Skip to main content

Full text of "Lettres écrites de la montagne;"

See other formats


Google 


This  is  a  digital  copy  of  a  book  thaï  was  prcscrvod  for  générations  on  library  shelves  before  it  was  carefully  scanned  by  Google  as  part  of  a  project 

to  make  the  world's  bocks  discoverablc  online. 

It  has  survived  long  enough  for  the  copyright  to  expire  and  the  book  to  enter  the  public  domain.  A  public  domain  book  is  one  that  was  never  subject 

to  copyright  or  whose  légal  copyright  term  has  expired.  Whether  a  book  is  in  the  public  domain  may  vary  country  to  country.  Public  domain  books 

are  our  gateways  to  the  past,  representing  a  wealth  of  history,  culture  and  knowledge  that's  often  difficult  to  discover. 

Marks,  notations  and  other  maiginalia  présent  in  the  original  volume  will  appear  in  this  file  -  a  reminder  of  this  book's  long  journcy  from  the 

publisher  to  a  library  and  finally  to  you. 

Usage  guidelines 

Google  is  proud  to  partner  with  libraries  to  digitize  public  domain  materials  and  make  them  widely  accessible.  Public  domain  books  belong  to  the 
public  and  we  are  merely  their  custodians.  Nevertheless,  this  work  is  expensive,  so  in  order  to  keep  providing  this  resource,  we  hâve  taken  steps  to 
prcvcnt  abuse  by  commercial  parties,  including  placing  lechnical  restrictions  on  automated  querying. 
We  also  ask  that  you: 

+  Make  non-commercial  use  of  the  files  We  designed  Google  Book  Search  for  use  by  individuals,  and  we  request  that  you  use  thèse  files  for 
Personal,  non-commercial  purposes. 

+  Refrain  fivm  automated  querying  Do  nol  send  automated  queries  of  any  sort  to  Google's  System:  If  you  are  conducting  research  on  machine 
translation,  optical  character  récognition  or  other  areas  where  access  to  a  laige  amount  of  text  is  helpful,  please  contact  us.  We  encourage  the 
use  of  public  domain  materials  for  thèse  purposes  and  may  be  able  to  help. 

+  Maintain  attributionTht  GoogX'S  "watermark"  you  see  on  each  file  is essential  for  informingpcoplcabout  this  project  and  helping  them  find 
additional  materials  through  Google  Book  Search.  Please  do  not  remove  it. 

+  Keep  it  légal  Whatever  your  use,  remember  that  you  are  lesponsible  for  ensuring  that  what  you  are  doing  is  légal.  Do  not  assume  that  just 
because  we  believe  a  book  is  in  the  public  domain  for  users  in  the  United  States,  that  the  work  is  also  in  the  public  domain  for  users  in  other 
countiies.  Whether  a  book  is  still  in  copyright  varies  from  country  to  country,  and  we  can'l  offer  guidance  on  whether  any  spécifie  use  of 
any  spécifie  book  is  allowed.  Please  do  not  assume  that  a  book's  appearance  in  Google  Book  Search  means  it  can  be  used  in  any  manner 
anywhere  in  the  world.  Copyright  infringement  liabili^  can  be  quite  severe. 

About  Google  Book  Search 

Google's  mission  is  to  organize  the  world's  information  and  to  make  it  universally  accessible  and  useful.   Google  Book  Search  helps  rcaders 
discover  the  world's  books  while  helping  authors  and  publishers  reach  new  audiences.  You  can  search  through  the  full  icxi  of  ihis  book  on  the  web 

at|http: //books.  google  .com/l 


Google 


A  propos  de  ce  livre 

Ceci  est  une  copie  numérique  d'un  ouvrage  conservé  depuis  des  générations  dans  les  rayonnages  d'une  bibliothèque  avant  d'être  numérisé  avec 

précaution  par  Google  dans  le  cadre  d'un  projet  visant  à  permettre  aux  internautes  de  découvrir  l'ensemble  du  patrimoine  littéraire  mondial  en 

ligne. 

Ce  livre  étant  relativement  ancien,  il  n'est  plus  protégé  par  la  loi  sur  les  droits  d'auteur  et  appartient  à  présent  au  domaine  public.  L'expression 

"appartenir  au  domaine  public"  signifie  que  le  livre  en  question  n'a  jamais  été  soumis  aux  droits  d'auteur  ou  que  ses  droits  légaux  sont  arrivés  à 

expiration.  Les  conditions  requises  pour  qu'un  livre  tombe  dans  le  domaine  public  peuvent  varier  d'un  pays  à  l'autre.  Les  livres  libres  de  droit  sont 

autant  de  liens  avec  le  passé.  Ils  sont  les  témoins  de  la  richesse  de  notre  histoire,  de  notre  patrimoine  culturel  et  de  la  connaissance  humaine  et  sont 

trop  souvent  difficilement  accessibles  au  public. 

Les  notes  de  bas  de  page  et  autres  annotations  en  maige  du  texte  présentes  dans  le  volume  original  sont  reprises  dans  ce  fichier,  comme  un  souvenir 

du  long  chemin  parcouru  par  l'ouvrage  depuis  la  maison  d'édition  en  passant  par  la  bibliothèque  pour  finalement  se  retrouver  entre  vos  mains. 

Consignes  d'utilisation 

Google  est  fier  de  travailler  en  partenariat  avec  des  bibliothèques  à  la  numérisation  des  ouvrages  apparienani  au  domaine  public  et  de  les  rendre 
ainsi  accessibles  à  tous.  Ces  livres  sont  en  effet  la  propriété  de  tous  et  de  toutes  et  nous  sommes  tout  simplement  les  gardiens  de  ce  patrimoine. 
Il  s'agit  toutefois  d'un  projet  coûteux.  Par  conséquent  et  en  vue  de  poursuivre  la  diffusion  de  ces  ressources  inépuisables,  nous  avons  pris  les 
dispositions  nécessaires  afin  de  prévenir  les  éventuels  abus  auxquels  pourraient  se  livrer  des  sites  marchands  tiers,  notamment  en  instaurant  des 
contraintes  techniques  relatives  aux  requêtes  automatisées. 
Nous  vous  demandons  également  de: 

+  Ne  pas  utiliser  les  fichiers  à  des  fins  commerciales  Nous  avons  conçu  le  programme  Google  Recherche  de  Livres  à  l'usage  des  particuliers. 
Nous  vous  demandons  donc  d'utiliser  uniquement  ces  fichiers  à  des  fins  personnelles.  Ils  ne  sauraient  en  effet  être  employés  dans  un 
quelconque  but  commercial. 

+  Ne  pas  procéder  à  des  requêtes  automatisées  N'envoyez  aucune  requête  automatisée  quelle  qu'elle  soit  au  système  Google.  Si  vous  effectuez 
des  recherches  concernant  les  logiciels  de  traduction,  la  reconnaissance  optique  de  caractères  ou  tout  autre  domaine  nécessitant  de  disposer 
d'importantes  quantités  de  texte,  n'hésitez  pas  à  nous  contacter  Nous  encourageons  pour  la  réalisation  de  ce  type  de  travaux  l'utilisation  des 
ouvrages  et  documents  appartenant  au  domaine  public  et  serions  heureux  de  vous  être  utile. 

+  Ne  pas  supprimer  l'attribution  Le  filigrane  Google  contenu  dans  chaque  fichier  est  indispensable  pour  informer  les  internautes  de  notre  projet 
et  leur  permettre  d'accéder  à  davantage  de  documents  par  l'intermédiaire  du  Programme  Google  Recherche  de  Livres.  Ne  le  supprimez  en 
aucun  cas. 

+  Rester  dans  la  légalité  Quelle  que  soit  l'utilisation  que  vous  comptez  faire  des  fichiers,  n'oubliez  pas  qu'il  est  de  votre  responsabilité  de 
veiller  à  respecter  la  loi.  Si  un  ouvrage  appartient  au  domaine  public  américain,  n'en  déduisez  pas  pour  autant  qu'il  en  va  de  même  dans 
les  autres  pays.  La  durée  légale  des  droits  d'auteur  d'un  livre  varie  d'un  pays  à  l'autre.  Nous  ne  sommes  donc  pas  en  mesure  de  répertorier 
les  ouvrages  dont  l'utilisation  est  autorisée  et  ceux  dont  elle  ne  l'est  pas.  Ne  croyez  pas  que  le  simple  fait  d'afficher  un  livre  sur  Google 
Recherche  de  Livres  signifie  que  celui-ci  peut  être  utilisé  de  quelque  façon  que  ce  soit  dans  le  monde  entier.  La  condamnation  à  laquelle  vous 
vous  exposeriez  en  cas  de  violation  des  droits  d'auteur  peut  être  sévère. 

A  propos  du  service  Google  Recherche  de  Livres 

En  favorisant  la  recherche  et  l'accès  à  un  nombre  croissant  de  livres  disponibles  dans  de  nombreuses  langues,  dont  le  français,  Google  souhaite 
contribuer  à  promouvoir  la  diversité  culturelle  grâce  à  Google  Recherche  de  Livres.  En  effet,  le  Programme  Google  Recherche  de  Livres  permet 
aux  internautes  de  découvrir  le  patrimoine  littéraire  mondial,  tout  en  aidant  les  auteurs  et  les  éditeurs  à  élargir  leur  public.  Vous  pouvez  effectuer 
des  recherches  en  ligne  dans  le  texte  intégral  de  cet  ouvrage  à  l'adressefhttp:  //book  s  .google .  coïrïl 


/ 


VK5.  ^ 


>n^f(?) 


V 


N 


\ 


i 


LETTRES 

ÉCRIX.ESDELA 

MONTAGNE.  • 

Far  j.  j.  rousse  au. 

PREMIERE    partie! 


A   AMSTERDAM, 

Chez    MARC    MICHEL   RE  Y. 

M  D  C  G  L  X  1  V. 


-~r 


■»       '   I 


AVERTISSEMENT. 

C'est  revenir  tard,  je  le  fens,  fur  un  fujet 
trop  rebattu  &^déja  prefque  oublié.  Mon  état, 
qui  ne  me  permet  plus  aucun  travail  fuivi, 
mon  averfion  pour  le  genre  polémique,  ont 
caufé  ma  lenteur  à  écrire  &  ma  répugnance  à 
publier.    Jaurois  même  tout  à  fait  fupprimé 
ces  Lettres,  ou  plutôt  je  ne  lès  aurois  point 
écrites,  s'il  h*eut  été  queftion  que  de  moi: 
Mais  ma  Patrie  ne  m*e{t  pas  tellement  deve- 
Jîue  étrangère  que  je  puifle  voir  tranquille- 
ment opprimer  fes  Citoyens,  fîxrtout  lorfqu*ils 
n'ont  compromis  leurs  droits  qu'en  défendant 
nia  Caufe.    Je  jferois  le  dernier  des  hommes 
û    dans   une   telle    occafion   j'écoutois    un 
fèntiment  qui  n'efl:  plus  ni  douceur  ni  pa- 

m 

tience ,  mais  foibleflë  &  lâdieté  ,  dans  celui 
qu'il  empêche  àp  remplir  fon  devoir. 

Kien  de  moins^  important  pour  le  public , 
J'en  conviens»  que  la  matière  de  ces  Lettres» 


AVE  R  T  I  S  S  E  M  E  N  T. 

La  Conflim^oo  d'une  petite  République ,  le 
fort  d'un  petit  particulier,  rexpofé  de  quelques 
injuftices,  Ja  réfutation  de  quelques  ibphifmes; 
tout  cela  n*a  rien  en  içà  d'afle^  configurable 
pour  mériter  beaucoup  de  ^.ef^eurs:  Mais  fi 
mes  fujets  CotA  petits  mes  objets  font  grands , 
&  dignes  de  Tattentron  de  tout  honnête  hom- 
me. LaiiTons  Genève  à  fa  place,  &  RoufTeau 
>dans  fa  dépreflion  ;  mais  la  Religion,  mais  la 
liberté,  lajufticeî  voila,  qui  que  vous  foycz^ 
ce  qui  n*efi:  pas  au  deffous  de  vous. 

Qu'on  ne  cherche  pas  même  ici  dans  le  fly* 
le  le  dédomagement  de  Taridité  de  la  matière. 
Ceux  que  quelques  traits  heureux  de  ma  plume 
-ont  fi  fort  irrités  trouveront  dequoi  s'appaiier 
dans  ces  Lettres.  L'honneur  de  défendre  un 
opprimé  eut  enfiamé  mon  cœur  fi  j'avois  par-» 
lé  pour  un  auo'e.  Réduit  au  trifle  emploi  de 
.me  défendre  moi-même ,  j*ai  dp  mé  borner  à 


AVE  R  T  I  ÎS  E  M  ENT. 

rsdfbnner  ;  m'&rhauffer  eut  été  m*avilir.  J'aurai 
donc  trouvé  grâce  en  ce  point  devant  ceux 
qui  s'ifnagiaent  ^'il-  e(L  efTeiKiel  i  la  vérité 
d*être  dite. froidement;  opinion  que  pourtant 
j'ai  peine  à  comprendre.  Lorfgu'une  vive  per- 
Tuafion  nous  anime ,  le  moyen  d'employer  un 
langage  glacé?  Quand  Ârchimede  tout  tran& 
porté  çoMToit  nud  dans  les  rues  de  Syracde  » 
en  avoit-il  moins  trouvé  la  vérité  parce  qu'il 
iè  paffiônnoît  pour  elle?  Tout  au  contraire» 

*  • 

cekii  ^ui  ^  (HWT  ne  pem;  s'abstenir  de  l'adorer  ; 
celui  qui  demeure  froid  ne  Fa  pas  vue. 

Quoiqu'il  en  foit,  je  prie  leé  Leâeurs  de 
vouloir  bien  mettre  à  part  mon  beau  flyle,  & 

d'examiner  feulement  fi  je  raifonne  bien  ou 
mal  ;  car  enfin ,  de  cela  fëul  qu'un  Auteur 
s'exprime  en  boffs  termes,  je  ne  vois  pas 
commeiît  îl  'peut  s'enfuît^fé  quç  cet  Auteur 
ne  fait  ce  quril  dit. 


T   A   B   L   E 


DES 


LE  TTRES 


Et  de  leur  contenir.  ' 


>    o  •  » 


^     4 


■FREMI  È  R  E    P  A  R  t  I  E. 

»  .  ;    .        , 


i  t    4  ,       \ 


LETTRE   PREMIERE.     Pag.  I 

Etat 'de  la  quejiîon  par  rapport  a  T^uimr.    Èi 

tf//^  /?/î.&  îd^ compétence  des  'Trihutiaiùè  civils^ 

'  Manière  injujîe  dé  Ta  réffudre.       '  "^"  '    ' 

.  -       .    .  '   •-.        •         . 

L    É    T    T    R    E     IX  '     <J3 


,D^   iï  Religion  dt  Genèvç.     Principes'  de,  la 

.    Jiéformatîon.    V Auteur  ^nzame  la  JifçufJÎQti 

/f^j  miracles. 


TA    B    LE 

ï-  E  T  T  II  E    m.     ,  Pag.  io($ 

Continuation  du  tntmâ  Sujet.    Court  examen  ék 
quelques  autres  accufations.. 
LETTRE      IV.         179 

-  »  •  • 

iJ Auteur  fefuppofe  coupable;  il  compare  laprth 
,     cédure  à  la  Lot. 

L    E    T    T    R    E      V.        iiC 

Continuation  du  même  Sujet.  'JurîfpfuietKe  tirée 
des  procédures  faites  m  cas  femhiables.  But 
de  r  Auteur  en  publiant  ^  la  JprofeJJîon  de  foi. 

L    E    T    T    R    E    VL         311 

S'il  eji  vrai  que  T  Auteur  attaque  les  Gouverne^ 
mens.  Courte  analyfe  djt  fon  Livre.  La  pro* 
cédure  faite  à  Genève  eft  font  exçmple ,  ^ 
«V  été  fuivîe  en  aucun  pays. 


/     / 


s  E  d  aND  E    PARTIE. 
LE    T    T    RE     Vit     Pag.  i 

l  j  •  •  •  1 

Etat  frèfent  du  Ooùvernement  de  Genève^  fixé 

* 

par  l'Edit  de  la  Médiation. 

L    E    T    T    R    E    VIII.     Page  61 

Efprit  de  cet  Edit,     Contrepoids  qfi'tl  donne  k  la 

•  ••  ,1  •    ^.   •>     .      ■*    ^ 

PuiJJance  arijlocratique.  Entretrife  du  petit 
Confetl  d'anéantir  ce  contrepoids  par  voye  de 
fait.  Examen  des  inconv^Sniens  'allégués.  Syf* 
téme  des  Edîtr  fut  ksttnjirifonnemtns. 

L    Ê   T  t    R    Ê    IX.         149 

Manière  de  raifonner  de    t  Auteur  des   Lettres 

écrites  de  fa  Campagne.  Son  vrai  but  dans  âet 

Ecrit:  Choix  de  ces  exemples.  Caractère  de  la 

'  'Bourgeoîjîe  St  Genève.  Treuve  par  tes  faits. 

Conchfiott,'      -   .  .  ,    .  -  .. j 

FIN. 


AVERTISSEMENT 

DU    LIBRAIRE. 

3' Ai  fait  ce  qui  a  dépendu  de  moi  pout  ren- 
dre rédition  de  ces  Lettres  correfte  ;  il  s'y  eft 
néanmoins  glifé  quelques  fautes  d^impreflion , 
que  le  lefteur  corrigera  aifément.  Voyez  Ver^ 
rata. 

Catalogue  des  Ouvrages  de  Mr,  J.  J.  RùuJJemè^ 
que  fat  imprimés  fur  ces  Manufcrits. 

Difcours  fur  Torigine  &  les    fondemens  de  rinégalké 

pannl  les  Hommes , 
Lettre  contre  les  Speftacles , 

iulie,  ou  la  nouvelle  Helolfe, 
*iincîpes  du  Droit  politique. 
Lettre  de  J.  J.  RouiTeau  a  Chriftopbe  de  Beaumont» 
Lettres  écrites  de  la  Montagne. 

ERRATA. 

Première  partie. 

page         ligne        ftàae  lijn. 

a72    -  -      3    -    partout      -    par  tout 
"a73    .  -    13    -    les  -    ces 

306    -  -    17    -    Tamour,  de    Tamour  de 
Seconde  partie. 

39    ^  -      9    -    point    •    .     points 
90    '  "      3    -    quelques    -    quelque 
124    -  -    12    -'  ces  -    cet. 

A  V  I  s   au  Relieur. 

II  y  a  4  Cartons  qui  fe  trouvent  imprimés  avec  la 
feuille  Jaar^ée  wd'une  étoile,  le  Relieur  aura  foiQ  de 
1m  placer  «xaâément  à  leur  place. 


y^ 


<    «        a. 


*  ■*       ,  ♦ 


«  •      »       •  ' 


«  « 


«         •  %  .  * 


»  ' 


LETTRES 


LETTRES 


ic  RITES    DE    LA 


MONTAGNE. 


t^ÊÊêi^mm^mtmmmm^m^m 


PREMIERE    LETTRE. 

■ 

JSIoni,  Monfieur,  je  ne  vous  blâme  point  do 
ae  vous  être  pas  joint  aux  Répr^fentans  'pour 
ibutenir  ma  caufe*  Loin  d'avoir  approuvé  moi* 
même  cette  démarche  ^  je  m'y  fuis  oppôfé  de 
tout  mon  pbuvqir ,  &  mes  parens  s'en  font 
redrés  à  ma  foUicication.  L-ôn  s'efl;  tu  quand 
il  fallbit  parler  ;  on  a  parlé  quand  il  nereftott 
qu'à  ie  taire.  Je  prévis  FinutiliDé  des  répréfen^ 
eations  ,  jVm  preiTentis  les  xonféquences  :  Je 
jugeai  que  leurs  faites  inévitables  trbublerôienc 
le  repos  piybiic ,  du  changeroient  la  confHtu* 
pon  de  l'Etat.  L'événement  a  trop  jailifîé  mes 
Partiel  A 


^'.PREMIERE 

k 

craintes.  Vous  voila  réduits  à  rakemative  qui 
m'effrayoîc.  La  crife  où  vous  êtâ  exige  une 
satre  délibération  dont  je  ne  fois  plus  Fobjet. 
Sur  ce  qui  a  été  fait  vous  demandez  ce  que 
vous  devez  faire:  vous  confidéiez  cpie TefiFet 
de  ces  démardies ,  étant  relatif  au  corps  de  la 
JBourgeoifîe  ^  ne  retombem  pas  moins  fur  ceux 
qôi  s'en  font  abftenus  qpe  îifi  ceux  qui  les  ont 
faites.  Ainfi ,  qàeb  qu'aient  été  d'abord  les 
divers  avis ,  l'intérêt  commun  dok  ici  tout  réo- 
BiF.  Vos  droits  réclamés  &  attaqués  ne  peu- 
vent ^  demeurer  en  doute  ;  il  faut  qu'ib 
loriot  reconiisis.ou  {uiéantis  >  &  c'efl;  leur  évU 
dence  qui  les  to^t  eti^peril.  B  dé  Bdloit  pas 
approcher  le  fiambew.  durant  l'c^age;  mais 
aujourd'hui  le  feu  e(t  à  la  maifbn. 
:  Quoiqu'il  ne  s^agifiè  plus  de  mes  ^ltàrêts; 
mon  honneur  nie  rend  toujours  p^e  dans  cet^ 
ce  affaire }  vous  le  ùva  p  &  vou  me  confatf 


teK  toutefois  comme  un  homme  neutre  $  vouf 
fuppofez  que  le  préjugé  ne  m'aveuglera  point 
&  que  la  paffioti  ne  me  rendra  point  injufte! 
je  r.efpere  aufli  ;  mais  dans  des  circonftances  fi 
délicates ,  qui  peut  répondre  de  foi  ?  Je  fens 
qu'il  m'eft  impoflible  de  m'oublier  dans  unç 
querelle  dont  je  fuis  le  fujet ,  &  qui  a  mes  mal« 
heurs  pour  première  caufe.  Que  ferai-je  donc^ 
Monûeur ,  pour  répondre  à  votre  confiance  Se 
juflifier  votre  eftime  autant  qu'il  dk  en  .moi  Y 
Le  voicL  Dans  la^  jufte  défiance  de  moi  •  md^ 
me  9  je  vous  dirai  moins  mon  avis  que  met 
raifons  :  vous  les  pé&rez ,  vous  comparerez ,  Si 
voi^  choifirez.  Faites  plus  ;  défiez  -  vous  tou« 
jours  j  non  de  mes  intentions  ;  Dieu  le  fait, 
elles  font  pures;  nuus  de  mon  jugement; 
IThomme  le  plus  jufte ,  quand  il  eft  ulcéré  voit 
rarement  les  choies  comme  elles  font.  Je  ne 
^ux  /Qrement  pas  vous  tromper,  mais  je  puis 


l 'i 


r       PREMIERE 

me  tromper  ;  je  le  pourrois  en  toute  autre 
çho(e,  &  cela  doit  arriver  ici  plus  probable^ 
ment.  Tenez-vous  donc  fuï  vos  gardes ,  & 
quand  je  n'aurai  pas  dix  fois  raifon ,  ne  me 
l'accordez  pas  une. 

.  Voila,  Monfieur^  la  précaution  que  vous 
devez  prendre  ,  &  voici  celle  que  je  veux 
prendre  à  mon  tour.  Je  commencerai  par  vous 
parler  de  moi ,  de  .mes  griefs  ,  des  durs  pro- 
cédés de  vos  Magiflrats  ;  quand  cela  .fera  fait 
&,  que  j'aurai  bien  foulage  mon  cœur ,. je  m'ou* 
tjierai  moi-même  ;  je  vous  parierai  de  vous, 
^e  votre ficuation ,  c'ed-à-dire,  delà  Répu- 
blique ;  &  je  ne  crois  pas  trop  préfumer  de 
jnoi ,  fi  j'efpere  ,  au  moyen  dé  cet  arrange- 
ment, traicer  avec. équité  la,:quefUon*que  vous 
me  faites. 

1  '.  J'^î  été  outragé  d'une  manière  d'^ant  plus 
•cruelle  que  je  me  flatois  d'avoir  bieQ  no^rité  de 


LETTRE.  5 

la  Patrie.    Si  ma  conduite  eut  en  befoîn  de  gra*> 
ce,  je  pou  vois  raifonnablement ,,  efpérer  de 
Ibbtenîr.    Cependant ,  avec  un  emptèflemœC' 
fails  exemple,  fans  avertîffement  ,  fans  cita- 
tion 5  fans  examen ,  on  s'efl:  hâté  de  flétrir  mes 
Livres  ;  on  a  fait  plus  ;  fans  égard  pour  mer' 
malheurs  pour  mes  m^ux  pour  mon  état ,  on 
a  décrété  ma  perfonne  avec  la  même  précipi- 
tation,* Ton  Trie  m'a  pai'même  éparghé  les  ter- 
mes qu'o»  ero'pteye  pour  ïes  malfaiteurs.    Ceit 
Meffieiiw  n!qnt  pas  été  indulgens ,  ont  •  ilidu 
moins  été  jnftes?  Cefl  ce  que  je  veux  rech'er* 
cher  avec  vous.    Ne  vous  effrayez  pas,  je 
vous  prie  ,  de  l'étendue  que  je  fuis  forcé  de 
donner  à  ces  Lettres.    Dans  la  multitude  de 
queftîons  qui  fe  préfentent ,  je  voudrois  être 
fobre  en  paroles:  mais,  Monfieur,  quoi  qu'on 

i'  • 

puiffe  faire,,  il. en  faut  pour  raifonner^  '     ' 
RaOmblom  d^abord  les  motifs  q  l'ils  ô](lt 

A3 


H         PREMIERE 

donnée  de  cette  procédure ,  non  dans  le  ré« 
qiiîfitohe  9  non  dans  Tarrêc ,  porté  dans  le  fe- 
oret  9  &'refté  dans  les  ténèbres  (i)  ;  mais  dans 
les  réponfes  du  G»ifeil  aux  Répréfentatiôns 
des  Citoyens  &  Bourgeois ,  ou  plutôt  dans  les 
li^etores  écrites  de  la  Campagne  :  ouvrage  qui 
Ifur  (erc  de  manifefle  ,  &  dans  iequel;^feul  Hs 
daignent  raifo^ner  avec  vous, 
.  ,,  Mes  livres  font,  "  difent-il?^^,;  vnpîe;s 
^  fcandaleux  téméraires ,  pleins  de  l^tefphèmes 
3^  &  de  calonmîes  contre  la  RdigioQ;  Sous 
,,  l'apparence  des  doutes  TAitteur  y  a  raflent 

(i)  Ma  famille  demanda  par  Requête 'communî-» 
fatiioD  de  cet  Arrêt.    Voici  la  réponfe. 

Du  2$  J^in  1762, 
*    „  En  Confeil  ordinaire  ,    vu  la  préf ente  -  Requête  ^ 
]^  arrêté  qu'il  n'y  a  lieu  faccQrder  nux  Jufplians  Ui 
„  fins  d'icelle.  *  ' 

L'Arrêt  du  Parlement  de  Paris  ftit  imprimé  auflî- 
t6t  que  rendu.  Imaginez  ce  que  c*eft  qu'un  Etat  li- 
bre oii  l'on  tient  cacbés  de  pareils  DécitU  çoaore 
rbonneur  1&  la  liberté  des  Citoyena! 


r 


LETTRE  5^ 

„  blë  tout  ce  qui  peut  tetadre  à  Apper,  ëbcaa-, 
,,  1er  &  détruire  les  principaux  fondesneos  de. 
9,  h  Religion  Chrétienne  révélée. 

,,  Ib  attaquent  tous  les.  Gouvemémens. 

^  Ces  livies  ibnt  d'autant  pka  dangereuaf 
,>  &  r^)réhenfibles  qu'ils  font  écrits  en  Frâo» 
n  ÇoiSy  du  flyle  le  plusièduâenr  ^  qu'ils  pa^ 
„  roUTent  £>Qs  le  nom  &'la  qualification  d'uQ 
,,  Citoyen  de  Qenève ,  &  que ,  fijon  rimen^ 

tien  de  r  Auteur  y  l'i^adilé  dok  iervSr  àa  gui* 

de  aux  pères  aux  mères  atix  précepteurs.     . 

,,  En  jugeant  ces  Livrea ,  il  n'a  pas  été 
9,  poffible  au  Confiil  de  ne  jetcer  aucun  regard 
^  fk  odui  qui  en  étoit  ptéfiuné  l'Auteur/*    : 

Au  iîefte,  le  Décret  porté  contre  ihoi 
\j  n'efl:»^*  continuent -ils,  „  ni  un  jugement 
^)  ni  une  ftntence ,  mais  an  &hpte  appointer 
1^  ment  ptx>v^okt  qtii  laifibte  dans  leur  entio; 

^  aet  esMâpâont  d(  défenfts  V  &  ^^  <^  ^ 

A4 


9J 


î> 


t:         P   H    E    M    I   E    R    E 

I,  CMS  ^prém  ftrvoit  de  préparatoire  à  la  pro-. 

,^  cëdupe  preftrkte  par  les  Edits  &!  pafc  FOr*. 

„  donnancGL  ètclèfiaflique/* 

.  A  cela  les  Ré{Sléferit2»ajs ,  fans  etttrer.d^t 

fexamen  de  la  doârifie  ,  objcâiendit  ;  ^*gue 

fy  Je  Conf^illutok  jû^'fims  forina}hés'|N3éHb^ 

fy  paires  :  .que/Mtiîele  88  de  i'Qbdqnnanca 

4i  ecG}éfîxfli<|ue:avoi& été. \'ioIé  dws jcë  ijisge-i 

II 
^'^sneJQtriqoe  la  procédure  faite  ta  15^2  coffire 

% 

^,  Jeaû  Morèlli'i'  fcJnsfe  de  cet'  Artîde  *  ca 
iQontrolt  da^œient  Tufage,  &^doniioit  par 
cet  exemple  pner  jt«îîipr^ence;<îç'Qn  n'au- 
roic  pas  da  méprifer  i  qoe  cette  nouvelle 
,,  manière  de  procéder  étoît  oiêine  coitfraîj^e  à 
»}  }«  i^^glc  du  .Droit  mturd  admife  che?  tous 
^  les  peùpk^  ^ .  laquelle  e^ige  '  que.  &u)  te':ibi( 
,»  condaoné  fansavo^récéuem^u^^dans  fe$ 
i,.  défen&i  ;l  qrt!oji  ne  ptax  fléoir  un.  ouvrage 
4.  finâ  âécri)^.en^da£â6,ttt:i|.l!Auteu£>  d^  il 


#9 


:  L  E;iT:  T  R  E;.    .       p 

^;  pbite  le  notai  j^u'oq  iie  voie  pas  qodks  e&> 
y,'  ceptions  &  dé&nfçs  il  refte  à  un  hdinme  dé- 
y,  daré  impië^y  t^éiiiéraite  ,  foandaleQx ,  dai^ 
^  iës  écrits  ^  "&  après  la  feotence  rendue'  ^ 
^\âcécutée.coqtrejEes  nitmtt  éàrit&y  juiî^uq 

fy  mie,  cdie(}Sirë£ulte:ds.M'c(»nbq{tion  d'u^ 
3,  livre  par.l^oiûin^du^  Bourreau  rejaillit  i^ 
y^  cejBorenù^fin:  F Aùtéiir  :  d^ûù  il*  fuit  qolon 
,,  n'a  pu  eide\resL8  oXiCwoys^}  k,  Um  le  plut 
p,  précicas^:>riiûiinear;  qo*<^  jevpoqprait  dé-, 
^  truire  (kjépvmloux ,  :foaié£at  ^  âDSiOcfn^ 
,,  inencer  pat.  }!entendre  ;  ^ue.ks.ouviBgqi 
,,  condanné&  ^  fiiécrîs  inâ^itcient  du  nioit^ 
9,  autant  de  fupport  &  de  tolàr^fe  que  divers 
^  autres  écries  oitrcm  fait  .de  trusBsM  fatyrci 
fur  la  Religion  y  ^  qui  ont  été  répandus  ^ 
même  knprifi^és  dan$  h  Ville  :  qtfeâfin  p^ 
y^  rapport  jux  JqoO^rarnemefis ,  il  a  toi^^ 

As 


99 


1% 


lo      P    R'  E    M    I    ERE 


fy  été  permis  daù  Genève  de  laiïbnnier  libre*, 
5^  mtrk  fur  cetcè^natiere  génërile  ;  qu'on  n' j 
^  défend  aucun  Livre  qui  en  traite,  qu'on  n'y, 
^  flédic  aucun  Auteur  pour  m  avoir  tnuté^ 
^  qud  qi^e  fcnè  fan  fêatimenc;  ..&  que,  loii^ 
^  d'actaqûériJeJSàttsrenirment  de::]a  iUpu&U^ 
i9  que  en  pmiculier^je  neJaii&édiapper  ao^ 
^)  cune  occalion  d'en  faire  Féiogâ/^ 
.  A  ces  objeââons  il  fut  répliqité  de  là  pai$ 
du  Confeiiif  ?  „  [  que  ce  n'eft  point  manquera  la 
5,  regU^M^oÎT^eiit  quenulnefd^ 
fj  l'entendre ,  que  de  condaimer  un  Livre  a* 
^  prés  en  avoir  pris  leûore  &  l'avoir  laminé 
ij  fuffiramment  :  que  l'ArucIe  Sgdes  Otdon* 
i^  nances  nr'eflf  applicable  qu'à  un  homme  qui 
yy  dogtnatife  &  non  à  un  Livre  deftruâif  d^ 
la  Religion  Chréciâbne  :  qu'il  n'eft  pas  vrai- 
que  la  fiétiifiore  d'un  ouvrage  fe  communir» 
^  que  à  TAutâir  ^  lequel  peut  n'avoir  été^ 


n 


L    E  >T.  T    R    E;     -       « 

^  qu'impilident  ou  maladroit  :  qu'à  Xéffïà  d^ 
y,  ouvrages  fcmàakxa  tolérés  ou  même  impri* 
,,  mes  dans  Genève.^  :il  n-eft.pas  laifbmiablr 
9,  de  prétendre  qu$  pour  avoir  diffimalé  qud** 
9,.qaefoi8)  un  Gdavernement  fôic  «bligé  de 
,,  dMimuler  toujoui»  s  qu^  d'ailleuts  lei  livrai 
9,  où  l'on  ne  (ait  ^ue  tourner  en  ridicule  h 
,,  Religion  ne  font  pas  à  beaucoup  prés  auiB 
y«  puniflàbles.  qtie  ceuic  où  fans  détour  on  Tob- 
,,  taque  par  le  taifonnement.  Qu^enfin  ce  que 
le  Confèil  doit  au  maintien  de  la^  Rel^on 
Cbrétienni?  dans  fa  pureté .^  au  bien  public, 
aux  Loix  y  &  à  Thonnéur  du  Gouvernemeot 
9,  lui  ayant  fait  porter  cette  fentence  y  ne  lui 
,,  permet  ni  de  la  changer  ni  de  Taffciblir.*^ 
Ce  ne  font  pas  là  toutes  les  raifons  objec- 
tions &  réponfes  qui  ont  été  alléguées  de  part 
&  d'autre,  mais  ce  font  les  principales ,  &  el« 

r 

les  fîiffi/ènt  pour  établir  par  rapport  à  moi  I^ 


99 


P    R    E'  M    1ERE 

f 

qoeflion  de  f$it:  &  de  droit. 

Cependant  comme  l'objet ,  âinfl  pféfenté, 

demeure  encore  on  peu  vague ,  je  vais  tacher 

de  le  fixer  avec  plus  de  piréci^km ,  de  peur  que 

Vous,  n'é^ndite  ma  dâa^  4  h  partie  de.  cet 

«bjet  que  je  h*y  veux  pas  embfaflèr.- 

:  :  Je  luis  homme  &  j^ai^foit^es  Livrés  ;  fai 

dcmc  fait;  auffi  des  erreurs ,  (a)î'  ftn  z^pei^ok 

md-mêrae  énaffez  grand  nombre  :  je  ne  dou? 

te* pas  que.Jautres  rfen'  voyeûc  beaucoup  da- 

» 
vantage  ,:  '&.'qa'il  rfy  en  ait  bien  plus  éncbre 

que  hinsoi  ni^d'autres  ne  voyons  pointi  Si  l'oa 

se  dit  que  cela  j^  Jbufcris 


i  '  •  •  ■ 


(2)  Exceptons  ,  fi  Ton  veUt  ,  les  Livres  de 
<}çbm(5trle'l&  leurs. Aurcuïs.!  Ericactf  s'il  nîy  apoîut 
d'erreurs  dans  les  propofîtioqs  mêmes». .qui  noua,  af- 
Turera  qu'il  n'y  en  ait  point"  dans  Tordre  de  déduc- 
tion, dans  le  choix»  dans  la -méthode?  Ëuctide  dé* 
montre  ,  &  parvient  à  fon  but  ;  mais  quel  chemin 
•prend  -  |t?  combien  n'jeire  t^il  pas  dans  fa  Voûte  ?  La 
fcience  a, beau  être  infaillible  ;  l'homme  qui  la  eut 
tlve  fe  trompe  fouvcnt. 


\ 


L    E    T    T    R    R  ï| 

Ma^  quel  Auteur  n'efl:  pas  dans  le  même 
cas,  ou  s'ofe  flatter  de  n'y  pas  être  ?  Là-def- 
ftu  donc ,  point  de  difpute.  Si  l'on  me  réfiite 
&  qu'on  ait  raifon ,  l'erreur  efl:  corrigée  &  je 
me  taîs.  Si  Ton  me  réfute  &  qu'on  ait  tort , 
je  me  tais  encore  j  dois-je  répondre  du  fait 
d'autrui  ?  En  tout  état  de  caulè ,  après  avoir 
entendu  les  deux  Parties,  le  public  efl:  juge,  il 
prononce»  le  Livre  triomphe  ou  tombera;  le 
procès  efl:  fini 

Les  erreurs  des  Auteurs  font  fouvent  fort 
indifférentes  ;  mais  il  en  efl:  auffi  de  domagea* 
blés ,  même  contre  l'intention  de  celui  qui  les 
commet.  On  peut  fe  tromper  au  pré^dice  du 
pubjic  comme  au  fien|propre  ;  on  peut  nuire 
innocemment.  Les  comroveiies  fLu*  les  matie* 

.0 

tes  de  jurisprudence ,  de  morale  y  de  Religion 
tombent  firéjuemmént  dans  ce  cas.  NéceflTaî* 
renient  un  des  deux  d^utans  fe  trompe  ,  â( 


t4:       P    RE    M   1ER    E 

Ferreor  forces  niatîei'es  importais  toujours  âe* 
vient  faute  ;  cependant  on  m  la  punk  pot 
c|uand  on  la  préfume  involontaire.  Un  homme 
ii*e(t  pas  coupable  pour  nuire  eiu  voulant  fer* 
vir ,  &  fi  Ton  pourfuivolt  crminellemént  un 
Auteur  pour  des  fautes  d'ignorance  ou  d'inad- 
vertance »  pour  de  maUvaifes  nâximes  qu'on 
pounroit  tirer  de  fes  écrits  trâi  confâpiemmenc 
mais  contre  fon  gré ,  quel  Ecrivain  pourroit 
fe  mettre  à  Tabri  des  pourfuites  ?  II  faurdoie 
être  infpiré  du  Saint  Efprit  pour  fe  &ire  Au- 
teur &  n'avoir  que  des  gens  infpirés  du  Saint 
Efprit  pour  jugea. 

Si  Fon  ne  m'impute  que  de  pareiDes  fautes  ^ 
)e  ne  m'en  défends  pas  plus  que  des  fimples  er- 
reurs.  Je  né  pds  affirmer  n'en  avoir  point 
commis  de  telles ,  parce  que  je  ne  fds  pas  on 
Ange  ;  mais  ces  fautes  qu'on  prétend  trouver 
dans  mes  Eaits  peuvent  fort  bien  n'y  pas  6« 


LETTRE. 


»5 


are,  parce  que  ceux  qui  les  y  trouvent  ne  font 
pas  des  Anges,  non  plus.  Hommes  &  fujett 
à  l'enreur  unfi  que  moi ,  fur  quoi  prétendent* 
ib  que  leur  niifon  foit  Farbitre  de  la  mienne^ 
&  que  ]e  îdà  punif&bk  pour  n'avoir  paspenië 
comme  eux? 

Le  public  efl:  donc  auffi  le  juge  de  ièmbla^ 
Ues  Suites;  fon  blâme  en  eft  le  feu!  chitknent. 
Nul  ne  peut  fe  foufbwre  à  ce  Juge,  &  quant* 
à-moi  je  n'en  appelle  pas.  Il  efl;  vrai  que  fi  le 
Magifbat  trouve  ces  fautes  nuifibles  il  peut 
défendre  le  Livre  qui  les  contient  ;  mais  je  le 
répeos  ;  il  ne  peut  punir  pour  cda  TAuteur 
qui  les  a  commifes;  puifque ce  ftroit  punir  un 
délit  qui  peut  être  involontaire ,  &  qu'on  ner 
dok  punir  dans  le  mal  que  la  volcmtë.  Ainfi  ce 
n'efl:  point  encore  là  ce  dont  il  s'^t. 

Mak  il  y  a  bien  de  la  différence  entre  ufll 
Livre  qui  contient  des  eneurs  nuifibles  &  m 


»<î       P  .a    «    M    I    E    R    E 

»  -  •  .  t 

Li^re  pemkieioi.  Des  princi{>«s  établis ,.  4ar 
^aîne.d'ufi  raifonoeiuenc  iiiivi,.des  cQnfëj(]uen*^ 
ces  déduîte$  manifeflenc  Tintention  de  FAu- 
teur  ,  &  cette  intention  dépendant  de  là  vo« 
lonté  rentre  fous  la  jurifdiâion,  des  Ldix.  Si 
cette  intention  eft  évidemment  mauvaiiè  ,  ce 
n*eft  plus  erreuî: ,  ni  faute ,  c'eft  crime  j  ici 
tout  change»  Il  ne  s'agit  plus  d'une  difpute 
littéraire  dont  le  public  juge  félon  la  rmfon» 
niais  d'un  procès  criminel  qui  doit  être*  jugé 
dans  les  Tribunaux  félon  toute  la  rigueur  des 
Loix  ;  telle  eft  la  pofitiôn  critique  où  m'ont 
jnis dës;Magiftrats qui  fe difent  juftes ,  &  des 
ËcrivaÎQs  zélés  qui  les  trouvent  trop  démens. 
Sitôt  qu'on  m'apprête  des  prifons ,  des  bour- 
reaux ,  des  chaîpes  •,  quiconque  m'accufe  efl: 
Un  délateur  ;  il  fait  qu'il  n'attaque  pas  feule« 
^lent  l'Auteur  mais  l'homme,  iJ  fait  que  ce 

qu  il 


r.  L  E  T  T.  a:  E.    :      if 

qull  ^çrît  peut  influer  fiJr  mon  fort  (g)  ;  cfc 
tfeft  plos  àma  feule  réputation  qu^if  eh  veut, 
^'eftà  moirhorinèûr  à  ma  liberté,  à' ma  yîe.  • 
•  Cçci  ^  Monfîeur  ,  nous  ramené  tout  d*un 
coup  à  Vétat  de  la  queftiqn^  dont  il  me  p«ok 
que  le  public  s'écarte.  Si  'j'ai' écrit  des  diofëi 
téprékctûhlét  on  peut  m'isb  blâmer ,  on  peut 
fuftpr&ner  le  livbe.  Mais  pour. le  ilétrir,  pbui 

(3)  îl  y  a  quelques  ahnées  qu'à  la  pre.inîçre.îip* 
pârJQiwi 'd*uii  Livre  céleire'-je*Wt6bs  d'en  âttatjuèt 
les  pîinciiies ,  que  je  trouvais  dangereux.  J*ex^* 
tois  cet!é  eritreprîfe  quand^j  appris  que  l'Auteur  é- 
toit  pottffUii^i^.  ,  A  rinfl9fn;i/}  jetcai  mes  feuilles^  aa 
feu  ,  jugeant  qu'aucun  devoir  ne.  pouvoit  autorifer 
la  baffeffe^-d»  *  s'unir  â 'la-'fdùlé  poui'  atfcîiWer  M 
hoornie  d'boqoeur.  opprimé.,,  .«^uand  tout  fut  l^cifi 
j'eus  occafîon  de  dirV  mon  fentîment  fur  le  mémo 
fujet  dan»  d'autrts  Ecria  ;[  mais- je  Hi  Ht  faftà  Mitl«* 
mer  le  Livre  ni  l'Auteur.  J'ai  cru  devoir  ajoiitcr  ce 
refpeâ  pour  fon  malheur  à  l'eftime  que  j'eus  *t6u« 
iouis  ipxuirjii  perfosme.  J^  Aie^p^  p^oint'gue  catte 
façon  de  flenrer  me  (bit  particulfere  ;  elle  eft  com* 
munêàtoik  les' hqtitfÉt¥s  gôÉs^^^Sitôt  qu'une  affairé 
eft  portée  s^u  criminel,  ils  doivent  fe  ^aLre,  ^  raoîM, 
qu'ils  ne  îbfent  ap^Êli'és  pour"  tétàoîgner. 


18       P   E    £    M   t   £   R   £ 

A'i^tt^uer  ^tibmieiletnent  ,il  fitot  phis  ;  h  F»i« 
jEe^nr  fiiffît  pas,  il£mt  un  déGt,  un  crime;  il 
faiiti|aé  f  aye  écrit  à  2naiivai&  imaéntion  an  Li^* 
^pn  permdeox  »  ôc  que  cela  foit  prouvé  >  Don 
liomme  isn .  Autéuf  prouve  qu'un  autre  Aoteilr 
ié  ttonape  »  mais  comme  un  accuTaceur  doit 
fpenvakicre  devant  Je  Juge  raccuféé  Poar  être 
tmseé  comme  un  maifdtéur  il  faut  ^qiie  :je:fois 
convaincu  de  îêtre.  CdH  la  première  ^ueftion 
^'iLs'agitd'e3Çaminb*...La&ço&(|ei  m&çipch 
f^ftt  lé  délit  conltaté ,  éft  d*en  fixer  là  nature., 
It:  liep  cà  9  a  éûéidommif^,  lé  oribùnal  ^ui  doit 
^  juger»  la  Loi  qui  jle  condanne,  :^  la  p^'ne 

^uî  doit  le  punir.   Ces  deux  quejftionis  une  fois 

• ••  ... 

.-.    ...  <  ->•.        ..-        ---•- 

lâobies  décideront  fi  j:aî  été  traité  jaftement 

•  •  •    I 

*  .        .   •      .        .     ■    -      '     ■ 

ou  non.,  ..  ..,.  ..„. ,,  .    . 

aPoar  favoîr  fifaî^écrk  desLîvrès^fernîcîétnt 
il  faut  «n^xaiiikierkf  principes  ;  <&  :\toir  ce 
qu*il  eh  téfulteroit  fi  ces  principes  étoient'ad- 
mis.   Comme  j'ai  ttaité  beaucoup  deVoàdeies^ 


LETTRE.  ip 

je  dois  me  refixaindre  à  celles  fur  leTquelIes 
3Ç  fuis  pourfuivi ,  favoîr ,  la  Religion  &  le 
Gouvernement.  Commentons  par  le  premier 
article ,  à  l'exemple  des  juges  «jui  ne  fe  font 
pas  expliqués,  fur  le  fécond.  " 

On  trouve  dans  TËmile  la  profefCon  de  foi 
d*un  Prêtre  Catholique,  &  dans  l'Héloïfe  celle 
d'une  femme  dévote  :  Ces  deux  Pièces  s'accor« 
dent  aÔèz  ppur  qu'on  piûiTe  expliquer  Tune  par 
l'autre^  &  de  cet  accord  on  peut  préfumer  a- 
vec  qadque  .yraifemblance  que  fi  l'Auteur  qui 
a  publié  .les.  Livres  où  elles  font  contenues  ne 
les  adopte  pas  en  entier  l'une  &  l'autre ,  da 
moins  il  les  favorife  beaucoup.  De  ces  deux 
profeffions  de  foi,  la  première  étant  la  plus  é- 
tendue  ^  la.  feule  où  l'on  ait  trouvé  le  corps 
du  délit  y  doit  être  examinée  par  préférence. 

Cet  examen,  pour  aller  à  fon  but,  rend  en- 
core un  éda^ciflèment  néoeflkire.  Car  remar- 

B  a 


}^W        P    R    E    M    I    E    R    ^ 

^uez  bien  qu'ëchircii^  &  diftingder  ki  prcv. 
pondons  que  brouillent  &'  confondent  mes 
âccufaceurs ,  c'efl  leur  répondre.  Comme  îb 
difj)utènr  contre  l'^videticc,  quafldla  que&' 
çion  eft  bien  pofée,  ils  font  réfhtés.  * 

Je  diftingue  dans  là  Religion  deux  jiartîes , 
butre  •  la  forme  du  culte ,  qui  n*efl:  qu'un  céré- 
inonial.  (3es  deux  parties  font  le  dogme  &  la 
morale.  Je  divilè  les  dogmes  encore  en  deut 

parties  ;  favoir,  ceHequî  poftnt  les  principes 

•'  ... 

de  nos  devoirs  fert  de  bafe  à  là  morale ,  Ôt 
•celle  qui ,  purement  de  foi ,  ne  contient  qufc 
des  dogmes  fpéculatifs. 

De  cette  divifion  ,  qui  me  paroit  exafte , 
>éfu!tê  celle    des   fentknens  fiir  la  Religion 

•  r 

'  4'une  part  en  vrais  faux  ou  douteux^  &  de. 
^Fautre  en  bons  mauvais  ou  indifiërëns.       -^ 

Le  jugement  des  premiers  appartient  à  ïs^ 

'  iraifon  feule ,  &  H  les  ThéoIogien^Ven  font  eâi« 

parés,  c'eft  con^e î^fifbnneursj  ç*cft  çomç^t^ 

4  *  *  . 


LE    T    T    R    E.  M 

piofeileurs  de  la  fcîenoe  par  laquelle  on  par- 
vient à  la  connoifTânce  idu  rfai  &  du  faux  en 
laatiere  de  foi.  Si  Terreur  .'en  cecte  partie  e^: 
nuifible ,  c'eft  feulement  à  ceux  qui  errent ,  ^ 
jc'eft  lèalement  un  préjù^jœ  pour  la  vie  à"  ve- 
nir fur  laquelle  les  Tribunaux  humains  ne'  peu- 
vent étendre  leur  compétôice.  Lôrlqu'ils  con- 
noifTent  de  cette  matière,  ce  n'eft  plus  comme 
Juges  du  vrai  &  du  faux  ,  mais  comme  Mi- 
mfbres  des  Loix  civiles  qui  règlent  la  formp 
extérieure  dii  culte  :  il  ne  s*agit  pas  dicore  ici 
de  cette  partie  ;  il  en  fera  traité  ci-apràs. 

Quaqt  à  la  partie  de  h  Religion  qui  regarr 
de  la  morale  ,  c'elt-à-dire  ,  la  jullice ,  le  bie^ 
public,  l'obéif&nce  aux  Loix  natuf elles  Se  pOr 
fitives  ,  les  vertus  fociales  &  tous  les  devoir^  ' 
de  rhomme  &  du  Citoyen ,  il  appartient  au 
Gouvernement .  d'en  connoître  :  c'efl:  en  ce 
point  j(!eul  que  la  Religion  rencrç  direclement 

B3 


M       P    R    E^  M    I    E    R    E 

'  Ibus  fa  jarifdiélion  y  &  qu'il  doit  bannir ,  non 
rerreur  ^  dont  il  n'eft  pas  jage ,  mais  tout  fen* 
ciment  fiuiflble  qui  tsend  à  couper  le  noeud  fo* 
dal 

Voila,  Monfietffi  la  didinflîon  que  vous  a- 

vez  à  faire  pour  juger  de  cette  Pièce  ,  portée 

au  Tribune  ^  non  des  Prêtres ,  mais  des  Ma- 

giffarats.    J'avoue  qu'elle  n'eft  pas  toute  aflEr-^ 

mative.  On  y  voit  des  obje^ions  de  des  dou* 

tes.    Pofonsy  ce  qifi  n'eftpas,  que  ces  doutes 

foient  des  négations^    Mais  elle  eH  affirmative 

dans  fa  plu;  grande  partie  j  elle  eft  affirmative 

&  démondrative  fur  tous  les  points  fondanten^ 

taux  de  la  Religion  dvile  ;  elle  eft  tellement 

décifive  fur  tout  ce  qtti  tient  à  la  Providence 

étemelle,  à  famour  dq  prochain,  à  la  juftice, 

à  la  pa^z ,  au  bonheur  des  hommes,  aux  Loîx 

de  la  fociétéi  à  toutes  les  vmus,  que  les  ob- 

Jeâions  les  doutes  mêmes  y  ûAt  pQitf  objei 


^  ». 


LETTRE.  ij 

qodqôe  avaDitage,  &  |e  défie  qu'on  m'y  tncm-i 
txe  un  feul  point  de  doârine  attaqué  que  jeiiè* 
prouve  être  nwTùk  dxa  hommes  ou  par  lui*, 
même  ou  par  Tes  inévitables  effets. 

La  Religion  eft  utile  &  nf^thc  nécef&ire 
aux  Peuples.  Cela  n*eft«il  pas  dit  fqatenu  prou^ 
vé  dans  ce  même  Ecrit  ?  Loin  d'attaquer  les 
▼lais  prind^  de  la  Religion»  l'Auteur  les  po» 
le  tes  affermit  de  tout:  fon  pouvoir;  ce  qu'il  at-' 
taque,  ce  qu'il  combat,  ce  qu'il  doit  combat* 

tre,  c'eft  le  fanatifme  aveugle ,  la  fuperftitiga 

« 

cmelle ,  le  ftupîde  préjugé.  Mois  il  faut ,  di« 
iènt-ils ,  lêfpeéler  tout  cela.  Mais  pourquoi  9 
Fiirce  que  c'efl:  ainû  qu'on  mené  les  Peuplei. 
Oui ,  c'eft  ainfî  qu'on  les  mené  k  leur  perte* 
La  ruperflition  efl;  le  plus  terrible  lléau  du  gqi* 
te  hnniam  ;  elle  abbratic  les  finales ,  elle  per* 
Skabs.  les  fages,  elle  endiaîoe  les  Natioos,  el« 
]e  ûic  pv  tout  cent  maox  effîroyables  :.  <jf¥i 

B4 


14      P    R  ^E    Al    I    E    a    E 

bien  fait^dle  ?  Aucan^  fi  eOe  en  fàic^  c*eft  aux 
Tyrans;  elle  efl:  ieui:  arme  la  plus  terrible ,  & 
cela  même  eft  le  plus*  grand  mal  qa^eUe  ait 
jamais  fait. 

^  Ils  difenc  qu^en  attaquant  la  fuperftttion  je 
veux  détruire  la  Religion  même:  comment  le 
fevent-ils  ?  Poafqubi  confondent-  ils  ces  deux 
eaufes,  que  je  diftingue  avec  tant  de  foin? 
Gomment  ne  voyent-ils  point  que  cette  impu- 
tatiôn  réfléchit  contre  eux  dans  toute  ùl  force, 
&  que  la  Religion  n'a  point  d'ennemis  plu& 
terribles  que  les  défenfeurs  de  la  fupèrdicion? 
SI  feroit  bien  cruel  qu'il  fut  fi  aifé  d'inculper 
llntention  d'un  homme ,  quand  il  eil  (i  diffici- 
le de  la  juftifier.  Par  cela  .même  qu'il  n'eft  pas 
prouvé  qu'elle  efl  mauvaife ,  on  la  doit  juger 
bcMinc.  Autrement  qui  pdurroît  être  à  l'abri* 
des  jiigemens  arbitraires  de  fes  ennemis?  Quoi! 
leur  iknpie  affirmation  fait  preuve  de  ce  qu'ils 


Li  E:  T    T    R'   E;     1       ty, 

tte  peuvent  (avoir,. &  la  mienne ,  jointe  à  tou-: 
te  iiia  conduite  ^  n'établit  point  mésf  proprest 
fentimens?  Quel  moyen  me  refte  donc  de.'kt; 
faire  connoître?  tiebien gae je lênsdans mon 
cœar  je  ne  puis  Je  montrer,  je  Fevoue  ;  maii 
quel  efl  Thomme  abominable  qui  s'de  vanter 
d^y  voir  le  mal  qui  n'y  fut  jamais?  .1 

Plus  on  feroit  coupable  de  prêcher  rirreE*. 
gion ,  dit  très  bien  M.  d'AIembert ,  plus  il  eft: 
crimind  d'en*  accufer  ceux  qui  ne  la  prêchent 
'  pas  en  effet.  Ceux  qui  jugent  publiquement 
de  mon  Cliriftianifme  montrent  feulement  Ye^. 
pece  du  leur ,  ôc  la  feule  cliofe  qu'ife  ont  prou- 
vée eft  qu'eux  &  moi  n'avons  pas  la  même 
Religion.  Voila  précifément  ce  qui  jes  fâche: 
on  Jknt  que  le  mol  prétendu  les  aigrit  moina 
que  le  b^en  même.  Ce  bien  qu'ils  font  forcés 
de  trouver  dans  mes  Ëcxits  les  dépité  &  lest 
gêne  ;  réduits  à  le  tourner  en  mal  encore ,  ily 

B  s 


y 


ta      PREMIERE 

■ 

I 

Tentent  qa'Ss  fe  décôovitnt  trop. .  Cand>icii  3ft 
feroîent  pku  à  letur  sâSc  û:  c^  Jbka  n^j  éloît 
pas!     «    '  :  •  '    i 

(^and  onJQe  xne  juge  pfûbt  for  oe  que  f a| 
ikf  mais  fur  âe  qu'on  afihre  qiie  j'ai  voulu  di* 
re ,  quand  on  dieithe  dui  me$  imenomt  |e 
niai  qui  n'eft  .pas.  dani  inësEcriti»  qae  poisrje 
Ëdce?  Iktlàœittent  nies  dtfcours  par  mes  pen- 
fies  ;  qu^nd  j'ai  dit  blanc  ils  aflSraient  que  j'ai 
voulu  dire  noir  ;  ils  fe  mettent  k  h  flàct  dtf 
Dieu  pour  faire  l'œuvre  du  Dîable;  comment 
dérober  ma  âte  à  des  cdqps  portés  de  fi  haut? 

Poâr  prouver  que  F  Auteur  n'a  point  aa 
Fhorrible  intention  qu'ils, lui  prêtent  je  ne  voit 
qu'un  moyen  ;  c'eft  d'en  juger  fur  l'Ouvrage^ 
Ah!  qu*on  en  juge  ainfi,  j'y  coniêns;  mais^ 
cette  tâche  n*êit  pas  la  mienne,  &  un  exa* 
tnen  fuivî  fous  te  point  de  vue  feroit  dé  tadk 
part  une  indignité.    JNfon,  MoDûeur^  il  d'j9 


il    E    T    T    R    E,  .2^ 

tu  malbear  m  iléoriflûie  qui  poHIènt  ne  rédiu« 
le  àc^e  abj6£tk>n.  Je  croiroîs  ouçrager  FAo- 
teur  l'Editeur  le  LeCleur  même)  par  une  judi- 
fication  d'aôciat  plus  honteufe  qu'elle  eft  plus 
fadle  ;  c'efl;  dégrader  la  ^eaxi  que  montra 
qu'efle  fl'eft  pas  un  crime;  c'eft  obicurcir  Tévj^ 
dence  que  prouver  qu'elle  efl:  la  vérité.  Non, 
lîfez  &' juges  >^ous-même«  Malheur  à  vous,  fi, 
durant  cette  leâure,  votre  cœur  ne  bénit  psis 
cent  fois  l'homme  vertueuK  &  ferme  qui  ofe 
inftruire  ainfî  les  humainsi 
Eh  !  comment  me  ré(btidrois  -  je  à  juftifier 

« 

cet  ouvrage?  moi  qui  crois  efl&cer  par  lui  les 
iàutes  de  ma  vie  entière;,  moi  qui  mets  les 
maux  qu'il  m'attire  en  compenfadbn  de  cerne 
que  j'ai  faits,  moi  qui,  plein  de  confiance  e& 
père  un  jour  dire  au  Juge  Suprême:  daigne  jii« 
gpc  dans  ta  clémence  un  homme^  foible  ;  j'û 
fâîc  le  mal  fur  la  terre,  mais  jai  publié  cet  £* 
âit« 


28       PU    É    M    ï    E   A    E 

-  Mon  cher  Monfieor ,  permettez  à  mon  corar 
gonflé  d'exhaler  de  cems  en  cems  Tes  foupirs; 
mais  fbyeSs  fur  que  dans  me$  difcuffions  je  ne 
'mBeraî  ni  déclamations  ^ m .  plaintes.  'Je  n'y 
'tnettraî  pas  même  la  vivacité  de  mes  adverfaî* 
tes  ;  je  raifonnerai  toujoars  de  làng  •  froid.  Je 
reviens  donc. 

Tâchons  de  prendre  un  milieu  qui  vous  ïk- 
tîsfafîe,  &  qui  ne  m'aviliiTe  pas.  Suppofons  un 
moment  la  prcrfeffion  de  foi  du  Vicaire  adop- 
tée en  un  coin  du  monde  Chrétien ,  &  voyons 
ce  qu'il  en  réfulteroit  en  bien  &  en  mal.  Ce 
ne  fbra  ni  Tattaquer  ni  la  défendre;  ce  fera  la 
juger  parfes  effets. 

Je  vois  d'abord  les  chofes  les  plus  nouvelles 
fans  aucune  apparence  de  nouveauté  ;  nul  chan* 
gêment  dans  le  culte  &  de  grands  changement 
dans  les  cœurs,  des  converfions fans édat ,  de 
|a  foi  fans  di/pute,  du  zèle  fans  fanatifme,  de 


,î.  ^P    T    T    R    E.  tjf 

la  Faifon  fans  impiété ,  peu,  de.  dogmes  & 
beaacQup:de  vertus ,  la  tolérance  du  philofo- 
phe  &  la  c)i^ké  du  Chrétiço* 
« .  Nos  prçfét^tes  auront  deux,  r^es  de  foî 
ij\»  tf^  ïm  a^vWe ,  h  j^op  .&  rEvangile; 
la feQoode.  ^rad-aittont  pluf  inuDuable  qu'elle 
ne  k  {oï^&iaL  que  fui  la  première ,  &  nulle- 
ment  fur  cmains  faits  9  lc|%iels  ayant  befoin 
d'être  attefté^gr^^a^^mettent  Ja  Beligion  fous  Vvx- 

•m     •  •    '    « 

torité  des  ,ljpmni€;s.  ,  ;  ^;  ,^;  .  ^ 
:^  Toute. ht; <ftfiérence  qu'jl,y.,anra.  d*cipc  aux 
autres  Ç|ir4^itf^^qu6,9eux^:i<»Qtdes  gens 
qui  difp9tçi^t  ;  beaucoup  f^  rÇyangile  fans  ie 
fbucier  de  le  pratiquer,  au  lieu  qu&nos  gei^ 
s*attadier(âit  beaacoj4p  à  Jajoatiqae ,   &  ne 

..Quand  les  Chrétiens  dfiputeurs  .  viendront 
leur  dire.  Vous  vous  dites.Chrétiens  fans  T^- 
tre  ;  car  pour  être.  Chrétiens,  il  faut  aoire.  es 


|<3       P*k -E   M   ï  Ê   k    E 

^éfûs  -  Ohrifl: ,  ôc  vous  n'y  cfoyéz  point  ;  kâ 
âirétîens  paifSbiea  leur  répcmâront  : .  ,5  Noué 

,,  ne  favons  p»  bien  (1  nous  CFoy.ons  en  jd^ 

•  -, 

^;,  fus  i  (Siiiflr  ciËhs  votre  idée ,  parce  que  hous 
*yi  ne  f  encent^iis  pas.  Mai^nonû  actions  d'ob^^ 
-3,  ferver  ce  ^u- îî  iaoas  prèffcrk  -  î^oïw  fàmmea 

»  -  • 

3;  C^rétiens-;^  cfaactins  à  notre  iHaniere ,  hous 
',;  en  gardatitla  parole,'  &  vbuse&'-tafoyaïît  eà 
Vi  lui.  Sa  c&crîté  Veut  que  no«s  foycmé  tôi» 
,,  frères,  nous  la  fuîvons  en  vous  admettant 

\y  pour  tclafy  poïr  fàmour  de  hiî  hè  nous  ôtez 

'   »    'i  *  • 

^,7paf  trti'tître^ue  nous  honorons  de  toutet 

'yl  tios^  forcés^  &  qui  nous  et  auiS  cher  cp^ 

V>i«)W.^^-       - 

"'  Les  Chrétiens ^difputeurs  înfîfteront  4àns  dou* 

te.   En  vous  renommant  de  Jéftts  3  faudrok 

inôus  dire  à'^el  titre?  Vous' fixiez,  dites* 

,  .      "        •«••..•»       -  ^ .«  ^ 

vous ,  fa  îwffble ,  mais  quéîfe  iautorité'  luî'  don* 
inez^ vous  ?  Reconnoiflêz  •  vous  ]i  Kéiréhtion  ? 


•   1/  E'   T   f  R    É.  fi 

^^la  reoonnoiflfez-vons  pas?  Admettez -vom 
t£\rangile  en  entier ,  ne  fadmettez- vous  ^'en, 
partie?  Sm  quoi  fohdez-vous  ces  diftinâions? 
Hàifaûs  Clirétiens  ,  qui  marchandent  avec  k 
tûAvct ,  qui  chcffîflent  dans  fa  doftrîne  ce  qu^il 
leur  plak  d'admettre  &  de  rejettéH 

A  cela  les  antres  diront  paifiiâement  „Met 
\y  frères  ,  nons  ne  marchandons  point  ;  car 
^y  notre  foi  n'eR  pas  uq  commerce  :  Vous  iup» 
^  poÊz  quHl  dépend  de  nous  d'admettre  ou  de 
)î  rejetter  €omme  il  nous  plait  ;  tirais  cda  n*eft 
„  pas,  i&  notre  taifon  n*obéit  point  à  notre 
,,  volonté.  Nous  aurions  beau  vouloir  que  ce 
,1  qd  nous  paroit  faux  nous  parut  vrai ,  il 
^  nous  paroitroit  faux  malgré  ncbs.  Tout  ce 
^,  qui  d^nâ  de  neus  efl  de  parler  febn  notro 

•  •  • 

yi  penfêe  du  contre  notre  penfôé,  &  nôtre  feul 

i,  Cîime  eft  de  ne  vouloir  pat  vous  trompers 

^  Nous  recionnoiflcns  Taucorité  de  Jéfù»# 


f  * 


^,  Chrift jt  ^parce  que  notre  intelligence  jaçfuîrf» 
;y,  ce  à  i^s  pcéçepces  &  nou;,  en  décbuvççf  h 
*.^,  fabUç^ût^j  ^^Içrnous  f^^^q^-irconyient:  aux 
^,  hommes;  ^fuivreces;précept;e^  9  maiff;q)i^ir 
j,,.  iétoît.  an  deflus  d'eux ^d^  le^.trppverj  J^Ious 
admettons  Ja  Révélation  icoinsne.  émanée  .de 


•  ««.  ■ 


»5  

3,-  l'Erçrit  de  Diéa,  faps.ç?  ^vj^ir  la.  maître, 
,^,  ^&.f^,;ioiis  tourniençet: pour.  J?.  découvrir^ 
^  pouryji  que.,  nous  làçhi(mS;qRe-^pieïi  a^^I^ 
3,,  -peu  410US.  ançorçe  :  d;  expliquer  içopraent  il 
,,  «*y  efl;  pri$,pour  fe  faire  entendre. ,  iAànfi:re- 
^,  connoiilknt  dans  r£yaQsile.F<^itq3;ité  divir 
.,,  ne,  nous  croyons  Jéfus-CIyrift; revêtu  de  cet- 
^  teautorité  ;  nous  reconnoii^s  une  Verti) 
plus  qu'humaine  dans^  fa  conduite  ,  ,&,unç 
fageffe  plus  qu'humaine  >  dans,  fes  leçons. 
j,  Voila  ce  qui  efl  bien  décjdp  pour  nous, 
p  Comment  çe^  s'eft-ijfjsiit  ?:  Voila  ce  qui. ne 
^  l'ed  pas  ;  cela  nous  paffe.  Cela  ne  vous  paf* 

.^  fe 


LETTRE.  If 

« 

^  fepas,  vouk;  àlabdoÉe  heuifc;  noos  vous 
y,  enfélicîcoDidetoutJioaeJcœttr.  Votre  fai« 
^,  fcHi  peut  être  (Upérkoipe à  la  nôtre;  mais  ce 
,»  n'eft  pa^^à  dire'/iu^ëlli  doive  noua  ficvir.  de 
„  Loi.  Nou$  coDiêotQM .  ^ue  vou3  iachîes 
,,  .tout  ;  ipâSîez  que  nousi^norioai  ^ue^oe 

91  ViH}$  noiv  dëfostààa  û  ntm  ^admettons 
),  tout  r£vsu3i^  ;  nciua\j3d»àto]is  tons  Içs 
„  eoiei^emeqfi  qu'a  doitfié  Jéâu-ChrifL  LV 
„  tilk^  b  nécefliléde  la  plupart  de  ces.enfei^ 
n  gnemena  nous  firape  4c  .noua  tâchons  do 
I,  nous  y  ccofiomi^.  Qufi;)ques-uns  ne  fi}qc 
„  pas^'OOcte  portée  ;  Us  obt  été  donnés.  £u^ 
}>  doute  p0ur  dct  effrita  plu3 .  intelligens  qu^ 
D  nous.  Nous  ne  croyons  point  avoir  atteint 
),  les],  limi^s  de  la.  raifcxi  hootaîne ,  &  les 
„  hommes  .^ui[  pénétrans  ont  befoin  de  pré» 
Il  cq)tçs  pîus  étevél.  ;     : 

Partii  L  C 


34       ^   R   Ë;  M   t   E   H    Ë 

r   ^,  Beaocoqp  de  (^ofeiB  dan&  TEvaDgite  pû£* 
^  ieût  notre  nûioti ,  &  même  la  choquent  i 
^j  nous  ne  lès  rèjetcons  pourtant  {tôs.    CoiX" 
^  vBÎnçurde  la  f<âbkfle  de  notre  entende- 
^  xhent  9  nous  favons  relj^âer  ce  que  nous 
^  ne  pouvons  concevoir ,  quand  l'afibciatiott 
I j  de  ce  que  nous  concevons  nous  le  fait  ju* 
;^'  ger  {teneur  à  nos  lumierei.    Tout  ce  qui 
^  laiM  eft  néodOËdre  k  favoir  ifour  être  faints 
3^  dons  parait  clair-dam  l'Evangile }  qu'avons^ 
i^.nous  befbitf  d'isncendre  le  refie?  iSur  ce 
jj  peint  nous  dânéurerons  ignomitt  mais  ex» 
yj  easpts  d'iorrettr»  ^  n<>us  n'en  fèrcMs  pas 
^,  ilioans  gens  de  bien  ;  cette  has^Ue  réftrve 
9,  eUe^même  èft  f ^prit  de  rSvangSe. 

j^  Nous  ne  refpe^ns  pas  prédféinent  cm 
1^  Livre. Sacré:  câbttie  Livre,  'mais  comme  h 
1,  parole  &  k  vie^de  Jëfus-  Chtâl.  '^  Le  cai^c^ 
ly  tere  de  vérité  de  fageffe  d^de  .l^teté  ^^hI 


r 


Lettre.        sj 

* 

y^  s'y  trooVe  nous  apphend  qiie  cecte  hîftoire 
),  n'a  {te  été  d&ncîellement  altérée  (4) ,  mm 
}n  il  n'eft  pas  déMbutté  pour  nous  qu'elle  ne 
,i  Tait  pomt  été  du  tout;  -  (^ui  fait  fi  les  cha» 
li  &s  que  nous  h*y  ciMiprenoos  pas  ae  ibat 
9,  point  des  Ëiutes  glifSeir  dans  le  tekte  ?  Qui 
^  ait  il  des  Difciples  fi  fort  itaférieurs  à  leur 
M  maîoerdnc  bien-  (Ct^i^ffic  &  bieb  raida  par 
M  tout  j?  Nmt  ne  iëaiddiK  |)b^  là-ddil»! 
i>  nous  ne  préfutnons  psis  èifitoe  ;  '^  IM)Ù6  ne 
j>  vdus  ptbpofràà  di»  âMje6^   que  parod 
),  que  tHïus  Fexigc&         . 

5,  îf  oas  poo^oiai  noss  ttioËiper  da&s  Ilot 
fi  jdées^  irais  vous  p^i^e£  suffi  vous  tromper 
fy  dans  les  ^Skte$.   FâWquoî  he  le  pourries^ 


pW* 


•  ^  ' 


(4)  Oh  en  feraient  les  fiinpies  fidellcs^  fi  l'on 
ne  poiiVoit  Avoir  cela  que  par  des  difculCons  de 
critique,  ou 4)^  l'autorité  . diw  Eafteurs  ?  Dp  quel 
front  DÎe^t-on  faire  dépendre  la  foi  de  tant  de  fden« 
^  ou  de  tant  <le  fioms^ofit 

C  a 


,3<5       PREMIERE 

^)  V0U3  pas  étant  hommes?  Vous  pdovez  avour 
jj  autant;  de  bonne  foi  que  nous  ,  msàs  vouf 
,9  n^n  (auriez  avoir  (bvantugé  : .  voiâ  pouvez 
,,  être  plus  éclairés ,  mais  vous  n'êtespâsin^ 
9,  £sLiIlibIes.    Qui  jugera  donc  entre  les  deux 
5,  partis  ?  feta^ce  .vous  ?  cela  tf  eft  pas  jufte, 
,^  Bien  mcfinsfèrarç^aoBs^UÎ  iloesxfâions  fi 
^  fon  -de  nous --nilfte».    Laîfloiw/donc  «ette 
^  décifionau  juge.conmiUQ  qui  nous 'entend^ 
»i^  p^ue  nou$ibini|ies d'accord  fur  les  re-^ 
^  g^s  4e  nos  dgfvôirsj  réciproques ,  fupportezr 
jy  nous  fur  le  refle,  comnje.  nous[  vous -fu^port^ 
5>,,tpQS,:  Sayoni  iii)]iisRM3  de prâ:,;  fcqpns  fre* 
y,  res  5  >  uniirons«|ioua  dans  f  amour:  de. iiK)tr& 
M.  commun  maître  ^  dairs  la.pradque  âes  verr 
„  tus  qu'il  nous  prefcrit.   Voila  ce  qui  fait  le 
5,  vrai -Chrétien. 

„  Que  fi  vous  vdiis  obftïnez  à  nous  lèfufer 
3,  ce  précieux  titre;  après  «voir  tout  fait  pol£l^ 


LETTRE.  37 

^  vivre  firatemellemcnt  avec  vous,  nous  noui  ' 
,,  confolerôiis  de  cette  iDJuflîce ,  en  fongeant 
y,  que  les  mots  ne  font  pas  les  chofes ,  que  les  * 
„  premiers  difciples  de  Jéfîis  ne  prenoicnt 
^  point  le  nom  de  Chrétiens ,  que  le  martir 
,,  Edenne  ne  le  porta  jamais  ^  &  que  quand! 
„  Paul  fut  converti  à  la  foi  de  dhrîft,  il  n*y 
„  avoiic  encore  aucuns  Chrétiens  (5)  fur  la 


n 


tene.  " 


Croyez- vous,  Monfîeur,  qu*une  contrôver- 
fe  aînfi  traitée  fera  fort  animée  &  fort  longue, 
&  qu'une  des  Parties  ne  fera  pas  bientôt  rié*  ' 
duite  au  filence  quand  Tautre  ne  voudra  point' 
dilputer. 

Si  nos  Profëlytes  font  maîtres  du  pays  oà  ils 
?ivent ,  ils  établiront  une  forme  de  culte  au(& 
fimpleque  leur  croyance,  &  la  Religion  qui 

*  * 

(5)  Ce  nom  4pur  fbt  donné  quelques  annéts  a«. 
fris  à  Actiocbe  pour  la  première  fois. 

C3 


s. 


/^ 


\ 


/ 


38        PREMIERE 

r^fultera  de  tout  cela  fera  la  plus  utile  auxi^ 
hommes  par  fa  (implicite  même.  Dégagée  de 
tçm  ce  qu'ils  mettent  à  la  plaœ  des  vertus ,  & 
iv'ayaut  ni  rites  fuperftitietn: ,  ni  fubtilitës  dans 
la  do6lrine  elle  ira  tqute  entière  à  ibn  vrai  but. 
^ui  eft  la  pratique  de  nos  devoirs.  Les  mots 
de  àèîiot  &  Sonlmà^xî  y  ibrcmt  fans  a(àge  ;  I^ 
i9on<^onie  ^e  certains  fons  articulé^  n'y  fera; 
pas  la  piété  >  il  n*y  aura  d'impies  que-  les  mé- 
dums ,  ni  de  fideUes  que  les  gens  de  biten.    ^ 

Cette  ii^Otîtution  une  fois  &ite  »  tous  feront 
obl^és  par  les  Lois;  de  s'y  iommettre  »  parce 
qu'elle  n'eft:  pokit  fondée  fur  l'autorité  des 
hommes ,  qu'elle  n'a  rien  qui  ne  foit  dans  for-*. 
^  des  lumières  naturdles,  qu'elle  x^  contiens 

m. 

aucun  article  qui  ne  fe  raf^rte  au  bien  de  \ 
ibciété ,  &  qu'elle  n'eft  mêlée  d'aucun  dogn^ 
inutile  à  la  morale  ^  d'aucun  ppipt  de  pfx^. 
feéculation. 


LETTRE,  ^ 

Nos  Frofélyteç  feront-ils  intolérans  pour  c6« 
h?  Au  contraire ,  S$  feront  tolëran$  par  priiv 
(dpe,   ils  le  feront  plus  q(a'on  ne  peat  récrè 
dans  aucune  autre  doâxiné,  ^ifqu'ils  admets 
tcont  toutes  les  bonnes  Religions  qui  ne  s'ad^ 
mettent  pas  entre  elles ,  c'eft-à*(Ure ,  toutes  cel« 
les  gui  ayant  l'eiFencîël  qu'elles  n^ligent ,  fot^ 
f  e(&ncidl  de  ce  qui  ne  f  eft  point.    En  s'atta^ 
é&mt ,  eux ,  à  ce  feul  e&nciel ,  ils  laifleroni 
ks  autres  en  fidre  à  leur  gré  racceflbire,  j^ur*» 
vu  qu'ib  ne  le  rejettent  pas  :  ils  les  laiâferoni 
expliquer  ce  qu'ils  n'expliquent  point ,  déddet 
ce  qa  ils  ne  décident  pouit.  Us  laiileroat  k  cha^. 
0an  fes~ rites I  fes  formules  de  foi,  fa  croyan* 
ce  :  ils  diront  ;  admettez  avec  nous  les  princi^ 
pes  des  devoirs  de  l'honmie  &  du  Citoyen  ;  div 
pefte,  c^oyea  tout  ce  qu'iS  vous  plsdra.    Quant 
9^  Reli^cttis  qui  font  eflencieilement  mauvais 
fiet,  qai  portent  l'homine  à  faire  le  mal ,  ik.  vis^ 

C4 


49       P   A    £    M    I    s    R    £ 

les  toléreront  point  ;  parce  que  cda  même'eflr 

* 

contraire  à  la  véritable  tolérance ,  qm.n'a.poiiir 
bat  que  la  paix. du  genre  humain.  Le  vrai  tô* 
lérant  ne*  toléré  point  le  crime ,  il  ne  tolère 
aucun  dogme  qui  t&aâô  les  hommes  méchan$» 
^  Maintenant  fuppbfons  au  contraire,  quenof 
Profélytes  foient  fous  la  domination  d'âutrui: 
comme  gens  de  pai^  ils  ferc^t  fournis  aux  Lois, 
de  leurs  maîtres ,  même  en  matière  de  Rdi- 
gion ,  à  moins  .que  cette  Rdigion  ne  fut  eflen^ 
ciellement  mauvaife  ;  car  alors. ,  ians  outrager 
ceux  qui  la  profeflènt ,  ilis  refùferoîent  de  la 
prôfefier.  Ils  leur  diroient  ; .  puifque  Die;M  nous 
appelle  à  la  fervitude ,  nous  voulons  être  de 
bons  ferviteurs ,  &  vos  fentimens  nous  empê* 
çheroient  de  l'être  ;  nous  connoifFons  nos  de^ 
voirs  nous  les  aimons ,  nous  rejettons  ce  qui 
nous  en  détache;  c'eft  afin  de  vous  être  fidel- 
les  que  nous  n'adoptons  pas  la  Loi  de  finiquitë.. 
Mais  fi  la  Religion  du  pays  eft  bonne  en  cl- 


L    E    -f    T    R    E. 


41 


k-mêmei  &  qoe  ce  qu'elle  a  de  mauvais  Ibk 
fedement  dans  des  interprétations  particufie-: 
res,  ou  dans  des  dogmes  purement  ipéculatifs; 
ils  s'attadieront  à  l'HTenciel  &  toléreront  le 
refte  ,  tant  pa^  reQ)eâ  pour  les  Loix^  que  par 
amour  pour  la  paix.  Quand  ils  feront  appelles: 
à  dédarer  expreffiâtâent  leur  croyance  ,  ils  le 
feront ,  parce  qu'il  né  £mt  point  mentir  ;  ils 
diront  au  bdbin  leur  lentiment  avec  fermeté, 
même  avec  force;  Ss  iê  défeiidtont  par  la  rai- 
fon  fi  on  les  attaque.  Du  refte  »  ils  ne  diipu^' 
teront  point  Contre  leurs  frères  »  &  fkns  s'ob«^ 
(Uner  à  /vouloir  ks  convaincre  ;  ils  leur  refte* 
ront  unis  par  la  charité  .^  îii  s^EËfteront  à  leurst 
affemblées,  ils  adopteront  leurs  formules,  & 
ne  fe  croyant  pas  plus  infailliWes  qu'eux ,  iU 
fé  foumettront  à  Tavjs  du.  plus  gr^d  [nombre » 
ea  ce  qui  A'intéreiTe  pas  leur  cgnfcience  ôç  0» 
loor  paroit  pas  importer  au  falat. 

C5 


/ 


4»       PREMIERE 

Voila  Je  bien,  medifcs^vws^  voyons  ié 
maT.  Il  fera  dît  ^  peu  de  parole^.  Dieu  ne 
fera  plqs  Torgane  4e  la  mëdiaoûsfié  des  faomn 
môs.  La  Religion  ne  Êvirira  pbs  d'inffariirâ 
à  la  tyrannie  des  geu  d'Eglife  &  à  la  veq^n^ 
ce  des  ttiUrpatears  j  dtes  ne  fi;mra  {^s  qu'à 
rendre  les  croyans  bons  &  jufles  ;  ce  n'eu  pasi 
là  le  compte  de  ceur^î  fes  mènent:  c^eft  pis^ 
pour  eus  q^e  fi  die  ne  Ib^oie  à  rien. 

Ainfi  donc  ki  doârine  en  qn^ion  eft  bon* 
ne  an  genre  humain  ^  miauTaife  à  les  oppreC- 
feurs.  IXns  qudËfô  dailb  si(blblue  la  faut»iy[  ttieu 
tre?  JTai  dit  fidèlement  le  pour  <&  le  contre; 
comparez  &  choifKl^ 

Tout  bien  examiné ,  je  crois  c^è  vous  ccm- 
viendrez  de  deux  diofes  :  Tuite  que  ces  hom- 
mes que  je  iUpp(^e  fe  cônduîroient  en  ceci 
très  conféquemment  à  la  profeffion  de  foi  da 
Vicaire;  Taucre  que  cette  conduite  feroit  noa 


LETTRE.  4J. 

Cernent  iiréprochabk  mais  vraiment  chré» 
ùenne  ,  S(  qu'on'  aocoit  txatt  de  rsfbfer  à  ce( 
bcimnes  bons  &  piçux  le  nom  de  Qirétiens) 
pui%iHls  le  mériteroient  parfaitement  par  leur 
çcmdiûte,  â^  qu'ib  feroîaiit  moine  'oppo(%(* 
paivleors  fbndmens  à  beaaooiq^  -de  ft^s  qui  le 
prennent  &  à  qui  on  ne  le  diipwte'  |iai,  que 
pluGeurs  de  ces  mêmes  feâes  ne  font  oppoféei; 
entre  elleft,  Ce  ne  feroîent  pas ,  Q  l'on  vpai^ 
4es  Chrétiens  à  la  mode  de  Saint  Caitf  qui  étCHt 
çatureBemtent  perfécqteur ,  à^  qa|  n'avoit  pa$ 
entendu  Jéfus - Cbrifl;  lui-même;  mai»  ce  Ç> 
roient  dies  Chrétiens  à  la  mode^  de>  Saint  Ja- 
ques, dioifi  par  le  maître*  en  perfbnne  &  qui 
avoit  reçu  de  fa  propre  bouche  les^  inftruâions. 
quffl  nous  tra^fmet.  Tout  ce  raifonnement  el^ 
bien  (impie  ^  mais  il  me  paroit  c<Hicluant. 

Vous  me  demanderez  peut-être  comment 
pn  peut  accorder  cette  do£bine  avec  ceDe 
4'un  homme  qui  dit  que  l'Evangile  eft  abfurde 


'44.>       PREMIERE 

&  pemideux  i  la  ibdété  ?  En  avouant  fran« 
ehenient  que  cet  accord  me  psroit  difficile ,  j^ 
TOUS  demanderai  à  mon  tour  où  efl:  cet  hom« 
me  qui  dit  que  TEvangile  efl;  abiurde  &  perni* 
deux  ?  Vos  Meffieiirs  .m*accu(ènt  de  TavcNU* 
dit;  &  où?.  Dans  le  ConiraSt  Social  au  Chapî^ 
cre  de,  la  Refigîon  dvile.  Void  qui  efl:  fingii* 
lier  !  Dans  ce  même  Livre  &,  dans  ce  même 
Chapitre  je  penfe  avoir  dit  précifément  le  con- 
traire: je  pei^eiavoir  dit  que  l'Evangile  efl:  fu* 
blime  &  le  plus  fort  lien  de  la  fociété  (6).  Je 
ne  veux  pas  taxer  ces  MelSeurs  de  menfbnge  ; 
mais  avouez  que  deux  propofitions  il  contraî- 
fies  dans  le  même  livre  &  dans  le  même  Cha* 
pitre  doivent  faire  un  tout  bien  extravagaint. 
.  N'y  anroit  •  il  point  ici  qudque  nouvelle  é« 
quiyoque»  à  la  faveur  de  laqudle  on  me  rendit 

'  (is)  ContraÔ  Social  L.  IV.  Chap.  8.  p.  3X0*  31  r^ 
jk  TËdition  in  8« 


«. 


t   É   t    T   s.   Ë.  4^ 


(las  «coupable  oa  pin»  fou  que  je  he-fiûs?  Ce 
fnot  de  Société  préfente  un  fens  on  peu  vagiie: 
il  y  a  dlans  le  rnoodé  des  focîétib  de  bien  (fes 
fertes ,  &  il  n^éft  pas  impoffîblé  que  (^  qui  fert 
à  l'une  naife  à  Tautre.  Voyons  :  la  méthode  fit-* 
vorîte  de  mes  aggrefleurs-  eft  tonjours  d'offrir 
avec  atcdes  idées  iddéteminées  ;  continuon» 
pour  toute  réponfe  à  tâcher  de  les  fixer. 

Le  Chapitre  dont  je  parle  eft  deftiné,^  com*'^ 
me  on  le  voit  par  le  titre  »  à  escaminer  coni^ 
aient  les  inftitudonrreligieufes^  peiîvent  entrer 
dans  la  êon&itiimn' de:  l'Etat.  Ainfi  ce  dont  il 
s'agit  ici  n'eft  point  de  confidérer  les  Rieli« 
^ons  comme  vràyes  ou  fauilb»  ni  mêAie  côtn- 
wc  bonnes  oa  mauvraifes  en  eOes^xiêmes ,  maîa 
de  les  confidérer  tmiquement  par  liecM^  rapports 
aux  corps  politiques ,  &  comme  paAies  de  la 
Légîflation. 

Dans  cette  vue,  l'Auteur  fait  voir  que  to^ 


4<f       i»    R    É    M    t   le    R    Ê 

fippropriéçK  ieiçarp0rée&  àl'Euc ,  &  formant 
la  bafé  ouda  sxKiins  faîTont  partie  da  Syftêoft 

}«e  C^iâtàmtbé ,  au  coutnikë  i  j:^  d«M 
fba  priocipe  une  Rel^ku»  umTàfdte ,  911  n'a 
rien  d'evdi^j;  rfen  de  k)cal>  rien  de  propnl 
k-tà  p2LjspkL0t qu'k  tel  autre»  Son  àif/in  Aa^ 
teur  eqé^a^QiiitC  ég^enieai  tw 
ibw  ia  Ghsrité  lant  homcsr^.e&'véàti  iever  :1* 
banrielje  ^  fêj^rok  lea^  Nadons ,  &  réatàt 
0Qf  }e  senr$.  htimain  dans  uni  peuple  de  fre« 
JÊ^  :  Aair^^  t^te  Naîon  cehù  qui  M  crainte  &, 

^  le  Vérkièle  efpiit^de  l'Evangila 
Ceux  dMie  wi  ont  voulu  &ifô  du 


••rtk«Ml|P«B«M 


(7)  Aft.  X.  35. 


•     L    É    t    ï    ft    Ë.  i} 

tahiQ  une  Rd^fi  fiaé^iûale  &  Vb&toêaàtt 
oâtBtne  ptffdë  cooftîtudve  dans  le  fydbême  <k 
ia  Légiflafioli  ^  ont  fait  pair  là  dtex  fautes, 
baffîbles,  Fisneà  la  Religion,  &¥wLtxQk}*E^ 
tat.  Us  fé  foht  édriéi  de.Fefprît  de.  Jéfiii* 
ChrlA:  dont'le  iegne  n^^  pas  de  ce  monde ,  Se 
tûêlànt  aux  intérêts  terrefbei  ceux  de  la  Relî^ 
ffon  y  Ils  ont  foofflé  la  pûrétéxélèfte ,  ils  ei 
ont  Eût  Fainne  dâé  Tyrans  &  Tinffaiiitient  dèl 
pérfécuieurSi  Bs  n^ont  pas  Qioins  Meflë  \à 
faines  maximes  de  la  politiqoè  ^  puifqu^ao  lie& 
defimplifirf  la  madune  du  6oatreniêxïient /À 
l^oÂt  cômpofôe,  îIb  M'ont  donné  des  re0bit| 
ëtrai^rs  ftperfius  ^  &  rafibjedilânt  à  deok 

mobiles  différens ,  foulent  cot^traires ,  ils  onè 

....  .'-  »»« 

cssiTéles  drailletnens  qu'on  fêtit  dans  tous  les 

États  chrâiens  où  Pbn  a  fait  entrer  la  Rdf- 

* 

gio&  dans  W  lyftême  poliiîqaè. 
Le  paifint  ChrifttaniTnie  eft  rînftimtion  f<» 


48       P    H    B   W   I   Ç.   R   E 

çiale univerfelle;  maisppur  fnontrer qu'il ii*c^ 
poiat  un  écaI)Mîni^c  {^l^aue:^  qa'il  nç 
concourt  poinc  aux  bonn^^  ^nftk^dons  pâûrti* 
iOEdieres,  ilivHpîtôcer  1^  Sophirn^s  de  ceiiii 
qui  mêlent  la-Reli^n  à  toat ,  conmie  ijpie  p^« 
iê  a^ec  laquelle,^  il^  s'emparent  de  ^toUt,  *T<3ii» 
les  établifiêinçns  humain^  fypt  fondés  iur  Its 

I 

pailipns ; ^maii^es. «^  feconferv^t  par  eO^^ 
ce.qçi  <X)2):^tKat  &  )|étruit  les  paflipcff.n'eft  doaç 
j^as  propre  àfqrtifkr  çes^^taUffTezijenSi  Com^ 
inept;  ce  <]w4éçac(ie  les  ccqurs  de  la  terre  noiis 
jlipnneroitTi^pIas.dlintérécpour  qui  s*y  foît^ 
icommeitt  ce\q^.iiqus  occupe  uniquement  d*Uf 
^  autre  Fam^iiwsa^  ^avantage  à 

jp^Qe^ci?, 

^  Les  RdtgÎQiis^'i^tîonnales  fof^t^^  TE* 
tac  comme,  parties  de  f^  conflitution ,  cela  ^ 

tnconteftable  ;  mais  eDes  font  nuifiblçs  au  Geo* 

•      *•  *  * 

1^  humain,  &  même  à  l'Etat  dgn  un  antre 

fens: 


L    Ê    T    t    R    E»       *   4^ 

fens:  j'ai  montré  comment  &  pourquoi. 

Le  Chriftianirme  »  au  contraire  »  rendant  les 
hommes  juHes  modérés  amis  de  la  paix  ,  eft 
très  avantageux  à  la  fociété  générale  ;  mais  il 
énerve  la  force  du  reflbrt  politique  »  il  comi- 
y&qvLt  les  niouvemens  de  la  machine»  il  rompt 
i'unicé  du  corps  moral ,  &  ne  loi  étant  pas  air* 
fez  approprié  il  faut  qu'il  dégénère  ou  qu'il  d^ 
meure  ime  pièce  étrango^  &  embarrailante. 

Voila  donc  un  préjudice  &  des  inconvéniâw 

des  deux  côtés  relativement  au  corps  poIiti*« 

que.    Cependant  il  importe  que  FËtat  ne  foie 

pas  (ans  Religion ,  &  cela  importe  par  des  rai- 

fons  graves  ,  fur  lefquelies  j!ai  par  tout  forte* 

ment  ii^Ulé  :  mais  il  vaudroit  mieux  aoicore 

n'en  point  avoir ,  que  d'en  avoir  une  barbare 

Sl  perfécut^e  t]ui,  tyrannifant  les  Loix^  mêr^ 

mes ,  Gonuarieroit  les  devoirs  du  Citoyen.  Qa 

àkok  que  tout  ce  qui  s'ed  pftfTé  dans  Genève. 

Farttc  I.  D 


r'50       PREMIERE 

à  mon  ëgarcTtfeftïaît  que  povk  établir  ce  Cha- 
'  jiîcre  en  exemple ,  pour  prouver  pair  ma  pro- 

fh-ô  hîftoii^e  que  j^ai  très  bien  îspfonrté. 

•    -Qtfe  doit  faire  un  fige  L^îflateur  dans  cet* 
'  te  tdternatîve  ?  •  Dé  deux  chofès  Tune.  La  pre- 
-iniëf è ,  d^tablif  tme  RdîgKMi  purement  dvi- 
lie ,  ^dins  laquelle  tenfermaht  Tes  dogmes  fonda- 
iîàûtiûk  der  toute  bôni^  Rel%ion ,  tous  les 
dogAîiés  Vnomëntiiidles'à  fe  focîécé,  (ok  uni- 
Vetfélle  foît  ^particulière  5  îl  bmétte  tous  Jes  au- 
ffefî^iiî  péu^eiit  importera  fe  foi  ^  ^nâSs  ùuHte- 
ttiéit  tiu  bien  terJèfhre ,  unique  objet  .de  la  -Lé* 
'gifléibnr'icar-cbinirient.te  «ïyftère  cle- là  TH. 
Mté ,  pst'éxstài^h>y  pinit-il  tïofleburk  à  Ib.bon-  ' 
ne  cddO&dûtiii  iiêVmi,'eii'ijëoVù>s  iWnfttréâ 
i^iroiit- 9s  htëOlë^  ^éôyéi^  qinh^  il»  ^fif ùk 
^It^^Ie  Wrifé'des  borinei  ttu«¥ës  ^  ^  ^ile 
f^i^  ail  Hèn  -dé  lâifc^été  -dvile  'lè>âdgtne  da 


fô^  une  iimàtxitiôh  de  pàià')  qui  île  voit  que  le 
Chriftianifhie  dogmatique  oa  théologiquè  é(!t\ 
pst  la*  i&3tituâë'&'  fcBlbunté  de  fès  dogntef» 
jtirtoiit' pair  IHsBHgaitibn  der les  admettre-,  on 
diamp  de  bataille  tda|Dàrs *  ouvert  ééttre-  lei 
hoiiMs  ,'Sicéii  &n  qu'à-  fbice  d'icterpréta» 
êcfàk  âè-àè  dëdîfidàs'  otj-  pinOt;  privetixt  dd' 
ÀôâvéOià  difputés  ftr  lés  ddâdods  mêmes^ 

ïi:mVré- eàpéSéat  eft- dèlaiflêr le  Clèiltia^' 
trifliié  tie!  qtt'S  eft  datâ-fbit  v^table  éT^rit ,  1î«* 
bt^,  dîig^ë'de  £baf  lidiê  dé  daky  ùài  autre- 
obligation  que  celle  de  la  confcience ,  uns  aa« 
tre  gêne  daoj  ksâognm  que  les  mœan'  &  leg 
LouL  La'  Rdigioû  Clèiàienne  eft ,  par  la  pu« 
reeé  de  famoiale»  toajours' bonne  &  faine  dani* 

« 

rStat ,  pourvu  qu'on  n'en  fafle  pas  une  partie 
de  fit  cotifHtUtîon^  poilh^  qu'elle  y  fok  admî- 
le  uniqsânent  comme  Région  ,  ftntiment ,  ' 
ppînion ,  croyance  ;  maïs  comme  Loi  poVJr 


çz         P    R    Ê    M    I    E    R    E 

que,  le  Chridianifine'dogmatîque  efl:  un  niai> 
vas  itabliflement. ,  , 

.  Telle  eft,  Mcmfienr ,  la  plus  forte  cotifé^ 
qaence  qu'on  puiiZe  ticer  de  ce  Chapitre,  où ^ 
bien  loin  de  taxer  le  pur  Evangile  (8)  detre 
pernicieux  à  la  fodété ,  je  le  trouve ,  eo  quel- 
qii^  Ibtte^  trop  fbcîablç ,  ^  enibraffimc  trop  tout 
le  genre  humain  pour  une  Légjilation  ^ui  doit 
êve  e:^ufive  ;  infpiranc  Thuroanité  plutôt  ^e 
le  .patriocifme ,  &  tendaxxt  k  former  des  honv 
mes  plutôt  que  des  Citoyens  (9).  Si  je  me  fuis 

(8)  Lettres  écrites  de  la  Campagne  p.  30. 

(9)C*eft  merveîite  détoir.  raiïbrtiment  de  beaux'- 
fentimcDs  qu'oruva  nous  entaiTant  dans  les  Livres: 
Il  ne  faut  pour  cela  que  de$  mots,  &  lés  vertus  en 
pApler  ne  coûtent  gueres;  mais  jelles  ne  s'âgeûcènt 
pas  tout-à-fait  ainfî  dans  le  cœur  de  Thomme,  &  il 
y  a  loin  des  peintures  aux  réaKtés.  -Le  patriocîfine 
&  rhumanité  font,  par  eiemple,  deux  vertus  in- 
compàtibres  dans  leur  énergie,  &  furtout  chez.ua 
peuple,  entier.  Lq  Légiflateur  qui  les  voudra  toutes^ 
deux  n'obtiendra  ni  l'une  ni  l'autre  :  cet  accord  ne 

•       •  •  «       « 

$"M  jamais  vu  5.  îl  ne  fe  vçrrà  jamais,  çarcc  qutt  ' 


LETTRE. 


53 


trompé  j*aî  fait  une  erreur  en  politique,  mais 
où  eft  mon  impiété  f 

La  fcîence  du  falut  &  celle  du  Gouverne- 
ment  font  très  diflFérentes  j  voubîr  que  la  prc- 
imere  embraffe  tout  efl  un  fanaLtifme  de  petit 
elprit  ;  c*efl:  penfer  comme  les  Alchymîftes , 
iqui  dans  l'art  de  faire  de  For  veyent  auffi  1) 
médecine  univerfeUe ,  bu  comme  les  Maho- 
métans  qui  prétendent  trouver  toutes  les  fcîen- 
ces  dans  TAlcoran.  La  doftrine  de  FEvangile 
li'a  qifun  objet  j  c'elld'appfeller  &  fau ver  tous 
les  hommes  ;  leur  liberté ,  leur  bien  -  être  îcî«> 
bas  n*y  entre  pour  rien,  Jefus  IX dit  mille  fois. 
Mêler  à  cet  objet 'de$  vues  terreflres,  c*efl:  al- 
térer  fa  fimplicîté  fublime  ,  c*efl:  fouiller  fa 
fainteté  par  des  intérêts  humains  :  c'efk  cela 
<|ui  efl  vraim£;nt:  ime  impiété. 


>«iw«ta 


eft  coDitraîre  à  la  nature ,  &  qu'on  ne  peut  donner 
dcuz  objets  à  la  même  paiSon* 

D3 


\        PREMIERE 

Ces.  diftinftîoDs  ibnc  de  tous  teins  éta^Uea* 
On  ne  les  a  confondues  gue  poift  moiXeuI,  ^ 
dçmt  des  In(Htuti^  natiçxwalcs  la  R€^|ion 
Chrétîenoe ,  j|e  Téç^îlis  la  meilleure  j{Qur  4c 
genre  humain..  X.'4îf tW  .de  TE^prît  des  l^oî^: 
a  fait  plus;  il  a  dit.gucja  mufulman^  étoijt  ]^ 

meilleure  pour  les  contrées  aHatjqueç,  JQ  rai; 

^*  .',♦«  <     .    -'  ».*.'•  ^«   •  »**  i«  .•-- •   « 

fonnoit.en  politigue,j&  ipoî  auflî.  Dans  qujd 
pays  a-t'on  cherché  quçrelle,  je  pe  dis,  pas  k 
l'Auteur ,  mais  au  J^îvre  ^(ip)  ?  JPour^pi  di^ç 
fuis  -  je  coupable  ,,.^qu  pourquoi  ^iiç  rétoit-îl 

pas?        . 

Voila,  Moi^Ceur,  comment  par  des  extraits 
fid^es  un  critique  équitable,  parvient  à  con-r 
Hoîtreles  vrais  fe«timens  d*un  Auteur  &  fe 


k  ^   j 


•i 


(lo)  Il  eft  bon  de  remarquer  que  le  Livre  .de 
rEfprît  des  Loix  fut  îraprimîi'pfciir  h  première  fois 
A  Genève  f  fans  que  Us  Scholarques  y  trouvalTent 
rien  à  reprendre^  &  que  ce  f^ç  un  P^^ftew:  qui  cor- 
rigea rEdicfofl.  '        • 


r 


\ 


L    E    T-T  -R.  E.,  ss 

defTeîn  dans  lequel  il  a  compofé  Ton  Liv^^ 
Qu'on  examine  cous  les  mi^ns  jpar  cçttè  ^j^ 
tl^ode  ,  je  ne  eraîns  point  le;  ju^emei^î.,  q^f 
tout  bonpêçe  homiAe  en  pourra  porter.  ^^ 
ce  rfeft  pas  ainQ  que  ces  ftleffiewrs  s'y  pre»j 
qent,  ils  n'ont  garde,  il?  n'y  trouYeK)ie]^t^as 
jcp  g{x!ils  cherchent.  Dàn^Je-proj^çj;  de  misf  ç^n- 
.^e  coupable  à  to.ut  prix  ,  ils  çç?tf çenp.  Iç  ,y^aî 
but  de  l'Oiiyrage;  ils,luj  c^pt^nt  pQijj- but  çh;^ 
j^e  erreur  chaque  néglij^çpcp  é(gl^^o  à  l'^u^ 
teucjj  &  fi  par  hazard  illaïC^  unp^iÇiçé  4<ml; 
vqqije,  ils  ne  man^upnji  p2\s  ^e. Twiterpr^ter  . 
dans  le  feqs  qqi  rU'efl  pa$  k  (l?n. .  Sur  un  ^rap^i 
;Champ  copvrert  d'un^  HK^flbn  ^^l6«  i^  vpm 
triant  avec  foin  quel(jues  mauv^fes  plante^ 
pour  fipcu%  celui  gvft  Ta  feifté,  tfptre  i^^,eçj- 

D  4 


•     I 


$6         PREMIERE 

honnêtes  datis  le  fens  que  je  leur  donnoîs.  Ce 
ïbnt  leurs  falfifications  leurs  fubreptions  ^  leurs 

« 

interprétations  frauduleufes  qui  les  rendent  pa- 
niflâbles:  Il  faut  les  brûler  dans  leurs  Livres  ^ 
&  les  couronner  dans  les  miens. 

Combien  de  fois  les  Auteurs  dîfiamés  &  le 

* 

public  indigné  n'ont  -  ils  pas  réclamé  contre 
cette  manière  odieufe  de  déchiqueter  un  ou- 
vrage, d*en  défigurer  toutes  les  parties ,  d'en 
Jiger  fur  des  lambeaux  enlevés  ça  &  là  au 
choix  d'un  accufateur  infidelle  qui  produit  le 
mal  lui  -  même ,  en  le  détachant  du  bien  qui 
le  corrige  &  l'explique ,    en  détorquant  par 
tout  lé  vrai  fens?  Qu'on  juge  la  Bruyère  ou 
la  Rochefoucault  fur  des  "maximes  ifolées,  à, 
la  bonne  heure  j   encore  fera  - 1  -  il  jufle  de 
comparer  &  de  compter,  Mais  dans  un  Li» 
vre  dç  raifonnement ,  combien  de  fens  divers 
ne  peut  pais  avoir  la  même  prc^ofitîon  feloa 


L    E    T  ,T    R    E.  s? 

ht  manière  dont  T  Auteur  l'employé  &  dont  il 
la  fait  envifager?  Il  n*y  a  peut  -  être  ps»  une 
de  celles  qu'on  m'impute  à  laquelle  au.Ueà 
où  j6  fai  miiê  la  page  qui  précède  ou  celle  qttî 
fuit  ne  ferve  de  réponfe ,  &  que  jb  rfaye  prîfc 
en  un  fens  différent  de  celui  que  lui  donneiic 
mes  accikateurs.  Vous  verrez  avant  la  fin  de 
ces  Lettres  des  preuves  de  cela  qui  vous  fur* 
prendront.  -• 

< 
•  •       •  • 

Mais  qu'il  y  ait  des  |xrop6fitions  fauflea^ 
rëpréhenfibles  )  blâmables  en  elles-mêmes,  ce« 
la  fuffit-il  pour  rendre  un  Livre  pernicieux? 
Un  bon  Livre  n'ed  pas  celui  qui  ne  contient 
rien  de  mauvais  ou  rien  qu'on  puiilè  interpré- 
ter en  mal  ;  autrement  il  n'y  auroic  point  de 
bons  Livres  :  mais  on  bon  Livre  eft  celui  (pi 
contient  plus  de  bonnes  choies  que  de  mauvais 
ies,  un  bon  Livre  efl;  celui  dont  l'effet  total 
eft  ée  Bieher  aa  bien ,  malgré  le  md  qui  peuc 

D5 


^5         p.p.    E    MI    E    RE 

f 

dfi:|î%!l^iW.graii^  i^ijyrafie  pleip..  de  vérités  ufi- 
M,  ;.iJe  feçpBSl<î3iU0^}fl^  ^Cf  j^  de  vprta, 

g^  «iK*^^cig.;îQW:^*.te§  ifflfreyr*»  tputpS;  les 

de  fa  matière ,  accablé  des  nombreufes  idé^ 
,qiMe-  lràofSïgfl%î  ^fkaif.^d^  iMPgs.  p^  les 

if^ui  eft  ifelé  j .  paig ,  j  tgi^gj;  j§  fçilltif.qdf , .  # 
.çhflfes  bQpi^  &::l^^$fi  qui  j  les  démçi^ef^ 

iOsontteiit  Ig lîT* kmâe lÂW^b^^fm^  9 


ï.    E    T  -t    R   «. 


