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L'INaUISITION
FRANÇOISE
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L' H I S T O I R E
DE X,A BASTILLE.:
.. -,.i î,..,.->f-.'. PAR
' Mr. Constantin dh Rinneville,
A AMSTERDAMj.
Xiia EiŒioœ RosEKiMaidiaMl-ibnurt.-
M. V. ce. XV.
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A S A'
MAJESTE,
I GEORGE PKEMIER,'
J ROI DE LA GRANDE BRETÂGNEi
r DE FRANCE, ET D'IRLANDE, .
»• DEFFENSEUR DE LA FOI; .
»l DUC DE BRUNSWIC , ET DE LU-
« NEBOURG . ELECTEUR ET AR-
CHI-TRESORIER DU SAINT EM-
PIRE, &c. &c. &c.
j'apporte au pied du Troue de
V ô T RÊ Majesté'- l'Hilïoire de
• 2 -, h-'
ui:,izf--„GoOglc
JV E P I T R E.
la BaAille , comme à mon R o i , à
mon Juge , & à mon Protec-
teur. Vous y verrez , Sire, ce
que f ai fbuf&rt pour la bonne caufe ,-
3c quoique mespeines aient été extrê-
mes, je ne dois plus me plaindre des
rigueurs de rinquifîtion Françoife,
puifqu'elles me procurent aujourd'hui
vavaotage de les confacrer à V. M.
dont fans doute elles attendriront le
grand cœur: & fofe me flatter qu'à
l'abri du. Sceptre équitable d'un Puif-
fant Koi , dont je me déclare haute-
ment le Sujet , je n'aurai plus à re-
douter la Verge de fer de mes cruels
ennemis. Comme mou Juge, vous
m'y verrez , Sire, perfecute pour
avoir detefté l'Erreur, fitaimèla Ver-
tu des Souverains qui la poflèdoient
au fuprême degré ; & le ïeul crime
que m'a imputé l'Envie , cft d'avoir
unploré leur mifericorde. Je fuis tom-
bé dans les pi^es que m'ont tendu les
Ennemis de la Paix, qui pendant plus -
d'onze Années m'ont fait ibuffi-ir des
peines plus améres que la mortlaplus
'" ri-
u,:,-,zf--„GoOglc
E P I T R E. V
r^oureulè. L'œil vigilant de V, M.
empêchera bien que h Tour de Lon-
dres, qui ne Eut trembler que les
Criminels, ne fc convertiffe en BafiU-
le, quiécrafe plus d'Innocents , que
de Coupables. Etcommc mon Pro-
tecteur, Sire, vousmedeffèndrez
demesPerfecuteurs, qui fir font gloire
de pourfuivre jufque dans le Sani^uai-
receux qui dévoilent leurs crimes, ou
qui ont le malheur de leur depliîre : &
quoi qu'ils aient donné à toute l'Eu-
rope trop de funeftes- preuves , qu'ils
oient étendre leurs violences julquc
dans les retraites les plus facrèes , ils
redouteront fans doute le glaive de ]\£-
tke quibrilledans les mains de V. M.
pour la confolation des Juftes , & la '
terreur des Tyrans.
J'aiefluiè mes lannes dès le mo-
ment que l'ai vu V. M. monter fur le
Trône. Mais je fens couler dans mon
cœur une joie f^naturelie, & que je
ne puis expriiiier, en approchant de
ce Trône augufte, oiï je vois aifis avec
tantdeCioire, de Majefté, &dedoa-
• 3 ceut
VI E P I T R E.
ceur un Prince que Dieu nous a
envoyé par une grâce fpeciale de fa
.Providence, pour rétablir les I-oix,-
un Prince qui eft le Proceâeur
de fon Eglife affligée, l'Ange de la
Paixj qui vient pour la rappcUer du
Ciel fur la Terre , & ratterniir non
feulement dans toute l'Europe , mais
pour l'étendre encore dans les cli-
• mats les plus éloignez, enfin un Roi,
tel que le Ciel le pouvoit accorder à nos
plus juRes foiihaits , Ennemi déclaré
de la flatterie , l'Ami de Dieu , le
Pcre Se les Délices de fon Ptuple..
Oui Peuple bienheureux. I c'eft ici
vôtre Alcicle,qui vient étouffer cette
Dilcorde qui vous a troublez depuis
li long-temps ; abattreunGerion, qui
menaçoi: de traiijer après lui la Ty-
rannie, la Superflition , la Vengean-
ce, & un nombre infini de Monftres
noir5& cruels, quifepromettoientde
rendre. l'Angleterre dclave : on lui
verra percer cet Hydre orgueilleux ,
dont les fifflements cmpcftez prcfa-
geoiem vôtre mort. Sous lui vçm ah
Jez
..Xooyic
E P I T R E: viï,
lez voir renaîtne vôtre Liberté dans
.toute fa fpJenrfeur.- Il va rappellcr chez
vous l'Abondance jaflurer vôtre Com-
merce i purger les Mers , dont vous
l'avez pxochmé Roi à jufte titre j i^otc-
gervos^ Alliez; & étendre vôtre gloi-
re jufqu'aux extramitez les plus recu-
lées de la Terre.
. En expofant , Sire, à V. M.
les peines que j'ai fouffertes , (c ne
dois pas oublier les malheureux que
fay iaiiïè dans ces mêmes peines ,
ou qui fouffrent encore fur les Galè-
res. Ces preuv«s animées, ces té-
moignages vivants de la fureur de leurs
Perfecuteurs reclament par- ma voix
vôtre mifcricorde. Ils attendent de vô-
tre Clémence, que V. M. remontrera
à un Grand Roi l'injuftice que commet-
. temceuxà qui il confie fon autoritéSc
iàiufticç, &qui s'en feivem pour pcr-
tuer les tourments de leurs viâi-
raes infortunées, dont la pJupart font
. réeonniies innocentes, par ceux mê-
me qui les perfecurent. Du fond des
£nfer$, des bords de l'Acheron, ces
*♦ op-
viii E P I T R E.
Oppritnez implorent vôtre apui. Que
vôtre Autorité, Sire, pénétre dans
ces Abymes, fur ces Rives infernales,
qui jufqu'ici n'ont été acccflîbks qu'à
k Fureur , à la Rage , & au Defef-
poir, Coifime un autre Hercule al-
lez forcer Plutoo, le cruel Bernaville.de
Vous relâcher une infinité de Thefèes,
qu'iltraittecn^omèthèes &cn Ixions.
Ce font des fu jets dignes de la Piété de
V. M. & qui la publieront par toute U
Terre, après que vous les aurez re-
tirez du Tombeau j & leur Poftèrirè
la plus ébignée (çaura , que vous au-
rez eu du pouvoir fur la Mort , en
ks rappellant à une féconde vie*
' Que le Salomon de la Grande-Bre^
tagnc , qui par fa Piété, & Juftice , fa
B(xicé , fà Sagelfc , & tant d'autres
Vcxtus qu'il poflède dans un fublnne
degré . s'eft rendu digne defa haute
vocatioi, trîomj^e , non lèulemem
dans rAngtetcire , mais qu'il foit ré-
véré de cmiterEarope, fie redouté des
Peuples les plus Barbares,- luiqbin'im-
poTe à ics Sujets d'autre joug . que
ror-
E P I T I E. nt
i'Ordtc de craindre Dieu, &d'obfeD-
vtr ks Loix. , & qui laifiTant à cet Ar-
' t»credes Rois le feprême pouvoir, fe
borne à Tautoritè que lui prdcrk fk
juftice, de nous faire du bien , &
qui par l'obèiflàoce qu'il rend i fec
conunandements fe trouve dans Lliea-
leuie itnpoflibilicè de nous £ure du
mal. C^ ce P r i n c x autant ja-
loux des Privilèges de ks Sujets
que des Prérogatives de k Couron-
ne, puiiTe ren^e dans LcHidres l'or
d*Ophir , & l'argent auHî commiuis
que les pierres. Q^e mm feulement
la Reine de Sçeba , mais que tous
les Princes dek Terre, vientmit ad-
mirer la magnificence de fon Trône,'
& la profondeur de la Sagcfle.
Pour moi , Sire, je dois bénâ-
à jamais l'adorable Providence, qui
après m'avoir délivré des fers, per-
met, tout mutilé que je fuis , que j ap-
proche du Tr&ie de. V ô t r e S a-
CR£*E Majesté', pour être a-
gregè au nombre de vos .Sujets 1er
plus zclez , & mêler mes vœux à
* j .ceux
X E P I T R E.
ceux de nu nouvelle -Se chcrc Pa-
trie, pour attirer du Ciel (urV.M.
&fur VÔTRE ROIALE ET Aù- •
GusTH- Famille fes Bénédic-
tions les plus precieuFes. Je de-
mande à ce Monarque Tout-Puif-
lànt, qui foit r^ner les Rois, qu'il
affermilîe vôtre Trône fur la Juftir
ce ^ la Prudence , & après . que
V. M. l'aura gouverné pendant un
long & heureux rœne, qu'il foit
pofledc en Paix ,. jiuqu'à la fin des
fiéclespar Vôtre Postérité' Hé-
ritière des Vertus, & de laPiètè
de V, M. auin bien que de ks Cou-
ronnes. Que la Religion foit infcr
parable de vos Royaumes , la Gloi-
re de vôtre Trône , 1^ Vidoirc de
vos Armées, k Fidélité du cœur de
vos Sujets , la Paix & l'Abondance
de vos Etats, & la Vénération qu'on
doit à vos Vertus des coeurs de tous
les Peuples de la Terre. Ce font Ic$
ibuhaits fiocéres d'un de vos nou-
veaux Sujets , SiRB , à qui Tes £n-
QCQiis n'ont Uiflé que jU vie , qu*il
- ' --- - ^ ^^
E P I T R E; - XI
eft prêt de làcrifier à V. M. jut
qu'à la dernière goûte de ion fang ,'
pour lui prouver avec ^el atache-
mcnt , quel zçlc , & quel relpcét B
cft de Vôtre Majesté*,
SIR E,
Le très huDible, tfit obttflàat
Serviteur & Sujet plus founû»
COKITAKTIH »E REHKETltU:.
• « PRE-;
u,:,-,zf--„GoOglc
PREFACE.
JE dois rendre nifon dans cette Pré-
face des motifs qui m'ont porté à é-
crire cette HiftoJre; pourquoi je lui
ai donné le Titre de Pïnquliltion Fian-
çoife, ou Hiftoire de la Baftille, & des
fins pour lefquellcs je Tai rendiîe publl-
*que. Les motils ont été te bien gêne-
rai & le particulier. I^ General regar-
de tout le Monde ; puilque j'ai vu dans
cet Antre abominable, pendant le temps
de ma- Frifon , malgré la vigilante pre*
caution de nos Ai^s , non feulement
des François, des AJIemans , des An-
rioîs, devËcoSois, deslrlandois, des
Ëfpa^ols } des Polonois , des Suédois ,
des Danois y des Mofcovites , St géné-
ralement des perfonnes de toutes les Na-
tions de l'Europe ; maisencorcdesFeu-
plcsdetoulEslesPartJesdela Terre, &
même des plus reculées , & qui à pei-
ne nous font conniies. J'y ai vu des
A^ncaûis, des Aliatiques , des Ameri-
cainS)
.--„Googlc
PREFACE. xm
etiàs, desTtins, des Mores, desPi.
p&-<7rxc5, desDerrô, desPrçkts^des
Miniftres , de& Prêtres , 8i des Moines
de toutes les cotilenrs, J^ ai vu des
Princes , cooune le Fib du Roi de Ma-
roc , <)ue Pon y a traitté d'une manière
btrbire& cruelle, & comme le dernier
des Goujats -j Le Prince de la Riccia , ou
malgré iês éminentes Qualitez, 6i ks
Vertus véritablement digues d^admira-
tioDi aété laviâimede Tavarice, &de
la haine fûrieufe de Porgualleux Bema-
ville } le plus inexorable de tous les
Tyrans. J^ aivûdes Ducs & Pairs , des
C«vlons-b]eus, des Officiers Généraux;
entr*autres le Lieutenant General Cher-
berg , du Canton de Zuric j Homme
plus que Sqituagenaire , qui avoîtblan*
chidansleierviceduRc», &qui, pour
avoir dit trop l&rement Ta penfée à Mr.
te JVLiréchal de Vitlçroi à la Bataille de
Ramillies , fut enfermé dans cette af'
freufe Spelouque , où Bemaville fait
fbufinrï ce venenâ>le vieillard des tour-
ments , dont les plus cruels Bourreaux
de l'Armée ne voudrtMcnt pas punir un
Soldat Saiâë, qui anroit dix fois mérité
rE&npaâe. Voici cependant tout Ton
crime. Ce General voyant le Rogi-
* 7 ment
u,:,-,zf--„GoOglc
HT PRE F.A CE.
ment du Roi qui alloJt être etivélopé Se
ttiUé en piecesÀ Ramillies, dit à Mr. de
Villeroi, ^ueii.iilui vouloitdoDnerfeu-
kmeot trois ou quatre Efcadrons de Ca-
valerie , il lui promettoic fur Ql tête de
dégager ce Régiment, & de lui faire fai-
re une honorable, retraite. AquoiMr.
le Duc de Villei'oi re^iondit , qu'ilavoit
d'aufli bons yeux que lui : fur quoi le
zèle, à la vérité trop fîncére de ce Gene-
ral lui Bt répondre : que & cela étoit,
les Troupes du Roi ne (broient pas ex-
pofées au carnage des £nnemis , -com-
me il les voioit , qu'elles étoient bon-
nes , & fei'oient admirablement bien leur
devoir, fi elles étoient bien conduites.
11 n'en fallut pas davantage pourenvoier
ce brave Officier à la BaAillej où une
petite recommandation de Mr. le Duc
de Vilkroi, qui fans doute en ignore les
confequences , a iàtt agir la rage de Ber-
naville dans toute fon étendiîe. Ce vé-
nérable Officier a été cinq ou lïx Ans
enfermé dans une Chambre au deffusde
k nôtre. Je lui ai entendu pouffer de»
gemifrements douloureux , des cris de
defefpoir, fiflesplainteslesplustouchan-
tes. Oui , difoit-il , je voudroîs qu'il
m*e(kt cofité tout moa bien »- & même
un
u,:,-,zf--„GoOglc
r R E F A C E. XV
an bris , & que le Roi , que Mgr. le
Dtic de Chartres , que mes Maîtres, ou
même Mr. de ViUerôi eufiènt k con-
noifiance de la. manière indigne, dont je
fuis traittéparun miferable Voleur, qui
cent fois a monté derrière le Carolle >
dans lequel fétois traîné avec fon Maî-
tre le Maréchal de Bellefond ; i la Ta*
ble duquel ce Tartuffe cent fois m*a ver-
Sé à boire danskpoAurela plus humbJej
& qui me met aujourd'hui le pied fur .la
gorge, m'écrafe comme un miferable ,
& me &it mourir de froid & de faim.
En effet pendant tout le temps qu'il a é-
té dans cette Chambre fur la nôtre , fi.--
mais on ne lui a donné du feu i on ne
lui porta pas un feul morceau de bois
l'Année du grand Hyver 1 709. Vingt
fois les Porte-Clefs, parméprife, nous
ont apporté fon dîne pour le nôtre; je
protelle que dans la plus miferable Gar-
gotte de Paris , un Crocheteur feroit
meilleure chère pour huit fols : cepen-
dant j'ai fçu par Rheilhe 8c par Ru, que
le Roi donnoit au Gouverneur quinze
&ancs par jotv pour la nourriture de ce
Genertl ; que cet Hypocrite Gargotticr,
aflifté du vénérable Père Rjquelet , &
comité duPeredelaBeaumeJefUites, ont
mis
u,:,-,zf--„GoOglc
CTi PREFACE.
, mis pour lûtlj dire, ^ la Torture, pour lui
Aire changer de S.cligk»i , lui promet-
tant k grâce de U part de Mr. de Vil-
roj. (>i aurcMt moins fait fôuffrir cet
Officier, en IcEù&nt moutir tout d^|n
coup, pour punkion d'un zélé iodifcret,
que de le fxtre languir dins les pluscruek
tourments , depuis près de neuf Ans : ce
^i me fit feire cette Epîgramme ftircet
infoTtnné General, que je trouvai le {c
crct de lui envoler. •
EPIGRAMME.
Tri^ généreux Chtrbtrg que ton fort tfi
criitl '■
' "Ion xJIeféur la gloire q|f cmfe de ta
peine :
Jamaii h Grand Couit «t t*etlt cru
crimintli
Si tu n'avais firvt que ftm le Grand
Turttiae.
. J'ai vu dans ortte Caverne de Poly-
I^me Mr. le Baron de Sacinet Officier
General de TEmpereur , qui maigre ii
Piété exemplaire , fa Charité, qui loi fai-
foit donner aux pauvres , par les mains
itttégret de Bemaville , la rtjoitié de la
Pealion que Sa Majïfté Impériale lui
u,:,-,zf--„GoOglc
PREFACE. ïvii
faifoit tenir dans jâ Frifon , & fes autres
Vertus Chrétiennes ^ étott traitté indi-
gnement par fon inhumain 'Guichetier,
Répertoire fidelle d'Avarice , où Har-
pagon n'auroit pu trouver à glofer. J'ai
vu dans ce lieu de delêfpoir un Gentil-
•Homme Alleman nommé Mr. de Nift-
vitz, dont l'extrême beauté faifoit tout
le crime. Elle panità laCourdeFran-
ce avec tant d'éclat , que les Maris de
la première diftinfïlion en furent allar-
mez. four éviter le fort d'Aâeon ,
dont ils fe croioient menacez , l'un
d'eux porta la jaloufîe fi loin , qu'en
roulant dérober , à (joelque prix que ce
fût*, ce Fils de Cythére aux rœards
trop curieux d'une Epoulê, qu'il foub*
çonnoit de trt^ de tendreJTe , il trou-
va moïeu de le plonger dans un a-
Mme capable d'éteindre jufou'k la
nxMndre étincelle de l'amour qu'A pour-
roit infpirer , & d'effacer dans peu les
traits les plus parfaits de ce charmant Ado-
nis. J'ai vu dans ce Repwre infâme, au-
trefois la Prîfon des Pnnces du Sang, de
U NoWefle de France , enfin des Prifon-
niefsd'Etat, j'yayTeudcsCrocheteurs&
des Prélats ; des Decroteurs de Souliers, &
des Mini&FL'S ; des Abbez & des Prêtres;
des
sviii PREFACE.
des Pouflêcus &. des Religieux i des Sol-
dais & des Qjiatre Mendiants ; desCIercs
de Procureurs & des Magirtrats ; des
Bei^eis &ç des Colonels : .des Ciieufes
de vieux Chapeaux & des Religieufesi
des Vieillards & des Enfants ; des Doue-
gnas décrépites & de jeunes Filles , des
Criminels Se des Inoocents. Enfin j'y
ai veu de toutes fortes de Perfonnes &
de Nations confondues les unes avec les
autres, dans le dur Prefibir d'airain d'un
Tyran, gui faifoit mouvoir tous les ref-
forts de la machine inferna/e, pour ex-
primer la fubAance de fes malheureux
Pigeonneaux, aiufî qu'il les appelle. O
Nations étrangères ! que la curiofîté por-
te à voir la France un' des plus beaux
Rpïaumes du Monde. & fur tout Paris,
la plus delicieufe de toutes les Villes de
la Terre , fouvenez-voiis qu'elle enferme
. dans fon fein la Baftille & Bicêtre , le Puf-
gatoire& l'Eijferdece Monde , où un E-
.tranger court fouveut rirque d'être Ic^é
quoique très innocent. Voilà l'avis que je
donne en gênerai à tous les Hommes.
iit vous Citoiens de Paris , quand vous
nîenerez vos Enfants àlapromenadefur
le Boulevart de .St. Anthoine , dans le
Bois de Yinoeiuies , dans les Jardins de
l'Ar-
u,:,-,zf--„GoOglc
PREFACE. x'x
J'Arfenal , faites leur confiderer atten-
tivement ces Tours énormes & affreufes
delà Baftille , & de Vincennes : qu'ils
apprennent de vous , & apprenez-le de
cette Hiftoire , que c'eft là que prefident
Bernaville , & St. Sauveur fon Neveu ,
les plus cruels Tyransqu'ait jamais vomi
PEnffer dans fa fureur. Bernaville, dont
la Gcneiation ell û ohfcure , qu'il a é-
té en obligation pour en cacher la Baif-
feOè , de changer fon nom de Charles
Fournier , en celui de Bernaville , Vil-
lage où il eft né , & qui appartient à Mr.
le Maréchal de Bellefond fon Maître j
comme font d'ordinaire tousles Laquais,
dont les uns fe nomment Champagae ,
Bouiguignon, Picard, Jean de Paris,
d'AIençon, Chalons , d'Auberyilliers,
Charenton , Vaiçirard , &c. du nom
de leurs Provinces, Villes, ou Villages.
C'eft à ce Maître que ce Chevalier de
l'Arc-en-Ciel a dérobé les dehors d'une
vertu folide, dont ce Maréchal étoit orné,
ce miferable voulant (bus ce voile cacher
le CG^ur ]e plus monftrucux, où jamais
rHypocrifie ait fourré fesplus peniicieu-
fes&ridicules grimaces &fonp]usdange-
reux poifon. Bernaville entend trois Méf-
ies par jour : ô le Saint Homme' mais ce
jour
XX PREFACE.
jour la même Bernaville îmtnole trois
Innocents à fon avarice &. à fa fureur :
ô le cniel Tyran I ô le méchant fcélé-
rat 1 Ce Tartufe couvre du manteau
de la vertu le plus méchant Homme,
que l'Envie ait pètr! pour l'affliftion
du Genre-Humain. Avec une mode-
ration affeâée, il eft d'une févérité &
d'une dureté implacable. La cruauté
eft peinte fur fon vîftge , & i'Hypo-
crifîe, toute diffimalée qu'elle eft, n'a
pû cacher l'air menaçant de fon front
d'airaia. ïlnefongctous lesjoursqu'àm-
venterde nouvelles gênes, pourmettre
à la torture fcs maineurcufes vjÂimes,
donc il boiroit le làng avec moins de
plaifîr j G les cbiin n'en étoient pas
ccMifûmées à petit feu par «e Barbare.
Toujours dans le trouble , toujours dans
l'inquiétude , toujours dans i*agitation j
ftns que Tor qu'il amafTe , comme un
autre Tantale puiflè étancher la foif vio-
lente qu'il en a. L'éclat éblouiflànt de .
cet or , qu'il accumule par les griffes de
laLefine, &qu'i] pétrit dans le iângde
fes malheureuiesHofties, non plus que
le brillant feftueux de fes meubles,oe peu-
vent charmer ni fon chagrin , ni fes re-
mords. Il étoit moinsfujet aux vapeurs,
quand
u,:,-,zf--„GoOglc
PREFACE. ixi
quand il ne voioit que fon toit niftique,
& les choux & les panets de (bn petït/ar-
din , qui compofotent tout fon héritage.
L.e lit voluptueux dans Icque) il coudie
aujourd'hui n'empêche pas qu'il ne trouve
lesnuitsplus longues, qnelorsqn'il étoit
étendu iurquelques peaaxdeBcebis, on
qu'il couchoit dans les Gcenieis de Mr.
le Maréchal deBeUefond. Après Vévt-
6on du Comte de Bucquoit, qui fe fiut-
Ta de la Baftille le 4. Mai 1 70{>. comme
on le verra dans cette Hifloire, il fit a^
battre tous les granit Arbres du Jardin,
aplanirtousleirecoiosdn Corridor, dont
il fit renverfer tous les ornements , oà
Voa pouvoit attacher des cordes ; 6ta les
couteaux des Prifonniers , Si tous leurs
ferrements , jusqu'aux moindres clous ;
tout le boisqu'iUsvdentdans leursCbam-
bres, jusqu'aux manches de leurs baSais.
11 nous 6ta nos couvertures , parce que
ce Comte s''étoit feiTi de la nenne dans
fon entreprilë. Cet Abbé ou Comte de
Buquok, CM-il eft l'un &rautre, étoit
dans une Chambre au deflnsde la mîen*
ne quand il Ce &uva: je lui «vois très dif-
ttnâement entendu limer Es griHes} ce
qui fit que Pigeon mon Coacaptif,' con-
jointement urecCiiiigalet, dirent aiM^ov*
ver-
u,:,-,zf--„GoOglc
«Il PREFACE.
veur que j'avois eu connoifiàoee ^(i def^
fein de ce Comte. Cefotaflèzquelade-
pofition'de ces fidelles Témoins pour me
faire plonger dans d'atTreux CadioCs,
oà nôtrecruel Tyran me laiflatrès long-
■temps pourrir , fans paille , fans une
pierre où repoiër ma tête ," couché fur le
limon du Cachot & la bave des Cra-
paux , avec du pain & de l'eau pour
. toute nourriture , & d'où il ne me reti-
ra que lors que je fus crevé. J'avoïsles
yeux prévue hors de la tête, le nez gros
comme un moien concombre , plus de
la moitié des dents , que j'avais aupara-
vant très faines, tombées du (corbut, la
bouche enflée Si toute en gale , & mes
os^ perçoient ma peau en plus de dix en-
droits- Quand le Médecin me vit dans
ce déplorable état , il dit que Ton m'a-
voit outré j que j'avoîs plutôt béfoio de
quelqu'un qui m'exhortât à la mort , que
d'un Chimrgien , & ne daigna pas lèu-
iemeotordonnerqu'on me pensât. Rheil-
he cependant le fit , par manière d'ac-
quit. Je guéri contre toute efperance ,
mais après avoir porté pendant près de
deux Ans un emplâtre qui me couvroit
tout le nra & l*œil droit. J'en fus quît- .
te ^ouruoe partiedu neaqui me tomba,
&
PREFACE. XII 1 1
il ma. &Dté que je n'ai jamais pu rétablir.
Après cette évafîon du Comte de Bu-
, quoît, on faiibit deux fois la Icmaioe la
vilïte 'dans nos Chambres. Il y avolt
toûjoare un Officier prefeot avec les
Porte-Ciefe j qui aportoient des mar-
teaux à Maçon , & des pics , avec lef-
' quels ils {ondoient nos grilles & nq&mursj
toamoient & renverfoient nos Lits, pil'- "
, loieiit toutes nos hardes^ & ae nous
: -laiflblent pas repofer.
■ Quelc^ies Prifonniers avojent attra-
' pé des rJgeonneaus qui avoient volé
dans leur .Chambre & leur avotent atta-
. ché des billets fous les alles^ pourdon.
' net avis à Jeuis Parents du -lieu où ils
étoient eufermâz. BeiTiaville décou-
vrit la rufe i & pour y remédier , il fit
. tuer tous les Pigeons , tous les Palîè-
Teaux qui failbient leurs nids autour
de la Baftille , & détruire à coups defu-
£1 tous les Oifeaux qui voloient dans le
Jardin. Les Pinçons joïeux , Se les chaTr
mantsR,onignolsn'en furent pasexempts.
Les tendres acceats-de Philomélejiepu-
. rent amolir la dureté de Bcmaville : il
fit tout mourir v ju^ues aux. Roite-
lets.
Son feul.afpeâ ell afil-eux , il a. deux
yeux
u,:,-,zf--„GoOglc
„,T PREFACE,
yeux de Veron enfoncez fous deux
Iburcils épais , qui fembleat lancer la
mort dans liuis terribles reganis , com-
me le Bafilic. Son front menaçant êe
ridé paroltêtreuneécorced' Arbre, fur
laquelle quelque Mufti a gravé l'Alco-
lân en caïaaéres Arabes. C?eft fur*in
teint que l'Envie cneille fea foucis les
plus jaunes. La Maigreur femHe avoir
travaillé furfon viftge à ftire le Portrait
de la Lefine, fa Divinité favorite, qa'el-
leacouvert d'un culibafané, qu'on pren-
drait pour de ce papier marbré lugubre
dont on couvre lés Oiaifons funèbres , tt
les Offices des Morts. Ses joues pliffées,
comme des bon«is à Citons, reffem-
Mént «ul gifles d'un Singe , dont il a
la'phifionomie & la malice,quoique le tout
pris enfemble' n'approche pas mal du vi-
Sge de certàncs petites écreviffe» de
lïfcr qu'on apelle Chevrettes, ou bon"
qiiets. Son poil ell d'un roux alfent
brûlé ; il me fouvient que quand il étoit
Chevalier de la Mandille , il portoit
fes cheveux plats, & frifez comme des
chandelles, d'un blond d'airain , qui ju-
loient que- leur Maître étoit de bonne
odeur. Quoiqu'il parle rarement , il
doit laen s'écouter patlcr, puifqu'ilala
DOUf-
ui:,iz.--„GoOglc
PREFACE. „,
bouche fort près des oreilles : clje ne
s ouvre jamais que pour prononcer la-
coniquement des anêts cruels. Ces ar-
rêts , quoique monofflabes, font exécu-
tez ponauellement par fcs barbares Sa-
tellites , quiue fe font jamais repeterdeui
fois la mlmechofe: ils connoiffcnt leur
Maître. Je me fuis vu loi demander à
genoux la Permiffion d'écrire à mon E-
poufe, pomlui maïquer feulement que
J 4tois encore en vie , & pour l'obtenir
fembniflbis les fcns que j'arrofois de
mes larmes; pour m'en détacher , iln'a-
voit qu'à dire ces deux mots ; au Ca-
chot Dansl'iuftant, fes Harpies m'en-
levoient avocla même rapidité, quel'oa
peint Euridice entraînée aux Enfi:re par
les Diables, malgré Jes tendi-es accents
de fon Cher Orphée. Si c'étoient mes
Ouvrages qu'on lui apportoit, après me
les avoir ravis ; il n'avoir qu'à pronon-
cer, au feu. Dans le moment fcs Gilf-
foni, fans examiner fi c'étoient les Souf.
fnmcesdejEsus-CHiirsT, oudesRc-
flexions Chrétiennes qui remplifibient
mes Cahiers , en, faifbient un Sacrifice
à Vnlcain , dont leur Maître meritoit
bien plus la fureur , que ces innocents
«rit!. C'eft S ce cruel Tyran qu'il faut
** que
«VI PRÉFACE.
que tous les Prifonniers obeîflêiit , fuT-
leDt-ils Princes du Saog j mîferable qui
n*a jaimis rendu d'autie fei-vice au Rdï ,
" que d'écorcher fes Sujets , fans diftinc-
tion» au contraire il traittoit plus fa-
vorableoient ceux dont la ba(le ez.ti'ac-
tion appi'ochoit plus de la (îenne , &
fur tout ceux , qui comme lui avoient
été bi^rez de couleurs. Cependant
le P. Kjquelet avoit le front un \qai dé
me fbutenir que c*étoit un HooimË
de Qualité , proche Parent de Mr. le
Maréchal à^ Bellefond; mais je le con-
fondis, ai lui fidiâot voir que je (à vois
mieux ion extradiion que lui. En effet
f ai été Diredeur dans le Pais de Ber-
naville , & j*ai vu St. Sauveur n'étant
encore qu'Enfant , Neveu de Bemavil-
lè) dont la Mère, Sœur de cet iliuAre
Gouverneur , étoit rediùfc dans une
pauvre petite chaumière enfumée , St.
Sauveur , djs-je , i-evêm d'une jaquet-
te de froc blanc , toute percée , auffî
bien que le bonnet qu'il avoit fur Ùl tê-
te de même étofiè , prendre mon che-
val par. la bride , & me tenii- l'étrié ,
quand je mcmtois deffus : cçpcoduit il
avoit le front à la ÇaHiJJe , .de me IÔup-
tcAir. que je ae le coouoifibis pas, i^if»
' ■ je
u,:,-,zf--„GoOglc
PREFACE. xxTO
je oe TatoÎs jamais v& y quoiqtK daniis
que fon Oncle l'avoit tire de la m to»,
pour le faire participant de (â Fortime,
je lui euffe donné à foiç^ chez moi à
Paris i où Mr. de k Viîlemœeon , qiy
a époufé une desParentes-deMr.le Ma-
réchal de Bellefondj & un Chanoiae de
Coutance me J'avoient amené i & ccoc
fois je l'avois vu à Vjncennefi auffi bieti
que ion Oncle chez Xiidatne la Maré-
chale de fiellefood. Mais qaand uns
fois ces fortes de Gmis de Néant foc*
élevez (m la roue de la Fortune , la pre-
mière chofe qu'ils oubiient c'eft les dCr
grez par où ils y ont monté ; & c'eftc^
que n*oubIie jamais le Public ; principjr
iementquandonlesyvoitinfoleœ, carn^
me Bernaville & (à Séquelle maudite,
qu'il a enracinée daiis la Baftille, dans
leïperance qu'ils y fleuriront comme
lui j Et malheur aux Frifonniers , car
de l'Auney & St. Sauveur heriterom
&ns doute de la cruauté , de ravarice ,
& de la malice de Bernaville , comm^
de fes biens immenfes. Ce cruel T]^
lan a trouvé les moïens, à force d'ar-
gent, défaire avoir la Lieutenance de
Koi de hBaflille à de PAunay fon Cou-
âuj afin de n'avoir plus Fedbnne qui
■oylc
xivm PREFACE.
contrôlât & LeGne & fès cvuautez ; &
pour cet efiêt il iê défit de Mr. d'Avi-
gnon, qui étpit un très HonnèteHom-
me , & brtve Officier , comme on le
verra dans cette Hifloire. Il a fait de
même avoir la Lieutenance de Roi de
Vincennes à faint Sauveur fon Neveu,
par un Brevet qui lui a coûté bien de
Targent , mais dont il e(l alTuré de fè
Tecompentèr au centuple : ainfi voila "
toute la Famille érigée en Tyrans; ~&
peut-être que l'on -en fera des Che-
valiers de St. Louis , pour recompenfe
de leurs belles Adèions. Et pourquoi
non ? on en avoitl«en honoré St. Mars,
dont tout le mérite étoit d'avoir gar- ,
dé à vue le déplorable * Mr. Fouquet
& Mr. Je Duc de L,auzun pendant tout
le temps de leur cruelle & longue Pri-
^o. t E^ mahtm quai vidi fut foie , tpiafi
ftr errorem tgrediem àfatii Principii. Poji-
tum (iultum in digtîitate Juilimi dr iivitei
feder« dtorjum.- Vidi ferves in tquit , &
Printifet tmi'tilaxtes fufer tenamgùafijer-
Et
• L'Aataor inrite le Leâeur ï lire utie Hif-
toîrc qu'il raportc dc.ccs deux lllullrcs Prironoieis
'çàns fa Préface "des Pfcijimes de la l'élût cncC
"■ ■ t Ecdefiaft, «p. n. y. j: fi: & ?•
u,:,-,zf--„ Google
PREFACE: ixîi
EtBernaville n'a-t-i] paslçû par fon
cagotifine outré , apuie pir des Gent
qiu étoioit lai^mmt païez, pour éta-
ler devant le Koi des vertus qu'il n'eut
jamais , à moins qu'on ne mette au
rang des vertus la Tyranie la plus bar-
bare , attraper un des meilleUFs Gou-
vememens de la France y dn moins le
pins lucratif, pendant que de bi^ves
Officiers , qui ont pafTé toute leur vie
au fërvice dn Roi , en Ibnt fniftrez. Ses
Patrons aveuglez , ne manquoient pas
de faire valoir à S. M., fon 2ele inviola-
ble pour & PerTonne facrée , dans le
temps que ce pernicieux Sujet ne s'oc-
cupoit qu'à détruire la réputation de-fbn
Mdtre , par les crimes abominablesqu'il
commettoit,&la r^ueur inhumaine avec
laquelle il trailtoit les Etrangers, fous
l*«utorité , & à Pinfçû de ce même
Maître.
■ Pour prouver que cet Impofteur n*st
que le -mafquc trompeur de la Piété, &
rien moins que de la vénération pour
Dieu , & pour fon Roi , je n'en veux ra-
porterqu*iin exemple, dont j'ai étéle té-
moin oculaire j Se que j'attefte devant
Dieu , connue une vérité que je fuis pr^
de ngner de mon fang. Quelques.uns
** j des
u,:,-,zf--„GoOglc
i« PR £ F A C E.
des Afïeurs de cette' Scène' Ibnt encore
léhieltement à la Haye.
Lorlqu'étant dïois un état deploraUe
je fus introdiric àans la première Cham-
bre de la Tour du Coin , où les Poitc-
Glefs me portereut preiquemourant; je
jus mis en entnuit , dans l'enfoncement
de la Chambre , à l'oppc^te de la che-
minée , où fur le mur on avoit peint à
frefque un JESUS-CHRIST de gran-
deur naturelle attaché en croix ; que des
Prifonniers avoient mutilé d'une manié*
re monltruenfë & cruelle. Ilsenavoient
efîJLcé tous les traits , lui avoient peint
deus cornes fiir la tête, ai la place du
voile^ ou de l'écharpe, dontd'ordînai-
tse on fait une ceinture au Crucifix par
bieiWéance: ik avoient figuré memhum
raormt , horreaium > tx quo copiofe fintàot
virus f ^ued fcekfti Sacriiegi o^/maboMtw»
jHorbo i/enereo procedere. Et fur Ùl p<M-
trine ils avoient écrit r *Myftért t h grandt
Sabylone^ la Mtre des mpadiàtet. > tf des
obûmitiathns de la lerre. Et quantité d'au-
tres Totifes de cette nitare. Il y avoit up
Portrait du Roi fur la chenimée , pafîà-
blement bien fait, iùr la tête duquel ces
Prifonniers fcelerats avoient peint des
cot-
• ApociiL Ch. 17. vers, j,
■ • , ...^Xooglc
PREFACE, XXXI
nés comme lu Crucifix. Bien plus, ils
avoîcDC poairé la fureur, ce qSe je n'é-
CTJs qu'avec horreur , Ôt tremblement ,
jufqu à peindre Téfigie de, S. M. iàcrée
attachée à une potence, avec cetteexe-
crable înicriptim. Louis XIV. pendu
pour fcs bienfaits & une autre couchée
fiir une roiie avec des inlôriptionsabomp'
Bables. II 7 avoit dans k même Cham-
bre un malheureux Prisonnier, nommé
Auguftin le Charbonnier , des environs
d'Alençcm,. qui avoit entièrement per-
du l'efprît , mais qui malgré Gi loMc
coofervoit une vénération Filiale & Zé-
lée pour Dieu & pour le Roi, qui fans
cefTe crioit par la fcoétre. Sentinelle a-
vertis Mgr. PArdieVêqae de Paris; a-
verds Mgr. le Chancelier que d'abomi-
nables Scélérats , ont ici mutilé & pro-
fané l'Image de J. C. ont attaché des-
comes fur la tête augufte du Roi, avec
des infcriptions infamantes. Ils ont mis
fon éfigie fur la roue, & l'ont pendue à une
potence , avec des foufcriptions atroces, •
diaboliques, fl£ exécrables: -Va vite", te
dis-je, le! en avertir, autrernent la ÉaP-
tille va abymer. Quand les Officiers ou i
les PoiteClefs entroient', ce pauvre.
HomESC'fetrainûit juÊju'à eux , car ces
•"•" 4 , mUc-
u,:,-,zf--„GoOgk
ixxii PREFACE.
milèribles Tyrans lui avoientcaffé une
cuifle, (fui Pcmpêchoit démarcher, &
il leur faifoit remarquer cesimaeescrimi-
nelles. Si tôt que je fus entre dans la
Chambre où je trouvai trdis fous, dont
le Charbonnier étojt le moins infuporta-
ble, fpeéiacle affreux & terribJe , car l'un
des deux autres étoit le plus fste , & le
plus importun de tous les fous ; & le
troifiéme avoit des intei-vales où lime
pai'loit tout à fait juâe , & d'autres où il
extravaguoit à perte de vue , Mr. médit
le Charbonnier , foiez le bienvenu, me
prenant pour un Commiflaire, ïly a ici
des Scélérats qu^il faut faire brûler tout
vifs ; voiez ce Crucifix , comment ils
l'ont mutilé : volez les outrages qu'ils
ont fait au Roi, le plus grandi & le
fjlus* refpeâàble Monaïque qui foit fiir
a Terre. Quoique je fufle accablé -dé
mal & de douleur, les cris importuns de
ce Fou me fij-ent jetter les yeux fur ces
images , qui me donnèrent de la fraïeur.
Lorfque le forte-Clefs m'aporta un peu
de bouillon , je lui dis, en lui montrant
ces figures. Ru quelles abominations font
ce h? mais il ne me repondit que par des
éclats de rire , comme fi c'eût été la
chofe du monde la plus plaifiinte. Lorf-
qu'il
u,:,-,zf--„GoOglc
P K Ë ï".' A C" E. rxxm
2il'il' vint des Officiers me voir, je leur
s remarquer la même chi^e : mais ils
me repentirent que s'il falloit châtier les
crimes de tous les Prifonoiers, ilnefau-
droit ceflèr du matin jufqil'au Toir de rom-
pre & de brûler. Quatre jours après on
amena avec nous un Vieillard qui étoit
l'Auteur de ces abominations, ficquien'
Êûfoit gloire, comme j'en ferai ailleurs-
le détail. Quand je pu me traîner, feC-
façai fout ce qui n'étoit peint qu'avecdu!
charbon, & oùjepouvoisatteindre;mais
tout ce qui étoit peint fur le Crucifix, 2e
les cornes fur la tête du Roiy étoientenr
core , quand je fuis forti de cette-
Chambre , & y ont été même très longr
tempsapi-ès, comme je l'ai fçu depuis..
BemaviUe a cent fois entre dans cette
Chambre, où il a vu ces deteftables-
impiétez; On lui en a fait des reproches-
fKtr un écrit, dont la copie iéra inférée
tout du long dans la fuite de cette Hifloi-
re: a t-ilpourcela-fïitagiriâpreteodùe'
piété? a^-t-il fait paroîtreiemoindrezele
pour le Roi? Il n'a pas fèùlonent daigné -
Bure* effacer les cornes & les ordures qiâ
étoient peintes fur le Cnidfix, ni leseor"- -
nesqui étoienrfur latêteduRoi. LeP.
BJqaelet-a été iaformd^de^eft&crilégcj, .
*♦' 5^ fans^
xxxÎT PRE E A C E.
ùm »*ea émoiivoir: ponr paraître înv
çroiat}le,:celan'eneftpourUnt pas moins
vrarl V^r qui ces ûcriléges etoient ils,
commis ? on croira fans doute que c*é-
toitpaf quelqa'infidelle, quelqu'Athée^
QU du moios par quelque Reformé outrée
Non i l'Autcuc etoit un vieux Catholi-
que Romaàij & l'Exécuteur un Fou
Hirieux. Poux moi, quand:j!atflprofondi
h choie, j'ay cruquelesofficiersavoieufe
fimulédemépri(êrce crime, crainte dele-
fitire punir, ce qui aurolt coûté la yie à,
^etques uns de leurs Pigeonneaux, c|ul
leur étoit plus precieufe , par les gams,
qu'Hsen mclroient, qiiela gloire de Dieu,:
& celle d'un Grand Roi , qu'ils voient
îoipunement en Cmulantde le fervîr.
En etet ces gaini font exprbitaa?. Ja
«ets en fiùt que dqiuis le 16 de Sep-
tembre 1 708 que Bemavjlle a ïticcedé^^
à St. Mais, il a tiré plus de quatre mil*
^ons de profit de iês malheureufês vîn-
mes. OnSci phimes de maigres Pigeon-.
Hçoux! La demonftration en &ra éviden-
ip: c^ellon fait âcile à veri6erauxMt-.
Iiiftfes du Roi , pour peu qu'ils veuil-
lent s'en dooncT â pdne. Je fîipore que
fioiu. aïoos été aûuellement deux Cens
l|rilôpnieis dans ce maudit Enfer} ce.
qu'au-.
u,:,-,zf--„GoOglc
FR E-rXcTE:. xxxt;
qu'aucun T^fonnierDe peut içavoir qi»
ptr conjeéHire ; ■ carilmeiiirequ^eDlôrtv -
un 7 en remet d'autres;- je mtperfaaAé':
qu'il eft peut être entrédeux milIePrifon- ■
nters dans ce maudit Trebudiet peudàntr
pIusd*onzeAnsquej'y«ifoupîré.' Jefup—
pofe encore qu'ils étoieut tous aune PiC--
tolè par jour, ce qui n'eft pourtant pas»,
car ir y a des- Priftinniers qui n'ont que ■
dnquante fols par jour , comme les De*- -
croteurs de Souliers , les Valets , - & au- -
très Prifonniers de bafiè conditioiï. Il y--
m a à cent fols, d'autres à dix francs,,
d'autres à quinro, à vingt, & juiqu**^
vingt cinq fi"ancs par jour j tel qu'^tOienÉî
S. A. -Mr. le Prince de k Rtccia,.
Mrs leDucd'Étrées', MOucdeFroa-
ftc, le Comte d'Harcour, Mr. deSur--
▼ille Lieutenant General, ,& plufîeurs au-
tres. Je fuppofe en outre , quTlencoûte;
au Gouverneur vingt fols par jour pour la t
nomiture de chaque Prifonnier, ce qui eft :
outrer la deperice ; car fuppofé qu'îl yait
dix Prifonniers à qui qui l'on failç meil^ ■
leure chère qu'aux autres , tout le rêfte '
cft mifcraWemcnf traitté , & il yen ai
beaucoup qui Icfontd'uneniàniéfetruel--
Jé, ti qui pour cinq fols vivroierittnîeus ■
ailleurs. . II i^èn coûte au Gouverneur"
**' 6^ qu'an i
.--„Googlc
«in P R E.F ACE.
qu'un fou par jour pour ceux ^î ftinfc
sus Cachots, qu'il a toujours Ibm de te-
nir bien garnis : ce qui lui fait appeller
ces lieux abominables Jei denier/ ctairs ;.
car un fol pour le Prifonnier , le refle
pour le pauvre Gouverneur , cela eft
clair y il ne faut point de plume p»ur en
faire le calcul. Je foutiens encose, que.
le revenant bon des vingt fous, que je
lui paflè par jour pour la nouo-iture de
chaque Prifonnier , elt plus que fufi^b
pour oourriiigraflèmcntj & païer large-
ment tous les DomeAiques ,.& faire ferviu
&. table abondaniiment , où il ne fbuffre
plus aucun Prifonniei: , comme fkifoit St.
Mars qui regalolt parfaittementbienceui:
qui étoient admis A: fa table.
Je dis donc deux Cents Pnlbnniers à-
dix francs par jour coûtent au Roi deux
mille Livres 20ooi
Sur quoi il faut deduii'C vingt fols pas
chacun pour leur nourriture. . 200^.
Relïe de profit par jour- au Couvert
neun 1800 i
Qui multipliez par 36;;. lui produir
fent pî»r An de proÇt. . , (S^Socoi
IJ y a plus de fix Ans-qu'il ell Gou-
verneur, ce qui a du pouflèr Ibn reve-
naptbon àplusdequatremillions, cûmv
me je Paidtf, II.
u,:,-,zf--„GoOglc
PREFACE. ixsvn
II eft facile au Miniftre de voir, s'il y a
dePerrear iûr le nombre des Prîibnniers,
& iîir la. formne que donne le Roi i cha-
que Prifonnier, & en faire après unefu-
putation jufte. Mais polons le fait qu'H
n^it gagDê que deux millions; où eft le
Goiiycrnement de Province qui foît fi"
Jucratif aux Princes qae le Roi en grati-
fie? Qu'eft ce que Bernavillc? Unmife-
rkblç CheTalier de la MandilTe, quFa-
près avoir couru longtemps , & roulé
derrière \m Carofle > a trouvé le fêcret
de fe lancer dedans, oà fon orgueil lui'
ftit croire , qoe la Terre n'en pas capa>-
blc de le porter. ïl a railbn , car il de-
▼roitêtre en l'air fiiraneroïïepourpunir
tirai des cPÎmes qu'il a commis, jitcurritt
t^aguret, & plaudite ParaviuiConfui'fac-
tut ^ ■> qui Mulii fikaBat. Cependant
ee qui me pafle , c'eft que ce TattufTe
«ft regarde à k Cour , * Qiue redore
fach HjfpecrhatH prof ter ptaata pepulî',
comme un Saint du premfer ordre , ua
Beat au m'and- coiier : avec fés yeux
baiflea, famine mortifiée, fbn fllence
mome , fi- douceur affeélée, fbn air
eoinpofé , cons- ceux qui ne Icconnoif^-
jènt pas y foat tréispez j car
» Jl!>b Cap. Î4. TMf- 3o*
.--„Googlc
Mxvui PREFACE.
BerttaviUt^àlev6irt»lectturnut CbrAUnX
t^iiii il plume, en Faucon , & je vente en
Vaitn,
On ne fait cependant qu'attendre fk :
• mort pour le canonifer , & le joindre
au Bienheweux Jafmin , Laquais de
Mad. la Prefidente Nicolai ^ dont on a
déjà publié la vie & les miracles dans
Paris, & qui feroit canonifé , fi quel-
que Bourvalet, quelque de Jean y. queU
que la Peyronnie j quelque Ç,ale , ou.
^uelqu'auti-e de fes Confieres les Par-
tifans avoit voulu en faire les frais.
Mais quand ces fortes de Gens font hors
de la Sphère de l'Arc-en Ciel, ils font
trop orgueilleux, poui- recoonoltrecetis.
qui en font encore pavez des- coul^rs ,..
pour leui> Aflçciez.. Les fommes ira-,
menfes dpnc de BeraavUle fupleronc à
tous les deux j car il n'eftpasdecesHy-
pocritcs fans fruit qui iê donnent auDia-
ble gratis; mais up de ces Rafinezqui
n'aiment de la Dévotion .que leproduit;
& on fera une.acoJade du. Bien- Heureux
Jafmin & Bernaville , pour les inftalcr,.
daos le, CaloM^ier Romain eolaplacedB
St:.
.--„Googlc
r R R F A C E. sxit»
St. Crefpin * de St. Cre^inie». Car
comme le corps veneraUe des Cheva-
liers de k Msndille aft beaucoup plus
nombreux que celui, àss Maîtres Jurez
de k Maoique.^ il aura h prefêreace }
euand ce ne ferok que par. h nouveauté '
du miracle., devoirdeuxS^nts Laquais.
Rei mnandal Us auroieat bien pA. pré-
tendre même à la d^radatisn de St.
Cofine, &de&. Damién, pourfcibu^
ter en ]eur place , par la con&nnitê
des couleurs & de la £^ience ; mais le
crédit des Fagons, & de tous les Fago
tins eft trop bien foutenu , & Fempor-
leroit fur une multitude atândonnée des
ingrats qui rougiâèiit d^avoir été -mem-
bres de leur Corps. C'èft à cet HypO'-
crite y qu'il faut que tous les Frifônniers,
de quelque Qjialité qu'ils (oient , o\^\C-
ftnt & qu^I fait , quand il lui plaît , uns
diftinâion & iâns mjet l^itime,, al!bln-
mer à coups de nerfs de bcEÙf . JI en 9
outragé le nofnjné Fontaine de TounUÎ
jufdu'a l'excès , qoieAmortdelaBgueurj
apiès «voir fouffeitun MaityMitiexpri-
mable.. 11 a ait cafler, la cuifie à Mr.
Einchy. Capitaiue Irlandois ■■, La jambe
au nomma Henry ou Heniicnie , Sx. qœ
l^QQinVditêtreËfpignol. Mr. leChe-
valier
IL préface;
valier Veizer de Bixich eft ici^ aâtiellâ*-
meot à h Hay« , foiti de k fiaftille le
premier jour de Décembre 1714. par le
Bénéfice de la P«x faite entre rÉmpî-
re & la France ; c'eft un Homme dedif--
tin£tion& de mérite, d'une Famille très
connue dans la Carinthie i Officier d'un
long lêi'vice qui a été Lieutedant Colo-
nel dans les Troupes du Roi Charles
aujourd'hui Empereur , & qui parle fis
fortes de langues avec la même facilité
C|ue ik langue maternelle. Il m*a afSrmé,
& m'a certifié par éait, qu'il a été plu-
fieurs fois frappé de coups de bâton juf-
qu'aufang, pai- ordre &cn prcfencedo
cruel Bernavilic , qui après l'avoir fait
brîlêr de coups , le i&iroit traîner tout
âmglant dans les Cachots , où ce Ty-
•ran le lailToit au pain & à' l'eau juf-
i]u'à ce. que ces forces. AiÛent entière-
ment, épuifées. Be fèpt Années qu'il
a été ^ans cette cruelle Prilbn , il en
a- pall% cinq dans ces horribles lieux
foutemins. Mr. Guéri Capitaine Ir-
Jaodois dent tout le crime étoitd'avoir
jêrvi fous le Roi Guillaume- , de glo-
rieufè mémoire , & de s'être déclaré
pour la bonne caufe, de onze Aimées
q^'ila été- enfermé dlans cette. ÛLveme
.--„Googlc
P R K F A C E. xu
txa T^res , en 2 paflé neuf duis les
Cichots, d'où on ne Fa Touvent reti-
ré , que lors qu'il étoit pi'êt d'être no-
yé par Teau qui aToit inoncié les Ca-
chots , &- où on Ta laiiTé des journées
toutes entières à crier mlfericorde , &
fe voyant prêt d'être noyé, ayant Peau
julqû'à lagoi^e ;■ c'eft ce brave Offi-
cier , homme de mérite & de pr(^i-
té , qui a Ibufièrt des tourments , qui
rendront Ton Hifloire affrcufe & que
la (âge Poftérité aura peine à croire ,
qui peut àJre avec Job. & le Piàimifte :
Dohres mortir tircaïuiedtrunt bu, Mr. le
Baron de Bfoch le jour même qu'il for-
tit aïant redemandé à /on butiare Gou-
verneur l'aident qu'on lui avoit pris en
entrant, &fes papiers, cerdficats , obli-
gations , fcs bijoux , & Tes hardes , lui
remontrant . qu'éloigné de 'deux, cents
liciiesdefonPaïs, il n'étoit pas un Hom-
me pour y retourner làns un fou , &
s'étant otrfliné à vouloir fe les faire reC
tituer , de l'Aunay Coufin du Gouver-
neur & Lieutenant de Roi de la BaftiU
le , pour l'expiation des péchea des Pri-
fonmers , Tyran piiis cniel & plusin-
humainencore, fijerofedire, queBer-
navUIe , le Édfît à la gorgp , en lui di-
tânt
u,:,-,zf--„GoOglc
XLi t P R £ F A C £.
Tant. Ah ! Ms. rAltetnaod , Cheval
ÎDdon^é, tu n'ai as donc pas aÛèz euî
•puiique tu n*ee pas content , je vais te
Aire donner ton refte j & pour le bran-
le de fouie il le fit tenaf&r par ies Sa^-
telJites , qui après lui avoir donné cior
quante coups de bâton , & de nnnche
d*hallebarde , le plongercht dans mi Ca-
chot feignant de tous les c6tez, & oùils
le taiflerent piiqu'àceque l'Exempt, qui
le dcvoit faire fortir hors du Royaume
pour lui fîgnîfier ion bannilTemeDt, lûr
les limites de France , Tcn vint retirer,
& Tenchtina avec Mr.Scbrader dePeck,
Gentilhomme de Hanovcr , Se accou-
plez comme deux Galériens, lesentrsi-
na hors de cetEnfer, 9c ne les decbalnft
^ lra^u*ils furent à plus de deux
heûes hors de Paris. Seroit-ce les Turcs
qaâ fêsoient de (êmblabks violences l 11
■ eft i remarquer que ces Tyrans font ban-
nir de la France prcfqoe tous ceux qu'ils
fimt forcez de relâcher , pour les empê-
cher de porter leurs plaintes au Roi , &
à fes Miniftres , de leurs barbares cniau-
tez> &parlacnuntequMlsontquequeI-
que généreux Prifonnier ne fe venge de
leurs outrages diaboliques par quelque
coup d'éclat; comme ils l'ont vu depuis
peu
u,:,-,zf--„GoOglc
P R E F A C E. xuii
pea oue leur Major a été poignardé pa^
des Gens inconnus , & eft tombé mort
i la porte de la Baftille fins prononcer
une ieule parole. Châtiment terriblcj mais
digne d'uD Tyran. Mifèrable Batteur en
Grange des environs de Rheims i qui
un jour de Fête , s'étaAt trouvé dam
une Taverne en Ton Village, oùîlyeut
un Homme tué en fâ Compagnie, pour
en Éviter le châtiment s'enrok pour Sol-
dat; defèrta des troupes de France,& paf-
& diuis celles de Hollande. Il y fërvit dans
le Régiment de Mr. le Comte de Hor*
nés pendant toute Ja Guerre terminée à
k Faix dcRyfwiek, puis il defeit» encwe
de Beigues op Zoom , replia eu Fnnt
ce. Se s*ei^;agei dtns le Riment aux
Gardes, d'où it &v<»t pris la Seigneurie
de Fierrot. Après il Ce maria à Tournai à
unevendeufe d^heibes, qui ctmtînisa ibn
métier, pendant que Îdd Mari, pour ie
diftinguer, {bumifibit les tables de l'Ar-
mée de dez & de cartes. C*cft de cette
noble occupation , que Mr. des G ran-
ges « dont il le dtfoit Allié, le tira pour
en Aire le Major de la Baftille. Aînfî
Mn le Batteur en Grange , Je Soldat ,
Je Deiërteur, le Pierrxrt , PEftaficrfut
érigé ca Officier, & bien -tôt en Ty-
ran
xLiv PREFACE.
nm tout des plus brutaux & inexorables.
Quid Domhù facitnt ■ auitnl cum talia
Fures ?
J'ai été arrêté , détenu Frifonnier on-
ze Ans deux Mois, traitté avec une cruau-
té inoiiie, mis hors de la Baftilk, & ban-
ni de la Fruice , ans que Jamais f aïe peu
en apprendre le fujet , fans même qu'on
ait voulu me permettre d'écrire à Mr.
le Marquis de Torcy pour reciamer la
juftice de ce Miniftre d'Etat qui m'avoit
fait arrêter j je defirois Cçavoir de lui de
quoi on m'accufoic , & le prierdem'ac-
corder des Commiâàires pour examiner
ma caufe. Cependant je prends Oiéu à
témoin , lui qui fraide les cœurs &: les
reins, & qui me punira/êverement,fije
luis aflez téméraire pour en impofer en
Apr^oice redoutable, que jamais je n'ai
eu le moindre reflenttment ou de haine,
ou de vengeance contre ce ÂgeMjniUre,
que de méchantes Gens, & qui pourtant
veulent me perfuader encore tous les jours
qu'ils font mes Amis , avoient prévenu
contre moi par leurs calofnnies: langues
&plumes ptxnicieufesjpeftea de laUepu-
blique, que Dieu réprimera un jour lans
doute y & qui méritent d'être battus de
plu-
u,:,-,zf--„GoOglc
PREFACE. iLT
phlfieurs coups , pour avoir &it un
fi mauvais uâge de leurs [>el)es Lumié*
res. Les vertus de ce Miniftre cftimé
d« (es Ennemis mêmes > m'ont fonte*
nu conti'e un Mixture plus crael que h
mort ; * t.Mtlior efl mort , quam vita
ttmara i & re^ms mttrna quam langmr
firfeverans. J'étois bien éloigné de re-
fHt>dieT à fa Prudence des auautez qui
avoient leurs fouîtes , & dont f allois
dierdier la racine dans le cœur de nos
borbaixs Bourreaux , pourra converfios
deiquels , & la prorperité de cet illuftrè
Miniftre , je priois Dieu tous les jours
avec une ferveui* non feinte. Je Im
rends juftice , ans efpoir de le revoir ja-
mais , ou d'obtenir la moindre grâce de
lui. S*il avoit été mon Patron , &
qu'il m*eût connu , comme Mr. Cha-
millart me connoiiToit , il m^aorbit mieux
protégé que celui-ci n'a fait', malgré .
toutes iês proteftatioos par écrit , que
je conferve eiïtore,& qmiie meferventà
prefënt qu'à me convaincre, que ce n'eft
qu'en Dieu fèul que nous, devons fonder
IH» efperasices, puis qu'il Ji*y a que lui
iêut qui oe trompe jamaéj, i.Safiiaàa
• Ecdefiafl. Cap. 30. V. 17.
t EccUfiaft. Cap. T.yei. ao.
.--„Googlc
iiTi PREFACE.
amjm/ivit fM/ùtntem fuper dttetn Prinàpts
Civitatit.
J'ai donné le Titre à mon Hiftoîre
d'Ioquifition Françoife. L'Inquifition
de Goï qui pa0e {}our le Tribunal le
plus inique qui foit 2U Monde , : n'eft
rien en ■ comparaifon des injaftices qm
îe pritiquent en la Baftille. Ceux qui
voudront confronter cette Hiftoire , a-
vec celle qui a pour Titre , Relation
de l'Inquifîtion de Goa , imprimée à
Paris chez Denis Hortemels , Rue St.
Jaques ^ auMecœnas, i*An i(S88. avec
Pnvilége du Roi, trouveront qu'il n'y
a pas de comparaifon des Rigœurs de
l'Inquifition de Goa à celles de laBaif-
tille. L'Auteur fe plaint d'avoir été
deux Ans dais les Prifons de Goa , ce
qui eft une chofe extraordinaire , puif-
auede'denx Ans, en deux Ans, ou
e trcns Ans tout au plus, on fait Ibr-
tir tous les Prifaaniers pour être pimis,
on ab<bus. Le Doïeo des Piiibnniers
de la Baflàlle , qui y étoit encore quand ^
f en fuis ibiti , 8c qui s'affile Mr. Jean
Caodel de Touif , y eft depuis trente
Aaa : ^oi qu'au bout de trois Aos il
«t été reconnu Innocent par Cz Partie
même, comm* j& Tai dk d&os ma Fa-
PRE F A CE. xLvir
npbrafe en Sonnets des Cantiques do
la ointe Eo-iture , & comme jen ië*
rai une ample Relation dans la fuitte de
cette HiftoJre.
j*ai vu un autre Prifoniiier en i?of.
qui avoit été arrêté long temps avapt
Mr. Carde), dont je n'ai jimais pu fça*
voir le nom : mais R.u le Porte-Qefseif
me reconduilânt en tua Chambre, de U
Sale où J'avois vu ce pauvre infortuné,
me dit gn*il y avoit trente un An qu'il
étoit Pnfonnier. Qjie Mr. deSt. Mars
Tavoit vnené avec lui de$ îû& de 5te.
Mai^uerite, oà il étoit condamné aune
Prifon perpétuelle, , pour «voir fait é-
tant Ecolier îgé de douze à treize Ans
deux Vers contre les Jefuites. Ç'eft ce
qui me fit croirequ'il étoit P Autheur de
ceux que je vais raporter qui furent affi^
chezcontre la Porte des JcfuttesdeParis»
à peu près dans ce temps là. Vonfçtài
aflez que fiir cette Forte ,. il y avoit au-
trefois écrit en Lettres d^or y eu gi-os
arzâéte». Ceiiegium Claromtittanftm Sv-
càtatù Jifui. Les Jeiùites prièrent, le
Roi & fa Cour, d'honorer de leur prÇr
i^ce ime Traite , qu'ils, avoîent fai-
te à la gloire de Sa Majefléi . Jls la fi-
lent ixorefeater pu leurs EûqUcc» de la
*^ The-
XLvni PREFACE.
première Qualité: Aâeurs, AfSbioes,
Danceui-s , & Danceuiês , Orcheftue de
rOpera , Décorations & Machines de
Théâtre , rien ni fut oublié. Le Roi
en fut fort fatisfàit , & comme le Père
Redcur du Collège reconduîfoit Sa Ma-
jcflé UD fevori loiia les Revei'euds Pères
de ta Société fiir le bon fitccez de h Piè-
ce. Sur quoi le Roi dît ; F«ut-il s*ea
étonner? c'eft mon Colége. Le Rec-
teur étoit trop habile Couitîfan , pour
ne pas ptofiter de cette déclaration favo-
rable. Dans le même inftant, îloivoia
quérir des 'Ouvrieis ; leur ordonna de
graver en grandes Lettres d'or fur du
ftiarbre noir. CoUegtumLttdavià Mt^ai.
& qu'il vouloit' abfolument que ce-
la uit prêt pour le lendemain au ma-
tin, qu'il fit ôter le Nom de Jtsus
pour mettre celui de Loihs de le Grand
en la pface, ainfi qu'oa l'y voit encore
aujourd'lïui. Un Ecolier témoin du ze^
le de ces Révérends Feres fît ces deux
Vers , qu'il appliqua le foir contre la
Porte du Collège, & en divers endroits
de Paris,:
jikpuHt kim J t -s u u , ptfuitque Infignia
■ ■**2'>- ' ■
hifiaGént: aliatiniOMCûùtiUaDevm.
La
u,:,-,zf--„GoOglc
PREFACE. xux
La Sodété ne manqua pas de crier
tu Stcrilége ! Ainremment que l*Au-
• leur fut découvert j & quoi que ce fût
un de leiirs tendres Ecoliers , il fût , à
c'cft celui-là que j'ai vu , à la Requête
des R. F- condamné à une Prifon perpe^-
meUC} &transferéauxlflesdeSte. Mar-
guerite en Provaice , pour cet effet ,
d^QÛ St. Mars le ramena à la Badille a-
vec des précautions extraordinaires j ne
le laiflànt voir à Perfonne par les chemins.
Enfin cet infortuné Poète, queReilhe,
qui nous en a conté toute rHiftoire^
nous aflùra être un Homme de Qualité ,
gagna le P. Rlquelet par le bon endroit.
Fendant le temps de fa. Prilôn , il étoit
devenu l'Héritier de toute Ci Famille ,
qui polTedoit de grands biens. Il en fut
averti par lecharitableRlgueletfonCon-
feÛèur. Lapluied'or qui força la Tour
de Danaë, ht le même e^t fur celle de
, la Baftille. Le zèle du P.Riquelet fitre-
montrerauxPeresdetâSociété, Fcifon-
nes fort definterelîées , comme tout le
Monde le fçait. Futile neceflité de met-
tre dehors fon Pénitent en toutes nuf^ié-
res. La Société pria le Roi de pardon-
ner à un Seigneur, dont la Famille al-
toit s'éteindre iâns fon fêcours. Le Roi
• * * qui
...^Xooglc
L PREFACE.
qui n'avolt confenti à Pemprifonnemer^
,de cçtEqfantqu'àla confideration de ces
R. P. figna volontiers fou élai^iflemept
à leur Requête. Il fortit deux pu trois
Mois après tjue je l'eu vu dans la Sale.,
QÙ par mepnfe je fus introduit avec lui.
Les Officiers m'aïant vu entrer, ils lui
firent promptementtoutnerledos devers
moi, ce qui m'empêcha de le voir au vi-
lâge. C*etoit un Homme de moïenne
taille, mais bien traverfée, portant iês
cheveux d*un crêpé noir, Si fort épais^
4ont pas un n*étoit encore mêlé.
Leîiommé Fariede GarlinenBearn,
a été vingt quatreAnnéesentiéiesenfer-
mé tant a Vincennes , qu'à la Baftille
pour-n'avoir pas- voulu abjurer la R.R. Il
eft forti de ce dernier Gouffre le Moisde
Novembre dernier; Le nommé la Masy
eft enfermé depuis l' Année itfp'. pour a-
yoir dit quelques véritez choquantes à une
IJame', qui n'étoit pasindiferenteàMr.
de Pontcnartrain , pour lors Controlleur
General des Finances, & depuis Chan-
celier. Mr. de Brunsfields Kouakre An-
glois, qui eft pour la Troifiéme fois àla
Ballille , dit y avoir vu un Confeillerdu
Parlement de Paris , qui y a été enfer-
mé pendant trente quatre Ans. Quand
il
PREFACE. t-t'
il en fortit , il trouva que & Petite TQ-
le, dont & Fille étoit enceinte, quand
il fut arrêté, étolt Àyeule,&par ce moien
l'avoit fait Trjfaïeul. II ne connoiflbit
plus rien dans fa Famille, tout étant mort
pendant la détention j il ne connoiflbit
paslâ Maifon même, à laquelleonavoit
^t quelques changements. Le nommé
Henry Francillon de St. Maximin près
de Gienoble a été enfermé dansce Cloa-
que pendant dix huit àdixneufAns,pour
h Religion , & y eft refté encore dix
Ans après avoir fait abjuration., preuve
évidente de k Piété & du zèle de Bernai
ville & du Fidelle P. Riquelet. Entre
feize Prifonniers que nous étions dans la
Tour du Coin , nous formions plus de
Cent cinquante Années de Prifon.
Si-tôt que Ton s*accu(ë de fon péch£
commis ou imputé, & qu'on en marque
ton lepentir aux Juges de Tlnquifitionde
Portugal , on eft aflûré d'être élargi :
nuis vous avez beau TousaccuieràlaBàA
tille, on ne vous écoute pas. Des fëize
f jîlônniers que je viens de citer , il n'y en
avoit que deux qui fe confeflallètit cnmi-
nelsi les quatorze autres proteftoient fur
ce qu'ils avoient de plus lacré, qu*ils ne
Icavoient pas feulement de quoi on les ac-
.--„Googlc
ui PREFACE.
cu^it. J^tù vu peudePrifonniersCrHtii-
QcIs à la Ba^le i & une ioânité d'inno-
cents, mais plufieurs d'une ionocence a-
verée.
Tel étoit Mr. Delfino Geatil-Homœe
Génois Secrétaire de Mr. le Comte de
Walftein , dont tout le crime étoit d'a-
voir été pris avecce Seigneur furunVait
feau Portu^is , pardesArmateursFi'an-
çois , lorfqu'ii revenoit de fon Ambaiîi-
de de Portugal où S. M. I. Tavoit envoie.
Quoique ce Secrétaire fût d'un rare me-
rjte, & d*une douceui' achevée, il a été
traitté par lesOffîciersdelaEaflilled'une
£iÇon barbare, Qu» poufTélafurçurjur-
qu'à tiier devant lui, .contre le mur, un
petit chien qu'il avoît , qui n'étoit pas
plus gros qu un Rat & foit mignon , &
après lui en avoir fj-otté le nez , on le
traina dans le Cachot , où on lui donna
tout le tçmps de rÊgrctter les plaintes
qu^tl avoit faites de la mauvaifë nourriti}-
re : & fcs Bourreaux ont abîmé fâ lanté
pendant neuf ou dix Années qu'ils l'ont
outragé daps cet Abyme contre le droit
des Gens.
Tel eft un Charles Frédéric JanJçon de
Montdevis, Fils de l'IntendantdeMr.le
Marêchîd de Schombei^, qu'iJsfontgç-
.--„Googlc
PREFACE. un
mir dans ce Tombein , depuis lêpt on
huit Ans, pour avoir euJatendreuèd'é-
crire à Mr. fon Frere, qui s'eft établi en
Hollande proche de GraTe , & l'avoif
prié de IVâifter de quelque cholë, parce
qu'il étoit chargé d'une nombreufe Fa-
mille. Sa Femme , qu'il aimoit tendre-
ment cil morte , dans un eipèce de de-
refpoir, de voir fcHi' Mari Prilbonicr, &
deux de Tes Enfants , qui font morts
auflî de douIeu^ & de nnfere r ce que ce
pauvre Efclave ignore, & qif il ignorera
apar^mtnent long-temps.
Tels font un Mr.DeodatideGenéve,
& un PierreBont de Manheim , dont on
peut voir PHiftoue dans la Prc&ce de
mes Cantiques de l'Ecriture Ste. Para-
phrafez eu Sonnets, de Plinpreffion de
Mr. Eftienoe Roger à Amsterdam.
Tel eft le Sieur Pierre Guenon jeune
C^rçon de Beurdeaux, Fils de Mr. de
Baubuiflbn Porte -Arquebufe du Roi
Guillaume, accufé parieSr. Menard Tail-
leur d'habite de Paris fon Hôte, de vou-
loir pafler dans lesPaïs-Etrangers, par-
ce qu'il avoitfoubconnéce jeune Homme
de quelque galanterie aveciâ Fille, qu'il
lui vouloit faire époufer malgré lui
Tel étoit le nommé Vincent Béguin
*** 3 un
u,:,-,zf--„GoOglc
tiT P R E F A C E.
un des Bedeaux de Ste. Geneviève de
Paris, accufé de vendre des Livres def-
feodus , par un Saveticj- fon Voifîn , qui
Touloît faire avoir à fon Fils la place de
Bedeau de ce pauvre Homme , qu'il fit
pour cet efîet mettre à la Baftille par le
Voraced'Argenfon 1 & telle eft enfin une
multitude prodigieufe d'autres Victimes
Innocentes , dont on pourroit faire ua
volume plus groa que Calepin j que l'A-
TOrice tient à la chaîne iâns aucunemife-
ricorde,
^uaod à k nourriture i le Pri&tuiiec.
de Goa avoue que leurs Inquifiteurs ont
foin de les bien nourrir , qu'on leur lërt
trois repas par jour. Ils ontlematinàfix-
Heures un petit pain de trois onces-, avec
dupoitTon frit, des fruits ou une faucif^
le : à dix heures du matin , de la viande
oudupoiflbn, unplatderis, &quelque
ragoût 3 & au foupe furies quatre heures
du foir,. on leur apporte encore un pain,
du poiflbn frit, un plat de ri», & un ra-
goût de poiiTôn ou d'œufs.. Etles Inqui-
fiteurs de la Baftille ne donnent à leurs
Pigeonneaux, avec le pain & de très
mauvais vin , qui fouvent n'en a que le
nom , que trois ou quatre onces de mé-
chante vache, que BemaviUe achette ,
rIut
P' R E F A C E. Lv
plutôt de l'Ecorcheur que du Boucher.
Aux jourstnaigres des haricots, des len-
tilles , des fèves y ou des poix cuils à l'eau
& au ïël. Et fî vous êtes aflèz témérai-
re ,- que d'en faire la moindre plainte ,
vous êtes plongé iâns remiflion au Ca-
chot , au pain & à l'eau , fi long-temps ,
que vous avez le loifir de r^retter la
charogne qui vous avoit fait poufler des
foupirs.
A Goa on laiflelaPortedes Chambres
des Frifonniers ouverte depuis fix heures
du matin ju(qu'à onze, afin que le vent ■
y entre & que l'air de la Chambre foit -
purifié: àlaEaftille, fi un Porte-Clefs
avOit la témérité de laiflèr la porte d'un
Prifonnier ouverte pendant un demy-
quart d'heure, quoiqu'il fût impoflîble
à ce pauvre Reclus de fortir , l'efcalier é-
tant fermé de trois ou quatre portes é-
paiflès d'un grand demi-pied chacune, &
couvertes pour laplupartdelamesdefer,'
il feroit chaflé lâns mifericorde. J'ai vu
mourir Mr. Hugues d'Hamilton Gentil-
Homme Ecoflbis d'un mérite diftingué,
& dont les vertus merîtolent un meilleur
fort , faute d'un peu d'air. Le Médecin
difoit hautement, que fi on vouloit ac-
corder deux heures par jourdepromena-
^*» 4 de
iTi PREFACE.
de dans la Copr à ce Moribond il repon-
droit de fa vie i mais Bernaville aînia
mieux le laiflèr crever.que de lui accor-
der cette grâce , quoique de fon avœu,
& celui de Corbé ^ ce pauvre Homme ,
Ïui a langui près de quatre Ans , fût très
nnoceut. Bernaville a fait murer tous
les Créneaux des Cachots , pour les ren-
dre plus affreux & p] us redoutables à ceux
qui oient fc plaindre de la mauvaife nour-
riture. J*ai été pendant trente neuf jours
dans celui de la Tour du Coin , & treize
jours dans celui de la Tour de la Liberté,
fans paille , couché fur le liuion & la ba-
ve des Crapaux , fans voir d'autre lu-
mière que celle d'un flambeau de poix-
i-aifîne,que la France, Porte-Clefs, avoit
ia malice de venir mettre fous mon nez,
parce qu'il voioit que fa fumée m'étoit
infuportable , dans un lieu,, oùjen'avois
aucun air , & où l'on avoit crevé les re-
traits dont l'ordure Si la puanttur m'ont
mis au pitoïable état où je fuis; car ce fut
Uqueje perdis mes dents,quej'avois très
feinesj & d'où je fuis forti, aïant la tê-
te enflée & mole , les yeux prefquehora
de la Tête, le nez gros comme un moien
concombre , & la peau percée en plu-
fieurs eudçoits. l\ fillut m*emporter à
qua,-
u,:,-,z'f.--„GoOglc
PREFACE. tvi'i
quatre de ce lieu- d'horreur, où il y a-
voit cinq jours que je envois pris aucun
nounîture, unegrofie fièvre que j'avois
s'étsat tournée en continue depuis cinq.
oulix jours. Le Médecin dit qu'il falloit
que j'eulîè, comme le Fils de Ferrxwiia.
trois âmes cramponnées dans le corps.
L'Inquifiteur à Goa , accom[ngn£
d'un Secrétaire & d'un Interprettej vi-- .
lltc tous les Pcifoonierstous lesdcux Mois».
pour leur demander fi ils ont befoin de^
quelque choie, fi on leur apoite à man-
ger aux heures prefcrites, & s'ils n'ont
point quelques plaintes à faire contre leS'
Officiers qui les approchent! Et jamais^
on ne voit là.qued'Argenroii,. qui a été-
quelques fisis jufqu'à trois Ansfaos vifi-
tet les Prifonniers. Et fi quelqu'un eft-
aâ'és hardi que de lui faire une plainte^ il-
cft aflbié que le refaltat de cette plùnte
c'eft le Cachot. Pendant les dernières
Années de ma Prifon, d'Argenlbnavoit.
pris'la coutume de monter une foisl'Àa-
née dans les Chambres. des Prifonniers,.
oii il tachoit de ks furprendre , lâns les-
en &ire.avertir: il y entroitbnifouement:
avec Bemaville & toute fa Séquelle. Il ire--
gxrdoit les Prifonniers les uns ^rès IeS'
autres j & fi quelqu'un lui fùfôit unede-
*■*• j; mac—
, ...^Xooglc
ivin F R E F A CE:
taaodé, fam lui fstire de r^nfe, H fé
tQurnoit promptement wrs l'autre , &
après leur avoir à tous recommandé la
patience , ûia leur donner la moindre
conlblatiod , il fortoit au plus vite : û bien:
qu'en moins de deux ou trois heures il a-
voit vifité toute la Baftille. Etcelas'ap-,
pelloit; la Vifîtede Mr. d'Argenfon, dont
•on amufoit les pauvres PrilÔnaiers, com-v
me fi leur Liberté eûfle du être au bout
£n onze Ans deux Moi» que fai été dans.
QE cruel Labyrinte , je n^ ai pas vu une
feule foisMr.leComtedcPontchartrainf
dont l'œil vm]anL& pénétrant, & la prur
dencefî confommée, & fi généralement
connue yferoienttrèsnécefîairespourte-
DÏrles Officiers dansiaci'ainte, le refpcÙy
& le devoir 3 il n'y eft venu qui que ce
foitdefapartj&je n'ai paseucfxmoilTan-
cie qu'aucun de^esCkincaptifs l'ait.vû.
On rend exadïement ce que l'on apris
aux FftfouniersdansriticiuintiondeGoa, ,
I^es Inqmfîteurs de la Baftille font feur
profit de tout ce qu'ils peuvent arracher.
a'IeursmaUieureufesvidimes. Aprèsm'a-
voir fait figncr qu'il» m'avoient toutren-
du , ils me pillèrent jufqu'à la chemilè.
JVvois une chemifttte de flanelle qu'il 7
ayoithuit Ansqjuejepot^oisj Us eurent
i'in-.'
u,:,-,zf--„GQOglc
PR. EF A C ET. iix
l'inhumanité de m*endepouiUêr en for- ;
tant. Ils m'ont retenu l'argent que fa"
vois en entnuit d'une manière odieufe ,
comme on le verra dans le corps de cet-
te Hiftoire ; ce que favois de bijoux ^ ■
comme mon diamant j une tabatière au ^
moins de douze Louis , de très bcaulin-
ge , de fort belles dentelles. J'ai perdu '■
deux Coffres & une valifé pleine de har-
des, de très beaux habits î mes papiers, .
ÔCquatoi-ze ouquinze mille livres cl'obli-
gations & d'effets; mesLivresi mesAr- -
mes très belles & très rares , particuliè-
rement une épée dont j'avoisrefufé vingt -
piftoles de Mr. Mahoni, quatre jours a- -
vant que d'être arrêté & dont je voulois ■
faire un prefentà Mr. ChamillartleFils, .
en lui prefentant Sept Tomesd'unLJvre ;
que i'aVois dédié à Mr. fon Père. Le '
nommé Pierre Pigeon eft afluellèmentà
la Haye. BcrnaviTle à la foitie de cet in-
fortuné, qui étoit Prîfonnier'depuis trei-
ze Ans , pour avoir conduit des Refu- -
giez en Hollande, luiarrachafesculottes
que le Roi lui avoitdonnéesdepiuslîxou '
icpt. Ans, & le laiffa avec celles qu'il a-
Tolt' quand il entra dans la Bastille, dont'
il n'y avoît plus un feul morceau de leur ■'
première inf^itution. Peut-on pouffer :'
.--„Googlc —
IX PREFACE.
plus loin la. rage & Tavarice î
Enân qu'oa compare l'Inquifîtlon de
Goa , i. celle de la Baftille , où la pudï-
cité des Femmes & des Filles eftcruelle-
mcDt expofèeauxdemi£resépreuveâ, Se
l'on verra Qii''on commet- à la Baftille des.
injuftices pfus criantes cent fois qu'à Goa.
Je dis quel'honneurdesFemmes&des-
FUIes ycourtdetrèsgrandsdangers; jjar-
ce qu'elles ne voient que des Hommes j
& des Hommes inhumains & corrompus.
Les deux Exemples que je vais raporter
en feront foi.
J'étois dans la Seconde Chambre delà
Tour du Gôln avec les nommez. Jean
Bonneau Médecin d'^AubulTon , Mathias-
duWal Pilote Irlandois, & Samuel Gcin-
galetduVillagede Verni au PaïsdeGeix;-
lorfque le lo, Aouft lyos- jour au quel
PEglife Romaine célèbre la Fête de St.
Laurent Martyr , B,n" entra dans nôtre
Chambre en ctiemifê & en Caleçons qui
étoient enfatiglantez de tous cotez. Il pa-
roiflbit tout épouvanté i & comme en ce
temps la il nous difoit tout , & que les
Porte-Clefs ne fàifoiènt pas les Myfté-
xieux, comme ils ont fait depuis^ nous
lui demandâmes ce qu'il avoit.^ & voici
oe (gi'il nous dit. Corbé vjentd'exercer,.
dit^
u,:,-,zf--„GoOglc
PREFACE. m
dit-il , une cruelle veDgeaoce fûrane Pri-
îoométe que je lèrs : âe eft {lutant ver-
tueulë qu'elle efl: belle. Il y a plus d'un
An que cefcelerst la pourfiiit, lànsen
pouvoir venir à bout. Il y a plus de fîx
Mois que la rage lui afattreti'aiicherplus
de la moitié de l'ordinaire de cette inno-
cente Damoi(ëUe > ce qu'elle a {buffeit t-
vec une patience angelique , fans en avoir
pouflé un foupir. Centfoisilm'aordon-
t^ de la malti-aitterpouravoirun prétex-
te de la mettre au Cachot : mais j'ai fait
tout le contraire , f^achuit la raifon qui
lui &it haie cette vertueufe Fille. Cema-
lÏD f ai conduit ma Prifonniére à la Mef>
&, : Ccrbé m'a fait lainèr mes clefs à fa
porte , ibus prétexte d'aller vifîter la
Chambre de cette Demo^elle ; où il a
mené la France mon Camarade, autre-
fois * -?qiiai? , & à prefent ame damnée
de Corbé. Ils ont fait eux mêmes un '
trou à fon plancher , fie m'aïantfait al-
lerulleurs) ilsl'ontreconduitedelaMef-
fe à la. Chambre -, où ils ont limulé de
découvrir le trou de communication,
Îju'ils feignoient qu'elle avoit avec les Pri-
onniejs fes Voifin». Ils Pont voulu me-
ner au Cachot. Je fuis arrivé dai&le temps
q}ie la France ,. la trdnant par les pi«^
.-„Goo.jk-
txii PREFACE,
dans l'efcalier, luienfaifoitcomptcrtou-
tes les marches avec le derrière de fa tê-
te, & decouvroit à fon in&me Bouc de
Maître l'objet de fâ fureur , que la pudeur
leur devoit faire du moins recouvrir à mon
abord. Je lui ai moi-même rabattu les
juppes, & j'ai jette le Porte-Clefs la Fran-
ce du bautenbasdesmontées; &ma]gré
Corbé j'ai remporté maPriibnniéreffens
Gl Chambre : elle étoit évanouie & toute
couverte de fon ftng. J'ai appelle l'Ecu-
yer C^itaine des Portes , ,quj a été ou^
tréaum bien que moi decetteaétionnoi-
re & infâme. Nousavons été tous les deux .
en faire nôtre raport à Mr. de St Mars,
qui veut abfolument oue la France ibit
mis au- Cachot & après chaffé ; & il a,
de^ndu à Corbé de retourner dans la
Chambre de cette pauvre Demoifelle , .
du fuig de laquelle vous me volez tout
couvert. Mais bien loin que cela ait é6S .
exécuté voici le refultat de cette aflàire;
La France ne fût pas au Cachot, au con-
traire , il poffeda mieux que jamais les
bonnes grâces^ fon Maître , quifevcn-
gea fur l'Bcuyer Capitaine des Fortes , .
qn*il fitdiafler delaBaftilIc, après tren-
tequatre Ans^JefervicerendusàSt.Mars -
Oacted« Corbé^ ,N*en pouvant faire au-
- tant 1
u,:,-,zf--„GoOglc
PREFACE. Lxm
tint i Ru , H le fit changer de Tour ;* Se
periëcuta. fi craellement la pauvre Dc-
nioiiëlle, que l'aiant enfcnnée dans nô-
tre Tour, dans un Pourpoint de pierre
large de Gx à (ëpt pieds entoi]sl!ëns, qui
étoit à câté de nôtre Chambre , la -pau-
vre malheureufe s'y étrangla , quelques
Années après y de fes propres mains ,
pour & délivrer de celles de lêsBourreaux.
lln'yavoitquedeuxjours, qucBertrand
Clerc de Procureur , lui avoit parlé ,
pbtu- lui ofirir de nôtre part tous lés iè-
cours que nous pouvions lui donner dans
fiHi Cachot.
L.*autre exemple n*eft pa* moins ter-
rible, he nommé Odricot & 6 Femme
Fille de ta Veuve Lailly Irlandois furent
tous trois mis à la Baftille en 1701. pour
des raifens que je déduirai dans la fuite de
^tte Hiftoire. La Femme d'Odricot é-
toit fort jolie i ce qui fît que l'Abbé Gi-
mut & Corbé cmploierent leur fçavoir
fiâre à la corrompre. Il y parut bien tôt:
Bu lui fêrvit de Matrone a Tes premières
couches qui fê firent à la Baftille. Mais
comme elle ne pouvoit décider , encoa-
&îeBce, qui étoit le Père de fôn Enfant,'
ou de l*Abbé, ou de Corbé; celai d
vpulut lui faire tu^autrc Eoiànt, dont H
pût
,.-„.Xooylc
Lxiv PREFACE.
pût être certain d'être Pei-e. Il prit de-
juftes mefures pour s'en aflurer , & em-
pêcher rAumônier de la voir davantage,
qui s'en confola avec d'autres Prifonnié-
res, Si des Religieufes dont il étoit l'A-
donis d'Egypte. La Femme d'Odricot
4evint encore grofle. Corbé la fit fortir
delaBaftille, & fut le Perc & le Parain.
de l'Enfant, qu'il nomma avec une Fil-
le de Mr. de St. Mars , que fon Pcre a-
voît deshcritée, & qu'ii ne vouloit pas
voir," à caufê qu'elle avoit eu elle même
un Enfant de Mr. Mole CapilaiDC aux
Gardes; aînfi que nousl'affir ma Bertrand..
Odricot Mari , de cette malheureule
Corrompue, qu'il n' avoit jamais pu o]>
tenir la liberté de voir depuis fonemprî-
fonnemcnt , le fcut , entra dans des fu^
reurs terribles , & jura de s'en vengerfur.
Giraut & Corbé. Pour l'empêcher d'en,
ajler porter là plainte à la Cour , & de.
joiiir du Bénéfice de la Paix que la Fran-
ce a faite avec l'Angleterre j. fes Bour;-
rcaux pour mettre le comble à leurs cri-
mes, l'oHt fait transférer à Bicêftre, où,
fans un miracle du Ciel, ou de quelque,
bon Prince en fa faveur il eftpourkref-
te de fes jom"s. II eftCocu, Battu, car
ils l'ont roué de coups, mais je fuis très,
perr-
PREFACE. riv
peribadé. qu'il n*eft pas Content.
C'eftcependant ce mêmcCorbé, qaî
bien loin d'étrecoucbé furuneroiiepour
punition de fes crimes , a été couché fur
.^tat pour recompenië de fes fcrvites
importants : on lui donne une Penfîon
confîderable , & on lui avoit promis de
le fiiire Chevalier de St. Louis ; mais je
doute fort que S. M. lui aaairde cette
grâce , fi jamais ellejcttc les yeux for cet-
te Hiftoire.
Les fins qui me l'ont fait compolér ,
font pour informer le Roi & Tes Miniftres
des crimes qui fe commettent dans cette
CaTeme de Voleurs , à i'inlçu, & ce-
pendant fous l'autorité de S. M. pref^ue
ibusiêsyeux; puiÂ]uec'eft dans fa Ville
Capitale } dans un Château Ro'isl , la
Priibn des Princes & de la NoWefle de
France, aujourd'hui une Caverne à Vfr;
leurs, oùd'Argenfon&Bemavilleexer-
cent le métier de Polyphême. Je fuis très
perTuadé que l'on prendra toutes les pré-
cautions néceflaires pour empêcher que
cette Hiftoir'e ne vienne à la connoiûan-
ceduRot. Mais peut-être que ce Grand
Prince fur qvi toute TEùropc a les ycnx
ouverts, & qui fait l'admiration de fcs
Amis & de £(» Ennemis j de qui tout le
Mon-
u,:,-,zf--„GoOglc
ixvi PREFACE.
Monde aïtend de fî grandes choies : ce
Sçfivant, ce Curieux qui lit tout jusqu'à
Fmchefae; ceCatonàquinean'échape,'
poum lire ces véritez que f écris. JLe
co£ur juile & droit de ce Héros eft hia^
cellible aux Cabales de ces Sangfues du
Peuple, qui lëmblent n'être admis dans
les grandes Charges que pour le renvei'-
ftraent des Lois , & la deftruftioa des
Roîuimes; fie je croi leur châtiment io'
dabitablc s*il vérifie les faits conltaotsde
cette Hiftoire. Comme il a hérité du
Frince fon Père de Tamour des Péaplesy
tuant que de Ca. valeur; fefpere qu^l Ce
déclarera hautement le Proteââur & le
Vengeur des innocents ; fur tout de ceux
qui gemilTent depuis fi long- temps dans
ce lieu de defefpoir & d'horreur. Peut-
être que Madame Belle Soeur du H-oi, u-
nc des plus vertueufës Pr!nceflcsdel*Eu-
rope j & la Charité même dans tout fon
liiftre, abai0era les yeux fur cette Hif-
toirej qui Pattendrira ad'és pouren faire
fon rapqrtau Roi. Peut-être que Mr.
Voilîn, en qui le Roi a trouvé un méri-
te fi diftingué, qu'il l'a honoré desdeux
phis éminentes,& importantes chargesde
fon Royaume, de Chef de fajuftice &
de' fes Armées , & qui fait honneur à tou*
■oylc
PREFACE. ixvn
tes les deux , ce Chancelier équitable ,
ce Mimftre vigilant, voudra bien iê don-
ner la peine d'approfondir les tcniblcsvé-
nte£ que je raporte ici , non pas pour
me venger de mes Ennemis, à Dieu ne
plaHê , je le prie très ardemment pour
leur coQverHon, mais pour exciter les
Proteâeurs de la France à fouiner de
nuUieurei^ës viâimea, ^ gemiffent dans
les ièrs , où f ai ftmptré poidant plos
d'onze Ans uns enrçavotriacaufe. Sans
. doute que Mr. de' Toicy dont jejnùs Ai-
re PËloge y fans crainte de [nficr powt
fiàteor, piufqne m'aiaot détenu £ loo^
temps Pnfbnnier, j'ofe matera Faccabio*
ment où j^ été roluit , soutenir qu'il
iîit l^tcfaiiration , non feulement des
François , mais univerfellemcnt de tous
les Etrangers , & des Nationsles plus é-
lo^ées qui ont le bonheur de traitter»-
veclui, 8î qui viennent desconfinsdela
Terre à Verfailles pour rendre Homma-
ge à fon Maître & à lui j fans doute dis-
je qu*il voudra bien prendre la defiénfe
de pauvres affligez qui font H prèsdelui,
lui qui protège avec tant d'éclat les Peu-
ples les plus éloignez. J'écris dans un
Païs libre ou l'intérêt ni lacnùnte nepeu-
vent plusrienfui'moncœur, oû[:riut-à-
Dieu
u,:,-,zf--„GoOglc
il^iii PREFACE.
Dieu qu'il eût été mieus écouté , quanil |
il y eft venu pour réconcilier (on MaStre
avec les Anciens & fidelles Amis ! Ce
Sage & Habile Miniftre & les autres que
k Roi admet dans fon Conreil peuvent
examiner les faits que je raporte , & s'il
s'en trouve un. feul faux , je ctmfcns de
paflèr pourCalomniateurt ficcommet^l .
d'être banni, non feulement des Cours
de tous les Souverrains, qui me doivent
partantd'endroitsleurProtcâicHii mais
même de la Société de tout le Genre
Humain. Je fuis d'une Famille très An-
cienne de l'Anjou» &quis'eft étendit
dans la Bretagne , & la Gtiienne , oâ
mes Parents poffédent aituellement les
Premières Charges deces Provinces. J*ai
été élevé à Caën , où la mémoire de
mon Père eft encore très precieufe , &
où i] s'eft actjuitté de les chai-ges avec
honneur & diftinftion. Je (îi-s le Cadet
& le feul qui refte de douze Frères qui
tous avons répandu nôtre faug pour le
Roi i fept deiquels ont été tuez à fbn
fervice. Voudroïs-je raporter des faufle-
tez, quand j'ai tant de véritez à dire,
que je n'en pouraï jamais écrire le quart,
ijuelquc précaution que je prenne à faire ,
une relation fidelle ? Q,u'on interroge
tous
u,:,-,zf--„GoOglc
PREFACE. ««
-tous les PnfbDoiers qui ibot ibrtJs de
k' BafliUe & reftez ea France i qu'on
s'iofonne de tous les Etrangers qm ont
été de mon temps dans cet Enfer, & â
tous ne tombent pas d'ftccoi:d des ùits
que je raporte , je veux bien pafTerpour
«nimpofteur, querondoitchaflercom-
me un Perturbateur du repos public. Je
ne raporte que des faks qui me font ar-
rivez j que j'ai vu , ou qui m'ont été ra-
portez par des Témoins oculaires Se fi-
delles } ou la plupart desquels j'ai par é-
crit de la main de Gens d'une probité
dont je prairrois répondre , comme de la
mienncï.
l\ n'y 4 que la manière d'écrire & de
raconter ces faits, que l'on peirtrepren-
dre , & qui certainement eft dans laTt-
gueur digne de cenfure. Elle eft fi négli-
gée à la vérité , que je n'ai pas eu le
temps même de relire mes eflàis , la fci-
tuatiiMi où je fuis ne me le permettant
pas. Lorique je ferai plus tranquille , je
puis alfurer le Public , que je lui donoe-
lai quelque chofê d« plus digéré , & une
narration plus Uniée j mais l'ardeur que
j'ai de foulager , s'il eft poffible mes in-
^Mtunez Concaptifs, m'a fait hazarder
ce Premier Tome , qui fera immédiate-
ment
LXi PREFACE.
ment Tuivi de ptufieurs autres. En drai-
nant le Titre d'Inquiâtioa Françoîfe à
mon Hiftoire , je ne pretens pas met-
tre une tache liir le front de ma Nation ,
une des mieux policée , & une des plus
civile de rEurope^encore moins quePé-
ckt en rejaliûe fur S. M. un des plus
Grands,& des plus auguftes Rois de laTer-
re , pour lequel je conferveraî de la vé-
nération Se du relpedl jufqu^au dernier
fbupir de nu vie. Je n'en veux- qu'à Pa.-
varice, & à lacniautédesTyrans&des
Loups , que ce Monarque a Commis (ut
la Eailille , comme les Juges & Jes Pal^
teurs de fes Brebis égarées j poui' les ra-
mener au devoir , 8c qui les tourmentent
comme des Furies , Sclesdechirentcom-
me des Tigres altérez de faug. II m'eft
bienamer, aprèsavoirrepandumonlàng
pour ma Patrie de me voir forcé d'em-
plpier ma plume pour tâcher d'en ùire
corriger les abus , par ceux qui ont in-
ipediionfiiries Prévaricateurs. Jeuedou-
te point que Mr. le Comte de Pontchar-
train, aux lumières adïives & juftes du-
qud rien ne peut échaper , qui voit tout
par lui même , & dont la balance pefe
tout à un poids exatS & r^oureux , qui
tient toute la France dans Pétonnement
u,:,-,zf--„GoOglc
PREFACE. Lin.
Ce la cramte , & qui a la Dîreéïion de la
BaffiUe, n^ezamine les grandes véritez
que j'expofe à iês yeux , la terreur des
égarez , pour reprimer des abus, dont
il feroit lerpoarable devant Dieu, s'il les
foufiroit, après qu*il n'en doutera plus.
Je me âate aulfi que tous {es Princes delà
Terre, Se principaJetneot ceux pourqoi
f ai ibufiert une Pnfba plus cruelle que
h. mort ■} & que tous les Hommes eiûSn
qui auront de la Piété , & feront iiifcep-
tiblesdecommilëration, me plaindront
du moins en voïant ce que j'ai fouffert fi
indignement, &fi injuftementavecune
patience,- qui m'avoit fait donner lenom
de Job par mes Concaptifs.
La Priibn eft un fupplice plus rigou-
reux qu'on ne s'imagine : L'Homme na-
turellement libre, ne .le fouffre privé
qu'avec peine d'un avantage qui femble
l'égaler à Dieu. JolêjA s'eft rendu fi-
meux par l'afcendant de Ibn mérite, -fic
par la vertu de les predi»3ions. Cepen-
dant après deux Ans de Prifon, il n'y
eft pas encore acoutumé ; il prie l'Offi-
cier dont il avoit prédit k délivrance de
fc Ibuvenir de lui , lorlqu'îl fera rentré
en grâce , & de faire par Tes bons ofEces
,ai5)rès du Roi , .qu'on le mette en liber-
té.
u,:,-,zf--„GoOglc
*xïH PREFACE.
té. Il a fçu foufirir avec patience U diA
gi'ace de ton exil , rejetter avec coura^
^ foUicitations de /à MaitreHe ; mais il
voit que (on cœur n'étoit pas à l'épreuve
de fa captivité.
Les Soldats eutrent dans le Jardin pour
prendre le Fils de Dieu ; un jeune Hom-
me s'y rencontre au même inftant. Se il
aime mieux abandonner le {êiil vêtement
qui le couvre , que de tomber entre ies
mains qui pouvoient Tarrêtèr.
Il n'eft pas dit que St. PieiTe ait dor-
mi dans la Pri(bn ou il étoit r^enu , que
cette nuit U même où il devoit être dé-
livré.
St. Paul obligé d'inllruire de fes fouf-
frances les Fïdelles , ne parle que de fes
chaînes : mais comme s*il étoit accablé
par leur pefantcur , il cherche à ladimi-
iiuer, appellant de fa caufè à Cefar j U
quaUfi^ d£ mort lui fembknt préférable
il celle de Prifonnier. * AdCttJaremap-
ftUo.
t II n'y a rien de fi cruel que de vivre
d'une vie plus cruelle que la raorti &je
ne vois pas qu'aucun Homme d'eipritait
cm que la mort fût un mal pourquique^
♦ Au. Apoft.Cap. »î. T. II.
t Cicer. }■ Ëp.ad Toiqiut. L. 5>
.--„Googlc
P R E F A C Ç. ixxut
ce foit i . non pas m&ne pour celui qui
TÎrroiC dans une profonde féjicité.
* £Â,bonneconicieiij::ee{tiapItj8gnut~
■àc çonfolaticMapourlesdil^rices , .& tout
le inal quleik daus leMoade eft peu de
chofe fî-i'ôn en excepte le pÉche.
La Priibn de la BaftUle eft une mort
^mle, quifaitdeûcerlaraortnfllurcHâ'à
cbaqueioftailtpeodxiit'des vingts & tiien-
teAnoées. iLfaut:être:biea:affifté de
la grâce pour re£âer à une épreuve plus-
crueilequekaïQn laplusten-ible, Auâî
dé dix Priiqnniers quel'oneriftvelrt dans.
cxTocubeau, &.quePon;7affligedes pei-
nes dont j'ai étéaccablé., trcûs iueiùent
oppr^nez fous le poids de ]a B^ftille ,
Trois s!y itranglent , s'y caflênt lâ^êto
contre les murs, ou s'y coupent la gor-
gev trois y perdent leur efprit, *&c'eft
grand hazard quand un en fort avec foa
pgement libre , & il en doit bénir Dieu.
C'eft ce que je fais de tout mon cœurj
ïe priant de confoler les affligez, decon-
Tcrtir les Oppre0eurs , de délivrer les.
Oppreflèz, & de fortifier fes Amis dans:
â grâce. Le fruit du repos que Ton trou-
ve en Keu , eft "de ne point craindre tous,
ks efibr lis des Hommes , lors même qu'ils. ■
• ««* onit
• -Gcw. 4. Ep. à Torquat. V s-
,.-„..C.ooylc
Exxrv PREFACE.
vnt refolu de nous perdre. Car k véri-
table Foi n^eft point timide. £t celai
qui craint Dieu , comme l*Ecnt«re dit
w craint que lui feu! : parce que la puîA
âtice des HonuiKs , quelque gnuode
qu'elle paroilTc , ett afltijettie a la neotie.
Apres ce que m'ont fait {ouSick mes
Tyrans j il ne leur vefte phi5qu''à m'ai«-
DBcherliTie , que ja leur i^ndonnc vo-
Jontîecs: }e prie Diâu Seulement que m(Mi
ûiçneleuEtoitpasimputéàjuftice^ mais
plutôt qu*il ferve à leur deffiUer les yeux
ûft le wrd de TAMnie , pour l'éviter
en deteftant Içurs crimes & rendant glot*
ne à Dieu.
Qii^uiffiu ift major , ' m^is tfi piateMù-
mm
w ..Google
A^y.\
.--„Googlc
Pag.J.-
L'INQUISITION
FRANÇOISE
ou
L' HISTOIRE
DE LA BASTILLE.'
'Eft avec une jufte raifonque
je puis dite avec Salomon : *
J'ai veu les opprcffions quilè
font fous le Soîeïl , les lar-
mes des Innocents , fans ,
qu'ils aient pcrforine oour les '
conlbler ; & l'impuil&nce où "
ils font de refiftcc à la violence, écantabaa-
dotinez du fccours ie tout le monde.
Et j'ai préféré l'état des morts â celui des '
vivants.
Et j'ai eflimé celui qui n'eft pas encore né
plus heureux que les uns &. les autres, & qui
n'a point veu les crimes qui fe commettent
ï«is le Soldl. A Ce
■ Vidi catumnjasqax Tub rele^nintuijtc^mas inno-
AHiom, & DcminïDi confoliioicm , ntc poflê icCftcie
Mnin nolfDiîs < cunâoiuai amilio deflitotoi.
. £t landa (i migti moiiaoi quim vivcnlcf.
Si fclkionm utioijuc judlcari, qui necdam iianucft,niec .
«UtI mtU qux &b iole lut. £ttl'ftfj:iif. ^.V.i,xi* %.
.--„Googlc
Ce lige Prince, lorfqu'il écrivoit ces Pai^
ivgcs ne fcmbloic-il pas lire datis l'avenir, &
nous dévoiler les ioliuautiitez des iKu-hares
OSciers de la Baftille opprimons les Inno^
cents également arec les Cfiininels f
En eâct que n'ai-jc pas veu dans ce lieu
d%orreur pendant pins d'onze Années qu'on
ra'f a fait fooârir des qisar qnî font an delà
de toîite exprcffioa? fans avoir jannùsfubi aiji
Icul interrogatoire ; faas avoir peu obtenir
ni Juges, nfCommiUàires poureiamiflerma
caufe ; lans que les MiniÀres da Roi aïent
voulu me déclarer le fujet de ma détention.
On m'a fait foudrir un'fapplicede plus dp
deux- Lultrcs , plHS inlùportable que -la tnoi^
la plus ctuellé, lâns m'en dire lacaufe; lans
vouloir pendant un fi long efpace de temps
m'accorder ïz grâce d'écrire i mon Epouze,
à mes Parents, à mes Amis, pas mcme au
Miniflre qui m'avoit &it arrêter. Jemcvoiois
enlèveli tout vif, iàns pouvoir aprendre, iî
j'avois encore une Femme & des Enfants an.
Monde , quelques prières & quelques fou-
miflîons que j'en fiOê à mes inexorables Per-
fecuteurs.
J*aî veu l'A^'arice animée faire mourir
prefque de faim des Prifonniers auxquels le
Roi croit qu'il ne manque rien que la liber-
té; car outre une Penfion vii^èrc qu'il don-
ne très confiderable , fuivant le rang & la
qualité des Perfonncs, & qui s'étend depuis
cinquante Ibis qu'il donne par jour pour la
nourriture des Laqûus, & des plus inTlèra-
blès, jufqa'à cinquante livres pour les Pria-
ces; il païc encotç largement les Médecins,
Chi-
•« riSflaire de U BaJJHle. *|
<>}rrirgîens , Aporfiicaires , &c , fournît !«;
lîts, I« ïutfes meubles, & tout le lingedes
Prifooniers ; il donne une fomme conuden-
blc, pour les entretenir, les blanchir, Ccles
habiller honnêtement, que les Officiers em-
ploient à fc parer , Comme de grands Set"
gneats , pour rdever lear baflelTe, fit fc do^
rra comme des Calices , pendant qu'ils laîf-
teas aller leurs viâimes toutes niies.
En plus d'onie Ans, je n*ai eu qu'unfcnl
jaQaucorps de revefche; j'ai été plus dccînq
Ans fans culotes ; j'ai porté pendant près
d'onze Ans les mêmes bas ; j'avois encore ï
mes pieds les mêmes foulicrs que j'aportaï
â la Baftille, ped avant que d'en fortir. Le
nommé Pigeon eft îcîàla Haïe, qulelirot-
li de la Baintle, avec lamêmeculotedeplu-
che qu'il avoit, quand il y entm, après l'a-
-Voir portée plus de treize Ans, & y avoir
mis pins de cent pièces.
■ J'sû veu le crime triompher delà vertu;
fouler fous fes pieds l'Innocence; l'Avarice
Te regorger du fang des mîferables ; Le Four-
be cruel & vindicatif caché fous le manteau
de l'hypocrifie , écbufer tous les fenriments
de Pieté & de Rçligîon pour opprimer impu-
■pement de malheureulès viâîmes.
j'ai veu l'Impudicité fe prévaloir d'une
iàtorité fans bornes , pour fednire & forcer
la' vcrtù& la pudiclté d'ilUiflres Dames, &
jèones lïamoifelles , & d'inoocemes Brebis
qui éroient facriâées à ces Iloâcs puante &
Infsnnes.
J'ai tA de gcnertus & nobles Officiers ,
«oaveiitii d'honorables plaïes qu'ils «voient
.--„Goôglc.
4 VI»^*ifitk» froMfoifi
reçues aoferviccduRoi, ou des autres Prin-
ces, courber leurs têtes & leurs dos fous Jes
courgées de tniferables Canailles, qui n'aa*
Toient pas ol^ dans le Monde^gûtder ces
Braves outragez au Tront.
J'ai vu traîner dans d'affreui & de puants
cachots des PerfooDes de qualité, des Mî-
niftrcs de Dieu, Abbei, Prêtres, Religieux,
de vénérables Vieillards , des Daines ver-
lueufes , de jeunes Filles , & de tendres En-
lùnts, fans d'autres fujets que celui d'aflba-
vir l'inlàtiable avarice d'un barbare Gouyer-
neur, qui pour s'aproprier tout l'argent que
le Roi donne aux Prilonniers , fur la moin-
dre vétille les plonge dans ces lieux de ténè-
bres, d'horreur, & de defcfpoir, où àpeiue
il leur donne un peu de p^n& d'eau, & fou-
vent point de paille; ce qui' lui fait appcller
CCS Antres de miféres, qui font affés nom-
breux à la Baflille, fes denicis clairs, qu*il
tient garnis, tout de fon mieux , & aux dé-
pens de qui que ce puifle être : car pour ua
ïbl de pain il y nourrît une malheureufe vic-
time', a qui le Roi donne une piltolepoprû
nourriture par jour, aux uns plus, aux au-
tres moins. Un fol pour le Prifontiier , le
refte pour le pauvre Gouverneur, cela eu
clair } le compte efl bien tôt &it ; il ne faut
point de iettons pour calculer; & H fes in-
fortunez Efclaves en murmurçnt, ce Tyrjia
inhumain , les charge de chaînes , & les fait
accabler de coups de nerfs de bœuf, fans
diflinftidn de caraâérc , d'âge, de fcxe , oi.dc
qualité. En forte que les Prifonniers peu-
vent s'écikilFaâifitmiiJ tmnitim ferilfi»na.
.,'•■.. . Ou .
.--„Googlc
M riSftmre de la BaJlWt. ^
Oà «la fe fàit-il ? par qui fe foit-îl ? prefqu©
Ibas les yeux du pltis ^atid, & du plus au-
gufte Roi de la Terre , au milieu de fa Vilr
le Capitale, dans un Château Roïal, la Pri-
foo des Princes du fang, & de la NoblelTc
du Roïaumc, devenue aujourd'hui la Car
veine de Polyph^mc, le Repaire de toutes
les immondices du Monde : car J'y ai veudes
Decrotears de fouliers , des Croctielears ^
des Porteurs d'eau, desHermites, desQua^
tre MuidianE, des Bergers, des Soldats aux
Gardes, des Bedeaux, des Clercs de Pfocu->
rettr, des Filles de joye&c, car tout ell bon,
ponrveu qu'on puiilc l'écorcher; en fortcy
?ae fi Monfeignear le Dauphin^, un desbons
rinces qui fut jamais, eût bien voulu fuie
taviâte de ce Ciiîteau,. il auroit peu dire a-
vec jnllice , ce que Jefu^-Chrilt difat aux
Marchands, & ans Changeurs qui trafiquoient
, dans le Temple. * Otet cela d'ici , & ne fai-
tes pas de laMaifon de mon Pcrc, une Ca-
rême de Voleurs ; & îsàùnt autant de laqs
de cordes, qu'il y a de Minières d'iniquité
dans cette noire fpelonque , attachez tes y
to«s au bout , & envoyez les à la Grève , j
pa'i'cr une partie de ce qu'ils doivent à Dieu
6: au Moiidc. Quels ibnt ces Officiers ? au-
trefois on a veu pour Gouverneurs de laBaP-
tille, des Perfonnes de la premiéreQualîté ,
mime des Princes ; aujourd'hui ce font des
gens de la dernière baiieàe: un Bernaville,
-qui a porté la Mandîlle chez feu M. le Ma-
réchal de Bellefond. t S'rvi dtmtnati futtt
A % noj-
» St. liàM Ib. t.Virl. It,
f Orti, Imia. itf. ji
.--„Googlc
4 L^ImjM^tw» Framfùtpt
9»/iri: mtmfmit qui rejimertt de mtmm ^crtim t
suTerable qoi a*a jamais rendu d'autres ïêr-
Tîces au Roi , que de decrotcr {es bottes de
Ion Maître, oa de Ini fellec Ton Cheval ; &
qui n'a jamais été i l'Année que Hu des ptt-
sieis de bagages, ou dans des furgoos. Ce
Singe de foo Maître, qui en imitât Tes gel^
les, & non pas les veitos, avec des yeux
buflez, un filence hypocrite , uneminemor-
nc & leveie, eft parvenu, premièrement à Ê-
Ve Garde des Chaûcs du &iis de Vinceanes
eut enfuite le foin d'apiéter i mang^ aux
Prilbnniers du Château de Vincennes, doot
Mr. le Maréchal de Bellefbnd avoit tcGon-
Temcmem, trop gencrcox pour vouloir e'é-
tigu en Gargpttier^ emploi qui honoraBer-
oaville, qui fut la bsze, le pivot ,~ le pre-
mier moÛIc de fa fortune. Enfin ion M^
tre le créa de foo chef Lieutenant du Châ-
teau & des Bois de Vincennes, ccquidq>en- ,
doit de lui en ce temps là , Mr. le Maidchal
dcBellefoudétaotinort, &BernaviUen'dant
^lus pafonne qui coatrdlàt fes aâions , puis-
que Madame la Maréchale ft donuseutiérer
■ement à la dévotion , & fon Petit-Fils I«
Marquis de Bellefond qui avoit eu la forvir
vance du Gouveruemeut n'étant qu'un Eqt
&nt, BernaviUe dis-je, fit profiter les Ulcnt$-
de la Gargotte , & de la Challè de Vincent
ues , fans obÛ^les & haut à la main. II ror
gna la portion de fes Pcifonnicrs de tous fes
oogles afilez comme des rafoirs ; il les plo-
ma fans crier; & fc fcrvit du Gibier & dcf
lopins de Vincenqes pour fe faire des Amis.
Il envoigit ttis regulicEcmot ieax&às cha-
lue
u,:,-,zf--„GoOglc
M PISfinf» it î» "BttfiUt. i
que ttmaiae des Lapins , ies Perdrix i St
^aotre Gibier au Roi , i Monfdgnear le
Dao^in, à Mr. de Pontchaittiiiii, aux en-
trés Miniftrcs, fur tout au P. de la Chftiïe
Confellèar du Rot , auprès duquel ce bon
Tflitafie l'efforçoit de palTer pour un Saiot
àa premier ordre. Cela lui reuffit admirable-
ment bieu; car Mr. da Joncas Lieutenant
du Roi à la Bafttlle étant morr,rodcar de ce
Gibier, plus forte qne celle du mérite de
Bernaville, & quelqn'argent femé à propos,
^éveilla \es Efprits de ceux qu'il avoir ména-
gez depnis It long temps, pour loi faire ob-
teuir cet emploi , an préjudice de mille &
mille Braves , qui l'avoient mérité au prix
de leur fang , de leurs bras , de leurs jambes
It de tout ce qu'il vous plaira.
Qm* mem mtrtali» feutra régis
AMrifiursfëmti f
Ce métal éblouilTant, l'apui du P. de J»
■Cl»ire, la foUîcitaiion de Mad. la Marécha-
le de Bellefond, & laproteaion.de M. de
Pontchartrain firent entendre au Roi , que le
cagotiTme dcBernavilIefctil, l'emportoit fur
le incrite de tous les Officiers de lès Troo-
pes ; qu'on avoit befoin d'un homme dur &
fevne i la Baftillc, & qu^on n'en trouveroit
pas an dans tout le Roïaume, qui eût ces
necelfaires vertus dans un plus haut degré de
pcrfcâion que lui; vcu principalement que le
vieui St. Mors Gouverneur de la Baltîlle ,
ne faifoit plus que radoter, jurer; &qu'à
peine luireÛoit-il aSéa debonfens, pour
compter ta Quantité prodigîeafê de lacs d'or
& d'argent,, qu'il avoitamallèz avec toute ta
A 4, bar-
• VJn^M^itian Fraufoifi
-barbarie tmagiaable, anx dépens des pleurs^,
des cris, do fang, & de la vie mJinc de tes
déplorables viâimes.
Ce bon & vieux Serviteur mourut comblé
,d*or, d'Années, & lur tout demilediâîons.
Bernaville avoil trop d'argent, de crédit, &
de tares talents, pour qucceGouvcrnetnent
fût donné si un autre, & quarante mille lî-
vtes qu'il fceut placer en ttèc bon lieu j car
.ce n'ed pa« un homme à tirer ià poudre aux
iMoincaux, l'eaiForterent fnr tomes les bri-
çaes de la Cour j m£me fur la bonne inten-
tion, qn'avoit S. M. d'en gratifiez un de les
bons & fidèles Sujets. VoilaThomme dont
je me telêrve de faire le Pontait en temps &
lieu , auquel îl faut que tous les Frifonniers
d'Etat foieot Ibumis, foilènt ils lesPremieu
Princes du Sang, U ils oublioient allez leur
devoir, pour fe rendre Criminels de Leze-
Majefté, Homme qui jour & nuit ne fônge
qu'a inventer de nouveaux moiens', de nou-
velles machines pour prefurer, alâmUqucr»
& tirer la QuinteÛcnce de fes ftuâueufes
>i£times. Encore  îl les âatoit en tirani le
làng de leurs veines, patience; mais non,
il n y a point de fupplice qu'il n'invente pour
les poullcr à bout. Comment pouvcMr espri-
mcr Ta rage, fa furent, ià barbarii:, & tout
ce qu'il a innové, inventé pour plumer fes
malheureux Pigeonneaux-,, comme il les ap-
pelle, les tourmens dont il les accable, in-
connus aux Nerons & aux Dioclctiens ; fa
malice, fes mfes, fa fevcrité, fou inhuma-
nité:, les tortures; la férocité qu'il inlpire
aux auis Exécuteurs de fes ordres tyranni-
ques,
éM rj£fto:rt Je lé BafiilU. - 9
9ie«, enfin le monftnienzaflèmblagedètoa-
icsfes p^Bonsiaftinales?
* Et ftMTMTn psrs magHt f*i. QmitaliafaMdo
■ Vu/ci '
Temferet à laerymisl
C'eQici qu*on ponrroît dire t avec Tertnllieri.
n '*,Oa ■ vcot perdre des perfonnes înnocen-
»tei. Et dans ceddTeinondffinmiileleiirvc^-'
^ta, qui eft très conniie, &. on tâche deles '
„ noircir par des crimes cachez, que jamais '
„perfonne n'a pu prouver. Ceux' qui fontir-
„ reprochablcs dans leur conduite font trai-
yttei comme des criminels. On ne leur op-
„pofe que des violences &des calomnies, &
„OQ leur Are tous les moiens de les repouf- -
„fèr. La terreur de ceux qui leur, font coiï-
,,ttaires rend toutes les boudies muettes pour '
nies deffendre. Quelques uns les plaignent,
„niais tons' les abandonnent. Ils font iànt
^i^perance & faDsfecoursdelapartdeshorrf-
^fnies. Il ne leur rcfte que les larmesj que
,,1'on voudfoit accufer d'oreueïl, oud'în-
„jallice, .&quî'ne fervent ^iràirriterdavan--
„tagc-ceu}[ qui les oppriment.
C'eft le feu! fujet de haine que j'ai donnf
i mes redoutables Oppreflëurs:j'ai gémi de-
vant'Dien; J'ai fonpiré devant euxj je me.
fois plaint aux hommes ,-. & j'ai-épreUvéque
le ecxnble des malheurs extrêmes, c*eft d'être
forcé de renfermer fa douleur, & de a'ofcr
répandre des larmes en lîbené. -
•tOtmii.Uà.II.
■ • Imtm. IB >H/Miu.-ril. -'
j|3 Vlii^mtfitio»Iratpifr
Ovouï, mon Dieu ! qui m'avei feu! Gan-
tïuu dans un li ]ong & fi CTuelMartyre, aî-
dËz moi à en faire la peinture nai've & îîn-
cerc, & ncpermettei pas quÇ't*ainour prb-
prei la haine, la vengeance., oa quetqu'aa-
tre pallion me faSis déguifcr la vérité en la.
moindre circonftance. Vous fçavet qae le
principal but que je me propoie , en e2po>
faut cette hiHoirc aux yeux de toute laTetre,
cH de vous glorifier, de faite connottrc à un
grand Roi, & à fes Minières, les crimes qui
le commettent contre Vôtre Divine Msjef-
té, fous leur ^tptité, pour qu'ils y aportent
le remède fi neceûâire à foulager les infortu-
nez C^fs,. que j'ai laiffé dans cet abîme,
& ceux qui y entrent tous les joius ; & de
faîte coanoître au Roi de la Grande Breta-
gne & à T. H. & T. P. S. M- L. E.G. ce
que j'ai fôufTert poiu: leurs intérêts , & pour
in'étre fournis à leur DoiniQation4 aâu de
les animer à me ftoKgsi contre laTyranoie
de mes Enoemjs , & loul^er mesmalheurs.
Pour eatrer en matière ;. je dirai qu^étant
venu m'établir en Hpilande avec coi^ Faoïillc.
en l'Année ifiyji.pour y vivre danslactaîn'
le de Dieu & la Liberté de fon Saint Svan-^
(ile, chofe quej'avois déjà tentée dn l'An-t
née 1^88: i la fqllicintion de igon Zpoatfi
qui deficoit ardemment de fe retirer en As-.
^eterre^ ou en HoUaD4e, & n'y ftjant pu.
trouvé tous le& avantages que je m'y étotjt.
I^rqpofé, & pour d'atttret,piiilIuiçesraifo&*.,
je prÀai Toreille aux foUîcîtatiQns {ireiGuitat
Ïie meiîûfoit M. Cbamillart de retourner en
tancf |»w des litres très engagcantft, que
l«
u,:,-,zf--„GoOglc
d* rHifiÙTt a là SaftiUe. tv
je communiquai à mes plus intimes Amis,.
& k des Perfoones de la ptemî^ediltlnâtoD,
qui me coofeîllcrent & foUiciterent mémede
ne pas balancer mon retour. L'envie de pto ■
carer quelque choie d'avantageux à ma Fa-
mille; le projet dSin établillèmeot confide--
rabie ; l'Amour de la PaOie ; peut-être l'am-
bition , . &- làns dqme l'aveuglement d'une
Fortune trompeofe , me firent refondre à
Isiflcr ma FanuUe en Hollande, fouslapro-
tcâioQ de quelques Puîïlânts Aints , &dere-^
toui-ner à. la Cour de France; où j'étois ra-
peHé par M. ChamiUart, qui depuis monde-
part avoït' joint au Contrôle General des Fi-
nances le Mioiilifre dË la Guerre , dont le
Roi l'avoit honoré après la mort de M. de
Barbezieuz.
Après avoir ;louÉ une Maifon i la Haye
pour mon £pouzef que je quittai avec une'
douleur qucj[p ne fcautois ailes vivement ex-
primer, je partis d'Amfterdam le Tcndredi
11: Janvier 1,70a.: je fortis deRoterdam le
lundi itf. pour prendre la barque d'Anvers ,.
d'oà je nie rendis à Bruxelles, &detftàPa-
ris par la route (»diiiaire ; & enfin j'arrivai à
Vemillcs le aj». du même Mois. Je fus re-
een de M. ChamiUart avec des dcmonflra-
tions d'amitié au delà de tout ce que j'en -
ponvois attoidre. Je ^nai les antres Minif-
ncs,. & aiant éx£ prefènté à M. le Marquis.
^Torcypar^M. te Comte Davaux, j'en fus
nçA très ÂtvoiablejneEit. M. ChamiUart me
vovlnt donner de l'emploi dans la Guerre,
m dans les Finances ; mais lui ai'ant temoi~
pé hk paffion. qoe' j'avois de m-MUcher K ■
A. fi Itti^.
S« Vlnjuii/itian-Pratifaife
luî,^l joignit i une Penfîon de mille Livres
dont il me fit gratifier par IcRoi, l'clîx>irdu
premier Emploi vacant , avec mille écus
d'afçointemens. Il ne me refiifoit aucune
des grâces que je lui demandois. J'obtins une
Compagnie vaccaiite dans le Regim^il de
Bannois pour M. Ic-Chevalier deDigoville
Frère de M. le Comte de Lapenti mes inti-
mes Amis. Après- l'atijùre de Crémone, je
fits le Solliciteur des-pauvresirlandoîs, dont-
la plupart des Offiders me font témoins ,
que je leur fis i tous plailir, foit-pour les a-
vancer dans de meilleurs polies, foit pour,
leur &îre accorder des gratifications , ou les
feire pflïer de ce qui leur étoit dcu. Mylord
Sianemepeut rendretémoignagéqueparmes
jbllîcitations auprès de M. Chamillart, je
lai obtins un Régiment nouveau à la paie é-
trangercj mais des raifons particulières, & •
lamortdu Roi Guillaume de giorieufe mé-
moire étant furveniie, il prit le boaparti, &.
retourna en Angletetre; ce qwnecontribus
pas peu à mon malheur, comme je le dirai
dans la fntte>
Je ftifois aufll fontJA&emeat laa-Cour è
M. le Marquisde Torcyqui me faifoit mb
Rcs bon accueil , & je voiois très fouvenc
M. Pequet fon Secrétaire homme d'un mé-
rite diftingué. Je me mainCenois toujours biea
auprès de M. le Chancelier, &-de M. leConv»
te de Pcmtchartrain , &je cultivois particu—
lièrement l'amitié de M. de la Chapelle fon
Secrétaire^ mon ancien Ami , dompourfiu-'
re l'Eloge en peu de mots, il fuflSt de dire,-
¥f!U.eft Is, digne Fils da jguneux lyl. .de 1%
■ ■ ■ Ch»;.
u,:,-,zf--„GoOglc
M rWfloire de U BtfiilU. t)
Chapelle de l'Acsidemie Françoifc, Ne? en de
VlUuftre M. des Preaai, & le Favori deM.
le Comte de Pontchattrain^ qu'il ftit hOQ-
nenr à tous les trois.
Je planois i la Cour , où' je me &ifbis
qiumtîté d'Amis par \i, fiivenr de M. Cha-
niîllan, ne cherchant qu'à ikîie plaiHl à ton-
tes les Ferlbunes de m^ite qui m'en folHci-
toicut , tocfque lajaloujiede miferables Mon<-
ches, dont il n'y & que tttyf- en. ce lieutle
nombre s'en augmentant tous les jours par
l'impunité de leurs crimes , & l'Envie cette
cruelle Megerc an teint livide & jaune, &
qui corrompt les chofes les plus pures qu'el-
le atteint de fa dent pourie,ttoubIerent mon
repos-L'envie aiant veifé foa plus nnir poîfba
dûis le fcin d'un malheureux corrompu , que
j.'avois autrefois^ particuliéremmt oblige, ce
. qui fkit voir, combien il elt dangereux de fe-
mer dans une teiie ingrate , il envoia à M.
le Marquis de Torcy deux Pidces en vers de
ma façon , que je n'avois faites que pour o-
bliger cet ingrat , qui fe m£loit de dWertir le
PnbliCr par qoantitédeRapfodies, °r*-
vares telles qu'il les pouvoir «traper,boiuies
oa maovaifes; env^t qu'il fit dans la feule
TÎie de me nuire auprès de ceMiniflre, &de
loi faire f».Cour à mes- dépens ; car j'épris,
par Paremhefe , qu'il en tiroit Penfîon. Si
itft qne ce Minilû-e les eut reçiies , il qk fit
appel 1er, & me les aïant produites écrites de
ma main, avec des ratures; il me demanda
d'wi air à glacer les plus intrépides, H je
connoiflbis PAutcur de ces Vers^ en me les
atomtatit' La Xfios^ (le mon Fiippoo, dont
A 7 je
u,:,-,zf--„GoOglc
14. Uluquifuieit Fraftftife
je coODOilTois fptt bien le caraâérc , écoît
a cbx , ainfi il D'y eut plus à balancer. Je lof
avouai la chofe, :^ je lui dis iDgsDiuneilt^ue
je les avois compofez, mais qae.I04ieii-de li-
berté où j'étoîs quand je Ics-fis , joint à lade-
mangeaifon que peut avoir un jeune homme
de. dire un boa mot, me les avoir fait écrire^
uns croire que cela pûc altérer en la iDoiah-
dre manière le zéLe que j'avais pour le Roi »
& l'amour >^ue je confervois pour ma Patrie:
les voici.
MADRIGAL,.
En faveur de la France & de l'E^pj^e- ,
contre Us Alliei de la Maifon d'Autriche ,.
par Allution fur te jeu du Piquet auxtennes
<le Quintç & Quatorze, avec les Noms des
Rois Philippe V. & Louis XIIIL
Coturt Quinte ^ Qtuavzt en m'aJMiMij itoA
jtM ;
0» ejl mimt en danser 4t perdre U PértUf
ï)ei pluift^ei Cenflits toute la farte unie
Kefert de rient mfirt de peu,
Penples qui -voiu ligmzt qu'avec vmsqKikm-
Jante
On vâtreperte', om vôtre gMÏmf
.Combattant P^pagnt £3" h France
Vogs trettoerez toUfvnrs QKÎntei'fjilnanrMt»
M<n».
. .L!hommc en qneâion me fit voir c«
Vex», & vcNCi U R^ufe ipie j'y %t for ]«
cbiD>p..
.--„Googlc'
tu FHiftoire it U BafiilU. t j
Kepoafè «n Bouts-nmez au précèdent Ma-
drigal de la part des Alliez,
Cemtre QmiMi bf Quatorze tnftmt faire . .
teaMJetti
Om rfi mime t^ur/ de gagner . U Partie;
Jtmjt fluî fagei Comfeih môtre force eft . tarie.
Vitre Qfuterzee^MMtivitrrQmiHteeJttrojppeM.
Le Ciel qui- voit et jeu fait faucher la . èa-
lame
Pêmr vôtre ferte , bf mStre . . faè»î
KêMJ ferons tm Aefie, ^ . . fE^agne
flf la FroKte.
Se treuvertMt Capot . . . QmmtebfQma-
torze tn main.
Mon Brouilloa en garda l'Original qoeje
fos aJfês iimple de lui confier , & après aroir
cftropié & défiguré le Madrigal , il le rendit
Poblic. je ne fçai par ^cl hazard ftu M. le
Verroni attrapa une copie du véritable ori-
S'ual , & l'inlèra dans & Qntntellcnce da j.
1 Mois de Décembre 1701. Il fttfort h-
tome, qa'aajeanc homme, deni jours après,
^BÎ o'avoit pas Tcu cette Quinieflènce, lui
tporu me» mêmes Boan-itmei , & deux on
trois mots jw^ts , qaHl aToitchange» , lui
fontenaot que e'Âoît lui qut^oît tait cette
Piecej quDïqse M. le Vetroox fût Hen cer*
tain da coiàt^e. J'anivaiJtifteiBeDt com^
ne cec-lioame teooit cette Piéceenfs'maïi^
& fitfoft- r*e l^wtte de fon effionteri*. Lorft
qa'il mcTÎt le ftu lui monta au vif^, &il
deiaesra fi confits 1 qu'If ne pouvoît pronon-
cer au fcDl mot; pendant que je me con^
mnUoit,, fax te boirijtnr qw j'wois de me
^, -► ren-
■„r ..Google
iS L'IxqiùJtt'uii- Franf^ife-
rcncoQtrer fi jufte avec les brâax Efiwiw^- Il
ïvoiia qu'il avoît leumes'Vers , âcqu'itsToît
fuivi ma penfôe , mais qn'il avoit entièrement
oublié mesBouts-rimcz, lotfiju'il compoâ
les fiensi Cet avœu redoubla la raillerie, Lic
Vertoui pour achever de le-demontcr tioas
tirade fon Poitefeuillo tes VetsTuivaivs, &
nous iuvita tous les deux à y i;!;po{>drefur..]e
champ en Bouts-rimci. J'acceptai ie défi a-
Tcc plaifir, & je me retirai en un coin, où
quoique nous tullïous fori; à l'ep-oit, dans ua
litti, où l'on n'avoir pas la difcretiondcme
prêter le filence ncceflàire, en moins d'une
heure, je fis les Bouts-rinacï, quç l'on va ■
voir ap;èg la Pièce loivantc.
A. S. A. S. M. le PrinceEDg^oedeSavoij
yefur fa Càmf^ç£,de.Cbiari.-;,
Oui troinvez Uûjùuri le feiret
P^enfiiujfer Q^iHZe cents avet QtiatorXe^Uri ■
^itX,-4ttOMt î»ftrMÛ^.vigiiMitisf diferèt.
Je vous fient fîut ?Wi-»» qu'Atlnk. -
SoieztBàjouTs muni de, faut,;
Et datu un p»fi« inafcêfft^ie i.-.
