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LETTRE Se
A M' DE JEAN,
DOCTEUR-REGENT
De la Faculté de Médecine , en
rUniverfité de Paris.
I. Sur les Maladies de St. Domingue^
I L Sur les Vlantes de la même île.
III. Sur le Rémora, & les Halcyons,
PAR
M.Chevalier, Dodeur « Régent , ancîea
ProfefTeur de la même Faculté , & ci-devant».
Médecin du Roi à St. Domingue,
i
A P A R I S i
Ckez Durand Libraire , rue St. Jacques
au Griffon & à St. Landry.
M. D C C. L I 1.
I
n^
.3nKYî
PRIVILEGE DU ROI
LOUIS PAR LA grâce: de Dieu , Roi
DE France et de Navarre a nos Ames
& féaux Confeillers , les Gens tenans nos Cours de
Parlement , Maître des Requêtes ordinaires de notre
Hôtel , Grand-Confeil , Prévôt de Paris, Baillis,
Séne'chaux , leurs Lieutenans Civils , & autres nos
Jufticiers qu'il appartiendra, SALUT. Notre amé
Laurent Durand, Libraire à Paris ,
Nous a fait expofer , qu'il déliroit faire imprimer &
donner au Public , Trois Lettres de M. Chevalier ,
Doâieur-Regsm ^ ancien Profejfeur de la Faculté de Mé-
decine en l'Univerfité de Paris ; S'il Nous plaifoit lui
accorder nos lettres de permiffion pour ce néçelTaires ;
A Ces causes , voulant favorablement traiter
l'Expofant , Nous lui avons permis ôc permettons par
ces préfentes , de faire imprimer iefdites Lettres en
un ou plufîeurs volumes , ôc autant de fois que bon lui
femblera , & de les vendre , faire vendre & débiter
par tout notre Royaume , pendant ie tems de trois
années confécutives , à compter du jour de la datte
des préfentes. Faifons defenfes à tous Imprimeurs,
Libraires & autres perfonnes , de quelque qualité 8c
condition qu'elles foient ^ d'en introduire d'impref-
lîon étrangère dans aucun lieu de notre obéïfTance :
A la charge que ces préfentes feront enregillrées tout
au long fur le regiflre de la Communauté des Impri-
meursÔc Libraires de Paris , dans trois mois de la
datte d'icelles ; que l'imprefïîon defdites Lettres fera
faite dans notre Royaume & non ailleurs, en bon pa-
pier & beaux cara(flères,conformément à la feuille im-
primée , attachée pour modèle fous le contre-fcel des
préfentes , que PImpétrant fe conformera en tout aux
reglemens de la Librairie , & nota^mment à celui du
10 Avril 1725* , qu'avant de les expofer en vente , les
Manufcrits qui auront fervi de copie à l'impreflîon
defdites Lettres , feront remis dans le même état où
l'approbation y aura été donnée , es mains de Notre
très-cher 3c féal Chevalier-Chancelier de France , le
Sieur de Lamoignon , & qu'il en fera ènfuite remis
deux exemplaires de chacune , dans notre Biblioteque
publique , un dans celle de notre Château du Louvre ,
un dans celle de Notre très-cher & Féal Chevalier-
Chancelier de France le Sieur de Lamoignon , & un
daiis celle de notre très-cher Féal Chancelier Garde
dès: Sceaux , le Sieur de Machault , Commandeur de
nôslOrdres ; le tout à peine de nullité des préfentes :
Du contenu defquelles vous mandons & enjoignons ,
de faire jouir ledit Expofant , & fes ayant caufes ,
pleinement & paifiblement , fans fouffrir qu'il leur
fbit fait aucun trouble ou empêchement. VOULONS ,
qïj% la copie des préfentes qui fera imprimée , tout au
long , au commencement ou à la fin defdites Lettres ,
foi foit ajoutée comme à l'original. Commandons au
irremier notre Huiffier ou Sergent fur ce requis , de
jfaire pour l'exécution d'icelles tous aétes requis & né-
';èej[raires , fans demander autre permiffion , & nonobf.
tanrclameur de Haro , Charte Normande , «Se Lettres
à ce contraires. CAR tel eft notre plaifir. DoNNE%
à Verfailles le dix-feptiéme jour du mois de Mai l'an
de grâce , mil fept cent cinquante-un , & de notre
Règne le trente-fixiéme. Par le Roi en fon Confeil ,
SAINSO N.
Kegifiré fur le Kf0re X. de U Chambre Koyale des
Imprimeurs é* Libraires de Paris, N^. folio cort-
formément aux anciens Réglemem , confirmés par celui d^
%t février 1723. w^ faris U
LE GRAS 5>»^»V.
PREMIERE
L E T T R
SUR LES M AL A
QUI REGNEN
A S^ DOMING
Leurs fréfervatifs & leur cure.
■•^«jh""<->-^
O u S fouhaitez , Monfieur
& cher Confrère , que je faffe
part au Public des obferva-
lions que j'ai faites à St. Do-;
mingue fur les maladies du pays,& fur
la manière de les traiter.
'-'^WWCVri; «.y-.l 'Vf-
Ma
L A D I E s
V^ous penfez que ces obfervations
pourront fervir non-feulement aux
Médecins qui fe déterminent à pafler
dans les îles Occidentales de rAmé-
rique , mais encore à ceux de Fran-
ce &c peut - être à ceux de toyte FEu-
rope.
En effet., ,plufieurs de ces maladies
qu'on peut regarder comme parti-
culières & propres à ces îles , parce
qu elles y font plus fréquentes , ôcplus
dangereufes , paroifTent ici très-fou-
vent: telles font les fièvres malignes
avec hémorrhagie , le -tétanos , les
écr^uelles , la lèpre ôc quelques autres:
à l'égard de celle que les Efpagnols
ont portée de St. Domingue chez eux,
.fout le monde fait qu'elle s'eft na-
turalifée dans tous les climats.
Si donc j'ai réuffi à traiter ces mala-
dies dans le pays vceuxqui me fuccé-
deront , feront à même de faire ce que
jVi fait, à moins que des lumierjes
DE St. Domi ngu e. 2
fupérieures ne leur diftent quelque
chofe de mieux : fi j'ai guéri par ex^
îinUïon , celles que j ai dit être com-
munes à Tun &: l'autre hémifphere
ayec moins de dégoût, de peines, dç
perte de forces qu'on n'en éprouve eii
fe livrant à la méthode ordinaire 3 il
celles que l'on juge incurables ,
comrtie les Anchylofes , ou prefquç
incurables , comme les Exoftofes , le^
Ecrouelles , la Lèpre , ont cédé à la
fumigation i je laifle à juger aux
grands Praticiens , fi l'on ne peut pa^
fe promettre en France les mcmes
fuccès.
Pourquoi le flux de bouche feroit-
îl plus nécejQTaire dans un air tempéré
que dans les pays chauds ? A l'égard
delà fumigation , . tout le monde
fait que la Faculté l'a approuvée.
Je vais donc , Monfieur , comment
çer par la defcription des maladies c
je rapporterai çnfiiite avec toute la
A i j
t
4
Ma
L^^^£^^ï :èIs
candeur poffible la manière dont je
les ai traitées.
Je fais trois claffes de ces maladies :
je place dans la première celles qui
font particulières aux Blancs ( c'eft
ainfi que dans les îles on appelle les
Européens )i dans la féconde, celles
qui font particulières aux Nègres 5
dans la troifieme , celles qui font corn-*
munes aux uns 6c aux autres.
Prefque tous les Blancs qui arrivent
dans rîle, non-feulement d'Europe,
mais encore des îles voifines te du
continent de l'Amérique , font atta-
xjués peu de tems après d'une fièvre
maligne , que Ton appelloit autrefois
maladie de Siam : on lui donna ce
nom , parce qu'elle commença , dit-^
on 5 dans la Martinique , peu de Jours
après l'arrivée d'un Bâtiment , chargé
de marchandifes qui venoient de ce
Royaume i & de laMartinique, elle
fc communiqua bientôt à St. Do-
2> È S'T. Do MI NGV E. jf
mingue. Cette maladie étoit Carac-
térifëe principalement par des hé-
morrhagies , par le nez , par les yeux ,
par les oreilles ou par d'autres parties
du corps, & très-peu en réchappoient.
Ce fymptome n eft plus fi commun >
du moins à St. Domingue : mais on
dit qu'il eft encore très-fréquent à la
Martinique 3 dans le cours de onze
années je n'en ai vu que deux dans les
quartiers de Léogane 6c du Cul-de-
fac , prefque les feuls où j'aye fait la
Médecine: j'en donnerai l'hiftoire.
Les Symptômes les plus ordinaires
delà fièvre maligne qui attaque au-
jourd'hui les nouveaux venus , font les
mouvemens convulfifs, le délire, le
Coma , & quelquefois la léthargie : les
malades lont fouvent emportés le
quatre, ou fur la fin du cinq :1e plus
fouvent , le fept, le neuf ôc le treize :
ceux qui paflentce terme > quoiqu'ils
foiem toujours en danger , même
A iij
*
$
M A L'-È J^ l E^S ^
jufquaa 25 5 guérifTent ordinàiremefft
ie 30 , le 3 3 j j'en a4 vu cependant
quelques-uns qui n'ont été guéris que
le trente-neuf 3 ce qui arrive aufli en
Europe comrne à St, Domingue.
Vous entendez -bien 5 Monfieur ,
que je parle des malades qui font
traités fuivant les règles de la Me^
decine i car ceux que les Chirur-
giens fe mêlent de gouverner , auffi-
bien que ceux qui ont le malheur
d*être relégués dans les Hôpitaux où
les Frères de la Charité veulent être
Apothicaires , Chirurgiens & Méde-
cins i ceux-là 5 dis-je , périffent prefque
tous.
Les anciens habitant font auflî quel-
quefois attaqués de cette fièvre avec
\ts mêmes Symptômes , la plupart
en guérifTent quand ils font biei> goit^
vernés.
Les maladies particulières aux Nè-
gres, peuvent au/G fe divifer en crois
claffes : celles qui arrivent aux nou-
veaux débarqués , aux enfans 6c aux
adultes.
Il eft rare que les Efclaves qu on
apporte de Guinée foient attaqués de
fièvre maligne : mais quelques-uns ->
principalement les jeunes , jufquà:
l'âge de quatorze ou quinze ans font
aflez fujets à une maladie que Ton
appelle dans le pays mal à'EJlomac, Ils
fentent delà douleur à la région épi-
gaflrique 5 tout le corps eft péfant ,
kfommeil les accable , en marchant t
en ' travaillant 5 ils voudroient être
feoiijours couchas 3 il faut les battre
pour les faire lever , àc les outils en
travaillant leur tombent des »ainsj
Ms ont une faim dévorante , on ne
jeut les raflafier.
Les enfans nouveaux-nés des Nègres
font fort fujets au tétanos qui leur prend
ordinairement avant le huitième jour ,
âcles fait périr communément en trois
A iv
s M A L A D l E "S ^
OU quatre jours. Trè:>-peu en rechap-^
peut, on pourroit peut-être même
dire qu'il n'en réchappe aucun: onap- '
pelle cette maladie , mal de mâchoire.
Il y a des habitations où elle eft plus
commune qu'en d'autres i & des Né-
greffes dont tous les enfans périffent 5
d'autres dont les enfans n'en font
point attaqués.^ Les Adultes fontauffi
fort fujets au tétanos : & il en meurt
plus que l'on n'en guérit.
Il y a encore une maladie particuliè-
re aux Negres:& qui eft fort commune.
C'eft le ver de Guinée : il arrive pour-
tant quelquefois que Its Capitaines
& leurs Equipages qui vont en Guinée
acheter ces malheureux , fe trouvent
attaqués de ces vers. Les fentimens
des Médecins & des Phyficiens anciens
& modernes font partagés fur la nature
de cette maladie : plufieurs des anciens
ont connu l'exiftence de cqs vers qui
s'engendrent dans les corps humains i
DE St. DoMîNGve. ^f
^ilslesonc appellés^r^f^, ou dracunculus
ferfarum . apparemment parce que
c'elt en Perfe qu'on a découvert les
premiers. Monfieur Aftruc croit que
c'eft une maladie endémique en Ara-
bie. De morbis venereis. lib. I. C x I;.
La plupart des modernes qui n'en
ont jamais vu, & qui n'en ont jugé
que fur des oui-dire , penfent que ce^
que Ton a appelle ver , n'eft qu'une^
lymphe concrète , qui s'eft filée , mou-
lée & durcie dans les vaifleaux, qui fe
fait jour enfuite par la peau, qu'elle
perce 5 je ne fai par quelle raifon on
l'appelle auflî , 'vena medinenfis.
Voilà , M"^- les maladies particu-
lières des Blancs &: des Nègres. Les
communes font la vérole , qui en
produit d'autres, différentes dans ces
deux efpeces d'hommes. Les Nègres
font plusfujets aux pullules ^ ou galles
véroliques , que l'on apelle des pians,
aux écrouelles , à la lèpre j car je re-
È- S
garde ces_ deux dernières maladies^
commela fuite d'une vérole qui a paflé-
par plufieurs générations de père en'
Ms. Mais les Européens font plutôt'
attaques d'obftrudions de rate, de foie^
& de diarrhées opiniâtres, qui en font-
périr un grand nombre.
Venons préfentement à la cure de'
ces maladies , & premièrement des'
nevres malignes. p
_ Lesfievresmalignes qui font très-'
irequeiîtes à Su Domingue ne difFe-
rent que du plus au moins de celles-
qu'on voit en France , principalement
en Automne. On doit faigner promp-
tement le premier jour au moins deux
ou trois fois du bras avant de venir à
la faignée du pié ; car dans le com-
mencement des grandes maladies^^
lurtout de celle-ci , toutes les parties»
du bas-ventre font dans une difpoJ
feion prochaine à l'inflammation,
^ette difoofition n'eft autre chofe
9^\
D E 5*. Do MiNè l&S. t %
^ù'un faïig qui remplit le^ artères, qm^
y rampe diffiGilement , ou qui s'y ar-
rête, qui les étend dans la^ partie fu-
périearevles rétrécit par confé^uent
dans Tinférieure , ô£ fe ferme à lui-
même le pafTage , d'oii nàiflent des
€ongefl:îons mortelles.
Gr il eft démontré que les faignées
du pi^ foîit dérivatives, à Tégard de
toutes les parties qui reçoivent leur
fang, tant de Taorte defeendante^que
des artères latérales qui en fortent.
Il eft encore certain que celui qui fort
de la faphenê vient immédiatement
du cœur , par un même canal qui
change de nom fuivant les parties par
où il pafle. Il n y a donc que ce canal
quifevuide, pendant que toutes les
latérale^ avec leurs divifïons ôcfabdi-
vifions , fe trouvent gonflées par la
quantité de fang qui s y précipite ,
qu elles ne peuvent tranfmettre avec la
même célérité dans les veines qui leur
I
j/'^t'-^
'J3, M 4 Z A
D I ES
repondent, parce que ces vaifTeaux
de décharge retrouvent trop pleins.
Je lai , mon cher confrère , &
yous ne l'ignorez pas , qu'il ya eu ,
f qu II y a peut-être encore des Phv-
liciens qui nient cette dérivation re-
connue par Hippocrate& par tous les.
Grands - Maîtres dans l'art de gué-
rir i démontrée par M^ Silva * & par
d autres Médecins qui ont examiné
avec foin l'effet des faignées : mais
pour faire revenir ces Meffieurs de leur
prévention , il fuffit de leur faire ob-
lerver , qu'il n'y a point de Médecin
unpeu verfédans la pratique,qui vou-
iut faire faigner du pié dans une in^
Hammation du foie , des reins , de la
veille, de l'itiems, des intellins, ni de
quelque partie inférieure que fe foit.
yuelle raifon peut -on apporter de
1. ^^fl^"*? '* '^'^"'^ des Saignées par M. Silva &•
les Réflexions critiques fur ce Traite'. '
DE St. DOM IN G V E, l J|
cette conduite , fi ce n'eft, qu'ils crai-
gnent d'augmenter l'inflammation?
Or la faignee du pié ne peut faire ce
mauvais effet que par la dérivation
qu'elle fait fur toutes les parties qui
reçoivent leur fang de l'aorte infe-
ricurc.
Si dans le cas d'inflammation de ces
.parties , on ne doit point faire de fai-
2nées du pié , on n'en doit donc point
faire dans l'état d'une grande plé-
nitude, wr r
Après avoir fuffifamment deiempii
les vaifleaux par deux ou trois faignées
-du bras , on doit alors faigner du pie.
: Mais il faut encore beaucoup de
.prudence pour n'en faire qu'autant
qu'elles font néceffaires : on ne doit
pas fuivre l'exemple de quelques Pra-
ticiens qui en ordonnent cinq ou lix
tout de fuite^dans la vue, difent-ils , de
debarraffer la tête prife , ou d'en pre-
.y enir l'embarras. Mais ces Meffieurs ne
SSSS^
*y^p^wg*^
font pas réflexion que pendant Ja fai-
gnee du pié, les artères carotides &
ymebrales portent très-peu de fan?
dans la tête , & moins pendant une
Jeconde faignée du pié, que pen-
dant la première , moins pendant la
troifieme , que la féconde , & ainfi tou-
jours en diminuant à proportion de la
plénitude qui fe trouve dans le corps.
L. elt pour cette raifon que les faignées
àa pie font très - falutaires , quand
elles font faites avec fage/Te : mais
quand elles font trop multipliées , bien
loin qu'elles foient propres à dégao-er
latete , ellesy occafionnent un engor,.
gement mortel. Et en voici la raifon:
lorfque les artères dont nous venons
de parler , ne font pas alTez pleines ,
elles ne peuvent embrafler la colonne
de fang , m le poulTer avec la force
neceflaire pour faire avancer celui qui
Je trouve dans les capillaires 5 il ne
fait plus xiu',y.ramperj il y féjourjQe^
wm
D E £r. iD P M i:n g i; e, g |
ill s'y arrêce. Dans cet état , c eft ind^
utilement qu'on tourmente le malade ,
•par des émétiques ou autres remèdes
qui tendent à fouetter le fang 5 toutes
ces drogues ne font propres alors qu'à
caufer de rérétifme dans les vailTeaux ,
,& par conféquent à augmenter le mat,
:ôc à faire périr plutôt le malade. ^
Lors donc que Ion a fait quelques
faignées du pié , fi la fièvre continue
fur le même ton , il faut revenir au
bras i ou fi la tête eft prife ou mena-
cée de l'être , il faut faire une faignéa
ou deux de la jugulaire , qui commui-
•nément guériflent le malade. '
Si lafievxe eft accompagnée de mou-
•vemens convulfifs , de treffaillemeiis
vdans les tendons, le felfédatâf à ta
idafe de huit , dix , ou douze grains
:dans un verre d'émulfion , &^ réitéré
de quatre en quatre heures, ou de fix
:en fix heures , rend le c^lMe au ma-
lade i & contribue ânfiniment à fâ
i
i6 Ma l a d i e s
guérifoii. S'ilfurvieiKuiiG;»^, ou fi
le malade afioupi en eft menacé > ce
qui eft très ordinaire à St. Domingue 5
il^ faut avoir recours aux emplâtres
veficatoires grandes & amples bien
chargées de cantharides , appliquées
fur la nuque , & qui occupent les
épaules: on eft quelquefois obligé d'en
appliquer^ encore aux mufcles de la
partie intérieure des cuiffes ,& même
aux deux gras de jambes.
Il arrive quelquefois qu'un malade
qui a befoin d être purgé tombe dans
le Coma. Alors , s'il n'y a point de
contre-indication , il faut avoir re-
cours a l'émétique en forte dofej s'il
n'agit point, ou s'il agit trop foible--
ment, on eft obligé de donner, pour
hâter fon adion , un lavement avec
la décodion d'un ou de deux gros de
tabac.
Je ne me fuis trouvé qu'une feule
fois dans ie cas de traiter une fièvre
maligne
t
V E St. Do m in g ve. ly
maligne de cette façon , le malade
guérit contre toute efpérance , & très-
proitiptement. Il eft bon de remar-
quer que je fus obligé de faire mouil-
ler continuellement les lèvres ôc le nez
du malade avec du vinaigre , & même
d*en faire fouvent tomber quelques
gouttes dans les yeux , pour Tempê-
cher de retomber dans le Coma, jufqu'x
ce que lemétique eût fait fon effet.
Lelendemain du jour qu'il prit rémé-
rique , il parut de la difpofition à re-
tomber dans le même état: je lui fis
prendre dans un feul verre i'infufiotf
dune demi-once deféné, avec deux
onces de manne. Il guérît,
t. Quand j'arrivai à St. Domingue , je
trouyai les Chirurgiens dans Tufage de
donner 1 emétique , ou le Kermès mi-
liéral dans ces fortes de fièvres j il paf^
foit même pour conilant,qu on ne pou-
voit les guérir fans ce fecours. Mon
exemple, dans les lieux où j ai fait la
B
|§ ^ AL A p î M ^ 'X
inedecine, ôcles leçons que j'ai don-
nées à ceux que je recevoisjes ont dé-
trompés. Je dis, dans les lieux où j*ai
pratiqué la médecine 3 car on m'a af-
luré qu'au Cap, qui eft environ à
quatre-vingts lieues de Léogane , les
Médecins & les Chirurgiens prodi-
guent l'émétique. Je nefaipas com-
ment les malades s'en trouvent : mais
je puis vous dire , mon cher Confrère.,
fans prétendre en tirer vanité , que j'ai
exercé ma profeiGon avec quelque
fuccès , & que dans le cours de onze
années , je n'ai donné ce remède que
trois fois : au malade que je vkns de
citer 5 à un autre, dans une maladie
fînguliere dont j'aurai l'honneur de
vous parler 3 & à un troifieme,dans une
maladie ordinaire.
Je n'ai jamais non plus tourmenté
mes malades ni avec le Kermès, ni
avec ces brûlots que l'on apppelle
poûons cordiales. Il eil pourtant de« .
D E St. Doming\u e. i ^
cas , mais qui font très-rares, oix cos
fortes de remèdes peuvent trouver
leur place > ce font ceux de l'atonie
de toutes les parties folides : alors
j'ai donné avec fuccès un fcrupule
d*antimoine diaphorétique,avec deux^,^
trois ou quatre grains de camphre dans
une cuillerée de tifanne.
Vousfavez, Monfieur,& tous les
Médecins le favent, ce que c'eft qu'a-
tonie. Ainfi, ce que je vais en dire
n'eft ni pour vous ni pour eux i mais
pour ceux qui fans fa voir la Médecine
pourront avoir la curiofité de lire ce
m moire^
L'Atonie eft une foiblefTe de nerfs,
des artères & des mufcles qui fervent à
faire les mouvemens naturels dépen-
dans ou indépendans de la volonté.
L'homme eft une machine compofée
de canaux de difFérens diametres,& de
liquides de natures différentes , qui
font plus ou moins épais. Laviecon-
B ij
M A LA Vi JE > -^
ftftedans un mouvement de dilata-
tion ai de contra£bion du cœur & des
artères, qui reçoivent &: pouffent les
liquides dans tous les canaux du corps »
& qui les font revenir dans la cavité
gauche du cœur , d'oix ils font partis :
ceft ce qu'on appelle circulation. La
fanté confifte dans une parfaite aifance
de cette circulation , dans tous les
points qui compx)fent les parties du
corps.
c La force du cœur, des artères & des
rfiufcles eft donc une force de refforc
qui fouffre d'être dilaté par l'entrée des
liqueurs , & qui les oblige à fe contrac-
ter ou reflerrer, lorfqu'ils ont été éten-
dus autant que la longueur de leurs
fibres a pu leur permettre.
Lorfque ces fibres font trop lâches
ou pour avoir été troplongtcms dans
une tenfion forcée , ou pour être trop
macérées, pour ainfi dire, par l'hu-
midité, ou par quelque autre caufe
1
DE SVé D(yMlNGVE. il
<jue ce foit, elles ne peuvent plus
poufler ces liqueurs , & la machine
périt : fi elle ne les pouffe que foi-
blement toute la machine languit :
les mouvemens ne s exécutent que
foiblement & imparfaitement i voilà
Fatonie ou défaut de reffbrt.
On parvient fouvent à le rétablir,
en diminuant parles faignées le vo-
lume des fluides qui oppofent aux fé-
lidés une réfiftance qu'ils ne peuvent
vaincre: mais il arrive auffi quelque-
fois que le reffbrt manque à un point,
qu'il ne peut pas même faire fortir le
fang par Touverture de la lancette ,
comme dans le cas fuivant.
Une Demoifelle de 15 à 16 ans {a)
d'un embonpoint raifonnable, après
une ou deux faignées tomba dans un
tel état d'atonie, quelle ne pouvoit
faire le moindre mouvement dans fon
(a) Mademoifelle de Marcombe , nièce de Mr»
Feron , Confeill^r au Confeil Supérieur de Léogam^^
B iij
OtZ M Al A O t È $
lit fans s'évanouir : le pouls étoîc très-
Eetit & très-lent, la peau feche, fans
eaucoup de chaleur. La nature,
qui eft le guide du Médecin (h)
muette & fans force , ne m'indiquoit
point le choix des toniques les plus
convenables. La faignée étoit impra-
ticable : lefangfautoitparrouverture
de la lancette , & puis il n'en couloic
pas une goutte. L'émétique me faifoic
craindre de jetterla malade dans une
fyncope mortelle i ou dans des con-
vulfions dangereufes. La fecherefle de
la peau ne permettoit pas d'efpérer du
fuccès des potions cordiales. Enfin,
obfervateur affidu de fon état & de fou
poulsj jem*apperçûs que la peau de-
venoitun peu plus fouple, & moins
feche. Sur ce léger indice , je me dé-
terminai pour Tantimoine diaphoré-
tique & le camphre. La première dofe
( b ) hfaitura ftimulata f^ impulfa artis peritis ^nid
faciendumjit demmjiraf» Hippocrates.
D E St. Domîng ve. 5 ^
procura un peu de moiteur, une fé-
conde , quatre heures après , donna
une fueur abondante , ôc mit la ma*
lade hors de danger.
Voilà , Monfieur & cher Confrère ,
comment j*ai traité les fievresmalignes.
Une crème de riz légère , au lieu de
bouillon 5 que la plupart des malades
voniifTent, faifoit toute leur nourri-
ture. De Teau , de la tifanne , de la
limonade , du lait d*amande étoit leur
boiflTon.Les lavemens d'eau froide, ou
dégourdie , tenoient lieu de tous ks
ftimulans que Ton a coutume de don-
ner pour tenir le ventre libre.
J'ai eu l'honneur de vous dire , ci-
deffus , que je n ai vu que deux ma-
lades de cette fièvre maligne , qu on
appelle maladie de Siam. Le premier
étoit un jeune homme de dix-fejpt ou
dix-huit ans : {c) d'une très-foible
complexion. Peu de tems après qu^il
{e) Le jeune Bertrand de Nemours en Gadnois»
B iy
24 M A l M D l rE^Sl T
fut arrivé , la fièvre le prit , mais une^
fièvre très-légere,&: qui n'avoit aucune
apparence de fièvre maligne. Je le fis
faigner une fois du bras le même jour.
Le lendemain la fièvre continuoit fans
diminution ni augmentation : je fis
réitérer la faignée. Le troifieme jour
il n'eut point de fièvre , & ne paroif--
foit point abattu. Le foir il avoit faim ,
je fis mettre une tranche de pain dans
fon bouillon : je lui permis une cuil-
lerée de vin dans un verre d*eau, qu'il
rue demanda.
Le lendemain matin, je le trou-
vai dans une agitation extraordinaire,
jettant (qs bras , fa tête . tout fon corps
ça & là 5 & fes draps tout noirs d'une
matière qu'il vomiflToit : le pouls étoit
petit &convulfifi & il avoit tous les
fignes d'une mort prochaine. J'ordon-
nai qu'on tînt une jatte prête pour re-
cevoir ce qu'il vomiroit : c'étoit du
fang noir comme de l'encre. Il mou-
D E- Sf. Do M iNG VE^ 2 J
rut en une demi-heure de tems. Le fe-^
cond étoit un Miffionnaire Jacobin.
On vint me chercher le cinq de la ma-
ladie fur le foirj il étoit en délire ôc
urinoit du lang. Je le trouvai dans un
état défefpéré 3 j'annonçai la mort, qui
arriva la nuit. -
J'ajouterai ici Thiftoire de deux
fièvres double-tierces qui fe termine--
rent bien différemment.
Deux nouveaux débarqués vinrent
loger dans la même auberge 3 l'un étoit
un ivrogne fieffé, Tautre fage ôc fort
tempérant. La fièvre les prit le rnême
jour. Après les remèdes ordinaires ,
je les mis au quinquina. La longueur
des accès diminuoit chaque jours de
forte qu'ayant commencé à huit heures
du matin , elle ne revint du moins à
celui qui mourut qu'à trois heures
après midi. J'avois caufé avec lui plus
d'une heure le matin. Il alla enfuite
à la Ville d'où il revint à midi. A
fi^ M 4 1 A o I e s^f
cinq heures je paflai chez lui , je le
trouvai en léthargie d oii il ne me fut
pas poffîble de le tirer:, il mourut à
minuit {d}^
^ Quelques jours avant, Tivrogne
etoit tombé dans des convulfions éton-
nantes: une fueur froide , fans pouls ,
avec une évacuation prodigieufe d*un
fang noir par les felles , me fît juger
^u'il n'avoitplus quequelques heures
a vivre: le lendemain matin , je le
trouvai parfaitement guéri,
Guillaume Pifon (e) a remarqué que
ces fortes d évacuations guériflent
quelquefois les fièvres aiguës: mais ce
•netoit point une fièvre aiguë ni même
commue. Elles font encore falutaires
dans les gonflemens de la rate (/) 3 le
( i ) J'ai vu mourir un homme de quarante ans , le
leptieme ou le huitième accès d'une fièvre tierce après
pix-fept heures d'interruption.
_ (e) De Medicina Braftlienft, c. 14, ( f ) fj/^^.
*: Voyez PAphorifme 213, feaion VI.. interprété
par M. Hecquet. '^
malade n'étoit pas non piu& dans C«
C2LS»
il ne feroit peut-être pas bien dif-
ficile à ceux qui vont dans lesîles , de
fe préferver de cette dangereufe mala-
La première précaution qu'il tau*
droit prendre , feroit» avant de s^em-
barquer , de fe faire faigner , rafraîchir
& purger , fi Ton en avoit befoin , &
de vivre fobrement avant & pendant
le voyage. La mer donne beaucoup
d'appétit 5 on mange trop, fi l'on n'y
prend garde , ôc Ton accumule infen-
fiblementdes fucsqui furchargent le
corps , ôc qui ne manquent point de
produire cette fâcheufe maladie.
Lorfque la chaleur du climat en
augmentant confidérablement la
tranfpiration , en excitant même des
fueurs continuelles , nelaiffe plus dans
les vaifleaux que des liqueurs épaifles,
en même tems qu elle diminue le ref-
"à^-'ir-
fort des parties folidesj l'équilibre «î
necefTaire pour la faute & pour la vie
€lt bientôt rompu. Les liqueurs épaif-
les oppofent plus de réfiftance aux
iorces mouvantes, que celles qui le
*°'î5™o'"!=' elies circulent donc plus
■difficilement. Les folides font plus
d effort pour les poulTer , & elles avan-
cent moins: elles gonflent les vaif-
leaux , elles forcent leurs diamètres ,
îelles entrent dans des canaux , qui
dans l'etar de fanté ne doivent point
les admettre j elles dilatent les artères
capillaires fanguines& lymphatiques i
elles y forment des varices 5 elles ou-
-vrent des voies aux hémorrliagies 5 en
un mot , elles renverfent toute l'œcor
nomie du corps humain,& deviennent
une fource de maladies mortelles , &
principalement des fièvres malignes.
Ceci, Monfieur, eft un avis que je
donne a ceux qui paiTent d'un climat
•tempère dans un fort chaud. J'ajoû-
ferai en leur faveur que la caufe im-
médiate des fièvres malignes eft uit
engorgement de fang dans les vifceres,
&: principalement dans le cerveau: c'eft;
Ce qu'on appelle proprement difpofi-^
tion inflammatoire , iorfque le fangj
rampe difficilement dans ces parties 5'
ou inflammation , Iorfque fon cours efl:
totalement arrêté , foit dans fes pro-
pres vaiffeaux feulement , ce qui eft-
plus rare, foit dans lesvaiffeaux lym-
phatiques ce qui eft très-ordinaire j
foit enfin dans les uns & dans les au-^
très , ce qui arrive dans Tinflammatioiï
éomplette.