^ 


a/aa  rçceuil  pour,  celui  .de  fe?  j^d^,  ,d'^. 
yaçttcer  .^ue  c'id^  là  Iç  r^jupé  (Ji?  ^  vpw  fen^ 
limaos,  &  de  1^  jugpr  fur  jm  ^^  e«rajt  J 

pans  quel  d^e^t  ^u^r^jt-il  fw.;  4^s,Jjjad  apy 
tr? .  %^oit- a  ft  çip^r; p^  ^^g^^  au| 

rœqp  du  njd  pijiijp!C)iept  Je  b^ ,  ,^^.ç<}nîpfie,  . 
ipioat  ppçr  rieq  Je  <^jb:  le?  wt^ORtioi^  j  1^  drcjj:, 
tare  p^ur  toat  ^vident,e  ^  .^^  ntij^^ci j^t  la  fa^^ 

crime  d'un  /Ç|élérat2  y  a-trjl  .^  feul  yvfÇi 
au  monde ,  giipl^ue  vpv ,  <nje|^ç,  Ij^  i  flif e^. 
que  excellent  qu'il  puiflë  êtte  qui  put  échapCT 
à  cette  infâme  inquifitîpQ  ^  |^Wy  ]^9n%ip» 
H  n'y  en  a  pas  un»  pas  un  ftul,  non  pas  FE- 
vangile  même  :  car  h  mal  gui  n'y  feroÎK:  p^  ils 
fauroient  l'y  mettr^  par  ^urs  c^tt^f j!  |nfi^dj^« 
les  ,  par  leurs  Êmflêr  iMerptrftatioâs.  - 
^(W/  t;(7i^j  déferons^  ùktçg^tïk  ^iixSxM^ 


6e       PREMIERE 

f  -  m 

'Livre  fcanâaleux  j  téméraire  ^  impie  ^  dont  là  mo- 
rale èjl  d! enrichir  le  riche  £?  de  dépouiller  le  pau- 
vre («),  d^ apprendre  aux  enfans  à  renier'leur  me- 
re  &  leurs  frères  (A),  de  s*  emparer  fans  fer  upule 
iu  bien  d* autrui  (c)y  de  n^injlruire  point  les  m/- 

r 
•   >  •  •  •       •  • 

cbanSy  de  peur  qu* ils  ne  fe  corrigent  £?  qu'ils  ne  « 
f oient  pardonnes  (d) ,  de  haïr  père  ,  mère  ,  fem- 
me  y  enfans  ,  tous  fes  proches  Ce)  ;  un  Livre  ou 
Vonfouffie  par  tout  le  feu  de  la  difcorde  (/) ,  ou 
Ton  fé  vante  t armer  le  fils  contre  le  père  {g) ,  les 
par  eus  Vun  contre  Vautre  (A)  ,  les  domejlîques 
fofttre  leurs  maîtres  (t)  ;  oU  l'on  approuve  la  vio* 

•                             •  •  t    • 

"^  »  11*1     II  ■■    ■       1 1>  I   1 1        II»  ».  Il» ■■   ■■  I  ~ 

^    (a)  Matth.  XIII.  12.  Luc  XIX.  26.     ' 
,  Ib)  Matth  XIl.  4|.  Marc  III.  33.  _ 

(0  Marc.  XI.  2.  Luc.  XIX.  30. 

(il)  ;Marc.  IV.  x2.Jean*xil.  40.      •        '■ 

(0  Luc.  XIV.  26. 

(f)  Matth.  k.  34.  Luc.  XIL  51.  52, 

{g)  Matth.  X.  35*  L«(S;  XH.  ^3. . 

(h)  Ibid, 

<0  Matth*  X.  16. 


L    E    1*    T    R    E.  €i 

latim  des  Loix  (ib),  aà  fon  itnpofe  eti  da)oir  la 
perfécution  (t)  ;  eU  pour  pmcr  les  peuples  au  hrU 
gandc^e  on  fait  du  bonheur  éternel  le  prix  de  la 
force  &  la  conquête  des  hommes*  violens  (j»). 

Figurez -vous  une  ame  kfemate  mûjùaat 
aiofi  tout  FEvangîIe,  formant  de  cette  calom- 
nreuie  analyfe  fous  le  nom  de  ProfeJjHon  de  foi 
évangélique  un  Ecrit  qui  ferpit  horreur ,  &  les 
dévots  Fharifiens  prônant  cet  Ecrit  d'un  air 
de  triomphe  comme  l'abrégé  des  leçons  de 
Jéfus-ChriïL  Voila  pourtant  julqu'où  peut 
mener  cette  indigne  méthode.  Quiconque 
aura  lu  mes  Livres  &  lira  les  imputations 
de  ceux  qui  m'acaifent ,  qui  me  jugent ,  qui 
me  condannent ,  qui  me  pourfiiivent ,  ver* 
ra  que  c'efl:  ainli  que  tous  m'ont  traité. 

(k)  Matth.  XII.  2.  &  feqq. 
(/)  Luc.  XIV.  23. 
(m)  Matth.  XI.  12. 


Si      f    «  »   Sf   f  Ë   R    Ë 

,  ;  Je  cteir  vous  avoir'  pfoiAtiS  tfië  céa  Mal 
ficirr  aè  s^nnc  pai'  jDgë  felon  h  niUciii  ;  j'ai 
'riia£nteiKAit'à'vûQf  pt)otl^«i'qil'iIs  ne  m'oât  pl& 
jugé  fel<ffi  kf  Ldk:  inais  laiâ^œbî  repfén* 
drè  An  inflanc  lialeitie.  A'  IjiitilS  crSIi;*  éltàis 
me  yoiï-Je  rAlui»  i  «on  â^?  DevoSl-  )t  '  â^. 
pMIre  fi  ànl  à;  ftiw  nisii.a^gte?  ihS^ 
té  ît  gémmàteiaœr? 


LETTRE.         »j 
SECONDE    LETTRE. 

t 

j'ai  fappofiS)  MonfieUr,  dans  ma  précédente 
Lettre  que  j'avoîs  cotiarnî*  in  effet'  contre  la 
foi  les  erreurs  dont  on  m'accufe,  &  j'ai  fait 
voir  qut  ces  érreitfs  n'ikam  point  nuifibles  k 
h  fbdété  n'étni^t  pas  pui^bles  devant  lu 
jaftice  humaine.  Dieu  s'efl;  r^fçrv^  fa  propre 
défenTé,  &  le  ehâtimefit  des  fautes  gui  n'of* 
fenlent  que  lui.  Ceà  uafàcrifege  à  des  honm 
œs  de  fe  faite  lei  vefigeufs  de  la  divinité^ 
comme  fi  lôr  pfôteâioa  h}!  écoit  néceilàire^ 
Ler  MigSlrâtr  les  Rois  n'im  ^99ioç(Bc  autorité 
fiir  les  anîies^  &  pourVii  qtf^a  foît  fidelle  aux 
Loix  de  la  fodétë  dans  ce  monde  »'  ce  ii*eft 
point  à  eux  de  fe:  .mêler  de  Ci  qu'on  devien- 
dra dans  Tautre ,  où  ils  tf  ont  aucune  inlpec- 
tion.    Si  Ton  përdôît  ce  principe  de  vue ,  Içs 


.^4  SECONDE 

Loix  faites  pour  le  bonheur  du  gieuré  humaiâ 
en  feroient  bientôt:  le  tourment ,  &  fou^  leur 
inquifition  terrible ,  les  hommes  ^  jugés  par 
leur  foi  plus  que  par  leurs  œuvres ,  ferôietit 
tous  à  la  merci  de  quiconque  voudroit  les 

*  • 

exprimer. 

Si  les  Loix  n*ont  nulle  autorité  fur  les  fëxiti- 
mens  des  hommes  en  ce  qui  tient  uniquement 
&  la  Rdîgion ,  elles  n*en  ont  point  non  plus  en 
xette  partie  for  les  écrits  où  Ton  manifefte  ces 
ientimens.  Si  les  Auteurs  de  ces  Ecrits  font 
puniflableâ ,  ce  n'eu  jamais  précifément  pour 
avoir  enfèigné  rérreur,  puifqpekiLoi  ni  fes 
miniftres  ne  jugent  pas  de  ce  qui  n*efl:  préci* 
fémest  ^\iâë  trteur,  L'Auteur  des  Lettres*  é* 
ei kâi  ^e  fa  Campagne  parbit  convenir'  de  ce 
principe  (n).    Peut-être  même  en  accordant     , 

qœ 

■>*■'.      n'         ■■■ — «-7 

(«)  A  cet  igafi^  dit-il  page  22,  ;c  retrouve  af* 


L    E    T    T    R    E.  ^ 

ijaë  ïa  Politique  (^  la  Philofophie  pourront  foute*- 
nir  la  liberté  de  tout  écrire  ^^  le  poufleroit-il  trop 
lôb  (0).  Ce  n'eft:  pas  ce  que  je  veux  exaiûî* 
miner  îcL 

Mais  voici  ûomment  vas  Méflieurs  &  lui 
tournent  h  chofe  pour  autorifer  le  jugement 
rendu  contre 'mes  Livres  &i  contre  moi.  Ils 
me  jugent  môînî  comme  Chrétien  que  comme 
Citoyen  ;  ils  me  r^ardeiH:  moins  comme  im« 
pie  envers  Dieu  que  comnié  rebdle  aux  Loix  ; 
ils  voyent  moins  .en  moi  le:  péché  que  le  crî^^. 
me^'à  ITiéréfie  que  la  defôbéilîancc.  J'ai,  fe*' 
Ion  eux,  attaqué  là  Religion  de  TEtat  j  jiaî 
donc  encouru,  la  pe^le  portée  par  la  Loi  contre 
ceux  qui  Fattaquent.  Voila,  je  crois,  le  fenf 


/es  mes  maséimes  dms  collet  dfî  réptéfintuXions  ; .  &  pa**' 
ge  29,  il  regarde  comme  inconteftable  que  perfonnc 
ne  ^eut  être  pôurfui'ùi  pur  Jes  idées  fur  ïa  Religion» 
'    (0).  Page  ao.  '  ,  .   . 

Partie  /•  '  JE 


es         SECONDE 

de  ce  qu'ils  ont  dit  d'intelligible  pour  jufiifier 
]ms  procédé.        .   : 

Je  ne  voln  à  cela  que  troîi  petites  difficul-* 
tés.  La  première ,.  de  favoîr  quelle  cft  cette . 
Eeligîon  de  FEtat  ;  la  féconde,  de  montrer 
comment  je  Fai  attaquée;  la  troifîen:^,  de 
isroaver  cette  Loi  félon  laquelle  j'ai  été  jugé. 
•  Qu'eft-ce  que  la  Religion  de  FEtat?  CeÛ 
kl  iâinte  Reformatiez  évangélique.  Voila  fans 
çpntredit  des  mots  bien  fonnanai  Mais  qu'eft* 
ce  à  Genève  ffîjouid'huiquela  KainteRéforma- 
koin.  évangélique?  Le  fauriez^vcaxs,  Monlîeur, 
par  hazard  9  En  ce  cas  je  vous  en  félicite. 
Quant  à  moi,  je  lignora  J'a^yoisjcm  ie  favoir 
ci'devàut;  maisje.me  trompois  ainfi  que  bien 
d'autres  9  plus  lavans^  que  moi  iur^tout  autre 
point ,  Se  non  moins  ignorant  fur  celuirlà.       i 

Quand  les  Réformateurs  fe  détachèrent  cje  t 
TEglife  Romaine  ils  Facaiferent.  d'erreur  ;  êi  ;; 


LETTRE.  €t 

pour  Corriger  cette  erreur  dam  fa  fource,  il« 
donnèrent  à  rEcrkare  un  autre  ièns  que  celui 
que  TEglife  lui  doiHioit»  On  leur  demanda  de 
quelle  autorité  ils  s'^artoient  ainfi  de  la  doo» 
trine  reçue  ?  II(S  dirent  que  c'étoit  de  leut 
autorité  prqpre  »  de  celle  de  leur  fa^on«  11$ 
dirent  quç  k  fois  de  la  Bible  étant  intelli^ 
glble  ât  cl»k  à  tou»  les  hommes  en  ce  qui 
étoit  du  faittt  y  chacun  était  JH^e  compétent 
de  la  doéhrine ,  &  pouvoit  interpréter  la  Bb» 
ble,  qui  en  efl:  la  règle ,  félon  fon  eiprit  par^ 
licalier;  que  tous  s*accorderoient  ainfi  furies 
chofes  «ilfencidles  »  &  que  cdles  fur  lequel- 
les  ils  ae  pourroient  s'acitorder  ne  Fétoieut; 
point. 

Voik  donc  Tefprit  |)aiticulier  établi  poœ 
unique  interprète  de  FEcricure;  voila  l'autori- 
té de  l!£glife  rejettée  ;  voila  chacun  mis  pour 
b  doâdne  fiais  fa  propre  jurifdiflion»    Tds 


«SS         SECONDE 

font  Jes  deux  points  fondamentaux  dé  la  Ré' 
forme  :  leconnoître  la  Bible  pour  règle  de 
&  croyance ,  &  n'admettre  d*autre  interprête 
dû  feris  de  la  Bible  que  foi.  Ces  deux  points 
ôDtoibinés  forment  le  principe  fur  l^uel  lés 
Chrétiens  Réformés  fe  font  féparés  de  FEglî- 
fb  Romaine  ,  &  ils  ne  pouyoîent  moins  fai- 
re, fans  tomber  en  côntradiékîon  ;  car  quelle 
autorité  ittterpfëtative  auroient-ils  pd  fe  féfer- 
ver ,  après  avoir  rejette  celle  du  corps  de  TE* 

^m-    - 

r*'Mais,  dîra-t-on,  comment  fur  un  .tel  princi* 
pe  les  Réformés  oiît-ils  pu  fe  réunir  ?  '  Com- 
iraent  voulant  avoir  chacun  leur  façon  de  pen- 
fer  ont-ils  fait  corps  contre  l'Eglife  Catholi- 
•que?  Ils  le  devpiérit  faire;  ils  fe  réunïflQÎénc 
•en  ceci,  que  tous  reconnoiflbient^diaêun  d'eux 
•comme  juge  compétent  pour  luî-mëjnè.'  Ils  to* 
léroient  &  ils  dévoient  tolérer  toutes  les  ioter-* 


LETTRE.  (^ 

prétatîons  hors  une,  favoîr  oeUe  qui  ôte  la  II*- 
berté  des  interprétations.  .  Or  cette  unique  in- 
terprétation   qu'ils  réjettoient  étoît  celle  des . 
Catholiques.     Ils  dévoient  donc  profcrîre  de; 
cxmcert  Rome  feule ,  qui  les  profcrivoit  égale-: 
ment  tous.  La  diverfité  même  de  leurs  façons 
de  penfèr  fur  tout  le  refte  étoît  le  lien  com-^ 
mun  qui  les  uniflbit.    Cétoîent  autant  de  pe- 
tits Etats  ligués  contre  i^ie  grande  Puiflknce,^ 
&  dont  la  confédération  générale  n*ôtoit  rien  à 
l'indépendance  de  chacun.  , 

Voila  comment  la  Reformation  évangclique 
s'eft  établie  ,  &  voila  comment  elle  doit  fe 
conferver.  Il  efl:  bien  vrai  que  la  doélrine  du 
plus  grand  nombre  peut  être  propofée  à  tous , 
comme  la  plus  probable  ou  la  plus  autoriféc. 
Le  Souverain  peut  même  la  rédiger  en  formu- 
le &  la  prelcrire  à  ceux  qu'il  charge  d'enfeî; 
gner,  parce  qu'il  fout  quelque  ordre  qudijuç 

Es     . 


fo  SECONDE 

règle  dans  les  inflruâîons  publiques,  &  qu'au 

« 

fond  Ton  ne  gêne  en  ceci  la  liberté  de  peribn-» 
ne,  puilque  nul  n'eft  forcé  d'enfeigner  malgré 
lui  :  mais  il  ne  s'enfuit  pas  de-là  que  les  particu* 
îîers  foient  obligés  d'admettre  précîfément  ces  ' 
interprétations  qu'on  leur  donne  &  cette  doc-r 
rrîne  qu'on  leur  enfeigne.  Chacun  en  demeure 
fëul  juge  pour  lui-même ,  &  ne  reconnoît  en 
cela  d'autre  autorité  que  la  fîenne  propre.  Les 
bonnes   inftruélions  doivent   moins  fixer  le 
choix  que  nous  devons  faire  que  nous  mettro 
en  état  de  bien  choiGr,  Tel  efl:  le  véritable  es- 
prit de.  la  Réformation  ;  tel  en  eft  le  vrai  fon» 
dément,    La  raifon  particulière  y  prononce, 
en  tirant  la  foi  de  la  règle  comnjune  qu'elle  é-« 
tablît ,  favoir  l'Evangile  ;  &  il  eft  tellement  de 
reffence  de  la  raifon  d'être  libre ,  que  quand 
elle  voudroit  s'aflervir  à  l'autorité,  cela  ne  dé- 
pendroit  pas  d'elle.  Portez  la  moindre  atteii^i^ 


LETTRE.  7» 

» 

œ  à  ce  principe,  &  tout  révangelirme  croule 
à  rinftanc.  Qu'on  me  prouve  aiçourd'hui  qu'elle 
matière  de  foi  je  fuis  obligé  de  me  foumettre 
aux  décidons  de  quelqu'un ,  dès  demain  je  me 
Eus  Catholique,  &  tout  homme  conféquenc  & 
vrai  fera  comnie  moi» 

■ 

Or  la  libre  interprétation  de  TEcriture  em« 

porte  non  feulemejtit  le  droit  d'en  expliquer  ks 

pafTages ,  chacun  félon  fbn  lèns  particulier  ^ 

mais  celui  de  refier  dans  le  doute  fur  ceux 

qu'on  trouve  douteux ,  &  celui  de  ne  pas  com<^ 

prendre  ceux  qu'on  trouve  incompréhenfibles. 

Voila  le  droit  de  chaque  iîdelle,  droit  fur  Ie« 

quel  ni  les  Fadeurs  ni  les  Magiftrats  n'ont  rîeii 

à  voir.    Pourvu  qu'on  relpecle  toute  la  Bible 

&  qu'on  s'accorde  fur  les  points  capitaux,  on 

^t  &ton  la  Réformation  évangelique.  Le  fer^ 

medt  des  Bourgeo»  de  Cenéve  n'emporte  rien' 

48  plag  que  Gfda. 

K^4 


7»  SECONDE 

•  Or  je  vois  déjà  vos  Dofteurs  triompher  fîir 
œs  points  t:api(aux ,  &  prétendre  (|ue  je  m'en 
écarte.  Doucement,  Meflîeurs,  de  grâce;  ce  . 
rfeft  pas  encore  de .  moi  qu'il  s'agit ,  c'eft  de 
vous.  Sachons  d'abord  quels  font ,  iëlon  vous , 
ces  points  capitaux ,  lâchons  quel .  droit  vous 
avez  de  me  contraindre  à  les  voir  où  je  ne 
les  vois  pas,  &.où  peut-être  vous  ne  les  vo- 
yez pas   vous  -  mêmes.    N'oubliez  point ,   s*il 
vous  plait,  que  me  donner  vos  déciSons  pour 
loîx,  c'eft  vous  écarter  de  la  fainte  Réforma^ 
tion  évangélique ,  c'eft  en  ébranler  les  vrais 
fondemens;  c'eft  vous  qui  par  la  Loi  mériter 
{Muiition. 

.  Soit  que  l'on  cônûdere  l'état  politique  de 
votre  République  lorfque  la  Réfo^^lation  fut 
ioftituée^Toic  que  Ton  pefc  les  termes  de  vos 
©ncîens  Edit^.par^rjippQrt  à  la  Religion  qu'ils 
prefcrivent ,  on  voit  que  la  JléfonuatMWi  eQ; 


Li  E    T    T    R    E.  73. 

par  tout  mife  en  oppolition  avec  TEglife  Ror 
nâîne ,  &  que  les  Lois  n'csit  pour  objet  que 
d'abjurer  les  principfjs  &  le  culte  de  celle  -  ci , 
deftruâdfs  de  la  liberté  dans  tous  les  lens. 
\  Dans  cette  pofitîon  particulière  l'Etat  n'c- 
^ûftoît ,  pour  aînfî  dire ,  que  par  la  réparation 
des  deu^  Eglifes ,  &  la  République  écoit  ané- 
antie fi  le  Papifme  reprenoit  le  deflus.  Ainfi  la 
Loi  qui  fixoit  le  culte  évangélique  n'y  confî- 
dèroit  que  Tabolition  du  culte  Romain.    C'efl; 
ce  qu'atteflent  les  inventives ,  même  indécen- 
tes ,  qu'on  voit  contre  celui-ci  dans  vos  pre- 
inicres  Ordonnances,  &  qu'on  a  fagement  re* 
tranchées  dans  la  fuite,  quand  le  même  danger 
tf  exifloit  plus  :  C'eft:  ce  qu'attefte  auflî  le  fer- 
ment  du  Confiftoire ,  lequel  confifte  unique- 
xnent  à  empêcher  toutes  idolâtries  j  bJafphèmes^ 
dijjolutions  ,  S  autres  chofis  contrevenantes  à 
rUmneifr  ^e  Dieu  ^  à  la  Réformation  de,  /'£- 

E5 


\ 
\ 


74  SECONDE 

vangile.  Tels  font  les  termes  de  rOrdonfiance 
p&niée  en  is6t.  Dans  la  revue  de  la  mêitie 
Ordonnance  en  1576  on  itiit  à  la  tête  du  fer^ 
ment,  de  veUler  fur  tous  fcandàks  (p);  ce  qui 

montre  que  dans  la  première  formule  du  fer- 
ment  on  n'avoit  pour  objet  que  la  féparation 
de  TEglife  Romaine  ;  dans  la  fuite  on  pourvut 
encore  à  la  police  :  cela  e(t;  naturel  quand  utl 
'  établiflement  commence  à  prendre  de  la  con« 
fiflance:  Mais  onfin  dans  Tune  &  dans  Tautre 
leçon,  ni  dans  aucun  ferment  de  Magifbats^ 
de  Bourgeois,  de  Miniflres ,  il  n*efl:  queftioû 
ni  d'erreur  ni  d'héréfie.  Loin  que  ce  fut  là 
Fobjet  de  la  Réformation  ni  des  Loix,  c'eût 
été  fe  mettre  en  contradîélion  avec  foi-même, 
Ainfî  vos  Edits  n'ont  fixé  fous  ce  mot  de  Rê^ 
formation  que  les  points  controverfcs  avec  TE* 
glile  Romaine. 


>  ■  I  I 


(f)  Ordon.  Ecclef..  Tit,  UI.  Art.  LXXV. 


LETTRE. 


75 


Je  fais  que  votre  hifloîre  &  celle  en  génë- 
tal  de  la  Réforme  efl:  pleine  de  faits  qui  mon- 
trent une  inquifîtioQ  très  févere ,  &  que,  de 
perfécutés  les  Réformateurs  devinrent  bientôt 

$ 

petfécuteors  :  mais  ce  contraflie ,  fî  choqoânt 
dans  toute  Thiftoire  du  Oiriftianifme ,  ne  proa- 
vé  autre  choie  dans  la  vôtre  que  Finconfô- 
quenœ  des  hommes  &  Tempire  des  paflions 
fur  la  raifon.  A  force  de  difputer  contre  le 
Qergé  Catholique,  le  Clergé  Proteftant  prît 
Fefprit  dilputeur  &  pointilleux.  Il  vouloit  tout 
décider  ,  tout  régler  ,  prononcer  fur  tout  : 
chacun  propofoit  nK)defl:ement  fon  fèntîment 
pour  Loi  fuprême  à  tous  les  autres  ;  ce  n'étoît 
pas  le  moyen  de  vivre  en  paix.  Calvin ,  fans 
doute,  étoit  un  grand  homme;  mais  enfin  c'é- 
toit  un  homme ,  &  qui  pis  efl ,  un  Théolo- 
gien :  il  avoit  d^ailleurs  tout  Torgueil  du  géj;u« 
qui  fent  là  fupérîorité,  [&  qui  s'indigne  qu'on 


7<J  SECONDE 

h  lui  dilpute  :  la  plupart  de  fea  collegaes  é- 
toîent  dans  le  même  cas  ;  tous  en  cela  d'autant 
plus  coupables  qu'ils,  étoîent  plus  mconfé- 
qiens. 

Auffi  quelle  prîfe  n'ont^ls  pas  donnée  en.  ce 
point  aux  Catholiques,  &  quelle  pitié  n'eft- ce 
pas  de  voir  dans  leurs  défenfes  ces  fàvans 
hommes,  ces  efprits  éclairés  qui  raifonnoienc 
fi  bien  fur  tout  autre  article,  déraifgnner  fi  fo- 
tement  fur  celui-là  ?  Ces  contradiélîons  ne 
prouvoient  cependant  autre  chofe ,  finon  qu'ils 
fuivoient  bien  plus  leurs  paffions  que  leurs  prin- 
cipes. Leur  dure  orthodoxie  é toit  elle-même  u- 
ne  héréfie*  Cétoit  bien  là  l'efprit  des  Réforma- 
teurs, mais  ce  n'étoit  pas  celui  de  la  Réfor» 
matîon. 

La  Religion  Protdlahte  efl  tolérante  par 
principe,  elle  efl;  tolérante  effenciellement,  el- 
le l'efl:  autant  qu'il  ed  poilible  de  l'êtne,  puiC; 


y< 


L    E    T    T    R    Ë.  ^f 

•que  le  feul  dogme  qu'eDe  ne  tolère  pas  eft 
celui  de  Kntolérance.  Voila  fînfurœontable 
barrière  qui  nous  fépare  des  Catholiques  A 
qui  réunit  les  autres  communions  tntre  elles  ; 
chacune  regarde  bien  les  autres  comme  étant 
dans  l'areur;  mais  nulle  ne  regarde  ou  ne 
doit  regarder  cette  erreur  conune  un  obfl> 
cle  au  falttt  (9). 

Les  Refermés  de  no!s  jours,  du  moins  les 
filiniftres  9  ne  connoîQent  du  n'aiment  pliis 

% 

kur  Religion.  S'ils  l'avoient  connue  &  aimée, 
à  la  publication  de  mon  Livre  ils'  auroiénc 
poufle  de  concert  un  cri  de  joye ,  ils  fe  ft- 


\ 
I 


(î)  De  toutes  les  Seftes  du  Chriftianifine  la  Lu^ 
thérienne  me  paroît  la  plus  inconféq^ente.  Elle  .a 
xéuni  comme  à  plaifîr  contre  elle  feule  toutes  les 
objeftions  qu'elles  fe  font  Tune  i  l'autre.  Elle  eft 
en  particulier  intolérante  comme  TEglife  Romaine; 
mais  le  grand  argument  de  celle-ci  lui  manque: 
elle  eft  intolérante  fans  favoir  pourquoi. 


^  s  /E    C    O    N    D    E 


•  ->». 


roiem  teus  unis  avec  moi  qui  n  atcaquois  que 

leurs  adverfaires;  mais  i]$  aim^t  mieux  abaii- 

domier  leur  propre  caufe  que  de  (butenir  la 

mienne:  avec  leur  ton  riOblement  a.rroganty 

«vec  leur  rage  de  chicanne  &  d'intolérancee,  ils 

.ne  favent  plus  ce  qu'ils  croyent  ni  ce  qu'ils  vea- 

Jenc  joi  oe  ^qu'ils  difenti  Je  ne  les  vois  plus  que 

comme  de  mauvais  valets  des^  Prêtres,  quil^ 

Jêrvent  moins  par  amour  pour  eux  que  par  hai« 

.  ne  contre  moi.  (r)  Quand  ils  auront  bien  difpv- 

té,  bien  chamaillé ,  bien  ergoté ,  bien  prononcé  ; 

tçxit  au  fort  de  leur  petit  triomphe,  le  Clergé 

^Rom^,  qui  maintenant  rit  &  les  laifîè  fair»^ 

viendra  les  chafTer  armé  d'arguxnens  ad  homi' 

Hem  fans  réplique,  &  les  battant  de  leurs  pro^ 

libres  armes,  il  leur  dira:  cela  va  hîen;  maisfi^ 

(r)  Il  eft  affez  fuperfiu ,  Je  crois ,  d'avertir  que 
j'excepte  ici  mon  Pafteur  ,  &  ceux  qui ,  fur  ^e 
point,  p en fent  comme  lui» 


li    E   T   T    R    E^  7(| 

fréjent  ôtez-^vms  delà^  méthms  intrus  que  vout 
êtes  ;  vous  riceoez  travaillé  que  pour  htms.  Je  re-; 
viens  à  nK>il  fujet. 

jL'EgUfe  de  Genève  n'a  dooc  &  ne  doit  z^ 
imt  coimne  RâKmnée  aacuneprofeffion  de  foi 
pîéciie  9  ardcidée ,  &  commune  à  tous  fei 
membres.  Si  Ton  vouloic  en  aroir  une,  en 
cda  même  on  blef&roit  la  liberté  évangelique^ 
m  renonceroit  an  principe  de  la  Réformatîon  i 
on  violeroit  la  Loi  de  TEtat,  Toutes  les  & 
glifes  Proteftantes  qui  ont  drefTé  des  formules 
le  profeflion  de  foi ,  tous  les  Synodes  qui 
ont  déterminé  des  points  de  doéfaine,  n'onc 
Touh  que  preicrire  aiix  Pafteurs  celle  qu'ils 
dévoient  enfeigner ,  &  cda  étcût  bon  &  con« 
venable*  Mais  û  ces  Eglifes  &  ces  Synodes 
ont  prétendu  £aîre  plus  par  ces  formules ,  ôc 
{xrefcrire  aux  fidelles  ce  qu'ils  dévoient  croire  3 
alors  p^  de  telles  décifioos  ces  âlTembiéçs 


fcy         SECONDE 

i 

rfont  prouvé  autre  chofe,  fî  non.  qu'elles  îgho- 
roient  leur  J)ropfe'  Religion. 

L'Eglife  de  Genève  paroiflbît  depuis  long-' 
tems'ï'écarter  mDÎns  que  les  àutares  du  vérita- 
ble efprit  du  Chriftianifme ,  &  (feft  fur  mte 
crompeufe.  apparence  que  f  honorai  (es  Paf- 
teurs  d'éloges  dont  je  les  croyois'  dignes  ;  car  * 
«ion  intemiôirn'étôitlaflhrémèntipas  d*^abirfbr> 
Ifcï.phblic.  Mais  qui  peut,  voir  aujourd'hui 'ces? 
H^^émes  JViiniffires ,  jaxiîs  Hcoulans  &  devenu» 
tout  à  coup'  fi  rigides ,  chicaner  fiir  l'orthodo- 
xie d'un  Laïque  &  laiffer  la  feuï-dans  unetfî 
fcaridaleufe  incertitude  ?  On  leur  '  demande  fr 
Jèfus-Chrift:  eft  Dieu,  ils  n'ofent  répondre:  aa 
leur  demande  quels  myfleres  ils  admettent ,  ils 
n'ofent  répondre.  Sur  quoi  donc  répondront- 
ils ,  &  quels  feront  les  articles  fondamentaux  ^ 
difFérens  dès .  miens  ,  fur  lefquels  ils  veulent 
qu'on  fe  décide,  fi  ceux ''là  n'y  font  pas  com- 
pris?  Un 


L    E    T    T    R    Ê;  Zi 

'  Un  Thîlofophe  jette .  fur  eux  un  coup  d'œîl 
rapide;  il  les  pénètre,  il  les  vqît  Ariens,  Socî* 
tiiens;  il  le  dit,  &  penfe  leur  faire  honneur: 
mais  il  ne  voit  pas  qu'il  expofe  leur  intérêt 
temporel  ;  la  feule  chofe  qui  généralement  dé* 
cide  ici  •  bas  de  la  foi  des  hommes. 

AùBx iàt  allarmés,  effrayés,  ils  s'aiTemblenC^' 
ils  difcutenc ,  ils  s'agitent ,  ils  ne  favent  à  quel 
faint  &  vouer  ;  &  après  force  confultations 
(s) ,  délibérations ,  conférences ,  le  tout  aboa-- 
tit  à  un  amphigouri  où  Ton  ne  dit  ni  oui  ni 
non ,  &  auquel  il  efl:  aufli.  peu  poiTible  de  rien 
comprendre  qu'aux  deux  plaidoyés  de  Rabe-» 
Jais  (f).  La  do6brine  orthodoxe  n'eft-elle  paâ 


(i)  Quand  on  ejl  bien  décidé  fur  ce  qu'on  croit 
diibit  à  ce  fujet  un  Journalifte ,  une  profejfion  de  foi 
doit  être  biemôt  faite. 

(t)  Il  y  auroit  peut-être  eu  quelque  embarras 
i  s'expUquer  plus  clairement  fans  être  obligés  de  fe 
jetraâer  fur  certaines  chofes. 

Partiel  F 


8t  SE    C    O   N    DE 

l^iea  c!aire ,  &  ne  la  voila-t-il  pas  en  de  f&rei 

SPBÛÙS  ? 

:    Cendant  parce  qu'un  d'entre  eux  comi»- 
lant  force  plai&nceries  fcholafHques  ai^  bé« 

xùgnes  qu'élégantes,  pour  juger  mon  Chriflia- 

>  • 

nifme  nç  craint  pas  d'abjurer  le ,  fieq  ;  tout 
f^harmés  du  favoir  de  leur  confrère,  &  furtout 
)de  fa  logique,  ils  avouent  fon  doâe  ouvrage , 
&,  l'en  remercient  par  une  députation.  Ce 
iont,  en  vérité,' de  fîngulieres  gens  que  Mes- 
iieuîs  vos  Miniffares  !  on  ne  fait  ni  ce  qu'ils 
croyent  ni  ce  qu'ils  ne  croyent  pas;  on  ne  /ait 
f  as  même  ce  qu'ils  font  fembl^c  de  croire  : 
leur  feule  manière  d'établk  leur  foi  efl:  d'atta*^ 
quer  celle  des  autres;  ils  font  comme  les  Jé« 

iîiitës  qui ,  dit-on ,  forçoient  tout  le  monde  à 

k 

figner  la  conHicution  fans  vouloir  la  ilgner  eux* 

jnêmes.   Au  lieu  de  s'expljquer  fur  la  doflxinQ 

qu'on  leur  impute  ils  penfent  donner  le  cfaao^ 


LETTRE.  tî 

*ge  aux  autres  Eglîfes  en  cherchant  querelle 
à  leur  propre  défenfeur  ;  ils  veulent  prouver 
par  leur  ingratitude  qu'ils  n'avoient  pas  befoin 
de  mes  Ibins^  &  croyent  fe  montrer  ailêz  Or^ 
thodoxes  en  fe  montrant  perfécuteurs. 

De  tout  ceci  je  conduds  qu^il  n'efl:  pas  tàfS 
de  dire  en  quoi  confifte  à  Genève  aujourd'hui^ 
la  fainte  Râbrmation.  Tout  ee  qu'on  peut 
avancer  de  certain  fur  cet  artide  efl:,  qu'eOé 
doit  conGfter  prihdpalement  à  rejetter  le^ 
points  conteftés  à  l'Eglife  Romaine  par  ki 
premiers  Réformateurs ,  &  furtout  par  CdMn^ 
Ccft-là  Telprit  de  votre  inftitutîon;  c'eft  par 
là  que  vous  êtes  un  peuple  fibre ,  &  c'efl  par 
ce  côté  feul  que  la  Religicm  fait  chez  vont 
p^e  de  la  Loi  de  l'Etat. 

De  cette  première  queftion  je  paiFe  à  la 
féconde  y  âc  je  dis;  dans  un  Livre  où  la  vérité 
TxitSké  la  neceflité  de  la  Rdigion  en  géqéral. 


^4  SECONDE 

^{t  établie  avec  la  plus  grande  force, -oq,  far» 
donner  aucune  exclufion  («) ,  F  Auteur  préfère 
la  Religion  Chrétienne  à  tout  autre  culte ,  &  la 
JRéformation  évangélique  à  toute  autre  fefte, 
comment  fe  peut -il  que  cette  même  Réfor- 
ination  foit  attaquée  ?  Cela  paroit  difficile  à 
concevoir.    Voyons  cependant. 
:   J'ai  prouvé  ci-devant  en  général'&  je  proii- 
verai  plus  en  détail  ci-après  qu'il  n'eft  pas  vrai 
que  le  ChriClianifme  foit  attaqué  dans  mon  Li- 
yre.  Or  lorfque  les  principes  communs  ne  font 
pas  attaqués  on  ne  peut  attaquer  en  particulier 
aucune  feâe  que  de  deux  manières  ;  fa  voir  y 
indireâen^nt  en  fbutenant  les  dogmes  didinc- 
tifs  de  fes  adverfaires,  ou  direâement  en  ac^ 
taquant  les  fiens. 
< 

(u)  J'exhorte  tout  Icfteur   équitable  à   relire  & 
pefcf  dans  KEtnilè -ce  -qui   fuit  iiirmédiatement  la* 
Brofcflîon  de  foi  cju  Vicaire,  &  où  je  reprends  la 
parole. 


L    E    T    T    R    E;  ès' 

Mais  comment  auroîs-je  foutenu  les  dogmer 

dîftinftîfs  des  Catholiques ,  puîfqu'au  contraire' 

ce  font  lesfeiris  quej'aye  attaqués,  &  puîfquè* 

c'cft' cette  attaque  même  quî.afoulevé  contre 

iHoi  le  parti  Catholique ,  fans  lequel  il  eft  fiir 

que  les  Proteftans  n'auroient  rien  dit  ?  Voila  / 

je  Tavoue ,  une  des  chofes  les  plus  étranges^l 

dont  on  ait  jamais  ouï  parler ,  mais  elle  n*en 

eft  pas  moins  vraie.    Je  fuis  corifefleor  de  la  . 

...  • 

foi  proteftante  à  Paris ,  &•  c'efl:  pour  cela  que 

je  le  fuis  encore  à  Genève. 

Et  comment  aurois-je  attaqué  les  dogmes 
diftinOiifs  des  Proteftans ,  puifqu'au  contraire  ce  ' 
font  ceux  que  j'ai  fout  en  us  avec  le  plus  de  for- 
ce 5  puiique  je  n'ai  ceffé  d'infîfter  fur  l'autorité 
de  la  raifon  en  matière  de  foi ,  fur  la  libre  in-  1 
terprétation  des  Ecritures ,  fur  la  tolérance  é- 
vangélique ,  &  fur  Tobéiflance  aux  Loix ,  me* 
we  en  matière  de  culte;  tous  dogmes  diftinc— • 


k6-  SECONDE 

f 

dfs  &  radicaux  de  FEglife  Réforme  ,  & 
lâns  lefquels ,  loin  d'être  folidement  établie  y  eh 
le  ne  pourroit  pas  même  exiger.  . 
,  II  y  a  plus:  voyez:  quelle  force  la  forme  mê- 
me  de  FOuvrage  ajoute  aux  argumens  en  fa- 
veur des  Réformés.  Ceft  un  Prêtre  Catholî- 
que  qui  parle ,  &  ce  Prêtre  n'efl:  ni  un  impie 
ni  un  libertin':  C'efl:  un  homme  croyant  Se 
pieux,  plein  de  candeur ,  de  droiture,  &  mal- 
gré fes  difficultés  fes  objedlions  fes  doutes , 
nourrifTant  au  fond  à^e  fon  cœur  le  plus  vrai 
refpefl:  pour  le  culte  qu'il  profefle.;  un  homme 
qui ,  dans  les  épanchemens  les  plus  intimes  dé- 
clare qu'appelle  dans  ce  culte  au  fervice  de 
TEglife  il  y  remplit  avec  toute  l'exaôîtude 
poilîble  les  foins  qui  lui  font  prefcrits ,  que  fa 
confcience  lui  reprocheroit  d*y  manquer  vo 
lo;itairement  dans  la  moindre  chofe ,  que  dans 
le.xpyflere  qui  choque  le  plus  fa  railbn^  il  &:, 


Vv 


X    E    T    T    R    E.  tr 

fecueine  aa  momeat  de  la  confécradûii  pour 
la  ^ire  avec  toutes  les  dHpafidons  qu'exigent 
FEglife  &  la  grandeur  du  facrement,  qu'il  pro* 
nonce  avec  refpeâ  les  mots  facramentaox  ^ 
qa'il  donne  à  leur  effet  toute  la  foi  qui  dépend 
de  lui,  &  que,  quoi  qu'il  en  foie  de  ce  myr* 
tare  inconcevable ,  il  ne  craint  pas  qu'au  jour 
du  jugement  il  foit  puni  pour  l'avoir  jamais 
profané  dans  fon  cœur  (x).  .  rt 

Voila  comment  parle  &  penfe  cet  homitnQ 
vénérable ,  vraiment  bon  ,  fage ,  vraiment 
Chrétien,  &  le  Catholique  le  plus  fincere  qui 
peut-être  ait  jamais  &ôSté. 

Ecoutez  toutefois  ce  que  dit  ce  vertueux» 
Prêtre  à  un  jeune  homme  Proteftant  qui  s'é« 
toit  fait  Catholique^  auquel  il  donne  dés  con^^ 
fi^,  ,y  Retournez  dans  votre  Patrie  »  reprect 

(«)  Emile  T. m.  p.  185  &  x8<J.  j 

F4 


99 

99 
99 


«8  S    E  :C    O    N    D    E 

',,  nez  la  Religion  de  vos  pères,  fuivez-Ia  dam 
.„  la  fîncérité  de  votre. cœur  &  ne  la  quittez 
.„  plus;  elle  eft  très-fimple  &  très-iainte;  je 
la  crois  de  toutes.  les  Religions  iqui  ù>m  fbr 
la  terre  celle  dont  la  morale  eft  la  plus 
pure ,  &  donc  la  raîfon  fe  .  contente  k 
^  mieux  (y).  '^ 

D  ajoute  un  moment  après.  „  Quand  vous 
„  voudrez  écouter  votre  confcience,,  mille  ob^ 
,,  .ftacles  vainis  diÇpatoîtront  à  fe  vok. .  Vous 
„  feôtirez  que  daps  fincertitude  où  nous  fon> 
,,  mes ,  c*eft  une  inexculàble  préemption  de 
„  profeffer  une  aufre  Religion  que  celle  o£|; 
„  Ton  eft  né,  &  une  faiiffeté  de  ne  pas  pratî- 
,,  quer  firicérement  celle  qu'on  profeflè.  Sî 
,,  Ton  s'égare ,  oii  s*ôte  une  grande  excufe  au 
p  trihupal  du  Souverain  Juge.    Ne  pai^onne-. 


(y)  ibid,  p.  19^. 


LE    T    T    R-  IX  8p 

;,  ra-t-îl  pas  plutôt  Terreur  où  Te»  fat  nourri, 
„  que  celle  qu'on  ofa  choifir  ibi-mème?  (2)  ". 
Quelques  pages  auparavant  il  avoit  dît;. 
9,  Si  j'asrois  des  Frocefhms  à  mon  voifinage, 
,,  ou  dans  nui  Paroiflè,  je  ne  les  djftinguçrois^ 
9>  point  de  mes  FaroiiSens  en  ce  qu^  tient  à 
^  la  charité  Chiétienne  ;  je  les  portei^ôis  tour 

i 

5,  également  à  s'ëntte  -  aimer  ;  à  fe  regarder 
,^  '  coDome  '  fr^ÊB  y ,  à  Tefpeéler  tontes  *  les  Reli- 
,,  gîons  &.à  vivj^e  en  paix>  chacun  dsms  la^ 
,)  fiemiew  Je  p$tife  que  ibllkicer  ^dqu'un  der 
,^  quktet  ceBejOÙiÂl  ell  oé^ic'efttle  foUiciterj 
^j  de  mal  faire  &.par  conféq^ent  fair^  mal  foi«  : 
,,  même.  En  attendant  de  plus;  grandes  lumie*; 
^^r&&^  gardons  Fordre  public,  dans  tout  pays: 
,,  refpeélons  les  Loix,  ne  troublons  point  1er 
9>  adte  qu'elles  preTerivent,  ne  jponxms  poioc: 


■•»w«*w*^ip*"""<'"i"*— *i»*" 


($^  Ibid.  p.  J95.  .*.      ^    .,...:.,; 


f' 


9«  S   E   c   o   N   d:  e 

^  les  Qtoyetà  &  la  defobéiflàhce  :  car  nous 
,;  ne  (avons  point  certainement  fi  c'efl:  wx 
^  bien  pour  eux  de  quitter  leurs  opinions 
j,  pour  d'antres,  &  nous  fkvcHis  certainement 
^  qne^c'eft  un  msU  de^  defobélr  ans  Loix.  ^^ 

Voila,  ]Vl<^&nr,  cothménc  parle  un  Prê- 
tre Catholique  dans  un  Ecrit  où  Ton  lo'accui^. 
d'avoir  attaqué  I6  culte  dôs  Réformés,  Se,  o\^ 
îi  n'en  efl:  pas  dit  autre  choTe^  Ce  qu'on  auroit 

pu  me  reprocher,  peâ^êQre>v^^îl^^I^  P^^^ 
tialité  outrée  en  leitf  faveur.  ÂTiun  défont  de 
convenance,  en  fa^&ntp»Ier  un  Prêtre  Ga< 
tholique  comme  jamais  Prêtre  Csithol^ue  n'a 
parlé.  Ainfi  j%i  fm  en  toute  chofe  préciië* 
ment  le  contraire  de  ce  qu'on  m'accufe  d'à- . 
voir  fait.  On  dtooit  que  vos  Magiflrats  iè. 
font  conduits  p»  gageure:  quand  ils  anroient,> 

* 

parié  de  juger  contre  l'évidence  ils^  n'auroienc 
pu  mieux  réuflir.  ; 


LETTRE."         çt 

I  > 

Mais  ce  Livre  condenc  des  objeâioos ,  des 
^tifficcdtés,  des  doutes  !  Et  pourquoi  non,  je" 
vous  prie?  Où  eft  le  crime  à  on  Proteftant  de 
propofer  fes  doutes  fur  ce  qu*il  trouve  dou* 
teux ,  &  fes  objeâions  for  ce  qu'il  en  trouve 
fufceptible?  Si  ce  qui  vous  paroit  ckdr  me  pa« 
roit  obfcur,  fi  ce  que  vous  jugez  démoptré  ne 
me  femble  pas  Têtie ,  de  quel  droit  prétendez* 
vous  fqumettre  ma  raiibn  à  Ja  vôtre,  &  me 
donner  votre  autorité  pour  Loi,  comme  fi  vous 
prétendiez  à  Tin&inibiUté  du  Pape  ?  N'eft-il 
pas  plaifant  qu'il  faille  raifbnner  en  Catholique 
pour  m'accufer  d'attaquer  les  Ftotellans  ? 

Mais  ces  objeâions  &  ces  doutes  tombent  - 
fur  les  points  fondamentaux  de  la  foi  ?    Sous 
.  Tapparence  de  ces  doutes  on  a  raflëmblé  tout 
ce  qui  peut  tendre  à  fapper  ,  étomler  &  dé»  ' 
traire  les  principaux  fondemens  de  la  Religion  ' 
Chrétienne  ?  Voila  qui  change  la  thefe,  &  fi^ 


02  s    E    G    O  *N    D    E 

V 

cela  eft  vrai ,  je  puis  itre  coupable  ;  mais  aullT 
c'ed  un  menfonge,  &  un  menTonge  bien  im^ 
prude^nc  de  k  part  de  gens  cfui  né  fàvent  pas^ 
eux-mêmes  en  quoi  confident  les  principes  fon- 
damentaux de  leur  Chrillianifme.  Pour  moi ,  je* 
fais  très  bien  en  quoi  confident  les  principes 
fondamentaux  .du  mi^ ,  &  je  l'ai  dit.   Piefque . 
toute  la  profefliûn  de  foi  de  la  Julie  ed  affir^ 
mative ,  toute  .la  première  partie  de  celle  du 
Vicaire  eft  affirmative,  la  moitié  de  la  fècon* 
de  partie  ed  encore  affirmative ,  une  partie  da 
dbapitre  de  la  Religion  civile  efl:  affirmative, 
la  Lettre  à  M.  l'Archevêque  de  Paris  eft  af- 
firmative. Voila ,  Mefiieurs ,  mes  articles  fcm« 
damentaux  :  voyons  les  vôtres, 

.Ils  font  adroits»  ces  Meir^eurs;  ils  établif. 
fent  la  méthode  de  difcufiion  la  plus  nouvelle 
&  la  plus  commode  pour  des  perfécuteurs.  Ils 
laiiFent  avec  art  tous  les  principçs  de  la  doc« 


LETTRE.  93 

« 

trîne  incertains  &  vagues.  Mais  un  Auteur  z* 
l'îl  le  malheur  de  leur  déplaire ,  ils  vont  fure- 
tant dans  fes  Livres  quelles  peuvent  être  fes 
opinions.  Quand  ils  croyent  les  avoir  bien 
conftatées,  ils  prennent  les  contraires  de  ces 
mêmes  opinions  &  en  font  autant  d'articles 
de  foi.  Enfuîte  ils  crient  à  Timpie  au  blafphê- 
me,  parce  que  T Auteur  rfa  pas  d'avance  ad* 
mis  dans  fes  Livres  les  prétendus  articles  de 
foi  qu'ils  ont  bâtis  après  coup  pour  le  tour-^ 
menten 

Comment  les  fui^re  dans  ces  multitudes  de 
points  fiir  lelquels  ils  m'ont  attaqué?  comment 
rafTembler  tous  leurs  libelles,  comment  les 
lire  ?  Qui  peut  aller  trier  tous  ces  lambeaux 
toutes  ces  guenilles  chez  les  frippiers  de  Ge« 
i\ève  ou  dans  le  fumier  du  Mercure  de  Neuf-, 
châtel?  Je  me  perds  je  m'embourbe  au  milieu 
de  tant  de  bêtifes.  Tirons  de  ce  fatras  un  feuL 


\ 


n 


^ 


S-E.  C    O    N    D    Ë 


^tide  pour  ièrvk  d'exemple  ,  leur  article  le 
jfhs  triomphant ,  xrelui  pour  lequel  leurs  pre- 
dkans  {*)  fe  font  mi^  en  campagne  &  donc 
ils  ont  fait  le  plus^  de  bruit  :  les  miracles. 

Jentre  dans  un  long  examen.  Pardonnez* 
m'en  l'ennui,  je  vous  fupplie.  Je  i^  veux  di& 
çuter  ce  point  fi  terrible  que  ^our  vous  épar* 
gner.  ceux  fin:  lef^^s  ils  ont  moins  infiilé. 
,  Ils  difent  donc  »  J.  J.  Roufleau  n'eft  pas 
^  Qirétien  quoiqu'il  iè  donne  pour  tel;  car 
,,  nous,  qui  c^tainement  le  (bmmes,  ne  pen-- 
y  fons  pas  comme  lui.  J.  J.  RouiFeau  ne  croit 
gp  point  à  la  Révélation ,  quoiqu'il  difè  y  croi* 
9  re:  en  voici  la  preuve. 

,,  Dieu  ne  révèle  pas  fa  volonté  immédia* 


(*)  Je  n'auroîs  point  employé  ce  terme  que  je 
trouvoîs  déprifant,  fi  l'exemple  du  Confeil  de  Ge* 
nève,  qui  s*en  fervoît  en  écrivant   au  Cardinal  de, 
Fleury,  ne  m*eût  appris   que  mon  fcrupule  école 
niai  fondé*  -^ 


LETTRE.  » 

^)  temait  à  tous  les  hommes.  Il  leur  parle  par 
,,  fes  Envoyés ,  &  ces  Envoyés  ont  pour 
,,  preuve  de  leur  miflion  les  miracles.  Donc 
,,  quiconque  rejette  les  miracles  rejette  les 
,,  Envoyés  de  Dieu,  &  qui  rejette  les  En« 
,,  voyés  de  Dieu  rejette  la  Révélation.  Or 
9)  Jean  Jaques  Roufleau  rejette  les  miracles.  ^^ 

Accordons  d*abord  &  le  principe  &  le  fait 
comme  s'ils  étoietlt  vrais  :  nous  y  reviendrons 
dans  la  fuite.  Cela  fuppofé,  le  raifonnement 
précédent  n'a  qu'un  défaut  :  c'efl:  qu'il  fait  dî- 
reâement  contre  ceux  qui  s'en  fervent.  H  eft 
très  bon  pour  les  Catholiques,  mais  très  mau- 
vais  pour  les  Proteflans.  Il  faut  prouver  4 
mon  toîir. 

Vous  trouverez  que  je  me  répète  fouvent,' 
mais  qu'importe  ?  Lorfqu'une  même  propofr 
ïîon  m'eft  néceffaîre  à  des  argumens  tout  dif- 
férens ,  dois  -  je  éviter  de  la  reprendre  ?    Cette 


L    y 


^  S-rE    C    O.N    D    E 

*^ 

t 

I 

-fiffeâation  ferait  puérile»  Ce  n'eft  pas  de  va:- 
^iété  4ju'il  s*agit ,  c'eft  de  vérité ,  de  raifonne^ 
4nens  juftes  &  concTuans.  Faflêz  le  refte ,  & 
ne  fongez  qu'à  celguv,      ,  • 

<^uand  les  premiers  Réformateurs  commen- 
•cerent  à  fe  faire  enteijdfiij^rEgUre  univerfelle 
^toit  en  paix  j  tous  les  Hêntimen^  étoient  una« 
^imcs  ;  il  n'y  avoit  pas  un  dogme  efFenciel 
débattu  parmi  les  Chrétiens.- 

Dans  cet  état  tranquille ,  tout  à  coup  deux 
ou  trois  hommes  élèvent  leur  voix ,  &  crient 
dans  toute  l'Europe  :  Chrétiens ,  prenez  garde 
à  vous  ;  on  vous  trompe ,.  on  vous  égare ,  on 
vous  mené  dans  le  chemin  de  Tenfer  :  le  Pape 
efl  rAntechrifl;  le  fuppôt  de  Satan,  fon  Egli- 
fe  efl:  l'école  du  menfonge.  Vous  êtes  perdus 
fi  vous  ne  nous  écoutez. 

r 

A  ces  premières  clameurs  l'Europe  étonnée 
xella  quelques  momens  en  iilence>  attendant 

ce 


Lettre».        jf 

tst  qu'il  en  arrîveroir.  Enfin  le  Clergé  revenu 
de  (a  première  {urprife  &  voyant*  que  ces 
nouveaux  venus  fe  faifoient  des  Sénateurs, 
comme  s*en  fait  toujours  tout  homme  qui  dog- 
matife ,  comprit  qu'il  falbit  s^expliquet  avec 
eux.  Il  commença  par  leur  demander  à  qui  ils 
en  avoîent  avec  tout  ce  vacarme?  Ceux-ci  ré-» 

r 

pondent  fièrement  qu*ils  font  les  apdtres  de  la 
vérité,  appelles  à  réformer  TEglife  &  à  rame- 
ner  les  fidelles  de  la  voye  de  perdition  où  les 
conduifoîent  les  Prêtres» 

Mais 9  leurrépliqua-t-on^  qui  vous  adonné 
cette  belle  commiffion ,  de  venir  troubler  la 
paix  de  FEglife  &  la  tranquillité  publique? 
Notre  confaence,  ditent-ils,  la  raifon,  la  lu- 
mière intérieure,  la  voix  de  Dieu  à  laquelle 
naos  ne  pouvons  réfifbr  ùm  crime  :  c'eft  lui 
gui  nous  appelle  à  ce  faint  minifterei  &  npus 

fuivons  notre  vocation. 

. .       <■       •      .        .       •        .  ■• 

Partie  J.  G 


\ 


^8  SECONDÉ 

Vous  êtes  donc  Envoyés  de  Dieu,  repri- 
rent les  Catholiques.  En  ce  Cas ,  nous  conve- 
nons que  vous  devez  prêcher  réformer  inflrui-* 
re,  &  qu'on  doit  vous  écouter*  Maïs  pour 
obtenir  ce  droit  commencez  par  nous  moth 
trer  vos  lettres  de  créance,  Prophétîfèz ,  gué- 
riflez ,  illunûnez ,  faîtes  des  miracles ,  déployez 
les  preuves  de  votre  mîffion.  * 

La  réplique  des  Réformateurs  eft  belle,  & 
vaut  bien  la  peine  d*être  tranfcrîtte.    '"     - 

5,  Oui,  nous  fommes  les  Envoyés  de  Dieu: 
5,  maïs  notre  miflîon  n'efl  point  extrabfdînaî- 
5,  re  :  die  eft  dans  Fimpulfion  d'une  confcîen^ 
„  ce  droite ,  dans  les  lumières  d'un  entende* 
„  ment  faîn.  Nous  ne  vous  apportons  point 
j,  une  Révélation  nouvelle  ;  nous  nous  bor* 
nons  à  celle  qui  vous  a  été  donnée,  &  que 
vous  n'entendez  pTûs.  Nous  venons  à  vous  , 
91  non  pas  avec  des  prodiges  qui  peuvent  être 


55 
55 


y  » 


L    Ë    T    t    îi    Ê.  pd 

^)  trompeurs  &  .dont  tant  de  fauOTes  doflrlnes 
^1  fe  font  étayées,  mais  avec  les  lignes  de  la 
),  vérité  &  de  la  mfoa  qui  ne  trompent 
,^  point;  avec  ce  Livre  faint  que  vous  défi* 
^,  gurez*&  que  nous  vous  expliquons.  Nos  mi- 
),  rades  font  des  argumens  invincibles,  nos 
„  prophéties  font  des  démonflrations  :  nous 
,9  vous  prédifons  que  fi  vous  n'écoutez  la  voix 
I)  de  Chrift  qui  vous  parle  par  nos.  bouches^ 
9,  vous  ferez  punis  comme  des  ferviteurs  infi* 
))  délies  à  qui  Ton  dit  la  volonté  de  leurs^naî* 
^  très,  &  qui  ne  veulent  pas  Taccomplir.  ** 

^  Il  n'étoic  pas  naturel  que  les  Catholique* 
convinfiènt  de  l'évidence  de  cetta  nouvelle 
doârine ,  &  c'ék  aufli  ce  que  la  plupart  d'en« 
tre  eux  fe  gardèrent  bien  dé  faire.  Or  on  voit 
91e  la  difpute  étant  réduite  à  ce  point  ne  pour- 
voit ptas  finir ,  &  que  chacun  devoit  fe  don** 
Acr  gain  de  caufe.  ;  les  Proteftans  foutenaos 

G  2 


aoo         S    E    C    O    N 'D    E 

t  toujours  que  leurs  interprétations  &  Icur^ 
preuves,  étoient  fi  claires  qu'il  falloit  être  de 
mauvaife  foi  pour  s^y  refufer  ;  &  les  Catholî^ 
ques,  de  leur  côté,  trouvant  que  les  petits  ar- 
gumens  de  quelques  particuliers  ^  qui  même 
n'étoient  pas  fans  réplique ,  ne  dévoient  pas 
l'emporter  fur  Fautorité  de  toute  TEglife  qui 
de  tout  tems  avoit  autrement  décidp  qu'eu:^ 
ies  points  débattus. 

Tel  eft  Fétat  où  la  querelle  eft  reftéfc.  Oa 
n'a  ceffé  de  difjputer  fur  la  force  des  preuves  : 
difpute  qui  n'aura  jamais  delBn,  tant  que  les 
liommes  n'auront  pas  tous  la  même  tête. 

Mais  ce .  n'étoît  pas  de  cela  qu'il  s*agiflbît 
pour  les  Catholiques.  Ils  prirent  le  change  ^  & 
fi,  fans  s'amuler  à  diîcanner  les  preuves  de 
leurs  adverfaires ,  ils  s'en  fuflent  tenus  à  leur 
difputer  le  droit  de  prouver ,  ils  lés  auraient 
cmbarrafFés,  ce  me  femble. 


L    E    T    T     RE.  101 

„ Premièrement", leur  auroientils  dit,  „ vq- 
,,  tre  manière  de  raifonner  ri'efl:  qu'une  petî- 
„  tion  de  principe  ;  car  fi  la  force  de  vos 
„  preuves  eft  le  figne  de  votre  miffion ,  il 
„  s'enfuit  pour  ceux  qu'elles  ne  convainquent 
„  pas  que  votre  miffion  eft  fauilè ,  &  qu'aiolî 
„  nous  pouvons  légitimement,  tous  tant  que 
5,  nous  fommes  ,  vous  punir  comme  héréti- 
,,  ques ,  comme  faux  Apôtres  ,  comme  per- 
„  turbateurs  de  l'Egiife  &  du  Genre  humaiq. 
.  „  Vous  ne  prêchez  pas  ,  dites- vous  ,  des 
5,  Doctrines,  nouvelles:    &  que  faîtes -Vous 
„  donc  en  nous  prêchant  vos  nouvelles  expli- 
„  cations?  Donn2r  un  nouveau  ïens  aux  pa- 
„  rôles  de  l'Ecriture  n'eft-ce  pas  établir  une 
„  nouvelle  do6lrine?  N'eft-ce  pas  faire  parier 
,5  Dieu  tout  autrement  qu'il  n'a  fait?    Ce  ne 
99  font  pas  les  foos  mais  les  fens  des  mots  qui 
99  font  révélés  :  changer  ces  fens  reconnus  Se 

G  3 


(' 
yo2  SECONDE 

„  fixés  par  FEglife,  c*efl:  changer  la  Révélation, 
,,^oyez  ,  de  plus,  combien  vous  êtes  in-' 
^,  juftes!  Vous  convenez  qu'il  faut  des  mîra- 
„  des  pour  autorifçr .  une  miffion  divine  ,  & 
„'  cependant  vous ,  fîmples  particuliers  de  vo- 
„  tre  propre  aveu ,  vous  venez  nous  parler  a- 
jj,  vec  empire  &  comme  les  Envoyés  de  Dieu 
„  {ad).  Vous  réclamez  l'autorité  d'interpréter 
„  FEçrîture  à  votre  fantaifie ,  &  vous  préten-» 
,31  dez  nous  ôter  la  même  liberté.    Vous  voua 


(aa)  Farel  déclara  en  propres  termes  à  Genève 
Rêvant  le  Confeil  épifcopal  qu'il  étoît  Envoyé  dej 
Dieu  :  ce  qui  fit  dire  à  l'un  des  membres  du  Con- 
feil ces  paroles  de  Cdïphe  :  //  a  blafpbémé  :  qu'eftH 
tefoin  d'autre  Umoignage  1  Jl  a  mérité  la  mort.  Dan» 
la  doélrine  des  miracles  il  en  falloic  un  pourpré- 
pondre  à  cela.  Cependant  Jéfus  n'en  fit  point  en 
cette  occafion ,  ni  Farel  non  plus.  Froment  déclara 
de  même  au  Magiftrac  qui  lui  défendoit  de  prêcher, 
|tt'î/  imUit  mieux  obéir  à  Dieu  qu'aux  hommes  y  Sc 
continua  de  prêcher  malgré  la  défclife;  conduits 
Qui  certainement  ne  pouvoic  s'autorifçr  que  pay  un 
Qî4^:ç  çxprès  de  Dieii, 


99 
9» 


LETTRE.  103 

^  arrogez  à  vous  feuls  un  droit  que  vous  refu- 
,,  fez  &  à  chacun  de  nous  &  à  nous  tous  qui 
„  compofons  l'Eglife,    Quel  titre  avez -vous 
„  donc  pour  foumettre  ainQ  nos  jugemens 
communs  à  votre  e(prit  particulier  ?  Quelle 
infupportable  fuffifànce  de  prétendre  avoir 
„  toujours  raifon ,  &  raifon  feuls  contre  tout 
„  le  monde  ^   fans  .vouloir  laifler  dans  leur 
„  fentiment  ceux  qui  ne  font  pas  du  vô- 
I,  tre ,    &    qui   penfent    avoir   raifon    auf- 
„  fi  (*)  1  Les  diflinftions  dont  vous  noiis  pa- 
„  yez  feroient  tout  au  plus  tolérables  fi  vous 
„  difîez  Amplement  votre  avis ,  &  que  vous  ' 
„  en  reftaffiez-là  ;  mais  point.   Vous  nous  faî- 

I   .  — -" — —     --    -'         „>^_^^_^_^__^^.^^»^_^_„_^^_^^^^^ — . 

(♦)  Quel  homme,  par  exemple,  fut  jamais  plus 
tranchant  plus  impérieux,  plus  décifif,  plus  divine- 
ment infaillible  à  fon  gré  que  Calvin ,  pour  qui  la 
moindre  oppoCtion  la  moindre  objedlîon  qu'on  ofoît 
lui  faire  étoit  toujours  une  œuvre  de  fatan ,  un  cri» 
me  digne  du  feu  ?  Ce  ïi'eft  pas  au  feul  Servet  qu*il 
en  a  coûté  la  vie  pour  avoir  ofé  penfer  autrement 
<jiie  lui.  r  . 


1 


J04        SECONDE 

„  tes  une  guerre  ouverte  ;  vous  foufflez  le  feo 
„  de  toutes  parts.  Réfifter  à  vos  leçons  c*eft 
„  erre .  rebelle  ,  idolâtre  ,    digne  de  rdifer. 
,,  V  h:s  voulez  abfolument  convertir ,  convaîn* 
„  cre,  contraindre  même,  ^  Vous  dogmatifez, 
„  vous  prêchez ,  vous  cenfurez ,  vous  anathé- 
„  matîfez,  vous  excommuniez,  vous  puniflez^ 
vous  mettez  à  mort  :  vous  exercez  Tautorité 
des  Prophètes ,  &  vous  ne  vous  donnez  que 
„  pour  des  particuliers.    Quoi  !  vous  Nova- 
„  teurs  ,  fiir  votre  lèule  opinion ,  foutenus  de 
„  quelques  centaines  d'hommes  vous  brûlez 
„  vos  adverfaires;  &  nous,  avec  quinze  Sié- 
„  clés  d'antiquité  &  la  voix  de  cent  millions 
„  d'hommes ,  nous  aurons  tort  de  vous  brû- 
„  1er  ?  Non ,  ceflèz  de  parler  d'agir  en  Apô- 
„  très,  ou  montrez  vos  titres,  ou  quand  nous 
i,  ferons  les  plus  forts  vous  ferez  très -judo? 
^1  roçQt  traités  en  împofteurs.  ^l  - 


0> 


LETTRE.  105 

A  ce  difcours,  voyez -vous,  Monlîeur,  ce 
que  nos  Réformateurs  aoroîent  eu  de  folide  à 
répondre?  Pour  moi  je  ne  le  vois  pas.  Je  pen« 
fe  qu'ils  auroient  été  réduits  à  fe  .taire  ou  k 
f^re  des  miracles.  Trifle  reflburce  pour  des 
amis  de  la  vérité  ! 

Je  conduds  de -là  qu'établir  la  néceffité  des 
nurades  en  preuve  de  la  miffion  des  Envoyés 
de  Dieu  qui  prêchent  une  doéhrine  nouvelle, 
cefl;  renverfer  la  Réformation  de  fond -en - 
comble  ;  c'eft  faire  pour  me  combattre  ce 
qu'on  m'accufe  fauflement  d'avoir  fsdt. 

Je  n'ai  pas  tout  dit ,  Monfieur,  fur  ce  cha- 
pitre; mais  ce  qui  me  relie  à  dire  ne  peut  & 
couper ,  Ôc  ne  fera  qu'une  trop  longue  Lettres 
D  efl  tems  d'achever  ceQe-ci. 


Qs 


106        TROISIEME 
LE  T  T  RE    TROISIEME. 

0 

J  £  reprens ,  Monfieur ,  cette  queflion  des  mi* 
racles  que  j'ai  entrepris  de  difcuter  avec  vous, 
&  après  avoir  prouvé  qu'e't^blir  leur  néceffité 
c'étoît  détruire  le  Proteftantifine,  je  vais  cher- 
cher à  prâênt  quel  eft  leur  ufage  pour  prou- 
ver  la  Révélation. 

Les  hommes  ayant  des  têtes  fi  diverfement 
crganifées  ne  {àuroient  être  aiFeétés  tous  éga« 
lement  des  mêmes  argumens,  furtout  en  ma* 
tîeres  de  foi.  Ce  qui*  paroit  évident  à  l'un  ne 
paroit  pas  même  probable  à  Tautre  j  Tun  par 
fon  tout  d'eJprit  rfefl:  frappé  que  d*un  genre 
de  preuves ,  l'autre  ne  l'efl:  que  d'un  genre  tout 
dîflFérent.  Tous  peuvent  bien  quelquefois  con* 
venir  des  mêmes  chofes,  maïs  il  eft  très-rare 
qu'ils  ea  conviennent  par  les  mêmes  raifons: 


LETTRE.  107 

ce  qui>  pour  le  dire  en  pailâhc^  montre  corn* 
bien  la  difpute  en  dle-même  eO;  peu  fenfée: 
autant  vaudroic  vouloir  forcer  autrui  de  voir  ' 
par  nos  yeux. 

lK>rs  donc  que  Dieu  donne  aux  hommes  oœ 
Kévéladon  que  tous  font  obligés  de  croire»  il 
faut  qu'il  rétablilTe  fur  des  preuves  bonnes 
pour  cous ,  &  qui  par  conféquent  foient  auffi 
diverfes  que  les  manières  de  voir  de  ceux 
qui  doivent  les  adopter. 

Sur  ce  raifonnement  »  qui  me  paroit  jufte  ^ 
fimple,  on  a  trouvé  que  Dieu  avoit  donné  à 
la  nûflion  de  fes  Envoyés  divers  caractères 
gui  rendoient  cette  mifllon  reconnoiflkbie  à 
tous  les  hommes,  petits  &  grands ,  lages  âc 
fots  ,  favans  &  ignorons*  Celui  d'entre  eux 
qui  a  le  cerveau  afTez  flexible  pour  s'affeâer 
à  la  fois  de  tous  ces  caraâe^res  eft  heiu'eux 
ians  doute  ^;  mais  celui  qui  n'efl:  frappé  quft 


io8        T  R  O"  I  S  I  E  M  E 

de  quelqiies-uns  tfeft  pas  a  plaindre,  pourvu 
qu'il  en  foit  frappé  fuffilàmmenc  pour  être 
*  perfuadé» 

Le  premier ,  le  plus  important ,  le  plus  cer- 
tain de  ces  caraéteres  fe  tire  de  la  nature  de 
ladoârine;  c'efl;- à-dire,  de  Ton  utilité,  de  fa 
beauté  (i),  de  fa^fainteté,  de  fa  vérité,  de 
fa  profondeur,  &  de  toutes  les  ^lutres  qualités 
qui  peuvent  annoncer  aux  hommes  les  indruc- 


(i)  Je  ne  fais  pourquoi  Ton  veut  attribuer  au 
progrès  de  la  philofophie  la  belle  morale  de  nos 
Livres.  Cette  morale,  tirée  de  TEvangile,  étoit 
Chrétienne  avant  d*être  philorophique.  Les  Chré- 
tiens Tenfeignent  fans  la  pratiquer  ,  je  l*avoue  ; 
mais  que  font  de  plus  les  philofophes  ,  fi  ce  n'eft 
de  fe  donner  à  eux-mêmes  beaucoup  de  louanges , 
qui  n*ctant  répétées  par  perfonne  autre,  oc  prou- 
vent pas  grand  chofe ,   à  mon  avis  ? 

Les  préceptes  de  Platon  font  fouvent  très-fubli^ 
mes,  mais  combien  n'erre-t  il  pas  quelque  fois ,  & 
Jufqu'oii  ne  vont^  pas  fes  erreurs  ?  Quant  à  Cice- 
ron ,  peut^on  croire  que  fans  Platon  ce  Rhéteur  euç 
trouvé  fes  offices  ?  L'Evangile  feul  eft  quant  à  la 
loprale,  toujours  fur,  toujours  vrai,  toujours  um-; 
que»  &  coujouxs  femblable  à  lul-mâme. 


dons  de  la  fuprême  fagefle,  &  les  préceptes 
delà  fuprême  bonjé.  Ce  caraftere  eft,  corn, 
tne  j'ai  dit,  .le  plus  flir,  le  plus  infaillible,  il 
porte  en  lui-même  une  preuve  qui  difpenle  de 
toute  autre  j  mats  il  eft  le  moins  facile  fk  conf- 
tater:  il  exige,  pour  être  fenti,  de  l'étude  de 
la  réâcydotï  dei  connoiiTances ,  des  dlfcuilions 
qui  ne  conviennent  qu'aux  hommes  fages  qui 
font  înftruîts  &  qui  favent  raifonner. 

Le  fécond  cara^ere  eft  dans  celai  des  hom* 
mes  choifis  de  t>ku  pour  anncwicer  fa  parole  ; 
leur  fainteté ,  leur  véracité ,  leur  juftîce ,  leurs 
mœurs  pures  &  fans  tache ,  leurs  vertus  înac- 
ceflibles  aux  paffions  humaines  font,  avec  les 
qualités  de  l'entendement,  la  râîfbn  l'elpritte 
favoir  la  prudence,  autant  d'indices  relpefta- 
•bles,  dont  Ja  réunion,  quand  rien  ne  s'y  dé» 
ment ,  forme  une  preuve  complette  en  leur 
Êveur,  &  dit  qu'ils  font  plus  que  des  hom^ 


ito       T  tl  0  î  S  1  Ê  M  Ë 

pies.  Ceci  efl:  te  fjgoe  qiii  frappe  pat  prëfër^fr 

jçe  les^eos  bofis  ^  droits  qui  voyent  la  vériU 

par  tout  OÙ:  ils  voyient  la  juCkicet  &  n'encea^ 

)  ctenc  la  voix  de  Dieu  que  dans*  la  bouche  de 

Ja  vertu.  Ce  çaraôere  a  ft  çjçrtitudc  encore, 
mais  il  tfeflr  pa$  impoffible  qu'il,  trompe ,  &  ce 
n*eft  pas  un  prodjgç  qu*ua .  impofteur  abule  les 
gens  de  bkii»  ni  qu'un  homme  de  bien  s'a- 
bufe  lui-mêaie  »  entraîné  par  Fardeûr  d'un  fainc 
Mk  qu'il  pceochm.  pour  de.  IjWpiration* 

Le   troifikme  caraftere  des  Envoyés   de- 
Dieu . .  eft  ane  én^âpàtion  de  là  JPuiflknce  di« 

V 

vine  ,  qui  peut  interrompre  .&  changer  le 
cours  de  la  nature  à  la  volonté  de  ceux  qui 
reçoivent  cette  émanation.  Ce  caraâere  dt 
SoM  contredit  le  plus  brillant  des  trois ,  le  plus 
irappant,  le  plus  prompt  à  fauter  aux  yeuKj 
^relui  qui  fe  marquant  par  un  efiet  fubit  &  fen» 
jQble^  femble  exiger  le  moins  d'examen  &  de 

\ 


LETTRE;  «tl 

difcuffion  :«  par- là  ce  caraâere  eft  aufll  celui 
qui  faifîc  fpécialemeût  Je  peqple ,  iotapable  de 
raifonneniens  fuivis ,  d'obfervatioos  lenoes  (Se 
fûtes  j  &  en  toqte  çhofe  efdave  de  fes  feni: 
mais  c'eft  ce  qui  rend  ce  même  caraétere  é* 
qaivoque,  comme  il  fera  prouvé  diaprés;  Se 
en  effèc,  pourvu  ^'il  frappe  ceux  auxquels  il 
eft  dediné  qu^ùnporte  qu'il  foit  apparent  lou 
rédf  Ceft  une  di(lîn£Uon  qu'ils  font  hors  d'^« 
tatde  faire:  ce  qui  montre  qu'il  n'y  a  de  ligne 
vrafan^t  certain  que  celui  qui  iè  tire  de  la 
doârine,    &  qu'il  n'y  a  par  confêquent  que 
les  bon^  raifonneurs  qui  puifient  avoir  une  f<A 
f<àkk  &fàTGi  mais^la  bonté  divine  fe  prête 
«QX  foiblefles  du  vulgaire  &  veut  bien  lu! 
donner  des  pf&u^s  qui  faflîent  pour  lui. 

Jelifarrêce  id  fans  rechercher  fî  ce  dénom- 
brement peut  alter  plus  loin:  c'cft  une  difcur. 
(ion  inutile  khnàttt:  car  ilêA  clair  que  quand  ^ 


m         TROISIEME 

tous^^  ces  fignes  fe  trouvent  réunis  c^en  ed:  a(^ 
fcL  pour  perluader  tous  les  hommes ,  les  fages 
les  bons  &  le  peuple*  Tous,  excepté  les 
foux,  incapables  de  raîfon,  &  les  méchaas 
qui  ne  veulent  être  com^incus  de  rien» 

Ces  cairaâeres  font  des  preuves.de  Tauto- 
rité  de  ceux  en  qui  ils  léfident;^  ce  font  les 
jaifons  fur  lefquelles  on  efl  obligé  dé  leâ  croi- 
re. Quand  tout  cela  eft  fait  la  vérité  de  leur 
miffion  ed  établie  ;  Ds  peuvent  alors  agir  avec 
droit  &  puifBmce  en  qualité  d'Envoyés  de 
Dieu.  Les  preuves  font  les  moyens ,  la  foi 
due  à  la  doârine  eft  la  fin.  Pourvu  qu'on  ad* 
«ette  la  doârine  c'eft  la  chofe  la  plos  Vaine 
de  difputer  fur  le  nombre  &  le  choix  d^ 
preuves ,  &  fî  une  feule  me  perfuade,  vou* 
loir  m*en  faire  adopter  d'autres  efl  un  loin 
perdu.  Il  feroit  du  moins  bien  ridicule  de  fba« 
tenir  qu'un  homme  ne  aoit  pas  ce  qu'il  die 

croire. 


\ 


ti    E    t    t    R    È 


"S 


feroite,  parce  qu'il  ne  le  crdit  pas  prédfénieM 
par  le3  mêmes  nufbtis  qœ  nous  difons  avoir 
de  le  ctoire  auilL 

Voila»  ce  me  femUë,  des  principies  dair» 
&  incoQtefbbles  :  venons  à  rappKcadon.  Je 
m^  déclare  Chrétien  ;  tnes  perfécutenn  difens 
que  je  ne  le  fuis  pas.  Us  prouvent  que  je  im 
fiiis  pas  Chrétien  parce  que  je  rejette  la  Ré^ 
véiation ,  &  ils  prouvent  que  je  rejette  la  Ré-^ 
véiation  parce  que  je  ne  crois  pas  aux  mî« 
iades. 

Msûs  pour  que  cette  conféquence  fut  jufte^^ 
û  {iaudroit  de  deux  cbofes  Tune  :  ou  que  le< 
miracles  fuflent  Tunique  pireuve  de  la  Révé« 
hcioni  od  qile  je  rejettaffe  également  les  aiï* 
très  preuves  qui  Fatteltent.  Or  il  n'eft  pas 
ttai  que  les  miracles  foîent  rùnîque  preuve 
de  la  Révélation^  &  il  n'dl  pas  vrai  que  je 
tejette  les  autres  preuves  ;  puifqu'au  cbntrakiqf 

Psrtiê  l  H 


n4    *    TR  O  I  s  I  Ê  M'E 

on  les  trouve  'établies  dans  l'ouvrage  tdêtû» 
OÙ  Ton  m'accufe  de  détruire  h  Révélation  (2)» 
Voila  précifçment  à  quoi  nous  en  fomnics. 
Ces  Meifieurs,  déterminés  à  me  faire  malgré 
ftioi  rejetter  la  Révélation ,  comptent  pour 
rien  que  je  l'admette  fur  les  preuves  qui  me 
convainquent  9  fi  je  ne  Tadmets  encore  fur  cel^ 
les  qui  ne  me  convainquent  pas  ^  &  parce 
que  je  ne  le  puis  ils  difent  que  je  la  rejette. 
Peut-on  rien  concevoir  de  plus  inj'ufte  &  de 
plus  extravagant? 

r    Et  voyez  de  grâce  fi  j'en  dis  trop  ;  lorf- 
qu  ils  me  font  un  crime  de  ne  pas  admettre 


»    I         Éi  *  I  I  II.*!  É.      m> 


'  (2)  Il  Importe  de  remarquer  que  le  Vicaire  pou- 
voit  trouver  beaucoup  d'objeftions  comme  Catho- 
lique, qui  font  liullcs  pour  un.Proteftaîit,  Ainfi  le 
fcepticifme  dans  lequel  il  rcile  ne  prouve  en  auca* 
ne  façon  le  mien  ,  furtout  après  la  déclaration  très 
«xpréfle  que  j'îd  laite  4  la  fin  de!  ce  même  Ecrit. 
Pn  voit  clairement  dans  mes  principes  que  pJu- 
*Ceufs  des  objeftions  'qii'il'coniient  portent  à  faux. 


L    Ê   T    T    R   Ê.  us 

taâe  preuve  que  non  feulement  jéfuis  n'a  pas 
donnée  5  mais  qu'il  a  refufée  exprefTément^ 
Il  ne  s'anonça  pas  d'abord  par  des  miracles 

mais  par  la  prédication.  Â  douze  anis  il  di& 

« 

putoit  déjà  dans  le  Temple  avec  les  Doc« 
teurs^  tantôt  les  iticerrogeant  &  tantôt  la 
furprenant  par  la  fageife  de  fes  réponfes.  Ce 
Fut  là  le  commencetpent  de  fes  fonfliohs  ^ 
comme  il  le  déclara  lui-même  à  fa  mete  &  & 
Jofeph  (3).  Dans  le  pays  avant  qu'il  fit  aucun 
miracle  il  fe  mit  à  prêcher  aux  peuples  le  Ro^ 
yaume  des  Cieux  (4)  »  &  il  àvoit  déjà  raflenl- 
blé  pIuGeurs  diiciples  lans  s'être  autorifé  prèi 
d'eux  d'aucun  ilgne  ^  puifqu'il  efl:  dit  que  ce 
fiit  à  Cana  qu'il  fit  le  premier  (5). 
Quand  il  fit  enfuite  des  miracles ,  c'étoit  le 


(3)  Luô.  Jtl.  45.  47.  49. 

(4)  Matth.  IV.  17. 

(J)  Jcin  IL  II,  Je  ne  puis  penser  que  perfoA- 

Ha 


ti6        TROISIEME 

plus  fbuvent  dans  des  occafions  pardculîere» 

/ 

dont  le  choix  n'annonçoic  pas  un  témoignage 
public,  &  dont  le  but  étaîc  fî  peu  de  manifef- 
Jler  fa  puiiTanee,  qu*0D  ne  lui  en  a  jamais  de- 
mandé pour  cette  fin  qu'il  fte  les  ait  refufés. 
Voyez  là- deflus  toute  Thiftoire  de  fk  vie;  é- 
coutez  furtout  fk  pro]pre  déclaration:  elle  eft 
ij  décifive  que  vous  n*y  trouverez  rîen  à  ré- 
pliquer. 

Sa  carrière  étok  déjà  fort  avancée  y  quand 
ks  Dofteurs ,  le  voyant  faire  tout  de  bon  le 
•Prophète  au  milieu  d*eus,  s'avi&rent  de  lui 
demander  un  figne.  A  cela  qu'auroit  dû  ré- 
pondre Jéfiîs,  fcloai  vos  Meffieurs?  „  Voiis 
,,  demandez  un  figne,  vous  en  avez  eu  cent 

•„  Croyez- voui  que  je  fois  venu  m'annoncer  à 

• —       III  I     . 

ne  veuille  mettre  au  nombre  des  lignes  publics  de 
fa  million  la  tentation  dix  diable  &  le  jeûne  de  quv 
jfODte  jours. 


LETTRE.  tir 

,,  voi^s  pour  le  Meflle  lâns  commencer  par 
^  rendre  témoignage  de  moi  5  comme  fi  jV 
,,  vois  voulu  vous  forcer  à  me  méconnoître  : 
,,  &  vous  faire  errer  malgré  vous?  Non ,  Ca« 
,y  na ,  le  Centenier,  le  Lépreux ,  les  aveu^ 
„  gles,  les  paralytiques,  la  multiplication  des^ 
,,  pains,  toute  la  Galilée,  toute  la  Judée  dé- 
„  pofent  pour  moi.  Voila  mes  fignes  ;  pour^ 
„  quoi  feignez- vous  de  ne  les  pas  voir?" 

Au  lieu  de  cette  réponfe ,  que  Jélîis  ne  fit  * 
point,  voici,  Monfieur,  celle  qu^il  fit» 

.  ha  Nation  méchante  &  adultère  demande  un 
M^^t  f?  il  ne  lui  en  fera  point  donné.    Aîl- 
leurs  il  ajoute.  //  ne  lui  fera  point  donné  d^m^: 
trejigne  que  celui  de  Jonas  le  Prophète.  Et  leur^ 
tQurnam  le  dos ,  il  1 V»  alla  (6), 

Voyez    d'abord  comment ,   blâmant  cette 

-  -  -  I         . 

(fi)  Marc.  VIII.  12.  Matth.  XVI.  4.  Pour  abréger' 
j'ai  fondu  enfemble  ces  deux  pafTages  ,  mais  j'af 
eoQfcrvé  h  diftinaion  eflencielle  à  la  queftion« 

H3 


n^        TROISIEME 

« 

manie  des  fignes  miraculeux ,  il  traite  eenii . 
qui  les  demandent?  Et  cela  ne  lui  arrive  p^s^. 
une  fois  feulement  mais  pjuiieurs  (7).    Dana 
lô  fyftéine  de  vos  Meiïieurs  cette  demande  ë- 
teit  très  légitime  :  pourquoi  donc  infuher  cea^  - 
.  qoi  la  faifoient  ? 

-.Voyez  enlîiite  à  qi^î  nous  devons  ajouter  foi 
par  préférence  ;  d'eux,  qui  foutiennent  que. 
c'cil  rejetter  la  Révélation  Chrétienne  que  de 
nelpas  admettre  le$  xmrades  de  Jéfus  pour  ka 
fignes  qui  l'établiflent,  ou  de  Jéfus  lui^mênié,, . 
qui  déclare  qu'il  n'a  point  de  figne  à  donner^ 
"ilfs  demandercMit  ce  que  c'eft  donc,  que  le 
figne  de  Jonas  le  Prophète?  Je  leur  répondrai 
que  c'eft  fa  prédication  aux  Ninivîtes ,  préd*? 
fément  le  même  figne  qtfenployoît  Jéfus  s^ec- 


~arr, — ■■■'■'  .     '   ■      >  ■  ■■'  "1 

t 


^^.Coaferez  les  paf&ges  fuivans,  Mattb.  XIL-Sp^ 
41.  Marc.  VIII.  1.2,  Luc.  XL  29^  Jcfia  IL  iS»  I5f-. 
JY-  4a.,.V.  34.  3(5.39.  . 


t 


LETTRE.'        11^ 

lés  Juîfe,  coîmne  il  Tcxplique  lui-même  (8); 
On  ne  peut  donner  au  fécond  paflàge  qu^un 
fens  qui  iê  rapporte  au^  premier ,  autrement 
Jéfus  fe  fcroît  contredît.  Or  dans  le  premier 
paffage  où  Ton  demande  un  miracle  en  figne,^ 
Jéfus  dit  pofitîvemcnf  qu*il  n'en  fera  doiïné 
aucun,  '  Donc  le  fens  du  fecond  paffage  rfin-* 
diqae  aucun"  fîgne  miraculeux.  * 

Un  •  troifiefne  paffage  ,îniîfteFont-ik,  explî-f 
que  ce  fîgnè  par  là  réfurreftîon  de  Jdfos  (9); 
Je  le  nie  ;  il  l'explique  tout  aiî  plus"  par  fa^ 
moTt.  Or  la  mort  d'un  homme  'n'efl:  pas  ui> 
miracle;  te  n'en  eft  pas  même  un  qu'aprésr 

*  ^ 

avoir  refté  trois  jours  dans  la  terre  dn  corp^ 
en  fok  retiré.  Dans  ce  paffage  il  tf  eft  pastîii; 
un  mot  de  la  réfurreOSon.  D'ailleurs  queP 
genre  de  preuve  feroît  -  ce  de  Vautorifer  durant 


(a)  M4tth..XH.  41.    LttcXI.  30.  32" 

(9)    Maith.  XII.  40. 

H4 


i^ 


|Sg        T  R  O  I  !B  I  E  M  Ç 

fz  vie  far  oq  flgne  qui  n'aura  lieu  qu'après  fii 
ipprt  ?  Cq  feroit  yoi^loir  ne  trofiver  que  d^ 
i|îp-édule^  ;  ce  feroit  cacher  la  çbaqdelle  fQu$ 
Iç  boifTeai):  Cominç  cefte  conduite  feroit  iut 

4 

jufte,  cette  interprétatioq  feroit  wpîc 

Pe  plus,  Fargqment  invincible  revient  enn 
çpre.  Le  fens  di|  çroifieme  paflage  ne  do^t  pas 
attaquer  le  pren^er ,  &  le  preniier  affirme 
^'il  ne  fera  point  doqné  4e  figqe,  poiqt  da 
tpqt,  aucun.  Enfin,  quoiqu'il  en  puifie  être, 
il  refte  toujours  prouvé  par  le  téqioignage  do 
Jéfus  même 9  que,  s'il  a  fait  des  miracles  dii« 
i^nt  fa  vie ,  il  q'en  a  pqint  fait  ep  Ijg;ne  de 
la  miflion. 

Tputes  les  fois  que  1^^  Juifi^  ont  înfîfle  fqi; 
ce  genre  de  preuves  j^  il  les  a  tpujqurs  reqvç^ 
yés  ayeç  mépris ,  faps  daigner  j|amais  les  Czst 

» 

çisfaire.   Il  n'appiouvoit  pas  même  qu'on  prit 

CEI  ce  fcn3  fes  oeuvres  de  charité.  Si  vous  n^ 


L    ET    T    R   E.         i»i 

j^oyez  des  pro£ges  &  éks  niîrachs\^  vous  m 
croyez,  point  ;  difoic-il  à  celui  qqî  le  priok  de 
guérir  ion  fils  (  lo).  Parle-t-^cm  fur  ce  toiH 
là  qaaqd  on  veut  donner  des  prodiges  en 
preuve^?  ; 

Co^ka  n'élpit-il  pas  étonnant  que,  s'il 
$a  eiic  tant  .donni^  de  teHes,  on  continuât  iko$ 
cefTe  à  loi  en  demander?  Quel  miracle  fifis-tti^ 
lui  diibient  les  Juifii ,  afin  qui  FayanS  vu  mus 
trêyons  à  Ht.?,  Moyfe  donn^^ ia  fn^m(!^ÂW^  k 
Mfert  à  nos  fer^si  mais  tri  ^  qjnelk^qsfmefm'^, 
tu  (ay?  Ceù,  k  peu  près,  dans  lefens  de  vof 
MeBiedrs,  ât  laiflànt  à  part  la  Majeft^  royale, 
«pmme  fi  quelqu'un  venoit  dire  k  Frédéric, 
On  te  £t  un  grand  Capitaine  ;  (^  paurqwn  denc  f 
Qu*as^tu  fait  qui  te  montre  teI2  Gujiave  Vûùh 
9ttft  à  l^pfifi  à  Dazen^  Charles  à  Frétât  k 


(lo)  Jean  IV.  48. 
{tk)  Jcaa  VI.  30.  31.  &  fuiv.  •i 

H  5 


î«4        T'ÎRX)  I  S  ï  ITM^E 

Narva  ;  'fids  ekvfoé  th^  fnimménsf  Qàéftéf 
tnitùite^  as -tu  fimpùrtée^  qu^^lacê^  aï-  tupi^ 
ft^  quellâ  maf0hè-^s-m  fyfP6j}^$lle  Campagne^ 
fa  ô^m'^  ^lkrfi?^T^^é^  (fB^'^dféU  pmrtés^^  m 
le  fumi  de  Grand?  L'impudence  d*bÊ  pareil 
âîfcoairs.efb  etle  côncevitbley^âs'  d-ouvdhôk-'on 

tenir?  <  •.\V:*)v.  '**''•  -'•  •  '-'-  ■".*:'■  .  .'. ^  '■ 
Cepênâmçvfàns  faire. {mute  4  cèiisc^^ qui  hA 
en  teiK)iâl^^^a^^f€lllbIàbtev  fânsMé^^  accoixier 
aucun  mÉïicfe'î  \^faâ8  les'écfiSef  au  moins  C» 
igfettx^  qrfa-àt^itnfeiîtst,- jéfuè'^  efi  ilponfe^  hUf 
queftîon ,  fé  cômente  à*z\\égoti(ep  fwr  le  psua 
âa  Ciel:  zûfR,-  loin  gué  Ùl  rëponfé  lui  dmmâsr 
âé  nouveaux. Êifcipkff,  elle  lui  ê»  ôla  pkti 
fifeurs  de  ceu*  quir4v<«^kj  &  goi,'  fan^doate-i 
penfoîent  comme  vosc  Théobgieni'  ta  défer*» 
tîôn  fut  tëÏÏFquH  dit  aux  douze  ;  Et  vous ,  ne 
%ioukZ'Vous  pas  wijji  vous  en  alUr?  D  ne  pa^ 


L    E    T  ^T   R  H  Kj 

lofr  pas  qu'il  eac  fort  à  cœar  <i6-  eenferve^ 

eeox  qu*il  ne  poaToic  reieâir  qûâ  par  deà 

jniiacles/  » 

Les  Juifs  demstndc^ént  un  figne  du  Ciel 

Dans  leur  fyftSme»  Ssavoiftirnâbii.  Lefigoe 

qui  devok  conftat^  la  venue^  dû  Meflie  ne 

poQVpk  pour  emt  être  trop  évident  »  trop  dé^ 

dGf ,  trop  au  defiu»  de  tout  (bupçon ,  ni  avo» 

tn^  de  témoins  occulaiiesj  eomme  le  témoî« 

gt^ge  immédiat  de  Dieu  vàiit  toujouri  mieux 

<  » 

^  celo)  dea  ké^ntees,  îi  étcnt  phxs  fftr  d'ëfl 

ctoiipeau  figne  même,  qu^aux  gens  qui  difoient 

ravoir  vu.,  &  pbbr  cet  èSbt  le  Cid  étoil 

préfâable  à  la  terre,, 

Lea  Juifs  avbient  done  ridfon  d^  leur 

vua^  ^ree  qu'ils  voûloient  un'Mëffie  appa-» 

tdan  âc  tout  miraculeuï.  Mais  Jéfus  die  apréc 

le  JRrc^ête  que  le ''Royaume  ^des-CSefox  ne 

vient  *|io^  avee-appittence^  que  çdm  qpi 


Ï24        T  R  O  I  s  i  E  M  E 

V 

]*annonçe  ne  débat  point ,  net  crie  points  qu'on 

n*entend  point  fa  voix  dans  les  mes.  Tout  ce* 

la  ne  refpire  pas  Toftentation  des  miracles; 

auffi  n'étoit-elle  pas  1$  but  qu'il  fe  propofoit 

dans  les  fkns.  U  ii'y  Q^ttQic  ni  Tappareil  ni 

Faudiendcité  néceflàir$i.(  %potB:  conftater   de 

yraîs  fignès»  parce  qu'il  ne  les  donnoit  point 

pour  tels.   Au  contraire  il  recommandoic  '  le 

fecret  aux  malades  qu'il  guérifloit ,  aux  boi« 

teux  qu'il  £ûfoit  mardie^^  ^j;  poiTédés  91'il 

délivroit  du  Démon.  L'on  eut  dit  qu'il  crai* 

gnoit  que  fa  vertu  miraçuleurQ  ne  fut  coamie; 

on  m'avouera  que  c'était  .une  étrange  .mamere 

d'en  faire  la  preuve  dé  fk  miilioQ. 

Mais  tout  cela  s'explique  de  foi-ménie >  û- 
tôt  que  l'on  conçoit  que  le^  Juifs  allpient  çbeiv 
cfaaitt  cette  preuve  où  Jéfi^s  ne  vouloâ;  pas 
qu'elle  fut.  Celui  qui.  me  rejette  a^  difei(.ii» 
%t4ile  juge^    Ajoutoit-il,  ks  n^açlfs  fue  j'aé 


LETTRE.  i2| 

faits  le  condanneront?  Non,  mais;  la  parok 
que  fai  portée  le  condannera*  ha,  preuve  efl 
donc  dans  la  parole  &  non  pas  dans  les  miU 
racles. 

On  voit  d^s  FEvangile  que  ceux  de  Jéfus 
écoient  tous  utiles  :  mm  ils  étoient  fans  éclat 
(ans  apprêt  fans  pompe ,  ils  étoient  fimples 
comme  fês  difcours,  comme  fa  vie^  comme 
toute  fa  conduite.  Le  plus  apparent  le  plus 
palpable  qu*il  ait  fait  efl:  fans^  contredit  celui 
de  la  multiplication  des  cinq  pains  &  des  deux 
poiffons  qui  nounirent  cinq  mille  hommes. 
Non  feulement  fes  difciples  avoient  vu  le  mi- 
racle,  mais  il  avoit  pour  ainii  dire  paiFé  par 
leurs  mains;  &  cependant  ils  n'y  penfoient 
pas ,  ils  ne  s'en  doutoient  piefque  pas.  Con« 
cevez-vous  qu'on  puiiTe  donner  pour  lignes 
notoires  au  Genre  humain  dans  tous  les  fié- 
des  des  faits  auxquels  les.  témoins  les  phuf 


ta«        T.  R  0  t  S  t  Ë  M  Ê 

imoiédiâts  font  à  peine  attention  (5)t 

Et  tant  s'en  faat  que  Pobjec  réel  des  miti^ 
clés  de  JéSks  fat  d'établir  la  fpi ,  qu'au  com 
traire  il  commençoit  par  exiger  la  foi  avant 
que  de  faire  le  miracler  Rien  tt'eft  fi  fréquent 
dans  rEvangîle,  Ceft  précifément  pour  cela^ 
c^eft  parce  qd*un  Prophète  n'^ft  fans  honneur 

que  dans  fon  pays  >  qu'il  fit  dans  le  fîen  très 
peu  de  iniradôs  (r)  ;  il  efl:  dit  même  qu'il  n*efl 
pût  faire,  à  caufe  de  leur  incrédulité  (d). 
Comment?  c'étoit  à  caufe  de  leur  incrédulité 
xfjLil  en  faîloit faire  pour  lés  convaincre,  fi  fês 
-miracles  avoient  eu  cet  objet;  mais  ils  ne  Ta* 
voient  pas.    Cétoient  fîmplement  des  aâes  dd 


(p)  Mire.  VI.  $2-  Il  eft  d(t  que  c'étoît  â  caufe 
«ue  leur  cœur  étoit  ftupide;  mais, qui  s*oferoît  van« 
ter  d*avoir  ^in'ccBur  plus  intelligent  dans  les  chofes 
(àintes  que  les ,  ^fciples  choiûs  par  JéfttS4 

(0  Matth/xiIL  S8* 

id)  Marc  VL  $♦ 


LETTRE:         ttf 

bonté,  de  diarité,.de  bien&îlànce,  qu'il  fiu« 
foit  en  fiiveur  de  Tes  amis,  &  de  ceux  qui  cro" 
ydenc  en  lui  ;  &  c'étoit  dans  de  paieili  aéles 
que  confiftoîent  les  œuvres  de  miféricorde  ^ 
vraiment  dignes  d'être  fiennes ,  qu'il  difoio 
rendre  témoignage  de  lui  (e)^  Ces  œuvres  mar« 
quoienc  le  pouvoir  de  bien  faire  plutôt  que  la 
volonté  d'étonner,  c'étoientdesverttts(/)  plus 
que  des  miracles.  Et  comment  la  fQprême  fa* 
gdlë  eut-elle  employé  des  moyens  fî  contraires 
àMa  fin  qu'elle  fe  propofoit  ?  Comment  n'euc« 
elle  pas  prévu  que  les  miracles  dont  elle  appu-^ 
yoit  l'autorité  de  Tes  Envoyés  produiroient  un 
eiFet  tout  oppofé ,  qu'ils  feroient  fufpeâer  ki 
vérité  de  l'hiftoire  tant  fur  les  miracles  que  for 
ia  miflion  ,  &  que  parmi  tant  de  folides  preu^ 


(e)  Jean.  X.  25.  ^2.  38. 

(/)  C'cft  le  mot  employé   dans  rEcriturc  ;  not 
traduéleurs  le  rendent  par  celui  de  mûacles. 


•^ 


«r  TROISIEME 


•f 


M  «4      a 


Tes,  cdle-là  ne  fefoicque  rendre  plus 
&r  toutes  les  autres  les  gens  éclairés  &  vrais? 
Oui  je  le  foutiendrai  toujours ,  Tappui  qu'on 
veut  donner  à  la  croyance  en  efl  le  plus  grand 
obftacle  :  ôtez  les  miracles  de  FEvangile  & 
toute  la  terre  e(t  aux  pieds  de  Jéfus-Chrifl:  {£)4 
Vous  voyez ,  Monfieur ,  qu'il  efl  attefté  par 
FEcriture  même  que  dans  la  MilSon  de  JéiUs^ 
Chrîfl;  les  miracles  ne  font  point  un  fîgne  telle» 
Bsrât  néceflàire  à  la  foi  qu'où  n'en  puifTe  avoir 
fims  les  admettre.  Accordons  que  d'autres  paf^ 
ûges  préfentent  on  fens  contraire  à  ceux-ô^ 


s  (£)  Paul  préchant  aux  Athéniens  fut  écouté  fort 
pâifiblement  jufqu'à  ce  qu'il  leur  parlât  d'un  honN 
me  refrufcité.  Alors  les  uns  fe  mirent  à  rire;  les 
Éûtres  lui  dirent:  Célâjuffii,  nous  iniéndrdris  le  rejli 
mu  MUft  fois.  Je  ne  fais  pas  bien  ce  que  penfeat 
au  fond  de  leurs  jcœurs  ces  bons  Chrétiens  à  la 
mode  ;  mais  slis  croyent  à  Jéfus  ^ar  fes  tniracfes  » 
ifidl  j*7  crois  malgré  Tes  miracles ,  &  j'ai  dans^  Vci* 
prit  que  8la  fot  vaut  niei|a  çue  iâ'ktfr. 


LETTRE.         i£<| 


ceux  -  ci  rédfn'ogaemeiic  préfentent  on  fmi 
contraire  aux  autses,  &  aldC3  je  d^oifls^  u@mc 
de  mon  droit ,  celui  de  ces  fens  qui  me  paroîc 
le  plus  laifonnable  âc  le  plus  clair.  Sifavois 
l'or^udl^de  vouloir  tout  ex^quer>  je  poutroit 
en  vrai  Tliéolpgien  tordre  &  tirer  chaque 
paffi^  à  moa  fens  ;  mais  la  bonne  fcÀ  ne  ine 
permet  point  ces  interprétations  Sophîftiques; 
fttffifamment  autorifi^  dans  mon  iêntimâit  (b) 


(b)  Ce  fentîment  ne  m'eft  point  tellement  parti- 
calier  quUI  ne  foît  aaflî  celui  dé  pluiieurs  Théolo- 
giens dont  l'orthodoxie  eft  mieux  établie  que  celte 
du  Clergé  de  Genève.  Voici  ce  que  m'écrîvoît  la* 
delTus  un  de  ces  Meffieurs  le  28  Février  1764. 

„  Quoîqû'en  dife  la  cohue  des  modernes  apolo* 
\j  gifles  du  ChiilUanifrae,  je  fuis  perfuadé  qu'il  n'y 
„  a  pas  un  mot  dans  les  '  Livres  facrés  d'où  l'on 
^,  puiflb  légitimement'  conclurre  que  les  miraclej| 
yf  aient  été  deftînés  it  fervir  de  preuve  po^r  Ie$ 
,y  hommes  de'  tous  les  tems  &  4e  tous  les  lieux. 
,9  Bien  loin  dé -là  ,  ce  n'é;:oit  pas  i  mon  avis  le 
„  principal  objet  pour  ceux  qui  en  furent  les  té* 
„  moins  oculaires.  Lorfque  les  Juifs  demandoien^ 
„  des  miracles  i  Saint  Paul  »  pou/  (oute  jréponfp 

Partie  L  I 


n9 


TROISIEME 


pair  cç<[ae  je  comprendi,  je  re^e  jen  paix  fUr 
$e  ^e  je  œ  GOiopréods  pas,  &  que  ceox.qut 
me  rexptic|UeDt  nie  font  encore  taokm  com« 
pt&aàt9^  L'autonité  que  je  donne  à  1  Evangile 
|e^  ne  la  donne  poinc  aux  interpiétatic|ns  des 
homHies»  &  jft  n'enteods  pas  pitas  les  foumet^ 
tre  à  la  nûenoe  qtte  me  foomectre  à  la  leur* 


.Ji*B 


Il  leur'pirèchoit  Jéfus  cmcîfië^     A  coup  fur  fi 
Ôrotiu9,    le»  Auteurs  de  la  fociété  de  Boyle^ 
Vernes,  Vernet  &c.  euflent  été  à  la  place  de  cet 
Apôcre,  ils  n'aaroient  rien  eu  de  plus  prefTé  que 
d*en¥oyer  chercher  des  tréteaux  pour  fatisfairc 
à  une  demande  qui  quadre  fi  bien  avec    leurs 
ptindpes.     Ces  gens -là  croyent  faire  merveilles 
avec  leurs  ramas  d'argumens;  m^is  un  jour  on 
doutera  j'efpere,  s'ils  n'ont  pas  été  compilés  par 
une  fociété  d'incrédules,  fans  qu'il  faille  être 
J^s^^douin  pour  cek.<< 
,    Qu'on  ne  penfe  pjas ,  ^u  refte  que  l'Auteur  dç 
cette  Lettre ibit  mon . partifan ;  ttnt.s'eQ  faut:  il 
eft  un  de  mes  adyerfajses*  Il  trouve  feulement  que 
les  autres  ne  fayent  ce  qu'ils  difent.    Il  foupçonne 
pcttt-âtre  pis  :  car  la  fol  de  ceux  qui  croyent  fut 
les  miracles,  ffra  toujours  très  fufpeâs  aux  ge&s 
éclaixj£$. 


If 

99 

91 
9$ 


99 


99 


>f 


M 


êpt 


/ 


h    E    T    T    HE.  131 

La  régie  eft  cooimime,  &  dske  ep  ce  qui 
importe  ;  la  raifon  qui  l'explique  eft:  paniC^* 
re,  &  diacuti  a  la  fienne  qui  ne  fait  autorité, 
que  pour  lui  Se  laifler  mener  par  aotrqi  fur 
cette  madère  c'efl:  fubftituâr  rexplxjsitioà  'an 
texte,  c'efl:  iè  foomettré  aiâc  hpmmes  &  non 
pas  à  Dieu. 

Je  reprends  môQ  hafomiement,  &  après  âh 
voir  établi  que  les  mkaelcs  se.  font  pgs  un  fi- 
gue héeeflaire  à  la  foi»  je  vais  montrer  m 
confirmation  de  x!ela  que  ks  miracles  ne  font 
pas  un  figne  inÊuHible  &  dont  les  homm^ 
puifient  jttgor. 

Un  miracle  eft,  dans  un  fait  particulier,^ 
un  aâe  immédiat  de  la  pdlTance  divine»  un 
diangement  fenfible  dans  Tordre  de  la  nature, 
une  exception  réeSe  &  vifible  à  fes  Loix^ 
Voila  ridée  dont  il  ne  faut  pas  s^écarter  .fi 
fon  veut  s'^wttpdre  en  raifonnant  far  cette 

V 

la, 


I31Î        TROISIEME 

matière.  Cette  idèa  offre  deux  qaëftîoos  à  ré* 
foudre. 
La  première  :  Dieu  peût-îl  faire  des  mira- 

X 

des?  Ceft^à-dlre,  peutâl  déroger  aux  Loix 
^a'il  a  établies?  Cette  qûeftioû  férieuièment 
itraitée  feroic  impie  Ci  elle  n'étoît  abfurdej  ce 
feroît  faire  trop  d'honneur  à  celui  qui  la  réfbu- 
-droît  négativement  que  de  le  punir;  i}  fuflSroit 
-de  l'enfermer.  Mais  auflî  quel  hoxmne  a  ja^ 
'mais  nié  que  Dieu  put  faire  des  miracles?  Il 

falloit  être  Hébreu  pour  demander  fi  Dieu 
.pouvoit  dr^ffer^des  tables  dans  là  défert. 