Vont poufferez toâjt/urs vas iiif»Mnit abouti: ■
J^oui ferez teâjours inviueièlt.
Mais ^ fir^fi jii'^is de vof relràMfbetfttMt ■ .
r«ur combattre i ou faire retrmtê^
^Us.voHS exfoferitz à reniiért défaite- ^ "■
Pt de que vous avez avec vous d'Ail«Mam,..
. Quand par leur vaUur fans feetnde^
fis auraient emporta le^Cbduau da Milam-
Peut être pouvez vous faire unplfiiju^plM^
Et vofts pT$mtttrt d'eux k CoMfuéie ^ Monde.
tM ftËfloht it U BdftilU. rj
Méat £rthaKttMi»t , qu'ow »'i> rifMveittf^al
Parmi Ut Lwomi Romanes I
Âkt ta, /a voutpfitit, Maufitur li Gtwtr^
Om mepi»t vous pajfer des parolei Ji vatmet >
F»0iez i/omtplnigramdqtt'AMminU,
J< Jfai tant ie rtjptél qtCon doit à vStre AUefft'~
Il faut lui parltr fans fimtfe;
Et Kt lui rien dire à mohi/.
Vpms aurez It ^ it Mtxfe i
f^emi verrez la J'erre prtmife i
Mai/ veut m'y mettrez pat Itfi/'
Reponfc ea BoiUs-dmez.
Ssmi itrt Faitfaron on trùHve , . . lefeertfr
Avte UM Peleleit au deffout deviup . . millf
D'arrêter VUlerti ChefvaiUtmtfmait . ^firet,
Eugéme fm UUfe i^ généreux , > AthiU
Demtute ce grand Duc en refifimt à . teut ;.
Framebijftnt dit Rotberilaeititt ^inneeejtble.
Qui ^nn heroi moixt ^ge <ib misFadrege • *
à bout^
Il pejie maigri lai Çon Armée . hnineibUx
Si l'Ennemi s'attache àjes , retranehememi »
// le forte à gra/tds foupi à faire fa . retraitt
l^ frudeut y illerei pour e ouvrir fa . défaite^
Dit ^n'il a fait cacher le Chef des . Allemans;
Et pour faire briller fa . valeur fams féconde »
Enflé defes exploits il s'enferme a . Milauy
Oi là , pour le Printemps , il médite le . fia»
Qui Udoit expojir aux yeux de tout le. Monde»
Cmone ungraudConfueraut fui n'eut jamait^ .
dWgali
Et tfni doit effacer les ProAeJfef • Romaines.
Oui font doit rtj^eéler te (Taillaut . General,
ilui voit eeuler lefang dans f es bouillantes . veines
iB h'InfKÎjitmt Framfoife
De Cyms, AUxamire^ Afimhûl . . Awmttsl
Aitt ta grand htrt$\ é{»uut fi» . . Akeffe ■,
Qjn v»mi dit hsmumtml, faut de f Mrs . fattJjf-
Nom, mm ^m'il ne vint f mi feur ritmfair* ._
Il tmfimt défnhir le detHm . ... de Mayfe<
Pomrveit pie * Jafi/ de . la Terre Promt/i ,
Pomr frmit de fom trepai me voui laiffi unfcml .
fi/.
Après qne j*eus remis mes Vers entre le»
mains de M. Je Verroui, nous cames la pa-
tience d'attendre encore rendant plus d'une
heure tes effets de-mon Jeune-Homme, qat
fuoit ï grolTesgoates, quolqa'il&tFort^oid,
cfi fe rongeant les ûnales, eu un coin. L'iiU".
patience nous prit : le Verrooivoulut voir ce
gi^'il avoit fait ; c'étoit quatre miferables V as,
où tl ni avoit ni fens, ni forme, ni aorS:*
truâion. Le pauvre Homme, tout honteux,
nous dit pour foa eicule , qu'il n'écoit pài
dans fa veine , & fortit en nous taiilànt un
rtfible «xttnple du ridicule, oùs'expofcnt
cent qui 1« parent des depoUitles d'kutnii.
Je ne ^aî par quelle avannire mon Origi*
nal avoit palKdes main« de M.' le Verroux
daiK celjes démon Peifide, & je nclefçau-
r«i jainais, car ils font morts tous deux;
maiscëqu'ilyadecûnftant, c'eftquelesdsUX
Originaux des Bouts^imet que je viens dera-
pOFMT'étoient entre les mains de M. le Mar-
qui»>dB Torcy.
hftki mon aveu, il me dit d'un ton très
obli-
^UEmftnm UfM *
u,:,-,zf--„GoOglc
M PHifieir» i» la BttfiHU. jf
flUigeiatrjc fii» bnen aife d'être conninca
3 oc vous avez ide rElbritt mais je vous prie
e mîeox. remploiera ravenir; & t'aperce-
vant de la peine où j'<(tois devoir ces Origî-
Baax rcftei enuc fes mains, il les jctta dam
le. feu en m^ prcftacc. Je fus fi fenfibletnent
toacfaé An ce trait de bonté ,. qoe tout tranf-
poné, je m'eSbrçai de loi balfèr les mûns,
mais lui poor me combler degraces^ m'em-
braflà tendremeat. Je répondis à cetexcèsde
generofittf par des larmes,. plti)éIoqueDunetTt
qite je a'aor(xs &ic par les difcours Itfs pins
ândie».
. Cène a6HoD me toacha 6. f«ilîbleinent , &
me fit fi bien rentrer en moi-même poarap-
profondît toutes les paffions qoi m'avea-
glQÎent, que je refolas de m'attachcr uniq«e-
meijt i un Patron â gencreox , & d'un fî^oti
cvoc , & pow cela & renoncer à tout autft
Commerce; même de donner la préférence
i ce Sage & éclairé Mîniilre fui M. Cha-
niiJlart, je &ifois à tcms momensdet ¥«tt-
iellet.de tous lesdrax, qui me finnbloîeitt
fbn jndicieia &.me coafirmoienidans ma
lefolutioD. Je redoublai donc mes affidttîtez
auprès de M. le Marquti-de Tore^, &je
Toiois ton; les jours fort esaâement M.'Pe-
quet , es qui je déconvrois de [4us en plas
1)0 fond de prc^ité qui roecharmoit.
J'écois dans ces heureufes difpolîtioiis ,
lorfqu'nne tcttre qm vint d'Hollande me pM^
dît entiétemenc. - Elle étoit écrite par aBe
Petfonne de diflisâion que j'timeis & qœ
Ïbonorois particnliércmoitL; jeveustakefoa
ïom pat i'çftimeqw j'a^pewrltt'i * «f®*"
.--„Googlc
20 Vlnqmfiiam HrMiifùifi
re taéme chuïtablcmeat qv'tl l'aTOît i£cHÉ*
piBCÔt par mepiiCèi que pai mtlice. Qnoi>
qu'ih en foit clic fut adrcfliie i M. de Torcy
qui m'envoie quérir^ & avec qnc doiu^ur
queje n'oublierai jamais, & qol-m's foateiMi
peiidatit toute ma Piifoa contre tonCct les
impulfions de la Nature leroltée, il me Is
doana à lire', me i^ardant fiiemetit pen-
dant que je la lifois. Après l'avoir leiic^ il
me dit : H^ bîeo.Monâau que dites vous de
cela?Je lui rqtODdlsT ûaxi m'agita, nitn'alr
Ianner:je dis qse c'eH on homme qui me
vent perdre, & qui pretcod vous faîie l'inf-
trament de fa Tcngeacce : mais vous métne,
McmfeigDeur, qa^ penTex-yons ? ofèrcMS-je
vous demander, fi je fêtai aâifs-nalbeoreux
que de vous roîr donner dans lepi^eqn*<Hi
me dreÛc^Si je vous aoioii Cnmue], xe-
prii-il, yqasaorin déjà vâtretéteàrof pied»;
quoique M. ChamUIan ait répondu de vôtre
iotiocence an Roi , il t'a^it de m'en convain-
cre; û vous voBlez que j'en réponde suffi î
S. M.Nemedegniftsricn, &j«poadecihoi
jufte. Après quoi il m'interrogea fbr le con-
tenu de cette Lettre, & je lui répondis avec
tant de tranquiljté , tant de juJldlè & de mo- .
^ieration , qu'il fut tout à £ut perfiudé de
mon innocence. Allez me dit-il, continuel
vôtre emploi , & quand j'aurai bcfoin de
vous, je Yous demanderai àM-Cfiamillart,
pour m'en (irvit utilement : je veux faire
quelque chofc pour vous. .Non, Moofei-
fineur, lui repondis-je, m«s EuBcmis n'ont
pas commencé par ce qutvous m'svczfiui
la grâce de me communiquer, pour en de-
meu-
.--„Googlc
*g rmjioirtJt la BafiilU. 1 1
■enrer-là ; ils pourront s'adreflèr à.qUel"
^'auue de la Cour, qui n'aura pas vôtrepc-
DOratioD , & qui me fera la vi'âime de leur
«ngcance. Soiiifrcz que je m'éloigne de la
CoDT, M. Chamillan m'a vouludonoer de
l'emploi dans les Arinéesdu Rot, ou dans les
Finances ; je vais lui reiaontrer de quelle con-
fcqueuce eli la ncceflité qoi me fait prendre
i i^efenc un parti que j'ai d'abord rc&fé ; à
moins que vous même, Monfcigueur, n'ai-
fflin mieux m'cmploier dans lès Pais-Étraa-
gcis ; & je fuis prêt d'aller en tel lieu' du Mon-
de qu'il vous plaira m'ordonner, pour Atct
tous les foupçons qu'on voudroît vous don-
aa de ma conduite. Non , demeurez , me
dîi-il d'une manière obligeante ; je fuis très
content de vûtre obeïûàncc, ^ je veux vous
bitedubieu. VosEnneçiis nepoujroatriea
rarmon eTprit, ni furcelul d'aucun Miuiflre,
lupiès defquels je vous protégerai tant que
ïouî marcherez droit , il ni auta que la veri-
t£ prouvée de ce que l'on avance contre vous
Qui pourra vous nuire.
Je ne' manquai pas de coiamuniquer exac-
tement cctw Scène à M. Chamillart qui dif-
fipa ma cr»ntc , me donna, de nouvelles af-
furances de fa proteâion , dans des termes
très touchants ^ & me promit de parler à M.
de Ttwcy en ma &,vcar , pour difliper juf-
qu'aa moindre Jiua^e & d'eu prévenir même
le Roi. Je le priai très in^ammeiit de m'c •
loigner deUCour , msûs ce fut en vain, nu
mftuvùfe étoile couvoit les influences malt-
Eoes fous Icfquelles je devois être opprimé :
Il cft cepeadvot cerMÎD qne j'Aurois pris I«
' parti
.--„Googlc
parti de faire mralte , fans les EicmpIafMf
d'un Livre que j'attendois d'AmUerdam, oâ
)I s'imprimoic chez M. Etienne Roger en ftpt
Tomes , que j'avois dcdté à M. Chanûllart,
&• qui n'arrivèrent, malhcureufement que
trois jours après que je tiis arrêté, 2e qui ont
été perdus pour moi , auifi bien que quan-
tité de hardcs que mon Epoulè y avoir join-
tes; j'écrivis à mon Epoule, pour l'avertir de
ce qui î'étoit palTé , & la prier de ne tn'écri-
re que dans tadernléreneceffité, Adedeman-
der la ménie grâce à tous mes amis ; & for
Wut de m'adrcflèries Let^es chez M.de Tôt-'
cy à qui je remit les miennes toutes ouvertes
le fuppliant d'ordonner à les Gens de les fàl'
re tenir à leurs adrelTes. Mais toute la prtf-
dence humaine ne fert de rien , contre les
décrets de Dien : Il avoit refolu de me fu-
re fiire pénitence des éçarements de ma jeu-
nellè ; « il voulut que je les espiafle dans la
plus cruelle Prifon du Monde, pour me ga-
rantir des hoiTcurS d'une Prifon éternelle:
que fon faint Nom en foit gloiiôé.
L'a&idnité qne i'avois auprès de M. Cha-
millart ne m'empëchoit pas de faire eiafits
ment ma Cour àM.deTorcy, dequij'étoij
toujours traité fâvorablemetit ; cependantun
dimanche i+. Mai 1701. je le rencontrai qui
forloit feul du Confcii , je me fcrvis de cette
ôccallon pour l'accompagner de chei leRô!
jBfques chei lui ; mais il lança fîir ntoi ih)
*ei! terrible, me demanda tiëremcnt ccquejè
demandois, & mecoiffiedia avecunehiuteur
i me faire trembler. Il n'en ^lloit pas da>
Tamise pour me faire rentrer en motmémc^
u,:,-,zf--„GoOglc
•M FHiflairt de UBaJiilU J|
t prendre le puti de fortii de VcrTaîlIfcs , S
j'ttois dû éviter mon malheur. Mais je fus
MDs le moment chez M. Chanullard; je 1«
tronvû qai fônoit auâîdnConlè)l,enviroa-
0^ d'anc foutle prodigieofe d'Officiers de toui
te les efpéces , car on 6to\t fur le point d'en-
trer veritid>temeQt enaâion de tons les cAiez,
pois que la Guerre tut déclarée le lendemaia
de la part des Aliiei. Il étoit obfedé de Ducs^
de Cordons bleus, Mardchaoz de France j
ï'îeutenants Généraux, Maréchaux de Camp*
Sn^adïcrs, Colonels, & on aurott bien com^
pofé un Battaillon des Capitaines , & autres
Offidersquis'eSbiçuientde l'aprochei. J'en-
trai dans ion Cabinet, où je l'atendis, malgré
Fcnant qui s'eSbrçoit de me periuader d'en
fiHtir ; cor ceux qui ont Tufage de la Cour
ftfvent que le Cabinet du Miuiflre cA naer-
[wce de Sanâuaire, dont l'entrée n'eit permi-
& qu'à ceux qui viennent de la part du Roi,
ou qui font introduits par ordre exprès du
M'niltre ; autrement il feroît accablé,&n'au'
roit pas la liberté de travailler en pais aux
' affaires de la dernière importance. M. Cha-
iBitlart me voïant tout efïrué , m'endeman■^
da.le fajet, que je lui comptai le plasfuccin-^
temeni qu'il me iùt poffible. Il me dit qu'it
ne pouvoir pas me garantir de lapeor , mais
bien du mal que je craignois , qu'il vcrroit le
lendemain M. de Torcy ; que l'air dont il mV
voit reçu , procedott des afiàîres dont il 6-
tint accablé , & qu'il ne me vooloit aucun
mal.
Le lendemain je me rendis à la mémeheo-
re dans fes appartcmetus , & comme il for-
toit
14 Ulnqulfition Fraufoift
toit dnConfei] ; il m'aperçut, au trJtversdes
Légions qui raccabloient ; il' me ât figDc de
U main qu'il vouloir me parler ; mais Fer-
rant ne voulut jamais me permettre d'entrer
dans le Cabinet, comme j'avois fait le jour
precedeiM: il fallut l'attendre à la porte de ce
Cabinet , d'où je lus debufqué par les flots
de CCS Officiers , dont les torrents m'en-
trainetent, quelque refiflance que je âllc. Il
entra; la porte fut fermée:apres quelamul-
titude fW éclvprëe, je gratai; Ferrant vint;
& quoiqu'il fut mon bon Ami, ilmeditque
quand il s'aglroit de ma vie, il nepouvoic
pas m'introduire , li je ne venois pas de la
part du Roi.
Il me confeîlla d'attendre fonMidtrçdans ;
une galerie par où il devoir palier pour aller
dinerrmon malheur voulut qu'il montât pat
nu petit cCcalicr dcrot>é. La delicatellè que
j'eusde ne me pas picfenter à fa table, pour
ne palTcr pas pour un piqueur; qui d'ailleurs
n'étoit que trop affichée par une quantité pro-
digieufe d'Officiers Généraux, fie que je re-
mis à le parler lorfqu'il en fortitoit ; mais il
defcendit dans fbn Cabinet par le même es-
calier, qu'il étoit monté. J'atcndis encore
i. le voir lorsiiu'ilfortiroitpourallerauCon-
fcil des dépêches, qui fe dcvoii tenir l'après
midi ; mais le Roi envoie avertir les Minif-
ter qu'il n'y en auroît pas , parce qu'il alloit
à Trianon. Sortant de chez lui, je rencon-
trai le Baron de Corneberg, fi connu pour
ce brave Colonel de Houllars , qui ayoit.
f«it tant de belles aâions pendant la derniè-
re Guêtre, & qui s'étant brouillé avec M>:
i. ■ de
ACooylc •
«» PHiftoire it h BmfitSt, i-}
^BarbcficQx, svoit son fealemmt perdu
le fruit de fes traviux , mais bien plus, a-
Toit €té mis à la Baflille , par ce MiDiItre,
qai l'y avoir retenu pendaniplas de trois ans:
&<}ai contre les Sollicitations desPriscJ-
ptux de la Cour , de tous les Officiers de tné ■
rite, &des pre^ntes inftances-qac je fis {-'
Mr. Chaenillart pour le fwe rentrer en grâ-
ce, ent ordre de Te retirer , & de fortir au '
plut6t du Roïaume : il m'entraîna , malgré
nu refiilance dtner avec lui , & pendant tout
lerepaSf il ae me patlaquedelaBaAille, &
delà manière dont il y avoir été traité par feu
Mr. de Béfemaui , qui pour lors m étoit
Gouverneur. Nous ne nous doutions pas
tons les deux que je devois le lendemain ma-
tin à huit heures enuer dans cette Caverne
dePolyphéme , dont il me faifoit la defcripr
lion. Il me dit qu'il panoit le lendemain pour
illcren Hollande, fortpenetrédes bonsftiv
vices que je m'étois efforcé de lui tendre ,
je l'embralTai tendrement , & jfl le priai de
voir mon Epoufeà la Haye, pour lui domier
de mes nouvelles, & j'ai ^pris qu'il s'en eft-
Ktjnité fort ponâuellcment.
Je travaillai toute l'après-midi, & Air les
boit heures. du foir. Je faschezMr. leCitar-
pentier y prendre uueronte, pour l'envoyer
iMt. leChevalietdcDigoville, pourcondui-
rtUQC rccriie à Ton Regiment,qui étoit it Stras-
bourg ; j'avois encore cette route dnns ma
poche tors que j'enctai dans la Baâille , &
que lEtOfficiers ne voulurent jamais envoicr
imonAmi. )e fas prendfel'aitlfur later-
nflë où jctiouvai Mr. du BoQUay, Capicai-
_ B ce
1$ VlmfMÎ/îtiii FratrfQîfi
Dedans le RcgîmentD«afin, qui voulut m*a-
mener fouper avec lui , ce que je refufàii.
Comme je me cetîiots chei moi , je vis des-
cendre le Roi de Coo caroflè , à Ton retour de
Ttianon, & j'aperçus qu'il fe mrtioit en pof-
ture, comme s'il eût voulu faire des armes >
en parlant à «des Seigneurs qui l'attendolenc
fur les marches delà petite Cour, à l'entrée
du grand efcalier, Je m'aprochai pourfçavo/r
ce que c'étoît, & j'apris qu'à -fon retour de
Trianon, il avoit trouvé deux Officiers dans
le bois qui fc barioicot à l'épce ; que le Roi
ks avoitfait feparer, dcfarmer, & conduire
en Prifon ; mais qu'ils étoiem fi pleins de vin,
qu'on n'avoil pu fçavoir le fujct de Icurqae*
telle, DÎentireiaucunenùfon. J'étoisprcf'
que forti de la Cour , lors que Mr. de Mau*
pertuis Goufin de Mr. ChamîlIarC courut a*
près moi & m'arrêta, pour me demander li
je voulois lui donner i fouperou qu'il m'en
donnât: jeprisie pajti de lui eiidonneravec
plailîr : il me dit qu'il partoit le lendemain
pour Bruxelles, où il alloit entrer dans une
affaire , que lui procuroît Mr. Chamillart, qut
étoitadmirable, qu'il vouloit que je fufle de
iapartie; que nôtre Fortuneétoitaffiirtfc, &
que Mr. ChamiUart m'y fêroit entrer d'une
part li tôt que je le voudrois, &qu'il m'al^
droit de mes avances. Après le repas if
m'en fit voir le plaa; &qiioiquel'afïiiiremc
parût très bonne , je le remerciai de Gi bonni!
volonté ; mais il pétfifla à vouloir m'y oh
gager & dit que le lendemain , d^s les qua>
ire herresdu matin, ilferoîtàinapoitepoiii
m'anjenei d^jeuQcraveclui, &inefmevïttc
Ict
.--„Googlc
.'...^Xooglc
•mrHifi»iredeUBafiii!e. V?
fct confcq»eoces de l'affaire qnfl mcpropo-
foit. Je lui fis voir l'cflài de l'Epitre dcdica-
toirc de mon Recneil des Voiages qui oQt
ftrvi ï l'établiflement & au Progrès de la
Compagnie des Indes Orientales , formée dans
ks Provinces Unies dcsPaïs-bas, avec la vi-
yoctte an dcObs de l'Epîtrç , où j'avois fait
fraver les armes de Mr. Chamillart, Apres
l'arofr leiie, je la mets, dit-il, dans ma po-
che, pour vouî marquer l'eftime que j'en fajs
& je retiens un Exemplaire de vos fept To-
mes. Minuit fonna, je fisailu-nerunflam-
bcza pour le conduire chez lui ; jnaîs il ne
■voulut jamais permettre que jb l'accompa-
f naiTc , & me renvoya coucher. J'écrivis en-
core i mon Epoufe avant que de le faire 3c
après je me mis au lit.
Jamais je n'avoisdormi S. tnmquîlement ni
fi profondément que je fis cette nuit: c'étoit
le dernier adieu que je difoîs aux plaillis ;
Itvsque fur les quatre heures du matin j'en-
tendis friper i la porte de ma chambra ,
jecrûquc c'étoit mon Ami qui venoit s'ac-
qnker de fa promeiTe ; je me levai prompte-
mcnt en Robe de chambre pour lui ouvrir.
Mais quelle tiii ma furprife , quand au lieu
de Mr. de Maupertuii, je vis un Exempt de
Mr. lePrevôt de l'Hôtel ,avec trois Hocque-
tons, dont le premierme prefentalc bontde
fx ^ale baguette & les autres le bouc de leur
carabine contre !c ventre , dont le rcffort étoit
lond^. Sij'avois fç'ûqucilcdevoitécrelafuite
de cette première Scène, indubitablement je
llaurois enfanglantce,& je me ferais fait tuer,
carlamoit citfans doute pius douce que ce
B % CLUC
u,:,-,zf--„GoOglc
i8 L'Iwqmfitian fr^Mfoift
Soej'idfottgat. L'Exempt medk: Mon- |
eur je vous uiëte de par le Roi ; oe bran-
la pas. A quoîjc répondis : fansdoi]te:vou>
vous méprenez .Moniteur ; vous me preoez
pour un autre ; je m'apclle Mr. Cooflantia
de Renncvillc. C'eÛ à vous même que j'en
veux , reprit il : j'obéis lui dis-je , fans taire
- paroîtrela moindre émotion, ni changetneat
devifage, faites vAtre devoir: après je lui de-
mandai iî jVvois la permiffion de m habiller.
Oui Moqueur, me ait-il, mais faites prompr
tement, & me donnez vos atmcs& vos pa-
piers.
Je loi fus quérir moi même mes acmes ,
3ui confifloient en une paire de piitolets &
euzépées , dont l'une éioit parfaitement bel-
le, travailléeen pointcsde diamants, de ces
beaux ouvrages de Berlin; j'en avois rcftiic
deux cents livres de Mr. le Chevalier Maho-
ui peu avant que d'Être arrêté; jeladellinois
au Fils de Mr. Chamillart , & j'attendois,
pour la lui otlric i que les Exemplaires de
mes livres fuflcnr venus , pour n'en pas fai-
re à deux fois, & lui prefentcr les fept Tomes
de mon Livre avec mon Epéc, que Mr. de
Maupertuis :ivoit admirée le foir precedcm.
L'Exempt lit monter Mr. l'Affilé mon Hô-
te, & en nu prefence , lui remit mcsarmes
& ma canne, qui n'avoit pu entrer dans mes
coffres , dans lefquels il ine fit mettre tou-
tes mes hardes; & .après m'avoir tait fermer
> clef mes deux coffres &ma valife, il remit
■ le tout àMr. l'Affilé devant moi , enmedj-
Jant que quoi qu'il fût en droîtdegardcirnes
jir;ncs , il o'avoît jamais voulu profiter des
dç-
.--„Googlc
a» PHifiBire de UBâftiUt, ty
débris d^ infortanez , & me fit coas les com-
plîmeas dont ces Meffienrs ne font pas avares'
dans de femblables occalîons. Pour mes pa^
picrs noQS tes rcnfennimes dans deux de mes
fërvîettcs , qn'it ferma de foo cachet âftiu mien
i^>Tès les avoir bi«(i cousutfs , lui mJme le
porta chez Mr. de Torcy, comme il me 1»
dît après. Je lui demandai fi lui & Tes Gent
avoient déjeuné, &m'aiant dit que non, te
fis apporter du pain & du vin , dont nous bû-
me» chacun deux coups , pendant que moa
bâtCf Jà femme & fa fervante fon(k)îent en
larmes , que je confolois de mon mieux.
L'Exempt me dit de prendre quelques li>
rtes dont j'avois un bon nombte, pour me
delèimuier, & fitprendre maRobc decham-
bce, monManteaa&mon bonnetdenuitpar
on de îès hocquetons, co qui me fit lui de-
mander , fi je coucheroic en la Prifon oà il
m'alloît mener, & âil Jic meferoit pasper-
nûs d'en fortir îbus camion ; à quoi il ne me
repondît rien, & fe prit à fourire quandilvit
que j'ordonnoîs à mon hôte de m'y aporrer i
manger. Nousdefcendimes dan$1aGour,où
je troQVEÛ un CatoITe à quatre chevaux & deux
chevaux de felle.. Ce fut pour lors que je
lut demandai, où il vouloir me cotidoire; &
m'aiant répondu que c'étoit i la Bailille , je
me recriû contre cette injuftice , & contre
Mr. ChaniiUart qui l'autoiifoit ou^ qui du'
. moins laXbuâroit. J'eus encore aHez depre-
fence d'efprit pour lui demander deux jcia-
ces; l'une demelaiûèrécrireâMr. de Tor-
cj, àMT-Chamillart, âcàmonEpoa&'i-rau-'
tre de me laiHer emporter mes hatdw • Pour
S 3 To»
u,:,-,zf--„GoOglc
9o VlnpÊtfitKH Ft-enfâift %.
vos harâes, HtAX , vous n'en aurez pss ht-
iôin , cttr je fçai <}ac vous ne demeuiereï
pas longtemt où je voue mène; &poarvo9
LetrcsvcHU les écrirez à IftBaiUtle, ajerons
engage tïia parole que j'en donner» deux
en tnaÏQ propre ails.MinilÎTcs, & l'auixe je
la mettrai moi-même ï la pofte.
Koui montâmes co CftiolTc : nous nom
KÎmes r£icnipr&iïK)îdatis lefbnd, &deux
des hocquetons iSu'\t devant ; & ït dît tons
haut as troiliAne de remener les dicvaux â
L'Ecurie, & quelatranqnilîté que j'avoii lUl
paroître , & mon peu d'dniotîon lui étoient
de feurs gtrantsque je ne ferojt aacnne rio-
fèace. Sur ^uoi je loi protcAai. que jemc
cioiois â peu coupole, qnefile Roi, m'eût
ordonné de me conÔitaa moi-icéme Prifoft-
Dîer, j'aïuoitexecHtéresordretËmsIemlnif-
tére d'aucun de fes Qfficiert. Je le prîat de
me dire lequel des MiniÛrei me &ifôit tr-
réter , it quoi 11 ne répondit pas. Je lui de-
mandai fon Nom; il me dit qu'il s'appelloit
de Bowbon , & il fe trouva que nous avion»
ièrvi enfemble dans les Moufquet^ûres fon
f'ils & moi; il me dit que ccFils étoit Ca-
pjtùDc de Cavalerie ; que pour lui quoiqu'il
tût Ëxen^» , il n'en Ikijbit plus les fonâîons,
étant auprès de MadJa DuchcQè du Ludc, qui
l'avoit pris pour fon Ecuycr , & que c'étoit
bien contre fon inclination qu'il avoit été for-
ce de prendre l'ordre de m'arrêter , lorsque
le jour [recèdent il s'étoit trouvé dans les apar-
tements; ce qui me fit cotmoltrequecet Or-
dreavoitété&g&éaaConfèilleluiidi, &qne
le -lignai que m'avoit ^t Mr. Otamillart en
for-
.--„Googlc
M rHJflo'tre de Im BafHtte. ^ i
fortant du Conftil étoit «[^nremment pout
m'en donner avis.
Je l'entrcrenois avec la même liberté, qne
s'il to'eût conduit à qusique partie de pîw- ~
fir ; & aïant aperçu fur les coties d'armes des
Hocquetons nnemafle tonte hcrifféedc poin-
tes avec, cette dcTÎfe: Me/i/tromm ternir t je
lui dis en riant , lui montrant fcs gens : voi-
la donc la terreur , & voici le Monftrc ; en
me montrant après : (ilcRoienavoitunmi-
lion de pareils ils feroîent plus propres i ê'
poQvanter les Ennemisde S.M.qu'àtuinuia
re. Sur quoi je pris occafion de Inî dire que
j'ftois le Cadet & le féal qui reftois de dou-
te frères qui tons avions répandu nôtre fang
an fervice du Roi ; fepc delquels avoientété
tan dans le môme fervice. Que mon Père
iioit pareillement le plus jeune de donie frè-
res qui tons avoient aufli fervi ; & que fon
Père mon Aïeul étoit pareillement le dernier
de douM Frères , qni tous avoient aulfl porté
les armes, & avoietii verfé leurfaii^pourla
qaerelJe de leurs Rois ; que de pareils Sujets .
ne devoiem pas pafTcr pour des Monfttéîi ,
dans le moment encore que j'avois quantî-
téde NevcQï, de Confins & d'autres proches
psrens qui fervotenc le Roi dans fes Armées.
L'Esempt , qui me parut être un très hon-
nête homme , me promit affeaueufement qu'il
me rendroit fervice auprès des MiniftreS.
Nous arrivâmes à Paris ; il voulut fçavojr
quelle heure il étoit ; je tirai ma montre ;
pour la confronter au quadran de la Samari-
taine; il étoit huit heures juiles. Nous ^-
perçumes Mr. le Comte dç Grianniont'qni
B ♦ def-
SS Vli^mifit'u» Trtmftîft
defcendoit les marchesdu Pont-neuf, îlvoff-
Im faire artéter le CaroHè pour lui parler,
mais le Cocher ne l'entendit pas & palïi outre.
Enfin nous arrivâmes au lieu redoutable ;
CD entrant, lirtât que les fentinelles nous ap-
perceurent, ils mirent feur&chapeauxdevaat
leur* vifages : j'ai apris depuis qu'ils fai-
ibient cette étrange cérémonie parce qa'il
leur eA ddfendu de regarder uo Prifonniet
.CD. face.
Etant arriver à la petite Cour de l'apartc-
^ent du Gouverneur, où nom mimes pied à
' terre , nous fumes reçus au pied de l'eJcalier
psr un liomme de bonne mine , qui comme
je l'ai apris dans la fuite, tftoitle Lieutenant
de Roi nomrn^ Mr. du Joncas,. & on autce
petite figure d'homme de tr£s mauvaise apar
iCDce , & fort mincement vêtu , qui s'apel>
loit de C9rb(f, Neveu du Gouverneur , qui
nous conduijîrent,r£ienipt & moi dans ra-
partemeat de Mr. de St. Mars. Les deux
Hocquetons avoient commencé \ monter
dans l'efcalicr , pour nous y fnivrc ; mais
Mr. de Joncas fe tournant vers eux, les fit
defcendie , en leur difant avec allez de fier-
té ; quand vous nous arex remis Monfieut
entre les mains , nous fotnmes aflex cwa-
blesd'en repondre ;demeurei au bas del'efca-
lier. NousentràmesdansunecKambretcudue
d'un damas jaune , avec une crépine d'argent,
anime parut aiTei propre, aoffi bien que It
Gouverneur qui étoit devant un grand feu ;
c'étoit un petit vieillard de très maigre appar-
tence, branlant de lat£te,destn3insadetoiit
feo corps, qui nous reçut fort civilement :
.--„Googlc
eal'HifioSredtlaBaJl'iIU. i\.
il- me pre&Dta fÀ maia tremblante , qa*!l mît
' dans la micane ; elle étoit troide comme un
glaçon ; ce qui me ât dire ea mon cœur :
voici qnieftdemauT^feaagnré, lamort^ ou
fon fubfïitut fait alliance avec moi. L'Esempt
lui donna ma' lettre de cachet', où l'bidre de
m*arr£tcr , & ràîanr tiré en Tin coiti de là
chambre pour lui parler bas à roreille;com-
me-le GouvetncarétotiJî fourdqxt'îlncpoa-
vojt l'emendte, il loi ât repeter ce qu'il lui
dïfoit plus haut ; & j'entmdîs fort dlAinâe-
mcnt ces paroles :Mr, Chamillart m'a ordon-
na de vous recommander particulièrement'
oeMonficur ,- & vous enjoint de le traiter
plnS'favoisUemcQt que les autres Prifbnoier^
ce qui t'obligea à me Toiir faire beaucoup
de carelE». Enfuîte il ligna le double de
ma lettre de cachet aubasde laquelle il mit
& recoanoiilànce , comme TËiempt m'a-
vcMt remis entre lès mains ; & m'étant un
■MO avancé, je vis qne la lettre étoit lignée
<uOlbert ; ce oui me fit récrier : quoi donc
c*eft Mr. de Torcy qui me fait arrêter ! lui
même répondit l'Exempt , & c'eA chez lui
que j'ai poité vos i»piers. Je le priai de me
tenir ïk promeOe, & de fe chaîner des trois >
lettres, dont je lui avois parlé le matio. Il
demanda du papier au Gouverneur pour les
écrire , qui lui-r^>ondit', quefî-tot qn'un^
Prifonnier ell entre fes miiai, il nepouvoit
M permettre d'^rire Jàns an or^e particu-
lier de la Coar. L'Esempf pour'me confb-
lo de cette difgtacc, mejwomt, fi-tôtqu'il
fetoit i Verfailles , d'aller trouver Mrs. de
Totc; & Chailùllan- pour en demander la;
B j ppt-
.--„Googlc
^ L'Inqu^îtien Franfaîfe
ferwiSion. Le Gouverocur doos oSrjt A
tous le déjeuné ; mais L'Exen^tt qui I'cq re-
mercia prit ]a parole , & dit que j'y avois pow
vu , & que je leur avois fait boire d'excel-
lent vin de Bourgogne : il prit cougé du Gou-
verneur & de fa Compagnie avec lefquels il
me laiflà. Le Gouverneur ordonua à foa
Neveii d'aller me faire ptepsKC la fecdode
chambre de la Chapelle : fur quoi ce petit
hoihme répondit avec étoniiepunt ; la fécon-
de de la Chapelle? Ôiii, répondit l'OticIe,
la féconde de ia Ch^elle, en ^mnt le St.
Nom de Dieu , & lançant des yeux.terribles
fur lui, tous nébuleux qu'ils étoîenl ; exécu-
tez mes ordres , dît-il , & ne me répliquez
pas. Le Neveu defcendit au plus vite , &
étant le^lé feul avec Mr. de Jbncas & lui,
]] me demanda Ê j'ctois di^puis long-temps à
la Cour ; & fur ce que je lui dis que j:*^
^tois arrivé de Hollande depuis quatre Mois,
il fe mit lur fes prolixes dont il me van-
ta l'énotmité , i mon gté fort mal â pro^
pos.
Il me dit qu'il étoît fort! de Hollande le
lendemain de la Naili^nce du Roi Gtiilbu-*
me, autrefois Prince d'Orange, parcequclA
jour précèdent , comme tout le Monde étoit
dans la teJQuiilance, il avait pris querelle a->
vecf^tHoIlandois, dont il etiavoittuéqua'-
tre, &defarméles t^ois autres. Je regardas
ce Palladin qui s'érigeoit en Hercule , éc
^ui ne m'en paroiiToit être tout au plus que
rexcremcnt. De li il s'écoit embarqué pour
. Lisbone , où il avoit remporté le prix danfr.
«Q &meux tournoi. Ssfûte il iveit paâiE
.--„Googlc
«» PfËficirt tU U lèdfiiUe . J j
âlaCourde Madrid, oùilsVtoit&it at^-
rer dans one conrfe de Taureaux , dont il
avoir pareillemeat emporté leprii ,avec l'ad-
miradoR de toutes les Dames, quîl'avoîeni-
yeaCÉ noï'cr fous un déluge d'œufs parfumez .
remplis d'eaux de (ènteurs; & il ne pronoa-
çoit pas quatre mots lans jurer , pour afiQr-
mer des todomontodes , qui ne repondoient ■
gncre à fon volume. Aparcmmentqu'ilm'al-
loit conduire dans les Indes pour j enlever ■
quelqo'In^te , lors que fon Neveu vint a-
fertir que je n'avois qu'à defcendre , que tout
ftoit prêt. Mon nouvel Hôte me fit bien
dw proteftations qu'il auroîE pour moi tons
les égards poflîbles ; que je fèrois bien irai- '
té, & qo'tlmevifiteroit fonvent. Nous dcf-
cendimes dans la Coui du Gouvo'neut , où je
irottvai encore l'Exempt que je priai devoir ,
Mr. Chanullartde ma part & de le conjurer
it ne pas me laiffer languir long temps dans
a lieu de defolation , ce qu'il me promit.
Corbé Neveu du GouverHeur accompagné
de trois hommes de fi mauvaife mine , -que
•jetés pris pour des bourreaux, mefitrraver-
fet an corps de garde , où ilyavoit pluiieurs •
Soldats fous les armes , qui fe mirent aullî
Icars chapeaux fur le viiàge, d'où nouspaP-
flniesdaits BnegratideCoiit, au bout de la- -
ijMlle à main droite, nous entrâmes par uqe
porte qnarrée peinteen verd, oùl'on monte
pw trois marches , dans un gVand cïcalîer
fttmédedenx portes, qui firent un bruit é-
poavcntaWe en les ouvrant.Après avoir mon-
tÉTmgtcinq ou trente marches de cet efca-
fe, nous entrâmes par deuj perte» couTer-
B 6 tet
SA ■V'Iuqiiifitiom IkâUftife
tes. de- lames de fer, qui firent encore plos de-
bruit ea les ouvrant que o'avoientiâit Ictirois
premières, dans un grand, lieu qui me parut
être un fepulchre, long de plus de foiiante
pieds , large environ de quinze , & haut de
treize à quatorze ; je me mis à me récria' ;
quel crime ai-jedonc commis pour me met-
tre dans un Heu lî aJTreux, &,uns meubicsî.
£ir quoi, un de mes aŒQants, homme en-^
core plus épouvantable que. te lieu , c'étoit.
cependant le Capitaine des. Portes, médit,,
pour me confoler , que. c'étoit la plus belle
chambre de la.Baftitle, &.que l'on n'yinet-
tpit que des Princes. Mais quel fut mon €-
tonnement, lors que ce petit homme qui pa-
roinbitles commande):, me dit d'un ton mat.
affermi ,. qu'il ^tloitlui donner tout ce que
i'avois fur moi; & fur ce. que je lui. dis fiè-
rement , en le regardant d!un air qui le fit
p^lir , que je n'en ferois ti^Q v V^^ j'étois:
dans une Pruonroï^le^ où les Officiers, de—
vxoient avoir horreurdesaâions.quifairoient
rougir les Goiciietiers les plus féroces. II.
me proteilaquec'£toitnoa feulement la.cou-i-.
tume, mais même l'ordre du Roi & de fes,
lk$înillres ; & fur ce qu'il fe mit en devoir:
de venir me dépouiller ; miferable lui diSTJe,
4. tu m'jiproches, je te vais étrangler de mes
mains, tiie moi iï tu veux avoir madq>ouil-
he, car tu ne I*aiiras jamais de mon vivant:
«1^-ce daas un Château tel que.celuîrct,.qu'ii. .
tH permis de detroulTer un homme , que hors
d'ici tu âj'oferois regaiderenirc les^ei^x? Sa,
£gnre ne pouvoit pas me faire deviner que
Cétoit Jç Nçvcn du .GouYCrueur à qnijepar-. '
"içis;,
.--„Googlc
.--„Googlc
Mt CHifimt de U B»flilU. ^
\snt'. il «rottuapctic tuMtgris deras dcN^
mes, fî pelé , qu'il ^foit peur va\ voleurs
ca leur moatrani la corde ; une mechtruc
ruiote bleiie toute oTée rapiécée pu les gc
DOUX , & d'une étoSè leUe qu'on ea donne
lux lôldats ; UD chapeau Jadis noir ombragé
d'nu vieux plunaetnoir tout plumé , qui pa-
toilToit avoir eûùîé la fatigue de plus de qua-
tre Aricre-baus , qu'il tenoit de uiauvaife
gtace fous fou bras , & une perruque qui rou-
giiToit d'être Q antique ;. là. mine balle, bien
encore au de0bus de foc équipage l'auroit
plutôt fait prendre pour un Pouwcu , que
pour ua Officier. Ses trois autres Énafiers
encore plut tnal bitis & plus hideux que lui,
étoieut chapeau ha.i auprès de lui fans bnio-
1er; quand le' plus igé qni paroillbit^trefoa
Père & avoir. tout au moins foixante &:quin2e
in», quc^ l'on me dica]nis être le Capitaine
des Portes , prit la parole , éc me dit. Mon-
fîeur vous pouvez en toute fcnrcté remettre
ce que vous avei dans vos poches entre les
niains de Mr. o&tic Lieutenant ^ il ne vona
en fera pas fait tort d'une épingle , & l'on
¥ons rendra. ri»t ponâuellement le tout , a»
l^ès que Mr. le GtMivernenr & Mr. le Com^
fiiïlàire l'auront examiné. Il n'entre pas un
tifonnicr ,. quand ce feroit un Frince, qui
ne faSt la,m&ne chofc. Faites-le de voua
même , iaes. contraindre Monfieur à 4àire
nioi^ter des Soldats q.ui vous y forceroient
avec une violesce indigne de vous.. Mon-
iteur vous, va donner un Mémoire de- tout
vôtre argent, & de toutes. vos h8r4es,-avec
une foomiffîoB .4c vous les remettre.. Le dif.
B 7 cour,
j8 L^JmipiifiiiM Fiwif»^f ■■■■
cours de cet Homme m'apaifil , & je con-
nus bien que le meilleur panique j'avois à
prendre étoit d'y Kcquiefcer. Le Lieutenant
en queilion rira vite de fa poche du papier
& une écritoire ; & moi je lui vuidai dans
Ton petit chapeau tout ce quej'avois dans les
miennes , que ce vieui Capitaine des Portes
fouilla eofuite très eiaâemcnt ; & aperce^
vant uae bague au petit doigt de ma main
gauche , il ms dit de ialeur donner par forma-
Eté feulement : je me doutai bien^ue c'étoit
pour la parapher, ut ■varittur. Mon Aigre-
fin fit un memoiredemesNipes, &demoii
argent, & mit fa foumiiTîon au pié , qu'il
the lailTa, & m'en fit iigner le double, qu'il
empoita avec ma dépouille , en mOntraiir
unejoîe, conune fî le toetluieûtdéjaapar-
icnu :,^ cous }es antres fermèrent lespottcs
fur nioî , aVcc un bruit effro'iable , en me
taiflant feiit dans ce lieu de ptair3nce,où je
n'avois pour tonte Compagnie , qu'un cha-
grin devorsnt, avec lequel je iiae mis i ru-
jniaer fur ce qui ponvoit caafermadifgTace.
Suis je trahi, di fors -j« ^ fans doute quelque"
fatale Lettre femblable à 11 première a caufé
mon malheur. Pourquoi n'ai-je pas veuMr.
Chamiltarti' Je vololt de peni^ en peufée,
fins pouvoir décider laquelle étoit la plus
^tâe, puis qo'iln'yenavokpasune qujdon-
nit fiu bat. L'image de toutes mes infortn^
- oes qui fivppa le pins mon imagination , &'
^ui portale coup lepIusfeAfibleàmon cœur,-
fitt celle de ma Ch^e Ëpoufe, atnndonn^e
à la dottlrnr la plus vive dans un Pais étran-
ger, fius p«ov«irtitetde fKamn & decon-
fola-
.--„Googlc
9B PH^we de U BaftiHe. 3J
rofiCÏon de Pcrfoane , que d'an Jeune En*
tant dont l'âge tendre étoit plus capable de
ladcfoler, que de la foulager. Cette feûl«
idée m'a plus tourmenté , quelque refigna-
tiiHi -que j'aïe eue en ia mirericorde de Dîcti,
Cfoe toutes les cruautez , dont on m'a acca-
blé pendant plus d'onze Années.
Après avoir ftitplufienrstoursàgrandsîîaB
dans cette vafte Caverne, je me mis à en
&jrc l'inventaire, qai' fut fore fuccînt ^ car il
f avoit pourcout meublé un petït Ht compo-
12 d'une mechinte paillaQè, d'un petitlitde
plome , 4*un matelas de bonre , d'ane mé-
chante couverture , d'un périr boîs de lit ,
tout mang^ des vers, avec un ToordeBïo--
quelle ou Porte-Paris , qui étolt la moins
DMOvaife pMce dn Grabat , avec trois grands
FaaMnils de commodité garnis debougran!^
& bien embourez.
Les mnr^'lles toutes noires &: enfilméeS
de cet epartement étoïent tapiflTéesdes noms
de mes ntajhcnreuxpredeceueurs, Àdetout
c« qn'tls y «voient voulo écrire. Sur l'eu-*
(froit le pJni aparent , à-cftté de la cheminée,
' il yavùîtécrit en gros earaflére. La Veufve
Lailly & Odricotte fa Fille Irlandoîfe ont
(û amenée» dans cet Enftr le 17. Septem-
bre 1701 : je mett celles cy les Premières ,'
eu j'aerat fejet dans la faite de lîion Hiftôi-.
[c ds parler amplement de Cet Femmes , &.-
d'Odncot Mary de laFillede la Veuve Làil-,
ly; veu qui! lenrïft arrivé des chofes terribles,
& qui dcvroient rendu* CorbéSc l'AumÔnjet^
Gimat *gnes do feu. Ce Vers (Etoit écrit,
for la ehemiatîe.
Z}4f
.--„Googlc
4A ' L^lnjMifitiam- FréUftifi-
Dot ventatH Corvis-, iSix'at ernfnra Cilomhar* -
&■ au defTous Maillefer Prieur du Val-SecreC
né à Rheiins ; & plus bas Henri d© Mont-
inoreacy Duc de Luzcmbourg % été amena
îct : le relie étoit effacé : en c0et j'aprîs qa&
ce Maréchal de France , qui f^ès-afait tant
' d'éclat dansle Monde, avoii été long-temps -
enfermé dans cette Chambre , anlSbien qae^
le Maréchal de Biroa , & le Macéchal de
BaiTompierie. L'on meditQacoreottec'é--
toît dans le m£mc lieu , que Mr. de Sacy ft-
voit fait la plus grande partie defon admira-
ble Traduâion de l'Ecritute Sainte , avec
fon excellente Explication tirée des SSi Po--
ries, & des Auteurs Ecclefiafliques. QucMr.-
delaToUanne à qui l'on vcnoitde faire ren-
dre compte d'une manière & prodigieufe, y
avoir été enfermé. A côté de la fenêtre qui.
ttoït Uen vitrée , & fermoit i deux grands
volets ;, qui n'avoîent' qu'une grille , mais-
très forte, avec un treillisdeboÏE endehors
peint en vcrd , qui empëchoit i ceux qui fe-
Îromeuoient fur le Corridor, on dans le-
irdin de voir les Prîfonniers |. mais quin-em- - ■
pêchoit pas les Pnfonniers.de les voir, & u-
ne grande partie du Jardin, de la Porte , Sx. .
du r aux-bourg S. .Aôitoine ; à c6té dis-Je de
cette fenêtre, on voioit écrit les Noms fui-
vans. Poiret dcVileroi de Vaucouleur , Iç
Vicomte dé la Laone , X.oUi$ Getvais , Clas- -
de de Launay, Madelaioe de faim Michel, ,
& une inanité d'autres^ dont il ne me Cou-
vient plus, avec quanciiédebellesl^nccaces;,
mais il y avûif do Coofcild'UD Priace Ita-
lien,,
en rHifioipe d* Ât Bi^tte. 41
lien, que je trouvai aflifslïngalicr, mais d'a-
ne très pcroicicafè confeqoence:
EmpvifiHM ovè JirtMgola.
Cependant, comme jeraiapmdanslïfui-
te, il n'y a eu que trop de mes malhcoreax
Concaptifs, qui ont mis cet abominaUe avî»
en ptvique; je l'eSa^ai auffi bien que lenom
deion Auteur , que je tais pai le lefpeâ qui
cft dâ à fa Famille. Te fuis très perfuadé
que Mr. le Prince de Kiccia arrêté pour les
troubles de Naples, qui étoit dans cetapar-
tement quand je fuis fort! de la BallilIc,ratH
la Qiaé de meilleures maiimes , & c'eS dcquoî
fes vertus , & fur tout fon édifiante Pieté
me repondent. Je ne puis encore m'empé-
chei de ^^MUtc^ ce qui étoit écrit derrière un
des vollets de la fenétie : à la fuite de plu-
fieucs qui 7 avoient écrit le fnjet de leur dé-
tention, on voioit ce qui fuit. Et moijeaa
Crânier, j'ai ité traduit ici deViacennes,
oùj'avois ciSi la tête au fripon de Beraaville
Gargotier , ou plutôt Bourreau du Chitcau de
Vincennes, pour m'avoir fait rouer , en fa^e-
fence , de coups de bâton. Un Prifonnier avoit
fait cette fentcnce : Patient!^ hvimsfil malmm.
& le même Crouier avoit écrit au defibus :
Ls Patience edlavertu des Afnes, &cnûa-
te qu'on doutât qu'il étoit l'Auteuideccye-
nenible Proverbe , il avoit mis fon nom au
deflbns. J'ai connu & fréquenté très parti-
culièrement le Frère de ce même Ctânier ,
fi connu en Hollande pour celui qui faifoît
la Gazette Burlefque , fon Ftere t'appelle
SimeoQ le Crôoler Sr. du Teil de la Paroif-
h de St. George de Rouellay , Ifieutqaaot.
de
.--„Googlc
4> L'iMfMiJitioK Franfoifi
de rEleaion de Mortwi , qui cft an très
honnËEc homme , bon & genereui Ami , &
qui a une fort aimable, & honorable Famil-
le; il m'avoit feit entrer dans leur Société ,
qui eft tonte des plus charmantes , & com-
pose dePcrfbnnesfçavantes&dcmentc, en-
tre autres de Mr. de Hoiicflay Seigneur & Pa-
tron du Heu, &dcMcflîeurs fes Frères Gen-
tils-hommes très accomplis , deMr.duPont
Oué du lieu , DoÛetir de Sorboiine. l! lî-
toit de Magelone en Languedoc , & fa
fdence , quoique très profonde , bien loin
d*itre fauvage, étoit toute enjoUée&fecom-
muniquoit aifement, & avec plaifir; unAd-
vocat nommé Mr. de Kiotiere , qui avec de«
manières tris civiles faifoit parfaiteincntbien
lei honneurs de fa Maifon,étoit do nombre.
Comme je Ans ravi de dire du bien de mes
Amis , jB croi t;iie l'on ne fera pas fâché
que cette petite flirgreffion faflfe connoître
les douceurs que j'ai goûti^es , avec des
Gens qu'on ne peut trop' loiicr. En faiHint
TEloge de ceui-là, je ne dois pas paflcr fous
filence, Mr.Ie Comtcdc l'Apenty , &Mrs.
fes Frères, Mr. le MarquisduBaillculHer-
fty de Goron , Mr.deLongu^veLouvigtn-,
Mr. de Champcaux Mattîgni , Mrs, de St.
Patrice, Benuflon, du Bailleul Lieutenant
General de Mortain , & fes Coufins , du
Temple Rufigni , & une quantité d'autres
Gentils-hommes qui font honneur à leur
Païs, & qui vivent d'une Société toutà iâit
exemplurc , & dont j'ai reçu mille marques
d'amitié pendant quatre ans ijuc j'ai vécu a-
vcc eux ; Je connoiffols d<j» la plupart de
ces
tm THiftolre dt la Bafiiïle. 4|
ces Meffieurs de)>ais long-ten^s , pour vttAt
ûadié, (mfervi IcRoiaveceux. '
l'étoîs occupé à lire les vstiâez qui étcrient
écrites iax ce terrible & inébrsinldble cafaiei^
qae l'on appelle commanenxnt le Reg^ftrc
des fous , lors que j'entcadjs bruire les ver*
roux de mon trifte «patement , dont il ftl-
loit ouvrir cinq portes avant que d'y entrer,
qni âiîfoienE un bniit terribteçn lefrOQvr&nt;
ï. Quoy repondoient lagubremeat les EctiM
qui tftoient luitdaAs l'efcalier , qn* dans Ici
^rtemei» qui y joignoJent. Les claq pot^
tçs ouvertes , je vis entrer an Monâre iuîvl
d'an Satyre , cnr c'ejl aîsfl qa'oo peot ae>
peller les deia hommet qiri me vlnreoi v»-
tcr. Le premier qui eflti4 aT<^ le mesflb
UDt bûuâ , fon fiiont fcmUoit être latedcot-
ee d'arbre ftir laquelle )• petite vérole «voit
pris i ttche de graver l'Alcontt , Tes yeiït
cachez comme aufond^denicoracstidez,
fous deux fourcils ép^s d'un ponce, étoieat
rotn &atfreax, fon nez tout buriné, & tour-
né en pied de marmite . chargé de vingt ou
trente «utrepetltei n« detoutes les couleurs,
paroiflbir une néâe écrafôe au deffus de fa
bouche dont Ict Mvres bluâtre* fcmées tfc
petits rubis & de petites perles fe rdevoiem
eu doubles bonrelets , fçavoîf la fupetiéta«
au niveau de fon neï, & l'inferiçoie ombra-
geait une partie de fon menton couvert d'un
crinpiusnoir que du geaîs : î% âcure courte
& ramaiTée , oe pouvoit prefque Te fomentf,
tant l'eau de vie dont elleétoit pleine U UX~
foit chanceler, lié Satyre éroit en cherrùfê
Aien eatleçoQs Tans autre bonnet à ia léte-
qu'une
44 L'l0quifitio» FrMfoîfe
qu'une maffe de poîl roux , nuis d'an roux
d'airain tout hciilTé & qui paroi0bit n'avoir
^té peignée de plus d'un An ; un pareil poil,
d'une nuance plus roulTc cachoit toutronvi-
fàge jufques fous les yeux , qu'il avoit toat
botdei d'écarlate : au travers de ce poil , on
ne laiflbit pas de voir que fes jolies creufes
étoîent pliâmes comme un vertugadin ; & la
bouche relevée comme celle d'un N^ure ,
en s'ouvrtDt , montroit un râtelier jaunâtre,
& mal rang^. Dans la faite j*^ apris que
le Monstre s'appelloit Jacques Ro]!àrge,q)ie
.le GouTerneur avoit érigé en Major , & le
Satyre Anthoine Ru , qui étoit un Serviteur
-de ceux qu'on nommePorieclefs, &quil!e-
:Toit me fcrvir; tous deux Provenceauij^pis
je ne te peux dire, difoitHenry IV. LePre-
micr en entrant dans mo^^ antre , le clia-
peaufôus le bras , & très mal Enguenîllé ,
car Ton habit jadis bleu , d'un gros drap qui
montroit la corde de tous les cdtez étoit
blanchi de vieillefle & paroiiToit li caduc ,
qu'il ne fe foutenoit plus qu'à l'aide de plu-
fieurs pièces de raport fort difcordantes arec
le gros de la macJiine ; ce Narquois dîs-je ,
me ât quatre àcinq révérences avec des con-
torlions & des mouvemens qui dansuncaa-
treiàifonne m'auroient pas peu rejoui. Le
fécond portoîc une petite table pleiante ton-
te oeufved'unemain, & de l'autre une gran-
de cruche de grais pleine d'eau , qu'il dg>o-
fa dans ma chambre , & pendant que le Ma-
jor m'entreienoit , il retourna quérir un Pot
a c»i, & un pot de chambre de &îsiicejjin
vene, deux lerviettes blancbes^ goe dwife
pcr-
u,:,-,zf--„GoOglc
' am.rrUftoireJtUBéfltUt. 4f
fece^ede bois .de noyer fott ftropre, une
fàilicre, une cneitlicr, &uaefbatcbened*é-
taÏQ, arccURpaîtçoiue&u, letonttoutneu^
an psùn environ d*une livre, & unebouteit-
te de Tin d'un verre double, environ de troÎE
demy fcpriers ; ii étoîi à peu près onie heu-
res & demie. Je demandai à cet homme ,
qui me dit éttbie Major , û L'on ne me met-
troitpas dans une Chambre plus, propre ft
tapiâée , & fî Mr. le Gouyernear.me fù-enoit
pour un bandit, de m'envoicrune cuillier &
uoe fourchette d'étain. Il me protcûa qu'on
n'en doonoît pas d'autres aux Princes ; que
il ta Cour vouloir bien me te permettre , je
pourrois en faire venir d'argent, & d'auttct
meuble^ tels que ielesvoudiois , mais qu'il
meiallolt un oiore exprès du Miniftrc : il
me protcila que Citais dans la plus bdte
chambre de la BaUille, comme depuis i'ù
apris que c'étoit la vérité , que le Roi ne don-
noit aui Prifonniers que les quatre muraillets
& qu'il me fàudroit paj'er fix francs par Mois
pour te loyer de mon lit; ce que depuis j'ai
apris être une friponnerie des Officiers,. pu»
que le Koi fournit les Pdfonniers d'£cat^|F^
neralement de toutes les chotès oécefTaires
{>onr la vie & pour la confervaciou de leur
fanté. Il voulut envoler qucrir un £^ot &
fïire allumer du feu pour chaâcr te mauvais
air de la Chambre , mais je l'en remerciai
parce qu'il ne ^foit déjà que trop chaud.
Je lui deo^ndai lî l'on ne me tendroit'pas
mamomte, domj'avoisbefoia, & lesautres
Mrdes qu'o{i n^'^oit pilfes le matin , mais
.fili tou[ uses Itvies qui pouiroiciu m'entre-
4t L'Iufiùfitia» FrMUfaife
tenir duis ma fblinide. Il me répondit qae
& tût que le Miniftre en auroit fait l'eiamen,
pn me les leadroit à la reÇenc de l'aigcnt ,
& des ferremeats qoi pcnin-oïenc oie Icrvir à
quelque maarais ul^e. Je voalus fçavoîr
quel étoit leMinidreaevant qui ilfalloitf»-
re palier mes babioles en reviie : il me dît |
que ccladepeiidoitdeMr.leComcedePoat- '
chartraÎD , qui ne venoic prefque jamais , à
JaBaftîlIe, qu'il enavoit tailTéle ToinàMr.
des Granges ion Commis , Beau Père du
Filsde Mr.deSt. Mars, avec uneefpécede
Dîreâionà Mr. d'Argençon te Lieutenant de
Police de Paris , qui avoit encore fous loi
Mr. Camufct Commiflàire de la Baflille. H
me demanda combien d'argent j'avois Tur
moi quand Corbé s'en éioic emparé. Je lui
dis que je n'avois que cinquante deux livres
& quelques lettres de change , te reite étant
dans mes coffres : je lui montrai le mémoire
de mes hardcs , avec la foumiflîon de Cor-
bé. Comment dit-it brufquement , voilide
bonnes nippes î cela doit m'apartenir ; je
vais bien les lui faire rendre. Ce DifcouFS
me donna bien à entendre en quelles mains
j'étois tombé,. & m'anonça. la perte de mes
bijoux ; car comme il étoit yvre , je raî-
fonnois fur le pciocipe
Je lui demandai quelle forte d'homme c'âioit
que ce Corbé, & quel étoit fon emploi : il
me dit qu'il étoit Neveu du Gouverocar i
qui l'avoir fait Lie'uttnani de la Compagnie
qui gtudoit le Chftteau j mais qu'il étoit an
dcf-
.--„Googlc
o« FHiJhire it U B^ïtle. ^7
ètScas de lai, puifqii'il étoît Major de I«
Baflîlle ; qu'il étoît parvenu à ce pofte glo-
rieux par tous les degrez ; qu'il yavoit treate
& un an qu^l fcrvoit Mr. de Si. Mars ;
S'il avoit d*abord poné le moufquet dapsfa
mpagntc, &quc lors qu'ilétoicvenuavec
lui, des Ifies de Sainte Mar^erite à Paris,
il avoit rhoimeur de porter ia hallebarde. Il
n'en falloit pas plus que cette éloquen-
K decIaratioQ, joiwe à là figure, pour m«
tiiire co9iioître le Perrotinage. Je lepriai ce-
pendant de faire. mes excufes à Corbé, apre^
nant qu'il étoit le Neveu du Gouverneur ,
de ce que je l'avois brufqué le marin , mais
qne l'affront qu'il m'avoit fait , joint au char
grin de me voir arrêté contre toutes (es ré-
gies de la juftiçe , m'avoient pou/le à lui en
tôno^ner mon relTentiment contre les de-
voirs de la bienfeance :, il me répondit que
ce a'étoit qu'une bagatelle; qu'il elTuioit des
chofes bien plusoutrageantes,&qu'ilfelcsar-
litoit par fes manières dcfobligeantes & parfon
avarice dcmefu ré e. A peine pouvoît il fe foute-
nir, cependant il ne raifoanoit pas mal pour
un homme qui paroîiroit enfevelidaoslacrar
pule; il fortiteiifail^ntdesSStrèsperiSleufes
&je l'entendis qui penfafe cafferlecoudaaï
la montée. Le Satyre qui puoit plus que le
bouc le plus infeâ, ferma la porte, en me
^^t, qu'il m'alloit aporter à dîner dans lé
ntomeat:je lui demandai rï c'étoic le Roi qui
me nourriroit , OU s'il me feroit permis de
me faire aporter i manger à mes d^ens ,
mais il ne voulut pas me repondre.
Je ine am aurore i. i£vei Gu ma fùnefle
avan-
.-„Goo.jlc
48 L'iMjuifithit Fraufoîfe
ftvanture , 1 reparler tout ce que j'avoîs farè
& dit; ■& plus je chcrchois à deretoper la
csiufe de mon malheur, plus je m'enfouçois
daiK des raifonnements qui m'entreiEtoii^at
d'un abyme dans un autre lâns en pou-
voir Ibrtir. j'élois enfevcli dans ces rêveries , -
quand une heure Tonnant , je fus revallé
fax te tintamare des verrous qui fembloient
me pénétrer dans les os; laderniére porte ou-
verte je vis entrer Gorbé,quimef3lna d'oii
air riant ; il écoit futvi de mon puant Porte-
clefs, chargé de plats ; JE mît une de mes
fervtcttes fur la table & y plaça mon difné,
qui confiltoit en une foupe aux poids verds ,
garnie de laitues, bien mitonnée & deboone
mine, avec un quartier de volaille deflus ;
dans une alGette il y avoit une tranche de
bœuf iiicculent avec du jus & une couronne
de perlïl , dans une autre un quartier de go-
diveau, bien garni de ris de veau, de crêtes
de coq, d'alperges, de champignons, de
truffes &c. & dans une autre une 4angue de
-mouton en ragoût, tout cela fort bicnapré-
té; & pour le dcCftrt un^ t cuit éC deux pom-
mes de tenettes. Si tôt quelcPorte-Cletseut
fervi iJs'enalla. Corbcs'affit auprès de moi fii
ne voulut pas prendre ladroitte; je l'invitai à
manger, mais il me dit que cela ne lui étoit
pas permis, & voiant que ^e ne mangeoii
qu'un peu de potage . il me loUicita déman-
ger d'une manière très engageante ; je lur fis
des excufes fur ce qui s'étoii pailif t« matin ;
mais il me dit fort obligcammentqil'ilfalloit
uc pas taire attention à la fentibilité d'un
homme qui r« voioitdaaslaJîtuatioaflchcQ-
fç
.--„Googlc
r
am PHiftùire de la BafiHk. 49
j ïèoàj'étois; qnedèsqa'il le pourcoi'til me
■ fcroit rendre mes hardes, J'inlillai fur mes
firres, & il nie promit que fi-tôt qu'ils aa-
lOicQt été examinez, il me lesrapottcroitluï
même. Il voulue me verfcr du vin de cette
botucille qu'on m'avoït aportée le matin ,
c'étoit de rrès.bon vin de Bourgogne, & le
pain éioit excellent. Je le priai de boire ,
mais il m'affirma qu'il ne lui ^toit pas per-
mis. Je lui demandai fi je païerois ma nour-
riture, ou II j'en ^tois redevable au Roi. II
■ médit que je n'avois qu'à demander tout ce
qui naturellement pourroit me &ire plailîr,
qu'on tâcheroit de me iàtisfaire, & que S.
M. païoît tout. Je m'informai fi M.dcTor-
cy ne me donneroit pas des Commiflaircs
pour m'cxatniner ; il me dît qu'il falloii at-
inidre les ordres , que d'ordinaire on adref-
Toit à M. d'Argençon, que M.dePontchar-
triin avoir commis pour en faire le raport
an Roi. Je le pn'ai demedirequandilcroioit
que je pourrois le Toîr : il ne vous verra pas,
me repondit-il, qu'il n'en ait un ordre exprèi
du Minillrc qui vous a fait arrêter , ainu ne
vous impatientez pas , & fur tout point de
lriûel&, banniflc2 la autant que vous pour-
rez. Si-tôt qucj'cus mangé, il prit congé de
moi de fort bonne grâce, en medifant que
fi je voulois qu'une autrefois il eût le plaîfir
de m!entretenir pendant mon repas, iltallott
que je mangeaflè de meilleur apetit , & c'é-
loit dc^noi fon Oncle me. prioittrèsinftam-
nent. Je fils fiirpris de trouver tant de civi-
lité daas un homme de li mauvaife apparen-
ce , & qui m'avoit patu II btutal le matin ;
C mi;is
^...Cooylc
g« L'iM^MÎfitioKfranfoi/i
maif firas doate que fon Oncle lui avoit fait
fa leçoD , comme j'ai eu tout lieu de le
Cfoire. Il ferma toutes les cinq portes
fur moi , & me laiHà fcul arpenter ma
chgmltfe.
Mes refleiions vinrent encore m^aflôillir ;
celle qui dans te moment meparoilTotttapIUs
vrai-lèmblable , 'étoit détruite par celle qui ' la
fuivoit ; de reflexion donc en reflexion , je
vins à celle qui me rapclîaquej'av^isétéia-
vité par unOflicier de !a Panneterie nommé
Mr. Warm:é , fort joly homme , &. d'autres *
Officiers d'être d'un rt^al qu'ilsdcvqîeiîtfai-
re à St. Cyr, lieu qu'ils avoient chom pour
la commodité de Mr. de la Fcrté IHreâeur
de St. Cyr mon bon amî , qui en deroit êtTe^
& où ils dévoient célébrer la fête de St. Ho
noré , que i'Egliib Romaine a indiquée aa
if. Mai, f^netle jour pour moi. Un (laf^
con en mi place n'auioit pas manqué dédi-
re que MocitîeuSt. Hoanorat, l'auroit beau-
coup deshounorat : pour moi j'admiroîs la
viciflîtude des Chofes : aujourd'hui , difoit- ,
. je, je devojs me régaler avec mes Amis, Se
je Aïs enfermé dans un lieu zàïeax , oà
dans un morne lilence , je n'ai que lescha- j
^rins & la triileil^ pour toute ctunpagnîe : \
mes amis boivent à ma lànté , & peut être '
qu'ils raiibnDent lôr mon cmptifonncment !
bien ou mal , Aiivant que te vin leur fugge- j
re, tandis que moi-même j'en raifoiuie peut I
^treencoreplusmal qu'cui,fuivantque mea j
caprice le veut. O jour tàial ! m'écrioSs-jç
' en mon cœur , que le i6. Mai, que je dois |
bien te marqua d'une pierre ooitc! Ce ts,
jour
ou VH^m Je U BsfiilU. j^
da Mots de Mai me n^lls un Trîolet de
Mr. Ranchin , tpiî » été regarda comme le
Ony^éc des Trfolets : Le voici , fl j'ai
booue mémoire :
te premier jt*r dm Mais de Mat
Fmt le plHJ heureux de ma vie :
Le ieau dejfeiu que je fortnsi
Lt premier Jour du Moii de Msi\ ■
y« vont vit Es" je voMî siméi :
Si ce drffetK vomi plut Syhie ,
Le premier jour du Meti de Mai
Fut le pim heureux de ms vie.
Et dans le moment je fis ces Bouts - rimez
I *pw j'écrivis contre le mur avec mon coa-
BOUTS-RIME Z.
Le fcizi/mt - - - dmMiit de Mai
Fut le plus erutJ - - d« ma vie:
Datu ia'BaJIilli je fâ - mai
L e feiivémt - - - dm Meit de Maif
Ou me ravit te que f - aimai ;
Pmiique jt perdtj ma - Syhfie,
Le feiiiAti* • - . du Mois de Mai
Fut le plui fruel - - 4* ""' "'•
_ Uo moment après avoir rfcrît ces Bouts-
■iinei , je voulois les efFacet r quoi ! fuis-je
fon,difois-jcenmoî-méme, dcnùrcdcsveii
dans us tombeau , où je ne dcvrois fongtf
^B'ilàiremonEpitaphe i car c'eft ici tetom-
bnu des vivants , où je me tchs cefcvcii A
C a M
.-:„GoOglc
la fleur de mon ige. Je promenois mes
yeux fur cette valte^ éteudut: ^murailles ,
qui fembloient netne prefeatcr qucdesfpec-
tacles d'horreur : j'aperçus auï quatres an-
gles de la Chambre quatre figures antiques
mal taillées, & les aïant examinées de plus
près je reconnus que c'étok les quatre fim-
boles que l'on applique aux quatre Evange-
liftes , l'Ange que l'on donne à S. Matthitu,
le Lîoii à St. Marc , le Taureau à St. Lac,
. & l'Aigle à St. Jean : je vis encore d'autres
niM-ques qui me firent croire que ce lieu a-
voit fervi autrefois de Chapelle, ce qui me
fut après confirmé par les Officiers , qui
me dirent que c'eil ce quj fàifoit appellcr ce
liew l'apartement de la Ch^elle. Il s'éleva
r après midi un vent qui donnant contre mes
fenttres , formoit des accents , en parlant
par les jointures des carreaux des vitres ,
comme d'une Perfonne qui fe feroit plainte
(JoulouTcufement. Quoique J'euffe une con-
noiiïaace parfaite de la çaufe qui exciroît ce
bruit, il ne laiffoit pas de redoubler ma trif-
tcffe , & de me rapetler les plaintes funelles
& juiies qu'alloit faire ma chère Epoufe &
toute ma Famille defolée lors quelle apren-
droii mon crilel einprifonnement. Quand
le vent redoubloit , ces prétendiies plaintes
redoubloient avec une variété très touchan-
te , & cela continua jour & nuit fort long-
temps ,' ce qui ne laiflbit pas , malgré ma
Philofophie , d'entretenir ma trilteflè. J'y
aurois Wen mis ordre , fi j'avois eu du pa-
pier & de la colle , mais j'étoîs dedituc de
tontes chpfes , & quaad j'en dçipaodai aux
^ _ Of-
u,:,-,zf--„GoOglc
OH riSJÏcirtdt h BafiilU. j^
Officiers , en 'car fàtfànt connoître lefujei
pourquoi je le demandois , ils me dirent
qu'ils ne pouvoient m' enaccorderfàns un or-
dre exprès de laConr,
Sur les quatre heures après midi le Porte-
Clefs vint deflêrvir accompagné du Capitai-
ne des Portes ; il m'^orta quatre groflèsr
chandelles de quartier, un chandelier de fi-
ïance , une bouteille de vin pareille i celle
du matin , & une pure de draps très fins Se
blancs ; je leur demandai fi quelqu'un vien-'
droit faire mon lit , mais le Capitaine des
Portes me dit , qu'il felloit obtenir de la
Conr la liberté de faire venir mon Vallet,
dont le Roi paicroit la nourriture & l'entre-
tien , & qu'en attendant qu'on m'eût accor-
dé cette grâce, je ferois obligé defairemoti
Ift. IJc Porte-clcft fortit avec tout» favaîP--
felleA fon dîné, auquel je n'avois pas preP-
que touché , non plus qu'»i Vin qu'il rempor-
ta , & me laiHâ feul avec le Capitaine des
Portes. C'étoit un homme affreui , & tel
que Rubensdépeignoit fes bourreaui , quand'
il vouloir nous iaiflêr une fanglante idée de
h paffion de J. C. dans quelqu'un de fcs ta--
bleaax. Ilavoitles épaules groflês- & roit-
des comme une timbale renverfée au niveau
de fa tête , qui fembloit enfoncée dans fcs
épaules; à peu près commeBoierPetit-Puys
dans fes voy^es , nous peint certains Peu»
ptes qu'il dit avoir veu dans les Indes_ , ati
delTusdufaultdelaRivieredeSunnam > qui-
ont le vifage, un peu au detfous des épaules,
à côté de leurs bras , & immédiatement au
delliis de l'eltomach. Son vif^e compofif
C 3 «n
u,:,-,zf--„GoOglc
54 VhpùfitioM FfMifife
en moliqae , ham & 1ns & tout de ttaver t ,
avoif plus l'air d'un Lion contourné que d'ua
Homme; il reilêinbloktantfes jolies écoieot
bouffies, au Chérubin du jugement fonnant
de la trompette , excepté qu'il s'en ^Iloit
beaucoup qu'il ne fût (î beau ; fôn nez étoit
&tt comme le bout d'un andoiiiile , & tout
Son vilàge cnIuminéd*uniougenoif , paroif-
ibit itxe un de ces uiafques , dont onfefeit
i l'Opéra, quand on tàitparoîtie fur laScé-
ne des Diables foitauts de l'enfer. Toute Ik
^KoregroiTe, coune, &rainiiir^eétoïtplutAt
tonde que carr^ : il portoit fes propres che-
veut , dont malgré fou grand âge , il n'y en
^voitpas encore un feul de blanc j ileilvraj
que s'il en eût eu deceUe couleur on ne les
anroit pu diRinguer , tantiis étoient confits
dans la grailTe , outre ^u'ii n'en avoit qu'un
jKU fur les oreilles & au deiriù'e de la t£tc
tout le relie ^tant pelé comii^e un genou.
. U me dit qu'il javoixtremedeuzans qu'U
ftfvoit le Gouverneur, un an avant le Ma-
jor , qnî Tavoit Tuppiani^ dans cet en^loi ^
qui devoir lui apaitenir, puifque l'autre étoû
un miferable Ramonoeur de ctieininées , qui
étoit entré la première fuis dam Paris lagaa-
le fur l'épauk. Que pour lui il avoit eu
i'bonneur de conduire ks Chevaux de Bas~
Il les Mulets des fils de Mr. le Gouverneur.
Qu'il étoit bien vrai que fi il avoit f(â lire &
.écrire, on ne lui auroitpas {ait cette inji4fti-
cc, Ciue bois ceuefcience, ilneluienman-
quoit pas une feule ; qu'il avoit eu le bon-
hem de convertir pour la bonne part quantité
de PioteHantt ,. k même îles Miniflrts des
plus
u,:,-,zf--„GoOglc
e» fHiftaire de la BaJIille. f j
plus hauts hnpcz. Si les pins barbares tour'
ments peuvent pa£Ièr pour de légitimes
moiensde convcrlion, je fuis perroaa^ qu'il
nùTonnoit jufle , car ^s M^res en avoient
inventé , dont il avoic été l'exccuteur , qui au-
iwat retuté les bourreaux des Nerons , &
des Diocletlens j cependant j'ai remarqué *
dans la fuite qocc'étoit ie moins méchant de
tous lesËcorcheurs de la Baflille, &leplus
confciencieux des Officiers , (i tant efl qu'il
icfte de la confcience à ces Gents là, après
qu'ils ont fait le ferment de fidélité entre les
mains de leurs Maîtres , dont le premier &
le plus inviolable' ell de ne jamaisdire la vé-
rité. Il me plaignit beaucoup d'être tombé
dans un lien suffi teniblequccdui où j'étois,
& ^rès avoir bien prié Dieu de me donner
la patience de fuporter mes croix avec con-
ftaoce , il me lailTa feul r£ver il ma dif-
gnicc.
Repris le psr^ de^Kremonlîi poorUpr^
miére fois , le moins mal <]ae je pus , après
?;Uoi je reattaidanslclabyrinthedcmeicrcti»
es refleâions : je m'y égarois CDcinre lors
que ùu tes fepthçnref j'entendis recommen-
cer le charivait de met tânianisverroux ,capa^
pie de faire trembler l'homme le plus ferme.
La porte s'ouvrit, & jevis entrer Corbéfol-
vi de Ru, chargé de tnoQ fuupé , quicontillott
cnun morceau deveaurôty de très bonne ap-
parence S( du jus defTous , avec deux autret
aflicttes , dans l'une derquclles il y avoit la
moitié d'un poulet, & dans l'autre un ragoût
debeatilles; au tout ^toitjoiatune faladede
cœurs de Intact trètbieo aflàifgonée , & pour
■ C \ le
.--„Googlc
Jff Uînquifitian Franpoife
le dcflert une affiette de fraifes au vîn & au
fucre. Depuis le iff. Mai que j'entrai dans
cette chambre jufqu'au 31. Juîlletfuivantqne
j'en fortis, je fus toujours trairté à peu près
de la même manière , mais toujours avec
changement; c'cllàdire que fi j'avoiseuau-
jourahuî un quartier de volaille furmafoup-
pe, le lendemain c'étoit un morceau dtjaret
de veau, ou unquarrédemouton: toujours
de la patillèrie , foît de petits pâtez fur le bord
de mafouppe , foit un quart de godiveau , &
les deux aflîettes qui ac co m pag noient mon
bouilly toujours différentes de celles dn jour
précèdent. Au foir on obfcrvoii la même
légle: un jour c'étoit de l'Agneau ou du Mou-
tonavec un Pigeonneau, & l'autre jour c'é-
toit du veau & la moiiii; d'un Poulet, ou le
quart d'un chapon&toûjouts iin ragoût dïf-
ftrent, avec une làlade &uni3ejrert,,le tout
très propre & très - bon. Tous les matins
on m'aportoit pour tout le jour un pain
d'une livre cuit la nuit précédente, & du
meilleur de Paris & une houteille de vin
environ de trois demi-feptiers pour mort dî-
né ; & l'aprts midi , on m'en aportoit une
pareille pour mon foupé. Les jours maigres
j'étois encore mieux traité que les jours gras.
J'avois toujours pour le dîné une très-bon-
ne fouppe, quelquefois aux écrevifes, aux
huitres , aux moules avec un plat de trèj
bonpoilToR bouilîy & un de rôty ou frit,
4 une affiette de légumes, comme afperges,
artichands , petits poids , choux fleurs \
felon la fiu'fon , ainfi que du defert. Pour
te poiffott foit de Mer, foit d'eau douce, je
^.. puis
u,:,-,zf--„GoOglc
0» VHiftoire J* la BafiilU. Jf
puisaffiimer que c'étoît da meilleur de la
PoiflbDnerie,rouventda Siuraon frais, des-
Vives , des SoUes , de la Perche , da Bro-
chet j des Trurttes &c. tout bien af rété.
Dans une des bounes Auberges de Pm-ïs je
n'aurois pas mieux été fervi à un ëcu par re-
pas: mais dans la fuite il y eut bien à rabat-
tre, paîfque le cruel Corbé& l'Avare Berna-
ville, à peine m'ont donné de la vache plu)
inauvaifeque cellcqu'on donncauz Soldats,
Scdeméchantes légumes, comme pois, fèves,
haricots, lentilles &c. cuites au Tel &à l'eaii,.
& cependant le Roi pai'oit le même prix au-
dernier jour comme au premier, comme je-.
l'ai apris dans la fuite, qui écoit une piltole.
I^ jour pour ma feule nourriture,
C5orbé me âi encore pins de civilitez au fou-'
^qu*ilncm'enavoit Ait àmondîn^: il m«.
l'ervit lui-même à manger &ï boire-, me:
pria de lui dire ce qui étoit de mon goât , a- ~
lin qu'il m'en ût fervir , & me fit bien des •
honnâtetez, auxquelles jenemanquaipas de-
repondre de-mou mieux, & quand j'eus foupé-
il prit congé de moi, & me Idlfafeul enfer'
mé dans tna -chambre attendrela plustrille-
miit que j'euQe, encorepalfée de ma vie, qui^
a été fuivie de 4&ci8. autres, dont la^ plupart,
m'ont paru plus améres que la mort. Si-tdt-
qu'ii eut fermé- les portes, & que- leur bruit
^raïant eut cefTé , je rentrai dans mes rêve-
ries , dent Dieu meretira par fa divine tnilè-
ricorde pour me faire rentrer eu moi-même &. .
ine&ireretoumer vert lui, Jeme jeuaiàfes ,
pieds, j'implorai foa aâiHance. dans l'état de :
ptonU>Icoàj«inevoïoisredatt:jerepallùitou-.
c j; «^
.-■^.(Google
jet t*Imf»^tiê»IrMifo!Ji
te maviey'cB deêeftai rirrégularité,& ma niM-
Ttilè conduite, 4c les égarements dema jeu-
net excitèrent en mon cœur un verîtablefic
Sacire repentir, «^ui me fit répandre un tor-
rent de larmes. J'entrai amoureufcmentdans
les plaies de ]. C. & j« le priai tendrement
d^briïler &decoafbmcr dans le feu de fon
aniente charité tout ce qu'il voioit en moi
«Tindignederadivineprefence. Pourquoi ,dî-
fois-je chcrdher hors de moi les fajets de ma
ftiron, dontje ne découTrinii jamais la ve-
ntt'bIe'C«i(ë-qK*«nDieH &d8ns iafource de
BM coeruptioa ? Nedois-jcpas lui rendre ua
Bâlion de ^cesdelatàveur qu'il m'accorde
d'en Aire KÎ pénitence ? n'cft-il pasinanifefle
<}u'ilveut mefauver & me rapeller àluipar
unchïtiment quej'aifijaftementmerTté. Oi
feniis-je i |»elem, s'il m'eût pnni feion que
je le merrtois toutes les foii que j'ai provo-^
qWî îi colère? Quelle coraparaifon y-«H-il
de-cette Prifos -oùil nfaccorde la grâce de le
«clamer, â cette PriïbBéfernclleioù les PÎ-
oheors impénitents Ualplvémeront fon Saiiit
AredoutiAle Nom pendantuneétcrnitémal-
heureulè , fans aucun efpoir de voir jamais
finir leurs peines f Pénitence des damnez
S te tu es Tt{;ouraufè mais que tu ce Inutile !
e ftt d«ns ce« bons lèntimens que je paf-
fai toute la nuit fans repoTer'que très légè-
rement.
Si tôt que les T^ïons de l'Aurore vùireot
xtc découvrir les horreurs de mon rednit,je
«;C(afacrai à Dieumoncoeur, les prémices de
l'a jonrfléc & tous les momcns de mon heu-
ttBX esclavage qec je regardoit comme de
pre-
•
u,:,-,zf--„GoOglc
«* niiftohedeUBaftilk, 1»
• fBCcieaxdons que Dteu m'accordolt pour fà-
tisfaire à fa JuÂice qne j'avois fi cruellemcat
oatrxg&. Je as ua paiaklle judicieux de ce
■que j'Étois à ce que je devois être : je priiu
 juftice de redoubtêr les chârimcns à pro-
portion de met péchez , twûs de me doanef
en même temps ta mefure 4e Ta grâce fi
aece&ire pour ea fourmir le poids âusfac*
comber, & c'eftde <|aol depuis cetlieureax
moinencje ne me fuis jamais deHflé, pendant
tout le reftede ma PrUbo, daiM qudqaeao-
cablement que je mefois trouvé. Aufl) c'eft
daas ce retranchcmoit falutdre , que j'ai trou-
vé lesr«âbarcesdontj'aJ eu befoîopoBrfoo-
tenir les ^auts continuels fous (dquels le
Monde & l'enfer m'ont voulu accabler p.cn-
4tiit onze Aqs deux Mois , fans me don-
iMr ni trêve , n! r^>OE , connue on )e v^ra-
4aii« la ruit«.
Si t6t q»e je fiis luibillé , je £« rra prière, .
&.je la fis da profond de mon ccevr : après
je fit mon lit : pendant cette occnpaiion , je .
refiechiflois à la douceur que j'avois reffcn-
tie dans cettepriére, bien difierentede la tié-
deur, pourneftasjjireda degoùtqucmecau-
foit celle que j'étois forcé de faire d^ns Je
monde, pour m'acquiter de moa devoir de
Qif'^tioDi &jeprQtcâe qu'ii^vès plnfienrs
réflexions ftn^lftbles ..ou plus fortes» fv^-
raent, pour ne pas dire. jamais, jenemcljitS'
vAvfé de moB oraifon qu'avec' de nonvel-
)«t fior^ec. ]< tain^ ces- endroits , qub
I^CU m'efl témoin que-j« ne. mets pas ici
par v^ité , mats pour & gloire, fi je n'a-
rois «as en vik d'animer à «e làiot exerci-
--. C6. ce
.--„Goo'jlc
tfO L'tHqu]fitioji Fraufoif»
ce ceux qui , comme moi , fê troaveroat dans
de pareilles affliâions.
Lors que mes rcveri'es & mes agitations
vouloiem m'attaquer, je me retournois du
côti de Dieu & j'imfloroîs fon aliiitance,
& foudain j'éprouvois fon fecours. Ce fttt
en reâechinaatriirlefujet de ma Prifon que
je fis les quatre Vers fuivants, que j'écrivis
fuc la porte de ma Chambre.
DéUt M liefiirifte isf fomhe , oà r/gme leff
lenct
Xit Roi nte fait gémir , fam rawir méritai
Grand Dieu', t'eflbienplutôl l'effet dt.tabomU.
Qui veut q:^entre tes murs jcfiffifenitemee.
En eflet depuis que j'eus raporté à Die»
toutes mes affligions ,. le poids ne'm'en ajar
mais pu accabler: C'efl ce qui. me fit écricc:
ces quatre autres Vers fur ma cheminée.
PriJoHmers qui demi Us miferts
Gemijftz dam te trifie lieu ,
OffrtK Iti dt hou ^eeur à Dieu,,
£/ vont Jet Irouvertz légères.
Se/eut fupremafaeerefeturoj mala.
Des mxuir extiëmes ont coutume de aoat:
mettre eu feuret^ , dit Séuéque.
Les Officiers de 1» ^^Aille coQtiniiereDt
[DÛjours à me venir voir, & jamais, tant que
je fus dans cette chambre je ne mangeai
qu'en ptefeace, foit du Major, du Lieute.-
oaot Cotbé-, ou du Capitaine des.portes; &
.--„Googlc
nremcDt le Major y efl Ï1 venu fans ^tre
yvre , & me Mic voir de pins en plus le tï-
dicule outré du p!uï fat , & du plus rifible
Personnage (^ ftitjamds^. Ilsmetrouvoieut
toâjonrs dans une profonde trifteflè , lànsea
pouvoir péeétrer la véritable caufc, qu'ils at-
itibuoicnt à la dureté de mes fers ; mais qui
itoitcettetriftcflelèlon Dieu, domparlerA-
p6trc, qui opdre le Salut.
je ne leur defliandoisplosquemes Livres,
& for tont mon Nouveau Teftament , & mes
Plèaotnes de David, deia Verfioti de Cou- ■
lan ; enfin au bout de huit jours oa me rap-
porta mon Nouveau Teftament , parce
«pi'heoreufement pour moi il étoi't de Ijvcr-
fion du P.D. Amelotc} pour mes Pfeaumes
ilt ftirent jugei apocrifes ; on me rendit en?
coreaa petit livfede prières , un peuplusgros
([De le pouce, dans lequeiiiy avait plufieurs
rlèuunes en Latin. Ces livres ont beaucoup
contribué à me confoïer dans nies tribula-
tioni, paiiqacje n'en lu» point d'autres pen-
dant que je fus feul. -Je lus âc reins mon
Nouveau Tc(l»mcnt avec tout le retpeS St
l'attention que mérite nA Lirre 11 lùint, Sf
plus je te lilbîs & plus j'y trouvofs cet-
te manne cachée , dont plus on mange plus
en fent rcdoublerfafaim; j'y decouvroîs ces
lumières qui font voilcfes aux yeuxdumon<
de: & je fut pénétré par mon expérience de
cette conQaate veiité de l'Apôtre : f fi l'E-
vangile cil. couvert d'un vdile , c'cft pour
ecoi qui pcrilTent qu'il eft couvert^' Pour
cmi à qui le Dieu du fiecle a a,venglé J'cf-
C 7 prir
U. tfii. * A. l4)d «w tn.ti. 4. wr( l i^ M
.--„Googlc
4l ' L*IiifuifitJoM Fraafoife
pcit par l'incrédulité, afin que la ^endeBr.
de l'ËvaDgile de la gloire de Jefus - CtiriA , .
uii cfl l'iinage de Dieu, ne les éclsîre pas.
Pendaut le prcmicc Mois de Juin dejnia.Prî-
fon, ^ Ibs très axieativaaeot tom le Non*-
veau TeflajsieQt juToues i oeuf fois , & I9
dernié're fois gue je le liibis c'«toit svee pliu-
d'avidité que ]a précédente.
Ce fut le Majoi: mi me raports ces deux
Livres ,. avec nu Montre qui eA très belle
& pac&itanent bonne , faite à Loutres pxr
de Charmes, ua des ineilletiK Ouvriers de
cette célèbre Ville, Ci)rt>é pour montrer un-
iîchaudllQQ de Tes tours- de Maître Gouih ,
Tavint cftropiée, &.il me fit demander aa
âom du Gouyerueur, came faiikirtfsiredes
excu(ès.de ce ptOteodJj «ccideot , fi jt vou-
Lois la v«idre, parce qu'il Irt^fWjvoitâBBtîtif»
te: je lui ri^oodisqdc }tà'ifoisf»viïBiMT-
phaud de ces Ibrtes de chofes « mais .que je
me ferois un plaiHr de la dog^f r «u GÔaver—
tteur , &- je priai le Majof 4e ia lui pn&ar-
ter de ma part: il. la De&iToit d'une maniéce'
a me faîrjecoi^nciitre qu'il en «voit gifledeeti.r-
yje ; j'inlii^ai à 1* ^ Eure prendre ; o^m»-
âaoX ou bom^efortunc fi cQtUiittreCR toutes
cbofes, jne uvOrjfà povrla CfmPi &■ lui lis-
les tpains pour Ae p4s l'acKtcbo. Je jsoo-
nus le iejidernajn qtie 1« Gouv«fncttf n'i-
Yoit eu aucune Mrt à cette £ripHtnerio4 car
h me âr dcTpware da^s.une gandJc Satie
le nteicredy ,14, du fuoit as m«f iieevié->
mp jour de iQQp emptl^fumemeot posr me
' parler.^ & aprfs si'av.Qir dewudï rtàatdemft
UUUf) & ^ j'étoit.cootentde ma -noiuTii^e,
.-■^.(Google
.--„Googlc
^o-..^
.-.G<>o;(lc ._
a me prit d'une aaaïÊK fore enfpgeuite dô-
BC me poÎDi chugriaer : je loi repondis arec
ane hoQn^teté doxit il j>ai'a[ très-iàtùfâit ;
wm il fut ftxt âonn^ de me voir tirer im
noutre , que je lai srcfciitv de fort bonae
graee ^ en le priant de l'accepter. Il me dk
fti'il n'étoit pas homme à riai prendre d'an
nfoDoier, a. qu'il ^toicfore furprîs démon
compliment; furquoije lui répliquai que j'ai-
mois beaocoti^ mieai lai donner ma motv-
■Dï que de Ja Ini vendre : il me ât explî-
qHcr, &. qoand ii eut découvert la friponn»-
tiède iim Neren&du Major, il emradans
snciùreor terrible: il juroit, iltrappoitdes
^edî, il ^ofl:rophoît & le Neven « le M.^
jor par.de&iBJnres q«'il lèmbloit forger es-
pfis pour eux^ mais quand }e lui xlemandai
mes byonx , À qn'U afrît qu'on ne me les
■voit pas i«i<^i ., il es[r««ui9 des «mpor-
tanents qnt le readircnt «lOt ■d&^t , & le
baBfportereDt hors de hutnéme. }e &ifois
loiu aoes el&ns pour l'appuTer ; il ne ai^4-
«Dtaok pas , . il s'écoutoic qne & pafioR ; il.
fit cfaercherCorbé&kMjMor; maiii iSn «V
VDjcnt gapde de paDOttre. Le Jèn lui fonoit
des yeux , fes tremblement mtar^ i«>
dcmbloteQt d'oK force , ^eje croioit qa'II.
mlloit fc diUbqncf & tomber en moroeanz.
Enfin ftpr^s des agitattonE tertibtet , il s'ap-
Mi£i on peu, At parut levntîr dans ïbn boBL
Icas ; & quand il ^t an peaplus traoquile ,
â me dit qoc dus le moment il «lltÀ DM
pcDvoïcr tont ce que l'on m'avoitpris , dont
je lui fis voir l'^^rentaire tigné de fon Ke-
«en, Api^B 41 «K tit aitèoii duu os ^raod
Enu-
■oylc
^ L^Inquifitip» Fraxfoif*-
feuteuil, & s'alÙt devant moi,. la table entrt
nous deui , fur laquelle il y avoit du papin
blanc , des {«lûmes & une éciicoire; & s'^
tant mis eu devoir d'écrire , if me dit que le
Roi defiroit deiçavoir, lij&n'avoispa^d'ao-
très papiers que ceui qae l'on m'avoit failîs c
je lui dis queij'avois de que» en charger plus
de deux Mulets, mais que- jeJes^avois iaiffé
en Province , comme titres qui re^rdoient
ma Famille, & mesaSairesdomelliqueEi Ge
nefout pas ceux-là que je vous demande, re-
prit-il,en blaTphêmant le SalntNom de Dieu ;
ce font ceux que vous devez avoir cachet à
Ver&illcs , & qui regardent vos négociations
avec les PuiJiànces Etrangères , & fur tout
ceux qui concernent les tiaifons que vous avez
avec l'Angleterre &i la Hollande. Je pris mon
ferieux; 6c le regardant d'un air fier, je liU
demandai fi c'étoit pour fe moquer de moi,
qu'il me faifoit defcendre; que Mr.de Tor-
cy avoit tous les papiers généralement qu»
j'avois à Ver&jlles, &,quc ie n'avois nulle
reisuion avec qui que ce foit,. qui pût m'at-
tirer la difgraceduRoi ; &que jedemandois
avec inftance , qu'il plût à S, M. de me don-
ner des Commiilàires pour m'cxaminer ■; Ig
■]ue li l'onmetrouvoit coapable, jenevou-
Jois aucune grâce, maisque fi J'onmetrou-;
voit innocent,. je rcclamois lajuflice du
Roi, pourmereadrç ma liberté avec fa bien^
veillance ordinaire. Je lui dis cela d'un ton fi
haut qu'il en piit un plus j'adouci , pour me
denundetfijeconnoifibis MyloidSlane, Se
fi je ne lui avois pas confeillf de rcps^lèt
«.Angleterre?, Je. lui répondis que j'axai»
l'hoa-
s« rUlJiBlrt dt la BaftUh. 6;
l'honneur deconnoître trèspaniculidrement
ccMylord; mais que bien loin de lui avoir
inlpiré le defTcin de rerourner chez lui , My-
lora Barwik, toute la Cour d'Angleterre,
Mr. le Duc de Bouflers , Mr. Charaillart ,
Mr. Callîeres & plus de cent autres Perfou-
ncs d'honneur m'éroient témoins, auffi bien
quêtons les OfEciers Irîandois,que j'avuis fol-
licité un Régiment Irlandois de nouvelle créa-
tion à la paye étrangère pour ce Mylord, qu'on
lui avoir même accordé; mais qu'en lutte on
l'avoir donné à Mylord Earvvick , ce qui a-
vojt fait prendre le parti à Mylord Slane a-
prcs la mort du Roi Guillaume, defe reti-
rer chcï lui ; qu'il étoit alTés prudent pour
fe confeiller foi-méme , & qu'il n'y avoît
nulle aparence, qu'il m'eût voulu confulter
fur an fait dont il pouvoit lui feul être le
juge j & que Mr. Chamillart lui avoit , de
fon mouvement, en ma prefence, accordé
fon Paffepott. Que je ne dcmandois pas d'au-
tre témoin que ce Mylord, Seigneur très in- ■
légre ëz d'une probité généralement aprou-
vée, & fi il difoit que je lui eufle ditunfeul
mot pour l'engager de retourner en Angle-
terre, que je fignerois ma condamnation de
mort au pié de Ih déclaration. Il eft ici Prï-
fonnicr avec vous dans ce même Château ,
reprit le Gouverneur, & c'cft lui qui vous
accufe. Faites leparoître, lui dis-je, il il
vous va defavoUer dans le moment. Je plains
ce Seigneur qui mérite un autre fort' que ce-
lai de la Baftille, après les fervices qq'il ft
rendus à la France & i Ton Roi : ne puis-j.*
pas le voir ? lî faut un ordre de la Cour pour
cela.
.--„Goog[c
66 Vlnquifitiou fr^uifc^t
cela, me dit-il, & quaDdiircravwiH,jeTOOt
ferai parler â lui.
II me denuada aufli, fi je n^avois pas eu à
la Haye des Conférences avec le feu 'R.cA
Guillaume , & de fréquentes conver&tious»-
*cc Mylord Portland ? je lui dis que je le
avois fait folticiter par mes Amis , pour eo
obtenir de l'emploi dans l'éiablilTement que
je pretendois faire en Hollande , ou en An-
gleterre. II me dit, que le Miniftre deiiroit
encore fçavoir , quelle relation j'avois avec
M. le Marquis de Bougy , M. de l'Etang , &
M. de Colombieres Capitaine auï Gardes à
la Haye. Je lui dis que c'étoient trois de mes
Amis, dont'deux étoient des Gentils-hommes
de la Province où l'avoisétéélevé, qu'un de
mes Frères avoit €xé Capitaine dans le Régi-
ment de Cavalerie de M. leMarquisdcBoa-
gy, très intime Aiïiî de féu mon Perc; &
qu'iïant fait connoUlànce avec Mr. de Co-
lombicres dans ie temps quej'étoisDireâear ,
ï Carenten, je rayoisrenouvclléeàlaHaye,
OÙ il m'avtrft ftfi un accueil favorable. Uuî,
dit-il 1 nous fçavons que Mr. de l'Etang, &
le Capiiaiae aux Gardes, vous ont fouvem
mené chez Mr. le Grand Penlionnaire , &
que Mylord Poriland conjoîntemeni avec
Mylord Galloway vous ont plufieursfoiiîn-
troduit auprès du fcu Roi Guillaume, avec
lequel vous avei eu de longues conférences.
Je niai abfolument la choie, & je dis que je
confiéDiDls de mourir, fi oo pouvoir me la
prouver; à la relèrve de leur proteâiOQ qoe
je leur avois dciofladée pour moa étabulfc-
.vasm.
A-
.--„Googlc
OM i'HiJîoire de la BaJlUle. 4j
Après cela il me ât des propoftdons, qui
ineËreiUhoiTear,&qiiejc]]cvcux pas coucher
fur ce papier par le refpeâ que j'ai pour les
Minières de France} quoique, làni doute,
le Gouverneur parlâtdefonchef, lànsTavcu
de pas un d'eiji. Je croVois être mieui connu
de Mr. Chai^larti reprts-je d'un ton fier :
Sii ce o'efl qu'aux dépends de mon honneur,
qa'il vent me mettre hors de la Bafiille, on
m'y gardera jufqu'à ma mort ; dites lui cela
s'il vous plaît de ma part , Mou{îeur, & qu'il
fe foavient bien mal des belles promeilès
qu'il m'avoit Eûtes en merapcllant en France.
Je vais lui écrire, & à Mr. de Torcy tou-
te uâtre coDverfatioQ mot pour mot , me
dit-il , en attendant leur reponce tenez vous
joleux, je vous rendrai fer vice , oujenepou-
rai , car je connois que vous £tet loubçooné
i ton & que vous êtes un tuave homme ;
comptez la deHus. U me fit reconduire dans
Ojacbambre, après plufieurccûmplimeusde
part ii d'antre : cependant oncques depuis je
nel'airevAt &jen aipculuiparler, quelques
inltaaces que j'en aie faîtes.
On ue me raporta pas meshardes, que j'ai
prefqac toutes perdijes , aulïï bien que mon
argent, & mes Lettres de change , comme je
l'expliquerai dans lafuitte.IjeMa.jorvintmiC
voir iînet , comme i l'ardinaire ; je lui fis des
ezcufet , fiir la méprife que j'avois &ite en
oCram ma Montre au Gouverneur, &eDlui
redemandant mçs hardes. Vous ne connoif-
ïèz pas ce R^iard là, reptîile Major; ilvou-
droit tenir vôtre MoHtrc , fi'ous<ftteiHom-
inc ^ U ini vcii4rç, vous a'va toftcJKnnpas
dç
.--„Googlc
tfS L'IuquifitioK Franfaife
de fva argent; ^ comme le Nevcn nevaut
pas mîeui que l'Oncle, vous coutei rifqae
de ne revoir jamais vos bijoux, vôcreargent,
& vos lettres; fi vous u'infiftez pas àmefoi-
re remettre le tout, c'eft autant de perdu pour
vous. Quoi qu'il fût yvre à ne pouvoir fefou-
tcnîr, j'ai reconnu qu'il difoit vraienpartic.
Pour ta Montre j'ai apris depuis de Mon-
ficur le ChevfliierBurnet, Neveu do Fameux
MylordBurnet Evéqucde Salysbury, & du
P. Florent de Brandebourg Capucin , aux-
quels je parlai quelque temps après, qu'on
leur en avoit fài: tout autant qui moi. Ces
Filouz pour escroquer les Montres de leurs
Prifonniers, en ôtoient une pièce; ils fimu-
loient après qu'il étoit arrivé accident i la
Montre; ils propofoicnt au Propriétaire delà -
vendre; fi on étoii aflïs lîmple pour le taire,
]a Montre leur demcnroit, & l'argent ils vous
le difcomptoient en bois, chandelle, loyer
du .lit &c. Si non , ils y remettoient les piè-
ces qu'ils en avoient ôtées, & fâifoient croi-
re qu'ils CD avoient paie unefommeconlide-
rable à l'Orloger.
La Converlàtion que j'avois eue avec le
Gouverneur fcrvit à me f^re connoître de
quoi l'on me ibubçonnoit , ce qui me donna
de terribles inquiétudes ; car je reflechiflbis i
ce que l'avarice efl capable de produire, &
jufqu'oà mes Ennemis qui avoient commen-
cé de me perfecutcr, pouvoient pouffer leur
malice.
Je regardols d'un autre côté en quelles mains
j'étois tombé; c'étoit entre les mains degests'
jaclpablet d'aucun \Àea, & capables d« tout-
mal.
.--„Googlc
on rmjtoire de laBaJîilU. 69
nial.Itne feroitpasmal je cioi de dire par qui
laBïftillc étoit gouvernée, lorrquej'yfuisen-
rré , & quel étoit le caraâére & la figure de
ces Hommes qui enavoientradminiftratîon,
comme Je l'ai reconnu dans ia fuite , tant
par ma propre esperictice, que par uii jufte
& fidèle récit que m'en ont fait mes Concap-
tifs.
Voici les noms des Officiers ; Mr. de St.
Murs Capitaine du Château de la BalliUe ,
mais à qui prefque tout le Monde donne la
qaalité de Gouverneur. Mr. du Joncas Lieu-
tenant de Roi ; ce font les fenls qui font à la
aomination du Roi, & inllalei par luevet,
ceux qui fuivent , font à !a nomination du
Gouverneur, qui peut Icscaflcr, quandilluî
plaît. Jacques Rofarge Major, Guillaume
Formanoir dit Côrbé , Lieutenant de la Com-
pagnie qui garde le ChSteau , Neveu du Gou-
verneur. Ijc nommé l'Ecuyer Capitaine.dcs
Portes. Abraham Reilhe Chirurgien , le
nommé l'AWjé Giraut Aumônier , Antoine
Ru, les nonnnez Boutonnière &Bourgouin;
ces trois derniers étoient Porte-Clefs. Il y
avoit encore ]c P. Riqoclet Jcfuite Confef-
fcur ordinaire de la Baftille, mis de la part
du Roi à la nomination du Père de la Chai-
fe fon Confeffeur ; un Médecin nommé M,
Frefquier, de la part du Roi , à la nomitia-
tionde M. Fagon fon Premier Médecin, &
ua Apothicaire en titre d'Office. Il ne faut
pas oublier un petit Drôle nommé Jacques
la France, que l'on difoit être Fils naturel
de Corbé , & pour lors fon Laquais , ^ui elt
vfi des' plus méchants & plus fcéletats Per-
.--„Googlc
7o VlmqMifitkn Fravfoife
fonnages , qui dans la fuke ont para fur la
Scène. Le Gouverneur avoît encore les Ser-
reants, autres Officiers Subalternes, &Sol-
dats de fa Compagnie qui gardoient le Châ-
teau , mais qui n'kvoicnt aucune communi-
catiou avec les Prilbnniers; non plus que fcs
Valets de Chambre, Officiers, Cnifiniers,
Cochers, Laquais & autres Cents quilefcr-
voient. Tous les Prifonnïcrs , de quelque
'qualité qu'ils fuient, le Gouverneur, Se tous
les Officiers que j'ai nommez, & générale-
ment tous ceux qui ont quelque relation i la
BaAille , font fous la Direâion de Mr. le '
Comte de Pontchartrain Miniftre & Secré-
taire d'Etat ; mais comme il vient rarement
à laBaftille, car en plus d'onte Aonéesque
j'y ai été, je ne l'ai pas veu une feule fois,
ni qui que ce foit de fa part", il y a fubdele-
eué Mr. d'Argençon Lieutenant de PoHce,&
depuis peu ConfciUcr d'Etat , qui a fous loi
le Commil&ire de la BaAille, nommé Mr.
Camuftt , [fes Secrétaires , Grclîers , Inter-
prètes, & autres Officiers ; & quand il ^ut
juger quclqi^'un à mort, il fe ftît donner un
ordre du Confeil privé du Roi, qui le nom-
mé Juge en dernier reflbrt , & fans appel ,
avec une certaine quantité de Confeillersda
Chatelet, que d'Argençon prend toujours
à là difcrction; ainli il e(t le Maître ab(bla
de la vie & de la mort de ceux qui tombent
& qu'il fait tornber dans fes filets :ergo mal-
heur à fes Ennemis. Outre ce Minîifre Me.
!c Comte de Pontchartrala àvoit établi un de
lès Commis noiiuné Mr. des Gianges , qui
avoit une clpéce d'inQ)eâioa fur le Gouver-
neur
u,:,-,zf--„GoOglc
Coojlc
.--„Googlc
I BaflHle. 71
delafiaftille, &
r on ■contre les Pri-
ic grand amateur
itponrcefacrétne-
nniers, dit -on, fc
naqucjcvaiscom-
s'appclle Marc Re-
arquis d'Argençon
itcnant du Prelidial
devenu Intendau:
de la part du Roi en
Itdit Sr. d'Argen-
ute lafînefTe&cout
toute l'adrefle & la
A voix publique dit
onmie c'eft un être
déjà tant donné de
e-Branche, Cordc-
taiit d'autres, il n'a-
Qger. Je ne parlera!
, & de fon corps :
revêtu Magiftrale-
e, femble être une
an. On auroit peine
tu, de fa perruque,
rnx, de Ibn vtfage ,
s noir : je n'ai que
j'en ai déjà dit la
Veux; il fautl'îtvoir
' a point d'homme ,
lit, qui ne foit làiii
t.Ileft d'une Kvérité
poavantable , d'une
luiuivc icuuuiw'c, <A d'une avaiicc în&ia-
bte.
u,:,-,zf--„GoOglc
7» L'IufHifitiçtt FroHfoife
ble. Ot£ï le de ù, M^ftrature, dans la vie
civile, c'efl ijn Homme d'une converfation
agréable, très fçavant, très poli, & à fa fi-
gure près tout charmant. Malgré toutes les
charges dont il eft accablé ,- & qui donoe-
roient bien de l'occupation à vingt des plus
habiles hommes de la France, il vacquc à
toutes , tant bien que mal ; & fur tout il tire
la quintelTqnce de toutes. Il eft autant haï dans
Paris, .qu'il yeft redouté; & quoi qu'il n'y
foît mmé de qui que ce foit , pas même de Is
Famille, il va la tête levée partout, avec la
même audace , que s'il étoic aimé de tout le
Monde -, parce qu'il connoît parÊiicemeiit
bien le cœur des Pariiiens. Si il leurafaJtdu
bien, en donnant la chaflè aus Ftloux&aax
Filles dejoïe, il leur fait encore plus de mal.
Mais l'on peut dire que c'eft fur les Prifon-
hiers de la Baitille quetombefafuieur. C'eft
là que fa malice n'eft bornée par aucune con-
sidération ni divine, tii humaine; car com-
me fon unique but clt de plaire au Roi, il le
tait aux di;pens de tous ceux qui luitornbent
entre les mains; & fous ombre d'admipiftret
la Juftice d'un des plus grands & des plusju-
dicieux Monarques, qui Ibient au Monde, il
y exerce la plus cruelle Tyrannie qui foît dans
VUniveis, ûnsen excepter les Enfers ; car là
les Démons ne font que les objets , ou les
iiiftrumenis de la colère, & de la juftice de
Dieu, & ne châtient que des criminels; Se
ce Miniflre accable & dévore également 1 ih-
noccnt comme le coupable , pour aflbuvir
fon avarice & fes autres palÉous. Comme'
j'aurai tujetde parler de lui encore plus d'une
fois ,
.--„Googlc
MirJfi/hireJttàBaJtUU. -y^
ftij», je quitterai fon Portait pôurfûre celai
du GoaveiDCDr.
Bniigne de St. Mars ^toit tut Homme de
-Fortune, de qm leveritablenommêmea'eft
pas Wen connu. Le nommé Pierre Bertraol
du Village de Joigny près d'EOampes, jadi»
Clerc de Procureur que j'ai connu trcs par-,
ticuliérement d&ns laBailîlle, m'aaffirmifa-
vec ferment <jue le propre nom de St. Mar»
AoJt Bénigne d'Auvergne;, qu'il avoit uoe
Niécc nommée Anne û'Auyergne Servante
chez Mr. deTurmény, avec laquelle, lui
Benrand, avoit été en promeïIcdeMarii«e:
mais comme ce Bertrand eft un Homme fiti»
foi, & des plus grands fourbes que j'aie ja-
nms connu, je ne puis rien avancer de poli-
tif fur fa parole. Ce qu'il y a de.conûaut,
c'eft que Mr. de St. Mars étoit garde du. Corps,
lorfque Mr. Fouquet fiit arrêté, & que l'on
jetta les yeux fur lut , pour garder à viie ce
déplorable Miniflte dans fa Prifou ; parce
qu'on crut ne pouvoir pas.trout^er d'homme
dans toQt le Roïaume , plus dur & plus in-
exorable, pour être enfermé avec lui, dan«
le temps qu'il fut traqsfèré & étroitement
gardé dans la Citadelle de Pignerol. Il s'en
acquitta fi bien , c'ell à dire avectant d'inhu-
manité , qu'on lui donna encore en ià garde.
Mr. le Comte de Lauiun , après là di/grace,
La férocité brutale avec laquelle ce Tyran
itaitU ces.illoftres Malheureux, a quelque
chofè de iiterrible, qu'elle ferolt capable de
faite rougir les Denis & les Nerons. Grain-
te qu'on ne taie ma plume de légèreté , je
veni cB npoitet on Exemple que je tiens de
j P fou
^..Xooylc,
}4 X'jwyjfffM» frmif«ifi
ibn fiddle Nevea , <ia^)iacoiitoit comme aif
aâe ^mcoi de l'hcroisme de fon Oncle , à
les nulhenreBlcK viâtmes, pour lenrdonner
Quelques itnprcfik»u de la dureté de nAtre
îeoÛer , & reptodre de la tCTTeurdans le
coeur des plos innepidcs, pour les Aire ram-
per fout la verge de ter.
Ce Comte iiiîbrtuDé s'^tuit voalu^ch^>«r
des mains cntcltcs de foa Tynn inhumaïa ,
& fit ^>porter des cordes, da limes, & les
antres inftramcntt dont il avoit befoio pour
iÔD évafion, pat fou Valet de Chambre: ils
furent furpris, co exécutant leur entieprilè^
Mr. le Comte de Liauzun fut defcendu dans
un affi-enz Cachot au fond de la Citadelle.
L'on fit le procez à Ton malheureux Valet de
Chambre , qui fut pendu. St. Mars voul ut a-
ioBter aux di%:accs do Comte, aujourd'hui
Duct celle détacher le Cadavre de fon Va-
let aux créneaux de fon Cachot, afin qu'il
eût cpntinuellcmcnt devant les yeux cet nor
TÎble fpeâaclct dans un lieu, où ce Comte
couché lùr la paille, -réduit au pain&àt'cau;
n'avoit pour toute coulblation , que les idées
de l'a grandeur paffîe. Saut livres , fans oc-
cupation, n'étant vîtité que delonbu'bare
Surveillant, lorfqu'il lui ^oRoitdupain: le
Comte ne fçachant, à quoi s'amnfèr, avotl
apris i une petits Aragnée de fon Cachot )
delcendre dans & main, pour y ptendre da
painqa'il lui tendoit. Un jour St.^ Mars en-
tra dans le moment que le Comte étoit-dans
cette amufànte occupation avccfosAragoée;
il lui ^t le detul de-ce beau divsKiflèraoïf-v
& ce brutal voiant qaé le Comte y prenoit un
ef-
.--„Googlc
tCfia it phtifir, lat ^crafa l'Ar^née daiii
la tmio, caluidifsnt, qnc les Criminels',
comme lui, étoiem indigoes du moiodrc dl-
fenH&inent. Mr. le £)iicdeLauzmi, depuis
Sa'il eft rentra en grâce , i protcfté à St. MirS,
que de tout les rarai qu^I loi avoit fiait eil;-
ourcr, celui la lui avoit paru le ptus infupot-
«We, fans en excepter fon Valet pendu atn
fbi^irans de Ion Cachot. Tant il efl vnl qu'il
w faut qu'ooc bagatelle ponr démonter un
homine, quand il e(l dans ladonlcur, &qiie
les plus grands efprits, après avoir renflé aux
phi! rudes ai&uts de la Fortune irritée, fuc-
nœibcnt qiiclqaesfois fooïunefoibleffe, quî
les feroit rougir,- fi Hfl étoient dans une fi-
tmiofl-à; pouvoir ennnner le néant de Ta
Chimère qoi les Wciïè.
Si St. Mars a «crcé departîHes dnretez
eavcrs Bft FaTori du Roi , comme (bn Ne-
vee l'a raconté, nos feulement à moi, mais
à quantité d'autres Prîfonnîets dignes de Foi,
ëoBt quelques uns même font encore aÛnet-
femem à' la Haye , ïe laJOe i penfer ce qu'A
a pâ £u¥e fur des malheureux fans apni.
Mt. Fouquct mon , & feu Mademoifelte
vmt feit rentrer Mr. le Duc de LaUiun CQ
Ece, St. Mu* eut le Gouvernement des
sd'Hieres, pottr teeompenft des ctuautci
qu'il avoit exercées l'mf fes deux malheureu-
ftt viiAimes. Ce fat H qu'éloigné dû Soleil
itit des croautecinoaies, if j'en veux croire
-qodqaes un? dcmeaCotitiaptrfs, qulavoieût
jwlé i lies Prifoiffliers quravoienrétéfousl»
Serajc^leSt. Mars dans PlflcSt. Marguerite,
lis VK9^£nKat (Pavois povSCè Is foreur juf -
D a qu'à
u,:,-,zf--„GoOglc
yf . L'iKjMÏfitUM Frampife
.qu'à loUIêr mourir de &îm , & mémfi faii«
étouffer plufîetirs de fes Prifonniers> dont. il
ne laiiToit pas de toucher la pcnllon^ çomniç
fî ils eufTent été vivants , long-tems après leur
mott. £nân Mr. de BeHemaux Gouverneur
de la BaAille étant mort, Mr. des Granges
Commis de Mr. le Comte de Poatchartiaio,
& Beau-Pere du Fils de St. Mars ,. ibllîckm
ce Gouvernement pour le Père de (on Gen-
dre, & l'obtint du Roi. St. Mars étoît im
petit homme très laid, & crâs ma!-£ut, qui
paroifToit âgé de près de quatre vingts ans,
quand je l'aiveu la première fois , tout cour-
bé, tremblant, & d'un emportement terri-
ble, jurant & blafphémaot , continuellemt^
& paroiffaut toujours être en colère ; dur ia-
'exùrable & cruel au dernier point.
Guillaume de Formanoir dit Corbé Ton '
Neveu, étoit encore plus laid, plus mal tour-
né, & plus méchant qtie fou Oncle. Les
'Porte-Clefs & fur tout Ru,qui le hailfoit mor-
tellement, difoient hautement aux Prifoor
nicrs, & Ru aie l'a dit plufieurs fols , que
Corbé étoit Fils d'un Jardinier de Montfo;^
Lamaury en Beaullè. St.MarsfonOnc!epar
fon crédit lui avoit Sût quitter la bêche & le
.râteau, poîif l'élever à la dignité de Sous-
Lieutenant dans une Compagnie de celles
qu'on appelle falades; pofte qu'il avoitcoo-
llamment conlèrvé lous la proteâion deî);ip
Oncle pendant dix lept à dix huit An«, ^
dont faas doute il auroit été à la. en chaîlé ,'
malgré faperfeverancé, II fouQnclcn'ena-
Tuit délivré ta. Compagnie, poureniàireaS-
trc Seau. Il avoit à peu près cinquante Ans,
quand
.Coogic
0» rHifloire dt là BiJUnt. if
quand je l'ai vcn U première fais. Sbnfront
pas plus large que le pouce, fcmble être une
étiquette de parchemin grillé, fous lequel
s'enfoQcent deui petits yeux de cochon brû'
H , noirs comme des pruneaux relavez ; il a
un nez pointu comme un fupolitoire , ou-
Tcn par les narines en forme de ces machi-
nes dont on éteint les bougies dans les Eglt-
fes. Il s'entend fort bien parler, car' fa bou-
che aboutit à fes deux oreilles; il a tout au
moins les deux tiers du vifage en gueule ;
iès dents toutes corrompiies, & d'une puan-
teur infuportable , ont été peintes en ébeine
par la fumée du tabac qu'il prend en quanti-
té :. quand il rit, il ouvre labouche& ferme
les yeux d'une manière toutàf^itrilible. L'on
preodroit fon menton pour le polilToir d'un
Cordonnier. Il marche tout courbé furdeui
jambes caignenlès, toutes contoiiraécs> com-
me celles d'un Balfetd'Artois: cependant Ibn:
cTprit elt plus mal bâti & plus de travers que
iôn corps.
Mr. du Joncas Lieutenant de Roî, étoït-
nu Gentilhomme des environs de Bordeaux;
il étoit Exempt des Gardes, lorfqu'il entra
Officier à la Baflille , homme de moienne
t^lle, ipais bien fait, qui paûbît fes fixante
Ans, qui avoir debounes&demauvaîfesqu^-
litez, comme tous les autres hommfe. Pour
moi, à qui il n'a jamais fait que du bien, je
fuis obligé d'en dire lincerement mon fenii-
ment. Ses bonnes qualitez l'emportoîent de
beaucoup fur les autres. Il étoit Officieux ,
aSable, doux, honnête : jamais il ne m'a dit
«ne pû-ole derobligeante ; au contraire il ne
D 3 cher-
TI L*Uf»y!tim h-smfaipt
cherchoiE qn'i mé coafolcr^ & il n'a p«s te~
BB i l«i que je n'aie obtenu ma liberté. La
Jeroùfre paroje qa'il médît avant fa nort,
•ft qu'il m'alloit faire foittr , ou qu'il n'y poui-
»it rien. Tant qu'il a vfcu , il m'a prêté
beaccoap de Liîvret , & il fe declura haute-
«lem pour moi contre la Tyrannie de Got-
bé. S^hant que la France, quefon Maître
»?oit érigé en Porte-Cleft , m'avoit outragé
4e paroles , il s'emporta contre lui , jufqo^à
couloir l'envoieraaCadiot, &protella, que
fi il lui arrivoit jamais d'infulter le moindre
Prifbiuiier, Il le chaflèroît, comme unMa-
raut qu'il <tolt, malgré la Proteâiondefoa
Adattre. Ceui <jui & plaignoicnt de Mr. da
JoQcas l'accufoient d'étie inquiet , vif, re-
ainant , d'une (é'vétivi outrée, -& de ne dire
jiBiâii ÎA Tcritc. Capcndait' je protefte qnTî
ai'a to4j(Mirc parié avec fÎQcérité. Il me faî-
ibit beaacoup de douceurs , qu'il ne bîtoit
pas. anz autres Prifbnniers , foit parce qu'ff
étoit pcrfuadé de mon innocence, ou parce
<;n't) connoilfoit particulièrement un de mes
proches Parents Conrciller an Parlement de
Gafenne, qui lui avoir &itp]aiJîr, comme II
me l'a dit plnfieurs fois. Il eft vrai que c'cft
Mr. du Joncas qui a fait mettre pour la pre-
mière fpîs des doubles portes à toutes les
Chambres, & des avant griites à plufîeurs fe-
nêtres , pour ôter aux Prifonniets la viie fnr
las iUies de Paris, & dans prefque toutes les
Chambres, il n'y a laiifé qu'une feule fenê-
tre ouverte, ce qui a fiiit un très grand pre-
mdîce à la fanté des Prifonniers , auxquels
il ne fouffroh aucune communication : car
.--„Googlc
Y FHifiwt dt Is'Baftaie. ff
on trou fait i U cheminée ïod aa pltndwr,
pour parler i tes Voifios; paâôit dm tul
^ui un nci grand crime,' qu'il putiiflbittrcs
lifvà'emeiu.
Je croi qu'il n'cft pas bcIbÎD qneje retou-
che le PoTtr^tde Jacques Ro&rge Major,
le plus brucat de tons les hommes ; j'en aï
déjà aiTés dit & la fuite de ctne Uiltoirefcra
conuoître que lesPrifonniers ne pouvoient
pas tomber dans de plus iadignes mains , fi
4'on n'en excepte la France Porte-Cicfs, &,
Bernaville. J'en dis autant de l'EcuyerCapi*
talDC des Portes , cependant bien moins mér
chant, fans compataifon, que Je Major, &
même il paroilloit qu'il avoit encore qucl-
qn'e p^ccdc crainte de Dieu.
Abraham Reilhe Cbinugieii de laBaltilIe,
cofiuu de Nifmes, & c'cA teut dire, avccle
fçavoir £urc & les foupleilèsdHuiLaiigoedo-
cien , & l'avidité d'ua Gafcon , avait dei
ooglcs juicju'aui coudes affilez comme des
nloirs : jôgcz s'il ayoit envie de feire For-
tune , auHi n'y épa^noit-il fasfespetîts foin».
Uétoit tout nouveau venuàlaB^lIe, lorf-
iqne j'y entrai, où l'Abt>é Ginwt l'avoit in-
troduit; il étott FiaiCT, dans ime Cooipa-
gnie d'Iuiantcrie. Il avoit encore l'babit de
Soldat fur le corps , qttaod je le vis la pre-
mière fois., qm malgré la nuuvaîfé tctnmrc
de caâ'é-, dont on l'avoit ondoie , jnroit
qu'il coafetvcroit là première inlHtutionJuf-
?a'à l'eiuémité , dont il ne patoinbit pas
m éloigné. Ce Frater était un petit-bout
d'homme bien alêne, au fond fort ignorant,
car à peine If avoit-il ùiit la batbe dans ion
D 4. No-
.--„Googlc
,9d Z^ImqmJiMM^dimfeife ,
Noviciat; mus ïqx dépens des Prifonniert^
à plulîeurs desquels il en a coûté cher, Am-
nc à moi f par exemple qui en fuis quitte pour
le bout da nez , & à quelques uns la vie ;
- nomme aux Abbei Gomcllcs Francomioîs
Frères, dont il a tué l'Aîné, auquel à deui
beutes après midi , lor'fqu'tl fe portoît fort
bien, il donna de l'Emetique, pour le fjire .
vomir , à trois heures il redoubla la doie ; à
ciivq heures iii^a^xr ut/upra, & à dix heures
defoir il étpît mort, dans uue efpéce dera-
f:, & des douleurs inexprimables. Pour Ton
rere , il en a 6ié quitte pour être eiiropîé
<i'un t^s ; mais il ell fans doute plus mat-
heureux que ïbn Aîné, tout mort qu'il eft,
puifque le chaj;rin & ledcfefpoirrontfaii de-
venir Fou , comme on le verra dans la fuite
<le cette hîQoite. Aux dépens dîs'je de Cet
Patiens, ce Frater efl devenu un bon Sujet
de St. Cofme. Et ce qui a achevé d*en faire
un Homme de confcquence , c'ell que I*A-
pothtcaire de la Baflille efl mort, il en a a-
cheté la charge , par la médiation de Berna-
ville, auquel il en afaîtuneretrîbntion, cai
rien pour, rien chez les Tyrans, &moiennai]t
-la loïalc part qu'il lui fait de fes parties d'A-
pothicaire , les Prifonniers , qui auparavant
-Kheilhe Titulaire, avoiçnt abondamment tou-
tes les drogues de laPharmacie, ibntaujour>
d'hui privea du très neccf&ire , en paiiUènt ,
«n gemiirem , & en font fort incommodez ,
pour ne rien dire de, plus. Le Regillre n'en
.ctt pas moins.Iargement chargé, aux dépens
,dn Roi, & de la fanté des pauvres languîf-
fants. Quand il entra dans ce Cb&tCBP , il é-
loit
u,:,-,zf--„GoOglc
M rm/isire ie Ut BafliUt. 8 1
toit fouple comme tm gtind rîen de plut
Kamblc , ni de plus aSeâueux ; miIs quand
il eui fait émondw fa tête taillée en buis , fur
chaque cheveu de laquelle il y avoit aux
moins quatre lentes, arbora une des vieilles
perruques furannées du Gouverneur , & en-
doSé un de fes vieux juflaucorps , il devint
ïnfolent , & traitta les Prifonniers avec ua
mépris iafoportaUe; & Mr.leBarbetotttaa-
cha du Grand Seigneur.
ô T'emplira ! S morei.
Ru étoit un des Porte-Clefs, âgé d'environ
cinquante ans que le Gouverneur avoii a-
taeaé de Provence : il en avoit bien les ma-
nières, & rencherilTfHt même fur les plus a- *
oivêrfellement defaprouvéeï. Jecroi en avoir
touché quelque chofe, & ilfctrouveraocca-
fiOQ de parler de lui plus d'une fols.
Il ne contribuoit pas peu àfaîreparoîtreles
deux autres Porte-Clefs encore moins mau-
vais qu'ils n'étoient ; quoique peut être il n'eil
pas entré de meilleurs Entants qu'eax à la
Baftille. pour fervir les Prifonnieis. Bouton*
niere- étoit Paiilïen, Boutonnier de fa pro-
fellïon,'bon lïraëlite, &ns fraude ni dol;
fort compatifTant aux mifetes des Prifonniers;
& je puis dire que les cruautei que l'on a
exercées contre moi l'ont attendri , juCqu'à
répandre i&s larmes fur mes Souffrances-
Mais Bouraouin particulièrement meritoit
une autre deflinée que celle de Porte-Clefs ;
aulli ne relta<-il pas long-temps à la Baftille.
Il étoit Bourguignon ; il avoit fervi dans les
Dragons , ou il étoit Maréchal des Logis . '
T> i quanq
..^Xooylc "
8 s Vln^uifitien Fr^nfoife ■ ■
quand VAhbi Ginxit qwÉ étoit allé acheter da
via ch« l'Oncle de Buuigouia Curé en Bour-
ffogne , l'en raira fous ombre de lui faire li
Fortuoe, & quand il le tint à ia Baftille, il
l'attacha au collier de mifere. Mais bien loin
d'y contrarier la férocité <iu'infpire ce barba-
re emploi, il étoit civil, hoanéte, afable,&
bienfàifant , & uns faire tort à fes Maîtres ,
il fe fiifxàt. an plailîr d'obliger tuas les Pri-
fisnnters ; je n'eii al pat veu un feul qui oe
l'aimac tendrement.
J'ai gardé les DiredeiirE de Ja confcîence
des Prîlonniets & dcsPrifontiiercs , au moins
de ceux & de celles qui avoicat le malheiu
de les écouter , pour clore nies Ponraits.
, Aux derniers les Bons.