■ Un autre effet de rairchaud,c'eft d'ê-^'
treplus léger, ôc de comprimer moin^
toute lafurface du corps. La force de
l'air du dedans n étant plus fuffifani-
ment contrebalancée par celle de Taiî^
extérieur, Tair intérieur fe raréfie à pro"-
portion que la compreffion du dehors^
éft diminuée : il occupe plus de plaeè
lil^
M A
t A D 1 B S
& augmente par conféquent le volume
des liqueurs.Quand,dans cette difpofw
tion , il fe trouve déjà trop de fang
dans les vailTeaux , ou faute de s'être
fait faigner, ou pour avoir pris trop de
nourriture, Us défordres dont nous
venons de parler doivent s'enfuivre
néceffairement.
Quand même ceux qui s'embarquent
n'auroient point trop de fang, quand
même ils vivroientfobrement pendant
le voyage, & après leur arrivée 5 par la
laifonderépaiffifTement inévitable des
liqueurs , & de la raréfadion de l'air
qui fe trouve dans toutes les parties du
corps mêlé avec le fangj ilfeferoit
toujours une fauiTe pléthore, qu'il
feroit auffi dangereux de lailler lub-
fifter,que fi réellement la quantité du
fang & des autres liqueurs étolt aug-
mentée au-delà de celle qui peut
fubfifter avec la fanté dans l'air tem-
jéf é cle France. La néceffité de fe faire
1
D E St. Dom in Gvn. 1 1
faignereft donc évidente quand oii
habite un air plus chaud que celui
qu'on a quitté. Il cft donc à propos ,
& prefque indifpenfable de le faire
ioriqu*on approche du Tropique : il
eft néceffaire par la même railon de
réitérer la faignée , quand on eft ar*
rivé dans les îles : & là on doit être
encore plus fur fes gardes contre toute
forte d'intempérance.
Mais la plupart de ceux qui vont
dans cç^s climats brûlans , veulenc
boire , manger , veiller, comme s'ils
étoient en France : ils font pis encore i
ils fe plongent dans une débauche^
horrible y dont il eft d'autant plus dif-
ficile de fe préferver , que les occa-
fions en font toujours préfentes.
Je crois vous avoir dit , mon cher
Confrère , que je n'éprouvai point
cette fièvre maligne, parce que je me
fis faigner avant de fortir de Paris , je
me fis faigner à la Rochelle, à la Mar«
î^
M Al A D 1 E S
tiniqiie oii nous mouillâmes 5 je mè
fis faigner deux fois ficot que je
fus arrivé à St, Domingue : auffi , la
première année je n'eus point d'autre
incommodité que celle qui m'avoit
fait quitter Paris , je veux dire des
froids de tête, qui par trois reprifes
me donnèrent la fièvre comme j'avois
coutume de lavoir ici : depuis j'en ai
été quitte : je ne les reffens pas même
cet hyver , quoique j'aie la tête beau-
coup moins couverte que je n'étois
obligé del'avoir, & que je me faffe râ-
ler la tête régulièrement tous les mois,
ce que je ne pouvois faire dans lafai-
fon la plus chaude de l'année.
.La faignée feule ne fuffit pas tou-
jours pour remédier aux fuites de la
plénitude vraie ou fauffe > il faut y
joindre affez fouvent la purgation :
mais avant de fe purger, il faut être
affùré du bcfoin que l'on en a, & qu'on
qA dans les difpofitions convenables
pour
DE St. DOMINGVE. JJ
pour en tirer Tavantage que Ton s*en
promet»
Il eft encore un autre fecours con-
tre la fauffe pléthore , c'efl-à-dire ,
contre le gonflement du fang & des
autres liquides. Ce font les" boiffons
rafFraîchiflantes : telles font les émul-
fions faites avec les amandes , les fe-
mences de melon , de concombre , drc.
les limonades avec le limon, le citron,
l'orange fauvage , la bigarade , les
ananas > les boilTons aigrelettes fai-
tes avec les gelées d'ozeille de Guinée,
de cerifes 3 les oranges douces man-
gées le matin à jeun ôc au delTert après
le repas. '
J'ai dit ci-defllis , Monfieur , que les
jeunes Nègres nouvellement débar-
qués étoientfujetsàune maladie que
les habitans de St. Domingue appellent
mal d'eftomac. Ceft un epaiffiflement
du fang qui engorge les vaiflTeaux des
vifceres. Cet ^ épuifement vient do
C
■■■■
Î4
M A L A D
l E S
la nourriture groffiere qu'on leur a don*
née dans toute la traverfée, car ils ne
mangent que des fèves de marais
cuites avec du Tel, 6c peut-être quel-*
que graifle.
Lacuie de cette maladie confifte en
des faignées ^ des purgations , de l'ex-
ercice y 6c un travail modéré avec
une nouriture plus convenable : il en
jpieurt quelques-uns après avoir lan-
gui quelques mois.
- Le mal de mâchoire > ou le tétanos
des ^x\î^a% eft prefque incurable. Il a
diiFérentescaufes.La plusordinaire eft
le trop de feu que les Négreffes accou*
chées font dans leur café 5 à laquelle
on peut ajouter là fumée continuelle ,
^ar elles p'ont point de cheminée. Par
la chaleur du feu , les enfans font fou-
vent en fueur? & la moindre fraîcheur,
foit de la nuit quand le feu s'éteint ,
foitdumatinquandelles ouvrent leurs
portes ) ©u quelles portent leurs en*
DE St. DOMING VE. ^ j*
fans dehors, fait impreflîon fur les
nerfs délicats de ces jeunes créatures.
Le mal commence par les mâchoires :
elles deviennent immobiles. L'enfant
ne peut plus prendre le téton. La roi-
deur fe communique au dos ôc aux
cuiflTes, La circulation eft bientôt ar-»
rêtée , ôc l'enfant périt. Il eft aifé de
concevoir que la fumée peut faire le
même effet.
- Une autre caufe fort ordinaire dé
cette maladie font les paflîons de
la mère, & la manière dont elle a
vécu dans fa grolTefle : les enfans des
Négreffes qui font colères, qui boivent
beaucoup d'eau-de-vie de canne que
l'on appelle tafia, qui mangent beau-
coup de piment , font plus fujets aux
mal de mâchoire que ceux des mères
plus réglées.
Il fe peut faire auffi que la manière
de ferrer le cordon ombilical après
l'amputation , y ait quelque part : iorf-
C ij
^6 Ma i a^d I e s
qui! eft ferré outre mefure , il fait de
la douleur à renfant , parce que le fil
coupe ces vaifleaux > & cette blellure
peut caiifer le Tétanos. /» tetuno ex
njulnere Agerh^cpatitur : maxilla con-
gelant ur ac rigent ^ os operire non po^
tefi^àorfum riget é*-» crurafieBere nonpo^
tefi [a).
Il y a aulïî de certaines habitations oii
prefque tous les enfans meurent du
mal de mâchoire , ôc d'autres où il$
en font rarement attaqués.
Pour prévenir ce malheur qui caufe
beaucoup de perte aux habitans , il
faudroit envoyer accoucher les Né-
greffes d^ns les habitations où les en-»
îans font moins attaqués du tétanos.
Si cela ne fe peut , il faut tâcher d'é-
loigner les caufes qui peuvent le pro-
duire. La première précaution feroit
d'avoir une café de maçonnerie bien
( a ) Htpp}craîes di intenih AJeêïionibus» ., . . dt
âUbuiJHdituUrm .,•••• Ltkrê ds ifiçrbh jo*
V E St. Do min' gue. § 7
clofe pour faire acoucher les Négref-
fes3 ôcne point permettre qu elles ayent
du feu. Il faudroit qu'un Chirurgien
entendu, montrât auxNégrefles accou-
cheufes la manière de lier le cardon
ombilical. Pour ce qui eft d'empêcher
les Négrefles de fe mettre en colère ,
de boire du tafia , de farcir leurs ra-
goûts de piment, la chofe n eft pas fa-
cile.Lors qu'une NégrefTe dont les en-
fans meurent ordinairement du mal
de mâchoire eft accouchée , je crois
qu'il faudroit donner à l'enfant dès le
premier jour un ou deux grains de fél
fédatif dans un peu de lait de fa nour-
rice , & reitérer au moins quatre fois
dans les vingt-quatre heures : peut-
être un peu d'eau de pavot feroit elle
le même effet. Si malgré ces précau-
tions on voit venir le mal , il faut
-augmenter la dofe dufel fédatif, & le
donner jufqu'à quatre grains.
Je n ai été confulté que deux foî^
C iij
58 M A l A D l Es
pour ces enfans déjà attaqués du mal
J'ordonnai alun trois grains de Tel
fédatif de quatre en quatre heures
dans une cuillerée de lait de la nour-
rice , Tenfant reprit le téton, on le
crut fauve: je ne fai filon continua
comme je Favois confeillé , mais le
tétanos revint, & Tenfant mourut.
Dans une autre occafion, jen'avois
point de fel fédatif : je fis donner par
intervalle , ou du moins j'ordonnai
que Ton donnât une goutte de tein-
ture anodyne qui ne produifit aucun
bien i Tenfant mourut.
Quand au Tétanos des adultes,
comme cette maladie demande un
prompt fecours , (a) de que les habita.-
tions font éloignées les unes des au-
tres , je n'ai pas eu occafion d'en voir
beaucoup. Les Nègres ont coutume
de les traiter d'une manière affez con-
^ ' ( a ) Efi AHtem morhis grA-vis en fiatim curattone o^us
haèet. Hip. de internis affe<flioni bus.
1
PB 5t, Pp min GVE.
forme à ce qu'Hippocrate ordonne.
ta) Ils les frottent avec de 1 huile
chaude , & pendant la friaion les
membres deviennent fouples ; ^lais
ils fe roidiflent aufli-tôt qu'on cefle de
les frotter. Ceft ce que j'ai vu amvçî
à unç^Mulâtre , qui avoir , me dit-on ,
mangé des crables. Je foupçonnai
qu'elles étoient mauvaifes , cQmme
font ordinairement celles déterre , ou
qu'elles n'étoientpas affez cuites. Je
la euéris avec deux prifes d'orvietan.
Après que ces Nègres ont bien trotte
le malade, ils le couchent parterre ,
ôc allument du feu autour de lui ; lui
donnent des breuvages que je ne coii-
pois point , ( car ils font fort jaloux dç
leur fcience ); avec tout cela ils çn
guiriffent peu.
- fa) Huncffvere ùftftet é> f«»^/«» »»?'"" *'
ignem , ne» iL frcfe , c»Ufrceu , &c. de mterms
affeftionibus.
C iv
^.o Ma l a d 1 ES
Le véritable moyen de les guéri/;
c'eft de les faire fuer avec de bonne
thériaque dans du vin , à laquelle il
faut ajouter quelques gouttes anody-
nes. Il faut les faigner quand on peut,
& leur tenir le ventre libre par des la-
vemens. Il me fouvient d'avoiiautre-
fois à Paris guéri de ce mal , un hom-
ine , dont tout le corps étoit fi roide
qu il n'étoit pas poffible de le faigner.
Je lui fis prendre , par intervalles , de
la teinture anodyne, jufqua ce que
fes bras devenus fouples puflent per-
mettre de lui tirer du fang. J'en ai
guéri quelques-uns à St. Domingue i
iun entre-autres fi fort travaillé de
répifl:liotonos , que je fus obligé de le
lier à une colonne.
Une autre (c'étoit une jeune Né--
greffe) àquijedonnois trois fois par
four de la teinture anodyne. En auo--
mentant toujours, elle enprit jufqu^à
i8 gouttes: lorfque la maladie céda.
^
D E St. D om in'G ve. 4I
je diminuai la dofe chaque jour , juf-
qu à ce qu elle fut réduite à fix gouttes.
L un & l'autre de ces deux malades
furent environ dix-huit ou vingt jours
à guérir.
Je vous ai parlé autrefois , Monfieur,
d un Tétanos dans lequel une cuille-
rée d*eau fit un effet fmgulier : ôC
vous jugeâtes que ce fait méritoit d'à-»
voir place dansmesmémoires.Le voici.
Un jeune homme à qui on avoit
fait une opération (a) à caufe d'un
farcocele (^),fe porta fort bien les
huit premiers jours 5 ôc la plaie alloità
merveille. Le neuf il fe plaignit d une
douleur de cou. Peu à peu le mouve-
ment des mâchoires diminua au point
quilne pouvoir prefque point ouvrir >
la bouche, ni fléchir les jambes. Le
pouls étoit fort , égal &: point dur. Le
treizième jour tous les fymptomes de
( a ) exclfus fuerat tefitculus,
( b ) P r opter gonorrhœam maie cmatamt
451 Mal a d i é s
ropifthotonos augmentèrent confîdé-
rablement. De tems en tems il jettoit
de grands cris , & il tomba de fon lit:
tantôt il étoit tourmenté d'ifchurie
tantôt de ftrangurie : cela m'obligea
de tenter le bain. Dès que fon corps
eut touché Teauv tous les membres (^)
fe roidirent fubitement. Dès qu'on
ieut remis dans fon lit , il eut de vio-
lentes convulfions, avec beaucoup
d*écume autour de la bouche. Le
pouls manqua totalement , on le crut
mort. Peu de tems après je fentis une
légère pulfation du pouls entre le
plis du bras & le poignet. Laconvul-»
Son reprit. Je lui mis une cuillerée
d'eau dans la bouche , la convulfion
CefTai la préfence d'efpritlui revint >
fon pouls fe rétablit , il ouvrit faci-»
tement la bouche, il parla librement,
& cracha avec autant de facilité, que
s'il ne lui étoit rien arrivé , ce qu'il
( a ) PcnU i^fe.
3Ë St. D 0 M r N c ue. ^|
n'avoit pu faire depuis quelques jours.
Cependant, il avoit de raverfionpour
tout liquide. Un délire de peu de du-
rée reprenoit de tems en tems : tout
cela fe pafToit fur les fépt heures^ dit
foir. Enfin 5 après une convulfion d'en-
viron deux heures , il mourut entre
quatre & cinq du matin.
Il y a de Fapparence que le Tétanos
qui furvint neuf jours après ropération,
n'eut pour caufe que la ligature faite
de plufieurs fils cirés , qui venant à
couper le cordon firent refFet d'une
blefiure.
^ Si cette conjefture a quelque fonde-
ment , je penfe qu'en pareil cas il fau-
droit fe fervir d'un ruban de fil ou
autre matière i parce qu'il n'eft quef-
tion que de prévenir l'hémorrhagie, &
d'empêcher le fuc nourricier de fe
porter au delà de la ligature: or la feule
•compreffion fuiSt. Je voudrois qu'on
eût la même attention quand on cou-;
M Al A
D 1 E'S
pe le cordon ombilical d un enfant i
peut-être n'en périroit-il pas un fi
grand nombre du mal de mâchoire.
. J ai déjà remarqué , que le Dragon ,
ouleDragoneau desPerfes, appelle
auffi ve^a medinenfis eft un véritable
ver , ( que Ion appelle à St. Domingue,
ver de Guinqe ) , & non pas une lym-
phe concrète , comme on le penfe
communément en France, {a,) Il eft
rond, d*un rouge pâleôc tranfparent ,
ftflez femblable aux vers de terre ap-
pelles lomhrki ^ mais beaucoup plus
long.
- Je ne m'arêterai point à prouver
que ce ne peut être une lymphe mou-
lée & durcie : qui lui donneroit cette
forme ? elle ne pourroit l'avoir acquife
que dans les vàilTeaux fanguins ou lym-
phatiques , fi cela étoit. Comment en
fortiroit-elle ? Quelle puifiance mo-
trice lui feroit percer la peau ? Corn-
il*) Voiez la Chirurgie de Monfïeur Col de Vil-
arls.
1
^•JËl
vn St. D om ïngv -e. 4 f
ment fe trouveroit-elle fbuvent en-
tortillée autour des mufcles ? Les rai-'
fonnemens font inutiles, quandilne
faut que des yeux pour en juger. Jeu
ai peut-être vu plus de cent en vie :
tous les Médecins , tous les Chirur-
giens 5 tous les habitans en voyent tous
les jours. Ceft donc un fait qu'on ne
peut révoquer en doute.
Ces vers font engendrés dans le
corps par les raauvailes eaux que les
Neo-res boivent dans quelques endroits
de Guinée , & dans la traverfée,quand
les Capitaines Négriers enont faitleuî^
provifion dans ces lieux-là.
Un ancien Médecin de St. Domina
gue nommé de Pas , a vu un particu-
lier à la Rochelle,quife trouva infedé
d'un de ces vers , pour avoir été fou-
vent dans le navire d'un Négrier de
fes amis , ôc avoir bu de Teau qui avoit
été apportée de Guinée.
Quand ce ver s'eft fait jour, &: qaon
Mai 4 DIE s
peut en tirer une petite partie , on la
roule fur un petit bâton , en prenant
bien garde de le calTer. On y revient
tous les jours, & on en roule jufqu'à
ce qu on fente trop de refiftance > ainfi
dans Tefpace de plufieurs jours on le tire
tout entier. S^il fe caffe , comme cela
arrive aflez fouvent , il ne faut pas
ouvrir la peau pour le fuivre,6c le tirer
tout entier , comme quelques-uns le
confeillent : il fuffit d'appliquer fur
Tendroit par ou il a commencé à for.
tir , quelques plantes émollientes : je
ne mefuisjamaisfervique d'une feuille
d'opuntia ou raquette coupée en
lames épaifles d'un doigt, ôcpalTée fur
la flamme pour la ramollir. Le ver ref*
fort par la même ouverture , où bien
il fe fait jour par un autre endroit ^
fouvent afTez éloigné du premier. Je
n*ai jamais vu arriver aucun de ces ac-
cidens qu'en veulent faire craindrç
ceux qui confeillent l'ouverture.
VE St. DoMingve. ^f
( a) J'ai vu à une Négrefle dé Monfieur
de Larnage notre Général , un petit
trou dans le grand angle d'un œil, que
je prislongtemspour unefiftule lachry-
male , car il en fortoit de l'eau ôc quel-
quefois un peu de pus. Ayant été
obligé de faire un voyage aflez longs
à mon retour, je demandai des nou-
velles de la Négrefle: l'Hofpitaliere
me dit, qu'il étoitforti parla joue du
même côté, un ver de Guinée, je
vis la prétendue fiftule parfaitement
guérie.
Les Nègres n'ont pas fouveiit poul:
un feul ver. Il y en a quelques-uns
qui en ont un grand nombre , qui
avec le tems fortent tous. Je n'ai jamais
donné de purgatifs ni de vermifuges.
Je penfe qu'il feroit dangereux de les
faire mourir > il vaut infiniment mieux
leur donner le tems defortir.
{ 0) Minguet dont nous parlerons dans la fuite , dit
qve le fuc de Ja fauge mis dans k trou d'un ver die
Guinée le fait fortir.
Une me refteplus, Monfieur, qu'à
vous entretenir des maladies commu-
nes aux Blancs & aux Nègres, oii de la
maladie vénérienne.
Il n'y a peut-être point de pays ou la
maladie vénérienne foit Ç\ commune
que dans ces îles. Tous les Efclaves
mâles5c femellesFapportent deGuinée,
lesenfansqui en naiflent infedés par
conféquent , en engendrent d'autres
encore plus viciés qu'eux.
Il y a très-peu de Blancs qui n'^ayent
commerce avec ces : NégrelTes , & ce
feroit grand miracle qu'elles ne leur
communicaflent point leurs mal. Les
maris en font préfent à leurs femmes >
malt corvi , mdum ovum. Les mifé-
.rables enfans qui en viennent portent
les péchés de leurs pères. Ceux même
dont les parens font fages ne font guère
exempts du malheur commun , parce
qu'on ne leur donne jamais pour nour-
rices que de m,ifér,ables Négreffes.
M Peut-
^
M"^
DE St. Dt)MrN^uE. 45
Peut-être c^uelqu'un penferâ-t*il qu oii
pouvoit guérir ces créatures avant de
leur donner des enfans à nourrir. Mais
quel tems prendroit-on pour les net-
toyer? Seroit-ce avant qu elles accou-
chent? Cela fepourroit faire abfolu-
ment : j'ai traité fans aucun danger de
ces femmesgrolTes par la fumigation ^
qui font accouchées heureufement à
terme. Mais s'il y a un intervalle entré
raccouchement, & le tems qu'on leur
donnera l'enfant , qui pourra répondre
de leur fagefle ? & quand elles /bX
roient fages pendant ce tems, le fe-i
ront-elles pendant tout le tems qu'el-
les nourriront? Cela n'eftprefque pas
poffible: il n'y auroit qu'un moyen de
préferver ces innocentes vidimes delà
corruption générale : ce feroit de les
faire nourrir par des chèvres. J'ai donné
ce confeil à tout le monde, perfonne
ne l'afuivi: on eft fi fort familiarifé -
avec cette infâme maladie, qu'ili^itw
D
TO M d t A D l S S
ble qu'on ne la craigne point.
Elle produit des effets différens dans
lesBlancs & dans les Nègres. Ceux-ci
font ordinairement remplis de pullu-
les , ( que l'on appelle des pims ) 5 parce
qu'ils ont la peau plus dure , & qu'ils
font expofés aux fraîcheurs du matin
& du foir, & à la plus grande ardeur
du Soleil. LesBlancs ont rarement des
pians , par la raifon contraire.
. Comme le premier effet de la mala-
die vénérienne eft d'épaiffir toutes les
liqueursi la tranfpiration doitfe faire
plus difficilement êc moins abondam-
ment: plus difficilement, parce qu'il
faut une plus grande force pour pouf-
fer & faire circuler des liqueurs épaif-
fes que des fluides. Le cœur & les ar-
tères n'ont de force que pour poufler
une certaine quantité de liquides tels
qu'ils doivent être dans l'état naturel.
Lorfque cette proportion ne fe trouve
plus , foit par l'excès de la quantité»
^â^vU
D E Sf^ Do M î NGUE. CJ
foit par celui de répaifleur , il aborde
moins de ces fucs dans les vaiffeau^
qui doivent les tranfmettre hors du
corps. Si déplus le diamètre de ces
vaijQTeaux eft diminué, ce qui arrive
néceflairement dans une peau durej
s'ils prêtent moins , comme cela doit
être encore parlamêmeraifon , il eft
évident qu'il fe ferat beaucoup moins
de diffipation par cette Voie qu'il ne
s'en fait dans l'état naturel. Les fucs
les plus groflîers qui ne pourront être
chaires dehors , feront arrêtés vers
l'extrémité de ces vaifleaux exctétoi*
res : ils s'y accumuleront , ai formeroiit
ces pullules ou gales véroliques, qui fe-*
ront plus ou moins grofles , fuivaiiè
qu^un plus grand nombre de puftulei
fe joindront enfemble , c'eft-à-dire >
que plufieurs tuyaux Voifins les uns deû
autres fe trouveront engorgés.
C^s pullules dégénéreront en ulcé-'
res, fila force qui pouffe la matierô
Dij
ji Ma t a d i e $
dont iellés font compofées , eft aflèz
grande pour déchirer rextrémité des
vaifleaux excrétoires , la peau & Té-
piderme : fi elle eft trop foible pour
produire cet eflfet, les ptiftules refte-
ront couvertes de leur peau.
En effet , les Nègres ont de deux
fortes de pians ou de puftules : les uns
font ulcérés , d'où il fort une farine
jaunâtre , ou font fimplement couverts
d'une efpece de croûte de même cou*
leur > d*autres ne font point ulcérés.
Les Nègres font encore alfez fujets
à de grolles gales , que Ton appelle
gale de Guinée. Elle eft facile à dif-
tingucr des pians. Ceux-ci font durs ,
calleux , circulaires , foit qu ils foient
couverts de leur peau ou non 3 les
gales font plus molles, plus élevées ,
d*une figure moins régulièrement ron-
de, & rendent un pus plus épais & eix
plus grande quantité, & font moins
jaunes , & moins larges.
jD E St. Do min g us. j^f
La vérole invétérée qui a paffe , de
génération en génération , des parens
aux enfans, dégénère aflTez fouvent en
écrouelles ou en lèpre.
J*ai remarqué quatre efpeces de lè-
pre. L'une qu'on pourroit appeller
ulcérée , parce que le corps eft tout
couvert d'ulcères qui répandent au
loin une puanteur infupportable.
Une féconde qui défigure par une
infinité de tumeurs dures fur le vifage ,
fur les mains , les bras , les jambes, les
pieds , 6c généralement fur toute l'ha-
bitude du corps 5 moins fur les join-
tures que fur les mufcles.
Une troifieme qui rend la peau
écailleufc , principalement celle des
jambes. Les Grecs ont appelle cette
troifieme cfpecc elephantiajis ^ àcaufe
de la reflTemblance de la peau avec
celle des Eléphans.
La première & la féconde efpece
font quelquefois acccompagnées de
D iij
M A^ h 4 D I M S
€orne3 au front , ce qui les a fait nom-
m^t fatirujls.
Il y en aune quatrième efpece plus
difficile à connoître dans fon com-
mencement 5 que les autres efpeces.
Elle ne fe manifefte quelquefois que
parla rougeur de la conjondive , fur-
tout de la partie qui tapifie ia paupiiT
re , par répaiffeur 5 la dureté , la rou-
geur de Toreille externe avec un grand
inal de tête, ôclacbûte des cils 6c des
paupières. Dans la fuite la peau des
Nègres devient de couleur de feuil--
le morte dans plufieurs parties , &
quelquefois de tout un coté du corps,
pendant que l'autre refte noire: enfuite
les majins. fe fermtent de manière que
le i^alade ne peut les ouvrir : quelques
ph,alan;ge5 des doigts des mains §c des
pies, fe coupent & tombent.
Les blancs font bien moins fujets 4
ces fort03 de produdions de la vé-
lole^.q^je les Nègres., furtout à la
V E Sx* D OMI NGU E. jj J
lèpre {a) : chez eux les fuites ordi-*
naires de cette maladie font dcsf
obftrudionsde la rate, du foie, des
hydropifies ou des diarrhées opiniâ-
tres & mortelles.
Il y a plus de deux cens ans (^) que la
maladie vénérienne infede toute TEu-^
rope^ôc c eft un fait conftant,que fi elle
n'étoit pas inconnuq avant ce tems y
elle n étoit pas à beaucoup près fi com-
mune , ôcque depuis elle a été accom-^
pagnée de fymptomes qui annoncent
plus manifeftement fa préfence & fom
origine. Ne feroit~ce point parce que
cette maladie communiquée aux Ef-
pagnols par les femmes fauvages de St.
Domingue , avoit des degrés de ma-
lignité que n'avoit point celle que
Ton voyoit quelquefois en Europe ï
{a) Je n*ai point vu de François lépreux > j^HîTai
vu c^u*un Efpagnol.
{b) Sur la fin du q^uînzieme ftecle.
D ir
i
Ceqiiieft certain, ceft qufe depuis,'
portée par les Efpagnols dans leRoyaii-
inede Naples , d ou elle s'eftcommu-
aiquée aux François & aux autres na-
tions, on Ta vue fe multiplier prodi-
gieufement, & par des fign es incon-
nus jufqualors, qui lui ont fait don-
ner le nom de mal de Naples , enfuite
celui de maladie vénérienne, terme
qui défigne plus clairement & fa caufe ,
& la manière de fa propagation.
Au refte , Monfieur , je ne prétends
pas décider fi cette maladie eft nou-
velle, ni fi elle eft abfolument difFé-
rentedela lèpre. Peut-être pourroit-
on foupçonner que la lèpre n'a cefle
en Europe depuis qu'on a trouvé le
moyen de guérir la vérole ^ que parce
qu'on n'a pas donné letems a celle-
ci de palfer de génération en généra-
tion y & que la première , par confé-
quent a été étoujETée dans fon bercçau.
Quoi qu'il en foit, cette difcuffion n'eft
iiMÉiMii
D JE S¥^ D& MI AT G 17 E. ^f
point de mon fujet : (i quelqu'un ignore
ces queftions , il peut confuiter le fa-
vant ouvrage de Mr. Aftruc, de Morhis
venereis y qui eft auffi traduit en Frao-
çois.Il pourroit être vrai que toute forte
de lèpre n'eft point une fuite de la,
vérole , comme il eft certain que
les obftrudions de la rate 6c du foie ,
les hydropifies ôcles diarrhées fréquen-
tes à St. Domingue , n'en font pas tou-
tes non-plus.
Ce qui me paroît inconteftable , c'eft
que la lèpre auffi-bien que les écrouel-
les que j*ai vues & guéries dans le pays
étoient une vérole dégénérée. Voici
mes preuves : je lésai guéries avec les
mêmes remèdes , & de la même ma-
nière que la vérole : concluez ) Mon-
fieur, A la vérité je me fuis fervi de U
fumigation, & j'ai lieu de croire , (ôc
j'en donnerai des preuves) que les
jfridions merçurielles ne conviennent
point dans ces maladies^ comme M*^*
Aftruc l'a remarqué.
58
Ma l a jf i ES
!!!'■
Il y a deux méthodes également
fûres pour guérir la vérole récente >
qui n'a pas fait encore de grands pro-
grès , c'eft-à-dire , quin*a produit ni
exoftofes, ni auKy lofes (4t) ni ulcères
avec déperdition confidérable de fubf-
tance , ni de carie aux aux os. Ces deux
méthodes font la fumigation & la
fridion : mais quand cette maladie
eft accompagnée des fymptomesci-def-
fus , les fridions ne fujffifent pas, il
faut néceflairement avoir recours à la
fumigation. Cette vérité eft non-feu-
lement certaine par un grand nombre
d'expériences que j'ai faites pendant
onze ans , mais encore par le témoi-
gnage d'un grand nombre deMedecins
cités par Monfîeur Aftruc , qui ordon-
nent la fumigation quand la fridion
(a) L*exoftofe eft un os groffi contre nature»
L'Ankylofe eft un engorgement de la lymphe dans
les articulations des membres qui leur ôte le mouve-
ment de flexion.
m
DE St. Dcminçv^. fg^)
§cles autres remèdes n'ont pas reuffi (4).
Pourquoi > dira quelqu'un , ces Mé-
decins ne confeiUoient-ils pas la fumi-
gation dans tous les cas par préférence
aux friftions ? Eft-il de la fagefle d'un
Médecin de faire paffer un malade par
des remèdes dangereux, ou du moins
très-laborieux , dans l'incertitude s'il
guérira , pour revenir enfuite à un
autre que le malade, afFoibli , exténue,
anéanti , s'il n'eft pas arrivé pis , ne
pourra peut-être pas fupporter }
La queftion n'eft pas difScile à ré-
foudre. La fumigation telle qu'on la
pratiquoit autrefois , étoit encore plus
dangereufe que les friâions. On em-
ployoit pour cette opération non-fevi-^^
lement des gommes & des refines { ^ )
mêlées avec le mercure , dont le ma-
lade avoir de la peine à fupporter la
fumée, ai> y ajoûtoit même de véri-
(a) De 'Morèîs Fenereis , L II. r. viij. Ô»
faffim,
(b) Uid.
■■
\f*
60 Mal a d i ehst^^
tables poifons {a)i &c quoique les ma-
lades eufTent la tête hors du pavillon ,
ilscouroient rifque d*être empoifon-
lîés. Les Médecins jugeoient donc fa«
gement qu il étoit à propos d employer
d'abord le remède qui faifoit courir
moins de rifques aux malades , avant
de paflTer à un autre qui pouvoit avoir
des fuites encore plus fâcheufes , mais
dont leur prudence pouvoit quelque-
fois garantir : & ce parti étoit préfé-
rable à celui d^abandonner cts mal-
heureux à des maux qui les auroient
fait périr infailliblement dans des fouf-
frances intolérables (^).
Quand je dis que les friftions mer-
curielles font auffi fûres que la fumi-
gation pour guérir les véroles récentes,,
j'entens les friftions par extin6Hon^ c*eft-
à-dire faites, non par intervalles.
Comme prétendent quelques-uns j
(a) Ih'tà,
( b ) lùUfm
ÉMta
DE St. D ominùv e. 6t
mais réitérées tous les jours , autant
qu'on le peut, avec une petite portion
d onguent 5 en évitant foigneufement
la falivation.
