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Full text of "Lettres a M. de Jean, docteur-regent de la faculté de medecine, en l'Université de Paris. : I. Sur les maladies de St. Domingue. II. Sur les plantes de la même île. III. Sur le remora et les halcyons. Par M. Chevalier, docteur-regent, ancien professeur de la même faculté, & ci-devant medecine du Roi à St. Domingue."

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LETTRE  Se 

A    M'  DE   JEAN, 

DOCTEUR-REGENT 

De  la  Faculté  de  Médecine ,  en 
rUniverfité  de  Paris. 

I.  Sur  les  Maladies  de  St.  Domingue^ 
I  L  Sur  les  Vlantes  de  la  même  île. 
III.  Sur  le  Rémora,  &  les  Halcyons, 

PAR 

M.Chevalier,  Dodeur  «  Régent ,  ancîea 
ProfefTeur  de  la  même  Faculté ,  &  ci-devant». 
Médecin  du  Roi  à  St.  Domingue, 


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A       P    A    R    I    S  i 

Ckez  Durand    Libraire ,  rue  St.  Jacques 
au  Griffon  &  à  St.  Landry. 


M.    D  C  C.     L  I  1. 


I 


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.3nKYî 


PRIVILEGE   DU  ROI 

LOUIS  PAR  LA  grâce:  de  Dieu  ,  Roi 
DE  France  et  de  Navarre  a  nos  Ames 
&  féaux  Confeillers ,  les  Gens  tenans  nos  Cours  de 
Parlement ,  Maître  des  Requêtes  ordinaires  de  notre 
Hôtel ,  Grand-Confeil ,  Prévôt  de  Paris,  Baillis, 
Séne'chaux  ,  leurs  Lieutenans  Civils ,  &  autres  nos 
Jufticiers  qu'il  appartiendra,  SALUT.  Notre  amé 
Laurent  Durand,  Libraire  à  Paris  , 
Nous  a  fait  expofer  ,  qu'il  déliroit  faire  imprimer  & 
donner  au  Public  ,  Trois  Lettres  de  M.  Chevalier  , 
Doâieur-Regsm  ^  ancien  Profejfeur  de  la  Faculté  de  Mé- 
decine en  l'Univerfité  de  Paris  ;  S'il  Nous  plaifoit  lui 
accorder  nos  lettres  de  permiffion  pour  ce  néçelTaires  ; 
A  Ces  causes  ,  voulant  favorablement  traiter 
l'Expofant  ,  Nous  lui  avons  permis  ôc  permettons  par 
ces  préfentes ,  de  faire  imprimer  iefdites  Lettres  en 
un  ou  plufîeurs  volumes  ,  ôc  autant  de  fois  que  bon  lui 
femblera  ,  &  de  les  vendre  ,  faire  vendre  &  débiter 
par  tout  notre  Royaume  ,  pendant  ie  tems  de  trois 
années  confécutives  ,  à  compter  du  jour  de  la  datte 
des  préfentes.  Faifons  defenfes  à  tous  Imprimeurs, 
Libraires  &  autres  perfonnes  ,  de  quelque  qualité  8c 
condition  qu'elles  foient  ^  d'en  introduire  d'impref- 
lîon  étrangère  dans  aucun  lieu  de  notre  obéïfTance  : 
A  la  charge  que  ces  préfentes  feront  enregillrées  tout 
au  long  fur  le  regiflre  de  la  Communauté  des  Impri- 
meursÔc  Libraires  de  Paris ,  dans  trois  mois  de  la 
datte  d'icelles  ;  que  l'imprefïîon  defdites  Lettres  fera 
faite  dans  notre  Royaume  &  non  ailleurs,  en  bon  pa- 
pier &  beaux  cara(flères,conformément  à  la  feuille  im- 
primée ,  attachée  pour  modèle  fous  le  contre-fcel  des 
préfentes ,  que  PImpétrant  fe  conformera  en  tout  aux 
reglemens  de  la  Librairie  ,  &  nota^mment  à  celui  du 


10  Avril  1725* ,  qu'avant  de  les  expofer  en  vente ,  les 
Manufcrits  qui  auront  fervi  de  copie  à  l'impreflîon 
defdites  Lettres  ,  feront  remis  dans  le  même  état  où 
l'approbation  y  aura  été  donnée  ,  es  mains  de  Notre 
très-cher  3c  féal  Chevalier-Chancelier  de  France ,  le 
Sieur  de  Lamoignon ,  &  qu'il  en  fera  ènfuite  remis 
deux  exemplaires  de  chacune  ,  dans  notre  Biblioteque 
publique  ,  un  dans  celle  de  notre  Château  du  Louvre , 
un  dans  celle  de  Notre  très-cher  &  Féal  Chevalier- 
Chancelier  de  France  le  Sieur  de  Lamoignon  ,  &  un 
daiis  celle  de  notre  très-cher  Féal  Chancelier  Garde 
dès:  Sceaux  ,  le  Sieur  de  Machault ,  Commandeur  de 
nôslOrdres  ;  le  tout  à  peine  de  nullité  des  préfentes  : 
Du  contenu  defquelles  vous  mandons  &  enjoignons  , 
de  faire  jouir  ledit  Expofant ,  &  fes  ayant  caufes  , 
pleinement  &  paifiblement  ,  fans  fouffrir  qu'il  leur 
fbit  fait  aucun  trouble  ou  empêchement.  VOULONS  , 
qïj%  la  copie  des  préfentes  qui  fera  imprimée ,  tout  au 
long  ,  au  commencement  ou  à  la  fin  defdites  Lettres , 
foi  foit  ajoutée  comme  à  l'original.  Commandons  au 
irremier  notre  Huiffier  ou  Sergent  fur  ce  requis ,  de 
jfaire  pour  l'exécution  d'icelles  tous  aétes  requis  &  né- 
';èej[raires ,  fans  demander  autre  permiffion  ,  &  nonobf. 
tanrclameur  de  Haro  ,  Charte  Normande  ,  «Se  Lettres 
à  ce  contraires.  CAR  tel  eft  notre  plaifir.  DoNNE% 
à  Verfailles  le  dix-feptiéme  jour  du  mois  de  Mai  l'an 
de  grâce  ,  mil  fept  cent  cinquante-un  ,  &  de  notre 
Règne  le  trente-fixiéme.    Par  le  Roi  en  fon  Confeil  , 

SAINSO  N. 


Kegifiré  fur  le  Kf0re  X.  de  U  Chambre  Koyale  des 
Imprimeurs  é*  Libraires  de  Paris,  N^.  folio  cort- 
formément  aux  anciens  Réglemem  ,  confirmés  par  celui  d^ 
%t  février  1723. w^  faris  U 

LE  GRAS  5>»^»V. 


PREMIERE 

L  E  T  T  R 

SUR    LES    M  AL  A 
QUI      REGNEN 

A  S^    DOMING 

Leurs  fréfervatifs  &  leur  cure. 


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O  u  S  fouhaitez  ,  Monfieur 
&  cher  Confrère  ,  que  je  faffe 
part  au  Public  des  obferva- 
lions  que  j'ai  faites  à  St.  Do-; 

mingue  fur  les  maladies  du  pays,&  fur 

la  manière  de  les  traiter. 


'-'^WWCVri;  «.y-.l  'Vf- 


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L   A    D    I   E    s 


V^ous  penfez  que  ces  obfervations 
pourront  fervir  non-feulement  aux 
Médecins  qui  fe  déterminent  à  pafler 
dans  les  îles  Occidentales  de  rAmé- 
rique  ,  mais  encore  à  ceux  de  Fran- 
ce &c  peut  -  être  à  ceux  de  toyte  FEu- 
rope. 

En  effet.,  ,plufieurs  de  ces  maladies 
qu'on  peut  regarder  comme  parti- 
culières &  propres  à  ces  îles  ,  parce 
qu  elles  y  font  plus  fréquentes ,  ôcplus 
dangereufes ,  paroifTent  ici  très-fou- 
vent:  telles  font  les  fièvres  malignes 
avec  hémorrhagie  ,  le  -tétanos  ,  les 
écr^uelles ,  la  lèpre  ôc  quelques  autres: 
à  l'égard  de  celle  que  les  Efpagnols 
ont  portée  de  St.  Domingue  chez  eux, 
.fout  le  monde  fait  qu'elle  s'eft  na- 
turalifée  dans  tous  les  climats. 

Si  donc  j'ai  réuffi  à  traiter  ces  mala- 
dies dans  le  pays  vceuxqui  me  fuccé- 
deront ,  feront  à  même  de  faire  ce  que 
jVi  fait,    à   moins  que  des  lumierjes 


DE  St.  Domi ngu e.      2 

fupérieures  ne  leur  diftent  quelque 
chofe  de  mieux  :  fi  j'ai  guéri  par  ex^ 
îinUïon ,  celles  que  j  ai  dit  être  com- 
munes à  Tun  &:  l'autre  hémifphere 
ayec  moins  de  dégoût,  de  peines,  dç 
perte  de  forces  qu'on  n'en  éprouve  eii 
fe  livrant  à  la  méthode  ordinaire  3  il 
celles  que  l'on  juge  incurables , 
comrtie  les  Anchylofes  ,  ou  prefquç 
incurables ,  comme  les  Exoftofes ,  le^ 
Ecrouelles ,  la  Lèpre  ,  ont  cédé  à  la 
fumigation  i  je  laifle  à  juger  aux 
grands  Praticiens ,  fi  l'on  ne  peut  pa^ 
fe  promettre  en  France  les  mcmes 
fuccès. 

Pourquoi  le  flux  de  bouche  feroit- 
îl  plus  nécejQTaire  dans  un  air  tempéré 
que  dans  les  pays  chauds  ?  A  l'égard 
delà  fumigation  ,  .  tout  le  monde 
fait  que  la  Faculté  l'a  approuvée. 

Je  vais  donc ,  Monfieur ,  comment 
çer  par  la  defcription  des  maladies  c 
je  rapporterai  çnfiiite  avec  toute  la 

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Ma 


L^^^£^^ï  :èIs 


candeur  poffible  la  manière  dont  je 
les  ai  traitées. 

Je  fais  trois  claffes  de  ces  maladies  : 
je  place  dans  la  première  celles  qui 
font  particulières  aux  Blancs  (  c'eft 
ainfi  que  dans  les  îles  on  appelle  les 
Européens  )i  dans  la  féconde,  celles 
qui  font  particulières  aux  Nègres  5 
dans  la  troifieme ,  celles  qui  font  corn-* 
munes  aux  uns  6c  aux  autres. 

Prefque  tous  les  Blancs  qui  arrivent 
dans  rîle,  non-feulement  d'Europe, 
mais  encore  des  îles  voifines  te  du 
continent  de  l'Amérique ,  font  atta- 
xjués  peu  de  tems  après  d'une  fièvre 
maligne ,  que  Ton  appelloit  autrefois 
maladie  de  Siam  :  on  lui  donna  ce 
nom ,  parce  qu'elle  commença ,  dit-^ 
on  5  dans  la  Martinique ,  peu  de  Jours 
après  l'arrivée  d'un  Bâtiment ,  chargé 
de  marchandifes  qui  venoient  de  ce 
Royaume  i  &  de  laMartinique,  elle 
fc  communiqua   bientôt    à    St.  Do- 


2>  È  S'T.   Do  MI  NGV  E.        jf 

mingue.  Cette  maladie  étoit  Carac- 
térifëe  principalement  par  des  hé- 
morrhagies ,  par  le  nez  ,  par  les  yeux , 
par  les  oreilles  ou  par  d'autres  parties 
du  corps,  &  très-peu  en  réchappoient. 
Ce  fymptome  n  eft  plus  fi  commun  > 
du  moins  à  St.  Domingue  :  mais  on 
dit  qu'il  eft  encore  très-fréquent  à  la 
Martinique  3  dans  le  cours  de  onze 
années  je  n'en  ai  vu  que  deux  dans  les 
quartiers  de  Léogane  6c  du  Cul-de- 
fac ,  prefque  les  feuls  où  j'aye  fait  la 
Médecine:  j'en  donnerai  l'hiftoire. 

Les  Symptômes  les  plus  ordinaires 
delà  fièvre  maligne  qui  attaque   au- 
jourd'hui les  nouveaux  venus ,  font  les 
mouvemens  convulfifs,  le  délire,  le 
Coma ,  &  quelquefois  la  léthargie  :  les 
malades  lont    fouvent    emportés   le 
quatre,  ou  fur  la  fin  du  cinq  :1e  plus 
fouvent ,  le  fept,  le  neuf  ôc  le  treize  : 
ceux  qui  paflentce  terme  >  quoiqu'ils 
foiem   toujours  en    danger  ,  même 

A  iij 


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M  A   L'-È  J^  l  E^S     ^ 


jufquaa  25  5  guérifTent  ordinàiremefft 
ie  30 ,  le  3  3  j  j'en  a4  vu  cependant 
quelques-uns  qui  n'ont  été  guéris  que 
le  trente-neuf  3  ce  qui  arrive  aufli  en 
Europe  comrne  à  St,  Domingue. 

Vous  entendez -bien  5  Monfieur  , 
que  je  parle  des  malades  qui  font 
traités  fuivant  les  règles  de  la  Me^ 
decine  i  car  ceux  que  les  Chirur- 
giens fe  mêlent  de  gouverner ,  auffi- 
bien  que  ceux  qui  ont  le  malheur 
d*être  relégués  dans  les  Hôpitaux  où 
les  Frères  de  la  Charité  veulent  être 
Apothicaires ,  Chirurgiens  &  Méde- 
cins i  ceux-là  5  dis-je ,  périffent  prefque 
tous. 

Les  anciens  habitant  font  auflî  quel- 
quefois attaqués  de  cette  fièvre  avec 
\ts  mêmes  Symptômes ,  la  plupart 
en  guérifTent  quand  ils  font  biei>  goit^ 
vernés. 

Les  maladies  particulières  aux  Nè- 
gres, peuvent  au/G  fe  divifer  en  crois 


claffes  :  celles  qui  arrivent  aux  nou- 
veaux débarqués ,  aux  enfans  6c  aux 
adultes. 

Il  eft  rare  que  les  Efclaves   qu  on 
apporte  de  Guinée  foient  attaqués  de 
fièvre  maligne  :    mais  quelques-uns  -> 
principalement    les    jeunes ,    jufquà: 
l'âge  de  quatorze  ou  quinze  ans  font 
aflez  fujets   à  une  maladie  que   Ton 
appelle  dans  le  pays  mal  à'EJlomac,  Ils 
fentent  delà  douleur  à  la  région  épi- 
gaflrique  5  tout  le  corps  eft  péfant  , 
kfommeil  les  accable ,  en  marchant  t 
en '  travaillant  5    ils  voudroient   être 
feoiijours    couchas  3  il  faut  les  battre 
pour  les  faire  lever ,    àc  les   outils  en 
travaillant  leur  tombent  des  »ainsj 
Ms  ont  une  faim  dévorante  ,   on  ne 
jeut  les  raflafier. 

Les  enfans  nouveaux-nés  des  Nègres 
font  fort  fujets  au  tétanos  qui  leur  prend 
ordinairement  avant  le  huitième  jour , 
âcles  fait  périr  communément  en  trois 

A  iv 


s  M  A   L    A    D    l    E  "S      ^ 

OU  quatre  jours.  Trè:>-peu  en  rechap-^ 
peut,  on  pourroit  peut-être  même 
dire  qu'il  n'en  réchappe  aucun:  onap-  ' 
pelle  cette  maladie ,  mal  de  mâchoire. 
Il  y  a  des  habitations  où  elle  eft  plus 
commune  qu'en  d'autres  i  &  des  Né- 
greffes  dont  tous  les  enfans  périffent  5 
d'autres  dont  les  enfans  n'en  font 
point  attaqués.^  Les  Adultes  fontauffi 
fort  fujets  au  tétanos  :  &  il  en  meurt 
plus  que  l'on  n'en  guérit. 

Il  y  a  encore  une  maladie  particuliè- 
re aux  Negres:&  qui  eft  fort  commune. 
C'eft  le  ver  de  Guinée  :  il  arrive  pour- 
tant quelquefois  que   Its  Capitaines 
&  leurs  Equipages  qui  vont  en  Guinée 
acheter  ces  malheureux ,  fe  trouvent 
attaqués  de  ces  vers.   Les  fentimens 
des  Médecins  &  des  Phyficiens  anciens 
&  modernes  font  partagés  fur  la  nature 
de  cette  maladie  :  plufieurs  des  anciens 
ont  connu  l'exiftence  de  cqs  vers  qui 
s'engendrent  dans  les  corps  humains  i 


DE  St.  DoMîNGve.     ^f 

^ilslesonc  appellés^r^f^,  ou  dracunculus 
ferfarum .  apparemment    parce    que 
c'elt  en  Perfe  qu'on  a  découvert  les 
premiers.  Monfieur  Aftruc  croit  que 
c'eft  une  maladie  endémique  en  Ara- 
bie. De  morbis  venereis.  lib.  I.  C  x  I;. 
La  plupart  des  modernes  qui  n'en 
ont  jamais  vu,  &  qui  n'en  ont  jugé 
que  fur  des  oui-dire  ,  penfent  que  ce^ 
que  Ton  a  appelle  ver  ,  n'eft  qu'une^ 
lymphe  concrète ,  qui  s'eft  filée  ,  mou- 
lée &  durcie  dans  les  vaifleaux,  qui  fe 
fait  jour  enfuite  par  la  peau,  qu'elle 
perce  5  je  ne  fai  par  quelle  raifon  on 
l'appelle  auflî ,  'vena  medinenfis. 

Voilà  ,  M"^-  les  maladies  particu- 
lières des  Blancs  &:  des  Nègres.  Les 
communes  font  la  vérole  ,  qui  en 
produit  d'autres,  différentes  dans  ces 
deux  efpeces  d'hommes.  Les  Nègres 
font  plusfujets  aux  pullules  ^  ou  galles 
véroliques ,  que  l'on  apelle  des  pians, 
aux  écrouelles ,  à  la  lèpre  j   car  je  re- 


È-  S 


garde  ces_  deux  dernières  maladies^ 
commela  fuite  d'une  vérole  qui  a  paflé- 
par  plufieurs  générations  de  père  en' 
Ms.  Mais  les  Européens  font  plutôt' 
attaques  d'obftrudions  de  rate,  de  foie^ 
&  de  diarrhées  opiniâtres,  qui  en  font- 
périr  un  grand  nombre. 

Venons  préfentement  à  la  cure  de' 
ces  maladies  ,  &  premièrement  des' 
nevres  malignes.  p 

_  Lesfievresmalignes  qui  font  très-' 
irequeiîtes  à  Su  Domingue  ne  difFe- 
rent  que  du  plus  au  moins  de  celles- 
qu'on  voit  en  France ,  principalement 
en  Automne.  On  doit  faigner  promp- 
tement  le  premier  jour  au  moins  deux 
ou  trois  fois   du  bras  avant  de  venir  à 
la  faignée  du  pié  ;  car  dans  le  com- 
mencement  des    grandes   maladies^^ 
lurtout  de  celle-ci  ,  toutes  les  parties» 
du  bas-ventre  font  dans  une  difpoJ 
feion     prochaine    à    l'inflammation, 
^ette    difoofition    n'eft   autre   chofe 


9^\ 


D  E  5*.  Do  MiNè  l&S.       t % 

^ù'un  faïig  qui  remplit le^ artères, qm^ 
y  rampe  diffiGilement ,  ou  qui  s'y  ar- 
rête,  qui  les  étend  dans  la^  partie  fu- 
périearevles  rétrécit  par  confé^uent 
dans  Tinférieure  ,  ô£  fe  ferme  à  lui- 
même  le  pafTage  ,  d'oii  nàiflent  des 
€ongefl:îons  mortelles. 

Gr  il  eft  démontré  que  les  faignées 
du  pi^  foîit  dérivatives,  à  Tégard  de 
toutes  les  parties  qui   reçoivent  leur 
fang,  tant  de  Taorte defeendante^que 
des  artères    latérales  qui  en  fortent. 
Il  eft  encore  certain  que  celui  qui  fort 
de  la  faphenê  vient  immédiatement 
du  cœur  ,  par  un  même  canal  qui 
change  de  nom  fuivant  les  parties  par 
où  il  pafle.  Il  n  y  a  donc  que  ce  canal 
quifevuide,  pendant  que  toutes  les 
latérale^  avec  leurs  divifïons  ôcfabdi- 
vifions  ,  fe  trouvent    gonflées  par  la 
quantité   de  fang  qui  s  y   précipite  , 
qu  elles  ne  peuvent  tranfmettre  avec  la 
même  célérité  dans  les  veines  qui  leur 


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'J3,        M  4  Z   A 


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repondent,  parce  que  ces  vaifTeaux 
de  décharge  retrouvent  trop  pleins. 

Je  lai  ,  mon    cher  confrère  ,   & 
yous  ne  l'ignorez  pas  ,  qu'il  ya  eu  , 
f  qu  II  y  a  peut-être  encore  des  Phv- 
liciens  qui  nient  cette  dérivation  re- 
connue par  Hippocrate&  par  tous  les. 
Grands  -  Maîtres  dans  l'art  de  gué- 
rir i  démontrée  par  M^  Silva  *  &  par 
d  autres   Médecins   qui  ont  examiné 
avec  foin  l'effet  des  faignées  :  mais 
pour  faire  revenir  ces  Meffieurs  de  leur 
prévention  ,  il  fuffit  de  leur  faire  ob- 
lerver ,  qu'il  n'y  a  point  de  Médecin 
unpeu  verfédans  la  pratique,qui  vou- 
iut  faire  faigner  du  pié  dans  une  in^ 
Hammation  du  foie  ,  des  reins  ,  de  la 
veille,  de  l'itiems,  des  intellins,  ni  de 
quelque  partie  inférieure  que  fe  foit. 
yuelle  raifon  peut -on  apporter  de 

1.  ^^fl^"*?  '*  '^'^"'^  des  Saignées  par  M.  Silva     &• 
les  Réflexions  critiques  fur  ce  Traite'.  ' 


DE  St.   DOM  IN  G  V  E,       l  J| 

cette  conduite ,  fi  ce  n'eft,  qu'ils  crai- 
gnent d'augmenter  l'inflammation? 
Or  la  faignee  du  pié  ne  peut  faire  ce 
mauvais  effet  que  par  la  dérivation 
qu'elle  fait  fur  toutes  les  parties  qui 
reçoivent  leur  fang  de  l'aorte  infe- 

ricurc. 

Si  dans  le  cas  d'inflammation  de  ces 
.parties  ,  on  ne  doit  point  faire  de  fai- 
2nées  du  pié  ,  on  n'en  doit  donc  point 
faire   dans  l'état   d'une  grande  plé- 
nitude, wr        r 
Après  avoir  fuffifamment  deiempii 
les  vaifleaux  par  deux  ou  trois  faignées 
-du  bras ,  on  doit  alors  faigner  du  pie. 
:     Mais  il  faut  encore  beaucoup  de 
.prudence    pour  n'en  faire  qu'autant 
qu'elles  font  néceffaires  :  on  ne  doit 
pas  fuivre  l'exemple  de  quelques Pra- 
ticiens  qui  en  ordonnent  cinq  ou  lix 
tout  de  fuite^dans  la  vue,  difent-ils ,  de 
debarraffer  la  tête  prife ,  ou  d'en  pre- 
.y enir  l'embarras.  Mais  ces  Meffieurs  ne 


SSSS^ 


*y^p^wg*^ 


font  pas  réflexion  que  pendant  Ja  fai- 
gnee  du  pié,  les  artères  carotides  & 
ymebrales  portent  très-peu  de  fan? 
dans  la  tête ,  &  moins  pendant  une 
Jeconde  faignée   du  pié,  que  pen- 
dant la  première  ,  moins  pendant  la 
troifieme ,  que  la  féconde ,  &  ainfi  tou- 
jours en  diminuant  à  proportion  de  la 
plénitude  qui  fe  trouve  dans  le  corps. 
L.  elt  pour  cette  raifon  que  les  faignées 
àa  pie  font  très  -  falutaires  ,  quand 
elles  font  faites  avec  fage/Te  :  mais 
quand  elles  font  trop  multipliées ,  bien 
loin  qu'elles  foient  propres  à  dégao-er 
latete ,  ellesy  occafionnent  un  engor,. 
gement  mortel.  Et  en  voici  la  raifon: 
lorfque  les  artères  dont  nous  venons 
de  parler ,  ne  font  pas  alTez  pleines , 
elles  ne  peuvent  embrafler  la  colonne 
de  fang ,  m  le  poulTer  avec  la  force 
neceflaire  pour  faire  avancer  celui  qui 
Je  trouve  dans  les  capillaires  5  il  ne 
fait  plus  xiu',y.ramperj  il  y  féjourjQe^ 


wm 


D  E  £r.  iD  P  M  i:n  g  i;  e,     g  | 

ill  s'y  arrêce.  Dans  cet  état ,  c  eft  ind^ 
utilement  qu'on  tourmente  le  malade  , 
•par  des  émétiques  ou  autres  remèdes 
qui  tendent  à  fouetter  le  fang  5  toutes 
ces  drogues  ne  font  propres  alors  qu'à 
caufer  de  rérétifme  dans  les  vailTeaux , 
,&  par  conféquent  à  augmenter  le  mat, 
:ôc  à  faire  périr  plutôt  le  malade.       ^ 

Lors  donc  que  Ion  a  fait  quelques 
faignées  du  pié ,  fi  la  fièvre  continue 
fur  le  même  ton  ,  il  faut  revenir  au 
bras  i  ou  fi  la  tête  eft  prife  ou  mena- 
cée de  l'être ,  il  faut  faire  une  faignéa 
ou  deux  de  la  jugulaire  ,  qui  commui- 
•nément  guériflent  le  malade.  ' 

Si  lafievxe  eft  accompagnée  de  mou- 
•vemens  convulfifs  ,  de  treffaillemeiis 
vdans  les  tendons,  le  felfédatâf  à  ta 
idafe  de  huit  ,  dix  ,  ou  douze  grains 
:dans  un  verre  d'émulfion ,  &^  réitéré 
de  quatre  en  quatre  heures,  ou  de  fix 
:en  fix  heures  ,  rend  le  c^lMe  au  ma- 
lade i   &  contribue  ânfiniment  à  fâ 


i 


i6      Ma  l  a  d  i  e  s 

guérifoii.  S'ilfurvieiKuiiG;»^,  ou  fi 
le  malade  afioupi  en  eft  menacé  >  ce 
qui  eft  très  ordinaire  à  St.  Domingue  5 
il^  faut  avoir  recours  aux  emplâtres 
veficatoires  grandes  &  amples  bien 
chargées  de  cantharides ,  appliquées 
fur  la  nuque  ,  &  qui  occupent  les 
épaules:  on  eft  quelquefois  obligé  d'en 
appliquer^  encore  aux  mufcles  de  la 
partie  intérieure  des  cuiffes  ,& même 
aux  deux  gras  de  jambes. 

Il  arrive  quelquefois  qu'un  malade 
qui  a  befoin  d  être  purgé  tombe  dans 
le  Coma.  Alors ,  s'il  n'y  a  point  de 
contre-indication  ,  il  faut  avoir  re- 
cours a  l'émétique  en  forte  dofej  s'il 
n'agit  point,  ou  s'il  agit  trop  foible-- 
ment,  on  eft  obligé  de  donner,  pour 
hâter  fon  adion ,  un  lavement  avec 
la  décodion  d'un  ou  de  deux  gros  de 
tabac. 

Je  ne  me  fuis  trouvé  qu'une  feule 
fois  dans  ie  cas  de  traiter  une  fièvre 

maligne 


t 


V  E  St.  Do  m  in  g  ve.     ly 

maligne  de  cette  façon ,  le  malade 
guérit  contre  toute  efpérance ,  &  très- 
proitiptement.  Il  eft  bon  de  remar- 
quer que  je  fus  obligé  de  faire  mouil- 
ler continuellement  les  lèvres  ôc  le  nez 
du  malade  avec  du  vinaigre ,  &  même 
d*en  faire  fouvent  tomber  quelques 
gouttes  dans  les  yeux  ,  pour  Tempê- 
cher  de  retomber  dans  le  Coma,  jufqu'x 
ce  que  lemétique  eût  fait   fon  effet. 

Lelendemain  du  jour  qu'il  prit  rémé- 
rique  ,  il  parut  de  la  difpofition  à  re- 
tomber dans  le  même  état:  je  lui  fis 
prendre  dans  un  feul  verre  i'infufiotf 
dune  demi-once  deféné,  avec  deux 
onces  de  manne.  Il  guérît, 
t.  Quand  j'arrivai  à  St.  Domingue ,  je 
trouyai  les  Chirurgiens  dans  Tufage  de 
donner  1  emétique  ,  ou  le  Kermès  mi- 
liéral  dans  ces  fortes  de  fièvres  j  il  paf^ 
foit  même  pour  conilant,qu  on  ne  pou- 
voit  les  guérir  fans  ce  fecours.  Mon 
exemple,  dans  les  lieux  où  j  ai  fait  la 

B 


|§         ^  AL    A   p   î   M   ^      'X 

inedecine,  ôcles  leçons  que  j'ai  don- 
nées à  ceux  que  je  recevoisjes  ont  dé- 
trompés. Je  dis,  dans  les  lieux  où  j*ai 
pratiqué  la  médecine  3  car  on  m'a  af- 
luré    qu'au  Cap,   qui  eft  environ  à 
quatre-vingts  lieues  de  Léogane  ,  les 
Médecins  &  les  Chirurgiens   prodi- 
guent l'émétique.    Je  nefaipas  com- 
ment les  malades  s'en  trouvent  :  mais 
je  puis  vous  dire  ,  mon  cher  Confrère., 
fans  prétendre  en  tirer  vanité ,  que  j'ai 
exercé  ma    profeiGon  avec  quelque 
fuccès ,  &  que  dans  le  cours  de  onze 
années  ,  je  n'ai  donné  ce  remède  que 
trois  fois  :  au  malade  que  je  vkns  de 
citer 5  à  un  autre,  dans  une  maladie 
fînguliere  dont  j'aurai  l'honneur  de 
vous  parler  3  &  à  un  troifieme,dans  une 
maladie  ordinaire. 

Je  n'ai  jamais  non  plus  tourmenté 
mes  malades  ni  avec  le  Kermès,  ni 
avec  ces  brûlots  que  l'on  apppelle 
poûons  cordiales.    Il  eil  pourtant  de« . 


D E  St.  Doming\u e.    i ^ 

cas ,  mais  qui  font  très-rares,  oix  cos 
fortes  de  remèdes  peuvent  trouver 
leur  place  >  ce  font  ceux  de  l'atonie 
de  toutes  les  parties  folides  :  alors 
j'ai  donné  avec  fuccès  un  fcrupule 
d*antimoine  diaphorétique,avec  deux^,^ 
trois  ou  quatre  grains  de  camphre  dans 
une  cuillerée  de  tifanne. 

Vousfavez,  Monfieur,&  tous  les 
Médecins  le  favent,  ce  que  c'eft  qu'a- 
tonie. Ainfi,  ce  que  je  vais  en  dire 
n'eft  ni  pour  vous  ni  pour  eux  i  mais 
pour  ceux  qui  fans  fa  voir  la  Médecine 
pourront  avoir  la  curiofité  de  lire  ce 


m  moire^ 


L'Atonie  eft  une  foiblefTe  de  nerfs, 
des  artères  &  des  mufcles  qui  fervent  à 
faire  les  mouvemens  naturels  dépen- 
dans  ou  indépendans  de  la  volonté. 
L'homme  eft  une  machine  compofée 
de  canaux  de  difFérens  diametres,&  de 
liquides  de  natures  différentes ,  qui 
font  plus  ou  moins  épais.  Laviecon- 

B  ij 


M  A    LA    Vi    JE  >       -^ 

ftftedans  un  mouvement  de  dilata- 
tion ai  de  contra£bion  du  cœur  &  des 
artères,  qui  reçoivent  &:  pouffent  les 
liquides  dans  tous  les  canaux  du  corps  » 
&  qui  les  font  revenir  dans  la  cavité 
gauche  du  cœur ,  d'oix  ils  font  partis  : 
ceft  ce  qu'on  appelle  circulation.  La 
fanté  confifte  dans  une  parfaite  aifance 
de  cette  circulation  ,  dans  tous  les 
points  qui  compx)fent  les  parties  du 
corps. 

c  La  force  du  cœur,  des  artères  &  des 
rfiufcles  eft  donc  une  force  de  refforc 
qui  fouffre  d'être  dilaté  par  l'entrée  des 
liqueurs  ,  &  qui  les  oblige  à  fe  contrac- 
ter ou  reflerrer,  lorfqu'ils  ont  été  éten- 
dus autant  que  la  longueur  de  leurs 
fibres  a  pu  leur  permettre. 

Lorfque  ces  fibres  font  trop  lâches 
ou  pour  avoir  été  troplongtcms  dans 
une  tenfion  forcée ,  ou  pour  être  trop 
macérées,  pour  ainfi  dire,  par  l'hu- 
midité, ou  par  quelque  autre  caufe 


1 


DE  SVé   D(yMlNGVE.       il 

<jue  ce  foit,  elles  ne  peuvent  plus 
poufler  ces  liqueurs ,  &  la  machine 
périt  :  fi  elle  ne  les  pouffe  que  foi- 
blement  toute  la  machine  languit  : 
les  mouvemens  ne  s  exécutent  que 
foiblement  &  imparfaitement  i  voilà 
Fatonie  ou  défaut  de  reffbrt. 

On  parvient  fouvent  à  le  rétablir, 
en  diminuant  parles  faignées  le  vo- 
lume des  fluides  qui  oppofent  aux  fé- 
lidés une  réfiftance  qu'ils  ne  peuvent 
vaincre:  mais  il  arrive  auffi  quelque- 
fois que  le  reffbrt  manque  à  un  point, 
qu'il  ne  peut  pas  même  faire  fortir  le 
fang  par  Touverture  de  la  lancette , 
comme  dans  le  cas  fuivant. 

Une  Demoifelle  de  15  à  16  ans  {a) 
d'un  embonpoint  raifonnable,  après 
une  ou  deux  faignées  tomba  dans  un 
tel  état  d'atonie,  quelle  ne  pouvoit 
faire  le  moindre  mouvement  dans  fon 

(a)  Mademoifelle  de  Marcombe ,  nièce  de  Mr» 
Feron ,  Confeill^r  au  Confeil  Supérieur  de  Léogam^^ 

B  iij 


OtZ         M  Al  A  O   t   È  $ 

lit  fans  s'évanouir  :  le  pouls  étoîc  très- 

Eetit  &  très-lent,  la  peau  feche,  fans 
eaucoup  de  chaleur.  La  nature, 
qui  eft  le  guide  du  Médecin  (h) 
muette  &  fans  force  ,  ne  m'indiquoit 
point  le  choix  des  toniques  les  plus 
convenables.  La  faignée  étoit  impra- 
ticable :  lefangfautoitparrouverture 
de  la  lancette  ,  &  puis  il  n'en  couloic 
pas  une  goutte.  L'émétique  me  faifoic 
craindre  de  jetterla  malade  dans  une 
fyncope  mortelle  i  ou  dans  des  con- 
vulfions  dangereufes.  La  fecherefle  de 
la  peau  ne  permettoit  pas  d'efpérer  du 
fuccès  des  potions  cordiales.  Enfin, 
obfervateur  affidu  de  fon  état  &  de  fou 
poulsj  jem*apperçûs  que  la  peau  de- 
venoitun  peu  plus  fouple,  &  moins 
feche.  Sur  ce  léger  indice  ,  je  me  dé- 
terminai pour  Tantimoine  diaphoré- 
tique  &  le  camphre.  La  première  dofe 

(  b  )  hfaitura  ftimulata  f^  impulfa  artis  peritis  ^nid 
faciendumjit  demmjiraf»  Hippocrates. 


D E  St.  Domîng  ve.    5 ^ 

procura  un  peu  de  moiteur,  une  fé- 
conde ,  quatre  heures  après ,  donna 
une  fueur  abondante  ,  ôc  mit  la  ma* 
lade  hors  de  danger. 

Voilà ,  Monfieur  &  cher  Confrère , 
comment  j*ai  traité  les  fievresmalignes. 
Une  crème  de  riz  légère  ,  au  lieu  de 
bouillon  5  que  la  plupart  des  malades 
voniifTent,  faifoit  toute  leur  nourri- 
ture. De  Teau ,  de  la  tifanne ,  de  la 
limonade ,  du  lait  d*amande  étoit  leur 
boiflTon.Les  lavemens  d'eau  froide,  ou 
dégourdie  ,  tenoient  lieu  de  tous  ks 
ftimulans  que  Ton  a  coutume  de  don- 
ner pour  tenir  le  ventre  libre. 

J'ai  eu  l'honneur  de  vous  dire ,  ci- 
deffus ,  que  je  n  ai  vu  que  deux  ma- 
lades de  cette  fièvre  maligne ,  qu  on 
appelle  maladie  de  Siam.  Le  premier 
étoit  un  jeune  homme  de  dix-fejpt  ou 
dix-huit  ans  :  {c)  d'une  très-foible 
complexion.  Peu  de  tems  après  qu^il 

{e)  Le  jeune  Bertrand  de  Nemours  en  Gadnois» 

B  iy 


24        M  A   l  M   D   l  rE^Sl  T 

fut  arrivé  ,  la  fièvre  le  prit ,  mais  une^ 
fièvre  très-légere,&:  qui  n'avoit  aucune 
apparence  de  fièvre  maligne.  Je  le  fis 
faigner  une  fois  du  bras  le  même  jour. 
Le  lendemain  la  fièvre  continuoit  fans 
diminution  ni  augmentation  :  je  fis 
réitérer  la  faignée.  Le  troifieme  jour 
il  n'eut  point  de  fièvre  ,  &  ne  paroif-- 
foit  point  abattu.  Le  foir  il  avoit  faim , 
je  fis  mettre  une  tranche  de  pain  dans 
fon  bouillon  :  je  lui  permis  une  cuil- 
lerée de  vin  dans  un  verre  d*eau,  qu'il 
rue  demanda. 

Le  lendemain  matin,  je  le  trou- 
vai dans  une  agitation  extraordinaire, 
jettant  (qs  bras ,  fa  tête  .  tout  fon  corps 
ça  &  là  5  &  fes  draps  tout  noirs  d'une 
matière  qu'il  vomiflToit  :  le  pouls  étoit 
petit  &convulfifi  &  il  avoit  tous  les 
fignes  d'une  mort  prochaine.  J'ordon- 
nai qu'on  tînt  une  jatte  prête  pour  re- 
cevoir ce  qu'il  vomiroit  :  c'étoit  du 
fang  noir  comme  de  l'encre.  Il  mou- 


D  E- Sf.   Do  M  iNG  VE^      2  J 

rut  en  une  demi-heure  de  tems.  Le  fe-^ 
cond  étoit  un  Miffionnaire  Jacobin. 
On  vint  me  chercher  le  cinq  de  la  ma- 
ladie fur  le  foirj  il  étoit  en  délire  ôc 
urinoit  du  lang.  Je  le  trouvai  dans  un 
état  défefpéré  3  j'annonçai  la  mort,  qui 
arriva  la  nuit.  - 

J'ajouterai  ici  Thiftoire  de  deux 
fièvres  double-tierces  qui  fe  termine-- 
rent  bien  différemment. 

Deux  nouveaux  débarqués  vinrent 
loger  dans  la  même  auberge  3  l'un  étoit 
un  ivrogne  fieffé,  Tautre  fage  ôc  fort 
tempérant.  La  fièvre  les  prit  le  rnême 
jour.  Après  les  remèdes  ordinaires  , 
je  les  mis  au  quinquina.  La  longueur 
des  accès  diminuoit chaque  jours  de 
forte  qu'ayant  commencé  à  huit  heures 
du  matin  ,  elle  ne  revint  du  moins  à 
celui  qui  mourut  qu'à  trois  heures 
après  midi.  J'avois  caufé  avec  lui  plus 
d'une  heure  le  matin.  Il  alla  enfuite 
à  la  Ville  d'où  il  revint  à  midi.  A 


fi^     M  4  1  A  o  I  e  s^f 

cinq  heures  je  paflai  chez  lui ,  je  le 
trouvai  en  léthargie  d  oii  il  ne  me  fut 
pas  poffîble  de  le  tirer:,  il  mourut  à 
minuit  {d}^ 

^  Quelques  jours  avant,  Tivrogne 
etoit  tombé  dans  des  convulfions éton- 
nantes: une  fueur  froide  ,  fans  pouls , 
avec  une  évacuation  prodigieufe  d*un 
fang  noir  par  les  felles  ,  me  fît  juger 
^u'il  n'avoitplus  quequelques  heures 
a  vivre:  le  lendemain  matin  ,  je  le 
trouvai  parfaitement  guéri, 

Guillaume  Pifon  (e)  a  remarqué  que 
ces  fortes  d  évacuations  guériflent 
quelquefois  les  fièvres  aiguës:  mais  ce 
•netoit  point  une  fièvre  aiguë  ni  même 
commue.  Elles  font  encore  falutaires 
dans  les  gonflemens  de  la  rate  (/)  3  le 

(  i  )  J'ai  vu  mourir  un  homme  de  quarante  ans  ,  le 
leptieme  ou  le  huitième  accès  d'une  fièvre  tierce  après 
pix-fept  heures  d'interruption. 
_  (e)  De   Medicina  Braftlienft,    c.   14,   (  f  )  fj/^^. 

*:  Voyez  PAphorifme  213,   feaion  VI..  interprété 
par  M.  Hecquet.  '^ 


malade  n'étoit  pas  non  piu&  dans  C« 

C2LS» 

il  ne  feroit  peut-être  pas  bien  dif- 
ficile à  ceux  qui  vont  dans  lesîles ,  de 
fe  préferver  de  cette  dangereufe  mala- 

La  première  précaution  qu'il  tau* 
droit  prendre  ,  feroit»  avant  de  s^em- 
barquer ,  de  fe  faire  faigner ,  rafraîchir 
&  purger ,  fi  Ton  en  avoit  befoin  ,  & 
de  vivre  fobrement  avant  &  pendant 
le  voyage.  La  mer  donne  beaucoup 
d'appétit  5  on  mange  trop,  fi  l'on  n'y 
prend  garde ,  ôc  Ton  accumule  infen- 
fiblementdes  fucsqui  furchargent  le 
corps  ,  ôc  qui  ne  manquent  point  de 
produire  cette  fâcheufe  maladie. 

Lorfque  la  chaleur  du  climat  en 
augmentant  confidérablement  la 
tranfpiration  ,  en  excitant  même  des 
fueurs  continuelles ,  nelaiffe  plus  dans 
les  vaifleaux  que  des  liqueurs  épaifles, 
en  même  tems  qu  elle  diminue  le  ref- 


"à^-'ir- 


fort  des  parties  folidesj  l'équilibre  «î 
necefTaire  pour  la  faute  &  pour  la  vie 
€lt  bientôt  rompu.  Les  liqueurs  épaif- 
les  oppofent  plus  de  réfiftance  aux 
iorces  mouvantes,  que  celles  qui  le 
*°'î5™o'"!='  elies  circulent  donc  plus 
■difficilement.    Les  folides  font  plus 
d  effort  pour  les  poulTer ,  &  elles  avan- 
cent moins:  elles  gonflent  les  vaif- 
leaux ,  elles  forcent  leurs  diamètres  , 
îelles  entrent  dans  des  canaux  ,  qui 
dans  l'etar  de  fanté  ne  doivent  point 
les  admettre  j  elles  dilatent  les  artères 
capillaires  fanguines&  lymphatiques  i 
elles  y  forment  des  varices  5  elles  ou- 
-vrent  des  voies  aux  hémorrliagies  5  en 
un  mot ,  elles  renverfent  toute  l'œcor 
nomie  du  corps  humain,&  deviennent 
une  fource  de  maladies  mortelles ,  & 
principalement   des  fièvres  malignes. 
Ceci,  Monfieur,  eft  un  avis  que  je 
donne  a  ceux  qui  paiTent  d'un  climat 
•tempère  dans  un  fort  chaud.  J'ajoû- 


ferai  en  leur  faveur  que  la  caufe  im- 
médiate  des  fièvres   malignes  eft  uit 
engorgement  de  fang  dans  les  vifceres, 
&:  principalement  dans  le  cerveau:  c'eft; 
Ce  qu'on  appelle  proprement  difpofi-^ 
tion  inflammatoire  ,   iorfque  le  fangj 
rampe  difficilement  dans  ces  parties  5' 
ou  inflammation ,  Iorfque  fon  cours  efl: 
totalement  arrêté ,   foit  dans  fes  pro- 
pres vaiffeaux  feulement ,  ce  qui  eft- 
plus  rare,  foit  dans  lesvaiffeaux  lym- 
phatiques   ce  qui  eft  très-ordinaire  j 
foit  enfin  dans  les  uns  &  dans  les  au-^ 
très ,  ce  qui  arrive  dans  Tinflammatioiï 

éomplette. 