Seconde  queftion  :  '  Dieu  veut  *  il  faire  des 
jniracles  ?  C'efl:  autre  chofe.  Cette  queftion  en 

elle-même  &  abftraéHon  '  faite  de  toute  autre 
.confidératîon  eft  parfaitement  indijBFérente  ;  êl- 
\t  n'interéÏÏe  en  rien  la  gloire  :  dé  Dieu  dont 

nous  ne  pouvons  fonder  les,  deffeins.  Je  dirai 

plus  ;  s'il  pouvoit  y  avoir  quelquis  :}diff^encfe 


L    ET    T    R    E.  135 

ciuant  à  h  foi  dans  la  manière  d  y  répondre , 
les  plus  grande»  idées  que  nous  puiflions  avoir, 
de  la  fagefle  &  de  la  majefté  divine  feroient 
pour  Ja  âégitive,  il  n'y  a  que  Torgucil  humain 
qui  foit  oMte.  Voila  jufqu'où  la  raifon^  peut 
aller.  Celte  queftion ,  du  refie^  efl:  par&nent 
oi&ufè,  <Se  pour  la  réfoudre.il  &udroit  lire  dans, 
les  décrets  étemels  i  car .  comme  on  verra 
tout  à  rtoiië,  die  efl  inqpoSiblë  à  dédder  par* 
les^faita^/Gardcms  nous  ^Qticd'o&r  plorter  uir 
ràl  curieux:, fur  ces  myftefps;  7Rctad0ns.ce  refe 
peâ  à  Teflence  infinie  de  neirien  pron<Mice& 
d*dl^:  nous  n'en  coimoifions  quC'  rimmeaScé# 
Cepaidant  quand  un  mortel  vient  bardîr; 
ment  nous,ài£imer  qu'il;' a  vu  im^  miracle» -il 
crandie  net  câlte  grande  qudlion  ;  jugez  (i 
Ton  doit  reiiapoiré  iîir  fa  parole!  Ilsferoienc 
mille  que  je  ne  les  en  croiroîs  pas. 
.  Je  Jai0è  \  paitJe  groifia:  fophifme  d'emplo*» 

I  3 


»     r 


1^4         T  R  O  I  S  I  E  M  E 

yer  la  preave  mora|e  à  cohftater  des  Faic^  mh 
(orellement  impoffibles ,  pais  qu'alors  le  prin^ 
dpe  même  de  la  crédibilité  fondé  i!ir  la  pôf- 
fibilité  naturelle  ëft  en  défaut.  Si  les  horn* 
mes  veulent  bien  en  pareil  qas  admettre  cecto 
preuve  dans  des  choies  de  piire  (pécidatîon , 
un  dans  des  faits  dont  la  véritéme:  les  «toadie 
guera,'  afFurom^^noiis  (|u'ils  fefoi^t  pieu  diffi^ 
cilQs  s'il  s'agiiS)it  jptour  eux  du  mc^indt^e  intérêt 
t^npord.  Suppofons  qu'on  mort' Vint  rede* 
ifiiander  (bs  lâens  k^&s  hériâarsiaffiitnant  qû'i) 
eft.  t^ifafdté  ^^-fèquérant  d'acte  adinis  à  I4 
preuve  (1),i  ««jy^-vous  qu*il  y  Jût  lïn  feul  tri- 
buzial  fui*  la  terré  où  cda  lui  fat;'aât^dé?Mai& 
encore  un  coup'ïi'tfntamCtns  pas  ici  ce  débat: 
laliiS>ns  aax  f^ts  isoute  la  c^ptitûde  qu^^m  Uxat 

■     ■  I    I  I    ;     j  11 


y 


(i)  Prçnez  biôn  garde  que  dans  ma  '  fuppofîdoa 
«îeft  une  réftutéâlon  xéïlUlAt.&^iUI^  {^as-oaç  f%Qf« 
f<S  IQQK  ^u'il  s'agî(  de  couljater^. 


LETTRE. 


i^iS 


jj[ùe  le  fens  peuc  attester  de  ce  que  la  raifoii 
jpeut  conclurre. 

Paî(qa*un  miracle  dt  une  exception  auji 
Loixde  la'nature,  pour  en  juga-  il  faut  con^ 
nottre  oes  Loix  ^  &  pour  en  juger  fûrement  il 
faut  les  connoître  toutes:  car  une  feule  qu'on 
ne  connoietoit  pas  pourroit  en  certains  cas  in* 
connus  aux  fpeâateurs  changer  Tefiet  de  cel^ 
les  qu'on  connoîtroic  Ainû  celui  qui  prononce! 
qu'un  tel  ou  tel  aâe  eÙiuÀ  miracle  déclare  qu'H 
connoit  tobte^  les  Loix  de  h  nature  &  qu'il 
iâit  que  œt  a£te  en  elt  une  exception. 

Mais  quel  eH  de  niortél  qui  connoît  ioUi 
tes  les  Loix  de  la  nature?  Newton  ne  k  van-» 
toit  pas  dé  les  connoître.  Un  homme  (âge  té^ 
inoiil  d'un  fait  idouï  pebt  àtteftér  qu'il  a  vu  ce 
(ait  &  l'on  peut  le  croire  ;  mais  ni  cet  hommdf 
jfâge  ni  nul  autre  homme  fage  fur  la  terre  n'âf- 
&iii^a  jamais  que  ce  fait,  quelqete  étennarif 


l4 


•''  \ 


I3<5        TROISIEME 

qu'il  puîfle  êtte ,  foitr  un  miracle  ;  car  com- 
ment peut  -  il  le  favoîr  ? 

Tout  ce  qu'on  peut  dire  de  celui  qui  fe 
vante  de  faire  des  tniracks  cft  qu'il  fait  des 
chofes  fort  extraordinaires;  mais  qui  eft-ce 
qui  nie  qu'il  fe  falle  des  chofes  fort  extraor- 
dinaires ?  J'en  aï  vu ,  moi ,  de  ces  chofes 
/  là,  &  même  j'en  ait  fait  (*). 

m  ■■  I     III  <  ■      ,  !■  -i       ■ I  .■..,■■.  i..iy       II  ,1   . 

(k)  J*ai  vu  à  Venife  en  1743  une  manière  de 
forts  aflez  nouvelle,  &  plus  étrange  que  ceux  de 
Prenefte.  Celui  qui  ies  vouloit  confulter  entroit 
dans  une  chambre,  &  y  reftoit  feul  s*il  le  defiroit. 
Là  d'un  Livre  plein  de  feuillets  blan6  il  en  tiroh 
4  un  i  fon  choix  ;  puis  tenant  cette  feuille  il  deman- 

<}oit,  non  â  voix  haute,  mais  mentalement  ce  qu'il 
vouloit  favoir.  Enfulte  il  plioit  £à  fcuillff  blan» 
che  ,  l'enveloppoit,  la  çachetoit,  la.plaçoît  dans 
un  Livre  ainfi  cachetée  :  enfin  après  avoir  récité 
'  certaines   formules  fort  baroques  fans  pje/dre  fon 

Livre  de  vue,  il  en  alloit  tirer  le  papier,  recon- 
nottte  le  cachet,  l'ouvrir,  &  il  troûvoit  ùl  répcmfe 
'  écrite. 

Le  magicien  qui  faifoît  ces  forts  étoît  le  premier 
•  Secrétaire  de  TAmbailàdeur  de  Fran<îe^&  il  s*app^ 
loit  J.  J.  Rou fléau. 


L    E:  T    T    R  :E.  137 

li'écude  de  la  nature  y  fait  faite  tous  les 
jours  d^e  nô^vçfies  découvertes  :  '  nadoÛrie  b> 
TMÔDQ  fe  pecTeâiome  tous  les  jours.  \  h^  CSiy» 
mie  coneafe  :9  des  ctatifmutations,  des  préci» 
pitaûonsydcsdéoûiwdoiiSy  des.eipIaGom,  des 
pho^hoies,  des  j>yr^9ph0i^y  dfi$  tig^mbletncns 
de  ten'e^  4iiï4)te  i^oixes  moveill^s  à-faire  Gr 
gner  mille  fois  le  pei^le  qui  les  verroi(.  Uhui^ 
le  de  Gayac  &  rdprîç.de  mit  9»  font  pas  dea 
liqqeursfort  jw«sj(Ug|le3;pies:«Qr0t^]ei^  vouf 
verres  ce  qD^iljml^Meiia;  vtmi%'2^  pas  fai- 
re (^txe40s^f^\  dans  une  dmmbte^  car  vous 
« 

poomfiz  bien.metcreJe  £w  à  b  oiaifou  .(/)•  Si 
les'Préires  de:)B^i.a«oîem;  m  M.\R(Hidle  aa 

J ; p, ^4^- 


}6  me  çontcntois  d'être  fpErcier  pdtce  que.  j'étois. 
modcfte  ;  mais  fî  j*avoîs  eu  Tambîtion  d'être  Pro- 
phète, qui  m'^ut*  empêché  de  le  develiîr? 

(i)  Il  y  a  des  précautions  à  prcnde  pour  réuiïïr 
dans  cette  opération":  Ton  me  dirpenfeni  biw,  Je 
pcfrfie,  d*ca  piCÊfefCilfi  le  Réc^pé.. 

15 


t3«         T^R  O  I  S  J  E  M  E. 

toîlîeu  d'eux  leur  bochér  ôut  pris  feu  de  luî- 
méme  &  £^  eut  été  pm  ipobr  dupe. 

VoùgyeÊdttL  (je  Ttisni  dim  de  Teàu  ,  vcâla 
de  r^nord  ; '^rOQt  veifez  de  ïeau^âns  de  fetii, 
voila  un  corps  dur*  -  Un  l^ftd^tie  du  Ccàlege 
de  Harcoutt  va^en  Gaif|fo;d^^'âu  pè^;^i 
recoutibiàreK  le  |ioavoir  de  cdùiqi^m^x^ye^ 
je  vak  cbâvêf tfe' de  1  eâu-^tg .pi^e f  par  de$ 
fiociyetis  timm  du  moin^lliîc^r  it  fait'xb 
k  gbcei  vbîla'  les  Nègres  préc^  à  Tadorer.  : 
-'■  )^êik  4er  Ffopbêtes  ààRA^tit  d^kend»  it 
:TmÊ'A/mk  kPféu  dû  CS»t;  tti^id'lioi  lesenfoita 
en  foqt'auàGAC  avec  ^pëliciiibi-ceau^dé' ver- 
«i.  J<]ifoé'fie  anéteir  lè-Solè^^  uti'Jf^iëiff  cl'àU 
manacrva  le  £ttre  édipfêr;  le  prodige  efl;  eiio 
corè  plus  feriîbîe.  Le  càtinet  dé  M.  l'AtÂé 
NoHec  cft  ui^iaboratoire  de  magk,  les  récréi* 
tiens  niâthématîques  font  un  recueil  de  mîra^ 
des  ;  que  dis  -je?  les  foiits  mèniè  ài  foiarn^     i 


î.   E    T    T    Rv  E. 


iS9 


ferom»  les  BAodaéi  n'y  font  pu  ncèi;  le  finfl 
Fïyfan  de/NoathoUande  qui  fgl  im  vingt  fojt 
dumer  &  diwd^  a^  i!an  coaceau  a  de- 
^cjpdi  fubjngfier  tout  te  Pwple ,  «lèiM  à  Farki 
qiîe  peofia  -Vous  qaH  e^  fiât  an  Syrie  ? 

Ce&  un  ï^e%ele  bien  fing^^  qt^ft'^»  foi* 
TCto  de  Buris  ;  ï  n^y  «  a  pa»  oiie  4iù  f  on  M 

« 

voye  les  cbdlas  les  pkis  ÀonnaiHes,  fins  ^ 
je poblic d^ugnepi^ae  y  âte aittatâon { caM 
on  fù  Bceé&tmké  aux  choies < étonnantes,  ôi 
même  à  ceBés  qn^on  ne  peut  €oneev>6ki  On  y 
wok  au  moment  que  j'écris  ceci  deux  machinet 
pemdves  %«Féés,  dont  l'oné  màrcke  ou  s'aN 
i^  esaâemént  à  k  vokHM^é  4e  o^i  qui  ftk 
marier  ou  arrêter  Tautre.  J'y  ai  vu  une  tite 
debcHsquipàrloit,  &  dont  on  ne  parlditpas 
fanr  que  de  ce&e  d^AH^ert-  lé  ^rând.  J^ai  ni 
même  ime  ehofe  plus  furprenante}  €^éik>it  foiv 
Ce  têtes  d'hommes,  de  favaos  j  d'AcsidéniidMtf 


? 


.140         T  ROI  SI  E  M  E 

^uî  couroient  aux  miracles  dei  cônvuKions ,  ^ 
qui  m  reveooient  tout  émtavjéMn.  :  i 

Avec  le. canon,  Toptiquiè»  T^ant,  le  baror 
laetre  ^quàs  prçdiges  ne  fak^on  pas  diçi-ks 
ignotans?  Les  Eurc^éen^  avec  leurs  arts  (mt 
tbùjous^pafle^poar  des  Dieux  pariai  les  Barba- 
ces.  Si  dsms  le  feia^même  dt»  Atts, 
ces,  des  collèges,  des  Acadénues;  fi  4a08  le 

•m 

aûlieu  deTEurc^^  en  Fiance,  en  Angleteiro^* 
m  b<»nme  fut  vénale  fiéde  deçiier,  armé  de 
(ous  les  jnûraclcts  de  râeârieité;  que.  nos  pby&: 
«icQs  openent  $^urd'hm,  feutc^n  brâl^.cQi^ 
me  un  fbrcier ,  l'eut  •  on  fiiivî  comme  ^  Pr<v 
]^$tç  ?  Il  elt  a  ^^  préfumer  ..qu'on  eut  fait  Tun  au 
llsotre  :  il  çfl:  certain  qu'cm  aurait  eu  tort.  . 
^:  Je  i^e  ûîs  û^l'art  de  gu^îr  eft  trouvé  nis'H 
lè/ttouvera  jamais:  Ce  qo/eje  fajis.c'eO:  qu^i} 
ïCm  l^s  hors  de  la  nature»  H  efl  tout  aullî  na* 
tmà.  qu'un,  houipe  guériife  qu*il  refl;  qu'il  tom^ 


LETTRE.  141 


be  malade;  il  peat  tout  auffi  bien  guérir 
ment  que  mourir  fubitement.  Tout  ce  qu'on 
pourra  ^e  de  certaines  guérifoùs»  c'efl:  qu'dlef 
Ibnt  iûrprenantes,  mais  non  pas  qu'elles  font: 
impoffibks  ;  commentprouverez-vous  donc  que 
ce  font  des  miracles?  Il  y  a  pourtant»  je  ï^ 
voue,  des  chofb  qui  m'étonneroient fort  fi  Jen 
étoîs  le  témrâi:  ce  ne  (eroit  pas  tant  de  voir 
marcber  un  boiteux  qu'un  homme  qui  a'avoil: 
point  de  jambe,  ni  de  voir  un pazaly tique  mou- 
voir ion  bras  qif  un  homme  qui  n'en  a  ^'u& 
reprendre  les  deux.  Cela  me  frapperoit  encore 
plus ,  je  l'avoue  y  que  de  voir  refliifcicer  un 
mon;  car  enfin  un  mort  peut  u'être  pas  more 
(m).    Voyez  le  Livre  de  M.  Bruhîer. 


j(tn)  Lazare  étoit  déjà  dans  h  terre  ?  Seroit-il  Ip 
premier  homme  qu'on  auroic  enterré  vivant  ?  Il  y 
étoit  depuis  quatre  jours  ?  Qaî  les~  ^  comptés  ?  Cç 
n'eft  pas  Jéfus  qui  étoit  abfent  II  puait  déjà?  Qu'eu 
favez-votts?  Sa  fœur  le  dits  voila  toute  la  preuve^ 


/ 


ut       T.'lR  O  I  S  r  Ë:  M  Ë 

Ab  i^êdËg,  quelque  frappât  que  pdt  ia^  p^ 
j-oltre  un  pareîi  T^âacle,  je  ne  iroudrois  poitf 
iriea  aa  iiKStyte  Àt  être  xsmxètk  ;  car  ^e  îais^ je 
<ce  qofii  en  poorsoîc  arriver?  ilcr  Ika  de  me 
fencte  tsédxHm ,  j'^aurcm  grand  peor  qu'tt  n6 
me  fMitqufiffoa  r  nuii  ce  n'eft  {Mis  tte  imt 

Qft  ^âstt  «Éi^OidQvtt  ie&cKS'de  teflôfeicât 
^kiriidyés;  on  s  déjà  dierehë  («ftiideixffi^d- 
ter  itt  {»e&4u«  ;  qo»  fsîir  11  dtt«  d^aiwrea  georéi 
de  moft^  on  h^  psavienâm  pof^  jr^encke  ]a  vie 

L-effroi  le  dégoût  en  etit  feît  dire  acttaât  â  toute 
autre  femme,  quand  même  cela  n'eut  pa$  été  vrai, 
gft^j  mfaXt  que  Vup^Hler,  {f  iV/ort.*  Prtirex  fearde 
de  mal  raifonner.  Il  s'agifibic  de  lUmpoiffifoHité  phy* 
lique;  elle  n'y  eft,  plus,  Jéfus  faifoit  bien  plus  de 
façons  dans  d'autres  cas  qui  n'étoient  pas  plus  diffi^^ 
cîles  :  voyez  la  note  <}ui  fuit.  ?oui^qubi  cette  diffé- 
rence,, il  tout  étolt  également  lûiraculeux  ?  Cad 
]peut  être  une  exagération,  &  ce'  n'eft  pas  la  plui 
forte  que  faint  Jean  ait  faite]  j'en  attelle  le  deroict 
Vcirfèt'do  fou  Evangile. 


L.  ET   T    R   %  t43 

I 

à  des  corps  ^â'on  m  avok  cm  privés»  On  tm 
favoit  jadis  ce  que  c'étoic  qoé  d'abattre  la  ca« 
taraâe  ;  c'eft  un  jeq  maintenant  pour  nos  cbi« 
rur^^.  Qui  &it  S'il  tfy  a  pas  quelque  fecrec 
trouvable  pour  la  fake  tomber  tout  d*un  coi^  ? 
Qm  iàk  fi  le  po£fefièur  d*un  pareil  fecret  nt 
pâli  pas  faire  aviec  fiffipUcité  »  ce  qa!un  fpeéla* 
tcor  ignotaot  va  {H^endre  pour  un  mÎFacle,  ôf 
ce  qu'un  AMeur  {ffévâm  peut  donmo:  pour 
cel  r*)?   Toi^  cela  n'eft  pat  vraîfeRiblable» 


(*)  On  voit  quelquefois  dans  le  détails  des  faits 
rapportés  une  gradation  qui  ne  convient  point  à 
une  opération  furnaturelle.  On  pféftme  àJéfUs  nn 
aveugle.  Au  lieu  de  le  guérir  à  Tinfiant,  il  l'em- 
mené hors  de  la  bourgade.  Là  il  oint  Tes  yeux  de 
falive,  il  pofe  fes  mains  fur  lui;  après  quoi  il  lut 
demande  s'il  voit  quelque  chofe.  L'aveugle  ré- 
pond qu'il  voit  marcher  des  hommes  qui  lui  parois 

fent  comme  des  arbres  :    Sur.  quoi ,  jugeant  que  la 
première  opération  n'ed^pas  fufiîfante,  Jéfus  la  re* 

commence,  &  enfin  l'homme  guérit» 

Une  autre  fois ,  au  lieu  d'eitiployet  de  la  falif f 

pure  y  il  la  délaye  avec  de.  la  terre* 


14+        TROISIEME 

foie:  Mais  nous  n'avons  point  de  preuve  qae 
cela  fott  impoffible,  &  c*efl:  de  l'impoffibilic^ 
phyfique  qu-il  s'agit  ici  Sans  cela»  Dieu  dé* 
ployant  à  nos  yeux  fa  puilTance  ti'aùroic  p« 
nous  donner  que  des  iignes  vraifemblables ,  de 
fitnples  probabilités;  &  il  arriveroit  de-là  que 
l'aucoritë  des  miracles  n'étant  fondée  que  fin: 
l'ignorance  de  œùz  pour  qui  ils  auroient  été 
faits,  ce  qui  f^roit  ininiculeuz  pour  un  fiéde 
ou  pour  un  peuple  ne  lé  feroit  plus  pour  d'au* 
très;  delbrteque  la  preuve  univerfelle  étant 

ea 


mm 


Or  je  le  demande ,  à  quoi  bon  tout  cela  pour 
yn  miracle?  La  nature  difpute-t-elle  avec  Ton  maî- 
tre? A-t-il  befoin  d*eiFort,  d*obftination ,  pour  fc 
faire» obéir?  A-t-il  befoin  de  falive,  de  terre,  dla- 
grédiens  ?  A-t-il  même  befoin  de  parler ,  &  nç 
fuflGit-il  pas  qu'il  veuille?  Ou  bien  ofera-t-on  dire 
que  Jéfus,  fur  de  fon  fait,  ne  laifle  pas  d'ufer  d'ua 
.petit  manège  de  charlatan,  comme  pour  fe  faire  va- 
Joir  davantage,  &  amufer  les  fpeftateurs?  Dai^  le 
fyflême  de  vos  Me{fieurS|  jil  faut  pourtant  Tua  oit 
l'autre.  ChoiSS&z.  '^ 


LETTRE.  145 

en  d^ut,  le  fjrftêmè  établi  fur  dUe  fêrok  dé> 
cruîL  Non ,  donnez-moi  des  miracles  qui  de« 
meurent  tels  quoi  qu'il  arrive ,  dans  tous  les 
tems  &  dans  tous  les  lieux.  Si  plufîeurï  de 
>ceux  qui  font  rapportés  dans  la  Bible  paroiflênt 
être  dans  ce  cas,  d'autres  auffi  paroifTent  n'y 
pas  être.  Répond-moi»  dpnc,  Théologien ,  pré*' 
toids^tu  que  je  paiTe  le  tout  en  bloc,  ou  fi  ta 
me  permets  le  triage?  Quand  tu  m'auras  dé* 
cidé  ce  point,  nous  yàrons  après. 

Remarquez  bien ,  Monfieur ,  qu'en  fuppo- 
fimt  tout  au  i^us  quelque  amplification  dans  les 
drcondances,  je  n'établis  aucun  doute  fur  1« 
fond  de  tous  les  faits.  Cefi  ce  que  j'ai  déjà 
dit,  &  qu'il  n'efl:  pas  fuperflude  redire.  Jélîis, 
édairé  de  refprit  de  Dieu ,  avoit  des  lumières 
fi  iupérieures  à  celles  de  fes  difciples,  qu'il 
n'efl:  pas  étonnant  qu'il  ait  opéré  des  multitu- 
des  de  chofea  extraordÎQÛres  o^  rigoûnuice 

Fartie  I.  K 


I    ,      - ,  I 

\  1 

\ 

I 


Ï4S        T  R  O  I  S  i  Ë  M  Ë 

des  Ipéftàteurs  a  vu  le  prodige  qaî  n*y  étoît 

pas.  *  A  quel  point ,  èh  vertu  de  ces  lumières 

pouvôît-îl  agir  par  dés  voyes  naturelles ,  ihccn- 

hùes  à  eux  &  à  nous  (o)  ?  Voila  ce  que  hous 

ne  favbns  point  &  ce  que  nous  ne  |)ouvons 

làvoîr.  Lés  fpeélateuft  dès  chofes  riiervdHëu- 

fes  forif  naturellement  pôttés  à  les  décrire  av^ec 

ëxagémiôn.  La-defflis'on  peut  de  três^botttie- 

fôî  s'abùfer  loi  -  iriêîrie  -en  abùlaht  lés  autres: 

pour  peu  qu'on  fait  (bit  au  defTûs  de  nos  îumie* 

»>      »  ,'  ^  • 

ïes  noua  le  fuppofons  au  deflbs'de  lâ'raifbn, 

H-^t  «ni'  . -    !:■■■"'  '"       '     '  '         '  '      '   ■   ■         Il  I    !■■  .      '     ■    .  1 1  i.j. 

^^  (ôj  Nos  "hommes  de/Dieu  Veulent  a,  tovite  .fprce 

que  i'aye  fait  de  Je  fus  un  Impofteur.  Ils  s^échauflFent 

^ôltr    rëpondre  à  cette -feidigne    accufattoh,-   kflti 

qu^oi)  p.eofe  quç  je  l'ai  faite.;  ils  la  fupp.ofeD.t  avec 

un  air  de^ certitude;  ils  y  infîflènt,  ils  y  reviennent 

"^Teftoeufement.     Alj'iî'ces;  dpQX  Ch retiens ^po»- 

.  voient  m'ariacher  à  la  fin  quelque  bîafphÊme,  .c]uc\ 

*'trîdm5:>he  !  quel    contentement  ,   truelle   édification 

.pour  leurs  charitables,  âmes  !    Avec  iquelle    feinte 

joye  ils  apporteroicnt  les  tîTons  allumés  au   feu  de 

-kur  sièk,  pour  eiubraÉir'in<5à  bûcher  1'.  : ';    '  "' 


L    Ê    T   1!^    R  U  14^ 

i&  rdptît .  v-oit  enfin  :du  prodige  où  le  cœut 
.nous  fait  àéùxtx  fortemefic  d'en  voir. 

Les  miracles  font,  comme  f  ai  dit ,  leâ  prâu« 
ves  des  iimples,  pour  qui  les  Loix  de  la  nature 
forment  un  cercle  très  étroit  autour  d'euxi. 
Mais  la  fphere  s*ctend  à  liiefure  que  les  hom* 
mes  s'indfuiient  &  qa*ils  ientent  combien  il 
leur  refte  encore  à  favoir.  Le  .jgrand  Phyficien 
voitiî  loin  lès  bornes  de  wtte  fphere  qu*il  ne 
fmiroit  difeorner  un  mitacle  au-delà.  Cela  ne 
Je  peut  eft  un.  mot  qui  fort  rarement  de  la  bou* 
che  des  iages}  ils  difent  plus  fréquemment, 
je  ne  fafs»     J . 

Que  devons*nQus  donc  pénfer  de  tant  de 
tnirades  rapportés  par  des  Auteurs ,  véridî- 
ques  ^  je  n'en  doute  pas ,  mais  d'une  H  crade 
ignorance ,  ^  fi  pleins  d'ardeur  pour  la  gloi- 
re de  kur  maître?  Faut^il  rejetter  tous  ces 
faits  ?  Non*  .faut-il  tous  les  admettre  ?  Je  Tî- 

K  a     • 


V 


Ï48         T  R  O  I  S  I  E  M  :E 

gnore  (p).    Nous  devons  les  refpeftèr  faos 
prononcer  fur  leur  nature»  doffîons-nous  êcie 


:  ':  (P)J1  y  en  a  dans  TEvanglle  qu'il  n'efl  pas  mê- 
me  poffible  de  prendre  au  pied  de  la  Lettre  fans 
renoncer  au  bon  fens.  Tels  font',  par  exemple, 
ceux  des  pofl$dés»  On  reconnoit  le  Diable  à  fon 
teuvre,  &  les  vrais  poffédés   font  les  méchans;  la 

'  raifon  n'en  reconnolcra  jamais  d'autres.  '  Mais  paf* 
fons:  voici  plus.  . 

Jéfiis  demande  â  un  grouppe  de  Démons  com- 

.jnent  il  s'appelle.  Quoi  l  Les  Démons  ont  des 
noms  ?     Les  Anges  ont  des  noms  ?     Les  purs  Ef- 

.pries  on  des  noms  9  Sans  doute  pour  s*eQtre  ap- 
peller.  entre  eux^  ou  pour  entendre  quand   Dieu 

'les  appelle?  Mais  qui  leur  a  donné  ces  noms?  En 
quçlle  langue  ci^  font  les  mots?  QueUes  font  les 
bouches  qui  prononcent  ces  mots,  les  oreilles  que 
leurs  fons  frappent  ?  Ce  nom  ceft  Légion ,  car  ils 

^  font  plufieurs ,  ce  qu'apparammenç  Jéfus  ne  favoit 
pas.    Ces  Anges,  ces  Intelligences   fublimes  dans  le 

.  mal  comme  dans  le  })ien ,  ces  Etres  Céleftes  qui  ont 
pu  fe  révolter  contre  Dieu,  qui  ofent  combattre 
fes  Décrets  éternels  /  fe  logent  en  tas  dans  le  corps 
•d'un  homme:  forcés  d'abandonner  ce  malheureux, 
ils  demandent  de  fe  jetter  dans  un  troupeau  de  co- 
chons, ils  l'obtiennent;  ces  cochon*  fe  précipitent 
dans  la  mer  ;  &  ce  font  là  les  augiiltcs  preuves  de 
la  million  du  Rédempteur  du  gpnre  humain  ,  les 


LETTRE.  149 

<ent  fois  décrétés.  Car  enfin  Tautoricé  des  loix 
ne  peut  s'étendre  jufqu'à  nous  forcer  de  mal 
laifoimer  ;  &  c'eft  pourtant  ce  qu'il  faut  faire 
pour  trouver  nécelTairement  un  miracle  où  k 
raifon  ne  peut  voir  qu*un  fait  étonnant. 

Quand  il  leroit  vrai  que  les  Catholiques  ont 
un  moyen  fur  pwr  eux  de  faire  cette  diftinc- 
tion  9  que  s*enfuivroit-iI  pour  nous  ?  Dans  leur 

V 

fyflême^  lorfque  TEglîfe  une  fois  reconnue  a 
décidé  qi'un  tel  fait  eft  un  miracle,  il  eft  un 
miracle  ;  car  l'Eglifë  ne  peut  fe  tromper.  Mais 
ce  n'efi:  pas  aux  Catholiques  que  j'ai  à  faire 
ici,  c'eft  aux  Réformés.  Ceux-ci  ont  très  bien 
réfuté  quelques  parties  de  la  profelfîon  de  foi 


preuves  qui  doivent  l'atteftcr  à  tous  les  peuples  do 
tous  les  âges^  &  dont  nul  ne  fauroic  douter  ,  fous 
peme  de  dannation  !  Juile  Dieu  !  La  tête  tourne  ; 
on  ne  fait  où  I*on  eft.  Ce  font  donc  1.^^  Meilleurs, 
lés  fondemens  de  votre  foi  ?  La  mienne  en  a  de 
plus  fûrs,  ce  me  fetnble. 

K3 


ISO         TROISIEME 

du  Vicaire  qui ,  n'étant  écrite  que  contre  r& 
glife  Romaine ,  ne  pouvoit  ni  ne  devoit  rien 
prouver  contre  eux.  Les  Catholique  pourront 
de  même  réfuter  aifément  ces  Lettres ,  parce 
que  je  n'ai  point  à  faire  ici  aux  Catholiques ,  de, 
que  nos  principes  ne  font  pas  les  leurs.  Quand 
il  Vagit  de  montrer  que  je  ne  prouve  pas  ce^ 
que  je  n'ai  pas  vonhi  prouver,  c'eft  là  que  mes 
%irôtfme&  triomphent. 

De  tout  ce  que  je  viens  d'expofa^  je  coiv- 
duds  que  les  faits  les  plus  atceflés ,  quand  mê^ 
xne  on  les  admettront  dans  toutes  Ums  circon^i 
ftances ,  ne  prouyeroient  rien  y  &  qu'on  peut 
même  y  foupjonner  de'  l'exagération  dans  leS; 
circonftances ,  fans  inculper  la  bonne  foi  de 
ceux  qui  les  ont  rapportés.  Lés  Bécouvertes 
continuelles  qui  fe  font  dans  les  loix  de  la  na-' 
ture,  celles  qui  probablement  fe  feront  enco^ 
tç^  çeBes  ^ui  relieront  taujours  à  feirc;;  la 


LETTRE.         151 


t , 


progrès  pafles  préfens.  &  fatums  de'  l'indullrip 
hutnamç.  ;  les  dlverfcs  bornçs  que  don^j^nt  k^ 
peuplçs^.à  Tordre  des  ppffibles  félon  ^u'i^fi  ^^^\ 
plus  Qu  moins  éclairés  j  tout  noua  prouYe  que 
nous  ne  pouvons  connoître  ces  bçtrn^.  Ç^R^.^ 
dantilfaut  qu'un  miracle  pour  être  yjairaent 
tel  Jes  pafle.,  Sqic  àpjfp  (^]\\  y  îût  d^  ,.içîra- 
cks,  foiç  qu'^1  n'y  çn.ait  pa^  ^  ^  eft  icnpoffiblp 
au  fiiçe  4?  s'affurer  q^i^  gwfl^jue  fait  que  çp 
puiflp  Qtre  px  eft  un. 

Iq4épendainipent  des  preuves  de  c^tte.  îm- 
pQÛibiUt^  gue  jq  viens  d'établir ,  j'en  vojs.  w^^e 
autç^  non  moin§  forte  d^w?  la  fuppofitiQ^  me- 
me:  car^  ajccordops  qu'il-^  ait  ^e  vrai?  fnir^^- 
cles;  de  ^^ïçjI  nous  ferviroi^^ls  s'il  y  ^  ^^fli-^ 

faux  roir4ffJ^  defqqels  il  efl  iippoffible  4e  Jçs 

».  •  *  "         < 

difcp|:.Bp:?  ££•  faites. JjSpp.^tteqtion  que  îe  ij'ap- 
pelle  gaf  icj  f^  nj|raçlç.  iTOrpiracl^  qui  n'^ 
pas  réel„  .m^  uq  aâe  biea  jéellemeRf  fuma- 

K4 


ï 


ïsa,        TROISIEME 

turel  fait  pour  foutenîr  une  fauiTé  doftrîne. 
Comme  le  mot  de  miracle  en  ce  fens  peut  blet 
^  fer  les.  oreilles  pieufes  ,  employons  un  autre 
mot  &  donnons  -  lui  le  nom  de  prejiîge  :  mais 
Touvenons  -  nous  qu'il  eft  împoffible  aux  fens 
humains  de  dilcerner  un  preftige  d'un  miracle. 
La  même  autorké  qui  attefte  les  miracles 
attefle  auffi  les  prefb'ges,  &  cette  autorité 
jfrouve  encore  que  l'apparence  des  preftiges 
ne  diffère  en  rien  de  celle  des  miracles.  Com- 
ment donc  diitinguer  les  uns  des  autres ,  & 
que  peut  prouver  le  miracle ,  fi  celui  qui  le  voit 
ne  peut  difcemer  par  aucune  marque  afFurée 
'&  tirée  de  la  chofe  même  fi  c'cfl:  l'œuvre  de 
Dieu  ou  fi  cf eft  Toauvre  du  Démon  ?  Il  faudroît 
un  fect)nd  miracle  pour  certifier  le  premier. 
Quand  Aaron  jetta  fa  verge  devant  Pharaon 
&  qu'elle  fiit  changée  en  ferpent,  les  inagî- 
dens  jetterent  auffi  leurs  verges  ôc  elles  furent 


L    E    T    T    R    E.  153 

changées  en  ferpens.  Soit  que  ce  diongement 
fut  réel  des  deux  côtés,  comme  il  eft  dit  dans 
FEcriture,  foît  qu*il  n'y  eut  de  réel  que  le  mi- 
racle d'Aaron  &  que  le  pieftige  des  magiciens 
ne  fut  qu'apparent  »  comme  le  difent  quelques 
Théologiens^  il  n'in^rte;  cette  apparence  é- 
toit  exaâement  la  même  ;  TExode  n'y  remar- 
que aucune  différence,  &  s'il  y  en  eut  eu,  les 
magiciens  fe  feroient  gardés  de  s^expofer  au 
parallèle»  ou  s'ils  Tavoient'  fait  Us  auroient  été 
confondus. 
Or  les  homtnes  né  peuvent  juger  des  mira* 

des  que  par  leurslchs,  &  fi  la  fenfation  eft  la 
même ,  la  différence  réelle  qu'ils  ne  peuvent 
appercevoîr  n'eft  rien  pour  eux,  Ainfî  le  fi- 
gne»  comme  figne ,  ne  prouve  pas  plus  d'un 
côté  que  de  l'autre,  &  le  Prophète  en  ced  n'a 
pas  plus  d'avantage  que  le  Magicien.  Si  c'eft 
encore  là  de  mon  beau  ftile,  convenez  qu^ 


^S^         T  R  O  I  S  1  E  M  E 

en  faut*  itfi..  bi^a.  pl(i$  beaq?  polir  le  réfuter^ 
Il  eft  ytai  <^'k  feiipei^  cVAaP^on  dévora  Ie& 
.fe3îpœ&..4?$.  Msgiçîens/.Mais,  forcé  d'adtoet?- 
rOrc  une  i(»9  1^  Magî(Ç ,  Pbai^aop  put  fort  bien 
n'en  conclure  autr^  chofe.,  ^npn  qu'A^on  é- 
toic  piuys  habile  ga'ieux  d»ns  .(:ç(:  art  j  c'efl;  ainii 
-^iie  Simoji  ravi  dés.  çhftfe?  que  feifoit  Piûli^ 
ipe,:  .wuittt  :a$rHe»r  jfes  Apôcreï;  ie  feçi«  d'e;> 

.  .D'aiHçurs  Firféfîorfeé  ^$  iftfcgicîens  éfj^^t 
due  à  la  préfence  d*Aaron.  Mais  Aaron  abfeaç,. 
^Ut  faîi&nt  1q  mêmes  Hg^^^j  ^yoienç  droit  de 
^pr^çqcjre  à  1^  même^  autorité.  Le  figne  en  lui- 
mêîpe  ne.prouypît'donc  TÎen;  - 
.'  Quand,  MoyCe  changea.  Tpau.  en  iang,  le^ 
,M3giciens  changèrent  Teau  ei^  Cwig  ;  <5[ii^d 
.Mçyfe  produifit-des  grenouilles,  k(r  Magici,ei)5 
'produifirent  des  grenouilles.  .Us  échpuerent  ii 
f^  troiiieme.  p^aye;  mfis  teppns-nous  aux  d^eus: 


Im  /B  tr   T  R;  E. 


*5S 


premières  éaax  Dieu  même  avait  6àt  Ik  pKm 
ve  da  .pouvoir  Dim  (f)»  I^â»  JSipgiasîit  £^ 
3«ntauffi  acte  i»reiiv6-]à.      -    . 

Quant  à  la  troifieme  pbjié.  qx'îh  nepo^feitt 
imker,  oq  ne  Toit  patce  <pi  birçnàmû'di& 
ficile,  au  point  de  marquer  qtie  ItAiigtéQ'ûin 
it^-là.  Pour^not  c«u  quî^poratt  frcxibire 
m  animal  ne  piiteitt-&  produiib  uo  iidèâe> 
&  comment,  aç^s  avoir  fak  é»  sttnoiiîttes^ 
ne  purent'ils  fake  des  poûxF  Sil  eft  vrai  qu'il 
nyait  dans  ces  chofesrlà  que  Je  premier  pys 
qoi  coûte,  c^étoit  affiirémeiu;  s'anéttr  en  bea« 

Le  même  Mû^fe ,  inftniit  par  toutes  ces  ei> 
périences,  orcicmne  que  fi  un  faux  JPœphêtt^ 
vient  annoncer  d'autres  Dieux ,^.c'efl:;i^«  dire, 
lae  &uflë  doâân&v  &  que  xac  Im^fys^bètei 


(})  Exode  vu.  f7* 


I 

iS6         TROISIEME 

autoiiie  fon  àisvipar  des  prédi£â(»is' ou  des 
prodiges  qui  réufliiTent ,  it  ne  faut  point  Té- 
coacer  mais  le  mettre  à  mort.  On  peut  donc 
employer  de  vrais  figues  en  faveur  d'une  fauf- 
(e  do6farine;  un  figne  en  lui-même  ne  prou- 
ve  donc  rien.^ 

La  m^e  do6farine  des  finies  par  des  preftî- 
ges  eft  établie  en  mille  endraits  de  rScriture. 
Ken  plus  ;  après  avoir  déclaré  qu'il  ne  fera 
point  de  figues^.  Jéius  annonce  de  faus:  Chrifts 
qui  eq  feront  ;  il  dit  qu'î/r  feront  de  grands 
figne  s  )  des  tmacles  capables  de  fidmre  les  élus 
mêmes  j  s'il  était  pojjible  (r).  Ne  ieroit^on  pas 
tenté  fur  ce  langage  de.  prendre  les  fîgnes 
^our  des  preuves  de  fs^uffeté? 
.  Quoi  !  iDîeu,  maître  du  choix  de  i&s  pren- 
ves  qoand^  il  vâit  {larler  auxhommei,  choiik 

(r)  Matth.  XXIV.  24.  ]^rc.  XUI.  22. 


L    E    T    T    K   >E.  157 

par  préférence  CÊifles  qui  fappioiênt  des  con« 
noifiàiKres  qu'à  fait  qu'ils  n'ôno  pas!  II  prend 
pour  les  inftruire  k  même  voye  qu'il  fait  que 
prendra  le  Démon  pour  les  tromper  !  Cette 
marche  feroit^elle  donc  cdle  de  la  divinité? Se 
pourroit-il  que  Dieu  &  le  Diable  fuiviflent  la 
même  routet  Voila  ce  que  jt  ne  puis  conce* 
voir.        .      • 

Nos  Théolo^ens,  m^Heurs  raifonneurj 
nuds  de  moins  bonne  foi  qae  les  anciens  »  font 
fort  embai^raffés  de  cette  magie  :  ils  vou* 
droienc  bien  pouvoir  tout  à  fait  s'en  délivrer, 
mais  ils  n'ôfâit;  ils  fentent  que  la  nier  feroit 
juer  trop.  Ces  gens  toujours  G  décififs  chan« 
gent  ici  de  langage;  ils  ne  la  nient  ni  de  l'ad^ 
mutent;  ils  prennent  le  parti  de  tergîverih-, 
de  chercher  des  '&ux  -  fu^ans ,  à  chaque  pas 
ils  s'arrêtent;  ils  ne  favœt  fur  quel  pied 
danfer.  > 


.  Je  cfoi9^  IVfenfieûr^^  vitùs  a^fràr  fait  fentk 

bix  gît  ta  tttffiC(i]0éw\  Four  qiiûg^  rfiâo  «ne  tnaUque 

àfeiclarti4j:Jarvaièi-mife  oÉsWemme. 

:    Sî/Tonaieids  {Kfêftîges  ^  an  ne  peut  proti* 

ver  les  iniftidbç^  f)>ir<se.(qiie  tesuns &  les  au* 

tte3  fonc.;fooaé5:fur'la':ni&ifô  «itsotîtd 

.   EcfU'iOiiîadiii^&rlçsiprefl^ê^  àviecles  mim^ 

des ,  on  n'a  point  de  règle  fûre  précife  jSc 

cfoke  (f^Qtir  à^iSfyffir  ksmlt'do^Altref  :  ^dnfi 

te ^ïnimcles-,tie,[p»«iviait  weiî.  -  :.     /. 

<  Je  iàîs  :  bi^n:  ^que  nos  g^ns>^îân&  ;preâes  tû^ 

,xi&m^t  à  bt domine:,  m^isrâsoitblieiit  bocb* 

noBerrt  ^efi-  la  do£hriâeitfb;âi8filîé^  Je  mita* 

cle  efl  &fjcirâii)'  &  qae  fi^^lkjne.ireft  pas^ 

4Ue  Bt  peut  rien  iprouvën  : 

rJVlt  prenez ^pâs  ici  le  cbat^^  jtf  voas  fiip* 

q^:,  &  de  ce,  qne^/je  n'ai  pas.  regardé  les  œi- 

iBadesiCommeiefodèls  an  Cfariffiomime,  in'lal- 

lez  pas  conclure  que  j'ai  rejette  les  mitaclca. 


1.    Ê    T    T    R   E.  TS9 

N<^,  MonHdurV'je  xfe  iès  ai  lejetcésm  ne 
les  lejecte;  fi  ftti  dit  dés  itûfi;»»  pour  tù  dou- 
ter, je  n'ai  poîiit  difliiàdé  les  laiibdB  d-y  ctqî* 
re  ;  il  y  ia  isi^-^:ati4e  (i^ffiérénce  ètttre  nier 
une  €k6fe'i&  qèjdfwsïffinner,  Mtœia  rejet- 
ter  À  ne  pas  l'âdinettre ,  &  fai  fi  peii  décidé 
ce  pc»nt,  ^'je  défie  qu'on  trouve  \m  feul 
encbott  dans  tous  nies*  écrits  où  je  iôisi^alfir- 
matdf  cbndre  les  niiracles. 

Eh  !  comment  l'aifrois-je  été  ittaf^é  mes  pro* 
près  doàtës,  pntfque  partout  où  je  ftns^fedit  à 
moi,  le  plus  décidé  ^je-Joi^dBrmb^^riéi'encD]?^ 
Vtfjfz  quelles  «jffiimâtiens  peut  £ià:e  un  hon^ 
me  qoi  piarle  ain&dès  fa  Fïéface  (x).       '*  , . 

^  :A  Tégaîd  de  ce  qu'on  appelleta  la^panje 
Il  fyftématique,  qm^n'«f1:  'aifcre  dkcfy  ^  que 
n  la  marche  de  la  oàcnre,  c'efi:  là\:e  Cfii  dé- 


(i)  Préfacé  d^Emîk.  p.  iv. 


i6o        TROISIEME 

„  routera  le  pbs  les  leâeurs}  c'eft  aullî  par  là 
jj  qu'on  m^attaqu^a  uns  doute ,  &  peut-être 
yy  n'aura*t-on  pas  tort«  On  croira  moins  lire  un 
,,  Traité  d'éducation  que  les  rêveries  d-uo  vi- 
,,  fionnaire  fur  l'éducation.  Qu'y  faire  ?  Ce  n'eft 
,,  pas  fur  Içs  idées  d'autrui  que  j'écris ,  c'eft 
,,  fur  les  miennesL  Je  ne  vois  point  comme 
•,,  les, autres  hommes  ;  il  y  a  bngtems  qu'on 
y,  me  l'a  reproché.  Mais  dépend -il  de  moi 
,)  de  me  donner  d'autres  yeux,  &  de  m'aâFec- 
,9  ter  d'autres  idées?  Nonf  ildépend  de  moi  de 
.,^  ne  point  abonder  da&s  mon  fèns ,  de  ne  point 
^,  crcnre  être  feul  plus  fage  que  tout  le  mon- 
,9  de;  il  dépend  de  moi,  nOn  de  changer  de 
),  fentiment,  msds  de  me  défier  du  mien:  Voi- 
^j  la  tout  ce  que  je  puis  faire,  &  ce  que  je 
,,  fais*  <^ae  fî  je  prends  quelquefois  le  ton  af- 
^,  firmatif  9  ce  n'efl:  point  pour  en  impoiêr  au 
,,  leâeur^  c'eft  pour  lui  parler  comme  je  pen* 

fe. 


LETTRE.         'i<Si 

))  Te.  Poitfquoî  propbiërois-jè  par  fom^  de 

« 

yy  doute  ce  donc  quant  à  moi  je  ne  -tlouce 
,,  point  t  Je  dis  exaâement  ce  qui  ft  pafle 
5)  dans  mon  efprit. 

V  „  En  ezpofant  avec  liberté  mon  fèntîtoent, 
„  Jentends  fi  peu  qu'il  fySe  autorité  ^  que  /y 
5,  jcws  toi^urs  mes  nûfpns^  afin  q^'on  les  pe- 
j)  fe  &  qu'on  me  juge.  Mais  qaoi<pie  je  ne 
,,  veuille  pdnt  m'obftsiçr.  &  défendre  mes  î- 
9)  4ées>  je  ne  me  crois  pas  moins  obligé  de  les 
,»  propofer-  ;  car.  ks  msut^naes  >  fur  kfqudles  je 
„  fuis  d*ttn  avis  contraire  à  celui  des  autres  ne 
i9  foQt  pc^t  indifférentes,.  Ck  font  de  celles 

« 

9^  dont/  la  vérité  ou  h  fauflêté  importe  à  con* 
„  noitre^  &9)i  font  le  bonheur  ou  le  mal-. 

s 

Un  Agaàot.^  ne„jbtc,lui<m&De  s'Un'^ 
point  dans  retreur ,  qui .  craint  qae  toat>  ce 
^a'il'dit  nefyk  un  tifiii  «^ .  rêveries,  qoi  t  jQtt 

Partit  L  h 


ïiSl       T  R  Ô  TS't  Ê  M  E 

,  pWi^ht  cHkHgét-dè'lêntiinÉiis',  ft  dëfie  do 
îîëft'ÎJqlM-rtâ  prend  point  te  ton  aflfenatif  poiap 
^e'€2>i^i<».  m^S'fk^ttppàilèr  confiée  II'  pa^e, 
qui,  ne  voulianc  point  fair&'aqtorilé,  die  tou? 
j}ht^  Ces  kaÇôm  àfiS  qu'on  lè  juge ,  &  ^  me- 

tS&sv  #t  A\it?ei»c^':f  iile  iàdCt  kH  ^^cef  d« 
%if  (Ll^  ;piVi»Ù&^il^i^oncér^  ââ6:  dindts.? 
^eëtt'H  â'o^^^eé dS^^s-,  dt'ifSf  cetc&dir 
'<^ratibti<pi<ëS^iitâi^|]ë^ttiêt'^:^  BÔ  riloMbiC 

'ëii^éfterii^Wib'oMUiâite'  i<''d^âi«l9«I  ki  hw 
\Bëésf  rè'fSroit'%^éëâl^  Jdè  H»j(iftkie.-<iClè  ne 
-^i  pèiliPnié!»'4âéé  éfdeP^'  ciéffends^'  «^^rag 
perfonne.  Si  ron"n'W%fo^Ô\<|ult!'tWiii'lir 
^fés  i'-^j'àfeto©  ■déîkfeânfehti'gàril^Jte^fill^eî 
i^  ùif  ^iâ&^ld;-?De|MHlS:<rk:«htiM^ 


'«'»  '. 


1    ■• 


I 


^^'on^  ùi  ma  taifois- je  faute  ;d'iiggce^cirs?; 
Mài&  qoàncftoû  me:  poiirûiit^'  qoand  oatme  dé«I 
crête ,  quand  on  me  déshonore  pouf  avoir  die 
ceqiie  jenTai  pas  dît  >  il  faWt  bien  pouc  îne 
déCendse  iQÔutrcir  que  je.  nû  M  pas  dit.  Ce 
ibtic  ma  ennemis  qui  âuîlgrë  moi  me  remet* 
tent  lâ'plittfl^  à^Iii  maini  -  Eh  S  qolls  melaift 
fenr^^yç|)C«y'4&  ^;^ 'kjâk«d>  I4  'public  ;  j'ea 

Ged  f&r6di^  id$  liépcdifô'iîi  ^^^js^Ugn  rétt9r4 
five  que  j'ai  prévenue ,  de  vouloir  fair-^  moiit 
iHêpie  J6-i«ëfâénm0ur  étr  b^imnt  1tf$  opiaibns 
de  tout  mon  (lecle  ;  car '^ïiiËnÀ'ii  moins  fair  d<| 
bavadB''fçpf'u»P^eil'.Icui^é^^À:^  n'eU^pas 
afl(irëmeH('^'M«erk!Û  fb«  «iË''Ffb^hê£e--^^d9 

dé  éoâHaS^itf  iia^ôir  de  dBê^nknï-fôtôilieBt'  en 

« 

chofeg-importantcs  -&-  atîtes7  mais  -ai-je  dît  ua 
mot  y  ai-je  fait  un  pas  ponir  fô  iiire  adapta:  à 


\ 


Z(54         T  K.O  I  S  I  E  M  E 

d'autres  ;  quelqu'un  a-t*il  vu  dans  ma  conduite 
rà^  à'vLVL  homme  qui  cherchok  à  fe  &ure  des 
feûateuts?  .    ^ 

^.En  tranfcrîtant  rEcfît  partîailîer  qui  fait 
tàAt  d'impréyus  zélateurs  delà  foi,  j*avertis  en* 
core  le  lefletir  qii'irdQÎt  fe  défier  de  mes  juge- 
Hieûs,  que  e'eft  à'^ui  dé  voir  srîl  peut  tirer  de 
oet? Ecrit  qudqaesriiéâKtioiâ  utiles,  que  je  ne 
lui  prbpofe  ni  le  .&9(}ment  d^autrui  ni  le  mien 
JxMit  r^Ie  ,  [quç  ,Je  4e  lui  préfeute  à  exami- 
ner (f^-      '  »  '  ''^^. 

Et  lorfqtie  je  f  i^|!i$nds  b  parofe  l^oîd  ce  que 
fajoUt^  eûGorç'r^rk  fin.  -  -  ....ji)  ?  •.. 
::  .  j,  Paî  tçinfcrît  cet  Ecfît,  noftjÇçprte  une 
1^': régie  des  fentîm$nft'qu'Qp  d&jifofgivre  en  ma- 
,vtiff€ii%  Rdigîçnj-^i  comm^  W  .eK^DpIe 
^^^deja^raigni^^  dçnt  on  p&^tmÇoofi^t  avec 


. )  •      .  •  •    ' 

r 


LETTRE.  i6s> 

„  fbn  élere  pour  ne  point  s^écarter  de  ît  mé 
„  thode  que  j*ai  tâché  d'établir. ,  Tant  qu'on 
,9  ne  donne  rien  à  l'autorité  des  hommes  ni 
),  aux  préjugés  des  pays  où  l'on  ttt,  né,  les 
5,  feules.lumieres*  de  la  raifon  ne  peuvent  dans 
„  rin(titution  de  la  Nature  nous  mener  plu^ 
„  loin  que  la  Religion  naturelle ,  &  c'eft  à 
„  quoi  je  me  borne  avec  mon  Emile.    S'il  en 

r 

5,  doit  avoir  une  autre,  je  n'ai  plus  en  cela  le 

„  droit  d'être  fon  guide;  c'eft  à  lui  feul  de 

„  k  dioîGr.  Ou)  " 

». 

Quel  dk  après  cela  l'homme  affez  impudent 
pour  lu'ofer  taxer  d'avoir  nié  les  miracles  qui 
ne  font  pas  même  niés  dan^  cet  Ecrit  ?  Je 
n'^  ai  pas  parlé  ailleurs  (x). 

(v)  Ibid.  T.  IIL  p.  204. 

(x)  J'en  ai  parlé  depuis'  dans  ma  lettre  à  M. 
de  Beaumont  :  mais  outre  qu'on  n*a  rien  dit  fur 
cette  lettre  ,  ce  n'eft  pas  fur  ce  qu'elle  contient 
qu'on  peut  fonder  les  procédures  faites  avant  qu'el- 
le ait  paru. 

L3 


i66 


T  R  -0  I  S  r  E  M-X 


Quoi  !  parce  que  l'Auteur  d'un  Ecrit  publie 
par  un ,  autre  y  intràduit  un  raifonneur  qu'il 
défaprouye  (y) ,  &  qiri  dans  une  difputc  f-ejet^ 
te  les  miracles  9  il  s'enfuit  delà  que  non  feule^ 
ment  l'Auteur  de  ^  Ecrit  mais  l^fediteur  re- 
jette auffi  les  miracles?  Quel  tiffu  detémérî* 
tés  !  Qu'on  fe  jpermette  de  telles  .préfomptions 
dans  la  chaleur  d'une  querelle  littéraire ,  cela 
eft  très  blâmable  &  trop  commun  ;  mais  les 
prendre  pour  des  preuves  dans  les  Tribunaux  ! 
Voila  une  jurifpmdence  à  faire  trembler  l'hom- 
me le  plus  jufte  &  le  plus  ferme  qui  a  le  mal- 
heur de  vivre  fous  de  pareils  magîftrats. 

L'Auteur  de  k,profeffion  de  foi  fait  des  ob- 
jeftions  tant  fur  Tutilîté  que  fur  la  réalité  des 
miracles ,  mais  ces  objeftions  ne  font  point  des 

négations.  Voici  là  deflus  ce  qu'il  dit  de  plus 

. ., '. i , — 

'  (y)  Emile,  T.  HI.  p,  isu  • 


/ 


LETTRE.  iàf 

»  •        •  • 

Jbft.  „  Ceft  rôrdre  înajtérable  de  'la  nature  quî 

,y  montre  le  mieux  l'Etre  fuprême.  S*il  arrivbit 

I,  beaucoup  d'exceptions ,  je  ne  fauroîs  plus 

,,  qu'en  penfer ,  &  pour  moi  je  crois  trop  en 

^^  Dieu  pour  croire  à  tant  de  miracles  fi  pèû 

V  dignes  de  ^ui;  *^   *.      * 

Qr  je  vous'  prie  ^  qu'eft  •<:e  que  cela  dît  > 

(^une  trop  grande  multitude  de  mirâcks  Uà 

rendroît  fujpeâà  à  TAuteur.  '  Qu^t^'admec 

pomt  imiîftinéteÀient  toute  finte  'cfe  nuràdes^^ 

&  que  fa  foi  en  Dien  Ibi  fait  rejétter  tout 
,  .         •  ♦        . 

ceux  qui  ne  font  pà!s  dignes  «dé  Dieb,   Quoi 

donc?  Celui  qui  n^dmet  pa»  toui-lâ  mira^ 

»  • 

des  rejette-t-fl  tops  les  miracks,  &  faut-fl 
croire  à  tous  ceux  de  la  Légende,  pour  croira 
fafcenfîôn  de  Chrift  ? 

Pour  comble.  Lom  que  les  doutés  coiitefiiii 
^bns  cette  féconde  partie  de  la  profeffion'  d4 
(oi  puiflent  être  pris,  pour  des  n^ationt^^  kjk 

h  4 


■  Ml|«4tl«»'.  III 


x58        T    R    O    S    I    E  ;M.E 

ip^gatîons  y  au  coadaire ,  qa'elle  peut  cottte^ 
DÎT  9  ne  doivent  être  prifes  que  pour  des  don- 
tes.    Cefl:  la  déclaration  de  T  Auteur ,  en  la 

3  iîir  les  fentimens  yi'il  va  <:oin- 
làattre.  ,^Ne  àmnez  •  dît  -il ,  à  mes  dtfcmrs  que 
T  autorité  de  la  mfon.  Jlignùre  Ji  je  fuis  dans 
terreur.  ^  Il  efi'djjSvik  ^  quand  m  difcute  de  ne 
p{fs  prendre  que^rfois  le  ton  affirmatif;  tnaif 
JbwoeneZ'^voxs  qu^i  t  mît  s:  mes  aMrmatims  ne 
font  querdes  raifims  de  douter  Cz\  Feut-on  par« 

:  QuaQt  à  moi, -je  vois  des  faits  attelles  dan^ 
jfi$  £ûim  £gritwe&  ;  ceb  faffit  poop:  atréter 
(fur  ce  point  mon  jugement*  iS'ils  étoientâl- 

«Içurs^  îçr  ^j^^Ç^^?^  ÇÇ^^fj^^^  ^  j^  J^  ôteroi^ 
le  nom  de  miracles  ;  «  mais'  parce  qu'ils,  fooc 
^dans  rScricure  je  ne  les  ;  rejette  point.   .Je  ne 


*       4    •  A 


'*■  If    .^  ♦  I      *  '   '    "JI  8J  H    ■        ■>  ■      P' 


(«)  Eoûïc  T.  Iil..p.  J31.  ^ 


LETTRE.  169 

les  admets  pas,  non  plus,  parce  que  ma  rai&n 
s'y  refufe,  &  que  ma  décifion  fur  cet  article 
n'intéreiTe  point  mon  falut.  Nul  Chrétien  judî- 
deux  ne  peut  croire  que  tout  Toit  infpiré  dans 
la  Bible,  jufqu'aux  mots  &  aux  erreurs.^  Ce 
qu'on  doit  croire  infpiré  eft  tout  ce  qui  tient 
à  nos  devoirs;  car  pourquoi  Dieu  auroit-il 
inipiré  Iç  refte  ?  Or  la  db6b:ine  des  miracles 
n'y  tient  nullement;  c'efl:  ce  que  je  viens  de 
prouver.  Ainfi  le  fentiment  qu'on  peut  avoir 
en  cela  n'a  nul  trait  au  refpeâ  qu'on  doit  aux 

V 

Livres  facrés* 

D'ailleurs,  il  efl:  impoflible  aux  hommes  de 
s'afîurer  que  quelque  fait  que  ce  puiiTe  être  eft 
un  miracle  {ad)  ;  c'efl  encore  ce  que  j'^i  prou- 

(a«)  Si  ces  Meffieurs  difent  que  cela  efl:  décidé 
dans  rEcrîture,  &  que  je  dois  reconnoitre  pour  mi- 
racle ce  qu'elle  me  donne  pour  tel  ;  je  réponds  que 
c'efl;  ce  <iui  efl:  en  qucftion ,  &  j'ajoute  que  ce  rai- 
fonaemeut  de  leur  part  efl:  un  cercle  vicieux.  Cor 

L5 


^iTo         T  R  O  I  S  I  Ë  ÎSI  R 

^vé.  Donc-en  aiâméttaht  {(H»s^lès  «'^foits  comemis 
^ans  la  ïible,  on  peut  réjetter  les* miracles 
fans  impiété  ^  &  même,fras'inê(m(ëquence.  Je 
n*ai  pas.  été  jafques  là. 

Voila  comment   vos  Moeurs  tirent  des 

miracles ,  qui  ne  font  pas  certains ,  qui  ne^font 

-pas  néceffaires,  qui  ne. prouvant  rien,  &  ^ue 

^ je  n'ai  pas  rejettes ,  la  preuve  évîdeme  -que  je 

^  renverfe  te  fondcmens  du  Qiriftîanîfmé , .  & 

que  je  ne  fuis  pas  Chrétien. 

L'ennui  vous  empêdieroit  de  me  feivre  u 

V. 

j'entrois  dans  le  même  détail  fur  les  -autr^  ac- 
♦  <  •  ,  é~      . 

cufations  qu'ils  entaflènt,  pour  tâcher  de  cou- 
vrir par  4e  nombre  rinjuftîce  de  ch:icune  en 
particulier.  Ils  m'accufent  par  ..exemple  ^de  re- 
jetter  la  prière.  Voyez  le  Livre,  &  vous  trou- 

■  K        |i       ■    I""      -     ipi     I p ■  ■  k  ..    ...^ 

puifqu'ils  veulent  que  le  mîracîe  ferve  de  preuve  â 
la  Révélation,  ils  ne  doivent  pas  employer  Tauco- 
rïté*  de  la  Révélation  pour  conftater  le  miracle. 


L    E    T    T   «R  '^^.- 


verez  une  .prière  dans  Tendroic  même  dont  il 
s'agit.  L'homme  pieux  qui  parle  (bb)  ne  croit 
pas,  il  eft  vrai,,  qu'il  foit  abfolument  néceflàî- 
re  de  demander  à  Dieu  telle]  ou  telle  chofe  en 

particulier  Çcc).  Il  ne  delaprouve  point  qu'on 

^  < 

■■'         '  ■  ■       ■  ... i.i    ,     ,  ,.,      ,  ■ .. 

(pli)  Un  Miftîftre'de  G6nè\re,'dîffîdieafntrément 
en  Chrifliîanirme  dans  les  jugenrens  qu*U  porte  da 
mien,  affirme  que  j'ai  dit,  moi  J.  J,  Roufleau,  que 
je  ne  priols^ûs  Dieu  :  Il  raOfbre-^n-'tb^t  autant  .de 
termes,  cinq  ou  fîx  fois  de  fuita,  &  toujours  en  me 
fiômmant.  Je  veux  porter  /efpéa  à  TEglife,  mais 
oferbis-je  lui.Kl^^nder  oii'>*aî  ditc«Ia?>  11  eft  per« 
mis  â  tout  barbouilleur  de  papier  de  déraifonner  & 
bavarder  tant  qii^bveut;  mais  il  n^èftpas  permis  i 
un  bon  Chrétien  d*être  un  calomniateur  public. 

(ce)  Quani  vous  prierez  dit  Jéfus,  priez  ainfi. 
Quand  on  pticavcc  des  paroles ,  c'eft  bien  fait  de 
préférer  celles-là;  mais  je  ne  vois  point  ici  Tordre 
de  prier  avec  des  paroles.  Une  autre  prière  cft  pré- 
férable ;  c'eft"  d'être  diXpofé  à  toet  ce  qwe  Dieu  veut. 
Me  ^oicif  SfigneUr^,  p9ur  faire  $a  vehnlé.  De  toutes 
les  formules,  TOraifon  dominicale  eft,  fans  con- 
(redît,  la  plus  parfofte;  mais  ce  qui  eft.  plus  parfait; 
encore  eft  l'entière  téfîgnation  aux  volontés  de  Dîeu« 
Non  p^int  -ce  que  Je  veux ,  mais  ce  que  iu  veux,  Qik^, 
dis-je  ?  C*eft  rOraifon  dominicale  elle  même«    EUfi 


17»        T  R  O  I  S  I  E  RIE 

le  fyffe  ;  quant  à  moi,  dit-il ,  je  ne  le  fais  pas , 
perfuadé  que  Dieu  eft  un  bon  père  qui  lait 
mieux  que  Tes  enfans  ce  qui  leur  convient. 
Mais  ne  peut-on  lui  rendre  aucun  autre  culte 
auflî  digne  de  lui?  Les  hommages  d'un  cœur 
plein  de  zele,  les  adorations,  les  louanges,  la 
contemplation  de  fa  grandeur,  Taveu  de  no- 
tre  néant,  la  réfignation  à  &  volonté,  la  fou^ 
mîflion  à  fes  loix  ,  une  vie  pure  &  fainte, 
tout  cela  ne  vaut-il  pas  bien  des  vœux  intéref- 
fés  &  mercenaires  ?  Près  d'un  Dieu  jolie  la 
meilleure  manière  de  demander  eft:  de  mériter 
d'obtenir.  Les  Anges  qui  le  louent  autour  de 


eft  toute  entière  dans  ces  paroles  ;  Que  ta  volonti 
fiît  faite.  Toute  autre  prière  eft  fuperflue  &  ne  fait 
que  contrarier  x:eUe-li.  Que  celui  qui  penfe  ainfî 
fe  trompe,  cela  peut  être.  Mais  celui  qui  publi- 
quement Taccufe  à  caufe  de  cela  de  détruire  la  mo- 
rale Chrétienne  &  de  n'être  pas  Chrétien,  eft-il  un 
fort  bon  Chrétien  lui-même? 


:u  ir.  T  ;t  r  z. 


«73 


Con  Trône  leprient^ils?  Qu'aurôient-ilf  à  lui 
demander ?,Gb  mot  d^  prière  eÀ  iouvent  em« 
ployé  dans  TEçriturè  pour  bmmage^  adoration^ 
&  qui  fak  le  |dus  eft  quite  du  mom    Pour 
moi  3  je  né  rejette  aocune  des;  manières  d'ho-  ; 
nôrer  Dieu  ;  j'sû  toujours  aj^ouvé  qu'on  fer 
joignît  à  FE^ffiqui  le  prie;  je  le^fàîs;  le* 
Prêtre  Sàvoyara.le'feifôît  iuwnême  (dd).  L'E-  : 
ait  fi  i  videmtnent.  attaijué  eQ;  plein  de  tout 
cela.  ISTimporûs:  je  rejette^ 'dit*on  9  lafirierej' 
je  fuis  !  un  Ippk  à  btûler^  r  ;  JMfe  xèiia .  jugé,    «c 
Us  difent  encolle  :  que  j!accu(&  Ja  mordie  : 
Chrétienne  de  rendre  tous  lios.  deroirS'  im-: 
praticables  en  les.  outrant.    La: morale  .Cht^^r 
dcnueyeû!  ceBe  4*  f Evàngife;  je  n*en  recoïi^r 
hois  point;  ^atot  ^  &  c'eft?  en^cce:  fen^  auffi.^ 
que  r^editendinioaMiSulateui^  i|>uiiqoe  c'éft  des. 


>« 


{ii)  £mi}e. g^rgif^p.  iS^, 


. j:  j  '  ■" 


\ 


qu'il,  concludr^  ^aelquâs^  lignes;  aptâ^/^gaè.c'cft; 

pla^r6o0»/&'3n(œb:eii;ino6  mai^rai&t  fo(  plofti 

iQârqu^ey  puifqv^  daaa  l^'^P^^^i^  ^eiHCanJji- 
vxè  ojI  ceci  i^ra^o;te[  ilufJeft^sIihâmeîi^^ 
filil^.  qui('j!%eriixnddupatfôi?denfi^^       /;  *  1  /{ 

9ûSm)ikvfiSrsL^:iOXir4bair]pithLamirl2qg^         ce 
M:^iiiepocrBi6i&rte  rendrô  : ^iigvëabib  aax:hbm^ 
>,'j»Ëd.  .JaomlifiScoiinaDlidâacacîtorBitër^tfi^^ 

^r^s'i^sr  fonDqpeiP  tébtés  JâfeviMSEsf  ilflio^at:<fl: 


■*i*fcii^fcaj»a.A.jftg  iii  nrrr^fcty 


(jse)  Letcreg  écrites  ^^i^  jÇadJjjpa^&iûiX  ^wS } 


\ 


Xi  -  BTv  T  1  T    H.  JE  .♦'        "^75 

,;  .voirs  v^.  ChiiSiaiiîGnè  les  rendJioçratica^ 
„  blés  ârv&îofc:  £  fionre  dfincerdim  aux  fem-. 
,^  rsÊSB  Is'.chaiit  %di(nfe  &  tou&ks  ^o^mens 
„'  éi  monde,  iiJffirsndmaui&desvgrondeai' 
^/ ftiP,^upp60Qdb]ês^dânsr.kbi9^^ 

&niLaierte  dkntf  i&'4adanfe'^oàjâfb«ce  qu'il 
les  affetvî&àuoJQ  tiiilfassûlévaSrs;?:  Tout  âd  codi* 
traire  ily'd!b,pulléîdesî'd6iyôi»'d  narhr^maiii 
ïrnlyc^'pQScdidâiattnyc^de  œdi  desi^emnidiL 
Qonc  uns  ai  tqnr  de  me.  faice'^dkê  ideLrEvangtt* 
k^  que  je  n'ai  dit  que  des  Janfenî^es,  des 
Mcthodiftes,  &  d-'autres- dévots  d'aujourd'hui, 
qui  font  do  CJirïftèitiifine  une  ICtlMe^n  auffi 
terrible  &  dépl^ifaafte,  {ff)  qu'ell^^ft  ^^griéabk 

^j_ijlL  ■       li       I  I        ~    ~1 — ..-J--^    -f>.  ■  ■- ^J_I_.^    ■  .._^^â  ■■  ■    ■    -  ^        ^ ^ 

(Jf).L6s  pèértiièîS  Ueformc^é  «ïtinh'érent  i^abçiri 
dûfjs'cet  êxtès'âvèc'ûné'dureté^qtft  fîc'blfc'd^^  hy^ 
pocrftes,  S  lès  premiers  Janfeniftes  île  riïanq&eifent 
pas/dtc/les  imitér^'^eh  cela.  Un'  prédicacèu'ï  de  Gé- 
néré', "appelle  Étettri  *de''la  ijjirre  ,  feutenoit  ca 


iy6       T.R  O  I  S   I  E  M  E\ 

&  douce  Tous  la  viérîcable  loi:de  Jéfus-Cfariil 

» 

-  Je  nevoudrois  pas  prendre  le  ton  du  Fere 
Bemiyer  ^  que  je  n'aime  guère ,  &  que  je 
trouve  même  de  très  mauvais  goût;  mais  je 
ne  puis  m'empêcher  de  dite  qa-une  des  dioles 
qui  me  charment  dans  le  caraftere  de  J^us, 
n*eft  pas  feulement  la  douceur,  des  moeua»  Is 
fimplidcé,  .niais  la  fadfité'la  gtace  &  même 
fék^atice:  H  ne  fuyoit  ni  les  plaifîrs  ni  les 
jfêtes ,  il  alloit  aux  noces ,  il  voyoit  lesièm- 
iioes,  il  jouoit  avec  les  enfans»  il  aimoit  les 
•  par- 


•        # 


t^i^^^mmiammmmmamÊmmm^i 


chaire  qlie  c^étott  pécher  que  d'aller  à  la  noce  plus 
joyeufement  que  Jéfus  -  Chrift  n'étoit  allé  à  U 
mort.  Un  curé  Janfenifte  roatenoîc  de  même  que 
les  feftins  des  noces  étoîenc  une  Jnvehcion  du  Dia- 
ble. Quelqu'un  lui  objecta  li-deflus  que  Jéfus-Cbrift 
y  avoîc  .pourtant  aiCfté,  &  qu'il  avoit  même  daî- 
^é  y  faire  .fon  premier  miracle  pour  prolonger  la 
jgaité  du  feftin.  Le  Curé ,  un  peu  embarraffé ,  ré- 
pon(^it  en  grondant  :  O  n*ejl  jox  cg  fiilfi^  dtmiiux. 


& 


LETTRE.  177 

parfums,  il  mangeoic  chez  les  financiçrs.  Ses 
difciples  ne  jeunoienc  point  j  fon  •  auftérîté 
fi'étoic  point  facheufe. .  Il  étoît  à  la  fois  indul« 
gèi^.&  jade ,  doux  aux  foibles  &  terrible  aux 
ft^çtiaos.  Sa  fnorale  avoit  quelque  choie  d'at- 
trayant; de  careflant'^  de  tendre;  il  avoit  le 
çœùtfeo/lUe,  il  était  faosmne  de  bonne  ibcié* 
té.  Quand  il  n'eut  pas  été  le  plus  fage  des 
mortels,  il  en  eut  étielç  plus  aimable. 

Certains  pafTages  de  Saint  Paul  outils  ou 
mal  entendus  ont  fait  bien  des  fanatiques ,  & 
^  ces  fanatiques  ont^fouvent  4éfiguré  &  desho- 
noté  le  Chriftianirme.  Si  Ton  s'en  fut  tenu  k 
fefprit  du  Maître ,  cela  ne  feroit  pas  arrivé. 
Qu'on  m'accuie  de  n'être  pas  toujours  de  l'avis 
de  Saint  Paul ,  on  peut  me  réduire  à  prouver 
que  j'ai  quelquefois  raifon  de  n'en  pas  être* 
Mais  il  ne  s'enfuivra  jamais  de -là  que  ce  foie 
par  dérifion  que  je  trouve  l'Evangile,  divio» 

Pmk  I.  M 


178       T  R  O  I  S  I  E  ME 


Voila  pourtant  comment  raifomient  mes  per^ 

.  Pardon,  MonGeur;  je  vous  excède  av^  est 
longs  dâails  ;  je  le  fens  &  je  les  termine;  je 
tùm  ai  d^  que  trop  dit  poar  ma  défede,  âc; 
je  m'ennaye  moi*même  de  répondre  toujoiffs 
par  des  raifbns  à  des  accostions  ûas  raifaa 


Lettre.       179 


QUATRIEME   LETTRE. 


J 


È  VOUS  ai  fsit  voir ,  Monfieur ,  que  les  îm* 

» 

putadon^  tirées  de  mes  Livre!  en  preuve  que 
j'attaquais  h  Religion  écat^ié  par  les  hix  é« 
toienc  fauiTes.  Ceft ,  cependant  >  fur  ces  impu^ 
laûatis  qilê  j*^  été  jugé  coupable ,  &  traité 
cèmtne  té.-  Suppdfons  maintenant  que  je  !e 
fuife  en  çffçt,  ôc  vopns  en  œtétat  la  pont; 
tion  qiiî  m'étoît  due. 

Ainfi  que  la  vertu  le  vice  a  fes  degrés» 

Pour  être  coupable  d*un  <rime  on  ne  Teft 
pas  de  tous.  La'  jultîce  confiée  i,  mefurer  ex^ 
aâement  la  peine  à  la  faotp ,  &  Pexôéme  jufl 
tice  eOe-méme  eft  une  injure ,  lorfqu'eBe  n'a 
fini  égard  aux  oonfidératibns  raîibnnables  qui 
tbivent  senrpéter  la  rigueur  dfe  la  loi 

Le  délit  fuppofé  réel,  il  nous  refb  à  chef» 

M  2 


•  • 


i8o        Q  U  A  T  k  I  E  M  E 

cher  quelle  efl:  ià  nature  &  quelle  procédure 
eft  prefcritte  en  pareil  cas  par  vos  loix. 

Si  j'ai  violé  mon  ferment  de  Bourgeois, 
copime  on. m'en  accufe,  j'ai  commis  un  crinie 
d/Ëtat-)  &  la  cofîndflànce:  de  ce  cria^  ap- 
I^r|ient  4îre^€nient  au  Coafeil  ;  .cela  jeft  in- 
contefbye,:;      :  .  ;j  .:,;". .  » 

l  :  Mais;, fi ,  tout;,  .moja  crime  coûfllle  en^ erreuï 
fur  la  ^Q^fiDi?,  cette  erreur.futrçUeinême  unç^ 
impiété;  ç'^  autre  chofe.  ^  Selon. vos  Editsil 
appartient  à  un  autre  Tribimal^d'en' connoîcre 
en  pr(a;nier*;reflr(yt.     ^  ;  . 

'  Et  qu5a?d  même  mon  aime.feroît  un  crime 
d'^tat,,fi.ppiir  Je  décider  tel  iljatjt.pféalîible- 
î^ept.,4iB^,.^4ci§pn  fur  ^  .àpQ^^  ,  ce  n'eft 

V.  1 

jw^sa»  Çqçfeil  d^.la^doôperj  Çjçft  bien  à  lui 
de^punir  le  crime.,  mais  npupas^de  le.  copfta-* 
ter.  Cela  eft-  fiopuel  par  vos  %^ ,  W^^^ 
jQous  verrons  .çi  -  après.       :     .,  ,:  • 


L    É    T    T    R    E.;.  i8i 

Jl  s*agit  d*abora  'de  favôiî*  lî  j-aî' Violé  mort 
ferment  de  Bourgeois,  c^ell-à'dire,  le  ferment 
qtfont  prêté  mes  ancêtres^  quand  ils  ont  été 
admis  à  la  Bourgeolfie  :  car  pour  moi ,  n'ayant 
pas  habité  la  Ville  &  n'ayant  fait  aucune  fonc- 
tion de  Citoyen ,  je  n'en  ai  point  pr^té  le  fer- 
Rient;  mais  pafîbns. 

Dans  la  formule  de  ce  ferment,  il  n'y^a  que 
deux  articles  qui  puifferit  regarder  mon  délit: 
On  promet  par  le  premier,  de -vivre  félon  h 
déformation  du$t.  EvaAgile;  &'par  le  dernier, 
de  ne  faire  ne  fouffrïr  aucunes  pratiques  machin 
nations  on  entreprifes  contre  la  Réformation  du 
St.  Evangile.  - 

Or  loin  d-enfreîndre  le  premier  article ,  je  m'y 
fuis  conformé  avec  une  fidélité  &  même  une 
hardiefle  qui  ont  peu  'd'exemples,  proféflant 
hautement -ma  Religion  chez  les  Catholiques , 
quoique  j'euilë  autrefois  vécu  dans  la  leur  ;  & 

M  3 


1 


m       Q^  A  T  R  I  E  M  E 

l'on  ne  peut  alléguer  c^  écart  de  mon  enfance 
comme  une  iofraâion  au  ferment,  furtout  de- 
puis ma  réunion  authentique  à  votre  Eglife  en 
1754.  &  mon  rétablifTement  dans  mes  droits 
de  Bourgeoifie ,  notoire  à  tout  Genève ,  & 
dont  j'ai  d  ailleurs  des  preuves  pofitives. 

On  ne  fauroit  dire ,  non  plus ,  que  f  aye  en^ 
Jreint  ce  premiar  artide  par  les  Livres  condan- 
ses  ;  puiique  je  n*ai  point  ceflTé  dé  m'y  déda* 
rer  Protdlant.  D'ailleurs ,  autre  chofe  eft  la 
conduite,  autre  chofe  font  le^  Ecrits.  Vivre 
félon  la  Réformaticm  c'efl:  profeiTer  la  Réfor- 
mation ,  quoiqu'on  fe  puiiTe  écarter  par  erreur 
deia  doélrine  dans  de  blâmables  Ecrits,  ou 
commettre  d'autres  péchés  qui  offenfent  Dieu  „ 
mais  qui  par  le  feul  fait  lie  retranchent  pas  le 
délinquant  de  FEglifè*  Cette^dilHnâion ,  quand 
on  pourroit  la  dilputer  en  général  y,  efl:  ici  dan& 
le  ferment  même  i  puifqu  on  y  fépare  en  deux 


LETTRE.  183 

irddes  ce  qui  n'en  pourroîc  faire  qu'un ,  fî  la 
profeflion  de  la  Religion  étoit  incompatible  ii* 
vec  toute  entreprife  contre  la  Religion.  On  y 
jure  par  le  premier  de  vivre  félon  la  Réforma- 
tion ,  &  Ton  y  jure  par  le  dernier  de  ne  rien 
entreprendre  contre  la  Réformatjpn.  Ces  deux 
artides  font  très  diflin£ls  &  même  fôparés  piur 
beaucoup  d'autres.  Dans  le  fens  du  Légiflateur 
ces  deux  chofes  font  done  féparables.  Donc 
quand  j'aurois  violé  ce  dernier  article  y  il  ne 
s'enfuît  pas  que  j'aye  violé  le  premier. 

Mais  ai*  je  violé  ce  dernier  article? 

Voici  comment  FÂuteur  des  Lettres  écrî* 
tes  de  la  Can^agne  établit  l'affirmative  »  pa* 

ge  30. 

,)  Le  ferment  des  Bourgeois  leur  impofe  Fo* 
5,  bUgation  de  ne  faire  ne  fouffrir  être  faites 
,,  aucunes  pratiques  machinations  ou  entreprifes 
„  cotitre  la  Sainte  Réformation  Evangiïique.  U 

M4 


i84       QUATRIEME 

,,  fenabte  que  c*eft  un  pra  (a)  pratiquer  &  ina- 
.„  chiner  contre  elle  que  de  chercher  à  prou- 
,,  ver  dans  deux  Livres  fi.  féduiian^  que  le  pur 
„  Evangile  eft  abfurde  en  lui-même  &  pemi- 
,,  cieux  à  la  fociété.  Le  Confeil  étoît  donc 
,,  obligé  de  jetter  un  regard  fur  celui  que  tant 
,,  à^  préfomptions  fi  véhémentes  acçafoieat 
„  de  cette  entreprife," 
.  Voyez  d'abord  que  ces  Meffieurs  font  agré- 
ables! Il  leur  lemble  entrevoir  de  loin  un  peu 
de  pratique  &  de  machination.  Sur  ce  petit 
femblant  éloigné  d\me  petite  manœuvre,  ils 
jettent  un  regard  far  celui  qu'ils  en  préfunaent 
l'Auteur;  &  ce  regard  efl;  un  décret  de  prife 
de  corps. 


(a)  Cet  un  peu^  fi  plaifant  &  fi  différent  du  ton 

grave    fit  décent  du  relie  des  Lettres  ,    ayant  été 

retrancha  dans  la  féconde  édition  ,   je  na'abftien» 

d'aller  en  quiîte  de  la  griffe  à  qui  ce  petit  bout, 

'    bon, d'or eiile,  lirais  d'ongle  appartient. 


'    L    E   .T    T    R    E.  185 

n  eft  vrai  que  ïe  même  'Auteur  s*égaye  à 
prouver  enfiiite  que  c'éft  par  pure  bonté  pour 
moi.  qu'ils  m'ont  décrété.  Le  Confeil^  dit-îl, 
pùuvoif  ajourner  perfonnellement  M.  RouJJeau ,  il 

pmmx  TaJJigner  pour  être  ouï ,  il  pouvoit  le  dé- 

« 

çréter De  ces  trois  partis  le  dernier  et  oit  îji- 

comparablement  le  plus  doux ce  ffitoît  au 

fond  qu'un  avertiffement  de  ne  pas  revenir ,  s'il 
ne  vouloit  pas  s*expofer  à  une  procédure ,  ou  s'il 
voubit  s'y .  expofer  de  bien  préparer  /es  défen- 

Âinfi  plaiiàntoit,  dit  &antome,  ^exécuteur 
de  IMortuné  Dom  Carlos  Infant  d'Ëfpagne. 
Comme  le  Prince  crioit  &  vouloit  fe  débattre  ^ 
Paix^  Monfeigneurj  lui  dilbit^il  enTetranglant, 
tout  ce  qu'on  en  fait  n'eji  que  pour  votrt  bien^ 

Mais  quelles  font  donc  ces  pratiques  &  ipa* 

(*)  Page  31. 

M  5 


IM        QUATRIEME 

chinadons  dont  on  m'acciîfe?'  Pratiquer  ;  û 
j'entends  ma  langue,  c'éftfe  ménager  des'in<r 
teîligences  fecrettes  j  machiner  ,  c^eft  faire  de 
fourdes  menées  y  c*eÀ:  faire  ce  que  certaines 
gens  font  contre  le  Chiiftîanîfme  &  contre 
moi.  Maïs  je  ne  conçois  rien  de  moins  fecret, 
rien  de  moins  caché  dans  le  monde  ,  que  de 
publid*  un  Livre  &  d*y  -mettre  fbn  nom. 
Quand  j'ai  dit  mon  fentiment  fur  quelque  ma- 
tière que  ce  fut ,  je  Fai  dît  hautement ,  à  la  fa- 
ce  du  public ,  je  me  fuis  nommé  y  &  puis  je 
Au*s  demeuré,  tranquille  dans  ma  retraite  :  on 
me  perfuadera  difficilement  que  cela  reflembie 
à  des  pratiques  &,  machinations. 

Pour  bien  entendre  refprit  du  ferment  &  le 
fens  des  termes  ^  il  faut  fe  tranfporter  au  tems 
où  la  formule  en  fut  d!<eflrée  &  où  il  s*agifîbît 
eflencidlement  pour  l'Etat  de  ne  pas  retomber 
fous  le  double  joug  qu'on  venoic  de  fecouer.^ 


LETTRE. 


187 


Tous  ks  jours  pn  découvrok  quelque  nouvel» 
k  crame  en  faveur  de  la  mdfon  de  Savoye  ou 
des  Evêques ,  fous  préteste  de  Religion.  Voila  ' 
for  quoi  tcnnbent  dairement  les  mots  de  pra-' 
ûq/ies  &  de  macbÎHations y  qui^  depuis  que  la 
langue  Françoife  exiile  n'ont  Airement  jamais 
été  employés  pour  les  ientimens  génàraux 
qu'un  homme  publie  dans  on  Livre  où  il  ie 
nomme  -,  fans  projet  fans  objet  ans  vue  parti* 
culiere^  &  fans  trait  à  aticun  Gouvernement. 
Cette  àccu&tion  paroit  fi  peu  férieufe  k  F Au« 
teurmême  qui  Toiè  faire,  qu'il  me  reconnoit 
fiâelk  aux  devoirs  du  CHtyyen  (c).  Qr  comment 
poonrois-je  l'être ,  fi  j'avais  enfreint  mon  fer- 
ment de  Bourgeois  ? 

H  n'efl  donc  pas  vrai  que  f aye  enfreint  ce 
ferment.  J'ajoute  que  quand  cela  feroit  vrai  » 


(f)  Pi«c  8. 


tn 


QiU  A  T  R  I  £  M  E 


■rien  ne  feroit  plus  inouï  danfr  Genève  en  cho- 
ies àe  cette  éfpecê,  que  la  procédure  faite  con- 
;  trè  moi.  Il  n*y  *a  peut  -  être  pas  de  Bourgeois 
qui  n'enfreigne  ce  ferment  en  quelque  article 
.(d)y{ms  qu'on  s'avife  pour  cela  de  lui  cher- 
cher .  querelle ,  &  bien  moins  de  le  décréter. 
:  On  ne  peut  pas:ïEre ,  non  plus  ^que  j'attaque 
la  morale  /dans  on ,  ^Livre  où  j  étab&  Àe  -tout 
mon  pouvoir  la  préféretice  du  bien  général  fur 
le  bien  particulier»  &  pu  je  rapporte  hos  de- 
voirs envers  les  hommes  à  nos  dévoi/s  enver; 
Dieu  ;  feul  principe  fur  lequel  la  morale  puifFe 
être  fondée ,  pour  être  réelle  &  paîTer  l'appa- 
rence. On  ne  peut  pas  dire  que  ce  Livre  tende 
en  aucune  forte  à  troubler  le  culte  établi  tii 
Tordre  public ,  pûîfqu'au'  contraire  J'y  infifte  fur 


(rf)  Par  exemple,  de  ne  point  fortir  de  la  Ville 
pour  aller  habiter  ailleurs  fans  peraiiffion.  Qui  eft- 
ce  qui  demande  cette  permiillon  ? 


;.    !t    JE    T    T    R    fi.  189 

le  refpef):  >;  qo^on  doû.  aius  iopœs  établies ,  ;  fur 
robéiflàncecaux  loix  en  tonte  cfaoiè,  njiême  en 
matière  de  Religioa ,  &  pui^ue  c'efl  de  cette 
obéîfpMfÇg,  «^itte ,  gu>n  Prêtre  de  Gçnève 

m'a  k  plp^  ja^gpeqiept  repris.    ,-  . 

•      * 

,  Cp  (]Qi^  fi  terrible  &  dont  on  fait  tant  dç 
bruit  re.:i:é.4ui|:  donc ,  en,  l'admettant  pour 
répi ,  à  .guel(^  erreur  fur  la  foi  qi^  ,  fi  elle 
D'ed  .avantagâilè  à  la.^ibciét^  ,  l^i  efl:  du 
moins  très  indifférente  ;  le  plus  grand  irai  qu) 
en  r^ltç  é(ant  la  toléfs^ce  .pour  les  ienDimçns 
d'autrui.  par.  conféquent  kpaû  dans  r£tati& 

dans  le  monde  fur  les  matières  de  Relîgîoiu; 

' .  ... 

Mais,  je  vous  demandç.,  à  vous,  JVIonfieur^ 
.  qui  connoiflêz  votre  Gpuverpement  6c  vos 
loix,  ^à  qvii.  il  appartient  de  juger,  &  furtouç 
en  premiei:e  ii^flan^ce  ^^  à^%  erreurs  fur  la  foi  que 
peut  commettre  un  paiijcieulier  ?  Efl:  •  ce  au 
Coûfeil  r  efl^ce.au  Confifloire?  Voila  Iç  nçein4 

I  •  » 

de  la  queflioOt 


ipd       qV  A  t  R  î  È  M  Ë 

U  falloic  d'abord  réduire  le  délit  à  fon  efpe* 
te.  A  prient  qu'elle  eft  connue  ^  il  faut  com« 
para*  la  procédure  à  la  Loi, 
'    Vos  Edits  ne  fixent  pas  la  peifie  due  à  celui 
qui  erre  en  matière  dé  foi  &  <Juî  publie  fon 
ttreau  Mais  par  PArticle  88  dé  l^Ordonnance 
ècetéfiaftique)  tu  Chapitre  du  Coinfitoire ,  Ib 
ïeglent  rOrdre  de  k  procédure  cbntïè  celui 
qui  dogmâtife.  Cet  Anacle  eft  couché  en  ces 
teftncî."  "'  '^^   •  '^    •  —  '       "  '    '■"'.'    ' 

^il  y  a  quelqi^ûn  qUÎ  dt^àatijicààtre  la  dèc^ 
nîrie  reçue  j  qi/{I'jhii  Jfpéilé  pou?  cùftférér  aveâ 

hn:  sHlfe  r0ige^  qu'on  le  fupforte  Juns  fiandak 

.     •*  .■  .    . 

nt  diffame:  %^ît  eft  opmâtre\  qu*on  Tàdmonefie 
far  quelques  fois  pour  ejjayer  à  k  réduire.  Si  on 
voii  enfin  qdïïjoii  befoin  de  plus  grande  févéri* 
iéj  qu'on  lui  interdtfè  la  Sainte  Céne<^  &  qu'on 
en  axjtrlîjje  le  Magiftrat  afin  d*y  pourvoir. 
^  On  voit  par  là;  Iq.  Que  la  première  inqui- 


L    È   1*    T    R   E.         ipj 

fition  de  cette  eipece  de  délit  appartient  au 
CoDâftoiie. 

20.  Qoe  le  Légfflaceur  n'entend  point  qu'un 
td  délit  (bit  îrrémifiible  ^  fi  celui  qui  Fa  com* 
mis  fe  Tepent'&  fe  rangâ. 

3^  Qu'il  prefcrit  les  voyes  qu'on  doit  fuîvre 
jHxir  ramener  le  coupable  à  fon  devoir. 

4^  Que  ces  voyes  font  pleine»  de  doucœf 
d'égards  de  commifération  ;  tdies  qu^I  con* 
vknt  à  dei  Chrétiens  d'en  ufer ,  à  rexempici 
de  leur  makre ,  dans  les  (kutes  qui  ne  troublent 
point  la  fociété  civile  &  n'intérefient  que  la 
Refigioa 

5«.  Qu'enfin  la  tiemîere  &  pltls^  grande  peî* 
ne  qu'il  prefcrit  eft  tirée  de  la  nature  du  délit, 
comme  cela  devrait  toujours  être,  en  privant 
le  coupable  de  là  Sainte  Cène  &  de  là  coni« 

m 

munion  de  l'Eglife,  qdH  a  offenfée,  &  qu'ij 
reut  continuer  d'offenfer. 


19»        Q.  U   A  T  R  I  .E  M  E 

Aprè|:tout  cela  le  Confiftpirele  ^énonpe  au 
Magiftrat  qui  doit  alors  y  pourvoir;,  parte ^e 
la  Loi  ne  foufirant  dans  i'Etat  qu'une  feule 
Religion ,  celiH  qui  s  pbftiî^  à  voufoir  en  pfô-t 

fefler  &  enfeigner  une  aiitre^,  doit  ètt^  tp^ 

■» 

tranché  de  l'Etat.       ^     '  :  -'^   ■ 

On  voit  ^application  -  de  toqt^s  les  Jjaf  ses 
de. cette  I>oi  dans  la^fonne.de  procédure- i^i- 
vie  en- 1563  contre  Jean  MprelJî..  '  :  :  .  ;  ; 
Jean  MprelU  habitant  4e  Genève  av0itr|»| 
&  publié  un  *  Livre  dans^  lequel  il  attaquoif  k 
oîfcipline^^  eccléfiaftique  &;  gui  fat  cenfurg  'm 
Synode  d'Orléans.  L'Auteur  ,  fe  plaignaiji 
.  Ijeaucoup  de  cette  ceniure '&  ayant  été^^  pour 
ce  même  Livre  appelle  au  Confiftoire  de  Ge- 
aève  ^  n'y  voulut  point  coipparoitre  &  s'en- 
fait  j  puis  étant  revenu  avec  la  permiffion.  du 
^agiftrat  .pourfe  réconcilier  avec  les  Minif- 
tres  il  ne  tint  compte  -de-leui  parler  ni  de  fe 

rendre 


LETTRE.  195 

tencte  au  ConQfloîre ,  julqu'à  ce  qu'y  étant 
cité  de  nouveau  il  comparut  enfin ,.  ,&  après 
de  longues  difputes,  ayant  refufé  toute  efpe- 
ce  de  fatisfaâion  3  il  fut  déféré  &  cité  au 
Confeil,  où,  au  lieu  de  comparoitre ,  il  fit 
préfept^r  par  fa  femme  une  excufe  par  écrit, 
&  j'enfuît  derechef  de  la  Ville.  . 

Il  fut  donc  enfin  ^ôcé^é  contre  lui ,  c^efl* 
à-dire^,  çQPt/K^  fon  Livre ,  &.  comme  la  fen^ 
tence  rendue  en  cette  occafîon  efl:  impor* 
tante,  ''même  quant  aux  termes  ,  &  peu  con- 
nue ,  je  vais  vous  la  tranfcrire  ici  toute  tn^^ 
tiere;  elle  peut  avoir  fon  utifité. 

„  (1)  Nous  Sindiques  Joges  dès  caufes  cri- 
^  mineUes  de  cette  Cité  ,  ayans  entendu  le 
))  rapport  du  vénérable  Confîfloire   de   cet-f 

>  • 

• 

(0  Extrait  des  procédures  faites  &  tenues  conâ»' 
tre  Jean  Morellî.  Imprimé  à  Genève  chez 'François 
Perria,-ïs63,pagc  10. 

Fartîe  I.  N  ' 


194         QUATRIEME 

^,  ce  Eglife  ,  des  procédures  tenues  envers 
j^  Jean  Morelli  habitaqt  de  cette  Cité  :  d'au- 
3^  tant  que  maintenant  pour  la  féconde  fois 
^y  il  a  abandonné  cette  Cité  y  &  au  lieu  de 
jy  comparoltre  devant  nous  &  nôtre  Cçafeil, 
^  quand  il  y  écoit  renvoyé ,  s'ed  montré  des- 
yy  obéiilknt:  à  ces  caufes  &  autres  jufles  à  ce 
),  nous  mouvantes,  feans  pour  Tribunal  au 
5^  lieu  de  nos  Ancêtres ,  félon  nos  anciennes 
fy  coutumes,  après  bonne  participation  de 
^y  Confeil  avec  nos  Citoyens ,  ayans  Dieu  & 
^^.fes  Saintes  écritures  devant  nos  yeux  &  in- 
,,  voqué  fon  Saint  nom  pour  faire;  drok  juge* 
3^  ment;  difans.  Au  nom  du  Fere  du  Fils  & 
i,  du  Saint  Elprit,  Amen.  Par  cette  nôtre  déf- 
fy  finîtive  fentence,  laquelle  doJiBtons  ici  par 
„  écrit ,  avons  avifé  par  meure  délibéntion 
^y  de  pro:éder  plus  outre,  comme  en  cas  de 
»  contumace  dudit  Morelli:  furtout  âfln'dV 


L   E  :T   T  It   E»         apf 

^,  verdr  .tôt» .  ceux  qu'il  appartiendra  ^  de  fe 
^  donnée  garde  du  Livre  y  afin  de  n'y  êtr^ 
,,  point  abufés«  £fl:antvdonc  duement  infoi^? 
„  mez  des  réff  eries  &  erreurs  lefquels  y  font 
^  contenus  )  &  furtout  que  le  die  Livre  tend 
,y  à  faire  fchifmes  &  troubles  dans  l'Eglifè 
^,  d'une  {açon  féditieufe:  l'avons  condanné  & 
„  condannons  coihme  un  Livre  nuifible  & 
„  pernideuK ,  &  pour  doiinei'  exemple,  or«' 
fy  donné  &  ordonnons,  que  Fun  d'iceux  (oie 
„  prëfentemenc  bruflé.  Défendons  à  tous  lA^ 
,,  hmrts  d'-en  tepirini  expbfer'en  vente:  &i 
„  tous  Otoyem  Bourgeois  &  Habitans  de 
yy  cette  yUle  de  quek|ue  qualité  qu'ils  foietxt^ 
yy  d'en  acheter  ni  avoir  pour  y.  lire  :  commaiK 
^  dans  à  tous  ceux  qui  en-  auroiênt  de  nous 
„  1er  apporcér ,  &  ceux  qui  faurdent  où  il  y  et^ 
,;  a,de  le  Abus  révéler  danfr  vi&gc  quatre  heu-* 
9^  resj  foiis  peine  d'être  ^rigoureufemenc  punis;^ 

N  z 


\ 


%^       Q  U  A  T  R  I  E  M  E 


5» 


y' 


£(;  à  vous  noffare  Lieutenant  comtciandons 
^>.^uç'fadezmettr.e  noftre.préfentefentcnce  à 
,>  due  &  entière  exécntion," 
■♦,-    Prononcée^  exécutée  le  Jeudi  feizième  jour 
',     .  .  de.  Septembre  mil  cinq  cenf  faixante  trois. 

,5  AinQ  figné  P.rChenelat/' 
.'j  Vous  trouverez,  Mdnfiéur,  des  obfèrvatîons 
de  plus  dun  genre  à  faire  en  tems  &  lieu  fur 
ce£Ce,  pièce.    Quant  à  préfent  ne  pehièns  pas 
notre  objet  de  vlie.  Voila  :comment'il  fut  pro- 
cëdé:  au  jugement  :  de  MbrdK ,"  dont  le:  Livre 
ttc.'ïut  brâJénqu!âx.la  fin  du  procès  i,  fins  qu'il 
iât  parle  de  Botârreau  ni  de  flétriiTurey  &  dont 
I^  perfonne  ne  fut  jamais  àéoxhég^i,  ^i^uojqu'iL 
fojD  opiniâtre  '&, cont^max. :  [-.  7,j'.:!. .-.  /        . 
:  Au  lieu  dé  cdar^:  chacun  feilrconjimenÉ  le 
Gonfeil  a  procédé,  contre  môî ,  danft  J'inflant. 
que  rOuvrage  a  paru,  & (aiis  qu'iiait  même, 
été  lait  mention  dB^^Confiftoare.  ^^l^cevoir  le 


\ 


:     LETTRE.  :ij>7 

Livre  par  la  pofte,  le  lire ,  rexammer ,  le  dé- 
férer. Je  brûler,  me  décréter,  tout  cela  fut 
l'affaire  de  huit  ou  dix  jours  :  on  ne  fkuroit 
imaginer  une  procédure  plus  expéditive. 

Je  me  iuppoiè  ici  dans  le  cas  de  la  loi, 
dans  le  feul  cas  où  je  puiilë  être  puniflable; 
Car  autrement  de  quel  droit  puniroit-on  des 
fautes  qui  n  attaquent  perfonne  &  fur  lefquel- 
les  les  Loix  n'ont  rien  prononcé? 

UEdit  a-t-il  donc  été  obfcrvé  dans  cette  af- 

&ire  ?   Vous  autres  Gens  de  bon  fens  yous 

imagineriez  en  l'examinant  qu'il  a  été  viol^ 

comme  à  plaifir  dans  toutes  {c$  parties.  „  Le 

„  Sn  Roufleau  "  ,    difent  les  Répréfentans , 

,,  n'a  point  été  appelle  au  Confiftoire ,  mais  le 

^j  magnifique  Confeil  a  d'abord  procédé  con- 

5,  tre  lui;  iïdevoit  ètie  fupporté  fans  fcandale, 

„  mais  fes  Ecrits  ont  été  traités  par  un  juge- 

„  ment  public,  comme  téméraires^  impifs^ 

N3 


\ 


i^       QUATRIÈME 

jy  fcandaleux  ;  il  devoît  être  fupporté  fans  dif 
^y  famé  ;  mais  il  a  été  flétri  de  la  manière  la 
,,  plas  diffamante  ,  fes  deux  Livres  ayant  été 
,,  lacérés  &  brûlés  par  la  main  du  Booireau. 

5,  L'Edît  n'a  dont  pas  été  obfervé  "  con- 
tinuent -  ils ,  yy  tant  à  Tégard  de  la  jurilciiâon 
„  qui  appartient  au  Confîftoire ,  que  relative- 
3,  ment  au  Sr.  RouflTeau ,  qui  devoit  être  ap- 
,,  pelle  ,  fupporté  fans  fcandale  ni  diffame, 
yy  admonefté  par  quelques  fois,  &  qui  ne  pou- 
yy  voit  êti^e  jugé  qu*en  cas,  d'opiniâtreté  ob- 

ftinée." 

Voila,  fans  doute,  qui  vous  paroit  plus  dair 
que  le  jour  ,  &  à  moi  auflî.  Hébîen  non  : 
vous  allez  voir  comment  ces  gens  qui  ftvent 
montrer  le  Soleil  à  minuit  favcnt  le  cacher  à 
midi. 

X'adrefle  ordinaire  aux  fophîfles  eft  d*cn- 
tàfTer  force  argumens  pour  en  couvrir  la  foi« 


9> 


LETTRE.  igg 

t 

bleffe.  Pour  éviter  des  répétitions  &  gagner 
du  tems ,  divifons  c&a^.  des  Lettres  écrites  de 
la  Campagne  ;  bornons  nous  aux  plus  eiTen- 
ciels,  laiiTons  ceux  que  j*ai  ci-devant  réfutés, 
&  pour  ne  point  altérer  les  autres  rapportoirs 
les  dans  les  termes  de  l'Auteur. 

Cefi  (T après  nos  Loix^  dit-il ,  que  je  dois  ex^ 
mimer  ce  qui  s'ejl  fait  à  V égard  de  M  RouJJeatu 
Fort  bien  ;  voyons. 

Le  premier  article  du  ferment  des  Bourgeois  les 
Mge  à  vivre  félon  la  Réformatton  du  Saint  E" 
vangile.  Or ,  je  le  demande ,  eji-ce  vivre  félon 
t  Evangile ,  que  d'écrire  contrç  P  Evangile  ? 

Premier  fophifme.  Pour  voir  daîrem^t  lî 
c'eft  là  mon  cas ,  lemeçtez  dans  la  mineure  de 
cet  argument  le  mot  Réformation  que  l'Auteur 
en  ôte ,  &  qui  eft  néceffaire  pout  que  fon  rai* 
fonnemcnt  (bit  concluant. 

Second  fophifme.  Il  ne  s'agit  pas  dans  ce( 

N4 


V  200       QUATRIEME 

article  du  fennent  d'écrire  félon  la  Réforna-  - 
•  tîon ,  mais  de  vivre  felott  là  Réformation.  Ces 
.  deux  chofes ,  comme  on  Fa  vu  ci  -  devant  fqnt 
didinguées  dans  le  ferment  même  ;  &  Ton  a 
>vu  encore  s'il  efl  vrai  que  j'aye  écrit- m  contre 
la  Réformation  ni  contre  l'Evangile.  ^ 
-  Le  premier  devoir  des  Syndics  ^  ÇonfeH  eji 
Je  maintenir  la  pure  Religion. 

TroiGeme  fophifme.  Leur  devoir  efl:  bien 
àc  maintenir  la  pure  Religion ,  mais  non  pas 
de  prononcer  fur  ce  qui  n'eft  ou  n'eft  pas  h 
pure  Religion*  Le  Souverain  les  a  bien  char- 
ygés  de  maintenir  la  pure  Religion ,  mais  il  ne 
îes^  pas  faits  pour  cela  juges  de  la  do6bine. 
Ceû,  un  autre  corps  qu'il,  a  chargé  de  ce 
foin,  &  c'eft  ce  corps  qu'ils  doivent  conful* 
tçr  fiirtoutes  les  matières  de  Réligioij ,  comme 
ils  ont  toujours  fait  depuis  que  votre  Gouver- 
l^iQmencexilte/  f;n  cas  de  délit  en.  ces  s^'e* 


LETTRE*         Ao? 

tes,  deax  Trifamnaux  font  établi;»  Ton  pour 
le  conftater,  &  Fautre  pour  le  punir;  cela  eft 
évident  par  les  termes  de  l'Ordonnance:  nous 
y  reviendrons  ci-après.  ^ 

Suivent  les  imputations  ci  •  devant  eicami? 
nées,  &  que  par  cette  raifon  je  ne  répéterai 
pas;  mais  je  ne  puis  jn'ablteQÎr  de  tranfcrire 
ici  Tardcle  qui  les  termine:  il  eft  curieux. 

Il  eft  vrai  que  M.  RouJJeau  &  fes  pmifant 
pétendent  que  ces  doutes  n* attaquent  point  réelk" 
mnt  le  Chriftianifme  ,  qu^à  cela  près  il  continu^ 
iappeller  divin.  Mais  Ji  un  Livre  car aStêrifé^ 
cmm  T Evangile  Peft  dans  les  ouvrages  de  M. 
P.ouJJeau^  peut  encore  être  appelle  divin ,  qu^on  me 
iife  quel  eft  donc  le  nouveau  fens  attaché  à  ce 
terme?  En  vérité  Ji  ceft  une  contradiSion  y  elle 
eji  choquante;  Ji  c'eft  une  plaifanterie ^  convenez^ 
qu'elle  eft  bien  déplacée  dans  un  pareil fujet  (/)  ? 

(/)  Page  II. 

N  s 


604         (QUATRIEME 

J'entends.  Le  culte  fpirîtuel ,  la  pureté  du 
<:œur  j  lei  œuvtes  (k  nûféricorde,  la  confiance, 
Thumîlîté  ^  la  réfignatîon ,  la  tolérance ,  ToubK 
des  injures ,  le  pardon  des  ennemis ,  Tamour 
du  prochain ,  la  fratâmïté  tiniverfelle  &  l'union 
du  genre  Humain  par  la  charité ,  font  autant 
d'inventions  du  di&le.  Seroit-ce  là  le  fenti- 
merit  de  1*  Auteur  &  de  fes  amis  ?  On  le  diroit 
à  leurs  raifonnemens  &  fiîrtout  à  leurs  œuvres. 