On a cru longtems , & il y a peut-
être encore quelques Médecins dans
cette erreur , qu'il falloit abfolument
faire faliver les malades pour les gué-
rir. Les uns vouloient que la quantité
de la falive montât jufqu a fix livres
^ans les vingt-quatre heures : il n'y a
pas encore longtems que les plus mo-
dérés en demandoient au moins deux
ou trois livres dans le mêmeefpace de
tems. Quelques autres en petit nom-
bre, reconnoifloient les dangers delà
falivation: mais ils ordonnoient pour
chaque friftion une telle quantité
d onguent quelle produifoit toujours
la falivation , ôc ils croyoient mettre le
malade bien en fureté en la fuprimant
par des purgatifs, quand elle étoic
furvenue. Après la purgation ils fai-
et Maladies
foient frotter de nouveau, le flux de
bouche reprenoit 5 ils purgeoient , 6c
continuoient ainfi à plufieurs reprifes»
Il eft furprenant que ces Médecins
n'ayentpasfenti qu'ils bâtiffoient d'une
main & détruifoient de l'autre. A la
vérité cette manière de traiter les ma-
lades 5 qu'ils appelloient par ^x^/^ff/W,
lespréfervoît communément desdan^
gers du flux de bouche : mais outre
qu'elle fait pailer par les Telles , le mer-
cure qu'on introduit parla peau; fup-
pofé qu'elle puifle guérir, elle ruine
la fanté bc le tempérament des ma*
iades par ces fréquens purgatifs.
Heureufement aujourd'hui à l'ex-
ception des Chirurgiens , prefque tout
le monde eft revenu de lanéceffité de
iâ fali vation abondante 5 ôt la méthode
de Textinclion telle que nous venons de
la repréfenter, ne trouve plus que uès^
peu de défenfeurs parmi les Mede-^
cins.
1
DE St. Domi]^cve. £^
Il y a quatre ou cinq ans que je lus
Touvrage d'un Médecin de Montpel-
lier qui m'apprit que tous lesMedecins
de cette iiluftre &favante faculté ëvi-
toient avec grand foin de donner la
falivation 5 j*avois déjà traité 6c fait
traiter de cette manière par les Chi-
rurgiens, un bon nombre de malades,
même un enfant d'un an, qui tous
âvoient été heureufement guéris , fans
aucune incommodité.
Pour peu qu'on réfléchiffe fur la na-
ture de cette maladie, & fur la ma-
nière dont elle eft guérie par le mer^
cure 5 on conviendra facilement avec
moi que la falivation eft non-feuk*-
ment inutile pour parvenir à fa gué-
rifon , mais encore qu'elle s'y oppofe ,
& qu'elle eft un inconvénient du re-
mède.
L'effet du virus vénérien eft d'épaif-
fir le fang 6c la lymphe t c'eft à cette
qualité de ces humcuris, que Ton doit
M A L A D 1 ES -
attribuer les exoftofes, les anKylofes ,
les ulcères, la carie des os ôc tous les
autres fymptomes. Cette lymphe trop
épaifle s'arrête & fe coagule dans les
articulations, fource des AnKylofes:
elle s'arrête pareillement &: s'accumule
dans les tuyaux étroits des os 3 de-là
les exoftofes : elle croupit dans les ca-
naux capillaires du périofte , s'y aigrir,
s'y corrompra ronge les os, voilà la
carie. Le fang trop épais ne peut par-
courir les artères capillaires, il les gon-
fle & les déchire 3 il s'y fait des con-
geftions. Eft il une caufe plus natu-
relle des ulcères ?
^ Le mercure par (es parties infiniment
divifibles & mobiles pénètre , defunit,
fépare les globules drt fang & de la
lymphe, dont plufieurs réunis ne fai-
foient plus qu'uni il rend à ces liquides
bourbeux leur fluidité naturelle, ôc
rétablit ainfi toute l'œconomie de la
machine. P^ur produire cçt effet, il
faut
D E St. DOMINGU E. 6$
faut qu'il roule longtems dans le corps^
il ne faut donc pas Ten chaffer par
des purgatifs : il ne faut donc pas le
lailTer s'échapper par les glandes fali*
vaires. Quand il furvient un •dévoie-»
ment aux malades que Ton traite,
tout le monde convient qu'il faut Tar-
rêter 5 parce qu une partie du mercure
s*en va par les felles , que cette
évacuation afFoiblit les malades, ôc
les met hors d'état de recevoir denou-
veau mercure. Le mercure pajûTe avec
lafalive , c'eft un fait certain y la fa-
livation affoiblit le malade ,& le ré-
duit fouvent dans un état affreux > il
faut donc l'éviter.
Un autre fait confiant , prouve que
la falivation n*eft point néceffairepour
guérir. Il y a de certains malades aux-
quels on ne peut procurer le flux de
bouche 5 quelque quantité d'onguent
que Ton employé pour y parvenir : ce-»
pendant tous les Praticiens conviens-
E *
■Mil
~N.
A L A Û I ES
:i î-i
nent que ces malades font guéris après
avoir ireçu fept ou huit fridions. En
faut-il d'avantage poUr prouver Tinu-
tilité de cette évacuation ?
" On s'imaginera peut-être que la
falive épaiffe , gluante , fœtide , puru-
lente n'eft telle que parce qu'elle eft
chargée du virus véroliquei qu'il faut
par conféquent le faire fortir par cette
voie : car comment guérir une mala-
die , dira-t'on , fans en faire fortir U
caufe par quelqu'un des émoncloires >
Idées faufles 5 raifohnemens pitoyables.
La mâuvaife qualité de la falive vient
des ulcères que le mercure fait dans la
bouche: que l'on donne le flux à un
horhmefain, la falive fera corrompue
comme celle de l'homme le plus in*
feâé.
A regard du virus que l'on prétend
évacuer par la falivation , rendez le
fang & la lymphe coulante, &C vous
avez détruit lé virus.
D E St. D 0 MIN G V E. Çf
' Il réfiilte encore un autre avantage
confîdérable de la fridion par extinc-
tion : c'eft qu'il entre plus de mercure
dans le corps du malade, & qu'il y
refte plus longtem^ que celui qui a
provoqué la falivation pour la procu-
rer. On a coutume d'employer à cha-
que fridion une demi - once d'on-
guent 5 où il entre la moitié de mer-
cure : or il eft rare que l'on puifle
frotter le malade plus de trois fois,
^uand cefluxdê bouche eft une fois
venu , il ne fe termine pas conimu-^
nément avant le vingtième ou le vingt-»
c^inquieme jour. Quand ce tems eft
pafte, dans quel état font les pauvres
malades , quoiqu'il n ayent reçu que
flx gros de mercure ? Il n'y a que ceux
qui les ont vus qui puiiTènt fe le repré-
fenter : il n'y a pas moyen de revenir
aux fridions. A la vérité,les fymptomes
les plus apparens font évanouis : mais
pour combien de teitïs? Jene dis pas
E ij
■«■■■■■■
1 -i,
1!;.
62 M^ t A D I ES
qu'il n'y en ait quelques-uns qui ^ué-
riffent véritablement: mais en vérité
le nombre en eft bien petit.
Suppofons que Ton donne cinq fric-
tions ou l'équivalent , tant pour pro-
curer le flux de bouche que pour l'en-
tretenir, il fera entré dix gros de mer-
cure dans le corps : de ces dix gros ,
combien en eft il forti par la falivation?
' Par l'extinélion, qu'un malade ait été
frotté trente fois , { c'èft le moins qu'il
doive l'être ) avec un gros ôc demi
d'onguent fait au tiers : le malade re-
çoit quinze gros de mercure fans qu'ij.
s'en foit perdu un grain , ni par la
falivation ni par le dévoiement 3 ces
quinze gros ont donc roulé dans le
corps du malade pendant plus d'un
mois, car il eft rare que l'on puiffe
donner trente ou quarante fridions
fans interruption. Ces quinze gros de
mercure ont donc eu le tcms de re-
mettre les liqueurs dans l'état naturel.
•.£?■.•■»■..''%.-
ff Je crois , Monfieur, & cher Coïi-r
frère , avoir fuffifamment prouvé l'a-
bus de la falivation. Vous attendez de
moi , fans doute que je vous expofe de
quelle manière j'ai pratiqué les fric-
tions par extinftion. La voici.
Après avoir fait faigner , rafraîchir
& purger les malades; je les ai fait
frotter tout de fuite fans les faire bai-
gner , au moins communément.^ Ce
n'eft pas que les bains ne foient utiles:
mais je ne les crois pas néceflaires ,
dans les pays furtout ou la tranf-
pîration eft abondante, &c par confé-
quent ou les pores de la peau font fuf-
fifamment ouverts? je ne lésai omis,
que quand les malades n'ont pas eu la
commodité de les prendre. Pour les
Nègres , cela auroit été trop embarraf-
fant 3 & pour les Blancs, trop d*appret
auroît pu faire foupçonner ce qu'ils
avoient intention de cacher 3 en un
mot , je VQU5 dis ce que )'ai fait 3 &: noa
E iii
ce qu'il eft bon & à propos de faire.
Je crois donc qu'on peut utilement
baigner les malades après la faignée 5
les purger après huit ou dix bains , ôc
•faire prendre encore quelques bains
après la purgatioa.
Le Médecin de Montpellier , dont
j'ai eu l'ouvrage , ordonne la faignée
èc Lapurgationi les bains enfuitej après
lefquels il fait encore faigner & purger>
Je crois que la première purgatioa
eft mieux placée après , que devant les
bains 3 & que la féconde aufli-bien que
la féconde faignée font communément
de trop.
, rnUn ou deux jours après la purgar
tion 5 j'ai fait frotter les adultes d'une
foible complexion pendant deux ou
trois jours avec .un gros d'onguent,
ou il n'entre qu'un tiers de mercure.
Le troilîeme ou quatrième jour , j'ai fait
ajouter un quart de gros 5 le fix ou le
fept , un autre quart i & j'ai fait conr
V Er S'r.T PÇMINGV E. ^l
V
xinuer tous les jours avec ce gros &
demi ( a ). Je n'ai trouvé perfonne qui
pûtfupporter la friaion de deux gros
fans danger de faliver , au lieu qu'avec
un gros àc demi , la plupart ont fouf-
fert la fridipn vingt ou vingt- deux
jours de fuite. .
L'on peut fans rien craindre , faire
la même chofe ici. Il faut avoir foin
d'examiner tous les jours la bouchp
pour s'affûrer fi le malade n'a point de
difpofition àfaliveri c'eft-à-dire , s'il
jn'y a point de chaleur au palais, fi les
o-encives ne font point gonflées , fi les
dents ne font point de mal , fi le ma-
lade n'a point de crachottement 3 en ce
xas il faut continuer ; fi au contraire
^on voit quelques-uns de ces figiies
précurfeurs de la falivation , il faut
,fufpendre le^ fridions jufqu'à ce
qu'ils ayent difparu 3 & pour aidgr
( a ) J'ai fait frotter les perfonnes robuftes avec u»
gros & demi dès les premier jour. ^
E IV
¥"' I.
'■ I
1 F. ■
Kl
!i'f'
ï
۔*
M A LA jJ I* J5^ JF
à les diflîper , on fera, un gargarifme i
avec une décodion de plantain,& dans
une chopine on fera diflbudre douxe
grains d'alun.
Il faut communément trente fric-
tions pour guérir : mais il faut les réi-
térer huit ou dix fois après que tous
les fymptomes font diflîpés.
Il eft beaucoup mieux de faire les
fridions le foir deux heures après un
léger fouper^ que dans un autre tems
de la journée : le repos de la nuit , la
dou ce chaleur du lit aident au mercure
âpafTer dans le fang.
Il fuffit de frotter les bras , les jam-
bes & les cuifles. Il eft auffi in utile qu'in-
décent de frotter les autres parti es 5
pourvu que le mercure entre, il n'im-
portjsparoù.
Il eft bonde tenir un réchaut avec
de la braife au-defTous des membres
que Ion frotte, fuppofé qu'il fafle trop
chaud pour faire les fridions auprès du
feu.
'^^^^^^^Sg&iïLïrSin:^
Quoiqu'il foitfacile de fe préferver
du froid, & même du frais, principa-
lement aux riches , il faut autant qu on
le peut , ne point traiter ces maladies
en hy ver.
On commencera par frotter depuis
le bas de la jambe jufqu au milieu.
Le fécond jour depuis le milieu juf-
qu'au genou 3 le troifieme, depuis le
genou jufqu'à la moitié de la cuifTe 5 le
quatrième, le refte delacuiflei le
cinquième, la moitié du bras 5 le (i-
xieme le refte du bras.
Le feptieme on commencera la jam-
be, le bras & la cuifle de l'autre
côté 5 on reviendra enfuite à la jambe
<jui a été ftottée la première , & oii
continuera dans le même ordre.
Après la guérifon du malade , il ne
faut ni le faigner ni le purger , comme
on le fait communément , à moins
qu'il n'y ait dans les malades des indi-
cations évidentes qui le demandent*
iii>-<a>«i I an iMiiiÉiraM it^inaaÉitMJir^Mgaa
m^MiÊ^^BÈ^ÊfÊBaéi.iSA
f3^ :M^s^ ^Q. E É^
Pendant tout le tems dés friftîons i
le malade ne fortira point , & il évitera
avec foin Tair frais.
Les Médecins de Montpellier
font vivre les malades «ayec dii
lait. L'Auteur que j ai le n eft pas
fi rigide. Je penfe avec lui qu'on peut
leur permettre le potage , le bouilli ,
le rôti &: rien de plus. Pour la boif-
fon une tifanne fmiple de chiendenp
& de régliffe fuffit > on peut même
permettre un peu de vin à ceux qui
ont coutume d'eji boire.
Je ne veux pas quitter cette ma-
tière fans dire un ino^ \de la fuf
migation.
L'ufage de la fumigation eft auflî an-
cien , & peùt-êire plus que la fridioa.
Je dis peut-être plus , car les Chinois
qui fuiv^nt le fentiment de M'* Af-
truc , ont reçu la vérole des Portur
gais 5 ne connoilTent point les ondions
mercurielles , & employent la fumir
.ÂgH'^hnfA^S^j
vE Sri DpmihJS^e. 71
gàtion. Voyez M»^* Aftruc Liv. II. p,
1 70 5 6c fa difTertation fur la nature aç
la maladie vénérienne qui règne chez
les Chinois , ôc fur leur manière de la
guérir.
On appelle Fumigation la méthode
de traiter les maladies vénériennes par
une poudre que Ton fait brûler fur un
peu de braife dont le malade reçoit la
vapeur par le nez. On devroit plutôt
rappeller exhalaifon du mercure, car
cette poudre ne doit point faire de
fumée 5 mais feulement une petite
flamme bleue , qui ne s'élève pas plus
haut que deux travers de doigt au-
deffus de la braife: ainfi, cette opéra-
tion n'efl: pas difficile à fupporrer, &C
ne dure que quatre ou cinq minutes.
Elle n'efl: néceflaire que dans les cas
que nous avons indiqués ci-deflus.
Cependant 5 fi les perfonnes du fexe
avoient une gonorrhée , ou même des
I
k
jftrtn ^ %
fleurs blanches [a], je leur confeilld
de la préférer auxfridions 5 auffi-bien
ou a tous ceux qui ont des dartres ou
éts puftules.
Quant à la matière que l'on doit
employer pour fumiger , vous me
difpenferez , Monfieur, d'entrer dans
le détail de toutes celles dont les
anciens Médecins fe font fervis :
Monfieur Aftruc lésa rapportées avec
beaucoup d'exaditude {h) 5 je ne
pouvois que le copier. D'ailleurs mon
intention n'eftpas de faire un livre,
mais un mémoire le plus court qu*il me
fera poflible, & principalement de
rapporter ce qui m'a réuffi. >
J'employai d'abord une livre decîn*
nabre artificiel, convaincu que c'étoit
le remède dont M. Charbonnier avoît
( « ) Hippocrate employoit des fumigations poiuf
cette maladie. De Mwbh mulisrum.
{\i) De Morhts venereis» Lib II. cap. viij»
fait des épreuves heureufes aux In-
valides , fous les yeux de M" Malouec-
alors Médecin de cet Hôtel , & à Bif-
fêtre fous la diredion des députés de
notre Compagnie : &: quoique tous les
malades n'euflent pas été guéris , la
Faculté qui connut quec'étoit la faute
de celui qui adminiftroit le remède, Sc
non pas dvi remède même , ni de la
façon de remployer, nelaiflapas d*ea
jugerfavorablementjôc de Tapprouvers,
Îerfuadée qu entre les mains de fes
)oaeurs , il feroit fupérieur à tous les;
autres. J'en fis d'abord l'eflai fur quatre
Nègres les plus maléficiés , entre un
grand nombre que le Chirurgien de
l'Habitation des Mineurs Mithon de-
voit traiter par les friélions avec la
falivation. Je les guéris dans un mois j
§c je fus obligé peu de tems après de
faire fumiger prefque tous ceux qui
avoient paffé par les mains du Chirur-
gien.
Oitt
EBAfiOaitaSaBi
fg: ^M A L A D I Jg >
Il eft vrai qu'à run des quatre qui
âvoientétéfumiges, il revint des pians
peu dé tems après 3 ce qui me fît ju-
ger qu'il falloit continuer le remède
encore plus longtems que je n avois
fait , après que les malades paroiiTent
guéris.
J'eus bientôt épuifé la livre de cin-
nabre 5 il auroit fallu au moins cinq oii
fix mois pour en faire revenir d'autre
de Paris: je fis réflexion que toute
préparation de mercure qui pouvoic
être prife intérieurement fans danger,
pouvoit être propre pour fumiger. Sur
ce principe je me déterminai pour
F^thiops minéral : mais la prépara-
tion ordinaire jette une grande flamme
& fe confomme tout d'un coup 5 il fal-
lut donc ajouter une matière qui ne
fît point trop de fumée , & qui retar-
dât la déflagration de VJEthiops , fans
diminuer la vertu de ce remède: je
choifis l'antimoine diaphorétique 5 je;
D E S '^» Do M 1 NG V E^ J
m'en fervis pendant quelque tems, èC
enfin au lieu de cet antimoine j'ajou-
tai du metcure crud autant que j'en
pus éteindre avec la plus petite portion
de fleur de foufre , & je parvins à en
éteindre une livre avec quatre onces
de fleur. Si Ton met moins de fleur de
foufre , la matière ne peut brûler. Si
l'on en met plus^elle jette trop de flam-
me, brûle trop vite, èc incommode
les malades.
Je fis faire un grand fiége en fera
cheval, fur lequel huit ou dix Nègres
puffent tenir affis. Il étoit entouré d'uii
pavillon qui traînoit par terre , & qui
étoit élevé environ de deux pies au-def-
fus de la tête des Nègres, & dont les
deux pans fe croifoient. Je mettois
un réchaud entre deux Nègres, qui
la bouche ôcles yeux fermés d'un ban-
deau, recevoient l'exhalaifon de la
poudre dont je mettois environ une
petite cuillerée à cafFé dans chaque ré-
§ • ■ ' !■:
.^«.Mi^fti
i^m^BÉ^aa
Ma
A SI È 9
chaud i après avoir refermé le.pavillon
j'y laifTois les Nègres fans chemife, ( a )
jufquace quilsfufTent bien enfueur>
ce qui arrivoit aux uns après quatre
ou cinq minutes, à d^autres après fix ou
fept Je les faifois alors reprendre leurs
cnemifes , & coucher fur une paillaffe,
couverts d'une couverture de laine,
pii je les laiflbis fuer au moins deux
heures : après ce tems on les changeoit
de chemife. Ils faifoient ordinairement
deux , trois ou quatre felles par jour.
Je vifitois leur bouche tous les ma-
tins : s'il paroiflbit quelque difpofition
à la falivation , on fufpendoit le re-
mède jufqu'à ce que cette difpofition
fût pafTée : j'employois alors un gar-
garifme,ou avec les plantes aftringen-
iQs j comme le plantain , la grenade
( s ) Quand j*ai fait fumiger des Blancs , les hom-i
mes étoient en chemife ac en calleçon , les femmes en
chemife ôc en juppon»
fauvageit
DE St. Do m ïj^gue. %\
fauvage , ou fimplement queiqires
grains d'alun fondus dans Feau*
La falivation furvenoit rarement
avant qu'on l'eût prévûeielle étoit tou-
jours légère , oc n'étoit gueres qu'un
ptyalîfme , ou crachottement i les
gargarifmes l'arrêtoient , ou une eau
de cafle quand ils ne fuffifoient pas.
Tant que j'ai pu veiller par moi-
même àcette opération, les plus mal^
traités de la maladie en étoient déli-
vrés parfaitement dans l'efpace de
deux mois 5 ceux qui n'avoient que
des pians &: des ulcères peu profonds
étoient guéris dans trente ou quarante
jours. Quand il y avoir carie aux os,
exoftofes , anky lofes, perte de la luette
ôc des amygdales , il falloit bien plus
de tems 5 & encore plus pour les
écrouelles & la lèpre. M^is lorfque
mes occupations ne me permirent plus
de faire faire ces remèdes en ma pré-
fence , ôc que je fus obligée d'en char-
F
£^ M A L A ï> I ES
ger le Chirurgien de rhabitation, qui
s en rapportoic le plus fouvent au Ne^
gre , chef de la petite Cafc (/z), (parce
qu'il a voit auffi fes affaires ) 3 les Nè-
gres guérifîbient à la vérité , mais bien
plus lentement.
Pour boifTon ordinaire on faifoit
une tifanne avec le bois de gayac , ôc
récorce de bois de fer. J'ordonhois
qu'on y aioûtat de la fquine & de la
falfepareille jqui croiflent abondam-
ment dans le pays : mais je m'apperçus
bien-tôt, que non-feulement on n'a-
joûtoit point ces dernières plantes,
mais que la plupart de ces Nègres ne
vouloient boire que de l'eau ^ ce que
je fus obligé de tolérer.
Pour la nourriture des Nègres pen-
dant le traitement , je faifois dans les
premières années acheter demi - li-
vre de viande , êc une livre de pain
par chaque Negrc pour la journée,
' (w ) C'^ft ainfi qu'on appelk PHôpkal deftiné àcei
tnaiadies.
DE St. Domingue. 8|
fans compter les potages , & la caf-
fave. Dans la fuite , comme cela
coutoit trop 5 je me reduîfis à mettre
dans une grande chaudière une tête de
bœuf avec des patates (a) & du bif^
Guit. Cela fuffifoit pour bien nourrir
une vingtaine de Nègres: quand j'en
avois davantage à traiter , ( car le nom-
bre alloit fou vent jufqu'à trente ) je
faifois ajouter deux ou trois pies de
bœuf. Ces Nègres engraiffoient con-
fidérablement au lieu de maigrir, à
mefure qu'ils guériflbient.
Les exoftofes , les anKylofes y la ca-
rie des os , les écrouelles , la lèpre ^
ne demandent point de cure particu-
lière: je faifois feulement enveloppe^
( 4 ) La patate eil la racine d'une efpece de con-
volVulus rampant , qui eil au moins aufïî bonne que
le maron. C'eft non feulement la nourriture ordi-
naire des Nègres de St. Domingue , mais les habitans
la préfèrent fouvent au pain , ô^ l'on en fert fur les
Bieilleures tables.
Fij
r
i
M A L A D I Èk
84 MALADIES Jjj
la partie exoftofée ou aiikyloféeavec
remplâtre de Vigo cum 'menurio , & je
faifois couvrir les ulcères profonds des
écrouelles, Scies autres aveclemême.
emplâtre.
Je vous ai promis , Monfieur, une
obfervation qui nrafait penfer queles^
fridions mercurielles étoient contrai-
res aux lépreux. La voici. Une jeune
Négreflede feize àdix-fept ans , étoit
couverte d'une lèpre ulcéreufc depuis
les pies jufqu'à la tête, d'une puanteur
infupportable depuis plufieurs années,
qui Tavoit réduite dans un tel état de
maigreur , qu'il ne lui paroiffoit plus
aucun mufcle : les deux pics étoient
fort gros &: couverts d'ulcères , l'un
beaucoup plus que l'autre. Elle m'a-
voit été envoyée du Cul-de-Sac de
Léogane , par un des plus riches
habitans du lieu , & par parenthefe ,
un des plus honnêtes hommes 6: des
i
^
-'a^^
ÉMMiiiâÉinÉÉiHii
DE St. Do MI N GUE.
plus pieux delà Colonie , nommé M'*
Aubri. En moins de trois mois elle
Teprit chair , 6c les ulcères du corps fu-
rent féchés. La tumeur des pies fut
plus longtemsàfe diffiper , fa couleur
noire revint (a) , les règles parurent
pour la première fois de fa vie , de cou-
lèrent en quantité convenable. Je né-
tois plus occupé que d'un pié, qui
etoit prefque réduit à la groffeur de
l'autre parfaitement guéri. Ureftoit un
petit ulcère fous le talon > il y avoit
déjà près dun an > ou plus, quelle
étoit dans les remèdes. J'interompois
detems entemsla fumigation. Enfin,
après avoir cefle de la fumiger, je lui
fis frotter pendant quelques mois le
deffus du pied deux fois par femaine,
avec une très-petite portion d'onguent
dans lequel ilentroit un neuvième de
mercure. Il lui furvint une fièvre quar-
( » ) Les Nègres malades oat une couleur de feuille
jnoits , & redeviennent noirs engaériflant. ■--'
F iij
w
26 M Al 4 m t B s
tcj quicefTa & revint plufieurs fois:
elle maigrit beaucoup , perdit fa cou-
leur » ôC il parut un petit crachotte^
ment qui augmenta peu à peu > & qui
lui faifoit rendre , les premiers jours ,
au plus y une demi livre de fali ve 3 dans
le plus fort elle n'en rendoit pas deux
livres. Je ne mapperçus pas même
dabord de ce ptyalifme 5 il dura une
vingtaine de jours : elle fut fl mal fur-f
tout les premiers jours que je crûs
qu'elle mourroit. Au flux de bouche
fe joignit un devoiement qui la faifoit
aller quatre ou cinq fois dans les 24
heures ; il ceffa èc revint a différentes
reprifes. Elle mourut enfin après un
dégoût de trois ou quatre jours. J*ai
toujours attribué à la friftion faite fur
fon pié 5 quoiqu'il y eût longtems qu'on
ne la pratiquoit plus , tous les accidens
qui lui furvinrent 5 ôc la mort même
parce que je n'en ai pu voir d'autre
caufe que celle-là.
DE St. Do min EVE.
Je ne dois pas oublier que cette Ne-
çrefle avoit deux élévations eonfide-
rables au deux cAtés du front, qui re-
préfentoient parfaitement les cornes
qui commencent à pouffer aux ani-
maux qui en portent : l'une s'eflaça
après quelques mois 5 l'autre perça,
la peau ,& parut fous la forme d'un
champienon, dont la tête étoit élevée
au-deffus de la peau i & le pie bien
diftingué de la tête, étoitadhereiit au.
mufcle frontal.Ce champignon s'effaça
avec le tems , & la peau fe réunit ft
parfaitement , qu'il ne refta point de
cicatrice vifible.
De toutes les efpecesde lèpre, le-
cailleufe eft la plus difficile à guerin
M'- Mercier, premier Secrétaire de
M"^- le Général me donna une jeune
Néereffe qui étoit dans le cas : c'ét^iç
prmcipalement la peau de fes jambes
qui étoit épaiffe & dure. Je les rétablis
dans l'état naturel: mais peu de vapis
F iv
HH
BB Maladies
après elles revinrent dans leur premier
état. Il mêla renvoya , je la fis fumi-
ger de nouveau i je la rétablis comme é
lapremierefois. Cette féconde guéri- ^
fon ne fut pas plus durable que la pre-
mière. On lui fit prendre quelques
gouttes de folution de mercure dans
Teau forte: elle guérit, mais je ne fai
pas fielle n'ell point retombée.
Voici comment fe fait cette folution,
& la manière de s'en fervir.
(a) On fait diJÛToudre une once de
mercure dans une quantité fuffifante
de bon efprit de nitrê. On la met dans
une bouteille avec vingt-quatre onces
d'eau. On donne fix ou huit gouttes
de ce mélange dans une pinte d'eau
que Ton fait prendre tous les matins.
J'ai donné à un homme qui n'étoit
point Chirurgien , la permiffion de
traiter des Nègres avec ce remède , à
la foUicitation & fur le certificat de
[a] Fid. Coi, medie, Parif.
VE St; T)oMiN GUE. 8(^;
plufieurs habitans dont il avoit guéri
des Nègres, fans qu'il en fût arrivé
aucun accident: mais je n'ai jamais
voulu m*en fervir.
Après cette efpece de lèpre , celle
qui fe manifefte par une grande quan-
tité de tumeurs charnues fur toutes les
parties du corps , efb la plus rébelle.
Le dernier Nègre que j'ai fait traiter
fur l'habitation de M'* Fontelaye , ou
j'ai demeuré trois ans , fut guéri après
trois ou quatre mois : mais cette gué-
rifon n'a pas duré deux ans : quelque
tems avant que je partifle, pour re-
venir, le Chirurgien recommença aie
traiter. Il étoit horriblement défiguré
par une quantité de tumeurs furie vi-
fage5fur les mains , fur les doigts & fur
tout le corps. S'il s'étoit montré dès
que cts tumeurs commencèrent à re-
venir 5 il auroit été facile de le guérir :
mais comme il étoit chaffeur ^ on ne le
voyoit point. Je ne fçai fi ceChirur-
gicn en fera venu à bout.
^o
M A l A D î B s
Pour guérir les écrouelles , il ne faur
que fumiger les malades, & couvrir
les ulcères profonds , ou les tumeurs
avec Templâtre de Vigo cum mercurio^
Quant aux Gonorrhées , aux Bu-
bons , aux Rhagades , âux Porreaux ,
Par très 5 Phymofis, Paraphymofis,
voici par quelles méthodes je les ai
traité es.
Lorfquela eonorrhée étoit accom-
pagnée de la vérole u niverfelle , je fai-
fois fumiger les malades, après les avoir
fait faigner , purger, rafraîchir & avoir
diffipé Finflamm^tion qui accompagne
cette maladie > je leur donnois pour
boillon ordinaire , la décoftion de la
racine de pois puant 3 la vérole univer-»
felle &: particulière guériiloienten me-»
ine tems.
Quand la gonorrhée étoit feule,
la tifanne de cette racine la guérifloiç
parfaitement. Pour difpofer les ma-
lades à prendre ce>te tifanne > je leur
DE St, Dominçve. ^
faifois ufer d'une autre,faite avec la ré^
gliffe du pays. Un habile Chirurgien
m'a affùré qu'il ne donnoit pour gué-
rir la gonorrhée que les tifannes rafraî-
chiflantes.
Après la guérifon des gonorrhées, il
refte aflez fouvent dans l'urethre des
cicatrices dures , élevées , qui caufent
des dyfuries très - douloureufes , que
les Chirurgiens appellent des carnofi-
tés,ôc qu'ils guériilent avec des mèches.
J'en ai guéri quelques unes par l'ex-
halaifon du mercure introduite dans
l'urethre^par le moyen d'un entonnoir^
& cette manière d'effacer ces cicatrices
eft plus fûre que les mèches , qui d'ail-
leurs font douloureufes 5 au-lieu que
la première ne l'eft point du tout.
Avant de finir cet article , je veux,
Monfieur , vous faire part de deux ac-
cidens fmguliers furvenus à la gonor-
rhée fupprimée. Une femme qui avoit
une gonorrhée viririentc,très-abondan-
te,tomba malade d'une fièvre maligne,
dont elle ne guérit que le trente-neu-
vième jour. La violence de la fièvre >
ou les faignées &: les autres remèdes
fupprimerent totalement le flux. Peu
de tems après cette guérifon , elle fe.
trouva tellement dégoiitée de tous les
alimens ordinaires , qu elle ne fou-
haittoit que des porreaux ou des ok
gnons crudsjqu elle dévoroit quand el-
le pouvoit en attrapper. Ce dégoût fut
bientôt accompagné d'une méiancho-
lie ou d'tme trifteffe dont on ne pou-
voit la diftrairc. Enfin ) elle perdit en-
tièrement la mémoire , &: devint imbé-
cille. Elle fut trois ou quatre mois dans
cet état. Une nuit elle en fut totale-
ijient ôc fubitem.ent délivree-.la gonor-
rhée avoit paru. Quoique de ce mo-.
ment elle eût recouvré fon jugement
6c fon efprit , elle ne s'eft jamais f ou-
VE'Sf. DOMINGV E.
venue "qu'elle avoir été malade.
Une jeune Négreffe de quinze ou
feize ans , dont la gonorrhée avoir été
fupprimée,apparemmenr par quelques
drogues quelle avoir prifes, (car les
Nègres fe mêlent de guérir cette nia-
ladie) , devint imbécille, & fa vû^
diminua , de forte qu'elle ne voyoit
pas a fe conduire. Informé de ce qui
lui étoit arrivé , je tâchois de rappeller
Févacuation fupprimée : lorfquelle
reparoiffoit , la Négreffe fe trouvoic
mieux, mais elle étoit médiocre. Se
ceflbit fouvent. Comme je ne demeu-
Tois plus fur les lieux.y je ne faifi^elle
devint plus abondante par elle-même,
ou par les remèdes. Elle fut environ un
an dans cet état , & je lai vue depuis
parfaitement guérie.
