
didinguées dans le ferment même ; & Ton a
>vu encore s'il efl vrai que j'aye écrit- m contre
la Réformation ni contre l'Evangile. ^
- Le premier devoir des Syndics ^ ÇonfeH eji
Je maintenir la pure Religion.
TroiGeme fophifme. Leur devoir efl: bien
àc maintenir la pure Religion , mais non pas
de prononcer fur ce qui n'eft ou n'eft pas h
pure Religion* Le Souverain les a bien char-
ygés de maintenir la pure Religion , mais il ne
îes^ pas faits pour cela juges de la do6bine.
Ceû, un autre corps qu'il, a chargé de ce
foin, & c'eft ce corps qu'ils doivent conful*
tçr fiirtoutes les matières de Réligioij , comme
ils ont toujours fait depuis que votre Gouver-
l^iQmencexilte/ f;n cas de délit en. ces s^'e*
LETTRE* Ao?
tes, deax Trifamnaux font établi;» Ton pour
le conftater, & Fautre pour le punir; cela eft
évident par les termes de l'Ordonnance: nous
y reviendrons ci-après. ^
Suivent les imputations ci • devant eicami?
nées, & que par cette raifon je ne répéterai
pas; mais je ne puis jn'ablteQÎr de tranfcrire
ici Tardcle qui les termine: il eft curieux.
Il eft vrai que M. RouJJeau & fes pmifant
pétendent que ces doutes n* attaquent point réelk"
mnt le Chriftianifme , qu^à cela près il continu^
iappeller divin. Mais Ji un Livre car aStêrifé^
cmm T Evangile Peft dans les ouvrages de M.
P.ouJJeau^ peut encore être appelle divin , qu^on me
iife quel eft donc le nouveau fens attaché à ce
terme? En vérité Ji ceft une contradiSion y elle
eji choquante; Ji c'eft une plaifanterie ^ convenez^
qu'elle eft bien déplacée dans un pareil fujet (/) ?
(/) Page II.
N s
604 (QUATRIEME
J'entends. Le culte fpirîtuel , la pureté du
<:œur j lei œuvtes (k nûféricorde, la confiance,
Thumîlîté ^ la réfignatîon , la tolérance , ToubK
des injures , le pardon des ennemis , Tamour
du prochain , la fratâmïté tiniverfelle & l'union
du genre Humain par la charité , font autant
d'inventions du di&le. Seroit-ce là le fenti-
merit de 1* Auteur & de fes amis ? On le diroit
à leurs raifonnemens & fiîrtout à leurs œuvres.
JE» vérité j fi c^eft une coniradiStion , 'elle ejl
choquante. Si cefi une plaifantcrîe , convenez
qu'elle efi bien déplacée dans un pareil fuj^t.
Ajoutez que la plaifanterie fur un pareil fu-
jet eft fi fort du goût de ces MdTieurs, que,
félon leurs propres maximes , elle eut dû , fi je
Tavois faite, me faire trouver grâce devant
eux (g).
Après Pexpofitîon de mes crimes j^ écoutez
, - I — •- ■ ' ' '
Ml 1 I I
(g) Page 23*
LETTRE. 20â
les laifbns pour Irfqudles on a fi cradlemenc
KQdiéri fur la ngaear de la Loi dans la pour*
fuite du criminel
Ces deux IJvrâS forc^ita fous le nom d*un
Citoyen de Genève. ÙEurpp9 en témoigne fok
Jcandak. Le premier Parlemens d*un Royaume
^oifin fourfuit Emile &fon Auteur. : Que fera
Je Gouvernement de Genève ?
Arrêtons un moment. Je crois a{>percevoir
ici quelque menfonge.
Selon notre Auteur le fcandale de fËarope
força le Confeil de Genève de févir contre le
Livre & T Auteur d'Emile, à Texemple du Par^
Jement de Paris: mais au contraire, ce furent
les décrets de ces deux Tribunaux qui caa&«
lent le fcandale de TEurope. Il y avoit peu de
jours que le Livre étoit public à Paris brique
le Parlement le condanna (h) ; il ne paroiflfoic
(b) Cétoit un arrangement pris avant que le Liè-
vre parut.
ît5+ Q U A T.R I E M'E
encore en nul autre Pays y pas loeme éh H^lr
Jande, où il iétoit imprimé; éSc il n'y <ut eih>
tre le décret du Parlement de Paris & celui dji
.Cônfeil de Genève que neuf jours d'intierval-
je 0 ; le tems à peu près, qu'il falloic poui
avoir avis dé ce qui fe paiToic à Paris. . Le va^
carme afireux <][Ui fut fait en SiiilTe fur cet-
te affaire, mon expulfîon de chez mon ami»
te tentatives faîtes à.Neufchâtel & mêmç à
ia Cour pour m'ôter mon dernier azile , tout
cela vint de Genève & des environs, après le
décret. On fait quds furent les inftigâteurs.,
on fait 'quels furent les émifTaires, leur aâivité
6it fans ocen^^ple ; il ne tint pas à eux qu'on
• ne m'otât le fieu &\reau dans J Europe entière,
qu'il ne me reClât .pas une- terre pour lit, pas
* ■ i
• (I) Le décret du Parlement fut donné le 9 Jttî»
flt celui du ConfeH le if.
L :E? T T % lEr 20S
tine pierre poitr \chevet:. Ne trant^ons donc
point ainfi ie$ cbofes , & ne donnons poioc
poiK moâf.du:décJret'viàç Gêoèvé fe fcandale
qui eh fat Tefeu ,::... .
Le pr&mn'Farlement t^un Royamne voijin
pmrfuU Emile i^fott Ay$eûr. Que far a le Gou*
vemement de Genève? /. ;• .
La irépcffife pftfîpiple. 'B Mi fec» cien , il ne
doit rieitfiBre^riOU ptacôtj.iJidott ne rien fai-
re. Il renver^oit tx>at ordi^e ji^ciaire, il bra**
veroit le FarlçioemdePïuîfl,. il.'Iui.diTputeroic
la compéteaoe^.e^ l'imitât Cétoit précifémeni;
parce que j'étois décrété à Parift que je ne pour
vois l'être à Genève. Le délit d'wn criminel a
certainement u») lien & un lieq u^i^ej i\ ne
pçut pas :pli«| être coupable; à la k>\i 4« même:
délit :en: deux Ctats> qu'il ne.pÉuf êti'e en deux:
feux idan^ Je. même tems, &:ç'il.veut purger;
fcs deux défcrfetti commenç y<)u]e??- vous qu'ifc
Q>U-A T R I:E M E
:ie parcage^ En effet , w&i^mm 'jamais oui
j^e qu'oo ait. décrété le «mê&ie liomme en
deux pays à la fois pour lé même fait? Cen
efl ici le premier exemple, .& probablement
ce iëra le dernier. J'aurai dans mes maiheurs
lé triftô' konnçar "d'être à %àas égards un e-
xemple unique. ' > v^ i>
«
'- Les crimes" k» plus, atrocêà ^ les affitATmacs
même ne font par & ne dpivent ^ être p6ui>
fuivis pat dèvanî. d^autres Tributiaux que ceux
des lieux où îts ont été commis Si un Gén^
vois tuoit un homme ^ mêiiie un autre Gène*
vois en pays étranger , le Confeil de Genève
lie pourroit s'attribuer la conncni!ancè de ce
crime : il pourroit livrer lé coupable s'il étoio
réclamé , il pourroit en folliciter le châtiment»
âiais à moins qu'on ne lui remit volontairemenc
te jugement avec les pièces de la procédure, if
né le jugeroit pas^ parce qu'il ife Ibi appartioac
: L E :t r K E. ioT
pat de connoître d'un défit commi$ <!hez tin
autre Souvetain^ & qu'il ne peut pas même or*
donner les informations néceflairès pour le
conftater^ Voila la règle & voila k réponie à
la queltion ; que fera le Gouvernement de Geftè*
ve? Ce font ici les plus fimples notions du Droit
public qa*il feroit honteux au dernier Magif*
tiat d'ignorer. Faudra - 1 - il toujotors que j'en*
feigne à mes dépends les élemens de la jurif^
pnidence à, mes Juges?
// ie^mt fuivant les Auteurs des Réprifenta*
tionsfe borner à (Mfendre provijiorinellement le dé*
Int ions la FiJh (k). Ceft, eneflFet, tout ce
qu'il pouvoit légitimement faire pour contenter
ion animofîté ; c'efl ce qu'il avoit déjà fait pour
la nouvelle Héloïle , inaîs voyant que le Parle-
ment de Paris ne àifoit rien , & qu'on ne f^
(k) Page 12,
. toa Q.tJ A T R I E M E
fpit nulle part une fémblabjë; défeni^ , il en mit
honte &:1* «tira .tout dotïcement (/). Mais
une improl^ntioH fi foibk rCaumt'-eîle pas été ta-
ié§ de fefrate connivence ? . Mais il y a tong-
tems que „ pour d'autres Ecrits b^ucôup moins
tolérabtes, oïj.iiuçe le Confeil de Genève d'une
connivence affez peu feiarettp j ; fans qii'il fe
mette fort en peine de ce jugementi, Perfnth;
fie^ ditfod., iiquroît pu fe'fcandàUfer de la imâér.
ration dont on auroit ufé. \^ çii pliblic vous
apprend' œiçbièn on eft Çç^siMM du contr^-
re* Be bonne foi , fil s'était, is^gi d'un bomm
aujjî déf agréable çu pubHc tp^^ M. RpuJJeau lui
et oit cler^ceqtLon appelle m^rmim n' auroit -il
- . ' ; ' ., : pas
(/) Il faut convenir que fi l'Emile doit être dé-
Tendu , THéloife doit être tout au moins brûlée.
Lqs notes furtouj; en. font ^d'une hardiejTe .dont la
profeffioDi de foi du Vicaire n'approche affurémcnt
pas. '
-LETTRE. zotf
pas été taxé d'indifférence j de tiédeur impardon-'
noble "? Ce n'auroît pas été un fi grand mal que
cda , & l'on ne donne pas des noms fi honnê*
tes à la dureté qu'on exerce envers moi pour
mes £aits, ni au fapport que l'on prête à ceux
d'un autre.
£q contiHuant de me fuppofer coupable ,
fuppofons , de plus , que le Confeil de Genève
ayoit droit de me punir , que la procédure eue
été conforme à la Loi , & que cependant , faps
vouloir même cenfurer mes Livres, il m'eut
reçu paifiblement arrivant de Paris ; qu'au-
roient dit les honnêtes gens? Le voici.
M Us ont fermé les yeux^ ils le dévoient.
3, Que pouvoient-ils faire? Ufer de rigueur
3, en cette occafion eut été barbarie , ingrati-
,, tude 9 injoftice même , puifque la véritable
„ juftice compenfe le mal par le bien. Le
,3 coupable a tendrement aimé fa Patrie, il en
Fartie L O
^ftio QUATRIEME
,, a bien mérité; il Ta honorée dans rEurope,
„ & tandis que fes compatriotes avoîent hon-
,, te du nom Grénevois, il en a fait gloire, il
„ l'a réhabilité chez Tétranger. Il a donné ci-
,^ devant des conièils utiles, il vouloit k bien
„ public, il s'efl: trompé, mais il étoît pardon-
.„ nable. It a fait les plus grand éloges des
„ Magiftrats , il cherchait à leur rendre la
„ confiance de la Bourgeoifie ; il a défendu la
„ Religion des Miniftres , il méritoit quelque
^, retour de la part de tous. Et de quel front
•„ euffent-ils ofé févir pour quelques erreurs
„ contre le défenfenr de la divinité, contre
.„ Tapologifte de la Religion fi généralement
„ attaquée, tandis qu'ils toléroîent qu'ils per-
•„ mettoient même les Ecrits les plus odieux,
„ les plus indécens , les plus infultâns au Chrif*
„ tianifme, aux bonnes mœurs, les > plus def-
5, truftifs de toute vertu, de toute morale.
.LETTRE. 511
,, ceux mêmes que Rouiteau a cru devoir ré-
futer? On eut cherché les motifs fecretg
, d'une partja'ité fi choquante ; on les eut
, trouvés dans le zèle de Taccufé pour la liber-
, té & dans les projets des Juges pour la dé-
, truire. Roufleau eut paffé pour le martîr des
, loix de fa patrie. Ses perfécuteurs en pre-
, nant en cette feule occafion le mafque de
, rhypocrifie enflent été taxés de fe jouer de
, la Religion , d'en faire l'arme de leur ven-
, geance & Tinflrument de leur haine. Enfin
, par cet empreflement de punir un homme
, dont Tamour pour fa patrie efl le plus grand
) crime , ils n'euflent fait que fe rendre o*
, dieux aux gens de bien , fufpeâs à la bôur-^
, geoifie & méprifables aux étrangers." Voi-
la, Monfîeur, ce qu'on auroît pu dire; voila
tout le rifque qu'aurpit couru le Confeil dans
le cas fuppofé du délit , en s'abftenant d'eu
connoître. O 2
212 QUATRIEME
. Qtie}qu!un a eu rai/on de dire qu'il falhît brû'
>
1er r Evangile ou les Livres de M. RouJJeau.
La commode méthode que fuivent toujours
xres Meilleurs contre moi ! s'il leur faut des
.preuves, ils multiplient les aflfertions & s'i!
leur faut des témoignages , ils font parler des
. Quidams.
La fentence de celui-ci n'a qu'un fens qui
ne foit pas , extravagant , ôc ce fens eft un
blafphême.
Car quel blafphême n'efl-ce pas de fuppofer
l'Evangile & le recueil de mes Livres fi fem-
blables dans leurs maximes qu'ils le fuppléenc
.mutuellement, & qu'on en puifTe îndiffercm-
..ment brûler un comme fuperfîu, pourvu que
l'on conferve l'autre ? Sans doute;, j'ai fiiivi
du plus près que j'ai pu la doûrine de l'Evan-
«
gile; je l'ai aimée, je l'ai adoptée étKidue ex-
pliquée , fans m'arrêter aux obicurités , aux
.LETTRE. 215
diiEcakés , aux tnyfteres , fans me détourner de
reflenciel : je m'y fuis attaché avec tout, le z>
h de mcto cœur j je me fuis indigné , récrié de
voir cette Sainte doftrine ainfi profanée avilie
par nos prétendus Chrétiens , & fur tout par
ceux qui font profeffion de nous en înftruire.
J'ofe même croire , & je m'en vante , qu'au-
cun d'eux ne parla plus dignement que moi. du
vrai Chriftianifme & de fon Auteur. J'ai là-
deflîis le témoignage l'applaudiffement même
de mes adverfaires , non de ceux de Genève
à la vérité , mais de ceux dont la haine n eft
point une rage ^ & à qui la paffion n'a point
ôcé tout fentiment d'équité. Voila ce qui efl:
vrai , voila ce que prouvent , & ma réponfe
au Roi de Pologne , & ma Lettre à M. d' A-
lembert, & l'Héloïfe, & l'Emile, & tous mes
Ecrits , qui refpîrent le même amour pour l'E*.
^gile, la même ^vénération pour Jéfus-Chrift;
03
114 Q IT A T R I E M E
Maïs qu*il s'enfuîve de-Ià qu'en rien je paiflè
approcher de mon Maître & que mes Livres
puiflent fuppléer à^ fcs leçons , c*eft ce qui eft
faux 5 abfurde , abominable ; je detefte ce blaf*
phêrae & défavoue cette témérîcé. Rien ne
peut fe comparer à l'Evangile. Mais fa fubli-
me Cmplicité n'efl pas également à la portée
de tout le monde. II faut quelquefois . pour l'y
meure Texpofer fous bien des jours. Il faut
conferver ce Livre fàcré comme la règle du
Maîire, & les miens comme les commentai-
res de l'Ecolier.
J'ai traité jufqu'ici la qnefhon d'une manie-
re un peu générale j rapprochons-la maintenant
des faits , par le parallèle des procédures de
15^3 & de 1762, & des raifons qu'on donne
de leurs différences. Comme c'eft ici le point
décifif par rapport à moi , je ne puis , fans né-
gliger ma caafè y vous épargner ces détails ,
LETTRE. 215
peut-être ingrats en eux-mêmes, mais intéref-
fans , h bien des égards , pour voiu & pour
vos Concitoyens. Cefl: une autre dîfcufllon qui
ne peut être interrompue & qui tiendra feule
une longue Lettre. Mais , MonHeur , enco-
re un peu de courage j ce fera la dernière de
cette efpece dans laquelle je vous entretiendrai
de moi.
04
1
îi« CINQUIEME
•*
CINQUIEME LETTRE.
Apres avoir établi, comme vous avez vu,
la nécelTité de fëvîr contre moi, F Auteur des
Lettres prouve , comme vous allez voir , que
la procédure faite contre Jean Morelli , quoi-
qu'exaftement conforme à l'Ordonnance , &
dans un cas femblable au mien , n'étoit pgint
un exemple à fuivre à mon égard ; attendu ,
»
premièrement, que le Confeil étant au deflus
de l'Ordonnance n'efl: point obligé de s'y con-
former; que d'ailleurs mon crime étant plus
grave que le délit de Morelli devoît être trai-
té plus févérement. A ces preuves l'Auteur a-
joute, qu'il n'eft pas vrai qu'on m'ait jugé fans
m'entendre, puifqu'il fuffifoit d'entendre le Li-
vre même & que la flétriffure du Livre ne
tombe en aucune façon fur l'Auteur j qu'enfin
LETTRE. 217
les ouvrages qu'op reproche aa Confeil d'avoir
tolérés font inaocens & colérables en compa-
raifon des miens.
Quant au premier Artide, vous aurez peut-
être peine à croire qu'on ait ofé mettre fans
fa$;on le petit 0)nfeii au defTus des Loix. Je
se connois rien de plus Hir pour vous en con-
vaincre que de vous tranfcrire le paf&ge où
ce principe efl établi & de peur de changer /
le fens de ce paiTage en le tronquant , je le
tianfcrirai tout entier,
„ (a) L*Qrdonnance a-t-elle voulu lier les
,, mains à la puiiTance civile & Tobiijger à ne
„ réprimer aucun délit contre la Religion
n qu'après que le Confifloire en auroit con-
), nu ? Si cela étdit il en réfulteroit qu'on
,, pourroit impunément écrire contre la Reli-
(«) Page 4.
O S
* I
218 CINQUIEME
„ Kgîon , que le Goiivernem^t leroît dans
„ rîmpaiîflance de réprimer ^cette licence i &
„ de flétrir aucun Livre de cette efpece ; car
„ fi rOrddnnance veut que le délinquant pa*
„ roiflê d^abord au Confïïloîre, l'Ordonnance
^, ne prefcrit pas naoîns que s'il fe range on le
„ fupporte fans diffame» Ainfi quel qu*aît été
,, fon délit contre la Religion , l'accufé en fai-
5, fant femblant de fe ranger pourra toujours
„ échapper ; & -celui qui auroit diffamé la Re-
^, lîgîon par toute la terre au moyen d un re-
„ pentir fimulé devroit être fupporte yi;2j dif-
,, famé. Ceux qui connoiffent l'elprit de févé-
„ rite, pour ne rien dire de plus, qui régnoit,
„ lorfque TOrdonnarice fut compilée, pour^
„ ront-îls croire que ce foit-là le fens de TAr-
„ tîde 88. de l'Ordonnance ?
„ Si le Confiftoire tf agit pas , fon inaftion
)9 enchaînera-t-elle le Conieil? Ou du moins
lettre; iijj
,, fera-t-il réduit à la fonflibn de délateur au-
„ près du ConGftoke? Ce n'efl: pas là ce qu'a
„ entendu TOrdonnance , lorfqu après avoir
„ traité de rétabliflèment du devoir & du pou-
„ voir du Confiftoire , elle conclud que la puît
5, fance civile refte en fon entier , en forte
„ qu'il ne foit en rien dérogé à fon autori-
,, té , ni au cours de la juflice ordinaire par
„ aucunes remontrances eccléfîaftiques. Cette
„ Ordonnance ne fuppofe donc point, comme
5, on le fait dans les Répréfentations , que
55 dans • cette matière les Miniftres de TEvan*
„ gile Ibient des juges plus naturels que k$
„ Confeils. Tout ce qui eft du reflbrt de Tau-
„ torité en matière de Religion eft du reflbrt
«
3, du Gouvernement. C'eft le principe dd
j, Proteftans, & c'eft fingulîérèment le prîncî*
„ pe de notre Conftitution qui en cas de difi
3, pute attribue aux Confeils le droit de dé^
„ cider fur le dogme. *;|
fio CI N Q U I E M E
Vous voyez , Monfîeur , dans ces dernières
lignes le principe fur lequel eft fondé ce qui
ks précède. Ainfi pour procéder dans cet ex-
amen avec ordre , il convient de commencer
par la fin.
Tout ce qui eji du f effort de V Autorité en ma-
tiere de Religion eji du rejfort du Gouvernement.
Il y a ici dans le mot Gouvernement une é-
quivoque qu'il importe beaucoup d'édaircir , &
je vous confeille , fi vous aimez la çonfl^itution
de votre patrie, d'être attentif à la diftinc-
tion que je vai3 faire ; vous en fentirez bien>
tôt l'utilité.
Le niot de Gouvernement n'a pas le même
fens dans tous les pays , parce que la confliitu-
tion des Etats n'eft pas par tout la même»
Dans les Monarchies où la puiifance execu-
tive efi; jointe à l'exercice de la fouveraineté ,
|c Gouvernement n'eft autre chofe que le Sou-
LETTRE. aâ»
terain lui-lnême, agifTant par fes Miniftres ^
pdj: fon Coûfëil , ou par des ^orps qui dépens
dent abfolument de fa volonté* Dans les Ré^
publiques, fùrtout dans les Démocraties, où le
Souverain n'agit jamais immédiatement par lui- .
même, c'efl: autre chofe. Le Gouvernement
n'efl alor& que la puiiTance executive , & il
eft abfolument diftinâ: de la fooveraineté.
Cette dillinélion efl très impcNtante en c^
loatieres. Pour l'avoir bien préfente à TefprK
on doit lire avec quelque loin dans le ContraSt
Social les deux premiers Chapitres du Livre
troiGeme, ou j'ai tâché de fixer par un fens
précis des exprefllons qu'on laiflbit avec art
incertaines , pour leur donner au befoin telle
acception qu'on vouloit. En général, les CheEs
des Républiques aiment extrêmement emplo*
yer le langage des Monarchies. A la faveur
de termes qui femblent confaciâ , ils. favent
i
822 C.'I N Q U I E* M E
saaener peaii peu Jes chofês que ceis mots û-
é
gnîfient* C'eft ce. que fait ici très-habilement
f Auteur à& Lettres , en prenant le mot de
GowememeM^i tjui n'a rien tf effrayant en lui-
*
même, pour Feiercicé de la fôaveraîneté, qui
feroît révoltant , attribué fans détour au petit
ConfeiU ^ •
C'eft* ce qtf il : fait ; ehcdré plus ouvertement
^ans un axitre paf&ge (é) où, aprèsi- avoir dit
>
que le Petit Confeil ejl le Gouvernement même^
ce qui effi vrai en prenant ce mot de Gouroer-
jiemenp. dans un- fens fubordonné , il o(ê ajouter
:qu'à ce titre il exorce toute' Tautorité qui n'efl:
;pas attribuée aux 'autres Corps de FEtat ; pre«
nant ainfî le mot de Gouvernement dans le
fens de la fouveraineté , comme fi tous les
Corps de l'Etat, & le Confeil général lui-mê-
{h) Page Ô5.*
L E. T T R E. 223
me, étoient inflimés par le petit Confeil: car
ce n*efl: qu'à la.faveur de cette iuppofîtion qu'il
peut ;5'at;tribuer à lui feul tous les pouvoirs que
h Loi ne donne exprefTément à perfonne. Je
reprendrai ci • après cette queftîon.
Cette équivoque éclaîrcie ^ on voit à decou*
vert le fbphifme de l'Auteur. En effet , dire
qae tout ce qui efl: du reilbrt de l'autorité en
matière de Religion eft du refTorc du Gou-
vernement , ed une propofltion véritable y fi
par ce mot de Gouvernement on entend la
puilTance légiflative ou le Souverain ; mais elte
efl très faufle fi l'on entend la puiiTance exécu*
tîve ou le Magiflrat ; & l'on ne trouvera ja-
r I
mais dans votre Republique que le Confeil gé-
néral ait attribué au petit Confeil le droit de
régler en dernier reflbrt tout ce qui concerne
la Religion.
Une féconde équivoque plus fubtile encore
ôH C IN Q U I E M E
vient à l'appui delà preniîere dans ce qui fuit.
Cefi le principe des Protejians^j & (feji fingu-
liérement Fe/prit de notre conjiitution quij dans
le cas de difpute attribue aux Confeils le droit
de décider fur le dogme. Ce droit , foit qu'il y
m
ait difpute ou qu'il n'y en ait pas, appartient
fans contredit aux Confeils mais non pas au
Confeil Voyez comment avec une lettre de
plus ou de moins on pourroit changer h
conftitution d'un Etat ! •
Dans les Principes des Proteftans , il n'y a
point d'autre Eglifé que l'Etat & point d'autre
Légîflateur eccléfiaftique que le Souverain.
Cefl: ce qui eft manifefte , furtout à Genève,
où l'Ordonnance eccléfîaftiquç a reçu du Sou-
s,
verain dans le Confeil général la mênse iknc-
tion que les Edits civils.
Le Souverain ayant donc prefcrît fous le
nom de Réfomution la doébrise qui devoit ê-
tre
V
Lettre*
2tS
bre enfeignée à Genève & la forme de culte
qu'on y devoit fuivre , a partagé entre deux
corps le foin de maintenir cette dodlrine & cô
culte tels qu'ils font fixés par la Loii A l'un elle
a remis la matière des enfeignemens publics ^
la décifion de ce qui efl conforme ou contraire
à h Religion de l'Etat, les avertiiTemens &
admonitions convenables, & même les puni-
tions fpirituçlles , telles que l'exeommunication*
Elle a chargé l'autre de pourvoir à l'ezécutiott
<
des Loix fur ce point comme fur tout autre ^
& de punir civQement les prévaricateurs ob<*
ftinés»
Axtû toute procédure régulière fur cette
tnatieie doit commencer par l'examen du fait ;
ftvQÎrj s'il efl vrai que l'accufé foit coupable
d'un délit contre la Religion, & par la Loi
cet examen appartient au feul ConGfloii;e/
Quand le délit efl çonfhté & qu'il elt d$
Partit L P
2i6 C I N Q U I E M E
nature à mériter une punition civile, c^efl: alors
au Magiftrat feul de faire droit , & de *dëcer-
rier cette punition. Le Tribunal eccléfiaftique
V
dénonce le coupable au Tribunal civil , & voi-
la comment s'établit fur cette matière la com-
pétence du Confeil.
■ Mais brique le Confeil veut prononcer en
Théologien fur ce qui efl: ou n'eft pas du dog-
mef, lotfque le Confiftoire veut ufurper la jurif-
diftion civile', chacun de ces corps fort de fa
compétence ; il défobéît à la Loi & au Souvc-
rîtîn qui Pa portée 5 lequel n'eft pas moins Lé-
giflateur en matière eccléfiaftique qu'en matie-
re civile, & doit être reconnu tel 'des deux
»\ •
côtés.
' •. - ' • • .-^
Le Magiftrat eft toujours juge des Mînif-
ttes en tout ce qui regarde le civil , jamais en
ce qui regarde le dogme ; c'efl: le Confiftoire.
t\ le Confeil pronon^oît les jugemens de FE*
LETTRE. 127
/
glife il auroit le droit d^excommunication , Ôc
au contraire les. membres y font fournis eux*
mêmes. Une contradiflion bien plaifante dans
cette affaire efl: que je fuis décrété pour mes
erreurs & que Je ne fuis pas excommunié ;
le Confeil me pourfuic comme apoflat & le
Confifloire me laifle au rang des fidelies {
Cela n'efl-îl pas [fîngulîcr?
D efl bien vrai que s'il arrive des difTentions
entre les Miniflres fur la doftrine, & que par
fobflination d'une des parties ils ne puiflènt
«
s^accorder ni entre eux ni par l'entremife des
Anciens , il efl dit par F Article 18. que la eau*
fe doit être portée au Magiflrat pour y mettre
êràé.
Mais mettre ordre k h querdie tf eft pa«
décider du dogme. L'Ordonnance explique el-
fe-inême le motif du recours au Magiflrat J
^efl robflînation d'une dès-Parties. Or la po^
t28 CINQUIEME
lîce dans tout l'Etat , rinlpeftion fur les ^ueret-
ks, le maintien de la paix & de toutes les
fondions publiques Ja réduâion des obdinés^
font inconteftableihent du reflbrt du Magidrat.
Il ne jugera pas pour cela de la do6lrine , mais
il rétablira dans Taflemblée Tordre convenable^
pour qu'elle puîfle. en juger.
Et quand le Copfeil feroit juge de la doc*
ffinè en dernier reflbrt j toujours ne lui feroit-
îl pas permis d'intervertir Tordre établi par la
i»oi , qui attribue au Confifloire"^ là première
connoiiTance en c«s matières; tout de même
qu'il ne lui eft pas permis , bien que juge fu-
prême, d'évoquer à foi les caufès civiles, a-
vant qu'elles aient pafFé aux premières appeV '
fetio^s*
L'article i8 dit bien qifen cas que les Mî«
nifbres ne puiCTî^nt s'accorder , la çaufe doit être
portée au Magidrat pour y mettre ordres
L E T T R E. £29
\
nais il ne die point que la première connoif'
fance de la doftrine pourra être orée au Con-
fiftoîre par le Magiftrat , & il- n'y a pas un feul
exemple de pareille ufurpation depuis que la
République exifte (c). . CeU dequoi rAuteitf
(f) Il y eue dans le feizieme fiécîe beaucoup de
difputes fur la. prédedination , dont on auroît dû
faire l'aîtiufement des écoliers , & dont on ne man-
qua pas , fclon l'ufage , de faire une grande affaire
d'Etat. Cependant ce furent les Miniftres qui la dé-
cidèrent, & môme contre l'intérêt public. Jamais,
que je fâche, depuis les Edics, le petit Confeil ne
s'eft avifé de prononcer fur le dogme fans leur
concours. Je ne connois qu'un jugement de cette
efpecc, & il fut rendu par le j Deux-Cent. Ce fut
dans la grande querelle de i66g fur la grâce partir
cuHcre. Aprci de longs & vains débats dans la Corn*
pagnie & dans le ÇonGiloire, les ProfeflTcurs, ne
pouvant s'accorder , portèrent Taffaire au petit Con*
feil, qui ne la jugea pas. Le Deux-Cent révoqua &
la jugea,' L'importante queflioa dont il s'agiiïqic é-
toit de favoir fî Jéfus étoit mort feulement pour le
falut des élus , ou s'il étoit mort auflî pour le falut
des dannés* Après bien des féances & de meures
délibérations , le Magnifique Confeil des Dcux-Cenç»
prononça que Jéfus n'étoic mort que pour le falut
P3
^So CINQUIEME
des Lettres paroit convenir lui-même en difan^t
qa'tn Cas de difpute les Confeils ont le droit de
décider fur le dogme ; car c'eft dire qu'ils n'ont
ee droit qu'après l'examen du ConGfloire, &
qu'ils ne l'ont point quand le Confiiloire efl:
d'accord.
Ces difiinâîons du reflbrt civil & du rdTort
cccléfiaftique font claires , & fondées, non feu^
ies éius. On conçoit bien que ce Jagement fut une
afFaîre de faveur, & que Jéfus feroît mort pour les
dannés , fi le ProfefTcur Tronchin avoît eu plus de
crédit que fon adverfaire. Tout cela fans doute cft
fort ridicule: on peut dire toutefois qu'il nes'agif-
foît pas ici d'un dogme de foi, mais de runiformi-
té de rinftruftion publique dont Tinfpeftion appar-
tient fans contredit au Gouvernement. On peut a-
jouter que cette belle difpute avoit tellement excité
l'attention que toute la Ville étoit en rumeuT. Mais
n'importe; les Confeils dévoient appaifcr la querel-
le fans prononcer fur la dodrine. La décifîon de
toutes les queftions qui n'intéreffent perfonne & oit
qui que ce foit ne comprend rien doit toujours être
laiiTée aux Thigologicns.
LETTRE. 23:1
kmcnçTur la Loi, mais fur la mîfon, qù.ne
veutpa$ qae Ijes Juges , de qui. dépend le.foîçt
deg particulièFs en pui/Tent;; décider autrement
qiie (ur dçs £sùts conflans ,^ iur des corps de 4ér
Uc pçfiofs, bien avérés, & non fur des impu-
utîons auffi vagues aufli arbitraires que c^
ks des çrrcu^s fur la Religiqn;; & de queltç
fureté jouiroienc les Citoyens , fl ; dans tani^
de dogmes obfcurs , fiifçeptibks de diverla;
interprétations 5 le Juge pouvojt chqiiîr. au
ffé de fa paflion celui qui cbargeroit ou q1£^
culperoît l'Accafé, pour tecondanner ou Tafo
foudre?
La preuve, de ces dilHnélions âd dans fi^h
(Htution nieme,.qui n'aUroit pas établi m%
Tribunal inutile; puifque (îJeXpafeil pouyoiç
• ^^
PS^ r furtOHS en jHremîer • rçflbrt , des matieroii
eccléfiaftiques s l'inflitution du ConiUloire ne
fcrviroit de.rieît :.
P4
*< ^
as* C I N Q"U I E M E
Elle eft encore en mille endroits de rO>
Confiance , où le Légiflateur dîftÎDgue avec
tant de foin rautoricé dea deux Ordres ; dis-
^âîon bien vaine ,; fi dans Teieercice de fës
fondions l'un étoit- en tout fournis à l'autre.
Voyea dans les Articles XXIH & XXIV. la
fpëcifioation des crimes puniffables' par les
téix , & de ceux dont h première inqutjitm
appartient au Conjiftotre. . . . '
Voyez la fin du même Arcide XXIV , qui
veut qu'en ce dernier cas, après la conviclioa
^ coupable le Confiftoire eii faflfe rapport au
Confeil , en y ajoutant fon avis. Afin , dit I'Of-.
<î(M>nance , tjfiie le jygemenP^ concernant la punu
ti&h fok toujours- refervé à la Seigneurie. Tep*
4
mes d'où Ton -doit inférer que le jugement
concernant la domine appartient au ConfiA
Ifolre^
Yej^z 1^ fçw.ent à,ts Miniftres, qui ^eçft
♦^ L Et T R É. 233
de ft rendre pour leur part fiijets & obéiflàns '
aox Loix; & au Magiflxac entant que leur Mi-
niftere le porte : c'eft-à-dire fois préjudicîer 3
la liberté qu'ils doivent avoir d'enfeigner félon
que Dieu le leur commande^ Mais où lêroit
cette liberté sîils étoient par les loîx ftijets.
pour cette doârine aux déciflons d^un' autre
corps que le teur ?
Voyez l'Article 80 , où non feulement FEdît
prefcrit au Confiftoire de veiller & pourvoir
aux défordres généraux & particuliers de !*£«
life, mais où il l'inflituê à cet effet. Cet artî-
cle a-t-il un fens ou n*en a-t-îl point ? eft-îl ab-' *
folu, ri'eft-îl que conditionnel j & le Confiftoi-
re établi par la Loi n'auroit-fl qu'une èxiften-
ce précaire, & dépendante du bon pkdfîr du
Confeil?
Voyez l'Article 97 de la même Ordonnance,
OÙ ^s les cas qui exigent punition civile | il
P 5 '
i34 9 IN Q U I« M E
cOa dit qae le Confiftoire ayant ouï les Parties
& fait les rcQioatniQces & cenfutes ecdéûaf-
fiques doit rappj^ter le toQt .^u Ceofeil, lequel
fur fon^ rapport , remarquez^ M^ . la répétîtibii
de ce mot ^Mifera à" ordouni^.ÇiJ^irejugemmt^
filon Pixigencê du ^ cas. Voyes^> eogni ;ce qui
iuit dans 1q . w^tpe Article :i &^ n'oubliez pas
que c'elt le Souverain qui parle Car combim
que csfwnt jçhof es. conjointes ^ injeparables que
«
la Seigneur k ^ Jup/érimti que Dietf nous a dm-
née y ^ kiiouvememer^ fpirituelqu^ilji établi
4ans fon Kgl^e 5 elles ne doivent nullement être
çqnfufesi pmfqus.celuî qui \a tout empire de com-
mander ^ auquel nous voulons rendre toute fu-
jétion comme nous- devons y veut: être 4ellement re-
connu Au,tei!ir du Gouvernemenf ffiliti^e £f ec"
cléfiajlique , que cependant il a expreJJ&ment dif"^
cerné tant M vocations que TadmniftTûftion de
Tun S de Vrmtre^
\
t
L E T T RE. %ss
»
Mais camment ces adminUfa^doQs; peuvent-
elles être diftinguées fous raatoricé commune
du Lëgjflateur, 11 Tune peut empiéter à Ton
{ré fur <^e de Tautre.?. S'il n'y a pas Jà de la
cootradi^on» je n'en fiturpif Voif nyHe p0i&
A FArade .88, qui prefcrît expreflëment l'ol^
dre de {«'océdure qu'on doit obferver contre
ieux qui dogmatifent , j'en joins un autre qui
n'eft pas moins impartant ; c'efl: l'artide 53 au
ti&e du CêtbicUfme^ où il efl: ordonné. 91e ceux
qui contreviendront au bon ordre ^ jiprés avoir
été remontrés Tuffifamment , s'ils perfiftent ^
foient appeOés au Confîfloire, . ^ fi lors ih ne
vwlsnt obtempérer aux remôntraiKes qui leuf
feront faites, qu'il en Jînt fait, rapport à la Sek
gnenrie. ' «
De quel bon ordre efl-il parlé là ? Le Tkrci
le dit ; c'eft du bon ordre en matière de doc-r
Trine « nuifqu'il ne^asit.CRie du Qthéchîfine
ti6 CI N (^ U"I É M E
qui en eft le Ibmmaire. D*aîlleurs le maîmicn
du bonoÈdre jen général parbît bien dIus ap-
paTtenk au JMàgîftrat qu*a^ Tfîbiinal ecdéflaf-
tîque. Cépleîldani: voyez quelle gradation! Pre-
métcmslntHl faut remontrer j fi le coupable per-
fifte , il faut Vàppeller au Cffriji/loire ; enfin s il
ne veuf obtempérer, tlfcSir faire- rapport àk
Seigneurie. En toute matière de foi, le d<*-
nier reflbrt eft toujours attribué aux Confeils;
telle eft la Loi . telles fbnir toutes vos Loil
J*attenck de .vôîrqudqueiiftîcle, quelque-paP
4
ikge dans vos Edks , en veriù duquel lè petit
Confèil s'attribue auflî le premier reflTort*, &
paifle faire tout d'un coup d'un pareil délk le
fejet d'une procédure eritninelle.
Cette marche n'efl pas feulement contraire à
M Loi , elle eft contraire à l'équité , au bon
fens, à l'ufage univerfel. Dans tous les pays
du monde la règle veut qu'en ce qui concerna
L B T T R E S37
une fcience ou un art, on prçnne, avant que
de prononcer y le jugement des Profeflëuri
dans cette fcience ou des Experts en cet art ;
pourquoi , dans la plus obfcure dans la plus
diffidle de toutes les fciences , pourquoi , lors-
qu'il s'agit de l'honneur & de la liberté d'un
homme, d'un Citoyen , les Magiftrats négli^
geroient-ils les précautions qu'ils prennent danf
l'art le plus mécanique au fujç( du plus v^
intérêt?
Encore une fois , à tant d'autorités & tant
de raiibns qui prouvent l'illégalité ôc l'irrégula*
rite d'une telle procédure qudle Loi , quel E-
dit oppofe-t-on pour la juflificr ? Le feul pat
fage qu'ait pu citer l'Auteur des Lettres eft ce«
lui ci, dont encore il tranfpofe les tçrmes pour
en altérer refprit.
Que toutes Us remontrances eccUJiafiîqaes f§
fajjent en telle forte que far k Çonjijioîrc ne /oit
i3* C I N Q U ï Ê ME.
>n rien dérogé à t autorité de h Seigneurie ni if
iajuflice ordinaire; mais que la puijpmce civih
demeure en fon entier (rf).
Or voîd la conféquence qu'il en tire. „ Cet-
,, te Ordonnance ne fiippofe donc point, corn*
9, me on lé fait dans les Représentations que
9j les Miniilres de FEvangile fbîent dans ces
'9, matières des Juges plus naturels que les
;, Conieib. ^^ Commençons d'abord par remet4
tre le mot Confeil au fîngulier, & pour cauiê^
Maïs où eft-ce que les Répréfentans ont
>
fappofé que les Miniftres de FEvangile fulTenc
dans ces matières des Juges plus naturels que
le Confeil (e).
fd) Ordonnances eccléfiaftîques Art. XCVIL
(e) L'examen 6P la difcuffion de cetts rnatierê , dl-
fent-ils page 42 , appartiennent mieux aux Minif-
tres de r Evangile qu'au Magnijù^ CenfeiL Quelle e(l
la matière dont il s'agit dans ce paffage? Ceft la
queltion fi fous l'apparence des doutes j*ai raSembIti
LE T T .R ' E. 23^
SdontEdit le CJonfiftoire & te Confea font
Jages nataïdi chacun dans ià partie, Fan de la
doârine , & Tautre du délk Ainll la puiflan-
ce civile & Tecdéfiaftique refteht chacune en
fou entier fous Fautorité commune du Souve-
rain ; & que fignifieroic ici ce mot même de
Puijjance civile , s'il n'y avoît une autre Puijpm*
ftf fous-entendue ? Pour moi' je ne vois,- rien-
dans ce pafiàge qui change le fèns naturel de^
ceux que j'ai cités. Et bien loin de-là; les li-
gnes qui fuîvent les confirment, en détermî*
nant l'état où le Confiftoire doit avoir mis la
dans mon Litre tout ce qui peut tendre à fapper é-;
branler & détruire les principaux fondemens de la
E^llgioQ Chrétienne. L'Auteur des Lettres part de-'
là pour aire dire aux Eépréfencaos que dans ces.
matières les Miniftres font des Juges plus naturels
que les Confeils. Ils font fans contredit des Juges*
plus naturels de la queftion de Théologie ^ mais
non pas de la peine due au délit, & c'eil auffî^ce
qu€ Us Réf réfentans n'ont ni dit ni fait entiendrd.
5>
fi4ô_ C I N Q U I E M È
iprocédure avant qu'elle fbit portée ae Confeîi.
Çeft précifément la conelufîon contraire à cel-
le que l'Auteur en voudroît tîrerj
Mais voyez comment , n'ofant attaquer
rOrdonnance par les termes , il l'attaque par
les conféquenceSé
L'Ordonnance a-t-elle voulu lier les mains
^ à la puifTance civile , & l'obliger à ne ré-
„ primer ajicun délit contre la Religion qu'a-
yy près que l^Confiftoire en auroit connu ? Si
^ cela étoît ainfi il en réfulteroit qu'on pour-
3^ roit impunément écrire contre la Religion ;
n, car en faiiant femblatit de fe ranger l'accufé
„ pourroit toujours échapper, & celui qui au*
„ roit diffamé la Religion pai* toute la terre
y^ devtoit être fupporté fans diffame au moyen
„ d'un repentir fimulé (/). '^
. Ceft
I y ii'iii iliiiMii m «iiirti n m" I II • I I ~
LE T t 6. Ê» 441
C*eft donc pour éviter ce malheur a^ux,
cette impunité feandakafe ^ que TAucear ne
veut pas qu'on fuîve la Loi à la Lettre. Tou-
tefois fei2e pages après » le même Auteut vous
parle ainfik
jy La politique & la philôfophie pourrooc
)^ foutenir cette liberté de tout écrire ^ mais
)) nos Loix Tont réprouvée t or il s'agit de fa«>
), voir fi le jugement du Cohfeil contre les Ou--
5, vrages de M. RçufTeau & le décret contre
I, fa perfonne font contraires à nos Loix^ 3t
9) non de favoir s'ils font conformes à la phi«
),- lofophîe & à la politique (g). *•
Ailleurs encore cet Auteur ^ convenant que
la flétrUTure d'un Livre n'en détruit pas les ar«
gumens & peut même leur donner une publî«
eité plus grande , ajoute : ,, A cet égard , je
; ' — =-r
(g) Page 30.
Partît l Q
,s^4^ Cl N Q U I E M E
i^ retrpuve afîez mes-maximes dans ceHes des
^.„ Répréfentadons. Mais ces maximes ne font
.„ pas celles de nos Loix (h). "
^^ En refFerrant & liant tous ces pafTages , je
leur trouve à peu près le khs qui fuit.
- j^WiP/jM^ I^ Pbilofafhîe la- Politique (^ la rai/on
^^piiffent fotUerîîr la liberté de tout écrire^ on doit
Jans notre Etat punir cçtte liberté y parce que nos
Jjoix la réprouvent. Mais il' ne faut pourtant
juïs fuivre nos Loix à la Lettre , parce (^ alors
an ne pîtnîroit pas cette liberté.' .
A parler vraî, j'entrevois là je ne fais quel
galimathias qui me choque ; & p9urtant F Au-
,c«r „ paroit ho,nm.d-erp™ : ainfi dan,, ce
ré fumé je penche à croire que J€ me trompe
fans .qu'il me foit pofliblô de yoir en quoi
.Comparez don« vousrmême les pages 14, 22,
(b) Page 22.
I I
3^5; & vous verrez fij ai tpitt «ou raifiJn: ;
: Quoi qu'il en, foie , en; aitendant qile F Aotçuft
nous montre ces autt^S Loîx.oii les'prëcôptéa.
it là Philôfophie & de Jà Politique font té-
k 0
prouvés , repireilons l'exameii de. fes objeéliàn^
contre celle -ci.
,. « • » t I • • • •
Premièrement, loin que, de peiir de hiSkx
m délit impitm > A Toit pertnis dans une Ré-^
pubSque au MagUbrat d'ag|;rayer la l«oi i il né
lu ell pas même pernaif de Tétiendcé aVix dé**,
lies fur lefquels elle n'eft. pas.fprmelle^ & Tbni
feît cojtabien.de Coupables lédjappehç epjftjx*
gleterre à .k faveur de la moindre diûinâdûn
fahàk dans les termes de la .Loi Qmoniue ejl,
. pins févere que les Loix , dît Vauvenargue, eji
un Tyran (?).
* «
i^iA.
^'4
■ (/) Comme il n/y a point à Genève de Loîx pén«-..
1*5 proprement dites, le Magiftrât inflige arbitrair«-i
mencja poine à^os crimes; ce qui «û affUréin^î un^
2U C ï N Q U t E M E
JVfais voyons fi la conféquence de Timpun}'
té» dans Tefpece dont il s'agit , eft fi terrible
^ue l'a fait TAutear des Lettres*
II faut 9 pour biim juger de refprit de h
Loi, fç rappeller ee grand principe, que les
meilleures Loix criminelles font toujours celles
qxà tirent de la tmmt des crimes les châti-
mens qui leur font impofês^ Âinfi les aflaiSns
doivent être punis de mort , les vofeurs , de la
perte de leur bien , ou, s'ils n'en ont pas , de
cdle de leur liberté, qui eft dors le fêul bien
qui leur refte. De même, dans les délits qiû
grand défaut dans U Légiflatîon & un abus énorme
dans un Etat libre. Maïs cette autorité du Magif-
trat ne s'étend qu'aux crimes contre la loi naturelle
& reconnus tels dans toute fociété , ou aux chofes
fpécialement défendues par la loi pofitive ; elle ne
va pas jufqu'à forger un délit imaginaire oii il n*/
en a point , ni , fur quelque délit que ce puiiTe ê-
trc, jufqu'à rcnverfer, de peur qu*un <:oupabIe n'é^
Chape ^ l'ordre de la procédure fixé par la Loi.
LETTRE. MS
font uniquement contre la Religion , les peines
doivent être tirées uniquement de la Religion ;
tel efl 9 par exemple ^ la privation de la preu-
ve par ferment en chofes qui l'exigent ; telle
efl: encore l'excommunication , prefcritte ici
comme la peine la plus grande de quiconque t
dogmatifé contre hi Religion. Sauf, enfuite,
le renvoi au Magiftrat y pour la peine civile
due au délit civil, s'il y en a.
Or il faut fe refibuvenir çie l'Ordonnance,
TAateur des Lettres, & xnoî, ne parlons ici
que d'un délit fimple contre la Religion. Sî
le délit étoit complexe , conune fi, par exeni-
pie , J'avoîs imprimé mon Livi-e dans l'Etat
fans permiflion,il eft inconteftàble que pour ^
tre abfous devant le Confiftoire , je ne le férois
pas devant te Mâgîflfat . ; ^
Cette dîftinâîon faite , je reviens & je dis:
|I y a cette différence encre les .délits contre
«7
4« CINQUIEME
Ja Religion & lés dt^lits civils, que les dernierî
».
fôôt aux hommps ou aux Loix un tort un mal
fée! pour lequel laf 'ficelé publique ex^ge néceff
faiiieipônc réparâtÎDn&pamrion; .mais les au-
tres'font ^feqleijientJdfisoffienfes contre la dj-
xûnité , à qoî . nulî'ne • peut nuîre. &cgui pardon*
/leaupepencià. C^iKÎk ditûnité dlappaifce,
if nly apluîj dé délit s^ punir, fiuî le Tcandale,'
& le fcandale-iferrëpard en donnant au*xepei^
«tir la méibé publicité xjnk eu la faute. La cha-
rité Chrétienne ,mîii3e âlofs la clémence divine,
&, ce feçQÎt iintf 'inconféquence abforde de ven*-
•ger k Religion par une rigueur* que. la Religion
féprouve. La'juflice'liumaine h%Sf,xie,d(i^
-avoir nul.ëgàra'ai jcqjentir, j^fâvouci mai?
'm)i}âj p]9écifçoiéiit'pDurquoi;,.<kRs^ane .efpeca
de délit que le repentir peut réparer,. VOrdoHf
^cë appris dttsm^uf es poiu:.qneJ*;Arihuna.
^Ur.n^ pritapas: d'abord canuQt>6k^K& :
L E T T /R E. ?43î
L!îiK:5nvériienctembje quç l'Auteur tKHjyjj
à laiflèr, impunis cîvileiilent les délies contre 1^
Religion n'a. donc pas h réalité qu'il lui donne ^
& la ocMSiféquence .qii'iî en. tire pour prouver
que x^\ ttîeft pas T^fpfit de -la Loi, n'eft 'ppl^i
jufte, contre les termes J fqrniels de laL^V '•
AmA:^^li^'m çié h délit eçntre la Religion ^;
ajoute - 1 - il , taccufé en faifartf femblanf^ df fc^
rang9r potaira, taiijdu0^ éebçppp\z: L'Oefdonnarvcc
y dk©a%i-^!M/^^V:'j^|72è/^^7t^<?/*- r^?^5.^^'^-eiie^
dit, /iljt r^i|g^,:(&..ii;yîa'des règles auflî cer-
uines •qi^'pîi5îÇû puiiTe, av<ïjr '§n^ tout ^utre cas;
ppuc difticgu^r ici. 1*. réalité :dg laTauffe ap^^i^*
rence , furtout quant aux effets extérieur 3 ,f
feuls conjpjfis; fpus ce, mot; sHl fe raug^^^.-r
C9in»ei;r,un -pouijeau d^t plus gravé -& <juî^.
mçrite up trajtf:ement p|us rigoureuse. H efl rcr^
bps , &les Toyes de le ramener à fon devoir
• ' ■ ... '-::.-: * . . : / '. j
V
148 CINQUIEME
font plus féveres. Le Conjëil a là ddfiu pomr
modèle les formes jadidaires do rinquifitioa
(1), & fi rAqceur des Lettres n'approuve pas
qu'il fbit auffi doux qu^elIe , il doit au moins
loi laiiTer toujours la diftinâion des cas ; car
îl n'eft pas permis , de peur qu'un délinquant
ne retoin^> de le tr^ter d'avance comme s'il
étok déjà retombée
Ceft pourtant fur ces fauflês conféquenoes
que cet Auteur s'appuye pour a£Srmer que 1'%
dit dans cet Article n*a pas eu pour objet de ré^
gler la procédure & de fixer la ci^npétence des
Tribunaux. Qu'a donc voulu VEdit; félon lui?