JE»  vérité  j  fi  c^eft  une  coniradiStion  ,  'elle  ejl 
choquante.  Si  cefi  une  plaifantcrîe  ,  convenez 
qu'elle  efi  bien  déplacée  dans  un  pareil  fuj^t. 

Ajoutez  que  la  plaifanterie  fur  un  pareil  fu- 
jet  eft  fi  fort  du  goût  de  ces  MdTieurs,  que, 
félon  leurs  propres  maximes ,  elle  eut  dû ,  fi  je 
Tavois  faite,  me  faire  trouver  grâce  devant 

eux  (g). 

Après  Pexpofitîon  de  mes  crimes  j^  écoutez 

,  -        I        — •-    ■  '     '  ' 

Ml  1    I  I 

(g)  Page  23* 


LETTRE.  20â 

les  laifbns  pour  Irfqudles  on  a  fi  cradlemenc 
KQdiéri  fur  la  ngaear  de  la  Loi  dans  la  pour* 
fuite  du  criminel 

Ces  deux  IJvrâS  forc^ita  fous  le  nom  d*un 
Citoyen  de  Genève.  ÙEurpp9  en  témoigne  fok 
Jcandak.  Le  premier  Parlemens  d*un  Royaume 
^oifin  fourfuit  Emile  &fon  Auteur.  :  Que  fera 
Je  Gouvernement  de  Genève  ? 

Arrêtons  un  moment.  Je  crois  a{>percevoir 
ici  quelque  menfonge. 

Selon  notre  Auteur  le  fcandale  de  fËarope 
força  le  Confeil  de  Genève  de  févir  contre  le 
Livre  &  T Auteur  d'Emile,  à  Texemple  du  Par^ 
Jement  de  Paris:  mais  au  contraire,  ce  furent 
les  décrets  de  ces  deux  Tribunaux  qui  caa&« 
lent  le  fcandale  de  TEurope.  Il  y  avoit  peu  de 
jours  que  le  Livre  étoit  public  à  Paris  brique 
le  Parlement  le  condanna  (h)  ;  il  ne  paroiflfoic 

(b)  Cétoit  un  arrangement  pris  avant  que  le  Liè- 
vre parut. 


ît5+        Q  U  A  T.R  I  E  M'E 

encore  en  nul  autre  Pays  y  pas  loeme  éh  H^lr 
Jande,  où  il  iétoit  imprimé;  éSc  il  n'y  <ut  eih> 
tre  le  décret  du  Parlement  de  Paris  &  celui  dji 
.Cônfeil  de  Genève  que  neuf  jours  d'intierval- 
je  0  ;  le  tems  à  peu  près,  qu'il  falloic  poui 
avoir  avis  dé  ce  qui  fe  paiToic  à  Paris. .  Le  va^ 
carme  afireux  <][Ui  fut  fait  en  SiiilTe  fur  cet- 
te  affaire,  mon  expulfîon  de  chez  mon  ami» 
te  tentatives  faîtes  à.Neufchâtel  &  mêmç  à 
ia  Cour  pour  m'ôter  mon  dernier  azile ,  tout 
cela  vint  de  Genève  &  des  environs,  après  le 
décret.    On  fait  quds  furent  les  inftigâteurs., 
on  fait 'quels  furent  les  émifTaires,  leur  aâivité 
6it  fans  ocen^^ple  ;  il  ne  tint  pas  à  eux  qu'on 

•  ne  m'otât  le  fieu  &\reau  dans  J  Europe  entière, 
qu'il  ne  me  reClât  .pas  une-  terre  pour  lit,  pas 


*  ■      i 


•  (I)  Le  décret  du  Parlement  fut  donné  le  9  Jttî» 
flt  celui  du  ConfeH  le  if. 


L  :E?  T    T    %  lEr         20S 

tine  pierre  poitr  \chevet:.  Ne  trant^ons  donc 
point  ainfi  ie$  cbofes  ,  &  ne  donnons  poioc 
poiK  moâf.du:décJret'viàç  Gêoèvé  fe  fcandale 
qui  eh  fat  Tefeu  ,::...  . 

Le  pr&mn'Farlement  t^un  Royamne  voijin 
pmrfuU  Emile  i^fott  Ay$eûr.  Que  far  a  le  Gou* 
vemement  de  Genève?  /.  ;•        . 

La  irépcffife  pftfîpiple.  'B  Mi  fec»  cien ,  il  ne 
doit  rieitfiBre^riOU  ptacôtj.iJidott  ne  rien  fai- 
re. Il  renver^oit  tx>at  ordi^e  ji^ciaire,  il  bra** 
veroit  le  FarlçioemdePïuîfl,.  il.'Iui.diTputeroic 
la  compéteaoe^.e^  l'imitât  Cétoit  précifémeni; 
parce  que  j'étois  décrété  à  Parift  que  je  ne  pour 
vois  l'être  à  Genève.  Le  délit  d'wn  criminel  a 
certainement  u»)  lien  &  un  lieq  u^i^ej  i\  ne 
pçut  pas  :pli«|  être  coupable;  à  la  k>\i  4«  même: 
délit :en:  deux  Ctats>  qu'il  ne.pÉuf  êti'e  en  deux: 
feux  idan^  Je. même  tems,  &:ç'il.veut  purger; 
fcs  deux  défcrfetti  commenç  y<)u]e??- vous  qu'ifc 


Q>U-A  T  R  I:E  M  E 

:ie  parcage^  En  effet ,  w&i^mm  'jamais  oui 

j^e  qu'oo  ait.  décrété  le  «mê&ie  liomme  en 

deux  pays  à  la  fois  pour  lé  même  fait?  Cen 

efl  ici  le  premier  exemple,  .&  probablement 

ce  iëra  le  dernier.    J'aurai  dans  mes  maiheurs 

lé  triftô'  konnçar  "d'être  à  %àas  égards  un  e- 

xemple  unique.  '      >    v^    i> 

« 
'-  Les  crimes" k»  plus,  atrocêà  ^  les  affitATmacs 

même  ne  font  par  &  ne  dpivent  ^  être  p6ui> 

fuivis  pat  dèvanî.  d^autres  Tributiaux  que  ceux 

des  lieux  où  îts  ont  été  commis    Si  un  Gén^ 

vois  tuoit  un  homme  ^  mêiiie  un  autre  Gène* 

vois  en  pays  étranger ,  le  Confeil  de  Genève 

lie  pourroit  s'attribuer  la  conncni!ancè  de  ce 

crime  :  il  pourroit  livrer  lé  coupable  s'il  étoio 

réclamé ,  il  pourroit  en  folliciter  le  châtiment» 

âiais  à  moins  qu'on  ne  lui  remit  volontairemenc 

te  jugement  avec  les  pièces  de  la  procédure,  if 

né  le  jugeroit  pas^  parce  qu'il  ife  Ibi  appartioac 


:    L    E  :t    r  K    E.  ioT 

pat  de  connoître  d'un  défit  commi$  <!hez  tin 
autre  Souvetain^  &  qu'il  ne  peut  pas  même  or* 
donner  les  informations  néceflairès  pour  le 
conftater^  Voila  la  règle  &  voila  k  réponie  à 
la  queltion  ;  que  fera  le  Gouvernement  de  Geftè* 
ve?  Ce  font  ici  les  plus  fimples  notions  du  Droit 
public  qa*il  feroit  honteux  au  dernier  Magif* 
tiat  d'ignorer.  Faudra  - 1  -  il  toujotors  que  j'en* 
feigne  à  mes  dépends  les  élemens  de  la  jurif^ 
pnidence  à,  mes  Juges? 

//  ie^mt  fuivant  les  Auteurs  des  Réprifenta* 
tionsfe  borner  à  (Mfendre  provijiorinellement  le  dé* 
Int  ions  la  FiJh  (k).  Ceft,  eneflFet,  tout  ce 
qu'il  pouvoit  légitimement  faire  pour  contenter 
ion  animofîté  ;  c'efl  ce  qu'il  avoit  déjà  fait  pour 
la  nouvelle  Héloïle ,  inaîs  voyant  que  le  Parle- 
ment de  Paris  ne  àifoit  rien ,  &  qu'on  ne  f^ 


(k)  Page  12, 


.  toa        Q.tJ  A  T  R  I  E  M  E 

fpit  nulle  part  une  fémblabjë;  défeni^ ,  il  en  mit 
honte  &:1*  «tira  .tout  dotïcement  (/).  Mais 
une  improl^ntioH  fi  foibk  rCaumt'-eîle  pas  été  ta- 
ié§  de  fefrate  connivence  ?  .  Mais  il  y  a  tong- 
tems  que  „  pour  d'autres  Ecrits  b^ucôup  moins 
tolérabtes,  oïj.iiuçe  le  Confeil  de  Genève  d'une 
connivence  affez  peu  feiarettp  j  ;  fans  qii'il  fe 
mette  fort  en  peine  de  ce  jugementi,  Perfnth; 
fie^  ditfod., iiquroît  pu  fe'fcandàUfer  de  la  imâér. 
ration  dont  on  auroit  ufé.  \^  çii  pliblic  vous 
apprend'  œiçbièn  on  eft  Çç^siMM  du  contr^- 
re*  Be  bonne  foi ,  fil  s'était,  is^gi  d'un  bomm 
aujjî  déf agréable  çu  pubHc  tp^^  M.  RpuJJeau  lui 
et  oit  cler^ceqtLon  appelle  m^rmim  n' auroit -il 
-     .  '  ;  '    .,  :  pas 


(/)  Il  faut  convenir  que  fi  l'Emile  doit  être  dé- 
Tendu  ,   THéloife  doit  être  tout  au  moins  brûlée. 
Lqs  notes  furtouj;  en.  font  ^d'une  hardiejTe  .dont  la 
profeffioDi  de  foi  du  Vicaire  n'approche  affurémcnt 
pas.  ' 


-LETTRE.  zotf 

pas  été  taxé  d'indifférence  j  de  tiédeur  impardon-' 
noble  "?  Ce  n'auroît  pas  été  un  fi  grand  mal  que 
cda ,  &  l'on  ne  donne  pas  des  noms  fi  honnê* 
tes  à  la  dureté  qu'on  exerce  envers  moi  pour 
mes  £aits,  ni  au  fapport  que  l'on  prête  à  ceux 
d'un  autre. 

£q  contiHuant  de  me  fuppofer  coupable  , 
fuppofons ,  de  plus ,  que  le  Confeil  de  Genève 
ayoit  droit  de  me  punir ,  que  la  procédure  eue 
été  conforme  à  la  Loi ,  &  que  cependant ,  faps 
vouloir  même  cenfurer  mes  Livres,  il  m'eut 
reçu  paifiblement  arrivant  de  Paris  ;  qu'au- 
roient  dit  les  honnêtes  gens?  Le  voici. 

M  Us  ont  fermé  les  yeux^  ils  le  dévoient. 
3,  Que  pouvoient-ils  faire?  Ufer  de  rigueur 
3,  en  cette  occafion  eut  été  barbarie ,  ingrati- 
,,  tude  9  injoftice  même ,  puifque  la  véritable 
„  juftice  compenfe  le  mal  par  le  bien.  Le 
,3  coupable  a  tendrement  aimé  fa  Patrie,  il  en 

Fartie  L  O 


^ftio       QUATRIEME 

,,  a  bien  mérité;  il  Ta  honorée  dans  rEurope, 
„  &  tandis  que  fes  compatriotes  avoîent  hon- 
,,  te  du  nom  Grénevois,  il  en  a  fait  gloire,  il 
„  l'a  réhabilité  chez  Tétranger.  Il  a  donné  ci- 
,^  devant  des  conièils  utiles,  il  vouloit  k  bien 
„  public,  il  s'efl:  trompé,  mais  il  étoît  pardon- 
.„  nable.  It  a  fait  les  plus  grand  éloges  des 
„  Magiftrats ,  il  cherchait  à  leur  rendre  la 
„  confiance  de  la  Bourgeoifie  ;  il  a  défendu  la 
„  Religion  des  Miniftres ,  il  méritoit  quelque 
^,  retour  de  la  part  de  tous.  Et  de  quel  front 
•„  euffent-ils  ofé  févir  pour  quelques  erreurs 
„  contre  le  défenfenr  de  la  divinité,  contre 
.„  Tapologifte  de  la  Religion  fi  généralement 
„  attaquée,  tandis  qu'ils  toléroîent  qu'ils  per- 
•„  mettoient  même  les  Ecrits  les  plus  odieux, 
„  les  plus  indécens ,  les  plus  infultâns  au  Chrif* 
„  tianifme,  aux  bonnes  mœurs,  les > plus  def- 
5,  truftifs  de  toute  vertu,  de  toute  morale. 


.LETTRE.  511 

,,  ceux  mêmes  que  Rouiteau  a  cru  devoir  ré- 
futer?  On  eut  cherché  les  motifs  fecretg 
,  d'une  partja'ité  fi  choquante  ;  on  les  eut 
,  trouvés  dans  le  zèle  de  Taccufé  pour  la  liber- 
,  té  &  dans  les  projets  des  Juges  pour  la  dé- 
,  truire.  Roufleau  eut  paffé  pour  le  martîr  des 
,  loix  de  fa  patrie.  Ses  perfécuteurs  en  pre- 
,  nant  en  cette  feule  occafion  le  mafque  de 
,  rhypocrifie  enflent  été  taxés  de  fe  jouer  de 
,  la  Religion  ,  d'en  faire  l'arme  de  leur  ven- 
,  geance  &  Tinflrument  de  leur  haine.  Enfin 
,  par  cet  empreflement  de  punir  un  homme 
,  dont  Tamour  pour  fa  patrie  efl  le  plus  grand 
)  crime ,  ils  n'euflent  fait  que  fe  rendre  o* 
,  dieux  aux  gens  de  bien ,  fufpeâs  à  la  bôur-^ 
,  geoifie  &  méprifables  aux  étrangers."  Voi- 
la, Monfîeur,  ce  qu'on  auroît  pu  dire;  voila 
tout  le  rifque  qu'aurpit  couru  le  Confeil  dans 
le  cas  fuppofé  du  délit ,  en  s'abftenant  d'eu 
connoître.  O  2 


212        QUATRIEME 

.    Qtie}qu!un  a  eu  rai/on  de  dire  qu'il  falhît  brû' 

> 

1er  r Evangile  ou  les  Livres  de  M.  RouJJeau. 

La  commode  méthode  que  fuivent  toujours 
xres  Meilleurs  contre  moi  !  s'il  leur  faut  des 
.preuves,  ils  multiplient  les  aflfertions  &  s'i! 

leur  faut  des  témoignages ,  ils  font  parler  des 
.  Quidams. 

La  fentence  de  celui-ci  n'a  qu'un  fens  qui 

ne  foit  pas ,  extravagant ,  ôc  ce  fens  eft  un 

blafphême. 
Car  quel  blafphême  n'efl-ce  pas  de  fuppofer 

l'Evangile  &  le  recueil  de  mes  Livres  fi  fem- 

blables  dans  leurs  maximes  qu'ils  le  fuppléenc 
.mutuellement,  &  qu'on  en  puifTe  îndiffercm- 
..ment  brûler  un  comme  fuperfîu,  pourvu  que 

l'on  conferve  l'autre  ?  Sans  doute;,  j'ai  fiiivi 

du  plus  près  que  j'ai  pu  la  doûrine  de  l'Evan- 

« 

gile;  je  l'ai  aimée,  je  l'ai  adoptée  étKidue  ex- 
pliquée ,  fans  m'arrêter  aux  obicurités ,  aux 


.LETTRE.  215 

diiEcakés ,  aux  tnyfteres ,  fans  me  détourner  de 
reflenciel  :  je  m'y  fuis  attaché  avec  tout,  le  z> 
h  de  mcto  cœur  j  je  me  fuis  indigné ,  récrié  de 
voir  cette  Sainte  doftrine  ainfi  profanée  avilie 
par  nos  prétendus  Chrétiens ,  &  fur  tout  par 
ceux  qui  font  profeffion  de  nous  en  înftruire. 
J'ofe  même  croire ,  &  je  m'en  vante ,  qu'au- 
cun d'eux  ne  parla  plus  dignement  que  moi. du 
vrai  Chriftianifme  &  de  fon  Auteur.  J'ai  là- 
deflîis  le  témoignage  l'applaudiffement  même 
de  mes  adverfaires ,  non  de  ceux  de  Genève 
à  la  vérité  ,  mais  de  ceux  dont  la  haine  n  eft 
point  une  rage  ^  &  à  qui  la  paffion  n'a  point 
ôcé  tout  fentiment  d'équité.  Voila  ce  qui  efl: 
vrai ,  voila  ce  que  prouvent ,  &  ma  réponfe 
au  Roi  de  Pologne ,  &  ma  Lettre  à  M.  d' A- 
lembert,  &  l'Héloïfe,  &  l'Emile,  &  tous  mes 
Ecrits ,  qui  refpîrent  le  même  amour  pour  l'E*. 
^gile,  la  même  ^vénération  pour  Jéfus-Chrift; 

03 


114        Q  IT  A  T  R  I  E   M  E 

Maïs  qu*il  s'enfuîve  de-Ià  qu'en  rien  je  paiflè 
approcher  de  mon  Maître  &  que  mes  Livres 
puiflent  fuppléer  à^  fcs  leçons ,  c*eft  ce  qui  eft 
faux  5  abfurde ,  abominable  ;  je  detefte  ce  blaf* 
phêrae  &  défavoue  cette  témérîcé.  Rien  ne 
peut  fe  comparer  à  l'Evangile.  Mais  fa  fubli- 
me  Cmplicité  n'efl  pas  également  à  la  portée 
de  tout  le  monde.  II  faut  quelquefois .  pour  l'y 
meure  Texpofer  fous  bien  des  jours.  Il  faut 
conferver  ce  Livre  fàcré  comme  la  règle  du 
Maîire,  &  les  miens  comme  les  commentai- 
res de  l'Ecolier. 

J'ai  traité  jufqu'ici  la  qnefhon  d'une  manie- 
re  un  peu  générale  j  rapprochons-la  maintenant 
des  faits ,  par  le  parallèle  des  procédures  de 
15^3  &  de  1762,  &  des  raifons  qu'on  donne 
de  leurs  différences.  Comme  c'eft  ici  le  point 
décifif  par  rapport  à  moi ,  je  ne  puis ,  fans  né- 
gliger ma  caafè  y  vous  épargner  ces  détails , 


LETTRE.  215 

peut-être  ingrats  en  eux-mêmes,  mais  intéref- 
fans ,  h  bien  des  égards ,  pour  voiu  &  pour 
vos  Concitoyens.  Cefl:  une  autre  dîfcufllon  qui 
ne  peut  être  interrompue  &  qui  tiendra  feule 
une  longue  Lettre.  Mais ,  MonHeur ,  enco- 
re un  peu  de  courage  j  ce  fera  la  dernière  de 
cette  efpece  dans  laquelle  je  vous  entretiendrai 
de  moi. 


04 


1 


îi«         CINQUIEME 


•* 


CINQUIEME      LETTRE. 

Apres  avoir  établi,  comme  vous  avez  vu, 
la  nécelTité  de  fëvîr  contre  moi,  F  Auteur  des 
Lettres  prouve ,  comme  vous  allez  voir ,  que 
la  procédure  faite  contre  Jean  Morelli ,  quoi- 
qu'exaftement  conforme  à  l'Ordonnance ,  & 
dans  un  cas  femblable  au  mien ,  n'étoit  pgint 

un  exemple  à  fuivre  à  mon  égard  ;  attendu , 

» 

premièrement,  que  le  Confeil  étant  au  deflus 
de  l'Ordonnance  n'efl:  point  obligé  de  s'y  con- 
former; que  d'ailleurs  mon  crime  étant  plus 
grave  que  le  délit  de  Morelli  devoît  être  trai- 
té plus  févérement.  A  ces  preuves  l'Auteur  a- 
joute,  qu'il  n'eft  pas  vrai  qu'on  m'ait  jugé  fans 
m'entendre,  puifqu'il  fuffifoit  d'entendre  le  Li- 
vre même  &  que  la  flétriffure  du  Livre  ne 
tombe  en  aucune  façon  fur  l'Auteur  j  qu'enfin 


LETTRE.  217 

les  ouvrages  qu'op  reproche  aa  Confeil  d'avoir 
tolérés  font  inaocens  &  colérables  en  compa- 
raifon  des  miens. 

Quant  au  premier  Artide,  vous  aurez  peut- 
être  peine  à  croire  qu'on  ait  ofé  mettre  fans 
fa$;on  le  petit  0)nfeii  au  defTus  des  Loix.  Je 
se  connois  rien  de  plus  Hir  pour  vous  en  con- 
vaincre que  de  vous  tranfcrire  le  paf&ge  où 
ce  principe  efl  établi  &  de  peur  de  changer  / 
le  fens  de  ce  paiTage  en  le  tronquant ,  je  le 
tianfcrirai  tout  entier, 

„  (a)  L*Qrdonnance  a-t-elle  voulu  lier  les 
,,  mains  à  la  puiiTance  civile  &  Tobiijger  à  ne 
„  réprimer  aucun  délit  contre  la  Religion 
n  qu'après  que  le  Confifloire  en  auroit  con- 
),  nu  ?  Si  cela  étdit  il  en  réfulteroit  qu'on 
,,  pourroit  impunément  écrire  contre  la  Reli- 


(«)  Page  4. 

O  S 


*  I 


218         CINQUIEME 

„  Kgîon  ,  que  le  Goiivernem^t  leroît  dans 
„  rîmpaiîflance  de  réprimer  ^cette  licence  i  & 
„  de  flétrir  aucun  Livre  de  cette  efpece  ;  car 
„  fi  rOrddnnance  veut  que  le  délinquant  pa* 
„  roiflê  d^abord  au  Confïïloîre,  l'Ordonnance 
^,  ne  prefcrit  pas  naoîns  que  s'il  fe  range  on  le 
„  fupporte  fans  diffame»  Ainfi  quel  qu*aît  été 
,,  fon  délit  contre  la  Religion ,  l'accufé  en  fai- 
5,  fant  femblant  de  fe  ranger  pourra  toujours 
„  échapper  ;  &  -celui  qui  auroit  diffamé  la  Re- 
^,  lîgîon  par  toute  la  terre  au  moyen  d  un  re- 
„  pentir  fimulé  devroit  être  fupporte  yi;2j  dif- 
,,  famé.  Ceux  qui  connoiffent  l'elprit  de  févé- 
„  rite,  pour  ne  rien  dire  de  plus,  qui  régnoit, 
„  lorfque  TOrdonnarice  fut  compilée,  pour^ 
„  ront-îls  croire  que  ce  foit-là  le  fens  de  TAr- 
„  tîde  88.  de  l'Ordonnance  ? 

„  Si  le  Confiftoire  tf  agit  pas ,  fon  inaftion 
)9  enchaînera-t-elle  le  Conieil?  Ou  du  moins 


lettre;         iijj 

,,  fera-t-il  réduit  à  la  fonflibn  de  délateur  au- 
„  près  du  ConGftoke?  Ce  n'efl:  pas  là  ce  qu'a 
„  entendu  TOrdonnance ,  lorfqu  après  avoir 
„  traité  de  rétabliflèment  du  devoir  &  du  pou- 
„  voir  du  Confiftoire ,  elle  conclud  que  la  puît 
5,  fance  civile  refte  en  fon  entier  ,  en  forte 
„  qu'il  ne  foit  en  rien  dérogé  à  fon  autori- 
,,  té  ,  ni  au  cours  de  la  juflice  ordinaire  par 
„  aucunes  remontrances  eccléfîaftiques.  Cette 
„  Ordonnance  ne  fuppofe  donc  point,  comme 
5,  on  le  fait  dans  les  Répréfentations ,  que 
55  dans  •  cette  matière  les  Miniftres  de  TEvan* 
„  gile  Ibient  des  juges  plus  naturels  que  k$ 
„  Confeils.  Tout  ce  qui  eft  du  reflbrt  de  Tau- 
„  torité  en  matière  de  Religion  eft  du  reflbrt 

« 

3,  du  Gouvernement.  C'eft  le  principe  dd 
j,  Proteftans,  &  c'eft  fingulîérèment  le  prîncî* 
„  pe  de  notre  Conftitution  qui  en  cas  de  difi 
3,  pute  attribue  aux  Confeils  le  droit  de  dé^ 
„  cider  fur  le  dogme.  *;| 


fio        CI  N  Q  U  I  E  M  E 

Vous  voyez ,  Monfîeur ,  dans  ces  dernières 
lignes  le  principe  fur  lequel  eft  fondé  ce  qui 
ks  précède.  Ainfi  pour  procéder  dans  cet  ex- 
amen avec  ordre ,  il  convient  de  commencer 
par  la  fin. 

Tout  ce  qui  eji  du  f effort  de  V Autorité  en  ma- 
tiere  de  Religion  eji  du  rejfort  du  Gouvernement. 

Il  y  a  ici  dans  le  mot  Gouvernement  une  é- 
quivoque  qu'il  importe  beaucoup  d'édaircir ,  & 
je  vous  confeille ,  fi  vous  aimez  la  çonfl^itution 
de  votre  patrie,  d'être  attentif  à  la  diftinc- 
tion  que  je  vai3  faire  ;  vous  en  fentirez  bien> 
tôt  l'utilité. 

Le  niot  de  Gouvernement  n'a  pas  le  même 
fens  dans  tous  les  pays  ,  parce  que  la  confliitu- 
tion  des  Etats  n'eft  pas  par  tout  la  même» 

Dans  les  Monarchies  où  la  puiifance  execu- 
tive efi;  jointe  à  l'exercice  de  la  fouveraineté , 
|c  Gouvernement  n'eft  autre  chofe  que  le  Sou- 


LETTRE.  aâ» 

terain  lui-lnême,  agifTant  par  fes  Miniftres  ^ 
pdj:  fon  Coûfëil ,  ou  par  des  ^orps  qui  dépens 
dent  abfolument  de  fa  volonté*  Dans  les  Ré^ 
publiques,  fùrtout  dans  les  Démocraties,  où  le 
Souverain  n'agit  jamais  immédiatement  par  lui- . 
même,  c'efl:  autre  chofe.  Le  Gouvernement 
n'efl  alor&  que  la  puiiTance  executive ,  &  il 
eft  abfolument  diftinâ:  de  la  fooveraineté. 

Cette  dillinélion  efl  très  impcNtante  en  c^ 
loatieres.  Pour  l'avoir  bien  préfente  à  TefprK 
on  doit  lire  avec  quelque  loin  dans  le  ContraSt 
Social  les  deux  premiers  Chapitres  du  Livre 
troiGeme,  ou  j'ai  tâché  de  fixer  par  un  fens 
précis  des  exprefllons  qu'on  laiflbit  avec  art 
incertaines  ,  pour  leur  donner  au  befoin  telle 
acception  qu'on  vouloit.  En  général,  les  CheEs 
des  Républiques  aiment  extrêmement  emplo* 
yer  le  langage  des  Monarchies.  A  la  faveur 
de  termes  qui  femblent  confaciâ ,  ils.  favent 


i 


822         C.'I  N  Q  U  I  E*  M  E 

saaener  peaii  peu  Jes  chofês  que  ceis  mots  û- 

é 

gnîfient*    C'eft  ce.  que  fait  ici  très-habilement 

f  Auteur  à&  Lettres ,  en  prenant  le  mot  de 

GowememeM^i  tjui  n'a  rien  tf effrayant  en  lui- 

* 
même,  pour  Feiercicé  de  la  fôaveraîneté,  qui 

feroît  révoltant ,  attribué  fans  détour  au  petit 

ConfeiU      ^  • 

C'eft*  ce  qtf il  :  fait  ;  ehcdré  plus  ouvertement 

^ans  un  axitre  paf&ge  (é)  où,  aprèsi- avoir  dit 

> 

que  le  Petit  Confeil  ejl  le  Gouvernement  même^ 
ce  qui  effi  vrai  en  prenant  ce  mot  de  Gouroer- 
jiemenp.  dans  un-  fens  fubordonné ,  il  o(ê  ajouter 
:qu'à  ce  titre  il  exorce  toute'  Tautorité  qui  n'efl: 
;pas  attribuée  aux  'autres  Corps  de  FEtat  ;  pre« 
nant  ainfî  le  mot  de  Gouvernement  dans  le 
fens  de  la  fouveraineté  ,  comme  fi  tous  les 
Corps  de  l'Etat,  &  le  Confeil  général  lui-mê- 


{h)  Page  Ô5.* 


L    E.  T    T    R    E.       223 

me,  étoient  inflimés  par  le  petit  Confeil:  car 
ce  n*efl:  qu'à  la.faveur  de  cette  iuppofîtion  qu'il 
peut  ;5'at;tribuer  à  lui  feul  tous  les  pouvoirs  que 
h  Loi  ne  donne  exprefTément  à  perfonne.  Je 
reprendrai  ci  •  après  cette  queftîon. 

Cette  équivoque  éclaîrcie  ^  on  voit  à  decou* 
vert  le  fbphifme  de  l'Auteur.  En  effet ,  dire 
qae  tout  ce  qui  efl:  du  reilbrt  de  l'autorité  en 
matière  de  Religion  eft  du  refTorc  du  Gou- 
vernement ,  ed  une  propofltion  véritable  y  fi 
par  ce  mot  de  Gouvernement  on  entend  la 
puilTance  légiflative  ou  le  Souverain  ;  mais  elte 
efl  très  faufle  fi  l'on  entend  la  puiiTance  exécu* 
tîve  ou  le  Magiflrat  ;  &  l'on  ne  trouvera  ja- 

r  I 

mais  dans  votre  Republique  que  le  Confeil  gé- 
néral ait  attribué  au  petit  Confeil  le  droit  de 
régler  en  dernier  reflbrt  tout  ce  qui  concerne 
la  Religion. 
Une  féconde  équivoque  plus  fubtile  encore 


ôH       C  IN  Q  U  I  E  M  E 

vient  à  l'appui  delà  preniîere  dans  ce  qui  fuit. 
Cefi  le  principe  des  Protejians^j  &  (feji  fingu- 
liérement  Fe/prit  de  notre  conjiitution  quij  dans 
le  cas  de  difpute  attribue  aux  Confeils  le  droit 
de  décider  fur  le  dogme.  Ce  droit ,  foit  qu'il  y 

m 

ait  difpute  ou  qu'il  n'y  en  ait  pas,  appartient 
fans  contredit  aux  Confeils  mais  non  pas  au 
Confeil  Voyez  comment  avec  une  lettre  de 
plus  ou  de  moins  on  pourroit  changer  h 
conftitution  d'un  Etat  !    • 

Dans  les  Principes  des  Proteftans ,  il  n'y  a 
point  d'autre  Eglifé  que  l'Etat  &  point  d'autre 
Légîflateur  eccléfiaftique  que  le  Souverain. 
Cefl:  ce  qui  eft  manifefte ,  furtout  à  Genève, 
où  l'Ordonnance  eccléfîaftiquç  a  reçu  du  Sou- 

s, 

verain  dans  le  Confeil  général  la  mênse  iknc- 
tion  que  les  Edits  civils. 

Le  Souverain  ayant  donc  prefcrît  fous  le 
nom  de  Réfomution  la  doébrise  qui  devoit  ê- 

tre 


V 


Lettre* 


2tS 


bre  enfeignée  à  Genève  &  la  forme  de  culte 
qu'on  y  devoit  fuivre ,  a  partagé  entre  deux 
corps  le  foin  de  maintenir  cette  dodlrine  &  cô 
culte  tels  qu'ils  font  fixés  par  la  Loii  A  l'un  elle 
a  remis  la  matière  des  enfeignemens  publics  ^ 
la  décifion  de  ce  qui  efl  conforme  ou  contraire 
à  h  Religion  de  l'Etat,  les  avertiiTemens  & 
admonitions  convenables,  &  même  les  puni- 
tions fpirituçlles ,  telles  que  l'exeommunication* 

Elle  a  chargé  l'autre  de  pourvoir  à  l'ezécutiott 

< 

des  Loix  fur  ce  point  comme  fur  tout  autre  ^ 
&  de  punir  civQement  les  prévaricateurs  ob<* 
ftinés» 

Axtû  toute  procédure  régulière  fur  cette 
tnatieie  doit  commencer  par  l'examen  du  fait  ; 
ftvQÎrj  s'il  efl  vrai  que  l'accufé  foit  coupable 
d'un  délit  contre  la  Religion,  &  par  la  Loi 
cet  examen  appartient  au  feul  ConGfloii;e/ 

Quand  le  délit  efl  çonfhté  &  qu'il  elt  d$ 

Partit  L  P 


2i6        C  I  N  Q  U    I  E  M  E 

nature  à  mériter  une  punition  civile,  c^efl:  alors 
au  Magiftrat  feul  de  faire  droit ,  &  de  *dëcer- 
rier  cette  punition.  Le  Tribunal  eccléfiaftique 

V 

dénonce  le  coupable  au  Tribunal  civil ,  &  voi- 
la comment  s'établit  fur  cette  matière  la  com- 
pétence du  Confeil. 

■  Mais  brique  le  Confeil  veut  prononcer  en 
Théologien  fur  ce  qui  efl:  ou  n'eft  pas  du  dog- 
mef,  lotfque  le  Confiftoire  veut  ufurper  la  jurif- 
diftion  civile',  chacun  de  ces  corps  fort  de  fa 
compétence  ;  il  défobéît  à  la  Loi  &  au  Souvc- 
rîtîn  qui  Pa  portée  5  lequel  n'eft  pas  moins  Lé- 
giflateur  en  matière  eccléfiaftique  qu'en  matie- 

re  civile,  &  doit  être  reconnu  tel  'des  deux 

»\    • 

côtés. 

'    •.  -  '       •  •     .-^ 

Le  Magiftrat  eft  toujours  juge  des  Mînif- 
ttes  en  tout  ce  qui  regarde  le  civil ,  jamais  en 
ce  qui  regarde  le  dogme  ;  c'efl:  le  Confiftoire. 
t\  le  Confeil  pronon^oît  les  jugemens  de  FE* 


LETTRE.  127 

/ 

glife  il  auroit  le  droit  d^excommunication ,  Ôc 
au  contraire  les.  membres  y  font  fournis  eux* 
mêmes.  Une  contradiflion  bien  plaifante  dans 
cette  affaire  efl:  que  je  fuis  décrété  pour  mes 
erreurs  &  que  Je  ne  fuis  pas  excommunié  ; 
le  Confeil  me  pourfuic  comme  apoflat  &  le 
Confifloire  me  laifle  au  rang  des  fidelies  { 
Cela  n'efl-îl  pas  [fîngulîcr? 

D  efl  bien  vrai  que  s'il  arrive  des  difTentions 
entre  les  Miniflres  fur  la  doftrine,  &  que  par 

fobflination  d'une  des  parties  ils  ne  puiflènt 

« 

s^accorder  ni  entre  eux  ni  par  l'entremife  des 
Anciens ,  il  efl  dit  par  F  Article  18.  que  la  eau* 
fe  doit  être  portée  au  Magiflrat  pour  y  mettre 
êràé. 

Mais  mettre  ordre  k  h  querdie  tf  eft  pa« 
décider  du  dogme.  L'Ordonnance  explique  el- 
fe-inême  le  motif  du  recours  au  Magiflrat  J 
^efl  robflînation  d'une  dès-Parties.    Or  la  po^ 


t28        CINQUIEME 

lîce  dans  tout  l'Etat ,  rinlpeftion  fur  les  ^ueret- 
ks,  le  maintien  de  la  paix  &  de  toutes  les 
fondions  publiques  Ja  réduâion  des  obdinés^ 
font  inconteftableihent  du  reflbrt  du  Magidrat. 
Il  ne  jugera  pas  pour  cela  de  la  do6lrine ,  mais 
il  rétablira  dans  Taflemblée  Tordre  convenable^ 
pour  qu'elle  puîfle.  en  juger. 

Et  quand  le  Copfeil  feroit  juge  de  la  doc* 
ffinè  en  dernier  reflbrt  j  toujours  ne  lui  feroit- 
îl  pas  permis  d'intervertir  Tordre  établi  par  la 
i»oi ,  qui  attribue  au  Confifloire"^  là  première 
connoiiTance  en  c«s  matières;  tout  de  même 
qu'il  ne  lui  eft  pas  permis ,  bien  que  juge  fu- 
prême,  d'évoquer  à  foi  les  caufès  civiles,  a- 
vant  qu'elles  aient  pafFé  aux  premières  appeV  ' 
fetio^s* 

L'article  i8  dit  bien  qifen  cas  que  les  Mî« 
nifbres  ne  puiCTî^nt  s'accorder ,  la  çaufe  doit  être 
portée  au  Magidrat  pour  y  mettre  ordres 


L    E    T    T    R    E.  £29 

\ 

nais  il  ne  die  point  que  la  première  connoif' 
fance  de  la  doftrine  pourra  être  orée  au  Con- 
fiftoîre  par  le  Magiftrat ,  &  il-  n'y  a  pas  un  feul 
exemple  de  pareille  ufurpation  depuis  que  la 
République  exifte  (c). .  CeU  dequoi  rAuteitf 


(f)  Il  y  eue  dans  le  feizieme  fiécîe  beaucoup  de 
difputes  fur  la.  prédedination ,  dont  on   auroît  dû 
faire  l'aîtiufement  des  écoliers ,  &  dont  on  ne  man- 
qua pas ,   fclon  l'ufage ,  de  faire  une  grande  affaire 
d'Etat.    Cependant  ce  furent  les  Miniftres  qui  la  dé- 
cidèrent, &  môme  contre  l'intérêt  public.  Jamais, 
que  je  fâche,  depuis  les  Edics,  le  petit  Confeil  ne 
s'eft  avifé  de  prononcer    fur  le  dogme  fans   leur 
concours.    Je  ne  connois  qu'un  jugement  de  cette 
efpecc,   &  il  fut  rendu  par  le j  Deux-Cent.     Ce  fut 
dans  la  grande  querelle  de  i66g  fur  la  grâce  partir 
cuHcre.  Aprci  de  longs  &  vains  débats  dans  la  Corn* 
pagnie  &  dans   le    ÇonGiloire,   les  ProfeflTcurs,  ne 
pouvant  s'accorder ,  portèrent  Taffaire  au  petit  Con* 
feil,  qui  ne  la  jugea  pas.  Le  Deux-Cent  révoqua  & 
la  jugea,'  L'importante  queflioa  dont  il  s'agiiïqic  é- 
toit  de  favoir  fî  Jéfus  étoit  mort  feulement  pour  le 
falut  des  élus ,  ou  s'il  étoit  mort  auflî  pour  le  falut 
des  dannés*     Après  bien  des  féances  &  de  meures 
délibérations  ,  le  Magnifique  Confeil  des  Dcux-Cenç» 
prononça  que  Jéfus  n'étoic  mort  que  pour  le  falut 

P3 


^So        CINQUIEME 

des  Lettres  paroit  convenir  lui-même  en  difan^t 
qa'tn  Cas  de  difpute  les  Confeils  ont  le  droit  de 
décider  fur  le  dogme  ;  car  c'eft  dire  qu'ils  n'ont 
ee  droit  qu'après  l'examen  du  ConGfloire,  & 
qu'ils  ne  l'ont  point  quand  le  Confiiloire  efl: 
d'accord. 

Ces  difiinâîons  du  reflbrt  civil  &  du  rdTort 
cccléfiaftique  font  claires ,  &  fondées,  non  feu^ 


ies  éius.  On  conçoit  bien  que  ce  Jagement  fut  une 
afFaîre  de  faveur,  &  que  Jéfus  feroît  mort  pour  les 
dannés ,  fi  le  ProfefTcur  Tronchin  avoît  eu  plus  de 
crédit  que  fon  adverfaire.  Tout  cela  fans  doute  cft 
fort  ridicule:  on  peut  dire  toutefois  qu'il  nes'agif- 
foît  pas  ici  d'un  dogme  de  foi,  mais  de  runiformi- 
té  de  rinftruftion  publique  dont  Tinfpeftion  appar- 
tient fans  contredit  au  Gouvernement.  On  peut  a- 
jouter  que  cette  belle  difpute  avoit  tellement  excité 
l'attention  que  toute  la  Ville  étoit  en  rumeuT.  Mais 
n'importe;  les  Confeils  dévoient  appaifcr  la  querel- 
le fans  prononcer  fur  la  dodrine.  La  décifîon  de 
toutes  les  queftions  qui  n'intéreffent  perfonne  &  oit 
qui  que  ce  foit  ne  comprend  rien  doit  toujours  être 
laiiTée  aux  Thigologicns. 


LETTRE.  23:1 


kmcnçTur  la  Loi,  mais  fur  la  mîfon,  qù.ne 

veutpa$  qae  Ijes Juges ,  de  qui.  dépend  le.foîçt 

deg  particulièFs  en  pui/Tent;;  décider  autrement 

qiie  (ur  dçs  £sùts  conflans  ,^  iur  des  corps  de  4ér 

Uc  pçfiofs,  bien  avérés,  &  non  fur  des  impu- 

utîons  auffi  vagues  aufli  arbitraires  que  c^ 

ks  des  çrrcu^s  fur  la  Religiqn;;  &  de  queltç 

fureté  jouiroienc  les  Citoyens ,  fl  ;  dans  tani^ 

de  dogmes  obfcurs  ,  fiifçeptibks  de  diverla; 

interprétations  5  le  Juge  pouvojt  chqiiîr.  au 

ffé  de  fa  paflion  celui  qui  cbargeroit  ou  q1£^ 

culperoît  l'Accafé,  pour  tecondanner  ou  Tafo 

foudre? 

La  preuve,  de  ces  dilHnélions  âd  dans  fi^h 

(Htution  nieme,.qui  n'aUroit  pas  établi  m% 

Tribunal  inutile;  puifque  (îJeXpafeil  pouyoiç 

•  ^^ 

PS^  r  furtOHS  en  jHremîer  •  rçflbrt ,  des  matieroii 

eccléfiaftiques  s  l'inflitution  du  ConiUloire  ne 

fcrviroit  de.rieît      :. 

P4 


*<  ^ 


as*        C  I  N  Q"U  I  E  M  E 

Elle  eft  encore  en  mille  endroits  de  rO> 
Confiance ,  où  le  Légiflateur  dîftÎDgue  avec 
tant  de  foin  rautoricé  dea  deux  Ordres  ;  dis- 
^âîon  bien  vaine ,;  fi  dans  Teieercice  de  fës 
fondions  l'un  étoit- en  tout  fournis  à  l'autre. 
Voyea  dans  les  Articles  XXIH  &  XXIV.  la 
fpëcifioation  des  crimes  puniffables'  par  les 
téix ,  &  de  ceux  dont  h  première  inqutjitm 
appartient  au  Conjiftotre.  .    .     .  ' 

Voyez  la  fin  du  même  Arcide  XXIV ,  qui 
veut  qu'en  ce  dernier  cas,  après  la  conviclioa 
^  coupable  le  Confiftoire  eii  faflfe  rapport  au 
Confeil ,  en  y  ajoutant  fon  avis.  Afin ,  dit  I'Of-. 
<î(M>nance  ,  tjfiie  le  jygemenP^  concernant  la  punu 
ti&h  fok  toujours-  refervé  à  la  Seigneurie.  Tep* 

4 

mes  d'où  Ton  -doit  inférer  que  le  jugement 
concernant  la  domine  appartient  au  ConfiA 
Ifolre^ 
Yej^z  1^  fçw.ent  à,ts  Miniftres,  qui  ^eçft 


♦^     L    Et    T    R    É.  233 

de  ft  rendre  pour  leur  part  fiijets  &  obéiflàns  ' 
aox  Loix;  &  au  Magiflxac  entant  que  leur  Mi- 
niftere  le  porte  :  c'eft-à-dire  fois  préjudicîer  3 
la  liberté  qu'ils  doivent  avoir  d'enfeigner  félon 
que  Dieu  le  leur  commande^  Mais  où  lêroit 
cette  liberté  sîils  étoient  par  les  loîx  ftijets. 
pour  cette  doârine  aux  déciflons  d^un'  autre 
corps  que  le  teur  ? 

Voyez  l'Article  80 ,  où  non  feulement  FEdît 
prefcrit  au  Confiftoire  de  veiller  &  pourvoir 
aux  défordres  généraux  &  particuliers  de  !*£« 

life,  mais  où  il  l'inflituê  à  cet  effet.  Cet  artî- 
cle  a-t-il  un  fens  ou  n*en  a-t-îl  point  ?  eft-îl  ab-'  * 
folu,  ri'eft-îl  que  conditionnel  j  &  le  Confiftoi- 
re établi  par  la  Loi  n'auroit-fl  qu'une  èxiften- 
ce  précaire,  &  dépendante  du  bon  pkdfîr  du 
Confeil? 

Voyez  l'Article  97  de  la  même  Ordonnance, 
OÙ  ^s  les  cas  qui  exigent  punition  civile  |  il 

P  5    ' 


i34         9  IN  Q  U  I«  M  E 

cOa  dit  qae  le  Confiftoire  ayant  ouï  les  Parties 
&  fait  les  rcQioatniQces  &  cenfutes  ecdéûaf- 
fiques  doit  rappj^ter  le  toQt  .^u  Ceofeil,  lequel 
fur  fon^  rapport ,  remarquez^  M^ .  la  répétîtibii 
de  ce  mot  ^Mifera  à" ordouni^.ÇiJ^irejugemmt^ 

filon  Pixigencê  du  ^  cas.  Voyes^>  eogni  ;ce  qui 
iuit  dans  1q  .  w^tpe  Article  :i  &^  n'oubliez  pas 
que  c'elt  le  Souverain  qui  parle  Car  combim 
que  csfwnt  jçhof es. conjointes  ^  injeparables que 

« 

la  Seigneur k  ^  Jup/érimti  que  Dietf  nous  a  dm- 
née  y  ^  kiiouvememer^  fpirituelqu^ilji  établi 
4ans  fon  Kgl^e  5  elles  ne  doivent  nullement  être 
çqnfufesi  pmfqus.celuî  qui  \a  tout  empire  de  com- 
mander ^  auquel  nous  voulons  rendre  toute  fu- 
jétion  comme  nous- devons  y  veut:  être  4ellement  re- 
connu Au,tei!ir  du  Gouvernemenf  ffiliti^e  £f  ec" 
cléfiajlique ,  que  cependant  il  a  expreJJ&ment  dif"^ 
cerné  tant  M  vocations  que  TadmniftTûftion  de 
Tun  S  de  Vrmtre^ 


\ 

t 


L    E    T    T    RE.  %ss 

» 

Mais  camment  ces  adminUfa^doQs;  peuvent- 
elles  être  diftinguées  fous  raatoricé  commune 
du  Lëgjflateur,  11  Tune  peut  empiéter  à  Ton 
{ré  fur  <^e  de  Tautre.?.  S'il  n'y  a  pas  Jà  de  la 
cootradi^on»  je  n'en  fiturpif  Voif  nyHe  p0i& 

A  FArade  .88,  qui  prefcrît  expreflëment  l'ol^ 
dre  de  {«'océdure  qu'on  doit  obferver  contre 
ieux  qui  dogmatifent ,  j'en  joins  un  autre  qui 
n'eft  pas  moins  impartant  ;  c'efl:  l'artide  53  au 
ti&e  du  CêtbicUfme^  où  il  efl:  ordonné.  91e  ceux 
qui  contreviendront  au  bon  ordre  ^  jiprés  avoir 
été  remontrés  Tuffifamment ,  s'ils  perfiftent  ^ 
foient  appeOés  au  Confîfloire, . ^  fi  lors  ih  ne 
vwlsnt  obtempérer  aux  remôntraiKes  qui  leuf 
feront  faites,  qu'il  en  Jînt  fait, rapport  à  la  Sek 
gnenrie.  '  « 

De  quel  bon  ordre  efl-il  parlé  là  ?  Le  Tkrci 
le  dit  ;  c'eft  du  bon  ordre  en  matière  de  doc-r 
Trine  «  nuifqu'il  ne^asit.CRie  du  Qthéchîfine 


ti6        CI  N  (^  U"I  É  M  E 

qui  en  eft  le  Ibmmaire.  D*aîlleurs  le  maîmicn 
du  bonoÈdre  jen  général  parbît  bien  dIus  ap- 
paTtenk  au  JMàgîftrat  qu*a^  Tfîbiinal  ecdéflaf- 
tîque.  Cépleîldani:  voyez  quelle  gradation!  Pre- 
métcmslntHl  faut  remontrer  j  fi  le  coupable  per- 
fifte  ,  il  faut  Vàppeller  au  Cffriji/loire  ;  enfin  s  il 
ne  veuf  obtempérer,  tlfcSir  faire-  rapport  àk 
Seigneurie.  En  toute  matière  de  foi,  le  d<*- 
nier  reflbrt  eft  toujours  attribué  aux  Confeils; 
telle  eft  la  Loi .  telles  fbnir  toutes  vos  Loil 
J*attenck  de  .vôîrqudqueiiftîcle,  quelque-paP 

4 

ikge  dans  vos  Edks ,  en  veriù  duquel  lè  petit 
Confèil  s'attribue  auflî  le  premier  reflTort*,  & 
paifle  faire  tout  d'un  coup  d'un  pareil  délk  le 
fejet  d'une  procédure  eritninelle. 

Cette  marche  n'efl  pas  feulement  contraire  à 

M  Loi ,  elle  eft  contraire  à  l'équité  ,  au  bon 

fens,  à  l'ufage  univerfel.   Dans  tous  les  pays 

du  monde  la  règle  veut  qu'en  ce  qui  concerna 


L    B    T    T    R    E  S37 

une  fcience  ou  un  art,  on  prçnne,  avant  que 
de  prononcer  y  le  jugement  des  Profeflëuri 
dans  cette  fcience  ou  des  Experts  en  cet  art  ; 
pourquoi ,  dans  la  plus  obfcure  dans  la  plus 
diffidle  de  toutes  les  fciences ,  pourquoi ,  lors- 
qu'il s'agit  de  l'honneur  &  de  la  liberté  d'un 
homme,  d'un  Citoyen ,  les  Magiftrats  négli^ 
geroient-ils  les  précautions  qu'ils  prennent  danf 
l'art  le  plus  mécanique  au  fujç(  du  plus  v^ 
intérêt? 

Encore  une  fois ,  à  tant  d'autorités  &  tant 
de  raiibns  qui  prouvent  l'illégalité  ôc  l'irrégula* 
rite  d'une  telle  procédure  qudle  Loi ,  quel  E- 
dit  oppofe-t-on  pour  la  juflificr  ?  Le  feul  pat 
fage  qu'ait  pu  citer  l'Auteur  des  Lettres  eft  ce« 
lui  ci,  dont  encore  il  tranfpofe  les  tçrmes  pour 
en  altérer  refprit. 

Que  toutes  Us  remontrances  eccUJiafiîqaes  f§ 
fajjent  en  telle  forte  que  far  k  Çonjijioîrc  ne /oit 


i3*         C  I  N  Q  U  ï  Ê  ME. 

>n  rien  dérogé  à  t autorité  de  h  Seigneurie  ni  if 
iajuflice  ordinaire;  mais  que  la  puijpmce  civih 
demeure  en  fon  entier  (rf). 

Or  voîd  la  conféquence  qu'il  en  tire.  „  Cet- 
,,  te  Ordonnance  ne  fiippofe  donc  point,  corn* 
9,  me  on  lé  fait  dans  les  Représentations  que 
9j  les  Miniilres  de  FEvangile  fbîent  dans  ces 
'9,  matières  des  Juges  plus  naturels  que  les 
;,  Conieib.  ^^  Commençons  d'abord  par  remet4 
tre  le  mot  Confeil  au  fîngulier,  &  pour  cauiê^ 

Maïs  où  eft-ce  que  les  Répréfentans  ont 

> 

fappofé  que  les  Miniftres  de  FEvangile  fulTenc 
dans  ces  matières  des  Juges  plus  naturels  que 
le  Confeil  (e). 


fd)  Ordonnances  eccléfiaftîques  Art.  XCVIL 
(e)  L'examen  6P  la  difcuffion  de  cetts  rnatierê ,  dl- 
fent-ils  page  42  ,  appartiennent  mieux  aux  Minif- 
tres de  r Evangile  qu'au  Magnijù^  CenfeiL  Quelle  e(l 
la  matière  dont  il  s'agit  dans  ce  paffage?  Ceft  la 
queltion  fi  fous  l'apparence  des  doutes  j*ai  raSembIti 


LE    T    T  .R  '  E.  23^ 

SdontEdit  le  CJonfiftoire  &  te  Confea  font 
Jages  nataïdi  chacun  dans  ià  partie,  Fan  de  la 
doârine ,  &  Tautre  du  délk  Ainll  la  puiflan- 
ce  civile  &  Tecdéfiaftique  refteht  chacune  en 
fou  entier  fous  Fautorité  commune  du  Souve- 
rain  ;  &  que  fignifieroic  ici  ce  mot  même  de 
Puijjance  civile ,  s'il  n'y  avoît  une  autre  Puijpm* 
ftf  fous-entendue  ?  Pour  moi' je  ne  vois,- rien- 
dans  ce  pafiàge  qui  change  le  fèns  naturel  de^ 
ceux  que  j'ai  cités.  Et  bien  loin  de-là;  les  li- 
gnes qui  fuîvent  les  confirment,  en  détermî* 
nant  l'état  où  le  Confiftoire  doit  avoir  mis  la 


dans  mon  Litre  tout  ce  qui  peut  tendre  à  fapper  é-; 
branler  &  détruire  les  principaux  fondemens  de  la 
E^llgioQ  Chrétienne.  L'Auteur  des  Lettres  part  de-' 
là  pour  aire  dire  aux  Eépréfencaos  que  dans  ces. 
matières  les  Miniftres  font  des  Juges  plus  naturels 
que  les  Confeils.  Ils  font  fans  contredit  des  Juges* 
plus  naturels  de  la  queftion  de  Théologie  ^  mais 
non  pas  de  la  peine  due  au  délit,  &  c'eil  auffî^ce 
qu€  Us  Réf  réfentans  n'ont  ni  dit  ni  fait  entiendrd. 


5> 


fi4ô_      C  I   N  Q  U  I  E  M  È 

iprocédure  avant  qu'elle  fbit  portée  ae  Confeîi. 
Çeft  précifément  la  conelufîon  contraire  à  cel- 
le  que  l'Auteur  en  voudroît  tîrerj 

Mais  voyez  comment ,  n'ofant  attaquer 
rOrdonnance  par  les  termes ,  il  l'attaque  par 
les  conféquenceSé 

L'Ordonnance  a-t-elle  voulu  lier  les  mains 
^  à  la  puifTance  civile ,  &  l'obliger  à  ne  ré- 
„  primer  ajicun  délit  contre  la  Religion  qu'a- 
yy  près  que  l^Confiftoire  en  auroit  connu  ?  Si 
^  cela  étoît  ainfi  il  en  réfulteroit  qu'on  pour- 
3^  roit  impunément  écrire  contre  la  Religion  ; 
n,  car  en  faiiant  femblatit  de  fe  ranger  l'accufé 
„  pourroit  toujours  échapper,  &  celui  qui  au* 
„  roit  diffamé  la  Religion  pai*  toute  la  terre 
y^  devtoit  être  fupporté  fans  diffame  au  moyen 
„  d'un  repentir  fimulé  (/).  '^ 

.       Ceft 

I  y     ii'iii  iliiiMii    m  «iiirti  n  m"    I  II         •         I  I  ~ 


LE   T   t   6.   Ê»         441 

C*eft  donc  pour  éviter  ce  malheur  a^ux, 
cette  impunité  feandakafe  ^  que  TAucear  ne 
veut  pas  qu'on  fuîve  la  Loi  à  la  Lettre.  Tou- 
tefois fei2e  pages  après  »  le  même  Auteut  vous 
parle  ainfik 

jy  La  politique  &  la  philôfophie  pourrooc 
)^  foutenir  cette  liberté  de  tout  écrire  ^  mais 
))  nos  Loix  Tont  réprouvée  t  or  il  s'agit  de  fa«> 
),  voir  fi  le  jugement  du  Cohfeil  contre  les  Ou-- 
5,  vrages  de  M.  RçufTeau  &  le  décret  contre 
I,  fa  perfonne  font  contraires  à  nos  Loix^  3t 
9)  non  de  favoir  s'ils  font  conformes  à  la  phi« 
),-  lofophîe  &  à  la  politique  (g).  *• 

Ailleurs  encore  cet  Auteur  ^  convenant  que 

la  flétrUTure  d'un  Livre  n'en  détruit  pas  les  ar« 

gumens  &  peut  même  leur  donner  une  publî« 

eité  plus  grande ,  ajoute  :    ,,  A  cet  égard ,  je 

; ' — =-r 

(g)  Page  30. 

Partît  l  Q 


,s^4^         Cl  N  Q  U  I  E  M  E 

i^  retrpuve  afîez  mes-maximes  dans  ceHes  des 
^.„  Répréfentadons.  Mais  ces  maximes  ne  font 
.„  pas  celles  de  nos  Loix  (h).  " 
^^  En  refFerrant  &  liant  tous  ces  pafTages ,  je 
leur  trouve  à  peu  près  le  khs  qui  fuit. 
-  j^WiP/jM^  I^  Pbilofafhîe  la- Politique  (^  la  rai/on 
^^piiffent  fotUerîîr  la  liberté  de  tout  écrire^  on  doit 
Jans  notre  Etat  punir  cçtte  liberté  y  parce  que  nos 
Jjoix  la  réprouvent.  Mais  il' ne  faut  pourtant 
juïs  fuivre  nos  Loix  à  la  Lettre ,  parce  (^ alors 
an  ne  pîtnîroit  pas  cette  liberté.'    . 

A  parler  vraî,  j'entrevois  là  je  ne  fais  quel 
galimathias  qui  me  choque  ;  &  p9urtant  F  Au- 
,c«r  „  paroit  ho,nm.d-erp™  :  ainfi  dan,,  ce 
ré  fumé  je  penche  à  croire  que  J€  me  trompe 
fans  .qu'il  me  foit  pofliblô  de  yoir  en  quoi 
.Comparez  don«  vousrmême  les  pages  14,  22, 


(b)  Page  22. 


I      I 


3^5;  &  vous  verrez  fij  ai  tpitt  «ou  raifiJn:  ; 
:  Quoi  qu'il  en,  foie ,  en;  aitendant  qile  F Aotçuft 
nous  montre  ces  autt^S  Loîx.oii  les'prëcôptéa. 
it  là  Philôfophie  &  de  Jà  Politique  font  té- 

k        0 

prouvés ,  repireilons  l'exameii  de.  fes  objeéliàn^ 

contre  celle -ci. 

,.  «  •  »  t    I  •  •  •  • 

Premièrement,  loin  que,  de  peiir  de  hiSkx 
m  délit  impitm  >  A  Toit  pertnis  dans  une  Ré-^ 
pubSque  au  MagUbrat  d'ag|;rayer  la  l«oi  i  il  né 
lu  ell  pas  même  pernaif  de  Tétiendcé  aVix  dé**, 
lies  fur  lefquels  elle  n'eft.  pas.fprmelle^  &  Tbni 
feît  cojtabien.de  Coupables  lédjappehç  epjftjx* 
gleterre  à  .k  faveur  de  la  moindre  diûinâdûn 
fahàk  dans  les  termes  de  la  .Loi  Qmoniue  ejl, 
.  pins  févere  que  les  Loix ,  dît  Vauvenargue,  eji 
un  Tyran  (?). 


*         « 


i^iA. 


^'4 


■  (/)  Comme  il  n/y  a  point  à  Genève  de  Loîx  pén«-.. 
1*5  proprement  dites,  le  Magiftrât  inflige  arbitrair«-i 
mencja  poine  à^os  crimes;  ce  qui  «û  affUréin^î  un^ 


2U       C  ï  N  Q  U  t  E  M  E 

JVfais  voyons  fi  la  conféquence  de  Timpun}' 
té»  dans  Tefpece  dont  il  s'agit ,  eft  fi  terrible 
^ue  l'a  fait  TAutear  des  Lettres* 

II  faut  9  pour  biim  juger  de  refprit  de  h 
Loi,  fç  rappeller  ee  grand  principe,  que  les 
meilleures  Loix  criminelles  font  toujours  celles 
qxà  tirent  de  la  tmmt  des  crimes  les  châti- 
mens  qui  leur  font  impofês^  Âinfi  les  aflaiSns 
doivent  être  punis  de  mort ,  les  vofeurs ,  de  la 
perte  de  leur  bien ,  ou,  s'ils  n'en  ont  pas ,  de 
cdle  de  leur  liberté,  qui  eft  dors  le  fêul  bien 
qui  leur  refte.    De  même,  dans  les  délits  qiû 


grand  défaut  dans  U  Légiflatîon  &  un  abus  énorme 
dans  un  Etat  libre.  Maïs  cette  autorité  du  Magif- 
trat  ne  s'étend  qu'aux  crimes  contre  la  loi  naturelle 
&  reconnus  tels  dans  toute  fociété ,  ou  aux  chofes 
fpécialement  défendues  par  la  loi  pofitive  ;  elle  ne 
va  pas  jufqu'à  forger  un  délit  imaginaire  oii  il  n*/ 
en  a  point  ,  ni ,  fur  quelque  délit  que  ce  puiiTe  ê- 
trc,  jufqu'à  rcnverfer,  de  peur  qu*un  <:oupabIe  n'é^ 
Chape  ^  l'ordre  de  la  procédure  fixé  par  la  Loi. 


LETTRE.         MS 

font  uniquement  contre  la  Religion ,  les  peines 
doivent  être  tirées  uniquement  de  la  Religion  ; 
tel  efl  9  par  exemple  ^  la  privation  de  la  preu- 
ve par  ferment  en  chofes  qui  l'exigent  ;  telle 
efl:  encore  l'excommunication  ,  prefcritte  ici 
comme  la  peine  la  plus  grande  de  quiconque  t 
dogmatifé  contre  hi  Religion.  Sauf,  enfuite, 
le  renvoi  au  Magiftrat  y  pour  la  peine  civile 
due  au  délit  civil,  s'il  y  en  a. 

Or  il  faut  fe  refibuvenir  çie  l'Ordonnance, 
TAateur  des  Lettres,  &  xnoî,  ne  parlons  ici 
que  d'un  délit  fimple  contre  la  Religion.  Sî 
le  délit  étoit  complexe ,  conune  fi,  par  exeni- 
pie ,  J'avoîs  imprimé  mon  Livi-e  dans  l'Etat 
fans  permiflion,il  eft  inconteftàble  que  pour  ^ 
tre  abfous  devant  le  Confiftoire ,  je  ne  le  férois 
pas  devant  te  Mâgîflfat .  ;    ^ 

Cette  dîftinâîon  faite ,  je  reviens  &  je  dis: 
|I  y  a  cette  différence  encre  les  .délits  contre 


«7 


4«        CINQUIEME 


Ja  Religion  &  lés  dt^lits  civils,  que  les  dernierî 

». 

fôôt  aux  hommps  ou  aux  Loix  un  tort  un  mal 
fée!  pour  lequel  laf  'ficelé  publique  ex^ge  néceff 
faiiieipônc  réparâtÎDn&pamrion; .mais les  au- 
tres'font  ^feqleijientJdfisoffienfes  contre  la  dj- 
xûnité ,  à  qoî .  nulî'ne  •  peut  nuîre.  &cgui  pardon* 
/leaupepencià.  C^iKÎk  ditûnité  dlappaifce, 
if  nly  apluîj  dé  délit  s^  punir,  fiuî  le  Tcandale,' 
&  le  fcandale-iferrëpard  en  donnant  au*xepei^ 
«tir  la  méibé  publicité  xjnk  eu  la  faute.  La  cha- 
rité Chrétienne ,mîii3e  âlofs  la  clémence  divine, 
&,  ce  feçQÎt  iintf 'inconféquence  abforde  de  ven*- 
•ger  k  Religion  par  une  rigueur* que.  la  Religion 
féprouve.  La'juflice'liumaine  h%Sf,xie,d(i^ 
-avoir  nul.ëgàra'ai  jcqjentir,  j^fâvouci  mai? 
'm)i}âj  p]9écifçoiéiit'pDurquoi;,.<kRs^ane  .efpeca 
de  délit  que  le  repentir  peut  réparer,. VOrdoHf 
^cë  appris  dttsm^uf es  poiu:.qneJ*;Arihuna. 
^Ur.n^  pritapas:  d'abord  canuQt>6k^K&      : 


L    E    T    T  /R    E.  ?43î 

L!îiK:5nvériienctembje  quç  l'Auteur  tKHjyjj 
à  laiflèr,  impunis  cîvileiilent  les  délies  contre  1^ 
Religion  n'a.  donc  pas  h  réalité  qu'il  lui  donne  ^ 
&  la  ocMSiféquence  .qii'iî  en.  tire  pour  prouver 
que  x^\  ttîeft  pas  T^fpfit  de -la  Loi,  n'eft  'ppl^i 
jufte,  contre  les  termes  J  fqrniels  de  laL^V  '• 

AmA:^^li^'m  çié  h  délit  eçntre  la  Religion  ^; 
ajoute  - 1  -  il ,  taccufé  en  faifartf  femblanf^  df  fc^ 
rang9r  potaira,  taiijdu0^  éebçppp\z:  L'Oefdonnarvcc 

y  dk©a%i-^!M/^^V:'j^|72è/^^7t^<?/*-  r^?^5.^^'^-eiie^ 
dit,  /iljt  r^i|g^,:(&..ii;yîa'des  règles  auflî  cer- 
uines  •qi^'pîi5îÇû  puiiTe,  av<ïjr  '§n^  tout  ^utre  cas; 
ppuc  difticgu^r  ici.  1*. réalité :dg  laTauffe  ap^^i^* 
rence  ,  furtout  quant   aux   effets   extérieur 3  ,f 
feuls  conjpjfis;  fpus  ce,  mot;  sHl  fe  raug^^^.-r 

C9in»ei;r,un -pouijeau  d^t  plus  gravé  -&  <juî^. 
mçrite  up  trajtf:ement  p|us  rigoureuse.    H  efl  rcr^ 

bps ,  &les  Toyes  de  le  ramener  à  fon  devoir 

•     '  ■       ...        '-::.-: *  . .  :  /    '.  j 


V 


148  CINQUIEME 

font  plus  féveres.  Le  Conjëil  a  là  ddfiu  pomr 
modèle  les  formes  jadidaires  do  rinquifitioa 
(1),  &  fi  rAqceur  des  Lettres  n'approuve  pas 
qu'il  fbit  auffi  doux  qu^elIe ,  il  doit  au  moins 
loi  laiiTer  toujours  la  diftinâion  des  cas  ;  car 
îl  n'eft  pas  permis ,  de  peur  qu'un  délinquant 
ne  retoin^>  de  le  tr^ter  d'avance  comme  s'il 
étok  déjà  retombée 

Ceft  pourtant  fur  ces  fauflês  conféquenoes 
que  cet  Auteur  s'appuye  pour  a£Srmer  que  1'% 
dit  dans  cet  Article  n*a  pas  eu  pour  objet  de  ré^ 
gler  la  procédure  &  de  fixer  la  ci^npétence  des 
Tribunaux.  Qu'a  donc  voulu  VEdit;  félon  lui? 
I^e  vQÎcî. 

Il  a  voulu  empêcher  que  le  Confiftoire  ne  fô- 
vir  contre  des  gens  auxquels  on  impnteroît  ce 
qu*ils  n'auroient  peut-être  point  dît ,  où  dont 
on  auroit  exag;éré  les  écarts  j  qu*il  ne  févît,.dî^ 


g  "  ■  ^'  ^. 


(10  Voyçî  le  mm\iel  dçs  Inquifitcms^ 


LETTRE.  «49 

je,  contre  ces  gens-là  fans  en  aVoir  conféré  a« 
vec  eux,  fans  avoir  ei&yé  de  les  gagner. 

Mais  qa*efl>ce  qae  févir,  de  la  part  du  Con« 
fjibire  ?  Ceft  eïcommuaier ,  &  déférer  au 

ConfeiL  Ainfi,  de  peur  que  le  Confîftoire  tm 

défère  trop  légèrement  un  coupable  au  Con* 

feil  9  rSdit  te  livve  tout  d*un  coup  au  ConieiL 

Ceft  une  précaution  d'une  efpece  toute  nou« 

velle.  Cela  eft  admirable  que,  dans  le  même 

cas,  la  Loi  prenne  tant  de  mefûres  pour  em« 

pêcher  le  Coidtfboire  de  fêvir  prédpitanmient» 

&  qu^elle  n*en  pfenne  aucune  pour  empêcher 

le  Conleil  de  févir  précipitamment;  qu'die 

porte  uae  attntira  fi  fcrupaleufe  à  prévenir 

la  diflfamation»  &  qu^elle  n'en  donne  aucune  à  j 

|«évenir  le  (upi^ice  j  qu'elle  pourvoye  à  tant 

de  choies  pour  qu'un  homme  ne  foit  pas  a-') 

» 
cônmiumé  mal^à-pfopos^  &  qut'dle  ne  pour^r^ 

wye  h  rien  pour  qu'&ne  (bit  pai  brûlé  mal^^ 

Q5 


250        C  IN  Q'U  TE."»MvfE 

r 

Minifl:re5 ^  &  •  fi  peu.ceïle  -des:: ]^s  I  - Cétwt 
bkn  Tait  •  affiirémôntdefcoçïpcer  pour  beâu- 
cbup  la  communion  4es  :fideHes$':màis^ce  nl^! 
toit  pas  bâen  fait  de  'Comif-eE>ppj[|r  fi  pelu  leifl^ 
fôreté,  fcur.  libeFté,  •leuciY»}i^-S:ôttC;iiaçûiCi. 
Religion .  qui.  •  ptefcrîyoikj^nfciâ'iôdulgence  f  à. 
fes  gardiens  ,  ne  devoij  p^jî.'doi^rvtftnt:')^ 
barbarie  à  f€s'vfngpuïi.;:.i:r,,Li  zi:^  if..^  ,.' 

•^  Voik.-ço«refôi$  j  fôJoa.iiotijetiAqtQaci  hk: 
lide.raifoii:ipôiirq*jo(î  lX)i:dooifîilî®tîn*à  ffes^tsir.; 
lu  dire  ce.  qw:^[e^dàt;  :  J^.-CJ^gMj  que^  Ifcxfw^ç: 
c'efl'  affeç  :y  .répançîre.  ; .  faiTQns  im^ntenm  à^l 
Tapplicatioà  ;  jn»l»  Ae  la  ^tr^i^^f^^ft  |^  ïxmk 
curîeofe.  que.i'ifit^pflétîitiî^   ;0  ,  p  ,:  , .    .     : 

dogmsifife  i  quifcofeiga^  ,~goi , içftrijil..  ll:..nç, 
qui  nfi  ÊW:qs^,p»l)U«rj:W.  Jâvre.  ^;^i4^,j»^ 


'  U   E'  T    T    R    R  -.       ist 

« 

fcrpliT^  &Jt\enbcsa'T€çoCi  A^Aiié\2s  vérité, 
cqtte^diftiïiGliamnB  paroît  unpéu.fiibtîle;car^ 
eomme;  difeot  trè^  bjenlcp  Répréfentaqs,.oq 
dogmaûfe  ^eécvit^^tçat  ctAnixiç  deivivcivoix; 
R^aîs  admettûM  cette  futtfflitéi;  nous  y  troinre* 
tons  une  âiIf{hf}:iDti;i9aiËivetii;  ^uriadjoucir  b 

pans  .t<^&-.lejf;|^cai:s.  à\\  mqn^.Ja  poliœ 
yelile  avec  le  plus. grand  foin  :fuf.,cpu?., qui  va^^ 
itruilencqui  eçfdgnei^t  (^.^ç>j^p^Qj^;,éi^ 
oe  pcmet  çp?,  fojtçç^de  fça^p^  fl">:g«}J^ 

autorinis...  Il.p'fflhP3?.#"Sf  BerWIt"?^.  ?^^ 
la. bonne  do£lrinç,fi  Ton  n'eft  ^ç£  prédica- 
teur. Le  Peuple  ^yeog^^  elt  facile  à  déduire j 
«in  homnne^V  49gmatîfe  ,,^ttroupe,,  &  bieu^, 
tôt  îlnem  ameuter.  La  moindre  entreprifera 
.«se.pcânç  efl  toujours, rç^ard^ecpçime  qn-.^« 
.teetqt  •  pui^f&^lp, , ,  ^  qiufc  des  .conf^q^e^ee$ 


35»       C  I  N  q  U  I  E  M  E 

^  Il  û'etî  eft  pas  de  même  de  FAuteur  6tm 
l^ivre  ;  s'il  enfeigne  »  au  moins  il  n'actroiq)e 
poîat ,  il  n'ameute  point  »  il  ne  foice  perfon^- 
ne  à  récouter,  à  le  lirej  il  ne  voas  recherche 
point  9  il  ne  vient  que  quand  vous  le  recher'- 
chez  vous-même  ;  il  vous  laiiTe  réfléchie  fur  ce 

qu'il  vous  dît  ^  il  ne  difpute  point  avec  vous» 
ne  s'anime  point,  ne  s'obfline  point,  ne  levé 
point  vos  doutes,  ne  réfout  point  vos  objec- 
tions, ne  vous  pourfuit  point  j  voulez -vous  le 
quitter,  il  vous  quitte,  &,  ce  qui  eft  ici  Far- 
tîcle  important,  il  ne  parle  pas  au  peuple. 

Auffi  jamais  la  publication  d'un  Livre  ne  fut- 
elle  regardée  par  aucun  Gouvernement  du  me- 
hie  œil  que  les  pratiques  d'un  dc^matifêur.  I) 
y  a  mêmef  des  pays  où  la  liberté  de  la  prcflfe  eft 
entière}  mais' il  n'y  eii  à  aucun  où  il  foit  per- 
mis à  tout  le  monde  de  dogmatifer  îndiffé* 
femmo&t.    Dans  les  pa;|[s  où  il  eft  défewia 


t.  t  t  t  t.  t»       If) 

dl^ittprîméf  dei  hbnea  fans  penaiffion  i  eeofc 
qui  défobéîiîeflt  font  punis  quelqilefois  pour  s(« 
voir  défobéi }  tms  la  preuve  qu'on  t&  regiur de 
pas  au  fond  te' que  dit  un  Livfe  iSdmme  u66 
choPô  fart  itt^ôrtstnte  ëft,  lafadlité  avec  kh 
quelle  on  Mft  entrer  dans  VZm  ces  méméA 
Livres  que,  pour  n'en  pas  paroître  approuve^ 
les  maximes ,  on  n'y  làiife  pas  imprimer* 

Tout  ced  eft  vrai,  furtoat,  dés  Livres  qiil 
ne  font  point  écrits  pour  le  peuple  tels  qu'ont 
toujours  été  les  miens.  Je  fais  que  votre  Con^ 
feil  afiirme  dans  fes  réponfes  que ,  félon  Pimen* 
tion  de  F  Auteur^  TEmU  éoit  fervir  de  guidé  aux 
ferez  ^  aux  mnes  (/);  mais  cette  aflotioti 
n'efl:  pas  excufable ,  puifque  j'ai  manifeflé  dans 
la  préface  &  plufî^urs  fois  dans  le  Livre  une 
intention  toute  différente.    Il  s'agit  d'un  noa« 

y 

> 

(0  Page  2a  &  23  ,  des  Répréfentations  impri*- 
mées. 


^54         0;I.N  (^  U  I  «  lit  Ë 

•veau  r^&èm  d'éducadon.dciiï:  f<^r^  fô  |)]an'  » 
J'examea  4e&  fag^s,  &  non  pas  d'One  méthode 

ai 

pour  les  pères.  &  les  mères ,  à  lagbelle  je  n'ai 
Jamais  fongé^  Si  quelquefois,  par  une  £gure 
aflez  commona  >  je.pvoîs  leur  adrefièt  h  pa- 
role, c'eft)  ou.  pour  mie  faire  mîâoz  entendre^ 
*  pu  pour  m'exprîmer  en  moins  de  mots.  Il  efi 
vrai  que  j'entrepris  mon  livre  à  1^  foUidtaciotl 
d'une  m^re  ;:  m^ais  cette  mère,'  toute  jeune  & 
toute  aimable  qu'elle  -efl,  a  de  la  philofophia 

&  connoit  le  cœur  humain  i  elle  eft  par  la  &• 

»  • 

gure  im  ornement  de  fon  fexe,  &  par  le  génie 
ijne  exception      C'ed  pgur.  les  eiprits  de  k 

trempe  du  £ien  que  j'ai  prîç  la  plume»  non  pour 

"        -   ■  «  .' 

des  Meffieurs  tel  pu  tel,  ni  ppuf; d'autres  Mef- 
(leurs  de  parçille  étoffe ,  qui  me  lifent  faid 

,  ê 

©'entendre  3t&  V^  m'outragent  fans  me  fâcher; 

4 

Il  réfukc  de  la  diftînélion  fuppofée  que  fi  la 
procédure  pf'efcritte  pHr  l'Ordôbrianœ  coiitre 


;L.E:.T;    T    R    B;    ,       ^^55, 

'  ion. homme  i]ui.dogmatife,n'efl:  paat  ajpplicable  2 
l'Auteur'  d'un  Livre,  c'eft  qu'elle  efl.trop  fé- 
vere  pour  ce  dernier.  Cette  confëquence  fi 
naturelle , ,  cette  confëquence  que  vous  &  tous 
mes.leSteurs  tirez  fûrement  ainfi  que  moi,  n'eft 
point  cdie  de  l'Auteur  des  Lettres.  II  en  tire 
une  toute  contraire.  H  faut  l'écouter  lui-mê- 
me :  vous  ne  nfen  croiriez  ^psis  >  fi  je  vous 
parlois  d'après  lui. 

„  Il  ne  faut  que  lire  cet  Article  de  l'Or- 
^  donnance  pour  voir  évidemment  qu'elle  n'3 
,,  en  vue  que  cet  ordre  de  peribnnes  qui  ré; 
,,  pandent  par  leurs  difcours  des  principes  eftî-  * 
,,  mes  dangereux.  Si  ces  per formes  Je  rangent^ 
„  y  eft-il  dit,  (pion  les  fupporte  fans  diffame. 

é 

„  Pourquoi?  C'eft  qu'alors  on  a  une  fureté 
raifonnablc  qu'elles  ne  répandront  plus  cet- 
te  y  vraye ,   c'eft  qu'elles  ne  font  p'.us  à 

„  Grainiir«.    Mais  qu'importe  la  rétraftatioa 


5> 


J9 


^SS       C  ï  N  Q  U  i  E  M  fe 

),  vraie  ou  fîmalée  de  celui  qui  p^  la  voyè' 
3,  de  rîmpreilion  a  imbu  tout  le  monde  de  fes 
^y  opinions?  Le  délit  efk  confommé;  il  fbb^ 
),  ûflera  toujours,  &  ce  délit,  aux  yeux  de  It 
„  Loi ,  e(t  de  la  même  efpece  que  tous  les 
y,  autres,  où  lé  repentir  efl  inutile  dès  que  la 
„  juftice  en  a  pris  coiinoiflance.  " 

II  y  a  là  dequoi  s^émouvoîr ,  mais  Calmons^ 
nous ,  &  raifonnons.  Tant  qu^un  homme  dog« 
matife ,  il  fait  du  mal  continuellement  ;  juT^ 
qu*à  ce  qu'il  fe  foit  rangé  cet  homme  eft  k 
craindre;  fa  liberté  même  eft  un  mal,  parce 
qu'il  en  ufe  pour  nuire  ,  pour  continuer  de 
dogmatifer.  Que  s'il  fe  range  à  la  fin  ,  n'im^ 
porte;  les  enféignemens  qu'il  a  donnés  font 
toujours  donnés ,  &  le  délit  à  cet  égard  eft:  au* 
tant  confommé  qu'il  peut  l'être.  Au  contraire! 
auflitôt  qu'un  Livre  efl:  publié  ,  l'Auteur  ne 
fait  plas  de  ioal ,  c'efl;'  ]ç  Lîvfe  feUl  qui  en 

frit. 


LETTRE*  £57 

I  9    • 

Mt.  Que  FAuteitf  foît  libre  ou  (bit  arrêté,  lé 
Livre  va  toujours  foii  tfaîft.  La  d&entidn  dé 
TAuteur  peut  être  un  châtiment  que  H  Loi 
prononte  ,  mais  elle  n'eft  jamais  un  remède 
au  tôal  qu'il  a  fait ,  ni  utie  précaution  pdiu* 
en  airêtci:  le  {Jrogréi. 

Ainfi  les  rettiedes  à  ces  deux  maux  ne  foilt; 
pas  les  mêmes.  Pour  tarir  la  fource  du  mal  que  ' 
fait  le  ddgnultifeur  9 il  hyz  nul  moyen  prom^ft 
àlîir  que  de  l'arrêter:  maïs  arrêter  TAuteu^ 
c'eft  ne  remédier  à  rien  du  tout;  c'eft  au  con- 
iraire  augmenter  la  publicité  du  Livre  ,  & 
par  conféquent  empirer  le  mstl ,  comme  le  dit 
très  bien  ailleurs  l'Auteur  des  Lettres^  Ce  n'eft 
donc  pas  là  un  préliminaire  à  la  procédure,  ce 
n'eft  pas  une  précaution  cohvenalJle  à  la  cho' 
fe  ,•  c'eft  une  peine  cjui  ne  doit  être  infligée 
que  par  jugement ,  &  qiîi  n'a  d'utilité  que  lé 
châtimerit  du  coupable.  A  moins'  donc  que  fort 


/ 


1 


2j8         CINQUIEME 

délit  ne  foît  un  délit;  civil ,  il  faut  commencer 
par  raifonner  avec  lui,  Fadmonefler ,  le  con* 
vaincre  s  Fexhorter  à  réparer  le  mal  qu'il  a  fait, 
à  donner  une  récraflacion  publique ,  à  la  don* 
ner  librement  afin  qu'eue  faflè  fon  effet ,  &  à 
la  motiver  fi  bien  que  ces  derniers  iêntiniens 
ramènent  ceus:  qu'ont  égaré  lesi  premiers.  Si 
loin  de  fe  ranger  il  s'(^fHnç,  alors  feulemeQC 
on  doit  févîr  contre  \^  TeHe  ,eft ,  certaine- 
ment la  m^urdie  pqqr  aller  au  bien  de  la  cbofe) 

•  »  4»- 

td  efl:  le  but  de  la  Lei  >  té  fera  celui  d'un  fa- 
ge  Gouvernement ,  ^  ioiti  bien  moins  fe  pr(h 

» 

fofer  de  punir  T Auteur  que  d'empêcher  î effet  de 
rmvrage  (m)* 

ComHient  ne  le  feroit-ce  pas  pour  l'Auteur 
d'un  Livre ,  puifque  l'Ordonnance ,  qui  fuit  en 
tout  Iça  voyes,çonvenayes  à  l'efprit  du  CSirit 


(w)  Page  %^ 


tîâhîîbe ,  iie  veut  pzt  même  qu'on  arrête  !é 
dogmâdfeitt  âVârtC  d'avxHr  ëpuîfé  tdife  lei 
moyens  i^offibles  pour  le  rameiîet  au  devoir  f 
é\é  aime  mieux  Courii"  les  rifqùfes  du  mal  qu*i! 
peut  contînuef  de  faire  qiile  de  ttistatJliÈr  à  W 
charité*  ChefcheÉj  de  grâce  ^  d)mméhtdéce^ 
la  feul  on  peut  conclurre  que  la  mênie  Ordon^ 
fiancé  veut  qu*on  débuté  contre  FÀut^ur  pat 
un  décret  é6  prife  de  côirps? 

Cependant  1* Auteur  des  Lettres ,  après  avoî^ 
déclaré  qu*il  retrouvoit  alTez  fes  maximes  fui 
cet  article  dans  celles  des  Répréfentahs^^  ajou^ 
te;  mais  ces  maxims  ne  font  pas  celles  de  nos 
Loix^  &  un  itiomeilt  après  il  ajoute  encore  ^ 
que  ceux  qui  înclinent  à  une  pleine  toUranct 
pourmeht  tùuP  au  plus  critiquer  le  Confeil  de  ria^ 
voir  pas  dans  ce  cas  fait  faire  une  Loi  dont  F  ex* 
trcice  ne  leur  paroit  pas  convenable  (fi)*  .  Cette 

(«)  Page  33. 

R  a 


i^o         CINQUIEME 

condafion  doit  farprendre ,  après  tant  d'effbrti 
pour  prouver  qne  la  fêute  Loi  qui  paroît  s'ap- 
pliquer à  mon  délie,  ne  s'y  applique  pas  nécef* 
Virement.  Ce  qu'on  reproche  au  Çonfeil  n'eft 
point  de  n'avoir  pas  fait  taire  une  Loi  qui 
exifte,,  c'efl:  d'en  avoir  fait  parler  une  qui 
^  rfexifte  psks. 

•  -  La  Logique  employée  ici  par  l'Auteur  me  ' 
paroit  toujours  nouvelle.    Qu'en  penfez-vous, 
Monteur  ?  connoîflez- vous  beaucoup  d'argu- 
mens  dans  la  forme  de  celui-ci? 
.    La  Loi  force  le  ConfsU  é  févir  contre  rju- 
iem  du  Livrei 

.   Et.où  eft-cUé  cette  Ldî  qtti  fôrfe  lé  Confeil 
à  févir  contre  l'Auteur  du  Livre  ? 
•  -'■Elle  nexijie  pas^  à  la  vérité:  tnais  il  en  exif 
tewie  autre  y  quij  ordonnant  de  traiter  avec  doW' 
xewr  ç§Im  qui  dogmutife'i  ordonne  ,  par  conjt 


LETTRE.  t6t 

fierU,  de  traiter  arôec  rigueur  rjuteiir,  dmt  elle 
ne  parle  pomt: 

Ce  raîfonnement  devient  bîen  plus  étrange  en- 
core poyr  qui  fait  que  ce  fut  comme  Auteur  & 
non  comme  dogmatifeur  que  Morelli  fut  pour- 
fuivi;  il  avoît  auflî  feît  un  Livre ,  &  ce  fut  pouF 
ce  Livre  feul  qu'il  fut  accufé.  Le  corps  du  de'# 
lie,  feloij  la  maxime  de  notre^  Auteur  étoit  dans 
le  Livre  même ,  TAuteur  n'avoit  pas  befoîn 
d  être  entendu  ;  cependant  il  le  fut ,  &  non 
feulement  on  l'entendit  ,  majs  on  l'attendit  ; 
on  fuivit  de  point  en  point  toute  la  procédure 
prefcrite  par  ce  même  article  de  l'Ordonnance 
^u'on  nous  dit  ne  regarder  ni  Içs.  livres  "nî 

» 

les  Auteurs.   On  ne  brûla  même  le  Livre  qu'a-" 
près  la,  retraiçe  de  l'Auteur, Jamais  il  ne  fut  dé- 
crété,  Ton  ne  parla,  pas  da  Bourreau  (o);  en- 

(è)  Ajoutez  la  circonfpeaibn  du  Mai^idriiC  dans; 

R3 


»<Sa        C  I  î!î;  9  U  I  E  M  E 

fin  tout  cela  fe  "fit  fous  \e$  yeux  du  Légifla^ 
teur,  par  les  rédafteurs  de  TOrdonnance,  ao 
momeaat  qu'elle/ venoit  de  pafler  dans  le  tems 
même  où  régtioît  cet  eQ)rit  de  févéxité  qui , 
fdon  notre  Anonyme ,  Tavoit  diâée ,  &  qu  il 
allègue  en  juftification  trci  claire  de  la  rit 
gueur  exercée  aujourd'hui  contre  mou 

Or    écoutez  là  •  deflus  la  diftjnaion  qu'il 
fait,,  Après  ^voir  çypofé  toutes  les  voyes  (te 


|oute  cette  affaire,  fa  marche  lentç  &  graduellç  dans 
hiprocédiie,  Iq  rapport  du  Confiftoire»  Tappaieil 
du  jug^ement.    Les  Sindics  montent  fur  kui  Tribu- 
nal public,  Us  invoquent  le  nom  de  Dieu  y  ils  OBt 
|bU9  leurs  yeux  la  faînte  Ecriture  ;  apiès  une  meure 
Ôélibcratiou  ,  après  avoir  pr\s  cojpfcil  des  Citoyens  » 
ils  prononcent;  leur  jugcmçnt  devajnt  le  peuple  afin 
qu'il  en  fachc  les  -cau^s. ,    |Is  le  font  impsiniei  & 
publier ,  &  tout  cela  pour  la  fîm^Ie  çondannation. 
d'un  Livrç,  Cans  fïéttlSùte,  fans  décret  contre  l'Au-. 
%€ui  ,  opiniâtre  &  coptulijax.     0?s  MeŒcurs,  de-. 
puis  lors,   ont  appris  à  difpofer  moins  cér^iniônieu- 
feinent  de  l'honneur  &  de  la  liberté  des  hommes,  & 
fur^out  des  Citoyen?  ;   Cajç  il  qfl;  4  rem,ai^uer  ^^ft 
l^oxqlU  n^  r^çoi^  f  asu^ 


9> 
99 


LETTRE.         263 

douceur  dont  on  ufa  envers  Morellî ,  le  tems 
qu'on  lui  donna  pour  fe  ranger,  la  procédure 
lente  &  régulière  qu'on  fuîvît  avant  que  fon 
Livre  fut  brûlé,  il  ajoute.  „  Toute  cette 
marche  efl:  très  fage.  Mais  en  faut^îl  con- 
clurre  que  dans  tous  les  cas  &  dans  des  cas 
„  très  différens,  il  en  faille  abfblumerit  tenir 
„  une  femblâble  ?  Doit  -  on  procéder  contre 
„  un  homme  abfent  qui  attaque  la  Religion 
\j  de  la  même  manière  qu'on  procéderoit  con- 
„  tre  un  homme  préfent  qui  cenfuré  la  dîfci- 
„  pline  (p)?**  Ceft-à-dire  eh  d*autreç  termes  ; 
„  doit- on  procéder  contre  uii  homme  qui 
„  n'attaque  point  les  Loix ,  &  qui  vit  hors  de 
„  leur  jurifdiftion ,  avec  autant  de  douceur  que 
„  contre  un  homme  qui  vit  fous  leur  jurifdic- 
„  tion  &  qui  les  attaque  ?*^   Il  ne  fembleroit 

V 

O)  PàgÇ  17.  •     '  j 

R4 


fy 


64      c  1  ^  qv  1  E  U  E 


pas  5  eu  effet ,  que  çeja  dut  faire  une  queflîpn. 
Vqicî,  j'en  fuis  fur,  1^  première  fois  qu'il  ^ 
pafle  par  refprit  humain  d'aggraver  k  peine 
^'un  coupable ,  uniquement  pa^rce  que  te  crir 
me  n'a  pas  été  commis  dans  l'Etat. 

„  A  la  vérité ,  "  çontînue-t-il ,  ,9  on  remar- 
^  que  dans  le?  Répréfentatîons  à  l'avantage  de 
,j  M.  Rouflean  que  Morellî  avoît  écrit  ccStitre 
ly  un  point  (Je  difciplîne ,  au  lieu  que  les  Lî' 
„  vres'de  M.  Rouffeau,  au  fentimenc  de  fes 
,,  Juges  ,  attaquent  proprement  la  Religion. 
j,  Mais  cette  repairque  pouuoit  bien  n'être 
^i  P^  généralement  adoptée,  ^  ceux  qui  r^ 
^,  gardent  la  Religion  comme  rOfivrage  de 
p  Dieu  &  l'appui  de  la  çonflitution  pourront 
„  penfer  qu'il  efl  moins  permis  de  Tatt^quêr 
,,  que  des  points  ^  difciplîpè,  qui ,  n'étant  que 
„  rOuvrage  des  hommes  pi^uvent  être  fuf* 
,^  peéls d'erreur,  &f  du  moin?  fufceptible?  4'^1 


<  • 


L    E    T   >T    R    E.       '26s 

„  ne  infinité  de  foripes  &  (^  çonibinaîfon» 
^  différentes  (5}  ?•  •         .; 

Ge  difcours,  je  vous  Tavoue  ,  me  paroîtroîf 
tout  au  p^s  paflable .  dans  la  bouche  d'un  Ca,- 
pucia,  mzis  il  mç  chogueroit;  fiyt  fous  1^  plu- 
me d'un  jMagîftrat.:  Qu'irappjtç  gue  la  remarr  » 
qiie  des  Répréfentans  ne  fbit  pas  génçralemeiv 
:;doptée,  G.  ^ux  jjui  l^- rejettent  nç  le  font  qup  „ 
parce  qu'ils,  rajfomienç  mal  ?   ... 

Attaquer  la  Religion  ed  iaps  cppt^edît  qn 
plus  grand  péché  :  devant  Diçu  f^  d'attaquer 
la  difcipline.  Il  n'en  efl  p^s  dp  .mem^  devauf 
Içs  Tribunal^  jbumaîns  qui  font  ^blis  ppur 
punir  les  aimes,  non  les  péchés ,  &  qui  ne 
fpnj  pas  les  vengeurs  de  Dieu  maîs^,  des  Loî^, 

La  Religion  ne  peut  jam^  faire  partie  de  I9 
]Lési{]atîon  qu'en  ce  qui  concerne  les  a6lions 


»  .• 


t6é        CINQUIEME 

Ses  hommest  La  Loi  ordonne  de  faire  ou  de 
s^abftenir,  mais  elle  ne  peut  ordonner  de  croî. 
re,  Ainft  quiconque  n'attaque  point  la  pratique 
de  la  Religion  n'attaque  point  la  Loi, 

Mais  la  difcipline  étabUe  par  la  Loi  fait  eA 
fencietlement  partie  de  la  Légiflatîon  y  elle  de* 
vient  Ld  dle-n^ême.  Quiconque  Fattaque  at^ 
taque  la  Loi  &  ne  tend  pas  k  moins  qu'à  txo\i^ 
hier  la  conftitution  de  l'Etat.  Que  cette  con* 
ftitutîon  fut,  avant  d'être  établie ,  fufceptibte 
de  plufîeurs  formes  &  combinaifons  différen-* 
tes  y  en  eft^lle  moins  refpeéfabte  &  facrée 
ibus  iHie  de  ces  formes,  quand  die  en  efl  une 
fois  revécue  à  l'exclufion  de  toutes  les  autres; 
&  dès  lors  la  Loi  politique  n'eft  elle  pas  çon^ 
ilàte  &  fixe  ainfi  que  la  Loi  divine  ? 

Ceux  donc  qui  n'adopteroîent  pas  en  cette 
aSTaire  la  remarque,  des  Répréfentans  auraient 
d'autant  plus  de  tort  que  cette  remarque  fut 


LETTRE, 


2^7 


faite  par  le  Confeil  même  dans  la  fbntence  coq« 
tre  le  Livre  de  MorçIK  »  qu'elle  accufe  fîirtout 
de  tmàre  à  faire  fcblfme  &  trouble  dans  TEtat 
i'une  manière  féditîeufe }  impqtatîôq  donc  il  fe» 
roit  difficile  de  charger  le  mien. 

Ce  que  les  Tribunaux  civils  ont  à  défendra 
n'eft  pas  TOuvrage  de  Dieu ,  c'efl  FOuvrage 
des  hommes  j  ce  tfeft  pas  des  âmes  qu'ils  font, 
chargés  ,  (fell  des  corps  ;  c'ell  de  l'Etat  Se 
noix  de  l'Eglile  qu'ils  font  les  vrais  gardiens,  âg 
lorfqu'ils  fe  mêlent  des  matières  de  Religion , 
ce  tfeft  qu'autant  qu'elles  font  du  reiTort  des 
Loix  j  autant  que  ces  matières  importent  au 
ton  ordre  &  à  la  (ûreté  publique.  Voila  les 
laines  maximes  de  la  Magiflxature,  Ce  n'eft 
pas  j  fi  l'on  veut ,  la  dofbrine  de  la  puifFancQ 
abfolue ,  mars  c'eft:  celle  de  la  juftice  &  de  la 
raifon.  Jamais  on  né  s'en  écartera  dans  les 
Tribv.nau)(  civils  fans  dpnner^  dans  les  plus  ï^ 


/ 


358         Q  I.N  Q  U-  lE  M  E 

nèfles  s^bus ,  fans  mettre  l'Etat  çn  com^uftîon. 
ikns  faire  des  Loix  &  de  leur  autorité  Je  plu? 
odieux  brigandage.  Je  fuis  fâché  pour  Je  peu- 
pie  de  Genève  que  le  Confeil  le  méprife  afTez 
pour  Tofer  leurer  par  de  tels  difcours^  dont 
les  plus  bornés  &  les  plus  fuperûitieux  de  l'Eu- 
rope ne  font  plus  les  dupes.  Suf  cet  Article 
vo?  I^épréfentans  raifonnent  en  hommes  d'E- 
tat, &  vos  Maçiflrats  raifbnnent,  en  Moines. 
Pour  prouver  que  l'exemple  de  Morçlli  n^ 

-   -    -  *  -  • 

fait,  pas  règle ,  l'Auteur  des  Lettres  oppofe  à 

¥■*  •  *  »  •' 

la  procédure  faîte  contre  lui  cçlle  qu'on  fit  ep 
1632  contre  Nicolas  Antoine  y  un  pauvre  fou 
qu'à  la  folîicitation  des  Minîftres  le  Coofeil  fit 
brûler  pour  le  bien  de  fon  ame.  Ces  Auto-da* 
fès  n'étoient  ,pas  r^res  jadis  à  Genève,  âç  ij 
paroit  par  ce  qui  me  regarde  que  ces  Mcf- 
fleurs  ne  manquent  pas  de  coût  pour  Içs  rcj 
nouveller. 


LETTRE)         i6p 

Commençons  toujours  par  tranfcrîre  fiddle* 
mèot  les  palTages  ,  pour  ne  pas  îmicet  la  mé^ 
thode  de  mti  perfécuteurs. 

„  Qu'on  voye  le  procès  de  Nîcdâs  Antoî- 
^  ne  L'Ordonnance  ecclélîaftîqué  exîftoît ,  & 
^  bn  étoit  âfTez  près  da  teitis  où  elle  avok  été 
„  rédigée  pour  en  connoître  refprit  ;  Aikoine 
),  fat-il  cité  au  ConlHtoîre  ?  Cependant  parmi 
^  tant  de  voix  qui  s'élevèrent  contré  cet  ' Ar-» 
^,  rêt  fanguûiaire,  &  au  milieu  des  efforts  que 
iy  firent  pour  le  fauver  les  gens  humains  & 
9,  modérés  »  y  eut  «il  quelqu'un  qui  réclamât 
5,  contre  l'irrégularité  de  la  ptodédurie?  Mo- 
^  relli  fut  cité  au  ConTiftoire  y  Antpine  ne  le 
iy  fut  pa$;  là  ckatiop  au  Confifloiré  n^eil:  donc 
^,  pas  nécefikiï'e  dans  tous  les  cas  (r).  " 
-    Vous  croirez  là  deffus  que  le  Confeil  procès 


(f)  Pa«e  17. 


,  j 


V  ^  ^- y 


s 


I?d        CINQUIEME 

da  d' emblée  Contre  Nicolas  Amôioe  comme  il 
a  ùk  contre  moi ,  &  qu'il  ne  fut  pas  feuler 
ment  quefiîon  du  Coniiftoire  ni  des  Mlnîftres  i 
Vous  allez  voîrr 

Nicolas  Antoine  ayant  ëté^  dans  un  de  fes 
accès  de  fureur ,  fur  le  point  de  fê  précipiter 
dans  le  Rhône,  le  Magiftrat  ie  détetnnnlà  1$ 
tiret  du  logis  public  où  il  étoit ,  pour  le  mett 
tre  à  FHÔpiul ,  où  les  Médecins  le  traitèrent» 
Il  y  refla  quelque  tems  proférant  divers  btaf« 
phêmes  contre  la  Rdigion  Clirétienne*  ^,  Les 
yy  Minifixes  le  voyoient  tous  lesr  jours  ^  &  ta* 
5^  choient ,  lorfque  fa  fureur  paroifToit  an  peu 
^  calmée,  de  le  faire  revenir  de  fes  erreurs» 
^  ce  qui  n'aboutit  à  rira ,  Antome  ayant  die 
jy  qu'il  perfifleroit  dans  fès  ientimens  jafqu'i  la 
,,  mort  qu'il  étoit  prêt  de  fouffrir  pour  la  gloi* 
5,  te  h  grand  Dieu  d^ïfrael.  N'ayant  pu  rien 
99  pgner  fur  lui ,  ils  en  informèrent  le  Cbn* 


L    E   T    T   B;.  jEo        t7t 

ly  feil  9  où  ils  te  f ëprëfenterent  pïït  que  Servet , 
y^  Gentilis  &  tous  les  autres  Aoidtxmtsâxe$^ 
^  conduant  à  ce  qu'il  fut  mis  en  chambre 
„  claufe;  ce  qui  fut  exécuté.^*  (x)» 

Vous  voyes  là  d'abord  pourquoi  il  ne  fiit  pas 
dté  au  Confiftoire;  c'efl:  qu'étant  griévemeoc 
mahde  &  entre  les  mains  des  Médecins,  il  lui 
écoit  impoflibte  d'y  comparoitie.  Mais  s'il  n'al« 
loit  pas  au  Coofîftoire»  le  Coniifloire  oa  fea 
mend>ies  aUoient  vers  lui.  Les  Miniffares  lo 
voyoienc  tous  les  jours ,  l'^xhortoient  tous  lea 
jours.  Enfin  n'ayant  pu  rien  gagner  fur  lui,  ils 
le  dâioncent  au  Confeil,  le  répr^lentimt  pirer 
que  d'autres  qu'on  avoît  punis  de  mort,  re* 
quià-ent  qu'il  foit  mis  en  prifon^  &  fur  leur 
rquifition  cela  ç&  exécuté. 

£n  prîfon  même  les  Minières  firent  de  leur 

(0  Hîft.  de  Genève  ,  in -12.  T.  2.  page  550  & 
fuiv;  à  la  note. 


<v 


t^i        CINQUIEME 


mieûïc  pour  le  nuxiener ,  entrèrent  avec  lui 
dans  la  difcaffion  de  diveils  paifages  de  Tan^ 
den  Teftament^  &  te  conjurèrent  partout 
ce  qu'ils  puràit  imagina:  de  plus  touchant  de 
renoncer  à  fes  erreurs  (r)  ^  mais  il  y  demeora 
ferme.  Il  te  fîit  auffi  devant  le  Magifliat,  qui 

lui  fitfubir  les  intexrogatdires  ordîaakes;  LorP 

y. 

qu'il  fut  quellion  de  jugeï  cette  affiiirc^  le 
Magifixat  cbhfulta  encore  lés  Miniftres,  qui 
comparurent  en  Con&il  au  nombre  de*  quinze  ^ 
tant  Pafteurs  que  Profefleurs:  Leurs  opinions 
forant  '  partagées  ,   niais  l'avis  du  plus  grand 

V 

sotnbre  fat  foivi  &  Nicolas  exécuté.  De  forte 
que  te  procès  fut  tout  eccléfiàflique  ^  &  que 

Nicolas 

(*)  S'il  y  eue  renoncé,  eut-il  également  été  brù- 
K  ?  Selon  la  maxime  de  l'Auteur  des  Lettrée  il  au- 
rolt  dû  l'être.  Cependant  il  paroit  qu'il  ne  l'auroit 
pas  été;  puifque,  malgré  fon  obftination  ,  le  Ma- 
giftrat  ne  laifla  pas.  de  confulter  les  Miniftres.  Il  1« 
regardoit ,  en  quelque  forte  >  comme  étant  encore 
fous  leur  jurifdi^lîon. 


LETTRE»  6^3 

Nicolas  fiit^  pour  àinfi  dire^  ^rûlé  pax  la  maia 
des  Mmiflreà 

Tel  ht  9  Mooikdr)  fonîfe  <le  )a  praeédure 
dans  laqudle  l'Auteur  des  Lettres  nous  aflTure 
iga?Antoîbe  ne  fut  pas  dté  au  Confiftoire.  D'o^ 
il  coQdud  que  cette  ckation  n*eft  donc  pas 
toujours  néceflâitei  L'eiemple  vous  paroit^U 
bien  cfaoîfî? 

SuppofoUs  qu^il  ie  fcky  que  sWuitrà«t«il^ 
tes^  Rëpréfentans  cocduoieitt  d'un  fait  eQ 
oonfiimatîoii  d'une  LoL  L'Autent  des  Let^ 
tKs  coiidud  .d'un  fait  contre  cette  m^e 
Loi  Si  rautQrité  de  chacun  de  fes  deUx  faîci 
détruit  cdié  d$  Tautre^  refte  la  Loi  datts 
fôn  entiqn  Cette  Loi»  quoiqu'une  fois  eQ» 
freinte^  en  eft-elle  moins  exprefTe,  &  CM* 
toit -il  de  ravoir  violée  une  fois  pour  avoif 
droit  de  \i  violer  tôujooii  i 

Concluons  à  tootre  tour.    Si  j'aî  dogtâa^*. 

Partie  t  8 


s^i^        C  t  N  Q  Ù  t  E  M  Ë 

fe ,  je  fuis  certainement  dans  le  cas  de  lâ 
Loi:  fi  je  n'ai  pas  dogmatîfé  ,  qu'a- 1- on  k 
Jne  dire?  adcurie  Loi  n*a  parlé  de  moi  (u). 
Donc  on  a  tranfgrelTé  la  Loi  qui  ezifte,  oa 
fuppo*e  celle  qui  n'exifte  pas. 

»  '  *         *  • 

Il  efl:  vrai  qu'en  jugeant  FOuvrage  on  n'i 
pas  jugé  définitivement  TAuteun  On  tf a  fait 
.encore  que  le  décréter ,  &  Ton  cbmpte  cela 
pour  rien.  CSela  me  paroit  dur ,  cependant; 
mais  ne  ibyons  jamais  injuftes ,  même  envers 
ceux  qui  lé  font  envers  nous,  &  ne  cherchottt 
'point  l'iniquité  où  elle  peut  ne  pas  être.  Je  ne 
fais  point  un  crime  au  Conlèil ,  ni  même  à 

-  ^  *  " 

l'Auteur  des  Lettres  de  la  difBnâbn  qu'ils 
mettent  entré  l'homme  &  fe  Livre ,  pour  fe 


(w)  Rien  de  ce  qui  ne  bleflç  aucune  Loi  natit 
relie  ne  devient  criminel ,  que  lorfqull  eft  défendu 
par  quelque  Loi  pofitive.  Cette'  remarque'  a  pom 
J3ut  de  faire  fentîr  aux  raifonneurs  fupeificieUqae 
mon  dilemme  eft-  exa£t. 


i 


L    E    r  T    R    E 


27-5 


âî&ulper  âe  m'avoîr  jagé  fans  m'enténdcç.  Les 
Juges  ont  pu  voir  la  chofe  comme  ils  la  mon- 
trent ,  ainfi  je  ne  lès  accufe  en  cela  ni  de  fîi« 
percherie  ni  de  inàai^&foj.  Je  les  accule  ièu- 
lement  de  s'êtoe  trompés  à.  tnes  dép^ds  eg 
un  point  très  grave;  &  fe  tromper  pour  ab- 
foudre  efl  pardonnable,  mais  fe  tromper  poœ 
punir  eft  une  erreur  bien  cruelle. 

Le  Confeil  avançoit  dans  fes  répohfes  que» 
maiffé  la  âëtrilTure  de  mon  livre,  je  reftois, 
quant  à  ma  perlbnne ,  dans  toutes  mes  ex- 
cq^tions  &  défenfes. 

Les. Auteurs  des  Réprëfentations  répliquent 
qu'on  ne  comprend  pas  quelles  aceptk>ns  & 
défenlês.  il  refte  à  un  homme  déclaré  impie^ 
téméraire  ,  fcandàleux,  &  flétri  même  par  la 
main  du  Bourroau  dans  des  ouvrages  qui  por- 
tent fon  nom. 

»  Vous  fuppofez  ce  qui  n'eft  points,  ^^  Jdiç 

S  a 


tjô        CINQUIEME 

à  cda  TAuteur  des  Lettres  ;  „  ÙLVàir ,  qoe  le 
^  jugement  porte  fur  celui  dont  TOuviage 
^  porte  le  nom  :  mais  ce  jugement  lie  Ta  pas 
^,  encore  effleuré,  Tes  excepticxDs  &  àékafb 
^j  lui  refient  donc  esttieres/^  (x). 