Voici qu'elle étoit ma méthode
pour les Bubons vénériens.
Lorfque quelqu'un avoir de ces bu-
-bonsjje ne le guériffois point autrement
p^, Maladies
queparlafumigatîonjcelaluiépargnoic
les douleurs des incifions , la longueur
& rennui des émolliens , maturatifs ,
fuppuratifs , ôc la crainte que le virus
renfermé dans le bubon ne fût rentré
dans le fang. Si le bubon étoit accom-
pagné de vérole , ce qui eft très-ordi-
naire 5 j'étois certain d^avoir guéri Tun
& l'autre de ces maux en moins de
tems qu'il n'en faut pour guérir les
bubons.
Quant aux autres fymptômes de la
vérole , tels que les Rhagades , les
Porreaux , le Phymofis , le Paraphy-
mofis, ils fe guériflent par la fumi-
gation.
Il n'en eft pas de même des dartres,
principalement de celles des Nègres :
quoiqu'elles fe diffipent communé-
ment , non-feulement il s'en trouve
quelques-unes dont on ne peut pas ve-
nir à bout 5 mais quelquefois après la
guérifon des pians, & même delà vé-
BÉ St. Dômïngue. pi
fole> il envient de farineufes à ceux
qui n'en avoient point, le fquellesréfif-
tent longtems , ou toujours , aux to-
piques de toute efpece : les émoi-
liens , la pierre infernale , les eaux
mercuriellesjles pommades avec le fu-
blimé , tout enfin devient inutile con-
tre cette maladie de la peau. J'en ai
trouvé une entre-autre qui n'a pu en
être délivrée qu'en buvant longtems
Teau mercurielle décrite ci-deflus.
Voilà , Monfieur , de cher Confrère,
ce que j'avois à dire fur les maladies
particulières de St. Domingue. Mais
on peut faire une réflexion fur toutes
celles qui font particulières aux Blancs
dans ce climat & dans ceux qui lui font
femblables: c'eft quelles participent
toutes des maladies d'automne dont
parle Hippocratte. Lorfque dans un
mime jour , dit ce Prince delà Mede-*
cine 5 {a) il fait tantôt chaud^tantvt froid ,
( a ) Quando eadem c'ie modo cala , modo frigfisft ,
éUptHtnnaUi mon 9$ gx^eâare oprttt* Aphoi. 4 led. 3.
^6 Maladies
on doit attendre des maladies d'automne.
Voilà précifément ce qui arrive dans
rîie 'S>t, Domirjgue: les foirées, les nuits,
les matinées font fraîches ^ ou froides,
comparées aux chaleurs exceffives des
autres heures du jour. Toutes les ma-
ladies doivent donc être femblables
à celles que l'on voit en Europe dans
rAutomne- Or dans TAutomne [a)
les maladies font très- aiguës & très-
dangereufes.
Les maladies de l'automne qu'Hip-
pocrateaobfervées,fontr.plufieursdes
maladies de l'été : œs maladies de Tété
font des fièvres continues , des fièvres
ardentes j . plufieurs tierces & quartes ,
<Iesvomi{remens, des cours de ventrp.
2°- Les maladies particulières à Tau-
tomne , outre les fièvres quartes U. ^r-
rantes , font principalement les gonflemens
de rate , les hydropifies , les phthtfies , les
( a) In^ autumno morhi acutijfimi ^ omnino morttferi.
Aphor. ^. feCt. 3.
flrangurjes ^
DE St. DOMINGVË. gj
firmguries , les lienteries^ lesdyjfenteries ^
les efc^uinancies ^les ajlhmes^{a).
Toutes ces maladies régnent com-
munément à St. Domingue , mais dans
le même degré qu elles ont en Europe
dans Tautomnei c'eft-à-dire , qu'elles
doivent être la plupart très-aiguës , ôc
toutes très-dangercufes*
Pour éviter ces maladies cauféespar
les variations de Tair, les habitaris
devroient fe vêtir fuivant le degré de
chaleur, com.me on fait en Europe
dans les différentes faifons: mais en
touttems, ils font également couverts,
c'ejft-à-dire, qu'ils ne le font prefque
point. Unevefte de bafîn , ou d étoffe
encore plus légère , & toujours débou-
tonnée , fait tout leur habillement
dans toutes les heures du jour, même
( a ) Antumno autem ^ ex &jl'wîsmulti , ^ febres
quâirtam é* erronés. , iQ* fflenes , ^ hydropes , ^ t^-
hesi^ urinS'fiillicidm , ^ UenteriA , ^ infanU , ç^ dy^
yinteri y ^ arigimi é* '^fthmatà, dcc, Aphor. zx. led. |,
G
aux mois les moins chauds de Tannée,
qui font Janvier , Février & Mars :
bien plu$ , la plupart couchent fans
couverture &: fans draps. Cette mau-
vaife habitude eft la caufe la plus
ordinaire desgonflemens de rate, des
4iai'rhées &C des dysenteries fi commu-
nes dans ce pays.
Je vous ai promis , Monfieur &cher
Confrère , dès le commencement de
ma lettre5de vous parler d'une maladie
fmguUere dans laquelle je fus obligé
de donner lemétique. Un homme de
quarante-deux ans , aflez chargé d'em-
bonpoint j, d'un |:empérament phleg-
matique, après avoir traîné pendant
près d'un mois fans fièvre apparente ,
au moins pendant le jour, luivant le
rapport des voifins & du Chirurgien ,
tomba dans un tel état d'atonie, qu'il
ne pouvoit ni fe foùtenir fur fesji^m-
bes, ni porter un gobelet afa bouche.
Comme il n'écoit pas en état de fe
D B St. Do min GUE.
faire gouverner chez lui/ M'* Fonte-
laye habitant du Cul-de-Sac, le fît
venir fur fon habitation,où je demeu-
rois alors 5 je dois lui rendre ce té-
moignage & à Madame Fontelayefon
époufe , que c^étoient les gens les plus
charitables que j'aye jamais connus ;
leur îliaifon étoit un afyle ouvert à tous
les malades , & pendant plus de dix
ans j'y en ai toujours vu quelqu'un ,
dont ils avoient le même foin que fi
c'eût été leurs enfans.
Le malade 5 qu'ils avoient envoyé
chercher dans leur chaife arriva le foir.
Le lendemain matin je lui fis pren*
dre fix grains de tartre ftibié dans un
verre d'eau , ôc deux heures après trois
autres grains. Et comme iln'etoit que
foiblement évacué 3 je lui fis donner
furies quatre ou cinq heures du foir ,
un lavement avec une décodion or-
dinaire5à laquelle je fis ajouter environ
deux gros de tabac. L'évacuationt fut
G ij
; \
fÔO M AL À D î É> ^
abondante. La fièvre le prit peu de
tems après 5 c'elVee que je fouhaitois,
comme un moyen de rétablir la force
des artères Se des autres parties folides.
Je la lailïlii fubfifter pendant vingt oa
vingt-quarré heures 5 après ce tems je
lefis faigner. Le lendemain je le pur-
geai fortement i lefur-lendemain jele
fis faigner du pie*
Le Chirurgien qui n'eft pas tout-à-
fait ignorant 5 parût fort étonné de la
manière dont je m'y étois pris : je Finf-
truifîs des raifons qui m'avoient dé-
terminé. Le lendemain de la faignée
du pié le malade fut guéri 5 ôc en état de
fe promener : cependant je trouvois
que fon efprit n'étoit point dans fon
affiette ordinaire.
Huit ou dix jours après , il fe déran-
gea totalement. Ce dérangement fe
manifefta d'abord par des chants, des
ris immodérés, des difcoursplaifans,
'dans lefquels il imitoitle langage des
Nègres avec une guaieté & un facilite
.qu'il n'avoit point auparavant. Il nous
couchoit en joue les uns après les au-
tres, avec fon oreillerjfaifant de grands
.éclats de rire. Il fit cent autres extra-
.vagances : mais dès le jour même on
fut obligé de le lier , ôc dans la fuite de
lui mettre une chaîne au pié pour le
-moins incommoder.
. Dans ce tems-là couroit une maladie
inconnue jufqu alors , qui enleva un
grand nombre d'efckvesi elleprenoit
par un gros rhume de cerveau & une
toux violente qui duroit toute la ma-
ladie : le corps fe couvroit de petits
boutons durs , fou vent dès le premier
jour,avecla fievre,&: quelque- fois auffi
fans fièvre : à mefure que ces boutons
féchoient, il furvenoit un dévoiement
violent qui duroit fept ou huit jours
•plus ou moins 5 quelques-uns mou-
roient pulmoniques , &le_plus grand
pombre par la diarrhée. Dans unç
G iij
mÊm
ÏÔ2 Ma l a d 1 é &
habitation de deux cens Nègres, iieii
tomboit malades chaque jour jufqu*à
vingt & trente.
Elle attaquoit auflî quelques Blancs ,
principalement des enfans : on Tap-
T^çiioijarempion ou falempion , nom Ef-
pagnolj difoient quelques-uns, ou
Provençaljfuivant d'autres.Cétoit une
efpece de rougeole boutonnée , & elle
n*en difFéroit qu en ce que la peau n'é-
toitni élevée ni enflammée. J'ai pour-
tant vu quelques enfans blancs avec
CQs deux fymptomes.
Notre malade en fut attaqué le cinq
ou fixieme jour de fon délire , mais
fans rhume de cerveau ni de poitrine ,
& avec peu de fièvre : il n'en fortit
que quelques grains au vifage , aucoU
& aux mains. A mefure que les puC-
tules fécherent , fon délire diminua. Il
en reparut d'autres dix ou douze jours
après : le délire augmenta. A peine cc^
fécondes furent-elles féchées , qu'il en
revint de nouvelles aux mêmes en-
droitsi le délire fUt moins fort qu avant
6c pendant la féconde éruptibii. Elle fé
fit encore au moins trois ou quatre fois.
Pendant tout ce tems qiii fût environ
de deux mois , le délire ne ceffa point
entièrement: mais à chaque éruption il
étoit moins violent qu'à la précédente >
quand il ne s'en fit plds du tèut, le
malade revint dans fonbon fens.
Il y avoit plus de trois mois que la
fanté du corps 6c de Tefpric étoit réta-
blie 5 quand il en reparut de nouveau .
Jufqu à troisreprifes. A la première , le
malade parut morne , Tefprit & la mé-
moire s'afFoiblirent un peu 3 à la fé-
conde & troifieme, qui fut enfin la
dernière, le corps ni Tefpritne fouf-
frirent point. Le malade n'eut point de
dévoiement dans aucun tems , ma^is
feulement le ventre plus libre après
chaque éruption, lorfquelespuftutes
commençoient à fécher. Pour fuppléer
G iv
w
^mk-.
fi 04 Mal. de St. Dôm;^
à cette évacuation critique , je le pur-
geai deux ou trois fois avant qu'il pa-
rût de nouvelles puftules.
J'ai l'honneur d'être j&c.
Fip^ de la première Lettre,
SECONDE
L E T T RE.
SUR LES PLANTES
DE St. do min GUE.
O u S m'avez paru content ,
Monfieur, de ce que je vous
ai écrit fur les maladies de
St. Domingue , & vous m'ex-
hortez à communiquer auffi ce que j'ai
remarqué fur les Plantes du même
pays.
Je ne fai fi je pourrai vous fatisfairc
fur cet article : jo n'en ai décrit que
H
P LA
N T E S
quelques-unes dont les qualités fingu-
lieres font ignorées ou peu connues i
& quelques autres dont \qs defcrip-
tions données parles Auteurs de ma-
tière médicale, fontfauflTes ou impar-
faites. ^
J'ai été détourné d'en décrire un
plus grand nombre, parce que j'ai fup-
pôle quon trouveroit dans le P. Plu-
mier tout ce quon pou voit fouhctiter
fur cette matière. Mais de retour ici ,
quand j'ai examiné Touvrage de ce
favaiit Religieux, il mVparu que ni
IQS Médecins du pays ni ceux d'ici n'en^.
jTourrôient pas tirer un grand fecôtirs
^ pour les maladies , parce qu'il n'indi-
que ni its vertus médicinales des plan-
tes, ni le nom qu'elles portent à St. Do^^
lîiingue. Si l'on vouloit quelque chofe
de parfait en ce genre , il faudroic
qu'un Médecin uniquement cxrcupe dd
cet objet parcourik les difFérens quar-
tiers de cette îleiqu'îl s'informât exac-
VE Sf. DoMi^cvE. Î07
tement du nom de toutes les plantes
qu*on y emploie avec fuccès, qu'il
en fît une defcription exade : enfnitc
il les rangeroit , ou les communique-
roit aux Botaniftes de profeffion qui
lesrangeroient dans les clafles auxquel-
les elles appartiennent, ou qui en for-
meroiént de nouvelles. Mais on nc^
doit pas attendre ce travail d'un Mé-
decin occupé à traiter les malades.
Ainfi quand j'aurois fu ce qui man-
que à l'ouvrage du P. Plumier , il m'au-
roit été impoffible d'exécuter ce que
je viens de propofer.
Pour faciliter ces recherches, je
crois qu'on pourroit fe fervir utilement
d'un manuicrit que j'ai entre les mainé
qui a pour titre :
„ Livre des fimples de l'Amérique
fervans au corps humain , décou-
verts par André Minguét, tant en
Médecine, que Onguens. A la côte
de St. Domingue, l'an de grâce 1 7 1 p
>>
3>
»
ii: i
i)R». fit
X08 P LA N TE 5r2
; Ce manufcric eft fort rare , je n'eix
ai vu qu une copie , qui appartenoit à
M^'- Duhamel Médecin du Roy 5 faite
fur l'original que poffédoit M^'- Depas,
auffi Médecin du Roi, & qui! voulut;
bien me communiquer.
. Vous voyez , Monfieur , par le feul
titre,queMinguet étoit un homme fans
lettres. Auffi n'étoit-il ni Médecin ,
ni Chirurgien, ni Apothicaire. Ce-, '
pendant tout ignorant qu'il étoit, il
a eu une grande réputation dans lepay^
pour la guérifon des maladies tant im
ternes qu'externes. Cela n'eft poinç
étonnant , vous favez le proverbe,
au pays des Aveugles les Borgnes font
Rois,
^ Aux portes de Paris , pour ainfi dire >
n'avons-nouspas vûun payfan, connu
fous le nom à^Medecm deChmdrai.q^uQ
Ton alloit confulter de dix lieues à la.
ronde, & de Paris même? Quelques,
cures faites au hafard , par le moyeu
DE Sr. DOMÏN GVE. {Q^
de quelques plantes qu*il ne connoif-
foit 2;ueres mieux que les maladies,
5c qu'il ordcmioit pour toute forte de
maux 5 fans diftindion d âge , de
fexe, & de temperamens , lui don-
nèrent une réputation qu'un bon Mé-
decin n'auroit peut-être pas pu acqué-
rir. La raifon en eft, que pour faire
honneur à ces fortes de gens , on
ne compte que ceux qu'ils ont guéris
ou foulages, & non ceux qu'ils ont
manques, ou à qui il eft arrivé quelque
chofedepis.
Tel étoit apparemment ce Minguet
dans un pays qui n'a voit peut-être
pas encore vu de véritables Médecins.
Quoiqu'il en foit, fon ouvrage, tout
imparfait qu'il eft, peut apprendre au
moins le nom desplaotes de cette île 5
&: quant à ce qu'il dit de leurs vertus,
les deux Médecins dont j'ai parlé , n'y
ont rien trouvé à redire 5 &: M'* Dulia-
•^mel grand Botanifte , qui a corrigé
5 ' I
1 lO
Plantes
i
une vingtaine de dénominations dé
plantes , n'a pas corrigé un feui mot
fur les qualités qui font attribuées
tant à celles que j*ai extraites de fon
nianufcrit, qu'à toutes les autres dont
je n'ai point parlé.
Je les ai auflî prefque toutes emplo-
yées , & quand j'en rapporte quel-
qu'une dont je ne me fuis pas fervi ,
ou que je ne connois point, je ne
manque pas d'en avertir: c'eftun aveu
que je ne fuis pas caution de ce qu'il
avance. 4
J'ai cru ne devoir rien changer dans
le ftyle de Minguet , puifque c'eft fon
ouvrage que je donne &; non le mien.
Son texte eft diftingué de ce que j'y
ajoute par des guillemets , ou par le
caradere italique.
Entre les plantes que j'ai choifies
dans ce recueil , j'ai remarqué celles
que M''* Lepoupée des Poxtes , Méde-
cin du Roi au Cap , a fait entrer dans
■;"^fl^'':
D E St. DOMÎNGU E. Ht
les formules pour THôpital dont il
étoit chargé. J'ai même cité le P. La-
bat quand j'ai trouvé qu'il avoit bien
décrit quelque arbre ou quelques
plantes dont parle Minguet. Enfin ,
Monfieur , je n'ai rien oublié de ce
que j'ai cru qui pouvoir contribuer à
donner une connoiflance plus parfaite
des plantes de St. Domingue & de leurs
vertus.
POINCILLADE,
Toi^ciama , Jlore pulcherrimo,
LaPoincillade eft un arbrifleau épi-
i;ieux qui croît à la hauteur de lîx oii
fept pies. Il a tiré fon nom du Com-*
mandeur de Poincy , Gouverneur Gé-
néral des îles du Vent , c'eft-à-dire ,
Général de la Martinique , 6l des îles
qui en dépendent {a). Ses feuilles re&
( a ) C'eft lui , qui ayant découvert quelque amer*
tUiTiedans cette fleur, jugeaqu*eliepouvoit être bonne
ïlâ P l AN t Ê i? ^
femblentàcelle deTacacia, ou delà
réglifTe da pays, rangées vis-à-vis l'une
de Tautre, fur une côte qui donne une
épine formée en hameçon à la balTc
de chaque feuille. Ses fleurs font à
cinq pétales. Il y en a quatre d'une
égaie grandeur difpofés en croix, gau--
dronnés à leur bord, qui eft d'un
beau jaune , le refte eft de couleur de
feu : la partie inférieure des feuilles
de la fleur eft rouge, étroite comme
celle de l'œillet : cette couleur rouge
s'étend jufqu'au milieu de chaque
feuille , comme par autant de petites
'artères qui portent ce fuc rouge juf-
qu'aux bords qui deviennent auflîroir-
■ges , quand la fleur n'eft cueillie qu'a-
près vingt-quatre heures ou environ.
Ces quatre feuilles font foutenues
pour la fièvre , il en efTaya & il reuflîr. Me. dcLar*
nage m'apprit qu'à ia Mar.inique on en donnoic Pinfu-
fion dans du vin , pour les fièvres quartes. J'en guéris
deux ; ce qui me donna occafion de l'eflayei: en infur
fion dans l'caii bouillaiue. '
chacmK
DE St. Domin gv e. h^
chacune par une autre plus épaiffe ,
faite en cuilleron , qui n'eft autre cho-
fe que la feuille d\in calice découpé
jufqu'à fa bafe en cinq parties. La
cinquième feuille de ce calice , faite
auffien cuilleron plus profond que les
au tres^eft placée dans un intervalle que
luilaiflent deux des grandes feuilles de
la jfîeur , vis-à-vis la cinquième feuille :
celle-ci s'élève hors du rang des qua-
tre autres plus proche du centre ? com-
me une efpece de cylindre prefqu aufli
haut que les bords des quatre grandes
feuilles: elle s'évafe en une feuille
moitié plus petite que chacune des
quatre, fa forme eft prefque ronde a
gaudronnée comme les autres , prefque
toute jaune 5 on apperçoit quelques
veines rouges 5 & en reftant fur lar-
briiTeau elle devient tout à fait rouge.
Du centre , entre cette petite feuille
Scelle du calice qui lui eft oppofée ,
fortent dix étamines rouges qui s'éle-
H
î 14 ■ ^ ^^ N T Ë s
vent feeancoLip au-deflus delà fleur
de qui font un peu courbées : elles en-
y ipDnnent l'embryon qui fe termine en
un filet de la même hauteur que les éta-
mines. Cet embryon devient unefiii-
queplatc,diire,de couleur de châtaigne
en delîors $ blanchâtre en dedans ,
formée de deux coffes qui renferment
huit ou neuf femences., larges, cpaifles
comme les plus groiîes lentilles , de
figure prefque qiiarré€,ou approchante
dun cœur applatti, fogées chacune
dans une foflfe féparée l'une de l'autre.
Les feuilles du calice font de cou-
leur de feu en dedans,&en dehors d'un
rouge mQJ4iis£oncé me le de jaune ôc de
verd.
Les boutons delà fleur font rangés
en épi ferrés, attachés par de courts pé-
dicules fur une tige fans feuilles , gros
en bas &: plus petits à mefure qu'ils
s'approchent de la fommité. Les pé-
dicules s'allongent en longue queue,
DE St. Domïn gve. ii|
àmefureque les boutons groffiflents:
il ne s'en épanouit gueres que quatre
chaque nuit 5 & ainfi de proche en
proche du bas en haut de la tige , qui
croît auflî jufqu a un certain point , de
manière qu'il yen a qui donnent plus
de cent fleurs > enfuite cette tige fe
feche.
Il y a peu de branches de rarbrifleau
qui ne produifent en même tems plu-
fieurs grappes ou épisi &â mefure que
les tiges fechent, il en renaît d'autres ,
en grande quantité pendant près de
neuf mois , & toiijours quelques-unes
pendant toute l'année , plus ou moins,
lui vaut qu'il y a plus ou moins de pluie.
Les mois de fecherefle , font Décem-
bre , Janvier , Février , Mars , quel-
quefois Avril. Il naît allez fouvent
une fleur dans l'aifiTelle de quelques
feuilles.
Les fleurs de la Poincillade pri-
fes , comme du thé , avec un peu de
H ij
m
IJ^ P L A N TE S
fiicre , font fudorifîques béchiques
vulnéraires. J'ai guéri par leur fe-
Gours trois perfonnes qui avoient un
ulcère au poumon. M'^' Alais Méde-
cin de la Rochelle , à qui j'en en-
voyois tous les ans , m'a écrit, qu'il
avoit p-uéri plufieurs vieillards de tu-
berculesaupoumon5&rétablilapoitrine
de quelques Avocats de Paris,auxquels
il en avoit envoyé. Je m'en fuis fervi
avec fuccès pour les petites véroles,
les rougeoles accompagnées de toux
ferines , 6c dans tous les rhumes. On
en met une pincée dans une pinte de
tifanne convenable ou d'eau bouil-
lante. Elles font auflî un excellent fé-
brifuge, données dans une forte infu-
fion. Il faut en mettre une petite
poicrnée dans un pot j on verfe par-
deflus une pinte d'eau bouillante , on
couvre le pot : on en donne au ma-
lade deux , trois , Se quatre taffes bien
chaudes avec du fucre, une heure ou
r> E St. Do min gu e, u j
deux avant l'accès. Ordinairement
le malade fue beaucoup , ôcle troifie-
me accès ne revient point.
Elles ont cet avantage fur le quin-
quina, que Tonn'eftpas fuj et aux ré-
cidives, 6c qu'elles lont agréables à
prendre.
Je les ai auflî données avec fuccès ,
pulvérifées , en opiate , dans les fiè-
vres rebelles , principalement les quar-
tes.
Il faut les cueillir tous les matins
quand le Soleil a féché la rofée qui
etoit deffus 3 les faire fécher à Tom-
bre , avoir foin de les retourner tous
les jours , 6c les enfermer enfuite dans
une boîte.
Tois fuant.
Le pois puant, {^) eft une plante
qui jette plufieurs rameaux forts dui^s^
( a ) Les Botaniftes difent quq c'eft une efpecç
de cafle.
ïl
P Z A
TES
& eomme ligneux, à la hantear de
trois OU' quatre pies. Les feuilles font
oppofées deux à deux fur une côte ,
oblongues , pointues , vertes en def-
fus , blanchâtres en-delTous, fort
puantes: fes fleurs font à cinq feuilles
alfez reflemblantesà celles du genêt.
Elles font fuivies de gonfles longues
d'un doigt, prefque rondes de la grof-
feurd'un gros tuyau déplume. Elles
contiennent plufieurs femences noi-
râtres, groffes comme des pépins de
raifins , applaties dans le milieu , &
un peu pointues par rextrémité qui
était attachée à la gonfle avant de
fécher. U y a des gonfles qui en ren-
ferment plus de cinquante.
On aflTure que les femences ro- «
tîes & broyées prifes en guife de cafFé, "
font bonnes pour lapaffionhyfl:érique,
& quelles font emménagogues.
Les feuilles en layemen}; , font fort
efficaces contre les vapeurs , & dans
DE St. Dqmingve. h^
les cataplafmes refalutifs. U) La ra-
cine eft excellente pour guérir les go-
jiorrhées3 on les donne en tifanne poux
toute boiflon 5 elle eft um.peu amese.
Il faut auparavant faire préeéder
les faignées néceffaires> &: les tifam-ies
rafraîctiiflantes , j;ufquà ce que les
douleurs foienx paffées. Pendant: to%îU
le tems que j'ai été à St Domingoe «
je n ai point employé d'autres remèdes^.
On peut conjecturer que cette ti-
fanne conviendroit également dans
les fleurs bdanckes.
Il y a une autre efpece de p^i^
puant 5 q^i ^"'^ diffère delà première
que par fes feuilles qui font prefque
rondes & d'un ver plus clair: je nai
point ùàt ïïkfage de,C€tte Çecoade.
L'arbre nommé Immortel (^) efl
(;^) MonCewiT Lepouçé-e DefpoFtes, Medeem du
Rûi au Cap , daaisks focmuksd'Hô-pita].
H iv
120
L 4 N T E S
épineux jufqu*à ce qu*il ait acquis
la grofleur de la jambe : à niefure
qu^il croît & groflît , il perd fes épines ,
ôc il n'en refte que fur les jeunes
branches. Il a été ainfi nommé,
parce qu'on peut , dit-on , le dépouil-
ler de toute fon écorce , fans qu il pé-
rifle ( 45 ). Il a une cavité , comme
le fureau : mais elle eft plus étroite àc
a moins de moelle par conféquent.
Ses feuilles font en cœur, non
échancrées par la bafe , difpofées
comme celles des pois , trois fur une
longue queue. Elle tombent vers le
mois de Décembre , & font place à la
fleur.
pelle immortel , fort différent de celui-ci.
(a) J'en ai fait dépouiller fix , qui n'avoienr pas
deux ans, depuis le bas du tronc jufqu'à la divifion
en branches. Les feuilles n'en changèrent pas de cou-
leur. ^Ils portèrent des fleurs à l'ordinaire : il n'en
mourût qu'un après avoir porté fes fleurs. Il efl: auflî
connu fous le nom d'Arùor Maurepajta * le Maurepas;
que je lui ai donne' à caufe de fes excellentes qualités.*
D E St. Do mi ng ue. 121
Les fleurs forment u ne infinité de gros
bouquets compofés de boutons cour-
bes, au nombre de cinquante ou foî-
xante , de la longueur du petit doigt,
fur une grolfe tige. Ils font enveloppés
d'une gaine ou calice, qui fe fend
en long par le milieu, & laifle voir
une portion de la fleur de couleur de
feu. Chaque bouton a une queue lon-
gue de quatre ou cinq lignes. Quand
il s'épanouit , il paroît une feule
grande feuille droite , longue d'un
demi doigt à peu-près en fer de pique
allongé 5 à Toppofite paroît le calice
formé en long cuilleron. Au milieu
du calice & au-deflbus de la feuille de
la fleur , on voit une petite fleur à
quatre feuilles difpofées en grelot.
Du centre fort le piftil , enveloppé
d'une gaine , qui fe divife en dix
étamines. Le piftil eft l'embryon du
fruit. Toutes les parties de cette fleur
repréfentent alTez bien un cafque.
I2Z P L A N T E S
Le fruit ell une goufle courbe con-
tenant fix ou fept fèves, groffes ,
(avant qu'elles foient deffëchées )
comme une fève de marais.
Les feuilles , leur queue , &
Fécorce de cet arbre font le plus grand
remède qui foit connu pourTafthme:
on en met un gros dans cinq demi-
feptiers d'eau que Ton fait réduire à
une pinte avec du miel i ou bien on
met du fucre en la prenant chaude-
ment. Pendant Taccès on en peut
prendre tant qu'on veut: ce remède,
n'échauffe point , & ne fait d'autre
effet que de procurer Texpedoration,
{a) pour prévenir l'accès, il fuiSt d'ea
prendre plein une petite jatte matin
& foir.
La même décodion eft auffi fort
bonne dans les rhumes de poitrine.
On fait avecla fleur un firop excellent
pour les poitrines échauffées.
^ ( ^ ) Il m^4 pourtant paru un peu laxatif & diuré-
tiq e.
t>£ St. DOMINGUE. I2J
Cet arbre eft fort commun , furtout
depuis que je l'ai multiplié: il vient de
graine 6c de bouture , ôc croît environ
de fix lignes en vingt-quatre heures 5
en forte 5 qu'en moins de deux ans
il a des branches qui ont plus de dix
pies de haut.
Les Botaniftes ^ d'après le P. Plu-
mier , l'appellent cor dlodendr on y vciot
grec, qui fignifie arbre de Corail*
Il y a à St. Domingue un autre
arbriflbau qui vient dans les haies,
dont les fleurs font affez femblables à
celles du chevrefeuil, que l'on appel-
le arbre de Corail ; on fait avec
fes feuilles des bains eftimés pour
guérir la galle.
Cachiment ou cœur de bœuf.
Il ne faut pas confondre CQt arbre
& fon fruit avec celui qui eft décrit
dans le Didionnaire de Lemery, Cet
9»
i 14 P ^^ N T E s
Auteur parle d'un arbre qu'il nomme
gmabâne ou cœur de bœuf. '< C'elc , dit-
" il) un grand & bel arbre des Indesi il
w porte un fruit très-beau , gros ordi-
» nairement comme un melon médio-
cre , & quelquefois comme la tête
9» d'un enfant. L'écorce de ce fruit
'> efl verte , & femble diftinguée par
»• certaines écailles, comme la pom-
« me dcJPin Sa chair elt fort
•' blanche ôc d\in goût très-délicat . »»
L'arbre qu'il décrit , s'appelle à St.
Domingue, Coroflblier, & le fruit Co-
roflol. Ce n'eft ni un grand, ni un bel
arbre 3 fon fruit n'eft pas d'un goût fore
délicat. Lés Nègres &: quelques fem-
mes Créoles en mangent , mais fans en
être friands. On en fait une gelée ai-
grelette affez bonne.
Le P. Labat a fort bien décrit le Co-
roffolier , un autre arbre , que l'on ap-
pelle le pommier de canelle , Se le cœur
ce bœuf. Les Planches qu'il 3 fait
DM St. Do mingve, 12 f
graver , répréfentent parfaitement ces
trois arbres avec leur fruit.
L'arbre dont le fruit s'appelle cœur de
bœuf , ou cachiment cœur de bœuf,
eft comme le précédent, un petit ar-
bre ordinairement tortu & fort mal
fait 5 de la hauteur d'un néflier. Ses
feuilles reiTemblent à celles du pêcher.
Je crois que celles du ganabane font
faites de même , fnion qu'elles font
plus vertes 5 auffi-bien que celles d'un
autre arbre que l'on nomme cachi-
ment Efpagnol ou pommes de canelle
qui ont beaucoup de reflemblance
avec le corroflol par la figure , par la
chair membraneufe , les pépins de les
écailles, fi ce n'eft qu'elles font plus
petites.
Je n'ai pu voir la fleur du cœur de
bœuf 5 parce qu'il n'y en a point dans
les quartiers ou j'ai demeuré: elle
paroît vers le mois de Décembre.
Son fruit eft gros comme^ une groffe
126 P L A ^ T JE ^
poire de bon chrétien > il a la fi(>ure
approchante d'un cœur vert au com-
mencements d'un jaune brun, quand il
a acc|ais fa groiïeur, & de couleur de
rofe quand il eft mur. Sa pulpe eft
blanche alors , & de confiilance de
bouillie: les Nègres & quelques fem-
mesCréoles en mmgentjellen'eft point
aufli délicate queleditle Diftionnaire
de Trévoux y {a) mais elle n'eft pas de-
fagréable.
Quand il a acquis à peu près fa grof-
feur, je le fais cueillir avant fa matu-
rité , je le coupe par tranches &
le mets fécher à Fonibre.