■  Un  autre  effet  de  rairchaud,c'eft  d'ê-^' 
treplus  léger,  ôc  de  comprimer moin^ 
toute  lafurface  du  corps.  La  force  de 
l'air  du  dedans  n  étant  plus  fuffifani- 
ment  contrebalancée  par  celle  de  Taiî^ 
extérieur,  Tair  intérieur  fe  raréfie  à  pro"- 
portion  que  la  compreffion  du  dehors^ 
éft  diminuée  :  il  occupe  plus  de  plaeè 


lil^ 


M  A 


t  A   D  1   B    S 


&  augmente  par  conféquent  le  volume 
des  liqueurs.Quand,dans  cette  difpofw 
tion  ,  il  fe  trouve  déjà  trop  de  fang 
dans  les  vailTeaux  ,  ou  faute  de  s'être 
fait  faigner,  ou  pour  avoir  pris  trop  de 
nourriture,  Us  défordres  dont  nous 
venons  de  parler  doivent  s'enfuivre 
néceffairement. 

Quand  même  ceux  qui  s'embarquent 
n'auroient  point  trop  de  fang,  quand 

même  ils  vivroientfobrement  pendant 
le  voyage,  &  après  leur  arrivée  5  par  la 

laifonderépaiffifTement  inévitable  des 
liqueurs ,  &  de  la  raréfadion  de  l'air 
qui  fe  trouve  dans  toutes  les  parties  du 
corps  mêlé  avec  le  fangj  ilfeferoit 
toujours  une  fauiTe  pléthore,  qu'il 
feroit  auffi  dangereux  de  lailler  lub- 
fifter,que  fi  réellement  la  quantité  du 
fang  &  des  autres  liqueurs  étolt  aug- 
mentée au-delà  de  celle  qui  peut 
fubfifter  avec  la  fanté  dans  l'air  tem- 
jéf  é  cle  France.  La  néceffité  de  fe  faire 


1 


D E  St.  Dom in Gvn.     1 1 

faignereft  donc  évidente  quand  oii 
habite  un  air  plus  chaud  que  celui 
qu'on  a  quitté.  Il  cft  donc  à  propos  , 
&  prefque  indifpenfable  de  le  faire 
ioriqu*on  approche  du  Tropique  :  il 
eft  néceffaire  par  la  même  railon  de 
réitérer  la  faignée ,  quand  on  eft  ar* 
rivé  dans  les  îles  :  &  là  on  doit  être 
encore  plus  fur  fes  gardes  contre  toute 
forte  d'intempérance. 

Mais  la  plupart  de  ceux  qui  vont 
dans  cç^s  climats  brûlans  ,  veulenc 
boire  ,  manger ,  veiller,  comme  s'ils 
étoient  en  France  :  ils  font  pis  encore  i 
ils  fe  plongent  dans  une  débauche^ 
horrible  y  dont  il  eft  d'autant  plus  dif- 
ficile de  fe  préferver  ,  que  les  occa- 
fions  en  font  toujours  préfentes. 

Je  crois  vous  avoir  dit ,  mon  cher 
Confrère ,  que  je  n'éprouvai  point 
cette  fièvre  maligne,  parce  que  je  me 
fis  faigner  avant  de  fortir  de  Paris ,  je 
me  fis  faigner  à  la  Rochelle,  à  la  Mar« 


î^ 


M  Al  A   D  1   E    S 


tiniqiie  oii  nous  mouillâmes  5  je  mè 
fis   faigner   deux    fois    ficot    que  je 
fus  arrivé  à  St,  Domingue  :  auffi ,  la 
première  année  je  n'eus  point  d'autre 
incommodité   que  celle  qui  m'avoit 
fait    quitter  Paris ,  je  veux    dire  des 
froids  de  tête,  qui  par  trois  reprifes 
me  donnèrent  la  fièvre  comme  j'avois 
coutume  de  lavoir  ici  :   depuis  j'en  ai 
été  quitte  :  je  ne  les  reffens  pas  même 
cet  hyver  ,  quoique  j'aie  la  tête  beau- 
coup moins  couverte  que  je  n'étois 
obligé  del'avoir,  &  que  je  me  faffe  râ- 
ler la  tête  régulièrement  tous  les  mois, 
ce  que  je  ne  pouvois  faire  dans  lafai- 
fon  la  plus  chaude  de  l'année. 
.La  faignée  feule  ne  fuffit  pas  tou- 
jours pour  remédier  aux  fuites  de  la 
plénitude   vraie  ou  fauffe  >  il  faut  y 
joindre  affez  fouvent   la  purgation  : 
mais  avant  de  fe purger,  il  faut  être 
affùré  du  bcfoin  que  l'on  en  a,  &  qu'on 
qA  dans  les  difpofitions  convenables 

pour 


DE  St.  DOMINGVE.        JJ 

pour  en  tirer  Tavantage  que  Ton  s*en 
promet» 

Il  eft  encore  un  autre  fecours  con- 
tre la  fauffe  pléthore  ,  c'efl-à-dire , 
contre  le  gonflement  du  fang  &  des 
autres  liquides.  Ce  font  les"  boiffons 
rafFraîchiflantes  :  telles  font  les  émul- 
fions  faites  avec  les  amandes ,  les  fe- 
mences  de  melon ,  de  concombre ,  drc. 
les  limonades  avec  le  limon,  le  citron, 
l'orange  fauvage ,  la  bigarade ,  les 
ananas  >  les  boilTons  aigrelettes  fai- 
tes avec  les  gelées  d'ozeille  de  Guinée, 
de  cerifes  3  les  oranges  douces  man- 
gées le  matin  à  jeun  ôc  au  delTert  après 
le  repas.  ' 

J'ai  dit  ci-defllis ,  Monfieur ,  que  les 
jeunes  Nègres  nouvellement  débar- 
qués étoientfujetsàune  maladie  que 
les  habitans  de  St.  Domingue  appellent 
mal  d'eftomac.  Ceft  un  epaiffiflement 
du  fang  qui  engorge  les  vaiflTeaux  des 
vifceres.    Cet  ^  épuifement   vient   do 

C 


■■■■ 


Î4 


M  A    L   A    D 


l    E    S 


la  nourriture  groffiere  qu'on  leur  a  don* 
née  dans  toute  la  traverfée,  car  ils  ne 
mangent  que  des  fèves  de  marais 
cuites  avec  du  Tel,  6c  peut-être  quel-* 
que  graifle. 

Lacuie  de  cette  maladie  confifte  en 
des  faignées  ^  des  purgations ,  de  l'ex- 
ercice y  6c  un  travail  modéré  avec 
une  nouriture  plus  convenable  :  il  en 
jpieurt  quelques-uns  après  avoir  lan- 
gui quelques  mois. 
-  Le  mal  de  mâchoire  >  ou  le  tétanos 
des  ^x\î^a%  eft  prefque  incurable.  Il  a 
diiFérentescaufes.La  plusordinaire  eft 
le  trop  de  feu  que  les  Négreffes  accou* 
chées  font  dans  leur  café  5  à  laquelle 
on  peut  ajouter  là  fumée  continuelle , 
^ar  elles  p'ont  point  de  cheminée.  Par 
la  chaleur  du  feu ,  les  enfans  font  fou- 
vent  en  fueur?  &  la  moindre  fraîcheur, 
foit  de  la  nuit  quand  le  feu  s'éteint , 
foitdumatinquandelles ouvrent  leurs 
portes )  ©u  quelles  portent  leurs  en* 


DE   St.  DOMING  VE.       ^  j* 

fans  dehors,  fait  impreflîon  fur  les 
nerfs  délicats  de  ces  jeunes  créatures. 
Le  mal  commence  par  les  mâchoires  : 
elles  deviennent  immobiles.  L'enfant 
ne  peut  plus  prendre  le  téton.  La  roi- 
deur  fe  communique  au  dos  ôc  aux 
cuiflTes,  La  circulation  eft  bientôt  ar-» 
rêtée  ,  ôc  l'enfant  périt.  Il  eft  aifé  de 
concevoir  que  la  fumée  peut  faire  le 
même  effet. 

-  Une  autre  caufe  fort  ordinaire  dé 
cette  maladie  font  les  paflîons  de 
la  mère,  &  la  manière  dont  elle  a 
vécu  dans  fa  grolTefle  :  les  enfans  des 
Négreffes  qui  font  colères,  qui  boivent 
beaucoup  d'eau-de-vie  de  canne  que 
l'on  appelle  tafia,  qui  mangent  beau- 
coup de  piment ,  font  plus  fujets  aux 
mal  de  mâchoire  que  ceux  des  mères 
plus  réglées. 

Il  fe  peut  faire  auffi  que  la  manière 
de  ferrer  le  cordon  ombilical  après 
l'amputation ,  y  ait  quelque  part  :  iorf- 

C  ij 


^6        Ma  i  a^d  I  e  s 

qui!  eft  ferré  outre  mefure ,  il  fait  de 
la  douleur  à  renfant ,  parce  que  le  fil 
coupe  ces  vaifleaux  >  &  cette  blellure 
peut  caiifer  le  Tétanos.  /»  tetuno  ex 
njulnere  Agerh^cpatitur  :  maxilla  con- 
gelant ur  ac  rigent  ^  os  operire  non  po^ 
tefi^àorfum  riget  é*-»  crurafieBere  nonpo^ 
tefi  [a). 

Il  y  a  aulïî  de  certaines  habitations  oii 
prefque  tous  les  enfans  meurent  du 
mal  de  mâchoire ,  ôc  d'autres  où  il$ 
en  font  rarement  attaqués. 

Pour  prévenir  ce  malheur  qui  caufe 
beaucoup  de  perte  aux  habitans  ,  il 
faudroit  envoyer  accoucher  les  Né- 
greffes  d^ns  les  habitations  où  les  en-» 
îans  font  moins  attaqués  du  tétanos. 
Si  cela  ne  fe  peut ,  il  faut  tâcher  d'é- 
loigner les  caufes  qui  peuvent  le  pro- 
duire. La  première  précaution  feroit 
d'avoir  une  café  de  maçonnerie  bien 

(  a  )  Htpp}craîes  di  intenih  AJeêïionibus» ., . .  dt 
âUbuiJHdituUrm  .,••••  Ltkrê  ds  ifiçrbh  jo* 


V E  St.  Do  min' gue.     § 7 

clofe  pour  faire  acoucher  les  Négref- 
fes3  ôcne  point  permettre  qu  elles  ayent 
du  feu.    Il  faudroit  qu'un  Chirurgien 
entendu,  montrât  auxNégrefles  accou- 
cheufes  la  manière  de  lier  le  cardon 
ombilical.  Pour  ce  qui  eft  d'empêcher 
les  Négrefles  de  fe  mettre  en  colère , 
de  boire  du  tafia ,  de  farcir  leurs  ra- 
goûts de  piment,  la  chofe  n  eft  pas  fa- 
cile.Lors  qu'une  NégrefTe  dont  les  en- 
fans  meurent  ordinairement  du  mal 
de  mâchoire  eft  accouchée ,  je  crois 
qu'il  faudroit  donner  à  l'enfant  dès  le 
premier  jour  un  ou  deux  grains  de  fél 
fédatif  dans  un  peu  de  lait  de  fa  nour- 
rice ,  &  reitérer  au  moins  quatre  fois 
dans  les  vingt-quatre  heures  :  peut- 
être  un  peu  d'eau  de  pavot  feroit  elle 
le  même  effet.  Si  malgré  ces  précau- 
tions on  voit  venir  le  mal ,  il  faut 
-augmenter  la  dofe  dufel  fédatif,  &  le 
donner  jufqu'à  quatre  grains. 
Je  n  ai  été  confulté  que  deux  foî^ 

C  iij 


58         M  A  l  A  D   l   Es 

pour  ces  enfans  déjà  attaqués  du  mal 
J'ordonnai  alun  trois  grains  de  Tel 
fédatif  de  quatre  en  quatre  heures 
dans  une  cuillerée  de  lait  de  la  nour- 
rice ,  Tenfant  reprit  le  téton,  on  le 
crut  fauve:  je  ne  fai  filon  continua 
comme  je  Favois  confeillé ,  mais  le 
tétanos  revint,  &  Tenfant mourut. 

Dans  une  autre  occafion,  jen'avois 
point  de  fel  fédatif  :  je  fis  donner  par 
intervalle  ,  ou  du  moins  j'ordonnai 
que  Ton  donnât  une  goutte  de  tein- 
ture anodyne  qui  ne  produifit  aucun 
bien  i  Tenfant  mourut. 

Quand  au  Tétanos  des  adultes, 
comme  cette  maladie  demande  un 
prompt  fecours ,  (a)  de  que  les  habita.- 
tions  font  éloignées  les  unes  des  au- 
tres ,  je  n'ai  pas  eu  occafion  d'en  voir 
beaucoup.  Les  Nègres  ont  coutume 
de  les  traiter  d'une  manière  affez  con- 

^  '  (  a  )  Efi  AHtem  morhis  grA-vis  en  fiatim  curattone  o^us 
haèet.  Hip.  de  internis  affe<flioni bus. 


1 


PB  5t,   Pp  min  GVE. 

forme  à  ce  qu'Hippocrate   ordonne. 
ta)   Ils   les  frottent  avec    de  1  huile 
chaude  ,  &   pendant  la  friaion  les 
membres  deviennent   fouples  ;  ^lais 
ils  fe  roidiflent  aufli-tôt  qu'on  cefle  de 
les  frotter.  Ceft  ce  que  j'ai  vu  amvçî 
à  unç^Mulâtre  ,  qui  avoir ,  me  dit-on , 
mangé   des  crables.    Je  foupçonnai 
qu'elles  étoient  mauvaifes  ,   cQmme 
font  ordinairement  celles  déterre  ,  ou 
qu'elles  n'étoientpas  affez  cuites.   Je 
la  euéris  avec  deux  prifes  d'orvietan. 
Après  que  ces  Nègres  ont  bien  trotte 
le  malade,  ils  le  couchent  parterre  , 
ôc  allument  du  feu  autour  de  lui  ;  lui 
donnent  des  breuvages  que  je  ne  coii- 
pois  point ,  (  car  ils  font  fort  jaloux  dç 
leur  fcience  );  avec  tout  cela  ils  çn 
guiriffent  peu. 

-  fa)  Huncffvere  ùftftet  é>  f«»^/«»  »»?'""  *' 
ignem  ,  ne»  iL  frcfe  ,  c»Ufrceu  ,  &c.  de  mterms 
affeftionibus. 

C  iv 


^.o       Ma  l  a  d  1  ES 

Le  véritable  moyen  de  les  guéri/; 
c'eft  de  les  faire  fuer  avec  de  bonne 
thériaque  dans  du  vin ,  à  laquelle  il 
faut  ajouter  quelques  gouttes  anody- 
nes.  Il  faut  les  faigner  quand  on  peut, 
&  leur  tenir  le  ventre  libre  par  des  la- 
vemens.   Il  me  fouvient  d'avoiiautre- 
fois  à  Paris  guéri  de  ce  mal ,  un  hom- 
ine  ,  dont  tout  le  corps  étoit  fi  roide 
qu  il  n'étoit  pas  poffible  de  le  faigner. 
Je  lui  fis  prendre ,  par  intervalles ,  de 
la  teinture  anodyne,  jufqua  ce  que 
fes  bras  devenus  fouples  puflent  per- 
mettre de  lui  tirer  du  fang.  J'en  ai 
guéri  quelques-uns  à  St.  Domingue  i 
iun  entre-autres  fi  fort   travaillé  de 
répifl:liotonos ,  que  je  fus  obligé  de  le 
lier  à  une  colonne. 

Une  autre  (c'étoit  une  jeune  Né-- 
greffe)  àquijedonnois  trois  fois  par 
four  de  la  teinture  anodyne.  En  auo-- 
mentant  toujours,  elle  enprit  jufqu^à 
i8  gouttes:  lorfque  la  maladie  céda. 


^ 


D  E  St.  D  om  in'G  ve.     4I 

je  diminuai  la  dofe  chaque  jour  ,  juf- 
qu  à  ce  qu  elle  fut  réduite  à  fix  gouttes. 

L  un  &  l'autre  de  ces  deux  malades 
furent  environ  dix-huit  ou  vingt  jours 
à  guérir. 

Je  vous  ai  parlé  autrefois ,  Monfieur, 
d  un  Tétanos  dans  lequel  une  cuille- 
rée d*eau  fit  un  effet  fmgulier  :  ôC 
vous  jugeâtes  que  ce  fait  méritoit  d'à-» 
voir  place  dansmesmémoires.Le  voici. 

Un  jeune  homme  à  qui  on  avoit 
fait  une  opération  (a)  à  caufe  d'un 
farcocele  (^),fe porta  fort  bien  les 
huit  premiers  jours  5  ôc  la  plaie  alloità 
merveille.  Le  neuf  il  fe  plaignit  d  une 
douleur  de  cou.  Peu  à  peu  le  mouve- 
ment des  mâchoires  diminua  au  point 
quilne  pouvoir  prefque  point  ouvrir > 
la  bouche,  ni  fléchir  les  jambes.  Le 
pouls  étoit  fort ,  égal  &:  point  dur.  Le 
treizième  jour  tous  les  fymptomes  de 

(  a  )  exclfus  fuerat  tefitculus, 

(  b  )  P r opter  gonorrhœam  maie  cmatamt 


451      Mal  a  d  i  é  s 

ropifthotonos  augmentèrent  confîdé- 
rablement.  De  tems  en  tems  il  jettoit 
de  grands  cris ,  &  il  tomba  de  fon  lit: 
tantôt  il  étoit  tourmenté  d'ifchurie 
tantôt  de  ftrangurie  :  cela  m'obligea 
de  tenter  le  bain.  Dès  que  fon  corps 
eut  touché  Teauv  tous  les  membres  (^) 
fe  roidirent  fubitement.  Dès  qu'on 
ieut  remis  dans  fon  lit ,  il  eut  de  vio- 
lentes convulfions,  avec  beaucoup 
d*écume  autour  de  la  bouche.  Le 
pouls  manqua  totalement ,  on  le  crut 
mort.  Peu  de  tems  après  je  fentis  une 
légère  pulfation  du  pouls  entre  le 
plis  du  bras  &  le  poignet.  Laconvul-» 
Son  reprit.  Je  lui  mis  une  cuillerée 
d'eau  dans  la  bouche ,  la  convulfion 
CefTai  la  préfence  d'efpritlui  revint  > 
fon  pouls  fe  rétablit ,  il  ouvrit  faci-» 
tement  la  bouche,  il  parla  librement, 
&  cracha  avec  autant  de  facilité,  que 
s'il  ne  lui  étoit  rien  arrivé  ,  ce  qu'il 

(  a  )  PcnU  i^fe. 


3Ë  St.  D  0  M  r  N  c  ue.    ^| 

n'avoit  pu  faire  depuis  quelques  jours. 
Cependant,  il  avoit  de  raverfionpour 
tout  liquide.  Un  délire  de  peu  de  du- 
rée reprenoit  de  tems  en  tems  :  tout 
cela  fe  pafToit  fur  les  fépt  heures^  dit 
foir.  Enfin  5  après  une  convulfion  d'en- 
viron deux  heures ,  il  mourut  entre 
quatre  &  cinq  du  matin. 

Il  y  a  de  Fapparence  que  le  Tétanos 
qui  furvint  neuf  jours  après  ropération, 
n'eut  pour  caufe  que  la  ligature  faite 
de  plufieurs  fils  cirés ,  qui  venant  à 
couper  le  cordon  firent  refFet  d'une 
blefiure. 

^  Si  cette  conjefture  a  quelque  fonde- 
ment ,  je  penfe  qu'en  pareil  cas  il  fau- 
droit  fe  fervir  d'un  ruban  de  fil  ou 
autre  matière  i  parce  qu'il  n'eft  quef- 
tion  que  de  prévenir  l'hémorrhagie,  & 
d'empêcher  le  fuc  nourricier  de  fe 
porter  au  delà  de  la  ligature:  or  la  feule 
•compreffion  fuiSt.  Je  voudrois  qu'on 
eût  la  même  attention  quand  on  cou-; 


M  Al  A 


D  1    E'S 


pe  le  cordon  ombilical  d  un  enfant  i 
peut-être    n'en  périroit-il    pas  un  fi 
grand  nombre  du  mal  de  mâchoire. 
.   J  ai  déjà  remarqué  ,  que  le  Dragon , 
ouleDragoneau  desPerfes,  appelle 
auffi  ve^a  medinenfis  eft  un  véritable 
ver ,  (  que  Ion  appelle  à  St.  Domingue, 
ver  de  Guinqe  ) ,  &  non  pas  une  lym- 
phe concrète  ,    comme  on  le  penfe 
communément  en  France,    {a,)  Il  eft 
rond,  d*un  rouge  pâleôc  tranfparent  , 
ftflez  femblable  aux  vers  de  terre  ap- 
pelles lomhrki  ^  mais  beaucoup  plus 
long. 

-  Je  ne  m'arêterai  point  à  prouver 
que  ce  ne  peut  être  une  lymphe  mou- 
lée &  durcie  :  qui  lui  donneroit  cette 
forme  ?  elle  ne  pourroit  l'avoir  acquife 
que  dans  les  vàilTeaux  fanguins  ou  lym- 
phatiques ,  fi  cela  étoit.  Comment  en 
fortiroit-elle  ?  Quelle  puifiance  mo- 
trice lui  feroit  percer  la  peau  ?  Corn- 

il*)  Voiez  la  Chirurgie  de  Monfïeur  Col  de  Vil- 
arls. 


1 


^•JËl 


vn  St.  D om ïngv -e.     4 f 

ment  fe  trouveroit-elle  fbuvent  en- 
tortillée autour  des  mufcles  ?  Les  rai-' 
fonnemens  font  inutiles,  quandilne 
faut  que  des  yeux  pour  en  juger.  Jeu 
ai  peut-être  vu  plus  de  cent  en  vie  : 
tous  les  Médecins  ,  tous  les  Chirur- 
giens 5  tous  les  habitans  en  voyent  tous 
les  jours.  Ceft  donc  un  fait  qu'on  ne 
peut  révoquer  en  doute. 

Ces  vers  font  engendrés  dans  le 
corps  par  les  raauvailes  eaux  que  les 
Neo-res  boivent  dans  quelques  endroits 
de  Guinée ,  &  dans  la  traverfée,quand 
les  Capitaines  Négriers  enont  faitleuî^ 
provifion  dans  ces  lieux-là. 

Un  ancien  Médecin  de  St.  Domina 
gue  nommé  de  Pas ,  a  vu  un  particu- 
lier à  la  Rochelle,quife  trouva  infedé 
d'un  de  ces  vers ,  pour  avoir  été  fou- 
vent  dans  le  navire  d'un  Négrier  de 
fes  amis ,  ôc  avoir  bu  de  Teau  qui  avoit 
été  apportée  de  Guinée. 

Quand  ce  ver  s'eft  fait  jour,  &:  qaon 


Mai  4  DIE  s 


peut  en  tirer  une  petite  partie  ,  on  la 
roule  fur  un  petit  bâton  ,  en  prenant 
bien  garde  de  le  calTer.  On  y  revient 
tous  les  jours,  &  on  en  roule  jufqu'à 
ce  qu  on  fente  trop  de  refiftance  >  ainfi 

dans  Tefpace  de  plufieurs  jours  on  le  tire 
tout  entier.  S^il  fe  caffe  ,  comme  cela 
arrive  aflez  fouvent ,  il  ne  faut  pas 
ouvrir  la  peau  pour  le  fuivre,6c  le  tirer 
tout  entier  ,    comme  quelques-uns  le 
confeillent  :    il  fuffit  d'appliquer  fur 
Tendroit  par  ou  il  a  commencé  à  for. 
tir  ,  quelques  plantes  émollientes  :  je 
ne  mefuisjamaisfervique  d'une  feuille 
d'opuntia    ou    raquette    coupée    en 
lames  épaifles  d'un  doigt,  ôcpalTée  fur 
la  flamme  pour  la  ramollir.  Le  ver  ref* 
fort  par  la  même  ouverture  ,  où  bien 
il  fe  fait  jour  par  un  autre  endroit  ^ 
fouvent  afTez  éloigné  du  premier.  Je 
n*ai  jamais  vu  arriver  aucun  de  ces  ac- 
cidens  qu'en  veulent  faire  craindrç 
ceux     qui    confeillent    l'ouverture. 


VE  St.  DoMingve.    ^f 

(  a)  J'ai  vu  à  une  Négrefle  dé  Monfieur 
de  Larnage  notre  Général ,  un  petit 
trou  dans  le  grand  angle  d'un  œil,  que 
je  prislongtemspour  unefiftule  lachry- 
male ,  car  il  en  fortoit  de  l'eau  ôc  quel- 
quefois un  peu  de  pus.  Ayant  été 
obligé  de  faire  un  voyage  aflez  longs 
à  mon  retour,  je  demandai  des  nou- 
velles de  la  Négrefle:  l'Hofpitaliere 
me  dit,  qu'il  étoitforti  parla  joue  du 
même  côté,  un  ver  de  Guinée,  je 
vis  la  prétendue  fiftule  parfaitement 

guérie. 

Les  Nègres  n'ont  pas  fouveiit  poul: 
un  feul  ver.  Il  y  en  a  quelques-uns 
qui  en  ont  un  grand  nombre ,  qui 
avec  le  tems  fortent  tous.  Je  n'ai  jamais 
donné  de  purgatifs  ni  de  vermifuges. 
Je  penfe  qu'il  feroit  dangereux  de  les 
faire  mourir  >  il  vaut  infiniment  mieux 
leur  donner  le  tems  defortir. 

{  0)  Minguet  dont  nous  parlerons  dans  la  fuite ,  dit 
qve  le  fuc  de  Ja  fauge  mis  dans  k  trou  d'un  ver  die 
Guinée  le  fait  fortir. 


Une  me  refteplus,  Monfieur,  qu'à 
vous  entretenir  des  maladies  commu- 
nes aux  Blancs  &  aux  Nègres,  oii  de  la 
maladie  vénérienne. 

Il  n'y  a  peut-être  point  de  pays  ou  la 
maladie  vénérienne  foit  Ç\  commune 
que  dans  ces  îles.  Tous  les  Efclaves 
mâles5c  femellesFapportent  deGuinée, 
lesenfansqui  en  naiflent  infedés  par 
conféquent ,  en  engendrent  d'autres 
encore  plus  viciés  qu'eux. 

Il  y  a  très-peu  de  Blancs  qui  n'^ayent 
commerce  avec  ces  :  NégrelTes ,  &  ce 
feroit  grand  miracle  qu'elles  ne  leur 
communicaflent  point  leurs  mal.  Les 
maris  en  font  préfent  à  leurs  femmes  > 
malt  corvi ,  mdum  ovum.  Les  mifé- 
.rables  enfans  qui  en  viennent  portent 
les  péchés  de  leurs  pères.  Ceux  même 
dont  les  parens  font  fages  ne  font  guère 
exempts  du  malheur  commun ,  parce 
qu'on  ne  leur  donne  jamais  pour  nour- 
rices que  de  m,ifér,ables  Négreffes. 
M  Peut- 


^ 


M"^ 


DE  St.  Dt)MrN^uE.     45 

Peut-être  c^uelqu'un  penferâ-t*il  qu  oii 
pouvoit  guérir  ces  créatures  avant  de 
leur  donner  des  enfans  à  nourrir.  Mais 
quel  tems  prendroit-on  pour  les  net- 
toyer? Seroit-ce  avant  qu  elles  accou- 
chent? Cela  fepourroit  faire  abfolu- 
ment  :  j'ai  traité  fans  aucun  danger  de 
ces  femmesgrolTes  par  la  fumigation  ^ 
qui  font  accouchées  heureufement  à 
terme.  Mais  s'il  y  a  un  intervalle  entré 
raccouchement,  &  le  tems  qu'on  leur 
donnera  l'enfant ,  qui  pourra  répondre 
de  leur  fagefle  ?  &   quand  elles  /bX 
roient  fages  pendant  ce  tems,  le  fe-i 
ront-elles  pendant  tout  le  tems  qu'el- 
les nourriront?  Cela  n'eftprefque pas 
poffible:  il  n'y  auroit  qu'un  moyen  de 
préferver  ces  innocentes  vidimes  delà 
corruption  générale  :  ce  feroit  de  les 
faire  nourrir  par  des  chèvres.  J'ai  donné 
ce  confeil  à  tout  le  monde,  perfonne 
ne  l'afuivi:  on  eft  fi  fort  familiarifé  - 
avec  cette  infâme  maladie,  qu'ili^itw 

D 


TO         M  d   t   A   D    l   S    S 

ble  qu'on   ne  la  craigne  point. 

Elle  produit  des  effets  différens  dans 
lesBlancs  &  dans  les  Nègres.   Ceux-ci 
font  ordinairement  remplis  de  pullu- 
les ,  (  que  l'on  appelle  des  pims  )  5  parce 
qu'ils  ont  la  peau  plus  dure ,  &  qu'ils 
font  expofés  aux  fraîcheurs  du  matin 
&  du  foir,  &  à  la  plus  grande  ardeur 
du  Soleil.  LesBlancs  ont  rarement  des 
pians  ,  par  la  raifon  contraire. 
.    Comme  le  premier  effet  de  la  mala- 
die vénérienne  eft  d'épaiffir  toutes  les 
liqueursi  la  tranfpiration  doitfe  faire 
plus  difficilement  êc  moins  abondam- 
ment: plus  difficilement,  parce  qu'il 
faut  une  plus  grande  force  pour  pouf- 
fer &  faire  circuler  des  liqueurs  épaif- 
fes  que  des  fluides.  Le  cœur  &  les  ar- 
tères n'ont  de  force  que  pour  poufler 
une  certaine  quantité  de  liquides  tels 
qu'ils  doivent  être  dans  l'état  naturel. 
Lorfque  cette  proportion  ne  fe  trouve 
plus ,  foit  par  l'excès  de  la  quantité» 


^â^vU 


D  E   Sf^    Do  M  î  NGUE.       CJ 

foit  par  celui  de  répaifleur ,  il  aborde 
moins  de  ces  fucs  dans  les  vaiffeau^ 
qui  doivent  les  tranfmettre  hors  du 
corps.  Si  déplus  le  diamètre  de  ces 
vaijQTeaux  eft  diminué,  ce  qui  arrive 
néceflairement  dans  une  peau  durej 
s'ils  prêtent  moins  ,  comme  cela  doit 
être  encore  parlamêmeraifon  ,  il  eft 
évident  qu'il  fe  ferat  beaucoup  moins 
de  diffipation  par  cette  Voie  qu'il  ne 
s'en  fait  dans  l'état  naturel.  Les  fucs 
les  plus  groflîers  qui  ne  pourront  être 
chaires  dehors ,  feront  arrêtés  vers 
l'extrémité  de  ces  vaifleaux  exctétoi* 
res  :  ils  s'y  accumuleront ,  ai  formeroiit 
ces  pullules  ou  gales  véroliques,  qui  fe-* 
ront  plus  ou  moins  grofles ,  fuivaiiè 
qu^un  plus  grand  nombre  de  puftulei 
fe  joindront  enfemble ,  c'eft-à-dire  > 
que  plufieurs  tuyaux  Voifins  les  uns  deû 
autres  fe  trouveront  engorgés. 

C^s  pullules  dégénéreront  en  ulcé-' 
res,  fila  force  qui  pouffe  la  matierô 

Dij 


ji         Ma  t  a  d  i  e  $ 

dont  iellés  font  compofées  ,  eft  aflèz 
grande  pour  déchirer  rextrémité  des 
vaifleaux  excrétoires ,  la  peau  &  Té- 
piderme  :  fi  elle  eft  trop  foible  pour 
produire  cet  eflfet,  les  ptiftules  refte- 
ront  couvertes  de  leur  peau. 

En  effet ,  les  Nègres  ont  de  deux 
fortes  de  pians  ou  de  puftules  :  les  uns 
font  ulcérés ,  d'où  il  fort  une  farine 
jaunâtre ,  ou  font  fimplement  couverts 
d'une  efpece  de  croûte  de  même  cou* 
leur  >  d*autres  ne  font  point  ulcérés. 

Les  Nègres  font  encore  alfez  fujets 
à  de  grolles  gales  ,  que  Ton  appelle 
gale  de  Guinée.  Elle  eft  facile  à  dif- 
tingucr  des  pians.  Ceux-ci  font  durs , 
calleux  ,  circulaires ,  foit  qu  ils  foient 
couverts  de  leur  peau  ou  non  3  les 
gales  font  plus  molles,  plus  élevées  , 
d*une  figure  moins  régulièrement  ron- 
de, &  rendent  un  pus  plus  épais  &  eix 
plus  grande  quantité,  &  font  moins 
jaunes ,  &  moins  larges. 


jD  E  St.  Do  min  g  us.     j^f 

La  vérole  invétérée  qui  a  paffe ,  de 
génération  en  génération ,  des  parens 
aux  enfans,  dégénère  aflTez  fouvent  en 
écrouelles  ou  en  lèpre. 

J*ai  remarqué  quatre  efpeces  de  lè- 
pre. L'une  qu'on  pourroit  appeller 
ulcérée  ,  parce  que  le  corps  eft  tout 
couvert  d'ulcères  qui  répandent  au 
loin  une  puanteur  infupportable. 

Une  féconde  qui  défigure  par  une 
infinité  de  tumeurs  dures  fur  le  vifage , 
fur  les  mains ,  les  bras  ,  les  jambes,  les 
pieds ,  6c  généralement  fur  toute  l'ha- 
bitude du  corps  5  moins  fur  les  join- 
tures que  fur  les  mufcles. 

Une  troifieme  qui  rend  la  peau 
écailleufc  ,  principalement  celle  des 
jambes.  Les  Grecs  ont  appelle  cette 
troifieme  cfpecc  elephantiajis  ^  àcaufe 
de  la  reflTemblance  de  la  peau  avec 
celle  des  Eléphans. 

La  première  &  la  féconde  efpece 
font  quelquefois  acccompagnées   de 

D  iij 


M  A^  h  4  D  I  M  S 

€orne3  au  front ,  ce  qui  les  a  fait  nom- 
m^t  fatirujls. 

Il  y  en  aune  quatrième  efpece  plus 
difficile  à  connoître  dans  fon  com- 
mencement 5  que  les  autres  efpeces. 
Elle  ne  fe  manifefte  quelquefois  que 
parla  rougeur  de  la  conjondive ,  fur- 
tout  de  la  partie  qui  tapifie  ia  paupiiT 
re ,  par  répaiffeur  5  la  dureté  ,  la  rou- 
geur de  Toreille  externe  avec  un  grand 
inal  de  tête,  ôclacbûte  des  cils 6c  des 
paupières.  Dans  la  fuite  la  peau  des 
Nègres  devient  de  couleur  de  feuil-- 
le  morte  dans  plufieurs  parties ,  & 
quelquefois  de  tout  un  coté  du  corps, 
pendant  que  l'autre  refte  noire:  enfuite 
les  majins.  fe  fermtent  de  manière  que 
le  i^alade  ne  peut  les  ouvrir  :  quelques 
ph,alan;ge5  des  doigts  des  mains  §c  des 
pies,  fe  coupent  &  tombent. 

Les  blancs  font  bien  moins  fujets  4 
ces  fort03  de  produdions  de  la  vé- 
lole^.q^je  les  Nègres.,  furtout  à  la 


V  E  Sx*   D  OMI  NGU  E.     jj  J 

lèpre  {a)  :  chez  eux  les  fuites  ordi-* 
naires  de  cette  maladie  font  dcsf 
obftrudionsde  la  rate,  du  foie,  des 
hydropifies  ou  des  diarrhées  opiniâ- 
tres &  mortelles. 

Il  y  a  plus  de  deux  cens  ans  (^)  que  la 
maladie  vénérienne  infede  toute TEu-^ 
rope^ôc  c  eft  un  fait  conftant,que  fi  elle 
n'étoit  pas  inconnuq  avant  ce  tems  y 
elle  n  étoit  pas  à  beaucoup  près  fi  com- 
mune ,  ôcque  depuis  elle  a  été  accom-^ 
pagnée  de  fymptomes  qui  annoncent 
plus  manifeftement  fa  préfence  &  fom 
origine.  Ne  feroit~ce  point  parce  que 
cette  maladie  communiquée  aux  Ef- 
pagnols  par  les  femmes  fauvages  de  St. 
Domingue ,  avoit  des  degrés  de  ma- 
lignité que  n'avoit  point  celle   que 
Ton    voyoit  quelquefois  en  Europe  ï 

{a)  Je  n*ai  point  vu  de  François  lépreux  >  j^HîTai 
vu  c^u*un  Efpagnol. 

{b)  Sur  la  fin  du  q^uînzieme  ftecle. 

D  ir 


i 


Ceqiiieft  certain,  ceft  qufe  depuis,' 
portée  par  les  Efpagnols  dans  leRoyaii- 
inede  Naples ,  d  ou  elle  s'eftcommu- 
aiquée  aux  François  &  aux  autres  na- 
tions, on  Ta  vue  fe  multiplier  prodi- 
gieufement,  &  par  des  fign es  incon- 
nus jufqualors,  qui  lui  ont  fait  don- 
ner le  nom  de  mal  de  Naples  ,  enfuite 
celui  de  maladie  vénérienne,  terme 
qui  défigne  plus  clairement  &  fa  caufe , 
&  la  manière  de  fa  propagation. 

Au  refte ,  Monfieur ,  je  ne  prétends 
pas  décider  fi  cette  maladie  eft  nou- 
velle, ni  fi  elle  eft  abfolument  difFé- 
rentedela  lèpre.  Peut-être  pourroit- 
on  foupçonner  que  la  lèpre  n'a  cefle 
en  Europe  depuis  qu'on  a  trouvé  le 
moyen  de  guérir  la  vérole  ^  que  parce 
qu'on  n'a  pas  donné  letems  a  celle- 
ci  de  palfer  de  génération  en  généra- 
tion y  &  que  la  première ,  par  confé- 
quent  a  été  étoujETée  dans  fon  bercçau. 
Quoi  qu'il  en  foit,  cette  difcuffion  n'eft 


iiMÉiMii 


D  JE  S¥^    D& MI  AT  G  17  E.      ^f 

point  de  mon  fujet  :  (i  quelqu'un  ignore 
ces  queftions ,  il  peut  confuiter  le  fa- 
vant  ouvrage  de  Mr.  Aftruc,  de  Morhis 
venereis  y  qui  eft  auffi  traduit  en  Frao- 
çois.Il  pourroit  être  vrai  que  toute  forte 
de  lèpre  n'eft  point  une  fuite  de  la, 
vérole  ,  comme  il  eft  certain  que 
les  obftrudions  de  la  rate  6c  du  foie  , 
les  hydropifies ôcles  diarrhées  fréquen- 
tes à  St.  Domingue  ,  n'en  font  pas  tou- 
tes non-plus. 

Ce  qui  me  paroît  inconteftable ,  c'eft 
que  la  lèpre  auffi-bien  que  les  écrouel- 
les  que  j*ai  vues  &  guéries  dans  le  pays 
étoient  une  vérole  dégénérée.  Voici 
mes  preuves  :  je  lésai  guéries  avec  les 
mêmes  remèdes  ,  &  de  la  même  ma- 
nière que  la  vérole  :  concluez  )  Mon- 
fieur,  A  la  vérité  je  me  fuis  fervi  de  U 
fumigation,  &  j'ai  lieu  de  croire ,  (ôc 
j'en  donnerai  des  preuves)  que  les 
jfridions  merçurielles  ne  conviennent 
point  dans  ces  maladies^  comme  M*^* 
Aftruc  l'a  remarqué. 


58 


Ma  l  a  jf  i  ES 


!!!'■ 


Il  y  a  deux  méthodes  également 
fûres  pour  guérir  la  vérole  récente  > 
qui  n'a  pas  fait  encore  de  grands  pro- 
grès ,  c'eft-à-dire  ,  quin*a  produit  ni 
exoftofes,  ni  auKy lofes  (4t)  ni  ulcères 
avec  déperdition  confidérable  de  fubf- 
tance ,  ni  de  carie  aux  aux  os.  Ces  deux 
méthodes  font  la  fumigation  &  la 
fridion  :  mais  quand  cette  maladie 
eft  accompagnée  des  fymptomesci-def- 
fus  ,  les  fridions ne  fujffifent  pas,  il 
faut  néceflairement  avoir  recours  à  la 
fumigation.  Cette  vérité  eft  non-feu- 
lement certaine  par  un  grand  nombre 
d'expériences  que  j'ai  faites  pendant 
onze  ans  ,  mais  encore  par  le  témoi- 
gnage d'un  grand  nombre  deMedecins 
cités  par  Monfîeur  Aftruc ,  qui  ordon- 
nent la  fumigation  quand  la  fridion 

(a)  L*exoftofe  eft  un  os  groffi  contre  nature» 
L'Ankylofe  eft  un  engorgement  de  la  lymphe  dans 
les  articulations  des  membres  qui  leur  ôte  le  mouve- 
ment de  flexion. 


m 


DE  St.  Dcminçv^.    fg^) 

§cles  autres  remèdes  n'ont  pas  reuffi  (4). 

Pourquoi  >  dira  quelqu'un ,  ces  Mé- 
decins ne  confeiUoient-ils  pas  la  fumi- 
gation dans  tous  les  cas  par  préférence 
aux  friftions  ?  Eft-il  de  la  fagefle  d'un 
Médecin  de  faire  paffer  un  malade  par 
des  remèdes  dangereux,  ou  du  moins 
très-laborieux  ,  dans  l'incertitude  s'il 
guérira  ,  pour  revenir  enfuite  à  un 
autre  que  le  malade,  afFoibli ,  exténue, 
anéanti ,  s'il  n'eft  pas  arrivé  pis ,  ne 
pourra  peut-être  pas  fupporter } 

La  queftion  n'eft  pas  difScile  à  ré- 
foudre. La  fumigation  telle  qu'on  la 
pratiquoit  autrefois ,  étoit  encore  plus 
dangereufe  que  les  friâions.  On  em- 
ployoit  pour  cette  opération  non-fevi-^^ 
lement  des  gommes  &  des  refines  { ^  ) 
mêlées  avec  le  mercure  ,  dont  le  ma- 
lade avoir  de  la  peine  à  fupporter  la 
fumée,  ai>  y  ajoûtoit  même  de  véri- 

(a)  De 'Morèîs    Fenereis ,  L  II.  r.  viij.  Ô» 
faffim, 

(b)  Uid. 


■■ 


\f* 


60      Mal  a  d  i  ehst^^ 

tables  poifons  {a)i  &c  quoique  les  ma- 
lades eufTent  la  tête  hors  du  pavillon , 
ilscouroient  rifque  d*être  empoifon- 
lîés.  Les  Médecins  jugeoient  donc  fa« 
gement  qu  il  étoit  à  propos  d  employer 
d'abord  le  remède  qui  faifoit  courir 
moins  de  rifques  aux  malades ,  avant 
de  paflTer  à  un  autre  qui  pouvoit  avoir 
des  fuites  encore  plus  fâcheufes ,  mais 
dont  leur  prudence  pouvoit  quelque- 
fois garantir  :  &  ce  parti  étoit  préfé- 
rable à  celui  d^abandonner  cts  mal- 
heureux à  des  maux  qui  les  auroient 
fait  périr  infailliblement  dans  des  fouf- 
frances  intolérables  (^). 

Quand  je  dis  que  les  friftions  mer- 
curielles  font  auffi  fûres  que  la  fumi- 
gation pour  guérir  les  véroles  récentes,, 
j'entens  les  friftions  par  extin6Hon^  c*eft- 
à-dire  faites,  non  par  intervalles. 
Comme    prétendent   quelques-uns  j 

(a)  Ih'tà, 
(  b  )   lùUfm 


ÉMta 


DE  St.  D  ominùv e.    6t 

mais  réitérées  tous  les  jours  ,  autant 
qu'on  le  peut,  avec  une  petite  portion 
d  onguent  5  en  évitant  foigneufement 
la  falivation. 