I^e vQÎcî.
Il a voulu empêcher que le Confiftoire ne fô-
vir contre des gens auxquels on impnteroît ce
qu*ils n'auroient peut-être point dît , où dont
on auroit exag;éré les écarts j qu*il ne févît,.dî^
g " ■ ^' ^.
(10 Voyçî le mm\iel dçs Inquifitcms^
LETTRE. «49
je, contre ces gens-là fans en aVoir conféré a«
vec eux, fans avoir ei&yé de les gagner.
Mais qa*efl>ce qae févir, de la part du Con«
fjibire ? Ceft eïcommuaier , & déférer au
ConfeiL Ainfi, de peur que le Confîftoire tm
défère trop légèrement un coupable au Con*
feil 9 rSdit te livve tout d*un coup au ConieiL
Ceft une précaution d'une efpece toute nou«
velle. Cela eft admirable que, dans le même
cas, la Loi prenne tant de mefûres pour em«
pêcher le Coidtfboire de fêvir prédpitanmient»
& qu^elle n*en pfenne aucune pour empêcher
le Conleil de févir précipitamment; qu'die
porte uae attntira fi fcrupaleufe à prévenir
la diflfamation» & qu^elle n'en donne aucune à j
|«évenir le (upi^ice j qu'elle pourvoye à tant
de choies pour qu'un homme ne foit pas a-')
»
cônmiumé mal^à-pfopos^ & qut'dle ne pour^r^
wye h rien pour qu'&ne (bit pai brûlé mal^^
Q5
250 C IN Q'U TE."»MvfE
r
Minifl:re5 ^ & • fi peu.ceïle -des:: ]^s I - Cétwt
bkn Tait • affiirémôntdefcoçïpcer pour beâu-
cbup la communion 4es :fideHes$':màis^ce nl^!
toit pas bâen fait de 'Comif-eE>ppj[|r fi pelu leifl^
fôreté, fcur. libeFté, •leuciY»}i^-S:ôttC;iiaçûiCi.
Religion . qui. • ptefcrîyoikj^nfciâ'iôdulgence f à.
fes gardiens , ne devoij p^jî.'doi^rvtftnt:')^
barbarie à f€s'vfngpuïi.;:.i:r,,Li zi:^ if..^ ,.'
•^ Voik.-ço«refôi$ j fôJoa.iiotijetiAqtQaci hk:
lide.raifoii:ipôiirq*jo(î lX)i:dooifîilî®tîn*à ffes^tsir.;
lu dire ce. qw:^[e^dàt; : J^.-CJ^gMj que^ Ifcxfw^ç:
c'efl' affeç :y .répançîre. ; . faiTQns im^ntenm à^l
Tapplicatioà ; jn»l» Ae la ^tr^i^^f^^ft |^ ïxmk
curîeofe. que.i'ifit^pflétîitiî^ ;0 , p ,: , . . :
dogmsifife i quifcofeiga^ ,~goi , içftrijil.. ll:..nç,
qui nfi ÊW:qs^,p»l)U«rj:W. Jâvre. ^;^i4^,j»^
' U E' T T R R -. ist
«
fcrpliT^ &Jt\enbcsa'T€çoCi A^Aiié\2s vérité,
cqtte^diftiïiGliamnB paroît unpéu.fiibtîle;car^
eomme; difeot trè^ bjenlcp Répréfentaqs,.oq
dogmaûfe ^eécvit^^tçat ctAnixiç deivivcivoix;
R^aîs admettûM cette futtfflitéi; nous y troinre*
tons une âiIf{hf}:iDti;i9aiËivetii; ^uriadjoucir b
pans .t<^&-.lejf;|^cai:s. à\\ mqn^.Ja poliœ
yelile avec le plus. grand foin :fuf.,cpu?., qui va^^
itruilencqui eçfdgnei^t (^.^ç>j^p^Qj^;,éi^
oe pcmet çp?, fojtçç^de fça^p^ fl">:g«}J^
autorinis... Il.p'fflhP3?.#"Sf BerWIt"?^. ?^^
la. bonne do£lrinç,fi Ton n'eft ^ç£ prédica-
teur. Le Peuple ^yeog^^ elt facile à déduire j
«in homnne^V 49gmatîfe ,,^ttroupe,, & bieu^,
tôt îlnem ameuter. La moindre entreprifera
.«se.pcânç efl toujours, rç^ard^ecpçime qn-.^«
.teetqt • pui^f&^lp, , , ^ qiufc des .conf^q^e^ee$
35» C I N q U I E M E
^ Il û'etî eft pas de même de FAuteur 6tm
l^ivre ; s'il enfeigne » au moins il n'actroiq)e
poîat , il n'ameute point » il ne foice perfon^-
ne à récouter, à le lirej il ne voas recherche
point 9 il ne vient que quand vous le recher'-
chez vous-même ; il vous laiiTe réfléchie fur ce
qu'il vous dît ^ il ne difpute point avec vous»
ne s'anime point, ne s'obfline point, ne levé
point vos doutes, ne réfout point vos objec-
tions, ne vous pourfuit point j voulez -vous le
quitter, il vous quitte, &, ce qui eft ici Far-
tîcle important, il ne parle pas au peuple.
Auffi jamais la publication d'un Livre ne fut-
elle regardée par aucun Gouvernement du me-
hie œil que les pratiques d'un dc^matifêur. I)
y a mêmef des pays où la liberté de la prcflfe eft
entière} mais' il n'y eii à aucun où il foit per-
mis à tout le monde de dogmatifer îndiffé*
femmo&t. Dans les pa;|[s où il eft défewia
t. t t t t. t» If)
dl^ittprîméf dei hbnea fans penaiffion i eeofc
qui défobéîiîeflt font punis quelqilefois pour s(«
voir défobéi } tms la preuve qu'on t& regiur de
pas au fond te' que dit un Livfe iSdmme u66
choPô fart itt^ôrtstnte ëft, lafadlité avec kh
quelle on Mft entrer dans VZm ces méméA
Livres que, pour n'en pas paroître approuve^
les maximes , on n'y làiife pas imprimer*
Tout ced eft vrai, furtoat, dés Livres qiil
ne font point écrits pour le peuple tels qu'ont
toujours été les miens. Je fais que votre Con^
feil afiirme dans fes réponfes que , félon Pimen*
tion de F Auteur^ TEmU éoit fervir de guidé aux
ferez ^ aux mnes (/); mais cette aflotioti
n'efl: pas excufable , puifque j'ai manifeflé dans
la préface & plufî^urs fois dans le Livre une
intention toute différente. Il s'agit d'un noa«
y
>
(0 Page 2a & 23 , des Répréfentations impri*-
mées.
^54 0;I.N (^ U I « lit Ë
•veau r^&èm d'éducadon.dciiï: f<^r^ fô |)]an' »
J'examea 4e& fag^s, & non pas d'One méthode
ai
pour les pères. & les mères , à lagbelle je n'ai
Jamais fongé^ Si quelquefois, par une £gure
aflez commona > je.pvoîs leur adrefièt h pa-
role, c'eft) ou. pour mie faire mîâoz entendre^
* pu pour m'exprîmer en moins de mots. Il efi
vrai que j'entrepris mon livre à 1^ foUidtaciotl
d'une m^re ;: m^ais cette mère,' toute jeune &
toute aimable qu'elle -efl, a de la philofophia
& connoit le cœur humain i elle eft par la &•
» •
gure im ornement de fon fexe, & par le génie
ijne exception C'ed pgur. les eiprits de k
trempe du £ien que j'ai prîç la plume» non pour
" - ■ « .'
des Meffieurs tel pu tel, ni ppuf; d'autres Mef-
(leurs de parçille étoffe , qui me lifent faid
, ê
©'entendre 3t& V^ m'outragent fans me fâcher;
4
Il réfukc de la diftînélion fuppofée que fi la
procédure pf'efcritte pHr l'Ordôbrianœ coiitre
;L.E:.T; T R B; , ^^55,
' ion. homme i]ui.dogmatife,n'efl: paat ajpplicable 2
l'Auteur' d'un Livre, c'eft qu'elle efl.trop fé-
vere pour ce dernier. Cette confëquence fi
naturelle , , cette confëquence que vous & tous
mes.leSteurs tirez fûrement ainfi que moi, n'eft
point cdie de l'Auteur des Lettres. II en tire
une toute contraire. H faut l'écouter lui-mê-
me : vous ne nfen croiriez ^psis > fi je vous
parlois d'après lui.
„ Il ne faut que lire cet Article de l'Or-
^ donnance pour voir évidemment qu'elle n'3
,, en vue que cet ordre de peribnnes qui ré;
,, pandent par leurs difcours des principes eftî- *
,, mes dangereux. Si ces per formes Je rangent^
„ y eft-il dit, (pion les fupporte fans diffame.
é
„ Pourquoi? C'eft qu'alors on a une fureté
raifonnablc qu'elles ne répandront plus cet-
te y vraye , c'eft qu'elles ne font p'.us à
„ Grainiir«. Mais qu'importe la rétraftatioa
5>
J9
^SS C ï N Q U i E M fe
), vraie ou fîmalée de celui qui p^ la voyè'
3, de rîmpreilion a imbu tout le monde de fes
^y opinions? Le délit efk confommé; il fbb^
), ûflera toujours, & ce délit, aux yeux de It
„ Loi , e(t de la même efpece que tous les
y, autres, où lé repentir efl inutile dès que la
„ juftice en a pris coiinoiflance. "
II y a là dequoi s^émouvoîr , mais Calmons^
nous , & raifonnons. Tant qu^un homme dog«
matife , il fait du mal continuellement ; juT^
qu*à ce qu'il fe foit rangé cet homme eft k
craindre; fa liberté même eft un mal, parce
qu'il en ufe pour nuire , pour continuer de
dogmatifer. Que s'il fe range à la fin , n'im^
porte; les enféignemens qu'il a donnés font
toujours donnés , & le délit à cet égard eft: au*
tant confommé qu'il peut l'être. Au contraire!
auflitôt qu'un Livre efl: publié , l'Auteur ne
fait plas de ioal , c'efl;' ]ç Lîvfe feUl qui en
frit.
LETTRE* £57
I 9 •
Mt. Que FAuteitf foît libre ou (bit arrêté, lé
Livre va toujours foii tfaîft. La d&entidn dé
TAuteur peut être un châtiment que H Loi
prononte , mais elle n'eft jamais un remède
au tôal qu'il a fait , ni utie précaution pdiu*
en airêtci: le {Jrogréi.
Ainfi les rettiedes à ces deux maux ne foilt;
pas les mêmes. Pour tarir la fource du mal que '
fait le ddgnultifeur 9 il hyz nul moyen prom^ft
àlîir que de l'arrêter: maïs arrêter TAuteu^
c'eft ne remédier à rien du tout; c'eft au con-
iraire augmenter la publicité du Livre , &
par conféquent empirer le mstl , comme le dit
très bien ailleurs l'Auteur des Lettres^ Ce n'eft
donc pas là un préliminaire à la procédure, ce
n'eft pas une précaution cohvenalJle à la cho'
fe ,• c'eft une peine cjui ne doit être infligée
que par jugement , & qiîi n'a d'utilité que lé
châtimerit du coupable. A moins' donc que fort
/
1
2j8 CINQUIEME
délit ne foît un délit; civil , il faut commencer
par raifonner avec lui, Fadmonefler , le con*
vaincre s Fexhorter à réparer le mal qu'il a fait,
à donner une récraflacion publique , à la don*
ner librement afin qu'eue faflè fon effet , & à
la motiver fi bien que ces derniers iêntiniens
ramènent ceus: qu'ont égaré lesi premiers. Si
loin de fe ranger il s'(^fHnç, alors feulemeQC
on doit févîr contre \^ TeHe ,eft , certaine-
ment la m^urdie pqqr aller au bien de la cbofe)
• » 4»-
td efl: le but de la Lei > té fera celui d'un fa-
ge Gouvernement , ^ ioiti bien moins fe pr(h
»
fofer de punir T Auteur que d'empêcher î effet de
rmvrage (m)*
ComHient ne le feroit-ce pas pour l'Auteur
d'un Livre , puifque l'Ordonnance , qui fuit en
tout Iça voyes,çonvenayes à l'efprit du CSirit
(w) Page %^
tîâhîîbe , iie veut pzt même qu'on arrête !é
dogmâdfeitt âVârtC d'avxHr ëpuîfé tdife lei
moyens i^offibles pour le rameiîet au devoir f
é\é aime mieux Courii" les rifqùfes du mal qu*i!
peut contînuef de faire qiile de ttistatJliÈr à W
charité* ChefcheÉj de grâce ^ d)mméhtdéce^
la feul on peut conclurre que la mênie Ordon^
fiancé veut qu*on débuté contre FÀut^ur pat
un décret é6 prife de côirps?
Cependant 1* Auteur des Lettres , après avoî^
déclaré qu*il retrouvoit alTez fes maximes fui
cet article dans celles des Répréfentahs^^ ajou^
te; mais ces maxims ne font pas celles de nos
Loix^ & un itiomeilt après il ajoute encore ^
que ceux qui înclinent à une pleine toUranct
pourmeht tùuP au plus critiquer le Confeil de ria^
voir pas dans ce cas fait faire une Loi dont F ex*
trcice ne leur paroit pas convenable (fi)* . Cette
(«) Page 33.
R a
i^o CINQUIEME
condafion doit farprendre , après tant d'effbrti
pour prouver qne la fêute Loi qui paroît s'ap-
pliquer à mon délie, ne s'y applique pas nécef*
Virement. Ce qu'on reproche au Çonfeil n'eft
point de n'avoir pas fait taire une Loi qui
exifte,, c'efl: d'en avoir fait parler une qui
^ rfexifte psks.
• - La Logique employée ici par l'Auteur me '
paroit toujours nouvelle. Qu'en penfez-vous,
Monteur ? connoîflez- vous beaucoup d'argu-
mens dans la forme de celui-ci?
. La Loi force le ConfsU é févir contre rju-
iem du Livrei
. Et.où eft-cUé cette Ldî qtti fôrfe lé Confeil
à févir contre l'Auteur du Livre ?
• -'■Elle nexijie pas^ à la vérité: tnais il en exif
tewie autre y quij ordonnant de traiter avec doW'
xewr ç§Im qui dogmutife'i ordonne , par conjt
LETTRE. t6t
fierU, de traiter arôec rigueur rjuteiir, dmt elle
ne parle pomt:
Ce raîfonnement devient bîen plus étrange en-
core poyr qui fait que ce fut comme Auteur &
non comme dogmatifeur que Morelli fut pour-
fuivi; il avoît auflî feît un Livre , & ce fut pouF
ce Livre feul qu'il fut accufé. Le corps du de'#
lie, feloij la maxime de notre^ Auteur étoit dans
le Livre même , TAuteur n'avoit pas befoîn
d être entendu ; cependant il le fut , & non
feulement on l'entendit , majs on l'attendit ;
on fuivit de point en point toute la procédure
prefcrite par ce même article de l'Ordonnance
^u'on nous dit ne regarder ni Içs. livres "nî
»
les Auteurs. On ne brûla même le Livre qu'a-"
près la, retraiçe de l'Auteur, Jamais il ne fut dé-
crété, Ton ne parla, pas da Bourreau (o); en-
(è) Ajoutez la circonfpeaibn du Mai^idriiC dans;
R3
»<Sa C I î!î; 9 U I E M E
fin tout cela fe "fit fous \e$ yeux du Légifla^
teur, par les rédafteurs de TOrdonnance, ao
momeaat qu'elle/ venoit de pafler dans le tems
même où régtioît cet eQ)rit de févéxité qui ,
fdon notre Anonyme , Tavoit diâée , & qu il
allègue en juftification trci claire de la rit
gueur exercée aujourd'hui contre mou
Or écoutez là • deflus la diftjnaion qu'il
fait,, Après ^voir çypofé toutes les voyes (te
|oute cette affaire, fa marche lentç & graduellç dans
hiprocédiie, Iq rapport du Confiftoire» Tappaieil
du jug^ement. Les Sindics montent fur kui Tribu-
nal public, Us invoquent le nom de Dieu y ils OBt
|bU9 leurs yeux la faînte Ecriture ; apiès une meure
Ôélibcratiou , après avoir pr\s cojpfcil des Citoyens »
ils prononcent; leur jugcmçnt devajnt le peuple afin
qu'il en fachc les -cau^s. , |Is le font impsiniei &
publier , & tout cela pour la fîm^Ie çondannation.
d'un Livrç, Cans fïéttlSùte, fans décret contre l'Au-.
%€ui , opiniâtre & coptulijax. 0?s MeŒcurs, de-.
puis lors, ont appris à difpofer moins cér^iniônieu-
feinent de l'honneur & de la liberté des hommes, &
fur^out des Citoyen? ; Cajç il qfl; 4 rem,ai^uer ^^ft
l^oxqlU n^ r^çoi^ f asu^
9>
99
LETTRE. 263
douceur dont on ufa envers Morellî , le tems
qu'on lui donna pour fe ranger, la procédure
lente & régulière qu'on fuîvît avant que fon
Livre fut brûlé, il ajoute. „ Toute cette
marche efl: très fage. Mais en faut^îl con-
clurre que dans tous les cas & dans des cas
„ très différens, il en faille abfblumerit tenir
„ une femblâble ? Doit - on procéder contre
„ un homme abfent qui attaque la Religion
\j de la même manière qu'on procéderoit con-
„ tre un homme préfent qui cenfuré la dîfci-
„ pline (p)?** Ceft-à-dire eh d*autreç termes ;
„ doit- on procéder contre uii homme qui
„ n'attaque point les Loix , & qui vit hors de
„ leur jurifdiftion , avec autant de douceur que
„ contre un homme qui vit fous leur jurifdic-
„ tion & qui les attaque ?*^ Il ne fembleroit
V
O) PàgÇ 17. • ' j
R4
fy
64 c 1 ^ qv 1 E U E
pas 5 eu effet , que çeja dut faire une queflîpn.
Vqicî, j'en fuis fur, 1^ première fois qu'il ^
pafle par refprit humain d'aggraver k peine
^'un coupable , uniquement pa^rce que te crir
me n'a pas été commis dans l'Etat.
„ A la vérité , " çontînue-t-il , ,9 on remar-
^ que dans le? Répréfentatîons à l'avantage de
,j M. Rouflean que Morellî avoît écrit ccStitre
ly un point (Je difciplîne , au lieu que les Lî'
„ vres'de M. Rouffeau, au fentimenc de fes
,, Juges , attaquent proprement la Religion.
j, Mais cette repairque pouuoit bien n'être
^i P^ généralement adoptée, ^ ceux qui r^
^, gardent la Religion comme rOfivrage de
p Dieu & l'appui de la çonflitution pourront
„ penfer qu'il efl moins permis de Tatt^quêr
,, que des points ^ difciplîpè, qui , n'étant que
„ rOuvrage des hommes pi^uvent être fuf*
,^ peéls d'erreur, &f du moin? fufceptible? 4'^1
< •
L E T >T R E. '26s
„ ne infinité de foripes & (^ çonibinaîfon»
^ différentes (5} ?• • .;
Ge difcours, je vous Tavoue , me paroîtroîf
tout au p^s paflable . dans la bouche d'un Ca,-
pucia, mzis il mç chogueroit; fiyt fous 1^ plu-
me d'un jMagîftrat.: Qu'irappjtç gue la remarr »
qiie des Répréfentans ne fbit pas génçralemeiv
:;doptée, G. ^ux jjui l^- rejettent nç le font qup „
parce qu'ils, rajfomienç mal ? ...
Attaquer la Religion ed iaps cppt^edît qn
plus grand péché : devant Diçu f^ d'attaquer
la difcipline. Il n'en efl p^s dp .mem^ devauf
Içs Tribunal^ jbumaîns qui font ^blis ppur
punir les aimes, non les péchés , & qui ne
fpnj pas les vengeurs de Dieu maîs^, des Loî^,
La Religion ne peut jam^ faire partie de I9
]Lési{]atîon qu'en ce qui concerne les a6lions
» .•
t6é CINQUIEME
Ses hommest La Loi ordonne de faire ou de
s^abftenir, mais elle ne peut ordonner de croî.
re, Ainft quiconque n'attaque point la pratique
de la Religion n'attaque point la Loi,
Mais la difcipline étabUe par la Loi fait eA
fencietlement partie de la Légiflatîon y elle de*
vient Ld dle-n^ême. Quiconque Fattaque at^
taque la Loi & ne tend pas k moins qu'à txo\i^
hier la conftitution de l'Etat. Que cette con*
ftitutîon fut, avant d'être établie , fufceptibte
de plufîeurs formes & combinaifons différen-*
tes y en eft^lle moins refpeéfabte & facrée
ibus iHie de ces formes, quand die en efl une
fois revécue à l'exclufion de toutes les autres;
& dès lors la Loi politique n'eft elle pas çon^
ilàte & fixe ainfi que la Loi divine ?
Ceux donc qui n'adopteroîent pas en cette
aSTaire la remarque, des Répréfentans auraient
d'autant plus de tort que cette remarque fut
LETTRE,
2^7
faite par le Confeil même dans la fbntence coq«
tre le Livre de MorçIK » qu'elle accufe fîirtout
de tmàre à faire fcblfme & trouble dans TEtat
i'une manière féditîeufe } impqtatîôq donc il fe»
roit difficile de charger le mien.
Ce que les Tribunaux civils ont à défendra
n'eft pas TOuvrage de Dieu , c'efl FOuvrage
des hommes j ce tfeft pas des âmes qu'ils font,
chargés , (fell des corps ; c'ell de l'Etat Se
noix de l'Eglile qu'ils font les vrais gardiens, âg
lorfqu'ils fe mêlent des matières de Religion ,
ce tfeft qu'autant qu'elles font du reiTort des
Loix j autant que ces matières importent au
ton ordre & à la (ûreté publique. Voila les
laines maximes de la Magiflxature, Ce n'eft
pas j fi l'on veut , la dofbrine de la puifFancQ
abfolue , mars c'eft: celle de la juftice & de la
raifon. Jamais on né s'en écartera dans les
Tribv.nau)( civils fans dpnner^ dans les plus ï^
/
358 Q I.N Q U- lE M E
nèfles s^bus , fans mettre l'Etat çn com^uftîon.
ikns faire des Loix & de leur autorité Je plu?
odieux brigandage. Je fuis fâché pour Je peu-
pie de Genève que le Confeil le méprife afTez
pour Tofer leurer par de tels difcours^ dont
les plus bornés & les plus fuperûitieux de l'Eu-
rope ne font plus les dupes. Suf cet Article
vo? I^épréfentans raifonnent en hommes d'E-
tat, & vos Maçiflrats raifbnnent, en Moines.
Pour prouver que l'exemple de Morçlli n^
- - - * - •
fait, pas règle , l'Auteur des Lettres oppofe à
¥■* • * » •'
la procédure faîte contre lui cçlle qu'on fit ep
1632 contre Nicolas Antoine y un pauvre fou
qu'à la folîicitation des Minîftres le Coofeil fit
brûler pour le bien de fon ame. Ces Auto-da*
fès n'étoient ,pas r^res jadis à Genève, âç ij
paroit par ce qui me regarde que ces Mcf-
fleurs ne manquent pas de coût pour Içs rcj
nouveller.
LETTRE) i6p
Commençons toujours par tranfcrîre fiddle*
mèot les palTages , pour ne pas îmicet la mé^
thode de mti perfécuteurs.
„ Qu'on voye le procès de Nîcdâs Antoî-
^ ne L'Ordonnance ecclélîaftîqué exîftoît , &
^ bn étoit âfTez près da teitis où elle avok été
„ rédigée pour en connoître refprit ; Aikoine
), fat-il cité au ConlHtoîre ? Cependant parmi
^ tant de voix qui s'élevèrent contré cet ' Ar-»
^, rêt fanguûiaire, & au milieu des efforts que
iy firent pour le fauver les gens humains &
9, modérés » y eut «il quelqu'un qui réclamât
5, contre l'irrégularité de la ptodédurie? Mo-
^ relli fut cité au ConTiftoire y Antpine ne le
iy fut pa$; là ckatiop au Confifloiré n^eil: donc
^, pas nécefikiï'e dans tous les cas (r). "
- Vous croirez là deffus que le Confeil procès
(f) Pa«e 17.
, j
V ^ ^- y
s
I?d CINQUIEME
da d' emblée Contre Nicolas Amôioe comme il
a ùk contre moi , & qu'il ne fut pas feuler
ment quefiîon du Coniiftoire ni des Mlnîftres i
Vous allez voîrr
Nicolas Antoine ayant ëté^ dans un de fes
accès de fureur , fur le point de fê précipiter
dans le Rhône, le Magiftrat ie détetnnnlà 1$
tiret du logis public où il étoit , pour le mett
tre à FHÔpiul , où les Médecins le traitèrent»
Il y refla quelque tems proférant divers btaf«
phêmes contre la Rdigion Clirétienne* ^, Les
yy Minifixes le voyoient tous lesr jours ^ & ta*
5^ choient , lorfque fa fureur paroifToit an peu
^ calmée, de le faire revenir de fes erreurs»
^ ce qui n'aboutit à rira , Antome ayant die
jy qu'il perfifleroit dans fès ientimens jafqu'i la
,, mort qu'il étoit prêt de fouffrir pour la gloi*
5, te h grand Dieu d^ïfrael. N'ayant pu rien
99 pgner fur lui , ils en informèrent le Cbn*
L E T T B;. jEo t7t
ly feil 9 où ils te f ëprëfenterent pïït que Servet ,
y^ Gentilis & tous les autres Aoidtxmtsâxe$^
^ conduant à ce qu'il fut mis en chambre
„ claufe; ce qui fut exécuté.^* (x)»
Vous voyes là d'abord pourquoi il ne fiit pas
dté au Confiftoire; c'efl: qu'étant griévemeoc
mahde & entre les mains des Médecins, il lui
écoit impoflibte d'y comparoitie. Mais s'il n'al«
loit pas au Coofîftoire» le Coniifloire oa fea
mend>ies aUoient vers lui. Les Miniffares lo
voyoienc tous les jours , l'^xhortoient tous lea
jours. Enfin n'ayant pu rien gagner fur lui, ils
le dâioncent au Confeil, le répr^lentimt pirer
que d'autres qu'on avoît punis de mort, re*
quià-ent qu'il foit mis en prifon^ & fur leur
rquifition cela ç& exécuté.
£n prîfon même les Minières firent de leur
(0 Hîft. de Genève , in -12. T. 2. page 550 &
fuiv; à la note.
<v
t^i CINQUIEME
mieûïc pour le nuxiener , entrèrent avec lui
dans la difcaffion de diveils paifages de Tan^
den Teftament^ & te conjurèrent partout
ce qu'ils puràit imagina: de plus touchant de
renoncer à fes erreurs (r) ^ mais il y demeora
ferme. Il te fîit auffi devant le Magifliat, qui
lui fitfubir les intexrogatdires ordîaakes; LorP
y.
qu'il fut quellion de jugeï cette affiiirc^ le
Magifixat cbhfulta encore lés Miniftres, qui
comparurent en Con&il au nombre de* quinze ^
tant Pafteurs que Profefleurs: Leurs opinions
forant ' partagées , niais l'avis du plus grand
V
sotnbre fat foivi & Nicolas exécuté. De forte
que te procès fut tout eccléfiàflique ^ & que
Nicolas
(*) S'il y eue renoncé, eut-il également été brù-
K ? Selon la maxime de l'Auteur des Lettrée il au-
rolt dû l'être. Cependant il paroit qu'il ne l'auroit
pas été; puifque, malgré fon obftination , le Ma-
giftrat ne laifla pas. de confulter les Miniftres. Il 1«
regardoit , en quelque forte > comme étant encore
fous leur jurifdi^lîon.
LETTRE» 6^3
Nicolas fiit^ pour àinfi dire^ ^rûlé pax la maia
des Mmiflreà
Tel ht 9 Mooikdr) fonîfe <le )a praeédure
dans laqudle l'Auteur des Lettres nous aflTure
iga?Antoîbe ne fut pas dté au Confiftoire. D'o^
il coQdud que cette ckation n*eft donc pas
toujours néceflâitei L'eiemple vous paroit^U
bien cfaoîfî?
SuppofoUs qu^il ie fcky que sWuitrà«t«il^
tes^ Rëpréfentans cocduoieitt d'un fait eQ
oonfiimatîoii d'une LoL L'Autent des Let^
tKs coiidud .d'un fait contre cette m^e
Loi Si rautQrité de chacun de fes deUx faîci
détruit cdié d$ Tautre^ refte la Loi datts
fôn entiqn Cette Loi» quoiqu'une fois eQ»
freinte^ en eft-elle moins exprefTe, & CM*
toit -il de ravoir violée une fois pour avoif
droit de \i violer tôujooii i
Concluons à tootre tour. Si j'aî dogtâa^*.
Partie t 8
s^i^ C t N Q Ù t E M Ë
fe , je fuis certainement dans le cas de lâ
Loi: fi je n'ai pas dogmatîfé , qu'a- 1- on k
Jne dire? adcurie Loi n*a parlé de moi (u).
Donc on a tranfgrelTé la Loi qui ezifte, oa
fuppo*e celle qui n'exifte pas.
» ' * * •
Il efl: vrai qu'en jugeant FOuvrage on n'i
pas jugé définitivement TAuteun On tf a fait
.encore que le décréter , & Ton cbmpte cela
pour rien. CSela me paroit dur , cependant;
mais ne ibyons jamais injuftes , même envers
ceux qui lé font envers nous, & ne cherchottt
'point l'iniquité où elle peut ne pas être. Je ne
fais point un crime au Conlèil , ni même à
- ^ * "
l'Auteur des Lettres de la difBnâbn qu'ils
mettent entré l'homme & fe Livre , pour fe
(w) Rien de ce qui ne bleflç aucune Loi natit
relie ne devient criminel , que lorfqull eft défendu
par quelque Loi pofitive. Cette' remarque' a pom
J3ut de faire fentîr aux raifonneurs fupeificieUqae
mon dilemme eft- exa£t.
i
L E r T R E
27-5
âî&ulper âe m'avoîr jagé fans m'enténdcç. Les
Juges ont pu voir la chofe comme ils la mon-
trent , ainfi je ne lès accufe en cela ni de fîi«
percherie ni de inàai^&foj. Je les accule ièu-
lement de s'êtoe trompés à. tnes dép^ds eg
un point très grave; & fe tromper pour ab-
foudre efl pardonnable, mais fe tromper poœ
punir eft une erreur bien cruelle.
Le Confeil avançoit dans fes répohfes que»
maiffé la âëtrilTure de mon livre, je reftois,
quant à ma perlbnne , dans toutes mes ex-
cq^tions & défenfes.
Les. Auteurs des Réprëfentations répliquent
qu'on ne comprend pas quelles aceptk>ns &
défenlês. il refte à un homme déclaré impie^
téméraire , fcandàleux, & flétri même par la
main du Bourroau dans des ouvrages qui por-
tent fon nom.
» Vous fuppofez ce qui n'eft points, ^^ Jdiç
S a
tjô CINQUIEME
à cda TAuteur des Lettres ; „ ÙLVàir , qoe le
^ jugement porte fur celui dont TOuviage
^ porte le nom : mais ce jugement lie Ta pas
^, encore effleuré, Tes excepticxDs & àékafb
^j lui refient donc esttieres/^ (x).
Vous vous trompez vouirmême, dîroi^je à
xec écrivain. 'Il eft vrai que le jugemeot ^ui
qualifie & flétrit le Lme. n'a pas 'encore atta-
.que la vie de T Auteur, mais il a déjà tué fon
.honneur : Tes exceptions & défenfes lui reftent
encore entières pour pe qui regarde la peine
aifiiâive , mais il a déjà reçu la peine ioâp
mante: Il efl déjà' flétri & deihonnoré, aa«
tant qu'il dépend de fe juges : h3L feufe diofe
^ leur refle à. décider, c^efls'il fera brûlé
ou non* ' \ .
I
- La diftiuâion fur ce point entre le Livre &
- (*) ftjc tu ■ ■
LETTRE. 377
PAateur efl: inqtfe, pulf^u'un Livre a'efl: pat
punifiahlé^ Uii Livre a^eft en lui * même ni
impie ni lânëraire ; ces épithetes ne peavent:
tomber que ilir la doârmequ'^ contient ^ c'efl^
à-dire fcur TsAnteur de' ce«e 'doS:rine'.. Quand
on brûle xtu Livre, que .fait là le Bourreau 9
Desbonore^fit.^ il lea feuillets r du Livre? qui
jâimaîs:6uSt.ditt qu'unLivrejeqt 5ie rhomieur^
YoSafenjeûr; eq. vçim la Joiffce: uaidago
Kûl dQjfemliiu; ' . " . . -: . •
. On écrit heauùçHîp de Lîvjf€S;î/on en écrk
peu avecimddis iincere d^aller au bien^ Dq
cent Onyrages qui^ paroiSsm;^ foixajiïe : au;
moins <;^c> popr objet des motifs dlntàrêt &,
d'ambition. Tiente antréi^ diâés pay TeipriH
de pacM, p2B;ix h9ine^T<»ni^\à'lâ. fayeur tic
Fanonyiôe'poijter dans ïe pul^lic le poifon d&
la calonmield; de la. fatyie. IHxy peut-être j,
& c'djt beaùcoi^, fonc ^cciu dans de bom^
S3
27» C I N Q U I E M:E
vues: on y dit la vérité qu'on fidt, on y cher-
che le bien qu'on akie. Oui ; mais où e(t
rhomme à qui l'on pardonne la vérité ? II faut
donc fe cacher povir la dire. Pour être utile
3mpuném£nt, on lâche, fon Livre dans le pu-
blic, & l'on fait le'^pbngeon.
De ces divers Livres , quâques uns des
mauvais & à.peuprès ù>us les bonsl font dé*
nonces & profcrîts dahs> les Tribunaux: la
araifon de cela fe voit fans que je la dife. Ce
-n'elt, au furplus, qu'une fîmplefonmUté, pooc
ne pas paroître ap^ouver tacitement ces Li-
vrés,- Du rcfte^ pourvu que les* noms des Au-
teurs n'y (bient pas-, ^es ^Acteurs, quoii|ue toat
le monde lçsconiK)Ufe&., les. noiiimevhè Tout
pas connus .du' Magiik^t Ekinecu!s:inçme font
dans i'uSige d'avouer ces Livres^poqrs^én faire
honneur , & dé les renier' pour feîmettre k
couvert; le même homme feaa l'Aàeizr m
'_
LETTRE. strg
ne le fera pas» devant le mêtne homme félon
qu'ils feront à l'audience ou dans un foupé.
Ceft alternativement oui & non , fans difficul-
té, làos. fcrupule. De cette façon la fureté ne
coûte rien à la vanité. Cefl: là la prudence &
l'habileté que l'Auteur d.^ Lettres me repro*
che de nWoir pas. eue, & qui pourtant n'exi-
ge pas , ce me femble ^ que pour l'avoir on fe
mette en grîffldft fraix d'efprît . .
Cette manière de procéda: contre des Livres
anonymes: dcçt on ne .veut pas ccnmoître les.
Auteurs ^efl: devionue un ufage judiciaire*
QQaad,on:veUtfçvir contre le Lîyre on le
brûle, parce, qu'il n'y a j^rfonng ^ entendre^
& qu'on voit bien que l'Auteur qui fe. cacher
n'efl; pas d'hameui: à l'ayo^^;.(àuf à rire le
foir avec lui - même .. des infpnnations qu'on
vient d'<s:4<wper J* matin, contre lui. Tel eft
s 4
aSo C IJMIQ p l E M:E
4
m
;; Mablorfqu'on Aateôr mal-adxô:; c*e(I:-a-
4ire^ un Auteur qui coonoit foot devoir , qia
le veut remplir, ib crqk ob^gé db qe rien dire
au publie qu^ii ne f avoue , qu'ilne fe acrâme î
qu'il ne fe monti^ pour eo ré|KDad£e , :^rs l'é»
quité, qoi ne doit pâé punk cominte uq crime
la mal'Udreflfe d'un homme d'hôn^^oar , v^ut
qu'on proœde ^^vec hû d~une zxexe rnsoiierei
elle veut qu'on 4ie îé^t ^oipf, I4 ciuleda Li«
vre de ceHe 4e f honune , pui^li àédist en
mettant Cm nom ^ne I^ vouloir pmit^^9t^j
die veut qu'on ne jc^e f ouvrage q^ui fie peut
répK^dre^' qu^â^ri» avoir oùï l'Aufeur <^ rf
pond pour }ui. Aîtifi , bien que c&ndaunei; un
Livifè^onjmô fdit^en e£Fet ne condimierque
te Livre , condanner un Livr^ qui pcsrte le
nom de FAuteur , c^eft condanner I^Aiitéur
même 5 & qu^d oft ne Ta pioint wk à portée
de répondre^ (feil le juger fans ravoir entendu*
; L; Ç W T R Eo iU
veôt, le détïwdé prîfe ée COffS W^onc in»
dTf^iaiâblê en pôsml ëds avant-'Ué- procédear wi
jogèment du Livret &^Taînèmerit dîroît-ori
?vec FAqteur de$'jLettresqùè'Ié*<KlTt êft-ét^î*
dent,- qu'^l^- ^irl^' lime] ttêmè j- cela ne*
<S|teiifè pçfot ■ 4e^ ftîvte iâ'^Wfne- jiidîcîaîfe
gt}*oiti iîiiit dans ]ësf j^liis grands - cirimes, datisî
» • - 1 » • f
les-pfesi-vër^, 'dâhs'vles niiènx Couvés: Car
qçâhè toute la Vîïe aûrôît Vu iih'hwimè enp
a&flîaei' lirt uiitre-, encore iie^jujgeroît^- on'
pdnt, raÛkffin ftns Tentendrei oi]^ fî(n* TàVô^r'
p& à portée d'être entende ' I
-'Et pourquoi cette frandiîfed^titf Auteur quî
ft'Oomme tou)rtîérôît-el!e aîhii côiîtfe Im? Ne*
doit^eHepas, au contraire, lui iriéiS^er des ë^"^
gards*? Ne dbîtr-éBe pas înipbfô ate'Jûg^^
pi» de cîrcbhïiie^ôn que s'il ne-fe fût ]^i
S5
Cl Nt QUI EUE
^ns hardies s^e^^feroit^il ainfiy^s'i} oefe
fentoît rafloré contre les dangers , par des rai-
Ions qu'il peut aSéguer en fa faveur & qu'on
peut, préiùmer fur fa conduite même v^iloir Jbi
peine d'être , entendues ? . L'Auteur des Let*
très aura beau qualifier, cette' conduite d'im*
prudence & de xnal-adrdi& ; die n'en eUt pas^
moins celle d'un homme d'honneur , qui voie
ion devoir où d'autres yoyent cette impruden*
ce, qui fent n'avoir rien à craindre de quicoih
que voudra procéder avec lui justement , &
qui regarde; comme une lâcheté puniQkble de
publier des chofes qu'on ne veut pas avouer,
: S'il n'eft queflion que de la réputation d'Au-
teur, a-t-on be(bin de metgre fon. nom à ioa
I^ivre? • Qui ne fait comment on s'y prend
pour en avoir tout l'honneur fans rien rifquer^
pour s'en glorifier fans en répondre, pour
prendre un air humble à fprce de vanité ? ]>e
c ■'
^
L'E^ T T: R E.
^8S
quels AiÀeors d^une certaine volée ce petk
our d'adr^fie eft - il ignoré ? Qui d'entre eux
ne^fàît qu'il efl; même au deflbu» de la dignité
de fe nommer^ tomme fi chacun ne devoit patf
en IHant TOùvi^ge (feviner le* Grand homme
qui Ta ècMnpofé ? -
Maïs ces Meffieurs n'ont vu que Fdkge orr
£naire, & loin de vofa: res:c^tion qui faifoit
en ma faveur^ ils l'ont faio ftrvir côAtre moi^
Ils devaient bri!^r>4e Livre ifans fair&mentiitMi
de l'Auteur , ôils'ife^ett vocâoiaiD à Muteur,'
attendre qu'il fut :|3Téfent' ou ' ccàitomax pour
brâlelr le li^re«: Mais points ils htùkat le-
Livre comme- fi TAuteum'étoît pas connu ^ &
décrètent Muteûv comme fi ile Liwè n'iétoit^
psi9 .brûlé. rMe'Jécréter après mîavoir diffa-
Qié! que me voulcuent-ils donc encore? Que^
ftie jéfervoiênt-ils de pis daQs:]a:;fuite2. Igoo^)
roiçpt-ils. qûe.i'lioQneut d'un hûQuéte
Utiiim -^-
28* €J N Q.Ut HTlHlE
9 lui §sâxtà> 4i^M "^^ a cpriinfeiiQ!^;p«(r le âé-.
pe foctc )ii!r9i£) 4é la^mebdfieeft la 'plus cm^
le peine qu'ils poiirroient ia%m^eK>&, fé^
:. On éom0iew5ftjîï£tf:irt& tr^^ tous ^as^
V
4^s fçixil cc)]:^:&rpui9 oïl dit .^acquiHâmeob
^ue je Tefb)f^s:^0utes:m«s ex^€|)tion$ & dé«.
i^tiiibî JSlaia' comment ces /exceptions. & 'dé-(
fia^fes effaoeroni^elle? rig]iicimînl& &: h, i^
qu'on mlaurà £ut : {buSrîr. d'oroACè ^ tjaa^
SQOQ [Livre. & dans ma. pecf<j&ne!, qufttfd j'au^
lai été promeoé'jdaiis les rues par des archëtf»
^pand mue jiiàox.iguî m'àccabtent ou aura pri»
ûm d'aj(»ifiecies rigtteuradeJla:pi^oa? Quoi
k «
t E T T H E., isaar
donc! poat être jafte dok^Qnr confondre dans
la même clafie &, dans le même traitement
toutes les fautes & .cous. les hommes ? pour
im aâe de franchile appelle mal^adreilê» faut-il
débutser par traîcer un Citoyen (ans reproche
dans les prifcms a»nme/ un fcélérai;? Et quel
avantage aura donc déviant les juges TeClime
publique & Tintégrité de la vie entière , fi
cliquante ^s d'honneur vis à vis du moindre
indice (y) ne iâuvent un homme d'aucun af-
front?
«
(y) Il y auroît , à Texamen , beaucoup â rabac^
tre des pKéroint)tions que rAoteûr des Lettres affeç^
te d*accumuler contre mpi. Il dit; par exemple,
^ue les Livres déférés paroîflbient fous le mÔme
format que mes autres ouvrages. U eft vrai qu*îU
étoient in douze & in oélavo; Tous quel format font
donc ceux des autres Auteurs ? Il ajoute qu'ils é^
toient ifnprimés par le même Libraire^ voila ce qui
h'eft pas. L'Emile fut imprimé par des Libraires
difFérens du mien i & avec des carttéberes qui n*4-
voient fervi à nul autre de mes Ecrits.. Ainfi I'In«
dice qui réfuleoft de cette confrontation n'étoic
point contre moi^ il étoit à ma décharge.
r
•â9S Cl N Q U 1 8 M E
,, La comparâifon d'Emile & du Gintrââ
V
,, Social avec d'autres Ouvrages qui ont été
',, tolérés, & la partialité qu'on en prend oc-
„ cation de reprocher au Confeil nei me ibm^
jy blent pas fondées. Ce ne feroit pas bien
„ raifonner que de prététidïe qu'un Gouver-
„ nement parce qu'il auroit une fois difltmnlé
„ feroit obligé de diâimuier toujours: fi ç'eftif*
„ ne négligence on peut la redrefler ;fi c'eft un
^y filence forcé par les circondances ou par la
„ politique , il y auroit peu de juftice à en fai-
,, re la matière d'un reproche. Je ne prétends
point juftifier les ouvrages défignés dans les
Répréfentàtîbns ; mais en confcience y-a-t-
„ il parité entre des Livres où l'on trouve des
^9 traits épars & indifcrets contre la Religion,
„ & des Livres où fans détour fans ménage-
,, ment on l'attaque dans fès dogmes dans fk
- »
it morale « àfps fon influence fur la Société
'^ L É T t k «7 isf
5 dvile? Fàilbns împàrtàlement - la ' cbmpa-
I) raifon 4^ ces Ouvrages , jugeons en par
„ rimpreflion qu'ils ont faite di^s le mon^
9) de ; les uns s'impriment & & débitent par
,9 tout; on lait comment y ont été reçus les
j, autres (2)." .- * " \
faî cru devoir trànfcrîre d'abofd ce para*
graphe en entier. Je le reprendrai msûntenan»
par fragniens. Il mérite un peu d'analyre. ^
Que n'imiMrime*t*on pas à Genève ; que t!f
tokre - 1 - on pas ? . Des Ouvrages qu'on a pfeiae
à lire fans indignation s'y débitent publique-*
ment; tout le monde les lit ^ tout le monda lâr
aime, les Magiftrats Ib taifent , les Mioiilrei
fourient, l'air auftere n'eft plus du bon air.
Moi feul & mes Livres avons mérité i'animad^
verfîon du Confeil, & quelle animadveriion?
*W; Ç'jt I? QUI R ME
îi&a ne pçot ttêiœ Tima^et p|us. ^nioleiue
\
9i plaai cemUa; Mon Dieu} je n'aurois jamais
cm d'êlTQ im fi s^ fcélérat;
'. Ia compara^n d^EpUle &'du; CmrûSt, Sociâi
(gpec djaiaixs. Owrû^es tolérés, ne m fimik pi
fondée}. Ah je Felperel -^
.; Ce ne Jbroispas^ Ken tai/ùf^ner 4^ ^riieiàe
ftfun Gouvermm^h t^c^ qu'il norois une fris
ài[fimlé i^Jefoil obligé 4e digmuler toujmsk
Cent } nw.voyet les tems les «UeuK les perfon-
Qe$ ( vojpez les écrits far le^œls on difliraule)
ât.céux qu'on <:hoifit poor nepksdlàBEmQlerj
WjesL les ^niewrs qu'on fêfe ji G«nèye, &
Foyez ceuîc qi^on y pourfuki
^ Si c'eji'une négligence on peHt là ndreffer*
On le pou\rôic^ on Tauroit dû, Ta-t-on fak^
Mes écrits 6c letlt Auteur oiit été pétris fiuis
avoir mérité de rêtre; & œult qui l'ont mé*
rite ne font pas moins tolérés qu'auparavant.
1 t f t :r Éi •■ ii^
• » «
L'exception n'efl: que poir «6i feul;
Si C*èji-un fiietke foreê pdr Ui ciféor^cÀéi^
^ par l» pdHtiquei il y iiuiôît féud» jufilch à
en fane^ la matière itùk./eprodië. Sî l'ôû VGUJ
fotceâ tolâiet àti Eàits ptuâi&blei, tolérétf
donc auffi cènk' qui ne te Gtat psa. ' Ia décantô
au oÀJio» €3^ qu'ofa iâche Ai peuple caf
dioqtântes acceptions dsf peribnneaf, qui pu-i
iâTdft fe fôible iOnoiôbiC de» fiaxà du piÂic
éoupabk Quoi ! «es dStinâibc^ fâuxdâtettiê£
fimt^-^ës- ddâcf des nufbns ,*: ^ feront ■•' elk»
cofc^dufs d«$ dapies ?Ne dM^-^ pss' ^ fê
fort tife-qtidques fatyïietf bbicines: JnMfi'^bdlWç
«outylëi FetëKtaô ,"â ^qiifif^i^tre: Vitte^W 4fi
£fc édraféelfi l'on n'y talerâi •fri^Da'.ii^^.im^
I»îché,-iS-P)^'n'y vetfitfiibiiqàemeiitrâsiaS-
Auèeuts>?c 'FeopW, càmî^ieii ôi^ ^^^ jsû^.éu
icérdo^' soi: âiTatt fft ^biimot kièifJeoir (Sàf
Tarttt t T
e^Q CINQUIEME
l •
Fuiflane^ pour a«tQii&r le tqal qu'dles igao^
s^at ^ qu'on vaut faire en Içiir Qom !
^ Ix^fque j'airiyal 4^s. ce psiys on e^t dit
m
des':f<ifibti ^b9v m'«f4eF«'i 4f» bnl^yi^ftw
Bi'aflaffiocr; il étok apâai^. si^audeiiit f^ isf^
de ma iqaKba. ToUs;!!^.: d^Rgsn -ga^ v^tm^j^ii
I. E T T K E. M|
^qvteiwbôuiljeaF âe papier devenk poor Cotf
uudheMP m homme au0.iiQpQCfa|it; EA^f
iie tfintdp kéâSss, jjp sais jea Jff^A<? j Je çpOr
.On m'accueille j on me.,qu3efl8^, jp r^
. le hpanêfçtés & il ne t^'eipt g^'à Jnqi /l'^ J^ç^'
jceiTi^ jdfpuntaj^e. Je moi^giç paiy^gillcqieJip
«teç.inoi;,Uop,towbe,^ mn\eti}tçfi^
vi^ pas; cm bil;^, fprteffwitt mçn éi^fîoxdâ^;
jrie> mwi c^i .çe0e de. pe menacer de ^a Fir^s^;
jCe; on a railba. Si j^unais: des afls^ffiM daX^I
^nent terminer mes lbuffi(^uv:es ,-, ce. n-efl fa-
resne^t pas de xe^pay^-là qu'ils, >pçfl^^ . ;
. Je ne qoxtfbz^ds point 1^ diverfes^^ (ànici àç
pies 4^graoes; je pus bien, ififcecçer celles .^
fond Tefiçt-des qrpcoilfauioetv l'ouvrage de If
infte neceffit^, 4e cdOes fl^.ine vicnfienç np-»
4jnen^ez^ del^ ha^e 4e qies eonen^s• Pi ! plâtr-
ai «Dlieu gue je ^'eft euflê* {as flus .i .X#tïnè\^
T A
i^à c ï-t^ <} 1/ I ■ Ë il é •
*qu'en France , & qu^is n'y fdfenr pas pfùir
împlacàbles f Chacun' fait aujoprahui d'où font
. • • • . ♦
partis les coups ^*on m'a pôrtés'&'quî m'ont
lété les plus fenfifeles: • Vos gens irie repro-
Tdient' mes !naHïenri5''cbmmé s'ils n'étoient paf$
leur ouvrage.' Quefle iloifteur plus cruelle qoe
► • »
TÈfe me faire un^crihie à Genèvedés perf&tf-
fiôM qu'bti me MStoic dansla duiffei & de
lin^acçtifer ' de^ ri'êtfe 'âdtnîs hulîe' pan:'-,^ en me
ifitîfant chatlfe de'par tou'tî 5rààt-îi" qiie je rt^
'J^tckrhe à fàminé^quî m'à^peîlial dansées cbir-
TÉHées 1è vbifinâgè^'dé rnorfjiàyis?*' J'oie en a£^
• • »•» » ♦ *
l "foil , é^ptë' fe- âùiffî ,• 'o& je il'éiifle pa*
«B ''feçd y'-'/dêri^ à^êc fibnherâ^Ç-'TotftéfiJB
xlors«je inè'i^iKfre'aa cTiôîJ? (3è'îicr'ïétr2àte?