L'Abbé Giraut Aumônier ordinaire de la
Baftille eft encore un Provençal que St-Marsi
avoit amené de l'Ile de St. Marguerite. L'on
dîToit que fon bon.M^tre Sl Mats n'avoit
point d'aroe; mais on fc trompoît fort ; car
ce charitable Prftre étoît famé de St. Mars-,
vûifque St. Mars n'étoit animé qtic par lui ,
li ne juroit que pu lui , il n'écorchoit que par
lui , il ne tyrannifbit que par hii. L'Abbd
<!toit la Marotte de St. Mais , & St. Mars c-
tpit le Godenot de l'Abbé. Nervis alienis m»-
kiie ligaum. Il n'agiflbit que par l'Abbé , qui -
' i((]uffloit de tous fes poumons (jemetrompe,
puifqu'ils pal&ient pour tous pouris) fur ce
•i'raa tifon, pour l'embralêr &lul &ire met-
tre le feu à tout ce qui l'environooit. Il loi
glfoit connoître que c'étpît l'intetuiou de
ieu,qiu fe fervoit de fon pieux miniilérc poor
^unir let Méchants. Ce zélé Aiunânicr étoît
.--„Googlc
-,c,, />>~.^^^
e» PHiJloirt de la Ba/ttÛe. fij
le Gargorier de la Baftille, qaand j^yentral;
mais Corbc le trouvant trop prodigue , le
fubtlitua en fa place pour rétrécir les tnarmîl-
tcs , bannir de la cuifîae toutes les cafTeto-,
les, & metamorphoferlebceufen vache, que
Bernavillc encherillant fiir lui a trouvé Icfe-
crct de convertir en charogne. L'Aumânier
garda toujours jufqu'à la mort de St. Mars l*
charge de fommclier de la Badille; & (1 la
charité de J. C. lui fit changer l'eau en vin,
ce dcteftable Architriclin, pour être en tout
Ante-Chrift , fans miracle, trouva l'art de
changer le vin en eau. Bien loin d'aller con-.
foler les Prtfonniers dans leurs Chambres,
comme fon devoir l'y obligeoit, je ne l'ai
jamais vu venir qu'une feule fois dans la
nôtre, le jour précèdent d'une vilîte que
devoit faire M. le Comte de Pontchar-*
train , mais qu'il ne fit pas fc contentant
de ta faire taire par. M.. d'Argenlbn , pour
me prier de la part de Iba cher Maître , &.
m'exhorter chrétiennement de ne pas ^irO:
de plaintes contre la tnauvaîfe nouriiure, &■
far tout de ne pas découvrir qu'on nous Uif^
Ibic paJTer tous les hyvCTS, fans voir d'autre
feu que celui d'une très avare£handelie,me
promettant de la p^ de M. de St. Mars , &
me juranc foi de Prêtre, que non feiilemenc
on ne me laiflèroit manquer de rien , mais
que tous les deux , prévenus de mon iouo-
cence, Ploient travailler ferieufement àroe
procurer ma liberté. Je fis femblant de le
croire : je ae dis mot , voiant que d'Argcn-
çon étoit feul à &ûit la vifite : je fus ccpen-;
dant encore .plus maltiaitté qu'auparavant/
D s Si
.--„Googlc
ïfî Vlnquifitiom Frànfatfe
Si il ne vifitoit jamais les Prifonniers, il n'en
ôoii pas de même des Prifonnieres , chex Icf-
quetles il éioit toujours fouré , cho. celles au
moins qui en valoient la peine. C'eft «ne
chofe iiorrible , que d'entendre les abomina-
tions que les Prifonniers en racomoient^ &.
dont plufieurs.affirmpient avok été les t€-
moins oculaires. Le jeune M. Schrader de
Pec Geotilhomme de la Ville deHame dan»
le Pais de Hannovre , fort J0I7 Garçon, &
d'un mérite 'diftingiié , m'a protdlé d'avoic
vu par des tro&s .qu'il avok laits à fon plan-
cher , une-Femme nommée Fleury ,, ^ ""^
jame Fille nommée Marton toutes nues, &
ce Bonc exécrable, commettre des crimes fi.
horribles, que je rougTOis d'en falirmaplu-
me , & plût-à-Diea les pouvoir bannir aaSi.
iùcilemeiit de ma penfée ; & Corbé partager
avec luiresin&mes plaifits; iSt que tous deux
Avoîent encore corrompu un« jeune Damoi-
i!dle Donmufe Bondy , belle à charmer. Le
Frère atné de M.dePec,quifutmisaprès lui
dans la même chambre, & l'Abbé Papafare-
do Prêtre lulien , ont veu & affirmé la mf-
ine chofe. Le nommé Jean Alexandre vxa
der Burg HolIandoJs, quife difoîtd'Amiier-
dam, m'aprotcfté que, c'étoit una chofe qui
n'étoit que trop conjtante , me récitant det-
circonflances épouvantables , qui étaient a~
l^ées par quantité d'autres Prilbnniers, di-
gnes de foi. ' Quand ces infâmes ayoieot à
leur dîfpofitîon une. Femme , ou une .Fille
qoi leur plaifoit ; S elles refîfloicnt à leurs
^talitez, ils la piongeoient dans d*^reux
Q^Cho» , pOQi la fîpic fuccomber .&. la for^
.-„Goo.jlc
0» FBflért de U BaJtilU. 85
cer i. fe rendre : fi elle 7 acqwefçoït , rien ne
lui manquoit. Ces in^gres AdmÎDiftrateiirs
kii foumflToient abondamment les chofes-les
plas d61icieu&s de la vie : le Gibier le plas
rare, les vins les plus exqaia, les pJus belles
' confitures , I2 p^tlTerie I2 plus fine ; rien ne
leui étoit épargné ; to« lent étoit donné g-
Tec piofulion ; cnforte que, qoand fes A-
mams étoîeniroitîs,clle en foatnillbit ^)on-
damment tous fes votiîns , qui étoient fiitfa
t^te, &iQUS fes pieds. Le jeune M. Schrs>
der de Pec , qui avoîi été &ul fur la tête de
plufieurs , & enlùite en compogiue dans le
métne lieu, m'a juré que laFleury & Mar-
ton avoient léfolu de le &ire defceodrcdans
leur chambre ; & qu'elles avoient demandé
à leurs Gîalants une broche pour tâtit leurs
Perdrix & Leurs Cailles ,^ fous prétexte de les
Bianger plUG chaudes , mais dans la vérité
pour la fK-étcr à M. Schrader, pour faire un
trou dans la cheminée; ce qu'il nlloitexecur
ter, lorsqu'on lui amenapouc Con^^nont
l'Abbé Papaflàredo & le nommé ^^colas •
Sandro , tics bon enfant du Village dés Ha-
yes d'Avefneduc&té duHainaut, autres té-
moins oculaires de ces abominations. J'ai
eu avec ce dernier uue communicatïondont
je parlerai dans la fuite de cette Hilïoire. Le
jour que l'Abbé Papaflàredo & Sandro en-
trèrent avec M. Schrader.au dclTus de fes
Femmes , elles leur donnèrent de quoi faire
fi bonne chère , que Papaffarcdo , qui étoit
affamé de longue maia , s'emplît tant l'efto-
niK qu'il en penfa cioier : il mangea tant
decoDÛtuicS) &>at tani.de,viad'£lf>^n&,
P' 7 qu'U
.--„Googlc
8tf .L' Iiqu'/ttian Franfoift
qu'il ne fit que vomir tottte là nuit; & fôs
Compagnons étoient fort embaraiTez à pur-
fer leur Chambre de fon ordure ; car l'odeut
u vin & des confitures ti'auroit pas manqué
de les fiiîrc découvrir le iendemarn. La dîf-
grefiion ett ua peu lougue , mais très neceP-
lairc, pour faire connoîtrè l'intégrité de ce
[>ieux & charitable Aumônier, qui étant un
Hotnoje de moienne taille , a le vifage (ait
comme un mafque de grands yeui creuï, un-
long net en rabattant a laBoromée, fait en
tec de Perroquet , une bouche relevée com-
me celle d'un More , arec un teint plomba
& olivâtre, crachant continuelletneut, & i%
plaignant fans ceiTe d'une oppreffioa de pot-
tfiue. Auieftc d'uneproprcté.AlAatialCj tou-
jours le cailor le plus lultré , la perruque la.
plus blondeâc la mieux poudrée , le rabatde
ia bonne ikifeufe, leplusregulier, fur lequel
ja Nonne Ii plus critique ivauroitpfis trouvé
la moindre - chofe à gWer; le glan le plus,
poupin, le bas deibïekniîeuxtiré, &leîba-
Ucr tout dcs'plus mJgnons> Anâî nous avons,
découvert dûii la fuitte, comme je le ferai
voir qu'il ne t'en tcnoit pas à fes feules.Pou-
lettes les PrifonDieres , & qu'il étoit.encore
l'Adonis de certaines Nonnatoes qui t'acca^
blotcat de prefens &de bille» d»UE, un 4es-
quels le hazàrd & fon avarice nous-firent
tC>mber entre les. mains comme on le verra
plus bas,
: Le Perç Riquclef de laveqeraUe Sodété'i
£unblc èutl là mine groffiére & lourde un
Jdtiite tonc des; plus FmchÎBftt y t>i*î^ àvat
\t Soai il «ft lia de«;plut £iu ^ (tnpliis ic*-
\ :.. ^toïs.
.--„Googlc
.-.Goosic
•« rUipirt Ji la BaftilU. t^
tors. Les fubtilitM loi fortciit de tous les cô-
t«; il eft tout farci de rdîriâions mentales^
& doublé de la plus 6ne étamine. Je ne fçal
fi c'cft fon naturel, ou l'air contagieux deU
Ballille qui le fàifoït mentir; mais il n'a ja-
nuit dit Is vérité aus Prifonnicrs fes Enfants
l{>irituelE,Iégitimes ou Profelytes , ce qui l'a-
voit tait lurnommer le Bateleur fpiritucl , ou
l*endormeur de Couleuvres., J'ai entendu on-
ze Prifotinicrs fèparez en trois Chambres, ft
Ëùre un raport fidelle de la converfation que
chacunenpatticuîiei, &feparementavoiteue
avec ce bon Père eu un m^mejour, quitou-
tes fc trouvoient différentes & le contrarîoient
quand on en ^ifoit le raport des unes aux au-
tieE.> Jamais il ne regarde un homme enface.
toujours la veîie bailTée fur le plancher j £cil
eft'&cile de remarquer la gène & l'inquiétu-
de oâ il elt i chercha des reponces confor-
mes à fes iatentions , ou à celles des Perfon-
nes qui l'emploient. Il a un grand défaut :
c'cft qu'il manque de mémoire , qualité fi
Deccflaiie a un bon menteur. Pour m'étre
lailTé feduire à cet Artificieux, par le delïr de
nu liberté, & avoir fimulé d'écouter favora-
blement cet ImpoDcur, je dirai dans la fuite
ce qu'il m'en écouté; car c'a été fans doute
un de ceux qui a le plus contribué ï malon-
gue détention , & le prînrtpai infltument de
mes tourments. Que Dieu lui fafle miièri-
corde, & le convettiflc& tous les Méchants.
' La première chofe que lesPiifonniert difoient
i un Kouvcftu-venu , c^étoit defe prendre
gude dtt.Pete Riquelet, qui ne fe fàilbitpirf
onXctBiKdcdcievclec laCbnftflîDD desPrî^
^..Xooylc
S8 Uluquifitten Frauftife .
fonniers aux MiaiflresdcIaBaftilIe, conune
pluticurs l'ont malhcureufement éprouré, .6t
quelques-uns raeront affirmé fur tout ceqtfiis
avoieuLde plus facré.
J(: devrois encore iddkeqaslquecholèda'
nommé la France, mais j'attends à -le faite
qus^je le mettrai. fur laScéne, oùilajouâ
un Perfonnaee tout des plus cruels.
J'ai déjà dit que jedcmearaidanslaCham^
bre delà féconde de la Chapelle depuis le 1 6. .
du. Mois de Mai 1701. jour de mon «tnpri^
fonnement , jufqu-au ]i. de juillet fuivant.
Fendant ce temps là il nefepailâiiendecoa^
liderable qui put parvenir à ma connoiflance,
puifqu'il n'étoitpermis qu'aux mouches, aux
rats, & âmes Tyrans de mevifîter, J'enten-
dois tous les foirs régulièrement un bruit
fourd, .conune H l'on eût reirapé delaMon-
noieàiaBalUUe. Ce bruit, qui fembloit ve-.
nir comme des fouterrains du Jardin, ..ctHil*
inençpît iuftemeut à dix heures & demie .du
ibir 1 & durcit jufqu'à uncheure pf ecife. Ç'é-
toit la même cadence, lemfnieiatervale, Is
mënie bruit . &. tous les mouvemcats d'ua-
balauciei , a. qui continuoit tous les Jours
làns interruption, excepté le Dimanche; & j'ai
cru , ou qu'ils faifoient de la Faufle monnoie^
ou du moins qu'ils remarquoient I^eipèces. .
Ils étoient ailes avares â^és méchants pguc
ajouter ce crime â tous ceus qu'ils commet'-'
toîent. Il y eut auffi ua Sergeant de la^Com-
i>^nie qui tomba du Coridor dans le foifé ,
&îe tua. J'avoisdefleiad'avertir lès Officiers,
que les Ouvriers qui travaJlloient depuis quel*
q^es JOUIS au Coiidor, avoieot fimaldifpg?
fé.
•s Tfiijieiri de làBafiiUe. 89
ft leurs planches, que ceux qui paflêroient
dellùs courroiem rifquc de fe bleifer , iflais
malbcnreufement ce hit le Major qui vint
me voir foii(>er, & H étoit fi yvre quejalmis
je ne pu lui faire entendre raifon. Sur «s
onie heures du foir j'entendis le Sergeaût ,
qui dcjnanda 3 la Sentinelle s'il pouvoir paf-
fer fans haïaid fur la planche. Oui , lui d't
le Soldat, pourvu que vous preniez du c6t^
de la muraille; cVtoit jugement le mauvais
en^oit, aparemment qu'il vouloit ft venger
de quelques coups de manche de hallebarge;
& comme j'avois très diUinÛemenf entendu
ce dangereui.Confeil , je me levm au plus
vite pour lui dire de n'en rien faire : mais dans
l'indant que j'ouvrois mafenfitreenluicriaru
^ paflïr de l'autre côté ; j'entendis la plan- "
che qui lui manqua fous les pieds, &lepau-
vte Homme tomber dans le folfé, delahau-
teur de plus de trente fis pieds, oùiel'exhor-
tai de mon mieux de demander paraon à Diea
defcs fautes, ÔEdeluirecommandcrlbname.
)ls Âircnt tris longtemps avant que de le fe-
coarir, & l'enlevèrent avec bcaucoupdedîfi-
cttlté ; car pour dcfcendre dans le foffé il n'y
a qu'un efcalier tournant , où un homme li-
bre a affc's de peine à paflèr. Deux jours a-
pris il mourut tout brifif , dans des douleurs
ttès aiglies, comme me le dit le Major. Il,
m'affirma que le Gouverneur en avoit beau-
coup de chagrin , puifque le mort étoit un
Gentilhomme d'un mérite dittingué, trèsbrar
ve Officier, & fort aimé des Soldats. Il n'y
avoit qnc ce dernier article qui fût véritable ;
car cet infortuné Sergeant, Aoit un pauvre
Tail-
^...Cooylc
90 Vlm^Mifitie» frsitf»ift
Tailleur de ù. profcffioh, qui habilloit les
Prifonoierï, pacce qu'ils le font tous «la dé-
pens du Roi , quand ils n'ont pas la libetté
d'écrire chci eux; & le Gouverneur luiavoit
accorda Ik hallebarde, quoiqu'il n'eût jamais'
lèrvi, pour avoir fes façons d'habits à meil-
leur marché. Je dirai, parpareuthéfe, que
ce Coiidor qui n*e(l ouedcbois, & qui tour-
ne tout au tour de la Baitille, coâte plus aa
Koi à entretenir, que s'il l'avoît fait bitirde
marbre de Paros, oudcGranit; caiityatous
les Ans une quantité confiderable d'Ouvriers
à y travailler. Le Roi en eft la dupe; mais
qu'importe ? Les Officiers y trouvent leur
compte, & les Ouvriers auŒ.
J'emendis dans la fiute qu'il y avoit des
Prifonnieis dans- tme Chani>re qui étoit aa
deObs de la mienne; j'eo beau letir donn^
d«s jîgnaux , ëc Ir^per contre le plancht»- ,
avec un morceau des fonds de mon lit , je ne
pu les obliger à percer le plancher , pour me
parler. J'ai pourtant fçeu depuis que c'étoit
un Kouakre nommé Mt. de Brnnsfields An-
glois, qm «voit fuîvi le Roi Jacques, qui é-
toit dans cette Chambre avec le Curé de Le-
ry, comme ce dernier me l'a dit cinq ou Sx
Mois apris.
Un foir que j'étois couché & que je dor-
mois iranquilemcnt , malgré l'horreur du lieu
où je repofois, & la dureté de mon grabat ,
je fus reveillé par le fracas des verroux', à
minuit ; & tout d'un coup je vis entrer le
M^r yvrc i fon ordinaire, qui me deman-
da tout en fureur , d'où vient queje chantots
en langue étrangère f que le Gouverneur en-
vou-
.--„Googlc
«ff riTiJioire de la Ba/Ulk. 9 *
fonloit fçavoir U raifon, & que la Sentinel-
le m'avoit entendu chanter en Angjoîs. Je
lui dis,' qu'outre que la fituacÎDn où il me
trouvoît lui pouvoTt fcrvir de rqionce, que
je nepouvois pas comprendre , comment un
homme poavoit chanter dans l'Enfer ; & qu'à
pnne pouvoîs-je demander mes oeccffiteï ,
en Anglois. j'ai cependant bien enicnda
chanter depuis, & par des Gens tout d'us
autre caraâére que des Chanteurs de l'Opé-
ra, ce qui r^a pas été une de mes moindres
peines. Ru qui l'accompagaoït , encore qu'il
ne fût pas plus raifonnable que lui, quoique
moins plein de vin, lui affirma qu'il fe m€-
[>renoit , auffi-bien que la Sentinelle , qui a-
ïoit pris une Chambre pour l'autre , & qu'il
ièdouioitWen qui ftoit celui qui ivoit chan-
ta. En eiîet j'*i fçû depuis que c'éioit le
Kouakre.' Ils rcfènncrent les Portes, & me
Idflcrent rêver à cette bifarc avanture.
Totne mou occupation dans cette Cham-
bre , fut de me reconcilier lîuceremcnt avec
le fuprérac Souvcrwn ; d'apprrfondir mon
irfant, de repaflcr les égarements demajcu-
neffe, ponr les detefter du plus profond de
mon cccur ; de me confacrer entîdrement à
Dieu, & de prendre des fermes refolutions
pour diriger à l'avenir tous lesaÛesdenia
Tie, au niveau de fes divines loix; del'avoit
toujours prefent devant mes yeux, & de lui
dévoiler jufqu'à mes moindres penfécs. je
pris'uue habitude de ne commencer aucune
aâion, quelque Wgcre qu'elle fit, fans Im
avoir auparavantdemandéfcslumiércs, pour
rcxecuier' félon (on bônplaHir.Le matio, «»
me-
■ .Coogic
m'^TcUlant, je prcTCOots prtMnptemcnt mes
penfff es , pour loi ea offni tes prémices ; &
c*efi toâionrs ce que j'ai confûmment ac-
coinptt oepais: & j'en ù retiré ,& j'en re-
tire encore tons les jours de très grands a-
vantages. Les Perfonnes de piété, ne feront
peut-être pas ûchécs de voir à quoi j'em-
-'ploîois le temps dans ma Prifoii ; & de quel-
les limes je merervois, pour lîmermesféTt,
& le fruit qne je retirois de mes méditations.
Voici quelques Somiets que j'écrivis contre-
les mors de ma Chambre, & qui n'ont pas
heareufement échapé de ma mémoire, par
rhabîtnde que je me fuis ^te de les rq>eter
toiu les jours ae nu PrifOD.
Sonnet Chrétien , ta fbtme .de
Priete pour le Matin.
Au f «*« •mvrmtt Itj ye»x , jr t'awvn am^
Emkrtf* U^ SeigtKmTf itsftm* d* tKntm»ttr%
Et fmts^m* t* hoMté m^setorJe rmeor fejomr^
Emfiebt fue U viev t» tormaft U fr*mt.
Ut Vtrtms qt^um Mtude ttvemgït
Qiu Im eraimtt & l'effeir m'amiacm tour i
tour :
ÛMefoMS teffe occupé Att charmes de taCoUr,
Mon coeur élance au Ciel iej torrtui defafiame.
Arrache dt monfiim Vwgmtil, la vamiti\
Quefa/fh-i àta^ioire, avec bumilit/i
Que
.--„Googlc
f» ranime Jt la Smjmje. «j
claire.
Qf'Jeififife e» fatx U riguutr de ttiMforti
Qm* chaqme aâe aujomrdbui me prtfsrt À U
tnart,
-E» f«« mom fiul dtfirfm ethù Je te plaire.
Sonnet, en forme de Prière, pour
le Soir. En Bouts-rimez.
ye ferme,» Dieu, mes yeux, i^ je t'euvre . .
memame',
Ji*Mf les hras du fonuneil fais vtilltr mom ., .
amoHTi
Qiu la nuit du fiibi faffe flate au grand . .
pur ,
Dont le temps nef aarra jamais Hftr . la trame.
Jtujemrdhui foi p/fb/ , fen mérite le . . .
blâme j
Excite ma danlenr^ par m» heureux re- . . .
taur :
Que je rentre au fentitr qui conduit à : : ta
Cturf
Qu^iferct defoupirs jeralume ma . . fiâme.
Je detefie àtes pieds . . I'argueil,la vauit/f
ye veux à ton exemple aimer r • . bumilit/i
Dam Pamirre de la Muit , ^ue ta grâce . . mV-
tlaire.
- ta iuftice tu et Ut peut ttrmtuer . . mon
firtt
Et
.--„Googlc
M L'iKfmifitiê» B'^imfvflr <
EfjaÙÊdrt mêMfêmmeil am fimKuil Ji . . U
Mort;
Jt matarai fitisfait t fi ma mm ftMt ...»
flaire.
Autte Soane(, en fcMunc de Prière
pour le Matin.
Ouvrant les yeux , Seigaeur , Mtm ame eft
■ éhUuU
De Pau^u/le clart/ qmî iiffifft U nuit :
Je t'effrt cet imfiamt £^ ttui ceux àt ma viV,-
Pnrge moi Ju poifon ^ui tent fois m^ajedxh.
y'aiore^ humilié^ ta Cramieur tufisie}
Je •utHxpar (*n amour fms cej(fe être conduis,:
Si/o/ai t'sffenfer . qnr ta hâté Pomblie ;
Car privé de ta grâce oiferois-je réduit f
Arrache de mou fei» toas les defirs frivoles;
EUve ma penfie ; anime mes paroles ; *
Somtitns tKa foi fragile J excite ma langtsettrw
Que je fouffrt tes camps fatu murmaretfans
plainte'.
Fais mai fuivre tes Loix ; fais moi vivre en ta
faisftndre avec ta» feu laglact de mam eaur.
.--„Googlc
Autre Sonnet , fur le même fujet en
Bouts-rinKZ.
De mitU twtbmmtemeius vois mon am* i .
. éblouit , ■
Fau mM/m-tir, Se^meur, deUterrUle . nuit
Ûi P Ennemi crSel a fait Unguir . . ma vit :
StUilfur^ fait imi vir Perreur qui . . m^a
frJnif.
D'ms forfait infini, U peine efi . . infinit:
ye tremble au bord du gouffre oitTorptetl m^a
' . . eonduit :
Ne permets pat , 4 Dieu ! ymV» ce jours je *'
. . eMbii»,
Peins à met yeux P horreur ok Pîujujie ejl . .
reiitiL
Que f abhorre le Monde , ^ fis pomfet . .
frivoles ', '
Devoilt moi le fou diUtfMmku . . fmoles.
Si mo»cœuri*a£oupity réveille fa . langueur,
Sijemeurs daiKietfirt, fme/yvive . . .
Jan s plainte i
Peree umfein erimiuel des fiéeies de ... t»
eramte\
Dtefen de tog amour daigne enfidmer . . mon
Sonnet
.--„Googlc
jt«. Vlnquifitit» Framfoife
S(»nct, en f«-me de Prière, pour
le Soir. .
Sur les mêmes Bouts-rïmez.
Dm féux jtmr Jm pétbi . . mtm sme eft /-
Sf» AUt Alipfé me fait erdmàrt . . /«tJ^f,
Ce terme redemté f«i Jeit hamtr . . «« *« :
Parthvne moi . SeitiieKr l'erreur qui . • w'«
^ f/Juit.
yadore em me couçha»t . . uGrOnJetiri»-
finie:
y Mffire i ce grand jomr oà la Foi mut . . ,
tOMtiuit,
HèUt! qu'elle tft h fin ^$m Péebeiir qui t^ . .
. lublieX
Et fi tu m^ouiMstoà ferw-je * . redmtt
Bauui Jlr mom finuueil tous les fii^et . . .
fi-ivolet;
Peut-iirt }out-ce ici les derm/res . . .paroles
QKemuboutbe t'a^efft aveetrtfie . Ut^meur.
Çiue ne puis- je miltr met pleurs avee ma . .
plaèuteï
Regarde avee piti/lefujet de ma , . eraintei
/icforde ton or^aHraux Claies . . Je mou eàar.
.--„Googlc
M THiftoiTe it U Baflaie. 97 .
Autre Sonnet , fur le même fiijet.
Sur les mêmes Bouts-rimez.
Ntfiuffrt pas. Seigneur, quemen âme . ',
Slouie
Des omhrtsdHffehifaffe àPaffrmft . . tmiti
■Ni ju'u» Jammeil fatal u tlirnier . , de m»
vie.
Me livre à l'Impofteur . . qui cent f oh m'a
feduit.
Mm crime efi iiifimi , msis ta grâce , . in»
finie
M'arrache dt l'abyme »U l'erreur mus . . >
conduit ;
Je U feus qui m'éveille alori que je t' . ouèlie^
Et me fait voir P/tat oà l'ingrat eji .. . réduit,
A ta fieds p-ojlerni i de cent tbefes . . fti~
voles.
De mille égarements, d'indifcrettes .. paroles
Je m'accuje confus avec trop de . . langueur.
Anime mesfeupirs j écoute ma eom- plaint^
Fatsfncceder l'amonr à ma trop iujie . craintes
■Quand Je dors dam tes iras, viens veiller dont
• ' mon cxur.
Un jour que je reflechidbis aux capricec
■de laFortano, & que je&ifoîs un paraleiie
■de l'éclat pompeui où Mr. Chanwilart étoit
^ievé, avec l'état humiliant où je mevoiois
Kdnit^ contre toutes les tendres & obligeant
£ £es
^...Cooylc
y8 UJwfM^iar FrêMftifi
tes promeflet qu'il m'avoit&iccs, demepro-
coicron établiflèmctulblide, jefiscetteEpi-
gnunme.
VHtMftre ChamiUart m*a£cerJoitfatenirtf-
Lors fM Km bemreux icîatbrilloildamsmsùÏM'
h"'
Ls rorttme F^live t antMMt q^elU tiCabmfft^
Cmt il eft f<ât MiMiftre ^ f^jefmis em Prifim.
Cependant, difoisjc, nn momeat après',
quelle ell'cette élévation ? qu'elle eAéblouif-
ènte ! qu'elle eft fragile! qu'elle ell incons-
tante ! qu'elle ell oncreufe ! où me conduirott-
ellci fi c'étoit mon état ? peut-être dans une
^ternit^ malheureufc! où me conduiront mes
fou6rancei?fansdoatc dans une écermtdbieo-
heureufe , fi j'en fais un bon ufâ^ I après tout
no) n'cft malheureux en cette vie, que celui
qui le croit être : & rien ne peut troubler ce-
lui qui cherche fbn unique bonheur dans la
volonté de Dieu. Saint Paul étoit plus hea-
reux' dans fes chaînes , que l'Empereur qui
l'en chargeait ne l'étoit lîit fon trône. Fer-
tKMé xiftrrima tuta efij difoit Ovide.
Comme je rappcllois dans mon idée tons
les morceaux de Poelîe que J'avois veûdaiw
le Monde, & qui n'étoient pas encoreécha-
pcï à ma mémoire, comme ils ont iàit de-
:yuis; car alors je l'avois parfiutement heu-
reulè, & je l'ai cottfervéc telle jufqu'à l'âge
de cinquante ans; nuis foit que laNaturec-
|>utfôc par tant de travaux que j'ai foufferts ■,
luit qtte r»<âivité ar^ laquelle j'ai travaillé
.--„Googlc,
en Profe & ea Vers pendant plus d'onte aat
l'ait énervée , je l'aî prefqu'cntîerement per-
dae, & peu s'en cR fallu que je n'aye eu le
même malheur de Corviuus : en repaHEànt ,
dis-je, le Sonnet de Mr. Lombud Mmiâre
à Midelbourg, qui eS très beau, qaoiqu^r-
rraulia; je voulus eflàier d'en faire on l^r l«
même matière. Voici le lîea
Sonnet de M.Lombart fur le Tabac.
Doux fiarme de luafoJitHJe ,
Brulamte fippe , ardant foameoH
§ y purge d^tuneur mùm cerveà$iy
t mom tfjirit d'iuqiâetudt ^
Tabac degt moH amt eft ravie ,
Lvrs quejt u vois perdre en l'air
ÂMffi frompttntmt qu'tim /clair t
Je voii rimage de ma vie.
Je remets data mon fimeair ^ .
Ce: ^u'mn jour je doit devenir .
N'/tawt fx'am; ettidre animéti
£t tout coufui je m't^erfii *
OjÎiV» ceuraut afrir tafxmée ,
je faffe de mime que toi.
Voici le mien-
Sonna Chrétien fur le Tabac;
Taàae ^ precseirx fiiu y amufaute fum/e
T» mats Jtvaitt mes yeux l'imàn dt U mert;
£» rm
lOO L'TiÊjKifitiM FraHfolfi
Tom htrhe, em difiilautUvafrur qui m'endort^
Dams te crenfet frapU tjl bit»-iôt eonfumét.
Qt^ejl-te qut HÔtre viet mte ctnirt animée;
Elle l'évaMiit afrès amfeibh effort ^
Nôtre etrftfe diJJoMt, t'efprit pretidfonejfert.
Et laijfe ce fHinier dont noire âme eft charmée.
Suhtile exbalaifon fmt ^évapore en l'airy
Tu montrer q»t nos jours fajfent cofime hk é-
clair-i
Le temps nous les ravit ^kmc -uîtejfe extrême.
l'on eharhon emhrafé ftmble dire tout bas :
Ti» déteins tomme moi, in finiras de même,
Maisfi ton corps ferit y toi* ame ne meurt fai ■
J'ai bicndes fois repaflif les bcanx Vers fut-
Tants , & j'ai eu tout le temps de regretta la
faute que j'avois faite de ne les p» mettre. eu
pratique dans le Mbude.
Stet quicunjue V«Iet polens
Aula limine Luèrict}
Me dulcis future C quîts i
OyfcHre pofitus hcû., .-. ■ i
Lene ferfruar osia, .. ^,
Nullu nota Quiritièus
JEtai per tacitum fiuet.
Sit (um tranfterint met
NuUo cumjirepitu Mes,
Plehejus moria^ Seuex. > . , , _
un mors 'gravis incubât.
Qui nimis mi^s omsfibMS^
l^natuf moritur Jibi. ^
ïn
.--„Googlc
En voici une imituton qnt m'a p&ni tris
belle, §, fur taqnelle je fis les Bouts rimez
fuivants, qui me femblcrent conveaJr allez
bien au déplorable état oùjemevoioisredatt.
SONNET.
Silivt ffw/ voudra, par f^rre , tupor eirt^t
Jmjqu'au fimmet gl'^i"* dti Grtmdettrj dt U
Cour;
hfoije vetrxt fan% qniittr mam aimable fejamry
Loia dit Momde i^ d» bruit rtehtrther m Sa ■
S'I-
Là, faut crainte deiGramdi, fans faftejans
triftep,
Mtjyttux , aprèf la mmit , vanut uaitre U
jvurX
Je verr4i fet f'ifi'sfi fuivrt tour i ttitr t
At dams um doux refos f attendra la vitillejfe.
Aiufî lorfqme U fort vïemdra rompre le cours
Des iieu-heuremx mtmeuts qui composent met
jours ,
Jt momai etarg^ d'amiy iutomtKfolitairt.
QM*mm Homme efi miferath y à Heure dm
trépas.
Lors qu^aiant néglige U feul point, uiceffaire ,
Il meurt connu de tous, i^nefe couuoit pas.
Ej Sonnet
u,-,,.., Google
Somet ca B(»Ks-rime&
Sfiaa item Jt Feffrît , Ufamt bte» ^ T .
aàrefft
Ponr fvittr Ut Uqj jne Fom tmd i . h Cour ;
S.IU ffi'tf VtMdu eb€r fam feJipfMt , . Jejouri
Gbm^di fil MttrtatiJt uuMftu it . . fa-
v^-
S*s flMf/îrt m'tMt fbug/ Jaiu t^ap-enfe . . .
tripe fe;
Et fin èrilhart Alat m V fait ftràre . ïi jamt \
Dm Ltttvre féi ttmbidams urne ohfcmr* . Tcmr.
Oàj* vûj (9IU Ui maux prévenir ms . . *«/-
up.
Jm fWwiJt » hi fiagrim , fomw tit êmtir
. . . le court ,
Em trsaj^tsl m eomiasifovt éf^der met . ,.
Mf.iliii'gemt en ttmbtdmmiM j/Mtrt ■ folitaire.
C«P fn'l^t^f f«f «M vtif n» Jttrnel . . .
trepatt
Çm mt i* Uigi i<i , tvim» »» nui • • ntcef-
faire
Pwrfniffrir nuiU PMrtt^ i^fenrn'e» »e«-
rir , . . . fat.
Ce fiit âv»s ce tn9c Urt qae je commen-
fû à compoftt mon Foemc de l'Amour &
«e l'Amitté, que dans la fuite j'ai poafféjaC-
qu'à iîx mille Vers, quemet barbares Tyrans
m'Qttttvtij aulG buea qi)C mes ■.atcet Ouvra-
ges,
.-„Goo.jlc
OM Pittfime dt ia BafiilU. 10}
ges, dont la perte m'a ^té plus fenlîble , que
tous les tourmeots que j'ai fouâïrts dansm^
Prifon , quelqu'eicefljfs qu'ils aient été : car
c:c que j'en aï fauve n'aproche pas de ceux
que j'ai perdas ; j'avoîs eacore tout mon feu
3iiand je les ai compofez, & pluid'onzeans
e Baflille l'om bien étouffé, poornepasdi-
re entièrement éteint. CcPocmeétoitceqoe
j'ai fait de menai mauvais en ma vie; auffi
l'avois-je compofé en viie de ma Chère E-
pouie , dont le ptecieux ibuvenir Icmbloit
m'en avoir diâé les plus tendres endroits.
• Le Sonnet de des Bareaux efl trop beau ,
trop célèbre, & meconvienttropbïcn, pour
le laiflèr fans Bouts-riaic2 ; je fçai qu'on en
a fiut plulieurs qui valent , fans doute, mieus
que le mien, cependant je le donne tel qu'il cft.
SONNET.
Le Pécheur s'accuCmt dbnmt Dieu.'
Seigmemr Us j^imenlsfamt rtn^Ut ^é^m$éi
TtiSjoMrj tmfrtMis fUifir i mamj être fnfUe}
Mms foi fétt tsmt Je maifjmejamah tdhiiÙ
NtfeMtmepmfdommtTtfÊMS tbtfmertsjmlliff.
Oui , mom Dieu , la rrmmitmr it mêm tuf
fiit/
Ne iaiffeàtoMfomvoirfiU le tbtix dM fmfplic»;
Tom intérêt t'ofpofe à mafelleit/,
El ta CUmenee mime attend que je ftrijfe.
CwUeHte lem d<firt fuis am'il t'eBrhrttmx ;
104 L*I»fkifitïom Franpife
Offtnft toi des fUurs fui touleat de mesjfemx^
lieme , Jrappf, il eft ternes ^rendi meiGuerrf
fOKT Guerre,
jPadere t» expirant la raifm qui t'aigrît
Mais dejfus quel endroit peut tomber ton t»a-
mtrre,
QnintfMttoMtCBUVertdufai^deJefus-CbriJi-
Sonnet en Bouts-rimez.
Dieu répond au Pécheur-
Puifque mes '. . jugements font remplit d*/.
qmit/f
Au Vichtur fénitint jt veux . ■ être propice:
ileftvr^i que ton ertme a lajfé ma , . hni/i
Mais je fuis pardonner , fani ibofuer ma . .
jttfiice.
Oui, quoiqme la grandeur de ton , . imfi/t/
N« laiJlt À mon courroux . . que le thotx du
fupplice j
Tes cris , qui m'ont JUchi fottt ta . . felicit/,
MenJmtnr ne veut pas qu'un coeur contrit . .
perijje.
toujours de faireirate il me fut . glorieux;
yt fuss touché des pleurs qui coulent de tes . .
yeux'.
idu fenl impénitent je déclare la . . . Guerre.
Un foupir m'adoucit, fi le fiché »' . aigrit.
Mon Fils qui te reclame arrête mon . tonnerre;
Quepuis-jt rtfufer au fang de Jefus-Chrijlf
Je
om TlSftoire ii la BaftiJU. rb%
Je fis encore quantité d'autres Vers dans
cette Première Chambre, mais outre qu'il ne
m'en fouvicnt plns,il dl temps de pafler à une ■
aut-reScéhc, carfîj'emploiois autant detemps
à tontes- les autres, je crafndrois d'abufcr de
la patience de ceux , qui voudront bien fê
donner la peine de lire cette Hiftoire.
Il y avoit deux Mois &'demijuftesqucj'é.^
tcMS datis' la féconde de la Chapelle, lorlquc
le lundi 31. jour de Juillet, fut les troisheu-
rcs après midi> après le vacarme ordinaire'
des cleft , des verroui , des portes , & des €-
00s, je vis entra dans ma Chambre le Ma-
jor accompagné de Ru , & d'un autre viftge
qaï m'étoit inconnu. Rofarge, aprèsfesbur-
lefques révérences, dont il n'étoit pas avare, -
me dit de m'habiller. Quoi! luîdIs~je,Mon-
fieur , eft-ce que ma liberté eft vehiie ? Non , -
Moniteur, reprit il, c'eft un petit change-
ment,unpetitchangement, parordrcdeMr.
le Gouverneur qui veut faire reblanchirvAtre
Chamtn-e. Pendantque je quittai ma Robe de
CSiambre pour m'habiller, les deux Affif^
tants du Major fetàilirent de mes bardes, &
lui me donna ta main avec une gravité rifl-
blCj pour fonir de la Ch^nbre & delcendré
l'efcalier: on ferma la porte & pendant tout
le reflc de ma Prifon, je n'ai pas rentré datis-
cetteTour. On me fit traverfer la Cour, bà
je ne vis Iperfoone, fans médire où l'on me
menoit. Le Major ouvrit la porte d'une au->
treToHr, dittelaBortaodiére, commejcTai'
apris. depuis,. &• après avoir monté environ
vingt cinq à trente marches, onmefitentret '
dons ati'liea.,"Oû l'onçe'voioitj^dute. Je -
- ; £ J. veu-
.--„Googlc
voulus demander an Major ce que j'avoîs
ftit i Mr. le Gonverneor , pour me mettre
4*as un lieu fi aflreux , mais Cids vouloir me
lepondre un fcot ntot, on jett» idcs bardes
dûs. rembrafutc d'tHi crcneaa , &l'onferma
prOQ^ement Ii porte Cur moi. Je me miTà
rêver fuf cette avuiture, (aXts m'allarmet ce-
pendant. Ç'itoit un petit réduit Oâogonc
large environ de douze i aàze pied$ea.taa5.
fcns , j)t à peu près de la même hauteur.. Il y .
avoit on pied d'ordure fur te plancher , qui
ctDpJchoît dcvpir qu'il étoit d(;pjâtr«; tous
lei crcnauiz étoiem boucbei , à la referve.
■ de deux qui étoieot grillez. Ces créneaux é-^
toietu du cAtéde la Chambre larges de deox.
piedi , & tliojent toujours en diminuant en.
*^e, dans l'épaitleur du mur jufqu'à l'ei^
trénaîté, qui dacdté dufoiTé n'avoit pasdc-s
my pied d'ouTertnrc & parce mèm^ côté , é-
toiem fermer d'un treillis de 01 de ffr fort:
ferré; comme c'Aoit à travers de ce treîtlÎE
qse vcqoit le jour, qu'il étoit encore (^cor-
ci mt cette épaiffcnr de mur , qui de ce côt<
a dix pieds, par lanille, &;pai n^ie fen£tcQ-
<îfà fèrmoit «a dedans de la Chambtc à vo-
let, garni d'un verte trcc cfais, & très Tal-
le, H étok G foible, que quand il entrent
dans la Chambre , à peine fervoît-il i faire,
diftinguer les' objets, &iicft>nnO!tqa'anfi»ax, •
jour : en forte qu'il iàlloit s'apuier Uu le cte ;
ncan, pour pouvoir lire quand le Soleil d(HV
iKrit à plomb, & que trèi foavent au,M.^*,
d'Août il a £dlu allumer de lachandellcpôur
m'éclairct à dtnet. Les murs de la Cbatniwe.
^toient tiis failc* St g&tez d'Qtd^irc, Ce. «îu'il.
.--„Googlc
0itPHift»irt<^dèUSMfiilU. 107.
y avoit de pins propre, c'étoit unplafonddé-
E litre très uni œ très blanc. Poortontmen-
le il n'y avoir qa'une petit» fable pliant*-'
très violle & rnmpuj! , & Que petite ctnùft
enfoncée de paille, fidifloqufe, qti'à pcifltf
ponvoiton s^aflbir delïus. La Chambre étoif
fi pleine de poces , que dans an inflant J'en
fiis tout couvert, & qoe mes habici en fem-
bloient tout noircis, four me confoler de
l'incommodittf que me canfoient ces infcc*
tes,. Ra me dit, dans la fuite, qnecelapro'
venoit de ce que le Prifonnîer qui en yenoit
de fortir , pîlloit fans façon contre les murs ;
ils itoiem tapiffeï des noms de quantité de
Prifonnicrs. -voici ceux que j'ai peu retenir.
Marc Liiich Capitaine Irlandoîs arrêté le a 5.
Juin 1 6p9. * amené ici fansfçavoir pourquoi ;
c'étoit on fort brave &joîi Homme, comme
je le dirai dans la fuite , car j'aurai bien fujec
de parler de lui. Pierre Linck de Limi en
Autriche. Jean Caftel des Sevénes:il avoit
écrit contre la Porte & le mur. Jeari Caftel
de St. Hypolite dans les Sevénes de la Reli-
gion Prétendue' reformée , amefié ici fans fça-
Toir pourquoi. François Doublet. F. Poirot
Maître d'Hôtel de Mr. !c Duc de Chevrea-
fe ; & pluiïeurs antres qui me font échapcx
de la nacmolre. Sur les fept heOres Ru m'a-
(Kjrta un petit lit de Campdefanglés, unpe- ,
tit matelas, on travers de lit garni de plu-
mes , une méchante coovertore verte toute
percée, & fi pleine d'une épouvatitable ver-
mine, que j'ai eu bien de la peine i l'en pur-:
ger , & anc paire de draps blancs. Je puis
proteftcr qttc ;e tas aflàilli des qUitirc Man-
£. t. diants,,
.--„Googlc
ioïf L'InquifttioiiFranfeife]
diants, qui me firentbeaucoupfoufTrir. J'^k'
rois bien voulu les rcnvoier dans les Con-
vents leurs véritables domiciles. C'étoicpouc
la premîtïre fois de ma vie que j'étois affligé
de ces vilains hôtes, & par ta gracedeDieu
c'a été la dernière, car je n'en ai pas été inr
commode d!un feul depuis, pendant tout le
reftc de ma Prifon, Je fis de grandes plaintes
au Porte-Clefs de la manière indigne dont
j'étois traltté ; je le pri^ de me dire ce que
j*avois fait à Mr..lc Gouverneur, pour être
outragé de la forte, & s'il voudroit faire cou-
cher un. de. fes Laquais fur un lit auâl mef-
«juin que celui qu'on me donnoit-^ Pourt-ou-
te raifon , il me dit de prendre, patience , &
que c'étoit.pour mon avantage quel'oncnu-
foît.ain(i. U referma promptement la porte,,
& me laina.moialifer lout à mon aife^tur l'é-
tat pitoiable, où je me voioîs réduit. Ce fut
le Suprême Confolateur qui me fit porter ea
paix un revers fi funellerje lui conlacrai cet-
te crois , . & je, le conjurai de me donner la
force dont i'avois befoin pour la porter conf-
t^mmçnt. Sur les neufheuresduloirRumV
porta, un très méchant foupé & m'aluma,m3.
chandelle, car j'en avoisencoredeux des qua-,:
tre qu'il m'ivoit aportées la première fois. Il,
n'y avoit point d'ûfBcier avec Ru; aparem-
ment pour s'épargner les reproches que je
n'aurois pas manqué de lui faire fur fa mau-.
vaife chère, fur ma Chambre , qn'oii appelle
•n ce lieu un Cachot clair , & îur l'irregu- .
l»ritè de mes meubles.
Je foupai très mal, & je couchai encore
pjus va3,\-, car outre les mauvais hôtes qui mei
tOUtï
ou rHifiairt de la Bajlilte. 109
toarmentoicDt, & qui ne me permirent pas ■
de fcnneri'œilpcndanttoutclanuît, ]apuaa-
tcur de laChatnbreJtoitinfiiportabîc; âchs-
que quart d'heure de UnuitlaSentinellefon-
ooit une cloche qui étoit lî proche de ma
Chambre que je croioîs l'avoir dans les oreil-
les^ aufï bien que le qui va la des Sentinelles,
qtu hurloient d'une maniéreépouvantabIej&
pendant tout le temps que je reftai dans cette
Chambre, fçavoir depuis le 31, Juillet jus-
qu'au a 8. Septembre, je ne pus obtenir un ba>
lai pour netoïcr mon Cachot. Ajoutez à cela
que depuis le jour précèdent de mon empri-
founcment je n'avois pas changé dcchemife,
Sl que je n'en changeai que le 1 1 . Novembre
enmivant : celle que j'avois fur le corps qui
étoit très fine, devint toute brune; & cepen-
dant elle ne pourit pas ; & après l'avoir feît
bien blanchir, elle m'a fervi encore plus de
quatre ans, moiennantlesteparattonsquej'a-
pris à y faire, ce qui efl nne des principales
occupiuions des Prifonniers. Ce qu'il y a de
rejouJUànt dans cette affaire , cVit qu'ils a-
voient une quantité de très beau linge il moi:'
car le famedi avant mon emprifonnementj*a-
vois donné ce que j'avois de linge fâlle à nu-
Blanchifiëafè à Verfailles; & aïant fait en-
tendre à Corbé qu'il étoit très beau, avec des
dentelles très ânes, &desMalinestoutesdeS'
plus belles^ il en prit un mémoire , l'envoi»-
» Verlàilles ; ôtaportet mon linge, au moins'
ce que j'en avois mis entre les mains de ma
BlanchiOèofe ; m'en fit ligner la réception en-
viron le S. Juin, & legardajuiqu^uii. No-
vembre , qu'il me le rendit à moitié ufé, quoi*
Et q"«
.--„Googlc
1 1« L'lHt(ttifitiM Franfeift
qie je reu0e fait fuie, an peuavaiitqiied*é<
tre ariété. Dix fois an moins je Ini aï vu por-
ter mon linge : je reconootllbis mes chemilè»
& mes cravattes fur lui , pendant que jVtois
falle comme un Ramoimeur > & qinad je te
menaçois de frapper à ta porte, pour m'ea
plùndie au Goiavemenr , il me menaçoit à
{bti tour de me faire mettre aux fers dans an
Cachot. A la au lui & Ra m'ont pîtlâ tout
ce que j'en avoisdcplas beaa, & m'ont nfé
le celle; car vingtfotsj'eaaicceonnufarRu,
qui CQ étoir quitte pour en rire de tout fo»
coeur^ dJEe qp'il me le rendrok. Quand je lui
en dooaois à blanchir toûjoiars ta plut belle
pièce avoit éti perdue au blancbil^c ; oà it
mfépargDoit le foin de la lui demander deux
fois, en me difaat qu'un Fripon étoit entré
dans fa Chambre, qui me l'avoitvoUe, c'é-
toit peut être li &ule choie , qu'il m'a ditte
de véritable. Ru m'aa&rtBépluâeursfoiiqne
moD ling^ avoit fait beaucoup de plaîSr &
d'bonneor à Corbé, car it n'en avoit pas ou
morceau; & il lui 3 reproché devant moi,
£il i^avott qu'aiie diteaàSt , qoaDd.ll entra-
is la Baâitie, & qa'il fillot qu'il loi <K.
prêtât une des fiennes pottr en dia0g«.
Je defccnds dans ces paiticulaiim pour £ù-
ce voie julqu'où cet Gens pouâbient Icni
lc6ne, teus&Iponneric&leiubarkcrîecnverS'
les Prifomùers. C» qei a lit de pint dut
que de laifTst un Uommefànsehai^erdeliO''
se pendant plut defisMots, qnaiidik en obC
nac qnuiùé conâdmblc à loi ? Mon otfcu-.
pationdone ftit d'all«eiaâemcntâl3.ohairey:
&j«fi$wi frgCTildcMawgc de gibier TOrtctj
■que
»u PHifteirt d* la Bt^Qt. 1 1 1
e je le detrutfis rsDs qQll ea rcftit imeièii-
piéce d'aucose c^cce.
(Quand le Porte-Clefs aporta à mai^a
BS DÔtie Tour, j'écoutai, & je recODot»
. t'îl entroit dans fept aputemcnts, trou aa
ûbus du Bu'ea, & aois aadcfiût; & j'ai
pris depuis qu'il y a dans cette Toor, qui
l double, doux Cachots oUcais les uns fur
^ aaiics : celui d'enbas dl tout des ptas
tnels. J'ai éK mis dans on pareil, dan» la
rour de la Liberté. La première Chambre
m deflbus de ta mienne étoît pareille à cetle
DÛ j'étots : il n'y en a que quatre jèmblables
lans la Baftille; fçavoir la premi^e & lafe"
ponde de la Tchu de laBertaudiere, & la
première & la féconde de la Tour de la Ba-
ainiere. J'ai fait le plan de la mienne qui peut
IdonDct une idée des trois autres. La Cham'
jbre «a defliis de la mienne s'appelloît la Tror-
|Sémc ; j'ay fçû qu'elle étoft aiKS belle âi bien
I éclairée , auÉ -bien que la quatrième ; & en-
I fia la Calotte. (L'on appelle ainlî Ici plat
I hatits & derniers ètsges deaToora, quieffec-
I ôvement abondflcni en fotme de Calottes)
I comme j'y ai €t€ , je me refcrve à en faire la
I defcripiion un peu ^usbai. L'onna'aaâlfmé
^e tontes les Calottes font de la lOJmc &•
çon: pour ks Chandircs elles AMBCtouieadif*
I tcrentes. De ^'atUce cAté de l'^calicr itctu
te mime Tour , l'ai m'a cncoie dtcqu'il J
avoir quatre Cbanbrea & une Calotte ièm-
blaUa i cellct que je viens de décrire^ c'eS
4t quoi je ne me fui) jjunan pea bi» é*
clwcir.
FiÙfijiM j'ai iaiMt vfk PHa 4« 1* T«w 4«
te
.-„Goo.jlc
»I1 L'I^quifititH Franfùijê
la Bertaudiére , je vcus donner de fuite celn(
de toute la Baltille ; ce lieu (I fàmcu![ & fi re-
douté , non feulement dos François , inais
tucorc des Etrangers ,- mérite bien que j'err
£^e 11 defcriptioB.
Cétoit autrefois la Porte de Paris par ow
l'on p^bit pour aller au Faux-bout^ St,
Anthoine; mais Hugues d'Aubriot- Bourgui-
gnon^ qui p» la faveur dn Duc de Bourgo-
gne s'a.vanç3.beaucoup à la Cour de France,,
où il eut le foin des-Financas , & fut Prévôt
des Marchands dePwis, la changea en Baf'
tille, dont il pofa les fondements le ij. Avril ■
i^tfj), felondu Tillet, par ordre de Charles^
V. Après avoir fait achever cet énorme Edi-
fice, il fut le premier qui yfut enfermé:, car
il fut à la poUrfuite du- Clergé , condamné à
finir Tes jours entre quatre murailles , pour
crime d'impiété & d'derefic, & pour î'itre-
montré cruel Ennemi de l'Univerlité. . Des.
feditieux qu'on nomma MailIotîns> quis'éle-'
verent contre- les impots au co m me n cernent -
duR^ne de Charles VI. L'An lîSt.fousua.
Chef nomméC^ïoche écorcheur, briferent^
les Prifons,. & en firent fortit cet.AubriOt >.
qu'ils choilirent pour leur Capitaine. Mais il'
les quitta dès le foirméffie du jour qu'ils I©
mirent en libené, & prit la fiiiteenfonPaïs-
de Bourgogne, où il mourut peu de temps a-
près. Les Auteurs de ce temps la dilènt q«&
Hi^es d'Aubriot avoit tenu un grand ranjj
ï la Cour, & qu'outre la:Baitille.ilavoitfait
'ftùre de beaux édifices à Paris , comme le
Pont S. Michel, qui étoit alors de bois, le
EetU-Pont.d* Pierre^ le.Pctit-Ci»içlet,.&
les
.--„Googlc
.--„Googlc
.--„Googlc
o« PHifloiffie la BaflilU. 1 1 )
I«s mors de la Pone 9t. Antoine le long de
la Seine. Ceux qui étoient oppofcz au parti
de la Mailbn de Bourgogne, fe declaxerent
contre lui , & lui firent des affaires. II étoit
de la même Famille que Jean d'Aubriot de
Dijon Evâque de Châlons liir Saône depuis
l'An 1341. juG]u'en I9JO. Ceciregarde Ton
Fondateur , dont j'ai voulu donner une idée
avant que de parler de £à Struâure.
La Baftille ell bitie à la gauche de la Sei-
ne, à cdt£ de l'Arrenal. On y entre du côté
de la Rue St. Antoine par une porte oà il y
a un Corps-dc-Garde avancé : quand on l'a
paffé on trouvenuPont-LeTisavecunegran-
de Porte qui conduit ï l'apartemeutdoGoa-
Tcmeor , que Bernaville a f^it rebâtit depuis
un An tout de neuf, aux dépends du Roi ,
cela s'entend; il ,cft tout des plus propres. Il
cft bien iufte qu'un Homme te] que lui fe dif-
tingue a ne loge pas dans un vieux Palais ,
qui jufqu'à lui , n'avoit fervi qu'à mettre à
C0QV«t quelques miferables Princes, ou au-
tres Gouverneurs moins lignalez qu'un Che-
valier de laMandille. Cet apartement donc
eft feparédu Corps delà Baftille, compofé
de huit grolfes Tours & de leurs intervalles,
par un folK que l'on paflê encore fur un au-
tre Pont-Levis, & on entre par une grande
& fbrte Porte dans un Corps de Garde, où
font les Officiels & Soldats pour g^er la
Baftille. Outre cela il y a une grande &for-
te Barrière, dont Icspicuxfontarmezdefer,
qui fepare le Corps-de Garde de la Grande
Cour, & en rend les Soldats les Maîtres :
cac li les PriTonoieis trouvoieiu le tpc^en ,
P"
1 14 VÎM^mifitia» TréMfaift
pir aac ftiiprUè , de dcrccndre dam l« graO'
de Cour ; il ftodioic poiv fortii , qu'ils for-
çatfëm cette Bairiérc : avut que de fe ica-
dre Maltret du Corpi-dc-Girde & il feioït
fiuile auj Soldats de les aiquebofèr an tia-
Ters des paliilàdes de liBamére, qui a une
Pone &ite de grollcs pièces de bois croifées ^
percées ajout, & feimantes à def, par oâ
ron entre dans la grande Cour , qui cil as
grand qoarré long, qui ni*a paru de la lon-
gaeat environ de fiz-vingt pieds, futqoatre-
vingt de laigenr. C'eft dé cette Cour qne l'on
cotre dans routa les Tours , excepté deux ,
ftxiont ht baoMur & les mailês redoutables,
gmies de grilles de kx rendent cette Cour
i^cofe. £n entrant par la Porte de la fior-
liérc, àmaÏD droittc, l'on trouTe un aparte-
ment où l<»ent quelques Officie^ Subalter-
oes, le Soldat Taiilenr dcliBafliUc, &m«.
me quelques Prifonuieis qui ont la liberté des
Cours , & qui penrent s'appeller les favoris
du Gonremenr. Mais j'ai apris, que depuis
i]De celoi-cy cfl en charge, U y a très peu de
ces fortes de Prifonniers dans cet stpntcnient ;
car Bcrnavillc ne ccumoît point d'aocrcs F»-
VMÏs que Ta Fomine. Joiguant fut la droite
ou troure la Tour de la ConKé , en Aiite la
Tour du Trefor, ajwès on trouye enviroa
dans le milieu de la Courunc Arcade quifer-
Toit autrefois de Porte i la Vilicde Paris, &
oà ï prefent on aménagé divers apartements;
& c'cft dans l'un de ceai la qu'étoit Mr. le
BarondeSacinct quand je fuis foni delà Baf-
tille,qui fia pris pendant IcsprcmierstrosUes
de NapIeSf oâ il était allé pou leCcrvicede
l'Em-
.--„GooglQ
tnrHiftnndtUB^itle. llf
rEmpmiir, & amené en France avec Mr.
If Priace de laRiccia, an commeacemmt
4c J'Aiinie i>o>. Enfuiteontrouvelecorpj ■
de rADCîeaiie Chapelle, doQtonafàitdiven
■partemenïs pour les Priibanicrs; c'eftlcprer
nier oô je fiis eus en arrivant, comme J4
l'ai dit a & le même oà étQït encore , quand
Ëfois forti de la BafliUe, Mr. le Prince de la
cela i ^ès ugaoi dans reocoigiHire ell la
Tour de U Chapelle. Voila ce qui coDipo&
l'aîle droite de- la Cwit, «wecdegtaodtMnn
«à joigiient les Tours les vacs aux autres ,
•ont l'jUpeâ feul fait tremi^ci, daol le cear
tie defqtùls on a ménagé divers trous , pout
&ire conyer aux Pigeonneaux du &tal CoLotn-
Mcr des piftoles pour le panTte GoBTeroeuf,
Dans le fond de la Cooc efttiQ gcaod Corpa
de I/ogjs^ qui Tepare la srandcCoardelape<
tile Cow, qteron sppdle laCoiuduPuita^
parce qu'eSeâivement il jr a nn: gcandPaits,
ponr Vttfige des Cniânes : o« phtt6t coi
Cours qui autrefois n'm£iiroieiitqu*Boe, ont
ttt fepaiées par ce Ëitiment, qui, conum
U eft »fè de le voir a ct^ biti long-temps ai-
près le Corps de laBaûUle. CeC<Hptdelja>
ps eft ftpaté ea deux, par nn grand Ëfcaliet
qui condait aux Âpartements d'enbuit , ft
we Allée qui conduit à la petîteCour. A la
droite d'un JEfcalier de cinq marcbetoqui àna.-
ne dans la gzaitde Cour, ontroavePApane-
ment, dans lequel, après nnVeftihale, cA
une grande Salle» cm Mr. d'Ar^çoa &ks
antres Mintllres imeito^cnt les Priîbanieis,
qsand Us veulent km aire leur proc^ r (1 j
% d»s rcofonjceioeu no grand Cabinet, 06
l'oa
Il(f L*IiijKifitiom Frajifoife
l'on enferme toutes les hardes, Alespapier»
que l'on faifit aux Prilbnniers. Derrière cet-
te Salle , du côté de la Cour du Puits foot
d'autres réduits, dans l'undefqtiels mangent
les Porte-CIeft , & autres Officiers Subalter-
nes, les autres fervants i d'autres uftges. A
la gauche en entrant par ce même elcalier ,
font les Cuifines & les Offices, qui ont en-
core une fortie par la Cour du Puits. On
monte par un efcalier de bois dans les apar'-
tements , où d'ordinaire on met les Prijb&'
niers qui ont la liberté des Cours. C'eftanffi
an plus haut de ce corpsdelogis, làrlamain .
droite, qu'efl Tapartemnit du Lieuteuantde
Roi. Joignant les Cuiilnesde l'autre i6t( de
la grande Cour, qni en &it l'aile gAuche en
entrant par la barrière, on trouveendefcen-
dant des apartemens à ladroite, la Tour de
la Liberté, dont les cachots s'étendent fôas
les Cuifines : après la Tour de la liberté on
IroQve an vieux apartement, dans lequel on
« memgé une Chapelle , avec des niches pOor
cacher les Prifonniers , defquelles nichés ,
de l'invention deBemaville, ilsentendentla
Meflè malquée, parce qu'outreunmurgril-
lé,&des vitres qui les feparent de la Chapelle,
on y met encore dédoubles rideaux, que l'on
ne tire que dans le temps de l'éievatioii<de
l'holtie. .Sur la Chapelle & i fes cotez en def-
cendant du côté de la Barrière, on trouve la
Tour de la Bertaudiére : en fuite de vieux A-
partemems, où logent le Major, leCapitai-
ne des Portes les Porte-clefs, & autres Do-
meftiques , & eufindans l'encoignure qui joint
i la, barrière eft la Tour de la 13a£niére : a-
vant
eu Pf£Jl»ire de la BafiiUe. iir
T«nt '<}ue d'y entrer , or rencontre une petite
coQr ou velljbule, qui a communication pu
onc porte , qui ferme à clef, au Corps de
garde.
J'ai dit , que dans le Corps de logis qui
ftpare les deur Cours, on trouveuneelpèce
de galerie ou allée qui donne entrée à la Cour
du puits, C'eft dans l'enfoncement de cette
Cour , en entrant à la droite que l'on trouve
la Tour ditte du Coin , qui eft feparée de la
Tour ditte du Puits par de vieux &a&rcusap-
panements, où logçnt les Cuifiniers, mar~
mitons, dometliquesdesPrironniers, & m^-
me quelques Prifonniers qui y (ont enfermés
d'une manière cruelle , comme je le dirai
dans la fuite de cette hiltoire. La veille que
j'en fuis forti , j'apris que très certaioe-
meat Monficor Jean Cardel de Tours,PriIbQ-
nîer depuis plus de vingt huit ans,y étoit en-
core, & n'en avoir pas forti depuis ttois ans
que je l'y avois entendu monter.
La Co:ur du Puits cil plus large que lon-
gue: elle n'a pas plus de vingt cmq pied» de
fongueur fur environ cinquantede largeur: el*
le eS très infeâée par la puauteur, c^c'efl
là que les Cuifiniers jettent leursvuidanges,
^tètent leur j>oilfon, & lavent leur vaifl^IIe;
c'eft encore là que le Gouverneur cuf^rma
là Volaille.
Au tour de ce Château il y a un foflï lar-
ge d'environ fis vingts pieds, qui l'envirou-
ne eiçiérement \ il eft fermé d'une muraille
hante â pp u près de foii:ante pieds ; contre la^.
quelle on a appliqué un coridor Qu galterie
de bois avec fou parapet , qui régne tout au-
tour
u,:,-,zf--„Go6glc
i-iS UIuqnifitiM Frimftift
tour da foflSï à l'oppoSie du châteaa , for le-
quel il y a tout U jour une Senttaclle pouc
garder les Prifonniers , & la nuit on y ea
met dcui dq>ais l'évalion de Mr. rAyjé du
Bucquoit. On y monte par deux efcaliers qui
font i droit & a gattchcacvant le|rand corps
de garde du Château. L'Hyver & quelques
fois l'été le foffé eft plein d'eau qui y entre
par les dt^rdcments de la Seine, & par les
grandes pluies. Au dehors de la Baftillcdu cô-
té du Fauxbou^ S. Anthoine il y aungrand
Baltion dégagé du corps du Château (ai le-
quel on aplanté des arbres & fait un Jardin ,
dans lequel on entre par une porte qui a été
pratiquée fur le Coridor, ris i vis des apor-
tements de la Chapelle. A la Gauche de la
Ballille efl U Porte de St. AlUhoiae qui eft
flanquée d'Un autre Baftioo qui iait £tce an
BaAion de la Bailîlle ; fur celui U aboutit le
beau Cours à double rang d'Arbres que Ton
a plantez depuis quelques années autour de
Paris & qui régne depuis la Porte St. Hono-
ré , julqu'à la Porte St. Antoiiie. £stre les
deui Badtons il y a le beau Pont depienede
la Porte S. Anthoine, avec les fbOès de ié
Ville des deux cdtez : ce Pont aboutît ï nst
grande place, qui fait face à la Baftillt^ cotK
rouhée de belles Maifbns, & où aboattflètu
quantité de belles rues, particulièrement cel-
le du Fauxbourg St. Antoine.
Après m'étre promené partoate laBaftille
& rinâme dans fes dehors , il eft temps que
je rentre dans mon Cachot clair , pour tuit
ce qui s'y paiïa peadtnt le titlle fejonr qiw
j'y fi*-
Le
u,:,-,zf--„GoOglc
e» FHifiûft dt U Sicile, i tf
Le leodcmaia maciaRum'oportâmonnia
& mon via comme à l'ordinaire ; nuis il oe
voulut pas m'écouter, oi me parler. Après
qu'il eut fermé ma Porte & qu'il fut faors de
û Tour, je frapai au haut ae mou plafond
pour avertir ceux qui ^toieut fîir ma tête ,
qoe je delttots avoir quelque communiauioa
avec eux \ je frappai pareillement fur mon
plancher , pour avertir de la même cholï
ceux qui etoieat deflbus tnoi ; mais perfoaae
ne voulut me rq>ondre. j'auiois été fort def-
oeuvré fans mes pratiques de piété, quejete-
doublois autant qu'il m'étoit poffible ; car je
n'avois du jour que deui ou trois heures tout
au plus par jour pour lire auplus haut du fo>
Icil fur le tnidi, apuié I\ir les bords de moa
créneau.
Ru vint fènl m'aporter à d!acr fur les deux
heures : l'un avoit beaucoup retranché mon
ordiiuùrc ; j'avois cependaiit une bonne fou-
pe aux croûtes, un morceau de bceufpaflàble ,
une langue de mouton en r^oût, & deuxé-
chaudez pour mon dcilèrt. Je fus fervi à peu
prësdclamémemaiiiére pendant tout le temps
qoe je fiis dans ce trtfte lieu , quelquefois OU
adjoutoit furma&uppeuueaile, ouunecuiÇ-
St de volaille , on quelquefois on mettoit
Xur te bord de ma fouppe deux petits pâtez ,
niais Ibuvent je me fuis ^erçu que Ru les
croquoit, par les fragments qui en lelloient
Gix les bords du plat. Le foîr j'avois ou du
veau, ou du mouton rôty, avec un peu de
jragoût , quelquefois un Pigeonneau , " &
quelquefois, mais plDs rarement, lamoir
XM d^uu Potttet , in df temps en temps une
iài-
.--„Googlc
I U3 - . L'iHqmifithit FrMtfâfè
Iklade. ]e rendoîs les trois qnartsdetout cela
au Porteclcfs ; c'étoîcnt fes profits , auflî
bien qoe les puins entiers ; les morceaux é-
toient reportez à la cuifine, pour fervir à la
fonpe des Prifonniers : quand j'en fus certain,
j'avoiî la compisûfance de ne leur rendre ja-
mais de morceaui_ ; quelquefois un pain me
faffifoit pour toute une fcmaine : quelque
appétit que j'aie eu, rarement J'ai mangé plus
de rrois pains par femaine, ainîi je leur ai toû ■
jours readu au moins quarrc pains, & quel-
quefois (îx par femaine ; & quelques cruau-
tez qu'ils aient eiercéeî contre moi, quand
ils m'ont plongé dans d'affreux cachots où ils
m'ont traiité avec la dernière indignité , ja-
mais je n'ai cefl? de leur faire tout le bien
que j'ai pu : quand je n'y ayois que da
pain , comme je n'en pouvois prefque pas
manger , je leur en rendois toujours la plus
' grande partie , & jamais de morceaux. J'étoi*
ravi de pratiquer le précepte de Jefus-Chrilï.
Aimet vos ennemis. Faites du bien à ceux qui
vous haïffent Et priez pour ceux qui vous
pcrfccntcnt & qui vous calomnient. G'eft ce
que, par la grâce de Dieu, j'm toujours ac-
compli du plus profond de mon cœur. Je
fus encore vifité de temps en tems , mais ra-
rement, par Corbé,le Major & le Capitaine
des Portes, ce n'étoient pas Cents i medon-
ncr fatisiâàion fur mes jultes plaintes.
Je delîrôis toujours de communiquer avec
quelqu'un : l'Homme eft né pour lafociété:
& ma curiofité étoit du moins pardonnable
dans une IbHtude aûffi fiinefteque la mienne.
Les Prïfonniers qui étoient audeiTousdemoî
.--„Googlc
OK-FUifime tU la BaftiiU. Ht
-De me repondoient pas j j'ai depuis uns que
c'étoit le Curé de Lery, & le Kouaicre Mr.
Brunsâelds , qui tous deux lia peu aupan.-
vaut ëtoient au defTus de moi dans latioifié-
me dimibie des apanements de la Chwclle.
Ceux quiétoicncfurmatéte, me repondoient
^r des flgnaux, mais il n'y avoit pas d'apa-
Teace de percer le plancher ; c'étoic un pla-
fond dès blanc 8c irès uni , où la moindre
ftââure auioit été trop TÎCblc. A force d'y
rSver j'inventai une manière de leur commu-
niquer mes penfées tout à fait extraordinaire.
Je formai un Alfabetdansmatcte, qnej'ese-
cutai en frappant contre la muraille avec uq
des bltons de ma ctiaife. Pour former uoa,
je frappois un coup , pont un b deux, pour
un c trois , ainfî du rcile, en augmentant.
Par Eïcmplc , pour exprimer le mot de
Monfieur : ^our l'M, je frappois id'abord
d<5uze coups &. puis jem'arrétois un moment:
pour l'o j'en frappois quatorie & je m'arrè-
lois encore, pour l'n j'en frappoistrdze&jc
jn'art(:tois de même : pour l's j'en frappofs
dis huit, & puis je m'arrêtoîs ; pour l'i , j'en
frappois neuf, & je fàîfois encore unepaufe;
pour l'e, 'jcftappûis cinq fois , après quoi j'at-
lendois un moment ; pour l'u, j'en frappois
vingt ', ap^s quoi une autre paufc : & cnfiii
pour Tr je frappois dix fept tbis ; & puis je
m'arrctois longtemps. A forcederepeterunc
'infinité de fois ce llratagcme , ceux qui étoient
aii deffiis de ma tStc le comprirent , & je fiis
Agréablement fûrpris qu'ils me demandèrent
«de la mSme manière qui j'étois ; je leur djs
"mon nom; ils me aient connoître qu'ils m'en-
F leu-
IIS L'Infnifithm fréHifoife
tendoient Men. Ils me dirent pareillement
leor nom : l'un s'appeUoit le Comte deBrc-
"derodc , qui depuis a. été amené dans ma
Chambré, un antre Mr. Stinklbn Banquier
Anglois,qui demcuroit dans le Cnl de Sac de
la Kiie Quinquempoix , & tin Abbé Italien
de qui je n'm pft apprendre le -nom : îl fe
ftifoit un mifiérc de !ï cacher, commebeau-
coup d'antres que j'ai connui dans la iûite.
Comme il ûltoit mie forte ^pHcation Se va.
grand filencc, pour mettre en pratique ccp-
tc métode de parler , nous ne commencions
nôtre manceuvre qu'a dix heures jufles du foîr*
Qiiand- on m'eut donné un Compagnon je né-
gligeai cette gênante manière de parler : j'aî
<tt pl«s de quatre ans fens la mettre en pra-
tique ; même fans en entendre plus parler.
Mais je fiïs fort furpris, qu'après un fi long»
temps, il vint de nouveaux PrifoniersquipfU'-
loient de cène manière- avec >ine fsici\icé &
une TÎielIë prodigicule. Mon Art avoîtéti
perfcâionné, de vous dire par qui, c*eil.de
■quoi je fuis en peine. Cen'eftpasaflùrement
pat Mr. le Comte de Brederode ; c'ell donc
par Mr. Stinkfon, par l'Italien, ouparquel-
qu'autre à, qui l'un des deux l'a communiqué;
«n^s enfin. dans la lliitedu temps, il yeutpeù
de Prifonicrs qui n'apriflènt cA Art & qiii
ne s'en fcrvillènt ; il fiit nommé la manière
'de parler du bâton. Les Officiers lefçurent;
& cela fit un fort bon efïeâ ; car dans la fui-
te , après la mort de Mr. du Jûncas , ils nt
turent plus fi exads à empêcher les PrifonuierS
d'avoir des comrhunications , par les chemi-
nées, au travers des Wilnchws, &parlBsf*-
ni'
Vftfxts , d'une mantâepliu commode, ooib-
mcje l'expliquerai dans ion temps.
Ëafin le vendiedy 8. de Septembre, jeAif
fort faipris d'eiUendie ootiù laTcporavÉtiC
«latre heures du mititii & de vdirRaenmii:'
oaos mon Cachot chaj^ d'un lie de fajigle ;
après il apoita une paill«£&, anmatelas, ua
travers de lit, une convcrliirc, éc une chaifè
cofoccée de paille, le'toutrout neuf. Jc-hû
demandai ce que tàa. âgni&Mt: c'eû dit-il,
on Comffgooa qa'oa va tous donner ; .on
bcare iGarçoo Jî il en fîit jamais : aux 'condi-
tions t)B*jl ne l'avoit jaBoais vu , comme jeie
1^ trcùs jours après , car ce Compagnon ne
vint que le lundi onze Stiptembre- fur Icshuic
besres da mads. l>ès les cinq heures j'avois
entendu un grand bruit dans la Toor , mon-
ter & dcicendre, & les Port&c]e& & donner
bien du monvemeot : qqand enfin je vis ou-»
vrir ma porte, & entier un homme âflësÛea
iak, mats en très mutais état, quirimmc
iànter au coupoufm'embral&r, esmedifant
qne j'étoili le jH'emier bommç qu'il avoir vé
depuis deux. ans, excepté fci Guichetiers^
Vous faites hten de l'honneur ï Meâîears les
Officiers <le Vinoesnes de les traitter de
Saichctias , reprit fièrement Je Major , qui
rsvoit conduit avec Ru dans ma chambre ;
Ëtaaaijedis, mon' Ami , que c'ell l'hon-
neur qu'ils «Miiteut Auflî-bieo que toi, reprit
rinttodsit,. car fomlcO'elilB'iïpasdeplui
«andt Ibelcrats .que ceux qui affligent l«
UomiQes par des iJuppltoes qui ne coBvien-
nent qu'aux damaee, âtdontlesdÎAUesfculi
1 i.ittc kl Jdiaiftïes. Vtaw&eswiii
Fi de«
.--„Googlc
114 Vluqui/itien Framfoife
des causilln indignés de \x vie. Mon étoo-
nement dtoit extrême de voir un Ptifonier.
dire li librement les véritez à des bouneaux
qui avoient fui nous upe autorité abfolue &
lâniborues. Le Major orgueilleux comme on
Paon, s'cDtendaut tutoicr, fonit crainte de
s'attirer quelque chofe de plus ddàvanta-
gcux , & tit refermer la Porte fur le nouveau
venu & fur moi , après avoir jette fes hardes
dans ma chambre , qui confi Itoient en un v ieux
Manteau de Dragon , & sn petit pacquet de
linge blanc. La première chofe que nous 6-
mes d'abord que nous fumes fculs ce fut da.
nous demander mutuellement qui ètesvous^
d'oi; venei-vous ? qui vous a mis ici ? Après
avoir faris&it à fa curiulité du mieux qu'il me
futpoflîble, il contentai! mienneabondam-
ment, car il pziloit beaucoup &parloitbia].
C'étoit un homme qui n'avoit.que trente cinq
ans , & qui cependant en avuit déjà pafTé
vingt au licvlce du Roi : il étoit Officier dans
le régiment de dragons de Zaïde. Il avoit l'air
aflés^ guerrier ; ii étoit de moienne taille ,
mais bien traverfé & nerveux; il avoit le vi-
lage mile, & dont lescicatricesdevoientfai-
re rougir ces Juges qui enchainoient li injuf-
tement fa valeur depuis decx ans entiers, par
un pur motif d'avarice , & pour la chofe du
Monde la plus criante. Voici le fait : On a-
voit iTMS en parti la recherche de la NobIcC-
fe, pour taxer les faux Nobles , & les re-
lancer dans la roture, d'où ils s'étoicntvoa-
lu defembonrber par des voies- illegitimesi
Cela ctoit très jufte ; Si les harpîes de Partit
lins n'avoieiit pas , pai une in uUice inouïe {
cou-
ou rfjijiolfe de la tafiilk. "HJ
confondu les vrais Nobles avetces ofurpa-
teors. Ils avoieot obtenu un arrêt du ConîëU
qui ordonnoit que tous les Nobles reprefen-
teroient en ordinal leurs titres, leurs extraits
de Baptême & les Contrats de mariage deleurs
Pères & de leurs Aieux , des copies collation-
D^es lôi les originaux & en bonne forme ne
fDffifoieni pas ; il falloit les minutes ; ce qui
^oit proprement leur ordonner rimpoffible';
car les Parrifans avoient trouvé le iècrct de
.i'eniparer de la plus grande partie de ces ori-
ginaux , & par concernent étoient les MattrR
« de^adct de leur Nobleffe la plupart des
Gentilshommes, prjpcipalement ceux que
l'on appelle Campagnards. Mon nouveau
Compagnon £tott dans le cas. Il s'appelle Jean
fiaptilte de l'Ormeau Seigneur de Falour-
det, qui etl une tene noble dans la paroillè
dcPongy, bourg à quatre tieiies de Tt-oye en
Champagne ; il prouvoit fa NoblelTe pardes
titres autcntiqucs déplus de quatre cents ans.
Il m'a affirmé que dans l'Eglife Paroiffiale de
St. Denis , & dans plulieurs autres de fon
Païs, on tiouvoit quantité de tombeaux deftï
Ancâires d'une antiquité incontcftable. IJ a-
Toit recouvert tous les originaux des Contrats
de mariage de fes Ancêtres , à la relèivc
de celui de Ton Bisaïeul qai étoit marié à
Anei , faute duquel on prçtendoit le faire dé-
grader de Nobkfle, quoiqu'il en eût une co-
pie en parchemin en bonne forme. L'ïntea-
dant de ia. Province avoit aaminé fes titres ,
& aiant trouvé que cette pièce y manquoit on
Tavoit aflîgné par devant Mr.' d'Argcnfon
Snbdelegué du Confeil, pouriugerdece$af-
F î M-
'!< L'TMfUffitio» franfittfi
£ùres. Il avtttt été chn t« Commis qne le '
aiime d'Aigenfba avoitfvopoCei pour en fai-
re l'eiamen, lefqaelï Im a?oîcDt dît que fi il
Touloit leur donner use fommed'argent , ils
)e tir Aoîcnt d'inqni^tudcA feioient confiimor
A Noblefle par Arrêt du Confcil. , S'étant
accommodé atec eux pour trente pîllotes ,
ils l'envoierent à Anet chci les héritiers
du Notaire qui avoit fat le Contraâ de
MMÎage de fon filfaienl y pour en chercher
Tor^nal ; c'étoient de bonnef: Gens qui vi-
^Toiedt à la Campagne, & qui poot i^ac légé- ~
rtf fomjne l'inirodûilîreiit dans un grenier oà
Soient toute) les papcfaûès du defuitt Notai-
re dont il) avoicnthcrité , tt l'y lafilcroat U\xl
eiaminer ces vieux cahier) tant qu'il Tonlut.
Il avoTt beau chercher nnc chofc que les
Ctmunisd'Argeufon ettS:mJmes,quiyavoicat
étéav«m4Bi, avotentcnlevéeftibrepticemeni.
Quand il fut de retour auprès d'om il leur ri-
potta qu'il n'avoitricn trouvé ; c'efldcqnoi il^
étoient très Inen prévenus. Ces Commit d'î-
Biquîté l'adteâèrênt enfuite chez vn vieux
FaulTaîre Agé de pins de quatre vingts ans qnî-
demcuroîC'dans la riie St. Antoine dans itn
coin de gcenier, qui pour une modique fom-
me contrefit le Contrat de mariaj;c de fon
Sîsaieul , dans les marnes termes qu'il étoit
conçu , & en pareille écriture gotique, qu'il
infera dans un vieux rcgitlre , où ce édcllc
Ecrivain en avoit fourré quantitéd'autres, à
la follicîtation des mêmes Commis de Mr.
d'Argenfon. lis firent encore attendre long-
temf» Mr. de Falooidct juiqu'à ce que le Re-
ùAU SB queflioufût tout remplUaprès quoi
ils
u,:,-,zf--„GoOglc
tu FH^atre tU UBafiilU. Ht
ils le renvoierent à.Aoct, avecleânixR^r-
trc dans fes chaulïcs , cher les mêmes héri-
tiers, qui l'introdaifirent, conimclapremié-
rè fois dans le même Grenier. Denx heures
MTcs qu'il y fut, il feignit d'avoir trouvé le
Regiftre qu il chcrchoit : ces bonnes Gens eu
mrent réjouis : ils euvoïerent quérir unNo-
taîre qui lui en délivra une copie , avec ai-
feftation que l'original étoit relié entre les
mains des héritiers du Notaire qui en avoir
cnrcgillré la miniftc. L'affaire wt mifè au
raport de Mr. de Caumartin , qui ne put
s'empêcher de lui donner gain de caufe;qaoi-
3u'il fouljçonnât qu'il y avoit quelqiK chofc
C' caché, voiant tant de Contrats de ma-
riage pa£Ièz à Anef, quoique les parties fiif-
fcnt d'une Proviijce très éloignée , comme
de Normandie, du Maine, de Bourgogne ,
d'Anverene,& autres Provinces, carravarice
avoii tellemeHt aveuglé ces Commis , qu'ils
àvoieût mis au raport en môme temps ,
quantité d'affaires de Perfonnes inquiétées
pour leur "Noble/Iè ; dont les Contraâs a-
voient été gaffez à Anet. CeMîniftrcfedou-
la de la friponnerie des Commis, Il fit venir
Mr. Falourdet, & en lui délivrant tbfl Arrêt,
il lui dît : J'ai vu Monfieur par vos titres
que vous êtes d'une très ancienne & incon-
teflable Noble0c , & ce n'cft qu'une chican-
ne gae les Traîttants vous ont fait, en vous
obligeant de rqrefentef l'Originaldu Coiir
trat de maris^e de vôtre Bisaieul ; , je
fuis convaincu que la copiequevousencon-
fcrvez dans vôtre Famille eft véritable, njais
je foubcpime de 1% fraude dans l'original : a-
F 4. voiiêi
.--„Googlc
1x9 L^Iuqui/ïtieM Franfoifi
voilez moi la véricé, & je vousprometsquei
■ non feulement vôtre NoblelTe vous fera con-
fctvée , mais que je vous ferai recompenfêr.
par ]e Roî , dont vous aveT, toiijonrs éxé fi-,
délie Serviteur. La Hncérité avec laquelle
parloir Mr. de Caumartîti , ouvrit un rafte
champ à celle de Mr. Falourdet pour tirer Ix
Té;ittf des ténèbres, & fc venger de latyrau-
uiedesCommisd'Argenfon, qui ^areinment.
de concert avec ]es Traitants métoient tout^
en pratique pour. plumer les vrais & les faux.
Nobles; Les vrais enlcnrfâllàntacheterlcur'
titres autant qu'ils en pouvoient tirer d'argent j -
& les Faux-Nobles en leur vendantdes titres
fuppofez le plus chfr qu'ils pouvoient. Ils &-
voient tiré de MaJ de St. George d'Aunây,
de la généralité deCaen, quejeconnoish'es
particulièrement, jufques a fîx.mîlle livres,
pour lui vendre de pareils titres , elleaperdu
Ibn argent, a été enfermée deux ans à Vin-
cennes, où elle a beaucoup foufTert, & elle
& fes Enfants ont été déclarez roturiers. Mr.
de Falourdet découvrit toutle mylitTre àMr.
de Caomartin qui jura de lui tenir fa promeP'
fe, le tenvoia dans fa Province , & écrivit
i l'Intendant de ne pas l'inquiéter. II fit as-
réter les Commis, plufieurs faux-Nobles ; &
le vieillard Fauffaire , qui auroit été penou j
fi la mort ne lui en eût pas naturellement €•
pargné la honte , en l'enlevant dans le châ-
teau de Vîncennes. Mr. de Falonrdçt jouiP
foit pleinement & pai^blement des privilèges
de fi Noblefle dans fa terre, où il s'étbit de-
puis peu d'années marié à utie iaimàble E-
poofe , qui étoit nouTellemeDt accouchée ,
lors
u,:,-,zf--„GoOglc
«« PBJîoire de la BâJUlU. II?
Jors qu'étant à la chaflè à cheval avec foft
vallet, il fevit aborder, parquatrcCavaliers,
qui lui dirent qu'ils venoient le làljier de l«
part des Officiers de fou Régiment, lllescrut
bonnement , & les invita à l'accompagner
dans fon Château, où il les recevrcât delba
mieux : mai» étant auprès de loi , ils fc jet-
tcrent fur fes armes , & lui firent entendre
qu'il falloir les fuivre chez Mr. de Cautnar^
tin. I! leur témoigna qu'il étoit furpris dé
leur procédé ; que Ii Mr. de Caumartin , de
qui il aroit reçu des lettres depuis huiljoursj-
lui avoit ordonné de fe rendre chez lui , le
moindre billet de fa. part étoit fuâî tant pour
le faire partir dans le moment ponrobeir i
fcs ordres , fans l'envokr qumr i main for-
te, contre laquelle, lî il fecroioitcotipable,
il (çavoit bîencommeilpourroitîwirj&daHs ■
l'inltant, donnant de l'éperon à u cavale, il
écarta ceux qui le voulbit arrêter & fè déga-
gea de leurs mains, pendant que fon vallet; -
couchant le plus apparent de la troupe en joiic , ,
Jura qu'il l'alloii jetter en bas fi il branloit,
Mr. de Falourdet comraanda-à ibn Vallet de
lever fon fuiïl ; mais de ne pas ft laillèr apro-
■ cher : enliiite il demanda à ceux qui le vou-
loiect arrêter, s'ils defiroient l'accompagner
chez lui , où il vouloit dire Adieu à fa l cm-
nw avant que de les fuivre. Il s'étoit fi adroi-
tement debaraffé d'eux qu'il étoitencore Maî-
tre de fes armes à la rcferve d'un de fes pif-
toletS', dont s'étoit faifi un des Cavaliers ;
- mais, loin de vouloir profiter du defordre où
•il les avoitjettei , il leur dit, nelècroîant
pas coupable, quel! Iapropo£tion qu'il leur
E j, tai-
î?o , VlHquifitiom fraupiji
(fûfott !<iir MuToit le moindre cmbaras, qu'il
itoit prit àe. les accompagner , quoiqu'il ne
(dt fia tn eut de t^ire un fl long voiage^ £e
-trouvant avec peu d'argent fur lui & n'aiant
■f»s m^e d« linge pour changer. Ils luipro-
«cûerent ^ue rien ne lui manqueroît qu'ils
aroicnt Drdre de fournir à fa d^ence, qu'ils
:Ie poutvoiroient abondamment de tout ce
^u'tl saroit befoin , & que Mr. de Caumar-
•tfn lui donneroit de quoi retourner chez lai.
il donna fon fufîl à fon valet , qu'il renvom
dans fa M«foa avec ordre de dire à fa fem-
me de ne fè pas inquiéter. L'Esempt & fïs
gardes loi tinrent leur promeflêenlecoudui-
fant , le Cavalier lui rendit fou piftolet & ils
lui lajflêrentlèsarmesj pendant tout le voïage
ili le tegalcrent bien ; mais au lieu de le con-
duire à Paris chez Mr. de Caumartiu , ils iêi-
Snirent de vouloir pafler au travers du château
e Vincennes quand ils fiirent auprès , &
quand ils forent dans U Cour, ils lu! décla-
rèrent que c'étoit là qu'ils avoient ordre de
le laifTer , en attendant nouvel ordre de liL
Cour. On lui fit rendre fes armes , qu'on
«Bt foin de renvoieravecûCavale&toucfoa
^uipage chez lui, marque qu'il avojt-à faire
4 un honnête Exempt ; ajccroiqtiec'ellMr^
' 4e Bourbon le même qui mVréta. Il s'apec-
>çilt trop tard de la iaote. qu'il avoit faite : ' il
jji'^toii; plus temps dé faire le brave dans ua
château tel que celui où ils étoient , dont le,
Pontlevis fut levé, & les. port.es fermées dès,
-qu'ils Y furent entrer U ^liU mettre pied à.
torre & paflèr dans le Oonjon où l'on garde
'l«%'f!nf«Qiiiei.s.. C'eâU^u'iJaKAédeBxaDs,.
pu PiSjloir* d« UBafifîU. .I3<'
avec ^lantitëdeCoQcaptifsquiy^toieDtpout'
iâ tn^me afrair« que k iïenne &plu£eursaU'
. très qui j étoient pour d'autres fujets ; &
quoiqu'il ait toujours iîé lèul, iln'apaslaiF-
fé d'avoir communication avec plulîears de
ces Mtffieurs, «ntr'wttes avec S. A. M. le
Prince de la Riccia arrêté pour avoir pris le
parti de l'Enipercur dans l'af^e dcNaples
au commencemetit de i7P>; dnlî qu'avec le
nommé Farie .de (jarlm en Bearn qiii étbît
. Ptifonnier depuis oaze ans lorfqu'il lui^Krla,.
pour n'avoir pas voulu abjurer là Religion *.
qui étoit la Reformée; ce pauvre Hommeé-
toit tout nud fans chemirc & dans une calot- -
te, où ilavoit pour tout meuble une c»uver-
turedans Jaqudleils'euvelopoittiljoiiifibit,,
, tmlgré toutes les rigueurs dont on Taccabloît,.
d'une faute par&ite ; il ëtoit gros , & gras, &
: d'une fcnneté inébranlable dans fa relignaiion
,BUi oti^res de la Providence. J'ai vu quantité
^de fes écrits, qu'il avoit donnés à Mr.Fa-
,toutd^ , ppnr Élire tenir i fon Eppuie & i'
:;fes £nfants, ,fon édifi^Qts ; o^., quoiqu'on.
' rît bien qn'it n'avoir pas d'éçiide,- la piété é-
_toit iôweniie. d'une éloquence naturelle &
fblide ;1^ manière dont ils fe communiquoieiic
e(l aûez linguliére..Mr. Falourdet avoit une-
.glanchpfut laquelle il écrivojt avec du char--
.bon eo gio|i caraâére i^n mot, puis ilappro-
..chQ.it la planche 4p S^, fenftre & quand Faric :
. l'areitlu, V(u)tr&].?£lfaçoit & en éctivoit ail
.«Bti« , &:jtoâJQar« -dp fuite , ce que Farie
tranfctivoitiur du papier gris, qtl'ùn leur don-
noir pour leurs néccâitez; car ii avoit fait des.
plumes avec des os , & de l'encre avec du
r ï- noir
ijj Vlnquifitian FraMfolfe
noir de filmée. Fane faifoît une ample rcpon-
ce à Mr. Falourdet fur du papier gris ; &
comme j'ai déjà dit que Farie étoît dans «ae
calotte je dois dire encore que Mr. Falour-
det étoit dans un premier étage où il avott
été mis pour être plus à portée de le foigner,
parce qu'il avoit été malade & avoit penfë
mourir & où il avoit même la liberté de te
promener dans. un petit jardin qui domioitau
pied de la Tour où étoit enftrméFarie, qui
lalfl<)!t tomber fon papier dans lequel î] cnve-
lopoit un os pour lui donner plus de poids,
rautre le ramaiToit, le métoit dan» fà poche
& le lifoit tout à loifir quand i! étoit eaternié
dans'Gi Chambre. Lorfqtie Mr. Falourdet fac
entièrement gueti , on ne lui donna plus la
liberté de îe promener dans le jardin ; mais
comme la fendre étoit au niveau de ce jar-
din, il s'avifad'aprendreà une chicqnefêrme
qu'avoit Eernaville à lui raporter unj>eîottoa
de papier, qu'il lui jettoit de Ta fenétiedans'
le jardin , & qu'elle lui raportoit du Jardin
fur la fenêtre j pour la païer de fa peine , il
ïui gardoit- une partie de fa viande qu'il lui
donnoit. Après qu'il l'eut bien eiercée à ce
badinage , il en avertir Farie en lui écrivant
far là planche , & ils convinrent à un certaài
fignal, qui marqueroit à Farie que la chienne
étoit dans le jardin , parce qu'il ne l'y pou-
voit pas voir du lieu où il étoh, qu'il l«{(Iè-
voit tomber fon papier avec une petite pferrc
envelopée dedans :. iis, ^iereat prenûéte-
meot avec du papierftns écriture; ladiiennc
l'aportB fort fidcllemenc à Mr. Falourdet; iJ
«i.epyoia d'écrit. qui eut le mOme foccès.;
, «iûfi.
éu rHijïoire de ta Ba/lilU. I î 5
*sunG la chienne leur fervir de meiliiger pen-
dant un très long-temps. Mais enfin ils fu-
rent, lî non découverts, du moins fonbcon-
nei; heureufcment pour eux iln'yavoïtdans
le papier que des raifins fecs que Farie en-
voioit àfqn Ami , fans écriture , dans l'inllant
qne la Chienne l'aportoit à Mr. Falourdet ,
BernaTille entra, à qui elle le prefenta; fi y
trouva des railîns; il n'en dit mot, & quoi-
que Farie priât le Porteclefs , quand il Iiii
porta à tonpé , de lui rendre fes raiiins qu'il
difoit avoir mis i fecher fur le bord de fa
■fenitrc, & qui étoient tombeidans tejardîn,
on ne lalflâpasde mettre des palkTadesdevant
la fenêtre de Mr. Falourdet, pour empêcher
Ift Chienne d'en approcher. Farie communi-
3ua cependant toujours avec lui jufques "au
emîer jour de la fottie de Mr. Falourdet ,
car il démonta fa table, fur unedes planches
de laquelle il écrivoiten gros caraâérçs, &
hâCoh lîte fon écriture â fon cher ami , qOi
refpeâivcment loirepoadoitdela,m,ôinema-
niére. ■
Depuis fai va ici 3 là Haye une lettre ^
critte de Pao en Bearn,- eh datte du 21. Dé-
cembre 1714. parun'Âmi à Mr, de la Foc-
cade Miniftre du St. Evangile y qui lui don-
no!t avis que Mr. Farie avoit été nais en li-
berté, en taveur de laPaîx générale, lèmoïs
de Noveinbre précèdent, après vfngt quatre
-Années de Prifon, & qu'il avoit vu unelet-
tre du dit Sr. Farie qu'il écrivott de la Ballïl-
le i un de fcS amis ,, en datte du mêmerhois
de Novemto'e, potfr Ini donner àvisde&de-
livrance , & le prier d'ivcrtii f» Femme &
E 7. ft!,.
.--„Googlc
]^4 L*Imqui/a!o)i Framfêifi
:^s En&ns qu'il auroit la confolatioD'de les
embioilèr bien tôt. Le dît St. Farie avoîcété
snèté en ifi9i à Paris eafortaat de UBoutî-
que d'un Apoticairc , & enfcnné dans'Vin-
cennes, d'où il fnt transféré à la Bafttlle en
1707, lors que Bemaville liictedaàMr. du'
Joncas. Dieu lui fàffe la graqe de faire un
bonQ^ederaIibettc& d'en jouir long temps.
. Mr. de Falourdet communîquoit enco-
re avec Mr. le Matquis de la Baldonniére
Poitevin, qui étoit accufé d'avoir le feciet de
£ure de l'or : il y avoit dix ans que ce pauvre
Gentilhomme étoit Priibnnier i Vinceunes ,
lors qqe ce Minillre, pour fe dcbaranbi d^
iiAportunitez de Madame fon Epouic, qi^i
Ibllicitoit vivement la liberté de fon Mari y
la fit arrêter & enfermer dans le même chili—
-teau de Vincennes , où elle a été pendant
denx ans mangeant le méjne pain , beuvaat
le même vin que Ibnmary, fans avoirjirnais
pu obtenir la liberté de le voit. Tout ecque
-Bemaville leur accorda , après avoir eii^
"d'cuï , ponr cette faveur , une grande lampe,
& lix chandeliers d'argent pout la cha^llede-
Vinccnnes, fut la permlÉon de s'écrire de
temps en temps. Mr. Falourdetvilibrtir Ma-
dame de la Baldonniére de cette fucieltc c^e ;.
elle étoit magnifiquement habillée ^ fortfaiea-
fitte, ftavoit un air uia;ellueuz, ellejiairojt
ponr avoir beaucoup devenu. MïideJaBâî-
-âonnlére étoit un vendable vieillv'l qiùétoit-
d'ane;pI6té conlbmmée.,;
Il parla encore iunMinillrêProEë&ajitqut
Aoit dans un état lamentable, & qui ne vou-
lut P3S loi dire fon nom. Depuis une longue
fui--
.--„Googlc'
wrHifttirtJt UBm0U. t%^
fuite d'auQées il étoit dons un trou obGmr ,
où le jour a'entroit jninitij , où le&rbare
Bcrnaviile l'avoic enfermé pour lut f&ireafa-
jorer fa Religion. On lui poitoît à maoser
aux flambeaus, & conune cedcplorableanU-
gé s'opîaiâtroit à ne pas manger , qu'on ne
lui eâtpamis de voir le Soleil encore une fois
.avant que de mourir , car IVIr. Falourdet ,
.qui n'en étoit fèpiié que d'une cloifon , ne
perdoit pas an mot de tout ce qu'il diruit, il
remendit battre crnellementà coups dener^
.debcEuf par desfoldats, euprefenceducniel
Bernaville, pour le forcer à manger, & qui
lui difo't itnpitoiablement , tu ne verras ja-
mais le Soleil, vieux tifon d'Enfer, quêta
ne lois Catholique ; & le pauvre Homme , '
quoique devenu fou ,% pHoit Dieu pendant
qu'on l'aflômmoitinhumunement. Hvit, &
entendit encore le ConfelTeur de Madame
Guyon -, cette fameufe QuîetiHe dont rtiif-
toire a tant fait de bruit dans le monde , &
qni étoit alors dans nôtre même tout de la
Éeitaudiére, comme je le dirai plus bas. C'é-
toit un vénérable vieillard, blanc commaun
Cygne, âgé de plus de quatre vingts ans; je
le croi de l'ordre des Bernabites i il Âoic
aufli dans un Cachot obfcur , où du matin,
jufqu'au foir il ne celfoit de chanteren &u.
bourdon des înveâives contre Bernaville, «:
les Elogec de Mad. Guyon la. faiote; jivct-
till&nt tous les FrifiHUueis de le pitni^ gar-
de de l'Hypocrite & perfide Betnaville ; da-
teftont les JeSlitcs & une Dame de la Cour
qu'il difcMi être leur PrMeârice. La cervel-
le lui avoittoat&J P» Ici ootiagei dou l'a-,
«oit.
■„r ..Google
Jji L' Inquifitiatt Trenp'ift
voit accablé fon exécrable Tyran.
Parmi une quantité prodigieiïfe de Prifbn-
niers qui étoicnt enfermez à Vinceimes ,
pour la même affaire de Mr. Fak)iKdet j'aî
rerenu les noms de ceux-cy qu'il m'avoît
nommez, le Major de St. George dont j'ai
déjà parlé, le nommé Varin de Rennes en
Bretazne qui avoit été Co'mmis de Mr. Puf-
fort. Mr. Anchoiae Vidal de Toulooie, c'é-
. toit un Homme qui avoit infiniment de TcG.
prit» & qui fouvent a démonté Mr.duBuif-
fon Intendant des Finances qui étoit rapor-
teur de cette affaire, tout Stoïque qu'il étoit.
Mr. Jean Felix,Gaotierd'Heniflàrt, &Mar-
. guérite Fijandtier. marchande de cheveux du
Cloître Se. Oportune. Cette pauvre Fille qoi
.étoit l'Amante de Mr. Vidal avoit été lade-
.politaire de quatorze cents &ancs qu'il luiar-
.voit confignea avec un- billet cacheté, qu'eN
le devoit garder fermé jufqu'à un certain.
: temps , & enfuite l'ouvrir pour en-donner
l'argent à celui qui lui feroii indiqué par ce
billet; ou autrement remettre le tout entre
les mains de Mr. Vidal. Cette fomme étoit
confignée pat un Homme inquiète'. pour fa..
.Nobiciiè , qui dans ce billet conlcutoit que
Ja Somme tournât au bénéfice des Commis
-df d'Argcnfon , en cas^qu'ils filTent fon af-
laite ; & quoique cette pauvre Fille n'eût au-
cune connoiOance de cette convention , &
-ne fçût en auctme manière la -raifon pour la-
quelle c£t argent lui étoit conligné, on I*a
retenue pendant deux ans Prilbnniére à Vi»-
cennes, ce qui a f^t un préjudice trèscon*
Hderable à. fon négoce , à ËL^mté , & à fon
éta-
■ Coo^jlc
OH rHtJîoire de la BapiUe. f j?
établiflcpietit ; qui la recoiilpenferadc tout ce-
la? d'Afgehfon? il a la confckhco trop teH-
drepour nepasindêmuifer, &mêmereconi-
]>enrer cette innocente vîâime. Mr. Falour- '
det m'a dit i^uè cette FÎIIe étoit d'une hu-
meur tout à fait agréable. Comme ils ontét<
long-temps voifins; lors que le Porte-cleft
lia venoii férvir , li tôt qn''' alloir nétoier fes
pots , elle fortuit promptemem de (à Cham-
bre, dont il laillbit la porte entr'ouvene, &
venoif dire quelque plaîfatiterie i Mr. dcFa.-
loortcr , & lui tendre la main ail travers de
là grille ; puis elle retournoit aVec la mSme
l^itelTe fe rentbticer dans fon antre , où elle
rfiantoit du matin jufqu'au foir. Cependant
en faifant ce badinage , elle Hfquoit d'aller
au Cachot, qui lui eût éié in&îiriWe, flellc
eût été prife fur le f^t. Ori lui avoit donné
'des oiftaui , auxquels elle acoitapris mille
■paile-paiïês; nn jour un chat lu) en ptitnn;
elle appella promptement l'officier qui étoït
dans le jardin pourleprierd'arracherdesgrif-
fes de ce voleur, le plus adroit de fes moi"
neaux : ah ! dit- elle , Mianfieur courrez vite ;
c'eft celui qui dance iî bien le rigcsdon ; elle
fit des chaulons tout à fait drôles fur cette a^
vàOture ; & le Confeffeur de Mad. Guyoh fit
Voraifon ftmèbre du PalTereau d'une manière
tout à fait rilible.
Il eft temps de décrire ce qui fe paflàdans ,
'nôtre fpelonque, pendant que Mr. Falourdet
■& moi nous y reliâmes enfemble. Sur les dis
"heures do matin du jour de fou entréeRua-
porta le pain & le vin; il y avoit uttpaîn cha-
pelle, tel qu'il m'en apoitoitd'ordia^e, &
>ï8 VltifuifitiaM FramfMp
un, antre pain de U mÉmc groflcur , maïs d*a-
□e'i^te moias fine; avec une bouteille de vîn
de Bourgogne telle qu'il avoit coutume deme
. la donner, & uue autre petite bouteille tout
au plus de demy lèptier, M. Falourdet lui
demanda promptemerit, pourqniétoîtlagrof
fe bouteille ? & Ra lui ayant repondu que
c'étoitpour moi, & la petite pour lui; ileui-
tra dans une fiircur terrible, Veuï tu, li^
dit-ïl , que je te c^ la tête de cette petite
boDteille ? apprehs à itie connoître : Va dire
i ton Gouverneur que (î il ne m'envcne pay
une bouteille de vin pareille à celle deMoit
iîeur, que je m'en plaindrai avec éclatâmes
Juges lî-iÔt que je comparoîtrai devant eux;
que je ne leur répondrai pas qu'il ne m'aieni^
fait raîibn de cette înjuftice&qu'enattendaià
il n'entrera pas dans la chambre tant que j'f
jëraî Doe feule bouteille femblableicettepe-
tite, que je ne la cafTe dansleinbmeotconr
*re le mur. Ru lui répondit , qu'il y a.voît
diSerence de moitié de (â penSon à lamien-
JWÎ que le Soi ne luidonnoit que cent ïbls
pai jour. Comment ceiit fols par jour] re^
pondit-il, avec cette Tomme, ton Maître tne
doit donner une Perdrix , ou l'équivalent à
tous mes repas , .& du meilleur vin de la Vit
le ; & devroit ftire chère de Commidàire ï
MonJîeur pour fa pilïolle. Ru alloit fortîr ,
& lut laiflcr la petite bouteille ; quand M.
Falourdet iè jeta deffus avec fnrîe & lui en
alloit caÛêr la t^te, il je ne l'avols retenu :
je me mis au devant , je lui arrachai la bou-
teille des mains t & je le priai d'accepter la
nu'enoe , & que Je gardeiois: lapetitepour
moi,
.--„Googlc
M PHiJIeirs de la B^fi^le- t Jy
tnot. Ra devînt laifoBa^e poorlapremiérfr
fois; il reprit la petite boatcille, & dit qu'il
alloit lai en siporter ane grofle, puifque le
Gouverneur g^ooit aSet vai nous ; & daes
le momcDt il revint avec une groQè bouteille
lêmblable à fa mienue. JYtoisdansledernier
ftonnement de voir avec quel emportement
M> Falourdet biurquoit des Gens qui étoieut
ea pouvoir de tout faire, impunément contre
luL 11 me fit entendre que s'il n'avoit ufédo
la même hauteur avec Bernavilte ï Vincen-
ne», il l'auroit traitté comme les malheureuict
vtâimes qu'il avoitreduittes datis no état dé-
plorable , & qu'il nourriiToit plus mal qu'on
nefait le^kleiiens àMarreille. lime fit en-
tendre (MPïIloil fortir dani qmnze jours^i
plus tard de la Bailille , & que le bien ou I«
mal de toa. affaire étantdecidé, iln'avoitplm
Aucuns ménagements à garder avec dea Gcut
qu'il n'envilageoit que cootme let plttS
barbares Boureaux qui fulTent fous 1« Ciel.
Mais ce fut tout autrechofe.lDrfqu'oaitPUt
aporta à dîner ; & qs'jl vit qu'on lui I^volt
ane mâchante foope, qui îembloitn'éttepH-
reitient qne de l'eaubottillte avec un morceau
de bœuf defliis, qui aiant fervi ï fiûredBJus »
<toit pins ïëc qne du bois, puili]nc le fuc en
tfto-'t tout eiprimé, lorfqu'on me fervoit ua
ordinaire p^ble. Il entra dans des fougues
lenibleï. LePorteclefsdécampa,, aprcsavoit
fermé la porte: il ïCy avoit pas moiendejet»
ter les plats par les fenêtres; il apoUrophalt
Gouverneurdelabellemaniérei ilfiappavio-
lemment à laporte, malgré toutes mes oppo-
sitions } pOBT cooclofioa le Major vint lui
dire
.--„Googlc
140 VlH^uifftien Frattfçifi
dire au travers de la porte, qu'il le d<Hinât
patience, qu'il feroit mieux tiaittélefoir, &
que G il vouloit faire des violences , on fça-
voit fort bien les moïcns de l'eu punir.
Je le confolai de mon mieux, il s'adoucit,
nous nous accommodâmes de ma petite por-
tion, & il garda la iieane entière pour lajet-
ter à la tâte du Porte-clefs quand il entreroit.
Jcgagnaiencorefur lui , qu'il- n'en feroit rien,
qu'il fe contentcroît de lui faire voir qu'il n'y
avoit pas touché ; & de lui dire qu'on ncde-
Voît pas traitter ainfl un Homme de fon méri-
te. Le foir il fut un peu mieux traltté ; m«s
t>endaQt tout le temps qu'il demeura avec
tnoi , fa fierté eut beaucoup à ^Ëir , pai
toutes les couleuvres que ces g9Ra lui fi-
rent avaler, car affùrement tout ce qu'on lui
donnoit bien iiipputé , ne montoît pas à dix
fols. Il me fit le détail de fon afi'aire : il me
parûilToit fort inquiet, &fansdoute, Itona-
voit pouifé les chofcs à la rigueur , il avoit
railbn de l'être. Il avoit donné de l'argent an
Fanflàire pour contrefaire l'original de fou
contrat, qu'il avoit porté lui memeclandeC-
tinement dans le grenier des héritiers du No-
taire d'Anei ; tout cela ne pouvoir être adou-
ci que par l'avceu qu'il en avoit f^t à Mr. de
Caumartin, fur la parole que ce Miuiftrelui
avoit donnée de ne lui pas faire de mal, pw
la folidité confiante & cfFcaivedefaNoblef-
fe, pour laquelle on l'inquiétoît mal à pro-
pos , & par la (implicite du Gentiltiomme
qui inhabile dans les affaires , s'étoit laiflif
féduire, làns en connoître les confequences.
Il me dît encore que Mr. du fiuiObn In'
.--„Googlc
tu rHiftair» Je la BafFilU. 141
tendant d<is finances qui étoit fon Raporteur ,
lui avoit témoigné beaucoup de compaflioo
& de bienvdllanîe; qu'in'avoit toujours fait
aflbir & fe couvrir quand îlI'avoitimerrOTé;
qu'il ne le cachoît pas de dire devant lui à mr-
naville, que la feule chofe qui pouvoitfauvcr
la vie aux Commis de d'Argenfon , cft que
le Maître y écoit tellement impliqué, qu'il é-
toit impoflible de pouflèr les chofes à la ri-
gueur contre ceux là , fans y enveloper ce-
lui ci: qu'il' dîfoïE encore hautement en fa
prefence que d' Argenfon Aoit un homme qui
ne trouvoic rien de trop chaud ni de trop froid ,
& tellement avide d'argent , qu'il bandoil
tous les relforts de fon efprit,tout des plus
fabtils, peut en attraper, fans confulter fa
confcience ni fon honneur. Jamais Mr. du
BoiJTon ne fbrtoit d'avec mon Concaptif,làns
le recommander ï Bernavilie , à. en particu-
lier il lui demandoit lî il en étoitbient'raitté.
En effet Bernavilie lui permettait d'écrire tous
les Mois à fon Epoufe& d'en recevoir répon-
ce.Il étoittrès bien nourri. Quand il fut malade
&r«luît à l'extrémité, on lui donna une fem-
mepour le garder,& on en eut un foin tout par-
ticuJier. De tout cela j'angurois que fon affaire
preodroitunbontour; ^qu'ilen ferait quitte
pour avoir perduun Œil & une partie de la mâ-
choire dans faPrifon pendant fa maladie: dans,
Is fiiite j'ai fçu que je ne m'étois pas trompé.
Pendant nôtre conc^tivité il me conta les
^conlbnces d'une fuperAition très particu-
lière, <^i fe pratique en fon pays ; & com-
nie il m'a pant très lîncére pendaJit tout le
ira^ "¥ie j'ai-^té avec lui, je le cru trèsfe-
»-, Google
141 VlnqmfiAm FrsHfaije
. ciknKttt : il me certifia que (Uns la paroUIè
de St. I>eiiis , où j'ai déjà dit qu'il y avoiC
pluHeOFE tonUJeaux de fes Aïeux , & qui cfl
tout. proche de fit Teire, l'on communie
les chiens eoiagez , les chevaux, les bœufs, les
vaches, & autres animaux qui fcotmaladet;
& voici comme il m'a affitm^ que l'on exé-
cute cette cérémonie. Les Propriétaires des
Bé[eG qui ont beibin d'être £>ulagées , les ar-
mènent dans le cimetière de St.T^coif; &i%
cholè en vAutlapeînc, ils fom dire une Mtil
fe, le remède en eâ plus efficace ; api«s quoi
on les introduit .dans le bas de r£gliié où il
y a une grande cure pleine d'ean DOiîte. Si
tdt que lePrétre revftu dc|fcu)furplis&d'a-
ne étole a reccn le prix fix^ 'povi chaque es-
pèce d'aBÎmal , car il iaat garder ta bonne foi
par tout , l'cHi tic Sak grâce à perfonne , mais
l'on uc ^end pas plus qu'il oc faut , il pofe
le bout d'en bas de fon étole ûu la tête de la
bâte malade & dît le plus promptemeot qu'il
peQt,&pour caufe,uneoraifoaponrfaitonva-
IdrencC] & labenït d'un figne de croix ;' en fuite
11 pr<nd un petit mor.oeau de pain ,& une petite
image que rulgairemenî l'on nomme un noot
de Jefus qu'il bénit pareillement d'unaïUtefif
gne de croix, pois il trempe le tout dans
l'eau iï&ite Tufilite , & le depofc dans U
gtKoJle de la BCte iàuffrance , que pour cet
effet JePn^ïriétaire, ou le Clerc do Ptétte
ouvre.Ieplus large qp'il peut; aprèsUyvcr-
lè de l'eau bénite; celait, fi l&BétCBKBrL
c!efi lepeude fbi du.Propnétaite, qnicBeft
la caofe, carunc foisje i-rëtcca filicibnd»>
voùdaasJcs foriïics,.f]iast:q>eadancétrefo^
■ jet
u,:,-,zf--„GoOglc
tftPHifith'etlt û BafiiUe. 14)
jtt 4 la garantie. Il «lejumqa'H y avoit quel-
ques années <jue prcfijue toutes les vaches
de la Champfçoeavoîentétémaladesj&que
l'cin €fi nvoit conduit une fi grande quantité
4-St. Denis, que le CiKé & les Prêtres en a-
toîcm tiré un profit très eonfidcrable. Au-
jootd'hai que la maladie régne univcrfelle-
ment fur tous les belKaui , dans une bonne
^partie tie l'Europe , l'on aurait bien befoia
dn fecours de ces bons &. zélei Prêtres , fi
l'oo avoit ici autant de ftiô qu'en Champa*
goe , mais c'eft de qooi je ne fais pas bien
pet&adé.
Le tnême m'a encore affirmé qu'à Vitry
le François pendant qu'il y étoit jeune éco-
lier , il vit trainer fur !a clayc une Femme
toute niie dont le crime étoit d'être morte
dans la ReHgion reformée, érqu'enfuiteellc
fat jettéc à la voirie, où les Ecoliers firent
mille indignitez àce pauvre cadavte,tuibrûleT
rent avec de la paille tout le poil du corps ,
& exercèrent deflUs des infamies que la pu-
deur m'empêche d'eipriracr ,, & qui feroient
révolter les eceurs les plus barbares ; pen-
dant qoe le Mari rfefolé de cette mîfcrable
Tiâîmepleiiroir à chaudes larmes, &fejettoit
au3 pieds ides femmes de fes Juges , en les
fiippîîant d'avoir commrfèration d'un refte
malheoreoT de leur Sexe ; & que ces Dames
n'ofoient lui repondre que par des pleurs ,
des Ibopirs & en' haullanc les épaules. Mon
■Compagnon dcmandoitpatdon a Dieu de tout
ton cœur d'avoît été un des AÔeurs de cetf
te fnneftc Tn^jedic, comme Ecolier & toilt
'des pins malins. - -
• , Quand
.....Xooylc
X44 L^Iifjuifitiç» FrMUfoife
QuïiiJ je fiis certain de fafortîe, jepiofi->
tai dtrs bonnes difpoUtioQS où je le voiois de
me rendre fetvice : il avoit heureufement du
papier, fur lequel, dans un pre£(ânt befoîn,
i'oQ pouToit encore écrire; je fis des plumef
avec des os j & de l'encre avec du noirielà
fumée de notre chandelle. J'écrivis à mon
EpoufeSt àmonFils, i Mr.de Torcy&Cha-
millart , & à mes autres Amis. Je fuis très
perfuadé de fa bonue volonté & qu'il a fait*
tous £es eiTorts pour m'obliger; cependant
mon Epoufe n'a pas apris mou cmprifonne-
ment par foii canal , & les lettres que je lui
remis ne font pas parveoUes >ufques i elle ;
elle aprit la nouvel le douloureufe de mon mal-
heur par la Gazette deRotterdam , qutdifoit
polîtivemcnt , que Mr.ConflantindeReiine-
ville Commis .de Mr. Chamillart.avoit éiij
arrêté & conduit à la Babille fans fçavoîr
pourquoi.
Enfin le jour de Cbnjugementarriva, quîj
fi je ne me trompe fut le lundi 25. Septem-
bre 1 70:. Dès cinq heures du matin le Ma^^
jor vint l'avertir de fe tanirprct pourctre ju-
gé. Il me fit les derniers adieus,commeB il
eût du mourir; Jereteiioismes larmes, pour
l'encourager de mon miçux , & lui Protefter
qu'il en lerott quitte pour la peur. Enfin fur
les dï% heures du matin, le Major accom-
pagné du Capitaine des Portes & de Kii vint
le faire fortir de nôtre antre, je l'en^aOàî
l(;ndrement avant qucde le laiiTer. Quandif
porte fut fermée fur moi je ne pus epip'êchèr
mes pleurs de fe débonder ; j'en vçi'fai quj
partoient du piofoad de mon cœur , car je
l'ai-
.--„Googlc
«« FHiftûre Jt la Béfiitte. 14$
roimois véritablement de toute mon ame,
aufiî le meritoit-il bien , & je croi qu'il me
rmdoît biea le redproque. Je me jettai à ge-
noux , & je pliai Dieu très ardemoien:, qu'il
lui accordât les fèconrs donc II avottbefoin,
& je ne difcontianai pat ma prière , jufqu'à
ce qu'il fût de retour. Enfin je le vis arriver
deux heures après & voici le récit qu'il me lit
de ce qui s'étoit pafTé depuis nôtre ièpat*-
tion.
A lafortic de nôtre Chambre le Major le
prit par UD coin de fonjuHaucorps, «qu'il
eiude lapcineàfouflnr; au pied de l'efcalier
de la Tour il trouva plulieurs Soldats armez,
. dont quelques uns furent affés infoleiitc
'pour l'outrager par des railleries tout i fait
hors de raifon, tous enfen^le rejoignirent
an Major , & à fa Compagnie pour Pefcor-
ter jufqu'à t'ArXenal, oùilsentrerentparune
.petite porte qui a communication à la BaP-
tille; iptès avoir traverfé lagrande Coikr , la
'Barrière., le Co^s de garde , & la Cour de
l'apartement du Gouverneur de la Baflille*
on le .fit paflîr par plufieurs apartcments de
l'ArfenaL, & en tin on le .fit aitéter dans une ,
.grande faLe toute remplie de Laquais., Huif-
.fiers , Exempts , .& d'autre vermine fembla-
ble : où, après l'avoir fait attendre .pendant
.près de demy heure., oal'introduifit dans une
^grande & magnifique fale. toute tapifféedejti-
ges , qui fembloient collez contre le mur ,
.enfoncez dans leurs ^uteuils comme daiS
.autant de niches, avec des robes d'éca^late,
s& de grandes perruques , dans IcfqueUçs teur.s
Jlàtts tembloiem eolevelies. M. de la Renie
G ' pre-
.--„Googlc
I4< ' Vlfefui/SfÛM J^fMtfpiJi
ptefidoit far cet aagufte SeniU:, ^s dans «n
efpèce de tr6ae &'Mr.<Iu fiuiilbn raporteor
de Vaffiate ét(ritadisàfonc6té droit, &toas
les antres Jugjes en fuàte, à droit & i gauche
^e ce terrible Tribunal. Aux pieds deMr.de
ta Renie écoit aâls le Greffier, avec une lon-
gue table devant Ini, couverte d'un g^and tapis
traînant à terre , aux deux extremùtei de 1^
i)iietle étoient d<Â>out plolteurs Huiflîers avec
Jeors maûès. Un Huiffier ût ailbir Mr. Fa-
lonrdct au milieu du Parquçt fur une petite
fellette de bois élevée d'un pjcd de terre. Il
m'a juré depuis;. que dans I^indant il tut prU
.d'«n tremblement fi terrible qu'il perdit loa-
te connoiflânce, ft penlà tomber àlarcnver-
.ft; Non , me ditoit-il, j 'ai aidé à foutenir le
Si^e deNamurconirel'Atmée du Roi Guil-
laume & de fes Alitez ; toute la terre a fçn
avec quelle vigueur nons fAmes attaquez ;
j'aimerois cependant mieas efliiîer vingt px-
reils Sièges que de fubirune femblable ièan-
ce. Je tne repcefetitai le jugement dernier; &
,l2 crante de la mort avec tout fîm appareil,
me ûilit 11 fon le cœur que j'allois tomber
en defiullance, lors que M. dekRenîe, qui
s'en apcrjBt, me ranima ^ar de douces parch-
les, anm bien que Mr. du Bulffon. Emhite
■unHHilïïer dilWbua à chacun des Juges un
Cahier , dans lequel aparemment étoît écrite
la copie de Cm interrogatoires. Alors le Prc-
lident l'interrogea, fur ce qu'on luîavoitde-
mandé dans fes intcrrogatoircs,qu'il affirma
véritables. Lors qu'il élevoitnnpen (à voix,
■.on lui iùîfoit vilement prendre un ton plus
bâsj & lors qu'il parloit bas, un autre Juge
lAi
tHTi^me Jt fa SsfiiUt. 14J
lui eommandoit de prmdre un ton plsS haut.
Il y en eut □□ i^uEIe reprit de ce qu'il le don-
noit trop de mouvemenr en gefticulantfnrfa
&\ette. Helas dfi-îl, MefrdgncurE , fi vous
me l'ordonnei , je me jctteni i genoux , &
je me proftemerai même levifagecontretcr-
, re. Ce terrible aâefÏDi, toCte 1 Wcn^lée loi
témoigna êtic contente de fes reponces fit
fans lui dire le fiiccer de fon affaire on le fit
relever, & un HutlTier le conduîlit marchant
âreculons, le vlfage tourné du cAcé de ièc
Joges, jiifqu'à ce qu'il fût hors de la fale &
dans l'ami chaid^e, où le Major & faSequel-
Ic rattendoient,qiii le ramenèrent dans ma ca-
verne, où il me fit le (fetail que je viens de
rapoiter, ûir lequel aoustaiiônflâmes tout le
reâe da Jour i perte de viie ; c» les hauts &
\ bas des Prifanniers font étranges; eaunmo-
meat on pafTe de reiperanceâanetrifledefo-
ladcm , & on flotte încell&niiaeBt entre l'cf-
■ j>oïr & la crainte.
Après deux uis d'sfctar^e & de mifêre
rbeureux moment arriva , qui devoit termi-
ner fes peines & le remettre en liberté : ce
fiit le jeudi x8. Septembre fur les f^t heures
de matin que te Major Tint lui dire de B'ha-
trilkr & que fa Itbené étoitventîe. llpriatrès
îiiÂamment ce fobre Oficier de lui dire quel
étoit fon jugement, &fi on lerenvoioitchez
hii, ou à la grève; ii lui dit que le Gouver-
neur lui en alloit dire des nouvelles. Je pris
congé de luiteElarmes^uxyeuT, nefçachant
pat quel étoitfon jugement. Nôtre fe|^ation
iut xullî tendre qu'elle eût pik être, iinousa-
«ions toujours vécu enièmble dès DÔcre en-
■ G a fttt-
.--„Googlc
I4$ L'Inqttifition Fraufaifi
faitcâ dans une pariante union. Un quart
d'heure après qu'il fut font, Ru vint prendre
fon manteau, qu'il avoir oublié dans ma chmn-
bre, & ni'affura que Mr. Falourdet avoir la
liberré de retourner chci lui yvivre tranquil-
le, ce qui me donna unegrandeconfolation.
J'en rendois grâces àDicu, lorfquefurles
huit heures du matin le Major vint me dire
de ploier tout mort bagage, & qu'il m'alloit
conduire dans une des Chambres de lafialtil-
]e. Je ne me le fis pas dire deux fois,Ru qui
l'accompagnoir & un autre Portccleft Ce faî-
lirent de mon bagage. Je montai tout au haut
de la Tour ; mais quel fut mon étonnement
quand au lieu d'une Très belle Chambre, j'en-
trai dans une Calotte. C'ell une Chambre oc-
togone, dont huit arcades qui aboutiiTent en
calotte occupent la plus grande partie , en
forte qu'on ne peut fe promener qu'au milieu
de la chambrei & qu'on a peine à inettre un
lit de camp, dans les intervales des arcades.
Il y a une avant-grille devant la fenêtre au
dedans de la ,Ghamtire,quî eft dclahauteurde,
cette Chambre; elle. empêche qu'on ne puiflè
approcher de .diï. pieds., qnifontl'épaiflèurdu
mur, de l'autre grille qui efl .pofée au dehors
de la muraille, ce qui borne extrêmement la
vile, fans quoielleferoitd'unevafteétendiie,.
car malgré cet oWlacle, on découvre une
grande partiede Paris , on voit bicaavant dans
larijj de St. Antoine, comme auffi les Tours
de Nôtre Dame, les Invalides, & encore bien
su delà. Ce qu'il y a de plus incommode,
t'eft qu'en Eté,,i! y lait une chaleur exccffi-
ve, & en hyver un froid inTupoitahlo. Tou-?
.--„Googlc
.--„Googlc
■ -,Googlc
ùH fHîJioire de U BaJiUJe. I49
téis les Calottes font faîtes à peu près de la
même mahiéie. J'ai étédanscdIedelaTour
du Coin , qut eft tout à fait femblable, excép-
té fes ¥ués: celle-cy regarde le Soleil Icvaut,
Si l'autre le couchant.
ans cette Calotte un Jeune
Lir fon lit, envelopé dans une
e de fatin raî^ doublé de taffè-
lit fort fâle, & ne branla pas
nous entrâmes dans la Chaîn-
ai au Major fic'étoit tàleplus
la Bailillc , comme il me IV
lui^ Monfîeur, me dit-il, &
oudroientbieny être, n'ylbnt
:iixquiyfont, luirepondîs-jc,
1 n'y itre pas. Je ne fus p.is
■ qu'il ne m'avoit pas accufC
beauté de nôtre Chambre , car
ar la première fois qu'il eût dit
ois déjà tontaccoutumé à l'eii-
; Tous les Officiers faifoient
edeteftable vice, pour mieux
'ère du menfonge.
'eurent enfermé avecmon nou-
veau Compagnon , & «3ue je mevisfeuiavec
■lui, je fus l'embtafferfurfoniit, d'oùilnV
voit iàît encore aucun mouvemeat. Il fe le- .
va, & me fit voir on grandjeune homme bien
fait de dix neuf -à vingt ans ; mais fort trifte &
deifaît. Je connus bien qu'il et oit étranger je
lui demandai d'où il étoh, mais il ncmc répon-
dit que par un cariiet iierftan , ce qui me fit
conjeûurer qu'il étoîtAlleman. Je lui demaii--
dai en marnais Hollandois, que j'entendois
alors un peo , de quel Canton d'Allemagne
G J il
u,:,-,zf--„GpOglc
rîO Vlwfuifitiott Frmfeife
S 6toîc ; il me rqiondit qa'il étoit de Leîpfic
en Saxe : Je lui parlai iktiD ; il me iqiliqaa
âans la même langue ; il Ce trouva mfine
qu'il fçavQiE, ftuûi bien que moi, un peu ]8
^gue Italienne. Je ne fîis pas long-temps
fans connoître que cVtoit un fort joli hom-
me, & d'un mérite diftineu^. Son nom étoit
GhriHîea Henri Liuck , Fils dtin Medecif)
trËs Puinàu't & riche de la Ville de Leipfic :
Il me laconit pai quel malhcnt il étoit ton^
bé dans ce funcile & mi&rable abyme. Son
Fere qui l'aimoit tendrement, :^re$ fes étu-
des l'ayoit envoie dans toutes les Cours d'Al-
lemagne : on lui avoit taitac trouvé tant de
mérite dans celte de Wiitemberg , qu'on l'a:-
Toit retenu auprès de S. A. S. Madame U
Dnchcûè Régnante pour Stte Ibn Médecin,
iafcience farpsiTant làjeanellèXabeautéd'a-
ne jeune Languedocienne,qui étoit aàpràsdc
cette Princeflc , pour lui aprendre la langue
Françoilèf attesarit fon jeune cœur pour la
^emiére fois. £lle étoit favorite de la Du-
cheHe ; nos deux jeunes Commeulàux ne fu^
tent pas loi^tenips fans s'aimer. L'Amant
écrivit à fon Fere pour obtenir la permiJiîon
d'époufer cette aimable Demoifclle, qui s'ar
pcUe Marguerite de Vicqae de Montpellier ,
que les troubles de la Religion ont faitfortir
âe France : elle eft Nièce & Héritière du fa-
meux Mr.Troiiillon Doâeur en Médecine,
tefugié à Bâlepoui le m^mefujet, dcqui el-
le jeîpeic de grands biens , - puifque c'cll un
bomme très âgé , fort riche, & fans Enfants.
I/c Peie de Mr. Linck jugea qu'il étoit trop
Jeune pou. fe mvicTi & quoi^^'îLaprouvit
fore
.--„Googlc
fbrt le choix judicieux de fon Fils , il lui
confeilla de voir la France au l'Italie à Son
choit, & même toutes ces deux charmaates
parties de l'Europe avant que de s'étaiblir. Le
délit d*a{)teiidre la lanfueFian^oilè, poiulè
minix uire entendre de lÀMaittellè, lui fit
commencer par la France. Il vintlogcràPa-
ris chei Mr. Chuas Apothicaire, âts dufea
célèbre Moyfe Charas Doâeur en Médecine»'
riic des Boucheries au Faux-bourg St. Ger-
main, quiautrefoisademeuréchezMr.LJnck.
le Père à Leiplic, car il eil Médecin & A-,
pothicajre, ces deux ptofeiEons étant fou-
vent conjointes en Allemagne. CeJeaneSa^
xon, alloît aux Ecoles de MedecineàParis,
pour fe peifeâiooner , aufll t»eii qu'aux Hô-
pitftux , au Jardin roïal des plantes , & Aûi
autres lieux d'allèniblées qui concernent cet
Art I & failbit les Exercices d»as cette fii-
p«rbe Ville , lors qu'on ie vintavenïr de for-
tir du Royaume , où il nVtoit pas en feureté,
pai le trouble que la mort du Roi d'Eliragne
mettoit eutielaMaifcuid'Aluric^&laFraa-
ce. Oed ce qui fit refoudre Mr. Linck&let
autres AUemans qui étoient de fa conuoif-
fànce au retour de la- foiredeBefons, oikilt.
avoient été fe divertir, d'aller à Verfàilles:
trouverM^DicBelk-Soeurdu Roi, ftPro--
teârice genereufe de là Nation, pour la fup->-
plier de leur fa&e counoître li ils potivoient.
lefter en feurettf à Paris. Elle leur ât entea-
dre qu'ils n'avoient lïen à craindre , maiS'
que pour plus grande aâiuance elle voaloic
le içavoir au ^oiméme, &4ans le moment
elle fut le trgHver pour ce fujet; & peu de
G 4., tenq>S'
rj» Vlnquifiûom Franfoift
temps après elle revint leur protcflcr , qa'ilt •
rftoient les Maîtres d'y demeurer fccrement,
& qu'elle les feroit avertir de U part de S.
M. quand ils dcvroientfe retirer. Cependant
dès le lendemain , fans attendre pluHoin , a-
près leur retour de Verfàilles, ilsfiirentpoai
la plus grande partie arrêtei à Paris. Hnît
jours auparavant Mr. Anchiiz , aniïi Saxon,
k. quelques autres Allemands avoient déjà
tti emptifonnés ; mais ceux-ci croioientque
c*étoit pour d^s , & n'en prenoieni aucun
ombrage.
' Ce mt le 5. Septembre jour de la naifl^-
ce du Roi deFrance, que for les quatre heu-
res du matin on vintfrappcràlaportedeMr.
Linck ; il ouvrit & fiit riirpris de voir entrer
trois ou quatre viTages inconnus, & de très
mauvaife aparencc, qui lui demandèrent fi il
»e s'appelloit pas Mr.- Linck & iî il ne con- .
Hoiûbft pas Mr. Anchits; il leur fit entendre
par Mr. Charas qu'il fit monter qui il étoit ,
& la relation qu'il avoit avec Mr. Anchits ;
ils lui dirent qu'ils vcnoient de fa part loi
propo&r que comme Mr. Anchitz luidevoit
de l'argent, qu'il lui avoit prfté depuis peu ,
& doiit il ne lui avoit donné aucune recon-
noiflàace , il defiroit -lui en donner des aflii-
nuices pour s'en faite païer par fes Parents ;
ft n il ne vouloit pas bien inciter en Caroflè
avec eux pour l'aller trouver pour ce fujet.
Ils avoient apris de Mr, Anchitr Prifonnier
depuis peu à la Baftilie ces particularitei qui
firent le malheur de Mr. Linck. Lui qui ne fe
doutoit pas du piège que ces Filoux lui ten-
doicot, leur témoigna qu'il étoît près de les^
Où,-*
- fiiivrc; Ilfiit fort étonné dcvoirqu'ilscont*
menccrent par faire rinventairc de fits meu-
bles, & de s'en mettre enpofleffionenmén»
temps : après quoi ils le firent dcfcendre &
monter en Carolfe. Mr. Charas voîoic cet-
te injuflice avec douleur , fans ofer s'y oppo-
iev. Si tôt qu'il fiit entré dans le caroftc on le
ferma de tous les cotez fans ylailTeiquetrès
peu de jour. L'Exempt étoit à ùl droite dans
le fond; deux pooûèculs furledevam, &Ies
aatrcs-fiir le derrière, & à côté du Cocher ,
car il y enavoit plufieurs qui étoieni rcflez
dans la riie devant la Maifon de Mr. Charas. -
liors qu'ils tinrent leur proie, ils firent tou-
cher promptranent au funeflc Colombier, où
en dcfcenaant, ils nemanquerenupas d'cJj-
ferver la ceremonîedc lui mettre Jeur chapeau
. devant le vifage. Ainlidonc-à tâtons-, fuis
fçavo» où on le menoit , il fut conduit dans
le gîte où nous étions tous les deux, &donc
j'ai déjà fait la defcription. Il itoit environ
Cn heutes du matin lorfqa'il entra dans cat
antre épouvantable , où il n'y avoii aucun
meuble ; pas même une pierre pour s"airoir ,
& on l'y laiflà enfermé jufqu'à onze heures
du foir,aptci avmrpris tout fon argent,conl)- .
fiant en ■««. louis , trentcécns , & une latte
de crédit fur Mr.Tourton banquier , quanti-
té de pieferies qu'il avoir fur lui, toutes fes
hatdes , & tourné toutes ft-s poches.
■ II eut pendant ce temps beaa.fàlre des re-
fieiions , dontpasunenetouchoit au but, car
il ne fçavoit où il étoit. Enfin accablé de laffi-
tude, dc&im', &defommeil, ilafTemblaa-
vec.tcs mains & fes pied; tout lefiiatier de
G j; fon.