On  a  cru  longtems ,  &  il  y  a  peut- 
être  encore  quelques  Médecins  dans 
cette  erreur ,  qu'il  falloit  abfolument 
faire  faliver  les  malades  pour  les  gué- 
rir. Les  uns  vouloient  que  la  quantité 
de  la  falive  montât  jufqu  a  fix  livres 
^ans  les  vingt-quatre  heures  :  il  n'y  a 
pas  encore  longtems  que  les  plus  mo- 
dérés en  demandoient  au  moins  deux 
ou  trois  livres  dans  le  mêmeefpace  de 
tems.  Quelques  autres  en  petit  nom- 
bre, reconnoifloient  les  dangers  delà 
falivation:  mais  ils  ordonnoient pour 
chaque  friftion  une  telle  quantité 
d  onguent  quelle  produifoit  toujours 
la  falivation ,  ôc  ils  croyoient  mettre  le 
malade  bien  en  fureté  en  la  fuprimant 
par  des  purgatifs,  quand  elle  étoic 
furvenue.  Après  la  purgation  ils  fai- 


et       Maladies 

foient  frotter  de  nouveau,  le  flux  de 
bouche  reprenoit  5  ils  purgeoient ,  6c 
continuoient  ainfi  à  plufieurs  reprifes» 

Il  eft  furprenant  que  ces  Médecins 
n'ayentpasfenti  qu'ils  bâtiffoient  d'une 
main  &  détruifoient  de  l'autre.  A  la 
vérité  cette  manière  de  traiter  les  ma- 
lades 5  qu'ils  appelloient  par  ^x^/^ff/W, 
lespréfervoît  communément  desdan^ 
gers  du  flux  de  bouche  :  mais  outre 
qu'elle  fait  pailer  par  les  Telles ,  le  mer- 
cure  qu'on  introduit  parla  peau;  fup- 
pofé  qu'elle  puifle  guérir,  elle  ruine 
la  fanté  bc  le  tempérament  des  ma* 
iades  par  ces  fréquens  purgatifs. 

Heureufement  aujourd'hui  à  l'ex- 
ception des  Chirurgiens ,  prefque  tout 
le  monde  eft  revenu  de  lanéceffité  de 
iâ  fali vation  abondante  5  ôt  la  méthode 
de  Textinclion  telle  que  nous  venons  de 
la  repréfenter,  ne  trouve  plus  que  uès^ 
peu  de  défenfeurs  parmi  les  Mede-^ 
cins. 


1 


DE  St.  Domi]^cve.     £^ 

Il  y  a  quatre  ou  cinq  ans  que  je  lus 
Touvrage  d'un  Médecin  de  Montpel- 
lier qui  m'apprit  que  tous  lesMedecins 
de  cette  iiluftre  &favante  faculté  ëvi- 
toient  avec  grand  foin  de  donner  la 
falivation  5  j*avois  déjà  traité  6c  fait 
traiter  de  cette  manière  par  les  Chi- 
rurgiens, un  bon  nombre  de  malades, 
même  un  enfant  d'un  an,  qui  tous 
âvoient  été  heureufement  guéris ,  fans 
aucune  incommodité. 

Pour  peu  qu'on  réfléchiffe  fur  la  na- 
ture de  cette  maladie,  &  fur  la  ma- 
nière dont  elle  eft  guérie  par  le  mer^ 
cure  5  on  conviendra  facilement  avec 
moi  que  la  falivation  eft  non-feuk*- 
ment  inutile  pour  parvenir  à  fa  gué- 
rifon  ,  mais  encore  qu'elle  s'y  oppofe , 
&  qu'elle  eft  un  inconvénient  du  re- 
mède. 

L'effet  du  virus  vénérien  eft  d'épaif- 
fir  le  fang  6c  la  lymphe  t  c'eft  à  cette 
qualité  de  ces  humcuris, que  Ton  doit 


M  A   L    A    D   1   ES      - 

attribuer  les  exoftofes,  les  anKylofes  , 
les  ulcères,  la  carie  des  os  ôc  tous  les 
autres  fymptomes.  Cette  lymphe  trop 
épaifle  s'arrête  &  fe  coagule  dans  les 
articulations,  fource  des  AnKylofes: 
elle  s'arrête  pareillement  &:  s'accumule 
dans  les  tuyaux  étroits  des  os  3  de-là 
les  exoftofes  :  elle  croupit  dans  les  ca- 
naux capillaires  du  périofte ,  s'y  aigrir, 
s'y  corrompra  ronge  les  os,  voilà  la 
carie.  Le  fang  trop  épais  ne  peut  par- 
courir les  artères  capillaires,  il  les  gon- 
fle &  les  déchire  3  il  s'y  fait  des  con- 
geftions.  Eft  il  une  caufe  plus  natu- 
relle des  ulcères  ? 

^  Le  mercure  par  (es  parties  infiniment 
divifibles  &  mobiles  pénètre ,  defunit, 
fépare  les  globules  drt  fang  &  de  la 
lymphe,  dont  plufieurs  réunis  ne  fai- 
foient  plus  qu'uni  il  rend  à  ces  liquides 
bourbeux  leur  fluidité  naturelle,  ôc 
rétablit  ainfi  toute  l'œconomie  de  la 
machine.  P^ur produire  cçt  effet,  il 

faut 


D  E   St.   DOMINGU  E.     6$ 

faut  qu'il  roule  longtems  dans  le  corps^ 
il  ne  faut  donc  pas  Ten  chaffer  par 
des  purgatifs  :  il  ne  faut  donc  pas  le 
lailTer  s'échapper  par  les  glandes  fali* 
vaires.  Quand  il  furvient  un  •dévoie-» 
ment  aux  malades  que  Ton  traite, 
tout  le  monde  convient  qu'il  faut  Tar- 
rêter  5  parce  qu  une  partie  du  mercure 
s*en  va  par  les  felles  ,  que  cette 
évacuation  afFoiblit  les  malades,  ôc 
les  met  hors  d'état  de  recevoir  denou- 
veau  mercure.  Le  mercure  pajûTe  avec 
lafalive ,  c'eft  un  fait  certain  y  la  fa- 
livation  affoiblit  le  malade  ,&  le  ré- 
duit fouvent  dans  un  état  affreux  >  il 
faut  donc  l'éviter. 

Un  autre  fait  confiant ,  prouve  que 
la  falivation  n*eft  point  néceffairepour 
guérir.  Il  y  a  de  certains  malades  aux- 
quels on  ne  peut  procurer  le  flux  de 
bouche  5  quelque  quantité  d'onguent 
que  Ton  employé  pour  y  parvenir  :  ce-» 
pendant  tous  les  Praticiens  conviens- 

E  * 


■Mil 


~N. 


A    L   A    Û    I    ES 


:i  î-i 


nent  que  ces  malades  font  guéris  après 
avoir  ireçu  fept  ou  huit  fridions.  En 
faut-il  d'avantage  poUr  prouver  Tinu- 
tilité  de  cette  évacuation  ? 
"    On  s'imaginera  peut-être    que   la 
falive  épaiffe ,  gluante ,  fœtide  ,  puru- 
lente n'eft  telle  que  parce  qu'elle  eft 
chargée  du  virus  véroliquei  qu'il  faut 
par  conféquent  le  faire  fortir  par  cette 
voie  :  car  comment  guérir  une  mala- 
die ,  dira-t'on  ,  fans  en  faire  fortir  U 
caufe  par  quelqu'un  des  émoncloires  > 
Idées  faufles  5  raifohnemens  pitoyables. 
La  mâuvaife  qualité  de  la  falive  vient 
des  ulcères  que  le  mercure  fait  dans  la 
bouche:  que  l'on  donne  le  flux  à   un 
horhmefain,  la  falive  fera  corrompue 
comme  celle  de  l'homme  le  plus  in* 
feâé. 

A  regard  du  virus  que  l'on  prétend 
évacuer  par  la  falivation ,  rendez  le 
fang  &  la  lymphe  coulante,  &C  vous 
avez  détruit  lé  virus. 


D  E  St.   D  0  MIN  G  V  E.     Çf 

'  Il  réfiilte  encore  un  autre  avantage 
confîdérable  de  la  fridion  par  extinc- 
tion :  c'eft  qu'il  entre  plus  de  mercure 
dans  le  corps  du  malade,  &  qu'il  y 
refte  plus  longtem^  que  celui  qui  a 
provoqué  la  falivation  pour  la  procu- 
rer. On  a  coutume  d'employer  à  cha- 
que fridion  une  demi  -  once  d'on- 
guent 5  où  il  entre  la  moitié  de  mer- 
cure :  or  il  eft  rare  que  l'on  puifle 
frotter  le  malade  plus  de  trois  fois, 
^uand  cefluxdê  bouche  eft  une  fois 
venu  ,  il  ne  fe  termine  pas  conimu-^ 
nément  avant  le  vingtième  ou  le  vingt-» 
c^inquieme  jour.  Quand  ce  tems  eft 
pafte,  dans  quel  état  font  les  pauvres 
malades ,  quoiqu'il  n  ayent  reçu  que 
flx  gros  de  mercure  ?  Il  n'y  a  que  ceux 
qui  les  ont  vus  qui  puiiTènt  fe  le  repré- 
fenter  :  il  n'y  a  pas  moyen  de  revenir 
aux  fridions.  A  la  vérité,les  fymptomes 
les  plus  apparens  font  évanouis  :  mais 
pour  combien  de  teitïs?  Jene  dis  pas 

E  ij 


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1 -i, 


1!;. 


62  M^  t    A   D  I    ES 

qu'il  n'y  en  ait  quelques-uns  qui  ^ué- 
riffent  véritablement:  mais  en  vérité 
le  nombre  en  eft  bien  petit. 

Suppofons  que  Ton  donne  cinq  fric- 
tions ou  l'équivalent ,  tant  pour  pro- 
curer le  flux  de  bouche  que  pour  l'en- 
tretenir,  il  fera  entré  dix  gros  de  mer- 
cure dans  le  corps  :  de  ces  dix  gros  , 
combien  en  eft  il  forti  par  la  falivation? 
'  Par  l'extinélion,  qu'un  malade  ait  été 
frotté  trente  fois ,  { c'èft  le  moins  qu'il 
doive  l'être  )  avec  un    gros  ôc  demi 
d'onguent  fait  au  tiers  :  le  malade  re- 
çoit quinze  gros  de  mercure  fans  qu'ij. 
s'en  foit  perdu  un  grain  ,  ni  par  la 
falivation  ni  par  le  dévoiement  3  ces 
quinze  gros  ont  donc  roulé   dans  le 
corps    du  malade  pendant  plus  d'un 
mois,  car  il  eft  rare  que  l'on  puiffe 
donner  trente  ou  quarante  fridions 
fans  interruption.   Ces  quinze  gros  de 
mercure  ont  donc  eu  le  tcms  de  re- 
mettre les  liqueurs  dans  l'état  naturel. 


•.£?■.•■»■..''%.- 


ff  Je  crois  ,  Monfieur,  &  cher  Coïi-r 
frère  ,  avoir  fuffifamment  prouvé  l'a- 
bus de  la  falivation.  Vous  attendez  de 
moi ,  fans  doute  que  je  vous  expofe  de 
quelle  manière  j'ai  pratiqué  les  fric- 
tions par  extinftion.  La  voici. 

Après  avoir  fait  faigner ,  rafraîchir 
&  purger  les  malades;  je  les  ai  fait 
frotter  tout  de  fuite  fans  les  faire  bai- 
gner ,  au  moins  communément.^  Ce 
n'eft  pas  que  les  bains  ne  foient  utiles: 
mais  je  ne  les  crois  pas  néceflaires  , 
dans  les  pays  furtout  ou  la  tranf- 
pîration  eft  abondante,  &c  par  confé- 
quent  ou  les  pores  de  la  peau  font  fuf- 
fifamment ouverts?  je  ne  lésai  omis, 
que  quand  les  malades  n'ont  pas  eu  la 
commodité  de  les  prendre.  Pour  les 
Nègres ,  cela  auroit  été  trop  embarraf- 
fant  3  &  pour  les  Blancs,  trop  d*appret 
auroît  pu  faire  foupçonner  ce  qu'ils 
avoient  intention  de  cacher  3  en  un 
mot ,  je  VQU5  dis  ce  que  )'ai  fait  3  &:  noa 

E  iii 


ce  qu'il  eft  bon  &  à  propos  de  faire. 

Je  crois  donc  qu'on  peut  utilement 
baigner  les  malades  après  la  faignée  5 
les  purger  après  huit  ou  dix  bains ,  ôc 
•faire  prendre  encore  quelques  bains 
après  la  purgatioa. 

Le  Médecin  de  Montpellier ,  dont 
j'ai  eu  l'ouvrage ,  ordonne  la  faignée 
èc  Lapurgationi  les  bains  enfuitej  après 
lefquels  il  fait  encore  faigner  &  purger> 

Je  crois  que  la  première  purgatioa 
eft  mieux  placée  après ,  que  devant  les 
bains  3  &  que  la  féconde  aufli-bien  que 
la  féconde  faignée  font  communément 
de  trop. 

,  rnUn  ou  deux  jours  après  la  purgar 
tion  5  j'ai  fait  frotter  les  adultes  d'une 
foible  complexion  pendant  deux  ou 
trois  jours  avec  .un  gros  d'onguent, 
ou  il  n'entre  qu'un  tiers  de  mercure. 
Le  troilîeme  ou  quatrième  jour ,  j'ai  fait 
ajouter  un  quart  de  gros  5  le  fix  ou  le 
fept ,  un  autre  quart  i  &  j'ai  fait  conr 


V  Er  S'r.T  PÇMINGV  E.    ^l 

V 

xinuer  tous  les  jours  avec  ce  gros  & 
demi  (  a  ).  Je  n'ai  trouvé  perfonne  qui 
pûtfupporter  la  friaion  de  deux  gros 
fans  danger  de  faliver ,  au  lieu  qu'avec 
un  gros  àc  demi ,  la  plupart  ont  fouf- 
fert  la  fridipn  vingt  ou  vingt- deux 
jours  de  fuite.  . 

L'on  peut  fans  rien  craindre  ,  faire 
la  même  chofe  ici.  Il  faut  avoir  foin 
d'examiner  tous  les  jours  la  bouchp 
pour  s'affûrer  fi  le  malade  n'a  point  de 
difpofition  àfaliveri  c'eft-à-dire ,  s'il 
jn'y  a  point  de  chaleur  au  palais,  fi  les 
o-encives  ne  font  point  gonflées ,  fi  les 
dents  ne  font  point  de  mal ,  fi  le  ma- 
lade n'a  point  de  crachottement  3  en  ce 
xas  il  faut  continuer  ;  fi  au  contraire 
^on  voit  quelques-uns  de  ces   figiies 
précurfeurs  de  la  falivation  ,    il  faut 
,fufpendre    le^     fridions    jufqu'à    ce 
qu'ils  ayent  difparu  3  &  pour    aidgr 

(  a  )  J'ai  fait  frotter  les  perfonnes  robuftes  avec  u» 
gros  &  demi  dès  les  premier  jour.  ^ 

E  IV 


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1   F.  ■ 

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M  A  LA  jJ  I*  J5^  JF 


à  les  diflîper  ,  on  fera,  un  gargarifme   i 
avec  une  décodion  de  plantain,&  dans 
une  chopine  on  fera  diflbudre  douxe 
grains  d'alun. 

Il  faut  communément  trente  fric- 
tions pour  guérir  :  mais  il  faut  les  réi- 
térer huit  ou  dix  fois  après  que  tous 
les  fymptomes  font  diflîpés. 

Il  eft  beaucoup  mieux  de  faire  les 
fridions  le  foir  deux  heures  après  un 
léger  fouper^  que  dans  un  autre  tems 
de  la  journée  :  le  repos  de  la  nuit ,  la 
dou  ce  chaleur  du  lit  aident  au  mercure 
âpafTer  dans  le  fang. 

Il  fuffit  de  frotter  les  bras ,  les  jam- 
bes &  les  cuifles.  Il  eft  auffi  in  utile  qu'in- 
décent  de  frotter  les  autres  parti  es  5 
pourvu  que  le  mercure  entre,  il  n'im- 
portjsparoù. 

Il  eft  bonde  tenir  un  réchaut  avec 
de  la  braife  au-defTous  des  membres 
que  Ion  frotte,  fuppofé  qu'il  fafle  trop 
chaud  pour  faire  les  fridions  auprès  du 
feu. 


'^^^^^^^Sg&iïLïrSin:^ 


Quoiqu'il  foitfacile  de  fe  préferver 
du  froid,  &  même  du  frais,  principa- 
lement aux  riches ,  il  faut  autant  qu  on 
le  peut ,  ne  point  traiter  ces  maladies 
en  hy  ver. 

On  commencera  par  frotter  depuis 
le  bas  de  la  jambe  jufqu  au  milieu. 
Le  fécond  jour  depuis  le  milieu  juf- 
qu'au  genou  3  le  troifieme,  depuis  le 
genou  jufqu'à  la  moitié  de  la  cuifTe  5  le 
quatrième,  le  refte  delacuiflei  le 
cinquième,  la  moitié  du  bras 5  le  (i- 
xieme  le  refte  du  bras. 

Le  feptieme  on  commencera  la  jam- 
be, le  bras  &  la  cuifle  de  l'autre 
côté  5  on  reviendra  enfuite  à  la  jambe 
<jui  a  été  ftottée  la  première ,  &  oii 
continuera  dans  le  même  ordre. 

Après  la  guérifon  du  malade ,  il  ne 
faut  ni  le  faigner  ni  le  purger ,  comme 
on  le  fait  communément ,  à  moins 
qu'il  n'y  ait  dans  les  malades  des  indi- 
cations évidentes  qui  le  demandent* 


iii>-<a>«i  I an    iMiiiÉiraM  it^inaaÉitMJir^Mgaa 


m^MiÊ^^BÈ^ÊfÊBaéi.iSA 


f3^    :M^s^  ^Q.  E  É^ 

Pendant  tout  le  tems  dés  friftîons  i 
le  malade  ne  fortira  point ,  &  il  évitera 
avec  foin  Tair  frais. 

Les  Médecins  de  Montpellier 
font  vivre  les  malades  «ayec  dii 
lait.  L'Auteur  que  j  ai  le  n  eft  pas 
fi  rigide.  Je  penfe  avec  lui  qu'on  peut 
leur  permettre  le  potage  ,  le  bouilli  , 
le  rôti  &:  rien  de  plus.  Pour  la  boif- 
fon  une  tifanne  fmiple  de  chiendenp 
&  de  régliffe  fuffit  >  on  peut  même 
permettre  un  peu  de  vin  à  ceux  qui 
ont  coutume  d'eji  boire. 

Je  ne  veux  pas  quitter  cette  ma- 
tière fans  dire  un  ino^  \de  la  fuf 
migation. 

L'ufage  de  la  fumigation  eft  auflî  an- 
cien ,  &  peùt-êire  plus  que  la  fridioa. 
Je  dis  peut-être  plus  ,  car  les  Chinois 
qui  fuiv^nt  le  fentiment  de  M'*  Af- 
truc ,  ont  reçu  la  vérole  des  Portur 
gais  5  ne  connoilTent  point  les  ondions 
mercurielles  ,  &  employent  la  fumir 


.ÂgH'^hnfA^S^j 


vE  Sri  DpmihJS^e.   71 

gàtion.  Voyez  M»^*  Aftruc  Liv.  II.  p, 
1 70  5  6c  fa  difTertation  fur  la  nature  aç 
la  maladie  vénérienne  qui  règne  chez 
les  Chinois ,  ôc  fur  leur  manière  de  la 
guérir. 

On  appelle  Fumigation  la  méthode 
de  traiter  les  maladies  vénériennes  par 
une  poudre  que  Ton  fait  brûler  fur  un 
peu  de  braife  dont  le  malade  reçoit  la 
vapeur  par  le  nez.  On  devroit  plutôt 
rappeller  exhalaifon  du  mercure,  car 
cette  poudre  ne  doit  point  faire  de 
fumée  5  mais  feulement  une  petite 
flamme  bleue  ,  qui  ne  s'élève  pas  plus 
haut  que  deux  travers  de  doigt  au- 
deffus  de  la  braife:  ainfi,  cette  opéra- 
tion n'efl:  pas  difficile  à  fupporrer,  &C 
ne  dure  que  quatre  ou  cinq  minutes. 
Elle  n'efl:  néceflaire  que  dans  les  cas 
que  nous  avons  indiqués  ci-deflus. 
Cependant  5  fi  les  perfonnes  du  fexe 
avoient  une  gonorrhée  ,  ou  même  des 


I 

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jftrtn  ^  % 


fleurs  blanches  [a],  je  leur  confeilld 
de  la  préférer  auxfridions  5  auffi-bien 
ou  a  tous  ceux  qui  ont  des  dartres  ou 
éts  puftules. 

Quant  à  la  matière  que  l'on  doit 
employer  pour  fumiger  ,  vous  me 
difpenferez  ,  Monfieur,  d'entrer  dans 
le  détail  de  toutes  celles  dont  les 
anciens  Médecins  fe  font  fervis  : 
Monfieur  Aftruc  lésa  rapportées  avec 
beaucoup  d'exaditude  {h)  5  je  ne 
pouvois  que  le  copier.  D'ailleurs  mon 
intention  n'eftpas  de  faire  un  livre, 
mais  un  mémoire  le  plus  court  qu*il  me 
fera  poflible,  &  principalement  de 
rapporter  ce  qui  m'a  réuffi.  > 

J'employai  d'abord  une  livre  decîn* 
nabre  artificiel,  convaincu  que  c'étoit 
le  remède  dont  M.  Charbonnier  avoît 


(  «  )  Hippocrate  employoit  des  fumigations  poiuf 
cette  maladie.  De  Mwbh  mulisrum. 

{\i)  De  Morhts  venereis»  Lib  II.  cap.  viij» 


fait  des  épreuves  heureufes  aux  In- 
valides ,  fous  les  yeux  de  M"  Malouec- 
alors  Médecin  de  cet  Hôtel ,  &  à  Bif- 
fêtre  fous  la  diredion  des  députés  de 
notre  Compagnie  :  &:  quoique  tous  les 
malades  n'euflent  pas  été  guéris ,  la 
Faculté  qui  connut  quec'étoit  la  faute 
de  celui  qui  adminiftroit  le  remède,  Sc 
non  pas  dvi  remède  même ,  ni  de  la 
façon  de  remployer,  nelaiflapas  d*ea 
jugerfavorablementjôc  de  Tapprouvers, 

Îerfuadée  qu  entre  les  mains  de  fes 
)oaeurs ,  il  feroit  fupérieur  à  tous  les; 
autres.  J'en  fis  d'abord  l'eflai  fur  quatre 
Nègres  les  plus  maléficiés ,  entre  un 
grand  nombre  que  le  Chirurgien  de 
l'Habitation  des  Mineurs  Mithon  de- 
voit  traiter  par  les  friélions  avec  la 
falivation.  Je  les  guéris  dans  un  mois  j 
§c  je  fus  obligé  peu  de  tems  après  de 
faire  fumiger  prefque  tous  ceux  qui 
avoient  paffé  par  les  mains  du  Chirur- 
gien. 


Oitt 


EBAfiOaitaSaBi 


fg:       ^M  A  L  A  D   I  Jg  > 

Il  eft  vrai  qu'à  run  des  quatre  qui 
âvoientétéfumiges,  il  revint  des  pians 
peu  dé  tems  après  3  ce  qui  me  fît  ju- 
ger qu'il  falloit  continuer  le  remède 
encore  plus  longtems  que  je  n  avois 
fait ,  après  que  les  malades  paroiiTent 
guéris. 

J'eus  bientôt  épuifé  la  livre  de  cin- 
nabre  5  il  auroit  fallu  au  moins  cinq  oii 
fix  mois  pour  en  faire  revenir  d'autre 
de  Paris:  je  fis  réflexion  que  toute 
préparation  de  mercure  qui  pouvoic 
être  prife  intérieurement  fans  danger, 
pouvoit  être  propre  pour  fumiger.  Sur 
ce  principe  je  me  déterminai  pour 
F^thiops  minéral  :  mais  la  prépara- 
tion ordinaire  jette  une  grande  flamme 
&  fe  confomme  tout  d'un  coup  5  il  fal- 
lut donc  ajouter  une  matière  qui  ne 
fît  point  trop  de  fumée ,  &  qui  retar- 
dât la  déflagration  de  VJEthiops ,  fans 
diminuer  la  vertu  de  ce  remède:  je 
choifis  l'antimoine  diaphorétique  5  je; 


D  E  S  '^»    Do  M  1  NG  V  E^      J 

m'en  fervis  pendant  quelque  tems,  èC 
enfin  au  lieu  de  cet  antimoine  j'ajou- 
tai du  metcure  crud  autant  que  j'en 
pus  éteindre  avec  la  plus  petite  portion 
de  fleur  de  foufre  ,  &  je  parvins  à  en 
éteindre  une  livre  avec  quatre  onces 
de  fleur.  Si  Ton  met  moins  de  fleur  de 
foufre  ,  la  matière  ne  peut  brûler.  Si 
l'on  en  met  plus^elle  jette  trop  de  flam- 
me, brûle  trop  vite,  èc  incommode 
les  malades. 

Je  fis  faire  un  grand  fiége  en  fera 
cheval,  fur  lequel  huit  ou  dix  Nègres 
puffent  tenir  affis.  Il  étoit  entouré  d'uii 
pavillon  qui  traînoit  par  terre  ,  &  qui 
étoit  élevé  environ  de  deux  pies  au-def- 
fus  de  la  tête  des  Nègres,  &  dont  les 
deux  pans  fe  croifoient.  Je  mettois 
un  réchaud  entre  deux  Nègres,  qui 
la  bouche  ôcles  yeux  fermés  d'un  ban- 
deau, recevoient  l'exhalaifon  de  la 
poudre  dont  je  mettois  environ  une 
petite  cuillerée  à  cafFé  dans  chaque  ré- 


§  •  ■  '  !■: 


.^«.Mi^fti 


i^m^BÉ^aa 


Ma 


A  SI  È  9 


chaud  i  après  avoir  refermé  le.pavillon 
j'y  laifTois  les  Nègres  fans  chemife,  (  a  ) 
jufquace  quilsfufTent  bien  enfueur> 
ce  qui  arrivoit  aux  uns  après  quatre 
ou  cinq  minutes,  à  d^autres  après  fix  ou 
fept  Je  les  faifois  alors  reprendre  leurs 
cnemifes ,  &  coucher  fur  une  paillaffe, 
couverts  d'une  couverture  de  laine, 
pii  je  les  laiflbis  fuer  au  moins  deux 
heures  :  après  ce  tems  on  les  changeoit 
de  chemife.  Ils  faifoient  ordinairement 
deux ,  trois  ou  quatre  felles  par  jour. 
Je  vifitois  leur  bouche  tous  les  ma- 
tins :  s'il  paroiflbit  quelque  difpofition 
à  la  falivation ,  on  fufpendoit  le  re- 
mède jufqu'à  ce  que  cette  difpofition 
fût  pafTée  :  j'employois  alors  un  gar- 
garifme,ou  avec  les  plantes  aftringen- 
iQs  j  comme  le  plantain  ,  la  grenade 

(  s  )  Quand  j*ai  fait  fumiger  des  Blancs  ,  les  hom-i 
mes  étoient  en  chemife  ac  en  calleçon  ,  les  femmes  en 
chemife  ôc  en  juppon» 

fauvageit 


DE  St.  Do  m  ïj^gue.     %\ 

fauvage  ,    ou  fimplement    queiqires 
grains  d'alun  fondus  dans  Feau* 

La  falivation  furvenoit  rarement 
avant  qu'on  l'eût  prévûeielle  étoit  tou- 
jours légère  ,  oc  n'étoit  gueres  qu'un 
ptyalîfme  ,  ou  crachottement  i  les 
gargarifmes  l'arrêtoient ,  ou  une  eau 
de  cafle  quand  ils  ne  fuffifoient  pas. 

Tant  que  j'ai  pu  veiller  par  moi- 
même  àcette  opération,  les  plus  mal^ 
traités  de  la  maladie  en  étoient  déli- 
vrés parfaitement  dans  l'efpace  de 
deux  mois  5  ceux  qui  n'avoient  que 
des  pians  &:  des  ulcères  peu  profonds 
étoient  guéris  dans  trente  ou  quarante 
jours.  Quand  il  y  avoir  carie  aux  os, 
exoftofes ,  anky lofes,  perte  de  la  luette 
ôc  des  amygdales ,  il  falloit  bien  plus 
de  tems  5  &  encore  plus  pour  les 
écrouelles  &  la  lèpre.  M^is  lorfque 
mes  occupations  ne  me  permirent  plus 
de  faire  faire  ces  remèdes  en  ma  pré- 
fence  ,  ôc  que  je  fus  obligée  d'en  char- 

F 


£^         M  A    L    A    ï>    I    ES 

ger  le  Chirurgien  de  rhabitation,  qui 
s  en  rapportoic  le  plus  fouvent  au  Ne^ 
gre  ,  chef  de  la  petite  Cafc  (/z),  (parce 
qu'il  a  voit  auffi  fes  affaires  )  3  les  Nè- 
gres guérifîbient  à  la  vérité ,  mais  bien 
plus  lentement. 

Pour  boifTon  ordinaire  on  faifoit 
une  tifanne  avec  le  bois  de  gayac  ,  ôc 
récorce  de  bois  de  fer.  J'ordonhois 
qu'on  y  aioûtat  de  la  fquine  &  de  la 
falfepareille  jqui  croiflent  abondam- 
ment dans  le  pays  :  mais  je  m'apperçus 
bien-tôt,  que  non-feulement  on  n'a- 
joûtoit  point  ces  dernières  plantes, 
mais  que  la  plupart  de  ces  Nègres  ne 
vouloient  boire  que  de  l'eau  ^  ce  que 
je  fus  obligé  de  tolérer. 

Pour  la  nourriture  des  Nègres  pen- 
dant le  traitement ,  je  faifois  dans  les 
premières  années  acheter  demi  -  li- 
vre de  viande ,  êc  une  livre  de  pain 
par  chaque  Negrc  pour  la  journée, 

'  (w  )  C'^ft  ainfi  qu'on  appelk  PHôpkal  deftiné  àcei 

tnaiadies. 


DE  St.  Domingue.    8| 

fans  compter  les  potages ,  &  la  caf- 
fave.  Dans  la  fuite ,  comme  cela 
coutoit  trop  5  je  me  reduîfis  à  mettre 
dans  une  grande  chaudière  une  tête  de 
bœuf  avec  des  patates  (a)  &  du  bif^ 
Guit.  Cela  fuffifoit  pour  bien  nourrir 
une  vingtaine  de  Nègres:  quand  j'en 
avois  davantage  à  traiter ,  (  car  le  nom- 
bre alloit  fou  vent  jufqu'à  trente  )  je 
faifois  ajouter  deux  ou  trois  pies  de 
bœuf.  Ces  Nègres  engraiffoient  con- 
fidérablement  au  lieu  de  maigrir,  à 
mefure  qu'ils  guériflbient. 

Les  exoftofes ,  les  anKylofes  y  la  ca- 
rie des  os ,  les  écrouelles ,  la  lèpre  ^ 
ne  demandent  point  de  cure  particu- 
lière: je  faifois  feulement  enveloppe^ 

(  4  )  La  patate  eil  la  racine  d'une  efpece  de  con- 
volVulus  rampant ,  qui  eil  au  moins  aufïî  bonne  que 
le  maron.  C'eft  non  feulement  la  nourriture  ordi- 
naire des  Nègres  de  St.  Domingue  ,  mais  les  habitans 
la  préfèrent  fouvent  au  pain  ,  ô^  l'on  en  fert  fur  les 
Bieilleures  tables. 

Fij 


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M  A    L    A    D   I   Èk 


84         MALADIES  Jjj 

la  partie  exoftofée  ou  aiikyloféeavec 
remplâtre  de  Vigo  cum  'menurio  ,  &  je 
faifois  couvrir  les  ulcères  profonds  des 
écrouelles,  Scies  autres  aveclemême. 
emplâtre. 

Je  vous  ai  promis ,  Monfieur,  une 
obfervation  qui  nrafait  penfer  queles^ 
fridions  mercurielles  étoient  contrai- 
res aux  lépreux.  La  voici.  Une  jeune 
Négreflede  feize  àdix-fept  ans ,  étoit 
couverte  d'une  lèpre  ulcéreufc  depuis 
les  pies  jufqu'à  la  tête,  d'une  puanteur 
infupportable  depuis  plufieurs  années, 
qui  Tavoit  réduite  dans  un  tel  état  de 
maigreur  ,    qu'il  ne  lui  paroiffoit  plus 
aucun  mufcle  :  les  deux  pics  étoient 
fort  gros  &:  couverts   d'ulcères ,  l'un 
beaucoup  plus  que  l'autre.  Elle  m'a- 
voit  été  envoyée  du  Cul-de-Sac  de 
Léogane ,    par   un    des   plus     riches 
habitans  du  lieu  ,  &  par  parenthefe , 
un  des  plus  honnêtes  hommes  6:  des 


i 


^ 


-'a^^ 


ÉMMiiiâÉinÉÉiHii 


DE  St.    Do  MI  N  GUE. 

plus  pieux  delà  Colonie  ,  nommé  M'* 
Aubri.    En   moins  de  trois  mois  elle 
Teprit  chair ,  6c  les  ulcères  du  corps  fu- 
rent féchés.    La  tumeur   des  pies  fut 
plus  longtemsàfe  diffiper  ,  fa  couleur 
noire  revint  (a) ,  les  règles  parurent 
pour  la  première  fois  de  fa  vie ,  de  cou- 
lèrent en  quantité  convenable.  Je  né- 
tois  plus   occupé  que  d'un   pié,  qui 
etoit  prefque  réduit  à  la  groffeur  de 
l'autre  parfaitement  guéri.  Ureftoit  un 
petit  ulcère  fous  le  talon  >    il  y  avoit 
déjà  près   dun    an  >  ou  plus,  quelle 
étoit  dans  les  remèdes.  J'interompois 
detems  entemsla  fumigation.  Enfin, 
après  avoir  cefle  de  la  fumiger,  je  lui 
fis  frotter  pendant  quelques  mois  le 
deffus  du  pied  deux  fois  par  femaine, 
avec  une  très-petite  portion  d'onguent 
dans  lequel  ilentroit  un  neuvième  de 
mercure.  Il  lui  furvint  une  fièvre  quar- 

(  »  )  Les  Nègres  malades  oat  une  couleur  de  feuille 
jnoits  ,  &  redeviennent  noirs  engaériflant.  ■--' 

F  iij 


w 


26     M  Al  4  m  t  B  s 

tcj  quicefTa  &  revint  plufieurs  fois: 
elle  maigrit  beaucoup  ,  perdit  fa  cou- 
leur »  ôC  il  parut  un  petit   crachotte^ 
ment  qui  augmenta  peu  à  peu  >  &  qui 
lui  faifoit  rendre ,  les  premiers  jours , 
au  plus  y  une  demi  livre  de  fali ve  3  dans 
le  plus  fort  elle  n'en  rendoit  pas  deux 
livres.    Je  ne  mapperçus  pas  même 
dabord  de  ce  ptyalifme  5  il  dura  une 
vingtaine  de  jours  :  elle  fut  fl  mal  fur-f 
tout  les   premiers  jours  que  je    crûs 
qu'elle  mourroit.  Au  flux  de  bouche 
fe  joignit  un  devoiement  qui  la  faifoit 
aller  quatre  ou  cinq  fois  dans  les  24 
heures  ;  il  ceffa  èc  revint  a  différentes 
reprifes.  Elle  mourut  enfin  après  un 
dégoût  de  trois  ou  quatre  jours.  J*ai 
toujours  attribué  à  la  friftion  faite  fur 
fon  pié  5  quoiqu'il  y  eût  longtems  qu'on 
ne  la  pratiquoit  plus ,  tous  les  accidens 
qui  lui  furvinrent  5  ôc  la  mort  même 
parce  que  je  n'en  ai  pu  voir  d'autre 
caufe  que  celle-là. 


DE  St.  Do  min  EVE. 

Je  ne  dois  pas  oublier  que  cette  Ne- 
çrefle  avoit  deux  élévations  eonfide- 
rables  au  deux  cAtés  du  front,  qui  re- 
préfentoient   parfaitement  les  cornes 
qui  commencent  à  pouffer  aux  ani- 
maux qui  en  portent  :  l'une    s'eflaça 
après  quelques  mois  5  l'autre  perça, 
la  peau  ,&  parut  fous  la  forme  d'un 
champienon,  dont  la  tête  étoit  élevée 
au-deffus  de  la  peau  i  &  le  pie  bien 
diftingué  de  la  tête,  étoitadhereiit  au. 
mufcle  frontal.Ce  champignon  s'effaça 
avec  le  tems ,  &  la  peau  fe   réunit  ft 
parfaitement ,  qu'il  ne  refta  point  de 
cicatrice  vifible. 

De  toutes  les  efpecesde  lèpre,  le- 

cailleufe  eft  la  plus  difficile  à  guerin 

M'-  Mercier,    premier  Secrétaire  de 

M"^-  le  Général  me  donna  une  jeune 

Néereffe  qui  étoit  dans  le  cas  :  c'ét^iç 

prmcipalement  la  peau  de  fes  jambes 

qui  étoit  épaiffe  &  dure.  Je  les  rétablis 

dans  l'état  naturel:  mais  peu  de  vapis 

F  iv 


HH 


BB      Maladies 

après  elles  revinrent  dans  leur  premier 
état.  Il  mêla  renvoya  ,  je  la  fis  fumi- 
ger  de  nouveau  i  je  la  rétablis  comme  é 
lapremierefois.  Cette  féconde  guéri-  ^ 
fon  ne  fut  pas  plus  durable  que  la  pre- 
mière. On  lui  fit  prendre  quelques 
gouttes  de  folution  de  mercure  dans 
Teau  forte:  elle  guérit,  mais  je  ne  fai 
pas  fielle  n'ell  point  retombée. 

Voici  comment  fe  fait  cette  folution, 
&  la  manière  de  s'en  fervir. 

(a)  On  fait  diJÛToudre  une  once  de 
mercure  dans  une  quantité  fuffifante 
de  bon  efprit  de  nitrê.  On  la  met  dans 
une  bouteille  avec  vingt-quatre  onces 
d'eau.  On  donne  fix  ou  huit  gouttes 
de  ce  mélange  dans  une  pinte  d'eau 
que  Ton  fait  prendre  tous  les  matins. 
J'ai  donné  à  un  homme  qui  n'étoit 
point  Chirurgien  ,  la  permiffion  de 
traiter  des  Nègres  avec  ce  remède ,  à 
la  foUicitation  &  fur  le  certificat  de 

[a]  Fid.  Coi,  medie,  Parif. 


VE  St;  T)oMiN GUE.    8(^; 

plufieurs  habitans  dont  il  avoit  guéri 
des  Nègres,  fans  qu'il  en  fût  arrivé 
aucun  accident:  mais  je  n'ai  jamais 
voulu  m*en  fervir. 

Après  cette  efpece  de  lèpre ,  celle 
qui  fe  manifefte  par  une  grande  quan- 
tité de  tumeurs  charnues  fur  toutes  les 
parties  du  corps ,  efb  la  plus  rébelle. 
Le  dernier  Nègre  que  j'ai  fait  traiter 
fur  l'habitation  de  M'*  Fontelaye ,  ou 
j'ai  demeuré  trois  ans  ,  fut  guéri  après 
trois  ou  quatre  mois  :  mais  cette  gué- 
rifon  n'a  pas  duré  deux  ans  :  quelque 
tems  avant  que  je  partifle,  pour  re- 
venir, le  Chirurgien  recommença  aie 
traiter.  Il  étoit  horriblement  défiguré 
par  une  quantité  de  tumeurs  furie  vi- 
fage5fur  les  mains ,  fur  les  doigts  &  fur 
tout  le  corps.    S'il  s'étoit  montré  dès 
que  cts  tumeurs  commencèrent  à  re- 
venir 5  il  auroit  été  facile  de  le  guérir  : 
mais  comme  il  étoit  chaffeur  ^  on  ne  le 
voyoit  point.  Je  ne  fçai    fi  ceChirur- 
gicn  en  fera  venu  à  bout. 


^o 


M  A  l  A  D  î  B  s 


Pour  guérir  les  écrouelles ,  il  ne  faur 
que  fumiger  les  malades,  &  couvrir 
les  ulcères  profonds  ,    ou  les  tumeurs 
avec  Templâtre  de  Vigo  cum  mercurio^ 

Quant  aux  Gonorrhées  ,  aux  Bu- 
bons ,  aux  Rhagades ,  âux  Porreaux , 
Par  très  5  Phymofis,  Paraphymofis, 
voici  par  quelles  méthodes  je  les  ai 
traité  es. 

Lorfquela  eonorrhée  étoit  accom- 
pagnée de  la  vérole  u niverfelle ,  je  fai- 
fois  fumiger  les  malades, après  les  avoir 
fait  faigner ,  purger,  rafraîchir  &  avoir 
diffipé  Finflamm^tion  qui  accompagne 
cette  maladie  >  je  leur  donnois  pour 
boillon  ordinaire  ,  la  décoftion  de  la 
racine  de  pois  puant  3  la  vérole  univer-» 
felle  &:  particulière  guériiloienten  me-» 
ine  tems. 

Quand  la  gonorrhée  étoit  feule, 
la  tifanne  de  cette  racine  la  guérifloiç 
parfaitement.  Pour  difpofer  les  ma- 
lades à  prendre  ce>te  tifanne  >  je  leur 


DE  St,  Dominçve.     ^ 

faifois  ufer  d'une  autre,faite  avec  la  ré^ 
gliffe  du  pays.  Un  habile  Chirurgien 
m'a  affùré  qu'il  ne  donnoit  pour  gué- 
rir la  gonorrhée  que  les  tifannes  rafraî- 
chiflantes. 

Après  la  guérifon  des  gonorrhées,  il 
refte  aflez  fouvent  dans  l'urethre  des 
cicatrices  dures ,  élevées  ,  qui  caufent 
des  dyfuries  très  -  douloureufes  ,  que 
les  Chirurgiens  appellent  des  carnofi- 
tés,ôc  qu'ils  guériilent  avec  des  mèches. 

J'en  ai  guéri  quelques  unes  par  l'ex- 
halaifon  du  mercure  introduite  dans 
l'urethre^par  le  moyen  d'un  entonnoir^ 
&  cette  manière  d'effacer  ces  cicatrices 
eft  plus  fûre  que  les  mèches ,  qui  d'ail- 
leurs font  douloureufes  5  au-lieu  que 
la  première  ne  l'eft  point  du  tout. 

Avant  de  finir  cet  article  ,  je  veux, 
Monfieur ,  vous  faire  part  de  deux  ac- 
cidens  fmguliers  furvenus  à  la  gonor- 
rhée fupprimée.  Une  femme  qui  avoit 


une gonorrhée  viririentc,très-abondan- 
te,tomba  malade  d'une  fièvre  maligne, 
dont  elle  ne  guérit  que  le  trente-neu- 
vième jour.  La  violence  de  la  fièvre  > 
ou  les  faignées  &:  les  autres  remèdes 
fupprimerent  totalement  le  flux.  Peu 
de  tems  après  cette  guérifon  ,  elle  fe. 
trouva  tellement  dégoiitée  de  tous  les 
alimens  ordinaires  ,  qu  elle  ne  fou- 
haittoit  que  des  porreaux  ou  des  ok 
gnons  crudsjqu  elle  dévoroit  quand  el- 
le pouvoit  en  attrapper.  Ce  dégoût  fut 
bientôt  accompagné  d'une  méiancho- 
lie  ou  d'tme  trifteffe  dont  on  ne  pou- 
voit la  diftrairc.  Enfin  )  elle  perdit  en- 
tièrement la  mémoire ,  &:  devint  imbé- 
cille.  Elle  fut  trois  ou  quatre  mois  dans 
cet  état.  Une  nuit  elle  en  fut  totale- 
ijient  ôc  fubitem.ent  délivree-.la  gonor- 
rhée  avoit  paru.  Quoique  de  ce  mo-. 
ment  elle  eût  recouvré  fon  jugement 
6c  fon  efprit ,  elle  ne  s'eft  jamais  f ou- 


VE'Sf.    DOMINGV  E. 

venue  "qu'elle  avoir  été  malade. 