"Korff rtàî^é^'tkiilf:d'àtharii£toéï£' •& d'otitttf-
^s," fài4HRS^'gdgtw?q*-f»ëfdttV4afl'*^
i
L E T. T R E.Î «PS
Keith! mon protefteur mon'^amj,;mon peiei
. pu que vous £byez/où que j'achève mes txïCr ^
tes jours , & dufle-jc n^ "voos revoir de roji
vie .; non , . j^ ne reprocherai point au Ciel
mes rnifcres ;; je leur dois votre amitié.
En confcifnçe^ y-at-il parlti entre des Livres
ûù ron iTOuve ' quelques traits Jpars £? inàfcrets
contre la Religion ^ ^ des Livres*^ okfans détoiLr
fans ménagement m T attaque ^ms, fçs dogmes^
dans fa mqrale y dans fort iriftnçnçe. fur la fa?
ciété ? * V .. • '
£n confcience !....., . U^ne fîéroit pas à un
impie tel que moi d'ofer -parter .de confcience
.... fur tout vis-à-vis deces bons Chrétiens ..•.
aînfî je mè feîs..,.. C*efl: pourtant une flngu-
«
liere confcience. que celle qui fait dire à des
JMagifcrats j nous fquffrons" volontiers qu'on
blafphême , maià nous ne- ibuSrôns pas qi^'oa
raîfonnç, ! .Otpus, MonQeur , la. difparité d(âi
. T3
694 .CXI* Q U I É M E
iixjtti; c*en: avec ces tâêmes fôçoâ^ de penfèr
qité lés Athiéiûeni applaudiilbient àùx im^uétéâ
d'Ariftôphâne & firent mourir Socrale,
* Urié des chofes qui me donnent le plus de
confiance dans ihïs principes efl de trouver
îeur application toujours jùfle dans les cas que
j'avois le moins prévus ; tel ed ceM qui /ê
|)rérenteid. Une des maximes qui décodent
tde Fanalyffe que j'âî faite de la Religion & de
(Ce qài lui efl eflèndel efl que les^ hommes ne
doivent fe mêler de celle d'autrui qu'en ce qui
les intéfefle;-d'où il fait qu'ils ne doivent ja-
* » •
^ais punir di^s Ôfiènfes (àa) fidtes uniquemeot
(as) N<)te2< que Je me ibis de to mot (^n/Vr
T>liuMotx l'ufage, quoique je fois très éloigné de
Tadmèttie d^ Ton feus propre, &-qw je lë trou-
^vq/ très. mal appliqué % comae fi quelque être que
ce feit , un noihme , un Ài)gè , |è Diable în&mô
|H)Uvoîe jamais ofiFe^fer Dieu.^ Le mot qae iiouâ
Tendons par offenfes eft traduit comme prefque tout
^ lefte du cÈxre facré} c*eft tout dix^« Des h(^ah
LE T T . R £• âp5
& Dien,.9à &uîa bien les punir lui* mêfne. //
/â»^ binorçr^ la imntti ^ ne la venger jarnais^
difent 9pr!b$ Moncei^aieu les Répréfentan^ j i)s
ont miotL Cepœdapc lea ridicules outragcans.,
les impiétés groffieres ^ les blaiphémes contie
la RdJ^Qti font punifTable», jamais les raifoq-
nemais. Pourquoi cela ? fdxct que dans ce
premier cas on n*attaqne pas feulement la Re-
li^on, mais ceux (pu la jfrofefiènt, on les in«
fulte, oà les outrage dans leur culte, on mar*
mes enfarinés de leur théologie ont rendu & défigu-
ré ce Livre admirable fefon leurs petites idées , &
voila dequoi Ton entretient la folie & le fanatifme
du peuple. Je trouve très fagc la circonf^eftîon de
rSgUre Romaine fur les traduâions de TËcriture ea
langue vulgaire, & comme il n'eu pas néc'eflaîre de
propofer totijours au peuple les médkationi\ybla|i»
tueufes du Cantique des Cantiques» ni les, malédic-
tions continuelles de David contre fes c;nnemis, ni
les foUtiHtés de St. Paul fur la grâce , il eft dange-
reux de lui propofer la fublime morale de FËvangi*
le dans des terihes ^i lie tendent pas exa^lement 1^
fens de TAuceur ; car pour peu qu'en s*en écarte ^
en prenant une autre route on va très loin*
T4
*^ Cl N^ Q' U I E M E
^'-".j
^^^è iin i]iëjH:is r^voltapt j)our ce gtfîl$.mpec-
«tôîp &' par conféquene ppûr eux. De telj
' piktkgçs doîyeiit ^e pùms par ks Ic^, parce
«qù^St: retombent &r lès hommes^, *&tfxtlc8
' hôtnmes ont droit «dé s^en rieflfeiitîr; ^])|^aîs ofe
'èifi 'te' înortel filr Isi te^ise qii*ua rsfîfoBnemcnt
doiV'é bfferifer^Où èft-çelui qpî pdbt fe fâcher
dé^ ce qi^on le tr^e çn homme & nu'ou le
ftpppfe taifôonable?' fi le raîfonneur le trompe
ôtt'héus trompe, &que vous voils-kltérefliez
à lui ou ^ nous, montrez lui fon tort, défâbii-
&Ztnous, battez-le de fes propres: armes. Si
Vpus tfen voulez pas prendre 1^ peine , ' ne dî-
(es rien, ne l'écoutez pas, laiflèz^Ie raifonner
pjik déndfonner, & tout eil fini âins bru|t, fans
guerepç, fens ipfiilte quelconque pour qui que
ce Toit. 'Mais fur quoi peut-on fonder la ma^
xime contr^re de tolérer la xaiUerie le mé-
^rîs rouçraj^e, QÎE de punir k mTon? La vâm*
m s'y penî, . ['-^
fiet.MeflÎQar; voyeat fi fouv^nt]^. d^ VoI«
eiice. 'Comment' ne km 4*t-il point, infpiiré cec
^prit de .coljéf^nœ qu'il prêche Ctqs ceiTey &
dont il ^ qqelquqfois'befpi^;? S'ils reufleni .un
peu çonfiîlté ^ans ^tjS aâaire,/.il|i9e p^oit
qu'il ei)t p(| leiju: parier à peuprès , ftinfi.
^y Meffieurs 1 ce i^e fqnt poinç^ les. raifpn-r
,, neurs qui/onc du mal , ce foot les -caifiairdsr.
^, La Plûlofqphie peut aller, fqn grain fans riP-
,, qvp, le peuple ne l'eptend pa^ ,our la l^ifle
,9 dire . & lui rend tquc le dédain gu'ellp s
^ pouc IhL ^aifonneç çfl: dp touces.les folies
jy .des hqmmes celle qui auît^ le moins^^gepre
,^ Iwmain^ & l'on vmt n^^n^ .des. gens fages
,j entichés par fois^ de cette foliç-ls^ J^ ne raî-
^, fonnepaSjmoij cçl^eft vrai, mais d'iiutret
,, raifonnent ; qu^çl mal en arrive-t^il •?. Voyez ,
,, (q1, tçl, & tfii ouvrage i .n'y a.-4:iiil que des
I, plaii^tesies daos ces Uyxes-là? M^m^me
Jî>« CINQUIEME
3, enfin, fi jâ ne ndfûnne pasy je fd» mieiu:;
,, je fitit raifonner mes leâeuit. Voy^s mon
^ chapitre des Juifs ; voyez le même chapicn
3, pins développé dans le Sennon des cinqoan-
'^ te. H y a là da raifbmiemeât ou Péquivalent»
yy je penfêp Vous coàviendrez auffi qu'il y s
3, peu àci détour ^ & quelque choie de plw
„ qufe dei traits épars & iruHfcrets^
3, Nous avons arrangé que mon grand cré-
^ die à la Cour & ma toute-puii&nce pf^en*
^j due vous ferviroient dtf prétexté pour laif^
^ fer courir en paix les jeux bàdkis de fises
33 vieuraiï$: cela efl bon, mak^ne brâlcKpas
33 pour cela des écrits plus gi^veâ j car sfors
13 cela feroit trop choquant.
y J'ai tant prêché la tolérance ! II ne iaat
^ pas toujours l'exiger des autres & n'en ja«
^ mais ufer avec eux. Ce pauvre homme doit
^ en Dieu ? paiTons^ui cela 3 il ne fera pas
Ir Et T R Ë. 099
\^ {eOë. n ék ennuyeux? Tous les raifonneurs
,^ h ibnt. Nous ne mettrons pas celulci dé
^j nos foupés; dii reftè, que nous importe? Si
^ Ton brûloît tous les Livrer ennuyeux, quel
,, deviendiôient les Kbiiothéques? & û Ton
I, brûloit tous les gens emmyeux,* il faudroît
iy faire un bûcher du pays, Croyéz*moi, laàC^
,, fons raifonner ceux qui nous^ laîflent plaî^
,, fadter; ne brtfons ni gens ni Livres^; ât
„ triions en plux ; c'efl: mon avis. *^ Vdla,
febn moi , ce qu'eut pu dire d'un meilleur ioû
M. de VblÙiïei & ce n'eut pas été là , cd
tne fen&le , le "phs mauvais cônfëil qu'H
aoroit donâé.
Faifens impartialement h compatalfon àr cet
euvrages} jugeùtts en par Tiinprejjlùn quHh on»
faite dans le monde. J'y conlens de tout mori
cœur. Les uns s'impriment &fi débitent pâttmti
Çn fait comment y ont été reçus les èmrts. -
V
-^r
|oo Ç I N Q U I E M E
eqes. Je ne .^i^.p^ fbus lei«[ae]^r Auteur em
fgqd mes é(yi^j mais ce que je, puis dire; c'eft
qu'çn les ixnpyiçiô dans tous les. pays, qu'on
|e^ f raduk cbûs • tou^^ leç ; laogiu^ ^ qu'on à mê:
me fait, à' la fois deux tradu6tiuns.de TEmilc à
][^pQdres ,; houjQ^ que n'eutj^ais aucun au-
tre Livre eaiceptérHéloïfe, aii^ moins, que je
fâche. Je dir^i,., de plus, ^;-çn .France» en
% .s
Angleterre i ea Allemagne, vnjiêmp çn Italie
on me plaint ^ on m'aime- on^ yo^d^oic m'act
cudllir, & qu'il n'y a p^ tout qu'un cri d'iûr
dîgnation contre le Conf^ de Genève. Voila
ce que je fais du fort de mes Ecrits; jt'ignqr
re celui des autres.- , . .
1- •
t
• Il eft tems de finir. Vous voyez, MonfieyCi
^ue dans cette Lettre & dans la précédente je
nie fuis fuppofé coupable ; mais dans les troi^
pren(iieres j'ai m,ontré quç je ne. fçtoîs p^s. Or
h Ë t t R %^ ^ài
jugez de trvr qtfune protéAfre ïrtjtrfe cJdntre dit
• • » • f^
coupable âoît ^feconire ûh innocent !
Copendam ces Meffieurt, bien détennînës ai
laîfTer fubfifter cette procëduréi ont hadtemeUt
ttfédaré que le bien de hUèfig^on ne leur per-
« r
bcttôît pas"dfe recbnnoîtie leof tort , m Thon-
neor'du Gbtivemement de réparer leur îrfjufli-
ce. S faudroit un ouvrage entier pour mon-
trer les oohfeqùences de cette màiime qui coof-
facrt & 'chanjge eti arrêt dû dtftin toutes Its
iniquités dèsMîhîftreàfdes^IloÇx."'Ge irtft pat
^e cda qu'il ^-agit eiicoie j-'^iSt je 'ne me -fois
propofé jtiJqu'îcî que d'eiafrîiifô^ ï nàjulKce
avoît ëté'conunîfe, & non fi elle devait être
•réparée^ 'Dans le cas de- TâffirinaiiTé', îidlà
irenr^w» cî-îçiîfe quelle rèflburfe'tos Lûîx' fc
<font raéaa^éè -pour remédier H} leur violatîbnL
£tf attenant /^ite fàut-îl pënfér de ces jugei
'tnflexîÊlés'V ^ j[<îècédent 'dkniFièurs jagemèii»
/"
^
aoi CINQUIEME
.atiffî lé|éteme&t q^ $^ils tfe tîmîeat polot &
conféquence» & 91! les maintiennent avec au*
,tant d'jobftinadop gue s'ib y avoie&t appptté
le plw mur .examqo? *
Quelque los^gues qu^aient été c^% x^iTeuffiânSi
j'ai cm que )eur objet vous doAmsroit la pa-
tience de les fuivréf j'oie inême;d^j&que vous
> deviez., puii^u!eUes iJQiif ^^t;s^lt ^^apologi^
de VQsJop: ^e Ja wçojpp, Pans i|p, ga^s Bbie
^ dVf^s* ytte I^eligion lai/bpnaU^, ,1a M ^
^eQdrqit crynîi^ iin Xivre p;^H au mien fe*
pS% 4iQe XfÀ ^efb^ A^'i): fai^drQit fe. bâter
^'stwgpF j|K>!ir.:J^wwçur ^ ^\mà^ l^Etat.
JB4lMi5 ^ç;e. au Ciçl il a'ei^^ nçn de Jtelpar^
am 70US9 çotnine je vi^ 4e le/grouv^^ ^
il yauc m&Wi ^e Fiû}uil^cc 4<^ |? ^^^ ^9-
tîmè fpît Touyi^ge di^ J\^[agi{]tt^ qœ 4e^ Ix^i
Cèx les erreurs 4^ hommes font p^d&gpoes,
mais ceilei ^ Ifiif^ cl^veQC «^iGW %<a'e9e%
L E T T R EL
303
Im» que r.ofbacUme <f» m'exile k jaœnis ds
mon pays foit l'ouvrage de mes. fàotes » je
ir'«i jamais mieux zen^H moa devoir de Cî-[
tffjçn ^u'ou mpmçpc^ue je. ce0è de l'étiie, â:
j'ea 3)^01$ mérité le titre pvr Fadie 9» m'f
t.
2lj|)|^U^-von« ce qui venpit die & paflèr il
7 Vfcit pfxL d*aDQée& au fiijet de F Amcje 6<«;
oétii de M. d*^n))?ert Loîo de calnier let
^^' '«'fît» ^
wupvures lexciti^ j^r cet Artide rSalt pu*
Uié par ies Fadeurs raroii; angooeoté^ & S
n'y a perfoime qui nt iacbe que mon ouvta«
ge ]eur fit plus de Ueu que le leur. Le part{
Prouftanty méqoptqnt d'eux» n'édannt pas^
mais il pouvoit éclater d'un moment ^ Fautiieji'
Se èallweufement les Gouvememens s'allar-
fqcof, de (i peu.dejErhqfe en ces maâeres» que
les querelles des Théologiens, faites |)Qur tom«
ber. 4?^ l^'^^^ d'dles^jpêmes pcçpnent tou^'
3%4 ci N Q tr i È U É
fbùrè délliîiportinde pir cdle qu'dri kif
Polit moî Je ile^dois cbrâmé lai gloire 6ê
le ïmhéa àé la Patrie là'a^ou' ira Clergé anï-
jbé dlih éfpïîr fi rare dîins fou ordre , & qin ^
fans s'attacher à la doélrine purement fpécula-
flvé, îrîppWtbîc totït à k'înbrile & aux de-
vbîrs de Rionone & dii' ÊStoyrà. Je penlort
qtte, f^s'fàrè tïîreiaement foii âpologief, juP
fifièr ks'iûaxiihes que 'je Ka fotJpbfois & pr©-'
îrenîr tes cenftir^ qu'on en pourrbit fidre étoît
Un fervice- îf''isénarè i'TEtaè En mônbant
que ^€è 'qu*tf néglîgeoîi: lï'eltoït-ifi certa&.m
fîtîlë, fèfpéroîs contenir ceux <jé voudroient
Jiii en 'faire un xh-ime : 'iâns fe nommer, TaM
le déflgner» f^s compromettre fon orthoao&
lie, c'étoit lé donner eh' temple aur aitttre»
lens,'
lif ê&rëpnii ^toït ïardîè j iwo» êÙé tf-éfoii
h Ë T T R É 8ô|
jpas tém&aké^ & faùs dès eîrcdhlhticds qif if
était difficile de flrévoir^ elle devde oâtarel^
lement réaflir. Je n'étds pas fenl de ce feniU
ment; des gœs très éelairés d'illttfljes Magii^
trats même penfbient cdmme tacA. CùbSdéret
rétat re^giêus: dé l'Euràpe au momat où je
psbCai mon Ldvre^ & troos verrez qu'il étoic
plus que probable qu'il feroit par tout aâcueiU
E La^Religion déorëditée en tout lieu par bi
philofophie avoit perdu foji afitendant ju^èt
fiff le peuple. Les Gens d'EgUiè,^ obfldntfs è
fëtayer psff fbn côté foibtei avoieni laiffé
mner tout le refte j & rëdîfioe entier pônaoi
à faux étoit ptet à s'éarouler» Les controvâS
fes avoient celTé parce qu'dies n'intéreiBietifi
plas pârfonne, & la paiai'lëgnoit cbcJ!e lei
diffërens partis, parce que niiL qe fe fôuciole '
plus du fien; Pour ôter les niaiivaiifcs brail«
cheftdn avoit abattu Parbré;.pour lé
Partie L V
3û5 C ï N Q,U lE ME
ter il fallôit n'y laiffér que te tronc.
' Quel moment plus baireox pour éiablir fo-
lîderfïent la paîjt anivârfelle , qpe .cduî où Tani-
ihbficé dçÈ pattii fofpenclue teifToktouc le mon-
de en état d*écoutar U r»foh? Aquîpouvoic
déplaire un ouvi^e. où fins blâmer^ du moins
féns.esclune perf<«me, on fei^t voir^u'aa
fond cous écoieQC d'ac^ioirâi ^ tak 6s ài£^'
noàs ne i'écmcnc ékfv<â^ , ipa tant de &qg
tCwùit écé veiSfé qiSt pour dôs œa^entendos;
qœ chacun (ieVoit refter en Fepo$ dans fou cul*
te, fans ttoublcr célid des autres; qae partout
îm deyoit fiarvic Dîéû * aimer fou prodoifi,
obéir aux Loh, j& ^'en cda fetJl éonfiftoit
l^fTcûceife toute bèmie Région? Cétoîcéta*
Mr à fa fcns la Ubeité philofophique* & la pîé«
té xeligieiire; cfétoic œacilier Tamo^ , ^ fori
dre & Tes égards pour les préjugés drssitruî;
€*étx)it ikns détraire ks divers partis 1^ rasi^
L E t T RE; : s«»?
na toos^ tçrme comman de l'faamaaîté &<le^
là ratfon; lom d'exciter des querelles» c'étojfr
couper h racine & celles qui germent encc^e^^
& qui renaîtront infaillS^lemeiu; d*un joor à
Fautre, lorfqoe le aéle du ânat^Tme qui n^eft
qu'aflbq)i fe réveillera: c*étoit, en un mot^
dans ce fîécle pacifique par indifférence, don*
lier à chacun des raiibns très fortes , d'être
toujours ce qu'il eft maintenant uni &voic
poisrquoL
Que de maux tout prêts & renaître n'é»^
toient point prévenus fi Ton m'eut écouté 1
Quds inconvéniens étoient attachés à cet
avantage f Pas un, non» pas un. Je défie
qu'on m'en montre un feul probable & mê-
me pofiSble, fi ce n'efl: l'impunité des er«
reurs innocentes & Firopuiflimce des per-
fécuteurs. £h comment le peut -il qu'après
tant de tiiiles espériences & dans un fiéde Qi
V a
3o8 CIN-QUIÈM^
écldté, les Gouvememens tf aient pas encore
appris à jetter & b*îfer cette arme terrible,
qu*on ne peat manier avec tant d adrefTe
qu'elle ne Coupe la maîn qui s'eii véxt fervîr?
L*Abbé de Saint Kerre vouloit qu'on ôtât les
écoles de théologie & qu'on foutînt k Rdî-
gîon. (^ut\ parti prendre pour parvenir fini
bruit à ce double objet , qui , bien VU , fe
confond en un ? Le parti que j'avoîs pris.
Une circonftance malbeureufe en arrêtant
l'effet de mes bons deffeins a raHemblé fur ma
jtête tous les maux dont je voulois délivrer le
igenrè humain. Renaîtra - 1 - il jamsds un autre
ami de la vérité que mon fort n'effraye pas?
je l'ignore. <^u'il foit plus fage , s'il a le mê-
W m
ifne zèle en feta-t-il plus heureux? pen doute.
'IM moment que j'avois faifi, puifqu'îl eft man-
"qué, ne reviendra plus. Je fouhaitè de tout
-mon cœur que lé Parlement de Paris ne fe
LETTRE.
309
repente pas un jour lui -même d'avoir ; rem!»
dans la main de la^ fqperftitioi) le pcigm^
que j'en faîfoi^ tomber. , . /
Mais laiiTons les liçur&Iestemsiéloignës.»
& retournons à Gçiièye; Çeft |à que je Vj^x
vous ramener par une demîçre çbfervatiçn^qpç
vous êtes ;bîen à portçe de faire , ^. qui .doit
certainement vous frapper^ Iç«^çz les yejjx. fur
ce qui fe . pa(& autour de vous. Quels font ceux
qui me pourfuivent, guels font ceux qui me
défendent ? Voyez parmi les Répréfentans Tçj-
lîte de vos Citoyens , Genève en a - 1 - elle de
plus eftimables ? Je ne veux point parler de
mes,perfécuteurs;i Dieu ne plaïfe que je fouil-
le jamais ma plume & ma caufe des traits de
«
la Satyre ; je laifTe fans regret cette arme à
mes ennemis : Mais comparez & jugez vous--
même. De quel côté font les moeurs , les ver-
tuS) la Mde piété,, le plus vrai patriotifme?
V3
jià C I N q a I E ME
^poi l foffenfe les loix ^ & kors {dus xèléê
défeofeors font les miens! Jattaque lé Gou*
veraement » & les méiUeuîs Citoyens m*ap-
ptpuvent! Jattaque b Re^gion^ & faipour
inoi ceux qui ont te plus de Religion! Cetce
feide ch&iyatiùn dit tout ; elle feule montre
imon vrai crime & le vrai fujet de mes ëTgrai»
ces. Ceu& qui me haïfibot & m*outrag^t font
ioon éloge en dëpit d'eux. Leur haine 8'e}Kp&
91e d'elle-même^ Un Genevois peat*il if
tromper?
y
LETTRE. su
s I X I EM E LE T T R E,
JOtNcoRE uae Lettre, MoniGeur, & vous êtes
délivré de moi. Mais je me tiouve en la coin«
menant dansime. fîcuatÎQn biea bizarre ; obli*
gé de récrim^ Sl ne fâchant de qpoi la rem*
plir« Concevez-vous qu!tm ait à iè juftifierd'un
crime qu'on ignore, & qu'il faffle fe déffindne
fans favoir de cpaotyrot «fl; accuf^? C'eB: pourt
tant ce que j'ai à faire au fujet des Gouvei^
mens. Je fuis, nm pas accofé , mab jugé ,
mais âétri pour avoir publié deux Qu\n»gi9
timtrmresi fcandaleus impies y t puions è déirttirf
b.ReMgkm^^ClkiiiiHne & tout. bs. Gtmf^érmnlenu
-Quant àlailelig^oci, noisavona eu .dni moi^^
qudqiie prîfe. pour trouver, oeiqù^oâ 4 voulu
^è , '& :nous Favotis ess^ndné. Mais quant
aux QammumeM^ rien oe pôtt QcniS fowBV
V4
\fi moindre indice; On a toujours évité (otil«
çfpecç 4'^xpHc^tion fur ce point: çn lï'a ja?
mais voulu dire en quel lieu j'entreprenois ainfi
de les détruire , ni comment, nipouiquoi, ni
rien dé ce qui peut coiiflatér qiie le défit n'cft
pas imaginaire. Oefl comme fi-fon ^geoit
qae}qa'uh pour awir tué un hpmnxe &m dicer
ni où, ni qui ^ ^hi' quand ; pour un meurire ab-
ftrak 'A nnqaîfeion l'onr farqèbien J'acarfé
de ^cvîner de qud ôû facoule) mais on ne k
juge pas fanfr àifp for quoi,
f y Auteur des Lettres écrites, dé. la Campagne
évite avec le niêmevfoin de s'expliquer for ce
prétendu déHt ; il joint également la ReKgion
& les Gouvâmemens dans la même' accoâdon
générale: pms^ entrant en matière for la Re-
ligion y il déclare vouloir s'y borner , & il tient
'|far<>}e/ Gomment parviendroWnoas à véofier
Ir^cctt&tton qui regarde Içs Gobvecnemensy it
eevoi qui l'intenDent-rÊfiifeiiç dç dire l^r qyaqi
elle porte?
. Remarquez même comment d'un . trait de
.plume cpt Autei^r^f hange Fétat de.la gueftîoij.
JLe Çonfeil pronpijç^que mçS;i.iva:es tendent ^
détraire tous les Gouvememens..L'Auteurde«
lettres dit fei^lemcnt ^e les Qonvjeniemeps y
. Jmt livrés ' à U p^s ,9.udacie^(e ci^icique^ Cela
elt fort diflKrenc.; .Une critique j .quelque s^u-
d^cieufe qpa*elk puîijfe êtije n'eu pojtaf 4ine ^^^^
fpiratîon, .(^riç^qijer pu bl^m^.gu^ijucs UiîX
9'eft p^ refayerfer .tcmçes Je^i.lfWr jAujc^t
vai^oîc^ acci^er quelqu'un d'aiMiner les.nja-
lades lof^u^il moptr^ le$ fautes des ;Médç;çin^
Encore une fois ^ que l'épondre à des, rai»
\fy^ qu'on ne veut pas dire? Comment fe ju-
(tifier contre un jugement porté fans motifsr?
. Que, J&nspreuyede part nîfd'autre, ces l^Ief-
. Ikws 4îrwc ; (p9 j^ vçuK r^ye^er toi^ }»
_3
• •
314 S t X I E M E
• I
Gouvememens , & que je dife, mo^, qoe je
ne veux pas renverfer tous les GouveroemenS)
» ' »
il y a dans ces apercions parité exaâe, excep-.
té que le préjagé eft pour irioî ; car il îefl; à pré-
fumer que je fais mieux que pezfcHiàe ce que
je veux faire.
Mais où la parité manque , c^efl: dans fefiet
de Faifertion. Sur la leur mon Livre dt brû-
lé, ma perfonne eft décrétée; & ce que faf-
... ♦
firme ne rétablit rien. Seulement , fi je prouve
4
que Taccufation eft fauile * &. le jugement ini-
que, faffront qu'ils m'ont fait retourne à eux-
• • •• •
mêmes : Le décret , le Bourreau tout y devrok
retourner ; puHque nul ne détruit fi jradicale-
'ment le Gouvememéit , que celui qui en tire
on ufage direflement contraire à la &i poolr
laquelle il eft înftitué.
' Il ne fulfit pas que j'affirme, il &ut que je
^prouve ; & c'eft ici qu'ott voit combien eft
LETTRE. 315
déplorable le fort d'un particulier fournis à
d'injufles Magifhats , quand ils n'ont rien à
craindre du Souverain , & qu'ils fe mettent au
défias des loîx. D'une affirmation fans preuve , ^
i1$ font une démonftratîon ; voila Tinnocene
puni. Bien plus, de fa dëfenfe même ils lui
fcHit un nouveau aime , & il iie tiendrdt
pas à eux de le punir encore d*avoir prouvé
qu'il étoir mnocent.
Comment m'y prendre pour montrer qu'ils
n'ont pas dit vrai ; pour prouver que je ne
détruis point les Gouvememens? Quelque en-
droit de mes Ecrits que je défende, ils diront
que ce n'eft pas celui-là qu'ils ont condanné;
quoîqulls ayent cûndanné tout ; le bon <:Qmme
le mauvais» iâns àulle diftinâbn. Pour ne leur
kiffer aucune défaite /il faudroît donc tout re-
■jttendïe, tbiit fiiilne d*un Ijoat à hmtre, Li-
•we à livre, pajge à page, Hgné à ligne, &
«i^ ,S. I X <I E M E
# y
prefque enfin» mot à mot. U faudroît de plus,
ci^aminer tous- les. GpuverxieH^iis dix moncfc,
puifqu ilç- difçnt que jç les détruis tous, (^el-
le eqtTeprife ! que ^'w^pées- yy faudroit-il em-
.ployer? (^ue cl'/X-/(?g«. fa,udroiç..il éérire; &
îiprès cela, qpi les lîi;oit?
.. Exigez deiqqî cç qui e/J; faifajble. Toat
I^omme fenfô- dwt.fç caotentpr dç .ce quei<ii
à vous dire : vous ne voulez. Tôirenient n,çp
.4e plua, ., , . • ,
De mesi d&xi Livres brûlé^ à la ibis iôqs
des imputations communes, ^ il n'y en aqu'iin
qui tr^e du droit ; politique &.4es matiei^
de Gouvernement. Si Fautie en traite , ce
n'eQ; qqe dans un entrait. di^. premier. Afù^i
je fupppfé que c'eft fur celui-çî feu.lemç3Pit (pt
tonoibe l'accufatioa ^i cette accuiâ^tion poftoit
fur quelque paflàge psuticuUer. on Taurplt ci-
.té, r^as <lQbtç& on m ^mp;c nja mc^ apw(
L Ç t'T R E; SI?'
quelque maxime , fidelfe ou infîdelle^ tolnihd
oti â fait fùî les points concetnans la Rdi*
gîon.
Ceft donc le Syftêriae établi daùs le totpi
dé Touvrage qui détruit les Gouvememens ; il
ne s'agît donc que d'expolèr c!e Syflême ou de
dite une analyfe du Livre ; & fi nous li'y vo^'
yons évidemment, les principes deftru6Ufs
dont il s'agit, nous faurons du moins où les
cherchei' dans l'ouvrage , en fuivant la mé;
thode de l'Auteur.
Mais, Mônfieur, fi dutaht cette analyfe ï;
qui fera courte, vous trouvez quelque confé-
queftce à tirer, dé jgrace ne vous preflêz paSé
Attendez que nous en raifonnions enfemble.
Après cela vous y reviendrez fi vous Voulez,
Qu'eft-ce qui Faît que l'Etat eft un? Cefl:
îunion de Tes membres. Et d'où naît Tunion
de fes membres ? De l'obligation qui les lie;
Tout eft d^accDtd jtt%a*kl
Mais quel dt h fondement- de cette ob]î«
gation? Voila où les Auteurs ie divifent. Se^
Ion les uns ^ e'efl: la fidrce^^ félon d'antres^
Tautorité patemdle} félon d'autres ^ 1» vo»
lonté de Dieu. Chacon établit ion prin«
cipe & attagpe celui des autres.: je n'ai
pas moi-* même fait autrement, &, fuivant
. la plus faine partie de <;eus: (fâ ont dif-*
. cuté ces matières , j'ai pofé pour fonder
ment du corps politique la convention de fes
membres » j'ai léfucé les prtndpes dàSéteoi
du mien,.
Indépendammait de la vérité de ce prind-
pe , il remporte lur tous les autres par la fo-
lidtcé du fondement qu'il éublit; car quel fon-
dement plus fur peut avoir l'obligation |>armi
les hommes que le libre engagement de celui
^ui s'oblige? On peut diiputer tout autre
1- E T T R R
81»
principe (a) ; on ne iauroit d^piiQcr celui-là.
Mais par cotçe copdidoa de la lib^té, qui
en renferme ^'aiittes» coûtes fortes d'engagé^
mens ne (ont .pa$ v^ides5 même devant les
Tribunaux hittoaios» Ainfî pour déteraûner
celui«d l'on dok en esplifuer la nature ^ on
doit en trouver Tufage .& la fin ^ on ddt prou*
ver qu'il efl: convenable à des hommes , âc
qu'il n'a rien de contraire aux Loix naturellesç
car il n'dR; pas plus permis d'enfreindre ks
Loix nativelles par le Contraâ Social ^ qa'il
n'eft permis d'enfreindre les Loix pofitivés
pv les Contrafb des particuliers, & ce n'eft
que par ces Loix-mêmes qu'exifte h liberté
(a) Même celui de la volonté de Dieu y du moins
quant à Tapplicatlon. Car bien qu'il foit clair que
ce que Dieu veut Tbomme doit le vouloir , 11 n'eft
pas clair que Dieu veuille qu'on préfère tel Gou-
vernement à tel autre, ni qu'on obéifle i Jaques plu-
tôt qu'à Guillaume. Or voila dequoi il s'agit.
^ià SIXIÈME
qui donhe fiw'^é à Véngagemètit;
J'ai t)Otit réfultât de cet examen qiie Yità^
blilTement du Contrat Soeiàl eft un pa6te d'd^
ûe efpecé particulière ^ par lequel chacun s'en^
^ge envers tous^ d'o& s'ensuit rengagement
téciproque de tous envers diàdin ^ qtii efl
robjer immédiat de runidm
Je dis que cet engagement efl: d'une ^fpeet
|)&rticulierej en ce qu'étant abfolu , fanscom
dîtîôn , (ans réferve j il ne peut tofutefois être
înjuftô in fufceptiblé d*altos ; puîfqu'il rfeft paJ
poffible qiié' te >:orps fe veuille nuire à lui-mêi
tbe^ tant que le tout ne veut qde pour t(M
• , Il effe encore d*une çf^ete i^rticiïliere en ce
qu^il lie les contra6fans fans les aflbjétir à pef-
fdnne ^ & qtf en leur donnant leur feule Vôlon*
té pour.^egle il les laifFe auûî libres qu'aupi»*
yanti,
La volonté de totis eft donc rordfe ïa ri^W
fuprl*
L E T T iR ^. - 3«t
i
fuprêine, & cette règle générale & perfoni*
fiée eft ce que j'appelle le Souverain;
il fait de-là que la Souveraineté efl indi^
viûble » inaliénable ^ & qu'elle rëfide eflèncieU
letncnt dans tous les membres du corps.
■
Mais comment agit cet être abftrait &
coUeâif? n agit par des Loix^ & fl né
âuroit agir autrement
Et 91'efl: • ce qu'une Loi ? Ceft une décU-
radoD publique & iblemnelle dé la volonté
générale^ fiir un objet d'intérêt commun.
Je dis , fur un objet d'intérêt commun ;
parce que la Loi perdroit ià force & celFeroic
d'être légitîaie^ fi l'objet n'en importoit à tous.
La Loi ne peut par fa nature avoir un objet
particulier & individuel : mais l'application dé
la Loi tombe fur des objets particuliers Ôi
individuels.
Le pouvoir Légiilatif qui efl; le Sonvenun 9
Vartic L X *
32^
SIXIEME
donc befoin d*un autre pouvoir qui exécute,
ccfl- à-dire, qui réduife la Loi en aftes parti* ^
ciiliers. Ce fécond pouvoir doit être étstli
de manière qu'il exécute toujours la Loi, &
qu'il n'exécute jamais que la Loi. Ici vient
rinftitution du Gouvernement.
Qu'eft-ce que le Gouvernement ? Cdt un \1
corps intermédiaire établi entre les fujets &
le Souverain . pour îeur mutuelle correfpon-
dance, chargé de l'exéeution de* Ldx 4tda
maintien dfe la Liberté tant civ2e qiie pfolitH^e*
'Le Gouvernement comme, partie îmégian-
te* du corps po&îque participe à h vdhSité
générale qui te cohftîtûe ; coHitee cbrp* laî
même il a fa vcdbhté propre. Osé deux
voloiltés quelques fois s'accordent & quelques
fois^ fe éombàttcnt. Ceft de l'effet o^nbiné
de ce concours & de ce conflit ^que lÉéluke
le jeu de toute la jtnachine.
. i
L E T T R E. 3*3
ï^ principe qui conflitiie les diverlès formes
<)a Gouvernement confiée dans le nombre dei
jl membres qui le coropofent. Plus ce nombre eft
Il petit , plus le Gouvernement a de force ; plus
le nombre eft grand , plus le Gouvernement
eft foible; & comme la fouverain^té tend tou«
jomrs au relâchement , le Gouvernement tend
toujours à & renforcer. Ainfî le Corps exécutif
doit l'emporter à la longue fur le corps legifta-
tif y & quand la Loi eft enfin foumife aux liom-
mes, il ne refte que des eiblaves& des maî«
très; l'Etat eft détruit.
Avant cette deftrudion, le Gouvernement
doit par fon progrès naturel changer de forme
& paflêr ^' >degrès du grand nombre au
mcHnd^e.
Les diveries formes dont le Gouvememenci
ceptible fe réduifent à trois principales.
prés les avoir comparées par leurs avantages
3H SIXIEME
& par leurs inconvéniens ^ je donne la ^fë-
tence à celle qui efl; intermédiaire entre les
deux extrêmes , & qui porte le nom d'Arifto-
cratie. On doit fe foavenir ici que la conflî-
tution de TEtat & celle dû Gouvernement fout
deux chofes très diftinâes, & que je ne les ai
pis confondues. Le. meilleur des Gouverne*
mens eft l'ariftocratîque ; la pire des fbuyerai*
netés eft l'ariftocratiquei
- Ces difcuiHons en amènent d'autres for la
manière dont le Gouvernement dégénère, &
fur ks moyens de retarder la ddixuâibn du
iCorps politique. . ^
Enfin dans ië dernier livre j'exaonine psi,
uroye de comparaifoa avec le meilleur Gouver-
nement qui ait exifté, favoir celui de Rome,
^h police la plus'favdrable h la bonnet conilî-
tûtîon de l'Etat; puis je tèrmitie ce Livre &.
«ou^rOavrage par des recherches, far; la nia-
LETTRE. 32y
nîec^ dont la Religion peut & doit entrer *
»
comme partie conflitiitive dans la compofîn
tion du corps politique.
Que penfiez-vous, Monfîsur , en lîfant cet-,
te analyfe courte & fidelle de mon Livre ? Je
le devine. Vous diGez.en vous-même ; voila
rhiftoire du Gouvernement de Genève. Ceft
ce qu'ont dit à la lefture du même Ouvrage
ioiis ceux qui connoîffent voire Conftitution.
EteaeflFet, ce Contraft primitif , cette ef»
fence de la Souveraineté , cet empire des Loix,
cette inftitutîon du Gouvernement , cette ma-
nière de le.refferrer à.divers dégrés pour corn-
penfer Fautorité par la force , cette tendance
à 1 ufurpation , ces aflemblées périodiques, cet-
te adrelle à les ôter , cette de{lru£tioa-pro<>
chaîne , enfin , qui vous menace & que je
vtxiloîs prévenir; n'eft* ce pas trait pour trait
limage de votre République^ depuis fa naiffâiv
ce jufqu'à ce jour ?. X 3
3^6 SIXIEME
paî donc pris votre Conftîtutîon , qw Je
trouvois belle , ^om modèle des inftitutions
politiques , & vous propofant en exemple à
TEurope , loin de chercher à vous détmire j'ex-.
pofoî's les moyens de vous ccMiferver, Cette
Conflitution , toute bonne qu'elle eft , n'effc
pas fans défaut ; on poavoic prévenir les alté^
rations qu'elle a foufFertes, la garantir du dan-
ger qu'elle court aujourd'hui. J'ai prévu ce
danger , je l'ai fait entendre, j'îndiquoi^ de»
préfervatifs ; étoit-ce la vouloir détruire que
de montrer ce qu'il fsdioic faire pour la main-
tenir? jC'étoit par mon attachement pour elle
que jaurois voulu que rien ne put l'altérer^
Voila tout mon crime ; j'avois tort , peut-
^ être ; mais fi Tamour de la patrie m'aveugla
fur cet article, étoit-ce à eHede m'en punir?
Comment pouvois-je tendre à renverfer tous
les ^ Gouvememens , en pofant en -prin^^s
LETTRE. 327
tous.ceux du vôtre? Le fait feul détruit Fac-
cufatîon. Puifqu'îl y avoic un Gouvernement
çxîftant fur mon modèle, je, ne tendois donc
pas à détruire tous ceux qui exiiloient. Eh !
Monfieur ; fi je n*avoîs fait qu'un Syftême,
vous êtes bien fiir qu'on n'auroit rien dît. On
■
fe fut contenté de reléguer le Contracl Social
avec la République de Platon l'Ufopie &. le«
Sévarambes dans le pays des chimères. Msis
je peîgnoîs un objet exiftant, & Ton vouait
43ue cet objet changeât de face. Mon Livre
portdît témoîgilage contre l'attentat qu'on al-
loit faire. Voila ce qu'on ne m'a pas pardonné.
Maïs voici qui vous p^roitra bizarre. Mon
Livre attaque tous les Gou vernemens , & il
n'eft profcrit dans aucun! Il en établit un feul,
il le propofe en exemple , & c'efl: dan< celui-
là qu'il eft briïlé î N'efl-il pas fingulier que
les Gouvernemens attaqués le taifent , & que
X4
^2S S I X I E M Bi
Je Gouvernement relpeûé févifle? Quoil Le
I^Iagiftrat de Genève fe fait Iç protefteur des
autres Gouvernemiens contre le flen même ! H
punît fea propre Citoyen d'avoir préféré les
Loix de Ton pays à toutes les autres! Cela eft-
^ conce\^bIe s & le croiriez- vous & vous ne
l'euffiez vu? Dans tout le refte de TEurope
quelqu'un, s'^cll-il^ avifé de flétrir l'ouvrage?
Non y pas même TScat où il a été impri-
mé (b). Pas même la France où les Magif-
trats foat là-deflîis fi féveres. Y a^-t-oa défeo-
du le Livre? Rièa de fembiable ; on n'a pç
kifle d'abord entrer, l'édition de Hollande,
mais dfl Ta ccmtrefaîte en France, & Touvra-
ge y court fans difficulté. C'étoit donc aoe
(6) Dans le fort dqs premières clamears cauKef
par les procédures de E^ris & de Genève , le Ma-
giflrat flirpris défendit les deux Livres : mais far
'ipn pfoprè çuppenrcç fage Magiflrac a bien chaog^
de fencimenc» furtout quant au Contraél Social*
L ET T R ^. 329
âSàifô de ccanmerce & non de police: on
préféroic le profit do- Libraire de ' France
au profit du Libraire étranger.' Voila tout
»
Lé Contraft Social n'a été brûlé nulle part
qu'à Genève où il n'a pas été^ imprimé ; le
fenl Magiftrat de Genève y à trouvé des
jprîncîpes deftruélifs dé tous les Gouverne-
mens. A la vérité , ce Magîftrat n'a point
dît quels étoient ces principes'; en cela je
croîs qu'il a fort prudemment -fek. *
L'effet des défenfes indifcretes Ht de tfêtré
point obfervées & d'énerver h foi^ce de l'auto-
rité. Mon Livre eft dans les niains de tout le
monde à Genève , & que rfeft-il également
dans tous les cœurs ! Lifezle, Monfîeur, ce
Livre fi décrié, - mais fî néceflaire ; vous y
verrez partout la Loi mife au deflus des hom-
mes; vou^ y verrez par tout la liberté récla^
mée , mais toujours fous l'autorité des loix /
X5
359 SIXIEME
fins IdqoçUes la liberté ne peiat exHler , de
fous lefquelles on efl; toujours libre, de quel-
que façon qu'on fdt gouverné. Par là je ne
{àis pas, dît-on, ma cour aux puifTances : tant
pis pour elles; car je fais l^ufs vrais intérêts,
fi elles favoient les voir & les fuivre. Mais
les pallions aveuglent les hommes fur leur
propre bien^ Ceux qui foumettent* les Loix
aux paffions humaines font les vrais deflxac-
teurs des Gouvernemens : Voila les gens qu'il
faudroit punir.
Les fondemens de FEtat ^nt^ les mên^
dans tous ks Gouvernemens , & ces fonde-,
mens font mieux pofês dans m^n Livre que
dans aucun autre. Quand il s agit enfuite de
comparer les diverfes formes de «Gouverne*
mœt, on ne peut éviter de pefer feparément
les avantages & les inconvéniens de chacun :
ç^eft ce que je croîs avoir fait avec impartiali^
M,
LETTRE. 33t
té. Tout balancé , j'ai donné la préférence
au Gouvernement de mon pays. Cela étoit
naturel & raifbnnable ; on m'auroit blâmé fi
je ne Teufle pas fait. Mais je n'ai point don-
né d'ezclufion aux autres Gouvememens ; au
contraire : j'ai montré que chacun avoit la
raifon qui pouvoit le rendre préférable à
tout autre , felôn les hommes les tems &
les lieux. Ainfî loin de détruire tous les Cou-
vememens, je les ai tous établis.
En parlant du Gouvernement Monarchique
en particulier, j'en ai bien fait valoir l'avanta-
ge, & je n'en ai pas non plus déguifé les dé*
fauts. Cela eft , je penfe , du droit d'un hom-
me qni raifonne; èc quand je lui aurois donné
rexdufion, ce qu'aflurément je n'ai pas fait^
s'enfuîvroît^il qu'on dv& m'en punir à Genève?
Hobbes at-il été décrété dans quelque Monatw
chie parce que &$ principes font deftruâifs de
S32 SIXIEME
tout Gouvernement répàbliciaîn , & fait- on fer
procès chez les Rois aux Auteurs qui rejettent
& dépriment les R^ublîques ? Le droit n'efe
3 pas réciproque , & tes Républicains ne font-
îk pas Souverains dans kur pays comme les
Rois le font dans le kur. Pour moi , je n'ai
rejette aucun Gouvernement^ je n'en ai mi.
prifé aucun. £n tes examinant , en les corn-
parant j'ai tenu la balance & j*ai calculé ka
poids : je n'ai rien fait de plus..
On oe doit punir la raifbn nulle parti, ni
même te raifonnement ; cette punition proor*
veroît trop contre ceux qui fimpoferoient.
Le» Répréfentans ont très bien, établi que mon
Livre, où je ne fors pas de la théfe générale^
ç'attaqu^nt point le Gouvernement de Genève
& imprimé hors du territoire » né peut être
confidéré que dans, le nombre de ceux quitrai-i
tenc du droi^ naturel & politique , fur lefquel$
L E 1: T R E- 333
les Loix ne donnent au Confeil aucun pouvoir ^
& qui ie font totijours vendus publiquement
dans kt Ville , quelque principe qu'on y avance
& quelque fentiment qu'on y fbdtienne. Je ne
fais pas le ieul qui difcutant par abflraélion
des queflions de politique ait pu les tnûcet
avec quelque hardiefle; chacun ne le fait pas 4
mais tout homme a droit de le faire ; pIuQeuri
ufent de ce droit, & je fuis le feul qu'on puf
niffe pour en avoir ufé. L'infortuné Sydnd
penfûit comme moi , mais il agiflbit ; c'ed pous
fon fait 4& non pour fon Livre qu'il eut Thon^
neur de verfer fon fang. Althuikis en Allema<
gne. s'attita des ennemis, mais oh ne S'avifa pas
de le pourfuivre criminellemcnti Locke, Mon*
teiquieu , l'Abbé de SaintPierre ont traité lel
mêmes matières, & fou vent avec la même lîy
berté tout au moins. Itockc en particulier. Ifii
a traitées exaftçjtnent dans les mêmes principes
â34
SIXIEME
que mol Toas trois font nés fous des Rois»
one véeit tranquilles & font morts honorés
dans leurs pays* Woos faVez comment j'ai
été tTdké dans le mien,
Àu^ foyez fôr que loin de rougir de ces
flétriflures je m'en glorifie , puifqu*elles ne fer-
vent qu'à mettte en évidence le motif qui me
les attire , & que ce motif n'ed que d'avoir
bien mérité de mon pays. La conduite du
Confeil envers moi m'afflige ,' fans douce ^ en
rompant des nœuds qui m'étoient fi chers; mais
peut-elle m*avilir? Non, elle m'élève, elle me
met au rang de ceux qui ont fouiFert pour la
liberté. Mes Livres, quoi qu'on fafle , por-
teront toujours témdgnàge d'eux-mêmes, &
le traitement qu'ils ont reçu né fera que faa«
ver de l'opprobre ceux qui auront l'honneur
d'être brûlés après eux. .
Fin de la f remise Partie»
\
/
LETTRES
ÉCRITES DE LA
MONTAGNE.
rjR y. y. rousses a
SECONDE PARTIE.
J JMSTERDJM,
Chra MARC MICHEL REK
MD COL XIV.
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LE TTRES
ECRITES DE LA
MONTAGNE.
SECONDE PARTIE.
SEPTIEME LE T T R E.
Vous m'aurez trouvé diâus^ Monfieur; maûr
il {afloit rétre, & les fujets que favois à traî*
ter ne fe difcutebt pas par des é^jgramines^
D'alileors ces fujets m'éloignoient moins qu'il
ne femble de celui qui vous intéreflëi £n par«
lant de moi je penfois à vous ; & votre que(^
tion tenoic fi bien à la mienne, que l'une eft
déjà réfolue avec l'autre, il ne me reCte que
la conféquence à tirer. Par tout où Tinnocen^
ce n'efl: pas en IJketé, rien n'y peut être: par
Partie IL A
2 SEPTIEME
tout où les Loix font violées impunément^
il n'y a phis de Kbertc*
Cependant commç on peut féparer Tintérêt
* -
d'an particuIieF de celui du pubKc, vos idées
fyr ce point font eneotfe iocefcakies i vou$
perfifl^ k vouloir que je vous ^^e àles^ fixer.
Vous demandez quel eft l'état préfent de vo»'
ire République , & ce que doivent faire fef
*
Citoyens? H eft plus aife de répondre à la pre-
C«tfiî pir^^e qurf^îoii vous en*arraflfe fift*
rmi^ v^^ par «Scrra^noie que par 1^9 folo^
tÎpQfi Qpniradi^oires qu'on lui ^coine autour dt
vx3)(^9^ J>e$ QeDs dQtf^ bpn îkm ^?Qua dif^Qt^
iKlus^ fommes h pdus Hbre de tous les pçuplei,
Sf d'^u£fëa Gep$ de très.' bon fens vous difenc}
i>Qt<s vivons foua le plus dur efclavage. Lef-
quête ont raifon, me denoandez-voqs ? Tons y
Monfieur ; mais à différeiis égards ; une dif^
LETTRE; I
èi&âion très iiAiple les coticilie; Ripa â'e^
^ius libre que votre état l^icitne ; rien n'eft
plus fervîle que votre état aftdel
Vos loix ne tiennent leur autorité que dé
vous } vous ne reconnoiilëz que ceiks que vom
faites ; vous ne payez que les droits que voal
impofez ; yous éliKt les Chefs qui vous goiir
Vement ; ils n'ont droit de vous juger que pat
des formes prefcriteSi E41 Conièil général voua
êtes LégiflateurSi Souverains, indépendant
de toute puiiTance humaine; vous ratifiez lef
traités/ vous décides de la paix & de la guer^ -
re ; vos Magiflxats eux « mlines^ vous traitenc
de Magnifiques , , très honorés & fouvirains Sei*
gtiéurs. Voila votre liberté i voici votre fer^
Vitude^
Le corps chaîné de Teicécutiôh de vos Loîst
en ^ rinterpréte & Tarbiti^e fuprême ; il les
fait pixï&t coaune il lui plaie } il pôut les fal^ci
.A»
-4 SEPTIÈME
taire ; il peut même les violer fans que vois
s.
puiiliez y mettre ordre ; il efl au dëflus à&
Loix.