Nous n'avons point en europe de
remède fi prompt &:fi afliiiré contre les
diarrhées & les dyflenteriesi après les
fiîgnées convenables, & les pùrga-
tions> fi elles fojit néceffaircs, lorf-
(a) Il y efl dir , que c'ait un friût de Siam. j'ai
connu ces jours-ci un Chirurgien qui venoit desGraa-
des-indes , qui m'a die qu'il j en a voit vu.
DE St. Do min g ve. 127
qu'il n'y a point de fièvre ni de dou-
leurs dans le ventre : le ténefme feul
ne doit pas empêcher de s'en fervir.
On fait bouillir deux gros de ce fruit
mis en poudre dans une chopine d'eau,
ou d'une décoâion émoliiente réduite
à moitié. On donne cette décoclion
avec la poudre. Le malade garde ce
lavement le plus qu'il peut.
Si le ténefme eft violent ou fré-
quent 5 il eft bon de faire bouillir la
poudre dans la décoftion d'une tête de
pavot écrafée , & de pafTer la décodion
avant d'y faire bouillir la poudre >
ou bien dans la décoftion de la pou-
dre faite dans l'eau , ou dans une dé-
coûion émoliiente 3 on ajoutera un
gros de thériaque nouvelle, ou bien
quelques gouttes de teinture anodyne.
On réitère ces lavemens fuivant le
befoin.
Dans les diarrhées ^ les dévoie-
Biens y il faut ufer , pour boillon or-
' »».^*^^..
128 Plantes
dinaire d'une tifanne faite avec ce
fruit coopé par morceaux. On en
fait bouillir un gros dans cinq demi
feptiers d'eau , que 1 on fait diminuer
eiîYÎron d'un quart, ou jufqu'àce que
ia reiotore foit de couleur de rofe , ou
à\in vin clairet i on peut y ajouter
de ia régliffe. Si le malade a coutume
de boire du vin , s'il eftfoible , ou fi la
diarrhée eft invétérée , il peut en met-
tre environ un quart fur trois quarts
de la tifanne.
Du Alap^gle rouge,
îi Y a trois ou quatre efpeces de
Mangle. [a) Je ne connois les vertus
que de celui qu'on appelle mangle
rouge. Il vient comme les autres fur
le bord de la mer. Il croît d'une fa-
{a ) Voyez le Diclionnaire de Lemeiy , article
Man^s p» 542. ii en fait de trois efpeces ; de blanc ,
A^-<ftxA^ & d'une autre efpece » dont il ne dit point
lacoueiir. Ilfe trompe fur prefque tous les articles ;
ce qiii approche le plus duvrai, efl: 1^ remarque tirée
de ia relation de Monfieur Froger.
con
I
DE St. Domïngve. i^^
çon finguliere. Le premier jet qui
fort de terre en produit d'autres à les
cotés 5 qui au lieu de s'élever en Tair
fe recourbent vers la terre , & y pren-
nent racine, enforteque dans cetétac
il repréfente un trépié. A mefurc
que la première tige qui efl: la princi-
pale, ôc qui devient arore , s'élève , elle
produit d'autres rejettons , qui fe re-
courbent comme les premiers , & pren-
nent auflî racines i ainfi cet arbre tient
par une douzaine , ou plus, de ces
pies qui deviennentgros & forts , aux-
quels les huîtres s'attachent ( a ), LorC-
que le tronc eft parvenu à la hauteur
de trois ou quatre pies, il fe divife en
plufieurs branches, à la hauteur de
huit ou dix pies. Je ne l'ai point vu en
( » ) Les huîtres de St. Domîngue , iûrtout dans
les quartiers que j*ai habités, font fort petites, <Sc
beaucoup moins bonnes que celles de France. Plu-,
fîeurs écailles fe tiennent enfemble & forment comme
des efpeces de petits rochers autour du bois.
IJO P L 4/N T E S
fleur, fes fruits font des goufles, mais
qui n'égalent pas la groiJeur d'un tuyau
de plume , fes feuilles font allez fem-
tlables à celles du laurier.
Le P. Labat fe trompe fur Tarticle
du mangle rouge, comme fur bien
d'autres : mon intention n'eft pas de
le redreller. Ce qu'il eft important
pour la médecine, defavoir, c'eflque
fon écorce , qui eft rougeâtre , féchee ,
réduite en poudre & prife enfubflance
ell un fébrifuge aufS affùré que le
quinquina , furtout quand elle eft
jointe avec la poudre du convolvulu$
câthartkus. Je ne l'ai point éprouvé en
4écoâ:ioi.i: mais jeprenois un gros de
poudra de mangle avec un fcrupule
pu un demi gros, (félon que je vou-
lois purger plus ou moins ) de poudre
des tiges de convolvulus féchéesy j'en
formols une opiate avec laquelle je
guérijQTois ^n deux ou trois prifes
toutes les fièvres tierces des Nègres:
V E St. D 0 MINGVE. i>£
ce que j'ai pratiqué pendant plus de
fîx ou fept ans : enforte que pendant
ce tems on n*a pas employé un grain
de quinquina dans Thabitation des
Mineurs Mithon , où il y a 300 Nègres.
Liane à médecine de Minguet.
Convolvuius Catharticus Americanus ,
Jive fcAmmonïa Amcricana.
Cette efpece de liferon que Minguet
appelle liane à médecine (4), eftpré-
cifément la même chofe que la plante
de Syrie , que Ton appelle Icammonée,
fi ce n'elt que fa racine n'elt pas à
beaucoup près fi longue ni fi grofle que
M^' Lemerylediti qu'elle n'eiè point
iaiteufe ; ôc par conféquent la fcam-
nionée qu'on employé , n eft point le
fuc concret de la racine , mais de 1^
( 4 ) A St. Domîngue , tous les convolvulus , &
toutes les plantes farmentcufes s'appellent liane , parc$-
quelles fervent à lier*
I ij
LAN TE S
tige 3 à moins qu on ne veuille dire
que la fcammonée de Syrie eft telle
qiî elle eft décrite dans le didionnaire
des drogues fimpks , &. que celle de
St. Dominguenelui eftfemblable que
par fes tiges , fes fleurs & {es feuilles.
Mais cet Auteur fe trompe fi fouvent
dans la defcription qu'il donne des
plantes de St, Domingue , qu'il peut
bien fe tromper auffi dans celle des au-
tres plantes étrangères.
- Quoi qu'il en foit , cette plante
pouffe plufieurs tiges longues, groffes
prefque comme le petit doigt, qui s'at-
tachent aux arbriffeaux voifins : (es
feuilles font larges d>c longues comme
la paume de la main , pointues par
leur extrémité , & du côté de la queue
échancrées èc formées en cœur. Ses
fleurs font en cloche. Je n'ai point vu
lès fruits 5 car cette plante ne vient
.|ue dans les montagnes.
Ses tiges vertes font laiteufesi 6c
DE St. DdMlNGVE. Ï2Z
quand elles font feches , elles font
remplies de réfine brillante quand on
les cafiTe.
Les Nègres eoupent ees tiges vertes
en bifeau , de la longueur d'un demi-
doigt. Ils arrangent ees morceaux dans
un plat. Le lait en fort &: il s epaiffit
en une belle raifine blanche 5 ou bien
cefuc feehe à Textrémité de ces pe-
tits morceaux , & avec une lame de
couteau on le gratte & on en fait d€
petites malTes.
On employé ceconvolvulus en in-
fufion 5 en firop , en extrait. Les ha-
bitans du pays qui le donnent en in-
fufion déterminent la dofe parla lon-^-
gueur des deux bras de ceux qu'ils
veulent purger. Cette préparation a
deux défauts: le remède eftmaldofé,
& Tinfufion ou décoftion eft fort acre.
Le firop eft encore trop acre. L'ex-
trait, à la dofe d'un gros n eft pas
mauvais , il purge & eft un bon vermî-
I iii
Plan t s s
fuge. On donne aaflî laréfine jufqu'à
dix ou douze grains en bol aux enfans:
cette dernière manière de remployer,
eftla moins bonne , parce que fou vent
la refîne s'attache aux parois du ven-
tricule ou des inteftins , caufe des fu-
perpurgations , des tranchées, ôc même
des convulfions.
On pourroit faire avec cette réfine
une poudre ^^ tribus: & parce que
cette poudre caufe fouvent des fuper-
purgations & des tranchées , pour re-
médier à ces incon véniens , voici com-
me je la fais faire.
Prenez de l'antimoine diaphoréti-
que , du diagrede , de Txthiops mi-
nera ^parties égales:non-feulement elle
ne donne ni fuperpurgations ni tran-
chées, mais c'eftun excellent fébrifuge.
Mais la meilleure manière de fe
fervir du convolvpilm catharticus , c'eft
de mettre fes tiges feches en poudre
& de l'employer dans les éleAuaire^
où l'on fait entrer la fcammonée.
VE St. Do min GUE, ijj:
Herbe au Charpentier,
Uherbe au charpentier , ( ceft
ainfi qu'on Tappelle à St. Domingo e ,
au lieu deTherbe du charpentier ) eft
une petite plante qui jette beaucoup
de rameaux rampans remplis de nœuds
de diftance en diftance 5 d'où fortenc
des racines capillaires par le moyen
defquelles elle s'étend beaucoup. Elle
a deux feuilles à chaque nœud > op-
pofées l'une à l'autre en fer de pique.
Les fleurs naiffent à l'extrémité de:
chaque rameau , qui fe divife alors en;
plufieurs autres plus petits» fans feuil-
les. Elles font d'un violet clair ^ ens
<yueule5 & très-petites. Ce font des
tiuyaux évafés en deux lèvres i,ruaeT
fupérieure, l'autre infétrieuarc. La fu-
périeure eftrenverfée en dehors,échan-
crée en trois parties. Les deux des
côtés font un peu plus étroites ôcplus;
hautes que celle du milieu. Depuis, le
I iv
I'! I
1^6 P L A N TE S
commencement de celle-ci jufqu'aux
échancrures , il paroît quatre petits
filets blancs couchés à roppofite les
tins des autres de chaque côté , &
deux qui s'avancent vers la troifieme
partie: ils ne fe féparent pas facile-
^Hient de cette feuille. Ils m ont paru
les ramifications d'un nerf blanc qui
règne furie dos de laJevre fupérieure
depuis le commencement du tuyau
|ufqu aux bords de la partie moyenne.
La lèvre inférieure eft une petite
feuille pliée en cuilleron , qui ne s'é-
lève guère plus haut que la petite plat-
te-formeque fait la lèvre fupérieure
en fe renverfant.
En ouvrant le tuyau on apperçoit
trois ou quatre étamines blanches qui
entourent un piM blanc. Elles font
ordinairement couchées & renfermées
dans la duplicature de la lèvre infé-
rieure.
Lç calice de^ la û^ur eft très - petk ,.
1
VE St. DôM IN G UE. 157
divifé jiifqua fa bafe en plufieurs
petites pointes , il ne monte pas au
quart du tuyau. Le piftil fort du
fond du calice, au lieu que les éta-
mines naiffent du fond du tuyau. En
arrachant la fleur toute entière , le
piftil feul refte adhérent au fond du
calice, §c le tuyau femble n'être
percé que pour laifler pafler ce piftil y
qui paroît pofé fur un embryon très-
petit 5 qui devient apparemment une
femence ou une capfule très-petite ,
que mes yeux n'ont pu reconnoître ,
même à l'aide d'un microfcope.
Le plus grand mérite de Therbc
au charpentier , eft qu'on en fait un
firop excellent pour le goût, & très-
bon pour le rhume de poitrine 3 il a
l'odeur & le goût d'amandes.
tiM'^* Lepoupée Defportes en confeille
l'infufion dans la cachexie. Il fait en-
trer les feuilles dans les cataplafmes
émolliens ôcréfolutifs.
On dit que la plante pilée & appli-
quée fur une plaie récente , la guérit
enpeudetemsi ôcqueceft par cette
raifon quonlui a donné fon nom.
On alTiire encore qu elle eft emmé-
nagogue > eJleeft certainement aphro-
difiaque , & fon ufage échauffe.
On peut la prendre auffi eninfufion
après une légère ébuliition., • '
Cmîficier ou Cdjfier.
On donne à St. Domingue, cts
deux noms àfarbre qui porte la caflTe.
II eft grand & gros^fes feuilles viennent
oppofées Tune à l'autre au nombre de
dix ou douze , ôi finirent par deux fur
une tige longue d'environ un pié.
Ses fleurs' font à cinq feuilles, jau-
nes , prefque rondes , longues de dix!
ou douze lignes , fur une autre tige de'
mênie longueur, depuis vingt-quatre
jufqu'à trente , avec de longues queues,
ce qui forme de gros bouquets, enforte |
que cet arbre fleuri eft dune grande ^
beauté.
1.
DE St. Do min g ve. i^gj
Les cloifons des filiqiies ont fort
peu de pulpe : on ne peut pas les mon-
der. On eft obligé d'écrafer les bâtons
& de les mettre infufer ou bouillir>
de plus , rarement peut-on les avoir
mûrs. Les Nègres les volent prcfque
encore tout verds , ou les maîtres les
cueillent avant leur maturité , crainte
d'être prévenus par les efclaves. Il ar-
rive de-là, que plufieurs ont des co-
liques, & rendent des glaires fân-^
glantes , pour un feul verre de cette
décodion.
Lacafle de la Martinique eft meil-
leure 5 la pulpe eft plus épaifle fur les
cloifons. M""' Lemery a raifon d'à-*
vertir , que la cafle du levant eft la
meilleure* La defcription que je viens
de faire eft peu différente de celle
qu'on trouve dans cet Auteur : mais
il fe trompe lourdement , quand il af*
fùrc avçc tous les Botaniftes de l'Eu-
rope , que la partie de la falfepareillc
t^O Mal a d i e s
dont on fe fert, eftla racine dune ef-
pece de fmilax.
Sdfefareille,
La Salfepareille, eft une plante
quipouiTe de fa racine plufieurs tiges
longues, farmenteufes , qui fe fendent
aifement , blanches en dedans , bor-
dées de deux raies rouges, moelleufes,
quand elle font fendues. Il y en a de
deux efpeces , l'une grifâtre , nouée
de diftance endiftance, unie, (fi ce
n'eft quelquefois Textrémité la plus
proche de la racine qui eft ridée & plus
grolTe que le refte). Elle .eft garnie
de tenons ou mains,avcclefquelles elle
s'attache aux arbrifleaux voifins i en
un mot telle que nous la voyons ici ,
excepté qu on en a ôté les tenons. Je
n'en ai jamais vu qu'un dans celles
que l'on nous apporte. Il s'en faut
beaucoup que it^ feuilles ayent la lon-
gueur que M^- Lemery leur donne :
DE St. Do min g V e. i^ï
elles n'ont pas plus de trois ou quatre
doigts y elles ont des oreilles 5 c'eft-à-
dire , quelles font découpées ( ordi-
nairement profondément) de chaque
côté vers le milieu , enforte qu'elles
repréfentent trois fers de pique > parce
que chaque portion fe termine en une
pointe. Cette plante croît dans les lieux
pierreux & fabloneux, avec les ha-
liers. J'en ai pourtant vu dans les bois,
mais la terre étoit fabloneufe.
Les tiges fortent quelquefois d'une
tête grofle comme un œuf [a)) le refte
de la racine n'eft pas plus gros que la
tige , longue tout au plus d'un demi
pié 3 elle fort aufll de la même tête.
L'autre efpece eft noirâtre^ridée, rem-
plie de petites racines capillaires,parce
qu'elle rampe parterre. Je n'ai jamais
vu ni feuilles^ni fleursjui fruits de cette
efpece. Il y a apparence qu'elle croît
dans des lieux marécageux 3 ôc que
(a ) Sa fubftance approche de celle de lafquine d«.
St. Domingue , qui e& plus dure que celle qui nous
vient des Indes Orientales.
^4^ P l ^ N T E s
ces tiges ne trouvant point a s'accro-
cher, rampent parterre, & y jettent la
grande quantité de racines capillaires
Sue Ton y voit, & qui ont donné lieu
e croire qu elles font elles-mêmes des
racines. La blanche en jette aulîî
quand elle ne trouve rien pourfe foû-^
tenir. -
Il fort des aiflclles des feuilles de
petites q-jeuesqui foiitiennent la fleur:
elle elt en étoile à cinq feuilles,ôc non
en grappe. Ce calice dans fon com-
mencement eft fermé 5 dans la fuite
U s'épanouit, & fait voir un difque,
autour duquel il y a deux rangs de
filets très -courts comme deux cer-
cles concentriques. Le plus grand a
auflîdes filets, plus longs, dont la poin-
te eft un peu recourbée vers la fleur
ou le calice : le plus petit qui envi-
ronne le difque eft compofé de filets
très - courts , qui ne reffemblent pas
inalà une frange. Du milieu du difque
i> E St. DoMiNCv E. 14,3
fort un piftil qui devient le fruits
quand la fleur elt paflee. Autour de
Tembryon qui eft élevé fur la pointe
du piftil (^), on voit trois ou quatre
étamines qui naiflent de la bafe de
l'embryon i il y en a deux qui reflem-
blentàuncompas ouvert dont le fom-
met porte fur le haut de Tembryon ,
&: les branches pendent en bas, '
Entre Textrémité fupérieure du
piftil & lembryon naiflent trois ou
quatre étamines , qui par leur difpofi-
tion s'emblent auffi un compas ou-
vert , dont le fommer porte & fur l'ex-
trémité du piftil & fous, la bafe de
l'embryon , & les branches pendent
en bas. Il y a encore fur la pointe de
Tembryon trois ou quatre autres éta-
mines pofées de la même façon en
compas , dont le fommet couvre la
( ^ ) Dans les fleurs ordinaires , le piftil porte
communément fur Tembryon : dans celle-ci , l'em-
bryon eft fur le fommet du piftil qui fait iVfficç de
pédicule , & qui foûtiçnt le jeune fruit.
I;;'; i:l-
■MM
144 Plantes
partie fupérieure de Tembyron , & les
branches pendent en bas far le difque.
Le fruit de la falfepareille rejGTemble
parfaitement parle dehors à un grain
de raifin , verd avant fa maturité ,
noir quand il efl: mur. Il contient un
fuG rouge , comme celui des mûres >
Se renferme pkiiieurs graines ou pé-
pins comme ceux de la grofeille. Le
nombre n eft pas égal , on en trouve
douze, quinze, dix- huit , peut-être
plus.
Le féné eft une herbe, &ç non un
arbrifleau. 11 pouffe de fa racine des
tiges longues de deux ou trois pies ,
foibles & pliantes , groffes comme
l'extrémité du petit doigt 5 elles ont
befoin d'être foûtenues ,fans quoi elles
ramperoient par terre : les feuilles
naiiient oppofées deux à deux , au
nombre de quatorze fur une côte. Les
fleurs
J>E St. DOMINGUE. JA^
fleurs naiiTent fur une autre qui n'a
point de feuilles , & qui fort de l' aifTelle
de la première : elles font jaunes à
cinq feuilles , & repréfentent un gre-
lot avant d'être épanouies. Il leur ^ic-
cède des goulTes , qui font connues
ious le nom de follicules : chaque tige
en porte cinquante ou foixante 3 &
chaque follicule renferme huit femen-
ces dans autant de loges: ces femen-
ces font a peu femblables aux pépins
de railins. ^
Ses racines font fort longues , un peu
plus grolTes que les tiges quifortentde
terre. J en ai vu qui avoient près de
deux pies.
Le féné que je viens de décrire eft la
féconde efpece dont parle Lemerv •
^en^M itdtcafi-ve foins obtufis. J'en ai
peuplé dans le tems de la guerre, les
quartiers de Léogane & du Cul-de-fac.
Il m a paru purgermoins que celui de la
1 alteice quipeut veniraulfijde ceque je
K
\\AÙ\\
Plantes
ji'ai cueilli les feuill es qu*après la parfaî-
ce iTiaturité des follicules. Je fuis confir-
mé clans cette penfée par la remarque
4e Minguer 3 qu'il faut les faire fécher
à Pombrei & par celle que j*ai faite,
xjue les foUicuLes qu'on nous apporte
du Levant , ont été cueillies avant leur
maturité, ce qui eftprouvé par leurs
femences , qui n'ont pas leur grojQTeur
ordinaire.
On m'obje£kera peut-être , qu'il ne
s'enfuit nullement que le féné dont
nous nous fervons ne foit pas les
feuilles d'un arbriffeau , parce que ce-
lui que j'ai cultivé eft un herbe 5 on
alléguera pour preuve , que cet arbrif-
feau eft dans le jardin du Roi.
A cela trois réponfes. La première ,
qu'il n'eft pas vraijGTemblable qu'une
plante foit herbe dans un pays , & ar-
briffeau dans un autre. La féconde
qu'au moins cette féconde efpece n'eft
pas arbxiffeau i 6c que le Didionaire
DE St. DomiNGUE. t^j
des drogues iimplesnc fait point cette
diftinAion. Latroifieme , querarbrif*
feau dn Jardin du Roi, n'elt peut-être
pas lefénc) Ton ne peut s'en ailurer
que par les follicules , & on ma dis
qu'il n'en portoit point. Quoi qu'il en
foit, il eftaiféd'écl'îircir cet article. Je
dis ce que j'ai vui & l'on auroit tore
de douter démon témoignage.
Noms & vertus de plufieurs fiantes dont
on fait ufage k St. Domingne,
Je choifirai les plus utiles & les plus
curieufes dans le recueil de Mino-uet
Se dans les formules que M''. Lepoupée
Defportes, Médecin du Roi au Cap,
avoit faites pour l'Hôpital dont il était
charge.
Avocatier.
L'avocatier eft un arbre fruitier , qui
croît fort haut, qui s'étend peu. Ses
K ij
148 P ^^ N r E s
fruits font gros comme une poire de
virgouleLife,oblongs,clunverdqui jau-
nit un peu en miirifrant. Il pend à
rextrémité des branches par une queue
longue comme la moitié du doigt , le
noyau eft fort gros^rond^extrèmement
amer. On n'en fait aucun ufage. Il
eÛ couvert d'une chair blanche , tirant
fur le jaune , qui a la confiftance de
beurre frais dur 5 & il en a prefque le
goût. On le mange avec du fel 6c du
poivre. Communément les nouveaux
débarqués ne le trouvent pas bon d'a-
bord: mais ils s'y accoutument aifé-
nient , & en mangent avec plaifir.
Minguet alTureque ce fruit eft bon
pour le flux de fang. Je ne l'ai point
éprouvé.
On fe fert journellement de {es
bourgeons en infufion , pour rétablir
récoulement desregles,ôc dans les fup-
preffions qui arrivent après les couches.
On s'en fert auffi après les chûtes ou les
2?B ST^Dô'MÏI^àVE. t^^
contLifions , poiir diffbudre le fang cail-
lé. M^ Lepou pée Defportes les ordonne
dans les tifannes apéritives, & emmé-
îîàgogues. '
, J'en ai fou vent fait de la limonade
f'>OLir Ids fièvres ardentes & mêmç ma-
ignés. ^ On le coupe par tranches
minces , que Torit met dans Feau avec
un pëtrdc fucre. Je crois quïl eft pré-
férable au Gitroil du pays , qui eft fore
acre.
:Miriguêt le recommande pour l'hyV
4ropifie , les gonfliemens de ratte , &
la gravelle. Je^ n^ Tai point v^ûjçm^
plpyer J> &je ne rn'É^n fuis jamais fervi
int-érjieurement. Ses feuilles coupées
par tranches §^ appliquées fur larorti-^
lure font excellentes.
Bois Laiteux,
-Xiè bois laiteux elt un arbriflTeau
K iij
pifif.wpip
'•i ■ t
donc les feuill<?s &: les jeunes branches
ont beaucoup de lait. 0.i met infufer
au foleil une grande quantité de ces
feuilles dans une baignoire. Ce baijii
guérit fouvent la fiev-re des enfans &
même des grandes perfonnes.
Minguet dit que ce, Uit arrête Vhé-r
morrhagje d'une bleiTure. Il le faifoit
entrer dans la compofition des onguem. ;
comnie Muhylon, de fontfes termes..,
■- . . ■ •■ - ■ - . - - . ,<
Çalebajji de' Bûiis, ^
La calebafle eft le fruit d'un petiV ar-
bre extraordinairement couvert de
feuilles qui vien^nerit fur toutes les
branches, même \^s plus groflfès. Ld
foait eft ^ndôcgrc^s cornme unepom-me
de* rainette; Son écorce eft duré & li^
gneufeà peu-près comme celle du co^
et) , toujours ve^te : il eft rempli' d^iiiiéf
pulpe blanche.
Minguet dit, que le fuc quon en
tirc>. purge comme l&.meUl£ur& médecine.
DE St. DoiiÊiNGVE. ffi
Il ajoute qu'a demi mûr , il entre
dans les 'tifannes pour lliydropifie & les
maux d€ ratte. Il avertit qui! faut
prendre garde qu'il ne foit piqué de
vers 5 parce qu alors c'eft un poifon.
Je n'ai point entendu parler de cette
précaution i ni qu'on l'emploie autre*
ment que comme un excellent vuliié-
raire. Pour cet effet on le fait cuireious
la cendre , on en exprime le jii^ pouf*
prévenir ou réfoudre le fang caillé
après une chute. On en fait pendre
auffi pouf le^ abfcès & ulc€re:s internet '
Je ne m'en fuis iamaisfefrvi , parce qud
ce remède échauffe beaucoup y & que
j'en ai va arriver de mauvais dSctSf^
probablement par ^'impéride de cèiïîe'^
qui remployent. J^ai toujours préfère-
les fleurs de poindllâde,
Ga trouve dans^ leDididnaî^^è dé^
drogues fimples la defcriptîoh dufrùit^
d'un arbre des îles de Mmériqu^?
qui eft appelle mâcha -mona 3 en
K iy
ti 1 .1
1^2 P L:^iîir(ri^^ s Hfî
François , calebafle de Guinée, qui ref-
lemble beaucoup à celui de la cale-
bafle Efpagnole. Celle-ci eft très-com-
mune à St. Domingue. Elle croît com-^
me la citrouille : elle ,eft aufli grof-
fermais ordinairement plus longue.
Les Nègres s'en fervent pour mettre
deTeauou autre boiflTon. Lorfque ces
calcbafltsfont au quart de leur groffeur,
on en mange comme des concombres y
elles ont un goût aigrelet fort agréable.
Ceft peut-être celle que Minguet ap-
pelle calebafl^e douce. Il parle" encore
de deux efpeces de grofles calebafles ,
Tune qu'il appelle calebaflTe à gourde j
fa femence eft une des froides. (Par
con/^fue^; ceft U courge ),Lçs Elpagnols
s'en ferveiTt pour leurs voyages, L au-
tre çalebaffe eft aniere>elle fert de feau
poûf mettre de feau ou pour faler de
la viande: apparemment qu'il n'apa^
connu l'arbrç dont parle Lemery.
p B St. Do min g ue. i^f
Câprier,
Defcription de Minguet. ,, Il a la
55 feuille comme le pourpier, courant
55 fur la terre. Il porte une graine qui
55 a trois à quatre pointes piquantes,
55 avec une fleur jaune. Il croît abon-
,5 dam ment dans [esfavanes(a).Ceik un
55 pâturage excellent pour les bœufs.
5, Sa racine s'emploie dans les tifannes
55 apéritives. Mingoèt ajoute „ quefes
5a feuilles pilées , font bonnes pour
„ ôter rinflammation 5 & pour mû-
3,^ rir les abfcès. „ Ses racines font
vraiement a:péritives, ôc s'employent
joLirnellemenc.
Bois épineux iAune.
Minguet affure 5 que récorce de ce
bois eft auflîpuilTante contre les mala-
(/») Les Tavanes font les prairies de St. Donaingue
que l'on ne fauche jamais. Aufli n*y vienr-il point de
foin , mais différentes herbes; comme clïica-dent,pié de
poule , câprier , &c.
it'tî!
! I
TJ^ P I, -A N T E S'
dies vénériennes que le Gaiac. M^
Defportes Temploie dans les tifannes
aftringentes.
Collet à Dame.
, Cette plante eft ainfi nommée , à ee
qu'on m'a dit , parce que fa feuille eft
grande , ronde , avec une échan-
crure du coté delà queue ^ comme un
collet que les payfannes portoient
autrefois. Je ne Tai jamais vue. Le
P» Plumier rappelle , fmrurus folHs
amplis rotundhs é" umbilicAtis,
Il y en a de deux fortes , Tune qui a
la feuille plus douce & plus fine que
l'autrerMinguet appelle celle-ci/euille
à collet bâtarde. „ Sa racine, dit cet
„ Auteur , eft excellente en' tifanne ,
„ pour la ftrangurie récente & les go-
,y norrhées, „ On n'entend pas bien ce
qu'il veut dire par ftrangurie récente.
5, Sa feuille eft très-bonne en cata-
3,i pkfme> elle attire beaucoup.
) Mafofi' rouge,
Ceft un gra-nd & gros arbre, qui
s'itendbeaucGupi il eft fort commun,
„ la fleur eft blanche, il lui fucced^,
yy une grolîê poire remplie de coton. >>3
Minguet.. Ce qu'il appelle poire , eft.
une coque grofTe comme celle du mar-
rpnier, remplie dame foie jaune exr
trèmemenc finer &; douce au toucher l^
j'en ai envoyé à Paris. Oa^rreripem,
rien faire 3 elle eft trop epu^te pour;
cÊre filée r:i m\ efflaya^ d'ejt fa^ire des
chapeaux,) elle ne pevtt pais, fé; lier en-v
femble 3 m^lëe^'avec leeaftor , elle: ner
prend pointlateinture. . Il.es habitans;
de St. Domingue fo]ii:Ç lin© tifanne^i
aviec ioA^écorce pour l^rQuge:Qfe&lar:
petite vérole. J'ai trouvé que cette]
tifanne eft trop diaiiider & qu^plle
4onne des-miaux de gprge* J'ai tourf
jours préféré les fleurs de poincillade
fèche : une pincée fur deux ou trois
:;!;;.^ :i!l:,
pintes d'eau de chien-dent (a).
Goyavier.
'"Le goyavier eft un arbre d'une gran-
deur moyenne. Son fruit eft fort bon
& fort eftimé. Il y eii a de trois fortes.
Les goyaves aigres qui fervoient à faire
une gelée excellente, ceft la plus
petite efpece: elle eft ronde, greffe'
cbiiime là f\m greffe pomme d apis j-^
lâ^chair en éll Vouge , remplie de petits"
pépiiis fort teûidres, -^ < -i ^ •
- La goyave Efpagnole èft k ^plds ëf.
timée, elle eft oblongue , groflfe à peu-
près comme une poire de virgbuleufe,
verte dàbord, .jaune q^iaiid elle eflîl
rftûre. Les habitans du pays la man-
gent crue-: elle eft fort bonne en com-
potes ^^U\J ,
*>'Lk; goyave de Guinée ift de la
mêMe figure & de la mêrile orroffeuf,
«•« ^ . • ' • ■ ' '^r, . J . .,- . ■',,,!' ■
•J i ■■' . '- ■ i . V » ^v 'y ^ • , , ■, ,.. ^ î • ' ,
i ^.) ^^ y a un: ;tpapou gris ^ fî gros qu'pn en fait de
grands canots, '
î> E St. Do mi n au e, îyir
a peu -près que U précédente: la
chair en eft rouge, on la mange com-
me la goyave Efpagnolej mais elle
n'eft pas fi délicate.
L'eau exprimée des bourgeons pi*
les, efface les taies des yeux , félon
Minguet: bouillis dans Feau ils entrent
dans les gargarifmes pour les chancres
5c les ulcères de la bouche , fuite de
la falivation.
Le fruit avant fa maturité , encore
mieux au tiers ou quart de fa grof-
feur, eft aftringent, & convient dans
les diarrhées 5 en tifanne. M'^* Defpor-
tes fait entrer la racine de goyavier
dans les tifannes aftringentes {a).
Herbe h Blé.
„ Ainfi nommée, dit Minguet, a
j, caufe de la reffemblance qu'elle a
j, avec le blé. „ Elle croît de même,
à la hauteur de trois ou quatre pies ^
( i» } Le Pcic Labat décriç aflez bien le goyavier.
iy8 P i^ Jt N T E *
elle porte un long épi , dans lequel je
n'ai vu ni grain iii feiiience. Un demi-
verre de jus exprimé de l'herbe pilée ,
eft fort purgatif) on le mcLeavec au-
tant deau de caire. On emploie com-
munément fa racine dans les tifannes
rafraîchilTantes avec le chien-dent & la
^racine de pié de poule, herbe égale-
3!nent communcc Les vertus que Min-
guet donne à l'herbe à blé font d'être
feonnes dans topite s fortes d'onguens: dins
Ia compofitian de toutes fortes d'eaux pour
les cancers é" ulcères > & dans les tifan^
nés pour maux vénériens. Il ne parle
pi)int de fa vertu purgative. Je ne m'en
luis fer vi qu'en tifanne: mais un Ha-
bitant chez qui j'ai demeuré trois ans ,
pi'a affuré que pendant plufieurs an-
nées il ne s'étoit pas fervi d'autre çhofe
pour purger ks Nègres.