Vous  vous  trompez  vouirmême,  dîroi^je  à 
xec  écrivain.  'Il  eft  vrai  que  le  jugemeot  ^ui 
qualifie  &  flétrit  le  Lme.  n'a  pas 'encore  atta- 
.que  la  vie  de  T  Auteur,  mais  il  a  déjà  tué  fon 
.honneur  :  Tes  exceptions  &  défenfes  lui  reftent 
encore  entières  pour  pe  qui  regarde  la  peine 
aifiiâive ,  mais  il  a  déjà  reçu  la  peine  ioâp 
mante:  Il  efl  déjà' flétri  &  deihonnoré,  aa« 
tant  qu'il  dépend  de  fe  juges  :  h3L  feufe  diofe 
^  leur  refle  à. décider,  c^efls'il  fera  brûlé 
ou  non*        '     \  . 

I 

-   La  diftiuâion  fur  ce  point  entre  le  Livre  & 

-    (*)  ftjc  tu    ■     ■ 


LETTRE.  377 

PAateur  efl:  inqtfe,  pulf^u'un  Livre  a'efl:  pat 
punifiahlé^  Uii  Livre  a^eft  en  lui  *  même  ni 
impie  ni  lânëraire  ;  ces  épithetes  ne  peavent: 
tomber  que  ilir  la  doârmequ'^  contient  ^  c'efl^ 
à-dire  fcur  TsAnteur  de'  ce«e  'doS:rine'..  Quand 
on  brûle  xtu  Livre,  que  .fait  là  le  Bourreau  9 
Desbonore^fit.^ il  lea  feuillets r  du  Livre?  qui 
jâimaîs:6uSt.ditt  qu'unLivrejeqt  5ie  rhomieur^ 
YoSafenjeûr;  eq.  vçim  la Joiffce:  uaidago 

Kûl  dQjfemliiu;  '  .   "  .  .  -: .    • 

.  On  écrit  heauùçHîp  de  Lîvjf€S;î/on  en  écrk 
peu  avecimddis  iincere  d^aller  au  bien^  Dq 
cent  Onyrages  qui^  paroiSsm;^  foixajiïe  :  au; 
moins  <;^c>  popr  objet  des  motifs  dlntàrêt  &, 
d'ambition.  Tiente  antréi^  diâés  pay  TeipriH 
de  pacM,  p2B;ix  h9ine^T<»ni^\à'lâ.  fayeur  tic 
Fanonyiôe'poijter  dans  ïe  pul^lic  le  poifon  d& 
la  calonmield;  de  la.  fatyie.  IHxy  peut-être  j, 
&  c'djt  beaùcoi^,  fonc  ^cciu  dans  de  bom^ 

S3 


27»        C  I  N  Q  U  I  E  M:E 

vues:  on  y  dit  la  vérité  qu'on  fidt,  on  y  cher- 
che le  bien  qu'on  akie.  Oui  ;  mais  où  e(t 
rhomme  à  qui  l'on  pardonne  la  vérité  ?  II  faut 
donc  fe  cacher  povir  la  dire.  Pour  être  utile 
3mpuném£nt,  on  lâche,  fon  Livre  dans  le  pu- 
blic, &  l'on  fait  le'^pbngeon. 

De  ces  divers  Livres ,  quâques  uns  des 
mauvais  &  à.peuprès  ù>us  les  bonsl font  dé* 
nonces  &  profcrîts  dahs>  les  Tribunaux:  la 
araifon  de  cela  fe  voit  fans  que  je  la  dife.  Ce 
-n'elt,  au  furplus,  qu'une  fîmplefonmUté,  pooc 
ne  pas  paroître  ap^ouver  tacitement  ces  Li- 
vrés,- Du  rcfte^  pourvu  que  les*  noms  des  Au- 
teurs n'y  (bient  pas-,  ^es  ^Acteurs,  quoii|ue  toat 
le  monde  lçsconiK)Ufe&., les. noiiimevhè Tout 
pas  connus  .du'  Magiik^t  Ekinecu!s:inçme  font 
dans  i'uSige  d'avouer  ces  Livres^poqrs^én  faire 
honneur  ,  &  dé  les  renier' pour  feîmettre  k 
couvert;  le  même  homme  feaa  l'Aàeizr  m 


'_ 


LETTRE.  strg 

ne  le  fera  pas»  devant  le  mêtne  homme  félon 
qu'ils  feront  à  l'audience  ou  dans  un  foupé. 
Ceft  alternativement  oui  &  non ,  fans  difficul- 
té, làos.  fcrupule.  De  cette  façon  la  fureté  ne 
coûte  rien  à  la  vanité.  Cefl:  là  la  prudence  & 
l'habileté  que  l'Auteur  d.^  Lettres  me  repro* 
che  de  nWoir  pas. eue,  &  qui  pourtant  n'exi- 
ge pas ,  ce  me  femble  ^  que  pour  l'avoir  on  fe 
mette  en  grîffldft  fraix  d'efprît  .   . 

Cette  manière  de  procéda:  contre  des  Livres 
anonymes:  dcçt  on  ne  .veut  pas  ccnmoître  les. 
Auteurs  ^efl:  devionue  un  ufage  judiciaire* 
QQaad,on:veUtfçvir  contre  le  Lîyre  on  le 
brûle,  parce,  qu'il  n'y  a  j^rfonng  ^  entendre^ 
&  qu'on  voit  bien  que  l'Auteur  qui  fe. cacher 
n'efl;  pas  d'hameui:  à  l'ayo^^;.(àuf  à  rire  le 
foir  avec  lui  -  même ..  des  infpnnations  qu'on 
vient  d'<s:4<wper  J*  matin,  contre  lui.    Tel  eft 

s  4 


aSo       C  IJMIQ  p  l  E  M:E 

4 
m 

;;  Mablorfqu'on  Aateôr  mal-adxô:;  c*e(I:-a- 
4ire^  un  Auteur  qui  coonoit  foot  devoir ,  qia 
le  veut  remplir,  ib  crqk  ob^gé  db  qe  rien  dire 
au  publie  qu^ii  ne  f  avoue ,  qu'ilne  fe  acrâme  î 
qu'il  ne  fe  monti^  pour  eo  ré|KDad£e ,  :^rs  l'é» 
quité,  qoi  ne  doit  pâé  punk  cominte  uq  crime 
la  mal'Udreflfe  d'un  homme  d'hôn^^oar ,  v^ut 
qu'on  proœde  ^^vec  hû  d~une  zxexe  rnsoiierei 
elle  veut  qu'on  4ie  îé^t  ^oipf,  I4  ciuleda  Li« 
vre  de  ceHe  4e  f  honune ,  pui^li  àédist  en 
mettant  Cm  nom  ^ne  I^  vouloir  pmit^^9t^j 
die  veut  qu'on  ne  jc^e  f  ouvrage  q^ui  fie  peut 
répK^dre^'  qu^â^ri»  avoir  oùï  l'Aufeur  <^  rf 
pond  pour  }ui.  Aîtifi ,  bien  que  c&ndaunei;  un 
Livifè^onjmô  fdit^en  e£Fet  ne  condimierque 
te  Livre ,  condanner  un  Livr^  qui  pcsrte  le 
nom  de  FAuteur ,  c^eft  condanner  I^Aiitéur 
même  5  &  qu^d  oft  ne  Ta  pioint  wk  à  portée 
de  répondre^  (feil  le  juger  fans  ravoir  entendu* 


;  L;  Ç  W   T   R   Eo        iU 

veôt,  le  détïwdé  prîfe  ée  COffS  W^onc  in» 

dTf^iaiâblê  en  pôsml  ëds  avant-'Ué-  procédear  wi 

jogèment  du  Livret  &^Taînèmerit  dîroît-ori 

?vec  FAqteur  de$'jLettresqùè'Ié*<KlTt  êft-ét^î* 

dent,-  qu'^l^- ^irl^'  lime] ttêmè  j-  cela  ne* 

<S|teiifè  pçfot  ■  4e^  ftîvte  iâ'^Wfne-  jiidîcîaîfe 

gt}*oiti  iîiiit  dans  ]ësf  j^liis  grands  -  cirimes,  datisî 

»         •  - 1    »     •      f 

les-pfesi-vër^, 'dâhs'vles  niiènx  Couvés:  Car 

qçâhè  toute  la  Vîïe  aûrôît  Vu  iih'hwimè  enp 

a&flîaei'  lirt  uiitre-,  encore  iie^jujgeroît^-  on' 

pdnt,  raÛkffin  ftns  Tentendrei  oi]^  fî(n*  TàVô^r' 

p&  à  portée  d'être  entende  '      I 

-'Et  pourquoi  cette  frandiîfed^titf  Auteur  quî 

ft'Oomme  tou)rtîérôît-el!e  aîhii  côiîtfe  Im?  Ne* 

doit^eHepas,  au  contraire,  lui  iriéiS^er  des  ë^"^ 

gards*?    Ne  dbîtr-éBe  pas  înipbfô  ate'Jûg^^ 

pi»  de  cîrcbhïiie^ôn  que  s'il  ne-fe  fût  ]^i 

S5 


Cl  Nt  QUI  EUE 

^ns  hardies  s^e^^feroit^il  ainfiy^s'i}  oefe 
fentoît  rafloré  contre  les  dangers ,  par  des  rai- 
Ions  qu'il  peut  aSéguer  en  fa  faveur  &  qu'on 
peut, préiùmer  fur  fa  conduite  même  v^iloir  Jbi 
peine  d'être ,  entendues  ? .  L'Auteur  des  Let* 
très  aura  beau  qualifier,  cette'  conduite  d'im* 
prudence  &  de  xnal-adrdi&  ;  die  n'en  eUt  pas^ 
moins  celle  d'un  homme  d'honneur ,  qui  voie 
ion  devoir  où  d'autres  yoyent  cette  impruden* 
ce,  qui  fent  n'avoir  rien  à  craindre  de  quicoih 
que  voudra  procéder  avec  lui  justement ,  & 
qui  regarde;  comme  une  lâcheté  puniQkble  de 
publier  des  chofes  qu'on  ne  veut  pas  avouer, 
:  S'il  n'eft  queflion  que  de  la  réputation  d'Au- 
teur, a-t-on  be(bin  de  metgre  fon.  nom  à  ioa 
I^ivre?  •  Qui  ne  fait  comment  on  s'y  prend 
pour  en  avoir  tout  l'honneur  fans  rien  rifquer^ 
pour  s'en  glorifier  fans  en  répondre,  pour 
prendre  un  air  humble  à  fprce  de  vanité  ?  ]>e 


c    ■' 


^ 


L'E^  T    T:  R    E. 


^8S 


quels  AiÀeors  d^une  certaine  volée  ce  petk 
our  d'adr^fie  eft  -  il  ignoré  ?  Qui  d'entre  eux 
ne^fàît  qu'il  efl;  même  au  deflbu»  de  la  dignité 
de  fe  nommer^  tomme  fi  chacun  ne  devoit  patf 
en  IHant  TOùvi^ge  (feviner  le*  Grand  homme 
qui  Ta  ècMnpofé  ?  - 

Maïs  ces  Meffieurs  n'ont  vu  que  Fdkge  orr 
£naire,  &  loin  de  vofa:  res:c^tion  qui  faifoit 
en  ma  faveur^  ils  l'ont  faio  ftrvir  côAtre  moi^ 
Ils  devaient  bri!^r>4e  Livre ifans  fair&mentiitMi 
de  l'Auteur ,  ôils'ife^ett  vocâoiaiD  à  Muteur,' 
attendre  qu'il  fut  :|3Téfent'  ou  '  ccàitomax  pour 
brâlelr  le  li^re«:  Mais  points  ils  htùkat  le- 
Livre  comme- fi  TAuteum'étoît  pas  connu  ^  & 
décrètent  Muteûv  comme  fi  ile  Liwè  n'iétoit^ 
psi9  .brûlé.  rMe'Jécréter  après  mîavoir  diffa- 
Qié!  que  me  voulcuent-ils  donc  encore?  Que^ 
ftie  jéfervoiênt-ils  de  pis  daQs:]a:;fuite2.  Igoo^) 
roiçpt-ils.  qûe.i'lioQneut  d'un  hûQuéte 


Utiiim  -^- 


28*         €J  N  Q.Ut  HTlHlE 

9  lui  §sâxtà>  4i^M  "^^  a  cpriinfeiiQ!^;p«(r  le  âé-. 

pe  foctc  )ii!r9i£)  4é  la^mebdfieeft  la 'plus  cm^ 
le  peine  qu'ils  poiirroient  ia%m^eK>&,  fé^ 

:.  On  éom0iew5ftjîï£tf:irt&  tr^^    tous  ^as^ 

V 

4^s  fçixil  cc)]:^:&rpui9  oïl  dit  .^acquiHâmeob 
^ue  je  Tefb)f^s:^0utes:m«s  ex^€|)tion$  &  dé«. 
i^tiiibî  JSlaia' comment  ces /exceptions.  &  'dé-( 
fia^fes  effaoeroni^elle?  rig]iicimînl&  &:  h,  i^ 
qu'on  mlaurà  £ut  :  {buSrîr.  d'oroACè  ^  tjaa^ 
SQOQ  [Livre.  &  dans  ma.  pecf<j&ne!,  qufttfd  j'au^ 
lai  été  promeoé'jdaiis  les  rues  par  des  archëtf» 
^pand  mue  jiiàox.iguî  m'àccabtent  ou  aura  pri» 
ûm  d'aj(»ifiecies  rigtteuradeJla:pi^oa?  Quoi 


k  « 


t   E    T    T    H    E.,        isaar 


donc!  poat  être  jafte  dok^Qnr  confondre  dans 
la  même  clafie  &,  dans  le  même  traitement 
toutes  les  fautes  &  .cous.  les  hommes  ?  pour 
im  aâe  de  franchile  appelle  mal^adreilê»  faut-il 
débutser  par  traîcer  un  Citoyen  (ans  reproche 
dans  les  prifcms  a»nme/  un  fcélérai;?  Et  quel 
avantage  aura  donc  déviant  les  juges  TeClime 
publique  &  Tintégrité  de  la  vie  entière  ,  fi 
cliquante  ^s  d'honneur  vis  à  vis  du  moindre 
indice  (y)  ne  iâuvent  un  homme  d'aucun  af- 
front? 

« 

(y)  Il  y  auroît ,  à  Texamen  ,  beaucoup  â  rabac^ 
tre  des  pKéroint)tions  que  rAoteûr  des  Lettres  affeç^ 
te  d*accumuler  contre  mpi.  Il  dit;  par  exemple, 
^ue  les  Livres  déférés  paroîflbient  fous  le  mÔme 
format  que  mes  autres  ouvrages.  U  eft  vrai  qu*îU 
étoient  in  douze  &  in  oélavo;  Tous  quel  format  font 
donc  ceux  des  autres  Auteurs  ?  Il  ajoute  qu'ils  é^ 
toient  ifnprimés  par  le  même  Libraire^  voila  ce  qui 
h'eft  pas.  L'Emile  fut  imprimé  par  des  Libraires 
difFérens  du  mien  i  &  avec  des  carttéberes  qui  n*4- 
voient  fervi  à  nul  autre  de  mes  Ecrits..  Ainfi  I'In« 
dice  qui  réfuleoft  de  cette  confrontation  n'étoic 
point  contre  moi^  il  étoit  à  ma  décharge. 


r 


•â9S       Cl  N  Q  U 1  8  M  E 

,,  La  comparâifon  d'Emile  &  du  Gintrââ 

V 

,,  Social  avec  d'autres  Ouvrages  qui  ont  été 

',,  tolérés,  &  la  partialité  qu'on  en  prend  oc- 

„  cation  de  reprocher  au  Confeil  nei  me  ibm^ 

jy  blent  pas  fondées.    Ce  ne  feroit  pas  bien 

„  raifonner  que  de  prététidïe  qu'un  Gouver- 

„  nement  parce  qu'il  auroit  une  fois  difltmnlé 

„  feroit  obligé  de  diâimuier  toujours:  fi  ç'eftif* 

„  ne  négligence  on  peut  la  redrefler  ;fi  c'eft  un 

^y  filence  forcé  par  les  circondances  ou  par  la 

„  politique ,  il  y  auroit  peu  de  juftice  à  en  fai- 

,,  re  la  matière  d'un  reproche.  Je  ne  prétends 

point  juftifier  les  ouvrages  défignés  dans  les 

Répréfentàtîbns  ;  mais  en  confcience  y-a-t- 

„  il  parité  entre  des  Livres  où  l'on  trouve  des 

^9  traits  épars  &  indifcrets  contre  la  Religion, 

„  &  des  Livres  où  fans  détour  fans  ménage- 

,,  ment  on  l'attaque  dans  fès  dogmes  dans  fk 

-  » 
it  morale  «  àfps  fon  influence  fur  la  Société 


'^  L  É  T  t  k  «7     isf 

5  dvile?  Fàilbns  împàrtàlement  -  la  '  cbmpa- 
I)  raifon  4^  ces  Ouvrages ,  jugeons  en  par 
„  rimpreflion  qu'ils  ont  faite  di^s  le  mon^ 
9)  de  ;  les  uns  s'impriment  &  &  débitent  par 
,9  tout;  on  lait  comment  y  ont  été  reçus  les 
j,  autres  (2)."  .-  *  "  \ 

faî  cru  devoir  trànfcrîre  d'abofd  ce  para* 
graphe  en  entier.  Je  le  reprendrai  msûntenan» 
par  fragniens.  Il  mérite  un  peu  d'analyre.    ^ 

Que  n'imiMrime*t*on  pas  à  Genève  ;  que  t!f 
tokre  - 1  -  on  pas  ? .  Des  Ouvrages  qu'on  a  pfeiae 
à  lire  fans  indignation  s'y  débitent  publique-* 
ment;  tout  le  monde  les  lit  ^  tout  le  monda  lâr 
aime,  les  Magiftrats  Ib  taifent ,  les  Mioiilrei 
fourient,  l'air  auftere  n'eft  plus  du  bon  air. 
Moi  feul  &  mes  Livres  avons  mérité  i'animad^ 
verfîon  du  Confeil,  &  quelle  animadveriion? 


*W;       Ç'jt  I?  QUI  R  ME 

îi&a  ne  pçot  ttêiœ  Tima^et  p|us.  ^nioleiue 

\ 

9i  plaai  cemUa;  Mon  Dieu}  je  n'aurois  jamais 
cm  d'êlTQ  im  fi  s^  fcélérat; 
'.  Ia  compara^n  d^EpUle  &'du;  CmrûSt,  Sociâi 
(gpec  djaiaixs.  Owrû^es  tolérés,  ne  m  fimik  pi 
fondée}.    Ah  je  Felperel  -^ 

.;  Ce  ne  Jbroispas^  Ken  tai/ùf^ner  4^  ^riieiàe 
ftfun  Gouvermm^h  t^c^  qu'il  norois  une  fris 
ài[fimlé  i^Jefoil  obligé  4e  digmuler  toujmsk 
Cent }  nw.voyet  les  tems  les  «UeuK  les  perfon- 
Qe$ (  vojpez  les  écrits  far  le^œls  on  difliraule) 
ât.céux  qu'on  <:hoifit  poor  nepksdlàBEmQlerj 
WjesL  les  ^niewrs  qu'on  fêfe  ji  G«nèye,  & 
Foyez  ceuîc  qi^on  y  pourfuki 

^  Si  c'eji'une  négligence  on  peHt  là  ndreffer* 
On  le  pou\rôic^  on  Tauroit  dû,  Ta-t-on  fak^ 
Mes  écrits  6c  letlt  Auteur  oiit  été  pétris  fiuis 
avoir  mérité  de  rêtre;  &  œult  qui  l'ont  mé* 
rite  ne  font  pas  moins  tolérés  qu'auparavant. 


1  t  f  t  :r  Éi   •■    ii^ 


•    »  « 


L'exception  n'efl:  que  poir  «6i  feul; 

Si  C*èji-un  fiietke  foreê  pdr  Ui  ciféor^cÀéi^ 
^  par  l»  pdHtiquei  il  y  iiuiôît  féud»  jufilch  à 
en  fane^  la  matière  itùk./eprodië.  Sî  l'ôû  VGUJ 
fotceâ tolâiet  àti  Eàits  ptuâi&blei,  tolérétf 
donc  auffi  cènk'  qui  ne  te  Gtat  psa.  '  Ia  décantô 
au  oÀJio»  €3^  qu'ofa  iâche  Ai  peuple  caf 
dioqtântes  acceptions  dsf  peribnneaf,  qui  pu-i 
iâTdft  fe  fôible  iOnoiôbiC  de»  fiaxà  du  piÂic 
éoupabk  Quoi  !  «es  dStinâibc^  fâuxdâtettiê£ 
fimt^-^ës- ddâcf  des  nufbns  ,*:  ^  feront  ■•' elk» 
cofc^dufs  d«$  dapies  ?Ne  dM^-^  pss'  ^  fê 
fort  tife-qtidques  fatyïietf  bbicines:  JnMfi'^bdlWç 
«outylëi  FetëKtaô  ,"â  ^qiifif^i^tre:  Vitte^W  4fi 
£fc  édraféelfi  l'on  n'y  talerâi  •fri^Da'.ii^^.im^ 
I»îché,-iS-P)^'n'y  vetfitfiibiiqàemeiitrâsiaS- 

Auèeuts>?c  'FeopW,  càmî^ieii  ôi^  ^^^  jsû^.éu 
icérdo^'  soi:  âiTatt  fft  ^biimot  kièifJeoir  (Sàf 
Tarttt  t  T 


e^Q       CINQUIEME 

l  • 
Fuiflane^  pour  a«tQii&r  le  tqal  qu'dles  igao^ 

s^at  ^  qu'on  vaut  faire  en  Içiir  Qom  ! 

^  Ix^fque  j'airiyal  4^s.  ce  psiys  on  e^t  dit 

m 

des':f<ifibti  ^b9v  m'«f4eF«'i  4f»  bnl^yi^ftw 
Bi'aflaffiocr;  il  étok  apâai^.  si^audeiiit  f^  isf^ 
de  ma  iqaKba.  ToUs;!!^.:  d^Rgsn  -ga^  v^tm^j^ii 


I.   E   T   T   K   E.  M| 

^qvteiwbôuiljeaF  âe  papier  devenk  poor  Cotf 
uudheMP  m  homme  au0.iiQpQCfa|it;  EA^f 
iie  tfintdp  kéâSss,  jjp  sais  jea  Jff^A<?  j  Je  çpOr 

.On  m'accueille  j  on  me.,qu3efl8^,  jp  r^ 
.  le  hpanêfçtés  &  il  ne  t^'eipt  g^'à  Jnqi  /l'^  J^ç^' 
jceiTi^  jdfpuntaj^e.  Je  moi^giç  paiy^gillcqieJip 
«teç.inoi;,Uop,towbe,^  mn\eti}tçfi^ 

vi^  pas;  cm  bil;^,  fprteffwitt  mçn  éi^fîoxdâ^; 
jrie>  mwi  c^i  .çe0e  de.  pe  menacer  de  ^a Fir^s^; 
jCe;  on  a  railba.  Si  j^unais:  des  afls^ffiM  daX^I 
^nent  terminer  mes  lbuffi(^uv:es ,-,  ce.  n-efl  fa- 
resne^t  pas  de xe^pay^-là  qu'ils,  >pçfl^^  . ; 
.  Je  ne  qoxtfbz^ds  point  1^  diverfes^^  (ànici  àç 
pies  4^graoes;  je  pus  bien,  ififcecçer  celles .^ 
fond  Tefiçt-des  qrpcoilfauioetv  l'ouvrage  de  If 
infte  neceffit^,  4e  cdOes  fl^.ine  vicnfienç  np-» 
4jnen^ez^  del^  ha^e  4e  qies  eonen^s•  Pi  !  plâtr- 
ai «Dlieu  gue  je  ^'eft  euflê*  {as  flus  .i  .X#tïnè\^ 

T  A 


i^à      c  ï-t^  <}  1/  I  ■  Ë  il  é  • 

*qu'en  France ,  &  qu^is  n'y  fdfenr  pas  pfùir 

împlacàbles  f  Chacun'  fait  aujoprahui  d'où  font 

.  •      •  •  .      ♦ 

partis  les  coups  ^*on  m'a  pôrtés'&'quî  m'ont 
lété  les  plus  fenfifeles:  •  Vos  gens  irie  repro- 
Tdient'  mes  !naHïenri5''cbmmé  s'ils  n'étoient  paf$ 

leur  ouvrage.' Quefle iloifteur  plus  cruelle qoe 

►  •  » 

TÈfe  me  faire  un^crihie  à  Genèvedés  perf&tf- 
fiôM  qu'bti  me  MStoic  dansla  duiffei  &  de 
lin^acçtifer  '  de^  ri'êtfe  'âdtnîs  hulîe'  pan:'-,^  en  me 
ifitîfant  chatlfe  de'par  tou'tî  5rààt-îi"  qiie  je  rt^ 
'J^tckrhe  à  fàminé^quî  m'à^peîlial  dansées  cbir- 

TÉHées  1è  vbifinâgè^'dé  rnorfjiàyis?*' J'oie  en  a£^ 

•     •      »•»      »  ♦  * 

l  "foil ,  é^ptë'  fe- âùiffî ,•  'o&  je  il'éiifle  pa* 
«B  ''feçd  y'-'/dêri^  à^êc  fibnherâ^Ç-'TotftéfiJB 
xlors«je  inè'i^iKfre'aa  cTiôîJ?  (3è'îicr'ïétr2àte? 
"Korff  rtàî^é^'tkiilf:d'àtharii£toéï£' •&  d'otitttf- 

^s,"  fài4HRS^'gdgtw?q*-f»ëfdttV4afl'*^ 


i 


L    E    T.  T    R    E.Î        «PS 

Keith!  mon  protefteur  mon'^amj,;mon  peiei 
.  pu  que  vous  £byez/où  que  j'achève  mes  txïCr  ^ 
tes  jours ,  &  dufle-jc  n^  "voos  revoir  de  roji 
vie .;   non  , .  j^  ne  reprocherai  point  au   Ciel 
mes  rnifcres  ;;  je  leur  dois  votre  amitié. 

En  confcifnçe^  y-at-il parlti  entre  des  Livres 
ûù  ron  iTOuve  '  quelques  traits  Jpars  £?  inàfcrets 
contre  la  Religion  ^  ^  des  Livres*^  okfans  détoiLr 
fans  ménagement  m  T  attaque  ^ms,  fçs  dogmes^ 
dans  fa  mqrale  y  dans  fort  iriftnçnçe.  fur  la  fa? 
ciété  ?  *   V  ..     •  ' 

£n  confcience  !....., .  U^ne  fîéroit  pas  à  un 
impie  tel  que  moi  d'ofer  -parter  .de  confcience 
....  fur  tout  vis-à-vis  deces bons  Chrétiens ..•. 

aînfî  je  mè  feîs..,..  C*efl:  pourtant  une  flngu- 

« 

liere  confcience.  que  celle  qui  fait  dire  à  des 
JMagifcrats  j  nous  fquffrons"  volontiers  qu'on 
blafphême ,  maià  nous  ne-  ibuSrôns  pas  qi^'oa 
raîfonnç,  !  .Otpus,  MonQeur ,  la.  difparité  d(âi 

.    T3 


694       .CXI*  Q  U  I  É  M  E 

iixjtti;  c*en:  avec  ces  tâêmes  fôçoâ^  de  penfèr 
qité  lés  Athiéiûeni  applaudiilbient  àùx  im^uétéâ 
d'Ariftôphâne  &  firent  mourir  Socrale, 
*  Urié  des  chofes  qui  me  donnent  le  plus  de 
confiance  dans  ihïs  principes  efl  de  trouver 
îeur  application  toujours  jùfle  dans  les  cas  que 
j'avois  le  moins  prévus  ;  tel  ed  ceM  qui  /ê 
|)rérenteid.  Une  des  maximes  qui  décodent 
tde  Fanalyffe  que  j'âî  faite  de  la  Religion  &  de 
(Ce  qài  lui  efl  eflèndel  efl  que  les^  hommes  ne 
doivent  fe  mêler  de  celle  d'autrui  qu'en  ce  qui 
les  intéfefle;-d'où  il  fait  qu'ils  ne  doivent  ja- 

*  »  • 

^ais  punir  di^s  Ôfiènfes  (àa)  fidtes  uniquemeot 

(as)  N<)te2<  que  Je  me  ibis  de  to  mot  (^n/Vr 
T>liuMotx  l'ufage,  quoique  je  fois  très  éloigné  de 
Tadmèttie  d^  Ton  feus  propre,  &-qw  je  lë  trou- 
^vq/ très. mal  appliqué  %  comae  fi  quelque  être  que 
ce  feit ,  un  noihme  ,  un  Ài)gè  ,  |è  Diable  în&mô 
|H)Uvoîe  jamais  ofiFe^fer  Dieu.^  Le  mot  qae  iiouâ 
Tendons  par  offenfes  eft  traduit  comme  prefque  tout 

^  lefte  du  cÈxre  facré}  c*eft  tout  dix^«    Des  h(^ah 


LE    T    T  .  R    £•  âp5 

&  Dien,.9à  &uîa  bien  les  punir  lui*  mêfne.  // 
/â»^  binorçr^  la  imntti  ^  ne  la  venger  jarnais^ 
difent  9pr!b$  Moncei^aieu  les  Répréfentan^  j  i)s 
ont  miotL  Cepœdapc  lea  ridicules  outragcans., 
les  impiétés  groffieres  ^  les  blaiphémes  contie 
la  RdJ^Qti  font  punifTable»,  jamais  les  raifoq- 
nemais.  Pourquoi  cela  ?  fdxct  que  dans  ce 
premier  cas  on  n*attaqne  pas  feulement  la  Re- 
li^on,  mais  ceux  (pu  la  jfrofefiènt,  on  les  in« 
fulte,  oà  les  outrage  dans  leur  culte,  on  mar* 


mes  enfarinés  de  leur  théologie  ont  rendu  &  défigu- 
ré ce  Livre  admirable  fefon  leurs  petites  idées  ,  & 
voila  dequoi  Ton  entretient  la  folie  &  le  fanatifme 
du  peuple.  Je  trouve  très  fagc  la  circonf^eftîon  de 
rSgUre  Romaine  fur  les  traduâions  de  TËcriture  ea 
langue  vulgaire,  &  comme  il  n'eu  pas  néc'eflaîre  de 
propofer  totijours  au  peuple  les  médkationi\ybla|i» 
tueufes  du  Cantique  des  Cantiques»  ni  les,  malédic- 
tions continuelles  de  David  contre  fes  c;nnemis,  ni 
les  foUtiHtés  de  St.  Paul  fur  la  grâce ,  il  eft  dange- 
reux de  lui  propofer  la  fublime  morale  de  FËvangi* 
le  dans  des  terihes  ^i  lie  tendent  pas  exa^lement  1^ 
fens  de  TAuceur  ;  car  pour  peu  qu'en  s*en  écarte  ^ 
en  prenant  une  autre  route  on  va  très  loin* 

T4 


*^         Cl  N^  Q'  U  I  E  M  E 


^'-".j 


^^^è  iin  i]iëjH:is  r^voltapt  j)our  ce  gtfîl$.mpec- 
«tôîp  &' par  conféquene  ppûr  eux.  De  telj 
'  piktkgçs  doîyeiit  ^e  pùms  par  ks  Ic^,  parce 
«qù^St:  retombent  &r  lès  hommes^,  *&tfxtlc8 
'  hôtnmes  ont  droit  «dé  s^en  rieflfeiitîr;  ^])|^aîs  ofe 
'èifi  'te'  înortel  filr  Isi  te^ise  qii*ua  rsfîfoBnemcnt 
doiV'é  bfferifer^Où  èft-çelui  qpî  pdbt  fe  fâcher 
dé^  ce  qi^on  le  tr^e  çn  homme  &  nu'ou  le 
ftpppfe  taifôonable?'  fi  le  raîfonneur  le  trompe 
ôtt'héus  trompe,  &que  vous  voils-kltérefliez 
à  lui  ou  ^  nous,  montrez  lui  fon  tort,  défâbii- 
&Ztnous,  battez-le  de  fes  propres:  armes.  Si 
Vpus  tfen  voulez  pas  prendre  1^  peine ,  '  ne  dî- 
(es rien,  ne  l'écoutez  pas,  laiflèz^Ie  raifonner 
pjik  déndfonner,  &  tout  eil  fini  âins  bru|t,  fans 
guerepç,  fens  ipfiilte  quelconque  pour  qui  que 
ce  Toit.  'Mais  fur  quoi  peut-on  fonder  la  ma^ 
xime  contr^re  de  tolérer  la  xaiUerie  le  mé- 
^rîs  rouçraj^e, QÎE  de  punir  k  mTon?  La  vâm* 
m  s'y  penî,  .  ['-^ 


fiet.MeflÎQar;  voyeat  fi  fouv^nt]^.  d^  VoI« 
eiice.  'Comment'  ne  km  4*t-il  point,  infpiiré  cec 
^prit  de  .coljéf^nœ  qu'il  prêche  Ctqs  ceiTey  & 
dont  il  ^  qqelquqfois'befpi^;?  S'ils  reufleni  .un 
peu  çonfiîlté  ^ans  ^tjS  aâaire,/.il|i9e  p^oit 
qu'il  ei)t  p(|  leiju:  parier  à  peuprès , ftinfi. 

^y  Meffieurs  1  ce  i^e  fqnt  poinç^  les.  raifpn-r 

,,  neurs  qui/onc  du  mal ,  ce  foot  les  -caifiairdsr. 

^,  La  Plûlofqphie  peut  aller,  fqn  grain  fans  riP- 

,,  qvp,  le  peuple  ne  l'eptend  pa^  ,our  la  l^ifle 

,9  dire  .  &  lui  rend  tquc  le  dédain  gu'ellp  s 

^  pouc  IhL  ^aifonneç  çfl:  dp  touces.les  folies 

jy  .des  hqmmes  celle  qui  auît^  le  moins^^gepre 

,^  Iwmain^  &  l'on  vmt  n^^n^  .des.  gens  fages 

,j  entichés  par  fois^  de  cette  foliç-ls^  J^  ne  raî- 

^,  fonnepaSjmoij  cçl^eft  vrai,  mais  d'iiutret 

,,  raifonnent  ;  qu^çl  mal  en  arrive-t^il  •?.  Voyez , 

,,  (q1,  tçl,  &  tfii  ouvrage i  .n'y  a.-4:iiil  que  des 

I,  plaii^tesies  daos  ces  Uyxes-là?  M^m^me 


Jî>«       CINQUIEME 

3,  enfin,  fi  jâ  ne  ndfûnne  pasy  je  fd»  mieiu:; 
,,  je  fitit  raifonner  mes  leâeuit.  Voy^s  mon 
^  chapitre  des  Juifs  ;  voyez  le  même  chapicn 
3,  pins  développé  dans  le  Sennon  des  cinqoan- 
'^  te.  H  y  a  là  da  raifbmiemeât  ou  Péquivalent» 
yy  je  penfêp  Vous  coàviendrez  auffi  qu'il  y  s 
3,  peu  àci  détour  ^  &  quelque  choie  de  plw 
„  qufe  dei  traits  épars  &  iruHfcrets^ 

3,  Nous  avons  arrangé  que  mon  grand  cré- 
^  die  à  la  Cour  &  ma  toute-puii&nce  pf^en* 
^j  due  vous  ferviroient  dtf  prétexté  pour  laif^ 
^  fer  courir  en  paix  les  jeux  bàdkis  de  fises 
33  vieuraiï$:  cela  efl  bon,  mak^ne  brâlcKpas 
33  pour  cela  des  écrits  plus  gi^veâ  j  car  sfors 
13  cela  feroit  trop  choquant. 

y  J'ai  tant  prêché  la  tolérance  !  II  ne  iaat 
^  pas  toujours  l'exiger  des  autres  &  n'en  ja« 
^  mais  ufer  avec  eux.  Ce  pauvre  homme  doit 
^  en  Dieu  ?  paiTons^ui  cela  3  il  ne  fera  pas 


Ir    Et    T    R    Ë.         099 

\^  {eOë.  n  ék  ennuyeux?  Tous  les  raifonneurs 
,^  h  ibnt.  Nous  ne  mettrons  pas  celulci  dé 
^j  nos  foupés;  dii  reftè,  que  nous  importe?  Si 
^  Ton  brûloît  tous  les  Livrer  ennuyeux,  quel 
,,  deviendiôient  les  Kbiiothéques?  &  û  Ton 
I,  brûloit  tous  les  gens  emmyeux,*  il  faudroît 
iy  faire  un  bûcher  du  pays,  Croyéz*moi,  laàC^ 
,,  fons  raifonner  ceux  qui  nous^  laîflent  plaî^ 
,,  fadter;  ne  brtfons  ni  gens  ni  Livres^;  ât 
„  triions  en  plux  ;  c'efl:  mon  avis.  *^  Vdla, 
febn  moi ,  ce  qu'eut  pu  dire  d'un  meilleur  ioû 
M.  de  VblÙiïei  &  ce  n'eut  pas  été  là  ,  cd 
tne  fen&le ,  le  "phs  mauvais  cônfëil  qu'H 
aoroit  donâé. 

Faifens  impartialement  h  compatalfon  àr  cet 
euvrages}  jugeùtts  en  par  Tiinprejjlùn  quHh  on» 
faite  dans  le  monde.  J'y  conlens  de  tout  mori 
cœur.  Les  uns  s'impriment  &fi  débitent  pâttmti 
Çn  fait  comment  y  ont  été  reçus  les  èmrts.  - 


V 


-^r 


|oo         Ç  I  N  Q  U  I  E  M  E 

eqes.  Je  ne  .^i^.p^  fbus  lei«[ae]^r Auteur  em 
fgqd  mes  é(yi^j  mais  ce  que  je, puis  dire;  c'eft 
qu'çn  les  ixnpyiçiô  dans  tous  les. pays,  qu'on 
|e^  f raduk  cbûs  •  tou^^  leç  ;  laogiu^  ^  qu'on  à  mê: 
me  fait,  à' la  fois  deux  tradu6tiuns.de  TEmilc  à 
][^pQdres ,;  houjQ^  que  n'eutj^ais  aucun  au- 
tre Livre  eaiceptérHéloïfe,  aii^  moins,  que  je 
fâche.    Je  dir^i,.,  de  plus,  ^;-çn  .France»  en 

%  .s 

Angleterre  i  ea  Allemagne,  vnjiêmp  çn  Italie 
on  me  plaint ^ on  m'aime-  on^  yo^d^oic  m'act 
cudllir,  &  qu'il  n'y  a  p^  tout  qu'un  cri  d'iûr 
dîgnation  contre  le  Conf^  de  Genève.  Voila 
ce  que  je  fais  du  fort  de  mes  Ecrits;  jt'ignqr 
re  celui  des  autres.-      ,        .     . 

1-  • 

t 

•  Il  eft  tems  de  finir.  Vous  voyez,  MonfieyCi 
^ue  dans  cette  Lettre  &  dans  la  précédente  je 
nie  fuis  fuppofé  coupable  ;  mais  dans  les  troi^ 
pren(iieres  j'ai  m,ontré  quç  je  ne.  fçtoîs  p^s.  Or 


h    Ë    t    t  R  %^        ^ài 

jugez  de  trvr  qtfune  protéAfre  ïrtjtrfe  cJdntre  dit 

•    •         »  •      f^ 

coupable  âoît  ^feconire  ûh  innocent  ! 

Copendam  ces  Meffieurt,  bien  détennînës  ai 
laîfTer  fubfifter  cette  procëduréi  ont  hadtemeUt 
ttfédaré  que  le  bien  de  hUèfig^on  ne  leur  per- 

«  r 

bcttôît  pas"dfe  recbnnoîtie  leof  tort ,  m  Thon- 
neor'du  Gbtivemement  de  réparer  leur  îrfjufli- 
ce.   S  faudroit  un  ouvrage  entier  pour  mon- 
trer les  oohfeqùences  de  cette  màiime  qui  coof- 
facrt  &  'chanjge  eti  arrêt  dû  dtftin  toutes  Its 
iniquités  dèsMîhîftreàfdes^IloÇx."'Ge  irtft  pat 
^e  cda  qu'il  ^-agit  eiicoie  j-'^iSt  je 'ne  me  -fois 
propofé  jtiJqu'îcî  que  d'eiafrîiifô^  ï  nàjulKce 
avoît  ëté'conunîfe,  &  non  fi  elle  devait  être 
•réparée^ 'Dans  le  cas  de- TâffirinaiiTé',  îidlà 
irenr^w»  cî-îçiîfe  quelle  rèflburfe'tos  Lûîx'  fc 
<font  raéaa^éè  -pour  remédier  H} leur  violatîbnL 
£tf  attenant /^ite  fàut-îl  pënfér  de  ces  jugei 
'tnflexîÊlés'V  ^  j[<îècédent  'dkniFièurs  jagemèii» 


/" 


^ 


aoi       CINQUIEME 

.atiffî  lé|éteme&t  q^  $^ils  tfe  tîmîeat  polot  & 
conféquence»  &  91!  les  maintiennent  avec  au* 
,tant  d'jobftinadop  gue  s'ib  y  avoie&t  appptté 
le  plw  mur  .examqo?       * 

Quelque  los^gues  qu^aient  été  c^%  x^iTeuffiânSi 
j'ai  cm  que  )eur  objet  vous  doAmsroit  la  pa- 
tience de  les  fuivréf  j'oie  inême;d^j&que  vous 
>  deviez.,  puii^u!eUes  iJQiif  ^^t;s^lt  ^^apologi^ 
de  VQsJop:  ^e Ja  wçojpp,  Pans  i|p,  ga^s  Bbie 
^  dVf^s*  ytte  I^eligion  lai/bpnaU^,  ,1a  M  ^ 
^eQdrqit  crynîi^  iin  Xivre  p;^H  au  mien  fe* 
pS%  4iQe  XfÀ  ^efb^  A^'i):  fai^drQit  fe. bâter 
^'stwgpF  j|K>!ir.:J^wwçur  ^  ^\mà^  l^Etat. 
JB4lMi5  ^ç;e.  au  Ciçl  il  a'ei^^  nçn  de  Jtelpar^ 
am  70US9  çotnine  je  vi^  4e  le/grouv^^  ^ 
il  yauc  m&Wi  ^e  Fiû}uil^cc  4<^  |?  ^^^  ^9- 
tîmè  fpît  Touyi^ge  di^  J\^[agi{]tt^  qœ  4e^  Ix^i 
Cèx  les  erreurs  4^  hommes  font  p^d&gpoes, 
mais  ceilei  ^  Ifiif^  cl^veQC  «^iGW  %<a'e9e% 


L    E    T   T    R    EL 


303 


Im»  que  r.ofbacUme  <f»  m'exile  k  jaœnis  ds 
mon  pays  foit  l'ouvrage  de  mes.  fàotes  »  je 
ir'«i  jamais  mieux  zen^H  moa  devoir  de  Cî-[ 
tffjçn  ^u'ou  mpmçpc^ue  je.  ce0è  de  l'étiie,  â: 

j'ea  3)^01$  mérité  le  titre  pvr  Fadie  9»  m'f 

t. 

2lj|)|^U^-von«  ce  qui  venpit  die  &  paflèr  il 
7  Vfcit  pfxL  d*aDQée&  au  fiijet  de  F Amcje  6<«; 

oétii  de  M.  d*^n))?ert  Loîo  de  calnier  let 

^^'  '«'fît»  ^ 

wupvures  lexciti^  j^r  cet  Artide  rSalt  pu* 
Uié  par  ies  Fadeurs  raroii;  angooeoté^  &  S 
n'y  a  perfoime  qui  nt  iacbe  que  mon  ouvta« 
ge  ]eur  fit  plus  de  Ueu  que  le  leur.  Le  part{ 
Prouftanty  méqoptqnt  d'eux»  n'édannt  pas^ 
mais  il  pouvoit  éclater  d'un  moment  ^  Fautiieji' 
Se  èallweufement  les  Gouvememens  s'allar- 
fqcof,  de  (i  peu.dejErhqfe  en  ces  maâeres»  que 
les  querelles  des  Théologiens,  faites  |)Qur  tom« 
ber.  4?^  l^'^^^  d'dles^jpêmes  pcçpnent  tou^' 


3%4     ci  N  Q  tr  i  È  U  É 

fbùrè  délliîiportinde  pir  cdle  qu'dri  kif 

Polit  moî  Je  ile^dois  cbrâmé  lai  gloire  6ê 
le  ïmhéa  àé  la  Patrie  là'a^ou'  ira  Clergé  anï- 
jbé  dlih  éfpïîr  fi  rare  dîins  fou  ordre ,  &  qin  ^ 
fans  s'attacher  à  la  doélrine  purement  fpécula- 
flvé,  îrîppWtbîc  totït  à  k'înbrile  &  aux  de- 
vbîrs  de  Rionone  &  dii'  ÊStoyrà.  Je  penlort 
qtte,  f^s'fàrè  tïîreiaement  foii  âpologief,  juP 
fifièr  ks'iûaxiihes  que  'je  Ka  fotJpbfois  &  pr©-' 
îrenîr  tes  cenftir^  qu'on  en  pourrbit  fidre  étoît 
Un  fervice- îf''isénarè  i'TEtaè  En  mônbant 
que  ^€è 'qu*tf  néglîgeoîi:  lï'eltoït-ifi  certa&.m 
fîtîlë,  fèfpéroîs  contenir  ceux  <jé  voudroient 
Jiii  en 'faire  un  xh-ime  :  'iâns  fe  nommer,  TaM 
le  déflgner»  f^s  compromettre  fon  orthoao& 
lie,  c'étoit  lé  donner  eh' temple  aur  aitttre» 


lens,' 


lif  ê&rëpnii  ^toït  ïardîè  j  iwo»  êÙé  tf-éfoii 


h   Ë   T   T    R    É  8ô| 

jpas  tém&aké^  &  faùs  dès  eîrcdhlhticds  qif  if 
était  difficile  de  flrévoir^  elle  devde  oâtarel^ 
lement  réaflir.  Je  n'étds  pas  fenl  de  ce  feniU 
ment;  des  gœs  très  éelairés  d'illttfljes  Magii^ 
trats  même  penfbient  cdmme  tacA.  CùbSdéret 
rétat  re^giêus:  dé  l'Euràpe  au  momat  où  je 
psbCai  mon  Ldvre^  &  troos  verrez  qu'il  étoic 
plus  que  probable  qu'il  feroit  par  tout  aâcueiU 
E  La^Religion  déorëditée  en  tout  lieu  par  bi 
philofophie  avoit  perdu  foji  afitendant  ju^èt 
fiff  le  peuple.  Les  Gens  d'EgUiè,^  obfldntfs  è 
fëtayer  psff  fbn  côté  foibtei  avoieni  laiffé 
mner  tout  le  refte  j  &  rëdîfioe  entier  pônaoi 
à  faux  étoit  ptet  à  s'éarouler»  Les  controvâS 
fes  avoient  celTé  parce  qu'dies  n'intéreiBietifi 
plas  pârfonne,  &  la  paiai'lëgnoit  cbcJ!e  lei 
diffërens  partis,  parce  que  niiL  qe  fe  fôuciole  ' 
plus  du  fien;  Pour  ôter  les  niaiivaiifcs  brail« 
cheftdn  avoit  abattu  Parbré;.pour  lé 
Partie  L  V 


3û5       C  ï  N  Q,U  lE  ME 

ter  il  fallôit  n'y  laiffér  que  te  tronc. 

'  Quel  moment  plus  baireox  pour  éiablir  fo- 

lîderfïent  la  paîjt  anivârfelle ,  qpe  .cduî  où  Tani- 

ihbficé  dçÈ  pattii  fofpenclue  teifToktouc  le  mon- 

de  en  état  d*écoutar  U  r»foh?  Aquîpouvoic 

déplaire  un  ouvi^e.  où  fins  blâmer^  du  moins 

féns.esclune  perf<«me,  on  fei^t  voir^u'aa 

fond  cous  écoieQC  d'ac^ioirâi  ^  tak  6s  ài£^' 

noàs  ne  i'écmcnc  ékfv<â^ ,  ipa  tant  de  &qg 

tCwùit  écé  veiSfé  qiSt  pour  dôs  œa^entendos; 

qœ  chacun  (ieVoit  refter  en  Fepo$  dans  fou  cul* 

te,  fans  ttoublcr  célid  des  autres;  qae  partout 

îm  deyoit  fiarvic  Dîéû  *  aimer  fou  prodoifi, 

obéir  aux  Loh,  j& ^'en  cda  fetJl  éonfiftoit 

l^fTcûceife  toute  bèmie  Région?  Cétoîcéta* 

Mr  à  fa  fcns  la  Ubeité  philofophique*  &  la  pîé« 

té  xeligieiire;  cfétoic  œacilier  Tamo^ ,  ^  fori 

dre  &  Tes  égards  pour  les  préjugés  drssitruî; 

€*étx)it  ikns  détraire  ks  divers  partis  1^  rasi^ 


L   E   t   T    RE;    :      s«»? 

na  toos^  tçrme  comman  de  l'faamaaîté  &<le^ 
là  ratfon;  lom  d'exciter  des  querelles»  c'étojfr 
couper  h  racine  &  celles  qui  germent  encc^e^^ 
&  qui  renaîtront  infaillS^lemeiu;  d*un  joor  à 
Fautre,  lorfqoe  le  aéle  du  ânat^Tme  qui  n^eft 
qu'aflbq)i  fe  réveillera:  c*étoit,  en  un  mot^ 
dans  ce  fîécle  pacifique  par  indifférence,  don* 
lier  à  chacun  des  raiibns  très  fortes  ,  d'être 
toujours  ce  qu'il  eft  maintenant  uni  &voic 
poisrquoL 

Que  de  maux  tout  prêts  &  renaître  n'é»^ 
toient  point  prévenus  fi  Ton  m'eut  écouté  1 
Quds  inconvéniens  étoient  attachés  à  cet 
avantage  f  Pas  un,  non»  pas  un.  Je  défie 
qu'on  m'en  montre  un  feul  probable  &  mê- 
me pofiSble,  fi  ce  n'efl:  l'impunité  des  er« 
reurs  innocentes  &  Firopuiflimce  des  per- 
fécuteurs.  £h  comment  le  peut -il  qu'après 
tant  de  tiiiles  espériences  &  dans  un  fiéde  Qi 

V  a 


3o8       CIN-QUIÈM^ 

écldté,  les  Gouvememens  tf  aient  pas  encore 

appris  à  jetter  &  b*îfer  cette  arme  terrible, 

qu*on   ne  peat  manier   avec  tant  d  adrefTe 

qu'elle  ne  Coupe  la  maîn  qui  s'eii  véxt  fervîr? 

L*Abbé  de  Saint  Kerre  vouloit  qu'on  ôtât  les 

écoles  de  théologie  &  qu'on  foutînt  k  Rdî- 

gîon.  (^ut\  parti  prendre  pour  parvenir  fini 

bruit  à  ce  double  objet ,  qui ,  bien  VU ,  fe 

confond  en  un  ?   Le  parti  que  j'avoîs  pris. 

Une  circonftance  malbeureufe  en  arrêtant 

l'effet  de  mes  bons  deffeins  a  raHemblé  fur  ma 

jtête  tous  les  maux  dont  je  voulois  délivrer  le 

igenrè  humain.    Renaîtra  - 1  -  il  jamsds  un  autre 

ami  de  la  vérité  que  mon  fort  n'effraye  pas? 

je  l'ignore.    <^u'il  foit  plus  fage ,  s'il  a  le  mê- 

W  m 

ifne  zèle  en  feta-t-il  plus  heureux?  pen  doute. 
'IM  moment  que  j'avois  faifi,  puifqu'îl  eft  man- 
"qué,  ne  reviendra  plus.  Je  fouhaitè  de  tout 
-mon  cœur  que  lé  Parlement  de  Paris  ne  fe 


LETTRE. 


309 


repente  pas  un  jour  lui -même  d'avoir  ;  rem!» 
dans  la  main  de  la^  fqperftitioi)  le  pcigm^ 
que  j'en  faîfoi^  tomber.  , .  / 

Mais  laiiTons  les  liçur&Iestemsiéloignës.» 
&  retournons  à  Gçiièye;  Çeft  |à  que  je  Vj^x 
vous  ramener  par  une  demîçre  çbfervatiçn^qpç 
vous  êtes  ;bîen  à  portçe  de  faire ,  ^.  qui  .doit 
certainement  vous  frapper^  Iç«^çz  les  yejjx.  fur 
ce  qui  fe .  pa(&  autour  de  vous.  Quels  font  ceux 
qui  me  pourfuivent,  guels  font  ceux  qui  me 
défendent  ?  Voyez  parmi  les  Répréfentans  Tçj- 
lîte  de  vos  Citoyens ,  Genève  en  a  - 1  -  elle  de 
plus  eftimables  ?  Je  ne  veux  point  parler  de 
mes,perfécuteurs;i  Dieu  ne  plaïfe  que  je  fouil- 
le jamais  ma  plume  &  ma  caufe  des  traits  de 

« 

la  Satyre  ;  je  laifTe  fans  regret  cette  arme  à 

mes  ennemis  :  Mais  comparez  &  jugez  vous-- 
même. De  quel  côté  font  les  moeurs ,  les  ver- 
tuS)  la  Mde  piété,,  le  plus  vrai  patriotifme? 

V3 


jià       C  I  N  q  a  I  E  ME 

^poi  l  foffenfe  les  loix  ^  &  kors  {dus  xèléê 
défeofeors  font  les  miens!  Jattaque  lé  Gou* 
veraement  »  &  les  méiUeuîs  Citoyens  m*ap- 
ptpuvent!  Jattaque  b  Re^gion^  &  faipour 
inoi  ceux  qui  ont  te  plus  de  Religion!  Cetce 
feide  ch&iyatiùn  dit  tout  ;  elle  feule  montre 
imon  vrai  crime  &  le  vrai  fujet  de  mes  ëTgrai» 
ces.  Ceu&  qui  me  haïfibot  &  m*outrag^t  font 
ioon  éloge  en  dëpit  d'eux.   Leur  haine  8'e}Kp& 
91e  d'elle-même^    Un  Genevois  peat*il  if 
tromper? 


y 


LETTRE.         su 

s  I  X  I  EM  E    LE  T  T  R  E, 

JOtNcoRE  uae  Lettre,  MoniGeur,  &  vous  êtes 
délivré  de  moi.  Mais  je  me  tiouve  en  la  coin« 
menant  dansime.  fîcuatÎQn  biea  bizarre  ;  obli* 
gé  de  récrim^  Sl  ne  fâchant  de  qpoi  la  rem* 
plir«  Concevez-vous  qu!tm  ait  à  iè  juftifierd'un 
crime  qu'on  ignore,  &  qu'il  faffle  fe  déffindne 
fans  favoir  de  cpaotyrot  «fl;  accuf^?  C'eB:  pourt 
tant  ce  que  j'ai  à  faire  au  fujet  des  Gouvei^ 
mens.  Je  fuis,  nm  pas  accofé ,  mab  jugé , 
mais  âétri  pour  avoir  publié  deux  Qu\n»gi9 
timtrmresi  fcandaleus  impies  y  t  puions  è  déirttirf 
b.ReMgkm^^ClkiiiiHne  &  tout.  bs.  Gtmf^érmnlenu 
-Quant  àlailelig^oci,  noisavona eu .dni  moi^^ 
qudqiie  prîfe.  pour  trouver,  oeiqù^oâ  4  voulu 
^è ,  '&  :nous  Favotis  ess^ndné.  Mais  quant 
aux  QammumeM^  rien  oe  pôtt  QcniS  fowBV 

V4 


\fi  moindre  indice;  On  a  toujours  évité  (otil« 
çfpecç  4'^xpHc^tion  fur  ce  point:  çn  lï'a  ja? 
mais  voulu  dire  en  quel  lieu  j'entreprenois  ainfi 
de  les  détruire ,  ni  comment,  nipouiquoi,  ni 
rien  dé  ce  qui  peut  coiiflatér  qiie  le  défit  n'cft 
pas  imaginaire.  Oefl  comme  fi-fon  ^geoit 
qae}qa'uh  pour  awir  tué  un  hpmnxe  &m  dicer 
ni  où,  ni  qui  ^  ^hi' quand  ;  pour  un  meurire  ab- 
ftrak  'A  nnqaîfeion  l'onr  farqèbien  J'acarfé 
de  ^cvîner  de  qud  ôû  facoule)  mais  on  ne  k 
juge  pas  fanfr  àifp  for  quoi, 
f  y  Auteur  des  Lettres  écrites,  dé.  la  Campagne 
évite  avec  le  niêmevfoin  de  s'expliquer  for  ce 
prétendu  déHt  ;  il  joint  également  la  ReKgion 
&  les  Gouvâmemens  dans  la  même' accoâdon 
générale:  pms^  entrant  en  matière  for  la  Re- 
ligion y  il  déclare  vouloir  s'y  borner ,  &  il  tient 
'|far<>}e/  Gomment  parviendroWnoas  à  véofier 
Ir^cctt&tton  qui  regarde  Içs  Gobvecnemensy  it 


eevoi  qui  l'intenDent-rÊfiifeiiç  dç  dire  l^r  qyaqi 

elle  porte? 

.    Remarquez  même  comment  d'un .  trait  de 

.plume  cpt  Autei^r^f hange Fétat  de.la  gueftîoij. 

JLe  Çonfeil  pronpijç^que  mçS;i.iva:es tendent ^ 
détraire  tous  les  Gouvememens..L'Auteurde« 
lettres  dit  fei^lemcnt  ^e  les  Qonvjeniemeps  y 

.  Jmt  livrés  '  à  U  p^s  ,9.udacie^(e  ci^icique^  Cela 
elt  fort  diflKrenc.;  .Une  critique  j  .quelque  s^u- 
d^cieufe  qpa*elk  puîijfe  êtije  n'eu  pojtaf  4ine  ^^^^ 
fpiratîon,  .(^riç^qijer  pu  bl^m^.gu^ijucs  UiîX 
9'eft  p^  refayerfer  .tcmçes  Je^i.lfWr  jAujc^t 
vai^oîc^  acci^er  quelqu'un  d'aiMiner  les.nja- 
lades  lof^u^il  moptr^  le$  fautes  des  ;Médç;çin^ 
Encore  une  fois  ^  que  l'épondre  à  des,  rai» 

\fy^  qu'on  ne  veut  pas  dire?  Comment  fe  ju- 
(tifier  contre  un  jugement  porté  fans  motifsr? 

.  Que,  J&nspreuyede  part  nîfd'autre,  ces  l^Ief- 

.  Ikws  4îrwc  ;  (p9  j^  vçuK  r^ye^er  toi^  }» 


_3 


•  • 


314  S    t   X    I    E    M    E 

•  I 

Gouvememens ,  &  que  je  dife,  mo^,  qoe  je 

ne  veux  pas  renverfer  tous  les  GouveroemenS) 

»  '  » 

il  y  a  dans  ces  apercions  parité  exaâe,  excep-. 
té  que  le  préjagé  eft  pour  irioî  ;  car  il  îefl;  à  pré- 
fumer  que  je  fais  mieux  que  pezfcHiàe  ce  que 
je  veux  faire. 

Mais  où  la  parité  manque ,  c^efl:  dans  fefiet 
de  Faifertion.  Sur  la  leur  mon  Livre  dt  brû- 
lé, ma  perfonne  eft  décrétée;  &  ce  que  faf- 

...  ♦ 

firme  ne  rétablit  rien.  Seulement ,  fi  je  prouve 

4 

que  Taccufation  eft  fauile  *  &.  le  jugement  ini- 
que, faffront  qu'ils  m'ont  fait  retourne  à  eux- 

•  •  ••  • 

mêmes  :  Le  décret ,  le  Bourreau  tout  y  devrok 

retourner  ;  puHque  nul  ne  détruit  fi  jradicale- 
'ment  le  Gouvememéit ,  que  celui  qui  en  tire 

on  ufage  direflement  contraire  à  la  &i  poolr 

laquelle  il  eft  înftitué. 

'  Il  ne  fulfit  pas  que  j'affirme,  il  &ut  que  je 
^prouve  ;  &  c'eft  ici  qu'ott  voit  combien  eft 


LETTRE.  315 

déplorable  le  fort  d'un  particulier  fournis  à 
d'injufles  Magifhats ,  quand  ils  n'ont  rien  à 
craindre  du  Souverain ,  &  qu'ils  fe  mettent  au 
défias  des  loîx.  D'une  affirmation  fans  preuve ,  ^ 
i1$  font  une  démonftratîon  ;  voila  Tinnocene 
puni.  Bien  plus,  de  fa  dëfenfe  même  ils  lui 
fcHit  un  nouveau  aime ,  &  il  iie  tiendrdt 
pas  à  eux  de  le  punir  encore  d*avoir  prouvé 
qu'il  étoir  mnocent. 

Comment  m'y  prendre  pour  montrer  qu'ils 
n'ont  pas  dit  vrai  ;  pour  prouver  que  je  ne 
détruis  point  les  Gouvememens?  Quelque  en- 
droit de  mes  Ecrits  que  je  défende,  ils  diront 
que  ce  n'eft  pas  celui-là  qu'ils  ont  condanné; 
quoîqulls  ayent  cûndanné  tout  ;  le  bon  <:Qmme 
le  mauvais»  iâns  àulle  diftinâbn.  Pour  ne  leur 
kiffer  aucune  défaite /il  faudroît  donc  tout  re- 
■jttendïe,  tbiit  fiiilne  d*un  Ijoat  à  hmtre,  Li- 
•we  à  livre,  pajge  à  page,  Hgné  à  ligne,  & 


«i^        ,S.  I    X  <I    E    M    E 

#  y 

prefque  enfin»  mot  à  mot.  U  faudroît  de  plus, 
ci^aminer  tous-  les.  GpuverxieH^iis  dix  moncfc, 
puifqu  ilç-  difçnt  que  jç  les  détruis  tous,  (^el- 
le eqtTeprife  !  que  ^'w^pées-  yy  faudroit-il  em- 
.ployer?  (^ue  cl'/X-/(?g«.  fa,udroiç..il  éérire;  & 
îiprès  cela,  qpi  les  lîi;oit? 
..  Exigez  deiqqî  cç  qui  e/J;  faifajble.  Toat 
I^omme  fenfô-  dwt.fç  caotentpr  dç  .ce  quei<ii 
à  vous  dire  :  vous  ne  voulez.  Tôirenient  n,çp 
.4e  plua,     .,     ,     .  •  , 

De  mesi  d&xi  Livres  brûlé^  à  la  ibis  iôqs 
des  imputations  communes, ^  il  n'y  en  aqu'iin 
qui  tr^e  du  droit  ;  politique  &.4es  matiei^ 
de  Gouvernement.  Si  Fautie  en  traite ,  ce 
n'eQ;  qqe  dans  un  entrait. di^. premier.  Afù^i 
je  fupppfé  que  c'eft  fur  celui-çî  feu.lemç3Pit  (pt 
tonoibe  l'accufatioa  ^i  cette  accuiâ^tion  poftoit 
fur  quelque  paflàge  psuticuUer.  on  Taurplt  ci- 

.té,  r^as  <lQbtç&  on  m  ^mp;c  nja  mc^  apw( 


L    Ç   t'T    R   E;         SI?' 

quelque  maxime ,  fidelfe  ou  infîdelle^  tolnihd 
oti  â  fait  fùî  les  points  concetnans  la  Rdi* 
gîon. 

Ceft  donc  le  Syftêriae  établi  daùs  le  totpi 
dé  Touvrage  qui  détruit  les  Gouvememens  ;  il 
ne  s'agît  donc  que  d'expolèr  c!e  Syflême  ou  de 
dite  une  analyfe  du  Livre  ;  &  fi  nous  li'y  vo^' 
yons  évidemment,  les  principes  deftru6Ufs 
dont  il  s'agit,  nous  faurons  du  moins  où  les 
cherchei'  dans  l'ouvrage ,  en  fuivant  la  mé; 
thode  de  l'Auteur. 

Mais,  Mônfieur,  fi  dutaht  cette  analyfe ï; 
qui  fera  courte,  vous  trouvez  quelque  confé- 
queftce  à  tirer,  dé jgrace  ne  vous  preflêz  paSé 
Attendez  que  nous  en  raifonnions  enfemble. 
Après  cela  vous  y  reviendrez  fi  vous  Voulez, 

Qu'eft-ce  qui  Faît  que  l'Etat  eft  un?  Cefl: 
îunion  de  Tes  membres.  Et  d'où  naît  Tunion 
de  fes  membres  ?  De  l'obligation  qui  les  lie; 


Tout  eft  d^accDtd  jtt%a*kl 

Mais  quel  dt  h  fondement-  de  cette  ob]î« 
gation?  Voila  où  les  Auteurs  ie  divifent.  Se^ 
Ion  les  uns ^  e'efl:  la  fidrce^^  félon  d'antres^ 
Tautorité  patemdle}  félon  d'autres  ^  1»  vo» 
lonté  de  Dieu.  Chacon  établit  ion  prin« 
cipe  &  attagpe  celui  des  autres.:  je  n'ai 
pas  moi-* même  fait  autrement,  &,  fuivant 
.  la  plus  faine  partie  de  <;eus:  (fâ  ont  dif-* 
.  cuté  ces  matières ,  j'ai  pofé  pour  fonder 
ment  du  corps  politique  la  convention  de  fes 
membres  »  j'ai  léfucé  les  prtndpes  dàSéteoi 
du  mien,. 

Indépendammait  de  la  vérité  de  ce  prind- 
pe ,  il  remporte  lur  tous  les  autres  par  la  fo- 
lidtcé  du  fondement  qu'il  éublit;  car  quel  fon- 
dement plus  fur  peut  avoir  l'obligation  |>armi 
les  hommes  que  le  libre  engagement  de  celui 
^ui  s'oblige?  On  peut  diiputer  tout  autre 


1-    E    T    T    R    R 


81» 


principe  (a)  ;  on  ne  iauroit  d^piiQcr  celui-là. 
Mais  par  cotçe  copdidoa  de  la  lib^té,  qui 
en  renferme  ^'aiittes»  coûtes  fortes  d'engagé^ 
mens  ne  (ont  .pa$  v^ides5  même  devant  les 
Tribunaux  hittoaios»  Ainfî  pour  déteraûner 
celui«d  l'on  dok  en  esplifuer  la  nature  ^  on 
doit  en  trouver  Tufage  .&  la  fin  ^  on  ddt  prou* 
ver  qu'il  efl:  convenable  à  des  hommes ,  âc 
qu'il  n'a  rien  de  contraire  aux  Loix  naturellesç 
car  il  n'dR;  pas  plus  permis  d'enfreindre  ks 
Loix  nativelles  par  le  Contraâ  Social  ^  qa'il 
n'eft  permis  d'enfreindre  les  Loix  pofitivés 
pv  les  Contrafb  des  particuliers,  &  ce  n'eft 
que  par  ces  Loix-mêmes  qu'exifte  h  liberté 


(a)  Même  celui  de  la  volonté  de  Dieu  y  du  moins 
quant  à  Tapplicatlon.  Car  bien  qu'il  foit  clair  que 
ce  que  Dieu  veut  Tbomme  doit  le  vouloir ,  11  n'eft 
pas  clair  que  Dieu  veuille  qu'on  préfère  tel  Gou- 
vernement à  tel  autre,  ni  qu'on  obéifle  i  Jaques  plu- 
tôt qu'à  Guillaume.    Or  voila  dequoi  il  s'agit. 


^ià        SIXIÈME 

qui  donhe  fiw'^é  à  Véngagemètit; 

J'ai  t)Otit  réfultât  de  cet  examen  qiie  Yità^ 
blilTement  du  Contrat  Soeiàl  eft  un  pa6te  d'd^ 
ûe  efpecé  particulière  ^  par  lequel  chacun  s'en^ 
^ge  envers  tous^  d'o&  s'ensuit  rengagement 
téciproque  de  tous  envers  diàdin  ^  qtii  efl 
robjer  immédiat  de  runidm 

Je  dis  que  cet  engagement  efl:  d'une  ^fpeet 
|)&rticulierej  en  ce  qu'étant  abfolu ,  fanscom 
dîtîôn ,  (ans  réferve  j  il  ne  peut  tofutefois  être 
înjuftô  in  fufceptiblé  d*altos  ;  puîfqu'il  rfeft  paJ 
poffible  qiié'  te  >:orps  fe  veuille  nuire  à  lui-mêi 
tbe^  tant  que  le  tout  ne  veut  qde  pour  t(M 
• ,  Il  effe  encore  d*une  çf^ete  i^rticiïliere  en  ce 
qu^il  lie  les  contra6fans  fans  les  aflbjétir  à  pef- 
fdnne  ^  &  qtf  en  leur  donnant  leur  feule  Vôlon* 
té  pour.^egle  il  les  laifFe  auûî  libres  qu'aupi»* 
yanti, 

La  volonté  de  totis  eft  donc  rordfe  ïa  ri^W 

fuprl* 


L    E    T   T   iR  ^.  -        3«t 

i 

fuprêine,  &  cette  règle  générale  &  perfoni* 
fiée  eft  ce  que  j'appelle  le  Souverain; 

il  fait  de-là  que  la  Souveraineté  efl  indi^ 
viûble  »  inaliénable  ^  &  qu'elle  rëfide  eflèncieU 

letncnt  dans  tous  les  membres  du  corps. 

■ 

Mais  comment  agit  cet  être  abftrait  & 
coUeâif?  n  agit  par  des  Loix^  &  fl  né 
âuroit  agir  autrement 

Et  91'efl:  •  ce  qu'une  Loi  ?  Ceft  une  décU- 
radoD  publique  &  iblemnelle  dé  la  volonté 
générale^  fiir  un  objet  d'intérêt  commun. 

Je  dis ,  fur  un  objet  d'intérêt  commun  ; 
parce  que  la  Loi  perdroit  ià  force  &  celFeroic 
d'être  légitîaie^  fi  l'objet  n'en  importoit  à  tous. 

La  Loi  ne  peut  par  fa  nature  avoir  un  objet 
particulier  &  individuel  :  mais  l'application  dé 
la  Loi  tombe  fur  des  objets  particuliers  Ôi 
individuels. 

Le  pouvoir  Légiilatif  qui  efl;  le  Sonvenun  9 

Vartic  L  X         * 


32^ 


SIXIEME 


donc  befoin  d*un  autre  pouvoir  qui  exécute, 
ccfl- à-dire,  qui  réduife  la  Loi  en  aftes  parti*  ^ 
ciiliers.  Ce  fécond  pouvoir  doit  être  étstli 
de  manière  qu'il  exécute  toujours  la  Loi,  & 
qu'il  n'exécute  jamais  que  la  Loi.  Ici  vient 
rinftitution  du  Gouvernement. 

Qu'eft-ce  que  le  Gouvernement  ?  Cdt  un    \1 
corps  intermédiaire  établi  entre  les  fujets  & 
le  Souverain .  pour  îeur  mutuelle  correfpon- 
dance,  chargé  de  l'exéeution  de*  Ldx  4tda 
maintien  dfe  la  Liberté  tant  civ2e  qiie  pfolitH^e* 
'Le  Gouvernement  comme,  partie  îmégian- 
te*  du  corps  po&îque  participe  à  h  vdhSité 
générale  qui   te  cohftîtûe  ;  coHitee  cbrp*  laî 
même  il  a  fa  vcdbhté   propre.    Osé  deux 
voloiltés  quelques  fois  s'accordent  &  quelques 
fois^  fe  éombàttcnt.    Ceft  de  l'effet  o^nbiné 
de  ce  concours  &  de  ce  conflit  ^que  lÉéluke 
le  jeu  de  toute  la  jtnachine. 

.  i 


L    E    T    T    R    E.  3*3 

ï^  principe  qui  conflitiie  les  diverlès  formes 
<)a  Gouvernement  confiée  dans  le  nombre  dei 
jl      membres  qui  le  coropofent.  Plus  ce  nombre  eft 
Il      petit ,  plus  le  Gouvernement  a  de  force  ;  plus 
le  nombre  eft  grand ,  plus  le  Gouvernement 
eft  foible;  &  comme  la  fouverain^té  tend  tou« 
jomrs  au  relâchement ,  le  Gouvernement  tend 
toujours  à  &  renforcer.  Ainfî  le  Corps  exécutif 
doit  l'emporter  à  la  longue  fur  le  corps  legifta- 
tif  y  &  quand  la  Loi  eft  enfin  foumife  aux  liom- 
mes,  il  ne  refte  que  des  eiblaves&  des  maî« 
très;  l'Etat  eft  détruit. 

Avant  cette  deftrudion,  le  Gouvernement 

doit  par  fon  progrès  naturel  changer  de  forme 

&  paflêr  ^' >degrès  du  grand  nombre  au 

mcHnd^e. 

Les  diveries  formes  dont  le  Gouvememenci 

ceptible  fe  réduifent  à  trois  principales. 

prés  les  avoir  comparées  par  leurs  avantages 


3H         SIXIEME 

&  par  leurs  inconvéniens  ^  je  donne  la  ^fë- 
tence  à  celle  qui  efl;  intermédiaire  entre  les 
deux  extrêmes ,  &  qui  porte  le  nom  d'Arifto- 
cratie.  On  doit  fe  foavenir  ici  que  la  conflî- 
tution  de  TEtat  &  celle  dû  Gouvernement  fout 
deux  chofes  très  diftinâes,  &  que  je  ne  les  ai 
pis  confondues.  Le.  meilleur  des  Gouverne* 
mens  eft  l'ariftocratîque  ;  la  pire  des  fbuyerai* 
netés  eft  l'ariftocratiquei 
-  Ces  difcuiHons  en  amènent  d'autres  for  la 
manière  dont  le  Gouvernement  dégénère,  & 
fur  ks  moyens  de  retarder  la  ddixuâibn  du 
iCorps  politique.      .     ^ 

Enfin  dans  ië  dernier  livre  j'exaonine  psi, 
uroye  de  comparaifoa  avec  le  meilleur  Gouver- 
nement qui  ait  exifté,  favoir  celui  de  Rome, 
^h  police  la  plus'favdrable  h  la  bonnet  conilî- 
tûtîon  de  l'Etat;  puis  je  tèrmitie  ce  Livre  &. 
«ou^rOavrage  par  des  recherches,  far;  la  nia- 


LETTRE.  32y 

nîec^  dont  la  Religion  peut  &  doit  entrer  * 

» 

comme  partie  conflitiitive  dans  la  compofîn 
tion  du  corps  politique. 

Que  penfiez-vous,  Monfîsur ,  en  lîfant  cet-, 
te  analyfe  courte  &  fidelle  de  mon  Livre  ?  Je 
le  devine.  Vous  diGez.en  vous-même  ;  voila 
rhiftoire  du  Gouvernement  de  Genève.  Ceft 
ce  qu'ont  dit  à  la  lefture  du  même  Ouvrage 
ioiis  ceux  qui  connoîffent  voire  Conftitution. 

EteaeflFet,  ce  Contraft  primitif ,  cette  ef» 
fence  de  la  Souveraineté ,  cet  empire  des  Loix, 
cette  inftitutîon  du  Gouvernement ,  cette  ma- 
nière de  le.refferrer  à.divers  dégrés  pour  corn- 
penfer  Fautorité  par  la  force ,  cette  tendance 
à  1  ufurpation ,  ces  aflemblées  périodiques,  cet- 
te adrelle  à  les  ôter ,  cette  de{lru£tioa-pro<> 
chaîne ,  enfin  ,  qui  vous  menace  &  que  je 
vtxiloîs  prévenir;  n'eft*  ce  pas  trait  pour  trait 
limage  de  votre  République^  depuis  fa  naiffâiv 
ce  jufqu'à  ce  jour  ?.  X  3 


3^6  SIXIEME 

paî  donc  pris  votre  Conftîtutîon ,  qw  Je 
trouvois  belle  ,  ^om  modèle  des  inftitutions 
politiques  ,   &  vous  propofant  en  exemple  à 
TEurope ,  loin  de  chercher  à  vous  détmire  j'ex-. 
pofoî's  les  moyens  de  vous  ccMiferver,    Cette 
Conflitution  ,  toute  bonne  qu'elle  eft ,  n'effc 
pas  fans  défaut  ;  on  poavoic  prévenir  les  alté^ 
rations  qu'elle  a  foufFertes,  la  garantir  du  dan- 
ger qu'elle  court  aujourd'hui.    J'ai  prévu  ce 
danger  ,  je  l'ai  fait  entendre,  j'îndiquoi^  de» 
préfervatifs  ;  étoit-ce  la  vouloir  détruire  que 
de  montrer  ce  qu'il  fsdioic  faire  pour  la  main- 
tenir?  jC'étoit  par  mon  attachement  pour  elle 
que  jaurois  voulu  que  rien  ne  put  l'altérer^ 
Voila  tout  mon  crime  ;  j'avois  tort ,  peut- 
^  être  ;  mais  fi  Tamour  de  la  patrie  m'aveugla 
fur  cet  article,  étoit-ce  à  eHede  m'en  punir? 
Comment  pouvois-je  tendre  à  renverfer  tous 
les  ^  Gouvememens ,    en  pofant  en  -prin^^s 


LETTRE.  327 

tous.ceux  du  vôtre?  Le  fait  feul  détruit  Fac- 
cufatîon.  Puifqu'îl  y  avoic  un  Gouvernement 
çxîftant  fur  mon  modèle,  je, ne  tendois  donc 
pas  à  détruire  tous  ceux  qui  exiiloient.  Eh  ! 
Monfieur  ;  fi  je  n*avoîs  fait  qu'un  Syftême, 
vous  êtes  bien  fiir  qu'on  n'auroit  rien  dît.  On 

■ 

fe  fut  contenté  de  reléguer  le  Contracl  Social 
avec  la  République  de  Platon  l'Ufopie  &.  le« 
Sévarambes  dans  le  pays  des  chimères.  Msis 
je  peîgnoîs  un  objet  exiftant,  &  Ton  vouait 
43ue  cet  objet  changeât  de  face.  Mon  Livre 
portdît  témoîgilage  contre  l'attentat  qu'on  al- 
loit  faire.  Voila  ce  qu'on  ne  m'a  pas  pardonné. 
Maïs  voici  qui  vous  p^roitra  bizarre.  Mon 
Livre  attaque  tous  les  Gou vernemens ,  &  il 
n'eft  profcrit  dans  aucun!  Il  en  établit  un  feul, 
il  le  propofe  en  exemple ,  &  c'efl:  dan<  celui- 
là  qu'il  eft  briïlé  î  N'efl-il  pas  fingulier  que 
les  Gouvernemens  attaqués  le  taifent ,  &  que 

X4 


^2S  S    I    X    I    E   M    Bi 

Je  Gouvernement  relpeûé  févifle?  Quoil  Le 
I^Iagiftrat  de  Genève  fe  fait  Iç  protefteur  des 
autres  Gouvernemiens  contre  le  flen  même  !  H 
punît  fea  propre  Citoyen  d'avoir  préféré  les 
Loix  de  Ton  pays  à  toutes  les  autres!  Cela  eft- 
^  conce\^bIe  s  &  le  croiriez- vous  &  vous  ne 
l'euffiez  vu?  Dans  tout  le  refte  de  TEurope 
quelqu'un,  s'^cll-il^  avifé  de  flétrir  l'ouvrage? 
Non  y  pas  même  TScat  où  il  a  été  impri- 
mé (b).  Pas  même  la  France  où  les  Magif- 
trats  foat  là-deflîis  fi  féveres.  Y  a^-t-oa  défeo- 
du  le  Livre?  Rièa  de  fembiable  ;  on  n'a  pç 
kifle  d'abord  entrer,  l'édition  de  Hollande, 
mais  dfl  Ta  ccmtrefaîte  en  France,  &  Touvra- 
ge  y  court  fans  difficulté.    C'étoit  donc  aoe 


(6)  Dans  le  fort  dqs  premières  clamears  cauKef 
par  les  procédures  de  E^ris  &  de  Genève ,  le  Ma- 
giflrat  flirpris  défendit  les  deux  Livres  :  mais  far 
'ipn  pfoprè  çuppenrcç  fage  Magiflrac  a  bien  chaog^ 
de  fencimenc»  furtout  quant  au  Contraél  Social* 


L    ET    T    R  ^.       329 

âSàifô  de  ccanmerce  &  non  de  police:  on 
préféroic  le  profit   do-  Libraire  de  '  France 

au  profit  du  Libraire  étranger.'   Voila  tout 

» 

Lé  Contraft  Social  n'a  été  brûlé  nulle  part 
qu'à  Genève  où  il  n'a  pas  été^  imprimé  ;  le 
fenl  Magiftrat  de  Genève  y  à  trouvé  des 
jprîncîpes  deftruélifs  dé  tous  les  Gouverne- 
mens.  A  la  vérité ,  ce  Magîftrat  n'a  point 
dît  quels  étoient  ces  principes';  en  cela  je 
croîs  qu'il  a  fort  prudemment -fek.  * 

L'effet  des  défenfes  indifcretes  Ht  de  tfêtré 
point  obfervées  &  d'énerver  h  foi^ce  de  l'auto- 
rité. Mon  Livre  eft  dans  les  niains  de  tout  le 
monde  à  Genève ,  &  que  rfeft-il  également 
dans  tous  les  cœurs  !  Lifezle,  Monfîeur,  ce 
Livre  fi  décrié,  -  mais  fî  néceflaire  ;  vous  y 
verrez  partout  la  Loi  mife  au  deflus  des  hom- 
mes; vou^  y  verrez  par  tout  la  liberté  récla^ 
mée ,  mais  toujours  fous  l'autorité  des  loix  / 

X5 


359         SIXIEME 

fins  IdqoçUes  la  liberté  ne  peiat  exHler ,  de 
fous  lefquelles  on  efl;  toujours  libre,  de  quel- 
que façon  qu'on  fdt  gouverné.  Par  là  je  ne 
{àis  pas,  dît-on,  ma  cour  aux  puifTances :  tant 
pis  pour  elles;  car  je  fais  l^ufs  vrais  intérêts, 
fi  elles  favoient  les  voir  &  les  fuivre.  Mais 
les  pallions  aveuglent  les  hommes  fur  leur 
propre  bien^  Ceux  qui  foumettent*  les  Loix 
aux  paffions  humaines  font  les  vrais  deflxac- 
teurs  des  Gouvernemens  :  Voila  les  gens  qu'il 
faudroit  punir. 

Les  fondemens  de  FEtat  ^nt^  les  mên^ 
dans  tous  ks  Gouvernemens ,  &  ces  fonde-, 
mens  font  mieux  pofês  dans  m^n  Livre  que 
dans  aucun  autre.  Quand  il  s  agit  enfuite  de 
comparer  les  diverfes  formes  de  «Gouverne* 
mœt,  on  ne  peut  éviter  de  pefer  feparément 
les  avantages  &  les  inconvéniens  de  chacun  : 
ç^eft  ce  que  je  croîs  avoir  fait  avec  impartiali^ 


M, 


LETTRE.  33t 

té.  Tout  balancé  ,  j'ai  donné  la  préférence 
au  Gouvernement  de  mon  pays.  Cela  étoit 
naturel  &  raifbnnable  ;  on  m'auroit  blâmé  fi 
je  ne  Teufle  pas  fait.  Mais  je  n'ai  point  don- 
né d'ezclufion  aux  autres  Gouvememens  ;  au 
contraire  :  j'ai  montré  que  chacun  avoit  la 
raifon  qui  pouvoit  le  rendre  préférable  à 
tout  autre ,  felôn  les  hommes  les  tems  & 
les  lieux.  Ainfî  loin  de  détruire  tous  les  Cou- 
vememens,  je  les  ai  tous  établis. 

En  parlant  du  Gouvernement  Monarchique 
en  particulier,  j'en  ai  bien  fait  valoir  l'avanta- 
ge,  &  je  n'en  ai  pas  non  plus  déguifé  les  dé* 
fauts.  Cela  eft ,  je  penfe ,  du  droit  d'un  hom- 
me qni  raifonne;  èc  quand  je  lui  aurois  donné 
rexdufion,  ce  qu'aflurément  je  n'ai  pas  fait^ 
s'enfuîvroît^il  qu'on  dv&  m'en  punir  à  Genève? 
Hobbes  at-il  été  décrété  dans  quelque  Monatw 
chie  parce  que  &$  principes  font  deftruâifs  de 


S32  SIXIEME 

tout  Gouvernement  répàbliciaîn ,  &  fait- on  fer 
procès  chez  les  Rois  aux  Auteurs  qui  rejettent 
&  dépriment  les  R^ublîques  ?  Le  droit  n'efe 
3  pas  réciproque ,  &  tes  Républicains  ne  font- 
îk  pas  Souverains  dans  kur  pays  comme  les 
Rois  le  font  dans  le  kur.  Pour  moi ,  je  n'ai 
rejette  aucun  Gouvernement^  je  n'en  ai  mi. 
prifé  aucun.  £n  tes  examinant ,  en  les  corn- 
parant  j'ai  tenu  la  balance  &  j*ai  calculé  ka 
poids  :  je  n'ai  rien  fait  de  plus.. 

On  oe  doit  punir  la  raifbn  nulle  parti,  ni 
même  te  raifonnement  ;  cette  punition  proor* 
veroît  trop  contre  ceux  qui  fimpoferoient. 
Le»  Répréfentans  ont  très  bien,  établi  que  mon 
Livre,  où  je  ne  fors  pas  de  la  théfe  générale^ 
ç'attaqu^nt  point  le  Gouvernement  de  Genève 
&  imprimé  hors  du  territoire  »  né  peut  être 
confidéré  que  dans,  le  nombre  de  ceux  quitrai-i 
tenc  du  droi^  naturel  &  politique ,  fur  lefquel$ 


L   E    1:    T    R    E-  333 

les  Loix  ne  donnent  au  Confeil  aucun  pouvoir  ^ 
&  qui  ie  font  totijours  vendus  publiquement 
dans  kt  Ville ,  quelque  principe  qu'on  y  avance 
&  quelque  fentiment  qu'on  y  fbdtienne.  Je  ne 
fais  pas  le  ieul  qui  difcutant  par  abflraélion 
des  queflions  de  politique  ait  pu  les  tnûcet 
avec  quelque  hardiefle;  chacun  ne  le  fait  pas  4 
mais  tout  homme  a  droit  de  le  faire  ;  pIuQeuri 
ufent  de  ce  droit,  &  je  fuis  le  feul  qu'on  puf 
niffe  pour  en  avoir  ufé.  L'infortuné  Sydnd 
penfûit  comme  moi ,  mais  il  agiflbit  ;  c'ed  pous 
fon  fait  4&  non  pour  fon  Livre  qu'il  eut  Thon^ 
neur  de  verfer  fon  fang.  Althuikis  en  Allema< 
gne.  s'attita  des  ennemis,  mais  oh  ne  S'avifa  pas 
de  le  pourfuivre  criminellemcnti  Locke, Mon* 
teiquieu ,  l'Abbé  de  SaintPierre  ont  traité  lel 
mêmes  matières,  &  fou  vent  avec  la  même  lîy 
berté  tout  au  moins.  Itockc  en  particulier.  Ifii 
a  traitées  exaftçjtnent  dans  les  mêmes  principes 


â34 


SIXIEME 


que  mol  Toas  trois  font  nés  fous  des  Rois» 
one  véeit  tranquilles  &  font  morts  honorés 
dans  leurs  pays*  Woos  faVez  comment  j'ai 
été  tTdké  dans  le  mien, 

Àu^  foyez  fôr  que  loin  de  rougir  de  ces 
flétriflures  je  m'en  glorifie ,  puifqu*elles  ne  fer- 
vent qu'à  mettte  en  évidence  le  motif  qui  me 
les  attire ,  &  que  ce  motif  n'ed  que  d'avoir 
bien  mérité  de  mon  pays.    La  conduite  du 
Confeil  envers  moi  m'afflige ,' fans  douce  ^  en 
rompant  des  nœuds  qui  m'étoient  fi  chers; mais 
peut-elle  m*avilir?  Non,  elle  m'élève,  elle  me 
met  au  rang  de  ceux  qui  ont  fouiFert  pour  la 
liberté.    Mes  Livres,  quoi  qu'on  fafle  ,  por- 
teront toujours  témdgnàge  d'eux-mêmes,  & 
le  traitement  qu'ils  ont  reçu  né  fera  que  faa« 
ver  de  l'opprobre  ceux  qui  auront  l'honneur 
d'être  brûlés  après  eux. . 

Fin  de  la  f  remise  Partie» 


\ 


/ 


LETTRES 

ÉCRITES    DE   LA 

MONTAGNE. 
rjR  y.  y.  rousses  a 

SECONDE    PARTIE. 


J   JMSTERDJM, 

Chra    MARC    MICHEL    REK 

MD  COL  XIV. 


< 

I 


\. 


!•-  »   -il 


.•   « 


<» 
#• 


^  t 


••'    O    O   "^     f*^    r^ 


«  -î 


«      i;»        «  r>'  * 


r   '.' 


I  ' 


> 

«^ 


^ 


T 


LE  TTRES 


ECRITES    DE    LA 


MONTAGNE. 

SECONDE    PARTIE. 

SEPTIEME      LE  T  T  R  E. 

Vous  m'aurez  trouvé  diâus^  Monfieur;  maûr 
il  {afloit  rétre,  &  les  fujets  que  favois  à  traî* 
ter  ne  fe  difcutebt  pas  par  des  é^jgramines^ 
D'alileors  ces  fujets  m'éloignoient  moins  qu'il 
ne  femble  de  celui  qui  vous  intéreflëi  £n  par« 
lant  de  moi  je  penfois  à  vous  ;  &  votre  que(^ 
tion  tenoic  fi  bien  à  la  mienne,  que  l'une  eft 
déjà  réfolue  avec  l'autre,  il  ne  me  reCte  que 
la  conféquence  à  tirer.  Par  tout  où  Tinnocen^ 
ce  n'efl:  pas  en  IJketé,  rien  n'y  peut  être:  par 
Partie  IL  A 


2  SEPTIEME 

tout  où  les  Loix  font  violées  impunément^ 
il  n'y  a  phis  de  Kbertc* 

Cependant  commç  on  peut  féparer  Tintérêt 

*  - 

d'an  particuIieF  de  celui  du  pubKc,  vos  idées 
fyr  ce  point  font  eneotfe  iocefcakies  i  vou$ 
perfifl^  k  vouloir  que  je  vous  ^^e  àles^  fixer. 
Vous  demandez  quel  eft  l'état  préfent  de  vo»' 
ire  République ,  &  ce  que  doivent  faire  fef 

* 

Citoyens?  H  eft  plus  aife  de  répondre  à  la  pre- 

C«tfiî  pir^^e  qurf^îoii  vous  en*arraflfe  fift* 
rmi^  v^^  par  «Scrra^noie  que  par  1^9  folo^ 
tÎpQfi  Qpniradi^oires  qu'on  lui  ^coine  autour  dt 
vx3)(^9^  J>e$  QeDs  dQtf^  bpn  îkm  ^?Qua  dif^Qt^ 
iKlus^  fommes  h  pdus  Hbre  de  tous  les  pçuplei, 
Sf  d'^u£fëa  Gep$  de  très.' bon  fens  vous  difenc} 
i>Qt<s  vivons  foua  le  plus  dur  efclavage.  Lef- 
quête  ont  raifon,  me  denoandez-voqs  ?  Tons  y 
Monfieur  ;  mais  à  différeiis  égards  ;  une  dif^ 


LETTRE;  I 

èi&âion  très  iiAiple  les  coticilie;  Ripa  â'e^ 
^ius  libre  que  votre  état  l^icitne  ;  rien  n'eft 
plus  fervîle  que  votre  état  aftdel 

Vos  loix  ne  tiennent  leur  autorité  que  dé 
vous }  vous  ne  reconnoiilëz  que  ceiks  que  vom 
faites  ;  vous  ne  payez  que  les  droits  que  voal 
impofez  ;  yous  éliKt  les  Chefs  qui  vous  goiir 
Vement  ;  ils  n'ont  droit  de  vous  juger  que  pat 
des  formes  prefcriteSi  E41  Conièil  général  voua 
êtes  LégiflateurSi  Souverains,  indépendant 
de  toute  puiiTance  humaine;  vous  ratifiez  lef 
traités/  vous  décides  de  la  paix  &  de  la  guer^  - 
re  ;  vos  Magiflxats  eux  «  mlines^  vous  traitenc 
de  Magnifiques , ,  très  honorés  &  fouvirains  Sei* 
gtiéurs.  Voila  votre  liberté  i  voici  votre  fer^ 
Vitude^ 

Le  corps  chaîné  de  Teicécutiôh  de  vos  Loîst 
en  ^  rinterpréte  &  Tarbiti^e  fuprême  ;  il  les 
fait  pixï&t  coaune  il  lui  plaie }  il  pôut  les  fal^ci 

.A» 


-4  SEPTIÈME 

taire  ;  il  peut  même  les  violer  fans  que  vois 

s. 

puiiliez  y  mettre  ordre  ;  il  efl  au  dëflus  à& 
Loix. 

« 

Les  Qiefs  que  vous  élîfez  ont,  îndépèncïam- 

ment  de  votre  choix,  d*autres  pouvoirs  qu'iîs 

'  *ne  tiennent  pas  de  vous ,  &  qu'ils  étendent  aux 

-dépends  de  ceux  qu'ils  en  tiennent.    Limkéi 

dans  vos  éleftîohs  à  un  petit  nombre  d'hom- 

mes  ,  tous  dans  les  mêmes  principes  &  tous 

•animés  du  même  intérêt,  vous  faites  avec  un 

grand  appareil  un  choix  de  peu  d'importance. 
1        ■  ... 

*  Ce  qui  impôrteroit  dans  cette  affaire  fooit  de 

pouvoir  rejetter  tous  ceux  entre  lelquels  on 

vous  force  de  choîfir.    Dans  une  éledtion  libre 

en  apparence  vous  êtes  fi  gênés  de  toutes  parts 

que  vous  ne  pouvez  pas  même  élire  un  pre- 

xmer  Syndic  ni  m  Syndic  de  ta  Garde  :  le 

/^hef  de  la  République  &  le  Commandant  dç 

b  Place  ne  font  pas  à  votre  choix. 


\*- 


*  '" 


L    E    T    T    R    E.  ^] 

Si  Ton  n'a  pas  le  droit  de  mettre  fur  vous 
de  nouveaux  impôts,  vous  n'avez  pas  celui  de 
rejecter  les  vieux.  Les  finances  de  l'Etat  font 
fur  un  tel  pied  que  fans  votre  concours  elles 
peuvent  fuffire  à  tout.  On  n'a  donc  jamais 
befoin  dé  vous  ménager  dans  cette  vue ,  & 
vos  droits  à  cet  égard  fe  réduifent  à  être  ex- 
empts en  partie  &  à  n'être  jamais  néceiTaires. 

Les  procédiffes  qu'on  doit  fuivre  en  vous  ju- 
geant font  pi;dcrites;  mais  quand  le  Confeil 
veut  ne  les  pas  luivre  perfonne  ne  peut  l'y  con« 
trabdre ,  ni  l'obliger  à  réparer  les  irrégularités 
qu'il  CGKnmet.  Là-deiTus  je  fuis  qualifié  pour 
feire  preuve ,  &.  vous  favez  fi  je  fais  le  feul. 

Ea  Conl^  général  votre  Souveraine  puîf- 
iknce  dk  enchaînée  ;.  vqus  ne  pouvez  agir 
que  quand  il  plait  à  vos  I4^gi(lrats,  ni  par? 
1er  qiie  qaand  ils  vous  interrogent.  S*ils  veu- 
lent  ■  même  .ps  poiat  affembler  de  Confeil  gé- 

A3 


\ 


e        SEPTIEME 

f)éral,  votre  autorité  votre  exiftence  eft  anéaih 
tie^  fani  que  vous  puiiSe;  leur  oppofer  qoo 
^e  vains  mumiuies  «qu'ils  foQt  en  po|{e(fion 
de  méprifer. 

Enfin  (i  vous  êtes  Souverains  Sei^eurs  dans 
raiTemblée,  en  forçant  de -là  vous  n'êtes  plus 
rîeut  Quatre  heures  par  an  Souverains  fubor< 
donnés,  vous  êtes  fujets  le  refte  de  la  vie 
^  livrés  fans  réièrve  à  la  difcrétiop  d'autrui 

Il  vous  efl:  arrivé,  Meffieurs,  ce  qu'il  airii 
ve  k  tous  les  Gouvememens  &mbkbfes  an 
vôtre.  D'abord  la  pui(&nçe  Légiib^tive  ^  la 
îmiflance  e:^écutive  ^ui  çonfUtueDC-  I9  ibuve^ 
faineté  n'en  fo^t  pas  diftin6^es,  Le  Peuple  Sou^ 
verain  veut  par  hii-f^êine^  &  p^-iui^iQpœe  il 
fait  ce  qu'il  veut.  Bientât  l'inçopunoifté  de  (A 
concours  de  tous  à  toin:e  chofe  force  te  *Peu{de 
^uveraiu  dé    charger  quelque»^  on^  4e*  &a 


:  L  .ET    X  R   e: 


.i 


.ciers,  aptes  avoir  rempli  kur  commifficm  m 
rendent  compte ,  &  rentrent  dans  la  comnm^ 
ne  égalité.  Peu- à -peu,  çe$  ceoimlfliQQa .  d<^. 
viennent  fréquentes  ^  ei^ij  permanentes*  In- 
fenfiblement  il  fe  forme  un  corps  gui  agH  (q^ 

joats.    Un  >arpS'  tpi  agit  tonjours  Qç.peut 

-/ 

pas  rencke  compte  de  cha^e  a6le  :  il  m  rend 
pkis  compte  que  dea  principaux  ;  bianét  |1 
vient  à  bout  de  n'en  re^c^e  d'^ixrua  Fluâ  I9 
puiflàfice  qû  agit  elt  aâ/^ve^  plus  ^elj^  .^e^ve 
la  piui^a&e  qui  veut.  La  volant^  d'hier. eft 
c^ée  être  aufli  celle  .d'^joiu:d'J[iui$  aa  Ijett 
que  radie  d'hier  ne  difpeiife  pas  d'^ir  a^Qur> 
d'hùi*  Eùfin  rinaâ:ion:de  la  puilTaitcç  qui 
veut  h  fomm.  à. la  pui£&{içe:qui  ^é9«be^ 
c^Ue-cI  f&id  peiâ-à-pi^  &$  aétietts  indépen^r 
d«QCet.^;>kâcût  f^  velo4ts$  :  au  lieu  ^'agir. 
pour  là  .puiflaooe  qm  iReut>  elle  agit  fm:  eHe* 
M  àe^  refte;  alors  datfs  l'Eiat  ^'une  puiflane^ 

A4 


Q         SEPTIEME 

«giflante,  c^efl:  rexécutive.  La  puiilance  exe- 
cutive n'ed  que  la  force ,  &  où  règne  la  feu- 
le force  FEtat  eft  diff>ut.  Voila ,  MoBfkur, 
conuneBt  périfTont  à  la  fin  tou«  les  Etats  dé- 
ftiocratiquei. 

Parcourez  les  annales  du  vôtre  ,  depuis  le 
tems  où  vos  Syndics,  fîmples  procureurs  ëta* 
blis  par  la  Communauté  pour  vaquer  à  telle  ou 
telle  affaire ,  lui  rendoient  compte  de  leur  Com- 
miflion  le  chapeau  bas ,  &  rehtroient  à  rinfhmc 
àzns  Tordre  des  particuliers  ,  jufqu^à  celui  où 
ces  mêmes  Syndics,  dédaignant  les  droits  de 
Chefs  &  de  Juges  qu*ils  tiennent  de  leur  élec- 
tion ,  leur  préfèrent  le  pouvoir  arbitraire  d'un 
corps  dont ,  la  Communauté  n'élit  point  les 
xtiembres,  &  qui  s'établit  au  defliis  d'elle  con- 
tre les  Loix:  fuivez  les  progrès  qui  fëparent  ces 
deux  termes  /  vous  connoitrez  à  ^el  poifit 
vous  en  êtes  ai  pu  quels  dégrés  v^ras  y  êtes 
parvenus^  .    •- 


LETTRE. 


Il  y  a  deux  fîécles  qu'un  Polîtîqae  auroît  pu 
prévoir  ce  qui  voua  arrive.  Il  auroît  dit;  Tin- 
ftitution  '  que  vous  formez,  eft  bonne  pour  le 
préfent ,  &  mauvàîfe  pour  l'avenir;  elle  eft 
bonne  pour  établir  la  liberté  publiqme  »  niai>*' 
vaife  pour  la  conferver ,  &  ce  qui  fait-  mainte- 
nant  votre  fÛFeté  fera  dans  peu  la  matière  de 
vos  chaînes.  Ces  trois  corps  qui  rentrent  teK 
lement  l'un  dans  l'autre  i  que  du  moindre  dé- 
pend i'aftivité  du  plus  grand ,  font  «i  équilibre 
tast  que  VnB^on  du  plus  grand  dl  nëceilaire  & 
que  la  Légiflatîon-  ne  peut  (e  paffer  du  Légî 
lateûr.  Mais  quand  une  fbi$  l'établiflemene- 
fera  fait ,  le  corps  qui  l'a  formé-  manquant  de 
pouvoir  pour  le  maintenir ,  il  faudra  qu'il  tom- 
be- en  ruine ,  &  ce  feront  vos  Loix  mêmes  qui 
cauferont  votre  deflruftîon.  Voî!a  précifé- 
Hient  ce  qui  vous  eft  arrivé.  Ceft ,  fauf  la 
dîfproportioii, 'Ja  ckute  du  Gouvernement  P&3 

A  s 


lo       SEPTIEME 

kmoîs  par  retttémité  coatraire.  La  conflico- 
tion  de  ]a  Républiquis  de  Pologne  n'eil  bonne 
que  pour  un  Gouvernement  où  il  n^  a  plus 
lien  à  faire.  La  vôtre  \  au  contraire ,  n'ed 
bonne  qu'autant  que  le  Corps  lég^latîf  agis 
toujours.* 

Vos  Magiftrats  ont  travaillé  de  tous  les 
tems  &  fans  relâche  à  faire  paiTer  le  pouvoir 
liiprême  du  Confeil  général  au  petit  Ccmfeil 
par  la  gracktion  du  Deux-Cent;  mais  leurs  ef- 
forts ont  ei)  des  effets  différens,  félon  la  ma* 
niere  dont  ils  s*y  font  pris.  Pref^  toutes 
kurs  entreprifes  d*éclat  ont  échoué  ^  jKiree 
qu'alors  ils  ont  trouvé  de  la  réfîftaaee,  &  que 
dans  un  Etat  tel  que  le  vôtre ,  la  réffîaQc& 
publiqifê  efl:  toujours  fore ,  quaq^  elle  eft 
fondée  fur  les  Loix. 

La  raifofn  de  ceci  eft  évidente.  Dans  tout 
Etat  la  Loi  parlé  où  parte  le  fouveraio.  Ok. 


LETTRE, 

dans  une  Di^mocratie  où  le  Peuple  eft  Souvo» 
rain^  quand  les  diviiloDS  inteftines  fliPpcnclnc 
toutes  les  fonn^  &  font  taire  toutes  les  w 
toriiéS)  la  iienne  feule  demeure,  &  où  fe  por^ 
ce  alors  le  plus  grand  nombre ,  là  réGde  la  Loi 
&  Tautorit^ 

Que  fi  les  Citoyens  (k  Bourgeois  réunis  ne 
font  pas  le  Souverain ,  les  Coniëils  fans  les  Ci^ 
toyens  &  Bourgeois  le  font  beaucoup  moina 
encore  ,  put^u'ils  n*en  font  que  la  moindre 
partie  en  quvititë,  Sitôt  qu'il  s*agit  de^rantoc 
mé  fopiême  j  tout  rentre  à  Genèvç  dans  réga» 
)kéy  ielon  les  tçrmes  de  rcdît^  Que  tous  f dent 
iwaem  en.  dégré\  i»  Citoyens  ^  Bourgeois  ^  fyns 
voukirfe  préférer  ^  fmrihuer  qudque  autorki 
^  Seigneurie  far  àeffus  les  mares.  Hors  dti 
Conf^  général,  it  n'y  a  point  d'autre  Soave« 
min  que  la  Loi,  mais  quand  la  Loi  même  eft 
gttaqué^  par  lès  Mimftres,^  c'efl..ao  Légâfla^eut 


12       SEPTIEME 

à  la  fbutenîr.  Voila  ce  qui  fait  que  partout 
où  règne  une  véritable  liberté ,  dans  les  axtxo^ 
prifes  marquées  h  Peuple  a  prêfque  touj<»ir5 
Tàvantage^ 

'-  Maïs  ce  n'e(t  pas  par  des  çntreprifes  mar- 
quées que  vos  Magiflrats  ont  amené  les  chofes 
au  point  où  elles  font  ;  c*eft  par  des  efforts 
modérés  &  continus  ,  par  des  changemeos 
prefque  infenfibles  dont  vous  ne  pouviez  pré- 
voir la  conféquence ,  &  qu'à  peine  même  pou^ 
viez-vous  remarquer.  Il  n'efl:  pas  poflible  ai| . 
Peuple  de  fe  tenir  fans  ceflë  en  garde  contre 
tout  ce  qui  fe  fait ,  &  cette  vagîlance  lui  tour* 
neroit  même  à  reproche.  Oh  l'accuferoit  d'ê* 
tre  inquiet  &  remuant,  toujours  prêt  à  s'alla^ 
mer  fur  des  riens.  Mais  de  ces  riens-là  furlefr 
quels  on  fe  tait ,  le  Confeil  fait  avec  le  tems 
faire  quelque  chofe.  Ce  qui  ie  pafFe  aéhielle* 
talent  fQus  vos  yeui;  en  eil  la  pteuve«       *  ^ 


I     E    T    T    R    E.      :  t3 

Toute  raatoricé  de  la  Répubii(}ae  rëfidb 
dans  les  Syndics  qui  font  élus  dans  le  Confeil 
général.  Ils  y  prêtent  ferment  patce  qu'il  eft 
Jeur  feul  Supérieur, &  ils  ne  le  prêtent  que  dans 
ce  Confeil ,  parce  que  c'efl:  à  lui  feul  qu'ils  doi- 

« 

vent  compte  de  leur  conduite ,  de  leur  fidélité 
à  remplir  le  ferment  qu'ils  y  ont  fait. .  Us  ju« 
rent  de  rendre  bonne  &  droite  jufUce  ;  ils 
font  les  feuls  Magiilrats  qui  jurent  cela  dans 
cette  aflèmblée ,  parce  qu'ils  font  les  feuls 
à  qui  ce  droit  foit  conféré  par  le  Souve- 
rain (a)  y  &  qui  TeKercent  fous  fa  feule  au« 

(û)  Il  n'eft  conféré  à  leur  Lieutenant  qu'en  fous- 
ordre,  &  c*eft  pour  cela  qu'il  ne  prête  point  fer- 
ment en  Confeil  général.  Mais  ,  dît  l'Auteur  des 
Lettres  ,  le  ferment  que  prêtent  les  membres  du  Con- 
feil  ejl'îl  moins  obligatoire ,  ff  rexécution  des  engage* 
mens  contraQés  avec  la  divinité  mime  dépend  -  elle  du 
lieu  dans  lequel  on  les  contraUe  ?  Non  ,  fans  doute, 
mais  s'enfuit-il  qu'il  foit  indifférent  dans  quels  lieux 
&  dans  quelles  mains  le  ferment  foit  pi^ité  ,  &  ce 
choix  ne  marque-t-il  pas  ou  par  qui  l'autorité  cft; 
conférée ,  ou  à  qui  Ton  doit  compte  de  Tufage  qu'on 


è4     é  è  p  t  t  t  u  ë 

torité.  l)ans  le  jugetneht  pxV&i  des  critalûieii 
ils  jurent  encore  feuls  devant  le  Peuple  y  eA 
fe  levant  (^)  &  hauflàût  leurs  bâtons,  êi'aorir 
féi  droit  jugement  y  fans  home  m  faoeur^ 
.  pîant  Dieu  de  ks  punir  s'ils  ont  fait  au  c&m 

^ 

traire  ;  &  jadis  ks  iêntetices  criminelles  fe 
rendoient  en  leur  nom  feul ,  fans  qu'il  Ait  fait 
tnention  d'autre  Confeil  qUe  de  celui  des  Ci* 
toyens  ^  eœnxne  cm  le  voit  ptf  la  feàtence  de 
Morelli  ci-devant  tranfcrite ,  &  par  celle  de 
Valentîn  Gentil  rapportée  dans  les  opufâiles 
de  Calvin^ 

Or  vous  fentez  bien  que  cette  puîflaiice  eS- 
cludve  y  ainfî  reçue  immédiatement  du  Peu* 
pie,  gêne  beaucoup  les  prétentions  du  Con* 


«i«B««M«HtaMMaMMMMM«Mmi«Bi^ 


•n  faitt  A  quels  hommes  d*Etat  avons-nous  à  faire 
^W  faut  leur  dire  ces  chofes^là?  Les  ignorenc«>i1Sé 
ou  s*iÎ8  feignent  de  les  ignorer? 