«
Les Qiefs que vous élîfez ont, îndépèncïam-
ment de votre choix, d*autres pouvoirs qu'iîs
' *ne tiennent pas de vous , & qu'ils étendent aux
-dépends de ceux qu'ils en tiennent. Limkéi
dans vos éleftîohs à un petit nombre d'hom-
mes , tous dans les mêmes principes & tous
•animés du même intérêt, vous faites avec un
grand appareil un choix de peu d'importance.
1 ■ ...
* Ce qui impôrteroit dans cette affaire fooit de
pouvoir rejetter tous ceux entre lelquels on
vous force de choîfir. Dans une éledtion libre
en apparence vous êtes fi gênés de toutes parts
que vous ne pouvez pas même élire un pre-
xmer Syndic ni m Syndic de ta Garde : le
/^hef de la République & le Commandant dç
b Place ne font pas à votre choix.
\*-
* '"
L E T T R E. ^]
Si Ton n'a pas le droit de mettre fur vous
de nouveaux impôts, vous n'avez pas celui de
rejecter les vieux. Les finances de l'Etat font
fur un tel pied que fans votre concours elles
peuvent fuffire à tout. On n'a donc jamais
befoin dé vous ménager dans cette vue , &
vos droits à cet égard fe réduifent à être ex-
empts en partie & à n'être jamais néceiTaires.
Les procédiffes qu'on doit fuivre en vous ju-
geant font pi;dcrites; mais quand le Confeil
veut ne les pas luivre perfonne ne peut l'y con«
trabdre , ni l'obliger à réparer les irrégularités
qu'il CGKnmet. Là-deiTus je fuis qualifié pour
feire preuve , &. vous favez fi je fais le feul.
Ea Conl^ général votre Souveraine puîf-
iknce dk enchaînée ;. vqus ne pouvez agir
que quand il plait à vos I4^gi(lrats, ni par?
1er qiie qaand ils vous interrogent. S*ils veu-
lent ■ même .ps poiat affembler de Confeil gé-
A3
\
e SEPTIEME
f)éral, votre autorité votre exiftence eft anéaih
tie^ fani que vous puiiSe; leur oppofer qoo
^e vains mumiuies «qu'ils foQt en po|{e(fion
de méprifer.
Enfin (i vous êtes Souverains Sei^eurs dans
raiTemblée, en forçant de -là vous n'êtes plus
rîeut Quatre heures par an Souverains fubor<
donnés, vous êtes fujets le refte de la vie
^ livrés fans réièrve à la difcrétiop d'autrui
Il vous efl: arrivé, Meffieurs, ce qu'il airii
ve k tous les Gouvememens &mbkbfes an
vôtre. D'abord la pui(&nçe Légiib^tive ^ la
îmiflance e:^écutive ^ui çonfUtueDC- I9 ibuve^
faineté n'en fo^t pas diftin6^es, Le Peuple Sou^
verain veut par hii-f^êine^ & p^-iui^iQpœe il
fait ce qu'il veut. Bientât l'inçopunoifté de (A
concours de tous à toin:e chofe force te *Peu{de
^uveraiu dé charger quelque»^ on^ 4e* &a
: L .ET X R e:
.i
.ciers, aptes avoir rempli kur commifficm m
rendent compte , & rentrent dans la comnm^
ne égalité. Peu- à -peu, çe$ ceoimlfliQQa . d<^.
viennent fréquentes ^ ei^ij permanentes* In-
fenfiblement il fe forme un corps gui agH (q^
joats. Un >arpS' tpi agit tonjours Qç.peut
-/
pas rencke compte de cha^e a6le : il m rend
pkis compte que dea principaux ; bianét |1
vient à bout de n'en re^c^e d'^ixrua Fluâ I9
puiflàfice qû agit elt aâ/^ve^ plus ^elj^ .^e^ve
la piui^a&e qui veut. La volant^ d'hier. eft
c^ée être aufli celle .d'^joiu:d'J[iui$ aa Ijett
que radie d'hier ne difpeiife pas d'^ir a^Qur>
d'hùi* Eùfin rinaâ:ion:de la puilTaitcç qui
veut h fomm. à. la pui£&{içe:qui ^é9«be^
c^Ue-cI f&id peiâ-à-pi^ &$ aétietts indépen^r
d«QCet.^;>kâcût f^ velo4ts$ : au lieu ^'agir.
pour là .puiflaooe qm iReut> elle agit fm: eHe*
M àe^ refte; alors datfs l'Eiat ^'une puiflane^
A4
Q SEPTIEME
«giflante, c^efl: rexécutive. La puiilance exe-
cutive n'ed que la force , & où règne la feu-
le force FEtat eft diff>ut. Voila , MoBfkur,
conuneBt périfTont à la fin tou« les Etats dé-
ftiocratiquei.
Parcourez les annales du vôtre , depuis le
tems où vos Syndics, fîmples procureurs ëta*
blis par la Communauté pour vaquer à telle ou
telle affaire , lui rendoient compte de leur Com-
miflion le chapeau bas , & rehtroient à rinfhmc
àzns Tordre des particuliers , jufqu^à celui où
ces mêmes Syndics, dédaignant les droits de
Chefs & de Juges qu*ils tiennent de leur élec-
tion , leur préfèrent le pouvoir arbitraire d'un
corps dont , la Communauté n'élit point les
xtiembres, & qui s'établit au defliis d'elle con-
tre les Loix: fuivez les progrès qui fëparent ces
deux termes / vous connoitrez à ^el poifit
vous en êtes ai pu quels dégrés v^ras y êtes
parvenus^ . •-
LETTRE.
Il y a deux fîécles qu'un Polîtîqae auroît pu
prévoir ce qui voua arrive. Il auroît dit; Tin-
ftitution ' que vous formez, eft bonne pour le
préfent , & mauvàîfe pour l'avenir; elle eft
bonne pour établir la liberté publiqme » niai>*'
vaife pour la conferver , & ce qui fait- mainte-
nant votre fÛFeté fera dans peu la matière de
vos chaînes. Ces trois corps qui rentrent teK
lement l'un dans l'autre i que du moindre dé-
pend i'aftivité du plus grand , font «i équilibre
tast que VnB^on du plus grand dl nëceilaire &
que la Légiflatîon- ne peut (e paffer du LégîÂ
lateûr. Mais quand une fbi$ l'établiflemene-
fera fait , le corps qui l'a formé- manquant de
pouvoir pour le maintenir , il faudra qu'il tom-
be- en ruine , & ce feront vos Loix mêmes qui
cauferont votre deflruftîon. Voî!a précifé-
Hient ce qui vous eft arrivé. Ceft , fauf la
dîfproportioii, 'Ja ckute du Gouvernement P&3
A s
lo SEPTIEME
kmoîs par retttémité coatraire. La conflico-
tion de ]a Républiquis de Pologne n'eil bonne
que pour un Gouvernement où il n^ a plus
lien à faire. La vôtre \ au contraire , n'ed
bonne qu'autant que le Corps lég^latîf agis
toujours.*
Vos Magiftrats ont travaillé de tous les
tems & fans relâche à faire paiTer le pouvoir
liiprême du Confeil général au petit Ccmfeil
par la gracktion du Deux-Cent; mais leurs ef-
forts ont ei) des effets différens, félon la ma*
niere dont ils s*y font pris. Pref^ toutes
kurs entreprifes d*éclat ont échoué ^ jKiree
qu'alors ils ont trouvé de la réfîftaaee, & que
dans un Etat tel que le vôtre , la réffîaQc&
publiqifê efl: toujours fore , quaq^ elle eft
fondée fur les Loix.
La raifofn de ceci eft évidente. Dans tout
Etat la Loi parlé où parte le fouveraio. Ok.
LETTRE,
dans une Di^mocratie où le Peuple eft Souvo»
rain^ quand les diviiloDS inteftines fliPpcnclnc
toutes les fonn^ & font taire toutes les w
toriiéS) la iienne feule demeure, & où fe por^
ce alors le plus grand nombre , là réGde la Loi
& Tautorit^
Que fi les Citoyens (k Bourgeois réunis ne
font pas le Souverain , les Coniëils fans les Ci^
toyens & Bourgeois le font beaucoup moina
encore , put^u'ils n*en font que la moindre
partie en quvititë, Sitôt qu'il s*agit de^rantoc
mé fopiême j tout rentre à Genèvç dans réga»
)kéy ielon les tçrmes de rcdît^ Que tous f dent
iwaem en. dégré\ i» Citoyens ^ Bourgeois ^ fyns
voukirfe préférer ^ fmrihuer qudque autorki
^ Seigneurie far àeffus les mares. Hors dti
Conf^ général, it n'y a point d'autre Soave«
min que la Loi, mais quand la Loi même eft
gttaqué^ par lès Mimftres,^ c'efl..ao Légâfla^eut
12 SEPTIEME
à la fbutenîr. Voila ce qui fait que partout
où règne une véritable liberté , dans les axtxo^
prifes marquées h Peuple a prêfque touj<»ir5
Tàvantage^
'- Maïs ce n'e(t pas par des çntreprifes mar-
quées que vos Magiflrats ont amené les chofes
au point où elles font ; c*eft par des efforts
modérés & continus , par des changemeos
prefque infenfibles dont vous ne pouviez pré-
voir la conféquence , & qu'à peine même pou^
viez-vous remarquer. Il n'efl: pas poflible ai| .
Peuple de fe tenir fans ceflë en garde contre
tout ce qui fe fait , & cette vagîlance lui tour*
neroit même à reproche. Oh l'accuferoit d'ê*
tre inquiet & remuant, toujours prêt à s'alla^
mer fur des riens. Mais de ces riens-là furlefr
quels on fe tait , le Confeil fait avec le tems
faire quelque chofe. Ce qui ie pafFe aéhielle*
talent fQus vos yeui; en eil la pteuve« * ^
I E T T R E. : t3
Toute raatoricé de la Répubii(}ae rëfidb
dans les Syndics qui font élus dans le Confeil
général. Ils y prêtent ferment patce qu'il eft
Jeur feul Supérieur, & ils ne le prêtent que dans
ce Confeil , parce que c'efl: à lui feul qu'ils doi-
«
vent compte de leur conduite , de leur fidélité
à remplir le ferment qu'ils y ont fait. . Us ju«
rent de rendre bonne & droite jufUce ; ils
font les feuls Magiilrats qui jurent cela dans
cette aflèmblée , parce qu'ils font les feuls
à qui ce droit foit conféré par le Souve-
rain (a) y & qui TeKercent fous fa feule au«
(û) Il n'eft conféré à leur Lieutenant qu'en fous-
ordre, & c*eft pour cela qu'il ne prête point fer-
ment en Confeil général. Mais , dît l'Auteur des
Lettres , le ferment que prêtent les membres du Con-
feil ejl'îl moins obligatoire , ff rexécution des engage*
mens contraQés avec la divinité mime dépend - elle du
lieu dans lequel on les contraUe ? Non , fans doute,
mais s'enfuit-il qu'il foit indifférent dans quels lieux
& dans quelles mains le ferment foit pi^ité , & ce
choix ne marque-t-il pas ou par qui l'autorité cft;
conférée , ou à qui Ton doit compte de Tufage qu'on
è4 é è p t t t u ë
torité. l)ans le jugetneht pxV&i des critalûieii
ils jurent encore feuls devant le Peuple y eA
fe levant (^) & hauflàût leurs bâtons, êi'aorir
féi droit jugement y fans home m faoeur^
. pîant Dieu de ks punir s'ils ont fait au c&m
^
traire ; & jadis ks iêntetices criminelles fe
rendoient en leur nom feul , fans qu'il Ait fait
tnention d'autre Confeil qUe de celui des Ci*
toyens ^ eœnxne cm le voit ptf la feàtence de
Morelli ci-devant tranfcrite , & par celle de
Valentîn Gentil rapportée dans les opufâiles
de Calvin^
Or vous fentez bien que cette puîflaiice eS-
cludve y ainfî reçue immédiatement du Peu*
pie, gêne beaucoup les prétentions du Con*
«i«B««M«HtaMMaMMMMM«Mmi«Bi^
•n faitt A quels hommes d*Etat avons-nous à faire
^W faut leur dire ces chofes^là? Les ignorenc«>i1Sé
ou s*iÎ8 feignent de les ignorer?
(}) Le Confeil eft préfent auffi , mais fes mtrs^
bres ne jurent point & demeurent afSs»
L E 1* T R % ts
fi^l. Il eft donc naturel qoe poitf fe dâîviet
de cette dépcndaftce il tâche tf affbiblîr pcii-à»
peu raatorkrf des Syndics, de fondre dans la
Çonfeil la jurifdîflîpn qu'ils ont reçue, & de
tranfmettre in^eBfiblefBeRt à ee eorps pctim^
Bent , dont le Peuple n*élît point les mem-^
btes, le pouvoir grand mais paffagcr des Ma*
giflrats qtfil élit Les Syndics eux-mêmes,
kin de s'oppofçr à ee changement doivœc
auffi le favorifer ; pairce qu'ils font Syndic*
feulement tous les quatre ans , de qu'ils peu*
vent même ne pas l'être ; au lieu que , quoî
qu'il arrive, ils font Confeillers toute leur vie,
le Grabeau n'étant plus qu'un vain
fiial (c).
'*■■■ ■ ■'— 1 1 11 If
(0 Dans la première Inftitution, les quatre Syn-
dics nouvellement élus & les quatre anciens Syndkj
rejçttoient tous les ans huit' membres des feize reC*
cans du petit Confeil & en propofoient huit nou-
veaux , lefquels paffoient enfuitç aux fuffrages des
j6 s et T I E m E
«
' Cela gagné 9 Yékdàaa des Syndics devleii*
dra de même une céréinonie tout auiSi val-
pe qae l'eft déjà la tenue des Confeils gêné'»
' nuz«
Deux-Cens, pour être admis ou rejettes* Maïs in-
fcnfibleincnt on ne rcjetta des vieux Confcillers que
ceux dont la conduite aVoît dotiné prîfe au blâme,
& lorfquUls avoîenc commis quelque faute grave^ oh
B^attendoit pas les éleél^ions pour les punir; mail
on les mctt oit' d'abord en prifon , & on leur faifoit
leur procès comme au dernier particulier. Par cet-
te règle d*anticiper le châtiment & de le tendre
févere» les Confeîllers reliés étant tous irréprocha-
bles ne donnoient aucune prife à l'excluflon : ce
qui changea cet ufage en la formalité cérémonieufe
& vaine qui porte aujourd'hui le nom de Gràbetu.
Admirable effet des Gouvernemens libres, oii'les u-
furpations sièmea ne peuvent s'établir qu'à Tappui
de la vertu !
Au refte le droit réciproque des deux ConfclK
empécheroit feul tucun des deux d'ofer s*en fervir
fur Tautre finon de confert avec lui , de peur de
i'éxpofer aux répréfâilles. Le Grabeau ne fert pro-
prcmeritqu'à les tenir bien unis contre la bourgeoi*
fie, & à faire fauter Tun par Tautre les membrci
qui n'auroîçnt pas l'efprlt du corps*
" LETTRE. t^
Taux , & le petit Confêil verra fort paifible*
ment les exdufions pa préférences que le
Peuple peut donner pour le Syndicat à fei
membres 9 iorique tout cela ne décidera plus
de rien.
Il a d'abord pour parvenir à cette fin un
grand moyen dont le Peuple ne peut connoî**
tre; c'eft la- police intérieure du Confêil ,
dont , quoique réglée par les Edits , il peut
diriger la forme à fon gré (i), n'ayant àucua
furveillant qui Fen empêche ; bar quant au
Procureur général, on doit en ceci le, comp-
ter pour rien (f). Mais cela ne fuifit pas
(d) C*eft ainfi que dès Tannée 1655 le petit Con«'
feil & le Deax-Cent éublîrent dans leurs Corps la
btiote & les billets, contre l'fidit.
(e) Le Procureur général , établi pour être rhom-'
me de la Loi, n'efl que Thomme du Confeil. Deur
caufes font prefque toujours exercer cette charge
contre r^fprit 4e fon inftitution. L'une eft le vice
de rinftitution même qui fait de cette Magifiraturc
Partie IL B
18 SEPTIEME
tûcore ; il faut accoacumer le Peuple même
k ce traniport de jurifdi£lûon. Pour cda tià
ne commence pas par ériger dans d'impor-
tantes affaires des T^bunaux compofës de
feuls Confeillers ^ mais oh en érige, d'abord
.•de nîoins remarquables fur des objets peu in-
téreflans. On fait ordinairement préfîder ces
^Tribunaux par un Syndic auquel on fubftitae
« un degré pour parvenir au Confeil : au lieu qu^un
ÎPrdcareur gértërtl ne dcvoît rien voir au deffus de
fa plaee & qu'il devoit lui être interdît par la Loi
, d'afpirer à nulle autre. La féconde fcaufc eft Tim-
prudenqe du Peuple qui confie cette charge à des
hommes apparentés dans le Confeil , ou qui font de
tamilles en poflcllîon d*y entrer ^ tzns confidérer
qu'ils ne manqueront pas ainfl d'erii})ioycr contre lui
les armes qu'il leulr donne |>our fa défeiïfes pal out
ides Genevois diftîi)|uer rhdmnie du peu]rftf d'avac
l'homme de la Loi y cominè fî ce n'étpic pas la mS-
-me chefel Les Procureurs généraux dcvroient être
durant leurs ûx ans les Chefs^ de la Bourgeiefîe • &
devenir fon confeil aprèô cela : mais ne ht voila-t-il
•.pas bien protégée & bien confeillée, & a*a-t-dlc
'l>às fort k fe féllelter de fon choisi
L E T. t R Ei i|l
quelqadfols ù& ancien Syndic » puis lui Coo-
feiller, fams^^e {ierfonne ^ (iS& attention; on
irepette fans bruit cette manitBuvife jufqû'à ce
qu'elle faiûfe ufage } on la tr^fporte au crimi«
neL Dans une bccaiibn plus incitante on é-
rige un Tribunal pour juger des Citoyehs. A
la faveur de la Loi des rjéîcufations oh fait»
préfider ce Tribunal païf un Confeiller. Alorè
• , • I
le Peuple ôuvrç les yeuic & murmure. On lui
dit^ dequoî vous pkignez-vous? Voyek lei
exemples; noiis n'innovons rien.
'••■'••'
Voik^ Mbnfieur, la politique de vos Mi-
gifbrats. Ils font leurs innovations peu-àrfiea^
lentement , fans que perfonne en voye la con-
* - • ■ <
féquence ; & quand enfin Ton s'en^apperçôit
*" ■ ' - ' , •• " '.
& qu'on y veut pottd: remède , ils client
qu on veut mnover.
Et voyez j> eh effet, fans fcfrtir de cet exem-
«
(lie , 06 qu'ils OQC' dit k cette 6ccàCioti. M
20 SS FTIEME
r'apptiyoknc fur la Loi des récufàtiotis : on
leur répond; la Loi fondamentale de l'Etat
veut que les Citoyens ne foîent jugés que par
leurs Syndics^ Dans la concurrence de ces
deux Loix celle-ci doit exclure fautre ; en
pareil cas pour les obferver toutes deux on
devroit plutôt élire un Syndic ad aStum. A ce
mot 9 tout ej(l perdu ! Un Syndic ad aStum !
innovation ! Pour xhoi^ je ne vois, rien là de il
nouveau qu'ils difent: fi c'eft le niot , on s'en
fert tous les ans aux éleâions ; & (i c'eft la
chofe , elle eft encore moins nouvelle ; puif-
.que les premiers 'Syndics qu'ait eu la ViDe
n'ont été Syndics qu'iii aSlum : lyrique le
.Procureur général cft recufable , n'en faut - il
pas un auti^e ad aSlum pour faire fes fonftions ;
& les adjoints tirés du Deux - Cent pour rem-
plir les Tribunaux , que font - ils autre diofe
. que des Confeillers ad oEtum^ Quand ua noa*
LETTRE. 21
và abus s'introduit ce n'efl: point innover que
d*y prop'ôfer un nouveau remède; au contrai-
re, c*eft chercher k rétablir les chofes fiir Tan-'
cien pied. Mais ces Meffieurs' n'aiment point
qu'on fouille ainfi dans les antiquités de leur
Ville : Ce tfefl: que dans celles de Carthage ;&
de Rome qu'ils permettent de chercher l'ex-
plication de vos Loix.
Je n'entreprendrai point le parallèle de cel^
les de leurs ^treprifës qui ont manqué & ^le-
celles qui ont réufli: quand il y auroic com-^
penfation dans le nombre, il n'y en auroit
point dans l'effet total Dans une entreprife
s
exécutée ils «gagnent des forces ; dans uçecvstv
creprife manquée ils ne perdent que dutems;
Vous^ au contraire , qui hé cfaerdieis & ne-
pouvez chendièr qu'à maîncenir votre conllî-
tution , quaiid^ vous perdez^ vos pertes fbntr
réelles » & quand vous gagnez , vous ne
B3
/
i% a E r T ï E M E
]^agnez rien. Dans un progrès de cette ef-
pece comment efpërer de refter au même
point ?^
: De toutes ks Coques, qu^oflQre à méditer
Fhiftoire inflxuéUve de y.o!;re Gouvèmement,
\^ plus remarquable par & çaufe & Ja plus im-
portante par ioa^eSet^^ dl celle qui a [Hxxiuic
le règlement de la Médiation, Ç$ qui iionna
lieu {MTimitivemçiit a Cette céld>re époque fut
Hâe entreprife iDdiff^rete , f^ite bors de tems
par vos MagiftraS. ' Avant d'avoir aflèz affcr-
]iii leur puiilànce. iU voulurent uTutper ie droit
^è mettre des impôts. Au Heu de ié(b:ver ce
i^oiip pour le dernier Favidité le leur fit por-
ter avs^t les autres 9 &précirément apiésune
commotion qui n^étoit pas bien aflqupîe. Cet*
t^ faute €a attira de plus grandeis^ difficiles à
réparer, CoqimeQt de fi fins politiques, igno-
r
^nt-ils uQe lïu^^we auffî jSn^ple^ que celle
j
LETTRE. «3
qu'ils chequereiit en cette occafibn? Par tooç'
pays le peuple ne s*apperçoit qu'on attente k
fa liberté que lorfqu'on attente à fa bourfe ;
ce qu'aufli les ufurpateurs adroits fe gardent
bien de faire que tout le refte ne foît faîr.
Ils voulurent rçnvecfer cet ordre & s'en trou<«
verent mal (/)* I,es fuites de cette affaire
produiQrent les roopvemens de 1734 & Taf»
i^eax complot qui en fut le fruit.
Ce fat une féconde feute pire que la prs-
naiere. Tous les avantages du tems font peut
eax;^ ils le lç$ ôtent dans les entreprise bruf«
-; -
• ♦ •-- >*
(/) L'objet des împ,ôts AabUs en 1716 étoit Is^
depenfe des nouvelles fortifications : Le pltn de ces
nouvelles fortifications étoit immenfe & il a été exé-*
çuté en partie* De û vaftes fortifications rendoient
Bécjeflaij:^ .une grolTe gâmifon , & cette grofPs. gar-
nifon avoitpour but d« tenir les Citoyens & Bout'
geois fous le joug. On parvenoit par cette voye à
fojmer à Leurs jdépends les fers qu'on leur prép««^
rolt. Le projet étoit bien lié , mais il marcholt
4aQj un ordre rétrOgrad.e. AufG n'a-t-il pu réuffîr* -
B4
H SEPT I. E M: E
«
qoes, & mettent la machine dans le cas de
ft remonter tout d'un coup : c'efl: ce qui fail«
lit arriver dans cette affaire. Les événemens
qui précédèrent la Médiation leur firent per-
dre un fîécle & produifirent- un autre effet
défavorable pour eux. Ce fut d'apprendre à
TËurope que cette BourgeoiHe qu'ils avoient
voulu détruire & qu'ils peignoient comme
une populace effrénée , f^voit garder dans fes
avantagés la modération qu'ils ne connurent
jamais dans les leurs»
; Je ne dirai pas fi ce recours à la Média-
tion doit être compté comme ,une troifieme
faute. Cette Médiation fut ou parut offerte;
fi cette offre fut réelle ou follîcitee c'eft ce
,que je ne puis ni ne veux pénétrer:: je fais
feulement que tandis que vous couriez le plus
grand danger tout garda le filence j & que ce
ûlence ne fut rompu que quand le danger
LETTRE. zs
paflà dans Tautre parti. Du refle, je veux
d'autant moins imputer à vos Magiftrats d'a«
voir imploré h JVlédiation y qu*ofer même en
parler eft à leurs yeux le plus gra;id des
crimes.
Un Citoyen ie plaignant d'un emprifbnnc*
ment illégal injufle & deshonorant , deman-
doit comment il falloit s'y prendre pourre*
courir à la garantie. * Le Magiflrat auquel il
s'adrefToit ofa lui répondre que cette feule
propofîtion méritoit la mort. Or vis-à-vis du
Souverain le crime fbroit auili grand & plus
grand, peut-être, ^e la part dû Confeil quQ
de la part d'un finiple particulier j & je ne
vois pas où Ton en peut trouver un digne de
mort dans un fécond recours, rendu l^itime
par la garantie qui fut l'effet du premier.
Encore un coup , je n'entreprends poiqt
de difcuter une quedion fi délicate; à [[traitei
B5
j5 s E P t I e m e
^ fi difficîîe à réfoudre, ^entreprends fim-
pïement d'exanaihgr, for Tobj^t qui i^aus oc*
çupe, Téîzf, de votre Gouyememcnt , ib^ci^
devant par le rigletnent. de$^ Plénipotentiaires,
qiais dénaturé, niaiptena^ pajr^ les. qoovdlès
» . .♦
œtreprifes. de vo?^ Magîftrats. Je. fuis obKgé
de faire un teng circuit pçxir aBer à mon but,
ijlâîs daignez me. fiiîyre '^ Sç; xipas nous re-
r
trouverons bien.
• • • » »
Je rfâî point la témérité de vouloir criti-
quer ce régléti^nt ; aii contraire , j'en adôiire
la fageffe & . j'^en refpefte Fimpartialité. Jy
crois voir les intentions les ^qs droites & lei
difpofitioni les plus judîcîeufes. Quand on.
feit combien de chofes étoient contre vou$
dans ce moment critique, combien vous aviez
de préjugés à Vaincre, quel crédit à. furmon»
ter, que de faux expoles à détruire j quand on.
fe rappelle avec quelle confiance vos adverfii*
LETTRE. s?
|es comptoîent vous écraier par les maîns
tf aatruî , Ton ne peut qu'honorer le zele la
confiance & les talens de vos defenfeurs , Yé^
qnité des Puîflancei médiatrices & Tintégrîté,
des Plénipotentiaires qui ont confbmmé cet
çuvrage de paix. •
Quoi qu'on en puîfRi dire , EEdît de la Mi*
djatîon a été le falut de la République , &,
■ * ■ • ■•
quand on np L'enfreindra pas î| en fera la con-
f^rvatîon. $î cet ÔuiTage n*eft pas parfait
en luî-mêrne, B Tell' relativement ; il Teft:
quant aux tems aux lieux aux cîrconftances;
îl «ft le mdllcur qui yous ^put convenir. Il-
^oît yous être invidahle & fdcté par pruden-^
ce , quand ' il ne le feroît pas par néceffité , *
& vous n'en devriez pas ôter une Ligne,
quand vous feriez les maîtres -de ranéantîK
Bien plus, la raifon même qui le rend néceC
i&îre , ' le rend hécefFaire dans • fon entier. Com-
r
28 SEPTIEME
me tous les articles balancés, forment réquilî-
bre, un feul article altéré le détruit. Plus le
règlement efl: utile , plus il feroit nuifible sunfi
mutilé. Rien ne feroit plus dangereux que
plufieprs articles pris féparément & détachés
du corps qu'ils afiermiflênt. Il vaudroit mieux
que l'édifice fut rafé qu'ébranlé. Lfaiifez ôter
une feule pierre de la voûte , & vous fcrei
écrafés fous fes ruines.
Rien n'eft plus facile à fentir par l'examen
des articles dont le Confèil fè prévaut ; & de
ceux qu'il veut éluder. Souvenez-vous , Mon-
fieur , de YtÇpnt dans lequel jentireprcnds cet
examen. Loin de vous confeîller de toucher
^ à l'Edit de la Médiation , je veux vous fake
fentir combien il vous importe de ^ n'y laiflèr
porter nulle atteinte. Si je parois critiquer
quelques articles, c'eft pour montrer de quel-
le conféquence il feroit d'ôter ceux qui les
LETTRE. ^2^
reéUfîent. Si je parois propofer des expédiens
qui ne s'y rapportent pas , c'eft pour mon-
trer la mauvaife foi de ceux qui trouvent des
difficultés infurmontables où rien n'eft plus
aifé que de lever ces difficultés. Après cette
explication /entre, en matière fans fcrupulç^
"bien perfuadé que je parle à un homme trop
^uîtable pour me prêter un deiKin tout con-
traire au mien. ^
■
Je fens bien que fi je TO*adreflbîs aux é-
crangers il conviendroît pour me faire enten-
dre de commencer par un tableau de votre
coiiflitution ; mais ce tableau fe trouve déjà
tracé fuffifamment pour eux dans l'article Ge-
nève de M. d'Alembert , & un expofé plus
détaillé feroit fupetflu pour yous qui connoi&
fisz VOS Loix politiques xhieux que moi-mê-
me, ou qui du moins en avez vu le jeu de
:pltt$ près. Je me borne donc à parcourir les
V
à<*
SEI^TIËME
*
iartkles da règlement qui tiennent à la qoet
tîon préfence & qui peuvent le mieux eà
fournir la folution.
Des le premier je vois votre Gouvenie-
inent compofé de cinq ordres fubordonnéi
mais indépendans, c'efl-à-dîre exiflans nécef-
iàirement , dont aucun ne peiit donner attein-
ie aux droits & àftributs d'un âutèe , & dan^
tes cîn^ ordres je vois compris fe Goofdil gé-
néral: tiè& - là je vois dans chacun des cin^
une {Portion particulière du Gouvernement ;
mais je n'y vois point lâ Pûii&nce conftitutive
qui les établit , qui les lié ^ & de laquelle âji
dépendent tous : je n'y vois point le Souvœ^"
br dans toiit Etat politique il faut une PoK^
/
r
m
fance fbprême , un centre où tout fè rapporte^'
îm principe d'cNi toiit dérivé , On iSeuveriûd
. qui puiiTe tout
\
LETTRE. 31
VOUS re&dàQîc compTe de la cotaftitutiott dé
rAnglecerro tooÈ. pdrle dûd 1^ Le Gôuver-
,y nement de la Grande Brecàg^àe efl: cbmpofé-
„ de quatre Ordres ^ont aucun ne peut at-
j^ tenter aux droits & attributions des autres ^
jy ikvokyle Koî, la Chambre haitce, la Cham-
\^ bre bafle, & le Parlement ^^ Ne diriez^ voui
pas à rinftant; vous vous trompes : il n'y a
que trois Ordres. Le Parlement qui , lorlque le
Roi y iiége, les comprend tous, n^en eflpaè
un quatrième: il efl: le tout ; il eft Je pouvoir
ufûqiie & fupréme duquel chacun tire fcà
exîftence & fgs droits. Revêtu de Fantorité
légiflativë , il peut changer même la Ldl foi^
jdamentale en vertu de laquelle, chacun àt cdt
ordres exifle; il le peht, & déplus, fl Fa faic^
Cette réponfe eil juflé i ^application en cft
claire i & cependant il y à encore cette diffî^^
ttnce que le Parlement d'Angleterre n'eft foi^
gjî SEPT I E ivr E
verain qu*en vertu de la Loi & ieulemeot
par attribution & députation. Au lieu que le
Confeil gâiéral de Genève n'^ établi ni dé-
puté de perfonne j il efl; fouverain de fon pro-
pre chef: il efl; la Loi vivante & fondamen-
tale qui donne vie & force à tout le refte, &
qui ne connoit. d'autres droits que les fiensL
Le Con&E général n*efl; pas un ordre dans
r£tat, il eft , FËtat même.
L'Article fécond porte (pie les Syndics ne
pourront être pris que dans le Confeil des
* Vingt-cinq» Ôr les Syndics font des Magif^
trats annuels que le peuple élit & choifît , non
feulement pour être fès juges,, mais pour ê-
tre fes. Protë£i:eurs au befoin contre les mem-
bres perpétuels desConfeils, qu'il ne choifit
pas (g). L'ef-
(g) En attribuant la nomination des membres da
petit Confeil au Deuz-Ceut rien n*étoic plus aifé
' LETTRÉ. si
Ueâet de cette, reflriétion dépend de la dif-
iférence qu'il y a entre Tâutôrké des membre*
du Coâfeil & ceQé des Syndiés. Car G la dif-
férence tfefl: très grande , & qu'ùii Syndît
n'eftime plus fôn autorité anhùené Comme Syn*
^ic que fbn autorité perpétUeSe comme Con«
rdller^ cette éIe£Ho& lui fera plrefque indiffé- *
rente; il fiera peu pour robtecSi" & ne fera rieit
pour la jàftifier. Quand tous les membires dû
Cohfeil animeç du ihême ef^rit fuiVront les
que d'ordonner cette attribution félon la Loi fou«
damentale. Il Tuffifoit pour cela d'ajouter qu'on ne
pourroît entrer au Confeil qu'après avoir été Audi-
teur. De cette manière la gradation des charges é«
foît mieux obfervée , & les trois Confeils concou-
roicnt aux choix de celui qui fait tout mouvoir ,* ce
qui étoit non feulement important mais indifpenfa-
ffie, pour maintenir ruriité de la conftitution. Lei'
Genevois pourront ne pas fentir l'avantage de cette
clûufe , vu que Te choix des Auditeurs eft aujour-
d'hui de peu d'effet; mais on TeUt confidéré bieà
différemment quand cette charge fut devenue li'
f«ule portfe du Confeil. - ' '
Fartk IL t
!
i »
I
34. SE. P TIEME
mêmes maximes, le Peuple, fur une conduite
commune à tons ne pouvant donner d'ex-
clufion à parfonne , ni choifir que des Syndics
déjaConfeillers, loin de s'afiurer par cette é-
Jéftion des Patrons contre les attentats du Con-
feil, ne fera que donner au Confeil de noa-
velles forces pour opprimer la liberté.
Quoique ce même choix , eut lieu pour Xox-
flinaire dans l'origine de Tijiflitatiôn , tant
^if il fut libre il n'eue pas la même conféquen-
ce. Quand le Peuple nommoit les Confeîllerg
lui-même , ou quand il les nommoit indire£le-
m^nt par les Syndics qu'il avoit nommés , il
lui étoit indifférent & même avantageux de
choifir fes Syndics parmi des Confeillers déjà
de fon choix (h) » & il étoit iàge alors de
"■■"'' ' ' I ■ .1-- -r- ' ' ■
(b) Le petit Confeil dans fon origine n'étoit
qu'un choix fait entre le Peuple, par les Syndics,
âe qjaelques Notables ou Prud - hommes pour leur
r
LETTRE. 35
pr<^ëTer des chefs déjà verfés dans les aiFai-
réi : mais une confidération plus importante
eut dû remporter aujourd'hui fur celle - li.
Tant il efl vrai qu'un même ofâge a des ef-
fets diflFérens par les çhangemens des ufages
#
qui s'y rapportent , Ôf qu'en ca$ pareil c'efl
innover que n'innover patl
L'Article IIL du Règlement efl: plus confî-
dérable. H traite du Confêil général légitime-
fervir d'AlTeflei^rs. Chaque Syndic en choînflbîtf
quatre ou cinq donc les fondions ûniflToient avec leA
flennes : quelquefois même il les changeoit durant
le cpurs de fon Syrndicat Henri die VEf pagne fut le
premier Confeiller â vie en 1487 , & il fut établi
par le Confeil général. 11 n'étoic pas même nécef-
faire d'être Citoyen pour remplir ce pofte. La Lot
n'en fut faite qu'à l'occafîon d'un certain Michel
Guillet de Thonon, qui, ayant été mis du Confeil
étroit , s'en fit chaffer pour avoir ufé de mille fî-
nefTes ultramontaines qu'il apportoit de Rome ob
il avoit été nourri. Les Magiftrats de la Ville,
alors vrais Genevois & Pères du Peuple » avoient
toutes ces fubtilités en horreur.
C z
a6
SEPTIEME
ment ^emblé : il en. traite popir fixer l«s droits
& attributions qui lui font propres , & il lui.
en rend plulreiir^ qi^. les Ço^feils inférieur
avoient ufurpçs. Ces droits en > totalité ibnt
grands & beaux , fans dç^u^e -^ m^ première^
ment ils font Tpécigés. ^^ p^ cela feul linûn
tés ; ce qu'on poTe exclud ce qu'oa ne pofe
jpas, & même le mo^ lijnités eO: dans F Article.
Çr il efl de refleni:e dfi h Puiflànce Souverai-
lie de nç popvQÎr être linûtée :; elle peut tout
eu elle n*efl: rien* Cçmjne elle contient éroi-
»emment toutes les puiflances aftives de TE»
tat & qu'il n'exifte que par elle y elle, n'y peut
jreconnoîcre d'autres droits que les Gens <S^
ceux qu'elle communique. Autrement les pof-
£b0eur8 de ces droits ne feroient point partie,
du corps politique ; ils lui feroient étrangers
par ces droits qui ne feroient pas en lui, & la
perfonne mors^Ie ni^quant d'anité s'évatioiûV
roît. ,. ,
: L E T T' R Er "37
Cette lîmitatiop même èfl pofîtivë en ce
^ concertie les Impôts. Le Gpiifeil ^ Sou*
yerain lui - même n'^ pas le drpk d'abolie
eux qui était établis aiy^Qt; 17 14. Le voila
domr à çec égard^ fournis à use puiilànoe fi^^.
périeure. Quelle eft: cette Çuiflance ? '
Le pouvoir Légiilatif :confî(te en deux chor
ies iDfépar^les : fiu!;e Içs 14^ ^ ioê mainte- .
jjir î c efl>i-dire , ayok inlpeSion fur le pou-
voir exécutif. II n^y a poii^tt d'£tai; au -mondi^.
où le Souverain n*ait cette infpeâion. San3
cela toute liaifon toute fubordination manquant
entre ces deux pouvoirs , le dernier ne dépen-
drait point de l'autre ; Texécution n'aiîroit aur
cuti rapport nécef&ire aux Loix; la Loi ne
&rqit qu'un mot , & ce mot ne fignifieroit;
xâen. Le Confeil général eut de tout tems
ce droit de proteûion fur fon propre ouvra^^
ge , il l'a, toujours exescé : Cependant il n'en
Ç3
38 SEPTIEME
dl point parlé dans cet article , & s'il n'y
ëtoit fuppléé dans un autre y par ce feul (i-
lençe votre Etat feroit renverfé. Ce point eft
important & Jy reviendrai ci -après.
Si vos droits font bornés d'un côté dans cet
Article , ils y font étendus de l'autre par les
paragraphes 3 & 4: mais cela fait -il com-
penfation ? Far les principes établis dans le
Contrafi; Social, on voit que malgré To*
piniom commune , les alliances d'Etat à £-
tat 9 les déclarations de Guerre & les trsutés
de p^ ne font pas des aâes de fouveraine-
té mais de Gouvernement , âc ce fentiment
efl; conforme à l'ulâge des Nations qui ont le
imeux connu les vrais prindpes du Droit
politique. L'exercice extérieur de la Bii&
fance ne convient point au Peuple; les gran-
des maximes d'Etat ne font pas à fa portée;
3 doit s'en rapporter là-defFus à fes chefs qui 9
L E 1" T R E. 39
toujours plus éclairés que lui fur ce point,
n'ont gueie intérêt à faire au dehors des trai-
tés défavantageux à la patrie ; Tordre veut
qu'il, leur hiilè toat Téclat extérieur & qu'il
s'attache oniquement au fblide. Ce qui impor-
te eflêndellement à chaque Gtoyen ^ c'efl lob-
ièrvsition des Loix au dedans, la propriété dei
bieniî» la ffîreté dçs paniculiers. Tant qpie tout
' ira bien^ fur ces trois point , laiilèz les Confeils
négocier & traiter avec . l'étranger ; ce n'eft
pas delà que viendront vos dangers les- plus k
craindre^ Ciefl: autour des. individus qu'il ùm
rafTêmbler les dibits du Peuple ,^ & quand on
*
peut l'attaquer féparément on le iubjugu& toà«*
jours. Je pourrois alléguer la iàgeile des Ko-
niaîns qui , laiiTant au Sénat un grand pouvoir
au dehors le forçoient dans la Ville à refpefter
le dernier Citoyen ; mais n'allons pas fi loin
chercher des modèles. Les Bourgeois de
e4o 3 É P T i .Ë M É
^ N<sufchâcei.felxmt jçondûits bien plus iàgemeitt
. îbus leurs Pf iûcest que vous fôus vos Magif-
^trâts (hi). Ils ne foQC ûi la paix m la guerre^
iline ratifient polm leî; traités^ ntiLis ils jouSC-
fent en fureté. cte leurs francfaifes>;> êc com^
j^e h Loi n'a pôiilt préfamé . qà& dans une
^ite Ville Utf petit nomlùre d'iioniiêt^ Bout-
gecÂ; ferbieht des fcélécacs 5 m £ie' redanie
yoâv (Jass: leUts n^àrs , diî n-f.c6mck^
It^êteë , rocHenx: dnKt'.d'empiSfoiineit fan» fôï^
gj^iC^.. Chez TOUS on s'efl: tDopar; hiifê fér
dttifieiJ'appareàcé, A l'on ^ n^gérd&n-
ii^iel; Ôd. s',e(! trop occupé, da C021&9 gé^
bérâl, & pasr afla de Tes membres : il &lbit
moins; Ibnger à.l!àutorité^ & plus k 1» lèer-
ffi) Ceci -^forr dit eii mettant à. j^rt îet abus)
qii'.afllirémcnt j,e fuis bien éloigne d'approuver.
KJ. tj
L E t t R Ë. 4t
\è. 'Revenons aux Confèîb généraux. -:
Datre leH Limitations de T Article IH^ 1«
Articles V <& VI eti offrent de bien plas é-
tranges. Ua corps foaverain qui ne peut qi
fe fonber^ ni former aucune opération de :lui«
Uêmey & fournis abfolament, quant à Ton ac-
tivité & quant aux matières qu'il traite ^ à d^ft
tribunaux fubaltemes^ Comme ces Tribunaux
D^approuvércHit csrmînement pas des propofî-
lions qui leur feroient en particulier préjudi*
«
* ciâbles , û l'intérêt de l'Etat fe trouve en con-
ait avec le leur k dernier a toujours la préfé»
r^ce, partie qu^il n'ell permis au Légîflateur
de connoître que de Ce qu'ils ont approuvé.
A force de tout foumettre à la règle on dé-
tnût la première des règles , qui efl la juftice
& le bien public. Quand les hommes fenti-
ront - ils qu'il n'y a point de défordre aaill fu-
nefte que le pouvoir arbitraire , avec lequel ils
Partk ÎI. D
4» SEPTIEME
penfeflt y remédier? Ce pouvixr efl: luî*inêôfe
ié pire de toui les défordres : employer un td
moyeu pour les prévenir, c'eft tuer leigehi
afin qu'ili n*^ent pas la fièvre.
-' Une grande Troupe formée en cunmite peut
^re beaucoup de mal. Dans une aflèilâ>lée
«nombreufe, quoique régulière , fi cbsTcunpeut
'dire & piropoferGe qu'il veut, on perd bien
ûa tems à écouter des folies & Ton peut !•
-tre en danger d'en faire. Voila des vérités
inconteflables j mais efl: -ce prévenir Tabus
-d'une manière raifonnable , que de faire dépens
dre cette ailemblée uniquement de ceux qiii
voudroient l'anéantir, & que nul n'y paiilè
tien pTopofer que ceux qui ont le plus grand
intérêt de lui nuire? Car, MônCeur, n'eft-cfc
*pas exa£lement là l'état des chdes , & y a-c«
îl un feul Genevois qui puifle douter que fi
4'exifleace d\x Confeil général dépendoic toiit
L Ë t t ii p. ^
à -fait du petit Confcil,. le Confeîl général
Me fut pour jamais fupprimé?
Voila pourtant le Corps qui feitl convoqua
ces aflemblées & qui feul y propofe ce qu'il
lui plait : ajr pour le Deux-Cent il ne fait que
répéter les ordres du petit Confeil» & quand
une fois celui-ci fera délivré du Confeil géné-
ral le Deux- Cent ne lembarraiTera gueres ; il
ne fera que foivre avec lui la route qu'il a
frayée avec vouSi
Or qu'ai-je à craindre d'un fupérîeur inco*
mode dont je n'ai jamais befoin , qui iie peut
fe montrer que quand je le lui permets^ ni ré-
pondre que quand je l'interroge ? Quand jd
M réduit à ce point ne^ puis*je pas m'en re«
garder comme délivré ?
Si l'on dit que la Loi de l'Etat a prévenu
TaboUtioft des Confeils généraux en les ren*
riant nëi^eflàifes 'à l'éleflion des Magiflrats ai
D i
44 SEPTIEME
à la' fanâlon des nouveaux Ëdits; je tépaaàs^
quant au premier point, que toute la fotce dû
Gouvernement étant paflee des mains des
Magîfhats élus par le Peuple dans celles du
petit Cônfeil qu'il rfélit point & d*où fe firent
les principaux de ces Magiftràts, Téleâion &
l'affemblée où efle fe fait ne font plus qu'une
vaine formalité fans confiilance, & que des
Confeils généraux tenus pour cet unique objet
peuvent être rendes comme nuls. Je réponds
encore que par le tour que prennent les chc^es
il feroit même aifé d'duder cette Loi fans que
le cours des aSaires . en fut arrêté : car fup-
pofons que, foit par la rejeflion de Cous les
fujets préfentés y foit fous d'autres prétextes^
on ne procède point à Téleâîon des Syndics,
h Confeil , dans lequel leur juriidifiiion fe fond
infenfiblement , ne l'exercera • t * il pas à leur
défaut, comme il l'exerce dès à prélat indé*
LETTRE. 45
r
pendamment d'eux ? N'olê-t-on pas déjà vous
dire que le petit Confeil , même fans les Syn-
dics 9 eft le Gouvernement ? Donc fans les
Syndics TEtat n'en fera pas moins gouverné.
Et quant aux nouveaux Edits» je réponds
^'ils ne feront jamais aflèz néceflaires pour
qu à l'aide des anciens & de {ez ufurpations »
ee même Coniêil ne trouve aifément le mo-
yen d'y fuppléer. Qui fe met au deflus des
anciennes Loix peut bien fe pafler des nou*
velles.
Toutes les mefîires font prifes pour que vos
^fTemblées générales ne foient jamais néceflai-
res. Non feulement le Confeil périodique în-
ftîtué ou plutôt rétabli (/) l'an 1707. n'a ja-^
(f) Ces Confeîls périodiques font auflî anciens que
Ja Légîflatîon, comme on le voit par le dernier Arti-
cle de rOrdonnançe eccléfiaûîque. Dans celle de 1575
imprimée en 1735 ces Confcils font fixés de cinq
en cinq ans; mais dans l'Ordonnance de 1 561 impri«
D3
4tf SEPTIEME
maî^ été tenu qu'une fois & feulement pour
l'abolir (k) , mais par le paragraphe 5 du troi-
sième Article du règlement il a été pourvu
fans vous ôc pour toujours aux frais de J admi-
îiirtratîon. Il n'y a que le feul cas chimérique
â'une guerre indifpenfable ou le Confeil géné<
Tal doive î^bfolument être convoqué,
• Le petit Confeil pourroit donc fupprimer
nbfolument les Confeils généraux fans autre in*
convénient que de s'attirer, quelques répréfen*»
étions qu'il eft en pofleflion de rebuter , ou
inée en 156a ils étoîenc fixés de trois en trois ans.
Jl n'cft pas raifonnable de dire que ces Confeils n'a-
voient pour objet que la leélure de cette QrdonJiao-
ce , puifque rimpreflion qui en fut faite en même
tems donnoit â cbacun la facilité de la lire écoute
heure à fon aife , ftns qu'on eut befoln pour cela
(cul de l'appareil d'un Confeil général. Mallicurcu-
fement on a pris grand foin d'çfFaccr bien des tradi-
lions anciennes qui feroient maintenant ^'un j^rauJ
çfage pour réclaircifTement des Edits.
(JÙ y^^^^i^^W ci-aprè$ cet Edit d'aboUtiou,.
L E T T R E. 47,
<i*cxdcer quelques vain» murmures qu'il peub
méprifer ùm rifque ; car par les ardcles VU,
XXIU, XXIV. XXV. XhUl toute efpece
de refîfbnce efl: 4é&udue en quelque cas que
ce puifle être , & les reflburces qui font hors
de la confHtution n'en font pas partie &
n'en corrigent pas les défauts.
11 ne le fait pas , toutefois , parce qu'au
fond cél^ lui efl très indiffèrent , & qu'un fi*»
mulacre de liberté fait eodiKer . plus patiem*
ment la fervitude. Il vous amufe à peu do
frais, foit par des éleétions làns confëquence
quant au pouvoir qu'elles confèrent & quant
au choix des fujets élus, foit par des Loix
qui paroiiTent importantes , mais qu'il a foia
de rendre vaines, en ne les obfervant qu'an-
0
tant qu'il lui plaic«
. D'ailleurs on ne peut rien prôpofer dani
«çs «Semblées, qq n'y peut rien difcutcir^ 00
D4
48 SEPTIEME
n*y peut délibérer fbr rien. Le petit Confêil
y préfidej & par lui**inême , & par les Syn*
dics gai n'y portent que Tefprit du corps. Là**
même il eft Magifliat encore & maître de
fon Souverain. N'ed-il pas contre toute rai*
ion que le corps exécutif règle la police du
corps Légiflatif 9 qu'il lui prefcrive les matie*
ses dont il doit connoitre^ qu'il lui interdife
le droit d'opiner , & qu'il exerce ùl puiflance
abfoltte jufques dans les aâes faits pour la
contenir?
Qu'un corps fi nombreux (/)ait befoln de
(jf) Les Confeils généraux étoient autrefois très
firéquens à Genève ,& tout ce qui fe ftiifoit de qucK*
^e importance y étoit porté. En 1707 M. le Syn-t
die Chouet difoit dans une harangue devenue céle*
bre que de cette fréquence venoic jadî$ I4 foiblefle.