] j4 VJâ^iî»» FrdKfeift
ibn redait , dbat il fc compofa un espèce dq ,
&; il fe depoailU de Ton juAuicoips qu'il
mit' deilôt , mit foa chapeau couvert de ia
fcTTuqnr: pour lui fervir de chevet, s'eiivelo-
fat la t^ de foo mouchoir & fc coucha ea
Tcfte fur cedurgrabat. llcommençoitàroniT
SKiller lors que fur les onze heures, il en-
tendit, braire lesTciTOtUt dont le tiatamarre
^Kiayantabic, lui et croire qu'il alloit voir
Aitrer tous le& Diablet daf» fà caverne : mai)
u & remit un peu, voiant qu'il cnétoitquît-
Ijc pour voir entrer Ru , qui n'étoit guert
^loins hideux, ppttaiit une table & une chai-.
ts avec une chandelle allumée, fuivi de deux
autres homin^s chargez de molles , conûf-
MntSj en.irn lit de langlçs, unepaLUaSè, uo
matelas , un travers de lit, deux coasetturcs
^cox draps., & deux fervieties, le tout tout.
■enf ; & le Capitaine des portes portant foa
£>upév comppfé d'un morceau de mouton,
.fbty &oid& d'un pain blanc d'une livre. Ru
l'étant déchargé de ce qu'il ponoi» , aoflî
hien que les deux hommes qui l'accompa-
ghoicnt, ils retournèrent quérir une bouteille
^vindedèmyfeptîer,nnecruchepIeined'e3t^
«ne cuiller, une fourchette, une Ïftl1iére,na
petit couteau , un verte, on chandelier, &un
pbt de chambre de faïance , le, tout auSi tout
lieuf. lis. lui parletcot & il leur parla, mais
comme ils ne s'entre entendoient pas, ceiaex-
droit Ru à rire de tout fon cœur. Us rcfer-.
merent les portes fur lui ^ ^irès lui avoir aL;
lamé une chandelle. '
' Comme il n'avoit ni bû, njniangédetou-.
tiç la joarnée, laptemi^ic cbofequ^ljfit, fut,
' ' dp;
de couvrir là tible, de «'y aflbîr, A d'y fl»»,-
Torcr Tes viânaillcs , cC qui Ait tHcnt^tclP^ '
dié ; aprèsqnoi, ilfitfongrid>at, t'ycoucaa|-
& dormit de toute fon ame. 11 étoiteofeveli ■
daos UR profond fommeii , tocfquc fut les.-
trots tieares du matin il fut tev^Ué pariia>
bruit épouvantable. Il y avait quelques te-
jouiQïmces en campagne , qui firent tirer 1» '
Canon de laBaflille, & les Boëtes qu'en ce
temps là , & longtempt^ièt l'on rangeoit.
far la plue forme, d'où on les a deCcendiies,-
dans la fuite dans le Jardin , paioe qu'elle '
crevoicot letVoateSt comme elles firent C(t-
matin la, que le pa^yre Mr. iJinckcnpeulÀ
être tué. Lc-C^onronloit fm fàiâte; en-:
tre eux il a'ya'Voit que^l'épajlfèuidâlavoute^:
Xieg Boc'tes par leur eâoTt creyerent cette
Toute droit lùr la tête, & firent tomber à ua-
pied de fan lit une quantité prodigieulc dq -
{verres.. Je Uiflè à penfer quelle fut la peut -
4*un Jeune Hcraune, qui ne fçavoit où il é-
toit, qui enteodait tont le fracas desBoëtes, .
ft du Canon , ,& qui fe crut enCeveli fous \'éi •
bouicment de fa Caveroe. Il m'a juré depuis '
qu'il crut qu'on alloit le faire iÀutcrcn l'air, .
puce qfa'il étoi't Saxon , dont le Duc avojt :
éti declaté Roi de Pologne , par prcferenc* -
à Mr. le Prince de Conti. Sur les fept heu^
res on lui aporta un pain & demy feptier d« -'
vin : il fit voir à Ru les pierres éboulées , qui '■
«voteiit manqué d'écrafer fon lit : mais Ru n«
r^iondit , qu'avec de grands éclats de rit*..
Enâaiidcmeurafaiisfçavpiroùilnoit, ni ce ;
(^'on^lni vouloir jufqu'à l'oqiieme de Sep-
ttmbre , qu'on lui amena pouf Comp^gnoa ^
G 6- le^
.--„Googlc
Ipï I^n^K^thn Françeîfe
le nommé Varin de Rennes en Brewçne ,
gros homme alTcz bien Mt , & qui étoit un-
dès Commis, de d'Argenibn, dont J'ai déjà'
parlé , pourfaivi pout la friponnerie tàiic en-
Faffaire de la. recherche des Nobles , & au-
quel 11 l'on avott rendu juilice, on auioit fait,
nirenne perilleufe c^riole. Il avoit été Com-
ftiisdeMr. Pullbrt. Il apritàMr.Lînck par-
ce qu'il fçavoit parler laîin , qu'il étoit à la
BaHîllo, que. le Canon. qu'on avoit tiré letf.
du mâme Mois- étoit en a^îon de grâces de
quelque viâôire qui i^iareouncnt avoit été
remportée par les François , & qu'indubita-
blement on l'avoic arrêté par ce qu'il étoit é-
tranger, & que la guerre étoit déclarée entre
I^Ëmpirs &i la France. Dans les convcrfa-
âons qu'ils, eurent eoTcmble, ^Ar. Linck fit
tonnoître à Varin* que la chofc qui lui fai-.
foit le plus de peine , c'éioicune MaitreU^
qu'il avoit laiuée ii.Stoutgard, qu'il aimoic
pajiîonnément : it luifit.voirunebaguequ'eK
lè lut avoit donnée daq^ l'aneaa de laquelle
elleayoit f^i graver Ion nom ^ & qn'ilavoit
dérobée à l'avarice de fes detroullèurs, parce
qu'il la^iortoit toujours attachée fur fôn cœur.
Varin convoita la bague, qui félon fes bons .
principes en valoitb>en lapetne, &levoiant
^rt delireux de faire fçavoir de tes nouvelles
ï Stontgard à fa^ MaiirefTe & â fon Père à
Ijcipfic, poiu lequel iî avoit une vénération
toute paiticuliére , il lui piomi.t.de leiirécri-
re à tous-deuï le jour quîit lèroitXorti^ &
qu'il leur enfeigneroit les^ motens^c lut procu-
rfr fa liberté ; mais que comme il craignoit
(tout>Uei: le nom dç MadMe V icque , qui é^
.--„Googlc
tu rBifloire de laBaJiiîk. Iî7
ttrft gravé dans la bagne , il étoît. néce/Taire
qu'il la.lui prêtât pout s'en fervir â mettre fou
âdreire for la lettre qu'il lui devoit écrite ; &
que dans te moniem qu'il auroit fa Itbené ,
à laquelle il alloit travaillrt inceflàmment ,
il lui reodroit fa b^uc, dont il faifoit une fi
grande eflime, à caufe de la main qui la lut
avoit donnée: Mr. Linck qui auroit accordé
fil peau pour faire fçavoir de fes nourdles %
foa Perc & à fa Mairrcfle, & fortir de l'hor-
rible gouffre où il étoit , donna fa b^e à.
Variii, mais je doute fort qu'il le foît acqui-
té de fes commiôioBs , & encore plus qu'il
ait rendu la bague à Mr. Linck après qu'il a
il€ mis en liberté.
Varin fut jugé le même jour que Mr. Fa-
lourdel-, maïs loin d'avoiier ingetiiiement à
fian Ccréfipagnon qu'il avoii étémisfurla fel-
lette, il fit entendre à Mr. Linck, que Ces
Jnges ne l'avoient fait cntrerdansleuraffem-
blee que pour lui faire de grandes eicufesde
se qu'on l'avoit retenu fi long-temps Prîfon-
Bter. Cependant le Major nous dit aprèsqu'il
en avoit été quitte pour être banni. Ce qu'il
y a de particulier , c'«ft que pendant tout le
temps que ce Varin fut à la ÊaÛille, on eut
pour lui des égards tout eitraordrnatres : il
liu nourri délicieufement., on lui fervoit du
gibier le plus an , les mets les plus delîcats,le
vin le plus exquis, on le promenoit tous les
jours fui la terrallè & dans le jardin , pour
quoi ?parceque ce-criminel apartenoîtà d'Ar-
ceDlbn,daus le temps qu'on donnoitdabœul^.
dont on avOit eiprimé le jus , à Mr. Falour-
4ct mQuCompagnoainnoecQti EnfiaceVa<
Gl 7 a»
u,:,-,zf--„GoOglc
Ij8. UInquifi^Q«Framf<ttft
ria fottït le 17. M. Falourdet le »8. joum*
quel je fus mis a,vec M. Linck.
Le premier fervicc que me rendît Mr.
Linck , fut de me couper la barbe avec de
vieux cifeiux tout rouillez qu'il avoit trou-
vez daos la poulTiéie de fon réduit, quilàat
doute n'4voit pas ballaié depuis deuxoa trois
ans. L'on ne m'avoit pas râfédepuisquej'é-
tois \ la Bannie , ce qui faifoit que mabarbe
me fervoit de Cravatte; Il me lacoupaavec
tant d'adreflTe , qu'il auioit été diâcile à un.
habile Barbiec de le iâire plus proprement a—
vec un bon rafoir^ J'ai déjà fait connottre.
que ce pauvre £t)£iat avoit. été mis à la petite,
bouteille, & comme par confequent il Àoîti-
la petite portion, je lai enfeignaile feactde
ft faire mettre à lagtoûè; car quoiqueje me-
filTe un plailîr de lui faire paît de mon vin ,
& de ce qu'on me donnoit de mpins inau~
viis, comme quand ou me fervoit despîtez.
ou quelque cholë qu'il aimoit,qaeietrouvois-
la manière de lui faire agtéêr; même malgré ^
loi, il luiétoitdeladerniéreconfequeacede
lai faire accorder le gros ordinaire. Ilppih--
voiE reJler long-temps à la Baftille ; eneSet, .
il fçait bien que fans qwi, il y teroit encore-'
comme la plupiut des autres AUeinaods :
nous pouvions être fepam ; c'étoît donc ua
coup (îe partie de l'anacher d'une miféieqoi-
. pou voit durer longtemps. Il m'avoit^ùtea-
toidre qu'il étoitpuiilàmment riche, comme-
en eflet.c*étoitJa vérité: jeluiconieillai donc
<te donner cinq écui à Ru; ,il leâtavecplai-'
Sr , & Ru en aprit la nouvelle encore avec
()W de joie;^ pf>urnout-ea ^moisoer fa-
.--„Googlc
M rUiJMrêiUUBaflUU. 159
rccoMKHffiutce , il tioas arertit (ja'II fidloit
gagner Corbé ; (]bc comme il étoit enréoie-
ment iotéreiTé , & que Mr. Li'nck avoît d*
fort belles btgues , il M\o'n qa'il lui en ftt
pieAnt d'uoe , & que dam le moment non
feulement on lui accotderoit la gioQc por-
tion & la gr<^ bouteille , mais encore que
Corbé nous mettroitdaasIaplasbclleCham-
bre delaëallille, & ooos obtiendroit defon
Oncle la liberté de faîr*vcnirde H Villepour
ndtie argent toutce que nous voudrions. Mr.
Xiinck y confentit de toM fon cœsr : Ru eut
ordre de faire montei Corb^ànôtreCalotte,
qui ne ic le fit pas dire deoz fois , aprenant
que cVioit pour recevoir nue grati^cationdt
confec^acc ; il vint dans le momant ; ilre*
fttt le pjefent en fai^t des- reveisnces qui
vaa £ient croire qu'il s'alloit diUoqUer tout 1«
carps i malbeureafement il n'en £t tien. Çt
prefcQt âott on parfaitement beau zaphirac>
compagne de lix diamants le tout des plus
brillants. Il promit la grcHe portion, & la
g[u0ê bootcille « & Mr. Linck l'cnt dia le
jour même, tnifii bien que la permiflion de,
Uir« venir de la V il le tout ce qu'il roudroit
poHr Ton argent: pourmoi, on médit qu'il mc
^loit uo ordre de la^Cour , & commejenV
vois pRS donné de bagues quoique Corbém*«i
«t escroqué dans la fuite aae fort jolie , je
n'aijan^spuobtËnitce privilège. Il nousde-
OUudauB peu plus deC^ôips pour nousjnettre
âans une des plus bcUes.Chamlxes delaBaf-
tille; pacceqne, nous difoir-il. poorenAifC
îiiUa ceux qui y font , il faut que je preBO*.
flpipa tanp*P<Mui«w&ire BJW qnct^le d'AlU-
.--„Googlc
itfo LTnfuifitioM FrdMfoiJé
man , & le faire troaver boa à mon Oncle.
Si j'étcns le feul maître ici , tout iroit le mieux^
du Monde , mais je ne »is pas tout ce que
je veux ; il s'en feut bien. En attendant
demandez moi tout ce que vous voudrez;.
tant que j'aurai de l'argent à vous rien ne
vous fera refufiS ; & vous ferez fervi ho-
norablement.
En eâ'et aux dépens de la bourfe de Mr.
Link, nous fîmes uis bonne chère, Pigeons^
Chapons , Gibier , Entremets , Patillèric ,..
Deûèrt, vin de Bourgogne & de Champa^nej
Ratafiats, rien ne nous manquoît. Nous ne.
touchions prefque pas à l'ordinaire de laBafr-
tillc. Ru faifoit fôn petit compte avec nousj
tout le mieux du Monde : cependant il defo*
loit Mr. Linck , quand nous le voions aa
travers de nôtre porte manger ce que nous
avions de meilleur , mais principalement
nôtre patifTerie , dont lui & Ru étoient
grands Amateurs : Ru ne preooit {>as garde
qu'il y avoii un grand trou à nôtre porte , ■
par où nous l'examinions très facilement.
Si-tôt qu'il avoit ouvert la première porte»
après -avoir polîf nos plats fur la fèciHid»
marche , nous le voïons qui enTsùfoit la rei
vite & qui engloutiHbt en un moment C9~
.qui ^toit le plus à fon apetit , & qui pour en
confoler Mr. Linck , prenc^tunedenosbou--
teilles, donifouvcnt d'un feul trait, fans go»
belet ni verre , il vuîdott plus de la moitié, .
& nous difoit après qu'elle s'étoit répandii»
dans la montée. Si-tôt que Ra eut ordre d'a-
cheter à Mr. Linck tout ce qu'il lui deman*
4eioît., .ce.<]uiiutfjùcâasieatiâi9a« loifquc
Mr. .
.--„Googlc
9MrBftoirtdtUB*ftilU. i<(
Mr.Tourtoa fameux Banquier de Paris vint
par ordre du Père de Mr. Linck dire aux
Officiers de laBafiilIe , qu'il" répondoit gé-
néralement de tout .ce qu'on lui donneroit,
fans limitation, ainfî que Corbé nous l'affir-
ma , Ru dis-je , plumoit le paUvre Pigeon-
neau d'une manière exhorbitantc ; il lui vou-
loir faire pafler du vin à fii fok au plus la
bouteiilc, pour duvin de Champagneà vingt
fols ; de méchantes pommes , qui auroiem
rebuté des cochons un peu délicats , pour
des pommes de Renettes ; de petites châtai-
gnes pourics poui des marons du Mans , de
vieilles Poulies dures pour des Gelinotes du
Cotentin, ainli detouteschofcs, cequïnons
obligea à faire avec lui un règlement fort ai-
ceilaire , & qui en rempliflant fon avarice ,
pouvoit mettre là confcîence en repos, fup-
pofé qu'il en eût , c'eft ^ue Mr. Link lui
dit, en prefence deCorbé, qu'il lui permet-
toit de lui compter les chofes le double de
ce qu'elles valoîent aux conditions de Içs
choifir toutes des meilleures. Corbé trouva
la propolition trop avantageufe , &ttoprai-
fon.iable pour ne pas prendre ce parti; il fit
entendre qu'il s'acquiteroit mieux des achapts
que Ru, qui étoit trop embaraHépourle fai-
re eiaâement. Qu'il laîfleroît à Ru le dé-
tail des petites provifions , pendant que lu)
fe chargeroit des groiTes : une fois il ell rai-
fonnable que tout le monde vive. Il nous pro -
mit que dès le foir même il nous' envoiroit
nne douzaiue de bouteilles devin de Cham-
pagne , un Dindonneau , fit un plat de Gi-
bier de fon^hoix , & qu'il lailTeroit à Ru le
foin
.-Xooyic
If» Vhi^mifititm FrMtfetfi
foin d'acheter leddlèrt, qu'il pretendoit Jtr«
tout du meilleui. Il s'acquita ponâuelle-
ment de fàpromcflè: nouseumesdouïebou-
teiilesde vin délicieux, tel qu'il cq croît aux
Ronl;eres , le Gibier répoodoit an boa vin,
& pour le coup Ru acheta un très bon dcflert,
Jiuoiqu'outré d'avoir vu que Corbé l'avoît
upplanté dans fa principale négociation ; fe
flataift fans doute de lepaier cette diigrace j -
la première occalion.
Comme des jours maigres , on nous don-
noit encore de très bon Poiflbn , &'dc très
bonnes légumes, MrXinck ne faifoit acheter
^ue du vin & du deflert: mais il y avoît na
inconvénient qui defoloit Mr. Link ; c'eft
que Ru avoît un Amienfèrmé danslacham-
bre fous la nôtre, i qui nous entendions fort
diltinâement qu'il donnoit tout ce que nous
, avionsde meillçur. A la fin laJKdece ma-
nège, il lui en témoigna fon chagrin, & ]«
pria de ne plus faire le libéral à nos dépens.
Mais Ru , nous dit fort naiVement que c'é-
toit un Prifonnierquifçavoit peindre ■ &que
commeîl lui avoit feitpl'ufieurs petits tableau^
il étoit bien juitc qu'il eût de la reconnoit
&nce pour lui-
Dans ce temps-là nous découviimes que la
fameufc Mad. Guyori , fi connue pour une
des plus zélées Partîfannes duQuiétifine, é-
toit dans la troifiéiue chambre de nôtre Tour,
d'oùà la fin fes Paréos qui étoient très con-
fîderables, la firent forrir; & obtinrent fa li-
berté aux conditions qu'ils ne la laifleroîent
parler à Perfonne , comm,e Ru nous l'affir-
ma i nous avions trouvé le fccretdc l'huma*
.--„Goi>glc
Bifer ; en adjoutant aax ptCfeott Iréqnents
des âort de vin & de ratifia: il ne nous ca-
choii rien. I» vimo verùas.
Si Uiet iit vimc Veritas , ut carmina dictait^
Iitvemh vertim Themje , vet hrveniet. ■
C'eft ce que Mr. Linck Tçavoit admirable-
ment bien pratiquer , à l'aide de Bacchus il
titoit les vers du nez de nôtre Satyre , que
nous attendfilSoQs allez quelquefois pour
qu'il noos embraint tout deux fletroittemcot,
que nous avioni occafîoa de nous en repen-
tir pIuE d'ua quart d'heure après, par l'tafiec*
tioa do)U ftt baifers étoient accompagnez.
Mr.Liock à quij'apreaois à parler François,
ce qu'il faifoit avec use vivacité mervcLIlen-
,fi , lui donnoit la queilioa } & quand il
vcMt,jqn'ilfiùfi3it(liâc:*lté dévoiler, unvcc*
rc de vin ou de ratifia donné bien à propof,
cmpéchoit Ru de perâder dans fon âlence;
cela nous a produit dans la foitte de grandes
découvertes, comme on pourralc remarquer
dons cette i^Aoire.
Enfin le »\. Novembre i7oa.iin'minlian
siaiin, Corbé accompagné deRheilhe,n&tre
Oiirurgien , viût nous auoncer Ta^éable
souvelle, que nous allions fortir de- nôtre
, Calotte , pour entrer dans nne des plus bel-
les Chambres delaBaQille; nous renremer^
cilmesdans des rennes tout des plus giadenx,
& fur les onze heures , Ru , aflîflâ de deux au-
tres P(wte- clefs, vint prendre nos meubles
pour les traafpoiter dans nôtre apartementi
oûCorbd nous ytot condatre, & noos VûSi
fott
.-„Goo.jlc
I&4 L'Inquifition Fra^feife
ftwt fatifws de nôtre changement, outre qu'on
me donna mon linge, qu'il y avoît fii mois
que Corbé avoit fait venir de Vertàillcs-, ce
qui me fit un plaifir indiciblcj car je n'avoÎ!
pas changé de linge depuis mon emprifonne-
ment. CorW & Ru avoiem leurs Rations pour
cela, carils portoienttous les joursmonlin-
ge,qui leur ^ifoit honneur , & qu'ils me ren-,
dirent à moitié nfé.
Cette Chambre elt une des plus belles delà
Baftille,s'it eft vrai qu'on puifle trouver de \i\
beauté dans une Prifon ; c'eti la troifiémc de 1ï
Tour ditte du Coin: elle efl oâogone , com'
me le font prefque toutes les Clîambres det
Tours , haute de plus de tteîie pieds , ave< :
on beau plafond , fort uni & fort blanc ; lar-
ge environ de vingt pieds fur tous les fens -.
elle a une grande cheminée qui fume rare-
ment. Il yavoit autrefois dcni très-belles croi
fées, mais Mr. du Joncas à ce que nousdï
Ru, avoit &ii boucher cellequiregardoitdi :
côté de la Ville. Oamontoitàceîle qui reft ;
ouverte par tiois marches , depuis l'estrémi !
té dcfquelles elle cft eihaiiflée jufqu'auplan
cher ; le haut en e(t fermé par un chaffis ar ,
rété , & le bas par un chaÂis volant, de I:
hauteur de fis pieds , que l'on ôte & rcme
comme on veut , derrière lequel i! y a troî
grilles de fer dans l'épaiflêur du mur , don '
les barreaux font de la grofleur du bras. A"
travers de ces barreaux on a une très-bell .
viie qui regarde fur la Porte& le Boullevai i
St.Amhoine, bien avant dans le Fauibonr
& s'étend à droit &à gauche bien au dclàd
IgMaîAïQdes Jeliiites, qui elt d'ordinaire 1 ■
fc '
.--„Googlc
ùU VHiJiQiTt it U BaJUIle. iSj
iè,our de Plaifànce du Confeffeur du Roi ,
& que ces Révérends Pères ont baptifée du
nom de Mont-Loiiis ; foit que le Roi , leur
tit fait bâtir cette agréable Maifon , comme
on a voulu nous petfuader , ou par la poli-
tique de cette Société , qui fçaît rafiner fur
tout. Nous avions encore par cette fenêtre
la commodité de voir tous ceux qui emtoîent
dans le Jardin de la Baftiile, que l'onapra-
tiqué fur un des BouUevars de la Porte.
Si -tôt que nous filmes feuls nous com-
mençâmes , comme le font d'ordinaire tous
les Prifonnî«rs , par faire l'inventaire de nôtre
Chambre , nous trouvâmes dans les cendres
quelques papiers fignei de Mr. Vidal qui con-
cemoient fes aSaires, & qui nous firent ju-
ger par leur force, qu'il avoit beaucoup d'ef-
prit , & connoître qu'il étoit forti de cette
Chambre.
J'ai déjà dit qu'il étoit embaraffé^dan s '.l'af-
faire de la recherche des Nobles , & j'igno-
re encore comme il s'en e(t tiré. Nous fi-
mesune leâurc exaÛc du Reçîftre de nôtre
Chambrei .& nous lûmes pamii quantité d'au-
tres Noms de Prifonniers dont je ne peux me
reffoûvenir, ceui-ci. Mr.Amonnet, Calvi-
niftc , cette ^ithéte étoit gravée après îbn '
nom. Polrel Villeroy de Vaucouleur, entré
en 1689. Beauchéne, EcuverdeMr. le Prin-
ce deCondé , Jean Syo de St. Lo, Potier
Breflànt , Guilladme du Bois , Lugiiî des
Coutures , Cahanel de St. Lo. Le Marquis
de Cagnj' , &c.
Apres que nous eûmes arrangé nos meu-
bles , ce qui fut biea-tôt dépêché , & fait nos
gra
.--„Googlc
if 6 L'ÏMqtùfitk» FrjMfffife
grabats ,' on nous apportu n6tre dla6 puéJùr
blement boii. A peine nous étions nous mi»
à table , que nous enteadiincs ouvrir nôtre
porte , & nous vîmes entrer uti homme que
Ru BOUS amena dans un état pitoïabte ; od
ne pouvoit pas le regarder fans fréoair; ilé-
toit tout éguenillé ; Ton chapeau étoit tout
percé , & a peine paroiflbit-i! avoir été noir.
Il nous dit daiis ta fuite qu'il y avoii deux
ans qu'il lai fervoît de chapeau & de bonnet
de nuit; il ne lui reçoit plus que quelques
cheveux altafhez à [& coefie de fa perruque
qui étoit & ^àile, qu'on ite pouvoic en dif'
çtiner le miîeaa : il nous affirma qu'il y a.
voit deux aos qu'elle n'avok peigné; une vieil-
le manche de chemitc toute déchirée luifat-
Toir de cravatte, & étoit blanche comme te
predeoK coi^s de la cheminée. SonjuÔan-
corps étoit tout en lambeaux quoiqu'it fut
foôiciiu de pu» de cent pièces . ft <chi»nifè
aulITnoire que^ cravatte fottoit par plusdit
trente endroits de fa culotte qm n'en «voit -
plus la fbrme , le plus grand mOTceau de Cts
bas n'étoit pas plus large que le poace , U»
lèmelles de fes ifoâiiers toutes percées se un
noient au delTas qu'avec des cordes, &daiii
' laiùîtteaj'ant eu le temps d'examinerde plus
près cçsideûiis, nous reconnûmes' qu'il, n'y
svoit plus nnfeiil morceau de leur première
inflitution , . & que tout étoit, compofé des
dd>rîs de vieux gands. Tontes les pjéces qui
foûtenoient l'économie de cette machine é-
toicnt cousUes afec du fi! dc.toutesfortcsde
couUurs. SoQVifage, quoique gros & bour-
Xouffié demifere^ éwil Cuiné & déËût , &
.--„Googlc
-71 tr
.ojlc ^5^
■couvert d'onc barbe moufle & grife i pea près
comme on peint celle de St. Pierre. Si-tôt
quenous vîmes cette effraïantc figure, nous
noas écriâmes d'étonnemeat, en demandant
-à Ru cequcnous vouloir cet Homme. Mef-
fieurs, nous dit-il, c'eft un Compagnon que
.Mr. le Gouverneur vous prie de fouflrir a-
vec vous , qui ne vous incommodera pac
Jongtemps. ; & lui connoilTant bien que l'é-
tat mifcrablc où il étoît, pourroit nous for-
cera le refufer, prit la parole, & bous dit:
.Meffieurs quoique mes habits ne fembJente-
,tte que ceux d'un bandit , je fuis cependant
Tin honnie homme , & li vous voulez bien ,
.me" Ibuffriren vôtre Compagnie, jefuis très
.pcrfuadé quevousn'enferez pas Hcheï, ou-
tre que je ne vous importunerai pas long-
.temps, pnifqne je dois fortirdans peu dece
terrible lieu. L'entendant parler fi honnê-
tement, Je me levai pour lui ftire civilité ; je
i'embrafÉu même, Mr. Lincken fit autant,
,& jeluiprefentai unechaifc, car nous ena-
TÎons trouvé quatre dans nôtre nouvel apat^
.tement. Ru nous protcfta que Mr. le Gou-
verneur nous fçauroit très bon gré de nôtre
.honnêteté , prit congé de nous , & referma
,I8 porte.
Nous voulûmes .faire mettre lïôtre Con-
captif à table; mais il nous dit qu'il avoît dî-
né; nous leémes aprocher du feu, car on
nous en étoit venu allumer un fort grand u-
.ne heacc après nous avoir introduit dans nô-
.tre Chambre, il nous jura qu'il y avoitdeux
.ans qu'il n'avoit vu aucun feu , ce qui nous
Jferpnt extraoïdiuairement , né pouvant pas
croi~
.--„Googlc
lit UInfMÎfitnM Franfvift
croire que je ferois fept ans fans aptochcr
d'autrCKuquedc celui de la chandelle; auSi
avoit-il toute la peau des mains comme des
pleures d'oignon pourri. Je luiprcfentai deux
petits pitcz qu'il avalà fans mâcher en nous
difant que c'écoient de bons Kâteaui ; n'en
aiant pas fenti la viande, je lui fervis de
même une aile de poule dont le pauvre hom-
me ne 6c qu'un article , & but trois ou quar
trevcrres de vin avec une avidité extraordi-
naire. Il ouvroit les yeux fur nôtre table,
avec un étonnemcnt qui m'en fit deviner
le fujet, ce qui me fit lui di^mander ce qu'il
avoit mangé à fondiué. Helas ! reprit- il Mon-
fieur, un peu de foupe d'eau bouillie & envi-
ron deux onces de viande pire, que celle qu'on
domie aux Soldats ; il y adeus ans que ces
Meffieurs ici me font moudrde ^m, mais,
je fors d'une Chambre où il y a des Pri-
foiiniers plus maltraltci que moi, & un plus
mifciable cent fois puifqu'tl a perdu fonef^
prit ; il y a plus de fept ans qu'il vcft tout
nud fans cheniife, & lans un bonnet i cou-
vrir fa tite, St C\ '^E n'euflepas tècouru un
pauvre malheureux qu'on lui avoit donné
pour Compagnon, il alloit éprouver le mô-
me fort, & tomber dans une terrible frene-
fie; car lorfque j'entrai dans leur Chambre
il en avoit de dangcrcufes atteintes.
Lorfque nous l'eûmes bien fait ' chauf-
fer, & plus que fuSifament boire & mangée,
.car r.-ividité avec laquelle il le faifoit nous
faifoit appréhender qu'il ne s'incommodât ,
& que nous lui eûmes dit en peu de mots
f}ui nous étions , nous lui demaadânfes foa
Nom,
.--„Googlc
e« rUifliire Je la BafiiUt. tt^
Nom, celui de fa Patrie, & ce qui le redni'
foit au pitoyable ëtatounouslcvoiousrpoar
làdsiàire à nôtre cutiolîté , voici à peu près
la répoDce qu'il nous fit.
Je m'apelle Jacob le Berthon ; je luis de
la Ville de Chatelleraut, en Poitou , Fili
d'an fameui Médecin , qui nous a \^\Si un
bien confiderable pour vivre honorablement.
Mon Père m'eovoya étudier à Genève dans
l'eiperance de m'avancer dans le Miniftére ;
car nous étions de la Religion Reformée.
Mais la Perfecution contre nos EgUlès nou*
aïant pour la plupart faXt pa£Ièr dans les Pa»
Ëtrangers , je lus en Hollande. Je me ren-
dis âlaHaye, oùj'avois un Oncte , Miniftre,
nommé Mr-Orillac, & quantité de Parents
alfès accommodez des biens de la Fortune.
Je CToiois que je n'avois qu'à me prerenterà
l'Eglife pour être fcçû Propofaur, ouà mes
Parents pour trouver de l'emploi ; mais je
trouvai que ta charité étoit bien refroidie, &
que la Hollande n'étoit rien moins que ce
que je m'étois figuré. Après avoir frappé
v»nement à toutes les portes , je fus contraint
de porter le moufqueti la faveur demesPa-
reus s'étendit à me recommander à Mr. d'Où-
werkerque, dans le Régiment duquel j'étôts
entié Soldat parleur médiation, & oùjede-
mcurai jufqu'à la JBataille de Fieurus, Mr.
outre Colonel s'étoit jette dans le Chttean
de St. Atnand,qu'il deôenditvigoureu&ment,
mais les ennemis aïant pointé douze.piecet
de canon contre cette méchante Place, qu'ils
avoient environnée de toutes. parts , & où
nous nefûmespasJècOTinis, ils nou» forcèrent
H à
i OMt fCitdre PriiÔDiùeis de Gticire. Moa's
f^mes wtBoet i Tioye en Champagne , où
par <ics itdiiÛittDÎtez inouïes , on dobs con-^
traigoit de prendre pani àuis les troupes de
FrsQCt. Je fus mis dins te Regimen« de Sur-
Itobc, ,& mmé mqoaitier d'hyver ï Aknçon.
I^a.pieilUéfe ftûsqnejc piHkienrevâë, mon
IWDlunr voulu c}ae te Conunîttàire ffit un
de mei Coafbis, quim'û'?nt reconna nwtî-
I» des rangs y it msix donner inon Congé.
, Csanao Ja ne voulait i^olnmcne pas i»e
faite de \a, Rel^îon Romaine, Je convins a-
vec ine& Ft:c3es d'une penfion aflëz modique,
avec ht^ielle je me retinû à Paris , croïant
ituciix Ot'y cacher qa'eH lieu du Roiaume.
T^ais une hcueliè chez qui j'avu>s demeuré
phiûeucs aanôes, qui avoir reconnu que j'é-
toi& dfi bL{l.Blîgtoii Rcfoiraée , fur un faxtx.
fonhcOB qu*Blte eut que }'avois découvert à
foti mari qwetgB'intrigue amourtsafe qu'elle
axQÎtt allamsiienoncec à Mr. DargeRfon,'
. (pii me âl anjtec il y a un peu plus de deux
aiis, & cuaduioe^ons ce ctueVGouffi-e. Dès
lea pcanjei» jqw<- <]i>C j'y ^^ entré on me
fatiicsadedunoar deRetigtion , avec pto-
iHei& dâ ji)»EeadM Bta libené , &demedon-
noc ut) hop oKiploi : mais^ le Père Riquelet,
ni: \e& CtËcicf t-a\uHU pu rien gagner fur moi,
caR. Pvxa. m^iant fait venir devant lut&ls
GDQnuGtaeur, pour iliçavoir ma deraiére ceK^u-
t^GUL, mctiouxafU'inébîanlable, i]«s'empo'F-
teceot au (kcnieE point contre moi , ils me
chaflàrçai du Isaf-pj;«i«nce , en me-proteilant'
quejsn^ l£xor»pa»ieçdà faire mot) abjura-
tian quaadtjcl&vQttdiois-, & me âreatcoâ-
dui-
.--„Googlc
.--„Googlc
.--„Googlc
m
tt
de
II
rit
if-
ris
H
de
.--„Googlc
XTS L'ImfMffitfoK.frsiifQifi
rctombei eo dc&illaace , quand mon pan-
vre Compagnon enguenillé, fe prit âme coa-
folcr du Ton mieux , & me fit entendre que
j 'avois belbin d'un grand fond de patience pouf
ne pas fuccomber dans ce lieu de delèfpoir,
où il gemillbit dcpnis uois ans , làas avoir
peu trouver lefecretde fkîie fçavoir à fa fem-
me qu'il 4tolt à la Ballil^e , qui fans doute
auroît tout mis en œuvie pooi l'eu retirer â
elle en avoit eu connoiHance.
. Après avoir nn peu repiÏB mes efprits , je
lui demandai qui il était , & pourquoi il é-
toit à la Baflille dans un jj pitoyable état.
II ne &ut pas que j'oublie à vous dire, que
pendant toute la Scène qui fc paiTa depuis
mon entrée dans ce lieu de plaifancc , mon
autre Compagnon i» ptirii Moturalibus , n'a*
voit ceifé de rite à goi^e dcploiée , & de
ganibader en découvrant ce que la pudeur,
ji il en avoit été capablci lui auroitdeu faire
cacher ; & difant qu'il étoit le Dieu du Ciel,
le Roi de la Terre, & le Seigneur Univer-
fel de toutes cftofés. Mon pauvre Confola-
teur, en jett&nt uu grand foupir, me dit* je
m'^clic Charles Farcy ; je fuis Soldat aux
Gardés , cependant fils d'un bon Bourgeois
de Paris ; car mon perc étoit Maître Cou-
vreur de cette Ville&fort riche; il a donné
quarante mille livres à mon unique fœur en
la mariant à. ua Courier du Cabinet. L« U-
tertiiiage me fit tnéprifer laprofelHon de mon
Père , pluï que les dangers de ce périlleux
métier , quoique je fois un jour tombé de 11
cime du clocher de St. Paul , qui n'ell pas
loin de nôtre enfer , & faus moa marteau ,
que
.--„Googlc
imflBfinrêdeUBâflnit. I7i
quejepiquài dans l'ùdoife, & qal me retint
jMTeï pour ne p» taire une â lourde chute que
celle que je dévots &iie, je Q'auroîs jamais
éti traîna ï ,iâ Ba«illc ; & plét àDieu être
mott dans ce temps, je nicferpis épargné u-
tfs infinW de iravcrfes , car ma vie tfa été
qu'une fuitte de malheurs , que j'aurai tout
le temps de vous raconter.. Je {x-is-le parti
des armei , refource de tous les débauchez ,
où il m'etî arrivé des avantures tout à fait
bizarre & «xcraordinaires. Après plusieurs
Çanjpsgoes , je me irouTai enroUé dans le
RegimeiHdcirâ«rdES. l^a Veuve d'an Mai^
çhà^d épicier , fott jeune & jolie femme,
chea qui j'allois fouvent boire de l'eau dévie,
me trouva fi i fon gnf , qu'cHe m'époulà ,
frntve le confentement deiès Parents. El-
le me diégagea & me ât pailèr M#)rre ; mais
i'Aoïpiix q^^elle avoir pour moi , -tu tous ftr
4gvd^ i aejn'arxacherent pasà mon liberti-
pag^i qçLVdtoitpour aiiili dire nataraliféen
moi-. Je fréquentai mes anciens Camarades,
& pour être plus à portée de continuer mes
debiuiches avec eux , je m'emollai encore
dans .la ^^me Compagnie, d'oâ maFemme
mlavptt déga^t^ i force d'argent, & avec une
tendrelfe qvi ,me dcvoit; readre {dus Sage.-
M^^ il rpe ËiUqit. trois ans de Badille pour
me donner le tempide teâechir fur meséga-
remeots. Cependant elle étoit fur le pant
deme dégager , unefecondefois, forlespro-
melTes que je lui avois faites de vivre mieur
à l'avjEniri & méttie elle étoit convcaueavec
mon' Capitaine, lorCju-'un mâtin au plus fort
de rt^yer<talucoucliéaiu>cèsde mafènune»
"Ha . dès
4csl«]tewile At JQâr , î!enten<UG fitji^ft â H
porte , de <BaiBoiUàc|na,x]ai Ëuiïe coin de la
itié dieiure.dc N^r^JDéme. Croiant«^e'c'<-'
boit des ourij^s q^î <rauloiCnt boire -dtf
r«aii<kvie, jeinitusk-t*a«i|«we de pren-
ne BiB owJqu» , & Revêtir 11 Siqaâiiille d<!
iTreilil^ qve l^'on^ûDoe aus SoMsts ,> pour
fanf ,b»$ J'jQUKds pcompuautit ma boutiqae,'
^aù i l'iatbtnt je:âts<icé avecYtolence par
fij bonunujyri me ^«nnbroatîa bouche d'un
mouahoir , ifonà nr'eiiip^disr 4eciier , ^È
nul cQDiDiejIâoiSjjnejetMMm-daiisunCs^
Eââè & sj'eiftiBÎiifitaat dans cette tnteaèkt
Utwlè ; ;OÙ iÙBslïiat ma^ j'^tOis l'on m'a-
loefw ey«c se J'Apvi^^q^] , -^i depuis apen-
1< i>ar ûts .«atasftganaet , me retA^pfér \4.
sfipreMe. {^i^EiioB.fiiffîoB5 .pti,^u«'fi3ft
4e Hi^Her ,: je oepA Obtenir tâ'haJ>ier;' Ici
O^ers jnc é'âqt pour KXite -PaifiïU j - ^(i«
nptt Cfanp^ibniVen .ps^oitbibti , <ue j4
çp dMHÛ {»t )£tce plus délicat qneltlL Ton*
tjp Ia 'SfMS qu'ils Boe fiqent fut â« me doH-
B«f Ar^is boiXes ^ j^iUw pow me coucher,
Vl'iiiï Jï'Qllt paGiy9Blu4Df;«btuig«rdepBftfr<^
J'4i.f)r!£'»tiMrncat les OfficiârB ,' & je I«s
ai <cfiniM''U>awedcsiaiiiKs capables d'uteii-
4rjr d^ l^f^^ ) de tne dire If Âijct de ma
d«teptiG>e : ^s m'iOBt rebutté «vec une dure-
il^ ctpabie. <de <Faiix perdre pattejice â tous
^ SaiMS du Paradis. . J'ai eu t<Mit le tenips
^ Iti'expniiaer : d'abord j'ai: cm <ïaec't!to]t
lësFfCU.âema Ffanmeosiift £ch«^ de
, : ■ Paris,,
u,:,-,zf--„GoOglc
0» PHi/hiréJelMÉ^^^lU. ils
Parii ,' qoi confiii d'avoir nn Be«« Ftwe
Soldat aux Garder , m'avoit &it arrêter ;
mais j'si bien connu d^is qoc je m'étob
noinpé, & fans doute «n vkAcs l'infîullibtt
fujet.
Un jour que j'étoïs tllé monter la ^rdfe
A VerfiiUles , je me trouvai à boire dans uti
Cabaret avec d'autres Soldats , Acomtnema
Femme m'avoit donné de l'argem nous pouf-
ruines loin la débauche. Nous chantâmes
des cbanfODS de Qtivois, tt dans la chateor
du vin i j'en chantai une, où MadamedeMam'-
teiKiu a'étoit pas épargnée ; cependant c'étdit
atuchanfoQ que chautoient hautement dans
les liies , les Enfants de PatiS; Un Laquais
de cette Dame qui buvoit dans une Chambfc,
^aijoigooitlanôtre, vint me regarder & en-
joignit au Maître de fçavoïr mon Nom, &
■dequclteCompagaiej'étois. L'hôte vint tri'ço
donBeraviB, ceqnimetttfbrtlraupluj ytteda.
. .Cabaret , & huit jours après je fus arrêta.
- ■ Je ne pu m'cinpéchet d'interrompre la nar-
ration dé Mr.IeBcrthon, povrlnidireqticje
ctoiois CEtte Dame incapable d'une ven-
geance fi iodigtw de ton é)6vatioQ^ dt defes
^grandes qualitez. Quoi difois je nous'voi'ons
dans l'hiltoire qu'un joui- Catherine de Me^
dicis femme de Henri H. & Mère de trois '
de nos Rois, enteudatit des Soldats gui en
filant rôtir une Oye tous fts ftsi^tres, difoient
de cette Reine des cht^ès^ abominables & les
plus outrageâmes , elle fr contenta d'^onvrfr fa -
tcnéire jponr dire i cette Canaille i Pottfquoi
dittes vous tant de mal de la paavre Reînc
. Caitierine t^i oC'Voas fait tuctin. tort i* c'en
H ♦ . elle
• 'o,:,-,.-„Cooylc
H* Vlkqitifitie» Ffanfoife
elle qui vous paie H biea , & qui eft Caufê
<jae vous rfititicz l'Oye. Surquoî le Roi de
Navarre , qui étoit avec elle , & qui avo^
entendu les injures de ces fielitres , aïaat
voulu fortir pour les faire châtier , elle le
retint, &luî dit: Mon Frère, lailTez là ces
milèrables ,. nfttre colère ne doit pas defcen-
dre jnfqu'à eus. Cependant un des plus grands
hommes du Régne de cette Reine l'appelloit
la Furie de la France, qu'elle dcchboitim-
pitoiablement ; & l'on me fera croire, qu'u-
ne Dame d'un Génie fubtime, &dn comble
des grandeurs où la fortune l'a élevée, vou'
droit s'abaiÛer jufqu'à un Soldat aux Gardes,
& le faire punir pour une chantbn , chan-
tée mémeau fort de la débauche , &lepunir
d'un long fupplice mille fois -plus cruel que
ia mort ? cela eft incroiable.
Cependanc-rien n'ell plus vtai , reprit Mr. le
Serthon car depuiS' que nous fommes enfcmr
ble, Mr. d'Argenfon l'afaitdefcendre&luîa
demandé fi une autrefois il s'aviferoit de chan-
ter des chanfons contre les Perfonnes de quali-
té ; & fa Femme ^rcs quatre mis de recherches
inutiles, ai'ant aprisparunPtifonnierquifor-
ti t de la Baflitle , avec lequel nous avions eu
une communicatioaXecrette , que fan mari
yétoil enfetmé„quoiqttc les Officiers lui eut
lent protelié vingt fois qu'il n'yétoitpas,
«lie alla fe jettcr aux pieds de Madame Veu-
ve de Moniteur Frère unique du Roi , pour
la fupplier de&ire rendre la liberté àfoaMa-
rj. Quoique Madame ,avecunebontéqu'on
nef^uroit aflez loiier, l'eût obteniieduRoi
ion cieie, ct9i.ordonBa.àMrJc.Chaacelier
de
.--„Googlc
tiriSfieire de laBaJimt. Ifl'
défaire fouir Farcy, les Officiers l'ont en-
core retenu un An tout entier. Sa Femme
est la. liberté de levcnirvoir trois fois lafc-
maine ; je t'» Ttic plus de trente fois, car
Rn qnî la conduifoit fur l'cfcalicr devant nfl-,
tre Chambre pour y voir fon Mari, qu'il fai-
foit ftmir d'avec nous pour cet effet, s'endor-
moit fur les marches j pendant qu'ils pailoient
enfemblcj & Farcy entr'ouvrQit nôtre porte
pendant fon fommeil pour me la faire voir.
C'eft une fort jolie & aimable Femme -, qui
{laroît avoir bien de la vertu, mais qu'on n?
çauroit aiTei loiier de toutes les démarches
qu'elle a faittespourfon Mari, L'aiant trou-
■yé tout nud elle 4ui apporta un très bon ha-
bit, du linge, & nn fort bon- lit; jamais el-
le ne l'eÛ venuvoir fans nous apporter quel- '
qvechofe, tantât c'étoit un chapon rôti, ou ■
quelque GodiVeài , un panier de "Fruit, un
Gâteau j .& toujours quelques bouteilles dé
très bon Vin.' Elle ne celloit d'alJcr à -St. -
Ciou folliciter Madame, qui en a parlé trois
fois an Roi, & qui enfin dit à Mr. le Chan-
celier que le Roi vouloit qu'on rendît la li-
berté à ce malheureux-, qu'elle prenoit fous
fa proteâion , &- que li il ne le âilôit pas é-
J»r^r , ce feroit à lui que S. A- R. s'en prep-
<lK>it, & qu'elle demanderait fatisIlËlion au
Roi. C'eft ce quô Mad. Farci dit à fonMa-
ri vendredi au matin ^ , en Iim apportant un
excellent pâtéd'anguilles&deux bouteilles de
boD' vin de Bourgogne. Elle {ni dit auffi que ~
Mt,. d'Argrafon l^voit iàit veiM'r cheilui
jeudi , &' qu'après l'avoir traittée avec une
: JQdigtù d'un MagiArat , & de I»
■ H , Prc- -
.--„Googlc
1)8' VJÉqii^tttiiFrlÊttfoift
ProteiSioa Roïale doQt cette fenuneâoâ
honorée , il Jui tînt ce dificoars. Tu t«ui
donc , malgré moi , ravoir ton Mari i ra.
l'auras \ mais dis lui , qu'à la première faiiflè
demuche <ju'ilféra , je le ferai pendre: voit
fi tu T«ux l'avoir à csHe coodiiion ? & la
renvoya avec indignation.
Samedi au foirftlr. d'Arfienfon fitdefcea-
dre Farci (x. lui tint à peu prèE leQiéoie latii-
gage ; 4c ^rès lui avoir ^ lever la main ^
& jitfM* qu'il ûc dirttt-ffen de ce quilf patft
«n la Biiftille , &,lHi «a avoir ftit figner lu
protellation , & qu'il avoit été traitté fnivant
i'întenCîoB du Roi, il le renvoya dans nôtre
Chambre , où il étoit encore quaudon m'ea
a^t fonir ; rxM» apparemment qu'il elt en
liberté de ri)cure que je vous parle. C'eflun
faqnune très tûen fait de corps , baut de gx
pieds , d'une nande iin^llcité ' & douceur ;
tL quoi qu'il ait été fon débauché , il n'a pas
le fond mauvais , & jamais n'a commis de
ctimes reprehenlîbles. Mais le pauvre Hom*
me étoii fort altéré quand je fuis \\aa avec
lui, & fans doute il aJloit perdre topt à Uit
l'efprit , qu'il avoJt échauÂ'é outre mcfnre,
fans les confolatious que je lui donnai , À
la joi'e qu'il eut do voir fa Femme , qvi le
remit entièrement , & moi auflî ; car li elr
le «voit attendu tioic Mois à venir , nous
ferions mous tous les deux; cous navions
plus que la peau percée en diveijs «adrotrt
cundue fur les OG tous d^^harnez : nous
ae pouvions plus nousfoàtenir dcjiotit. L*a&
fitVance qu'elle J)ous a donnée m'arenu£«it
VitfHi oà Yftuc mu v^efe, queQieulalteDiiïèi
Coo^jlc
' Le fou gui é(oit avec nous eft un homme
fort bîoti ïtit, & bien groportioDué ; il a le
corps fort blanc & QOEVçtis, il eA à peu près
de la hauteur <lc Farçy i a les ckeveux d'ua
châtain bruu ciefpé qu'il treOrcomoiiuement
avec fa barbe, qui elî fNt longue & de menu;
couleur. Il y t plu$ M fe^t atu qu'il «R tout '
nud, fansfouSiic leinoifldrehahillemeDtfiic
fon corps, de borniQt k fi (été, ni dechauf'
fure à Ses pieds. Il t'appelle Nic.od^me Dciïm-
berg;. il ert de GrcaoWe-
Après avoir fervilongtçQips dans les Trout'
pesduRoi, un bâ£tilLo^.duRegi|T)eatdePi•■
ca^die qu'il conuna&dait en qïULlk^ de pre~
mier Ca^aioe fui détaché pour le Siiîgc diî
Namur ; là Compagsie y fiit entiéremei}! de-
,^e , & lui àangaeuikawm t>l«£K. U viqt fol-:
}u;itN>^ auprès éi Minière de qumr«iQettre Hi •
Compagnie- ; nms loiut de le recompcolèr ,
comme il le meritctt, oa iecaiSi. En vain il
fit parler tous les. Officier^ Q«Qff*qx ep.là -
faveur, qui aaeAoienE qu'il étpituaïFcsbra- -
veHomqiff, ai'aattoAJQiiispsr^'remeptbleii
fait ioA devoir : U Aoitrefomiéd'otigitiq; âî ■
l'on apdt qn'îL neêèCm pati rexftr(;içe de 'a '
fiel^ton Romaine ; -e'«n 6» siCis pf)ijE 1«
traita indij^BtineUf , loin (k Ittttfil^fN jiiâjr '
ce. ^ofia réduit au delÀfpoîr il pWA fa AÂ' "^
gle»ew«, & par d£S Amis. & desOffisjers qui
coMiaiflcipiit û)a metiw , il obti« »tn« «#' ■
dience dbt Sici, Guillsusir d^ glocJeti& iMIt^ '
moiir.
. II ât uns propo^tioft i S. M. fi tpmiïiif ^
coure le Roi de Franfc , qif Vié^e f««l«
«aAitliolBQira &¥ic>trQiuil'Kaiès«ltf lâMM '
H 6 ic^
Coo^jlc
l8t- L'Inquifuhn FrMfoife
le filcnce; fealement je dirai pour l'honiïeTir
de la mémoire de ce Grand Prince , que
quoiqu'on lui propofîr lu vengeance de ioa
plus grand Ennemi , dans un temps qu'il de*
couvroit tous les jours des confpirations tra.-
mécs contrcfaviéprétieulè, que même Char-
nok & Grand Val avec lears Complices a-
voient été exécutez nouvellement, atteint!!
& convaincus de crime de haute trahifon au
premier Chef, & qu'on avait découvert les
Auteurs de CCS abominations , comme tout
le. Monde Ta fçâ, il fit retirer ce miferable
de devant lui; commanda qu'on Tarrêtât, St
l'envoia pieds & mains liez à Louis XIV,
ayec une déclaration de la Propc^tiou de ce.
malheureux. Je laifle toutes les Réflexions
<tn'0D peut pouirer loin fur un fi beau fujet,
1 faire ï tous ceux qui oml'ame bien placée,
^ qui aiment- les grandes aâions.
Dezimbcrg fe voiant en^arqué pourrepaf^
Ça en France fut fi frappé des terreurs de la
inoit cruelle que metitoit l'énormité de Ton
«rime, qu'il perdit entièrement l'cTprit. Ji'a^
bprd qu'il fut remis entre les mains des Mi-
Btftres de France, ils crurent qu'il &iibic le
fou, pour fc deiober à la mott; mais il ne
doutèrent plus de la vérité- du fait , quandils
fçurent que ce Criminel avoit dectiité , noa
feulement tous fes habits ^ mais même tout
fon corps, dont les ruilTeaux de âng couloient
de tous cAtez j qu'il avoit.fallu l'enchaîner
pour l'empêcher de fe caifcr la tête contre les
niuis j qu'il s'outrageoit impitoiablcment de&
ongles & de la dent, fans fouffrir d'babits^
iù.yQulf>il couch» fui de lits, qu'il mettoit
tout
.--„Googlc
**r rnijhire Je la BtjUlU. i% i
tout tri pièces, qnand on lui en dotinoit. Il
futli furieux, que petidant'plusd'an An,oa
n'avoït ofé entter mas le lieu où il étoit en-
fènné, & qu'on fiii contraintdetàlreuntron
à la porte, par où on lui jetoitdupai'n, qu'il
devoroit avec une ragequifeilbittrembter mê-
me jufqu'à fes Porte-Cleft , dont la plupart
n'ont pourtant rien d'hanutn. Cependajit les
Officiers de la Ballilie ont eu la cruauté d*
hazarder de lui donnerdes Camarades. Farçy
n'avoit pas tté le Premier; CefutimCorde-
lier nommé le Père Dainav.e , fi j'ai bonne
mémoire, qui avoit été Aumônier de M.d«
St. Ruth General des Troupes, de S. M. en
Irlande. Ce vénérable Moine avuît tué ua
Pone Cleft, à pour l'en punir, après l'avoir
tenu enchaSoé pendant deux Ans dans un re-
trait , oa l'expofa à la fureur de ce Deiioi'
bere, qui s'adoacil enfaveurdubéatcaraâé-
re de fon AlTocîé j ils s'aprivoiferem lî bien
cnfemble , que quand le Gouverneur avok
quelque Prifonnier qu'il vouloJt cruellement
. punir; Quelque reformé endurci,, comme il
les i^)pelle , à qui il vouloit faire faire pro-
fî^on de la Religion Romaine, il l'enfcr-
'moit avec Deiimberg; qui outre qu'il étoft
de l'csdre des Adamites , ou des Temifcar
mins , . ne. lùflbit jamais repofer fes Caiharo/-
des. Il TeptiHbk toutes les nuits coHiiifémeat
toutes fes lUantares ; & etitroit quelquefois
dans des ttanlpons furieux , quand il pronon^
çpit le Nom de Louis, de Louvois, ou de
Èarbezieux, av«c.des blalphémes épouvautar
blés; & ce qu'il y a.de prodigieux c*ell qu'il
&'a.iamats nononcé le Nom.duRoiGuU-
H 7 Uu^
.--„Googlc
l8» . VInqtùfitio» Franfoift
Uuîne, qu'avec r€fpea,.â:qu«adfesComi
pagnons «HUtoieat fet feclks aâions dece
Graud Prince- devant ini, biEn4oui d'en pa-
roitre cDiÛ il Jes éca«Uoitavcc atteorion. Il
ne fouffroit iamais qiie.lesFoitc-CLefsoutra-
geaflieiu fes ConipagDOOî,qu'il deffwdoit avec
use fureur de Lion.
C'«ft wcc ces ie\a. Homme», dont je viens
<ie voaï^&iic le Poctrgtt, que-j'aiétéenfcrrarf
pcodant d»x Ans, & avcclelquolti'airotit-
feK un. fupjice iucomiu \ tous les Satellites
ifii Netons & dei Dioclerieiis. Il y a prèsde
deux Ans que je demande à ^re profeffion
de U RcltgiâQ Rotnaine fans Je pouvoir ob-
ccnii.
Sur ict reoiontf^ces ^at nous lui ~ûmt%,
il fe (vil ï pleurer am^ement & nous dit: je
fi^ai hiea qse w trabiE naa i:onû:ience, pour
fortir de cet tiiièr, duûe j'el^eix que £)ieu
Mra convalTuu de ma foibleirË & me fera
nti&ricotde, car il n't^ore pas ce que je lui
ai promis, loriquBj'fturw ma liberté, &Lyt\.a
prei^ i téamo de tnee booncs inteqtiobs,
Nouit'nhaTtânii££& nous le coQlbUqiei an.
tïâmx qu'il. fli3Ut (az pofiible , & par leebciiit
mitemcots que npus lui âmet, il fut bien-
-bât rêtnis ; liel»s ! fi le pauvre ttommen'avolt
tBsngc que ce qiie lec Porte^Clefs lui apoi*
toieat pour fon ordioair* , il aurçit abffdu-
ment fuccembé, car hçrcdupftÎBj &UflcpC'
tit« lw»|teiJte do Xtkt mauvais v'm^ <}uî tanolt
wiTWop ■n.iwte & demi,'^«roôeJeilln(»l^;»■
1tnu« tu v^eit paf un fou. A midi oa lui».
f oitoft un fWQ de p^j» tvetnpé ^iuu ^ l'«aii
-hoOilUc^ciaVwtMptUbit^atUMftjlifiMipc, a.^
.-„Gooylc
M rSipire 'Je la Badine. i«j
■*«€ uiie ou deux enccs dq Bœuf dont oa a-
toit eiprîmé le jus pouf les T^lés des Offi-
clers , deflèch^ comme du boij . & qu'un
Chien aoroit eu peine âmangcr; éclcfoiron
hiî aportoit d'orainaire un certain os de mou- '
ton que l'on appelle vulgairement la Mâtre,
fcndu en deux , & envelopé dans un petit
morceau de pcao. Je protcfte fincerement qu'il
n'y avoit pas çn tSutdequoîraffalîcruneiou-
rtJ i mais nous Je dedpmnugions amplement
de la Lelîne de nos avares Gargotlers. Mr.
Linck, qoi avoit la liberté défaire venirdcla
Ville tout ce qu'il vouloit, ne nous laiflbit
pas -manquer des viandes les plus deticicufes,
des malleurs vins, & de toutes fortes de Ra-
tafiats que lut m jme fçavoit par^itement bicii
compofer :■ & de tout cela il en tepandit Ta-
bohdance non feulement dans nôtre Cham-
bre, mais dans toutes les autres Chambres de
liôtrc.Tour, où îl en envoioil largement a-
T« une generofïté que je ne içaurois trop
loiiçr , dn moins ^toit ce fon intention j maiî
dont le Fripon de Rn Porte-Clefs faifob
un très mauvais ufage ; car peu après le de*
part de IWr. Linckj eus communication avec
les Prifoimicts de la même Tour , qui me
proteltercnt que ce Scélérat ne leur avojt ja-
ppais 4onné la moindre chofe de ce que Mr.
Linck leur avoît envoie avec profiiflon , &
ijue ce méchant hpmme metîoit à fon profit;
quoique Mr. l,inck j pour l'obliger à le ftr-
vir avçc jj^lc & aftiYittf ^ l'accabiSt tous les
jourç"de prçfçnts, & fljufftit fans s'cnpiîjti-
dre ^Sl lui volït fon plus be^u linge. Qoln-
ie jouts -svjitit que de ibrtir Mr. LinoK iid
f84 Ulnqu'^thm FraUfotft '
dbâna un très beau Manteau d'EcarIstâ tonf'
ueuf t dans la feule viie de- l'eaggger à nou&-
fsirc plailir, n'en aiant plus belom pour lui-
même, étant aflîiré de fa liberté. Iln-yavoit-
point de j.our non plus qu'il ne fit boire lar^
cernent ce Satyre , dont ÎL farciffoii le corps-
de toutes fortes de bon gibier , & fabreuvoït
des vins & des rataâats les plus esquis, auffi-
bien que nAtre ridicule MCjoi, qui n'entroib
jamais dans nôtre Chambre qu'ilnefùtchaa-
ccllant, quand mcmc il y.feroit venu dès qua-
tre heures du matin, cequîmefitcroirequ'il
ne defenyvroit Jamais.
Un famedi au ibir, comme nous allions -
nous mettre à Table. on fitdefcendreMr. Ja-
cob le Berthon , & une heure ^rès on- nous
le ramena tout pille& tout tremblant. Quand
Je Porte- Clefs eut refermé.la porte fur nous ,
& que nous eûmes fait revenir BÔtreCompa-
gnon flupefiéj avec un.cordial de Champa-
gne, nous lui demandâmes le fujet de fa peur
& de fon lîmotîôn. Pour ma peur, nous- dit-
il, elle cfl légitime, car.jevîens de voir le -
Piable ,, & mon érhodon ell.toute des plus ■
jiiftes, carjç viens d'apFendrcquejevaisfor-
■jir dei'Enfer, Aces agréables nouveUcs-nouJ
redoubiâines la dofe du Confottaiif , aptes -
quoi il nous fitatnH le récit de fon avaoture^
En defcendant au pied de l'cfcalier j'ai
tiouvé le Major qui m'adonne la main corn»
me à une mariée; aptes l'avoffûlud, je lui
aï demandé ce qu'on mcvouloit',- mais iàn»
vouloir me donner de repQnce, il m'a «m*
duit dans une grandeSale, oiij'aitrQuvéMr," .
d'Aigenfon sSis le dos au feu àe\aat une -
. . " Pm--
»i PHiftolre dt U BafiHk. 1 8 f
gronde Table , autonr de laquelle devant
lui étoîent debout pluficursPerftionesIapIa-
pari à moi inconnues. Ce Minidre <toit re-
vêtu de fa rot>e magiftrale , ce qui m'a fait
vous dite que j'avois vu le Diable, car fi il
n'cll pas plus méchant que lui, du moins eft-'
il tout auffi laid, & tout auflî noir. liaient
quelqne temps fans lever les yeux fur moi ,
pendant qu'un autre homme auffi en robe noi-
re, & qtte j'ai apris être Mr. GamufetCora-
mii&ircde la BaRilleétoit debout devant luii
fàos branler non plus qu'une (latiie: dans un
des coins de la Chambôre étoit un autre petit!
homme qui écrivoii fur une table > &j'aifçu
que c'étoit le Secrétaire de Mr. d'Argenfon ;
CSC Oii peu à c6té un antre homme qniécrivoit
fur un Bureau, & j'ai apris dans la fuite quti
cVtoit le Grefier. CorW étoit debout, cha-
peau bas, les, yeux baillez , demtoieç|uéld
Capitaine des Fones&quelquesaatres. Tour
d'un coup le Magiflnu s'cft levé, & me re-
gardant d'un air à donner tout au moins laco-
. lique, il m'a dît brufqucmeot que fwstuici?
Helas Monfeigneur, ai-jedit, jefouffre&je
jeune beaucoup. Es tu dans la refolution de
perljfter dans les erreurs du Catvinifmefa-t-
il repris. Ne vous a-t-on pas dit , Mgr. qu'il
y a deux Aas que je demande à en ^re abjo-^
ration? lui repondis-{e. Oui, dit-il, maïs tu
tt'étois pas encore bien converti. Ah. Mgr.
la BaAille elt capable feule de convertir tous
les Démons de t'£nfer , lai«-jedk. H eft
queflion d'un autre fait, a til continijé en
rompant les chiens , & le prenant d*an ton
plus haut Je veui te feire pendre, car m ai
me-
mérité la ootée. A cet puoles , j'ai en qne
tous mec ot Ce dilloq«oieiitpoarrefervird'é'
tai les «lu va autres. N'as tu pas fervi Icf
'S-OMms 4e ^. M. & Dc t-4 t-on pas pris les
année à la muo coiure toa Koî à la&taaiUe
de Fleuras? Il eft vrai Mgr. q\at m'Aantte-
tité £B HoUanjc à caufi: Ze maRcUgion, &
p'V tiouvant ptMpt d'^nploi , icliiï.coutraîiit
de prendre patti dans les Trempes de HoUan-;
d£ , mciG ils n'avoieflt pat dé guArFc alors
çpqtrc la Roi , & i^vasd elle a Cté déclarée
cqtw $. M. & L. H. P. jevQuhitmeictkcr,
PWM on Rc vovilut pwm'acowdcriBonCon-
gé, * jefti« fotçcileferTitinalgréiiioi,pni&
^tie l'on m'auroii paai comme delcitcur ,
Soais j'ai feivî depuit en France &j'ai<uparc
i l'AiestCtkr qve 1« Roi a accorda à toosies
Ff*oç(H» ^ <»it porté les Aintcs contre lai.
Cotte gwe dii Rpi , reprit*il , ne s'dl pas
4teti^U<; jufqu'» CQ), ain^ tsfsdjgoedeoipn,
&, pWpsye toj àcuropcvoirrAtrêt. L'airnae-
oaçaat dom-jl proflonÇ(»tcesparolesin'afàic
croire, qu'il difou vrai, &jugeidcmapciirt
je Jiv imi jette i genoux en pleuraiu & lui
difaQt.tlHe I# Roi ésoit le Maître, & que.}«
lai deàiADdois QitJ«ricorde. il te fait grace
V'a-t-i] dit, mais tnx oondittonsquetutete-
iw de la Religion Romaine. Peux tu ici me
donner caution de ta promeflc i" 11 y a en cet-
te Ville (jaits laRUc desLouibardsun Riche
Marchand Âinquier <]Di porte mou nom , qai
feut-ctre œ me rcfuièra pas la graoe de me
çautionqer ,. lui dis je, linon monFrercqni.
Remettre ï GhateUeraut le fera je croivolon-
twifi & ûdesûueréta deFamilierencmpé?
'. . choient*
u,:,-,zf--„GoOglc
■ciM9t«QC , je fste tkèi palCvaàé que monBMm
fv6te i^d et an ides .ptas tuHpm. A4vÉ>««fs
^ f^onricH te;A)niile tout fbn «XAr. llafris
-j'ddrfâè de tbtitec oesJPcrioMes , xfvès qtici
41 MI*-! dft (ttouEne' im-Ctwiitoe ,' pries y
iùen E)i«u pour S. M. le^m GUmt»>tdc»U!s
-les Roic, qui -te fait grâce, âc ibsgs à vtrié
à l'avesir^ti boa&âdéle4ii!f«. - -
A |»eiiie it jUHwiont nous Iwre rer«o{r dfe
-ion tr^lbleiHent') Mr. liocfc «6 fbHgeoit
-qù^ le iâke largeciMm toiM povir 1« congn-
^fet^ab 4 fcotiter^iafortiepeBFAtrt
-4^Mr«|ir de me» nowetles àUMl »è» Oh«i«Ë>■
-fK>uze & à pvOciKW te'LrbOftrf i Mf . LÀatk.
Voici <»ffiBwm j« m*yftit". ■
Mr. LtnckawSft dsMK «a lj!vR'^ft»tk<
de papier blanc qai n'^toil Me itnfiiaié^ jt
-i'FltuAMiN aiM«d« liw» Aftti^vinaH ois L«»-
itcG a'oRC jam^B <tié feivUkE t Icurc «dvd^C
aparcmmcnt p^ larliniditf de Mr.teSbrthost
j}ui lesOffiders n'ovbliérentpasdcdiw, com-
me. Us font à rou» tefl ^ff {ÔBnicM qui foRMK
4e leors grifes , q«e fi 4)4aBaci}t4e nos bouv
wietles dans le Monde , il ne jnâaquef oit pab
-d'-âtre Ternis â 1a BbIHHé potir le r>Ile de fin
-j'sdTS ; Se même ils ^font tiike ftnnentdV ofe
Tiçn rcvélw de ce qaî f« p«lfe à 1« Baftilfo',
«vec des menftçes terribles en cas de eontra-
-%t»fym. C'eft eparfeaiBwnt « quiftcmpé^M
-Mr. -FatOHVdet! mon Preiirief Cojn^agnon de
-inettt«:à la poflè cellet que je lui avofti do«-
-tiétBvmriee miecws Perfonms. MX' Unck
. . fitt
i88 Vlnq^iim f^aàtôifr
fut pJiis heureux ;;&sIjeai«sfiKenttti^i£%
que j'écrivis poBT tei à^l'Aii«Qnicr,<iu Reft-
deut tic Danaenitrk à Parts, i]^ cot^oUTpit
pftrticolÎÉrejnen» Mr Linck} ■& à Mademoi-
iclle Skmftre, qui étoit use Fill« AUemande
A qui Mi^œefiufoic une Penfiop & qu'elle -
tenoit; fous fa Protcâion. Mi. Linck promit
deux Cents Logis i cette DaiogifcUe, (iellf
pouvoit le ^reJbrtir de Prifoa,.cc qui lui
îcroit £icile eQSjlâDtttouvïrMadanieà VcC-
^11^, if. liii BcmoDtnnt riRinlU^equ'onlui
jivoitf^te,enl'art6nnt)ai &r k« autres Allo-
«laipds, dès le lendeniaîii.dviour:q'U«^eUe
Grande PtiaodTe teurwpit doonéUa pai»lè
du Roi.fon Ftere qu'opine leur feroit auco-
ne injure, Sx. qu'ils pouroicot demeurer àP»-
■rjs jufiju'à rprie que S. IWL Ifcûr fçroit .don-
ner de ibrtir 4a Roïanme- : '->
KpBS coarunes tQulc» cçs Lettres dans les
)Guenilles.de,Mr.l^erthoni.«tt¥Jadoubla-
-M & iedelTus.defoujuftattCOrpa, &oouspri-
jo^ tdtttes BUS mefuros pour qu'il en pât as
ntcûns ïâuver quelques unes.
EnfiA le bienheureui moment de la fortte
doMr.JaçobJftBerdion arriva lefoirà.uattf
-henitiS & d«nyuti&inedi-3o.DecembK;i.ïot.
Of): ne nous apotta aôtie ordinaire qu'après
«ya'ii lut fçr-ti , pour avoir !abarb«re làtis^o-
doB'de le mettre dehors fans fouper; même
nos cru^USourreauxtrouvoient mauvais que
nous preientallîpas du vin ï cepauvreHom-
nK,qu'ilstraitterentBvec laderniéreinhum»-
^nit^i &Rufurtout, qui devant nous lefouK-
lA par tout , mente aux endroits les plus f^-
«cets, ^rec ooefurçur biqt4Uc>.ei)lùdi^Rt
" les
.--„Googlc
les îojvres les plus .groffi^res & les puoles les
plus ouusgejintes, ceqtieceboD Vieilltrdagc
4e près, de 66. ans routTric avec une patience
c^>able d'amolir des Tygres. Ils le mirent
dehors uns ronlters, & uns avoir voulu per-
mettre àMr. Liuck de loi enikirc âiceàfès
dépends, qui avoitvoulnmémele&irehalnl-
1er fans que ces inhumains vouluiTent jamais.
lui donner la permiffioo de leiàire : il legra*
tifia d'un billet pour aUer chci Mr. Toucto»
Baaquier y prendre rargeot dont il avdit bc
foin pour fe mettre en ecat deretournerchcz
lui & le conduire jufqu'à ChâteUeraut. Ce.
Bonhomme étoit fl tranfporté & G trem-
blant, tant lajoîe de fe voir libre ravoitfai-
ii , qu'il ne put jamais nous dire une feule pa>
rt>le; Excepté qu'après.qucnousreumeïcm-
braflc tendrement il fe retourna devers nous,
quand il iiit forti de la Chami>re, pour nous
dire. Adieu mes chers Meffieurs^ priez Dieu
pour moi.
Nous fimes une FÈte de & fortie, qui da-
ta tQut au mpius une Oâavc toute entière ;
& certainement Mr. Linck avoit bien raifon.
de s'eu rejouir, eu: lÀns cela il Êouroit gran-
de rifque de demeurer jufqu'i. la Pais, dans-
cette maudite Caverne à Voleurs; & la Sor-
tie de Mr. le Breton & moji' induàrie prooa-
rereiit, non lèulemem là Libené , mais en-
core celle de Mr. Nifvitz & de plufieursau-
très Allemands , pont l^uels Mr. Linck
allapuîilemmcntfolicitcr Madame, lorsqu'il
fat mis en liberté.
- 1^ lendêmatu Corbé notu vint voir , &
s'adrcljjuu à Mr>Lmck, ranerdexinot, lui
dit-
.--„Googlc
dit-il-., d(r TOUS- itvi^r ^ia]^4 t^Kvntqti^tf
Tâas-m x«reioc«>ftté«DavlMbi4)«ra£h«iiiIttf-;
et tàotma (}ut foRin a'avac Tbu« hier as Cokf
tôt voas Mr. demandes |Nrtk>n à Dfâsdtf^
m'Ëo aroit ea^4«hé , (fit Mt. Lincfc j-ja- nHf-
droïs xfoir psfij ie^M&le des chofcs' dont ît^
«voit bofoùc & qu'il at KR pat-forti a&ffi VH^
ftn^ qoe Taui> Tavex. Uiilë etiliotW'de véît-
Malw. t V nns sa nipoiuke% devant EXsU-, «!ar
BXin inteatioa » ivé tjonae. Il fonJt'tràfr.HMll
fiaiit^ de la reponce que M¥. t^inêk AVûif
fiute à^ fon barbare aomplimeDt.
- Nôtre amiad croiHoit tout- les jobte de
plus en' plusj j& clïetîfMs Mr.-Lincfe tiQim-'
metmon Fils^ & il ni'aicnoitdoitiitte Ion Pe-
rd. Le ibir comme nou« noAs-chauâons }•
B^tre< aUè du boiSvquHl fairoit- abendoihmenf
Atherer , ncn». enteni^mes ptt rïâni' ckosH"
Aée dâ& voit conliifêfr de Pr^ainOTS qui .é-
toicnt au deOuus de nous. Nous m>H« ha-
zM4ï«eet (bi peton" la ctied^tkfe^ ft avee de
U'HeotlB qw nouc-âffieis tn'«« lât boâcfiOcKi
dw bailtn4la»<f«iiia de Ch^ïipa^â'^u^oRi
nous.' ^>ot«oit dn GabaieT «ouief coëtfêaS-,'
MoHffdfflbeot^Hei «a birtttt â-iiof Voilins^;
ï)s l^antcbercM aulB E^ân qu» Erfare titodïe a*'
Trie une violanoe', doue nou» ne pouvions-
deviow la. eaaCSi Nous- sii' ôcrifwrws. uni
ff^e<q«îbi«linipn numvilleuFruccsi^-Noa»
Viw ^lioiw 'q«Â' ffou9 â^osà-y -it'nèus les
^iiems d&'tWRWs» teiï <^a' «oïli'poffîiMiv
nous confolcr mutuenemem^, mais ilti àni
•voa\àmat pas ncnu faire aitGtt««rEipott«é j
- .fit
.--„Goog[c
■■.: ',CX
■'x,:ïi-
.C<x,8lc
-' 'r\
oit ^S^okfie}» IbifUl^. lifi
fit eft*«B(ke ttds tlilKnaèinrim tout ce qu7Tî
diibient. Je diflîngnai la voiJ d'un nommé
Mr. le Poulllou» Gentithomme du Poitbii^
les autre» étoient les nomiriei Jean Bonnem,
Medecki , 6!s d'un MiniftrBd'Aubuffimea
Aaifêi^ne , Mathîas du Val , Pilote Irlair-
dois. , & Jean Geflnin , Semirier de Paris.
Noos counômes facilement qae Mr. tePooil-
touii'quî étoit d'une- hu [heur fiwt douce, a-
Toii beaacoap à Ibaffriravcc les trois autres^
lotit deus étoktit fous , & le troiHéme pa-
ieiffôitunAnïrppophagc infuportable. L'en-
ïie que j'avois cependant de parler à Mr. le
Pouilloux, me fit haïardèr dcieùr parlerpar
. HÛtre troçj mafs je ftis fort fôrpris d'eateir-
.d«e Mr. le Ponilloux , qur me' conjura de
boucher bien itôtre trou, qui nous fcroit tons*
aller as Cachot, fi il étoit déconrcrt ; qu'il
aA'oitds moins autant d'envie-quc moi de me
parler , mais qu'il avoit des raifons invinci-
Wcs qui l'en etnpdchoient..'' Nous fuiviines
fon confeil & nous jugeâmes bien qu'il y a-
voit quelqu'un pannfeux alï?s tr^re & mâ-
chant pour aous découvrir.
Le i&. Janvier de l'Ai:ntfe'i70j. comme
nous achevions de dîner derantbonreu, nous
entendimes ouvrir nôtre porte , & nom vî-
mes entrer le Major & Ru, fuîvis d'un Prô-
tre de môîenne taille, mais bien traverfé'te,
' vi&ge aflêzmâle; mais-cepeHdanrd'une très
inànvaif& PhyfiOHOmie. Sfes yeux étoienr
rouges , comme- ceux d'mn Afptc' Au refttr
c'éEoît un bon groi Gourdin bien j>ontmé ,_
îriïïs trais & dans la vigueur de fon âge, car
Une paroilToit pat avoir plus de j^. à 35-
ans.
.--„Googlc
ij)» L'InfifithK Frampaife
ans. A ù. carure , fes jambes & fes bras , îl
Ë^bluir que la nature eut eu delTein d'en ai-
re un Porteur de Chaife , ou un Porte-&ix ;
iaais dans ia fuite on verra, qu'elleavoiteu
detièspernicieuièsraîfons, pour en faiieun
Curé tonal. Cet Hommeen eacrant nousCi-
lua alTés fièrement ; puis il remit pron^te-
ment fon chapeau fur là tête , pour prendre
un des pans de fon manteau , qu'il pofa fur
fon épaule, eu s'en cachant la moitié du vi-
fage , & UitlK pendre l'autre en bas , ïur la
partie inférieure de fon audacieufe figure.
Le Major, après fes gtotefq\ies révérences ,
nous dit que c'étoit uu Compagnon que Mr.
le Gouverneur nous envoioit, & qu'il nous
priôît de recevoir avec nous ; & Ru prit la
parole t pour nous affirmer que c'étoit un des
meilleurs Gars de laBaftille, & que nous en
ferions contents. Nous nous levâmes pour
lui fiiirc civilité, & nous prefentâmes duvjn
à nôtre nouveau Venu , 5c à fes Introduc-
teurs, qui après avoir bû deux coups de cha-
que main , nous dirent qu'ils ne pouvoient
pas relier plus long-temps avec nous ; qu'ils
en étoient très fâchez, fur tout le Major qui
fçachani que nos Cantines étoicnt bien gar-
nies, ne les quittoit qu'à regret, mais qu'ils
avoient des anaires deladerniéreconfe>)uen-
ce; & aïant refermé lesPoirtes, ils nous laif*
ftrent feuls avecnôltenouvelAflbcié. Ilou-
vroit les yeus fur les débris de nôtre dîné ,
aifés bons encore pour être convoite! d'au-
tres que d'un Famélique, comme s'il n'eût
mang^de trois jours. Ce quim'obligeadelui
demsnder, lî il avoit dîné, & s'il nevouloit
pas
.--„Googlc
om V-Hijioirt dt la BaftilU. 19$
ns tnen nous &ire la graçe de fe mettre i
Table avec nous auprès du feu ? Je ne m'en
ferai pas prier deux fois , nous dit-il ; car ou-
tre que je vois que vous êtes de bons-Vî-
vjtnts, c'eft que j'ai toûjonrs fait trèsmai'^
dierc, depuis que je fuis àlaBaltille; ledif-
né que j'ai fait aujourd'hui ne m'empêcheroit
pas d'aller à la Noce , & je n'ai pas veu de
feu depuis que je fuis dans ce diable de gouf-
fre, quoiqueje fois en Enfer. J'aportai une
carcaue de Dindon froid de furerogation à
nos bribes ; je lui prefeotai nue chaifc à la
place la plus honor^le, & je le priai de met-
tre fon manteau bas , pour erre moins eini:^'
raflï. Mais, quelle mt ma furprifè, quand
après l'avoir depofé , je vis que c'étoit un
Abbé mi-party , moitié froc & moitié drap.
Avant que dt^ le mettre à Ton aife auprès du
feu , où je le ferai tancôc jafer comme un E-
tourneau, il efl très eiipedient que je fallêln
dcfcription, fi je le puis, de fon hétéroclite
figure. Je commencerai par fun chapeau \ il
Ijb merite"bieii. C'étoitunCaudebecgoderou-
né , tant il étoit fduienu d'audaces ; ou en
auroir bien rctroucé le chapeau detlouzeScrf-
dais aui Gardes, tant il portoit de gances à
lérecoquiller,auffimedit-iidanslafnite^que
les Abbcx uu peu Galants, commeIui,appel-
loient ces fortes de chapeaux entr'eus , des
Caftors à la falbala pretiutailJeï. SaPerruque
étoit la meilleure pièce du fac ; clleétciitd'ua
très beau blond ; & nous aprîmes avec le
temps , que c'étoit la Tonfuce d'une de fcs
MaitreiTes. Son rabat, jadisblanc, auflibitu
^eXes manchettes,' étoient d'une baptillc
I tou-
Coo^jlc
19+ VlnqHiJt'tion Fraufolfe
toute des plus belles: il nous jura, qu'elle Inî
avoit coûté dix francs l'aune dans Cambray.
En revange fa chemiiè étoit d'une loilje plus
groffiére , que celle dont on fait les facs : il
devoit cependant bien la chérir, puifquec'é-
toit fon unique , comme nous l'aprîmes après ;
parce que, nousdifoit-il,jen'aimeàmechar--
ger que du néceU^re, & qusjeme mets fort
peu CD peine des chofes qu'on ne voit pas.
Sous fon manteau il étoit en verte, dont le
devant & les poignets étoient d'un très beau
drap, éc tout le refte étoit d'un froc tout des
plus revêches. Le devant de fa Cuiote é-
toit de veloux violet; & le derrie're de froc
bleu ; ce qui m'a fait dire , que c'étoit un
Abbc-mi -p^ci. Ses bas, qui étoicnt attache? au
delfous de fes genoux avec des cordes , lài-
foient une figure tout à fait drôle: il en avoit
fait defcendre le gras de la jambeàlachevil-
le du pté; car à mefure que fes bass'ufoient
par le pîé , lans façon , il coupoit ce qui é-
loit ufé , & faifoit defcendre le relie plus bas ,
en forte, qi(e les talons fe virentd'abordfe-
melles ; enfuitc le bas de la jambe , & il en étoit
augrasdelajambe, quand il cntraavec nous: fi
bien que fes jambes qu'il avoit naturellement
très gro/fes , paroiffoieut monflrueufcs. Il a-
voîi la figure d'un I. Gtec renverfé. 11 n'y
avoit plus de femelles à fes fouliers , qui ne
tenoient à fes pieds qu'à force de cordes , &
làns exagération, fon pié avoit près de deux
pieds de Roi , tant-ilétoitéiiormement grand
lïc p'at. Ilrougii, quand il eut mis fon man-
teau bas, s' apercevant bien , qucnousavïons
allës de peine à nous empêcher de rire, d'un
ha-
u,™--„Goog[c
0X FHi/loirt de la Ba/IlIIe. 197
habillement auffi bizare que le lîén. Mcffi'cufs,
nous dîuil , fi le Major m'avoit donné le
temps de prendre mon Jultaucorps fur moi.,
vous m'auriez vu plus propre qiron Lapin,
car il eft du même drap que le Maiiteat% de
tout entier , que j'aiacheté en Hollande. Maie
entre nous autres Abîmez, qui nefommespas
trop* riches, & qui voulons cependant paroî-
tredans le Monde, nous'nenous formalifons
que de ce que l'on voit, & nous ne nous in-
formons guère de ce que l'on ne voit pas :
pourvcu que l'extérieur foit de miiè & brillé,
l'intérieur va comme tu pourras. Il parloit .
un Normand fi grolTiCT , que je connus bien
à ion langage qu'il étoit du côté de Koiien^
LojueU manifefiuin fecit. Il s'aflît fans façon
au haut bout de la table , c'étoit l'homme
d'Efope , il fe prit â dévorer ; il u'avoit pts
le temps de mâcher, il avaloît les morceaux
tous entiers : ce qui fît que Mr. Linck me
dit bas à Toreille afTez plailamment, qu'il
buvoit la viande ; exprefiîon que je troa-
vm aflei fignificatiVe, quoique très naïve.
A peine eut-il bîl une demi -bouteille de
vin que le feu lui monta au vilàge. Je crô
d'abord que c'étoit l'eifea da feu , dans le-
quel nous avions jette cinq ou fix bûches
d'augmentation ; mais Tes extravagances nous
:tirerem bïen-t'ôc d'erreur. Sans en être re-
quis, il nous fit un détail de fa vie, la plus
■dépravée, & la plus débordée, comme on le
va voir, dont les plusgrands Scélérats puif-
ient être capables. EccUfta feriierfa oflendet
faeiem Diabali. Vérité , dont nous voient
■un exemple exécrable devant nous. Il noui
i 1 «voit
u,:,-,zf--„GoOglc
1^6 L^lmft^fitaH Fraiffoife
avoit dit qu'il s'appelloît Mr. de la Motthe,
Abbé de St. ADtoine. Meflîeurs , nous dit-
il , je vois bien que vous êtes d'aflcz bons
Enmits , pour ne vous rien celer : mon vé-
ritable nom ed Antoine Sorel , Curé de Lie-
ry ,*4 quatre lieues de Rouen . qui eft la troi-
fiéme Cure qne j'ai perdue pour mes diables
de galanteries. * u Nâtre bon Rouai a* eu
'„ grand tort de ne pas m'anvoyai à TAmc-
,1 tique, j'y érols peuplai comme quatre des
■„ pu hardis. En treîie mois de temps il y
„ a eu frpt Filles de ma Parouaiflc qui ont
„ accouchi pour mouai , dont il y en avoit
„ une belle comme unSoIey, nommée Eli-
„ fàbeth de la Feuillée , fœur d'un Maître
,, Chapelier de Roiien," qui étoit ma Coufi-
„ ne Germaine; non comprins les Femmes,
■,, car j'ai feit en forte , quin'ontrientretou-
„ tes a lè reprochi; exceptai trois , que je
„ n'ai jamais pu mettre à la raifon ; & fi j'a-
,, vois da encore des Maitrefîcs à Roiien &
,, de tous les cotei. Dame Dame , vêla un
,, Cur^ ftila. En achevant celte belle Con-
ftffion, il fi; leva , & me prit par la nuùn
pour me coùtraindre i dancer avec lut ; Se
voïant que j-cVen étois pas d'humeur, il le
prit â dancer feul d'une manière aufli barleC-
que, que j'aie veu dancer eu ma vie ; ' en
^i^nt des lâuds û lourds , & avec tant de
-violence, qu'il eût enfoncé le pjanché, s'il
•eût été moins folîde , en chantant une chan-
fon fiin&me,' qu'elle auroit fait rougir Icplus
ef.
• Tout « qu'il dit, ic c|Di rit difUngui ^' de» guîll».
ncuBD commencaaent'du lignc>i df du Nocxiaàd, id
qu'il le pttlgit.
.--„Googlc
eu VHiJietre de la Baflitti. Ijt?
èCfrcHité Goujat de l'Armée. Cependant ,
nous difoiï-il , „ je l'ai fiiit danchi bîea des
„ fouais anxFumcIles deinaParouaiire,dafis
„ men Prebîtaite, principalement les Diman-
I) chesquejedanchionsl'aprèsmidijenatten-
„ damVeipres, & après Veipres,'q«ei'avions
„ mille câlins : jenosegofillionsdc^îrecom-
„ medcsCoffres. LepauvreMr.Lînck,lQÎiI
de rire de cette datice lôrbare , & de ce ridicule
Perfonnage , alla fe jetter fur fon lit , tout
trifte , ou il fe prit à pleurer le malheur de
fe voir enfermé avec cet extravagant. Je cou-
rus à lai pendant que nôtre vénérable Curé
paJIbit en rcviie les bribes de nôtre dtnc ,
pour fe refaire de fa fatigue ; car véritable-
ment il fuoit ï groflTcs goûtes. Mr. Linck;
va me ferrant la main , ah Dieu ! me dit-il ,
qud Homme nous a-t-on donné ? c'eft un ■
Diable plutôt qu'un Prêtre. Si un de nos
Minîdres avoit fait cbez nous la dixième
partie des crimes , dont ce fcelerat Xe vante ,
on l'auroit brillé vif: fi les Ofiders laiOënt
reperdu avec nous, indubitablement j'en mou-
rai de deplaiCr. Je le confolaidu mieux qu'il
roc fiit poffible ^ en l'aflurant que nous fei
rions les Maîtres de.le chaflcr d'avec nous;
mais nous ne coimoifltons pas encore U
Baftillc. Nôtre charitable Curé me deman-
da ce qn'avoit Mr. Linck ; & lui aïant ré-
pondu qu'il fe trouvoit un peu mal ^- mais
que quelques heures de repospourolentlere-
mettre. „ Mordîere qu'il boive & mange
„ comme mouai; qu'il cabriole, & qu'il fe
,, goffe de l'incontûncc : vive la jpïe. Je le
priai de le l^llèr un peu repolcr , (Sclurai'aiic
t 5 , ter-
u,:,-,zf--„GoOglc
158 Vhqmfitioti Fraitfoift
verfé an): rgfade de vin de Champs^e , qtii
acheva de lui tourner la. cervelle , je le fis
aiToir Auprès da feu , & je le priai de me fai-
re l'Hiftoire de û vie, où je ne doatois pas
qu'il n'y eût des avantures tout à fait extra-
ordinaires. , Jamais Bufcon, reprit-il, ni
„ Laiarillc de Tonnes n'y firent œuvre : je
,1 vos raconterai tout de point en point :
„ mais au moins , i la pareille. Un Bar-
M bier raze l'autre; vosme dégouaifern la
„ vôtre i. vdtrc tour. Voici comme il
commença , eu parlant affez haut pour
que Mr. Linck o'en perdit pas uo fcul
mot.
„ Je fieus deLeryprèsduPoat-dc-l'Arche
„ en Normandie , Fils d'un bon Fermier
„ de Mr. le Cardinal de Bouillon. Mea
,, Père e(l d'une des meilleures Familles du
„ Village, &avouaJtgentimentdubieii, mais
„ comme nos étions biaucoap d'Ends qu'il
„ à tous ^lu élevai honorablement , l'en
„ petit fait y a palTai : il n'y a que men
„ Fïere ainai', qui eft demeurai à fe n'aife ,
„ & qui a prîns les fermes de Mr. le Cardi-
y, nal, en.Ia pladie de mcn Père, & un de
„ mes Cadets ^ qu'un bon mariage a bien
„ mis à ie n'aife. J'ai itout une Sœur qui
,, eQ mariée à un des pu fameux Cabaretier&
„ de Louviers , qui s'appelle Mr. Bras-dor.
,, Vos voiez que je fommes gentiment apa-
„ rentSz , & que je ne fommes pas de la Ca-
„ nmlle otiida. Dèsquej'étois petit, menPe-
p rc me deftinoit pour eitrc Preitre ; car é-
>, tant Fermier de Mr. le CardinaldeBouil-
,1 loa, ij ]f.doutoit bieà que. les Cuics ne
--„Googlc
•« rHifioire de la BafliUf. ]»p
„ me maat^ueroient pas pu que liaa dans la
„ Rivicre. J'étudiai pour cet effet à Rouen ;
„ & comme j'écois ai&z bîau mile , une £-
„ chopiére devint amoureufe de mouaî. Je
l'interrompis , pour lui demander ce qile vou-
loît dire une' Échopiéie. „ Comment me
), répondit-il brurquement ! eites vou& le feul
„ enlfraclqui l'ignoriei? C'cft une Femme
„ qui vend de la grailTc , de t'huîte i brûlai
„ à petite mefure, du beurei du tard, de la
„ chand^Ie , &c. Tout le monde appelle
y, cela Ëchopiére ; & Vaagelas la nomnu:
,1 aiufî dans l'on Diâionnaire du bîau Lan-
*i Saffc. Je lui demandai excufe de ce que
j'avois oublié ce terme , & qu'il devoh «-
tribtt^ ce defïaut de mémoire à ma Prifoii.
■Jiftèi quoi' il Ce trauquilifs , car il âoittout
.^ma de mon ignorance : il continua «ulî.
a, Tontes les touais que je pxffois devant fa.
tt boutique^ elle m'arr^toit pour mecareflai; "
„ tantôt elle me donnoituiK becrée avec un
„ COUP de bon gros cidre; tantAt des poires
^ ou acs pommes cuittes , & trejoois qué-
y, qucs petites ftiâleries : qoéqucs fouais
t, itout elle me fkifoit entrer daos l'gtnéte
», Boutique , & mefaaifoit i lajoe. Enfin
,. elle devint fi éperdiiemcnt amourefife de
„ mouaî, qu'elle mé voulait épouîâi à toa-
„ tes i'orccs , & qu'elle me fit la piopclîtion
„ de tne donnai tout fcn bien , fi je vouloJs
„ en taire ma Femme. Elle me dit qu'elle
y, me donncroit raillant plus de deux mille
^ 'écus : qu'elle m'acbeteroit une Charge de
,» Fcanc-Porteus au Grenier à fel. Elle eflt
„ bien éiai ma Qrand-Mere , & c'étoit une
I 4 gtoûè
. , , -.^Xooylc
aoe L*îmqt^ti»m frampoife
„ groflè tripière ^i me M&yx mal an cœur ^
„ tant elle ètoit graiiTeufe ; mais le bien &
„ la Charge me firent ouvrir les yeui. Je l'y
„ dis que je le voulois bien , & que j'îrois
„ en pârlw à men Père & à maMete. Jen'y
„ manqui pas. Men Père & ma Mère vin-
f, rent ] a voilais. Ellenosregalîtqaerienn'y
1, manquoit. J'étions près d'écrire, quan4
„ fes héritiers èvantlrentla mèche & même-
M naffiicm, que fi j'ypenfois feulement, ce
„ feroit fait de mouai. Elle avoit des Ne-
I, veus Purins qui étoient de grands drôles
„ bien découplés : ils me guètirent, ce qoî
,t fat caafe que je n.'ofoïs pu y allai que le
„ foUer. Unefois que j'en fortoisbientard,
f, ils me tirèrent no coup de piHoletfansme
„ blechi , qui me fit décamper de la belle
„ manière. Ma Soeur , qui ètoît Fille de
„ Chambre chetMad:!a PrefidèntePlot, ne
„ voulut pu que j'y retourniffc, & dit qu*el-
„ leaimoit mieux que je fulTe Preitre ; &
„ pour cet effet elle priit Mr. le Prefidcnt de
ti me Couvai une condition , pour entrer
,1 Prec^teoT dans une maifou de Qnatitai ;
„ car j'ctois bon Rhetotîcicn. Je failbis dc-
,1 jolie petite profe latine, tout comme Ct-
„ ceron, il n'y avoit pas.de choix entre nos
„ deui. Je.faifois itoutde jolis petits Ver»
t. Grecs ; ppur des Vers Latins, jcm'cnbat-
„ tois ies.fellês j je n'y ai jamais pu mordre;
„ cela m'elugeoit lacervelle. M. Plot écri-
,, vit ï Lion i Tes Parents ; & il ut ordre de
„ m'y envi^ , pour dire Précepteur des En-
,> fants de Mad. Plot de Bulliou. J'y fus ,
„ & j'ètois là comme le.poïc ï Vaâ%e. Je
■oylc
en THiJithe d* U SaJIHU. toi
' K' n^y cù pas été trois mois , . qùè je' deritig
., vermeil commeune Rofe, & grascomme
„ un Moine. Pendant que mes Ecoliers é-
1, toient en claflè, j'étudîois mouai en Phi-
t, lofophie, oùj'argumentois comme un Pla-
nton. Je m'aperçn bien-t6t que ma Mai*
t, tfeOè étoit devenu aoiourenfe de mouai;
„- Je no^ enlrclorgnîons à qui mieux Bueux^
„- les meilleux morcianx de la Tableelte me
,j les tapoit toujours fu me n'âffiette. EulSa
„ j'étoisâgogo, qnandjçm'acoAid'uugraad
„■ drûle d'Ecolier bien découplat , qui étoû-
,, debanchi , qui me perdit eotieremeut: Ma -
„ MaitrefTe qui difott irejouts qu'elle vou-
„ loit m'attachi pour jamais aupreis d'elle ,■ >
„■ & pour cet -efFet me- donnai une des Cure»
,,. qui étoient i fa nomination, car ene<:toit
,j Dame dcqoatre o cinq Parouaiffes , m'a-
„- voit fiiit recevoaer Dincre ^ quand l*Eco-
„• lier que j'ai dit , qui s'appelloit l' Abbé de
„ St. Martin , Gentilhomme de St. Etienne
„ en Forêt; me fit faire i'EcoIe-biflbnniére, ■
,,:pour m'en traînai au cabaret, avec d'autres*
,1 garnements comme liU', on je fricaSious-
„ tout ce que je ponvois attrapai, Il m'avûir
„■ tellement enfôrcclai que je ne pouvois pu'
„ me paflài de li. Je n'écoutois pu les re- '
„ montrances de ma Maitre^e: elleavoit
„ biau mefermonnai , un mot de men Ca-
„ marade de débauche c^çoinont; Quand
„ heureuftnienl pour mouai, il s'engagridani
„ la Cavalerie, où je me feroîs mis avecli,
„ fi je n'avois pas étai dans les ordres ; &
„ fen Capitaine l'amenit.en Allemagne. Je-
„ll'cQ entendit pu parler peada^t cinq o fix
l j ■ „ mois, -
.....^Xooglc
40t- ^ Vîé^MifùioM Fra/tfaife'
„ mois. Je repriQS l'Etude ; & j'étois prft
„ à chaatai m» première Meflc , quand un
„ btaa matin, jercçuune lectredemonGail-
„ lard qui m'écrivoît du Faux-bourg de la
„ Guilotiéte, audelàduPont,oùilmeprioit
„ de l'aller trouvai, dans un Cabaret où il me
1, marquoit qu'il m' attend oit. Je ne me le
„ fis pas dite deux fouais ; j'y vôlîs. Mais
„ quelle fut ma fnrprife, quand je*l'ytrou~
„ vis en habit de Recolet ; je penfi tombai
„ de meri haut. Jamais Mafcarade n'a été
lit pu dràïe. Vb^it pourtant ne demantoit
„ pas fa bonne mine ; c'étoit trejours le mé-
,, me, droit comme un. jonc , frais comme
„ un Gardon. Apr&s les Ambrachades , je
M fimes venir du vin, &il me coniit qu'en
„ Allemagne il avoir trouvai ua Recolet de
t^ faconnoilTaiice, quil'avoitteEiraidansfon
„ Convent, parcequefon Capicainene luia-
„ voit pas voulu donnai fon congeaiL Que
„ les Moines l'ayoicnigardaiprèsd'unmoiï,
yf jttfqu'à ce que fa Compagnie fût partie;
„ pendant lequel temps ces bons Religieux
„ l'avoient prefque fait crever à force de boî-
,, re; & qu'après, crainte qu'il ne fûttecon-
„ nu, & prins comme Deferteur, ils liu a-
„ voient donnai un habit de Recolet , avec
„ une obédience, pour allai de Convent en
„ Convent jufqu à Lîon , où il devoit quit-
3^ ter l'habit , & le rendre aus R, P. Re-
„ colets. Que par toute la route, il avoit
„ fait une vie defordonniîe. Qu'aux Con-
„ vents où il avoit logeai , on lui avoit par*
„ tout donnai de$ prcfeais, p<^ apporter
m PHiJhire de la Bd/fille. su}
,, au P. Supérieur , & à divers P. Rccolets
i, de Lidn ; mais que par It chemîii , il
„ âvoit tout vendu &ftica0àt. Qu'ca fartant
i, d'un Convent où les bout ReJigieui l'a-
„ voient tant fait boire , qii'it en étoit trou-
„ b)ai ; il renconttit une Fille qu'il voulut
r; forçai, & il dc fçavoit pas ce quicnletoit
i,- arrivai , iUns des Païfans qui accouruient
„■ aux CriK d« la Fu:Tjelle , & qui voulurent
,y le ratberiai au Convent, pour te tàirechâ-
„ tiaî par fes Supérieurs , ne voulant pas l'y
t) tojichi, àcaufedefencaraâére, maiscom-
»r me il étoit plusforiquCcesRuftres, après ■
i,- s'être gourmai avec cui , il s'^roit échapai
„ de leurs mains. Je -fûmes trois jours en-
„ tiers ^tK te CabaretdelxGuilotiéret fans
j, nos-<]uittai j mais comme il n'avoit pas
„- an ^ou , & que je e'étois guère chai^cai
„ d'argent, quand j'enmes tout mangeai, je ■
„ IJ confeilli d'aller aux Recolcts , leur de-
,,'inandai deshabiit &quelqu'argentp(»)rre-
ft-loVrRai chez^ li ; pucequ'il en étoit bien
1,'comio, & qac les bons Peces alloiencàla
f, queite fotfvent chez fen Fera & fa Mère.:
),-/e CacccMnpagni jafqa'au Gonveiit. Mais
„ je vis bientôt qu'il alloit bien mat de fes
„ afaiies; car je ne fumes pas plutôt entres •
„ dans te Couvent, que le Frère Portier fou-
„ Bit trois fois uns cloche , qui fit parnître '
„ tout à ccajp «inq ou fix grands Eliafiers do
„ Moines , qui comtnencirsiK à vomir mil-
i, le injHFes- contre li , en liu difaitt. Ah !
„ vous voici donc Mr. le Fripon , qui avec
]> QÔtre habit nos avei fcandalifci par vos
I « • „ (ie-
.-iCooglc
M4'< L*Imqmifitiêm Ffamfnfi-
n ddianches ; qui «t« &icsflài toatcequ'on
■n vos aroit donnai pooi le Convent , &
11 qui vonkz foiaù les Filles 'Entrez, cn-
ji Irez dans le Rereiâoiicrcj.ilyaloiigtemp^
1) qne nos .vos attmdonE. EtvosMr. fe
tt loumant .dcTCrs monii, a*£tcs vos^ pas de
» Gi Compagnie?^ ne velci vos p?s- entrer
it avec lia, pour être regabi^Neoiii dames,
)> R. P. ce leoE dit-je, voiant .qu'il^-^toient;
n d^ja plos dfi. quinze, cm fcizc Papplards »
y\ qni le.tiroîontdan&le-ReftâDuere , ou.il
)i n'entroit pas de.bonc(SQE; jeneleconnoîs
,• fcalement pat : btmimtm tmf. mevi : .c'cduiv
■V, bon ReHgieui ,qni m'a priai de li montraî-
„ le chemin do Convent. Je Icreniy commc.
,1 Pierre, & en dîTam cela jç decanq>e.ftapu.
„ vite. II D^ avoit pas pu de deux heures gu'e^,
ft jVtoie de retour à ia.Mai&]n, oànaaMai-:-
,t Creflc me lavit laieite de labeUejnaniére^.
,1 que je reçu un billet de mcu pauvre Ca-
,) marade, qui me ptioit de.raliai trouvai:
^ dans le mJme.C^âret, où.j'aviOQS paflàl>
y^ trois jours enfènable. L'envie.que j'avois ■
,1 de fçavoiier comment. il s'^oit tirai des
,, nains de ces Caffiuds de. Moines, ât:.quc
,1 je ne balaoci pas .un moment : Je.prins le
p reile que.j'avois d'argent^ &. preftenjent j^ .
fi fus le trouvai. Jamais je ne fus pu ébahi.,
„ que quand je.le retrouvï eticore .dans; fort
„ habit de Recolet.. Mais te pauvre Garçon,'
„ après avoir barrai japortQrurnosdeui,de-
„ tachit fa corde, lailijrtqmbairaRobe, &&
„ mie tput nud. Il étoit comme un Etfe bo^
,, W0. lis ne ravoieoc pasfeflâi, ils revoient
^,,.ccorchi. Il fc.mil î pleurai , & mo^ài 1
pieu-
oii fHi/tcire 4t Is Bë/SUlê. KOf
^ pltoru devMtli ; Je pleuHons tous dfeuX'i
Y. qui mieux mleai. A la parfiitil me contit
rt &n avaaUie^ Si-t6t que je fiis entrai, <ijt>
«« ii, dans te Rcfcâouere, ilsm'j'doiinireiu
„ aatMaarcgal. Us meliyrcntàon des piliers
,» avec RU corde, & les leurs, ftaprism'a''
„ voit bien çurotai pdï les picdS'& les maioa^
„ il» me mtrcnt- tout nad , & aprè» ils tnc
M ceignircntcooU'e le piliéàtfftTeFsdesreini^
,, en Jbne qse ic ne ponvois tnanJai , ni pié;
„ ni^atte. Apwicbela^uxgrandsPwUiards
„ des pu dccoujpSés iè fonc pris i^m'émouchi-ï
n coups de difciplioe, Dieufi^ait la joie} ils
,t n'ont pas travailU long,-tenipsqB'ilsin*ônt
M eu.dcchirai la piau, d^is les £paale$juf-
,, qa'aoi nions.. Je criois comme un^SoJai.
„ J'ai biea fenu que c'étoit lùr les feflfes^u'ila
I, le font le jpa, acbarn^s-;. aiiSje ne Crof
n pas en gnnir de plus- de quinze jours. £q
n Ole flagellant , Us' me diloient : vêla pour
t, lepreientdu R. P. ftici; yela pour lepre-
tv Cent duR-P.âila.; TCla pour avoir voulu
}>iHÛ&i la vilagpeil£^; enfinilsm'en^cKitdDn''^
n lUù pour tmis mes. péchez, poorlxvigile
n & le jour. Après m'en avouéiJionnai dos de
„ ventre , il a ét^ qucllion de me renVid
„ chcax men Père. L'un difoit qu'il me&l->
„ loit mettre, dans un eu de baûé -foJIè pen«
y, dant^qulDxe jours, au pain &àliau. L'iih'
^ tcc qu'il me lalloit domtai un- habit f(!ei>'
„ lier, & me faire jurer que-jeleTchveira^Sj
t, quand je ferois arrivai i la^Ma^bli. Ne
„ vos y âcz pas difoit us autre, il le gard&a
„ ra. D'autres dilbienc qu'il me fiilloit rea-
^.riai arec l'habit, de Recolet, &.mc donnai
1.7 on'
.--„Googlc
xoâ Vluqu^ition Fr-aiÊfaifi
„ un pfire & an Frère pour m'aBcâmpagni,
^ & laportai l'hsbit; .Jnait pas oq n^ voulu
M accqrui U comottâlon de L'Ambal&de-: ils
y, ont biea fait car (Uns .leâe&li>cHr ailils
,1 m'ont mi» , je les éiois tués tous deux.
it D'autres ont dit. qu'il jnc falLoit rcnviai
}, tout feul , & écrîre'une Lettre dc- civilitaî
y, à mçn Père , qui étoit. honuéoe hanutie ,
y, &.qui iiuJuIjitableaienL «cnrdrok l'fuibit.
>t, Enénaprps s'êtve.rcticai.eii nscoia, &a<
^ voir conférai longtempsesftmble, lïdei-
„ nier avis a paHai à la pluralitaî des vois.
^ Us m'ont detachi &après ijue.le P. Pré- •
^ lat, maeu^t un fermon, qu'.ilneEncte<
t, noi( d'eutendj-e , puurfn|aihortai àimioux
I, vivrc,^il m'a demandai, li|B«ouljMsinBnr
,, gçai. Ab! ce li ai-jc ropondu, on fondant
^t eu larinei ■ il ue m'cn.ti«iit c-vos in'aveï
„ allé« bien, régalai : vos m'eti «vcs-dontiaî
,, pour le relie de ma vie.. Enonces Frclwn-
t, pieis m'ont fait jcpiaicUe Leur diable' d« :
u froc , écm^ontËBi rccoadieu/eàDrsdeU
u-Mi^le plu:.q^atre.de teursplus forits- SmcIt
y lit^s , qui par le cbcœiD ine cwvlqlteient
yx:4* DC pas oœ vantcE daen aOâ de maboa?
Il ne-iofinne; & que je pauvoiiétreaiTaTavi
^ que , de leur cûtat cela ïèrolt cafeveltTous
y^ terre.. Pendant cctcnaps là jcoaeditois les
1, moiens de m'en vangeoi : mait que fkirc
la^-f^Aocre ces Ëciilies de Moines? je pettao^
,»ve point id'aulre refonccc quc-de les allai
H. brûlai dans !eui Convent y- dilbii-jecaipoiT
w la^me. Enfin qoaitd ils m'ont eu quittai,
*, & perdu, devile, j'aipiinsungranddecour,
j, -?t. je &ÔS. lerxiut ici , moa cber & iotinv
', . Ami,. .
.--„Googlc
tu PHifiairt dt UBafltlU. S07
M Ami , pour te confiiltai , & te conjorai
„ par nôtre amitié inviolable, que («m'aides
>, à me vanKcai de ces .Bourreaux de C&^-
„ fars. Apres que je liu eu promis & jurai^
1, que je ferois généralement toutauMonde
„ ce qn'il voudroit. As-tu de l'argent , me
,, dit-il? Bien petitement-, H repondis-je; &
,1 pour peu que je tardions ici , je n'en drai *c
„ que (H>ur en ionir. Allons , buvons, te-
I, piit-il , pour en avalai le courroux. L»
„ nuit porte Confeii : mais faifons aupara-
„ vaut venir de l'huile d'amende douce , &
„ m'en frotte je te prie par tout ; car mefc
„ playes me cuifent comme du feu , & me
„ picquent, comme des égullcs. Ce qui fut
,, diti fut fait. Après je bûmes pendaiu une
„ bonne partie de la nuit. Enfin après avouer
,1 biçu r^vai à tons les molens dont je pOu.^
1, lions nos vangeai de ces Pères KouaiW
I, ieuj[ ; il fut reK>lu que je nos habillerions
„ tous deux en P. Rccolets, & quej'itionft
„ par tpus les vilages faire la Que^e; &qù'è
„ mefure que j'amaûètions de quai , je me
,> ratùLlerois dans mon habit d'Abbé , pdUB
' ,1 «lier vendit ce que j'éiions queicai. L*
„ quediont^toit d'avoir encore un habit, & par
^ ifii le &ire faire. D'abord il vonlokquejo
,« tuiâioas deux Recolets pour le va&geai &.
it prendre leor dépouille : mais la Confei) é-<
,1 toil trop dangereux. A quéquQfiA, derif-
„ quai la corde, pour allât à MQueite^ Qui
„ a4e Tvgent ades coquilles ■ triedk-il ;
,» va cbes tcâ; prend tout ae que tu pourras*
(, avoir de meilleur, & puis vien metetrou-
,t vai. Je fui& refolu de <taçit«r ftol^ jufqu'î'
» ce
.-„Goo.jlc, ■
^ ce que nos faons arrÎT^s cb« qù der
„ Fermiers de tnen Perc , qui cft on bon
„ homme- & bien liche: je contreferai i'écri-'
,, curede meo Fcrci qnileprîra demedon-
„ oer ccDt fnaci ■ à valoir far ce qu'il lor
^ doit, pour faire iB.ftlltndemaProfeflioaj
„ parce que je-fuis -KtxX m&faîreRccolct,
^ & puis je te ferai habiUcf . Je donni mca
„ aprobatton à lèd projet. Dans lemomeaf
^ je fÎM dans -ma Chambra , où je raffli tout-
„ ce quej'avois âeLirres , dellingc, &dc'
„ pu biau & de meïlUar, & jevintleretroa-
^ vai dans le- Cabaret ; mais tout y fut au- -
„ tai, avant que d'en fortir, &jevandisjuf-
^ qu'an boucles de mes fouliers , 2e auxbou--
„ tons de mes manches, qui^toientd'argent,'.
„ auparavwitqiie-d'en partir. A lafinjcnos^
„ minmes en chemin. Quand il entroit chcz*-
„ les bonnes Gentt j j'érois jurai , qu'il n'au- -
„. roit fiut d'autre mette en fa vie que do qaei-
„ tai, tant il fi prenoit de bonne grâce. Diem
Q foit-ccans, difoit-il en entrant, lafaiidu'
„ Seigneur Joit avec vos & vos accompa-'
,1 gnepar tout: qu*ilbeniâè & multiplie vos -
^ biens. Je viens eicitai vAtre Ciiaritaienfe-- '
„ iiienr de nos R.- P, qui priront EWeu pour
„ vos & pour tous leurs Bienfaiacursi «quii
„ offriront le St Sacrifice dclaMcdâè, pour
„ le repos des Ames de vos Parents & boni
„ Amis trépanas- Vos fcavés que'nâire*
„ Convem eff pauvre , &- que nos avonsr
I, bien de la peine à vicre; en recompaifeil'
„ eft riche en bosnes oeuvres , dontdenfttre-
„ côtay , je vos donnerons une part aboa.
,,. duite. CAnslaplupandesMaifoat, auffi-,
M THiJïoirt de la 'Èsftine. )0>
»»l6t que j'y entrions la napc ftoit mifb-,
„ ou du moins on nos dounott i boire ;
apès quoi nos ne ibrtîons jamais le*
^maÏDS vuides. Sî il s'y rcncontroit qu<-
^ que jeune Fille i mariai , il ne manqnoft
*»pas de demandai ff elle étoit accordée i
»,on fi elle avoait qnéque bon Ami^ & fui^
„ vanï fa reponce il ne manqnoit pas dedi-.
re qu'il connoiflbit un Jeune-homme bien-
fait, & bien fage , qui avoit de bon bien,
" qui itoit du Cordon du Seraphiquc Père
** St. François , qui l'avoît priai de lui trou-
ai v« quÉque jolie & honnête Fille : qui fc-
tioix bleu fen afTaire , &que fi ellelctroa-
^Toîtbon, il li amen croit au premîcrjour.
^ Aux jeunes Garçons, aui Veufs, & aux
Veuves , il leiir en difoit autant, & il a-
**voit trejoursàqui les accouplai; carcom-
*»mc vos- fcaveï , leur difoit-il, que nos
*» entrons dans toutes les bonnes maîfons ;
r, & que nos connoilTons tout le monde,
j, nos ne cherchons qu'àrendrelebîenqo'oB
, nosbit au centuple. Je fors du Conveot
* de Nantes , eu j'ai étai bien regretai , &
** dans les environs , à fis lieues à la ronde ; eà
nunande temps j'^af fajtplus decentma^
*>riages , & de la grâce i Dieu , jejurervî
„bien, fur laveritai, quejedoisauSeigaeui^
,, & à nôtre Seraphique Père St. François,
que je n'en ai pa» eude reproche d'un fcul,
" tant que j.'aî la main bonne , pour étrctodre
** le nœud du grand Sacrement , commedit
* l'Apôtre St. Paul. Après cela Dieu fçift
»» combien ccni que cela regardoit nosdon-
y, noient de benedfâicina , -& combien cet*
u,:,-,zf--„GoOglc
^ lO UIwqKifltWH FrMMfCift
leur fiùfoit ouviir les maÎDS , vciat faire
, pluvouer dans la Tirelire , le Panier, &
* laBefaflë. Les unsnosdooaoientdeI*a^-
*'gcIlt| da bceure, des œufs, du lard, da
VFtomage, de la chandelle, duel, delafi-
ii laûe ; tout nos ctoit propre & Je ne refii-
,1 lions rien. Quéqucs uns li de-nandoteac
,ce qu'^toit devenu Frère Pancrace, quîé-
toit un û bon Religjcus : il leur nommoît
*'dans riiiilaniuûConvent, où il itoit allai
" par ordre de les Supérieurs , & tju'ii ftoît vc-
** nu en là pUce , & qu'avec In faiote j^ce
M du Seigneur, ils ne l'croicnt pas moins coa-
\, teats de li , que eu bon Frère Pancnuc
^Quand ou lï demandoit Ten nom, il dïlbit
ju'il s'apelloit Timuihée i Frcre Recolec
^ indigne. Toui Hu 4emaadoient qui j'étois ;
*) & il lepoudoitque j'Aois uuPoAulftRtpour
•' le iàini Habit , à qui ; l'oa i«foit tàirc foa
» Noviciat de Oueite ^ & mouai je bsil&JS
),Iej yeux &jeâlfois le C^otà merveilles.
^ C'^toit mouai qui portois un grand Panier,
que j'avions en^runtai , pour demandai la
^ Charitai : coût le monde admirait ma.ie-
,^' lignatiou, & m'encourageoic dsBS la per-
'»' leverance ; jl n'y avoit que qnéqties jeunes
**fumelles, qui bauilbient les épaules, eudî"
^£uil toutbû: que dommage 1 Pour men
„ Compagnon, il portoic la beface, qucj'a-
j vions faite d'une des ua^es dt nôtre. Hôte
.'. de la Guiloti^re , que je l'y aviorsexca-
»' motée pour Ip coup-de partie : il gagnent
■«' ailés fur mes Livres, .& fur mes jiipes. il
.M poMoit itoui une titelire de fttrblanc que
.«j'ajiiops achetée, pom. mettre l'aient, de
.--„Googlc
ùu PHiJiolre dt U BafiilU. lis
„ nos QBeîtcs. Pour décriai les Rtcolcts ,
j^ quand j'avioos feit la QueiK dans ao Vil-
lage, & qacje n'avions pu rien à ypretcn-
-*' dre ; quand je rencontrions depetits Gar-
»' yons, &qutaoGdem3ndoiejitdesCbapdeft
>t ou des Images ; va au diable leur dlToit ii ,
,1 ou bien il kur jettoic d la teite les inja-
„ rcs les plus impudentes , & les plus grof-
fiéres. Quand jerencontiionsqDéqucsgen-
** tilles Filles . qui )i demandoient fa bene-
'* diâion , il leur diïbit du fotiiès , & les
"" P^ grofès ordures ; & quaod eliei Notent
i> graçdettes & loutes fcralcs , il rouloit les
,1 baifai , & je ne UilEoot pas d'ea croqat qu£'
„ ques unes, moïtit! fi^iwt & moitié raiiÎDi.
No« lai^nsuacbcmiBodcurdes Rfcoleti
par tout où je paflioas. il arivit qaêjeftt-
'^ mes queitai dans un Village, oà il a'f «'•
** voit que quinze jours que Frerc Psocaee
ri avoit £tic fa Queite. Je le cfaer diimei pw
,1 tout : a je l'avions rencootiai , je H eof-
^, fioQ charitablement reoda aa «iouble , ce
, que Tes Pères Hagncnactcts avoimc prêtai
* à men Camarade Timotée. £nân après
'* avoUer rodai pu de llx £émaines de temps,
'* en faifant gogailles de nos qudCes^ j*anvi-
nmes chsji le Fermier du Pete <u Mr.
}, l'Abbé de St. Martin. II me gt cachidaos
j^unTaillis, derrière lainaifonoùilentroît.
j^ 11 fit fon compliment & prefentit la Jcctre
pretendiie de fen Père , au Boa-Hotnmet
"qui ne pouvoir pas croire ce qu'il voïoîf.
*> Eh-quoi ! lui dilbit ce bon Vieillard, l'on
" ne fçaîtoùvouseites, t'oneftdaas oncin-
,> quiétude terrible chcux vôtre fi«redeccj^tve
.--„Googlc
tli VlHfuiJitim Frtmpife
,,vos cites devenu , & tout d'un conp vos
■ parouaîUêz en Père Recoîet ! quelchange-
mem? Vosvousùcï, rcpritiiôtrebonTar-
"tufFe, quand il ptaît à Dieu , il touche nos
«cœurs, & d'un Libcrtinil en fw'tun grand
*» Saint. Vos f^avei ce qui efl arrivai à St.
,1 Auguftin , & à St. Guillaome Duc d'A-
j, quitaine. No» feçit taliur umni Nation*.
^ Depuis que je me fieus couvert decefaint
' habit , j'ai tâchai d'eipiai mes péchez fous
** le fac & lacendre, par le ,eune, la mor-
*' tiâcatioti, & fiir tout par la difcipline ; je
f» fçai le fnïît qu'on tire de ce làînt outil ',
,t & ce qu'en vaut Taune. Mertifieate car-
^»et vefiraj. Quelle confolation ponr vô-
tre Père, pour vôtre Mère ; & pour toutp
*laFanulle! reprcnoitlcboiiFermier,p!eu-
"raotprefquedejo'i'e. Hstas! ilt craigtioieiï't
» que vôtre efprit efcarbillard ne vos cauliUï
*) qu^que delaHre , & ne leur âfle quéqnfc
j, honteux eniront ; mais , grâces à Dieu 1
„ les velà heureufemeat trompés : le Ciel
en foit bcni. Ce pauvre Bon-homme ap-
*' pellît fa Femme i & toute fa Famille , pour
**Mrticipai à fa juye & le régalai : mais le
»» R. P- Timoihée prefToit trejours pour fe
*»&irecoiuai l'argent. Quand tout fut -ait
nlëmblai, pendant. qu'on regatoitmondrô-
^le, & qnejegM-doiîIes Maotiaux, ilatj-
^^ vit un de leurs Voillns , qui étoit pu i^ti
qu'eux, qui gitittout le Miltére , & rui-
>* nit nos prétentions. Il nos avoit vu con-
» ferai cnliirable , & me c«chî derrière Te
-n Taillis, ce qui llfit fobçonnai duquafttf?
«fîl.demaadit à fen Vcôiia , d'où vient que
„Mr.
.--„Googlc
„ Mr. de St. MartinlePetc, qui n'étoît qu'à
deux iiciies de là, ue l'avoit pas plutôt en-
**yrai quérir par un Laquais , pour lipor-
** tai de l'argeur , que de li écrire par fen r ils,
»» que naturellement il devoît retenir chci li,
„ & faire tuai le Viau gras , pour le régalai
^ comme l'Enfant Prodigue. A quoi nôtre
Cagot repartit promptement, que fen Pe-
* re avoit été bien aife de donnai la fatisfàc-
" tion à fen Fermier de voir fon Fils qu'on
» croioit perdu, & qui étoit ii lieureufement
» retrouvai. Il liu demandît ; - pourqiiai il
,, étoit feul , puifque jamais les Recolets ne
„ vont que deui à deux ? Il li repondît , que
^ fen Compagnon étoit reBaî à la maifon de
* fen Père , parce qu'il étoit blelfaî à un
',' pied. Qu'eft-ce donc, reprit le Voifin»
»'» qu'un jeune Prcitrequi étoit tantôt en con-
,» fercnce avec vos ■ & que vos avez fait
,, cachi , avec fen panier & vôtre beface *
, dans le Bois-Taillis , où il eft encore ?
* Cette interiogatoueredemontit le bon Re-
'* ligieux. Il repondit pourtant , que c'étoit
*' un jeune Pollulant , qui n'avoit ofai en-
»» trai. Tout cela jetit du foubcon dans l*ef-
j, prit du Fermier , qui concluiit , qu'il &l-
^ loii portai enfemble les cent francs à fen
Père , qui en feroit tout ce que bon liu
"fembleroît. C'étoit le parti qu'il fallait ac-
" ceptai, &^rlccheminj'enérionsdé[rouf'
"fai le Bon-Homme, Je nos en repentîmes
'jbien après , maïs il n'en étoit pu tcnips.
>) Sage Normand après le fait. Le Père Tî-
,, mothée dit au Fermier qu'il alloit encore
„ faire une viiite ayec fea Poftulant chcux
ÏI4 VlnfmJÎMH Franfeife
jjtinc de fes Confines qui demenroît à one
liciJe de là , A qu'au retour ; il le repran-
** droit en palfant pour allai eiifemble cbeux
**feR Père. Ce que j'en eu de bon , c*eft
y* qu'on me dcnichtr , malgré mouai , de mon
n ambufcade , & l'on me lit entrai cheox le
», Fermier , où j'eumes tous deui une bon-
ne lecareîure de ventre. Enfutte je fortî-
mcs pour allai faire la vilite cheux laCou-
** fine du R. Perc , & après revenir prendre
** le Bon-Homme , qui nos attend encore,
n Quand je lûmes dehors, je pellimes terri-
nblement contre le ma'udii Voifin du Fer-
(, mier . qui nos avoit emçefchi de touchai
^, nos cent francs ; & après l'avoir donnai
ie. bon cœur à Satan , je primes une autre
*' route , pour retournai de l'autre cotai de
*'Lion, continuai nôire Qucitc, qui alloit
«trejours rondement fen petit train. Mais
» à une petite lieiie de Lion, je rencontii-
j, mes un Ecolier de nôtre connouaiflancç ,
qui revcnoit de laCampaguepalïàilesFei-
tes de Pâques cheux fes Parents , qui nos
■ voiant dans ce bel équipage, fedoutitbien
'' que c'étoit de nos qu'on avoit parlai dans
** fen Villagej & nos dit , qu'il y avoit or-
>)dre de la part des R. P. Recolets de Lion"
,) de nos arrêtai : que le Dimanche précèdent,
^ il avoit entendu le Curai de fa ib'arouaifle,
recommandai à fen Prône , à fes Parou-
**aiiricns d'arrôcai deux Garnements qui
*' queitoicnt, dont l'un étoit dcguifai enRe-
» colet , & l'autre habilli en Preitre. Il n'en
» fallut pas d'avantage., pour nos faire preii-
„ dre un autte parti. Ce fui de paflài tous
..deux
.--„Googlc
f:
m^^.
.--„Googlc
■ -,Googlc
, ouî'BlfiBire de taBaflilte. HJ
^deox en Italie. Jenosyachemîmmesdond,
^ mais trejonrsenqueîtant, & n'oubliant pas
*de faire des nôtres, à nôtre ordinaire ; co
'* qui nos fit bientôt pourfuivre la fourchi^
'>aiicu, commedes Loups. Unjourquejc
9) filmes queicai dans un gros Bourg ■ où mal-
(jheureulcmenr il y avoir un Convcnt de
,. Recolets ^ qui avoîent étai avertis de nos
fredaines. Ils avoient priât, que fîonnoc
* decouvroit , on eût a les en avertir , ce
" qui fut fait. Tout le Conveiit (brut ia
• *» nous ; & veU tous les Moines & leurs Val-
m lets à nos trouiiès. Heureufement pour
„ nos 1 il y a:voit une Montagne tout au*
près, dont je nos reudimes Maîtres, &au
detliis il y avoit une Forer. Et à coups it
" cailloux fur les Caffards', je les tenion»
" en refpeét & en crainte. J'en attrapi un
" d'une miche de St. Etienne par t'eftomac,
M que je jetis les quatre fers en l'air, & que
,', je fis dégringolai jufqu'au bas de la Mon-
tagne , d'où je le vîmes remportai à fbn"
^ Couvent , par deux Champions , qui étoicift
'" bien ailes de prendre ce prétexte , pour ia
"retiïaide la BataiHe., qui ctoitrude&làfv»
»»glante, & évitai nôtre fureur, carj'étîon;^
}) tous deux 1 comme deui Lions. Comme
,>j'(îtoisen ibutanelîe, jYtois le plusalert-e':
,^j'eu bien-totgagui la Montagne. Il m'etf
coutir portant men panier ■ où il'y avoit
"'pour pu de trois o quatre écus de mifieha^
" dile que j'ivions queitée;' il mefïchîtb&ik
»'5e le quittai-j mafs fi je m'etoîs bbÛjnai
» à te gardai , j'érois étai happai ; outre que
,.jeu'Éto!s pas aflcz dilpos , pour me deP
„ fendre
,u,:,-,zf--„GoOglc
kitf VInqMiJiti»» Frauftifi
,, fendre ,.fans le meore^à bas : les Aflàil*
lants m'fpargnireat la peine de le r^ortaî
"aux bonnes Gents à qui je l'avoîs emprun-
•*tai. Mais men Camarade quoi qu'il eût
**retroufliû fa jaquette jufqu'au deflùs des
«igenoai, & qu'il fût bien alerte, il nepou-
«1 voit pas courir fi vite que mouai Se ne vou-
^ lut jamais quïuai fa betàce qui étoit |;ciiti-
ment garnie , & qu'il fe mît en écharpe*
** ceinte de fa corde. Il y eut un Moine qui
*»l*atcignît , armai d'un grand bâton ferré|';
" l'autre fans s'étonnai , l'atendit de pied fer-
nme; & après avouer parai fon coup, il iè
),jait lin fes quatre quartiers, lui arachit fon
„ bâton 1 & ii en lâchit une volée fur le corps,
qui [e culbutit au bas de ta Montagne. Le
* plus refolu de la troupe , fe prefcntit avec
*' une fourche-fitfre pour revengeai feu Com-
ȕ pagnon j mais le mien li ramenit un fi grand
}i coup fur la teite, du bâton qu'il avoît arra>
», chiauR.F.Etriili,qu'il;l'envoiit,touten(à^-
„ glantai , les pieds contre Mont , trouvaîfon
Camarade au picddelaMontagne; &pen-
dant ce temps là je roulois des pierres , du
*'hauidclaMontagne, pugrofles ^ejen'é-
« tois par le corps , qui en dégringolant avec
*t des lauts terribles , faifoient tout tremblai.
iy lis nos laiffirent donc échapai, & aiant gagui ,
j^ la Forêt , je nos enfoncimes dedans. Je
courûmes tout le refte dujour fans nos ar-
^'rcitai. Après Soleil couchi, nosvimesdc
"loin delatuméedanslaForét, &j'y fumes
^rout droit. C'étoient des CharbonnîeK,
»» à qui je fimes entendre que j'étions égarés .
j. Ils nosdonnîrem te couvert, & du forma -
«gc
u,:,-,zf--„GoOglc
M rWfiotrf Je la BafiiUe. 1 1^
n^-gè de chèvre : heufeufcmem j'ayions en-
'■ corc du paîn , donc te leur donnimcs , &
■** ils aToieiit de bon vin , dont je butnes à
'* gogo ; j'en filmes quitte pour un chapelet,
*> que je aonnimes aune petite Fille d'un des
»» Charbonniers, qui avoit prêtai fa baguede
», Hans-Carvcl à Frerc Ttmothtfe , comtnfc
^j il me le dit après , & dont je le grondfs
, afiës, pour ne m'en avoiier pas averti pa-
* eût. Dès la pointe du jour le lendemain,
*' après leur avouer donnai nôtre benedic-
■»>tion, qu'ils reçurenttoos à genoux ,' un
M deus vint nos mettre hors laForét. Je nos
„ echcminimes vers Rome , en demandaiït
,, la Charicai, mais on nos avertit de ne pas
allai à Rome, parce qne , comme on aN
" toit ouvrir l'Année du Grand-Jubilai en
" 1*99- o" arrêtait tous les Bandits & Va-
■»» fiabons ; ce qui nos fit peut , & nos fit ti-
» rai d'un, autre- côui. Un jour de la Pen-
»,tecÔte , bon jour bonne œuvre, jft
rencontrimes une jeune Femme qui É~
toit groilè , & qui s'en ail oit à Veîprcs.
" yVoiTitôt fans fechon le R. P. TimotJiiîc,
»" qui s'aperçut qu'elle nos lorgnoit tous
■»' deux avec convoîtife , li demandit la
>) courtoifie. Mais elle nos fie entendre ,
,, du mieux qu'elle put , qu'elle ne pou-
-voit pas , car elle avoit communiai ce
- jour-là. Cependant i! la cajolît ii bien',
"car cVtoît un bigre de corps qui entendoit
'*bien fon métié, qu'elle nos remenit à ii
•» Maifon. Elle -voioit deur jeunes drôles
vt \Aca atenes , & Ii fur tout efi un des biaux
^, Gardon! , qu'on paillé rcgtudai de dcuic
K. yeuï.
.--„Googlc
,,ycuX', & comnc vos voies « jene lî e*
, cède de guère. £llç,tiosfit c^jendce ^'ÎI
*<^IIoït mont:» dans ua Grenict à foîa, t&
**ddrus de l'ttablé aux Vaches , où jepjrf-
*> ferions la nuit , &qu*elle nos y aporteroit
t* bien à mangeai & i boire j car fî, Tcn Mar
>) ri noi d^couvroit , il aos étrîpcroit tons
j^ trois. Je vDUlij doncioontai le premicT
an Grenier , pendant que le R. Père s'a-
** mnfoit à caieuài la Villageoife : maïs mal'
"heureufement, comme il faloit montai A
*> Grenier , pài dans, le Râtelier , qui étoit
ntoût vermoulu, &.quejc n'étois pas dç
.„ plume, je fis tooitaiteRatclicr, Kjetom*
^bis avccque fiir les Vaches , & fur Frerè
Timothee. Heureufement que la Fumel-
le que mcnCompagiionavoitpuuflctecon-
** tre la muiaillc, n'en fut pas atteinte. Ce
»* fut fur le Bon Pcre que lomhit: le pu pe-
'j>fant du faidiau, & il en fuf quitte pouia-
^y ne jambe demiiè j &. uo bias to^it écorchî.