Une  jeune  Négreffe  de  quinze  ou 
feize  ans  ,  dont  la  gonorrhée  avoir  été 
fupprimée,apparemmenr  par  quelques 
drogues  quelle  avoir  prifes,  (car  les 
Nègres  fe  mêlent  de  guérir  cette  nia- 
ladie)  ,    devint  imbécille,  &    fa  vû^ 
diminua ,   de  forte  qu'elle  ne  voyoit 
pas  a  fe  conduire.  Informé  de  ce  qui 
lui  étoit  arrivé  ,  je  tâchois  de  rappeller 
Févacuation    fupprimée  :    lorfquelle 
reparoiffoit ,    la  Négreffe  fe  trouvoic 
mieux,  mais  elle  étoit  médiocre.  Se 
ceflbit  fouvent.  Comme  je  ne  demeu- 
Tois  plus  fur  les  lieux.y  je  ne  faifi^elle 
devint  plus  abondante  par  elle-même, 
ou  par  les  remèdes.  Elle  fut  environ  un 
an  dans  cet  état ,  &  je  lai  vue  depuis 
parfaitement  guérie. 

Voici   qu'elle   étoit    ma    méthode 
pour  les  Bubons  vénériens. 

Lorfque  quelqu'un  avoir  de  ces  bu- 
-bonsjje  ne  le  guériffois  point  autrement 


p^,      Maladies 

queparlafumigatîonjcelaluiépargnoic 
les  douleurs  des  incifions ,  la  longueur 
&  rennui  des  émolliens ,  maturatifs  , 
fuppuratifs ,  ôc  la  crainte  que  le  virus 
renfermé  dans  le  bubon  ne  fût  rentré 
dans  le  fang.  Si  le  bubon  étoit  accom- 
pagné de  vérole  ,  ce  qui  eft  très-ordi- 
naire 5  j'étois  certain  d^avoir  guéri  Tun 
&  l'autre  de  ces  maux  en  moins  de 
tems  qu'il  n'en  faut  pour  guérir  les 
bubons. 

Quant  aux  autres  fymptômes  de  la 
vérole ,  tels  que  les  Rhagades ,  les 
Porreaux  ,  le  Phymofis  ,  le  Paraphy- 
mofis,  ils  fe  guériflent  par  la  fumi- 
gation. 

Il  n'en  eft  pas  de  même  des  dartres, 
principalement  de  celles  des  Nègres  : 
quoiqu'elles  fe  diffipent  communé- 
ment ,  non-feulement  il  s'en  trouve 
quelques-unes  dont  on  ne  peut  pas  ve- 
nir à  bout  5  mais  quelquefois  après  la 
guérifon  des  pians,  &  même  delà  vé- 


BÉ  St.  Dômïngue.    pi 

fole>  il  envient  de  farineufes  à  ceux 
qui  n'en  avoient  point,  le fquellesréfif- 
tent  longtems  ,  ou  toujours  ,  aux  to- 
piques de  toute  efpece  :  les  émoi- 
liens  ,  la  pierre  infernale  ,  les  eaux 
mercuriellesjles  pommades  avec  le  fu- 
blimé  ,  tout  enfin  devient  inutile  con- 
tre cette  maladie  de  la  peau.  J'en  ai 
trouvé  une  entre-autre  qui  n'a  pu  en 
être  délivrée  qu'en  buvant  longtems 
Teau  mercurielle  décrite  ci-deflus. 

Voilà ,  Monfieur ,  de  cher  Confrère, 
ce  que  j'avois  à  dire  fur  les  maladies 
particulières  de  St.  Domingue.  Mais 
on  peut  faire  une  réflexion  fur  toutes 
celles  qui  font  particulières  aux  Blancs 
dans  ce  climat  &  dans  ceux  qui  lui  font 
femblables:  c'eft  quelles  participent 
toutes  des  maladies  d'automne  dont 
parle  Hippocratte.  Lorfque  dans  un 
mime  jour  ,  dit  ce  Prince  delà  Mede-* 
cine  5  {a)  il  fait  tantôt  chaud^tantvt froid , 

(  a  )  Quando  eadem  c'ie  modo  cala  ,  modo  frigfisft , 
éUptHtnnaUi  mon  9$  gx^eâare  oprttt*  Aphoi.  4  led.  3. 


^6      Maladies 

on  doit  attendre  des  maladies  d'automne. 
Voilà  précifément  ce  qui  arrive  dans 
rîie  'S>t,  Domirjgue:  les  foirées,  les  nuits, 
les  matinées  font  fraîches  ^  ou  froides, 
comparées  aux  chaleurs  exceffives  des 
autres  heures  du  jour.  Toutes  les  ma- 
ladies doivent  donc  être  femblables 
à  celles  que  l'on  voit  en  Europe  dans 
rAutomne-  Or  dans  TAutomne  [a) 
les  maladies  font  très- aiguës  &  très- 
dangereufes. 

Les  maladies  de  l'automne  qu'Hip- 

pocrateaobfervées,fontr.plufieursdes 
maladies  de  l'été  :  œs  maladies  de  Tété 
font  des  fièvres  continues  ,  des  fièvres 
ardentes  j .  plufieurs  tierces  &  quartes  , 
<Iesvomi{remens,  des  cours  de  ventrp. 
2°-  Les  maladies  particulières  à  Tau- 
tomne  ,  outre  les  fièvres  quartes  U.  ^r- 
rantes ,  font  principalement  les  gonflemens 
de  rate ,  les  hydropifies ,  les  phthtfies  ,  les 

(  a)  In^ autumno  morhi acutijfimi ^  omnino morttferi. 
Aphor.  ^.  feCt.  3. 

flrangurjes  ^ 


DE   St.  DOMINGVË.       gj 

firmguries ,  les  lienteries^  lesdyjfenteries  ^ 
les  efc^uinancies  ^les  ajlhmes^{a). 

Toutes  ces  maladies  régnent  com- 
munément à  St.  Domingue  ,  mais  dans 
le  même  degré  qu  elles  ont  en  Europe 
dans  Tautomnei  c'eft-à-dire ,  qu'elles 
doivent  être  la  plupart  très-aiguës ,  ôc 
toutes  très-dangercufes* 

Pour  éviter  ces  maladies  cauféespar 
les  variations  de  Tair,  les  habitaris 
devroient  fe  vêtir  fuivant  le  degré  de 
chaleur,  com.me  on  fait  en  Europe 
dans  les  différentes  faifons:  mais  en 
touttems,  ils  font  également  couverts, 
c'ejft-à-dire,  qu'ils  ne  le  font  prefque 
point.  Unevefte  de  bafîn ,  ou  d  étoffe 
encore  plus  légère ,  &  toujours  débou- 
tonnée ,  fait  tout  leur  habillement 
dans  toutes  les  heures  du  jour,  même 

(  a  )  Antumno  autem  ^  ex  &jl'wîsmulti ,  ^  febres 
quâirtam  é*  erronés.  ,  iQ*  fflenes ,  ^  hydropes  ,  ^  t^- 
hesi^  urinS'fiillicidm  ,  ^  UenteriA  ,  ^  infanU  ,  ç^  dy^ 
yinteri  y  ^  arigimi  é*  '^fthmatà,  dcc,  Aphor.  zx.  led.  |, 

G 


aux  mois  les  moins  chauds  de  Tannée, 
qui  font  Janvier  ,  Février  &  Mars  : 
bien  plu$  ,  la  plupart  couchent  fans 
couverture  &:  fans  draps.  Cette  mau- 
vaife  habitude  eft  la  caufe  la  plus 
ordinaire  desgonflemens  de  rate,  des 
4iai'rhées  &C  des  dysenteries  fi  commu- 
nes dans  ce  pays. 

Je  vous  ai  promis ,  Monfieur  &cher 
Confrère  ,  dès  le  commencement  de 
ma  lettre5de  vous  parler  d'une  maladie 
fmguUere  dans  laquelle  je  fus  obligé 
de  donner  lemétique.  Un  homme  de 
quarante-deux  ans ,  aflez  chargé  d'em- 
bonpoint j,  d'un  |:empérament  phleg- 
matique,  après  avoir  traîné  pendant 
près  d'un  mois  fans  fièvre  apparente  , 
au  moins  pendant  le  jour,  luivant  le 
rapport  des  voifins  &  du  Chirurgien  , 
tomba  dans  un  tel  état  d'atonie,  qu'il 
ne  pouvoit  ni  fe  foùtenir  fur  fesji^m- 
bes,  ni  porter  un  gobelet  afa  bouche. 
Comme  il  n'écoit  pas  en  état  de  fe 


D  B  St.  Do  min  GUE. 

faire  gouverner  chez  lui/  M'*  Fonte- 
laye  habitant  du  Cul-de-Sac,  le  fît 
venir  fur  fon  habitation,où  je  demeu- 
rois  alors  5  je  dois  lui  rendre  ce  té- 
moignage &  à  Madame  Fontelayefon 
époufe ,  que  c^étoient  les  gens  les  plus 
charitables  que  j'aye  jamais  connus  ; 
leur  îliaifon  étoit  un  afyle  ouvert  à  tous 
les  malades  ,  &  pendant  plus  de  dix 
ans  j'y  en  ai  toujours  vu  quelqu'un  , 
dont  ils  avoient  le  même  foin  que  fi 
c'eût  été  leurs  enfans. 

Le  malade  5  qu'ils  avoient  envoyé 
chercher  dans  leur  chaife  arriva  le  foir. 

Le  lendemain  matin  je  lui  fis  pren* 
dre  fix  grains  de  tartre  ftibié  dans  un 
verre  d'eau ,  ôc  deux  heures  après  trois 
autres  grains.  Et  comme  iln'etoit  que 
foiblement  évacué  3  je  lui  fis  donner 
furies  quatre  ou  cinq  heures  du  foir  , 
un  lavement  avec  une  décodion  or- 
dinaire5à  laquelle  je  fis  ajouter  environ 
deux  gros  de  tabac.  L'évacuationt  fut 

G  ij 


;  \ 


fÔO      M  AL   À   D    î   É>      ^ 

abondante.  La  fièvre  le  prit  peu  de 
tems  après  5  c'elVee  que  je  fouhaitois, 
comme  un  moyen  de  rétablir  la  force 
des  artères  Se  des  autres  parties  folides. 
Je  la  lailïlii  fubfifter  pendant  vingt  oa 
vingt-quarré  heures  5  après  ce  tems  je 
lefis  faigner.  Le  lendemain  je  le  pur- 
geai fortement  i  lefur-lendemain  jele 
fis  faigner  du  pie* 

Le  Chirurgien  qui  n'eft  pas  tout-à- 
fait  ignorant  5  parût  fort  étonné  de  la 
manière  dont  je  m'y  étois  pris  :  je  Finf- 
truifîs  des  raifons  qui  m'avoient  dé- 
terminé. Le  lendemain  de  la  faignée 
du  pié  le  malade  fut  guéri  5  ôc  en  état  de 
fe  promener  :  cependant  je  trouvois 
que  fon  efprit  n'étoit  point  dans  fon 
affiette  ordinaire. 

Huit  ou  dix  jours  après ,  il  fe  déran- 
gea totalement.    Ce   dérangement  fe 
manifefta  d'abord  par  des  chants,  des 
ris  immodérés,  des  difcoursplaifans, 
'dans  lefquels  il  imitoitle  langage  des 


Nègres  avec  une  guaieté  &  un  facilite 
.qu'il  n'avoit  point  auparavant.  Il  nous 
couchoit  en  joue  les  uns  après  les  au- 
tres, avec  fon  oreillerjfaifant  de  grands 
.éclats  de  rire.  Il  fit  cent  autres  extra- 
.vagances  :  mais  dès  le  jour  même  on 
fut  obligé  de  le  lier  ,  ôc  dans  la  fuite  de 
lui  mettre  une  chaîne  au  pié  pour  le 
-moins  incommoder. 
.  Dans  ce  tems-là  couroit  une  maladie 
inconnue  jufqu  alors  ,  qui  enleva  un 
grand  nombre  d'efckvesi  elleprenoit 
par  un  gros  rhume  de  cerveau  &  une 
toux  violente  qui  duroit  toute  la  ma- 
ladie :  le  corps  fe  couvroit  de  petits 
boutons  durs  ,  fou  vent  dès  le  premier 
jour,avecla  fievre,&:  quelque- fois  auffi 
fans  fièvre  :  à  mefure  que  ces  boutons 
féchoient,  il  furvenoit  un  dévoiement 
violent  qui  duroit  fept  ou  huit  jours 
•plus  ou  moins  5  quelques-uns  mou- 
roient  pulmoniques  ,  &le_plus  grand 
pombre  par   la  diarrhée.   Dans  unç 

G  iij 


mÊm 


ÏÔ2      Ma  l  a  d  1  é  & 

habitation  de  deux  cens  Nègres,  iieii 
tomboit  malades  chaque  jour  jufqu*à 
vingt  &  trente. 

Elle  attaquoit  auflî  quelques  Blancs , 
principalement  des  enfans  :  on  Tap- 
T^çiioijarempion  ou  falempion ,  nom  Ef- 
pagnolj  difoient  quelques-uns,  ou 
Provençaljfuivant  d'autres.Cétoit  une 
efpece  de  rougeole  boutonnée ,  &  elle 
n*en  difFéroit  qu  en  ce  que  la  peau  n'é- 
toitni  élevée  ni  enflammée.  J'ai  pour- 
tant vu  quelques  enfans  blancs  avec 
CQs  deux  fymptomes. 

Notre  malade  en  fut  attaqué  le  cinq 
ou  fixieme  jour  de  fon  délire ,  mais 
fans  rhume  de  cerveau  ni  de  poitrine  , 
&  avec  peu  de  fièvre  :  il  n'en  fortit 
que  quelques  grains  au  vifage ,  aucoU 
&  aux  mains.  A  mefure  que  les  puC- 
tules  fécherent ,  fon  délire  diminua.  Il 
en  reparut  d'autres  dix  ou  douze  jours 
après  :  le  délire  augmenta.  A  peine  cc^ 
fécondes  furent-elles  féchées  ,  qu'il  en 


revint  de  nouvelles  aux  mêmes  en- 
droitsi  le  délire  fUt  moins  fort  qu  avant 
6c  pendant  la  féconde  éruptibii.  Elle  fé 
fit  encore  au  moins  trois  ou  quatre  fois. 
Pendant  tout  ce  tems  qiii  fût  environ 
de  deux  mois ,  le  délire  ne  ceffa  point 
entièrement:  mais  à  chaque  éruption  il 
étoit  moins  violent  qu'à  la  précédente  > 
quand  il  ne  s'en  fit  plds  du  tèut,  le 
malade  revint  dans  fonbon  fens. 

Il  y  avoit  plus  de  trois  mois  que  la 
fanté  du  corps  6c  de  Tefpric  étoit  réta- 
blie 5  quand  il  en  reparut  de  nouveau  . 
Jufqu  à  troisreprifes.  A  la  première  ,  le 
malade  parut  morne ,  Tefprit  &  la  mé- 
moire s'afFoiblirent  un  peu  3    à  la  fé- 
conde &  troifieme,  qui  fut  enfin  la 
dernière,  le  corps  ni  Tefpritne  fouf- 
frirent  point.  Le  malade  n'eut  point  de 
dévoiement    dans  aucun  tems ,  ma^is 
feulement  le  ventre  plus  libre    après 
chaque  éruption,  lorfquelespuftutes 
commençoient  à  fécher.  Pour  fuppléer 

G  iv 


w 


^mk-. 


fi 04   Mal.  de  St.  Dôm;^ 

à  cette  évacuation  critique  ,  je  le  pur- 
geai deux  ou  trois  fois  avant  qu'il  pa- 
rût de  nouvelles  puftules. 

J'ai  l'honneur  d'être  j&c. 


Fip^  de  la  première  Lettre, 


SECONDE 

L  E  T  T  RE. 

SUR     LES    PLANTES 


DE   St.  do  min  GUE. 

O  u  S  m'avez  paru  content , 
Monfieur,  de  ce  que  je  vous 
ai  écrit  fur  les  maladies  de 
St.  Domingue ,  &  vous  m'ex- 
hortez à  communiquer  auffi  ce  que  j'ai 
remarqué  fur  les  Plantes  du  même 
pays. 

Je  ne  fai  fi  je  pourrai  vous  fatisfairc 
fur  cet  article  :  jo  n'en  ai  décrit  que 


H 


P  LA 


N  T  E   S 


quelques-unes  dont  les  qualités  fingu- 
lieres  font  ignorées  ou  peu  connues  i 
&  quelques  autres  dont  \qs  defcrip- 
tions  données  parles  Auteurs  de  ma- 
tière médicale,  fontfauflTes  ou  impar- 
faites. ^ 

J'ai  été  détourné  d'en  décrire  un 
plus  grand  nombre,  parce  que  j'ai  fup- 
pôle  quon  trouveroit  dans  le  P.  Plu- 
mier tout  ce  quon  pou  voit  fouhctiter 
fur  cette  matière.  Mais  de  retour  ici , 
quand  j'ai  examiné  Touvrage  de  ce 
favaiit  Religieux,  il  mVparu  que  ni 
IQS  Médecins  du  pays  ni  ceux  d'ici  n'en^. 
jTourrôient  pas  tirer  un  grand  fecôtirs 
^  pour  les  maladies ,  parce  qu'il  n'indi- 
que ni  its  vertus  médicinales  des  plan- 
tes, ni  le  nom  qu'elles  portent  à  St.  Do^^ 
lîiingue.  Si  l'on  vouloit  quelque  chofe 
de  parfait  en  ce  genre  ,  il  faudroic 
qu'un  Médecin  uniquement  cxrcupe  dd 
cet  objet  parcourik  les  difFérens  quar- 
tiers de  cette  îleiqu'îl  s'informât  exac- 


VE  Sf.  DoMi^cvE.   Î07 

tement  du  nom  de  toutes  les  plantes 
qu*on  y  emploie  avec  fuccès,  qu'il 
en  fît  une  defcription  exade  :  enfnitc 
il  les  rangeroit ,  ou  les  communique- 
roit  aux  Botaniftes  de  profeffion  qui 
lesrangeroient  dans  les  clafles auxquel- 
les elles  appartiennent,  ou  qui  en  for- 
meroiént  de  nouvelles.  Mais  on  nc^ 
doit  pas  attendre  ce  travail  d'un  Mé- 
decin occupé  à  traiter  les  malades. 

Ainfi  quand  j'aurois  fu  ce  qui  man- 
que à  l'ouvrage  du  P.  Plumier ,  il  m'au- 
roit  été  impoffible  d'exécuter  ce  que 
je  viens  de  propofer. 

Pour  faciliter  ces  recherches,  je 
crois  qu'on  pourroit  fe  fervir  utilement 
d'un  manuicrit  que  j'ai  entre  les  mainé 
qui  a  pour  titre  : 

„  Livre  des  fimples  de  l'Amérique 
fervans  au  corps  humain ,  décou- 
verts par  André  Minguét,  tant  en 
Médecine,  que  Onguens.  A  la  côte 
de  St.  Domingue,  l'an  de  grâce  1 7 1  p 


>> 


3> 


» 


ii:     i 


i)R».        fit 


X08         P    LA    N    TE   5r2 

;    Ce  manufcric  eft  fort  rare  ,  je  n'eix 
ai  vu  qu  une  copie  ,  qui  appartenoit  à 
M^'-  Duhamel  Médecin  du  Roy  5  faite 
fur  l'original  que  poffédoit  M^'-  Depas, 
auffi  Médecin  du  Roi,  &  qui!  voulut; 
bien  me  communiquer. 
.  Vous  voyez  ,  Monfieur ,  par  le  feul 
titre,queMinguet  étoit  un  homme  fans 
lettres.   Auffi  n'étoit-il  ni  Médecin  , 
ni  Chirurgien,  ni  Apothicaire.    Ce-,  ' 
pendant  tout  ignorant  qu'il  étoit,  il 
a  eu  une  grande  réputation  dans  lepay^ 
pour  la  guérifon  des  maladies  tant  im 
ternes    qu'externes.    Cela  n'eft  poinç 
étonnant  ,    vous  favez  le  proverbe, 
au  pays  des  Aveugles  les   Borgnes  font 
Rois, 

^  Aux  portes  de  Paris ,  pour  ainfi  dire  > 
n'avons-nouspas  vûun  payfan,  connu 
fous  le  nom à^Medecm  deChmdrai.q^uQ 
Ton  alloit  confulter  de  dix  lieues  à  la. 
ronde,  &  de  Paris  même?  Quelques, 
cures  faites  au  hafard ,   par  le  moyeu 


DE   Sr.    DOMÏN  GVE.    {Q^ 

de  quelques  plantes  qu*il  ne  connoif- 
foit  2;ueres  mieux  que  les  maladies, 
5c  qu'il  ordcmioit  pour  toute  forte  de 
maux  5  fans  diftindion  d  âge  ,  de 
fexe,  &  de  temperamens  ,  lui  don- 
nèrent une  réputation  qu'un  bon  Mé- 
decin n'auroit  peut-être  pas  pu  acqué- 
rir. La  raifon  en  eft,  que  pour  faire 
honneur  à  ces  fortes  de  gens  ,  on 
ne  compte  que  ceux  qu'ils  ont  guéris 
ou  foulages,  &  non  ceux  qu'ils  ont 
manques,  ou  à  qui  il  eft  arrivé  quelque 
chofedepis. 

Tel  étoit  apparemment  ce  Minguet 
dans  un  pays  qui  n'a  voit  peut-être 
pas  encore  vu  de  véritables  Médecins. 
Quoiqu'il  en  foit,  fon  ouvrage,  tout 
imparfait  qu'il  eft,  peut  apprendre  au 
moins  le  nom  desplaotes  de  cette  île  5 
&:  quant  à  ce  qu'il  dit  de  leurs  vertus, 
les  deux  Médecins  dont  j'ai  parlé  ,  n'y 
ont  rien  trouvé  à  redire  5  &:  M'*  Dulia- 
•^mel  grand  Botanifte  ,   qui  a  corrigé 


5  '    I 


1  lO 


Plantes 


i 


une  vingtaine  de  dénominations  dé 
plantes  ,  n'a  pas  corrigé  un  feui  mot 
fur  les  qualités  qui  font  attribuées 
tant  à  celles  que  j*ai  extraites  de  fon 
nianufcrit,  qu'à  toutes  les  autres  dont 
je  n'ai  point  parlé. 

Je  les  ai  auflî  prefque  toutes  emplo- 
yées ,  &  quand  j'en  rapporte  quel- 
qu'une dont  je  ne  me  fuis  pas  fervi , 
ou  que  je  ne  connois  point,  je  ne 
manque  pas  d'en  avertir:  c'eftun  aveu 
que  je  ne  fuis  pas  caution  de  ce  qu'il 
avance.  4 

J'ai  cru  ne  devoir  rien  changer  dans 
le  ftyle  de  Minguet ,  puifque  c'eft  fon 
ouvrage  que  je  donne  &;  non  le  mien. 
Son  texte  eft  diftingué  de  ce  que  j'y 
ajoute  par  des  guillemets ,  ou  par  le 
caradere  italique. 

Entre  les  plantes  que  j'ai  choifies 
dans  ce  recueil ,  j'ai  remarqué  celles 
que  M''*  Lepoupée  des  Poxtes ,  Méde- 
cin du  Roi  au  Cap  ,  a  fait  entrer  dans 


■;"^fl^'': 


D  E  St.  DOMÎNGU  E.     Ht 

les  formules  pour  THôpital  dont  il 
étoit  chargé.  J'ai  même  cité  le  P.  La- 
bat  quand  j'ai  trouvé  qu'il  avoit  bien 
décrit  quelque  arbre  ou  quelques 
plantes  dont  parle  Minguet.  Enfin , 
Monfieur  ,  je  n'ai  rien  oublié  de  ce 
que  j'ai  cru  qui  pouvoir  contribuer  à 
donner  une  connoiflance  plus  parfaite 
des  plantes  de  St.  Domingue  &  de  leurs 
vertus. 

POINCILLADE, 

Toi^ciama ,  Jlore  pulcherrimo, 

LaPoincillade  eft  un  arbrifleau  épi- 
i;ieux  qui  croît  à  la  hauteur  de  lîx  oii 
fept  pies.  Il  a  tiré  fon  nom  du  Com-* 
mandeur  de  Poincy  ,  Gouverneur  Gé- 
néral des  îles  du  Vent ,  c'eft-à-dire  , 
Général  de  la  Martinique ,  6l  des  îles 
qui  en  dépendent  {a).  Ses  feuilles re& 

(  a  )   C'eft  lui  ,  qui  ayant  découvert  quelque  amer* 
tUiTiedans  cette  fleur,  jugeaqu*eliepouvoit  être  bonne 


ïlâ  P    l   AN    t    Ê    i?       ^ 

femblentàcelle  deTacacia,  ou  delà 
réglifTe  da  pays,  rangées  vis-à-vis  l'une 
de  Tautre,  fur  une  côte  qui  donne  une 
épine  formée  en  hameçon  à  la  balTc 
de  chaque  feuille.  Ses  fleurs  font  à 
cinq  pétales.  Il  y  en  a  quatre  d'une 
égaie  grandeur  difpofés  en  croix,  gau-- 
dronnés  à  leur  bord,  qui  eft  d'un 
beau  jaune  ,  le  refte  eft  de  couleur  de 
feu  :  la  partie  inférieure  des  feuilles 
de  la  fleur  eft  rouge,  étroite  comme 
celle  de  l'œillet  :  cette  couleur  rouge 
s'étend  jufqu'au  milieu  de  chaque 
feuille ,  comme  par  autant  de  petites 
'artères  qui  portent  ce  fuc  rouge  juf- 
qu'aux  bords  qui  deviennent  auflîroir- 
■ges  ,  quand  la  fleur  n'eft  cueillie  qu'a- 
près vingt-quatre  heures  ou  environ. 
Ces  quatre  feuilles  font  foutenues 

pour  la  fièvre  ,  il  en  efTaya  &  il  reuflîr.  Me.  dcLar* 
nage  m'apprit  qu'à  ia  Mar.inique  on  en  donnoic  Pinfu- 
fion  dans  du  vin  ,  pour  les  fièvres  quartes.  J'en  guéris 
deux  ;  ce  qui  me  donna  occafion  de  l'eflayei:  en  infur 
fion  dans  l'caii  bouillaiue.  ' 

chacmK 


DE  St.  Domin gv e.   h^ 

chacune  par  une  autre  plus  épaiffe , 
faite  en  cuilleron  ,  qui  n'eft  autre  cho- 
fe  que  la  feuille  d\in  calice  découpé 
jufqu'à  fa  bafe  en  cinq  parties.  La 
cinquième  feuille  de  ce  calice  ,  faite 
auffien  cuilleron  plus  profond  que  les 
au tres^eft  placée  dans  un  intervalle  que 
luilaiflent  deux  des  grandes  feuilles  de 
la  jfîeur ,  vis-à-vis  la  cinquième  feuille  : 
celle-ci  s'élève  hors  du  rang  des  qua- 
tre autres  plus  proche  du  centre  ?  com- 
me une  efpece  de  cylindre  prefqu  aufli 
haut  que  les  bords  des  quatre  grandes 
feuilles:  elle  s'évafe  en  une  feuille 
moitié  plus  petite  que  chacune  des 
quatre,  fa  forme  eft  prefque  ronde  a 
gaudronnée  comme  les  autres ,  prefque 
toute  jaune  5  on  apperçoit  quelques 
veines  rouges  5  &  en  reftant  fur  lar- 
briiTeau  elle  devient  tout  à  fait  rouge. 
Du  centre  ,  entre  cette  petite  feuille 
Scelle  du  calice  qui  lui  eft  oppofée  , 
fortent  dix  étamines  rouges  qui  s'éle- 

H 


î  14        ■    ^  ^^  N  T   Ë   s 

vent  feeancoLip  au-deflus  delà  fleur 
de  qui  font  un  peu  courbées  :  elles  en- 
y ipDnnent  l'embryon  qui  fe  termine  en 
un  filet  de  la  même  hauteur  que  les  éta- 
mines.  Cet  embryon  devient  unefiii- 
queplatc,diire,de  couleur  de  châtaigne 
en  delîors  $  blanchâtre  en  dedans , 
formée  de  deux  coffes  qui  renferment 
huit  ou  neuf  femences.,  larges,  cpaifles 
comme  les  plus  groiîes  lentilles ,  de 
figure  prefque  qiiarré€,ou  approchante 
dun  cœur  applatti,  fogées  chacune 
dans  une  foflfe  féparée  l'une  de  l'autre. 
Les  feuilles  du  calice  font  de  cou- 
leur de  feu  en  dedans,&en  dehors  d'un 
rouge  mQJ4iis£oncé  me  le  de  jaune  ôc  de 
verd. 

Les  boutons  delà  fleur  font  rangés 
en  épi  ferrés,  attachés  par  de  courts  pé- 
dicules fur  une  tige  fans  feuilles ,  gros 
en  bas  &:  plus  petits  à  mefure  qu'ils 
s'approchent  de  la  fommité.  Les  pé- 
dicules s'allongent  en  longue  queue, 


DE  St.  Domïn gve.   ii| 

àmefureque  les  boutons  groffiflents: 
il  ne  s'en  épanouit  gueres  que  quatre 
chaque  nuit  5  &  ainfi  de  proche  en 
proche  du  bas  en  haut  de  la  tige ,  qui 
croît  auflî  jufqu  a  un  certain  point ,  de 
manière  qu'il  yen  a  qui  donnent  plus 
de  cent  fleurs  >  enfuite  cette  tige  fe 
feche. 

Il  y  a  peu  de  branches  de  rarbrifleau 
qui  ne  produifent  en  même  tems  plu- 
fieurs  grappes  ou  épisi  &â  mefure  que 
les  tiges  fechent,  il  en  renaît  d'autres , 
en  grande  quantité  pendant  près  de 
neuf  mois ,  &  toiijours  quelques-unes 
pendant  toute  l'année  ,  plus  ou  moins, 
lui  vaut  qu'il  y  a  plus  ou  moins  de  pluie. 
Les  mois  de  fecherefle ,  font  Décem- 
bre ,  Janvier  ,  Février  ,  Mars  ,  quel- 
quefois Avril.  Il  naît  allez  fouvent 
une  fleur  dans  l'aifiTelle  de  quelques 
feuilles. 

Les  fleurs   de  la  Poincillade    pri- 
fes ,  comme  du  thé  ,  avec  un  peu  de 

H  ij 


m 


IJ^  P  L   A  N  TE   S 

fiicre  ,  font  fudorifîques  béchiques 
vulnéraires.  J'ai  guéri  par  leur  fe- 
Gours  trois  perfonnes  qui  avoient  un 
ulcère  au  poumon.  M'^'  Alais  Méde- 
cin de  la  Rochelle  ,  à  qui  j'en  en- 
voyois tous  les  ans  ,  m'a  écrit,  qu'il 
avoit  p-uéri  plufieurs  vieillards  de  tu- 
berculesaupoumon5&rétablilapoitrine 
de  quelques  Avocats  de  Paris,auxquels 
il  en  avoit  envoyé.  Je  m'en  fuis  fervi 
avec  fuccès  pour  les  petites  véroles, 
les  rougeoles  accompagnées  de  toux 
ferines ,  6c  dans  tous  les  rhumes.  On 
en  met  une  pincée  dans  une  pinte  de 
tifanne  convenable  ou  d'eau  bouil- 
lante. Elles  font  auflî  un  excellent  fé- 
brifuge, données  dans  une  forte  infu- 
fion.  Il  faut  en  mettre  une  petite 
poicrnée  dans  un  pot  j  on  verfe  par- 
deflus  une  pinte  d'eau  bouillante  ,  on 
couvre  le  pot  :  on  en  donne  au  ma- 
lade deux ,  trois ,  Se  quatre  taffes  bien 
chaudes  avec  du  fucre,  une  heure  ou 


r>  E  St.  Do  min  gu  e,  u  j 

deux  avant  l'accès.  Ordinairement 
le  malade fue  beaucoup  ,  ôcle troifie- 
me  accès  ne  revient  point. 

Elles  ont  cet  avantage  fur  le  quin- 
quina, que  Tonn'eftpas  fuj et  aux  ré- 
cidives, 6c  qu'elles  lont  agréables  à 
prendre. 

Je  les  ai  auflî  données  avec  fuccès  , 
pulvérifées ,  en  opiate  ,  dans  les  fiè- 
vres rebelles ,  principalement  les  quar- 
tes. 

Il  faut  les  cueillir  tous  les  matins 


quand  le  Soleil  a  féché  la  rofée  qui 
etoit  deffus  3  les  faire  fécher  à  Tom- 
bre ,  avoir  foin  de  les  retourner  tous 
les  jours ,  6c  les  enfermer  enfuite  dans 
une  boîte. 

Tois  fuant. 

Le  pois  puant,  {^)  eft  une  plante 
qui  jette  plufieurs  rameaux  forts  dui^s^ 

(  a  )  Les  Botaniftes  difent  quq  c'eft   une   efpecç 
de  cafle. 


ïl 


P  Z   A 


TES 


&  eomme  ligneux,  à  la  hantear  de 
trois  OU' quatre  pies.  Les  feuilles  font 
oppofées  deux  à  deux  fur  une  côte  , 
oblongues  ,  pointues  ,  vertes  en  def- 
fus  ,  blanchâtres  en-delTous,  fort 
puantes:  fes  fleurs  font  à  cinq  feuilles 
alfez  reflemblantesà  celles  du  genêt. 
Elles  font  fuivies  de  gonfles  longues 
d'un  doigt,  prefque  rondes  de  la  grof- 
feurd'un  gros  tuyau  déplume.  Elles 
contiennent  plufieurs  femences  noi- 
râtres,  groffes  comme  des  pépins  de 
raifins  ,  applaties  dans  le  milieu  ,  & 
un  peu  pointues  par  rextrémité  qui 
était  attachée  à  la  gonfle  avant  de 
fécher.  U  y  a  des  gonfles  qui  en  ren- 
ferment plus  de  cinquante. 

On  aflTure  que  les    femences  ro-  « 
tîes  &  broyées  prifes  en  guife  de  cafFé,  " 
font  bonnes  pour  lapaffionhyfl:érique, 
&  quelles  font  emménagogues. 

Les  feuilles  en  layemen}; ,  font  fort 
efficaces  contre  les  vapeurs  ,  &  dans 


DE  St.  Dqmingve.  h^ 

les  cataplafmes  refalutifs.  U)  La  ra- 
cine eft  excellente  pour  guérir  les  go- 
jiorrhées3  on  les  donne  en  tifanne  poux 
toute  boiflon  5  elle  eft  um.peu  amese. 

Il  faut  auparavant  faire  préeéder 
les  faignées  néceffaires>  &:  les  tifam-ies 
rafraîctiiflantes  ,  j;ufquà  ce  que  les 
douleurs  foienx  paffées.  Pendant:  to%îU 
le  tems  que  j'ai  été  à  St  Domingoe  « 
je  n  ai  point  employé  d'autres  remèdes^. 

On  peut  conjecturer  que  cette  ti- 
fanne  conviendroit  également  dans 
les  fleurs  bdanckes. 

Il  y  a  une  autre  efpece  de  p^i^ 
puant 5  q^i  ^"'^  diffère  delà  première 
que  par  fes  feuilles  qui  font  prefque 
rondes  &  d'un  ver  plus  clair:  je  nai 
point  ùàt  ïïkfage  de,C€tte  Çecoade. 

L'arbre  nommé  Immortel  (^)  efl 

(;^)  MonCewiT  Lepouçé-e  DefpoFtes,   Medeem  du 
Rûi  au  Cap  ,  daaisks  focmuksd'Hô-pita]. 

H  iv 


120 


L    4    N   T    E  S 


épineux  jufqu*à  ce  qu*il  ait  acquis 
la  grofleur  de  la  jambe  :  à  niefure 
qu^il  croît  &  groflît ,  il  perd  fes  épines  , 
ôc  il  n'en  refte  que  fur  les  jeunes 
branches.  Il  a  été  ainfi  nommé, 
parce  qu'on  peut ,  dit-on ,  le  dépouil- 
ler de  toute fon  écorce  ,  fans  qu  il  pé- 
rifle  (  45  ).  Il  a  une  cavité  ,  comme 
le  fureau  :  mais  elle  eft  plus  étroite  àc 
a  moins  de  moelle  par  conféquent. 

Ses  feuilles  font  en  cœur,  non 
échancrées  par  la  bafe  ,  difpofées 
comme  celles  des  pois ,  trois  fur  une 
longue  queue.  Elle  tombent  vers  le 
mois  de  Décembre ,  &  font  place  à  la 
fleur. 


pelle  immortel ,  fort  différent  de  celui-ci. 

(a)  J'en  ai  fait  dépouiller  fix ,  qui  n'avoienr  pas 
deux  ans,  depuis  le  bas  du  tronc  jufqu'à  la  divifion 
en  branches.  Les  feuilles  n'en  changèrent  pas  de  cou- 
leur. ^Ils  portèrent  des  fleurs  à  l'ordinaire  :  il  n'en 
mourût  qu'un  après  avoir  porté  fes  fleurs.  Il  efl:  auflî 
connu  fous  le  nom  d'Arùor  Maurepajta  *  le  Maurepas; 
que  je  lui  ai  donne'  à  caufe  de  fes  excellentes  qualités.* 


D E  St.  Do  mi ng  ue.  121 

Les  fleurs  forment  u  ne  infinité  de  gros 
bouquets  compofés  de  boutons  cour- 
bes,  au  nombre  de  cinquante  ou  foî- 
xante  ,  de  la  longueur  du  petit  doigt, 
fur  une  grolfe  tige.  Ils  font  enveloppés 
d'une  gaine  ou  calice,  qui  fe  fend 
en  long  par  le  milieu,  &  laifle  voir 
une  portion  de  la  fleur  de  couleur  de 
feu.  Chaque  bouton  a  une  queue  lon- 
gue de  quatre  ou  cinq  lignes.  Quand 
il  s'épanouit  ,  il  paroît  une  feule 
grande  feuille  droite ,  longue  d'un 
demi  doigt  à  peu-près  en  fer  de  pique 
allongé  5  à  Toppofite  paroît  le  calice 
formé  en  long  cuilleron.  Au  milieu 
du  calice  &  au-deflbus  de  la  feuille  de 
la  fleur ,  on  voit  une  petite  fleur  à 
quatre  feuilles  difpofées  en  grelot. 
Du  centre  fort  le  piftil ,  enveloppé 
d'une  gaine ,  qui  fe  divife  en  dix 
étamines.  Le  piftil  eft  l'embryon  du 
fruit.  Toutes  les  parties  de  cette  fleur 
repréfentent  alTez  bien  un  cafque. 


I2Z         P    L    A    N  T  E    S 

Le  fruit  ell  une  goufle  courbe  con- 
tenant fix  ou  fept  fèves,  groffes  , 
(avant  qu'elles  foient  deffëchées  ) 
comme  une  fève  de  marais. 

Les  feuilles  ,  leur  queue  ,  & 
Fécorce  de  cet  arbre  font  le  plus  grand 
remède  qui  foit  connu  pourTafthme: 
on  en  met  un  gros  dans  cinq  demi- 
feptiers  d'eau  que  Ton  fait  réduire  à 
une  pinte  avec  du  miel  i  ou  bien  on 
met  du  fucre  en  la  prenant  chaude- 
ment. Pendant  Taccès  on  en  peut 
prendre  tant  qu'on  veut:  ce  remède, 
n'échauffe  point ,  &  ne  fait  d'autre 
effet  que  de  procurer  Texpedoration, 
{a)  pour  prévenir  l'accès,  il  fuiSt  d'ea 
prendre  plein  une  petite  jatte  matin 
&  foir. 

La  même  décodion  eft  auffi  fort 
bonne  dans  les  rhumes  de  poitrine. 
On  fait  avecla fleur  un  firop  excellent 
pour  les  poitrines  échauffées. 

^  (  ^  )  Il  m^4  pourtant  paru  un  peu  laxatif  &  diuré- 
tiq  e. 


t>£   St.    DOMINGUE.     I2J 

Cet  arbre  eft  fort  commun ,  furtout 
depuis  que  je  l'ai  multiplié:  il  vient  de 
graine  6c  de  bouture ,  ôc  croît  environ 
de  fix  lignes  en  vingt-quatre  heures  5 
en  forte  5  qu'en  moins  de  deux  ans 
il  a  des  branches  qui  ont  plus  de  dix 
pies  de  haut. 

Les  Botaniftes  ^  d'après  le  P.  Plu- 
mier ,  l'appellent  cor dlodendr on  y  vciot 
grec,  qui  fignifie  arbre  de  Corail* 

Il  y  a  à  St.  Domingue  un  autre 
arbriflbau  qui  vient  dans  les  haies, 
dont  les  fleurs  font  affez  femblables  à 
celles  du  chevrefeuil,  que  l'on  appel- 
le arbre  de  Corail  ;  on  fait  avec 
fes  feuilles  des  bains  eftimés  pour 
guérir  la  galle. 

Cachiment  ou  cœur  de  bœuf. 

Il  ne  faut  pas  confondre  CQt  arbre 
&  fon  fruit  avec  celui  qui  eft  décrit 
dans  le  Didionnaire  de  Lemery,   Cet 


9» 


i  14       P  ^^  N  T  E  s 

Auteur  parle  d'un  arbre  qu'il  nomme 
gmabâne  ou  cœur  de  bœuf.  '<  C'elc ,  dit- 
"  il)  un  grand  &  bel  arbre  des  Indesi  il 
w  porte  un  fruit  très-beau  ,  gros  ordi- 
»  nairement  comme  un  melon  médio- 
cre ,  &  quelquefois  comme  la  tête 
9»  d'un  enfant.  L'écorce  de  ce  fruit 
'>  efl  verte ,  &  femble  diftinguée  par 
»•  certaines  écailles,  comme  la  pom- 

«  me  dcJPin Sa  chair  elt  fort 

•'  blanche  ôc  d\in  goût  très-délicat .  »» 

L'arbre  qu'il  décrit ,  s'appelle  à  St. 
Domingue,  Coroflblier,  &  le  fruit  Co- 
roflol.  Ce  n'eft  ni  un  grand,  ni  un  bel 
arbre  3  fon  fruit  n'eft  pas  d'un  goût  fore 
délicat.  Lés  Nègres  &:  quelques  fem- 
mes Créoles  en  mangent ,  mais  fans  en 
être  friands.  On  en  fait  une  gelée  ai- 
grelette affez  bonne. 

Le  P.  Labat  a  fort  bien  décrit  le  Co- 
roffolier ,  un  autre  arbre ,  que  l'on  ap- 
pelle le  pommier  de  canelle ,  Se  le  cœur 
ce  bœuf.   Les  Planches  qu'il  3  fait 


DM  St.  Do mingve,  12 f 

graver ,  répréfentent  parfaitement  ces 
trois  arbres  avec  leur  fruit. 
L'arbre  dont  le  fruit  s'appelle  cœur  de 
bœuf ,  ou  cachiment  cœur  de  bœuf, 
eft  comme  le  précédent,  un  petit  ar- 
bre  ordinairement  tortu  &  fort  mal 
fait  5  de  la  hauteur  d'un  néflier.  Ses 
feuilles reiTemblent  à  celles  du  pêcher. 
Je  crois  que  celles  du  ganabane  font 
faites  de  même  ,  fnion    qu'elles  font 
plus  vertes  5  auffi-bien  que  celles  d'un 
autre  arbre  que  l'on  nomme  cachi- 
ment Efpagnol  ou  pommes  de  canelle 
qui  ont    beaucoup   de  reflemblance 
avec  le  corroflol  par  la  figure ,  par  la 
chair  membraneufe  ,  les  pépins  de  les 
écailles,  fi  ce  n'eft  qu'elles   font  plus 
petites. 

Je  n'ai  pu  voir  la  fleur  du  cœur  de 
bœuf  5  parce  qu'il  n'y  en  a  point  dans 
les  quartiers  ou  j'ai  demeuré:  elle 
paroît  vers  le  mois  de  Décembre. 

Son  fruit  eft  gros  comme^  une  groffe 


126         P  L   A  ^  T  JE  ^ 

poire  de  bon  chrétien  >  il  a  la  fi(>ure 
approchante  d'un  cœur  vert  au  com- 
mencements d'un  jaune  brun,  quand  il 
a  acc|ais  fa  groiïeur,  &  de  couleur  de 
rofe  quand  il  eft  mur.  Sa  pulpe  eft 
blanche  alors  ,  &  de  confiilance  de 
bouillie:  les  Nègres  &  quelques  fem- 
mesCréoles  en  mmgentjellen'eft  point 
aufli délicate  queleditle  Diftionnaire 
de  Trévoux  y  {a)  mais  elle  n'eft  pas  de- 
fagréable. 