Herbe à mille pertuis.
Cette herbe a la feuille percée > dit
VE St. DoMiisi c^e. j^é
Minguet.,îMâchée , elle appaife les dou-
5,leursdedents,enlaifrantlemarcleplus
j, longtems qu'on peut „. Il confeille
aiifli pour les maux d'oreilles d'enfaire
tomber le jus dedans, & de mettre du
marc par defTiis 5 pour la fièvre, d'en
faire infufer une poignée dansun veire
d'eau , &: de le boire avant l'accès.
Monfieur du Hamel {a) avec lequel
j'ai vécu quelques années à Léogane,
àc qui y elt mort il y a cin,q ou fix ans ,
fort regretté non - feulement à caufe
de fa probité & de fes grandes con-
noiffances , mais encore à caufe de [es
recherches immenfes fur la botanique ,
êc les curiofités naturelles, qui deyien»
dront peut-être inutiles , parce que fa
mauvaife fanté dans les dernières an-
nées de fa vie ne lui a pas permis de
les mettre en ordre: M''* Duhamel >
dis-je, dans fes remarques , fur le ma*
{a) il étoit Correfpondant de l'Académie des fcieaceç»
ï6o Plante r
iiufcritde Minguec, die de Tlierbe i
mille pemiis 5 que ceft uneaftéride,
qui a très- forte odeur, les feuillesten-
dres , fucculentes , d'un gouc de-
fagréable , mais fouverain en décoc-
tion pour la fièvre. Les fe menées font
aigrettées : elle n'eft nullement du
genre du mille pertuis.
Herbe h ulcère.
Elle efl: fort connue , & vient dans
les haies. „ L'eau que Ton en expri-
„ me , ditMingnet , mife dans unul-
„ cere , le guérit.
La feuille feule appliquée nettoie
l'ulcère de Çqs chairs baveufes. On rap-
pelle herbe à ulcère de Minguet, tout
le monde la conncîc. Les fleurs Scies
fruits viennent en ombelle {a).
Minguet décrit deux autres efpeces
d'herbe à ulcère i lune à feuille ron-
( a ) Les fruits font des baies , qui reffemblent à
Celles du fureau.
de,
Itl^ ^.^^^^at^t^g^a^tto^
DE St, Do min GUE. i^i
de, l'autre à feuille longue.
Herbe k ulcère k feuilles rondes,'
55 Ainfi nommée parce que j*en aî
55 guéri des ulcères de quatre ou cinq
ans. Je m'en fuis fervi dans la corn-
pofition des onguens i elle y a fort-
bien fait. Elle eft bonne dans les
bains aromatiques, pour gens acca-
blés de douleurs j & perclus de leufs
membres. Elle croît dans les pays
vieux habités , & porte une petite
fleur par grappe, avec une feuille
dentelée.
5>
3>
3>
53
J5
Herbe k ulcère k feuilles longues,
55 Elle croît dans les vieilles habita-
35 tions comme une mauve , porte trois
55 feuilles 6t un bouquet au bout delà
„ branche. Sa fleur eft double, à
„ trois ou quatre tirets au milieu. Elle
eft d'un blanc terne.
Il confeilie de laver Tulcere avec
L
»
m
lill
1^2 Plantes
l'eau de la plante > d'y tremper un plu*
maffeau , de l'appliquer fur Tulcere.
Je Ile eonnois point ces deux efpeces.
Herèâ k Taîts.
Je tië lâ'cëhiiôis point. „ La fleur, „
dit Miriguèt , éft violette, avec trois
ou quatrfe tîret§. Elle a la feuille
dentelée, tin peu rude & chargée
dé poils. L'eau que Ton tire de là
feuille écraféé dans la main , ôcinfu-
jfée dans lés yeux qui ont des taies
nouvelles , l'es giierit. Elle entré
„ dans lèis ëâitx diftiilées.
Autre herbe à taies y marjolaine fri fée.
„ Son jus inftillé dans une taie
Ij la gilérit.Ellë entré 'à%h$ lé^ ènguens. ;
y, Sa fleur eft blanche , fa féuilè den*
^s tfelé'e^ & fà graine gi'olTè comme un ^
\\ pbis. Je lié cbrinois poi-nt âon plus
cette fec'éii'dé èf|)èeé.
Herie fenfMe. I
C'eïl la ÏQXiÇimQ mimofa.
^)
)3
»
»
>3
DJ5 St. Dominùve. 1^9
Minguet en décrit de deux fortes,
Tane blanche oc Fautre rciige.
„ La blanche , dit-il , eft une efpece
„ d^ipécacuana pour fes vertus , en in-
ij flifion . pour les diarrhées & flux de
>, faiig. Elle croît dans les pays arides,
i, & ou il y a des fapins. Elle vient
comme Une ha?^e avec des feuilles
coupées j courant fur la terre:
elle fleurit blanc. Sa feuille touchée
fur le midi , fe fanne.
Herbe fenfihle ^ rouge,
5, Ainfi nommée , parce qu'étant
5, touchée la feuille fe ferme.
La même chofe nàrriveroit-elie
point à la blanche ?
„ La racine en infufion eft bonne
55 pour diarrhée &: flux de fang. On
„ peut s'en fervir faute d'ipécacuana.
Je n'ai point vu de fenfitive dans les
quartiers de St. Domingue, où j ai ha-
bite i il y en a appareniment dans le
Lij
(Pi
:!-ri
11^4 Plantes
quartier du Cap. J'en ai vu beaucoup
à la Martinique.
Herbe h pians,
5, Elle eft faite comme TabAnthe , &
croît dans les pays vieux habités.
L'eau que l'on en extrait feche les
pians que l'on en frotte: fa racine en
tifanne eft bonne pour les maux vé-
nériens. Elle eft appellée aufli ab-
finthe.
Dans les lieux que j'ai habités elle
eft fort commune : on l'appelle abfînthe j
marone , qui veut dire bâtarde. C'eft
une efpece de matricaire. Je ne m'en
fuis jamais fervi 5 que pour faire une
eau vulnéraire, &: jene l'ai vu em-
ployer par perfonne.
Houx de l^ Amérique.
3, Il reflemble à celui d'Europe. Il
55 faut y faire une entaille fort pro-
j, fonde pour en tirer une gomme
55
35
VE St. DOMINGVE. i6^
^5 verte, d'une odeur merveilleafe ôc
5, excellente pour lesonguens, corn-
3, me le betoniea Sc autres.
Je n'en ai vu qu'en arbre , un peu
plus gros parle tronc qu'un cerifier.
Ses fleurs viennent fur une tige fans
feuilles afiez longuesielles rcfTemblent
à celles du pêcher.Ses feuilles font fem-
blables à celles du houx d'Europe:
mais les pointes ne font pas fi dures.
Le tronc n'eft pas flexible ( a ). Cet ar-
bre eil aflez rare : je n'en ai vu que
deux.
Le Jat
yy II a autant dq, vertu que celui qui
3, vient d'Europe, dcc. Sa fleur eft
35 fort petite.
Celui que j'ai vu à Leogane , où il
y en a beaucoup dans les jardins , efl:
très-peu réfnieux y inférieur par con-
féquent à celui qu'on apporte en Eu*
rope.
(s) Di6lion. des drogues. L ii)
1*1
i66 Plantes
Ceft la racine des belles de nuit. U
y en a à fleur rouge & à fleur blanche >
ce font des tuyaux é vafés en eatonnoir.
&c. Voyez le Didionnaire des drogues
fimples. Quant à la racine , celles des
rouges & des blanches , des jeunes ôc
des plus vieilles , n'ont pas plus de ré-
Cne les unes que les autres.
Peut-être celles qui viennent dans
le quartier du cap 5 oudemeuroit Min-*
guet 5 font d'une autre efpece, ou font
plus réfmeufes.
Ipecacuam.
3, Il porte une fleur comme une
3, cloche de couleur violette.... fa
„ racine eftd'un blanc jaunâtre.
Je nen ai vu qu'une fois fur terre »
qui n'étoit pas en fleur. Sa racine étoic
ridée , tortue , de couleur brunejmoin?
grofl*e qu'une plume à écrire. Il croît
fur les montagnes.
35
VE St. DoMiNGu e. i éf
Manille bâtard^'
„ Elle porte une goufle comme la
manille franche , & croît le long des
arbres comme une liane verte fron-
de. C*eft le fondement de l'eau pour
les cancers > ulcères bi chancres. Elle
5, fait plus d'effet que le vitriol U, la
,5 pierre infernale, mangeant les mau-
„ vaifes chairs, nourriflant & faifant
„ revenir les bonnes. ,, M'* Duhamel
dans ïts remarques fur le manufcrit de
Minguet, ditque cette manille bâtarde
eft Varam repens , extraordinairemenc
cauftique. J'ai entendu dire à Min-
guet, ajoute-t'il, qu il en faifoit un
onguent pour les ulcères , ôc qu'il
avoit la force de faire fauter le cul de
la chaudière ie fer ou on le fait.
Monhin , ot^ Manhin.-
Eft un arbre des plus gros , fortconitt
mun. Minguet dit que la racine en
L iv
ÉtÉiÉ
1^8 Plante s
tifanne guérit la diarrhée ôc la dyfTen-
terie. Je ne Fai point vu employer à
cet ufage.On fe fert communément des
feuilles pour les bains. On appelle fou
fruit prunes de monbin. Elles font
jaunes , ont fort peu de chair fur le
noyau {a ). Les Nègres mêmes ne font
pas fort curieux d'en manger. Quelques
habitans en font une gelée , que ion
dit être bonne.
Medecimer,
Le medecinier eft un grand arbrif-
feau. Son fruit cfl; gros comme un.
maron^par bouquets de trois ou quatre,
fur de longues queues. On l'appelle
noix de médecine. L'amande renfer-
mée dms une coque eil de fort bon
gouc:. mais c'eft un violent émétique
& purgatif Elle l'eil beaucoup moins
( «» } 11 s'en faut beaucoup qu'elles foienr auflî oroiTes
que Jes prunes de Sîe. Cachçiiae , comine \ P.
Laljat le dit.
DE St. Do mi n GUE. i ^a
quand on en a ôté le germe & la pel-
licule qui fépare les deux lobes. Je
crois qu'on pourroit en tirer parti ,
en ajoutant une amande ou deux dans
une émnlfion. On m'a même fou vent
exhorté a tâcher d'en trouver la dofe :
mais je crois , quand on a des purgatifs
fûrs, qu'il ne convient point à un mé-
decin d'en elTayer de douteux: il doit
laiffer faire cqs épreuves aux autres, 6c
en profiter (a).
Le P. Plumier appelle ces efpeces
de pignons , ou noix de médecine ,
ri ci no ides gofjipii folio.
Il me paroit que l'article ricînus dans
le Didionnairedes drogues fimples de
Lemery eft fort embrouillé. Il parle
de quatre efpeces de ricins ou pignons
( /» ) Le Père Labat a d'écrit affez bien , ( à quelque
chofe près } le medecinier, & fes noix. Il dit que
quatre ou cinq , félon Page & le tempérament des
perfonnes fuffifent pour purger très - bien : mais que
qjuand on en prend une plus grande quantitéj'ons'expofe
4 des vomifleraens cruels 6ç à des évacuations trop
grandes.
M M
wmm
^^M
ma
70
Plantes
dinde. Dans le premier il déerit le
falma ckrifiL
Dans le fécond, c*efl: le medecinie^
qui porte une amande, comme il le
dit , plus groffe que celles des grains de
ricin 5 c'ell-à-dire plus grofTe que celle
du palma chriftt. C*eft celle que je
viens de décrire , ou Tappelle à St.
Domingue , noix de médecine.
Il parle dansle troifieme d'un autre
ricin, qu'on appelle pignon d'Inde,
en latin grana tilli , grana tilliA. Je
crois que ce font les mêmes que les
pignons du pdma chriflï.
Enfin il en ajoute une quatrième
efpece , qu'il appelle medecinier d'Ef-
pagne, ou la noifetté purgative. Je
crois que c'eft le fruit qui eft décrit
dans le fécond article. Ainlî il n'y au-
roit que deux efpeces de ricins ou
pignoris d'Inde 3 ceux du F aima, Chrijiiy
6c ceux du medecinier.
Je n'ai vu à St. Domingue que le
ï>£ St. Domi n que. 171
palmachriJH , & le medeciiiier , dont
il y a trois efpeces , fuiyant le Père
Labat.
Quoi quil en foit, il eft facile de
Véclaircir fur cette matière.
Minguet ne parle que de Tamande
du medeeinier. Elle eft ^ dkAl , purga-
tive ^ mais danger eu fe , parce quil eft
bien difficile d'en trouver la dofe. Elle
purge haut & bas ^ fi on n^en ote pas le ,
germe»
Enôtant le germe & la pellicule qui
fepare les lobes , elle eft moins vprni*
tive , mais elle l'eft toujours.
Nandiroga 5 ou Contrepoifon de
l'Amérique,
5, Je nomme kinfi ce fîmple , die
3, Minguet, à caufe de fon fruit, ou
j, graine, grande comme une pièce
^5 de huit (4î), ronde & faite comnie
^, la noix. On en peut tirer Thuile
{n) Ceft une piaflre valant huit efcalins;
Plantes
comme de Tolive , 6c en faire pren-
yy dre à une perfonne empoifonnée ,
cela la guérira. Elle entre dans la
t.ï compofition des ongiiens , comme
beaucoup attractives elleeft encore
5> bonne pour les éréfipelesy elle croît
3> le long des arbres. Elle porte une
35 fleur blanche. ^, Je ne connoispoint
fes vertus. Le Père Plumier Tappelle
nb^niiroba fcandens foliis hederaceis an-
gulofis,
Mariacobl ou Mariacobo.
35 II croît ordinairement fur le mû-
5, rier , par le moyen des oifeaux qui
5j y portent la graine : cette plante eft
55 pleine de piquans & fort tendre >
5> fon fruit eft bon à manger ,& pour
,, arrêter les cours de ventre. Il eft
martelé , & fon écorce eft fembla-
55 ble à celle de Tananas. Il eft rempli
53 de petites graines noires.
Je n'ai point vu de ces fruits.
Î>E Sr, DOMIN CUE. 175
Quand Mingiiet dit que cette plante
vient fur lemûrieri il ne faut pas croire
que ce foit des mûriers femblables aux
nôtres: il n y en a point à St. Domin-
gue. L orme de St. Domingue , qui
reflemble aflez à ceux d'Europe, porte
un fruit fait comme une mûre verte
au commencement, noire quand elle
eftmûrei mais dure. C'eft une bonne
nourriture pour les chevaux , bœufs ,
moutons , ôcc,
^ Monfieur Duhamel aiTûre que; le
mûrier de Minguet eft le bois jaune
du Cul-de-fac, qu'il eft bon pour la
teinture.
Orange aigre.
5, Le fruit entre dans la compofi-
tion des eaux & des onguenspour
les ulcères les plus vilains & les plus
vieux. On fait de fon écorce féchée
au foleil une poudre à vers fort
5>
amere. Sa feuille & fes bourgeons
174 P i ^ N t E s
„ entrent dans les bains aromatiques |
5j fa racine dans les tifannes potir les
j, maux vénériens* „
Il a oublié de dire que les efclâvês
fe fervent de ces oranges pour blàii*-
chir le linge, ôcc. & que hoiicd^éeif ^
comme on parle à St. Domingue , c'eft^
à-dire un peu cuites fur les charbons ,
on s'en fert journellement pour les
bleffures des chevaux , de même pour
nettoyer les ulcères des Nègres.
Ces orangei-s viennent en grande
quantité dans les bois. On en met
de dillance en diftance dans les haies
de citronniers, que Ton taille commô
la charmille dans nos jardins, 6c que
Ton cercle très-foigneulement 3 ce qui
rend les chemins , qui ont environ
foixante pies de large , d'une extrê-
me beauté 5 car ces orangers font toû-
jouts chargés de fruit & de fleurs.
t>E St. D omingv e. 17J
Orme.
9> De fes bourgeons & de fon fruit,
3> on fait une boilTon fort agréable,
5, & purgative. Elle maintient ceux
„ qui en boivent gras & frais , comme
3, s'ils yenoient d'Europe. Toute forte
5î d'animaux s'en nourrirent. Sa cen-
ii dre eft bonne pour faire du fa von.
j5 Sa fleur eft blanche. Cet arbre entre
iy dans Igs tifannes pour gonorrhées
33 (^)& galanteries. „
Il ne dit point quelle partie.
J ai beaucoup entendu parler de
cette boilfon : mais je n'en ai point vu.
Le P. Plumier appelle cet arbre
gmjumn arhor ulmi folio ^fru^lu ex ^ur-
furânigro.
Thihé.
>, C'eft un pbîfon d'autant plus dan-
( » ) Je fai que quelques Kabitans fe fervent "dç
rccorcc pour les gonorrhées.
/.,
75 Planter
i
55 gereux que Ton en meurt pour peu
35 qu'on en mange, ou que l'ayant
3, manié on ne fe lave pas les mains.
55 On ne change point de couleur , on
5, n'enfle point. Il empoifonne les
5, chiens 5 les chevaux en meurent fi-
55 tôt qu'ils en ont mangé. 55 Minguet
fe trompe.
J'ai guéri des mulets , dont l'un
entre-autres étoit empoifonne dès la
Teille 5 ^ fort enflé. Je leur faifois
avaler une demi-once d'orvietan dans
une cfaopine de vin.
Cette herbe vient dans lesruifTeaux.
, M'* Duhamel appelle cette plante 5
ra puncultis aquâticus foliïs cichorii , ^ore
dho , îuhulo longî(fimo. Le P. Plumier
la nomme trachelium fouchi folio , fiore
albo
tubulo longifjimo.
Quenique*
5, S 1 graine eft de couleur de cendre :
,5 bonne dans les tifannes pour les go-
„ nor-
ÙE Sf, DôMINGV E. IjJ
rhées. Il croît au bord de la mer
armé de piquaiis,& produit une gouf-
fç comme un pois jaune. „
Je ne connois point cette plante*
Rofeau.
i, 5à racine efï bonne dans les tîfan^
nés pour gonorrhées. Il croît au bord
des rivières comme une canne à
_ fucre-Jl porte uii pehnache pour
j, fleur au bout de la tige. „ Ce pen-^
nache eft àffez femblable a la fleur des
cannes à Hicre que Ion appelle flèche*
^ On fe fert très-communément de la
racine dans les tifannes rafraîchif'-
tantes*
Ce peut-être une efpece debanbou,
'ou rofeau des Indes Orientales. Il n'eft
ni fi beau , ni fi gros , ni fi haut.
3>
■A- ^
RégliffPdt^ Amérique, -
î, Ceft une liane qui a la même
M
ijg Plantes
odeur 5 ( ^ ) que la régliffe véritable i
elle eft bonne pour les maux véné^
55 riens. Sa feuille eft fort douce , la
5, fleur d'un blanc fale , fon écorce
55
»
55 crrife.
On l'appelle liane , parce qu'elle
porte des tiges menues , pliantes 6c fort
longues. Ses feuilles font aflezfembla-'
blés à celles de l'acacia, ou de lapoin^
cillade , rangées par paires. Son fruit
eft un petit pois rouge, avec un point
noir dans une gou0e fort courte. On
en apporte dans les ports - de mer :
les Religieufes en font des chapelets i
le peuple en fait des colliers pour les
enfans. Il n'y a que fa feuille & fa
tige qui ait le goût de la réglijïe, la
racinç ne Ta point. On pourroît la
"nommer Glycyphylloj^ Americanum,
On l'employé dans les tifannes, ou
feule ou mêlée avec d'autres plantes.
Je m'en fervois dans les commence-
[ /» }' lia voulu dire k même goi3c»
DE St, Domingue^ ijù
mens des gonorrhées jufqua ce que
la douleur rut paflee.
Le P. Plumier l'appelle Orcbus fruSiu
soccineo nigrâ macula nofato.
Ronce de l* Amériques
5, Cette plante croît k long des
montagnes : elle eft fort épineufe ,
& jette plufieurs pommes enfemble^
j, le long de hs branches. Le deflTous
eft par barre j &fa pomme eftgrife.
Elle entre dans les tifannes pour
les maux vénériens : on la coupe
par morceaux.
Le P. Plumier la nomme , FereskU
nculeata , fiore Mo , fruBu flavefcente.
Je ne la connois point.
Rai f nier du bord de la mer.
5, On fait de la racine une tifanne
bonne pour le flux de fangôc cours
de ventre. Son raifin bouilli avec
un peu de fucre & coulé , eft boa
M i j
5>
3>
^80
F L A NT E S
>•)
»>
pour les mêmes maladies. Il fleurit
violet {a). „
. Raquette.
Min guet dit que la fleur entre dam
les tifannès four galanterie ; que fin fruit
efl rouge : que fa feuille cuite fous .. la
hraife , àé fouillée àe fa première feauy
^fpii^uée fur apoflumes , y fera bon effet.
Il n'en dit rien d'avantage.
Ses feuilles ( que Ton appelle patte
de raquette ) , boucanées ^ c'eft-à-dire 5
paflées fur la braifé , appaifent les in^^
llammations 5 mûriiTçnt les abfcès, ap-^
pliquées deflTus.
En lavemens , elles font excellentes
pour les douleurs de ventre , la dyflçn-
terie &: la diarrhée. ,
On mange fon fruit en comporte : on
dît quil elt aftringent 5 il eft un peu
fade.
( /î ) Cec arbre n'eft point le naangle rouge , comme
le P. L abat le dit. • :
V
V E Sf. Do M ï N'CV E. t S I
' Le P. Plumier îïpelle la raquette,
Opî^ntia major validijjimis Jpinis mu'^
fiit^^ Je ne fai s*il a donné ce nom
à la raquette bafTe. Il me femble qu'à
caufe du terme , major ér validijjimis
fpinis munita^ il conviendroit mieux
à l'arbre. Il femble auflî que c'eft
l'arbre qui eft défigné par les Auteurs
rapportés dansleDîdionnaire des dro-
gues fimples.
' Quoi qu'il en foît , la raquette arbre,
eft garnie d'épines plus longues & plus
dures que la raquette baiïe 5 elles oc-
cupent le troncjles branches &comma-
némentles feuilles. Ces. feuilles de ta
raquette balTe font longues d'env.irôh
un demi-pié, plattes, en ovale ^ épaîf-
fes tout au plus comme le doigt ( ^ ) 5
celles de l'arbre font moins longues.
11 y en a de plattes , de triangulaires ôc
( ^ ) Il y en a une efpece toute garnie d'épines blan-
châtres , comme le tronc de l'efpece qui elt arbre :
liijaç autre toute Tçrtc,âvec quelques tubercules épineux»^
M iij
Pl 4 H t Ê s
de quadrangulaires. Le fruit eft le
même dans Tune & Taiitre efpece. Je
ne fai fi Ton mange celui de l'arbre.
Je n*ai vu employer que la bafle, que
l'on pourroit appeller, Opuntia mimr
humilîs , folïts \ terra, exfurgentihus^
Il y a une efpece de cette dernière
que l'on appelle raquette Efpagnole ,
qui n'a point d'épines , dont on fait
un firop fort bon pour la toux, pour
les poitrines feches, échauffées, &c.
SaugCé
,5 Elle croît le long des rivières {a)
elle a l'odeur de la fauge de l'Eu-
5, rope. La fleur eft blanche par pe-
tits bouquets. „ Elle reffemble à la
grande fauge, nommée parquelque$
Botaniftes falvia latifolia.
Le P. Plumier l'appelle , camaraarho'-
rejcens falvia folio.
( <f ) Il devoir ajouter comme un petit arbriflcau qui
A beaucoup de tiges.
»
3>
»
t>n St. Do min g ve. i8|
Sauge blanche.
55 Elle croît dans les vieilles faranes,
n'a point tant d'odeur que l'autre >
fa feuille eft plus petite & plus
blanche ; fa fleur efl blanche, entre-
„ coupée en trois. Elle pouffe une
3, feule tige fort petite. ,,
Je n'en ai jamais vu.
Surelle ou Ozeille de Guinée,
„ Elle eft bonne dans lafoupe &
dans les bouillons des malades ( a).
Son fruit bon pour faire gelée , &
„ vin qui enivre. „
Son truit eft une coque épaifle, ten-
dre , qui fuccedé à une grande fleur ,
en cloche : on en fait des compottes &
de la gelée fort bonnes : on la prend
avant qu'elle commence à fécher.
[ii] M. Defportes en employoit les bourgeons dans les
tiUnnes lafiâkhiâantes»
M ir
33
9>
m
li y en a de blanche & de rouge.
La blanche eft moins fure que la
rouge 5 on la préfère pour les' com-
portes,
La plante vient comme un grand '
arbrilleau ,fort touflupar la multitude
des branches quifortenc dune feule
racine.
Seguine rouge,
5> Purgative & fudorifîque. Elle
^> croît dans les montagnes : fa tige
3> eft noûeufe comme un rofeau i'ar-
3, mée de petits pîqu ans, &c, ,, Ceft .
la fquine ou Tef^uine. Sa racine eft
comme Lemery Ta écrite, mais beau^
coup plus grofle & plus longue. Il y
en a qu on eft obligé dé couper pour
la tirer de terre. AuiG Minguet ^ . dit ,
que chaque fié en fourmi plus c^un baril.
Il y en a de difrérerîte groffeur. Elle eft
plus dure, plus çompade & plusJi-
gneufe que celle qui.nous vient de k
Chine*
DE St. Do MIN ^Ve. ïg|
Je n'ai point reconnu de vertu pur*
gative dans cette racine: peut-être 1^
perd-elle en féchant 3 il y en a même
qui la font fécher au four ayant de
s'en fervir. Je me contentois de i'ex-
pofer à l'air pendant trois ou quatre
mois.
Elle pouffe une tige qui monte &
s'attache dans les arbres : elle eft d'un
verd brun , couverte de petites épines >
comme le rofier: mais elles ne font
pas fi fortes , elle a des nœuds en dif^
'tances inégales, faits comme ceux du
rofeau. Cette tige principale en pro-^
duit d'autres qui fe fectient ôc qui tom-
bent. Elle porte des feuilles rangées
alternativement fur des queues affez
longues. Ordinairement il fort une
ï Htige commune à trois feuilles , donc
l'une eft portée fur une queue plus
courte, les deux autres fur deux
queues bien plus longues. Ces feuilles
font oblongues & fe terminent en une
tB6 P L À N T E S
pointe un peu allongée 5 mais qui ne
pique pas.
Scolopendre double.
5, J'ai découvert ce fimple depuis peut
'^ elle eft fort rare & croît fur des ar-
5, bres pourris. On en fait un firop
j, excellent pour toutes fortes de mala-
„ dies de poitrine 5 comme afthme ^
,, rhume &: autres. Elle entre dans
t, les tifannes pour Thydropifie & maux
9, de ratte. „ Minguet parle encore
de deux autres efpeces: il appelle Tune
fcolopendre jaune , qui vient auprès des
Arbres é* fur des arbres & contre des bois
pourris.
Il appelle l'autre ^^fcolopendre rouge ^
qui croît par bouquets le long des arbres.
Cette troifieme a les feuilles plus
grandes avec des efpeces de piquans
aux deux côtés. Il leur attribue les
mêmes vertus , avec cette obferva-
tion que la dernière en a moins que
les deux autres. 3^
5»
%y
»
31
9}
DJff St. DOMINGVIË. ïijt
Je ne connois point ces efpeces de
fcolopendre.
Sep^é bâtard.
i, Très'bon dans les lavemenscom-
i, poféspour hydropifiei&lorfqu'ileft
„ lec 5 dans les bains aromatiques*
„ Sa fleur eft jaune & d*un rouge
„ mourant. Il porte une cofïe fort pe-
tite & platte aprochant du fené
du Levant. Il croît ordinairement
dans les favanes , meurt dans les fe-
cherefles , & reverdit dans les tems
„ humides, & en fi grande quantité,
„ que Ton a de la peine àpaCTerou il
„ y en a. Ses feuilles font un peu lon-
j, gués, oppofées vis-à-vis Tune de
), l'autre , non terminées par une ïm*
„ paire. „
Séné de r Amérique.
i; Plus fort que celui du Levant i
ij très-propre en infufion> furtoutpour
9>
Mi
»5
l>
3)
>>
5>
fgg .'']P JS j ïyr f B £ Cl
hydropifie, pourvu que coupé on
le fafle fécher à lombre. Sa fleur
eft petite, ronde, d'un blanc blafard.
Sa cofle eft ronde & longue con-
tenant fa graine. Il croît ordinai-
rement dans les endroits élevés,
terres autrefois défrichées Se aban-
3, nées.
; Je n'ai jamais vu de féné dans les
quartiers ou j'ai demeuré. Celui que
j'ai cultivé venoit de graine que l'on
avoit apportée du Cap.
Trompette»
' II y a un arbre à St. Domîngue qu'on
appelle bois trompette, qui croît fore
haut , & qui a peu de branches. C'eft
apparemment de cet arbre que notre
Auteur veut parler fous le même nom
de trompette: du moins n'en connois-
^:pas d'autre.
::i, Sf & racines fbnt^diD-iljécartéçs i elles
VE St. Doj^^^PV^ 189
5, entrent dans les tifannes pour go-
„ norrhées Sa fleur ell blanche ,
^5, [a) par trois queues de rat , fa graine
3, bonne à manger. „
M'* Defportes employé fon écorcé
dans les tifannes apéritives.
Trefè.
it
5
„ Bon en-tifanne pour difficulté
d'urine. Sa racine eft très -bonne
auffi: mais il en faut ufer médio-
crement, car elle feroit piÏÏer juA
/.' qu'au fang. Sa feuille entre dails les
5, tifannes pour maux vénériens. Les
5, gou {les font en grappe 5 fa feuille.
„ rondej&l la fleur pale : il croît le long
^^ des chemins Se favanes. „
Selon M"^- Duhamel ce que Mi h-
guet appelle trèfle, eft une efpece de
pois chiche fort peu diffemblable |
celui d'Europe.
-'(a) Il y a là quelque chofe de louche : il y manfii^
apparemment le mot terminer.
IpÔ P L A N T E ê
Bois fifieux y ou hois h flot.
,5 Son bois eft extrêmement léger.
,, Sa feuille fort grande, fa fleur blan-
5, che , fa gouffe longue , des femen-
„ cts petites , noires & rondes , fon
„ cotton d'une finelle incomparable.
Je ne la connois point.
Bois major^
Ceft un petit arbrifleau. Je me fuis
fervi de fa racine pour les gonorrhées ,
lorfqu'on netrouve plus de pois-puant,
qui meurt dans la faifon des fccs (a).
Il eft fort connu.
Minguet n'en parle point.
( <» ) Dans les îles de St. Domîngue & autres, fîtuées
entre le tropique du caiicer & l'équateur , on ne
compte que deux faifons : la faifon des pluies qui
commence dans le mois de Mai, & finit vers la fête de
tous les SS. & la faifon des fecs , depuis Novembre
jufqu'au mois de Mai , parce qu'il pleut tout au plus
une fois le mois pendant tout ce tems , au lieu que
dans les autres, il pleut prefquetoUslçs jours»
^E Sr^ Do MIN GUE. ïpi
Bois Mary ou d'Almarie.
» Cet arbre eft bon en mâture de
" vaifTeaux, mais fortpefant, fa fleur
» eft blanche i les oileaux mangent
w fon fruit.... lien fort vme gomme
» d'un très-beau vert , elle entre dans
« les onguens.
J'ai vu à St. Domingue pendant la
guerre , de belles bougies vertes , ap-
portées 5 à ce qu'on diloit, de la nou-
velle Angleterre. Elle étoit certaine-
ment faite avec une gomme , mêlée
peut-être avec quelques-unes de ces
huiles du pays qui fe figent, ou bien
avec un peu de cire. N'étoit-ce point
avec cette gomme (/î) ? C'eft à caufe
de ce foupçon que j'ai parlé de cet
.arbre, qui d'ailleurs n'entre point dans
l'objet que je me fuispropofé.
( M ) J'en ai vu d'autres faites avec le blanc de ba*
lene ôc c[uelqu'autre matière grafle.