(})  Le  Confeil  eft  préfent  auffi  ,  mais  fes  mtrs^ 
bres  ne  jurent  point  &  demeurent  afSs» 


L   E   1*   T   R   %  ts 

fi^l.  Il  eft  donc  naturel  qoe  poitf  fe  dâîviet 
de  cette  dépcndaftce  il  tâche  tf affbiblîr  pcii-à» 
peu  raatorkrf  des  Syndics,  de  fondre  dans  la 
Çonfeil  la  jurifdîflîpn  qu'ils  ont  reçue,  &  de 
tranfmettre  in^eBfiblefBeRt  à  ee  eorps  pctim^ 
Bent ,  dont  le  Peuple  n*élît  point  les  mem-^ 
btes,  le  pouvoir  grand  mais  paffagcr  des  Ma* 
giflrats  qtfil  élit  Les  Syndics  eux-mêmes, 
kin  de  s'oppofçr  à  ee  changement  doivœc 
auffi  le  favorifer  ;  pairce  qu'ils  font  Syndic* 
feulement  tous  les  quatre  ans ,  de  qu'ils  peu* 
vent  même  ne  pas  l'être  ;  au  lieu  que ,  quoî 
qu'il  arrive,  ils  font  Confeillers  toute  leur  vie, 
le  Grabeau  n'étant  plus  qu'un  vain 
fiial  (c). 


'*■■■  ■  ■'— 1 1  11  If 


(0  Dans  la  première  Inftitution,  les  quatre  Syn- 
dics nouvellement  élus  &  les  quatre  anciens  Syndkj 
rejçttoient  tous  les  ans  huit'  membres  des  feize  reC* 
cans  du  petit  Confeil  &  en  propofoient  huit  nou- 
veaux ,  lefquels  paffoient  enfuitç  aux  fuffrages  des 


j6       s    et    T    I    E    m    E 

« 

'  Cela  gagné  9  Yékdàaa  des  Syndics  devleii* 

dra  de  même  une  céréinonie  tout  auiSi  val- 

pe  qae  l'eft  déjà  la  tenue  des  Confeils  gêné'» 

'  nuz« 


Deux-Cens,  pour  être  admis  ou  rejettes*  Maïs  in- 
fcnfibleincnt  on  ne  rcjetta  des  vieux  Confcillers  que 
ceux  dont  la  conduite  aVoît  dotiné  prîfe  au  blâme, 
&  lorfquUls  avoîenc  commis  quelque  faute  grave^  oh 
B^attendoit  pas  les  éleél^ions  pour  les  punir;  mail 
on  les  mctt oit' d'abord  en  prifon  ,  &  on  leur  faifoit 
leur  procès  comme  au  dernier  particulier.  Par  cet- 
te règle  d*anticiper  le  châtiment  &  de  le  tendre 
févere»  les  Confeîllers  reliés  étant  tous  irréprocha- 
bles ne  donnoient  aucune  prife  à  l'excluflon  :  ce 
qui  changea  cet  ufage  en  la  formalité  cérémonieufe 
&  vaine  qui  porte  aujourd'hui  le  nom  de  Gràbetu. 
Admirable  effet  des  Gouvernemens  libres,  oii'les  u- 
furpations  sièmea  ne  peuvent  s'établir  qu'à  Tappui 
de  la  vertu  ! 

Au  refte  le  droit  réciproque  des  deux  ConfclK 
empécheroit  feul  tucun  des  deux  d'ofer  s*en  fervir 
fur  Tautre  finon  de  confert  avec  lui ,  de  peur  de 
i'éxpofer  aux  répréfâilles.  Le  Grabeau  ne  fert  pro- 
prcmeritqu'à  les  tenir  bien  unis  contre  la  bourgeoi* 
fie,  &  à  faire  fauter  Tun  par  Tautre  les  membrci 
qui  n'auroîçnt  pas  l'efprlt  du  corps* 


"     LETTRE.  t^ 

Taux ,  &  le  petit  Confêil  verra  fort  paifible* 
ment  les  exdufions  pa  préférences  que  le 
Peuple  peut  donner  pour  le  Syndicat  à  fei 
membres  9  iorique  tout  cela  ne  décidera  plus 
de  rien. 

Il  a  d'abord  pour  parvenir  à  cette  fin  un 
grand  moyen  dont  le  Peuple  ne  peut  connoî** 
tre;  c'eft  la-  police  intérieure  du  Confêil , 
dont ,  quoique  réglée  par  les  Edits ,  il  peut 
diriger  la  forme  à  fon  gré  (i),  n'ayant  àucua 
furveillant  qui  Fen  empêche  ;  bar  quant  au 
Procureur  général,  on  doit  en  ceci  le, comp- 
ter pour  rien  (f).    Mais  cela  ne  fuifit  pas 

(d)  C*eft  ainfi  que  dès  Tannée  1655  le  petit  Con«' 
feil  &  le  Deax-Cent  éublîrent  dans  leurs  Corps  la 
btiote  &  les  billets,  contre  l'fidit. 

(e)  Le  Procureur  général ,  établi  pour  être  rhom-' 
me  de  la  Loi,  n'efl  que  Thomme  du  Confeil.  Deur 
caufes  font  prefque  toujours  exercer  cette  charge 
contre  r^fprit  4e  fon  inftitution.  L'une  eft  le  vice 
de  rinftitution  même  qui  fait  de  cette  Magifiraturc 

Partie  IL  B 


18         SEPTIEME 

tûcore  ;  il  faut  accoacumer  le  Peuple  même 
k  ce  traniport  de  jurifdi£lûon.  Pour  cda  tià 
ne  commence  pas  par  ériger  dans  d'impor- 
tantes affaires  des  T^bunaux  compofës  de 
feuls  Confeillers  ^  mais  oh  en  érige,  d'abord 
.•de  nîoins  remarquables  fur  des  objets  peu  in- 
téreflans.  On  fait  ordinairement  préfîder  ces 
^Tribunaux  par  un  Syndic  auquel  on  fubftitae 


«  un  degré  pour  parvenir  au  Confeil  :  au  lieu  qu^un 
ÎPrdcareur  gértërtl  ne  dcvoît  rien  voir  au  deffus  de 
fa  plaee  &  qu'il  devoit  lui  être  interdît  par  la  Loi 

,  d'afpirer  à  nulle  autre.     La  féconde  fcaufc  eft  Tim- 

prudenqe  du  Peuple  qui  confie  cette  charge  à  des 

hommes  apparentés  dans  le  Confeil ,  ou  qui  font  de 

tamilles  en  poflcllîon  d*y  entrer  ^    tzns  confidérer 

qu'ils  ne  manqueront  pas  ainfl  d'erii})ioycr  contre  lui 

les  armes  qu'il  leulr  donne  |>our  fa  défeiïfes    pal  out 

ides  Genevois  diftîi)|uer  rhdmnie  du  peu]rftf  d'avac 

l'homme  de  la  Loi  y  cominè  fî  ce  n'étpic  pas  la  mS- 

-me  chefel    Les  Procureurs  généraux  dcvroient  être 

durant  leurs  ûx  ans  les  Chefs^  de  la  Bourgeiefîe  •  & 

devenir  fon  confeil  aprèô  cela  :  mais  ne  ht  voila-t-il 

•.pas  bien  protégée  &  bien  confeillée,  &  a*a-t-dlc 

'l>às  fort  k  fe  féllelter  de  fon  choisi 


L    E    T.  t    R    Ei  i|l 

quelqadfols  ù&  ancien  Syndic  »  puis  lui  Coo- 
feiller,  fams^^e  {ierfonne  ^  (iS&  attention;  on 
irepette  fans  bruit  cette  manitBuvife  jufqû'à  ce 
qu'elle  faiûfe  ufage }  on  la  tr^fporte  au  crimi« 
neL  Dans  une  bccaiibn  plus  incitante  on  é- 
rige  un  Tribunal  pour  juger  des  Citoyehs.  A 
la  faveur  de  la  Loi  des  rjéîcufations  oh  fait» 

préfider  ce  Tribunal  païf  un  Confeiller.  Alorè 

•  ,  •  I 

le  Peuple  ôuvrç  les  yeuic  &  murmure.  On  lui 
dit^  dequoî  vous  pkignez-vous?   Voyek  lei 

exemples;  noiis  n'innovons  rien. 

'••■'••' 
Voik^  Mbnfieur,  la  politique  de  vos  Mi- 

gifbrats.  Ils  font  leurs  innovations  peu-àrfiea^ 

lentement ,  fans  que  perfonne  en  voye  la  con- 
*  -    •  ■  < 

féquence  ;  &  quand  enfin  Ton  s'en^apperçôit 

*"  ■  '  -    '   ,  ••     "      '. 

&  qu'on  y  veut  pottd:  remède ,  ils   client 

qu  on  veut  mnover. 

Et  voyez j>  eh  effet,  fans  fcfrtir  de  cet  exem- 

« 

(lie ,  06  qu'ils  OQC'  dit  k  cette  6ccàCioti.    M 


20        SS    FTIEME 

r'apptiyoknc  fur  la  Loi  des  récufàtiotis  :  on 
leur  répond;  la  Loi  fondamentale  de  l'Etat 
veut  que  les  Citoyens  ne  foîent  jugés  que  par 
leurs  Syndics^     Dans  la  concurrence  de  ces 
deux  Loix  celle-ci  doit  exclure  fautre  ;  en 
pareil  cas  pour  les  obferver  toutes  deux  on 
devroit  plutôt  élire  un  Syndic  ad  aStum.  A  ce 
mot  9  tout  ej(l  perdu  !    Un  Syndic  ad  aStum  ! 
innovation  !  Pour  xhoi^  je  ne  vois,  rien  là  de  il 
nouveau  qu'ils  difent:  fi  c'eft  le  niot ,  on  s'en 
fert  tous  les  ans  aux  éleâions  ;  &  (i  c'eft  la 
chofe ,  elle  eft  encore  moins  nouvelle  ;  puif- 
.que  les  premiers 'Syndics  qu'ait  eu  la  ViDe 
n'ont  été  Syndics  qu'iii  aSlum  :     lyrique  le 
.Procureur  général  cft  recufable ,  n'en  faut  -  il 
pas  un  auti^e  ad  aSlum  pour  faire  fes  fonftions  ; 
&  les  adjoints  tirés  du  Deux  -  Cent  pour  rem- 
plir les  Tribunaux ,  que  font  -  ils  autre  diofe 
.  que  des  Confeillers  ad  oEtum^  Quand  ua  noa* 


LETTRE.  21 

và  abus  s'introduit  ce  n'efl:  point  innover  que 
d*y  prop'ôfer  un  nouveau  remède;  au  contrai- 
re, c*eft  chercher  k  rétablir  les  chofes  fiir  Tan-' 
cien  pied.  Mais  ces  Meffieurs'  n'aiment  point 
qu'on  fouille  ainfi  dans  les  antiquités  de  leur 
Ville  :  Ce  tfefl:  que  dans  celles  de  Carthage  ;& 
de  Rome  qu'ils  permettent  de  chercher  l'ex- 
plication de  vos  Loix. 

Je  n'entreprendrai  point  le  parallèle  de  cel^ 
les  de  leurs  ^treprifës  qui  ont  manqué  &  ^le- 
celles  qui  ont  réufli:  quand  il  y  auroic  com-^ 
penfation  dans  le  nombre,  il  n'y  en  auroit 
point  dans  l'effet  total    Dans  une  entreprife 

s 

exécutée  ils  «gagnent  des  forces  ;  dans  uçecvstv 
creprife  manquée  ils  ne  perdent  que  dutems; 
Vous^  au  contraire ,  qui  hé  cfaerdieis  &  ne- 
pouvez  chendièr  qu'à  maîncenir  votre  conllî- 
tution ,  quaiid^  vous  perdez^  vos  pertes  fbntr 
réelles  »    &  quand  vous   gagnez ,   vous  ne 

B3 


/ 


i%      a  E  r  T  ï  E  M  E 

]^agnez  rien.  Dans  un  progrès  de  cette  ef- 
pece  comment  efpërer  de  refter  au  même 
point  ?^ 

:  De  toutes  ks  Coques,  qu^oflQre  à  méditer 
Fhiftoire  inflxuéUve  de  y.o!;re  Gouvèmement, 
\^  plus  remarquable  par  &  çaufe  &  Ja  plus  im- 
portante  par  ioa^eSet^^  dl  celle  qui  a  [Hxxiuic 
le  règlement  de  la  Médiation,  Ç$  qui  iionna 
lieu  {MTimitivemçiit  a  Cette  céld>re  époque  fut 
Hâe  entreprife  iDdiff^rete ,  f^ite  bors  de  tems 
par  vos  MagiftraS.  '  Avant  d'avoir  aflèz  affcr- 
]iii  leur  puiilànce.  iU  voulurent  uTutper  ie  droit 
^è  mettre  des  impôts.  Au  Heu  de  ié(b:ver  ce 
i^oiip  pour  le  dernier  Favidité  le  leur  fit  por- 
ter avs^t  les  autres  9  &précirément  apiésune 
commotion  qui  n^étoit  pas  bien  aflqupîe.  Cet* 
t^  faute  €a  attira  de  plus  grandeis^  difficiles  à 
réparer,   CoqimeQt  de  fi  fins  politiques,  igno- 

r 

^nt-ils  uQe  lïu^^we  auffî  jSn^ple^  que  celle 


j 


LETTRE.  «3 

qu'ils  chequereiit  en  cette  occafibn?  Par  tooç' 
pays  le  peuple  ne  s*apperçoit  qu'on  attente  k 
fa  liberté  que  lorfqu'on  attente  à  fa  bourfe  ; 
ce  qu'aufli  les  ufurpateurs  adroits  fe  gardent 
bien  de  faire  que  tout  le  refte  ne  foît  faîr. 
Ils  voulurent  rçnvecfer  cet  ordre  &  s'en  trou<« 
verent  mal  (/)*  I,es  fuites  de  cette  affaire 
produiQrent  les  roopvemens  de  1734  &  Taf» 
i^eax  complot  qui  en  fut  le  fruit. 

Ce  fat  une  féconde  feute  pire  que  la  prs- 
naiere.  Tous  les  avantages  du  tems  font  peut 
eax;^  ils  le  lç$  ôtent  dans  les  entreprise  bruf« 

-; - 

•  ♦  •--      >* 

(/)  L'objet  des  împ,ôts  AabUs  en  1716  étoit  Is^ 
depenfe  des  nouvelles  fortifications  :  Le  pltn  de  ces 
nouvelles  fortifications  étoit  immenfe  &  il  a  été  exé-* 
çuté  en  partie*  De  û  vaftes  fortifications  rendoient 
Bécjeflaij:^  .une  grolTe  gâmifon  ,  &  cette  grofPs.  gar- 
nifon  avoitpour  but  d«  tenir  les  Citoyens  &  Bout' 
geois  fous  le  joug.  On  parvenoit  par  cette  voye  à 
fojmer  à  Leurs  jdépends  les  fers  qu'on  leur  prép««^ 
rolt.  Le  projet  étoit  bien  lié  ,  mais  il  marcholt 
4aQj  un  ordre  rétrOgrad.e.    AufG  n'a-t-il  pu  réuffîr*  - 

B4 


H       SEPT    I.  E    M:  E 

« 

qoes,  &  mettent  la  machine  dans  le  cas  de 
ft  remonter  tout  d'un  coup  :  c'efl:  ce  qui  fail« 
lit  arriver  dans  cette  affaire.  Les  événemens 
qui  précédèrent  la  Médiation  leur  firent  per- 
dre un  fîécle  &  produifirent-  un  autre  effet 
défavorable  pour  eux.  Ce  fut  d'apprendre  à 
TËurope  que  cette  BourgeoiHe  qu'ils  avoient 
voulu  détruire  &  qu'ils  peignoient  comme 
une  populace  effrénée ,  f^voit  garder  dans  fes 
avantagés  la  modération  qu'ils  ne  connurent 
jamais  dans  les  leurs» 

;  Je  ne  dirai  pas  fi  ce  recours  à  la  Média- 
tion  doit  être  compté  comme  ,une  troifieme 
faute.  Cette  Médiation  fut  ou  parut  offerte; 
fi  cette  offre  fut  réelle  ou  follîcitee  c'eft  ce 
,que  je  ne  puis  ni  ne  veux  pénétrer::  je  fais 
feulement  que  tandis  que  vous  couriez  le  plus 
grand  danger  tout  garda  le  filence  j  &  que  ce 
ûlence  ne  fut  rompu  que  quand  le  danger 


LETTRE.  zs 

paflà  dans  Tautre  parti.  Du  refle,  je  veux 
d'autant  moins  imputer  à  vos  Magiftrats  d'a« 
voir  imploré  h  JVlédiation  y  qu*ofer  même  en 
parler  eft  à  leurs  yeux  le  plus  gra;id  des 
crimes. 

Un  Citoyen  ie  plaignant  d'un  emprifbnnc* 
ment  illégal  injufle  &  deshonorant ,  deman- 
doit  comment  il  falloit  s'y  prendre  pourre* 
courir  à  la  garantie.  *  Le  Magiflrat  auquel  il 
s'adrefToit  ofa  lui  répondre  que  cette  feule 
propofîtion  méritoit  la  mort.  Or  vis-à-vis  du 
Souverain  le  crime  fbroit  auili  grand  &  plus 
grand,  peut-être,  ^e  la  part  dû  Confeil  quQ 
de  la  part  d'un  finiple  particulier  j  &  je  ne 
vois  pas  où  Ton  en  peut  trouver  un  digne  de 
mort  dans  un  fécond  recours,  rendu  l^itime 
par  la  garantie  qui  fut  l'effet  du  premier. 

Encore  un  coup ,  je  n'entreprends  poiqt 
de  difcuter  une  quedion  fi  délicate; à [[traitei 

B5 


j5      s    E    P    t    I   e    m  e 

^  fi  difficîîe  à  réfoudre,    ^entreprends  fim- 

pïement  d'exanaihgr,  for  Tobj^t  qui  i^aus  oc* 

çupe,  Téîzf,  de  votre  Gouyememcnt ,  ib^ci^ 

devant  par  le  rigletnent.  de$^ Plénipotentiaires, 

qiais  dénaturé,  niaiptena^  pajr^  les.  qoovdlès 

»  .  .♦ 

œtreprifes.  de  vo?^  Magîftrats.    Je.  fuis  obKgé 

de  faire  un  teng  circuit  pçxir  aBer  à  mon  but, 

ijlâîs  daignez  me.  fiiîyre  '^  Sç;  xipas  nous  re- 

r 

trouverons  bien. 

•  •     •         »  » 

Je  rfâî  point  la  témérité  de  vouloir  criti- 
quer ce  régléti^nt  ;  aii  contraire ,  j'en  adôiire 
la  fageffe  & .  j'^en  refpefte  Fimpartialité.  Jy 
crois  voir  les  intentions  les  ^qs  droites  &  lei 
difpofitioni  les  plus  judîcîeufes.  Quand  on. 
feit  combien  de  chofes  étoient  contre  vou$ 
dans  ce  moment  critique,  combien  vous  aviez 
de  préjugés  à  Vaincre,  quel  crédit  à.  furmon» 
ter,  que  de  faux  expoles  à  détruire  j  quand  on. 
fe  rappelle  avec  quelle  confiance  vos  adverfii* 


LETTRE.  s? 

|es  comptoîent  vous  écraier  par  les  maîns 
tf aatruî ,  Ton  ne  peut  qu'honorer  le  zele  la 
confiance  &  les  talens  de  vos  defenfeurs ,  Yé^ 
qnité  des  Puîflancei  médiatrices  &  Tintégrîté, 
des  Plénipotentiaires  qui  ont  confbmmé  cet 
çuvrage  de  paix.    • 

Quoi  qu'on  en  puîfRi  dire ,  EEdît  de  la  Mi* 

djatîon  a  été  le  falut  de  la  République ,  &, 

■  *  ■      •  ■• 

quand  on  np  L'enfreindra  pas  î|  en  fera  la  con- 
f^rvatîon.  $î  cet  ÔuiTage  n*eft  pas  parfait 
en  luî-mêrne,  B  Tell' relativement  ;  il  Teft: 
quant  aux  tems  aux  lieux  aux  cîrconftances; 
îl  «ft  le  mdllcur  qui  yous  ^put  convenir.  Il- 
^oît  yous  être  invidahle  &  fdcté  par  pruden-^ 
ce ,  quand  '  il  ne  le  feroît  pas  par  néceffité ,  * 
&  vous  n'en  devriez  pas  ôter  une  Ligne, 
quand  vous  feriez  les  maîtres  -de  ranéantîK 
Bien  plus,  la  raifon  même  qui  le  rend  néceC 
i&îre ,  '  le  rend  hécefFaire  dans  •  fon  entier.  Com- 


r 


28        SEPTIEME 

me  tous  les  articles  balancés,  forment  réquilî- 
bre,  un  feul  article  altéré  le  détruit.  Plus  le 
règlement  efl:  utile ,  plus  il  feroit  nuifible  sunfi 
mutilé.  Rien  ne  feroit  plus  dangereux  que 
plufieprs  articles  pris  féparément  &  détachés 
du  corps  qu'ils  afiermiflênt.  Il  vaudroit  mieux 
que  l'édifice  fut  rafé  qu'ébranlé.  Lfaiifez  ôter 
une  feule  pierre  de  la  voûte ,  &  vous  fcrei 
écrafés  fous  fes  ruines. 

Rien  n'eft  plus  facile  à  fentir  par  l'examen 
des  articles  dont  le  Confèil  fè  prévaut  ;  &  de 
ceux  qu'il  veut  éluder.  Souvenez-vous ,  Mon- 
fieur ,  de  YtÇpnt  dans  lequel  jentireprcnds  cet 
examen.  Loin  de  vous  confeîller  de  toucher 
^  à  l'Edit  de  la  Médiation ,  je  veux  vous  fake 
fentir  combien  il  vous  importe  de  ^  n'y  laiflèr 
porter  nulle  atteinte.  Si  je  parois  critiquer 
quelques  articles,  c'eft  pour  montrer  de  quel- 
le conféquence  il  feroit  d'ôter  ceux  qui  les 


LETTRE.  ^2^ 

reéUfîent.  Si  je  parois  propofer  des  expédiens 
qui  ne  s'y  rapportent  pas ,  c'eft  pour  mon- 
trer la  mauvaife  foi  de  ceux  qui  trouvent  des 
difficultés  infurmontables  où  rien  n'eft  plus 
aifé  que  de  lever  ces  difficultés.  Après  cette 
explication  /entre,  en  matière  fans  fcrupulç^ 
"bien  perfuadé  que  je  parle  à  un  homme  trop 
^uîtable  pour  me  prêter  un  deiKin  tout  con- 
traire  au  mien.         ^ 

■ 

Je  fens  bien  que  fi  je  TO*adreflbîs  aux  é- 
crangers  il  conviendroît  pour  me  faire  enten- 
dre  de  commencer  par  un  tableau  de  votre 
coiiflitution  ;  mais  ce  tableau  fe  trouve  déjà 
tracé  fuffifamment  pour  eux  dans  l'article  Ge- 
nève de  M.  d'Alembert ,  &  un  expofé  plus 
détaillé  feroit  fupetflu  pour  yous  qui  connoi& 
fisz  VOS  Loix  politiques  xhieux  que  moi-mê- 
me, ou  qui  du  moins  en  avez  vu  le  jeu  de 
:pltt$  près.  Je  me  borne  donc  à  parcourir  les 


V 


à<* 


SEI^TIËME 


* 

iartkles  da  règlement  qui  tiennent  à  la  qoet 
tîon  préfence  &  qui  peuvent  le  mieux  eà 
fournir  la  folution. 

Des  le  premier  je  vois  votre  Gouvenie- 
inent  compofé  de  cinq  ordres  fubordonnéi 
mais  indépendans,  c'efl-à-dîre  exiflans  nécef- 
iàirement ,  dont  aucun  ne  peiit  donner  attein- 
ie  aux  droits  &  àftributs  d'un  âutèe ,  &  dan^ 
tes  cîn^  ordres  je  vois  compris  fe  Goofdil  gé- 
néral: tiè&  -  là  je  vois  dans  chacun  des  cin^ 
une  {Portion  particulière  du  Gouvernement  ; 
mais  je  n'y  vois  point  lâ  Pûii&nce  conftitutive 
qui  les  établit ,  qui  les  lié  ^  &  de  laquelle  âji 
dépendent  tous  :  je  n'y  vois  point  le  Souvœ^" 
br  dans  toiit  Etat  politique  il  faut  une  PoK^ 

/ 

r 

m 

fance  fbprême ,  un  centre  où  tout  fè  rapporte^' 
îm  principe  d'cNi  toiit  dérivé ,  On  iSeuveriûd 
.  qui  puiiTe  tout 


\ 


LETTRE.  31 

VOUS  re&dàQîc  compTe  de  la  cotaftitutiott  dé 
rAnglecerro  tooÈ.  pdrle  dûd  1^  Le  Gôuver- 
,y  nement  de  la  Grande  Brecàg^àe  efl:  cbmpofé- 
„  de  quatre  Ordres  ^ont  aucun  ne  peut  at- 
j^  tenter  aux  droits  &  attributions  des  autres  ^ 
jy  ikvokyle  Koî,  la  Chambre  haitce,  la  Cham- 
\^  bre  bafle,  &  le  Parlement  ^^  Ne  diriez^  voui 
pas  à  rinftant;  vous  vous  trompes  :  il  n'y  a 
que  trois  Ordres.  Le  Parlement  qui ,  lorlque  le 
Roi  y  iiége,  les  comprend  tous,  n^en  eflpaè 
un  quatrième:  il  efl:  le  tout  ;  il  eft  Je  pouvoir 
ufûqiie  &  fupréme  duquel  chacun  tire  fcà 
exîftence  &  fgs  droits.  Revêtu  de  Fantorité 
légiflativë ,  il  peut  changer  même  la  Ldl  foi^ 
jdamentale  en  vertu  de  laquelle,  chacun  àt  cdt 
ordres  exifle;  il  le  peht,  &  déplus,  fl Fa faic^ 
Cette  réponfe  eil  juflé  i  ^application  en  cft 
claire  i  &  cependant  il  y  à  encore  cette  diffî^^ 
ttnce  que  le  Parlement  d'Angleterre  n'eft  foi^ 


gjî       SEPT    I    E    ivr   E 

verain  qu*en  vertu  de  la  Loi  &  ieulemeot 
par  attribution  &  députation.  Au  lieu  que  le 
Confeil  gâiéral  de  Genève  n'^  établi  ni  dé- 
puté de  perfonne  j  il  efl;  fouverain  de  fon  pro- 
pre chef:  il  efl;  la  Loi  vivante  &  fondamen- 
tale qui  donne  vie  &  force  à  tout  le  refte,  & 
qui  ne  connoit.  d'autres  droits  que  les  fiensL 
Le  Con&E  général  n*efl;  pas  un  ordre  dans 
r£tat,  il  eft ,  FËtat  même. 

L'Article  fécond  porte  (pie  les  Syndics  ne 
pourront  être  pris  que  dans  le  Confeil  des 
*  Vingt-cinq»  Ôr  les  Syndics  font  des  Magif^ 
trats  annuels  que  le  peuple  élit  &  choifît ,  non 
feulement  pour  être  fès  juges,,  mais  pour  ê- 
tre  fes.  Protë£i:eurs  au  befoin  contre  les  mem- 
bres  perpétuels  desConfeils,  qu'il  ne  choifit 
pas  (g).  L'ef- 

(g)  En  attribuant  la  nomination  des  membres  da 
petit  Confeil  au  Deuz-Ceut  rien  n*étoic  plus  aifé 


'      LETTRÉ.  si 

Ueâet  de  cette,  reflriétion  dépend  de  la  dif- 
iférence  qu'il  y  a  entre  Tâutôrké  des  membre* 
du  Coâfeil  &  ceQé  des  Syndiés.  Car  G  la  dif- 
férence tfefl:  très  grande ,  &  qu'ùii  Syndît 
n'eftime  plus  fôn  autorité  anhùené  Comme  Syn* 
^ic  que  fbn  autorité  perpétUeSe  comme  Con« 
rdller^  cette  éIe£Ho&  lui  fera  plrefque  indiffé-  * 
rente;  il  fiera  peu  pour  robtecSi"  &  ne  fera  rieit 
pour  la  jàftifier.  Quand  tous  les  membires  dû 
Cohfeil  animeç  du  ihême  ef^rit  fuiVront  les 


que  d'ordonner  cette  attribution  félon  la  Loi  fou« 
damentale.    Il  Tuffifoit  pour  cela  d'ajouter  qu'on  ne 
pourroît  entrer  au  Confeil  qu'après  avoir  été  Audi- 
teur.  De  cette  manière  la  gradation  des  charges  é« 
foît  mieux  obfervée  ,  &  les  trois  Confeils  concou- 
roicnt  aux  choix  de  celui  qui  fait  tout  mouvoir  ,*  ce 
qui  étoit  non  feulement  important  mais  indifpenfa- 
ffie,  pour  maintenir  ruriité  de  la  conftitution.    Lei' 
Genevois  pourront  ne  pas  fentir  l'avantage  de  cette 
clûufe  ,  vu  que  Te  choix  des  Auditeurs  eft  aujour- 
d'hui de  peu  d'effet;  mais  on  TeUt  confidéré  bieà 
différemment   quand  cette  charge   fut    devenue    li' 
f«ule  portfe  du  Confeil.  -  '  ' 

Fartk  IL  t 


! 

i  » 
I 


34.     SE.  P     TIEME 

mêmes  maximes,  le  Peuple,  fur  une  conduite 
commune  à  tons  ne  pouvant  donner  d'ex- 
clufion  à  parfonne ,  ni  choifir  que  des  Syndics 
déjaConfeillers,  loin  de  s'afiurer  par  cette  é- 
Jéftion  des  Patrons  contre  les  attentats  du  Con- 
feil,  ne  fera  que  donner  au  Confeil  de  noa- 
velles  forces  pour  opprimer  la  liberté. 

Quoique  ce  même  choix ,  eut  lieu  pour  Xox- 
flinaire  dans  l'origine  de  Tijiflitatiôn ,  tant 
^if  il  fut  libre  il  n'eue  pas  la  même  conféquen- 
ce.  Quand  le  Peuple  nommoit  les  Confeîllerg 
lui-même ,  ou  quand  il  les  nommoit  indire£le- 
m^nt  par  les  Syndics  qu'il  avoit  nommés ,  il 
lui  étoit  indifférent  &  même  avantageux  de 
choifir  fes  Syndics  parmi  des  Confeillers  déjà 
de  fon  choix   (h)  »  &  il  étoit  iàge  alors  de 

"■■"''       '        '  I  ■  .1--  -r-    '  '    ■ 

(b)  Le  petit  Confeil  dans  fon  origine  n'étoit 
qu'un  choix  fait  entre  le  Peuple,  par  les  Syndics, 
âe  qjaelques  Notables  ou  Prud  -  hommes  pour  leur 

r 


LETTRE.  35 

pr<^ëTer  des  chefs  déjà  verfés  dans  les  aiFai- 
réi  :  mais  une  confidération  plus  importante 
eut  dû  remporter  aujourd'hui  fur  celle  -  li. 
Tant  il  efl  vrai  qu'un  même  ofâge  a  des  ef- 
fets  diflFérens  par  les  çhangemens  des  ufages 

# 

qui  s'y  rapportent ,  Ôf  qu'en  ca$  pareil  c'efl 
innover  que  n'innover  patl 

L'Article  IIL  du  Règlement  efl:  plus  confî- 
dérable.    H  traite  du  Confêil  général  légitime- 


fervir  d'AlTeflei^rs.  Chaque  Syndic  en  choînflbîtf 
quatre  ou  cinq  donc  les  fondions  ûniflToient  avec  leA 
flennes  :  quelquefois  même  il  les  changeoit  durant 
le  cpurs  de  fon  Syrndicat  Henri  die  VEf pagne  fut  le 
premier  Confeiller  â  vie  en  1487  ,  &  il  fut  établi 
par  le  Confeil  général.  11  n'étoic  pas  même  nécef- 
faire  d'être  Citoyen  pour  remplir  ce  pofte.  La  Lot 
n'en  fut  faite  qu'à  l'occafîon  d'un  certain  Michel 
Guillet  de  Thonon,  qui,  ayant  été  mis  du  Confeil 
étroit ,  s'en  fit  chaffer  pour  avoir  ufé  de  mille  fî- 
nefTes  ultramontaines  qu'il  apportoit  de  Rome  ob 
il  avoit  été  nourri.  Les  Magiftrats  de  la  Ville, 
alors  vrais  Genevois  &  Pères  du  Peuple  »  avoient 
toutes  ces  fubtilités  en  horreur. 

C  z 


a6 


SEPTIEME 


ment  ^emblé  :  il  en.  traite  popir  fixer  l«s  droits 
&  attributions  qui  lui  font  propres ,  &  il  lui. 
en  rend  plulreiir^  qi^.  les  Ço^feils  inférieur 
avoient  ufurpçs.  Ces  droits  en  >  totalité  ibnt 
grands  &  beaux ,  fans  dç^u^e  -^  m^  première^ 
ment  ils  font  Tpécigés.  ^^  p^  cela  feul  linûn 
tés  ;  ce  qu'on  poTe  exclud  ce  qu'oa  ne  pofe 
jpas,  &  même  le  mo^  lijnités  eO:  dans  F  Article. 
Çr  il  efl  de  refleni:e  dfi  h  Puiflànce  Souverai- 
lie  de  nç  popvQÎr  être  linûtée  :;  elle  peut  tout 
eu  elle  n*efl:  rien*  Cçmjne  elle  contient  éroi- 
»emment  toutes  les  puiflances  aftives  de  TE» 
tat  &  qu'il  n'exifte  que  par  elle  y  elle,  n'y  peut 
jreconnoîcre  d'autres  droits  que  les  Gens  <S^ 
ceux  qu'elle  communique.  Autrement  les  pof- 
£b0eur8  de  ces  droits  ne  feroient  point  partie, 
du  corps  politique  ;  ils  lui  feroient  étrangers 
par  ces  droits  qui  ne  feroient  pas  en  lui,  &  la 
perfonne  mors^Ie  ni^quant  d'anité  s'évatioiûV 
roît.  ,.     , 


:       L    E    T    T'  R    Er         "37 

Cette  lîmitatiop  même  èfl  pofîtivë  en  ce 
^  concertie  les  Impôts.  Le  Gpiifeil  ^  Sou* 
yerain  lui  -  même  n'^  pas  le  drpk  d'abolie 
eux  qui  était  établis  aiy^Qt;  17 14.  Le  voila 
domr  à  çec  égard^  fournis  à  use  puiilànoe  fi^^. 
périeure.    Quelle  eft:  cette  Çuiflance  ?         ' 

Le  pouvoir  Légiilatif  :confî(te  en  deux  chor 
ies  iDfépar^les  :  fiu!;e  Içs  14^  ^  ioê  mainte-  . 
jjir  î  c  efl>i-dire ,  ayok  inlpeSion  fur  le  pou- 
voir exécutif.  II  n^y  a  poii^tt  d'£tai;  au  -mondi^. 
où  le  Souverain  n*ait  cette  infpeâion.  San3 
cela  toute  liaifon  toute  fubordination  manquant 
entre  ces  deux  pouvoirs ,  le  dernier  ne  dépen- 
drait point  de  l'autre  ;  Texécution  n'aiîroit  aur 
cuti  rapport  nécef&ire  aux  Loix;  la  Loi  ne 
&rqit  qu'un  mot ,  &  ce  mot  ne  fignifieroit; 
xâen.  Le  Confeil  général  eut  de  tout  tems 
ce  droit  de  proteûion  fur  fon  propre  ouvra^^ 
ge ,  il  l'a,  toujours  exescé  :  Cependant  il  n'en 

Ç3 


38        SEPTIEME 

dl  point  parlé  dans  cet  article ,  &  s'il  n'y 
ëtoit  fuppléé  dans  un  autre  y  par  ce  feul  (i- 
lençe  votre  Etat  feroit  renverfé.  Ce  point  eft 
important  &  Jy  reviendrai  ci -après. 

Si  vos  droits  font  bornés  d'un  côté  dans  cet 
Article ,  ils  y  font  étendus  de  l'autre  par  les 
paragraphes  3  &  4:  mais  cela  fait -il  com- 
penfation  ?  Far  les  principes  établis  dans  le 
Contrafi;  Social,  on  voit  que  malgré  To* 
piniom  commune ,  les  alliances  d'Etat  à  £- 
tat  9  les  déclarations  de  Guerre  &  les  trsutés 
de  p^  ne  font  pas  des  aâes  de  fouveraine- 
té  mais  de  Gouvernement ,  âc  ce  fentiment 
efl;  conforme  à  l'ulâge  des  Nations  qui  ont  le 
imeux  connu  les  vrais  prindpes  du  Droit 
politique.  L'exercice  extérieur  de  la  Bii& 
fance  ne  convient  point  au  Peuple;  les  gran- 
des maximes  d'Etat  ne  font  pas  à  fa  portée; 
3  doit  s'en  rapporter  là-defFus  à  fes  chefs  qui  9 


L    E    1"    T    R    E.  39 

toujours  plus  éclairés  que  lui  fur  ce  point, 
n'ont  gueie  intérêt  à  faire  au  dehors  des  trai- 
tés  défavantageux  à  la  patrie  ;  Tordre  veut 
qu'il,  leur  hiilè  toat  Téclat  extérieur  &  qu'il 
s'attache  oniquement  au  fblide.  Ce  qui  impor- 
te eflêndellement à  chaque  Gtoyen ^  c'efl lob- 
ièrvsition  des  Loix  au  dedans,  la  propriété  dei 
bieniî»  la  ffîreté  dçs  paniculiers.  Tant  qpie  tout 
'  ira  bien^  fur  ces  trois  point ,  laiilèz  les  Confeils 
négocier  &  traiter  avec .  l'étranger  ;  ce  n'eft 
pas  delà  que  viendront  vos  dangers  les-  plus  k 
craindre^  Ciefl:  autour  des.  individus  qu'il  ùm 
rafTêmbler  les  dibits  du  Peuple  ,^  &  quand  on 

* 

peut  l'attaquer  féparément  on  le  iubjugu&  toà«* 
jours.  Je  pourrois  alléguer  la  iàgeile  des  Ko- 
niaîns  qui ,  laiiTant  au  Sénat  un  grand  pouvoir 
au  dehors  le  forçoient  dans  la  Ville  à  refpefter 
le  dernier  Citoyen  ;  mais  n'allons  pas  fi  loin 
chercher   des  modèles.     Les  Bourgeois  de 


e4o         3    É    P    T    i  .Ë    M    É 

^  N<sufchâcei.felxmt  jçondûits  bien  plus  iàgemeitt 
.  îbus  leurs  Pf  iûcest  que  vous  fôus  vos  Magif- 
^trâts  (hi).  Ils  ne  foQC  ûi  la  paix  m  la  guerre^ 
iline  ratifient  polm  leî;  traités^  ntiLis  ils  jouSC- 
fent  en  fureté. cte  leurs  francfaifes>;>  êc  com^ 
j^e  h  Loi  n'a  pôiilt  préfamé .  qà&  dans  une 
^ite  Ville  Utf  petit  nomlùre  d'iioniiêt^  Bout- 
gecÂ;  ferbieht  des  fcélécacs  5   m  £ie'  redanie 
yoâv  (Jass:  leUts  n^àrs ,   diî  n-f.c6mck^ 
It^êteë  ,  rocHenx:  dnKt'.d'empiSfoiineit  fan»  fôï^ 
gj^iC^..  Chez  TOUS  on  s'efl:  tDopar;  hiifê  fér 
dttifieiJ'appareàcé,  A  l'on  ^  n^gérd&n- 
ii^iel;    Ôd.  s',e(!  trop  occupé,  da  C021&9  gé^ 
bérâl,  &  pasr  afla  de  Tes  membres  :  il  &lbit 
moins;  Ibnger  à.l!àutorité^  &  plus  k  1»  lèer- 


ffi)  Ceci -^forr  dit  eii  mettant  à.  j^rt  îet  abus) 

qii'.afllirémcnt  j,e  fuis  bien  éloigne  d'approuver. 


KJ.    tj 


L    E    t    t    R    Ë.  4t 

\è.  'Revenons  aux  Confèîb  généraux.  -: 
Datre  leH  Limitations  de  T Article  IH^  1« 
Articles  V  <&  VI  eti  offrent  de  bien  plas  é- 
tranges.  Ua  corps  foaverain  qui  ne  peut  qi 
fe  fonber^  ni  former  aucune  opération  de  :lui« 
Uêmey  &  fournis  abfolament,  quant  à  Ton  ac- 
tivité &  quant  aux  matières  qu'il  traite  ^  à  d^ft 
tribunaux  fubaltemes^  Comme  ces  Tribunaux 
D^approuvércHit  csrmînement  pas  des  propofî- 
lions  qui  leur  feroient  en  particulier  préjudi* 

« 

*  ciâbles ,  û  l'intérêt  de  l'Etat  fe  trouve  en  con- 
ait  avec  le  leur  k  dernier  a  toujours  la  préfé» 
r^ce,  partie  qu^il  n'ell  permis  au  Légîflateur 
de  connoître  que  de  Ce  qu'ils  ont  approuvé. 

A  force  de  tout  foumettre  à  la  règle  on  dé- 
tnût  la  première  des  règles ,  qui  efl  la  juftice 
&  le  bien  public.  Quand  les  hommes  fenti- 
ront  -  ils  qu'il  n'y  a  point  de  défordre  aaill  fu- 
nefte  que  le  pouvoir  arbitraire ,  avec  lequel  ils 

Partk  ÎI.  D 


4»         SEPTIEME 

penfeflt  y  remédier?  Ce  pouvixr  efl:  luî*inêôfe 
ié  pire  de  toui  les  défordres  :  employer  un  td 
moyeu  pour  les  prévenir,  c'eft  tuer  leigehi 
afin  qu'ili  n*^ent  pas  la  fièvre. 
-'  Une  grande  Troupe  formée  en  cunmite  peut 
^re  beaucoup  de  mal.  Dans  une  aflèilâ>lée 
«nombreufe,  quoique  régulière ,  fi  cbsTcunpeut 
'dire  &  piropoferGe  qu'il  veut,  on  perd  bien 
ûa  tems  à  écouter  des  folies  &  Ton  peut  !• 
-tre  en  danger  d'en  faire.  Voila  des  vérités 
inconteflables  j  mais  efl: -ce  prévenir  Tabus 
-d'une  manière  raifonnable ,  que  de  faire  dépens 
dre  cette  ailemblée  uniquement  de  ceux  qiii 
voudroient  l'anéantir,  &  que  nul  n'y  paiilè 
tien  pTopofer  que  ceux  qui  ont  le  plus  grand 
intérêt  de  lui  nuire?  Car,  MônCeur,  n'eft-cfc 
*pas  exa£lement  là  l'état  des  chdes ,  &  y  a-c« 
îl  un  feul  Genevois  qui  puifle  douter  que  fi 
4'exifleace  d\x  Confeil  général  dépendoic  toiit 


L  Ë  t  t  ii  p.        ^ 

à -fait  du  petit  Confcil,.  le  Confeîl  général 
Me  fut  pour  jamais  fupprimé? 

Voila  pourtant  le  Corps  qui  feitl  convoqua 
ces  aflemblées  &  qui  feul  y  propofe  ce  qu'il 
lui  plait  :  ajr  pour  le  Deux-Cent  il  ne  fait  que 
répéter  les  ordres  du  petit  Confeil»  &  quand 
une  fois  celui-ci  fera  délivré  du  Confeil  géné- 
ral le  Deux- Cent  ne  lembarraiTera  gueres  ;  il 
ne  fera  que  foivre  avec  lui  la  route  qu'il  a 

frayée  avec  vouSi 

Or  qu'ai-je  à  craindre  d'un  fupérîeur  inco* 
mode  dont  je  n'ai  jamais  befoin ,  qui  iie  peut 
fe  montrer  que  quand  je  le  lui  permets^  ni  ré- 
pondre que  quand  je  l'interroge  ?  Quand  jd 
M  réduit  à  ce  point  ne^  puis*je  pas  m'en  re« 
garder  comme  délivré  ? 

Si  l'on  dit  que  la  Loi  de  l'Etat  a  prévenu 
TaboUtioft  des  Confeils  généraux  en  les  ren* 
riant  nëi^eflàifes  'à  l'éleflion  des  Magiflrats  ai 

D  i 


44       SEPTIEME 

à  la'  fanâlon  des  nouveaux  Ëdits;  je  tépaaàs^ 
quant  au  premier  point,  que  toute  la  fotce  dû 
Gouvernement  étant  paflee  des  mains  des 
Magîfhats  élus  par  le  Peuple  dans  celles  du 
petit  Cônfeil  qu'il  rfélit  point  &  d*où  fe  firent 
les  principaux  de  ces  Magiftràts,  Téleâion  & 
l'affemblée  où  efle  fe  fait  ne  font  plus  qu'une 
vaine  formalité  fans  confiilance,  &  que  des 
Confeils  généraux  tenus  pour  cet  unique  objet 
peuvent  être  rendes  comme  nuls.  Je  réponds 
encore  que  par  le  tour  que  prennent  les  chc^es 
il  feroit  même  aifé  d'duder  cette  Loi  fans  que 
le  cours  des  aSaires .  en  fut  arrêté  :  car  fup- 
pofons  que,  foit  par  la  rejeflion  de  Cous  les 
fujets  préfentés  y  foit  fous  d'autres  prétextes^ 
on  ne  procède  point  à  Téleâîon  des  Syndics, 
h  Confeil ,  dans  lequel  leur  juriidifiiion  fe  fond 
infenfiblement ,  ne  l'exercera  •  t  *  il  pas  à  leur 
défaut,  comme  il  l'exerce  dès  à  prélat  indé* 


LETTRE.  45 

r 

pendamment  d'eux  ?  N'olê-t-on  pas  déjà  vous 
dire  que  le  petit  Confeil ,  même  fans  les  Syn- 
dics 9  eft  le  Gouvernement  ?  Donc  fans  les 
Syndics  TEtat  n'en  fera  pas  moins  gouverné. 
Et  quant  aux  nouveaux  Edits»  je  réponds 
^'ils  ne  feront  jamais  aflèz  néceflaires  pour 
qu  à  l'aide  des  anciens  &  de  {ez  ufurpations  » 
ee  même  Coniêil  ne  trouve  aifément  le  mo- 
yen d'y  fuppléer.  Qui  fe  met  au  deflus  des 
anciennes  Loix  peut  bien  fe  pafler  des  nou* 
velles. 

Toutes  les  mefîires  font  prifes  pour  que  vos 
^fTemblées  générales  ne  foient  jamais  néceflai- 
res.  Non  feulement  le  Confeil  périodique  în- 
ftîtué  ou  plutôt  rétabli  (/)  l'an  1707.  n'a  ja-^ 

(f)  Ces  Confeîls  périodiques  font  auflî  anciens  que 
Ja  Légîflatîon,  comme  on  le  voit  par  le  dernier  Arti- 
cle de  rOrdonnançe  eccléfiaûîque.  Dans  celle  de  1575 
imprimée  en  1735  ces  Confcils  font  fixés  de  cinq 
en  cinq  ans;  mais  dans  l'Ordonnance  de 1 561  impri« 

D3 


4tf  SEPTIEME 

maî^  été  tenu  qu'une  fois  &  feulement  pour 
l'abolir  (k) ,  mais  par  le  paragraphe  5  du  troi- 
sième Article  du  règlement  il  a  été  pourvu 
fans  vous  ôc  pour  toujours  aux  frais  de  J  admi- 
îiirtratîon.  Il  n'y  a  que  le  feul  cas  chimérique 
â'une  guerre  indifpenfable  ou  le  Confeil  géné< 
Tal  doive  î^bfolument  être  convoqué, 
•  Le  petit  Confeil  pourroit  donc  fupprimer 
nbfolument  les  Confeils  généraux  fans  autre  in* 
convénient  que  de  s'attirer,  quelques  répréfen*» 
étions  qu'il  eft  en  pofleflion  de  rebuter ,  ou 


inée  en  156a  ils  étoîenc  fixés  de  trois  en  trois  ans. 
Jl  n'cft  pas  raifonnable  de  dire  que  ces  Confeils  n'a- 
voient  pour  objet  que  la  leélure  de  cette  QrdonJiao- 
ce  ,  puifque  rimpreflion  qui  en  fut  faite  en  même 
tems  donnoit  â  cbacun  la  facilité  de  la  lire  écoute 
heure  à  fon  aife  ,  ftns  qu'on  eut  befoln  pour  cela 
(cul  de  l'appareil  d'un  Confeil  général.  Mallicurcu- 
fement  on  a  pris  grand  foin  d'çfFaccr  bien  des  tradi- 
lions  anciennes  qui  feroient  maintenant  ^'un  j^rauJ 
çfage  pour  réclaircifTement  des  Edits. 

(JÙ  y^^^^i^^W  ci-aprè$  cet  Edit  d'aboUtiou,. 


L    E    T    T    R    E.  47, 

<i*cxdcer  quelques  vain»  murmures  qu'il  peub 
méprifer  ùm  rifque  ;  car  par  les  ardcles  VU, 
XXIU,  XXIV.  XXV.  XhUl  toute  efpece 
de  refîfbnce  efl:  4é&udue  en  quelque  cas  que 
ce  puifle  être ,  &  les  reflburces  qui  font  hors 
de  la  confHtution  n'en  font  pas  partie  & 
n'en  corrigent  pas  les  défauts. 

11  ne  le  fait  pas ,  toutefois ,  parce  qu'au 
fond  cél^  lui  efl  très  indiffèrent ,  &  qu'un  fi*» 
mulacre  de  liberté  fait  eodiKer .  plus  patiem* 
ment  la  fervitude.  Il  vous  amufe  à  peu  do 
frais,  foit  par  des  éleétions  làns  confëquence 
quant  au  pouvoir  qu'elles  confèrent  &  quant 
au  choix  des  fujets  élus,  foit  par  des  Loix 
qui  paroiiTent  importantes ,  mais  qu'il  a  foia 
de  rendre  vaines,  en  ne  les  obfervant  qu'an- 

0 

tant  qu'il  lui  plaic« 

.  D'ailleurs  on  ne  peut  rien  prôpofer  dani 
«çs  «Semblées,  qq  n'y  peut  rien  difcutcir^  00 

D4 


48         SEPTIEME 

n*y  peut  délibérer  fbr  rien.  Le  petit  Confêil 
y  préfidej  &  par  lui**inême ,  &  par  les  Syn* 
dics  gai  n'y  portent  que  Tefprit  du  corps.  Là** 
même  il  eft  Magifliat  encore  &  maître  de 
fon  Souverain.  N'ed-il  pas  contre  toute  rai* 
ion  que  le  corps  exécutif  règle  la  police  du 
corps  Légiflatif  9  qu'il  lui  prefcrive  les  matie* 
ses  dont  il  doit  connoitre^  qu'il  lui  interdife 
le  droit  d'opiner ,  &  qu'il  exerce  ùl  puiflance 
abfoltte  jufques  dans  les  aâes  faits  pour  la 
contenir? 
Qu'un  corps  fi  nombreux  (/)ait  befoln  de 

(jf)  Les  Confeils  généraux  étoient  autrefois  très 
firéquens  à  Genève  ,&  tout  ce  qui  fe  ftiifoit  de  qucK* 
^e  importance  y  étoit  porté.  En  1707  M.  le  Syn-t 
die  Chouet  difoit  dans  une  harangue  devenue  céle* 
bre  que  de  cette  fréquence  venoic  jadî$  I4  foiblefle. 
&  le  malheur  de  l'Etat  ;  nous  verrons  bientôt  ce  qu'il, 
en  faut  croire.  Il  ihûûe  au(C  fur  Te^trême  augmen- 
tation du  nombre  des  membres»  qui  rendroit  au- 
jourd'hui cette  fréquence  impoflîble,  aflSrmant  qu'au- 
liefois  cette  aflçmWép  ne  pajQToic  pas  4cu^  i  troU 


LETTRE.  49 

police  &  d'ordre,  je  Taccôrde:  Mais  que  cet- 
té  police  êc  cet  ordre  ne  lenverfent  pas  le 


■w 


cents  f  &  qu'elle  eft  à  préfent  de  treize  à  quatorze 
cents.  Il  y  a  des  deux  côtés  beaucoup  d'exagéra- 
tion. 

Les  plus  anciens  Confeils  généraux  écoient  ztx 
moins  de  cinq  à  fix  cents  membres  ;  on  feroit  peur- 
être  bien  embarralTé  d'en  citer  un  feul  qui  n*ait  été 
que  de  deux  ou  trois  cents.  En  1420  on  y  eu 
compta  720  ftipulans  pour  tous  les  autres  ,  &  pea 
de  tems  après  on  reçut  encore  plus  de  deux  cents 
Bourgeois, 

Quoique  la  Ville  de  Genève  foit  devenue  plus 
commerçante  &  plus  riche,  elle  n'a  pu  devenir 
beaucoup  plus  peuplée ,  les  fortifications  n'ayant  pas 
permis  d'aggrandir  l'enceinte  de  Tes  murs  &  ayane 
fait  rafer  fes  fauxbourgs.  D'ailleurs ,  prefque  fanô 
territoire  &  i  la  merci  de  fes  voifins  pour  fa  fubfiP' 
tance,  elie  n'auroit  pu  s'aggrandir  fans  s'affoiblîr. 
En  1404.  on  y  compta  treize  cents  feux  faîfant  au 
moins  treize  mille  âmes.  Il  n'y  en  a  gueres  plus 
de  vingt  mille  aujourd'hui;  rapport  bien  éloigné  de 
celui  de  3  à  14.  Or  de  ce  nombre  1!  faut  déduire 
encore  celui  des  natifs,  habitans  ,  étrangers,  qui 
n'entrent  pas  au  Confeil  général  ;  nombre  fort  aug;- 
mente  relativement  à  celui  des  Bourgeois  depuis  le 
refuge  des  François  &  le  progrès  de  TinduArie. 
Quelques  Confeils  généraux  font  allés  de  nos  jours 


5,(^       SEPTIÈME 

4?pj:  de  fôn  înftitutioiL  Eft-œ  doue  une  àa^ 
/e  plus  difficile:  jd'étabHr  la.  it^e  bm  fervitd^ 


.a  quatorze  &  même  à  quinze  cents  ;  mais  commu- 
nément ils  n'approchent  pas  de  ce  nombre;  fi  quel- 
ques-uns  môme  vont  à  treize,  ce  n'eft  que  dans 
des.  occadons  critiques  oii  tous  les  bons  Citoyens 
croîr oient  manquer  â  leur  ferment  de  s'abfenter ,  & 
;oii  les  MagiflratSf  de  leur  côté,  font  venir xlu  de- 
hors leurs  xliens.  pour  favorifer  leurs,  manœuvres.; 
or  ces  manœuvres  ,  inconnues  au  quinzième  fiécle 
n*exigeoient  point  alors  de  pareils  expédlens.  Gé« 
néralement  le  nombre  ordinaire  roule  entre  huit  1 
;neuf  cents  ;  quelquefois  il  refle  au-defibus  de  celui 
.de  Tan  1420,  furtout  lorfque  Taflemblée  fe  tient  ep 
tté  &  qu*il  $*agit  de  diofes  peu  impprtaotes.  ]'al 
jnoi-mâme  ailîdc  en  1754  à  un  Confeil  général  qui 
n'étoFt  certainement  pas  de  fept  cents  membres. 

11  refaite  de  ces  diverfes  confidéfatîons  que  , 
tout  balancé,  le  Confeil  général  eft  à-peu-près  au- 
fourd'hui,  quant  au  nombre,  ce  qu'il  étoît  il  y  a 
deux  ou  trois  fiécîes,  ou  du  moins  que  la  diffé- 
rence ell  peu  confidérable.  Cependant  tout  le  mon- 
de y  parloit  alors  ;  la  police  &  Ja  décence  qu'on  y 
voit  régner  aujourd'hui  n'étoit  pas  établie.  On 
crîoit  quelquefois  ;  mais  le  peuple  étoit  libre  ,  le 
Magiftrat  refpeélé  ,  &  le  Confeil  s'aflembloit  fré- 
quemment. 'Donc  M.  le  Syndic  Chouet  accufoit 
{aux^  &  raîfonnoit  mah 


L-  E  iT    T    a   R  ■■)       ^^ 

"dé  entre  çielqueg  centaines  dlbqmmes  natiN 
reUeasâit  graves  &  froids  9  qu'elle  ne  Tâoit  & 
Athènes,  donc  on  ncms  parle,  dans  Faflémblée 
de   plufieurs  milliers   de   Citoyens  emportés 
bonillans  &  prefque  efirénés  ;  qu'efle  ne  l  etoit 
dans  la  Capitale  du  monde,  où  le  Peuple  en 
xorps  exerçoit  en  partie  la  Puiflknce  ezécuti* 
ve,  &  qu'elle  ne  l'éfl  aujourd'hui  même  dans 
le  grand  Confeil  de  Venife ,  auffi  nombreux 
que  votre  Confeil  général?  On  fe  plaint  de 
rimpolice  qui  règne  dans  le  Parlement  d'An« 
glèterre  ;  &  toutefois  dans  ce  corps  compofé 
de  plus  de  fept  cents  membres,  où  fe  traitent 
de  n  grandes  afEùres ,  où  tant  d'intérêts  fe 
croifent ,  où  tant  de  cabales  fe  forment,  où 
tant  de  têtes  s'échauffent ,  où  chaque  membre 
a  le  droit  de  parler ,  tout  fe  fait ,  tout  s'expé- 
die ,  cette  grande  Monarchie  va  foft  train  ;  <St 
€he£  vous  où  les  intérêts  font  (1  fimples  fi  peu 


5»       SEPTIÈME 

«onçfiqaésy  dû  Ton  n'a»  pdar  ainfî  k  r^tf 
que  Idi  affaires  d'une  fitmifle  ^  on  vous  hk 
peur  des  orages  comme  fi  txwt  alloît  renverfef  ! 
Monfieip:  »  la  police  de  votre  Confeil  général 
eft  la  chofê  du  monde  la  plus  facile  ;  qa'oti 
veuille  fincérement  l'établir  pour  le  bien  pu- 
blic, alors  tout  y  fèra  libre  &  tout  s'y  pafleni 
plus  trancpiiBement  qu'aujourd'hui« 

Suppofons  que  dans  le  Règlement  on  edC 
pris  la  méthode  oppofêe  à  celle  qu'on  a  fui- 
vie  ;  qu'au  lieu  de  fixer  les  Droits  du  Confeil 
général  on  eut  fixé  ceux  des  autres  Confèib» 
ce  qui  par  là-même  eut  montré  les  fîens  ;  con- 
venez qu'on  eut  trouvé  dans  le  feul  petit  Con- 
feil un  aflemblage  de  pouvoirs  bien  étrange 
pour  un  Etat  libre  &  démocratique ,  dans  des 
chefs  que  le  Peuple  ne  cholfit  point  &  qui 
reftent  en  place  toute  leur  vie. 

D'abord  l'union  de  deux  chofes  par-tout  sil^ 

leari 


Xi   :£    T    ir  -.R   lE.  ^>    'i        53 

leurs  'iscoppatibles.;  ibvoir ,  radmhiiiiraticA 
des  affaires  de  YEt^t  &  l'exercice  rupoâcnd^  et 
la  jullkp  &r  tes  biens,  la  vie  &  rfaonheuc  joTêi 
Citoyens.  ,       .  . .[ 

'  Un  Qr<&e^  fe  dernier^  de  tous  par^lbn.  rang 
&  le  premier  par  ia  puiflkhcr./    .      ) .  ? 

.Un  Cbnftil  inférieur  fans  lequel  tout  ieft 
mort  dan&'  la  Jl^ublique  ;  qui  propore  feul^ 
qui*  décide,  le  premier,  &  dont  la  feule  voix, 
•même  dans  Ton  prapre  farît ,  peimec  à  fes^fu* 
périeurs  d'en  ayoir  une»  .. 

Un  Cotpè  qui  rèconnoîc  rautorrté  d*uti  au- 
tre ,  '&  ijiii  lèul  a  la  nomination  des  ^membre^ 
de  ce  corps  aqque^  il  eft  fubordoniié.     .   T, 

Un  Tribunal  luprême  duquel  on  appelle  ;  ou 
bien  au  contraire ,  un  Juge  inférieur  qui  pré^ 
fide  dans  les  Tribunaux  fupérîeurs  au  (îen. 

Qui ,  après  avoir  fiégé  comme  Juge  infé- 
rieur  dans  le  Tribunal  dont  on  appelle  ,  non 

Partie  IL  E 


1  • 


I 


34       S    E    P    T   I    E    ME 

Ibâiement  va  (léger  comme  Jage  fapr^e  daDi 
le  Tribunal  où  efl:  appellé^^  mais  n'a  dans  ce 
SlibonaL  fupréme  que  les  collègues  91'il  s'efl; 
lui-même  choifis. 

Un  Ocdre,  enfin,  qui  ieol  a  i<m  a6Hvité 
propre,  qui  donne  à  tous  tes  autres  .la  leur,  & 
qui  dans  tous  foutenant  \t%  réfolutioos  qu'il  a 
{)rifes,  o^incdeux  fois  &  vote  crois  (m). 


i 

■*      Il    I      ■       ■       ■       ^.     .  J  C  I  H   ■  ■ 


S 


.  (f»)  Dans  uiîïtatiqui  fc  gcruverîfc  en  Rçpublî* 
que  &  où  Ton  parle  la  langue  françoife ,  îl  faudroit 
fe  faire  un  langage  à  part  pour  le  Gothreniementé 
yar  .exemple ,  DéHtérer ,  Opiner  ,  Foter ,  font  trois 
chofes  très  différentes  &  que  les  François  ne  dîftin- 
^l^eot  piB  alTez»  Détibérers  c'rà  pefer  lepoarâf 
le  contre;  Qpiner  c'eft  dire  fon  avis  &  le  moti- 
ver ;  Fuier  c'eft  donner  fan  fuiFrage,  quand  îl  ne 
lefte  plus  qu'à  recueillir  les  voix.  0;>'  met*  d'abord 
la  matière  en  délibération.  Au  premier  tour  on 
opine;  on  vote  au  der;)!^.  Le^  Tribunaux  ont  par 
tout  à -peu-;  près  les  mômes  former,  mais  comme 
dans  les  Monarchies  le  {)nMic  n'a'pa'S  befôin  d*eti 
appifendre.  les  termes ,  ils  reftfnt  codfacrés  au  Bar<» 
leaut  C'eft  par  une  autre  inexaftitude  de  la  Lan* 
^ue  en  ces  matières  qu«  M.  d«  MontcTl^uku  y  qui 


LETTRE.  î's 

L^âppel  du  petit  tohfeîî  au  Deux-Cent  efï 
hh  véritable  jeii  d*ehfant;  Ceft  utie  farce  en 
{)Wlitîque  i  à'il  efa  fut  jamais*  AiM  fa*appelic-t- 
bn  pas  proprement  ciet  appel  un  appel;  c*efl 
hhe  grâce  qu'on  imploré  en  juflice ,  tm  re« 
bours  en  cafTatibn  d'arrêt  ;  on  ne  comprend 
pas  te  que  t'eft.  Croît-on  qiie  fi  le  petit 
(Confeil  h'eiit  bien  fenti  que  ce  dernier  recours 
ëtoit  {ans  confequehce^  il  s'en  fut  volontaire* 
ihent  dépouillé  comme  il  fit  ?  Ce  dëfintéreiTe* 

tnetit  h'efi:  pas  dans  ies  maximes. 

.« 

Si  lés  jugement  dû  petit  Confeil  ne  font 

pai  toujours  Confirmés  en  Deux-Oeht,   c'eft 

dans  lès  afi'àlres  particulières  &  contradiélôl- 

'tes  où  il  n'importe  guère  au  Magiflrat  h^ 


/  la  favoit  fi  bien ,  n*a  pas  laiffé  de  dire  toujours  là 
FuîJJ'ahce  exécutrice,  blcffant  ainfi  î'aiialogîe,  &  Ui» 
fant  adjtflif  le  mot  exécuteur  qui  cft  fubftantif.  Ccft 

*  la  même  faute  que  s'il  eut  dicj  It  Pouvoir  légiflattuH    . 


.  5<5.       SEPTIEME 

guelle  des  deux  Parties ,  perde  ou  gagne  fon 

procès.    Maïs. dans  les  aflfaixes  quon  pourfuic 

d'office,  dan$  toute  afFairç  où  le  Confeil  jui- 

même  prend  intérêt,  le  Deux -Cent  repare-t-; 

'•  '*.,  "  ».-' 

îl  jamais  fes ^^injufiices ,  protège- 1- il  jamais 

J'opprime,   ofe-t-il  ne  pas  confemer . tout  ce 

qu'a  fait  le  Confeil ,  .ufk-t-il  jamais  une  feule 

fois  avec  honneur  de  fon.  droit r  de  -fair-e  grar 

ce?  Je  rappelle. à. xegret  des.  .tems  4ont  la 

mémoirç  eft. terrible  &  ne'cejQTalre.    Un  Ci,- 

toyen  que  le  Confeil  immole  à  fa  vengeance 

a  recours  au  Deux -Cent;  l'infortuné .  s'ayilit 

jufqu'à  demander  grâce;  fon  innocence  neft 

ignorée  de  perfonne.;  toutes  les  régies  ont  été 

violées  dans,  fon  procès:  la  grâce. eft  refufée, 

&  l'innocent  périt.  Fatio  fentit  fi  bien  Tinu- 

tilité  du  recours  au  Deux -Cent  qu'il  ne  dai- 

*gna  pas  s'en  fervir. 

» 

Je  vois  clairement  ce  qu'efl  le  Deux  •  Cent 


LETTRE.  57 

à  Zurich,  à  Berne,  à  Fribourg  &'dans  les* 
autres  Etats  ariflocratiques;  mais  je  ne  faurois  • 
voit  ce  qu'il  eft  dans  votre  Conflitutîon  ni  • 
quelle  place  il  y  tient.  Eft- ce  un  Tribunal 
fupérieur  ?  En  ce  cas  ,  il  eft  abfurde  que  le  » 
Tribunal  inférieur  y  fiége. .  Eft-ce  un  corps 
qui  répréfente  le  Souverain?  En  ce  cas  zxSb 
au  Répréfenté  de  nommer  fon  Répréfentant. 

UétabliflTement  du  Deux  -  Cent  ne  peut  avoin 

« 

d'autre  fin .  que  de  modérer  le  pouvoir  énor^ 
mé  du  petit  Confeil  ;  &  au  contraire,  i!  ne  fait 
que  donner  plus  de  poids  à  ce  même  pouvoir. 
Or  tout  Corps  qui  agit  conftamment  contre 
refprit  de  fon  Inftitution  eft  mal  infticué. 
.  Que  fert  d'appuyer  ici  fur  dea  chofes  notoi- 
res qui  ne  font  ignorées  d'aucun  Génevoîs  3 
Le  Deux-Cent  n'eft  rien  par  lui-même;  îl  n'eft  ^ 
que  le  petit  Confeil  qui  reparoit  fous  une  autre 
forme.    Une  feule  fois  il  voulut  tâcher  de  feç 

E  3 


5«  SEPTIEME 

çouer  le  joug  de  fes  maîtres  &  fe  donnée  uoç 
exiftence  indépendance ,  &  par  cet  qn^uB  ef* 
fort  l'Etat  faillit  être  renverfé.  Ce  v^dï  qu'aij 
feul  Confeil  général  que  le  Deux -Cent  doic 
çncore  une  appai-ençe  d*autpri(é*  Cela  fe  vie 
bien  dairemçnt  dans  l'époque  d0;it  Je  parle , 

«  '  ,  • 

^  cel^  fe  yerr^  bien  mieux  d^ns  1^  Hûçe^  fi  le 
petit  Cpnleil  parylept  à  fon  ^ut  :  ainfi  quand 
de  concert  avec  ce  dernier  le  Deux<  Cent  cra- 
vaille  à  déprimer  le  Cpnfeil  génér^,  U  travail- 
le à  fa  propre  ruine,  •&  s'il  orpit  fuiyi^e  les  brî^ 
jfées  du  Deux  -  Ceqt  de  Berne ,  i^I  prend  biea 
groflîérement  Iç  change  ;  inais  on  a  prefque 
toujours  vu  dans  ce  Cprps  peu  de  lujçnieres  &  1 
j^noins  de  courage ,  &  cela  ne  peut  guère  êr 
ire  autrement  par  la  manière  dont  M  efi:  rem- 

■  ... 

•  (n)  Ceci  s'cnticnd  «n  général   &  fettlenjent    de, 
refpiit  du  ccxrps  ;  car  je  f&is  qu^il  y,  a  dans  le  Deux- 

•  t  '  »  J 


LETTRE,  s9 

Voqs  voyez, -Monfîeur,  combien  au  lieu 
fie  fp^ci6er  les  (Iroits  di(  Confe^l  Spuveramj^ 
il  eue  été  pluç  utile  4^  rpéçifîer  les  attribut 
(ions  des  corps  qui  lui  fqnt  fubordonnés ,  ai 
fans  aller  plus  loin,  yqus  voye^  plu^;  évidem^ 
ment  encore  que,  par  la  force  de  certains  ar-^ 
ticle;  pris  fêparémei^t ,  le  petit  Cp;iieil  eft 


Cent  des  membres  très  éclafrés  &  qut  ne  manquent 
pas  de  zèle:  mais  incefTammonc  fous  les. yeux  dii 
petit  Confeil  ,  livrés  ^  fa  mei;ci  fans  appui,  fans, 
^eOburee,  &  fendant  bien  qu'ils  fe^oient  abandonnés 
de  leur  Ccrrps ,  ils  s'abftiennent  de  tenter  des  démar- 
ches inutiles  qiM.  ne  feroient  quç  les  compromettre 
(^  le^  perdre,  .^a  vile  tdurbe  bAurdoune  &  uiom^ 
pbe.  Le  fage  (e  tait  &  gémit  tout   bas. 

Au  lefte  If  Deux-Cent  D*a  pas  toujours  été  dans 
le  difcrédit  où  il  eft  tombé.  Jadis  il  jouît  de  la  con? 
fidération  publique  &  de  la  eonfîance  des  Citoyens  : 
9ufli  lui  ialiïbient~ils  fnns  inquiéti^de  exercer  le$ 
droits  du  Confdl  général,  que  le  petit  Confcil  tacha 
dès -lors  d'attirer  à  lui  par  cette  voye  indirefte; 
Nouvelle  preuve  de  ce  qui  fera  dit  plus  bas ,  que. 
la  Bpurgeoifîe  de  Genève  cil  peu  remuante  &  ne 
cherche  gyèrc  à  *  intriguer  des  affaires  d'Etai* 


E^ 


'-v 


■■ 


<?o 


SEPTIEME 


Farbitre  fuprême  des  Loix  &  par  elles  du  k 
de  tous  les  particuliers.    Quand  on  confèi? 
.les  droits  des  Citoyens  &  Bourgeois  A^ 
jeo  Coûfeil  général ,   rieii  n'efl  plus  brik: 
Mais  cotiQdérez  horsde-là  ces  mêmes  Citoyets 
&  Bourgeois  comme  individus  ;  que  foot-il;, 
que  deviennent  ils?  Efclavesd^ud  poavoirar* 
bitraire^  ils  font  livrés  fans  défenie  à  lanier' 
d  de  vingt-cinq  Defpotes;  les  Âthèmem^i 
moins  en  avoîent  trente.  Et  que  à\v^^  ^|! 
cinq  ?  Neuf  fuffifent  pour  un  jugement  ck 
treize  pour  un  jugement  criminel  (o). 
ou  huit  d'accord  dans  ce  nombre  vont 
.  pour  vous  autant  de  Décemvirs  ;  encoreJ 
Décemvirs  furent  ils  élus  par   le  peuple;! 
lieu    qu'aucun    de  ces   juges    rfeft  àe 
choix;  &  Ton  appelle  cela   être  \&m\ 

W  Edits  civils    Tit.  I.  Art.    XXXVL 


•      L    E'   t    T    R    È.   •         6i 

fî  Ù  I  T  I  ÉME    LETTRE.' 

"Jli  wé  î"^^  Mohfiedr  ;  rëxamen  de  votre  Gou- 
verneÀienrpféfent  ckr  RéglemeniPcfe  là  Mé- 
tfiaiïoh  par  lequel  tè  (joaveriiemélit  efl:4îké} 
^aîs  '  loin -^d'itiipiltor  aux  Médiateurs  d'avoir 
Voulu  vdus.'  réduire  en  fervitude ,  je  prouve- 
Tois  ^aSféraent  àù  contraire,  qu'îfe  ont  itendà 
votré^  îGtaatioh  meilleure  à'  pluGeur^s^  égards 
quWe  n'étoît  avant  les'troûblds  qui  vous  for- 
cerentf-  d'accepter  leurs  bons  offices.  .  Us  ont 
trouvé  une'  VîHe  en*  armes;  tout  étoit  à  lèiir 

'  \  *  * 

artivéè  dans  un  état  de  crife  &  de  confufiôn 
qûî  ne  leur  permettoit  pas  dé  tirer  de  cet 
état  la  régie  de  leur  ouvrage.  Ils  font  remori- 
-tés  aux  tems  pacifiques ,  '  ils  ont  étudié  la 
c<)n(lîtution  primitive  de  votre  Gouvernement  ; 
dans  les  progrés  qu'il  avoit  .déjà  fait ,   pour 


^     H  .tj  .!i  T  r  e:  m  e 

Aw .  fetir  dajœoûié.  de  i-vbs  îImjbk  à  viola 
Jaûtre.. .:. . 

Il  eft  clair  d'abojrd  :^iir>  lé  Règlement  luir 
jp^e^lt'^^  p<Si)t'  un^  Loi  que  kâ  Médiateurs 
:ay¥nc  y<>u)a  :ifn|)|)ret  à  la  :  I^épqt>]îqui$  ,iinaij| 
/eateijç^t/^u&îaïcprdîqu'iteoiit  ^labli.  entre  fes 
jB^mferfiSi  â;  çe'ite  ^'pift  pfer/ronféquent  porté 
clwllftjpiMoiÔ  àûlà  r<>av»a»çté^  O^a  dk  çlajr, 
iîi5-je;;ï)ar:J!Artfele  XLI% ,'  qpi  faille  au^Côa- 
fe^l  j  géftS^aj  -fc^iêtiieirt^t;  gtflSswiblé  le  droit  dç 
f^e.  tM  .açiôlo^-  du .  Rélleïpent  tel  ;  change- 
jsQe^  ;  qtf il  ?lui  plwt*  ;   Aiqfî., tes  Médiateurs  ne 

jnj^tqit  point.  laur-volont:éiau  deilus  dp  la  &n- 

» 

jie',  ife.n'injtervîennent  queiî;cas  de  tlivifion. 
.Cfft  le  ,fgpft.de  r Article  XV.,;    .     . 

Mais  de  J|k  réfuItejauflîJâ  nuilité  des  réferves 
^  .;ljraicatîoji§  ciôni^ées:  dà'n^  l'Article  III  aux 
droits  4&  aiprjibtitionrs  du  fîonfeil  général  :  car 
fi  je  Confeil  général  dédde  que  ces.réferves 

& 


:.L.E  :T  ,T    R;  E:     ::      6s^ 

i 

&  limitatioQs  ne  borneront  plus  fa  piiiflàn^. 
ce,  elles  ne  la  borneront  plusj  &  quand  toud. 
les  membres  d'un  ^tat  fouyeraîn  règlent  Ton; 
pouvoir  ibr  eux-mêmes  ,  gui  eil-ce  qi^i  a 
droit  de  s'y  oppsofer  ?  Les,  exclufions  quW 
peut  kiférer  de  l'Article  III  ne  fîgnifiqnt  donc 
autrq  chofe,  ilnon  que  le  Confèil  général  f^ 
renferme  dans  leurs  limites  jufqtt'à  ce  qu'il- 
trouve  à  propos  de  les  palier. 

Cefl;  ici  l'une  des*  CQQti^dîâions  dçn^  f  ai 
parlé,,  &  l'on  en  démêle  aif^pjeçt  la  caufe.  Il 
étoit  d'aitieurs  bien  difficile  .au|c  P]énipotentiai« 
res  pleins  des  maximes  de  GouverpemeQs  tout 
diffi^rejy ,  d'approfondir  al&z  les  vrais  princi- 
pes du  .vôtre.  La  ConfliuKÎon  démocratique  a 
jufqu'à  préfent  été  mal  examinée.  Tous  cenx 
qui  en  ont  parlé  ^  ou  ne  la  coi^oifloient  pas,  ou 
y  prenqient.trop  peu  d'iqt^i;^  ^  ou  avo^nç  in- 
térêt de  {a  préfènter  fous  m  faux  jour.  Aucun 

Partie  IL  F 


«^       H    O    I    T    i    È    M   » 


è^'eôâL  tfa  fiif&famfiiaHi  (Mingaé  fe  SmvtsdSà 
àct  Gouvememetit  9  la  Paiflàiicé  légifl^ive  de 
l^écadve.  II  n*y  a  jpoihc  d'Etac  où  ces  cfeui 
^im^irs  foient  fî  Çépaxés ,  &  où  ron  »t  taafi 
affeéié  de  les  cqtifondre.  Les  dns  s^imagmenfi 
^^une  Démocratie  eu  un  GouVememefit  où 
tout  le  Peuple  efl:  Ma^Ibat  &  Juge.  D'autres 

« 

île  voycnt  h  l&até  que  daiis  le  droit  d'éfi- 
re  fes  chefs ,  &  n'étant  fournis  qu*à  des^  Priii- 

êes ,   croyent  que  cehû  qui  conumàde  eft 

», 

toujours  le  Souverain.     La  CônClitution  dé^ 

fnocratwjue  eft  Certainement  le  Chef-  d'œuvref 

ée  rart  pdWqiic  :  mais  plus  ra*tffiee  en  eft 

admirable  /  fïioiiis  il  ^^partielii:  à    tous  ktf 

^eâx  de  le  pénétrer.  '  N'e(l  ■*  il  pas  vai% 

Monfieur,    que  fat   preiliîere  précaution  de 

tf  admettre  aucun  Gcrtfeff  général  légrtîuïe  que 

«^ 

Ibus  la  conVocatSônf  éi  petit  *€onîeîl ,    &  la 

fceonde  précautîoîlii  ^e  nY  f^fiff^fr   «lucane 


LETTRE.  îeJ! 

jpfôpoiitioft  qu'avec   Tàpprobàtioiî    du  petit! 

Confdl  y  fuffîToienc  fetiles  pour  maintenir  te 

« 

Confeil  général  dans  là  pluft  tôtiere  dé|>endaii<« 
(6€  ?    La  troifîeme  ptéeàiitioh  d*y  régler  la 
compâence  dés  maûeres  ëtôic  donc  h  diofe 
du  moiidè  la.  plus  fu^jerfitie  ;  &  quel  eut  étc^ 
Tinconvénient  de  laii!br  an  Confeil  général  lé 
plénitude  deà  droits  iupFêdles<^  puifqull  n'crî  v 
peui;  faire  jmcun  ù&ge  qu'autant  que  le  petit 
Confeil  le  lui  permet  ?  Eti  île  bornant  pas  kè 
droits  de  la  PdiTànce  fbûveraine  on  ne  la  ren- 
doit  pas  dans  le  &it  moins  dépendante  &  Foii 
ëvitmt  une  contradi6lion  :  ce  qui  prduîre  que 
c'efl?  pour  n'avoir  pis  bieh  connu  votre  Con-^ 
ilitutîon  qu'on  a  prit  des  précautions  Vaines  . 
tn    dks- mêmes  &  cbiltrâdiâoirei  dàn^  leu£ 
©bjet: 

On  dira  qtie  ces  Smîtatk^s  aVoieèt  feî^*- 
mem  pour  fin  de  marqoer  les  cas  où  let  Ùitiè; 
-  F  â 


(J8         HUITIEME 

feîte  inférieurs  feroient  obligés  d  aflèmbler  le 
Gonfeil  général.  J'entens  bien  cela;  maïs  n'é- 
tôit*iipas  plus  naturel. &  plus  fîmpfe  démar- 
quer les  droits  qui  leur  ^étoient  attribués  à  eux- 
mêmes,  &  qu'ils  pouvoient  exercer  fans  le  con- 
coure du  Confeîl  général  ?  Les  bonaes  étoient- 
dleS' moins  fixées  |)arxe  qui  efl  au  deçà  que 
par  ce  qui  eft  au.  delà,  &  lorfqùe  les  Confêils 
inférieurs  voûtaient  pafler  cesix>mes,  n'eft-il 
'pBS  clair  qu'ils  avoisnt  befoin  d'être  autorifés  ? 

Par  là ,  je  l'avoue,  oamettoit  plus  en  vue  tant 

« 

de  pouvoirs  réunis  dans  les  mêmes  mains, 
mais^  on  préfentoit  les  objets  dans  leur  jour 
véritable  )  on  tiroit  de  la  nature  de  la  choie 
le  moyen  de  fixer  les  droits  refpeSifs  des 
divers  corps,  &  l'on  fauvoit  toute  contra- 
diélion. 

•  A  la  vérité  Muteui'  des  Lettres  prétend 
que  le  petit  Confeir  étàm  le  Gouvernement 


\^ 


LETTRE.  6p 

même  doit  exercer  à  ce  titre  toute  Tautorité 
qui  n'efl:  pas  attribuée  aux  autres  corps  de  l'E- 
tat ;  mais  c'efl  fuppofer  la  fienne  antérieure 
aux  Edîts  ;  c'eft  fuppofer  que  le  petit  Confcil, 
fourcè  primitive  de  la  puiffknce,  garde  ainfi* 
tous  les  droits  qu'il  n  a  pas  aliénés.  Recon- 
noîflez-vous,  Monfieur,  dans  ce  principe  ce-, 
lui  de  votre  Conllitution  ?  Une  preuve  fî  eu- 
rieufe  mérite  de  nous  arrêter  un  moment.  ' 
Remarquez  d'abord  qu'il  s'agît  là  (p)  da 
pouvoir  du  petit  Conleil ,  mis  en  oppofîtîon 
avec  celui  des  Syndics  ,  c'eft-à-dire ,  de  cha- 
cun de  ces  deux  pouvoirs  féparé  de  l'autre. 
L'Edi^  parle  du  pouvoir  des  Syndics  fans  le^ 
Confeii ,  il  ne  parle  point  du  pouvoir  dd 
Confèil  fans  les  Syndics;  pourquoi  cela?  Par- 
ce que  le  Confeii  fans  les  Syndics  efl  le  Gou* 

(p)  Lettres  écrites  de  la  Campagne  page  66. 

,    F  3 


7.0        HUITIEME 

vernement.  Donc  le  iîlence  même  des  E^t| 
jfttf  le  pouvoir  du  Cdnfeil  loin  de  prouver  la 
pullîté  de  ce  pouvoir  çj^  prouve  retendue. 
VoiI«^«  fans  doute,  une  condufion  bien  neu* 
ve.  Admettons-la  toutefois,  pourvu  que  l'an- 
técédent  foit  prouvé. 

Si  c'çfl:  parce  que  Ip  petiç.  Cçnfeii  efl  le^ 
gouvernement  que  ks  Edits  ne  parlent  point 
de  fon  pouvoir  ,  ils  diront  du,  moip9  .que  le, 
petit  Confeil  eft.  le  Gouvernement  :  à  moins 
f^ue  de  preuve  eri  preuve  leur  fUencç  n'ëta- 
bliffe  toujours  le  contraire  de  ce  qu'ils  ont  dit. 

Or  je  demande  qu*on  me  montre  dans  vos 
Xdits  où  il  eft  dit  que  le  petit  Çonfeil  efl  le 
Gouvernement,  &  en  attendait  je  vais  vous 
montrer,  moi,  où  il  eft  dit  tout  le  contraire: 
Dans  l'Edit  politique  de  1568,  je  trouve  le 
préambule  conçu  dans  ces  termes.  P-ource  que 
le  G^vcTttcment  ^  Efiat  d^  cçtte  Vilk  conHJlc 


LETTRE  7< 

pfj-  quatre  Syndicques^  le  Conjeil  des  vingt -cinq.  ^ 

^  CenfeiJ  des  foixantel  des  Deux-Cents,  du  Génér 

.1  •  •  »        .      .  ,  . 

ral^  t^  un  Li^tena^  en  la  jujlice,  ordinaire,  ^i- 
vec  autxes  Offices^  feloji  qu£  bonne  police  le  r$r 
quîert,^  tarif  pur  J admvnifira^îon  du  bien  public, 
que  de  la  jujlice ^  nous  avons  recueilli  l'ordre' qui 
^uf qu'ici  a  été  obfervé  .<.;.......  afin  qu'il  foil 

gardé  à  F  avenir comme,  s*  enfuit. 

Dès  r^icle  premier  <fc  l!Edit  de  i73ft,  y^ 
yois  sncore  que  cinq  Ordnes  compfent  le  Gou^ 
vernemera  de  Genève^  Çr  de  ces  cinq  Ordi^ 
les  quatre  Syndics  tout  feuls  en  font  un,  le. 
Confeîl  des  vin^t-cinq ,  ou  font  certainement 
compris,  les  quatre  Syndics  en  fait  un  autre, 
&  les  Syndics  entrent  encore  dans  les  trois; 
j^vans.  Le  p^tît  Confeil  fans  les  Syndlcsi, 
n'ell  donc  pas  le  Gouvernement. 

J'ouvre  TEdit  de  1707,  &  j'y  vois  à  TAi^ 
ticlç  V  en  jpropres  termes ,  que  Meffîeurs,  Ics^ 

F  4 


72         HUITIEME 

Syndics  ont  la  dircSion  fif  le  Gouvernement  de 

» 

TEtat.  A  rînftant  je  ferme  le  Livre  ,  &  je 
dis;  certainement  felon  les  Edirs  le  petk  Con- 
fdl  fans  les  Syndics  n'ell  pas  le  Gouverne- 
ment ,  quoique  FAuteur  des  Lettres  affirme 
qu'il  l'eft.  * 

On  dira  que  moi-même  j  attribue  fouvent 
dans  ces  Lettres  le  Gouvernement  au  petit 
Confeil.  J'en  conviens;  mais  c'eft  au  petit 
Confèil  préfidé  par  les  Syndics  ;  &  alors  il 
efl:  certain  .que  le  Gouvernement  provifion- 
nel  y  réOde  dans  le  fens  que  je  donne  à  ce 
mot  :  mais  ce  fens  n*efl:  pas  celui  de  l'Auteur 
des  Lettres  ;  puifque  dans  le  mien  le  Gou- 
vernement n  a  que  les  pouvoirs  qui  lui  font 
donnés  par  la  Loi,  &  que  dans  le  fien,  au 
contraire ,  le  Gouvernement  a  tous  les  pou- 
i^oirs  queia  Loi  ne  lui  ôte  pas, 

Refle  donc  dans  toute  fa  force  robjeélion 


LETTRE. 


73 


âes  Répréfentans ,  qae  ,  qoand  TEdit  parle 
des  Syndics ,  il  parle  de  ledr  puiTance ,  & 
que ,  quand  il  parle  du  Confeil  ^  il  ne  parle 
que  de  fon  devoir.  Je  dis  que  cette  objec- 
tion refte  dans  toute 'ia /orce  ;  car  l'Auteur 
des  Lettres  n*y  répond .  que  par  une  afTertion 
démentie'  par  tous  les  Edits.  Vous  me  ferez 
ptaifir,  Monfieur,  fi  je  me  trompe,  de  m*ap*: 
prendre,  en  quoî->péche  mon  raifonnemeût.     . 

Cependant .  cet  Auc^r  ,  très  content  du  : 
fien,  demandé  commfeiit,  f%  le  Lêgijlateur  nia- 
vm  pas  ct^fidéré^de  cet  œil  Je  ^ petit  Cànfetl^ 
•TfipoùrrùiP'  ifoncevm  quç  dans  imcùn  endroit  de . 
rEdit  il  n'en  réglât  fautoriié;  qu'il  Ta  fuppot^  : 
fât .  par  tout  É?  qu'il  ne  la  déterminât  nulle ^ 
part  (q)? 

J'oferai  tenter  d'éçlaîrcîr  ce  profond  myf-  . 


(j)  Ibii  page  67. 


f4       H.  xr  i  .T  ;i  e  m  Ê 

tere*    Le  Légiflateui  ne  régie  point  h  puÈ^ 

&nce  da  Cdnfeil,  psvbe  qu'il  ne  kl  eD  doii^ 

•  •'  • 

îie  ^cunei  iQdépeQdatnment  des  Sjrodics  ,  & 

lorfqu'il  Ist  ibppofe,  c'eft  en  le  ibppofânt  auBx 

préfidé  par  eux.    II  a-  déterminé  la  kor,  pac 

conséquent  il  eft  fuperfiu  de  déiemiBier  b 

tiemit.  Tues^  %hdics  ne  peuvent  paa  tout  ans 

le  Can&ily  tnaîr  le  Cdnfëi  nr  peut  iden  &d$ 

les  ■  Syndics^  ;  ik  n'eft  rien  faos  eux  i.  il  ef( 

hiùins  que  h'ésdiç  le  Deui[-Cent  même  kârP 

^'il  fut  préfidé  p^  rAudiceui?  Samaàm 

.  Voilà ,  je  crois  ^  la-^  feole  m^teôece  ssdfcttH 

ïabh  d'expAîquer  le  fileude  des^  Edîts  ûst  lé 

pouvoir  du  Coti&iî;  niais  te  if  eft  pas  ceQé 

^a^l  convient  aux^^  Magîftrats  dCadbpter;    Ch 

fcut  prévenu  dans  le  règlement  4eurs  fingqlie* 

res  interprécationi»  fi  ron  eut  pris-  ùn&  mte- 

thode  contraire,  &  qn'au  lien  de  marquer  lei 

droits  du  Confeil  général  on  eut  déterminé  kâ 


,     '■■LÈ'-f-  r a  %  ::    f$' 

Uxlàt!  Maïs  pour  hlnrdîr  pm  xadkt  dire  ëfi 
que  n'ont  pas  dk  lef»  Editt,  on  a  fait  enieii- 
dre  ce  qa'Ms  rk€ût  jàsùaii  fiippofë^ 

Que  dediQ&s  i^n^kesà  la  liberté  publia 

que  &  au  droits-  des  Citoyens  ôc  Bourgeois , 

•  » 
&  combien  n'en  poiirroîs- je  pas-  ajouter,  enco- 
re ?  Cependanfc^Qus.  ces  dëiâvantagès  qëî  naid 
foîent  ou  feinbldîent  naître  de  votre  Conftîttit 
tîon  &  qu'on  n'àuroît  pu  détruire  fins  Fëtean^ 
let,  ont  été  balancés  &  réparés  avec  la  plus 
graiîde  fagefife  par  des  compenfàticrtîs  qui  ce 
haîflbîenc  auflS ,  &  telle  étoît  préciféiftent  Fin- 
tention  des  Médiateurs  j  qui,  fekmleÙF  propre 
dédaration  i  fut  de  cmfirwr  à  <:bacun  Jts  ânMè 
fes  attributions  particuîîèfès  provenant  de  h  Loi 
fondamentale  de  VEtàt^  •  M  Michdi  Efa  Crée 
aigri  par  fes  malheurs  contre  cet  ouvrage  dans 
lequel  il  fat  oublié ,  Taccufe  de  renverfer  Tin-  ' 
ftâtution  fondamentale  du  Gom^eriîeracnt  &  àe 


7^       H:^U   I    T    r  E    M   E' 

I 

dépQiiiHer:fes  Ckojfçns  &  Bourgeois  t}^4aiâ:s 
dcoicsi  fans  vouloir  voir  combien  de  ce$ 
droiu,  tant  poUica  qœ  particuliers,  ontâé 
cônfervés  oa  rétab^s  par  cet  £dit ,  dans  les 
Article»  III,  IV,jX,  XI,  XK,  XXII,  XXX, 
XXXI,  XXXII,  XXXIV,  XLII,  &  XLIVj 
fans  fonger  furtout  que  la  force  de  tQus  ces 
Articles  dépend  d'yn  feol.  qui  vçus  a  aufli  été 
confervé».  Article  effencipl,  Article  équipon* 
(ferant  à  tous  ceux  qui ^  vous  font  contraires, 
^  H'  néc^lTajre  à  1  Wec  dç  ceuif  qui  vous  ibnt 
favorables  qu'ils  feroient  tQu$  inutiles  fi  Ton 
venoit  à.bput  d'éluder  celui-  là,  ainfi  qu'on  l'a* 
^ntreprç^  Nous  voici  parvenus  au  point  im- 
portait; mais  pour  en  bien  fentir  l'importance 
il  falloit  pefer  tout  ce  que  je  viens  d'expofer. 
»  On  a  beau  vouloir  confondre»  l'indépendan- 
ce &  la  liberté.  Ces  deux  choies  font  fî  dif- 
férentes  que  même  elles  s'excluent  mutuelle* 

ment. 


L  :£    T    t-R;  Kl         ?^ 

ment.  Qaand  chacan..  fait  ce  'çgrïl jluî  phi^i 
on  fait  ibuv€nt  ce  qai  d^Iait  à  d'autxesi ,  j8c 
cela,  ne  s'appdle  pas  un  état  libre.  '  La  Kberté 
conGfleMnoms-  à -faire  ià;  vdqnçé  .^a  n^êc^ 
pas  fournis  à  celle  d'au trui;  eUe"C0QÛfle  encoit 
à  ne  pas  foumecu^  la  ycdom&d'aiurui<à  la  nàf^ 
tre.  Quiconque  efl  maître  ne  pqut  être  libre , 
&  régner  c'efl:  obéir.  ;  Vos  Magiflxats  favent 
cela  mieux  que, pçrionne^  eux  ^ui'^cpinme  0« 
thon  ^omettent  jien  cfe  fervile  ppur  comment 
der  Yr\    le  ne-ccmnois'de  volonté  vraiment 


(r)  En,  général  y  ^ît  ^Auteur  cbs  Lettres,  /^x  ^owi* 
mes  craignent  encote  plus  d'obéir  qu'Us  rCaimenc  à  com* 
mander.  Tacite  jen  jogepiit  aatrenfiot  &<cQDnoiQQt( 
le  cœur  humain.  Si  la  maxime  étoit  vraie ,  les  Va- 
lets des  Grands  feroient  moins  infolens  avec  les 
Bourgeois ,  &  Ton  verroit  moins  de  faînéans  ram- 
per dans  les  Cours  des  Princes.  Il, y  a  peu  d*honi- 
mes  d'un  c'œujf  aflez  fain.pour  favoir  aimer  la,  liber- 
té :  Tous  veulent  commander  ,  d  ce  pHx  nul  ne  ' 
craint  d'obéir.  Ua  petit  parvenu  fe  donne  cenç 
maîtres  pour  acquérir  dix  valets.    H  n'y  a  qu'à  voir 

Partie  IL  G 


!5S        H   U   I    T   I   E  !M   Ë 

»  •        •  •  • 

IS^^e  que  celle  à  foquefle  nid  nV  droit  d*opp<> 
fer  <le  la  réGftan<:e;  émz  la  liberté  commune 
fettl  rfa  ctoitdé  feke  ce  que  la  liberté  d'un  au- 
tre hiî  interdît ,  &  la  vraie  ïibcrté  tfeft-jimaîs 
aëftrù£tivéd''ellè-m6me.  Aînfi  la  liberté  &ns 
la  juftice  èft  tihe  véritable  contradîétion  j  car 

comme  qu*ôn  s*y  prenne  tout  gène  dans  Texé* 

„        »•■«•-  » 

eut  ion  dtme  -volonté  défordonnée. 

*'  Il  n'y  a  donc  -point  de  liberté  fîms  Loîx,  ni 

bli  quelqu'un  eft  au  deflus  des  Loix:  dans  Té- 

iat  même  de  nàttirè  rhomme^n'cft  ïbre  qu'à  la 

&veur  de  la  Loi  naturelle  qui  commande  à 

f  ... 

tous.    Un  peuple  libre  obéit,  mais  il  pe  fert 
pas;  il  a  des  die£i  &  non  pas  ^des  maîtres  j  il 


MiM* 


la  fierté  des  noWiis  dans  les  Mohairchies  ;  avec  quel» 
le  emphafe  ils  prononcent  ces  înots  (Je  firvice  &  de 
fervir;  combien,  ils  5'efliment  grands  &  rcfpedables 
quand  ifs  peuvent  avoir  Thônnêur  de  dire  ,  U  Rot 
moh  màitre;  combien  ils  méprifent  des  Républicains 
qui  ne  font  que  libres  ,  &  qui  çertainemeijt  font 
plus  nobles  qu'èWi 


ii    Ë    T    t    BL    tw  ^j^ 

ttb^taux  Lohiitms  3  n'o^ék  iju'aux  Loix^ 
■&  c'eft  par  h  force  des  Ï40ÎX  qu'if  rfobdic  po» 
atof  liommes.  Toutes  les  b^rkres  qu'on  dodne 
dam  les  Républiques .  au  pouvoir  des  Magîr 
Qhts  ne  fùtt  étàbUes  q&e-  pouf*  garantir  dé 
leurs  atteitities  TeilçeiQte  facrée  des  Loix;  i!s  etïl 
jfbnt  leS  Miilifireb  non  les  sffbitres  ^  ils  doivent 
les  garder  non  le^  énlfreindre;  Un  Peuple  efl 
libre  9  «{Ëieli^e  fâme  qu'&it  ibn  Gouverne^ 
znent^  quiJbd^nS  déhû  çti  JegoâVeme  il  ne. 
Voit  point  rhobime  ^  maiil  iWgane  de  la  Lc^iLi 
En  un  moc^  h^berté  fuit  tcu,^s  le  fôrt  des 
)Lok  ,  eHe  ixsgtae  ofta  pérk  avec  ^  eles;*  je  né 
Hiché  rieû  de  plus  certain. 
.  Voiâ  avei  des  Ldiic;  botlnes  &  iagès  »  fbit 
tHft  elleshmêiœsj  foit  par  cek  feu}  que  ce  font 
des  I^&.^Tôdte.  condition  impofSe  à  chacuil 
par  tous  iie  peut  être  one'reufeà  perfoàne,  &. 
Il  pire  des  iioik ,  vwat  àxsové  mieux  que  le 

0  % 


\ 


%ô        H    U    I    T    ï    E    M"  E 

meilleur  tnaître  ;  car  toat  maître  a  des  préfé^ 
rences  ,  &  la-  toi  n^en  a  jamafs» 
'  Depuis'  que-  la  CônftîtUticm -de  votre  Etat 
a  .pris  une  fwme  fixe  &  ftablé,  vos  fonc-^ 
dôn^  de  Légiflateur  fpnt  finîei.  La  fureté  de 
rédifîce  veut- qu'on  trouve  è  i)réfent  autant 
d'obftacles  ppûr  y  tdUcher.qu'2  falloîc  cf abord 
de  facilités  poiirlô  conf&uîref.'    1-e  droit  né*. 
gatif  des  Cooféîls  pâï'çn  'ce  fens^efl:  fappui  de 
la  Republique.  :  -ï'Açiîcle  VI '^  da  ^  'Réglemœt 
eit  c\é.v  âc  prid^'l  je  me  rends  fur  ce  poinr 
*3x  raifbnhemens^'PAuteur.dcs  Lettres,  je. 
les  trpuve  ikis' réplique ,  &  quand  ce  xiroit.£t; 
jufiement  réclamé  par  vos  ;  Mà^ftrats  (èroît 
contraire  à  vos  intérêts  y  il  fkudrok  fouflFrir  & 
voue  taîrel  Ifes^hûbunes  droits,  ne  doivent  ja* 
mais  fermer  lés  yeux  :à  rëvidenœ,  'Jdi  difputer 
contre  la  v^ité.     - 
L'ouvragé  eH  conibniiné ,  il jne  .s'agit  plus 


LETTRE.  Si 

que  de  le  rendre  inaltérable.  Or  l'ouvrage  du 
Légifliteur  ne  s'âlcere  &fic  fe  détruit  jamais 
que  d'une  manière  ;  c'efl  quand  les  dépofitaires 
de  cet  ouvrage  abufent  de  leur  dépôts  &  fe 
font  obéir  au  nom  des  Loix  en  leur  défobéif* 
lànt  eux  -  tnêmes  {s).  Alors  la  pire  chofe  naît 
de  la  meilleure,  &  la  Loi  qui  fèrt  de  fauve- 
garde  à  la  Tyrannie  eft  plus  fmefte  que  la 
.Tyrannie  elle-même.    Voila  précifément  ce 


(s)  Jamais  le  Peuple  ne  s'eft  rebellé  contre  les 
Loîx  jne  les  Chefs  n*aîent  commencé  par  les  en- 
freindre en  quelque  chofe.  Ceft  .fur  ce  prjncipe 
certain  qu'à  la  Chine  quand  il  y  a  quelque  révolte 
dans  une  Province  on  commence  toujolors  par.  punir 
le  Gouverneur.  En  Europe  les  Rois  fuivent  con- 
ftamment  la  maxime  contraire,  aiiffi  voyez  commeiit 
profperenc  leurs  Etats  l  La  population  diminue  par 
tout  d'un  dixième  tous  les  trente  ans;  elle  ne  dimi- 
nue point  â  la  Chine.  Le  Defpotlfndlie.  .oriental  fc 
foutîent  parce  qu'il  eft  plus  févere  fur  les  Grands 
que  fur  le  Peuple  :  il  tire  ainfî  de  lui-môme  fon  pro- 
.  pre  remède.  J'entends  dire  qu*oa  commence  i  pren* 
dre  à  lu  Porté  la  maxime  Chrétienne.  Si  cela  eft, 
on  verra  dans  peu  ce  qu'il  en  réfultera,  ^ 

G3 


p  ,       H    U.   I    T    I    E.   M   m 

que  prévient  lè  droit  de  KépréCêotation  (H- 
pulé  dans  vos  Edi^  &  redraint  mais  con^« 
xné  par  la  MécUa,tîûîv*  Ce  di^pit  vous  donne, 
infpeâiou ,  noii  plus  fut:  k  Légiiktioa  com- 
zne  auparavant,  mais  fat  Tad^iniflration^  & 
VOS  Magiflirafs;  coi^  ppi^^^  ^  nom  des 
Xoix,  feols  maîcreii  d'en  laroppfer  au  LegiHa* 
teur  de  hoavielles ,  foot  fourni^  à  fes  jùgemens 
Vils  s'écartent  de  celles  qui  font  établies. 
Par  cet  Article  lèul  votre  Gouvernement 

•     !  .  -  ,  ,  .  V 

j^jet  4'ail|^urs  à  pludeucs  défauts  confidéra* 
bles,  devient  le  meilleur  qui  .jamais  ait  exif- 
té:  car  qud  meilleur  Gouvernement  que  celui^ 
4ont  toutes  l^a  parties  ie  Ijalancent  dans  ua 

* .  ■  ^ 

paifaic  équilibre,  où  les  particuliers  ne  peuvent 

tranfgreire];.  les  Loi^  parce  qu'ils  font  fournis 

à  des  Juges,  5c  où  ces.  Juges  ne  peuvent  pas 

non  plus  les  tranfgrefler ,  parce  qu'ib  font  fur- 
'  ■     .  *■ 

yeillés  pa^  Iç  J^euple  ? 


L    E    T    X    R    1^  «J 

^  9 

% 

t 

U  eft  vrai  qipe  pour  trouyei?  ^uçlq^f  réalîçé 
^ns  cet  avaptiage,^  il  aç  f^t  pa^  le  foQdfs: 
gir  un  vain  droit:,  mm  qui  <Jtf  Uft  droit  nç  dit. 

gas  une  chôfe^  v^Éîe.  Dke  ^  celui  qui  a  tranf», 

*  ■  •  •  .      ,       » 

greflK  h  Loi  qtfi}  ^  ujaijfereffiî  k  Loi,  ç'eft, 

^  -       '■  -    •  . 

prendre  upe  peine  biea  riditrule  ;  ç!eft  luî^ 
apprendra  uj^iç  çl\ofe  qu'il;  fait  aii$  bien  qup. 