^^Jé crions tous à qi}i mieui pi'cux , IcsVâ-
' , ches & nos deux, & la pauvre Femme é-
■ ' toit i demi-mot^c. Tous les Voifins quï
**dtoit:nt reHez dans.leuiE Maifoqs accoo-
»» furent auTiatamar* , & nos prenant pour
,> des Voleurs , nos .vouloienî . aObnunai »
tt ce qu'ils érQÎent fait immanquablement ^
^fans la Femme,, quîleurâ^entendre, que
^,jVitons de bonpcs Geqts, quili^vionsde*
* mandai du lait ch^ud ; &, que voulant.(EW-
'*re une Vache, elle s' étoit épouvantée, &
»'avoic fait tomber le Râtelier, fu ellç Âfa
» nos. Ces bons RuÛres p^flirçnt de latu-
^leur'à la commiretation , îls.eHyoyef.euc
que-
êM PHfJhh-f Jt U BdJKUi, if >t
i, rîr le Barbierdo Village, qniittSt à'Vei<J
ti.pres ; <)ut Ik&sâifouavouît, que censeur''
^ re pafToît là cap&cinù. Qac Ift chnTitle dft"
,1 Rcverend Pete Aoit deboirtev&rqo'it f*-
», loit abfolumoit le poctir à ooalongne-, '
„ qui ctoit la Ville la pà proche-, où l'oa'
„ poorroît le medlcftoicntcr. 11 ae li en'te-
,i Doit pu de rire
Comme il en éEoit là , nous entendîmeï^^Is-
carillon des vcrroux , & Ru entra qui nod»-
sportoitnos oïdinaires, & celui deMr. l'Ab-
bé à paît , qui étoit û exigu , qu'il n'y aiuoit'
pas eu d« quoi rafT^ûer un Rat bien afiamé^-
âvecune bouteflledeviui telle qu'on lad<KW'
noit à Mr. Jacob le Brethon, qui ne tesdit'
pas deux verres , & du vin encore non;^po->
table. Mr. Litick avoit comtnaitdë à Ru de
lui apporter d'extraordii»ire,poarfbn argent,'
un bon Chapon , & deux douzaines' d*Al~'
loiietes , qui avec nâtre foupé fuppléérent à'
celui du pauvre Cwé, à qui l'on apporta tom'
fou bag^e, quiconlîtloitaujudaueorpï'qn'ilt
nous avoit vaoté , en un périt portaei^le ,.
dans lequel, il y avoit cinq ccdicts, & aa->
tant de manchmes^ & fou Brcviairc. Leiif
jde Mr. le Brethon étoit encore dans nôtres
Chambre, dont on lui ditdes'acconunoderv-
avec denx fiiaps que Ru lui donna. Qum»
le PoFte-clc& eut refermé la porte. „ ^el-
„ leconfuliouMcfBeurs, nous dit ndtreKuF-
„ tauc, pour un homme comme mouafi tia'
„ Preitre Titrai ! un Gurat quî a Cba^d'A'-
„ me! de le voir traitai comme nn Oredinl- ,
,, anmilcrable! J'ovoiiey que quandJ'enteR<:
•dis. le Titre demeuré charge d'iUne ,- qu'il
■ Kl fe
u,:,-,zf--„GoOglc
MO VI»q*ifuiom Framf^fe
fe;donBoit spiès la Confeffioo qu'il venoît
de nous faire , je ne pu jamais retenir ud é-
clat de rire qui m'échapa. Il en rougit ; Se
pout reparer mon indifcretioD , Je lui dis:
Mr. l'Abbé , fi vous avez eu charge d'Ame,
TOUS vous en fites bien aquité : preuv* vôtre
Coultac la belle Babet de la Feuiltée, & Tes
Aflbciées. „ II eft vrai, me dit -il, quej'ai
,t eu la foiblcflc de donnai dans çu maudit
„ penchant, mais -c'a été celui de Salomon,
„ & de tous les Grands Hommes , & dans
„ la colère , je ne fçai , fi je me fcrois pu em-
,> pefchide jouir de ma propre Sœur : pour
„ mes Nièces» ma Sœur a eu grand tort de
„ me ks confiai. Brifons là delFus , repris-
je, Mr. l'Abbé; je n'en veux pas fça voie da-
vantage fur ce Chapitre ; feulement je puis
•^ous affirmer, que ce n'a pas été , par ce
crime deffendu par la Loi , & détefté de 0ieu,
que Salomon , ni fes ftrnblablcs , ont mérî-^
té le nom de. Grands. Laiflbns là vos Fem-
mes & vos Filles de joie , & ne fongeons à
prefcnt qu'à bien fouper &• à étourdir nôtre
chagrin; & ^rèsfonpé, fi vous voulez bien
m'achever vos agréables Avantures , vous
me ferez un fignalé plaifir. „ Taupe &iin-
,1 que; je le veux bien mordiére: buvons &
„ rejoiflbns nos , des Femmes je m'en
w gauberge ; je vodrois qu'il n'en fût non
^pu que de Merles blancs: après je vos con-
M tcrai mes Avantnres : mais il y en a au
„ nioins pour pu de trois jours , lî je veuï
„ tout dire. Mr. Linck le regardoit avec
horreur & indignation. Je fis ce que je pu,
pour lui foire quitter fon air foml»e& trîfte.
Je
u,:,-,zf--„GoOglc
ou fHlflolre Je la Bajiille. Xi\
Je fis cent Contes à plaiflr , & rejouiflànts i
mais moins gras que ceux de nôtre Pitaur,
qui le faîfoient éclater de rire, Ct bon Curé
affirmoit „ fouai de Preitre , que fi jamais il
„ étoit Evéque , comme une habile Egyp" ■
,t tienne li avoitprédit, ilvoudroittourjours
„ m'avouer à fa Table. Mr. Linck lui dit de
prendre garde d'être Evéque de Campagne,
& de donner la benediâîon plutôt avec les
pieds qu'avec les mains. Cette prediftîon ,
dont raccompliflemcnt n' étoit £as incompa-
tible, avec fon mérite , étoit trop fine pour
lui , pour qu'il pût y rien comprendre.
„ Mordiére, dit-il , fi j'étois Cardinal, Ar-"
„ cbevcfque , ou tant feulement Eveff^ue ,
„ je donncrois ma benediâion des mams ,
„ des pieds & de tout le corps : je n'en ib-
„ rois pas vilain: morgicnne il feroit bon a^
■■„ vec mouai : je ne fuis f«is chiche de Lard,
„ quand j'ai du Cochon. Ma dernière Cu-
t, le bon An , mal An , me valoir bien au
„ moins cinq cents bonnes livres de revenu,
„ & fi au bout de l'An je n'en avoispasun
„ fou de lefte: au contraire, il n'y apas on
„ de mes Parouaiflîens à qui je ne doive au
,, moins une Piftollc; &ii ma Famille aroit
„ voulu me croire , je l'éiois réduite à 1!^-
„ cuelle : mats un bon mariage paira tout.
„ Que je fois Cardinal feulement un petit ,
„ pour voiles comme cela ira: comment
„ diantre je ferai ciaqnîr mon fouet. . Vous
«n prenez affés bien le chemin ,- reprit Mr.
Linck. „ Je n'en luis pas fi élotgni , peuN
„ être, que vousiecreiriezbien, dit-il. Les
„ premières teites Couronnées de l'Europe.-...
K ] mai» '
u,:,-,zf--„GoOglc
A!» L't^^HJfitifM. Frgnfùife ■
„ .raiàs mot. Je nHM^en» iooppç & je me
^ taj^ ,J'a<linii;oi& cette affiuence d'itnpcrtî-
^iticçs dont il le^prguott , & la nunicredi-
ivertilQuite , dpntil I«fi dtbitoft. Si S^tcho,
■^ifois-jk:, A éU rEcii)«çr .du CbevalÏCT i la
.Xrifte-F'gure , .celnitci en jdoit toetout au
^oins l'AumoniQr'i, & Don Quixote te fera
,ArcI|evéque d'-uoe Iflé en Terte-ftrme. J'é-
.tQÎs cejoiii d'avoir, un £,oman Comiouctont
■ yivaiit, dans Je temps que Mr. Lincb «i é-
.{oîtdefoU; &.cncâa,'il av»jc plus de ni-
iba. qjie qaol, par ^nerpri[rpiophetiq.ue; cv
.ce Ki)âre4a9t.Uf))it«; ^m^ fut -une peine.,
jSe ua tort, cppJtfUrablf par £ï qvlioe. Avec
.fts nuiuér«sj|ïoâîéroS'& lourdes, lluvoicuD
artiâce dinboli^ue. U^icû fourbe, méchaat,
vindicatif, ^ d'uaorgtieil iartippôtttblc;cat
^ooîqu'il £&t lie la deuiârc csmt à.a PeuplCr
f]£tii dans la ^iJî)i]£ , & fans «stcsftç iéi^- •
jiQin, (juiud il parlott de^i'Ajnitle, ilfem-
,4iloit qu'il ponvoit compteraiï «leHus de f«-
Ze quartiers de Nol>Ielië.. 11 ôtoit fon cha-
'.ff»a. toutes les fais qu'il {rroBoaçoit le BOtQ
r4c Mr. 6m$'d'OF:rfonj&c«a-Frere,&deMr-
^avet, Beau-Frcrcde^nFrerei cependant
vj'ai ^ô depuiS' du nonuné Pigeon qui étoit
.de l^niviçis ,, & ^\ .cow>oiQbit.triès porticu-
JîéieBieattoutclaf unlllfl.de Sorel, quecV-
toit de laCsflailletpiKede la plus vile &<je
. Jji plus ;honteulè ; que «c Mr. Bras • d'or >
XfUif vaBt^,it«ooif M Cabaret borgne à Lou-
.vicrc, QÛ peodo^potiTQnfejgDe le brat-d'or,
.^(oiuce de fa Seffipeorîe. Je demandois an
iaur,à ce bon PJëtre, ce que.c'étoit ose ce
Il^.I^vet, 4Qi».tl âu&il;.fanDeT.IeNoin)î
Haïu.
.--„Googlc
haut. yy. C'ed pçut ekrc:, dit-il , ondes pu ri-'
I, ches Marchands de Paris:, il demeure fuE
„ le Quai de l'Ecole. Ç'çfl Ji qui a le foia
,', de faire déchargi tout le boit qui vicn^ de.
^ î^ornÙDdïe par la Semé ; & il tient une.
„ Cbambrje à li tout lèul dans une. Aubetve,
„ où tous ceux qui viennent à Paris vendre
„ leor bois , vont prendre lenr repas : il a.
,^ condit li même pendant très long t^nps
„ lin des Chalants dans quouai no voiture.
-,( le bois fu la Seios. On peut juger par l'E-
loge de ces paiticuliut , ce que pouvoit être.
le total. ^ÎJuand il ie mettoit çn colère , il
Jtoit tout furieux ; il n'y avoît point d'ia.u-
res les plus groffiéres, &4'ordures&lesplus
infâmes qu'il ne vomît. Cependant il difoic
à tous moments qu'il avoit fon cœur fur le
6oïd de Tes icvrcs : ce *iul me ut Is: clirc uh
jour ( que je ne m'étonnois doi}c pas poUf
quoi r& l?puche fentoic ii ni^iuvais. £n effet
elle étoit d'iine puanteur 11 infupponable ,
qu'un joor Mr.Liacl; s'évanouit en luicou*
pant la barbe avec fcs cifeauxf & pour s'en
excufer , il difoit que , cela Eie liù étoil pas
naturel , mais que c'étpit un refte dé quel',
ques petites galanteries , & que fans rien a-
voir bazardé àlaX^otteriei il avoit eu le gros
lot. Quaud il vouloitaÊnneTquelquemèn-
fonge, ce qui luiarriroit allifs louvent, ilfc
levoit promptemcQt & alloit prendre fon
Bréviaire , en dilànt „ fouai de Prcitre * .
y, çonime j'fû les deux mains fïr çu Bcevlai- .
,t rCt celaeit véritable, oujeveui perdiele
,1 caraâere que je porte.
KottS quittâmes ia Table , où Mr. Liock
K if: " . s'en-
M4' L'Imfmifititm FraMfoift
ï'eonBÎoitd'cntcndrefrsfotifts; &aprèsfca-
pé, aïaatptts nu lxniteille& deux verres bien
rincei uprès d'nn bonftn; je le priai deme
lenir fa parole, „ Très volontiers , dît - il ,
y, mais faites mouai fcniTenir oà j'en étions
„ dcmenin de mon Hiftoirc. Vons étiez ,
Jui dis-jc , vons & vôtre R, Père Eftropié
chex vôtre Paîfànnc, fort cmbarafFez corn*
ment vons ponrtin le voitarer & le fbivre à
l'Hôpital.
„ JufleDientt dît-il. Qaand le Mari delà
„ Femme fat revenu de Veipres , fçachant
,1 ()ue le de(â(lre étottarrivai dans fa Maifoo,
,, & par la faute de fa Vache > du moins y
li avoir îl de la corne au fait, il eut la cha-
,1 ritai , pour nos recompenfaî de celle que
., j'avions voulu aToiicr pour fa Furaelle ,
„ de nos cherchai une Liitiére , & lî mcmê
„ vint conduire le bon Religieux àlHôptal-
„ deBoulongne , qui par 1c chemin crioit^
„ comme un Diable, &liaffirmoit pourtant,
,, quand fes bouffées li donnoient quéque
„ relâche , que fi-ïôr qu'il fcroitgneri, il le
',, retourneroit voir; & il lî promctioît cent
„ Méfies pour lé iccompenfai de la peiné
„ qu'il prenoit. Le Bon-Hommefecroîoit
„ déjà délivrai du Purgatoiiere , par rintcr-
,1 ceflîon du Bon Saint Timothée. A la par-
,,-fin je parvînmes à l'Hôpital de Boufogne
„ , fur les dix heures du foiicr. D'abord quç
„ le Chartier c«t dît que c'étoit un bon Re-
„ lîgieui qui étoît blcfîai , & un Prcître qui-
„ l'accompagnoit , onnosouviittoutàThcu-
„ rc. On m promptement venir' les Chi-
„■ rurgiens ., qui lui firent l'cçetatioa parfei-
.-„Goo.jlc
guTHiJIoire de la BaflUie- »i J '
,1- tement bien. Apres quoi on me fit va Ht
j, auprès de celui de men Compagnon , le
„ R. P. Timothéc , où je nje coudîis , sçrèï
,, avoiier Iplendidemcatj foupaî > & auR.Pe-
„ re on H donnît de bonBouillon , & deux
■„ œufs freiï. Mais il peofit mourir quand
„ il entendit que les Chinirgieas defFendirent
„ de li donnai du vin, & qu'on eût à H fat-
„- rc boiiere force tifaane. £aân je demeu-
„ rimes là près de cinq femaines. Mais une
,t des bonnes Sceurs Claires qui avoicatfoin
^ de-mouai& du R. Père, devint amoureu'
,,-Iëde li, ce,qui mit qnéque petit empéclie-
M ment à fa guerifon, & 11 fit prendre pude.
„' ptaifir à l'Hôpiial , où rien ne nos manquent»
„ par les foins de la boDïie Sœur, qui -me
„- fie quéquc petite part de fcs bonnes gra-'
„' ces , û bien qu'elle -& nos /avions tout'
„ à gogo.'- -
„ Quéquebicn que'Je'fufiîons, étant gras '
M Â rebondis comme des Moines, il en fal- ■
„- tut fortir au grand regret de laBoune Sqeur
„ Claire , qui fe tuoit de dire au Bon-Frcrc "
„ Timothée , défaire tourjours fêmblant de
,,-bokai plus bas. Elle nous dotinit eiv Cot*
,1 tant gentiment du linge , & un biau qua-
„ iruple d'ordabon Dieu, ou plutôt de Sa-
„ tan , car ce fut entre nous la pomme de '
„.difcordei leR. Pcrelevouloitgarderpour
„ li tout feul , dîfant qu'il l'avpait gagnai à
„ la lueur de fan corps. Et mou^ t quoai ?
„.lî difois-je: je pcnfe m'étre alfés bic;i &c- •
,,'quJtaî de men petit devûUer. J'en vijiiG»
„ es rq>ioches.. Je li dis , que j'^tois bieit-
ji tiiulheuieuz d'tvoUer quittai mes Etudes,
K s- .. fc-
.--„Googlc
jj.A fenla inft Fortune , après avouer oun-
fj goaï tout meo petit fait-, pourfuivreuniaT
^ par Vaux & par Mont. Que j'^tois com-
" me le poiflbn- daas rî«i chez Mad. Plot
» de Sultjoui quand it m'eiLavoît tiiai : ^ue
!• Ptns ïi je Arois 4e l'heure c^'il e& Cui ai
>, d'une boni>cPaFC^aî£b,àboidie'<)«e veux-
ta, oà fait, ootBme j'Aote, jeIêrotsqiu«
^ û Makrc de cholfir la'fubdlc^de mes Outil-
** tes pODT Bies meatiE pbifirs^ Tn ne fera»-
*> JMnaJS 4)a'ua fat, rqxit-il ,. dis monai^
» tourjours chinniQ Aifiuit ,. de testes no»,
»• bmaesAventures qvl nos font arrivées^
^> en as tu pntcnrai une féale ï la. comiou*
^, naotsi t' Non , H di«-je, mais û ta as pro^
curai des b(»tBes , ta diabte de tcite nos 3t
** attii«i toBtes les mauTÙfes. Tais toit coq-
" tinaa-t-il. Si je te qui trois , tu moorois de,
'«'faimj comme an iipbecile qnetues- Mais.
ti poH^ac j'en fonuiws aux reproches > dib
^ mouM on ^eo- , noo Ami , qoi eH-cc qaî
m'a eilroptaL que ta bnualitxi ^ & ta mal •
«drcfle? &i;s toi qoel plailir?. & qui te.
'ttuveit ptocorai h étù, t»cn. i touai I faî'.
*> re.dce coinparûfon& avec un Gmtil-bgnv
, *> me comme moaai ! Mordiéro je fuis,
ijdans les Ordres, repilii-je, & oa Preitrc^
> quéqae petit qu'il foit , fijt-ce le Fils du.
,^ Porcher du Vllage , a le pas àcnnt fboL
S^gnau dftFarouai0«. Situleprendspar
*» U , moa Ami , dit Taotrc , je ptwte iW.
**MtdeRccalet, àquitudois duicfpeâfSa-
M t«nt qu'à ma P^rfonne. A quel titre iç.
H-pone ta, lî4i$'je,&<iaaiulcej[i:ioû-l^>-.
timc:
.--„Googlc
J
^ .- -.-
* I
^■%a;
ii"tflhè{î^t»depiiis quand as tu appriftsqae
-^îttrfLMiJmespaflentdevant ïcsPreitrcs? de
•^ijalfithM iFr«lanipiers ! de bons pouiHards!
*'<He biS^tfx f^èdins ? dès Prélats bicQ relevés,
<» jfertir'firèndre'lc pis ft dec Génts càmmr.
j^niôUâi! Je ttpreflisqiieçet habit qoetuvari-
i^ testant. i!c qui t'a déjà tant fait tftiHlli, te
■■'tïiJt'tténmfeiinjdtir, & tu nct'endetfaisau
''■Wi *fe.:''CHcvaI de Carbtte , me dit-il (
î'!Ît=i(e*pk!ttrpa foiiffrir tes impertinences.;
«îfëh-dSffiHècda il ferait fuinouaî; &
*'«dfiâi'^ae"le''recpvoueF les roings fermei
j, dé W'bfihnt minière. Lé Combat fut ni- -
jj'tfé^ il jftoitfoîT iStmoùai itont; &ânsd<S'
' CflSf ^ilSs^Jâi nos lèparirent.; jenosferîqps
'■^W'irràtfral-lèsîeuxde fa teîte. J'étioa
^wH tr^'ch fang.par le nci & par làbou-
vgF»":fe '«■^tjjs caflàiioutesks dents, &
#~fl'ifi'dvôTf Btitifi va ée\i au beù(c noir. Les
ji;^^S' dipiià flE (ié poing, trottoient dni&
jc'éiiiiâ^ ôttcraiihVtenâoitpas l'antre. En'-
" finjè-noîftF'ârimcs, enhosdiraTit mîileîn--
'iures , &;u>s donnant autant du nialedicr.-
*'mftS. ' Il -av6lt pourtant le bon par deverç
*»1î, I^iiibd^pïcà tèbîdKc.. Il fiitdèfen
ïrftWâi, a- mouâidumien; Là piÉcediiqua-'
^ffè'piffollciftitftenoit bien ail ccéur. Ge-
■"ipt'daBnt, comme je fais la bontai même'
„af niott naturel, quand macolere fiitéta-'
pôîft, & ma bîle refroidie , j'eu bien du
'ij^étdécequis'étoit pafla ,' & l'amitié
* t'einfforfoît fur lahaiue. Cominent avàuer
''rompu ; difiSis-jc à parmouai, avec unHorii^'
»y<nedé cttfe confeqnencc, &avecquij'é~
^tois cbhjolntpar des liansfi teenfonne/i:
K 6 „Js-
u,:,-,zf--„GoOglc
hS" Vlnqmfiùtm frsmfMft
, Je me donni le tort. Ed dïèt , ^ li ea-a-.
vois trop dît. Pendant que j'^tois èa Ita-
**lîe, je voulu encore voir quéiiues"Viiles
*- des plus fameufes ; & cornme.on.cft pa
n charitable en.ce^ïs là cent fois^^'cn
M France, car c'eflle Pais deCocagneppurJev,
» Pauvres , fans façon j'allois couchidans jes ,
Hôpitaux, qui s'y rcncontrcnii çhaquebQut
"de champ; oii j allflis aux PortesdesCon-
'* vents demandai la MeneiJlre, fiiïtoijtàla^
»» Porte des Bcaedjâins ; ce. font d,e Ix^yes
n Moines, Les Capucins itout, tous pauvre&
»» qu'ils ibnt, font les chofes çenereufemenr ,
^ & les Cordeliers ne leur cèdent en rien de.'
ce cotai là. Mais les Jefuites ce font des.
" Gredins , qui ne valent pas plein leur wp».
** du eu d'eau bouillante, desPyratcs à'"!**-
'î coEuts de roches ,, qui l^ifleroient moàrir
i>. un Pauvre à leur Forte^ &^te de. ]i tendra
MUD morciau de pain ; itstiedonueroientpas.
,, lîau, où ontcuitleursœofs. Jati^âis je n'en ,
ai pu arrachi une gueuUc., & lî jeleu^par-
** lois Latin comme Ciceron..
'* Unjèur "que je fus, pour ,d(ïnài)dai Isi-.
»îcharhai à la porte desCapiicinsdcPii4qi!ei.
i\\'j trouvi l'Abbé de St. Martin menj^uvre;
», Compagnon , qui étoit là pour le âiëme.
^fujet, dans feu habit deReligieux. LicPor-
,' tier nos fit entrai tous deui dans uae petite ,
'Sale bien propre, toute tapiflïe dcScntea-'
"ces , & pendant qu'il fut queiir jiiiPerc'
" pour nos tenir Compagnie, & qiiçDOsfu- ■
j'.mcs fculs; leboiilàngiieputiheptir. Kos<
M velaà nos fautai au cou l'Un de l'autre ,.ic:
tÀ pleurai à ^ui mieux mieux, X^: Père cjvî-
^...Cooylc
tu l^Hiflùire dé la Baftilh. iv^
n àràTit'& qai H&âvlttous Cn larmes ,_ nos'
„■ eii.dEmimdît !e fujet. Nos H dimcsqae nos '
„:^Ôîoiis dn mértie Fais , que nos Dos con-
,tiim)flioHS paitionliércniCTif, Sqne TétatOiï'
^;(no« nos v(rio(is réduits l'un l'autre , avoif
^ pitovoqva! nos larmes. CelafirunfbrtbOil'
„ eÔèt } j'en fuBitt mieux irairéS , & ïe P.
jjCapudo-ftftnosquerir Hn petitKlltr, pdar-
„ -allai pteiult«jChoo» letir Agïot , unEùdat'
^ ponrnosaidsi i-aos conduire. ' ' ,*
. „ No. vel» r^attfés mieux qne jamaii :■
^ m^s'cene Ait paspotirlong^temps: Jene-
„ pouïois m'empêchai de lipaïlaiduquatru-
,, pie: il mereprochoit Ikjambedcmîfe.En*
„ fiftjeiiiOBeiitriebatiiTies encore une fbuais,&"
,, je BOS-ftpuimes ponr ne punosrcvooaii*
„ on Italie: Je iv'en aVoii point entendu par*
„ loi, jnIqtt'aoMoli-de Mart'del'AïnïOO.'
^ qu'il me vinttrouvai àLerydansmonPrc-
,y bUairc fcn habit d'Abbé fort propre : ce n'é-
„ toit'pn Fr«e Titnethéejc'étbitMr. TAb-
„. hé de St, Martin gros «omme, le bras. Il
,^tBep«rouaiflbit biênpofai & revenu de tou-
,j t£S.ilcs foUts^ ïldeminirit quinze jours ou'
„. trois fttnaiiwtciheuï moiiai , où; je lî'fis-
,, .pan "de^ qaaïro o cfoq-demeu oomiesaVan*'
,^ races, pOTiT renouvelai la cotincnflànce. Il-
„ iiie.coiitit,qu^rètnôtE£feparation, quand
„ il eût. bien rodej' par l'Italie & étai I Ro"
„ me ; il s'âoit daiinai -i un bon Homme-
^ d'Htrmitc pn>ch«-dé Savone ; qui ravoit'
,^ ptiqs en giâadti amiité : mais qnrlîî s'en-''
„ notant de ce métiof^e- coquin , avt>ît'vô-;
,^ kï rHamite , lî aVtrit emportâî tout ftn ■
,( arK6[m.^& «ïuit ltlonta^ fur 1k Mille gucT-
'* ° K 7 tea- -
u,:,-,zf--„GoOglc
„ teufe , s'en étoAt allÀî tWH lîM Tetre 1^-:
„ voit pu portai. Qu'»pris quchui il s'éloit
„ fait Fteitre i Albani. . Qit'fia ifiriEe il étent.
,, revenu chez li, où le» PurAlUS rtvis de le
„ voir li changeai, li VQieiK4btciHi-nBboih
,, Bénéfice , avec lequel il.vivoit ftvt tKMio-
„ rabletncnt. Mais que. nAlbeûreuftineat
,, aiant étai voir de« Keligiewiès^ik foa vùx-.
„' iînage, une étoit dçveaueamourcnre deJi ,.
„ qu'ils avbîcot trouvai lestnaiensdefevoff;.
^ & que par haiard e(leétoit-(ieVeau6nD£Ief.
„ & qu'oa difoit qu'il n'avait pas nai à fa-
„ groflcfle. Qu'ii avoît étai obligeai de dc-
„ campai, julqu'à Ce que lès Patents cuilciit
„ accommodai la choîe ; (t mi'il ealèrDit-
„ duitté pour quéqiifcs Moi8-«e:&eBiuiarei
„ Qu'à lavetilr il avoit}arai dc r«llalç■i■à■
^ feS fiedatuest &dei(ivretIibf)iiaJU9Ha^-*-
„ me. ' ; ■ ..■.-.■■ -J:' ..
^ Poor mouai, jequÏEi l'Italie «jqcrcdn.
„ àLioDt ta- vicariaot , c'elîi.dtrecDflUiiit-
„ , cheài tous les Cui^s , dont \ts piicWiéaT
„)bles me dônnoient lapftf&db'i Qtopil jo-
^ paiToispai des Villes oâjl y, »V^ ^«sfio-/
M jéges l'jj'alois poiiflài. uo^ nfgtaïKaà &'cela^
„ me Valait ^ourkws ^ftéquo ebofe-.' Eon-v
^,f^ant par Padoiio i. j'argmnciHis. i «on
^ oulmaire , & je pla tagt att RegieaK & -MX -
^ Ecoliers , qû'i^lsme firent nheCjftiSte i^i:
„ moniit àunePîlioie. jen'doHleispasfionit
„ les. Couvents, & k^ÛéfitatnaiesAltbtri,
„ ^ de lïtiige- £n ffiriva»! à Xâok, je ^s ,
„ tout droit , ïiuu:%P».»''ctiettx Mad. Plot,
„ mda ànc^cimê MaitiëfEq. £Hc:iinr(rit<pnAS;
^ UB autic FKceptOHTf s»» éouftoerce nY->,
i ,. toit-
.--„Googlc
aaFHifhire JèUB»fiSU. tyt
M to«t qu'un Afae en companùfonderooiu^
», OD le toit bien tôt dehors. , poor «^ faire
M reiuiai.Al»Mutieirçni'obtintdeMr.l^r'«
„ cbcrdquc un «xrist pour si'&laî £^'i^ rece-
^ TÔir Pieitre i St. raui-Tri)îs-Chati«it ,
M piïceqiK la chOfcficQbit, Attendu^uelft
„ Carc d« Gaerin ■ dans la Fiiadpant^ de
jt Dombcï étott vacante j & comme «lie €-t
rt toit à la nomioatioti de Mad. PlotçUen'i
^ Je □e'peuxpaflWfoQS^eiicetisâfiiedia.
^ le de biefi drôle qui m^aiivit^ en tevenaat
^ dcmefî^cordoDiialPreftrc. J'avionïphn&
f, des Maiettcs, d'autres jeunes. Prcitrcs Se,
1, movai poar nos en retournai ILf on.. Peai
», dam que je levions cli9|nDâte.i nhCi^ian
„ kC BoT];ne qui ^toit fa ndtiechçmîn, des
„'Coiirtaut5 de Boiuiquc de.Lioo , qui-a-.
„ Voient des Fumeltes avec qn'eux y .voqIiit
„ reiit prendre nos Alkes y pour les numtal
r, defibs^ diiànt qu'il fidloit iitire lacouttoU
n lie aux Dames. J'avtons paiai nos Alaxet-
M Us y & il m'éioit bico lâchai àe tevenJr à
,• pied à lion, pendant que ces Diolefleif^
M ïèrpient pavantes fur nos Afnes. Je leuj^
tyiiùaes. vfoe.}t n'en ferions rtiAi;q«.^4i
^ 'ddufl £ttiff«à , & que fi iisvonloieDtniOiv<
„ toi letiti! Dames , ikpOavoieiU leDi.lou4
n das Baudets T CQitune nous. lU vonlurCnj^
M prendre . nos montores de force , , en nos
„ appeiuts GictStts, JSlal-^nflS, & milànf^
„ Ùes. J« nos eatrcbatimes : Us miorciK lié-;
^ pée à la main. Un de mit Prcttrc&ntiLiùc
H tuâ: li caffit fe nVpée ,. étda'tionfoik L^
n. en tûicbit.TivaiuatlHoicil]cfc Cdamf^
.-„Goo.jlc
a^% L'Ixfuifiti*» FrOKftifi -
^ mit le ventre an coeor: j'ca entre-|mas do'
^ qat paroUIbk. le plus animai ; & du premier
t, coup de bâton que je ]i porti, jcHcaffiun-
,^ te^s, pour 1i apprendre à écoutai uix por-
», tes ; &: je l'éiaudis au biau mitaada che-
„ mini oùilccioit, commeun perdu; &!e»-
^ Fnmelies étoient comme autant de Bac-
,„ chaotes ,^qui harloient comme des Mege-
„ res. Je nos échapiroes , en remontant fur- '
„ nos Aûies. Les Courtauts voulurent nos-
„ &ire des aâiures à Lion. Mais Mf. l'Ar-
y, chereftfue étant informai du fait & làchanc-
„ que c'étoït, eox qui étoieut les Agrellèux ^
y, il Icut deSbndit dcpaflài outre ; & le Cour-
„ tant eut le bras calFai pour fon compte.
Mr. Ltnck'luidit, que c'éioitlaime bonne
»âion de grâces, pouc bénir Dieud'avoir été
introduit dans le .Sacerdoce; queSamucI,cu
pareil cas^-n'en aorait pas iaitmoias. ,< Bien
„ attaqua ,.. bien dftfendn rqirit vilement-
„, l'Abbé. Je fuis bien certain que' li on avoit'
„. voulu démontai Aton même , & tirai l'é-
^ {>eefus Ji, qu'il ne t'étoit.pasfouttertlànB.
„ montrai qu'il avoit d^tfang.aux oiKles.
„ Tancia je chanti ma premi^ic Meflè i^
), Guecin .dont Mad. Plot ât tons les frais ,-
f, & meublit monPrdiitaire r comme laMai-
y, fon d'une Mariée , & m'y donnit fesEa-
^'f^nttcn peniion; en me tbumiâknttoutes'
,,.le$ ProTilions qui m'étoient néccûâires ,-
,-,.pour commençai un ménage. Mais m»-
„.manraife étoile ne m'en laîffit pas jouir
„ long temps. C'efl le p!us bisi Pais qu'il y.
^.ait fous. le Ciel, &qu il ^rottlesmeilleuz
^,Tiiu du Monde. Le Sexe cQ^ut des pv
.--„Googlc
*« rHifloire de la Ba/IilU. 133
», gracienx, maïs il a une Janguecommettar
», tout aillcut's. Quéques Femmes revclirent
»; il Icnrs Maris les propos que je leur avofs
>, tenus dans le Confeffionna?. D'autres s'a-
t, perçurent de la ftmiliantai que j'avois avec
t, leurs Fumelles ; fi bien qu'ils me firent une
», fi cnielle Guêtre, jufqu'à m'aflîegeai dans
>, mon Prcbitairc , que je fus contraint de
j, quittai le bénéfice. Outre que Mad. Plot
ï, rebuttée de mes fredaines > m'avoit retirai
», fës Enfiints , & m'avoit abandonnai. Que
■« &i*je mime fi elle n'animoit pas mes Pti-
i, rouaiffienscomremouai, furquielleavoît
,, toute autoritai , parce qu'ils étoient ftï
„ Vaflaux, Ce qui eft dé certain , c'eft qut
I, bien loin de me protégeai auprès de Mr.
„ l'ArchcTelque , elle me l'avoit mis à dos.
», Ajoutés à tout cela que mes Parents, bnv-
,, lant d'envie de me voir Preitre & dtnteit-
„■ dre m» Mcflfc , m'avofent obtenu de Mr. le
,,'Càrdina] '<fe Bouillon la Cure de Ledan i
,t deus lieiies de Lery. Un biau matin donc
,, je vendis tous mes meubles , que mes Pa-
„ rouatfficnS achettrent avec joïe» Afansdi-
„ re adieu, à Perfomie , pas même à' Mad'.
„ Plot ma bonne Maitreffe , fottement je qnit^
„ ti la Cure de Guerln , qui eft une tics plus
„ grandes feutes que j'aie ftitte en ma vie;
„ car ma Cure me valoit pu de fii cents H-
„ vres de revenu. J'étois logeai comriieun
„ Prince, avec un biau Jardinât toutes fortes
„ de bons fruits, je dimois fiif tout; & fi je
,, n'avois pas voulu diimai fii les Fumeltes,
,t i'éroH étai le plus heureux Ciirai du Mon-
.--„Googlc
Itî4 L'iM^iJttitm FrMfêift
,, Ce fut encere ce qiii fit mon nuilbrai
f, à Ledan ; je mi adrem foax pa haut hvpT
„ pées. Ma bonne mine ft lepofte où j'é-
„ tois , me faifoit tout entreprendre: niais
„' quéques unes ne me gaidirent pas le fe-
„ cret^ Monfètgneur rEvefqttcd'Evteo^tne
„ maiidit: il fallut obeïf après m'àvouerbieq
„ lavai la itiç , il me dit que ii je ne vouiois
tt citre Sage, il metcroit'enf'ertnsù entre quar
„ "tre murailles.'
„ Enfin par bonheur po\iT mouaî le Ctu-sù
„ de Lery mourut : mon Fdre demandit 1»
^ Cure pour mouai ï Mr. le.Cardfnal d$
„ Bouillon & rdbtint. Comme j'étois Èiir
„ fiât du lien , les Femmt^ eurent ponr'mguàï
,) pudeoondefcendance. Mais cofin pu^'ea
H avois &pa j'en vouloii avoDcr. J'étotsu^
^ autre Salomon. Je voùlns iiout careû^ï
„ lesFilles. Comme j'avouais toutes forte;
4t d'in/lnimensdans meoPrebitaire, entt'an-
^, très unèiauClayectni liiK 2>emaîtèlledc
,t grande qualitai, &quî en fçavoitbienfon-
„ nai y vmt : lî elle me plut, je ne liplupaf
„ moins : malheureufement il y parut bien-
„ tôt. Si fes Frères s'en étoient aperças ils
„ jnVroient étropiai. Que faire? je.licon-
„ feilUs d'achetai des toilleg , dont ontàit
t, quantitai à Louviers & cheuxnous, &lbu$
nl^etcxte d'allaï les vendre à Paris, d'y met?
„ tre fen paquet bas. Comme elle ëtoit très
„ fine elle fit lî bien que fa biautaiendoQnit
(, dans la viie de Mr. d'Apoigni Capkai^je dç
n Dragons , qui écoit en quartier d'iryvçr
_„ dieux nos. Ii eftle Fils de Mî.d'Apoig-
^ ntt Fermier Genûai. Apparemment qu'el-
M le
«« J^Hiftti^ Âe la Bé^tlJe. i J f
j,ie IMtBit-)m».le chuaiiirbnuge t pour
H faire acroire jqu'it étoiLleM^trcdemes
** auyres t mais. j'en oitris daqs iine;tcHcijav
'* louât, que .j*CD.peniî:tioubhij. Mais ce .
>' fut -bien pis ^uand J'ijppms ^u'il lavo&loit
V 4pouzai. J.'cmri cniirear. Jllis un to-
»ïagc exprès àAiixeirceoBout^ogoe, d'oÀ ,
,j, j'apprihs t^'dtbit fon Pece i & je ^terri
fl bien fa' Uenealogie , .qoc je. fçd , que ce
Fermier Général ttoit rili d'un.Martfchal
** Ferrant. Tant |Cela. ni. âifoit lîen. te Ca?
**^ilaitteittâi bien&it» ùxàt iboiuéce Hom-
M iBt,-aKû[t(^'bien &âoIcUen:véJi9deS'Fre*
4,Tes'jCide^SliËtir.C>]aDdjem^ayilîdelidoa'
„ nii^e lajslbuiîe , I li même , ««la lidonnit
^, du TtifroJcyHèment. Un joor qat. la De?
jnoifelle étoit Tcnu.foi^nsr iiu. Clawaciq
^ ditai moMsL* Jelidi&lesifoptprfdutEiiiorf
«j ttfls. Je la trdtis à'cffrontà^ rfcvitaine,
t* deproliituée/d'abandotio^c, pàidauqu'e^?
«,1c foQlioiltoiitiours,limi faîte teijMmtae
m'^coaui. , Mais quand j'en vins, aux in^
jures lés .plus ^rofll^ces , elle.fe ievit tout
'*'d*an coup , & encrant en fomiE. Ouîccnûr
>' tte, oui lâche ;. dis ■^acjc ûùi cacore^
■» que tout cela, putl^ue je.fois la Cusoidû^
i> ne d'an Pteiire & de mon Con&fièar. . Je
^vais mejetlai aazpiedsdemesFreres, Icoi
demandai pardon de les avouai deshoi)0>
rés, & les conjurai d'en prendre vengeao<
** ce Âi le pu mécham de tous les Honmiet,
** & leur contai toute ta vie. Coninie «lie
„ étoit
a de I» DcnoiicU^i
.--„Googlc
. sjS L'Iirt/uifitioM Fr^Mfeift
y, itoit Famclle à le faire , tout comme elle
„ ic difoit , je me mins au devant d'elle en
„ tremblant pu menu que la feuille , & je
i, voulu l'appaifai ; mais elle étoit ineiora:-
„ ble: c'^toituQe Furie. Je l'embrafilii ten-
„ dmneni'que je la fis pleurai. Quand je
„ la vis attendrie, je jouis de mon relie, &
„ je refis la Paix de la Maifon. AmamiuM
„ (>•£, atnoris rtdintrgratiotjl ,\\i\iK-]C. Juf-
„ tement , reprit-il , vos y vcla. Deux am-
„ trai&dés eu firent le rapatriage.
„ J'en avois encore deui qui étolent en
„ m£inepoint qùclaDemoifelleCtavecineu!-
„ ft, & quatre autres encloiiéesr, quimepe-
„ foient bien pu iur l'efprit , dont la priuci-
„ pale étoît ma Confine Babet de laFeuttlée,
,i qui ne pouvoii pu cachai la ^oflèflè. On
^ CDinmeDÇoit à en mdrmurai , mais four-
„ deïnent; car qui fe fcroit perhiadai qu'une
^i Fillette de quatoneà quinie ans feroitde-
j, venu grollè , quand on ne H voiott poiat
„ de Galants i Je m'avifi d'en fàiiela confi-
„ dence à ma Marine Madame de Vaudreuit
„ qui étoit une Femme puilTamment riche :
f, elle m'aimott bien , & même je m'aperçft
M bien, qu'il j avoit quéque petite chofe de
j, pu que de l'amitié. Je convînmes qu'elle
„ viendroit la prendre dans fcn Garoffe un
,( Dimanche à la fortie de la MclTe devant
,, tous les Paroifilens, & qu'ellediroithaute-
„ ment , qu'elle la trouvait affez jolie pour
„ en £ùre fa Fille de Chambre , & qu'elle la
I, meneroit devant tout le Monde au Vau.
„ dreuil, où je l'irois prendre , pour l»me-
„ nai accouchi chez un Savetier où j'avoisdc-
ji-meutai
.--„Googlc
tu THifloire de h Ba/IHU. xp
,, meorai Ecolier à Rouen. La chôfe fut
,t exécutée à merveille. Je fis Dommai l'EiF-
„ font au nom dé men Frète, à qui j'en tis
„ l'honneur. Coimneilétoiteucorc Garçon,
,i cela faifoit un bon eSet. Elle acouchit
,', d'un Garçon qui fut nommé Pierrot , com-
,", me men Frère. Jamais on ne s'en Tefoit
„ aperçu. Maisj'aiapprins , que depuis men
,, départ le Gareleus > n'étant pu paie de la
,, pcnlïon de l'Entant ,. fut le portai publi-
)", quemcnt à fa Mcre à Lety ; & que fen
,-, Frcre le Chapelier avoit étai contraint de
„ le prendre, faute de quoai, il feroit mort
„ de faim , car on ne vouUiit pas le rece-
„ vouer à l'Hôpital des Enfants trouvez de
,", Roiien, car il n'étoit pas de la Ville. C'eft
,, dommage que cette pauvre Fille ait écédes-
,, honorée par ce malotru de Savetier , car
„ c'ert une des plus belles Créatures qu'on
,, puWTe voir; droittc comme un jonc,bloa-
„ de comme un Baflîn , blanche comme un
„ Lys , vermeille comme" une Rofe : dei
,, yeux bleus comme de l'Aïur; une bouche
„ de Coraîltcnrjonrs riante, & les dents com?
,, me des Perles; Vive comme une potée de
,', Souris, & remuante comme une Anguil-
„ lei & d'une taille deDieiîè:
■ ,, L'autre écoit une Marchande de Den-'
,, terelle de Roiien, blonde coimne un écu
,, d'or, blanche comme un fat in , & belle côm-
,', me un jour; & voicin comme le malheuc
„ li étoSt arrivai. Comme ma Cure nepou-t
„ voit pas fabvenî à toute la depenlè que je
„ faifoiî; carj'étois un panier perçai; je ne
„ pouvois ricu gardai. Je tranchois trop du
„grsuid
u,:,-,zf--„GoOglc
t.]S L'hqttifititm Fraif^fe
^grïndSeigBeur, MaMaiftHi ae-'deOnipUr-
j, loi[ pas ; ce n'étoient que fedins. Je me
nuuB donc à faiiedes mariages contre les
Qrdoaaapces du Rouai. Il n'en faUacqcc
•• deux o trois pour m'^chalacdai. Apiis
*»ceU ils yvenoientdctoutes parts, &com-
1* me cette Fille la étoit de la Religion Rc-.
M fonnie, elle fe trouvtt à trois o quatre,.
entr'autrcs i celui de Mr. le Comte de
'Brederodes , que je mariai avec..M2d. là
' Marquife de Bois-Roger , & qui fat lafotir-
»* ce de tous mes malheux. Cette belle Fil-
f* le driie & faite au tour , qui n'en devoit
»i rien à D\a Coufîne Babet de la Feuillue,
^ me louit fur la bonne grâce que j'avois à
, mariai les Gents; que je faifoistoutcom-
*mefes Minifltes, & qu'en me voyant fkî-
*tc elle croîoit eitre encorç à QUerilli, où
»' elle vojoit Mr. Banage foire fes fdnaîons
"Je li dis , que quand elle voudroit je lî
», rendrois ce bon office, & que je la umi-
^^rois. Oui, n.e dit-elle , celui quejçvou-
droîs choiSr, quoiqu'il l'oit à mariai , ne
** Voudroit pas, peut-eitre quiuai foa pofte»
'* pour m'épouiàî. Je vis bien que c'Étoit
*• de mouai , qu'elle vouioit parlai. Je M
»»demandis la permiffion de l'allai voiies.
i> Elle me l'accordit, & me dit fa demeure.
u J'y fus, J'entrimes en matière. Elle me
dit que fi je voulois paflaî en Angleter-
re avec elle , qu'elle avoit pu de vingt-
*' mille francs en effet , qu'elle me donne-
«roit , & qu'elle avoit affés d'Amis pour
»me faire recevouerMiniftre , & qu'avec la ^
^ boQoe grâce que j'avois , jepourroisbicn-
„tÔt
.-„Goo.jlc
«.'tAt devenir Ert^e. Ce]a.cftltcnt aSStT'tr
it.vec.mitpcnliâioiidQl^Ëgyptâeiuin'j'rcoa'-
M festît. Je^fiiaesile mariage ËLJcuLdei Vàgn
•/□«s. Elle fia. biemdi enclouée^ & ma
«•psdÏQic toutjourt de If teair.ma parole, &
V de pa^ai ;ivec die eu. Angleterre. Rtea a%
** preŒsit. encore.. Ellç ctioUii tu jour de
Noël poOr ni&veiHrfomtnitidemaptôi]KG>
"&, [juiiiiie dieux mouai , fans m'cnaverf^
îîttr.. Jamf& jÊ'.ne fuEpUis étodnai qfi'^n
,, dtasttnt ma grande Meffô4e.dix beinesy
„qBSiid jeYÏBsJâ mé ret«uruai , pour dke
I, ntoa Damiiuu vobifi:u*M-y yevâ nu FuraeL-;
Hleâ^genoux contre laBajuftrade. Jasais
(telle ne m'avoji para fi belle. EUeétcùei;^
" bâbit de cheval , luftiée .comméuaeiTaim-j
'■' cexellc ; riea n'y masquoii.. J^vdb .tôcn
J' prcp«raijua joli petit -PrÔRe pooK mos Pat
^'.roimffieas, àcaufede-taFeicc; mais,qiian4
^* je la vis ,.je ranj(aaini bien-lôi roea conm
,) planent : j'abregi bien-tôt ma Meffc.: en .
,, deux tOurt.de broches & un petit feu clai]i
M ceia fut iien-iAt rôty. Après je meais m^
rtFumelle aiiPrebitairt.! J^ajoutis àlafbr-,
t, tune du poc une bonne ^clasche & ua boa
*> chapon, & peodaiu que-ceta ouilbit je lî
" as voiies ma Ciiambre-, où je- la cegali de
fia bonne manière. Je dinimes tons deux
'• tcite à teite. Entre la poire & le fromagç
" autre vliite à laChatnbre , qui fut reïciii^
V avant que de moatai à Cheval: elle s'eif
ijCetonrnJtgaillacdementà Rotienj âtmouai
,,'je fus chantai met Veipres àniesParouaif:
ttJiens qui m'atcendoieBt impatiemment, &
»eiure .Veipres &.iaBenediâioa dii.Sr. Sa:
,.ae-
.--„Googlc
a44 Vlfio^tdo» R^iMfoSft
, CKDKDt , qac j*a4ois cxpofki., i cauft'de
T, la Saintetai au jour , pour les empcfchai
T, de murmurai , je leur metamoipholi mon
1, Prdnedu matin, en un joUpecitSermoii,
t, dont ils dirent très contents , & pour a-
j, bondance de droits, i laBenediâiondaSt.
i, Sacrement , que je leur doimois le foir,
t, je leur fis encore oœ .belle & jolie pe-
„v titc Exhortation. Mr. Liuek l'iiit«r'<>
rompit , pour lui' dire, qu'il s'y étgitaâ^s
bien prépaie, & tifmoigna qu'il voulut sM-
1er coucher. „ Pour Ta préparation, dit-il,
„ je m'en berne . je Pi^cheiois , ai abrupto:
„ mais attendez , je vos prie , car voici le
„ pu biau: vos allez vouer, cotnmeje pei«-
„ dis ma Cure. Je joignis mes princes aux
oennes : je fis faire g<ou glou à ma btnudt-
le , ce que je fUCoii de temps en temps *
Eour lui Eure reprendre haleine : je mis du
ois au feu, & il continua ainfi.
„ Ma Fumelle pour abrégeai matière fut
„ acccmchî à Paris , où elle poitoit tûus ks
,, Ans quantitai de dentêrelles "qu'elle \suh
,, doit à des Dames de qualitai, ave&qui et-
„ Je étoit achalandée. Sçachani qucma Cla-
j, vccineuièyitort alléépour le niêniefujet,
„ plutôt que pour y vendre des toiles, pour
„ montrer combien elle m'airooit., elle fut
,, affés genercuTe pour allai iî ofiHrde l'ar-
„ gent; mais IJiutce la refiiût fiéccmenij ce
„ qui me fit croire que- Mr. Dapoigni le Ca^
„ pitaioe avoit ta jouai du pouce, Tavoitiàit
j, aconchi , & s'étoit chargeai de l'Entant.
^ Je tùs aux coucher de ma Marchande 4â
„ deutcielleï, qui mit au-, Monde une i^ille.,
u,:,-,zf--„GoOglc
sa rHiftoîre ât la ^afliiU. U\
, que nos mimss aux Enfants trouvés , a-
. vcc un billet & de t'at^ent pour là penllon ,
f avec ordre de la nommai un tel nom , &
• de la redonnai à la Perfonne qui aporte-
» roic un écrit pareil à celui qu'on leur en^
' voyoit avec le cachet. Us ont bien lamî-
• ne de l'attendre long-temps. Je vis itont
" ma Clavecineufe , qui ne me demandît
" pas feulement comment je vouloir qu'on
", nommit nôtre Enfent. -
f. Voici le coup fatal. Le Diable qui ne
,,dort jamais, fie que Mad. la ComtelTe de
» Brederodes fe degoutit de Mr. fen Mari.
.• II lui avoit promis que L. H- P- L. E. G.
"-le meitioient en pofleffion d'une partie de
"iès héritages de la Waifon de Brederodes.
" La Marquilc de Montpouillan fa Coufî-
" ne. II avoit confirmai la chofc:- rien de
"tout pela ne venoit. Elle l'envoiit en
,'Hollande , pour foUîçitai du moins une
„Penfîon : il revint comme il étoit allai.
I, Elle H refiifit fa Maîfon : il voulut y en-
.(■trai comme cheux faFcmmc,qu'eIle^toit.
t» Grand bruit. Que fit elle ? Elle tne vînt
u trouvai , & dit quej'eultêàdecampat j que
** ma vie & mes mariages tàifoient un très-
" mauvais effet ; & que fi la chofe venoit à
" éclater & que je iu£Ë prtRS, que je ferois
" pendu. Elle eut l'adrcffe de me &îre in-
II tîmidai itout pat dej Amis qu'elle avoit d
„ l'Oflî ci alitai deRoUen. J'-cu peui. Jeven-
„dis mes meubles; j'empnintide l'argent ,
„ & comme on étourdi j'abandOniiî ma Cu-
« re , dont mes Parents penfirent mourir àe
*)déplaifir : quoiqu'ils fc doutoîcm bien que
.h „ la
.--„Googlc
*4% Ulitquifitie» FroMfoife
'^ la cbofè en viendroit là , par la vie que je
menouais. Je ne voulouais entendre remon-
trance ni de Père, ni de Mère; & deux o
* trois fois je nos étions entr^iattus mcn
)* Frère ainai &mouâîènleurprefence, par-
>' ce qu'il fe meflott de me vouloir donnai
M des correSions. •
>, L'aflaire de Mr. le Comte de Bredcro-
„ Âé& , & de Mad. la Marquifc de Boit-Ro-
ger, laFemme, éctatit auPaiIcment, où
** an mariage fut déclarai nul , faute par lî
;'* de produire une atteftation & des preuves.
» Il ne pouvou^t avouer men Ceniâcai, puif-
^, que j'étouais pailài en Angleterre, Les té-
,, moins n'étoîent] point connus de Mr. le
Comte de Brederodes ; c'ctoient Gents à
" la difcretion de Mad.de Bois-Rc^cr, auî
" quels elle fcrmit la bouche. Le pauvre
»» Comte audefelpoir, m'a cherchai par tout,
n comme je l'ai apprins depuis lîins m'avonet
„ pu trouvai,
„ Ma Marchande deDcntereJlesnevou-
: lot pu que jerafprochilTe, depuis fescca-
* ches; « pour m'en empefcliai & d'achevai
'» de li mangeai fcn petit fiiit , que j'avouais
» déjà terriblement égrenai , elle paffit en An-
Mglsterre. Avant-que de partir, ellemedït
„ de t'allfli trouvai. Je courus la gueule en-
,,&rinée , cioiaut que c'étoit pour un bon
• elfet, mais ce fut pour me repiochi mon
* inâdelitai ; me dire quedevaut Dieu j'étois
''fen Mari, & que quand je voudrois joiiir
" de ina Femme, j'irais la retrouvai en An-
s) gleterre. Après quoai elle De voulut pu m'é-
„ coûtai, & iae mit dehors.
, , „Mais
.--„Googlc
«» rHiJloire de la BaJUHe, li\
„ Mais combien fut-elle ravie , quand cl-
„ le jne vit en Angleterre , où je palîi au
„ cojnmencemcnt de l'Année 1701. Je la
„ fu trouvai chez fen Frère : rien ne li cou-
^ toic àmedonoai ; &àmouai encore moins
„ à le prendre ; qtielle joie , quand elle vit
„ ^ue je voulois ^ire men abjuration , & que
„ je la voulois époufaitoutde boni ËUeme
„ menit au Gonnftoire , où l'on me promit
„ de me recevoir Propountt quand on feroit
„ bien informai de ma Ooârine, & édiâaîdc
^ mes mœurs. Je as bien-tôt men abjura-
,^ tion. On mit dans la Gazette, que l'£<
„ vefque de Lety avoit abjurai les erreurs de
,, la Religion Romaine. Ne voiià-t-il pas
l'accompliiTcment de la prediâion , Mr. L'Ab-
bé , & ne paffiez vous pas , lui dis-je , déjà,
pour un Kvêque? „ Ce n'en étoit encore
„ qu'un petit prélude , reprii-ildu^Iusgrand
„ fericux du Monde. On me (àifoiides hOB.-
„ neurs à l'£glife tout â fait estraordîn aires.
„ On fe levoir pour me lailTai paiTat ; on m'in-
„ vitoit àdinaîauxmcilleuiesMaifnns. Mais
,, au bout de quéque temps tout cela s'en a!-
„ lit en fumée. Plus d'honneurs ; plus de
„ repas; on ne meparloit pu de Penlîon ; à
,, pciue me tegaidoît-on- Par malheux j'é.-
„ tois mal avec ma MaitrcHc:. avant que de
„ rép9ufai, je vouluéprouvaifi ellem'avoit
^ tourjours étai lidelle. Je li dcmandis , du
„ plvs grand ferieus du monde , û elle n'a-
„ voit jamais connu que mouai. Elle me le
„ jurit avec fincerîtai. Oh ! bien, li dis-je.
„ pour éprouvai fa contenance, jcvaîsinvo-
„ fuai-^ I}iat)le , fi ce que vos me dittes
L * ^clt
•44 ■ L'Inquifuion Tranfoift
,, eft vrai , il ne vous dira rien : maïs d vons
^m'accufei faux , prenez garde à vous , je
n'en réponds pas au moins. Elle me re-
*' gardit avec indign^ion , & me dît. On
■* m'avoit bien dit , que Vos étiez un m(?-
*» chant Homme : je n'en doute pus à pre-
>*fêiit: je fuis vôtre duppe, mais je ne lale-
,» rai plus de ma vie : retirM vos de mouaî ,
& que je ne vos voie jamais. Je voulu
l'arrêtai; elle m'échapit ; fen Frerc vint
**me dirci de fortir de fa Maifon, & de ni
•» revenir pu. Je fus trouvai de ce pas Mr.
»>Tallard nôtre Ambailàdeux en Angleterre:
,tje li coufeffi toutes mes fredaines , & les
j, larmes aux yeux , je le priai de m'obtenir
ma grâce de nôtre ix>n Rouai, & jelecon-
- juri de me faire rentrai dans ma Cure. Il
'* me le promit & medonnit une lettre pour le
»»Pere la Chaife , Confeffeuï du Rouaî , &
n cinquante Francs pout revenir en France.
,» Je revins en Hollande , où je fus trouvai
-nôtre Ambafladeux pour le m6nc fujet ,
qui me fit la même grâce, j'étois pour-
* tant irrefolu : je difois la MeSe cheus l'Am-
»'lraiiradeuï. & aux autres Egiifes, &je ne
ï'iaiflbis pas d'allai aux Prêches cher les Re-
»» formez. Enfin portant je me detctminis,
„ après avoir reçu de l'argent que m'en-
voïirent mes Parents , fur l'alTurance que
I je leur donnis de mieux vivre àl'avenir^ &
■* que j'avois un ordredes Ambaffadeux d' An-
*'gleterre & de Hollande pour rentrai daus
j' ma Cure ; je m'embarquis ppur Dieppe ,
« d'où je me rendis cheox nous , & de lavi-
jiUmem à Paris, quand je vis 4«'ily «oa-
«voit
.--„Googlc
mrHiJiolre iehtBafliîU. a-}5
,, voit un autre en ma place. Le tré R. P.
, la. Chaife leut mes Lettres , & me donnît
* un billet pour allai ï St. Lazare; me pro-
*' mettant , ^ue fi l'on étpit bien content de
»' moufti , & que j c fiiJTe véritablement bien
»ï repentant de mes fautes, il me feroît ren-
}i trai dans ma Cure , que pour ce fujet il al -
,,,loit écrire à Mr. le Cardinal de Boinllon ,
pour le pri^ de me la confervai. Je fusa
'* St.Laxare, où je fis fi bien le Cagot pen-
" dant fis femaines , que tous les R. 1'. Cafti-
»' gants écrivirent en ma laveur au R. P- la
n Chaife , qui me dit , que ma Cure étant rem-
^plscée, iln'y avoitpumoien d'y rentrai. Il
,^me donnit un billet pout allai trouvailVIr.
j l'Archevêque de Paris , pour me donnai
* pcrmifllon de dire la Meffe dans l'on Diô-
.'* cefe , me promettant que fi je me com-
>» poçtois bien, les Bénéfices nememanquc-
" roîent pas pu que l'ian dans la Rivière.
nMes Meffes ne me valoient pas dcquoî
j, feire un repas très fuccinâpar jour, avec
un petit demi-fcpticrdevin , qui demeuroit
** encrouai dans ma gorge. Je fus revoir le
»' R. P. Ja Chaife , & Mr. l'Archevêque ;
" c'étoit la Chanfon de Ricochet. Je me
»»depiti. Je fus à Cambrai trouvai Mr. l'Ar-
tt chevéque, l'illuftre chef des Perfecutez ,
^, qu'on m'avoit dit être un Prélat très cha-
j titable; mais après m'avouer écoutai deux
' ou trois fois , il ne me voulut pu voir. Je
*' pafl!ài jufqù'à Bru.xel!es ; je demandai de
" l'emploi à tous les Ambafiâdeui. Quand
>» je vis qu'ils ne vouloîent pas m'en donnai,
»t je m'eiigagi avec Mr. le P. de Leycefler,
L 3 Seig-
14IÎ l^lnqmfiùtn FraMfoîfe
„ Seigneur Allemand , en qualiuî de Valet
I, de Chambre , pour voiageai par toute l'Al-
■,, lemagoe ; mais auparavant, alons nous cou-
„ chai; en vêla raiibiiaablementpourlapre-
„ miérc fçéance. Bon foir & bonae nuit ,
„ c'eft pour deux fois.
Il étoit affîs tard pourlecroire. Pourmoî,
je me faifois nn vrai plaiHr de l'entendre ;
mais je voioîs bien qu'il fetiguoit Mr. Lfnck.
Je lui vcrfai encore «nvcrrc de vin poailui
laver la bouche , & je lui dis que je me tc-
fervoîs à faire mes reflexions fur fa vie, qui,
comme il me l'avoir fort bien dit, étoit plus
pleine d'événements que toutes celles des A-
vantiiriers dont j'avois lû l'Hiftoirc : mais
qu'il ctoit temps de prier Dieu , fur toat de
lui demander pardon de nos fautes, & de nous
aller repofer. Mr. l'Abbé ne vows reïibove-
ncz jamais de vos avantures « fur tout des
fcandaleufes, que pour les detefter, & non
pour en tirer gloire ; car celui q«i fevante
de fes crimes Icmble csciter Dieu à en pren-
dre vengeance. Je vous fouhaîte une bonne
Jiuît.
Le lendemain au matin il écort tout prit
à continuer le récit de fes Avantures; quand
je le priai d'en remettre la Narration pourt-
près le dîné. Mr. l'Abbé, lui dîs-jé, voici
quelle efl nôtre conduite , d^uis que nous
fonmies eafen^le Mr. Linck & moi. ^ Jove
prhcipium. Noos donnons à Dieu les prémi-
ces delà journée, & après lui avoirdemandé
les fecours defagrace, pour porter oonftam-
menti & &n$ murmurer le poids dcnosfers,
& toute*, les affliiâionï qu'il lui plaira nous
.--„Googlc
M tBifioiTt de U S^mit. (47
çovoier , & fur tout Taflillance de fbn Gàiat
Éfprit pour ne le point offenfer, noaslifons
quelques Chapitres du Nouveau Teftamcm,
& de quelques autres Livres de pieté. Enfaite
nousécrivonsnosréfleïions, &cc qu'il plaît
à l'Efprit Conlblateurde nous diâer pour nô-
- tre commune & irutuelle édiâcation. L'a-
près midi nousUronsTHiltoire, où nous £u-
fons quelques autres ouvrages innocems ,
qui puifftQt adoucir U dureté de nos fers ;
nous nous les communiquons eulùite. Cet-
te maai^re de vivre pailîble & tronquile a ci-
menté entre Monsieur &. moi une union très
par&ite. Je l'aime tendrement comme mon
Fils , & il me chérit comme fon Père. Si
vous voulez bien entrer d'un tiers avec nous.
□OUI vous en faciltceions tous ûs cnoiens
qui dépendront de nous. ,• Palûnguai je le
„ veux bien ■ dit-il : je fuis du bois dont ou
„ îût des Vielles , je m'accorde à tout. Le
„ matin je vos chanterai la MeiflTe, ^l'après
j, midi mes Veiprcs , car je fçaîs men pleiu-
„ chant , comme le Maître des Enfants de
„ Chœurde Nôtre-Daiic. Mr. l'Abbé, ce
n'ell pas cette Muûque là i qui e(l agréable
à Dieu , dans la fîtuation où vous êtes- Je
croi , lui dis-je, que les accords des foupirs
de vôtre coeur , avec l'abondance de vos lar-
mes lui feroient plus agréables , que tous vos
Dem'tHHs vabifcum , &vos OrateFroires. Pour
qu'une Muuque foit a^réalple , il faut que
toutes les parties foiem d'accord; C'cftcequi
fait les charmes destavi/Tantes^eoibléesdcs
Fidelles. Or quelles difcordances fèrions-
Dous, fi vous, vous chantiez vôtre MeQè en
L 4 La-
u,:,-,zf--„GoOglc
148 I7Imqiiifi$iom Framfeife
Latin ; Mr. Lïnck , fes Pfcaumes en Alle-
mand ; & moi en François : cctEe harmoaic
fcroit elle bien agréable à Dteu^ Lavt^zqoi
te tçnche d'avantage, eft celle du cœur: cel-
le deslévresfeulc, n'arrivera pas jufqu'à (on
tr6ne. Et croiei vous qu'il vous écou-
te , avant que d'avoir fincérement détefté
vos ciimes , & que vous ne lui en aiez de-
mandé pardoD du plus profond de vôtre coeur?
Combien vous faudra-til gcmir , pourrallu-
mer une étincelle de ce feu , que vous avez
éteintfous destorrents de pcchei. multipliez
& accumulez les uns fur les autres. En qua-
lité de Paftcur, ce feroit à vous àmcremon-
trer ces grandes veritez : mais comme vou»
femblcz prefque les avoir oubliées , pcrmet-
ceimoi, comme vôtre Ancien , quejevoas
en fidic rcffouvenir. Et pour y travdllerrf-
âcacement , & fur un plan folide , oferois-
je vous demander , de quelle Religion vous
iàites profeffion prefeotemcnt i" car en un An,-
je vous en ai vu changer tout au moins deux
fois. „ Dittes trois s'il vos plaît, Moufieur,
1, fans crainte de mentir, rcprir-il prompte-
„ ment : je me fis l'Etal de la même Âu-
„ née Luthérien à quatre lieiies de Lcipllc,
„ qui comme je l'apprenseft la VilledcIMIr.
„ Linck. C'eft ce que je vos conterai tan-
„ tôt. Pour à cette heure , Je ne fuis pas
„ bien déterminai en fait de Religion ; car
„ depuis que je fuis i. la BaHîlle, j'ai étai a-
„ vec un Kouakre , qui m'a tait voir clair
„ comme le'jour , que c'étoii la lîenne qui
„ étoit la meilleure, & queliievouIoîsTem-
„ braiTai , il me donaeroit fa Fille en maria-
u,:,-,zf--„GoOglc
Bsi VHiJioire dt la Baft'tlU. S4>
„ gc, qui eft belle comme le jour , A riche '
„ à l'avenant. Pour la Meflè j'ai penfai ren-
,> verfai ma pauvre cervelle, pour compren-
„ dre comment avec cinq mots , je pouvois
„ fiiire defccndre Jefus Chrift de la droitede
,, fen Père, où i! eft ailis pour toute IVternî-
„ taj , dans an petit pain i chantai > qui , a-
„ vant cette cérémonie, valoit moins qu'uû
Il denier; & quieft-cequi m'adonnaicepou-
,t voir W : & c'eft de ce manque de Fonai »
», qu'cft venu la fâcilîtaide direma Mdiècn '
,t très mauvais état ; & je m'en (5tois feît a '•
,, ne habitude, qui après celaapailàiencou-
„ tume. MaisdepuLS que je fuis à laGallil* -
„ te, fi vos fçaviez tout cequej'ayfaîtpour
',, en demandai pardon à Dieu, vosentrem- "
„ blerrez. Je mefuis couchai tout nud fuie
i, pavai. J'ai pafl^'des jours tous entiers fans
„ mangear & fans boire. Un jour on m'a-
„ portit un bail ai de boulio pour ballié ma
„ Chambre ; comme il étbit tout verd , j'en
„ 6s une bonne poignie de verges » dont je -'
„ m^étrillis dos & ventre. Mr.leCur^, re- -
pris -je, toutes ces macérations là font immo--
derées, & JcdoutcfortqueDieu les approii-
ve. IJes Dervis , les Talapouins , les Bon-
fes & les Prôtres des Idoles en font de plus
grandes-, & Dieu les afansdoutcenhorreur. ■
Nous déplorons la fuperftition de ces pau- -
vrcs Gents, que nous voyons fc feire écrafer
fous les chars de leurs Idoles ; ou s'afïbm-
mer mifçrablement pour faire honneur à
leurs Prophètes. Si vous voJlei retour-
ner lîncerement à Dieu, commencez par
dacfter vcritablwncnt vos pechet^ îcluiprc- -
L-j, teftcr-
»J0 L'ItfKififioM FréMftiff
tefler fans féfnre que vous aimeriez mîéur
mourir mille fois que âe, commettre uq ftul
péché. Si vous n'avei cette intention, tout
ce que vous ferez ne icrvira de rien. Knfni-
tç demandez lui dans une profonde humilité
l'ainiïance de Ton divin Eipric pour connoî-
tre Tes faitucs yeritez. P^lcz, Seigneur, car
vôtre Serviteur écoute. Dites moi une pa-
role de paix , qui me leconcilie avec vous y.
pour ne plus jamais vous abandonner.. Lifèz
humUement l'Ecrirure avec attention , & dans
j'efprit d'en tirer tout le fruit, qui ed renfer--
taé dans cette riche femence.. Si quelqu'en-
droit vous paroît obfcur , ou douteui , met-
tçz vous à eenouz pour obtenir les lumières,
du St. Ëfpnt, pour vous en doimcr l'intelli-
gence: priez, preJTez, fans vous en rebuteri,
jUiqn'à ce qu'il vons ait écouté. Vous n'au-
rez pas pratiqué cela long temps , que vous,
n'en retiriez de graads progrès & de douces
cpafolations. „ En veritai, MonHeur, re-
„ prit-il, c'eit dommage que vos n'aiez pas
„ étai Curât; vosériezpiefcbai à merveilles.
tx Je n'eu ai pas entendu qui m'ait toucbidV
,f vantage. l)i$-mouai qui tu as fréquentai,
„ & je devinera qui tu es. VeSà bien autre
,t chofe que le Kouakre j il ne faudrait pu
t, que vos euflîez une gentille Fille, & que
„ vos voulufQez bien me la donnai en maria-
fi 9^ I pont que je li diOe adieu & bon foir â
^1 ^mais : je vos érois bien-tôt fait grand-
„ Père , où elle ne me voudroit pas croire.
Toujours des Femmes, Mr. l'Abbé , re-
pris-je, &vousmedilîez hier au foir que vous,
rbudriez qu'il n'en tût pas plus que de Mer-
Us
jcs blaocs. „ Qae voule:L-vos? ^t il , danp
„ Ifi piau mourra le Ren»cl , s^il ti'«ft écofr
■jf diâi vif : mais je m'en voit tant priai le
„ BonDieu, qu'iUurapkiédeoiouai. Nous
voiaàt à genoux, il t'y mit aulS. PoistouiC
d'un coap il te leva. „ Velà qui e& ma];-
*„ hoanéte , cootiiuia t il de parlai à Dieu .k
„ Jeunj riialeine en lent pu mauvais; t^fland
„ j'^i mangeai ub morcîau, & bu un coup,
,, il m'en écoutera mieux. C'eft ce^'îlw,
enfuiie il ix remit à genoux , & ftûDîeude
ineii1earcourage.£nruite, il dit fon Bréviaire,
£n&ilantdes potlores touti^'trîJibks. Il le
zenv£rlbit£n arriére, la tête en haut , en cou-
lant les y«ux dans latéte,fi]istout(i'uncoup il
-fe^ourbojt en devant , la tête eu bas , en fecou-
aat les xireil4es , & fe donnant des coups de
poing dans l'efîomach japtès^lferelevoittoat
droit tjrufqueinent comme uncol de plomb.
.Comme il me V4t écrû-e , il Ce làilit d'un
: jie mes litres dans l«s interlignes duquel j')i-
vois ictit un Traitté des Devoirs du Fidell#
' ,Chc£tion 4aas tous les Etats 4e la V ie , & a-
près.en av^r lu quelques pages, i, Dame^
„ Dame en veld uo Aila ! Non , je ne croi
-,, pas, dit-il , que jamais Grenade , Rodri-
^, guez,mSl. François dêSalesaientrieii^Jt
-*,' de plus biau. Si vos aviez commençai à
,, ^ccice de mdlleune heiue , vos étiez éud
,.. un autreSt.-Chrilbftome, ou St. Augutlin.
iVîais £11 fcuillcttaut mes autresLiVces, il en
trouva an dans les interlignes auquel j'avo^
liait tàoQ Poëme de l'Amour & de l' Amitié,
& un autre Poème en Vers libres, qui^ftoit
laI}Gl^il«ion4e Alont<Loais, Mskon 4fi
L.tf. plai-
.-„Goo.jlc
syl L'ImfiiifiticiÊ R-anfoIft
Ïlairance da Perc la Chufe , Confèircar Ai
Loi, il cnira dans dcseztafes toutes des pins
t:idîcales. „Nod. difoit-îl àMr.Liack, vos
,, avez là UD trefor , que vos ne connoif--
t, ftz pas : mouai qui m'y connais un petit , &
„ qui m'enmélcparfouais , jevousàlfeure&
„ râoteûe, fonai de Prcitrc,que Corneille &
„ Racine ne l'y fcroicnt pas la barbe. Je riou
de tout mon cœur de cette affluencc d'abfnrr
dîtei, & j'éprouvoiï cette vérité ; qac l'Admî-
j^'on immodérée eft Fille de. rienotance.
Enfin on nous apporta nôtre aîné : nous
Texpcdiâmes ptomptement , & après nôtre
Icâurc, je lui dis : hé bien Mr. l'Abbé , la
continuation de vos Avantures nous tiendra
lieOf fi vous le voulez , de leâure divettif-
ïànte. Mr. Link a ici quelques Romaos ;
mais il n'y en a pas un rempli d'événements
Jî extraordinaires que les vôtres. „ Je les en
« .deâe tretous , dit-il , mordiére. „ Si vos
„ qui avez une H grande facilita! à écrire ,
„ vouliez bien mettre cela dans-un joli petit
„ François, cela feroitbien rire le Monde ;
,» mais je ne voudrois pas que vos y mifllei
„ men nom, car cela deshonorc^oitmaFa-
^ mille. Mr. l'Abbé , iî jamais je fuis vo-
ue Hilloriographe , repris-je, tout ira bien,
& je vous peindrai comme un Original ini-
mitable. „Pa!fangouai, dit-il, Gttfmand'Al-
„ varacKe étwt un biau Bclitre en comparair
„ fon de mouai; &Ji jene fuis pas encore
,, au mitan de ma courfe: écoutez mouai bien.
„ J'en étions demeurés hier au ibir â men
,,, engagement avec S. A.S. Montèigneur le
^ Ptiuçe deXiejceAer, le meilleur Seigneur
.--„Googlc'
eu rBftoire de la BaftilU. 153
„ qui fut jamais : je fûmes bien-tôt comme
j, deux Frères. Jamais il ne s'érpit fi bien ac-
„ commodai de Serviteur, comme de mouai-
„ Je le faifois piffai à fes chauffes force de ri-
„ re; &]'avoTS des complailânces pourliau
„ delà de toute imagination: carilyavoitde
„ certains temps où i! n'entendoit pasraille-
r, rie- Il tenoii fes Cents dans le refpeâ ,
j, comme de raifon • à tout Seigneur , toitt
„ honneur, dît un des Sept-SagesdclaGré-
„ ce , n'importe pas lequel. Il me fit voir
,,- toute l'Allemagne ; une partie du Danne-
„ marck ; un com de la Pologne , & un pe-
,, tit bouWde la Suéde. J'allions de Cour en
,, Cour , & j'étions bien venus par tout. Il
„ ne fe fioît qu'à mouai. Comme j'étions en
,, Sase, il s'avifit de me demandai dequelle
„ Religion jVtois. Après avoir un petit brin
y, penm à ce que J'avois à lî répondre^ je lî
„ dis que l'étois Calvinilfe Reformai. lime
ty repondit qu'il vouloit que tous fes Gents
„ fiifiènt de ià Religion ; & que li jenevou-
„ lois pas me faire Luterien , j'euife à pren-
„ dre men parti. Mouai qui me lèrois ftit
„ Juif , voire Mahommefan pour le fuivre,,
„ je ne balançi pas à l'y accordai tout ce qu'il
,, voulut. Anffi-tôt dit , auffi tôt fdt. Il fit
,, Venir le.Miniftrc du Village où j'Stions.
„ Monfeigneur le Prince l'yexpofitlachofc:
„ le Miniiire enftitravidejoïc, StdansTinf-
„ tant fit fonnai toutes ks cloches de l'Egli-
„ fe, où tout le Monde s'aflcmblit. Mgr. le
■„ Prince fit cherchai par tout du Gibier , &
„ tout ce qu'il y avoitde pu biau & demeil-
„ leur I & ordoonit ï fen Cuilîoiet de faire
L 7 oa
.-„Goo.jlc-
ft;4 L'InjMÎfitien FrsMfeifi
un Dînai magnifiquie. Après Mgr, lePrin-
ce fonit de l'Auber^'e ^ fuivî de tous fes
" Doineftiq«es» me pliant inarchaiàcûtaJde
** S. A. S. à & gauche. Quand je fûmes à
n l'Eglîfe, le Minidre fit un biau Sermon ea
,1 Allemand, où je n'entendoîs rien. Eufui-
-, te , il me fit faire, mcn Abjuration en La-
tin & en François devant tous les Gentils-
hommes, & Jcs Principaux deiaPatouaif<
*• le , qu^l «voit vitement fait aflèmblai. Tou-
■*• tes les cloches vinrent encore à foonai,- &
n le Mmillce, à qui S. A. S. Mgr.le Prince
^ de Leycefler donijît trente ducats d'or, no
, vint reconduire i n^tre Aubet^A, fuîvi de
tous les Gentils-Hoaunes defaParooaiilc ;
Mgr. le Prince retint le Minière & lé pu
** Haut-Huppés à dinai. Il me fit mettre à la •
Vtjble ; il ^toittoutlèul au haut-bout ,leMî- -
*> uitlre plus bas àla droite , &mouaî à câtaj '•
«jduMinidre, & tous les autres après. Jeân-
j mes Bonne chère ; & je bûmes tout comme .
^ j des trous jufqu'à minuit. Mgr, lePtince but
' piuficHrs fois à la fantai.du niuivlau Con-
"*' verti I ^ tous les autres , au^ bien que
•»mouai H repondîmes de bon cœur. LeMi-
>ï niftre ine jurit en Latin , qu'en fa^vw il ti'4-
j, voit ea yne ii bonne journée. Ajwes ,cel4
,, S. A. S. Mgr. m'en aimit dai^aiitâKe , &
■ dit qu'il vpuloit ftiire maf ottuDc. Connue
■ il .vit que j'étois Homme d'eiprit , & i^~
■"guïmt, il écrivit pour niouai à laÇourde
^Vienne. Je liavoisavouaî, quej'avoisécai
:»Pi^re; h iB^njie quej'avoiseucharged'à-r
»tlie dans une des boànes Paro^i^illès de
^KQiu^die. ^ordieie, dit il., ,ycla la
«Guer*
.--„Googlc
a^'
'J
- f
r -.
^ > ^^/
M riEfiùrt de la BapIU. if y
^t Guerre qui va recommencaî ; n'y tfroit-ïl
,„ pas moien que vos eiitruQîci Aumofpier
„ dans' quéque Rt^imcot , & tàctuû d'aï lai
„ dans l'Armée (TAlieimgne^ Rien n'clt pu
„ tacilc, ce Ji rcpondis-jc, pnuvcoquej'àie
k, de l'argent pour allai poftuJarcet emploi,
„ Je revijifmes enfemblc à Bruielles, où le
,, proprejour de la Nôtre-Dame de Septembre
y, 170t. jetouchidouiecentsflorias. Jaoï^s
M je ne m'i^tois vu (i riche. Je fiis àlaHaye,
f, où je me fis habillai en Preitre : je me fis
„ faire le Juilaucorps & le Mantiw que vos
\, me voicz là. Je fus i Amfterdatn , où je
„ mis la pu grande par de mon argent en Li->
», vres de contrebande y tous des pu drûjes.
.>, Je fils fans façon dire la MeHë chet^ l«t
„ Ambailideux de France & d'Efpagne, qui
„ me donntrent des Lettres de recommanda
„ tion pour Paris. J'avais prins un Garçon
», Tailleux pourmenValIet, quej'avoisfait
1, habiUcy bien, propre avec un chapiau Bor-
„ dai d*or. £n ce bd équipage je îîis cheux
t, udus , où ma Famille fut bien aife de me
^ revois , li glorieutëment au defTus de mçs
i,.airaires, malgrai mes envieux. Jejuriàtoqs
,, mes Amis qu'ils ne me reverroicnt jamais
„ que je ne fufTe Evefque , & que j'en fça-
y, vois bien les moîens. C'ctoit à qui me fe-
„ roit carelTe , & li j'avois eu quatre corps ,
„ ils éroient été bien emploiei avec mes Àu-
^ ciejmesConnoiflànces. Enfin j'vTÎvis-iPft-
„ ris , où en vendant mes Livres je podulis
,t de l'empK)!. J'allois aui Tuîlleries , auP^-
t, lais Roial , au Luxembourg mes pod^es
„ pleines de Urres , & je les remportois
,,toBr-
.--„Googlc
1 j6 ' L'Ittqni/u'tBH Franfoife
toofioiirs pleines d'argent. Un petit Livret
"qui ne m'avoit coûtai que quatre fols en
** Hollande, je le revcndois jufqueï àtrente
' *» & quarante fols aux Badams de Paris, Je
9* m'en fus bien tât deSait. Je doonis un
„C^alogue de ceui qucj'avois aux Curieux,
„& j'envoiis mon Vallet leur portai mes
Livres dans leur Maifon. Outre cela j'â-
** vois mes Meflcs qui alloient rondement
**Ieur petit train. Mr. l'Abbé Manoury dans
»» le Palais, & Mr. l'Abbé deTifis'empioii^
M rent pour mouai. Enfin je mistantd' Amis
», en Campagne , que Mr. l'Abbé Coupar
„ Aumônier des Gardes du Corps , me fit
entrai AumAnier dans îcRegimentdcCa-
' Valérie de Marivaur qui s'en alloit en Alle-
** magne. Mr. l'Abbé de Colibeaiix qui demeu-
•ïtoit cheux Mr. le Curai de St. Paul, m'a-
,>voit voulu feire entrai Aumônier cheux
j, Mad^ la Ducheiïe des Diguieres ; mais j'â-
, vois mes raifons pour n'en rien faire : ce
' n'étoit pas là le chemin de l'Evefché, En-
" fin je partis pour allai joindre le Régiment -
«'furleKnin, qui étoitàSdieledad. Mais je -
,* priai Mr. l'Abbé Rolet & mes autresAmis, .
ïjquî feuls içavoiencmesaffaîres, de icS bien
, cachai à tout le Monde, & furioutàmen
,, Vallet_,que 'avois battu & jettai dehors; par-
j, ce qu'il faifoit du pair à Compagnon avec
mouai. J'avois même priai Mr.l'Abbd-Ro-
•*lçtquî li avoir promis de H faire donnai par
**Mr.BtunetdeRancy fermier General, une
MCommiflion d'Archer de Gabelles de. n'en
)» rien faire, parce qu'il avoiteurinfolcnce de
«me menaçai, mémc-enfaprefencedera'ea
„ faire .
.--„Googlc
tu fHiftoirt de laBafiiUe. ^S^
, faire repentir , & qu'il en fcavolt bien les
, moiens. Quand je fus une fois reçu &aa-
, crai dans le Régiment, lamaniérefamilié*
, re avec laquelle je vivois avec les Officiers,
, m'eut bien-tôt attirai l'anutîé de tretous ,
, jufque du moindre Cavalier. Je leur don-
, nois l'abfolution tout d'acheval. CVioit à
, qui me regaleroit. Quand unbiaumatindu
, »7.J^vier 1702, parun vendrcdijourquî
, m'a étai tourjours tunefte,onme vînt arré-
> tat de la part du Rouai ; & après s'être faifi
, de toutes mes hardes,fur tout de mes Livres
, & de mes papiers , l'on me mît enPrifbn.
„ Jamais Je ne me fuis cru fî près de ma
, fia que çu jour là, car Hilsm'avoientfaili
, deux heures putôt, ils méroient trouvai des
, Lettres qui n'étdiem pas de pdlle, &dont
, heureufèment J'avois brûlai les originaus un
, moment auparavant. L'on me mit tontau
, haut d'une Tour dans un petit trou , où
, pour tout meuble, il n'y avoit qu'une chaî-
, le de paille; j'avois là tout le temps defai-
, re des reflesions. Sans doute, difois-jemçs
, Lettres ont étai interceptées : adieu lEvef-
, ché; l'Egyptienne auramentipourJecoup.
, Mais ce qui me confolc , c'eltquefijefuïs
, pendu, ma Famille n'en fi^aura rien. J'a-
, vois paOài une bonne partie de la journfe
, fans mangeai;' quand l'aptès midi une peii-
, te Fille vînt me demandai , fi je voulois
, mangeai quéque choCs ■ que j'eulTe à li
, donnai de l'argent. J'avois encore pour tout
, bien vaillant un Louis d'or, quejcl'ydon-
, nis, & jeli demandisdaIaitboaîtl7,qa'eI-
, le me ûi paiei quinze fols. Je paflîs la nujt
ù,:,-,zf--„GoOglc
xyt VlMfiùfitMm Frémfoift
^aâisdnuBU chaifc, où il Dcmeteooîtde
dormir, pour plu&cnre raifoos. Le Icndc-
nuio aanutin sS. Jnovier, usiàmedîili
** petite pointe dajoui, on vint medeiùdù,
^ pou me &ire montai i Cheval. Il y avoit
M un des Gardes de Mr. l'InteiKbuitdeStns-
jibotug, (]iiî donooitordreàtoot, qaigron-
,,dit tȎn, qaand il fceut <^'tMi oe m^voii
pudondli ni feu , ci lit. 11 y avoit deux
Compagnies de nôtre Rcgimcot qui m'al-
** teodoiem en H^û ï Cheval à la Porte de
** la PrifMi. Quud les Officier» ftCavatien
M me vircDt toDt pâle & défiait , Q^fènûrent
„àbeilài]esye«z, $ àoicBt tous iriAet ; &
^ menai je me mias 1 pkaoi, qiuad je vis
qu'on m'ametiotcât , & aa'mi ne Irak les
** jambes avec «ne dùine oc iér par defloas
*> le ventre du Cheval , & ea cebrl éqnipage
»le Gatde, & lesdcuxCoaiptgaiesincsie-
>i nirent d Stra&boofg , tont droit gkai i la
„Piir(Hi, tout au haut d'une Tobt, d'ovje
j^découvroiï tien loîn fur le Rhin. Lie Gar-
de de Mi. l'Intendant me traitit bicB par
'* le chemin, & me noorità boucheqncvenx
** tu ? mais il Q£ me laiHoit parlai à pcrfbn-
**tie, ce tjui me ât croire quelam^cbeétoit
M découverte. On me donnii un bon lit dans
^ laPiifon, & bien i m^ng^, &àboirede
^ bon vin du Rhin-
j^ Dès le lendemain au matin fur les 8. heu-
res rioteadant de Strasbourg m'envoiit
** quérir par le même Garde , & une Compa-
** gnîe d'In^tetie qui matchoic ea hayc 3
>> cAté de menai , & qui ne fouffroit à pcr-.
^Ibnocdeai'af^Pfdial. Je trouvis l'Imen-
»,dant
.--„Googlc
CM rWfipire de la BafiHU. IJy
~y^ dVM dtns vRe Sale devant bin fën , iree
> Teii SecretaÏTe & trois oo guktre «nres.
" D'abord qtfilme vit. Hé bien -Mt. l'Abbé
** medit-ii, n'êtes vous pas un honnéteHom-
*» me j un bon Sujet A un boa Preitre , de
*» contrevenir , commt vos aveï fiiît , aux
9> Ordonnances de vôtre Rouai, le meiU
,f leur PrincQ & le plus Clément qui fut
^, jamais pour lès Sujets, qui nedevroieirtlâ
regardai qu'avec des yeux d'admiration f j«
" commcRçai i refpîfai, quand je vis que ce
**n'étoit qôe cela ; car It jE m'aroit lainai
»» parhii le preisier , j'«llois me jettai i ge-
iinoBX, demandaipardonànôtrebonRocait
,,& me découvrir moi-mdme. Akmjeliâisi
„ Monfeigtieur il eft bien vrai, que j*si griè-
vement contrevenu aux ordonnances du
*' RotiSfi i m^s ît m« l'a pardonnai , 0c Mr. -
" Tallard , & le R'. P. la Chaîfe en font d«
>i bons tdmoÎDs. J'ai (ai lis (emdnes auSe-
^minarre de St. Lazare pour leftît, oùj'ea
^ ai feit une rude ^Hmitence. Mr. TAbbé-d-
pliflucï vous mieux , dit-il , je ne vousea-
- tends pas. JeveaxdîreMonfe'^eur, qu'é-
'' tant Curai à Lery en Normandie-, je âc
*>plufieurs mariages contre les ordres dr«
>> Rouai , qui me firent abandonnai ma Cor
,' re, & palîai en Angleterre, où j'eus lafoi-
^ blellè d'Apoltaliai. Mais je tus trouvu
^ l'Aumofnier de Mr. Taljard à Londres,
* qui me reconciliit à Dieu , & fon Màitie
'* au Rouai. Il me donnit des Lcftres de re-
■" .commaiidation pour le R. P. delaGhaiftf,
» pour rentrai dans ma Cure , mais oomme
M elle écoit remplie, j'aiétai-dietdiaidel'enir
nPioi
.--„Googlc
i6o L'Im^uifitioM FrAMfoi/i
y, ploi aillcors ; & rafio jefuîsentru AvtrA-
„ nier dans le Repaient de Marivam. A-
„ lors il fc toornit vers fen Secrétaire. C
,, fiuit, dit-il, recoDinKDçailePréambalcdc
„ nôtre Frocéz verbal. Voici qq fak qai U
„ meiite bien , & un Homme pa coupablct
tf que je ne croions. La fièvre me penSi
„ prendre, &je nedoutoispu, quclaminu
„ De fut éventée. J'allois de çu coup lame
„ jettai i fcs genoux , & li avouai men pe-
„ tit fait, quand il médît: N'eft-cepasvos,
^ qui avei vendadesLivresdeSendu5àrAI>-
„ M Roiet , Précepteur dei Enfants de Mr.
„ Biunct de Rancy , Fermier General , &
„ à un Médecin nommai la Sautais ? N'eft-
„ ce que cela, dis-je en moi-même? Mon-
„ feigneur, li dis-je, j'avois achetai par cq-
„ nolitai quéques Livrés en Hollande , &
„ comme j'étois biep ajfe de m'en deffaire;
„ & d'en ravoir mon aident , je les leur ai
„ redonnai pour le prix qu'ils me coûtolent.
„ C'étoient des Livres fort curieux vraiment,
„ dît-il , & dont le feul Titre vos- dcvoit
„ &irehorreur» livosaviciétaîurjbonFran-
„ çois i mais vos Mariages contre les Or-
„ donnances de Sa Majeliaî font aJTés con-
j, noître que vos n'avez jamais étai qu'un
„ très méchant & iufidelle Sujet. Ah ! Mon-
,t feigneur, dis-je, j'aime nôtre bon Rouai,
„ pus que ma vie, & j'aimerois mieux mou-
„ rir,. que de li déplaire : mais vous même,
„ qui eites de fes Miniflres , ii vos vos é-
„ tiez trouvai, comme ihouaf , eu Hollan-
„ de , auriez vos pu vous empefchai d'acbe-
„ tai , & de lire de ji drôles 4e Livres? &
„ tOBS
;C.oo^jlc
eu rHifioire de ta Bajlille. 10I
i> tous les Miniftresde France ne les ont-ils
), pas dans leurs Cabinets , aufli bien que le
„ Chancelier, les Premiers Prelidents &au-
,-, très Officiers de Sa MaeHai? .Ne fcavei
„ vous pas , dit il , que vos biaux & drôles
„ de Livres font ia caufe que l'Abbé Rolet,
„ & la Saulais font à la Ballille ? Non ,
>', Monfdgneur, li répondis-je , & je plains
„ le pauvre Mr. de la Saulais. car jamais il
}t n'en a eu que trois , &tous des pu medio-
,t cres. Pourl'Abbé Rolet , il en a eugea-
t> timent & bien. Cependant reprit il teui-
1, arrêt a étai tnilis fur la Gazette ; ne l'avei
„ vous pas leiie ? Non Monfeigneur , fi je
,» l'avois leiie j lui dis-jc , vos ne me tien-
■ „ driez pas dans vos pattes ; j'érois bientôt
T, futjacqucs Déloge. Cependantilyaétailî
„ bien mins, reprit-il, qu'en voilà l'article
I, couchaitoutdu longfur la Gazette; tenez
„ lifei là. Et qttandje l'u Icu toutdu long,
„ je n'en douti pu. Après il me démandit,
,( fi je n'en avots pas donnai à d'autres? Noa
„ Monfeigneur , li dis -je. Qu'elle impu-
„ dence, reprit-il i comme fi nos ne fçavions
„ pas bien , que vos en avez aportai une
„ quantîtai prodigieufe d'Hollande , & que
„ vos les debitiez^aux Tuilleries, au Palais
„ Roial , au Luxembourg ■ & que vos &
„ vôtre Vallet les portiez vendre par les Mair-
», fons ! Quand il m'eut dit cela, jemejet-
„ tis à genoux, & je lidcmandîs pardon, ea
„ pleurant , & je le priai de m'obtcnir ma
„ grâce de nôtre bon Rouai. Vos mérite-
jt riez, dit-il , que je vos âlfe pendre tout
„ à l'heure; nuii remereiez Dieu de ce que
.--„Googlc
stf» Ï^ImqmJitU» FroMfiife
„ VOS aveï affaire à on Rouai Clément , fc
„ qui n'aime pas à répandre le fang. Apris
„ cela il me ht paflki dans UBe autre Cham-
^ bre , où je fus pu de trois heures avec fcs
„ Gardes, & d'autres Genis, qui me dirent
,, que mes affaires alloient bien , paifqne
^ Monfeigneur l'Intendam m'avoît parlai
,^ comme cela; que c'étoit un bon & hoiH
^ aète Homme, qui ne tiroit pas les chofès
„ à la rigueur. Après cela Monfeignenr
„ l'iqteiKuqt ine fie rentrai, poiir me lire \ç
„ procès verbal qu'il alloit enviai àla Cour;
„ qa'il u'avoit pas manquai de commençai
„ par l'indulgence qu'avoit eu pour mouai
rt DÛire bon Rgu^i , de me pardonnai mes
M Marines prohibez par Tes Ordonnances ;
„ D0n<d>llant quouai j'av:]is retombai à faire
1, na Trafic fcandaleux & éiroitrcmeijt def-
„ fendu du Livres diaboliques , que j'avois
,1 débitez par tout Paris, &dont l'AbbéRo-
p lett Chaaoine d'Autun, avoit achetai une
„ qqautitai confiderable: que pour le Mede-
„ cia la Saulais , il n'en avoit eu que trois»
„ tous'des plus Jinples i, & i! m'ordonnit
^ de fîgjBai çu procès VEibfti. . ^\\] lidis-Je,
f. MonfeigneuTi vos meperdeï , en leçon;-:
„ njençantpattcnonvelailepaidon, qucm'a
ti accordai le boa Rouait dont ne falloir i^a
H pu parlai que de mes vieuillesiitatines , ou.
I, des nits d'entan, C'cû, dit-il, pourmiem
„ ot^enir vôtre grâce ; qui yos a pardonnai
p one fois, vos pardonnera bien deuji; &n,ç
- H li<Hei vos p^ bien , que je tipis par dire,
^ que vos VQS teaiettez î la, Glemepçc da
M &VMi4 d9tUï VOS implAT» 19 wreçjcorde,
,. Après
ouVISJtaire de la BaftUU. atfj
,, Après cela je lignîs, & il me renviit dans
laPrilbn , où je refti jufcju'au ïtf. Macs.
""Si j'avoîs fçû que jedcvois venir à laBaf-
*' tille, je me ierois fauvaivîngt fouaisponr
''une; car la Geôlière éroît devenue amou-
»reufe de mouai, &venoit à cœur dejour-
„ née caulài dans ma Chambre» & me con-
^ toit, que quoiqu'elle fût très gentille, & eût
,^ le plus biau corps de Femtne qiii fut ja-
mais, que fen Mvi ne l'aimoitpas) qu'il
"n'avait que du mépris pour elle, & me fit
>* aflètconnoîti'e, que Hjc voulois l'amenai
»» avec mouai , elle me facîlîteroit les moïens
,) de me fauvai , & qu'elle emporteroit tout
ce qu'elle avoil de meilleur. Quedel'aa-
tre cotai du Rhin je ferions fur les Terres
* de l'Empereur , où ame qui vive ne nos
•' dîroit rien. Que de la manière dont elle
«♦s'ypreodroitjeneftnonsjamaisdéconverts.
>> Que toute £% vie elle aroit eu volontai de
,t fe fktre de la Religion Reformée, & que
,, j'irions tenir Cabaret enfemble à BaÛe , oà
en quéqu'autre bonne Ville. Il t avoit
** itout fous ma Chambre une jeune Troupe
'* de Drôles condamnez d'allai aux Qaleres,
" qui ne demandoieat pas mieux que de Ce
r*èmvai- LiCJourla, Geolîér« me permict-
„ tott de les allai voiies dans leur Chambre.
,, Il y avoii entr autres un grand Decouplai
bien alerté nommai le Chevalier, quiétoit
' de Granville i en attendant la chaine ils ;
*' faifoiem une vie defordoonée , ^ cban-
' ** toient & buvoietu du matin jufqu'au foir.
hll ne tenoît. qu'à monai de me f«vir de
«tleur oiiaiftéw powmoa iva&oa ; mais il
„étoIt
.--„Googlc
i64' h'Iuquyitum franfoïje
„ étoit écrit que je dcvois venir à la Baflille;
„ & ma mauvaife Fortune me gardoit en-
„ corc cette poîre d'angoiflc.
«Enfin l'heure fatale arrivit , qui fut un
„ Dimanche %€. Mars au matin . que qua-
t, tre Archers vinrent meprendreàlaPrifon,
I, pour m'amenai dans cedetettable Colom-
„ hier groffir le nombre des Pigeonneaux de
„ Mr. le Gouverneur. La Geolitfre ^toit
i, toute éplor^e, &medifoit tour bas qu'il
„ txcàt bien cmploiai , que j'alifTe à la Baf-
,, tille, poilqu'il n'avoit tenu qu'à mouai de
„ mefauvaî. Ils me mentirent achevai de-
„ vant tout le monde, judement comme oa
t, fortoit de !a grande Mefle , & me garori-
,1 rent les mains, & me liirent les pieds par
„ defibus le ventre du Cheval. Mais le len-
,, demainils me laiHircntlibre, quand jeleur
„ eu)p'romis,fouaide Preitrc,que je ne m'é-
,t chaperois pas. Cependant , eu paflànt dans
„ tin bois , la tentation me print: je fautii
„ du Cheval à bas , & je m'cchapis dans le
„ bois. Ils courirent après mouai , & me
„ ratiapirent , & me reliirent mieux que ja-
„ mais. Ils me noùrrifToicnt comme un Pa-
„ pc; tourjours â nos repas Ros & Bouil-
„ Jy , & du vin à gogo. Je les prii de ne
„ me pu liai; & je leur fis des ferments ter-
„ riblcs , que je ne m'exquiverois pu ; maiï
„ lis ne voulurent pu s'y fiai. La nuit il j
„ en avoit un qui couchoic tourjours avec
„ mouai , & qui s'attaclioit une chaîne i la
„ jan^ , qui tenoit à la mienne, fermée d'un
„ Cadenas. Je fis le malade : Je ne voulois
„ pu tnaogeai ; ce^quifitqulils meproinicent
» de
.--„Googlc
»n l'HiJioire de h 'ÉaflUh. t6f
,^ deinedetftchai, quand nous entrerîoss dans
^j les Villes. Je n'atcendois qu'à palfai fur
un Pont , pour me jettaî dans l'iau , & com-
»* me je nage comme un poiflbn , je me fe-
»» rois bien-tôt fauvai. Maisjecroi qu'ils
*• s'en doutoient ; car quand je paffions'par
,, deiTusun Pont, ou quéqu 'autre endroit pé-
„ rîllcux. ils me faifoicnt marchai au mitan
d'eui quatre. Enfin j'arivimes à laBaAi'l-
** le un Jeudi 6. Avril 1701 : où les Gardes
*' me priîrent de rendre un bon témoignage
wdu bon traictement qu'ils m'avaient fait
,• par le chemin; ce que je fisétoquemment.
,, En effet ils me donnoient tout ce que je
„ vôulois , & hors la libertai , rien ne me
mauquoit,
* O'abord en arriva' t dans ce maudît gouf-
»' frc I on me mit à la première Chambre de
»> la Tour du Trcfor ; mais je n'y fus que
ijdcuxjnurs. Après on memitàlatroiliéme
,,dt; la Chapelle, oùjcfisune Penkenceton-
, te des plus rudes : cefiKlàquejcm'étrillî»
de la bo{ine manière , ainll que je vos l'ai
''racontai. Comme en entrant ils ne m'a-
*» voient pas fouillai, croiant aparemment que
'» je l'avois étai à Strasbourg, j'avois biaucoup
ti' de papier blanc fur mouaî , & mon éctitoi-
,j rc quejeconfervai. J'écrivis ma Confeflîon
, générale d'un bout à l'autre bout: il yen a-
' voit une belle râtelée Je la cachi dans un
*' trou , en attendant le Gonfefleux , que je .
" demandois tous les jours , fans pouvai .
'♦l'obtenir. Et bien m'enpriutd'avoirmins
» ma Confellton dans un trou ; car au boiu
u de quéque temps , on me vînt vllitai , &
M II aprtt
s4ftf It^InjuiJttnw Françoife
après avoir prins men papier, &mcn écti-
toire, ils me rournircDt toutes mes poches;
**niepriiirem quarante fols que j'avois, que
** la Geôlière de Sttast>oi]rg avoîi fourrai dans
nm^poche, enmedifantadicu, &enm*cni-
ï)brachant, & me reminrent dans laprcmiè-
^re Chambre , oà j'avois étai en arrivant.
, Au bout de huit jours , ils m'en rctirirent,
pour me remettre dans la troiiîéme de la
Chapelle , où j'avois cachai ma ConfelTîou,
» qui me tenoit terriblement en cervelle ; car
»> enfin , fi elle ètoit tombée es mains des
Il Officiers, j'étois perdu fans refource. Je
,, trouvis dans cette Chambre un Kouakrc
Anglois , qui s'appclloit Mr. de Brunsfields,
"un des pu biaui elprtts du Monde. G'é-
' toit on Médecin de la Rciucd'Angleterre,
* Femme du Rouai Jacques. Il l'avait, fui-
*• vi en France , & c'étoit pour la troifième
>t fbuais qu'il ètoit à la Baltîlle , pour avoir
„dic Jrop fincerement fa penfôc; Il avoital-
iîfl^ aui Couchés de la Reine en Angle-
terre, & à St. Gennain; & il H tenoitu-
•* ne des mains , en qualitaî de fen Médecin,
*' pendant qu'elle acoucho-ît. Quand j'en-
»» tri avec li , il avoit la teice liée d'une fer-
>» victte toute enfanglantée. Ru l'avoitkit*
^tVa y & li avoit calfai la teite d'une chaife.
, j'eumes bientôt fait connoiffance ; il me
contit tontes fes avantures. Il avoit prêtai
^ tout fon argent au Roi Jacques , & à li
"Reine fa Femme. Il aune bel le Femme &
«une belle petite Fille de dis o douze Ans,
n qu'il ma promife en mariage. Je l'ai vUe bien
„ des fouais.car la Mcre & I3 Fillevenoient le
«voir
u,:,-,zf--„GoOglc
cm VHifiàh-e de h Bâjmie. i(.f ^
„ voir fouvent àlaBaftille, & après cela cl-
„ les fe promenoient fu le Pont St. Aotoi-
,, ne, &dans la place, pour que je les viJffi.
Nous l'interrompîmes pour lui dirCj que nous
les avions viles bien des fois aum ; & que
nous nous étions bien dautet , qu'elles avoient
quelqu'un â la Baftille , par l'attachement
qu'elles avoient à la rÉgarder, „ Ce n'étoFt
„ qu'à mouai qu'elles en vouloient, dit- il;
1, cat elles avoient déjà parlai à Mr. Bruns-
„"fields quand elles venoient là, N'ai-jepas
„ une gentille petite Maîtreffe ? Oui , !uî
dit Mr. Linck , mais quand vous feriei ca
état & Maître de l'époufer» vous ne lepour-
rieî, quand à prefent: ce n'efl qu'un Enfant,
Vous feriez bien fon Père. „ A vicui Chat,
„ tendre Souris , reprit -il : ou en croque de
„ pu vertes : pour être petite , elle n'en efl
„ pas moins creufe ; & puis que je ne fni^
„ pas dehors , je ne fommes pas tous deut,
„ en Angleterre; ni je ne fçais en quoi con-
t, fiflefen bien : je veux voir clair, &nemè
„ pas mariai comme un fot. Et que devient
l'Evêché Mr. l'Abbé? répris-je, „ Patien-
,', ce, tout aura fon temps , répondît-il, il
„ eft des Evefchei en Angleterre, auflî bien
,, qu'en Allemagne. Oui. disje, mais ce
■ n'eli pas pour les Kouakres; ils en font ét-
eins. „ Monfieur , teprit-il le Rouai peut
„ touf ; & fi il rentre dans fen Roïaume ,
„ comme cela eft indubitable , ainfi que te
„ Kouakte me l'a fait voir , comme un &
„ deux tout trois ; la Mère du jeune Rouai ,
„ pourra bien l'obligeai de donner un mér
„ chailtEvefch6,pourrecompenfaiunHoin- "
M » ..me
>oylc
s68 L'IiÊfaifitiff» FroMf^fi
■ „ me qui leur a facrifiai tout fen tnen ; car
^ &RS l'Evefchtf, adjeujufqu^aa revoir: en-
^ coiena coup je ne ferai rien fans voir bien
„ clair. Je comprïns bien tôt, par ces raî-
lonnements , qu'outre la bctife naturelle éc
jnhcrantc , il y avoit bien du dérangement
daos Gl cervelle. „ La première chofe que
„ je fis après l'avouer en^ral&i , continua t-
„ il , & lui avouer offert mes petits fervi-
,) CCS , ce fut d'allai promptement vois en
»i men trou , fî ma Confeffion y étoit en-
tt core : mais je fus bien ébahi & bien pe-
" naut , quand je ne ti trouvis plus. Que
" cherchei vous , me dit-il, Mr. l'Abbé? je
" vos vois tout inquiet. Rien, li répondis-
"je. Monlicnr, dit-il , ii'elî -ce pas vôtre
" ConfefGon? n'en foiezpasen peine; c'eft
*' mouâi qui l'ai trouvée. En veritai où cft
" vôtre difcrction? n'eft-ce pas afTez que de
,, demandai pardon à Dieu, tans déclarai vos
,, péchei aux Hommes ? Si cc'.a étoit tom-
„ bai es mains des Officiers , où eu éùn-
,• vos? & fi vos aviez lu cette belle Confef-
♦» fion à l'Amôoicr, ou au Jefuite ■ vos é-
»• tiei ici tout au moins pour le rcfïe de vos
»' jours; car c'eft la même chofc que fi vos
" l'avicï revcltc à Mr. d'Argenfon. Ils n'o-
" fcroient , fur peine d'être brùlei vifs , li
" dis-je. Ilsnefont pasbrûleivifi, reprînt-
JJ il , & ils le font tons les jours : j'en fçaî
„ des exemples , contînua-t-il fi terribles «
„ que cela fait horreur. Apres il me lavît
„ de la belle manière la teite fur toutes mes
» escapades , & mes menées. Penfez vos
» de bonne fouaî , me difoit-ilavecunecha-
.--„Googlc
M PHifloire de la Bafiiîte. i «9
j, titai paternelle , allai jamais en Paradis à
moins que de verfai une' Mer de larmes ?
' Après tout, aufond, lidis-je, je n'ai fait
'' tort qu'à mouai même , je n'ai tuai, vo-
*» lai , ni iM-ulai. Quoiiai! reprenoic-il ce
»» n'ell faire tort qu'à vos mêmes, que de
M corrompre quafî toutes les Femmes , & les-
^Filles d'une Parouaifîe ? d'en prendred'au-
^j très par violence , & d'emprunter , pour
ne jamais rien rendre i Vos cites dunné
*» pauvre Homme ! fi vos ne fuites une pé ■
** niteace proportionnée à vos crimes. C'ell
M bien men intention , lui dis-je , comme
», vos l'avei pu vois par ma Confeffion. Cette
^, ConfeâionUelt un noQvieau crime, reprit-
il; c'elllurladuretaide vdire cœur qu'il la
" fwt gravai , avec des larmes de fang. Enfin il
*»mefermonnitdelabellemai;ifre. Quéqiies
>*joursaprèsquejefumetenfeinb]e. lâFem-
n me aportit un ordre de Mr. de Pontchar"
„ train , qui enjoignoit au Gouverneux de li
, faire vois fenMari: il n'y avoir pas à balançai.
Commémore poui empefchai , qu'ilnc li
'* contît fcsgriefs? Ilavoitaâuellementdeiu
'* trous dans lateite, que Ru li avoit^ts,pour
M s'être plaint de ce qu'on Icfaifoit mourir de
» faim. Enfin Corbé montic à nôtre Chan^
„brc, pourlidire, qu'il alloit vois faFcm-
„me, & laFillejmaisqueMr. le Gouverneux
lepriuit, de ncpasdirec&quis'étoitp^fô&
" que li il ai fe plaignoit pas , il li rendroil
*^ tous les txms fervices qui dependtoient de li.
" Il avoit amenai avec li le Capitainedes Por-
«tes, le Chirurgien , & Bourgouîn qui a-
yt madouirent bien le bon Kouakie ^ pooi
M 3 jjl'eîi-
^70. L'Ivqaifitk» Fratipife
,^ l'engageai i ne pas fe plaindre, lis firent
,ce qu'ils purent pour li faire ûtai la fer-
* vietK qu'il avoit à la tcite , & prendre fa
** perruque , tnaïs il ne voulut jamais. A-
>7 prCs Ûea des allées & des venues, ils lefi-
Mtent à la parËn defcendre , fur les trois
»r heures de relevée , dans la Sak , où fa
,, Femme l'attendoit depuis neuf heures du
j OUtin : il eft vrai que le Gouvèroeuï l'a-
' voit ^leadidement Im diiiai avec lî, elle
. *' & fa Fille. P'abord que là Femme le vît
'• en il bel équipage , elle fe mît à pleurai ,
>i & li dire : eh quoi 1 mcn Mari ou me dit
M que vos faites ici le mauvais. £t boa
^, Dieu! qu'cft devenue vôtre douceur ordi-
naire ^ & vos impatientez -Vos , p^ice
"que Dieu vos aSUge^ Namii ma Femme,
"dit-il , l'on voi trompe : l'étal où vos
'! yie voie* , eft une preuve do contrsûre.
»» Allez trouver la Reine , je vos en coa-
„ ju^e , & je vos l'ordonne , & dittes li ,
,j que fi elle ne me ti^e d'ici , c'eft fait de
tnoijai: l'on m'y fait mourir de faim , &
" q<)an4 je m'en plains , Ton Qi'ajromnie \
» en deux mots voilà la veritai puis qu'on me
>> force à la dire. Aparemment que je vos
n vois pour U dermére folies , & en difant
,, cela il l'embraflit , cUe&faFille, quifon-
^^ doient toutes deux en larmes. Sa Femme
j^ s'évanouit, quand il fortit de la Sale. Dès
.le lendemain on nos mit tons deux dans
>'' lapremiéreChambrede la Beitaudiére, qui
"cft us Cachot clair. Voilà, dit il, pom'me
*■> puni d'avoir dit la veriiai : mais je fuis cer-
it tain de ne pas demeurai daa$ ce trou quin-
,,te
u,:,-,zf--„GoOglc
eu Fniftairt de la BafliUe. 171
„ le jours , ou que j'y demeurerai toute inavic.
„ En cttet j'entrimcs daus cette Chambte le
„ 17. Aoult t & ît efi forci de laBattilIe le
„ 30. Septembre de l'Année àetaiéiç. C'eft
„ le plus bel efpirit du Monde, il a trouvai
„ le fecret de flire allai un Vaifièau de Guerre
„ contre vent & marée: ilen afait^épreu-
,, ve au delfus de Conflans , devant Mr. de
„ Poiurîs, qui a dit au Rouai, quccVtoit la
„. pu belle découverte du Monde. II fçait
„ tomes les particularité! de la Ballilte fuie
„ bout du doigt, & il ne tient qu'àlidelaire
„ pendre le Gouverneux & tous fes Satellî-
„ tes. Il tenoit quali les Longitudes &■ \c
ft Mouvement perpétuel , quand on ratrêtù.
„ Il a trouvai le fecret d'avcuglai toute une
y. Armée. C'eft le mcme dont fe fervit St.
„ Paul devant le Proconful Serge Paul , pour
„ aveuglai les deux Faui Prophètes. Il fait
donc des miracles, luîdîs-jc'' „ Bon! il
,, fait tout , me dit-il , hors la faufle mon-
„ noïe; encore laferoit-il bien, fiilvouloit
„ C'eft un Homme incomparable.
„ Après qu'il fut parti , je fus mins avec
,t Mr. te C^Ton de Pokenet de Vienne ,
y. Homme de qualitaj & très bienfait, quia
„ éiai au Setvicede l'Eiopereux, où ilavoit
f, étai Lieutenant Colonel d'uuRrgimentdc
„ Cayalcric;& après l'EmpereuxTavoit don-
f, iiai au Rouai Ciuillaame pour commandai
„ fes Années , comme un Officier bien en-
,,'Iendii au métier de la Guerre. Et comme
„ il aimolt paiTioDuement la France , on fl
„ avoii fervi étant jeuue dans tes Moafque-
„ taireî ilyrepa£[itapcÈslaPaû.deR;fwtdt,'
M 4- „«t
■ ..^Xooylc
»r» flnqKijîthn Frawf»!fi
», & il 3 ^tai artétai , comme Etranger H y a
^^ environ cinq o iix Mois. Sen pu grand
crime cft qu'il étoit faifi des Eitampcsquc
"D**' L'** F***, Libraire à Amllerdam
*> a iàit gravai contre le Rouai, qui feroient
w crevai de rire , car je les ai vu tretoutes
nd'un bout à l'autre, aiiSi-bîenqne fen Al-
„ loiias. C'cft de li que j'avoîs achetai lapu
„ grande part de mes Livres : c'eft le pu drôle
^^ 3e corps que la Terre aitjamais portai. Je
ne nos foininesjamaispu accommodai Mr.
"le Baron de Pokenct&mouai; carildifoit
s' qu'il n'avoit jamais vu de François fi mal-
,1 bâti que mouai , quejenefçavois pas vivre;
«quejen'étois qu'un RuUre&un Pitaut. Et
^ inouai je li dilois qu'il n'étoit qu'un Gre»
din, unCociier, &unBitcleuxi îln'avoit
"qu'un liard fu li, quand i! fut arrêtai, par-
"ce qu'il avoit perdu tout fenargenilefouer
ï' précèdent cheuï des Dames , où il alloit
,> jouai. Il eit vrai (ju'ila des habits ma^ni-
,1 fiques, &Ies pu belles denitrellesduMoii-
^de, fines comme les-cheveuï. Il a un
^ Mantiau de vclou rouge tout brodai d'or»
' qui a coûtai cinq cents écus. Il n'étoît
'* pourtant pas, iî bien norri que IMr. Con-
»' llaiitin , quoiqu'il fût à la groffe bouteille;
„ & il me faifoit acroire , qu'il u'avoii pu
,, voir fen Valet de Chambre , ni fes Laquais
^^ depuis qu'il avoit étai arrêtai : mais je le
crois bien, car il en avoit autant queTi-
*'tou, pas pu que ma Grand-Mcre. II y a
»' huit jours que Mr. d'Argcnfon le fit def-
'ïccDdre : il le jettit à genouï devant li, le
M coajurit d'avoir compaHion d'un Homme
» "ifi
u,:,-,zf--„GoOglc
ùitTHiftoire-^laBaftilU. 27Î
r, it oualitai très innocent , & que le feul
,, plai^r de demeurai dans Paris rendoitmal-
„ heureux. Hier an matin on Icfit fortir
>, d'avec mouai. je !e crois dehors de la
■1 BaliiMe, car on vint quérir toutes fcs har-
„ des , qui étoient dans nôtre Chambre , &
„ mouai trois heures après on m'àmenit ici.
,, Et vêla !e Gaillard ! Allons buvons un
I, coup; j'ai affei parlai pour boire,
AfTuremeut Mr. l'Abbé , & vous nousavei
raconté des chofes étranges-, lui dis -je. Mais
permettez moi de prendre vôtre parti contre
vous;mêmc.D'où nous coniioiflei vousMon-'
fieur & moi, pourïious faîredes confidences
telles que celles quevous veiiei de noasfat^
le? „ Palfanguoai, je vos ai déjà dit, que
„ j'ai le ccEQr fur le bord de mes iévres , dît'
„ il en m'interrompant , & que je fuis franc
„ comme l'ofier. Patience Mr; l'Abbé, lui
dis-je, écoutez-moi, je vous prie avec autant
de tranquilité & d'attention, que j'en ai ea
pour VOUS; Un aveu indifcret & téméraire
ne fe doit pas appeller fincerité. Nous coa-
noiffez vous encore un coup , alfez , pour
«n moins de vingt quatre heures qu'il y a.
que vous êtesavecnous, nous rendre les Ar-
bitres de vôtrevie? Car enfin , finousétions
suffi indifcrets que vous, pardonnez moi ce
terme , où en feriez vous? „ Que vos aî-
„ je donc dit, Mefficurs? reprit-il. Allez,
Itii dit Mr. Linck , pour vous envoler à la
Grève, fi nous n'étions pas Monfieur& moi-
d'auflt honnêtes Gens que nous le fommesj
Mr. l'Abbé cominuai-je , vous ne nousavci-
rien dît, & pour moi j'ai toutoubHé, quand'
M jj. voui-
■ ■ u,:,-,zf--„GoOglc
1^4 L'In^KÎJîtioif. Fraitfçife
vous m'amiei caffé un bras . jenem'enjbn..
vjpndrois pas pourvous faire du mal ; mais lî
ispiais vous êtes mis avec quelques autres
Çrifonniers , aiez un peu plus de difcretion.
& gardiez vous bien d'avoir la îangueli légè-
re. L'Evéche qu'on vous a promis , pour-
lipit bieu vous &ire doiyipr uue M.ytre de pâ^
BÎer , plutdt qije cells eu broderie , <i^i vous
a fait tout haïar4er pour l'obtenir , & après
lAflUelle \ous foupirez fi ardemment & (w â
Iflin. Voilà pour' ce qui regarde vûtrecorpsi
4e pour vôtre ame Mr. l'Abb4 , hclas! peu,-
ftz - vous iàns trembjer au fupçfte état où
vom êtes, réduit? Vos pcchei accumulez &
Ipultjpliei parde0\jï,lçg cheveux, de vôtreté-
t^, ont éteint en, vous juiqii'à la moindre é-
tincelle de vôtre Foj, Quellovie a. été la vô-
V« ? comment r-eilitucc l'honneut à tant de
Çemmçs & de Filjes que vou# avez corrom-,
pues? VousvouB5tpsfcrvi.de vôtre Minifté-
^e, DOp pas pou^édifi(;r, mais pour détruire;
qoQ pas pour retirer vos IJrebis du, bourbier ,
m^is pour les y plonge^. d,'une manière ese-
<;rable. Ijcur Conl^eflîon vous a découvert
If urs fccrets ,. & leurs foiblelTes ^ dont vous
Yous êtes fervi ,pour les livrer auoc paflious Ie&
illusfcandalqu|i;s& les plus ctimincllçs. Quel
Fadeur, quidevoroit fesOuaillesîComtnent;
lellituer cet argent , que vous avezeippiun-
té fi légérenjcnt â vos Pafoifliens poi|r;fQur-
lyr à vos débauches ? cetïe réputation qutsvousi
^vez par majice i^vie auj; Recolets. ? Caf ».
quoique la plupart de ces Moines ne valent
guère mieuïque vous, du inoins ilsontfoin
4? faurct les aparepces. Et encoK biea qu^
vous
.--„Googlc
êurWfièirl'diîiffalîiUè. rfr-
vousaîetyolé des Voleurs, pnîfqtt'euT mtf-
mes, en gueufamcommeirstom. voîentles^
véritables Pauvres, je croi que tous él« en^ .
obligation de leur reftituer ee que vous leur'
avc2 volé ; comme eux mêmes fom obtîgeï-
dc reftituer aux Pauvres ce qu'ils leur volcnt-
tous les jours. Vous avez empêché Mr. Da--
poigni d'époitfer une DemoifellfeqBe vous a--
viei corromptie , non pas, parce que l'honneur"
de ce Cavalier y étoit iiuereilîf, imispArun
principe de jaloufie; comment pourrez voas-
jamais reparer te tortque vous av« fait icette"
Demotfelle ? comment repirer celui que vooS'
avez fait i vôtre Confine Babetti deJaFeuilMej,
à la Marchande de dentelles? Au- lieuée l'ëpou-
vanter par unefeîme vifion diil>iab!c, (s'voug.
. euffiez ratifié !e mariage que devant Dieu voo»;
aviez contrafté avec elle , combien lériez-vous-
plus heureux que vous n'&tes aujourd'hui ?'
Vous n'avez tùit vceuderenoncerau mariage.-
&de garder la continence que pour enfrein-
dre les Lois les plus facrées du mariage , &;
vous plonger dans toutes fortes dediÏÏbiutiony.-
Vous n'avez plus de Religion , parce que:
vous en avez làppé tous les fondements , re-
jette la grâce , & éteihtdans ledtbordemenC-
de mille impûretez le Flambeau ^evÔfrefof,
que vous ne pouvez plus raîumer, qu'en ti--
rant de lincéres foupîrs d« plus profond de
vôtre coeur. Dieu ne vous a mis dans cette-
Frifon , que pour rentrer en vous même,".
& retourner à lui par une Pénitence auftcre
& cOnltantc. Mais l'ciiènriel-dc la Péniten-
ce , c'eft une douleur parfaite , une hor-
reur, at^liie du péché', & une rcfolution fin--
M.*' ^ oé*- -
u,:,-,zf--„GoOglc
*7* L*^I)iqHifit}oH Franfo'tfe
cérede ne plus le commettre. Sicencfont
pas la vos fcntimeats , Mr. l'AbW , toutes
ces maccratioDs , ces jeunes , ces flagella-
lions ne font que de fauffcsaparctices , & Icî
préludes de i'affreufe Pénitence que l'impc-
nitent fera pendant une éternité fans jamais
fléchir la divine Mifericorde, Pardon Mon
cher Mr. l'Abbé , fi je vous parle avec tant
de liberté , mais je vous trahirois , &moi
auffi , fi je vous déguifois mes véritables feo-
timents. Je prie Dieu de tout mon' cœur de ■
vous bénir par fa grâce , & de vous rappel-
1er des tenètffes à ù. véritable lumière. „ Et la ,
»,laMonfieur, dît il. fijepéchc,cen'erï pas
»pv ienorance ; j'ai deux bons yenx > Dieu
„merci, & ;e fcai menCatccime , comme
,1 men Paternofler : mais c'tft ce diable d'ai-
,,guillon delachair, qui regimbe, commedit
t> le grand St. Paul , & fans les Fumelies j'é-
„rois étai nu des grands Saints du Paradis. Le
ijVice 3 prins nature en mouai, âciltautqne
„ j'aille à Ville-Dieu pour me faire retondre.
Ah ! mon cher Monfieur , crt«eï-moi , re-
pris-je , vous ne trouverei jamais un meil-
leur creulèt que la Baflille.- Sans-Alchimie^
un coeur qui entre tout d'airain , de fer, &
de plomb dans cette founiaife , fera bien-tôt
chûigé eu oi très pur , fi il veut le plonger
dans les eaux de la grâce , & l'embrafer du
■feu d'une ardente charité: Il n.'a qu'àpleurer
& prier: Dieu ne tardera pas à l'exaucer, &à
lui faire fentir les effets de fa toute puilfance.
Ru vint aporter nôtre foupé , qui inter •
rompit nôtre morale, dont l'Abbé ne fut pas.
Qché, „ Avouez mpuai le fait, dit-il,Monr
„ ficur
en FHifloire d* la Baftille. 177
-). fieut , nos avons tous deux aHez patlaî
„ pour faire une paufc ; & l'eiitraâe que
^ nos allons laite, eft un bon veiiicuie à la
„ contrition : car j'ai tourjours oui dire aux
„ plus anciens de ma ParouaiOe , que ventre
„ atfamai n'a point d'oreilles. Mettons nos
„ à table, & après je prirons Dieu de nos par-
„ donnai nos tantes ; & puis vivat.
ïl ne fejourna pas longtemps avec oous
Cins nous donner des preuves inteillibles, que
l'on nous avoit dornié pour compagnon un
des pius méchants Hommes qui fût fous le
Ciel. Tout groflier, fou, & brutal qu'il é-
toit, cVtoît un t'ourBc très pernicieux : il a-
voit des fîueûes diaboliques. M- Lînck ne le
pouvoir plus fuporter. li u'v avoit point de
lottes de rufes qu'il ne pratiquât pour nous "
btouiller M.Linck&moi. 11 me liroitàpart
quand .M. Linck étoii occupé à la prière ou
à l'étude, pour me faire un fous raportdelui,
&fafoit le femblable contre moi auprès de M.
Linck , quand il en trouvoit l'occafion.
Voiant qu'il n'y pouvoit rcuffir , i4 inventa
tous les artifices que fa malice pouvoit lui
^g^erer pour nous cbagrincr. Qaand il nous
voioit occupez à écrire, il fe mettoit à chan-
ter ou à faire quelque lingerie grofiiére. Il
s'avifa de contrefaire le malade, pourïc&ire
donner des Médecines, Ce fut le commence-
ment ouué de fa folie déclarée. Il fe mettoit
à genoux devant nous , pour nous prier de
demander iM.Liiiclt & moi chacun une Mé-
decine , il en demandoit auâl une , & pre-
noit malgré nous toutes les trois dans un m£-
me matin, S'U avoit été moio& robuUc, il fe
M 7 fe-
u,:,-,zf--„GoOglc
378 i,'ÎKfM^iiMt froKfelfr
feroit iadabitai^lemcnt fait cecvct. Un jour
il en prie en R gsaads qiuutlté , & qui mal-
heureufeoieot ctoidn tlvioleatei, que jecm
qu'il ea mourott^ parlescfËortseitraordina»-
res qu'il fit & par haut , & par bas. Gepea-
daat , fclon Lui , jamâiï. fa Médecine n'avoir
bien opéré : il fe pl^iignoit de a'avoit Ëur que
cinq ou fis pauvre» petites, fellcs. Tantôr it
s'en preaoit à une LcÉiucelàiteavectropd'a-
plicatioa ; tatU-àc àuneplume qu'il avoit tran-
chée , ce qui lui avoit éch«iffî le fang ; tan-
ti6c à ne s'êtnepas aïïes coaveR, Se toujours
à n'avoir pas pris aiiJËs de Médecine, ce qui
lui faifoit redpublci la Sole, lue péril où il
k'é toit trouvé par l'excès des Médecines, ne
le reildojt pa& pius circonlped. Quand il a-
voJt pris uns quaudté prodigicu&de drogues,
fiir tout a écail li>it déclaré pour les Apofé-
msi- je lui su ai v^boireju^seEàdeusbou-
tfiillei^ de piflte cbacuoe pow un matin ; il fe
CQUvrait de toutes noï couvwtuces-, &{e{a.î-
IJû'a- £uer d'une manière pDodi^ieufe. Il prenoit,
pour iâi..e év,ai:usr tous ces nemédcs ,. tout le
boiiiUon qui uous étoit aponté pour tous tes
tKois,: outre lequel , îl ^foit boiiijlir toute,
la, viande qiû nous, refloit , & qu-'il avoit a-
malISe queli^e (oh d'une l«inaifis , dont il
fiti&ic encore d-'autre bouillon. , qu'il enton^-
aoit dans fon corps^par dei&i» l'ature. Je lui
eu ai va Le venOie fi plein , qu'il étoit gros
comme un. tambouc ;, & Mr. Linck regardoic
comme un prodige de ne le pas voir crever..
Ge a'ell pas l'unique fou à. qui j'ai vu' faire,
ees méiiiËS extravagances, comme on le ver-
ra d^us Uliiitte de cette Hiftoiie. Nous-noos.
trouï
»M riiifioire dt U BaflilU. z 7»
taOïWÏmjïs fi htigaez de fes folies , de Ces
pnVKears, de &s impettioenees , & de fes
OiâUc«s , que iioits- fîmes tout ce que nous
pûmes auprès des Officiers poBr nous deli-
vier de ce mauves Prêtre. Mr. Linck offrit
ju^ju'à. dix Louis d'or à Ru , pour le f^re
Qjettte ailleius ; mats vainement. Il y a de
l*apar£nce qu'ils s'oppiniawoient à le laiffer
4vecoous ,daDs.l'erperance de bous fàkepci-
dte l'elprit aul£ biea qu'à lui , pournous gar-
der tous tes trois diuis leur maudite caverne,
juCju'à la fin da nos jours. Sorcl écrivoit
ij'«s fouventdes billets aus Officiers > qui £•
toient bien aifes aparemmeni de l'avoir pour
leur elpion dans nôtre Chambre. C'eft de quoi
nous eûmes de fortes indices ; comme on le
va voir. A^ant aprîs <5ue nous avions fait
un trou dans nôtre cheminée 1 pour parlée
auï Prilpaoîcrs.qui étoient au deffous de nous,
il ne nous porta point de repos , qn'il n'eût
' couvert, mai%té nous ce metne trou. II s'ef^
forçoit de nous perfuader qu'il les feroit par-
1er, ce'qa?ilsnemanqueto(ent pas da &ire ,
quaftd ils.i^auroisni qu'il étoit Prêtre , puif^
qu'ils auroient du refpod pour-fon caraaére :
Ù avoiï fct vues malignes. Sou deflèin exe- ■
mité , U eut beau iè nommer , les prier, les
conjurer, les alfurer qu'il avoitdescho(èsde
ladérniàre conrequence à leur dire; il ne put
jamais, eoitirecv un feul mot. Il laiilâ le trou.
Qttvatt , aparemment par malice , fans vou-
loir me pecniettre de le reboucher. Il écrivit
uiLbiliet à fon ordinaire, qu'il donna le loir à:
Sai. Bès le lendemain au matin , à la potntS'
dû; jour., le Ma]oc uft maofiua pas de venir
dans
.--„Googlc
»8o UlHjmfiùoH FramfoSfe
dans nôtre Chambre, & d'aller droit au trou
delà Chcmiuéc, tju'il trouva tout oavct, &
Cnfuite à une autre niche , où ce bon Prétie
avoit caché uafetrement) quelehazaidnou»
avoir tait trouver, & dont il avoir ouvert le
uou. Grand brait de la part du Major, dont
le Curé paroiiToit toutjoïeuxi &rioitdetout
ion cœur, croiant.qu'il nous alloît voirtrai-
oer dans leCachot. CequevoïantMr. Linck-
toutindignéjilditauMajor : n'cft ilpasvraî,
Monlieur, que l'av.is vous en aéré donnédc
nôtre Chambre? ehbienjevousjure foi d'hon-
nête Homme , que le trou a été ouvert par-
le mcme qui vous en a averti. Sur quoi ,
mon fidelk Paliçur ne put s'empêcher de fe
découvrir. „EndiraiitfouaidePrdtre,com-
„mej'ai lamainfurçu Bréviaire, celan'eft-
„ pas vrai ; le trou ttoit feit avant que j'eutril".
„ le dans la Chambre. Oui fourbe impudent ,
reprit Mr. Linck , 3e trou étoit fait , & c'é-
toit moi qui l'avois fait, làns en fçavoir les;
confequences ; mais n'en aiant fait aucun u-
fï^e , puifque ces Meâleuis qui font là bas
ne nous ont pas voulu parler, je l'avois par-
faittemcntbien refermé : mais tuer vou-sl'ou-
vritcs, malgré nous, difantquevouslesfor-
cericï à nous parler , par vôtre mérite pei'
fonncl. Ils ne vous ont pas voulu repondre;
& vous n'avei jamais voulupeimettreàMr.'