W%
ip2
L A N t[E^é
Bois Capitame,^
. C'eil: unarbrijGTeau. Ses feuilles font
p^Lvàedus vertes & cuifaintes , pardef-
fous blanchâtres , remplies de petites
pointes très -fines qui relient dans icà
doigts quand on les touche. // porfè
un fruit comme une cerife , bon k manger \
dit Minguet. Sa fleur eit blanche.
Comme f ai été àttrappé une fois à fa
feuille 5 je ri'ai pas eu là curiofité dé
coûter fon^fruit.
' Le P.' Pîamiér a nommé cet arbri<^
feau , Màlptghia latifolia^ folio JubtUs
' ■ Bois âe fer^
.. -Min-à . . ' -^
^^'•ii Son fi'Oit eft gros Ki^ond comnie
^iî le petit doigt. Son bois eft fort amer^:
i, il cafle les meilleures haches lorf-
» qu'on lé veut couper. » ^
Minguet n en dit pas davantage.
Son écorpe entre dans les ti fa unes
fudorifiques
VE St. Do mi noue, ip^
fudorifîques avec le gayac. V^oyez le
Diclionnaire des drogues fimples, Arc.
lignumfcrri.
Cœur de bœuf,
Noas en avons parlé ci-deflTus. Voici
ce que Mingaet en dit;
»Son fruit eftfemblable au cœur d'un
M bœtif ) jaune en dehors , lorf qu'il
»» eft imxr ( a ), blanc en dedans^ & reiîi^
» pli de petites graines. Il eft bon à
»' manger , ôc fon ufage peut arrêter
" un cours dé ventre. » C'eft fur fon
témoignage que je m en fuis fervi,âvec
un fuccès incroyable. Il ajoute : « Sa
*5 fleur eft jaune tirant fur le blanc. >*
Chêne i
Minauct parle de deux efpeces de
chêne, il appelle Tune chêne à gland.
*• Ce chêne eft gris. Le bois en eft
in ) Je n'en ai vu que de couleur de rofe.
N
IÇ'^ ^ HA M TE 3
>v bon pour la conftrudion des mou*
»^ Mns à fucre , & lorfqu'il eft mis en
» œuvre 5 il a l'odeur de la rofe. Sa
M fleur eft à trois feuilles & autant d'é*
w tamines.... Son fruit eft femblable
V» aix gland de FEurope. Les Sangliers
M le mangent. >>
Selon M'' de la Lande y homme
cl'efprit , très- curieux ôc grand Ingé-
ni^m j e'eft le bois de rofe. Voyez
Lemery , Art, kois de rofe^
Chêne noir.
» Bon à faire planches &à bâtir ,
» niçiUeur que celui d'Europe , parce
»». que le vei: n y donne pas . , . , Sa fleur
« eft blanchcja quatre feuilles, fuivie
»> d'une longue goufle remplie de fi-
*> lafle. »
Cet arbre reflemble affez au chêne
d'Europe par fa feuille & par fon écor-
Ce. Les gonfles ne font pas plus groflès
qu'une aiguille à tricotten Elles onc
VE St. Do min g ve. jpr
bien un pie &:demi , ou deux pies de
long. C'eft: la Bignomà arbor foUo (m^u^
lari ^filiquis lonQ^tjJlmis (^ â^^ufliillmis
du P. Plumieri C'ait uniquement pour
faire connoîcre la Bigmma , que j'ai
rapporté ces deux derniers articles*
CroquC'^mùilier,
« Sa fleur eft blanche & foarcliuei
*» fon fruit eft noir^ gros comme le
* poucejèc couronné .... Il eft aftrin-
w gent. Prenez-en quantité pour le
i> faire bouillir &i diminuer en confif-
^> tance de firap, pour le fluxdefangi
qui fera arrêté en 24 Iieures^ H
croît au rivage de la mer ^ 6c pays
filineux. Sa feuille eft armée de
»* piquans comme celle du petit houx.»
Je n'ai vu cet arbre que de loin en
voyageant.
Frangipane,
C*eft un arbre de moyenne grandeur
N ij
•j»
)>
jq6 Plantes
êchauteur,dont lesbranches font toutes
tortues , fa fleur eft à cinq feuilles, va-
riée de rou^e & de blanc. Elle eft épaif-
fe. On en fait un firop foft bon pour
les poitrines écliaufFées (a),
« Ainfi nommé, parce que fa feuille
.> reffemble à celle d'Europe. Il eft fort
» haut ôc droit , propre à faire du mer-
« rain. Son fruit eft gros comme le
•^ pouce, prefque de la figure de lo-
^» live5 fervant de nourriture aux fan-
M gliers ôc aux oifeaux.
Son fruit n eft pas plus gros que les
olives fauvages. Il eft verd avant de
mûrir , il eft noir quand il eft mûr :
il vient par bouquets fur de longues
queues/ Il a fort peu de pulpe : elle eft
pâteufe. Il renferme un noyau fort dur
( a. ) Quand les fleurs font tombées , il s'engendra
deffus une chenille qui mange les feuilles & tour ce
qu'il y a de verd. Ces chenilles font Yertes,tort groliei
ac d'une grande beautés
-^
VE St. DOMIN GUE. l^J
dans lequel il y a une amande très-
amere. J'en ai fait tirer de Thuile. Une
livre d'amande çn doi;ine quatre onces.
Il faut la laver dans plufieurs eaux
pour ôter fon. am^ertume. Alors elle
eft fort bonne à manger. Elle fe fige
comme fait ici l'huile d'olive en hy-
yer^ elle eft fort blanche.
Indigo marron^.
Il vient fans culture. On le cultive
aujourd'hui comme le franc , auquel
plufieurs habitans le préfèrent.
Selon Minguet, (a racine entifanne
eft bonne pour les gonorrhées.
Quelques -un3 employent auflî la
décoftion de toute la plante pour
l'atthme : elle eft fort défagréable, 6C
peu en ufage, apparemment par cette
raifon, ou parce que cette vertu n'eft
pas bien connue, ou parce qu'elle ne
réuffit pas ordinairement.
, N iij
nHai
Plante 4?
aane a caconne.
» Sa fleur eft d'un blanc jaune, elle-
•» produit une gouffe garniç d'un poil
» roux. La fève qu'elle contient eft
» grofle comme une châtaigne , de la
V même couleur, mais platte, ronde
« & peinte d'un cercle noir dans fa
» rondeur. Elle eftamere , quoique
" les fangliers la mangent fort bien.
J'ai vu de ces eouffes : 6c l'on m'a dit-
que cette ëfpece d^ maron qui eft fore
gros, étoit unboncontre-poifon.
Le P. Plumier lui a donné le nom de
fhafeolusjîliqms: làtis , hiffidis , (^ r/^-»
Lime h çhi^u'e.
» Sa graine eft par grappes, comme
»» le mifîn, blanche quand elle eft
M mûre , 6c a fur le bout de chaque
•!» graine , tïn petit œil. Elle 'croît le
« long des rivières , elle eft bonne
»»^..— ,'^^nn.j»'; i
j)E St. Do mi 0 "ùve. i^^
»> à manger , contenant d^ petits
^ grains, comme des têtes d épingle.
JA" Defportes en employé kraciae
dans les tifannes apéritives..
Lia^e à bouton,
>• Elle produit une pomme dans la-
y^ quelle eft ua bouton couvert d'un
« poil noir 3, doux comme fatin^, dans
^ lequel font plufieurs petites graines >
» il n y a point de fleur. Elle eft bonne
»> pour guérir des ulcères.» Lés tiges
&: les feuilks entrent dans les tifannes
apéritivesdeM'^* Defîportes.
Unne À hosufs^
.. Elle croît dans les montagnes,, 5c
rapporte la châtaigne de meryâinfi
nommée, parce que les rivières dé-
-- bordant Ten traînent à la mer. Cette
»»chataigne,quieftfortgroiïe&:en£orme
^ de cœur,fert à faire des tabatieresXes
u fangliers la mangent. Pulvérifée&
N vi
««^
>»
200 Plantes
P infufée pendant une nuit, elle eft boû-^
»* ne pour un fébriGitant.Cette lianne eft
?* fort greffe, court d'arbre en arbre,
«quelquefois plus dune demi -lieue.
"Son pie çft ordinairement ou il y a
^'de Teau. Sa feuille eft fort petite i
•'les bœufs l'aiment beaucoup. >> ^
Je ne connois ni cette lianne ni fa
vertu.
hianne À tonnelle,
■ '"Il eft certain que deux pies bier^
w entretenus peuventfervir à une ton-
« nçlle de demi -lieue: elle produit
»> tant d ombrage , §c fon épaifleur
»- eft telle que l'on y peut parer un
«grain de pluye. Son fruit eft gros
»^ comme un œuf, ayant trois quarts
»> & trois noyaux. Sa fleur eft jaune,
^ en forme de cloche , avec quatre éta-
» mines dans le milieu. »v
C-efi le convoivulus polyphyllos flore.
lutèoé^fruUu maximis du P. Plumier.
DE St. DOMINGVE. 2QI
J'ai vu dans la Ville de Léogane une
de ces tonnelles.
Âda^gle du ^ard dehM&r,
V H produit une gouffe fort allons
i> o-ée , fa feuille eft ronde ( a ). Sa fleur
n eft de couleur de feuille-morte. Son
?» écorce eft bonne en infofion , pour
w une perfonne enflée , avec cette
*M précaution de prendre le côté où le
^> Soleil réchaufFe le plus. Il faut zw^x
i> choifir récorce ta plus fine de fes
?' jambes ou racines hors de terre , ou
»' d'eau. Il porte une graine que les
\> ramiers mangent. »a M'* Defport§s
i'employe avec le quinquina, Técorce
^Q fucrier &: d'amandier.
Voyez ci - deftus cç que nous en
avons dit.
Mûrier,
V La fleur eft petite & blanche > fui-
( a ) Minguet fe trompe : elle eft oblongue comme
nous l'avons dit, approchant de celle da laurier»
■Mm
M
|lOà P l A J^ T E s
» vie d'un fruit gros comme le pouce ^
>' comparable à la fraife pour fon boa
»» goût.. Son pépin eft fort petit, toutes.
»* fortes d'oi féaux s'en nourriflTent, "
Le bois jaune du Cul^de-fa^ y eft fans*^
doute le marier de Atinguet, Cet arbre
eft bon four la teinture ; je fuis fur pris
quil nefafte pas mention de cette particu^
tarit é^, F eut-être ne eonnmjfoit - il pas le
hois jaune ; peut-être aùjft quil né favcit
pas fon ufage, M'^" DuhameL
J*ai demeuré trois ans au Cul-de-
fac : & je n'ai jamais entendu parj.er
ni de ce mûrier ni de fon fruit > d'où
je conclus qu il.neft pas fort commun^
Perroquet.
» Dans le mûrier & autres arbres ;
» croît le perroquet > qui contient
»* quatre ou cinq pots d'eau bonne à
»> boire: on perce la plante avec la
VE St. Dûminùve. '^jt)^
V baguette 4u boucanier [a), >*
Noifettes.
w Le noifèttier vienc fort haut. Sa
» feuille eft petite g^ fort fine.. Il naît
" dans les pays arides, &: produit un
»,» fruit gros comme le pouce , rondôc
» bon a manger y ayant beaucoup de
*? faveur : fa coque eft' fort fine : mais
^ fi-tôt que cette noifette efl vieille»
V elle fe rancit. Elle feroit bonne à
»A faire de rhuite.
Je ne connois point cette efpece
de noifette. Je n'en ai pas même en-*
tendu parler: mais il y a dans quei^
ques jardins de Léogane un grand
arbre dont Técorce eil blanchâtre y
qui né porte pas un grand nombre de
branches , & dont les feuilles font auffi
blanchâtres & fort grandes , il ne me
fouvient pas de fa fleur. On rappelle
( 4 ) C*eft un fulil plus gros 5c plus long que les fulik
ordinaires.
noifeccier. Il porte un fruit gros com^
me une pomme de grofTeur médio^
cre : la peau eft verte, ôç la pulpe qui
eft deffous eft jaunâtre.. Elie couvre
trois eros noyaux, dans cliacun def-
quels il y a une amande grofTe comme
jno5 noifettes , & auiîî bonne. J'en ai
fait faire de rhiiile excellente,
Marrom^
»j Lianne grife , qui porte une feuille
w ronde,rapporte un fruit gros comn>e
A' une orange &: de la.même couleur ,
-w quand il eft mûr 5 s'ouvrant pa'^r
» le milieu , pour laiffer fortir trois
'»» grains femblables aux marrons
•» d'Europpe 3 même écorcç &: même
•c goût. Peu de perfonnes la connoif-
>? fenti elle grimpe dans les noyers. »t
Je ne connois point cette lianue.
Noyer,
» Il porte des noix , femblables i
DE St.Î)OMÎNCVÈ. 2Ôf
0 celtes d'Europe i mais la coque eft
M plus épaiffc &plus dure , ôc ramande
*> moins grofle. Il croît dans les mon-
»> tagnes arides 5 fa feuille reffemble
» à celle du frêne d'Europe* "
Je neconnois point cette efpece de
noyer: mais j en ai entendu dire c0
que Mingueten rapporte.
Sucrier de montagne , ou hbis cochon.
,» Sa gomme eft excellente pour les
» coups de fer* Il faut laver la plaie
»» avec de Teau fraîche , y infmuer du
w baume avec Unpeu de charpi, u\m
n comprefle avec un bon bandage
^> pardeflTus: la plaie fe ferme au bout
n de 24 heures. »'
Ce qu'il a appelle gomme^il l'appelle
baume 5 c'eft fon véritable nom. On
l'appelle encore huile , parce qu'il en a
la confiftance. Ce baume participe du
baume de copaû &: de l'huile de téré-
benthine. Il eft bon d'avertir qu'il n^.
w\ï
r^
Plantes
faut pas iïiettre du eharpi dans là
plaie j coîilme il le dit , mais un peu
de baume ^ & pardetTus un plumaffeau
qui en fera imbibée «« Son écorce eft
»* bonne dans les tifànnes pour les pians^
>i^ parce que fa gomiHe elt purgative. >*
( Je ne je^ois pas de fi^ wvis , elle efi
trop chaude, ). » Son écorce eit encore
» bonne en tifanne pour les gens at-
*> taqués du poumon j ou de Tafth-
« mes Si fi là partiegauche n'eft point
y^ attaquée 5 cela fauve la vie; ckofe
** éprouvée* ( U îH^a Pair d^Un- mAîivâ,H
ohfer'Vdteur fur ceP article ^t*- On Pappelle
•• bois cochon 1 parce que le cochon
{Marrvn<^ oufangUerde cepays-lk) « étant
*> blefle y va mordre cet arbre , en fait
« forcir la gomme 5 y frotte fa plaie bL
» la o-uérît. »»
Un des meilleurs ufages qu'on peut
faire de cette écorce , c eft de la faire
entrer dans une eau vulnéraire faite
au foleil , dans le goût de celte que
m^>m
D E St. Do mi noue. 20 f
je compofoisil y a une trentaine d'an-
nées^qui eft aujourdliui fort commune
dans Paris, èc connue fous le nom
d'eau rouge , ou d'eau de vie rouge.
J'en ai fait auflî à St. Domingue avec
les plantes vulnéraires du pays , par
Tufage de laquelle j'ai fauve à des
Nègres leurs mains écrafées par les
moulins à fucre 5 que Ton avoit cou-
tume de leur couper. Depuis le pre-
mier jour jufqu'au dernier, je ne les
faifoispanfer qu'avec cette eau-devie.
M'^* Defportes fait entrer cette écorce
dans les tifannes apéritives,
Citronmer,
»Sa racine eft bonne dans les tifannes
>» pour galanteries. Son fruit fert à
»' faire l'onguent noir avec lequel on
>» ne manque jamais de guérir quelque
»> ulcère que ce foit. Il eft fi violent
!• qu'il fait plus de douleur que la
» pierre infernale : c'efl: pourquoi on
« rappelle auffi l'onguent du diable 5
« il mange les mauvaifes chairs , nour-
w rit êc fait venir les bonnes, ôc pré-
i> férve de la gangrené. >>
L'onguent noir fe fait avec du mâ-
che-fer > de ia fuie &: du jus de citron.
Il eft fort en ufage 5 on l'applique
chaud 5 ceft pourquoi il fait tant de
douleur. » Ses pépins piles font mou-
ii rir les vers des enfansi »>
M" Defportes fait entrer fon écorcej-
avec celle d'oranger fauvage dans les
opiates aperitives^
Cerifes de t Amérique.
» Rouges grappues , groffes comnic
.!- celles d'Europe , pâteufes ôc alté-
« rantes. Cet arbre a la feuille large
« & grande comme le coudre. »
Le P. Plumier l'appelle MdpigU rmli
■punici facie*
Je ne connois point cet arbre , 6: je
ïi'en
DF St. Domin gve, 209
ti*€n ai jamais entendu parler.
, Le véritable cerifier de St, Domingue,
Cell un petit arbre épineux à petites
feuilles rondes , avec quelques échan-
crures: fon fruit efl: rouge & gros com«
me une cerife : mais i) eil à quatre
petits coins. Au lieu de noyau , on
trouve au milieu trois petits morceaux
d*une fubftance membraneufe & co-
riace.
Ce fruit cru eft fort acide & âpre.
Quelques-uns pourtant le mangent
faupoudré de fucre. En comporte il
eft excellent: il a le goût des cerifes
& des framboifes d'Europe : on en fait
auilî une gelée parfaitement bonne.
Ici finit MingHcf,
210
Plan
T E ^
Bois cCInde»
Minguet ne parle point d'un grand,
arbre des îles , que Ton nomme bois
d'Inde» Quoique je n*en aie pas fait
dans le pays une defcription exade,
je vais en dire ce que j'en fai.
Il ne faut pas le confondre comme
a fait Lemery , avec le bois de la Ja-
maïque ou bois de Gampêche. Celui-
ci eft un bois fort épineux , dont on^
fait des haies à St. Domingue depuis
peu detemsi il vient mieux que le ci-
tronnierôc garnit davantage.
Quand on le laiffe croître , il devient
un grand arbre , dont on envoyé le
cœur en France , pour les teintures.
L'erreur de Lemery , vient apparem-
ment, de ce qu'autrefois, avant que
l'on connût le nom de bois delà Ja-
maïque & de Gampêche en France,
on l'appelloit purement 6c fimplement,
bois d'Inde^ Cette partie de l'arbre eft
v.,,/i-
DE St. Domîn^ve. 2l\
rouge: il ne porte point de baies, nuis
une petite follicule mcmbraneufe ,
minet 5c platte,à peu-près comme celle
du frêne : ces baies , non plus que les
feuilles , n'ont ni l'odeur ni legoiit de
la feuille & des baies du bois d'Inde,
cette petite goulfe renferme des fe-
mences.
Le bois d'Inde de St. Domingue &
de plufieurs autres îles, eft un grand
arbre, ôc peut-être le même, qui félon
Lemery , croît en Cambaya , dans les
Indes Orientales {a). Les feuilles de
celui dont je parle font grandes comme
celles* du laurier, liiTes & de couleur
verte.
Elles ont uneodeur mêlée de poi\Te,
de girofle 6c de lauriers. Ainfi elles font
les mêmes que iefclium I^dum^que[*on
fait entrer dans la thériaque , avec
cette différence que celles de$ Indes
Orientales , vendues en France , n'onc
( a ) Voyez htmçTj , Arc. MAlaèatram p, y^^j,.
212
P l À N t E $
prefqiie plus aucunes des qualités que
les Auteurs demandent > les baies {a )
poffedent ces trois qualités plus émi-
nemment que les feuilles.
Dans les oaies du bois dinde de là
Jamaïque, le poivre dominé. C'eft par
cette raifon qu'on les appelle poivre de
de la Jamaïque.
Lemery fe trompe encore , quand il
dit ) que Técorce de ce bois elt la ca-
iielle blanche (h), La canelle blan-
che eft récorce d'un autre petit ar-
bre , du moins je n'en ai vu que de
petits à la Martinique. Je n'en ai point
vu àSt. Domingue.
Il y a fixou fept ans que j'envoyai à
M''* Laborye , Apothicaire fort connu
par fa capacité 6c fa probité , une
boîte de feuilles de bois d'Inde , pour
être employées dans lathériaque.
{a) Ces baies font aflfez bien décrites dans Tarti-
cle ci-defTus ; Malahatrum.
{é) Article , bois d'inde. ^. 502 1 • .•
î>E St. DômîncveI 215
Le P. Labat a déerit affez bien le
bois d'Inde 3 qu il appelle auiîî laurier.
Il dit qu'il porte deux fois Tannée
de petites fleurs blanches , qairougif-
fent un peu vers leurs extrémités 3 elles
font par bouquets.
Voilà 5 Monfieur 5 & cher confrère
ma tâche faite, &je vous envoyé ce
que je vous ai promis. J'ai pourtant
envie d'y joindre quelque chofe fur le
-bananier , le palmifte &: le ktanier.
Je n'ai pas rapporté ci-delîiis 5 ce- que
■je connois de cqs arbres 3 parce qu'il
n'y a rien ou peu à gagner , pour la
matière médicale. Mais toute réflexion
faite , je crois qu'ils méritent de trou-
ver place dans ce recueil, à caufe de
leurfingularité. Vous en jugerez.
Bmjtnier ( a ),
Il y en a de deux efpeces , qui ne
[a] Mftfaarhf PalmahumiUs Ungis latif^Hefoliih
Toma Fftradifi, ^c. Voyez Lemery.-
G iij
différent gueres que par leur fruit. Le
fruit de Tun s'appelle banane > le fruit
de l'autre s'appelle figue banane.
Le ba-iianier n eft autre chofe que
plufieurs feuilles roulées les unes fur
les autres , qui forment une efpece de
tronc , toujours tendre , toujours verd,
de la grofleur du corps d'un homme
ordinaire , ôc qui croît jufqu'à la hau-
teur de fix ou fept pies. Si on doit l'ap-
peller arbre ou plante, je le laiffe à
décider aux Botaniftes de profeffîon.
Sa racine eft unegroffe bulbe blan-
che , qui produit plufieurs cayeux,
qui avec letems pouffent des rejettons
autour du tronc.
Voici fa manière de croître.
Il fort d'abord de terre deux feuilles
roulées qui s'élargiffent pour faire
place à deux autres , qui viennent du
centre : ces fécondes font place à une
troifieme paire 5 la troifieme à une
quatrième. Etainfi des autres. Ces
VE St.DoMINGUE. 21 f
feuilles s'appliquent fortement les unes
contre les autres de prefque toute leur
longueur, qui peut être d'un pie &
demi ou de deux pies : enfuite leurs
pointes qui fe recourbent vers la terre ,
fe feclient Se tombent.
Quand le bananier eft arrivé à la
hauteur que nous avons dit , fes feuil-
les, d'un beau verd, fortent abfolu-
ment hors du centre , & s'étendent en
l'air 5 prefque toutes en lignes direftes,
peu écartées les unes des autres. Com-
me elles font fort pefantes àcaufe de
leur longueur , qui eftaumoins de cinq
ou fix pies , 6c de leur largeur qui en a
deux ou environ , elles penchent un
peu vers la terre : elles y tornberoienc
en peu de tems , fi elles n'étoient pas
foutenues par une fortgrofle queue,
ronde d'un côté & platte de l'autre ,
qui règne , en diminuant , jufqu'au
bout de la feuille , & diftribue des
nervures pour la foûtenir. Malgré ce
O iy
21$ ^ Z A N T E S
fecours , elles font fort faciles à dé-^
chirer, & pour peu que le vent foit
fort, îl les fépare en une iufinité de
bandelettes > de la largeur d'un pouce*
Il ne faut que neuf mois au bananier
pour faire fa crue : alors , du milieu
de fcs feuilles , on voit naître une
grolTe Se (one tige ligneufe longue de
trois ou quatre pies > qui fe termine
en un gros bouton oblong , aprochanc
delà ligurç coniquç» de couleur de
eris de lin^ Cette ti^e eft diftino-uée de
diftance en diftance, par des efpeces
d'anneaux environnés de petits bou-*
tons: ce font les embryons des fruits
qui y font collés 5 à mefure qu'ils grof-
fiflent , on apperçoit un pédicule li-
gneux auquel ils font attachés quatre
ou cinq enfemble.
Chaque anneau porte plufieurs d^
ces pédicules, enforte que la tige efl
toute couverte de ces fruits i longs
À\m demi pié , de la groffeur du brajj
pw St. Do min a ve. 2tf
d'un enfant de cinq ou fix ans , rele-
vés de trois coins , couverts d'une
peau verte qui devient jaune , de qui
s*éleve facilement de toute fa lon-
gueur en trois parties, quand le fruit
eftmûr.
• Il en vient communément {^)>
cinquante, foixante ou même da-
vantage fur la tige 3 qui ainfi chargée
s'appelle un régime.
Les fruits font fort bons. Leur chair
eft jaune ôc ferme à peu-près comme
la poire de virgouleufe , leur centre
dans toute la longueur eft garni de
petites graines tendres , attachées à de
petits filets, on les mange avec le fruit.
Ce fruit fe mange cru , en compot-
tes y bouilli avec du bœuf falé 5 frit ,
coupé en tranches minces de toute
fa longueurs boucanné, c'eft-à-dire >
( a ) Lemery dit deux cens , c'eÛ. trop : le P. La-
bat , depuis trente jufqu'à cinquante , ce n»eft pas
^ffez.
2iR Plan tes
cuit fur le gril ou fur les charbons.
C'eft une fort bonne nourriture &: d'un
grand fecours quand le pain manque ,
comme il arrive fouvent en tems de
guerre. On plante 1 oignon de bana-
nier 5 ou fesrejettons avec lescayeux
dont ils font fortis, le Ion o- de ca-
naux qui conduifent Téau dan^ les ha-
bitations.
Voici les qualités que Minguet at-
tribue au bananier.
» L'eau du corps, ou du tronc eft
» bonne pour le cours de ventre , pour
» nettoyer les yeux chaffieux 3 Teau
>? du bouton pour déterger les ulcères.
» L ecorce du fruit verd, réduite en
'» charbon & pulvérifée , guérit les ul-
» ceres ôcles crables {a).»;
Du h manier qui porte U figue bmme.
Toute la différence qu'on peut re-
{a.) Ce font des fentes qui viennent fous la plante
4es pies des Nègres.
VE St. DOMINGVE. 21^
marquer entre ces deux efpeces d'ar-
bres avant qu'ils portent leur fruit,
c eft que le bananier proprement dit a
le tronc vcrd , & que celui du bana-
nier-figuier tire un peu fur le gris de
lin. Mais le fruit nommé figue banane
eft fort différent de la banane : il eft
plus court , moins gros ôc moins
droit. La Subftance cuite de quel-
que manière que ce foit eft plus
fondante §c a un autre goût. Elle ne fe
mange guère autrement que rôtie fur
la braife , avec du fucre, en tourte ,
& en beignets, ou elle approche du
goût de la pomme de reinette.
Minp-uet appelle cette efpece deba-
Xianier , bana?iter?nujqué, 11 ait, qu une
feule grafpe ( c'eft-à-dire , une tige ou
régime ) , porte quelquefois plus de
cent fruits 5 ôc il a raifon.
On a donné au bananier en géné-
ral le nom de pommier de paradis &
de figuier d'Adam 5 parce que quel-
tm
t%6 P l A N T s S^
qiies Théologiens croyencque fon fruit
eftie fruit défendu: '(mais c'eft peut-
être mal deviner) & que nos premiers
pareas fe couvrirent de fa feuille i
( ce qui eft plus vraiffcmblable ). [a\
Du^ fdmïfte*
Le Palmifte eft un arbre de trente:
ou quarante pies de haut , fort droit ,.
fans branches^ fans écorce,ôc. couronné
de dix ou 1 2 feuilles, qui font comme
une efpece de pennache. Elles font
beaucoup moins longues &: moins lar-
ges que celles du bananier.
Il eft foûtenu par une infinité de ra-^
cines qui ne font pas fi groftes que le
petit doigt 5 qui forment au bas du
tronc tout autour une groife mafle
toute ronde.
life forme, comme le bananier de
{a) On appelle le bananier figuier d'Adam , oa
pommier de Paradis , comme iî c'étoit l'arbre du fruit
défeadu qu'Adam mangea. Dictionnaire de Trévoux.
Î>È St. DOMINGV E. Z2t
quelques feuilles qui forcent de terre
éc fe roulant les unes fur les autres ,
font un petit tronc verd qui fe durcit
& devient grifâtre à mefure que Tar-
bre croît : ainfi la partie fupérieure
eil: toujours verte & l'inférieure grife.
Au lieu que le trône du Bananier eft
toujours tendre & verd , celui du pal-
mifte eft extrêmement dur & lifle.
Il eft ordinairement moins gros par
le pie, que par le milieu. Dans cette
dernière partie il égale lagroflTeur d'un
homme ordinaire 5 il revient enfuite
à peu- près à la groffèur du pie , qu'il
conferve jufqu'àla partie d'où fortent
les feuilles, La partie fupérieure eft
toujours verte, quelqu'âge qu'ait l'ar-
bre 5 elle s'appelle chot^. Je croirois
pourtant qu'il eft d'autant plus court
que l'arbre eft plus vieiuc &: qu'il ceile
de croître. C'eft une obfervation que
je n'ai pas faite , & qui ne m'eft pas
venue dans Tefpri té tant fur les lieux:
M
22%
L A N t E S
quoi qu'il en foit , la parcie verte eft
ordinairement haute de trois ou
quatre pies*
Quand on en a déroulé deux ou
trois lames , donc la première eil épaiffe
à peu^près de quatre ou cinq lignes,
& toutes les fuivan'tes plus minces à
proportion^ on trouve les autres fort
blanches avec un rouleau au cœur ou
milieu , auffifort blanc & fort tendre.
Ce chou palmifte eft auiîî bon que
nos choux-îleurs 5 on le mange , non-
feulement comme eux au beurre , au
jus , à rhuile 6c au vinaigre ou comme
des artichauds à la poivrade 3 on en
met auffi dans les potages gras 6c mai-
gres ou feul ouavec d'autres légumes.
Lorfqu ona enlevé ce chou , l'arbre
meurt. On fait du tronc qui refte , des
pieux pour des entourages, pour bâtir
des cafes,ou des planches po-ir les fer-
mer , au lieu de maçonnerie.
Ce bois eft un peu creux, rempli
jdê St. Do min GUE. 21%
de fibres fortes & mobiles , comme
le gros fil que Ion appelle fil de bre-
tagne , qui s'étend d une extrémité à
l'autre de larbre. Je foupçonne
qu'elles fervent à foûtenir Tarbre con-
tre les grands vents , de peur qu'il ne
fe cafie.
Cette efpece de palmifte s^appellepal-
mifte franc.
^ Je ne veux pas omettre , qu a la Mar-
tinique on mange de gros vers blancs ,
que l'on trouve , ou plutôt que l'on
fait venir dans le tronc du palmifte
après l'avoir abbattu : je vais copier ce
qu'en dit le P. Labat, tomepremier,:
pag. 225.
Ver de palmijte.
» C'eft un infede qui fe produit dans
» le cœur de cet arbre {du palmifte).
« quand il eft abattu. Ces ycts font
^ de la grofleur du doigt & d'environ
» deux pouces de longueur. Je ne>
m
t» puis mieux les comparer qui un
« pelotton de graifle de chapon enve-
m> loppé dans une pellicule fort tendre
^ èc fort tranfparente. On ne remar-
n que dans le corps de ranimai aucune
,, partie noble , ni entrailles ni intef-.
., tins, dit moins à la vue, car on
M voit autre chofe avec une loupe de
« cryftal , quand on a fendu Tani-
M mal en deux parties : la tête efl
,• noire 6c attachée au corps fans au-
H cune diftindion de cou, ^
o La manière de les apprêter, elk
•. de les enfiler dans une brochette
^ de bois pour les tourner devant ^le
.. feu. Quand ils commencent à se-
., chauffer, on les faupoudre avec de
H la croûte de pain râpée , mêlée avec
f» du fel : cette poudre retient toute
- la o-raifTe qui s'y imbibe : quand ils
.. fon^'t cuits , on les fert avec un jus.