& le malheur de l'Etat ; nous verrons bientôt ce qu'il,
en faut croire. Il ihûûe au(C fur Te^trême augmen-
tation du nombre des membres» qui rendroit au-
jourd'hui cette fréquence impoflîble, aflSrmant qu'au-
liefois cette aflçmWép ne pajQToic pas 4cu^ i troU
LETTRE. 49
police & d'ordre, je Taccôrde: Mais que cet-
té police êc cet ordre ne lenverfent pas le
■w
cents f & qu'elle eft à préfent de treize à quatorze
cents. Il y a des deux côtés beaucoup d'exagéra-
tion.
Les plus anciens Confeils généraux écoient ztx
moins de cinq à fix cents membres ; on feroit peur-
être bien embarralTé d'en citer un feul qui n*ait été
que de deux ou trois cents. En 1420 on y eu
compta 720 ftipulans pour tous les autres , & pea
de tems après on reçut encore plus de deux cents
Bourgeois,
Quoique la Ville de Genève foit devenue plus
commerçante & plus riche, elle n'a pu devenir
beaucoup plus peuplée , les fortifications n'ayant pas
permis d'aggrandir l'enceinte de Tes murs & ayane
fait rafer fes fauxbourgs. D'ailleurs , prefque fanô
territoire & i la merci de fes voifins pour fa fubfiP'
tance, elie n'auroit pu s'aggrandir fans s'affoiblîr.
En 1404. on y compta treize cents feux faîfant au
moins treize mille âmes. Il n'y en a gueres plus
de vingt mille aujourd'hui; rapport bien éloigné de
celui de 3 à 14. Or de ce nombre 1! faut déduire
encore celui des natifs, habitans , étrangers, qui
n'entrent pas au Confeil général ; nombre fort aug;-
mente relativement à celui des Bourgeois depuis le
refuge des François & le progrès de TinduArie.
Quelques Confeils généraux font allés de nos jours
5,(^ SEPTIÈME
4?pj: de fôn înftitutioiL Eft-œ doue une àa^
/e plus difficile: jd'étabHr la. it^e bm fervitd^
.a quatorze & même à quinze cents ; mais commu-
nément ils n'approchent pas de ce nombre; fi quel-
ques-uns môme vont à treize, ce n'eft que dans
des. occadons critiques oii tous les bons Citoyens
croîr oient manquer â leur ferment de s'abfenter , &
;oii les MagiflratSf de leur côté, font venir xlu de-
hors leurs xliens. pour favorifer leurs, manœuvres.;
or ces manœuvres , inconnues au quinzième fiécle
n*exigeoient point alors de pareils expédlens. Gé«
néralement le nombre ordinaire roule entre huit 1
;neuf cents ; quelquefois il refle au-defibus de celui
.de Tan 1420, furtout lorfque Taflemblée fe tient ep
tté & qu*il $*agit de diofes peu impprtaotes. ]'al
jnoi-mâme ailîdc en 1754 à un Confeil général qui
n'étoFt certainement pas de fept cents membres.
11 refaite de ces diverfes confidéfatîons que ,
tout balancé, le Confeil général eft à-peu-près au-
fourd'hui, quant au nombre, ce qu'il étoît il y a
deux ou trois fiécîes, ou du moins que la diffé-
rence ell peu confidérable. Cependant tout le mon-
de y parloit alors ; la police & Ja décence qu'on y
voit régner aujourd'hui n'étoit pas établie. On
crîoit quelquefois ; mais le peuple étoit libre , le
Magiftrat refpeélé , & le Confeil s'aflembloit fré-
quemment. 'Donc M. le Syndic Chouet accufoit
{aux^ & raîfonnoit mah
L- E iT T a R ■■) ^^
"dé entre çielqueg centaines dlbqmmes natiN
reUeasâit graves & froids 9 qu'elle ne Tâoit &
Athènes, donc on ncms parle, dans Faflémblée
de plufieurs milliers de Citoyens emportés
bonillans & prefque efirénés ; qu'efle ne l etoit
dans la Capitale du monde, où le Peuple en
xorps exerçoit en partie la Puiflknce ezécuti*
ve, & qu'elle ne l'éfl aujourd'hui même dans
le grand Confeil de Venife , auffi nombreux
que votre Confeil général? On fe plaint de
rimpolice qui règne dans le Parlement d'An«
glèterre ; & toutefois dans ce corps compofé
de plus de fept cents membres, où fe traitent
de n grandes afEùres , où tant d'intérêts fe
croifent , où tant de cabales fe forment, où
tant de têtes s'échauffent , où chaque membre
a le droit de parler , tout fe fait , tout s'expé-
die , cette grande Monarchie va foft train ; <St
€he£ vous où les intérêts font (1 fimples fi peu
5» SEPTIÈME
«onçfiqaésy dû Ton n'a» pdar ainfî k r^tf
que Idi affaires d'une fitmifle ^ on vous hk
peur des orages comme fi txwt alloît renverfef !
Monfieip: » la police de votre Confeil général
eft la chofê du monde la plus facile ; qa'oti
veuille fincérement l'établir pour le bien pu-
blic, alors tout y fèra libre & tout s'y pafleni
plus trancpiiBement qu'aujourd'hui«
Suppofons que dans le Règlement on edC
pris la méthode oppofêe à celle qu'on a fui-
vie ; qu'au lieu de fixer les Droits du Confeil
général on eut fixé ceux des autres Confèib»
ce qui par là-même eut montré les fîens ; con-
venez qu'on eut trouvé dans le feul petit Con-
feil un aflemblage de pouvoirs bien étrange
pour un Etat libre & démocratique , dans des
chefs que le Peuple ne cholfit point & qui
reftent en place toute leur vie.
D'abord l'union de deux chofes par-tout sil^
leari
Xi :£ T ir -.R lE. ^> 'i 53
leurs 'iscoppatibles.; ibvoir , radmhiiiiraticA
des affaires de YEt^t & l'exercice rupoâcnd^ et
la jullkp &r tes biens, la vie & rfaonheuc joTêi
Citoyens. , . . .[
' Un Qr<&e^ fe dernier^ de tous par^lbn. rang
& le premier par ia puiflkhcr./ . ) . ?
.Un Cbnftil inférieur fans lequel tout ieft
mort dan&' la Jl^ublique ; qui propore feul^
qui* décide, le premier, & dont la feule voix,
•même dans Ton prapre farît , peimec à fes^fu*
périeurs d'en ayoir une» ..
Un Cotpè qui rèconnoîc rautorrté d*uti au-
tre , '& ijiii lèul a la nomination des ^membre^
de ce corps aqque^ il eft fubordoniié. . T,
Un Tribunal luprême duquel on appelle ; ou
bien au contraire , un Juge inférieur qui pré^
fide dans les Tribunaux fupérîeurs au (îen.
Qui , après avoir fiégé comme Juge infé-
rieur dans le Tribunal dont on appelle , non
Partie IL E
1 •
I
34 S E P T I E ME
Ibâiement va (léger comme Jage fapr^e daDi
le Tribunal où efl: appellé^^ mais n'a dans ce
SlibonaL fupréme que les collègues 91'il s'efl;
lui-même choifis.
Un Ocdre, enfin, qui ieol a i<m a6Hvité
propre, qui donne à tous tes autres .la leur, &
qui dans tous foutenant \t% réfolutioos qu'il a
{)rifes, o^incdeux fois & vote crois (m).
i
■* Il I ■ ■ ■ ^. . J C I H ■ ■
S
. (f») Dans uiîïtatiqui fc gcruverîfc en Rçpublî*
que & où Ton parle la langue françoife , îl faudroit
fe faire un langage à part pour le Gothreniementé
yar .exemple , DéHtérer , Opiner , Foter , font trois
chofes très différentes & que les François ne dîftin-
^l^eot piB alTez» Détibérers c'rà pefer lepoarâf
le contre; Qpiner c'eft dire fon avis & le moti-
ver ; Fuier c'eft donner fan fuiFrage, quand îl ne
lefte plus qu'à recueillir les voix. 0;>' met* d'abord
la matière en délibération. Au premier tour on
opine; on vote au der;)!^. Le^ Tribunaux ont par
tout à -peu-; près les mômes former, mais comme
dans les Monarchies le {)nMic n'a'pa'S befôin d*eti
appifendre. les termes , ils reftfnt codfacrés au Bar<»
leaut C'eft par une autre inexaftitude de la Lan*
^ue en ces matières qu« M. d« MontcTl^uku y qui
LETTRE. î's
L^âppel du petit tohfeîî au Deux-Cent efï
hh véritable jeii d*ehfant; Ceft utie farce en
{)Wlitîque i à'il efa fut jamais* AiM fa*appelic-t-
bn pas proprement ciet appel un appel; c*efl
hhe grâce qu'on imploré en juflice , tm re«
bours en cafTatibn d'arrêt ; on ne comprend
pas te que t'eft. Croît-on qiie fi le petit
(Confeil h'eiit bien fenti que ce dernier recours
ëtoit {ans confequehce^ il s'en fut volontaire*
ihent dépouillé comme il fit ? Ce dëfintéreiTe*
tnetit h'efi: pas dans ies maximes.
.«
Si lés jugement dû petit Confeil ne font
pai toujours Confirmés en Deux-Oeht, c'eft
dans lès afi'àlres particulières & contradiélôl-
'tes où il n'importe guère au Magiflrat h^
/ la favoit fi bien , n*a pas laiffé de dire toujours là
FuîJJ'ahce exécutrice, blcffant ainfi î'aiialogîe, & Ui»
fant adjtflif le mot exécuteur qui cft fubftantif. Ccft
* la même faute que s'il eut dicj It Pouvoir légiflattuH .
. 5<5. SEPTIEME
guelle des deux Parties , perde ou gagne fon
procès. Maïs. dans les aflfaixes quon pourfuic
d'office, dan$ toute afFairç où le Confeil jui-
même prend intérêt, le Deux -Cent repare-t-;
'• '*., " ».-'
îl jamais fes ^^injufiices , protège- 1- il jamais
J'opprime, ofe-t-il ne pas confemer . tout ce
qu'a fait le Confeil , .ufk-t-il jamais une feule
fois avec honneur de fon. droit r de -fair-e grar
ce? Je rappelle. à. xegret des. .tems 4ont la
mémoirç eft. terrible & ne'cejQTalre. Un Ci,-
toyen que le Confeil immole à fa vengeance
a recours au Deux -Cent; l'infortuné . s'ayilit
jufqu'à demander grâce; fon innocence neft
ignorée de perfonne.; toutes les régies ont été
violées dans, fon procès: la grâce. eft refufée,
& l'innocent périt. Fatio fentit fi bien Tinu-
tilité du recours au Deux -Cent qu'il ne dai-
*gna pas s'en fervir.
»
Je vois clairement ce qu'efl le Deux • Cent
LETTRE. 57
à Zurich, à Berne, à Fribourg &'dans les*
autres Etats ariflocratiques; mais je ne faurois •
voit ce qu'il eft dans votre Conflitutîon ni •
quelle place il y tient. Eft- ce un Tribunal
fupérieur ? En ce cas , il eft abfurde que le »
Tribunal inférieur y fiége. . Eft-ce un corps
qui répréfente le Souverain? En ce cas zxSb
au Répréfenté de nommer fon Répréfentant.
UétabliflTement du Deux - Cent ne peut avoin
«
d'autre fin . que de modérer le pouvoir énor^
mé du petit Confeil ; & au contraire, i! ne fait
que donner plus de poids à ce même pouvoir.
Or tout Corps qui agit conftamment contre
refprit de fon Inftitution eft mal infticué.
. Que fert d'appuyer ici fur dea chofes notoi-
res qui ne font ignorées d'aucun Génevoîs 3
Le Deux-Cent n'eft rien par lui-même; îl n'eft ^
que le petit Confeil qui reparoit fous une autre
forme. Une feule fois il voulut tâcher de feç
E 3
5« SEPTIEME
çouer le joug de fes maîtres & fe donnée uoç
exiftence indépendance , & par cet qn^uB ef*
fort l'Etat faillit être renverfé. Ce v^dï qu'aij
feul Confeil général que le Deux -Cent doic
çncore une appai-ençe d*autpri(é* Cela fe vie
bien dairemçnt dans l'époque d0;it Je parle ,
« ' , •
^ cel^ fe yerr^ bien mieux d^ns 1^ Hûçe^ fi le
petit Cpnleil parylept à fon ^ut : ainfi quand
de concert avec ce dernier le Deux< Cent cra-
vaille à déprimer le Cpnfeil génér^, U travail-
le à fa propre ruine, •& s'il orpit fuiyi^e les brî^
jfées du Deux - Ceqt de Berne , i^I prend biea
groflîérement Iç change ; inais on a prefque
toujours vu dans ce Cprps peu de lujçnieres & 1
j^noins de courage , & cela ne peut guère êr
ire autrement par la manière dont M efi: rem-
■ ...
• (n) Ceci s'cnticnd «n général & fettlenjent de,
refpiit du ccxrps ; car je f&is qu^il y, a dans le Deux-
• t ' » J
LETTRE, s9
Voqs voyez, -Monfîeur, combien au lieu
fie fp^ci6er les (Iroits di( Confe^l Spuveramj^
il eue été pluç utile 4^ rpéçifîer les attribut
(ions des corps qui lui fqnt fubordonnés , ai
fans aller plus loin, yqus voye^ plu^; évidem^
ment encore que, par la force de certains ar-^
ticle; pris fêparémei^t , le petit Cp;iieil eft
Cent des membres très éclafrés & qut ne manquent
pas de zèle: mais incefTammonc fous les. yeux dii
petit Confeil , livrés ^ fa mei;ci fans appui, fans,
^eOburee, & fendant bien qu'ils fe^oient abandonnés
de leur Ccrrps , ils s'abftiennent de tenter des démar-
ches inutiles qiM. ne feroient quç les compromettre
(^ le^ perdre, .^a vile tdurbe bAurdoune & uiom^
pbe. Le fage (e tait & gémit tout bas.
Au lefte If Deux-Cent D*a pas toujours été dans
le difcrédit où il eft tombé. Jadis il jouît de la con?
fidération publique & de la eonfîance des Citoyens :
9ufli lui ialiïbient~ils fnns inquiéti^de exercer le$
droits du Confdl général, que le petit Confcil tacha
dès -lors d'attirer à lui par cette voye indirefte;
Nouvelle preuve de ce qui fera dit plus bas , que.
la Bpurgeoifîe de Genève cil peu remuante & ne
cherche gyèrc à * intriguer des affaires d'Etai*
E^
'-v
■■
<?o
SEPTIEME
Farbitre fuprême des Loix & par elles du k
de tous les particuliers. Quand on confèi?
.les droits des Citoyens & Bourgeois A^
jeo Coûfeil général , rieii n'efl plus brik:
Mais cotiQdérez horsde-là ces mêmes Citoyets
& Bourgeois comme individus ; que foot-il;,
que deviennent ils? Efclavesd^ud poavoirar*
bitraire^ ils font livrés fans défenie à lanier'
d de vingt-cinq Defpotes; les Âthèmem^i
moins en avoîent trente. Et que à\v^^ ^|!
cinq ? Neuf fuffifent pour un jugement ck
treize pour un jugement criminel (o).
ou huit d'accord dans ce nombre vont
. pour vous autant de Décemvirs ; encoreJ
Décemvirs furent ils élus par le peuple;!
lieu qu'aucun de ces juges rfeft àe
choix; & Ton appelle cela être \&m\
W Edits civils Tit. I. Art. XXXVL
• L E' t T R È. • 6i
fî Ù I T I ÉME LETTRE.'
"Jli wé î"^^ Mohfiedr ; rëxamen de votre Gou-
verneÀienrpféfent ckr RéglemeniPcfe là Mé-
tfiaiïoh par lequel tè (joaveriiemélit efl:4îké}
^aîs ' loin -^d'itiipiltor aux Médiateurs d'avoir
Voulu vdus.' réduire en fervitude , je prouve-
Tois ^aSféraent àù contraire, qu'îfe ont itendà
votré^ îGtaatioh meilleure à' pluGeur^s^ égards
quWe n'étoît avant les'troûblds qui vous for-
cerentf- d'accepter leurs bons offices. . Us ont
trouvé une' VîHe en* armes; tout étoit à lèiir
' \ * *
artivéè dans un état de crife & de confufiôn
qûî ne leur permettoit pas dé tirer de cet
état la régie de leur ouvrage. Ils font remori-
-tés aux tems pacifiques , ' ils ont étudié la
c<)n(lîtution primitive de votre Gouvernement ;
dans les progrés qu'il avoit .déjà fait , pour
^ H .tj .!i T r e: m e
Aw . fetir dajœoûié. de i-vbs îImjbk à viola
Jaûtre.. .:. .
Il eft clair d'abojrd :^iir> lé Règlement luir
jp^e^lt'^^ p<Si)t' un^ Loi que kâ Médiateurs
:ay¥nc y<>u)a :ifn|)|)ret à la : I^épqt>]îqui$ ,iinaij|
/eateijç^t/^u&îaïcprdîqu'iteoiit ^labli. entre fes
jB^mferfiSi â; çe'ite ^'pift pfer/ronféquent porté
clwllftjpiMoiÔ àûlà r<>av»a»çté^ O^a dk çlajr,
iîi5-je;;ï)ar:J!Artfele XLI% ,' qpi faille au^Côa-
fe^l j géftS^aj -fc^iêtiieirt^t; gtflSswiblé le droit dç
f^e. tM .açiôlo^- du . Rélleïpent tel ; change-
jsQe^ ; qtf il ?lui plwt* ; Aiqfî., tes Médiateurs ne
jnj^tqit point. laur-volont:éiau deilus dp la &n-
»
jie', ife.n'injtervîennent queiî;cas de tlivifion.
.Cfft le ,fgpft.de r Article XV.,; . .
Mais de J|k réfuItejauflîJâ nuilité des réferves
^ .;ljraicatîoji§ ciôni^ées: dà'n^ l'Article III aux
droits 4& aiprjibtitionrs du fîonfeil général : car
fi je Confeil général dédde que ces.réferves
&
:.L.E :T ,T R; E: :: 6s^
i
& limitatioQs ne borneront plus fa piiiflàn^.
ce, elles ne la borneront plusj & quand toud.
les membres d'un ^tat fouyeraîn règlent Ton;
pouvoir ibr eux-mêmes , gui eil-ce qi^i a
droit de s'y oppsofer ? Les, exclufions quW
peut kiférer de l'Article III ne fîgnifiqnt donc
autrq chofe, ilnon que le Confèil général f^
renferme dans leurs limites jufqtt'à ce qu'il-
trouve à propos de les palier.
Cefl; ici l'une des* CQQti^dîâions dçn^ f ai
parlé,, & l'on en démêle aif^pjeçt la caufe. Il
étoit d'aitieurs bien difficile .au|c P]énipotentiai«
res pleins des maximes de GouverpemeQs tout
diffi^rejy , d'approfondir al&z les vrais princi-
pes du .vôtre. La ConfliuKÎon démocratique a
jufqu'à préfent été mal examinée. Tous cenx
qui en ont parlé ^ ou ne la coi^oifloient pas, ou
y prenqient.trop peu d'iqt^i;^ ^ ou avo^nç in-
térêt de {a préfènter fous m faux jour. Aucun
Partie IL F
«^ H O I T i È M »
è^'eôâL tfa fiif&famfiiaHi (Mingaé fe SmvtsdSà
àct Gouvememetit 9 la Paiflàiicé légifl^ive de
l^écadve. II n*y a jpoihc d'Etac où ces cfeui
^im^irs foient fî Çépaxés , & où ron »t taafi
affeéié de les cqtifondre. Les dns s^imagmenfi
^^une Démocratie eu un GouVememefit où
tout le Peuple efl: Ma^Ibat & Juge. D'autres
«
île voycnt h l&até que daiis le droit d'éfi-
re fes chefs , & n'étant fournis qu*à des^ Priii-
êes , croyent que cehû qui conumàde eft
»,
toujours le Souverain. La CônClitution dé^
fnocratwjue eft Certainement le Chef- d'œuvref
ée rart pdWqiic : mais plus ra*tffiee en eft
admirable / fïioiiis il ^^partielii: à tous ktf
^eâx de le pénétrer. ' N'e(l ■* il pas vai%
Monfieur, que fat preiliîere précaution de
tf admettre aucun Gcrtfeff général légrtîuïe que
«^
Ibus la conVocatSônf éi petit *€onîeîl , & la
fceonde précautîoîlii ^e nY f^fiff^fr «lucane
LETTRE. îeJ!
jpfôpoiitioft qu'avec Tàpprobàtioiî du petit!
Confdl y fuffîToienc fetiles pour maintenir te
«
Confeil général dans là pluft tôtiere dé|>endaii<«
(6€ ? La troifîeme ptéeàiitioh d*y régler la
compâence dés maûeres ëtôic donc h diofe
du moiidè la. plus fu^jerfitie ; & quel eut étc^
Tinconvénient de laii!br an Confeil général lé
plénitude deà droits iupFêdles<^ puifqull n'crî v
peui; faire jmcun ù&ge qu'autant que le petit
Confeil le lui permet ? Eti île bornant pas kè
droits de la PdiTànce fbûveraine on ne la ren-
doit pas dans le &it moins dépendante & Foii
ëvitmt une contradi6lion : ce qui prduîre que
c'efl? pour n'avoir pis bieh connu votre Con-^
ilitutîon qu'on a prit des précautions Vaines .
tn dks- mêmes & cbiltrâdiâoirei dàn^ leu£
©bjet:
On dira qtie ces Smîtatk^s aVoieèt feî^*-
mem pour fin de marqoer les cas où let Ùitiè;
- F â
(J8 HUITIEME
feîte inférieurs feroient obligés d aflèmbler le
Gonfeil général. J'entens bien cela; maïs n'é-
tôit*iipas plus naturel. & plus fîmpfe démar-
quer les droits qui leur ^étoient attribués à eux-
mêmes, & qu'ils pouvoient exercer fans le con-
coure du Confeîl général ? Les bonaes étoient-
dleS' moins fixées |)arxe qui efl au deçà que
par ce qui eft au. delà, & lorfqùe les Confêils
inférieurs voûtaient pafler cesix>mes, n'eft-il
'pBS clair qu'ils avoisnt befoin d'être autorifés ?
Par là , je l'avoue, oamettoit plus en vue tant
«
de pouvoirs réunis dans les mêmes mains,
mais^ on préfentoit les objets dans leur jour
véritable ) on tiroit de la nature de la choie
le moyen de fixer les droits refpeSifs des
divers corps, & l'on fauvoit toute contra-
diélion.
• A la vérité Muteui' des Lettres prétend
que le petit Confeir étàm le Gouvernement
\^
LETTRE. 6p
même doit exercer à ce titre toute Tautorité
qui n'efl: pas attribuée aux autres corps de l'E-
tat ; mais c'efl fuppofer la fienne antérieure
aux Edîts ; c'eft fuppofer que le petit Confcil,
fourcè primitive de la puiffknce, garde ainfi*
tous les droits qu'il n a pas aliénés. Recon-
noîflez-vous, Monfieur, dans ce principe ce-,
lui de votre Conllitution ? Une preuve fî eu-
rieufe mérite de nous arrêter un moment. '
Remarquez d'abord qu'il s'agît là (p) da
pouvoir du petit Conleil , mis en oppofîtîon
avec celui des Syndics , c'eft-à-dire , de cha-
cun de ces deux pouvoirs féparé de l'autre.
L'Edi^ parle du pouvoir des Syndics fans le^
Confeii , il ne parle point du pouvoir dd
Confèil fans les Syndics; pourquoi cela? Par-
ce que le Confeii fans les Syndics efl le Gou*
(p) Lettres écrites de la Campagne page 66.
, F 3
7.0 HUITIEME
vernement. Donc le iîlence même des E^t|
jfttf le pouvoir du Cdnfeil loin de prouver la
pullîté de ce pouvoir çj^ prouve retendue.
VoiI«^« fans doute, une condufion bien neu*
ve. Admettons-la toutefois, pourvu que l'an-
técédent foit prouvé.
Si c'çfl: parce que Ip petiç. Cçnfeii efl le^
gouvernement que ks Edits ne parlent point
de fon pouvoir , ils diront du, moip9 .que le,
petit Confeil eft. le Gouvernement : à moins
f^ue de preuve eri preuve leur fUencç n'ëta-
bliffe toujours le contraire de ce qu'ils ont dit.
Or je demande qu*on me montre dans vos
Xdits où il eft dit que le petit Çonfeil efl le
Gouvernement, & en attendait je vais vous
montrer, moi, où il eft dit tout le contraire:
Dans l'Edit politique de 1568, je trouve le
préambule conçu dans ces termes. P-ource que
le G^vcTttcment ^ Efiat d^ cçtte Vilk conHJlc
LETTRE 7<
pfj- quatre Syndicques^ le Conjeil des vingt -cinq. ^
^ CenfeiJ des foixantel des Deux-Cents, du Génér
.1 • • » . . , .
ral^ t^ un Li^tena^ en la jujlice, ordinaire, ^i-
vec autxes Offices^ feloji qu£ bonne police le r$r
quîert,^ tarif pur J admvnifira^îon du bien public,
que de la jujlice ^ nous avons recueilli l'ordre' qui
^uf qu'ici a été obfervé .<.;....... afin qu'il foil
gardé à F avenir comme, s* enfuit.
Dès r^icle premier <fc l!Edit de i73ft, y^
yois sncore que cinq Ordnes compfent le Gou^
vernemera de Genève^ Çr de ces cinq Ordi^
les quatre Syndics tout feuls en font un, le.
Confeîl des vin^t-cinq , ou font certainement
compris, les quatre Syndics en fait un autre,
& les Syndics entrent encore dans les trois;
j^vans. Le p^tît Confeil fans les Syndlcsi,
n'ell donc pas le Gouvernement.
J'ouvre TEdit de 1707, & j'y vois à TAi^
ticlç V en jpropres termes , que Meffîeurs, Ics^
F 4
72 HUITIEME
Syndics ont la dircSion fif le Gouvernement de
»
TEtat. A rînftant je ferme le Livre , & je
dis; certainement felon les Edirs le petk Con-
fdl fans les Syndics n'ell pas le Gouverne-
ment , quoique FAuteur des Lettres affirme
qu'il l'eft. *
On dira que moi-même j attribue fouvent
dans ces Lettres le Gouvernement au petit
Confeil. J'en conviens; mais c'eft au petit
Confèil préfidé par les Syndics ; & alors il
efl: certain .que le Gouvernement provifion-
nel y réOde dans le fens que je donne à ce
mot : mais ce fens n*efl: pas celui de l'Auteur
des Lettres ; puifque dans le mien le Gou-
vernement n a que les pouvoirs qui lui font
donnés par la Loi, & que dans le fien, au
contraire , le Gouvernement a tous les pou-
i^oirs queia Loi ne lui ôte pas,
Refle donc dans toute fa force robjeélion
LETTRE.
73
âes Répréfentans , qae , qoand TEdit parle
des Syndics , il parle de ledr puiTance , &
que , quand il parle du Confeil ^ il ne parle
que de fon devoir. Je dis que cette objec-
tion refte dans toute 'ia /orce ; car l'Auteur
des Lettres n*y répond . que par une afTertion
démentie' par tous les Edits. Vous me ferez
ptaifir, Monfieur, fi je me trompe, de m*ap*:
prendre, en quoî->péche mon raifonnemeût. .
Cependant . cet Auc^r , très content du :
fien, demandé commfeiit, f% le Lêgijlateur nia-
vm pas ct^fidéré^de cet œil Je ^ petit Cànfetl^
•TfipoùrrùiP' ifoncevm quç dans imcùn endroit de .
rEdit il n'en réglât fautoriié; qu'il Ta fuppot^ :
fât . par tout É? qu'il ne la déterminât nulle ^
part (q)?
J'oferai tenter d'éçlaîrcîr ce profond myf- .
(j) Ibii page 67.
f4 H. xr i .T ;i e m Ê
tere* Le Légiflateui ne régie point h puÈ^
&nce da Cdnfeil, psvbe qu'il ne kl eD doii^
• •' •
îie ^cunei iQdépeQdatnment des Sjrodics , &
lorfqu'il Ist ibppofe, c'eft en le ibppofânt auBx
préfidé par eux. II a- déterminé la kor, pac
conséquent il eft fuperfiu de déiemiBier b
tiemit. Tues^ %hdics ne peuvent paa tout ans
le Can&ily tnaîr le Cdnfëi nr peut iden &d$
les ■ Syndics^ ; ik n'eft rien faos eux i. il ef(
hiùins que h'ésdiç le Deui[-Cent même kârP
^'il fut préfidé p^ rAudiceui? Samaàm
. Voilà , je crois ^ la-^ feole m^teôece ssdfcttH
ïabh d'expAîquer le fileude des^ Edîts ûst lé
pouvoir du Coti&iî; niais te if eft pas ceQé
^a^l convient aux^^ Magîftrats dCadbpter; Ch
fcut prévenu dans le règlement 4eurs fingqlie*
res interprécationi» fi ron eut pris- ùn& mte-
thode contraire, & qn'au lien de marquer lei
droits du Confeil général on eut déterminé kâ
, '■■LÈ'-f- r a % :: f$'
Uxlàt! Maïs pour hlnrdîr pm xadkt dire ëfi
que n'ont pas dk lef» Editt, on a fait enieii-
dre ce qa'Ms rk€ût jàsùaii fiippofë^
Que dediQ&s i^n^kesà la liberté publia
que & au droits- des Citoyens ôc Bourgeois ,
• »
& combien n'en poiirroîs- je pas- ajouter, enco-
re ? Cependanfc^Qus. ces dëiâvantagès qëî naid
foîent ou feinbldîent naître de votre Conftîttit
tîon & qu'on n'àuroît pu détruire fins Fëtean^
let, ont été balancés & réparés avec la plus
graiîde fagefife par des compenfàticrtîs qui ce
haîflbîenc auflS , & telle étoît préciféiftent Fin-
tention des Médiateurs j qui, fekmleÙF propre
dédaration i fut de cmfirwr à <:bacun Jts ânMè
fes attributions particuîîèfès provenant de h Loi
fondamentale de VEtàt^ • M Michdi Efa Crée
aigri par fes malheurs contre cet ouvrage dans
lequel il fat oublié , Taccufe de renverfer Tin- '
ftâtution fondamentale du Gom^eriîeracnt & àe
7^ H:^U I T r E M E'
I
dépQiiiHer:fes Ckojfçns & Bourgeois t}^4aiâ:s
dcoicsi fans vouloir voir combien de ce$
droiu, tant poUica qœ particuliers, ontâé
cônfervés oa rétab^s par cet £dit , dans les
Article» III, IV,jX, XI, XK, XXII, XXX,
XXXI, XXXII, XXXIV, XLII, & XLIVj
fans fonger furtout que la force de tQus ces
Articles dépend d'yn feol. qui vçus a aufli été
confervé». Article effencipl, Article équipon*
(ferant à tous ceux qui ^ vous font contraires,
^ H' néc^lTajre à 1 Wec dç ceuif qui vous ibnt
favorables qu'ils feroient tQu$ inutiles fi Ton
venoit à.bput d'éluder celui- là, ainfi qu'on l'a*
^ntreprç^ Nous voici parvenus au point im-
portait; mais pour en bien fentir l'importance
il falloit pefer tout ce que je viens d'expofer.
» On a beau vouloir confondre» l'indépendan-
ce & la liberté. Ces deux choies font fî dif-
férentes que même elles s'excluent mutuelle*
ment.
L :£ T t-R; Kl ?^
ment. Qaand chacan.. fait ce 'çgrïl jluî phi^i
on fait ibuv€nt ce qai d^Iait à d'autxesi , j8c
cela, ne s'appdle pas un état libre. ' La Kberté
conGfleMnoms- à -faire ià; vdqnçé .^a n^êc^
pas fournis à celle d'au trui; eUe"C0QÛfle encoit
à ne pas foumecu^ la ycdom&d'aiurui<à la nàf^
tre. Quiconque efl maître ne pqut être libre ,
& régner c'efl: obéir. ; Vos Magiflxats favent
cela mieux que, pçrionne^ eux ^ui'^cpinme 0«
thon ^omettent jien cfe fervile ppur comment
der Yr\ le ne-ccmnois'de volonté vraiment
(r) En, général y ^ît ^Auteur cbs Lettres, /^x ^owi*
mes craignent encote plus d'obéir qu'Us rCaimenc à com*
mander. Tacite jen jogepiit aatrenfiot &<cQDnoiQQt(
le cœur humain. Si la maxime étoit vraie , les Va-
lets des Grands feroient moins infolens avec les
Bourgeois , & Ton verroit moins de faînéans ram-
per dans les Cours des Princes. Il, y a peu d*honi-
mes d'un c'œujf aflez fain.pour favoir aimer la, liber-
té : Tous veulent commander , d ce pHx nul ne '
craint d'obéir. Ua petit parvenu fe donne cenç
maîtres pour acquérir dix valets. H n'y a qu'à voir
Partie IL G
!5S H U I T I E !M Ë
» • • • •
IS^^e que celle à foquefle nid nV droit d*opp<>
fer <le la réGftan<:e; émz la liberté commune
fettl rfa ctoitdé feke ce que la liberté d'un au-
tre hiî interdît , & la vraie ïibcrté tfeft-jimaîs
aëftrù£tivéd''ellè-m6me. Aînfi la liberté &ns
la juftice èft tihe véritable contradîétion j car
comme qu*ôn s*y prenne tout gène dans Texé*
„ »•■«•- »
eut ion dtme -volonté défordonnée.
*' Il n'y a donc -point de liberté fîms Loîx, ni
bli quelqu'un eft au deflus des Loix: dans Té-
iat même de nàttirè rhomme^n'cft ïbre qu'à la
&veur de la Loi naturelle qui commande à
f ...
tous. Un peuple libre obéit, mais il pe fert
pas; il a des die£i & non pas ^des maîtres j il
MiM*
la fierté des noWiis dans les Mohairchies ; avec quel»
le emphafe ils prononcent ces înots (Je firvice & de
fervir; combien, ils 5'efliment grands & rcfpedables
quand ifs peuvent avoir Thônnêur de dire , U Rot
moh màitre; combien ils méprifent des Républicains
qui ne font que libres , & qui çertainemeijt font
plus nobles qu'èWi
ii Ë T t BL tw ^j^
ttb^taux Lohiitms 3 n'o^ék iju'aux Loix^
■& c'eft par h force des Ï40ÎX qu'if rfobdic po»
atof liommes. Toutes les b^rkres qu'on dodne
dam les Républiques . au pouvoir des Magîr
Qhts ne fùtt étàbUes q&e- pouf* garantir dé
leurs atteitities TeilçeiQte facrée des Loix; i!s etïl
jfbnt leS Miilifireb non les sffbitres ^ ils doivent
les garder non le^ énlfreindre; Un Peuple efl
libre 9 «{Ëieli^e fâme qu'&it ibn Gouverne^
znent^ quiJbd^nS déhû çti JegoâVeme il ne.
Voit point rhobime ^ maiil iWgane de la Lc^iLi
En un moc^ h^berté fuit tcu,^s le fôrt des
)Lok , eHe ixsgtae ofta pérk avec ^ eles;* je né
Hiché rieû de plus certain.
. Voiâ avei des Ldiic; botlnes & iagès » fbit
tHft elleshmêiœsj foit par cek feu} que ce font
des I^&.^Tôdte. condition impofSe à chacuil
par tous iie peut être one'reufeà perfoàne, &.
Il pire des iioik , vwat àxsové mieux que le
0 %
\
%ô H U I T ï E M" E
meilleur tnaître ; car toat maître a des préfé^
rences , & la- toi n^en a jamafs»
' Depuis' que- la CônftîtUticm -de votre Etat
a .pris une fwme fixe & ftablé, vos fonc-^
dôn^ de Légiflateur fpnt finîei. La fureté de
rédifîce veut- qu'on trouve è i)réfent autant
d'obftacles ppûr y tdUcher.qu'2 falloîc cf abord
de facilités poiirlô conf&uîref.' 1-e droit né*.
gatif des Cooféîls pâï'çn 'ce fens^efl: fappui de
la Republique. : -ï'Açiîcle VI '^ da ^ 'Réglemœt
eit c\é.v âc prid^'l je me rends fur ce poinr
*3x raifbnhemens^'PAuteur.dcs Lettres, je.
les trpuve ikis' réplique , & quand ce xiroit.£t;
jufiement réclamé par vos ; Mà^ftrats (èroît
contraire à vos intérêts y il fkudrok fouflFrir &
voue taîrel Ifes^hûbunes droits, ne doivent ja*
mais fermer lés yeux :à rëvidenœ, 'Jdi difputer
contre la v^ité. -
L'ouvragé eH conibniiné , il jne .s'agit plus
LETTRE. Si
que de le rendre inaltérable. Or l'ouvrage du
Légifliteur ne s'âlcere &fic fe détruit jamais
que d'une manière ; c'efl quand les dépofitaires
de cet ouvrage abufent de leur dépôts & fe
font obéir au nom des Loix en leur défobéif*
lànt eux - tnêmes {s). Alors la pire chofe naît
de la meilleure, & la Loi qui fèrt de fauve-
garde à la Tyrannie eft plus fmefte que la
.Tyrannie elle-même. Voila précifément ce
(s) Jamais le Peuple ne s'eft rebellé contre les
Loîx jne les Chefs n*aîent commencé par les en-
freindre en quelque chofe. Ceft .fur ce prjncipe
certain qu'à la Chine quand il y a quelque révolte
dans une Province on commence toujolors par. punir
le Gouverneur. En Europe les Rois fuivent con-
ftamment la maxime contraire, aiiffi voyez commeiit
profperenc leurs Etats l La population diminue par
tout d'un dixième tous les trente ans; elle ne dimi-
nue point â la Chine. Le Defpotlfndlie. .oriental fc
foutîent parce qu'il eft plus févere fur les Grands
que fur le Peuple : il tire ainfî de lui-môme fon pro-
. pre remède. J'entends dire qu*oa commence i pren*
dre à lu Porté la maxime Chrétienne. Si cela eft,
on verra dans peu ce qu'il en réfultera, ^
G3
p , H U. I T I E. M m
que prévient lè droit de KépréCêotation (H-
pulé dans vos Edi^ & redraint mais con^«
xné par la MécUa,tîûîv* Ce di^pit vous donne,
infpeâiou , noii plus fut: k Légiiktioa com-
zne auparavant, mais fat Tad^iniflration^ &
VOS Magiflirafs; coi^ ppi^^^ ^ nom des
Xoix, feols maîcreii d'en laroppfer au LegiHa*
teur de hoavielles , foot fourni^ à fes jùgemens
Vils s'écartent de celles qui font établies.
Par cet Article lèul votre Gouvernement
• ! . - , , . V
j^jet 4'ail|^urs à pludeucs défauts confidéra*
bles, devient le meilleur qui .jamais ait exif-
té: car qud meilleur Gouvernement que celui^
4ont toutes l^a parties ie Ijalancent dans ua
* . ■ ^
paifaic équilibre, où les particuliers ne peuvent
tranfgreire];. les Loi^ parce qu'ils font fournis
à des Juges, 5c où ces. Juges ne peuvent pas
non plus les tranfgrefler , parce qu'ib font fur-
' ■ . *■
yeillés pa^ Iç J^euple ?
L E T X R 1^ «J
^ 9
%
t
U eft vrai qipe pour trouyei? ^uçlq^f réalîçé
^ns cet avaptiage,^ il aç f^t pa^ le foQdfs:
gir un vain droit:, mm qui <Jtf Uft droit nç dit.
gas une chôfe^ v^Éîe. Dke ^ celui qui a tranf»,
* ■ • • . , »
greflK h Loi qtfi} ^ ujaijfereffiî k Loi, ç'eft,
^ - '■ - • .
prendre upe peine biea riditrule ; ç!eft luî^
apprendra uj^iç çl\ofe qu'il; fait aii$ bien qup.
VOUS,
Le dipit efl^ fidoa, Fai]%i|(]9f^^^^ uae qualité ^
morale par laqudle. % noafk dSt, dû quelque ciio^
&. La fîtnpl^s; liber^^ de fe plaindre n'efl donc
pas ua droit , ou du moinys c'eft. un droit que
la nature aircoçde à tûa&.& que Ja Loi d'aucun
l^ays n'ôte à perfonne. S'avi&trop. jamais de
ilipuler dans dçs Loix que celui, qui perdroit
un procès auront la lih^ de & plaindre ? S'^a-
yifa t-on jamais ^e punir quelqu'un pour l'avoir
fpt ? Où eft le Gouvernement , quelque abféfa.
^u'il puifTe être, où tout Citoyen n'^ic pa^ le,
G 4
/
«4 HUITIEME
droît de donner des mémoires au Prînce ou
à fbn Minîftre fur ce qu'il croit utile à TE-
tat, & quelle rifée n'exciteroit pas un Edit
public par lequel on accorderoit formellement
aux fujécs le droit de donner de pareils mémoi-
res? Ce n'efl: pourtant pas dans un Etat des-
potique , c'eft dans une République , c*efl dans
une Démocratie, qu'on donne authentique-
ment aux Citoyens, aux membre? du Souve-
rain , la permiffion d'ufer auprès de leur Ma-
giftrat de ce même droit que nul Defpote
2i'ôta jamais au dernier de fes eiclaves.
Quoi ! Ce droit de Répréfèntation confia-
teroit uniquement à remettre un papier qu'on
»
eft même difpenfé de lire, au moyen d^une
réponfe féchement négative (r)? Ce droit fi
^^^■"•"^^
(t) ,TelIe , par exemple , que celle que fit le
Confeil le lo Août 1763 aux Répréfentations remi-
fes le 8 à M. le premier Syndic par un grand nom-
bre 4e Citoyens & fiourgeois»
J
LETTRE.; 85
foléroxiellemejic Itipulé en compenfàtion de
tant de facrifices^ fe bornerok à : la rare pré^
fogative de demander* & ne rien, obtenir?
Ofer avancer une telle propôfition , c'eft ao*
caler les Médiateurs d*avoir nfiî^iKec la.fiour-!
geoifie de GqiéVë dç^ là plus: indigne lùpèrH
dierie , c'eft oflfœfer la pcobiBé A». Plàiîpo;
tetitiairej, Xè^vé^ dâs ^uiffiaace^ -fnéiîatrices,;.
c*eft bléffer coûte bienféan(îQ.> p^dft. 'outfagen
même le bcyi fens. „ .- ~ ' . f
Mais enfin ^nel ^eft ce* ctewt?i jOfqu où j 'é^
iea4-il? coa^mentîpeutril'.êarfc'«2Èrc;é? Pour*i
quoi tien de.toija.fCel^ n^eftfîi fpécifié da^^^
F Article y II ?, yoHa des^efljoiftiTrjlifonwrt
blés; -elles; i^fSfônt. des difficultàf qui- méritent,
*
La folucicFt^ d'une feule npu^- dQnncrs» (^x
le -de toutj» îes -autres, &;itiiDqs dévoilera \^i
véritable efpdt de cettp îqftîtutiojî../ ;, ;. , ^*
X
U B XJ :i T î t U È
Dans Un £tau: td que k vôcire*, où hfbû*
Verainecé iiï enûre ks màîai du Feuplb , lé
Légiilateur èadfte toujours, qoôiqu'il ne fô
montre pas toujours. Il n^efl: taifâtiblé â
ne parle authehtiquemrat que dan* le Confël
(général ; m&is hoifi du Cbnfei) geàéral il n'dl:
pas aiiéami; 'i^ menibf^ Jbiit ép»s^ mail
ils ne fcmt pu^tm^ ^ âfê ^euveât partes
par des Loix^ mate ils pietiv^ttt tol^'oors veil-
ler fur radmihiiîiration deif Lô\i ^ c'eft uff
dtoic , i^'âfl^ ^rtié UA devoif attaché à leurs
perTonnes, ât qd*^ jàe p«oc lâdr êtfe bié dâtt»
«lëun xkta»^ I)é-IA lé ch-c^ dâ Rë^lèmst»
tion. Ainâ' M Ité^eiibtîôn '^ (j'uiî Citoyen
dTcin Boûiig^is ^^ de plafîéuiï H'^ que Is
déclaration de leur avis fur une matière de
leur tompétetft^. ' Ceci êfl! te îeèië chir &
Xtëcëfiâiîë <ié rSâie de Ï7ô7;<laîi8 rArtiétë
V qui conifëi^ne les R^prérémaék^ik
M t- :e :"^Tï T- R a ii t?
la voye des f%nati^e^) p«rcÊ que. cecte vo^
de voûter ps^ t^ comdie û â^a.l'ôtti ètok ek
Coofeil gédéfaH-& qdè li lonBé^âù ConM
gëoétal ne ddl être itU vie que ]<^u'il ètt W-
j^tttëtaeût âflèmblé. La voyie des &^iîtfl(ï
tations z'\6 xcàme avaataii^) ikHï' avoir te
même ËacôDvéïâeiic. Ce n'eft {tas Voft«!r eH
/
Cc^ifeil général , c'efi; opînér ftir lè^ maderei
^i doivent y^ être citées $ pullqù'on itt
compte pas les voix ce tCeÀpii dJmnàt foà
ittffirage ^ c'aft feulement dire ibfi avis. Cet
z,v\s.n'èQ:y à- la vérité^ que celui d*un paiti^
culicf OQ de plufieurs ; mais ces particuIîM
éCBnt, membres du SouveraîÛ & pouvsit le
répréfenter quelquefois par ieuf multitude, la
taifcÀ veut qu'alors on ait égard à leur avis»
non cQimne à une déciiion , mais comme à
88 H H I: T,'I.E M E
HOB pr<^fîcton qui la^detnâade , & qui la
i«nd vqudqjiefokq^efJSiàre; . 1 :
^. Ca iftépr^aïaâoijl peuvent jrouler, fur
d«ux dbjçtOï?fl?îB^^î> A la différence de
ces objeesv décide; de la div^:.9)3iûere dcnfO
le Coji(^il;dpi!; faire drpjt fur ces' mêmes Ré*^
pEéfepawoiis^^ De.ces^deux-pbjcts.i Toa ^
if ê*rpjÇJÉa"? ^^g^roent à la Loi, Tau*
tre de . ;répÉtfer .q^^elque ttaî^effiçn de la
»
Ixà: Çe^e ^i^îùoû efl cpmfdecte & comr
j^n4>/:tou?er 1^ ^ matiei^ Jjit l^uelle peuvoit
f^l^ jes' BjéjprjéfeotacîoQt. - £Ue dl fondée
faç TEdit ipêÇie Sui » diftiî^a[nt Jes termes
feloi^ ces; objets |mpofe aa Pjrô.cureur gêné'
ira); 4e: faire ;des pifi^mes ou :.d^s remontrances
félon que :ler;Cjitt>yens lui ont fait des plains
p^s ou dc& rjéquijitims (u).
. : • CetUfi
(tt) Réquérir ii*cft pas feulement demander , mais
LETTRE. 89
Cette diftinélion une fois établie, le Con-
(bil auquel ces Répréfcntations fbnc adre&
fées doit les envifager bien différemment fe«
ion celui de ces deux objets auquel elles fe
rapportent. Dans les Etat^ où le Gouverne»
ment & les Loix ont déjà leur aOiete , on
doit autant qu'il fe peut éviter d'y toucher,
& iurtout dans les petites Républiques , où
le moindre ébranlement défunit tout. L'a<
verfîon des nouveautés efl donc généralement
bien fondée; elle Tefl furtout pour vous qui
demander en vertu d'un droit qu'on a d'obtcnfr.
Cette acception eft établie par toutes les formules
judiciaires dans lefquelles ce terme de Palais eCb
employé. On dît réquérir jufticc; on n'a jamais dit
requérir grâce. Ainfî dans les deux cas les Cito-
yens avoieot également droit d'exiger que leurs r^-
quifitions ou leu^s plaintes y rcjettées par les Confeils
it^érieurs , faSenc portées en Confell gi^néral. Mais
par le mot ajouté dans l'Article VI. de ÏEiiit' de
1738, ce droit eft reftraint feulement au cas de U
plainte^ comme il fêta dit dans le cexce.
Partie IL U
00 HUITIEME
ne pouvez qu'y perdre , & le Gouvernement
ne pçut apporter un trop grand obftade à
leur établiflèment; car quelqueis utiles que fuf*
fent des Loix nouvelles , les avantages en
font prefque toujours moins fûrs que les dan-
gers n'en font grands. A cet égard quand
le Citoyen 'quand le Bourgeois a propofé fori
«
avis il a fait fon devoir , il doit au furplus
avoir aflez de confiance en fon Magiflrat pour
le juger capable de pefer l'avantage de ce
qu'il lui propofe & porté à l'approuver s'il
le croit utile au bien public. La Loi a dond
très fagement pourvu à ce que l'établiffement
& même la propofîtion de^pareilies nouveaii'
tés ne paifôt pas fans l'aveu des Confeils, &
' . ' .
voila en quoi doit cônflfter le droit négadf
C[ù'ils réclament, & qui, félon m6î, leur ap!-
J)artient inconteflablementé
Maïs le fécond objet ayant HO principe tout
LETTRE. ^'r
a
r ' ■ • .
oppofé doit être envîfàgé bien dîflPércmment:
Il ne s'agît pa[s ici d'innover ; il s'agît , au con-
traire, d'empêcher qu'on n'innove ; il s'agit
) . . . •
non d'établir de nouvelles Loix , mais de main*
'.••'■ ' '
tenir les anciennes. Quand les chofes tendent
au changement par leur pente, il faut fans cef-
' ■ ; •
fe de nouveaux foins pour les arrêter. Voila
' ■ ' •' • • • '
ce que les Citoyens & Bourgeois , qui ont un
• ■ • . ■ '." "
a grand intérêt à prévenir tout changement,
fe propofent dans les jdaintes dont parle !'£•
dit. Le LégiAateur exiilant toujours voit Téf-
fet ou l'abus de Tes Loix: il voit fi elles font
iuivies ou tranfgreiTées , interprétées de bonne
♦ • ■ • •
ou de mauvaife foi ; il y veille , il y doit veil-
» . ' .
1er ; cela eft de fon droit , de fon devoir , mê-
me de fon ferment. C'eft ce devoir qu'il rem-
plit dans les Répréfentations , c'eft ce droit ^
■
alors , qu'il exerce y & il feroît contre toute
iàifoh , il feroît même îndéceqt , de vouloir
H a
9Z HUITIEME
étendre le droit négatif du Confeil à cet ot>*
jet- là.
Cela feroit contre toute raifort quant au Lé«
gillaceur; parce qu'alors toute la folemnité des
Loi» feroît vàîne &. ridicule^ & que réellement
l'Etat n'auroic point d'autre Loi que la vdoiv
té du petit Confeil, maître abfolu de négliger ,
méprifer , violer , tourner à fa mode les règles
qui lui feroient prefcrkes,& de prononcer noir
où la Loi dirôit blanc ^ fans en répondre à per-
fonne. A quoi bon s'afFembler folemnellement
dans le Temple de Saint Pierre, pour donner
aux Ëdits luie fanéliôn fans effet ; pour dire au
petit Confeil: MeJJîeurs yVoila le Corps de Lois
que nous étâblijfons dans VEîat , &, dont nous
vous rendons les dépofitakes , pur vous y sonfof-
mer quand vous le jugerez à propos^ ^ pour k
tranfgrtjjer quand il vous plaira.