CoDllantin de reboucher le trou , fous om-
bre qu'à la fin vous les feriez parler , mais
gour en donner avis à Mr. le Major, par le-
billet que vous donnâtes hier aufoir à Ru.
ïvlonfieur, cominua-t-il , envoies moi au Ca-
^ox, , j*y coulems , j'y feru..ceat fois plus'
côn--
.--„Googlc
»» PHiftoire de U BaJîilU. iBi
content qu'avec ce méchant Prêtre. Le Curi
fkiibit des ferments exécrables , pour protef-
tcr , qu'il n'écoît rfen de tout ce dont on l'ac-
cufoit. Le M^jor, moins yvre qu'à Ton or-
dinaire , vint a mon lit , oùj'étois encore
tranquillement couché , (ans avoir ouvert la
bouciie, me demander gravement lavérîté du
fait, pendant que Ru rioit de toutfoncœur.
Je ^li dis : iVIonfieur , fi vous connoifîiei bien
Mr. Linck, vous rougirîeî, fans doute, de
douter un feul moment de ce qu'il vous dit :
& je fuis très certain qu'il ejl incapable d'un
menfonge prémédité. Le bon Cnré fe prit à
pleurer, difant que nous lui fuppofions ce
crime, pour le chafler de la Chambre. Non,
Monfieur le Major, repris je, je vous con-
jure de l'y lailTcr, mais feul, Àdenous con-
duire Mr. Linck & moi dans un Cachot, où
nous nous eftimerons plus heureux qu'avec
Mr. l'Abbé. Mr. Sorel , lui dit le Major,
tranqurlifcz vous, & fi vous me faîtes remon-
ter ici une autre-fois, comptez que ce fera
pour vous conduire dans un lieu, où vous
aurei tout le temps de vous repentir. Le Ma-
jor alioit fortir , lorfque prenant prompte^
ment ma Robe de-Chambre , je courus à lui
pour le conjurer d'exécuter nos demandes ;
poUc l'attendrir & le forcer à ne pas nous re-
fufcr, pendant que Mp. Linck l'arrétoit, je
courus à une bouteille d'excellent Ratafia,
dont je lui verfaî pluiicurs rafades. Il ne put
tenir contre, non plus que Ru. lis nous ju-
rèrent tous les deux , qu'ils perdroicnt leur
nom , ou qu'ils porteroicm le Gouver^
neur à nous tendre tous trois fatistaits, avant
la fin du jour : mais c'efl à quoi ils ne penfe-
reot plus , quand ils virent ta bouteille bou-
chée , & qu'ils eurent referme la Porte. Le
Curé ât des fennents eiecEabks , pour nous
affirmer Ton innocence , & nous perfuader
que nous le foubçonnions à tort ; ce qui re-
doublait nôtre indignation & nôtre mépris.
Souvent aprèV nous avoir dit millcinjures,
& nous avoir fait cent outrages , il fe jettoità
genoux & nous demandoit pardon, &aQiAo-
ment après recommeuçoii fur nouveaux frais.
Il avoit l'infolence de reprocher à Mr. Linck,
qu'il étoit IcFilsdMnApotiucaire, quoiqu'il
fcût, qu'outre qu'il écoit Doâeur en Méde-
cine , il éioit puiflamment riche , conune le
font la plupart des Apothicaires d'Allemagne.
Oui , lui difoit Mr. Linck , je fuis le Fils
d'un Apothicaire, & j'en &is gloire; mais d'un
Apothicaire qui a dii Garçons dans fa Bou-
tique , dont le moindre ne voudrot pas s'a-
baîÉTer à faire comparaifon avec un mifera-
blc, comme vous. Qui étçs vous? un pauvre
Paifan , qui a gagné une CiKç à foiieter des
Enfeiits. & faire peut-être encore pis, &quî
l'a perdue en corrompant fcs uialheureufes
Brebis, & en méritant le feu. Ce bon Prêtre
me failbit rire , quand il proteftoit du plus
grand ferieux, que bien loin d'être Paifan, il
étoit Fils d'un bon Bourgeois de Village ,
qui ne païoit la taille que pour foJi divenif-
■ èmcnt ; que fon Frcrc ctdf Fermier d'un
Prince de l'Eglife ; & que pour lui » s'il a-
voir mieux pris fes mefutes , il avoit lepié à
l'Etrié pour être Princedel'Eglifeàfontour,
Quel grand miracle! difoit-il, „ Siste V. qui
n'é-
^...Cooylc
„ n'étoîtqii'uR Gardem de Cochons, parvînt
„ Wen il n'y a pas long temps à eicre Pape : je
„Be ibis pas dcfibasalooaique lij je mis dé
„ chair & d'os coût comme lî ; & je n'ai pas
' „motfis de talents que II, pour parvenir à ctt-
„ te Dignitaî ; ce qui me faifoit fouvett'r de
Balfâc, qui dit dans une de Tes Lettres, qu'il
n'y a fi petit Preftolet de Village, quinePa-
pai-je.
Ses manières & (àbétifc, qui nous avoient
divsrti dans les premiers jours , nous devin-
rent infaportables dans la fiiite , par les cir-
conftanees fScheufes qui en étoicnt infepara-
bles. Cent fois Mr. Linck auroit ufê de maia
nùre, pour châtier fesinfolences, fi je ne t'en
avois pas empêché, en ïe priant de tempori-
fer; ï\ foutenoît tes chofes du Monde tes plus
ridicules avec des eniîtemens & des hauteurs
înfuportables, & choit les plus &jneux Au-
teurs pour apuicr fes Abfijrditez. Par exem-
ple il maintenoit que St. Jean Batifte ayoic.
été prcfervd de la tache drigînelle, QuePha-
raon avolt abufé de la Femme d'Abraham.
Que Jacques Premier Roi d'Angleterre étoii "
Frère de Jacques Second. Qii'un Frippier , '
dans la pureté de la Langue-Francoife, s'ap-
peltoit un Chîncherre ; qu'il l'avoit lu dans
les Diéiionnairesde VaugelaSjdeMorerî, &
de Furetiére. Je lui paffois tout ; ce qui ic
faifoit entrer dans des fougues terribles; car
fouvent il ne difoît des pauvretcz que pour '
me donner matière de le reprendre ; ot ne ■
mê contredifoit que pour avoir le plaifird'eu-
trcr en difpnte.
Dans le temps dçs Rogations, qu'i( voioit
ftf-
■u,:,-,zf:--„GoOglc
i84 L*Iiifmlfifiom Frauftifi
affloer 1 Paiis toatcs Ict Proccfliont des Vîl-
J^cs drcoQVOtlÎDS de cette t^iande Ville ; il
CDttoit dans des cstafcs qui leraviflbîent of-
qu'au troi&^me Ciel. Rien à Ton gré n'étoit
plus majeilueux qu'un Curé rcvétud'ua Sut-
plist avec une étolc aucon, un bonnet carié
en tétc ^ précédé de trois ou quatre autres
Prftres , £c de quelques Enfants de Chœur ,
armez de Chandeliers d*argent ,' dont la pe-
fautcur les faifoit fuer à grofTes goûtes ; en-
tre deux dcfquels étoit une jeuneFilIct pt^r-
tant un Cierge prefqu'aufil gros qu'elle, tdut
garni de rubans de toutes couleurs ; le tcwt
précédé de trois Paifans revêtus de furplis par
delTus leurs houpelandts de revéche, dont l'un
portoii laCtoiï, l'autre laBanniére, 'ATau-
Ire deux petites cloches . qu'il accordoît au
charivari du gros du corps , devant lequel
courroient de jeunes Enfants. Après !e Curé
marchoimi les hommes têtes niies , & en-
fuite les Femmes ; & toute la marche étoit
■ fermée d'une Calvacadc d'Afnes & de Boq-
riqueï, furlcfquels éioient montei des Vieil-
lards, des Matrones, & les moins difposdu
■ Village : tous fouvcnt crotei jufqu'àréchine
hurlorent les Litanies des Saints a fefme en-
tendre d'une lieiie. Il nous failbic tout quit-
ter pour venir admirer avec lui cette Pompe
ruilique , & iicus en foire remarquer toutes
les béautci. Maisilnefepoiredoitplus,quand
il voioit aller la Proceflîon de St. Paul dans
le Fauxbourjj. „ Venez vouais Mr. Linck,s'é-
„ crioit-îl , vos qui cites Etranger , lapu bel-
,, Icchofequi foit au Monde, & faifoit des
geftes , & tomboît dans des canvullioos, qui
ne fe peuvent bien décrire. Ve-
u,:,-,zf--„GoOglc
M rmpire Je la BaJiilU. *8j
, Vonaiïez, vouaiïez la belle Banitfrc, quid'or-
dinaiie marchoit un quart d'heure devant la
Proceilîon , portée par deux Hommes , pré-
cédée & fuivie d'une multitude prodigieuledc
Canaille detoiicesefpéces. qui crioient de tou-
te leur tête, comme de» Bacchantes. i,;Vouai-
ifiezlabien cette Bannière i elleelttouted'or:
jtjefçai qu'elle a coûtai pu de trente mille é-
„cus: laConverfiondeSt. Paul y eft brodée
„ defl\ïs ; vouaîïei, nediroit on pas que vêla feu
„ Cheval qui s'échappe? Unjour, parparen-
théfe, le vent donna dans laBanniJre, avec
tant de violence qu'il la renvcrfa par terre,
auSi-bien que les deux Hommes qui la por-
toient , l'un desquels Ru nous aflura en avoir
été eltropié pour le relte de fesjours. „Vou-
„ aiïez , coniinuoit nôtre Adorateur , laCroiz
„quieft toute d'or maflif, & les Chandeliers
„tous dorei. Contemplez le bel ordre de ces
jiPrcitres qui marchent deux âdcux. Quelle
^,longue File! ily apeut-eitre, parmi cusle
jjFilsdequéquePrjucedu fang; tourjoutsje
,) fuis bien perfuadai , qu'il y a au moins des
t,Filsde Ducs &Pairs & des Maréchaux de
I, France, qui tremblenlt devant le Curai ; &
„qui n'oferoient avoir CouÉflai devant li. VOQ-
,t aiïcx lai bien çu Curai ; il adc la denterel-
„le de pu de deux pieds de hauteur à fcn futi-
„ plis: vouaitez feu Chaperon de Doâeur qu'il
,,portefufonép3vIc: quelle gravitai! Dame,
,1 Dame çu Curai li ne lé troquerolt pas coa-
- i,tre un Évéque ! fa Cure li vaut pu de qua-
,,rantemillivrcsderente : il «tout affermai*
-»,& n'a retenu que la petite oye po'r Tes mp*
„ BUS plftilîrs. A tout cela Mr. Lincfc ne ré»
pon-
o,:,-,.-„Go0.îlc ■
igiî VhfKifitiom Frmçtife
• pondoit quepu des éclats de lire; ftca tour-
liant en ridicule ce qui failbit le ravfHëment
de mon Prêtre ; dont il eotroit dans des foa-
gucs li turieufcs, qu'on eût dit qu'il étoîta-
giti^ .d'un muliii elprit.
Tous ic^ jours il me faifoit la grâce de
dire que j'avols mérité d'être bruIé vif; que
tout ce qu'il avoit fait, en compHraifoD de
moi , ce nVtoit que des bagatelles ; parce
giïc , {Tour lui tenir la prumetTé que je lui a.
vois feitte de lui conter mts Avantures, a-
prèt qu'il m'auroit bit un détail des fîen-
lies , je lui avois fait part de quelques tours
d'Elpiégle que j'avois laits , lOrfque j'élois
Ecolier.
Je lui avois raconté qu'un jour , pont fai-
'repefter le Pretet du Colléged«s Jdbitesd«
Cacn , le P. Gauiruche-,' le plus emporté ,
quoiqu'un des plus fçavants de l'Ordre; j'a-
vois attaché ï la porte de Ta Prcftâure , où
ce bon Vieillard étoitenarmé, l'Ane qui a-
voit apporté ks Provîfions du Gonvent , de
leurTcrredel'Etiifey , Maifon deCampagne
qu'ils ont à une lieiie de Gàën , & que l'on
avoitlaiflé pêître dans la Cour du Collège,
fon bail fur le dos^ après l'avoir déchargé de
fts panniers. J'avois lié l'Animal aux oreil-
les proiiïes de fi près à la porte , qui s'ou-
vroic en dedans , que c'étoit une chofe \m*
poffibicau Bon-HMIitne cc (brtir, fans faire
entrer le Doèteur BSté. J'attendoîs dans la
Cour, avec d'antres Efearbiilardsdêmatréni-
pc, quelle ftroit ta caiaftropbe de cette Sc<î-
ne, lorfque l'on vînt i fotiner la cloche qui
«ppelloil te PreCrt au Refcétoir. Le Père
• tiroic
.--„Googlc
.C<x,8lc
.--„Googlc
ou PHiftoirt Je la BaftHh. »8 7
tirolt tout de fa force- en dedans , & la Bé»
indocile en dehors. Le Bon -Homme crut
?tie cVtoii qnelqu'Ecolier , qui par malice
'empêchoît d'ouvrir fa Porte ; & comme it
partoit toujours Latin, même aux Femmes,
il fe prit à crïef â voix enjouée, jlperi Januam
InfoUns: quare PricfeiîiimiuitmretrudiSf duM
cam^Anitjanat J Verfor accerfe CorreSoTtmy
Ht pœnas det pro merilis Petutans ijit. A ce-
la le pauvre Martin ne répondoit pas un f^ul
fnot. Enfin après que les deux Doâeors eu-
rent tiré de part & d'autïe, «a charitable E-
colicr, ému decompaffionde voir tantfouf-
frir le forain , pouilà l'Ane qui entra dans .
la Prefeautc. Il feroir bien diaScile de dé-
crire la colère du R, Pcre. Il s'en prcnoiti
la pauvre Bâte , comme fi elle eu ctlt dté la
cauïè, & lui vomîfToit cent injures en Lat^,
qu'elle fuportoit patiemment) li fallut faire
ujrtir le Baudet de laPrefeâure, quiitialgré
. toute la fcience de fon Antagonifte , ne s'y
ttouvoit pas trop bien , & qui auroit prérëré
iin chardon, à tous les volumes dont elle é- .
toit remplie. Mais par fimpliciti; j'avois &it
tant de nœuds au licou , qu'il étoit impoffi-
blc au R. Père de les dénouer. Enfin per-
dant patience, il iîit prendre un gaiiif fur fa
table , qui coupa le nœud gordien , & ren*
Toia la pauvre Bfte brouter fon herbe, pen-
dant que !e billieux Préfet couroit après nous -,
irrité de nous entendre rire à gorge dcploVée,
& fe doutant ■ bien que quelqu'un de nous
étoit caufe qu'il mangeroit fa foupe froide.
La chofe du Monde qui faifoit le plus'de
peine à ce R. Peie , c'étoit d'entsudre flffler:
l88 L* InquiJitioH Framçoife
an coup ^e {ifilet le fairoit entrer dans des
fougues terribles. Comme ii étoit des iati-
Dics Amis demonPere, & qu'il venoïc fou-
veuc chez nous , il nous en avoit dit la rai-
fon, qui étoit, qu'il avoit une dent creufe,
dans laquelle ii-lui fembloit que l'éclat da
fifflct enttoit avec tant de violence, qu'il lui
perçoit la tête. J'apoilai trois Enfants de
mon âge, auili modclies que je l'éiois, mu-
nis auflî bien que moi d'un lifflet bien per-
çant, & nous nous mimes aus quatre coins
de la grande Cour du Collège. D'abord que
le Pretct vint à paroître , le plus éloigné fe
prit à (iiflcr de toute fa force, & monR.Pe-
"re à courir de toute la fîenne du côté où il
avoit entendu le fifllct. Avant qu'ilfût arri-
vé au bui, celui qui écoit à un des coins op-
pofei , donna un autre coup de fiftlet, & le
Pi-efct rétrogradant s'emprellkd'y voler. Le
troiticme lui fit perdre la voie; lequatriéme
tout de même. Enfin après l'avoir bienfait
courir en vain aux quatre coins de la Cour,
en ciiant qu'il donncroit une lirait ad om-
»tm immuaitatem , à quiconque arréteroit l'In-
folent, charitablement le plas confciencieus
des quatre , failît le premier Gourdin qu'il
rencontra , & le livra au Père furieux , qui
malgré les proteflatîons de fon innocence,
l'entraîna dans fa Prefeélure , où il le fit
fultiger de la bpnnc manière , pour avoir eu
la téraéritÈ de lîtilcr , jufqu'à ' ce qu'il eût
avoué fon crime ; autrement fon derrière.
n'en auroit pas encore été quitte à fi boa
marché.
Comme j'allois fouvent dans fa Préfectu-
re,
..Xooyic
eu HHiJlotre Jt h Safiille. iS^
re f oà-H le plaîfoit à me faire repeter mes
ampliâtations , ou mes Vers ; je m'aperça^
qu'avant qpc d'en fortir , pour aller doaner
les ordres dans les ClaJIès , comme il avoit
la viâe très baffe, il fc frotoit les yeux d'une
caxi, que, pour cet efret> il conlèrvoit dans
une bouteille de verre double. Un matin,
qu'il en Était foni pour quelques affaires ,
éi qu'il m'av oit enjoint de l'y attendre, pour
n'yf^s relier inutrlemem, je m'avi;ài devuî-
der la bouteille où ilmettoit Ton eau pour les
yeux . & je la remplis d'encre , d'une groflè
bouteiilc qui en étoit pleine , en i^n coin de
la Prefeaure. Il revint après : je lui leu
mon théine; il me carelfa , & je pris congé
de lui. Mais ce fut pour l'aller guétcr à la
fortie de la Prefeâure ; d'où , un moment
après je le vis fonir barbouillé , comme un
Arlequin. Javois bien de la peine i m'cm-
p^cher d'éclater, je le fuivis jufqu'à la por-
te de la première Clafle , où d'abord qu'il
fut cntté, l'on entendit une huée terrible; ce
ii'étoient qu'éclats. Le Régent lui même ne
pouvoir s'eiTipêcherde rire , & encoremoins
en empCcher fes Ecoliers. Le Préfet n'étoit
Ruere en état d'impofer du refpeCt : il voulut
s'informer de la caufe de leur infolence. Le
Régent eut bien de la peine à reprendre fon
fencux, pour luidirequ'ilétoittoutbarbouil-
ié d'encre. Le Bon-Homme fortit pour al-
ler tè demafquer. Aparemment qu'il s'en prit
à quelqu'un des R. P. de la Société , car il
ne m'en dit rien : aufii il me connoiïToit trop
(impie pour me foubçonner de lui avoir vou-
lu ^ire une telle lingerie.
N Voi-
.-iCooglc
ajro l'inqmjititm frémfoife
Voici daix autres touri qui parottront pins
cntsmels aux Imaginaires , mais qui dânt '
le fond ne font quedes bagatelles. Il y ar
voit na grand Tidileau dans la Chapelle dei'
Jefbites de Caën, dans lequel ccsReTereodr
Pères avoientfâîtpeindreleursdeux ApAttCt,
celui d'Ef|>]^e, & celui des Indes ; le N(»t
de Jefus au milieu des deux , d'où fOTCoiea
des flRaKs , qui paroiûbtent pénétrer ces Pa-
triarches. Au ddlôus d'Ignace étoiz écrit en
gros caraâéies d'or, /fmpiiui Dmtine ! àm~
fiitts: & au doUbus de Xavier, en pareils ca-
raâéres. Satis eft Domine ! fatij efl' Pour
.abaîflcr un peu l'orgueil naturel de ces Révé-
rends Pères , dont rambilion demeflirée com-
mençoit â &re odicufe à la Ville; par le cré-
dit defqueh Mr. Cally Reâeur de l'Univcr-
Ifté & Curé de St. Martin de Caen; Mr.Ma^-
JtHiin Cure de St. Etienne , & leCur^deSt.
Sauveur de laméme Ville avoient été envoiez
en exil , pour n'avoit pas voulu ploïer fous
]a férule de cesR. Impérieux, qui les avoioit
accufcz de JanfeaUnie , je fis la PaCquînade
que l'on va voir.- Comme je fçavois afl«
bien dcffigner, un après midi qu il n'y avoit
peribnne ,à l'ordinaire , dans la Chapelle»
je mis dans la mainduBîeH-tieureux:Loy(H«,
ime bouteille, & dans l'autre un verre,
comme s'il eût voulu prefentcr ralàde à foo
Compagnon, & à côté de fon Ampiius Do-
minei ampiius. Je mis: Camarade encore uit
coup. El à côté de fon Aflôcié , de la bon-
, the duquel je faifois fortir quelque cfaofe,
qui faifoît croire qu'il enavoit trop pris ; j'é-
crivis fous le Satit ffl Domne '. fath eji. Et
.--„Googlc
'.'^ m
.--„Googlc
«m rmjloi're Jt la B«/KKr. %ff-
ne vois ta pas que je fuis li fou que je crÉve?
Le lendemain au matin, ma Pafquinade qm
ne parut qu'avec le jour , fut viie de tous les
Ecoliers, plus attentifs'millcfoîs à en rire de
tout leur cœur, qu'à enteadre la MeûTe qu'on
leur dîfoit. Un des Rcgentspïeufcment vou-
lut effacer mon Ouvrage; m^slePiefeâl'en
empêcha, dîfant qu'il falloir que la JuAiceen
Et mformer. Le biuit que les Ecoliers en
répandirent par toute ta Ville , y attira une
foule prodigieufe de Peuple , dont la plus
grande partie fît bien voir la haine generalev
que l'on avoit contre cette pernicieufe Socié-
té, qui fit bien dubniiti fkns pouvoir décoa-
vtir l'Auteur de leur chagrin ; car j'avoîs eu
la prudence de n'en faire conâdeoce ï perfoQ*
ne. A l'autre.
Les Régents des R. P. de la Société pour
prouver leur grande piété dans les matières
importantes de laReligîoa , s'ctoient avilèz de
mettre auprès du Bénitier, qui étoicàla por-
te de la Chapelle , des Contrôleurs , pour
examiner ceux des Ecoliers, qui manqnoienC
à refaire un grand fignc de croii fur le front,
avecde l'eau bcnite, en entrant dans l'EgJi-
fe. Ces Cenfeurs marquoient in&iltiblemenc
fur leur Csaalogue , ceux qui avoîent (:u le
malheur de leur déplaire, ou de s'attirer leur
indignation, quiiiemanquoient pas d'en être
rîgoureufement punis , fouvent contre toute
juliicc. Je fus du nombrei fans l'avoir mé^
rite. Pour m'en venger voici ce que je fis.
Un matin en Hyver , que l'on fait aller les
Ecoliers à la MelTe à fis heures trois quart»,
je fils vuider toute l'eau qui étoit dans leBe-
N t nîtier
.-„Goo.jlc
«>l 'VlnquifilioM Franfoije
nicîcr j & après l'avoir bien efluié avec on '
linge , je veriai dedans une groflè bouteille
d'encre double toute des plus noire. Iln'étoit
pas befoin d'efpionS , pour tenir Regiftre de
ceux (juî s'étoîcnt fignex d'une croîï'; au con-
traire leur Cataloguefut témoin de leur in6-
'delité , puîfqn'îls y avoient couché ceux qui
«ftoient vifiblement innoccnis ; car tous les
Ecoliers étoicnt marquei comme des NjOU-
tons de Berry : je n'avois eu garde de neme
'pas mettre du nombre. AptÈs la Mt-ffe, quand
'les Ecoliers vinrent dans les Clailes, où les
chandelles éioient allumées , chacurt rîoii de
tout fon cœur de voit fou Compagnon bar-
bouillé , ne fcàchant pas qu'il avoit une pa-
reille marque: maisquandod eut connuque
1, mal étoit rnivctfel , on fe douta bien de
la chofe. Pour la vérifier, les Regcnts en- -
Toierent voir au Bénitier , où fans miracle,
on trouva l'eau convertie en encre. On fit
d'exaâcs informations , qui n'eurent pas un
"Wieilleur'fuccès , que celles qui avoîait été
'ftîttcs'pour les fondateurs de la Société. Et
c'f^toit pour ces crîines énormes 1 pltis grands
mille fois, que de corrompre la plus grande
partie des Femmes & des Filles d'une Pa-
loiffe, de faire violence à d'autres, de piller
-toutes fes Ouailles, ■& deconimettredesSa-
rrik'gcs fans nombre, que fiiivant nôtre lélé
fi. infaillible Cafoiile , je tnerltois au inoins
]e£|^.
Corbé , pour nous faire fouffrir r.ôtre mal
en patience , difbit tons les jours à Mr, Linck ,
que MademOilellcScItingretfavailloît à fa li-
berté avec iihe aâiïité iitcroiable. Qu'elle
alloit
.--„Googlc
«« rHijio'trt de WBaflilU. Ipî
(flloit fbuvent jufqu'à trois foîs-parfemaïnei
Veï'faillcs auprès de Madame, pour la fup-
plierd'înterpofer fou autorité auprès duRoi.
En effet cette Princeffe pouvoir bien lui re-
montrer rinjuflicc que l'on faifoitàdes Etran-
gers , qui avoient reclamé fa proteâion , de
les arrêter le lendemain que Je Roi leur a-
voit tait donner, par Elle , fa parole roiale.
qu'ils pouvoient demeurer en feureté dans fon
RoVauine, fans crainte qu'on leur fit le moin-
dre outragé, & qu'on retenoit cependant de-
puis ce temps là 3 laBallilIe.
■ Le premier jour d'Avril 1703 on nous
donna un terriblePoifTond' Avril. Nouspcn-
0mes être étouffez tout ce que nous étions
de Prifonnlersdans la Tour, On avoitdon-
néi quatre Prîfonniersqui étoîentfousnous
<{aas la féconde Chambre, de la paille, pour
mettre dans leurs -lits^ dout ils n*av oient
point changé depuis un grand nombre d'An-
nt5es qu'ils étoîent à la Baftille , entre autres
un Gentilhomme Poitevin , nonimô Mr. le
Pouilleux. Ils àvoient vuidéleur vieillej>ml-
le daiisunCavoi, où étoient leurs fjeux com-
muns, pour s'en fervir , quandils voudroient
ftîre chauffer quelque thofe pour leur ufàge.
Le nommé Gefnouin , Serrurier de Paris ,
dont le crime étoit d'av-oir été en Hollande
reformer fa Religion, & étreenfuîte retour-'
né à Paris par un xélc immodéré, ponrj re-
former Mr. l'ArdtevÉquc & tout (on Cler-
pi: ce pauvreHommc,foit qu'il aimâtmieur
<tre étouffé, que de languir plus longtemps
dans ce Jieu de defolation ; foit qu'il voulût
të vangcr d'ua Pilote Irlaadois nommé Ma?
N 5 thia
u,:,-,zf--„GoOglc
«94 L*Imqmfition Franfoife
«hias duWal , qui le maitraîtoit tons les jonn-,
foit enfin pat folie , (imuia après dîné d'aller .
*«j lieui, & mit le feu dans la paille. Com-
me il a'y avoit aucun jour , ni aucune ou-
Tcrture aans le Cavot, quand le feu eut pris
dans la paille , la fumée en fortit bien-iôt à
gros torrents. NôtreChambre, laPremiére,
. la Quatrième & même la Calotte, comme
je l'ai apprit depuis , en furent remplies en
un inClant , en forte que nous ne pouvions
refpirer. Je laiffc à juger en quel état étoieut
les Prifonniers de la Te conde Chambre, Vai-
nement frapions nous à la porte , & appel-
lions nous la Sentinelle: perfonnene venoit
i nôtre fccouts. A !a fin on vint ouvrir aux
Prifonniers de la Seconde Chambre , dont
B.U emporta Mr. le Peuilloux , & un Vieil-
lard nommé Mr. Bonneau , Médecin , à moi-
tié étouéez. Pour nous & les autres Cham-
bres , on nous laiifa avaler de la fumée tant
& plus. L'odeur en dura plus de trois jours
dans toute la Tour , & plus de ijuit dans la
Seconde Chambre , ce qui indubitablement
avança la mort de Mr. le Pouilloux, qui é-
toît un Hcwnme de mérite ; car les Officiers
eurent l'iahumanîté de fiùrc rentrer le même
jour les quatre Prifonnicts dans leur Cham-
bre , quoiqu'elle fût toute pleine de fumée,
& que le feu fût encore dans la paille du Ca-
Tot qu'il leur ftUnt éteindre. Plus de &i-
le Mois après j'ai été dans la même Cham-
bre avec deux des Prilboniers qui y étoietit
alors , & l'odeur de la ftimée étoit encore
dans le Cavot qoelque' peine qu'ils euûèot
prisàrcapuiger, £{laCluuiitB;eeaétoitieftée
. toute
■,.^.^Xooylc
éu rHiJhire de la BafiHU. •*$
toute noire. Quand le foir nous nous plai-
gaimes aux Officiers de ce que l'ou nous a-
vdiï laiffé fuffoquer jufqtfà vomir le fàng ,
& qu'ils virent nôtre Chambre encore toute
pleine de fumée ; ils nous dirent que nous
n'avions rien (buffert encompaiaifondesau-
^cs ; que Mr. le Gouverneur vouloit abfo-
iÛment qu'on laifUt étouifer les quatre Ptî-
fonniersde la Seconde Chambre, cequ'îlaa-
roit infuilliblement exécuté , Hslik la confidcra-
tion qu'il avoîi pour Mr.Ie Ponilloux> qui tftoit
d'une douceur &d'uae afabilïté exemplaire.
Le Samedi fuivamScptiéme du même Mois
d'Avril , veille de Pafques Mr. d'Argenfou
fit dcfcendre Mr. Linck fur les fcpt neurcî
du foir, pour l'interroger. D'abord qu'il en-
tra dans la Sale, &qu'ileutr3!ii(^avecfraieur
l'ombre infernale , qu'il trouva revécue M J-
gillralenient, affiliée de tous rcsSupots& Sa-
tellites, ce Miuos lui demanda avec une fier-
té brutalle & en lui parlant par toi , ce qu'il
étoit venu tàireàParis, Mr. Linck lépondit
qu'il étoit venu pour étudier en Médecine , 6c
fatisfaiie à lacuriotîté qu'il avoit de voit la plus
belle Ville de Franc*. Mr. d'Argenfon lui
dit qu'il fçavoit bien le contraire, & qu'il a--
voit découvert les intrigues qu'il avoit avec
les £nuemis de la France , & lai tout avcC'
le Roi de Folugne qui l'avoit envoie à Paris.
Mr. Linck lui dit qu'il n'avoit point d'autres
relations avec les ËniiemisduRoi, que ceux
que lui donnoit fa oifinanoc; qu'étan^Saxoa
il étoit Sujet du Roi de Pologne , comité
Duc de Saxe ; mais que fon Peie étoit aiTéS'
paillant poor ieâiire voïager, fans avoir ré-
N 4. conr».
u,:,-,zf--„GoOg[c
tytf Vimqmi^hm Franfùft '
cours àlamediadoD de fôn Soarerain. Mr.
d'ArgeofOD l'emenduit repondre G iadicicn-
ixau.ut, prit un ton plus radouci , «pliisci-
vil i & après lui aroir ordonné de prendre
une chaifc , il l'interrogea fur toutes }es ba-
bioles qu'on lui avoii failics , qui la plupart
rcgardoient fà Froteflion, avec autant de prc-
cautioD , que il il y avoit eu nn myllére ca-
ché fous ces limplc^, <;ui eût renfermé tout le
boullcrerfèmcnt de U France. Mr. Ltuck lui
cipliqua les vertus & les propriécei de chaque,
racine, de chaque plante, de chaque graine,
& de chaque limple avec une netteté , & une
érudition qui le furpritent , & dont il parut
charmé ; mais il le fat encore davantage,
quand les Officiers lui affirmèrent qu'il ne
ti,avoit pas un mot de François, lorlqu'il en-
tra dans laBailillc, & que c'étoitmoîquilui
avilis appris à le parler en fî peu de temps.
£n le renvoiant dans nôtre Chambre , il le
pria de fe tranquiiifer , & lui dit , quM pou-
voit £ire aiTeuié que fes aflaires prenoientun
bon train : & en fe tournant devers le Coin-
.miljâire Camufet. Mr. loi dit -il. il faat que
TOUS veniez demain cominucr l'interrogatui-
re de Mr. Linck ; & fur ce que le ConuniC-
laire s'exculâ bu la lâioteté du jour de Pâ-
i]ucs , auquel il vouloit fatisfaire à fes dévo-
tions. Vous içavcz , lui repliqua-t-il , que
eeite affaire ne foufie point dercmilè, puit-
qu'îl y a un ordre pofîtil'duRoiderexpedicr.
]Ne manquez donc pas d'y revenir Lundi
prochain.
Lorfqne Mr. Linck de retour fur les neuf
lieures, m'eut Sait nae Relation exaâc de ce
qoi
u,:,-,zf--„GoOglc
•« PHifioire de h Baflillâ. «HT
qui sVroît paflî, j'en conclus que Ci liberté
prochaîne c'toil infaillible , & comme il n'y
avofc nuls moments à perdre, je me prefTat
d'écrire i mon Epouïe , à Mr. le Marquis
de Torcy _, à Mr. Chaihillart & ï mes Amiâ
pour fpllîcîter ma chère libertf. Le Curé ne
manqua pas d'écrire à fi Famille pour le mê'-
me i'ujet. Il fut trois ou quatre jours à com-
pofer une Lettre qui étoit impaïaMe. Sf Mr.
Linck en avoir retenu une copie, comme il
me l'avoit promis , j'en tejoiiirois Ip public,
car rien n'étoît plus rilible. ■ Pourries mîen-
neSi il les a rendues (i eiadement» qu'il efî
venu ici exprès à la Haye remettre cclics que
j'avois écrites à mon Epouie, a mon Fi!s&
à mes Amis.
Le Lundi des F^tcs de Pâques leCommîP
faire ne manqua pas de fiàirc encore defcen'-
drc fur les fept heures du foir Mr. Linck ,,
qu'il interrogea feulementpourlaforme, fur
pluJîeurs qacliions fort inutiles. 11 lui fit bien
des civilitei ; le regala m(;mc d'une ampie
colîatîon , où le bon virt (Je Bour^ongtie ne
manquoit pas. Tout cela fentoit bien lebran-
le de fonie ; dont je congratulai mon Ami à
fbn retour, dans des termes 'qui partoientdu
fond du cœur. I! n'y avoir que nôtre PiCné
qui en paroiflbic chagrin ; car l'ombre de la
prolpériré de fon Prochain fuffifoit pour l'at-
trifter , tant il avoit l'ame belle ! outre qu'il
penfoit bien i ^u'il falloir direadieu au gib-
Mer, au bon vin & à la bonne chére-
Lejeudidouïcd'Avril, on fie encorc-def-
ccndre Mr. Linck . pour coutronter tomes
&s drogues, & en aàie des eflais devant l'A-
N 1^ E>
.--„Googlc
•98 L*^Imfuifitkn Frsmfoifi
^>tbicaire de la BaAille, en prefence deMr-
D'Argenfon & du Commiflaire : cerertionic
ifbrt myft^rieule , mais très inutile ; qui.âmoa
svis , Bc fervoit qu^à perfuadci aux Étrangers,
qu'en Francç tout fc fait arec ordre & cir-
conkpcâion. L'Apothicaire étoit G ignorant
^'iL ne coniKH^oit ni la nature , ni les propri^-
texde pluSeuts Hmples qu'avoii Mr. Linclc,
pas même, ce que c'étoit que le foufFrc d'an-
titooine > &à quel ufàge on pouvoit s'en fer*
Vir.
Plus le terme de la fortie de Mr. Linct
wprochoit , & plus les brutaOtez. de nàtre
fougueux Curé fcaibtoient redoubler. Mr.
Linck aroït coufu toutes iioii Lettres dans
fon jull»icorpSt dajis l'intention de les ren-
dre ponâaeltement à Icursadrelfes. Unjonr
cePrJtre, après une profonde rêverie, oùil
pwoilToit enicvelî , fe leva brurqnement , &
vint dire \ Mr. Linck, qu'il eût à lui rendre
fet Lettres, & qu'il vouloit les brûler, puif-
qu'il étoit très perfuadé qu'il ne les rendroit
1^. Mr. Linck eut beaul'aiTurerducontrair
re : le Curé pouiTa ia folie jufqu'â le mena*
cer de frapper à la porte pour appetler des Of-
flciers qui cootiaindroient, Mi- Linck de loi
rendre Tes Lettres.
Il iàllat donc que Mr. Linck eût la par
tience de découdre fon iullaucor^ , pour lui
obeïr. Le Curé les déchira & lesjettaaufeu.
Il me rendit auffiles miennes: jeJimutaiauJQ
4e les déchirer , & je jettai dans le feu d'au-
tres papiers, que j'avais promptementdifpo-
fez pour ce fujet. Je rendis adroittcment mes
Letues i Mr*Liack, <iai les remit dus îba
juf-
.--„Googlc
en VHifioire de Im Bi^ïUe. i.99>
Î'bUaucotps, lorfqu'i) lerecooËt, fànsquclc
^téirc s'ca aperçût. Le lendenuun au matiii-
l'Abbé fuppliant fc jetta igcDonx devant Mr.
l>iacki pour le coDJurcrdeluipeimettred'é-
■ crire d'autres Lettres , avaiiant que c'éloît
ion Deinon malin qui l'avoit porté à faire le
trait de folie du jour précèdent. Mr. Linck
jura qu'il ne fe chargetoit pas de fes Lettres»
que l'Abbé ne m'eût engagé par fcs prières k
vn écrire d'autres. Antres genafles{oas£icer>-
dof^Jes devant' moi : mais ce fut vainement
qa'il m'en pria ; je prôtcftai que je n'en fe-
rois rien j maisjepriallincerementMF. Linck
de permettre àcebonCoQcaptifd'écrired'au-
très Lettres; & je lui demandai trisinflam-
ment eu grâce de les rendre it leurs adrefles..
J'en ufois aînli., parce que je connoifibis la
jaloulïe d&ce méchant Homme ^ qui aurolt
mieux aimé que fes Lettres n'cuffcnt pas ét^
tenlies , . que de foufirir que. Mr. Linctc cAt-
en^orté les miennes, qu'il croioit brûlées.
Enfin l'heureux momeiu de la fortie de~
Mr. Linck arriva, qui fut un Dimanche i ].
May de l'Année 170S- Le matin on nous
ât deTcendre le pFétre.& moi , & l'on nous .
interrogea tous deux feparemeat. Mr. du Jun-
cas me.conjura de lui dire lînceranem com-
me bon Serviteur du Rof, ce que je croiois
de Mr. Linck. Jeluiproteftaiquejelccroiois •
très innocent, & que c'étoitundespkishon*
nétesHommes^ &.pIuscraignaiitDicui que.
j'euOe pratiquera nui vie. Corbé vint nous-
reconduire dans nâtre Chambre, quifutfuE<
pris» auffi-bien que noas , de~n'y plus trou-
Ter.Mr. Liack. Après avoir caché toutes les
N*. har--
.--„Googlc
}00 L*lMqmfim» Fr«meoife
h&rdes fous fon lit , il s'étott fonré dans Is
cheminée , où il ^toit monté comme na Ka-
monneur , pour nnus âiirc croire qu'on l'é-
toit venu enlever pendant nôtre abTence.
Lorfqa'il entendit l'agriation , où (.toa. Coi-
bé de ne le pas trouver, il fe laillà gtilTer de
la cheminée dans la Chambre, & courut em-
brafTer CoiM , en riant de tout fon cœur ; à
qui il dit , ' ce qui Pavoit pnné à nous îaxK
cette plaifanterie , dont Cotbé nefitqncrJrc,
& après nous avoir ait adieu refi^ma la pone
fur nous.' Nous en rions encore , lorfqu'mi
piomentaprès le Major, pailablement yvre
à fon oïdinaire , entra fuivi de Corbé & de
Ru. Ils dirent à Mr^-Linck de s'habiller; que
|k Lettrçde<^chetétoitTeniîe, queMr.Cha-
ras l'attendoit dans la Cour avec un Carollc,
& que Mr. le Gouverneur ne lui avoit pas
envoie fon dîné , parce que Mr. Charas lui
»voit affirmé que les Amis de Mr. Linck Tat»
tendoientavecuQ repas , qui lui feroitplusdc
plaiiir, que tous ceui qu'il avoitprisàlaBaf-
tille. Ce cher Enlànt fit tout ce qu'il put pour
m'obliger à accepter toutes fes haides , qu'il
me vouloit donner : &voïantquejemecQn-
tentois de lès Livres, & qnc je r^ol'ois abfottH
ment le refle, il en fit pfefcnt, en laprefen-
ce des deux Offîcieti, au Prétre&à Ru. Il a-
voit donné i) n'y avoit pas long temps tiR
Manteau d'écarlatc tout neuf à ce dernier ,
pour l'engager à nous faire du bien , & ifei^
re donner au Curé , tout méchant & infupor-
table qu'il étoit, la grofie bouteille à Tes re-
pas , an lien de la petite où il étoit réduit ,
% uQ jDcUleiu oïdinaice. Mi.. Linck fortit
avec
l-iGooglc
«I» rHiJîtirt Jt la BaflUU. 30 1
wec les feules hardes qu'il avoitfnr (on corps.
Je l'aroluis de mes larmes , en iiti difant a-
dieu : il, dît au Major & à Corbé tout le bien
.qu'il pot de moi, & les conjura d'eobicnu-
fcr à mon éKard. Quoique je -ver&flc incef-
femnlËtit ra&de de vin au Major , dont Mr.
LinckuousavoitaboDdimmcnt pouTvus,ilne
ccffoit de prcflèr Mr. Linckdeforttr; iuire-
montianc que Mr. Charas l'iiendoit dans la
Cour do Château, oùilnefçavoit pasqu'ila-
voit Ibn propre Frcre enfermé depuis très long
temps , & qui y a été iix Ans , fin Mois ,
làns que Mr. Charas- , ni fa Famille eullènt
peu difcouviir ce qu'il étoir devenu, comme
vn le va voir un peu plus bas.
Rien n'a pu me conïbler dans la fuite de
nu Prifou de l'abfencc de mon Atni , que le
plaifîr de le fçavoir libre. li m'a écrit depuis
que Dieu m?3 rendu ma chère Liberté , pour
m'apprendre , qu'en fortant de nôtre Cham-
bre, on le conduiiit dans la fiale, où on lui
fit ^ire fermeni qu'il ne diroit ricu de ce qui
fe palfoii à la Baftille , & fur tout qu'il ne
nomtneioic jamais aucun de ceus qui de fa
connoiU'ance y étoicnt retenus. Etdtiice on
lui ât fiener une reconnoiOànce , comme on
lui avoit rendu tout ce qui lui apartenoit ;
quoiqu'ils lui cu0ent retenufes bijoux lesplus
precieiu , &ns compter fou argent , & des
lommes confidwables que Corbc lui âtpaïer
deux jours aprèsfa fcmie, dont Mr.Tourtpn
avoit répondu , fur lefquelles il avoit gagné
tout au moins les trois quarts. Ru fut auffi
lai poner fan déloyal Mem<HFe : il nous dit ,
que W^. LîDCk. revoit pû'éi fans eo rabutn
.--„Googlc
jCii , X'ImtfMifititm Frsmfo^é
un liard j l'avoit bien regain de Chocolat ,
Racaâas , pâtez^ vias de loutct Ibrtcs; mais
qu'il avoit eu l'iiifoleace de ac lui prelènur
que trois miferablei Ijouis , comme à xax
Croquant) pour le recompcoifr detoutesks
peines qu'il avoicptifespourlui; mais qu'une
autrefois îl ne fe fieroît plus aux Prifoimien. -
Comment ,. lui dis-je, Ru ne comptez vous
pour rien tout l'argent qu'il voosadonné dans
la Prilbn. cciui que vous avez gagaé furfc-s.
nienioîres , le Manieaiid'écarlate,,& toute
fa dépouille ? Car dès le lendemain qae Mr.
Linck fut foiti, Sorel, pour trois ou quatre:
onces de tabac, dooi^ à Ru poarplusdedix.
éç-tis de très beau linge , &t de nipes , dont.
Mr. Linck lui avoit lait prefent.en lui difant
adieu , & ce Curé ne fe rererva.qu£i]uetqucs
chemircs de deflbus, &uQe.Robede Chani--
bre qu'il ôtoit & rem^K, au moins dix fois
pour un matin : il mc&ilbitfouvcnirda Gen-
tilhomme Bourgeois. La Robe de Chambre
éioit d'un facin rayé encore psilàblement bel-
le, avec laquelle mon Prêtre £c donnoit des
airs tout des plus ridicules. Et qu'eft- c«. que
cela? me dit Ru , bagatelles ! Uji Piifonnicr
uu peu.raironnabie, quand il fort d'ici, nous
Uonne , tout au moins truite Louis ;.& ce
n'ed rien en comparaison durégne.deMr.dc
Befemauii. Quand on arrêta les .Empoifoli-
neurs , il y eut tel Prifonnier qui donna juf-
qu'à dix paille-ftaqcs à un Porte-Ciets poi»
Jui porter une Hmple Lettre, d'où depcndoit
Cl vie , ou celle de quelqu'autre Perfonne de
qualité. ItyaeuunPorte-Cleâquieulbrtaiit
Ciel a «cbéctf une Tene de <i«urc-Yiiigtmil-
.--„Googlc
le âaacs avec upe bonne charge qoi le fait
vivre en grand Seigaear : mais le teii^s n'en
eft plus; car le Gouverneur d'aujourd'hui eft
un Bait^e dur, qui garde tout pour lui. Au
temps dont je vous parle ît y a eutelPrifon-
nier tjui eft' forti avec plus de ni:! le écus de
fa Priiôn: il il voul<»t changer Ibnvinenar-
gent , orïleluipaioicddix folspar bouteille;
car il n*entroit dans la Bàftille que du v)n de
Champagne & de Bourgongne: cenYtoitpas
du tipope comme celui d'aujourd'hui; duvÏD
de fircqujgay qui fait dancer les Chèvres :
tous les r^as dont un Prifunnict voulott îè
faûer , lui étoicnt payei à quinze fols cha-
cun : en ce temps là un feul repas en valoit
mieux que dii de ceux que l'on vous donne ,
& iîiffiCuit pour nounir fort grallèment un
homme tout un jour, & même délicatement-:
Vorrouloit ici parmi les Prifonnicrs , com-
me au'ourd'hui tait la mifére : il j avoic des
Particuliers qui s'y faiibient mettre exprès
pour fâirç bonne chère & s'y bien divertir. 1}
cA vrai que lorfque j'étois à la Cour , un It^
iandois pria initainmeat la Reine d'AngIeter>
le , de le âùre mettre i puur trois ou quatre
Ans fculemeucâ laBaOille, pour racommo-
der Tes aSaiics : il ne ticndroît pas le méii»
Uogageaujourd'hui, iiilTçaToii comment oa
ventraiEté; car très lincrircment lî l'on me
àoQDoit le choix ^elaBaftille, oudelamort,
je ne balancerols pas un &al moment â pre*
^er ta TecriUedes Terribles, auxcruautex
dont les impitoïables Tyrans de la B^ftills
accablent leurs malheureufe) Viâimes. 11 eft
«ICO» viai que ce que me difi>it «lors Ku .
»'•
.--„GoogJc
304 UlKfMlfitiem framfoife
m'» éié dqniis confirma par pluficnrs des Of-
ficiera, &?«■ divers Anciens PrifonniCrs, a-
vec lef^juefs j'ai érf, qui rftoîem à I»BattiJlc
dès le temps du GouTernement de Mr. de
Beflèmaux. Tous les Officiers , & les Porte-
Clefs fur tout, faifoient des coups confidera-
hles ; l'or y étoit plus commun qu'aujour-
d'hui la patUeue l'ell dans les Cachots , puis-
que j'y ai éxé jufqu'à quatorze jours fans pail-
le , couché fur le timon & la bave des cra^
SOI, Bien loin que les Porte-Clefs y fsT-
it aujourd'hui fortune , j'ai vu, &tonsIcs
Prifbnn'irsavecmoil'ontlçujque le nommé
le MaiL"ier Porte-Clefs . donné à Bernavil-
le par lii bonne MaitreHë Mad. la Maré-
chale de Bcllefiind a pourri dans un art'reui
Cachot pour avoir pris vint cinq piltojesd'ua
Comte, pour lui porter une lettre en Ville:
tout ce que le pauvre Hommcavoit légitime-
ment g^néfut confifqaépar Bernaville, qui
après l'avoir tenu 6\ Mois dans cet enfer au
fain & il l'eau fiins paille, où j'ai été pende
temps après ce malheuteui , & traitté en-
core plus cruellement que lui, l'a fait enfer-
mer à Biceftre pourlerefte de fès jours. Mi-
chel Capitaine des Portes ; l'Ame damnée
du Gouverneur & le cruel Exécuteur dé"
fcs Arrêts barbares , poar avoir trempé dans
t'atïàire de Mafurier , eut un fort tout pa-
reil 1 malgré jnille crimes commis en fa-
veur de Bernaville fon bOnMaîtrc; ccMi-
chel étoit Irlandois, mais un des pins mé-
chants & des plus cruels Ëonrreaui qui ait
jamais emré daas laBaÛtlle, fi l'on en ex-
cepte celui, qui lui co^unandDit les inhu*
IIH^
cuTHifiurt 4e la BapilU. JOJ
manîtei , dont il ôoit l'inâme Exécuteur.
C'étoit ce Barbare , qui à l'aide de trois oa
quatre autres Sueliitcs, depouiltoit nudslee
Prifonniers ', &. après les avoir liez pieds &
mains ■ leur dechargeoit à tout debras au-
tant de coups de nerfs de Bœuf., qu'il plai-
foit à fon boh.IMattre, qui ^toit prefent à
ce rpeâacle, & comptoit avec la tête d'ua
^rond ûng froid , tous les coups qu'il fei-
ibit pluvoir fur ces pauvres Viâimes ; &
de. la main , quand fa uge. érdit alfoavie ,
fuifoit un iigqal làns parler , pour marquer
que c'étoil aljèz. Ce. lâche Michel s'anhar-
noicavecplus de fureur fuc lis Compatrio-
tes , pour prouver au.Gouvecnear, dont il
coiinoifToit parfailtement l'implacable foreur,
que les.Loixies plus Jacrées n'iitoient pas
capables de teteuir fs main' iànguinaire. Il
a exercé plulieurs fois furunCordelierirlan-
dois ce châtiment rigoureux. Le BoutrciUi
ne craignoit pas de mettre les mains facrilé-
ges fut un Prêtre , & le Tyran ne craignoii
pas de l'ordouner , quoiqu'ils fulTent tous
deui CatholiquesRomains &quemiîmeEcr-
navillcpaQ'âtdtns le Monde pour un Saiac;
taut il fçatt bien deguifer fonCagotifine. Ils
ont fait devenit le pauvre Coideliert^buàfoi^
ce de le maltraitier , & l'ont après enfermé
dans Bicejlre pour le refte de fes jouis. Ce-
pendant /ai aprJs depuis que ce Cordclier c(t
d'une des meillvures Familles d'Irlande. 11
n'y a point de fiipplice (i criicl , dans tout
ce qui eit raportt!, d»aB le Martyrologe, que
œ qve Beroavillc & Michel ont fait foa&rir
à Mr. Quçry Capitaine l^liuidois » peadant
onze
^06 L'Imqmfit'têm Framfoift
onze Ans qu'il a été ï la BaAille. Oiofe
incroyable ! mais très vraye , dont j*m con-
noiQance & que ce brave Officier m'a a&t-
mée chra moi i la Haye, depuis qu'il a été
mis en liberté, par les fol ti citât ioDt que j'ea
ai &ît Taire auptès de la Reine Annedtr glO'
ricufe mtîmoire,&de L. H. P. M. L. E. G. De
fcs onze Années dePrifon, îl enapallïneuf
dans les Cacliots , redait au pain & à l'eau;
.très fouveiicfans paille, & quelques fois dans
l'eau jufiiu'au cou. Je dosnerai fon Hiftoi-
re dans les Tomes fuivants , écritte de fa
propre main. Qnel.étqit foB crime? il étoit
âdelle Serviteur de Guillaume le Conqué-
rant. Pigeon & Gringalet font ici aâttelle-
ment à la Haye , qui tous deur m'ont affir-
mé depuis nôtre élargiffemeni , que lorfqae
nous étions enfermez enfemble , ce Michel
-les avoit pricï de fe jetter fur moi de (àog
fioid , & après de frapper à la porte, & de
-protefter qucj'étois l'agreffeur , pour avoir
Je plaifir de metrainer dans le Cachot, pour
fatisiaire à la haine de fon cher Maître ; qui
fans avoir égard à tant de bons offices, acte
lui même le fourreau de fon Bourreau ; &
lui tait traincr à Bicôtre «ne .vie mille fois
plus cruelle que la mort, qu'il a tant defois
méritée. Le nommé du May antre Porre.-
Clefs, pour avoir donné des nouvelles à un
Pritonnicr de la part de là femme, à eu un
pareil fort, & après avoir langui dans les Ca-
chots à été trainéàBicfitrt, d'oui! n'eftfoï-
tl que par les inftàntes follicitations de fa
Femme , qui alla fe jetter aux pieds de Mr.
le Comte de Pontctuûtraia , pour obtmir fa
.-„Goo.jlc
vt rUiftoire Jk la Ba/Jîlle. Jû^ .
liberté. Ce n'efl pas par là que BernavîIIe
^dlitéra les moïens à les Porre-CIcft d'ache-
ter des Terres Seigiteuriales , comme ils ont
fait fous Mr. de Belfcmaux. Le Chinirgieu
qui étoit de fon temps, & qLiiétoit auffi Va-
let de Chaml»c du même Mr.de Beflemaui.
ne vouloît pas rafer les Prîfonniers à moins
de trente fols par chaque barbe. Au01 les
fervoit-il avec un équipage tout des plus mar
gaiâquec : Baâln & Coci}uemar d'argent , Sa-
vormecte parfumée, Serviette à barûc garnie
-dedentelle, beau bonnet', rien n'y manqnoit.
Il portoit au doigt un Diamant de deux mil-
leccus, qu'il en tiroit, lorsqu'ilrafoitqnel-
Îu*on.. Unjouril l'oubliadans une Chambre,
-e nommé Van derBurg qui s'en aperçut, s'en
faiât lêctetemem. LcChîriirgîenpeudetemp^s
après vint le redemander : ceux qu'il avoît
rafez jurorent, comme il étoit vrai qu'ils
ne l'avoient pas. Van derBurg qai ne fe fé-
roit pas fait ralèr , quand il ne lui en auroit
coûté qu'un fou, ne fil pas feulement fem-
blant de l'entendre.- Le Chirurgien bien de-
iblé, protella qu'il avoit lallfé fou Diamant
dans la Chambre , & les conjura de ne Je
point forcer d'en Venir à des eïtremitex qui
-leur feroient à tous f^cheufes. Rien n'é-
branla le Détenteur, Mr. de Beflêmaux vint
trouver les Prifonnters dans leur Chambre ,
pour les pri«-dc rendre un bijoux qui mettoît
îbn Valet de Chambre au defespoir. Mais
votant que les deux Compagnons de Van-
derBurg, qu'il connoilToii pourdesGensin-
capables d'ane pareille friponnerie , lui ju-
toient fericufément qu'ils ne fçavoicnt où é-
.--„Googlc
^o9 JJ Itiijiiijiûon Franfoife
toit le Diamant, &que fiil^toitabrolamenc
dans leur Chambre , il fçavoit bien à qui il
fe (kvoit adreffcr ; il les quitta. Lorsque
le Goavernent fut foiti , les deux Compag-
nons de VanderBuig eurent beau le conja*
rcr de ne point leur iâîre d'aftront , & de lea-
dre la bague, fi il Tavoit: il tint encore fer-
me , & fit des ferments horribles , pour af-
firmer fon innocence. Le Gouverneur. pea
de tempi après le tii delcendrc , & lui dit,:
je ne veux pas en avoir le démenti. Je içaî
.que vous avei le diamant; lî vous tieiereo-
dez volontairement : voilà Âz Soldats qui vous
vont dt^poiiiller nud, & vous Itapper à coups
de nerfs de bceuf , jufqu'à ce que vous l'a-
iez rendu. 11 ât encore deifer.meats exécra-
bles qu'il ne l'avoir pas; jnais.quandle Gou-
verneur lui eut tourné le dos , en le r^ar-
dam avec indignation, & quêtes Soldats fc
.mirent en devoir de le dépouiller, il fit rap-
peller Mr. de Beflemaui, tirale Diamant de
l'on fondement , où il l'avoit caché envelo-
pédans un linge, & le lui rendit , en dilant,
qu'il n'avoit fiut ce tour, que pour rire. Le
Gouverneur l'envoia dans un (^choc aufli
pour rire, où il le lailTapeiidïtntquînsc jours
au pain & à l'eau, en lui decIarantquMm^-
litutt un plus rude châtiment, mais qu'il é-
toit fun Gouverneur , & non pas iba Bour-
reau. Si il en avoit fait autant fous Beiua-
ville , il l'auroit fait "ïcotcher vif ea.fa pre-
, fynccj puifqu'il lui a fait fouffrir des:fuppii-
,ces très cruels, fouvent pour lui avoirfcuJc-
. ment reproché fon avarice & tks, iuhumaai-
tez.. Je n'ai ikit cette dilgreflîon, qui n'ell.que
trop
u,:,-,zf--„GoOglc
tu rHifioire de la BaJtUle. ]o»
trop longue ■ qut: parce que dans la fuitte de
cette Hiftoire , j'aurai fujet de pailer de ce
VanderbHtg plus d'ujie fois, qui n'c'ïoit cOn-
jiu à la Batnlle que par la Seigneurie de Brail-
lard ; fes extiavagancei outrées, St Tes em-
portemerits fijrieux lui ai'ant acquis ce beau
for nom.
£n quiitantlaBadille, Mr.Linckfutchcz.
fAi. Charas Apothicaire, tîjedes Boucheries
au Faui-bourg St. (jermain , où Mr. Tour-
ton Banquier & pjujicurs autres de Ces Amis
l'attend oient à dmer ; d'où le lendemain Mr.
d'Argenroii le fit venir chez lui, pourlui or-
donner de fortirdans trois jours de Pari». &
inceffammciu du Royaume. Cet ordre lui
6t prendre le parti d'aller à Verfailles t.ou-
ver Madame , pour lui remontrer l'impolfi-.
faîlité où il étoit' d'exécuter l'ordre de Mr.
d'Argenfon , avant que d'avoir rei^u de chez
lui les fecours qui lui étoient lî neceUâires
pour fe rendre à Leipfik. Cette genereufe
& obligeante PrinceJIe fut trouver dans l'Li- .
ftant le Roi , & en obtint pour Mr. Linck
un PaJTeport, avccpermiflion de pouvoir en-
core relier huit femaipes à Paris. Le troilié-
me jour du Mois'dc Juin, un Dimanche a^
près niidî > il vint, nous dire adieu , comme
, il nous avoit promis. Il étoit daus un beau
Carofle avec plulïeurs Dames; il le fit arrê-
ter dans la place qui eft devant la.Portç de
St. Antoine ; & en étajit defcendu lui & Ta
Compagnie, il vint à.pied jufqucs furlePa-
rapet du bord du foSé. Il nous falua plu-,
iieurs fois ; nous fît les lïgnaus dont nous
ftions convenus; après quoi il remonta eo
Caroffe. Il
3IO Vhqmjitiim fnmçtift
II meferoit très dificUe de btea «primer
tout ce <]ue j'ai eu à roaSVir avec moa boa
Prêtre depuis le lî- Mai 1703. jufqu'au 17.
JuiD que je fus féal avec lui. A chaqu'in-
llant c'étoit nouvelle impertinence, qui cn-
cheriffoit fur la précédente. Très fouvent îl
fe levoît brufquemeot du lieu où il faîfbit ïa
(mère , & où il fembloit Otre ravi en extalë,
pour venir de fang ftoid , me dîRraire de cel-
le que je faifois au pied de mon lit , & me
chanter toutes tes injures que fa rage te d
fblie lui pouvoicnt inJpirer. (Quelquefois il
le mcctoitâfairc les mêmes aâions, comme
s'il m'-cût traîné par les cheveux d'un bout de
la Chambre à l'autre ; fautant avec fes deux
énormes pieds, cariHes avoîc fi larges, que,
quand le Gouverneur fut forcé de lui faire
faircdes Souliers , il fallut que le Cordonnier
fit faire exprès une forme, n'en aiantpas d*af-
fe/, grande pour luii faifant dis je les mêmes
poilures , avec des grimaces furîeufes , comme
s'il m'eût foulléfous les picds& m'eutdanfë
liir Iccorps, en donnant des coupsde poing
en l'air comme s'il m'eût; efFeaivcment outra-
gé. Je fiis forcé de lui dire,- que j'avois gagnd
fur moi de fouffrir avec patience toutes fes er-
trav^anccs , &quetantiiu'îln'y3voiteuque
des paroles , je les avois laiifé paficr ; mais
que fi il avoit l'infolence d'ufer de maiiimi-
fi je Je mettrois en état de ne plus menacer
pcrfonnc. Je me cru obligé d'avenir les Of-
fxicn de fes emportements fougueux , &
de leur déclarer que la patience m&îllible-
ment m'écbapcroit , & qu'ils feroicnt caufe
des
.--„Googlc
M fHilftin de UBaflilU. Jii
<ieS Taïtes ficheufes qui en pourroient arriver,
fi ils ne m'ôtoicnt pas ttn furieux , qui avoît
plus bcfôinde menottes, que de fon Bréviai-
re, lioîn de fe rendre à de fi juftes railbns,'
ils Se contenterem de me donner un troifié-
me Compagnon , comme on le va voir lorf-
que j'aurai dit cequi noas arriva encore lorf-
que nous filmes fculs.
Le 14. Mai 170). le lendemain de la for-'
tie de Mr. Linck fiir les deux heures après-
midi, lorfque j'écrivois quelques réflexions,
il vint une voix de la cheminée qui nous fa-
iBâ , nous demanda IVtat de nôtre i~anté , &
s'informa qui nous étions, je cru d'atord
que c'éroit la voix de Stentor , tant elle me
parut affi-eulè , ou que c'étoit quelqu'un qui
nous parloit de la Piate-forme au delfus de la
Tour , avec un Porte vois. Je fàl:ist!s à la
curiolité de Flnquifiteur ; & après lui avoir
dit qui nous étions , au moins moi , car le
Guré de Lery ne vouloit £rre connu que fous
le Nom d'Abbé de U Motte ; je lui deman-
dai, qui étoit celui à quîj'avtjisl'honnearde
p^ler, quels étoient fes Compagnons, &en
quel lieu de la Tour ils étoient?II me dit
qu'ils étoîcnt trois gîtez dans la Calotte ;
qu'il s'appelloît du Prey de Genève, quelW
Comps^nons s'appclloient , l'un Matliurin
Picot, Laboureur deGournaien Picardie, &
l'autre Piiilîbert la Salle de St. Etienne en
Foreft , Laquais de Mr. le Fort auffi Prifon-
niei à la Ballille. H me dit encore le temps
i peu près qu'ils avoient été arrêtez, & ilfe
trouva que ^'étols à tous leur Doyen de Balr
tille. Je Tatisâs-à leur curiofité du tnieiix qu'il
^1» VltufitipieH trMfe'ifi -
me fi}t po^iWe. Je luidîs quej'avoiï été ar-
réu- à Verfailles, âïfldt été rafpellé de Hol-
lande à Ja Qour par ^r. Cbamillart ; Sx. que
ynénut rev<(iu TM^fa Fpi dcceMiniitre, qui
m'avoit reti-mi auprès délai, Mr. le Marquis
de Torcy m'-avoic fait acrÊccr, lorfque jeme
croiois dans la taveur par deflus les yeui ; &
que j'emploioîs le crédit que tnedonuoit Mr.
Chamtilart i me faire des Amis, en obligeant
tous les Officiers en qui je croiois découvrir
du mérite. Il me dit que lui du Prey avoîi'
été trahi par un l' aui-rretc , qui avoit feint
d'être de la Religion Reformée pour le Li-
vrer à Mr. d'Argcntbn. Je lut repondis que
Mr. d'Argenfon «'avoit nulle /autoricé ai in-.
^cétion fur Meilleurs de Genève pourJefait
de la Religion ; qu'î.s tutoient fous la Piotec*
tioD du Roi ., & que je m'étonnois que ce
Minillre l'eût tàit eruprilbiiaer pour un Aâc
que les Genevois prot'elTuient publiquement à
la Cour > à Paris , & par luut le Roïaume
fous l'autorité du Roi. Je vis bien parfès re
ponics ambiguci qu'il mê déguifuit lavérité,
é'. je n'ai fçû que plus de trois ans enfuite
& plus de deux après que j'eus été fpndeplo
lable Compagnon , qu'il s'appelloit Samuel
Gringalet de Verni dans le Pais de Geiî, ■&
découvert le véritable ftijei dcfon arrêt ; car
c'écoii un homme qui faifoii le myftérifux en
tout; & plût à Dieu que ç'eûtétéfon unique
delïaut.
Mathurin Picot étoit un bon Laboureur ,
qui dans fon langage & fcf ipaniéres paroif-
wà très greffier . iqais qui dans le foudétoif
très habille , très honnête homme & bien
■ ; " craig-
.--„Googlc
«*»ignant Diai..Sa bonté faifoir tout fou cri-,
me. On l'avoit. arrêté pwctqaec'étoit le Me-'
decin charitable de fon Pats • & qa'il étoit 2,
peu près à Gournay ce que Chtifl(^h|e Oza-
ne étoit à Cbaurdnu. ll^avoit iàit des curei^
fbfprenaQtes , comme je l'ai appris fur les,
lieux de l'Hôte de Gourotu , où nous droi-
Hies , lorfqne les Exempts du Roi nous coa>
doifiretu de la fialUlIe â l'iûe, homme dqai:
Picot nous avoi( raconté mille biens dan.s^
Prifon, &quime parutfbrtdroit& fort judi-
cieux. Il m'aigrit la funçUe cataArophe du
pauvre Picot, qui avoit les Médecins pour par-
tie : Gents implacables; furtoutquaudoa va
Tut leurs bnXées, qu'on decouvra leur igno-
rance commune , & qu'on ]«ir âte leur pra-
tique, eu dévoilant la iKUUpedes lîraptes qui
fKQvcpt nous fouJager, iàns leur Galimatias,
& les termes barbares de leur Faculté. Pi-
cot gueriflbit gratis, pendant que les antret
aQàfiinoiem à grands tiais : c'en étoit plot
qu'il n'en falloit pour leur taire perdre leur
otedit , & les mettre ainli ea Aireur. Leur
Alitoiité donc fit oçttre Picot à la Babille,
parce qu'il ne fi^avojt pas'fervirla owrtdans
les formes, qu'il ^uetiifott contre lesforpiet,
<luoîqiie pour cet etfet il ne fûtpasrev^tu de
la Robe de Rablais , ni honmé du Bonnet
XlodoraJ. Mais le crédit de Mr. Amelot dé
Ift Houflàye ^ dmit par bonhaut Picot, étoit
jermicr, & Fermi«rdroit & fidelle, r«wi-
randa ! le tira pour pncemps d'un Ueu, op
fçjoo toutes les jiparencçs , il ttoit renfermé
four toute là vie. Car quand les MedecîtH
tau fait tiaiisfcrer quelqu^on de leurs Auta-
O ^o-
u,:,-,zf--„GoOglc
goniftes tlans'cettcCarcme «ux Lions, ilsiy
tOQt demeurer Iç'rcfte âc fbt joQrs , par le
dredit de Mi. FagOn Premier Médecin do
Roi, qiiÏBeinanqae pasd'en remtmneciStt
Majeflé les joAes & judicienlës confeqnea-
ces. Picot de retour en fon faïs , an An
après qae je lui ea parlé par nfttre chenu-
née, Ât encore Médecin charitable , com-
âie je Pai appris fur les Hen, & fa fdea-
ée ^t tant de bmit , que la Faculté ajoatà
i lès accuCidons contre lui, pour ïmpôfèr
Alence à Mr. Amelotde laHot^re, l'Att
fterct prétendu de faire de l'or. Ilsgagne-
rent le Cur6âe Gournai, qui afiRnna avoir
TÛ en Livre miracbleni entre les mains de
picot, f^r le moieii dtiqael, il avoit conv
jnunicarion avec les httcltigenccs fupcrieui-
rcs. Le Livre ne s'eft jamais trouvé: ccpcn-
l^nt fnr cette dépolhion autcntique , & le
crédit des Doâeurs de la Faculté, Picot fut
remis à la Baflille, od peu de temps après
il mourut dé deplaifir ; & fkns doute de mi-
jcre, acravée à la recommandation de Mr.
FrcfquKf Médecin de H Batlille. Il I^lfii
noc Fine aniqne, fi panvre, malwé fes fe-
crcts, capables d'enrichir tout un RoVaumev
" que la malheureuftétoità travailler ajournée
3 la Terre , lorfiiue noas paiHmes au Mois
de Juiiletdel'Anntfe 1713. à GourOai. J'an-
rois été bieii aîfe de la voir , & mémet'HÔ-
tc voiIlBt nous la faire appellcr , mais com-
me lès Officiers de la Biltille m'avoient de*
poUîHé dctout avant que de m'eiivoycr en
exil, & que je n'avoit rien 3 donnet i cette
pauvre Fiile, poifqtt'll»nem*ar<»eDtp»]«tf-
u,:,-,zf--„GoOglc
ta FHiftohe de ta BaJMle. 3 f j
Ci un fou , je fus privé de laûtis&aion <{e
lavoir, & de m'infowner plus particulière-
ment des malheurs de fon Père, à qui U j»-
loulîe de la Faculté «voit dopntf l^ ipott •
mais une mort ttès cruelle, & (î'une'Hiaoa-
re tout à fait inhumaine.
Philibert la Salleétoitun jeuiie ^rçonds
dJxhuit ans: il étoit au fervice d'un nomm.é
Mr. le Fort lors qu'il fiit arrêté. Son Maî-
tre avoir pris avec lui uncAngloife très bien- -
faitte, mais fort libertine, qu il faîfoitpaflet
pour fa Femme, àlatenoiten chambre gar-
nie , chez le nommé Collier , Maître Cor-
donnier riie Trouflfe-vache, Unfbir fur Içs
hait heures le Fort & fa pretendiié Femme
furent arrêtez par des Exempts, &unenom-
breufc Kirielle de Hapech«rs, qui les^forcç-
rent de monter en Carolfc. Philiberten qua-
lité de Laquais monta derrière, comme s'il
eût eu bien affaire à la Baflille. Lors qu'ûa
fit entrer fou Maître & fa Maitreffe dans la
Caverne de Polyphémc, il fit l'oflBcieus & vint
ouvrir la portière du Carofle. Qu'es-tu toif
Joi dit un des Exempts. Je fuis , répôndit-ij,
le Laquais de Mr. le Fort II n'en fellot
pas davantage poQr le faire entrer dans l'Au-
tre redoutable, où après Tavoir gardtf qu^.
ques Années, fins ïçavoir dequoi même on
accufoit fon Maître , d'Argenfon Je vendît
au Roi pour en faire un Dragon. J'aidepu»
apris que le Fort , f» Nimphe., ' & fon Laquais
n'avoîcnt pas étiï arrêtez feu[s i que fmt i
huit Pçrfonnes , qui quelques jours avant leiir
■arrêt , avoicnl foupéareCeux, ayciemparcili—
Icmeia 6ti arr&cz : que Collier leaiHôïfi*:
Qa ft
^1.5 . L'IitfMÏfitiom FrMtfoife
la Femme , malheureufement ponr eux in-
vitez à ccfuncne foupé , avoient cté emptî-
"fîïnnez, auŒ-bienque leurs Enfants , quoi-
que le plus âgé n'eût t^tie huit ou neuf ans,
Cour avoir verfé à boire pendant le repas,
"out avoir été amené au Colombier de d'Ar-
^enfon , qui leur y avoit fait couver des pif-
toles à fou bénéfice le.plus long-temps qu'il
avoit pu , aptes quoi il avoit laiflé envoler
fesPif,eotmeau3. A paremment qu'une defes
'mouches avoit été durepas, où l'oQavoitpû
lâcher quelque parole contre fes extorlîons,
■ ou contre le Gouvernement. Le raport vnû
~ou faux avoit liiffi , .pour faire arrêter tous
CCS pauvres Gens. Mais ce qu'il y avoit de
funcfte pour Collier & fa Femme, c'eft que
d'Argenfon avoit fait vendre les Ibulitrs, le
cuir & toute la Boutique du pauvre homme.
'. Le Propriétaiie de la Maifon de foii côté a-
Toit fait vendre les Chambres-gatnies, dont
avec là Boutique il faifoît fubfifter fàFamil-
le, qui en fortant de la Ballille fe vit fur le
payé , eipofée aux dernières miféres. O Juge
Dwbare de Police infernale! comment répa-
rer la defoi^tion de Tes funcfies viâimcs de
vôtre avarice iàns bornes i & d'un nombre
infini d'autres malheureui, opprimeï par vô-
"tre autorité , & que vos eiaâions ont réduit
'à la mendiciié î Pendant que vous regorgei
de leurlàng , la vois ea monte au Ciel pour
'y provoquer la juftice d'un Dieu qpi ne fc
'fcrt de vôtre Minillc're, que poiy châtier
Yon Pcuplel mais prcne? garde quil ue jct-
u les verges' dans ceitéu gui lie s^teiiidia
'iamais.
Ce
.--„Googlc
- Ce PhilibcrtlaSaHeavanttiDêd'entrcrdans
i» Calotte , où il étoît aflacllemcnt, fortwt àè'
}a première Chambre de la Toarde la Com-'
té, d'a,vec Nïcodéme dcslmbcrs.oùitavoft
ét^ mis en I* place de Farcy avec le Sieur'
Charas,qaiyavoiréttf mis en laplacedeMr.
Jacob le Beithon. j'ai déjadit ce qucje fca--
vois de Mr. IrBerthon, deFarcy, &dcâet
Imbers; & voici ce que la f^le m'afprit de'
Mr. Cluras Frère de celui qui le jourprecv-"
dent, étoit Tenji faire fortir Mr. Lisck de -îa
Ballîlk, où-il 'ifcfçavoit pas qu'il avoir un'
Frère depuis tris long-temps.
■ AprèslaPaix de Ryfwick , Mr. ChaKî"
Chinirgiea, qui ^toit'émbti&marié à Lon-
- drcs depuis la perfecution , eut envie de ve-
nir voirfa- Mère, foa Frère &fcsanrres Pa-
rents; &aianr laifféfaFemme&fes Enfants'
chez lui, il vint à Paris , ^icu de fa naiflàn-
ce , car il étoit Fils du Fameui- Moyfe Cha-
ras, célèbre Médecin delà Faculté de Paris,
celui donr les ouvrages font encore l'admï— '
ration de tous les Sçavans; A peine yfut-
il arrivé , qu'il fut enleva & conduit ilaBaP-'
tille. Sa Mère & Ibn Frcre vainement vin-
rent l'y chercher : on leur affirma qu'il n'y
éioit pas. Ils crurent que quelque chagriif
ïècret lui avoît fait quitter Londres , poUr
voyager'à t'aide de Ion Art, où il éroit foft
habile. Le pauvre Prifonnîerdefoncôté, nt
fevoïautpas reclamé, crut qu'il avoitét^ ar-
rêté par le crédit de les Parents , qui par là
Se feroient exemptez de partager avec lui la
fùccelllon de fon Pcre. Mais c'étoittHCn-
injullcment , puifque fa Mère & Ipn Ftorr:
O j ètoieat
Coo>;lc ■
âoicnt dans lA-âeriùéTe sffltâKmi de ne poo-
TOtr Mprendra ce qa'H-étoitdtfveDa. ^sbor-
hires Ttiubs i pow Atci toate c<»iO(M&aGe
de fk dctentton à Cenx qttr Ttnnnent pu ré-
clamer l'avoÎMitenferm^dMisHnCachot, eà
il s refté r<^«ace de pris de cinq «os. Eirfn
rèdnit aa defeTpoir , fc roiast tout nad , lès
haHts ^rant ofei , cai il n'y a point de liea
oà l'on en ufcplas ^ae dans leï Cachots, je
leifupareipcricacc, mol RouitU ^aascoB-
fgladon, il refolntde (bnninec fet jours par
fes propres mains- Pour cet effet il fit vat
poÎDte à &ia coQteaa, àforceAer^aifofiir
ouccnichedegnus, dans l3<]aelle su luidon^
noii de l'eau ponr boire , dont enfiiite il fe
frappa, & toit^ de faU^ute ptiv< decon-
noiflànce. Leporte-Clefs le tr«ival«itoo*r-
■vert de fon fa^, lorfqu*à l'hcar* otdioaiie
il vint lui aporter du pain. Il aï^laproEMM
tcmcnt Rcilha le Chirurgien , qui heoreuft-
mentlè troBva être des Parents de Mr. Ch»-
ras , fans qae le Pcifonnier en ait rien fçu
qu'après fa délivrance , ainfi qoe Reilhe lui
m£me me l'a dit : il fonda fa blcOùre , qut
ne ic trouva pas mprlellc , car par bonheur
le couteau avoit gliiïë fur une c6te. Lorf-
qji'il l'eut fait revenir tte fon évaaouiiTeinent
par fes remèdes , le GouTerncor defcendit
dans le Cachot , & au Heu de le confoler ,
es blafphêmant le faint Nom de Dieu , d'u-
nemaatéreesecrable, il vomît contre lui tout
ce que fa rage lui put fuggracr ; après quoi
ilTenvoia, pourmietixleguerirdefesbieflii-
rcs, avec des Imbers, ce fou tout nud dont
j-'ai pultf , & luidoniia poiu: ttoUàcme Corn-.
. -. pag,non
.^.C.oo>;lc
iJâgnbn La Sali» , pour l'empÉchct de con -
feiWer à fe fiOre violence , & prolefta à la
-^lle ; qu'il en repoadioit im fa téfe , en cstt
Tjue Mr. Charas vînt l s'outrager en fa cofll-
^agnie , comOie fi toute la pnideace hnffiaî-
■ne- pouvoir «np£eher un Homnic d'attefiter
à fa vie , quand, il en a fermé la réfolutïon.
il' tut queftion d'habiller le dit Siteuf Charas-,
pour le iiire Comparoître devant Mr. d'A*-
genftm. Le Roi païoit l'habit ; maïs en ôi
S«)àtiaiK Uh à Mt. Charas les Officiers n'en
«lt<oient pas mis l'argent dan^ leur poChlï.
Que foire pour obvier à ce malheur ^ L'a-
varice leur en fuggera le moyen; Ils ftfeitt
écrire uilfi Lettre à Mr. Charas , qa'îl aÀef-
fbit àfaMcre, datléeduChâceaildcHan, par
iWquclle il la prioit délai envoiter dix pittotès
pour liialdHer t puifqu'il étoit tout nud ; ft'
qu'elle n'avoit qu'à donner les dix pîftblcs à
mr. du Joncas , Lieutenant de Roi de Ik
Baifille , qui les feroit tenir très-feutemcnt
à Mr. le Gouverneur de Han. Mr. Charas
i'Apoticairc fut les porter lui m^me à Han ,
& conjura le Gouverneur, par tout ce qnt:
la tcndiellè peut infpiret de plus touchant à
«n Frère , pour émouvoif 'un cœur , de lui
fftirc voir fon FrerCi Le Gouverneur qui i-
toit honnête Homme rrfiilà foh' argent , ,&
l'afllira dans des tetities fi forts, ^ucl'onFre-'
re n'étott pas dans foà Château y & qu'infait-
liblement il écoit à làBaftilie, que Mr Cha-
ras le crut, & revîhtàParis lollicîcer 1* Oï^
■ficiers de la Baftîile de lu* avoiierfifon Frè-
re étoit entre leuts mains. Ils lui firent <}«
ferments horribWs, pour luiaffitaietlccofi-
O 4 traite.'
-, . Coo^jk
3ao L'iuqui/ttiùm FrMMfâfi
traire. Enfin la Salle étant foiti pour fer?â
dans les Dragons , il tint la promelTe qo'fl
avoit faiue à Mr. Charas Prifonoicr, &il6r
crivit i Mr. Charas Apothicaire , pour lui con-
firmer qnc foQ Frerc étolt daiis la Baftille.
.Sa Mcre & lui cmploïcreat taot d'Amis au-
près da Roi;, de Mr. le Chancelier , & de
Mr. le Comte de Pontchartrajn , qu'ils jeâ<-
rcnt fortir de cette. Speloqque înftrnile , am-
ples iix Ans (ix Muis d'unt^Prifon inhumai^
ne, où j'ai appris que cet infortuné, qui eft
un très hpniû^e. Homme, a perdu fafaoté,
ai)$ [»ep que moi , d'une maniée^ à ne poQr
roir. jamais la rétablir.
I^e prétendu du Prey nous dît qu'il étoit
foni depuis peu de la Calotte de ta Comté ,
où il avoit eu communication avec des Pri-
founiers qui étoicnt au delfous de lui , dont
l'un étoit l'Abbé RoUet, Chanciine d'Âutuii,
Précepteur des Enfants dç Mr. Biunet <k
Rancy, L'autre étoit un Gentil- Homme de
Hanover , de la Ville de Hanidn , nommé
Mr. Schiader de Pcck, Capitaine de Cavalerie
dans les Troupes de S. M. Impériale. & ci
devant Capitaine d|Infiuiterie en France,
dans le Régiment de Surlaube; & le troilîé-
,inc, un notnmé Jacques Maurice, Tailleur
d'habits d'un Village aux environs de Valen-
cienues. Le Curé de Lery fe mit à dreffer
les Oreilles , comme un Ane qui boit dans
un. fcau , quand il entendit parler de TAb-
.bf Rollett & pria l'Oraipur du Prey, de
.lui en détailler pofitivcmcnt tout ce qu'il
.en fçavoit ; & voici ce que Gringalet nous
ep apprit, avec une voix pareille à. celle
d'un
i),-„r;., Google*
d'un Taureau qui auroit mugi dans la che-
minée.
L'Abbé Rbllet étbît aU ' Collégfe ■d'HW'-
court avec les Enfants de Mr. BrèSet de
Rancy, Fermier General , lorfque les aïatft
conduit à la Promenade au Jardin de Lo-
■ ïembouriî, un jour de congd-, il y trou?»
un Prêtre qui- revenoit de Hollande, qiri
s'appelloit Sore! autrefois Curé de Lery ,
qui -l'aiant abordé aroii fait coniioîflànce a^-
vec lui, & lui avoit donné un ou -deuxpe-
tits Livres brochei qu'il aToit apportez de
Hollande. Le lendemaiu ce Prebre l'étSBï
allé voir au Collège d'Harcourt,- luien a-
voit vendu quelques autres , & l'avoit prié
de lui en faire vendre dans le Collège aux
autres Gouverneurs & Précepteurs qu'il coa-
noiffoit. Le nommé La Saulais, Mededa
s'étant trouvé chez lui , lorique le-dit So*
rel y étoit, il luien avoit pareillement ven-
du deui ou trcMS.- Enfuite ledit Sofel IV
voit prié très inilamment de lui obtenir de
Mr. de Rancy une Commiflion d'Ardicr
d& Gabelle pour fon- Valet auquel il dcvoit
une recompenfe; ce queledirSr. AbbéRol-i
let lui avoit accordé. Mais enfin ledwSr.'
Sorel aïant qucr-cllé , battu & Outragé- fon
Vailct , il l'avoit chaffé ; après quoi iViant
trouvé chei leditSr, Abbé Rotlet-,' qui fot*
lîcitoii l'emploi qu'il lai avoit fvV eipercr >.
le djr Sorel s'étok encore brHtalemem chi-
portè contr» lui, & conjuraledit Sr^Abbé
de ne lui- pas -faire donner l'emploi lïo'il M
ftvoitpromis. puifqù'iru'en'àuroit pasd'hOQ-'
Bwu-fon -Valet étant un Fripoa. « Ce. Va*
. -. 0-j . ISP.-
L„:,-,zf--„GoOg[c
1ct,lloniiDéGuill!ÛaGoargue dû Roqnefon,
Twlleur d'habits de fa proieflîon , pour s*eo
vcuser toi trouver Mr. d'Argencon , & lui
decuum le commerce de Livres de Ton Maî-
tre, Qui ne l'étant plut trouvé à la Ga.de-
Roïals UL haut de 1» K.i'C St. Jacques , où il
Jçgeolt avant que de panir pour Schclellat,
«à il élDÏt allé à l'inrçu de ce Roquefort, aur
^pel It avoit reigncurement caché Ton em-
Îloi & fon.voïiWeT ledit Roquefort avoit dit
Mr. d'Argeal^n ■ que le véritable moiea
<ie Icavoir ce qu'étoït devenu Sor^l , c'ctoit
«te ttirearritei Mr. l'Abbé Kollct , auquel
^ avoit veoda une quantité prodigieufedefes
iLivres. Il en dit plus qu'il n'en faloit pour
fiùre éclater le zélé toujours aâif de Mr.
d'ArgeafoQi alléché part'elpoird.'une bonne
capture; il fit inyeihrleCoUégedcHarcouix
4ai)S les fbrmes par une multitude {MTodigteO"
fe d'Exempts. d'Archers, de Pouffccus,, &.
^'autres pareilles Canailles , qui fouillèrent
ciaâement, non rculcmeut i'apartemeîic de
Mr. l'Abbé Rollet, maïs généralement tout
le Collège, où l'on ne trpuva rien de ce que
d'Axgenloa cherchoit. Il s'y étoit tranl)>0[-
té magtllraleinent , pour infpirer plus de ter*
icur. Quoique Mr. l'Abbé Rpllet fût jufli-
fié de l'accuution de Rochefort , ne, s'étant
{autrouvédeLiyresdetfeaduschezIui, d'Ar^t
Konfon ne l«llà^asde mettre cet Abbé i 6(.
La Saulajt Mcdecio , che^ qui on avoit étâ
faire 009 pareille perquilition,. en «rêt chez
I^ Exempt, où ils mreitt plus.d'uu Mpit. •
dtaneudaiùqu'on&fûtlàifi de StxdenAl-
laiB^¥, OÙ ron Offrit qu'il étOftAÛiuâiuec
^ d'un
.--„Googlc
d'an Régiment de Cavalerie ; lequel en dé-
clara plus qu'on n'en voulut fçavpir. ÏI,'»'"
voua qu'il avoît vendu une quantité co*fi3é-
rable de Tes Livres audit Sr. Roltet, & qjiel-
eues uns audit Sr. de li Satilais. Ccii futaf-
iCL pour les faire enfermer tons le* diîu*' â
la Baitille, où ledit Sr. Rôllct, qUife fercdt
fauve vingt fois de cheï PÉxempts fi il a*-
voit voulu',' Aott tombé dans un acJc^lê-
meftt & une langueur , qtif avoïttit ttll*-
ment miné fa fanté, qu'il nVavoit pasd'*--
parence qu'elle pût jsm^'s fc~ rftablir. ft
avoittrouvé Icfecret de foire l^àvoirde ie»-
nouvelles à Madame de Rancy , d'àne ma*-
nitfrc très îngenieulè , malgré' la vïgilahcà ■
de fes barbares Tvi^ns, Il apprit que Tci
pains entiers que les Prilonhiers dbnnolettt-
aux Portc'-Gleft toumoienr ï Teur bcncflctf; .
que le pain qu'ils emportoiefttparmorceaïit,
étoit emploie à foire la foupe des PTMbntiicry, . ■
& que les Porte -Clefs vendaient cts pains-
entiers anx Soldats de la Garnifon du Châ'- ■
teau. Mr. RoUct fit adroïttenwnr utïe ot^
verture ï un de Cts pains entiers, écrivît,
une Lettre à Madamede Rancy- qu'il four-
ra dedans , & . boucha le tf ou fi sdroitïe- -
ment , que l'Ouverture étoit imperceptible: .
Le Soldat à qui le p^'n fut vendft , en lé
coupant; y trouva le billet, qui étoit à-pea
l^ès.xODfu dans ces ttiïnei ■■
MA*
.--„Googlc
M
VI»qmfitiom B^ft^-
AD AM'E,
' jF*«i mieji p^^de eomfi^Mee em voi iomtez »
qtujefmû trii-ttrtaîm ame immi fem éU^mer
mm ko» emfUi ^ «m de yargemt mm Portemr àe
tt biiitt , dmmt le miomemt fm'il vtms le remdrs.
.& vomt vomUt mt famver. la vie ^ follifittt, «M
Liberté Mifrif dm Roi , de Mr. le Cttnte dt
Pmttiartraim , i^ tmsort plMs^fùrtemewt am-
frès de Mr- ^AT^imfaa > de qmi elle dife»4
tAftUtmmt : t^Jt em me laijfe emtore mm Mois
jei^ jefmis mert\ i^ t'efi faier tref eher umt
fmtsU emriofiti. Pour mmrne qite voms avez
rêfmceUllet, miz la hemtf Mtfdame de tm e»'.
VMer Kiei hardei ; i^ damt la. tnaacbe gamthe
df mu SomtemelU dtfeyt, entre la daMbiMre^
le deffm , vous y ferez mettre , i^il vam fUîi
mme Réfomft à te billet., L'Abbé Rollet.
Et fins bas.
A Madame de Ramey à fHiltl de CMVavalett
Rie de la Cotumre pi/ite Catèerime.
Quatre joars après Mr. l'Ab^rf Rollctre-
(Ut UQ grand panaier plein de toutes Ibr-
les de nfraidimea>eDts , Vins «x<mî.s, fruits,
coufiniret ^ rîeti n'y jnaaquoit ; çtun coifre
plein de hardes^ dont la plufKiit dtoient
toutes neuves. On n'y avoir pas oublié la
Soutaoelle de 'foVe ; dans la manche 11 f
iroavt «a billet i peu près dans ces ter-..
XOHfieMT de Ramey ' domtté dams U mtmiM
ttnt- Citmmiffton tU Brigadier ' À i'homm* eu
fmeftiom , îjf de fàrgeitt foM« fe tawdxirt: en
te ^ojit ti.ii le tomjervera êm votre confider
■ ration , Mottfietir ; ytutfortittz imttffêmuaemty
eu je m'aurait »«/ crédit. Sur tout Ht vaut
impatiemteZ fui. Je vous euvoirai Jinveue
dts rufraifhiffements fitreih à. eaufei y.têiit
^ue vous ferez, à'- la Bafiiilet .
Depais que ma Iïbeiti5 me fut aqonc^ê .,
j'appris par un des Soldats <;u! nous efcortoieiu
fur la PMe-fonne, où nous eûmes la liberté
d'aller prendre l'air quatr£ oacinq autres
Piifonniers & moi , que ce pauvre AÛié étoit
forti T par les foUicitattoos de Monlieur &
de Madame de Rancji^ aux conditionsde ai-
re une Année, de Séminaire à St. Lai^are ; à
la fortie duquel il s'tftoit jette dans les Bons-
hommes à Chailjoc, pour y paiTer le reltede
fes jours , tnaudiiTant , appareoiment de tout
fon cceur , le moment qu'il avoit veu pour
la première fois le Curtf Jie Lery.
Gringalet nous raconta pareillement l'aven-
ture de Mr. Schrader de Pcck , & celle de ■
Jacques Maurice. Il iiuus dit que Mr, Schra-
der étoit au Camp.duRoi des Romains, o^
un Toir il regala quelques Officiers de &ax
Rcfeimcnti avecl'uadeiquels, étaoten poin-
te de vin, il prit querelle, & que s'étant bat-
tu av^ lui. en duel, il le tua: ce qui l'auroic
coDtraint de fe fauver à Thionviile , où it
Femme , fou Frère , qui é(oit Lieutenaiit
dans le même Régiment où il étoit Capitair
0« , & le Sr. Wipertnan l^ut Cotilip qui <£-
■ 0.7 ; toit
.--„Googlc
toit Cornette durt la Conqngniede PAtirf,
l^vfHCnt fiiivi. Ils-étoient vennstooseoïcA>
btc i Faris , où ledit Sieur Sdinuicr s'étoji
^t de piu0àiits AmÀ , pendant qu'il éioii
Capitaine en Sorlanbe. Il ^crivirdcs'le joa
même qu'il y arriva, qm Aoit nn jendi à Mt.
le M»rqo»-de Radlly nn de (es PatroDS, qui
taî av(Mt mtoie noirané on de fcs Enfknts',
]ni détailla fonavaittuiirc, & le priadelcîoti-
teotrde remploi, pour lai, fon Frère & fon
CoufÎBi Mr. de Raciiïy loi fit réponie dès
le lendemain, Taflu^ qu'il avott donné Coa
placet â Mr. Chimlllart, lui protellant qs'il
l'apuiroit de tout foii crédit, ne dontant pas
d'une heufcufe reuflîtte. Cependajic le lun-
dy fuwant i pluficurs Exempts iîiivis d'un
Peuple d'Archers de la PafEon , vinrent l«s
arrêter dès le matin , au CroiOànt on ils é-
Kdent logez au FauxboUi^ St. Germain , &
les amenèrent tous qOatrc, arec deux Valets,
& Qnc Fine de Chambreà la BafHlJe. J'au-
ratfiijet de parler d'eux dansl'autieTomtdc
cette Hifloire, & les fuirants, carillcurcft
arrivé des chofes-tom i iâit fiuieftes.
Jacques Maurice étoit un pauvre Tailletir
dtûïnts de fa profeffion , dans un Village auï
environs de Valenciennes , jTui le bord de~
rEfcaut, oà il étoit FairagerordinairedePe-
re en Fils. Sa barque étoit une Cuve, dans
laquelle ce Bûn- Homme Carpn meltoit f«
PaS^cis i l'autre bord. Quelqu'un de fcs ■
Ennemis eut la malice d'aller déclarer à fin.
tendant, que parmi ceux que cefimieuxNaa-
fonnier avoir palfé , il yen avoitplufieursde
Tk RctigloQ Reforinf e , qui jè Croient de
u,:,-,zf--„GoOglc
oàffiifiche Je la ttaflHU. fij
France dant letPdt's Etrangers. Comnre fî
ce malheurcQX eât dâ , on pu les diftmgucc
des autres. Sur cette belle depofirion Tln-
tciK^Bt le fit arrêter & t'etivoïa i la titille:
Un feni Honime l'y conduiTit ; & Maurice
était li fiir^e , ^tt'il aticndit fon Guide un
jour i St. Quentin , où il étoit lombtf mala^
de ; le Nocher aïantlaUbeni d'aller en Vil-
le quérir ce dont fon malade svoit befoia.
En entrant dans Pdrîs » où leï ni fon Guide
n'avQJent jamais ^i^ , ils demandèrent plu-
sieurs ftris le chemin de la Baftille, oùlort
que Maurice te vit enferma , le pauvre Hom-
jne devintfou, par une devotionoutrée. Sa ,
folie copfiftoit à aller en Pèlerinage. Qua-
tre on cinq fois par jour , il alloic à Nôtre-
Dame d« Lieflê I à St. Jacques'eti Galice , à
Nôtre-Dame de Mmit-Sara 1 à Nôtre-Dame
delAurme, &c. U fe mtttoît pieds nuds,
rcpandoît del'eaudans la Chambre, &après
il affirmoit ^u'il pafibit fur lePont-qui -trem-
ble, bclas mon Dieu ! ou bréa il caiToit ik
ctucHe, ât en follblt une tracedes tefts, ftir
lefquels il nuwchoit nuds pieds 1 qu'il met-
toit quelquesfois tous en fang; après quoiil
s'illoit couchef ^ en rendant grâces à Dieu.
d'£txe enfin arrivé en un bon Hôpital, ou îî
£e rqiofoit de toutes fes fatigues. Il Âifoit le
Prophète , & protcftoii , que Mr. le Cari^-
ml de Noailies , alliû^ de fon Clergé* mar-
chant à la gauche du Roii vic<:droient tous
wOciei^à la main, le faitefonjr rfelaBaft
cille, pour te mènera l'Ëgliïè deNôtre-Da-
me, luiftlre réparation d'honneur devai.tI4
Chapelle dfc !a Viciée. Dix fois pu jour il
«voit
u,:,-,zf--„GoOglc
Kvoïtdes Viâons de la Viet^e: tlTOu1oîtM-<
te mettre à genoux Xes Compagnons, ou \ts
Porte-Clefs, en leur difaot: la voilà qui me
tend let tiras , qui me donne fa beoediâionj
& lorfqu'on lui faifoit porter la maia^u lieu
où il cioioit la voit , il s'y ttonvok au . liea
de la Vierge, une toille d'Arragnée^ an cra<
chat , ou quelqu'autie immoudice. Au rciïe
il éioit très Officieux envers fes Compagnons,
raccommodant toutes.leors guenilles avec mic
aâeâiun , qui moLtroit la bonté de foo cœur,
& ûfimplicité. Cependant, malgré fon in-
iiocence , le Jnalfaeureux feroit encore à la
Baftîlle, fi comme je i'ai-appris du Sr. Jean
EoHel, fon Voifio , un des Officiers qui vin-
rent en France pour enlever Mr. de Berio'
gheu Grand-Ecuycrde France, &dont)cfe-
rai i*Hifloîre dans les Tomes fuivans , qui
connoilTLiit très particulièrement le bon Maû*
rice ; fî , dis-je , la Femme dudit Maurice ,
quoique très pauvre & chargée de fix ou fept
):iifams, n'eût voulu £e remarier. Ellcavoit
"une petite Chaumière fur le bord de l'Efcaut;
c'en étoît alFez pour donner dans lav.ued*ua
Pailàn plus miferabîe qu.'eJle. Elle preïïà
fon Curé de proclamer Ton mariage , 3vec
proieflation d'y procéder autrement , luire- i
montrant qu'il y avoic plus de feptansqu'eJ- '
le éioit fins Mari , & que n'aiant pas en-
tendu feulcmciu pM-ler de lui» fans doute il
iftoit mort. Le Curé en- écrivit à Mt. d'At-
genfon , & au Cjouverneur-de la Baftiile ,
leur remontrant quel fraudale ce feroit , fi
çeue Femme fe rcmarioit du vivant de foa
X/iwy ; mais ce ji'éto.it [las làiemoieo d'ca
âwâr .
.-„Goo.jlc
e« rUiftoirt de la SafiilU. ii>
avoir 3es aouvelles. Importuné par les foi-
licitations réitérée? de cette Femme ^ qui
voaloit , à quelque prix que ce tût, être te-
iBoriée , le Curé lût trouver Mr. l'iutendant^
qui étant honnCtcHomme. luiconfeiliad'eii
é<^rîre à Mr. le Marquis de TMcy, &dclui
expolêt le foît , l'airurant qu'il éroit certain,
que la probité de ce MiniÀre le tireroii; de
l'etnbaras où il étoit. I! ne fut pas trompé
dans fon efpcrance. Mr. le Marqois de Tor-
cy eut la boi^é d'en parler au Roi & au Fe-
rc de ta CiiaiTe. On donna, un ordfc pofisîf
à Mr. d'Argenfon de mettre dehors Maurî-i
ce , qui alla gaecir fa Fcmme.dc la rage de
fe rern^icf; àç. qui fc remaria lui même en
Secondes N,6c«s j, après près de huit. Ao-
uées de Veuvage. j
Nous remerciâme; Mr..dQPreîdefesbon-,
nés nouvelles, nous lui fîipes part deceque
nous fçavions de. \s Baftille: nouslm4emaa-
dâmcs Quand nous pourrionsavoir une iècon-;
de conférence avec lui. Il nous marqua chaffc
fur les dix heures du foir , lorfque nos Ty-
rans & leurs Satellites feroicnt retirei^ afin
d'avoir plus de liberté de, nous, parler, fanç
crainte. £n prenant congé de lui > nous le
priâmes de radoucir un peu fa voix, quipour-
roit être entendue de dcffus la, Plaitç forme,,
& même de plus loin ; & nous, nous retirâ-
mes pour faire nos Réflexions fur.tDUt.ce.qu!ii
nous avoit dit.
Il n'y avoil.p3iS d'aparcnce dç raifonncr a-
vecun homme qui n'avoit piu^deraifoni &
Jui fur un oui, ou un non entroitenfureur,
e \m avoit dix fois fait remarquer la f^t^
tju'il
u,:,-,zf--„GoOglc
3 jo Vîn^Mifithm frto^fr
qn'il «oit feîte d'oatr^er foQ Vallet, «cd^ân-
pèdher Mr.. l'Abbé RoUet de lui faire dMi-
ner del'emploî, puifqnec'étoitiui, Ciiisdoa-
•e qBi les avoit dénoncer à Mt. d'Argénfo»;
ie; que j'avois conjeânré do derail qu'il m'a-
Voît fait de fes avuitures. J'avois auilî bew
«otop infifté fur l'improdence qu'il avoit eîic
é^avoUer qu'il eût vendu des Livres, paiF-
qu'on ne l'avoit trouvé ftifi d'aucHn : mais
c'^toit donner matière au: empâtements àtt
plus brutal de tdus les Hommes. Il fit pro-
itienoit à grands pas dans la Chambre , Se
frappoit fi rudement d,es pieds fut le plancher
<)ui étoit fort raboteux , que comme &s ih^-'
Kers étoient fans lamelles , il l'eut bientdr
tout en&neltnttf ; il fennoit lès poings ; roi'-
dilToit fes bras , mordoit fts Wvres , & ft'
coiioit fà tite fens dire un feul mot. Après
«roir long temps fait cette manœuvre , if
rompit le faïence , pour dire brulquement S:
avec les dcmiersemportements, quéfijamais
il troavoit fon Vallet fous fa main . c'é^coit
feit de fa vie; qu'il lui arracheroitlecœurdu
ventre-, & qu'il lui en frotteroit le vilage;
Vous reconnoiflci donc , lui dis-je, Mr. l' Ab-'
bé que vôtre emportement contre ce miftta*
We, comme je vous l'ai dit plulieurs fois, ell
la fource de vôtre malhcnr } & que l'avœu à
contre-temps que vous avct fait , d'avoir
vendu des Livres à Mr. l'Abbé Rolet & i
Mr. de Jà Saulais Médecin fontcaufedcleur
emprilbnnemcnt. Mais loin d'en tomber d'»c-
cortt , il fe prit à foutcnir ie contraire avec
des emportements' & des bnitalïtcï qui me fi-
ifcnt garder le lilence.
Sur
u,:,-,zf--„GoOglc
nVtti/ioire de U BoflHU. j;i
Sar ]ei dii beares dii fait le iignat fe flt
dans lachemiaite, Je nous allâmes iPau^cR*-
tX de nAtre Stcntori II noas apprit qu^l «•
Voit cooimanic^tioa d^njs quelque teinpsi^
IFCC les Prifonnîers de la Quatrième Cham-
bre» qui dciîroicnt ardeminciit avoir relation
avec nous. Nous le priâmes de tes avertir de
Ce dooner bien de garde de percer kar plan^
cber , puifque nôtre Chambre avoir un f*]ai-
fbnd & blanc & 11 uDî , que )e moîn'dfe tnm
qu'ils y feroienr , feroit aperçu d'ès }c même
joar des Officiers , ou des Rbrte-Glefs i qui
'Vieodroiojt â tenr ordinaire nous voir'; maft
que rien n'étoit plus aifd , que de Mre ah
troa dftBS ndtre cheminée, qui'nVtoitqaedb
biiques. Nous lai demandâmet quels étoient
££9 Mcffieurs-, & lî il l^s connoilToit. Il nous
àk qu'il lear parlait , fans lesv6ir : qu'ils é'
• toient trois : que l'on étoit.un Prfnce Etran-
ger, qui jamais n'avoit voulu dire fonNoirt;
-que l'autre é(oit on Loid AngloiSi &leTrQt-
'liéinc UD Bourgeois de Paris. IV fat leur par-
ler; & un moment après, il vint nous de-
mander, 11 nous n'avions pas quelque ferre-
ment àlcurprétct, parcequ'iisn'avoicntrieil
■pour percer nôtre cheminée. 11 nous defccn-
dit un fil atfés fort pour enlever onedes bran-
ches des vieux cizeaux, que Mr.LïnclE nous
avoit laiirez, qu'il eut bien de la peine à faire
patfer par fou trou. Enân nous entendîmes
nos Voifins travailler attire leur ouverture,
& nous conviâmes avec Mr. du Prcy , que
nous nous irions coucher lui & nous , pen-
dant que les trois MantEUvreS feroient leur
trou, & quç le lendemain à trois heures db
nia-
u,:,-,zf--„GoOglc
IJt Vlmqt^'nm FrMmfùfe
matin Doos leur paileriont. Nous lepriiiiKS
de leur fouhaher de oAtrc parc une aùflibi»-
Dc unit y que noot hli ibobaitîODS à lui uÀ-
jne, & à fès Compi^oiis, & doosiiods Ar
jlmes reporer, cd «ttcadaot nôtre audîmoR
. Pendant que je t^ois ma prière ,. je fat
fnrpiis devoir monTiÀrCt qui vint fe met-
.ue à genoux devant moi , ponrmepricrdcRc
ie pas Taire connoître à nos Voitîus , parce
qu'il lui écoit de la dernière confèqucoce ,
qu'on ne i^ÛE pas que c'éioit lui , qui étoic
caufe dc rcmprifQnaenieiit de Mr. VAtiat
'Roltet& le Médecin la Saulais, ce qu'il ve-
noitdeuicr, il q'y avait qu'un moment.. Je
!lai dis qu'il pouvoit dormir en repos , & qoc
je preDarois bien garde de leur dire qucj'eufic
^aucune (ouiioiflance de Tes aâaîies. il ik.
«lit à calirioi« dejoïe, & ("e donner du ta-
jqn par. les fèOes , comme fî Je lui eni& anoo.-
.cé fa'libertè.
Le lendemain au matin; dès les crois heu-
res , moment marqué pour la conférence,
unevoii très fonorc nous fouhaita le bonjour
j>3T la cheminée. Je laillai aller le Curé le
premier à l'audience, qui. y courruitout nud
.en chemife, pour demander en très nrauvai*
Latin au Prelident, li ce n'étoit pas aûPrin-
ce qu'il partoit, & iî il eniendoit cette laiu
guei" L'autre lui répoudit dans des termes
très élégants , qu'ïlj'cntendoit un peu; &Iaî
parla avec une faciljté , & une puieté ,■ qui
vas firent connoître qu'il pofledoît part'aitie-
mcnt cette langue; ce qui cmbarrafla beaucoup
nion Curé, qui n'en Içavoît pas ttuitàbeau- .
coup près. ' Le, Curç' comiauaat tol^ours à
par-
on THiftoire de la BaflUh. ) } 3
parler fbnLat'-nde cuïjîne, lui demanda, s'il
çoanoiflbit Mr. l'Abbé Rollet? L'autr:elat
répondit, au'il ne le coBDuitToit lyie depuis
qu'il étoit a Jafiafltlle , mais qu'il avoit en
relation avec loi pendant -trois Mois qu'ils
s'étoient communiquez au travers du pUa-
cher; & le pria de lui dire , f)ourquoi il lui
faifoic cette demande , & fi lui même connoifV
foit cet Abbé ? Soref qui cfuurneuçoit tp4-,
jours fàfrafe par, Maxime Printtfi fcm
Jltitudo vejira &c. quoi qu'il ne parlât qu'à
un Capucin , comme on le veira dans la fui-
te , après avoir exigé de S. A. S. qu'elle ne
[cveletoit jamais à perfonne le fecret qu'il
Im alloit dire , fit l'avoir fait jurer plufieurs
fois pour confirmer fa prqmefle, proferace
graHfl fecret dans ces termes. £go/«»i , i^..
non alÎMi , Ânthauiiis Sorti , Sactrdm y fîi
fiÇc'opMf Ltry, Ahbas ât la MoiU ^ SanOi
Antloaiiàic. Nous demeurâmes , à ces mot»,
tout étonnez comme des Fondeurs de çloi
cties t dont le métal a coulé ; cuï de coniioi-
tre qu'ils parloient à l'Auteur des malheuis
d'un fort honnÉte Homme, qu'ils conlide-
roient beaucoup j & moi de voir l'indifcte-r
tion d'un Prêtre, qui lefoirpreçedeut mepiir
oîi à genoux de ne pas le decouviir. Il leu^
jeclara comment il avoit été arrêté à "Sche-
leflat ; ce qu'il avoit avoiié à l'inteiidant de
Strasbourg fur le compte de l'Abbé RoUeti
& de quelle manière il avoit été couduit à
laBailille.' Après quoi le prétendis Princi;
le pria de nie taire venir au Vatloîr. ; , ~ '- - >
Après les complimentsfaits dp paft^ d'au-
tre, je priai Mi. l'Oïaat de m'^cu^t .fij9
)$4 L^Imqt^thn Ivémfttfè-
se Im parloîs pu «« LatiHj car outngnen
ae le parlois pas auâî élégamment que Mr.
TAbbë 1 a'aïant point de myftére à lui rcTc*
1er , j'^tois bien aîfe de lui parler uae Lan-
tué que tout le Monde pût atfcment entea-
are. Il nie deiiuuida qui j'étois. Je fatisfis
à ce qu'il exigeoic de moi, le plus fuccinâe-
ment & lîncerement que je pu. Je le priai
de me dire à Ton tour qui H étoit. Il médit,
que pour le moment il ne pouvoir pas tatis-
faite à ma curiolïté; mais qu'il letcroitdans
peu, & qu'il m'étonneroic beaucoup. Apris
jepailai au Lotd Anglois qui me parut êae
un fort honnête Homme, & d^n rare m^-
nte. II poilèdoit parfaitement les langues
Lattoe, Grecque, Angloife, Italienne, Al-
lemande , Efpagnolb & Françoilc , avoit
beaucoup & utilement lâ& retenu , Àfaifort
en très bon u&gc de & leâure. Il me dît
qu'il s'appeiloit le Ghevaîier Thomas Bnr-
nct, Neveu du iàmeaxMylordBnrnet, Evo-
que de Salisbucy. Enfuite j'eus une petite
converfation avec le Troifiéihe qui étoit un
Gafcon, BourgeoisdeParisnoniméMr.To-
làin. Ils me remirent h la nuit prochaine i
me conter leurs avantures , & exigèrent de
Bioî que je leur fifie on détail des miennes;
ce que je fis le plus en abrégé qu'il me fiit
pofiîble. Ils en parurent très fatisfaits , â
prirent congé de nous , jufqu'à dix heures dn
foîr , crainte que -quelqu'un ne nous fnrprft
âans nôtre entretien , qui tout innocent qu'il
étoit, , aaroit été puni comme un ^rand tri*
me. Il ell à remarquer que Gringalet & fes
Compagnons ftv oient l'avantage de ne pas per-
die
.--„Googlc
«» tHiftwt 4e ta B^t. «9^
dté Un Ceal mot detpat ce que nous difions;
parce que nos vois portoient aa h«u de i^
chemtoée, où ils Aoient fort attentifs.
Leur tcou cdwuch^ , le Caré ne manqo»
pas , -de me tuer d'inclrilité , de truttet uo
Grand Prince , £5" peg* eitre U Fih dt q»ic
qtu Momai , de Monlîeur. je me contentai
de Iiu.dire que jufqD'à ce quej'eulTe l'bon*
«eur de le connoître plus patticuliérement ,
je ne croiojs pas lui devoir parler autrement,
& qu'il n'y avoit que les Princes du fang e»
France, quicullèm £ire ttaittei dans la co^
verfatioa de Monfeigneur. Il me ât enten-
dre « que s'il étolt feulement jamais Evéque,
qu'il garderoît û bien fa dignité , qu'il ne r£-
pondroit à Perfbnne, pas même aux Princes,,
ji ils ne le Monlîgnorifoïem pas. Je lui pro-
mis, que fi-tdt qu'il feroii Evéque, alors je
lui donnerois du Monfdgnear gros comme
le bras : il en fiit très content, & parut d'Ur-
ne gaye^ Epîfcopale tout le rétledu jour.
Après foupé, fur les dix heures nous nous
trouvâmes au rendez-vous, c'eft è dire qu'au
fîenal qui rions to&ît, nciUsmontâmesdaat
notre cheminée, comme des Ramohoieurs ,
pour mieux écouter. Le Premier OrMeup
qui fè mit fur les rançs , ce fut le Prince,
qui nous fit une Hiftuire à plaifir, rcmpliedp
mille incidents ; où je connus fort bien qup
â langue faifoit plus d'effort que Sk mémoi-
le , mais avec bien du brillant. Le Cun<
en ^it javi aa extafe ; & quand il vpioit Iç
bel^quipage qtie trainoit le Prince apr^s lejù
lesChéus dePoOe, leiCatoOès, les Ut-
tiércs. les Mulets, les Chevau. 6t tous Os
• Of-
)^K Vlmqmijaîi* Frêkfoifi
Officiers , îl pcnfoît en lui même > qn^*lcA
«iroît do moins autant , quand it lèrok
Cardinil : ce qui ne tni tèroitpas Uen ch'fi-
-dle , fi îl ne Toi en colltoit pas plus qa'à ce
Prince , qui cH étoit quitte pîir toat poar ob
Deogratraty Dîeuvousle rende.
Le Second qui vint nous cntreteeirde lès
Avantores fut le Chevalier Thomas Bomet.
I! nous dit qu'anrès avoir étévoïagerenAl-
4emagnc, en Itaiie,&dansdiveTEautres Can-
tons del'Eorope, ilavoitvouln voirlaFrao-
ce, où ilavoitfté anété 1 Paris, & qaetoot
Ibn crime étoit d'être Etranger : à q«oi l'oa
Euvoit ajouter, (ans dnute, l'ellime qne le
>i Guillaume deglorieufemëmoire, avoît
pour toute fa Famille. Je le coafblai du
mieux qu'il me fut poilible ; en l'alfurant que
îorfque Mylordfon Oncle, dont jeconaoif-
tbis parfaitement le crédit , auroit connoii^>
ce de fa difgrace , il f^aurcit bien le met-
tre en liberté , ou le tarte cclianger ccffl"
tre quelqu'Officier François, de diftinâioa ,
■& qu'infailliblement il fortitoit dans peu:
«e qui arriva , comme je le lui àvois pré-
-dit, le as. du Mois de Juin pen de tcn^ 3-
ptès.
Lr Troiliéme qui fit la clôture do Fatio
ment , ce fut le nommé Toiain Vieillard
prcfque Septuagénaire. La caufcdelbncm*-
prifonncmcnt ell criante. Sa Femme qaî £•
tOft de qualité , & Fitle d'un Cordon-blei
^i bords de la Garonne. Tawait épouûîpaf
«mour , ce qui avait peni'é conter la vie uk
-{MMvre Homme , pardeshazards, dantlere-
cit no fait rien à nûtte Hiltoiie. :. cett^ pau-
e« PHt/toire de UBtftilk. 337
vce Feûimc, dis-je, fe voïoit réduite, à le
lervir elle même , pendant que fon Mari ,
qui étoituniatrignant, étoit Solliciteur d'af>
iaires. Il nous affirma avoir beaucoup per-
du à la mort de Mr. Boucherat ; cars'étant
Hé d'amitié avec le Vallet deChambre dece
Chancelier , il ne manquoit pas une grâce.
On s'addreifoit à lui de toutes parts ; & quand
i\ y avoir quelques centaines de piltolesàpat-
tager , le ValletdcChambreen avoiilamoi-
t\é & Tozain l'autre , moiennant quoi le
fceau écoit immanquable ; ce qui pour lors
le faifoit vivre graHement. Mais n'aVant pas
trouvé les mêmes douceurs fous Mr. de Pont-
chartrain , il lui avoit fallu rétrécir fa mai-
mittc ; & du premier étage , où ils étoient fort
au large , i l'Hôtel des Noyers , monter à
un Quatrième . où ils étoieut fort à l'étroit.
Un jour que fa Femme venoit de laver ia
vaiffelle elle en jetta les lavûres fur une de
leurs Vqilines, avec laquelle elle n'étoitpas
en bonne intelligence. Les injures récipro-
ques fuivircnt ta réprimande, d'abord un beau
procès de DicUfde la part de la Voifine, a-,
vec une bonne alTîgnation dans les forthes à
la Femme de Toiain , pour comparoître
devant Mr. d'Argenfon Lieutenant de Poli-
ce, pour fc voir condamner & par corps,
comme de matière provifoire, àpayer l'habit
delà Requérante , & à une Amendeà ladif-
ctetiondu Juge, pour contravention en ftit
de Police, malicieufement faite,, de la part de
ladite Tozain , & aux dépens. C'étoit gra-
ter fon Mari par où il fe dcmengeoit. Il ai-
iQOit la chicanne , c'étoit fou métier ; il en
P vivoit.
.--„Goojjlc
3tt L^IitfuifitiuiJirMfeaife
vivoit. Il fe promcttoit bien de traSaer fk
Voit)B« daos tous les Tribunaux de Paris ,
&. de lui fftÎTC eâîiier tout au inoins quane
on cinq bons Arrits , avantlafin duProcez.
A l'ccheaiicê de t'affignation , Tozaia com-
parut devBmt le tedoBtabte Minos , qui après
avoîf entendu toutes les accufacions & te-
pii<iucs » de !a Requérante & de l'Ititimé , le
condamna â piïer Hiabît de la Plaintive , à
reftimation d'Arbitres , qui feroîcnt nommcî
pour ce fait , & à vingt livres d'Amende ,
poorétrecontreventlelaFemmedudit Toiain
aux ordonnances & règlements de Police ,
& aux dépens. Toiain voulut fe recrier con-
tre ce jugement. Sur quoi d'Argenfon, pour
lui impoftr filence , prononça Laconique-
ment d'un ton aigre à cinquante livres d'A-
mende. Toiain hauffafa voix pour feplain-
dte. D'Argenfon hauflà la lienne pour pro-
noncer à cent livres d'Amende. Toiainfit
éclater fà plainte d'un ton plus haut. D'Ar-
genfon d'iin ton plus haut prononça , à cin-
quante écus d'Amende, Le Condamné s'é-
cria : quel Juge bon Dieu ' te Condamnant
prononça qu'il le condamne à cent écus
d'Amende. Et fiir ce que Tozain lui dit ;
qu'il rend oit grâces à Dieu , de ce qu'il y a-
voit dans Paris des Juges au deflus de lui ,
qui le Jugeroient fans paflîon ; d'Argenfon
Tcnvoia Prifonnier au Châtdct ; où voîant
que Tozain barbouilloic trop de papier , à
taire des Plaintes, dreffer des Requêtes pour
fe faire élargir , & demander JuIHce à des
Tribunaux plus équitables , il le fit transfé-
rer i la Baiiillc; où après l'avoir Jaillé deui
Aiis,^,
u,:,-,zf--„GoOglc
nu rHiflotre de la BafiiHe. jjy
Ans , fans vouloir lui laifler avoir commu-
nication avec perfonne, il le fit CQmparoîtte. -
devant lui, & lui reprocha tous les aâes de
fa vie les plus fecrets. Il faUoit que ce Mi-
niftre eût trouvé- l'onginal de ja Cmifeffioa
générale de Tozaîn, car le moindre trait de
j.euneire , la plus petite fauûê démarche , la
moindre minutie , dont à.peine Tozain pou-
voil fe refouvcnir , n'étoient pas feulement
échapei à ce Lins Antrqpophage. EnfuUeiJ
lui demanda ii il pouvait trouver quelqu'un
dans Paris , qui voulût le cautionner d'être
plusSage à l'avenir ; Nota que Toiain avoit
près de foisaiite dix ans , après quoi , il ta-
chcroifde lui procurer fa liberté , à la re-
commandation de Mr. de Joncas qui com-
me fon bon Voifin avoit fortement Ibllicité
fôn élargiflement. En effet fans Mr. du jon-
cas qui écoit du Pais, 6c de la porte de To-
zain, ce pauvreHommeferoitmortà laBaf-
tille ; où , nonobftant la proteélion de ce
L.ieutenaiit de Roi , il avoit fouffert , tout
ce qu'on peut fouiFrir làns mourir. Ce pau-
vre Vieillard en arrivant â la Baftille futmis
dans un Cachot; & l'on peut juger, fi, àla
recommendation de d'Argençon, cefutdans
le moins mauvais. Dans ce lieu de plaJlàn-
ce , où il entra tout fain & vigoureux pour
fon âge ; il fut accablé de tous les fléaux
dont la Vieillefle eft fouvent affligée , dans
les lieuï du Monde les plus agréables & les
p'us commodes. Pour furcroît de malheur,
après avoir long temps pourri dans ce cloa-
que, il lui vint un ulcère à l'épaule , caufé
apparemment par l'humidité du tJachot, où
. P a il
u,:,-,zf--„GoOglc
340 VlnqMÏJit'Mi Pramçtife
il y' avott près de dixhuit Mots qa'ïl éiid
Coimne la playe augmcntoit beaucoup ,'
■UnSt voir au Porte-Clefs , lorfqu'i! lui i
toit fon paîn. Celui-ci en avertit le CT
f;icn, qui avecla permiâion duGouvei
defcendit au Cachot, & vîfita le mal-^-a
ne pauvre aSligé. Il en fit foti ra|kc^^
Gouverneur., & dit que cette p!w*"^f^
dangereufe , & que fî la cangrénç é'jL '
toit, commcilétoicà craindre, ïndùr*
ment cet Homme en mourroit ; & ^
le penier, il feltoit le njettrc dans uaé'C
brc, où il y eût du jour &de l'air, ,
cieufe avarice du Gouverneur qui lui it ^^
dre de perdre les profits qu'il &ifcHt^
vieux Pigeonneau , le fit monter à ^i^
triémc Chambre de la Tour du Coiq ;3
des plus belles , ou plutôt une des m^âtT
fteufes de k Bafiille, qui pOur lors p^,*fi
tieur étoit vuide, & oùil ètoît encorei "%,
tjuc je lui parlai. D'abord Rheiihe, qulfn
malheur pour Tozaiu , ^toit tout noeq
venu à laBaftille , & en ce temps-IÏÎ
ignorant i comme plufieurs Prifbnniers'^l^
éprouvé , malheUreufemenl aux dëpcns'î
-leurs vies , dit qu'il faJloit faire incifion ct^
ciale. Il lafiE fi adroitement, qu'il lui cOaiM;
un artère. Corbf qui ctoii prefent à cette iâip'
Tation, voïant ce pauvre Homme quipei^^
tout fon laiig ,en pouflànt les cris les pHÈt'"
.douloureux, &Rhei]hefiembaraffé, quilpe
fçavoit que faire pour étanchcr le fang qnf
fortoit à gros bouillons de la blclTure qu'il
venoii défaire àfon Martyre, loin dcleiè-
courir , courut à la fenêtre ) oui] fç mit à
chan-
.-.Coojlc
Xoogic
•» PHtftotrt dt la Bafiille. 341
chtnter ; pour empêcher , que l'oii n'enten-
dtt les cris du blefle; pendant qyc Rheilhe fut
chercher les inftrumenis, & l'appareil nécef-
faire pour mettre le feu à la playede ce mal-
heureux Patient. Il le trouva évanoui, quand
il revint, par l'épuifement de fon fang,dont
ton lit étoit tout baigné; mais fécondé de Ru.
il le fit bientôt revenir, p^-une douleur plus
cruelle que la première , mw's neceflaïcealors
pour lui fauver la vie. Il mil donc le feu à
laplaye , pendant que Tozain faifoit des cris
que l'on entendait de la Place de la Porte
St. Anthoine , & maudiffoit d'Argenfon de
tout fon cœur. Enfin après le mal fait, Mr.
du Joncas en étant averti fit venir le Méde-
cin , qui voiaot Tozain en péril , fit appeller
un autre Chirurgien , qui repara le mal que
l'ignorant avoit fait. Mais on eut la dureté
de laiffer ce pauvre eftropié quarante lêpt-
jours couché furie côté, fansqu'il pûtiè re-
muer, ni pouvoir obtenir du Porte-Clefs le
Charitable Ru , la grâce de lui faire fon lit
une feule fois , ni même de lui hauflèr fon.'
chevet. Il n'eut pendant tout ce temps , pour
toute nourriture, qu'unpeudebouillon, que
Ru, une foispar jour, lui faifoit lapper com-
me à un chien , dans une caiferole fi (aie,
que le feul afpcâ lui faifoit bondir le cœur;-
& Dieu fçait quel bouillon ! Le récit qu'il
m' en faifoit, me fit verfer des larmes; nepen-
fant pas alors, que dans la fuite de maPri-
fon , jedevoisétrebcaucoopplusmaltraitté;
puifque fiins parler des Cachots, où j'ai été
couché fanspai]|e,fur te limon, &cinqjoois'
«nljers & cinq nuits , par deux fois difterer.-'
P 3 M-
u,:,-,zf--„GoOglc
tes, fans prcndoe lata^tKlK.DOutTiniie, p««
mémeuncgomted'eau: pend&ntplasdetroà
Mois , onne m'adORD^ , pour toute fublîftui-
ec , qa'un oeuf par joiit , >v«c on peu de ptî-
iôiûiet &DE pain, ^svin, Sta6 quoique ce
£>u qu'oa pttiâè imaginer. J« I«ifl~e à pcnfcr
à RHH boiQDie rufonDable , comment un
Homme puîûiiiec , dans la âeur àe Coa âge ,
peut fè fouteair avec de tels alimmts , dans
un lieu fans air, intèâ, & enferma comme
je l'étois alors avec tiais fous. Cctiufonu*
oéVieillaiddécharnéli cruellerecnt , queles
os lui perçoient la peau de tous les cotez ,
cioîant toucher à les derniers moments* de-
manda avec iiWlance qu'on lui fit venir le
ConfeOèur de la Baâille , car il étoit de la
Religion Romaine , ce qu'on lui refuià, quoi-
(}(ie l'Aam6aier montât tous les jours deux
ou trois fois dans la Troiâcme ChatiU>re de
U même Tour, audeilbusdcTozain, pour
J vilîter uoejeune Marchande de Tournaj,
que depuis nous avons fçu s'appeller Mad,
du Bois. Par ua bonheur estraoïdinaire . le
Cbicurgieii étranger, qu'on avoit envoie que-
lir pour fupléer à l'rgnotauce de Rheilhe, é-
tsRt venu peaficr Mr. Tozain, de quilablef-
fuie avoit empiré , par l'iafomnie , le mauvais
aaittement qu'on lui failbit , & les cris con-
tinuels & perçants que fes douleurs luiiai-
Ibient pouâTei ; Rheilhe de plus étant ablent,
& pendant que l'autre peofoit le malade. Ru
aïant été appelle fut contraint de lailier le
Chirurgien feul avec Mr. Tozair. , qui , la
larme a l'oeil le conjura, par tout ce que la
charité d'imCbrétienJuidcyoitinfpireti d'à-
.->r„ Google
Tertir ftolement Mr. tfa Joncas (fcl'éat dé-
plorable où il iîroît. Cet Homme- le lui pro-
mit , & lui tiat & promeffe. Ttlr. dii Joncàs
vint 1 qui trouvant foii cher Compatriote dans
ce pitoiablc état ne pm retenir fes larmes. II
fonda Ru & le Chirurgien qu'il ât appeller.
s lui dirent qu'il y avoit onlre du Gouver-
neur d'en ufer ainfi. M r.du Jbncas, aprt s avoir
remontra à Mr. Toiain le tort qu'ilavoiteu
d'irriter Mr. d'Argenfon, lui promit del'ap-
paifer, & qu'il feroit de plus les cifortspour
le faire mettre en liberté. Il ordohiiaàRheil-
he d'en avoir un foin tout particulier , & à
Ru de le bien nourrir. 11 envoia au malade
fis bouteilles devin de Champagne, des O-
rangts, des Confitures & d'autres Rafraichif-
fcmenls. Il le venoit voir tous les jours pour
le confoler , & lui faire prendre couiagc.
Quand la bonne nourritun; eut un peu réta-
bli fa lanté , on lui donna Mr. le Chevalier
Burnei pour Compagnon , & peu de reinps
après le Prince. Eu6n Mr. du JoncasaVant
demandé pardon à Mr. d'Argenfon pour ce
pauvre outragé , obtint fa liberté comme je
le dirai dans la fuitte. Mais cour mettre le-
combîc à la defolation de Tosaîn , outre
fa Famille defolée , deshonorée & ruinée à
ne s'en pouvoir jamais relever , fon Fils qui
fc faifoit appeller Ste. More, & qui étoit Lieu-
tenant des Grenadiers du RcgîmentdeLimo-
• ges eutle mf-mefort; carétantvenufiSlIiciter
la Liberté de fon Père , fbit qued'ArgenIbn le
craignit, foit qu'il importunât ce Miniftrc , -
il fut envoyé pard'Argenfon tenir compagnie
à fon Père à la Bafiille. Que dis-jè? ils ne
P 4 s'y
u,:,-,zf--„GoOglc
344 . L^JtiquiJitio» Franfoife
. l'y virent jamais. Ils ont été près de ckrui
Ans dans cet tnfer fans que Tozain ait fçu
la defolation'de fon Fils. Ils étoient dans
le mÊme Colombier , ^toient au même ordi-
naire, tourmentez par les mêmes Bourreaux,
iàns pouvoir fe voir ni fe communiquer. Mr.
de Sie. More Officier de mérite , petit Fils
de Mr. de Jonfac , li je ne me trompe , qui
comptoit une longue fuite de Ducs & de
Cordons bleus pour fes Aïeuï , dont tout le
crime ^toit d'avoir eu de la tendreife pour fan
Père , fut traitté dans la Bailiile comme le
dernier des fcéiérats. Il a paffé deux hyvers
fans bas, Iàns fouliers &fans feu. 11 étoit à
la petite portion , plus mal qu'un de fes Sol-
dats. PouJTé au dernier defefpoir , il fe fè-
roit deftait lui même , uns le nommé San-
dre du Vill^edesHayesdc Fleuryprcsd'A-
vênest qui l'en empêcha, &lui fauva lavie»
comme ce mêmeSandroniel'adir, ainlîque
je le dirai dans la fuite de cette Hilloire. Je
laifle les reflexions que l'on peut fair^furl'é-
quité de ce Miniltre , à ladifcretion dt ceux
qui voudront fe donner la peine de lire ces
feits, que la fage Pofterîié , & eeux qui ne
connoilTent pas la Baftille, aurontdela pei-
ne à croire ; & dont Dieu feu! , félon tou-
tes les apparences , fe refervera la JuÛice ,
que les méchants ne peuvent éviter , que
par une auflére & Jincéie pénitence.
Nous témoignâmes à ce déplorable Mar-
tyre de l'ambition & de latyranniede d'Ar-
genfbn , combien fon trifle fort nous étoit
lenâble; nous lui fouhaitâmes $[ à fês
Compagnons une prompte & heureufe de-
li-
ci PHiftoire de la BafiiUe. 34î '
lîvrance , ainfi qu'une bonne nuit. Avant
que de fermer leur trou , le Prince exi-
gea de moi , de lui dire fincerement le lù-
jet de ma Prifon, en m'affirmant qu'il avoît ■
defortes raifons de me le demander. J'eQ a-
voU de plus fortes pour ne lui en rien dire ;
c'eft que je ne lesfçavois pas. Je lui protêt^
tai que je les ignorois moi même; mais que
je prefumois que c'étoit pour avoir été en -
Hollande > où dans l'^tabliflèffleat ^que j'y
pretendois faire, le Roi Guillaume d'immor-
KJIle mémoire , & quelques Seigneurs d'e'ri-,
tre L. H. P. L. E. G. m'avoicnt accordé
l'honneur de leur proteâion. Ilinfifta, en'
difant qu'il en vouloir fçavoir d'avantage ; ■
qu'il ne m'en quitioit pas à fi bon marché , ■
qu'il voioit bien que je lui diflîmuloîs la vé-
ritable caufe, & qu'il avoit plus d'intérêt à le
fçavoir que je ne penfois. Pour medebai
ratfer ie Ton importunité, je lui promis <)ue •
le lendemain à la pointe du jouç je lui ren-
drois rdifon de ce qu'il exigeoitde moi. Il en
parut fort content & nous Qous dimes reci-
protîuement adieu.