Quand  il  a  acquis  à  peu  près  fa  grof- 
feur,  je  le  fais  cueillir  avant  fa  matu- 
rité ,  je  le  coupe  par  tranches  & 
le  mets  fécher  à  Fonibre. 

Nous  n'avons  point  en  europe  de 
remède  fi  prompt  &:fi  afliiiré  contre  les 
diarrhées  &  les  dyflenteriesi  après  les 
fiîgnées  convenables,  &  les  pùrga- 
tions>  fi  elles  fojit  néceffaircs,  lorf- 

(a)  Il  y  efl  dir  ,  que  c'ait  un  friût  de  Siam.  j'ai 
connu  ces  jours-ci  un  Chirurgien  qui  venoit  desGraa- 
des-indes  ,  qui  m'a  die  qu'il  j  en  a  voit  vu. 


DE  St.  Do  min  g  ve.    127 

qu'il  n'y  a  point  de  fièvre  ni  de  dou- 
leurs dans  le  ventre  :  le  ténefme  feul 
ne  doit  pas  empêcher  de  s'en  fervir. 
On  fait  bouillir  deux  gros  de  ce  fruit 
mis  en  poudre  dans  une  chopine  d'eau, 
ou  d'une  décoâion  émoliiente  réduite 
à  moitié.  On  donne  cette  décoclion 
avec  la  poudre.  Le  malade  garde  ce 
lavement  le  plus  qu'il  peut. 

Si  le  ténefme  eft  violent  ou  fré- 
quent 5  il  eft  bon  de  faire  bouillir  la 
poudre  dans  la  décoftion  d'une  tête  de 
pavot  écrafée ,  &  de  pafTer  la  décodion 
avant  d'y  faire  bouillir  la  poudre  > 
ou  bien  dans  la  décoftion  de  la  pou- 
dre faite  dans  l'eau ,  ou  dans  une  dé- 
coûion  émoliiente  3  on  ajoutera  un 
gros  de  thériaque  nouvelle,  ou  bien 
quelques  gouttes  de  teinture  anodyne. 
On  réitère  ces  lavemens  fuivant  le 
befoin. 

Dans  les  diarrhées  ^  les  dévoie- 
Biens  y  il  faut  ufer ,  pour  boillon  or- 


'  »».^*^^.. 


128        Plantes 

dinaire  d'une  tifanne  faite  avec  ce 
fruit  coopé  par  morceaux.  On  en 
fait  bouillir  un  gros  dans  cinq  demi 
feptiers  d'eau  ,  que  1  on  fait  diminuer 
eiîYÎron  d'un  quart,  ou  jufqu'àce  que 
ia  reiotore  foit  de  couleur  de  rofe  ,  ou 
à\in  vin  clairet  i  on  peut  y  ajouter 
de  ia  régliffe.  Si  le  malade  a  coutume 
de  boire  du  vin  ,  s'il  eftfoible  ,  ou  fi  la 
diarrhée  eft  invétérée  ,  il  peut  en  met- 
tre environ  un  quart  fur  trois  quarts 
de  la  tifanne. 

Du  Alap^gle  rouge, 

îi  Y  a  trois  ou  quatre  efpeces  de 
Mangle.  [a)  Je  ne  connois  les  vertus 
que  de  celui  qu'on  appelle  mangle 
rouge.  Il  vient  comme  les  autres  fur 
le  bord  de  la  mer.  Il  croît  d'une  fa- 

{a  )  Voyez  le  Diclionnaire  de  Lemeiy  ,  article 
Man^s  p»  542.  ii  en  fait  de  trois  efpeces  ;  de  blanc  , 
A^-<ftxA^  &  d'une  autre  efpece  »  dont  il  ne  dit  point 
lacoueiir.  Ilfe  trompe  fur  prefque  tous  les  articles  ; 
ce  qiii  approche  le  plus  duvrai,  efl:  1^ remarque  tirée 


de  ia  relation  de  Monfieur  Froger. 


con 


I 


DE  St.  Domïngve.  i^^ 

çon  finguliere.  Le  premier  jet  qui 
fort  de  terre  en  produit  d'autres  à  les 
cotés  5  qui  au  lieu  de  s'élever  en  Tair 
fe  recourbent  vers  la  terre ,  &  y  pren- 
nent racine,  enforteque  dans  cetétac 
il  repréfente  un  trépié.  A  mefurc 
que  la  première  tige  qui  efl:  la  princi- 
pale, ôc  qui  devient  arore ,  s'élève  ,  elle 
produit  d'autres  rejettons  ,  qui  fe  re- 
courbent comme  les  premiers ,  &  pren- 
nent auflî  racines  i  ainfi  cet  arbre  tient 
par  une  douzaine  ,  ou  plus,  de  ces 
pies  qui  deviennentgros  &  forts ,  aux- 
quels les  huîtres  s'attachent  (  a  ),  LorC- 
que  le  tronc  eft  parvenu  à  la  hauteur 
de  trois  ou  quatre  pies,  il  fe  divife  en 
plufieurs  branches,  à  la  hauteur  de 
huit  ou  dix  pies.  Je  ne  l'ai  point  vu  en 

(  »  )  Les  huîtres  de  St.  Domîngue  ,  iûrtout  dans 
les  quartiers  que  j*ai  habités,  font  fort  petites,  <Sc 
beaucoup  moins  bonnes  que  celles  de  France.  Plu-, 
fîeurs  écailles  fe  tiennent  enfemble  &  forment  comme 
des  efpeces  de  petits  rochers  autour  du  bois. 


IJO  P  L    4/N    T    E    S 

fleur,  fes  fruits  font  des  goufles,  mais 
qui  n'égalent  pas  la  groiJeur  d'un  tuyau 
de  plume ,  fes  feuilles  font  allez  fem- 
tlables  à  celles  du  laurier. 

Le  P.  Labat  fe  trompe  fur  Tarticle 
du  mangle  rouge,  comme  fur  bien 
d'autres  :  mon  intention  n'eft  pas  de 
le  redreller.  Ce  qu'il  eft  important 
pour  la  médecine,  defavoir,  c'eflque 
fon  écorce ,  qui  eft  rougeâtre ,  féchee , 
réduite  en  poudre  &  prife  enfubflance 
ell  un  fébrifuge  aufS  affùré  que  le 
quinquina  ,  furtout  quand  elle  eft 
jointe  avec  la  poudre  du  convolvulu$ 
câthartkus.  Je  ne  l'ai  point  éprouvé  en 
4écoâ:ioi.i:  mais  jeprenois  un  gros  de 
poudra  de  mangle  avec  un  fcrupule 
pu  un  demi  gros,  (félon  que  je  vou- 
lois  purger  plus  ou  moins  )  de  poudre 
des  tiges  de  convolvulus  féchéesy  j'en 
formols  une  opiate  avec  laquelle  je 
guérijQTois  ^n  deux  ou  trois  prifes 
toutes  les  fièvres  tierces  des  Nègres: 


V  E    St.    D  0  MINGVE.     i>£ 

ce  que  j'ai  pratiqué  pendant  plus  de 
fîx  ou  fept  ans  :  enforte  que  pendant 
ce  tems  on  n*a  pas  employé  un  grain 
de  quinquina  dans  Thabitation  des 
Mineurs  Mithon  ,  où  il  y  a  300  Nègres. 

Liane  à  médecine  de  Minguet. 

Convolvuius  Catharticus  Americanus  , 
Jive  fcAmmonïa  Amcricana. 

Cette  efpece  de  liferon  que  Minguet 
appelle  liane  à  médecine  (4),  eftpré- 
cifément  la  même  chofe  que  la  plante 
de  Syrie ,  que  Ton  appelle  Icammonée, 
fi  ce  n'elt  que  fa  racine  n'elt  pas  à 
beaucoup  près  fi  longue  ni  fi  grofle  que 
M^'  Lemerylediti  qu'elle  n'eiè  point 
iaiteufe  ;  ôc  par  conféquent  la  fcam- 
nionée  qu'on  employé ,  n  eft  point  le 
fuc  concret  de  la  racine  ,  mais  de  1^ 

(  4  )  A  St.  Domîngue  ,  tous  les  convolvulus ,  & 
toutes  les  plantes  farmentcufes  s'appellent  liane ,  parc$- 
quelles  fervent  à  lier* 

I  ij 


LAN    TE    S 

tige  3  à  moins  qu  on  ne  veuille  dire 
que  la  fcammonée  de  Syrie  eft  telle 
qiî  elle  eft  décrite  dans  le  didionnaire 
des  drogues  fimpks ,  &.  que  celle  de 
St.  Dominguenelui  eftfemblable  que 
par  fes  tiges ,  fes  fleurs  &  {es  feuilles. 
Mais  cet  Auteur  fe  trompe  fi  fouvent 
dans  la  defcription  qu'il  donne  des 
plantes  de  St,  Domingue ,  qu'il  peut 
bien  fe  tromper  auffi  dans  celle  des  au- 
tres plantes  étrangères. 
-  Quoi  qu'il  en  foit ,  cette  plante 
pouffe  plufieurs  tiges  longues,  groffes 
prefque  comme  le  petit  doigt,  qui  s'at- 
tachent aux  arbriffeaux  voifins  :  (es 
feuilles  font  larges  d>c  longues  comme 
la  paume  de  la  main  ,  pointues  par 
leur  extrémité ,  &  du  côté  de  la  queue 
échancrées  èc  formées  en  cœur.  Ses 
fleurs  font  en  cloche.  Je  n'ai  point  vu 
lès  fruits  5  car  cette  plante  ne  vient 
.|ue  dans  les  montagnes. 

Ses  tiges  vertes  font  laiteufesi  6c 


DE  St.   DdMlNGVE.    Ï2Z 

quand  elles  font  feches  ,  elles  font 
remplies  de  réfine  brillante  quand  on 
les  cafiTe. 

Les  Nègres  eoupent  ees  tiges  vertes 
en  bifeau ,  de  la  longueur  d'un  demi- 
doigt.  Ils  arrangent  ees  morceaux  dans 
un  plat.  Le  lait  en  fort  &:  il  s  epaiffit 
en  une  belle  raifine  blanche  5  ou  bien 
cefuc  feehe  à  Textrémité  de  ces  pe- 
tits morceaux ,  &  avec  une  lame  de 
couteau  on  le  gratte  &  on  en  fait  d€ 
petites  malTes. 

On  employé  ceconvolvulus  en  in- 
fufion  5  en  firop ,  en  extrait.  Les  ha- 
bitans  du  pays  qui  le  donnent  en  in- 
fufion  déterminent  la  dofe  parla  lon-^- 
gueur  des  deux  bras  de  ceux  qu'ils 
veulent  purger.  Cette  préparation  a 
deux  défauts:  le  remède  eftmaldofé, 
&  Tinfufion  ou  décoftion  eft  fort  acre. 
Le  firop  eft  encore  trop  acre.  L'ex- 
trait, à  la  dofe  d'un  gros  n  eft  pas 
mauvais  ,  il  purge  &  eft  un  bon  vermî- 

I  iii 


Plan  t  s  s 

fuge.  On  donne  aaflî  laréfine  jufqu'à 
dix  ou  douze  grains  en  bol  aux  enfans: 
cette  dernière  manière  de  remployer, 
eftla  moins  bonne ,  parce  que  fou  vent 
la  refîne  s'attache  aux  parois  du  ven- 
tricule ou  des  inteftins  ,  caufe  des  fu- 
perpurgations ,  des  tranchées,  ôc  même 
des  convulfions. 

On  pourroit  faire  avec  cette  réfine 
une  poudre  ^^  tribus:  &  parce  que 
cette  poudre  caufe  fouvent  des  fuper- 
purgations  &  des  tranchées  ,  pour  re- 
médier à  ces  incon  véniens ,  voici  com- 
me je  la  fais  faire. 

Prenez  de  l'antimoine  diaphoréti- 
que  ,  du  diagrede  ,  de  Txthiops  mi- 
nera ^parties  égales:non-feulement  elle 
ne  donne  ni  fuperpurgations  ni  tran- 
chées, mais  c'eftun  excellent  fébrifuge. 

Mais  la  meilleure  manière  de  fe 
fervir  du  convolvpilm  catharticus  ,  c'eft 
de  mettre  fes  tiges  feches  en  poudre 
&  de  l'employer  dans  les  éleAuaire^ 
où  l'on  fait  entrer  la  fcammonée. 


VE  St.  Do  min  GUE,    ijj: 

Herbe  au  Charpentier, 

Uherbe  au  charpentier  ,  (  ceft 
ainfi  qu'on  Tappelle  à  St.  Domingo  e  , 
au  lieu  deTherbe  du  charpentier  )  eft 
une  petite  plante  qui  jette  beaucoup 
de  rameaux  rampans  remplis  de  nœuds 
de  diftance  en  diftance  5  d'où  fortenc 
des  racines  capillaires  par  le  moyen 
defquelles  elle  s'étend  beaucoup.  Elle 
a  deux  feuilles  à  chaque  nœud  >  op- 
pofées  l'une  à  l'autre  en  fer  de  pique. 

Les  fleurs  naiffent  à  l'extrémité  de: 
chaque  rameau  ,  qui  fe  divife  alors  en; 
plufieurs  autres  plus  petits»  fans  feuil- 
les. Elles  font  d'un  violet  clair  ^  ens 
<yueule5  &  très-petites.  Ce  font  des 
tiuyaux  évafés  en  deux  lèvres  i,ruaeT 
fupérieure,  l'autre  infétrieuarc.  La  fu- 
périeure  eftrenverfée  en  dehors,échan- 
crée  en  trois  parties.  Les  deux  des 
côtés  font  un  peu  plus  étroites  ôcplus; 
hautes  que  celle  du  milieu.  Depuis,  le 

I  iv 


I'!  I 


1^6  P  L  A   N  TE  S 

commencement  de  celle-ci  jufqu'aux 
échancrures ,   il  paroît   quatre  petits 
filets  blancs  couchés  à   roppofite  les 
tins  des  autres  de   chaque  côté  ,  & 
deux  qui  s'avancent  vers  la  troifieme 
partie:  ils  ne  fe  féparent  pas  facile- 
^Hient  de  cette  feuille.   Ils  m  ont  paru 
les  ramifications  d'un  nerf  blanc  qui 
règne  furie  dos  de  laJevre  fupérieure 
depuis  le   commencement  du  tuyau 
|ufqu  aux  bords  de  la  partie  moyenne. 
La  lèvre  inférieure    eft  une  petite 
feuille  pliée  en  cuilleron ,  qui  ne  s'é- 
lève guère  plus  haut  que  la  petite  plat- 
te-formeque  fait  la  lèvre  fupérieure 
en  fe  renverfant. 

En  ouvrant  le  tuyau  on  apperçoit 
trois  ou  quatre  étamines  blanches  qui 
entourent  un  piM  blanc.  Elles  font 
ordinairement  couchées  &  renfermées 
dans  la  duplicature  de  la  lèvre  infé- 
rieure. 

Lç  calice  de^  la  û^ur  eft  très  -  petk ,. 


1 


VE  St.  DôM  IN  G  UE.    157 

divifé  jiifqua  fa  bafe  en  plufieurs 
petites  pointes ,  il  ne  monte  pas  au 
quart  du  tuyau.  Le  piftil  fort  du 
fond  du  calice,  au  lieu  que  les  éta- 
mines  naiffent  du  fond  du  tuyau.  En 
arrachant  la  fleur  toute  entière  ,  le 
piftil  feul  refte  adhérent  au  fond  du 
calice,  §c  le  tuyau  femble  n'être 
percé  que  pour  laifler  pafler  ce  piftil  y 
qui  paroît  pofé  fur  un  embryon  très- 
petit  5  qui  devient  apparemment  une 
femence  ou  une  capfule  très-petite  , 
que  mes  yeux  n'ont  pu  reconnoître  , 
même  à  l'aide  d'un  microfcope. 

Le  plus  grand  mérite  de  Therbc 
au  charpentier ,  eft  qu'on  en  fait  un 
firop  excellent  pour  le  goût,  &  très- 
bon  pour  le  rhume  de  poitrine  3  il  a 
l'odeur  &  le  goût  d'amandes. 
tiM'^*  Lepoupée  Defportes  en  confeille 
l'infufion  dans  la  cachexie.  Il  fait  en- 
trer les  feuilles  dans  les  cataplafmes 
émolliens  ôcréfolutifs. 


On  dit  que  la  plante  pilée  &  appli- 
quée fur  une  plaie  récente  ,  la  guérit 
enpeudetemsi  ôcqueceft  par  cette 
raifon  quonlui  a  donné  fon  nom. 

On  alTiire  encore  qu  elle  eft  emmé- 
nagogue  >  eJleeft  certainement  aphro- 
difiaque  ,  &  fon  ufage  échauffe. 

On  peut  la  prendre  auffi  eninfufion 
après  une  légère  ébuliition.,  •  ' 
Cmîficier  ou  Cdjfier. 
On  donne  à  St.  Domingue,  cts 
deux  noms  àfarbre  qui  porte  la  caflTe. 
II  eft  grand  &  gros^fes  feuilles  viennent 
oppofées  Tune  à  l'autre  au  nombre  de 
dix  ou  douze ,  ôi  finirent  par  deux  fur 
une  tige  longue  d'environ  un  pié. 

Ses  fleurs'  font  à  cinq  feuilles,  jau- 
nes ,  prefque  rondes ,  longues  de  dix! 
ou  douze  lignes ,  fur  une  autre  tige  de' 
mênie  longueur,  depuis  vingt-quatre 
jufqu'à  trente ,  avec  de  longues  queues, 
ce  qui  forme  de  gros  bouquets,  enforte  | 
que  cet  arbre  fleuri  eft  dune  grande  ^ 
beauté. 


1. 

DE  St.  Do  min  g  ve.    i^gj 

Les  cloifons  des  filiqiies  ont  fort 
peu  de  pulpe  :  on  ne  peut  pas  les  mon- 
der. On  eft  obligé  d'écrafer  les  bâtons 
&  de  les  mettre  infufer  ou  bouillir> 
de  plus  ,  rarement  peut-on  les  avoir 
mûrs.  Les  Nègres  les  volent  prcfque 
encore  tout  verds ,  ou  les  maîtres  les 
cueillent  avant  leur  maturité ,  crainte 
d'être  prévenus  par  les  efclaves.  Il  ar- 
rive de-là,  que  plufieurs  ont  des  co- 
liques, &  rendent  des  glaires  fân-^ 
glantes ,  pour  un  feul  verre  de  cette 
décodion. 

Lacafle  de  la  Martinique  eft  meil- 
leure 5  la  pulpe  eft  plus  épaifle  fur  les 
cloifons.  M""'  Lemery  a  raifon  d'à-* 
vertir ,  que  la  cafle  du  levant  eft  la 
meilleure*  La  defcription  que  je  viens 
de  faire  eft  peu  différente  de  celle 
qu'on  trouve  dans  cet  Auteur  :  mais 
il  fe  trompe  lourdement ,  quand  il  af* 
fùrc  avçc  tous  les  Botaniftes  de  l'Eu- 
rope ,  que  la  partie  de  la  falfepareillc 


t^O     Mal  a  d  i  e  s 

dont  on  fe  fert,  eftla  racine  dune  ef- 
pece  de  fmilax. 

Sdfefareille, 

La  Salfepareille,  eft   une   plante 
quipouiTe  de  fa  racine  plufieurs  tiges 
longues,  farmenteufes ,  qui  fe  fendent 
aifement ,  blanches  en  dedans  ,  bor- 
dées de  deux  raies  rouges,  moelleufes, 
quand  elle  font  fendues.  Il  y  en  a  de 
deux  efpeces  ,   l'une  grifâtre ,  nouée 
de  diftance  endiftance,  unie,  (fi  ce 
n'eft  quelquefois  Textrémité   la  plus 
proche  de  la  racine  qui  eft  ridée  &  plus 
grolTe  que  le  refte).  Elle  .eft  garnie 
de  tenons  ou  mains,avcclefquelles  elle 
s'attache  aux  arbrifleaux   voifins  i  en 
un  mot  telle  que  nous  la  voyons  ici , 
excepté  qu  on  en  a  ôté  les  tenons.  Je 
n'en  ai  jamais  vu  qu'un  dans  celles 
que  l'on  nous  apporte.    Il  s'en  faut 
beaucoup  que  it^  feuilles  ayent  la  lon- 
gueur que  M^-  Lemery  leur  donne  : 


DE  St.  Do  min  g  V  e.  i^ï 

elles  n'ont  pas  plus  de  trois  ou  quatre 
doigts  y  elles  ont  des  oreilles  5  c'eft-à- 
dire  ,  quelles  font  découpées  (  ordi- 
nairement profondément)  de  chaque 
côté  vers  le  milieu ,  enforte  qu'elles 
repréfentent  trois  fers  de  pique  >  parce 
que  chaque  portion  fe  termine  en  une 
pointe.  Cette  plante  croît  dans  les  lieux 
pierreux  &  fabloneux,  avec  les  ha- 
liers.  J'en  ai  pourtant  vu  dans  les  bois, 
mais  la  terre  étoit  fabloneufe. 

Les  tiges  fortent  quelquefois  d'une 
tête  grofle  comme  un  œuf  [a))  le  refte 
de  la  racine  n'eft  pas  plus  gros  que  la 
tige  ,  longue  tout  au  plus  d'un  demi 
pié  3  elle  fort  aufll  de  la  même  tête. 
L'autre  efpece  eft  noirâtre^ridée,  rem- 
plie de  petites  racines  capillaires,parce 
qu'elle  rampe  parterre.  Je  n'ai  jamais 
vu  ni  feuilles^ni  fleursjui  fruits  de  cette 
efpece.  Il  y  a  apparence  qu'elle  croît 
dans  des  lieux  marécageux  3  ôc   que 

(a  )  Sa  fubftance  approche  de  celle  de  lafquine  d«. 
St.  Domingue  ,  qui  e&  plus  dure  que  celle  qui  nous 
vient  des  Indes  Orientales. 


^4^  P  l    ^   N   T  E  s 

ces  tiges  ne  trouvant  point  a  s'accro- 
cher, rampent  parterre,  &  y  jettent  la 
grande  quantité  de  racines  capillaires 

Sue  Ton  y  voit,  &  qui  ont  donné  lieu 
e  croire  qu  elles  font  elles-mêmes  des 
racines.  La  blanche  en  jette  aulîî 
quand  elle  ne  trouve  rien  pourfe  foû-^ 
tenir.        - 

Il  fort  des  aiflclles  des  feuilles  de 
petites  q-jeuesqui  foiitiennent  la  fleur: 
elle  elt  en  étoile  à  cinq  feuilles,ôc  non 
en  grappe.  Ce  calice  dans  fon  com- 
mencement eft  fermé  5    dans  la  fuite 
U  s'épanouit,  &  fait  voir  un  difque, 
autour  duquel  il  y  a  deux  rangs  de 
filets  très -courts  comme    deux  cer- 
cles concentriques.  Le  plus  grand  a 
auflîdes  filets,  plus  longs,  dont  la  poin- 
te eft  un  peu  recourbée  vers  la  fleur 
ou  le  calice  :  le  plus  petit  qui  envi- 
ronne le  difque  eft  compofé  de  filets 
très  -  courts  ,  qui  ne  reffemblent  pas 
inalà  une  frange.  Du  milieu  du  difque 


i>  E  St.  DoMiNCv  E.   14,3 

fort  un  piftil  qui  devient  le  fruits 
quand  la  fleur  elt  paflee.  Autour  de 
Tembryon  qui  eft  élevé  fur  la  pointe 
du  piftil  (^),  on  voit  trois  ou  quatre 
étamines  qui  naiflent  de  la  bafe  de 
l'embryon  i  il  y  en  a  deux  qui  reflem- 
blentàuncompas  ouvert  dont  le  fom- 
met  porte  fur  le  haut  de  Tembryon  , 
&:  les  branches  pendent  en  bas,  ' 

Entre  Textrémité  fupérieure  du 
piftil  &  lembryon  naiflent  trois  ou 
quatre  étamines ,  qui  par  leur  difpofi- 
tion  s'emblent  auffi  un  compas  ou- 
vert ,  dont  le  fommer  porte  &  fur  l'ex- 
trémité du  piftil  &  fous,  la  bafe  de 
l'embryon  ,  &  les  branches  pendent 
en  bas.  Il  y  a  encore  fur  la  pointe  de 
Tembryon  trois  ou  quatre  autres  éta- 
mines pofées  de  la  même  façon  en 
compas ,  dont  le  fommet  couvre   la 

(  ^  )  Dans  les  fleurs  ordinaires ,  le  piftil  porte 
communément  fur  Tembryon  :  dans  celle-ci ,  l'em- 
bryon eft  fur  le  fommet  du  piftil  qui  fait  iVfficç  de 
pédicule ,  &  qui  foûtiçnt  le  jeune  fruit. 


I;;';  i:l- 


■MM 


144       Plantes 

partie  fupérieure  de  Tembyron ,  &  les 
branches  pendent  en  bas  far  le  difque. 
Le  fruit  de  la  falfepareille  rejGTemble 
parfaitement  parle  dehors  à  un  grain 
de  raifin ,  verd  avant  fa  maturité , 
noir  quand  il  efl:  mur.  Il  contient  un 
fuG  rouge  ,  comme  celui  des  mûres  > 
Se  renferme  pkiiieurs  graines  ou  pé- 
pins comme  ceux  de  la  grofeille.  Le 
nombre  n  eft  pas  égal ,  on  en  trouve 
douze,  quinze,  dix- huit  ,  peut-être 
plus. 

Le  féné  eft  une  herbe,  &ç  non  un 
arbrifleau.  11  pouffe  de  fa  racine  des 
tiges  longues  de  deux  ou  trois  pies  , 
foibles  &  pliantes  ,  groffes  comme 
l'extrémité  du  petit  doigt  5  elles  ont 
befoin  d'être  foûtenues  ,fans  quoi  elles 
ramperoient  par  terre  :  les  feuilles 
naiiient  oppofées  deux  à  deux  ,  au 
nombre  de  quatorze  fur  une  côte.  Les 

fleurs 


J>E  St.    DOMINGUE.    JA^ 

fleurs  naiiTent  fur  une  autre  qui  n'a 
point  de  feuilles ,  &  qui  fort  de  l' aifTelle 
de  la  première  :  elles  font  jaunes  à 
cinq  feuilles  ,  &  repréfentent  un  gre- 
lot avant  d'être  épanouies.  Il  leur  ^ic- 
cède  des  goulTes ,  qui  font  connues 
ious  le  nom  de  follicules  :  chaque  tige 
en  porte  cinquante  ou  foixante  3  & 
chaque  follicule  renferme  huit  femen- 
ces  dans  autant  de  loges:  ces  femen- 
ces  font  a  peu  femblables  aux  pépins 
de  railins.  ^ 

Ses  racines  font  fort  longues ,  un  peu 
plus  grolTes  que  les  tiges  quifortentde 
terre.  J  en  ai  vu  qui  avoient  près  de 
deux  pies. 

Le  féné  que  je  viens  de  décrire  eft  la 
féconde  efpece  dont  parle  Lemerv  • 
^en^M  itdtcafi-ve  foins  obtufis.  J'en  ai 
peuplé  dans  le  tems  de  la  guerre,  les 
quartiers  de  Léogane  &  du  Cul-de-fac. 
Il  m  a  paru  purgermoins  que  celui  de  la 
1  alteice  quipeut  veniraulfijde  ceque  je 

K 


\\AÙ\\ 


Plantes 

ji'ai  cueilli  les  feuill  es  qu*après  la  parfaî- 
ce  iTiaturité  des  follicules.  Je  fuis  confir- 
mé clans  cette  penfée  par  la  remarque 
4e  Minguer  3  qu'il  faut  les  faire  fécher 
à  Pombrei  &  par  celle  que  j*ai  faite, 
xjue  les  foUicuLes  qu'on  nous  apporte 
du  Levant ,  ont  été  cueillies  avant  leur 
maturité,  ce  qui  eftprouvé  par  leurs 
femences ,  qui  n'ont  pas  leur  grojQTeur 
ordinaire. 

On  m'obje£kera  peut-être  ,  qu'il  ne 
s'enfuit  nullement  que  le  féné  dont 
nous  nous  fervons  ne  foit  pas  les 
feuilles  d'un  arbriffeau  ,  parce  que  ce- 
lui que  j'ai  cultivé  eft  un  herbe  5  on 
alléguera  pour  preuve ,  que  cet  arbrif- 
feau eft  dans  le  jardin  du  Roi. 

A  cela  trois  réponfes.  La  première  , 
qu'il  n'eft  pas  vraijGTemblable  qu'une 
plante  foit  herbe  dans  un  pays ,  &  ar- 
briffeau dans  un  autre.  La  féconde 
qu'au  moins  cette  féconde  efpece  n'eft 
pas  arbxiffeau  i    6c  que  le  Didionaire 


DE  St.  DomiNGUE.    t^j 

des  drogues  iimplesnc  fait  point  cette 
diftinAion.  Latroifieme ,  querarbrif* 
feau  dn  Jardin  du  Roi,  n'elt peut-être 
pas  lefénc)  Ton  ne  peut  s'en  ailurer 
que  par  les  follicules ,  &  on  ma  dis 
qu'il  n'en  portoit  point.  Quoi  qu'il  en 
foit,  il  eftaiféd'écl'îircir  cet  article.  Je 
dis  ce  que  j'ai  vui  &  l'on  auroit  tore 
de  douter  démon  témoignage. 

Noms  &  vertus  de  plufieurs  fiantes  dont 
on  fait  ufage  k  St.  Domingne, 

Je  choifirai  les  plus  utiles  &  les  plus 
curieufes  dans  le  recueil  de  Mino-uet 
Se  dans  les  formules  que  M''.  Lepoupée 
Defportes,  Médecin  du  Roi  au  Cap, 
avoit  faites  pour  l'Hôpital  dont  il  était 
charge. 

Avocatier. 


L'avocatier  eft  un  arbre  fruitier ,  qui 
croît  fort  haut,  qui  s'étend  peu.  Ses 

K  ij 


148        P  ^^  N  r  E  s 

fruits  font  gros  comme  une  poire  de 
virgouleLife,oblongs,clunverdqui  jau- 
nit un  peu  en  miirifrant.  Il  pend  à 
rextrémité  des  branches  par  une  queue 
longue  comme  la  moitié  du  doigt ,  le 
noyau  eft  fort  gros^rond^extrèmement 
amer.  On  n'en  fait  aucun  ufage.  Il 
eÛ  couvert  d'une  chair  blanche  ,  tirant 
fur  le  jaune ,  qui  a  la  confiftance  de 
beurre  frais  dur  5  &  il  en  a  prefque  le 
goût.  On  le  mange  avec  du  fel  6c  du 
poivre.  Communément  les  nouveaux 
débarqués  ne  le  trouvent  pas  bon  d'a- 
bord: mais  ils  s'y  accoutument  aifé- 
nient ,  &  en  mangent  avec  plaifir. 

Minguet  alTureque  ce  fruit  eft  bon 
pour  le  flux  de  fang.  Je  ne  l'ai  point 
éprouvé. 

On  fe  fert  journellement  de  {es 
bourgeons  en  infufion  ,  pour  rétablir 
récoulement  desregles,ôc  dans  les  fup- 
preffions  qui  arrivent  après  les  couches. 
On  s'en  fert  auffi  après  les  chûtes  ou  les 


2?B   ST^Dô'MÏI^àVE.    t^^ 

contLifions ,  poiir  diffbudre  le  fang  cail- 
lé. M^  Lepou pée  Defportes  les  ordonne 
dans  les  tifannes  apéritives,  &  emmé- 
îîàgogues.  ' 

,  J'en  ai  fou  vent  fait  de  la  limonade 

f'>OLir Ids  fièvres  ardentes  &  mêmç  ma- 
ignés.  ^  On  le  coupe  par  tranches 
minces ,  que  Torit  met  dans  Feau  avec 
un  pëtrdc  fucre.  Je  crois  quïl  eft  pré- 
férable au  Gitroil  du  pays ,  qui  eft  fore 
acre. 

:Miriguêt  le  recommande  pour  l'hyV 
4ropifie  ,  les  gonfliemens  de  ratte ,  & 
la  gravelle.  Je^  n^  Tai  point  v^ûjçm^ 
plpyer  J>  &je  ne  rn'É^n  fuis  jamais  fervi 
int-érjieurement.  Ses  feuilles  coupées 
par  tranches  §^  appliquées  fur  larorti-^ 
lure  font  excellentes. 

Bois  Laiteux, 

-Xiè  bois   laiteux  elt  un  arbriflTeau 

K  iij 


pifif.wpip 


'•i  ■  t 


donc  les  feuill<?s  &:  les  jeunes  branches 
ont  beaucoup  de  lait.  0.i  met  infufer 
au  foleil  une  grande  quantité  de  ces 
feuilles  dans  une  baignoire.  Ce  baijii 
guérit  fouvent  la  fiev-re  des  enfans  & 
même  des  grandes  perfonnes. 

Minguet  dit  que  ce,  Uit  arrête  Vhé-r 
morrhagje  d'une  bleiTure.  Il  le  faifoit 
entrer  dans  la  compofition  des  onguem.  ; 

comnie  Muhylon,  de  fontfes  termes.., 

■- . .  ■     •■   -       ■  -        .  -     -  .  ,< 

Çalebajji  de'  Bûiis,  ^ 

La  calebafle  eft  le  fruit  d'un  petiV ar- 
bre extraordinairement  couvert  de 
feuilles  qui  vien^nerit  fur  toutes  les 
branches,  même  \^s  plus  groflfès.  Ld 
foait  eft  ^ndôcgrc^s  cornme  unepom-me 
de*  rainette;  Son  écorce  eft  duré  &  li^ 
gneufeà  peu-près  comme  celle  du  co^ 
et) ,  toujours  ve^te  :  il  eft  rempli'  d^iiiiéf 
pulpe  blanche. 

Minguet  dit,  que  le  fuc  quon  en 
tirc>. purge  comme l&.meUl£ur&  médecine. 


DE  St.  DoiiÊiNGVE.  ffi 

Il  ajoute  qu'a  demi  mûr  ,  il  entre 
dans  les 'tifannes  pour  lliydropifie  &  les 
maux  d€  ratte.  Il  avertit  qui!  faut 
prendre  garde  qu'il  ne  foit  piqué  de 
vers  5  parce  qu  alors  c'eft  un  poifon. 

Je  n'ai  point  entendu  parler  de  cette 
précaution  i  ni  qu'on  l'emploie  autre* 
ment  que  comme  un  excellent  vuliié- 
raire.  Pour  cet  effet  on  le  fait  cuireious 
la  cendre ,  on  en  exprime  le  jii^  pouf* 
prévenir  ou  réfoudre  le  fang  caillé 
après  une  chute.  On  en  fait  pendre 
auffi  pouf  le^  abfcès  &  ulc€re:s  internet  ' 
Je  ne  m'en  fuis  iamaisfefrvi ,  parce  qud 
ce  remède  échauffe  beaucoup  y  &  que 
j'en  ai  va  arriver  de  mauvais  dSctSf^ 
probablement  par ^'impéride  de  cèiïîe'^ 

qui  remployent.  J^ai  toujours  préfère- 
les  fleurs  de  poindllâde, 

Ga  trouve  dans^  leDididnaî^^è  dé^ 
drogues  fimples  la  defcriptîoh  dufrùit^ 
d'un  arbre  des  îles  de  Mmériqu^? 
qui   eft   appelle   mâcha -mona  3   en 

K  iy 


ti  1 .1 


1^2        P   L:^iîir(ri^^    s      Hfî 

François ,  calebafle  de  Guinée,  qui  ref- 
lemble  beaucoup  à  celui  de  la  cale- 
bafle Efpagnole.  Celle-ci  eft  très-com- 
mune à  St.  Domingue.  Elle  croît  com-^ 
me  la  citrouille  :  elle  ,eft  aufli  grof- 
fermais  ordinairement  plus  longue. 
Les  Nègres  s'en  fervent  pour  mettre 
deTeauou  autre  boiflTon.  Lorfque  ces 
calcbafltsfont  au  quart  de  leur  groffeur, 
on  en  mange  comme  des  concombres  y 
elles  ont  un  goût  aigrelet  fort  agréable. 
Ceft  peut-être  celle  que  Minguet  ap- 
pelle calebafl^e  douce.  Il  parle"  encore 
de  deux  efpeces  de  grofles  calebafles , 
Tune  qu'il  appelle  calebaflTe  à  gourde  j 
fa  femence  eft  une  des  froides.  (Par 
con/^fue^;  ceft  U  courge  ),Lçs  Elpagnols 
s'en  ferveiTt  pour  leurs  voyages,  L  au- 
tre çalebaffe  eft  aniere>elle  fert  de  feau 
poûf  mettre  de  feau  ou  pour  faler  de 
la  viande:  apparemment  qu'il  n'apa^ 
connu  l'arbrç  dont  parle  Lemery. 


p  B  St.  Do  min  g  ue.    i^f 

Câprier, 

Defcription  de  Minguet.  ,,  Il  a  la 
55  feuille  comme  le  pourpier,  courant 
55  fur  la  terre.  Il  porte  une  graine  qui 
55  a  trois  à  quatre  pointes  piquantes, 
55  avec  une  fleur  jaune.  Il  croît  abon- 
,5  dam  ment  dans  [esfavanes(a).Ceik  un 
55  pâturage  excellent  pour  les  bœufs. 
5,  Sa  racine  s'emploie  dans  les  tifannes 
55  apéritives.  Mingoèt  ajoute  „  quefes 
5a  feuilles  pilées ,  font  bonnes  pour 
„  ôter  rinflammation  5  &  pour  mû- 
3,^  rir  les  abfcès.  „  Ses  racines  font 
vraiement  a:péritives,  ôc  s'employent 
joLirnellemenc. 

Bois  épineux  iAune. 

Minguet  affure  5  que  récorce  de  ce 
bois  eft  auflîpuilTante  contre  les  mala- 

(/»)  Les  Tavanes  font  les  prairies  de  St.  Donaingue 
que  l'on  ne  fauche  jamais.  Aufli  n*y  vienr-il  point  de 
foin  ,  mais  différentes  herbes;  comme  clïica-dent,pié  de 
poule  ,  câprier  ,  &c. 


it'tî! 

!   I 


TJ^         P  I,  -A  N  T  E   S' 

dies  vénériennes  que  le  Gaiac.  M^ 
Defportes  Temploie  dans  les  tifannes 
aftringentes. 

Collet  à  Dame. 

,  Cette  plante  eft  ainfi  nommée ,  à  ee 
qu'on  m'a  dit ,  parce  que  fa  feuille  eft 
grande  ,  ronde  ,  avec  une  échan- 
crure  du  coté  delà  queue  ^  comme  un 
collet  que  les  payfannes  portoient 
autrefois.  Je  ne  Tai  jamais  vue.  Le 
P»  Plumier  rappelle  ,  fmrurus  folHs 
amplis  rotundhs  é"  umbilicAtis, 

Il  y  en  a  de  deux  fortes ,  Tune  qui  a 
la  feuille  plus  douce  &  plus  fine  que 
l'autrerMinguet  appelle  celle-ci/euille 
à  collet  bâtarde.  „  Sa  racine,  dit  cet 
„  Auteur  ,  eft  excellente  en'  tifanne  , 
„  pour  la  ftrangurie  récente  &  les  go- 
,y  norrhées,  „  On  n'entend  pas  bien  ce 
qu'il  veut  dire  par  ftrangurie  récente. 

5,  Sa  feuille  eft  très-bonne  en  cata- 
3,i  pkfme>  elle attire  beaucoup. 


)     Mafofi'  rouge, 

Ceft  un  gra-nd  &  gros  arbre,  qui 
s'itendbeaucGupi  il  eft  fort  commun, 
„  la  fleur  eft  blanche,  il  lui  fucced^, 
yy  une  grolîê  poire  remplie  de  coton.  >>3 
Minguet..  Ce  qu'il  appelle   poire  ,  eft. 
une  coque  grofTe  comme  celle  du  mar- 
rpnier,  remplie  dame  foie  jaune  exr 
trèmemenc  finer  &;  douce  au  toucher  l^ 
j'en  ai  envoyé  à  Paris.    Oa^rreripem, 
rien  faire  3  elle  eft  trop  epu^te  pour; 
cÊre  filée  r:i  m\    efflaya^  d'ejt  fa^ire  des 
chapeaux,)  elle  ne  pevtt  pais,  fé;  lier  en-v 
femble 3  m^lëe^'avec  leeaftor ,  elle: ner 
prend pointlateinture.  . Il.es  habitans; 
de    St.  Domingue  fo]ii:Ç  lin©  tifanne^i 
aviec  ioA^écorce  pour  l^rQuge:Qfe&lar: 
petite  vérole.    J'ai  trouvé  que  cette] 
tifanne    eft  trop  diaiiider  &    qu^plle 
4onne  des-miaux  de  gprge*    J'ai  tourf 
jours  préféré  les  fleurs  de  poincillade 
fèche  :   une  pincée  fur  deux  ou  trois 


:;!;;.^  :i!l:, 


pintes  d'eau  de  chien-dent  (a). 
Goyavier. 

'"Le  goyavier  eft  un  arbre  d'une  gran- 
deur moyenne.  Son  fruit  eft  fort  bon 
&  fort  eftimé.  Il  y  eii  a  de  trois  fortes. 
Les  goyaves  aigres  qui  fervoient  à  faire 
une  gelée  excellente,    ceft  la  plus 
petite  efpece:  elle  eft  ronde,  greffe' 
cbiiime  là  f\m  greffe  pomme  d  apis  j-^ 
lâ^chair  en  éll Vouge ,  remplie  de  petits" 
pépiiis  fort  teûidres,  -^  <  -i   ^   • 

-  La  goyave Efpagnole  èft  k  ^plds  ëf. 
timée,  elle  eft  oblongue  ,  groflfe  à  peu- 
près  comme  une  poire  de  virgbuleufe, 
verte  dàbord,  .jaune  q^iaiid  elle  eflîl 
rftûre.  Les  habitans  du  pays  la  man- 
gent crue-:  elle  eft  fort  bonne  en  com- 
potes ^^U\J    , 

*>'Lk;  goyave  de  Guinée  ift   de   la 
mêMe  figure  &  de  la  mêrile  orroffeuf, 

«•«  ^  .   •      '    •  ■  '  '^r,       .  J  .        .,-      .  ■',,,!'  ■ 

•J  i  ■■'      .        '-  ■   i    .  V  »         ^v  'y        ^      •  ,  ,    ■,        ,..     ^  î        •  '       , 

i  ^.)  ^^  y  a  un:  ;tpapou  gris  ^  fî  gros  qu'pn  en  fait  de 
grands  canots,  ' 


î>  E  St.  Do  mi n  au e,   îyir 

a  peu -près  que  U  précédente:  la 
chair  en  eft  rouge,  on  la  mange  com- 
me la  goyave  Efpagnolej  mais  elle 
n'eft  pas  fi  délicate. 

L'eau  exprimée  des  bourgeons  pi* 
les,  efface  les  taies  des  yeux ,  félon 
Minguet:  bouillis  dans  Feau  ils  entrent 
dans  les  gargarifmes  pour  les  chancres 
5c  les  ulcères  de  la  bouche ,  fuite  de 
la  falivation. 

Le  fruit  avant  fa  maturité  ,  encore 
mieux  au  tiers  ou  quart  de  fa  grof- 
feur,  eft  aftringent,  &  convient  dans 
les  diarrhées  5  en  tifanne.  M'^*  Defpor- 
tes  fait  entrer  la  racine  de  goyavier 
dans  les  tifannes  aftringentes  {a). 

Herbe  h  Blé. 