Cela feroit contre la raifbn qiiant aux Ré*
LETTRE. 93
■
prëlêntatîons. Parce qu'alors le droit ftipulé
par un Arrîcle- exprès de FEdic de 1707 &
confirmé par un Article exprès de TEdît de
1738- feroîc un droit illufpîre & fallacieux,
qui ne fignifieroit que la liberté de iè plaindre
inutilement quand on efl: vexé; liberté qui,
n'ayant jamais été dîfputée à perfonne, efl
ridicule à établir par la Loi.
Enfin cela feroît indécent en ce que par
une telle fuppofition la probité des Médiateurs
fcrbit outragée , que ce fêroit prendre vos Ma-
giftmts pour des fourbes & vos Bourgeois
pour des dupes d'avoir négocié traité tranfigé
avec tant d'appareil pour mettre une des Par-
tîdî à l'entière difcrétion de l'autre , & d'avoir
compenfé les conceflîons les plus fortes par
des . /Ûretés qui ne fignîfieroient rien.
Mois ,: (£fenc ^ ces Meflîèùrs , les termes^ de
TEdit font formels : // ne fera rien porté au
H3
h
94 H V I T ; ï: M. ^.
f >
Confeil général qu'il r!ait été traité î^ approuvé ^ y
* ■ • • . ^
d'abord dans le Confeil des Vingt-cinq , puis dans
cehii des Deux - Cents.
Premièrement qu eft-ce que cela prouve au-
tre chofê dans la queftîon préfente , (î ce n'eft
yne marche réglée & conforme à l'Ordre, ô?
. Tobligation dans les Confèi!^ inférieurs de traî-
ter & approuver préalablement ce qui doit
être porté au Confeil général ? Les Confcîls
ne .font- ils pas tenus cJ'?ipprouver ce qui eft.
prefcritpar la Loi? Quoi!. fi les Confèîls n'ap-
prouvoient pas qu'on procédât à Fëleélbn des
*
Syndics, n'y devroit-on plus procéder ,' & fi.
- '^ -.•■'" ' ■•. ' '•
}es fujets qu'ils propofeçt font rejettes , ne
.. - • ■ '. ■
ibnt'ils pas contraints d'approuver qu'il en foit
pro[X)fé d'autres ?
4 »
, ' D'ailleurs , qui ne voit que ce droit d'ap-
prouver & de rejetter , pris dans fon iens
." • •
abfolu s'applique feulement aux propoficious
Lx E T T R E. 95
qpti renferaient des nouveautés*, & non à celles
qui n'ont pour obj,ec tpç le maintien de. ce
qui efl: établi ? Trouvez-vous du bon iens à
fappofer qu'il faille une- approbation nouvelle
pour répara ks tranrgreffions. d'une ancienne
Loi ? Danà Fapprobatioii^ donnée à cette Loi
lorfqu'elle fut pronuilguée. Com contenues tou*
%fis celles, qui & rapparcetst à fon exécution;
Quand :les Cônfeils. approuvèrent que cette Lof
feroit établie , î!s,. approuvèrent qu'elle. feroit
obfervée., par cooféquent qu'cm en puniroit
les tranlgreiTcsurs ; & quand: les Bourgeois (^ns
leurs plaintea fe bornent à demander répara^-
tîon fans punition, Ton veut qu'une telle pro-
^(îtion ait de nouveau befoin d'être approu^
vée ? Mcmûeur , iî ce n'efi: pas là fe moquer
4es geiB , dites- moi comment on peut s'en
Baoqnét ? .
. ' Toute ia di£içulté confîfle donc ici^dans^lf.
II 4
pis HUITIEME
feule quedion de fait. La Loi a^t- elle été
tranfgreflee , ou ne Ta-t-cUe pas été ? Les Ci-
toyens & Bourgeois difent qu'elle Ta été ; le»
Magiftrats le nient. Or voyez, je vous pr4e,
(1 Ton peut rien concevoir de moins raifonoa*
ble en pareil cas que ce droit négatif qu'ils
s'attribuent? On leur dit, vous avez tranA
greffé la Loi. Us répondent ; nous ne l'avons
pas tranfgreifée; &, devenus ainH juges fuprê-
mes dans leur propre caofe , les voila juflifiés
contre l'évidence par leur feule affintoatioiL
Vous me demanderez fi je prétends que
riffirtnation contraire foit toujoua l'evideBce?.
Je pe' dis pas cela ; j^ dis que quand* elle le
feroir vos Magiflrats ne s'en tiendroient pas
moins contré révidënoe à leur prétendu droit
négatif. Le <^ efl; aâoellement foas vos
yeuxi & pour qui doit être ici le préjugé le
plus légitime ? £{1-1L croyable; eft-il naturel
\
y
LETTRE. 97
que des particuliers fans pouvoir fans autorité
viennent dire à leurs Magiftrats qui peuvent
être demain leurs Juges ; vm^ . mez fait une
injujikc , lorfque cela .n'eft pas vrai ? Que
peuvent efpérer ces particuliers d'une démar--
che aufïï folle, quand même ils feroient flirs
de l'impunité ? Peuvent - ils peniêr que des
Magiftrats fî hautains jufques dans leurs torts ,
iront convenir fotxement des torts mêmes qu'ils
n'auroient pas? Au contraire, y a-t-il rien de
plus naturel que de nier les fautes qu'on a faî-
tes? N'a-t-on pas intérêt de lesfoutenir, &
n'eft-on pas toujours tenté de le faire loifqu'on
le peut impunément & qu'on a h force en
main ? Quand le foîble & le fort ont enfem-
ble quelque dij|)ate 3 ce qui n'arrive gueres
qu'au détriment du {Nremier, le feiitimeiM; pat
cela ièul le plusprobaUe dt toujours 91e c'efl:
le plus fort qui ? tort.
H 5
98 H U I T I E; M: E
Les probabilités , je le fcUS , ne font pas dei
Çreures :. Mais dans des faits notoires corn-
Çarés aux Loix, Ibjrfque nombre.de Citoyens
affirment qu'il y a injuftice , & que le Ma-
giftrat acciifé de cette jnjwftice affirme qui!
n'y en a pas , qui. peut . être jgge , fi ce n>(l
le public-: m&mi\ &^ ou trouver ce public
jnflxuii; à . Genève fi: ce a'eft dafts le Coofâl
.général' <QV){y>fô des deux partis ?
>
. 11 n'y. a ppipt. d'Etat aw'.niQncJe <hi le fu-
jet lés^é'parr un Magîftmi iiQji^e né puij[&'
par 45[u«lqae *oye pwrter. ià^lainte au Sou-
yeraiin ,. &\là ÇraSntç que: cette refTource m-
Ipirç eft tfn-fflcîâ. qui contient b«eaticpup d'i-
lûquités^. En France mênle^ dû. l'attachement
lies Parkihenà :^iîx Lqîx^ «fl: e»rêa*e > Ja vo-
•ye judidaire'^. efl: .ouverte contre .eux en plur
iieurs. cas par 4cs: requêtes ^ caflationd'Ai^
r6t. Les Genevois font privés d'an pareil
' t
I
I^ E T T R E. 99
avantage; la Partie condannée par les Con*
feils ne peut plus*, en tjuelque cas que ce
puifle être , avoir aucun recours au Souve^
, ■ ., » ■ •
raîn: mais ce qu'un particulier ne peut faire
pour fon intérêt privé, tous peuvent le faî*
rc pour rinterêt cotamiun: car toute tranf-
^eflion . des Laix étant une atteinte portée à
la liberté devient une affaire publique , &
^uand la voix publique s*éleve, la plainte doit
être portée au Souverain, H 'n'y.aurx^it fans
cela ni Parlement ni Sénat ni Tribunal fur la
terre qui ne fut armé du funefte' pouvoir
qu'oie ufurper votre Magiftrat ;- il n'y auroit
point dans aucun Etat de fort aafli dur que
le vôtre. Vous m'avouerez que ce Teroit là
«ne étrange liberté!
Le droit de Répréfentaîion eft intimement
lié à votre conftitution : il èft le feul moyen
pdfible d'unir la liberté à la fubordination ,
loo HUITIEME
& de maintenir le Magifbrat dans la dépendati-
ce des Loix fans altérer fon autorité fur le peu-
ple. Si les plaintes font clairement fondées » û
les raifons font palpables, on doit préfiunêr
le Confeîl aflez équitable pour y déférer. S'il
ne rétoit pas, ou que les griefs n'eufiènt pas
ce degré d'évidence qui les met au deûus dii
dDute, le cas changeroit, & ce feroit alors à
k volonté générale de décider ; car dans vo-
«
cre Etat cette volonté efl: le Juge fuprême &
Tunique Souverain. Or comme dès le con>-
mencemeot de la République cette volonté a-
Toit toujours des moyens de fe faire entendre
& que ces moyens tenoieht à votre ConfUtu^
lion, il s'enfuît que l'Edît de 1707 fondé
tfiailleurs fur un droit immémorial & fur Tula-
ge confiant de ce droit , n'avoit pas befoia de
plus grande explication.
Les Médiateurs ayant eu pour maxime fott-
LETTRE.
lOl
damentale de s'écarter des anciens Edics le
moins. qu'il étoit poflible, ont laifle cet Arti-
de tel qu'il étoit auparavant » & même y ont
renvoyé. Aînfî par le Règlement de la Média-
tion votre droit fur ce point eft demeuré par-
faitement le même , puifque l'Article qui le
pofe efl: rappelle tout entier.
Mais les Médiateurs n'ont pas vu que jes
changemens qu'ils éioient forcés de faire à
d'autres Articles les obligeoient^ pour être
conféquens , d'éclaircir celui-ci^ & d'y ajou*
ter de nouvelles explications que leur travail
rendoit néceflàires. L'effet des Répréfenta-
tions des particuliers négligée; efl: de devenir
enfin la voix du public ôt d'obvier ainfî au
déni de juftice. Cette transformation étoit alors
légitime & conforme à la Loi fondamentale,
qiii, par tout pays, arme en dernier reifort
le Souverain de la force publique pour l'exé-
Éution de fes volontés.
lOt
HUITIEME
Les MédiàtecM^s Ji*ont pas fuppofé ce déni
de juftice. L'événement prouve qu'ils l'ont du
fuppofer. Pour ^ afTurer la tranquillité publique
ils ont jugé à propos de féparer du Droit ht
puifTance , & de fupprimer même les afTem*
bJées & députations pacifiques de la bourgeoi-
/ , • •
fie; mais puifqu'ils lui ont d'ailleurs confirmé
fon ^oi( s; ils dévoient lui fournir dans la for-
me de l'inditution d'autres moyens de le faire
vabir y à 1^ place de ceux qu'ils lui ôtoient :
ils n^ rpnt pas fuit. Leur ouvrage à cet égard
èfl donc relié défeâueirs ; car le droit étant
demeuré I0 . même , doit toujours avoir le$
toêmes effets.
... • , . . . .... ,
Aufli voyez avec quel art vosMagiftrats le
prévalent de l'oubli des Médiateurs ! En quel-
i
,qae nombre que vous puiffiez être ils ne v6-
yent plus en vous que .des particuliers, &
depuis qu'il vous a été interdit de vous monh
LETTRE. io3
trer en corps ils regardent ce corps comme
anéanti : il ne Teft pas toutefois , puifqu il
conferve tous les droits, tous les privilèges;
& qu'il fait toujours la principale partie de '
l'Etat & du I^giflateur. Ils partent de cet-
te fuppofitîon fàufle pour vous faire mille
difficultés chimériques fur l'autorité qui peut
les obliger d'affembler le Confeîl général, il
n'y a point d'autorité qui le puifFe hors cel-
le des Loix , quand ils les obfervent : mais
l'autorité de la Loi qu'ils tranfgreflent retour» .
ne au Légiflateur ; & n'ofant nier tout-à-fait
qu'en pareil cas cette autorité ne foit dans
le plus grand nombre , ils raflemblent leurs
ôbjefUons fur les moyens de le conftater. Ces
moyens feront toujours faciles fitôt qu'ils fc-
toht permis, & ils feront fins inconvénient,
puîfqu'il eft aifé d'en prévenir les' abus.
II ne s'agiflbit là ci de tumultes ni de
104 HUITIEME
violence : il ne s'agiilbic point de ces reflbur-
ce9 quelquefois nécefTaires mais toujours ter-
ribles , qu'on vous a très fagement interdis
tes; non que vous en ayez jamais abufô,
puifqu'au contraire vous n'en ufates jamais
qu'à la dernière extrémité, feulement pour
votre défenfe, & toujours avec une modéra*
lion qui peut-être eut dû vous conferver le
droit des armes, fi quelque peuple eut pu
l'avoir fans danger. Toutefois je bénirai le
Ciel, quoi qu'il arrive, de ce qu'on n'en ver-
ra plus l'afireux appareil au milieu de vous.
Tout eji permis dans les maux extrêmes , dit
plufieurs fois l'Auteur des Lettres. Cela fut*
il vrai tout ne feroit pas expédient. Quand
l'excès de la Tyrannie met celui qui la fbu&
fre au deflus des Loix , encore faut - il que
ce qu'il tente pour la détruire lui lailTe quel-
que elpoir d'y réuflîr, Voudrojt-on vous ré-
duire
LETTRE. X03i
éiXïte à cette extrémité ? je. ne pais je croi-
re, & quand vous y feriez, je penfe encore
moins qu'aucune voye de fait put jamais
vous en tîren Dans votre pofitîon toute fauf*
fe démarche efl fatale , tout ce qui vous in^
duit à la faire ed un piège , & fufliez-voui
un infbnt les maîtres , en moins de quinze
jours vous feriez écrafés pour jamais. Quoi-
que faflent vos Magîftrats, quoique dife l'Au-
teur des Lettres , les moyens violens ne con-
viennent point à la caufe jude : fans croire
qu'on veuille vous forcer à les prendre,- je
■s
crois qu'on vous les verçoit prendre avec
plaiiir ; & je crois qu'on ne doit pas voua
faire envifager commç une refTource ce qui
ne peut que vous ôter toutes les autres. La
juilice & les Loix font pour vous ; ces ap-
puis, je le fais, font bien foibles contre le
crédit & l'intrigue; mais ils font les feula
Partie IL 1
166 H Ù I t I E Kî E
qui vous reftént: tenez- vous-y julqu'â la fin;
Ehi comment approûveroîsje qu*on vou-*
hit ttoubler la paix civile pour quelque inté-
rêt que ce fut, moi qui lui facrifiai le plus
cher de tous les miens? Vous le favez. Mon-
fieur, j'étois-défiré, follicîcé; je n'avoîs qu'à
paroître; mes droits étoient foutenas, pcut^
être mes affronts réparés. Mapréfence eut
du moins intrigué mes perfécuteurs , & jé-
tois dans une de^ces pofitions enviées, dont
quiconque âixné à faire un rolle fè prévaut
toujours avidement. J'ai préféré l'exil peqié-
tuel de ma patrie } j'ai rôioacé à tout, mè^
toe à refpérance i plutôt que d'expofer Iz
tranquillité publique : j'ai mérité d*étie cra
fincere , lorfque je parle cti fa faveur.
Mais pourquoi fupprimer des ailëmblées
paiiibies & purement civiles , qui ne pou-
voient avoir qu'un objet légitime » puifqu'elle»
X TS T T R EL toy
Teftoient toujours dans la fubordination due aia
Magiftrat ? Pourquoi , laîffant à la Bourgeoî-
ÛQ le droit de faire des^ K^réfentatîons , ni
lés lui pas laifler faire avec Tordre & Fauthen-
licite convenables ? Pourquoi lui ôter les mo-
yens d'en défibérer entre elle , & , pour éviter
des afTemblées trq> nônsibreufes , au moins par
fes députés? Peut«on riài imisiginer de nlîeuk
rég^é y de plus décent, de plus convenable que
les aflèmblées par. compagnies & la forme dé
traiter qu*a fuivi la Bourgeoifîe pendant qu'el*
fe a été la m'aîtreffe de TJEtat ? N^eft-il pas
d'une pojice mieux enteddue de voir monter h
FHôtel-de- Ville une trentaine de députés au
nom de tous leurs Concitoyens, que de vok
toute une Bourgeoifîe y monter en foule ; cha^
eun ayant fa. dédaration à faibe , & nui ne
pouvant parler que pour foi ? Vous avez vu ^
Monfîeur^ les Répréfentans en grand homlifc,
I 2
. I
io8 H U I T I E M, E
forcés de fe dîvifer par pelotons pour ne p»
Élire tumulte & cohue , venir fëparément par
bandes de trente ou quarante y & mettre dans
leur démarche encore plus de bienféançe & de
nàiodeflie qu'il ne leur en étoit prefcrit par la
Loi. Mais tel eft Fefprit de h Bourgeoifie de
Genève ; toujours plutôt en deçà qu'en delà
de Tes droits , elle' ell ferme quelquefois , elle
n'efl: jamais fôditieufe. Toujours la Loi dans
le cœur^ toujours le refpeâ du Magiftrat fois
les yeux, dans lé tems même où la {dus vive
indignation devoiti animer fa colère, & où
rien ne Tempêchoit de la contenter , elle ne
s'y livra jamais. £lle.fut jufte étant' la plus
forte; même elle fut pardonner. En eut -on
pu dire autant de fes opprefFeors ? On fait
le fort qu'ils lui firent éprouver autrefois ; on
fait celui qu'ils lui préparoîent encore.
Tels font les hommes vraiment dignes de
LETTRE. 109
h liberté parce qu'ils n'entabafènt jamais ,
t
qu'on charge pourtant de liens & d'entraves
comme la plus vile populace. Tels font les
Citoyens , les membres du Souverain qu'on
traite en fujets, & plus mal que des fujets
mêmes ; puifque dans les Gouvernemens les
plusL abfblus on permet des aflemblées de
communautés qui ne font préfidées d'aucun
Magîftrat.
Jamais, comme qu'on s'y prenne, des ré-
glemens contradiftoîres ne pourront être ob-
fervés à la fois. On permet on autorife le
droit de Répréfentation , & l'on reproche aux
Répréfentans de manquer de confidence en les
empêchant d'en avoir. Cela n'efl: pas jufte , &
quand on vQus met , hors d'état de faire en
corps vos démarches, il ne faut pas vous ob-
jefter que vous n'êtes que des particuliers.
0
Comment ne voit -on point que fi le poids
13
XiQ HUITIEME
^es Rcj)réfentatîons dépend du nombre des
Ig^épréfentans , quand, çlles font générales il eft.
ipipoflible de les f^iire un à un ; & quel . ne,
feroit pas Tembarra^ d^i Magiftrat s'il avoît à
lire lucceflîvement les Mémoires ou à écouter,
Ijcs difcours d'un millier d'honimes , comme ili.
y efl. obligé par .te l^îj.
Voici donc la facile folutîon de cette gran-
de difBculté que l'Auteur des Lettres fait va-
bir comtpç infoluble (x). Que lorfque h Ma-
gi [bat n'aura eu nul égard aux plaintes des
particuliers portées en I^épréfentations, il .perr
mette TafTemblée des Compagnies boorgeoi-.
fgs î qu'i] la permette féparément en dçs lieux
en des tems difFqrens ; que celles de ces Cqm-
pagnies qui voudront à la pluralité des iliSra-
ges appuyer les Répréfentations le faflent par
«
Ijars Députés. Qu's^lors le ijombre des Dépu-
LETTRE. iif
I
tés répréfentans fe compte ; leur nombne toul
eft fixe ; on verra bientôt (i leurs vœux font
pu ne font pa$ ceux db TEtat.
Ceci ne fignifie pas, prenez-y bien- garde ^
que ces affemblées partielles puiflent avoir a^-
cune autorité , fi ce n'efl: de faire entendre
l^ur fentimcnt fur la. matière des Répréfentar
tjons. Elles n'ajuront , convoie affemblces au,-
torifées pour ce feul ca», nul autre droit que
celui des particuliers ; leur objet n'efi: pas de
changer la Loi mais de jug-er.fi elle efl: fuivie,
n.i de redreiFcr des . griefs mais de montrer Iç
befoîn d'y pourvoir : leur avis , fut-il unanime ,
ne fera jamais qu'une Répréfentation. On
faura feulement par là fi. cette Répréfentation
mérite qu'on y défère ,. foit pour, affembler le
Çonfeil général fi les Magiflrats l'approuvent,
foit pour s'en difpenfer s'ils l'aiment mieux ,
ea.faifant droit par eux-mêmes fur, les juf-
I4
ïi* HUITIEME
tes plaintes des Citoyens & Bourgeois,
Cette voyeeft fimple, naturelle, lÛre, elte
efl fans inconvénient. Ce n'efl: pas même
une Loi nouvelle à faire , c'efl feulement un
Article à révoquer pour ce feul cas. Cepen-
dant fi elle effraye encore trop vos MagM"-
trats , il en refte une autre non moins fad-
le, & qui n'eft pas plus nouvelle: c'eft de
rétablir les Confeils généraux périodiques , &
d'en borner l'objet -aux plaintes mifes en Ré*
préfentations durant flntervalle écoulé de l'un
à l'autre , fans qu'il foit permis d'y porter au-
cune autre queflion* Ces aflemblées, qui par
une diftinôion très importante (y) ji'auroiem
pas l'autorité du Souverain mais du Magiftrat
fuprême , loin de pouvoir rien innover ne
pourroient qu'empêcher toute innovation de
im^Ê^mmirm^mmmm^^mmmm
(y) Voyez le Contracl Social, l». III. Chap, 17,
L E T T R E. 113
la part des Confeils, & remettre toutes cho-
ies dans Tordre de la Légiflatîon , dont le
Corps dépofîtaîre de la force publique peut
maintenant s'écarter fans gêne autant qu'il lui
plait. En forte que , pour faire tomber ces
affemblécs d'elles mêmes , les Magiflxats n'au- '
roient qu'à fuivre exaélement les Loi:s : car la
convocation d'un Confeil général feroit inutile
& ridicule lorfqu'on n'auroît rien à y porter ;
& il y a grande apparence que c'efl ainfî que
ie perdit Tufage des Confeils généraux pério-
diques au feizieme fléde , comme il a été dit
ci - devant.
Ce fut dans la vue que je viens d'expofer*
qu'on les rétablit en 1767 , & cette vieille
queftion renouvellée aujourd'hui fut décidée
alors par le fait même de trois Confeils géné-
raux confécutifs , au dernier defquels paflà
l'Article concernant le droit de Répréfenta-
I5
XI4. HUITIEME
fl
tion. Ce droit n'étoît pas contefté mais éhàti
Jes Magiftrats n'ofoient difconvenir que lorf^
qu'ils refufQJent, de fatisfaire aux plaintes d;
]^ Qourgeoifle la queftign ne dut être portée
en Confeil général ; mais çopmc il appartienç
à, eux feuls de le convoquer y ils prétendoient
fous ce. prétexte pouvoir en digérer la tmfi^
à leur volonté , & comptoient lafler à force de;
délais la confiance de la Bourgeoifie. Toute-
Cois fon droit fut enfin fi bien "reconnu quoq
fit dès le 9 Avril convoquer raffemblée géaé-
JD^le pour le 5 de Mai, afin^ dit lé Placard, tff
lever par ce moyen ks injinuatîons qui ont éU
répandues que la convocation en pourvoit éire
iludie (^ renvoyée e^ore loin.
Et qu'on ne di(è pas que cette convocation
fut forcée par quelque a£le de violence ou par
quelque tumulte tendant à féditîon , puifqap
tQi)t jfe craitoit alors par députation, comme le
LETTRE. xij?
Cçnfeîl Favok defiré y & que jamais les. Ci-
toyens & Bourgeois ne furent plus paifibles;
d^ns leurs aiTemblées, é^icant de le$ faire trop
nombreufes ^ de leur doniier un ajr impqr
iànt. Us pouffèrent ii^êtne fi loin la déceur
ce &, j'ofe dire, Ja dignité, quç.ccu^ d'entre,
eux qui portoîent habituellement Tépée la po-
rtent toiijour? pour y afifler (z). Ce ne fut
qu'après que tout fut fait, c'eCt -à-dire à la fia
du troifieme Confi^il générât, qu'il y eut un cri
d'armes caufé par la faute du^Confeil, qui eut.
rimprudcnce d'envoyer trois Compagnies dç la
garnifon la bayonnete zfi bout du fufîl, pouc>
■ ■ f ■■■ -
(z) lU eurent la même attention en 1734. dans.
leurs Répréfcntationè du 4 Mars , appuyées de mil-
le ou ^louze cents Citoyens oU Bourgeois en per-
fonnes 9 dont pas un feu! n'avoit Tépée au côté.
Ces foins, qui paroitroienc minutieux daui tout au»
tre Etat , ne le font pas dans une Démocratie , &
càradlérifent peut-être mieux un peuple que des traits
plus éclatansv
ii5 HUITIEME
forcer deux ou trois cens Citoyens encore aC-
femblés à Saint Pierre.
Ces Gonfeils périodiques rétablis en 1707.
forent révoqués cinq ans après ; mais par quels
moyens & dans quelles circonftances ? Un
court examen de cet Edit de 17 12 nous
fera juger de fa validité.
Premièrement le Peuple eflprayé par les exé-
cutîons & profcriptions récentes n'avoit ni li-
berté ni ilketé ; il ne pouvbit plus compter
fur rien après la frauduleufe amniftie qu'on
employa pour le furpreridre. Il croyojt à cha-
que inflant revoir à Tes portes les SuifTes qui
fervirent d'archers à ces fanglantes exécutions.
JVlal revenu d'un effroi que le début de l'Edit
étoit très propre à réveiller , il eut tout accor-
dé par la feule crainte; il fentoit bien qu'on
ne l'aiTembloit pas pour donner la Loi mais
pour la recevoir.
Les motifs de cette révocation, fondés for
_ j
LETTRE. 117
les dangers des Confeils généraux périodiques,
font d'une abfurdké palpable à qui connoit le
moins du monde l'efprit de votre Conflitution
& celui de votre Bourgeoîfie. On allègue les
tems de pefle de fatnine & de guerre, comme
fa la faniîne ou la guerre étoient un obflacle à
la tenue d*un Confeil, & quant à la pefle,
vous m'avouerez que c*eft prendre fes précau-
tions de loin. On s'efiraye de Tennemî, des
mal -intentionnés, des cabales; jamais on ne
vit des gens fi timides ; l'expérience du paflë
devoit les raiTurer: Les fréquens Conleils gé-
néraux ont été dans les tems les plus orageux
le falut de la République, comme il fera mon-
tré ci-après , & jamais on n'y a pris que des
réfolutions fages & courageufes. On -foutient
ces alTemblées contraires à la Conflitution ,
clont elles font le plus ferme appui ; on lès die
contraires aux Edits, & elles font établies par
^ti« H U r T I E M E
les £dits; on les accufe dë.nbavéautë, & eU^
fbnt auffi anciennes que la.Légiilation. U n'y
a pas une l^ne dans, ce pVéandbuIe qui ne foie
iitle fàailbcé où une extrav2(gance , & c'efl; fiir
ce bel capoté que la révocation pafle, fanis
programme antérieur qui ait infixuit les mem-
jbres de raflemWée de Ja ^ropoStîon qu'où
Jeur vouloit. faire., faiis leur donner Je loîfir
d'tn , délibérer entre eux, nîême d'y penferj
& dans un tems où la Bourgecdfîe mal in&
truite de rhiftdire de Ton Gouvernement s'ci
laiflbit aifément împofer par lé Magiflxât.
Mais un moyen de liulUté pks grave en«
. core efl la violation de TEdit danis fa partie
à cet égard la plus importante., (avoir la nùN
nîere de déclarer les billets ou de compter
les voix î car danis TArtide 4 de TEdit dû
1707 il eft dit qu'on établira quatre Secré-
taires' ad aSlum pour tecueillit les fuâfrâges^
L E T T R X ir9
deux des Deux-Centé & deux du Peuple , IcC-
^uels feront choids fur le champ par M« le
premier Syndic & prêteront ferment dahi le
Temple. Et toutefois dans le Confeil géné-
ral de ,1712, fans aucun égard à TEdit pré-
cèdent on fait recueillir les fufFrages par les
deux Secrétaires d'Etat. Quelle fut donc la
c
ràîfon de ce changement, & pourquoi cette
manœuvre illégale dans un poiat fi capital^
comme fi l'on eut voulu tranfgrcfler à plaiCr
la Loi ^ui venoît d'être faîte? On commence
. r
• V
par vicier dans un. article l'Edît qu'on veut
annuler dans un autre ! Cette marche eft-ellé
jfégulîere? fi comme porte cet Edit de rëvo^
cation l'avis du Confeil fut approuvé prefque
unanimement (ad) , pourquoi donc la forprifô
êc la confternation que marquôîânt les Cito^
(ûfl) Par la manière dont il m'èft rapporté qu'oii
sy prie, cette unanimité ia*étoit pas difficile à obto-
tto H tr I T I E M Ë
yens en forçant du .Confeil , tandis qu*on vo-
yait un air de triomphe & de fâtisfafUon fui*
les vifages des Magtflxats (J>b) ? Ces difiëren-
tes
nîr , & il ne tint qu*à ces Meilleurs de la rendre
, completre..
Avant raffemblée, le Secrétaire d'Etat Meflrezat
dît: Laijfez les venir ; je les tiens. Il employa, dit-
on, pour cette fin les deux mots JpprohûXimy & Re-
jeQiony qui depuis font demeurés en ufage dans les
billets : en forte que quelque^ parti qu'on prit tout
revenoit au-môme. Car fi, l'on choifîiToit Jpprobatioft
Ton àpprouvoîc ravis deJ^^oftf(fUs , qui rejettolt
J'affeioblée périodique ; & fi Von prenpit RéjeStion
Ton rejettoit raffemblée périodique. Je n'invente
pn^ ce'fa1t'^^&-j€ ne le rapporte pas fans autorité;
j(i prif le lefteur de. le croire; mais je dois à la vé-
rité de dire qu'il ne me vient pas de Genève, & â
la.3tifticeJ»d'ajoùter'quej^ ne le- cïoië pas^vrai : je
fais feulement que l'équivoque de ces deux mots a-
bufa bien des vôtans fur celui qu'ils dévoient choi-»
fir pour exprîjner : leur intention ,. & j'avoue encore
que je ne puis imaginer aucun motif honnête ni au-
cune excufe.légitimeirla.'tran^reffionde la loi dans
le recueillement des fulFrages. Rien ne prouve
mieux la terreur dont le Peuple étoit faifi que le fî-
Jence avec lequel il laîffa pafler cette irrégularité.
(bb) Ils difoient entre eux en fort^nt, & bien
L Ë T T -R Ë. lit
tes contenances font-elles naturelles à gens
»
qui viennent d'être imanimement du xnètM
avis?
Ainfi donc pour arracher cet Edit de r^^
vocation Ton ufa de terreur^ de furprife»
vraifemblablement de fraude, & tout au moins
on viola certainement la Loi. Qu on juge fî cet
caraâeres font compatibles avec ceux d^une
Loi (àci^e, comme on affeâe de l'appellera
Mais fuppofons que cette révocation fois
légitime & qu'on n'en ait pas enfreint les
conditions (ce) y qud autre eflFet peut-on loi
^mmma^
d^autres rentendîrcnt; nom vtnmî de faire une grârt^
de journée. Le lendemam nombre de Citoyens fa^
.rent fe plaindre qu'on les avoit trompés » & ' qu'ils
ti'avolent point entendu rejeecer les aflemblôes géné-
rales, mais Tavis des Confeiis. On fe moqua d*eux.
{c6) Ces conditions portent ^xx'aucun chingeinent
à PEiit n'aura force qu'il n'ait été approuvé dans' (A
fowjerain OmfeiU Refte donc à favoîr fi les infrac*
tions de l'Edit ne font pi» des changt meus à rsaitf
Partit IL K
ftt HUITIEME
donner 9 ^e de remettre les diofes fur le piedl
où elles écoient avant l'établif&meat dç la Lm
révoquée, & par conféquent la Bourgeoifie
dans le droit dont elle, étoit en pofl^Iion?
Quand on caflè une tranfa^ion, les Parties
SIC reftent-elles pas conmie eHes étoient avant
ftt'elle fut paifée?
' Convenons que ces Coo&ils généiauz pé^
tîodiqoes n'auroient eu qu'nn iëul inoonvé*
sient y mais terril:^ ; c'eut été de forcer les
Magiftrats & tous les ordres de ie contenir
danr les bornes de leurs devoirs & de leurs
droits. Par cela leul je fais que ces ailëm*
Islées fi effarouchantes ne feront jamais réta*
t)1ies y non plus que cefles de la Ëourgeokie
par compagnies $ mais aùfli n'eft*ce pas de
cela qu'il s'agit ; je n'examine point ici ce
^ni dbit ba ne doit pas fe fairç ; ce qu'on
fera ni ce qi^'oa ne fexft pa& Les expédicDfr
' L t T T B. ï. :t2|
'<|àe j'indique iimpidmenc caaaac poJUbles &
faciles 5 comme drés de votre confticiition ^^
n'éttnt plas conformes aux nouveaux Edict
ne peuvent pafTer que du coniëncemeni: dei;
Confeils y & mon avis n^êft aiTurémenc pn
'qu*on les leur propole t maïs adoptant . ua
moment la fuppofitîon de FAuteor des Leb-
treS) je réfous des obje6tions frivoles; je ùk
voir qu'il cherche dans la nature des chofea
des obitades qui n'y fosc point , qu^îls no^
fixnt tous ^e dai» la mauvaife volonté du
Confeil^ & qu'il y avoit s'il l'eue voulu cent
moyens de lever ces prétendus obftacles^ flani
altérer h Conditution , fans troubler, l'ordre li
& fans jamais expofer le r«po$ public
Mais cour rentrer dans la queftion tenoi»»
nous exaâement au demiâ: Edît, (k vous
n'y verrez pas une feule dîlBculté réelle Con*
tre l'effet néj:çflàire :. d>i droi( de Répréfeiif
catioa K 2
tu H U ï T I E. M E
. I. Celle d'abord de fixer le nombre dor
.Répréfentans eft vaine par TËdit même, qui
jie fait aucune diftinâion du nombre , & ne
donne pas moins de force à la Répréfenta-
tion d*Qn féui qu'à ceDe de cent
2. CeHe de donner à des particuliers le
droh dé foire aiTemlsIer le Confeil général efl;
Vaine encore ; puirquê ce droit , dangereux
eu non y ne refaite pas; de l'effet néc^fiaire
àes Répréfematjions. Comme il y à tous ks
ans deux . Confeib . généraux pour les élec-
tions « il n- en faut point pour ces effet a&m«
tiâ 4*extraQfdinu]?e» Il fuffit que la Réprélèo*
tation, après avoir été çmninée dans j les Coq-
feils» foit portée au i^lus prochain CônÀsil gé-
néral, quand ék<dk de nature à ritre (dd).
La féance^ n'en- fqra pas même prolongée dV
(dd) J'ai diftingué ci-devant les cas oîilesConfeils
font ceausde Vj porter^ & ceux o(i Us ne le font pas.
LETTRE. 125
\
/
lie Jieurè, comme il efl: manifefle à qui con-
noit l'ordre obfervé dans ces aflemblées. Il
faut feûleibent prendre la précaution que la
propofîdon paffe aux voix avant les éleftions :
car fi Ton attendpit que Téleftion fut faite, les
Syndics ne manqueroient pas de rompre auffi-
X$t Fafl&n^l^e., comme ils firent en 1735.
3» Qdle de multiplier; les Confeils .génërau?
cft levée avec la précédente & quajnd e^le.qe
Je feroit pas , où feroient les dangers qu'on y
.trouve? ;*c'efl: ce que je ne fauroîs voir.
. On , /réi^it en lifant rénuméraiion de ç^
dingjSix^ slansi les Lettres écrites de la Campsi-
gne , d^Qs 4'j£dit de 1712^ dans la Harapgap
.de M. Chou^t ; ; mais vérffipns;., Ce^derniep dk
qiïe la .République ne fut i^atigiiiHe que quand
ces aij^bl^ea 4^^^^^^ pl^ ^^^^« - ^ 7 ^ ^
une petite", inyerfion à réiablir.' Il fallpk dirf
^ae ces, ^li^]^ jçJeyyyeBSvp ^ juares quand
K3
•rf'
'12B HUIT î E M E
^ KépubHque fdt tran^uilte^, Lil&z, Monliénr^
)ès faf1:e8 de votre Ville durant le ièizieme fié-
^le. Comment fècotta-t>elIe ie double joug qui
:récrafoît ? Cmment é(ouffa-t-elfe ies fa^'oqi
^ui la déchiroient: t Conmient tifîfla-c-dle à
fes voîfîos avides ^ ^ui nç la fecoùToient quQ
pour Taflervir ? Commet l'étahlk dan3 ion
£bin la liberté évangélique & politique? Com-
tAeùt fa çonftitution prît-elle cje la^coirfiftance?
Comment fe forma leTyftême dç fim Gouver-^
jôement? L'hif^oire de ces mémorables temi
5eft um enchaînement de prodiges. Les Ty-
Tans^ les Voifhïs,, les ennemis , les ^mis, kai
lUjetS', les Citoyens, la guerre, la pefte, la far
VsùÉt j tout •Tembîoît concourir à la perte de
^tëtxiaUteuréufé Ville, On conçoit k pdœ
^omiùent m E<^t ^éja formé eift-pii ^éebai^)»
« i!ûus ces perilsC- N^ feiilaiïeht Genève ea
r
LETTRE. >i%7
que fê œnfbmme le grand Ouvrage de 4 I^^
gîflatioa, Cefu£ par1e$ fin^quens Confeils gi-
néimx.(ee)i cefutpacla prudence & la fer«
aiecé queib Citoyec^; y ^portèrent (jq'ils vain-
quireoc enfin to\i$ les obfl^lQs^ & lendireoc
leur Ville tibre & tranquille , de fujetxe ^ dé«
chirée qu'elle .écôf auparavanc^; ce fut. après
avoir tout n^is en prdre' m dedans qu'ils le
virent en état de faire au dehors la ^u^rre
avec gloire*. Alors 1$ ConXgll.^V^n.ar
Voie fioi fês fQpéUon;^ côtoie au Go^yensOf
ment de fiiire les fteni^s : iï.fie rieftoit plus^ au|;
*- ♦ ^
(eé) Comme on les alTembloît alors dans tous les
cas 0r(ku Mon les Edits , & que ces cas ardus le*
vçnoîenc très fouvenc daus ces tems orageux» le
Confen général étoit alors })lus fréquemment con«
ypqjié que Q*çfl aujourd'l^utlç Deut-Cent. Qu'on en
juge' par une feule époque. Durant les huit premiers
mois de ranbéë- 154.0 il fe tintiix-huit Confeils gé«^
nérauX; & .cette année n'eut ^rien de plus extcaordU
naire que celles qui avoient précédé & que celles^
f)û ftt^vircut./ ... : \^' J.y
'128 H U I T I E :k E
Génevcns qa'à défendre la liberté qu^ils ve<
noient d'établir /& à fe raoncrer au£G braves
foldats en campagne qu^ils s'étoient montrés
' dignes Citoyens au Confeil : c*efl ce qa'ils fi-
rent. Vos annales attellent par tout YutSàié
des Confeils généraux ; vos MoflOteura n'y vo-
yenc que des ùimk eSi'oyables. Ils font fob-
jedlion , mais rhïloire la réfout.
4« Celle de s'expofer aux faillies du Peuple
quand ^n avoiOne à de grandes FuiiTances fô
i<éfôut=<ie m&nei- je »é fiche point en œcî
âe meilleure répdnfe à des lophifiniâ que de^
faits conflans. Toutes les réfolutions des Con*
feils généraux ont été dans tous les tems dsoSût
pleines de fagefTe que de courage ; jamais el<
»
fes ne : fuftnt infôleiites ni lâches j on y a
quel^dfoi^ jur4 : de: Q^ourk pQur la patrie i
inâîs je défie qu'on m'en cite un feul , même
de ceûjt où le Peuple a le plus ifxù\ié , dans
LETTRE. M9
lequel on ah par ëtourderie mdifpofô .les FbiC-
£uioes voîfînes , non plas qu'un lèul où l'on
ah rampé devanc elles. Je ne ferois pas un
pareil défi pour tous les arrêtés du peth Con-
ieil : mais paflbna,* Quand il s'agh de nouvelles:
réfokiàons à prendre, c'eftwioc ConlHIs infiîk
TÎeurs de les prqpofix , au Confeil géaéial àù
les lejeccer ou de les admettre ;.il ne peut rien
Ëubre de plus^; on ae dilpute pas décela: Cette
objeâion pgrte donc à faux. :: . . .5
5. Celle de jetterdu doute. & de Pobfcurîté*
iur toitfes les Loix n'elt pas plus iblide, parcey
qu'il ne s'a^t pas id d'une interpcâation va^^
gue , générale , & lùibeptible de fiibtilités ç
mais d'une application nette & prédfe d'un
ùk à la Loi. Le Magiftrat peut avoir fe$
lèifons pour ixouver.obfcureunechofe daire^ '
mais cela n'en décruh pas la clarté. Ces Mef^
• «
{kaxs dénatiuenc. la queilkn. Moôtiq: psur k>-
K5
f3« H II I. T II E: M^ E
lettre d'une Ldrqu^élie a^Àe violée n'dl pas
protKsIbr idâs ddiifes: finr 'cette Loi S'3 y a
duit lç8 <i:eRâ£S de >]a IdI^uo feol' &ns feteo
kqt^ Jb ^1 ibit juflifié » ie Confefl dans &
zé^nfê ne! maoqpiiêrii pa^ <f établir ce feus.
Aides la. rBi^rëfcnàition perd' & forœ^ & fi
ron'y fiE^sfiit&v '<^leiCQ^^ eh
GonTeii général rrCacrrintsérêt de tonseft trep
grand ». tn^:.préfi3nt, trop finfibde^&rtout dam
une Ville de commerce', pour que la gé^
3jitîté vàijQle jansasr éfcbranleri^automéy le Gpo-
Yememeiky k ]^^ en jbraoocçaQt
qQ'uneLDta^éfiécranfgreiSiéy loriqe^il eSt pof«
Qfcde qaldle :iie ilait pas :éc£^
f Cjett.aa ^^q^iiateac, cell au redaàceurvoea
I^dx a Q*en: pa^ biflb: \ki tertnes équh^oqoBSL.
Qnand'ilsleibnt;. c^éft à.réqoké :da Magi^
crac d*en fixer k fens dans la pratique ; quand
laLoi a phifieuri fans , il ofc de ïoa droic en.
w.
i:E T T R K, 13»
è
I
^fônmt: celui ^Hlilui plaît: Aaît ce dtoit ne
fn, poînb jttTqu'à changer k f^ lictéial dés
lùîx âtà leor en donaer un qà^dje n'ont pau^
autrement il n'y tiuroiC' plcp de 4^1 La qcid^
^fl akifî poffo eft: Û nette gu-II eft facile ati
tion fens de pmnonçei), & <?e bon fens qiâ
|irononce (b trouve afoi« dans le Ôonfeil génô^
^l Loin que * diû^tà naiflent des i^éufSons ha^
-terQHnables / <fe$ par là q))^éà^o9mraire on les
^rëvietit ; (fâl pdr 1& qi^élevaitt..lë^Ëdks atf*
'dêflus ^^-intSr^lsrtiens'aAitFaires & parti-
e^iâres.qu^ Htitërêt oaJa^pafîionpeiKfiiggé,
rer, oii éft^qu'îis dHent toejoiH'é cè-qli'ite
»
f£i^nt, ^ que k» ^^culiers ite ^ibnt pliis dk
ijbute, fiir chaque âdaire, do^fens qu^il plairii
^ Mâjpftrat dé donner à-fa Loi» N'es- il paa
^dkir que les diiBculcés dont 9 afagk nmintê^
*iaBt rfexifteroîent ptas fi Ton eut prii d'^ord
r •
<fc mojfen de ^Ict réfoudre- ? - •. ^
13» IT U r T I JE îM E
6. Celle de foumetcpe lés ÇQtifei]s aux .at^
àietiàes,\Gsayem e(t ridicule. U dk certaia
que des .R^jpcâ^tadQmaé fenc, pas des J>r&
4res 9 non plfls que la requête: ^un.^omine
«qui demande juflice n'ed peu juiï< ordre; n^
}û IV^igiflrac n'en eft pas moins. obli;gé:de
jendre du fuppUaoc. la joflice qu'il demandej»
jSc le Con^ de .faire dsoît/ur , le^ RépScé-
tentations des .Citoyens & Bonrgeojs. : Quoi-
que les Mâ^&fm fovsot .les fupérieurs des
particuliers, cette fupériori^ ne les'diipaife
|)as d'acçordçr.si.rleur; infi^n^pn W qu'ils leur
doivent 9 &les.(ennçs r^çflugttt <yi':empIoT
^ent ceuxrd pour le demwdex n'ôtent tm
au drofc qu'ils ont de l'obtenir. Une Rëpré*
Xditation eft , fi l'on veut, on ordre donné jp
Confeily comme elle efl un ordre* donné ^.
^emier Syndic à qui on la préfente de 1^
communiquer auConfeil; c^ c'eft ce quil ^
L E T T H E. . 133
toujôurSv^hbgé de faire ^ foie qu'il approuve
la Répréfeatatioû, fok qu'il ne l'approuve pa8#
Au relie quand le G>nreil tire avantage dû
mot de Répréfei^athn qui marque infériorité;
en diiant une diofe que perfonne ne di/pute^
il oublie cependant que ce mot employé dans
lé Règlement n^efl; pas dans l'Edic . auquel il
renvoyé, mais hi&i oàùi de R^momrancis qui
préfente un tout autre iens : à quoi l'on peut,
ajouter qu'il y a de la différence entre les Re-
montrances qu'un corps de Magifhature fait
à ion Souverain ) & celles que des membres
du Souverain fpnt à un corps de Magifbratu*.
15e. Vous direz que j'ai tort de répondre, à
une pareille objeéëon i mais elle vaut bien
la. plupart des autres, . ;> :
' 7. Celle. enfin d'un homme «n crédit coR«^r
v^nl le fçns ou l'application d'une Loi cjA^
ïç coodanne^ & féduifant le public en ià fa-
fj4 H U 1 T î E H fi
Ireur, efl: tellp que je crois devoir m'abflâsiiif
de la qualifier. Eh l qui jâxmc a connu la
Bburgeoifie ( de Genève pour un peuple ièr^
Vilé, ardent vlnûcateur, fhipide.» exinemides
lûix, & fi prompt à s^enflamtoer pour lesin^
térâts d'aqtrui? Il faut que chacun ait bkn
lû'le fien compconûs dans léa affaires publia
qopf, avaiit qu^H poiffe fe réfi>udre à t'eif
mêler»
Souvent f injftftice & la fraude trouvent
dès proteâeurs ; jamais elles n'ont le publie
pour elles; c*eft en ceci que la voix du Peupte
eft la voix de Dîeu ; . mais malheureufbmeiic
â
cette vovc facrée e(l toujours foible dans les
affaires contre le cri de la puiflance ^ & la
plainte de Tinnocence opprimée s'exhale en
murmures méprifës par la tyrannie. Tout ce
qui fe fait par br%ae & féduétion fe fait par
pséiTâ^ènce au ptofit de ceux qui gouvernent]
I
' L E T T RE. »S5
cda ne faaroîc être autrement La rufe^ I9
préjugé I rimérét, la crainte, Telpoir, la va*
nicé , les couleurs fpécieufes , un air d'ordre
& de fubordination , ^tout eft pour des hommes
hatnles confUtués en autorité & verfés dans
fart d'abufer le peuple. Quand il s'agit d'op*
po(êr Tadrefle à Tadreflê , 012 le crédit au cré«*
dit, quel avantage immenfe n'ont pas dans une
petite Ville les premières familles toujours
uniçs pour dominer , leurs amis, leurs cliens,
leurs créatures , tout cela joint à tout le pou-
voir des Confeils , pour écralèr des particuliers
qui oferoient leur faire tête ^ avec des fophiA
msM pour toutes armes? Voyez autour de vous
dans cet inftant même, L'appui des loiz, l'é-
quité, la vérité, l'évidence , l'intérêt commua^
le foin de la flireté particulière , tout ce qui
4evroit ^traîner la foule fuffit à peine pour
protéger des Citoyens refpeâésqui réclvnenp
/•
ï3(J H ' U ï t t: É Irf Ë
toiitre rinîquîté la plus manîfefte ; & Ton vettC
que chez un Peuple éclairé l'intérêt d*im
brouiDon fafle {dus de partifans que n*en peut
faire celui de TEtat ? Ou je connois mal votre
Sourgëoifie & vos Giefs , ou fî jamais il fe
fait une feule Répréfentation mal fondée, c6
qui n'efl: pas encore arrivé que je fiche ;
T Auteur, s'il n*e{i: méprifs^ble, eft un homme
perdu.
^ Eft -il befoin de réfuter des objeétions de
cette efpece quand on parle à des Genevois?
Y a-t*il dans votre Ville un feul homme qui
n'en fente la mauvaife foi , & peut*on fêrieu*
fement balancer l'ufage.d'un chroit fàcré, fon-
xlamental , confirmé, néceflaire, par des in-
«onvéniens chimériques que ceux mêmes qoi
les objeâient favent mieux que perfbnne ne
pouvoir exîfter ? Tandis qu'au contraire ce
•droit enfreint ouvre, la porte aux excès de la
plus
L Ë T ï R El i^f
jpliis ddîeufe Olygarchîe j au point qtfon h
Voit attenter déjà fans prétexte à la liberté dés
Citoyens, & s'arroger hautement le pouvoit
de \ei emprifonner ans aflriélion ni condition ^
fans formalité d'aucune efpece , contre la te-
neur des Lois les plus prédiës , \& malgré
toutes les proteflations.
L'explication qu'on ofedbnhet à cies Loix
efl: plus infultante encore que la tyrannie qu'ob
exerce en leut nom* De quels raîfonnemens
on vous paye ? Ce n'efl: pas afféz de vods
traiter en efclaves fi Ton ne vous traite encore
en enfans. Eh Dieu ! Comment a-t«on pu
mettre en doute des queftions adffi claires,'
trommënt a-t-on pu les embrouiller à ce point?
Voyez, Monfieur, fi les pofer n'efl: pas les
réfbudre ? En finiflant par là cette Lettre ^
j'efpere ne la pas alonger de beaucoup.
Un homme peuc être conftîtué prifomuer de
Fartie II. L
f3« HUITIEME
trois manières. ^ L'une à Tinftance d'un autie
hûmnie qui fait contre loi Partie fonnelle ; la
féconde étant fut^s en flagrant délit & faifi
fur le champ » ou, oe qui revient au xoéme,
ppur crime not<â:'e dont le public efl: tânoin;
& la dXMfîeme^ d'office » paix la finale autoïké
du Magiltrat, fur des avis fecreu, fiir des in-
tltces, ou fur d'ancrés xaiibns ^^il trouve fuf-
£{ànt^
' Dana le prunier cas^ il et ordonné ptf les
Lois de Genève quç raccufiiteur revé(£ les
prifons y ainfi que Taccolë ; & de pJus^ l'S
B'«ft pas folyable, qu'M donne caution des dé*
pends&de Tad^iafgé. ^fi r<m a de ce côté
dass] fkïtéièt de f aocufàteur une fureté nû-
ibnoabte^ne k prévenu n'efl {^ arieté m-
JQitement;
Dans le Cscasvi cas, la preuve eft dans k
Sût même . i& faccufë efl m Quelque forte
LETTRE. #39
convaincu par ia propre dét^Kioq.