VOUS, 

Le  dipit  efl^  fidoa,  Fai]%i|(]9f^^^^  uae  qualité  ^ 
morale  par  laqudle.  %  noafk  dSt,  dû  quelque  ciio^ 
&.  La  fîtnpl^s;  liber^^  de  fe  plaindre  n'efl  donc 
pas  ua  droit ,  ou  du  moinys  c'eft.  un  droit  que 
la  nature  aircoçde  à  tûa&.&  que  Ja  Loi  d'aucun 
l^ays  n'ôte  à  perfonne.  S'avi&trop.  jamais  de 
ilipuler  dans  dçs  Loix  que  celui,  qui  perdroit 
un  procès  auront  la  lih^  de  &  plaindre  ?  S'^a- 
yifa  t-on  jamais  ^e  punir  quelqu'un  pour  l'avoir 
fpt  ?  Où  eft  le  Gouvernement ,  quelque  abféfa. 
^u'il  puifTe  être,  où  tout  Citoyen  n'^ic  pa^  le, 

G  4 


/ 


«4         HUITIEME 

droît  de  donner  des  mémoires  au  Prînce  ou 
à  fbn  Minîftre  fur  ce  qu'il  croit  utile  à  TE- 
tat,  &  quelle  rifée  n'exciteroit  pas  un  Edit 
public  par  lequel  on  accorderoit  formellement 
aux  fujécs  le  droit  de  donner  de  pareils  mémoi- 
res? Ce  n'efl:  pourtant  pas  dans  un  Etat  des- 
potique ,  c'eft  dans  une  République ,  c*efl  dans 
une  Démocratie,  qu'on  donne  authentique- 
ment  aux  Citoyens,  aux  membre?  du  Souve- 
rain ,  la  permiffion  d'ufer  auprès  de  leur  Ma- 
giftrat  de  ce  même  droit  que  nul  Defpote 
2i'ôta  jamais  au  dernier  de  fes  eiclaves. 
Quoi  !   Ce  droit  de  Répréfèntation  confia- 

teroit  uniquement  à  remettre  un  papier  qu'on 

» 
eft  même  difpenfé  de  lire,  au  moyen  d^une 

réponfe  féchement  négative  (r)?  Ce  droit  fi 


^^^■"•"^^ 


(t)  ,TelIe  ,  par  exemple  ,  que  celle  que  fit  le 
Confeil  le  lo  Août  1763  aux  Répréfentations  remi- 
fes  le  8  à  M.  le  premier  Syndic  par  un  grand  nom- 
bre  4e  Citoyens  &  fiourgeois» 


J 


LETTRE.;  85 

foléroxiellemejic  Itipulé  en  compenfàtion  de 
tant  de  facrifices^  fe  bornerok  à  :  la  rare  pré^ 
fogative  de  demander*  &  ne  rien,  obtenir? 
Ofer  avancer  une  telle  propôfition  ,  c'eft  ao* 
caler  les  Médiateurs  d*avoir  nfiî^iKec  la.fiour-! 
geoifie  de  GqiéVë  dç^  là  plus:  indigne  lùpèrH 
dierie ,  c'eft  oflfœfer  la  pcobiBé  A».  Plàiîpo; 
tetitiairej,  Xè^vé^  dâs  ^uiffiaace^  -fnéiîatrices,;. 
c*eft  bléffer  coûte  bienféan(îQ.>  p^dft.  'outfagen 
même  le  bcyi  fens.  „    .-  ~  '    .  f 

Mais  enfin  ^nel  ^eft  ce*  ctewt?i  jOfqu  où  j 'é^ 
iea4-il?  coa^mentîpeutril'.êarfc'«2Èrc;é?  Pour*i 
quoi  tien  de.toija.fCel^  n^eftfîi  fpécifié  da^^^ 
F  Article  y  II  ?,  yoHa  des^efljoiftiTrjlifonwrt 
blés;  -elles; i^fSfônt.  des  difficultàf  qui-  méritent, 

* 

La  folucicFt^  d'une  feule  npu^-  dQnncrs»  (^x 
le  -de  toutj»  îes -autres,  &;itiiDqs  dévoilera  \^i 
véritable  efpdt  de  cettp  îqftîtutiojî../  ;,  ;. ,    ^* 


X 


U      B  XJ  :i   T   î  t   U  È 

Dans  Un  £tau:  td  que  k  vôcire*,  où  hfbû* 
Verainecé  iiï  enûre  ks  màîai  du  Feuplb ,  lé 
Légiilateur  èadfte  toujours,  qoôiqu'il  ne  fô 
montre  pas  toujours.  Il  n^efl:  taifâtiblé  â 
ne  parle  authehtiquemrat  que  dan*  le  Confël 
(général  ;  m&is  hoifi  du  Cbnfei)  geàéral  il  n'dl: 
pas  aiiéami;  'i^  menibf^  Jbiit  ép»s^  mail 
ils  ne  fcmt  pu^tm^  ^  âfê  ^euveât  partes 
par  des  Loix^  mate  ils  pietiv^ttt  tol^'oors  veil- 
ler fur  radmihiiîiration  deif  Lô\i  ^  c'eft  uff 
dtoic ,  i^'âfl^  ^rtié  UA  devoif  attaché  à  leurs 
perTonnes,  ât  qd*^  jàe  p«oc  lâdr  êtfe  bié  dâtt» 
«lëun  xkta»^  I)é-IA  lé  ch-c^  dâ  Rë^lèmst» 
tion.    Ainâ'  M  Ité^eiibtîôn '^  (j'uiî  Citoyen 

dTcin  Boûiig^is  ^^  de  plafîéuiï  H'^  que  Is 
déclaration  de  leur  avis  fur  une  matière  de 
leur  tompétetft^.  '  Ceci  êfl!  te  îeèië  chir  & 
Xtëcëfiâiîë  <ié  rSâie  de  Ï7ô7;<laîi8  rArtiétë 
V  qui  conifëi^ne  les  R^prérémaék^ik 


M  t-  :e :"^Tï  T-  R  a  ii     t? 

la  voye  des  f%nati^e^)  p«rcÊ  que.  cecte  vo^ 

de  voûter  ps^  t^  comdie  û  â^a.l'ôtti  ètok  ek 
Coofeil  gédéfaH-&  qdè  li  lonBé^âù  ConM 
gëoétal  ne  ddl  être  itU vie  que  ]<^u'il  ètt  W- 
j^tttëtaeût  âflèmblé.  La  voyie  des  &^iîtfl(ï 
tations  z'\6  xcàme  avaataii^)  ikHï' avoir  te 
même  ËacôDvéïâeiic.    Ce  n'eft  {tas  Voft«!r  eH 

/ 

Cc^ifeil  général ,  c'efi;  opînér  ftir  lè^  maderei 
^i  doivent  y^  être  citées  $  pullqù'on  itt 
compte  pas  les  voix  ce  tCeÀpii  dJmnàt  foà 
ittffirage  ^  c'aft  feulement  dire  ibfi  avis.  Cet 
z,v\s.n'èQ:y  à- la  vérité^  que  celui  d*un  paiti^ 
culicf  OQ  de  plufieurs  ;  mais  ces  particuIîM 
éCBnt,  membres  du  SouveraîÛ  &  pouvsit  le 
répréfenter  quelquefois  par  ieuf  multitude,  la 
taifcÀ  veut  qu'alors  on  ait  égard  à  leur  avis» 
non  cQimne  à  une  déciiion ,  mais  comme  à 


88       H   H   I:  T,'I.E    M  E 

HOB  pr<^fîcton  qui  la^detnâade ,  &  qui  la 

i«nd  vqudqjiefokq^efJSiàre;  .      1     : 

^.   Ca  iftépr^aïaâoijl  peuvent  jrouler,  fur 

d«ux  dbjçtOï?fl?îB^^î>  A  la  différence  de 
ces  objeesv  décide;  de  la  div^:.9)3iûere  dcnfO 
le  Coji(^il;dpi!;  faire  drpjt  fur  ces' mêmes  Ré*^ 
pEéfepawoiis^^  De.ces^deux-pbjcts.i  Toa  ^ 
if  ê*rpjÇJÉa"?  ^^g^roent  à  la  Loi,  Tau* 

tre  de .  ;répÉtfer  .q^^elque  ttaî^effiçn  de  la 

» 

Ixà:  Çe^e  ^i^îùoû  efl  cpmfdecte  &  comr 
j^n4>/:tou?er  1^  ^  matiei^  Jjit  l^uelle  peuvoit 
f^l^  jes'  BjéjprjéfeotacîoQt.  -  £Ue  dl  fondée 
faç  TEdit  ipêÇie  Sui  »  diftiî^a[nt  Jes  termes 
feloi^  ces;  objets  |mpofe  aa  Pjrô.cureur  gêné' 
ira);  4e:  faire  ;des  pifi^mes  ou  :.d^s  remontrances 
félon  que  :ler;Cjitt>yens  lui  ont  fait  des  plains 
p^s  ou  dc&  rjéquijitims  (u). 

.  :     •  CetUfi 


(tt)  Réquérir  ii*cft  pas  feulement  demander ,  mais 


LETTRE.  89 

Cette  diftinélion  une  fois  établie,  le  Con- 
(bil  auquel  ces  Répréfcntations  fbnc  adre& 
fées  doit  les  envifager  bien  différemment  fe« 
ion  celui  de  ces  deux  objets  auquel  elles  fe 
rapportent.  Dans  les  Etat^  où  le  Gouverne» 
ment  &  les  Loix  ont  déjà  leur  aOiete  ,  on 
doit  autant  qu'il  fe  peut  éviter  d'y  toucher, 
&  iurtout  dans  les  petites  Républiques  ,  où 
le  moindre  ébranlement  défunit  tout.  L'a< 
verfîon  des  nouveautés  efl  donc  généralement 
bien  fondée;  elle  Tefl  furtout  pour  vous  qui 


demander  en  vertu  d'un  droit  qu'on  a  d'obtcnfr. 
Cette  acception  eft  établie  par  toutes  les  formules 
judiciaires  dans  lefquelles  ce  terme  de  Palais  eCb 
employé.  On  dît  réquérir  jufticc;  on  n'a  jamais  dit 
requérir  grâce.  Ainfî  dans  les  deux  cas  les  Cito- 
yens avoieot  également  droit  d'exiger  que  leurs  r^- 
quifitions  ou  leu^s  plaintes  y  rcjettées  par  les  Confeils 
it^érieurs ,  faSenc  portées  en  Confell  gi^néral.  Mais 
par  le  mot  ajouté  dans  l'Article  VI.  de  ÏEiiit'  de 
1738,  ce  droit  eft  reftraint  feulement  au  cas  de  U 
plainte^  comme  il  fêta  dit  dans  le  cexce. 

Partie  IL  U 


00        HUITIEME 

ne  pouvez  qu'y  perdre ,  &  le  Gouvernement 
ne  pçut  apporter  un  trop  grand  obftade  à 
leur  établiflèment;  car  quelqueis  utiles  que  fuf* 
fent  des  Loix  nouvelles ,  les  avantages  en 
font  prefque  toujours  moins  fûrs  que  les  dan- 
gers n'en  font  grands.    A  cet  égard  quand 

le  Citoyen  'quand  le  Bourgeois  a  propofé  fori 

« 

avis  il  a  fait  fon  devoir ,  il  doit  au  furplus 

avoir  aflez  de  confiance  en  fon  Magiflrat  pour 

le  juger  capable  de  pefer  l'avantage  de  ce 

qu'il  lui  propofe  &  porté  à  l'approuver  s'il 

le  croit  utile  au  bien  public.  La  Loi  a  dond 

très  fagement  pourvu  à  ce  que  l'établiffement 

&  même  la  propofîtion  de^pareilies  nouveaii' 

tés  ne  paifôt  pas  fans  l'aveu  des  Confeils,  & 
'  .  '  . 

voila  en  quoi  doit  cônflfter  le  droit  négadf 

C[ù'ils  réclament,  &  qui,  félon  m6î,  leur  ap!- 

J)artient  inconteflablementé 

Maïs  le  fécond  objet  ayant  HO  principe  tout 


LETTRE.  ^'r 

a 

r  '  ■  •  . 

oppofé  doit  être  envîfàgé  bien  dîflPércmment: 

Il  ne  s'agît  pa[s  ici  d'innover  ;  il  s'agît ,  au  con- 
traire, d'empêcher  qu'on  n'innove  ;  il  s'agit 
)  .        .   .  • 

non  d'établir  de  nouvelles  Loix ,  mais  de  main* 

'.••'■  '       ' 

tenir  les  anciennes.  Quand  les  chofes  tendent 
au  changement  par  leur  pente,  il  faut  fans  cef- 

'  ■  ;  • 

fe  de  nouveaux  foins  pour  les  arrêter.    Voila 

'  ■        '     •'       •  •      •  ' 

ce  que  les  Citoyens  &  Bourgeois ,  qui  ont  un 

•  ■  •        .      ■  '."       " 

a  grand  intérêt  à  prévenir  tout  changement, 

fe  propofent  dans  les  jdaintes  dont  parle  !'£• 
dit.  Le  LégiAateur  exiilant  toujours  voit  Téf- 
fet  ou  l'abus  de  Tes  Loix:  il  voit  fi  elles  font 

iuivies  ou  tranfgreiTées ,  interprétées  de  bonne 

♦  •      ■  •  • 
ou  de  mauvaife  foi  ;  il  y  veille ,  il  y  doit  veil- 

»        .         '         . 

1er  ;  cela  eft  de  fon  droit ,  de  fon  devoir ,  mê- 
me de  fon  ferment.  C'eft  ce  devoir  qu'il  rem- 
plit dans  les  Répréfentations ,  c'eft  ce  droit  ^ 

■ 

alors ,  qu'il  exerce  y  &  il  feroît  contre  toute 
iàifoh ,  il  feroît  même  îndéceqt ,  de  vouloir 

H  a 


9Z        HUITIEME 

étendre  le  droit  négatif  du  Confeil  à  cet  ot>* 

jet- là. 

Cela  feroit  contre  toute  raifort  quant  au  Lé« 
gillaceur;  parce  qu'alors  toute  la  folemnité  des 
Loi»  feroît  vàîne  &. ridicule^  &  que  réellement 
l'Etat  n'auroic  point  d'autre  Loi  que  la  vdoiv 
té  du  petit  Confeil,  maître  abfolu  de  négliger , 
méprifer ,  violer ,  tourner  à  fa  mode  les  règles 
qui  lui  feroient  prefcrkes,&  de  prononcer  noir 
où  la  Loi  dirôit  blanc  ^  fans  en  répondre  à  per- 
fonne.   A  quoi  bon  s'afFembler  folemnellement 
dans  le  Temple  de  Saint  Pierre,  pour  donner 
aux  Ëdits  luie  fanéliôn  fans  effet  ;  pour  dire  au 
petit  Confeil:  MeJJîeurs  yVoila  le  Corps  de  Lois 
que  nous  étâblijfons  dans  VEîat ,  &,  dont  nous 
vous  rendons  les  dépofitakes ,  pur  vous  y  sonfof- 
mer  quand  vous  le  jugerez  à  propos^  ^  pour  k 
tranfgrtjjer  quand  il  vous  plaira. 
Cela  feroit  contre  la  raifbn  qiiant  aux  Ré* 


LETTRE.  93 

■ 

prëlêntatîons.  Parce  qu'alors  le  droit  ftipulé 
par  un  Arrîcle- exprès  de  FEdic  de  1707  & 
confirmé  par  un  Article  exprès  de  TEdît  de 
1738-  feroîc  un  droit  illufpîre  &  fallacieux, 
qui  ne  fignifieroit  que  la  liberté  de  iè  plaindre 
inutilement  quand  on  efl:  vexé;  liberté  qui, 
n'ayant  jamais  été  dîfputée  à  perfonne,  efl 
ridicule  à  établir  par  la  Loi. 

Enfin  cela  feroît  indécent  en  ce  que  par 
une  telle  fuppofition  la  probité  des  Médiateurs 
fcrbit  outragée ,  que  ce  fêroit  prendre  vos  Ma- 
giftmts  pour  des  fourbes  &  vos  Bourgeois 
pour  des  dupes  d'avoir  négocié  traité  tranfigé 
avec  tant  d'appareil  pour  mettre  une  des  Par- 
tîdî  à  l'entière  difcrétion  de  l'autre ,  &  d'avoir 
compenfé  les  conceflîons  les  plus  fortes  par 
des . /Ûretés  qui  ne  fignîfieroient  rien. 

Mois ,:  (£fenc  ^  ces  Meflîèùrs ,  les  termes^  de 
TEdit  font  formels  :  //  ne  fera  rien  porté  au 

H3 


h 


94      H  V  I   T  ;  ï:  M.  ^. 


f  > 


Confeil  général  qu'il  r!ait  été  traité  î^  approuvé ^      y 

*  ■      •  •      .         ^ 

d'abord  dans  le  Confeil  des  Vingt-cinq ,  puis  dans 

cehii  des  Deux  -  Cents. 

Premièrement  qu  eft-ce  que  cela  prouve  au- 

tre  chofê  dans  la  queftîon  préfente ,  (î  ce  n'eft 

yne  marche  réglée  &  conforme  à  l'Ordre,  ô? 

.  Tobligation  dans  les  Confèi!^  inférieurs  de  traî- 

ter  &  approuver  préalablement  ce  qui  doit 

être  porté  au  Confeil  général  ?    Les  Confcîls 

ne  .font- ils  pas  tenus  cJ'?ipprouver  ce  qui  eft. 

prefcritpar  la  Loi?  Quoi!. fi  les  Confèîls  n'ap- 

prouvoient  pas  qu'on  procédât  à  Fëleélbn  des 

* 

Syndics,  n'y  devroit-on  plus  procéder ,' &  fi. 

-    '^  -.•■'"  '     ■•.  '     '• 

}es  fujets  qu'ils  propofeçt  font  rejettes ,  ne 

..  -  •        ■        '.    ■ 

ibnt'ils  pas  contraints  d'approuver  qu'il  en  foit 
pro[X)fé  d'autres  ? 

4  » 

,    '  D'ailleurs ,  qui  ne  voit  que  ce  droit  d'ap- 
prouver  &  de  rejetter ,  pris  dans  fon  iens 

."  •  • 

abfolu  s'applique  feulement  aux  propoficious 


Lx  E    T    T    R    E.  95 

qpti  renferaient  des  nouveautés*,  &  non  à  celles 
qui  n'ont  pour  obj,ec  tpç  le  maintien  de.  ce 
qui  efl:  établi  ?  Trouvez-vous  du  bon  iens  à 
fappofer  qu'il  faille  une-  approbation  nouvelle 
pour  répara  ks  tranrgreffions.  d'une  ancienne 
Loi  ?  Danà  Fapprobatioii^  donnée  à  cette  Loi 
lorfqu'elle  fut  pronuilguée.  Com  contenues  tou* 
%fis  celles,  qui  &  rapparcetst  à  fon  exécution; 
Quand  :les  Cônfeils.  approuvèrent  que  cette  Lof 
feroit  établie  ,  î!s,.  approuvèrent  qu'elle. feroit 
obfervée.,  par  cooféquent  qu'cm  en  puniroit 
les  tranlgreiTcsurs  ;  &  quand: les  Bourgeois  (^ns 
leurs  plaintea  fe  bornent  à  demander  répara^- 
tîon  fans  punition,  Ton  veut  qu'une  telle  pro- 
^(îtion  ait  de  nouveau  befoin  d'être  approu^ 
vée  ?  Mcmûeur ,  iî  ce  n'efi:  pas  là  fe  moquer 
4es  geiB  ,  dites- moi  comment  on  peut  s'en 
Baoqnét ?  . 

.  '  Toute  ia  di£içulté  confîfle  donc  ici^dans^lf. 

II  4 


pis        HUITIEME 

feule  quedion  de  fait.  La  Loi  a^t- elle  été 
tranfgreflee ,  ou  ne  Ta-t-cUe  pas  été  ?  Les  Ci- 
toyens &  Bourgeois  difent  qu'elle  Ta  été  ;  le» 
Magiftrats  le  nient.  Or  voyez,  je  vous  pr4e, 
(1  Ton  peut  rien  concevoir  de  moins  raifonoa* 
ble  en  pareil  cas  que  ce  droit  négatif  qu'ils 
s'attribuent?  On  leur  dit,  vous  avez  tranA 
greffé  la  Loi.  Us  répondent  ;  nous  ne  l'avons 
pas  tranfgreifée;  &,  devenus  ainH  juges  fuprê- 
mes  dans  leur  propre  caofe ,  les  voila  juflifiés 
contre  l'évidence  par  leur  feule  affintoatioiL 
Vous  me  demanderez  fi  je  prétends  que 
riffirtnation  contraire  foit  toujoua  l'evideBce?. 
Je  pe'  dis  pas  cela  ;  j^  dis  que  quand*  elle  le 
feroir  vos  Magiflrats  ne  s'en  tiendroient  pas 
moins  contré  révidënoe  à  leur  prétendu  droit 
négatif.  Le  <^  efl;  aâoellement  foas  vos 
yeuxi  &  pour  qui  doit  être  ici  le  préjugé  le 
plus  légitime  ?    £{1-1L  croyable;  eft-il  naturel 


\ 

y 


LETTRE.  97 

que  des  particuliers  fans  pouvoir  fans  autorité 
viennent  dire  à  leurs  Magiftrats  qui  peuvent 
être  demain  leurs  Juges  ;  vm^ .  mez  fait  une 
injujikc ,  lorfque  cela  .n'eft  pas  vrai  ?  Que 
peuvent  efpérer  ces  particuliers  d'une  démar-- 
che  aufïï  folle,  quand  même  ils  feroient  flirs 
de  l'impunité  ?  Peuvent  -  ils  peniêr  que  des 
Magiftrats  fî  hautains  jufques  dans  leurs  torts , 
iront  convenir  fotxement  des  torts  mêmes  qu'ils 
n'auroient  pas?  Au  contraire,  y  a-t-il  rien  de 
plus  naturel  que  de  nier  les  fautes  qu'on  a  faî- 
tes?  N'a-t-on  pas  intérêt  de  lesfoutenir,  & 
n'eft-on  pas  toujours  tenté  de  le  faire  loifqu'on 
le  peut  impunément  &  qu'on  a  h  force  en 
main  ?  Quand  le  foîble  &  le  fort  ont  enfem- 
ble  quelque  dij|)ate  3  ce  qui  n'arrive  gueres 
qu'au  détriment  du  {Nremier,  le  feiitimeiM;  pat 
cela  ièul  le  plusprobaUe  dt  toujours  91e  c'efl: 
le  plus  fort  qui  ?  tort. 

H  5 


98        H    U    I    T    I    E;   M:    E 

Les  probabilités ,  je  le  fcUS ,  ne  font  pas  dei 
Çreures  :.  Mais  dans  des  faits  notoires  corn- 
Çarés  aux  Loix,  Ibjrfque  nombre.de  Citoyens 
affirment  qu'il  y  a  injuftice  ,  &  que  le  Ma- 
giftrat  acciifé  de  cette  jnjwftice  affirme  qui! 
n'y  en  a  pas ,  qui.  peut .  être  jgge ,  fi  ce  n>(l 
le  public-:  m&mi\  &^  ou  trouver  ce  public 
jnflxuii;  à .  Genève  fi:  ce  a'eft  dafts  le  Coofâl 
.général'  <QV){y>fô  des  deux  partis  ? 

> 

.  11  n'y.  a  ppipt. d'Etat  aw'.niQncJe  <hi  le  fu- 
jet  lés^é'parr  un  Magîftmi  iiQji^e  né  puij[&' 
par  45[u«lqae  *oye  pwrter.  ià^lainte  au  Sou- 
yeraiin  ,.  &\là  ÇraSntç  que:  cette  refTource  m- 
Ipirç  eft  tfn-fflcîâ.  qui  contient  b«eaticpup  d'i- 
lûquités^.  En  France  mênle^  dû.  l'attachement 
lies  Parkihenà  :^iîx  Lqîx^  «fl:  e»rêa*e  >  Ja  vo- 
•ye  judidaire'^.  efl:  .ouverte  contre  .eux  en  plur 
iieurs.  cas  par  4cs:  requêtes  ^  caflationd'Ai^ 
r6t.    Les  Genevois  font  privés  d'an  pareil 


'    t 
I 


I^    E    T    T    R    E.  99 

avantage;  la  Partie  condannée  par  les  Con* 
feils  ne  peut  plus*,   en  tjuelque  cas  que  ce 

puifle  être  ,   avoir  aucun  recours  au  Souve^ 

,  ■         .,  »    ■  • 

raîn:  mais  ce  qu'un  particulier  ne  peut  faire 

pour  fon  intérêt  privé,  tous  peuvent  le  faî* 

rc  pour  rinterêt   cotamiun:  car  toute  tranf- 

^eflion .  des  Laix  étant  une  atteinte  portée  à 

la   liberté  devient  une  affaire  publique  ,    & 

^uand  la  voix  publique  s*éleve,  la  plainte  doit 

être  portée  au  Souverain,    H 'n'y.aurx^it  fans 

cela  ni  Parlement  ni  Sénat  ni  Tribunal  fur  la 

terre  qui  ne  fut  armé  du  funefte'  pouvoir 

qu'oie  ufurper  votre  Magiftrat  ;-  il  n'y  auroit 

point  dans  aucun  Etat  de  fort  aafli  dur  que 

le  vôtre.    Vous  m'avouerez  que  ce  Teroit  là 

«ne  étrange  liberté! 

Le  droit  de  Répréfentaîion  eft  intimement 
lié  à  votre  conftitution  :  il  èft  le  feul  moyen 
pdfible  d'unir  la  liberté  à  la  fubordination , 


loo       HUITIEME 

&  de  maintenir  le  Magifbrat  dans  la  dépendati- 
ce  des  Loix  fans  altérer  fon  autorité  fur  le  peu- 
ple. Si  les  plaintes  font  clairement  fondées  »  û 
les  raifons  font  palpables,  on  doit  préfiunêr 
le  Confeîl  aflez  équitable  pour  y  déférer.  S'il 
ne  rétoit  pas,  ou  que  les  griefs  n'eufiènt  pas 
ce  degré  d'évidence  qui  les  met  au  deûus  dii 
dDute,  le  cas  changeroit,  &  ce  feroit  alors  à 
k  volonté  générale  de  décider  ;  car  dans  vo- 

« 

cre  Etat  cette  volonté  efl:  le  Juge  fuprême  & 
Tunique  Souverain.  Or  comme  dès  le  con>- 
mencemeot  de  la  République  cette  volonté  a- 
Toit  toujours  des  moyens  de  fe  faire  entendre 
&  que  ces  moyens  tenoieht  à  votre  ConfUtu^ 
lion,  il  s'enfuît  que  l'Edît  de  1707  fondé 
tfiailleurs  fur  un  droit  immémorial  &  fur  Tula- 
ge  confiant  de  ce  droit ,  n'avoit  pas  befoia  de 
plus  grande  explication. 

Les  Médiateurs  ayant  eu  pour  maxime  fott- 


LETTRE. 


lOl 


damentale  de  s'écarter  des  anciens  Edics  le 
moins. qu'il  étoit  poflible,  ont  laifle  cet  Arti- 
de  tel  qu'il  étoit  auparavant  »  &  même  y  ont 
renvoyé.  Aînfî  par  le  Règlement  de  la  Média- 
tion votre  droit  fur  ce  point  eft  demeuré  par- 
faitement le  même ,  puifque  l'Article  qui  le 
pofe  efl:  rappelle  tout  entier. 

Mais  les  Médiateurs  n'ont  pas  vu  que  jes 
changemens  qu'ils  éioient  forcés  de  faire  à 
d'autres  Articles  les  obligeoient^  pour  être 
conféquens ,  d'éclaircir  celui-ci^  &  d'y  ajou* 
ter  de  nouvelles  explications  que  leur  travail 
rendoit  néceflàires.  L'effet  des  Répréfenta- 
tions  des  particuliers  négligée;  efl:  de  devenir 
enfin  la  voix  du  public  ôt  d'obvier  ainfî  au 
déni  de  juftice.  Cette  transformation  étoit  alors 
légitime  &  conforme  à  la  Loi  fondamentale, 
qiii,  par  tout  pays,  arme  en  dernier  reifort 
le  Souverain  de  la  force  publique  pour  l'exé- 
Éution  de  fes  volontés. 


lOt 


HUITIEME 


Les  MédiàtecM^s  Ji*ont  pas  fuppofé  ce  déni 
de  juftice.  L'événement  prouve  qu'ils  l'ont  du 
fuppofer.  Pour  ^  afTurer  la  tranquillité  publique 
ils  ont  jugé  à  propos  de  féparer  du  Droit  ht 
puifTance  ,  &  de  fupprimer  même  les  afTem* 
bJées  &  députations  pacifiques  de  la  bourgeoi- 

/  ,  •  • 

fie;  mais  puifqu'ils  lui  ont  d'ailleurs  confirmé 
fon  ^oi(  s;  ils  dévoient  lui  fournir  dans  la  for- 
me  de  l'inditution  d'autres  moyens  de  le  faire 
vabir  y  à  1^  place  de  ceux  qu'ils  lui  ôtoient  : 
ils  n^  rpnt  pas  fuit.  Leur  ouvrage  à  cet  égard 
èfl  donc  relié  défeâueirs  ;  car  le  droit  étant 
demeuré  I0  .  même  ,  doit  toujours  avoir  le$ 
toêmes  effets. 

...  •  ,    .  .       .  ....  , 

Aufli  voyez  avec  quel  art  vosMagiftrats  le 
prévalent  de  l'oubli  des  Médiateurs  !  En  quel- 

i 

,qae  nombre  que  vous  puiffiez  être  ils  ne  v6- 
yent  plus  en  vous  que  .des  particuliers,  & 
depuis  qu'il  vous  a  été  interdit  de  vous  monh 


LETTRE.  io3 

trer  en  corps  ils  regardent  ce  corps  comme 
anéanti  :  il  ne  Teft  pas  toutefois  ,  puifqu  il 
conferve  tous  les  droits,  tous  les  privilèges; 
&  qu'il  fait  toujours  la  principale  partie  de  ' 
l'Etat  &  du  I^giflateur.  Ils  partent  de  cet- 
te  fuppofitîon  fàufle  pour  vous  faire  mille 
difficultés  chimériques  fur  l'autorité  qui  peut 
les  obliger  d'affembler  le  Confeîl  général,  il 
n'y  a  point  d'autorité  qui  le  puifFe  hors  cel- 
le  des  Loix ,  quand  ils  les  obfervent  :  mais 
l'autorité  de  la  Loi  qu'ils  tranfgreflent  retour»  . 
ne  au  Légiflateur  ;  &  n'ofant  nier  tout-à-fait 
qu'en  pareil  cas  cette  autorité  ne  foit  dans 
le  plus  grand  nombre ,  ils  raflemblent  leurs 
ôbjefUons  fur  les  moyens  de  le  conftater.  Ces 
moyens  feront  toujours  faciles  fitôt  qu'ils  fc- 
toht  permis,  &  ils  feront  fins  inconvénient, 
puîfqu'il  eft  aifé  d'en  prévenir  les'  abus. 
II  ne  s'agiflbit  là  ci  de  tumultes  ni  de 


104       HUITIEME 

violence  :  il  ne  s'agiilbic  point  de  ces  reflbur- 
ce9  quelquefois  nécefTaires  mais  toujours  ter- 
ribles ,  qu'on  vous  a  très  fagement  interdis 
tes;  non  que  vous  en  ayez  jamais  abufô, 
puifqu'au  contraire  vous  n'en  ufates  jamais 
qu'à  la  dernière  extrémité,  feulement  pour 
votre  défenfe,  &  toujours  avec  une  modéra* 
lion  qui  peut-être  eut  dû  vous  conferver  le 
droit  des  armes,  fi  quelque  peuple  eut  pu 
l'avoir  fans  danger.  Toutefois  je  bénirai  le 
Ciel,  quoi  qu'il  arrive,  de  ce  qu'on  n'en  ver- 
ra plus  l'afireux  appareil  au  milieu  de  vous. 
Tout  eji  permis  dans  les  maux  extrêmes ,  dit 
plufieurs  fois  l'Auteur  des  Lettres.  Cela  fut* 
il  vrai  tout  ne  feroit  pas  expédient.  Quand 
l'excès  de  la  Tyrannie  met  celui  qui  la  fbu& 
fre  au  deflus  des  Loix ,  encore  faut  -  il  que 
ce  qu'il  tente  pour  la  détruire  lui  lailTe  quel- 
que elpoir  d'y  réuflîr,  Voudrojt-on  vous  ré- 
duire 


LETTRE.  X03i 

éiXïte  à  cette  extrémité  ?  je.  ne  pais  je  croi- 
re, &  quand  vous  y  feriez,  je  penfe  encore 
moins  qu'aucune  voye  de  fait  put  jamais 
vous  en  tîren  Dans  votre  pofitîon  toute  fauf* 
fe  démarche  efl  fatale ,  tout  ce  qui  vous  in^ 

duit  à  la  faire  ed  un  piège ,  &  fufliez-voui 
un  infbnt  les  maîtres ,  en  moins  de  quinze 
jours  vous  feriez  écrafés  pour  jamais.  Quoi- 
que faflent  vos  Magîftrats,  quoique  dife  l'Au- 
teur des  Lettres ,  les  moyens  violens  ne  con- 
viennent point  à  la  caufe  jude  :  fans  croire 
qu'on  veuille  vous  forcer  à  les  prendre,-  je 

■s 

crois  qu'on  vous  les  verçoit  prendre  avec 
plaiiir  ;  &  je  crois  qu'on  ne  doit  pas  voua 
faire  envifager  commç  une  refTource  ce  qui 
ne  peut  que  vous  ôter  toutes  les  autres.  La 
juilice  &  les  Loix  font  pour  vous  ;  ces  ap- 
puis, je  le  fais,  font  bien  foibles  contre  le 
crédit  &  l'intrigue;  mais  ils  font  les  feula 
Partie  IL  1 


166       H    Ù    I    t    I    E    Kî    E 

qui  vous  reftént:  tenez- vous-y  julqu'â  la  fin; 

Ehi  comment  approûveroîsje  qu*on  vou-* 
hit  ttoubler  la  paix  civile  pour  quelque  inté- 
rêt que  ce  fut,  moi  qui  lui  facrifiai  le  plus 
cher  de  tous  les  miens?  Vous  le  favez.  Mon- 
fieur,  j'étois-défiré,  follicîcé;  je  n'avoîs  qu'à 
paroître;  mes  droits  étoient  foutenas,  pcut^ 
être  mes  affronts  réparés.  Mapréfence  eut 
du  moins  intrigué  mes  perfécuteurs ,  &  jé- 
tois  dans  une  de^ces  pofitions  enviées,  dont 
quiconque  âixné  à  faire  un  rolle  fè  prévaut 
toujours  avidement.  J'ai  préféré  l'exil  peqié- 
tuel  de  ma  patrie }  j'ai  rôioacé  à  tout,  mè^ 
toe  à  refpérance  i  plutôt  que  d'expofer  Iz 
tranquillité  publique  :  j'ai  mérité  d*étie  cra 
fincere ,  lorfque  je  parle  cti  fa  faveur. 

Mais  pourquoi  fupprimer  des  ailëmblées 
paiiibies  &  purement  civiles ,  qui  ne  pou- 
voient  avoir  qu'un  objet  légitime  »  puifqu'elle» 


X  TS    T    T    R    EL  toy 

Teftoient  toujours  dans  la  fubordination  due  aia 
Magiftrat  ?  Pourquoi ,  laîffant  à  la  Bourgeoî- 
ÛQ  le  droit  de  faire  des^  K^réfentatîons ,  ni 
lés  lui  pas  laifler  faire  avec  Tordre  &  Fauthen- 
licite  convenables  ?  Pourquoi  lui  ôter  les  mo- 
yens d'en  défibérer  entre  elle ,  & ,  pour  éviter 
des  afTemblées  trq>  nônsibreufes ,  au  moins  par 
fes  députés?  Peut«on  riài  imisiginer  de  nlîeuk 
rég^é  y  de  plus  décent,  de  plus  convenable  que 
les  aflèmblées  par.  compagnies  &  la  forme  dé 
traiter  qu*a  fuivi  la  Bourgeoifîe  pendant  qu'el* 
fe  a  été  la  m'aîtreffe  de  TJEtat  ?     N^eft-il  pas 
d'une  pojice  mieux  enteddue  de  voir  monter  h 
FHôtel-de- Ville  une  trentaine  de  députés  au 
nom  de  tous  leurs  Concitoyens,  que  de  vok 
toute  une  Bourgeoifîe  y  monter  en  foule  ;  cha^ 
eun  ayant  fa.  dédaration  à  faibe ,  &  nui  ne 
pouvant  parler  que  pour  foi  ?  Vous  avez  vu  ^ 
Monfîeur^  les  Répréfentans  en  grand  homlifc, 

I  2 


.    I 


io8        H    U    I    T    I    E    M,  E 

forcés  de  fe  dîvifer  par  pelotons  pour  ne  p» 
Élire  tumulte  &  cohue ,  venir  fëparément  par 
bandes  de  trente  ou  quarante  y  &  mettre  dans 
leur  démarche  encore  plus  de  bienféançe  &  de 
nàiodeflie  qu'il  ne  leur  en  étoit  prefcrit  par  la 
Loi.  Mais  tel  eft  Fefprit  de  h  Bourgeoifie  de 
Genève  ;  toujours  plutôt  en  deçà  qu'en  delà 
de  Tes  droits ,  elle'  ell  ferme  quelquefois ,  elle 
n'efl:  jamais  fôditieufe.  Toujours  la  Loi  dans 
le  cœur^  toujours  le  refpeâ  du  Magiftrat  fois 
les  yeux,  dans  lé  tems  même  où  la  {dus  vive 
indignation  devoiti animer  fa  colère,  &  où 
rien  ne  Tempêchoit  de  la  contenter ,  elle  ne 
s'y  livra  jamais.  £lle.fut  jufte  étant'  la  plus 
forte;  même  elle  fut  pardonner.  En  eut -on 
pu  dire  autant  de  fes  opprefFeors  ?  On  fait 
le  fort  qu'ils  lui  firent  éprouver  autrefois  ;  on 
fait  celui  qu'ils  lui  préparoîent  encore. 
Tels  font  les  hommes  vraiment  dignes  de 


LETTRE.  109 

h  liberté  parce  qu'ils  n'entabafènt  jamais  , 

t 

qu'on  charge  pourtant  de  liens  &  d'entraves 
comme  la  plus  vile  populace.  Tels  font  les 
Citoyens ,  les  membres  du  Souverain  qu'on 
traite  en  fujets,  &  plus  mal  que  des  fujets 
mêmes  ;  puifque  dans  les  Gouvernemens  les 
plusL  abfblus  on  permet  des  aflemblées  de 
communautés  qui  ne  font  préfidées  d'aucun 
Magîftrat. 

Jamais,  comme  qu'on  s'y  prenne,  des  ré- 
glemens  contradiftoîres  ne  pourront  être  ob- 
fervés  à  la  fois.  On  permet  on  autorife  le 
droit  de  Répréfentation ,  &  l'on  reproche  aux 
Répréfentans  de  manquer  de  confidence  en  les 
empêchant  d'en  avoir.  Cela  n'efl:  pas  jufte ,  & 

quand  on  vQus  met ,  hors  d'état  de  faire  en 

corps  vos  démarches,  il  ne  faut  pas  vous  ob- 
jefter  que  vous  n'êtes  que  des  particuliers. 

0 

Comment  ne  voit -on  point  que  fi  le  poids 

13 


XiQ      HUITIEME 

^es  Rcj)réfentatîons  dépend  du  nombre  des 
Ig^épréfentans ,  quand,  çlles  font  générales  il  eft. 
ipipoflible  de  les  f^iire  un  à  un  ;  &  quel .  ne, 
feroit  pas  Tembarra^  d^i  Magiftrat  s'il  avoît  à 
lire  lucceflîvement  les  Mémoires  ou  à  écouter, 
Ijcs  difcours  d'un  millier  d'honimes ,  comme  ili. 
y  efl.  obligé  par  .te  l^îj. 

Voici  donc  la  facile  folutîon  de  cette  gran- 
de difBculté  que  l'Auteur  des  Lettres  fait  va- 
bir  comtpç  infoluble  (x).  Que  lorfque  h  Ma- 
gi  [bat  n'aura  eu  nul  égard  aux  plaintes  des 
particuliers  portées  en  I^épréfentations,  il  .perr 
mette  TafTemblée  des  Compagnies  boorgeoi-. 
fgs  î  qu'i]  la  permette  féparément  en  dçs  lieux 
en  des  tems  difFqrens  ;  que  celles  de  ces  Cqm- 
pagnies  qui  voudront  à  la  pluralité  des  iliSra- 

ges  appuyer  les  Répréfentations   le  faflent  par 
« 
Ijars  Députés.  Qu's^lors  le  ijombre  des  Dépu- 


LETTRE.  iif 

I 

tés  répréfentans  fe  compte  ;  leur  nombne  toul 
eft  fixe  ;  on  verra  bientôt  (i  leurs  vœux  font 
pu  ne  font  pa$  ceux  db   TEtat. 

Ceci  ne  fignifie  pas,  prenez-y  bien- garde ^ 

que  ces  affemblées  partielles  puiflent  avoir  a^- 

cune  autorité ,  fi  ce  n'efl:  de  faire  entendre 

l^ur  fentimcnt  fur  la.  matière  des  Répréfentar 

tjons.   Elles  n'ajuront ,  convoie  affemblces  au,- 

torifées  pour  ce  feul  ca»,  nul  autre  droit  que 

celui  des  particuliers  ;  leur  objet  n'efi:  pas  de 

changer  la  Loi  mais  de  jug-er.fi  elle  efl:  fuivie, 

n.i  de  redreiFcr  des .  griefs  mais  de  montrer  Iç 

befoîn  d'y  pourvoir  :  leur  avis ,  fut-il  unanime , 

ne  fera  jamais  qu'une  Répréfentation.    On 

faura  feulement  par  là  fi. cette  Répréfentation 

mérite  qu'on  y  défère ,.  foit  pour,  affembler  le 

Çonfeil  général  fi  les  Magiflrats  l'approuvent, 

foit  pour  s'en  difpenfer  s'ils  l'aiment  mieux , 

ea.faifant  droit  par  eux-mêmes  fur,  les  juf- 

I4 


ïi*        HUITIEME 

tes  plaintes  des  Citoyens  &  Bourgeois, 

Cette  voyeeft  fimple,  naturelle,  lÛre,  elte 
efl  fans  inconvénient.  Ce  n'efl:  pas  même 
une  Loi  nouvelle  à  faire ,  c'efl  feulement  un 
Article  à  révoquer  pour  ce  feul  cas.  Cepen- 
dant fi  elle  effraye  encore  trop  vos  MagM"- 
trats ,  il  en  refte  une  autre  non  moins  fad- 
le,  &  qui  n'eft  pas  plus  nouvelle:  c'eft  de 
rétablir  les  Confeils  généraux  périodiques ,  & 
d'en  borner  l'objet  -aux  plaintes  mifes  en  Ré* 
préfentations  durant  flntervalle  écoulé  de  l'un 
à  l'autre ,  fans  qu'il  foit  permis  d'y  porter  au- 
cune  autre  queflion*  Ces  aflemblées,  qui  par 
une  diftinôion  très  importante  (y)  ji'auroiem 
pas  l'autorité  du  Souverain  mais  du  Magiftrat 
fuprême ,  loin  de  pouvoir  rien  innover  ne 
pourroient  qu'empêcher  toute  innovation  de 


im^Ê^mmirm^mmmm^^mmmm 


(y)  Voyez  le  Contracl  Social,  l».  III.  Chap,  17, 


L    E    T   T    R    E.  113 

la  part  des  Confeils,  &  remettre  toutes  cho- 
ies dans  Tordre  de  la  Légiflatîon ,  dont  le 
Corps  dépofîtaîre  de  la  force  publique  peut 
maintenant  s'écarter  fans  gêne  autant  qu'il  lui 
plait.  En  forte  que ,  pour  faire  tomber  ces 
affemblécs  d'elles  mêmes ,  les  Magiflxats  n'au-  ' 
roient  qu'à  fuivre  exaélement  les  Loi:s  :  car  la 
convocation  d'un  Confeil  général  feroit  inutile 
&  ridicule  lorfqu'on  n'auroît  rien  à  y  porter  ; 
&  il  y  a  grande  apparence  que  c'efl  ainfî  que 
ie  perdit  Tufage  des  Confeils  généraux  pério- 
diques au  feizieme  fléde ,  comme  il  a  été  dit 
ci  -  devant. 

Ce  fut  dans  la  vue  que  je  viens  d'expofer* 
qu'on  les  rétablit  en  1767 ,  &  cette  vieille 
queftion  renouvellée  aujourd'hui  fut  décidée 
alors  par  le  fait  même  de  trois  Confeils  géné- 
raux confécutifs ,  au  dernier  defquels  paflà 
l'Article  concernant  le  droit  de  Répréfenta- 

I5 


XI4.       HUITIEME 

fl 

tion.  Ce  droit  n'étoît  pas  contefté  mais  éhàti 
Jes  Magiftrats  n'ofoient  difconvenir  que  lorf^ 
qu'ils  refufQJent,  de  fatisfaire  aux  plaintes  d; 
]^  Qourgeoifle  la  queftign  ne  dut  être  portée 
en  Confeil  général  ;  mais  çopmc  il  appartienç 
à,  eux  feuls  de  le  convoquer  y  ils  prétendoient 
fous  ce.  prétexte  pouvoir  en  digérer  la  tmfi^ 
à  leur  volonté ,  &  comptoient  lafler  à  force  de; 
délais  la  confiance  de  la  Bourgeoifie.  Toute- 
Cois  fon  droit  fut  enfin  fi  bien  "reconnu  quoq 
fit  dès  le  9  Avril  convoquer  raffemblée  géaé- 
JD^le  pour  le  5  de  Mai,  afin^  dit  lé  Placard, tff 
lever  par  ce  moyen  ks  injinuatîons  qui  ont  éU 
répandues  que  la  convocation  en  pourvoit  éire 
iludie  (^  renvoyée  e^ore  loin. 

Et  qu'on  ne  di(è  pas  que  cette  convocation 
fut  forcée  par  quelque  a£le  de  violence  ou  par 
quelque  tumulte  tendant  à  féditîon ,  puifqap 
tQi)t  jfe  craitoit  alors  par  députation,  comme  le 


LETTRE.  xij? 

Cçnfeîl  Favok  defiré  y  &  que  jamais  les.  Ci- 
toyens &  Bourgeois  ne  furent  plus  paifibles; 
d^ns  leurs  aiTemblées,  é^icant  de  le$  faire  trop 
nombreufes  ^  de  leur  doniier  un  ajr  impqr 
iànt.    Us  pouffèrent  ii^êtne  fi  loin  la  déceur 

ce  &,  j'ofe  dire,  Ja  dignité,  quç.ccu^  d'entre, 
eux  qui  portoîent  habituellement  Tépée  la  po- 
rtent toiijour?  pour  y  afifler  (z).  Ce  ne  fut 
qu'après  que  tout  fut  fait,  c'eCt -à-dire  à  la  fia 
du  troifieme  Confi^il  générât,  qu'il  y  eut  un  cri 
d'armes  caufé  par  la  faute  du^Confeil,  qui  eut. 
rimprudcnce  d'envoyer  trois  Compagnies  dç  la 

garnifon  la  bayonnete  zfi  bout  du  fufîl,  pouc> 

■        ■  f    ■■■  - 

(z)  lU  eurent  la  même  attention  en  1734.  dans. 
leurs  Répréfcntationè  du  4  Mars ,  appuyées  de  mil- 
le ou  ^louze  cents  Citoyens  oU  Bourgeois  en  per- 
fonnes  9  dont  pas  un  feu!  n'avoit  Tépée  au  côté. 
Ces  foins,  qui  paroitroienc  minutieux  daui  tout  au» 
tre  Etat ,  ne  le  font  pas  dans  une  Démocratie  ,  & 
càradlérifent  peut-être  mieux  un  peuple  que  des  traits 
plus  éclatansv 


ii5       HUITIEME 

forcer  deux  ou  trois  cens  Citoyens  encore  aC- 
femblés  à  Saint  Pierre. 

Ces  Gonfeils  périodiques  rétablis  en  1707. 
forent  révoqués  cinq  ans  après  ;  mais  par  quels 
moyens  &  dans  quelles  circonftances  ?  Un 
court  examen  de  cet  Edit  de  17 12  nous 
fera  juger  de  fa  validité. 

Premièrement  le  Peuple  eflprayé  par  les  exé- 
cutîons  &  profcriptions  récentes  n'avoit  ni  li- 
berté ni  ilketé  ;  il  ne  pouvbit  plus  compter 
fur  rien  après  la  frauduleufe  amniftie  qu'on 
employa  pour  le  furpreridre.  Il  croyojt  à  cha- 
que  inflant  revoir  à  Tes  portes  les  SuifTes  qui 
fervirent  d'archers  à  ces  fanglantes  exécutions. 
JVlal  revenu  d'un  effroi  que  le  début  de  l'Edit 
étoit  très  propre  à  réveiller ,  il  eut  tout  accor- 
dé  par  la  feule  crainte;  il  fentoit  bien  qu'on 
ne  l'aiTembloit  pas  pour  donner  la  Loi  mais 
pour  la  recevoir. 

Les  motifs  de  cette  révocation,  fondés  for 


_  j 


LETTRE.         117 

les  dangers  des  Confeils  généraux  périodiques, 
font  d'une  abfurdké  palpable  à  qui  connoit  le 
moins  du  monde  l'efprit  de  votre  Conflitution 
&  celui  de  votre  Bourgeoîfie.  On  allègue  les 
tems  de  pefle  de  fatnine  &  de  guerre,  comme 
fa  la  faniîne  ou  la  guerre  étoient  un  obflacle  à 
la  tenue  d*un  Confeil,  &  quant  à  la  pefle, 
vous  m'avouerez  que  c*eft  prendre  fes  précau- 
tions de  loin.  On  s'efiraye  de  Tennemî,  des 
mal -intentionnés,  des  cabales;  jamais  on  ne 
vit  des  gens  fi  timides  ;  l'expérience  du  paflë 
devoit  les  raiTurer:  Les  fréquens  Conleils  gé- 
néraux ont  été  dans  les  tems  les  plus  orageux 
le  falut  de  la  République,  comme  il  fera  mon- 
tré ci-après ,  &  jamais  on  n'y  a  pris  que  des 
réfolutions  fages  &  courageufes.  On  -foutient 
ces  alTemblées  contraires  à  la  Conflitution  , 
clont  elles  font  le  plus  ferme  appui  ;  on  lès  die 
contraires  aux  Edits,  &  elles  font  établies  par 


^ti«        H    U   r  T    I    E    M    E 

les  £dits;  on  les  accufe  dë.nbavéautë,  &  eU^ 
fbnt  auffi  anciennes  que  la.Légiilation.   U  n'y 
a  pas  une  l^ne  dans,  ce  pVéandbuIe  qui  ne  foie 
iitle  fàailbcé  où  une  extrav2(gance ,  &  c'efl;  fiir 
ce  bel  capoté  que  la  révocation  pafle,  fanis 
programme  antérieur  qui  ait  infixuit  les  mem- 
jbres  de  raflemWée  de  Ja  ^ropoStîon  qu'où 
Jeur  vouloit.  faire.,  faiis  leur  donner  Je  loîfir 
d'tn , délibérer  entre  eux,  nîême  d'y  penferj 
&  dans  un  tems  où  la  Bourgecdfîe  mal  in& 
truite  de  rhiftdire  de  Ton  Gouvernement  s'ci 
laiflbit  aifément  împofer  par  lé  Magiflxât. 
Mais  un  moyen  de  liulUté  pks  grave  en« 
.  core  efl  la  violation  de  TEdit  danis  fa  partie 
à  cet  égard  la  plus  importante.,  (avoir  la  nùN 
nîere  de  déclarer  les  billets  ou  de  compter 
les  voix  î  car  danis  TArtide  4  de  TEdit  dû 
1707  il  eft  dit  qu'on  établira  quatre  Secré- 
taires' ad  aSlum  pour  tecueillit  les  fuâfrâges^ 


L    E    T    T    R   X  ir9 

deux  des  Deux-Centé  &  deux  du  Peuple ,  IcC- 

^uels  feront  choids  fur  le  champ  par  M«  le 
premier  Syndic  &  prêteront  ferment  dahi  le 
Temple.  Et  toutefois  dans  le  Confeil  géné- 
ral de  ,1712,  fans  aucun  égard  à  TEdit  pré- 
cèdent  on  fait  recueillir  les  fufFrages  par  les 
deux  Secrétaires  d'Etat.    Quelle  fut  donc  la 

c 

ràîfon  de  ce  changement,  &  pourquoi  cette 
manœuvre  illégale  dans  un  poiat  fi  capital^ 
comme  fi  l'on  eut  voulu  tranfgrcfler  à  plaiCr 
la  Loi  ^ui  venoît  d'être  faîte?  On  commence 

.  r 

•  V 

par  vicier  dans  un.  article  l'Edît  qu'on  veut 
annuler  dans  un  autre  !  Cette  marche  eft-ellé 
jfégulîere?  fi  comme  porte  cet  Edit  de  rëvo^ 
cation  l'avis  du  Confeil  fut  approuvé  prefque 
unanimement  (ad) ,  pourquoi  donc  la  forprifô 
êc  la  confternation  que  marquôîânt  les  Cito^ 


(ûfl)  Par  la  manière  dont  il  m'èft  rapporté  qu'oii 
sy  prie,  cette  unanimité  ia*étoit  pas  difficile  à  obto- 


tto       H    tr    I    T    I    E    M    Ë 

yens  en  forçant  du  .Confeil ,  tandis  qu*on  vo- 
yait un  air  de  triomphe  &  de  fâtisfafUon  fui* 
les  vifages  des  Magtflxats  (J>b)  ?  Ces  difiëren- 

tes 


nîr  ,    &  il  ne  tint  qu*à  ces  Meilleurs  de  la  rendre 
,  completre.. 

Avant  raffemblée,  le  Secrétaire  d'Etat  Meflrezat 
dît:  Laijfez  les  venir  ;  je  les  tiens.  Il  employa,  dit- 
on,  pour  cette  fin  les  deux  mots  JpprohûXimy  &  Re- 
jeQiony  qui  depuis  font  demeurés  en  ufage  dans  les 
billets  :  en  forte  que  quelque^  parti  qu'on  prit  tout 
revenoit  au-môme.  Car  fi,  l'on  choifîiToit  Jpprobatioft 
Ton  àpprouvoîc  ravis  deJ^^oftf(fUs  ,  qui  rejettolt 
J'affeioblée  périodique  ;  &  fi  Von  prenpit  RéjeStion 
Ton  rejettoit  raffemblée  périodique.  Je  n'invente 
pn^  ce'fa1t'^^&-j€  ne  le  rapporte  pas  fans  autorité; 
j(i  prif  le  lefteur  de.  le  croire;  mais  je  dois  à  la  vé- 
rité de  dire  qu'il  ne  me  vient  pas  de  Genève,  &  â 
la.3tifticeJ»d'ajoùter'quej^  ne  le-  cïoië  pas^vrai  :  je 
fais  feulement  que  l'équivoque  de  ces  deux  mots  a- 
bufa  bien  des  vôtans  fur  celui  qu'ils  dévoient  choi-» 
fir  pour  exprîjner  :  leur  intention  ,.  &  j'avoue  encore 
que  je  ne  puis  imaginer  aucun  motif  honnête  ni  au- 
cune excufe.légitimeirla.'tran^reffionde  la  loi  dans 
le  recueillement  des  fulFrages.  Rien  ne  prouve 
mieux  la  terreur  dont  le  Peuple  étoit  faifi  que  le  fî- 
Jence  avec  lequel  il  laîffa  pafler  cette  irrégularité. 

(bb)  Ils  difoient  entre  eux  en  fort^nt,  &  bien 


L    Ë    T    T  -R    Ë.  lit 

tes  contenances  font-elles   naturelles  à  gens 

» 

qui  viennent  d'être  imanimement  du  xnètM 
avis? 

Ainfi  donc  pour  arracher  cet  Edit  de  r^^ 
vocation  Ton  ufa  de  terreur^  de  furprife» 
vraifemblablement  de  fraude,  &  tout  au  moins 
on  viola  certainement  la  Loi.  Qu  on  juge  fî  cet 
caraâeres  font  compatibles  avec  ceux  d^une 
Loi  (àci^e,  comme  on  affeâe  de  l'appellera 

Mais  fuppofons  que  cette  révocation  fois 
légitime  &  qu'on  n'en  ait  pas  enfreint  les 
conditions  (ce)  y  qud  autre  eflFet  peut-on  loi 


^mmma^ 


d^autres  rentendîrcnt;  nom  vtnmî  de  faire  une  grârt^ 
de  journée.  Le  lendemam  nombre  de  Citoyens  fa^ 
.rent  fe  plaindre  qu'on  les  avoit  trompés  »  &  '  qu'ils 
ti'avolent  point  entendu  rejeecer  les  aflemblôes  géné- 
rales, mais  Tavis  des  Confeiis.  On  fe  moqua  d*eux. 
{c6)  Ces  conditions  portent  ^xx'aucun  chingeinent 
à  PEiit  n'aura  force  qu'il  n'ait  été  approuvé  dans'  (A 
fowjerain  OmfeiU  Refte  donc  à  favoîr  fi  les  infrac* 
tions  de  l'Edit  ne  font  pi»  des  changt meus  à  rsaitf 

Partit  IL  K 


ftt       HUITIEME 

donner  9  ^e  de  remettre  les  diofes  fur  le  piedl 
où  elles  écoient  avant  l'établif&meat  dç  la  Lm 
révoquée,  &  par  conféquent  la  Bourgeoifie 
dans  le  droit  dont  elle,  étoit  en  pofl^Iion? 
Quand  on  caflè  une  tranfa^ion,  les  Parties 
SIC  reftent-elles  pas  conmie  eHes  étoient  avant 
ftt'elle  fut  paifée? 

'  Convenons  que  ces  Coo&ils  généiauz  pé^ 
tîodiqoes  n'auroient  eu  qu'nn  iëul  inoonvé* 
sient  y  mais  terril:^  ;  c'eut  été  de  forcer  les 
Magiftrats  &  tous  les  ordres  de  ie  contenir 
danr  les  bornes  de  leurs  devoirs  &  de  leurs 
droits.  Par  cela  leul  je  fais  que  ces  ailëm* 
Islées  fi  effarouchantes  ne  feront  jamais  réta* 
t)1ies  y  non  plus  que  cefles  de  la  Ëourgeokie 
par  compagnies  $  mais  aùfli  n'eft*ce  pas  de 
cela  qu'il  s'agit  ;  je  n'examine  point  ici  ce 
^ni  dbit  ba  ne  doit  pas  fe  fairç  ;  ce  qu'on 
fera  ni  ce  qi^'oa  ne  fexft  pa&  Les  expédicDfr 


'   L   t   T  T   B.   ï.  :t2| 

'<|àe  j'indique  iimpidmenc  caaaac  poJUbles  & 
faciles  5  comme  drés  de  votre  confticiition  ^^ 
n'éttnt  plas  conformes  aux  nouveaux  Edict 
ne  peuvent  pafTer  que  du  coniëncemeni:  dei; 
Confeils  y  &  mon  avis  n^êft  aiTurémenc  pn 
'qu*on  les  leur  propole  t  maïs  adoptant .  ua 
moment  la  fuppofitîon  de  FAuteor  des  Leb- 
treS)  je  réfous  des  obje6tions  frivoles;  je  ùk 
voir  qu'il  cherche  dans  la  nature  des  chofea 
des  obitades  qui  n'y  fosc  point ,  qu^îls  no^ 
fixnt  tous  ^e  dai»  la  mauvaife  volonté  du 
Confeil^  &  qu'il  y  avoit  s'il  l'eue  voulu  cent 
moyens  de  lever  ces  prétendus  obftacles^  flani 
altérer  h  Conditution ,  fans  troubler,  l'ordre  li 
&  fans  jamais  expofer  le  r«po$  public 

Mais  cour  rentrer  dans  la  queftion  tenoi»» 
nous  exaâement  au  demiâ:  Edît,  (k  vous 
n'y  verrez  pas  une  feule  dîlBculté  réelle  Con* 
tre  l'effet  néj:çflàire  :.  d>i  droi(  de  Répréfeiif 
catioa  K  2 


tu       H    U    ï    T    I    E.   M    E 

.  I.  Celle  d'abord  de  fixer  le  nombre  dor 
.Répréfentans  eft  vaine  par  TËdit  même,  qui 
jie  fait  aucune  diftinâion  du  nombre ,  &  ne 
donne  pas  moins  de  force  à  la  Répréfenta- 
tion  d*Qn  féui  qu'à  ceDe  de  cent 

2.  CeHe  de  donner  à  des  particuliers  le 
droh  dé  foire  aiTemlsIer  le  Confeil  général  efl; 
Vaine  encore  ;  puirquê  ce  droit ,  dangereux 
eu  non  y  ne  refaite  pas; de  l'effet  néc^fiaire 
àes  Répréfematjions.  Comme  il  y  à  tous  ks 
ans  deux .  Confeib .  généraux  pour  les  élec- 
tions «  il  n- en  faut  point  pour  ces  effet  a&m« 
tiâ  4*extraQfdinu]?e»  Il  fuffit  que  la  Réprélèo* 
tation,  après  avoir  été  çmninée  dans  j  les  Coq- 
feils»  foit  portée  au  i^lus  prochain  CônÀsil  gé- 
néral,  quand  ék<dk  de  nature  à  ritre  (dd). 
La  féance^  n'en-  fqra  pas  même  prolongée  dV 

(dd)  J'ai  diftingué  ci-devant  les  cas  oîilesConfeils 
font  ceausde  Vj  porter^  &  ceux  o(i  Us  ne  le  font  pas. 


LETTRE.  125 

\ 

/ 

lie  Jieurè,  comme  il  efl:  manifefle  à  qui  con- 
noit  l'ordre  obfervé  dans  ces  aflemblées.  Il 
faut  feûleibent  prendre  la  précaution  que  la 
propofîdon  paffe  aux  voix  avant  les  éleftions  : 
car  fi  Ton  attendpit  que  Téleftion  fut  faite,  les 
Syndics  ne  manqueroient  pas  de  rompre  auffi- 
X$t  Fafl&n^l^e.,  comme  ils  firent  en  1735. 

3»  Qdle  de  multiplier;  les  Confeils  .génërau? 
cft  levée  avec  la  précédente  &  quajnd  e^le.qe 
Je  feroit  pas ,  où  feroient  les  dangers  qu'on  y 
.trouve?  ;*c'efl:  ce  que  je  ne  fauroîs  voir. 
.  On ,  /réi^it  en  lifant  rénuméraiion  de  ç^ 
dingjSix^  slansi  les  Lettres  écrites  de  la  Campsi- 
gne ,  d^Qs  4'j£dit  de  1712^  dans  la  Harapgap 
.de  M.  Chou^t  ;  ;  mais  vérffipns;.,  Ce^derniep  dk 
qiïe  la  .République  ne  fut  i^atigiiiHe  que  quand 

ces  aij^bl^ea  4^^^^^^  pl^  ^^^^«  -   ^  7  ^  ^ 
une  petite",  inyerfion  à  réiablir.'  Il  fallpk  dirf 

^ae  ces,  ^li^]^  jçJeyyyeBSvp ^  juares  quand 

K3 


•rf' 


'12B         HUIT    î    E    M    E 

^  KépubHque  fdt  tran^uilte^,  Lil&z,  Monliénr^ 
)ès  faf1:e8  de  votre  Ville  durant  le  ièizieme  fié- 
^le.  Comment  fècotta-t>elIe  ie  double  joug  qui 
:récrafoît  ?  Cmment  é(ouffa-t-elfe  ies  fa^'oqi 
^ui  la  déchiroient:  t  Conmient  tifîfla-c-dle  à 
fes  voîfîos  avides  ^  ^ui  nç  la  fecoùToient  quQ 
pour  Taflervir  ?  Commet  l'étahlk  dan3  ion 
£bin  la  liberté  évangélique  &  politique?  Com- 
tAeùt  fa  çonftitution  prît-elle  cje  la^coirfiftance? 
Comment  fe  forma  leTyftême  dç  fim  Gouver-^ 
jôement?  L'hif^oire  de  ces  mémorables  temi 
5eft  um  enchaînement  de  prodiges.  Les  Ty- 
Tans^  les  Voifhïs,,  les  ennemis  ,  les  ^mis,  kai 
lUjetS',  les  Citoyens,  la  guerre,  la  pefte,  la  far 
VsùÉt  j  tout  •Tembîoît  concourir  à  la  perte  de 
^tëtxiaUteuréufé  Ville,  On  conçoit  k  pdœ 
^omiùent  m  E<^t  ^éja  formé  eift-pii  ^éebai^)» 
«  i!ûus  ces  perilsC-    N^  feiilaiïeht  Genève  ea 


r 


LETTRE.  >i%7 

que  fê  œnfbmme  le  grand  Ouvrage  de  4  I^^ 
gîflatioa,  Cefu£  par1e$  fin^quens  Confeils  gi- 
néimx.(ee)i  cefutpacla  prudence  &  la  fer« 
aiecé  queib  Citoyec^;  y  ^portèrent  (jq'ils  vain- 
quireoc  enfin  to\i$  les  obfl^lQs^  &  lendireoc 
leur  Ville  tibre  &  tranquille ,  de  fujetxe  ^  dé« 
chirée  qu'elle  .écôf  auparavanc^;  ce  fut.  après 
avoir  tout  n^is  en  prdre'  m  dedans  qu'ils  le 
virent  en  état  de  faire  au  dehors  la  ^u^rre 
avec  gloire*.  Alors  1$  ConXgll.^V^n.ar 
Voie  fioi  fês  fQpéUon;^  côtoie  au  Go^yensOf 
ment  de  fiiire  les  fteni^s  :  iï.fie  rieftoit  plus^  au|; 


*-  ♦  ^ 


(eé)  Comme  on  les  alTembloît  alors  dans  tous  les 
cas  0r(ku  Mon  les  Edits ,  &  que  ces  cas  ardus  le* 
vçnoîenc  très  fouvenc  daus  ces  tems  orageux»  le 
Confen  général  étoit  alors  })lus  fréquemment  con« 
ypqjié  que  Q*çfl  aujourd'l^utlç  Deut-Cent.  Qu'on  en 
juge'  par  une  feule  époque.  Durant  les  huit  premiers 
mois  de  ranbéë- 154.0  il  fe tintiix-huit  Confeils  gé«^ 
nérauX;  &  .cette  année  n'eut ^rien  de  plus  extcaordU 
naire  que  celles  qui  avoient  précédé  &  que  celles^ 

f)û  ftt^vircut./  ...  :       \^'  J.y 


'128        H    U    I    T    I    E    :k    E 

Génevcns  qa'à  défendre  la  liberté  qu^ils  ve< 
noient  d'établir  /&  à  fe  raoncrer  au£G  braves 
foldats  en  campagne  qu^ils  s'étoient  montrés 
'  dignes  Citoyens  au  Confeil  :  c*efl  ce  qa'ils  fi- 
rent. Vos  annales  attellent  par  tout  YutSàié 
des  Confeils  généraux  ;  vos  MoflOteura  n'y  vo- 
yenc  que  des  ùimk  eSi'oyables.  Ils  font  fob- 
jedlion ,  mais  rhïloire  la  réfout. 

4«  Celle  de  s'expofer  aux  faillies  du  Peuple 
quand  ^n  avoiOne  à  de  grandes  FuiiTances  fô 
i<éfôut=<ie  m&nei-  je  »é  fiche  point  en  œcî 
âe  meilleure  répdnfe  à  des  lophifiniâ  que  de^ 
faits  conflans.  Toutes  les  réfolutions  des  Con* 
feils  généraux  ont  été  dans  tous  les  tems  dsoSût 
pleines  de  fagefTe  que  de  courage  ;  jamais  el< 

» 

fes  ne  :  fuftnt  infôleiites  ni  lâches  j  on  y  a 
quel^dfoi^  jur4  :  de:  Q^ourk  pQur  la  patrie  i 
inâîs  je  défie  qu'on  m'en  cite  un  feul ,  même 
de  ceûjt  où  le  Peuple  a  le  plus  ifxù\ié ,  dans 


LETTRE.  M9 

lequel  on  ah  par  ëtourderie  mdifpofô  .les  FbiC- 
£uioes  voîfînes ,  non  plas  qu'un  lèul  où  l'on 
ah  rampé  devanc  elles.  Je  ne  ferois  pas  un 
pareil  défi  pour  tous  les  arrêtés  du  peth  Con- 
ieil  :  mais  paflbna,*  Quand  il  s'agh  de  nouvelles: 
réfokiàons  à  prendre,  c'eftwioc  ConlHIs  infiîk 
TÎeurs  de  les  prqpofix ,  au  Confeil  géaéial  àù 
les  lejeccer  ou  de  les  admettre ;.il  ne  peut  rien 
Ëubre  de  plus^;  on  ae  dilpute pas  décela:  Cette 
objeâion  pgrte  donc  à  faux.  ::  .  .  .5 

5.  Celle  de  jetterdu  doute.  &  de  Pobfcurîté* 
iur  toitfes  les  Loix  n'elt  pas  plus  iblide,  parcey 
qu'il  ne  s'a^t  pas  id  d'une  interpcâation  va^^ 
gue ,  générale  ,  &  lùibeptible  de  fiibtilités  ç 
mais  d'une  application  nette  &  prédfe  d'un 
ùk  à  la  Loi.  Le  Magiftrat  peut  avoir  fe$ 
lèifons  pour  ixouver.obfcureunechofe  daire^  ' 

mais  cela  n'en  décruh  pas  la  clarté.  Ces  Mef^ 

•  « 

{kaxs  dénatiuenc.  la  queilkn.  Moôtiq:  psur  k>- 

K5 


f3«       H    II    I.  T    II  E:  M^  E 

lettre  d'une  Ldrqu^élie  a^Àe  violée  n'dl  pas 
protKsIbr  idâs  ddiifes: finr  'cette  Loi  S'3  y  a 
duit  lç8  <i:eRâ£S  de  >]a  IdI^uo  feol'  &ns  feteo 
kqt^  Jb  ^1  ibit  juflifié  »  ie  Confefl  dans  & 
zé^nfê  ne!  maoqpiiêrii  pa^  <f  établir  ce  feus. 
Aides  la.  rBi^rëfcnàition  perd'  &  forœ^  &  fi 
ron'y  fiE^sfiit&v '<^leiCQ^^  eh 

GonTeii  général  rrCacrrintsérêt  de  tonseft  trep 
grand  ».  tn^:.préfi3nt,  trop  finfibde^&rtout  dam 
une  Ville  de  commerce',  pour  que  la  gé^ 
3jitîté  vàijQle  jansasr  éfcbranleri^automéy  le  Gpo- 
Yememeiky  k  ]^^  en  jbraoocçaQt 

qQ'uneLDta^éfiécranfgreiSiéy  loriqe^il  eSt  pof« 

Qfcde  qaldle  :iie  ilait  pas  :éc£^     

f  Cjett.aa  ^^q^iiateac,  cell  au  redaàceurvoea 
I^dx  a  Q*en:  pa^  biflb:  \ki  tertnes  équh^oqoBSL. 
Qnand'ilsleibnt;.  c^éft  à.réqoké  :da  Magi^ 
crac  d*en  fixer  k  fens  dans  la  pratique  ;  quand 
laLoi  a  phifieuri  fans ,  il  ofc  de  ïoa  droic  en. 


w. 


i:E    T    T    R   K,         13» 

è 

I  

^fônmt:  celui  ^Hlilui  plaît:  Aaît  ce  dtoit  ne 
fn,  poînb  jttTqu'à  changer  k  f^  lictéial  dés 
lùîx  âtà  leor  en  donaer  un  qà^dje  n'ont  pau^ 
autrement  il  n'y  tiuroiC'  plcp  de  4^1  La  qcid^ 
^fl  akifî  poffo  eft:  Û  nette  gu-II  eft  facile  ati 
tion  fens  de  pmnonçei),  &  <?e  bon  fens  qiâ 
|irononce  (b  trouve  afoi«  dans  le  Ôonfeil  génô^ 
^l  Loin  que  *  diû^tà  naiflent  des  i^éufSons  ha^ 
-terQHnables  /  <fe$  par  là  q))^éà^o9mraire  on  les 
^rëvietit  ;  (fâl  pdr  1&  qi^élevaitt..lë^Ëdks  atf* 
'dêflus  ^^-intSr^lsrtiens'aAitFaires  &  parti- 
e^iâres.qu^  Htitërêt  oaJa^pafîionpeiKfiiggé, 

rer,  oii  éft^qu'îis  dHent  toejoiH'é  cè-qli'ite 

» 

f£i^nt,  ^  que  k»  ^^culiers  ite  ^ibnt  pliis  dk 
ijbute,  fiir  chaque  âdaire,  do^fens  qu^il  plairii 
^  Mâjpftrat  dé  donner  à-fa  Loi»  N'es- il  paa 
^dkir  que  les  diiBculcés  dont  9  afagk  nmintê^ 
*iaBt  rfexifteroîent  ptas  fi  Ton  eut  prii  d'^ord 

r  • 

<fc  mojfen  de  ^Ict  réfoudre- ?  -     •.  ^ 


13»        IT   U    r    T    I  JE  îM    E 

6.  Celle  de  foumetcpe  lés  ÇQtifei]s  aux  .at^ 
àietiàes,\Gsayem  e(t  ridicule.  U  dk  certaia 
que  des  .R^jpcâ^tadQmaé  fenc,  pas  des  J>r& 
4res  9  non  plfls  que  la  requête:  ^un.^omine 
«qui  demande  juflice  n'ed  peu  juiï<  ordre;  n^ 
}û  IV^igiflrac  n'en  eft  pas  moins.  obli;gé:de 
jendre  du  fuppUaoc.  la  joflice  qu'il  demandej» 
jSc  le  Con^  de  .faire  dsoît/ur ,  le^  RépScé- 
tentations  des  .Citoyens  &  Bonrgeojs.  :  Quoi- 
que les  Mâ^&fm  fovsot  .les  fupérieurs  des 
particuliers,  cette  fupériori^  ne  les'diipaife 
|)as  d'acçordçr.si.rleur;  infi^n^pn  W  qu'ils  leur 
doivent  9  &les.(ennçs  r^çflugttt  <yi':empIoT 
^ent  ceuxrd  pour  le  demwdex  n'ôtent  tm 
au  drofc  qu'ils  ont  de  l'obtenir.  Une  Rëpré* 
Xditation  eft ,  fi  l'on  veut,  on  ordre  donné  jp 
Confeily  comme  elle  efl  un  ordre*  donné  ^. 
^emier  Syndic  à  qui  on  la  préfente  de  1^ 
communiquer  auConfeil;  c^  c'eft  ce  quil  ^ 


L    E    T    T  H    E.   .        133 

toujôurSv^hbgé  de  faire  ^  foie  qu'il  approuve 
la  Répréfeatatioû,  fok  qu'il  ne  l'approuve  pa8# 
Au  relie  quand  le  G>nreil  tire  avantage  dû 
mot  de  Répréfei^athn  qui  marque  infériorité; 
en  diiant  une  diofe  que  perfonne  ne  di/pute^ 
il  oublie  cependant  que  ce  mot  employé  dans 
lé  Règlement  n^efl;  pas  dans  l'Edic .  auquel  il 
renvoyé,  mais  hi&i  oàùi  de  R^momrancis qui 
préfente  un  tout  autre  iens  :  à  quoi  l'on  peut, 
ajouter  qu'il  y  a  de  la  différence  entre  les  Re- 
montrances qu'un  corps  de  Magifhature  fait 
à  ion  Souverain  )  &  celles  que  des  membres 
du  Souverain  fpnt  à  un  corps  de  Magifbratu*. 
15e.  Vous  direz  que  j'ai  tort  de  répondre, à 
une  pareille  objeéëon  i  mais  elle  vaut  bien 
la.  plupart  des  autres,  .  ;>  : 

'  7.  Celle. enfin  d'un  homme  «n  crédit  coR«^r 
v^nl  le  fçns  ou  l'application  d'une  Loi  cjA^ 
ïç  coodanne^  &  féduifant  le  public  en  ià  fa- 


fj4       H    U    1    T    î    E    H    fi 

Ireur,  efl:  tellp  que  je  crois  devoir  m'abflâsiiif 
de  la  qualifier.  Eh  l  qui  jâxmc  a  connu  la 
Bburgeoifie  (  de  Genève  pour  un  peuple  ièr^ 
Vilé,  ardent  vlnûcateur,  fhipide.»  exinemides 
lûix,  &  fi  prompt  à  s^enflamtoer  pour  lesin^ 
térâts  d'aqtrui?  Il  faut  que  chacun  ait  bkn 
lû'le  fien  compconûs  dans  léa  affaires  publia 
qopf,  avaiit  qu^H  poiffe  fe  réfi>udre  à  t'eif 
mêler» 

Souvent  f injftftice  &  la  fraude  trouvent 
dès  proteâeurs  ;  jamais  elles  n'ont  le  publie 
pour  elles;  c*eft  en  ceci  que  la  voix  du  Peupte 
eft  la  voix  de  Dîeu  ; .  mais  malheureufbmeiic 

â 

cette  vovc  facrée  e(l  toujours  foible  dans  les 
affaires  contre  le  cri  de  la  puiflance  ^  &  la 
plainte  de  Tinnocence  opprimée  s'exhale  en 
murmures  méprifës  par  la  tyrannie.  Tout  ce 
qui  fe  fait  par  br%ae  &  féduétion  fe  fait  par 
pséiTâ^ènce  au  ptofit  de  ceux  qui  gouvernent] 


I 


'     L    E    T    T    RE.  »S5 

cda  ne  faaroîc  être  autrement  La  rufe^  I9 
préjugé I  rimérét,  la  crainte,  Telpoir,  la  va* 
nicé ,  les  couleurs  fpécieufes ,  un  air  d'ordre 
&  de  fubordination ,  ^tout  eft  pour  des  hommes 
hatnles  confUtués  en  autorité  &  verfés  dans 
fart  d'abufer  le  peuple.  Quand  il  s'agit  d'op* 
po(êr  Tadrefle  à  Tadreflê ,  012  le  crédit  au  cré«* 
dit,  quel  avantage  immenfe  n'ont  pas  dans  une 
petite  Ville  les  premières  familles  toujours 
uniçs  pour  dominer ,  leurs  amis,  leurs  cliens, 
leurs  créatures ,  tout  cela  joint  à  tout  le  pou- 
voir des  Confeils ,  pour  écralèr  des  particuliers 
qui  oferoient  leur  faire  tête  ^  avec  des  fophiA 
msM  pour  toutes  armes?  Voyez  autour  de  vous 
dans  cet  inftant  même,  L'appui  des  loiz,  l'é- 
quité, la  vérité,  l'évidence ,  l'intérêt  commua^ 
le  foin  de  la  flireté  particulière ,  tout  ce  qui 
4evroit  ^traîner  la  foule  fuffit  à  peine  pour 
protéger  des  Citoyens  refpeâésqui  réclvnenp 


/• 


ï3(J        H  '  U    ï    t    t:  É    Irf    Ë 

toiitre  rinîquîté  la  plus  manîfefte  ;  &  Ton  vettC 
que  chez  un  Peuple  éclairé  l'intérêt  d*im 
brouiDon  fafle  {dus  de  partifans  que  n*en  peut 
faire  celui  de  TEtat  ?  Ou  je  connois  mal  votre 
Sourgëoifie  &  vos  Giefs ,  ou  fî  jamais  il  fe 
fait  une  feule  Répréfentation  mal  fondée,  c6 
qui  n'efl:  pas  encore  arrivé  que  je  fiche  ; 
T Auteur,  s'il  n*e{i:  méprifs^ble,  eft  un  homme 
perdu. 

^  Eft -il  befoin  de  réfuter  des  objeétions  de 
cette  efpece  quand  on  parle  à  des  Genevois? 
Y  a-t*il  dans  votre  Ville  un  feul  homme  qui 
n'en  fente  la  mauvaife  foi ,  &  peut*on  fêrieu* 
fement  balancer  l'ufage.d'un  chroit  fàcré,  fon- 
xlamental ,  confirmé,  néceflaire,  par  des  in- 
«onvéniens  chimériques  que  ceux  mêmes  qoi 
les  objeâient  favent  mieux  que  perfbnne  ne 
pouvoir  exîfter  ?  Tandis  qu'au  contraire  ce 
•droit  enfreint  ouvre,  la  porte  aux  excès  de  la 

plus 


L    Ë    T    ï    R    El  i^f 

jpliis  ddîeufe  Olygarchîe  j  au  point  qtfon  h 
Voit  attenter  déjà  fans  prétexte  à  la  liberté  dés 
Citoyens,  &  s'arroger  hautement  le  pouvoit 
de  \ei  emprifonner  ans  aflriélion  ni  condition  ^ 
fans  formalité  d'aucune  efpece ,  contre  la  te- 
neur des  Lois  les  plus  prédiës ,  \&  malgré 
toutes  les  proteflations. 

L'explication  qu'on  ofedbnhet  à  cies  Loix 
efl:  plus  infultante  encore  que  la  tyrannie  qu'ob 
exerce  en  leut  nom*  De  quels  raîfonnemens 
on  vous  paye  ?  Ce  n'efl:  pas  afféz  de  vods 
traiter  en  efclaves  fi  Ton  ne  vous  traite  encore 
en  enfans.  Eh  Dieu  !  Comment  a-t«on  pu 
mettre  en  doute  des  queftions  adffi  claires,' 
trommënt  a-t-on  pu  les  embrouiller  à  ce  point? 
Voyez,  Monfieur,  fi  les  pofer  n'efl:  pas  les 
réfbudre  ?  En  finiflant  par  là  cette  Lettre  ^ 
j'efpere  ne  la  pas  alonger  de  beaucoup. 

Un  homme  peuc  être  conftîtué  prifomuer  de 

Fartie  II.  L 


f3«        HUITIEME 

trois  manières.  ^  L'une  à  Tinftance  d'un  autie 
hûmnie  qui  fait  contre  loi  Partie  fonnelle  ;  la 
féconde  étant  fut^s  en  flagrant  délit  &  faifi 
fur  le  champ  »  ou,  oe  qui  revient  au  xoéme, 
ppur  crime  not<â:'e  dont  le  public  efl:  tânoin; 
&  la  dXMfîeme^  d'office  »  paix  la  finale  autoïké 
du  Magiltrat,  fur  des  avis  fecreu,  fiir  des  in- 
tltces,  ou  fur  d'ancrés  xaiibns  ^^il  trouve  fuf- 
£{ànt^ 

'  Dana  le  prunier  cas^  il  et  ordonné  ptf  les 
Lois  de  Genève  quç  raccufiiteur  revé(£  les 
prifons  y  ainfi  que  Taccolë  ;  &  de  pJus^  l'S 
B'«ft  pas  folyable,  qu'M  donne  caution  des  dé* 
pends&de  Tad^iafgé.  ^fi  r<m  a  de  ce  côté 
dass]  fkïtéièt  de  f aocufàteur  une  fureté  nû- 
ibnoabte^ne  k  prévenu  n'efl  {^  arieté  m- 
JQitement; 

Dans  le  Cscasvi  cas,  la  preuve  eft  dans  k 
Sût  même .  i&  faccufë  efl  m  Quelque  forte 


LETTRE.         #39 

convaincu  par  ia  propre  dét^Kioq. 

Mais  dan$  le  troifieme  cas  on  n'a  jtii  i% 
même  fôreté  ^pe  dans  le  preaiier,  ni  h  mèr 
me  évidence  que  dans^  le  fécond,  &  c'eâ  pouj: 
ce  dernier  cas  <}Qe  la  Lcd^  fuppdaot  le  Ma- 
giffarat  équitable,  prend  feoleaiait  des  mefurq» 
pour  qu'il  ne  foit  pas  furpris. 

Voila  les  principes  fur  leiquds  le  Légkla* 
teiâ:  fe  dirige  dans  ces  trois  cas  ;  en  voici 
mainteiiîuit  T  application. 

Dans  le  cas  de  la  Partie  formeUe ,  on  a  dès 
le  commencement  tui  procès  en  règle  qu'il 
faut  foivre  dans  toutes  les  formes  judiciaires: 
c'efl:  pourquoi  l'afiaire  eft  d'abord  traitée  en 
première  inftance.  L'empriibnnemenc  ne  peut 
être  fait  /,  parties  (fuïes^  il  n'a  été  permis. 
par  jujiice  (ff).  Vous  favee  que  ce  qu'oa 
appelle  k  Geséve  k  Ju(tioe  .eft  le  Tribupai 

"^  (//)  Edits  civils.  Tit.  XIL  Art.  I. 

L  2 


140        HUITIEME 

du  Lieutenant  &  de  fes  aflîflans  àppellâ 
i^uditeurs.  Ainfi  c'efl:  à  ces  Magîftrats  &  non 
à  d'antres,  pas  même  aux  Syndics  ,  que  la 
plainte  en  pareil  cas  doit  être  portée ,  &  c'efl? 
à  eux  d'ordonner  l'emprifonnement  des  deui 
parties  ;  iàuf  alors  le  recours  de  l'une  des  deuï 
aux  Syndics ,  Ji ,  félon  les  termes  de  l'Edic, 
-elle  fe  fentoit  grevée  par  ce  qui  aura  été  ordori'- 
•né  (gg).  Les  trois  premiers  Articles  do  titit 
XII 9  fur  les  matières  criminelles  fe  rapportent 
évidemment  à  ce  cas-là^ 

Dans  le  cas  du  flagrant  délit ,  fbit  pour  ai- 
me, foit  pour  excès  que  la  police  doit  punir, 
il  eft  permis  à  toute  perfonne  d'arrêter  le  cou* 
pable;  mais  il  n'y  a  que  les  Magiltrats  char- 
gés  de  quelque  partie  du  pouvoir  exécutif, 
tels  que  les  Syndics,  le  Confèil ,  le  Lieute* 

nant,  un  Auditeur ,  qui  puiflênt  l'écrouer;  un 

■  » 
(gg)  Ibid,  Art.  2. 


LETTRE.         141 

Coofèiller  ni  pluOeurs,  ne  le  pourroient  pas  ;  Se 
le  prifonnîer  doit  être  interrogé  dans  les  vingt- 
quatre  heures.  Les  cinq  Articles  fuivans  du' 
même  Edit  fe  rapportent  uniquement  à  ce. 
fécond  cas;  comme  il  efl  clair,  tant  par  lor-, 
dre  de  la  matière ,  que  par  le  nom  de  crimi- 
nel donné  au  prévenu ,  puifqu'il  n'y  a  que  le 
feul  cas  du  flagrant  délit  ou  du  crime  notoi- 
re, où  Ton  puifle  appeller  criminel  un  accu- 
fê  avant  que  fon  procès  lui  foit  fait.  Que  fî 
Xpti  s*Qbfldne  à  vouloir  c^accujé  <&  criminel 
fblent  fîoonymes ,  il  faudra ,  par  ce  même 
langage ,  quHnnocera  &  criminel  le  foient  aufïï^ 
.  Dans  le  refte  du  Titre.  XII  il  tfeft  plus 
queflion  d'emprifonnen^ent ,  &  depuis  FArti: 
de  9  inclufîvement  tout  roule  fur  la  procédu- 
re &  fur  la  forme  du  jugement  dans  toute 
efpece  de  procès  criminel.  II  n*y  eft  point 
pvlé  des  eiiiprifonnemens  faits  d'ofEce. 

L  3 


14»      HUITIEME 

Maïs  îl  en  eft  parlé  dans  FEdît  politique 
fiir  rOffice  des  quatre  Syndics.  Pourquoi  ce- 
la? Parce  que  cet  Article  tient  immédiatement 
à  la  liberté  civile,  que  le  pouvoir  exercé  fur 
ce  point  par  le  MagiÛrat  efl:  un  aâe  de  Gou« 
vem(aiient  plutôt  que  de  Magîftrature ,  & 
&jt\m  fimple  Tribunal  de  juftîce  ne  doit  pas 
être  revêtu  d'un  pareil  pouvoir.  Auflî  VEdît 
Taccorde-t-il  aux  Syndics  feuls,  non  au  Lieu* 
tenait  ni  à  aucun  autre  Magiftrat. 

Or  pour  garantir  les  Syndics  de  la  furprife 
dont  f^\  parlé ,  l'Edit  leu^  prefcrît  de  tnander 
premièrement  ceux  quil  appartiendra ,  d'exami- 
ner d'interroger^  &  enfin  àt  faire  emprifonner 
fi  mejlier  ejî.  Je  crois  que  dans  un  pays  fi* 
bre  là  Loi  ne  poùvoit  pas  moins  faire  pour 
mettre  on  frein  à  ce  terrible  pouvoir.  II  hnt 
que  les  Citoyens  aient  toutes  les  fûretés  Hii* 
fonnabtes  qu'en  feifant  leur  devc»r  ils  pour* 
ronc  CQUcher  dans  leiit  ^ 


\ 


LETTRE.  143 

L*Artîcle  fuîv^t  du  mêmie  Titre  rentre^ 
comme  il  eflr  mamfefle,  dans  le  cas  da  cri* 
me  notoire  ôc  da  flagrant  délit ,  de  même 
que  r Article  premier  dû  Titre  des  matières 
criminelles,  dans  le  même  £die  politique.  Toot 
cda  peut  paroître  one  répétition  :  mais  dans 
TEdit  civil  la  matière  eft  confîdérée  quant  à 
l'exercice  de  la  jullice,  &  dans  l'Edit  polîtî- 
que  quant  à  la  fÛret^  des  Citoyens.  D'ailleurs 
les  Loix  ayant  été  faîtes  en  differenstems, 
&  ces  Loix  étant  l'ouvrage  des  hommes,  oit 
n^  doit  pas  chercher  un  ordre  ^ui  ne  fe  4é-' 
mente  jamais  &  une  perfeéHon  fans  défaut» 

Il  fuffit  qu*en  méditant  fur  le'  tout  &  en^  com- 

.•  ....     , -^ 

parant  les  Articles ,  on  y  découvre  Tefprît 
^u  Législateur  <&  les  ra|fons.  du  difpoficif  de 
fon  ouvrage. 

Ajoutez  une  léâexioe.  Ces  droits  fî  judi^ 
deufement  combinés  ;  ces  droits  réclamés  par 

L4 


^^       HUITIEME 

le^  j^épréfentans  en  vertu  des  £dit$ ,  vous 
e^  jouiflîez  fous  |a  fouveraînet^  des  Ëvêques, 
!Ç>f euf(±âtel  en  jouit  fous  fes  Princes  >  &  à 
YQus  Républicains  o^  veut  les  ôter  1  Yoyez 
]ç$  ^ides  ip,  II 9  <&  plufieurs  autres  des. 
frapchiTes  de  Qenève  dans  Taâe  d'A^emaru^ 
fàbxu  Ce  monument  p'eft  pas  nio^^reip^. 
talple  aux  Genevois  que  ^e  l'eil  aux  Aûglois. 
Iji  grande  Cbartre  encore  plus  ancienne ,  S( 
je  dçute  qu'on  fut  bien  veiijiu  chez  ces  dqr- 
^ers  à  parler  de  leur  Chartre  ayeç  autant  d^ 
tt^épris  que  r  Auteur  djçs  Lettres  ofe  en  jçnar^. . 
quer  pour  la  v^e,   ,. 
,  Il  pi;étçQ4  qu'elle  a  ^cé  abrogée  par  les 
Çonflitutions  de  la  République  (bh),  Mais  au, 


(bb)  Céroic  par  une' Logique  toute  femblable 
qu'en  1742.  on  n*eut  aucun  égard  au  Traité  de  Soe» 
leure  de  1579,  foutenant  (ju*il  étoit  furanné;.  quoi- 
qu'il fut  déclaré  per|)étu^I  dans  l'Aéta  même  ,  qu'il 
c'ait  jamais  été  abrpgé  par  aucun  autre ,  &  (p^ 


;.    j;    T    T    R    E,  I4J 

V 

çontrsjîpc  je  vois-  très  fouvenç  dap3  vps  Editas 

ce  mot,  comme  .d'ancienneté^  qi4  renvoyé  au]C 

uf^s  anciens,  par  conréquent^au^  droits,  fur 

Jefquels  ils^  étoient  fpndesj  &  comme  fi  l'EJ- 

vêque  çut  prévu  que  ceux  qui  dévoient  prq- 

.téger  les  franchifes  les  attaqueraient,  je  vojs 

.qu'il  dédire  .dansi  TA^e  même  jqu'cjles  iêroi^t 

.perpétuelles ,  f^s  que  le  non-pTage  ni  aucune 

prefcription  les  puifle  abolir.  Voici,  vous  ep 

CQpviendre? ,  une  oppoGtion  \>kn  Cngulierç; 

^.e  favant  Syndic  Chouet  dit  dans  fon  Mq- 

^Çioire  à  Mylord  fowfend  que  .le  Peuple  de 

Genève  enpra,  pax  la  Réformation,  dans  Iqs 

4roît5  de  l'Evêque ,  qui  étoit  Prmce  teropa- 

xé  &  fpirîtuel  de  cette  Ville.    L'Auteui;  dqs 

Xettres  i^ous  allure  a^u  contraire  que  ce  mq- 

me  Peuple  perdit  en  cette  occafion  \t:s  fr^^g- 

•  •  •  • 

ait  été  rappelle  pluficurs  fbis ,  notamment  dans  Tac- 
.te  de  la  Médiatian. 

L  5 


s 


146       HUITIEME 

diifes  que  TEvéquë  lui  avoic  zccordées.  Aa- 
ipà  des  deux  croirons-noas? 

Quoi  !  vaa$  perdez  étant  Kbres  des  droits 
iant  vous  jouiffiez  étant  fbjets  !  Vos  Magif- 
Crats  Toas  dépouillent  de  ceux  que  vous  ac- 
cordèrent vos  Princes  !  fi  telle  dk  h  liberté 
que  vous  ont  acquis  vos  pères ,  vous  avez 
dequoi  regretter  le  fang  qu'ilsf' verferent  pour 
die.  Cet  a£le  fingulier  qui  vous  rendant  Soo- 
verains  vous  6ta  vos  franchifeSi  valoit  bien, 
ce  nie  femble,la  peine  d'être  énoncé,  &,  du 
moins  pour  le  rendre  croyable,  on  ne  pou-» 
voit  le  rendre  trop  folemnel.  Où  eft-il  donc 
tet  afte  d*abrogation  ?  ^fTurément  pour  fe 
prévaloir  d\ine  pièce  atrffi  tî^arre  le  moins 
qu'on  puiffe  faire  efl  de  commencer  par  la 
mcxitrer. 

De  tout  ceci  je  crois  pouvoir  conclura 
Mrec  certitude  9  qa*en  aucun  cas  poffible^  la 


LETTRE.  147 

Loi  dans  Genève  n'accorde  aux  Syndics  nî  k 
perfbnne  te  droit  abfola  tfemprîfonner  lei 
paitîcalieré  fans  dlriéUoft  ni  condition.  Maïf 
n'importe:  te  CottTeil  en  réponfe  ara:  Répré^ 
iêntations  établrc  ce  droit  fkns  répfique.  H 
rfen  coûte  que  de  vouloir ,  de  ]er  voila  en 
poiTeflion.  Tdte  eft  la  comodité  du  droit 
négatif. 

Je  me  propofoîs  dîe  montrer  daris  cette 
Lettre  que  te  droit  de  Répréièntation ,  intî- 

itoement  fié  à  la  forme  de  ^ôtre   Conftîtu- 

,  '    ■       <  '    '    '    ' 

tîon  n'étoît  pas  un  droit  îlhifoîre  &  vain  ; 
maïs  qu^ayaiit  ^  ^té'  fomieltement  '^étabti  [par 
fË^it  de  1707  âp' confirmé  '  par  cfiluî  de 
1738 ,  il  dev'oït  néceflaîrement  avoir  un  ef* 
fet  réel:  que  cet  effet  nWoic  p^iété  ftîpu- 
lé  dans  TAdte  de  la  Médiation  parce  qu*î^ 
ne  Tétoît  pas  dans  TEdît,  &  qu'il  ne  Tavoît 
pas  été  dans  l'Ëdit,  tant  parce  qu'il  réfuttoit 


*  j 


14»  '  H    U    I    T    r  E   M    E 

^ocs  par  lui-mêrae  de  la  nature  de  vottQ 
ConfUcu^oq ,  ^qa^.  parce  ;  qjie  le  même  Edit 
çn  ^tat^j^irpic  1^  f^r^é  d'unç  autre  maoiere: 
Q^e  Qf  4rpît;tS;  fon  ,effet  jnéeeflà^re  donçpnt 
ftul  4e  l^^^^çon^ftance  k,  tof^s  Jbi.  autres,  ét,Qit 
Tunique  ,&  vépjtablç:  équiyalcnc  de  ceaxjqu'x)n 
SiVoit  ôtés  .^Ja  Çqurgpoî^ç;  qu?  ceÇjéquwa- 
lent ,  fuififant  pour  établir  un  folide  éqiivlibre. 
çqtre  toutes  les  paijiesr  de  J'Etet,,  montroit 
la  fageffe  du  ;  Régleraient,  qui  i^ns  cela  feroîiî 
l'ouvrage  le  pltj?  inique  qu'il  fut  poflîble  d'i- 
maginer :  .^u>nfîn  ks  djfficujt^  qu'on  éle-  ' 
voit  contre  rcyerdçe  de  ce  droit  étaient 
des  diffi^tés.  frivoles  »  qui  o'exifloient  que 
d^i^s  ]?  mauvaîTe  volonté  de  ceux  •  qui ,  ki 
p^opofoîeat  3,  .&  qui  ne .  balanÇQieot  en  au* 
c^ne  manière  les  dangers. du  droit  négatif 
àKpIu.    Voila,  Monfieur ,  ce  que  j'ai  vou- 

4 

h  faire  i  c'efl:  si  vous  k  voir  fi  j'^  réuflî. 


L    Et    t    R    Ë.  i0 

NEUVIÈME    LETtRË. 

jAl  crû,  Monfieur,  qu'il  valoît  mieux  établir 
dîreftement  ce  que  j*avois  à  dire ,  que  de 
jn'attacher  à  de  longues  réfutations.  Èntrepren- 
dre  un  exameh  fuivi  des  Lettres  écrites  de  la 
Campagne  feroit  s'embarquer  dans  une  mer  de 
^fophifmes.  Les  faifir,  les  expolef  feroit  felôn 
moi  les  réfuter;  mais  ils  nagent  dans  un  tel 
flus  de  doflrine ,  ils  en  font  Ii  fort  inondés  » 
>qu'on  fe  noyé  en  voulant  les  mettre  à  fec. 

Toutefois  en  achevant  mon  travail  je  ne 
puis  me  difpenfer  de  Jetter  un  coup  d'ϔl  fur 
celui  de  cet  Auteur.  Sans  aiialyfer  les  fubtîlités 
politiques  dont  il  vous  leurre ,  je  me  conten- 
terai d'en  examiner  les  principes  ,  &  de  vous 
montrer  dans  quelques  exemples  le  vice  de  ù:s 
raifohnemens. 


> 

/ 


ISO       N    E  :U    VI   £    M   JE 


.  Vous  en  avez  vûxindevast  Vh 
par  rapport  à  n^oi  :  par  rapport  à  votre  Ré- 
publique ils  font  plus  captieux  quelquefois  ^  & 
ne  font  jamais  plus  iblidjes.  Le  ^I  &  vérî* 
table  objet  de  ces  Lettres  eft  d'établir  le  pcé- 
tendu  droit  négatif  dans  ,Ia  plénitude  que  lui 
donnent  les  uforpations  du  Confçil.  Cék  à  ce 

r 

but  que  tout  fe  xapporte^  ibit  direâemenc^ 
par  un  eochaînemeut  néçeflaire  ;-  foit  indirec- 
tement par  un  tour  d'adteife,  en  donnant  le 
change  au  public  fur  le  fond  de  la  queftioo. 
Les  imputatjojas  qui  me  ]:egardent  ibnt  dans 
le  premier  ça$,,  I^  Confeil  m*a  jwgé  cofl^are^l/ 
Loi:  des  Répréfentations  s'élèvent.  Four  éta« 
,blk  le  droit  négatif  il  faut  éconduire  les  Ré- 
préfentans  ;  pour  les  •écondudf  e  il  faut  prouver 
qu'ils  ont  tort  ;  pour  j^'ouver  qu'ils  ont  tort 
il  faut  foutenir  que  je  fuis  coupable  ^  mais 
coupable  à  tel  pplnt  que  pour  punir  mon 


LETTRE.  15X 

I 

ctmt  il  a  falla  déroger  à  la  Loi. 

Que  les  honunes  fremiroient  au  piemier  mal 
qu^iii  font ,  s^ils  voyoient  qu'ils  fe  mettent  dans 
la  trifte  nécdiité  d'en  toujours  fakCf  d'être 
méchaos  toiH^e  leur  vie  pour  avoir  pu  Têtre 
un  Qumient^  &  de  pouriuivre  ju(qu*i  la  more 
ie  malheureux  qu'ils  aot  une  feis  perfôcutë  ! 

La  qpefiîon  de  la  préiidénce  des  Syndics 
dans  les  Tribunaux  criminels  le  rapporte  aut 
Ç^QOùà  cas.  Croyez-vous  qu'au  fond  le  Confeil 
s'embarrafle  beaucoup  que  ce  foient  des  Syn« 
dics  ou  des  Ccmlèillâ's  qui  pr^fident,  depuis 
qu'il  a  fondu  les  droits  des  premiers  dans  touç 
le  corps  ?  Les  Syndics ,  jadi9  çhoîfis  parmi 
tout  le  Peuple  (â),  ne  Tétant  idu$  que  dans 

1 

(a)  On  pouflbît  fi  loin  Tattention  pour  qu'il  n^ 
eut  dans  œ  choix  ni  exdufion  ni  préférence  autre 
que  celle  du  mérite,  que  par  un  £dic  qui  a  été  a« 
brogé  deux  Syntîîcs  dévoient  toujours  être  prk  dans 
le  J}as  de  la  Ville  &  deux  dans  te  haut. 


îSi        I^    È    Ù    V    I    È    M    Ë 

le  Confeil  y  die  chefs  qu'3s'  écoient  des  aucrâ 
Magiftrats  font  demeurés  leurs  collègues^  & 
vous  ave2  pu  voir  clairement  dans  cette  affîii- 
re  que  vos  Syndics  ^  peu  jalouîc"  d'une  autorité 
pafTagere ,  iië  fbnt  plus  que  des  GonfeillerSi 
Mais  on  feint  de  traiter  cette  queftidn  comme 
importante ,  pour  vous  dîftraire  de  cèDe  qui 
Tell  véritablement ,  pour  vous  laîfler  croire 
encore  que  vos  premiers  Magiflxats  font  tou- 
jours élus  par  Vous ,  &  que  leur  puîflanc6 
eft  toujours  la  même. 

'  LaifFoôs  donc  id  ces  qûeftions  acceflbires 
que,  par  la  manière  dont  T Auteur  les  traite 
on  voit  qu'il  ne  prend  guère  à  cœur;  Bor- 
nons-nous à  pefer  les  raifohs  qu'il  allégaë 
en  faveur  du  droit  négatif  auquel  il  s'attache 
avqc  plus  de  foin,  &  par  lequel  feul,  adaiis 
où  rejette,  vous  êtes  efclaVes  ou  libres. 
L'art  qu'il  employé  le  plus  adroitement  ^ur 

V.  cela 


:       L    E    T    T    R    E.  153 

œk  efl;  de  réduire  en  proponûons  générales 
un  fyflême  dont  on  verroîc  trop  aifëment  le 
fojble  &îi  en  faifbit  toujours  l'application.  Pour 
YQUS  écarter  de  Tobjet  particulier  il  flate  votr« 
Wiour -.propre  en  étendant  vos  vues  fur  de 
grandes  quéllions ,  &  tandis  qu'il  met  ces  quef- 
tions  hors  de  la  portée  de  ceux  qu'il  veut  fô^ 
duire,  il  les  cajole  &  les  gagne  en  paroiflanc 
ks  traiter  en  hommes  d'£tat«  Il  éblouit  ainfi  le 
peuple  pour  l'aveugler ,  &  change  en  thefes 
de  pbilofophie  de$  queflions  qui  n'exigent  que 
du  bon  fens,  afin  qu'on  ne  puifle  l'en  dédire, 
&  que  ne  l'entendant  pas,  on  n'ofe^le  défa-^ 
vouer. 

Vouloir  le  fuivre  dans  Tes  fbphifmes  abflxaitt 
feroit  tomber  dans  la  faute  <]ue  je  lui  re{>roche. 
D'ailleurs ,  fur  des  queflions  ajnfi  oiaitées  ou 
prend  le  parti  çi'cm  veut  fans  avoir  jamais 
tort  :  car  11  entre  tant  d'élémens  dans  ces  pro- 

Partie  ir.  M 


r  ^  «  '   ^ 


154       NEUVIEME 


»         ■ 


^ofidons,  on  peut  les  envîfager  pat  tafit  dé 
faces ,  qu'il  y  a  toujours  quelque  côte  fufceptî- 
Blé  de'  yarpeft  qu'on  veut  leur  donner.  Quand 
bn  fait  pour  tout  le  public  en  général  unLi* 
vre  de  politique  on  y  peut  philofcçhef  à  fori 
aîfec  TAuteur,  ne  voulant  qu'être  hi  &  jugé 
parle&liommes  înflruits  dé  toutes  les  Nations 
i&  verfés  daris^la  matière  qu'il  traite,  abftrait 
&  générafife  fans  crainte;  il  he  s'appéfentit 
pas  fur  les  détails  àémentaîres;  Sî  Je  parlois 
à  vous  feul,  je  pourrois  ufer  dé  cette  ,inéchor 
de  ;  mais  le  fujet  de  ces  Lettres'  întéreflê  an 
'peuple  entier, 'compofé  dans  fon  plus  grand 
nombre  d'hommes  qui  ont  plus  de  fens  &  de 

jugement  que  de  leéhire  &  d'étude,  &  qui 

» 

pour  tfavoîr  pas  le  jargon  fcîentîfique  n*cn 
font  que  plus  propres  à  laifir  le  vrai  dans 
toDte  fa  fimplicitd  H  %ut  opter  en  pardi 
<^  entré  rintérêc  de  l'Auteur  &  cdul  d& 


'        t    Ë    tt    R    Ë.  isS 

'Le£locr*-s  j  &  qui  veut  fé  rendre  plus  utile 
doit  fe  réfoudi^  i,  êoré  moins  éblouilTant.    > 
IJne  autife  fbtitce  d'errmirs  &  de  fauilàé 
iipplicâtibns^  éO:  d'avoir  laidf^  les  idées  de  ce 
droit  hégatif  trop  vagues  trop  ioexaâes;  œ 
J^l  fert  à  dter  avec  un  air  de  preuve  les 
esemples  qdi  s'y  rapportent  le  moins  ^  à  dé^; 
tourôer  Vofe  Condtoyens  de  leur  objet  par  b 
^ompe  de  céut  «^u'oti  leur  prëfëbte^  à  foule- 
-vtx  leur  ot^kéâ  contre  leur  ra^n^  &  à  lel 
tonibler  doucement  de  d'être  pas  plus  libres 
<^e  tei  maîtres  du  monde.    On  fouille  avec 
Ifniditidn  dsuu  robfciirité  des  fié(:Ies^  oh  voufi 
|)romêne  avec  faite  chez  les  Feuilles  dé  l'an* 
tiquité;    On  vous  étale  fucceffivémeht  Athé- 
liêS|  Sparte^  Éôme,  darthage;  oh  vdui  jette 
Hiix  yeuk  ie  fable  de  la  Lybie  pour  vods  eîn^ 
l^chet  de  Voir  ce  qui  fé  palFe  autour  de  vovA 
'    Qu'dii  fixé  avec  précifion^  comme  fal  tâ^- 

M  2 


c 


IS6       NEUVIEME 

ché  de  faire ,  ce  droit  négatif,  tel  qae  pré* 
tend  l'exercer  IcConfeil;  &  je  fbutîens  qu'il 
;n'y  eut  jatiais  un  feul  Gouvernement  fur  la 
terre  où  le  Légiflateur  enchaîné  de  toutes 
manières  par  le  corps  exécutif,  après  avoir 
livré  les  Loix  fans  réferve  à  fa  merci ,  fut 
déduit  à  les  lui. voir  expliquer,  éluder,  tranf- 
.greffer  à  volonté ,  fans  pouvoir  jamais  appop» 
4er  à  cet  abus,  d'autre  oppQfidbn,  d'autre 
adroit,  '  d'jmtrè  réfîft^nçe.  qu!uû .  jnurmure  ino- 
ti!e  &  d'impuiffantes  clameurs.  • 
,  Voyez  en  effet  à  quel  point  votre  Anony* 
me  eO;  forcé  de  dénaturer  la  queftion,  pour 
.y  rapporter  moins  maI-à:propos  fes  exemplesi. 
.  Le  droit  négatif  n'étant  pas. ,  ditril  page  i  ro  , 
le  pouvoir  de  faire  des  Loix  ,  tnais  d'empêcher 
j^ue  tout  le  monde  indijlinêtement  ne  puijfe  niettn 
eji  mouvement  la  puijfance  qui  fait  les  Loix ,  (^ 
ne  donnant  pas  la  facilité  ffinn^er^  mais  k  pou^^ 


K>- 


L    ET    T    R  .£•  157 

iDaîr  de  s'ùppofer  aux  innoviffims^ ,  «  kja  dlreStc'' 
ment  au  grand- but  que  fe  fropftjt  une  focUté 
politique ,  qui  efi  defe  conferver  en  confervant 
fa  conjiitution.'  ,  - 

Voila  un  droic  négatif  très,  raîfonnable,  & 
dans  le  feps  éxpofé  cç  droic  eu,  en  effet  una 
partie  il  eilèoçielle  de  la  conftitution  démoQra-[ 
.tiguic,  ,qq'y.  feroMi  généralement  impoffitile 
i}u>Ile  fe.  maintint  9  fî  la  FuiOànce  Légiflâtive 
pouvoit  toujours  être  mife  en  mouvement  pai; 
chacun  de  ceui:  qui  la  compofent.  Vous  çQfht 
cqvez7  qu'il  n*efl  pgs  difficile'  d'apporter  des 
e:(emples  en  confirmation  d'un  principe-  aulfi 
certai.a.  ,  .  V 

Mais  Ccçtte  jnûtio&  n'ed  point  celle  du 
^oit  négatif  en:  queftiOn ,  s'il  n'y .  a  pas  dans 
€e.  palTagQ  un.  fêul  mot  qui  ne  porte  à  faiit 
p^  l'application  que  l'Auteur  en  veut  faire, 
▼pus  pi'avoQerez  que  les  preuves  âe  l'avanta* 

M  3 


ge  d'im  droit  négatif  tout  diffétent  né  font 
^as  fort  cpii^aige$  en  fav^etu:  de  çdaâ  qa% 
yeat  établir. 