,» d'orange ou de citron Celt un
p très-bon manger &: tres-deiicat.
f> 11
^ Il y a encore une autre manière de
»' les accommoder 5 c'eft de les mettre
« dans une calTeroUe ou dam un petit
*> canaris, avecdu vin, des épiceries,
w un bouquet d'herbesiines, quelques
•> feuilles de bois d'Inde, &des écor-
»* es d'orange. » Voici , continue le
PcLabac comment ces vers naiflent
dans les palmiftes 2
>' Lorfque le ^almiile eft abattu ,
»* & qu'on n*a pas befoin du tronc ,
•» on y fait avec la ferpe ou la hache
» plufieurs entailles le long du tronc,
» afin que certaines groffes mouches
^ qui produifentlesvers dont je viens
» de parler , puiflent entrer dans le
« cœur de l'arbre , en manger la
» moelle , & y laifTer leurs œufs , qui
« s'éclofent & forment ces vers. li
>^ faut avoir foin d'aller au bout de fix
>» femaines voir Tarbre qu'on a en-
^ taillé. On le fend dans toute fa 1oa|:
..:o
^â-^
là H^T ~t ^
99 o-ueur , & on trouve ces vers dans fa
n moelle. Quand on néglige d'y aller
»' environ ce tems4à, on ne trouve
^> plus de vers. Il faut qu'ils ayent
w changé défigure, comme les vers
w à foie , &: qu'ils foient devenus des
mouches.
»» Je n'ai vu ces vers qu'à la Mar-
tinique, quoi qu'il y ait des palmif-
ies à choux , dans toutes les autres
lies,. . .Ileft vrai que je n'y ai point
vu ces efpeces de mouches* »>
Il y a encore deux efpeces de palmif-
tes , dont l'une s'appelle palmifte épi-
neux 5 l'autre palmifte à vin.
, Le palmifte épineux eftainfi appelle,
parce que félon le P. Labat , &: Min-
guet , Ton tronc 6c (qs feuilles font
toutes couvertes d'épines. Il porte des
bouquets de petites noix ^ dit le P. La-:
bat 3 grofles comme des châtaignes ,
qui font remplies d'une fubftance
blanche ôc oiéagiaeiife. Son chou , dit-
f>
99
M
»»
1
îl encore , efi plus délicM que celui dû
fdmifte franc.
Le P. Plumier l'appelle ,ptm^ dac<
tilîfera. acîileata mimma,
^ Le palmifte a vin eft ôrdinairenieHc
beaueoup plus gros par léiîiîlieu que
par fa partie inférieure ou fupérieiife.
Minguet dit 5 qu'on n^xx mange poiilc
le chou 5 mais qu on en tire la moelle ,
qu'on en exprime le fuc 5' qu'on le gardé
dans des bouteilles , & que cette li-
queur devient un vin ^ o[m damlëcm^
mencement furge beaucoup ^ ^ ehgraijfek
^ne d'œil ; que fi l'on avm quelque
mauvais md dans le corps , iî le fer oit
for tir , & quil ote l^appétitl
Je n'ai point eiitendu dife qu'on
faffe de ce vin à St. Domingue. Peut-
être y en faifoit-^on avant qu'on eii
apportât de France»
Le P. plumier appelle cette efpece>^
fâlma dadilifera & viniferk
iizB
L À 2sr f ^ i
Du Latanier.
Le latanier ne diffère du palmîfte
que par fes feuilles. Il fort de terre de
la même manière , il devient de la
même hauteur également gros par
tout. Ses feuilles font au fommet ,
elles repréfentenr parfaitement un
éventail ouvert , de la longueur d'en-
viron un pie ou un pié ôc demi , &: un
peu moins de largeur. Elles font dé-
coupées profondément en plufieurs
bandelettes épaiffes, roides, terminées
en pointe, pliflTées par en bas , 6c
réunies fur une petite queue , grofle
comme une plume à écrire , longues
d'environ un pié ôc demi tout au plus ,
& non pas de trois ou quatre , com-
me lé P. Labat Ta écrit. Cet arbre
fert aux mêmes ufages que le palmifte.
Minguet compte quatre efpeces de
lataniers. Le petit, que le P. Plumier
appelle, palmada^ilifera. radiât a major
ii
mÊÊÊ
DE Sf. DOMINGUE, 22 0
glabra : le franc que le même Père
nomme Palma da5î^tlifera radiât a minor
glabra: {q y latanier à fcie > & le 4^;^
latanier épineux.
J'ai Thonneur d'être, 5cc.
Fin de U féconde Uttrel
»■'
V i
a
LE T T R E
R O I s I É M E.
Sur le Rémora & les. Hakfons»
E comptoîs 5 Monfieur ^ &:
\ cher Confrère 5 être quitte
É; avec vous après avoir fait ce
que vous m'aviez demandé fur
le* maladies qui régnent à St. Domin-
gue 5 ôc fur les plantes de cette île, jVîais
vous m'avez entendu parier du Remo»
ra & de THalcyon d'une manière fort
différente de ce qu'on en penfe 5
& vous m'exhortez à écrire ce que
.. \*tn ai vu j & ce que d'habiles Marims
P ÏY
nm
a 32 DU Rémora
m'en ont appris. Je ne fai fi beaucoup
de gens font curieux d'approfondir ce
qu'il y a de vrai Ôc de faux , dans les
anciennes fables du remord ér des
hdcyons. N'importe, dites-vous, cette
connoilTance eft du refforc de l'Hif-
toire naturelle? il s'en trouvera tou-
jours quelques-uns qui feront bien aifes
de favoir à quoi s'en tenir. A la bonne
heure , Monfieur , je vous obéirai.
Mais n'attendez pas de moi que j'aille
courir les bibliothèques , lire des ca-
talogues ôc feuilleter bien àt^ volu-
mes, pour rapporter ce que les Au-
teurs modernes, (s'il y en a) ont écrit
fur Qç^vi^ matière : je me contenterai
de rapporter ce que Pline écles autres
Auteurs anciens nous en ont laiffé , &
je tâcherai de développer ce que l'on
en doit croire.
»> le rémora , dit Pline eft un txhs"
5* petit poilTon 5 qui fe trouve fur les
*> rochers ; quand il s'attache à ta
ET DES H ALCYONS. 2 2^
» quille des navires 3 on croit qu'ils en
»» marchent plus lentement.Ce qui lui
» a fait donner le nom de rémora (a).
Il rapporte enfuitele fentimentdes an-
ciens, ^y Ariftote, dit-il jCf) croit qu'il a
,» des pies, de la manière dontlamul-
w titude de fes nageoires eft difpofée.
Mutianus penfeque c'eft le murex ,
coquillage plus grand que \ç,purpura[c}.
Le même Auteur rapporte, qu'il s'en
( a ) Echeneh efi parvus admodum pfiis ajfuetus feim-
hoc carims adhârente naves tarditts ire creduntur : inâe
mmine impofitff, Lib. I X. c. x x v. è nofiris quidun^
latimsremoram appellavere eum, Lib. XXXil. c. i.
(b) Pedes eum habere arhkratur Arifioteles ^ hapojitâ
flnnarum multiiudine
( f ) Le murex cil un coquillage dont la liqueur
ferv'oit à teindre ; les Latins n'appelloienr pas cette
teinture y purpura^ mus murex ccn:hiliata , v^fiistinâa
muircc , vsl conchiltata.
Le Purpura eft un coquillage qui fervoit auflî au
■mêmcufage. Ce qui écoit teint delà liqueur de cette
cfpece de coquillage s'appclloit purpura , que nous ap-
pelions auflî la pourpre Virruve a cru que le
coquillage appelle Purpura , avoit une couleur difFé-^
icntc , iuivant la différence du fol oii on le trouvoif;
'ïB 54 ^ ^ R E M Ô R A
étoit collé une fi grande quantité fotVs
un Vaideau que Périandre , Tyran de
Corinthe envoyoit [a) avec ordre de
mutiler inhumainement trois cens en-
fans nobles de Corcyre {l^)y qu'il ne
put jamais avancer, quoique les vents
enflafTent toutes les voiles 3 & que Ton
honoroit à Gnide dan^ le temple de
Venus ^ les coquilles qui avoiçnt opéré
cette merveille {c).
Enfin ,Trebius Niger {d) , dit , que ce
que celui de Tyr av-oit une couleur rouge ; que celui
^'Afrique l'avoit d'aa rouge foncé tirant fur ie violer»
Il y a des Auteurs qui afliîrent que les Latins fe fonc
trompés^ en croyant quelacouleur pourpre venoit à'mx
coquillage: ils prétendent , que ce qui feryoit à teiii-
dre en pourpre, écoic le fan g d'an petit infe£le , què
l'on appelle cochemlU.
(a) A Alyatte Roi de S:\Tae*
( b ) . Muîianûs murtam effe latiorem purpura conchd^ ,
ntroque latere fefe collîgente , quibus inh&rentibus , plenam
'uentis Jietijfe navem portaniem nanties a Periandro ut cetf-,
irarentur nobilespueri^ Conchafque quA idprAjiitennt apud
Gniàiorum Venerem Coli,
( c ) Hérodote ^ Livre UT.
(d) Trebius Niger , pedaiem effe-é* crajpmdme ^um^fte
d^korum : naves mffrari.
ST ^Es Halcyôns. ^^f
poiflbn eft long d'un pie & épais de cinq
doigts i & qu'il retarde la marche des
iVaiffeaux.
Nous voyons ici les fentimens par-
tagés fur la nature du rémora : les
uns penfent que c'eft un poifTon 5
d'autres que c'eft un coquillage. Arif-
tote femble éloigner cette idée en lui
donnant des pies , ou du moins en fup-
pofant que fes nageoires lui en ferventf
car les coquillages proprement dits ^
n'ont ni pies ni nageoires. Il faut join-
dre Trébius Niger à Ariftote: onpour-
roit 5 ce femble , attribuer ce même
fentiment a Pline. Mais on fera dé-
trompé quand on lira ce qu'il en a dit
dans le livre trente-deux , ou il parle
en Déclamateur plutôt qu'en Hiftorien
de la force immenfe de ce petit poiffon.
»•» Qu'y a-t'il de plus fort que la mer ,
I* les vents & les tempêtes {a) dit- il,
l a ) ^ijd vhUntim mari vmljve, ^ mr^méus é^
^^6 ^ ^ R E M 0 R Â
^ lorfque leur puiffance fe réunit à
9» pouflTer un Navire ? ôc cependant
»» un petit poifTon commandé à cet
»» élément , &: à la fureur des vents ,
" ôe le retient en un même lieu. Ce
w que les chaînes les plus fortes^ &les
»> ancres les plus péfantes ne peuvent
w faire j unfeul petit poifTon envient
w à bout fans peine , fans travail , non
3» en tirant, mais en s'y attachant. O
w vanité des hommes , s'écrie-t'il ! ils
ffocellh? tamen omnla h&e pariter ebdem împel-
lentia , unus ac parvm admodum pifciculus , eche-
Tteîs appeUaîus y infetenet» Huant vent i licet ^ f&viant
frocelU , imper at furori , virefque tantas compefcit ^
eogitfiare navigia. Quod non vincula ulla , non anchorsb
pondère irrevecaifilis jaéis. , infr&nat impetus ^ domat
mundirahiem^ nullo fuo labore non retinendo ^ aut aliê
modo quam adh&rendo Hac tantilla ejifatis contra tôt iw
fétus , ut vetet ire navigia
Sed armatA claffes imponunt fibi turrîum propugnacuU
ut in mari quoque pugnetur njelut e mûris. Heu 'vanitas
humana cumroflra illa Are ferro'^ue ad iSîus armatafe*
Tnipedulis inhiber e pojftt ac tenere devint a pifciculus .Fertur
A£iiaco marte tenuijfe prAtoriam navim Antonii tenuit
0» nofirA memoriâ Ca'ù principis Ah Afturà, Antinmxt'
Ammis>
^
Kr l^ns HalcyôUs. i0
w bâtiflent des tours & des forterefTes
» fur des Vaifleaux afin de fe battre
»> au milieu de la mer , comme ils
» feroient fur terre de defliis des mu-
»' railles 5 & un poiffon diin demi-pie ,
9> peut arrêter à fon gré ces machines
a» énormes, armées de fer & d*airain
a> pour les combats:il a arrêté le Vaif-
« feau Amiral que montoit Antoine
« dans la bataille d'Aftium : il a ar-
M rêté , de notre tems , celui du Prince
y» Caïus (a) lorfqu'il revenoit d'Af-*
w ture à Antium. Comme de toute la
» flotte ( ^ ) 5 fon VailTeau à cinq rangs
{a) Caligula,
( b ) Cum e tota cîajfe qulnquerenits foîa non proficenf 'i
€Xilientihus protinus qui id quâLVerent cîrca navim , inve*
nere adha/rentem gubernaculo ofienderuntque Caioindig-^
nanti hocfuijfe quodfe revocaret , quadringentorumque re"
ynigum obfe qui 0 contra fe intercederet. Qui tune pojîeaquê
videre , eum limaci magns.fimilem ejje dicunt Nos ptu"
rium opiniones pofuimus , in naturâ ft^uatiUum , cum di
90 diceremus ISIec dulfitamus demvalere mnr a gênera^
l fubaadi , concharum ] cptm c$Ubn ^ s.nfecrato ctmjfê
t
I g ^ ^ R E M 0 R A
» de rames , ëtoit le feul quin'avan-^
*» çoit point 3 des gens fautèrent du
» vailTeau pour chercher toiît au tour
•' ce qui pou voit caufer ce retarde-
p* ment 3 ils trouvèrent ce poifTon
»> collé contre le gouvernail y &: le
»> portèrent à Caïus qui fut fort indigné
i»» que fi peu de chofe eût pu rarrêter,6c
«* l'emporter fur les iotccs àt quatre-
•> censrameurs.Ceuxqtiile virent alors,
3, ôc qui lont vu depuis, ont dit qu'il
^i étoit femblable à un grand limaçon;
ja, Nous fommes perfuadés, ajoûte-t'il>
p, que toute forte de coquillage ont la
5, même force 3 ceux qui font confa-
3, crés dans le temple de Venus à Gnidc
3, en font une preuve bien éclatante 5
„ & ne nous permettent pas dendou-
g, ter „. Ilparoît donc que l'opinion
commune 6c celle de Pline , étoit due
le r^>^d?r/ï eft un coquillage.
t^émfh , *pud Gnîdiam vençrem^ ççnchas ^ho^U9 ejtif^
diftn pQtentiê credi neeejjefiti
Examinons préfentement ce qu'il y
a de vrai & de faux dans ce fentimenc
des anciens. Deux chofes font Tob jet
de notre recherche i Tune , quelle eft
k nature du rémora j l'autre, quelles
font les forces qu'on peut raifonnabie-
ment lui attribuer.
Entre les avis difFérens de plufieurs
Auteurs 5 le bon fens veut que nous
préférions le plus vraiiOTemblable.
Donc , quand l'un me dira qu'un feul
petit poiiron,d\in demi-pié, ou d'un^
pié enfe collant contre un navire , lar-;
rête tout courte je ne puis donner mon
confentement à cette propofition 3 par
conféquent, le fentiment de Trébius
Niger 5 & celui d'Ariftote me paroiffenc
évidemment faux. Mais celui de Mu-
rianus peut être vrai.
Il fenfuit donc, i«- Qu'en bonne
critique , un feul petit poiffon ne peut
pas retarder la marche d'un navire;
^S: Qu'il en faut un grand nombre^
pu Re Mo n4
3°" Que ce doit être des coquillages^
parce qu'un poiflon ordinaire feroic
bientôt écrafé par le froiflenient de
Teau, quiefttel 5 quand le vent eft
favorable, que la mer paroît là nuit
tout en feu autour du navire , par la
quantité prodigieufé d'étincelles qui en
fortent. Ainfi, première vérité , le ré-
mora doit être un coquillage. Mais
quelle force doit avoir ce coquillage l
Vous favez , Monfieur, que la plu-
part des fabl es , & peut-être toutes , ont
pour fondement quelques vérités hif-
toriques. Celle-ci n auroit jamais été.
imaginée , fi Ion ne s*étoitpas apperçu
qu'il s'attachoit quelquefois des co-
quillages fur la furface inférieure d'un
vaiffeau. Ce fait a été altéré, changé,
exagéré , en paffant de bouche en
bouche. La multitude des coquillages
a été réduite à unfeul: ad coquillage y
on a fubftitué un petit poiflon. Du re-
tard de la marche , on a fait un arrêt
total
nr DES HaICYO NS. îiAtI
total. Pour mettre cette vérité dans
tout fonjour, il n*eft queftion que de
fa voir fi efFedivement il s^amafTe quel-
quefois une fi grande quantité de co-
quillages fous la quille dun navire
que fa marche en foit retardée : c'eft
un fait certain , & connu de tous les
Marins , qui ont fait des voyages de
long cours.
En revenant de St. Domingue,
comme je confidérois une plante ma-
Tine , que l'on nomme raifip^i du, trofiq»e.
{a). Mon Capitaine m*en fit tirer de k
3iier une poignée : elleétoit remplie de
petits coquillages de la largeur & de
la longueur de longle du pouce 5 il
( ^ ) On en voit affez fourenc des battïcs longs A€
t.0 & 30 pics , larges de huit ou dix pouces , détachés
'des rochers par les vagues dont ils font battus. Ils font
emportés de PEft 4 PQueft & du Nord au Sud. En allant
ii St. Domingue « je n'en vis que proche du tropique.
Cette plante portoit.des baies grofTes comme un grairt
'deraifin. J'en goûcii , Je les trouvai fort fades. Enre-
^venant , je n'en vis qu'à deux ou trois cens lieues ca*
;4ega dg JPil^açç ; gljc î^'M^ii poiûl de baies.
^4^ JJ t? R Ê M 0 k A
m'aflura que quand des navires font
iono-tems dans de certaines rades oa
ports voifins des rochers , il s'en atta-
choit fous la quille une fi grande quan-
tité 5 que leur marche en étoit confi-
dérablement retardée^parce que ce co-
quillage devenoit de la grofTeur des
plus groflTes moules. Peut-on ne pas
reconnoître à ce récit le rémora des an-
ciens ?
On conçoit aifément , que quand la
quille d un navire eft plus ou moins
çr^mie de ces coquillages^ cette furface
étant devenue rabotteufe &fillonnée ,
elle gliffe plus difficilement fur Teau 5
c'eft'ce qu aflïïrent tous les Auteurs 5
^tardius ire treduntur'y nxves morark
Ce que M^ de Laly y Gapitainé";
qui m'a ramené , m'a dit, n'eft pas le
féntiment d'un feul homme : je ne
m'en fuis pas tenu à fon fetii témpi-^
gnage. J'ai prié M'' Nicolas Charetv
mon correfpondànt à Nantes,' fi coii^u
en Europe& eh Amérique par fa pro-
bité & fa piété ,- de s'informer des'an-
aens Mariniers, de ce que m'avoh dit
Moniieur de Laly , \oici , Mon_
iieur, la reponfe qu'il m'a faite :
•^ i égard du fettt coquillage que M>
de Laly -vous a dit croître de la aroL
feur d une grojfe moule, qui fe collet J a
retarde la marche, le fait efl Irai ■ ce
coqmllage s^ appelle des BerJches '
, il eit donc aifé préfentementde dif
tmguer ce qu'il y a de fabuleux dansie.
récits .que Plme èli^s autres Auteurs
IT\Z\T^''^'T'' RetrancC
en tout le merveilleux , & nous en
aurons une jufte idée. Nous demeu
rerons convaincus que le Rémora ne
peutctre m un petit poilTon, ni mêmi
. une multitude de poifrons 5 Ai uS
coqui âge, mais une multitude^
coquillagesi qu'un vailTeau dont ^
quille i^ra gamie^exes xoquiH^e^!
9- ij 2 '
lu
Pu R « M 0 « /
pourra bien à la vérité marcher moiilf
vîte qix'un autre , mais qu'il ne pourra
réfifter aux vents qui le poufleront.
Ajoutons que ce coquillage fe tient
probablement fur cette plante dont
Us avonsparlé,qu vient fur es
rochers: que quande le en eftdeta-,
rhée & qu'elle vient a pafler pardel-
foas des vaifTeaux qui font en repos
dans une rade ou dans un port elle s y
arrête ; que les petits coquillages fe
collentcontrelaquille,s'ymulnpl.ent
& s'v grofliffent J que fion n a pas le
foin de les détacher avant de mettre les
Vaiffeaux en route , ils marchent plus
lentement. ,
Ceux qui ne font pas contens de mes
preuves , ou de mes conjeaures
îomme on voudra les appeller , pour-
ront confulter les Marins , qui foiTC
îcsfeulsenétatde les confirmer, &
çeut-être d'ajouter de nouvelles preu-
ves, aux miennes, .r» ^(. o,
SivQUS êtes fatisfait, Monlieur e«
À
Miiilliiliiii
ET DES HaLCYONS^ 245
cher Confrère , ce fera pour moi un
heureux préjugé que le public le fera
auffi : & je doute fort qu'il prenne pour
le Rémora , le petit poiObn que Ton m'a
dit , qu'un certain curieux garde
précieufement 3 ni la lamproie , qui au
rapport du P. Hardouin , s'étant at-
tachée au gouvernail d'un VailTeau ;
fur lequel étoient le Cardinal de
Tournon , èc M""' Pellicier Evêque de
Montpellier , l'empêchoit de marcher i
quoiqu'on cite Rondelet , comme té-
moin oculaire de ce fait ( a ).
On doit faire le même jugement du
poifTon que M'' Gantier Médecin,
apporta en France en 1 7 1 7. Il avoit
été envoyé par Monfeigneur le Duc
d'Orléans , Régent du Royaume , fur
la Méditerranée , pour y faire des ob-
fervations. A l'embouchure du Nil
on prît unpoiflbn à bord du Touloufe,
commande par M'^' du Quêne , qu'on
C * ) Voyez le Pline du P. Hardouin fur le KémarA»
Qiij. V
Ti'
t^6 Du Rémora
dit être le Rémora. Il étoit de couleur
brune, long d'environ un pie: il avoit
fur le dos tranfverfalement des efpeces
de filions qui répréfentoient affez
bien un efcalier, dont les marches
diminuoient de hauteur à mefure
qu'elles approchoient de la queue.
Tous ces poiffbns n'ont du Rémora que
le nom qu on leur a donné. Il ne me
refte plusv-Monfieur, qu'à vous dire
lin mot fur les Halcyons.
Les Halcyons font des oifeaux ma-
rins très -fameux dans l'antiquité , ôc
lefujet d'une métamorphofe {a) dans
Ovide: Ciçeron les a célébrés par un
Poëme dont il ne nous refte que deux
vers 5 l'Empereur Gordien , par un au-
tre , dont il ne'nous refte rien du tout;
Les merveilles que les Naturaliftes
& les Hiftoriens en ont contées ., ont
paru fi certaines à un des plus refpec-
tables Pères de l'Eglife , ( c*eft St. Am-
(^) Métamorphofe L. XL
^
ET VES^ HaLCYÔ^ Si 245^
broïfe), qu'il n'a point fait difficulté
de les rapporter auflî férieufement
qu'il auroit pu faire la vérité la plus
connue.
» L'Haï cy on, ^/>- //, dépofe fes
,5 œufs au milieu de l'hy ver dans le
55 fable {a) du bord de la mer : dès ce
5v moment les vents tombent , la mer
devient tranquile §c .ce calme dure
quatorze jours, parce qu'il en faut
fept à cet oifeau pour couver {ts
qeufs & les faire éçlorre , & fept au-
5, très pour élever fes petits. „
5, Le Créateur a deftiné à ces petits
„ oifeaux pour faire leur nid la faifon'
„ la plus orage ufe , afin de rendre ,
„ par cette ferénité fubite , la faveur
3>
î>
5)
S)
(*) St. Ambroifc en conîgeant Ovide, qui dit, que
l'Haicyon fait fonniclfur les eaux de la mer , penden-
tihus ê^ucre nidis, affoiblit beaucoup le miracle qu'il
reconnoît , que le ciel fait en fa faveur : Dieu peut
aufîi-bein commander à la mer , de fouffrir que Poifeau
lafle Ton nid fur fes eaux , que defe tenir tranquille.
248 Du Rémora
5, qu il leur fait , plus fenfible & plus
3, éclatante,
5, Les Marins n'ignorent pas un li
„ grand bienfait jils appellent ces jours
5, Halcyomdes , Sc ils ont grand foin
j5 d'en profiter , parce qu'ils font cer-
tains qu'ils n'auront point de tem-
pêtes à effuyer pendant tout cç
tems4à (^). «
35
35
( a ) Halcyone eft avis mantima. qu&. in Utanhus fxtut
ftio^ edere folet , itf^ ut in arenis ûva depQnat medio ferè
hyemh ; nam idtemporisfovendis hahet âeputatum partu-
hm , quando maxime infurpt mare , liîoribufque yefje^:
T^enùor fla^us ilUditur , qu)> ntagii repentiziA placidita-^
tîs fQlemnitate avis hujus elucer et gratta. Islamque nbi
itndofumfuerit mare , pofiiis ovisfubit'o mitefcit , é* ^^"^
nés cadunt ventonim proeelU • . v • • âonee ovafovet Hal^,
€.yone'fi4^., Septem dies fœtus funt y quibus decurfis educU
fuUos : illico aîios feptem adjmgit dies , quibus tnutriat
fAYtmfms, donec incîpiant adolefcere. Tantum autem
^eneficium avicula hAc ^ divinitus fibi àatum y habet y ni
quatuor decim dies nauticiprAfumpt&ferenitatis obfervent ,
^UQS ^ Halcyonidai vacant , quibus lulla^ motus procellojl^
iernpeftatis horrefcant. Hinc poetA anfam fabulandi arri^
puerunt Halcyonem filiam /Eoli fuijje qui ingratiamfiliA ^
4um, illa in litore ova parit ^ frtm e^Hcat 9 vmQi û'^^
çlufosfirvah
mt^
ET VES H ALCYON Si x^
Des oifeaux qui ont un fî beau pri-
vilège doivent avoir une origine bien
iiluftre : auflî les Poètes leur en don-
nent-ils une divine. Les Halcyons ti-
rent leur nom à'HalcyoTte , fille d'Eole :
elle étoit femme deCeyx, petit fils de
Jupiter. Ceyx périt en allant par mer ,
malgré les réprefentations de foa
Epoufe , confulter Apollon fur Tétat
de fon Royaume : elle fe précipita
dans la mer à la vue du corps de fou
mari qu'on lui rapporta , d'autres di-
fent que les flots le rejetterent fur le
bord de la mer {a)\ les Dieux par corn-»
mifération les changèrent en oifeaux >
qui furent appelles Halcyons. Eole
voulant pourvoir à lapoftérité de fa
fiUe^renfermeles vents pendant qu'elle
fait fon nid, qu'elle pond, qu'elle
couve , qu elle élevé {qs petits.
LaifTons la Fable , Se voyons ce que
(a) Voyez Ovide |k iM*
tjo Z> V R M M 0 n 4
c'eft que les H^lcyons. Pline (a) nous
dit, que ce font des oifeaux „ un peu
,, plus gros qu'un moineau , de couleur
5, Dleue> poi^r la plus grande partie,
„ & que leufs aîles fonj: variées d'un
„ peu debianp & de pourpre, quils
5, ont le cou menu &: iong> le bjsc ver-
,, dâtre long & effilé. ,,
Ariftote ( h ) dit qu il y en a de deux
cfpeces, l'une qui chante, & qui fe
tient parmi les rofeaux: l'autre qui eft,
muette & plus groflTe.
La defcription de Pline eft aflez
|ufl:e : Thalcyon vu d'un peu loin , (sft
tout à fait femblable à l'hirondelle >
& la remarque d'Ariftote eft vraie au^
moins en partie 5 on n'a jamais entendu
riialcyon , ni chanter , ni rendre le
moindre fon : je ne fâche perfonne
( a j J/>/^ avis fauVo crajjior pajfere^ colore Cymeo ex
f»rte majore iantum , purpHre's e^ candidh admi/iii
fennîs , coîlo gracili ae frocero ; rofiro fubvindi , lon^9
^ tenui , raro vifam. Plin. de Halcyonibus.
( ^ ) Livre VlII. des Animaux*
ET DES HalcYONS. 2^1
qui ait vu l'autre efpece.
Les halcyons ne vont jamais que par
bandes, & ils ne paroilTent que* pen-
dant les tempêtes : ils fuivept les na-
vires i je penfe que c eft pour fe mettre
à couvert du vent 3 car on ne les voit
jamais ni devant ni à côté , mais tou-
jours derrière , éloignés de la poupe
d'environ quarante ou cinquante pas :
ils ne s'élèvent point dans Tair , ils
volent fort vite à un pié ou deuxau-»
dcffus deTeau, comme en tournant
& fe coupant les uns les autres. Ils ne
fe repofent point; feulement, de tems
en tems ils frifent l'eau , probablement
pour mouiller leurs ailes i comme les
poiflbns volans /qui fans ce fecours ne
pourroientpas voler longtems, ni évi-
ter d'être pris par la Dorade qui les
pourfuit.
Je n'en ai vu que dans les mers du
Nord , en revenant de St. Domingue ,
& point dans celle du Sud en y allant.
ap D V REMORA
Je ne voudrois pourtant pas afiurer
qu'il ne s'y en trouve point ; parce
que dans les mauvais tems qui nous
prirent entre les îles Canaries & les
Açores , je fus fi incommode du mal
de mer, que je ne pus me promener
fur le Vaifleau. .
Un ancien Officier du Navire de
M'- de Laly , qu'on appelle le Maître,
parce qu'il fait faire la manœuvre avix
Matelots , m'a affûré , qu'il avoit eu dç
ces oifeaux entre les mains j qu'ils n ont
point de plumes , mais feulement du
poil &c des aîles membraneufes,comme
les chauves-fouris , & les poiffons vo-
lans : je le croirois volontiers , (quoi-
qu'àla diftaticequ'on peut les voir, ils
paroiflent de véritables oifeaux) parce
que s'ils avoient des plumfes aux ailes,
il femble qu'ils ne pourroient pas
voler toujours , ni fi vîte , fans être ta-
tiaués par les tuyaux ; & qu'en mouil-
lant leur aîles , bien loin que 1 eau tut
4
KT DES HAICYONS. 2ff
un fecourspour les aideràvoler , ce
i^roit plutôt un obftacle.
Je ne dois pas diffimuler que M'^-
Charet que favois prié de s'informer
de ces particularités , m'a mandé qu'ils
ont des plumes ôc des pattes de ca-
nard. Ce dernier article ne meparoîc
pas vraiffemblable , puifqu'ils ne na-
o-ent point» On lui a ditauflî qu'il ref-
femblent à l'hirondelle pour la figure ,
la grofleur & le plumage i qu'on n'en a
jamais entendu chanter 5 qu'on en
trouve beaucoup dans les baies brades
de la Bretagne , quand il y a des an-
nées venteufes 5 qu'ils font leur nid
dans les îles d'Origny , près de Gre-
nezai & Nolaine , près .Ouellant ,
qui font inhabitées.
On peut inférer de-là , que ces
oifeaux ne font pas leurs œufs dans le
fable, ni leur nid furie bord de la
mer , encore moins fur l'eau quand la
mer eft calme , comme on le croie
(çomniunémcnt.
Voilà , Monjfîeur &cher Confrère ,'
tout ce que je fai des Halcyons 5 du
moins en ai~je dit aflez pour exciter
la curiofité des Naturaliftes à les
connoître plus parfaitement , en
confultant ceux qui font à portée
d'en voir tous les jours i & à s'aflurer
furtout , lî ces oifeaux font à poil ou
à plume.
J'ai rhonneur d'être, &c.
Fm de la troijiéme & dernière Lettrel
iiiiiiillÉ
APPROBATIO
De U Faculté de Médecine de Pdris;;
iM OUS, foufiîgnés Dodeurs* Regens ea
Médecine delà Faculté de Paris, nommés
par elle,, pour examiner un Manufcrit de
M. G H E VAL I E s^, notre C©nfi'ere , intitulé,-
JLettres-^ &c. Avons lu cet Ouvrage; & nous
croyons rendre témoignage à la vérité , ea
afîûrant qu'il eil également inftrudif & cu^
rieux.
Donné à Paris , ce cinq Février , mil fept
cens cinquante -un.
M E R Y.
T. BARON.
OUi le rapport de M«- François Mery
& Théodore Baron , Commifîaires nommés
par la Faculté, pour Pexamen d'un Livre
intitulé, Lettres fur les Maladies & les PlameB
des îles de St. Domîngue , &c, Compofé par
M. Jean-Damien Chevalier, notre
Confrère ; la Faculté confent , que ledit Ou-
vrage foit imprimé. Fait 6c arrêté aux
Ecoles de Médecine de Paris , en l'affemblée
eu 5 Février 175 1.
SAâON, Doyen.
Oi--t-;(
J'A I lu par ordre de Mônfeîgneur le Chari-
celier un Manufcrit intitulé , Lettres de
M. Chevalier , DoUetir - Relent , ancien Pre-^
feffeur delà Faculti de Médecine en ÏUmverfite
de Paris, &e. a M. De Jean , &c. Je penle
qu'on en peut permettre l'imprefTion.
G U E T T A R D.
A Paris, ce onzième Mars, 1751.
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