„  Ainfi  nommée,  dit  Minguet,  a 
j,  caufe  de  la  reffemblance  qu'elle  a 
j,  avec  le  blé.  „  Elle  croît  de  même, 
à  la  hauteur  de  trois  ou  quatre  pies  ^ 

(  i»  }   Le  Pcic  Labat  décriç  aflez  bien  le  goyavier. 


iy8         P  i^  Jt  N  T  E  * 

elle  porte  un  long  épi ,  dans  lequel  je 
n'ai  vu  ni  grain  iii  feiiience.  Un  demi- 
verre  de  jus  exprimé  de  l'herbe  pilée , 
eft  fort  purgatif)  on  le  mcLeavec  au- 
tant deau  de  caire.  On  emploie  com- 
munément fa  racine  dans  les  tifannes 
rafraîchilTantes  avec  le  chien-dent  &  la 
^racine  de  pié  de  poule,  herbe  égale- 
3!nent  communcc  Les  vertus  que  Min- 
guet  donne  à  l'herbe  à  blé  font  d'être 
feonnes  dans  topite s  fortes  d'onguens:  dins 
Ia  compofitian  de  toutes  fortes  d'eaux  pour 
les  cancers  é"  ulcères  >  &  dans  les  tifan^ 
nés  pour    maux  vénériens.  Il  ne  parle 
pi)int  de  fa  vertu  purgative.  Je  ne  m'en 
luis  fer vi  qu'en  tifanne:  mais  un  Ha- 
bitant chez  qui  j'ai  demeuré  trois  ans , 
pi'a  affuré  que  pendant  plufieurs  an- 
nées il  ne  s'étoit  pas  fervi  d'autre  çhofe 
pour  purger  ks  Nègres. 

Herbe  à  mille  pertuis. 

Cette  herbe  a  la  feuille  percée  >  dit 


VE  St.  DoMiisi  c^e.  j^é 

Minguet.,îMâchée , elle  appaife  les  dou- 
5,leursdedents,enlaifrantlemarcleplus 
j,  longtems  qu'on  peut  „.  Il  confeille 
aiifli  pour  les  maux  d'oreilles  d'enfaire 
tomber  le  jus  dedans,  &  de  mettre  du 
marc  par  defTiis  5  pour  la  fièvre,  d'en 
faire  infufer  une  poignée  dansun  veire 
d'eau ,  &:  de  le  boire  avant  l'accès. 
Monfieur  du  Hamel  {a)  avec  lequel 
j'ai  vécu  quelques  années  à  Léogane, 
àc  qui  y  elt  mort  il  y  a  cin,q  ou  fix  ans  , 
fort  regretté  non  -  feulement  à  caufe 
de  fa  probité  &  de  fes  grandes  con- 
noiffances ,  mais  encore  à  caufe  de  [es 
recherches  immenfes  fur  la  botanique , 
êc  les  curiofités  naturelles,  qui  deyien» 
dront  peut-être  inutiles  ,  parce  que  fa 
mauvaife  fanté  dans  les  dernières  an- 
nées de  fa  vie  ne  lui  a  pas  permis  de 
les  mettre  en  ordre:  M''*  Duhamel > 
dis-je,  dans  fes  remarques  ,  fur  le  ma* 

{a)  il  étoit  Correfpondant  de  l'Académie  des  fcieaceç» 


ï6o       Plante  r 

iiufcritde  Minguec,  die  de  Tlierbe  i 
mille  pemiis  5  que  ceft  uneaftéride, 
qui  a  très- forte  odeur,  les  feuillesten- 
dres  ,  fucculentes  ,  d'un  gouc  de- 
fagréable  ,  mais  fouverain  en  décoc- 
tion pour  la  fièvre.  Les  fe menées  font 
aigrettées  :  elle  n'eft  nullement  du 
genre  du  mille  pertuis. 

Herbe  h  ulcère. 

Elle  efl:  fort  connue  ,  &  vient  dans 
les  haies.  „  L'eau  que  Ton  en  expri- 
„  me  ,  ditMingnet  ,  mife  dans  unul- 
„   cere  ,  le  guérit. 

La  feuille  feule  appliquée  nettoie 
l'ulcère  de  Çqs  chairs  baveufes.  On  rap- 
pelle herbe  à  ulcère  de  Minguet,  tout 
le  monde  la  conncîc.  Les  fleurs  Scies 
fruits  viennent  en  ombelle  {a). 

Minguet  décrit  deux  autres  efpeces 
d'herbe  à  ulcère  i  lune  à  feuille  ron- 

(  a  )  Les  fruits  font  des  baies  ,  qui  reffemblent  à 
Celles  du  fureau. 

de, 


Itl^  ^.^^^^at^t^g^a^tto^ 


DE  St,    Do  min  GUE.    i^i 

de,  l'autre  à  feuille  longue. 

Herbe  k  ulcère  k  feuilles  rondes,' 

55  Ainfi  nommée  parce  que  j*en  aî 
55  guéri  des  ulcères  de  quatre  ou  cinq 
ans.  Je  m'en  fuis  fervi  dans  la  corn- 
pofition  des  onguens  i  elle  y  a  fort- 
bien  fait.  Elle  eft  bonne  dans  les 
bains  aromatiques,  pour  gens  acca- 
blés de  douleurs  j  &  perclus  de  leufs 
membres.  Elle  croît  dans  les  pays 
vieux  habités ,  &  porte  une  petite 
fleur  par  grappe,  avec  une  feuille 
dentelée. 


5> 


3> 


3> 

53 
J5 


Herbe  k  ulcère  k  feuilles  longues, 

55  Elle  croît  dans  les  vieilles  habita- 
35  tions  comme  une  mauve ,  porte  trois 
55  feuilles  6t  un  bouquet  au  bout  delà 
„  branche.  Sa  fleur  eft  double,  à 
„  trois  ou  quatre  tirets  au  milieu.  Elle 

eft  d'un  blanc  terne. 

Il  confeilie  de  laver  Tulcere  avec 

L 


» 


m 

lill 


1^2      Plantes 

l'eau  de  la  plante  >  d'y  tremper  un  plu* 
maffeau  ,  de  l'appliquer  fur  Tulcere. 
Je  Ile  eonnois  point  ces  deux  efpeces. 

Herèâ  k  Taîts. 

Je  tië  lâ'cëhiiôis  point.  „  La  fleur, „ 
dit  Miriguèt ,  éft  violette,  avec  trois 
ou  quatrfe  tîret§.  Elle  a  la  feuille 
dentelée,  tin  peu  rude  &  chargée 
dé  poils.  L'eau  que  Ton  tire  de  là 
feuille  écraféé  dans  la  main ,  ôcinfu- 
jfée  dans  lés  yeux  qui  ont  des  taies 
nouvelles  ,  l'es  giierit.  Elle  entré 
„  dans  lèis  ëâitx  diftiilées. 

Autre  herbe  à  taies  y  marjolaine  fri fée. 

„  Son  jus  inftillé  dans  une  taie 
Ij  la  gilérit.Ellë  entré  'à%h$  lé^  ènguens.  ; 
y,  Sa  fleur  eft  blanche ,  fa  féuilè  den* 
^s  tfelé'e^  &  fà  graine  gi'olTè  comme  un   ^ 
\\  pbis.  Je  lié  cbrinois  poi-nt  âon  plus 
cette  fec'éii'dé  èf|)èeé. 

Herie  fenfMe.  I 

C'eïl  la  ÏQXiÇimQ  mimofa. 


^) 

)3 
» 
» 
>3 


DJ5  St.  Dominùve.   1^9 

Minguet  en  décrit  de  deux  fortes, 
Tane  blanche  oc  Fautre  rciige. 

„  La  blanche ,  dit-il ,  eft  une  efpece 
„  d^ipécacuana  pour  fes  vertus ,  en  in- 
ij  flifion  .  pour  les  diarrhées  &  flux  de 
>,  faiig.  Elle  croît  dans  les  pays  arides, 
i,  &  ou  il  y  a  des  fapins.  Elle  vient 
comme  Une  ha?^e  avec  des  feuilles 
coupées  j  courant  fur  la  terre: 
elle  fleurit  blanc.  Sa  feuille  touchée 
fur  le  midi ,  fe  fanne. 

Herbe  fenfihle  ^  rouge, 

5,  Ainfi  nommée  ,  parce  qu'étant 
5,  touchée  la  feuille  fe  ferme. 

La   même  chofe  nàrriveroit-elie 
point  à  la  blanche  ? 

„  La  racine  en  infufion  eft  bonne 
55  pour  diarrhée  &:  flux  de  fang.  On 
„  peut  s'en  fervir  faute  d'ipécacuana. 
Je  n'ai  point  vu  de  fenfitive  dans  les 
quartiers  de  St.  Domingue,  où  j  ai  ha- 
bite i  il  y  en  a  appareniment  dans  le 

Lij 


(Pi 


:!-ri 


11^4       Plantes 

quartier  du  Cap.  J'en  ai  vu  beaucoup 
à  la  Martinique. 

Herbe  h  pians, 

5,  Elle  eft  faite  comme  TabAnthe ,  & 
croît  dans  les  pays  vieux  habités. 
L'eau  que  l'on  en  extrait  feche  les 
pians  que  l'on  en  frotte:  fa  racine  en 
tifanne  eft  bonne  pour  les  maux  vé- 
nériens. Elle  eft  appellée  aufli  ab- 
finthe. 

Dans  les  lieux  que  j'ai  habités  elle 
eft  fort  commune  :  on  l'appelle  abfînthe  j 
marone ,  qui  veut  dire  bâtarde.  C'eft 
une  efpece  de  matricaire.  Je  ne  m'en 
fuis  jamais  fervi  5  que  pour  faire  une 
eau  vulnéraire,  &:  jene  l'ai  vu  em- 
ployer par  perfonne. 

Houx  de  l^ Amérique. 

3,  Il  reflemble  à  celui  d'Europe.  Il 
55  faut  y  faire  une  entaille  fort  pro- 
j,  fonde   pour  en  tirer  une  gomme 


55 
35 


VE  St.  DOMINGVE.    i6^ 

^5  verte,  d'une  odeur  merveilleafe  ôc 
5,  excellente  pour  lesonguens,  corn- 
3,  me  le  betoniea  Sc  autres. 

Je  n'en  ai  vu  qu'en  arbre ,  un  peu 
plus  gros  parle  tronc  qu'un  cerifier. 
Ses  fleurs  viennent  fur  une  tige  fans 
feuilles  afiez  longuesielles  rcfTemblent 
à  celles  du  pêcher.Ses  feuilles  font  fem- 
blables  à  celles  du  houx  d'Europe: 
mais  les  pointes  ne  font  pas  fi  dures. 
Le  tronc  n'eft  pas  flexible  (  a  ).  Cet  ar- 
bre eil  aflez  rare  :  je  n'en  ai  vu  que 
deux. 

Le  Jat 


yy  II  a  autant  dq,  vertu  que  celui  qui 
3,  vient  d'Europe,  dcc.  Sa  fleur  eft 
35   fort  petite. 

Celui  que  j'ai  vu  à  Leogane ,  où  il 
y  en  a  beaucoup  dans  les  jardins  ,  efl: 
très-peu  réfnieux  y  inférieur  par  con- 
féquent  à  celui  qu'on  apporte  en  Eu* 
rope. 

(s)  Di6lion.  des  drogues.  L  ii) 


1*1 


i66       Plantes 

Ceft  la  racine  des  belles  de  nuit.  U 
y  en  a  à  fleur  rouge  &  à  fleur  blanche  > 
ce  font  des  tuyaux  é vafés  en  eatonnoir. 
&c.  Voyez  le  Didionnaire  des  drogues 
fimples.  Quant  à  la  racine ,  celles  des 
rouges  &  des  blanches ,  des  jeunes  ôc 
des  plus  vieilles ,  n'ont  pas  plus  de  ré- 
Cne  les  unes  que  les  autres. 

Peut-être  celles  qui  viennent  dans 
le  quartier  du  cap  5  oudemeuroit  Min-* 
guet  5  font  d'une  autre  efpece,  ou  font 
plus  réfmeufes. 

Ipecacuam. 

3,  Il  porte  une  fleur  comme  une 
3,  cloche  de  couleur  violette....  fa 
„  racine  eftd'un  blanc  jaunâtre. 

Je  nen  ai  vu  qu'une  fois  fur  terre  » 
qui  n'étoit  pas  en  fleur.  Sa  racine  étoic 
ridée ,  tortue ,  de  couleur  brunejmoin? 
grofl*e  qu'une  plume  à  écrire.  Il  croît 
fur  les  montagnes. 


35 


VE  St.  DoMiNGu  e.    i  éf 

Manille  bâtard^' 

„  Elle  porte  une  goufle  comme  la 
manille  franche ,  &  croît  le  long  des 
arbres  comme  une  liane  verte  fron- 
de. C*eft  le  fondement  de  l'eau  pour 
les  cancers  >  ulcères  bi  chancres.  Elle 
5,  fait  plus  d'effet  que  le  vitriol  U,  la 
,5  pierre  infernale,  mangeant  les  mau- 
„  vaifes  chairs,  nourriflant  &  faifant 
„  revenir  les  bonnes.  ,,  M'*  Duhamel 
dans  ïts  remarques  fur  le  manufcrit  de 
Minguet,  ditque  cette  manille  bâtarde 
eft  Varam  repens  ,  extraordinairemenc 
cauftique.  J'ai  entendu  dire  à  Min- 
guet,  ajoute-t'il,  qu  il  en  faifoit  un 
onguent  pour  les  ulcères ,  ôc  qu'il 
avoit  la  force  de  faire  fauter  le  cul  de 
la  chaudière  ie  fer  ou  on  le  fait. 

Monhin ,   ot^   Manhin.- 

Eft  un  arbre  des  plus  gros ,  fortconitt 
mun.  Minguet  dit  que  la   racine  en 

L  iv 


ÉtÉiÉ 


1^8       Plante  s 

tifanne  guérit  la  diarrhée  ôc  la  dyfTen- 
terie.  Je  ne  Fai  point  vu  employer  à 
cet  ufage.On  fe  fert  communément  des 
feuilles  pour  les  bains.  On  appelle  fou 
fruit  prunes  de  monbin.  Elles  font 
jaunes ,  ont  fort  peu  de  chair  fur  le 
noyau  {a  ).  Les  Nègres  mêmes  ne  font 
pas  fort  curieux  d'en  manger.  Quelques 
habitans  en  font  une  gelée  ,  que  ion 
dit  être  bonne. 

Medecimer, 

Le  medecinier  eft  un  grand  arbrif- 
feau.  Son  fruit  cfl;  gros  comme  un. 
maron^par  bouquets  de  trois  ou  quatre, 
fur  de  longues  queues.  On  l'appelle 
noix  de  médecine.  L'amande  renfer- 
mée dms  une  coque  eil  de  fort  bon 
gouc:.  mais  c'eft  un  violent  émétique 
&  purgatif  Elle  l'eil  beaucoup  moins 

(  «»  }  11  s'en  faut  beaucoup  qu'elles  foienr  auflî  oroiTes 
que  Jes  prunes  de  Sîe.  Cachçiiae  ,  comine  \  P. 
Laljat  le  dit. 


DE  St.  Do  mi  n  GUE.  i  ^a 

quand  on  en  a  ôté  le  germe  &  la  pel- 
licule qui  fépare  les  deux  lobes.  Je 
crois  qu'on  pourroit  en  tirer  parti  , 
en  ajoutant  une  amande  ou  deux  dans 
une  émnlfion.  On  m'a  même  fou  vent 
exhorté  a  tâcher  d'en  trouver  la  dofe  : 
mais  je  crois ,  quand  on  a  des  purgatifs 
fûrs,  qu'il  ne  convient  point  à  un  mé- 
decin d'en  elTayer  de  douteux:  il  doit 
laiffer  faire  cqs  épreuves  aux  autres,  6c 
en  profiter  (a). 

Le  P.  Plumier  appelle  ces  efpeces 
de  pignons  ,  ou  noix  de  médecine  , 
ri  ci  no  ides  gofjipii  folio. 

Il  me  paroit  que  l'article  ricînus  dans 
le  Didionnairedes  drogues  fimples  de 
Lemery  eft  fort  embrouillé.  Il  parle 
de  quatre  efpeces  de  ricins  ou  pignons 

(  /»  )  Le  Père  Labat  a  d'écrit  affez  bien  ,  (  à  quelque 
chofe  près  }  le  medecinier,  &  fes  noix.  Il  dit  que 
quatre  ou  cinq  ,  félon  Page  &  le  tempérament  des 
perfonnes  fuffifent  pour  purger  très  -  bien  :  mais  que 
qjuand  on  en  prend  une  plus  grande  quantitéj'ons'expofe 
4  des  vomifleraens  cruels  6ç  à  des  évacuations  trop 
grandes. 


M  M 


wmm 


^^M 


ma 


70 


Plantes 


dinde.   Dans  le  premier  il  déerit  le 
falma  ckrifiL 

Dans  le  fécond,  c*efl:  le  medecinie^ 
qui  porte  une  amande,  comme  il  le 
dit ,  plus  groffe  que  celles  des  grains  de 
ricin  5  c'ell-à-dire  plus  grofTe  que  celle 
du  palma  chriftt.  C*eft  celle  que  je 
viens  de  décrire  ,  ou  Tappelle  à  St. 
Domingue ,  noix  de  médecine. 

Il  parle  dansle  troifieme  d'un  autre 
ricin,  qu'on  appelle  pignon  d'Inde, 
en  latin  grana  tilli ,  grana  tilliA.  Je 
crois  que  ce  font  les  mêmes  que  les 
pignons  du  pdma  chriflï. 

Enfin  il  en  ajoute  une  quatrième 
efpece ,  qu'il  appelle  medecinier  d'Ef- 
pagne,  ou  la  noifetté  purgative.  Je 
crois  que  c'eft  le  fruit  qui  eft  décrit 
dans  le  fécond  article.  Ainlî  il  n'y  au- 
roit  que  deux  efpeces  de  ricins  ou 
pignoris  d'Inde  3  ceux  du  F  aima,  Chrijiiy 
6c  ceux  du  medecinier. 

Je  n'ai  vu  à  St.  Domingue   que  le 


ï>£  St.  Domi n que.   171 

palmachriJH  ,  &  le  medeciiiier  ,  dont 
il  y  a  trois  efpeces ,  fuiyant  le  Père 
Labat. 

Quoi  quil  en  foit,  il  eft  facile  de 
Véclaircir  fur  cette  matière. 

Minguet  ne  parle  que  de  Tamande 
du  medeeinier.  Elle  eft  ^  dkAl ,  purga- 
tive ^  mais  danger  eu fe  ,  parce  quil  eft 
bien  difficile  d'en  trouver  la  dofe.  Elle 
purge  haut  &  bas  ^  fi  on  n^en  ote  pas  le , 
germe» 

Enôtant  le  germe  &  la  pellicule  qui 
fepare  les  lobes  ,  elle  eft  moins  vprni* 
tive ,  mais  elle  l'eft  toujours. 

Nandiroga  5    ou   Contrepoifon    de 
l'Amérique, 

5,  Je  nomme  kinfi  ce  fîmple  ,  die 
3,  Minguet,  à  caufe  de  fon  fruit,  ou 
j,  graine,  grande  comme  une  pièce 
^5  de  huit  (4î),  ronde  &  faite  comnie 
^,  la  noix.   On   en  peut  tirer  Thuile 

{n)  Ceft  une  piaflre  valant  huit  efcalins; 


Plantes 

comme  de  Tolive  ,  6c  en  faire pren- 
yy  dre  à  une  perfonne    empoifonnée  , 

cela  la  guérira.  Elle  entre  dans  la 
t.ï  compofition  des  ongiiens ,  comme 

beaucoup  attractives  elleeft  encore 
5>  bonne  pour  les  éréfipelesy  elle  croît 
3>  le  long  des  arbres.  Elle  porte  une 
35  fleur  blanche.  ^,  Je  ne  connoispoint 
fes  vertus.  Le  Père  Plumier  Tappelle 
nb^niiroba  fcandens  foliis  hederaceis  an- 
gulofis, 

Mariacobl  ou  Mariacobo. 


35  II  croît  ordinairement  fur  le  mû- 
5,  rier ,  par  le  moyen  des  oifeaux  qui 
5j  y  portent  la  graine  :  cette  plante  eft 
55  pleine  de  piquans  &  fort  tendre  > 
5>  fon  fruit  eft  bon  à  manger  ,&  pour 
,,  arrêter  les  cours  de  ventre.   Il  eft 

martelé ,  &  fon  écorce  eft  fembla- 
55  ble  à  celle  de  Tananas.  Il  eft  rempli 
53  de  petites   graines  noires. 

Je  n'ai  point  vu  de  ces  fruits. 


Î>E    Sr,    DOMIN  CUE.     175 

Quand  Mingiiet  dit  que  cette  plante 
vient  fur  lemûrieri  il  ne  faut  pas  croire 
que  ce  foit  des  mûriers  femblables  aux 
nôtres:  il  n  y  en  a  point  à  St.  Domin- 
gue.  L  orme  de  St.  Domingue ,  qui 
reflemble  aflez  à  ceux  d'Europe,  porte 
un  fruit  fait  comme  une  mûre  verte 
au  commencement,  noire  quand  elle 
eftmûrei  mais  dure.  C'eft  une  bonne 
nourriture  pour  les  chevaux ,  bœufs  , 
moutons ,  ôcc, 

^  Monfieur  Duhamel  aiTûre  que;  le 
mûrier  de  Minguet  eft  le  bois  jaune 
du  Cul-de-fac,  qu'il  eft  bon  pour  la 
teinture. 

Orange  aigre. 

5,  Le  fruit  entre  dans  la  compofi- 
tion  des  eaux  &  des  onguenspour 
les  ulcères  les  plus  vilains  &  les  plus 
vieux.  On  fait  de  fon  écorce  féchée 
au   foleil   une    poudre  à  vers    fort 


5> 


amere.  Sa  feuille  &  fes  bourgeons 


174       P  i  ^  N  t  E  s 

„  entrent  dans  les  bains  aromatiques  | 
5j  fa  racine  dans  les  tifannes  potir  les 
j,  maux  vénériens*  „ 

Il  a  oublié  de  dire  que  les  efclâvês 
fe  fervent  de  ces  oranges  pour  blàii*- 
chir  le  linge,  ôcc.  &  que  hoiicd^éeif ^ 
comme  on  parle  à  St.  Domingue ,  c'eft^ 
à-dire  un  peu  cuites  fur  les  charbons , 
on  s'en  fert  journellement  pour  les 
bleffures  des  chevaux ,  de  même  pour 
nettoyer  les  ulcères  des  Nègres. 

Ces  orangei-s  viennent  en  grande 
quantité  dans  les  bois.  On  en  met 
de  dillance  en  diftance  dans  les  haies 
de  citronniers,  que  Ton  taille  commô 
la  charmille  dans  nos  jardins,  6c  que 
Ton  cercle  très-foigneulement  3  ce  qui 
rend  les  chemins  ,  qui  ont  environ 
foixante  pies  de  large ,  d'une  extrê- 
me beauté  5  car  ces  orangers  font  toû- 
jouts  chargés  de  fruit  &  de  fleurs. 


t>E  St.  D  omingv  e.  17J 

Orme. 

9>  De  fes  bourgeons  &  de  fon  fruit, 
3>  on  fait  une  boilTon  fort  agréable, 
5,  &  purgative.  Elle  maintient  ceux 
„  qui  en  boivent  gras  &  frais ,  comme 
3,  s'ils  yenoient  d'Europe.  Toute  forte 
5î  d'animaux  s'en  nourrirent.  Sa  cen- 
ii  dre  eft  bonne  pour  faire  du  fa  von. 
j5  Sa  fleur  eft  blanche.  Cet  arbre  entre 
iy  dans  Igs  tifannes  pour  gonorrhées 
33  (^)&  galanteries.  „ 

Il  ne  dit  point  quelle  partie. 

J  ai  beaucoup  entendu  parler  de 
cette  boilfon  :  mais  je  n'en  ai  point  vu. 

Le  P.  Plumier  appelle  cet  arbre 
gmjumn  arhor  ulmi  folio  ^fru^lu  ex  ^ur- 
furânigro. 

Thihé. 
>,  C'eft  un  pbîfon  d'autant  plus  dan- 

(  »  )  Je  fai  que  quelques    Kabitans  fe  fervent  "dç 
rccorcc  pour  les  gonorrhées. 


/., 


75        Planter 

i 

55  gereux  que  Ton  en  meurt  pour  peu 
35  qu'on  en  mange,  ou  que  l'ayant 
3,  manié  on  ne  fe  lave  pas  les  mains. 
55  On  ne  change  point  de  couleur  ,  on 
5,  n'enfle  point.  Il  empoifonne  les 
5,  chiens  5  les  chevaux  en  meurent  fi- 
55  tôt  qu'ils  en  ont  mangé.  55  Minguet 
fe  trompe. 

J'ai  guéri  des  mulets ,  dont  l'un 
entre-autres  étoit  empoifonne  dès  la 
Teille  5  ^  fort  enflé.  Je  leur  faifois 
avaler  une  demi-once  d'orvietan  dans 
une  cfaopine  de  vin. 

Cette  herbe  vient  dans  lesruifTeaux. 
,  M'*  Duhamel  appelle  cette  plante  5 
ra  puncultis  aquâticus  foliïs  cichorii  ,  ^ore 
dho  ,  îuhulo  longî(fimo.  Le  P.  Plumier 
la  nomme  trachelium  fouchi  folio  ,  fiore 
albo 


tubulo  longifjimo. 


Quenique* 

5,  S 1  graine  eft  de  couleur  de  cendre  : 
,5  bonne  dans  les  tifannes  pour  les  go- 

„  nor- 


ÙE  Sf,   DôMINGV  E.     IjJ 

rhées.  Il  croît  au  bord  de  la  mer 
armé  de  piquaiis,&  produit  une  gouf- 
fç  comme  un  pois  jaune.  „ 
Je  ne  connois  point  cette  plante* 

Rofeau. 

i,  5à  racine  efï  bonne  dans  les  tîfan^ 
nés  pour  gonorrhées.  Il  croît  au  bord 
des  rivières  comme  une  canne  à 
_  fucre-Jl  porte  uii  pehnache  pour 
j,  fleur  au  bout  de  la  tige.  „  Ce  pen-^ 
nache  eft  àffez  femblable  a  la  fleur  des 
cannes  à  Hicre  que  Ion  appelle  flèche* 
^  On  fe  fert  très-communément  de  la 
racine  dans  les  tifannes  rafraîchif'- 
tantes* 

Ce  peut-être  une  efpece  debanbou, 
'ou  rofeau  des  Indes  Orientales.  Il  n'eft 
ni  fi  beau ,  ni  fi  gros ,  ni  fi  haut. 


3> 


■A-  ^ 


RégliffPdt^  Amérique,  - 

î,  Ceft  une  liane  qui  a  la  même 

M 


ijg       Plantes 

odeur  5  (  ^  )  que  la  régliffe  véritable  i 
elle  eft  bonne  pour  les  maux  véné^ 
55  riens.  Sa  feuille  eft  fort  douce  ,  la 
5,  fleur  d'un  blanc  fale ,  fon  écorce 


55 


» 


55  crrife. 


On  l'appelle  liane  ,  parce  qu'elle 
porte  des  tiges  menues  ,  pliantes  6c  fort 
longues.  Ses  feuilles  font  aflezfembla-' 
blés  à  celles  de  l'acacia,  ou  de  lapoin^ 
cillade ,  rangées  par  paires.  Son  fruit 
eft  un  petit  pois  rouge,  avec  un  point 
noir  dans  une  gou0e  fort  courte.  On 
en  apporte  dans  les  ports  -  de  mer  : 
les  Religieufes  en  font  des  chapelets  i 
le  peuple  en  fait  des  colliers  pour  les 
enfans.  Il  n'y  a  que  fa  feuille  &  fa 
tige  qui  ait  le  goût  de  la  réglijïe,  la 
racinç  ne  Ta  point.  On  pourroît  la 
"nommer  Glycyphylloj^  Americanum, 

On  l'employé  dans  les  tifannes,  ou 
feule  ou  mêlée  avec  d'autres  plantes. 
Je  m'en  fervois  dans  les  commence- 

[  /»  }'  lia  voulu  dire  k  même  goi3c» 


DE  St,  Domingue^    ijù 

mens  des  gonorrhées  jufqua  ce  que 
la  douleur  rut  paflee. 

Le  P.  Plumier  l'appelle  Orcbus  fruSiu 
soccineo  nigrâ  macula  nofato. 

Ronce  de  l* Amériques 

5,  Cette  plante  croît  k  long  des 
montagnes  :  elle  eft  fort  épineufe  , 
&  jette  plufieurs  pommes  enfemble^ 

j,  le  long  de  hs  branches.  Le  deflTous 
eft  par  barre  j  &fa  pomme  eftgrife. 
Elle  entre  dans  les  tifannes  pour 
les  maux  vénériens  :  on  la  coupe 
par  morceaux. 
Le  P.  Plumier  la  nomme  ,  FereskU 

nculeata  ,  fiore  Mo ,  fruBu  flavefcente. 
Je  ne  la  connois  point. 

Rai f  nier  du  bord  de  la  mer. 

5,  On  fait  de  la  racine  une  tifanne 
bonne  pour  le  flux  de  fangôc  cours 
de  ventre.  Son  raifin  bouilli  avec 
un  peu  de  fucre  &  coulé ,  eft  boa 

M  i j 


5> 


3> 


^80 


F   L    A    NT  E  S 


>•) 


»> 


pour  les  mêmes  maladies.  Il  fleurit 
violet  {a).  „ 

.  Raquette. 

Min  guet  dit  que  la  fleur  entre  dam 
les  tifannès  four  galanterie  ;  que  fin  fruit 
efl  rouge  :  que  fa  feuille  cuite  fous ..  la 
hraife  ,  àé fouillée  àe fa  première  feauy 
^fpii^uée  fur  apoflumes  ,  y  fera  bon  effet. 
Il  n'en  dit  rien  d'avantage. 

Ses  feuilles  (  que  Ton  appelle  patte 
de  raquette  )  ,  boucanées  ^  c'eft-à-dire  5 
paflées  fur  la  braifé  ,  appaifent  les  in^^ 
llammations  5  mûriiTçnt  les  abfcès,  ap-^ 
pliquées  deflTus. 

En  lavemens ,  elles  font  excellentes 
pour  les  douleurs  de  ventre  ,  la  dyflçn- 
terie  &:  la  diarrhée.    , 

On  mange  fon  fruit  en  comporte  :  on 
dît  quil  elt  aftringent  5  il  eft  un  peu 
fade. 

(  /î  )  Cec  arbre  n'eft  point  le  naangle  rouge ,  comme 
le  P.  L  abat  le  dit.  •  : 


V 


V  E    Sf.    Do  M  ï  N'CV  E.     t  S  I 

'  Le  P.  Plumier  îïpelle  la  raquette, 
Opî^ntia  major  validijjimis  Jpinis  mu'^ 
fiit^^  Je  ne  fai  s*il  a  donné  ce  nom 
à  la  raquette  bafTe.  Il  me  femble  qu'à 
caufe  du  terme  ,  major  ér  validijjimis 
fpinis  munita^  il  conviendroit  mieux 
à  l'arbre.  Il  femble  auflî  que  c'eft 
l'arbre  qui  eft  défigné  par  les  Auteurs 
rapportés  dansleDîdionnaire  des  dro- 
gues fimples. 

'  Quoi  qu'il  en  foît ,  la  raquette  arbre, 
eft  garnie  d'épines  plus  longues  &  plus 
dures  que  la  raquette  baiïe  5  elles  oc- 
cupent le  troncjles  branches  &comma- 
némentles  feuilles.  Ces.  feuilles  de  ta 
raquette  balTe  font  longues  d'env.irôh 
un  demi-pié,  plattes,  en  ovale  ^  épaîf- 
fes  tout  au  plus  comme  le  doigt  (  ^  )  5 
celles  de  l'arbre  font  moins  longues. 
11  y  en  a  de  plattes ,  de  triangulaires  ôc 

(  ^  )  Il  y  en  a  une  efpece  toute  garnie  d'épines  blan- 
châtres ,  comme  le  tronc  de  l'efpece  qui  elt  arbre  : 
liijaç  autre  toute  Tçrtc,âvec  quelques  tubercules  épineux»^ 

M  iij 


Pl  4  H  t  Ê  s 

de  quadrangulaires.  Le  fruit  eft  le 
même  dans  Tune  &  Taiitre  efpece.  Je 
ne  fai  fi  Ton  mange  celui  de  l'arbre. 
Je  n*ai  vu  employer  que  la  bafle,  que 
l'on  pourroit  appeller,  Opuntia  mimr 
humilîs ,  folïts  \  terra,  exfurgentihus^ 

Il  y  a  une  efpece  de  cette  dernière 
que  l'on  appelle  raquette  Efpagnole , 
qui  n'a  point  d'épines  ,  dont  on  fait 
un  firop  fort  bon  pour  la  toux,  pour 
les  poitrines  feches,  échauffées,  &c. 


SaugCé 

,5  Elle  croît  le  long  des  rivières  {a) 
elle  a  l'odeur  de  la  fauge  de  l'Eu- 

5,  rope.   La  fleur  eft  blanche  par  pe- 
tits bouquets.  „  Elle  reffemble  à  la 

grande  fauge,  nommée  parquelque$ 

Botaniftes  falvia  latifolia. 
Le  P.  Plumier  l'appelle ,  camaraarho'- 

rejcens  falvia  folio. 

(  <f  )  Il  devoir  ajouter  comme  un  petit  arbriflcau  qui 
A  beaucoup  de  tiges. 


» 


3> 


» 


t>n  St.  Do  min  g  ve.   i8| 

Sauge  blanche. 

55 Elle  croît  dans  les  vieilles  faranes, 
n'a  point  tant  d'odeur  que  l'autre  > 
fa  feuille  eft  plus  petite  &  plus 
blanche  ;  fa  fleur  efl  blanche,  entre- 

„  coupée  en  trois.    Elle  pouffe  une 

3,  feule  tige  fort  petite.  ,, 
Je  n'en  ai  jamais  vu. 

Surelle  ou  Ozeille  de  Guinée, 

„  Elle  eft  bonne  dans  lafoupe  & 

dans  les  bouillons  des  malades  (  a). 

Son  fruit  bon  pour  faire  gelée  ,  & 
„  vin  qui  enivre.  „ 

Son  truit  eft  une  coque  épaifle,  ten- 
dre ,  qui  fuccedé  à  une  grande  fleur  , 
en  cloche  :  on  en  fait  des  compottes  & 
de  la  gelée  fort  bonnes  :  on  la  prend 
avant  qu'elle  commence  à  fécher. 

[ii]  M.  Defportes  en  employoit  les  bourgeons  dans  les 
tiUnnes  lafiâkhiâantes» 

M  ir 


33 


9> 


m 


li  y  en  a  de  blanche  &  de  rouge. 
La  blanche  eft  moins  fure  que  la 
rouge  5  on  la  préfère  pour  les'  com- 
portes, 

La  plante  vient  comme  un  grand  ' 
arbrilleau  ,fort  touflupar  la  multitude 
des  branches  quifortenc  dune  feule 
racine. 

Seguine  rouge, 

5>  Purgative  &  fudorifîque.  Elle 
^>  croît  dans  les  montagnes  :  fa  tige 
3>  eft  noûeufe  comme  un  rofeau  i'ar- 
3,  mée  de  petits  pîqu  ans,  &c,  ,,  Ceft  . 
la  fquine  ou  Tef^uine.  Sa  racine  eft 
comme  Lemery  Ta  écrite,  mais  beau^ 
coup  plus  grofle  &  plus  longue.  Il  y 
en  a  qu  on  eft  obligé  dé  couper  pour 
la  tirer  de  terre.  AuiG  Minguet  ^ .  dit , 
que  chaque  fié  en  fourmi  plus  c^un  baril. 
Il  y  en  a  de  difrérerîte  groffeur.  Elle  eft 
plus  dure,  plus  çompade  &  plusJi- 
gneufe  que  celle  qui.nous  vient  de  k 
Chine* 


DE  St.  Do  MIN  ^Ve.    ïg| 

Je  n'ai  point  reconnu  de  vertu  pur* 
gative  dans  cette  racine:  peut-être  1^ 
perd-elle  en  féchant  3  il  y  en  a  même 
qui  la  font  fécher  au  four  ayant  de 
s'en  fervir.  Je  me  contentois  de  i'ex- 
pofer  à  l'air  pendant  trois  ou  quatre 
mois. 

Elle  pouffe  une  tige  qui  monte  & 
s'attache  dans  les  arbres  :  elle  eft  d'un 
verd  brun ,  couverte  de  petites  épines  > 
comme  le  rofier:  mais  elles  ne  font 
pas  fi  fortes  ,  elle  a  des  nœuds  en  dif^ 
'tances  inégales,  faits  comme  ceux  du 
rofeau.  Cette  tige  principale  en  pro-^ 
duit  d'autres  qui  fe  fectient  ôc  qui  tom- 
bent. Elle  porte  des  feuilles  rangées 
alternativement  fur  des  queues  affez 
longues.  Ordinairement  il  fort  une 
ï  Htige  commune  à  trois  feuilles  ,  donc 
l'une  eft  portée  fur  une  queue  plus 
courte,  les  deux  autres  fur  deux 
queues  bien  plus  longues.  Ces  feuilles 
font  oblongues  &  fe  terminent  en  une 


tB6         P  L  À   N  T  E  S 

pointe  un  peu  allongée  5  mais  qui  ne 
pique  pas. 

Scolopendre  double. 

5,  J'ai  découvert  ce  fimple  depuis  peut 
'^  elle  eft  fort  rare  &  croît  fur  des  ar- 
5,  bres  pourris.  On  en  fait  un  firop 
j,  excellent  pour  toutes  fortes  de  mala- 
„  dies  de  poitrine  5  comme  afthme  ^ 
,,  rhume  &:  autres.  Elle  entre  dans 
t,  les  tifannes  pour  Thydropifie  &  maux 
9,  de  ratte.  „  Minguet  parle  encore 
de  deux  autres  efpeces:  il  appelle  Tune 
fcolopendre  jaune ,  qui  vient  auprès  des 
Arbres  é*  fur  des  arbres  &  contre  des  bois 
pourris. 

Il  appelle  l'autre  ^^fcolopendre  rouge  ^ 
qui  croît  par  bouquets  le  long  des  arbres. 
Cette  troifieme  a  les  feuilles  plus 
grandes  avec  des  efpeces  de  piquans 
aux  deux  côtés.  Il  leur  attribue  les 
mêmes  vertus  ,  avec  cette  obferva- 
tion  que  la  dernière  en  a  moins  que 
les  deux  autres.  3^ 


5» 


%y 


» 


31 


9} 


DJff   St.   DOMINGVIË.   ïijt 

Je  ne  connois  point  ces  efpeces  de 
fcolopendre. 

Sep^é  bâtard. 

i,  Très'bon  dans  les  lavemenscom- 
i,  poféspour  hydropifiei&lorfqu'ileft 
„  lec  5  dans  les  bains  aromatiques* 

„  Sa  fleur  eft  jaune  &  d*un  rouge 
„  mourant.  Il  porte  une  cofïe  fort  pe- 
tite &  platte  aprochant  du  fené 
du  Levant.  Il  croît  ordinairement 
dans  les  favanes ,  meurt  dans  les  fe- 
cherefles ,  &  reverdit  dans  les  tems 
„  humides,  &  en  fi  grande  quantité, 
„  que  Ton  a  de  la  peine  àpaCTerou  il 
„  y  en  a.  Ses  feuilles  font  un  peu  lon- 
j,  gués,  oppofées  vis-à-vis  Tune  de 
),  l'autre ,  non  terminées  par  une  ïm* 
„  paire.  „ 

Séné  de  r Amérique. 

i;  Plus  fort  que  celui  du  Levant  i 
ij  très-propre  en  infufion>  furtoutpour 


9> 


Mi 


»5 
l> 
3) 
>> 

5> 


fgg  .'']P  JS  j  ïyr  f  B  £      Cl 

hydropifie,  pourvu  que  coupé  on 
le  fafle  fécher  à  lombre.  Sa  fleur 
eft  petite,  ronde,  d'un  blanc  blafard. 
Sa  cofle  eft  ronde  &  longue  con- 
tenant fa  graine.  Il  croît  ordinai- 
rement dans  les  endroits  élevés, 
terres  autrefois  défrichées  Se  aban- 
3,  nées. 

;  Je  n'ai  jamais  vu  de  féné  dans  les 
quartiers  ou  j'ai  demeuré.  Celui  que 
j'ai  cultivé  venoit  de  graine  que  l'on 
avoit  apportée  du  Cap. 

Trompette» 

'  II  y  a  un  arbre  à  St.  Domîngue  qu'on 
appelle  bois  trompette,  qui  croît  fore 
haut ,  &  qui  a  peu  de  branches.  C'eft 
apparemment  de  cet  arbre  que  notre 
Auteur  veut  parler  fous  le  même  nom 
de  trompette:  du  moins  n'en  connois- 
^:pas  d'autre. 
::i,  Sf  &  racines  fbnt^diD-iljécartéçs  i  elles 


VE  St.  Doj^^^PV^    189 

5,  entrent  dans  les   tifannes  pour  go- 

„  norrhées Sa  fleur  ell  blanche , 

^5,  [a)  par  trois  queues  de  rat ,  fa  graine 

3,  bonne  à  manger.  „ 

M'*  Defportes  employé  fon  écorcé 
dans  les  tifannes  apéritives. 


Trefè. 


it 


5 


„  Bon  en-tifanne  pour  difficulté 
d'urine.  Sa  racine  eft  très -bonne 
auffi:  mais  il  en  faut  ufer  médio- 
crement, car  elle  feroit  piÏÏer  juA 
/.'  qu'au  fang.  Sa  feuille  entre  dails  les 
5,  tifannes  pour  maux  vénériens.  Les 
5,  gou {les  font  en  grappe  5  fa  feuille. 
„  rondej&l  la  fleur  pale  :  il  croît  le  long 
^^  des  chemins  Se  favanes.  „ 

Selon  M"^-  Duhamel  ce  que  Mi h- 
guet  appelle  trèfle,  eft  une  efpece  de 
pois  chiche  fort  peu  diffemblable  | 
celui  d'Europe. 

-'(a)  Il  y  a  là  quelque  chofe  de  louche  :  il  y  manfii^ 
apparemment  le  mot  terminer. 


IpÔ  P  L  A  N  T  E  ê 

Bois  fifieux  y  ou  hois  h  flot. 

,5  Son  bois  eft  extrêmement  léger. 
,,  Sa  feuille  fort  grande,  fa  fleur  blan- 
5,  che ,  fa  gouffe  longue ,  des  femen- 
„  cts  petites ,  noires  &  rondes  ,  fon 
„  cotton  d'une  finelle  incomparable. 

Je  ne  la  connois  point. 

Bois  major^ 

Ceft  un  petit  arbrifleau.  Je  me  fuis 
fervi  de  fa  racine  pour  les  gonorrhées , 
lorfqu'on  netrouve  plus  de  pois-puant, 
qui  meurt  dans  la  faifon  des  fccs  (a). 
Il  eft  fort  connu. 

Minguet  n'en  parle  point. 

(  <»  )  Dans  les  îles  de  St.  Domîngue  &  autres,  fîtuées 
entre  le  tropique  du  caiicer  &  l'équateur  ,  on  ne 
compte  que  deux  faifons  :  la  faifon  des  pluies  qui 
commence  dans  le  mois  de  Mai,  &  finit  vers  la  fête  de 
tous  les  SS.  &  la  faifon  des  fecs  ,  depuis  Novembre 
jufqu'au  mois  de  Mai ,  parce  qu'il  pleut  tout  au  plus 
une  fois  le  mois  pendant  tout  ce  tems ,  au  lieu  que 
dans  les  autres,  il  pleut  prefquetoUslçs  jours» 


^E  Sr^    Do  MIN  GUE.    ïpi 

Bois  Mary  ou  d'Almarie. 

»  Cet  arbre  eft  bon  en  mâture  de 
"  vaifTeaux,  mais  fortpefant,  fa  fleur 
»  eft  blanche  i  les  oileaux  mangent 
w  fon  fruit....  lien  fort  vme  gomme 
»  d'un  très-beau  vert ,  elle  entre  dans 
«  les  onguens. 

J'ai  vu  à  St.  Domingue  pendant  la 
guerre  ,  de  belles  bougies  vertes ,  ap- 
portées 5  à  ce  qu'on  diloit,  de  la  nou- 
velle Angleterre.  Elle  étoit  certaine- 
ment faite  avec  une  gomme ,  mêlée 
peut-être  avec  quelques-unes  de  ces 
huiles  du  pays  qui  fe  figent,  ou  bien 
avec  un  peu  de  cire.  N'étoit-ce  point 
avec  cette  gomme  (/î)  ?  C'eft  à  caufe 
de  ce  foupçon  que  j'ai  parlé  de  cet 
.arbre,  qui  d'ailleurs  n'entre  point  dans 
l'objet  que  je  me  fuispropofé. 

(  M  )  J'en  ai  vu  d'autres  faites  avec  le  blanc  de  ba* 
lene  ôc  c[uelqu'autre  matière  grafle. 