Le  dr'oit  négatif  tiejl  pas  cslui  dè^ftàre  ckx 
toix.  Non  t  «lais-  i  eft  çdui'id»  fb-'paffei  de 
Loix.  Faire  de  chaque'  a£ie  de  fe  volonté  une 
Loi  parcîcalicre  eft  bien  plusçoinmode  gué 
^eruivredes  Loix-généiçiles,  quanà  mêmeoA 
(Bftlferpit^foi-inêtïie  llAuteorv^   j^sf  ffempè-. 
gkér  i^t^out  If^ ' monde -ifJ^ifî^Stmêi^  ne  puijjh 
metPri^-^  efu*  fn&uifemént  la-  pi^fpimé^  ^  fàî^  Us 
fjoix.'  H  fiîltoîk  dk?e  au  Ke^  de  cela  i  mais^d^eny. 
^çhtr  que'-qtli  qu'e^câ  foit  ne  pùiffi  p^gér-  ki 
iofx  contre  h  fuijfance  qui  les  fubjugue. 
'ilQûine  ipnnad  pas  bifmBé]^^irmover..... 
foiàcfxti  fioti  ?  Qtti  ^  eft-œ  -^^^^ut  eiopêcbei- 
^ftnover  celui  cpù"  ^  la  force  en^ftiaiô,  âf:  qui 
ç'ëft  obUgé  cte  rendre  '  compte  de'  6  çondaî^ 
^  à  g^rfonioe?   Mï/V  le  ppvir^  â^ppiébe^  M 


kçm  que  .|'ê*iaiine.    ÇçHiic  ^i  a  la  Puifl&n^f 

iànce ,  de .  pjieiî  peu  Là  pfUicl»fie! .  chofe  à .  §i 
vdontré»  &  cela  nis^.fiiijt  jipi^Sr  uoe  ibn&cio« 

.  €«x  tu .fcômr^e,^  bnt  Jleçîl  afTei  attcmif 

"  *  •  • 

progrès  &  pour  en  prntàr^k  conféquence  ^ 

n^oab,:.|di!irTiii^er  q^^  ces  deux  partis 

à.grendre;  oUiJe  s'of^xoTer.  idTabocd  à  la  prc^ 

tniefc  -imavadûQ'qai  if efl.jamais^  qu'une. bai- 

^ateflei  &  aiDivitti.  i^.  mkè  dé.  gens,  inquiet^ 

M4     ' 


i6o 


N    E'U    VI    E    M    E 


brouillotn,  poinâSéut^  coujoars  prêtsàc^r* 
dier  querelle  ;  ou  bien  de  V^lever  enfin  contre 
un  abus  qui  fe  renforce  i  &^  alors  on  crie  a 
rinâovation.  Jédéft^  que,  qûdiq^:^os  Mat- 
^giSbtm  -entreprennent,^  vous  piiiffî^  en  "^Hxu 
■yoppofant  îéviteï  à  la'  fois  ces  deux  repro- 
ches. Mais  à  chô^x,  préfê^ez'le  pr^eti  (9ia» 
•^ùe  fôis^ue  le  Cdftf^tiakere  ^qudque  u&gs ,  il 
a.  fon'but  qaé^  pâibnhet  «eli  t^it» ,.  &  qu^^il  Ib 

"gande  bka  de  tnoiftiifiri:  ^Dat^  I&  (ipaie,anê« 
tez  toujours  toute  ncuVèàufté  ^pktîi&  ou  gran- 
de. Si  les  Syndics  étoient  dans  Tufàge  d^èntrer 
au  Confeil  du  pied'  droii?,  &  qniHls  y  yxxùaf- 
fent  entrev-du  pied -gauche,!  je  dis  qu^iLfaiih 
droit 'Içs^'cR^empôchcr.'/  •  ->  '^i-:([  ^ 

Nous  avons  ici  lacprepre  biesTenffls^.^  la 
âiGÎIité  de  condorre  Je|ioua:  &  \e  çoïKre  :pas 
.4b  'mécfaoderquei  fuit  àoive  Aocêor.^/car  afçH* 
foezigu  droit  de  Bipréferitatioficdesfiço^exa^ 


L  ;E    T    T    R    E.  i6t 

^  qu'il  applique  au  droit  négatif  •  des  Con* 

fôk  ;  &  Vous  trouverez  que  &  propofition 

géuéiiale  cfùmi&st  isicore  mieux  là  votre  ap^ 

pJîcitiOn  qu'à  la' fieiflie.  iJUdtm  deyRépréfen^ 

tatim^  direz- v'0»s  >  n^étant  pas  le  droit  de  faire 

^3\TjnXjhaïs  ^empèober  qu0  h  jfmjjance  qui 

Sii]  ks  adminiftrer  naJâs^  tfainfgrefjh  ^(^.ne  daa^ 

nmt:p^UÏrU>f<nmît  £îfm$tfer^nu4s'  ds^^ydppofer 

aux  nouveautés  ;  va  direStement  au  grand  but 

que  fo  pfopùfé  une  fociélé  politique  ;  cebn  de  fe 

cànferv&r  en  confervant  fa^ténJHt^tion^    N'eftl 

ce  pas  exaâenientià  ç&  que  les  Répréfeïitans 

avoiént  à  dire,  &  ne.&mblé'rt-ii  pat  que  l'Air^ 

teur  ait  raifonné  pour  eux  ?  '  Il  ne  ùjat  .point 

que  les  cobcs  nous  donnent  le  change  fur  les 

idées.i.LeiMrétenda  droit  négatif  du  Con&il 

cfl  réellement  un  droit  pofitif ,  &  le  plus  pofî.- 

tif  'même  que  roû  puifle  imaginer ,   puifqu'il 

rend  le  petit  Confeilfeul  maître  dire£l  &  ab^: 

M  5 


l6i       N    C'  U'  V.    I_E;:M    E 

I 

iblu  de  l'Ejat  Su  de  cpqfes  -les  Loîx ,  &'1q 
droit  de  ']R^éprérGrit^ioo\ii»^v  idftR^  J&ti  ^i 
ièos  D!eft  lài  >  mwie:qm0i  jis^:  aépti£; ,:  J3 
coofidie  uniquem^KVà  .empâchdri  la^  pui^oO^ 
exécutivei  de  den  çxécàcer  cxocttre  ies  \jûà.  . 
[  Saivéns  les  '  avwxx^dtf /^^A4tettt-i*3r  Jï^Tpté^ 
pofitîons  ' qu'il .  parâifcnû5';i\a5fee?ttois  mots  Ajâûn 

état  |iréfent*.>  <    ...•    v;-:  \_   ^  c     ;■        ^  ■"    ■ 

•   Comme:.  il\n'y^  àùroft'  fih^  A.  ®^^  fiw  w 

£pat . ùù  h cùxps  fkargé^  d9^ittxécv$im  dus  Ifihb 

pdfqu'il p9impoiffain€[  nxé(3ÊterS.tQfnmci  des  £crâ. 
Jis\'V9lom&  kst ^s^îy^mmifat^i:..  ..'.  ..-  :\.  . 
\  Voila  ^  Je  i|)£n{è;i>î2nitai3leaQv)d*apia^ 
lioùs  aUex  yoir  on  tabdèaii  dé\fiuitain&  ixû.^tL 

V/fL.£tat  ok  k'^Fm^^txeiccroif^fam.  te^ïe^lê^ 


:.  UL  E  ir  vr  JR.  :E.;i      -ify, 

ce  qui  a  propofé  que  le  ^o^  ^Qçerçàf  labs 

;    Après  çiVQÎr^mi£|)Qfii3(r.aûQ'«càrô^ 
•tIf*.q^e oeliû  cbnt* ilsVgit^/M^oeiif' <s^'iikqiiiâce 
^eapcoujfc  'pour  fiv%  ^pùAFto  idaifc  placer  v/qe 

fl)Ut  là^dlçfBs  ^4  prriic^e«^'af&  œ 

Tpontéiterai  pas,  .  C^  qjuav^  Jkmtt. force,  nigar 

» 

çle&9  qQQ^è  ne'im'attsuritfm.pâfiii  raivre;.r^ar- 
•ce  qa^Isfpnt.niap'jëldgné^uik'bpus.  &^ 
çoipc:étrâiiïgerS'.à/J^  çuâliofa,  'ii;:.'^..'  r  ',U  >' 
L.  Celui  iftttl  (S^  iFAtiglelèrxè  quîxft  fcrm  ni^ 
^eosc.&qûfilcice  avec  raii^;e(ânmé.un':m6- 
ddc-de  ht-jufte-lpalance-des  panvoirs-rcfpec- 
pfs^  mérite  un  moment  d'exatoài^  <S- je/  ne 


y^ 


V 


164       N.:E  jU    V    I    E    M    E 

me  permets  id  qu'après  lai  la  comparaifon 
,da  petit  au  grand  .  :  . 

Ma^é  la  pmffknct  'Royale^  qui  efiltf'ès  grarh 

àç  ^^la  dation  rtn- pat  crm^t  dc^^onnet  encore  au 

Koi  la  voix  négative:,  Mait  cmme  Une  peut  Je 

pajffir  longêem  de  '  la  '  puiffanèe  i  lé^ativâ  ^  Ëf 

fuHl  rCy  aurait  pas.  de  fâr^é-pàur  lui  à  Firri' 

•^er,  cette  fùtce ^.négatxop  deji  dans  k  fait  qu^un 

moyen  i'arrêeef . Içt  entreprifes  de^ la.puijjhnce 

'îégiJlcUive  j  &  4e  Prince  y  iranquille^dis^rts  la  pof- 

feffion  ii  patevêir  étendu  que  h  Çànfiitmum  hn 

e^^  Jera  intéreffé.'à  la  protéger  (b). 

Sur  ^  ce  taiibmàeifient  &  fur  rapplicatÎQQ 
qu'on  en  veut  faire  v  vous  croiriez  que  le  pou* 
voir  exécutif  du  JRoi  d'Angleterre  efl:  plus 
.grand  que  xélui  du  Confeil  à  Genève  que  le 
-droit  négatif  :  qii!a  ce  Prince  efl  femblable  i 


L    ET    T    R    E.  165 

celai  qu^afurpenc  vos  Magiftrars  ,  que  votre 
Gouvernement  ne  peut  pas  plus  fe  paflèr  que 
celui  d* Angleterre  de  h  puiflance  légiflative^ 
&  qu'enfin  Tun  &  l'autre  ont  le  même  intérêt 
de  protéger  la  conftitutxon.  Si  l'Auteur  n'a 
pas  voulu  dire  cela  qu'a*t*il  donc  voulu  dire, 
&  que  fait  cet  exemple  à  fon  fujet? 

Cefl:  pourtant  tout  le  contraire  à  tous  é* 
gards.  Le  Roi  d'Angleterre  ,  revêtu  par  les 
Loix  d'une  fi  grande  puiflance  pour  les  proté- 
ger, n'en  a  point  pour  les  enfreindre:  perfon* 
ne  en  pareil  cas  ne  lui  voudroit  obéir,  chacun 
craindroit  pour  fa  tête;  les  Miniflxes  eux-mê- 
mes la  peuvent  perdre  s'ils  irritent  le  Parle* 
ment  :  on  y  examine  fa  propre  conduite.  Tout 
Angloîs  à  l'abri  des  Loix  peut  braver  la  puif- 
lance Royale  ;  le  dernîer  du  peuple  peut  exiger 
&  obtenir  la  réparation  la  plus  authentique  s'il 
dl  le  moins  du  monde  ofFenfé  ;  Aippofé  que  le 


I^Qce.ofàc.eitfreindre  la  Loi  ims  la  moindri^ 
chofe^  rFirïfraâîon  feroit  à'  ïiaùant .  relevée  ;  il 
f&:  (mi  drotc:  &  ferait  fans  |k»ivoir  pour  là 

Chez  vodsla  PidfTaâcâ  da.  petit  CopfeD  €& 
^Uolùé  à  tous  égards  ;  il  eft  te  Miniftre  &  lé 
Prince  j  la  partie  &  le  Juge  toot-à-la-fois: 
il  ordonne  ôc  il  exécute  ;  H  cite^  il  Mit,  il 
emprifoûne  ^  il  juge ,  il  ^unit  lui-Mêoie  :  il  a  ht 
jbrce  en  rtuin  pour  tout  faire  ;  tdus  ceax  qu'il 
employé  font  irtécherchableô  ;  il  ne  raid 
tx^mpte  de  fà  conduite  ni  de  la  leur  4  perfbti^ 
he  j  il  n'a  irien  à  crakidre  du  LégUlatetir^  ao^ 
quel  il  a  feul  droit  d'duvrîr  là  bouche  ^  &  de- 
vant lequel  il  ft'ita  pas  s^accufér*  D  n'efl:  ja- 
'  mais  contraint  de  réparer  fes  injuHices,  &  tout 
ce  que  peut  efpérer  de  plds  heureux  rinnocent 
qu'il  opprime,  c'efl  d'échapper  enfin  faîn  & 
ùkul^  mais  fans  fatisfaéUon  ni  dédomagemenc» 


vl 


L    Eî  T    T    R    E.  iSf 


Jugez'  de  cette  différence .  par  les  faits  hi 
|>lus  réceos/  On  imprime  à  Londres  un  ouvra* 
ge  violemment  fatyrique  contre  les  Miniflres  ^ 
le  Gouvernement,  le  Roi  même.  Les  Impri* 
meurs  font  arrêtés»  La  Loi  n'autorife  pas  cet 
arrêt,  un  murmure  public  s'élève ,  il  faut  les 
relâcher.  L'affaire  ne  fimtpas  là:  les  Ouvriers 
prennent  à  leur  tour  le  Magiftrat  à  pattie,  âc 
ils  obtiennent  d'immenfes  dommages  &  in« 
térêts.  Qu'on  mette  en  parallèle  avec  cette 
affaire  celle  du  Sieur  Bardin  libraire  à  Genè- 
ve; j'en  parlerai  d-aprèSé  Autre  cas  ;  il  fe 
fait  un  vol  dans  la  Ville;  fans  indice  &  fur 
des  foupçons  en  Tair  un  Citoyen  efl:  emprifott* 

né  contre  les  lois;  fa  maifon  efl  fouillée ,  on 
ne  lui  épargne  aucun  des  affronts  &its  pont 
les  malfaiteurs.  Enfih  fbn  innocence  efl  re* 
connue ,  il  eft  relâché ,  il  fè  plaint ,  on  le  laif» 
fe  dire  ^  Se  tout  ell  fini. 


ï58       NEUVIEME 

Sappoibhs  qa'à  Londses  j'enfle  ea  le  mat 
heur  de  déplaire  à  la  Cour ,  que  ikns  juflice  & 
fans  raifoD  elle  eut  Mî  le  prétexte  d*un  de 
mes  Livres  pour  le  iaîje  bçûler  &  me  décré- 
ter. Jauroîs  préfeatà:  requête  au  Parlement 
comme  ayant  été.  jugé  contre  les  Loix  j  je 
F-auroîs  prouvé  ;  j'aurois  obtenu  la  fatisfaélîon 
la  plus  authentique  y  &  le  juge  eut  été  puni , 
peut-être  caffé. 

Tranfportons  maintenant  M.  Wilkes  k  Ge- 
nève ,  difant ,  écrivant ,  imprimant ,  publiant 
contre  le.  petit  Confeil  le  quart  de  ce  qu'il  a 
dit,  écrit,  imprimé,  publié  hautement  à  Lon- 
dres contre  le  Gouvernement  la  Cour  le  Prin- 
ce. Je  n'affirmerai  pas  abfolument  qu'on  Teat 
fait  mourir,  quoique  je  le  penfe;  mais  fûre- 
ment  il  eut  été  fai(i  dans  l'inflant  même,  & 

dans  peu  très  grièvement  puni  (c). 

On 

Il  !■  M  >   ■      I  — ■^.—  I  I  - 

(c)  La  Loi  mettant  M.  Wilkes  à  couvert  de  ce 


L    E    T    T    R    E.  16^ 

» 

t)tl  dira  que  M.  Wilkes  étoit  tnefiilMre  dit 
torps  légiflatif  dans  fon  pays  ;  &  moi ,  iiô 
récois -je  pas  aufli  dans  le  mien?  Il  eft  vmî 
que  rAuteur  des  Lettres  veat  qu'on  n'ait  au* 
Gun  égard  à  la  qualité  de  Citoyen.  Les  rt* 
gles^  dit-il,  de  la  procédure  font  ^  doivent  être 
égales  pour  tous  les  hommes:  elles  ne  dérivent 
pas  du  droit  de  la  Gté  ;  elles  émanent  du  droit 
de  Phumanité  (d). 

Heureufement  pour  vous  le  fait  tfefl  pa» 
fXBx  (e)  ;  &  quant  à  la  maxime  ^   c'efl  fout 


côté  ,  il  a  fallu  pour  Tlnquiéteir  prendre  un  autre 
tour ,  &  c'eft  encore  la  Religion  qu'on  a  fait  inter- 
venir dans  cette  afFairci* 

(d)  Pafge  54. 

(e)  Le  drdit  de  recours  i  la  grâce  ft'âppârtenoît 
par  rÉdît  qu'aux  Citoyens  &  Bourgeois  ;  mais  par 
leurs  bons  oflSces  ce  droit  &  d'autres  furent  com* 
înuniqués  aux  natifs  &  habitans ,  qui  ,  ayant  fait 
caufe  commune  avec  eux  ,  avoient  befoîn  des  mô- 
mes  précautions  pour  leur  fureté  ;  lés  étrangers  en 
font  demeurés  exclus»    L'on  fent  auffi  q^e  le  chokç 

Partie  IL  N    ^ 


170       NE    U    V    1%  M    É 

des  ^mots  trèà  hoimêtes  cacher  un  fophifine 
bien,  cruel  L'intérêt  du  Magiftrat ,  qui  dam 
more  Etat  le  rend  fouvent  paitîe  contre  le 
Gtayeû ,  jamais  contre  Tétranger ,  exige  dans 
h  premier  cas  que  la  Loi  prenne  des  pré« 


de  quatre  parens  ou  amis  pour  afllder  le  prévenu 
dans  un  procès  Criminel  n'efl  pas  fort  utile  â  ces 
i^Ierniers  ;  il  ne  l'eft  qu*à  ceux  que  le  Magiilrac  peut 
avoir  intérêt  de  perdre ,  &  à  qui  la  Loi  donne  leur 
ennemi .  naturel  pour  Juge.    II  eft  étonnant  même 

'  qu'après  tant  d'exemples  çfFrxiyans  les  Citoyen»  & 
Bourgeois  niaient  pas  pris  plus  de  mefures  pour  la 
it^xCLé  de  leurs  perfonnes  »  &  que  toute  la  matière 
criminelle  relie,  fans  Edits  &  fans  Loix  »  prefqoe 
abandonnée  à  la  difcrétîon  du  Confeîî.  Uh  fervice 
pour  lequel  feul  les  Genevois  &  tous  les  homme& 
juiles  doivent  bénir  à  jamais  les  Médiateurs  eft  l'a- 
bolition de  la  queftion  préparatoire.  J'ai  tpojouri 
fur  les  lèvres  un  rire  amer  quand  je  vois  tant  de 
beaux  Livres,  oii  les  Européens  s'admirent  &  fefont 
compliment  fur  leur  humanité,  fortir  des  mêmes 
pays  oii  Ton  s'amufe  à  difloquer  &  brifer  les  mem* 
bres  des  hommes  ,  en  attendant  qu'on  fâche  sUs 
font  coupables  ou  non.   Je  définis  la  torture  un  mo- 

yen  prefque  infaillible  employé  par   le  fort  pour 
charger  le  fbible  des  crimes  dont  il  le  veut  punir. 


LETTRE.  i7t 

cautions  beaacxiup  plus  grandes  pour  que  lac^ 
cufé  ne  Toit  pas  condanné  injuftemenc.  Cetce 
diftin6lîon  n'efl;  que  trop  bien  confirmée  par 
ks  faits»  II  n*y  a  peut-être  pas,  depuis  Té-  , 
tabliilement  de  la  République,  un  feul  exern* 
pie  d'un  jugement  injufle  contre  un  étrza* 
ger,  &  qui  comptera  dans  vos  annales  com^* 
bien  il  y  en  a  d'injuftes  &  même  d'atroces 
contre  des  Citoyens?  Du  rede,  il  dt  trèt 
imi  91e  les  précautions  ^'il  importe  de 
praidre  pour  la  fureté  de  ceux-ci  peuvoïc 
ÙM  inconvénient  s'étendre  à  tous  les  préve- 
nus,  parce  qu'elles  n'ont  pas  pour  but  de 
lauver  le  coupable^  mais  de  garantir  l'inno- 
cent* Cdt  pour  cda  qu'U  n'efl:  fait  aucune 
exception  dans  l'article  XXX  du  règlement, 
qu*on  voit  aflez  n'être  utile  qu'aui:  Genevois» 
'Revenons  à  la  comparaifon  du  droit  négatif 
dans  les  dçux  Etats. 

N  a 


î7a       NEUVIEME 

Celui  da  Roi  d'Angleterre  confifte  en  dent 
chofes  ;  à  pouvoir  feul  convoquer  &  diflbii- 
dre  le  corps  légîflatif ,  &  à  pouvoir  rejetter 
les  Loîx  qu'on  lui  propofe;  mais  il  ne  conGfta 
jamais  à  empêcher  la  puîflance  légîflative  dé 
connoître  des  infraâions  qu'il  peut,  faire  à  la 
Loi. 

D'ailleurs  cette  force  négative  efl:  bien  tenï» 
pérée  ;  premièrement ,  par  la  Loi  triennale  (/) 
qui  l'oblige  de  convoquer  un  nouveau  Tarle^ 
ment  au  bout  d'un  certain  tems  ;  de  plus ,  par 
fa  propre  néceffité  qui  l'oblige  à  le  laiflcr 
prefque  toujours  aflèmblé  (g);  enfin,  par  le 
droit  négatif  de  la  chambre  des  communes, 
qui  en  a,    vîs-â-vîs  dé  lui-même,   un  noa 


.  (/)  ,Deveniip  feptennale  par  une  faute  dont  .les 
Angîois  ne  font  pas  à  fe  repentir. 
'  '{g)  Le  Parlement  n'accordant  Jcs  -fub/îdes  que 
pour  une  année,  force  ainii  le' Roi  de  les  lui  rede- 
mander tous  les  ans^. 


L    E    T    T    RE.  173 

moins  puiflant  que  le  flen. 

Ellç  ;efl:  tempérée  encore  par  la  pleine  au- 
torité  .que  chacune  des  deux  Chambres  une 
/ois  aflèmblées  a  fur  elle-même  ;   foit  pour 

propofer ,  *  traiter ,  difcuter ,  examiner  les  Loi? 
&  toutes  les  matières  du  Gouvernement  ;  foie 
par  la  j)artie  de  la  puiflance  executive  quel- 

N 

les, exercent  &  conjointement  &  leparéiçent; 
tant  dans,  la  Chambre  .des  Communes  ,  qui 
cqnnQit,.de8  griefs  publics  &  des  atteintes 
pôrtées^  ^U3^;Loix,  que  dans  la  Chambre  des 
P;airs,.  Jugjes  fuprêipes  dans  les  matières  ;  cri- 
minelles ,'  &  furtout  dans  ceUes  qui  ont.  xap- 
port  aiix  crimes  d'Etat.  . 

Voila,  Monfieur,  quel  efl  le  droit  négatif 

du  Roi  d'Angleterre.  Si  vos  Magiflrats  n'en 

réclament  qyt'un  pareil,, Je;  vous  confeille  de 

ne  le  leur  pas  contefter^  Mais  je  ne.  vois  point 

.ijuel  befpin.,  dans  votre,  fituatîon  préfente, 

N  3 


J      4 


y 


174       NEUVIEME 

r 
\ 

ils  peuvent  jamais  avoir  de  la  puifTancë  léglf- 
latîve  9  ni  ce  qui  peut  les  contraindre  à  la 
convoquer  pour  agir  réellement ,  dans  quel* 
que  cas  que  ce  puîflè  être;  puilque  de  noa* 
velles  Lois  ne  font  jamais  néceflaires  à  gêis 
qui  font  au  deflus  des  Loix,  qu'un  Couver* 
nement  qui  fubfifte  avec  fes  finances  &  n*a 
point  de  guerre  n*a  nul  be£bin  de  nouveaux 

* 

impôts,  &  qu'en  revêtant  le  corps  entier  du 
pouvoir  des  chefs  qu'on  en  tire ,-  on  rend  te 
choix  de  ces  chefs  prefque  indiffèrent. 

Je  ne  vois  pas  même  en  quoi  pourroit  les 
contenir  le  Légiflateur,  qui,  quand  il  exifle, 
n'exifle  qu'un  inllant ,  &  ne  peut  jamais  décî« 
der  que  Tunique  point  fur  lequel  ils  l'inter- 
rogent, , 

Il  eft  vrai  que  Te  Roi  d*Anglecerre  peut  fân 
re  la  guerre  &  la  paix;  mais  outre  que  cette 
puiflance  efl:  ;^u$  apparente  queréeOe,  àx 


/ 


L    E    T    T^R    E.  175 

moîQS  quant  à  la  guerre ,  j'ai  déj»  fait  voir  ci* 
jdevaot  Si  daos  le  Contr^â  Social  que  ce  n'ell; 
1»$  de  celfi  qu'il  s'agit  pour  vous,  &  qu'il  faut 
renoncer  aux  droits  honorifiques  quand  on 
ireut  jouir  de  la  liberté.  J'avoue  encore  que  ce 
frinœ  p6ut  donner  &,  dter  les  places  au  gr^ 
de  fes  vues ,  &  corrompre  en  détail  le  Légif* 
lateur.  Ceft  prédfémenc  ce  qui  met  tout  l'a- 
vantage du  côté  du  Conièil  >  h^  qui  de  pareils 
moyens  font  peu  néceflaires  &  qui  voujs  eii* 
chaîne  à  moindres  frais.  La  corruption  eft  ua 
abus  de  la  liberté;  mais  elle  efirune  preuve  que 
b  liberté  exifte ,  &  Yqn  n'a  pas  befoin  de  cor* 
xompre  les,  gens  que  l'on  tient  en  fon  pouvoir  ; 
quant  mx,  i^aces,  fans  parler  de  celles  dont  1« 
Confeil  difpofe  ou  par  lui-même  ,  où  p^r  le 
Deux^Cesnt,,  i}  &at  mieux  pour  les  plus  unpor- 
tantes  ;  il  lesremi^it  de  fes  propres  membres  ^^ 
ce  qui  lui  cfl:  plw  avantageux  encore  j  car  09 

N4 


r»* 


\ 


/ 


176       N    E  'U    V    I    E    M    E 

«ft  toujours  plus  ftir  de  ce  qu  on  fait  par  fet 
tnaîns  que  de  ce  qu'on  faît  parcelles  d'aucrui 
L'hiftoire  d'Angleterre  eft  pleine  de  preuves 
de  la  réfîftance  qu'ont  faite  les  Officiers  ro^ 
yauit-  à  leurs  Princes ,  quand  ils  ont  voulu 
tranfgreffer  les  Loîx.  Voyez  fi  vous  trouverez 
ichez  vous  bien  dès  traits  d'une  réfiflance  pa* 

reille  faîte  au  Cohfeil  par  les  Officiers  de  l'E- 
tat,  même  dans  les  cas  ks  plus  odieux?  Qui- 
conque à  Genève  eft  aux  gages  de  la  Répu- 
blique ceffe  à  rînftanc  même  d'être  Citoyen  ; 
Jl^n^ft  plus  que-  Pefclavc  &  le  fatellite  des 
vingt -cinq,  prêt  à  fouler  aux-  pieds  la  Patrie 
&  lés  Loix  (îtôt  qu'ils  fordonneot.    EniBn  b 
Loi,  iguî  ne  lâiffe -en  Angleterre kûeune  pitf 
iancb  au  Roi  pour  :niàl  faire ,  lui  en  donne 
une  très  grande  pour  faire  le  bien-;  îl  ne  pa» 
roit  pas  que  ce  foat  dé  ee  côté^e  le  Cônfeiji 
•çft  jaloux  d'étendre  la  fienac»  .    - 


*      LETTRE.  177 

Les  Rois  d'Angleterre  aiTurés  de  leurs  a« 
vantages  font  imérefiës  à  protéger  la  conflitu* 
tien  préfente,  parce  qu'ils  ont  peu  d'efpoir  de 
la  changer.  Vos  Magiftrats,  au  contraire, 
lÛrs  de  fe  fervir  des  formes  de  la  yôtre  pour 
en  changer  tout  à  fait  le  fond ,  font  intéreflës 
à  conièrver  ces  formes  comme  l'inflrument  de 
leurs  ufurpations.  hc  dernier  p$s  dangereux 
qu'il  leur  refle  à  &iré  eft  celui  qu'ils  font  au- 
joqrd'hui.  Ce  pas  fait ,  ils  pour;:oot  &  dire 
èxfecore  plus  iùtérefTés  que  le  Roi  d'Angleterrer 
à.  cDnTerver  h  conflitution  établie ,  mais  pas 
on  motif  bien  différent.  Voila  tpu^e  la  parité 
quç  je  trouve  entre  l'état  politique  de  PAngle^ 
terre  &  le  vôtre.  Je  vous  laifle  à  juger  dans 
lequel  efk  la  liberté. 

Apres  cette  comparaîfon  ,  l'Auteur ,  qui  fè 
plait  à  vous  préfenter  de  grands  exemples  ^ 
TOUS  offre  celui,  dç  l'ançienae  Rome,    Q  lq| 

N  s 


t7S      NEUVIEME 

reproche  avec  dédain  Ces  Tribuns  brouillons 
âc  féditieux  :  Il  déplore  *  amèrement  fous  cette 
orageufe  adminiftraciôn  le  trifle  fort  de  cette 
malheureufe  Ville,  qui  pourtant  n'étant  rien 
encore  à  Téreftion  de  cette,  Magiftrature , 
eut  fous  elle  cinq  cents  ans  de  gloire  &  de 
profpéricés,  &  devint  la  capitale  du  mon* 
de.  Elle  finit  enfin  parce  qu'il  Ëiut  que  tout 
finifte  y  elle  finit  par  les  ufurpations  àt  fes 
Grands,  de  les  Confuls/  de  les  Généraux  qui 
rënvahirent  :  elle  périt  par  l'excès  de  fa  ptiîf* 
£mce  ;  mais  elle  ne  Tavoît  acquife  que  par  la 
bonté  de  fon  Gouvernement.  Oh  peut  dire 
en  ce  fèns  que  fes  Tribuns  la  détruifirent  (i^). 


(&)  Les  Tribuns  ne  fortoieot  point  de  U  Ville; 
ils  n*avoient  aucune  autorité  hors  de  fes  murs  ;  aiiffi 
les  Confuls  pour  fe  fouftraire  i  leur  infpeélîoo  te' 
noient-ils  quelquefois  les  Comices  dans  la  campagne. 
Or  les  fers  des  Romains  ne  furent  point  forgés  dans 
Rome,  mais  dans  fes  armées ,  &  ce  fu(  par  leots 


1    . 


LETTRE.  I7S) 

r 

Au  refte  je  n'excufe  pas  les  faute*  du  Peu- 
pie  Romain  ,  je  les  ai  dites  dans  le  Contraft 


"  ■  I 


conquÂtes  qu'ils  perdirent  leur  liberté.    Cette  per« 
te  ne  vint  don^  pas  des  Tribuns. 

Il  eft  vrai  que  Céfar  fe  fervit  d'eux  comme  SyK 
la  s'étoit  fervi  du  Sénat  ;  chacun  prenoit  les  mo- 
yens qu'il  jugeoit  les  plus  prompts  ou  les  plus  fCirs 
pour  parvenir  :  mais  II  falloit  bien  qud  quelqu'un 
parvint,  &  qu'importoit  qui  de  Marins  ou  de  Syl-^ 
la,  de  Céfar  ou  de  Pompée,  d'06lav«  ou  d'Antoine 
fut  l'ufurpateur  ?  Quelque  çarti  qui  l'emportât  l'w 
furpation  n'en  étoit  pas  moins  inévitable  ;  il  fallok 
des  chefs  aux  Armées  éloignées  ,  &  il  écoit  ÇHtr 
qu'un  de  ces  chefs  deviendroit  le  maître  de  l'Etat: 
Le  Tribunat  ne  faifoit  pas  à  cela   I:i  moindre  chofc. 

Au  refte,  cette  même  fortie  que  fait  ici  l'Auteur 
des  Lettres  écrites  de  la  Caiijpagne  fur  les  Tribuns 
-ïu  Peuple,  avoit.été  déjà  faite  eh  1715  par  M.  de 
Chapcaurouge  Confciller/ d'Etat,  dans  un  Mémoire 
contre  l'Office  de  Procureur  générsfl,  M.  Louis  Le 
Port ,  qui  remplîflbit  alors  cette  cbaige  avec  écltft , 
lui  fit  voir  dans  une  très  belle  lettre  en  réponfe  à 
ce  Mémoire,  que  le  crédit  &  Faûtotîtë  des  Trlbui^s 
avoient  été  le  falut  de  la  République,  &  que  fa  def- 
Uuâion  n'étolt  point  venue  d'etix ,  ;  mais  des  Côiv 
fuis.  Sûrement  lé  Procureur  général  Le  Fort  ne 
prévoyoit  gueres  par  q^ui  fefoit  renouvelle  de  nos 
jours  le  fentiment  qu'il  réfucoit  fi  bien. 


i8o        NEUVIEME 

Social  ;  je  l'ai  blâmé  d'avoir  ufurpé  la  puif- 
fance  executive  qu'il  dévoie  feulement  conte- 
nir  (i).  faî  montré  fur  quels  principes  le  Tri- 
tunat  devoit  être  inftitué  ,  les  bornes  qu'on 
Revoit  lui  donner,  &  comment  tout  cela  fe 
pouvoit  faire.  Ces  règles  furent  mal  fuivîes  à 
Rdme;  eBes  auroient  pu  l'être  mieux.  Toute- 
fois  voyçz  ce  que  fit  le  Tribunat  avec  fes  a- 
bus,  que  n*eut-il  point  fait  bien  dirigé?  Je 
vois  peu  ce  que  veut  id  l'Auteur  des  Lettres: 
pour  conclurre  contre  lui  -  même  j'aurois  pris 
le  même  exemple  qu'il  a  ch6ifi« 

Mais  n'flJlons  pas  chercher,  fi  loin  ces  iM- 
très  exemples ,  fi  fafl:ueux  par  eux-mêmes,  & 
fi  trompeurs  par  leur  application.  Ne  laiflTez 
point  forger  vos  chaînes  par  l'amour -proi^re. 


/-■  j 


(i)  VoTfez  le  Contraft  Socîal  Livre  IV.  Chap.  V, 
Je  crois  qu'on  trouvera  dans  ce  Chapitre  quf  eft 
-fort  court  ,    quelques    bonnes    maximes  fui  cet^ 
matière. 


LETTRE.         m^ 

Itioç  petits  pour  vous  comparer  à  rien ,  ref* 
tez  en  vous  -  mêmes ,  &  ne  vous  aveuglez 
point  fur  votre  pofition.  Les  anciens  Peuples' 
ne  font  plus  un  modèle  pour  les  modernes;  ils 
leur  font  trop  étrangers  à  tous  égards.  Vous 
lurtout,  Genevois,  gardez  votre  place,  & 
n'allez  point  aux  objets  élevés  qu'on  vous 
préfente  pour  vous  cacher  l'abyme  qu'on  creu« 
le  au  devant  de  vous.  Vous  n'êtes  ni  Ro- 
mains, ni  Spartiates;  vous  n'êtes  pas  même 
Athéniens.  Laiflez-là  ces  grands  noms  qui  ne 
vous  vont  point.  Vous  êtes  des  MarcHands , 
des  Ârtifans,  des  Bourgeois,  toujours  occu-> 
pés  de  leurs  intérêts  privés  de  leur  travail  de 
leur  trafic  de  leur  gain  ;  des  gens  pour  qui 
la  liberté  même  n'eft  qu'un  moyen  d'acquérir 
fens  obftacle  &  de  pofféder  en  lÛreté. 
*  Cette  fituation  demande  pour  vous  des  ma* 
:iimes  particulières.    N'étant  pas  oififs  coni« 


\ 


182       N    E    U    V    I    E    M    E 

me  étoient  les  anciens  Peuples ,  vous  ne  poup 
vez  comme  em  vous  occuper  fans  cefle  du 
Gouvernement  :  mais  par  cela  même  que  vous 
pouvez  moins  y  veiller  de  fuice  y  il  doit  être 
infticué  de  manière  qu'il  vous  (bit  plus  ai(3 
d'en  voir. les  manœuvres  &  de  pourvoir  aux 
abus»  Tout  fbin  public  que  votre  intérêt  cip,^ 
ge  doit  vous  être  rendu  d'autant  plus  fadle 
à  remplir  que  c'eft  un  foin  qui  vous  çqùXq 
&  que  vous  ne  prenez  pas  volontiers.  Our 
vouloir  vous  en  décharger  tput-à-feic  c'eft 
-  vouloir  ceflêr  d'être  libres.  Il  bat  opter,  dic 
le  Philofophe  bienfaif^t,  &  ceux  qui  ne 

V 

peuvent  fupporter  le  travail  n'ont  qu'à  cher- 
cher  le  repos  dans  la  fervitude. 

Un  peuple  inquiet  défœuvré^remuaat^  &^ 
faute  d'affaires  particulières  toujours  prêt  à 
le  mêler  de  celles  de  l'Etat,  a  befoin  d'être 
contenu,  |e  le  fais;  mais  encore  un  coup  la 


L    ]^    T    T    R    E.  2&3 

BoargeoiCe  de  Genève  eft-elle  ce  Peuple-là? 
Rien  n'y  refTemble  moins;  elle  en  e(l  Tantî- 
pode.  Vos  Citoyens,  tout  abfbrbés  dans  leurs 
occupations  domeftiques  &  toujours  froids 
fur  le  refte,  ne  fongent  à  Tintérêt  public  que 
quand  le  leur  propre,  efl:  attaqué.  Trop  peu 
Ibi^eux  d'éclairer  la  conduite  de  leurs  chefs , 
ils  ne  voyent  les  fers  qu'on  leur  prépare  que 
quand  ils  en  fentent  le  poids.  Toujours  dif- 
traits  9  toujours  trompés  »  toujours  fixés  fur 
d'autres  objets  »  ils  fe  laiffent  donner  le  diange 
fur  le  plut  important  de  tous,  &  vont  tou* 
jours  cherchant  le  remède ,  faute  d'avoir  la 
prévenir  le  mal.  A  force  de  compailêr  leurs 
démarches  ils  ne  les  font  jamais  qu'après  coup« 
Lrcurs  lenteurs  les  auroient  déjà  perdus  cent 
fois  fi  l'impatience  du  Magiftrat  ne  les  eut 
ituvés,  &  fi,  prefle  d'exercer  ce  pouvoir  fu* 
prême  auquel  il  afpire  »  il  ne  les  eut  lui-même 
avertis  du  danger. 


m 


NÊtJVÎÊMË 


Saivei  l'hiftorique  de  votre  Gouventemeîif , 
Vous  verrez  toujours  le  Coilfeil ,  ardent  danj 
fes  entreprifes  ,  les  manquer  le  plus  fouvent 
par  trop  d'etnprefTement  à  les  accomplir ,  & 
vous  verrez  toujours  la  Bourgeoifie  revenir  en- 
fin fut  de  qu'elle  a  l^flTé  faire  fans  y  mettre 
oppofition. 

En  1570.  FEtat  étoit  obéré  de  dettes  &  af» 
fligé  de  plufieurs  fléaux.  Comme  il  étoit  maV 
aifé  dans  la  circonftance  d'aflèmblér  fouvent 
Je  Confeil  général ,  on  y  propofe  d'autorifer  les 
"Confeils  de  pourvoir  aux  befoins  préfens:  la 
propbfition  paffe.  Us  partent  4e  -  là  pour  s'ar- 
roger le  droit  perpétuel  d'étaSlir  des  impôts , 
&  pendant  plus  d'un  fiécle  on  les  laiffe-feire 
fans  la  moindre  oppofition. 

En  17 14.  on  fût  par  des  vues  fecrettes  (k) 

l'en- 


(t)  Il  en  t  été  parlé  ci-devant 


L    E    T    T    R    E.  1^5 

l'ehtrepriïè  îmmenfè  &  ridicule  des  foflrtîfiçl- 
tions,  fans  daigner  confulter  le  Confeil  gè'rtîé- 
rai ,  &  centré  la  teneur  des  Edks/  En  cdnf?- 
qoence  de  ce  beau  projet  on  établit  pour  dir 
ans  des  impôts  fur  lefqiiels  on  ne  le  confulte 
pas  davantage.  Il  s'élève  quelques  plaintes;* on 
les  dédafgfie  ;  &  tout  fe  tait. 

En  1725  lé  terme  des  impôts  expire;  il*  s'a- 

* .  .  ».  '*  « 

.gît  de  les  prolonger.  Cétoit  pour  la  Bourgeoi- 

lie  le  moment  tardif  mais' néceflâîre  de  reveh- 

cliquer  fotl  droit  négligé  fi  lôtogteins.   Mais  la 

•  •         •   .  .  .  ^    » 

pefle  de  Marfetlle  &  la  Banque  royale  ayatic 
dérangé  le  commerce ,  chacun  occupé  de^  dahr 
^ers  de  fk  fortune  oublie  ceux  de  fa  liberté. 
Le  Confeil,  qui  n'oublie  pas  lès  vues  ^  renou- 
velle en  Deux-Cent  les  impôts ,  fans'  qu'il  foît 
quefiîon  du  Confeil  généraL^ 

A  réxpiratîon  du  fécond  terme  lés  .Citoyens 
ie  réveillent,  &  après  cent  foixante  ans^l'im- 

Pmie  II.  O 


r 


.it6       NEUVIEME 

jàokocty  ils  réclament  ienfîa  tout  de  bon  4ear 
droit.  Alors  au  Heu  de  céder  ou  tenaporifer,  on 
ftame  me  co^IpÂràtipa  (/).   Le  complot  & 


</)  II  s'igiflbît  de  forincr ,  par  une  enceinte  bar- 
TÎcadée ,  une  efpece  de  Citadelle  autour  de  Téléva- 
i  tiop.  furiaqucUe  cft  UHôtel-de- Ville  ,  pour  aflcrvir 
de -là  tout  le  Peuple,    Les  bois  déjà  préparéis  pour 
cette  enceinte,  un *plan' de  difpofition  pour  la  gar- 
lair,  :le$  ordres. donnés  en  conféquence  aux  Capital- 
nés  de  la  garnifon ,  des  tranfports  de  munitions  & 
-d^ftpites  der^Arfedat-âl'Hôtel-de-Vine  ,  le  tampon- 
nement  de  vingtrdeux  pièces  de  canon  dans  un  boa« 
levard  éloigné  ,    Iç  tranfmarchement  clandeftîn  de 
'J^l^ûçf^s  autxes  ;  eq  un  tnot  tous  les  apprêts  de  \^ 
plus  violente  entreprife  faits  fans  Taveu  des  Con- 
"^finlf  par  Jfc  Syndic  de  la  garde  &  d'autres  Magif- 
tratSy  ne^urent  fuffîre»  quand  tout  cela  fut  décou- 
vert, pour  obtenir  qu'on  fit  le  procès  aux  cbupâ- 
Jb}esh   nrn)^^e,.quH>n   iti^roqvàt   ntti^mçtxt  leur 
projet.    Cependant  la  Bourgoifie,  alors  maitrefle  de 
là  Place-, J  les  laîffti  paifibiemcnt  fortîr  fans  troubler 
Jetir  retraitç  ,,fans.  IcnT;feire  la  moindre,  infultç, 
fans  entier  dans  leurs  maifons ,  fans  inquiéter  leurs 
familles,  fans  touchée i Tien  qui  leur  appartint.  £s 
tout  autre  pays  le  Peuple  eut  commencé  jpaj  jnaf- 
"iâcrcr  ces  conspirateurs,  &  mettre  leurs  malfbûs  au 
^illtg«. 


r     y  ' 


I     E    T    T    R    E.  187' 

découvre;  les  Bourgeois  font  forcés  de  pren- 
dre les  armes  ^  &  par  cette  violente  entreprife 
le  Coniêil  perd  en  un  moment  un  fiéde  d'u- 
fbipation.     . 

A  peine  tout  iemble  pacifié  quc^  ne  pou* 
Tant  eùchiter  cette  efpece  de  défaite^  on  for- 
nae  un  nouveau  conçloc  S  faut  derechef  re^ 
courir  aux  armes  ;  les  Fuiilances  voifînes  in* 
terviennent ,  &  les  droits  ^nmtueb  font  enHn 
réglés. 

En  1650.  les  Conf^  inférieurs  introduifent 
dans  leurs  corps  une,  manière  àt  recueillir  les 
fiiffrages,  m^Heure.  qud  celle  qui  eft  établfeî 
mais  qui  n'efl:  pas  conforme  aux  -Edits.  On 
contimie  en*  confefl  général  de  fdvre  l'ancien- 
ne où  fe  ^^à&at  bien  des  abus ,  &  cela  duré 
clinquante  ans  &  davantage  ,  avant  fjue  lek 
Citoyens  ibngèrït  à  fe  plaindre  de  la  contra^ 

4 

Ivention  ou  à  ^demander  Tintroduétion  d'un  pa- 

O  2 


^ 


i88       N    E:  U    V    I    E    M    E 

reil  ufage  dans  le  Confeil  dont  ils  font  mem* 
bres.  Ils  la  demandent  enfin  y  &  ce  qu'il  y  a 
d'incroyable  eO:  qu'on  leur  oppofe  tranquille- 
ment ce  même  Ëdit  qu'on  viole  depuis  on 
demi-fîccle. 

.  En  1707.  un  Citoyen  efl:  jugé  dandeftine- 
soent  contre  les  Loix ,  condanné ,  arquebule 
daDs  la  prifon^  un  autre  ell:  pendu. fur  la  dépo- 
fitîon  d'un  &11I  iaux-témoin  connu  pour  td^ 
un  autre  efl:  trouve  mort«  Tout  cela  pafle,  & 
îl  h'en  çfl;  plus  parlé  qù^en  1734.  que  quel- 
qu'iia  s'avifè  de  demander  au  Magiilrat  des 
nouvelles  du  Citoyen  arquebufé  trente  anâ 
ftupar^vant.  ;         . 

.-  En  1736  <»  érige  des  Tribunaux  crimioeb 
^ns  Syndici  .Au  milieu  des  troubles  qui  ré« 
gnoient  alors,  les  Citoyems,  occupés  de  tam 
d'autres  affaires ,  ne  peuvent  fonger  à  tout. 
En  1758.  on  répète  la  même  maniœuvrei  odoi 


LETTRE.  189 

qu'elle  regarde  veut  le  plaindre  ;  on  le  fait  tai- 
re, &  tout  fe  tait,  En  1762.  on  la  renouvel- 
le encore  (m)  :  les  Citoyens  fe  plaignent  enfin 

I «i^MI     1 ' _p__.^ ^  ^ 

(m)  Et  à  quelle  occafîon  !  Voila  une  inquifitioix 
d*Etat  â  faire  frémir.  £(t-il  concevable  ^ue  dans  un 
pays  libre  on  puHiSe  criminellement  un  Citoyen 
pour  avoir ,  dans  une  lettre  â  un  autre  Citoyen  non 
imprimée ,  ralfonné  en  termes  décens  &  mefurés 
fur  la  conduite  du  Magiflrat  envers  un  troifieme 
Citoyen  ?  Trouvez-vous  des  exemples  de  violences 
pareilles  dans  les  Gouvernemens  les  plus  abfolus  ? 
A  la  retraite  de  M.  de  Silhouette  je  lui  écrivis  u-* 
ne  Lettre  qui  courut  Paris.  Cette  Lettre  étoit  d'une 
hardielTe  que  je  ne  trouve  pas  moi-même  exempte 
de  blâme;  c'eft  peut-être  la  feule  chofe  répréhenfi- 
ble  que  j'aye  écrite  en  ma  vie..  Cependant  m'a-t-on 
dît  le  moindre  mot  à  ce  fujet  ?  On  n*y  a  pas  mê- 
me (bngé.  £n  France  on  punit  les  libelles;  on  fait 
très  bien  ;  mais  on  laifle  aux  particuliers  une  liber- 
té honnête  de  raifonne^;  entre  eux  fur  les  affaires 
publiques ,  &  il  efl  inoui  qu'on  ait  cherché  querelle 
à  quelqu'un  pour  avoir ,  dans  des  lettres  relises 
snanufcf  ites ,  dit  fon  avis  ,  fans  fatyre  &  fans  in- 
veâive,  fur  ce  qui  fe  fait  dans  les  Tribunaux.  A- 
près  avoir  tant  aimé  le  Gouvernement  républicain' 
faudra  t-il  changer  de  fentiment  dans  ma  vieillefTe, 
&  trouver  enfin  qu'il  y  a  plus  de  véritable  liberté  ^ 

^ans  les  Moti^rchies  que  dans  nos  Républiques  f     > 

O  3 


<^ 


ipo        NEUVIEME 

lannée  fUivante.  Le  Confeîl  i^ond ;  vous  ve^ 
nez  trop  tard  ;  Tafage  efl:  établi 
.  En  Juin  1762.  un  Citoyen  que  le  Confeîl 
^voit  pris  en  haine  efl:  flétri  dans  les  Livres  ^ 
&  perfonnellement  décrété  contre  TEdit  l6 
plus  formel.  Ses  parens  éjtonn^  demandent  par 
requête  communication  du  décret  ;  elle  leur  efl 
refufée,  &  tout  fe  tait.  Au  bout  d'un  an 
d'attente  le  Citoyen  flétri  voyant  que  nul  ne 
protefl:e  renonce  à  Ion  droit  de  Cité.  I^  Bour- 
geoifle  ouvre  enfin  les  yeux  &  réclame  contre 

la  violation  de  la  Loi  :  il  n'étoit  plus  tems. 
Un  fait  plus  mémorable  par  fon  efpece, 
quoiqu'il  ne  s'agiilè  que  d'une  bagatelle  efl; 
celui  du  Sieur  Bardin.  Un  Libraire  commet 
à  fcn  correlpondant  des  exemplaires  d'un  Li« 
vre  nouveau;  avant  que  les  exemplaires  ar- 
rivent le  Livre  efl:  défendu.  Le  Libraire  va 
déclarer  au  Alagiflxat  (a  coromiilion  ,  &  de-> 


LETTRE.  191 

•  • 

mander  ce  qu*îl  doit  faire.  On  lui  ordonn* 
d'avertir  quand  les  exemplaires  arriveront;  ils 
arrivent,  il  les  déclare,  on  les  faifitj  îl  at- 
tend  qu*on  les  lui  rende  ou  qu'on  les  lui 
paye;  on  ne  fait  ni  l'un  ni  l'autre:  il  les  re- 
demande y  on  les  garde.  II  préfente  requiSte 
pour  qu'ils  foient  renvoyés,  rendus,  ou  pa- 
yés :  On  refufe  tout.  II  peift  (es  Livres ,  ' 
&  ce  font  des  hommes  publics  chargés  de 
punir  le  vol,  qui  les  ont  gardés. 

Qu'ott  pefe  bien  toutes  les   circonftances 
db  ce  fait  i  &  je  doute  qu'on  trouve  aucun 

V 

autre  exemple  femblable  dans  audm  Parle- 
ment ,  dans  aucun  Sénat ,  dans  aucun  Con- 
fdl ,  dans  aucun  Divan ,  dans  quelque  Tribu-  ' 
nal  que  ce  puiflè  être.  Si  Ton  vouloit  attaquer 
le  droit  de  propriété  fans  raifon  fans  prétexte 
&  jufques  dafls  fa  racine,  îl  feroit  impoflîble 
de  sY  pT&xàtt  plus  ouvertement.    Cependant 

04 


\  » 


'  » 


ipî        NEUVIEME 


TafFaire  palTe,  toat  ]e  monde  fe  tait»  &  fans 
des  .griefs  plus    grades   il   n'eut  jamais    été 
queflion  de  celui-là.    Combien  d'suitres  font, 
reftés  dans  Fobfcurité  faute  d'occadons  pour* 
les  mettre  en  évidence? 
^  Si  l'exemple  précédent  efl  peu  important 
en  lui-même,  en   voici  un  d'un  .genre  bien 
différent.    Encore  un  peu  d'attention»  Mon- 
fieur,  pour  cette  affaire,  &  je  fupprime  tou- 
tes celles  que  je  pourrois  ajouter. 
,  Le  20  Novembre  1763  au  Confeil  général 
affemblé  pour  l'éleâjon  du  Lieutenant  &  du 
TrêfcM-ier ,  les  Citoyens  remarquent  une  dif- 
férence entre  l'Edit  imprimé  qu'ils  ont  &  l'E- 
dit  manufcrit  dont  un   Secrétaire  d'Etat  fait 
le6lure  y  en  ce  que  l'éleftion  du   Tréfbrier 
doit  par  le  premier  fe  faire  avec  celle  des 
Syndics,  &  par  le  fécond  avec. celle  du  Lieu» 
tenant.    Ils  remarquent,  de  plus,  que  Télec- 


LETTRE.  193 

tion  du  Tréforîer  qui  £bIon  YEàk  doit  fe  fai- 
re tous  les  trois  ans,  ne  fe  fait  que  tous  Iqé 
Gx .  ans  félon  YnÇzge  ^  &  qu  aa  bout  des  trois 
ans^  on  fe  contente  de  propofer  la  confirma-, 
tion  de  celui  qui  efl;  en  place. 
^  Ces  différences  du  texte  de  la  Loi  entre 
le  Manufcrit  du  Confeil  &  TEdit  imprimé, 
qa*on  n'avoit  point  encore  obfervées^  en  font 
remarquer  d'autres  quîs  donnent  de  Tinquiétu* 
de  fur  le  refte.  Malgré  l'expérience  qui  ap- 
prend aux  Citoyens  Finutilité  de  leurs  Ré- 
préfentations  les  mieux  fondées ,  ils  en  foQt 
à  ce  fujet  de  nouvelles ,  demandant  que  le 
texte  original  des  Edits  foit  dépofé  en  Chan- 
cellerie ou  dans  tel  autre  lieu  public  au  choix 
4u  Confeil,  où  Ton  puifTe  comparer  ce  tex« 
te  avec  l'imprimé. 

Or  vous  vous  rappellerez,  Monfieur,  que 
par  l'Article  XLU  de  l'Edit  de  1738  il  eft  dit 

Os 


194-        N    Ë    U    V    I    Ê    M    E 

qa  on  fera  imprimer  au  plutôt  un  Code  gé* 
néral  des  Loîx  de  TEcat,  qui  contiendra  tous 
les  Edits  &  Réglémensi  II  n'a  pas  encore 
été  queftion  de  ce  Code  au  bout  de  vingt  fîx 
ans,  &  les  Citoyens  ont  gardé  le  filènce  (n). 
'Vous  vous  rappellerez  encore  que ,  dans  un 
Mémoire  imprimé  en  1745, un  membre  prof- 
crit  des  Deux-Cents  jetta  dé  violens  foupçons 
fur  la  fidélité  des  Edits  imprimés  en  171 3  & 
réimprimés  en   1735 ,  deux  époques   égalée- 


(n)  De  quelle  excufe  de  quel  prétexte  peut-oo 
couvrir  Tinobiervation  d'un  Article  auffi  exprès  & 
suffi  important  ?  Cela  ne  Te  conçoit  pa$.  Quand 
par  hazard  on  en  parle  à  quelques  Magiilrata  en 
converfation  »  ils  répondent  froidement.  Chaque  E' 
dit  particulier  eji  imprimé  ^  rc^enAïeZ'les.  Comme  fi 
l'on  étoit  fur  que  tout,  fut  imprimé ,  &  comme  ii  le 
recueil  de  ces  chiffons  formoit  un  corps  de  Loîx 
complet,  un  code  général  revêtu  de  l'authenticité 
xequife  &  tel  que  Tannoce  TÀrticle  XLII  !  Eft-ce 
ainfî  que  ces  Meil^rs  reuiptifleQt  un  engag^ement 
tufli  formel  ?  Quelles  conféquences  (inîftres  ne 
pourroit-on  -pas  tirer  de  pareilles  omiffions  f 


LETTRE.  ï9S 

ment  fufjpeâesL  .  II  dît  avoir  <xrf)âdonné  fut; 
des  Edits  manurcrics  ces  imprimés,,  dans  lef* 
quels  il  affirme  avoir  trouvé  quantité  d'erreurs 
dbqt  il  a  fait  note,  &  il  rapporte  les  propres 
termes  d'un  Edie  dé  1556  y  omis  tout  .entier 
dans  rimprîmé.  A  des  imputations  fî  grave? 
le  Confeil  n'a  rien  répondu,  &  les  Citoyens 
ont  gardé  le  iGlençe. 

Accordons ,  fî  Ton  veut ,  qi»e  la  dignité  du- 
Confeil  ne  lui  permettoit  pas  de  répondre  a« 
lors  aux  imputations  d'un  proicrit.  Cette  mê- 
me dignité,  Thonneur  com^nromis^  la  fidélité 
fufpeâée  exigeoient  maintenant  une  vérifica* 
don  que  tant  d'indices  rendoient  néceflàire,, 
&  que  ceux  qui  la  demandoient  avoient  droit 
d'obtenir. 

Point  du  tout  Le  petit  Confeil  juftîfie  le 

* 

diangement  fait  à  l'Edit  par  tm  ancien  ufage' 
auquel  le  Confeil  général  ne  s'étant  pas  op^ 


Ï96       NEUVIEME 

pofé  dans  ion  origine  n'a  plus  droit  de  s*op^ 
po&ï  aujoard*hui. 

II  d<»n6  pour  raifon  de  la  différence  qm 
efl:  entre  le  Manufcrit  du  Confeil  &  l'inopri- 
më^  que  ce  Manufcrit  ^(l  un  recueil  des  & 
dks  avec  les  diangemens  pratiqués ,  &  con- 
ientis  par  le  Iilence  di)  Confeil  général  ;  aa 
liea  que  Timprimé  n  efl:  que  le  recueil  des 
mêmes  Edits^  tds  qu'ils  ont  pafle  en  Confeil 
général 

jQ  juftifie  la  confirmation  du  Tré(brier  cou* 
cre  TEdit  qui  veut  que  Ton  en  élifè  un  au- 
tre ^  encore  par  un  ancien  ufage.  Les  Cito- 
yens n'apperçoivent  pas  une  contravention 
aox  Edits  qu'il  n'autorife  par  des  contraven* 
cicMQS  atttérîeures  :  ils  ne  font  pas  une  plainte 
qu'il  ne  rebute,  en  leur  reprochant  de  ne 
•'être  pas  plaints  plutôr. 

Et  quant  à  b  communication  du  tâcte  ori-  ' 


LETTRE. 


»P? 


ginal  des  Loix,  die  eft  nettement  refiifée  (o); 
foit  comme  étant  contraire  aux  règles;  Ibit  par- 
Ce  que  les  Citoyens  &  Bourgeois  ne  Mvent 


^^^m^^t^Êém 


(«)  Ces  refufc  fl  4ars  &   fl  fùrs  à  toutes  les  Ré* 

préfentations  les  plus  raifonnables  &  les  plus  juftes 

paroîfTent  peu  naturels.     Eft -H  concevable  quel© 

Confcil  de  Oeopve  ,  cogjpofé  dans  fa  majeure  par. 

tie  d'hommes  éclairés   &   judicieux,   n'ait  pas  fentî 

le  fcandale  odieux  &  même  eflRrayant  de  refufer  â 

des  homjnes  libres,  â  des  membres  du  ^-égifla^eur,' 

la  communication  du  texte  authentique  des  Loix    & 

•4e  fenentçr  aîQfî  comme  à  plaifîr  des  fbupçoiis  pro^  ' 

duits  par  Tair  de  myftere  &   de  ténèbres  dont  il 

VenVironne  fans,  ccfle  à  leurs  yeux  ?    Pour  moi ,  je 

penche  i. croire  que  ces  refus  lui  coûtent,  mais 

qu'il  s'eft  prefcrit  pour  règle  défaire   tomber  l'ufa- 

^edes  RépréCbûtattons ,  par  des  réponfes  conftaïa- 

ment  négatives.  En  effet  eft-il  à  préfumer  que  les 

hommes  les  plus  patiens  ne  fe  rebutent  pas   de  de« 

mander  pour  ne  rien  obtenhr  ?   Ajoulea  la  propofi- 

tion  déjà  faite  en  Deux-Cent  d'informer  contre  les 

Auteurs  des  dernières  Répréfentatîons ,  pour  avoir 

ufé  d'un  droit  que  la  Loi  leur  donne.    Qui  voudra 

-déformais  s'expofcr.  à  des  pourfuites  pour  des  dé- 

ïnarches  qu'on  fait  d'avance  être  fans   fuccès  V  Sî 

x'eft  là  le  plan  que  s'eft  fait  le  petit  Ck)iifeil,  il 

faut  avouer  qu'il  le  fuit  très  bien.  ^ 


\ 

t 


ip8      N    E  ,,V   ;V  .1    E    ME 

connoître  iautre  texte  des  Loix  aux  le  Uxtè 
imprimé^  quo^ue  le  pedc  Confeil  en  fuîye  uo 
autre  &.  le  fade  fuivre  ei^  Confiai  général  (f }• 
Il  eft  donc  contre  les  règles  ^ue  celai  gui 
a  palTé  un  aéle  ait  comnumîaidcHi  de  rori^- 
nal  de  cet  a6te ,  lorfque  lès  variantes  dans  les 
copies  les  lui  font  foupçonner  de  faffificatiofi 
ou  d'incorr^âion,  ^îl  dX  dans  h  règle  qu'on 
ait  deux  différens  textes  des  mêmes  Loix^ 
l'un  pour  les.  particuliers  &  Taut^e  poof  le 
Gouvernement  l  Ouîtes-vous  jamais  rîea  de 
femblabie?  Et  toutefois  fur  toutes  ces  décou*- 
vertes  tardives,  fur  cous  ces  refiis  révcricans, 
les  CitoyeQs ,  écondujits  dans  leurs  demandes 
les  plus  légitimes ,  fe  taifent ,  attendent ,  Se 
demeurent  en  repos. 


»»»«——  ■  I  ii  «M 


,  (f)  Extrait  dès  Regiftres  du  ConfeU'  du  7.  Dé- 
cembre 1763  en  réponfe  aux  Réptéfentations  ver- 
baU$  fakos  le  ^i  Novembre .  par  ûx  Citoyens  ou 
Bourgeois. 


L  X    T  VT    RE-  199 

'  Vaib  f  Mohfîeur  »  dès  faits  notoires  dans 
votre  Ville,  &  tous  plus  connus  de  «voos  que 
de  moi  ;  f  en  pourrais  àjoatér  cent  autres, 
fkns  compter  ceux  qui  me  Ibnt  édiapés.  Ceux- 
ci  fuffiroDt  pour  juger  fi  la  Bom^eoifie  de 
Genève  e&  ou  fut  jamais^  je  ne  dis  pas  re* 
muante  &  féditicuÊ^  mais,  vigilante ,  attenti- 
ve ,  radie  à  Vémouvoir  pour,  défiendre  les 
droits  les  mieuic .  établis  &  le  :.plusi  ouverte* 
ment  attaqués? 

On  nous  dit  (fi^une  iJgfhn  vive^  ingénîtufê 
&  très  occupée  de  fes  droits  foUtiques  aurait  ttft 
extrême  befoin  de  âormer  à  fon  Gùuvememen» 
une  force  négative  (q).  En  expU^ant  cecXQ 
force  négative  on  peut  convenir  du  i»rinci- 
pe;  msds  qjd-ce  à  vous  qu'on  en  veut  faire 
Inapplication?.  A-t-on  donc  oublié  qu'on  vous 


1 .11. 1  ■  '■■ 


(s)  Page  170. 


aoo       NEUVIEME 

donne  aîHain  plus  de  fâng'-froîd  qu'aux  autre* 
Peuples  (r)  ?  Et  comment  peut-on  dire  que 
cdoi  de.. Genève  Voccupe  beaucoup  de  &s 
droits  politiques ,  quand  on  voit  qu'il  ne  s'en 
occupe  jamais  que  tard,  ayec  répugnance,  & 
ièulement!  qwDd  le  péril  ^lë  plus  preflànt  Ty 
contraint,?.  De  fbïxe  qu*<en  n^attaquant  pas  fi 
brtifcpièmfic^  les  droits  jde  ia'ficwrgeaifie,  ^ 
ne  tient  qu'au  Coxifeil 'quelle  ne  s'en  occupe 
jamais; 

V  Mettons  <in  moment  en  paisallele  ks  deux 
pSffds  pour  juger  duquâ  Faflivité  efl  le  plus  à 
crainclre^  &  où  dok  être  placé  le  droit  négatif 
pour,  modérèf  cette  a£i!ivîté. 
'  D'ufi  côté  je  vois  un  peuple  ûrès-peu  nom- 
breux» paifible  iSi  Çroid ,  con^fé  d'honmies 

;    .  labo* 


(0  Page  154* 


LETTRE.  HQt 

laborieux,  amateurs  du  gain»  fournis  pour  le^r 
propre  intérêt  aux  Loix  &  à  leurs  Minifbes , 
tout  occupés  de  leur  négqçe  ou  de  leurs  mé- 
tiers ;  tous  )  égaux  par  leurs  droits  ^  peu 
dilUngués  par^la  fortunes  n*ont  enjtre  eux  jjfi 
chefs  ni  çliens  ;  tous ,  tenus  piu:  leur  cpair 
merce  par  leur  état  par  leurs  biens  dans  une 
grande  dépendance  du  \Magi{bat ,  ont  à  le 
ménager;  tous  crsugpent  de  lui  déplaire;  s'ils 

veillent  fe  mêlçr  d^s  affaires  publiques  c^eft 

,  ...... 

toujours  au  préjudice  des  leurs.  Diflraits 
d'un  côté  par  des  objets  plps  intére0àQs  pour 
leurs  familles;  de  Fautre,  arrêtés  par  des  coq* 
iîdérations  de  prudence  »  par  Fexpérience  dis 
tou9  les  tej(Ds,  qui  \&aT  apprend  combW  daqs 
un  aufli  pietit  £tat  que  le  vôtre  od  tout  parti- 
culier d[b  incdEuomeot  fo^s  les .  yeux  du  Cou- 
feil  il  eft  dangj^eux  de  roffenfer,  ils  font  poiv 
tés  par  les  raij^i  les  plu<  fortes  à  tout  faot* 
VartU  II.  ? 


262        N    E    li    V    I    É-  k    Ë 

fier  à  la  paîi  ;  car  c'efl:  par  elle  feule  qu'ils  peu- 
vent profpérer  ;  &  dans  cet  état  de  chofà 
diacun  trompé  par  (bn  intérêt  privé  aîme  en- 
tore  mieuz  êtfe  protégé  que  libfe,  &  fait  û 
tour  pour  faire  Ton 'bien.         ♦ 

De  Tautre  côté  je  vois  dans  une  petite 
Ville,  dont  les  affaires  font  au  fond  très  peu 
de  chofe,  un  corps  de  Magiflràts  indépendant 
âc  perpétue] ,  prelque  oifif  paf  état»  faire  fa 
principale  occupation  d^un  intérêt  très  grand, 
'&  très  naturel  pour  ceux  qui  commandébc, 

« 

c'eft  d*àccrôitre  ihceffamnient  Ton  empire  ;  car 
ràmbition'  comnie  l'avarice  fê  lioùrrît  de  fès 
avantages ,  &  'pitis  oh  étend  fa'  puifBlnce ,  jfliis 
on  cfl:  dévoré  du  défîr  de  tout  pouvoir.  Sains 
^C'elTe  attentif  à  marquer  des  dÛtaûbes-  trop  peu 

fenfibles*  dans '(es  égadt  de  nàiffance  »  il  ne 

»      -     «i^  •  '  /^ 

'Voit  en  eux  que  fes  "inférîéuis  ,  &  bfûlè  d'y 
Voîr  fes  fujéttf  '  Armé  dé  toute  la  fôïcè  pubtf 


Le  t  t  à  e:       ^y 

^e;  dépQncaîre  de  toute  Tautorité,  interprète 
&  dirpeaf^ceut  des  Loîx  qui  le  gênent ,  il  s'en 
fait  une  arme  offenfive  &  défenfive ,  qui  le 

% 

irend  redoutable ,  re(pe6lable,  iacré  pour  totu 
bèux  qu'il  veut  outragisr.  C'efl;  au  notn  même 
de  Ik  Loi  qu'il  peut  la  tranfgreflèr  impunéi 
nient.  Il  peut  attaquer  la  côhflitution  en  feî: 

gnant  de  là  défendre  ;  il  peut  punir  comme 

•  -  ... 

m  rebelle  quiconque  ofe  1^  défendre  eri  eSeu 
Toutes  les  entreprifes  de  ce  ccttrps  lui  dev;en*; 
nent  faciles;  il  ne  laiiTeà  perfonne  le  droit  dd 

les  arrêtei^  m  d'en  conis^îcre:  il  .peut  agir ,  dif- 

.  •  '  ■  *^  "  » 

fêter  9  fuij^ndrei  il  peut  féduire  effrayer  pu* 

iiir  ceux  qui  lui  réfiflenti  &  s'il  daigne  entf 

•     •         •  •  ■■  * 

pltoyer  pour  cela  des  prétextes ,  c'eft  plus  par 

•  .  '  •        >  *^ 

bienféancè  que  par  néceflité*  II  à  donc  la  vo- 

lônté  d'éteodre  fa  puiffance ,  &  le  moyen  d^ 

parvenir. à  tpijC  ce  qu'il  veut  Tel  eft  l'état  ré* 

•     '  y. 

laltif  du  petit .  Coiïfeil  &  4ç  la  BourgeoiCe  aé 

Pi 


/ 


ftQ4      NEUVIEME 

Genève.  Lequel  de  ces  deax  corps  dok  avoir 
le  pouvoir  négatif  pour  arrêter  les  entreprifès 
de  Fautre  ?  L^Auteor  des  Lettres  aflure  que 
c*eft  le  premier. 

Dans  la  plupart  des  Etats  les  troubles  ister^ 
nos  viennent  d'une  pc^ulace  abrotie  &  (I:upi« 
de  ,  échauffée  d*abord  pv  d'iûfiipportables 
vexations  >  puis  ameutée  en  fectet  par  des 
brouillons  adroits ,  revêtus  de  quelque  zmaati 
^'ils  veulent  étendre.-  Mais  eft-il  rien  de  plus 
faux  qu'une  pareiQe  Idée  aj^iquée  à  la  Bour* 
geoifîè  de  Genève  »  à  pi  partie  au  moins  qui 
fait  face  à  la  puiilance  pour  le  meuntien  des 
Loix?  Daùs  tous  les  tén^  cette  partie  a  tou* 
jours  été  Tordre  moyen  entft  les  riches  &  les 
pauvres,  encre  les  chefs  de  TËtat  &  la  popu* 
hce.  Cet  ordre,  compofô  d'hommes  à-pea- 
près  égaux  en  fortune,  «n  état,  en  lumières, 
^'efl;  ni  aflez  élevé  pour  avoir  des 


-<i  trt'ii 


L    E    T    T    R    R  20S 

m  aflez  bas  pour  n'avoir  ti^  à  perdre.  Leur 
grand  intérêc  leur  îméi^t  comnuin  efl:  que  les 
Loix  fbient  obfervées,  les  Magiibats  relpec* 
tés,  que  la  cooflicution Te  foutlemie  &  que 
r£tat  fok  tranquille.  Perionne  dans  cet  ordre 
ne  jouît  à  nul  égixcd  à'une  telle  iupâioricé 
ikr  les  aittres  qu'il  puiflê  les  mettre  en  jeu 
pour  fon  intérêt  particulîen  Cefl:  la  (dus  faine 
partie  de  la  République,  la  f^ile  qu'on  foit  af- 
furé  ne  pouvoir  dans  fa  oosiduite  fe  propoiêr 
d'antre  objet  que  le  bien  de  tons.  Auffî  voit^- 
on  toujours  dans  leurs  dém^ches  communes 
une  décence,  une  modeftie,  une  fermeté  re& 
pe6faieuie,  une  certaine  gravité  d'hommes  qui 
fe  fentent  dans  leur  droit  &  qui  fê  tiennent 
dans  leur  devoir.  Voyez.,  au  contraire,  de 
quoi  l'autre  parti  s^étaye  ;  de  gens  qui  nar 
gent  dans  fc^ttknce,  &  du  peuple  le  plus  ab« 
jet.  EStrCC  dans  ces  deux  extrêmes ,  fun 

P3 


\ 


; 


^otf       NEUVIEME 

pont  acheter  l'autre  pour  fe  vendre ,  qu'oi^ 
àoit  chercher  l'amour  de  la  ja(Uce  &  des  loïsit 
Ç'efl:  par  eux  toujours  que  l'Etat  dégénère:  Le 
riche  tient  la  Loi  dans  (a  bourfe  ^  &  le  pauvre 
^ime  mieux  du  paki  que  la  liberté.  II  fufBt  de 
comparer  œs  dçux  partis  pour  juger  l^uél 
doit  porter  aux  Loix  la  pren^ere  atteinte  ;  & 
cherche2;  en  effet  dans  votre  hiftoire  fi  too^ 
les  compbts  ne  font  pas  toujours  venus  du  cô* 

« 

té  de  la  Magiftrature  ^  &  fi  jamais  les  Cito- 
yens ont  eu  recours  à  la  force  que  lorfqu'il  l'a 
fallu  pour  s'en  garantir  3 

On  raille,  fans  doute,  quand,  fur  les  confé- 
qaences  du  droit  qu^e  réclament  vos  Concito- 
yens ,  on  vous  répréfente  FËtat  en  proye  à  la 
brigue,  à  la  féduâion. ,  au  premier  venu.  Xjù 
dioit  négatif  que  veut  avoir  le  Conieil  fut  ia- 
connu  jufqu'ici;  quds  maux  en  e(l-il  arrivé? 
U  en  fut  arcivé.  d'affreox  s'il  eut  vouki  s'y  ce- 


X 


L    E    T    T    R    E, 


«97 


(lir  quand  la  Bourgeoide  a  f^jic  valoir  le  fien. 
.  llécorqua  rargqmencqu'oo  tire  de  deux  cents 
a^ns  de  proipérîté ;  que  peut-on  répondre?  Ce 
(jouvememeot,  diro^  -  vous ,.  .établi  par  le 
tems,  Ibutenu  par  tapt  de  ticses ,  autorifç  p^r 
m  fî  lox^  ufage,  con&cré  paç  fe^  Tuccès,  & 
où  le  drpjit  négatif  des  Confeib  fut  toujours 
ignoré,  ne  vaut-il  pas  bien  c^autre  Gouvet- 
.nement  arbitraire ,  dont  nous  ne  coonoiflbns 
çncore  ni  les  propriétés,  ni  fes  rapports  avec 
notre  bonbeur,  â(  où  la  raifon  ne  peut  Jioujs 
çaontrer  que  le  coinble  ^e  notre,  miferç  ? 

Suppoiêr  tous  lés  abus  dans  le  parti  qu'oa 
attaque  &  n*en  fuppofer  ajucun  dans  le  fijen^ 
eft  un  fophifme  ïii^n,  grofli^  &  bien  ordinaî^ 
]:e,  dont  tout  homme  fênfé  doit  fe  garanjtii^ 
Il  faut  fuppofer  des  abus  de  part  &  d'autre,, 
parce  qu'il  s'en  gliffo^par  tout;  mais  ce  n'efl 
pas  ^  dire  qu'il  y  ait  égalité  dafis  leuri  coi^ 

P  4 


I 


fo8       NEUVIEME 

féquences.  Tout  abus  eft  un  mal,  fbovent  iné- 
vicabie ,  pour  lequel  on  ne  doit  pas  proloire 
ce  qui  eft  bon  en  foL  Mak  compares ,  & 
vous  trouverez  (Tun  côte  des  maux  l&rs ,  des 
maux  terr2)]es  fans  borne  Ôc  fans  fin  ;  de  Tan» 
tre  Tabos  même  diffidie ,  qui  s'H  éfl  grand  fera 
paflâger,  &  tel,  que  quand  3  a  fièu  if  poxte 
toujours  aveqdii  fon  remède.  Car  encore  une 
fois  il  n'y  a  de  liberté  poffible  que  cbns  Tcb* 
fervation  des  Loix  ou  de  la  volonté  gétaénh 
le,  &  il  n*efl  pas  plus  dans  la  vokmté  géné> 
raie  de  noire  à  tous ,  qde  dans  h  volonté 
particulière  de  nuire  à  foi-même.  Mm  ibp- 
pofi^s  cet  abtis  de  h  liberté  auiB  naturel  que 
Tabus  de  la  puiflance.  O  y  aura  tcràjours  cette 
£fiîérence  entre  l'un  &  fautre,  que  fabos  de 
k  liberté  tourne  au  préjudice  du  peuple  qui 
en  abufe,  &  le  puniffitm;  de  fbn  propre  tore 
h  fbrce  à  en  chercher  le  remède;  àinfi  de  ce 


LETTRE.  201) 

côté  le  mal  n'eft  jamais  qu^une  crife,  3  ne 
peat  faire  on  état  permanent.  Aa  lieu  que 
Tabut  de  la  puiiEmce  ne  tournant  point  aa 
préjudice  da  poiftant  mais  da  foible,  eft  par 
la  nature  iàns  ntefore  fans  frein  fans  limites: 
Il  ne  finit  que  par  la  deftniâion  de  celoî  qui 
ieul  en  relient  le  mal.  Difbns  donc  qu'il  finit 
que  le  Oonvemement  appartienne  au  petit 
nombre  »  nnfpeâion  fur  le  Gwvemement  k 
la  généralité ,  &  que  fi  de  part  ou  d*autre 
Tabus  tfk  inévitable  »  il  vaut  encore  mieux 
^a*un  peuple  foit  malheureux  par  fk  fauté 
qu'opprimé  fous  la  main  d'autrui« 

Le  premier  &  le  plus  grand  intérêt  pdbliç 
êfl;  toujours  la  juflice.  Tous  veulent  que  kl 
conditions  fbient  égales  pour  tous,  &  h  jut 
cice  n^eA  que  cette  égalité.  Le  Citoyen  ne 
teut  que  les  Loix  Ôc  que  robj^êrvation  dei 
Lois.    ChaqiMK  particulier  dans  le  iieople  ùm 

y  5 


aïo      N    E    U    V  I    E    M     B 

bien  que  &*il  y  a  4es  ei^cepûon^  ^  elles  m  iç- 
font  pas  en  fa  taveur«  Ainlî  tçut  craignent  les 
excep^ops,  &  quîcrainc  les  eicceptions  sûm^ 
la  Loi.  Chez  les  Chefs  c*ell:  tojice  autre  chpfc: 
leur  état  même  eft  un  éc^t  de  préférence,  Sç 
^8  cherchent  4es  p;référeQce$.par  tout  (i).  S'ils 
yeuleot  doi  Loijt ,  ce  n'dS:  pas  pour,  leur  obéic , 
ç^ell  ppur  en  être  les  attitrés.    Us  veulent  des 

y' 

Loix  pour  fe  mettre^à  leur  place  &  ppur  fe 
faire  craindre^  en  leur  nom.  Tout  les  favo- 
^ife  dao^  ce  prc^et.  Ils  fk  fervent  des  droits 

■       ■        ■-    -■    —  ^       -      -  ^ 

^)  Ln  juftîce  dans  le  peuple  éft  une.  vertu  d'é- 
tat ;  la  violence  ft  la  Tyrannie  eft.  de  même  dans  le$ 
Chefs  un  vice  d*état.  Si  nous  étions  â  leurs  places 
BOUS  autres  particuliers  \  nous  deviendrions  comme 
çux  violent  uruxpateur^  iniques.  Quand  des  Magi^ 
trats  viennent  donc  nous  prêcher  leur  intégrité  leur 
âodératlon  ,  ienr  juftice  ,  ils  nous  trompât  »  s'ils 
veulent  obtenir  aînfi  iâ  confiance  que  nous  ne  leur 
devons  pas  x  non  qu'ils  ne  puifTcnt  avoir  perfonnèf- 
lement  ce»  vertus  dont  ils  fe  vantent  ;.  mais  alors  11^ 
font  une  exception  ;  &  ce  n*eft  pas  aux  exceptions 
4uè  la  ]^oi  ^oit  ^ivpir  égard.  '  *    ^ 


LETTRE.:        «Il 

^  qu'ils  ont  pour  ufurper  fans  rifque  oeûx  qu'i)B 

n'ont  pas.  Ccnnipe  ils  parlent  tpqjom^  au  nom 

4e  la  Loi,  même  en  h  violant,  quiconque  off 

h  défendre  contre  eux  efl  un  fëditjcu};  un  %er 

bdle:  il  doit  périr ,  &  pcmr  eox»  toujours  fô^s 

de  rimpQnité  dans  lew^s  entreprifès,  le  pis  qui 

'     .leur  arrive  efi:  de  fie  pas  réûffîr.    S'ils  ont 

befoin  d'af^uis,  par  tout  iis  en   trouvent* 

C'efl:  une  ligue  naturelle  «^ue  ci^e  des  fo^^^, 

&  ce  qui  fait  la  fbiblefle  des  foibles  efl;  de 

ne  pouvpir  le  liguer  ainfî.    Tel  eQ:  le  deftin 

.du  peuple  d'avoir  toujours  au  dedaiis  ^  au 

:  dehors' fes  parties  pour  juges.  Hisureux!  quand 

il  en  peut  trouver  d'afTez  équitables  poux  lie 

protéger  contre  leurs  propres  maximes ,  cpn- 

j^t  ce  fentiment  fi  gravé  dans  le  cœur  hu- 

.main  d'aimer  &  favorifer  les  intérêts  feinbki* 

blés  aux  nôtres.    Vous  avez  eu  cet  avantage 

1^  ioki  ^  cç.fut  çon«ç  tjBute  «teote.  Quand 


81*       NEUVIEME 

h  Médiation  fut  accepta ,  on  voas  crut  é^ 
Ct9tk:  mais  voi»  entes  au  d^ea^eaxs  édai- 
1^  &  îexïSÊSSf  des  Médiateurs  intègres  &  gé* 
néreuz  ;  la  juftice  &  la  vérité  trkMiphereat 
FoiflSeK-Toas  toe  henreuic  deux  fois!  vous 
«urejs  jouS  d'un  bonheur  bien  noe  »  &  dont 
vos  o^reflèurs  ne  paroiflent  guère  sBarmés. 
AjNrès  vous  avonr  étaâé  tais  les  maux  ima- 
ginaires d*«i  droit  adfi  ancien  que  votre 
Cooftitutkm  &  qui  jamais  n'a  {urodhiit  aacœi 
fiud^  on  palfit  on  nie  ceux  du  Dn^it  aouveau 
q|Q'on  oforjpe  ^&  qui  fe  font  fentk  dès  aujour- 
d'hui* Fcxrcé  d'avouer  que  le  Gowernemenc 
peut  abufêr  du  droit  négatif  jufqd'à  la  plus 
intolérable  t^frannie ,  on  affirme  que  œ  i|tit 
arrive  n'arrivera  pas,  &  l'on  change  en  p(^ 
fibiiké  ians  vraifemUance  ce  qui  fe  pafle  w- 
jourd'hui  fous  vos  yeux.  Perfonne»  ofe-^-on 
diie  9  ne  dira  que  le  Gouvernement  ne  fefc 


LETTRE.  ti3 

ëqukable  &  doux;  &  rœiarqaez  que  cda  ii( 
dit:  en  répoofe  à  des  R^éfentadont  où  Toa 
fe  plaint  ^  hijuftices  &  des  violences  da 
Goaveraemen€.  Cf&  là  vraioient  ce  qu'on 
peut  içpeller  du  beau  ftyle  :  c'ed  l'éloquence 
de  Périclès  »  qui  renverfé  par  Thucydide  k 
h  kttte,  pFQuvoit  «ne  Ipeéhtteurs  que  cetok 
lui  qui  i'avoit  terrafle. 

Ainfi  donc  m  s'es^Kurant  du  bien  d'autmi 
fans  prâexee,  ep  emptifonnant  fans  n4ibn  lep 
innoceng ,  en  fléQrijQQmt  un  Citoyen  fans  T^ouïr  ^ 
en  jugeant  illégalement  un  autre  »  a  proté» 
ge^jt:  tes  livres  obfcttes  »  ^i  brûhnç  cenc 
qui  reipirent  la  vertu»  en  perfécotant  leurs* 
nuteurs^  ea  cachant  le  vrai  texte  dés  Loîx^ 
tt  refuf»it  lep  fatîdBi£tions  les  plus  juftes^ 
en  exer^t  le  plus  dur  defpodime»  en  dé*^ 
txvi&xÀ  la  liberté  qu'ils  devrdetc  défendie^ 
en  opprimant  la  Patrie  dont  ib  dejmcolent  ê- 


414        N-'-Ê  ■  O*  V    i    E   M    É- 

tre  les  pères,  ces  Meffieûrs  fe  font  complu 
ttient  à  ^éu:)c-tnêmès  fdr  h  grande  équité  dà 
feurs  jugeméns,  ils  s'êxtàHent  fat  la  douceur 
de  leur  adminifbrsciob ,  fls  affirment  avec  con- 
fiance  que  tûat  lé  inonda  elt  de  leur  avis  fur 
te  point.  Je  douté  fort,  to^efoîs^  que  câ 
atis  foit  le  TÔcrë ,  '  &  je  fuis  fâr  au  màiîA 
qu*il  n'efl:  pas  celui  des  Répréferïtans,     , 

(^e  l'intérêt  particulier  nd  me  rende  poinC 
Ihjufte.  Ceft  dé  tuas  nos  périchms  celui  cdri- 
lit  lequel  je  me  tiens  le  plus  en  garde  & 
ttoquel  j^efpere  avoir  lé  mieuîc  réfifté.  Vottè 
Magiflrat  tû  équitable  d^s  lés  chofes  indii^ 
féremes,  je  le  Croîs  potté  même  U  l'être  tofl- 
jours;  fës  pîaîces  font  péàjucrati^s î  il  rend  li 

*       •  * 

jiAkt  ât-nt  h  vend  point >  iléft:  perfonnelle* 
ttient  intégré  ;^  défihtéreflë ,  &  je  fais  que  daiÀ 
ce  Confdl  -û  defpodique  il  règne  encore  de  ÏA 
droîtu;e  i&  des  vertus,    ta  '  vo«s  mOfltradC 


L  E  T  1*  k-i:        ii'i 

W  ccfaféquences  du  droit  négatif  je  vous  ïî 
khoins  di(  ce  qu'ils  feront  dey enus  Souverains, 
que  ce  qu'ils  continueront  à  faire  pour  Têtré. 
tJne  fois  reconnus  tels  leur'  intérêt  fera  d*êtr6 
toujours:  jtiftés/  &  ilTeft  dès  aujourd'hui  d'ô- 
ire  jtiltes  le  plus  fbuvent:  mais  malheur  à 
^conque  olera  retoufir  acdc  Lois  encore , 
&  réclamer  la  liberté  !  Cefl:  contre  ces  infof-  ' 
tunés  que  tout  devient  penhis,  lé^itinie.  Ué- 
^uîté  y  la  vertu  y  l'intérêt  même  ne  tiennent 
p^oint'  devant  Yàxtmt  de  la  doiiunatibri  y  & 
celui  qui  fera  jufte  étant  le  maître  tf épargfîe 
aucune  injuftice  pour  le  devenir. 

Le  vrai  diemin  de  la  Tyrannie  n*eft  jioînt 

d'attaquer  directement  le  bîeiï  f)ublic  ;  ce  ferdît 

*révetller  tout  iû  monde  pour  le  défendit}  ma5$ 

"6*el1:  d'attaquet  fucceffiv-ement  tous  fes  défen- 

Teuts,  &  d'effrayer  quiconque  ôferoit  encore 

arpîrerà Têtré.  Perfuacîez  à  tou?  qvié  l'intérêt 


Èt6 


NEUVIEME 


public  n*eft  celui  de  perfonne  ^  &  par  cela 

•  ^ 

feul  la  fervicude  eft  établie  ;  car  quand  diacuiî 
fera  (bus  le  joug  où  fera  la  liberté  commune*? 
Si  quiconque  ofe  parler  eût  écrifé  ians  Hq* 
fiant  même ,  où  (eroot  ceux  qui  voudront  Ti- 
miter^  &  que)  fera  forgane  de  la  généralité 
quand  cbàque  individu  gardera  &p  (Ilenœ  ?  Le 
GouvemeiBent  févsK  donc  contre  les  zélés 
&  lèra  jufie  avec  les  «utres^  Ju£|i'à  ce  qu'il 
puUTe  être  inju0:e  ^vec  toui  impunément. 
Alori  fa  ji^ce  ne  fera  plus  qaune  écono* 
mie  pour  ne  pw  :di(fiper  ians  raifbn  fbn 
propre  bien* 

II  y  a  donc  un  fens  dans  lequel  le  Confdl 
cCk  julte»  &'doit  Têtre  par  intérêt:  mais  il  y 
00  a  un  dans  lequel  il  efl:  du  fy^ême  qu'il  s'eft 
Eut  d*êtie  fouverainement  jinjulie,  âr  m^le  ex-* 
cmples  ont  du  vous  app2:endre  combien  Va  pio* 
des  Loix  efi  infuffîlante  contre  la  haï- 


\ 


t    B    T    T    K    K  |è| 

ne  dû  Magîfln&  Qae  fera-cè,  Ior%ê  deve* 
nù  feul  maître  àbfolu  psar  fon  droit  négatif  il 

« 

Ae  fera  plus  gêné  par  rien  dans  fâ  conduite  y  Ô6 
ne  trouvera  plus  d'obflàde  à  les  paflîons? 
Dans  un  fi  petit  Etat  oii  nul  ne  peut  fe  eâcfatr 
dans  la  foule ,  qui  ne  vivra  pas  alors  dans  d'é-* 
temdles  frayeurs^  &  ne  ientira  pas  à  chaque 
inilant  de  fa  vie  le  malheur  d'avoir  fès  égauJS 
péar  maîtres?  Dans  les  grands  Etats  les  par-» 
ticuliers  font  trop  loin  du  Prince  &  des  chef» 
pour  en  être  vus ,  leur  petitefle  les  fauve  ^  & 
pourvu  que  le  peu{rie  paye  on  le  laiiFe  en  paix. 
Mais  vous  ne  pourrez  faire  un  pas  ikns  fentir 
le  poids  de  vos  fers.  Les  parens  ^  les  aitûs ,  les 
protégés  i  les  efpions  de  vos  maîtres  feront 

pliis  vos  maîtres  qu'eux;  vous  n'bferez  ni  dé« 
fendre  vos  droits  ni  réclamer  votre  bien  i 
crainte  de  vbus  faire  des  ennemis  ;  les  recoins 
ks  plus  dbfeors  de  pourront  tous  dérober  à  là 
Partie  IL  <^ 


Tyrannie  >  il  faudra  nëceC&ireméht  en  être  f^ 

tellrte  on  vîâime  :    Vous  fen  tirez  à  la  foB 

rcfdavage  poHtique  &  le  cîvîl ,  à  peî&é'  ofe- 

rcz-voas  refpîrer  en  liberté;  Voîïa ,  Monfieap, 

où  doit  naturellement  vous  mener  Tufirge  du 

droit  négatif  tel  que  le  ConfeQ  fe  TaîToge.  Je 

crois  qu'H  n^eti  voudra  ms  faire  un  u%e  auf& 

funefte ,  mais  3  le  pouira  cert»nemem ,  &  la- 

leule  certitude  qu'il  peut  impunément  être  in- 

3ufl:e,\Vous  fera  fentir  \ts  mêmes  maux  que  s'il 

rétoir  en  effet. 

•  Je  vous  d  montré ,  Monfîeur,  Fétat  de  vo- 

tre  Gonftitucion  tel  qu'if  fe  préTénte  à  mes 

•         •  •      . 

yeux.  Il  refaite  de  cet  expofé  que  cèttç  Con- 

fKtutîon,  prife  dans  (on  enfembïe  eft  bonne  & 
faîne  ;^  qii*en  donnant  à  la  liberté  fes  véri- 
tables bornes,  elle  ïuî  donne  en  même  tems 
toute  la  folidit^  qu*elle  doit  avoir.  Car  le 
Gouvernement  ayant  un  droit  négatif  contre 


\ 


LETTRE.  if^ 

les  innovations  du  Légîflateur ,  ^  le  Peuple  un 
droit  négatif  contre  les  ufurpadons  du  Confeif^  . 
ks  Loix  feules  régnent  &  régnetit  fût  tous  ;  te 
premier  de  l'État  ne  leur  efl  pas  moins  fournis 
que  le  dernier ,  aucun  ne  peut  les  enfreindre-^ 
nul  intérêt  particulier  ne  peut  les  changer,  Ôt 
la  Conflitution  demeure  inébranlable. 

Mais  fî  au  contraire  les  Miniftres  des  Loix 
en  deviennent  Tes  feub  arbitres ,  &  qu'ils  puif* 
fent  les  faire  parler  ou  taif e  à  leur  gré  :  fi  te 
droit  de  Répréfèntatîon  feul  garant  des  Loit 
&  d^  la  fibefté  n'efl:  qu'un  droit  illufoii^  & 
vain  qui  n^ait  en  aucun .  cas  aucun  efFet  né- 
cef&ire;  je  ne  vois  point  dé  fervitude  pareiBe 
&  la  vôtre,  &  limage  de  la  liberté  n'efl  plus 
chez  vous  cpi'un  leurre  méprîfant  &,  puérile, 
•qu'il  efl:  même  indécent  d'offirir  \l  àes  hommes 
fenfés.  Que  fert  alors  d"afrembler  le  Légifla- 
teor ,  puifque  b  volonté  du  Confcil  eft  TaîU- 


22C 


NEUVIÈME 


'  que  Loi  ?  Que  fêrt  d'élire  folemncUement  dd 
.  Magifiracs  qui  d'avsmce  étoient  déjà  vos  Ju- 
ges I  &  qui  ne  tiennent  de  cette  éleétion 
.qu'un  pouvoir  qu'ils  exer^oient  auparavant  ? 
Soumettez*  vous  de  bonne  grâce ,  &  renoncez 
à  ces  jeux  d'enfants ,  qui ,  devenus  frivoles ,  ne 
font  pour  vous  qu'un  aviliflement  de  plus. 

Cet  état  étant  le  pire  où  Ton  puilfe  tomber 
n'a  qu'un  avantage  ;  c'eft  qu'il  ne  fauroit  chan- 
ger qu'en  mieux.  C'eft  l'unique  reflburce  des 
maux  extrêmes  ;  mais  cette  reflburce  efl:  tou- 
jours grande ,  quand  des  hommes  de  ièns  & 
de  cœur  la  Tentent  &  favent  s'en  prévaloir. 
Que  la  certitude  de  ne  pouvoir  tomber  plus 
bas  que  vous  n'êtes  doit  vous  rendre  fermes 
dans  vos  démarches  !  mais  foyez  (Ûrs  que 
vous  ne  fortirez  ;  point  de  l'abtme ,  ta^t  que 
vous  {érez  divifésj  tant  que  les  uns  voudront 
agir  &  les  autres  refler  tranquilles^ 


L    E    T    T    R    E,  2»i 

Me  Toîci ,  Mondeur ,  à  la  conçlufîon  de  ces 
Lettres,  Après  vous  avoir  montré  Tétat  où 
vous  êtes ,  je  n'entreprendrai  point  de  vou^ 
tracer  la  route  que  vous  devez  fuivre  pour  en 
fortir.  S'il  en  ed  une ,  étant  fur  les  lieux  mê- 
mes ^  vous  &  vos.  Concitoyens  la  devez  voir 
mieux  que  mpi  ;  quand  on  (ait  où  Ton  efl: 
&  où  Ton  4oit  aller,  on  peut  fe  diriger  fans; 
peine.  ' 

L'Auteur  des  Lettres  dit  que  f%  on  remar- 
quoit  dans  m  Gouvernement  une  pente  à  la  vio-- 
knce  il  ne  faudroit  pas  attendre  à  la  redrejffer 
que  b  Tyrannie  s*  y  fut  fortifiée  (t).  Il  dit  en- 
core,  en  fuppofant  un  cas  qu'il  traite  à  la  vé- 
rité de  chimère,  qu'«7  rejieroiù  un  remède  trijie 
mats  légal ,  (^  qui  dans  ce  cas  extrême  pourroit 
être,  employé  comme  on  employé   la  main  £un 


ft)  Page  172. 


%2^        NEUVIEME 

Qmtrgim ,  ipimd  la  gangrène  Je  dédare  (c). 
Si  vous  êtes  ou  mm  daos  ce  csu  fuppofé 
chimérique  »  c  eCl  ce  que  je  viens  d'exami* 
oer.  Mon  canfeU  n'eft  doue  plus  ici  néœA 
faire  ;  FAuteur  des  Lettres  vous  Ta  donné 
pour  tnoL  Tou^  les  moyens,  de  réclamer 
contre  Finjuftice  font  permis  q^nd  ils  font 
paifibles,  à  plus  forte  raifon  font  permis  ceux 
qu'autorifent  ks  loix. 

Quand  elles  font  tranigrefiees  dans,  des  cas 
particuliers  vous  aves  le  droit  de  Répréfentao 
tion  pour  y  pourvoir.  Mais  q^iand  i::e  drcMt 
mène  eil  conteflé ,  c'efl:  le  cas  de  la  garante. 
}e  ne  Tai  point  miie  au  noiubre  des  moyens 
qui  peuvent  rendre  efficace  une  Réparéfcnct- 
tion  y  les  Médiateurs  eux  -  mSËoaes  n'ont  poim 
entendu  l'y  meure ,  puiiqu^l^  ont  d^aré  vit 

Wmw$\\  «»i»i    I ■   I      !■    m III   w   n         I    III  |iiiiiini»«»|>w»^»|p«pi—i^ti^w^ni,yai;^i    HLBUHj 


(^i  Paçe  iQU 


LETTRE. 


223 


vouloir  {Kurter  nulle  atteinte  à  rindépendaoce 
de  l'Etat,  âc  qu'alors,  cependant,  ils  ainroieiic 

f 

mis»  pour  ainfi  dire,  ]a  Clef  du  Gouverne^ 
mène  dans  leur  poche  (^x)^  AiaSi  dans  le  cas 
particulier  l'effet  dos  Répr^fentatioas  rejettée^ 
efl:  de  produire  un  Coqfeil  général  ;  mais  Yti* 
•fee  du  dFoic  même  de  Répréfencadon  rejette 
paroit  être  le  recours  à  la  garantie.  U  faut 
que  la  machine  ait  en  elle-même  tous  te 
îeflbrts  qui  doi^rent  |a  faire  jouer  :  quand 
die  s'arrête,  il  faut  appella:  rOavrier  pour 
la  remcmter. 


(x)  La  conférence  d'un  tsl  fyflème  eut  été  &é* 
tablir  un  Tribunal  de  la  Médiation  rélident  -  à  Gc« 
Bcve,  pour  connokyc  dei.tranfgîeflîons  des  Loir. 
Far  ce  Tribunal  la  fouverainc^  de  la  République 
eut  bientôt  é^é  détruite,  mais  la  liberté  des  Cito« 
yens  eut  été  beaucoup  ip>\us  afiuiée  qu*eile  ne  peat 
l'être  fi  Ton  ôtre  le  droit  de  Répréfentation.  Or*de 
n*être  Souverain  que  de  nom  ne  fignifie  pas  grand"* 
«hofe ,  mais  d*ê(re  libre  en  effo;  iigniSe  beaucoup» 


Q4 


224        N  -E    U    V    I    E    M    E 

Je  vois  trop  où  va  cette  relTource,  &  je 

fens   encore    mon  cœur  patriote  en  gémir. 

■ 

Auffi,  je  le  répète,  je  ne  vous  propofe  rien; 

qu*oferois'je  dire  ?  Délibérez^  avec  vos  Cbnci* 

toyens  &  rie  comptez  les  voix  qu'après  les  a-. 

voir  pefées.  Défiez-vous  de  la  turbulente  jeu- 

nefle ,  de  l'opulence  înfblente  &  de  l'indigeo- 

ce  vénale  ;  nul  fklutaire  confêiF  ne  peut  venic 

de  ces  côtés-là.     Confultez  ceux  qu'une  hour 

nête   médiocrité  garantit  des  féduétions   de 

l'ambition  &  de  la  mifere  ;  ceux  dont  une  ho^ 

norable  vieillefl^  couronne  une  vie  fans  repro^- 

che  ;  ceux  qu'une  longue  expérience  a  verfés 

dans  les  affaires  publiques  ;  ceux  qui ,  fans  am- 

bition  dans  l'Etat  n'y  veulent  d'autre  rang  que 

celyi  de  Citoyens  j    enfin  ceux  qui  n'ayant 

jamais  eu  pour  objet  dans  leurs  démarches  que 

le  bien  de  la  patrie  &  le  maindcn  des  Loix^ 

ont  mérité  par  leurs  vertus  l'eftimc  dupa- 


/ 

" 


LETTRÉ. 


435 


blic,  &  k  confiance  de  leurs  ég^ux. 
Mais  furtout  réunifTez  -  vous  tous.    Vous  ê- 

4 

tes  perdus  fans  refTouFcê  fi  vous  reftez  divi- 
tés.    £c  pourquoi  le  feriez- vous ,  quand  de  fi 

grands  intérêt^  communs  vous  unifient?  Com- 
ment dans  un  pareil  danger  la  bafle  jaloufie 
&les  petites  paflions  ofent- elles  fe  faire  en^ 
teindre  ?  Valent -elles  qu'on  les  contente  a 
fl  haut  prix  ^  &  faudra -t- il  que  vos  enfans 
difent  un  jour  en  pleurant  fut  leurs  fers  ;  voila 
le  fruit  des  difîehtions  de  nos  pères  ?  En  un 
mot ,  il  s'agit  moins  ici  de  délibération  que 
de  concorde  ;  le  choix  du  parti  que  voua 
prendrez  n'ed  pas  la  plus  grande  affaire  :  Fut- 
il  mauvais  en  lui-même,  prenez -le  tous  en*- 
femble;  par  cela  feul  il  deviendra  le  meilleur, 
&  vous  ferez  toujours  ce  qu'il  faut  faire  pour- 
vu que  vous  le  faffiez  de  concert.  Voila  mon 
avisj  Monfieur,  &  je  finis  par  .où  j'ai  cora- 

Q5 


I 


^ 

^ 


««NEUVIEME 

mencé.  En  vous  obéiiQant  fai  rempli  moll 
dernier  devoir  enveirs  la  Patrie.  Maintenant 
je  prends  congé  de  ceux  qui  Thabitent  ;  il  ne 
leur  refl:e  aucun  mal  à  me  fdre ,  &  je  ne 
puis  plus  leur  faire  aucun  bien. 

FIN. 


C  AT  A- 


CATALOGUE 

DE 

« 

LIVRES 

* 

Quon  trouve  chez  Marc  Michel  Rey 

Libraire  à  Amfterdam. 

Oeuvres  de  Jean  Jaques  Roufleau.  in  douze  S.  voL  fig. 

Amfter4ain. 
Répréfentations  des  Citoyens  &•  Bourgeois  de  Genève 

au  premier  Sindic  de  cette  République ,  avec  les  ré- 

ponfes  du  Confeil  à  ces  répréfentations.  8.    1 763* 
Bibliothèque  ie  Campagne  ou  amufemens  de  l'Elprît 

&  du  Cœur.  12.  12  vol.  avec  12  Frontifpices  &  13 

Vignettes  analogues    aux   fujets,  deffinés  par  Mr* 

Bolomey  gravés  par  Mr.  BoÛy. 
Confîdérations  fur  le  Gouvernement  ancien  &  préfent 

de  la  France,  par  le  Marquis  CCArgenfon  8.  i.  vol. 

Amfterdam.  1764. 
Considérations  fur  les  Corps  organifez  par  Mr.  Bonnet. 

8.  Amfterdam.  1764. 
Contemplation  de  la  Nature  par  le  même  2  vol.  8. 

Amfterdam.  1764. 
Traité  de  la  connoiflance  de  foi-môme  par  Jean  Màfan, 

maître -es  arxs,  traduit  de  l'Anglois  par  Jaques  Abei  ' 

-Brttm'er  Pafteur  de  TEglife  Françoife  à  Lcyde.  8.  i.vol. 

Amfterdam.  1765. 
ïnftruélion  paftorale  de  Mr.  VEvéï^e  du  Puy ,  fur  la 

prétendue  philofophie  des  incrédules  modernes.  12. 

I.  vol.  Amfterdam.  1765. 
Journal  des  Savafis  depuis  fon  commencement  en  1665 

jufqu'en  1753,  faifant  170.  volumes  12.  Amfterdam. 
Table  générale    alphabétique  du  Journal    des   Savans 

dépuis  fon  commencement  en  1665.  jufqu'à  l'Année 

1753.  înclufivement.    12.  2  vol.  Amfterdam. 
Jounial  des   Sçavans  combiné  avec  les  Mémoires  de 

Trévoux   depuis  Janvier  1754.    jufqu'en  Décembre 

1763.  en  79  volumes-   avec  leur  Table  des  Mattie- 

xes. 


CATALOGUÉ 


Journal  des  Sçavans  avec  ^es  Extraits  des  metlleurs  Jour- 
naux de  France  &  d'Angletterre  fuite  des  1 70.  voU 
du  Journal  des  Sçavans  &  des  79.  vol.  du  même  Jour- 
nal Combiné  avec  les  Mémoires  de  XrévouXJ  1764. 

Offrande  aux  aiitek  ôt  â  la  patrie,  contenant  Défenfè 
fiu  Chrîilianiftne  ou  réfutacion  du  Chapitre  huit  du 
Contracl:  Social.  Examen  hiflorique  des  quatres  Sic- 
cies  de  Mr.  de  Voltaire.  Quels  font  les  moyens  de 
tiret  un  Peuple  de  fa  corruption,  par  Jaq.  Jnt 
Roujlan ,  Mlnîllre  du  Saint  Evangile  à  Genève.  % 
I.  vol.  ÀmAcrdain.  1764.  - 

Eépublique  de  Platon  01^  Dialogue  fur  la  Juflice  divifô 
en  dix  Livres,  ii*  2  vol.  Ainfterdam.  1763. 

Hiftoire  naturelle  générale  &  particulière  avec  \t  def- 
.cripcion  du  cabinet  du  Roi,  par  Mrs.  Defiuffbn  & 
d'Aubenton  4.  11  vol.  figures  Paris. 

— ^ idem.    On  peufe  atoil:  les  Tomfes  io,  ii  (êpa- 

rément.  .     >  ,  , 

ii.  idemv.  in«i2.  is  vol.  figuresl    On  peut  avoir 

.  ies  Tomes  14  &  15.  féparément: 

Taftique  navale,  ou  Traite  des  Evolutions  &  Signaux  ; 
par  Mr.  De  Morogues.  4.  i  vol.  fîg.  Âmfterdaiii 
1764- 

Hiftoire  de  GutUve-AdpIphe  Roi  de  Suéde ,  compofée 
fur  tout  ce  qui  a  paru  de  plus  curieux,  &  fur  un 
grand  nombre  de  Manufcripts ,  &  principalement  fus 
ceux  de  Mr.  Arkenholtz ,  par  Mr.  D.  M.  Profeflfeii 
&c.  4.  I  vol.  Figures  Amfterdam.  1764. 

■  idem.  12.  4  vol.  Figures.  17(^4. 

jiritbmetù»  umverfalis  five  de  cmpqfitione  (f  refolutime 
dritbmeticà.  Auaore  If:  Newton.  Cum  commeraariojci- 
bannis  Caftillioneï ,  4.  2  voL  fig,  jîmjleiodami,  1761. 

Additions  à  l'Eflai  fur  l'Hiftoire  univerfelle  par  Mr. 
de  Voltaire.  8.  i  vol.  Amfterdam.  1763, 

AiTertîons  (E^Ctraits  des)  des  Jefuites.  8.  3  vol.  Am- 
fterdam. 1763.  

L*Homme  en  Société  ou  nouvelles  vues  politiques  pour 
porter  la  population  au  plus  haut  degré  en  France.  8- 
i  vol.  Amfterdam.  17.(53. 

t.a  voii  de  la  f|îaturé  ou  les  avantures  de  Madme.  la 
Marquîfe  de  ♦♦♦.  8.  5  part.  Amfterdànf  1764. 


870063 


•  "  »  »• 


«     »  -      1 


l'  . 


.i 


t' 


V  ' 


i 


i 


I    ^ 


r» 


\ 


s- 


Ti-i  V  h^^^* 


V 


"*■