Mais dan$ le troifieme cas on n'a jtii i%
même fôreté ^pe dans le preaiier, ni h mèr
me évidence que dans^ le fécond, & c'eâ pouj:
ce dernier cas <}Qe la Lcd^ fuppdaot le Ma-
giffarat équitable, prend feoleaiait des mefurq»
pour qu'il ne foit pas furpris.
Voila les principes fur leiquds le Légkla*
teiâ: fe dirige dans ces trois cas ; en voici
mainteiiîuit T application.
Dans le cas de la Partie formeUe , on a dès
le commencement tui procès en règle qu'il
faut foivre dans toutes les formes judiciaires:
c'efl: pourquoi l'afiaire eft d'abord traitée en
première inftance. L'empriibnnemenc ne peut
être fait /, parties (fuïes^ il n'a été permis.
par jujiice (ff). Vous favee que ce qu'oa
appelle k Geséve k Ju(tioe .eft le Tribupai
"^ (//) Edits civils. Tit. XIL Art. I.
L 2
140 HUITIEME
du Lieutenant & de fes aflîflans àppellâ
i^uditeurs. Ainfi c'efl: à ces Magîftrats & non
à d'antres, pas même aux Syndics , que la
plainte en pareil cas doit être portée , & c'efl?
à eux d'ordonner l'emprifonnement des deui
parties ; iàuf alors le recours de l'une des deuï
aux Syndics , Ji , félon les termes de l'Edic,
-elle fe fentoit grevée par ce qui aura été ordori'-
•né (gg). Les trois premiers Articles do titit
XII 9 fur les matières criminelles fe rapportent
évidemment à ce cas-là^
Dans le cas du flagrant délit , fbit pour ai-
me, foit pour excès que la police doit punir,
il eft permis à toute perfonne d'arrêter le cou*
pable; mais il n'y a que les Magiltrats char-
gés de quelque partie du pouvoir exécutif,
tels que les Syndics, le Confèil , le Lieute*
nant, un Auditeur , qui puiflênt l'écrouer; un
■ »
(gg) Ibid, Art. 2.
LETTRE. 141
Coofèiller ni pluOeurs, ne le pourroient pas ; Se
le prifonnîer doit être interrogé dans les vingt-
quatre heures. Les cinq Articles fuivans du'
même Edit fe rapportent uniquement à ce.
fécond cas; comme il efl clair, tant par lor-,
dre de la matière , que par le nom de crimi-
nel donné au prévenu , puifqu'il n'y a que le
feul cas du flagrant délit ou du crime notoi-
re, où Ton puifle appeller criminel un accu-
fê avant que fon procès lui foit fait. Que fî
Xpti s*Qbfldne à vouloir c^accujé <& criminel
fblent fîoonymes , il faudra , par ce même
langage , quHnnocera & criminel le foient aufïï^
. Dans le refte du Titre. XII il tfeft plus
queflion d'emprifonnen^ent , & depuis FArti:
de 9 inclufîvement tout roule fur la procédu-
re & fur la forme du jugement dans toute
efpece de procès criminel. II n*y eft point
pvlé des eiiiprifonnemens faits d'ofEce.
L 3
14» HUITIEME
Maïs îl en eft parlé dans FEdît politique
fiir rOffice des quatre Syndics. Pourquoi ce-
la? Parce que cet Article tient immédiatement
à la liberté civile, que le pouvoir exercé fur
ce point par le MagiÛrat efl: un aâe de Gou«
vem(aiient plutôt que de Magîftrature , &
&jt\m fimple Tribunal de juftîce ne doit pas
être revêtu d'un pareil pouvoir. Auflî VEdît
Taccorde-t-il aux Syndics feuls, non au Lieu*
tenait ni à aucun autre Magiftrat.
Or pour garantir les Syndics de la furprife
dont f^\ parlé , l'Edit leu^ prefcrît de tnander
premièrement ceux quil appartiendra , d'exami-
ner d'interroger^ & enfin àt faire emprifonner
fi mejlier ejî. Je crois que dans un pays fi*
bre là Loi ne poùvoit pas moins faire pour
mettre on frein à ce terrible pouvoir. II hnt
que les Citoyens aient toutes les fûretés Hii*
fonnabtes qu'en feifant leur devc»r ils pour*
ronc CQUcher dans leiit ^
\
LETTRE. 143
L*Artîcle fuîv^t du mêmie Titre rentre^
comme il eflr mamfefle, dans le cas da cri*
me notoire ôc da flagrant délit , de même
que r Article premier dû Titre des matières
criminelles, dans le même £die politique. Toot
cda peut paroître one répétition : mais dans
TEdit civil la matière eft confîdérée quant à
l'exercice de la jullice, & dans l'Edit polîtî-
que quant à la fÛret^ des Citoyens. D'ailleurs
les Loix ayant été faîtes en differenstems,
& ces Loix étant l'ouvrage des hommes, oit
n^ doit pas chercher un ordre ^ui ne fe 4é-'
mente jamais & une perfeéHon fans défaut»
Il fuffit qu*en méditant fur le' tout & en^ com-
.• .... , -^
parant les Articles , on y découvre Tefprît
^u Législateur <& les ra|fons. du difpoficif de
fon ouvrage.
Ajoutez une léâexioe. Ces droits fî judi^
deufement combinés ; ces droits réclamés par
L4
^^ HUITIEME
le^ j^épréfentans en vertu des £dit$ , vous
e^ jouiflîez fous |a fouveraînet^ des Ëvêques,
!Ç>f euf(±âtel en jouit fous fes Princes > & à
YQus Républicains o^ veut les ôter 1 Yoyez
]ç$ ^ides ip, II 9 <& plufieurs autres des.
frapchiTes de Qenève dans Taâe d'A^emaru^
fàbxu Ce monument p'eft pas nio^^reip^.
talple aux Genevois que ^e l'eil aux Aûglois.
Iji grande Cbartre encore plus ancienne , S(
je dçute qu'on fut bien veiijiu chez ces dqr-
^ers à parler de leur Chartre ayeç autant d^
tt^épris que r Auteur djçs Lettres ofe en jçnar^. .
quer pour la v^e, ,.
, Il pi;étçQ4 qu'elle a ^cé abrogée par les
Çonflitutions de la République (bh), Mais au,
(bb) Céroic par une' Logique toute femblable
qu'en 1742. on n*eut aucun égard au Traité de Soe»
leure de 1579, foutenant (ju*il étoit furanné;. quoi-
qu'il fut déclaré per|)étu^I dans l'Aéta même , qu'il
c'ait jamais été abrpgé par aucun autre , & (p^
;. j; T T R E, I4J
V
çontrsjîpc je vois- très fouvenç dap3 vps Editas
ce mot, comme .d'ancienneté^ qi4 renvoyé au]C
uf^s anciens, par conréquent^au^ droits, fur
Jefquels ils^ étoient fpndesj & comme fi l'EJ-
vêque çut prévu que ceux qui dévoient prq-
.téger les franchifes les attaqueraient, je vojs
.qu'il dédire .dansi TA^e même jqu'cjles iêroi^t
.perpétuelles , f^s que le non-pTage ni aucune
prefcription les puifle abolir. Voici, vous ep
CQpviendre? , une oppoGtion \>kn Cngulierç;
^.e favant Syndic Chouet dit dans fon Mq-
^Çioire à Mylord fowfend que .le Peuple de
Genève enpra, pax la Réformation, dans Iqs
4roît5 de l'Evêque , qui étoit Prmce teropa-
xé & fpirîtuel de cette Ville. L'Auteui; dqs
Xettres i^ous allure a^u contraire que ce mq-
me Peuple perdit en cette occafion \t:s fr^^g-
• • • •
ait été rappelle pluficurs fbis , notamment dans Tac-
.te de la Médiatian.
L 5
s
146 HUITIEME
diifes que TEvéquë lui avoic zccordées. Aa-
ipà des deux croirons-noas?
Quoi ! vaa$ perdez étant Kbres des droits
iant vous jouiffiez étant fbjets ! Vos Magif-
Crats Toas dépouillent de ceux que vous ac-
cordèrent vos Princes ! fi telle dk h liberté
que vous ont acquis vos pères , vous avez
dequoi regretter le fang qu'ilsf' verferent pour
die. Cet a£le fingulier qui vous rendant Soo-
verains vous 6ta vos franchifeSi valoit bien,
ce nie femble,la peine d'être énoncé, &, du
moins pour le rendre croyable, on ne pou-»
voit le rendre trop folemnel. Où eft-il donc
tet afte d*abrogation ? ^fTurément pour fe
prévaloir d\ine pièce atrffi tî^arre le moins
qu'on puiffe faire efl de commencer par la
mcxitrer.
De tout ceci je crois pouvoir conclura
Mrec certitude 9 qa*en aucun cas poffible^ la
LETTRE. 147
Loi dans Genève n'accorde aux Syndics nî k
perfbnne te droit abfola tfemprîfonner lei
paitîcalieré fans dlriéUoft ni condition. Maïf
n'importe: te CottTeil en réponfe ara: Répré^
iêntations établrc ce droit fkns répfique. H
rfen coûte que de vouloir , de ]er voila en
poiTeflion. Tdte eft la comodité du droit
négatif.
Je me propofoîs dîe montrer daris cette
Lettre que te droit de Répréièntation , intî-
itoement fié à la forme de ^ôtre Conftîtu-
, ' ■ < ' ' ' '
tîon n'étoît pas un droit îlhifoîre & vain ;
maïs qu^ayaiit ^ ^té' fomieltement '^étabti [par
fË^it de 1707 âp' confirmé ' par cfiluî de
1738 , il dev'oït néceflaîrement avoir un ef*
fet réel: que cet effet nWoic p^iété ftîpu-
lé dans TAdte de la Médiation parce qu*î^
ne Tétoît pas dans TEdît, & qu'il ne Tavoît
pas été dans l'Ëdit, tant parce qu'il réfuttoit
* j
14» ' H U I T r E M E
^ocs par lui-mêrae de la nature de vottQ
ConfUcu^oq , ^qa^. parce ; qjie le même Edit
çn ^tat^j^irpic 1^ f^r^é d'unç autre maoiere:
Q^e Qf 4rpît;tS; fon ,effet jnéeeflà^re donçpnt
ftul 4e l^^^^çon^ftance k, tof^s Jbi. autres, ét,Qit
Tunique ,& vépjtablç: équiyalcnc de ceaxjqu'x)n
SiVoit ôtés .^Ja Çqurgpoî^ç; qu? ceÇjéquwa-
lent , fuififant pour établir un folide éqiivlibre.
çqtre toutes les paijiesr de J'Etet,, montroit
la fageffe du ; Régleraient, qui i^ns cela feroîiî
l'ouvrage le pltj? inique qu'il fut poflîble d'i-
maginer : .^u>nfîn ks djfficujt^ qu'on éle- '
voit contre rcyerdçe de ce droit étaient
des diffi^tés. frivoles » qui o'exifloient que
d^i^s ]? mauvaîTe volonté de ceux • qui , ki
p^opofoîeat 3, .& qui ne . balanÇQieot en au*
c^ne manière les dangers. du droit négatif
àKpIu. Voila, Monfieur , ce que j'ai vou-
4
h faire i c'efl: si vous k voir fi j'^ réuflî.
L Et t R Ë. i0
NEUVIÈME LETtRË.
jAl crû, Monfieur, qu'il valoît mieux établir
dîreftement ce que j*avois à dire , que de
jn'attacher à de longues réfutations. Èntrepren-
dre un exameh fuivi des Lettres écrites de la
Campagne feroit s'embarquer dans une mer de
^fophifmes. Les faifir, les expolef feroit felôn
moi les réfuter; mais ils nagent dans un tel
flus de doflrine , ils en font Ii fort inondés »
>qu'on fe noyé en voulant les mettre à fec.
Toutefois en achevant mon travail je ne
puis me difpenfer de Jetter un coup d'ϔl fur
celui de cet Auteur. Sans aiialyfer les fubtîlités
politiques dont il vous leurre , je me conten-
terai d'en examiner les principes , & de vous
montrer dans quelques exemples le vice de ù:s
raifohnemens.
>
/
ISO N E :U VI £ M JE
. Vous en avez vûxindevast Vh
par rapport à n^oi : par rapport à votre Ré-
publique ils font plus captieux quelquefois ^ &
ne font jamais plus iblidjes. Le ^I & vérî*
table objet de ces Lettres eft d'établir le pcé-
tendu droit négatif dans ,Ia plénitude que lui
donnent les uforpations du Confçil. Cék à ce
r
but que tout fe xapporte^ ibit direâemenc^
par un eochaînemeut néçeflaire ;- foit indirec-
tement par un tour d'adteife, en donnant le
change au public fur le fond de la queftioo.
Les imputatjojas qui me ]:egardent ibnt dans
le premier ça$,, I^ Confeil m*a jwgé cofl^are^l/
Loi: des Répréfentations s'élèvent. Four éta«
,blk le droit négatif il faut éconduire les Ré-
préfentans ; pour les •écondudf e il faut prouver
qu'ils ont tort ; pour j^'ouver qu'ils ont tort
il faut foutenir que je fuis coupable ^ mais
coupable à tel pplnt que pour punir mon
LETTRE. 15X
I
ctmt il a falla déroger à la Loi.
Que les honunes fremiroient au piemier mal
qu^iii font , s^ils voyoient qu'ils fe mettent dans
la trifte nécdiité d'en toujours fakCf d'être
méchaos toiH^e leur vie pour avoir pu Têtre
un Qumient^ & de pouriuivre ju(qu*i la more
ie malheureux qu'ils aot une feis perfôcutë !
La qpefiîon de la préiidénce des Syndics
dans les Tribunaux criminels le rapporte aut
Ç^QOùà cas. Croyez-vous qu'au fond le Confeil
s'embarrafle beaucoup que ce foient des Syn«
dics ou des Ccmlèillâ's qui pr^fident, depuis
qu'il a fondu les droits des premiers dans touç
le corps ? Les Syndics , jadi9 çhoîfis parmi
tout le Peuple (â), ne Tétant idu$ que dans
1
(a) On pouflbît fi loin Tattention pour qu'il n^
eut dans œ choix ni exdufion ni préférence autre
que celle du mérite, que par un £dic qui a été a«
brogé deux Syntîîcs dévoient toujours être prk dans
le J}as de la Ville & deux dans te haut.
îSi I^ È Ù V I È M Ë
le Confeil y die chefs qu'3s' écoient des aucrâ
Magiftrats font demeurés leurs collègues^ &
vous ave2 pu voir clairement dans cette affîii-
re que vos Syndics ^ peu jalouîc" d'une autorité
pafTagere , iië fbnt plus que des GonfeillerSi
Mais on feint de traiter cette queftidn comme
importante , pour vous dîftraire de cèDe qui
Tell véritablement , pour vous laîfler croire
encore que vos premiers Magiflxats font tou-
jours élus par Vous , & que leur puîflanc6
eft toujours la même.
' LaifFoôs donc id ces qûeftions acceflbires
que, par la manière dont T Auteur les traite
on voit qu'il ne prend guère à cœur; Bor-
nons-nous à pefer les raifohs qu'il allégaë
en faveur du droit négatif auquel il s'attache
avqc plus de foin, & par lequel feul, adaiis
où rejette, vous êtes efclaVes ou libres.
L'art qu'il employé le plus adroitement ^ur
V. cela
: L E T T R E. 153
œk efl; de réduire en proponûons générales
un fyflême dont on verroîc trop aifëment le
fojble &îi en faifbit toujours l'application. Pour
YQUS écarter de Tobjet particulier il flate votr«
Wiour -.propre en étendant vos vues fur de
grandes quéllions , & tandis qu'il met ces quef-
tions hors de la portée de ceux qu'il veut fô^
duire, il les cajole & les gagne en paroiflanc
ks traiter en hommes d'£tat« Il éblouit ainfi le
peuple pour l'aveugler , & change en thefes
de pbilofophie de$ queflions qui n'exigent que
du bon fens, afin qu'on ne puifle l'en dédire,
& que ne l'entendant pas, on n'ofe^le défa-^
vouer.
Vouloir le fuivre dans Tes fbphifmes abflxaitt
feroit tomber dans la faute <]ue je lui re{>roche.
D'ailleurs , fur des queflions ajnfi oiaitées ou
prend le parti çi'cm veut fans avoir jamais
tort : car 11 entre tant d'élémens dans ces pro-
Partie ir. M
r ^ « ' ^
154 NEUVIEME
» ■
^ofidons, on peut les envîfager pat tafit dé
faces , qu'il y a toujours quelque côte fufceptî-
Blé de' yarpeft qu'on veut leur donner. Quand
bn fait pour tout le public en général unLi*
vre de politique on y peut philofcçhef à fori
aîfec TAuteur, ne voulant qu'être hi & jugé
parle&liommes înflruits dé toutes les Nations
i& verfés daris^la matière qu'il traite, abftrait
& générafife fans crainte; il he s'appéfentit
pas fur les détails àémentaîres; Sî Je parlois
à vous feul, je pourrois ufer dé cette ,inéchor
de ; mais le fujet de ces Lettres' întéreflê an
'peuple entier, 'compofé dans fon plus grand
nombre d'hommes qui ont plus de fens & de
jugement que de leéhire & d'étude, & qui
»
pour tfavoîr pas le jargon fcîentîfique n*cn
font que plus propres à laifir le vrai dans
toDte fa fimplicitd H %ut opter en pardi
<^ entré rintérêc de l'Auteur & cdul d&
' t Ë tt R Ë. isS
'Le£locr*-s j & qui veut fé rendre plus utile
doit fe réfoudi^ i, êoré moins éblouilTant. >
IJne autife fbtitce d'errmirs & de fauilàé
iipplicâtibns^ éO: d'avoir laidf^ les idées de ce
droit hégatif trop vagues trop ioexaâes; œ
J^l fert à dter avec un air de preuve les
esemples qdi s'y rapportent le moins ^ à dé^;
tourôer Vofe Condtoyens de leur objet par b
^ompe de céut «^u'oti leur prëfëbte^ à foule-
-vtx leur ot^kéâ contre leur ra^n^ & à lel
tonibler doucement de d'être pas plus libres
<^e tei maîtres du monde. On fouille avec
Ifniditidn dsuu robfciirité des fié(:Ies^ oh voufi
|)romêne avec faite chez les Feuilles dé l'an*
tiquité; On vous étale fucceffivémeht Athé-
liêS| Sparte^ Éôme, darthage; oh vdui jette
Hiix yeuk ie fable de la Lybie pour vods eîn^
l^chet de Voir ce qui fé palFe autour de vovA
' Qu'dii fixé avec précifion^ comme fal tâ^-
M 2
c
IS6 NEUVIEME
ché de faire , ce droit négatif, tel qae pré*
tend l'exercer IcConfeil; & je fbutîens qu'il
;n'y eut jatiais un feul Gouvernement fur la
terre où le Légiflateur enchaîné de toutes
manières par le corps exécutif, après avoir
livré les Loix fans réferve à fa merci , fut
déduit à les lui. voir expliquer, éluder, tranf-
.greffer à volonté , fans pouvoir jamais appop»
4er à cet abus, d'autre oppQfidbn, d'autre
adroit, ' d'jmtrè réfîft^nçe. qu!uû . jnurmure ino-
ti!e & d'impuiffantes clameurs. •
, Voyez en effet à quel point votre Anony*
me eO; forcé de dénaturer la queftion, pour
.y rapporter moins maI-à:propos fes exemplesi.
. Le droit négatif n'étant pas. , ditril page i ro ,
le pouvoir de faire des Loix , tnais d'empêcher
j^ue tout le monde indijlinêtement ne puijfe niettn
eji mouvement la puijfance qui fait les Loix , (^
ne donnant pas la facilité ffinn^er^ mais k pou^^
K>-
L ET T R .£• 157
iDaîr de s'ùppofer aux innoviffims^ , « kja dlreStc''
ment au grand- but que fe fropftjt une focUté
politique , qui efi defe conferver en confervant
fa conjiitution.' , -
Voila un droic négatif très, raîfonnable, &
dans le feps éxpofé cç droic eu, en effet una
partie il eilèoçielle de la conftitution démoQra-[
.tiguic, ,qq'y. feroMi généralement impoffitile
i}u>Ile fe. maintint 9 fî la FuiOànce Légiflâtive
pouvoit toujours être mife en mouvement pai;
chacun de ceui: qui la compofent. Vous çQfht
cqvez7 qu'il n*efl pgs difficile' d'apporter des
e:(emples en confirmation d'un principe- aulfi
certai.a. , . V
Mais Ccçtte jnûtio& n'ed point celle du
^oit négatif en: queftiOn , s'il n'y . a pas dans
€e. palTagQ un. fêul mot qui ne porte à faiit
p^ l'application que l'Auteur en veut faire,
▼pus pi'avoQerez que les preuves âe l'avanta*
M 3
ge d'im droit négatif tout diffétent né font
^as fort cpii^aige$ en fav^etu: de çdaâ qa%
yeat établir.
Le dr'oit négatif tiejl pas cslui dè^ftàre ckx
toix. Non t «lais- i eft çdui'id» fb-'paffei de
Loix. Faire de chaque' a£ie de fe volonté une
Loi parcîcalicre eft bien plusçoinmode gué
^eruivredes Loix-généiçiles, quanà mêmeoA
(Bftlferpit^foi-inêtïie llAuteorv^ j^sf ffempè-.
gkér i^t^out If^ ' monde -ifJ^ifî^Stmêi^ ne puijjh
metPri^-^ efu* fn&uifemént la- pi^fpimé^ ^ fàî^ Us
fjoix.' H fiîltoîk dk?e au Ke^ de cela i mais^d^eny.
^çhtr que'-qtli qu'e^câ foit ne pùiffi p^gér- ki
iofx contre h fuijfance qui les fubjugue.
'ilQûine ipnnad pas bifmBé]^^irmover.....
foiàcfxti fioti ? Qtti ^ eft-œ -^^^^ut eiopêcbei-
^ftnover celui cpù" ^ la force en^ftiaiô, âf: qui
ç'ëft obUgé cte rendre ' compte de' 6 çondaî^
^ à g^rfonioe? Mï/V le ppvir^ â^ppiébe^ M
kçm que .|'ê*iaiine. ÇçHiic ^i a la Puifl&n^f
iànce , de . pjieiî peu Là pfUicl»fie! . chofe à . §i
vdontré» & cela nis^.fiiijt jipi^Sr uoe ibn&cio«
. €«x tu .fcômr^e,^ bnt Jleçîl afTei attcmif
" * • •
progrès & pour en prntàr^k conféquence ^
n^oab,:.|di!irTiii^er q^^ ces deux partis
à.grendre; oUiJe s'of^xoTer. idTabocd à la prc^
tniefc -imavadûQ'qai if efl.jamais^ qu'une. bai-
^ateflei & aiDivitti. i^. mkè dé. gens, inquiet^
M4 '
i6o
N E'U VI E M E
brouillotn, poinâSéut^ coujoars prêtsàc^r*
dier querelle ; ou bien de V^lever enfin contre
un abus qui fe renforce i &^ alors on crie a
rinâovation. Jédéft^ que, qûdiq^:^os Mat-
^giSbtm -entreprennent,^ vous piiiffî^ en "^Hxu
■yoppofant îéviteï à la' fois ces deux repro-
ches. Mais à chô^x, préfê^ez'le pr^eti (9ia»
•^ùe fôis^ue le Cdftf^tiakere ^qudque u&gs , il
a. fon'but qaé^ pâibnhet «eli t^it» ,. & qu^^il Ib
"gande bka de tnoiftiifiri: ^Dat^ I& (ipaie,anê«
tez toujours toute ncuVèàufté ^pktîi& ou gran-
de. Si les Syndics étoient dans Tufàge d^èntrer
au Confeil du pied' droii?, & qniHls y yxxùaf-
fent entrev-du pied -gauche,! je dis qu^iLfaiih
droit 'Içs^'cR^empôchcr.'/ • -> '^i-:([ ^
Nous avons ici lacprepre biesTenffls^.^ la
âiGÎIité de condorre Je|ioua: & \e çoïKre :pas
.4b 'mécfaoderquei fuit àoive Aocêor.^/car afçH*
foezigu droit de Bipréferitatioficdesfiço^exa^
L ;E T T R E. i6t
^ qu'il applique au droit négatif • des Con*
fôk ; & Vous trouverez que & propofition
géuéiiale cfùmi&st isicore mieux là votre ap^
pJîcitiOn qu'à la' fieiflie. iJUdtm deyRépréfen^
tatim^ direz- v'0»s > n^étant pas le droit de faire
^3\TjnXjhaïs ^empèober qu0 h jfmjjance qui
Sii] ks adminiftrer naJâs^ tfainfgrefjh ^(^.ne daa^
nmt:p^UÏrU>f<nmît £îfm$tfer^nu4s' ds^^ydppofer
aux nouveautés ; va direStement au grand but
que fo pfopùfé une fociélé politique ; cebn de fe
cànferv&r en confervant fa^ténJHt^tion^ N'eftl
ce pas exaâenientià ç& que les Répréfeïitans
avoiént à dire, & ne.&mblé'rt-ii pat que l'Air^
teur ait raifonné pour eux ? ' Il ne ùjat .point
que les cobcs nous donnent le change fur les
idées.i.LeiMrétenda droit négatif du Con&il
cfl réellement un droit pofitif , & le plus pofî.-
tif 'même que roû puifle imaginer , puifqu'il
rend le petit Confeilfeul maître dire£l & ab^:
M 5
l6i N C' U' V. I_E;:M E
I
iblu de l'Ejat Su de cpqfes -les Loîx , &'1q
droit de ']R^éprérGrit^ioo\ii»^v idftR^ J&ti ^i
ièos D!eft lài > mwie:qm0i jis^: aépti£; ,: J3
coofidie uniquem^KVà .empâchdri la^ pui^oO^
exécutivei de den çxécàcer cxocttre ies \jûà. .
[ Saivéns les ' avwxx^dtf /^^A4tettt-i*3r Jï^Tpté^
pofitîons ' qu'il . parâifcnû5';i\a5fee?ttois mots Ajâûn
état |iréfent*.> < ...• v;-: \_ ^ c ;■ ^ ■" ■
• Comme:. il\n'y^ àùroft' fih^ A. ®^^ fiw w
£pat . ùù h cùxps fkargé^ d9^ittxécv$im dus Ifihb
pdfqu'il p9impoiffain€[ nxé(3ÊterS.tQfnmci des £crâ.
Jis\'V9lom& kst ^s^îy^mmifat^i:.. ..'. ..- :\. .
\ Voila ^ Je i|)£n{è;i>î2nitai3leaQv)d*apia^
lioùs aUex yoir on tabdèaii dé\fiuitain& ixû.^tL
V/fL.£tat ok k'^Fm^^txeiccroif^fam. te^ïe^lê^
:. UL E ir vr JR. :E.;i -ify,
ce qui a propofé que le ^o^ ^Qçerçàf labs
; Après çiVQÎr^mi£|)Qfii3(r.aûQ'«càrô^
•tIf*.q^e oeliû cbnt* ilsVgit^/M^oeiif' <s^'iikqiiiâce
^eapcoujfc 'pour fiv% ^pùAFto idaifc placer v/qe
fl)Ut là^dlçfBs ^4 prriic^e«^'af& œ
Tpontéiterai pas, . C^ qjuav^ Jkmtt. force, nigar
»
çle&9 qQQ^è ne'im'attsuritfm.pâfiii raivre;.r^ar-
•ce qa^Isfpnt.niap'jëldgné^uik'bpus. &^
çoipc:étrâiiïgerS'.à/J^ çuâliofa, 'ii;:.'^..' r ',U >'
L. Celui iftttl (S^ iFAtiglelèrxè quîxft fcrm ni^
^eosc.&qûfilcice avec raii^;e(ânmé.un':m6-
ddc-de ht-jufte-lpalance-des panvoirs-rcfpec-
pfs^ mérite un moment d'exatoài^ <S- je/ ne
y^
V
164 N.:E jU V I E M E
me permets id qu'après lai la comparaifon
,da petit au grand . : .
Ma^é la pmffknct 'Royale^ qui efiltf'ès grarh
àç ^^la dation rtn- pat crm^t dc^^onnet encore au
Koi la voix négative:, Mait cmme Une peut Je
pajffir longêem de ' la ' puiffanèe i lé^ativâ ^ Ëf
fuHl rCy aurait pas. de fâr^é-pàur lui à Firri'
•^er, cette fùtce ^.négatxop deji dans k fait qu^un
moyen i'arrêeef . Içt entreprifes de^ la.puijjhnce
'îégiJlcUive j & 4e Prince y iranquille^dis^rts la pof-
feffion ii patevêir étendu que h Çànfiitmum hn
e^^ Jera intéreffé.'à la protéger (b).
Sur ^ ce taiibmàeifient & fur rapplicatÎQQ
qu'on en veut faire v vous croiriez que le pou*
voir exécutif du JRoi d'Angleterre efl: plus
.grand que xélui du Confeil à Genève que le
-droit négatif : qii!a ce Prince efl femblable i
L ET T R E. 165
celai qu^afurpenc vos Magiftrars , que votre
Gouvernement ne peut pas plus fe paflèr que
celui d* Angleterre de h puiflance légiflative^
& qu'enfin Tun & l'autre ont le même intérêt
de protéger la conftitutxon. Si l'Auteur n'a
pas voulu dire cela qu'a*t*il donc voulu dire,
& que fait cet exemple à fon fujet?
Cefl: pourtant tout le contraire à tous é*
gards. Le Roi d'Angleterre , revêtu par les
Loix d'une fi grande puiflance pour les proté-
ger, n'en a point pour les enfreindre: perfon*
ne en pareil cas ne lui voudroit obéir, chacun
craindroit pour fa tête; les Miniflxes eux-mê-
mes la peuvent perdre s'ils irritent le Parle*
ment : on y examine fa propre conduite. Tout
Angloîs à l'abri des Loix peut braver la puif-
lance Royale ; le dernîer du peuple peut exiger
& obtenir la réparation la plus authentique s'il
dl le moins du monde ofFenfé ; Aippofé que le
I^Qce.ofàc.eitfreindre la Loi ims la moindri^
chofe^ rFirïfraâîon feroit à' ïiaùant . relevée ; il
f&: (mi drotc: & ferait fans |k»ivoir pour là
Chez vodsla PidfTaâcâ da. petit CopfeD €&
^Uolùé à tous égards ; il eft te Miniftre & lé
Prince j la partie & le Juge toot-à-la-fois:
il ordonne ôc il exécute ; H cite^ il Mit, il
emprifoûne ^ il juge , il ^unit lui-Mêoie : il a ht
jbrce en rtuin pour tout faire ; tdus ceax qu'il
employé font irtécherchableô ; il ne raid
tx^mpte de fà conduite ni de la leur 4 perfbti^
he j il n'a irien à crakidre du LégUlatetir^ ao^
quel il a feul droit d'duvrîr là bouche ^ & de-
vant lequel il ft'ita pas s^accufér* D n'efl: ja-
' mais contraint de réparer fes injuHices, & tout
ce que peut efpérer de plds heureux rinnocent
qu'il opprime, c'efl d'échapper enfin faîn &
ùkul^ mais fans fatisfaéUon ni dédomagemenc»
vl
L Eî T T R E. iSf
Jugez' de cette différence . par les faits hi
|>lus réceos/ On imprime à Londres un ouvra*
ge violemment fatyrique contre les Miniflres ^
le Gouvernement, le Roi même. Les Impri*
meurs font arrêtés» La Loi n'autorife pas cet
arrêt, un murmure public s'élève , il faut les
relâcher. L'affaire ne fimtpas là: les Ouvriers
prennent à leur tour le Magiftrat à pattie, âc
ils obtiennent d'immenfes dommages & in«
térêts. Qu'on mette en parallèle avec cette
affaire celle du Sieur Bardin libraire à Genè-
ve; j'en parlerai d-aprèSé Autre cas ; il fe
fait un vol dans la Ville; fans indice & fur
des foupçons en Tair un Citoyen efl: emprifott*
né contre les lois; fa maifon efl fouillée , on
ne lui épargne aucun des affronts &its pont
les malfaiteurs. Enfih fbn innocence efl re*
connue , il eft relâché , il fè plaint , on le laif»
fe dire ^ Se tout ell fini.
ï58 NEUVIEME
Sappoibhs qa'à Londses j'enfle ea le mat
heur de déplaire à la Cour , que ikns juflice &
fans raifoD elle eut Mî le prétexte d*un de
mes Livres pour le iaîje bçûler & me décré-
ter. Jauroîs préfeatà: requête au Parlement
comme ayant été. jugé contre les Loix j je
F-auroîs prouvé ; j'aurois obtenu la fatisfaélîon
la plus authentique y & le juge eut été puni ,
peut-être caffé.
Tranfportons maintenant M. Wilkes k Ge-
nève , difant , écrivant , imprimant , publiant
contre le. petit Confeil le quart de ce qu'il a
dit, écrit, imprimé, publié hautement à Lon-
dres contre le Gouvernement la Cour le Prin-
ce. Je n'affirmerai pas abfolument qu'on Teat
fait mourir, quoique je le penfe; mais fûre-
ment il eut été fai(i dans l'inflant même, &
dans peu très grièvement puni (c).
On
Il !■ M > ■ I — ■^.— I I -
(c) La Loi mettant M. Wilkes à couvert de ce
L E T T R E. 16^
»
t)tl dira que M. Wilkes étoit tnefiilMre dit
torps légiflatif dans fon pays ; & moi , iiô
récois -je pas aufli dans le mien? Il eft vmî
que rAuteur des Lettres veat qu'on n'ait au*
Gun égard à la qualité de Citoyen. Les rt*
gles^ dit-il, de la procédure font ^ doivent être
égales pour tous les hommes: elles ne dérivent
pas du droit de la Gté ; elles émanent du droit
de Phumanité (d).
Heureufement pour vous le fait tfefl pa»
fXBx (e) ; & quant à la maxime ^ c'efl fout
côté , il a fallu pour Tlnquiéteir prendre un autre
tour , & c'eft encore la Religion qu'on a fait inter-
venir dans cette afFairci*
(d) Pafge 54.
(e) Le drdit de recours i la grâce ft'âppârtenoît
par rÉdît qu'aux Citoyens & Bourgeois ; mais par
leurs bons oflSces ce droit & d'autres furent com*
înuniqués aux natifs & habitans , qui , ayant fait
caufe commune avec eux , avoient befoîn des mô-
mes précautions pour leur fureté ; lés étrangers en
font demeurés exclus» L'on fent auffi q^e le chokç
Partie IL N ^
170 NE U V 1% M É
des ^mots trèà hoimêtes cacher un fophifine
bien, cruel L'intérêt du Magiftrat , qui dam
more Etat le rend fouvent paitîe contre le
Gtayeû , jamais contre Tétranger , exige dans
h premier cas que la Loi prenne des pré«
de quatre parens ou amis pour afllder le prévenu
dans un procès Criminel n'efl pas fort utile â ces
i^Ierniers ; il ne l'eft qu*à ceux que le Magiilrac peut
avoir intérêt de perdre , & à qui la Loi donne leur
ennemi . naturel pour Juge. II eft étonnant même
' qu'après tant d'exemples çfFrxiyans les Citoyen» &
Bourgeois niaient pas pris plus de mefures pour la
it^xCLé de leurs perfonnes » & que toute la matière
criminelle relie, fans Edits & fans Loix » prefqoe
abandonnée à la difcrétîon du Confeîî. Uh fervice
pour lequel feul les Genevois & tous les homme&
juiles doivent bénir à jamais les Médiateurs eft l'a-
bolition de la queftion préparatoire. J'ai tpojouri
fur les lèvres un rire amer quand je vois tant de
beaux Livres, oii les Européens s'admirent & fefont
compliment fur leur humanité, fortir des mêmes
pays oii Ton s'amufe à difloquer & brifer les mem*
bres des hommes , en attendant qu'on fâche sUs
font coupables ou non. Je définis la torture un mo-
yen prefque infaillible employé par le fort pour
charger le fbible des crimes dont il le veut punir.
LETTRE. i7t
cautions beaacxiup plus grandes pour que lac^
cufé ne Toit pas condanné injuftemenc. Cetce
diftin6lîon n'efl; que trop bien confirmée par
ks faits» II n*y a peut-être pas, depuis Té- ,
tabliilement de la République, un feul exern*
pie d'un jugement injufle contre un étrza*
ger, & qui comptera dans vos annales com^*
bien il y en a d'injuftes & même d'atroces
contre des Citoyens? Du rede, il dt trèt
imi 91e les précautions ^'il importe de
praidre pour la fureté de ceux-ci peuvoïc
ÙM inconvénient s'étendre à tous les préve-
nus, parce qu'elles n'ont pas pour but de
lauver le coupable^ mais de garantir l'inno-
cent* Cdt pour cda qu'U n'efl: fait aucune
exception dans l'article XXX du règlement,
qu*on voit aflez n'être utile qu'aui: Genevois»
'Revenons à la comparaifon du droit négatif
dans les dçux Etats.
N a
î7a NEUVIEME
Celui da Roi d'Angleterre confifte en dent
chofes ; à pouvoir feul convoquer & diflbii-
dre le corps légîflatif , & à pouvoir rejetter
les Loîx qu'on lui propofe; mais il ne conGfta
jamais à empêcher la puîflance légîflative dé
connoître des infraâions qu'il peut, faire à la
Loi.
D'ailleurs cette force négative efl: bien tenï»
pérée ; premièrement , par la Loi triennale (/)
qui l'oblige de convoquer un nouveau Tarle^
ment au bout d'un certain tems ; de plus , par
fa propre néceffité qui l'oblige à le laiflcr
prefque toujours aflèmblé (g); enfin, par le
droit négatif de la chambre des communes,
qui en a, vîs-â-vîs dé lui-même, un noa
. (/) ,Deveniip feptennale par une faute dont .les
Angîois ne font pas à fe repentir.
' '{g) Le Parlement n'accordant Jcs -fub/îdes que
pour une année, force ainii le' Roi de les lui rede-
mander tous les ans^.
L E T T RE. 173
moins puiflant que le flen.
Ellç ;efl: tempérée encore par la pleine au-
torité .que chacune des deux Chambres une
/ois aflèmblées a fur elle-même ; foit pour
propofer , * traiter , difcuter , examiner les Loi?
& toutes les matières du Gouvernement ; foie
par la j)artie de la puiflance executive quel-
N
les, exercent & conjointement & leparéiçent;
tant dans, la Chambre .des Communes , qui
cqnnQit,.de8 griefs publics & des atteintes
pôrtées^ ^U3^;Loix, que dans la Chambre des
P;airs,. Jugjes fuprêipes dans les matières ; cri-
minelles ,' & furtout dans ceUes qui ont. xap-
port aiix crimes d'Etat. .
Voila, Monfieur, quel efl le droit négatif
du Roi d'Angleterre. Si vos Magiflrats n'en
réclament qyt'un pareil,, Je; vous confeille de
ne le leur pas contefter^ Mais je ne. vois point
.ijuel befpin., dans votre, fituatîon préfente,
N 3
J 4
y
174 NEUVIEME
r
\
ils peuvent jamais avoir de la puifTancë léglf-
latîve 9 ni ce qui peut les contraindre à la
convoquer pour agir réellement , dans quel*
que cas que ce puîflè être; puilque de noa*
velles Lois ne font jamais néceflaires à gêis
qui font au deflus des Loix, qu'un Couver*
nement qui fubfifte avec fes finances & n*a
point de guerre n*a nul be£bin de nouveaux
*
impôts, & qu'en revêtant le corps entier du
pouvoir des chefs qu'on en tire ,- on rend te
choix de ces chefs prefque indiffèrent.
Je ne vois pas même en quoi pourroit les
contenir le Légiflateur, qui, quand il exifle,
n'exifle qu'un inllant , & ne peut jamais décî«
der que Tunique point fur lequel ils l'inter-
rogent, ,
Il eft vrai que Te Roi d*Anglecerre peut fân
re la guerre & la paix; mais outre que cette
puiflance efl: ;^u$ apparente queréeOe, àx
/
L E T T^R E. 175
moîQS quant à la guerre , j'ai déj» fait voir ci*
jdevaot Si daos le Contr^â Social que ce n'ell;
1»$ de celfi qu'il s'agit pour vous, & qu'il faut
renoncer aux droits honorifiques quand on
ireut jouir de la liberté. J'avoue encore que ce
frinœ p6ut donner &, dter les places au gr^
de fes vues , & corrompre en détail le Légif*
lateur. Ceft prédfémenc ce qui met tout l'a-
vantage du côté du Conièil > h^ qui de pareils
moyens font peu néceflaires & qui voujs eii*
chaîne à moindres frais. La corruption eft ua
abus de la liberté; mais elle efirune preuve que
b liberté exifte , & Yqn n'a pas befoin de cor*
xompre les, gens que l'on tient en fon pouvoir ;
quant mx, i^aces, fans parler de celles dont 1«
Confeil difpofe ou par lui-même , où p^r le
Deux^Cesnt,, i} &at mieux pour les plus unpor-
tantes ; il lesremi^it de fes propres membres ^^
ce qui lui cfl: plw avantageux encore j car 09
N4
r»*
\
/
176 N E 'U V I E M E
«ft toujours plus ftir de ce qu on fait par fet
tnaîns que de ce qu'on faît parcelles d'aucrui
L'hiftoire d'Angleterre eft pleine de preuves
de la réfîftance qu'ont faite les Officiers ro^
yauit- à leurs Princes , quand ils ont voulu
tranfgreffer les Loîx. Voyez fi vous trouverez
ichez vous bien dès traits d'une réfiflance pa*
reille faîte au Cohfeil par les Officiers de l'E-
tat, même dans les cas ks plus odieux? Qui-
conque à Genève eft aux gages de la Répu-
blique ceffe à rînftanc même d'être Citoyen ;
Jl^n^ft plus que- Pefclavc & le fatellite des
vingt -cinq, prêt à fouler aux- pieds la Patrie
& lés Loix (îtôt qu'ils fordonneot. EniBn b
Loi, iguî ne lâiffe -en Angleterre kûeune pitf
iancb au Roi pour :niàl faire , lui en donne
une très grande pour faire le bien-; îl ne pa»
roit pas que ce foat dé ee côté^e le Cônfeiji
•çft jaloux d'étendre la fienac» . -
* LETTRE. 177
Les Rois d'Angleterre aiTurés de leurs a«
vantages font imérefiës à protéger la conflitu*
tien préfente, parce qu'ils ont peu d'efpoir de
la changer. Vos Magiftrats, au contraire,
lÛrs de fe fervir des formes de la yôtre pour
en changer tout à fait le fond , font intéreflës
à conièrver ces formes comme l'inflrument de
leurs ufurpations. hc dernier p$s dangereux
qu'il leur refle à &iré eft celui qu'ils font au-
joqrd'hui. Ce pas fait , ils pour;:oot & dire
èxfecore plus iùtérefTés que le Roi d'Angleterrer
à. cDnTerver h conflitution établie , mais pas
on motif bien différent. Voila tpu^e la parité
quç je trouve entre l'état politique de PAngle^
terre & le vôtre. Je vous laifle à juger dans
lequel efk la liberté.
Apres cette comparaîfon , l'Auteur , qui fè
plait à vous préfenter de grands exemples ^
TOUS offre celui, dç l'ançienae Rome, Q lq|
N s
t7S NEUVIEME
reproche avec dédain Ces Tribuns brouillons
âc féditieux : Il déplore * amèrement fous cette
orageufe adminiftraciôn le trifle fort de cette
malheureufe Ville, qui pourtant n'étant rien
encore à Téreftion de cette, Magiftrature ,
eut fous elle cinq cents ans de gloire & de
profpéricés, & devint la capitale du mon*
de. Elle finit enfin parce qu'il Ëiut que tout
finifte y elle finit par les ufurpations àt fes
Grands, de les Confuls/ de les Généraux qui
rënvahirent : elle périt par l'excès de fa ptiîf*
£mce ; mais elle ne Tavoît acquife que par la
bonté de fon Gouvernement. Oh peut dire
en ce fèns que fes Tribuns la détruifirent (i^).
(&) Les Tribuns ne fortoieot point de U Ville;
ils n*avoient aucune autorité hors de fes murs ; aiiffi
les Confuls pour fe fouftraire i leur infpeélîoo te'
noient-ils quelquefois les Comices dans la campagne.
Or les fers des Romains ne furent point forgés dans
Rome, mais dans fes armées , & ce fu( par leots
1 .
LETTRE. I7S)
r
Au refte je n'excufe pas les faute* du Peu-
pie Romain , je les ai dites dans le Contraft
" ■ I
conquÂtes qu'ils perdirent leur liberté. Cette per«
te ne vint don^ pas des Tribuns.
Il eft vrai que Céfar fe fervit d'eux comme SyK
la s'étoit fervi du Sénat ; chacun prenoit les mo-
yens qu'il jugeoit les plus prompts ou les plus fCirs
pour parvenir : mais II falloit bien qud quelqu'un
parvint, & qu'importoit qui de Marins ou de Syl-^
la, de Céfar ou de Pompée, d'06lav« ou d'Antoine
fut l'ufurpateur ? Quelque çarti qui l'emportât l'w
furpation n'en étoit pas moins inévitable ; il fallok
des chefs aux Armées éloignées , & il écoit ÇHtr
qu'un de ces chefs deviendroit le maître de l'Etat:
Le Tribunat ne faifoit pas à cela I:i moindre chofc.
Au refte, cette même fortie que fait ici l'Auteur
des Lettres écrites de la Caiijpagne fur les Tribuns
-ïu Peuple, avoit.été déjà faite eh 1715 par M. de
Chapcaurouge Confciller/ d'Etat, dans un Mémoire
contre l'Office de Procureur générsfl, M. Louis Le
Port , qui remplîflbit alors cette cbaige avec écltft ,
lui fit voir dans une très belle lettre en réponfe à
ce Mémoire, que le crédit & Faûtotîtë des Trlbui^s
avoient été le falut de la République, & que fa def-
Uuâion n'étolt point venue d'etix , ; mais des Côiv
fuis. Sûrement lé Procureur général Le Fort ne
prévoyoit gueres par q^ui fefoit renouvelle de nos
jours le fentiment qu'il réfucoit fi bien.
i8o NEUVIEME
Social ; je l'ai blâmé d'avoir ufurpé la puif-
fance executive qu'il dévoie feulement conte-
nir (i). faî montré fur quels principes le Tri-
tunat devoit être inftitué , les bornes qu'on
Revoit lui donner, & comment tout cela fe
pouvoit faire. Ces règles furent mal fuivîes à
Rdme; eBes auroient pu l'être mieux. Toute-
fois voyçz ce que fit le Tribunat avec fes a-
bus, que n*eut-il point fait bien dirigé? Je
vois peu ce que veut id l'Auteur des Lettres:
pour conclurre contre lui - même j'aurois pris
le même exemple qu'il a ch6ifi«
Mais n'flJlons pas chercher, fi loin ces iM-
très exemples , fi fafl:ueux par eux-mêmes, &
fi trompeurs par leur application. Ne laiflTez
point forger vos chaînes par l'amour -proi^re.
/-■ j
(i) VoTfez le Contraft Socîal Livre IV. Chap. V,
Je crois qu'on trouvera dans ce Chapitre quf eft
-fort court , quelques bonnes maximes fui cet^
matière.
LETTRE. m^
Itioç petits pour vous comparer à rien , ref*
tez en vous - mêmes , & ne vous aveuglez
point fur votre pofition. Les anciens Peuples'
ne font plus un modèle pour les modernes; ils
leur font trop étrangers à tous égards. Vous
lurtout, Genevois, gardez votre place, &
n'allez point aux objets élevés qu'on vous
préfente pour vous cacher l'abyme qu'on creu«
le au devant de vous. Vous n'êtes ni Ro-
mains, ni Spartiates; vous n'êtes pas même
Athéniens. Laiflez-là ces grands noms qui ne
vous vont point. Vous êtes des MarcHands ,
des Ârtifans, des Bourgeois, toujours occu->
pés de leurs intérêts privés de leur travail de
leur trafic de leur gain ; des gens pour qui
la liberté même n'eft qu'un moyen d'acquérir
fens obftacle & de pofféder en lÛreté.
* Cette fituation demande pour vous des ma*
:iimes particulières. N'étant pas oififs coni«
\
182 N E U V I E M E
me étoient les anciens Peuples , vous ne poup
vez comme em vous occuper fans cefle du
Gouvernement : mais par cela même que vous
pouvez moins y veiller de fuice y il doit être
infticué de manière qu'il vous (bit plus ai(3
d'en voir. les manœuvres & de pourvoir aux
abus» Tout fbin public que votre intérêt cip,^
ge doit vous être rendu d'autant plus fadle
à remplir que c'eft un foin qui vous çqùXq
& que vous ne prenez pas volontiers. Our
vouloir vous en décharger tput-à-feic c'eft
- vouloir ceflêr d'être libres. Il bat opter, dic
le Philofophe bienfaif^t, & ceux qui ne
V
peuvent fupporter le travail n'ont qu'à cher-
cher le repos dans la fervitude.
Un peuple inquiet défœuvré^remuaat^ &^
faute d'affaires particulières toujours prêt à
le mêler de celles de l'Etat, a befoin d'être
contenu, |e le fais; mais encore un coup la
L ]^ T T R E. 2&3
BoargeoiCe de Genève eft-elle ce Peuple-là?
Rien n'y refTemble moins; elle en e(l Tantî-
pode. Vos Citoyens, tout abfbrbés dans leurs
occupations domeftiques & toujours froids
fur le refte, ne fongent à Tintérêt public que
quand le leur propre, efl: attaqué. Trop peu
Ibi^eux d'éclairer la conduite de leurs chefs ,
ils ne voyent les fers qu'on leur prépare que
quand ils en fentent le poids. Toujours dif-
traits 9 toujours trompés » toujours fixés fur
d'autres objets » ils fe laiffent donner le diange
fur le plut important de tous, & vont tou*
jours cherchant le remède , faute d'avoir la
prévenir le mal. A force de compailêr leurs
démarches ils ne les font jamais qu'après coup«
Lrcurs lenteurs les auroient déjà perdus cent
fois fi l'impatience du Magiftrat ne les eut
ituvés, & fi, prefle d'exercer ce pouvoir fu*
prême auquel il afpire » il ne les eut lui-même
avertis du danger.
m
NÊtJVÎÊMË
Saivei l'hiftorique de votre Gouventemeîif ,
Vous verrez toujours le Coilfeil , ardent danj
fes entreprifes , les manquer le plus fouvent
par trop d'etnprefTement à les accomplir , &
vous verrez toujours la Bourgeoifie revenir en-
fin fut de qu'elle a l^flTé faire fans y mettre
oppofition.
En 1570. FEtat étoit obéré de dettes & af»
fligé de plufieurs fléaux. Comme il étoit maV
aifé dans la circonftance d'aflèmblér fouvent
Je Confeil général , on y propofe d'autorifer les
"Confeils de pourvoir aux befoins préfens: la
propbfition paffe. Us partent 4e - là pour s'ar-
roger le droit perpétuel d'étaSlir des impôts ,
& pendant plus d'un fiécle on les laiffe-feire
fans la moindre oppofition.