W% 


ip2 


L  A   N    t[E^é 


Bois  Capitame,^ 

.  C'eil:  unarbrijGTeau.  Ses  feuilles  font 
p^Lvàedus  vertes  &  cuifaintes  ,  pardef- 
fous  blanchâtres  ,  remplies  de  petites 
pointes  très -fines  qui  relient  dans  icà 
doigts  quand  on  les  touche.  //  porfè 
un  fruit  comme  une  cerife  ,  bon  k  manger  \ 
dit  Minguet.  Sa  fleur  eit  blanche. 

Comme  f  ai  été  àttrappé une  fois  à  fa 
feuille  5  je  ri'ai  pas  eu  là  curiofité  dé 
coûter  fon^fruit. 

'     Le  P.'  Pîamiér  a  nommé  cet  arbri<^ 
feau  ,  Màlptghia  latifolia^  folio  JubtUs 

'  ■       Bois  âe  fer^ 

..  -Min-à  .     .    '    -^ 

^^'•ii  Son  fi'Oit  eft  gros  Ki^ond  comnie 

^iî  le  petit  doigt.  Son  bois  eft  fort  amer^: 

i,  il  cafle  les  meilleures  haches   lorf- 

»  qu'on  lé  veut  couper.  »  ^ 

Minguet  n  en  dit  pas  davantage. 

Son  écorpe  entre  dans  les  ti fa  unes 

fudorifiques 


VE  St.  Do  mi  noue,   ip^ 

fudorifîques  avec  le  gayac.  V^oyez  le 
Diclionnaire  des  drogues  fimples,  Arc. 
lignumfcrri. 

Cœur  de  bœuf, 

Noas  en  avons  parlé  ci-deflTus.  Voici 
ce  que  Mingaet  en  dit; 
»Son  fruit  eftfemblable  au  cœur  d'un 
M  bœtif  )  jaune  en  dehors  ,  lorf qu'il 
»»  eft  imxr  (  a  ),  blanc  en  dedans^ & reiîi^ 
»  pli  de  petites  graines.  Il  eft  bon  à 
»'  manger ,  ôc  fon  ufage  peut  arrêter 
"  un  cours  dé  ventre.  »  C'eft  fur  fon 
témoignage  que  je  m  en  fuis  fervi,âvec 
un  fuccès  incroyable.  Il  ajoute  :  «  Sa 
*5  fleur  eft  jaune  tirant  fur  le  blanc.  >* 

Chêne  i 

Minauct  parle  de  deux  efpeces  de 

chêne,  il  appelle  Tune  chêne  à  gland. 

*•  Ce  chêne  eft  gris.  Le  bois  en  eft 

in  )  Je  n'en  ai  vu  que  de  couleur  de  rofe. 

N 


IÇ'^  ^  HA  M  TE  3 

>v  bon  pour  la  conftrudion  des  mou* 
»^  Mns  à  fucre  ,  &  lorfqu'il  eft  mis  en 
»  œuvre  5  il  a  l'odeur  de  la  rofe.  Sa 
M  fleur  eft  à  trois  feuilles  &  autant  d'é* 
w  tamines....  Son  fruit  eft  femblable 
V»  aix  gland  de  FEurope.  Les  Sangliers 
M  le  mangent.  >> 

Selon  M''  de  la  Lande  y  homme 
cl'efprit ,  très-  curieux  ôc  grand  Ingé- 
ni^m  j  e'eft  le  bois  de  rofe.  Voyez 
Lemery ,  Art,  kois  de  rofe^ 

Chêne  noir. 

»  Bon  à  faire  planches  &à  bâtir  , 
»  niçiUeur  que  celui  d'Europe ,  parce 
»».  que  le  vei:  n  y  donne  pas . , . ,  Sa  fleur 
«  eft  blanchcja quatre  feuilles,  fuivie 
»>  d'une  longue  goufle  remplie  de  fi- 
*>  lafle.  » 

Cet  arbre  reflemble  affez  au  chêne 
d'Europe  par  fa  feuille  &  par  fon  écor- 
Ce.  Les  gonfles  ne  font  pas  plus  groflès 
qu'une  aiguille  à  tricotten  Elles  onc 


VE  St.  Do  min  g  ve.    jpr 

bien  un  pie  &:demi  ,  ou  deux  pies  de 
long.  C'eft:  la  Bignomà  arbor  foUo  (m^u^ 
lari  ^filiquis  lonQ^tjJlmis  (^  â^^ufliillmis 
du  P.  Plumieri  C'ait  uniquement  pour 
faire  connoîcre  la  Bigmma ,  que  j'ai 
rapporté  ces  deux  derniers  articles* 

CroquC'^mùilier, 

«  Sa  fleur  eft  blanche  &  foarcliuei 
*»  fon  fruit  eft  noir^  gros  comme  le 
*  poucejèc  couronné ....  Il  eft  aftrin- 
w  gent.  Prenez-en  quantité  pour  le 
i>  faire  bouillir  &i  diminuer  en  confif- 
^>  tance  de  firap,  pour  le  fluxdefangi 
qui  fera  arrêté  en  24  Iieures^  H 
croît  au  rivage  de  la  mer  ^  6c  pays 
filineux.  Sa  feuille  eft  armée  de 
»*  piquans  comme  celle  du  petit  houx.» 
Je  n'ai  vu  cet  arbre  que  de  loin  en 
voyageant. 

Frangipane, 

C*eft  un  arbre  de  moyenne  grandeur 

N  ij 


•j» 


)> 


jq6       Plantes 

êchauteur,dont  lesbranches  font  toutes 
tortues ,  fa  fleur  eft  à  cinq  feuilles,  va- 
riée de  rou^e  &  de  blanc.  Elle  eft  épaif- 
fe.  On  en  fait  un  firop  foft  bon  pour 
les  poitrines  écliaufFées  (a), 

«  Ainfi  nommé,  parce  que  fa  feuille 
.>  reffemble  à  celle  d'Europe.  Il  eft  fort 
»  haut  ôc  droit ,  propre  à  faire  du  mer- 
«  rain.  Son  fruit  eft  gros  comme  le 
•^  pouce,  prefque  de  la  figure  de  lo- 
^»  live5  fervant  de  nourriture  aux  fan- 
M  gliers  ôc  aux  oifeaux. 

Son  fruit  n  eft  pas  plus  gros  que  les 
olives  fauvages.  Il  eft  verd  avant  de 
mûrir  ,  il  eft  noir  quand  il  eft  mûr  : 
il  vient  par  bouquets  fur  de  longues 
queues/ Il  a  fort  peu  de  pulpe  :  elle  eft 
pâteufe.  Il  renferme  un  noyau  fort  dur 

(  a.  )  Quand  les  fleurs  font  tombées  ,  il  s'engendra 
deffus  une  chenille  qui  mange  les  feuilles  &  tour  ce 
qu'il  y  a  de  verd.  Ces  chenilles  font  Yertes,tort  groliei 
ac  d'une  grande  beautés 


-^ 


VE   St.    DOMIN  GUE.    l^J 

dans  lequel  il  y  a  une  amande  très- 
amere.  J'en  ai  fait  tirer  de  Thuile.  Une 
livre  d'amande  çn  doi;ine  quatre  onces. 
Il  faut  la  laver  dans  plufieurs  eaux 
pour  ôter  fon.  am^ertume.  Alors  elle 
eft  fort  bonne  à  manger.  Elle  fe  fige 
comme  fait  ici  l'huile  d'olive  en  hy- 
yer^  elle  eft  fort  blanche. 

Indigo  marron^. 

Il  vient  fans  culture.  On  le  cultive 
aujourd'hui  comme  le  franc  ,  auquel 
plufieurs  habitans  le  préfèrent. 

Selon  Minguet,  (a  racine  entifanne 
eft  bonne  pour  les  gonorrhées. 

Quelques -un3  employent  auflî  la 
décoftion  de  toute  la  plante  pour 
l'atthme  :  elle  eft  fort  défagréable,  6C 
peu  en  ufage,  apparemment  par  cette 
raifon,  ou  parce  que  cette  vertu  n'eft 
pas  bien  connue,  ou  parce  qu'elle  ne 
réuffit  pas  ordinairement. 

,  N  iij 


nHai 


Plante  4? 


aane  a   caconne. 


»  Sa  fleur  eft  d'un  blanc  jaune,  elle- 
•»  produit  une  gouffe  garniç  d'un  poil 
»  roux.  La  fève  qu'elle  contient  eft 
»  grofle  comme  une  châtaigne ,  de  la 
V  même  couleur,  mais  platte,  ronde 
«  &  peinte  d'un  cercle  noir  dans  fa 
»  rondeur.  Elle  eftamere  ,  quoique 
"  les  fangliers  la  mangent  fort  bien. 

J'ai  vu  de  ces  eouffes  :  6c  l'on  m'a  dit- 
que  cette  ëfpece  d^  maron  qui  eft  fore 
gros,  étoit unboncontre-poifon. 

Le  P.  Plumier  lui  a  donné  le  nom  de 
fhafeolusjîliqms:  làtis ,  hiffidis ,  (^  r/^-» 

Lime  h  çhi^u'e. 

»  Sa  graine  eft  par  grappes,  comme 
»»  le  mifîn,  blanche  quand  elle  eft 
M  mûre  ,  6c  a  fur  le  bout  de  chaque 
•!»  graine ,  tïn  petit  œil.  Elle  'croît  le 
«  long  des  rivières  ,  elle  eft  bonne 


»»^..—    ,'^^nn.j»';  i 


j)E  St.  Do  mi 0 "ùve.   i^^ 

»>  à  manger  ,     contenant    d^  petits 
^  grains,  comme  des  têtes  d épingle. 
JA"  Defportes  en  employé  kraciae 
dans  les  tifannes  apéritives.. 

Lia^e  à  bouton, 
>•  Elle  produit  une  pomme  dans  la- 
y^  quelle  eft  ua  bouton  couvert  d'un 
«  poil  noir  3,  doux  comme  fatin^,  dans 
^  lequel  font  plufieurs  petites  graines  > 
»  il  n  y  a  point  de  fleur.  Elle  eft  bonne 
»>  pour  guérir  des  ulcères.»  Lés  tiges 
&:  les  feuilks  entrent  dans  les  tifannes 
apéritivesdeM'^*  Defîportes. 

Unne  À  hosufs^ 

..  Elle  croît  dans  les  montagnes,,  5c 
rapporte  la  châtaigne  de  meryâinfi 
nommée,  parce  que  les  rivières dé- 
-- bordant  Ten traînent  à  la  mer.  Cette 
»»chataigne,quieftfortgroiïe&:en£orme 
^  de  cœur,fert  à  faire  des  tabatieresXes 
u  fangliers  la  mangent.  Pulvérifée& 

N  vi 


««^ 


>» 


200        Plantes 

P  infufée  pendant  une  nuit,  elle  eft  boû-^ 
»*  ne  pour  un  fébriGitant.Cette  lianne  eft 
?* fort  greffe,  court  d'arbre  en  arbre, 
«quelquefois  plus  dune  demi -lieue. 
"Son  pie  çft  ordinairement  ou  il  y  a 
^'de  Teau.  Sa  feuille  eft  fort  petite  i 
•'les  bœufs  l'aiment  beaucoup.  >>  ^ 

Je  ne  connois  ni  cette  lianne  ni  fa 
vertu. 

hianne  À  tonnelle, 

■  '"Il  eft  certain  que  deux  pies  bier^ 
w  entretenus  peuventfervir  à  une  ton- 
«  nçlle  de  demi -lieue:  elle  produit 
»>  tant  d  ombrage  ,  §c  fon  épaifleur 
»-  eft  telle  que  l'on  y  peut  parer  un 
«grain  de  pluye.  Son  fruit  eft  gros 
»^  comme  un  œuf,  ayant  trois  quarts 
»>  &  trois  noyaux.  Sa  fleur  eft  jaune, 
^  en  forme  de  cloche ,  avec  quatre  éta- 
»  mines  dans  le  milieu.  »v 

C-efi  le  convoivulus   polyphyllos  flore. 
lutèoé^fruUu  maximis  du  P.  Plumier. 


DE   St.    DOMINGVE.    2QI 

J'ai  vu  dans  la  Ville  de  Léogane  une 
de  ces  tonnelles. 

Âda^gle  du  ^ard  dehM&r, 

V  H  produit  une  gouffe  fort  allons 
i>  o-ée ,  fa  feuille  eft  ronde  (  a  ).  Sa  fleur 
n  eft  de  couleur  de  feuille-morte.  Son 
?»  écorce  eft  bonne  en  infofion  ,  pour 
w  une    perfonne   enflée  ,  avec  cette 

*M  précaution  de  prendre  le  côté  où  le 
^>  Soleil  réchaufFe  le  plus.  Il  faut  zw^x 
i>  choifir  récorce  ta  plus  fine  de  fes 
?'  jambes  ou  racines  hors  de  terre  ,  ou 
»'  d'eau.  Il  porte  une  graine  que  les 
\>  ramiers  mangent.  »a  M'*  Defport§s 
i'employe  avec  le  quinquina,  Técorce 
^Q  fucrier  &:  d'amandier. 

Voyez    ci  -  deftus  cç  que  nous  en 
avons  dit. 

Mûrier, 

V  La  fleur  eft  petite  &  blanche  >  fui- 

(  a  )  Minguet  fe  trompe  :  elle  eft  oblongue  comme 
nous  l'avons  dit,  approchant  de  celle  da  laurier» 


■Mm 


M 


|lOà  P  l  A  J^  T  E  s 

»  vie  d'un  fruit  gros  comme  le  pouce ^ 
>'  comparable  à  la  fraife  pour  fon  boa 
»»  goût..  Son  pépin  eft  fort  petit,  toutes. 
»*  fortes  d'oi féaux  s'en  nourriflTent,  " 

Le  bois  jaune  du  Cul^de-fa^  y  eft  fans*^ 
doute  le  marier  de  Atinguet,  Cet  arbre 
eft  bon  four  la  teinture  ;  je  fuis  fur  pris 
quil  nefafte  pas  mention  de  cette  particu^ 
tarit  é^,  F  eut-être  ne  eonnmjfoit  -  il  pas  le 
hois  jaune  ;  peut-être  aùjft  quil  né  favcit 
pas  fon  ufage,  M'^"  DuhameL 

J*ai  demeuré  trois  ans  au  Cul-de- 
fac  :  &  je  n'ai  jamais  entendu  parj.er 
ni  de  ce  mûrier  ni  de  fon  fruit  >  d'où 
je  conclus  qu  il.neft  pas  fort  commun^ 

Perroquet. 

»  Dans  le  mûrier  &  autres  arbres  ; 
»  croît  le  perroquet  >  qui  contient 
»*  quatre  ou  cinq  pots  d'eau  bonne  à 
»>  boire:  on  perce  la  plante  avec  la 


VE  St.  Dûminùve.  '^jt)^ 

V  baguette  4u  boucanier  [a),  >* 

Noifettes. 

w  Le  noifèttier  vienc  fort  haut.  Sa 
»  feuille  eft  petite  g^  fort  fine..  Il  naît 
"  dans  les  pays  arides,  &: produit  un 
»,»  fruit  gros  comme  le  pouce  ,  rondôc 
»  bon  a  manger  y  ayant  beaucoup  de 
*?  faveur  :  fa  coque  eft' fort  fine  :  mais 
^  fi-tôt  que  cette  noifette  efl  vieille» 

V  elle  fe  rancit.  Elle   feroit  bonne  à 
»A  faire  de  rhuite. 

Je  ne  connois  point  cette  efpece 
de  noifette.  Je  n'en  ai  pas  même  en-* 
tendu  parler:  mais  il  y  a  dans  quei^ 
ques  jardins  de  Léogane  un  grand 
arbre  dont  Técorce  eil  blanchâtre  y 
qui  né  porte  pas  un  grand  nombre  de 
branches ,  &  dont  les  feuilles  font  auffi 
blanchâtres  &  fort  grandes  ,  il  ne  me 
fouvient  pas  de  fa  fleur.  On  rappelle 

(  4  )  C*eft  un  fulil  plus  gros  5c  plus  long  que  les  fulik 
ordinaires. 


noifeccier.  Il  porte  un  fruit  gros  com^ 
me  une  pomme  de  grofTeur  médio^ 
cre  :  la  peau  eft  verte,  ôç  la  pulpe  qui 
eft  deffous  eft  jaunâtre..  Elie  couvre 
trois  eros  noyaux,  dans  cliacun  def- 
quels  il  y  a  une  amande  grofTe  comme 
jno5  noifettes ,  &  auiîî  bonne.  J'en  ai 
fait  faire  de  rhiiile  excellente, 

Marrom^ 

»j  Lianne  grife ,  qui  porte  une  feuille 
w  ronde,rapporte  un  fruit  gros  comn>e 
A'  une  orange  &:  de  la.même  couleur  , 
-w  quand  il  eft  mûr  5  s'ouvrant  pa'^r 
»  le  milieu  ,  pour  laiffer  fortir  trois 
'»»  grains  femblables  aux  marrons 
•»  d'Europpe  3  même  écorcç  &:  même 
•c  goût.  Peu  de  perfonnes  la  connoif- 
>?  fenti  elle  grimpe  dans  les  noyers.  »t 

Je  ne  connois  point  cette  lianue. 

Noyer, 
»  Il  porte  des  noix  ,   femblables  i 


DE   St.Î)OMÎNCVÈ.     2Ôf 

0  celtes  d'Europe  i  mais  la  coque  eft 
M  plus  épaiffc  &plus  dure ,  ôc  ramande 
*>  moins  grofle.  Il  croît  dans  les  mon- 
»>  tagnes  arides  5  fa  feuille  reffemble 
»  à  celle  du  frêne  d'Europe*  " 

Je  neconnois  point  cette  efpece  de 
noyer:  mais  j en  ai  entendu  dire  c0 
que  Mingueten  rapporte. 

Sucrier  de  montagne  ,  ou  hbis  cochon. 

,»  Sa  gomme  eft  excellente  pour  les 
»  coups  de  fer*  Il  faut  laver  la  plaie 
»»  avec  de Teau  fraîche ,  y  infmuer  du 
w  baume  avec  Unpeu  de  charpi,  u\m 
n  comprefle  avec  un  bon  bandage 
^>  pardeflTus:  la  plaie  fe  ferme  au  bout 
n  de  24  heures.  »' 

Ce  qu'il  a  appelle  gomme^il  l'appelle 
baume  5  c'eft  fon  véritable  nom.  On 
l'appelle  encore  huile  ,  parce  qu'il  en  a 
la  confiftance.  Ce  baume  participe  du 
baume  de  copaû  &:  de  l'huile  de  téré- 
benthine.  Il  eft  bon  d'avertir  qu'il  n^. 


w\ï 


r^ 


Plantes 

faut  pas  iïiettre  du  eharpi  dans  là 
plaie  j  coîilme  il  le  dit ,  mais  un  peu 
de  baume  ^  &  pardetTus  un  plumaffeau 
qui  en  fera  imbibée  ««  Son  écorce  eft 
»*  bonne  dans  les  tifànnes  pour  les  pians^ 
>i^  parce  que  fa  gomiHe  elt  purgative.  >* 
(  Je  ne  je^ois  pas  de  fi^  wvis  ,  elle  efi 
trop  chaude,  ).  »  Son  écorce  eit  encore 
»  bonne  en  tifanne  pour  les  gens  at- 
*>  taqués  du  poumon  j  ou  de  Tafth- 
«  mes  Si  fi  là  partiegauche  n'eft point 
y^  attaquée  5  cela  fauve  la  vie;  ckofe 
**  éprouvée*  (  U  îH^a  Pair  d^Un-  mAîivâ,H 
ohfer'Vdteur  fur  ceP  article ^t*-  On  Pappelle 
••  bois  cochon  1  parce  que  le  cochon 
{Marrvn<^  oufangUerde  cepays-lk)  «  étant 
*>  blefle  y  va  mordre  cet  arbre ,  en  fait 
«  forcir  la  gomme  5  y  frotte  fa  plaie  bL 
»  la  o-uérît.  »» 

Un  des  meilleurs  ufages  qu'on  peut 
faire  de  cette  écorce  ,  c  eft  de  la  faire 
entrer  dans  une  eau  vulnéraire  faite 
au  foleil ,  dans  le  goût  de  celte  que 


m^>m 


D  E  St.  Do  mi  noue.  20  f 

je  compofoisil  y  a  une  trentaine  d'an- 
nées^qui  eft  aujourdliui  fort  commune 
dans  Paris,  èc  connue  fous  le  nom 
d'eau  rouge ,  ou  d'eau  de  vie  rouge. 

J'en  ai  fait  auflî  à  St.  Domingue  avec 
les  plantes  vulnéraires  du  pays ,  par 
Tufage  de  laquelle  j'ai  fauve  à  des 
Nègres  leurs  mains  écrafées  par  les 
moulins  à  fucre  5  que  Ton  avoit  cou- 
tume de  leur  couper.  Depuis  le  pre- 
mier jour  jufqu'au  dernier,  je  ne  les 
faifoispanfer  qu'avec  cette  eau-devie. 
M'^*  Defportes  fait  entrer  cette  écorce 
dans  les  tifannes  apéritives, 

Citronmer, 

»Sa  racine  eft  bonne  dans  les  tifannes 
>»  pour  galanteries.  Son  fruit  fert  à 
»'  faire  l'onguent  noir  avec  lequel  on 
>»  ne  manque  jamais  de  guérir  quelque 
»>  ulcère  que  ce  foit.  Il  eft  fi  violent 
!•  qu'il   fait  plus  de  douleur  que  la 


»  pierre  infernale  :  c'efl:  pourquoi  on 
«  rappelle  auffi  l'onguent  du  diable  5 
«  il  mange  les  mauvaifes  chairs ,  nour- 
w  rit  êc  fait  venir  les  bonnes,  ôc  pré- 
i>  férve  de  la  gangrené.  >> 

L'onguent  noir  fe  fait  avec  du  mâ- 
che-fer >  de  ia  fuie  &:  du  jus  de  citron. 
Il  eft  fort  en  ufage  5  on  l'applique 
chaud  5  ceft  pourquoi  il  fait  tant  de 
douleur.  »  Ses  pépins  piles  font  mou- 
ii  rir  les  vers  des  enfansi  »> 

M"  Defportes  fait  entrer  fon  écorcej- 
avec  celle  d'oranger  fauvage  dans  les 
opiates  aperitives^ 

Cerifes  de  t Amérique. 

»  Rouges  grappues ,  groffes  comnic 
.!-  celles  d'Europe  ,  pâteufes  ôc  alté- 
«  rantes.  Cet  arbre  a  la  feuille  large 
«  &  grande  comme  le  coudre.  » 
Le  P.  Plumier  l'appelle  MdpigU  rmli 
■punici  facie* 
Je  ne  connois  point  cet  arbre ,  6:  je 

ïi'en 


DF  St.  Domin gve,  209 

ti*€n  ai  jamais  entendu  parler. 

,  Le  véritable  cerifier  de  St,  Domingue, 

Cell  un  petit  arbre  épineux  à  petites 
feuilles  rondes ,  avec  quelques  échan- 
crures:  fon  fruit  efl: rouge  &  gros  com« 
me  une  cerife  :  mais  i)  eil  à  quatre 
petits  coins.  Au  lieu  de  noyau  ,  on 
trouve  au  milieu  trois  petits  morceaux 
d*une  fubftance  membraneufe  &  co- 
riace. 

Ce  fruit  cru  eft  fort  acide  &  âpre. 
Quelques-uns  pourtant  le  mangent 
faupoudré  de  fucre.  En  comporte  il 
eft  excellent:  il  a  le  goût  des  cerifes 
&  des  framboifes  d'Europe  :  on  en  fait 
auilî  une  gelée  parfaitement  bonne. 


Ici  finit  MingHcf, 


210 


Plan 


T  E  ^ 


Bois  cCInde» 

Minguet  ne  parle  point  d'un  grand, 
arbre  des  îles ,  que  Ton  nomme  bois 
d'Inde»  Quoique  je  n*en  aie  pas  fait 
dans  le  pays  une  defcription  exade, 
je  vais  en  dire  ce  que  j'en  fai. 

Il  ne  faut  pas  le  confondre  comme 
a  fait  Lemery ,  avec  le  bois  de  la  Ja- 
maïque ou  bois  de  Gampêche.  Celui- 
ci  eft  un  bois  fort  épineux ,  dont  on^ 
fait  des  haies  à  St.  Domingue  depuis 
peu  detemsi  il  vient  mieux  que  le  ci- 
tronnierôc  garnit  davantage. 

Quand  on  le  laiffe  croître ,  il  devient 
un  grand  arbre  ,  dont  on  envoyé  le 
cœur  en  France  ,  pour  les  teintures. 
L'erreur  de  Lemery ,  vient  apparem- 
ment, de  ce  qu'autrefois,  avant  que 
l'on  connût  le  nom  de  bois  delà  Ja- 
maïque &  de  Gampêche  en  France, 
on  l'appelloit  purement  6c  fimplement, 
bois  d'Inde^  Cette  partie  de  l'arbre  eft 


v.,,/i- 


DE  St.  Domîn^ve.    2l\ 

rouge:  il  ne  porte  point  de  baies,  nuis 
une  petite  follicule  mcmbraneufe  , 
minet  5c  platte,à  peu-près  comme  celle 
du  frêne  :  ces  baies ,  non  plus  que  les 
feuilles  ,  n'ont  ni  l'odeur  ni  legoiit  de 
la  feuille  &  des  baies  du  bois  d'Inde, 
cette  petite  goulfe  renferme  des  fe- 
mences. 

Le  bois  d'Inde  de  St.  Domingue  & 
de  plufieurs  autres  îles,  eft  un  grand 
arbre,  ôc  peut-être  le  même, qui  félon 
Lemery  ,  croît  en  Cambaya ,  dans  les 
Indes  Orientales  {a).  Les  feuilles  de 
celui  dont  je  parle  font  grandes  comme 
celles*  du  laurier,  liiTes  &  de  couleur 
verte. 

Elles  ont  uneodeur  mêlée  de  poi\Te, 
de  girofle  6c  de  lauriers.  Ainfi  elles  font 
les  mêmes  que  iefclium  I^dum^que[*on 
fait  entrer  dans  la  thériaque ,  avec 
cette  différence  que  celles  de$  Indes 
Orientales ,  vendues  en  France  ,  n'onc 

(  a  )  Voyez  htmçTj  ,    Arc.  MAlaèatram  p,  y^^j,. 


212 


P  l   À   N   t   E    $ 


prefqiie  plus  aucunes  des  qualités  que 
les  Auteurs  demandent  >  les  baies  {a  ) 
poffedent  ces  trois  qualités  plus  émi- 
nemment que  les  feuilles. 

Dans  les  oaies  du  bois  dinde  de  là 
Jamaïque,  le  poivre  dominé.  C'eft  par 
cette  raifon qu'on  les  appelle  poivre  de 
de  la  Jamaïque. 

Lemery  fe  trompe  encore ,  quand  il 
dit  )  que  Técorce  de  ce  bois  elt  la  ca- 
iielle  blanche  (h),  La  canelle  blan- 
che eft  récorce  d'un  autre  petit  ar- 
bre ,  du  moins  je  n'en  ai  vu  que  de 
petits  à  la  Martinique.  Je  n'en  ai  point 
vu  àSt.  Domingue. 

Il  y  a  fixou  fept  ans  que  j'envoyai  à 
M''*  Laborye  ,  Apothicaire  fort  connu 
par  fa  capacité  6c  fa  probité  ,  une 
boîte  de  feuilles  de  bois  d'Inde  ,  pour 
être  employées  dans  lathériaque. 

{a)  Ces  baies  font  aflfez  bien  décrites  dans  Tarti- 
cle  ci-defTus  ;  Malahatrum. 

{é)  Article ,  bois  d'inde.  ^.  502 1    •    .• 


î>E  St.  DômîncveI    215 

Le  P.  Labat  a  déerit  affez  bien  le 
bois  d'Inde  3  qu  il  appelle  auiîî  laurier. 
Il  dit  qu'il  porte  deux  fois  Tannée 
de  petites  fleurs  blanches  ,  qairougif- 
fent  un  peu  vers  leurs  extrémités  3  elles 
font  par  bouquets. 

Voilà  5  Monfieur  5  &  cher  confrère 
ma  tâche  faite,  &je  vous  envoyé  ce 
que  je  vous  ai  promis.  J'ai  pourtant 
envie  d'y  joindre  quelque  chofe  fur  le 
-bananier  ,  le  palmifte  &:  le  ktanier. 
Je  n'ai  pas  rapporté  ci-delîiis  5  ce-  que 
■je  connois  de  cqs  arbres  3  parce  qu'il 
n'y  a  rien  ou  peu  à  gagner  ,  pour  la 
matière  médicale.  Mais  toute  réflexion 
faite ,  je  crois  qu'ils  méritent  de  trou- 
ver place  dans  ce  recueil,  à  caufe  de 
leurfingularité.  Vous  en  jugerez. 

Bmjtnier  (  a  ), 
Il  y  en  a  de  deux  efpeces ,  qui  ne 

[a]  Mftfaarhf  PalmahumiUs  Ungis  latif^Hefoliih 
Toma  Fftradifi,  ^c.   Voyez  Lemery.- 

G  iij 


différent  gueres  que  par  leur  fruit.  Le 
fruit  de  Tun  s'appelle  banane  >  le  fruit 
de  l'autre  s'appelle  figue  banane. 

Le  ba-iianier  n  eft  autre  chofe  que 
plufieurs  feuilles  roulées  les  unes  fur 
les  autres  ,  qui  forment  une  efpece  de 
tronc  ,  toujours  tendre ,  toujours  verd, 
de  la  grofleur  du  corps  d'un  homme 
ordinaire  ,  ôc  qui  croît  jufqu'à  la  hau- 
teur de  fix  ou  fept  pies.  Si  on  doit  l'ap- 
peller  arbre  ou  plante,  je  le  laiffe  à 
décider  aux  Botaniftes  de  profeffîon. 

Sa  racine  eft  unegroffe  bulbe  blan- 
che ,  qui  produit  plufieurs  cayeux, 
qui  avec  letems  pouffent  des  rejettons 
autour  du  tronc. 

Voici  fa  manière  de  croître. 

Il  fort  d'abord  de  terre  deux  feuilles 
roulées  qui  s'élargiffent  pour  faire 
place  à  deux  autres  ,  qui  viennent  du 
centre  :  ces  fécondes  font  place  à  une 
troifieme  paire  5  la  troifieme  à  une 
quatrième.  Etainfi  des  autres.   Ces 


VE    St.DoMINGUE.      21  f 

feuilles  s'appliquent  fortement  les  unes 
contre  les  autres  de  prefque  toute  leur 
longueur,  qui  peut  être  d'un  pie  & 
demi  ou  de  deux  pies  :  enfuite  leurs 
pointes  qui  fe  recourbent  vers  la  terre , 
fe  feclient  Se  tombent. 

Quand  le  bananier  eft  arrivé  à  la 
hauteur  que  nous  avons  dit ,  fes  feuil- 
les, d'un  beau  verd,  fortent  abfolu- 
ment  hors  du  centre  ,  &  s'étendent  en 
l'air  5  prefque  toutes  en  lignes  direftes, 
peu  écartées  les  unes  des  autres.  Com- 
me elles  font  fort  pefantes  àcaufe  de 
leur  longueur ,  qui  eftaumoins  de  cinq 
ou  fix  pies ,  6c  de  leur  largeur  qui  en  a 
deux  ou  environ  ,  elles  penchent  un 
peu  vers  la  terre  :  elles  y  tornberoienc 
en  peu  de  tems  ,  fi  elles  n'étoient  pas 
foutenues  par  une  fortgrofle  queue, 
ronde  d'un  côté  &  platte  de  l'autre , 
qui  règne  ,  en  diminuant ,  jufqu'au 
bout  de  la  feuille ,  &  diftribue  des 
nervures  pour  la  foûtenir.  Malgré  ce 

O  iy 


21$  ^  Z   A  N  T  E  S 

fecours ,  elles  font  fort    faciles  à  dé-^ 
chirer,   &  pour  peu  que  le  vent  foit 
fort,  îl  les  fépare  en  une  iufinité   de 
bandelettes  >  de  la  largeur  d'un  pouce* 
Il  ne  faut  que  neuf  mois  au  bananier 
pour  faire  fa  crue  :  alors ,  du   milieu 
de  fcs   feuilles ,  on    voit  naître   une 
grolTe  Se  (one  tige  ligneufe  longue  de 
trois  ou  quatre  pies  >  qui  fe  termine 
en  un  gros  bouton  oblong  ,  aprochanc 
delà  ligurç  coniquç»  de  couleur  de 
eris  de  lin^  Cette  ti^e  eft  diftino-uée  de 
diftance  en  diftance,  par  des  efpeces 
d'anneaux  environnés  de  petits  bou-* 
tons:  ce  font  les  embryons  des  fruits 
qui  y  font  collés  5  à  mefure  qu'ils  grof- 
fiflent ,  on  apperçoit  un  pédicule  li- 
gneux auquel  ils  font  attachés  quatre 
ou  cinq  enfemble. 

Chaque  anneau  porte  plufieurs  d^ 
ces  pédicules,  enforte  que  la  tige  efl 
toute  couverte  de  ces  fruits  i  longs 
À\m  demi  pié ,  de  la  groffeur  du  brajj 


pw  St.  Do  min  a  ve.  2tf 

d'un  enfant  de  cinq  ou  fix  ans ,  rele- 
vés de  trois  coins  ,  couverts  d'une 
peau  verte  qui  devient  jaune  ,  de  qui 
s*éleve  facilement  de  toute  fa  lon- 
gueur en  trois  parties,  quand  le  fruit 
eftmûr. 

•  Il  en  vient  communément  {^)> 
cinquante,  foixante  ou  même  da- 
vantage fur  la  tige  3  qui  ainfi  chargée 
s'appelle  un  régime. 

Les  fruits  font  fort  bons.  Leur  chair 
eft  jaune  ôc  ferme  à  peu-près  comme 
la  poire  de  virgouleufe  ,  leur  centre 
dans  toute  la  longueur  eft  garni  de 
petites  graines  tendres ,  attachées  à  de 
petits  filets,  on  les  mange  avec  le  fruit. 

Ce  fruit  fe  mange  cru  ,  en  compot- 
tes  y  bouilli  avec  du  bœuf  falé  5  frit , 
coupé  en  tranches  minces  de  toute 
fa  longueurs  boucanné,  c'eft-à-dire  > 

(  a  )  Lemery  dit  deux  cens ,  c'eÛ.  trop  :  le  P.  La- 
bat ,  depuis  trente  jufqu'à  cinquante  ,  ce  n»eft  pas 
^ffez. 


2iR      Plan  tes 

cuit  fur  le  gril  ou  fur  les  charbons. 
C'eft  une  fort  bonne  nourriture  &:  d'un 
grand  fecours  quand  le  pain  manque  , 
comme  il  arrive  fouvent  en  tems  de 
guerre.  On  plante  1  oignon  de  bana- 
nier 5  ou  fesrejettons  avec  lescayeux 
dont  ils  font  fortis,  le  Ion o- de  ca- 
naux qui  conduifent  Téau  dan^  les  ha- 
bitations. 

Voici  les  qualités  que  Minguet  at- 
tribue au  bananier. 

»  L'eau  du  corps,  ou  du  tronc  eft 
»  bonne  pour  le  cours  de  ventre ,  pour 
»  nettoyer  les  yeux  chaffieux  3  Teau 
>?  du  bouton  pour  déterger  les  ulcères. 
»  L  ecorce  du  fruit  verd,  réduite  en 
'»  charbon  &  pulvérifée  ,  guérit  les  ul- 
»  ceres  ôcles  crables  {a).»; 

Du  h  manier  qui  porte  U figue  bmme. 
Toute  la  différence  qu'on  peut  re- 

{a.)  Ce  font  des  fentes  qui  viennent  fous  la  plante 
4es  pies  des  Nègres. 


VE    St.    DOMINGVE.     21^ 

marquer  entre  ces  deux  efpeces  d'ar- 
bres avant  qu'ils  portent  leur  fruit, 
c  eft  que  le  bananier  proprement  dit  a 
le  tronc  vcrd  ,  &  que  celui  du  bana- 
nier-figuier  tire  un  peu  fur  le  gris  de 
lin.  Mais  le  fruit  nommé  figue  banane 
eft  fort  différent  de  la  banane  :  il  eft 
plus  court  ,  moins  gros  ôc  moins 
droit.  La  Subftance  cuite  de  quel- 
que manière  que  ce  foit  eft  plus 
fondante  §c  a  un  autre  goût.  Elle  ne  fe 
mange  guère  autrement  que  rôtie  fur 
la  braife ,  avec  du  fucre,  en  tourte  , 
&  en  beignets,  ou  elle  approche  du 
goût  de  la  pomme  de  reinette. 

Minp-uet  appelle  cette  efpece  deba- 
Xianier  ,  bana?iter?nujqué,  11  ait,  qu  une 
feule  grafpe  (  c'eft-à-dire  ,  une  tige  ou 
régime  ) ,  porte  quelquefois  plus  de 
cent  fruits  5  ôc  il  a  raifon. 

On  a  donné  au  bananier  en  géné- 
ral le  nom  de  pommier  de  paradis  & 
de  figuier  d'Adam  5   parce  que  quel- 


tm 


t%6  P  l  A   N    T   s  S^ 

qiies  Théologiens  croyencque  fon  fruit 
eftie  fruit  défendu:  '(mais  c'eft peut- 
être  mal  deviner)  &  que  nos  premiers 
pareas  fe  couvrirent  de  fa  feuille  i 
(  ce  qui  eft  plus  vraiffcmblable  ).  [a\ 

Du^  fdmïfte* 

Le  Palmifte  eft  un  arbre  de  trente: 
ou  quarante  pies  de  haut ,  fort  droit ,. 
fans  branches^  fans  écorce,ôc. couronné 
de  dix  ou  1 2  feuilles,  qui  font  comme 
une  efpece  de  pennache.  Elles  font 
beaucoup  moins  longues  &:  moins  lar- 
ges que  celles  du  bananier. 

Il  eft  foûtenu  par  une  infinité  de  ra-^ 
cines  qui  ne  font  pas  fi  groftes  que  le 
petit  doigt  5  qui  forment  au  bas  du 
tronc  tout  autour  une  groife  mafle 
toute  ronde. 

life  forme,  comme  le  bananier  de 

{a)  On  appelle  le  bananier  figuier  d'Adam  ,  oa 
pommier  de  Paradis  ,  comme  iî  c'étoit  l'arbre  du  fruit 
défeadu  qu'Adam  mangea.  Dictionnaire  de  Trévoux. 


Î>È  St.  DOMINGV  E.    Z2t 

quelques  feuilles  qui  forcent  de  terre 
éc  fe  roulant  les  unes  fur  les  autres , 
font  un  petit  tronc  verd  qui  fe  durcit 
&  devient  grifâtre  à  mefure  que  Tar- 
bre  croît  :  ainfi  la  partie  fupérieure 
eil:  toujours  verte  &  l'inférieure  grife. 
Au  lieu  que  le  trône  du  Bananier  eft 
toujours  tendre  &  verd ,  celui  du  pal- 
mifte  eft  extrêmement  dur  &  lifle. 

Il  eft  ordinairement  moins  gros  par 
le  pie,  que  par  le  milieu.  Dans  cette 
dernière  partie  il  égale  lagroflTeur  d'un 
homme  ordinaire  5  il  revient  enfuite 
à  peu-  près  à  la  groffèur  du  pie ,  qu'il 
conferve  jufqu'àla  partie  d'où  fortent 
les  feuilles,  La  partie  fupérieure  eft 
toujours  verte,  quelqu'âge  qu'ait  l'ar- 
bre 5  elle  s'appelle  chot^.  Je  croirois 
pourtant  qu'il  eft  d'autant  plus  court 
que  l'arbre  eft  plus  vieiuc  &:  qu'il  ceile 
de  croître.  C'eft  une  obfervation  que 
je  n'ai  pas  faite ,  &  qui  ne  m'eft  pas 
venue  dans  Tefpri  té  tant  fur  les  lieux: 


M 


22% 


L  A    N  t   E   S 


quoi  qu'il  en  foit  ,  la  parcie  verte  eft 
ordinairement  haute  de  trois  ou 
quatre  pies* 

Quand  on  en  a  déroulé  deux  ou 
trois  lames ,  donc  la  première  eil  épaiffe 
à  peu^près  de  quatre  ou  cinq  lignes, 
&  toutes  les  fuivan'tes  plus  minces  à 
proportion^  on  trouve  les  autres  fort 
blanches  avec  un  rouleau  au  cœur  ou 
milieu  ,  auffifort  blanc  &  fort  tendre. 

Ce  chou  palmifte  eft  auiîî  bon  que 
nos  choux-îleurs  5  on  le  mange  ,  non- 
feulement  comme  eux  au  beurre  ,  au 
jus  ,  à  rhuile  6c  au  vinaigre  ou  comme 
des  artichauds  à  la  poivrade  3  on  en 
met  auffi  dans  les  potages  gras  6c  mai- 
gres ou  feul  ouavec  d'autres  légumes. 

Lorfqu  ona  enlevé  ce  chou  ,  l'arbre 
meurt.  On  fait  du  tronc  qui  refte ,  des 
pieux  pour  des  entourages,  pour  bâtir 
des  cafes,ou  des  planches  po-ir  les  fer- 
mer ,  au  lieu  de  maçonnerie. 

Ce  bois  eft  un  peu  creux,  rempli 


jdê  St.  Do  min  GUE.   21% 

de  fibres  fortes  &  mobiles ,  comme 
le  gros  fil  que  Ion  appelle  fil  de  bre- 
tagne ,  qui  s'étend  d  une  extrémité  à 
l'autre  de  larbre.  Je  foupçonne 
qu'elles  fervent  à  foûtenir  Tarbre  con- 
tre les  grands  vents ,  de  peur  qu'il  ne 
fe  cafie. 

Cette  efpece  de  palmifte  s^appellepal- 
mifte  franc. 

^  Je  ne  veux  pas  omettre ,  qu  a  la  Mar- 
tinique on  mange  de  gros  vers  blancs , 
que  l'on  trouve  ,  ou  plutôt  que  l'on 
fait  venir  dans  le  tronc  du  palmifte 
après  l'avoir  abbattu  :  je  vais  copier  ce 
qu'en  dit  le  P.  Labat,  tomepremier,: 
pag.  225. 

Ver  de  palmijte. 

»  C'eft  un  infede  qui  fe  produit  dans 
»  le  cœur  de  cet  arbre  {du  palmifte). 
«  quand  il  eft  abattu.  Ces  ycts  font 
^  de  la  grofleur  du  doigt  &  d'environ 
»  deux  pouces  de   longueur.   Je  ne> 


m 


t»  puis  mieux  les  comparer  qui  un 
«  pelotton  de  graifle  de  chapon  enve- 
m>  loppé  dans  une  pellicule  fort  tendre 
^  èc  fort  tranfparente.  On  ne  remar- 
n  que  dans  le  corps  de  ranimai  aucune 
,,  partie  noble  ,  ni  entrailles  ni  intef-. 
.,  tins,  dit  moins  à  la  vue,  car  on 
M  voit  autre  chofe  avec  une  loupe  de 
«  cryftal  ,  quand  on  a  fendu  Tani- 
M  mal  en  deux  parties  :  la  tête  efl 
,•  noire  6c  attachée  au  corps  fans  au- 
H  cune  diftindion  de  cou,     ^ 

o  La  manière  de  les  apprêter,  elk 
•.  de  les  enfiler  dans  une  brochette 
^  de  bois  pour  les  tourner  devant ^le 
..  feu.  Quand  ils  commencent  à  se- 
.,  chauffer,  on  les  faupoudre  avec  de 
H  la  croûte  de  pain  râpée ,  mêlée  avec 
f»  du  fel  :  cette  poudre  retient  toute 
-  la  o-raifTe  qui  s'y  imbibe  :  quand  ils 
..  fon^'t  cuits  ,  on  les  fert  avec  un  jus. 
,»  d'orange  ou  de  citron  Celt  un 
p  très-bon  manger  &:  tres-deiicat. 

f>  11 


^  Il  y  a  encore  une  autre  manière  de 
»'  les  accommoder  5  c'eft  de  les  mettre 
«  dans  une  calTeroUe  ou  dam  un  petit 
*>  canaris,  avecdu  vin,  des  épiceries, 
w  un  bouquet  d'herbesiines,  quelques 
•>  feuilles  de  bois  d'Inde,  &des  écor- 
»*  es  d'orange.  »  Voici  ,  continue  le 
PcLabac  comment  ces  vers  naiflent 
dans  les  palmiftes  2 

>'  Lorfque  le  ^almiile  eft  abattu , 
»*  &  qu'on  n*a  pas  befoin  du  tronc , 
•»  on  y  fait  avec  la  ferpe  ou  la  hache 
»  plufieurs  entailles  le  long  du  tronc, 
»  afin  que  certaines  groffes  mouches 
^  qui  produifentlesvers  dont  je  viens 
»  de  parler ,  puiflent  entrer  dans  le 
«  cœur  de  l'arbre  ,  en  manger  la 
»  moelle  ,  &  y  laifTer  leurs  œufs ,  qui 
«  s'éclofent  &  forment  ces  vers.  li 
>^  faut  avoir  foin  d'aller  au  bout  de  fix 
>»  femaines  voir  Tarbre  qu'on  a  en- 
^  taillé.  On  le  fend  dans  toute  fa  1oa|: 


..:o 


^â-^ 


là   H^T  ~t  ^ 


99  o-ueur  ,  &  on  trouve  ces  vers  dans  fa 
n  moelle.  Quand  on  néglige  d'y  aller 
»'  environ  ce  tems4à,  on  ne  trouve 
^>  plus  de  vers.  Il  faut  qu'ils  ayent 
w  changé  défigure,  comme  les  vers 
w  à  foie ,  &:  qu'ils  foient  devenus  des 
mouches. 