J'en de la peine à m'endormir : ce que le ■
Prince m'avoit dit ne laifToit pas de m'inquié-
ter , quoique ce ne fût qu'un pur effet de Ct '
curioliié , tant il eft vrai qu'il faut peu de ■
chofe pour faire bâtir bien des châteaux
en Efpague à un pauvre Prifonnier. Refle-
cbiflànt a la promefle que je lui avois ftite j ■
ne pouvant le fatisiaire véritablement, jere-
folusdelepayer d'imagination, même mon- ■
noie dont il m'avoit îervi dans Gi prétendue -
HiAoiie : mais pour ne me pas écarter de -
P-jj mos '
.--„Googlc
54*' Vlwqmjuiom Frtmgtife
non piiiK^K, j'y joigaiG la vérité en ^&nt
l^é^grxmme qu'on va voir,
A peine trois heures du marin avoïent
&oné > qvc le Priâce étoit au trou pour
me ibnimer de ma prouKilè, Je me levu'
promptemeot en Robe 4e Chambre, &poui
loi tcnii ou puale, je lui répétai cette £pi-
gnmiae.
AimvtMx fit ff avoir peurijuoi
On mua retitml dams ert abîme ?
ffm Ditm dt rim*rii tiaus fammet U vi^imey
Ehnt tm toMMtts la hou ne foi.
Pomf moi je M'ai pas Vautre crime
i^ Far^emt pis domit le Rai.
Il la trORva fljiUle, qu'il voulut tjuejc \%
taidiâRffe; & comme il felloit qu'il l'écri-
vît 3 & fenêtre, le jouo n'ctaiit pas encore
jlflci grand dans fa Chambré , il me fit &îre
ptufieurs repetitîoDS qui éveillèrent fis Gom-
p^nons. II Imr lut mon Ë^îgramme. Mr.
1« Chevalier Burnct vînt m'cnapplaudirdans
des termes tout à fait obligeauts, & qui pie
firent connoîtrc qu'il aimolt la Poëfie. Il
n'y eut pas jufqu'â Mr. Toiain qui n'ydon-
aât Ibn ^probation : pas un de nous autres
encore n'en avoir mieux éprouvé la vérité '
qne lui , & pas [un encore ne fouhattcoit
en faire une plus loague St plus rude éprea-
vequelui. Les Doâteurs de la Calotte voaln-
tent quejeJaleurrepetaflêà haute voix, tant
ils la trouvèrent à leurgré; & Gringaictpro-
oonça d'une vois à taire trembler tout le
Faioaflc : Csrmettir. Il n'y avoit que mon
Cu-
.-iGooglc
ou rBfiairt de fa BafiiUe. 34^
Curé qui peftoit de bon ccèur , & q(ui ne pou-
voj'tpas comprendre, commentdesGcnsbîen
fèncez pouvoientmcpropharter tftnrd'encen|
pour une faribole, Comme il l'appelloir. Le
Prince me répondit qu'immédiatement à dcui
heures , il me donnetoit des marques qo'H
aimoit la Poëfie : & pour me payer de celle
dont il vouloir me régaler, i! e^igeademoi,
que je lui fcroîs un Sonnet , pour prouver
que la Badille étoit le plus abominable lieu'
qui fût au monde. Je m'y engageai volon-"
tiers ; & nous nous fepatâmes pour aller
fonger à l'aCcompIiflemcnt de nos promeC'
fes.
A deux heures juftes il vînt à la tribune ;
tenebreufe ; S d'une voir telle que Baron -
fiiiibit éclater la fiennefurlaScéne, Jorfqu'il
reprefenioit Agamemnon , il déclama les V«s ■
fuivanis.-
Qui modo I<etttt eram gaudens , ^ nomlne ■'
Florciti ,
frijîis, y abjeéius nmnc mea fata gemo;'
IHJpanicâ fiuper excelfusverfabar /» jiula.
Et Grandes manibm ofculaprona daiatH. ■
Hic ego fxnarum fundo dttrttdor in imo j
Vultum defartnem ijut»t<iue -uidert pigtt.
Et Ccrert»t y Bacchnm cHnélimihi fpante'
Hic portant Jîliquat ; nec quii amicus «-
deji.
Sic variais Fortuna vie et alterna fectiridit
Salidit y ^ ambigito ttomne /«dit atrax. ■
P tf- Aprcs^
34' Vlti^mifitioM Franfoife
Aptis qaoi il me demanda mon Sonaet
Mais CD qualité de bon Normand je voulois
me rctraâer , n'aï'aat pas de rnoonoie. poui
loi païer Ci pièce. Le Curé juroît que c'é-
toit la plus belle chofe qui fut au Monde :
qucjamais.Horace, Ovide, Virgile, nimê-
me fet Regeots , tons Jefuites qu'ils étoient,
n'avoient rien fait de plus fublime. Cettfnas
doute , me difoit-il en coaâdence , du plus
Ïrand feiieuz du Monde , le Prince de la-
liîraudole qui eit reOufcité , ou tout au
moins un de lès Fils. Dame Dame celui-là
n'ell pas un Poëte de treize à la douzaine !
, Après qn'oQ eut bien nû^Gé le Prince de,
louanges, il voulut <meJeiepetairenionSoar
1^ t ce que je fis. Le voici^
SONNET
fur la Baftille.
2)e feutre , oJi la Famine , ÎS' la pâle Mi' -
genee
c^ctMt leur fureur fmr. mille malheureux,
S.ort MU hrouillard épaix , un air bitumineux
£>'om I0 Pejie apftf{fa mer/elle infiueuie.
Là l'Hi-ue KM Rocitr.d'unegroffeur immea-
_ /',
£^ doMtlejTontcbtHuftmbleiufulterles CitBx;
U» torrent fnU fan fein dont Ui bandi A«--
mttue
Tfmèent lUnt m ^hîmt aveequ* violente.
VirttKntrre 4ttrutly milefts éfUts :
.--„Googk
«» rHiftoirt de l» BafiHte. 349 ,
Or y voit des Lnli/fs, dams d'berribUs cont'
èatt,
S tKtr! arracher les yeux fous u» ebfiure grillt
Aucune herbe n'y croît , fi ce n'eft P Aconit i
l'ont AHiiital l'évite, là tout Aftre le fuit :
EJl-ii lieu f lus maudit? oui, Pa_§'reufe Bajîil^
le.
Ils me.donnctent tous uire approbation qu'il
ne mecltoic pas ; il n'y eut que le Curé qui
lui reodoit juilice fans le fçavoir , qui dit la vé-
mé pour la première fois , & qui protefla
qu'un feul pied des Vers du Prince , valoit u-
ne groffe. , c'ed à dire douze douzaines de
Sonnets comme les miens. Ce que j'avoiîai
fort ingénument. La Poèfîc nous amufa af-
fez agrdablemeut pendant tout le temps que
nous pûmes jouir d'une, converfation très-in-;-
nocente.. Il n'y eut pasjufqu'au CurédeLery
qui ne voulût faire des Vers,îIenfitdeGrecs.
Mais il fut bien furf^ls quand il vit que Mr. . le
Chevalier Burnet lui en fît remarquer les def-
fauts , & lui fît counoître qu'il fçavoit le fin
de cette langue, que le Poète Grec ignoroîl
parf^ttêment. Sorel voiant l'eftîme quenos
Voilîns faifoientderaacomplaifance, voulut
1» détruire par un tour de Ion métier. Nous
nous entrecommuniquions les petits ouvrai
gfis que nous faifions tous les jours ; & pour
cet effet ,, nos Voifins defcendoient par 1» ■
cheminée une ficelle, au bout de laquelle ils
njettoient leurs produâiôns &voiturotetules
nôtres dans leurs apartements. . II y mit ua
jour un billet, par lequel il km donnoit at
"^7 vis,
.--„Googlc
jjO L'IiiqiiiJitiini PrOMfoife
vis 1 qu'ità euITent à ft prendre garde de moî,
comme d'un très méchant Homme ; quej'é-
tois l'efpion du Gouverneur , & qu'infùîlli-
blement je les trahirois en découvrant nôtre
commerce. Le billet redoubla le mépris du
Prince & de fès Compagnons pour le Curé
"de Lery , dont ils découvrirent facilement
l'artifice groflier , & me plaignirent du mal-
heur que j'avoîs d'être avec un fcélérat de
cette trempe. Mais le Seigneur du Prey ,
homme à peu près du même caraâére , &
plus grippa d'un Karat , par Ja connexité &
la fimpatie qui eft entre les Fous , Gringaiî-
ïànt fur ce billet, comme il a fait for le ga-
limatias, dont il a fait rire ici tout le mon-
de, n;ie condamna, comme un Perturbateur
durep'os public; & entrrnitdansl'idée defoa
conformrfte, conclut que Soret étoir un Hom-
me de probité , doat il falloit iuivrc les avis,
& que j'étois un Pernicieux qu'il falloit évi-
ter comme ia pefte. Principe dont il n'eft
jamais revenu ,. malgré tous les éclairciflc-
ments de fes Voîlins , & les triftes effèâs qui
fiiivirent la malice de Sorel , qui nous en-
voia la plupart dans les Cachots, Cette
tite plus mal timbrée & plus ridicule , que
celle du mauvais Prêtre, & dont la vie n'eft
pas moins pleine d'incidents & de belles ac-
tions , m'a fait dans la fuitte de ma Prifon
reffentir de terribles & de funefles contrecoups
de fa folie. Le Prince fe contenta de médi-
re en Italien que j'cuïïe à me prendre garde
de Sorel , comme d'mi fourbe dangereux.
Nous continuâmes , malgréfa' malice , àfai-
re des quolibets pour oous dcfen..uyer. Je
niFi^irt de la Ba/tilk. 351
recitois an Prinw quclqne» ouvrages de ceux
qneyavois fiiits pendant, ou après mes Eco-
les, auxquels il fetnbloit prendre plaifîr. Il
mccommuniquoit les fiens. Il poffedoit par-
^'ttement bien la langue Latine , & failbit
es cette lajtgœ de très bons Vers : qaaiqaC
fouveot il voulût me donner le change , en
me recitant des Vers qu'il m'affirmoïc avoir
ÉJts, & que je ftavois bien avoir vu ailleurs.
Je lui muquois fouverit la chûtSt dont il né
^ifoie que rire, auffi-bien que fes Compa-
gnons , qui redoubloient leurs éclats > quand
(1 brodoit fes Avamurcs., Se principalement
Sat les équipages de fa fuite. Je ne fçavois
à quoi m'en tenir. Toiaîn me juroit qu'il
étoit Prince, Mr. le Chevalier Ôurnet gar-
doit le tacet làdeiTus, & tous les trois rioietit
de tout leur cœur des fiârîons du Prince , qui
métnc n'avoit pas un ordinaire aulR bon que
le mien ; car nous ne manquions pasdenons
détailler tous les jours lîdellemcnt nos repas,
qui ta ce tentps là étuent payables.
Un jour il rious vint une belle matière
d'épanouir nôtre rate à tous, Mr. te (che-
valier Buraet avoic la pcrmiflîon de faire ve-
nir des rafraichiffemenrs ; & comme fes Com-
pagHons lui en escroquoiemaumoînslamoi--
tié, il lui ftlloit fouvent retourner à la char-
ge. Il avoitderoandé des ConÊiures au Por-
te Clefs j qui lui aporta un pot de marmcla^
de environ de dttHxàtrois livres, qu'on hii fit
païer fix francs. On avoit fonbien écritfur
le papier qui le couvroit d'un beau caraâére
de temme: Marmelade d' Abricots _i7©i.
Après qu'ils egreni levéccpicinierpapierq°'
cou-
jja L'Imquifititn Frattfa^
couvioit le pot; ddliis un autre qui coovra't
les Couâtures , entie les deux papiers , ils
trouvèrent une Lettre d'une Religieuse , qui
donnoit cette Marmelade à l'Abbé Giraat
Aumônier de la. Ballîlle , qu'il fembloit que
l'Ainour avoic diâée. Rien de plus tendre,
ni de plus palTîonnf. La concluCon étoit
qu'elle l'attendoit l'après midi , après la be-
nediâion du très St. Sacrement , pour voir
s'il f^avoit poufler fapalTionauflIloinqueres
fleurettes^ & qu'elle fèroit MaiCrelTe ce jour
là duPailoîrmyflérteux: falettrc étoit lignée
Sœur Dorothée de l'Incarnation. Nouspouf-
fîmet loin nos teficxions. L'Abbé , - pour
coutentei Ton avarice ^ avoir nianqué apa-
remmeQt au rendez vous. La Socurderin-
carnation en avoit bien peUé, & nous avoir
donné matière d'une Sçéne tout à fait diver.
tilTantc, qui nous avoit faitrirejufqu'aufond
des Enfers. Nous connûmes par ce billet
que nôtre bon & tendre Aumônier ne fe con-
tentoit pas de fes Nimphes de la Baftille,
Le Prince fut peu de temps-après le confcf-
fer à l'Abbé, « nous protcfta qu'il s'étoitac-
cufé dans fa ConfelTion , de s'être fcandalifé
d'un billet amoureux d'une Religieufe à un
Abbé, qu'il avoit trouvéfur un pot de Con-
fitures : & encore plus d'avoir vu fortîr ce
mÊme Atrfxî, tout poudreux, du Colombier
qui étoit dans le Jardin , avec laServantedu
Château , en ce temps làfort jolie , qui lui ôta.
la poufliére de delfus l'on habit , comme lui
réciproquement avoit fecoué la pouffîére
de delfus les jupes de la Servante. Il décon-
certa lellemeot l'Allé , qu'oncques depuis,
il-
»« rHifloire de la BaftHU. îïj
il ne voulut plus entendre fa Confefllon^ H
ne faut pas quej'oublie que Mr. le Chevalier
Burnet fut celui qui mangea le moins de la
marmelade. Le Prince & Toiain y mirent
bon ordre. Tozain fc plaignit des Souris qui
mangeoient fon pain. La nuit il fe leva; fit
un trou au papier qui couvroit le pot de Con-
fitures , de même qu'aux Confitures , com-
me fi la Souris les avoir fait elle-même. Mr.
le Chevalier étoit trop délicat, pourenman-
ger après la Souris.; mais le Prince & To-
ïain qui n'y regardoient pas de fi près , s'en
accommodèrent fort bien. Ces deux Peftes,
l'un aleite & fin comme un Renard, l'autre
malicieux & rufé comme un vieux Singe ,
lui iaifoienttouSies jours de nouveaux tours,
que la bonté du Chevalier lui ^ifoit diilîmn-
ler & pardonner volontiers ; même il étoit
le premiijr à m'en divertir. Le Prinqe me
donnoittous les jours nouvelle matière pour
exercer ma veine. Il me pria de faire une
defcription de Mont-Louïs , Maifon du Con-
fefleur du Roi , qui étoit en perfpeilive , de-
vant nos fenêtres. Je fis un Poème en Vers
libres, fur le Heu de plaitànce , que mon Ami
Corbé me ravit, où il y avoit des penféesÂ
des infcnptions afiTez vives, & alfei naturel-
les : & quoique j'en aïe fait un autre depuis
fur des Vers Latins du P. Florent de Bran-
debourg , qu'on verra peut être dans les au-
tres Tomes: j'avoArai cependant, qu'il s''cn
faut beaucoup qu'iln'apptochedclaforcedu
premier. La Ballilte & fcs Cachots ne m'a-
voient pas encore énervé. Voici quelques
pièces que le Prince exigea de moi. Il a&it
plu-
u,:,-,zf--„GoOglc
554 VJnquifition Franpife
pIutTeuTsRecneilsdenosentPetfânsft de mes
Ouvrages: mtiscommcdepmsqucnoHslbni-
mes en Liberté , il n'a pas voulu m'en ftîre
part , cOmine cent fois il n» rav?)it promis,
il faut que je me contente des ftagmeiltsqiie
le haiard m'a conftrvM.
Mr. Toiain nous avoit dit qu'il avoït ft>F-
Ifcité la grâce d'un jeune Homme de Famîh
ïe, qai avoit ^té condamné par Arr^tdu Par-
lement de Bretagne à être ftiit montir , poor
avoir fait un Entant à une Pupille, auffi de
Famille , & que ne l'ayant pu obtenir , par
l'oppolition des Patents de IJa Fille , qui la
vouioient enferiner dans un Convent, pour
joiiir de fon bien , l'AmanM après la mort
'de ion Amant fe poignarda. Le Prince me
pria de taire un Sonner réguTîcr fiir ce fujet»
en irairation de ceîuî qu'on attribue à Mad.
tle l'a Sûfe, qui tout beau qu'il eft « cepen-
d«m eft très iiregulier. Le voici
S O N N E T
Attribué à Madame de la Suze , fur
MadMDoifeiie de Gacrchy Damoî-
felle de la Reine.
joi qui meurs avant que de naître,
Affemblagt confus de i'être if du»/a»t,
Trifle avorton ^ informe Enfam,
Rebm du néant £5" de VEtre.
"toi que V Amour fit far un (rime.
Et que C Honneur de ff ail par un crime à fon tour;
u,:,-,zf--„GoOglc
(« VlËflaire de ta Bafiillr. . 3 jç
Funefie ouvrage de C Amour %
l^e rHoimeur fmiefte viâime.
Donne fin 0KX remtrds, par qui iut'eiveng/y
Et d»findd» néant, ti'je t^aire^hngé,
N'entretiens foint l'horreur dmt tna faute efi
fuivit.
Deux Tyrans offiofez ont deeid/ ton fort.
L'/itnaeir , tmàpe l'Honneur , te fit donner la
vie;
V Honneur , malgré T Amour , te fît donner
la mort.
Et TOki le mien , que je ne mets ici qne
pow fctvir d'o«t>re à l'autre.
sonnet;
• Tbemis toi fut goutds les {bannes que im
blâmes ,
Peux tu de mon Amant faire étouffer les feuxt
Ldvt MU peu ^ éandenu, ton cxur moins ri-
L'enlevera fans doute à fis tourments infâmes.
La Mort malgré l'Amour j veut éteindre nos
fiâmes ;
VAmour, malgré la Mort y nous rejoindra t»us
deux.
Aveugles vitre fer ne peut couper nos neiuds;
Qui peut tout jur nos corps , ne peut rien fur
356 , L'Inquifitia» Franfoifi
Et toi funeftejrnitdi met fecoitJs trauffon
Vit» peufler avec mous V Emfire affreux à
Morts:
VHatmtur veut que ma mnni^mrrach* à i'd
famie,
Premice Je mon feu , foif viiiime à S*
tour y
Urne imju/le Jouteur iaveit down4 la vie i
Uut jufte douleur te vafriver du jour.
Il me dit un jour qu'il avoît fait cette Ef»
gramme fur un Homme que je connoiffoi
fort bien. Je loi dis que je connoilfoi! for
bien l'Homme, & eno^ore mieux l'Epigraffi
me: il ne fit que rire de fe voir découven;
le doutant bîea que je l'avois vile ailleon,
éSÏ quid ttntfacias , levior fluftia tft gra-
tta : fi quid peccatum fit > plumbtai irai
gerit.
EPIGRAMME.
On nefe fiuvieitt que du mali
L^ Ingratitude ré%He au Jifoude :
L'Injure fe grave en mêlai.
Et te Bienfau s'écrit fur l'onde.
Et voici la RéDoncequejefisfurlechunp.
en Bouts-rimez. "
.--„Googlc
oxfHifioindela Bafttlle. ]f7
Réponce en Bouts-Kimez
EPIGRAMME.
if moinJre bien méfait ouHier xntrani . . . maî\
■.ngran
flaire
DdoH cœur rtnnnoijfant vtut
monae,
tJiti'ieHfaitf tel qu'il fait, je le , . .grave
Et l'mJKre eft poKr moi le coup frappé dans
fonde.
Voici une Epigramme Latine qu'il avoît
' fiùttcfar un Avenj^tequi poitoitao Boiteux,
^ fur celle-ci d'Ofone.
Qui taret aller uter, fumit ai aber mtro,
EPIGRAMME.
Fert huttieris Claitdum Ceecus } fie forte ne-
llle 9culos Soeio fommodat ^ ille pedei. .
Et voici conrnic je la retournai.
EPIGRAMME.
J ^ui HQMs tend la main , il faut ten/re la ni*
tre:
V Aveugle officieux
Porte PEJïropié qui lui prête fes yeux.
l,^ Amour eji reetj'rgqu* ; un Barbier rafe fan-
Voici
.--„Googlc
Voici encore une Epigramme qu'il me
donna à tradoÎMen François, parce que noœ
la trouvions tous deux fort belle.
Lumine Àchon dextro^ taptaeft Leomillafi-
Et fotii efi forma vimctn mttrqitc Dees.
ParvePuer, lumen quodbahts, coHC^dtPt-
rend h
Sic $M (Œcus Amori fie erit illa l^enus.
V E R s I O N qucfenfis.
LeomiUf^foM Ftlfy charmants comme le joMTy
Eto'umt horgjut tous deux ; a» refh faits fnKT
flair*.
Si le Fils eût donné fin oeil gauche k ja Mère,
Elle tût été' Vertus ; */ eiit été P Amour.
En voici Bne de Sidoniire 'Hofdhius fur la
mort d'un Médecin ignorant , dont iljneptîa
encore de faire ime Imitation.
MMvJfoiiuM de te- mtiUum , nifi corpus ha-
behit ;
Ciziikus hoc tantunt ful^ahet Hiatuis,
IMITATION.
Lit mortque tU'fervois eux dépens da Muta'
des ,
Sans trouver Ion, efprit , n'em'poria ^ue ton
corps.,
Lf, -Bourg^ais qui fiiH^ent efuitnt tes btutMUs,
Au lieu d'un Médecin , n'en perd qut les de-
hors. Le
.--„Googlc
»m PBiJioirs de U BafitUe. ] jf
lie Priope ne me IsiObit |>a5 &ns occupa-
tion: nn lâcbe &jcte ilm'cn'dmaoituneau-
tre : il m'envoia les Vers fuivaiits , & me
pria de £nre i^pondre It Femme en Bouts-
ritncz.
MADRIGAL.
Sut la Femme d'un Paitifan qui fe far-
doit 8c ^toit Coquette.
Il ne vous efi fts difficiUt
De tant bStir aux Champs , auffi-bien qu'en h
FiUe;
Tout rit au^ri de vos defirs.
Vous vivti. de nas de^latfirs.
La Fortune vous idolâtre :
Qui fmrrvit mieux irâtir que vont ?
Le boit croît fur U chef de Monjîenr vôtre E-
faux ,
Et vans ne manquez fas de flaire.
Voici comme je -fis répondre la Femme.
MADRIGAL.
Réponcede l'Èpoufe en Bouts-rimez.
Jefaisplal/irMux Cents fans ê/re ... . difidle:
Chez mol Poupeut eoneher aux Champs, com.
me en la Fille.
I Et mon Epoux i^ moi nous fuivons nos. . deftrs\
\ Car fi fin avariée afaà vos . . . deflaifirt,
I Ma
I o,:,-,.-„Cooylc
jtfo L'Inquifition Françeife ,
H/ta prodigalité fait que l'an tn^ • idolâtre,
yoiezjnp{ues-ji( va ma charité pour ., . vomjj
Pour voui donner mon coettr > je Pôte à m»m
-, RpoHx ;
Quand vous Pavtz fi^né CEptux eu. efi fem
. flaire.
Je n'aurois jamais fait , (i je voulois repor-
ter.ici toutes les pièces, dont le Prince m' im-
pofoit ]a tâche. Mais pendant que nouslbm-
tnesftirlesBonts-rimez, je veax encore met-
tre ici ceux qu'il exigea de mot, furies beaux
Vers fuivants ., traduits du Pador-Ffdo. Il
me pria de faire répondre Mirtil à AmarilUs.
Ce que je fis. Perlbnue , je çrof , ne fer*
alFei injufte, pour me tascr de vanité , fi je
les mets ici , puifque je içai partaittement,
combien il cft dangereux de mettre fes ou-
vrages auprès de ceux qui out une approba-
tion générale. CattJvo l^itcino. Si l'on ne
renchérit pas fur la penfte qu'on imite , on
tombe. J'avoûrai que je fuis tonibé de bien
havi , & que ma chute feroic iiiexcufable , fi
elle n'^toit pas iàitte dans au lieu aufil téné-
breux que laBallille, oùfijepreteudoisntct-'
tre mes Vers en paralelle avec leurs V oifin's ;
auxquels je le r^ette encore une fois , ils
ne doivent fervir que d'ombre ; & ce fera
beaucoup, fi l'ombre eft tolerable auprèsdc
h vivacité des couleurs qui ont fait l 'admira-
tion de tout le Monde.
rRAG-
.--„Googlc
9H tBificire éU la Baftilk, j|((
FRAGMENT.
De la TraduÊtion dii Paftor Fido.
Uniqurfuiet de majUtme
JVlirtil , /» tupomieis ffmolr
Ct qui ft faffe dam mom amt ,
Sans doute o» te verrait avoir
Poar cette Amarillis que t» nommes cruelle.
Cttte même fitié que tu demawdts Joëlle.
Quoique tous deux Amanti ■, quoique tous deux
aimez ,
Et d'un mime feu confumtx, ,
De ititre amour pourtant le malheur eft extrême:
Car enfin aimable Berger,
De quoi te fert-il que je t'' aime y
Si je ne puis te foulager t
Ou de quoi me fert-il, qu'un Amant fi fidelle
Brûle aujourd'hui pour moi ^une flamefi belltf
DeJlinpBur nous trop rigoureux*
Far quel Ordre injujle § barbare
Faut-il que le Ciel neusfepare,
SH'jimournous unit tous deux de mêmes nceud/t
Ou far quel étrange caprice
Faut-il que le Cinuous unijfe.
Si le Ciel plus fuiffant nous fepare tous deuxi
Que vôtre bonheur eft extrime
Cruels Lions , fauvages Ours,
yous qui n'avez dans vos Amours
D'autre régie que l'Amour même !
Que j'envie vn femblabl* fort\
Et que uout fommes maibeureufes
Q Nn«/,
u,:,-,zf--„GoOglc
JioKS, de^ui les Loix rigoureufet
Pumjfnt rAmmr par la mort f
Si r^fiiȉ^la tf/, pa^iettffttt eurtrmrts.
Ont également attAcè/,
VtM tattt Je ffêifir au f^hé,
Vamtrt des ptities fi Jtveres i
Sans JfuteoM la Nattare efi itnparfaitfe en fit
QuinôMsdoHwetuipeiifbaut^nefaiidiaMBela Loi;
Ou la L*i thit fifT Pour M»e Loi trop dure
Qui cottdainme timpeitc/taitt ^ae dôme U Nature.
Mais que Coït aime peu , ^ua»d on eraint de
mourir l
jtèi Mirtii , flit au Ciel qu'une mort iabw
maint
FAt du f4thi iafitde peine '■
Je ferots gloire d^ courir.
Smie r^e d'une belle «me ,
Et h premier Die» de mon eeeur ,
Honneur, vois que je fais à tafahte rigueur
Un facrifife de ma fiame.
Et toi ehtr y parfait Amant
Pardonne à celle malhearenfe
Qui te maltraitte aparem'ment ;
Ei qui dait être rigoureuft
Par neteffité feulement ,
Jviais fi tu lieux tirer vengeance
De tes feux mat r/compenjiz ,
Scache que ta propre fanffrance
Me punit, ^ te venge ajfez.
Car enfin l'il efi •aeritable /•
Que tmfiis mon ameii^men etetir,
Cem'
»tt FHiJtoire de U Sajmie, 5^5
Comme tu l'es , qMeique rigueur
Qu'exerce conire tôt le Ciel impitoiaéle f
Toutes les fois fue tes douleurs
Te font oitfoùfirery ex repapdre des fleurs -î
Ces pleurs que tu répands , «VJÎ maxfang pn
tu verfes.
Var.ces cruels foupirs qui te ^trftnt It fein,
C'efl inoM propre fein que tu ptrces.
Et ces douleurs enfin
Ces cruaulez diverfes
Que le Ciel ^ l'Amour te fout fouffrirpour wo»,
Je le reffents encar flus vivemeutqetetei.
Rëponce en Bouts-rîmez
de MlRTÏLà AMARILLIS. .
Si tau cvur r^ud i , . wmjMjm^,
He ! ^ite me Jert de le , . ffavoirf
.*Je pvjfede tnacœttry tMpaJfédtsim . , ame;
C'ejltrop avoir, jAns rien . . . avoir.
jib! telle Amarillis tufiroistutnes . . trueltel
SiMJrtilmMutaiméttecrMitimûnsfi . . délie-
Bji-il tourment fins dur à deux jfmants ....
. aimez.*
Et d'unmir/iefeu . . . eonjumez.
Que defouffrir fans fin une rigueur . . extrême?
Nous pouvons profiter deCheuredst . . Berger X
Tu m'aimes autant . . . que je t'aime.
L'amour, quiveutnous . . foulager.
Te jure partes yeux ^ufje te fuis . . . fidetle :
Pourquoi donc amufer . , . une flame Ji hellei
Paur-
.--„Googlc
jlS4 VIp^Kifitun FrMfoiJi
PtmrjMoi d'MM tendre amour , em faire m
. . rigoureUxl
Otii te ftrte à fitre ''. . . harbMté.
Une chimère . . meier fefmn
V»e fanjfe fndeur l'e^pofe aux f lus Beaux . .
Mœmds-
Jj* Ciel m'eut jamais Je . , ea^rfcf.
Pourquoi vemhirqs^il des- . . jémfft
DtMX cccurs quepour s'aimer Uaformé. . .
tous Jeux.
Par mue harherit . extrême,
Ceutfois plus cruels que les . . O^rs,
Nous voulons rtglernos , amours
Sur aue affreufe La,i contraire à . . l'amour
Ab \puifqu^ aucun tourment n'égale niire . . fort,
Ne rendoM plus nos fiâmes . . malbeurekfes
Plus forts que cet . . ,Loixrigeureufej,
Pour jouir de ramaur, ofons traver ....la mort.
OppofoKS nôtre inflinc à des Lcix/i . . contraires,
Goûtons le plaijir .... attaché
Aux douceurs dont ces Loix nous ont fait un . .
■ ^ fécbi,
h /imeur, doit triompher de leurs peines , . . .
fé-o^tu
Montrons que la Nature eJiMaitreJfe de . . .
Que des cceurs amoureux c'efi la première . . .
- , „ Loi}
il» elle nepentrampeffoasuneLoifi....iiire,
Ht que future la toi c'eft forcer ... la Na-
ture.
Sl-4
.--„Googlc
M PHifloirt dt WBaflint. î* J
QMMJonmeunpourPaxiour, qu'il efl heau ., .
de mourir)
CarquaHdtHvitfamluilavieeJi. .•iHbumaiut.
Mais mourir de langueur e'efi une affreufe ... .
peine*
A cette dure mort y qui nous force à . . courriri
T'mvtMX qu'un vieux Tyran fait maître de lo»
aine ,
Quand r Amour r^ne dont ton . . cteur».
Pudtur ! chim/re ingrate , ai tu tant de ..,,
rigueur ?
Que ta fMriti veuille étouffer fa . . . Jîâmet
CrSelle Amariflis écoute un tendre . .' Amant*
Brife une chaîne . . .. malkeureuft*
Dont le frivole éclat t'honore . . . apaTemmeaf
Mais dont la fefanteurefi toute . . rigoureufe''
Etnefert qu^àgarder Ici dehors , .. . Jeuiemenf
Ouifur cette fndeur je veux prendre , . . ven-
geance^
Qui rend mes feux Ji . mal reeompenfeZy
Kn vrais plaifirs changeons noire . .fouffraacet
L'Amour tordosue^e'eft. . . . ajfez.
Car enfin s'il e^ . . . . véritable
Que te fois ton ame , l^ ton . . . cvur'.
Par quelle Loi, quelle .... rigueur
yeux lu qu'une Chimère îwjnjie . . . impitotahle
Mette le comble à nos . ... auteurs ^
Quoi ! n'aimons nous , que pour nous fondre en
I . pleurs^
Quelle efl l'utilité des larmes .. . quetuverfesf
Tes fleurs Amarillis me déchirent .... lefiiu ;
EnfouffautdtsfoM^irs c'efimo» . . . fein qut
tu tercet,
Q.j Chan-'
u,:,-,zf--„GoOglc
)M Vluquifitie» fraKfoifi
Ci4»geoMi Je battent . . . *Kfi0.
ïi tjl temp lpt1 VAntQUT couronne no* tra
Steurs de joie Mmjaurd'iui t l'H fitmt tMourir
pour moi;
£t q»t je mettre heitreax , s'il faut »M»tirir
four . . . . , toi,
Sorcl au defefpoîr de voir la bonne intel-
ligence qui reçnoit entre nos Voilîns & moi,
malgré Tes artifices , dit ouvertement qu'il
vouloit que le trou fût bouche , pour me priver
de la communication qucj'avoîs conjointe-
ment avec lui , avec cej Meffieiws , & da
plaifir que nous retirioQS d'une convjrfatîon
très innocente , dans laquelle Je ne parlols
jamais de Sorel , pour ne pas donner matié"
te àifes extravagances , dont il avoit un fond
ijie'puirablc. Toutes mes rt'moutrftiices ncfer-'
virent de rien : il dit que (i je ne rompoisce
commerce volontairement , il allait frapper
à la porte , pour appeller des Officiers, qui
nous y contraindroient d'une autre manière;
& il fc mit en devoir de le faire. Jcluidisl,
^u'il lalioit donc prendre congé de ct% Mef-
ticuTS auparavivit, & les en avertir, puifque
c'étoii à eux . & non pas à nous à refermer
leur trou. Il ne fe rendît qu'à peine à ces
julles raifons- Je doni^ti le lignai contre le
plancher , pour avertir nos Voilins que je
ibuhaîtois.de leur parler. Le Prince vint à
la Tribune : il fut fort étonné quartd je pris
congé de lui du plus grand fcrkux du mon-
«le , en fui téntoiguant que je lutdiTois adieu
avec regret. Il en voulut içavoir la raifon.
Je
(>« PHifieire Je U Bs/tHU. ^j
Je lui dis que Mr, l'Abbé alloil îa lai dire-
Sorel vint qni effrontément lai foatint qoc
nous le tournions en ridicule dans nos con-
verfations , & que je le dechirois fecrettc-
ment d'uue manière impitoiable. Comme
cela étoit très faux, le Prince lui jura le con-
traire , fur tout ce qu'il avoic de plus facré.
Mr. le Chevalier Burnet, en la probité du-
quel ce bon Prêtre avoir une entière confi-
ance, protefia queje n'avois jamais parlé de
lui dans mes écrits. Tozain 8c ceux de la
Calotte affirmèrent !a mcirte chot%. Quand
le Priiioc vit que ce Prêtre nevqploit pas fe
rendre à la raifon : écoutez moi bien Mr.
TAbbé, lui dit-il: frappez & dites que c'cft
moi qui ai fait un trou dans vôtre cheminée:
je I*avoùrai , & je montrerai le fer au Gou-
verneur que vous nous avei donné pour !e
fiûre , & toutes les Lettres que vous nous
avez écrittes, qui lui feroicnt cminoître la
bonté de vôtre cœur , & je ne lui cacherai
rien de tout ce que vous nous avez dit. Je
vous ttendrai ma promefle ; & ii cela vous
fiiit plaiiir , je vous donne jufqu'â ce foir à
Jpeurer: adieu. Je ne dis pas un feul mot
ce bon Prêtre de tout lereiie du jour, qui
écrivit des billets , qu'immédiatement après
il déchiroit: pnisilfe promenoit à grands p?s,
en eeiticulant dans la Chambre. £nânIefuT,
aptes bien des agitations i il frappa au plan-
cher pour demander audience. Le Prince
vint prefider i la noire Tribune , où Sorel
fe mît à genoux au pied de fon trône , pour
lai demander pardon de fes cmpcHtements.
lie Prince lui témoieua qoe tout le Confetl
Q ♦ ^ fu-
368 Vlmjuifitîo» FfMfùife
ftperienr Aoît ravi de le voir revenu dam
fon boa feus , & lui protefta qu'eux & moi
ne chetcherions qu'à lui faïie plaifir, tout
qu'il feroit ratfoiiaable : ce qui le fit pleu-
rer dej.oïe; & la Scènefiatt par fe$ larmes,
& une prière ardente qu'il leur fit d'oublier
Jepalfé.
Nous conttnuioDt à faire ronger nôtre
chs^în , par quantité de Vers Xiarios &
François , lors que ta fortune voulut met-
tre la dernière couche aux Avaniutes biia-
res de Sorel , par un effet de fon caprice
tout â faît^extraûrdinaire , & qui approche
plus de la fiâion, que de la vérité, queje
vais cependant expofer ici toute niie.
Le 17. Juin fur les fcpt heures du ma-
tin , lorfque Je lifoîs quelques Capitres de
mon Nouveau Tcftament , nous entendî-
mes ouvrir les portes de nôtre Tour ; après
quoi on vint droit à celle de nôtre Cham-
bre, où Ru introduiiit un Homme de très
bonne mine, mais très pâle, & qui fcmbloit
tout égaré. Ru prenant la parole , nous
dit, que c'étoit un Officier dequalitéj que
le Gouverneur nous envoioit pour Compa-
gnon , & avec lequel il nous prioit de bien
vivre: après quoi il referma ia porte fur nous.
Je làluai fort civilement nôtre nouvel Af-
Ibcié & je lui demandai ii il écoit malade,
queje le voiois toutdetfait. Non Moniteur,
me dit-il , mais je fais tout ce que je puis
pour l'être, & mourir allez vite, pourm'ar-
tacher à la barbare tyrannie de nos Bout*
reaux. L'état où vous me voiez, vient de
ce queje n'ai mangé ni bu, depuis plusde
cinq
un -izf- -,. Google
eà VHiftalre delà Baille. 3«> '
dliqjonrs; puifque c'efl aujourd'huilefixié-
ifie qu'il ne ra'eft rien entré dans le corps
que l'air abominable que je tefpire. Com-
me Ru en le condaifant dans nôtre Cham-
bre, nous avoir apporté nôtre pain & nôtre
vin , je lui en offris de fort bonne grâce , &
je courus à mon refervoir , qui étoit dans u- -
ne petite armoire bâtie à côté dé la chemi-
nife , lui quérir un morceau de veau rôti , ■
froid, mais de très bonne mine, dont je le
ïwîai de manger. Il le refufa d'une façon
îbrt-civile, & dit qu'ii béniflbit Dieu, de ce
qu'il lui faifoit rencontrer dans l'extrémité'
où il étoit un Homme raifbnnable , qui pÛt
recevoir les dernières paroles du Comte de
BrederodeSi & publier ufljourdans le Mon-
de l'injaftice que la France lui feifoit , après •
feizante' Ans d'un fervicefidelle &alCdu,
Sui lui avoir fait dépenfer fon bien , verier
sn fang & ruiner fafanté; AunomduCom- -
tcdc Brederodes mafurprirefutcitrcme. So-
rel , qui l'avoit regardé avec une avidité in- _
croïable , depuis que le Comteétoit entré
dans nôtre Chambre , fins dérourner laveiie-
dedi^fus lui, & fans dire un feulmot, lorC-
qu'il profera le nom de Brederodes , le rc--
connut , devint rouge comme de l'écarlale , -
& mettant le doigt lur la bouche, me lit li-
gnedenedire mot de ce que jefçavoisdefes
Avanturcs. Pour lui faire connoître que je
l'cntendois parfaitement bien. Quoi.! lui
dis-jc Mr. le Comte de Brederodes , eft^ir
pûflible que j'cinbraffe un Homme qu'ii y a
li. long temps que j'ai envie de voir, & que^--
jç connois-plus qu'il ne croit;- faut-il quc-cc"
Qj foj'f.-
o,:,-,.-„Co0^îlc ■
^TO Ulnquifit'itin FroHfoife
loir dans une Baflille que nous nous rencon-
trious enftmble ; oferois-je vous demanda
comment fc porte Madame vôtre chère E-
pouie. Ah ! Monfîeur , rcprit-il tout traaf-
porté 1 connoiflez vous cette cruelle fem-
me? Comment craelle! continuai-je ; ei-
pliqucz moi je vous prie Monfieur cette £-
D^gme 1 & me dirtes comment' Madame la
Marquife de Bois-Roger , qui. a aimé li paf-
âonnement Mr. le Comte de Brederodes ^
qa*elle a voulu être fa chère Epoufe lui eft
devenue cruelle. Je Gitisferai à vôtre curio-
&xé, me dit-il , quand vous aurez ïàtifait i.
la mienne : dictes moi , s'il vous plaît d'où
vous nous- connoifTez tou&Ies deujL! Jcvous
le dirai très volontiers , fl tût que vous m'au-
lez aj^cordc la grâce de manger un morceau.
Allons Mr. l'Abbé delà Moite, dis»jeàSo-
rel, que je vis bien que le Comte nerecon-
uoillbitpas, aidczmotàetigagerMr.IeCom-
te à prendre quelque nourriture , & à lui
laite changer le funefte defTdn où il cii. de.
mourir en celu'î de virÊenfibonneCompag-
uie : car continuai-je Mr. le Comte , voilà
un galant Abbé , qui eft de Lion , qui fera.
a*ifli-bieu que moi tous fcs effbrjs , pour a-
doucir les aigreurs de vôtre PiiTon. Oferoîs-
je vous demander , rcprit-il , Mr. qui vous
êtes , qui me. parlez li obligemment , & qui.
me témoignez tant de pitic dans ma dîJgra-
oe? Je m'appelle , lui dis-je Condantin de
Renneviilc, dont le fort n'eft pas moins fu-
nefte que Je vôtre: noï malheurs Hue
me dpuria pas le temps d'achever , & en-
ip'cmbtaûàiit, tcadieoieiu ^ cfl - il. poiljble ,
ou rUiflàirt Je la Baftttte^ 3 f% .
me dit-El, que je me trouve dans un lîeuaufli
abominable que celui-ci , avec le Frere de
Mr. de MaubuiiTon mon Ami & moH Capi-
taine, chez qui j'ai paffé un quartier dTiy ver
tout entier ! N'étoit-ce pas vous qui étiez il
va quelque temps , dans la féconde de la
Bertaudiérc , d'où je fors dans le moment y
lOrs que j'étoîs dans la Troiiléme avecMr.
Stinkfon Banquier Anglois , & un Abbé Ita-
lien ; qui trouvâtes le moien de nous faire-
comprendre qui vous étiez , en frappant con-
tre la moraille , ce que nôtre Abbé pénétra,
& àquoi ilrépoadit? Oui Monfieur, repris-
jC) & je fatisterai à toutes vos demandes, li-
t6t que vous aurez pris un doi^ de vin ,
comme je vous en conjure. Dieu vous a
mis avec un de vos Amis , dans la moins
inauvaifi: Chambrede laBafliJle. Venez ad-,
mirer cette belle viie, lui dis-je, en le coji--
duilant à la fenêtre , qui nous invite à ne pas
vous lailTcr mourir fi -tôt, &d'un genre do
mort ff-.criiel. Ah! Monfîeur , me dit -il ,„
quand vous fcaurcz mes malheurs , vous,
trouvcseique j'ai raifon de vouloir fortir c e
U vie; & fi jenc.craignois pas les jugements .
de Dieu,, il y a longtemps quej'aurois per-
cé le coeur du plus malheureux Homme qui'
foit fous le Ciel , pour mettre lin aux. plus .
bîfaces & plus terribles avamures , dont ja- .
mais vous aicz entendu parler. Je lui ûs ,
comprendre que mourir de tàim , & fe percer .
Je cœur» c'etoit la même choIè devant Dieu;,
qu'il n'étoit pas permis à un Chrétien démet-
tre fin à fes jours pour quelque caufe que ce
pût .être I que par les voies que la Nature lui ,
Q^tf, a..
^7** dèquifitiM FrMfoyi
« prefcrittes ; & qu'il y svoit mémedeliifoi-
bleflè à un brave Homme , comme luidcdc-
firer la mort , pour fe délivrer de affliâîons,
qii'il n'avoit pas le courage de fuporter. En-
fin je fis H bien , que je le contraignis de
manger; mais les conduits ordinaires étoient
tellement rétrécir , que la nourriture eut bfcn
de ta peine à y pailcr.
Quand il fut un peu revenu i lui: dittes
moi un peu je vous prie ■ Monsieur , medit-
îl, d'où vous me connoilTeT, & Madame la
Comtellc de Brederodes f N'eft il pas vraT,
loîdis-je, qu'elle a été l'adjudicatrice de la.
Terre de Lycvillc , qu'elle &ifoit decmer
dans le Cottentîn; & comme IVlr. deCham.-
be, Porte-Manteau du Roi, monBeau-Pc-
re t avoit cent livres de rente à prendre fuc
cette Terre, je fus un des Créanciers portei
for ce décret ; & je vous ai vu plufieuts fois.
vous & Madame la Marquifede Bois-Rogec.
à Carentan , oùj'étoîs Direâeur des Aydes &
Domaines, lorfque cette Terre lui fût adjo-
Îfe , & lebanie à fes irais , âute par elle
'en avoir feit le paiement, juftement , re-
pril-il, je vous femets à prefent, &j'aî mê-
me mangé plufieurs fois avec vous chez Mr..
le Comte d'Âuiais, où j'allois fôuvcati &
chez Mr. de Boîs-Grimot, Lieutenant. Ge>
neral : Mais je vous connois encore àeplus.
de vingt Ans auparavant, j'ai été chei vous ,
où j'ai paffé un Quartier d'Hyver ; &je vous
dirai tant de .circon (lances de vôtre Maifon,
que vous counoîirez ftcifemeot que j'y ai é-
té, puifque vous étiei trop jeune alors, pour
.TQijs lemèttn aujoaid'huî mon vUÀge i , ou-
.--„Googlc
tMrffiJiùhtdtlaBafiille. %j^ .
treqoe j'ai beaucoup changé depuis ce temps
là. J'écois EnfeigDe de la Compagnie de Mr.
de Maubutïïbn vôtre Frère , Capitaine dans
le Régiment de Champagne , dont Mr. le
Marquis de Bellefond , depuis Maréchal de
France, étoit Colonel. Mr. de Maubuiilba
étant ailé en recriie , comme il m'aimoit
beaucoup, il m'amena avectui à Cacn. Vô-
tre Maifon qui eft très antique , mais très
belle , efl tout proche le Château , & tait
face à l'Eglife de St. Pierre, n'yayant qu'u-
Be grande çkcé quartée oitre les deoi. Vous
aviez un très beau Jardin dans un des Fauz-
Bourgs de la Ville , & une belle Terre qui
n'en efl pas bien éloignée , où nous allions
fort fouvert chafler. VosMaifonsdelaVil^
le , de vôtre Jaidîn & de la Campagne é-
loîent remplie d'une quantité prodigicolè de
très beaux tableaux dont MonficurvôtrePe.*
re étoit très curieux. Il paroiûbit encore
tout jeune ; il étoit dans la Magidrature ,,
quoiqu'il ne fût-pas originaire de la Ville; il
me femble même qu'il étoit d'une Famille
d'Anjou. Il avoit grand nombre d'Enfants,
dont tous, les Ainei étoient dans te fervice ,
auin bien que Mr. de MaubuilTon mon Ca-.
pîtafne^ un feuL eiLcepté qi:iavoit une Char-
ge au BureaudesTreforiets.de France; c'é-
toit un des plus beaux Garçons que j'aie vu.
de ma vie. J'en ai connu très particulière-
ment un autre,, qui commaodoitie Régiment
de Coëi]in , .qui portoît vôtre même Seigneu-
tie deRcnncvilIe, qui étoit un très brave Of-
gciet , & qui dans la fuitte a été un de mes
incimesAmJs. Vous aviez de vos Frères Ai.-
Q7 nez
u,:,-,zf--„GoOglc
J74 L^Inqnifititm Franfoife
nez dans la Marine, emr'smrcs arnomnWdB
Clos très bien fait , qui fat envoie dans les
Indes avec Mr.Caron dans le temps que le
Roi l'y envoya Direâeur ; & un autre qui
s'appeiloJi Pierrcvil^e qnr commandoît la
Fregatte la Séné dans le Combat qui fiit.
donné fous le commandement du Roi Jac».
qucs , loFfqu'il n'étoit encore qne Duc
d'York. LorfqueiVtoischezvous vôtreFre-
re étoit encore efiropié des bîeffures qu'il a-
•voît rcciies dans ce Combat , où il fit fort
bien fon devoir. Vohs aviez d'autres Freresi
Officiers dans le Régiment de Picardie , &
des Sœuts fort belles . entr'autres l'aînée ,
mais on les voioit raremeni , parce que Ma-
dame vôtre Mère les couvoit toujours fous
fcs aîles dans un apartcmcnt fort retirai d'où
elles ne. fortoient jamais qu'avec clic. Vous
voîçz Monfiçur que je vous connois fort
bien & que j'ai la mémoire très hearea-
Caën eft une des pins belles & des plus
agréables Villes que j'aie viic , & la mieuï
fcituée , où il y a de très beau Monde &
fort focîable. Les Reformez, y avoient un
■ fort beau Temple , où s'affcmbloît un con-
cours ptodi^eux de Peuple , car il y a-
Toit près d'un tiers de la Ville de la Reli-
gion Reformée : j'y ai vu une file magnifi-
qi^e de Caroi&s. I! n'y a pas jufqu*au me-
nu Peuple qui n'ait de l'efprit , & j'en aire--
(enu des Hiftoires qui font tout-à-fait ré-
jouiffantes. Il m'y eft arrivé à moiquivous,
parle une avennire , depuis que j'ai ^oufê
ftflad. de.. Bois-Roger , qui cft jmpaïable ; je.
vous
u,™--„Googlc
M PHtfieîrt Je U Savait. 375
YOOS en ferai qaelque jour It récit. Msk
dittes moi auparav»nt ce çpie (bnf devenus
Mrs. vos Frcre» , & pur qïicl haiard vous
êtes ici ?
Mes Frères font tous morts ,• lui dis -je ,
j« rcfle fcul de douze Fils que mon perc çbt
de iJoa mariage avec ma Mère , & de Ax
qu'il eut avec fa première Femme , qui é-
toit une d'Aligre. Cei» du Premier Ht font
prelqae cous morts au fèrvice des Véni-
tiens , dont la plus grande partie a péri ai}
Siét;e de Candie. Moa Aîné du Second lit
fdt tué au Siège de ThionYÎlle , qui fut la:
pcetpiére Campagne du Roi , Six autres de
mes Frères ont été tuez dans diverfcs occa-
fîous. La feule Bataille de Senef en fit pé-
rit deux , Officiers dans le Régiment de Pi-
cardie ; a peu de temps au para vant j'en avois
perdu UD qui étoit Capitaine dans le même
Régiment; il fut tué devant Hardemboittg à
la déroute de Mr. de Nancraî. Vôtre Capi-
taine a été le dernier, qui fut lue ù la Hou>
gue , & les qUiUre autres font auffi morts
dans Je Service, mais de leur mort naturel-
le. VoHà pour ce qui regarde mes Frères,
Eî pour l'aventure qui méfait être vôtre Com-
Sguon de mifèrc , la voici. J'étois allé en,
ollaitdc pour m'y établir > où je croi mô-
me vous avoir vu chei Mad. la Mari^urfede
MoQtpouillan vôtre Parente ; lorfque Mr.
Chamillart , à force de promefTes me fit rc--
venir à la Cour, àdans le temps que je m*^'
croiois dans une parfaittefécuritélouslaFoi
& la Proteâion de ce Miniftre , au boiit de
qualwMois, je fus arrêté par otdte deMr-i
.Cooylc
yjé L'Im^uifitioM FfMMceîf*
leMaïqniS'dsToTCf-, &esfèrm^ dans ' et
Cloaque detedabte , où voici-là deaxitfme
Ann^e qve je gémis, fans avoir vu perfoone
qui m'en ait voulu dire la caufe , & fans a-
voir pu obtenir un CommiiTaîre pourm'exa-
miner. O fejour diabolique ; i'iîciia-t-il , gou-
verné parles plus cruslsTirans qui foicnc ao-
Mondé ! Je fais dans le même cas^ inoa cher
Monficur , il y a près d'un An qu'ils me re-
tiennent, fans m'en avoir encore voubi dire
. la raiibn. J'aidois à.Mr. de Murât Gentil-
Homme jdu- Dauphiné à faire foa Rcgitnenti
dont il m'avoit donné laMajorité, lorlqu'on-
me vint enlever , , de mon- Auberge , coqime
OD corps-faint , ppur me plonger dans cet An-
tre infernal, ou je cfoi que c'eftparlecrediti
de ma chcieEpoufeque je-fuis enferméi Car-
je l'aime , .toute perfide, toute criielle,tou'
te ingralte qu'elle eÛ^ &quoiqu'e!lemedoa<
ne ici la mort, l'amour que j'ai pour elle,
& que mâ1^é toutes fes iafidelitei , je ne-
puis arracher de mon cœur , me péfc plus.
mille fois. que. la Baftille. - je fis fort l'éton-
Bé , & je le priai.de me cooterres Avantu-
res, commelijene lesfçavoispas. Trcsvo-
lontiers, me dit^il ; mais peimettez moi an-
gavant de demander à Mr. l'Abbé qui ne
dit mot, &, qui me paroît fi ij;veur, ce qu'il
fait ici , , & quel .fujet l'y a ameaé. - Mon~
fieur dit Sorei , .que iious appelleront à prc-
fem l'Abbé delaMottc, écpourcaufe, nous-
fommes tous les. troîi aofli fçavants fur le-
fujel de nôtre emprifounement les uns que
les autres ; je ne fçai fi c'cU pour avoir dé-
jçunf -deux fois } oumaiiqi^é à diremonBte--
viai•
l),.■„^ -.Google
•« PHifioire de h Saflille. J77
viaire; tant i a que j'y fuis depuis il y eut ua
An ce Carême , '&, j'en telTortuiu quand il
plaira i Dieu , ou plutôt quand les Officiers
d« iaBallille n'aimeront plus l'argent. Le
Comte & l'AbW recommencèrent ieursApof-
trt^bes contre la Baltille & Tes AdminiAra-
ïeurs , & après avoir fuflîlàmment évaporf
leur bile , le Comte commença fon Hiftoi-
re de cette manière.
Mon Père s'appelloit le Comte de la Gar-
de, qui aïanr fuivi le Prince de Coudé aux
Pais-Bas pendant les troubles , époufa ma
Merc en Hollande. Elle étoit Confine de
Mad. la Marquife de Montpouiltan , & fans
contredit Héritière des grands biens de la
Maifon de Brederodes. Quand le Prince de
Condéeut fait la Pair avec le Roj, mçnPe^
re qui revint en France y ramena ma Mère
froflè de moi : elle accoucha à Vernon fiir
cine. Mr. Le Cardinal , à la foUicitation
de Mr. le Prince de Coudé, donna à mon
Perc la Majorité de Perpignan , avec une
penllon, pour le rccompenfer de fon Reçi.
ment qu'il avoit perdu ; peu après qu'il tut
arrivé , il mourut , & me iaifla fort jeune ,
fous la tutelle de Mr. de Tilly de Caë'n ,.
Commandant de Perpignan ■ qui prît foin
de moi, comme de fon propre Fils. MaMc-
re qu'on appelloit à la Cour la belle Hol-
landoife, fe remaria à un Gentil-Homme du "
■Cottentin. Mr. de Tilly , après m'avoir
fait apprendre mes eiercices dès l'Enfance,
à l'âge de dix Ans me donna un drapeau dan»
fon ilegiment ; enfuittc fon Rejjiment fiit
incorporé dans celui de Champagne , où je
fas
37^ li*7iif«ifit!«* Françoife
fox Enfëigne de la. Compagnie de Mi. vôtre
Frerej & depBÎs ee temps -là j'ai toéjoars €ex'
TÎ. Etant Capitaine dans hd Régiment E-
tran^er, je me mariai â XaMHcs, oùj'époB-
fai une Héritière pariaittement belle , <ionr
j'eus plufleuFs ËnBtnts qui font tous morts,
auffi bien qu'elle. Etant allé follîciter le
bien de ma Merc en Hollande, j'y fis con-
noifTance avec Mad. la Marquife de Bois-
Roger , qui y ^toit allée pour un pareil fu-
jet , fon Pcre & fa Mère étant Hollandois.
Si j'en fus channf, j'eus le bouheur anfli de
«e lui pas déplaire. Elle étoit Veuve , &
j'éwil Veuf. I>e retour totts deux en Fran-
ce, je la fus voir â ià Terre de Bots-Roger.
Je lui découvris ma paffion, & elle l'approu-
V* ; maiî comme nous étions tous deux de
la Religion Reformée , nous ne pouvions pas
nous marier en France contre les Ordon-
nances du Roi. Elle me leva ces difficnltci,
■& me d't qu'elle eonnoiflbit un certain Curé
de Lery qui étoIt dans fon Voifinagc, qui ne
ft failbit pas le moindre fcrupulc de con-
trevenir à ces Ordonnances , & q^ui feroit la
cérémonie de nôtre Mariage dès «^uenouslc
voudrions. Elle le fit venir à Roden, & la
chofe le paUa un foir en la Maifon d'une
Amie de la Marquife , devant les Témoins
qu'elle voulut y appeller, & que je ne con-
noiflbis pas, Enfuîte de quoi nous retour-
nâmes au Bois-RMer , oà pendant plus de
dishuit Mois je vécus avec mon Epoufe de
la plus grande union du Monde. J'avois
rendu queique partie du bien que j'avois de
im première Fenane en Xaîntonge , dont
tant
u,:,-,zf--„GoOglc "
tu PHifloire de U ■BaJîilU. 3ï9 '
tant que l'aident dura Mad. la Comtcffede
BredettHÎes m'accabîacîc cardTcs ; mais quand
les eaiïi viBrentàbailTcr, dlemcdîtqu'ilfal-
loit abfolument (juc j'allaJIc eh Hottandfimt
iaire rendre jnfliçe di.i bien de ma Mère ',
ou tom an moins folîicitcr une Penfion de
L. H. P. L. E. G. qui s'ctoient emparez
du bien de nôtre Maifon, J'y fus fis Mois
entiers , fans pouvoir obtenir aucune choft
qu'une légère Provilîon , par le crédit de la
Marquife de Moiitpouîllan, qui fealc avoît
cotttioîfïànce dé' la juflice de niacanfc, J'tf ■
toîs iàns titres % & il n'y avoir qu'elle qui
m'en pût indiquer. Enfin L. H P. me ren-
voîercnt chercher l'Extrait de monBaiôme,
Bc ïe Certtâeat de la mort de ma Mère ;
car j'avoisrecooTertfon Contraâ de Maria-
go avec mon Père, parles foins de la Mar-
qoife de Mompoiiillan ; moiennant quoi îfe
me promirent de me donner une Fenljoa ■
proportionnée à ma Naîfïànce , & â peo
près à mon bien. Je revins en France fur
ces affiiraiices ; mais je fus fort étonné ,
quand je voulus cmrcr chei moi ^ de voir
que ma Femme me fit fermer les Portes du
Châteuu, & Itverles Pouts-levis. J'eusbeatt
peftcr, prier, infiflcr; jamais etlcnç voulut
me voir; encore moînsmefaireouvrîr. Pen-
dant mon abfence , on avoir pourvu à une
Compagnie que j'avois dans Sutlaube, pour
achever de me pouflèr à bout. Je fus trou-
ver quelques Amis que j'avois aux environs
du Bois-Roger, entr'auttcs le Marquis de St.
Hillairc, Gentit-Homme fort honnête & d'u-
ne rare prebité, qui fut voir mon Epoufeau
Bois-
u,:,-,zf--„GoOglc
SSo Vltufaifiùen Françeifi
Bois-Roger , pour lui remontrer de queUe
confequence étoit l'éclat qu'elle alloit fiure:
mais il ne fut pas moius étonné que moi ,
quand elle eutlefroDtdclaifomeiiir, qu'el-
le n'étoit pas ma Femme. Je fus cotuùUer
un Avocat à Rouen , qui me dit qu'en lui
aportant l'estrait de mon Contraâ de Ma-
riage , & un Certificat du Curé qui en avoit
fait la cérémonie ■ il la forceroit bien à me
reconnoîtra , & à me donner une provifiou
iurfon bien.. La Demoifelle chez qui nous
nous étions matiez à Roiien , quiétoicMai-
chande de Dentelle , avoit paffé en Angle-
terre. Je courus i Lery pour obtenir un Cer-
tificat du Curé ; mais j'y appris qu'il avoit
abandonné fa Cure , podr fuivre en Angle-
terre la Marchande de£)entelle. LeNotai-
re qui avoii paiTé nôtre Contraâ au Bois-Ro-
ger étoii un Vieillard plus que feptuagenaT-
re : il étoit mort pendant mon abfence , &
j'eus un cha«in mortel d'apprendre , que la
Comteflè de Brederodcs s'étoit emparée de
tous fes papiers après fà mort. Je retournai i
Lery, pour voir li je ne poûrois pas découvrit
ce qu'étoient devenus les Reeîitres du Curé.
"Je parlaîàunbonVieilîardquime dit être fou
Père, & à un Laboureur qui me dit écrefon
Frère. Quand ils fceuremlefujetquim'arae-
noit; ils m'apprirent , en fondanLen larmes,
que le Curé étoit un débauché , qui après la
avoir ruinez & déshonorez , s'étoit enfui, char-
gé de dettes , pour courir ea Angleterre a-
près uîie Marchande de Dentelle de laR.R.
Que c'étoît la Marquife de Bois Rogpr, qui
après l'avoir &it intimider pac les Juges de
rof-
u,:,-,zf--„GoOglc
t*Officialité de RoiieD, lui avoic confellléde
quitter fa Cure ; & qu'elle n'avoit eu aucun
repos qu'elle ne lui eût psrfuadé la chofe :
Ce qu'il avoit exécuta après avoir venda fcs
meubles rourdemcQt, &parfà mauvairecoa^
duite leur avoit à tous porté un coup mortel.
Qu'ils ne doutoîempasquecemifirablen'eât
donné fes Kegiflres à la Marquife , ou qu'il
ne les eût brûlez. Ces trilles nouvelles me
percèrent le cœur: j^aimoispaflîoonememla
ComteiTe, malgré fa cruauté. Jelui écrivis
les lettres les plus tendres : je lui as parler
par ceux que je fçavoîs qu'elle conlîdeioic
davantage; & voiant qu'elle étoit inébranla-
ble , j'entrai dans une fureur que je ne puis
. vous exprimer. Je pris la refolution de cou-
rir aptes le Curé de Lery , qui feul pouvoir
me tirer de la peine où j'étois , en me don-
nant le Certificat dont j'avois befoîn , déter-
miné de le tuer s'il me refiifoit. Pour cet
effet , abandonnant entièrement le foin de
mes affaires d'Hollande, jcfuspromptemcnt
ta Xaiotonge, oùje vendis quelques arpents
de vignes < & quelques aires de marais al-
lants, & je pris avec moi deux Vallets qui
avoient été mes Soldats , &doatje connoJf-
fois le courage. Je les menai avec moi en An-
gleterre pour me féconder dans monentrepri-
îe. J'appris que le Curé , après y avoir fait
fon abjuration, en étoit parti, fans avoir é-
\ poufê fa Marchande de Dentelle , qui avoit
I af^iis de lui des chofes terribles qui l'avoient
j rebuttée. Je le fuivis en Hollande , où il
■" avoit palTé. Je feu qu'il avoît obtenufonpar-
doti'de l'Ambaitàdeur de France, & qu'il
1 étoit
I ■ ■ ^""81=
}|i . VIiKlMÎfitiou FramfoiJ*
étok «WoraéàPiifs, où jeleftsidiercïiet.
LxTM tenues ^èï je découvris q«'il étoit
paflï en Flandres , où je cOUras après lui
En&i je l'ai pourfuivi i lapîftedafis roote*
les CoUEsd'Allerragne, oà ilvoiageo* k lu
iîiitte d'un Sïigncar AiJemaQd > «n DaoDe-
mark , en Suéde & en Pologne. Je fuis en-
fuke revenu (or met pas i BrDïelles od je
l'ai perdu, j'ai &it pour le trouver près de
mille lieuei:&aprcsin'tîrreentiéremenfcoa-
fbihmé, jetctoumaiàRoikti, où jVmploîai
toutes fortes de moïens pourregi^nerlecœHr
de ma Femme. N'en pouvant venk à boot
parladonceor, je plaidai contre elle, oàjeiw
eagnaiptsplosqu'à courir après mon Frtpon
de Curd. La Guerre étoit alors anojnée par
tom ; je pris la rcfolution d'aller m'y fme
brûler te coeur pour en chafler entièrement M
paffion .violente, dont il étoit, & dont il eft
«ncorepénetiépourmacruelleEpoaft. Pour
cet effet je reïonrnai en Xaintoi^e v«ndrc
tant ce que j*y avois de refte du bien de ma
prcmi^e Femme. Je revins à la Goat- ibl*
iicîter un eraploh Je m'accommodai avec
Mr. iVIuiat , qui mSiccorda la Majorité de
fon Régiment de n»avelle ci^atioii , à des
conditions raifonnables. Je lui avotS &it la'
plus belle Compagnie de Grtfoadiers qui tut
jamais ; lorfqu'ctaut à la farveiile de mon
départ , tout mon b«gage aVatit d^ja pris le
devant , je fus arrêté & «mené dans ce dei
leftiile Gouâré , où de toutes ies peines
que je fens la plus ctiielle , c^^\ l'idée de
nm cheie Epoufe -que j'ai toâjoors devant
les yeux. Et vous Tciilez ijae je vive ! Ah!
mon
,,.,^:,C<x,8lc
ouVipfioire ilt U Binait. |8]
mOO cher Monlîear pburqaoi m'avez tous
^c manger !
SytvovK que j^çns tefbin de tonte ma Rhe-
toriqae pour ia cocrfbler : je trouvois lès
peines fi accafetantes, par le pitoVableétatoà
l'Amout & la Fortnite l'avoient réduit, qoe
je ne con^reaois pas comment il avoît pu
refiller i tant de malhenrî fans mourir. Si
dernière Avanture fur tout sivoit qudque
cholè de (î flirprenant , que je ne ponvoîs
en rereirir. Il avoit parcouru ta plus grande
partie de l'Europe, pour cberdier un Hom-
me qui fe trouve enfertné avec lui entre
quatre murailles , pu le cs^iricc du hazard ,
& il boit t mange & demenre avec lai pen-
danttrots Mois fàiis le recounoître. LeCu-
lé avoit dix fois changé de cooleur pendant
te Recitdu Comte. JejrcmbloisqueieCk>m-
te ne le reconnût , qui dans la r^où il é*
toit lui atrroit arrachif les yeux. Je ne poa-
vois comprendre l'imprudence des Offi-
' ciert de la Baltille , qui a'ùnt connoiflànce
de leurs demélex, lesaiférmaieotenfemble,
au haiard de s'égorger , éf à quelles rtfqaes
ils m'expofcàent. Le Corélui detnandabrurj
qaement s'il ^voit le Latin. Jevousai d6*
ja dit, Mr. rAbbtf , lui r^ondit le Comte,
quej'avois ^ifaxt Enfeigne à l'âge de dix
Ans , & que depuis ce tems-lâ je n'avois pas
qaxfnk le fervice : il aurott donc £illu que l'Au-*
pionier du Régiment eût tii mon Pseccpteur;
qu'il eût eu l'inclination & la Dcîencc necef^
&ire pourm'iolhuiFe, & que j'entTe eu autant
d'amour pour r£t«de , que j 'ed avois pour la
Guene. Non Mi. l'Abbé , je ne Icai ni
ùrec.
)l4 Vln^mjitiim Frmfoife
Grec, ni Latin ; mais en recompenfi* jepv-
Ic très bon Efpagnol , & j'entends an pculT-
talien. J'ai ét€ élev£ avec des E^gnols :
j'u fait long temps la Gnerre en Efpagne ,
oùj'xi été dcui fois Prifonnicr de Guerre ;
& mes premières Amourettes fiireot conû-
crécs i une Erpagnolette , qui m'a pen£ë
Aire perdre la vie j car il n'y a pas à railler
avec cette Nation.
Quand l'Abbé de laMottefçutqQe le Com-
te ne fçavoit pas de Latia ; îlât Umblant ait
lire fon Bréviaire : iI*iious demanda la per-
miffion de chuiter nneHymne avec une fbn-
miffion qui me furprît ; m^s je le fiis bien
d'avantage, quand au lieu de l'Hymne , je
lui entendis chanter une prière très inAantc
qu'il me faifoit de ne le pas découvrir. Je
lui dis tout haut: Mr. l'Abbéns fçavezvoas
pas cette autre Hymne , qui me paroît plus
belle & plus juile ? & dans l'inltant y en for-
me d'Hymne , je lui chantai l'affurance où
il poiivoit être de ma fidélité & de ma Pré-
caution ; & je lui dis en même temps qu'il
fettoit prévenir le Prince & Tozain. Car
pour Mr.leOievali» Burnet, comme je l'ai
déjà diti il étoit font le \i. du mémeMois.
On l'ai^ella , fous ombre de le fmre parler
à Mr. d'Argenfon, mais une heure après le
Major vint fa.\t& enlever toutes fes ^des ,
& dit à fes Compagnons , que & Liberté é-
toit veniif , & qu'il étoit échangé conue on
Prifonnier François , HommedediSinâioD,
qui étoit arrêté en Angleterre. Je dis à
TAbbé de la Motte qu'il n'eût aucun trou-
ble^ ni pas la moindre inquiétude; & que je
.--„Googlc
«» FJiifioin Je la Bsftilk. 3 ^
me chargeois du foin de Mre les choies 6
bien, qu'il auroitfajct d'en être tout à f^t
CBuoent. L'Abbé me protefta, que de & vie
il n'avoit cmeDdu nne ii bonne Hymne. En
effet elle le raJTuni beaucoup, & Une parut
plQS lî crîfte, qu'il l'étoit , avant quejel'cof-
fe chantée , ce que je ûs fut l'aii de: Tei/f
fit twU t'enniimm,
J« dis au Comte de Brederodes que nous
avions communication avec les Prilbnnîers
qui étoient au deOùs de nous , un defquels
îtoit un Prince qui paroiflbit avoir beaucoup
d*c(pfit r qu'il failoit tes avertir de fon arri-
vée dans nôtre Chambre : que je le priois
de m'escufer ft je leur parlois en Latin j mais
qn'il étoit à craindre que je ne fulfe entendu
des Potte-Clefs, qui fuuvent alloient écou-
ïer fur la Platce-Forme. Le Comte approu-
va la chc^c, fans y faire de rellesion, & en-
core moins lànscn pénétrer la caufe ; iln'a-
vtMt garde. Je fis le fignal au plancher. Le
Prince vint à la Tribune. Jamais Homme
ne fut pins (.'tonné que lui, lorfque jeluiap-
pris que le Comte de fircderodes étoit avec
-nous. Il fçavoit l'Hiftoire da Curé de Le^
ry> Il crut que je voulois lui faire un con^
te i plailîr : mais je iaî affirmai la c^hofe fi
ferieurement, qu'il ne pouvoit aflei admirer
la biiarcrie , & le caprice de ta Fortune Cut
ladeilinée du Comte & duCuré. Je le priai
de prendre de julles mefures avec ïbn Com-
pagnon , pour ne pas faire de , qui tri fata
dam ta coBveifation > dont lesfuiters feroient
très funeÛes. Il me promit une grande cir-
coiift>câion : ^lès quoi lu! & ton Compa-
R, gnon
u,:,-,zf--„GoOglc
}8tf' ' . L'Imqmifitim frampnft
gfïçn ûlnoKDt nôtre nooTowi Coactf^î^qni
leur fit tNcn des civilité! : puis ils refermc-
retit leur trou , cniote de furprife ; sprcs
QOtis «voir promis quils avcrtiroiem les Pri-
fonujers de Ja -Cslotte de leur deroir y &
Bons avoir marqué raudimce à dis hoiret
du loir.
Lorfqnc nous nous flimes un peu tiaa-
qiûltfcipar les mefiuesquc j'avois prifes, &
qui rendiKot l'Abbé tout joyeux , je priù
le Comte de defautter par me dire d'où il Ibr-
toit ; & d'avec quels Compagnons, Je fors>
dit îidettiSecoQdedelaBertaDdiére>oùvous
avez été , & où J'ai encore veu des Vers é-
crin coDtie le mur., que j'ai ctuétredevô-
Ire main ; & je quitte det Compagnons qac
je n*ai pas eu le temps de coiin(rïtEe,puif-
que je n'ai bu ni mangé avec cui. Maisje
veux vous dire tout ce qui m*eft arrivé de-
miis que je fuis anivé à la Baflillc , oà la
Fortune a voulu mefatre voir, qu'cJtelça-
voit me fournit des Avantuœs jniqa'aa fond
àes Enfers. Plus fuifvenaaces qi» vous ne
penlèzt Mr. IcComie, liùdis-Jci & toates
des plus cxttsordioaites^ Sans oon^iFen-
dre le fcss de nvMi £uigme, qui lui é-
toit impénétrable , il* continua fou dilcoms
ainlî.
Après que ces Canailles ici m'emrratfbuil-
]é jnfqu'aux endroits tes plus fecrets, & ea-
tent retourné toutes mes poches, ils me mi-
rent dans une Chamhdre , où je relW feul
près de deux Mtiis. J'eus tout le temps d'r
faire des réflexions , qui toiues aboutirent i
me convaiQcte , que c'étoit mon Epoufe
qui
u,-,,.., Google
0M rWftoin it UBaftHh. 387
Îid! m'avoir fait arrêter. On me tîra de ms
o]itude pour me mettre daOs la Troîlîéiîie
Chambre de la Bertandiérc avec un appelle
Mr. Stinkfoa , Bantlûîer Aaglois , fort hoa-
néte Homme, ér un AbM Italien qui nVjk.
mais voolu dire fon Nom, ni pour quel fii-
j« il eft ici ; mais quiadel'efprit inâniinent:
ce fut lai qui comprit ce quevous nousvoa-
!iet dite, en frapfànt Contre te mor. Stink-
foa a eu lemalheurdcs'aSbcierdausuneiM-
nufàâuie de Draps , avec des Fripons » qui
piellèz par.Iui de lai rendre letir comptes, oQc
gagné d'Argenfon, qui a fait m^tre ce pau-
vre Banquier à la Baftille , d'od il ne veut
pas le lailTer fortir, qu'il ne fe foit accordé
avec fes Créanciers. Sa Feirane a fkit rt-
montrer au Roi rinjaftlcc que l'on faifoiti
fon Mari, & le prejodicc que fa ctucUePri-
fon apportait à ra &tiqae. Le Rbî l'a retl-
voyéeà Mr. leComtede.Pontcbânraib, qui
pour toute grâce , lui accorda celle de voir
trois fois par femaipe fon Mari. Une Fri-
ponnerie que lui a faitte Corbé mérite bien
que je vous en faflê part. Mad. Stïnkfoh
dans le commencement de la Prifon de fon
Mari obtînt de Mr. d'Argenfon la liberté de
lui envoier un Iit& des hardes. Elle lui en-
Toia un grand coffre bien garni. Mr. Sttnk-
foD en prit ce qu'il crut lui poovoir fèrvir
dans fe Prifon , & remit lererfe à Corbé, le
prtaïKde le^irerendreàfaFemme , nevou-
hnt pas iè parer dans la Prifon d'habltt II
magnifiques , caï il y avoitune Robede Cham-
bre de Damas l fleurs d'or , toute des plus
fomptueofes ; on Habit galonné tiés propre,
R * avec
'u,:,-,zf--„GoOglc
jSS L*I»qtàfitioM FroMf^Ji
ftvec oneTcflcdc drap d*oi pariàitemcot bel-
le : tout cela a'avcHt encore été porté qu'a-
.ce oudeui fois , &detics beau linge. Cor-
bé lui dit qu'ilavoit ËiitrendreletoutàMad.
Stinkron , qui lix Mois^près eut Ia.libené
de venir voir foa Mari. Corbé n'eo fut point
.averti , qui jéioit ctt Ville., où une partie de
plaifir l'avoit tait trotter, lorfqu'ellc arrivai
U Baflil^e. Mr. StiakfoD ne tnanquapasdc
demander i la Femme , Jï on ne lui avoit
pas rendu Ton Habit , fou Linge , ïà Robe
de Chanit»c &c. Elle loi dit qu'elle n'ciia-
Toit rien vu. Elle demanda dans l'indant à
.parler i Corbé, pour s'éclaircir de lacholè.
On lui dit où il étoit: elle avoit fou CaroHc
i la potite, dic J'y ftit trouver. C'étoit une
Maiibn où elle étoit coimiie: on ladt mon-
ter au lieu QÙ étoit Corbé , fans qu'il en f^
averti. Elle le trouva au milicud'unegran-
de anèmblée de MeSIeurs & de Daines , pa-
ré de l'habit, de la vefte, & de la plus belle
garniture des dentelles de fou Mari, aveclef'
quels Mr. de Bafle-Mine lé donuoit des airs
tout des plus ridicules.
SimU limier Simia t itîam fi 4îirta geftat im-
fiinta.
Jugez de lafurprifcdetousles deux. Mad.
Stinkfonfitgrandbruit; Corbéfuthné, com-
me le Geai paré des plumes de Paon ; mais
il en fut quitte pour la honte, fi il en eût é-
,té fufceptible , & pour rendre le tout , a-
près en avoir &it l'étalage pendant fîi Mois.
Parbonlieur comme Corbé étoit plus petit
que Mr.StîDkfoa, ilavoictvtiecoupet l'ha-
bit
.--„Googlc
MtFUiftftrt Je ta BaftilU. 38»
bit & Is VeOc pour les accommoder à'ià'
taille, en fÎKte qu'ils n'ont pca fervirauPro--
fwiét^re, dont on avoitufé le Linge. LaRo-
be de Chambre étoit encore plus mal-trait-
tee; elle étoit toute crafTeafe, avec une gran-
de tache d'encre fur ie devant du côté droit.
Quand Mr^iinkfon s'en plaignità Mr.d'Ar-
Çenfon : ne les auriez- vous pas u&z , dit-^
il, pour l'en confoler , tî vous avieiété de*
borsf
Le Lcâeur me permettra bîendei^irc une
petite digceffion , pourraponer Dne pareille
friponnerie deRofarge , Major , gucj'aiw-
l^ifedansla fuitte , & que je mtxs ici après
l'autre , crainte qu'elle ne m'échappe, lorS'
qu'il feroit befoîn de la mettre siilleurs , fui-
\tai ia julte Cronologiede la Baftille. Ro-'
farge qui avoit coutume d'âtreioùjoursinal-'
proprement engucntllé, & liabiilé comme un-
ivrogne, qiit buvoit tout Ton argent, &ce-
lui des Piifonnîets, paruttout d'un coupvé-
tu fuperbement, & venoit le prollituer dans
tontes les Tours orné d'unhabîtmagnifiquet
doré comme un Calice. Ce qui ât croire:
que quelque Prifonnier en mourantavoitété-.
afleï fou pour donner fon habit à ce BeliAre;-
ouplutôt que quelqu'Hommedeconfequence,-
à qui ie Major avoit annoncé fa liberté , ravi
de joyéi lui avoit donné, fans réflexion, là'
dépouille-, pour le cecompenfer de fa bonne-
nouvelle. Rien moins que cela. On avoit
arrêté un Officier : fon Vallet de Chambre
vint pour lui parler , il s'adreifa au Major,
qui aïant fçu que c'étoit pour donner i foa
Maître un habit qui fortoit de chei le T«l-
R 3 leoT)
u,:,-,zf--„GoOglc
3ji»- Vîit^HiJitiou FroMfoifi
1«or, prit l'habit, promit qu'il raII<Mt rendre
à l'Officier Prifoniuer , & après avoir ren-
voie leValets'cnptra, ccanme JodclètPtîii-
ce d'Armeaie. Un An apiès , qaand le Pri*
foDnier eut la liberté de voir du Monde, le
Major qui en fiit prévenu, ât tourner l'ha-
bit & le Galon , & après le donna à l'Offi-
dèr, qui proteAa n'avoir jamais porté d'ha-
bit retourné. La chofe éclata. Le Major,
pour appaifcr l'Officier, lui dit qu'il eûtàfiu-
re efltmerfon habit, & qu'il lui fèroittuibil-
le païaUe quand il auioit de l'aident. L'Of-
ficier aima mieux rcpieodte Ton habit tout le-
tontné qu'il étoit , & le donner à £>n Vallet
de Chambre, quedelelailTerpIastong-temps
fur le dos de cet indigne Fripoii; fercfi-rvant
i rabattre les coutures du juiUucorpsdnMa-
J6r, quand il feroit en libétté. Quand onent
àté les Reliques de de0ns l'Ane , Martin
n'eut plus que fon bas & Tes oreilles. OU
dit que leMa or etit l'imprudence de deman>
der à l'Officier l'argent qu'il Itû avoit coûté
pourfure retourner Coa habit; c'cd cequcje
ne (çai pas poltiîvemeat ; mais ce que je fçal
cA très certain , c'elt qu'il n'en toucha pas
de mauvaife moonoie , & ne fut pas paie
comme il le meritoit.
Mr, le Comte de Brederodes continua, &
nous dit. On me.reiira4'avec Mr, Stink-
foD, & l'Abbé Italien, pour me mettre dans
la Tiotlîéme Chambre de la Tour du Puits,
avec un Abbé très bienfait , & qui m'a paru
fcrt honnête , & bien né. C'cft un Homme
«icore plus haut que vous , dit-il , en m'a-
dreilànt la parole, mais boflti; & je puis di-
re.
0» fUifhin Je U BajiilJr. Jyt
re, qae c'eft le pIBs 1)6311 Boffu qnc j'aie vu
de ma vie. Il a l'air majeflueux , leteintvif,
jes yeux pkins de fta , tous les traits du vi-
ftge très r«g«liets j & la barbe i qu'il porté
fort longuej-lViMitlatflîS croître depuis qu'il
eft à lafiaUille , ett très belle : eUccR cré^
pée & àgrolTesbouçlesd'une couleur dcgeals
■ admirable. Il s'appelle Gonzelle , il eft le
fils d'un Notaire d'auprès de DolcenFran-
bhe-Comté, Quand le Roi de France en fit
H conqtiête la dernière fois , ce Gonzelle ft ,
retira à Vienne en Autriche , où le jeu tni fit
fiiîrc greffe fortune. Il acheta une belle Teri-
re , que l'Amour le força de donner à une
Dame de qualité dont il étoh devenu amou*
reux ; il s'étoît feit recevoîtGomtederEm-
pire, poW lui mieux plaire; mais l'infidélité
de faMaitrcffe le fit refondre pal un faint
deKfpôit à fe faire Prêtre. Pour changer de
condition, il ne changea pas d'incHnatioù. Il
continua à jolier à gros jeu ; & gagna des
fommes très confideniblcs. Il eut envie de
voi* la Cour de France an commencemenî
de l'Année 1701. il t vînt avec un équipage
magnifique : CarOile ït fis Chevaux ; fuïctc
nombreufe de Domcftîques ; belle Livrée ,
rien n'y manquoit. Huit joarsaprè? fonën-
tréedans Paris, Mr. d^Argenfon Je' fit arrê-
ter, fc faiiit de tout fon argent, fitvertdreld
_ beau Caroffe & tonsleséquipages de l'Abbé,
' qu'il fit enfermer dafts laBallîlle, où jamais
il n'a pa Obtenir la grâcede fçavoir cequ'on
lui veut, ni de quoi on l'accufe.
D'ArgeUfon cependant le fit un jour dct-
cendre , pendant que nous étions eufembic.
R 4 &
39* VlH^i/Uiom Trm$fotft
& voïant que l'ÂbW ne le tjailifioit que de
MoDlîear, &DonpasdeMonfeigiieur, com-
me il l'exi^eoit înlolemintuit de )ï plusgnn-
de partie des Prifonniers. D'Argenfon l'en
reprit ; difant qu'il devoit [cfpeâer en lui le
Miniflre du Roi.. L'AbW loi dit qa'îl ref-
peâoit tout ce qui apartcnoit au Roi ; mais
3n'uQ Comte de l'Empire étoit djlpctifé de
ODner au Lieutenant de Police de fa Ma-
jefltf , le titre dcMonieigiieur: qaepoarloi
il ne conooiilbir point d'autres Seîjïneors que
Sa MajeClé Impériale & leRoi des Romains.
iês légitimes Seigneurs. D'Argenfou s'em-
porta jufqu'à lui parler par toi, en luidifant,
mon Ami n'es tu pas un plaiËint Comte de
l'Empire 1 le Fils d'un Notaire ! Monlîeur ,
reprit l'^bé , je vous connois mieux qoe
vous ne penfez > & je fçai que vous n'avez
pas toâjours été LieucenantdePolice; non
plus que Tamerlan n'avoit pas toujours été
îlmpereur, quoi qu'il fût un des plus grands
Princes de fon Siècle. Enân que j'aie étt
autrefois tout ce qu'il vous plaira ; l'Empe-
reur m'ajugé digne d'être tait Comtedel'Em-
§irc I &j'en foutiendrai la dignité jurqu'au
ernier foupir de ma vie. Ta qualité , dit
d'Argeolbn , ne m'empêchera pas de te faire
Ijendre, quandjc t'aurai fait ton procez. Mon-
lîeur ( je fuis en vôtre pouvoir, vous poa-
vei me faire mourir , quoiqu'Innocent , de
tel genre de mort qu'il vous plaira : mais je
fuis perfuadé que vous ne le ferez pas fans ré-
fléchir , que l'Empereur eft jufte , & aflcï
puillànt pour venger l'injullice que vous.fe-
lez envers moi , fur dix Comtes Frajiçois.
.Ce
^...Cooylc
M FHifloift de la BaJiflÙ. %^% "
Ce h*cft pas de ce que' vous fçavM faire que'
je fuis en peine* je nelefçaique trop; mais'
je dcfîrerois içavoir de quoi vous m'acculèi: '
Aites moi la grâce de me le dire, & jevoDs''
jure fur tout ce que j'd dé pluS facré i que'
je TOUS l'avoûrai', fi j'en fuis coupable. Ta'
n'auras pas le plaifir de le fçavoir li tôt, lui'-
dit ce ]pyal Juge: je t'accuie d'être un Info-*'
ICnC, que je vais envoler an Cachot , tout-
nud avec les fers auï pieds & aux mains.- Je
fuisPrâtre , Mortfieur , dit l'AbW , &Dieii'
m'^prend que li j'y dois le prlcrpour' vous. -
Pnîfque tu es Prêtre, dit d'Argenfon," retour-
ne en ta Chambre, oùjetédônneraidutçmps'
Ihffifammcnt pour prier Dieu pour mdi.- A-
<îief: qu'oïl j'ôte de devant moi, dît-il à fès *
Satellites, qui le ramenèrent dans nâtre Cham-
bre, oi i!me fit le récit de la férocité bar-
bare de fon Juge. ■ Nous vivions fort unis''
enfemble , & nous avions facilement feit a.~'~
mîtié par la conformité de nos mœurs & de ■
nôtre devinée ; lorfquelîxfemaf nés après na-
tte union, on me firfortir d'avec lui', pour'
me mettre avec fon'Freredanslà Seconde'"
Chambre de la Bertaudiiîre. C'eft auflî un'
Abbé, mais laid & mâl-fait, aUlantque fou
Frère eft beau & a d'èfprit. Je fus fort long' -
temps avec lui , fans qu'il voulût' me dire'
Ibn nom, qBOÎqu*rl fçût fort bienqucje for-
tois d'avec* fon Frère, dont ilnedaignoitpas "
feulement s'informer. Mais uft' jour queje
Hfois dans fon Btevi^re» j'yvisfonnomquî
Jétoit écrit.' Quoi! luidis-je j Monfieur,:
tes vous leFreredeMr. l'Abbé Gon'xelle,;
avec lequel /étois il y a peu de temps ^ Ouf; ■
R 5 Mon* -
MonCeor, dit-il , mais je n'ai ofé me faitt
CDDHottre à vons, craiateque vous Dcfuflîez
une PârfonnemiledeU part du Gouverneni
Ebur me tirer les vers du nez. Je lui fis fi
ien connoiure fou erreur , & il vit que j'a-
Tois tant d'aveilion pour nos Bourreaux , qu'il
me fit part de Tes Âvanturcs , i peu près dans
ces termes.
Je fuis Fils d'uD Notaire de Dolc: mon
Pcre nous laiflâ après ftmort un grand nom-
bre d'Enfants avec un bien fort médiocre.
Ma Meie» qui lui furvécut , eutfoin de fai-
re étudier tous fes Garçons, perfuadé que la
plus grande, richefle.qu on puiffe laiflèr à des
Enfants, c'eftl'éduQaiion&la fcicnce. Mon
Frère Aîn^ , que vous venez de quitter fut à
la Cour de Vienne, où il fit une fortune coq-
iîderable. Le bruit eu, vint jufqucs à nous,
& mémequ-'il étoit Comte de rÉmpire, J'y
courus t pour y^avoir quelque part. J'arri-
vai dans le temps qu'il, venoit de ïè faire re-
cevoir Prêtre, &.ud peu après qu'il eut don-
né de grands biens à uqc Came, dont l'infi-
délité ^ mit au defeipoir- II me mit en état
deparoîtreàl^Cour de l'Empereur, fans lui
^ire de hoiite. Je connus bien-tôt que ton-
te fa fortune rouloit furie hazard, &queles
cartes &les dez^ùfoient tout fon fond. Au-
jourd'hui il avoit mille pifiol es , deux jours
après il n'avoit pas un fou. Jamais de tran-
quilité , toujours d&ns l'inquiétude & l'agi-
tation. Un jour qu'il avoit eiccffivement
Sagné, je le priai de me faire un petit fond>
ont je feroismdlleur ménager, qu'ilnel'é*
toit de fès grandes richcfTet : mais il fiit auâî
avare
u,:,-,zf--„GoOglc
tu PHifiâire de U SaflUk. tPÎ
a.van pOitr moi, qa*!! avoit été libéral poat^
fa Dama. If me confeilla de me'ftftfr or-
donner Prêtre comme lot. Se; il m'efi' ftcrtî-
ta les moTens : après quoi il me doiWik de
quoi me reconduire chn nous , 0*4 ^-IC
moïen de mes Amis j'obtins un peiW Betne-
fice. C'étoit une Cure , où pour tout rere-
nu J'avois cent Anis , mes MeflSîs, S' logé,
paflablement bien. II y tvoft derrière ma
Maifon' une Rivière fort prfflîSftlieaft; JV
voîs fait &ire une petite barqtoe & deS ffféfs»
& U j'exercois les deux profcffioiMdé ' Sf.
Pierre , de pauvre Pêcheur , & de' vtgflatlt'
Pafleur: vivant fans ambition & dans- undé-^
. gagcmentdu monde, qui me donlioit un*
tranqnilité, dont le fonvenir&Vf ici maplus ■
grande peine. J'avois pris avtC moi unede
mes Sœurs , Fille fort limpic & fort fige,
quîgouvernoîtmonmenî^e. Lori^u'au cWrt"-
rfiencemcnt (Je l'Année 1701. je fastodtfnr^
pris de voir mon 'Frère le Comté artîrcr
chez moi avec un équipage de^'rince. Tou-
te ma Paroiffi; n'éroit pas affct grande pour
logerfa filftc.- Je le conjurai- en FfCrt- fi-
ge , dSvendrtfon Carofle à lîx ClièrtiiX ,
de congédier tous fes Gens, & de fe faire un
fond cficî nous , de l'argenf qu'il- avoit, a-
vec lequel i! pouvoit paffcr lèï jdursdsns'la
mflme ttanquilité , que celle où il m'irvoir
trouvé;' Maîs t'étdit préchef r^iiience"&'
la moderaion'à un Prélat dé Cour. Ilpre-
tendoit torillèr i la Cour de Fraate ,■ & y té- -
ntftoot un autre rang que celui où'îimevO--
îôltredulf- qui lui ftilhit pitîtf& doiifil'Jftbff '
confts; il'in'eiitrahi* malgré mW'à'Doit"
R 6 avec
)9< Iflmquifititii Framfeifi
avec lui. Là un de mes Frères (]oi a. &ît
profeffion dans les Carmes , fe joiguit avec
moi pour le follîcitet , & l'engager à s'éta-
blir dans nôtre Pais : mais cefuc vaiaemeou
I^ étoit Arr4t^ dans le Conieil éternel , qa'il
ïiendroità laBaftille, &qQe.radjlgracei)Ous.
j. CDtruncroit avec lui. £n effet , il pourfui-
.vit foa chemin vetSv la Cqur, mal^rènosre--
ipontrances, tenqilidefesgrapdes id^es. Ea.
me quittanc il me donna .cent ^cus t pour
m'indemuifer de ta dépenfe. qu'il m'flvoit&it
faire; parce qu'en trois jours Iui& ies Gem.
m'avoiept. conibmmé mes proviiloos « fai-
tes pour toute .une Apnée. Environ un Mois,
après foq départ, jamais je ne fus plus fur--
jiris que lors qu'uti Exempt & fil Archers,
entrèrent dans ma Msifon, où à.peineiismc.
donnèrent le temps de prendre mef hardes&.
du linge , & i4i)s me permcçtte de; dire feut
Içment adieu à ma chère Soeur , ils. me for--
cercm demonter.à ChevaU Sç fansdjre oà.,
ils me vouloiou conduite, ni pour quel Ca~-
jct il&m'arrftojcnt, ils me ârem marcher au^
fnilteu d'eux garroté^,, comme un cnmiuel.
Suandjious fûmes Meuz liciics ep décade.
oie , j'y trouva^ mop Frçre le. Carme ,
qu'an autre Exem^K , 6c fix At;chcrs avpicnt
mis au même état ou j'étois ; & fans vouloir,
feulement nous, accorder la. Iktisfiâion de.
nous enibraflcr mon Frère & moi , iis.DottS.
ont conduit. touï deux dans ce, criiel Labf
rinthe , fans qu'il m'ait été permis dç parler,
à. mon Frère par les chemins, ni de prendre,
mes repas avec lui dans les Auberges oà nous .
agiviom, ni que j'aie pu obteurl^ confola-
u,:,-,zf--„GoOglc
ou FITtfloire it la iafi'tHe. 397 •
tioQ de le voir une Icale foie depuis qu« je
fuis ici. Voilà la botme fortune que nous
a procuré Mr. le Conue <ie l'Empire. Mon
Beacâce, oùj'étcùs plusheureux, queleRoi
ne l'eQ ï Verlîiilles , & dont je ^foit les
fonâions en bon & lelé PaAeur , ell perdu
pour moi ; je n'y letournerai de nu vie : je
oe revemi plut mes IJmples Brebis ; & ms
Sceur qui m'aîmoît autant que je l'aimois eft
morte de douleur de ma dilgrace. Omache*
re Patrie pourquoi es tu tombée fous la Do-
mination desErauçois! ouqucpeut ciaiodie
le Roi d'un miferable Curé , quinelifoicciue
Cou Brcviftîic, &âiqm fk folitude tenoitlieu
de toute la Terre >
Après ce triile récit, il etitra dans une r{-
Ymeii profonde & fi mélancolique, quctoU'
ces m^ confolations ne purenc l'en faire rC'
venir. IL ne mlécoutoit feulenient pas ,. &
les yeux atta^ihez contre Terre , il îembioît
pétrifié. II demeura dans ce pitoïable état
glus de deux, heures , en^ouilànt detemps en
temps des foupirs , qui fembloient devoir *.-
■ molli nôtre Cachot , plusfcnllblequelecœur
de nos barbares. Tyrans. Tous les jours, il
entroit deuz ou trois fois dans- ces profondet
laveries , dont je ne pouvois le retirer , pas
même quand on apportoit nôtre dîné ^ qne
fouvent il laiffoit retourner , aufli bien que
moi, fans y toucher : car conunc nousman*
eions enfemble, j'àimoismieuxme palTerde
dîner, ou de foupet, que de prendre mes te-
pM fans lui. Quand il. étoit revenu de faLe-
tàrgie , il m'en demandoit paidon 1 & megroiiT
doit if D'ayoii pas voulu manger fans lui. . Il
R 7 ^^ <t«
u,:,-,zf--„GoOglc
j«8 Vln^ifitnm B-awfMfi '
*toit fort eiaâ à lire fon Brcvisire , prioît a-
vtc ferveur , dormoitpeu , Ar jcanoit beau-
coup. Ce <3nî' lai aHét» fi fort le cerveau,
que ce pauvre nMlhenwni Ptft ic ponflâ fà fo-
lie jolqa'à fe vouloir faire mourir. Ccfutaa
commencementdoCarémcdemicr, Onnous
avoir aporté de la Moriie pour nôtre dîné ,
que je ^voisqo'il ahnoitpaffionnemcnt. Je
mis !ep!àtd« morîic-dans l'endroit où il fèm-
bloitavoir fixé fonpointdevUe: maisiepan-
vre Homme la regardoit , fans la voir. Re-
venu de fon eital^ . il me demanda pardon
à fon ordinaire. Puis tout d'un coup , en
fejcttant far mon lit, oùjemVtois couché,
parce que je me trouvois indifpofé: ah \ Mr.
le Comte , me dît il , priei Dieu pour moi.
Je le confolai encore de mon mieux , & je
lui fis connoîcre le danger où iî ft mettoît
de perdne l'cfprit , en fc plongeant dans ces
abyme» de rivcricr. Que voulez-vous i dit-
il, jc-nr fois pas le Maître de maraifim, &
il n'y a que la mort qui puilTe mettre fin
. à ma profonde douleur. II fe mif en priè-
re. &pria.fort long temps : enfirite de quoi
il' alluma de lachandellfc, ôrliir jnfqu'à ce
ÎoelePotre-CIeftnous aportSt làCollatîoa.
l'Abbé GonteHen'avoirpoJnt" mangé détour
fejour, II foupa fort bien, mangea laMo-
riioqu'on nous avoit donné pour nôtre diné.
Four moi' je me contentsj d'un peu de fais-
de, que j'aime beaucoup , qu'onnous avoit
aportiï pour nôtre foupé. Il reflï forr Irtng
(tempï^ après fon repas à préparer l'âtordl du
flinefle & terrible projet qu'il 'avoir formé.
Pendant ce tcaips-la je m'endormis , ne me
dou*
oMplSfloire de ta. BéfiiUe. 39»
doutant pu qa'il voul^ attenter à fit vie.
EnviroD minuit je me réveillai iabroir qu'ti
fit eDtombtotpaf terre, & en coâsot uR4e
nos pots 4e chambre, je lui d«nnnd«î , s'il
fc tiouvoit m&l ? Ce n'ell rien^, me dit-il,
d'une voix mourante. Jeme. levai pr<>mi»e-
ment & je counis vers l'etidioio oâ je l'a-
vois entendu tomber, je le trouvai étcodo
parterre, n^eant dans fon iangi & le vifà-
ge fruid comme celui d'un Hamme mort.
Ah! iQirerabtetm''^<:nairjC(]ii'auezvoatfaitl
mais il ctaicfans fentimem. Je voulus bat-
rrc le fuli], mais il l'avoit cachrij auffibicn
que moQ couteau & la chandelle. }e frappai
promptement à la porte ; j'appellai la Senti-
Delle ; je criai de toute ma forceau Corpsde
Garde, qu'omeût à venir fccouririin Hom-
me quiperdoit tout fonfang. Plusd'unehea-
re après le Capitaine desPoitcs vint avec Ru.
Nous trouvâmes le malhcnreax Abbé tout
couvert de foa fang, dont il avoit perdu une .
quantité Ëprodi^eulc, qu'ilyenavoit lahau-
teur de trois doigtsfut le planches. £h ! bien,
dit le Capitaine des Portes , c'eft un Hom-
me d^ moins au Monde ; pnifqu'il s'ed def-
fait nous le jetteront à la voirie. Il- alIniiH
nàtre chandelle que rAU>é avoit cachtfe dans
lefondd'unCreneau, pourm'ôtertesmoïent
de le recourir. II courut^ chercher le Chi-
rurgieu} pendant que Ke & moi nousvifitl-
mes le.bleiTl^. Je jionvai quefon cœur pat-
pitoit encore ,* ce .qui me fit chercher l'en-
droit de fa bleâfuie « que nous euiAcs de ta
peine à trouver ; car il étoit tout couvert de
laog dcpois Ut^ jurqu'uix piedt. Nousvi-
mes
'■ u,:,-,zf--„GoOglc
40O JUImfuijtMm Fr^ifaift
mes qa'il s*étoit fàîcunc ligatute ad bras g»-
che aufli adrbitement qu'un Chirurgien , qni
rauToit voulu feigncr, l'auroit pafîiire. £>iiii
ce temps là Rheilhc cot» prelque coutiiod.
Il vifi» l'Abbé & trouva que le froid excrf-
fif qu'il £ufoît l'avoit empêché de mourir ,
comme il dévoie fiure natnrelIeinciH : car le
fug ivAt 6%é fur la playe , ^uî avoir arrêta
le relie du ung qui s'étoit prefenté pour ea
foftir. Le malheureui Abbé s'étoit coup*!
Itveineccp^alique; &Rheil])e l'a (i bien pen-
fé , qu'il ell demeuré eftropié du- bras -^-
che, auffi bien que de fonef^t poorlerelte
de fa déplorable vie. Od eut bien de lapeî-
□e à faire revenir ce miferable Abbé qui tiit'
tris long temps ions tionner aucun ligne de
vie ; & le pcemier qu'il doima fiit une extra-
vagance la.plBS.outtde. Il fit appel ter le Ma--
jor fur les huit heures du matin ; &- f tn'fqn'a-
près avoir eu ic la peine à le tîrei^du-Caba-
ttx.1 eau dévie, où il tenoit fes plaids, oa-
l'eut fait venir devant l'Abbé j ce mourauf
prit fâ Culotte , ât fans prononcer un fèul
mot fit ligncau Major d'en découdreUCein>-
tnr& D'abord que le Major fentic au tra-
vers de la doublure les pifiotcs qui y étoicm
enfermées: non je ne fçanroispas ^I« vive-
ment vous exprimer dans quelles coQvQllîons
il entra: l'agitadon, remprelfemcnt où lié-
toit , d'en £itre fortir le trefbr du pauvre im-
bécile.. Et vite,'crioit-ii , un couteau ! des-
ciitaps! quelle pitié.': quoi pcrfonne n'a riem
pour m'afTiller! AlafinBoutotHiiéreInipré<'
ta des Ciicaux , avec lefqaels de fes maint
ueiiiblitntes , il coupa les Culotto ; donbleu--
re,.,
M fUifitire Je la ^ilU. 40 1
re, & âeflils , d'oà il tirs huit Louis d'or^
Î[u'il ïaiiTa tomber dans une poche plus créa-
e qu'un Tac à bl^ , & apr&s avgir vifité la
Calotte de tous les càtei , avec une ciaâî-
tude qui £ii£bit bien voir l'envie qu'il »voit
d'y trouver une pareille niche , il la reudit
gravement au pauvre fou Après quoi, tirant
untfcu dc& poche; tenez Ru, dit-il, qu'on a-
chette un pot de terre tout Denf à, Mr. l'Ab-
bé > & qu'on lui faiTc^ un bon bouillon , car-
il en a bien beCoin ; & fur tout ménagez bien
cet écu dn relie duquel vous me rendrex
compte : & oncqoes depuis il n'ell plus re-,
venu voir le pauvre Extravagué , qui n'avoit
plus de Louis à lui donner. Il a guéri delà
bleflbrc , dont il ell toutefois ellropi^ , mais
il ne guérira jamais de fa folie , quq par un'
efpèce dcmiraclc, Il me faîfoit tous les ionrs
des extravagances qui me pounbicnt % bout.
Tantôt il difoit que,j'(£tois!'Efpipndu Gou-
verneur , ou que c'étoit moi qui lui avoît con-
■ feillé de fe tiier. Tantôt il me forçoJtdcre-
garder fous fonlît, pour en retirer un Soldat
qui venoit de s'y glillêr , ou bien que j'avois
trouvé fa Confeflion & que je l'avois révé-
lée. Il ne me iaiflbir repofer ni la nuit , ni
le jour. Je demandai abfolument à parler à
un Officier. Après bien des follicitations le
Capitaine des Portes vint à la fin. Je le priai
de bien retenir ce que j'allois lui dire , pour
en faite fon rapport à Mr. le Gouverneur.
Tant que j'ai pil foulager cepauvreHomme
que voilà , je Cai fait avec une charité véri-
tablement chrétienne; mais PTcfentenient que
l'état ou il elt leduit m'empêche de detneurn
avec
u,:,-,zf--„GoOglc
401 IMufMîfitîw Iranfaift
avec Ini, & me feit appréhender on (bit pa-
nîl an fîen ; pendAit qu'il tne relie encore
aflcï de jugement pour prévenir ce malheur,
je vous ai fiût venir pour vous proteftcr, qne
fi dans vingt quatre heures vous ne le retîm
pas d'avec moi , ou que vous ne me retiriez
pas d'avec lui , au choix de vos Officiers ja-
près lui avoir fauve la vie, je jure que je le
tu^'ai , & moi après : ce feront deui Hom-
mes que perdra Mt. le Gouverneur , & de
la mort dcfqnels je le charge devant Dieu.
Je pronoliçai ces paroles, quej'étoîsdansïc
deflein d'exécuter , d'un ton ff ferme , que
deux heures après l'on vint enlever ce panne
Homme & m'en délivrer.
Le Leâcur voudra bien que j'interrompe
Mt-. de &ederoàes dans là narration ; pour
loi apprendre quel a éxé le fort de ces trois
pauvres Fran-Comtoîs. L'Aîmf étott dans
la Chambre de la Tour du Puits , oùMr. de
Efederodes l'avoit larfféi lorfqu'nn jour, ft
trouvant Teflomac trop charge de la man-
vaifè nourriture qu'on nous donnoit , il en-
voia prier Hhcilhe de lui envoicr un vomi-
tif. Rhetlhelui fit porter, par lePone-Clefs,
une prifc d'Emetiquc , que l'Abbé Gonidlc
prit fiir Its deux heures après midi. L'Ab-
bé frappa pour ftire avertir Rheilhe que fon
remède n'avoit fait aucun effet , que de lui
caufer de grandes douleurs d'cftomac : fur
les cinq heures du foir Rhcïlhe lui envoia u-
ne pareille doïe d'Emetiquc , qui loin de le
fiiulager , lui caufa des douleurs cxceffivcs :
«qui étant rapporté à RhcîIhe, illuienen-
toia une troifiémc prife fur les fept heures,
qui
M FHiflnre 4t la B^ilU. 40}
qui firoit crever le pauvre Abbé fnr les onie
beareadu foir, dans des douleurs qBÎIefiii-
Ibient rugir comine un Lion, & qui neceC-
■ ferent qu'avec fà vie. Je n'ai gardedetaset
Mr. d'Argenfon de rccrîminatiun , ni d'ac-
cufcr les Officiers de la mort de ce pauvre
Homme , quoi que dans la fuitte de cette
Uitloire , on leur verra commettre des cri-
mes li &iorme*-, qu'on les jugera aîftment
capables de tout , & que moi-même j'aïe été
dans on très grand danger , pgr des pilhiles
empeifonnées , qui fans doute m'auroicnt fiiît
mourir, C\ le nommé du Val ne m'avoît paS
fecouru avec du Theriaque que par bonheur
il avoit, j'aime mieux croireque l'Aniimoi-
ne écoit mil préparé ; mais ce qu'il T a de
prodigieux , c'eft que Rheîlhe ce bonCHrur-
fien , ne voulutjamaîs mtHiter dans laCham-
rc de fon malade pour le foulager. Il mou-
rut entre- ki brasdi-PîcrreBertranddeJuigny
en Beauffe , Clerc de Procureur , fon Concap-
tif, qui m'en a fait le récit. Le fccooddes
Gonzellcs qui eft celui qui s'éioit coupé la
veine, & dont Mr. le Comte de Brederodes
nous avoit conté la manie I étoit revenudans
l'on bon fens , par les foins qu'en avoit pris
Je nommé Fontaiiiede Touriiay , un fort boa
. & brave Enfant, que Eernaviilc a fait crever
d'une manière très cruelle , & dont j'aurai
fiijct de parler encore plus d'une fois. Mais
cet Abbé infortuné s'étaot donné- la licence
de reprendre BernaTÎile cfl face de fon ava-
rice inf«iaMe> de fon hypocrifie outrée, &
de fa cruauté &nî bornes, ce barbare Gon-
, vemeur le fit plonger dans d'aftreuï Ca-
chots*
4o4 L'Iu^uifitioM Franfoîje
cbots 1 où il le ât jeuaer d'ane manière fi
craellc , que la machine fe démonta • potu
jamais ne fe remettre, (mçpuan miraclede
la divine Providence. Le pauvre Homme
devint fou à Herj & comme il chantoîttous
les jours ics Eloges deBernaviUe, duqaelil
recîtoît toutes les cruaucez d'une voiï écla-
tnme, qui fe ^ifoit entendre de tous les voi-
fins, malgré toutes les précautions de ce ra-
finé Tyran; d'Argeufoii & lui ont envoyifce
pauvre Homme à Bicétre , le plus cruel lieo
qui foit au Monde. Meflieiu's de la Reli-
gion Reformée prouvent qu'il n'y a point de
Purgatoire, mais ceux qui ont été 3 la Baf-
tillc , font en droit de leur foutenir le con-
traire. Car la Balîille eft le Purgatoire de la
Fiance, dont toutes lesMeffes qui fe difent
en cent Ans ne peuvent pas ddivrer un mal-
heurcui; & Bicétre en elt l'Enfer: c'eftàce
lieu maudit qu'on peut bien appliquer ccÈîili-
que.
Hic Latîrintus adtft j qiied fi deUéferis îu-
tHs;
Ktm LabirÏKtHS trit , fed Jaher imtMs trit.
Bertrand m'a affûté que le Troiliéme des
Gonzelles, celui qui écoit Carme, & qu'on
arrêta à Dole , s*^étoit étranglé dans un des '
Cachots de ia Baftiile. Mais comme ceBer-
trand eil un Impofteur outré , malgré tomes
les circonllances qu'il m'a dittesde cette mort
tr^iquc , j'aime mieux croire ce que m'en
ont dit d'autres Prifonniers ; qui m'ontaffir-
mé que fon Ordre l'a reclamé, & î'cft obli-
gé
u,:,-,zf--„GÔoglc
M PHificire de ta Babille. 40t
eé de le garder , fans le laiiTei parler à Per-
fonnc, & de le reprefenter toutes les fois que
fes Supérieurs en feront requis de la part
du Roi.
Mr. le Comte de Brederodes alloit noue
continuer fes avantures , lorj[que R.U nous
apporta nôtre dîné. Je fus fort furpris de
voir uii Hoi^ime du mérite du Comte réduit i
la petite bouteille, & au petit ordinaire. Mais
de quoi l'avarice des Officiers de laBaftîl-
le n'eA ellepas capable! lisnepouvoleotpas
iiJer que Mr. de Brederodes tie.fdt un Hom-
me deqq^ité; ûPeribunci fonair, fesma-
niéres, tout decouvroii en lui uue grandeur
qu'il ne pouvoil pas cacher, quand méme.il
l'auroit vouIq. Mr. du Joncas m'a dit plu-
Heurs fois qu'il le' connoiObit particutiére-
meat, & qu'il, eût t>ten voulu lui rendre fer-
vice, comme à un Officier qui t'étoit dillin-
gué. Il étoit fort bel Homme, & quoiqu'il
tdt prefque feptoagenaire , il n'avoit pas une
lîde. Il avoit de beaux traits , le teint vif,
les yeux bleus, ^lescheveui.d'unbeaublond
cendré, dont il n'y enayoit pas encore prel-
que de blanc. U étoit de moicnne taille ,
mais bîên prife , & qui commençoit cepetF-
dant à groâjr ; n'aj'aat aucaœ incommodi-
té que celles que lui caufoient fes blelTures.
Il ctoit généreux, bon, ^nc, & parce que
^n ai pu juger & apprendre depuis de Geos
qui le connoiilbient , il avoit toujours paiC6
pour brave Soldat & bon Officier. Enfin il
meritoit une autre deflinée que la BafliUe ,
fous le poids aObmmant de laquelle il a été
fcçaiAi f comme le derqier desmalbeureox,
aiDfi
I ■ u,:,-,zf--„GoOglc
40tf Vlmqmfi^oiê framfiife
^nfi que je le dirai après avoir nporttf eeqfii
loi arriva atcc noos, Oalui appotta fon(»^
dînaire conjointement avec celut de l'AbU
de \x Motte , auquel malgré toutes fes im-
peninenccs je faîfois toujours part du mien,
qai étott encore en ce temps-là pailàble: mais
je redoublai la do cncoitGdenitionduCoin-
te,quoiqii'iI s'en deffcndlt d^uncmamrfir tout
à ^ît honnfte; & commï il aimoit beaucoup
le vin , je luf donnai la plus grande partieda
mien , ce qac j'ât toujours lait pendant que
nous avdns été enfcmble. Nous Hâmcs une
amitié très étroîtte : &jcprotefteq«efamort,
dont nôtre fèparaiion fut en quelque fbrteli
canfc, m'a fcnfiblement touché.
Apres nôtre diné, qui fïtt fort fîiccînt pont
le Comte , car la viande & le pain aroicot
beaucoup de peine à paflêr; ce qui me fit lui
donner une fouppe de croûtes mïtonnées qu'il
mange3,^& il but du vin pur, il reprit amfi le fil
de fa narration. Après que l'Abbé Goniellefiit
forti de ma Chambre, j'y demeurai fcul , oc
quoiqii'dlc foit fort obicure , comme vous
le rçavBi , puîfque vous y aveï demeuré, je
me trouvoTS fort en repos. Le zi. de ce
Mois, à quatre heures du matm, dans le mo-
ïnent que je dormoîs profondement , on »-
mena aansmaOïambredeuïHammcs, pour
<tre mes Com^ragnons, dont l'un eft on E-
Taporé , qui paffcroit plutôt pour ledcmier de
.tous les Conpe-jarets , qoepour un Ecclc-
'fiaftiquc, fi il n'avoit pas une Soutanellc. Ce
Prêtre qui ledirtsntôt Sicilien , tantôt Napo-
licatn,feftitappellerrAbbé Papafaredo.C'eft
le plus cotrompudetous-leff hommes, leplin
dif-
outiUfMtt Jt la BafliUe. 407
«ltfic^j£.pliislUeenpvcOes,Ie plus malotni,
. le plus hideux, Itpliis falopc dkasfes habit^
là pccfonne &:iâmaniéie de maagerique j'aie
\ -vu de mes jours. On le prenaroit plutôt
poucuQ Huron, que pour nu Européen. Son
Collègue eft un très boa Homme , Paï-
' iÀn , nommé Nicolas Saudro , du Vill^e
■ de Fleury des Hayes d'Avênes dans le Hal-
' naat. Ce pauvre infortuné eft Hmple, &toat
à^Ca,\t bon Humain. Il .étoit venu à Paris
yeodie des fuicaux de huis , & d'autres feni-
blés babioles, dont on fait une quantité conl^-
derable dans fon Village ; lorfque malheu-
leufement il y rencontra le noDimé Pierre
Pigeon, homme de lÀ connoiQânce, qui lui
4einan<U , S il vcaloit lui loiier fa Cavale ',
foof aider i tirer une Chaifejufqu'àBrozelleq,
-quHI y vouloit conduire. Sandroqui étoit prêt
:i s'en retourner à vuidechez lui, iwdeman-
da pas mieux que de profiter d'une occafîon
qu'il croioit fi âvorable. Il convint deprix,
& fe mit en chemin avec Pigeon. Celui-ci
coaduifoit dans Sa, Chûfe-quatre Femmes,
& im Homme qui étoit à Cheval auffi t»ea
fie Pigeon ; . lorfqo'à dix lieiics de Paris , des
sempts accompagnez de quantité d'Archers,
& jettcrent lâr les Cavaliers , la Chaife, les
Femmes qui étoient dedans , & ceux qui les
condoilbient, & les ramenèrent tousàParit.
il Ht trpavaque c'àoieot Gensde la Religion
Kcfomée , que Pigeon palibit dam les Paie
£trangcrs. Sattdro jura qu'il lui avoit lout!
& Cavale, iîuisavoir connoitTancede fbn né-
goce; ^quoique Pigeou affiimâtquecepau-
vte homme étoit tris ionoceat, â'Argeôfoa
fit
.--„Googlc
4^ Vhjmfitkm Frsmfelfe
fit vendre fii Cavzlle , Im fit prendre le jn
d'af^m qu'il ïvok, & le âtincttre à laBaf*
tille, OB malgcé foQ inaoccnce reconnneon
l'a retenu pliUÎcurs Années (j'aurai fujec de
park-i de lui dans la fuite de cette HKtoirc,
& je dirai une partie de ce qa'una fait ibaf>
frir à ce pauvre opprimé, & àPigeoD,qtt^OB
a retenu plus de treize Ans à la Ëaflille.) Si
tôt que CCS deux Pcrlbnnagcs fuient eattei
dans ma Ciiambte: allons £dadro, dit l'Ab-
bé, qu'on 5uiù la vifïte; & dans l'inâant le
pauvre Homme Te fourra fous mou lit^ pots
voir û il n'y avoit pas quelques ferrements.
Saodro lui ht fou rapoit, qu'il y avoit tioo-
vé une chevittc de ^r , qui tenoit les bois de
mon Lit deCampcruifcz. L'Abbé ans con^
pliment vint dans l'inflaut à moi, & me dit
Debout , Monlieur . levez vous : je veux a-
voir une cheville de fer qui ta fous vôtre
Lit, dont l'ai befoin pour travailler àéJatgii
ces Fenêtres qui fout trop éiroittes, &doa-
ncr du jour dans ta Oiambrequi me parott ■
trop ohfturc. Mr. l'Abbé, lui dis-je, laiflcx
moi eti paix.: je fuis peu d'humeur de tire ;
& li vous clicrcbez à vous divertir, que ce
ne foir pas i mes dépens. I>dx>ut eacotean
coup repiit-il , & que je ne vous le diie pas
deui fois. Abl>é étourdi , repris-je tootfs-
' .lieux , fl tu me donnes la peine de me lever.,
ce fera pour t'étiîller d'une manière , que tn
auras tout fujct de te repentir de ta folie.
Sandro , dit-il , cet Homme me paroît pen
-fociable .; je vois bien que nous ne mange-
rons pas un boiilcau de fel enfemblc. Après
cela il s'enfonça daus un des Creoauïdejiô-
tre-
0M FHifteirt JU U Ba/Iilk. «oy
tre Oiâmbre , & le prit à appeller de IoonA
ftwce des Femmes ! Haye ! Marton! Bon-
'dj, la Ficary , quelqu'une des p1as jolies ?
qu'on me parle. Une Femme lui répondit,
à laqaèileil dît plos de Tottifes , que le plus
corrompa des SoldatsmuiGudesn'en auroït
voulu dire dans le ptns ia&me lieu dé dé-
bauche, dont ces Feinines rî(Neiit i gorge de-
ploïée. Le pauvre Sandre paroifToitenétre
nen chagrin, auât-bien que moi: cependant
an moindre ligne de l'Abbé, îlexecutoît Ces
Commandements. Je fouâris tout , en at~
tendant que le Porte-Clefs nous apponàt 1
d!ner. Quand il eut ouvert la porte, je me
levai ea chemife , & prenant tous les plats ,
je les jm^dans la montée, en t^drophant
les Officiers delà belle manière. Comment
donc , luidis-je , eft-ce que le Gouverneur
me prend pour un Beltlîre , de me mettre i
l'épreuve de tout ce qu'il a de Fous dans la
Balliile > Si je fuis coupable de la moindre
chofe qu'oa me t'aflè couper la tête , fans
tant me Biire languir , 11 non je fçaurai bien
m'afFranchîr moi-même du fiineâe cfclav:^
où m'ont réduit mos barbares Tyraas. Ce-
toit Bouconniéte qui noas avoit apporté 1
manger : le pauvre Homme étoït tout trem-
blant, & tâchoitdem'appaifer, enmedifknt:
l^on cher Mr. le Comte , aVez patience, je
vais faire monter un Officier. L'Abbé &
Sandro étoient fort étonnez du carillon que
je ^foîs , & l'Abbé fur tout peftoit fort de
voir fon dîné répandu fur les montées. Bou-
tonaiétc fit venir Corbé, quifittout cequ'il
put fom sa'aipai&t. Se mejaia queli-tôtquM
S I -
u,:,-,zf--„GoOglc
4IO ' Vlnquifitim Frmifâifi
y ftoioit UQC Chuubrï viiide ,' oa fR*7 mct-
troît. Je m'ftois remis aaLit & j'étoiscn-
■core couché quand il entra. Après loi avon
déduit toutes mes raifous , qu'il écouta urec
une rfpèccd'attentioK, je lai dis: Vjous vo-
ici bicii Monficur où je fuis , je vous pro-
mets foi d'homme d'honneur, que j'y refte-
rai , iàns boire Qî manger , & que je ne m'en
lèverai mort ou vif, que pour fortirde cette
Chambre , & me délivrer de la Compagnie
de ce galant Homme , en lui montrant le
Prêtre, Mr. l'Abbé , lui dit Corbé , voœ
Içavez d'où vous fortcz , & vous ne voulez
.[»s être plus fage, on vous y remettra pour
je refte de vos jours. Corbé mon Ami ,
reprit l'Abbé , vous faites l'Homme de con-
séquence, & vous n'êtes qu'un Faquin. Ne
vous ai'je pas^jt, petit bout d'homme , que
je ncmc tranquilîferai , que quand vous m'au-
rez mis de Chambre avec quelque Prifonnié-
re. Donnez moi la Martont la Fieury , la
' Rondy, la du Bois; cntin une de vos relies,
ou de l'Abbé Gîraut; & après cela laiflèï-moi
dans vftcre diable de Caverne , rognez y mon
ordinaire avec vosoD);lesa&i]ez jufques aux
coudes , tant que vous voudrez , je ne dirai .
plus mot. Je ne puis pas me palTer de Fem-
me plus que vous , petit Godenot, ou l'Au-
mônier Ribaut vôtre Aflbcîé en galanteries.
Sont ce U les difcours d'un Prêtre , reprit
Corbé, & ne devriez vous pas rougir de voj
împudicitez ? Pardi , dit l'Abbé , voici Mar-
tin qui veut remontrer à.fon Curé ! Et vouj
Officier Diabolique ne dcvrioa vous pas êm
biulc vif, pour avoir çorron^u toMes-not
u,-,,.., Google
Prifonni^res ? &S qnelqg'iiQe vous cefillc ,
vous la plongea cUos d'aJSreuï; Cachets , oÂ
vous la faites jeunet , juf^u'i ce qu'elle a£c
allbuvi vôtre fureiir bmc^e , 40X dépens d«
ce qu'elle a de plus cher , dont l'Abbé lui
donne l'abrolution , aux chacges de ïui ac-
corder la même grâce; après quoi, les cail-
les , les perdrix , le gibier le plus^xqutj,
les meilleurs vins, les confitures , &lcscho-
Tes les plus dclicieufesde la vie ne lui atta-
quent pas ; & vous f^'tles tous les jouis ri-
pailles enfemblejpendant c^ue vous f^tes mou-
rir de faim les pauvres Ptilonnieis. Monpe-
titBouc enfumé, vous fçavez que je nemeiy
pas & que je parle ^ vifu. II en alloitdire
davantage , lorfque Ckjtbé fortît , & ferma
.la porte, en m'aOurant qu'il alloit me reti-
rer d'avec cet infâme. L'Abbéretouruaàfofi
Créneau informer fes Voifines des véritçt
qu'il venoit de dire à Cotbé, & leur appren-
dre qu'il ne dîneroitpas de la journée, qu'il
étoit avec un Comte avec lequel il VQioit
bien qu'il ue fcroit pa^ fan compte , qui
n'aimoit pas les contes pour rite, & qui a-
voit debutié par lui jetter fon dtné dans VEC'
calier t & que lui & Ion fidelle Sandco dtne-
roient ce ^our là d'un .ii^nc de ctoix. Enfin
pendant cinq jours que j'ai été avec cet An-
tropophage ( car il Inangeoit tout ce qu'on
donnoit à Sandro . qui mange à part, carua
Cochon , pour peu qu'il eût eu le cœur bien
plac^, ne voudroit pas manger aveccemau-
ûde d'Abbé ) n'a ceffé de vomir des imper-
tinences avec wn débordement pcodjgieujt.
Hier au foir Boutonnière voïant qqetoutcc
S » . qn iî
.--„Googlc
4t> VIn^Mifithn Frmifgifi
qu'il m'ivoit apporté depuis cinq jinirs étoit
eocore fur nu table , m'a coojuré de man-
Ser, difimt que je ferois cauïe de ma mort,
[.qaej'en lépoadrois devant Diea. Com-
ment, a repris l'Italien, ellce que cetHom-
me-là mange? C'eft un Comte pétrifié , il
n'oarre pas fcalemeat la boache & ne parle
qu'à Dteu. Depuis cinq ioars entiers il ce
bii a pas entré une goûte d'ean dans, le corps.
C'cft on Caméléon ; il ne vit que de l'aJr.
Boutonnière me dit en foupirant , car c'efi
un Serviteur très tendre & très bon , voVint
que je ne voulois pas lui repondre, qu'il co
ftiloît ftire fon rafrort au ■Gouverneur ; & ce
ntstin ils m'ont retiré d'avec ce fou impor-
tun, pour m'amener ici , où fans vousj'é-
tois refotu de mourir de faim. Je croi ce
genre de mort aiTez doux , puirque d^uis
cinq jours que je jeune , je n'ai pas fentî
d'autre, douleur que de la foibleflè. Nevous
trompez pas Mr. le Comte , lui dis-je , j'ai
entendu dire que ce n'eft qu'au Septiémejoui
gu'on fent les grandes douleurs de la faim ;
mus j'ai lu quelque part , qu'elles font iî cruel-
les , ' que de tous les genres de mort , c'cft
le plus terrible. Je ne fçavois pas alors que
dans la fuite de ma Prifon , je (crois par deux
fois cinq jours & cinq nuits fans prendre la
moindre nourriture, mais ce n'étoit pas vo-
lontairement comniç le Comte de Brcderg-
des ; j'y éiois bien forcé par la Wbarîe de
mes Tyrans. ^
Quand nous eûmes un peu repris nos ef-
prits, & que j'eus remis le cceut' du Comte,
•11 lui tàilajit boire une des bouteilles derin
de
v^
.--„GDoglc
la^. fl}
.C<x,8lc
M rtiifiù'tre de-U B^ftllle. ^If
ie Chairqjagncque j'avois encore de retledes
liberaliteï de Mr. Lincfc , je le ptiàî de me
tenir (à parole , & de me feïrc le récit de quel-
ques-unes des Hiftoires de Gacn , qu'il m'a-
voit promifes, qui nous tiendtoient lieu de
ledure pour anjourd'hoi. Très volontiers
dit le Comte , luz' charges que vous ufc-
rei de reprefailles , & quand je vous aurai
raconté mon Hîftotre , que vous me paie-
rez en la même monnoîe. J'y consentis
avec plaifir , & voici comme il commen-
ça.
Je m'arrêtai on jour i pour voir une ad-^
jqdi cation des meubles, qu'onfidfoitdequel-
quc particulier, qui s'étoitlaiiK mourir. Le
Juré-Crieur étoit monté fur une table , fut
laquelle il était affis dans une chaife poiirft
mieuï faire entendre. C'étoit un petit bout
d'Homme d'ailci mauvaitê mine, s qui en»
tr'autres pêrfrâions avoît les cheveux fort
rouges. Il avoit le donde ftire le Sot-Plai-
ftnt de fort mauvaife prace. Après pluficurs
pièces qu'il adjugea à diverfcs Perfonnes, il
6t la vcndiie d'un Crucifik d'yvoire monté
far une Croix d'ébénc. 11 fe trouva là une
MatrAne quien eut envie. Cette Femmequi
paroilToitêireduplus commun Peuple) avoît
Cependantl'air fort grave, un bandeau fiir le
front I une bavolette pour mouchoir , une
gro0e ceinture d'argent for les reîns , d'oà
peadoîent un gros paquet de clefs, unebonr-
fe , plulieuis pelotions & un étui ; ellcètoit
trouflée comme un Cordelierqui va à la quê-
te. "Le Juré cria à trente fols le Crucifix-,
éc fit BU mauvais détail de fes petfeâions j
S I pour
414 L*Iitqu^fitm Frsufoîfi
foor ta telerer le prix à- fcs Sp«âatears. La
Matrone prédite, d'ua air grave , & «i Su-
ant un grlod iïgne de croii & une révéren-
ce , prononça porcment i i quarante fcls
mbo bon Sauveur A peine eut elle profé-
ré la parole, que le Cricur proclama le Cru-
cifix i cinquante fols. Afoiiamefolscebon
Dieu, répliqua la Femme, d'une voix fer*
me, mais fort modeftcmem. A quatre francs,
dît promptement le Ciieur. A ccntfoJsmoa
divin jssus-CHKrST reprit la MatrAae.
A fix francs dit le Juré. Cette Femme fans
Aire paroitre la moindre émotion , prit le Cru-
cifix de la main droite, & le failluitteiferaB
Grieur. tÀ dît-elle, baife lé encore une fois,
& puis le livre : j'ai déjà dit , que celui qoi
rendoit Je sus-Christ étoit du poil du
deSiint. Tout le Monde le prit à rire delà
penfée de la-Matrone; il n'y eut que le Ju-
das qui s'en mit en colère , mais pas a&i
pour s'aller pendre , après l'avoir livré, je
trouvai la Pafquinade fi bonne , que je vou-
lus fçavoir le nom £c les qualiiez delà Fem-
me. Elle s'appelloit ta Tibriet quolibet , qui
lignifie petit bmit,. nom qu'on lui avoît don-
né parironie, parce qu'elleavoitls votxhooir
mace & faifoic un bruit épouvcntable en par-
lant. Elle étoit Marchande d'iicrbes & de
fruits de fa profeffion , & tenoit fes plaid»
devant la Boucherie, oùellecatechilToittous
les Ecoliers , qui la faifoient enrager , mal-
gré une chopine d'eau de vie, qu'elle prenoit
tous les matins, pour lui donner le courage
de repouflèr verbalement leurs infultes : &
l'on m'affima qu« le jour qu'elle dcjnonta
.--„Googlc
9u PHiJMrt dt WB^IU. ^f
IdCrieur, que j'appris s'appclicr Roûgeval ,.
ellézvotc redoublé 1& d02e.
Vous vwez de cotucr ane Hifteîre Mr.
le Comce ,'Iui dis-jc qucje fçavois déjà ; niaise
que vous m'avei reada nouvelle , par les a-
grémencs dont vous l'avez ornée. J'ai con-
nu les dens Aâeurs en quelHon ; & j'ai été
«1 qualité d'Ecolier très Pcfle, un des Per-
Uirbateurs du repos de là Matrone Tibrie ;-
qui toujours en Hyver' avoit entre fes jain-.
bes une tnarmittc pleine de charbon , dans
l>tqueUe j'iù jette maints pétards & m^uts:
marons, en marchandant fou fruit: & Dievi'
fçait les benediâions qu'elle me donnoît ,
q.aand le pétard avoit mis le feu à fa cbe-
miTe , gu que le maron lui avoit bombardé
les califes.
. Pour fatis&ireàmapromeflè, pendantque '
nout fommes fur les Crucifix, je vous dirai
ce qui «ft arrivé à Ville Dieu , petite Ville,
où je me retirai pouréviter le Bombardement
de Graaville , lieu de ma reltdence , torfque
les Anelois & les Hollandoïs vinrent bom-
bardnât. Malo& Granville^peadint la Guer-
re terminée par la Pais dcRyfwick, &dout'
j'ai été informé fiir les lieux. Cerw Hiftoi-
re vottî fera connaître U fimplicité de Bour-
geois qui feroient les meilleures Gens dtt'
Monde, ù la Chicannet cette furie infan'a-
ble ne s'étoit pas fourrée chez eux , pour fè
regOKcr de leur fubftance. Ils font prefque
tous Chaudronniers, mais riches, aâifs, la-'
borieux , & dévots à la fuperflition. Leur
Curé,avare& luxurieux au fuprëme degré,
Aquiaroit, tout Septuagénaire 'qu'il étoic
S 4 &
^i4 Vlé^uifnia» Frsmfoift
& blanc conunc an poireau , ' an don root
particulier pour croquer l«s plus tendres poU'
Icttcs dé ÛL Patoi'ffc; & far tont pour tirer la
Qnimdicticc delaboarfcdeceslîmplcs Chré-
tiens , & les mgager à om«r fiin Ëgtifë , que
leur dévotion i rendiie m^ntâqtre , à la per-
lÂialion de cet artiâciem Renard , leur pré'
cha un joar , que leur Cracifis étant trop
TÎeux, Dieu nebeniroit pasieurtravaïl, s'ilt
s'en mcttoient pas un tout uenf en la place.