En 17 14. on fût par des vues fecrettes (k)
l'en-
(t) Il en t été parlé ci-devant
L E T T R E. 1^5
l'ehtrepriïè îmmenfè & ridicule des foflrtîfiçl-
tions, fans daigner confulter le Confeil gè'rtîé-
rai , & centré la teneur des Edks/ En cdnf?-
qoence de ce beau projet on établit pour dir
ans des impôts fur lefqiiels on ne le confulte
pas davantage. Il s'élève quelques plaintes;* on
les dédafgfie ; & tout fe tait.
En 1725 lé terme des impôts expire; il* s'a-
* . . ». '* «
.gît de les prolonger. Cétoit pour la Bourgeoi-
lie le moment tardif mais' néceflâîre de reveh-
cliquer fotl droit négligé fi lôtogteins. Mais la
• • • . . . ^ »
pefle de Marfetlle & la Banque royale ayatic
dérangé le commerce , chacun occupé de^ dahr
^ers de fk fortune oublie ceux de fa liberté.
Le Confeil, qui n'oublie pas lès vues ^ renou-
velle en Deux-Cent les impôts , fans' qu'il foît
quefiîon du Confeil généraL^
A réxpiratîon du fécond terme lés .Citoyens
ie réveillent, & après cent foixante ans^l'im-
Pmie II. O
r
.it6 NEUVIEME
jàokocty ils réclament ienfîa tout de bon 4ear
droit. Alors au Heu de céder ou tenaporifer, on
ftame me co^IpÂràtipa (/). Le complot &
</) II s'igiflbît de forincr , par une enceinte bar-
TÎcadée , une efpece de Citadelle autour de Téléva-
i tiop. furiaqucUe cft UHôtel-de- Ville , pour aflcrvir
de -là tout le Peuple, Les bois déjà préparéis pour
cette enceinte, un *plan' de difpofition pour la gar-
lair, :le$ ordres. donnés en conféquence aux Capital-
nés de la garnifon , des tranfports de munitions &
-d^ftpites der^Arfedat-âl'Hôtel-de-Vine , le tampon-
nement de vingtrdeux pièces de canon dans un boa«
levard éloigné , Iç tranfmarchement clandeftîn de
'J^l^ûçf^s autxes ; eq un tnot tous les apprêts de \^
plus violente entreprife faits fans Taveu des Con-
"^finlf par Jfc Syndic de la garde & d'autres Magif-
tratSy ne^urent fuffîre» quand tout cela fut décou-
vert, pour obtenir qu'on fit le procès aux cbupâ-
Jb}esh nrn)^^e,.quH>n iti^roqvàt ntti^mçtxt leur
projet. Cependant la Bourgoifie, alors maitrefle de
là Place-, J les laîffti paifibiemcnt fortîr fans troubler
Jetir retraitç ,,fans. IcnT;feire la moindre, infultç,
fans entier dans leurs maifons , fans inquiéter leurs
familles, fans touchée i Tien qui leur appartint. £s
tout autre pays le Peuple eut commencé jpaj jnaf-
"iâcrcr ces conspirateurs, & mettre leurs malfbûs au
^illtg«.
r y '
I E T T R E. 187'
découvre; les Bourgeois font forcés de pren-
dre les armes ^ & par cette violente entreprife
le Coniêil perd en un moment un fiéde d'u-
fbipation. .
A peine tout iemble pacifié quc^ ne pou*
Tant eùchiter cette efpece de défaite^ on for-
nae un nouveau conçloc S faut derechef re^
courir aux armes ; les Fuiilances voifînes in*
terviennent , & les droits ^nmtueb font enHn
réglés.
En 1650. les Conf^ inférieurs introduifent
dans leurs corps une, manière àt recueillir les
fiiffrages, m^Heure. qud celle qui eft établfeî
mais qui n'efl: pas conforme aux -Edits. On
contimie en* confefl général de fdvre l'ancien-
ne où fe ^^à&at bien des abus , & cela duré
clinquante ans & davantage , avant fjue lek
Citoyens ibngèrït à fe plaindre de la contra^
4
Ivention ou à ^demander Tintroduétion d'un pa-
O 2
^
i88 N E: U V I E M E
reil ufage dans le Confeil dont ils font mem*
bres. Ils la demandent enfin y & ce qu'il y a
d'incroyable eO: qu'on leur oppofe tranquille-
ment ce même Ëdit qu'on viole depuis on
demi-fîccle.
. En 1707. un Citoyen efl: jugé dandeftine-
soent contre les Loix , condanné , arquebule
daDs la prifon^ un autre ell: pendu. fur la dépo-
fitîon d'un &11I iaux-témoin connu pour td^
un autre efl: trouve mort« Tout cela pafle, &
îl h'en çfl; plus parlé qù^en 1734. que quel-
qu'iia s'avifè de demander au Magiilrat des
nouvelles du Citoyen arquebufé trente anâ
ftupar^vant. ; .
.- En 1736 <» érige des Tribunaux crimioeb
^ns Syndici .Au milieu des troubles qui ré«
gnoient alors, les Citoyems, occupés de tam
d'autres affaires , ne peuvent fonger à tout.
En 1758. on répète la même maniœuvrei odoi
LETTRE. 189
qu'elle regarde veut le plaindre ; on le fait tai-
re, & tout fe tait, En 1762. on la renouvel-
le encore (m) : les Citoyens fe plaignent enfin
I «i^MI 1 ' _p__.^ ^ ^
(m) Et à quelle occafîon ! Voila une inquifitioix
d*Etat â faire frémir. £(t-il concevable ^ue dans un
pays libre on puHiSe criminellement un Citoyen
pour avoir , dans une lettre â un autre Citoyen non
imprimée , ralfonné en termes décens & mefurés
fur la conduite du Magiflrat envers un troifieme
Citoyen ? Trouvez-vous des exemples de violences
pareilles dans les Gouvernemens les plus abfolus ?
A la retraite de M. de Silhouette je lui écrivis u-*
ne Lettre qui courut Paris. Cette Lettre étoit d'une
hardielTe que je ne trouve pas moi-même exempte
de blâme; c'eft peut-être la feule chofe répréhenfi-
ble que j'aye écrite en ma vie.. Cependant m'a-t-on
dît le moindre mot à ce fujet ? On n*y a pas mê-
me (bngé. £n France on punit les libelles; on fait
très bien ; mais on laifle aux particuliers une liber-
té honnête de raifonne^; entre eux fur les affaires
publiques , & il efl inoui qu'on ait cherché querelle
à quelqu'un pour avoir , dans des lettres relises
snanufcf ites , dit fon avis , fans fatyre & fans in-
veâive, fur ce qui fe fait dans les Tribunaux. A-
près avoir tant aimé le Gouvernement républicain'
faudra t-il changer de fentiment dans ma vieillefTe,
& trouver enfin qu'il y a plus de véritable liberté ^
^ans les Moti^rchies que dans nos Républiques f >
O 3
<^
ipo NEUVIEME
lannée fUivante. Le Confeîl i^ond ; vous ve^
nez trop tard ; Tafage efl: établi
. En Juin 1762. un Citoyen que le Confeîl
^voit pris en haine efl: flétri dans les Livres ^
& perfonnellement décrété contre TEdit l6
plus formel. Ses parens éjtonn^ demandent par
requête communication du décret ; elle leur efl
refufée, & tout fe tait. Au bout d'un an
d'attente le Citoyen flétri voyant que nul ne
protefl:e renonce à Ion droit de Cité. I^ Bour-
geoifle ouvre enfin les yeux & réclame contre
la violation de la Loi : il n'étoit plus tems.
Un fait plus mémorable par fon efpece,
quoiqu'il ne s'agiilè que d'une bagatelle efl;
celui du Sieur Bardin. Un Libraire commet
à fcn correlpondant des exemplaires d'un Li«
vre nouveau; avant que les exemplaires ar-
rivent le Livre efl: défendu. Le Libraire va
déclarer au Alagiflxat (a coromiilion , & de->
LETTRE. 191
• •
mander ce qu*îl doit faire. On lui ordonn*
d'avertir quand les exemplaires arriveront; ils
arrivent, il les déclare, on les faifitj îl at-
tend qu*on les lui rende ou qu'on les lui
paye; on ne fait ni l'un ni l'autre: il les re-
demande y on les garde. II préfente requiSte
pour qu'ils foient renvoyés, rendus, ou pa-
yés : On refufe tout. II peift (es Livres , '
& ce font des hommes publics chargés de
punir le vol, qui les ont gardés.
Qu'ott pefe bien toutes les circonftances
db ce fait i & je doute qu'on trouve aucun
V
autre exemple femblable dans audm Parle-
ment , dans aucun Sénat , dans aucun Con-
fdl , dans aucun Divan , dans quelque Tribu- '
nal que ce puiflè être. Si Ton vouloit attaquer
le droit de propriété fans raifon fans prétexte
& jufques dafls fa racine, îl feroit impoflîble
de sY pT&xàtt plus ouvertement. Cependant
04
\ »
' »
ipî NEUVIEME
TafFaire palTe, toat ]e monde fe tait» & fans
des .griefs plus grades il n'eut jamais été
queflion de celui-là. Combien d'suitres font,
reftés dans Fobfcurité faute d'occadons pour*
les mettre en évidence?
^ Si l'exemple précédent efl peu important
en lui-même, en voici un d'un .genre bien
différent. Encore un peu d'attention» Mon-
fieur, pour cette affaire, & je fupprime tou-
tes celles que je pourrois ajouter.
, Le 20 Novembre 1763 au Confeil général
affemblé pour l'éleâjon du Lieutenant & du
TrêfcM-ier , les Citoyens remarquent une dif-
férence entre l'Edit imprimé qu'ils ont & l'E-
dit manufcrit dont un Secrétaire d'Etat fait
le6lure y en ce que l'éleftion du Tréfbrier
doit par le premier fe faire avec celle des
Syndics, & par le fécond avec. celle du Lieu»
tenant. Ils remarquent, de plus, que Télec-
LETTRE. 193
tion du Tréforîer qui £bIon YEàk doit fe fai-
re tous les trois ans, ne fe fait que tous Iqé
Gx . ans félon YnÇzge ^ & qu aa bout des trois
ans^ on fe contente de propofer la confirma-,
tion de celui qui efl; en place.
^ Ces différences du texte de la Loi entre
le Manufcrit du Confeil & TEdit imprimé,
qa*on n'avoit point encore obfervées^ en font
remarquer d'autres quîs donnent de Tinquiétu*
de fur le refte. Malgré l'expérience qui ap-
prend aux Citoyens Finutilité de leurs Ré-
préfentations les mieux fondées , ils en foQt
à ce fujet de nouvelles , demandant que le
texte original des Edits foit dépofé en Chan-
cellerie ou dans tel autre lieu public au choix
4u Confeil, où Ton puifTe comparer ce tex«
te avec l'imprimé.
Or vous vous rappellerez, Monfieur, que
par l'Article XLU de l'Edit de 1738 il eft dit
Os
194- N Ë U V I Ê M E
qa on fera imprimer au plutôt un Code gé*
néral des Loîx de TEcat, qui contiendra tous
les Edits & Réglémensi II n'a pas encore
été queftion de ce Code au bout de vingt fîx
ans, & les Citoyens ont gardé le filènce (n).
'Vous vous rappellerez encore que , dans un
Mémoire imprimé en 1745, un membre prof-
crit des Deux-Cents jetta dé violens foupçons
fur la fidélité des Edits imprimés en 171 3 &
réimprimés en 1735 , deux époques égalée-
(n) De quelle excufe de quel prétexte peut-oo
couvrir Tinobiervation d'un Article auffi exprès &
suffi important ? Cela ne Te conçoit pa$. Quand
par hazard on en parle à quelques Magiilrata en
converfation » ils répondent froidement. Chaque E'
dit particulier eji imprimé ^ rc^enAïeZ'les. Comme fi
l'on étoit fur que tout, fut imprimé , & comme ii le
recueil de ces chiffons formoit un corps de Loîx
complet, un code général revêtu de l'authenticité
xequife & tel que Tannoce TÀrticle XLII ! Eft-ce
ainfî que ces Meil^rs reuiptifleQt un engag^ement
tufli formel ? Quelles conféquences (inîftres ne
pourroit-on -pas tirer de pareilles omiffions f
LETTRE. ï9S
ment fufjpeâesL . II dît avoir <xrf)âdonné fut;
des Edits manurcrics ces imprimés,, dans lef*
quels il affirme avoir trouvé quantité d'erreurs
dbqt il a fait note, & il rapporte les propres
termes d'un Edie dé 1556 y omis tout .entier
dans rimprîmé. A des imputations fî grave?
le Confeil n'a rien répondu, & les Citoyens
ont gardé le iGlençe.
Accordons , fî Ton veut , qi»e la dignité du-
Confeil ne lui permettoit pas de répondre a«
lors aux imputations d'un proicrit. Cette mê-
me dignité, Thonneur com^nromis^ la fidélité
fufpeâée exigeoient maintenant une vérifica*
don que tant d'indices rendoient néceflàire,,
& que ceux qui la demandoient avoient droit
d'obtenir.
Point du tout Le petit Confeil juftîfie le
*
diangement fait à l'Edit par tm ancien ufage'
auquel le Confeil général ne s'étant pas op^
Ï96 NEUVIEME
pofé dans ion origine n'a plus droit de s*op^
po&ï aujoard*hui.
II d<»n6 pour raifon de la différence qm
efl: entre le Manufcrit du Confeil & l'inopri-
më^ que ce Manufcrit ^(l un recueil des &
dks avec les diangemens pratiqués , & con-
ientis par le Iilence di) Confeil général ; aa
liea que Timprimé n efl: que le recueil des
mêmes Edits^ tds qu'ils ont pafle en Confeil
général
jQ juftifie la confirmation du Tré(brier cou*
cre TEdit qui veut que Ton en élifè un au-
tre ^ encore par un ancien ufage. Les Cito-
yens n'apperçoivent pas une contravention
aox Edits qu'il n'autorife par des contraven*
cicMQS atttérîeures : ils ne font pas une plainte
qu'il ne rebute, en leur reprochant de ne
•'être pas plaints plutôr.
Et quant à b communication du tâcte ori- '
LETTRE.
»P?
ginal des Loix, die eft nettement refiifée (o);
foit comme étant contraire aux règles; Ibit par-
Ce que les Citoyens & Bourgeois ne Mvent
^^^m^^t^Êém
(«) Ces refufc fl 4ars & fl fùrs à toutes les Ré*
préfentations les plus raifonnables & les plus juftes
paroîfTent peu naturels. Eft -H concevable quel©
Confcil de Oeopve , cogjpofé dans fa majeure par.
tie d'hommes éclairés & judicieux, n'ait pas fentî
le fcandale odieux & même eflRrayant de refufer â
des homjnes libres, â des membres du ^-égifla^eur,'
la communication du texte authentique des Loix &
•4e fenentçr aîQfî comme à plaifîr des fbupçoiis pro^ '
duits par Tair de myftere & de ténèbres dont il
VenVironne fans, ccfle à leurs yeux ? Pour moi , je
penche i. croire que ces refus lui coûtent, mais
qu'il s'eft prefcrit pour règle défaire tomber l'ufa-
^edes RépréCbûtattons , par des réponfes conftaïa-
ment négatives. En effet eft-il à préfumer que les
hommes les plus patiens ne fe rebutent pas de de«
mander pour ne rien obtenhr ? Ajoulea la propofi-
tion déjà faite en Deux-Cent d'informer contre les
Auteurs des dernières Répréfentatîons , pour avoir
ufé d'un droit que la Loi leur donne. Qui voudra
-déformais s'expofcr. à des pourfuites pour des dé-
ïnarches qu'on fait d'avance être fans fuccès V Sî
x'eft là le plan que s'eft fait le petit Ck)iifeil, il
faut avouer qu'il le fuit très bien. ^
\
t
ip8 N E ,,V ;V .1 E ME
connoître iautre texte des Loix aux le Uxtè
imprimé^ quo^ue le pedc Confeil en fuîye uo
autre &. le fade fuivre ei^ Confiai général (f }•
Il eft donc contre les règles ^ue celai gui
a palTé un aéle ait comnumîaidcHi de rori^-
nal de cet a6te , lorfque lès variantes dans les
copies les lui font foupçonner de faffificatiofi
ou d'incorr^âion, ^îl dX dans h règle qu'on
ait deux différens textes des mêmes Loix^
l'un pour les. particuliers & Taut^e poof le
Gouvernement l Ouîtes-vous jamais rîea de
femblabie? Et toutefois fur toutes ces décou*-
vertes tardives, fur cous ces refiis révcricans,
les CitoyeQs , écondujits dans leurs demandes
les plus légitimes , fe taifent , attendent , Se
demeurent en repos.
»»»«—— ■ I ii «M
, (f) Extrait dès Regiftres du ConfeU' du 7. Dé-
cembre 1763 en réponfe aux Réptéfentations ver-
baU$ fakos le ^i Novembre . par ûx Citoyens ou
Bourgeois.
L X T VT RE- 199
' Vaib f Mohfîeur » dès faits notoires dans
votre Ville, & tous plus connus de «voos que
de moi ; f en pourrais àjoatér cent autres,
fkns compter ceux qui me Ibnt édiapés. Ceux-
ci fuffiroDt pour juger fi la Bom^eoifie de
Genève e& ou fut jamais^ je ne dis pas re*
muante & féditicuÊ^ mais, vigilante , attenti-
ve , radie à Vémouvoir pour, défiendre les
droits les mieuic . établis & le :.plusi ouverte*
ment attaqués?
On nous dit (fi^une iJgfhn vive^ ingénîtufê
& très occupée de fes droits foUtiques aurait ttft
extrême befoin de âormer à fon Gùuvememen»
une force négative (q). En expU^ant cecXQ
force négative on peut convenir du i»rinci-
pe; msds qjd-ce à vous qu'on en veut faire
Inapplication?. A-t-on donc oublié qu'on vous
1 .11. 1 ■ '■■
(s) Page 170.
aoo NEUVIEME
donne aîHain plus de fâng'-froîd qu'aux autre*
Peuples (r) ? Et comment peut-on dire que
cdoi de.. Genève Voccupe beaucoup de &s
droits politiques , quand on voit qu'il ne s'en
occupe jamais que tard, ayec répugnance, &
ièulement! qwDd le péril ^lë plus preflànt Ty
contraint,?. De fbïxe qu*<en n^attaquant pas fi
brtifcpièmfic^ les droits jde ia'ficwrgeaifie, ^
ne tient qu'au Coxifeil 'quelle ne s'en occupe
jamais;
V Mettons <in moment en paisallele ks deux
pSffds pour juger duquâ Faflivité efl le plus à
crainclre^ & où dok être placé le droit négatif
pour, modérèf cette a£i!ivîté.
' D'ufi côté je vois un peuple ûrès-peu nom-
breux» paifible iSi Çroid , con^fé d'honmies
; . labo*
(0 Page 154*
LETTRE. HQt
laborieux, amateurs du gain» fournis pour le^r
propre intérêt aux Loix & à leurs Minifbes ,
tout occupés de leur négqçe ou de leurs mé-
tiers ; tous ) égaux par leurs droits ^ peu
dilUngués par^la fortunes n*ont enjtre eux jjfi
chefs ni çliens ; tous , tenus piu: leur cpair
merce par leur état par leurs biens dans une
grande dépendance du \Magi{bat , ont à le
ménager; tous crsugpent de lui déplaire; s'ils
veillent fe mêlçr d^s affaires publiques c^eft
, ......
toujours au préjudice des leurs. Diflraits
d'un côté par des objets plps intére0àQs pour
leurs familles; de Fautre, arrêtés par des coq*
iîdérations de prudence » par Fexpérience dis
tou9 les tej(Ds, qui \&aT apprend combW daqs
un aufli pietit £tat que le vôtre od tout parti-
culier d[b incdEuomeot fo^s les . yeux du Cou-
feil il eft dangj^eux de roffenfer, ils font poiv
tés par les raij^i les plu< fortes à tout faot*
VartU II. ?
262 N E li V I É- k Ë
fier à la paîi ; car c'efl: par elle feule qu'ils peu-
vent profpérer ; & dans cet état de chofà
diacun trompé par (bn intérêt privé aîme en-
tore mieuz êtfe protégé que libfe, & fait û
tour pour faire Ton 'bien. ♦
De Tautre côté je vois dans une petite
Ville, dont les affaires font au fond très peu
de chofe, un corps de Magiflràts indépendant
âc perpétue] , prelque oifif paf état» faire fa
principale occupation d^un intérêt très grand,
'& très naturel pour ceux qui commandébc,
«
c'eft d*àccrôitre ihceffamnient Ton empire ; car
ràmbition' comnie l'avarice fê lioùrrît de fès
avantages , & 'pitis oh étend fa' puifBlnce , jfliis
on cfl: dévoré du défîr de tout pouvoir. Sains
^C'elTe attentif à marquer des dÛtaûbes- trop peu
fenfibles* dans '(es égadt de nàiffance » il ne
» - «i^ • ' /^
'Voit en eux que fes "inférîéuis , & bfûlè d'y
Voîr fes fujéttf ' Armé dé toute la fôïcè pubtf
Le t t à e: ^y
^e; dépQncaîre de toute Tautorité, interprète
& dirpeaf^ceut des Loîx qui le gênent , il s'en
fait une arme offenfive & défenfive , qui le
%
irend redoutable , re(pe6lable, iacré pour totu
bèux qu'il veut outragisr. C'efl; au notn même
de Ik Loi qu'il peut la tranfgreflèr impunéi
nient. Il peut attaquer la côhflitution en feî:
gnant de là défendre ; il peut punir comme
• - ...
m rebelle quiconque ofe 1^ défendre eri eSeu
Toutes les entreprifes de ce ccttrps lui dev;en*;
nent faciles; il ne laiiTeà perfonne le droit dd
les arrêtei^ m d'en conis^îcre: il .peut agir , dif-
. • ' ■ *^ " »
fêter 9 fuij^ndrei il peut féduire effrayer pu*
iiir ceux qui lui réfiflenti & s'il daigne entf
• • • • ■■ *
pltoyer pour cela des prétextes , c'eft plus par
• . ' • > *^
bienféancè que par néceflité* II à donc la vo-
lônté d'éteodre fa puiffance , & le moyen d^
parvenir. à tpijC ce qu'il veut Tel eft l'état ré*
• ' y.
laltif du petit . Coiïfeil & 4ç la BourgeoiCe aé
Pi
/
ftQ4 NEUVIEME
Genève. Lequel de ces deax corps dok avoir
le pouvoir négatif pour arrêter les entreprifès
de Fautre ? L^Auteor des Lettres aflure que
c*eft le premier.
Dans la plupart des Etats les troubles ister^
nos viennent d'une pc^ulace abrotie & (I:upi«
de , échauffée d*abord pv d'iûfiipportables
vexations > puis ameutée en fectet par des
brouillons adroits , revêtus de quelque zmaati
^'ils veulent étendre.- Mais eft-il rien de plus
faux qu'une pareiQe Idée aj^iquée à la Bour*
geoifîè de Genève » à pi partie au moins qui
fait face à la puiilance pour le meuntien des
Loix? Daùs tous les tén^ cette partie a tou*
jours été Tordre moyen entft les riches & les
pauvres, encre les chefs de TËtat & la popu*
hce. Cet ordre, compofô d'hommes à-pea-
près égaux en fortune, «n état, en lumières,
^'efl; ni aflez élevé pour avoir des
-<i trt'ii
L E T T R R 20S
m aflez bas pour n'avoir ti^ à perdre. Leur
grand intérêc leur îméi^t comnuin efl: que les
Loix fbient obfervées, les Magiibats relpec*
tés, que la cooflicution Te foutlemie & que
r£tat fok tranquille. Perionne dans cet ordre
ne jouît à nul égixcd à'une telle iupâioricé
ikr les aittres qu'il puiflê les mettre en jeu
pour fon intérêt particulîen Cefl: la (dus faine
partie de la République, la f^ile qu'on foit af-
furé ne pouvoir dans fa oosiduite fe propoiêr
d'antre objet que le bien de tons. Auffî voit^-
on toujours dans leurs dém^ches communes
une décence, une modeftie, une fermeté re&
pe6faieuie, une certaine gravité d'hommes qui
fe fentent dans leur droit & qui fê tiennent
dans leur devoir. Voyez., au contraire, de
quoi l'autre parti s^étaye ; de gens qui nar
gent dans fc^ttknce, & du peuple le plus ab«
jet. EStrCC dans ces deux extrêmes , fun
P3
\
;
^otf NEUVIEME
pont acheter l'autre pour fe vendre , qu'oi^
àoit chercher l'amour de la ja(Uce & des loïsit
Ç'efl: par eux toujours que l'Etat dégénère: Le
riche tient la Loi dans (a bourfe ^ & le pauvre
^ime mieux du paki que la liberté. II fufBt de
comparer œs dçux partis pour juger l^uél
doit porter aux Loix la pren^ere atteinte ; &
cherche2; en effet dans votre hiftoire fi too^
les compbts ne font pas toujours venus du cô*
«
té de la Magiftrature ^ & fi jamais les Cito-
yens ont eu recours à la force que lorfqu'il l'a
fallu pour s'en garantir 3
On raille, fans doute, quand, fur les confé-
qaences du droit qu^e réclament vos Concito-
yens , on vous répréfente FËtat en proye à la
brigue, à la féduâion. , au premier venu. Xjù
dioit négatif que veut avoir le Conieil fut ia-
connu jufqu'ici; quds maux en e(l-il arrivé?
U en fut arcivé. d'affreox s'il eut vouki s'y ce-
X
L E T T R E,
«97
(lir quand la Bourgeoide a f^jic valoir le fien.
. llécorqua rargqmencqu'oo tire de deux cents
a^ns de proipérîté ; que peut-on répondre? Ce
(jouvememeot, diro^ - vous ,. .établi par le
tems, Ibutenu par tapt de ticses , autorifç p^r
m fî lox^ ufage, con&cré paç fe^ Tuccès, &
où le drpjit négatif des Confeib fut toujours
ignoré, ne vaut-il pas bien c^autre Gouvet-
.nement arbitraire , dont nous ne coonoiflbns
çncore ni les propriétés, ni fes rapports avec
notre bonbeur, â( où la raifon ne peut Jioujs
çaontrer que le coinble ^e notre, miferç ?
Suppoiêr tous lés abus dans le parti qu'oa
attaque & n*en fuppofer ajucun dans le fijen^
eft un fophifme ïii^n, grofli^ & bien ordinaî^
]:e, dont tout homme fênfé doit fe garanjtii^
Il faut fuppofer des abus de part & d'autre,,
parce qu'il s'en gliffo^par tout; mais ce n'efl
pas ^ dire qu'il y ait égalité dafis leuri coi^
P 4
I
fo8 NEUVIEME
féquences. Tout abus eft un mal, fbovent iné-
vicabie , pour lequel on ne doit pas proloire
ce qui eft bon en foL Mak compares , &
vous trouverez (Tun côte des maux l&rs , des
maux terr2)]es fans borne Ôc fans fin ; de Tan»
tre Tabos même diffidie , qui s'H éfl grand fera
paflâger, & tel, que quand 3 a fièu if poxte
toujours aveqdii fon remède. Car encore une
fois il n'y a de liberté poffible que cbns Tcb*
fervation des Loix ou de la volonté gétaénh
le, & il n*efl pas plus dans la vokmté géné>
raie de noire à tous , qde dans h volonté
particulière de nuire à foi-même. Mm ibp-
pofi^s cet abtis de h liberté auiB naturel que
Tabus de la puiflance. O y aura tcràjours cette
£fiîérence entre l'un & fautre, que fabos de
k liberté tourne au préjudice du peuple qui
en abufe, & le puniffitm; de fbn propre tore
h fbrce à en chercher le remède; àinfi de ce
LETTRE. 201)
côté le mal n'eft jamais qu^une crife, 3 ne
peat faire on état permanent. Aa lieu que
Tabut de la puiiEmce ne tournant point aa
préjudice da poiftant mais da foible, eft par
la nature iàns ntefore fans frein fans limites:
Il ne finit que par la deftniâion de celoî qui
ieul en relient le mal. Difbns donc qu'il finit
que le Oonvemement appartienne au petit
nombre » nnfpeâion fur le Gwvemement k
la généralité , & que fi de part ou d*autre
Tabus tfk inévitable » il vaut encore mieux
^a*un peuple foit malheureux par fk fauté
qu'opprimé fous la main d'autrui«
Le premier & le plus grand intérêt pdbliç
êfl; toujours la juflice. Tous veulent que kl
conditions fbient égales pour tous, & h jut
cice n^eA que cette égalité. Le Citoyen ne
teut que les Loix Ôc que robj^êrvation dei
Lois. ChaqiMK particulier dans le iieople ùm
y 5
aïo N E U V I E M B
bien que &*il y a 4es ei^cepûon^ ^ elles m iç-
font pas en fa taveur« Ainlî tçut craignent les
excep^ops, & quîcrainc les eicceptions sûm^
la Loi. Chez les Chefs c*ell: tojice autre chpfc:
leur état même eft un éc^t de préférence, Sç
^8 cherchent 4es p;référeQce$.par tout (i). S'ils
yeuleot doi Loijt , ce n'dS: pas pour, leur obéic ,
ç^ell ppur en être les attitrés. Us veulent des
y'
Loix pour fe mettre^à leur place & ppur fe
faire craindre^ en leur nom. Tout les favo-
^ife dao^ ce prc^et. Ils fk fervent des droits
■ ■ ■- -■ — ^ - - ^
^) Ln juftîce dans le peuple éft une. vertu d'é-
tat ; la violence ft la Tyrannie eft. de même dans le$
Chefs un vice d*état. Si nous étions â leurs places
BOUS autres particuliers \ nous deviendrions comme
çux violent uruxpateur^ iniques. Quand des Magi^
trats viennent donc nous prêcher leur intégrité leur
âodératlon , ienr juftice , ils nous trompât » s'ils
veulent obtenir aînfi iâ confiance que nous ne leur
devons pas x non qu'ils ne puifTcnt avoir perfonnèf-
lement ce» vertus dont ils fe vantent ;. mais alors 11^
font une exception ; & ce n*eft pas aux exceptions
4uè la ]^oi ^oit ^ivpir égard. ' * ^
LETTRE.: «Il
^ qu'ils ont pour ufurper fans rifque oeûx qu'i)B
n'ont pas. Ccnnipe ils parlent tpqjom^ au nom
4e la Loi, même en h violant, quiconque off
h défendre contre eux efl un fëditjcu}; un %er
bdle: il doit périr , & pcmr eox» toujours fô^s
de rimpQnité dans lew^s entreprifès, le pis qui
' .leur arrive efi: de fie pas réûffîr. S'ils ont
befoin d'af^uis, par tout iis en trouvent*
C'efl: une ligue naturelle «^ue ci^e des fo^^^,
& ce qui fait la fbiblefle des foibles efl; de
ne pouvpir le liguer ainfî. Tel eQ: le deftin
.du peuple d'avoir toujours au dedaiis ^ au
: dehors' fes parties pour juges. Hisureux! quand
il en peut trouver d'afTez équitables poux lie
protéger contre leurs propres maximes , cpn-
j^t ce fentiment fi gravé dans le cœur hu-
.main d'aimer & favorifer les intérêts feinbki*
blés aux nôtres. Vous avez eu cet avantage
1^ ioki ^ cç.fut çon«ç tjBute «teote. Quand
81* NEUVIEME
h Médiation fut accepta , on voas crut é^
Ct9tk: mais voi» entes au d^ea^eaxs édai-
1^ & îexïSÊSSf des Médiateurs intègres & gé*
néreuz ; la juftice & la vérité trkMiphereat
FoiflSeK-Toas toe henreuic deux fois! vous
«urejs jouS d'un bonheur bien noe » & dont
vos o^reflèurs ne paroiflent guère sBarmés.
AjNrès vous avonr étaâé tais les maux ima-
ginaires d*«i droit adfi ancien que votre
Cooftitutkm & qui jamais n'a {urodhiit aacœi
fiud^ on palfit on nie ceux du Dn^it aouveau
q|Q'on oforjpe ^& qui fe font fentk dès aujour-
d'hui* Fcxrcé d'avouer que le Gowernemenc
peut abufêr du droit négatif jufqd'à la plus
intolérable t^frannie , on affirme que œ i|tit
arrive n'arrivera pas, & l'on change en p(^
fibiiké ians vraifemUance ce qui fe pafle w-
jourd'hui fous vos yeux. Perfonne» ofe-^-on
diie 9 ne dira que le Gouvernement ne fefc
LETTRE. ti3
ëqukable & doux; & rœiarqaez que cda ii(
dit: en répoofe à des R^éfentadont où Toa
fe plaint ^ hijuftices & des violences da
Goaveraemen€. Cf& là vraioient ce qu'on
peut içpeller du beau ftyle : c'ed l'éloquence
de Périclès » qui renverfé par Thucydide k
h kttte, pFQuvoit «ne Ipeéhtteurs que cetok
lui qui i'avoit terrafle.
Ainfi donc m s'es^Kurant du bien d'autmi
fans prâexee, ep emptifonnant fans n4ibn lep
innoceng , en fléQrijQQmt un Citoyen fans T^ouïr ^
en jugeant illégalement un autre » a proté»
ge^jt: tes livres obfcttes » ^i brûhnç cenc
qui reipirent la vertu» en perfécotant leurs*
nuteurs^ ea cachant le vrai texte dés Loîx^
tt refuf»it lep fatîdBi£tions les plus juftes^
en exer^t le plus dur defpodime» en dé*^
txvi&xÀ la liberté qu'ils devrdetc défendie^
en opprimant la Patrie dont ib dejmcolent ê-
414 N-'-Ê ■ O* V i E M É-
tre les pères, ces Meffieûrs fe font complu
ttient à ^éu:)c-tnêmès fdr h grande équité dà
feurs jugeméns, ils s'êxtàHent fat la douceur
de leur adminifbrsciob , fls affirment avec con-
fiance que tûat lé inonda elt de leur avis fur
te point. Je douté fort, to^efoîs^ que câ
atis foit le TÔcrë , ' & je fuis fâr au màiîA
qu*il n'efl: pas celui des Répréferïtans, ,
(^e l'intérêt particulier nd me rende poinC
Ihjufte. Ceft dé tuas nos périchms celui cdri-
lit lequel je me tiens le plus en garde &
ttoquel j^efpere avoir lé mieuîc réfifté. Vottè
Magiflrat tû équitable d^s lés chofes indii^
féremes, je le Croîs potté même U l'être tofl-
jours; fës pîaîces font péàjucrati^s î il rend li
* • *
jiAkt ât-nt h vend point > iléft: perfonnelle*
ttient intégré ;^ défihtéreflë , & je fais que daiÀ
ce Confdl -û defpodique il règne encore de ÏA
droîtu;e i& des vertus, ta ' vo«s mOfltradC
L E T 1* k-i: ii'i
W ccfaféquences du droit négatif je vous ïî
khoins di( ce qu'ils feront dey enus Souverains,
que ce qu'ils continueront à faire pour Têtré.
tJne fois reconnus tels leur' intérêt fera d*êtr6
toujours: jtiftés/ & ilTeft dès aujourd'hui d'ô-
ire jtiltes le plus fbuvent: mais malheur à
^conque olera retoufir acdc Lois encore ,
& réclamer la liberté ! Cefl: contre ces infof- '
tunés que tout devient penhis, lé^itinie. Ué-
^uîté y la vertu y l'intérêt même ne tiennent
p^oint' devant Yàxtmt de la doiiunatibri y &
celui qui fera jufte étant le maître tf épargfîe
aucune injuftice pour le devenir.
Le vrai diemin de la Tyrannie n*eft jioînt
d'attaquer directement le bîeiï f)ublic ; ce ferdît
*révetller tout iû monde pour le défendit} ma5$
"6*el1: d'attaquet fucceffiv-ement tous fes défen-
Teuts, & d'effrayer quiconque ôferoit encore
arpîrerà Têtré. Perfuacîez à tou? qvié l'intérêt
Èt6
NEUVIEME
public n*eft celui de perfonne ^ & par cela
• ^
feul la fervicude eft établie ; car quand diacuiî
fera (bus le joug où fera la liberté commune*?
Si quiconque ofe parler eût écrifé ians Hq*
fiant même , où (eroot ceux qui voudront Ti-
miter^ & que) fera forgane de la généralité
quand cbàque individu gardera &p (Ilenœ ? Le
GouvemeiBent févsK donc contre les zélés
& lèra jufie avec les «utres^ Ju£|i'à ce qu'il
puUTe être inju0:e ^vec toui impunément.
Alori fa ji^ce ne fera plus qaune écono*
mie pour ne pw :di(fiper ians raifbn fbn
propre bien*
II y a donc un fens dans lequel le Confdl
cCk julte» &'doit Têtre par intérêt: mais il y
00 a un dans lequel il efl: du fy^ême qu'il s'eft
Eut d*êtie fouverainement jinjulie, âr m^le ex-*
cmples ont du vous app2:endre combien Va pio*
des Loix efi infuffîlante contre la haï-
\
t B T T K K |è|
ne dû Magîfln& Qae fera-cè, Ior%ê deve*
nù feul maître àbfolu psar fon droit négatif il
«
Ae fera plus gêné par rien dans fâ conduite y Ô6
ne trouvera plus d'obflàde à les paflîons?
Dans un fi petit Etat oii nul ne peut fe eâcfatr
dans la foule , qui ne vivra pas alors dans d'é-*
temdles frayeurs^ & ne ientira pas à chaque
inilant de fa vie le malheur d'avoir fès égauJS
péar maîtres? Dans les grands Etats les par-»
ticuliers font trop loin du Prince & des chef»
pour en être vus , leur petitefle les fauve ^ &
pourvu que le peu{rie paye on le laiiFe en paix.
Mais vous ne pourrez faire un pas ikns fentir
le poids de vos fers. Les parens ^ les aitûs , les
protégés i les efpions de vos maîtres feront
pliis vos maîtres qu'eux; vous n'bferez ni dé«
fendre vos droits ni réclamer votre bien i
crainte de vbus faire des ennemis ; les recoins
ks plus dbfeors de pourront tous dérober à là
Partie IL <^
Tyrannie > il faudra nëceC&ireméht en être f^
tellrte on vîâime : Vous fen tirez à la foB
rcfdavage poHtique & le cîvîl , à peî&é' ofe-
rcz-voas refpîrer en liberté; Voîïa , Monfieap,
où doit naturellement vous mener Tufirge du
droit négatif tel que le ConfeQ fe TaîToge. Je
crois qu'H n^eti voudra ms faire un u%e auf&
funefte , mais 3 le pouira cert»nemem , & la-
leule certitude qu'il peut impunément être in-
3ufl:e,\Vous fera fentir \ts mêmes maux que s'il
rétoir en effet.
• Je vous d montré , Monfîeur, Fétat de vo-
tre Gonftitucion tel qu'if fe préTénte à mes
• • • .
yeux. Il refaite de cet expofé que cèttç Con-
fKtutîon, prife dans (on enfembïe eft bonne &
faîne ;^ qii*en donnant à la liberté fes véri-
tables bornes, elle ïuî donne en même tems
toute la folidit^ qu*elle doit avoir. Car le
Gouvernement ayant un droit négatif contre
\
LETTRE. if^
les innovations du Légîflateur , ^ le Peuple un
droit négatif contre les ufurpadons du Confeif^ .
ks Loix feules régnent & régnetit fût tous ; te
premier de l'État ne leur efl pas moins fournis
que le dernier , aucun ne peut les enfreindre-^
nul intérêt particulier ne peut les changer, Ôt
la Conflitution demeure inébranlable.
Mais fî au contraire les Miniftres des Loix
en deviennent Tes feub arbitres , & qu'ils puif*
fent les faire parler ou taif e à leur gré : fi te
droit de Répréfèntatîon feul garant des Loit
& d^ la fibefté n'efl: qu'un droit illufoii^ &
vain qui n^ait en aucun . cas aucun efFet né-
cef&ire; je ne vois point dé fervitude pareiBe
& la vôtre, & limage de la liberté n'efl plus
chez vous cpi'un leurre méprîfant &, puérile,
•qu'il efl: même indécent d'offirir \l àes hommes
fenfés. Que fert alors d"afrembler le Légifla-
teor , puifque b volonté du Confcil eft TaîU-
22C
NEUVIÈME
' que Loi ? Que fêrt d'élire folemncUement dd
. Magifiracs qui d'avsmce étoient déjà vos Ju-
ges I & qui ne tiennent de cette éleétion
.qu'un pouvoir qu'ils exer^oient auparavant ?
Soumettez* vous de bonne grâce , & renoncez
à ces jeux d'enfants , qui , devenus frivoles , ne
font pour vous qu'un aviliflement de plus.
Cet état étant le pire où Ton puilfe tomber
n'a qu'un avantage ; c'eft qu'il ne fauroit chan-
ger qu'en mieux. C'eft l'unique reflburce des
maux extrêmes ; mais cette reflburce efl: tou-
jours grande , quand des hommes de ièns &
de cœur la Tentent & favent s'en prévaloir.
Que la certitude de ne pouvoir tomber plus
bas que vous n'êtes doit vous rendre fermes
dans vos démarches ! mais foyez (Ûrs que
vous ne fortirez ; point de l'abtme , ta^t que
vous {érez divifésj tant que les uns voudront
agir & les autres refler tranquilles^
L E T T R E, 2»i
Me Toîci , Mondeur , à la conçlufîon de ces
Lettres, Après vous avoir montré Tétat où
vous êtes , je n'entreprendrai point de vou^
tracer la route que vous devez fuivre pour en
fortir. S'il en ed une , étant fur les lieux mê-
mes ^ vous & vos. Concitoyens la devez voir
mieux que mpi ; quand on (ait où Ton efl:
& où Ton 4oit aller, on peut fe diriger fans;
peine. '
L'Auteur des Lettres dit que f% on remar-
quoit dans m Gouvernement une pente à la vio--
knce il ne faudroit pas attendre à la redrejffer
que b Tyrannie s* y fut fortifiée (t). Il dit en-
core, en fuppofant un cas qu'il traite à la vé-
rité de chimère, qu'«7 rejieroiù un remède trijie
mats légal , (^ qui dans ce cas extrême pourroit
être, employé comme on employé la main £un
ft) Page 172.
%2^ NEUVIEME
Qmtrgim , ipimd la gangrène Je dédare (c).
Si vous êtes ou mm daos ce csu fuppofé
chimérique » c eCl ce que je viens d'exami*
oer. Mon canfeU n'eft doue plus ici néœA
faire ; FAuteur des Lettres vous Ta donné
pour tnoL Tou^ les moyens, de réclamer
contre Finjuftice font permis q^nd ils font
paifibles, à plus forte raifon font permis ceux
qu'autorifent ks loix.
Quand elles font tranigrefiees dans, des cas
particuliers vous aves le droit de Répréfentao
tion pour y pourvoir. Mais q^iand i::e drcMt
mène eil conteflé , c'efl: le cas de la garante.
}e ne Tai point miie au noiubre des moyens
qui peuvent rendre efficace une Réparéfcnct-
tion y les Médiateurs eux - mSËoaes n'ont poim
entendu l'y meure , puiiqu^l^ ont d^aré vit
Wmw$\\ «»i»i I ■ I !■ m III w n I III |iiiiiini»«»|>w»^»|p«pi—i^ti^w^ni,yai;^i HLBUHj
(^i Paçe iQU
LETTRE.
223
vouloir {Kurter nulle atteinte à rindépendaoce
de l'Etat, âc qu'alors, cependant, ils ainroieiic
f
mis» pour ainfi dire, ]a Clef du Gouverne^
mène dans leur poche (^x)^ AiaSi dans le cas
particulier l'effet dos Répr^fentatioas rejettée^
efl: de produire un Coqfeil général ; mais Yti*
•fee du dFoic même de Répréfencadon rejette
paroit être le recours à la garantie. U faut
que la machine ait en elle-même tous te
îeflbrts qui doi^rent |a faire jouer : quand
die s'arrête, il faut appella: rOavrier pour
la remcmter.
(x) La conférence d'un tsl fyflème eut été &é*
tablir un Tribunal de la Médiation rélident - à Gc«
Bcve, pour connokyc dei.tranfgîeflîons des Loir.
Far ce Tribunal la fouverainc^ de la République
eut bientôt é^é détruite, mais la liberté des Cito«
yens eut été beaucoup ip>\us afiuiée qu*eile ne peat
l'être fi Ton ôtre le droit de Répréfentation. Or*de
n*être Souverain que de nom ne fignifie pas grand"*
«hofe , mais d*ê(re libre en effo; iigniSe beaucoup»
Q4
224 N -E U V I E M E
Je vois trop où va cette relTource, & je
fens encore mon cœur patriote en gémir.
■
Auffi, je le répète, je ne vous propofe rien;
qu*oferois'je dire ? Délibérez^ avec vos Cbnci*
toyens & rie comptez les voix qu'après les a-.
voir pefées. Défiez-vous de la turbulente jeu-
nefle , de l'opulence înfblente & de l'indigeo-
ce vénale ; nul fklutaire confêiF ne peut venic
de ces côtés-là. Confultez ceux qu'une hour
nête médiocrité garantit des féduétions de
l'ambition & de la mifere ; ceux dont une ho^
norable vieillefl^ couronne une vie fans repro^-
che ; ceux qu'une longue expérience a verfés
dans les affaires publiques ; ceux qui , fans am-
bition dans l'Etat n'y veulent d'autre rang que
celyi de Citoyens j enfin ceux qui n'ayant
jamais eu pour objet dans leurs démarches que
le bien de la patrie & le maindcn des Loix^
ont mérité par leurs vertus l'eftimc dupa-
/
"
LETTRÉ.
435
blic, & k confiance de leurs ég^ux.
Mais furtout réunifTez - vous tous. Vous ê-
4
tes perdus fans refTouFcê fi vous reftez divi-
tés. £c pourquoi le feriez- vous , quand de fi
grands intérêt^ communs vous unifient? Com-
ment dans un pareil danger la bafle jaloufie
&les petites paflions ofent- elles fe faire en^
teindre ? Valent -elles qu'on les contente a
fl haut prix ^ & faudra -t- il que vos enfans
difent un jour en pleurant fut leurs fers ; voila
le fruit des difîehtions de nos pères ? En un
mot , il s'agit moins ici de délibération que
de concorde ; le choix du parti que voua
prendrez n'ed pas la plus grande affaire : Fut-
il mauvais en lui-même, prenez -le tous en*-
femble; par cela feul il deviendra le meilleur,
& vous ferez toujours ce qu'il faut faire pour-
vu que vous le faffiez de concert. Voila mon
avisj Monfieur, & je finis par .où j'ai cora-
Q5
I
^
^
««NEUVIEME
mencé. En vous obéiiQant fai rempli moll
dernier devoir enveirs la Patrie. Maintenant
je prends congé de ceux qui Thabitent ; il ne
leur refl:e aucun mal à me fdre , & je ne
puis plus leur faire aucun bien.
FIN.
C AT A-
CATALOGUE
DE
«
LIVRES
*
Quon trouve chez Marc Michel Rey
Libraire à Amfterdam.
Oeuvres de Jean Jaques Roufleau. in douze S. voL fig.
Amfter4ain.
Répréfentations des Citoyens &• Bourgeois de Genève
au premier Sindic de cette République , avec les ré-
ponfes du Confeil à ces répréfentations. 8. 1 763*
Bibliothèque ie Campagne ou amufemens de l'Elprît
& du Cœur. 12. 12 vol. avec 12 Frontifpices & 13
Vignettes analogues aux fujets, deffinés par Mr*
Bolomey gravés par Mr. BoÛy.
Confîdérations fur le Gouvernement ancien & préfent
de la France, par le Marquis CCArgenfon 8. i. vol.
Amfterdam. 1764.
Considérations fur les Corps organifez par Mr. Bonnet.
8. Amfterdam. 1764.
Contemplation de la Nature par le même 2 vol. 8.
Amfterdam. 1764.
Traité de la connoiflance de foi-môme par Jean Màfan,
maître -es arxs, traduit de l'Anglois par Jaques Abei '
-Brttm'er Pafteur de TEglife Françoife à Lcyde. 8. i.vol.
Amfterdam. 1765.
ïnftruélion paftorale de Mr. VEvéï^e du Puy , fur la
prétendue philofophie des incrédules modernes. 12.
I. vol. Amfterdam. 1765.
Journal des Savafis depuis fon commencement en 1665
jufqu'en 1753, faifant 170. volumes 12. Amfterdam.
Table générale alphabétique du Journal des Savans
dépuis fon commencement en 1665. jufqu'à l'Année
1753. înclufivement. 12. 2 vol. Amfterdam.
Jounial des Sçavans combiné avec les Mémoires de
Trévoux depuis Janvier 1754. jufqu'en Décembre
1763. en 79 volumes- avec leur Table des Mattie-
xes.
CATALOGUÉ
Journal des Sçavans avec ^es Extraits des metlleurs Jour-
naux de France & d'Angletterre fuite des 1 70. voU
du Journal des Sçavans & des 79. vol. du même Jour-
nal Combiné avec les Mémoires de XrévouXJ 1764.
Offrande aux aiitek ôt â la patrie, contenant Défenfè
fiu Chrîilianiftne ou réfutacion du Chapitre huit du
Contracl: Social. Examen hiflorique des quatres Sic-
cies de Mr. de Voltaire. Quels font les moyens de
tiret un Peuple de fa corruption, par Jaq. Jnt
Roujlan , Mlnîllre du Saint Evangile à Genève. %
I. vol. ÀmAcrdain. 1764. -
Eépublique de Platon 01^ Dialogue fur la Juflice divifô
en dix Livres, ii* 2 vol. Ainfterdam. 1763.
Hiftoire naturelle générale & particulière avec \t def-
.cripcion du cabinet du Roi, par Mrs. Defiuffbn &
d'Aubenton 4. 11 vol. figures Paris.
— ^ idem. On peufe atoil: les Tomfes io, ii (êpa-
rément. . > , ,
ii. idemv. in«i2. is vol. figuresl On peut avoir
. ies Tomes 14 & 15. féparément:
Taftique navale, ou Traite des Evolutions & Signaux ;
par Mr. De Morogues. 4. i vol. fîg. Âmfterdaiii
1764-
Hiftoire de GutUve-AdpIphe Roi de Suéde , compofée
fur tout ce qui a paru de plus curieux, & fur un
grand nombre de Manufcripts , & principalement fus
ceux de Mr. Arkenholtz , par Mr. D. M. Profeflfeii
&c. 4. I vol. Figures Amfterdam. 1764.
■ idem. 12. 4 vol. Figures. 17(^4.
jiritbmetù» umverfalis five de cmpqfitione (f refolutime
dritbmeticà. Auaore If: Newton. Cum commeraariojci-
bannis Caftillioneï , 4. 2 voL fig, jîmjleiodami, 1761.
Additions à l'Eflai fur l'Hiftoire univerfelle par Mr.
de Voltaire. 8. i vol. Amfterdam. 1763,
AiTertîons (E^Ctraits des) des Jefuites. 8. 3 vol. Am-
fterdam. 1763.
L*Homme en Société ou nouvelles vues politiques pour
porter la population au plus haut degré en France. 8-
i vol. Amfterdam. 17.(53.
t.a voii de la f|îaturé ou les avantures de Madme. la
Marquîfe de ♦♦♦. 8. 5 part. Amfterdànf 1764.
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