»»  Je  n'ai  vu  ces  vers  qu'à  la  Mar- 
tinique, quoi  qu'il  y  ait  des  palmif- 
ies  à  choux ,  dans  toutes  les  autres 
lies,. .  .Ileft  vrai  que  je  n'y  ai  point 
vu  ces  efpeces  de  mouches*  »> 
Il  y  a  encore  deux  efpeces  de  palmif- 
tes ,  dont  l'une  s'appelle  palmifte  épi- 
neux 5  l'autre  palmifte  à  vin. 
,  Le  palmifte  épineux  eftainfi  appelle, 
parce  que  félon  le  P.  Labat ,  &:  Min- 
guet ,  Ton   tronc    6c  (qs  feuilles  font 
toutes  couvertes  d'épines.  Il  porte  des 
bouquets  de  petites  noix  ^  dit  le  P.  La-: 
bat  3  grofles  comme  des  châtaignes , 
qui   font     remplies   d'une    fubftance 
blanche  ôc  oiéagiaeiife.  Son  chou ,  dit- 


f> 


99 


M 


»» 


1 


îl  encore ,  efi  plus  délicM  que  celui  dû 
fdmifte  franc. 

Le  P.  Plumier  l'appelle  ,ptm^  dac< 
tilîfera.  acîileata  mimma, 
^  Le  palmifte  a  vin  eft  ôrdinairenieHc 
beaueoup  plus  gros  par  léiîiîlieu  que 
par  fa  partie  inférieure  ou  fupérieiife. 
Minguet dit  5  qu'on  n^xx  mange  poiilc 
le  chou  5  mais  qu  on  en  tire  la  moelle , 
qu'on  en  exprime  le  fuc  5'  qu'on  le  gardé 
dans  des  bouteilles  ,  &  que  cette  li- 
queur devient  un  vin  ^  o[m  damlëcm^ 
mencement furge  beaucoup  ^  ^  ehgraijfek 
^ne  d'œil  ;  que  fi  l'on  avm  quelque 
mauvais  md  dans  le  corps  ,  iî  le  fer  oit 
for  tir ,  &  quil  ote  l^appétitl 

Je  n'ai  point  eiitendu  dife  qu'on 
faffe  de  ce  vin  à  St.  Domingue.  Peut- 
être  y  en  faifoit-^on  avant  qu'on  eii 
apportât  de  France» 

Le  P.  plumier  appelle  cette  efpece>^ 
fâlma  dadilifera  &  viniferk 


iizB 


L  À  2sr  f  ^  i 

Du  Latanier. 


Le  latanier  ne  diffère  du  palmîfte 
que  par  fes  feuilles.   Il  fort  de  terre  de 
la  même   manière  ,    il  devient  de  la 
même  hauteur   également  gros    par 
tout.    Ses  feuilles  font    au  fommet , 
elles    repréfentenr    parfaitement   un 
éventail  ouvert ,  de  la  longueur  d'en- 
viron un  pie  ou  un  pié  ôc  demi ,  &:  un 
peu  moins  de  largeur.  Elles  font  dé- 
coupées   profondément  en  plufieurs 
bandelettes épaiffes,  roides, terminées 
en    pointe,   pliflTées  par  en    bas  ,  6c 
réunies  fur  une  petite  queue  ,  grofle 
comme  une  plume  à  écrire ,  longues 
d'environ  un  pié  ôc  demi  tout  au  plus , 
&  non  pas  de  trois  ou  quatre ,   com- 
me lé  P.  Labat  Ta  écrit.    Cet  arbre 
fert  aux  mêmes  ufages  que  le  palmifte. 
Minguet  compte  quatre  efpeces  de 
lataniers.  Le  petit,  que  le  P.  Plumier 
appelle,  palmada^ilifera.  radiât  a  major 


ii 


mÊÊÊ 


DE    Sf.    DOMINGUE,    22  0 

glabra  :  le  franc  que  le  même  Père 
nomme  Palma  da5î^tlifera  radiât  a  minor 
glabra:  {q  y  latanier  à  fcie >  &  le  4^;^ 
latanier  épineux. 

J'ai  Thonneur  d'être,  5cc. 


Fin  de  U  féconde  Uttrel 


»■' 


V  i 


a 


LE  T  T  R  E 


R  O   I  s  I   É   M   E. 

Sur  le  Rémora  &  les.  Hakfons» 


E  comptoîs  5  Monfieur  ^   &: 

\  cher    Confrère  5    être    quitte 

É;  avec  vous  après  avoir  fait  ce 

que  vous  m'aviez  demandé  fur 
le*  maladies  qui  régnent  à  St.  Domin- 
gue  5  ôc  fur  les  plantes  de  cette  île,  jVîais 
vous  m'avez  entendu  parier  du  Remo» 
ra  &  de  THalcyon  d'une  manière  fort 
différente  de  ce  qu'on  en  penfe  5 
&  vous  m'exhortez  à  écrire  ce  que 
..  \*tn  ai  vu  j  &  ce  que  d'habiles  Marims 

P    ÏY 


nm 


a 32       DU    Rémora 

m'en  ont  appris.  Je  ne  fai  fi  beaucoup 
de  gens  font  curieux  d'approfondir  ce 
qu'il  y  a  de  vrai  Ôc  de  faux ,  dans  les 
anciennes  fables  du  remord  ér  des 
hdcyons.  N'importe,  dites-vous,  cette 
connoilTance  eft  du  refforc  de  l'Hif- 
toire  naturelle?  il  s'en  trouvera  tou- 
jours quelques-uns  qui  feront  bien  aifes 
de  favoir  à  quoi  s'en  tenir.  A  la  bonne 
heure  ,  Monfieur  ,  je  vous  obéirai. 
Mais  n'attendez  pas  de  moi  que  j'aille 
courir  les  bibliothèques  ,  lire  des  ca- 
talogues ôc  feuilleter  bien  àt^  volu- 
mes, pour  rapporter  ce  que  les  Au- 
teurs modernes,  (s'il  y  en  a)  ont  écrit 
fur  Qç^vi^  matière  :  je  me  contenterai 
de  rapporter  ce  que  Pline  écles  autres 
Auteurs  anciens  nous  en  ont  laiffé ,  & 
je  tâcherai  de  développer  ce  que  l'on 
en  doit  croire. 

»>  le  rémora  ,  dit  Pline  eft  un  txhs" 
5*  petit  poilTon  5  qui  fe  trouve  fur  les 
*>  rochers  ;   quand  il  s'attache  à  ta 


ET    DES  H  ALCYONS.     2  2^ 

»  quille  des  navires 3  on  croit  qu'ils  en 
»»  marchent  plus  lentement.Ce  qui  lui 
»  a  fait  donner  le  nom  de  rémora  (a). 
Il  rapporte  enfuitele  fentimentdes  an- 
ciens, ^y  Ariftote,  dit-il  jCf)  croit  qu'il  a 
,»  des  pies,  de  la  manière  dontlamul- 
w  titude  de  fes  nageoires  eft  difpofée. 
Mutianus  penfeque  c'eft  le  murex  , 
coquillage  plus  grand  que  \ç,purpura[c}. 
Le  même  Auteur  rapporte,  qu'il  s'en 

(  a  )  Echeneh  efi  parvus  admodum  pfiis  ajfuetus  feim- 
hoc  carims  adhârente  naves  tarditts  ire  creduntur  :  inâe 
mmine  impofitff,  Lib.  I  X.  c.  x  x  v.  è  nofiris  quidun^ 
latimsremoram  appellavere  eum,  Lib.  XXXil.  c.  i. 

(b)  Pedes  eum  habere  arhkratur  Arifioteles  ^  hapojitâ 
flnnarum  multiiudine 

(  f  )  Le  murex  cil  un  coquillage  dont  la  liqueur 
ferv'oit  à  teindre  ;  les  Latins  n'appelloienr  pas  cette 
teinture  y  purpura^  mus  murex  ccn:hiliata  ,  v^fiistinâa 
muircc ,  vsl  conchiltata. 

Le  Purpura  eft  un  coquillage  qui  fervoit  auflî  au 
■mêmcufage.  Ce  qui  écoit  teint  delà  liqueur  de  cette 
cfpece  de  coquillage  s'appclloit  purpura  ,  que  nous  ap- 
pelions auflî  la  pourpre Virruve  a  cru  que  le 

coquillage  appelle  Purpura  ,  avoit  une  couleur  difFé-^ 
icntc ,  iuivant  la  différence  du  fol  oii  on  le  trouvoif; 


'ïB  54         ^  ^     R  E  M  Ô  R  A 

étoit  collé  une  fi  grande  quantité  fotVs 
un  Vaideau  que  Périandre  ,  Tyran  de 
Corinthe  envoyoit  [a)  avec  ordre  de 
mutiler  inhumainement  trois  cens  en- 
fans  nobles  de  Corcyre  {l^)y  qu'il  ne 
put  jamais  avancer,  quoique  les  vents 
enflafTent  toutes  les  voiles  3  &  que  Ton 
honoroit  à  Gnide  dan^  le  temple  de 
Venus  ^  les  coquilles  qui  avoiçnt  opéré 
cette  merveille  {c). 
Enfin  ,Trebius  Niger  {d) ,  dit ,  que  ce 

que  celui  de  Tyr  av-oit  une  couleur  rouge  ;  que  celui 
^'Afrique  l'avoit  d'aa  rouge  foncé  tirant  fur  ie  violer» 
Il  y  a  des  Auteurs  qui  afliîrent  que  les  Latins  fe  fonc 
trompés^  en  croyant  quelacouleur  pourpre  venoit  à'mx 
coquillage:  ils  prétendent ,  que  ce  qui  feryoit  à  teiii- 
dre  en  pourpre,  écoic  le  fan  g  d'an  petit  infe£le ,  què 
l'on  appelle  cochemlU. 

(a)  A   Alyatte  Roi  de  S:\Tae* 

(  b  ) .  Muîianûs  murtam  effe  latiorem  purpura  conchd^ , 
ntroque  latere  fefe  collîgente  ,  quibus  inh&rentibus ,  plenam 
'uentis  Jietijfe  navem  portaniem  nanties  a  Periandro  ut  cetf-, 
irarentur  nobilespueri^  Conchafque quA  idprAjiitennt  apud 
Gniàiorum  Venerem  Coli, 

(  c  )  Hérodote  ^   Livre  UT. 

(d)  Trebius  Niger  ,  pedaiem  effe-é*  crajpmdme  ^um^fte 
d^korum  :  naves  mffrari. 


ST  ^Es  Halcyôns.  ^^f 

poiflbn  eft  long  d'un  pie  &  épais  de  cinq 
doigts  i  &  qu'il  retarde  la  marche  des 
iVaiffeaux. 

Nous  voyons  ici  les  fentimens  par- 
tagés fur  la  nature  du  rémora  :  les 
uns  penfent  que  c'eft  un  poifTon  5 
d'autres  que  c'eft  un  coquillage.  Arif- 
tote  femble  éloigner  cette  idée  en  lui 
donnant  des  pies ,  ou  du  moins  en  fup- 
pofant  que  fes  nageoires  lui  en  ferventf 
car  les  coquillages  proprement  dits  ^ 
n'ont  ni  pies  ni  nageoires.  Il  faut  join- 
dre Trébius  Niger  à  Ariftote:  onpour- 
roit  5  ce  femble  ,  attribuer  ce  même 
fentiment  a  Pline.  Mais  on  fera  dé- 
trompé quand  on  lira  ce  qu'il  en  a  dit 
dans  le  livre  trente-deux  ,  ou  il  parle 
en  Déclamateur  plutôt  qu'en  Hiftorien 
de  la  force  immenfe  de  ce  petit  poiffon. 

»•»  Qu'y  a-t'il  de  plus  fort  que  la  mer , 
I*  les  vents  &  les  tempêtes  {a)  dit- il, 

l  a  )  ^ijd  vhUntim  mari  vmljve,  ^  mr^méus  é^ 


^^6      ^  ^     R  E  M  0  R  Â 

^  lorfque  leur  puiffance  fe  réunit  à 
9»  pouflTer  un  Navire  ?  ôc  cependant 
»»  un  petit  poifTon  commandé  à  cet 
»»  élément ,  &:  à  la  fureur  des  vents , 
"  ôe  le  retient  en  un  même  lieu.  Ce 
w  que  les  chaînes  les  plus  fortes^  &les 
»>  ancres  les  plus  péfantes  ne  peuvent 
w  faire j  unfeul  petit poifTon  envient 
w  à  bout  fans  peine ,  fans  travail ,  non 
3»  en  tirant,  mais  en  s'y  attachant.  O 
w  vanité  des  hommes ,  s'écrie-t'il  !  ils 

ffocellh?  tamen  omnla  h&e  pariter  ebdem  împel- 
lentia ,  unus  ac  parvm  admodum  pifciculus ,  eche- 
Tteîs  appeUaîus  y  infetenet»  Huant  vent i  licet  ^  f&viant 
frocelU ,  imper at  furori ,  virefque  tantas  compefcit  ^ 
eogitfiare  navigia.  Quod  non  vincula  ulla ,  non  anchorsb 
pondère  irrevecaifilis  jaéis.  ,  infr&nat  impetus  ^  domat 
mundirahiem^  nullo  fuo  labore  non  retinendo  ^  aut  aliê 
modo  quam  adh&rendo  Hac  tantilla  ejifatis  contra  tôt  iw 
fétus ,  ut  vetet  ire  navigia 

Sed  armatA  claffes  imponunt  fibi  turrîum  propugnacuU 
ut  in  mari  quoque  pugnetur  njelut  e  mûris.  Heu  'vanitas 
humana  cumroflra  illa  Are  ferro'^ue  ad  iSîus  armatafe* 
Tnipedulis  inhiber  e  pojftt  ac  tenere  devint  a  pifciculus  .Fertur 
A£iiaco  marte  tenuijfe  prAtoriam  navim  Antonii  tenuit 
0»  nofirA  memoriâ  Ca'ù  principis  Ah  Afturà,  Antinmxt' 
Ammis> 


^ 


Kr  l^ns  HalcyôUs.  i0 

w  bâtiflent  des  tours  &  des  forterefTes 
»  fur  des  Vaifleaux  afin  de  fe  battre 
»>  au  milieu  de  la  mer  ,  comme  ils 
»  feroient  fur  terre  de  defliis  des  mu- 
»'  railles  5  &  un  poiffon  diin  demi-pie , 
9>  peut  arrêter  à  fon  gré  ces  machines 
a»  énormes,  armées  de  fer  &  d*airain 
a>  pour  les  combats:il  a  arrêté  le  Vaif- 
«  feau  Amiral  que  montoit  Antoine 
«  dans  la  bataille  d'Aftium  :  il  a  ar- 
M  rêté ,  de  notre  tems ,  celui  du  Prince 
y»  Caïus  (a)  lorfqu'il  revenoit  d'Af-* 
w  ture  à  Antium.  Comme  de  toute  la 
»  flotte  (  ^  )  5  fon  VailTeau  à  cinq  rangs 


{a)  Caligula, 

(  b  )  Cum  e  tota  cîajfe  qulnquerenits  foîa  non  proficenf  'i 
€Xilientihus  protinus  qui  id  quâLVerent  cîrca  navim  ,  inve* 
nere  adha/rentem  gubernaculo  ofienderuntque  Caioindig-^ 
nanti  hocfuijfe  quodfe  revocaret ,  quadringentorumque  re" 
ynigum  obfe qui 0  contra  fe  intercederet.  Qui  tune  pojîeaquê 
videre ,  eum  limaci  magns.fimilem  ejje  dicunt  Nos  ptu" 
rium  opiniones  pofuimus ,  in  naturâ  ft^uatiUum  ,  cum  di 
90  diceremus  ISIec  dulfitamus  demvalere  mnr a  gênera^ 
l  fubaadi ,  concharum  ]  cptm  c$Ubn  ^  s.nfecrato  ctmjfê 


t 


I  g        ^  ^      R  E  M  0  R  A 

»  de  rames ,  ëtoit  le  feul  quin'avan-^ 
*»  çoit  point  3  des  gens  fautèrent  du 
»  vailTeau  pour  chercher  toiît  au  tour 
•'  ce  qui  pou  voit  caufer  ce  retarde- 
p*  ment  3  ils  trouvèrent  ce  poifTon 
»>  collé  contre  le  gouvernail  y  &:  le 
»>  portèrent  à  Caïus  qui  fut  fort  indigné 
i»»  que  fi  peu  de  chofe  eût  pu  rarrêter,6c 
«*  l'emporter  fur  les  iotccs  àt  quatre- 
•>  censrameurs.Ceuxqtiile  virent  alors, 
3,  ôc  qui  lont  vu  depuis,  ont  dit  qu'il 
^i  étoit  femblable  à  un  grand  limaçon; 
ja,  Nous  fommes  perfuadés,  ajoûte-t'il> 
p,  que  toute  forte  de  coquillage  ont  la 
5,  même  force  3  ceux  qui  font  confa- 
3,  crés  dans  le  temple  de  Venus  à  Gnidc 
3,  en  font  une  preuve  bien  éclatante  5 
„  &  ne  nous  permettent  pas  dendou- 
g,  ter  „.  Ilparoît  donc  que  l'opinion 
commune  6c  celle  de  Pline ,  étoit  due 
le  r^>^d?r/ï  eft  un  coquillage. 

t^émfh ,  *pud  Gnîdiam  vençrem^  ççnchas  ^ho^U9  ejtif^ 
diftn  pQtentiê  credi  neeejjefiti 


Examinons  préfentement  ce  qu'il  y 
a  de  vrai  &  de  faux  dans  ce  fentimenc 
des  anciens.  Deux  chofes  font  Tob  jet 
de  notre  recherche  i  Tune  ,  quelle  eft 
k  nature  du  rémora  j  l'autre,  quelles 
font  les  forces  qu'on  peut  raifonnabie- 
ment  lui  attribuer. 

Entre  les  avis  difFérens  de  plufieurs 
Auteurs  5  le  bon  fens  veut  que  nous 
préférions  le  plus  vraiiOTemblable. 
Donc ,  quand  l'un  me  dira  qu'un  feul 
petit  poiiron,d\in  demi-pié,  ou  d'un^ 
pié  enfe  collant  contre  un  navire ,  lar-; 
rête  tout  courte  je  ne  puis  donner  mon 
confentement  à  cette  propofition  3  par 
conféquent,  le  fentiment  de  Trébius 
Niger  5  &  celui  d'Ariftote  me  paroiffenc 
évidemment  faux.  Mais  celui  de  Mu- 
rianus  peut  être  vrai. 

Il  fenfuit  donc,  i«-  Qu'en  bonne 
critique  ,  un  feul  petit  poiffon  ne  peut 
pas  retarder  la  marche  d'un  navire; 

^S:  Qu'il  en  faut  un  grand  nombre^ 


pu   Re  Mo  n4 

3°"  Que  ce  doit  être  des  coquillages^ 
parce  qu'un  poiflon  ordinaire  feroic 
bientôt  écrafé  par  le  froiflenient  de 
Teau,  quiefttel  5  quand  le  vent  eft 
favorable,  que  la  mer  paroît  là  nuit 
tout  en  feu  autour  du  navire ,  par  la 
quantité  prodigieufé  d'étincelles  qui  en 
fortent.  Ainfi,  première  vérité  ,  le  ré- 
mora doit  être  un  coquillage.  Mais 
quelle  force  doit  avoir  ce  coquillage  l 

Vous  favez  ,  Monfieur,  que  la  plu- 
part des  fabl  es ,  &  peut-être  toutes ,  ont 
pour  fondement  quelques  vérités  hif- 
toriques.  Celle-ci  n  auroit  jamais  été. 
imaginée ,  fi  Ion  ne  s*étoitpas  apperçu 
qu'il  s'attachoit   quelquefois  des  co- 
quillages fur  la  furface  inférieure  d'un 
vaiffeau.  Ce  fait  a  été  altéré,  changé, 
exagéré  ,  en  paffant  de    bouche    en 
bouche.  La  multitude  des  coquillages 
a  été  réduite  à  unfeul:  ad  coquillage  y 
on  a  fubftitué  un  petit  poiflon.  Du  re- 
tard de  la  marche ,  on  a  fait  un  arrêt 

total 


nr   DES   HaICYO  NS.    îiAtI 

total.  Pour  mettre  cette  vérité  dans 
tout  fonjour,  il  n*eft  queftion  que  de 
fa  voir  fi  efFedivement  il  s^amafTe  quel- 
quefois une  fi  grande  quantité  de  co- 
quillages fous  la  quille  dun  navire 
que  fa  marche  en  foit  retardée  :  c'eft 
un  fait  certain  ,  &  connu  de  tous  les 
Marins  ,  qui  ont  fait  des  voyages  de 
long  cours. 

En  revenant  de  St.  Domingue, 
comme  je  confidérois  une  plante  ma- 
Tine ,  que  l'on  nomme  raifip^i  du,  trofiq»e. 
{a).  Mon  Capitaine  m*en  fit  tirer  de  k 
3iier  une  poignée  :  elleétoit  remplie  de 
petits  coquillages  de  la  largeur  &  de 
la  longueur  de  longle  du  pouce  5  il 

(  ^  )  On  en  voit  affez  fourenc  des  battïcs  longs  A€ 
t.0  &  30  pics ,  larges  de  huit  ou  dix  pouces  ,  détachés 
'des  rochers  par  les  vagues  dont  ils  font  battus.  Ils  font 
emportés  de  PEft  4  PQueft  &  du  Nord  au  Sud.  En  allant 
ii  St.  Domingue  «  je  n'en  vis  que  proche  du  tropique. 
Cette  plante  portoit.des  baies  grofTes  comme  un  grairt 
'deraifin.  J'en  goûcii ,  Je  les  trouvai  fort  fades.  Enre- 
^venant ,  je  n'en  vis  qu'à  deux  ou  trois  cens  lieues  ca* 
;4ega  dg  JPil^açç  ;  gljc  î^'M^ii  poiûl  de  baies. 


^4^  JJ  t?     R  Ê  M  0  k  A 

m'aflura  que  quand  des  navires  font 
iono-tems  dans  de  certaines  rades  oa 
ports  voifins  des  rochers  ,  il  s'en  atta- 
choit  fous  la  quille  une  fi  grande  quan- 
tité 5  que  leur  marche  en  étoit  confi- 
dérablement  retardée^parce  que  ce  co- 
quillage devenoit  de  la  grofTeur  des 
plus  groflTes  moules.  Peut-on  ne  pas 
reconnoître  à  ce  récit  le  rémora  des  an- 
ciens ? 

On  conçoit  aifément ,  que  quand  la 
quille  d  un  navire  eft  plus  ou  moins 
çr^mie  de  ces  coquillages^  cette  furface 
étant  devenue  rabotteufe  &fillonnée , 
elle  gliffe  plus  difficilement  fur  Teau  5 
c'eft'ce  qu  aflïïrent  tous  les  Auteurs  5 
^tardius  ire  treduntur'y  nxves  morark 

Ce  que  M^  de  Laly  y  Gapitainé"; 
qui  m'a  ramené ,  m'a  dit,  n'eft  pas  le 
féntiment  d'un  feul  homme  :  je  ne 
m'en  fuis  pas  tenu  à  fon  fetii  témpi-^ 
gnage.  J'ai  prié  M''  Nicolas  Charetv 
mon  correfpondànt  à  Nantes,' fi  coii^u 


en  Europe&  eh  Amérique  par  fa  pro- 
bité &  fa  piété ,-  de  s'informer  des'an- 
aens  Mariniers,  de  ce  que  m'avoh  dit 
Moniieur  de  Laly  ,  \oici  ,  Mon_ 
iieur,  la  reponfe  qu'il  m'a  faite  : 
•^  i  égard  du  fettt  coquillage  que  M> 
de  Laly  -vous  a  dit  croître  de  la  aroL 
feur d une  grojfe  moule,  qui  fe  collet  J a 

retarde  la  marche,   le  fait  efl  Irai  ■  ce 
coqmllage  s^ appelle  des  BerJches       ' 

,  il  eit  donc  aifé  préfentementde  dif 
tmguer  ce  qu'il  y  a  de  fabuleux  dansie. 
récits  .que  Plme  èli^s  autres  Auteurs 

IT\Z\T^''^'T''  RetrancC 
en   tout  le  merveilleux ,  &  nous  en 
aurons  une  jufte  idée.  Nous  demeu 
rerons  convaincus   que  le  Rémora  ne 
peutctre m  un  petit  poilTon,  ni  mêmi 

.  une  multitude  de  poifrons  5  Ai  uS 
coqui  âge,  mais  une  multitude^ 
coquillagesi  qu'un  vailTeau  dont  ^ 
quille  i^ra  gamie^exes  xoquiH^e^! 

9-  ij     2     ' 


lu 


Pu      R  «  M  0  «   / 

pourra  bien  à  la  vérité  marcher  moiilf 
vîte  qix'un  autre ,  mais  qu'il  ne  pourra 
réfifter  aux  vents  qui  le  poufleront. 

Ajoutons  que  ce  coquillage  fe  tient 
probablement  fur   cette  plante  dont 
Us   avonsparlé,qu    vient  fur    es 
rochers:  que  quande  le  en  eftdeta-, 
rhée  &  qu'elle  vient  a  pafler  pardel- 
foas  des  vaifTeaux  qui  font  en  repos 
dans  une  rade  ou  dans  un  port   elle  s  y 
arrête  ;  que  les  petits  coquillages  fe 
collentcontrelaquille,s'ymulnpl.ent 

&  s'v  grofliffent  J  que  fion  n  a  pas  le 
foin  de  les  détacher  avant  de  mettre  les 
Vaiffeaux  en  route ,  ils  marchent  plus 

lentement.  , 

Ceux  qui  ne  font  pas  contens  de  mes 
preuves  ,  ou  de  mes    conjeaures 
îomme  on  voudra  les  appeller ,  pour- 
ront confulter  les  Marins  ,   qui  foiTC 
îcsfeulsenétatde  les  confirmer,  & 

çeut-être  d'ajouter  de  nouvelles  preu- 
ves, aux  miennes,     .r»     ^(.       o, 
SivQUS  êtes  fatisfait,  Monlieur  e« 


À 


Miiilliiliiii 


ET    DES   HaLCYONS^    245 

cher  Confrère ,  ce  fera  pour  moi  un 
heureux  préjugé  que  le  public  le  fera 
auffi  :  &  je  doute  fort  qu'il  prenne  pour 
le  Rémora ,  le  petit  poiObn  que  Ton  m'a 
dit  ,  qu'un  certain  curieux  garde 
précieufement  3  ni  la  lamproie ,  qui  au 
rapport  du  P.  Hardouin ,  s'étant  at- 
tachée au  gouvernail  d'un  VailTeau  ; 
fur  lequel  étoient  le  Cardinal  de 
Tournon  ,  èc  M""'  Pellicier  Evêque  de 
Montpellier ,  l'empêchoit  de  marcher  i 
quoiqu'on  cite  Rondelet ,  comme  té- 
moin oculaire  de  ce  fait  (  a  ). 

On  doit  faire  le  même  jugement  du 
poifTon  que  M''  Gantier  Médecin, 
apporta  en  France  en  1 7 1 7.  Il  avoit 
été  envoyé  par  Monfeigneur  le  Duc 
d'Orléans ,  Régent  du  Royaume ,  fur 
la  Méditerranée  ,  pour  y  faire  des  ob- 
fervations.  A  l'embouchure  du  Nil 
on  prît  unpoiflbn  à  bord  du  Touloufe, 
commande  par  M'^'  du  Quêne  ,  qu'on 

C  *  )  Voyez  le  Pline  du  P.  Hardouin  fur  le  KémarA» 

Qiij.         V 


Ti' 


t^6   Du     Rémora 

dit  être  le  Rémora.  Il  étoit  de  couleur 
brune,  long  d'environ  un  pie:  il  avoit 
fur  le  dos  tranfverfalement  des  efpeces 
de  filions  qui  répréfentoient  affez 
bien  un  efcalier,  dont  les  marches 
diminuoient  de  hauteur  à  mefure 
qu'elles  approchoient  de  la  queue. 
Tous  ces  poiffbns  n'ont  du  Rémora  que 
le  nom  qu  on  leur  a  donné.  Il  ne  me 
refte  plusv-Monfieur,  qu'à  vous  dire 
lin  mot  fur  les  Halcyons. 

Les  Halcyons  font  des  oifeaux  ma- 
rins très -fameux  dans  l'antiquité ,  ôc 
lefujet  d'une  métamorphofe  {a)  dans 
Ovide:  Ciçeron  les  a  célébrés  par  un 
Poëme  dont  il  ne  nous  refte  que  deux 
vers  5  l'Empereur  Gordien ,  par  un  au- 
tre ,  dont  il  ne'nous  refte  rien  du  tout; 

Les  merveilles  que  les  Naturaliftes 
&  les  Hiftoriens  en  ont  contées .,  ont 
paru  fi  certaines  à  un  des  plus  refpec- 
tables  Pères  de  l'Eglife  ,  (  c*eft  St.  Am- 

(^)  Métamorphofe  L.   XL 


^ 


ET   VES^    HaLCYÔ^  Si    245^ 

broïfe),  qu'il  n'a  point  fait  difficulté 
de  les  rapporter  auflî  férieufement 
qu'il  auroit  pu  faire  la  vérité  la  plus 
connue. 

»  L'Haï cy on,  ^/>- //,  dépofe  fes 
,5  œufs  au  milieu  de  l'hy ver  dans  le 
55  fable  {a)  du  bord  de  la  mer  :  dès  ce 
5v  moment  les  vents  tombent ,  la  mer 
devient  tranquile  §c  .ce  calme  dure 
quatorze  jours,  parce  qu'il  en  faut 
fept  à  cet  oifeau  pour  couver  {ts 
qeufs  &  les  faire  éçlorre ,  &  fept  au- 
5,  très  pour  élever  fes  petits.  „ 

5,  Le  Créateur  a  deftiné  à  ces  petits 
„  oifeaux  pour  faire  leur  nid  la  faifon' 
„  la  plus  orage ufe  ,  afin  de  rendre  , 
„  par  cette  ferénité  fubite ,  la  faveur 


3> 


î> 


5) 


S) 


(*)  St.  Ambroifc  en  conîgeant  Ovide,  qui  dit,  que 
l'Haicyon  fait  fonniclfur  les  eaux  de  la  mer  ,  penden- 
tihus  ê^ucre  nidis,  affoiblit  beaucoup  le  miracle  qu'il 
reconnoît  ,  que  le  ciel  fait  en  fa  faveur  :  Dieu  peut 
aufîi-bein  commander  à  la  mer ,  de  fouffrir  que  Poifeau 
lafle Ton  nid  fur  fes  eaux  ,  que  defe  tenir  tranquille. 


248    Du    Rémora 

5,  qu  il  leur  fait ,  plus  fenfible  &  plus 
3,  éclatante, 

5,  Les  Marins  n'ignorent  pas  un  li 
„  grand  bienfait  jils  appellent  ces  jours 
5,  Halcyomdes  ,  Sc  ils  ont  grand  foin 
j5  d'en  profiter  ,  parce  qu'ils  font  cer- 
tains qu'ils  n'auront  point  de  tem- 
pêtes à  effuyer  pendant  tout  cç 
tems4à  (^).  « 


35 
35 


(  a  )  Halcyone  eft  avis  mantima.  qu&.  in  Utanhus  fxtut 
ftio^  edere  folet ,  itf^  ut  in  arenis  ûva  depQnat   medio  ferè 
hyemh  ;  nam  idtemporisfovendis  hahet  âeputatum  partu- 
hm  ,  quando  maxime  infurpt  mare  ,  liîoribufque  yefje^: 
T^enùor  fla^us  ilUditur  ,  qu)>  ntagii  repentiziA  placidita-^ 
tîs  fQlemnitate  avis  hujus  elucer et  gratta.  Islamque  nbi 
itndofumfuerit  mare  ,  pofiiis  ovisfubit'o  mitefcit ,  é*  ^^"^ 
nés  cadunt  ventonim  proeelU  •  .  v  •  •  âonee  ovafovet  Hal^, 
€.yone'fi4^.,  Septem  dies  fœtus  funt  y  quibus  decurfis  educU 
fuUos  :  illico  aîios  feptem  adjmgit  dies  ,  quibus  tnutriat 
fAYtmfms,  donec  incîpiant  adolefcere.  Tantum    autem 
^eneficium  avicula  hAc  ^  divinitus  fibi  àatum  y  habet  y   ni 
quatuor decim  dies  nauticiprAfumpt&ferenitatis  obfervent , 
^UQS  ^  Halcyonidai  vacant ,  quibus  lulla^  motus  procellojl^ 
iernpeftatis  horrefcant.    Hinc  poetA  anfam  fabulandi  arri^ 
puerunt  Halcyonem  filiam /Eoli  fuijje  qui  ingratiamfiliA  ^ 
4um,  illa  in  litore  ova  parit  ^  frtm  e^Hcat  9  vmQi  û'^^ 
çlufosfirvah 


mt^ 


ET    VES   H  ALCYON  Si  x^ 

Des  oifeaux  qui  ont  un  fî  beau  pri- 
vilège doivent  avoir  une  origine  bien 
iiluftre  :  auflî  les  Poètes  leur  en  don- 
nent-ils une  divine.  Les  Halcyons ti- 
rent leur  nom  à'HalcyoTte ,  fille  d'Eole  : 
elle  étoit  femme  deCeyx,  petit  fils  de 
Jupiter.  Ceyx  périt  en  allant  par  mer , 
malgré  les  réprefentations  de  foa 
Epoufe  ,  confulter  Apollon  fur  Tétat 
de  fon  Royaume  :  elle  fe  précipita 
dans  la  mer  à  la  vue  du  corps  de  fou 
mari  qu'on  lui  rapporta ,  d'autres  di- 
fent  que  les  flots  le  rejetterent  fur  le 
bord  de  la  mer  {a)\  les  Dieux  par  corn-» 
mifération  les  changèrent  en  oifeaux  > 
qui  furent  appelles  Halcyons.  Eole 
voulant  pourvoir  à  lapoftérité  de  fa 
fiUe^renfermeles  vents  pendant  qu'elle 
fait  fon  nid,  qu'elle  pond,  qu'elle 
couve  ,  qu  elle  élevé  {qs  petits. 

LaifTons  la  Fable ,  Se  voyons  ce  que 


(a)    Voyez  Ovide  |k  iM* 


tjo  Z>  V    R  M  M  0  n  4 

c'eft  que  les  H^lcyons.  Pline  (a)  nous 
dit,  que  ce  font  des  oifeaux  „  un  peu 
,,  plus  gros  qu'un  moineau ,  de  couleur 
5,  Dleue>  poi^r  la  plus  grande  partie, 
„  &  que  leufs  aîles  fonj:  variées  d'un 
„  peu  debianp  &  de  pourpre,  quils 
5,  ont  le  cou  menu  &:  iong>  le  bjsc  ver- 
,,  dâtre  long  &  effilé. ,, 

Ariftote  (  h  )  dit  qu  il  y  en  a  de  deux 
cfpeces,  l'une  qui    chante,  &  qui  fe 
tient  parmi  les  rofeaux:  l'autre  qui  eft, 
muette  &  plus  groflTe. 

La  defcription  de  Pline  eft  aflez 
|ufl:e  :  Thalcyon  vu  d'un  peu  loin  ,  (sft 
tout  à  fait  femblable  à  l'hirondelle  > 
&  la  remarque  d'Ariftote  eft  vraie  au^ 
moins  en  partie  5  on  n'a  jamais  entendu 
riialcyon  ,  ni  chanter ,  ni  rendre  le 
moindre  fon  :  je  ne  fâche  perfonne 

(  a  j  J/>/^  avis  fauVo  crajjior  pajfere^  colore  Cymeo  ex 
f»rte majore  iantum  ,  purpHre's  e^  candidh  admi/iii 
fennîs  ,  coîlo  gracili  ae  frocero  ;  rofiro  fubvindi ,  lon^9 
^  tenui  ,    raro  vifam.  Plin.  de  Halcyonibus. 

(  ^  )  Livre  VlII.  des  Animaux* 


ET   DES    HalcYONS.    2^1 

qui  ait   vu   l'autre   efpece. 

Les  halcyons  ne  vont  jamais  que  par 
bandes,  &  ils  ne  paroilTent  que* pen- 
dant les  tempêtes  :  ils  fuivept  les  na- 
vires i  je  penfe  que  c  eft  pour  fe  mettre 
à  couvert  du  vent  3  car  on  ne  les  voit 
jamais  ni  devant  ni  à  côté  ,  mais  tou- 
jours derrière ,  éloignés  de  la  poupe 
d'environ  quarante  ou  cinquante  pas  : 
ils  ne   s'élèvent  point  dans  Tair ,  ils 
volent  fort  vite  à  un  pié  ou  deuxau-» 
dcffus  deTeau,   comme  en  tournant 
&  fe  coupant  les  uns  les  autres.  Ils  ne 
fe  repofent  point;  feulement,  de  tems 
en  tems  ils  frifent l'eau  ,  probablement 
pour  mouiller  leurs  ailes  i  comme  les 
poiflbns  volans  /qui  fans  ce  fecours  ne 
pourroientpas  voler  longtems,  ni  évi- 
ter d'être  pris  par  la  Dorade  qui  les 
pourfuit. 

Je  n'en  ai  vu  que  dans  les  mers  du 
Nord ,  en  revenant  de  St.  Domingue  , 
&  point  dans  celle  du  Sud  en  y  allant. 


ap    D   V      REMORA 

Je  ne  voudrois  pourtant  pas  afiurer 
qu'il  ne  s'y  en  trouve  point  ;  parce 
que  dans  les  mauvais  tems  qui  nous 
prirent  entre  les  îles  Canaries  &  les 
Açores ,  je  fus  fi  incommode  du  mal 
de  mer,  que  je  ne  pus  me  promener 
fur  le  Vaifleau.  . 

Un  ancien  Officier  du  Navire  de 
M'-  de  Laly ,  qu'on  appelle  le  Maître, 
parce  qu'il  fait  faire  la  manœuvre  avix 
Matelots ,  m'a  affûré ,  qu'il  avoit  eu  dç 
ces  oifeaux  entre  les  mains  j  qu'ils  n  ont 
point  de  plumes ,  mais  feulement  du 
poil  &c  des  aîles  membraneufes,comme 
les  chauves-fouris  ,  &  les  poiffons  vo- 
lans  :  je  le  croirois  volontiers  ,  (quoi- 
qu'àla  diftaticequ'on  peut  les  voir,  ils 
paroiflent  de  véritables  oifeaux) parce 
que  s'ils  avoient  des  plumfes  aux  ailes, 
il  femble    qu'ils    ne   pourroient  pas 
voler  toujours  ,  ni  fi  vîte  ,  fans  être  ta- 
tiaués  par  les  tuyaux  ;  &  qu'en  mouil- 
lant leur  aîles ,  bien  loin  que  1  eau  tut 


4 


KT   DES  HAICYONS.    2ff 

un  fecourspour  les  aideràvoler  ,  ce 
i^roit  plutôt  un  obftacle. 

Je  ne  dois  pas  diffimuler  que  M'^- 
Charet  que  favois  prié  de  s'informer 
de  ces  particularités ,  m'a  mandé  qu'ils 
ont  des  plumes  ôc   des  pattes  de  ca- 
nard. Ce  dernier  article  ne  meparoîc 
pas  vraiffemblable  ,  puifqu'ils  ne  na- 
o-ent  point»  On  lui  a  ditauflî  qu'il  ref- 
femblent  à  l'hirondelle  pour  la  figure  , 
la  grofleur  &  le  plumage  i  qu'on  n'en  a 
jamais    entendu    chanter  5  qu'on  en 
trouve  beaucoup  dans  les  baies  brades 
de  la  Bretagne ,    quand  il  y  a  des  an- 
nées venteufes  5  qu'ils  font  leur  nid 
dans  les  îles  d'Origny  ,  près  de  Gre- 
nezai     &  Nolaine  ,  près  .Ouellant , 
qui  font  inhabitées. 

On  peut  inférer  de-là  ,  que  ces 
oifeaux  ne  font  pas  leurs  œufs  dans  le 
fable,  ni  leur  nid  furie  bord  de  la 
mer  ,  encore  moins  fur  l'eau  quand  la 
mer  eft  calme ,  comme  on  le  croie 
(çomniunémcnt. 


Voilà  ,  Monjfîeur  &cher  Confrère ,' 
tout  ce  que  je  fai  des  Halcyons  5  du 
moins  en  ai~je  dit  aflez  pour  exciter 
la  curiofité  des  Naturaliftes  à  les 
connoître  plus  parfaitement  ,  en 
confultant  ceux  qui  font  à  portée 
d'en  voir  tous  les  jours  i  &  à  s'aflurer 
furtout ,  lî  ces  oifeaux  font  à  poil  ou 
à  plume. 

J'ai  rhonneur  d'être,  &c. 


Fm  de  la  troijiéme  &  dernière  Lettrel 


iiiiiiillÉ 


APPROBATIO 

De  U  Faculté  de   Médecine   de  Pdris;; 

iM  OUS,  foufiîgnés  Dodeurs* Regens  ea 
Médecine  delà  Faculté  de  Paris,  nommés 
par  elle,,  pour  examiner  un  Manufcrit  de 
M.  G  H  E  VAL  I E  s^,  notre  C©nfi'ere ,  intitulé,- 
JLettres-^  &c.  Avons  lu  cet  Ouvrage;  &  nous 
croyons  rendre  témoignage  à  la  vérité ,  ea 
afîûrant  qu'il  eil  également  inftrudif  &  cu^ 
rieux. 

Donné  à  Paris  ,  ce  cinq  Février  ,  mil  fept 
cens  cinquante -un. 

M  E  R  Y. 

T.    BARON. 


OUi  le  rapport  de  M«-  François  Mery 
&  Théodore  Baron  ,  Commifîaires  nommés 
par  la  Faculté,  pour  Pexamen  d'un  Livre 
intitulé,  Lettres  fur  les  Maladies  &  les  PlameB 
des  îles  de  St.  Domîngue  ,  &c,  Compofé  par 
M.  Jean-Damien  Chevalier,  notre 
Confrère  ;  la  Faculté  confent ,  que  ledit  Ou- 
vrage foit  imprimé.  Fait  6c  arrêté  aux 
Ecoles  de  Médecine  de  Paris  ,  en  l'affemblée 
eu  5  Février  175 1. 

SAâON,     Doyen. 


Oi--t-;( 


J'A  I  lu  par  ordre  de  Mônfeîgneur  le  Chari- 
celier  un  Manufcrit  intitulé  ,  Lettres  de 
M.  Chevalier ,  DoUetir  -  Relent  ,  ancien  Pre-^ 
feffeur  delà  Faculti  de  Médecine  en  ÏUmverfite 
de  Paris,  &e.  a  M.  De  Jean  ,  &c.  Je  penle 
qu'on  en  peut  permettre  l'imprefTion. 

G  U  E  T  T  A  R  D. 

A  Paris,  ce  onzième  Mars,  1751. 


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