Immédiatement après fon iermon on Ibnn»
la grolfe cloche de r£glife. l<es Principaux
des Cyclopes s'aiièmblerem , & reconnurent
vîfîblemenc , que le dernier orage qui avcnt
fidt tomber leurs pommes , proecdoit de h
veiuftéde leurCmciâz, &qi]elemoïend'ap-
paifer lacolete de Dieu, c'dtoît d'en acheter
un tout des plus magnifiques. L'on députa
pour cet effet les trots ptasintelligensdeleur
Corps pour l'aller choîlir, avec ordre den'f .
rien épargner. Leur Curé indiqua an habile
Sculpteur en la Ville de ConllaBce, quifâi-
£)it des Cracifîx, auxquels il ne itianqii(»t
que ta parole, deSàutordinalreduPaVs. Le»
trois députez quittèrent leurs forges d'où l'oU'
entend retentir les marteaux de plus d'une
lieiie aux environs de la Ville , avec un bruit
accompagné d'une Aimée éponventable , &..
fe mirent en chemin avec une bonne Ibmmc
d'argent, pour faire.leut achapt, &unecha-
rette pour voiturec le Chrîft , mais bien gar-
BÎe depaille, pournejpoint blefler leur Cru-
cifix. Arrivez chezIeSculpteur, illeurmou-
tra des Crucifix de toutes les façons. CéttHt
un charme qued'enteDdre.rsilônoercesiroi»
Ex.
u,:,-,zf--„GoOglc
Expen fiir rOavragedc l'Artîfte. ynCra-
cifix aroit !a bouche' térfè ; l'autre atoit les'
yeux de travers ; celu^li faifoit des grimaces,
& feroit peur aux En&nts da Compère O-^
blin. Le Cgmpcre Engerrant difoîi qut c«'
autre pleuroît tri^ laidement > & qu'il fèroît
fîché que fa Femme qui 6toit gtoflè lui a-'
drefsât fa prière. Compère Braille difbir
que cet autre étoit trop beau Sl trop friiigant,-
&<]ue cela pourroitdonnerdemaovaifespea- •
fèes à fes Filles, qui d'ailleurs n'avoimtqae
trop la puce à l'oreille. A la fin cependant!
4^es ^votr bien ^ofé , ils fe déterminèrent
ea faveur de deux, dont l'unteprefentottua
Jefiis mbufam, & Tautreun Jefiis mort. Le
SculpteOF leur demanda -lequel des deux ils
vOuloienti ou du vif, ou du mort. Pardi,
diibient'ils , Mr' le Curé, lui qui îçait tout,
ne fçavoit il nous dire fi tl vonloit j. C. vîf
ou mort ! voîli bien de la peine qu'il nous
donne ; car fans doute il 6iut le confulterli
deCTus, & retourner i Ville- Dieu pour avoir
fa refoîutPon. Ils fc mirertt en chemin tous ■
trilles de n'avoir pas mieax pris leurs mefii-
res , &peftant fort contre leur Curé ; qui ne '
les avoit pas mieux informez. Oblin , ^
Compère Bataille marchoîent devant,- raifon-'
Dont fur l'atirude des Cmcifix qu'ils venolént
devoir; lorfque le Compère Engerrant, le
plus prudent des trois ,' quimarchoîtdeniére, -
raifofinablement ^éloigné des deux autres , Xe -
mit à les appellcr de toute fa force. Iteyc ! hayej
Compères, revenez, rcvénei.- PaMànguouai^
dit il nous femmes de grands fots, & de
pauvres ^touidls: Et mordi prénom -nAtre
S-j- Cw*-
4lS' ZVi«f»îtfï'« FrttHfùfà
Crucifix viv»nt , & pomms. le tel i Bfttce;
Curé, & 1) il le vc(û mort qu'il le tîie.
Ville-0te% dt use Commsnderie qui dé-
pend des Chevaliers de Malte , dont Mi. le
Chevalier Marquis deRochc-Chouart,Goo:-
fto de Mad. de.Montefpaa, étoit Conunaa-
deur, auquel Mr. le Cbeyalier de Bellefoi^
taineafucccdé. Loffqnc j'y étois Mr. dt
^ochechouMt y ât fa première Eatrée. Iic»
Bourgeois rcfôlux^t (le fiiire.péchet., pont
lui prefeoter avec le vin de leur Ville -.if^
"Xtmici qui Ibnt parfdttement bonnes & diO)^
leur Rivière abonde. I<es trois Ùo^tfej^
mf mîooDei dans l'HiCtoire precedem^CraM^
déléguez pour pre^dpr à cQttc pêche ,^&: fe A^-
;cnt aulTi â l'eau pour pêcbeteozmémea-.rJ[ii4^
memiéfe chofe qt» tomba dans leUt filet, fàth .
vil Ane , que des Meuniert , après là tnOD^
«voient jette dans 1^ Rivière. NosPécheu»
crurent , pu fà pefanteur , que c'étoit un-
poiflbn énortae. L'un affirmoit que c'étoit
une Baleine. L'autrç foucenoit que c*étoït
^c chofe impo$blQ^ pturqu'uae Ëaleiac i—
toit plus grande que tout Ville Dieu. Idi
Uoifîéine conclut que c'^oit un DaujSn , &
Que comme c'étoit un poilToa toïal , il ne
jcui étoit pas permis de le titerde l'eaaqQ'ea-
prelèDcc d'un Juge. L'avis étoit trop jufte».
ppQF n'étce.pas fuivî. Pour cet efièt Com-
père Engerrant fonit 4o Teau , & fans avoir
lé temps de mettre fà chcmifè « il ne prit que
fa culotte. pour aUcr appeller Mr. le Baillif,
& lui enj(»ndrc de venir fur les. lieux étreic.
témoin de leur p^che. Pendant qu'il allv
filtRÛtflcpWUioDf enhfèitàlavcritégivii'é-
toit.
u,:,-,zf--„GoOglc
.--„Googlc
.--„Googlc
^'â-^S
.-iGooglc
toi< p^ trop de ccrenumie , mais qnlfit biea '
rÏM Mttfame laEaiilire &fesFiiIeï: lacu- ■
rioAté prie i Compère Oblia devcur deqa£1'''
le couleur étoi un Datifin. Pour cet effet
U foalcva lé ïilcr. La première cho(& quele
DauSn-inoRtra, ce fat l'oreille. Pardi, d((*-
le Coitipere Bataille j'icpois bien raifea àc
dire que c'était une mterne, poilqu'en voi-
là'iec n^oices. Oblîn leva le âlet eucore
tinipcii plus haut , decounit le mufeau da -
Bwidet i qui icmbloit rire de leur étonne-
rnfent , en inonnant Içs dents ; &: «fin toa- -
te la ééte , qui tair fit connoîirc dîftînâe- ■
ment que leur Baleine & leur Danfin s'é---
toteiit metamorjphofei en Ane. Oblin crfai-
pfompteincntàfonCompeïeEngerTîuit, qiri-
avoMt déjà' été cbea le Bailly , qui ne sVtoîr;
arrêté qne pour prendre iâ Robe & fou Bon- ■
net . aén de aire la chofe plus décemmenr, -
& qui commcnçoit d^ja à paraître Magiflra-'
lement dans la prairie, pour Te rendre tarïti
lieux, iiaye î haie i Compère Engcrrailt -, '
recouine dire à Mr. le Bailly qa'i] ne vieiïoe ■
pas; ce n'ert qu'un Ane; cen'eftqu'unAae.i
Nora qiK ce Bailly qui s'appelloît Hénry-
Maurice, & quife croioit un Doâeur en
droit fout des plus fubtils , auroît parfaire-' ■
jnrait bien tenu fa partie dans la Société dçs'-
Martins. J'en fis rireMr. le M-arquisdeRO-'
chetiouartde ibut Coa cœur , auquel je tins'
Cenqwignie pendant Icftjourqu^il fitdansfa'
Gommanderic.
Vçn» voiei bien Mr. le Comte qu'envoi-'
là'deax pour la vâtie. Je vous entends, me'
dit-ili je .vous en dois une ■ -&je vait m'ae-^
S^ ■ qui-v
4(OÏ DlHfmifithB Frtuêfoife
ter, en voas diiâat une chofc Tcritable, qnf-
m'eft arrivée , il c'y a pas long temps , &
dont peut-être vous coonottrcz lesPedoo--
Peo de temps apiès (^ue je fut rEponx de -
Mad. la-Marquife de Bois-Roget ^ je l'ac-
cODUMg&ai dans an voïage qu'elle fit ea BaT-
fc-Nounandie : s'ctant trauv£c iodirpoftfe à-
Caëa, ellc^refta, & me pria d'aller à Vire
pour 7 recevoir quelque argent de As Créait*
dcrs. J'étois feuldans une Chaife avec mon.
Coctaer&un Laquais, quandà uneJieiiehots-
de la Ville^ j'aperçû de loin uaHominequù
maichoit'à pieu devant moi. Il s'aixétapoar
me demander fort civilement ilj'allois a Vii
rc : lui û'ant répondu que j'y alloiii , il me.-
pria de fi .bonne grâce de lui donner place,
daos ma cbaife , quemalgc£.fa manviu&mi-
ne je ne voulus fias IcrcfuCer. Je trouvaîj
qu'il avoii de l'elprit^ mais c'etoit du mé--
chaot.: aufC me dît il qa'iIâ:oit Avocat à,
Cerance, & qu'il s^appcUoit. Angine Folaia.
Sieur de la PiHcvcfficre. Comme Ceranceé--
toit an Païs perdu pour moi > pour me le f^- -
reconnoitce, il fallut. qu'il, prît lancine de.
in'cxpliqucr ce.quc c'étoit. C'cft me dit-il.
une Vicomte dont.Mr. le.Comtcdc Mont-
^cimcii T Chantelon c(t le Seigneur. C'eft
nn Bourg i trois lieiies de Conltance, Ville i
£pirc(^>ale en. Bafie-Normandic ; Jiuiï il y a
une fl grande antipatie.entre.iès habitans.&
les nôtres, que nous ne pouvons nous foof--
ftir. Nousfommes continuellement en pro-
cès les uns avec les autres; & li on Crcan--
fçit avoit maugé avec uo-Couftançois , il.
ii!olè-
.--„Googlc
owFHiftMn Jt là BtftiKe. «s »
B'oArôrtjiiniïi centrer dus le Boarg, fansr
courir ril^uei'y être lapidé: &pareilicroeatB
fi an Coii«nçois «voit feaJament parle! à ua-
Ceraaçois , ce fèroit i^Tei pouc le faire re-
garder de (es Compatriotes comme un pefti'
feré: Nou» a'aUoos jiitnais i Conflaace qae
pour y plaider , quoique nous foions trèt>
cettaînsd'y perdre nôtre caufe : mais, auffi-
tÔt, appel au Parlement de Roiien , où on
nous regarde comme les. Piliers de la Graor
de-Chambre, bù nous- les chitanons- à ou-
trance , Sa jttTqu'à la dernière maille. Les
haines & les procès- fe perpétuent de Père eu-
Fils chei nons ; &^'en connoisde lî enracî-
nei daiil une Famille , qu'il y en a aujour-
d'hui , qui ont£té intentez par le fiifayeul
du Chef de l&Maifon, Âquinevrcrontpéat*
âtre tennincï que par les Petits-Filsdecelul
qui procedeaâuellsmcnr, tant nous Iç^voii»
bien multiplier les êtres ! Bien attaqué , biea>
dedendu. Quand nous n'avons pas de pro-
cès avec eui.i nous trouvons bien les tno-
ïens de leur en fufciter , & nous les chica-
nons malgré eux jgfqu'à la mort. Je ne vois,
pas t lui dis-je r comment on peut- chicaner,
un Homme malgré lui: pourmot jedeâeroîs,
l'homme, du Monde k plus proceffîf , de.
trouver moïea de mefaireun procès dans les,
formes Abl Monliair ,. reprit-il , û vous,
étiez dcConftaDce, je vous fcrois bienchaa-'
ger de. langage; .mais-vousCtcs trop honnê-
te Homme pour être de cette Ville ; outre,
que je ne voudrois pas païer d'in^ttcnde le,
plaîur qae vous me ^cs de me voituter dans^
TÔtie Cbaife. Mais lî vous, vouliez ^eua
S 7 petit
u,:,-,zf--„GoOglc
4i*-' -VbqMÎfiiim FrmÊpùfe
petit parr svee moi , je- lUfiioij'le teoble
coDtre le fiœple avec vont, qw dès deana
iQ nutiB, je voas feroisun bc» procès dont
ront jRiriez i>{en de 1» peine à voot dcbaraf-
ftr. Je DedotuenuUemeDtMr.dc vôtiefçK-
Toir Aire, taidit-jc; mais je ne vois paspac
oà vont pourriez m'atnqner j \. moins qne
vous ne TOulufficz me repiendre ■ de vous
«voir donné la gauche au lieu de la droi-
te dan« DM Chaife. Et fy MonficDrirc'
prif-il ; je m'arrête bien à cef minuties : je
vn» an réel , \ l'eilëntiet , & au folide , aa
fblîde , an folide morbleu \ Et fi vous von-
le2 feulement médire vôtre nom, jèvousfe-
rai voir demain un petit tout du mater. Je
m'appelle, lui dis je, le Comte de Bredero-
des. C'edatlèi, Monfienr, reprit-il, oùa-
vcz vons logé la nuit dernière àCacn, &oâ
logerez vous cette nuit il Vire. J'ai logé à
Caëtt , lui répondis je au Signe de la Croix;
& je logerai à la meilleure Aubta^ede Vire,
fi vous voulez bien me l'enfeigncr. Mon* '
fient , la meilleure n'en vaut rieit-, dit-il ,
mais la moins mauvaife c'eli le Cheval-blanc
oô j'aurai l'honneur de vous conduire ; ce
qne j'acceptai) & où nous arrivâmes, après
qu'il m'eut bkn fatigui! de chicane tout du
long du chemin : Si tôt que naus fûmes dd"-
cendus dans la cour de l'Auberge , il dt^i»^
mt, après avoir prié le Vallct de l'Ëcoriede
fe reflbuvcnir , qu'il nous avoir vu' arriver
«ifemble: ce que mon Laquait me ditlelen*
demain. L'Hôte me voïant lènl , & aiant
fpû de mes Gens qui J'étois , me demanda
ujevouloit foupei en Comp^^e. Je ne
dc-
.---„ Google
90 nSfivrr Jr h SéiftHk. 41 \
deiQBDdBt pat^ndcsfc II me âr entrée dtta»
UBe Sale, où U y avoit hait cm dix coaverts
fur uno table : on y en mit «ncore un poor
moi ,& l'on fèrvit. Nous âmes bonne chè-
re, & ceui avec qui je mangeois, me firent
honneur , comme 4 un Etranger , nouveau
venu , & de bonne humeur. C'étoienC ton»
Citadins Gent de plume , qui s'étoîent là
ailemblez , pour devoret quelque Gentils-
hommes Campagnards de la Troupe, qnié-
toicnf venu plaider à la Ville. Sur Iccerdé
des Cliens de Themis fembloit prefiderun cer-
tain de rille Chapodclaine. J'appris que c'ë-
toii le plus expert de tons les Avocats de dix
lieues a la ronde , qui fçavoâ toutes les ru-
briques de la chicane , & qui aùroit pu glozer
Godefiroi & Banage, s'il n'avoit pastaht ai-
Blé la bouteille , car il étoit plos fouvent aoi
Cheval blanc, qu'en fa Maifon, oùfaFem-
me fe gardoit bien de tenir ordinaire, vi-
vant des grattlications des Pratiques de lôn
M^y : encatc*en revendoit elle les trois
Îuarts. Ce Chapedclaine paûbit pour ua>
)iable en procès: ildtoit le Code&laCou-
tume avec une facilita qui faitbït bien voir
qu'il les avoir plus étudiez que l'OraifonDo-
miaicak ou le Symbole des Apôtres. Il s'é-
coutoit parler, dicommeil parJoitaâezbien»
il fe faîfoit volontiers écouter : auffi étoit-ce
rOracie du PaVs . & ce n'ell pas peu dite ;
car la Ville de Vire palTe pour être ftconde
en beani efprits. Il me demanda ce que j'é-
tois venu taire en leur Ville; iî c'était pour
plaider, qu'il m'offroît volontiers fcs petits fcr-
v^es. Je leiemerctai, conuneje le devoit,
de
u,:,-,zf--„GoOg[c
414 VImq»ifiti*m Frampeifi
de Ces oSies obligeantes , & je loi protefîat
qa'ea ma vieje travois ea de procès. Et de
^el Pais êtes vous bon Dieu ! oà la Su'nre
Themis eft iï peo refpeâtfe , sVcria-t-il i &
eu l'ignorance des Loii tient :^^>aremmetit
lieu de mente, je dis que jMtoig Hollandois;
<c j'entrepris de faire voir les prérogatives
^ae Metcarc avoit fur une aveugle IHvinîté
dont les Adorateurs viroient lî malheureux,
& mouroient pour l'ordinaire à l'HApital.
j'avois affiiire à un terrible Adverlàire : ce-
pendant je dettbodis fi bien ma caufe , que
^ucûqne mes Juges fulfènt tous mes parties,
ils voulurent bien par condefcendance , me
donner gain de caufe. On fit venir du vin après
le foup^f & ndus ponfsâmcslacouverfttïon
bien avant dans la nuit : nous Hmesdes Hif-
toires toutes des plus rejoiiiOantes. Ils me
proteflcrent qu'ils tne trouvoient tout à fait
i leur gré , & que je ferois nu Homme im-
pa'i'^lc fi j'avois fréquenté le Battean. Ma
Compagnie & moi nous nous feparàmcs &
contens les uns des antres , que nous nous pro-
mîmes de nous ralTcmhler au même lieu pour
dîner le lendemain enfemblc. Je me couchai-
fort faiisfatt de mes nouvelles connoifi^nces,
& je dormois profondément, lorfque le len-
demain je fus reveillé par un Mt. Loyal qui'
vint me demander la permiâîoD de meligni- ,
fier un petit exploit, unyetit exploit parlant
à ma Perfonnci & après avoir écrit trois ou
quatre mots dans un broiJillon de papier, il
le mit fur ma table, & faifant deux ou trois
Etofondes révérences, ilfortitde ma^Cham-
rc. Après avoir Aotié. mes. yeiH& coHOtt'
.--„Googlc
M fHîJfiire Je la Baftille. 41 $
certainement qnejc ne révois pas, jedeman-
dti à moD laquais qui avoir fermé la porte for
ce MeQàgcr de maavaifès nouvelles , ce que
vouloic cet Homme. C'efrditil Monfieur
un p«it Eiploit ; nn petit Eiploit qu'il vous
donne , & m'aVant apporté dans mon lit le'
broiiillonde ce Déloyal, j'y dcchiftaî, com-
me je pu, ce que dans la ïuiie ic voulut ap-
prendtc par cœur, tant je le trouvai rîfîble ;
&■ que jen'ooblîrai jamais : c'étoit une af-
iignatîon cônçiie en ces termes , mot pour
mot.
Je ^ JoHS fign/ 1 Tves Griffon Sergeânt À
Verge Immatriiuîé au Prefidial, Bailliage f^f
Vicomte de f^tre , y démettront RHe du Pit<y-
ry , exploitant dans font U reffort de laju-
rifdiâim dn dit Vire . affiji^ de mes deux
Retards ordinaires, ceriijieque ce y^eiidita»-
tiéme tPun tel Mois, y d'un tel ^«-ififf l"
neuf bettres du matin. A la Requête de Maître
jintoine Felain Sieur delà PilUvefierr Avocat
enlayicomtédeCerance y refidant, E^ dejre-
frnt en tette Fille de Vire , où il a ttotnm^ four fin
Preenrettr Maître ^ean Almlien, Procureur er^
dènairedeceHeUt en ta Maiftn duquel il a fait
EleéHon de Domicile , J>»ur vingt-quatre heures
feuUmeut ; Je me fnis tranfpgrtf en l'Hôtellf
rie , eàpendpour Enfeigne le Cheval bknc , ok
ta fat fait tf donné affignation à Mr. le Com-
te d4 Brederodes , ainji piUim^a dit fe nom'
mer , en parlant à fa Perfount , à lire ^
eomfaroitrt demarm fur 1rs dix heures du ma-
tin, tomme de motive- ftrevifoire, hcurepre-
fixt ^ar devant Mr. le Lieutnant Gênent
«■
4i6 L'Inquifitit» Frauftifè
»m dit Pr^diat , om Mr. feu LkMtmMiit, f9W
fi vèir cendamner , i^ far corps , à pour am
dit S'temr Atqueramt Ufommedequatre-vimgt'
dix 'Meuf livret , dix- nei^feli, fsx àtmtrs
ItKmois , qu'il amroit frhéi i t» biame y /»-
iW« manmote dtanicanrt^ iij a q me Jqmei jours
mu dit Seigntur Comte de Brederties ■ en fi»
UTituteueeeffiti, en la Ville deCaèn, enfin
Àkierge , oir pend peur Enfeigne le ^gne de U
Croix I ità U dit Seigneur Comte était hg^'. 1^
tout offert prouver Qf vérifier par boni J^va-
lahles t/meint, eneai ie meconnoiffanct. Pra-
teftant ledit Sieur Requérant de Jtfinrner ta
eettt Fille, aux dépends dndit Seigneur Cem'
te de Brederodes , jnfyu'au patemeut aSnel de
t»difte fimme; fam prejuaiet dei dépens «■
teréts , y autres demandes du dit Sieur K*-
fneraut ; £7* procéder en ontte qu'il fe trou-
vera aparttnir. Relation bailUe , £5" delaif-
fie, parlant tomme dejfui , fuivant fOrdeif
gauet. Signé FoUin Avocat ., Griffa, Brifi-
micbe-t y Frijètorde avec leurs paraphes.
Je ne pus d'abord m'cmpêchcr de rite du
tour de mon Fripon ; mais, reflechifliot en-
lintc qu'il étoic trop effroaié pour en demeu-
rer Jà , & qu'à l'dde de fcs bons & valables
témoins il me feroit païcr dii pîrtoles , pour
l'avoir introduit dans ma Chwfc , je refolu
de décamper d^s le foir même , pour éviter
laperfecurion de ce FauOàire. A midi Oii-
pedelaine & fes Amis ne mviqi'creat pas 4c
fc trouver à l'Auberge. Je leur fis pan de
mon Aventure , dont ils riient de tout leur '
cceor, & m'affirmèrent .que c'étoit là un des
B« PBifiotrt de la BaJIilJe. *l J
Moîndfes toms de ce galant Homme, qu*ila
comioiiroieDt parfaitement bien. Je leurdîs
que je lui donnerois la peine de venir cher-
cher les dii piiloles qu'il me demandoit i au
Bois-Roger , où U on ne man^uoit pas de
bois pour le païeraveciiiterit. Gardeivous
en bien, me dit Chapedelaine : i! ne deman*
deroit pas mieux que vous vous laiiTafllez
condamner ici par dcffaut , pour multiplier
les irais , qu'il trouverojt bien moïcn de vous
fairepaVer,ran$s'âSporer àvôtrecolere. Com-
ment feraî-je donc ? donueray-je, dis-je, dir
piftoieg à un Coquin, pour Ëtrefa dupe, qui
en fera quitte pour s'en lire , & s'en faire
louer par fes Ëdeles Compatriotes ? Vous
voilà bien cmbarralTé en beau chemin , Mî,
Je Comte, dit Chapedelaioe ; mais je m'o-
blige de vous garaBtirde l'dvencmeqtdecetr
te aâàire , fi vous voulez-vous engager de
donner une bouteille de vin coëtf^e à toute
la Compagnie demaial'après midi, après ()u«
vous aurez eu gain de caufe. La propoliiioa
étoit trop jufte , pour n'y pas confentir : je
l'acceptai volontiers. Aux charges reprit-il,
que vous me laiâTerez parler . làns. dire mot;
& quoique je puifle avancer que vous nlu-
terromprci pas mon Plaidoïer. C'cB de quoi
je demeurai encore d'accord. Le lendemain
je me rendis au Parquet , avec mon Avocat
Chapedelatnefuivi defa fequelle, pùjetroU'-
vaiFolain , qui mefaluad'uoaîrriaiit, com-
me fî j'euiÈ été obligé d'être un de fes meil-.
leurs Amis. Mais je le regardai d'un cpil
menaçant t qui lui ât prendre la refolutîoa
d'iitteipofcr la proteâioo de. lès Juges contre
le»
u,:,-,zf--„GoOglc
Ht9 • VhpiifitioH Frtmpoiji
les emportements d*nn ingrat debitear. On i
ippelle nôtre caafè , & mon advcrfe Pwtie, |
après avoir demandé an Lieutenant General [
la permiflion de parler, plaida ainli fa caufc.
Mefficurs il n'eft pas befoin de longs dîfcQurs,
pour vous dire, quemVtanttrouvéilyaqua-
trejonrs avec Mr. le Comte de Brcderodes |
i Cacn en l'Hôtellerie , où pend pour En- [
feigne le Signe de la Croix, il mctémoi^na \
l'embaras ou il étoit d'en fortir, puifqu'ÎI é-
toit fans argent ; & fçachant d'ailleurs qu'il
Tenoit ici pour en recevoir de quelques Cré-
anciers, je Ini prêtai quatre vingtdii-ncuf li-
vres , dix- neuf fols fii deniers , pour le re-
tirer de la peine /)ù je le voiois. Pour me
tcmerderde mon honnêteté, de Caënilm'a
Toiturtf ici dans fa Chaife. Mais ma furprife
a été citréme , lorfqu'avant hier au foir , l'a-
ïant prié de me tenir fa parole , & de me
rendre mon argent, il a été aOez temenûrc,
pour me direqu ilne medevoitrien: &com-
mepar le plus grand bonheur du Monde pour
moi, j'ai des témoins delachoft, jedeman-
de 1 en taire la preuve , eu cas dedefaveu de
la part du dit Seigneur Comte : c'eft à quoi je
conclus , & aux ans de mon exploit : £xi.
Chapcdelaine aïant faJué les Juges, dit:Mef-
fieurs je parle pour Mr. le Comte de Brede-
rodes mon Clieii , ici prefent , qaî convient
que ledit Foiaîn lui prêta à Caëuleplusobli-
gemment du Monde , non feulement les
Quatre-vingt dix-oeuf livres, dix-neuf fols fiz
deniers , mais la femme entière de dix pifto-
les, que l'ordonnance empêche à MakreFû-
Iftia de redemander audit Seigneur Comtees
fou
u,:,-,zf--„GoOglc ■
Ibn lat^té. Quand je l'entendis débuter
aiblî , je crus qiril s'enccndoît avec mon Fi-
lon : >'avots beaa le ponHêr , & lui dire.
Mordi Mr. vous me perdez; il ne m'a jamais
prêté un fou. Taifez vous , me dit-il fière-
ment , puis leprenaiit Ton diicours. Mais
Miflieurs je fuis bien plus furpris de'Maître
Folain , qui veut tirer d'na fac deux moutu-
rcs : car j'offre prouver êc vérifier par bons &
valables témoins, que je fuis prêt deprodui-
re , qu'avant-hier au foir, un peu après que
le dît Seigneur Comte fiit arrivé en cette Vil-
le, il rendit audit lîeur Folain fon argent, en
même monnoie qu'il lui àvoit prêtée à Caën;
avec gratification d'une bouteille devinqult
lui donna ici en rÂuberge où pend pour En-
feigne le Cheval-blanc. & dont moi même,
qui vous patlei je bû mapan. Après cebeau
plaidoVer Qiapedelaine & ceuz de £âCompa-
gnie fe prirent à rire de tout leur cœur , en
voiant rolain tout en fureur , qui ne putre-
pondre antre chofe i Ch^edelu'ne , que de
lui dire : & fy donc Maître Chapedelaine
voos gâiex le métier, &fortit tout en colère
du Parquet: Chapedelaine lui prottfRant que
la charité & fon devoir l'oblîgeoicnt de fe-
conrir les Etrangers. Je revins à l'Hôtelle-
tie avec mon Avocat & fes Admirateurs ; je
m'acquittai avec fcrupule promptement de
ma promeflc : ;e les fis boire tant qu'ils voa-
InrCnt : je fis enfnite mes afiaircs, après quoi
je remontai promptement dans ma Chailè »
pour fuir de-V ire & n'y rentrer de ma vie.
Auprès que le Comte eut acheva fon tfiftoi-
re, j.e lui dis ^ac je counoilToispaiûitaiienc
43* VluquifitU» Frmtftife t
ce* deni Avocats . &quejeiçavoîsi)It!ïd'oi
de leurs tours: que ces Hoomiesdcvalqieat
pas mieux l'un quç l'autre. Que Chapedetai-
De ^tant Av.ocac de Mr. le Bâton de Moat-
bray, & d'iutelligence avec le ProcuEcur de
ce Seigneur, ils avoièm trouvé le fecret de
depoiiiller ce pauvre Baron de fes Tetres 4
de le mettre à retour de leurs procédures.
Chapedelaine a eu pour fa part la Baronnie
de Montbrai, &leProcttreurlaTerredei'A-
cherîe.dont ils font ftâuellcment en poiTef-
fïon. Moi même qui vous parle, j'ay prêté
de l'argent à un Particulier de St. Vigor det
Monts , Couiinde Chapedelaine. Môa débi-
teur me fit une^fauûeté , dont je meplaigiiis
à Chapedelaine; & je lui fis voit clairement
qu'il ne teuoit qu'à nioî de âïre punir hoa-
teufement & même corporellement fon Pa-
rent , ce que j'awois fait fans fa confideia-
tion. Chapedelaine me remercia avec des
témoignages de reconnoiflànce les plas^pa-
icnts ; protefta qu'il vouloit me faire païer,
ju qu'il me païetoit lui même pour fon Pt-
xent ; & quand il eut mes papiers , il me £t
perdre ma dette; & jamais je n'ai pu tirerde
raifon de ce bon Médiateur , qui a ruiné plu!
de trente Familles. Il eft animé encore p»r
fa Femme, qui femble être l'Original &[ic>n
une copie parfaite de l'avatice. Une Mé-
géie dont les ongles acérez & crochus trou-
veroient à tondre fur un <£uf, & qui poite
une poche de fer blanc fousfesjuppes, com-
me portoit Tardieu laLîeutc Aote criminel-
le de Paris, pour y tburrcr toutes tes bribes,
qti' elU.P«uc attraper, d^is 1^ ËiUiqvKts , tA
elle
.-iGooglc
M FtSfiokt éU la Ba/UlU. 43>
éUeelliiiTMepn'UcraîQteqaeronaderoB
Mari. Ces 6ntes de Gens font des Peltcs
dans une Republiqoe, quand ils emploientà
la dofoler les fcicnces qu'ils n'ont apprîlès
qae pour j maintenir les Loix. Montlien ,
dont vous avez fait mention dans vôtre Af-
figaadon,écoitaatre-foisun£vaaieurdePcI^
te, & il cft couché comme tel-dans les Re-
ghrcs de la Matfon de VHIe de Vire , qui
lui donnoit cinquante livres de g^ges pour
cet honorable emploi : & pour l'exercer on
lui avoit permis de bâtir un petit Apentf haut
de douze pieds proche de la Maîfoa de San-
té , pour s'y loger. Après avoir exercé plu-
fleurs métiers , tous des plus^bas . il troava
ntoï'cu de fe iaire Procureur , & dans cette
élévation il afi bien vollcavecla plume qu'il
a acquis des biens immenfcs. Enfin le Roi l'a
anobli I lai & un Ecorcheur de Chevaux de
la marne Ville, qui étoit parvenu à pareille
Fortune, par m£mcs degrez , moVennant deux
mille écus qu'il leur en a coâté i. chacun ,
pour obtenir ces titres d'honneur. Et d*Ar-
Ïenfon s'étonne que l'Empereur «t fiut un
ils de Notaire Comte de l'Empire ! OJor
Imcri fx re qHaiihet optimm. Il y a peu de
Peuples , dont l'efprit fbit plus fubtil , qaà
celui des habitans de Vire , ce qui s donné
lieu i ce dîAique.
P^irit Virifaum varia virtHte virefch %
A ma^nifyut Wïris ykia nomtm iaitt.
Mais par malheur depuis qu'ils ont recon-
W la Chicanne pour Icot Divinité ftvorite.
anîmn àe fon Génie iU font devoins ponr H
plupart fourbes & méchants. Nous avions tin
tris beau Domaine fur cette Ville , qui nous
taportoit juC^u'à deux mille livres de j'ente, a
Un de mes Ffcres qui entendoît mieux l'Ait ]
de la Guerre , que la Coutume de Norman- r
die , Au pour en paûêr un bail àun Fermier, I
Ïoi Can% ombre de lui faire ligner un Bail i |
etme, eut la fubtilité de lui en faire fignet ]
un Contraâ de vendue , dont tamais nous '
n'avons pu nous relever; quoique lafauiTetf i
fût toute évidente , nous avons perda nA-
tre Domaiae ; après bien des frais , Scda
temps emploie , à en [>ourfuivre le recoovte-
mei)t en Juflice. Chapedelaine eft un gros
Maoflade qui mâche contimiellement du ta>
bv:.
L'Avocat PîllevcflSere eft tout d'une coa-
leur, qui eil de cidre doux; fou chapeau, lî
perruque, iès yeur, fon vilàge, fa cravaite,
fon habit , tout eft de la même couleur : il
n'y apasjufqu'Â tenianiéresquinefecMeot
toutes douceieufes. Mais dans le fond c'cll
un viuaîgre tout des plus acides : il n'y a poim
d'eau force qui fuit plus cauOique. Quand il
tombe fui quelqu'un, il y paroït. J'aicouiu
très particulièrement un nommé Mr. Luos
Nc^ociaut de Granville, fort joli Homme, qui
raconta une Hilloire de Folain Pillcveffieie
devant lui, fans le connoître. Pailant deVi-
verfioD que les Habitants de Conltance i-
voient pour ceux de Ccrence', il dit qu'im
jour cet Avocat étant entré pour déjeuncri-
vec un de fès Clicns chez un Traiteur de
Confiaoce , où «'aOonbloieat tons les En*
fiuu
u,:,-,zf--„GoOglc
M FHifh'a-t Je la BaflilU, 433
fknts dcjoïe de la ViJle. Ce Traiteur quine
connoîfloit pas Pilleveffiere ai foa Clf«i
pour être de Cerance, leor ftrvit à dejean€
fUr une petite table auprès de Ion feu. Dans
ce moment un des Enfants de la Jubilation ,
qui vifitoit ce Traiteur plus que t'Ëglife Ca-
diedrale, -aïant aperçu Pi llcveffi ère déjeunant
atqK'ès du feu. Ah ! malheureux qu'as-tu-^t ,
dit il au Traiteur? Comineat tu as le front
de donner à maager à Pilleveâicre Avocat
Cerançois , & tu .crois qu'aucun Enfant de
la Ville puillè revenir chez toi ! Va , contî-
nua-t-il, tu es acomavxcàé iffifaîlo. Le
Traiteur bien étonné, mit prc»nptemcnt Fo-
laîu hors de chez lai &ns vouloir prendre de
ion argent: non obdant quoi tous les Enfants
de la joie ne voulurent plus approcher de ù.
Maifon. Le Traiteur pour, les 7 raf^Iler, fe
fournit à ta purifier lui même , & à paicr une
amende, pour avoir reçu innocemment Pîl-
leveilîere & Ton Clien à fa table , fans les
connoître. On fit fumer du genièvre dans fa
Maifon : on fit palTer trois fois le Tiait«ur
par.delTus la fumée en detellant Piltevefiîere
& tous les Cerançois. Le Traiteur regala a-
piès tous les boas Enfants , & cette etpéce
d'amende honorable, on fàtisfaâion volon-
ture , fit la fortune de cet Homme , par le
concours des Citoiens de Coutance, Gents
de bonne chère, qui alloient en fonllefe ré-
galer. On tait une remarque fur Coutance
qu'il y a Vingt Traiteurs tous riches, &ub
ieul Fonrbifleur d'épée très pauvre , marque
Îue CCS Peuples aiment plus Comusque Mars.
'iHevefileté , qui iivoit trasquilletnene lai^fé
T r*-
u,:,-,zf--„GoOglc
ls»oeiit« iOB Hidoire à Mr. Lncàs, qtumdîl
cet fini , piit à te^oia Ceux â qui il veook
à'-ee faire K t«Cit k & fit an fi arwel ^joûcès g»
ptavf e HIÂodea , qs'it af)vbK texnitia:, n»I-
rlet [HtuTes qu'il fut fiscile i ^Mr. Lacai
fs^reîle la vétité d'tm £dt . qni s'omit paf-
fè i la face de tout le Pnpte d'sOe jjftUKts
ViUei 4l a ^sm&nfe^âldsCnsDGOisuaK
CBYCi^ ft CoaMnce «k de Icofs Haibinns , te'
gii <a/ptif Aeberge pour evK , ne ttoorsat
MricMllKfesla Ville ^iii vonlûtlestecevoif^
& irai [V^irïéaaic oevoaixia ni n'oËuit loiiet
fe Maifoa i cet Aubccgifte^ ils ont été con-
traititis d'«o «chtxa une, où il ne loge qi»
Aee-Gcnaçois. L'ABbCigÛtedanDédnGoi^,
a prfa Ha ftébc , ctMnme il -n'atlott s^tablir i
CoMtaaec , qw poar l'atiltté as la CommB-
nautéi «««tii ec hri iH'CjwËciroit en rien, R
lui o« fee Ët^aanvouloicOL, rctoorner à Ce*
noce, où il» ne Jèrotent pas affligez de leurs
Compatriotes , pour "avoir demeuré à Cou-
tflnce , pai^ue ce nVtoit qu'à bonne inten-
tion ; & ^a\a cxmtraife on les y reocvioJt
eotame GÉat ati sftcnent Jàcriâez poar la
P»trie.
To8t ie menu Peuple deCerantsTÎtdete-
moignage: ilfi vont en juÔîce > fe prcfiaitent;
MdM>kufemeiit devant le Tribinal , &.poar
une laodique fomme ils depofent ce qu'on
leur fait dire, après avoir bien appris loar Ic-
çes. Il eft v^Tûi que â ^uelqu^on 7 tttaoqne ,
ou n'a pas affés d'cfprit pour fbolonir & dc-
podtion fans tergîverfer, îî reçoit de ceitai-
nés âëctirures fort affitgeantcs & foitdeebo-
aoiftbles; niais comme c'eft on uni prcfquV
.--„Googlc
alverfel dans te Bourg de-OcMuce , <on ne
t'en fuit plufi une aflàiR.
Ce Folsin PilkvoAerc s-":^ ttaia*é i]t fia
lî Âibtil en procei! que -chioanuit -jnriiu'^ix
CerAncois même , il« l'ont chnâS de leur
SïnéKu^c; ce qui l'udtftltgé de^s'alleréu^ir
 -Granvilte, nia1hetif«ilfenKiK-'pQur cet agréa-
ble fejo«r , Ville Franche (fimpefs , dont IcS
CJtoïcRi , le meilleHr Peuple ^fii fat fous ïp
Ciel i r'woit dans la ph» graitàefimpHcitid*
Monde; mais depuis que-ee F-cRamt IcsnotUt-
mez GlHHnpk>n , le Hou;u«s , Quefnel i Ib
Parc-Couroys , Ya<M, lAngtois, une trou-
pe noiïibreafe-iie Gerançois , & d'autros Ca-
nailles s'y font jettei , ils ont ibufflé lcor«5-
prit de chicane daas le faa de ces boOnee
Gens, du menu Peuple siçHtend, fi cnrelle-
i»ent qu'il eft à ctoindïe qa'ili n'cnfaflcnt
des Ciioiens auffi conoBipus que les Ceran-
çois mSincfi ; ce qui ferOit'ïWja arrivé , fi ils
n'tîtoient retenus par la crainte & l'esemple
■ie plufieurs Perlbnnes dian mcritediitingué ,
comnie Mr. de la Fertiere leur Gouverneur,
Mrs-. Piquelin Lieutenant Genetal ; IeSan>-
Tage Lieutenant de l'Amirauté, Baubriant,
J'Eveliîue Capitaines de Vaîffcaai, Sr. Pair
Procoreur du Roi, le Goq, Iroifdierc, fit
plufîeurs autres. Je les dte ici pour rendre
juftice à leurs vertus, qui m'ont beau coup é*
difié; pendant que j'avois enhorreurdesmî-
-fcti^les qui fitifoient gloire de paffcr pour lès
Perturbataufs do repos pubHc. j'y ai vu in-
«nter un procei par le nommé Simon, pour
■avoir pris une poulie dans une Haye le long
du cbcmin, iia'înconHnent'^rès il laiilâ en-
4%6 L'Ittquifitwiê Franfoifi
v6Ier, qui avoit déjà coûté plus de dix mile
écus. On avoit emendu plus de cent ténniii»
de pan & d'uitre. Prifes de Juges à pacties ;
infcriptions en faux; txciilàtions de témoins;
aucun des tours de la chicane n'avoit été
oublié : on y avoit impliqué iufqu'aox Curez
& leurs Vicuret, <)ui avoiem été forcez de
fulminer des cenfures , & qui ne pouroient
s'empêcher cependant de crier contre c«s a-
Iwt : & fans doute cette aSkîre ne fe termi-
nera point, qu'il n'en coûte lavieàplulieun
qui feront pendus pour leurs Ëiullêtei ■ &
. d'autres qui i«ront envolez aux Galères , &
qui pourront biw maudire la poulie à Si-
mon.
Il &ut que Je vous dlÛÀ vm.toutdes Ceran-
cois , qui vous fera connottre le Génie de
.cette diiUioliqueNuion. Mr. Pjqnelin Lieu-
tenant General de Granvflle , qui cA un foit
honnête Homme & très Riche, a plulieurs
Terres aux environs de Gérance, & même
une qui par'malheur fe trouve enclavéedans
lie territoire de Gérance. Les habitants de ce
repaire à Scélérats avoicnt calTé la cloche
de leur Egliie. Il s'agilToic de la faire refon-
dre f fans qu'il Jcur çn coûtât rien. Voici
comme ils s'y prirent. Un jour que le Père
de Mr. Piqnelin paÛbit au travers de Géran-
ce, pour aller à une de fes Terres ■ iis t'ar-
fêtèrent , limulant dé lui vouloir fiii.re hon-
neur; ils le forcèrent de defcendre de fôn Che-
val, qu'ilsmireatcheileSindic, l^us ombre
d: lui vouloir donner de l'avoine. I/aFemow
de ce Sindic étoit Qouvellemetiç acbuchée. Ils
prièrent cç vénérable vieille de nommer
l'En*
.--„Googlc
tu rHiftoire de la BaftUU. 417
l'En^t, & pour lui&ire en apsrence plus
d'honneur , ils lui denuDderent en grâce
de fe chQÏfir une Commère la plus bel-
le & la plus qualifiée du lieu . pour te-
nir l'En&nt avec lui. Le Bon-Homme fe
rendît à leurs importuQitez, Aptes la Céré-
monie du Baptême , c'cft la coutume du
PaVs, & de prefque toute la France, que le
Parain&laMaraine vont eux mêmes tonner
les cloches de l'Eglife , & donnent de l'ar-
gent pour les faire fonner. Car c'eft unetra-
aition confiante, & dont la preuve a <5té vé-
rifiée pat' toutes les vieilles qui fe font luftrécs
de plus d'un feau d'eau bénite, que plus on
les fonne, & plus l'EnÊinr aura la voix bel-
le. A peine le Bon-Homme eut-il mis la cor-
de en f» main , pour ébianlet la cloche^
qn'ils accufereni le ntJuveau Compère d'a-
voir cafTd leur cloche. Le Sindic ,, malgré
l'alliance qu'il venoit de contcafter avec lui ,
fut le premier à depofer le fait contre fou
Compère. Ils rarrê[ercnt,&proteftereiu qu'ils
ne lui rendroient pas fon ChcvaJ , qu'il n'eAt
païé leur cloche. Enfin pourfe dcbaraffer de
ces Harpies , Mr. Piquelin fut contraint de ,
leur donner cinquante écusj bicnrefolude
ne rcpalTer de fa vie au travers de Cerancc,
crainte d'une pius funelle Avantute.
Ces bons Cerancois , corrupteurs du me-
nu Peuple de Granvillc , ont defolé un des
Curez dé cette Ville. C'eft un Homme qui
eft de nailTançe , qui a de la pieté , du zèle ,
& du mérite ,' & qui n'eft pas loin du Royau-
- me de Dieu. Il s'appelle du Hommet d'une
trts ancienne Noblellè. Ce bon Prélat las dé
T s les
u,:,-,zf--„GoOglc
438 Vlnquijttian Framfoifi
ks catechi'Icr , fans pouvoir ]es faire lentrer
«n eux mêmes , s*aTifadefâiregraverunGru-
«ifix , amour da quel il fit rcpteifenter Ces
Loups raviflknts , plutôt que fes Brebis dans
tfvcrfts arimdcs. Champion perçoit le côté
de JESUS-CHRIST, & an delifaus étoit é-
crit. /1b 1 malheureux Champio» tu ferees le
jmfte. Le Hognais , Parconroys , & Ydot
joiioicnt an pied de la Croii aux dti , à qui
anroit Ii Robe dn SdgneUE : a c6td d'eux on
Toioit ces motsiHaiaxd , pourveu que j'en
aie la dépouille. Folain étoit monté flir une
BoQTtqiie avec là Robe magiftrale , qui. dîr
ibit : Seriptum ejl unum Mori pro Pofula.
Qaefitel,ftrAn|iols preftistoieut à J.C.udc
éponge trempée de vhiaigre,& à côté rftoité-
crlt. Voïons fi quelqti*iin viendra le délivrer
4c nos mains-. Et divers auires habitants de
Gérance étorcnt autour de La Croix qui blaf
phémoient contre le fils de 0ieu , fous la
Croix du quel on valoir ces mots gravez en
gros caraâft-es. O Ame Cerançoifc! com-
prends l'excès des maux que j'endure , par
l'excès de ta malice, plus cruelle que la I^-
ce qui m'ouvre le coPÏ, que lesclousquimc
Serçent les pieds & les mains , & que l'épine
ont ma tfte e£^ couronnée pour ton.amour.
H croioic qu'une Image fi touchante les feroît
rentrer en etis mêmes , pour leur faire détec-
ter leurs péchei & Ct convertir ; mais elle ne
fervit qu'à leur donner matière de chicaner
leur Tclé Pafieur: & reunis tous ensemble ,
ils l'ont poQrfnivi d outrance, dontleCplé-
gtte de ce bon Curé a été ravi. Il s'appelle
(aatiticr, & comme il a:1uiJB^&I'Âin&tpUr
.--„Googlc
on l'Hipire de la B'é'^k. 439
te CeraQcoiCe , il attifoic le feu de ces Airies ,
pour leur faire toqrmeufer foa Adjoint; ca»
l'EgliXe de Gcanvill« «Q dcGbtvie par deuK Cu->
rcz , mais qui ieiI«mbJefi; vtx Chapons de
rente : up bon & an mwvais.
IjOrfquc i'achevois l'Ejog^ de ces iHuftrei
PeiCoaaagiîs , Ry eatra i^vcc nôtre iJoafé y
qui nous, fît changer de dîf^^otvs. Nous ioa>
pâmes affés legeieincnt , ppur plufieurs rai-
ions , dont la pr«raicFe éioii que nous n'avions
rien de bon , & la féconde l'indirpotitian da
Comte ; après quoi noua fûmes à l'audiance
àa. Prince & de nos autres Voilîns , devant
lefquels le Comte fit briller fon cfprît. Le
i'rûicc nous dit que le leadcmaJfl il deroit
comparoïtie devtvit les Officiers , & que H
BQWS !c voulions voir par des fentes que nous
(avions pratiquées pour cet effet dans la mn-
r9iHe,qu'iIs'arrcteroidlQn)ïtcinps devant nous:
Je lui demandai comment il ferort habilla ,.
puuf le micus difiinguer. 11 nous dit qu'il
prendroit ce jour laun habit dePinchina, a-
vee uo p^flepoil d'or , & qu'il mettroit unt
plfUine Hanche à fi>n chapeau; ce qulfaifojt
faira des éclats de rire à Tozain fon Compa-
gBOQy i^nt je ne pouvois deviner la^caulèi
mais quA l'os verra dans la iiirte.
Enfin nous continoâmes nos converHu
lions , dont les ^réeraents , & fur tout de
çelk du Comta, (ervoicnt beaucoup à adon-
ciï l'amertvtiK que m'ayoit cauf^ rAbb* de
la MQttCi qui cependant s'dioitforthnnuuii-
ié depuis.reairiîe du ComtedaasnôtPC Cham-
bre. Je medonnois tous les jours dcsSç^nes
toiues.dttS plus reiouiflântcs. Je ftifols conter
T4 au
u,:,-,zf--„GoOglc
440 VInftiifitioM Prtuif^ife
an Comte les endroits de fa vie qai les regar-
4oieat tons denx refpeâivcment. Je deman-
dois an Comte ce qn'ii anroit fait an Curé de
Lery, fi il l'avoit rencontré. J'avois deflHn,
difbit le Comte, de debatter par lui faire don-
Bcr le Ceitiâcat de mon marine avec mon
EpODZe en bonne forme ; à Ion rcfiis ,*je
Faoïoîs tué fans qoartier : & s'il me l'avoit
accordé , pour lai iàirc païer la peine qu'il
m'avoit donnée de courir après lui , a. le
recompenfer ftlon qu'il le meritoit ; j'avois
refoln de le mettre en état de pouvoir à l'a-
venir £tre un bon Curé ; car comme j'avois
appris que c'étoit un Ribaut toutdesplusdif-
lolus , je lui aurois lait couper les nœnds de
' fes galanteries , avec le nez & les oreilles.
Pendant ce récit l'Atoé de la Motre fiioit i
groflès gouttes , & faifoît des contorlions de
poUëdé. Je pTcnois le parti du Curé de Lery,
contre le Comte , pour le mieux faire caa-
l£r. Je lai rcmontrois que] crime it auroït
commis de mutiler un Prêtre ; & tnncAt l'im-
poflïbilité où il auroit été d'exécuter fon def-
Icin : qu'outre que le Curé étoit fort & puif
lànt, qui fc fcroit biendeffcndu, illuiauroit
été impolTible d'en faire unEunuquedahs rai
Pays étranger où ce Prêtre auroit trouvé dn
lècours. S'ils'éioit biendcS'endUtreprenoitle
Comte , j'aurois pris le parti de lui ôter 1*
vie , pour le mieux mettre en madifpoUtioD,
&pouvoir plus facilement exécuter mon deP-
iein. Et pour n'être point furpris ep âilànt
mon coup, je l'aurois fait attirer par une Fil-
le de joie dans un lieu écarté , où il auroit
éié à ma. difcietioo , fans que j^eoflè conni le
• moin-
.--„Googlc
•« Fffijloire Je la BaJiUU. 441'
itioîndr'e hazard. Tantôt je demandois au
Comte ce-quc c'étoit que le Curé de Lery.-
Je lui difois , que l'on m'avoit voulu per-
iuader, que c'étoit un Prélat de confequen-
ce ; que même fon Bénéfice alloit du pair a-
vec les Evichei : qu'il me fouvcnoit d'avoir
]u dans la Gazette , lorfque cet Ahbé avoit
£ut abjuration de la Religion Romaine à
Londres, que l'Ëvéqne deLeryavoitreaon-
ce à lès erreurs ; & que j'avois toujours ea- •
tendu dire, que fa Famille étoit desplu£dif<
tmguéedu Pays, &'toat à fait honorable. Il
n'y a pas d'Homme qui puiflî vous en parler '
plus cettainement que moi , reprenoit le
Comte : j'ai été fur les lieux , oùj'ai fçu que
hi Cure de Ler-y ne valloît pas plus de quatre ~
cents livres de revenu, & dans les meilleures'
Années cinq -cents livres tout au plus. Quand
à fa Famille, j'ai vu fon Père & fa Mère; je
les ai interrogez plufîeurs fois ; ce font de
bonnes & pauvres Gents , qui fcroient ré-
duits à l'aumdnc , fans leur Fils atné^, qui
eft un (impIe-Labouteor, qui les &it fuÙî-
fl«r des Terres qu'il tient à terme de Mr. le
Cardinal de BoiJiilon. La dernière fois que je '
l'ai vu, après l'avoirlong-tcmpsattenduchez '
lai, je- l'y vis arriver, avec fa chartie, ,vo
naot del^xMirer la terre, couvert d'un Sarot
de toile , qu'il avoit mis par deffas un gros ■
habit de reveche, pour fcgarantirdelabotiei
arant plut de deui livres de -clous fous fes '
fouliers, avec des bas de toille à fes jambes. -
Pendant tout ce*tecic le Curé de Ltry étoit -
dans des convullions épouvantables,- & faî- '
Ijut' Ambiant de chantée une Antienne de fon '
T-j. Bïe--
4|S LTiipiifiiiim ^ampoifi
'Ësevmre * il difoit ea plaiocbaat. /mfam$
ttrtt ( memtitKr imfmMi , impMmt , impmu :
ÀiUimf- PoQr éprouver la âncerk<! du Com-
te, je lui âemaodojs d«s fîuit positifs qae je
içavois du Curé : p&r esemplc : cojmbieo il a-
voit dioanii >a Curé pour faire la ccrcanonie
4e fou Diariaee? ce qnc c'étoit que le Châ-
teau du ]9ois%oger? A quoi it me répondit
coofonnaneat à n qije m'en avoit die le
Frttre; qu'il lui avok doantf diiLatiisd'or,
jponr être venu de Lt^y i Roiicncelebrerfon
mariage. Que le Boifi-Rogçc ayoit aiUrefois
Mi ooe fort belle Terre, &très Sctgueurisr
le, jB^s qat étoii touK délabrée & s'en alloit
«D raine par la négligence de ra,Fetnme : que
"les mors du Château étaient à moiriérenver-
ifX; ftqu'il n'i avait ni ocdre, ntœcoaooue
dans cette Maifoii. Aii^i je conjeâuroisde
là , & de tout ec <^e n^ea avoit dit Sorel lui.
m^tXK , que le r^rt 4u CoDHe. écpit &tr
être.
Il Et cette Afioée àe& cbaJeors exccHiHes :
«lies furent caufe que le Comte & l'Abbé fe
ptouRnorent danslaQiambfe,nHÛs encbeoii-
ft, l'Afabé vonlin pqullêr ta galanterie plu
loin, & qwtter â cbemilc; mais j«pn>tcaai
que je ne le fouiirirois abfolâment pas ; & je
lui affirmai, qœ je demaudcrois a^ec en)-
pnûèmcat ï être Icpaié s'il voulait pouilèi
ioa itnpudcace 1 l'excès, il en fi» li outr^
que dès le foir ; c'Apit le premier jour de
Juillet, il doniu «a billet, att.Poae-Cl«&
Les fokes nous, âreno jwei ce qu'il conte-
noit;' car dès le leOdetsun ao cnuia on fîJt
fiE^ Ittf PdfiMuticrs d« J> CaIoir : nais ili
.--„Googlc
OH tHifithe de la BtifiUit. 443
que tés Officiers leiuprote^ei», 9i^'iIifça->
voient li^ qv'its iivoieM coomMfBicatioa a.
vec c4ni 4« 1» Quktri^e Chambi'e , &avec
Doat,i{9 ne le \ew pvcot f»ire avouer , & in-
dtfbitihJement fi no» Voirms delaQuatifém^
aVQWOt q£ de la Qléme precamion , les Qffi-
<;ier».ncU0UvaM rien , luuoient pu accxûir
l'Abbé d'iiBpoAare & d« calomnie. Mais é^
tant- venu vifiiei les deux Piiiaankts Ac ta
QatttiéoK V i^ trouvaient leor tnou cHcom-
toui ovveni qu'ils avoiem eu Cput le tcni|i»
4e Éecàm- ht* Offict«fs p«ilemu dans te*
trtw, povr decouTiir où il «voit commnDÎ*
cation, & l'Abbé de laMotHicouratBrcHnfH-
tçmcnt Ibufi la cheminée leur rçpondro. Ils-
vinrent eofUkc dans nôtre Chambre, oq il»
61CIU gcvul bttult : ce que le Comcc A moi-
nons reçames d'un lï grand faiig âroid > pean
daot q»a VAittié en teinoiguoit uaejoïu eir
ceflîve-, qu'ils doutojeat encore de la chofe.-
C^eodant dès le lendeoiaia ce ât forttr le
Pfiocï & Tozain de leot Chionfarfi: ncas ne
dDUtÂmes pat Qoe ce ne (Cm potu-les mettie-
au Cacbot, & nous aow attendiotisbicoil*
même deflio^e. Voiam bien d'où Jious pai-
toJent ces coups , le Comte «a vonlait rer-
cooipeiifcc J' Auteur , ce qu'il aiaoit^t&iis-
mot 11}} l'en erap^tiat i ep liù es f^tûnt roif^
Ui cqnfeqiMQces. Deuxjows af»» , le 6.
Juillet les Prifonniers de la Calotte « eurent
la même dellioée & fqrtat eafemm daps ]c
Culiot ds 1* laioit Tour ■ qui ttâiràspasnr'
' & Ctès aftreuXf mus qae Bernaritle a Dcpdu--
semble, eabouetunt toiw Iwfouptri^uds'
T. tf. ce.-
.--„Googlc
4W £*2»f«{fow« FrdMfwJr
oe fbntemiti tenetweax ; en ïbrte qu'il dV
eatre à prêtent d'autre m , que celui qui pai-
& au travers des Latrines. C'efl dans cet a-
n^able fejour où Gringalet fut près de fcpt
Mois, & où it auroitété plus longtemps, S-
je n'avois pas étépreudre là place. Ce fut-U
3n'il acheva de fe perfiiader qu'rl avoit reçu
a Ciel ta PliUofo{riiie par infulioa^ comme-
Salomoo , quoiqu'il ait fait £bn Cours de Phi-
lofophie à Genève dans la Boudqoe d'un Re-
lieur de Livres , dont il ne pat arorendre le
Bi^tier ; & dans cet Antre de la Sybile Gu-
inée. Il forma aparemmem le deflein de Cts-
Reflezicms fur quatre Queflions. Qui Aiis-je ^
Où &is-je ? Qui m'y a mis? Et pourquoi } dont
il ne donne pas une feule niilon dans toutlc-
Corps de Ton Livre i & fcs Effiùs Piiilorophi-
qnes & ThcoIogiqueE , 1 fublimes que je ne-
^che encore Pnfonne' qui en ait pu péné-
trer le fens: & fi riliWes qu'on dit en prover-
be aujourd'hui , qu'tu) Homme Gringalifè ,
quanu il. donne dans le Galimatias outré.
Kous demeuHlmes doaç^privez de focièté IC'
Comte &. moi antre que celle de l'Abbé de-
la Motte, dont, nous nom ferions paflèz a-'
vec plailîr. Nontoousentretenionstoasdeux-
ibrt agréablement, ce qui faifoit enrager'
l'Abbé , croiaiu toujours que c'étoit de lui
que nous parlions , quoique tons. deux nous-
enffîons Touin de tout nôtre cceut n*7 penfcr
de la vie.
]1 y «voit près d'un Mois que le Conucé-
t&it avec nous, lorfque le Major vint )e 24.
de. juillet de l'Année 1703. lui dire de s'ba-
bpler, f^s jamais vouloii lui en ^prendre'
le.
Coo^jlc
0» fUiJhiri dt U Baplle. 445
le fujet ; il permit même que je l'embraiîàfle
pour lui dire adieu , ïàns daigner aous dire ,
il va revenir dans peu. Troo heures après le
Major ramena le Comte de Brederode dans
nôtre Chambre, qui ne faifuit que Ibupirer ,
fans pouvoir dire un féal mat. A la tin re»
venu de f^ furprife : 6 Dieu dîr-il les cruelles
Getits que le» Admini orateur s de la Baflille !
Sçavcï-voas bien pourquoi l'on me fait ge^
mir dans cette Caverne Diabolique^ pour-
quoi l'on m'vtraitte comme uaBai)dit?pour-
quoî l'oB m a rendu le plus malheureux ds
tous les Hommes ? C'elt, continua- t-il, pour
avoir eu la curiofit^ de voir lever ,un trefor ;
©u plutôt pour avoir voulu voir , jufqu'oû
une jeune Fille de dix fept Ans pouUèroic fa
témérité. Après il me tira à part proche de la
fenêtre, pour ne pas être entendu de l'Abbé
de la Motte. Ecoutei, me dit-il, uue chofe
des plus [jrodieieufes que vous aîez entendu
eu votre vie. Voici le lait.
Je traverfois uiijour la Grévc> lor&u'an
Prieur qui elt de Caên , qui s'appelle Pinel,
que je connoifTois depuis quelque temps ,
m'appella-, d'an Cabaret où il étoît à boire
avec un Turc uommé Acmet. Après m'a-
voir prié de boire avec eux-,, il dit qu'il voa-
]oit faire ma fornine ; & me demanda fi je
n'auroîs pas de peur du Di abl e ? Je âis curieux
de l^avotr ce qo'il mevouJoîtdire, & à quoi
aboutiroient. f^ queflioiis; Il jne dit,. qu'ils,
dévoient lever un Trefor qui.étoit dans une
caverde à Arcudl : que .tout, écoit préparé'
pour &ire reuffir la chdfe, & que des le ibtr-
mtoie'je n'en dottterois pas, fi j'avoisl'ainu
T 7 na-)
.--„Googlc
44$ L'iK^Mifitùnt Fran^iff .
rance d'en écie le témoin ; & que je ptrtar
gerois xvbc eux tes tbaaaes immentes qw
compafoient ce Treror. Je vottius tOOf^
aer la chofc en ridicule. Il y a long-tcan
lui dis-j« , que j'ai eniendu dire , qu'il,']
lin TreîbrdafK 1» Caverne d'Arcueîl ; 4
je ne puis comprendre comnwilti ai pt ,
qaoi le DiaUe s'en met en poffèffioQ ;'-t^'
encore moins, coimncni: <y>i^ës s'es ,4Btli
mit eu pofkOiioa ,- il cft mei fot pQvmM
linvf an commandement A'vn Prto:e «■ OB
d'un Ihlagicien. Abus que tottf cela >. ..Â
j'7 «joule li peu de foi ^ - qu« loia 4'av(i£
peur de oce prétendus cjotciÛBes, je vtm
vcrrols faire toutes vos raomenei isps h
maittdrc Émotiou. Car croïe« vous âe botlr
oe ibi , que U ¥ntci d'une étQlc , d'm
pea d'esM , d'un figue 4e croix , ou de (put:
ques grains^ de fct , foît durable de foccer H-
Diable à voiu enrichir à ptâiâr? Moii cliet
Comte, reprit le Prient, vcnec avec oouièB-
lenient , Toie^ fetoie Se rofolu , ^ vous ne
doQterez ptqs de vôtre bonheur & in nàtie.
Qnfft eft le Mjgicicq & le Prêtre , dis-je,
qai doivent fkiu )a ccfemonic ? I^ Piètre 1
e'é&iRôi, dit le Prieur, i9i leM^icj»voiil
ftTpreadca bien ,■• quand vovs le vsrrn ici,
où Jl & 4ojt rendre dans m» hewe. £d efGa
(tenitt qM l<hnu» ^ éoaalée , j« vis «ft^
rot fbxemiVKrûMMK» y dont je ctMOoifibJii
iéjz lar plupttit. L'on fe noomMitr IfiChe-
waJiof, cléwriMip fcofln , BreïeBr «k fws
ééienntaïf ; onaatfetioiiSBé£>tvAuxS«*g««9t
(hnc 4e Ragiment de U Chlrre \ Un Berger
■onuU Pïcc«^ àa Village <kt Vsa-Gîivd
-n ./-r
,Coojlc j'SSi»
.Coojlc
>« rHiftairt dt U Baille. 4M
aux enviroBS de Paris : c'étoit lui qui avolt
îiidiqu^ le Trefer , & gagné le Jurdûiier de
Mad. d'Aicueii , qui leor d«voU ouvrir la
pone du JudJQ , & les introduire dans la
Caverne ; Mad. Daligai Femme d'un Cvgi-
taine du Régiment Roïal ; c'^toit etie qui
foumilfoit le Grimoire ou Uvre Ceremoaiel
pour îuvoquer le \>\^g. Je voulus rou-
vrir , mais on ne me donna pu le ttttpi d';
lite , c'était ua vieu2 Bouquia écrit en let-
tres Gothiques , que Mad. Oaligo; loutc-
trenibluite m'arracha des tiiains. Ils avotent
encore avec eux une pmite Fille de iàzt à
dîs-lept Ans; c'étoif une brune fort jolie &
fort éveillée , qui s'appelloit Mariane j elle
^toitdeBourdeaiUjOudes environs- I^Cbe-
valier après m'avoir faiué en entrant , de-
manda au Prieur s'il a^oît eu foi» de leur
faire faire à foupc. Tout eft prêt , dit-il, &
l'on fervira quand vous voudrez. FaîKsvî*
te, dit le Cbevalkr, car on ne peut pas Être
moins de deux tieores à taUe, & il y a um
bonne contfe d'ici à Arcuell, oùilaws/w
atrivei pteciTeineiit avant minait. Ccu qui
ne me connwlToieDt pat., deinind^ent qtu
i'âois. C'eû ua brave Hoaune dit k Cheva-
lier , & de la fermeté duquel yt repcadh
P'abord Je crus que le Beigec état le Mftf
gicien^ car d'ordiBsice OQ utribttc beMccnq»
de vertus l ce$Rtt(lre5.^ae«*Hs- nw^i«^
bieo étonné , ^and 1«. Prient oœbral&utt ta
petite GafcoBue , & LÀ memuit fw fies, ge-
noux. Cette bell« Ënfiu», inc dit-il , i)'«A*
elle pas bien propre ï dontier de la tcmsvt ^
Elle me donaetoit plutûi de i'aioov y 'Vf
4t
Coo^jlc"
44^ Vlitqtiijltia» Fraiifoifr
de J» crainte, lui repondis-je, Ellefairpour-
eant trembler le Diable, reprit-i!, ftluicom-
mande i la baguette, comme vons le verrez
tantôt. C'cft donc là vôtre Magicien ? con-
tînusi-je, & où en avei vous tant appris la
belle Enftnt' ? ■ C'eft une fcience dit clic ,
qui nous vient de Père en Fils-; & mon Père ,
était un des plus habiles Hommes des envi- '
rons des Landes de Boutdeauz, quoique ce
fût un Berger , cent Pois il a fw't defcendre '
la Lune , comme je l'ai ■vu moi-même , &
dancerleSoleil,a«ffibienque lesFilles qui lui
plaifoicnt le frfus, toutes niies. Il avoît un
don tout particulier pour trouver des Tre-
fors , des Sources , & des chofes perdues.
Aparcmmeiit, repris-je, qu'il quitta Heo-tôt
la profeffion de Berger , & qu'il eil mort ,
tout au mohis Prefidcntau Parlement de Gu-
yenne. Patience , me dit-elle , vous ftites
le railleur à prefent , mais quand vous ver-
Kl tantôt ce que je fçai faire, vous chaaec-
wt bien de langage & de fentiments. Onftr-
TTl fort bien i foupé , où tout te Monde fit
très bien fou devoir ; fur tout la petite Ma-
gicienne. Le Prieur qiie je- connus bientôt
pour être le Renautdefon Armidc, tontdes
f4us enchantez , avoit foin de lui garnir fon
affiette; & elle celui de la dégarnir d'unevi-
teffe incroiiU)le, Si elle mangeait bien ^ el-
le bavoit encore Tnieui , & lans ceflcbaifoit
^rOntement 'le Prieur, qui en étoit idol^.
Le Chevalier e» cbatoit à Mad. Daligny ,
& moi.jegardois-lesmanteaui.Qnand nous
ffimes prêts à partir dans d« Fiacres, qu'on
fit' venir pour, cet «fl«, j'envoiai le Garçon
■ . de-
.--„Googlc
tKrHipirtdeUSaftiUt. . 449
de l' Auberge m'acheter un fnzU , de la mè-
che, des alumettes, & une bougie': j'en fis
T'éprcuve ; après nous nous mîmes en che-
min. Nous arrivâmes à- Arcueil : le Jardi-
nier nous ouvrit la porte du Jardin , & nous
couduifit dans l'Antre de la Sibile. . CVtoit
une Caverne très obfcure & profonde : où
étant entré , je fis du feu î j'allumai ma bon-
fie; je tirai mon épée du fourreau, &jevi-
tai tous les rctoinsdc la Caverne, pendant
que Mariane fe deshabîiloit.' Elle y entra
niie en chemife , les cheveux lîpars , une
bougie de poiï raifiue noircie en une main,
& le Livre myilérieux en l'autre. Je voulus
l'y fuivre. Arrête téméraire , me dit -elle
d'un air furieus , & garde toi bien d'j; entrer
queje ne tlappelle ; il t'en couteroit cher.
Elle appellale Chevalier, & lui ordonnade
me retenir. Nous reftâmes tous deor à l'en-
trée de la Caverne , dont nôtre compagnie
s'éloigna par refpeâ , ou par crainte. Uq
quart d'heure après qu'elle fat dans la Caver-
ne nous l'enteiidimcs diftinâement parler à
quelqu'un, & lui commander d*un ton im-
pératif, ferme & refolu. Je diftîngoai fort
bien qu'elle lui difoit. Voilà bien des fois
que tu me remets ; je veux , j'entends , &
j'ordonne que tu me le livres prefeniement.
Tu ne gagneras rien fur moi , cette nurt,
reprît le iJiable prétendu , ne tp'importune
plus, il y a irop de monde avec toi, & fi
ton Prieur enrre, ou ^ui que ce fait , i^'ï'*
torderai le cou devant toi. Je t'en empêche-
rai bien lui dit-elle. Tremble pour toi-mé-
mc, reprit-il, vH careflèrtoû Prieur-, fors.
410 I/hqiùfitUn FrMHfoifc
& ne m'importune plos. Elle voulut nplt-
qucr : nous entendîmes qu'il la frappoit à
outiaace; ce qui la faifoit ciiec de toute fa
force. Je voulus m'avaucer dans la. Caver-
ne i'épée à ]a main pour la fecourir : mais
le Chevalier m'en empêcha, il me retint eu
me difant, que j'étois un Homme perdu, fi
j'avançois quatre pas. Va , dit la voii qui
pailoit à Maiiane , dis à ton Faniâron qu'il
entre } & fur tout ne reviens pas ici que Je
ne t'en donne la permijTiou. £llc fonic tou'
tefurîeufc, en dilaiit. Vatrompeur, vamé-
cbant , je ne me fierai plus jamais en toi.
5a chandelle dtoit étciutc ; ce qui fit , que
je voulus allumer ma bougit;; mais elle me
pria de n'en rien faire , difant qu'elle étoit
toute niie , que fa chemife étoit reliée dans
1i..Cavérne, Je voulus voir, fi c'étoit lavc-
tîl6 ; mais elle s'échappa dinfi'l'obfcurit^ ,
d'une vitcilc qui me la déroba bien-tôt. El-
le^soutut vers fon Prieur, & aïant pris fon
lupon , elle nous appella , & me dît d'allu-
mer luabouKii:, pourvoiràsbleffures. Nous
vimes Utr le plus beau corps de Femme qu'il
ibit poilible de voir, des aicurtriffures tciri-
blcs : elle feigiioit au nez, par la bouche, &
avoir les >eux tous étiuccllajits; & après a-
voir repris, (à Cimare , elle eut le courage
de rentrer dans laCaverne, & d'y reprcniCc
fa chemife, fou Livre &facbaiiaelle diabo-
^que. Le. Ptleiit en pleurant lui frotta fes
plaies a:vec. de Teau de la Reine d'Hongrie.
Ce qu'il y a de prodigieux , c'efl qu'elle ne
répandit pùnoe laiine, & ne poulla pas un
foupar , hors tes cris que nous lut «ntendî-
.--„Googlc
eu PHiftoire dt la BëflilU. 4J i
mes faire. Nous remontâmes en Carofle,
& nous retournâmes à Paris. Le Prieur a-
ïiiena la Magicienne chez lui , aparemment
pour mieux lui frotter fcs plaies. A'rôtrc
lèparatiou , nous nous donnâmes rendez-
vous dans trois jours.
, Je fus me coucher dans mon Auberge,
fans pouvoir rien conclure de ce que je ve-
nois dï voir & d'entendre. Au jour marr
que je ne manquai pas de me trouver aa
rendez-vous. Tous nos Gens y ^toîent",
Marianne Jùr tout éveïUëe comme utie
Caitlet qui ne fi; foQveuoir pTus que !e Dia-
ble l'avoic battue , & deux autres vilages à
moi inconnus. Après avoir bien dîné, nous
- montâmes en, Carolfe . environipiidî, pour
nous rendre dans- un Parc , qui apartenoit
à- un des IncOnnur, qui, fi je ne mé tromr
ce s'appelloft des Marets ^ fcitUé i' tiôft
^Heiies de Paris ,. où fe dcvoit paUer la Scè-
ne. Après que Marianne eut fait jurer au
Propriétaire qu'il n'y avoit que nous dans le
Parc, dont en outre elle nous fit faite exac-
tement la reviie ; elle nous polla tous à di-
verfes inHances les uns des autres , avecdes
cérémonies toutes ridicules;, faîfant des cer-'
clés autour de nous , avec deffenfes'd'en (br-
tir pour quelque (ujctque ce pût-Être. Com-
me l'Aûe fe paflà à trois heures après midi y
que le jour Étoît fort beau , je n'en perdis
aucune circonilance. Nôtre Medée fe mît
au milieu de nous. furunHcuémin£ot,d*oû.
nous lavoïons tous très diflinâement, EUj
le debutla par fe decoêffer , & peiçuer fe*.
cheveux ; après elle fe mit toute niie ; prit
, loa
.Coogic
44 3 L'In^Mifition Fra»fmfe
(bn Livre ■ lut dedans avec des àgîtatiotK
terribles. Elle fc piqua au bras avec un ga-
nif, & écrivit avec fonfang fur une feuille
de papier. Nous vîmes alors paroître de
loin des Cavaliers vêtus de rouge , de verd
& de bleu qui fembloient voltiger. Alorsel-
le fe leva debout à deui pieds iiir fon Livr^
toute niie; les chevcui , qu'elle avoir ailcz
beaux , & ca allez grande quantité ; épart
fur tes épaules , tenant le papier , dans Ict.
quel elle avoii écrit en fâ maiii. Nouï U
vimcs s'élever plulîeurs fois de là hautOit
de quatre à cinq pieds au deÛùs de foa là-'
vre , & demeurer quelque temps fuipenfffiç
en I air, & agittée , comme fi quelque veçt
l'avoit voulu emporter". & qui faifoit flotat
fes cheveux avec violence, fans qû'êlfè ffl
jncun mouvement de fon corps. A lafin C|&
le ftit élevée ()lus iiaut , & tout d'un coiW
vn tcforbillon l'emporta en l'aîr, & dans on
ioftant elle difparut. C'étoit fur les quàre
heures dans Tes beaux jours. Nous fiimes
près d'une heure , fans la voir. Je corn;
inençois à perdre patience, auffi Ixeh quele
Chevalier & mes autres Compagnons en-
chantez , lorfque le Prieur Pibçl fe mit i
nous crier, aullî bien qile le Berger, que fut
les yeux de nôtre tÉte, nous n'euflîons pas à
branler de nôtre place. Nous peftîons "de
tout nôtre cœur' courre Mariane , lorfque
noiis aperçûmes encorevoltigerde loin , les ■
mêmes Gavaliersverds, rouges&bleus, que
nous avions veu; & tout d'un coup un tour-
trtJlonrapona Mariane, qui tomba fur iùa
Livre en nous appellant à fonfecours. Nous
. - 1
u,:,-,zf-"-„ Google
/rs^
.--„Googlc
iuTJSfioire Jtla BaflilU. 4f)
Y coammcs : çUe n'étoit pas recoauoii&ble.
Elle avoit le viGigc & le corps tout meurtri:
elle avoit deux boiïès au ftotit au deQîis des
yeux , .^oll^S' chacune comme la moitié
a*un œuf : Elle fcîçnwt en divers cudroits
de foa Corps ; & les épaules & fes cuiUès
rembloiént avoir été flagellées. Il fallut
l'emporter dans la Maifon du Parc pour la
foulager. Le Prieur étoic incoiifplable. Notts
l^fsâmes uôtte Compagnie lui donner les fe-
courS'dont elle avoit befoin, & nous prîmes
congé d'eux. En fortactdu Parc. à plusde
ç'm<^ cents pas du lieu où s'éioit paiTé l'acr
tinn, je trouvd la plume , de laquelle Ma-
riane s'étoit ferviepour écrire, encore toute
■teiatç de fon fang. Le Chevalier&moinDoc
momâmesen Caroflê, pour nous en retout-
net à Paris. A peine pouvions nous croire
ce-que nous avions vil; &nousne pouvions
affei admirfcr l'effronterie & la témérité d'u-
Qc jeune Fille {\ tendre & Il 'belle. Mais
nous ne pûmes jamais pénétrer , à quel def-
ftto elle avoit ffut cette Scène tragique &
iànglantc; quoique le Chevalier m'affirmât,
-«tue Piael lui avoit dit en confidence , que
le Diable lui devoir tertnerîc jour, &rhea-
r.e qu'il lui devoit livrer fon Trcfor ; po^
^lité àlaquetle noï raifonnemens nousfour-
jiiiroient une infinité d'obflacles.
Je me trouvai cûcore à une pareille mo-
-jnerie qui le fit à la Salpçtriére, & àuaeaQ-
trcqui fe ont au dcffous de Montmartre :
mais je n'y voulus plus relo.ur{ier, quandje
vis qn^ toiis ces fpeâacles n'^utiflbient qu'à.
des 4«iQHements aÔteujL , oà 1» pwivM Ar-
mide
414 Vlnqm^tinRrânfUfi
mide fewMort fe ftketattre , pottr «»oir U
ttiftc confolwion de voir prl««rar fon Rïç-
ikUie foor^.
i^ qu'il -y cnt-de ^los fimefte dans, eeot
Tragédie , cVibqo'il «i coûta la vie au<»)i-
ièrablc le Chevalier. J'appris q°e ce de- ,
termina avoir mis pinte fur chôpjnc , a-
ac nuit qu'ils fiircnt à Arciiei! , dans l'ef-
petwice de kwer le Trefor. Le^ Chevalier
voulot entTCT &aia la Caverne, malgré Ma-
riuic & fts Aflbciei , poar foreer le l>i)*le
à lai livrer fon Trefiïr , ■ mais !» Fable oh
l^tïAoitedh , que le l>iable l'étriDgla. La
vérité cft que 4e Jacdinitr s'etffuitapràs avoir
averti Madame d'Aroneil du-mathcor qui é-
toit arrivé la -nwt prer«dente -dans fcajûdin:
elle fie avertir ta 3«ft>ce > «H" V4nt l&nsr le
corps mort , & fi»'« condamner la Caver-
ne. ■ ■ ' .
Je vis eBCoiicPi»elplofieuw*3is^oîvou-
lui m'entraiifer avec lui , mais je ne Ve von-
ius pas ■foHlemem -écouwr,
. Et c'<^' pNBQr cda qtiô jt jgemïs dans cet
Etiferl O'Apgttribn vieitt de Tn'4iltertt>gEt&
m'a voQltt&iredir&oiï^itfe je igivm de«tt-
-ce aSàtrc- ; niais yt lin^ ttdi>4iabile Homme
■^cnK m'enibaiaflèr daïit des rccoiemcats &
-confpowtatJOBe , qui tlie femieat éditer ici
tant que cette atûrc durera, D'ATgcnfon
m'adft que bô«s IbmHws ici dHEhuit Pr«bn-
-mets pouT'ceftjet- qw te Prfeuï Pinel, Ma-
:riHEine -, Aoaatx , Mad. IHUf^ , DivaHi ,
#icot , A wus les «atros me iharjÇeoicm,
JeJOitti répondu : î>s^^vem w>e <Aarger
-fttt^irtfcivtkiifcoat^-MêBficiKt -BMÎB-jen'ti
garde
gaide de chitrger Pwfonne, car je n'ai von-
iB riea voir ae leurs folies. J'ai feulement
tA unepetite Filfe fort jolie , mais bien rf-
Croatie fWpe des Siiigetles pour amufcr an
Prient qui en étott fou ; cela me fit plus de
compaoïon que d'envicd'êire un des Ââear»
de la Comédie , où je n'ai plus voulo retour-
ner depuis le premier A&e. Dites Tragédie,
m'a t-rl dit ; puifque la Scène a été enfan-
gtantée: il m*« voulu forcer i dire ceque je
içfivotg des cîrconftances de la mort du Che-
valier ! m'a fait Hre plufleurs dcpolïtions, &
nommé ceux qui me chargeoient le plus.
J'ai fait fort tVtonné , comme ue fçachant
pas la mort de ce miferable. A toutes fes
iatarogacîons j'ai proteftaî ignorer ce qu'il
me vouloit feîre confèlTcr : & lui a protefW
de fon côté qu'il me fcroit pourrir ici , Il je
ne lui avouois le fait. Il a eu même l'iufo-
lence de me menacer de me iàire mettre an
Cachot. Surquoi j'ai monté fur mes grands
chevaux 1 pour lui reprocher l'injullice des
Miniftres de France , d'artiter . pour u-
n^ bagatelle, un vkil OfRcier qui porte les
armes poar le Roi depuis foixante Ans , S:
qui s'efl ruiné & a blanchi à fou fervice, 4
que l'on plonge tout couvert de plaïcs, que
je lui ai vouhi montrer dans un Enfer abo-
minable. Mordi, Monfieur, (î ce n'eftpas
aflèz , que de me mettre dans un Cachot ,
feites moi écorcher vif ; vOas aucer mon'fang
& ma peau. QnaBd H m'a vïu eu colère,
il s'ell adouci , & m'i protelW qac puifque
j'étois innocent , ■ il me ftroit rendre juftice
par le Roi , & qne je ne fortirois pas d'Ici
&ÙS avoir une bonne PeufîoD. J'en
..^Xooglc
4f 6 L*ImqMifitiom FraMfoife
J'en felicitû ce pauvre Comte , & je le
loîiai beaucoup fur la prudcace qu^il avoit
eue de ne rien avouer de ce qu'il avoir vco,
qui u'auroit itrvi qu'à alongcr la procédure,
& le faire pail'er en quelque façon pour cri-
miiiel ; & de ce que pour m'en faire le récit, i
il t'étoit caché de l'Abbé de la Motte , qui I
étoît ua efptii dangereux , qui l'aoroii: pu tra-
hir , comme en ctfet il n'y aurpit pas man-
qué. Je jugeai qu'il alloit bientôt fortir, &
je pris de juftes inefures avec lui pour&i-
te Içavoir de mes nouvelles, dans. le Monde:
ce qu'il aoroit fait indubitablement , s'il é-
ioit foTti de la Badille en état de pouvoir
écrire.
Le Comte defcendk plulîeurs fois pout ê-
tre interrogé par Mr. d'Argenfon : mais il
nia toujours d'avoir aucunpconnoillàuceda
fait,
J'ai balancé long-temps , fi je devois ra-
porter cct[e Hilloire , ou il y a des fwts qui
paroinent incroVac^.cs , & que j'avoiie que je
ne croi pas moi-même ; mais enân jç ne fuis
garant que d'expofer un fait , dont ua Hom-
me de Qualité mon Concaptif m'a faitlerê-
cit, &'pour lequel il étoit Prifonnier , avec
dis-fcpt autres Perfonnes. Quelque temps
après je fus mis dans la féconde Chambre de
la Tour du Puits avec les nommez Jean A-
lesandre van dcr Burg , Hollandois, &. Hen-
ry Francillon, Médecin, d'avec lefquels le
Prieur Piuel venoit de fortir & dont je pre-
nois la place qui me racontèrent la chofc ,
(elle que Mr. le Comte de Érederodes me
^'avoit déduite > avec d'autres circoallances
qui
u,:,-,zf--„GoOglc
êntHiftoîre de Ta Bàjîille. 4jT
quhttefèmblentlj fabt^enfbs , qucjeneveoi
pas les coucher dans cette HiÂoiie. Ce qu'il
y a de certain, c'ed que Marianne a été cun-
damnée par d'Arf^enfon , & les Confêilleis
du Châtelet qu'il avoit choifi pour juger cette
affaire avec lui , i être renfermée le *e(le de
fesjours entre quatre marailieg^prës avoir ét£
raixe, & rcvfituë d'une tunique ^le , pour
tout habillement,& réduite au paia& à l'eaa
pour toute nouriture. Le Prieur Fine! dé-
gradé de fbn Beneâcei qui étoit on très-beau
Prieuré près de Fontaïnebleaa ; déclaré in-
capable de poflTeder i l'avenir aucun Bene&-
ce , j[ renvoie à l'Evéque de Sayens fou
Juge naturel , pour £tre cosdamné à telle
pane afflidive, que lui & fou Offîcialité ju*-
gcroient à propos. Un autre Prêtre qui a-
voit trempé dans ccUe affdre , fut con-
damné à lubir deux Années de Séminai-
re â St. Lazare. Mad. Daligay & le Ber-
g;r Picot à refîer encor«'deux Années à la
aflîlle ; les Officiers & Soldats qui étoienc
de la partie, â Tervir le Roi le re(te de leurs
jours. D'autres à un An de Badille , outre
le temps qu'ils yavoient déjà été; & le Comte
de Bréderodcs & un autfe qui n'avoient rien
«voiié furent élargis, comme on le verra ua
peu plus bas en la coaclulîoa qui regarde ce
Comte. Ce jugement m'a ^cé aitelié psur
divers Prifonnters;par Mr. du Joncat même',
aulH-bien que par le Major, Corbé, le Ca-
pitaine des Portes, & tous les Porte -Gleft,
qui en ce temps-là ne fe Ëufoient pas un myf-
téte de nous dite ces Ibrtes de choies , com-
V me
.-„Goo.jlc
45* Vlnqu^t'u» FfMfoîfi
me ils ont £ut dans la faite. Banavitlè %
ch^ des Porte-Clefs , pour iToir commn-
luqué à die Prifonaicrs des b^atelles de moia-
drecoulèquciicc que celle-là, J'ai appris de-
Miis par les mêmes Officiers i que le Pr£»c
Pinel aFoit été condamné par l'Evéque de
i^yeux , âc lès autres Jnges à la même pei-
ne, que là chère Marîanc , arec laquelle il
avoit commis des crimes abominables, dont
je ne veux pas ûlir cette Hiftoire. Pcn de
temps après, lorfôoe j'étois dans la Premiè-
re Chambre de la Tour du Puitc , avec Mts.
Hugues d'Hflmilton,GeDtîlhomme Ecoilbis,
& Jean Chrefticn Schraderde Peck, Genril-
Homme de Hanover , comme Mt. Schradcr
étoit tout nud, au fort de l'Hyrer, fans ha-
bit , fims culottes i fans bas , ni n>u1îers ,
Boargouin lui appocta ane vieille Robbe'dc
Chambre de toille taïée , pour le couvrir ,
& nous affirma que c'étoit la Robbe de Ma-
rianne , qui avoit été tafée & revêtiie d'un
bonnet & d'une Houpelande de Revêchegri-
fe; que leBouneau lui avait coupée au def.
fous des genoux; &nudspfeds, niies jam-
bes, l'avoit conduite àBicelUcpour y fubit
les rigueurs de fon Arrêt.
Pendant tout le temps que nous reASmn
enfcrablc le Comte de Brederodes , l'Abbé
de la Motte & moi , fans avoir communi-
cation avec d'autres Prifonnters , ce mauvais
Prêtre ne pouvoir s'empêcher de nous témoi-
gner la rage que lai caufoit l'union qui étoit
entre le Comte & moi. Ce Comte me ût
conBdence qu'il avott déjà été deux ans«n-
fermé dans Viocouies, accuTé de tiavaillei
à
u,:,-,zf-->GoOglc
#» FHifioirt it la Ba/Iitle- ASy.
i la recherche de l'œuvre ma|^ettque , ovL
£ei:Davilte luj avoit fait fouftrir des peiotit,
ioouies, par l'Hypocrifie decetiarbaiequili]!.
vouiqit ftîre changer de Religion, &par foBa-:
rice qui le fàifoit mourir de faim. Le Cpin--
te en effet avoil de très beauxfccrets, &a*eit
^avoit peut écte pas moins que. le Comte de
Gabalis, que tout le.Mondç fçait être l'Abi
bé de Vilarceaus : il poiïedoit admirablement
bien Ton Raynion Lulle , fou Albert le Gtaod,
le Comte de laMyrandole, & tous les. au-
tres Aâcurs de leur Seâe. Tout Prifonnio-
qu'il étoit, il ine. &t voir. des chofes prodi^
fieùfes; & il m'avoit promis de me donner
e tt es beauxieçreïs,aum'bîeii que Mr. Linck»
fi nôtre liberté conimude opus en fvoit tad^.
lité les inoiens.
L'Abbé de la Motte mettoit tout en prati-
que pour nous faire ftparer le Comte & moi.
Sur le récit que le Comte lui avoit fait de la
inaiice qu'avoit l'AlÂé Papaflaredo de percer
toutes les . bouteilles danslcrquellesonlutap^*
portoit ibn.vîn, :lï adroictement par le fonot
que les Porte-.Cle/s .ne; s'en «percev oient pas ,
& quand le Soimnetiei venoit il les remplir «
tout le vin fe repandoityil ne çellà.de prier
le Comte de lui faire voir comment ilfaifbit
pour les percer. Le Comte, paurfedebanU^
îer de fes importuniicz, lui dit qu'il avoit be-
ïbia d'un clou pour les percer.: L'Abbé lui
en eut bieo tôt arracha ua de laimuraUle, a»
vec lequel le Comfe perça unjnatinnostrpit
bouteilles.
' Le boDPrStre ne manqua pas cette occar
fioo pour jobcr ua inauvaîs tottx.ftu Comt^
-■ ■ V » lï
u,:,-,zf--„GoOglc
4^ VÏMfMiJhit» R-4Utféîft
It écrivit vn billet ifon ordinaire, &loii^e
l^après midi Ru vint defervir , il le loi mit «•
droitteoicnt dans U maïa ; mus j'entendis
fort dilHaâemetu, quelque bas qu'il crAt le
prononcer ( qu'il lui dît; liiez le (uns la moB<
V6e. En -cSct un moment ^ès Rh rentra *•
vec les troic bouteilles à lasuin, & nous de-
manda -qui de Doue ks svoît percées ? Pas un
ne vouloit Kpondre , & Ru vo'rânt q«e j'af-
£ïâois de lire, fans vouloir fetilenimt lever
Hs yeuz, crut que c'étoit moi, &cemjiBen-
^it à m'apoftropher comme conp^te « ce
que je fapmois très patîemmeut , malgré
mon inaôcence. Quand -l'Abbé fê levant
bmfquement , & courant promptement à Ion
Keviaire , mit la main deuus en jorast.
yyFouai Àe Preitrtj comme j'ai ia maim Jmrcm
^firtviiwrY, Rm et n'iifi pas mmtti. Eh bieit .
Ru puifque Mr. f Abbé )nre feri de Prêtre
que ce n'en pas lui ; je protefie dic-je a^
que ce n'eft fwis moi ; mais je veux vo«s dfrc
comment la cbofes'eftfaitte... Alors le Com-
te m'interrompant , & prenant la parole dit.
Ru foi d'honnête Homme, c'ell moi qui les
ai percées ; mais ça été à la follicitatîon de
têt Honnâte & ton- Abbé , qui m'en impor-
tune depuis pl-uâeUFS jours. Ouï fi Je n'avois
pwplus^erefpeâ pour TÔtrecaraâére, que
pour vous, mauvais Prêtre, je me jctierois
dans rinflautfiir les bouteilles, &jevouBeii
caûèrois la tête, comme à un Fripon , qui
vient de donner avis par un bilJet à Ru que
les trois bouteilles étoient percées. Le boa
Praire ft prit à pleurer , & à laite des Set-
niCOts extcrablec , «qu'il a'avoit pas écrit le
M-
•j* fmjfoire Je la BaffiiU. 4tf^
Êilleï, que Rn tira de fa poche , & nous fit
lire : il ftoît à peu près conçu dans ces ter-
mes. Si VOMI trouvez anjour^hmi vos trùit
bvuteiUti fereétj , ^ji m m'em mtenfh pas J:
Vùur fcavez à qui vous deOeZ vaiatH prendre.
Ru lai dit: vons êtes un fccicrat , qui metii-
tericï d'aller tout à ITieutcdany le Cachot ;
mais je ne ferai pas monraportaoïOfficicts-,
par le rcrpeft quej'^ pour Mr. leComte, *
pour vôtre caraSérc qae vduï dcshouorei S
indignement: Meflieurs , nous dit-il , nos
Prifonniers les plus méchants-, font les Pre-
nds; maîs' lîiportez celni ci pûchatité, &]•
TOUS promets que je^ous ferai sttousies-deut
tout le bien que je pourrai:
- li'Abbé rougit, pour la premiâ« fois , tt
chaîné de' coaiufîon, il fe retira dansuncOia^
de la Chand«e^en l'écriant iquifeâer àrave*-
■nir bon Dieu! il fe mit à genoux, & repanv
dantdes- lamies^le Crocodile, il lè-mîtà prier
DieUjOU à en Ëùre les grimace». Je dis qu'il re-
pandoit des larmes trompenlès ; car quelquei
jours après il nous trahit eiveore plus cruel-
lement, ce qui- me plongea pour la premiè-
re fois dans UU' affreux Cachot , & fit perîJre
la vie au paavre Comte de Brederodea. Ct
fat le lo. Septembre 170}, Corbé nous étant
Tenu voir , comme il fortoir après là vîiite ^
nous> aperçumcï très diflinâernent, que nô-
tre bon Abbé lui gtiiTa un billet. Un mo-
ment après Corbé ouvrit une féconde fois
nôtre porte, fit fortir nôtre fidelle Compa-
gnon, & lui parla long temps fur refc^ier;
après quoi il fit rentrer le venerable'Prétre
«ins nôtre Chambre , qui parut tout joïeui
V 3 If
4t* Vln^i^Ho» FroHfoife
le tefie éa jour- Le lendemain far les hnft
heures du inatiu, Ru vint lui dire de s*habil-
ïcr^enfuite lefit fortit de EÔtrc Chambre, où
deux heures après» lui & un autre Pocte-Clefs
viorejtt querîi le Lit & le teûe du petit bo-
gagederAbbéicnnousproteflant que nous ne
le ventent de la vie, & qu'ils nous co felîci-
toient , car c'étoit un méchsuit Homme. Je
ftîai Ru de m'affirmer, s'il m'accufoit juf-
te, d'autant que les conïequencesen étoicut
plus grandes qu'il nepenfoit. Jevpusjarere-
prît Ku,que de l'heùreque je vous pacte, il cft
gafevmé dans une Chambre d'où il ne fortiia
pas ll'tât,& où il aura tout le temps de regretter
ccllecy. Aprc$qucRueatrefeTÎn^lBporte,&
qu'ils nous curent laillèzlèals leComte & moi.
. He bien» mon cher Comte, lui dis-je ea
i'embr^f&nt , Içavez vous qui eft l'Homme
qui fort d'avec nous ? Ceû dit-il leplus Ersm^
Fti|)(»it & le plus grand Scélérat qui rot ja-
jnats.V ODS avez laiKin, lui dis-jetinaîs voua <a
ferez encore mieux cauvaincu,quand vous att-
jez ^pris que c'eft Sore], Curé de Lery, Quoi
JeCuié de Lery ! reprit- il avec étotine-
jncnc. Oui dis-je c'ell AnthoineSorel, C^ré
de Lery, qui vous a marié avec la Marquifè
4e Bois-Roger, après lequel vous avez tant
couru, & qui nous avoit conté foâ HiOoire
2c la vôtre i Mr.' Linclï & à moi , avant
qne nous euflions connoiHànce que vous é-
liez dans ce maudit Gouffre : & c'efl pour ce-
la que je vous ai dît dix fois que vôtre der-
nière Aventure étoit beaucoup plus extraor-
dinaire que les autres , & qu'elle vous étoit
incomfïehcaâblç iTo«sinemc. Ah.'Mon-
ficur
u,:,-,zf--„GoOglc
tM PHiftoirt ie UBa/mU. ^t
tplf, reprit le Comte, ponrquoi ne me l'a-
vez vous pas dit , pendant qu'il étoit avec
nous? je oe vous le pardonnerai jamais ; &
Bi^ quittant brufquement il alla rJver contre
la fenêtre. Je l'y Jaiilài quelques moments^
pour lui donner le temps d'évapqrer fa bile;
^rès quoi je lui dis , J'auroiï donc mieux fait,
mon cher Comte , de vous f^ire counoitre
vôtre Ennemi, pendant qu'il étoit avec nous,
poiir avoir le criiel pJaifirdç vous voir eiitr'ar-
racher les yeui, que de vous le cacher avec
une gêné eitriK>rdinaîre , pour maintenir 34
paix , & ypus empêcher de faire un mauvaii
çovp,. dont fans doute vousaHriei été puni î
Car enfin vous £tcs ici enfermé dans un lieu
terrible, où l'on opprime l'Innocent, bien
Join de faire grâce au Coupable. Le Comte
Xbttam de là rêverie , vint fe jctter à mon
coa,',ï^oQ, mon cher- Ami,, me dit -il, &
vôtre Sageilê m'a empêché de pouffer mafp-
.Kei l'extrémité : carlans doute j'auroîs tout
.ifâi «n ufage pour ôtcr la vie à un Perfide ,
J,uï eu c'aule d.e touï, 1^$ malheurs dont je
iiis accabid. Sçavcz vous ce que vousaves
j^aire, lui dis-je, pendant que vous leten»
dans '^Q lieu où il ne peut plus voujfairefai>
.te unt de. chemin pour l'atteindre? Mr. du
Jpncas, me paioît-étre un forthpnnêteHoni-
me , & il ii^a témoigné qu'il ne cherchoit
.qu'à vous faire plailir. Il faut le prier d'en-
g^er Sorel à vous donner un certificat d«
vôtre mariage. C'eft ce gue nous avons ten-
té tous les deui , depuis nôtre réparation^
mais vainement. Soi^*:!^i''C^fé'3chofeàMr.
dit Joncas. 9ftfDine,cct Officier, nte radie
V4 lui
^4 Llii^KÎ/îtîim FrêMforfi
hjï même , qaimit tout en œuvre pour en>>
gager ce méchant Prêtre à rendre cctrc taC-
Bce à ce Comte, qu'il loi affirma devoir être
éans peu remis en liberté. Mais ni prières, ni
menaces ne purent rien fur le coeur de cebar-
bare , qui perfifta dans fon opiniâtreté.
Ru nous aporta nôtre dîné , qui ftit tout
its plus magnifiques. On fàiloît maigre ce
jour-là, &depuisqucj'ftoisâ laBaftille-nous
n'avions pas élé fi bien fervts , & nous n'a-
vons jamais n'en vu depuis, pendant nôtre
Prifon 1 qui en approchât ; car quand nous
fûmes fous l'avare dircftion de Corbé-, & s-
près fous restrCme & fordide lefine de Ber-
naville, ils nous ont lailfô fcpt Joursdelalc*
maineà chargea la Providence, Le Comteeut
trois plats de poiflbn , & j'en avoîs fil : je
n'ai jamais pu deviner par quel- caprice; ■ Le
Comte avoît iwie foupc de moules, & j'ena-
vois une d'écrevi(ïës , mais admirables : par-
mi monpoilToQ) il y avoit une vive fort bel-
le, une grande Iblle fritte, &une perche, le
lout très bien afTaifonné , avec trois autres
plats. Nous dînâmes le Comte & -moi tout
i nôtre aife, ne nous doutant pas que ce fe»
toit le dernier repas que nous ferions dé nfr-
tre vie enfemble. Nous nous jurâmes une»-
mitiè mutuelle, & nous étions encore dans
ces agréables tranfoorts, lotfqne Ruvintme
dite de defcendre dans laSale, oùMr.d'Ar-
geafoa m'attendoit ; & fins me donner le
temps de quitter ma Robe de Chambre, &
de m'habiller, ne me permettant qu'à peine
d'emlmifKr le Comte , il me condullît dans
■Qt S^e gù. je trouvai- Cmrbé accomp^:né
des
u,:,-,zf--„GoOglc
des Porte-Clefs & de fis Soldats, qui après
m'avoir reproché des crimes fi^>polcz , que
m'avoit Impofé Sorel , & dont il ne voulut
jamais écouter la jultiâcatioa , il me com-
manda de me depoiiiller tout nud arec une-
ferocité , dont il fe feroit bien dépouillé , i!
nous avions été tête à tête. Je lui dis que je:
n'en ferois rien ; que je voulois parler àMr.
.le' Gouverneur . ou à Mr. du Joncai , quii
ièuls avoient droit de me commander. Met-
tez vite, me dit-il vos habits à bas; voasett-
épargnerez la peine i ces Gaillards, nion-
oruit fes Soldats ■ qui ne demandent pas
mieux que de vous rendre ce fervice, . & qui
ne le feront pas fi doucement que vous. Je;
confultois fi je ne pourtois pas mcjctter far
une de leurs epées, pour. la paÛèr autravers-
du corps de mon Tyran, que je.croiois me
. dcvoiréifreoutrafier; lorfqueBourgouins'Ap-
prochant demOii me diti. toutbasiobefûez-
à ce Maraut, plutôt que de.vousfâiredechî-
rer; car- pour lui plaire Jes Soldats ne deman-
daroient pas -mieux que d'exécuter Tes ordres-
oriicls. Je pris le parti de me deshabiller moi
même. Jcm'affis pour cet.eSct dans uu fau-
teuil., & Ru donnoit tout, pièce -à pièce k
Corbé i mefurcqueje m^en depouillois.. Jc-
!ui difois, dans la douleur outréedoarj'étoîs -
pénétré. * Confhjit me D*Msapui.iniqMMmy.
-£y manibus impiarum me tradidit. Peut^êttC
qu'un jour Diea me . mettra, en. état de me
plaindre huitement, on depte-vengerdevos.
mjuQices. Barbara forfatt.{^ htet oltm memi-
wijft juvatit. A tout cela il ae.^foicqy*.
V 5i btan-.-
* J^b. C*p. l(. T. M. 11. & »• -
u,:,-,zf--„GoOglc
40f 12lMqK^tmi frimfatjt
traoler U tte, eo ËûGuit les grimaces d'oae
goenachc qui avMte. Poidiuit quejemedcs-
fa^Ilou, on toi xporu tontes mes hatdes,
mes papiers & mes Livres. Qaand il me vît
nod en chemifc : laiHbz Ini & chcmilc , dit-il,
& le cooduifez où je vous ai dit. Ra après
«vqir pon^ fes mains pro&Des fous mes aifcl-
les, & en des oidroïts qni le dévoient 6iiie
TOn^, s'il avoît £tÉ foJ^eptible de pudeur,
me fit tnverfer la Couttout nudcnchemife,
& defcendre dias le Cachot de la Tour du
Puits ; oà je trouvai que la Juitice étoit foit
mal meublée, car il n'y avoît pas une pierre
fur laquelle j'collè pu me repofe-. C'iioît
le al. Septembre, jour de l'Ëquinoxe, où
l'on commence à fc reÛëntir de l'éloignement
du Soleil. J'entrai dans ce Cloaque, oùja-
m^s il D^falifes raïons, loties quatre lieu-
tes après midi , & je reÂ^û dans ce lieu de
plaifance, nud en chemilè jufqu'àièpt beu-.
Tes du foir. Mes pieds tous nuds ei^oDcci
dans le limon du Cachot, qui eu un foOter-
raïn voûté) commcaçotent à iièglaçcr, aoŒ
tnen que mon corps , oclecœurm'alloitnun-
quer , lorfque Ku m'apporta ma Rotibe de
Chambre , mes pantouScs , & mcm Lit qni
me ûuva la vie. Je m'y couchai prompte-
ment en con&crant à Dieu cette cruelle mor-
tification. Je dirai ce qui m'arriva dans ce
lieu de defèQ^oir, quand & comment j'en for-
lis, dans le Second Tome de cate Hiftoire.
Avant que de finir celui cy , je croi devoir
dire au Leâeur ce que devinicDt le Comt«
4c Brederodes & Sorel. '. .
Si-tdt que je fiu forti d'avec le Cointeoii
la
MT rhiftoire Je h BaftilU. ■_ 4 £7
le fit dcfccndre dans la Seconde Chambre delà
- Toui du Coin , avec le nommé Jean Bon-
neau , Médecin d'Aubuflba en Auvergne 1
vieillard plus quefeptuagcnaire, dontrefprit
étoit tout i fait dcpauperé, Mr. Samael le
Ponillouz , Gentilhomme de la Province de
Poitou , qui avoit de très bonnes qualitez ,
& étoit un fidelle bien craignant Dieu, îlsé-
toient tous de la Religion Reformée; &le
nommé Mathias du Wal Pilote Irlanâols
Catholique Romain des pins Bigots. Ildeve-
noit Dévot i viie d'œil, il prioftDiea quand
on le regardoit; Homme auffi fttbtil & nifé
que j'en aïe connu en ma vie : car je fus mis
quelque temps après avec eux, & ils m'ont
appris ce qui étoit arrivé i Mr. le Comte de
Brederodes après nôtre feparation ; dont il
eut tant de deplailir , qu'il voulut fe ïtaîTer
mourir de faim. Il fut cinq ou Ox jours ikirs
boire ni manger , malgré toutes les rcnibn-
trances de iks nouveaux Compagnons î -ce
qui lui donnaune rétention d'urinetrès cruel-
le. Il fallut le fonder , ce qui lui caufa da
doulctors tds aigiies : apaiettimeM qtie le Clu-
rurgien le U^a; quoique dans laâilteoneb
fit venir un de la Ville, Rheilhe avouant qut
-cela paûbit fa' coonoillànce. Il fe âtiintilce-
TCdans un endroit tris dangereux, qatcatt&
-la mort au pauvre Comte. -Pendàntqu'ilétoît
dans la fbïce de fcs douleurs, fa Lettre de
Clachet arriva. Le Gouverneur loi fit anôn'-
cerfalibwtéi & laîdonnsle chdxdcrcltâ .
i la BaRitle * où-il s'offroitd^aroir un foin
tout particulier ée lui : (car il-faut réQdM
ioffice à $ty Mars & à Jodcm t qw-peodaitrt
y « i$
468 VlnquifaioM frMfaifi ^
U maladie do Comte ils le traitèrent pat^'t-
temeat bien ; des Médecins & des Chirar-
gieos de Is Ville le venoteat vifiter tout les
joors : ces Officiers lui envoioient abondem-
ment de leur table les viandes les plas deli-
deufes , gibier , coofiturcs, vîas de liqaeoi
rien ne lui manquoit ; peadant qoeBernavil-
le liùlTeioit mourrir tous tes Comtes du Mon-
de , faute de leur donner une aile de poulet
pour leur fanver la vie) ou bien s'il voulcHt
aller à la Charité du Fauibourg de St. Gei-
maio oà nn Ptifonnier qui iio\t mort à la
Baflitle^ avoit fondé quatre Lits en faveur des
pauvres Prifonnicrs, où on le traitteroit avec
diAinâion, & fiiivant la qualité. Je dois di-
le, je croisi ce quec'eftguecettefondadoo.
Un Etranger dont je n'ai pu fbavxùrUjioin,
ni le Pais, iùt accufé de travailla dans Paris
à la transmutation des. mâaux & de faire.de
l'or. U fat mis à la BaAUle où il e(l mc»t, on
peu avant que j*y entrée. Se voi'ant à l'ex-
.trémité, il ât appeller le Gouverneur, &lDi
dit * qu'il avoit caché une fômme confido»
.t>lc d'or , dans une Cave, qu'il indiqua- Mi.
4'ArgpnfDn fut la ^e. lever enprçlcncede
.Mrt.4e.SçMais & dejoncas. IfèMajorme
4>t qu'il y avait. cent mille écas;,le Captai-
ne des Portes difoic qç'îl.ti'y avoitque cent
mille ûans; & Ru maptoteÂé qu'il y avoit
dfux cents mille écus. Lefquels croire i
.i^ioiiju'iJs fullènt tous trois témoins oculai-
res, ils s'accordoîent peu, coipme on le voit
furlafomme, qued'Argcniqn^lesOfficien
fHUtagerênt. Pour fairccroiEeqoeleDeffunâ
ça wro^ £ûf )'eoi£loi, en c» îf reclKcdu:,,
... ' ' il».
u,:,-,zf--„GoOglc
ïï
tu l'mjîoire Je la Sajîillc. ^9
ils Inî permirent de' fonder quatre Lits à 1»
Charité en faveur des Prifonniers malades,;
mais en la place des Prifonniers , Bernavil-
le, qmmet;toutiprofit, ^t occuper ces Lits,
d'ordinaire par fes Serviteurs, quand ilsfoM
malades, ou par les Soldats de fâGarnifon,
dont il garde la paie. LcMoùraiitfbndaaufli
une Bibliothèque enlaBailille,- en faveur des
Prifonniers : ces Filoux achetèrent quelques
méchants Bouqums, & gardèrent l'argent du
Fondateur; & jamais un Prifonnîer ne peut
obtenir de ces Tyrans, depuis que Betnavil-
le ellGouverneur, unLîvrc, dont la Icaure
pontroit adoucir fes chagrins & fes ennuis.Mï,
le Comte de Brederodes ne balança pas un raor
ment;& il aîmamîeui aller mourir à l'Hôpital,'
uedefinir fes jours dans un efpèce d'tnfe.
«e- Gouverneur lui prfita fon Çaroflci pour I4
conduire à la Charité du Faux BoargSt-Gctr
maiii.Mr.lePouilIoux fçacfiant queCbtbé ne
vouloitpaslui rendre l'argent qu'il avoit faifi
au Comte, quand il entra dans la Ba(lillé,lui
donna quatre Loiiis d'or .Huit jours après qu'A
ftit à la Charité.inalgré'tous les foins qu'on prit
de iui , il y mourut dans dès fcntîinents très
Chririens ; pardonnant à fes cruels Entier
mis , & fur tout à fa cherç Epouïe qu'il ai-
ma , toute infidelle qu'elle étoit , jnfqu'aii
dernier foopir de fa vie. Ainfi mourut mife-
rablcment Mr. le Comte de Brederodes,,vic-
time de l'avarice des DireSeurs de la Baftil-
le , & des caprices de la Fortune : Hommt
qui Certainement meritoit une autre deftîntfc,
& dont les jours fans doute ftircnt ^rc«tt
par la malice d'Antoine Sorti , «/w Cutcde
Icry. Pow
u,:,-,zf--„GoOglc
470 L^Inqitifiticn Fraxfùlfi
Pour ce qui eft de ce vénérable Prêtre, en
fbrtant d'avec nous on le mit avec le Prince
mentionné en cette Hîftoire, qui n'étoit an-
tre que le P. Florent de Brandebourg CafHi-
cin, de qui j'ai apptis lerefledefbn Hîftoire.
Les fous d'Ordinaire font longtemps à balan-
cer fur le genre de folie qu'ils en^rafleront:
fis font diverfcs eitravagances avant que de
lèfiicr i nnc : le Curé de Lery, de degrei en
dcgrei , devînt fou pommé.
Il ne poufià pas tout d'un coup fâ folie à là per-
fcâion : il en fît voirauparavant divers éclîan*
iHIons. Enfin il se détermina à croire qu'on
1*311011 pendre,' parce qu'ilétoit certain qu'il
l'avoir cent fois mérité. Tous les jours il s'y
prep3roit du plus grand ferieux du Monde,
il prioît fes Compagnons d'effaVer , s'il au-
lOTt bonne grâce à ftire an faut fur tien. H
ft païïbît une corde au cou , que lui pr^toit
tbarirablement le P. Florent, fe meitoit
i.getious devant luii & il dc leur donnoii
aucuti repos , qu'un deui acceptant reli-
gîeofement l'Office de Bourreau, ne fitfem-
plànt de le pendre avec les foriaalitei acou-
tuniées. Il chantoit lui même le Salve fort
jnétodîquement , fàifoit fa Con&ffion monf-
tfueufe&untEïprtation toute dès plus tilîbles
3 fes SpéâateUrs : & quand il voVoit fes Com<
pagtiojis Ht pouvoir contenir leurs éclatsdo*
rire, il eritroit tout de bon en colère, &leut
demandoit, s'il étoit de la bien féàncçde ti-
re, quand onallpit peudre IcsGentî? Qucl-
qiiefois,qi}andîl voïoitun dîné un peu moinf
maiivais. qu'à l'ordiuatre, Ufeoûttoitâpleu-
tttrHiJhiredeUBaflilU. - M\
ta à chaudes larmes , & difoit adieU à fes
Compagnons , comme s'il alloit faire le vo-
lage de l'autre Monde; Sx. quand ils lui qn
demandoieot lacaûfe: bel ne voîez vouspas
bien , difoit-ïl , que l'on me vapendre après
midi & que voila le diiié du Roi que l'on
me donnée parcequ'il'* avoit- entendu dire,
qu'en de certains Pais , comme en celui-cy
d'Hollande, on- régale les Criminels avant
que deles faire mourir. Tantôtil felevoitde
grand matin , & alloit , hud en chemilè , -fe
confeûèr à genoux', auprès di^ lit defescon-
«aptifs; & ne les quittoît pas qu'ils n'euilênt
iimulé lui donner l'abfolutipn. Je.fçai cela
d'un de fes Compagnons, qui me la conté
pluiieurs fois, & qui étoitun.des principaux
Aâeurs de ce badinage. Enfin Mr- D'Ar-
^enfon touché de compaffion pour lapcemié-
Je foisj feignit ^e lui donner & grâce, &lui
jura qu'il ne feroit pas p^du • CC Qui lu: ZSr
jnit Vd peu refprit. Mais' la contiance qu'il
cvrrén la parole deMr^ D'Argenfon, lejet-
ta dans une autre extrémité. Pteveou qu'il se
feroit pas pendu, îl fe lançafutieuxfurunde
fes Compagnons nommé LuOik de Maïence,
& l'outragea^ fort qu'il lui. fit trente doux
bleflures , dont i[ y en avoit jufqu'à treize
citioiées mortelles par les Chirurgiens qui le
-penfereut. Cependant , contre toute eiperan-
ce,le Blefifé n'en mourut pas ; mais le malheu-
rcuxCuré, qui n'attcndoitquç lacorde, qui
lui étoitinftilliWe, fifonAdvetûire fût mort,
fut enchaîné dans un afireux Cachot pendant
dix huit Mois ; pendant huitdefquels. il fbtre-
dutt au<pain & à l'eau, .ce qui acheva dé lui
de-
u,:,-,zf--„GoOglc
4Ta VlKjfiifitieu fratipiftf
démonter la cervelle. Quand jt fuis fortfdc
laBaftille, j'ai apris qu'il étoit dacs la Tour
de la Comté, avec un nommé du Pleffis-,
qui fe difoic Marquis Darcmberg de Bruxelî-
les, Prîfonni'cr qui eft devenu aveugle depuis
fept â huit ans , par les mauvais traittements
qu'on lui a faits , & fur tout par les humidf-
■tcz des Cachots : cependant cette infirmité ,
qui le met hors d'écat de nuire àPerfonne, ne
lui a pas fait rendre la liberté. Je l'ai vu dans
on déplorable état, & phis cnguenillé qw
les Gueux qui demandent l'anmône; quoi-
que l'on ip'àit affirmé que c'eft un Homme de
qualité & de mérite. Je ne fçai comment il
a attrapé On Cl wedn : je croi que c'eft Si A.
S. Mr. le PriiKX de la Riccia^ qui fe fiiîfo^
un plaiiir d'obliger tous ceux qu'il pouvoir,
qui le lui a donne-Omm'aditqu'ilen joiieaf-
féff bîcii ; & il a la patience de montrer àSo-
tel i le diTcorder pour eng^erce Curi foo,
i av6it foin' de ce deplor^ie aveagte. Qaét-
qnes uns m'ont dit anlB que Sorel étoit un
peu revenu de Tes extravagances outrées^ &
Îue fa folie étoic beaucoup diminuée. Je {ma
Hea par là grâce de lui accorder une bon-
ne & lincére- a>nveFlîoa-, & à tous- les Me>
chants.
Vous apprendre», mon cher Leûturdàns
le Second Tome de cette Hiftoire- & les fui'
vants, le refté de mes Aventures, àcellesde
plulîeufs autres infortunei,auxquels Si-Mars,
Corbé, Bemaville, St. Sauveur, & de l'Aunay,
Ont âJtfoufirirdestoumfienK<,capables défaire
rougir lesNerohs& les Denis. Jelpere de vous
pdooner des &its plus variez I- & tout DU moins
aufli -
,.-„-.C.ooylc
«s PHifliàre JtJa Baftîlîe. 4f }
auflî intereflants que ccrat qui font contenus
dans ce PremîwTomé. Je commencerai le Se-
cond par les foufFrances de ma première def-
centc au Cachot," où j'aWîis Tdfon dedirc!Îi|
mon barbare TyraDi avec Jeremie. ItitintMi'
xoHacavit me, quafi mortuos fem^itemos. La-
tmtMt. Jtrem. cap. ^:
F I N. ■ ■
yABtE
■,zf--„Googlc
TA BLE
D E S MATIERES
Contenues
dans ce Prenuer Volume.
ACmet, Tare, Page43ï
Application des Paflàgeidu IV. Chapi-
tïjedjc I'£ccl*fiafte aux crnautcï: de la E^-
tjJté, page première & fuivautes.
Ma4- de St. George d'Aunay. I?8
Mr."Anchîti , Saxon. i ï»
L'Anglpis.' ■ .
De l'Aunay , criiel Tyran.
Mr. d'Avignon.
4Î5
LeMarquis de la Baldonniere. 134
Baftille , fa defcnption.- lia
Mrs. Baubriant rEvefque. 4^5
Vincent Béguin. un
Becnaville , Chevalier de la Manditle , Coa
Apotheofe. xix. & j
Fait profiler la Gargotte& la ChaflëdeVîn-
cennes. 6
Par quelles voies il entre en la Baftille. 7
Par quels artifices il en obtient leGoaverne-
- - î- Ses
u,:,-,zf--„GoOglc
DESMATIERES. '
Ses cruaQtez. 9. & faiv.anl:e^
Sa Tyrannie depuis la Page première jufqq'à
" la dernière.
Mr. Jacob le Berthon, fon Hiftoiré," itf9
Mr. leMarëchal deBelIefond, Auteur de la
Fortune de Bemaville. 6
Pierre Bertran , Clercdc Procureur, iafign*
împoftcur. 7Î
Pierre Bont. lui
Jean Bafter, Officier Flamand. jag
Bourgouin, 81
Mr. du Boulay, Capitainedans le Régiment
Dauân. %6
Boutonnière, 8 1
Bouts-rimez. ij, 17, 5l,îtf}
Le P. Florent de Brandebourg, Capucin, le
dilànt Prince. îîî- Ses Vers. 34,7
Mr.lc Comtede Brcdcrodes, lai. SonHiC-
toire prodi^euCe. gtfS. Epouiè la Marqui-
iè de Boîs-Roger, 370
LeChevalier Veher de Broch. xL
Mr.deBrunsfieldsKouakre. go. fon Hi'ûoî-
re. z69
Mr.leComteduBucquoit. XIi
Mr. le Chevalier Thomas Biirnet. jjif
Mr.JeanCardel de Tours xlvi
Cereace & lesCetançois. . 4fc>
Cnampion. 43 1
Mr. Chamillart lapelle M,!. Conftantia en,
France. .10
Mr. de la Chapelle Secret aire de Mr. le Corn-.
te dff Pomchaitiain. i %
Mi.
T A B L E. 1
Mr. Charâs, fes Avantures. $tj
Atigufîiii le Charboauier. ixxi
MnCherberg, Lieutenant G^Qeut du Can-
tondeZuiig. xiu
LeChcvalier, 4^
Mr. Conlhuitinde RenncvîHe. cniautez ïa«
- ouïes dODt il eft accablé par BeraavîIIe.
XXII
Ifl arrêté* ij
' 'Son entrée dans la Badille, 32
EU introduit dans taleconde chambre de la
Chapelle. jf
On lefonilte. 16
Il ell transféré dans la Seconde Chambredc
la Tour de la Uertaudiere , dont il fait la
defcription. loj
On le laîfTe plus de fis Mois Gais changer de
Chcmifc, pendant que Cofbé fe paroit de
fon linge. ' ' 1 10
Il eft mis dans la Calotte de la Bertaudiere
avec Mr.Lînck de Leiplick. 150
Il eft transferéavec Mr. Lînck de la Calotte
' de la Benaudiere dans la Troifîéme Cham-
bredelaTourduCoin. ifj
' Refte par deux difTercnies fois dnq jours &
• onq nuits ians prendre la moindre noatri-
ture, Cependant plus de trois Mois ilav£-
cud'nnœuf &d'aapeu deptifane. 941
Il eft mis pour la première foisau Cachot.
466
UnConfeillerduParlementdeParis refte. 34,
Prifonnier. L
Collier, CordonniecdcPtrîs", fa Femme &
fesEnlàatsPjrifonnieis. J15
Mr. leCoî. 43 f
■ Corbé
u,:,-,zf--„GoOglc
DES MATIERES.
CorbéjNeveudu Gouverneur St. Mars. Soa
Portrait. 37. & 7*
Rofarge f«t l'Eloge de CorW. 47
ïilSgaeitiponinmfedéGorM. fii
Autre friponnerî«de Corbé & du. Major. tfS
Antre fr^onnerie éclatante de Corbé. 387
Crçne épouveat^le de Corbé. Lxi
Mr. le Baron de Corneberg, fes Avantures.
■■■■^■r ' »4
leaaCrofnier, -Anteardela Gazette Batlef-
qpc, fes Avantuïes. 41
Mad. Daligny. 447
Mr. D'Argenfon fou Portrait, jl. Son or-
gueil outré. . 391
Mr. le Comte Davaux prefeme Mr> ConfÛD'-
lia à Mr. le Marquis de Torcy. n
Mr. peïûao. lu
Nicodéme Delimberg de Grenoble , fon
Hiftoire. Terrible. 179
Mr. Diodàti. lui
Divaux. 44S
Diverlité des Prifonuiers qui cntrcot dans la
Baftille. S
Ecolier Prifotmier pendant jf. an , pour a-
. voirfâitdeuxVerscontrelesJefuites. xlvm
Epigrammes. tfo, 98, 34$, 3ï<^» & (Sui-
vantes.
Çhar-
.--„Googlc
Charles Farcy, Soldat ^L^GarâttS, fimHîf-i
toire. i7«
Mr.Farie, dcGirUa«lllBc«a. 1L.À1JS
. Mc.de la Ferriere. 43^
Marguerite Faandtier. . ' . ijrf
Fontaine de Tourtiay. xxnx. & 493
Mr. le Fort & UBC AnfiUâft. ' ji}
Antoine Folmn P'illeveffiere. . . , . 410
Henri Francillon , de St. Maxitnin pris de
Grenoble. u
Jean Félix GaïKîerd'Hcniflkrt. I3«
Gautier, Curéde Granvîllc. 4%t
Le P. Ga.utiHche i Jefuite. aStf
L'AbbéGiraut, AumônierdelaBaftîllc. 8»
ïj'AbbéGoniBlIe, l'Aîné, fonHiftoire. 3ji
L'Abbé Gonïelle , le Jeune , fon Htdoirç.
Wl
Samilel , ou plutât Geroiam Gringalet , 1«
iàifant appeler du Prey ,dvuomdeJadîtii
duPreylàMere, duVillagede Vemy,att
Païs de Gel & fe difant ae Genève. 3it|
& 44*
Pierre Guenon. lui
M> Gucry, Capitaine IrlaudOLs. xl
Mad. Guyoïi. &incu& Quiétifte Ton Coirfef'
fcur. tjf.&iA
.--„Googlc
BES MATIERES.
Mr. d'Hamilton, Ecoflbis. r.v
Le Hoguais. 4^5
Mi. du Hommet, Curé de Granvillc. ^37
; J-
Mi'.JatMçoade Montdevis. Lii
Jcfiiites, leur AmbîtionÔt leur Hypocrifie,
deux toursd'Ecoiiçrpourlesenpunir. 290
De l'ille ChapedéJaîne, Avocatà Vire. 41;
Mr.dujoncas, LieutcnantdelaBaÛille. 77
Parftlelle de l'Inquifition Françoifeàcelledc
Goa. xLvi
La VetfFve Lailly S fa Fille, IrlandiMfes. lxih
MrIcDuc deLaaian, Hiftoiro terrible. 7+
L'Ecuycr, Capitaine des Portes dclaBallil-
le. 53
Mr.CririftienHenriLînck ,dcLeîpfick, fort
Avatiturc. iso. Sa fortie. joo. Nous dit
adieu. 309
Mr. Liiich , Capitaine Irlandoîs. xxxix
Mr. de Loifeliere. 435
Jean-BabptilledeL'Ormeaa, Ef. Sr. de Fa-
lourdet , Officier deDragoQS. 1:4
Mr. Lucas, fooHiftoire. 451
Mr. Luftick. 471
Xi Ma-
u,:,-,zf--„GoOglc
M.
Madr'gaux. 3 S»
Mariaoae, Magicicoce. 447- Sacondamos-
doo. 4;j
LcFilsduRoidcMaroc. _ xm
Mr. de Maupenuis, Coufin de Mr.Chamil-
lart. 2*
L'Abbé deSt.Martin, de St. Etiaineen Ft>-
rtt, fonHifloire. »oi
La Mas. l
St. Mars , Gouverneur de la Baflille. Son Por-
trait. 3:. &7Î. Ses Gafconades. j4. Ter-
rible cmporiemcnt de ce décrépît. «4. Il
queflionne l'Auteur furfonfcjour en Hol-
lande. 66
Jacques Maurice, Taiîleurd'habits, près de
Valencienncs. ;a£
Henri Maurice, Baîlljr de Ville-Dieu. 419
Montlico, frocureur de Vire. 431
Mr.deSt.More, Lieutenant de Grenadiers ,
Fils de Mr. Toiain, Î4 j
£loge de la NobleOè des environs de Mor-
tain. 4:
Odtifcot , Irlandois , fon Hiftôire funette.
LIlV
.--„Googlc
DES MATIERES.
St. Pair, ProcarcurdoRoi de l'Amiratitéde
GraDville. 435
Papafaredo, Prêtre Italien. 8j.&4otf' ,
Le Parc-Couroys. 4ÎÎ
Mr. Peqûct , Secrétaire de Mr. le Marquis de ■
Torcy. i2
Maturin Picot, deGouniay,'fesAvaQtnres.
51a
Picot Berger. 44<-
Pigeon. ■ LIS. & 3
Pinél , Prieur. 41 S'
Mr-Piquelin. 43 j. L'Hiftoîrede fon Père. ■
- - 431Î
Du Pleffis, Marquis Daremberg. 47a-
Lc BaroD de Pofcenet. 971;
Q-
Qyefîiel. 43 j;
R.
Âbr^atQR<Uht,Chirttrgieade]aBaAiile.79'
Mr. le Prince delà Ricda. ïiii. & «ji
he P. Riqueiet , Jefuite . Conteflèur de li^
Baftilie. |tf-
L'AbbéRollet, Chanoine d'Autun, Précep-
teur des Enfants de Mr. Brunct de Ran-
cy. îio
RoOirge , Major delà Baflille. 41^ i*, &-
75. Inûgne friponnerie de ce Major, %$»■
Riie Porte-Clefs. 43. & 81
"?C-3 Phi^"
PhilibertdeUSalle.dcSt.Eiienne en Forefl-
Î>S
NicolïsSandro, desHayesd'AveliieenHai-
naut. 85. 6c 4^7
M.IeBaron de Saffinet. xvi.& 114
Mr.delaSauUis, Medccni. ^is
Mr. le Savage. 44)
St. Sauveur Neveu de Bernàville. jxv i
Mrs. Schraderde Pcck, Gentil - Homme de
Hanover. XLri, & 310
Simon Plaidear. 43f
Sonnets Chrétiens. 9?. & fuivantes. Sur la
Baftille. 348. Et furune Fille quffepoïg-
narda. J5Î
Antoine Sorel , Cuté de Lery , fcs Ayantur
res. lyif
Mr. Stinkfon , Banquiet. Anglois , fonHifloi-
te. 38y
La Tîbrie, fon Hiftoîre. 41 j
Mr. le Marquis de Torcy , Trait très tou-
chant defa generofité. 19
Toiain deBoEdeaux^BouigeoisdeParis,foa-
Hiftoîre. 3;$
Vander-borg, Hollandoli. jpj-
Varin de Rennes. ijtf. & 15*
Mr. Antoine Vidal , de ToulOuzr. ■ ;tf^
Ville-
.--„Googlc
DES MATIERES.
Ville-Dieu , HilïoircsdelafimpîîcitédcsHa-
bitans. 41 V & 4tS
Wiperman , Gentil Homme de Hanover.
Y.
Ynor, Avocat de Granvillc 43.J
.--„Googlc
1
FAUTES
SURVENUES I
A L'IMPRESSION. I
DANS LA PREFACE.
Page jïxi, ligne première nés: liiez, cornes.
Page st. ligne ao. ces forces : liïC2,fesfor- ■
Page xLi. ligne 7. effacez, & fe îoïantpiêt
d'être noyi^.
Page xLvi. ligne dernière dans ma Paraphra<
le : liiez dans la Préface de maParaphrafe.
Page tsiii. ligne 6. la pauvre malheureafè :
lifei cette malheureufe.
Page Lxiv. ligne a?. Prince en fa ^car :
liiez , Prince qui parle en fa faveur.
Dans le Corps de l'Ouvrage.
Page 5. lignes z & 3. du pim grand & du pins
augalle Roi : lifez , d'un des plus grands &
des plus augufles Rois.
Page 13. lignederniéreilfortoitilifez, com-
me Mr. Chamillart fortoit.
Page 14. lignes 4.&11. Ferrantilifex, Fer-
rant.
Page »9. ligneé.leporta: lifeZ', lespona. .
Page 93. ligne 30. eff : liiez , étoit. Ligne der-
nière pour en: tifez, pour leur en.
Page 39, ligne ztf. Itlandoife: lifeZjIrlandoifes.
Pa.
Page 4t. ligne io.deRîccia:iifcï,delaRio
da. Ligne z5.avoitfeit: lifez, avoitécrit.
Page 44. Iignci7.jcne tepeux; lifez, je ne
- te pais dire.
Page 46. lign«iî.leLieutenam:lifei,LJeu.
tenant.
Page 54. ligne 7. d'un: lifez, d'une.
Page j(!. Jigne j^. poids:, liiez, poix.
Page 71. ligné 17. il leur fait: liiez, îi leor
a fait.
Page 74, ligne dernière , prenoit un; lifez,
prenoit une.
Page 81. ligne 4. aux: lifez, au.
P^e 134. ligne 94. ce Miniftie : lifez , le
Miniftre.
Page i;tf. ligne 6. an lien de : le Major:
lifez, ^ad. de St. George.
Page 144. liçne 31. delelailTer: lifcx, de le
laiflèr partir.
Page 14.5. ligne I7, raifon: liiez, îkiCon.
Page 148, ligne 10. une des Chambres : li-
iez une des plus belles Chambres.
Page 161. ligne 1 i.dcsjours:lifez,]esjours.
Page 177. ligne 18. qu'elle demanderoit; li-
iez , qu'elle en dcmanderoît.
Page 179. ligne dernière, l'enJèvetit, lUcï,
enfevelir.
Page 2J4. ligne 14. En&nt : lîfèz, Enfant.
Ligne ij. étropiai: lifez, étripai.
P^e ÎI7: ligne»!, font: lifez, fout.
Page 338. ligne 10. rendoit : lifez, rendit
juDice. Ligne 14. les miens : lîici, le mien.
Page 5îî. ligne 27. iufcrîptions : lifez, dcf-
criptions.
Page Ï67. ligne ao. qui fcroient: lifez qnife-
lOltf.
Page
.--„Googlc
Page 37i. ligne »o. qni nous : lifeïqaivons.
P^c 37<. ligne 30. appelleront : liKzappel-
Page 390. ligne 11. bitff: lifez, billeu l-ig-
ne >t. imprudence: lifes impodence.' Lig-
ne 2 f.fçaieiltiès: lifez, fçaide très.
Page 3jii. ligne zi.joiiei agios: lifez, joiict
gros.
■Page 410. ligne 1*. Rondi : lifcz, Bondy.
Page 416. ligney.leurpiêcha: lilèr, Il leur
prêcha.
.--„Googlc
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